(Neuf
heures vingt-deux minutes)
Le
Président : Mmes et
MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants. Je vous remercie. Bon dimanche à toutes et à tous.
Affaires courantes
Déclarations de députés
D'abord, débutons à
la rubrique Déclarations de députés. Je cède maintenant la parole à Mme la
députée de Saint-François.
Rendre hommage à M. Normand Groleau, photographe
et fondateur de l'organisme Estrie-Aide inc.
Mme Geneviève Hébert
Mme Hébert : Merci,
M. le Président. J'en profite pour
souhaiter une belle fête des Pères à tous les papas et en particulier
aux deux merveilleux papas de ma vie, mon mari et mon père. Bonne fête des
Pères! Je vous aime.
Cependant,
c'est avec beaucoup de tristesse que j'ai appris le décès de
M. Normand Groleau, un grand bénévole, un mari, un papa, un homme
de coeur reconnu en Estrie pour sa grande générosité et son désir d'aider les
autres.
Originaire
de Coaticook, M. Groleau a d'abord fait sa marque comme photographe. Il a su
immortaliser de précieux moments dans la vie de nombreuses personnes.
Son
grand coeur l'a mené à fonder l'organisme Estrie-Aide et à diriger celui-ci
pendant plus de 15 ans. À sa façon, il a donné les moyens à des
milliers de personnes moins bien nanties de sortir de la misère. Sa joie de
vivre, son apport inestimable à la communauté ne seront jamais oubliés.
Chers
membres de sa famille et à tous ses proches, je suis de tout coeur avec vous en
ces moments difficiles. Je vous offre mes plus sincères condoléances. Merci,
M. le Président.
Le Président :
Merci. Je cède la parole à M. le député de Vimont.
Rendre hommage à M. Richard Choquette pour son
engagement social
M. Jean Rousselle
M.
Rousselle : Merci, M. le Président. J'aimerais souligner aujourd'hui en cette Chambre le travail exceptionnel de quelqu'un de mon
comté, M. Richard Choquette.
C'est la personne que
je connaisse qui, à ce jour, a eu le plus de distinctions et d'honneurs
d'accumulés, d'où la raison pour laquelle je
trouve important de souligner tous les efforts, les semaines, les mois et les
années de travail que cet homme a
faits pour divers organismes et diverses associations. Plusieurs fois, il a
travaillé bénévolement, dans l'ombre, laissant parfois même de côté sa
vie personnelle pour aider les autres. Ses dernières distinctions sont les
suivantes : bâtisseur du Cadre des instructeurs de cadets, certificat du
citoyen exceptionnel et la Médaille du souverain pour les bénévoles. Et je n'en nomme que quelques-unes, car M. Choquette en a plusieurs autres, qui, pour lui, sont toutes
aussi importantes les unes que les autres.
Un
citoyen exceptionnel comme Richard Choquette mérite une déclaration de son
député provincial. Et je profite de l'occasion pour lui souhaiter une
magnifique journée de la fête des Pères, entouré des membres de sa famille.
Merci, M. Choquette, pour tout le bien que vous faites pour la communauté.
Merci.
Le Président :
Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Laviolette—Saint-Maurice.
Rendre hommage à M. Roger Jeffrey, président de
l'organisme Oeuvre de la soupe
Mme Marie-Louise Tardif
Mme Tardif : Merci, M. le Président. Aujourd'hui, je veux
rendre hommage à M. Roger Jeffrey, qui s'implique pour l'organisme l'Oeuvre de la soupe, à La Tuque, et
ce, depuis plus de 40 ans. Il est d'ailleurs président depuis une
quinzaine d'années.
Homme
de coeur et de partage, M. Jeffrey affirme qu'aucun adulte, et encore
moins un enfant, ne devrait avoir faim.
À tous les jours de la semaine, durant la période scolaire, lui et son équipe
de bénévoles sont au travail pour que les jeunes et moins jeunes mangent des repas complets, et ce, gratuitement.
Ce sont environ 140 repas qui sont préparés et servis à chaque jour. En plus, il s'occupe de
l'accueil, de la discipline des jeunes et aussi des achats en magasinant les
rabais. À chaque année, lui et son équipe
permettent que 30 000 repas soient servis. Il a été nominé au
concours provincial coup de coeur de Radio-Canada.
M. Jeffrey, merci. Merci pour le bien que
vous faites chez vous et pour la société québécoise.
Le Président :
Merci. La parole à Mme la députée de Vaudreuil.
Souligner
le succès du colloque annuel du réseau Les Arts et la ville
Mme Marie-Claude
Nichols
Mme Nichols :
Merci, M. le Président. C'est avec fierté que la ville de Vaudreuil-Dorion et
le réseau Les Arts et la ville ont pu
témoigner du succès de la 32e édition de ce colloque qui s'est tenu du 5
au 7 juin derniers. L'événement a permis à 350 participants de
découvrir non seulement la région, mais aussi la vie culturelle qui l'habite.
Sachez que
toute l'énergie culturelle que développe la ville de Vaudreuil-Dorion rayonne
bien au-delà de notre région. Deux
invités internationaux de renom, M. Jordi Pascual, venant d'Espagne,
créateur de l'Agenda 21 de la culture, et M. Marc Villarubias, directeur des affaires culturelles de la ville
de Lyon, en France, étaient présents pour s'imprégner de notre richesse
culturelle.
Permettez-moi de féliciter le directeur du
Service des loisirs et de la culture de la ville de Vaudreuil-Dorion, M. Michel Vallée, qui a su accueillir et
organiser ce colloque avec toute la passion et l'originalité qu'on lui connaît
et, bien sûr, avec tout le support du maire, Guy Pilon, et son
conseil municipal, qui leur donnent appui de façon significative.
Bravo à tous de faire rayonner notre coin de
pays à travers la francophonie canadienne!
Le Président : Merci. M. le
député de Chauveau.
Souligner
le 10e anniversaire de la résidence Logis-Confort de la
Haute-Saint-Charles
M. Sylvain
Lévesque
M. Lévesque
(Chauveau) : Merci beaucoup, M. le Président. Je souligne aujourd'hui le
10e anniversaire de la résidence Logis-Confort du secteur de
Loretteville.
C'est en effet
en 2009 que cette résidence de 52 logements a vu le jour. Fait à noter, 14
résidents de l'époque y sont toujours. Logis-Confort est un organisme à but non lucratif qui permet à des personnes de 60 ans et
plus, autonomes et semi-autonomes, de
bénéficier de logements de qualité et sécuritaires à prix abordable. Elle est
la seule résidence du genre voisine d'un CLSC, ce qui au départ en
faisait un projet unique et novateur.
Salutations
à M. Michel Renaud, l'actuel président du conseil d'administration, de
même qu'à Mme Line Létourneau, trésorière,
ainsi qu'à toute leur équipe. Mention spéciale à M. Serge Gignac, premier
président du C.A. et membre du groupe fondateur.
Je tiens également à saluer la grande générosité
des bénévoles qui contribuent à créer un climat si chaleureux chez
Logis-Confort. Merci, M. le Président.
Le Président : Merci. La
parole, maintenant, à Mme la députée de Taschereau.
Déplorer
la brèche dans nos droits fondamentaux créée
par l'adoption du projet de loi sur la laïcité de l'État
Mme Catherine
Dorion
Mme Dorion : Il y a une quinzaine d'années, j'étais en France et je
remarquais une tension sociale palpable, une obsession autour de l'islam, amplifiée par certains médias et récupérée
par certains politiciens. Je voyais du monde en envoyer promener d'autres dans
la rue. Je regardais ça puis je me disais : Heureusement, au Québec,
ça n'arrivera jamais, ça. On
est bien trop relax, on est bien trop ouverts, au Québec. On n'est pas comme
ça, nous autres. Fiou!
Aujourd'hui, je vois des lois contre le droit à l'avortement être votées aux États-Unis, je vois le droit de manifester être
bafoué par une loi en France puis je me dis : Heureusement, au Québec, ça n'arrivera jamais, ça. On est bien trop
relax, nous autres, ça n'arrivera pas
chez nous. Sauf qu'aujourd'hui, contrairement
à jadis, je ressens le besoin de
croiser les doigts en le disant. Et
je veux dire que chaque personne dans cette Chambre qui va voter pour le projet de loi n° 21 portera la responsabilité de cette
première grande brèche à être pratiquée dans la digue qu'on avait fièrement
érigée pour protéger les droits fondamentaux de tous les Québécois.
• (9 h 30) •
Le Président : Je cède la
parole à Mme la députée de Châteauguay.
Souligner
l'initiative de la Coopérative de solidarité santé Saint-Isidore
pour la promotion de saines habitudes de vie
Mme MarieChantal
Chassé
Mme Chassé : M. le Président,
tous ici savent à quel point la santé me tient à coeur, celle de mes citoyens
et celle de notre ministre de l'Immigration tout autant. Aujourd'hui, j'ai l'occasion
de souligner l'initiative de la coop santé de Saint-Isidore.
Fondée en 2008, réalisant que l'unique
médecin oeuvrant dans leur municipalité se dirigeait vers la retraite, un groupe s'est fédéré en coopérative afin de
s'assurer de la continuité des soins de santé pour tous leurs citoyens.
En l'honneur de leur
10e anniversaire, ils ont décidé de lancer un nouveau projet de cuisine
collective. Oui, dès la fin de l'été, la coop offrira des ateliers
pratiques aux familles, aux jeunes et aux aînés de leur communauté afin qu'ils
cultivent de saines habitudes alimentaires.
Ils seront conviés à mettre en commun temps, argent et compétences pour
confectionner des plats économiques, sains et appétissants.
Félicitations à cette résiliente communauté qui sait se prendre en charge et qui récolte jour après jour le fruit de ses belles idées! Merci,
M. le Président.
Le Président :
Je reconnais maintenant M. le député de Chapleau.
Rendre hommage à M. Aurèle Desjardins pour sa contribution
à la communauté de Chapleau
M. Mathieu Lévesque
M. Lévesque
(Chapleau) : Merci, M. le Président. En cette journée de fête des Pères, je m'en voudrais de ne pas souhaiter une joyeuse fête des Pères à tous les
pères du Québec et à ceux du comté de Chapleau,
et particulièrement à mon père, Guy Lévesque, qui est très
important pour moi. Je t'aime, papa.
Cela étant dit, je tenais également, aujourd'hui, à saluer et à célébrer un grand citoyen
et bénévole de Chapleau, un homme dévoué, engagé et impliqué dans
notre communauté, M. Aurèle Desjardins.
M. Desjardins
est présentement directeur général des Apprentis, un centre d'apprentissage
pour la déficience intellectuelle. Ayant eu
la chance de le côtoyer, je peux vous assurer, M. le Président, que la cause
de ces adultes vivant avec une
déficience intellectuelle lui tient vraiment à coeur. Il est toujours à l'écoute et toujours
prêt à défendre la cause des plus vulnérables dans notre société.
Au
cours des années, Aurèle Desjardins s'est affilié à plusieurs
organismes et associations de la région comme Re-Source Intégration, Campus 3, pour ne nommer que ces derniers.
M. Desjardins trouve toujours du temps pour redonner à sa communauté, notamment par l'organisation de plusieurs soupers-bénéfice communautaires. Je tenais à le remercier pour son excellent
travail et son dévouement auprès de notre communauté. Merci beaucoup,
M. Desjardins.
Le Président :
La parole revient maintenant à M. le député de Nelligan.
Souligner les initiatives de jeunes entrepreneurs de la
circonscription de
Nelligan dans le cadre de La Grande journée des petits entrepreneurs
M. Monsef Derraji
M. Derraji :
Ce samedi, un rassemblement de 40 petites entreprises ont ouvert boutique
à Nelligan dans le cadre de La Grande
journée des petits entrepreneurs. Alors, qu'est-ce qu'on y retrouve? Eh bien,
de tout. Clara vous vendra ses petits savons faits maison. Toma vous fera
goûter à ses muffins au goût de la Roumanie, recette transmise par la
mamie. Juliette l'écolo vous proposera ses
sacs en tissu réutilisable pour pas cher, messieurs dames. Cédric et Félix vous
diront que c'est eux qui vendent les
meilleurs caramels, pas la peine de faire le tour. Combien je vous sers? Quant
à Emma, elle a compris que, l'année
prochaine, elle laissera tomber ses cookies pour se spécialiser dans le smoothie,
parce que ça se vend mieux.
Quant à ces chers parents, qui ont tenté de
récupérer leur mise de fonds... ont vu l'argent rapidement changer de main,
car ces jeunes entrepreneurs sont également devenus de jeunes consommateurs.
Une
chose est claire, la relève est dynamique, conscientisée, allumée et résolument
entrepreneure. Merci à Luis et Katya qui leadent au sein de Nelligan
cette magnifique journée de grands entrepreneurs. Merci.
Le Président :
Merci à vous toutes et à vous tous. Cela met fin à la rubrique Déclarations de
députés.
Avant
de poursuivre les affaires courantes, je vous rappelle que nous sommes réunis
conformément à la motion adoptée
hier, le 15 juin 2019, fixant le cadre temporel de nos séances extraordinaires
afin de compléter l'étude des affaires pour lesquelles l'Assemblée a été
convoquée.
Intervention
portant sur une violation de droit ou de privilège
Question
de privilège soulevée le 15 juin 2019 concernant les propos tenus
par le député d'Arthabaska à l'endroit du député de LaFontaine
À
ce moment-ci de nos travaux, je comprends que le whip en chef du gouvernement
souhaiterait faire une intervention. Je lui cède la parole.
M. Éric
Lefebvre
M. Lefebvre :
Merci, M. le Président. Ça fait trois ans que j'ai le privilège de siéger ici,
à l'Assemblée nationale. M. le
Président, je me fais toujours un plaisir de dire que j'ai développé de belles
amitiés des deux côtés de la Chambre. Mon leitmotiv, dans la vie, c'est
le respect, M. le Président.
Le député de LaFontaine et moi, nous
nous sommes toujours respectés, malgré nos différences politiques. Avec le
recul, M. le Président, ma réaction d'hier était exagérée. Le député de
LaFontaine s'est senti menacé ou intimidé. Je m'en excuse sincèrement,
M. le Président, au député de LaFontaine. Merci, M. le Président.
Le Président :
Je cède maintenant la parole au député de LaFontaine.
M.
Marc Tanguay
M. Tanguay :
Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je tiens à remercier le collègue
d'Arthabaska, effectivement, collègue
avec lequel on a toujours eu une relation de respect. J'accepte ses excuses.
Et, en ce qui me concerne, l'incident est clos et derrière nous, M. le
Président. Merci.
Décision
de la présidence
Le Président :
Alors, je comprends que cela dispose de la question dont j'ai été saisi hier.
Alors,
nous poursuivons nos travaux. Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations
ministérielles ni présentation de projets de loi.
Il n'y a pas de dépôt
de documents.
Il n'y a pas de dépôt
de rapports de commissions ni de dépôt de pétitions.
Il
n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une
violation de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous
en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je
cède la parole au chef de l'opposition officielle.
Recours à la procédure d'exception pour l'adoption
du projet de loi sur la laïcité de l'État
M. Pierre Arcand
M. Arcand :
M. le Président, après l'adoption de la loi anti-immigration ce matin, c'est un
autre jour triste pour le Québec et, en fait, c'est du jamais-vu. Au cours des
prochaines heures, le Québec sera l'unique endroit en Amérique du Nord où des gens se verront retirer des droits, et ce,
en dépit de la Charte des droits et libertés, adoptée à l'unanimité en 1975.
Le
gouvernement a présenté le projet de loi n° 21 comme s'il
présentait le brouillon d'un travail bâclé. Tout a été mis en scène pour que ce projet de loi soit adopté
sous bâillon, et ce, depuis février dernier. Il a confié à un seul ministre,
reconnu pour sa rigidité, deux projets de
loi majeurs. On parle d'un projet de loi que le gouvernement a choisi de
soustraire aux tribunaux. Pour citer
Lysiane Gagnon : C'est «une opération de marketing politique [...] pour
donner à une législation mesquine et
discriminatoire l'apparence d'un grand projet collectif». En 1977, après
10 ans de débats entourant la langue, René Lévesque a déposé un projet de loi qui a soulevé les passions.
Pourtant, M. Lévesque a refusé d'utiliser le bâillon; ça aurait été, pour lui, une atteinte à la démocratie.
Et les députés ont donc siégé tout l'été. Nous étions prêts à le faire pour
une question aussi fondamentale que celle des droits et libertés de la
personne.
M.
le premier ministre, je pensais que René Lévesque était votre modèle politique,
pourquoi n'avez-vous pas suivi son exemple?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, c'est un moment important aujourd'hui,
c'est un moment qui est attendu depuis longtemps
par les Québécois. C'est très clair, quand on parle aux Québécois, que ceux-ci
veulent qu'on interdise les signes religieux
pour les personnes qui sont en autorité. Malheureusement, le Parti libéral ne
veut même pas interdire, par exemple, le turban chez un policier, la
kippa chez un policier, le hidjab chez une policière.
Donc,
M. le Président, on a débattu pendant 60 heures en commission
parlementaire, et, même si on passait les deux prochaines années en commission parlementaire, on n'arrivera pas à
s'entendre, parce que, sur le fond, le Parti libéral n'est pas prêt à écouter les Québécois. Les
Québécois demandent depuis longtemps qu'on les écoute, c'est ce qu'on fait
aujourd'hui, puis moi, je suis très fier de ça.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M.
Pierre Arcand
M.
Arcand :
Hier, vous avez invoqué des risques pour la cohésion sociale pour justifier le
recours au bâillon. M. le Président,
c'est le projet de loi du premier ministre qui, en retirant des droits aux
gens, est un grand risque pour la cohésion sociale.
Le
Président : M. le premier ministre.
M. François
Legault
M. Legault :
M. le Président, le Parti libéral, depuis quelques années... ce n'était pas le
cas dans le temps de Robert Bourassa, mais
on voit de plus en plus que le Parti libéral du Québec essaie de défendre les
valeurs canadiennes au Québec. Nous,
comme gouvernement, ce qu'on essaie de faire, c'est exactement le contraire, de
défendre les valeurs québécoises,
défendre ce que les Québécois souhaitent, au Canada. C'est ça, être
nationaliste, et je suis très fier de l'être.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.
M.
Pierre Arcand
M.
Arcand :
M. le Président, le premier ministre n'a même pas été capable de nous dire
cette semaine si un jonc, c'était un signe religieux. Le projet de loi
n° 21 donnera lieu à une application tout à fait arbitraire. C'est une
longue série de débats judiciaires à
laquelle nous assisterons. M. le Président, les emplois payants, c'est du côté
des avocats que le premier ministre va les créer.
• (9 h 40) •
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, il y a des signes religieux qui sont
interdits en Allemagne, en France, en Belgique. M. le Président, les Québécois ont toujours été accueillants, seront
toujours accueillants, et jamais, comme premier ministre du Québec, je
n'accepterai que le Parti libéral laisse entendre que les Québécois sont
intolérants.
Le
Président : Troisième complémentaire, M. le chef de
l'opposition officielle. Vous êtes le seul à avoir la parole.
M.
Pierre Arcand
M.
Arcand :
M. le Président, le premier ministre a dit, dans une récente entrevue : Je
ne veux pas que le projet de loi sur
les signes religieux soit considéré comme mon legs politique. Vous savez quoi,
M. le Président? Son legs, ce sera ce projet
de loi bâclé, inapplicable, qui bafoue les droits des minorités. M. le premier
ministre, on se souviendra de vous pour ça.
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, je suis venu en politique pour qu'il y ait
plus de jeunes qui réussissent, donc, pour investir puis modifier les choses en éducation. Je suis venu en
politique pour enrichir le Québec, parce que je n'accepte pas que le
Québec soit moins riche que l'Ontario, moins riche que le reste du Canada,
reçoive de la péréquation. Et M. le
Président, oui, mon legs, je le souhaite davantage en éducation puis en
économie, mais, en même temps, sur certains dossiers, comme la loi sur la laïcité, c'est important de répondre aux
préoccupations puis aux demandes des Québécois. Puis c'est ce qu'on va
faire, puis il serait temps que le Parti libéral prenne acte de ce qui s'est
passé...
Le Président :
En terminant.
M. Legault :
...le 1er octobre dernier.
Le Président :
Oui. Question principale, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Motif
d'urgence d'adopter le projet de loi sur la laïcité de l'État
Mme
Hélène David
Mme David :
Dans quelques heures, nous voterons une loi qui fera fi des droits les plus
fondamentaux des Québécois. Depuis le début de ce débat sur la laïcité,
j'appelle le ministre au dialogue. Aujourd'hui, je suis forcée de constater que le ministre a été sourd à mes
attentes, à nos attentes, à celles des citoyens qui ne pensent pas comme lui.
Par sa procédure de bâillon, il dit à
tous les Québécois qui ne sont pas d'accord avec lui que leur avis importe peu,
que le respect de leurs droits n'est qu'un obstacle que l'on peut
facilement contourner.
Avoir
le courage de ses convictions, c'est avoir la capacité et la détermination d'en
expliquer et d'en défendre chaque aspect, et ce, même dans l'adversité,
avoir le courage d'être un démocrate jusqu'à la fin, être un politicien qui travaille avec les outils légitimes de la
démocratie plutôt qu'avec les recours les plus autoritaires que sont les
dispositions de dérogation et le bâillon parlementaire.
Comment peut-il en être fier?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, je suis extrêmement fier du projet
de loi n° 21. Savez-vous
pourquoi? Parce que,
dans le cadre du projet de loi
n° 21, M. le Président, on vient faire en sorte d'inscrire, dans nos lois, la laïcité
de l'État.
Qu'est-ce que
constitue la laïcité de l'État, M. le Président? C'est la
séparation formelle entre l'État et les religions. Et, quoi qu'on dise, au Québec
et au Canada, il n'y a pas de loi, ce n'est pas prévu dans la Constitution,
ce n'est pas prévu dans la Charte des
droits et libertés de la personne que l'État québécois, il est laïque.
C'est la toute première fois, M. le
Président, dans notre histoire législative que ça sera inscrit dans nos lois que
l'État québécois, il est laïque, pour la toute première fois. Ce qu'on vient faire, c'est de
s'assurer de notre choix de modèle de société, M. le Président. La laïcité,
c'est une valeur qui est chère et qui
est fondamentale pour les Québécois. Même les collègues du Parti libéral, je les ai entendus dire à de
nombreuses reprises : Le Québec est laïque, nos institutions sont laïques. Or,
en droit, ce n'est pas le cas, M. le
Président.
Alors, c'est
une avancée significative, et, dans le cadre du projet de loi, M. le Président, on donne des droits à tous les Québécois de recevoir des
services publics laïques. Je pense que, pour la société québécoise...
Le Président : En terminant.
M.
Jolin-Barrette : ...pour
l'ensemble de la société québécoise, il s'agit d'une avancée importante, M. le Président.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme Hélène David
Mme
David : M. le Président, le ministre avait le choix. Il n'y avait aucune urgence, même
pas l'ombre d'une urgence. Le ministre
aurait pu prendre le temps de répondre à chacune de nos questions, des
questions soulevées par les gens
visés par son projet de loi. Il aurait pu étudier chacun de nos amendements.
Il a plutôt choisi d'y mettre fin et d'imposer son projet de loi aux Québécois.
Il a choisi la fermeture au dialogue. Il a préféré l'artillerie lourde à la
sérénité.
Le ministre peut-il admettre qu'il a fait le
mauvais choix?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, le gouvernement a fait le bon choix en déposant le projet de loi n° 21. Le gouvernement a fait le bon choix en respectant ses engagements
qu'il a pris depuis 2013 et en respectant ses engagements qu'il a pris lors de
la dernière campagne électorale. Le gouvernement
du Québec avait dit qu'il adopterait
une loi sur la laïcité de l'État, qu'il interdirait le port de signes
religieux chez certaines personnes en situation d'autorité : les policiers,
les juges, les agents de services correctionnels, les procureurs, les
enseignants. C'est ce que nous faisons.
L'autre point
important, M. le Président, le gouvernement avait dit qu'il allait interdire... qu'il allait
obliger les services publics à visage découvert...
Le Président : En terminant.
M. Jolin-Barrette : ...réception
à visage découvert. C'est ce que nous faisons, M. le Président.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme Hélène David
Mme David : M. le
Président, Albert Camus disait :
«La démocratie, ce n'est pas la loi de la majorité,
mais la protection de la minorité.» Un véritable leader doit servir
le bien commun. Le ministre s'est dit fier hier de recourir au bâillon, il le dit encore : Fier. Fier de
renier les droits des parlementaires pour forcer l'adoption de sa loi? Fier de
bafouer les chartes des droits et libertés? Fier de brimer les droits
des minorités?
C'est vraiment comme ça que le ministre souhaite
passer à l'histoire?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, c'est la première fois que
la laïcité de l'État est inscrite dans nos lois. Les propos de
la députée de Marguerite-Bourgeoys, aujourd'hui, sont quand même durs. Ils ne
sont pas partagés par l'ensemble des Québécois.
Ça, je tiens à le rappeler, M. le
Président. Il est légitime pour une société
comme la nôtre de décider de quelle façon les rapports entre l'État et les religions vont s'organiser. Il est
légitime de dire qu'au Québec les services
publics sont donnés et reçus à visage découvert. Il est légitime dans une société
que les policiers ne portent pas de signe
religieux lorsqu'ils
arrêtent un prévenu. Il est légitime, M.
le Président, dans une société
de dire que, formellement, l'État et les religions, c'est deux choses.
Il est légitime, M. le Président, de donner davantage de droits aux citoyens québécois,
des droits collectifs à la nation québécoise...
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette :
...pour faire en sorte qu'au Québec c'est la laïcité qui s'applique.
Le Président :
Question principale, M. le député de LaFontaine.
Dispositions
de dérogation pour l'application
du projet de loi sur la laïcité de l'État
M.
Marc Tanguay
M. Tanguay : Oui, M.
le Président, le projet de loi n° 21 va à l'encontre de notre charte des droits et
libertés. Voulant empêcher les
contestations judiciaires, le gouvernement utilise les clauses dérogatoires. On pouvait lire
dans La Presse le 20 mars
dernier que le projet de loi n° 21 a été déposé, et je cite, «en dépit de l'opposition très ferme de tous les spécialistes du ministère de la Justice», fin de la citation. Au siège social du ministère de la Justice, je cite toujours, «vous ne trouverez pas un seul avocat qui approuve le projet» de loi. Le 26 mars dernier, M. le
Président, le président de la commission des droits de la personne a lancé à la ministre de la Justice un appel à la raison.
La ministre de la Justice est responsable de faire respecter notre charte des droits. Elle est gardienne de nos
droits et libertés. Elle est la première conseillère juridique du
gouvernement. La ministre de la Justice n'aurait jamais dû autoriser, M. le
Président, le dépôt de ce projet de loi.
Comment, aujourd'hui,
peut-elle permettre que son adoption se fasse sous le bâillon?
Le Président :
Mme la ministre de la Justice.
Mme Sonia
LeBel
Mme LeBel :
Oui. Merci, M. le Président. Effectivement, le député de LaFontaine a très bien
résumé mes responsabilités,
responsabilités que j'assume pleinement au sein de mon gouvernement.
Maintenant, il sait pertinemment bien
que je ne peux, ici, en cette Chambre, compte tenu de ces responsabilités-là,
exprimer une quelconque opinion ou un quelconque
commentaire sur les aspects juridiques de ce projet de loi, aspects juridiques
qu'il soulève dans sa question.
Par
contre, je veux profiter de l'occasion
pour dire que j'appuie haut et fort le principe de la laïcité,
M. le Président. J'y crois. L'interdiction du port des signes
religieux pour les personnes en état d'autorité, j'y crois. Pendant plus de 25 ans,
j'ai été procureure de la couronne dans une salle de cour. J'ai occupé
cette position. Jamais je n'aurais pu concevoir afficher mes couleurs ou porter
un signe religieux pendant je plaidais pour, contre la liberté d'un citoyen.
Alors,
c'est pour cette raison-là qu'aujourd'hui on dépose ce projet de loi et c'est pour
cette raison-là que je vais voter pour à toutes les étapes.
Des voix :
...
Le
Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît, non! Merci. Ça va bien jusqu'à maintenant.
Première complémentaire, M. le
député de LaFontaine.
M.
Marc Tanguay
M.
Tanguay : M. le Président, la ministre de la Justice... Est-ce
que c'est pour ces raisons-là qu'ils
doivent avoir recours aux deux
clauses dérogatoires? Est-ce que pour ces raisons-là que ça respecterait la
charte, mais que ça prend des clauses dérogatoires?
M. le Président, il y
a eu un débat important, fin des années 70, la loi 101. Et un grand ministre de
la Justice, Marc-André Bédard, avait
dit : Nous allons respecter les droits et libertés. Et la clause «nonobstant»
avait été retirée du projet initial.
C'est
de ça qu'on s'attendrait de notre ministre
de la Justice, que le débat se fasse
et qu'on respecte nos droits.
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, j'entends le député de LaFontaine. Est-il contre, M.
le Président, le fait que, dans la
Charte des droits et libertés de la personne, nous insérons le concept même de
laïcité, une valeur fondamentale, propre
à la société québécoise? Parce que, dans le projet de loi n° 21, c'est ce
que nous faisons. Nous faisons en sorte d'inscrire la laïcité dans la
loi sur la laïcité, mais également dans la charte.
Relativement
à l'utilisation des dispositions de dérogation, M. le Président, il appartient
aux membres de cette Assemblée, il
appartient au Parlement de déterminer de quelle façon les rapports entre l'État
et les religions doivent s'organiser, de quelle façon la société doit
s'organiser, de quelle façon est-ce que les rapports sont organisés.
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, il n'appartient pas aux tribunaux de trancher, mais à
l'Assemblée de choisir.
• (9 h 50) •
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de LaFontaine.
M.
Marc Tanguay
M. Tanguay :
Le leader du gouvernement me demande : Est-il contre? Je vais vous dire je
suis contre quoi, M. le Président. Je suis
contre une interdiction des signes religieux avec une définition confuse. Je
suis contre une interdiction de toute demande d'accommodement pour motifs
religieux. Je suis contre une clause dérogatoire qui suspend tous les droits et
libertés de tous les Québécoises et Québécois pour toujours, M. le Président.
Ça, c'est du jamais-vu dans l'histoire du Québec, faire en sorte de
modifier notre charte des droits sans rechercher l'unanimité et sous le
bâillon.
Comment la ministre
de la Justice peut-elle accepter tout ça sous sa gouverne?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, c'est fondamental d'inscrire la laïcité de l'État dans
la Charte des droits et libertés de
la personne. C'est fondamental aussi, M. le Président, que ça soit l'Assemblée
nationale du Québec qui détermine de
quelle façon les rapports entre l'État et les religions s'organisent. Ce n'est
pas aux cours à déterminer de quelle façon est-ce que ces rapports-là doivent s'organiser. Il appartient à tous les parlementaires ici, en tant que représentants de leur population, de déterminer comment s'organiseront ces
rapports. Au Québec, on a choisi de faire en sorte que l'État et
les religions soient séparés. Aujourd'hui, le projet de loi s'inscrit
dans cette continuité-là, M. le Président, notamment relativement à l'interdiction du port de signes religieux pour certaines
personnes en situation d'autorité. Et, M. le Président...
Le Président :
En terminant.
M.
Jolin-Barrette : ...le projet de loi, il est pragmatique, applicable
et modéré.
Le Président :
Question principale, M. le chef du troisième groupe d'opposition.
Conséquences
de l'adoption du projet de loi sur la laïcité de l'État
dans les réseaux de l'éducation et des services de garde
M.
Pascal Bérubé
M.
Bérubé : M. le Président, pour nous, débattre et légiférer sur la
laïcité, c'est légitime et c'est nécessaire. C'est un choix qu'une société fait. D'ailleurs, c'est un
gouvernement du Parti québécois qui a été le premier à vouloir légiférer
sur cette question.
Sur
le projet de loi n° 21, on est d'accord avec le contenu. Ceci étant dit,
l'enjeu, pour nous, c'est la cohérence. Alors, j'ai des questions à poser au
premier ministre. Le premier enjeu : si on considère que les enseignants
et enseignantes ont des postes d'autorité,
pour nous, en CPE puis en service de garde, c'est la même chose. 67 % des
Québécois le souhaitent, dans un sondage de mars dernier.
Pourquoi ne pas
assujettir les services de garde et les CPE à la loi n° 21?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, d'abord, content de voir que le chef du
Parti québécois puis le Parti québécois sont d'accord avec l'essentiel du projet de loi n° 21, c'est-à-dire
d'interdire les signes religieux pour les personnes qui sont en
autorité. Maintenant, avec raison, le chef du Parti québécois se pose la
question qui aurait été la question à débattre : Quelles sont les personnes qui sont en autorité? On sait que, dans la
charte des valeurs du Parti québécois, on avait inclus tout le réseau de la santé. Puis, effectivement,
on pourrait se poser la question : Est-ce qu'un médecin est en position
d'autorité par rapport à un patient? Les CPE, on pourrait se poser
effectivement la même question. Parce qu'on a choisi
de légiférer dans le domaine public. Techniquement, une garderie a son conseil
d'administration, même si c'est financé
par le gouvernement du Québec. Donc, on souhaite donner une certaine autonomie
aux garderies au Québec. Donc, c'est
pour ça qu'on a fait le choix de ne pas l'inclure dans le projet de loi. En
même temps, ça rend le projet de loi modéré, comme le sont les
Québécois.
Le Président :
Première complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition, à vous
seul la parole.
M. Pascal Bérubé
M. Bérubé : M. le Président,
j'aimerais ajouter l'étiquette de cohérent aussi au projet de loi.
Deuxième proposition du Parti québécois. Le
gouvernement a choisi de ne pas assujettir les écoles privées. Pourtant, la liberté de conscience, c'est bon pour
les élèves du primaire et du secondaire dans le réseau public, mais pas dans le
réseau privé, je dirais même semi-privé, parce que, collectivement, on envoie
500 millions de dollars annuellement puis on finance à 60 % et plus les élèves du privé. Il me semble
que, si on accepte l'argent de l'ensemble des Québécois, on devrait
accepter les lois aussi.
Pourquoi ne pas assujettir les écoles privées à
la loi n° 21? La liberté de conscience, c'est pour...
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, encore une fois, le chef du Parti québécois
fait une bonne proposition. Il faut se rappeler, quand on a déposé le projet de loi
n° 21, on a demandé à tout le monde de faire des compromis. Il y a des
gens qui trouvaient qu'on allait trop
loin, comme les libéraux puis Québec solidaire, puis il y a des gens qui
trouvaient, comme le Parti québécois, qu'on n'allait pas assez loin.
Pour
ce qui est des écoles privées, bien, le mot le dit, c'est privé. C'est vrai
qu'il y a 60 % qui est financé
par le public, ça, c'est peut-être un
autre débat qu'il faudrait avoir, à savoir est-ce que le gouvernement devrait
continuer à financer 60 %. Nous, on pense que oui, le Parti
québécois, on n'est pas sûr...
Le Président : S'il vous
plaît!
M. Legault : ...mais il reste que
les écoles privées sont des écoles privées.
Le
Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du troisième
groupe d'opposition. Nous sommes attentifs à vos propos.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé : M. le Président, je veux juste faire remarquer au premier
ministre que le visage découvert, ça s'applique aux CPE, donc on est
capable d'appliquer les règles qu'on veut au réseau qu'on veut.
Dernière proposition, le cours d'Éthique et
culture religieuse. Je lui avais posé la question et le ministre de l'Éducation
s'était engagé à modifier le cours.
Est-ce que le
premier ministre peut s'engager formellement à ce que ce soit modifié et nous
préciser un échéancier pour la partie religieuse du cours Éthique et
culture religieuse?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, la CAQ s'est engagée, en campagne
électorale, que, durant le mandat, on
va modifier le cours d'ECR, étude et
culture religieuse. Donc, ce sera fait, comme toutes les promesses, comme tous
les engagements qu'on a pris,
ce sera respecté pendant le mandat.
Le Président : Question
principale, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.
Droits et libertés de la
personne abordés dans
le projet de loi sur la laïcité de l'État
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Il y a des jours qui passent à
l'histoire pour des bonnes raisons. Je pense notamment au 27 juin 1975, quand les élus du peuple québécois ont
adopté, à l'unanimité, la charte québécoise des droits et libertés, le jour où
nous sommes devenus assez confiants en nous-mêmes pour reconnaître les citoyens
minoritaires comme des citoyens à
part entière. Puis il y a des jours qui passent à l'histoire pour des moins
bonnes raisons, des jours comme aujourd'hui, quand les élus de la CAQ
bâillonnent les oppositions pour suspendre les droits et libertés de nos
concitoyennes et nos concitoyens.
M. le
Président, toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la
liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d'opinion, la
liberté d'expression. Ça, c'est l'article 3 de notre charte. Il fait la
fierté du peuple québécois depuis 45 ans.
Puis le député de L'Assomption est
devenu premier ministre. Avec le projet de loi n° 21,
il suspend l'article 3, et, juste
pour être sûr de sa shot, bien, il suspend la 1, la 2, jusqu'à 38. M. le
président, pour joindre l'insulte à
l'injure, il le fait en sabotant la délibération démocratique.
J'ai besoin de
savoir : Le premier ministre est-il fier de ça?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, il y a quelqu'un qui a dit : Méfiez-vous de ceux qui disent
qu'ils aiment le peuple mais qui ne
veulent pas écouter ce que demande le peuple. Et je pense qu'on a un bel
exemple aujourd'hui. On a un peuple québécois qui est huit millions d'habitants dans un univers de
centaines de millions d'anglophones. La situation de ce peuple sera toujours vulnérable. Et il a été
prévu, dans la charte, d'avoir une clause dérogatoire. Il y a été prévu que,
parfois, il faut invoquer les droits collectifs, et c'est ce qu'on fait
aujourd'hui avec le projet de loi n° 21.
Et
donc, M. le Président, je pense que les Québécois souhaitent qu'on pose le
geste qu'on est en train de poser aujourd'hui, puis la cheffe de Québec
solidaire aurait intérêt à se promener dans toutes les régions du Québec.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.
Mme
Manon Massé
Mme
Massé : C'est vrai que la clause dérogatoire a déjà été utilisée, mais
c'était pour protéger des droits, pas en enlever. C'était pour favoriser l'accès à la justice, pour assurer
l'égalité des personnes en situation de handicap, pour protéger nos enfants
dans certaines situations à la DPJ. Le projet de loi de la CAQ, là, ce n'est
pas ça qu'il fait. Il retire des droits à tous nos concitoyens.
Il ne m'a pas répondu
de façon satisfaisante : Est-il vraiment fier de ça?
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François
Legault
M.
Legault : M. le Président, tous les Québécois ont constaté que la
position de la CAQ a été très claire depuis des années : très
claire en campagne électorale, très claire au débat des chefs, où on était,
tous les deux, face à face. M. le Président, on ne s'est jamais caché qu'on
voulait adopter ce projet de loi là avant la fin du mois de juin.
Maintenant, il y a
plus de 60 heures en commission parlementaire...
Le Président :
M. le leader de l'opposition officielle.
M.
Proulx : C'est mon privilège de pouvoir invoquer le règlement
également. Le chef de la CAQ, premier ministre du Québec, ne peut pas induire cette Chambre en erreur, M. le Président.
Il n'y a pas eu 60 heures de travaux parlementaires. Il y a eu, en étude
par article, 32 heures, 32 heures, M. le Président, pas 60, ça fait deux fois.
• (10 heures) •
Le
Président : On ne peut pas dire «induire en erreur», de un.
Secundo, M. le leader du gouvernement, rapidement.
M. Jolin-Barrette : Bien écoutez, le premier ministre a dit : En commission
parlementaire. Alors, les consultations particulières, il y a eu 27 heures de consultations particulières plus
32 heures en étude détaillée, M. le Président. M. le Président, ce sont des travaux parlementaires, à
moins que le leader de l'opposition officielle me dise que, lorsqu'on a des auditions, des consultations particulières, ce
ne sont pas des travaux parlementaires. Ce n'est pas le sens que je donne
à ce mot-là.
Alors, lorsqu'on fait
27 plus 32, ça donne 60.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! Merci. Revenons... M. le premier ministre, veuillez poursuivre
votre réponse, s'il vous plaît.
M.
Legault : M. le Président, les Québécois nous ont demandé d'agir. La
seule façon d'agir, c'est de procéder comme
on procède aujourd'hui. Je pense que le débat, il a assez traîné depuis
11 ans. Il est temps qu'on passe à l'action.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.
Mme Manon Massé
Mme Massé : Je trouve le premier
ministre bien naïf. C'est sûr que, demain matin, le débat parlementaire sera...
Le
Président : M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, on doit faire preuve de respect entre les différents
parlementaires. On ne peut pas utiliser le qualificatif que la cheffe du
deuxième groupe d'opposition a utilisé à l'endroit du premier ministre.
Le
Président : Je vais vous demander tout simplement de faire
attention aux propos que l'on utilise, s'il vous plaît. Continuons sur un bon ton. Évitez d'utiliser des termes qui
suscitent des débats. Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition,
poursuivez.
Mme
Massé : C'est sûr que, demain matin, le débat parlementaire va être
derrière nous, mais, s'il a écouté, là, en commission parlementaire, il sait très bien que plusieurs groupes qui
appuient son projet de loi voudraient aller encore plus loin. Ils voudraient enlever encore plus de
droits, encore plus de personnes, comme par exemple, le Parti québécois.
Alors,
M. le Président, le premier ministre leur ouvre la porte. Il ne peut pas en
même temps prétendre la fermer.
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M.
Legault : M. le Président, la cheffe du deuxième groupe d'opposition
laisse entendre qu'on voudrait étendre le
projet de loi. Je la rassure, il n'y a aucune intention. On n'est pas le Parti
québécois. La CAQ a une position claire, puis on va continuer de
l'appliquer, M. le Président.
Donc,
je me dis, tous les Québécois ont compris qu'il est temps que ce projet de loi
soit adopté, puis c'est ce qu'on va faire aujourd'hui. Puis je pense que
les Québécois vont être très satisfaits du travail qui a été fait.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Saint-Laurent.
Application
du projet de loi sur la laïcité de
l'État dans le réseau de l'éducation
Mme Marwah Rizqy
Mme
Rizqy : Ce que le gouvernement caquiste s'apprête à faire, c'est vrai
que c'est historique pour deux raisons : l'ampleur de l'atteinte à des droits fondamentaux et le recours
injustifié à la clause dérogatoire. Le projet de loi n° 21 que le gouvernement s'apprête à adopter avec le
bâillon, c'est-à-dire en mettant fin au débat démocratique ici, à l'Assemblée
nationale, aura des répercussions sur
plusieurs personnes, autant d'hommes, des femmes, et surtout des femmes, dans
le réseau de l'éducation.
J'aimerais vraiment
entendre le professeur idéaliste, celui-là qui a été très silencieux tout au
long de ce débat. J'aimerais entendre ce
prof idéaliste pour savoir comment il compte appliquer le projet de loi n° 21, notamment dans les classes
de maternelle quatre ans avec des éducatrices et des enseignantes
qui auront avec eux les mêmes enfants; certains, leurs droits seront
bafoués, d'autres, non.
Est-il toujours
idéaliste? Est-ce qu'il est encore cet enseignant qui écoute son réseau? Parce que tant la FAE que la CSQ, une autre centrale syndicale, dit que vous
n'avez pas besoin de ce projet de loi. Qu'est-ce que le ministre va faire?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, l'engagement du gouvernement, il était très clair, et
ça, depuis... dès 2013. En campagne
électorale, on a réitéré notre engagement, M. le Président, relativement à
l'effet que les personnes en situation d'autorité,
incluant les enseignants, allaient être... n'allaient pas pouvoir porter de
signes religieux durant leurs prestations de travail, et ça, c'est très
clair.
Le
gouvernement a fait un compromis, M. le Président, il a inséré une clause de
droits acquis pour les personnes déjà
en fonction à la date du dépôt du projet de loi. Le projet de loi que nous
avons est un projet de loi modéré et qui est applicable, M. le Président. Les enseignants représentent une figure
d'autorité importante pour les enfants, et on fait en sorte de répondre
à la volonté des Québécois d'interdire le port de signes religieux chez les
enseignants.
Je
pense, M. le Président, que la laïcité, et le processus de sécularisation de la
société québécoise, a débuté dans nos écoles, notamment avec le rapport
Parent, au fil des années. Et par la suite il y a eu la déconfessionnalisation
des systèmes scolaires. Et désormais les
professeurs ne pourront plus porter de signes religieux, M. le Président. C'est
la suite logique de l'évolution de la
laïcité au Québec que nous faisons aujourd'hui avec le projet de loi n° 21, en interdisant...
Le Président :
En terminant.
M.
Jolin-Barrette : ...le port de signes religieux à certaines personnes
en situation d'autorité.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme Marwah Rizqy
Mme
Rizqy : La confiance règne au sein du gouvernement! On empêche le
ministre de s'exprimer. Moi, j'aimerais vraiment savoir pourquoi que le ministre de l'Éducation n'a pas le droit
de se lever en cette Chambre pour nous expliquer comment qu'il va appliquer le projet de loi n° 21.
Pourquoi que le ministre de l'Éducation n'écoute pas le président de la Commission des droits de la personne et des droits
de la jeunesse qui dit déjà que le devoir de réserve et l'interdiction
de prosélytisme sont déjà encadrés?
Est-ce
que le ministre de l'Enseignement supérieur va porter la voix de tous les
étudiants qui disent qu'ils veulent accéder à leurs rêves d'être
enseignants? Est-ce qu'il va se lever?
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : Merci bien, M. le Président. Ce qu'on fait aujourd'hui,
c'est extrêmement important et c'est la suite de quelque chose qui a commencé il y a fort longtemps. Quand j'ai commencé
à enseigner, à la fin des années 90, c'était dans un système confessionnel. On m'a demandé à ma
première année d'enseignement si je voulais enseigner l'enseignement religieux catholique ou protestant ou si
j'enseignais le cours de morale. Je pense, la deuxième, la troisième année,
déconfessionnalisation du système,
commissions scolaires linguistiques francophones et anglophones. Et on a
instauré un cours d'Éthique et
culture religieuse, que nous allons revoir en cours de mandat, je le répète, évidemment.
Et aujourd'hui, bien, on va plus loin dans la bonne direction en
déconfessionnalisant...
Le Président :
En terminant.
M.
Roberge : ...vraiment et en laïcisant notre réseau de l'école
publique, c'est une simple question de cohérence.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme Marwah Rizqy
Mme Rizqy : Vous n'avez pas répondu, M. le ministre. Quand que vous avez commencé, c'était une chose. Puis, moi aussi, quand j'ai commencé l'école, c'est vrai
que j'avais des soeurs à l'école. Mais, quand j'ai terminé, c'était terminé.
Il n'y en avait plus, de religieuses non plus.
Alors,
dites-moi, M. le ministre, comment vous allez l'appliquer, le projet de loi n° 21, comment vous allez aussi porter la voix de ces étudiantes qui sont présentement sur les bancs universitaires, qu'elles complètent leur formation... Il
y en a d'autres qui sont déjà en stage, vous le savez.
Est-ce que
vous avez défendu votre réseau au sein du gouvernement ou vous avez
juste fait de l'aplaventrisme?
Le Président :
Monsieur...
Des voix :
...
Le
Président : S'il vous plaît. Soyons prudents pour les termes utilisés. Encore une fois, utilisons les termes et soyons de bon ton. M. le ministre de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, je crois que le terme
utilisé par la députée de Saint-Laurent n'est pas approprié, surtout est interdit
en termes de propos parlementaires.
M. le Président, la députée de Saint-Laurent vient de nous dire qu'à l'époque où elle était à
l'école c'étaient des religieux qui lui enseignaient. Alors, peut-être
peut-elle nous indiquer si elle a fréquenté une institution privée. Ça m'étonnerait que ça soit dans le réseau public que
des religieux lui aient enseigné. Alors, dans le cadre du projet de loi sur la laïcité, M. le
Président, dans le secteur public, au niveau
du primaire, du secondaire, les enseignants ne pourront plus porter de signes religieux. Alors, M. le Président, nous répondons à la volonté des Québécois.
L'engagement que nous avons pris était très clair à
l'effet que les personnes en situation d'autorité...
Le Président :
En terminant.
M. Jolin-Barrette : ...ne pourraient pas porter de signe religieux, incluant les enseignants. Nous respectons notre parole.
Le Président :
Question principale, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
Attribution
du contrat de desserte
maritime des Îles-de-la-Madeleine
M. Joël Arseneau
M. Arseneau :
Merci, M. le Président. Le 17 janvier dernier, le gouvernement a plongé
les Madelinots dans l'incertitude en
annulant deux décrets en matière de transport maritime. Il était prévu qu'un nouveau
navire de croisière serait financé et
que la compagnie CTMA opérerait les services pendant les 20 prochaines années. Le ministre des Transports avait promis une nouvelle proposition avant le 12 juin, mais rien n'a encore été annoncé. Il disait
vouloir faire un petit pas en arrière
pour en faire un plus grand en avant. Il disait vouloir mieux connaître les
besoins des Madelinots. Alors, les besoins,
M. le Président, c'est un navire neuf et un service
cargo-croisière opéré par les Madelinots, et qui leur appartienne.
Ma
question, M. le Président : Est-ce
que le gouvernement peut rassurer les
Madelinots sur l'avenir du lien maritime, qui est crucial non seulement
pour l'approvisionnement des insulaires, mais comme projet touristique et économique
créateur d'emplois?
Le Président :
Mme la ministre déléguée aux Transports.
Mme Chantal Rouleau
Mme Rouleau :
Merci, M. le Président. En réponse au député des Îles-de-la-Madeleine, évidemment
que le transport maritime est d'une grande
importance pour notre gouvernement. Nous sommes d'ailleurs à revoir ce qui s'appelait la Stratégie maritime, qui est issue du Projet Saint-Laurent, la grande
idée, le grand projet de société qui a été écrit et pensé par notre
premier ministre. Alors, dans ce contexte, le transport maritime prend toute sa
place. Transport récréatif, transport des
personnes, transport des marchandises : évidemment que ce transport se
rend aux Îles-de-la-Madeleine et que nous
sommes à voir, avec nos organisations
puis avec la Société des traversiers, par exemple, avec notre organisation au
ministère des Transports, et en consultation
avec les gens du milieu, à travers tout le Saint-Laurent, cette mise en oeuvre,
mise en oeuvre du volet maritime.
Des voix :
...
Le
Président : S'il vous plaît! Première complémentaire. La parole
n'appartient qu'au député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Joël Arseneau
M. Arseneau :
Merci, M. le Président. Je voudrais rappeler que 17 ans après la mise en
oeuvre du service cargo-croisière par le
gouvernement de Bernard Landry, son succès économique et touristique est
indéniable. On parle d'une centaine
d'emplois directs, des retombées économiques de plusieurs millions de dollars
dans notre milieu. C'est une réussite
dont le principal responsable, c'est le transporteur, la CTMA, mais c'est une
réussite dont le gouvernement du Québec devrait être fier.
Le
gouvernement peut-il confirmer aujourd'hui qu'il va consolider les emplois chez
nous, maintenir le partenariat avec la CTMA...
• (10 h 10) •
Le Président :
Mme la ministre du Tourisme.
Mme Caroline Proulx
Mme
Proulx (Berthier) : Merci, M. le Président. Je tiens à souligner que
notre gouvernement a fait le tour de toutes
les régions touristiques au cours de l'hiver dernier. C'est avec beaucoup de
bonheur qu'on a rencontré les gens des Îles-de-la-Madeleine,
qu'on a rassurés, M. le Président. La région touristique des
Îles-de-la-Madeleine est prioritaire pour notre gouvernement. Je tiens à préciser que je suis la ministre du
Tourisme, mais la ministre du Tourisme de toutes les régions du Québec. Très prochainement, notre
gouvernement, nous aurons l'occasion d'annoncer de bonnes nouvelles aux Madelinots. Nous sommes conscients que c'est
une région touristique extrêmement importante et nous déployons tous les
efforts pour s'assurer que les gens puissent visiter...
Le Président :
En terminant.
Mme Proulx
(Berthier) : ...la belle région des Îles-de-la-Madeleine.
Le
Président : Deuxième complémentaire. Encore une fois, la parole
n'appartient qu'au député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Joël Arseneau
M.
Arseneau : Merci. Je voudrais qu'on me comprenne, M. le
Président : je plaide pour ma région, mais je plaide aussi pour le Québec. Je vous propose de construire
un nouveau navire, mais de le faire ici, au Québec, un projet rassembleur, créateur
d'un millier d'emplois directs et indirects dans 13 régions du Québec, des
emplois payants, comme les aime M. le
premier ministre. Le fédéral va bientôt commander deux traversiers à la Davie.
Je n'ose pas imaginer que le Québec va en faire moins.
Au
nom du nationalisme économique dont il se réclame, le gouvernement peut-il
s'engager à faire construire un nouveau bateau...
Le Président :
Mme la ministre déléguée au Transport.
Mme Chantal Rouleau
Mme
Rouleau : Merci, M. le Président. Le Saint-Laurent est une richesse
incroyable pour le Québec. C'est une source de développement économique,
social et environnemental. Par le Saint-Laurent, un plan de développement
économique se met en place et servira à rehausser le niveau de richesse de
toutes les régions du Québec, jusqu'aux Îles-de-la-Madeleine évidemment, cette
magnifique région. Alors...
Le Président :
En terminant.
Mme Rouleau :
...en terminant, M. le Président, nous voulons...
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Image du Québec à l'étranger
Mme Paule Robitaille
Mme
Robitaille : Aux petites heures du matin, M. le Président, on a mis à
la poubelle les dossiers d'immigration de dizaines de milliers de
personnes en adoptant le projet de loi n° 9, et plus encore. C'est la
parole du Québec et sa compassion qui sont mises à mal. Là, on en rajoute une
couche. On sort la procédure d'exception encore une fois. Ce gouvernement caquiste va adopter un projet de loi
qui va suspendre les chartes canadienne et québécoise afin de limiter
les libertés religieuses, les libertés
d'expression d'une partie de la population. La semaine dernière, même Mario
Dumont mettait le gouvernement en
garde d'adopter un tel projet de loi sous bâillon. Je le cite : «On finira
par expliquer que ce nouveau
gouvernement n'a même pas respecté le Parlement et a imposé sa loi par le
bulldozer. Il n'en faut pas plus pour nuire à l'image internationale du
Québec.»
Pendant que la
ministre des Relations internationales sera en mission, que va-t-elle dire au
monde entier pour expliquer ce qui se passe au Québec?
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le Président, la ministre
des Relations internationales du Québec
dira que le gouvernement du Québec écoute la nation québécoise, que le gouvernement du Québec est à l'écoute de ses citoyens
et de ses citoyennes et que, lorsque le gouvernement prend
un engagement auprès de ses citoyens, il le respecte.
Le
débat sur la laïcité, c'est un débat qui est présent dans de multiples
sociétés dans le monde : en Europe, en Amérique. Vous savez, M. le Président, il n'y a
pas de réponse unique, il n'y a pas de modèle unique à la laïcité.
Chaque société est libre de faire ses
choix. Et on n'a pas à être jugés sur nos choix, M. le Président, parce que
ça appartient à l'Assemblée
nationale du Québec, aux élus de la nation québécoise de faire ce choix-là.
Alors,
la ministre des Relations
internationales pourra être fière de
dire cela, M. le Président, de dire qu'elle respecte son mandat démocratiquement élu, les engagements qu'elle a pris devant la
population et que le gouvernement du Québec a pris devant le peuple québécois, et surtout, M. le Président, le fait
que le Québec va se doter de sa propre laïcité, une laïcité qui lui est
propre...
Le Président :
En terminant.
M.
Jolin-Barrette : ...en lui seul.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Paule Robitaille
Mme
Robitaille : M. le Président, il suffit de lire les journaux dans le
monde. Après le Guardian, le New York Times, la semaine
dernière c'était le Washington Post qui dressait un portrait sombre des
conséquences de ce projet de loi controversé. Le gouvernement de la CAQ
n'envoie évidemment pas le bon message.
M. le Président, qu'est-ce
que le gouvernement va faire pour minimiser l'impact de ce message qu'il envoie
avec l'adoption de ces deux lois qui excluent bien plus qu'elles unissent?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, c'est très clair, il y a eu des consultations dans le cadre du rapport Bouchard-Taylor, des centaines d'intervenants ont été entendus. Ils ont fait la tournée
du Québec. M. Bouchard a dit : En 2008, il
y a eu une erreur, une erreur de la
part du Parti libéral de ne pas avoir versé les conclusions de son
rapport dans une loi. Il nous l'a dit il n'y a pas plus tard que deux
mois, M. le Président.
Ensuite, il y a
eu des projets de loi successifs qui ont été déposés : le projet de loi n° 94, le projet
de loi n° 60, le projet de loi n° 394 de la députée
de Gouin à l'époque, M. le Président. Tous visaient à interdire le port de signes religieux.
D'ailleurs, la députée de La Pinière, Mme Fatima Houda-Pepin, avait
également déposé un projet de loi...
Le Président : En terminant.
M.
Jolin-Barrette : ...et a été
expulsée pour ça du Parti libéral. Je pense qu'on répond à la volonté des Québécois.
Le Président : Deuxième
complémentaire, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme
Paule Robitaille
Mme
Robitaille : M. le Président, on dirait que c'est un peu un aveuglement volontaire. De toujours,
le Québec a été perçu comme une terre d'accueil, une société
ouverte et inclusive. Ce matin, M. le
Président, je suis profondément
triste. Après avoir jeté à la
poubelle les dossiers de dizaines de milliers de personnes, on s'apprête à
limiter des droits fondamentaux.
Est-ce que le gouvernement est conscient qu'il
ternit l'image du Québec?
Le Président : M. le ministre
de l'Immigration.
M.
Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, on est fiers d'être Québécois, et les Québécois sont fiers de leur gouvernement aujourd'hui, un gouvernement qui prend les décisions. On avait dit, M. le Président, en campagne électorale qu'on allait faire une loi sur la laïcité, qu'on allait interdire le port de signes religieux
pour certaines personnes en situation d'autorité, que les services publics allaient être donnés et
reçus à visage découvert, ce qui est, M.
le Président, dans notre société,
le minimum, M. le Président.
Alors, je
souhaiterais que le Parti libéral réalise, M.
le Président, que les Québécois
et les Québécoises souhaitent vivre dans une société qui est laïque, qu'ils souhaitent recevoir des
services publics laïques, qu'ils souhaitent avoir ce droit, M. le
Président. Ce que nous faisons aujourd'hui...
Le Président : En terminant.
M.
Jolin-Barrette : ...avec le projet de loi, c'est que nous donnons des droits collectifs aux Québécois
en rapport de la laïcité.
Le Président : Question
principale, M. le député de La Pinière.
Confiance du premier
ministre envers le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
M.
Gaétan Barrette
M.
Barrette : M. le Président, hier à la radio, on parlait encore du scandale Robert. Vous ne serez
pas surpris, ce n'était pas très
glorieux, mais le journaliste avait un bon angle. À la CAQ, on aime ça dire
qu'on est un gouvernement
d'hommes d'affaires. Même cette nuit, à 3 heures du matin, il y en a qui
se sont levés pour s'en vanter. Mais, comme le dit le journaliste, normalement
un chef d'entreprise, ça va sortir pour défendre bec et ongles son entreprise
et ses employés. Ce n'est pas exactement ce
qu'a fait le ministre, pourtant lui-même se vantant d'être issu du
milieu des affaires. Moi, M. le Président, une entreprise dont le boss largue les employés ou les congédie sur la
base d'une intuition, je me sauverais de ça en courant.
Comment voulez-vous que le personnel du MAPAQ
lui fasse confiance à partir de maintenant? Comment voulez-vous que le public ait confiance dans ce gouvernement, dans la gestion des pesticides avec ce ministre-là? M. le Président, le public est inquiet, le
MAPAQ est inquiet.
Est-ce que le premier ministre a maintenant
l'intuition de remanier son Conseil des ministres?
Le Président :
M. le ministre de l'Agriculture.
M.
André Lamontagne
M.
Lamontagne : M. le Président, ce qu'il est important de retenir du rapport de la Protectrice du citoyen, c'est que,
lors de la mise en oeuvre de la loi, il y a du soutien, il y a de l'outillage
qui devait être donné aux gens qui ont été nommés, qui ont été... on leur a assigné le rôle de responsables, et
puis ce soutien-là, il y a eu un manquement à ce niveau-là.
La
Protectrice du citoyen a émis un certain nombre de recommandations, et
je peux vous assurer, M. le Président,
que ces recommandations-là vont être
appliquées. Elle nous a demandé de lui soumettre d'ici le 30 juillet,
31 juillet, un plan pour
l'implantation de ces recommandations. Je peux vous assurer, M. le Président, que ça va être fait. Elle nous a demandé de lui rapporter le 30 septembre la synthèse,
la mise en oeuvre de ce plan-là au sein du ministère. Je peux vous
assurer que ça va être fait.
Entre-temps,
on a demandé une dispense à la Protectrice
du citoyen pour que ce soit elle qui
traite toute divulgation...
Le Président :
En terminant.
M.
Lamontagne : ...dénonciation
au sein du ministère. Elle a accepté pour une période de six mois, M. le Président.
Le Président :
Question principale, M. le député de La Pinière.
Principe
de responsabilité ministérielle
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : M. le Président, le même journaliste résumait comme ça le scandale Robert : une
farce. Il notait, à juste titre, que
personne dans cette affaire, absolument personne n'avait été puni, ce sont ses mots. Il y en a
même qui ont été promus, et c'est choquant.
M. le Président, quand on est assis
confortablement au salon bleu du parlement, c'est facile, comme on va le faire
ce matin, d'enlever des droits à des gens, et surtout un maximum de femmes qui
sont pour le gouvernement sans visage, à des centaines de kilomètres d'ici. C'est facile de ne pas respecter sa
parole pour 52 000 personnes qui, elles, sont à des milliers
de kilomètres d'ici, eux aussi sans visage.
• (10 h 20) •
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
M.
Jolin-Barrette : ...
Le
Président : Oui.
C'est en question principale, M. le leader
du gouvernement. M. le député de La Pinière, veuillez poursuivre.
M. Barrette : C'est même facile de bafouer des droits même
quand on connaît leur visage si la personne en autorité bien assise au salon
bleu nie sa propre responsabilité.
M.
le Président, c'est plus difficile quand il faut prendre une décision à propos
d'une personne dont on connaît le visage et qui est assise...
Le Président :
M. le ministre de l'Immigration.
M. Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, c'est très clair dans le dossier...
Une voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît, M. le député.
Une voix :
...
Le
Président : M. le député, je vous demande, s'il vous plaît...
Le seul qui a la parole maintenant, c'est le ministre de l'Immigration,
en réponse à votre question principale. Réponse, s'il vous plaît.
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, ce n'est pas parce qu'on utilise un
adjectif trois fois qu'il est plus vrai la troisième fois.
Des voix :
...
Le Président : S'il
vous plaît! Gardons le bon ton. Complétons la période de questions. M. le
ministre de l'Immigration. S'il vous plaît!
M. Jolin-Barrette : M. le Président, pour la suite des choses aujourd'hui, le gouvernement
pose un geste qui respecte ses engagements électoraux, qui répond à la volonté
des Québécois et qui fait en sorte d'inscrire la laïcité dans nos lois, de faire en sorte que les personnes en
situation d'autorité ne portent pas de signe religieux et, surtout, de faire en
sorte que les services publics sont donnés et reçus à visage découvert.
Le Président :
Cela met fin à la période de questions et de réponses orales.
Motions sans préavis
Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons
passer à la rubrique Motions sans préavis. Donc, à cette rubrique, M. le
leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : ...déposer la motion, je souhaiterais remercier M. le secrétaire
général, M. Michel Bonsaint, qui durant
plusieurs années a servi l'État québécois et qui a donné une partie de sa vie
au service public. Alors, merci, Michel, et bonne chance pour la suite.
(Applaudissements)
Le Président :
M. le leader du gouvernement.
Établir la procédure législative d'exception en vue
de compléter l'étude du projet de loi n° 21
M.
Jolin-Barrette : Oui, M. le Président.
«Qu'en
vue de compléter l'étude du projet de
loi n° 21, [la] Loi sur la laïcité de l'État, l'Assemblée
[nationale] établisse la procédure
législative d'exception telle que prévue aux articles 182 à 184.2 et
257.1 à 257.10 du règlement;
«Qu'à
tout moment de la séance, le président puisse suspendre les travaux à la
demande d'un ministre ou d'un leader adjoint du gouvernement.»
Merci.
Le
Président : Mmes, MM. les députés, je vais suspendre la séance
pour une période 15 minutes afin que les députés puissent prendre
connaissance de la motion présentée par le leader du gouvernement.
La séance est
suspendue.
(Suspension de la séance à
10 h 25)
(Reprise à 10 h 44)
Le Président :
Mmes et MM. les députés, nous reprenons nos travaux. Alors, y a-t-il des interventions
sur la motion? M. le leader de l'opposition officielle.
Débat sur la recevabilité
M. Sébastien
Proulx
M. Proulx : Oui, M.
le Président, très rapidement, parce que nous avons débattu hier amplement
d'une telle motion, peut-être vous
rappeler, M. le Président, que, dans votre décision, vous avez souhaité que,
dans l'avenir, des procédures comme
celle-là, notamment avec plusieurs affaires à l'intérieur de la même motion, ça
ne se reproduise pas régulièrement ou
que ce ne soit pas une habitude. Je vous rappelle, M. le Président, qu'on est
dans cette situation un peu particulière, encore une fois, où, en peu de temps, en deux journées, nous tiendrons
en deux séances, M. le Président, deux affaires à l'intérieur de la même
motion. Alors, je réfère à votre décision d'hier à l'égard du souhait que vous
avez exprimé, des orientations que vous avez exprimées et de votre intention
surtout qu'on puisse, dans l'avenir, revoir les choses pour rappeler, M. le Président, que ces procédures
doivent être exceptionnelles dans l'avenir et qu'il n'est pas souhaitable, dans
l'avenir, de les regrouper comme nous le faisons. Voilà.
Décision de la présidence
Le Président :
Bien compris. D'autres interventions sur la motion? Je n'en vois pas.
Débat
restreint sur le motif de la convocation en séances extraordinaires
et sur la motion de procédure d'exception
La motion
présentée par M. le leader du gouvernement étant recevable, je vous informe
maintenant de la répartition du temps
de parole établie pour le débat restreint sur le motif de la convocation en
séances extraordinaires et sur la motion présentée par le leader du gouvernement. La répartition du temps de
parole se fera comme suit : 29 min 15 s sont allouées
au groupe parlementaire formant le
gouvernement, 17 min 40 s sont allouées au groupe parlementaire
formant l'opposition officielle, 6 min 6 s sont allouées
au deuxième groupe d'opposition, 5 min 29 s sont allouées au
troisième groupe d'opposition, chaque député
indépendant dispose d'un temps de parole de 45 secondes. Toutefois,
lorsqu'un seul député indépendant participe à un débat, il dispose d'un
temps de parole d'une minute.
Dans le cadre
de ce débat, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des
groupes parlementaires sera
redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies
précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront
soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle aux députés indépendants
que, s'ils souhaitent intervenir au cours du débat, ils ont 10 minutes à
partir de maintenant pour en aviser la présidence.
Je suis prêt à entendre le premier intervenant.
M. le député.
M. Mathieu Lévesque
M. Lévesque
(Chapleau) : Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, je tiens à vous
saluer et à saluer l'ensemble des
collègues. Nous sommes réunis ici en ce dimanche matin parce que les libéraux
nous ont forcés à avoir recours à la procédure
d'exception pour permettre l'adoption du projet de loi n° 21, la Loi sur
la laïcité de l'État, avant de partir pour l'été. En effet, dès le début, dès le dépôt du projet de loi, les
libéraux et Québec solidaire, j'ajouterais, se sont campés sur leur position de blocage et d'obstruction. Ils ne
se sont pas inscrits dans un dialogue
constructif. Ils ne veulent trouver aucune
solution et n'acceptent aucune vision autre que la leur, M. le Président. Depuis le début de l'étude de ce
projet de loi — et
j'étais là parce que je suis moi-même un membre de la Commission des
institutions — les
libéraux ont systématiquement eu recours à des techniques d'obstruction
parlementaire durant des heures, des heures...
Le Président : M. le leader
de l'opposition officielle.
Une voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! S'il vous plaît, M. le député. M. le leader de l'opposition.
M. Proulx :
M. le Président, on s'est fait la remarque collectivement hier que nous devions
tenter de tenir nos propos le plus juste possible. Nous avons eu également
plusieurs références au règlement en disant qu'on ne pouvait pas passer son temps à s'imputer des motifs. Nous
sommes actuellement dans un débat restreint pour discuter de la motion qui suspend les droits. Je comprends qu'il veut
expliquer pourquoi il considère la motion recevable et nécessaire, mais,
M. le Président, si c'est pour être comme ça du début à fin, vous et moi, on va
avoir un bel avant-midi.
Le
Président : Je vais me permettre de vous rappeler de collaborer
et de faire en sorte qu'on ait un bon climat propice au débat important que nous devons avoir. Je vais vous demander
votre collaboration de fait qu'on puisse garder ce climat et cette sérénité. Je pense que ce qu'on fait est important.
Poursuivez, M. le député, mais dans cet esprit, s'il vous plaît.
M. Lévesque
(Chapleau) : ... — merci beaucoup — donc, durant des heures, des heures. Ils ont
le droit, hein, c'est leur droit en
tant qu'opposition, mais les façons dont ils ont utilisé ces techniques, aussi
farfelues les unes que les autres, nous ont menés à avoir un recours à
une mesure d'exception.
Des voix : ...
Le
Président : Écoutez, on vient juste de se le dire. Je
comprends, mais cela, c'est une question de collaboration, c'est une question de bien mener les travaux eu
égard à ce qu'on s'est donné comme consigne collective. Je vous demande encore une fois, pour la bonne marche de nos
travaux, votre collaboration, d'être prudent dans vos propos, s'il vous plaît.
M. le leader de l'opposition officielle.
M. Proulx :
Le problème, M. le Président, c'est que le collègue va avoir de la difficulté à
suivre votre recommandation parce que
son texte est écrit, alors les propos non parlementaires qu'il va répéter au
cours des prochaines minutes sont sur sa
feuille. Là, ce que vous allez lui demander, M. le Président, c'est de parler
par lui-même puis de le faire correctement, pas de lire le texte qu'il a
préparé s'il est plein de ce que je viens d'entendre.
Le Président : M. le leader
adjoint.
M.
Caire :
M. le Président, d'abord, ce que mon collègue exprime, ce sont des opinions. Il
y a une jurisprudence là-dessus de la
présidence de l'Assemblée nationale. Je vous demande de laisser mon collègue
exprimer ses opinions comme on doit faire dans cette Assemblée, et surtout
pas, surtout pas, comme le fait le leader de l'opposition officielle, je
dirais... En fait, ce que le leader
de l'opposition officielle vient de faire, ça, ça m'apparaît extrêmement
litigieux. Oui, le fait d'écrire un texte ne signifie pas qu'on
n'exprime pas ses opinions, M. le Président.
• (10 h 50) •
Le
Président : Non, mais je pense que... Regardez, là, je pense
que je viens de vous exprimer une volonté, je pense qu'elle est commune également, alors j'imagine que
ce que j'ai dit sera compris pour la suite. Je pense que tout le monde peut adopter et adapter, évidemment, son message
pour que ça se fasse dans les meilleures conditions possible. À nouveau,
je demande la collaboration.
M. Lévesque
(Chapleau) : ...donc, au lieu de chercher un compromis. J'ai
d'ailleurs senti que certains députés et leur caucus auraient aimé trouver un compromis, certains étaient en
faveur de la laïcité de l'État, mais, bon, au lieu de chercher ce compromis, les libéraux se sont
opposés, ils ont tout fait pour bloquer l'adoption de notre projet de loi, ils
ont bâillonnés, oui, oui, ce mot qui
semble les horripiler aujourd'hui, mais une technique qui est tout de même
utilisée par certains de leurs
collègues. C'est ce que l'on doit se rappeler aujourd'hui. C'est à cause de
cette intransigeance que nous sommes ici. Nous n'avons pas eu d'autre
choix que d'utiliser la procédure d'exception.
Au lieu de nous proposer des amendements qui
auraient pu avoir du sens et qui auraient pu être discutés raisonnablement, les libéraux ont préféré
présenter des amendements peu sérieux ou même présenter des amendements
sur lesquels ils ont eux-mêmes voté contre ou se sont abstenus. Dans certaines
circonstances, ils ont préféré ne pas en présenter du tout et laisser la place
à un tout autre débat. Moi qui croyais pourtant que la porte-parole de
l'opposition officielle en matière de
laïcité et députée de Marguerite-Bourgeoys prenait ce débat très au sérieux, et
elle l'a fait aussi...
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît! M. le leader de l'opposition officielle.
M. Proulx :
M. le Président, je comprends que le collègue veut exprimer des opinions. Je
comprends qu'il a un texte écrit. Je
comprends que, là, il est mal pris. Bon, ce que je vous demande, M. le
Président, c'est de faire respecter notre
règlement. Là, ça a commencé par «c'était le parti», c'est maintenant «la
députée de Marguerite-Bourgeoys». Alors, M. le Président, ça ne s'est pas amélioré dans les dernières minutes,
là, ça s'est détérioré. Et là c'est le début, on est au débat restreint. Ils n'ont pas encore fait la
plénière puis on n'est pas revenus pour les autres étapes dans un débat comme
celui-là.
Alors, M. le
Président, j'en appelle à vous. Le collègue, je le comprends, là, il est mal
pris. S'il veut prendre une minute pour y penser, il peut le faire. Ce qu'on
lui demande, M. le Président, c'est d'exprimer son point de vue sans attaquer les gens, sans attaquer une institution,
sans attaquer ceux qui ne pensent pas comme lui et surtout en respectant
l'esprit, le texte et la lettre de notre règlement, M. le Président.
Le
Président : Écoutez, je vais rappeler encore une fois... Je
pense que c'est assez clair, je pense qu'il y a une volonté commune qui est
exprimée. Je vais demander votre collaboration à tous et particulièrement de
faire en sorte qu'on évite les propos
qui peuvent être blessants. Il y a moyen d'adapter. Évidemment, je ne mettrai
pas de paroles dans la bouche de qui
que ce soit, mais, dans une volonté commune de bien mener nos travaux dans un
contexte particulier, M. le député, veuillez poursuivre, mais je vous
demande encore une fois votre collaboration, d'être prudent dans vos propos.
M. Lévesque (Chapleau) : Je
laisserais peut-être un collègue reprendre la relève puis je retravaillerais ce
moment-là, si vous permettez, M. le Président, oui?
Des voix : ...
Le Président : Non, s'il vous
plaît, on n'a pas à commenter non plus la demande du député. Le député peut
s'arrêter là, il n'y a pas de problème, il peut continuer. C'est à sa guise,
c'est sa décision. À ce moment-là, je passerai la parole à un député de
l'opposition.
M. Proulx : M. le Président,
notre règlement est très clair, à ma connaissance.
Le Président : Oui, mais je
vais demander un consentement, évidemment.
M. Proulx :
Bien, il n'y a pas de consentement, M. le Président. Le collègue ne peut pas
s'exprimer deux fois. Il a du temps.
S'il décide de ne plus le faire, il ne le fait pas. Mais, dans le contexte
actuel, M. le Président, il n'y aura pas un consentement pour se faire
insulter deux fois, c'est non.
Le
Président : Alors, je comprends qu'il y a donc possibilité
d'acquiescer à cette demande par consentement. Je comprends qu'il n'y a pas de consentement. N'ayant
pas de consentement, M. le député, poursuivez également, mais dans cette
volonté que nous venons d'exprimer.
Des voix : ...
Le Président :
Voulez-vous poursuivre ou non? Non, le député ne souhaite pas poursuivre. Je
cède la parole au membre de l'opposition officielle.
M. Marc
Tanguay
M. Tanguay :
Merci. Merci beaucoup, M. le Président. Ce qui nous réunit ici aujourd'hui,
procédure de bâillon sur un projet de
loi, M. le Président, qui a une connotation toute particulière, projet de loi
qui vise à modifier notre Charte des droits et libertés. Jamais, dans
l'histoire du Québec, jamais ça n'aura été fait sous le bâillon, premier
élément.
Deuxième
élément, au-delà de bâillon ou pas bâillon — on est en bâillon aujourd'hui, c'est une
première — au-delà de cela, jamais notre Charte des droits et
libertés n'avait été amendée autrement qu'en recherchant l'unanimité. Et, des
articles 1 à 38, il y a eu une bonne douzaine de modifications qui venaient
assurer davantage de droits aux minorités, et, dans tous les cas d'espèce, il y en a
seulement deux où ça n'avait pas été l'unanimité : un où il y avait un député
qui avait voté contre et un autre où deux députés avaient voté contre.
Alors,
quand on vous dit qu'historiquement, depuis 1975, la charte québécoise des
droits et libertés a toujours su et les législateurs qui voulaient
l'amender ont toujours su rechercher cette nécessaire unanimité, aujourd'hui,
avec le bâillon qui nous mène vers une
modification de la charte, on veut refuser à toutes les oppositions, M. le
Président, de faire un débat et de
s'assurer que notre Charte des droits et libertés puisse toujours nous
rassembler, puisse toujours être ce document fondateur, une loi qui
prime sur toutes les autres lois, M. le Président. Et ça, c'est important dans
notre société de droit. Et malheureusement,
malheureusement, le gouvernement va briser, va briser, cette entente historique,
ce consensus historique. Et, M. le Président, le Québec se distingue notamment
par la recherche du consensus dans ses documents fondateurs.
Ce
matin, j'ai eu l'occasion de citer ce qu'avait fait le ministre du Parti
québécois à l'époque, Marc-André Bédard. Dans la première mouture du
projet de loi 1, qui était l'ancêtre du 101, il y avait une clause
dérogatoire. C'était la première qui allait
être utilisée. Et, à l'époque, il avait été retiré, le projet de loi 1. Et
le projet de loi 101 ne connaissait pas... n'avait pas de clause dérogatoire, le projet de loi 101, ce
qui faisait en sorte que notre Charte de la langue française, qui, aujourd'hui, est une grande loi, a pu évoluer
à la lumière des deux chartes, la Charte canadienne, soit, mais la charte
québécoise également, où l'on faisait en
sorte que l'on ne pouvait pas discriminer, notamment, basé sur la langue, ce
qui fait en sorte qu'il y a eu un rééquilibrage.
Moi,
M. le Président, je ne peux pas passer sous silence... et je me dois de le
faire, en tout respect, à la ministre de la Justice. Elle est notre gardienne des droits et libertés, ce n'est
pas peu dire. Collectivement, en 1975, nous nous sommes donné une charte qui
faisait en sorte que la gardienne ou le gardien, c'était le ministre de la
Justice. Marc-André Bédard, Charte de
la langue française, s'était levé, avait fait retirer la clause dérogatoire. Et
ce document, cette loi avait su grandir, avait su se modeler avec les
années pour être rassembleuse aujourd'hui, M. le Président. Bien, ça ne sera
pas le cas, visiblement.
Et, moi, quand
j'entends la ministre de la Justice dire qu'elle s'en satisfait, moi, je ne
peux que le déplorer, M. le Président. Et
c'est important de rappeler ce que la ministre de la Justice avait dit, je la
cite, 16 octobre 2018, je la cite : «On s'apprête à faire des changements, on s'apprête à changer des
choses, on veut le faire rapidement. Mais rapidement, ça ne rime pas avec précipitation,
alors on fera les choses dans l'ordre, on fera les choses correctement et on
fera les choses dans le respect de
tous.» Fin de la citation. Ça, c'est la ministre de la Justice qui, le 16
octobre 2018, l'affirmait.
Malheureusement,
M. le Président, force est de constater que, dans les faits, cette
affirmation-là, cet engagement-là n'est
pas respecté aujourd'hui parce qu'on va modifier la charte québécoise des
droits et libertés autrement qu'en recherchant l'unanimité et sous le bâillon. Et ça, M. le Président, ça, une telle
loi si fondamentale, rappelez-vous d'une chose, la charte québécoise des droits et libertés ne permettra pas
ce rééquilibrage-là, au projet de loi n° 21 de vivre sa vie qui lui aurait
permis d'évoluer et d'être remodelé, obligatoirement et nécessairement.
Évidemment, le
gouvernement en est conscient, M. le Président, le gouvernement en est
conscient. Lors de la période de questions
ce matin, j'ai eu l'occasion de citer — puis, je veux dire, il faudrait contester
les sources journalistiques pour dire
que ce n'est pas vrai — que les avocates et les avocats au sein même du ministère de la
Justice sont contre ce projet de loi
là. Il y a même une citation d'une source journalistique — encore une fois, qu'on vienne détromper en
disant que le journaliste a mal fait
son travail, que les sources n'existent pas puis que ça n'a pas été dit — une source au ministère dit : Vous ne
trouverez pas un seul juriste de l'État qui vient cautionner ce qui est fait,
qui vient dire que c'est correct puis que
ça tient la route en respect des chartes des droits et libertés. Fin de la...
Alors, ça, M. le Président, c'est implacable.
• (11 heures) •
La
ministre, elle, est la première conseillère. Elle est présidente du Comité de
législation. Ça aurait dû arrêter là tout
de suite, M. le Président, de dire : De un, moi, comme ministre de la
Justice, je ne vais pas briser l'entente historique, je ne vais pas faire en sorte que l'on va
suspendre tous les droits. M. le Président, de 1 à 38, tous les droits, notamment
le droit à l'égalité hommes-femmes, notamment le droit de ne pas être
discriminé basé, entre autres, sur votre liberté de conscience et de religion, ça, c'est suspendu. Moi, M. le Président, je
me serais attendu qu'une ministre de la Justice, que la ministre de la
Justice dise : Non, sous ma gouverne, ça ne passera pas.
Un
débat qui était, et je reviens encore là-dessus, aussi, je vous disais... bien,
je vous dirais, M. le Président, aussi prenant,
aussi catalyseur que la Charte de la langue française, Marc-André Bédard
s'était levé puis a dit : Non, pas sous ma gouverne. Et lui, Marc-André Bédard, s'était même levé en Chambre pour
répondre aux questions des collègues et les rassurer en disant : Ne vous en faites pas, j'ai toutes les
assurances que ça va respecter la charte, et, de toute façon, il n'y aura
pas de clause dérogatoire. Ça, force est de constater que ça n'aura pas été le
cas ici, et on se serait attendu à cela.
Sur
le fond des choses, M. le Président, sur le fond des choses, on dit «le
consensus Bouchard-Taylor», rapport Bouchard-Taylor.
M. le Président, il y avait Taylor qui a quitté ce consensus. Il n'y a plus de
consensus. C'est de passer du rapport Bouchard-Taylor au rapport
Bouchard.
Maintenant, qu'en reste-t-il, de
M. Bouchard? Il est venu nous dire en commission parlementaire, et je le
cite dans un article de La Presse
du 5 avril 2019, je le cite, M. Gérard Bouchard : «[Le premier
ministre] erre gravement [...] en
assimilant le pouvoir extraordinaire de coercition à l'autorité pédagogique que
détient le personnel enseignant — il parle vaguement, à ce propos, de
"personnes en position d'autorité". C'est une confusion regrettable
qu'il importe de dissiper.» Et il cite
toujours, M. le Président, il parlait d'un projet de loi, M. Gérard
Bouchard, projet de loi radical qui ne ressemble pas aux Québécois et
qui est cadenassé.
M. le
Président, la motion, à laquelle nous allons voter bien évidemment contre, fait
en sorte non seulement de cadenasser les parlementaires, mais de
cadenasser les Québécoises et Québécois en leur refusant, sous l'égide, le cas échéant, de la loi n° 21, de pouvoir
bénéficier de leurs droits les plus fondamentaux. Ça, c'est cadenasser.
Également, M. le Président, je reprends les mots de M. Bouchard, ça
ne ressemble pas aux Québécois.
Ça, être
ministre, déposer un projet de loi qu'il juge important, un projet de loi qu'il
justifie en disant : Bien, vous savez, nous, on veut rétablir une paix
sociale... Il n'y a personne, M. le Président qui nous a fait la démonstration
qu'actuellement, au Québec, il n'y a pas de
paix sociale. Et, si tant est qu'on a besoin de statistiques, la Commission des
droits de la personne est venue nous dire en
commission parlementaire : Vous savez, des demandes d'accommodement,
que ce soit pour un handicap, que ce soit
pour un motif quelconque, notamment religieux, en 2017‑2018, sur
97 plaintes, il y en avait trois
qui étaient reliées à une demande d'accommodement pour motifs religieux. Et la
commission est venue nous dire que
c'est tout à fait normal, c'est tout à fait selon les normes. Les gens veulent
être éclairés et nous avons su, collectivement,
récupérer ce débat et grandir pour faire en sorte que, lorsqu'il y a des
demandes d'accommodement, bien, que
ça se demande et que la demande d'accommodement doit être analysée selon
certains critères, oui, ça a été communiqué aux décideurs, et faire en sorte que, oui, s'il y a accommodement, qu'il
soit raisonnable. Ça, c'était, entre autres, dans la
loi n° 62, M. le Président.
Donc,
rétablir la paix sociale, il n'y a pas de paix sociale qui est menacée présentement. Ce que le projet de loi vient faire...
Et on l'a dit, on ne le souhaite pas, M.
le Président, mais on ne ferait pas
notre job si on ne se levait pas en Chambre aujourd'hui pour crier haut
et fort que nous allons mettre à mal la paix sociale au Québec. Pourquoi, M. le
Président? Parce que, dans un dossier aussi délicat, on ne me fera pas dire...
Puis tout le monde autour de la table est d'accord avec ça. Les accommodements religieux, c'est un
dossier délicat. Les signes religieux, c'est un dossier délicat. Comment devons-nous le traiter? Pas par bâillon
puis par clause dérogatoire. Nous devons faire en sorte d'informer la
population, informer les décideurs.
Sous le
régime, si d'aventure le p.l. n° 21 est adopté,
il y aura une définition extrêmement
vague, extrêmement floue, M. le
Président. J'en veux pour preuve que, le lendemain du dépôt de l'amendement,
pendant 5 h 15 min, au Québec, selon les dires du premier
ministre, les joncs, les alliances de mariage, c'était un signe religieux puis
ça devait être interdit. Mais là il s'est
ressaisi et a remis à pâte à dents dans le tube, M. le Président, il a
dit : Non, non, non, c'est permis d'avoir
des joncs, des alliances lorsque vous vous êtes marié à l'église. Alors, ça,
vous voyez, si notre premier ministre, M. le Président, lui-même a eu cet
égarement, ce moment d'égarement, comment pouvons-nous faire en sorte d'être
confiants, de dire que les directrices
d'école, les directeurs d'école, tous ceux qui sont en autorité sauront
clairement c'est quoi, un signe religieux?
Et la définition qu'il a ajoutée ne fait que
rajouter... qui a été déposée à la dernière minute, M. le Président... Le pilier de ce projet de loi là, le pilier de
contestation aussi, de notre côté, c'est l'article 6, et l'article 6,
il n'a pas été discuté pendant
60 heures, 32 heures; pendant quelques heures, l'article 6. Et
ce n'est qu'à minuit moins cinq, la veille de la cessation de nos débats, que l'amendement, fondamental aux dires
du ministre, a été déposé. Alors, M. le Président, on ne peut pas dire : Nous, on était prêts à
faire le débat — ils
n'ont pas voulu faire le débat — et déposer un amendement fondamental à minuit moins cinq qui mérite d'être
débattu à la lumière de nos droits et libertés, qui sont, bien évidemment,
à préserver.
Et, M. le Président, j'aimerais vous donner un
exemple, parce que, là, on parle de la procédure de bâillon, j'aimerais vous donner un exemple où, dans le
contexte du projet de loi n° 157, loi sur le cannabis, à l'époque, vous
vous en rappellerez, le collègue leader du gouvernement était autour de
la table. C'est un projet de loi qui n'avait pas pris 32 heures moins cinq heures de pause, parce que, le 32 heures,
il faut y déduire un cinq heures de pause, de suspension. Alors, le
collègue leader du gouvernement, député de Borduas, était autour de la table,
et il y avait eu 136 heures... 137
heures, M. le Président, de débats, il n'y avait pas eu de bâillon, pas de
clause dérogatoire non plus, puis il avait été adopté. Et ça, ça avait fait en sorte que du choc des idées jaillit la
lumière puis qu'on puisse réellement bonifier. Là, on ne fait que
court-circuiter le débat.
La procédure
d'exception, elle existe, c'est dans notre règlement. L'amendement avait été
adopté le 21 avril 2009 et faisait en sorte que c'était une procédure
possible. Mais là, dans ce contexte-ci, elle n'est aucunement justifiée, M. le
Président. On court-circuite un débat fondamental, un débat qui interpelle la
société.
C'est rare,
les projets de loi, M. le Président, qui interpellent autant les gens. Moi, je
ne me rappelle pas d'exemples, d'avoir
vu une personne, un citoyen du Québec me dire : Écoute, moi, je n'ai pas
d'opinion sur le sujet, tout le monde a des opinions. Bien, ce n'est pas après moins de 32 heures, M. le
Président, qu'il faut court-circuiter ça, surtout que ça aura un impact
dans la vie d'hommes et de femmes, de femmes qui devront dire : Bien, moi,
j'ai une belle opportunité de me rapprocher
de ma résidence, je vais changer, comme enseignante, de commission scolaire...
Vous pourrez le faire mais uniquement
au prix de laisser votre liberté de religion, qui sait, d'avoir un hidjab, de
le laisser de côté. Et, M. le Président, c'est extrêmement, je crois,
réducteur, et je le dis en tout respect, de dire que l'on peut retirer un signe
religieux... Parce
qu'on dit : Ce n'est pas anodin, le gouvernement dit : Un signe
religieux, ce n'est pas anodin, c'est fondamental, vous devez l'enlever parce que c'est fondamental,
mais après ça on le justifie en disant : Bien, voyons donc, vous allez
juste l'enlever, le fondamental, du lundi au
vendredi, de 9 heures à 5 heures. Et ça, ce sera au prix d'un emploi
qui vous sied mieux, qui vous rapproche de votre résidence, qui vous
rapproche de vos enfants, qui vous rapproche de votre conjoint. Ça, vous devrez le faire au prix, si d'aventure vous êtes une
femme avec le hidjab, au prix de votre signe religieux, de votre sincère croyance et de votre liberté de
religion. Même chose, également, M. le Président, si vous
voulez avoir une promotion. Vous demeurez dans la même commission scolaire,
vous avez une promotion, vous êtes promue directrice adjointe de
l'école : vous devrez refuser au prix de... ou accepter au prix de mettre
de côté votre liberté de religion.
Le
leader a écrit, en 2018, un livre, le titre était J'ai confiance — Réflexions (sans cynisme) d'un jeune
politicien. Je vais vous faire
deux citations. La première, page 24 : «J'ai toujours pensé, et ce,
bien avant d'être admis au Barreau, qu'il
est important de vivre dans une société de droit, où le respect des règles
devait s'appliquer à tous, quels que soient notre origine et notre statut social. La justice est un univers où
l'arbitraire n'a pas sa place et où les gens ont la possibilité d'être soutenus dans la défense de leurs droits.»
Fin de la citation, page 24, collègue de Borduas qui est le parrain de ce
projet de loi là. Ce qu'il disait à l'époque qu'il tenait pour vrai, puis je
pense qu'il le tient toujours pour vrai, il est incohérent, M. le Président, et injustifiable que nous ayons, après
avoir discuté du projet de loi n° 21... qu'aujourd'hui on vient court-circuiter ça avec le bâillon et faire
en sorte de suspendre pas n'importe quelle loi, nos deux chartes des droits
et libertés.
Dernière
citation, page 96, je le cite, le leader du gouvernement : «Un bon
leader sait recourir à l'expertise d'autrui, assez modeste et assez sûr de lui pour accepter de s'ouvrir aux avis
extérieurs. Il reconnaît ne pas avoir le plein contrôle sur tout et ne pas avoir la science infuse.» Fin
de la citation. Ça, M. le Président, ça aurait été le fun qu'il l'applique dans
le débat actuel, que l'on continue les débats.
Vous
savez que la Charte de la langue française, là, M. le Président, elle a été
adoptée pas sous bâillon, pas de clause
dérogatoire. J'y vais de mémoire, là, on me corrigera si j'ai tort, le
27 août 1977 elle a été adoptée et sanctionnée, le 27 août 1977. Ça veut dire qu'en mai, en
juin, en juillet, en août ils ont débattu. Puis ce n'était pas un débat qui
faisait moins rage à l'époque
qu'aujourd'hui, puis savez-vous quoi? On avait fait notre travail, puis il n'y
avait pas eu de clause «nonobstant»,
et ce qui fait en sorte qu'aujourd'hui, la Charte de la langue française, nous
en sommes tous fiers, loi qui est rassembleuse. Je pense qu'il aurait
été, pour le ministre, pour le premier ministre, qui ont identifié ce projet de
loi comme étant, pour eux, une future grande
loi québécoise... il aurait été de bon aloi, et justifié, et non en bris
historique de la façon de faire au
Québec de se donner le temps de faire le débat, de le bonifier, d'écouter,
parce que personne n'a la science
infuse ici, autour de la table, et de faire en sorte que l'on puisse, M. le
Président, faire en sorte que les chartes, notre charte québécoise notamment, puissent s'appliquer à cette
importante législation là, importante quant à l'impact qu'elle aura dans
la vie des gens.
Alors,
bien évidemment, on va voter contre la motion, M. le Président, parce que nous
ne pouvons pas, dans notre âme et
conscience, refuser de faire le débat, nous allons voter contre la motion pour
le bâillon. Et ce qui est malheureux, M.
le Président : tous autour de la table, même ceux qui étaient pour le
projet de loi n° 21, parce qu'il y en avait qui étaient pour, il y
en avait qui étaient contre, c'était très polarisé, tous ont entendu dire que
des contestations judiciaires, des contestations
judiciaires, il y en aura beaucoup et que la paix sociale, qui n'est
aucunement, aujourd'hui, M. le Président, aucunement remise en question, il y a une paix sociale, bien, il y aura...
ce sera la source de chicanes et ce sera la source d'embarras, notamment au sein de nos écoles, puis,
au Québec, on n'a pas besoin de ça. Alors,
non, M. le Président, nous dirons non à cette façon de faire et
nous dirons non à ce projet de loi qui, en somme, est liberticide.
• (11 h 10) •
Le Président :
Je reconnais maintenant le leader du deuxième groupe d'opposition. M. le leader.
M.
Gabriel Nadeau-Dubois
M.
Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Je ne suis pas très vieux, mais c'est la deuxième fois de ma vie que
j'assiste ici à l'adoption sous bâillon
d'une loi qui suspend les droits et libertés de la personne au Québec.
La première fois, je n'avais pas les
pieds sur le tapis du salon bleu, j'étais dans les tribunes, juste là. Je m'en
rappelle. Ça ne fait pas si longtemps que ça, ça ne fait
même pas 10 ans, mais il s'est passé tellement de choses depuis qu'on
dirait que ça fait une éternité. À
l'époque, j'étais un simple étudiant. J'ai assisté, impuissant, à l'adoption
d'une loi liberticide, une loi inique qui limitait les droits et
libertés de milliers de jeunes de ma génération. Sous un tonnerre
d'applaudissements partisans, le gouvernement libéral, à l'époque, a adopté, avec
l'appui enthousiaste de la Coalition avenir Québec, une loi inutile et répressive qui enfreignait les libertés
fondamentales des Québécois et des Québécoises, une loi méprisant «les libertés de conscience, d'opinion, d'expression,
de réunion pacifique et d'association», et ça, M. le Président, c'est une
citation de la commission des droits de la
personne et de la jeunesse du Québec. Ce soir-là, en mai 2012, je me rappelle
d'avoir pleuré, pleuré de rage. Je me
souviens du sentiment de dégoût que j'ai éprouvé, je me souviens aussi du
sentiment de trahison que j'ai
ressenti. L'Assemblée nationale, le Parlement qui était censé me représenter,
adoptait à bride abattue une loi visant à écraser la plus grande
mobilisation de toute l'histoire de la jeunesse québécoise.
Cette
journée-là, ce n'est pas seulement une grève étudiante, pourtant, qui a été
attaquée, c'est le lien de confiance entre
plusieurs Québécois et Québécoises et leurs institutions démocratiques qui a
été affaibli. M. le Président, ce sont dans
des moments comme ceux-là que les gouvernements révèlent ce qu'ils ont dans le
ventre, et, en adoptant cette loi liberticide, le 17 mai 2012, le gouvernement
Charest dévoilait sa vraie nature. Pour marquer des points dans les sondages,
il administrait un électrochoc à la démocratie québécoise.
Sur
le moment, je me rappelle, cette loi m'est apparue comme un coup de force,
comme un signe d'autoritarisme. Ce
n'est que quelques années plus tard que j'ai compris ce qu'elle était
vraiment : un aveu de faiblesse face à une jeunesse qui ne se
laissait pas intimider.
Sept ans plus
tard, je suis quelques mètres plus bas, j'ai quelques responsabilités et plusieurs
cheveux gris en plus, mais je ressens des sentiments beaucoup trop
similaires.
D'abord, je
ressens le même sentiment d'impuissance. Je n'ai pas voté, à l'époque, la loi n° 78, mais, ce soir, le bâillon caquiste fera en sorte que je n'aurai pas
vraiment plus mon mot à dire, comme parlementaire, dans l'adoption de
cette loi.
Ensuite, le caractère liberticide de cette loi.
À l'époque, le Barreau du Québec, la commission des droits de la personne et de
la jeunesse du Québec, la majorité du milieu juridique, Amnistie
internationale, une foule d'autres organisations
s'inquiétaient de la loi n° 78, et aujourd'hui ces mêmes organisations, M. le
Président, s'inquiètent avec la même vigueur et selon des arguments très
semblables de la loi sur l'interdiction des signes religieux. Je l'appelle
comme ça, M. le Président, parce qu'il ne
s'agit pas d'une loi sur la laïcité, il s'agit d'une loi sur l'interdiction des
signes religieux.
Ensuite, j'ai
l'impression d'assister à un coup de force similaire. En utilisant le bâillon,
le gouvernement de la Coalition avenir Québec pose un geste autoritaire, il
sabote les délibérations démocratiques au Québec. Et je reconnais sur mon visage et sur les visages de mes collègues
députés de Québec solidaire les mêmes cernes que je voyais à l'époque, du haut de la tribune, sur les visages des
parlementaires alors qu'ils avaient passé toute la nuit à tenter en vain de
retarder ou de bloquer l'adoption de ce projet de loi.
Finalement, je reconnais le même aveu de
faiblesse de la part du gouvernement, l'aveu de faiblesse d'un nationalisme défensif et peureux, d'un
nationalisme qui pointe du doigt et qui isole. À Québec solidaire, nous sommes d'un autre nationalisme. Nous sommes du
nationalisme de Papineau, de Nelson, de Lévesque, de Godin, de Papineau et de
Khadir, d'un nationalisme qui...
Le
Président : Je m'excuse, je vous coupe d'abord pour vous dire
qu'il vous reste à peu près 1 min 30 s, mais aussi attention à
certains propos, à certains mots, «sabote», «peureux», des mots à ne pas
utiliser.
M.
Nadeau-Dubois : Je qualifie, M. le Président, une idéologie, je ne
qualifie ni une formation politique ni un individu, je qualifie une
idéologie, alors je maintiens ces propos.
À Québec solidaire, comme le dit...
Le Président : M. le... Je
m'excuse. M. le...
M.
Caire : ...faire
une question de directive.
Des voix : ...
Le Président : S'il vous
plaît!
M.
Caire :
Oui, merci, M. le Président. Alors, si tant est que vous acceptiez
l'explication du député de Gouin, qui qualifie une idéologie, je pense que mon
collègue, tout à l'heure, qualifiait une attitude. Donc, si on est dans la
qualification, il n'y a pas de problème, mais il ne peut pas y avoir deux
poids, deux mesures. Si on accepte...
Le
Président : Je comprends. Non, mais je comprends. Le temps
passe, on a du temps. Je comprends. On a bien expliqué, tout à l'heure, je pense qu'on a agi. Dans ce contexte-ci,
j'ai aussi pris la parole. Monsieur, veuillez poursuivre.
M. Nadeau-Dubois : À Québec
solidaire, nous sommes donc d'un autre nationalisme, d'un nationalisme qui rassemble parce que, comme le dit souvent la
députée de Taschereau, un peuple, ce n'est pas du monde tout pareil, c'est
du monde tous ensemble, parce que les peuples
forts n'ont pas besoin d'exclure pour se sentir fiers, parce que le Québec
est plus grand que ce projet de loi qui va créer de la division entre nous, M.
le Président.
Mais il y a
de l'espoir parce qu'au moment où on se parle, la loi dont j'ai assisté à
l'adoption en mai 2012, cette loi n'existe
plus, elle a été jugée inapplicable et autoritaire par les tribunaux. J'ai
espoir que la loi que nous voterons cette fin de semaine connaîtra le même sort mais, cette fois-ci, non pas par
les tribunaux, M. le Président, mais parce qu'un gouvernement subséquent, un gouvernement inclusif, progressiste,
indépendantiste prendra les rênes du Québec, et ce gouvernement, M. le
Président, il sera formé par Québec solidaire. Merci.
Le Président : Je reconnais
maintenant le chef du troisième groupe d'opposition.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé : Merci, M. le Président. À mon tour, au nom de ma famille
politique, le Parti québécois, je souhaite partager avec les parlementaires ce qu'on pense de ce projet de loi mais
ce qu'on pense de façon plus générale de la laïcité.
D'abord,
débattre et légiférer sur la laïcité, c'est légitime et c'est nécessaire dans
une société libre, une société qui est capable d'assumer ses choix. Si
on ne décide pas de prendre le virage de la laïcité, parce qu'on le prend pour
une première fois de façon codifiée dans une
loi, quelle est l'alternative? Comment on se comporte entre nous? Qu'est-ce qui
nous régit? Alors, d'avoir une loi comme celle-ci qui nous
permet d'apprécier la vision du gouvernement et, je l'espère, de comparer nos propositions, c'est souhaitable. Et nous nourrissons
l'espoir que, durant cette journée de débats, certains des arguments
qu'on a apportés qui sont, en fait, des propositions d'amendement pourront
trouver écho auprès du gouvernement.
J'ai
apprécié, tout à l'heure, l'ouverture manifestée par le premier ministre sur chacune des propositions que j'ai apportées. Évidemment, je serais davantage rassuré si elles
prenaient la forme d'amendements formels qu'on retrouve dans le projet de
loi. Et je m'explique.
• (11 h 20) •
D'abord, sur
le cadre de nos débats, évidemment, et je l'ai dit à plusieurs reprises, il aurait
été souhaitable qu'on n'ait pas de procédure d'exception, de bâillon. Et
tout ça aurait pu être possible relativement simplement si on avait commencé à débattre en février, à notre retour en
Chambre, alors que le projet de loi aurait pu être déposé à ce moment-là. On aurait eu amplement de temps, je crois, pour débattre de ces
enjeux.
À titre d'exemple,
le trop court laps de temps a fait en sorte que je n'ai jamais été en mesure de
proposer formellement mes arguments, mes amendements. C'est pour ça que j'ai
dû le faire auprès du premier ministre, c'est pour ça que je les annonce lors des
points de presse, c'est pour ça que j'écris à cet égard, et j'aurai l'occasion
de le faire aujourd'hui. Donc, c'est
ce que ça aurait permis. On propose des amendements; le gouvernement est
majoritaire, il en dispose. Il vote pour, il vote contre.
Ultimement,
les groupes parlementaires ont un choix à faire. Est-ce qu'il vaut mieux ne pas
légiférer ou tenter d'améliorer une
loi qui n'est pas nécessairement celle qu'on souhaite, mais qui est la
meilleure dans les circonstances? Je
pense qu'on a besoin d'une loi, et ma responsabilité, à titre de chef
parlementaire du Parti québécois et responsable de la laïcité, est de tenter
jusqu'à la fin de convaincre, par la force des arguments, le gouvernement qu'il
est souhaitable d'adopter nos amendements.
Le premier
ministre, tout à l'heure, a dit quelque chose que j'aurais dû relever, mais je
le fais maintenant. Il indique que le Parti québécois veut aller plus loin. Je
pense que l'idée, ce n'est pas d'aller plus loin, c'est d'être plus cohérent.
Quand le gouvernement fait le choix
judicieux d'inclure les enseignants et enseignantes dans sa loi parce qu'il
considère qu'ils sont en autorité, je ne comprends pas pourquoi il ne fait pas
la même chose avec les éducateurs et éducatrices des services de garde et des
CPE. C'est un choix. C'est totalement applicable. À preuve, la prestation de
services à visage découvert
s'applique à ce réseau. Alors, le gouvernement aurait pu faire le choix
d'appliquer sa loi à ce réseau, c'est un choix qu'il a décidé de ne pas faire. Le Parti québécois est la seule
formation politique qui plaide cela, et je sens qu'on est appuyés. Dans un sondage à la fin de mars dernier,
on indiquait que 67 % des Québécois souhaitent cela, et nous sommes
du nombre.
Même chose
pour les écoles privées. Pourquoi le fait de se payer un enseignement privé
dispenserait notre lieu d'enseignement de l'application d'une loi
québécoise? Moi, ça, ça me dépasse, M. le Président. Et un jour, et ça a été annoncé par le premier ministre, on aura un débat
sur le financement des écoles privées. On y participera, soyez-en assurés.
Mais la liberté de conscience pour des élèves, des enfants, des adolescents du
public, évidemment, mais pourquoi on dispenserait les élèves du réseau privé?
Moi, je ne comprends pas ça.
Aussi, j'ai
indiqué que, sur un enjeu qui est important pour nous, qui ne se retrouve pas
dans le projet de loi, qui est le
cours d'éthique et culture religieuse, pour lequel on a plusieurs critiques, on
souhaite un engagement formel. Lorsque j'ai posé la question, en
Chambre, au premier ministre, il a répondu, et ensuite le ministre de
l'Éducation a précisé sa volonté de faire
des modifications. Nous avons pris sa parole. J'aimerais, je l'ai entendu de la part du premier ministre, mais
un engagement plus ferme et temporel, il indique la durée du mandat pour
modifier ce cours.
Donc, pas
de surprise. Nos arguments sont connus, nos propositions sont connues, on va se
gouverner en conséquence. Et, au
terme de l'exercice, il y aura nécessairement une loi, et on espère qu'on aura contribué, à
travers nos propositions et notre attitude, à adopter la meilleure loi
possible.
Et dernière
chose : J'inviterais, à la fin, l'ensemble des parlementaires à demander
qu'on respecte cette loi, parce
qu'il en va de la primauté de l'Assemblée
nationale et de ses représentants
élus d'être les seuls maîtres de l'adoption des lois au Québec. Merci.
Le Président : À ce moment-ci,
je reconnais le député de Saint-Jean.
M. Louis Lemieux
M.
Lemieux : Merci beaucoup, M. le Président. Je me lève avec plaisir et fierté pour
participer à ce débat restreint qui
porte, faut-il le rappeler, sur le motif de la convocation en séances
extraordinaires et donc sur la motion fixant le cadre temporel et la procédure d'exception pour adopter
ce projet de loi n° 21 sur la laïcité de l'État, et vous me pardonnerez, je
l'espère, de m'en tenir à ce titre écourté, pour faire plus court, justement.
Avec plaisir, que j'ai dit, et même avec empressement, parce que je suis membre
permanent de la Commission des institutions qui a tenu les consultations particulières sur ce projet de loi et qui a commencé l'étude
détaillée article par article. Je dis bien «commencé» et je vous explique, parce que le
nouveau parlementaire que je suis n'a pas pu s'empêcher d'être impressionné en
appréciant les talents d'orateur des
collègues en commission, qui multipliaient, et le mot est faible, les
interventions et les explications pour
nous dire que ce n'était pas une affaire de faire du temps mais une affaire de
faire une meilleure loi, et j'en suis, mais j'ai eu le sentiment... c'est devenu une impression, en tout cas,
fatigante que le but, c'était de forcer ce qu'on est en train de faire
et de vivre ici aujourd'hui, et je m'explique, parce qu'en ce qui me concerne,
après toutes ces heures en commission parlementaire, j'en suis venu à la
conclusion qu'on ne réussirait pas à régler l'affaire en commission parlementaire et à se
mettre d'accord, parce qu'il y avait, me semble-t-il, en tout cas, de mes yeux
tout frais de parlementaire et de législateur, incompatibilité autour de
la table sur les bases mêmes de la loi.
Mais
ça, comme je vous le disais, c'est probablement juste moi qui n'ai pas assez
d'expérience, le petit nouveau qui ne
comprend pas le jeu des législateurs, la mécanique du comment on fait la
saucisse, comme on dit. Donc, pour ne pas jouer au mauvais juge, je vais oublier la forme, le contenant, et je
vais me contenter du contenu et me concentrer sur le fond, sur ce que j'ai entendu et ce que j'ai
compris des questions qui étaient posées au ministre et des amendements et
sous-amendements qui étaient déposés au fil
de l'étude article par article. Mais ne vous inquiétez pas, M. le Président, je ne
vais pas les répéter ici maintenant. On a déjà assez tourné autour du pot, à
mon avis, et on a assez perdu de temps à
se demander s'il est vraiment pertinent ou nécessaire de rajouter, par exemple,
les mots «du Québec» par ici ou «tel que défini par l'Assemblée nationale» par là. Et c'est sans compter ni
oublier qu'on a beaucoup insisté pour essayer de faire dire au ministre le contraire de ce qu'il venait
de dire, et qu'il répétait de toute façon depuis des semaines, et de ce qui
est écrit en toutes lettres dans le projet
de loi, qui a, me semble-t-il, le mérite, l'avantage, la qualité d'être simple,
alors qu'on s'est fait dire pas plus tard que jeudi soir, en préambule à une
question qui frôlait l'existentiel, que, et je cite, «plus on avance et
moins on comprend».
Il faut savoir et dire que, quelques
jours plus tôt, le ministre s'était fait demander ce que c'était au juste que
la religion et quelle était la définition du ministre de la religion. Je
l'ai trouvé, pour vous dire la vérité, bien patient, et même bon joueur et habile. Et j'avoue que sa réaction de citer la
définition de la Cour suprême du Canada de ce qu'est la religion, de
l'avis de la Cour suprême du Canada, bien écrit dans bien des jugements,
c'était un bon coup d'avocat. Mais le fait
est que ce n'est pas un dictionnaire que le ministre a déposé, c'est une
loi, une loi nécessaire pour qu'on puisse vivre aujourd'hui au Québec en fonction et en vertu de ce qu'on est devenus
après toutes ces années d'ajustements, de sécularisation, d'adaptation à
la modernité et la modernité et la maturité qui ont transformé notre société.
Et
donc c'est une loi, le projet de loi n° 21, qui vient concrétiser dans notre droit et dans
les faits ce que nous sommes collectivement devenus. Et j'en veux pour preuve
ce que dit le projet de loi. Comment est-ce
que ça pourrait être plus
simple que l'article 1, par exemple?
Cinq mots, M. le Président, on ne peut plus simples, clair et précis :
«L'État du Québec est laïque.»
En fait, il faudrait que toutes les lois soient écrites comme celle-là, parce qu'il
faut le dire, que ça coule de source et que ça se lit presque comme un roman,
avec des mots simples et des idées évocatrices, et descriptives, et pas
hermétiques que tout le monde, et pas juste les avocats, vont pouvoir
comprendre et qui nous permettent d'en mesurer la signification et la
portée.
Et
d'ailleurs j'ouvre davantage la parenthèse pour dire combien j'ai apprécié pas
juste la rédaction, mais la logique et
l'approche grand public du projet de loi, dont je recommande la lecture, en
passant, à tout le monde ne serait-ce que parce que c'est historique, M. le Président. Pour la première fois, le
droit québécois non seulement reconnaît, mais définit la laïcité de l'État, les principes sur lesquels
elle repose et ce que ça exige de ses institutions. Mine de rien, comme ça, là,
ce sont là les articles 1, 2 et 3 que je viens de vous résumer, à peine
résumer, c'est presque comme ça dans le texte.
Mais
1, 2 et 3, c'était bien, mais on s'est arrêtés, après je ne sais plus combien
d'heures, aux articles 4, 5 et 6 de... 32, pour le projet de loi n° 21, pour tourner, oui, peut-être
autour du pot, ce n'est pas... c'est trop méchant, «autour du pot», pour tourner en rond, en tout cas, ça, c'est
clair, mais en particulier pour tourner autour d'un concept de droit largement
reconnu et utilisé presque par défaut, celui
de la personne raisonnable. Ça permet aux juges et aux jurés d'apprécier la raisonnabilité de l'interprétation des faits en
regard de la loi. Vous me voyez venir. En tout cas, eux me voient venir parce
qu'ils étaient à la commission. Mais mal nous en pris puisqu'on a fini par
débattre en long et en large, plus long que large, des mérites des
opinions de la personne raisonnable au sens propre et même au sens
philosophique plutôt que légal, puisqu'on travaillait dans un projet de loi,
légal.
• (11 h 30) •
D'ailleurs,
sachez que la coïncidence n'est pas banale. C'est ce même concept légal de
personne raisonnable qui est utilisé dans le code d'éthique et de
déontologie de la plupart des organismes publics, comme par exemple celui des commissaires de la commission scolaire
English-Montréal, pour définir l'approche qu'ils doivent préconiser pour juger
de la façon dont ils s'acquittent de leurs
tâches et de leurs responsabilités, ce qui me fait penser et espérer, et
là-dessus le chef de la troisième
opposition sera d'accord avec moi, je pense, qu'il leur sera aisé, à eux et à
tous les parlementaires — «eux» entendre les commissaires
de la commission scolaire English-Montréal — de comprendre ce qu'on attend d'eux et de
nous et facile pour eux comme pour tous ceux qui auront à le faire, après l'adoption de la loi, de l'appliquer, parce que,
quand on y pense, ce n'est pas vraiment
compliqué, là. Elle dit quoi, la loi? Elle dit que les employés de l'État
en position d'autorité, tel que
défini dans les annexes dont je vous fais grâce, ne peuvent pas porter de signes religieux pendant leur prestation de travail au service de l'État. Et
c'est là où nous pouvons nous vanter, on l'a entendu aujourd'hui, mais je suis d'accord, c'est nous, le gouvernement, d'être modérés, et à l'écoute, et pragmatiques.
C'est justement dans cette liste de ceux et celles à qui la loi
interdit le port de signes religieux, considérant la laïcité assumée et responsabilisée de l'État, parce qu'il s'en trouve au moins autant pour dire
qu'on ne va pas assez loin que ceux qui nous reprochent d'aller trop loin.
Dans le monde d'où je
viens, M. le Président, vous aussi, d'ailleurs, le journalisme, quand les deux
côtés de ceux dont on parle, les deux côtés de la médaille, ou du conflit, ou
du débat, ou de la question, ou du projet de loi, trouvent à redire sur ce
qu'on a dit, c'est probablement un peu beaucoup parce qu'on a bien reflété la
situation des deux côtés. Je n'aime pas
l'expression «couper la poire en deux», il y a quelque chose de péjoratif
là-dedans, mais il y a beaucoup de mérite, souvent, à manger seulement
un demi-fruit. Toujours est-il que, dans le monde où je suis rendu maintenant,
c'est parce qu'on a tenu compte des besoins, et des impératifs, et des
attentes, et des susceptibilités, et vulnérabilités
de tout le monde, pour le plus grand bien de tout le monde. C'est ça, le bien
commun, et c'est ça que le projet de loi reflète.
D'ailleurs,
je dois noter qu'on ne s'est même pas rendus aux articles qui règlent pourtant
toute la question de la prestation et
de la réception des services à visage découvert. C'est dans le projet de loi.
On en a parlé par la bande, mais on
ne s'est pas rendus à ces articles-là. Dommage. Et ce n'est pas banal puisque,
mine de rien, ça n'avait jamais vraiment été réglé. Eh bien, là, ça
l'est ou, en tout cas, ça va l'être. Et ce sera simple, clair et précis.
Pour en
revenir à l'article 6, où on s'est arrêtés, il faut admettre qu'on ne s'est pas
arrêtés, on s'est plutôt embourbés dans
une kyrielle d'amendements et de sous-amendements, pas pour faire du temps,
non, non, non, pas pour faire du temps, mais toujours pour parler
davantage des concepts dont on parlait depuis le début. Mais c'est vrai qu'on
peut se poser beaucoup de questions sur ce
qui se passera une fois la loi adoptée et qu'avec un peu d'imagination, j'en
conviens, on peut évoquer toutes
sortes de scénarios qui permettent de se poser des questions et même de mettre
en doute éventuellement l'applicabilité
de l'une ou l'autre des parties de cette loi ou de n'importe quelle loi. Et,
comme pour n'importe quelle loi, justement,
l'applicabilité de la Loi sur la laïcité de l'État va passer par le GBS, le
gros bon sens, et la bonne volonté parce que, pour l'essentiel, pour
reprendre les mots de mon premier ministre, c'est déjà comme ça qu'on vit au
Québec.
Et, avant de
terminer et pour conclure sur le projet de loi et la nécessité de procéder
comme nous nous apprêtons à le faire
pour l'adopter, j'avoue, et je m'en suis confessé en commission, d'ailleurs,
que j'étais presque déçu d'un amendement
soumis par le gouvernement, qui l'était pourtant en guise de bonne foi, pour
essayer de faire débloquer l'allure des
travaux de la commission parce qu'à mon sens je n'étais pas d'accord parce
qu'on essayait de préciser davantage ce qui n'avait pas vraiment besoin de
l'être. Mais je me suis rallié sur-le-champ parce que, j'ai bien compris, c'est le métier qui rentre,
c'est comme ça qu'on fait des lois et c'est comme ça qu'on les fait adopter. Et
c'est ce que j'espérais et c'est ce que
je voulais, moi aussi, entre autres parce que c'est ce que les citoyens de ma
circonscription de Saint-Jean et d'ailleurs, qui m'en parlent depuis le lendemain des élections, me disent vouloir et
attendre de notre gouvernement. Et le fait est que ça fait longtemps que
ça aurait dû être fait.
Je vais tout
de même résumer l'essentiel de ce qui me fait dire ça et je m'excuse d'avance
de ne pas être original, parce que tout le monde le sait, mais ça fait trop
longtemps qu'on le dit, et c'est maintenant qu'il faut le faire. Il faut
faire ce que la commission Bouchard-Taylor
avait recommandé au gouvernement voilà plus de 10 ans déjà et qui, pour
l'essentiel, est resté lettre morte pour la partie importante dont on
parle encore aujourd'hui.
Il faut faire
ce que les libéraux n'ont pas réussi à faire, et ce ne sont pourtant pas les
occasions qui ont manqué depuis 2008,
comme leur loi n° 62, qui est toujours suspendue par la Cour
supérieure. Il faut faire ce que le gouvernement du Parti québécois aurait dû faire en 2013 en acceptant la main tendue
de la CAQ plutôt que de s'échouer avec une charte des valeurs qui prenait l'eau. Il fallait faire ce
que nous allons faire aujourd'hui, M. le Président, consacrer légalement
la laïcité de l'État québécois une fois pour toutes et passer à autre chose.
Et, même si, pour ça, il faut adopter ce projet
de loi en procédure d'exception dans le cadre d'une séance extraordinaire comme celle qu'on entame, c'est ce
qu'il fallait faire et c'est ce que nous allons faire parce que c'est une
mesure légitime d'un gouvernement majoritaire qui fait ce qu'il a dit qu'il
ferait et qui le fait de bonne foi, et pour les bonnes raisons, et parce que nous sommes persuadés, si j'ose parler au
nom de mes collègues, que le ministre qui l'a parrainé a présenté la loi dont nous avions besoin, et que
nous voulions, et que nous savons maintenant qu'elle est la meilleure
pour tous les Québécois. Merci, M. le Président.
Le Président : Est-ce qu'il y
a d'autres interventions? Je reconnais le leader de l'opposition officielle.
M. Sébastien Proulx
M. Proulx : Merci, M. le
Président. Je pense qu'il me reste environ...
Le Président : ...
M. Proulx : Pardon?
Le Président :
1 min 37 s.
M. Proulx :
Merci, M. le Président. Je prendrai cette minute 37 pour discuter de cette
motion et de l'opportunité que nous avons de se retrouver ici dans cette
période de bâillon.
Quelques mots, M. le Président, sur ce que j'ai
entendu jusqu'à maintenant de la partie gouvernementale. J'ai beaucoup entendu
parler du pourquoi c'est long en commission parlementaire, pourquoi et comment
c'est difficile en commission parlementaire.
Mais ce que je n'ai pas beaucoup entendu, c'était vrai hier, c'est vrai
aujourd'hui, M. le Président, c'est pour quelle raison on n'a pas siégé
assez souvent et assez longtemps en commission parlementaire.
La situation,
c'est la suivante, M. le Président, c'est que c'est le même ministre qui porte
les deux dossiers. C'est le même ministre qui, depuis le début, nous a
amenés dans la situation où il fallait, en alternance, siéger une journée dans l'un, une journée dans l'autre. Si on avait
eu, M. le Président, deux ministres responsables chacun de leurs dossiers,
on aurait eu vraisemblablement le double de
temps passé en commission parlementaire, ce qui veut dire, M. le Président, la
capacité et la possibilité d'aller encore plus loin dans les projets de loi.
Le projet de
loi n° 21, M. le Président, c'est encore plus gênant que c'était pour le
projet de loi n° 9 de faire cet exercice parce qu'on n'est même pas rendus
là où sont la suspension de nos droits et libertés. On n'est même pas rendus
aux annexes où il est temps de discuter de
qui sera brimé. On n'est même pas rendus, M. le Président, à discuter de la
clause dérogatoire, qui ne devrait pas être imposée lorsqu'on modifie la
charte québécoise des droits et libertés.
Ce
bâillon-là n'est pas légitime parce qu'on aurait pu agir autrement. C'est la
raison, M. le Président, pour laquelle nous ne sommes pas heureux de le
faire et nous allons voter contre cette motion.
Le Président : La parole au
député de Vachon.
M. Ian Lafrenière
M. Lafrenière : Combien de
temps, M. le Président?
Le Président :
10 min 53 s, M. le député.
M. Lafrenière :
Parfait. Merci beaucoup. Alors, M. le Président, vous allez m'excuser, je vais
commencer avec un message très direct
pour les libéraux, pour les péquistes, pour les solidaires. Je suis vraiment très heureux d'être parmi vous ce matin et je ne peux pas commencer sans
vous souhaiter une très bonne fête des Pères. C'est dimanche de la fête des
Pères. Bonne fête des Pères à tous! Vous avez tous eu peur, je le sais, mais je
voulais détendre l'atmosphère un peu.
Vous savez,
c'est un marathon intensif. Je veux féliciter les collègues qui sont ici aujourd'hui. Ça n'a pas été facile. C'est intensif et c'est intense, mais ça
se passe bien. Bravo!
M. le Président, alors que nous sommes assis aujourd'hui au salon bleu pour adopter via procédure
d'exception le projet de loi n° 21 sur la laïcité de l'État, je veux, comme parlementaire, rappeler que c'est notre rôle, en tant qu'élus, de collaborer le plus possible entre les partis pour
traiter des dossiers qui sont délicats. Nous nous devons de bien représenter les citoyens et les citoyennes du Québec afin de prendre des décisions
le plus près possible des valeurs des Québécois, de le faire avec sensibilité et de se rapprocher d'une forme de
consensus. Et c'est ce qu'on espère tous dans cette Chambre, M. le
Président.
• (11 h 40) •
Le
parlementarisme comme nous le pratiquons présentement est un pilier de la
démocratie. Et démocratie, ce n'est pas juste d'aller voter aux quatre ans. Ça
s'exerce aussi à chaque fois que des citoyens s'expriment publiquement
sur un enjeu, à chaque fois qu'un élu ici
prend la parole. Il faut prendre le temps de les écouter. La démocratie, nous
l'exerçons à chaque jour ici, à l'Assemblée nationale, ici même, au
salon bleu, ou encore lorsque ça se fait dans le cadre des commissions pour
entendre des citoyens ou des groupes, pour étudier en détail des projets de
loi. J'ai fait partie de la Commission des
institutions. On a reçu plusieurs groupes qui sont venus nous parler, on a pris
le temps de les écouter. En passant, je voulais remercier des gens qui
ont pris le temps de se déplacer ici, nous présenter des mémoires, nous présenter leur vision. Ça nous a beaucoup aidés
comme parlementaires, comme jeunes parlementaires, pour comprendre ce qu'ils
avaient. La démocratie s'exprime également quand on discute avec nos collègues
de notre groupe parlementaire en
caucus ou encore lors des discussions de corridor. Et d'ailleurs, je veux vous
avouer, comme jeune parlementaire, ça m'a agréablement surpris de voir les discussions de corridor qu'on peut
avoir entre les différents partis pour un seul et même but, faire
avancer les choses et de se comprendre, de se rapprocher.
M. le
Président, depuis plus d'un siècle, il y a eu dans ce salon des désaccords sur
des sujets qui étaient délicats, des
moments où la tension était palpable. Il y a aussi des moments où les lois ont
été votées, et ça a profondément changé la société québécoise, ça a amélioré la vie des gens. Il y a eu
également, M. le Président, des applaudissements, il y a eu des accolades, il y a eu de la franche
camaraderie, bref, toutes sortes d'émotions dans cette maison. C'est ce que
nous faisons aujourd'hui, débattre de façon responsable, même si on peut
être en désaccord sur cette dernière évaluation du projet de loi n° 21 sur la laïcité de l'État. Je me
considère comme honoré, M. le Président, d'être dans cette Chambre et de
pouvoir faire partie des parlementaires qui concluront enfin ce débat
après 11 ans.
Parce qu'il
faut se rappeler, on parle beaucoup d'heures de débat, mais il faut se rappeler
que ça fait plus de 11 ans. Après 31
jours d'audiences publiques, la Commission des consultations sur les pratiques
d'accommodement reliées aux différences
culturelles... Je pense que tout le monde se rappelle la commission
Bouchard-Taylor. Le vrai nom, c'était la Commission des consultations sur les pratiques d'accommodement reliées
aux différences culturelles. Ils ont déposé leur rapport de 310 pages il y a de cela 11 ans, et ça a ouvert la voie à des
pistes de solution pour le Québec. Cette commission a beaucoup fait parler d'elle depuis ce temps-là.
On en parle encore aujourd'hui comme si c'était hier. L'enjeu de la laïcité
suscite encore et toujours des débats qui
sont chauds. Je pense que vous en avez entendu plusieurs dans cette Chambre.
Pourtant, depuis Bouchard-Taylor, plusieurs tentatives pour régler la question
sont restées lettre morte. Ça n'a pas fonctionné, malheureusement.
Nos collègues
du Parti québécois y ont présenté, en novembre 2013, un projet de charte
affirmant les valeurs de la laïcité et de neutralité religieuse de
l'État ainsi que d'égalité entre hommes et les femmes, encadrant les demandes
d'accommodement. Pardon, c'était ... On a fait une proposition de compromis
inspirée de Bouchard-Taylor, et c'est exactement
ce qu'on vous dépose aujourd'hui. C'est une proposition qui s'inspire d'un
compromis de Bouchard-Taylor.
M. le Président, nos collègues libéraux ont eux
aussi essayé à plusieurs reprises, depuis 2008, de régler ce dossier-là. Et la loi n° 62
constitue leur dernière tentative, qui est toujours devant les tribunaux.
Nous avons été élus par les Québécois
pour réussir là où les autres n'ont pas... ça n'a pas fonctionné pour le
moment. Nous défendons la même position
de compromis depuis 2013. Il n'y a pas de surprise. Ce n'est pas nouveau. Les gens
qui nous écoutent connaissent notre
position. L'heure est venue aujourd'hui de poser un geste d'affirmation en faveur de la laïcité
de l'État et enfin tourner
cette page, passer à d'autres choses.
Des collègues
de l'opposition l'ont souligné ce matin, vous savez, en 1977, sous René
Lévesque, il y a eu dans cette
Chambre une décision très importante qui a été rendue : le caractère
distinct à l'échelle canadienne et nord-américaine. Et, pour nous, c'est important. Donc, depuis
11 ans, les Québécois ont eu maintes occasions de s'exprimer sur le sujet
ici, à l'Assemblée nationale, dans les
médias, un peu partout. 11 ans, 430 heures que nous avons passées au
Parlement sous forme de débats, d'audiences, pour régler la question.
En 2007, M. le
Président, on a compté 31 jours d'audience pour la commission
Bouchard-Taylor, 310 pages, je l'ai dit tantôt, et il n'y a pas eu
de suite. 2010‑2011, on a consacré 90 heures au projet de loi sur les accommodements.
En 2014, ce sont 13 journées,
70 heures, pour la charte des valeurs. En 2016‑2017, on parle de
75 heures de débat sur le projet de loi n° 62. Enfin, en 2019,
plus de 60 heures pour le projet de loi n° 21.
Alors que les
Québécois se sont exprimé, je pense que c'est très clair, ils ont eu l'occasion
de se faire entendre, on a eu
l'occasion de débattre dans cette chambre de plusieurs façons. La laïcité,
telle que définie dans le cadre du projet de loi, repose sur quatre principes qui devront être considérés en
concordance. Premièrement, la séparation de l'État et des religions. Deuxièmement, la neutralité religieuse
de l'État. Troisièmement, l'égalité de tous les citoyens et citoyennes.
Quatrièmement, la liberté de conscience et la liberté de religion, M. le
Président.
Le modèle québécois de laïcité qui est proposé
tient compte de notre histoire, de nos valeurs sociales et de la spécificité du Québec, notamment en privilégiant
l'équilibre entre les droits collectifs et les droits individuels. La charte
québécoise sera modifiée pour inclure l'importance fondamentale que la nation
québécoise accorde à la laïcité de l'État et
pour clarifier que les libertés et les droits fondamentaux s'exercent dans le
respect des valeurs démocratiques, dont
la laïcité de l'État, M. le Président. L'affirmation de la laïcité dans la
charte québécoise consacre une fois de plus le Québec comme société distincte à l'échelle canadienne et
nord-américaine. Je suis persuadé que mes collègues du PQ n'en sont pas
déçus.
M. le
Président, le projet de loi n° 21 s'inscrit dans la longue marche du
peuple québécois vers la laïcité de l'État. Il respecte les valeurs du Québec,
notamment la fondamentale : l'égalité hommes et femmes. M. le Président,
le Québec est mûr pour affirmer sa laïcité enfin, cette valeur
fondamentale, dans ses lois. C'est ce que nous faisons.
J'ai commencé
mon allocution en parlant de l'importance de la démocratie et de l'importance
du travail qu'on fait, M. le Président. J'aimerais aujourd'hui travailler avec
les collègues de l'opposition pour régler ce dossier qui est si important et qui a duré depuis plus de
11 ans. Et là je vais vous donner des exemples concrets parce qu'on parle
de neutralité. Et ce matin, en me
rendant ici, dans cette salle, j'ai pensé à un exemple qui était concret et qui
permet d'illustrer ce qu'on veut dire par neutralité. Puis je vais me
servir un petit peu de mon expérience de policier.
Quand on se
déplace comme parlementaire, on rencontre toujours les constables spéciaux qui
sont à l'accueil, qui nous accueillent ici, à l'entrée. Et je me posais
la question ce matin : Si, un jour, il y avait un de ces agents qui avait un macaron d'un parti politique, exemple, la CAQ,
et puis un collègue de l'opposition se présentait devant lui, puis il lui
dirait : Écoutez, la porte est barrée,
vous devez faire le tour. Même si, dans le fond, il est très neutre, je suis
persuadé que les gens de l'opposition diraient : Ah! on le sait
bien, c'est un constable spécial qui est caquiste. Il ne m'aime pas.
Ça a l'air
très loin, là, le parallèle que je fais, mais ce que je veux vous dire, M. le Président, pour avoir agi comme policiers pendant 26 ans, il y a la neutralité,
et c'est très dur d'aller mesurer, et il y a l'apparence de neutralité.
Et, lorsqu'on porte un signe religieux ou un
signe politique, c'est très difficile de démontrer notre entière
neutralité, et on place nos gens en
position d'autorité dans une situation vulnérable, où les gens vont remettre en question
ce qu'ils posent comme commande, ce
qu'ils donnent comme ordres, en disant : Est-ce que c'est vraiment
pour moi ou c'est un réflexe parce
que je n'ai pas la même religion ou
je n'ai pas la même appartenance politique? D'où l'importance de la neutralité. M. le Président, j'ai été
gestionnaire de policiers, je peux vous dire que mes hommes et mes femmes qui
ont travaillé pour moi, à chaque
jour, c'était très important, cette valeur de rester neutre et de ne pas
démontrer, de ne pas porter flanc à de la partisanerie, que ce soit pour
un groupe politique ou une croyance religieuse.
Pendant les commissions,
j'ai parlé aussi de l'histoire Shafia, histoire Shafia que j'ai vécue en 2009.
Comble du hasard, ça s'est passé le 30 juin. On se rappellera que les trois
jeunes filles avaient été retrouvées dans les écluses. Et la question que j'ai posée en commission,
je me suis dit : Si la jeune Geeti Shafia — son père l'obligeait à porter le foulard — si elle avait décidé d'appeler les policiers
pour porter plainte parce qu'il y avait de la violence et que la policière qui s'était présentée là portait un foulard, peut-être qu'elle serait très
neutre, mais la jeune fille aurait pu décider de ne pas porter plainte,
de ne pas lui parler parce qu'elle aurait pensé justement qu'il y avait un
enjeu religieux.
Alors, M. le Président, je pense que ce qu'on veut vous dire aujourd'hui, c'est qu'il y a
la neutralité et il y a aussi l'apparence de neutralité. Et c'est important
d'enfin tourner la page sur cette histoire qui n'en finit plus. Ça fait plus de 11 ans, plusieurs commissions,
plusieurs débats, plusieurs discussions qui sont fructueuses, et, M. le Président, on est rendus là. Ce que les gens nous disent sur la rue, je vais terminer avec ça, M. le Président, parce
que je rencontrais mes commettants
vendredi, ils disent : N'arrêtez pas. N'arrêtez pas. On vous a mis au
pouvoir, maintenant vous devez livrer. Faites votre job. C'est pour ça qu'on
vous a mis au pouvoir. Puis, M. le Président, ce qu'on fait aujourd'hui
avec les collègues de l'opposition, on fait
notre job. On fait ce pour quoi on a été mis au pouvoir, et c'est pour ça qu'on
travaille très fort, puis je suis heureux d'être parmi vous aujourd'hui,
M. le Président.
• (11 h 50) •
Le Président : Y a-t-il un
autre intervenant? Je reconnais un membre de l'opposition officielle, le député
de La Pinière, pour 21 secondes.
M. Gaétan Barrette
M. Barrette : Oui. Est-ce
que vous m'en donnez 31 puisque vous
m'en avez enlevé 10 la dernière fois? Non?
Le Président : 21 secondes, M.
le député.
M. Barrette : M. le
Président, à l'approche de la fin de
ces travaux-là, on peut dire une chose, M. le Président : le gouvernement a choisi de nous amener au bâillon, point à la
ligne. Ça sera retenu dans l'histoire. Mais, à la fin de ces travaux, on va pouvoir conclure une chose, une
chose : le premier ministre du Québec n'est pas le premier ministre de
tous les Québécois, il est le premier ministre...
Le Président :
Merci, M. le député de La Pinière. Complété.
Cela
met fin au débat restreint. Je mets donc aux voix la motion de procédure
d'exception présentée par M. le
leader du gouvernement, qui se lit comme suit :
«Qu'en
vue de compléter l'étude du projet de
loi n° 21, Loi sur la laïcité de l'État, l'Assemblée
[nationale] établisse la procédure législative
d'exception telle que prévue aux articles 182 à 184.2 et 257.1 à 257.10 du règlement;
«Qu'à
tout moment de la séance, le président puisse suspendre les travaux à la
demande d'un ministre ou d'un leader adjoint du gouvernement.»
Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix :
Adopté.
Une voix :
...
Le Président :
Vote par appel nominal. Que l'on appelle les députés.
• (11 h 51 — 12
h 1) •
Le Président :
Mmes et MM. les députés, nous reprenons les travaux.
Mise
aux voix de la motion proposant d'établir la procédure législative
d'exception en vue de compléter l'étude du projet de loi n° 21
Je
mets donc aux voix la motion de procédure d'exception présentée par M. le leader du gouvernement, qui se lit comme suit :
«Qu'en vue de
compléter l'étude du projet de loi n° 21, Loi sur la laïcité de l'État,
l'Assemblée [nationale] établisse la
procédure législative d'exception telle que prévue aux articles 182 à 184.2 et
257.1 à 257.10 du règlement;
«Qu'à
tout moment de la séance, le président puisse suspendre les travaux à la
demande d'un ministre ou d'un leader adjoint du gouvernement.»
Que les députés en
faveur de cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Legault (L'Assomption),
M. Jolin-Barrette (Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville),
Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay), M. Girard
(Groulx), Mme McCann (Sanguinet), Mme Roy (Montarville),
M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Roberge
(Chambly), Mme LeBel (Champlain), M. Lévesque (Chauveau),
Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes),
M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Caire
(La Peltrie), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé
(La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau
(Pointe-aux-Trembles), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour
(Abitibi-Est), M. Lacombe (Papineau), Mme Charest (Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs),
M. Julien (Charlesbourg), M. Boulet (Trois-Rivières), M. Lafrenière (Vachon),
M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand
(Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin
(Saint-Jérôme), Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger (Orford), Mme Picard
(Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Reid (Beauharnois),
Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Tremblay
(Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget),
Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice),
M. Caron (Portneuf), Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean), Mme Lecours
(Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe
(Ungava), M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé),
Mme Guillemette (Roberval), M. Provençal (Beauce-Nord),
M. Jacques (Mégantic).
Le Président : Que les députés contre
cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint :
M. Arcand (Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon),
M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel),
M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine),
Mme David (Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Melançon (Verdun),
Mme Ménard (Laporte), M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols
(Vaudreuil), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille
(Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis), M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan), Mme Rotiroti
(Jeanne-Mance—Viger),
Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Ciccone
(Marquette).
Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), M. Nadeau-Dubois (Gouin),
Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont),
M. Fontecilla (Laurier-Dorion), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve),
Mme Dorion (Taschereau), M. Zanetti (Jean-Lesage).
M. Bérubé (Matane-Matapédia),
M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Richard
(Duplessis), M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette),
M. Gaudreault (Jonquière), Mme Perry Mélançon (Gaspé).
Le Président :
Y a-t-il des abstentions? M. le leader du troisième groupe d'opposition.
M. Ouellet : Oui. Merci, M. le Président. On demande le consentement pour enregistrer
le vote du député des Îles-de-la-Madeleine, s'il vous plaît.
Le Président :
Consentement? M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
Le Secrétaire
adjoint : M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).
Une voix :
...
Le Président :
Oui.
M.
Jolin-Barrette : ...le vote du député de Rousseau.
Le Président : Y a-t-il consentement pour
enregistrer le vote du député de Rousseau? Consentement. M. le député de
Rousseau.
Le Secrétaire
adjoint : M. Thouin (Rousseau).
M. Thouin :
Pour.
Le Président :
Donc, je constate qu'il n'y a pas d'abstention. M. le secrétaire général, pour
le résultat.
Le
Secrétaire : Pour : 63
Contre :
42
Abstentions :
0
Le Président : La motion est
donc adoptée.
Conformément
au deuxième alinéa de l'article 27 du règlement, cela met fin à la période des
affaires courantes.
Affaires
du jour
Maintenant,
conformément à l'article 257.3 du règlement, la Commission des institutions
dispose d'au plus une heure pour déposer son rapport sur le projet de
loi n° 21.
Je suspends
donc immédiatement les travaux de l'Assemblée, et les cloches sonneront pour
vous aviser de la reprise de la séance.
(Suspension de la séance à 12 h 6)
(Reprise à 12 h 25)
Le Vice-Président (M. Picard) : Nous
reprenons nos travaux.
Et,
conformément à l'article 257.3 du règlement, je cède immédiatement la parole au président de la Commission
des institutions et député de Richmond pour qu'il dépose le rapport de la commission.
M. le député.
Dépôt du rapport de la commission qui a fait
l'étude détaillée du projet de loi n° 21
M.
Bachand : Merci
beaucoup, M. le Président. Je dépose le rapport de la Commission des
institutions, qui, les 4, 5, 6, 7, 11, 12 et
13 juin 2019, a procédé à l'étude détaillée du projet
de loi n° 21, la Loi sur la laïcité de l'État. La commission
n'a pas complété l'étude du projet de loi. Merci.
Le Vice-Président (M. Picard) :
Merci. Ce rapport est déposé.
Conformément
au deuxième alinéa de l'article 257.3, puisque l'étude détaillée du projet de
loi n'est pas terminée, nous allons maintenant en poursuivre l'étude en
commission plénière.
Je suspends
donc les travaux quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se
constituer en commission plénière.
(Suspension de la séance à 12 h 26)
(Reprise à 12 h 31)
Projet
de loi n° 21
Commission
plénière
Étude détaillée
M.
Picard (président de la commission plénière) : Nous sommes réunis en
commission plénière afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de
loi n° 21, Loi sur la laïcité de l'État.
Je
vous rappelle que l'étude détaillée en commission plénière est d'une durée de
cinq heures, tel que prévu au deuxième
paragraphe de l'article 257.1 du règlement. Dans le cadre de ce débat,
10 minutes sont réservées aux députés indépendants de Chomedey et de Marie-Victorin, sous réserve d'un maximum
de cinq minutes chacun. Enfin, je rappelle aux députés indépendants qui souhaitent intervenir au cours du débat qu'ils ont 10 minutes à partir
de maintenant pour en aviser la présidence.
Je
vous informe que, lorsque la Commission des institutions a mis fin à ses
travaux, les articles 1 à 5 de la Loi sur la laïcité de l'État étaient
adoptés. Enfin, au moment de l'ajournement de ses travaux, la commission était
à étudier l'article 6 amendé du projet de loi. Nous entreprendrons donc les
travaux de la commission plénière avec l'étude de l'article 6 tel qu'amendé. Y
a-t-il des interventions?
Des voix :
...
Le
Président (M. Picard) : M. le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti :
Non, c'est bon. Je me suis trompé.
Le
Président (M. Picard) : O.K. Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
Mme David :
Oui, M. le Président, par souci de clarté et de transparence, je pense qu'il
pourrait être très intéressant, pour montrer la bonne collaboration du
ministre, qu'il dépose tout de suite ses amendements qu'il aurait
éventuellement à nous proposer, pour que nous puissions peut-être travailler en
toute collaboration.
Le
Président (M. Picard) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : ...les amendements seront déposés article par article
lorsqu'on sera rendus.
Mme
David : Alors, si je comprends bien, il n'y a pas de souhait de
déposer, tout de suite, tous les amendements.
Le
Président (M. Picard) : C'est ce que je comprends moi aussi.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, on est présentement à l'étude détaillée du projet de
loi en commission plénière. À chacun des articles qu'il y aura des
amendements, ils pourront être étudiés à l'article pertinent.
Mme
David : M. le Président, est-ce que je peux poser la question d'une
autre façon? Est-ce qu'on peut prévoir qu'il y a des amendements qui
seront déposés?
Le
Président (M. Picard) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Comme je l'ai dit, M. le
Président, à de multiples reprises,
oui, effectivement, il y aura des
amendements qui seront déposés.
Mme
David : Donc, si je comprends bien, c'est conditionnel au fait qu'on
s'y rende. Si on ne s'y rend pas, vous n'amenderez pas, même si vous
trouvez que ça peut être une bonification.
M. Jolin-Barrette : M. le Président, peut-être peut-on renseigner la députée
de Marguerite-Bourgeoys relativement
à notre règlement. Cela étant dit, la procédure fait en sorte que nous
déposerons les amendements au fur et à mesure.
Le
Président (M. Picard) : O.K. Ça va? M. le
député de Jean-Lesage.
M. Zanetti :
Oui, j'aimerais demander le consentement de la commission pour pouvoir traiter
en priorité de l'article 27 et, ensuite de ça, revenir où on en était la
dernière fois. Puis j'ai expliqué la raison pour laquelle je fais cette proposition, c'est que... bon, le temps est très restreint, alors il faut, je pense,
choisir les moments qui sont le plus importants pour pouvoir déposer les
amendements qui sont les plus importants.
L'article
27 traite de la clause dite clause grand-père et nous, on a un amendement vraiment
très important, qui nous tient beaucoup
à coeur et que je pense, très sincèrement, que la partie gouvernementale sera intéressée
d'analyser et peut-être d'adopter aussi.
Alors, je
demanderais le consentement de la Chambre pour qu'on puisse d'abord traiter
27, pouvoir déposer les amendements
possibles pour être sûrs, parce que, vu que c'est à la fin, on risque de ne pas
pouvoir y arriver, puis il y a des enjeux
importants, pour qu'ensuite on revienne exactement là où on était, à l'article
6, puis qu'on continue le déroulement de notre étude détaillée.
Le Président (M. Picard) : Il n'y a pas de consentement? Est-ce que, sur l'article 6 tel
qu'amendé, il y a des interventions? M. le député de Jean-Lesage.
M.
Zanetti : Oui. Alors, je
suis très déçu, parce qu'on aurait pu
faire quelque chose d'important, qui aurait eu des impacts concrets dans la vie des gens. Je suis
déçu de voir qu'on ne daigne même pas vouloir analyser ça puis regarder ça.
Le Président (M. Picard) :
Oui, M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Le règlement
de l'Assemblée nationale prévoit qu'on étudie article
par article. Donc, moi,
je suis bien confiant qu'on peut se rendre à l'article 27 et étudier les
amendements du député de Jean-Lesage. Mais il faut qu'on se rendre jusqu'à l'article 27 présentement
et on a amplement le temps de se rendre jusqu'à l'article 27.
Faisons les choses dans l'ordre.
Le Président (M. Picard) :
Merci.
Une voix : ...
Le
Président (M. Picard) :
Bien, non, je ne pense pas que c'est un rappel au règlement, mais moi, j'étais
pour le faire. Lorsqu'il n'y a
pas de consentement, il n'y a pas de commentaire là-dessus. Donc, je vous
demanderais de parler sur l'article 6.
M.
Zanetti : Alors, j'ai un
amendement à déposer à l'article 6. Donc, il s'agit d'ajouter à l'article 6
l'alinéa suivant :
«Le critère du premier paragraphe a préséance
sur le critère du deuxième paragraphe.»
Le
Président (M. Picard) : O.K.
Nous allons distribuer copie de l'amendement. M. le député de Jean-Lesage,
voulez-vous expliquer...
M.
Zanetti : Bien, oui, volontiers. Essentiellement, une des
problématiques qu'il y a avec la définition actuelle du signe religieux incluse à l'article 6, une
de ces problématiques, c'est qu'il tente... je comprends l'objectif d'essayer
d'avoir une définition objective du signe
religieux, mais la tentative qui en est faite là n'est pas concluante à bien
des égards. Je pense qu'on a eu le
temps, dans nos discussions
précédentes, de le démontrer. D'une part, elle n'est pas concluante, d'une part, il est peut-être impossible de
définir, de façon objective, le caractère religieux d'un signe, d'un objet
qu'on porte. On est tout à fait d'accord avec la définition subjective
qui est proposée dans l'article du signe religieux.
Et on veut
donc, par cet amendement-là, lorsqu'il
y a aura confusion, lorsque ça ne
sera pas la même chose qui est pensée subjectivement d'un certain signe
et selon toute personne raisonnable, qui est le deuxième paragraphe de la définition, la deuxième condition... mais, quand il y aura
une disparité entre les deux... quand ce sera la même chose, tant mieux, quand
il y aura une disparité entre les deux, on veut qu'il soit précisé quel critère
aura préséance. Et donc que ce soit
le critère subjectif qui prime sur le critère objectif ainsi qu'on ne puisse
pas interdire à quelqu'un le port d'un signe qu'elle ne croit pas religieux, qu'elle ne porte pas pour des raisons
religieuses, même si la personne qui est mise en charge de l'application
considère, elle, donc à tort peut-être, que c'est un signe religieux...
Le
Président (M. Picard) : Des
interventions sur l'amendement? Est-ce
que l'amendement a été distribué? O.K. Ça s'en vient.
Mme David : Alors, écoutez, nous, on
n'a pas d'amendement, on parle sur l'amendement du collègue de Jean-Lesage, là. Je pense qu'il y a... nous
participons de la volonté de discuter de ça parce que c'est très, très
important par rapport aux deux paragraphes, un qui est dit supposément subjectif et,
l'autre, supposément objectif, alors j'en ai... On pourrait avoir de longues discussions sur le
supposément objectif, mais, avant de revenir là-dessus, je vais passer la
parole à mon collègue de Pontiac, s'il vous plaît.
Le Président (M. Picard) : M. le député de Pontiac.
M. Fortin :
Merci, M. le Président. Bonjour à tous. Je trouve ça intéressant, juste les
premières remarques du ministre, qui a refusé, hein, M. le Président, il y a quelques instants, de déposer ses amendements. C'est le
contraire de ce que le parti gouvernemental demande aux autres partis d'opposition,
aux partis d'opposition dans toutes les autres commissions, et fort probablement qu'ils le font sous consigne du leader, là, je ne veux pas présumer de
sa directive. Mais il demande ça aux partis de l'opposition. Alors, je trouvais ça particulier d'entendre le
leader du gouvernement ne pas acquiescer à la demande de la députée
de Marguerite-Bourgeoys.
Maintenant, pour l'article 6,
M. le Président...
M. Jolin-Barrette : ...dans quelle commission fait-il référence, le député de
Pontiac, outre la Commission de la
santé et de la sécurité au travail?
M.
Fortin : Le leader du gouvernement pourra aller voir les
procès-verbaux des commissions. C'est tout à sa disposition, et il aura
quelques mois pour étudier la question.
Le
Président (M. Picard) : Revenons sur l'article.
M.
Fortin : Merci, M. le Président.
M.
Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, on invoque...
Le
Président (M. Picard) : Est-ce que c'est une question de
règlement?
M. Jolin-Barrette : Oui. On invoque des faits, M. le Président. Je
veux bien comprendre. 212, 213, suite à l'intervention du collègue, je souhaite lui poser une question, à
savoir dans quelle commission précisément. Il donne des exemples, il dit
que l'ensemble de la députation ministérielle demande les amendements.
Le
Président (M. Picard) : M. le ministre. M. le ministre...
M.
Jolin-Barrette : On souhaiterait savoir quelle commission.
Le
Président (M. Picard) : M. le ministre, c'est après
l'intervention que vous pouvez poser une question.
M.
Jolin-Barrette : Ah! excusez-moi.
Le
Président (M. Picard) : M. le député de Pontiac.
• (12 h 40) •
M. Fortin : Merci, M. le Président. Alors, oui, pour intervenir sur l'article 6, M.
le Président, alors, l'article 6, très
clairement, là, porte sur les signes religieux, incluant les amendements qui
sont déposés. Et, aujourd'hui, ce que le gouvernement de la CAQ, par l'article 6 de sa loi, tente de faire, c'est
définir les signes religieux... qu'il tente de faire, hein? Ce n'est pas évident pour tout le monde, de
toute évidence, on a vu ça cette semaine. Il indique que l'article 6, dans
sa loi, dans le projet de loi n° 21, il
indique que l'article 6, comme tous les autres, s'appliqueront malgré les
articles 1 à 38 de la Charte des droits et libertés de la personne.
Alors,
puisqu'il tente, à travers l'article 6, de définir les signes religieux qu'il
sera interdit de porter à des milliers de Québécois, qu'il considère,
hein, qu'il considère en position d'autorité, alors qu'il s'apprête également à
utiliser la clause «nonobstant» pour
contourner ou pour suspendre les principes même de ce qu'on veut comme justice,
de ce qu'on veut pour régir les
relations entre les Québécois et les Québécoises, pour suspendre ces idéaux,
cette vision commune qu'on a de la
société québécoise, pour suspendre les articles 1 à 38, dans ce cas-ci, de la
charte des droits et libertés du Québec.
M. le Président, ça m'apparaît approprié, à ce moment-ci, de rappeler ces
principes puis de rappeler les raisons derrière son adoption.
M.
le Président, ce que je veux faire à l'instant, avec votre permission, c'est
citer un des grands ministres de la Justice
du Québec, M. Jérôme Choquette, qui, dans son intervention ici, en cette
Chambre, à l'intérieur de ces quatre murs, M. le Président, le 27 juin 1975, Jérôme Choquette étant membre du
gouvernement libéral de l'époque, de Robert Bourassa, du grand premier ministre Robert Bourassa, un
grand nationaliste, comme se plaît à le dire le gouvernement... Alors, je cite
M. Choquette au moment où les parlementaires
ici, dans l'Assemblée nationale, ont adopté la Charte des droits et libertés
de la personne du Québec.
«M.
le Président, au moment d'aborder l'étude de ce projet de loi en troisième
lecture, je voudrais profiter de cette occasion pour faire brièvement le point
sur les aspects principaux de cet important projet de loi. Je serai, cependant,
bref étant donné que l'élaboration, la
préparation et l'adoption définitive de ce projet de loi ont pris plus de huit
mois, presque une année, et que nous sommes maintenant arrivés au terme
de travaux qui ont été longs et considérables.
«L'adoption
de la Charte des droits et libertés de la personne constitue un moment
historique dans la vie du Québec et
signale, de sa part, une [certain] maturité[...]. La charte permettra de
définir avec précision un idéal de justice qui fera, j'en suis sûr, l'unité du
Québec autour de valeurs démocratiques que nous voulons garantir contre toute
violation.
«Les
énoncés de principe de la charte dépassent en [entendue] et en profondeur toute
autre charte canadienne et la plupart des autres chartes nationales des autres
pays. Les modifications apportées à la version originale du projet de
loi donnent à celle-ci un caractère
transcendant sur les législations à venir et seront un guide dans l'analyse de
nos législations antérieures par la Commission des droits de la
personne.»
M. Jérôme Choquette,
ministre de la Justice du Québec, le 27 juin 1975.
Pour notre mémoire collective, M. le
Président, et pour la suite des travaux, pour bien encadrer le débat qui va
suivre avec mes collègues, je pense que
c'est important, à ce moment-ci, de se rappeler de cette charte, de se
rappeler, de comprendre le document
de société qui jette les bases de notre vivre-ensemble et qui protège tous les
droits des Québécois et des Québécoises. M. le Président, la Charte des
droits et libertés de la personne :
«Considérant que tout
être humain possède des droits et libertés intrinsèques, destinés
à assurer sa protection et son épanouissement;
«Considérant
que tous les êtres humains sont égaux en valeur et en dignité et ont droit à
une égale protection de la loi;
«Considérant que le respect de la dignité de l'être humain,
l'égalité entre les femmes et les hommes et la reconnaissance des droits et libertés dont ils
sont titulaires constituent le fondement de la justice, de la liberté et de la
paix;
«Considérant que les droits et libertés de la personne
humaine sont inséparables des droits et libertés d'autrui et du bien-être général;
«Considérant qu'il y a lieu d'affirmer solennellement dans
une charte les libertés et droits fondamentaux de la
personne afin que ceux-ci soient garantis par la volonté collective et mieux
protégés contre toute violation;
«À ces causes, Sa Majesté, de l'avis et du consentement de
l'Assemblée nationale du Québec, décrète ce qui suit :»
Article
1 : «Tout être humain a droit à la vie, ainsi qu'à la sûreté, à
l'intégrité et à la liberté de sa personne.»
Article
2 : «Tout être humain dont la vie est en péril a droit au secours.
«Toute personne doit porter secours à celui dont la vie est
en péril, personnellement ou en obtenant du secours, en lui apportant l'aide physique nécessaire et
immédiate, à moins d'un risque pour elle ou pour les tiers ou d'un autre motif
raisonnable.»
Article
3, M. le Président : «Toute personne est titulaire
des libertés fondamentales telles [que] la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d'opinion, la liberté
d'expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté
d'association.»
Article
4 : «Toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur
et de sa réputation.»
Article
5 : «Toute personne a droit au respect de sa vie privée.»
Article 6 : «Toute personne a droit à la jouissance
paisible et à la libre disposition de ses biens, sauf dans la mesure prévue par la loi.
«7. La
demeure est inviolable.»
Article 8 : «Nul ne peut pénétrer chez autrui ni y
prendre quoi que ce soit sans son consentement exprès ou tacite.»
Article
9 : «Chacun a droit au respect du secret professionnel.
«Toute
personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou autre
ministre du culte ne peuvent, même en
justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en
raison de leur état ou profession, à moins qu'ils n'y soient autorisés
par celui qui [...] a fait ces confidences ou par une disposition expresse de
la loi.
«Le
tribunal doit, d'office, assurer le respect du secret professionnel.»
Article 9.1 : «Les libertés et droits fondamentaux
s'exercent dans le respect des valeurs démocratiques, de l'ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec.
«La loi
peut, à cet égard, en fixer la portée et en aménager l'exercice.»
Article 10, M. le
Président : «Toute
personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine égalité, des
droits et libertés de
la personne, sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la
couleur, le sexe, l'identité ou l'expression
de genre, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil, l'âge sauf dans
la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale,
la condition sociale, le handicap ou l'utilisation d'un moyen pour
pallier [à] ce handicap.
«Il y a discrimination
lorsqu'une telle distinction, exclusion ou préférence a pour effet de détruire
ou de compromettre ce droit.
«10.1. Nul ne doit harceler une personne en raison de l'un
des motifs visés dans l'article 10.»
Article 11 : «Nul ne peut diffuser, publier ou exposer
en public un avis, un symbole ou un signe comportant discrimination ni donner
une autorisation à cet effet.
Article 12 : «Nul ne
peut, par discrimination, refuser de conclure un acte juridique ayant pour
objet des biens ou des services ordinairement offerts au
public.»
Article 13 : «Nul ne peut, dans un acte juridique,
stipuler une [cause] comportant discrimination.
«Une telle clause est sans effet.»
Article 14 :
«L'interdiction visée dans les articles 12 et 13 ne s'applique pas au locateur
d'une chambre située dans
un local d'habitation, si le locateur ou sa famille réside dans le local, ne
loue qu'une seule chambre et n'annonce pas celle-ci, en vue de la louer,
par avis ou par tout autre moyen public de sollicitation.»
Article 15 : «Nul ne
peut, par discrimination, empêcher autrui d'avoir accès aux moyens de transport
ou aux lieux publics, tels les établissements commerciaux,
hôtels, restaurants, théâtres, cinémas, parcs, terrains de camping et de
caravaning, et d'y obtenir les biens et les services qui y sont disponibles.»
Article 16 : «Nul ne peut
exercer de discrimination dans l'embauche, l'apprentissage, la durée de la
période de probation, la formation professionnelle, la
promotion, la mutation, le déplacement, la mise à pied, la suspension, le renvoi ou les conditions de travail d'une personne
ainsi que dans l'établissement de catégories ou de classifications d'emploi.»
Article 17 : «Nul ne peut
exercer de discrimination dans l'admission, la jouissance d'avantages, la
suspension ou
l'expulsion d'une personne d'une association d'employeurs ou de salariés ou de
tout ordre professionnel ou association de personnes exerçant une même
occupation.»
Article 18 : «Un bureau de placement ne peut exercer de
discrimination dans la réception, la classification ou le
traitement d'une demande d'emploi ou dans un acte visant à soumettre une
demande à un employeur éventuel.»
Article 18.1 : «Nul ne
peut, dans un formulaire de demande d'emploi ou lors d'une entrevue relative à
un emploi, requérir
d'une personne des renseignements sur les motifs visés dans l'article 10 sauf
si ces renseignements sont utiles à l'application
de l'article 20 ou à l'application d'un programme d'accès à l'égalité existant
au moment de la demande.»
Article 18.2 : «Nul ne peut congédier, refuser
d'embaucher ou autrement pénaliser dans le cadre de son emploi une personne du seul fait qu'elle a
été déclarée coupable d'une infraction pénale ou criminelle, si cette
infraction n'a aucun lien avec l'emploi ou si cette personne en a obtenu
le pardon.»
Article 19 : «Tout employeur doit, sans discrimination,
accorder un traitement ou un salaire égal aux membres de son
personnel qui accomplissent [le] travail équivalent au même endroit.
• (12 h 50) •
«Il n'y a pas de discrimination si une différence de
traitement ou de salaire est fondée sur l'expérience, l'ancienneté, la durée du service, l'évaluation au mérite, la quantité de
production ou le temps supplémentaire, si ces critères sont communs à tous les
membres du personnel.
«Les ajustements salariaux ainsi qu'un programme d'équité
salariale sont, [en] égard [de] la discrimination fondée
sur le sexe, réputés non discriminatoires, s'ils sont établis conformément à la
Loi sur l'équité salariale.»
Article 20 : «Une distinction, exclusion ou préférence
fondée sur les aptitudes ou [les] qualités requises par un
emploi, ou justifiée par le caractère
charitable, philanthropique, religieux, politique ou éducatif d'une institution
sans but lucratif ou qui est vouée exclusivement au bien-être d'un
groupe ethnique est réputée non discriminatoire.
«20.1. Dans un contrat d'assurance ou de rente, un régime
d'avantages sociaux, de retraite, de rentes ou d'assurance
ou un régime universel de rentes ou
d'assurance, une distinction, exclusion ou préférence fondée sur l'âge, le sexe
ou l'état civil est réputée non
discriminatoire lorsque son utilisation est légitime et que le motif qui la
fonde constitue un facteur de détermination de risque, basé sur des
données actuarielles.
«Dans ces contrats ou régimes, l'utilisation de l'état de
santé comme facteur de détermination de risque ne constitue pas une discrimination au sens de l'article 10.»
Article 21 : «Toute personne a droit d'adresser des
pétitions à l'Assemblée nationale pour le redressement de griefs.»
Article
22 : «Toute personne légalement habilitée et qualifiée a droit de se
porter candidat lors d'une élection et a droit d'y voter.»
Article
23 : «Toute personne a droit, en pleine égalité, à une audition publique
et impartiale de sa cause par un tribunal indépendant et qui ne soit pas préjugé, qu'il s'agisse de la
détermination de ses droits et obligations ou du
bien-fondé de toute accusation portée contre elle.
«Le tribunal peut toutefois
ordonner le huis clos dans l'intérêt de la morale ou de l'ordre public.»
Article
24, M. le Président : «Nul ne peut être privé de sa liberté ou de ses
droits, sauf pour les motifs prévus par la loi et suivant la procédure
prescrite.
«24.1. Nul ne peut faire l'objet
de saisies, perquisitions ou fouilles abusives.»
Article
25 : «Toute personne arrêtée ou détenue doit être traitée avec humanité et
avec le respect dû à la personne humaine.»
Article
26 : «Toute personne détenue dans un établissement de détention a [le]
droit d'être soumise à un régime distinct approprié à son
sexe, son âge et sa condition physique ou mentale.»
Article
27 : «Toute personne détenue dans un établissement de détention en
attendant l'issue de son procès a droit d'être séparée,
jusqu'au jugement final, des prisonniers qui purgent une peine.»
Article
28 : «Toute personne arrêtée ou détenue a droit d'être promptement
informée, dans une langue qu'elle comprend, des motifs de
son arrestation ou de sa détention.
«28.1. Tout accusé a le droit
d'être promptement informé de l'infraction particulière qu'on lui reproche.»
Article 29 : «Toute personne
arrêtée ou détenue a droit, sans délai, d'en prévenir ses proches et de
recourir à l'assistance d'un avocat. Elle doit être promptement informée de ces
droits.»
Article
30 : «Toute personne arrêtée ou détenue doit être promptement conduite
devant le tribunal compétent ou relâchée.»
Article
31 : «Nulle personne arrêtée ou détenue ne peut être privée, sans juste
cause, du droit de recouvrer sa liberté sur engagement,
avec ou sans dépôt ou caution, de comparaître devant le tribunal dans le délai
fixé.»
Article 32 : «Toute personne
privée de sa liberté a droit de recourir à l'habeas corpus.
«32.1. Tout accusé a le droit
d'être jugé dans un délai raisonnable.»
Article
33 : «Tout accusé est présumé innocent jusqu'à ce que la preuve de sa
culpabilité ait été établie suivant la loi.
«33.1. Nul accusé ne peut être contraint
de témoigner contre lui-même lors de son procès.»
Article
34 : «Toute personne a droit de se faire représenter par un avocat ou d'en
être assistée devant tout tribunal.»
Article
35 : «Tout accusé a droit à une défense pleine et entière et a le droit
[de s']interroger et de contre-interroger les témoins.»
Article 36 : «Tout accusé a
le droit d'être assisté gratuitement d'un interprète s'il ne comprend pas la
langue employée à l'audience ou s'il est atteint de surdité.»
Article 37 : «Nul accusé ne
peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été
commise, ne constituait pas une violation de la loi.»
Article
37.1 : «Une personne ne peut être jugée de nouveau pour une infraction
dont elle a été acquittée ou dont elle a été déclarée
coupable en vertu d'un jugement passé en force de chose jugée.»
Article
37.2 : «Un accusé a droit à la peine la moins sévère lorsque la peine
prévue pour l'infraction a été modifiée entre la
perpétration de l'infraction et le prononcé de la sentence.»
Article 38 : «Aucun témoignage devant un tribunal ne
peut servir à incriminer son auteur, sauf le cas de poursuites pour parjure ou pour témoignages contradictoires.»
M. le Président, voilà les articles 1 à 38
de la Charte des droits et
libertés de la personne, qui
seront suspendus si le projet de loi du ministre est adopté aujourd'hui.
M. le Président, je vous dépose le texte des articles 1 à 38 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec pour la lecture des collègues d'en face. Merci, M. le Président.
Document
déposé
Le Président (M. Picard) : Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt ? Consentement pour le dépôt. Oui, Mme la députée de l'Acadie.
Mme
St-Pierre : Merci
de me donner la parole. Alors, M. le Président, puisque nous parlons de Charte
des droits et libertés, puisque nous
parlons de bâillon, de clauses dérogatoires, le fait qu'on va suspendre les
droits et libertés des citoyens québécois au cours de cet exercice et
que le gouvernement parle de fierté, bien, j'aimerais commencer mon intervention par une citation, celle de
Montesquieu, L'esprit des lois : «C'est une expérience éternelle
que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser...»
J'ai tenu à commencer
mon intervention par cette citation, car c'est bien d'abus dont il s'agit ici.
Ce gouvernement abuse en suspendant les libertés individuelles des
citoyens québécois. Ce gouvernement abuse en ajoutant une clause dérogatoire qui vise à museler, à bloquer, à
menotter les citoyens lésés qui voudraient s'adresser aux tribunaux pour
défendre leurs droits les plus fondamentaux. Ce gouvernement abuse en
utilisant le bâillon pour en accélérer l'adoption. Ce gouvernement abuse...
Des voix : ...
M.
Jolin-Barrette : ...ne peut
pas prêter des intentions, et je rappellerais à la collègue que l'ensemble de
l'utilisation des dispositions de
dérogation est prévu à la fois par des dispositions qui sont prévues à la fois
par la Charte des droits et libertés de la personne, à la fois par la Charte
des droits et libertés. Alors, M. le Président, le président de l'Assemblée
nationale, hier, a statué, relativement à la
conformité aux règlements de l'Assemblée nationale, la convocation en séances
extraordinaires de l'Assemblée nationale
ainsi que de la procédure législative d'exception, hier et pour aujourd'hui.
Alors, je pense qu'on devrait faire attention dans les propos et dans
les intentions qui sont prêtées.
Le
Président (M. Picard) : Mme la députée, je vous recommande la prudence
dans vos propos, mais vous pouvez continuer.
Mme
St-Pierre :
M. le Président, alors, je vais retenir évidemment la citation de Montesquieu.
M. le Président, cette charte, qui
avait tout d'abord été imaginée par Daniel Johnson père puis adoptée par le
gouvernement de Robert Bourassa, constitue une pièce fondamentale. Ces
modifications ont toujours été faites dans le plus grand respect.
J'ai
moi-même, comme ministre de la Condition féminine, fait un projet de loi qui
avait pour but d'amender la Charte
des droits et libertés, c'était en 2008. On voulait inclure, dans le préambule
de la charte, la notion d'égalité entre les hommes et les femmes. Il
aurait été, M. le Président, inimaginable de faire ces changements sous un bâillon.
Il a fallu évidemment consulter avant de
préparer le projet de loi. Nous avons aussi fait une commission parlementaire
et nous avons procédé par l'adoption
de ce projet de loi dans le plus grand respect des parlementaires. Et, à la
suite de la fin des travaux en
commission parlementaire et l'article par article, nous avons, M. le Président,
adopté ce projet de loi à l'unanimité, et
j'en étais très fière. Et la fierté, pour un parlementaire, c'est d'adopter des
projets de loi dans l'unanimité, c'est la fierté d'avoir cette Charte
des droits et libertés au Québec. Mais moi, je suis très fière d'avoir cette
charte des libertés.
Et, lorsqu'on nous rappelle et on nous
dit : M. Bourassa l'a fait... M. Bourassa l'a fait au moment où tout le
processus avait été utilisé jusqu'en Cour suprême. Ensuite, il a demandé à
Claude Ryan, son ministre, d'adopter une loi
sur l'affichage. La loi de M. Claude Ryan a été adoptée et elle tient toujours
la route. On n'a pas eu besoin de suspendre les libertés individuelles.
On n'a pas eu besoin de clause dérogatoire sur la loi de M. Ryan.
Alors, je pense que ce sont de beaux exemples,
M. le Président, un exemple où parfois il faut travailler plus fort, bien sûr, puis il faut réussir à convaincre
les autres, les collègues. Mais, à la fin, on se sent plus satisfaits, et les
lois tiennent la route. Cette loi, M. le Président, ne tiendra pas la
route, parce que cette loi, elle sera contestée, qu'il le veuille ou non. Ce
n'est pas terminé. Ce ne sera pas terminé aujourd'hui.
La Charte des
droits et libertés de la personne reconnaît que tous les individus qui se
trouvent au Québec sont égaux en valeur et en dignité. Ayant pour
objectif d'assurer les droits humains et d'harmoniser les rapports des citoyens
entre eux et avec leurs institutions, la
charte s'applique tant aux activités de l'État qu'aux rapports en privé. La
charte québécoise a été décrite comme
un document unique de l'histoire législative canadienne. Elle a été rédigée sur
la base des principes d'indivisibilité, d'interdépendance et d'indissociabilité
des droits de la personne. La charte s'inspire notamment de la
Déclaration universelle des droits de l'homme, du Pacte international relatif
aux droits civils et politiques, du Pacte international relatif aux droits
civils... aux droits économiques, dis-je, sociaux et culturels.
• (13 heures) •
Le droit à
l'égalité de tous les individus est protégé par l'article 10, comme l'a dit mon
collègue tout à l'heure. Cet article
interdit la discrimination, en garantissant à toute personne le droit d'être
traitée en pleine égalité et d'exercer ses droits et libertés sans distinction, exclusion
ou préférence fondée sur une caractéristique personnelle qui constitue un
motif de discrimination interdit. La charte
interdit la discrimination fondée sur une liste exhaustive de motifs : la
race, la couleur, le sexe, l'identité ou l'expression de genre, la grossesse,
l'orientation sexuelle, l'état civil, l'âge, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine
ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l'utilisation d'un
moyen pour pallier ce handicap.
M. le
Président, cette Charte des droits et libertés est un document tellement
important, M. le Président, qu'adopter une modification sous bâillon est
quelque chose qui est inadmissible à mes yeux et à nos yeux.
La
Déclaration universelle des droits de l'homme. On s'est inspirés de la
Déclaration universelle des droits de l'homme
pour adopter la Charte des droits et libertés au Québec. À l'article 18 de
la Déclaration universelle des droits de l'homme, il est écrit :
«Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion;
ce droit implique la liberté de changer de
religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa
conviction seule ou en commun, tant
en public qu'en privé, par l'enseignement, les pratiques, le culte et
l'accomplissement des rites.» On retrouve, essentiellement, ce même article dans le Pacte international relatif aux
droits civils et politiques. L'article 18 du pacte dit :
«1. Toute
personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion; ce droit
implique la liberté d'avoir ou
d'adopter une religion ou une conviction de son choix, ainsi que la liberté de
manifester sa religion ou sa conviction, individuellement ou en commun,
tant en public qu'en privé, par le culte et l'accomplissement des rites, les
pratiques et l'enseignement.
«2. Nul ne subira de contrainte pouvant porter
atteinte à sa liberté d'avoir ou d'adopter une religion ou une conviction de
son choix.»
M. le
Président, lorsque ces grands documents internationaux ont été adoptés, il y
avait des sociétés bien sûr qui n'étaient pas d'accord, il y avait des
pays qui n'étaient pas d'accord, il y avait des pays qui n'étaient pas
signataires. Mais le Canada était
signataire. Le Québec s'est lié à ces conventions, le Québec est lié. Et je
pense que, M. le Président, le
ministre, et son équipe, et la ministre de la Justice et Procureur général et
tous les représentants de ce gouvernement devraient réfléchir, devraient
réfléchir sur l'impact que ce projet de loi va avoir sur la réputation du
Québec à l'international et sur les citoyens
aussi qui vont subir ici, au Québec, cette loi. Je fais un petit calcul — tout à l'heure, je regardais l'équipe
autour du ministre : un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf,
dix. Si on inclut le ministre, savez-vous combien il y a de femmes dans son
équipe? Ils sont 11, il y a deux femmes. Alors, moi, je me dis...
M. Jolin-Barrette : ...
Le Président (M. Picard) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : ...M. le
Président, la députée...
Le Président (M. Picard) : Question
de règlement?
M.
Jolin-Barrette : Oui, oui,
oui. La députée d'Acadie vient présentement d'attaquer les fonctionnaires de
l'État québécois.
M. le Président, lorsque je suis arrivé en
poste, j'ai travaillé avec les équipes en place qui étaient engagées au Secrétariat à l'accès à l'information et à la
réforme des institutions démocratiques. Les propos que tient la députée
d'Acadie n'ont aucun bon sens.
D'attaquer la compétence, la qualification des hommes et des femmes qui m'ont
accompagné dans le processus de
rédaction. De dire que, les fonctionnaires de l'État québécois, parce
qu'il y a majoritairement des hommes dans cette équipe-là, il y a une problématique, je
n'en reviens tout simplement pas, de ce genre de propos d'une ex-ministre
du Parti libéral, à deux occasions. Je n'en reviens pas, M. le Président.
Le
Président (M. Picard) : Oui.
Mme la députée d'Acadie, je vous demande d'être très prudente dans vos propos.
Des voix : ...
Le Président (M. Picard) :
Mme la députée de Saint-Laurent, c'est Mme la députée d'Acadie qui a la parole
actuellement, et je vous demande d'être très prudente dans vos propos aussi
pour éviter les débats.
Et je vous
demanderais aussi de revenir sur l'amendement du député de Jean-Lesage qui est
en discussion. Là, je comprends que
le débat est large, mais on pourrait peut-être revenir sur l'amendement du
député de Jean-Lesage, s'il vous plaît.
Mme Rizqy : ...M. le Président.
Le Président (M. Picard) :
Oui, Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme
Rizqy : Article 35, paragraphe 6°. Il interprète les propos de ma
collègue et il n'a pas soulevé aucun article de règlement.
Le
Président (M. Picard) :
Est-ce qu'on peut revenir à l'amendement du député de Jean-Lesage? Mme la
députée d'Acadie, je vous demande
toujours la plus grande prudence et je... et la plus grande prudence à tous les
intervenants, s'il vous plaît.
Mme
St-Pierre :
Merci, M. le Président. Alors, j'ai été ministre de la Condition féminine et
j'en ai été très fière. Et j'ai fait adopter un projet de loi sur...
Une voix :
...
Le
Président (M. Picard) : L'article, monsieur...
Une voix :
...
Le
Président (M. Picard) : Question de règlement, l'article 35.
M.
Jolin-Barrette : Je trouve les propos injurieux, M. le Président,
injurieux.
En
vertu de notre règlement, à l'article 35, paragraphe 7°, «se servir d'un
langage violent, injurieux ou blessant à
l'adresse de qui que ce soit», en l'occurrence, M. le Président...
Actuellement, autour de moi m'accompagnent des gens qui travaillent pour l'État québécois, qui sont au
service de l'État québécois, qui servent, sans partisanerie, l'ensemble
des Québécois, qui ne sont pas affiliés à aucune formation politique. La
députée de l'Acadie a été ministre dans deux gouvernements...
Une voix :
...
M. Jolin-Barrette : ... — M. le
Président, je vais terminer — a été ministre dans deux gouvernements
libéraux. Elle a bénéficié de l'expertise, M. le Président, des fonctionnaires
de l'État québécois, qui font un excellent travail. Je n'accepterai pas
dans cette Assemblée qu'on attaque les fonctionnaires de...
Le
Président (M. Picard) : M. le ministre, s'il vous plaît! M. le
ministre...
Une voix :
...
Le Président (M. Picard) : Oui, vous allez pouvoir continuer. Je vous
demande la plus grande prudence, tout le monde, qu'on ait des bons débats.
Notre temps est très limité.
Je
vous demande de revenir le plus vite possible sur l'amendement de M. le député
de Jean-Lesage, toujours dans le respect de tous les parlementaires,
s'il vous plaît. Merci.
Mme
St-Pierre : ...puis j'ai le plus grand respect pour les
fonctionnaires du gouvernement, je pense qu'il peut aller vérifier, et
j'ai toujours eu le plus grand respect. Et je veux continuer, M. le Président,
pour...
Le
Président (M. Picard) : ...Mme la députée d'Acadie.
Mme
St-Pierre :
C'est moi qui ai la parole, là? O.K. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Picard) : Je vous demanderais d'éviter les dialogues. Mme
la députée, adressez-vous à moi, puis, les autres, on écoute.
Mme
St-Pierre : Merci. Alors, à la suite de ces remarques que
j'ai faites par rapport à la Déclaration universelle des droits de l'homme, par rapport au Pacte
international relatif aux droits civils et politiques, j'en arrive au fait que
le débat ne sera pas clos, parce qu'il va certainement y avoir des
procédures qui vont se tenir.
Et
j'aimerais citer un éditorial du Devoir, Charles Grandmont, qui dit, et
je cite : «Et, même si le premier ministre a hâte de passer à autre chose, il lui incombe de
s'assurer que les prochains chapitres ne plongeront pas le Québec dans la
tourmente. Son projet de loi comporte de trop grandes failles pour qu'il se
lave les mains de ses conséquences.» Il continue — et je cite toujours : «Et il est
important de rappeler et de réunir les conditions pour que le fameux
vivre-ensemble s'en trouve renforcé.
Malheureusement, le projet de loi est trop brouillon pour que l'on puisse avoir
confiance que l'on ira dans cette direction.»
Je
cite toujours l'éditorialiste : «Et, justement, qui sera responsable de
châtier les contrevenants? De quelle
façon? Pas de réponse claire, pour
l'instant, à ces questions et à beaucoup d'autres. Il faudra bien y venir, surtout dans
les écoles publiques, soumises, à
leur corps défendant, à l'interdiction du port des signes religieux. Les Québécois
sont, à juste titre, préoccupés par la montée de l'intégrisme dans le
monde, mais on cherche encore des preuves qu'une subjugation religieuse de la
province est en cours. Le projet de loi sur la laïcité ferait oeuvre utile s'il
aidait à apaiser les esprits et à calmer les
appréhensions. Il est en train de produire l'inverse, parce que
le gouvernement s'entête à prétendre que la menace
intégriste au Québec est telle qu'il y a urgence d'agir.»
M. le Président, je
vais poursuivre avec un article de Mario Dumont publié cette semaine, et il
parle aussi de l'impact sur la scène
internationale. Et j'ai été ministre
des Relations internationales et de
la Francophonie. J'ai été ministre
après tout l'épisode de la charte des
valeurs. Alors, j'ai été sur le terrain et j'ai été à même de comprendre la
réaction et de voir la réaction que
la charte des valeurs avait suscitée chez nos partenaires internationaux, M. le Président. Donc, je pense que j'ai toute la crédibilité pour parler de cette
question-là.
• (13 h 10) •
Alors,
Mario Dumont écrit : «J'aurais un énorme malaise à voir le gouvernement recourir à cette procédure dans le cadre du projet de loi n° 21 sur la laïcité — il parle du bâillon. [...]il faut garder à l'esprit qu'il touche la délicate
question des droits de chacun. Et il
inclut le recours à la clause «nonobstant» pour éviter que la loi ne soit
immédiatement contestée en vertu de la Charte des droits. Voici le portrait.
Suspendre les procédures parlementaires régulières pour faire adopter un
projet de loi qui suspend certaines libertés et qui suspend aussi l'application
de la Charte des droits et libertés, ça fait beaucoup.
Cela finit par donner des munitions à ceux qui veulent ternir l'image du
Québec. [...]Les choses ne sont pas aussi simples à l'échelle
internationale. Imaginez la situation présentée dans une conférence
internationale de science politique ou dans
un grand forum sur les droits de l'homme de l'ONU — imaginez la ministre de la Condition
féminine du Québec — ça, c'est moi qui parle — qui se rend à l'ONU pour parler du Québec. On dira
qu'un nouveau gouvernement au Québec
vient de suspendre les libertés religieuses d'une partie de sa population. On
ajoutera que la Charte des droits et libertés
a été suspendue. On finira par expliquer que ce nouveau gouvernement n'a même
pas respecté le Parlement et a imposé
[la] loi par le bulldozer. Il n'en faut pas plus pour nuire à l'image
internationale du Québec. Rien n'est plus difficile que de réparer des perceptions
erronées — et je
peux vous le dire, M. le Président — à l'international et de rétablir la
vérité une fois les choses parties de travers.»
J'ai été
ministre des Relations internationales et de la Francophonie. Nous avons des
bureaux dans 18 pays dans le monde.
Nous avons 32 représentations. J'ai fait le tour du monde, M. le
Président, dans le cadre de mes fonctions, en mission, et j'ai été en mesure, tout à fait, de voir les répercussions
que cette charte des valeurs avait eues sur la réputation du Québec.
La réputation
du Québec, c'est aussi des articles dans les journaux, ma collègue la députée
de Bourassa-Sauvé en a parlé, et on voit encore des articles dans la
presse internationale, et ça ne sera pas fini, ça va se poursuivre. Le Washington Post, le 13 novembre, publiait une opinion sous la plume de Nora Loreto.
Bien, le Washington Post compte 13,8 millions d'abonnés sur
Twitter. Alors, on peut imaginer ce que ça peut faire à la réputation du
Québec.
M. le
Président, Lysiane Gagnon, de La Presse, écrivait hier : «Tout cela est une opération de
marketing politique montée de toutes pièces pour donner à une
législation mesquine et discriminatoire l'apparence d'un beau grand projet collectif. [...]Non seulement le modèle français
de la laïcité n'a-t-il aucune racine dans l'histoire du Québec,
il n'a jamais non
plus été un enjeu de la Révolution tranquille ni fait partie des grandes
revendications nationalistes et souverainistes [du Québec].»
Mme Gagnon
poursuit : «D'où vient donc cet engouement subit pour le modèle français
de laïcité ? La réponse est
aussi navrante qu'évidente : [...]la peur de l'immigration — surtout
musulmane. Le p.l. n° 21 est du même acabit que les autres mesures anti-immigration du
gouvernement[...]. [...]Ce que l'on voit ici à l'oeuvre, c'est le vieux
nationalisme défensif et hargneux de l'Union nationale, qui est revenu
en force une fois la souveraineté évacuée du tableau.»
Alors, M. le Président, je vais terminer mon intervention en parlant d'un livre que le ministre
a écrit et qu'il a publié au mois de janvier 2018. Et je l'ai trouvé
très intéressant. Puisque je vais parler de lui, j'imagine qu'il va trouver que
je ne l'insulte pas. Alors, M. le Président, dans son livre, il écrit — il
y a un extrait ici : «Les gens ont parfois le sentiment que nous nous chicanons à longueur de journée[...] — il
parle de l'Assemblée nationale. Je suis conscient qu'il y a trop de mauvaise foi partisane au salon bleu — alors,
peut-être qu'il fait une admission. C'est un fléau à combattre — il
a raison. En même temps, il faut relativiser. En commission
[parlementaire] — "en
commission", dis-je — les
parlementaires tentent d'arriver à la
meilleure législation possible en déposant des amendements et en faisant
réfléchir le ou la ministre qui
dépose le projet de loi, mais souvent les élus négocient pour les différents
amendements — il y a
un amendement ici qui est devant nous — afin d'avoir la loi la plus
claire et pertinente possible.»
Je termine
sur le livre de Lucien Bouchard, qui a inspiré le ministre. C'est un livre que
j'ai aimé beaucoup lire, parce que je
suis arrivée en politique après 30 ans de carrière à Radio-Canada, mais je me
considérais comme une jeune politicienne. Alors, j'ai lu le livre de Lucien
Bouchard et ensuite je l'ai donné. J'ai fait ce qui lui est arrivé. Quelqu'un
lui a donné le livre, ça l'a inspiré
pour écrire le sien. Je l'ai donné à un stagiaire de la Fondation
Jean-Charles-Bonenfant qui était avec
moi. On avait fait une rencontre avec Lucien Bouchard. Et Lucien Bouchard, dans
son livre Lettres à un jeune politicien, écrit — et je pense que le message devrait être
vraiment porteur ce matin : «En affaires, comme en politique, il
faut chercher à résoudre les conflits par des solutions rationnelles. À cet
égard, le fait de diaboliser l'adversaire ou l'opposant
ne conduit qu'à la polarisation des positions et à l'impasse. Si jamais tu
exerces des fonctions électives, je t'adjure d'éviter l'excès de partisanerie. L'engagement pour une cause
s'accommode mal du fanatisme et du rejet de l'autre. Tu te rendras compte qu'il n'y a rien de plus humain
dans tous les sens que la politique. Elle poussera à leurs limites tes
meilleures dispositions et jettera une lumière crue sur tes
déficiences.»
Alors, M. le
Président, je pense que nous avons ici devant nous un projet de loi qui va
nuire considérablement à la
réputation du Québec à l'international, nous avons un projet de loi qui suspend
les libertés individuelles de citoyens québécois.
M. le Président, on nous taxe de toutes sortes de qualificatifs. On parle de la
charte québécoise des droits et libertés,
pas de la charte à Trudeau, là, comme dirait M. le leader de la deuxième
opposition. Pas la charte à Trudeau, là, c'est notre charte à nous. C'est ce
qui va se passer ici, dans cette enceinte. On va sortir d'ici en ayant suspendu
les libertés individuelles des
Québécois, en ayant modifié la Charte des droits et libertés dans une procédure
de bâillon, ce qui ne s'est jamais
vu. M. le Président, Montesquieu a écrit : «C'est une expérience éternelle
que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser...» L'esprit
des lois, 1748. Merci.
Le Président (M. Picard) :
Merci, Mme la députée d'Acadie. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : M. le Président,
ça fait déjà près de 45 minutes que nous avons entamé nos travaux, et, écoutez,
les collègues du Parti libéral présentent leurs positions, j'en conviens,
cependant on n'a pas beaucoup étudié d'articles. Et, comme le voulait le député de Jean-Lesage,
nous invitant à aller jusqu'à l'article 27, si on veut se rendre là, il
faudrait commencer par étudier précisément les articles.
Vous me
permettrez quelques commentaires, M. le Président, sur l'intervention de la
collègue d'Acadie. Le premier commentaire que j'ai, M. le Président, et
ça m'a profondément choqué tout à l'heure, M. le Président : les propos qu'elle a tenus à l'endroit des fonctionnaires, je
crois que ça mérite des excuses à leur endroit. Et il n'est pas question de
soupirer, Mme la députée de l'Acadie. Je
pense que les propos que vous avez tenus n'étaient pas conformes à la hauteur
des fonctions que vous avez occupées dans
l'État québécois et je pense que ce genre de propos là auprès des membres
de la fonction publique n'ont pas leur
place. Alors, je pense qu'il serait bien de présenter vos excuses aux membres
de la fonction publique qui m'accompagnent. Premier élément.
Le Président (M. Picard) :
On s'adresse à moi, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Pas
d'excuses?
Une voix : ...
Le Président (M. Picard) :
Oui, Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme
Rizqy : Le ministre — à l'article 35 — impute des intentions à ma collègue la
députée d'Acadie. Il a qualifié les propos de violents. Nous lui
demandons de se rétracter, car les propos n'étaient aucunement violents.
Le Président (M. Picard) :
...question de règlement. Continuez, M. le ministre, toujours dans la plus
grande prudence.
M. Jolin-Barrette : Deuxièmement, M.
le Président...
Le
Président (M. Picard) : Et
je vous encourage, à nouveau, de revenir sur l'amendement du député de
Jean-Lesage.
M.
Jolin-Barrette :
Deuxièmement, M. le Président, la députée d'Acadie, semblerait-il, elle a lu le
livre que j'ai écrit en janvier 2018. Alors, je suis heureux de savoir
qu'elle a lu ce que j'ai écrit. D'ailleurs, je souhaite informer cette Chambre que tous les profits du livre sont
versés à une maison de répit qui vise les enfants handicapés atteints du
spectre de l'autisme ou avec une déficience intellectuelle. Je pense que c'est
important de le souligner.
Dans le cadre
de ce livre-là, je fais appel à la démocratie, je fais appel aussi au travail
des parlementaires parce que je valorise le rôle des parlementaires. Et
moi-même, lorsque j'étais dans l'opposition, j'ai participé activement à l'étude de projets de loi en déposant des
amendements qui étaient constructifs, en faisant avancer les travaux. Vous
prendrez à témoin la précédente
ministre de la Justice. Les amendements que je déposais visaient à bonifier le
projet de loi. Je vous réfère aux débats parlementaires que nous avons
eus au cours des quatre dernières années.
La députée de
l'Acadie fait référence à 2008, lorsqu'elle a fait modifier la Charte des
droits et libertés de la personne pour inclure l'égalité entre les
femmes et les hommes, ce qui est une bonne modification, M. le Président.
• (13 h 20) •
Or, le Conseil du statut de la femme, qui était
présidé, à l'époque, par Mme Christiane Pelchat, je crois, qui a été
députée libérale de Vachon entre 1985 et 1994, je crois, et qui était
présidente du Conseil du statut de la femme, en
2007 écrivait, dans le rapport du Conseil du statut de la femme relativement
aux recommandations... et le Conseil du statut de la femme disait :
«Le conseil recommande que les représentantes et les représentants ou les
fonctionnaires de l'État ne puissent arborer
ni manifester des signes religieux ostentatoires dans le cadre de leur
travail.» Alors, le Conseil du statut de la femme recommandait
l'interdiction complète du port de signes religieux. Or, suite à la commission Bouchard-Taylor, M. le Président, et M. Bouchard nous l'a dit lorsqu'il
est venu en commission parlementaire, ça a été une erreur du Parti libéral de
ne pas prendre acte des recommandations et de ne pas les incorporer.
On a parlé également,
M. le Président, de Claude Ryan, de Robert Bourassa, de
l'utilisation des dispositions de dérogation, notamment en lien avec la
décision de la Cour suprême dans l'arrêt Ford. Pour des fins de pédagogie :
l'utilisation des dispositions de dérogation que nous faisons actuellement est
tout à fait conforme aux balises et aux enseignements édictés dans l'arrêt
Ford. Deuxièmement, lorsqu'on nous dit : Écoutez, le premier ministre
Bourassa a utilisé la disposition de dérogation uniquement après que la Cour
suprême ait invalidé une partie de la loi 101, bien, écoutez, M. le Président, c'est vrai dans ce
cas-là, mais ce n'est pas vrai dans les autres cas où M. Bourassa a eu
recours à la disposition de dérogation de façon préventive comme nous
l'avons... À des dizaines et des dizaines de reprises, M. Bourassa a eu recours à cette disposition de dérogation. Je
pense que c'était important d'informer les parlementaires de ce fait-là,
hein? C'est fondamental.
Tous les
partis politiques, qu'ils aient été péquistes ou libéraux, ont utilisé à des
dizaines de reprises les dispositions de
dérogation prévues aux chartes. Ce n'est pas nouveau. Et l'utilisation des
dispositions de dérogation est légitime pour l'État québécois parce que
ça fait partie du compromis de la Constitution de 1982, qui d'ailleurs n'a pas
été signée ni ratifiée par l'État québécois.
Cela étant dit, en termes de négociation avec les provinces, on a voulu prévoir
un aspect où le Parlement conservait
sa prérogative, et c'est justement ce que nous faisons dans le cadre du présent
projet de loi. C'est aux
parlementaires de décider de quelle façon les rapports entre l'État et les
religions vont s'organiser. C'est tout à fait légitime de le faire. Et
la disposition de dérogation est là dans la loi pour être utilisée.
D'ailleurs,
le premier ministre Chrétien disait : «Une des grandes réalisations du
rapatriement de la Constitution en
1982 était l'insertion, dans la Charte canadienne, de la clause de dérogation.»
Le premier ministre du Canada, à l'époque où lui-même, il était ministre
de la Justice, lorsqu'on lui demande rétrospectivement qu'est-ce qui a été un
bon coup relativement à la Loi
constitutionnelle de 1982, il répond : C'est l'insertion, à l'intérieur de
la charte des droits et libertés, de
la disposition de dérogation. Alors, si un des pères de la Loi
constitutionnelle de 1982 dit : La disposition de dérogation est là pour être utilisée, et ancien premier
ministre du Canada et ancien ministre de la Justice du Canada... je pense que
nous sommes autorisés et nous sommes
légitimisés d'utiliser ces dispositions de dérogation là, parce que, M. le
Président, on est face à un concept
important ici : Est-ce que c'est aux tribunaux à décider de quelle façon
les rapports entre l'État et les religions s'organisent ou c'est plutôt aux
parlementaires? Nous, on croit que c'est aux parlementaires à décider,
qui ont été dûment élus par la population québécoise sur cet engagement-là
précisément. Je comprends que, du côté du Parti
libéral, on souhaite faire une absence de prise de décision, on souhaite tout
le temps pousser le fardeau aux tribunaux, que ça soit le juridique qui
choisit.
M. le Président, on est face à un concept même
de démocratie : Qui doit être imputable?
Une voix : ...
Le
Président (M. Picard) :
Mme la députée, tout à l'heure, il y a eu beaucoup de minutes pour
l'opposition. Là, le ministre peut parler aussi sur l'amendement, là. Ce
n'est pas...
Une voix : ...
Le Président (M. Picard) :
J'essaie. Je balance le temps le plus possible, là. Je pense qu'il y a eu
plusieurs interventions du côté de l'opposition.
Une voix : ...
Le
Président (M. Picard) :
Il n'y avait pas d'appel au règlement, à ma... Vous pouvez continuer, M. le
ministre.
M.
Jolin-Barrette : Merci.
Alors, l'utilisation de la disposition de dérogation à la fois pour la charte
québécoise et la Charte canadienne,
elle est autorisée, elle est légitime, elle n'est pas là uniquement pour être
présente, elle est là pour être utilisée, et, de façon préventive comme nous le
faisons, ça a été réalisé à plus de 105 reprises par les gouvernements
successifs.
Ce que nous
faisons dans la Loi sur la laïcité, c'est que nous donnons des droits à tous
les Québécois, le droit d'avoir des services publics laïques, M. le
Président, le fait d'amener des droits collectifs, M. le Président. Il s'agit
d'avoir un équilibre entre les droits individuels et les droits collectifs, M.
le Président. Alors, lorsqu'on cite Robert Bourassa, M. le Président, qui a déjà été assis à la gauche de mon pupitre, je
pense que l'on doit le citer correctement, M. le Président, et on doit
rappeler l'histoire constitutionnelle d'une façon appropriée, M. le Président.
Dans le
dernier mandat du premier ministre Couillard, la députée de l'Acadie a voté à
plusieurs reprises pour voter sur des
lois qui utilisaient les dispositions de dérogation. À l'époque, sous le
gouvernement Charest, ça a été la même occasion, M. le Président.
Le Président (M. Picard) :
Madame... question de règlement?
Mme
St-Pierre :
...voté pour enlever des droits, on a voté pour protéger des droits.
Le
Président (M. Picard) : Mme
la députée, ce n'est pas une question de règlement, mais vous pourrez
intervenir à nouveau tout à l'heure. M. le ministre, vous pouvez
poursuivre.
M.
Jolin-Barrette : Écoutez, M. le Président, on insère des droits à la Loi sur la laïcité, on fait en sorte de
garantir des services publics laïques pour tous les Québécois.
Le droit à un
État laïque, c'est un droit collectif, M.
le Président. Et la disposition de
dérogation, elle est là pour être utilisée notamment pour s'assurer d'un
équilibre entre les droits individuels et les droits collectifs. Il est
légitime, et c'est dans l'intérêt
public, de faire en sorte que la laïcité devienne une valeur fondamentale de la société
québécoise. Et ça, je n'ai pas
entendu, M. le Président, la députée de l'Acadie sur ce point-là, à
savoir qu'on vient insérer, dans la Charte des droits et libertés de la personne, la notion de laïcité.
Est-ce qu'on est en désaccord avec le fait d'inscrire officiellement que l'État québécois, il est
laïque, et qu'on sépare la religion de l'État québécois?
M. le Président, on reproche au gouvernement d'utiliser la disposition de dérogation, mais la
question qui se pose aussi, c'est : Est-ce que le Parti libéral est contre le fait de dire qu'au Québec les services publics
doivent être donnés à visage découvert et reçus à visage découvert?,
parce que le recours à la disposition de dérogation, que nous utilisons aujourd'hui, nous permettra de nous assurer que les services publics vont être
donnés à visage découvert et reçus à visage découvert. Est-ce que le Parti libéral est contre ça? Parce que la députée de l'Acadie elle-même a voté
en faveur du projet de loi n° 62, et cet article-là, qui garantit le fait qu'au Québec
les services publics sont donnés et reçus à visage découvert, bien, cet
article-là, il est suspendu.
Est-ce que c'est ça, la notion de la démocratie
pour la députée de l'Acadie, M. le Président?
Le Président (M. Picard) : ...s'il vous
plaît. Aussi vite que ça?
M.
Jolin-Barrette : Bien, je me plie à vos demandes, M. le Président.
Le
Président (M. Picard) : O.K. C'est beau. Mme la députée
d'Acadie.
Mme
St-Pierre : Je pense qu'il faut faire un petit peu de
pédagogie aussi, parce que, M. le Président, sur la question du visage découvert, avec ma collègue la députée
de Notre-Dame-de-Grâce, on avait préparé un projet de loi avant l'arrivée
au pouvoir du Parti québécois, et c'était un projet de loi qui était sur la
notion de visage découvert. Et ce projet de loi est arrivé à la suite de nombreux avis que nous avions eus des
fonctionnaires, que je respecte beaucoup, nous disant que c'était impossible, sans appliquer la clause
dérogatoire et suspendre les libertés individuelles, d'y aller autrement ou de
façon plus large. Le visage découvert
passait le test de la charte parce qu'il s'agissait de questions de sécurité,
d'identification et de communication. C'était la fenêtre que nous avions
pour pouvoir adopter ce projet de loi. Malheureusement, avant l'arrivée du gouvernement de Mme Marois, on n'a pas pu faire
adopter le projet de loi que ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce et moi avions préparé. Mais c'était un projet de loi
qui faisait avancer cette question-là, mais faisait avancer cette question-là dans le respect des
libertés individuelles, dans le respect de la charte. Il n'y a pas de
hiérarchisation de droits dans la charte. Ce sont les tribunaux qui
doivent déterminer si une personne a été discriminée ou non.
Puis, M. le
Président, je peux vous assurer que ce qui nous a toujours motivés et ce qui
motivait l'équipe qui travaillait avec nous
et ce qui motivait les fonctionnaires, ce qui motivait l'équipe de juristes qui
travaillaient avec nous, c'était de
nous guider dans le respect de la Charte des droits et libertés, c'était
toujours le respect de la Charte des droits et libertés. On nous disait : Si vous avancez dans telle direction,
vous ne respectez plus la charte. Si vous allez dans une autre direction, vous ne respectez plus la charte. La
fenêtre était très, très, très mince, mais c'était la fenêtre que nous avions.
M.
le Président, le ministre a fait référence à l'avis du Conseil du statut de la
femme, que nous avions étudié avec beaucoup
d'intérêt, oui, que nous avions regardé, et nous l'avions regardé avec les
juristes. Nous l'avions regardé avec les
juristes, M. le Président, l'avis du Conseil du statut de la femme, et avec
Mme Christiane Pelchat et on arrivait toujours à cette notion que
le respect des droits fondamentaux... le respect des libertés individuelles.
Puis, pour ce qui est
de la laïcité de l'État, l'État est laïque, on l'inscrit ici, dans la loi, mais
elle s'adresse aux organismes. Les individus doivent avoir la possibilité de
s'exprimer dans le sens qu'ils veulent s'exprimer.
M.
le Président, ce qui est dommage dans tout cet exercice-là, ce qui est triste
dans cet exercice-là, c'est que nous allons procéder par bâillon à un
amendement de la charte québécoise des droits et libertés, qui s'est inspirée,
dans sa conception, dans sa rédaction, de la
convention des Nations unies sur les libertés et les droits des individus.
C'est absolument un moment qui est difficile, parce que...
• (13 h 30) •
Le Président
(M. Picard) : ...je vous demanderais de conclure, parce
que vous arrivez à votre 20 minutes...
Mme St-Pierre :
J'arrive à la fin. Bon. Parfait.
Alors,
M. le Président, je conclus, parce qu'il y a avoir de mes collègues qui vont vouloir prendre la
parole, mais mon message,
c'est : si on croit fondamentalement aux droits et libertés de la
personne, on ne doit pas adopter ce projet de loi là, et c'est le
message que j'envoie à tous les députés de l'Assemblée nationale.
Le
Président (M. Picard) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Intéressant, M. le Président, même très
intéressant, parce qu'on dit, écoutez : On va modifier la Charte des
droits et libertés de la personne. Du côté du Parti libéral, on nous dit ça. Et
on nous dit : On est en désaccord parce que la modification, elle
est effectuée par la procédure législative d'exception.
Sortons
de la procédure législative d'exception, M. le Président, ayons la réflexion
suivante — et c'est
ce à quoi je convie les députés du
Parti libéral : aux articles 17 et 18 du projet de loi n° 21, où
on vient modifier la Charte des droits et libertés de la personne, ça se
lit ainsi : La Charte des droits et libertés de la personne (chapitre
C-12) est modifiée par l'insertion, après le troisième alinéa du préambule, de
l'alinéa suivant :
«Considérant
l'importance fondamentale que la nation québécoise accorde à la laïcité de
l'État...»
M.
le Président, est-ce que le Parti libéral est en désaccord avec cette
proposition? Est-ce que la société québécoise accorde une importance fondamentale à la laïcité de l'État? Moi, j'avais
compris des discussions que j'avais eues avec la députée de
Marguerite-Bourgeoys que le Parti libéral était d'accord avec ça.
Deuxièmement :
L'article 9.1 de cette charte est modifié par l'insertion, dans le premier
alinéa et après «valeurs démocratiques,», «de la laïcité de l'État».
Que
les droits et libertés fondamentaux s'interprètent notamment en prenant en
compte la laïcité de l'État dans l'interprétation des droits fondamentaux,
le Parti libéral est contre ça? Ça me surprend un peu, M. le Président, parce que le Parti libéral a voté en faveur des
articles 1 et 2, qui viennent dire que l'État québécois est laïque et
que... sur les principes de ce que
constitue la laïcité de l'État. Alors, première contradiction au niveau de
l'argumentaire et de la rhétorique du Parti libéral.
Est-ce que la députée
de l'Acadie est contre le fait qu'on inscrive la laïcité de l'État dans la
Charte des droits et libertés de la
personne? C'est ça, la question de fond, M. le Président. Il y a la forme, mais
il y a le fond. Le fond des choses, M. le Président.
Deuxièmement,
ce qui est intéressant, M. le Président, c'est lorsqu'on souligne le passé. La
députée de l'Acadie nous dit : Écoutez, à l'époque où j'étais
ministre de la Condition féminine, j'ai, en collaboration avec la députée de Notre-Dame-de-Grâce, qui était à l'époque ministre
de la Justice, en 2010, déposé un projet de loi, n° 94, dans lequel on
souhaitait qu'il y ait le visage à découvert.
Et on nous dit, M. le Président : Écoutez, on n'a pas pu l'adopter à cause
des élections. Or, M. le Président, le projet de loi a été déposé le
24 mars 2010, les élections générales relativement à la
40e législature ont eu lieu le 4 septembre 2012, quasiment deux
ans et demi après. Il y a eu une prorogation, M. le Président, ça a été
redéposé le 24 mars 2011. M. le Président, il y avait du temps en
masse pour faire adopter la loi. Lorsqu'on
nous dit : Écoutez, nous, on est en faveur du visage découvert, bien, dans
ce gouvernement-là, ils auraient pu faire adopter le projet de loi s'il
y avait vraiment eu une volonté politique.
Mais après ça
passons, M. le Président, quelques années plus tard. La députée de l'Acadie
nous a parlé de la charte des valeurs
qui avait été présentée par le précédent député de Marie-Victorin, et, lorsque
le Parti libéral est arrivé au pouvoir en 2014 avec le premier ministre
Couillard, ils ont déposé, par le biais de la députée de Gatineau et ministre
de la Justice de l'époque, le projet
de loi n° 62, pour lequel... les députés, mes collègues, ont voté en
faveur du projet de loi n° 62, et
qui prévoyait une disposition d'interdiction de donner des services publics
avec le visage couvert et de recevoir des services publics avec le visage couvert, notamment pour des questions de
sécurité, d'identification, de communication et d'interaction. Tout le monde s'en souvient, je crois, M. le Président,
tout le monde s'en souvient. Or, la Cour supérieure du Québec a suspendu
l'article 10 de la loi n° 62 relativement à l'obligation de donner et de
recevoir des services à visage découvert.
Alors, d'un
côté, on me dit : Écoutez, c'est nous qui avait eu cette idée-là, mais, à
partir du moment où les tribunaux disent :
Écoutez, non, au Québec, on suspend ça, les tribunaux n'acceptent pas la
volonté de l'Assemblée nationale de faire
en sorte qu'au Québec les fonctionnaires de l'État québécois, dans le cadre de
leurs fonctions, aient le visage à découvert et que les citoyens, lorsqu'ils se présentent pour recevoir un service,
pour des questions de sécurité, d'identification... Et, même, la position du Parti libéral, c'est pour des
questions de communication et d'interaction. Bien, la cour nous dit : Non,
on n'accepte pas ça.
Or, c'est
un minimum dans notre société. Qu'est-ce qui arrive quand les tribunaux sont en
contravention avec l'intention du législateur? Ne devrions-nous pas utiliser la
disposition de dérogation? Parce qu'au Québec je crois que, dans notre société, c'est le minimum du minimum. Lorsqu'on
demande un service public, pour des questions de sécurité ou d'identification, on devrait se découvrir le visage. Et ça,
j'aimerais ça entendre les députés du Parti libéral là-dessus. J'aimerais ça
savoir s'ils sont d'accord avec moi pour qu'au Québec les fonctionnaires
de l'État québécois travaillent à visage découvert. Je connais la position de
Québec solidaire, qui ont changé d'avis, mais je voudrais savoir précisément la
position du Parti libéral, et surtout une ancienne ministre de la Condition
féminine, en lien avec cette proposition-là.
Est-ce que,
M. le Président, est-ce que l'Assemblée nationale peut faire des choix? Est-ce
que les députés élus démocratiquement
par l'Assemblée nationale peuvent faire des choix? C'est ça, la question. Et je
veux vraiment savoir de la part du
Parti libéral est-ce qu'ils sont d'accord avec le fait que les fonctionnaires
de l'État québécois doivent travailler à visage découvert et que les citoyens qui demandent des services publics,
pour des questions de sécurité et d'identification, doivent se découvrir
le visage?
Ça, c'est la
base dans notre société pour moi. Je veux savoir si on travaille sur la même
base, le Parti libéral et moi.
Le Président (M. Picard) :
Merci. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
M. le Président, pour répondre très précisément à la question du collègue
ministre, non, on ne travaille pas sur les mêmes bases, puis je vais
répondre à ses trois points.
Le premier, amender la charte en y excluant le
port de signes religieux, l'article 6, et utiliser les deux clauses dérogatoires pour mettre de côté complètement les
38 articles qui ont été lus par mon collègue de Pontiac, ça, c'est par l'usage d'une clause dérogatoire qui vient faire
deux choses que ses exemples n'ont jamais... ne rencontraient jamais ces
conditions-là de façon cumulative, à savoir brimer des droits et libertés de
façon pertinente.
Alors, quand
on brime des droits et libertés de façon permanente, quand on brime des droits
et libertés de façon permanente, M. le Président, ça, c'est une première
au Québec, ça, c'est faire fi de nos chartes, et ça, c'est tout à fait assimilable à dire : La charte, oubliez-les.
Qu'ils l'amendent ou qu'il y ait la clause
dérogatoire utilisée comme ça. Sur
son premier point, je pense que, clairement,
force lui est de constater que ce n'est pas anodin. Et je reviendrai sur
l'exemple de Bourassa tout à l'heure.
Deuxième élément, il a fait référence — je suis content qu'il fasse référence à
ça — au
projet de loi n° 94 déposé par
la collègue de Kathleen Weil... excusez-moi, je ne veux pas la nommer, collègue
de la ministre de la Justice à l'époque, députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Le projet de loi n° 94, il dit : Bien, il avait le loisir de faire
passer le projet de loi. Pourquoi se
sont-ils arrêtés en si bon chemin? Pourquoi vous pensez, M. le Président, qu'il
n'a pas été adopté, le projet de loi
n° 94? Parce que ça aurait pris un bâillon pour le faire passer, M. le Président,
et nous, on ne mange pas de ce pain-là. Nous, il n'était pas question
d'aller... M. le Président, d'aller sacrifier des droits et libertés...
Des voix : ...
• (13 h 40) •
M. Tanguay :
Je vois que ça les fait réagir, des fois. C'est toujours intéressant quand ça
fait réagir, c'est parce que le coup
vient de porter, le coup vient de faire mal. Quand il y a, M. le Président...
Lorsqu'on parle des droits et libertés, tu ne fais pas ça sur bâillon. Qu'il me
nomme un seul exemple où des droits et libertés ont été brimés par un
gouvernement libéral, sous le
bâillon, avec clause «nonobstant», puis je me rendrai à leurs arguments. Un
seul argument, c'est du un pour un.
Qu'est-ce
qui est devant nous? Brimer les droits et libertés, les limiter sous un
bâillon, clause «nonobstant». C'est la
tempête parfaite, on n'a jamais fait ça, et c'est là que, sur son deuxième
point, lorsqu'il dit : Bien, le p.l. n° 94,
vous auriez pu faire ça, brimer les
droits ou limiter les droits... pas les brimer, les limiter, vous auriez pu
faire ça sans l'unanimité, vous auriez
pu faire ça sur bâillon puis avec clause
«nonobstant», bien non, M. le
Président, on ne fera pas ça. Et
c'est là où on diffère. Parce qu'il
posait la question : En quoi c'est si différent? Bien, c'est là, c'est une
condition fondamentale, M. le
Président, on ne fera pas ça.
Troisième
point, il dit, et je vais le citer, puis il me corrigera si je le cite mal, il
dit : Les tribunaux, en contravention avec le législateur. C'est à peu près ça qu'il a dit : Les
tribunaux, en contravention avec le législateur. L'un des fondements mêmes de notre démocratie, M. le Président, c'est justement de respecter les trois ordres de pouvoir. Certes, il y a
l'exécutif qui a essentiellement loisir, comme les autres collègues
députés, de déposer des projets de loi, mais il fait appliquer les lois. Ça,
c'est l'exécutif dans, essentiellement, ses deux grandes fonctions. Le
législatif est d'adopter les lois, et le judiciaire
est de tester si les lois respectent l'entièreté du corpus législatif. Ça
inclut la Constitution, ça inclut nos chartes canadiennes et charte québécoise des droits et libertés, puis ça inclut le rapport
et l'interprétation par rapport aux autres lois.
Lorsque vous dites... Et je me rappelle de
l'échange que le ministre avait eu avec Patrick Taillon, professeur d'université avec lequel je suis allé sur les
bancs d'école, M. le Président, à l'Université
de Montréal. Puis, l'ironie du sort,
je suis allé... Nous étions trois dans la section D. Il y avait
Patrick Taillon, même année de scolarité, Université de Montréal, en droit. On était assis, imaginez-vous donc...
Dans la même classe, il y avait Patrick Taillon, universitaire, qui est pour le projet de loi n° 21, et il y avait
Philippe-André Tessier, qui est président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse,
puis moi, j'étais assis à l'autre bout.
Alors, M. le Président, comme on peut voir, M. Taillon, qu'est-ce qu'il est venu dire,
Patrick, Patrick Taillon, il est venu
dire, et ça, ça m'a extrêmement surpris, il est venu dire : Vous faites
bien de... je ne dirai pas «bâillonner», ça serait trop fort, bâillonner les tribunaux, mais vous
faites bien de — je
dirais ça de même, c'est plus respectueux, — empêcher le débat judiciaire, en quelque
sorte court-circuiter — je
ne pense pas que je suis dérogatoire en disant ça — le débat judiciaire, parce que les tribunaux ont, à
sa face même, selon leur interprétation, l'interprétation de Patrick Taillon, à
laquelle le ministre de la Justice... le ministre... — pardon,
c'est peut-être un beau lapsus, là, je ne sais pas si je traduis un désir — le
leader ministre de l'Immigration, il acquiesçait en ce sens-là. Ils ont dit :
Écoutez, les tribunaux ont, en quelque sorte,
mal agi par le passé. Ils n'ont pas respecté l'intention du législateur. Ils
ont contredit ce que le législateur voulait. Et à ça on pourrait ajouter l'exemple de Robert Bourassa qui a utilisé
la clause «nonobstant», puis je vais y arriver dans une minute, et donc c'est notre droit le plus
absolu de dire : Tous les articles substantiels de la charte canadienne,
de 7 à 15, tous les articles substantiels de la charte québécoise, 1 à
38, nous allons, de façon...
Deux
conditions, je reviens là-dessus, je le mets au défi, deux conditions qui ne
sont pas suggestifs puis objectifs, là,
comme la définition des signes, deux conditions qui sont cumulatives :
qu'il y ait eu un projet de loi, déposé par un gouvernement libéral, qui
brimait les droits et libertés, qui impliquait la clause «nonobstant» de façon permanente, et que c'était
annoncé ainsi, et qui a été adopté sous bâillon, M. le Président. C'est trois conditions. Il ne pourra pas m'en trouver un seul. Et ça, c'est fondamentalement ce qui ne doit pas être fait. On veut, M. le Président... Puis je pourrai lui laisser du temps pour réagir là-dessus.
Il a fait référence à Robert Bourassa, à Patrick
Taillon. Moi, je vais faire référence à celui qui, dans la même commission, la même consultation... qui est Pierre
Bosset, qui est passé tout de suite après Patrick Taillon et qui, lui, est
venu faire la preuve par a plus b que,
depuis 1975, toutes les modifications à la charte québécoise des droits et libertés, sur les articles substantifs, de 1 à 38, ont tous été faits de
façon unanime, sauf deux exemples.
Le premier
exemple, c'était une reformulation d'un droit existant, le droit des parents
sur l'éducation religieuse et morale de leurs enfants. Il y avait un
député qui était contre. Il y avait une limitation, un député qui était contre.
Et le deuxième, imaginez-vous donc, il y a
deux députés qui ont voté contre : l'ajout d'un motif de discrimination,
qui était l'orientation sexuelle.
Bon, il y a deux députés à l'époque qui ont voté contre. Dieu merci, les 120 quelques autres, ou les
110 autres, ou peu importe combien ils
étaient en 1977... je pense qu'ils étaient 110 en 1977, les 108 autres, ou
peu importe combien ils étaient, ils
ont voté en faveur. Ça, de tout temps, si on ne veut pas briser ce contrat
moral historique qui lie, qui participe de notre société québécoise...
C'est quoi,
être Québécois, M. le Président? C'est de faire consensus, c'est de nous
rassembler, nous assembler. Et ça,
honnêtement, M. le Président, au-delà de la ritournelle... Puis je sais que le
ministre, il a une certaine habilité — puis on peut y être nous également, à nos heures — à la ritournelle, mais, au-delà de ça, M. le
Président, c'est fondamental... Puis
j'en appelle à l'intelligence du ministre et à son honnêteté intellectuelle. On
ne peut pas dire, M. le Président, que ça, c'est anodin. Ça, il va le reconnaître, ce n'est pas banal. On ne peut
pas dire qu'il eut été... il eut été encore plus garant de l'avenir de
sa loi n° 21, qu'il veut pérenne et qu'il veut
rassembleuse, il la veut pérenne, il la veut rassembleuse, qu'il n'y ait pas de clause dérogatoire, qu'il y
ait un équilibrage qui se fasse par les tribunaux, qu'il n'y ait pas de
bâillon.
Puis, coudon,
la loi 101, ce n'était pas un débat qui était beaucoup moins intense que
ça. La loi 101, ils ont siégé jusqu'au 27 août 1977 puis ils l'ont
adoptée. Puis, la loi 101, puis je terminerai là-dessus, parce que je veux
laisser, en toute honnêteté, le ministre répliquer à ça, la loi 101, M. le
Président, Pierre Bosset est venu nous raconter... puis je vais utiliser
ses mots, je vais être plus efficace dans le peu temps qui m'est imparti. Il
nous a raconté l'anecdote, qui n'en est pas
une, mais qui est très révélatrice, suivante quand il est passé ici. Alors, il
parlait de la loi 101. Alors, on est au milieu des années 70,
au printemps 1977.
«À l'époque, la charte des droits était en
vigueur depuis à peu près un an et elle prévoit, à l'époque, qu'elle a préséance sur toutes les autres lois adoptées à
l'avenir. Arrive le premier projet de loi sur la langue française, qui prévoit
qu'il va s'appliquer malgré la charte québécoise en vigueur depuis quelques
mois. Beaucoup de réactions négatives dans le public et ici même, à l'Assemblée.» Ça, je pense que c'est
copier-coller de ce qu'on vit présentement sur le p.l. n° 21.
Je reviens à la
citation. «Et le premier ministre de l'époque, un certain René Lévesque,
demande à son leader parlementaire de retirer
le projet de loi, ce qu'il a fait. Et il a dit, à l'époque, M. Lévesque, que ce
n'était pas la trouvaille du siècle. Je le cite. Alors, le projet de loi 1 a été retiré, et, quelques semaines plus
tard, le projet de loi 101 a été déposé, qui respecte la primauté de la charte des droits. C'est ce qui a permis, je
crois, de favoriser l'adoption de la loi 101 à l'époque.» Fin de la
citation. Épisode admirablement décrit par M. Bosset.
M.
le Président, je suis allé sortir un extrait des débats de l'Assemblée
nationale à l'époque sur le projet de loi 101. Et on peut y lire,
je l'ai cité ce matin, durant la période des questions... je ne l'ai pas cité,
mais j'ai fait référence à Marc-André Bédard. Bien, j'invite tous les
collègues, puis le ministre en particulier, d'aller voir les galées au 23 mars 1977, où, dans un débat, Fernand
Lalonde, député libéral de Marguerite-Bourgeoys, défendait bec et ongles les
droits et libertés. Vous souriez, M. le Président. Vous ne l'avez pas
connu, j'espère? O.K.
Alors, que disait-il,
le ministre de la Justice, M. Bédard, à l'époque? Il disait, je le cite, là, au
texte : «...une préoccupation louable à l'effet que les dispositions de la
Charte des droits et libertés de la personne soient respectées, préoccupation, d'ailleurs, que je partage
également, je dois lui dire, et il le sait, que la loi est présentement en
discussion. Je voudrais lui souligner
que j'ai porté à l'attention du ministre d'État au Développement culturel,
chargé de la rédaction de cette loi, les dispositions de la charte. Je pense
que la meilleure garantie qu'aucune des dispositions de cette charte ne sera violée est le souci continuel, le respect continuel dont notre parti a toujours
fait état vis-à-vis les droits des minorités.» Fin de la citation.
Alors,
qu'on ne vienne pas nous donner le débat de la charte, on vient d'en faire la
preuve par a plus b, M. le Président.
Puis
j'aimerais entendre le ministre de façon précise. Peut-il, après avoir entendu
ça, sur la Charte de la langue française, son débat, son adoption, peut-il
continuer de faire un parallèle quand on dit qu'il y a un ministre de la Justice qui, à l'époque, s'était tenu debout puis avait
dit : Moi, c'est important, on retire la clause «nonobstant», et le premier ministre Lévesque également, il avait dit : On retire ça, «ce n'est pas
la trouvaille du siècle», pour le citer au texte, et faire en sorte que le ministre de la
Justice avait dit : On va s'assurer de respecter les droits et libertés?
Il
y a eu la loi 101, qui était contestée dans sa première mouture, M. le Président, parce qu'il était interdit d'afficher autre chose qu'en français. C'était l'exclusivité.
L'arrêt Ford, en 1988, ce n'est pas moi qui vais l'apprendre au ministre,
a dit : Bien non, ça ne tient pas la route, il y a la liberté
d'expression. Parfait. Robert Bourassa a mis sur pied la clause «nonobstant», qui était prévue pour deux choses, M. le Président, qui était prévue de façon très précise, ponctuelle, non pérenne. C'était le temps de trouver un accord, un
accommodement raisonnable, je dirais, socialement. Et ça a été
fait en 1993 par la loi 87, si ma mémoire est fidèle, qui faisait
en sorte qu'on passait d'affichage exclusif en français à prépondérance du français. Exit, la clause
«nonobstant», exit le... il n'y avait pas eu de bâillon là-dessus non plus, M. le Président. Il y avait eu un débat et, depuis ce temps-là,
il y a une paix sociale, si bien qu'il y a eu des gouvernements successifs du Parti québécois qui n'ont jamais remis ça en
question.
• (13 h 50) •
Ça,
ça devrait être l'étalon de mesure du ministre, l'étalon de mesure de la ministre de la Justice, comment faire
en sorte que... Puis je le sais, là, je ne veux pas leur prêter de mauvaises intentions, mais force leur est de constater qu'à
l'heure où on se parle, à l'heure où on se parle, M. le Président, il y a un
équilibre social. Ils veulent faire un pas de plus, ils veulent faire la
laïcité, ils veulent faire, ils veulent faire selon... C'est correct, ils ont
le droit, ils ont été élus. Mais on ne peut
pas, M. le Président, bâillonner les oppositions puis, à titre... sans être
méchant, je vous dirais, bâillonner les tribunaux. Parce que, si l'on veut rassembler, puis je suis sûr que le
ministre veut ça, là, ne trouve-t-il pas — j'aimerais ça l'entendre là-dessus — qu'il gagnerait à rassembler, via, entre
autres, au départ, le plus possible les oppositions en ne leur imposant pas un
bâillon, puis en faisant en sorte qu'il y ait des débats, puis en faisant en
sorte, M. le Président... Puis qu'il
ne vienne pas dire : Ah! bien là, non, non, on n'arrivera jamais à
s'entendre. Il a déposé, ça ne fait pas une semaine, un amendement-phare, puis j'y reviendrai tantôt
s'il me reste du temps, sur l'article 6, où il a essayé une définition qui
tient plus ou moins la route, puis c'est le premier ministre qui en a
fait les frais. Bien, quand ça va être les directeurs d'école qui vont en faire les frais, ça va être des chicanes puis des
contestations judiciaires. Ça fait des semaines, depuis le dépôt du projet de loi, pas depuis l'article par
article, ça fait tout juste 32 heures, qu'on le souligne qu'il va y avoir de la
chicane.
Il
va y avoir, je vous dirais, aussi, M. le Président, puis ça, il faut le prendre
très au sérieux, il va y avoir des drames humains. Il va y avoir des drames humains. Je ne suis pas en train
d'annoncer une catastrophe, mais, quand une personne de bonne foi, en son âme et conscience, devra
faire le choix, pour avoir une promotion ou pour déménager, parce qu'elle va
passer d'une commission scolaire à l'autre, de dire : Bien, si j'accepte,
moi, ça sera au prix de mes convictions... Puis
le ministre le met dans sa définition de l'article 2 : tu as le droit
d'avoir, au Québec... — ça, au moins ça, je vais lui donner — tu as
le droit d'avoir une liberté de conscience et de religion. Ça, pour avoir une
promotion, pour avoir une promotion ou pour
déménager, M. le Président, il faudra le faire au prix de sa conviction
religieuse. Puis qu'on ne vienne pas
me dire, de grâce, là, de grâce... Quand on a des convictions, puis une
conscience, puis une croyance religieuse, on ne peut pas mettre ça au garde-robe de 9 heures à 5 heures, du
lundi au vendredi, là. Ça ne tient pas la route, M. le Président.
Alors, en tout
respect, je pense que j'avais des points importants, pertinents, j'aimerais
l'entendre là-dessus, s'il peut y aller de façon systématique, parce que c'est
important.
Le Président (M. Picard) : M. le député de LaFontaine, avant de céder la
parole, je vous confirme qu'il y avait 110 députés en 1977. M. le
ministre.
M. Tanguay :
Et que vous n'étiez pas là.
Le Président (M. Picard) :
Et je n'étais pas là. M. le ministre, c'est à vous.
M.
Jolin-Barrette : M. le Président, le député de LaFontaine nous a beaucoup parlé de la loi 101. Dois-je lui rappeler que sa formation
politique a voté contre la
loi 101? C'est un peu ironique, M.
le Président, d'entendre le Parti libéral faire des parallèles entre le projet de loi n° 21
et la loi 101 et de se réclamer de la loi 101, alors qu'ils ont tout
fait, M. le Président, pour que la loi 101 ne s'applique pas. Ils
ont tout fait, M. le Président. D'ailleurs, lorsque le premier ministre Bourassa, suite à l'arrêt
Ford, a utilisé la disposition de dérogation, il y a des ministres importants
du gouvernement libéral de l'époque qui ont quitté, qui ont démissionné. Alors,
je ne pense pas que le Parti libéral peut se réclamer de l'héritage de la loi 101. Honnêtement, M. le
Président, l'histoire a démontré que, grâce au Parti québécois, grâce à la ténacité de Camille Laurin, l'État québécois est
français. Puis ça, je pense qu'il faut rendre hommage à Camille Laurin
là-dessus, M. le Président. Je ne pense pas que le Parti libéral peut se
réclamer de l'héritage de Camille Laurin. Je pense que le Parti québécois peut le faire, je pense que
les nationalistes peuvent le faire, je pense que le Parti libéral ne peut pas
s'en réclamer. Alors, avec respect, M. le
Président, je pense que les arguments rattachés à la loi 101, lorsqu'ils
émanent du Parti libéral, ne sont pas très pesants, M. le Président.
D'un autre
côté, M. le Président, le député de LaFontaine nous dit : Écoutez, jamais
le Parti libéral n'a adopté une loi
sous bâillon qui faisait en sorte de restreindre les droits. À mon souvenir, le
projet de loi n° 78 limitait la liberté de manifester. C'est mon souvenir. Je crois que le
député de LaFontaine n'était pas encore élu à cette époque-là, il a été élu
quelques mois après.
(Interruption)
M.
Jolin-Barrette : Je vais
continuer, M. le Président. Alors, je pense qu'il y a des nuances à apporter
dans les propos du député de LaFontaine.
Autre point intéressant, le député de LaFontaine
dit : Ce n'est jamais arrivé qu'on déroge aux articles 1 à 38. Or, il y a un précédent créé par le Parti libéral,
où on a dérogé, pas de 1 à 38, on a dérogé de 1 à 139, M. le Président, dans
la Loi sur les jurés, qui a été adoptée en
1976. M. le Président, il y en a, des exemples. Et cette loi-là est toujours en
vigueur.
C'est arrivé
deux fois également que le Parti libéral a utilisé une clause dérogatoire et a
eu recours au bâillon pour faire adopter la loi, incluant tous les
articles de la charte québécoise.
M. le
Président, je comprends que le Parti libéral est en désaccord avec la loi. Or,
le député de LaFontaine n'a pas répondu à ma question introductive que
je posais au Parti libéral relativement au visage à découvert. Je n'ai pas
entendu le début d'un commencement d'une réponse, à savoir : Est-ce que le
Parti libéral est d'accord avec le fait d'utiliser
la disposition de dérogation pour garantir qu'au Québec les services publics
sont donnés et reçus à visage découvert? Ça, c'est fondamental et c'est
un des points centraux du projet de loi n° 62, un des points centraux.
J'aimerais revenir également, M. le Président,
sur une comparaison qu'a faite la députée de l'Acadie tout à l'heure. Elle a dit : Le nationalisme de la
CAQ est comparable au nationalisme de l'Union nationale. Or, c'est tout le
contraire, M. le Président.
Mme
St-Pierre : ...je
citais un article de Mme Lysiane Gagnon.
M. Jolin-Barrette : Ah! Bon. On
citait Mme Gagnon.
Le
Président (M. Picard) : Ce
n'est pas une question de règlement, mais on comprend que Mme la députée citait un article. Vous pouvez continuer.
M.
Jolin-Barrette : On citait
Mme Gagnon. Eh bien, je dirais qu'on fait tout le contraire. M. Duplessis a
installé un crucifix ici, à l'Assemblée nationale, qui d'ailleurs est toujours présent. Et je ne pense pas que c'est une
surprise pour personne que, suite à l'adoption du projet de loi, à la suite de la motion que j'ai présentée, le crucifix sera déplacé,
sera retiré de l'enceinte du salon bleu pour
être mis en valeur ailleurs dans le parlement.
Alors, c'est tout le contraire qu'on fait,
M. le Président. On sépare formellement l'État des religions. Alors, on n'est
pas du tout dans la logique de M. Duplessis en lien avec la religion. On
fait avancer la société québécoise pour faire en sorte de s'assurer que l'État
québécois soit laïque.
Et, M. le Président, c'est la dernière occasion
qu'on siège ici et où le crucifix est présent.
Alors, M. le
Président, j'ai bien écouté le député de LaFontaine. Cela étant dit, je ne
partage pas ses arguments. Et nous devons nous rappeler que l'objectif que nous
avons notamment d'insérer la laïcité dans la Charte des droits et
libertés de la personne, ça vise à donner des droits, à garantir des droits à
l'ensemble des Québécois.
Et je n'ai
pas eu ma réponse à savoir est-ce qu'on était d'accord, du côté du Parti
libéral, avec cette proposition de modification à la Charte des droits
et libertés de la personne pour inscrire la laïcité comme valeur fondamentale
de l'État québécois. Est-ce que, pour le
Parti libéral, la laïcité de l'État, c'est une valeur importante qui doit
gouverner notre société? C'est ce à
quoi on est invité aujourd'hui, ce à quoi on devrait dialoguer. On a récité la
Charte des droits et libertés de la personne, mais il va y avoir un
amendement, à cette charte, aujourd'hui. Et je pense que cet amendement, il est
approprié et justifié, et représente l'état de fait dans lequel nous vivons et
que nous souhaitons vivre.
Alors, est-ce
qu'il y a un député libéral, de l'autre côté, qui est en désaccord avec le fait
d'inscrire la laïcité de l'État dans la Charte des droits et libertés de
la personne?
L'autre
élément, M. le Président, sur les propos du député de LaFontaine, il indique
que la charte québécoise a été modifiée
à l'unanimité, sauf à deux occasions. Or, ce n'est pas exact, Mme la Présidente.
Alors, je demeure disponible, Mme la Présidente, pour continuer à
avancer sur le projet de loi n° 21.
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre.
M. Tanguay : Oui, Mme la
Présidente...
La Présidente (Mme
Soucy) : Allez-y.
M. Tanguay :
Beaucoup de choses, beaucoup de choses. Il vient d'affirmer... Je vais prendre
par la dernière, là, puis on va remonter dans ce qu'il a affirmé.
Peut-il me
citer un exemple, autre que les deux exceptions, par rapport à modifier la Charte
des droits et libertés? J'ai souligné
les deux exceptions. J'ai très bien précisé que c'était en lien avec les
articles substantiels 1 à 38, que mon collègue de Pontiac a pris le
temps de lire tantôt. Est-ce qu'il y a un autre exemple?
La Présidente (Mme
Soucy) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Dans la
globalité de la modification de la charte, il y a eu plus de deux
modifications.
• (14 heures) •
M. Tanguay :
O.K. Là, Mme la Présidente, là, là, là, c'est la fin des écus. Il faut savoir
ce sur quoi on parle. Projet de loi
n° 21, clause «nonobstant», articles 1 à 38. Moi, je veux comparer du comparable au comparable,
pas une clause «nonobstant» sur des articles 39, 40 et autres. Je l'ai très bien
dit, puis je me fie sur l'honnêteté intellectuelle du collègue,
du leader, j'ai dit que, lorsqu'il y avait
des clauses «nonobstant» sur 1 à 38, ce n'est arrivé qu'à deux reprises
que ce n'était pas unanime et je les ai citées. Est-ce que j'ai eu tort?
Est-ce que je fais erreur sur les articles 1 à 38, oui ou non?
La Présidente
(Mme Soucy) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Sur l'ensemble
de la modification de la charte, il y a eu plus de deux modifications.
M. Tanguay : Sur les articles 1
à 38, est-ce que j'ai raison? Est-ce que mon affirmation est exacte?
M. Jolin-Barrette : Sur l'ensemble
de la charte, il y a eu plus de deux modifications.
M. Tanguay : O.K. Mme la
Présidente, je veux laisser les gens
juger. On l'a eue, notre réponse. La réponse est que je dis vrai sur les articles 1 à 38, les substantifs, ceux qui sont précisément visés par la clause
«nonobstant», et il n'a pas pu
me contredire là-dessus, premier élément.
Deuxième
élément, il dit — on
va y aller systématiquement : Les libéraux, ils ont voté contre la
loi 101 à l'époque, et il nous a
fait le reproche. Vous, aujourd'hui, 27 août 1977, est-ce que
vous votez pour la loi 101, vous, M.
le ministre, oui ou non?
La
Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député de LaFontaine. Je vous rappelle de vous adresser à la
présidence.
M. Tanguay : Vous avez
raison, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Soucy) : Et, M. le ministre, vous n'avez rien à
ajouter?
M. Tanguay : Il ne répond pas. Mme la Présidente, je le sais très bien
pourquoi il n'aurait pas voté pour. On le sait très bien
pourquoi il n'aurait pas voté pour. Puis je lui donne une
autre occasion de répondre. Là, il n'a pas répondu sur la première, je vais
voir... puis, je veux m'assurer, là... je ne veux pas qu'il dise : Aïe! Le député
de LaFontaine, il est allé trop vite. Je veux y aller à son rythme. Lui nous a fait le reproche,
les libéraux, l'expression anglaise, il ne l'a pas dit, je paraphrase, «shame on you», à peu près
ça, vous avez voté contre la loi 101, la mouture d'août 1977. Je lui donne
une autre occasion. Aujourd'hui, là, devant lui, la mouture 1977, août 1977, comme député de cette
Assemblée nationale, est-ce
qu'il aurait fait comme tous les députés libéraux, les valeureux députés
libéraux, et aurait voté contre la loi 101 ou aurait voté pour la
loi 101?
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci, M. le député. M. le ministre,
voulez-vous répondre à la question?
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, le député
de LaFontaine n'assume pas l'héritage de son parti. Est-ce qu'il a un malaise avec la façon
dont le Parti libéral a voté? Moi, j'assume l'héritage de mon parti, qui a été
créé en 2011.
M. Tanguay : Mme la
Présidente...
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, on n'arrête pas de nous
dire que le Parti libéral, ça fait 150 ans qu'il existe...
Des voix : ...
M. Jolin-Barrette : ...152,
excusez, 152, il est temps d'assumer.
M. Tanguay : Mme la
Présidente, Mme la Présidente, oui. Mme la Présidente, le ministre, on l'a tous vu, les gens jugent à la maison, il n'a pas pu me répondre, il
n'a pas pu dire, puis ça aurait été en ligne logique de son intervention : Bien oui, moi, j'aurais voté comme les députés du Parti québécois, j'aurais fait contrairement à tous les députés libéraux. Je le
sais très bien, Mme la Présidente, pourquoi il aurait voté contre,
imaginez-vous donc. Là, je vous mets de côté l'arrêt
Ford, qui disait que c'était affichage unilingue français. C'est correct, il y a
eu le débat, puis le débat des... un des motifs de contestation à l'époque, la Cour suprême a donné raison
aux députés libéraux d'avoir voté contre ça, et il y a un
rééquilibrage, puis le Parti québécois n'a même pas changé ça, c'est
prépondérance du français, premier élément.
Là, le ministre,
là, il va dire : Ah! ça y est, touché. Il va me dire : Touché. Je
vais vous parler de l'arrêt Blaikie.
Touché,
hein? L'arrêt Blaikie, qu'est-ce
qu'il dit, l'arrêt Blaikie? L'arrêt
Blaikie faisait en sorte, Mme la
Présidente, qui était une chose qui était tout à fait contradictoire à
notre société de droit, la Constitution canadienne, j'y
vais de mémoire, je pense que c'est l'article 133
ou 132 de la Constitution canadienne, puis c'est bien juste si le ministre
ne va pas me dire : C'est 133, parce qu'il sait très bien, fait en sorte qu'au Parlement
on peut s'exprimer en anglais. La charte
québécoise, première mouture,
interdisait à tout collègue de s'exprimer en anglais ici, et il n'y avait
qu'une seule version valide des lois,
c'était la version française.
Pire que ça, Mme la Présidente, ou autre
élément, la justice québécoise devenait, du jour au lendemain, exclusivement en français, exclusive en français.
Ça ne tenait pas la route. Et même M. Guy Rocher, Guy Rocher, je me
rappelle, j'ai tout ça à mon bureau, les citations,
avait confirmé qu'il s'agissait de quoi? Il s'agissait d'un électrochoc.
Camille Laurin, quand il l'a mis dans sa loi 101, il savait qu'il allait
être cassé par la Cour suprême parce qu'il avait très bien lu l'article 133 de la Constitution. Puis les témoignages
de l'époque, Guy Rocher l'a reconnu à l'époque, il y avait même le collègue Fernand Lalonde qui avait
témoigné dans un reportage — j'ai les citations, Mme la Présidente, qu'il
me demande de les déposer, je vais aller les
chercher, ça va me faire plaisir de les déposer — où Guy Rocher disait : Ça
faisait partie de la stratégie, on avait besoin d'un électrochoc, il fallait se
faire casser par la Cour suprême. C'est ce qui
est arrivé. Et là, évidemment, au sortir de cette décision-là, Camille Laurin,
avec le leader du gouvernement à l'époque, avait fait une pièce de théâtre, avait fait une conférence de presse en
disant : C'est épouvantable. Et Camille Laurin, pour le
paraphraser, avait dit : Je dois boire jusqu'au fond la lie de ce verre.
Mme la
Présidente, il le savait très bien, c'était déjà arrangé, et ça, c'était un des
éléments. Il le savait, il l'avait dit,
Guy Rocher l'a dit. Il serait ici, il nous le dirait, ça faisait partie d'un
électrochoc, faire casser par la Cour suprême, puis après ça les gens pourront dire : Aïe! C'est important, puis
ça va relancer le débat. Ça, Mme la Présidente, je pense que c'est clair, clairement, puis j'aimerais
entendre le ministre là-dessus, lui donner... de façon précise, là, puis qu'il
n'essaie pas de renvoyer la balle ailleurs, là, qu'il réponde de façon
précise, comme je le fais sur ses arguments.
La
Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le député de LaFontaine. Pour votre information, il vous reste
30 secondes de droit de parole. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, le député de LaFontaine est si
sûr de cela. Il met des intentions, des mots dans la bouche de précédents
ministres, de précédents parlementaires. M. Rocher est venu en commission
parlementaire, c'est dommage que le député de LaFontaine ne lui ait pas
posé la question à cette occasion.
M. Tanguay :
Alors, sur mon 30 secondes, Mme la Présidente, il y avait trois éléments à
défaire. On vient de défaire le un, on vient de défaire le deux, puis là on va
défaire le trois. Le ministre, il a cité la loi n° 78, qui, effectivement,
avait été adoptée sous bâillon, mais mal lui
en prit de citer la loi n° 78, il n'y avait pas de clause dérogatoire
dedans. Alors, son exemple, Mme la Présidente, là, fin de la citation,
point.
La
Présidente (Mme Soucy) :
Et ça met fin à votre droit de parole également. Merci, M. le député de
LaFontaine.
Alors,
est-ce qu'il y a d'autres interventions? Sinon, on va voter sur l'amendement.
Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme Rizqy : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Je vois qu'il y a aussi le ministre de l'Éducation, alors, s'il
y a consentement, j'aimerais ça que lui aussi puisse être en mesure de
répondre, puisque plusieurs articles, dont notamment
l'article 6, touchent le réseau de l'éducation de façon plus
prépondérante. Alors, est-ce qu'il y aurait consentement pour que le
ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur puisse répondre?
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, il n'y aura pas de consentement
parce que j'ai rarement des échanges avec
la députée de Saint-Laurent et je m'ennuie de nos échanges, alors je souhaite
pouvoir échanger avec elle. Honnêtement, je me sens un peu boudé parce que d'habitude elle ne vient pas dans mes
commissions parlementaires, alors je veux profiter de tout le temps que
nous avons ensemble.
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Mme la députée.
Mme Rizqy :
Je vois qu'il n'y a pas seulement les oppositions qui sont bâillonnées,
finalement. Est-ce que vous allez empêcher le ministre de l'Éducation et
de l'Enseignement supérieur de bien représenter son réseau, de pouvoir apporter de l'éclairage sur l'application du
projet de loi n° 21 dans le réseau de l'éducation? C'est une
question, je pense, qui est assez pertinente, et plusieurs personnes
nous suivent, dont notamment les différentes centrales syndicales qui
représentent plusieurs enseignants mais aussi des étudiants et étudiantes qui
sont présentement sur les bancs universitaires,
qu'ils apprécieraient avoir la voix du ministre qui, lui, aura toute la tâche d'appliquer votre projet de loi.
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme la Présidente, le ministre responsable
de la loi, c'est le ministre de l'Immigration, alors en l'occurrence,
c'est moi pour l'instant.
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci.
Mme Rizqy :
Donc, une fois que le projet de loi est déposé par le ministre de
l'Immigration, il ne lui appartient plus,
il appartient à l'ensemble des parlementaires, incluant notamment le ministre
de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, qui aura la lourde tâche... en
plus de devoir conjuguer avec différents autres chambardements dans le réseau
d'éducation, il devra aussi jouer et
conjuguer avec le projet de loi n° 21. Or, je me permets
d'insister parce qu'ici c'est clair
que c'est le ministre de l'Éducation qui en aura plein les bras à devoir régler
les différents enjeux dans le réseau de l'éducation qui auront été faits
grâce au projet de loi n° 21 écrit par le ministre de
l'Immigration.
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, Mme la Présidente, je peux référer la
députée de Saint-Laurent à l'article 28 du projet de loi n° 21 : «Jusqu'à ce
que le gouvernement prenne un décret désignant le ministre responsable de
l'application de la présente loi et
de la Loi favorisant le respect de la neutralité religieuse de l'État et visant
notamment à encadrer les demandes d'accommodements pour un motif religieux dans
certains organismes (chapitre R-26.2.01), le ministre de l'Immigration,
de la Diversité et de l'Inclusion est responsable de l'application de ces
lois.»
Et à
l'article 31 : «Le ministre désigné par le gouvernement est
responsable de l'application de la présente loi.»
Alors, Mme la
Présidente, moi, depuis le début, je souhaite dialoguer avec la députée de
Saint-Laurent, mais je ne comprends pas pourquoi elle ne veut pas me
parler. Honnêtement, je pensais d'être un bon accompagnateur pour la conduite
d'un débat.
• (14 h 10) •
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Mme la députée.
Mme Rizqy : Je voulais simplement m'assurer qu'il puisse
reposer sa voix et surtout de ne pas avoir l'étiquette du triple
o : omniscient, omniprésent, et vous savez le dernier. Vous le cherchez
encore?
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, je ne sais pas c'est
quoi, le dernier. J'aimerais ça qu'on me dise quel est le dernier o.
Est-ce que c'est «oh là là»?
La Présidente
(Mme Soucy) : Alors, on va revenir sur le sujet, s'il vous
plaît, de l'amendement à l'article 6.
Mme Rizqy : M. le
ministre de l'Immigration, vous avez
eu l'occasion d'entendre, lors des consultations, la CSQ, la FAE ainsi que la
CSN, qui représentent plusieurs enseignants, des milliers d'enseignants. Qu'avez-vous
retenu de vos échanges avec eux?
M. Jolin-Barrette : Plusieurs
choses, plusieurs choses. Parlons de la CSN, rencontre très intéressante avec
le président de la CSN, M. Létourneau. Alors, saviez-vous que la CSN était
en faveur de l'interdiction du port de signes religieux,
hein, pour les personnes en situation d'autorité jusqu'à ce qu'il y a deux mois
environ? Pendant des années, la CSN, qui avait consulté ses membres,
était en faveur de l'interdiction. Or, le projet de loi n° 21
a été déposé, et là il y a un changement de
cap. On a demandé s'ils avaient consulté leurs membres, et la réponse à cette
question-là, c'est non.
Je sais que
la démocratie syndicale préoccupe beaucoup le député de Jean-Lesage. Je l'inviterais
d'ailleurs à faire une visite à la
CSN pour voir comment les règles démocratiques s'appliquent. Je sais que le
député de Gouin est familier aussi là-bas. Mais ça m'apparaît
particulier, ce changement d'orientation de la CSN par rapport à la position de
cette organisation-là.
Donc, la CSN
était en faveur de l'interdiction du port de signes religieux durant des années
et puis, tout d'un coup, ils ont
changé de bord, et les membres n'ont pas été consultés. Est-ce que
le rôle de représentation de la CSN, dans le cadre de la présentation de ces recommandations en commission parlementaire sur le projet
de loi n° 21, a été avalisé par
ses membres? La réponse à cette
question-là, lorsqu'on l'a posée, c'est non. Alors, il y a une
question à se poser sur la consultation qui a été tenue à l'intérieur de
cette organisation syndicale là.
Mme Rizqy : ...entre la CSN, la
FAE et la CSQ, ça se résume à cela?
M. Bérubé : Question de
règlement, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Soucy) : Oui, M. le député.
M. Bérubé :
Article 211, sur la pertinence : «Tout discours doit porter sur le
sujet en discussion.» Il y a un amendement du député
de Jean-Lesage. Nous attendons patiemment le moment de déposer nos amendements,
nous sommes ici pour ça. On est à
l'article 6 sur 32. On a des propositions très concrètes à déposer au
bénéfice de l'Assemblée. Donc, il me semble qu'à tout le
moins, sans vouloir presser personne, on pourrait au moins disposer des
propositions qui ont été faites en
bonne et due forme par les gens qui ont travaillé là-dessus et ensuite avancer.
C'est le souhait du Parti québécois et c'est notre façon de contribuer
au débat.
La Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Tel que je vous l'ai demandé
tantôt, votre bonne collaboration, Mme la députée de Saint-Laurent, M. le
ministre. On va rester sur le sujet, et là on est en train de débattre sur l'amendement
de l'article 6. Alors, si vous avez
d'autres questions, je vais vous céder le droit de parole, sinon on va voter
sur l'amendement.
M. Tanguay :
Non, non, Mme la Présidente, sur le rappel au règlement, vous avez vu que les
échanges sont tout à fait pertinents.
L'article 6, c'est le socle du projet de loi n° 21,
c'est l'interdiction des signes religieux. L'interprétation de la
pertinence, 211, se fait de façon large et libérale. Et M. le... madame...
Des voix : ...
M. Tanguay :
Oui, tout à fait. Et, Mme la Présidente, je suis tout à fait attristé, et je
fais écho des propos de mon collègue du Parti québécois, malheureusement, c'est
ça, un bâillon, c'est qu'on n'a pas le temps nécessaire de faire notre
travail. C'est malheureusement ça, un bâillon.
La
Présidente (Mme Soucy) :
M. le député de LaFontaine, je comprends ce que vous dites, mais moi, je vous
dis que nous sommes sur l'amendement de
l'article 6. Alors, je comprends qu'on a une certaine latitude, qu'on
peut... mais il ne faut quand même pas exagérer, et on doit revenir, à
un moment donné, à l'amendement.
Alors, si
vous avez quelque chose à ajouter au sujet de l'amendement de l'article 6,
vous pouvez y aller, sinon on va la mettre aux voix ou on va passer à un
autre intervenant. Oui, M. le député de Nelligan.
M. Derraji : Un petit point,
Mme la Présidente. Je pense que l'intervention de ma collègue la députée de Saint-Laurent a toute sa place parce qu'elle parle
de l'applicabilité de l'article 6, notamment au niveau du domaine qu'elle
maîtrise, et c'est pour cela qu'elle interpelle le ministre. Je pense que nous
sommes encore dans l'article 6, parce que c'est très important, et nous sommes toujours dans l'amendement du
député, l'article... le critère du premier paragraphe a préséance sur le critère du deuxième paragraphe.
Donc, je pense que l'intervention de ma collègue députée de Saint-Laurent
est pertinente, et ça répond exactement à l'article 6.
La Présidente
(Mme Soucy) : Je comprends, M. le député de Nelligan.
Comme je dis, on se concentre sur l'amendement.
Avez-vous quelque chose à ajouter sur l'amendement? Mme la députée de
Saint-Laurent, la parole est à vous.
Mme Rizqy :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Comme vous le savez, l'article 6 plus
l'amendement et les questions de
critères, ils font référence aussi à l'annexe II, et vous comprenez qu'on
parle des enseignants, et d'autant plus qu'on a l'occasion d'avoir le ministre de l'Éducation et de
l'Enseignement supérieur, et je voulais savoir quels seront les critères,
comment qu'ils seront appliqués pour les enseignants. Alors, est-ce que
quelqu'un peut nous répondre, soit le ministre
de l'Éducation, qui est déjà présent ici, pour savoir comment les critères
seront appliqués aux enseignants, par exemple dans la classe de
maternelle quatre ans?
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, Mme la Présidente, relativement à
l'application de la loi, dans un premier temps, on le voit à l'article 6,
il y a une définition. Et, juste pour rappeler, le député de LaFontaine, tout à
l'heure, m'a reproché d'avoir déposé un amendement qui définissait ce
que constitue un signe religieux. Or, c'est précisément à la demande des collègues des oppositions, qui m'ont demandé de
définir ce que constitue un signe religieux, que j'ai déposé un amendement.
Alors, vous voyez l'état d'esprit dans lequel je suis, dans un état d'esprit
d'ouverture, de dialogue...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Bien, je suis comme ça, moi, M. le député de
LaFontaine. Je veux que ça marche, je veux collaborer avec vous, donc
j'essaie, j'essaie, de mon côté, alors...
La Présidente
(Mme Soucy) : ...à la présidence. Oui, Mme la députée
de...
Mme David :
En toute honnêteté intellectuelle, est-ce que je pourrais rappeler au ministre
que nous avons aussi déposé un amendement concernant des lignes
directrices? Et j'étais là, et le collègue vous en a parlé, parlé, parlé et reparlé, en toute collaboration, pour bonifier
votre projet de loi. Vous nous apportez un amendement, on vous en apporte
un. Ce qui est bon pour l'un doit être bon
pour l'autre. Ce qui est bon pour pitou est bon pour minou, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys. M. le ministre.
Des voix : ...
M. Jolin-Barrette : Je vais prendre les conseils du député de
Pontiac, Mme la Présidente. Effectivement, c'est vrai que la députée de Marguerite-Bourgeoys ou Bourassa-Sauvé — ah! la députée de Marguerite-Bourgeoys — a déposé un amendement qui souhaitait
faire en sorte qu'il y ait des lignes directrices. Or, ce n'est pas un
amendement sur la définition. Je n'ai eu
aucun amendement, de la part du Parti libéral, sur la définition d'un signe
religieux. On me dit : La définition,
elle est incompréhensible, alors qu'elle est très, très claire. Mais je n'ai eu
aucune proposition de bonification relativement à la définition d'un
signe religieux. Ça aussi, il faut avoir l'honnêteté de le dire.
Alors, je reviens, Mme la Présidente, à la
question de la députée de Saint-Laurent. Mais, avant d'y revenir, Mme la Présidente, je voudrais faire une autre
intervention relativement au commentaire qui a été dit par le député de
LaFontaine. On nous dit : L'article 6, c'est le socle du projet de
loi. Le socle du projet de loi, c'est les articles 1 à 3, qui font en sorte d'insérer la laïcité de l'État,
hein, dans nos lois, de faire en sorte que, pour la première fois, on vient
définir ce que constitue la laïcité
de l'État. Qu'est-ce que la laïcité de l'État? C'est prévu à
l'article 1 : «L'État du Québec est laïque.» L'article 2, vous avez la définition. 3, c'est les
exigences rattachées aux institutions de la laïcité de l'État, incluant, incluant les enseignants, parce que l'expression
de la laïcité de l'État s'exerce à travers notamment les enseignants aux
niveaux primaire et secondaire des écoles publiques.
• (14 h 20) •
Alors,
il est important de faire une mise en contexte, Mme la Présidente.
Premièrement, les enseignants qui portent un signe religieux à la date du dépôt du projet de
loi pourront conserver leur droit acquis au port de signes religieux. Ça, c'est
important de le souligner. Pour toutes les autres personnes, dans le cadre de
leur fonction d'enseignant, il ne sera pas
possible de porter des signes religieux, en fonction de la définition des signes
religieux prévue à l'article 6 du projet de loi tel qu'amendé, c'est-à-dire : «Au sens du présent article, est
un signe religieux tout objet, notamment un vêtement, un symbole, un bijou, une parure, un accessoire ou un
couvre-chef qui est — et là on a eu le premier critère, qui est subjectif, donc on se place dans les souliers de la personne qui porte le signe
religieux :
«1° soit porté en lien avec une conviction ou
une croyance religieuse.»
On a eu un
débat qui a duré plusieurs, plusieurs heures sur quelle est cette analyse
subjective là aux yeux de la personne
en fonction de ses croyances, de sa foi en son âme et conscience. Donc, je sais
que la députée de Saint-Laurent comprend,
elle, ce que ça signifie, une analyse subjective du critère en fonction
notamment de la croyance sincère en la liberté de religion. C'est le
critère qui s'applique.
Le deuxième
critère, qui est alternatif, c'est un critère de nature objective, alors :
«Soit raisonnablement considéré comme référant à une appartenance religieuse.»
Donc, lorsqu'on parle de la personne raisonnable, on a eu abondamment de discussions avec le député de Jean-Lesage à ce
niveau-là, qui est la personne raisonnable. Donc, on voit que c'est la personne fictive qui a été déterminée par la Cour
suprême. C'est un critère d'analyse objective. Alors, un critère ou l'autre.
Donc, pour répondre à la question de la
députée de Saint-Laurent, la personne qui porte un signe religieux va devoir se
conformer à l'article 6 en conformité de la loi.
La Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de
Saint-Laurent, avez-vous quelque chose à ajouter?
Mme Rizqy : Certainement, Mme
la Présidente.
La Présidente
(Mme Soucy) : Allez-y.
Mme Rizqy :
Merci énormément au ministre, parce qu'effectivement il faut un beau topo au
niveau juridique de son projet de
loi. Merci. Mais ma question était pratico-pratique : Comment, dans nos
écoles, l'article 6, conjugué avec l'annexe II, sera appliqué,
notamment dans la classe de maternelle quatre ans?
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Donc,
les enseignants dans les écoles publiques sont visés. Que ce soit auprès des
quatre ans, des cinq ans, troisième année, sixième année, c'est le statut
d'enseignant qui compte, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci. Mme la députée.
Mme Rizqy : Vous n'avez pas
répondu à ma question. Au niveau pratique, comment vous allez appliquer? Comment vous allez donner force de loi à votre
projet de loi n° 21? En fait, Mme la Présidente, est-ce que, récemment,
vous avez visité, peut-être, une école avec le ministre de l'Éducation,
récemment?
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, moi, je visite des écoles dans
ma circonscription. Le ministre de l'Éducation est député de Chambly. Savez-vous, on n'est pas très loin, on est
voisins de comté. Et d'ailleurs je dois dire que c'est un bon voisin de comté, Mme la Présidente.
Honnêtement, on n'a pas de chicane de voisinage, ça va très, très bien.
D'ailleurs, c'est dans une des plus
belles MRC du Québec, la MRC de La Vallée-du-Richelieu. Il ne faut pas oublier,
Mme la Présidente, la MRC des
Maskoutains aussi. Ça aussi, c'est une belle MRC. D'ailleurs, deux
municipalités de mon comté sont dans la MRC des Maskoutains.
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci.
Mme Rizqy :
La question... Je voulais savoir est-ce que, récemment, vous avez fait un tour
d'école avec le ministre. Je n'en doute pas, que c'est un bon voisin. Ça, je
n'en doute pas. Mais, pratico-pratique, êtes-vous allé sur le terrain pour voir
comment vous allez être en mesure d'appliquer le projet de loi n° 21?
La Présidente
(Mme Soucy) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Au niveau de l'application de la loi, c'est les
articles 12 et suivants, c'est la plus haute autorité
administrative qui est chargée de l'application de la loi, donc, que ce soit
dans le réseau de l'éducation et dans les autres
réseaux qui sont visés par l'interdiction de porter un signe religieux, que ce
soit pour les policiers, pour les agents de services correctionnels. Pour les juges, ça, dans ce cas-ci, c'est le
Conseil de la magistrature, on l'a vu à l'article précédent...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Non, non, mais je vous explique. Ce n'est pas
différent pour le réseau de l'éducation que les autres réseaux. C'est la plus haute autorité administrative qui est
chargée de l'application de la loi, comme ça se fait au niveau des conditions de travail. L'interdiction
de porter un signe religieux va être insérée relativement aux conditions de
travail des employés, ça fait partie des
conditions de travail des employés. Ce n'est pas différent de si un enseignant
porte un chandail «J'aime le Parti
libéral», ce qui serait surprenant, mais ça pourrait arriver. Donc, est-ce
qu'un enseignant a le droit de porter, dans les heures de classe, un
chandail qui est écrit «J'aime le Parti libéral» ou «Je n'aime pas le Parti libéral»?
C'est positif ou négatif, là, hein? À
ce moment-là, il n'est pas permis de
le faire, et donc la direction prend les mesures appropriées.
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci. Mme la députée, avez-vous quelque
chose à ajouter?
Mme Rizqy : Mme la
Présidente, je peux vous garantir que
j'aurai toujours, à votre... à votre question,
pardon, oui, des questions à répondre au ministre, de toute évidence.
Premièrement, je vais répondre à sa dernière intervention par rapport à un chandail d'un parti
politique, qui pourrait être un beau chandail libéral. Je vais citer quelqu'un,
hein, vous l'avez eu durant votre commission, Jocelyn Maclure, de l'Université
Laval : «L'argument que vous avancez n'est toutefois pas convaincant. Il
est vrai que la fonction publique doit
être neutre politiquement. Un employé de l'État applique des lois qui
ont fait l'objet de contestations politiques avant d'être
adoptées, et ils doivent être neutres par
rapport à ces controverses. La
religion, pour sa part, n'intervient pas dans le processus de formulation et d'adoption
des lois. L'analogie entre les signes
religieux et les signes politiques
néglige cette différence pourtant cruciale.» Ça, c'est le professeur de
l'Université Laval qui vous répond.
Mais, moi, ma
question, s'il
vous plaît, M. le ministre, car elle est très importante — et
vous comprenez que je suis porte-parole en matière d'éducation et d'enseignement supérieur, et c'est pour cela que j'essaie vraiment
de cadrer mes réponses en ce
sens : Au niveau pratique, dans la classe de maternelle quatre ans, est-ce que vous allez donner suite à la recommandation
de la vice-première ministre d'envoyer la police dans les écoles?
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bon, dans
un premier temps, je pense qu'il est important
de rectifier les choses. La vice-première
ministre a fait une correction
relativement à ses propos, et je pense que le fait de rappeler ça ici, Mme la Présidente, c'est un faux argument, considérant que la vice-première ministre a eu l'occasion de rectifier les propos. Alors,
je pense qu'au niveau de l'application de
la loi c'est très, très clair, et, honnêtement, ça ne donne pas
grand-chose faire ce que fait la
députée de Saint-Laurent en rappelant les propos de la ministre de la Sécurité publique.
Vous savez, M. Maclure nous dit, dans son
mémoire, que la liberté d'expression religieuse est au-dessus de l'expression
de la liberté politique. C'est son opinion, mais ce n'est pas mon avis...
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci. Mme la députée de Saint-Laurent.
M. Jolin-Barrette : ...
Mme Rizqy : Bon, vous avez
terminé votre réponse.
La Présidente
(Mme Soucy) : Mme la députée de Saint-Laurent.
M. Jolin-Barrette : ...et ça voudrait dire, notamment...
et ça voudrait dire, Mme la
Présidente, que M. Maclure
fait une hiérarchisation des droits. Et
j'aimerais savoir si la députée de Saint-Laurent est d'accord, si au Québec
on devrait avoir une hiérarchisation des droits, oui ou non.
La Présidente
(Mme Soucy) : Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme Rizqy : Mme la Présidente,
je vais recommencer encore ma question, car, de toute évidence, il tente d'esquiver parce qu'il sait parfaitement qu'au niveau pratique le projet de loi n° 21 n'arrivera pas à être appliqué. Et c'est pour
ça que je voulais avoir une réponse de quelqu'un qui se soucie... de toute façon, en apparence,
mais j'ai encore très confiance qu'il
se soucie de l'éducation, et c'est pour ça que j'interpelle le ministre
de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur, car c'est lui qui est sur le terrain, et que c'est lui qui va devoir
parler aux commissions scolaires, parler aux directions d'école, et c'est lui qui sait déjà, présentement, qu'ils doivent faire face à différents enjeux, dont notamment une
réforme majeure avec les maternelles
quatre ans, une pénurie
d'enseignants, et là, maintenant, vous lui envoyez aussi dans sa cour l'application du projet de loi n° 21. Alors, je demande au ministre de l'Éducation
et de l'Enseignement supérieur, avec
le consentement... Parce que, de toute évidence, M. le ministre de
l'Immigration ne veut pas répondre à ma question au niveau de l'application du projet de loi n° 21 et de
l'article 6, avec son annexe II, alors je m'adresse au ministre qui, lui, a déjà été enseignant et qui sait qu'au niveau
pratique il y a, évidemment, ici un enjeu. Alors, est-ce que le ministre de
l'Éducation et de l'Enseignement supérieur peut nous dire qui va appliquer la
loi et comment ils vont l'appliquer?
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Ça me
désole un peu, Mme la Présidente, que la députée de Saint-Laurent ne veuille
pas échanger avec moi, honnêtement. Je lui
donne des réponses, mais elle préfère le ministre de l'Éducation à moi. Je
commence à être jaloux, Mme la Présidente.
Écoutez, bon,
Mme la Présidente, l'application de la loi, c'est très clair, Mme la
Présidente, ça ne pose aucune difficulté. Le Parti libéral tente de
susciter un débat relativement à l'application de la loi, alors qu'il n'y en a
pas. Mme la Présidente, c'est très clair,
c'est interdit pour les enseignants de porter un signe religieux durant les
heures de travail, uniquement durant
les heures de travail. Parce que j'entends toutes sortes de choses, là.
Parfois, j'entends le fait de dire : Écoutez, le projet de loi va interdire le port de signes religieux en
tout temps, or c'est faux. L'interdiction de port de signes religieux
est prévue uniquement durant la prestation de travail pour les enseignants. Et
pour ceux qui étaient en poste avant le
28 mars 2019 et qui portent un signe religieux, ils ont un droit acquis.
Alors, c'est très, très clair, ça ne pose pas de difficulté
d'application.
Mais il y a
une chose que j'ai retenue, par contre, des propos de la députée de
Saint-Laurent relativement à mon collègue de l'Éducation, elle a
dit : Le ministre de l'Éducation, il est sur le terrain. Le ministre de
l'Éducation, c'est lui qui connaît ça. Il
connaît les écoles, il a enseigné pendant des années, pendant 17 ans, je
pense, dans le milieu scolaire. C'est
le meilleur ministre de l'Éducation que nous avons eu, et ça, la députée de
Saint-Laurent devrait le reconnaître. On n'a jamais eu un ministre de l'Éducation qui connaissait autant le réseau,
qui avait les outils et les qualifications pour poser les bons diagnostics, pour apporter des
correctifs. Et, vous l'avez vu, le ministre de l'Éducation, lorsqu'on
l'appelle, il va sur le terrain, il se préoccupe du succès des enfants, et ce
qu'il fait avec la maternelle quatre ans, c'est de donner une chance égale à tous les enfants du Québec. Et ça,
vous devriez le remercier qu'il ait autant de volonté, qu'il s'assure de
faire en sorte que tous les enfants puissent réussir au Québec et qu'on puisse
diagnostiquer leurs problématiques...
• (14 h 30) •
Des voix : ...
La Présidente
(Mme Soucy) : M. le ministre. M. le ministre.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Soucy) :
M. le ministre, s'il vous plaît!
M. Jolin-Barrette : ...
La
Présidente (Mme Soucy) :
M. le ministre. M. le ministre, merci. Mme la députée de Saint-Laurent, la
parole est à vous sur la question du règlement.
Mme Rizqy :
Premièrement, là, 35, paragraphe 6°, il interprète mes propos. Moi, je n'ai
aucun malaise à parler avec le
ministre de l'Éducation. J'ai eu la chance, évidemment, d'échanger avec lui
dans plusieurs différentes commissions. Alors, oui, vous comprendrez que nos échanges ont toujours été très
courtois parce que le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur répondait à nos
questions. Alors, je vais vous concéder une chose, c'est vrai qu'il est un
meilleur ministre de l'Éducation que le premier ministre l'a été en
Éducation.
La
Présidente (Mme Soucy) :
Mme la députée de Saint-Laurent, ce n'est pas une question de règlement, mais par contre vous aurez la chance de rectifier les
propos, si vous le voulez, un peu plus tard. On va laisser le ministre
terminer, s'il y avait autre chose à ajouter, sinon on va donner le
droit de parole...
M. Jolin-Barrette : Et j'ai une question relativement à l'application
de la loi pour la députée de Saint-Laurent dans sa perspective, parce que j'ai eu l'occasion d'avoir de nombreux
échanges avec les collègues du Parti libéral sur cela. Il y a certaines
commissions scolaires qui ont dit : Nous n'appliquerons pas la loi. Je
voudrais savoir : La députée de Saint-Laurent,
un coup que la loi sera adoptée et sanctionnée, est-ce qu'elle dénonce les
commissions scolaires qui disent qu'elles ne souhaitent pas appliquer la
loi? Va-t-elle respecter l'application de l'autorité de la loi? Est-ce qu'elle
va encourager les commissions scolaires à appliquer la loi? Je voudrais avoir
une réponse par un oui ou par ou non, s'il vous plaît.
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci.
Mme la députée de Saint-Laurent... Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David :
...c'est la deuxième fois qu'il fait
ça, le ministre, et je
pense que c'est son projet de loi à lui, il doit répondre aux questions.
Il fait de la politique. Il parle de voisinage, il parle de bons ministres,
ça n'a rien à voir avec la discussion en ce
moment, sur l'article 6
et sur l'amendement. Je demanderais au ministre, s'il vous plaît, d'arrêter de nous poser des questions puis de répondre aux questions
qu'on vous pose. Merci.
La Présidente (Mme Soucy) : Merci,
Mme la députée. Vous savez, la députée de
Saint-Laurent n'est pas obligée de répondre aux questions du ministre, mais elle a quand même son droit de
réplique, alors on va la laisser terminer son intervention. Allez-y, Mme
la députée de Saint-Laurent.
Mme
Rizqy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, j'aimerais vraiment savoir comment on va
appliquer le projet de loi n° 21 à
l'intérieur des murs de nos écoles, notamment
dans la classe de maternelle quatre ans. Qu'allez-vous faire?
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, la loi va s'appliquer comme toutes les autres
lois qui régissent le domaine du
travail, qui régissent l'instruction publique, ce n'est pas différent. Le
réseau de l'éducation est régi par de nombreuses lois, les milieux
de travail sont régis par de
nombreuses lois. Ce n'est pas différent de l'application d'un réseau à un
autre réseau.
Alors, Mme la
Présidente, je comprends qu'on me pose des questions, mais, nous, là, ce qu'on
a, c'est une conversation, et la
conversation, c'est bilatéral, hein, de part et d'autre. Alors, si on veut
avoir une conversation avec la députée de Saint-Laurent, ça ne peut pas
être unilatéral, c'est la pire chose. Il faut écouter et pouvoir répondre.
Alors,
je repose ma question, parce
que la députée de Westmount—Saint-Louis, elle n'était pas sûre, elle, qu'elle souhaitait soutenir l'application
de la loi envers les commissions scolaires. Est-ce que la députée de Saint-Laurent
va recommander aux commissions scolaires de respecter et d'appliquer la loi?
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le
ministre. Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme
Rizqy : Mme la Présidente, il ne s'agit pas de notre projet
de loi mais de son projet de loi, et par conséquent il revient
à lui de répondre à nos questions. Je vois qu'il est excellent pour patiner et
esquiver les questions, mais il doit, à un moment donné,
répondre.
Alors,
je reviens encore... Et je vous demande juste de faire un petit effort pour me
répondre, et surtout que vous avez
prisé notre moment d'échange entre nous deux, car vous l'attendiez depuis longtemps.
Il est arrivé. Alors, nous y sommes.
Au niveau du fonctionnement dans nos écoles, vous
savez pertinemment que, dans les maternelles quatre ans, il y aura des enseignants et aussi des éducatrices.
Vous savez aussi que, dans une école... ou vous devriez savoir, parce que
j'imagine que vous avez eu des échanges avec votre collègue le ministre de
l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, qu'un enseignant, après l'école, bien, il y en a plusieurs qui restent,
et qui restent volontairement, et d'autres aussi qui font du pro bono.
Est-ce que ça, ça va rentrer dans le fonctionnement?
M. Jolin-Barrette : ...clair à l'effet que ce sont les enseignants qui sont visés par l'application de la loi. Alors, l'interdiction de port de signes religieux
durant les heures de travail s'applique aux enseignants.
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci. Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme
Rizqy : Donc, les
enseignants qui restent à l'école pour une activité qui n'entre pas dans
leur cadre... Par exemple, moi, j'ai souvent quelques fêtes où est-ce que
les enseignants restent après l'école, la fête est organisée à l'école, c'est sur leur temps à eux, de façon bénévole, et
ils encadrent encore les élèves. Qu'est-ce
que vous faites avec ça? Comment
qu'on va régir le tout?
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, c'est dans
le cadre des fonctions de travail et
donc dans ce qui est prévu dans le
cadre des conventions collectives. Alors, la députée de
Saint-Laurent sait très bien que, lorsqu'on est un employé de l'État et qu'il y a une exigence relativement à
la prestation de travail, les règles s'appliquent durant la prestation de
travail. J'ai toujours été clair relativement à cela, relativement à l'application de la loi durant la période de travail qui est
visée. L'interdiction s'applique dans le cadre de la fonction d'enseignant, la prestation de travail qui est donnée par
les enseignants ou les enseignantes.
Alors, Mme la Présidente, on ne peut être plus clair que cela relativement à l'application de la
loi.
Et, vous savez, le Parti
libéral voit des difficultés d'application partout, ils ne me font pas
confiance, alors, honnêtement, ça me déçoit un peu. Je pensais que la députée
de Saint-Laurent me faisait confiance relativement à la rédaction du projet de loi et à son application et je souhaite pouvoir la convaincre relativement à l'application de la loi.
La Présidente (Mme
Soucy) : M. le ministre, merci. Je vous
rappelle, pour le bon fonctionnement de notre Assemblée,
de ne pas porter d'intentions aux autres parlementaires. Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Saint-Laurent.
Mme
Rizqy : Je vous remercie, Mme la Présidente, de rappeler nos règlements au ministre de l'Immigration, qui se fait souvent un plaisir de ne pas
les respecter. Alors...
M. Jolin-Barrette : ...des faits documentés
sur ce qui est...
Mme Rizqy : C'est assez factuel.
Vous avez un beau sourire.
La
Présidente (Mme Soucy) :
Aïe! S'il vous plaît, là, s'il
vous plaît! Vous connaissez les règlements,
vous êtes deux parlementaires d'expérience. Je vous invite à revenir sur
l'amendement de l'article 6, s'il vous plaît. Merci. Mme la députée de Saint-Laurent,
vous pouvez continuer votre intervention.
Mme
Rizqy : Ça fait quand même
plusieurs reprises que vous invoquez la tâche des enseignants. Vous savez que c'est déjà régi par convention et que l'interdiction de
prosélytisme et le droit de réserve est déjà conventionné. Alors, au niveau du fonctionnement, comment vous
allez vous assurer que votre projet de loi n° 21 est
réellement applicable à l'intérieur des murs des écoles?
La Présidente (Mme
Soucy) : Merci. M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Jolin-Barrette : Oui, merci,
Mme la Présidente. Dans un premier temps, vous savez, quand il y a une
disposition législative qui est
édictée... Nul n'est censé ignorer la loi, on est d'accord là-dessus? On est
d'accord là-dessus, parfait. Les gens
doivent se conformer à l'application de la loi. La députée de Saint-Laurent nous
dit : Comment vous allez faire pour vous assurer qu'il y ait application
de la loi? Elle présume que les gens ne se conformeront pas à l'application
de la loi, qu'ils ne respecteront pas la
loi. Or, c'est le contraire, Mme la Présidente, les gens respectent les lois,
et nous devons valoriser le fait de respecter les lois.
Certains
collègues en cette Assemblée appellent à la désobéissance civile. Alors, je
sais que ce n'est pas le cas de la députée de Saint-Laurent et elle va
s'assurer, à partir du moment où le projet de loi n° 21
sera sanctionné, même si elle est en
désaccord avec le contenu du projet de loi, elle va s'assurer de dire que les
commissions scolaires doivent appliquer la loi, que l'ensemble des intervenants, l'ensemble des personnes qui sont
visées par la loi doivent respecter l'interdiction de porter un signe religieux. Et je compte sur elle,
Mme la Présidente, dans le cadre de toutes les lois qui sont adoptées par
l'Assemblée nationale du Québec, de défendre leur validité et de s'assurer
qu'elles soient respectées. Je sais qu'elle en est une ambassadrice.
La Présidente (Mme
Soucy) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de
Saint-Laurent.
• (14 h 40) •
Mme Rizqy : Merci, Mme la
Présidente. Et merci pour cette confiance du ministre, je vous remercie.
De façon...
Je continue, parce que vous comprenez que ce que vous venez de dire n'est pas
tout à fait ce que je pensais, alors
je reprécise de nouveau pour vous. Ce n'est pas à savoir si, oui ou non, votre
loi sera respectée ou pas que je vous interroge, c'est sur son
application.
Je vais vous
donner un exemple. Imaginez, bon, il y a plus d'une centaine de religions, que
quelqu'un croit qu'il s'agit d'un
signe religieux, apporte le tout à l'autorité la plus compétente. Comment, par
la suite, on vérifie, par exemple, est-ce
que c'était une clause grand-père ou pas, est-ce que c'est un signe? Qui aura
cette fonction-là et comment on va s'assurer que tout soit respecté?
La Présidente (Mme Soucy) : Merci,
Mme la députée. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Revenons à
l'article 6 tel qu'amendé par notre amendement. Premièrement, à la demande des collègues du Parti libéral, nous avons
inséré une définition, parce que, dans un premier temps, je n'avais pas
défini «signe religieux» parce que c'est selon le sens courant, selon le sens
commun. Et la députée de Saint-Laurent connaît,
elle, quel est le sens courant, quel est le sens commun, et je suis convaincu
que, si elle avait passé tout ce temps avec
moi en commission parlementaire, elle aurait pu l'expliquer à ses collègues,
quel est le sens commun. Or, j'ai, dans un souci d'ouverture, inséré une définition à l'article de loi. Revenons
à cette définition : «Au sens du présent article, est un signe religieux tout objet, notamment un vêtement,
un symbole, un bijou, une parure, un accessoire ou un couvre-chef, qui
est :
«1° soit porté en lien avec une conviction ou
une croyance religieuse...»
Alors, si la
personne considère que l'objet qu'elle porte constitue un signe religieux et
qu'elle est visée par l'application
de la loi, elle ne peut le porter. Donc, on se met dans les souliers de la
personne. C'est la personne qui évalue est-ce
que ça constitue un signe religieux, c'est sa croyance raisonnable et sincère,
les critères associés à la liberté de religion tels que définis par la
Cour suprême.
Le deuxième
critère, qui n'est pas cumulatif mais qui est plutôt alternatif, la personne
dirait : Bien, pour moi, ça ne constitue pas un signe religieux, mais,
si, aux yeux de la personne raisonnable...
«2° soit raisonnablement considéré comme
référant à une appartenance religieuse.»
À ce
moment-là, ce n'est pas permis de porter le signe religieux, si on est visé par
l'interdiction de porter un signe religieux, aux yeux de la personne
raisonnable. Ces critères-là ont été définis par la Cour suprême également,
cette interprétation. Alors, c'est une
définition qui permet de définir très clairement qu'est-ce qui constitue un
signe religieux.
Et souvent on m'a questionné
relativement à l'interprétation, mais c'est très clair. On a un article
définissant la nature d'un signe
religieux avec à l'intérieur du même article des dispositions permettant
l'interprétation de ce qui constitue un
signe religieux, avec une analyse subjective dans un premier temps et dans une
analyse objective dans un autre temps, et
les critères ne sont pas cumulatifs. Alors, ça permet d'avoir un guide pour
cette analyse, qui peut s'effectuer en deux étapes.
La Présidente (Mme
Soucy) : Merci, M. le ministre. Mme la députée.
Mme
Rizqy : Donc, est-ce que vous comptez sur une forme de dénonciation de
quelqu'un qui va être, par exemple, au
paragraphe 2° de votre
amendement, une personne raisonnable, qui va considérer comme référant à une
appartenance religieuse, pour être en mesure d'appliquer
une des 100 quelques religions, pour bien les identifier?
M.
Jolin-Barrette : Pouvez-vous répéter la question?
Je n'ai pas entendu.
La Présidente (Mme Soucy) : Juste parler... Mme
la députée de Saint-Laurent, parlez un peu plus près de votre micro... ou l'orienter, là, je ne sais pas, mais on ne vous entend pas
tellement bien.
Mme Rizqy : Mais je pense qu'il y a un problème
avec mon micro, hein? Il y a vraiment un problème, mon micro, le son est au maximum.
Une voix :
...
Des voix :
Ha, ha, ha!
La
Présidente (Mme Soucy) : Mme la députée de
Saint-Laurent, continuez.
Mme
Rizqy : M. le ministre, plusieurs personnes, vous constatez, ont de la difficulté
à identifier les quelques centaines de religions. Êtes-vous d'accord avec cela?
M. Jolin-Barrette : Très certainement, la députée
de Marguerite-Bourgeoys a fait
référence à plusieurs centaines de religions... à plus d'une centaine de
religions, une centaine.
Mme Rizqy :
Mais est-ce que vous êtes d'accord que plusieurs personnes ont de la difficulté
à identifier qu'est-ce qu'un symbole religieux, là, puisqu'il y en a plusieurs,
quand même?
M. Jolin-Barrette : Bien, justement, la définition, Mme la Présidente, est là pour
accompagner les personnes. Justement, Mme la Présidente, la définition est là
pour accompagner les personnes, pour faire en sorte que ce soit très clair,
Mme la Présidente, pour les personnes
chargées d'appliquer la loi, qu'elles vont avoir deux critères d'analyse, le
critère de l'analyse subjective dans un premier temps et le critère de
l'analyse subjective dans un deuxième temps.
Et donc, Mme la Présidente, la plus haute autorité
administrative sera chargée de l'application de la loi. Et ce n'est pas différent de toutes les autres lois, Mme la
Présidente, qui s'appliquent dans les milieux de travail. Je pense, là, qu'il
faut arrêter de s'enfarger dans les
fleurs du tapis, Mme la Présidente, c'est fort important, parce que
l'application de la loi, elle est raisonnable, elle est simple. Et
notamment on réfère aux critères de la personne raisonnable, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Madame...
M.
Jolin-Barrette : Et d'ailleurs, et d'ailleurs je tiens juste à
rappeler aussi, Mme la Présidente...
Une voix :
...
La
Présidente (Mme Soucy) : Oui. Est-ce que, monsieur...
Aviez-vous terminé votre intervention?
M.
Jolin-Barrette : Non.
La
Présidente (Mme Soucy) : Bien, terminez-la...
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, je tiens juste à rappeler aussi
que, pour les enseignants, il y a une disposition de maintien en emploi, une
disposition de droits acquis. Le gouvernement a fait un compromis pour faire en sorte que les personnes déjà en emploi, dans le
souci d'une position qui est modérée, qui est pragmatique et qui est applicable... que les personnes, notamment les
enseignants qui portent un signe religieux, en date du dépôt du projet de loi,
peuvent le conserver s'ils exercent la même fonction pour la même organisation.
La Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Juste vous mettre en
garde, M. le ministre. Lorsque vous terminez votre intervention et que je passe
la parole à la députée de Saint-Laurent, s'il vous plaît veuillez respecter
les droits de parole. Merci.
Mme la députée de
Saint-Laurent, la parole est à vous.
Mme
Rizqy : Juste avant que le ministre de l'Enseignement supérieur
quitte, j'ai vraiment une question pour lui. Si vous le permettez, avec consentement, donnez-lui l'occasion de
répondre. Ici, il s'agit, là, d'un projet de loi historique, pour les mauvaises raisons, on s'entend, mais
j'aimerais vraiment savoir : Est-ce qu'il va défendre les étudiants et
étudiantes qui en ce moment sont sur
les bancs universitaires, qui en ce moment se demandent si, oui ou non, elles
pourront réaliser leurs aspirations
vraiment et devenir enseignants ou enseignantes dans nos écoles publiques du
Québec? S'il vous plaît, M. le ministre, partagez un peu de temps
d'antenne avec le ministre de l'Enseignement supérieur.
La Présidente (Mme
Soucy) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Non, pas de
consentement. Vous savez, le premier ministre m'a confié le dossier. Et, pour
les personnes qui sont présentement
aux études, c'est très clair, la loi s'applique, et le droit au maintien en
emploi s'applique pour ceux qui sont
en emploi actuellement. Donc, tout nouvel enseignant ne devra pas porter de
signe religieux dans les écoles publiques, c'est ce que prévoit la loi,
Mme la Présidente.
Et d'ailleurs
je tiens à souligner également, outre la présence du député de Chambly,
ministre de l'Éducation, la présence de pratiquement la totalité de la
députation du gouvernement, qui souhaite ardemment appliquer et adopter ce projet de loi parce que c'est ce que nous... ce
à quoi nous nous sommes engagés durant la dernière campagne électorale, et le gouvernement respecte ses engagements.
Alors, j'apprécie la présence de l'ensemble des collègues du gouvernement ici.
La
Présidente (Mme Soucy) :
Bon, merci, M. le ministre. Nous allons revenir à l'amendement de l'article 6, s'il
vous plaît, puisque notre collègue de Matane-Matapédia est très impatient de
pouvoir déposer son amendement.
Alors, je vous cède la parole, Mme la députée de
Saint-Laurent, pour terminer votre intervention.
Mme
Rizqy : Alors, vous
comprendrez que je ne doute pas du fait qu'il y a plusieurs
députés ici, dans cette salle, mais
la pertinence que je recherche est celle du ministre de l'Enseignement supérieur, car je suis porte-parole également
de l'Enseignement supérieur. Bon, je lui
souhaite d'avoir la chance, éventuellement, d'avoir la permission de pouvoir
s'exprimer et être le porte-voix de son réseau, parce que, vous savez, Mme la
Présidente, quand on est titulaire d'un portefeuille
et qu'on est député, on n'est pas uniquement la voix du premier ministre vers
le peuple, on est aussi la voix du peuple vers le premier ministre. Et
plusieurs personnes dans le réseau de l'éducation et de l'enseignement
supérieur ont émis énormément de craintes
mais aussi des questionnements, et leurs questions sont légitimes, et j'espère
que vous avez entendu le message.
Lorsqu'on a des étudiants et des étudiantes qui ont déjà consacré trois ans ou
quatre ans, qui sont déjà presque,
presque diplômés, et qu'elles se demandent ou qu'ils se demandent est-ce que,
oui ou non, ils pourront être enseignants...
Avez-vous un
petit peu d'ouverture là-dessus, M. le ministre de l'Immigration? Est-ce que
là-dessus, là, vous allez démontrer un peu de flexibilité après avoir parlé
avec moi? Est-ce que nos échanges auraient peut-être porté fruit sur quelque
chose qui pourrait commencer à montrer davantage d'ouverture de votre part?
La Présidente (Mme
Soucy) : Merci, Mme la députée de Saint-Laurent. M. le
ministre.
• (14 h 50) •
M.
Jolin-Barrette : Oui, Mme la
Présidente, je démontre énormément d'ouverture. Et d'ailleurs j'ai tenu,
justement, à continuer à dialoguer
avec la collègue de Saint-Laurent alors qu'elle souhaitait ne plus dialoguer
avec moi et parler avec le ministre
de l'Éducation. Écoutez, Mme la Présidente, je ne le prends pas personnel, je
comprends qu'il y a des liens particuliers qui ont été établis avec le
ministre de l'Éducation en raison des longues heures passées en commission parlementaire avec lui. Peut-être que nous aurons
l'occasion un jour, en commission parlementaire, de développer des aussi
bons liens qu'avec le ministre de l'Éducation, que vous avez actuellement.
La Présidente (Mme
Soucy) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de
Saint-Laurent.
Mme
Rizqy : ...se souvient parfaitement qu'on s'est déjà connus,
nous-mêmes, sur les bancs universitaires. Nos liens sont toujours bons, j'ose espérer. Mais vous comprenez que ce n'est
pas uniquement un dossier qui touche l'immigration et la laïcité, ça
touche aussi l'éducation, et c'est important d'avoir la chance d'entendre le
ministre de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur. Et j'essayais de l'avoir puisque je sais qu'on est tous... bien,
plusieurs d'entre nous sont de garde.
Alors, je comprenais qu'il avait sa garde en ce moment, alors je voulais avoir
l'occasion de pouvoir échanger avec lui sur un dossier aussi important.
Mais ne vous
leurrez pas, j'apprécie votre présence et nos échanges, je les apprécie
grandement, surtout lorsque vous
répondez, pratico-pratique, comment qu'on va s'assurer, par exemple, les
étudiantes, là, qui sont présentement en stage, qui vont terminer, qui vont graduer... Est-ce que là-dessus vous
allez montrer un peu de flexibilité, car elles sont plusieurs et ils sont plusieurs sur les bancs
d'université et ils se demandent : Est-ce que le ministre va peut-être
démontrer un peu d'ouverture là-dessus après avoir eu un échange avec la
députée, justement, de Saint-Laurent?
La Présidente (Mme
Soucy) : Merci, Mme la députée de Saint-Laurent. M. le
ministre.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Vous savez,
lorsque la députée de Saint-Laurent nous dit : Ça touche le réseau de l'éducation, le projet de loi, oui. Ça touche
aussi la sécurité publique, ça touche également la magistrature, ça touche les
différents collègues.
Alors,
Mme la Présidente, c'est moi qui est porteur du projet de loi, j'ai donné les
réponses à la députée de Saint-Laurent et
j'ai été très clair. Et tout au long de la commission je l'ai dit : Il y a
une clause de droits acquis pour les gens
qui sont en emploi depuis... au moment du dépôt du projet de loi, le 28 mars dernier. Donc, la clause de droits acquis va
s'appliquer uniquement aux personnes qui sont déjà en emploi.
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant,
nous allons reconnaître le député de Matane-Matapédia, qui veut la parole.
Allez-y, M. le député.
M.
Bérubé :
Je peux y aller? Bien, je veux faire écho, Mme la Présidente, à l'intervention
de la députée de Saint-Laurent très
brièvement parce que ce n'est pas une question théorique, là, c'est
une question réelle. Les étudiantes qui sont engagées dans un parcours
de formation soit en enseignement primaire et préscolaire, bon, l'enseignement secondaire, c'est quatre ans d'études, et, pour
avoir fait ce bac, je peux vous en parler. Et la question se pose, maintenant.
Elles se sont engagées, surtout
des femmes, elles ont mis du temps, elles ont passé des examens, elles ont
engagé des coûts. Il me semble que ça
ne doit pas toucher tant de monde que ça, et ça va... et de les considérer
n'irait pas à l'encontre des objectifs
poursuivis par le gouvernement sur ce projet
de loi. C'est une question
d'humanité, de sensibilité. Et je parle vraiment des étudiantes qui
sont déjà engagées, pas de celles qui voudraient s'engager
cette année, là; qui ont déjà une année de faite, par exemple, deux
années. Il me semble que ça, de considérer cet élément-là, ajouterait une
sensibilité nécessaire pour le début de
l'application du projet de loi. Parce
que n'oubliez pas, là, dans certains
cas il y a trois ans de faits sur quatre, ça veut dire que c'est trois ans de perdus. Les
personnes ne savaient pas, à l'époque, en entrant, que les conditions
allaient changer, ne pouvaient pas prévoir le résultat électoral et l'intention
du législateur. Donc, moi, je veux juste
inviter le ministre à être attentif à ça parce que
c'est une question qui est très déchirante. Et les personnes qui vont
vouloir s'inscrire peut-être ne le feront pas, connaissant les règles, mais les
règles n'étaient pas connues pour les personnes qui sont déjà engagées, donc,
qui sont déjà dans le bac.
Donc,
je veux juste soumettre ça au ministre. Peut-être qu'on aura un moment, plus tard, où son équipe
pourra évaluer avec lui si ça peut
entrer dans le projet de loi en équation avec les objectifs qu'il poursuit.
Mais je veux faire écho à la collègue
de Saint-Laurent, c'est totalement pertinent. Puis c'est à ce moment-ci qu'il
faudrait commencer à préparer un amendement pour qu'il puisse s'insérer
dans le projet de loi. C'est tout.
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. M. le ministre. M.
le ministre? Non?
M.
Jolin-Barrette : Ça va.
La Présidente (Mme Soucy) : O.K.
Alors, je suis prête à reconnaître un autre intervenant. Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme
Rizqy : Merci. M. le ministre, là, c'est là que je vous interpelle. Il y a quelques
minutes encore vous disiez faire
preuve d'ouverture. Alors, comment faites-vous preuve d'ouverture en ne
répondant même pas au leader du troisième
groupe d'opposition sur une question aussi pertinente et essentielle,
alors que, je peux vous le dire, c'est des questions que les étudiants et
étudiantes se posent présentement? Alors, pouvez-vous, s'il vous plaît, répondre à la question du chef — j'ai
dit «leader», hein, je m'excuse — du
chef du troisième groupe d'opposition? Mais vous êtes quand même un leader.
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, Mme la Présidente, la question que le chef du Parti québécois a présentée, a posée, c'est
la même question que vous avez posée, et c'est la même réponse. Les droits
acquis sont applicables uniquement pour les personnes qui sont en emploi
au moment du dépôt du projet de loi le 28 mars dernier.
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci.
Mme
Rizqy : Cette réponse, je
l'avais déjà comprise. Je vous demande de l'ouverture, parce qu'évidemment, lorsqu'on est en train de débattre, c'est aussi de voir qu'est-ce qu'on
peut, dans la mesure, sauver, entre guillemets. Et là, présentement, vous-même, vous le savez, à quel point c'est
difficile, des études universitaires, vous le savez, je m'en rappelle. Bien, là-dessus, M. le ministre, imaginez quatre années. Certaines ont déjà commencé des stages,
elles sont dans le processus.
Là, je fais appel à votre grand coeur. Avez-vous assez d'ouverture pour montrer
ici de la flexibilité puis vous assurer que tous ceux qui ont déjà fait une session puissent en bénéficier, de cette
clause grand-père? Je vous le demande. Et je pense sincèrement que,
là-dessus, si vous prenez même le temps de suspendre et en discuter avec le ministre
de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur, il peut lui-même vous dire
à quel point, à quel point nous recevons plusieurs courriels de futurs
enseignants et enseignantes qui veulent s'assurer de pouvoir accéder à leur
nouvelle profession dans le réseau public.
La Présidente (Mme
Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Alors, Mme la Présidente, la députée de Saint-Laurent sait très
bien que la présence d'un droit acquis dans une loi est d'interprétation
stricte, et le législateur, dans le cadre du projet de loi n° 21, a choisi de faire un
compromis pour les gens déjà en fonction dans des postes d'enseignants. Donc,
pour ceux qui sont déjà à l'emploi à partir
du 28 mars 2019, ils pourront, s'ils le souhaitent, conserver le droit de
porter un signe religieux. C'est une mesure de compromis que le gouvernement
du Québec a faite de façon à faire en
sorte que le maintien en emploi soit là pour les personnes qui sont déjà
en emploi.
Alors,
j'entends bien la proposition du député de Matane-Matapédia et de la députée
de Saint-Laurent. Or, le choix du gouvernement n'est pas
d'aller dans cette direction-là.
La Présidente (Mme
Soucy) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme
Rizqy : Vous venez de dire
que c'est vous, le porteur du ballon. Bien, vous avez un ballon en ce moment. Est-ce que vous désirez le
bonifier, ce ballon, ou en faire un raisin sec?
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, je ne suis pas sûr de comprendre
la métaphore pour le raisin sec, là, honnêtement, je suis...
Mme Rizqy :
Il se dégonfle.
M. Jolin-Barrette : C'est plus les Patriots qui font ça, là. Mais, Mme la Présidente, ce qui est très clair, c'est que le gouvernement a fait un compromis en présentant une clause de
droits acquis. Le gouvernement s'est assuré de faire en sorte que les personnes déjà en
emploi qui portaient un signe
religieux au 28 mars dernier pourront
conserver leur emploi. C'est un choix
que le gouvernement a fait, c'est une situation de compromis. Le gouvernement a mis une clause de droits acquis, qui était une situation
exceptionnelle, alors la clause de droits acquis ne s'applique et ne
s'appliquera pas aux personnes qui sont présentement dans leur parcours
scolaire.
La Présidente (Mme
Soucy) : Merci. Mme la députée de Saint-Laurent.
• (15 heures) •
Mme
Rizqy : Vous comprenez, un
ballon, vous le portez, le ballon, là, vous pouvez le bonifier, ce ballon, ça
vous revient. Vous n'arrêtez pas de dire que c'est vous, le titulaire de
ce dossier. Moi, je vous demande, pour le réseau de l'éducation et de l'enseignement
supérieur... Et votre ministre peut vous le dire. Dans le réseau de l'éducation
et de l'enseignement supérieur, ce
n'est pas du tout leur priorité, le projet
de loi n° 21. Mais
moi, j'essaie de voir avec vous si on
est capables d'assurer, les étudiants et étudiantes qui sont présentement sur les bancs universitaires, qui ont déjà engagé des frais
et qui sont...
Et,
vous savez, là, quand on se rend, là, à s'inscrire dans le réseau de l'éducation,
c'est parce qu'on y croit pour de vrai.
Votre ministre va vous le dire. Lui, là, c'est parce qu'il est
passionné de l'enseignement. Ce n'est pas parce qu'ils veulent faire du prosélytisme, là, qu'ils vont s'inscrire, c'est parce que ce sont des
passionnés. Et vous le savez aussi bien que moi, que les conventions collectives, déjà, régissent tout ce qui
est du prosélytisme et le devoir de réserve. Vous le savez, ça. Ça, je
le sais parce que vous êtes quand même toujours avocat.
Alors, M. le
ministre, un peu plus d'ouverture ne ferait jamais trop de tort.
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée de
Saint-Laurent. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Moi, Mme la Présidente, je suis toujours très,
très ouvert. Cela étant dit, le gouvernement a déjà fait un compromis en
insérant une clause de droit acquis pour les personnes déjà en fonction. Et,
vous savez, le gouvernement s'est toujours engagé à interdire le port de signes
religieux pour les personnes en situation d'autorité, incluant les enseignants. Les enseignants représentent une figure
d'autorité importante pour les élèves. Ils ont une influence
considérable.
Ce
que le projet de loi fait, c'est d'assurer le droit à un enseignement laïque,
notamment. Et, vous savez, la laïcité de l'État s'exprime notamment par ses
agents, notamment par le biais de l'article 4, par le biais des personnes
désignées à l'annexe II. Donc, les
enseignants incarnent l'État, incarnent une figure d'autorité, et ça va en tout
respect de la liberté de conscience
et la liberté de religion des enfants, des élèves qui se retrouvent dans ces
classes. L'apparence de neutralité est toute aussi importante, Mme la Présidente.
Alors,
c'est pour ça que les enseignants ne seront pas autorisés à porter des signes
religieux durant leur prestation de travail.
Mme Rizqy :
...M. le ministre, votre livre : «En commission, les parlementaires
tentent d'arriver à la meilleure législation
possible, en déposant des amendements et en faisant réfléchir le ou la
ministre...» C'est précisément ce que j'essaie de faire avec vous. Et là
je vous le demande, de réfléchir.
Je
comprends qu'au mois de mars vous avez pris une décision, mais, après ça, vous
avez eu des consultations, vous avez
eu des échanges avec différentes personnes. C'est là-dessus que je fais appel à
vous parce que je le sais que vous
croyez que ça prend moins de partisanerie. C'est vous-même qui l'écrivez. Et,
là-dessus, vous savez que vous avez ce
pouvoir aujourd'hui de modifier votre clause grand-père. Vous le savez, M. le
ministre. Et, en plus de cela, c'est que, s'il y a quelqu'un qui peut avoir l'approbation, c'est vous-même. Vous
avez juste besoin de vous consulter et de vous approuver.
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, Mme la Présidente, je suis d'accord
avec moins de partisanerie. Je suis on ne peut plus d'accord avec moins de partisanerie. Ça s'applique dans nos
échanges entre collègues. Ça s'applique aussi à travers les équipes qui
nous accompagnent, à travers les attachés politiques, à travers les chargés de
communication qui accompagnent les
différents partis et les différents chefs de parti. Ça, je pense que c'est très
important, de s'élever au-dessus de
la mêlée, d'avoir un respect mutuel, que ça s'applique entre collègues élus à
l'Assemblée nationale, mais dans l'ensemble de nos équipes également. Et je pense que c'est le devoir des députés.
C'est le devoir des chefs de parti. C'est le devoir des leaders, de s'assurer que leurs employés qui
travaillent avec eux respectent les collègues députés, respectent la fonction
de servir le Québec. Ça, je pense, c'est
fondamental, et je pense que c'est une responsabilité qui incombe à chacun des
parlementaires ici, en cette Assemblée.
Moins de
partisanerie, Mme la Présidente, ça implique aussi de se respecter, notamment
par la députée de Rouyn-Noranda. Je pense
que c'est important, ça aussi, de faire en sorte que tous se respectent et que,
lorsqu'on a des discussions entre
nous, on puisse discuter librement et on puisse aller au-delà de la
partisanerie parce que, si on veut faire avancer des choses ensemble, il faut pouvoir discuter ensemble. Il faut
pouvoir échanger et il faut pouvoir amener des idées qui nous
permettront de progresser.
Alors,
en ce qui concerne la réflexion, j'y ai réfléchi depuis le mois de mars. J'ai
entendu plusieurs arguments. Et,
encore ici, aujourd'hui, le 16 juin, j'entends la députée de Saint-Laurent,
j'ai entendu le député de Matane-Matapédia, j'ai réfléchi, mais ce que je vous dis, c'est que je maintiens la
position parce qu'il s'agit d'une clause précise. C'est une exception que nous avons faite. C'est un droit
acquis pour les personnes qui sont déjà à l'emploi en date du 28 mars. Le
gouvernement a déjà fait un compromis.
La Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de
Saint-Laurent, pour votre information, oui, il vous reste 2 min 45 s.
Mme Rizqy :
Merci. M. le ministre, je comprends que vous faites référence à un incident qui
est arrivé entre vous, notamment, et
la députée de Rouyn-Noranda, qui n'a rien à voir avec notre formation
politique, comme vous le savez. Et,
vu qu'on veut vraiment être très précis et rester dans le cadre de l'article 6,
et vous faites référence au respect, qu'aussi tous les attachés politiques doivent démontrer du respect, bien, nous en
sommes entièrement d'accord. Et c'est pour cela que la députée d'Acadie, lorsque certains incidents sont arrivés,
notamment durant les inondations, a rappelé à l'ordre gentiment tout le monde, surtout sur le contenu
sur les réseaux sociaux, et s'élever. Alors, la démocratie, évidemment, ça repose sur des bases très concrètes. Elle doit
s'incarner dans les institutions. Ça, c'est vous qui l'avez écrit. C'était
bien.
Et maintenant je vous
rappelle encore, encore, que vous avez ce fameux pouvoir. Et, quand vous dites
que l'article 6, avec la lecture de l'annexe
II, est très précis, permettez-moi de vous le lire : «Un directeur, un
directeur adjoint ainsi qu'un
enseignant d'un établissement d'enseignement sous la compétence d'une
commission scolaire instituée en vertu
de la Loi sur l'instruction publique...» Vous trouvez ça toujours clair? Oui?
Je prends pour acquis, je tiens pour acquis que le hochement de tête
ainsi, ça veut dire oui? Pouvez-vous le dire au micro, s'il vous plaît, pour
les fins des notes sténographiques?
La
Présidente (Mme Soucy) : ...s'il vous plaît, votre
intervention. Merci.
M. Jolin-Barrette :
Il n'y a pas de notes sténographiques.
La
Présidente (Mme Soucy) : M. le...
M. Jolin-Barrette :
On n'est pas à la cour.
Mme Rizqy :
Oui, vous avez raison. Vous avez raison. Je vous l'accorde.
La
Présidente (Mme Soucy) : Continuez, Mme la députée.
M. Jolin-Barrette : Écoutez, peut-être, Mme la
Présidente, qu'aujourd'hui le Parti libéral souhaite faire mon procès. Cela étant dit,
on va laisser les Québécois juger, si vous êtes d'accord.
La Présidente (Mme Soucy) : On va revenir à l'amendement de l'article
6, s'il vous plaît. Mme la
députée de Saint-Laurent, la
parole est à vous.
Mme Rizqy : Alors, vous trouvez ça clair, «sous la compétence
d'une commission scolaire instituée en vertu de la Loi sur l'instruction
publique»? Le 4 juin, votre collègue le ministre
de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur a déjà annoncé qu'il va déposer un projet de loi à l'automne qui abolit les commissions
scolaires. Donc, qu'est-ce qu'on fait une fois que votre projet
de loi est adopté?
M. Jolin-Barrette : ...le projet
de loi a été adopté, Mme la Présidente, bien, écoutez, je ne vois pas la difficulté d'application. La loi s'applique. On parle d'une hypothétique
loi qui abolit les commissions
scolaires. C'est ce à quoi vous
faites référence?
Mme Rizqy : Je fais référence à votre collègue,
parce que j'imagine qu'il vous a déjà
parlé puisqu'il s'agit aussi d'une
promesse électorale qu'il a clairement dit qu'il va réaliser et qu'il a confirmé en
entrevue, le 4 juin dernier, qu'il déposera,
à l'automne, un projet de loi qui abolit les commissions scolaires. Alors,
une fois que votre projet de loi n° 21 est adopté
et que son projet de loi sera tabletté... pardon, déposé, et j'imagine que
vous allez faire adopter ce projet de
loi parce que vous avez une majorité, est-ce
que vous trouvez toujours aussi claire votre annexe II pour le fonctionnement?
Et comment qu'on va s'assurer que votre projet de loi n° 21 trouve
application? Ou il va juste avoir un petit vide?
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme la Présidente, il n'y aura pas de vide.
Puis savez-vous quoi? Bon, premièrement, la députée de Saint-Laurent nous dit : Écoutez, le ministre de
l'Éducation a déjà annoncé qu'on allait remplir un de nos engagements
électoraux. Bien oui, c'est vrai. Et notre objectif, c'est de remplir tous nos
engagements électoraux. Et je trouve qu'on est bien partis. Honnêtement, je
trouve qu'on est bien partis. On est sur la bonne voie. Et souvent le Parti
libéral, savez-vous, Mme la Présidente, ce qui arrive? Ils nous reprochent de
tenir nos engagements électoraux. D'ailleurs,
le député de Pontiac le fait souvent à mon collègue de Taillon. Il lui reproche
de tenir les engagements pour lesquels on a été élu.
Écoutez, je
le sais, que ça dérange, de l'autre côté, qu'on tienne nos engagements, mais on
est faits de même, on veut respecter notre parole, on veut respecter ce
qu'on dit aux Québécois. Puis, théoriquement... En fait, dans les faits, nous, on le fait. Mais, théoriquement, à
chaque fois qu'il y a un gouvernement, il devrait respecter ses engagements.
Je sais que ce n'était pas trop le cas du Parti libéral, mais nous, on le fait,
on tient nos engagements, bon.
Sur ce point-là, revenons aux commissions
scolaires...
Mme Rizqy :
...c'est 80 % des derniers engagements qui ont été respectés lors du
dernier mandat. Alors, quand que vous serez rendus à 80 %, on s'en
reparlera.
• (15 h 10) •
La
Présidente (Mme Soucy) :
Mme la députée, comme je vous ai mentionné tantôt, notre règlement prévoit que,
lorsque vous voulez rectifier les... bien,
vous le ferez après l'intervention du ministre, s'il vous plaît. Merci. M. le
ministre, vous pouvez continuer.
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme la Présidente, on me dit, du côté du
Parti libéral, qu'ils ont réalisé 80 % de leurs engagements. Bien là, ce
n'est pas tous les engagements, ça, 80 %. Moi, je connais la députée de
Saint-Laurent depuis longtemps, Mme la Présidente. Et elle m'a dit tout à
l'heure : Des études universitaires, c'est difficile. Je sais que, pour la
députée de Saint-Laurent, ce n'était pas si difficile parce qu'elle était
excellente, qu'elle performait et qu'elle avait des très bons résultats, au-delà de 80 %. Et je le
sais, qu'elle ne se satisfait pas de résultats de 80 %. Et je sais que, si
jamais c'est elle qui prend les rênes du Parti libéral, elle n'acceptera pas un
si médiocre résultat. J'ai confiance en elle sur ce point. Ça, j'en suis
sûr.
M. Derraji : Question de
règlement.
M. Jolin-Barrette : 80 %,
ce n'est pas suffisant pour la députée de Saint-Laurent.
La Présidente
(Mme Soucy) : M. le ministre, juste un... Merci.
M. Derraji : Question de
règlement.
La Présidente
(Mme Soucy) : M. le député de Nelligan.
M. Derraji :
Je suis désolé de faire une autre intervention de règlement, parce que le
ministre maîtrise très, très, très bien nos règlements, et la pertinence
de son intervention par rapport aux engagements du parti qui n'est plus au pouvoir, je ne pense pas que ça va aider
l'avancement de l'étude de l'article 6. Donc, Mme la Présidente, je vous
invite à faire votre travail et à
arrêter quand les gens dérapent par rapport à la pertinence de l'article que
nous sommes en train d'étudier.
La
Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le Nelligan. Je fais mon travail, merci. Je l'ai rappelé à plusieurs
reprises. Alors, je vous invite à
vous concentrer sur l'amendement de l'article 6. Sur ce, M. le ministre,
est-ce que vous aviez terminé votre intervention? Continuez.
M. Jolin-Barrette : Non, Mme la Présidente. Parlons des commissions
scolaires parce que la question portait notamment sur les commissions
scolaires et le chiffre de 80 %. Et là j'ai un chiffre contradictoire
entre la députée de Saint-Laurent et la députée de Marguerite-Bourgeoys. La
députée de Marguerite-Bourgeoys me dit 82 %.
Une voix : ...
La Présidente
(Mme Soucy) : Question de règlement? Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys. Allez-y.
Mme David :
Mais c'est parce que j'ajoute la pertinence à l'impertinence, là. On n'est
vraiment pas dans le sujet. Et puis
il fait des histoires de statistiques
qui n'ont pas de bon sens. Et lui-même, dans son livre, dit qu'il ne faut pas faire ça en commission
parlementaire, puis qu'il faut parler
des vraies choses, puis qu'il faut discuter des vrais projets de
loi, et qu'il ne faut pas faire de
partisanerie politique. Alors, il n'est pas tout à fait d'accord avec lui-même, Mme la
Présidente.
La
Présidente (Mme Soucy) :
J'invite tout le monde à votre collaboration pour se concentrer sur l'amendement de l'article 6 déposé par le député de
Jean-Lesage. Alors, pour le bon fonctionnement de notre Parlement, je vous demande la collaboration de part et
d'autre des... et, M. le ministre, juste un instant, s'il vous plaît!
Alors, Mme la députée de Saint-Laurent, la parole est à vous, à moins que vous
ayez une question de règlement.
M. Jolin-Barrette : C'était
pour compléter la réponse sur les commissions scolaires.
La Présidente
(Mme Soucy) : O.K., je croyais que vous aviez terminé.
Alors, allez-y, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, la députée de Saint-Laurent nous
dit : Le ministre de l'Éducation a annoncé son intention de transformer les commissions scolaires
à l'automne. La députée de Saint-Laurent nous dit : Bien là, votre texte
législatif ne fonctionnera plus parce que, s'il n'y a plus de commissions
scolaires, la loi ne s'appliquera plus.
Alors, Mme la Présidente, vous savez...
Une voix : ...
La
Présidente (Mme Soucy) :
Vous rectifierez les propos après l'intervention. Je vais vous donner la parole
tout de suite, sinon il va avoir un
échange... On va laisser terminer le ministre, et après ça je vous donnerai la parole.
M. le ministre, si vous voulez terminer.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, Mme la Présidente, la députée de
Saint-Laurent, qui est une juriste, sait très bien... membre du Barreau?
Fiscaliste?
Des voix : ...
M. Jolin-Barrette : Fiscaliste, juriste, membre du Barreau,
doctorante... Non? Ah! docteure, excusez, docteure, docteure. Docteure.
La Présidente
(Mme Soucy) : Article 6. Merci.
M. Jolin-Barrette : Bon, la députée sait très bien comment
fonctionnent les lois. Dans l'éventualité où on apporte une loi qui apporte des
modifications à d'autres lois, il y a des dispositions modificatrices. Alors,
il pourrait y avoir des dispositions modificatrices dans une autre loi.
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci, monsieur... Merci. Et vous vous...
M. Jolin-Barrette : Si jamais
on transformait les commissions scolaires, comme le souhaite le ministre de l'Éducation, pour respecter nos engagements, nous
procéderons à la modification législative applicable à l'ensemble des lois
qui touchent... les différentes lois qui touchent les commissions scolaires.
La
Présidente (Mme Soucy) :
Mme la députée de Saint-Laurent, pour votre information, il vous reste environ
20 secondes.
Mme Rizqy :
...ça vous a pris énormément de temps pour me répondre, mais je suis contente
parce que, là-dedans, je voulais
aussi m'assurer que vous avez finalement peut-être siégé en table de
concertation avec le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur pour vous assurer d'une certaine
cohérence parce que, jusqu'à tant... je n'ai pas remarqué qu'il y avait
beaucoup d'échanges entre vous deux pour l'application du projet de loi n° 21.
La Présidente
(Mme Soucy) : En terminant.
Mme Rizqy : Alors, je vous
demande, là, de considérer deux affaires : un, les étudiants et étudiantes
qui sont présentement... je vous redemande puis je fais appel à votre...
La
Présidente (Mme Soucy) :
Merci, Mme la députée. Le temps est écoulé. Maintenant, je vais donner la
parole à Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Robitaille :
Oui. Bien, j'écoutais ma collègue de Saint-Laurent. Un point important. Vous
savez que, dans mon comté, il y a des
étudiantes en enseignement qui ont passé un an, deux ans, trois ans, quatre
ans... qui sont sur le point d'arriver
sur le marché du travail. Ces jeunes femmes là... et puis il y a des hommes
aussi dans mon comté, des hommes qui
portent la kippa, qui seront peut-être bloqués s'ils veulent aller travailler
dans la fonction publique. Je voulais juste entendre le ministre là-dessus, il est aussi le
ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion : Si ces
gens-là ne peuvent pas avoir accès
aux écoles publiques, elles vont aller dans des écoles confessionnelles, elles
vont aller dans des écoles privées, elles vont peut-être même partir en
Ontario. Est-ce que ça ne va pas un peu à l'encontre de ces grands principes là
d'intégration?
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui, Mme
la Présidente. Ce qu'on fait avec le projet de loi, là, c'est de faire en sorte, là, que, pour certains postes limités, il n'est pas possible de porter des signes
religieux. Je comprends, cet après-midi, là, que, peu importent les explications que je vais donner, le Parti libéral va être en désaccord. Ça leur appartient. Puis c'est vrai que ça
leur appartient. Ils sont conformes à leurs
idées, ils sont cohérents avec leurs idées. C'est : Non, on n'interdit pas
le port de signes religieux chez les
enseignants. C'est ça, la réalité. On a une position qui est très claire, qui
est très campée du côté du Parti libéral. De mon côté, le gouvernement a fait preuve d'ouverture. On a inséré une clause
de droits acquis pour les personnes
déjà en poste qui portent un signe religieux. C'est un compromis majeur. On a
fait un compromis en décidant de retirer le crucifix de l'Assemblée
nationale pour le placer, le mettre en valeur ailleurs. C'est un compromis.
Le
gouvernement a présenté un projet de loi qui est modéré,
qui est applicable et qui rassemble les gens parce que la population québécoise, ce qu'elle souhaite,
c'est que les personnes en situation d'autorité, incluant les enseignants, ne
portent pas de signes religieux et que la laïcité de l'État soit inscrite dans nos lois. C'est ça que les Québécois souhaitent et c'est ce à quoi le
gouvernement s'est engagé. Et nous respectons notre parole.
Le
Parti libéral a toujours refusé de légiférer dans ce domaine-là, a toujours
refusé. Tout à l'heure, on nous disait : Ah! on a déposé le projet de loi n° 94. Ils avaient deux
ans et demi pour l'étudier, le faire adopter, ça n'a pas été fait. On l'a
laissé mourir au feuilleton. Dans le cadre
du projet de loi n° 62, l'article sur le visage à découvert est
suspendu. Et je ne vous ai pas
entendue, Mme la Présidente, entendre un député du Parti libéral dire qu'il
était en faveur des services publics et
de la réception des services publics à visage découvert. Durant toute la
commission parlementaire, durant les consultations particulières, durant l'étude détaillée, je n'ai
pas entendu de députés libéraux me dire qu'ils étaient d'accord que j'utilise
la disposition de dérogation pour faire
en sorte qu'au Québec les services publics soient donnés et reçus à visage
découvert.
Alors,
on m'indique que la députée de l'Acadie n'est pas d'accord avec l'utilisation
de la disposition de dérogation pour
qu'il y ait des services publics qui soient rendus à visage découvert et reçus
à visage découvert. J'ai finalement ma réponse.
Le Parti libéral est contre le fait qu'au Québec on reçoive des services
publics et qu'on les donne à visage découvert.
La Présidente (Mme Soucy) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé, est-ce que vous
voulez continuer l'intervention, votre intervention?
Mme Robitaille :
Bien, en tout cas, pour en revenir à ces jeunes femmes là dans mon compté,
elles auront donné beaucoup puis
elles vont être bloquées. Et la moindre des choses aurait été que ces
étudiantes-là puissent au moins avoir accès
aux écoles publiques pour travailler parce que ça leur permet d'intégrer la
société québécoise et, à partir de là, de donner à la communauté, et ça favorise l'intégration, c'est très
important. Alors, en bloquant ces étudiantes-là, qui ont donné beaucoup, il me semble qu'on va à l'encontre
de l'idée qu'on veut donner d'intégration et d'ouverture au Québec.
La
Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée...
Mme Robitaille :
...
La
Présidente (Mme Soucy) : Oui. Non, mais, est-ce que vous
aviez terminé?
Mme Robitaille :
Non, mais, sur ce, je voudrais revenir à l'article 6 et à l'amendement de
mon collègue de Jean-Lesage.
Une voix :
...
La Présidente
(Mme Soucy) : Juste un instant! Elle va juste terminer son
point, si vous...
M. Jolin-Barrette :
...hors propos. Alors, j'aimerais ça répondre...
La
Présidente (Mme Soucy) : M. le ministre, s'il vous plaît!
Je vais vous donner le droit de parole après. Continuez, Mme la députée.
• (15 h 20) •
Mme Robitaille :
Alors, si on revient... et justement, si mon collègue de Jean-Lesage a amené un
amendement, c'est qu'il y a depuis le début, hein, de l'étude détaillée, depuis
le début de l'analyse détaillée de l'article 6... on se pose de sérieuses questions sur l'applicabilité de cet
article-là. Ça ne fonctionne pas. On l'a vu dans les journaux. On a eu des
chroniqueurs, on a eu des experts en
consultation, on a eu des gens des commissions scolaires qui nous ont dit qu'il
y aurait un énorme problème avec ça.
Le ministre
est arrivé avec son amendement, ça ne nous aide pas plus à comprendre. Et,
quand, justement, on a posé des questions, à savoir : Bien, comment le
directeur d'école va faire, finalement, pour trancher? On a amené toutes
sortes d'exemples au ministre de l'Immigration, et puis lui-même n'a pas été
capable de trancher.
Alors,
quel... Puis nous, on a voulu amener des lignes directrices pour amener ce
directeur d'école là ou cette
directrice d'école là à décider si, oui ou non, ce symbole-là ou, en tout cas,
cet objet-là est un signe religieux ou non. Et, bon, l'amendement de mon collègue nous donne des lignes
directrices, peut-être, nous donne peut-être des pistes, oui, si la personne se
prononce, donne son opinion. Mais, encore une fois, je me pose toujours la
question : Quel outil donnera-t-on au directeur d'école pour décider, pour trancher, pour voir si ce que
porte la personne, ce que porte cette enseignante-là, est bel et bien un
signe religieux?
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, la question de la députée de
Bourassa-Sauvé revient à des discussions que nous avons eues en commission
parlementaire, parce que ça fait un bout de temps, là, qu'on parle de l'article 6.
La question... Et la députée de
Marguerite-Bourgeoys avait déposé un amendement qui disait : On devrait
avoir des lignes directrices. Je me
souviens de la conversation que nous avions relativement à la présence de liste
ou non de signes religieux. Je
voulais juste que la députée de Bourassa-Sauvé me rappelle, à savoir est-ce
qu'elle, elle souhaitait insérer une liste de signes religieux dans le cadre de la loi, parce que je n'ai pas eu de
proposition d'amendement du Parti libéral qui venait circonscrire les signes religieux. Alors, est-ce
que la députée de Bourassa-Sauvé est en faveur ou non d'une liste de signes
religieux?
La
Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le ministre. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, si vous voulez
répondre.
Mme Robitaille :
Moi, je veux savoir quels outils on va donner au directeur ou à la directrice
d'école parce que, depuis le début de
nos discussions sur l'article 6, c'est tellement compliqué que je me mets
à la place du directeur ou de la directrice
d'école puis, vraiment, je ne saurais pas quoi faire. Il y a tellement de cas
ambigus. Alors, je me demande s'ils vont avoir des formations, ces directeurs,
ces directrices d'école là, pour déterminer si, oui ou non, c'est bien le
principe de la personne raisonnable
qui va s'appliquer. Est-ce que, je ne sais pas, moi, est-ce qu'ils vont avoir
des experts qui vont venir dans leurs
écoles leur dire comment faire? Et de là l'amendement de mon collègue.
J'aimerais qu'il nous dise, encore une fois, le ministre, comment il va
encadrer ces gens-là qui vont devoir appliquer la loi.
La Présidente
(Mme Soucy) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, Mme la Présidente, l'article 6, il
est clair. C'est un article qui définit un signe religieux à la demande des collègues du Parti libéral. Et ce
qui me désole un peu quand je pose des questions, Mme la Présidente, c'est qu'il n'y a pas de dialogue. J'ai
l'impression de parler, Mme la Présidente, et de ne pas avoir d'écoute de
l'autre côté par rapport à ce que je dis, Mme la Présidente. J'ai essayé
d'avoir une relation bilatérale avec la députée de Saint-Laurent, ça ne fonctionne pas. Là, j'essaie d'en avoir une avec la
députée de Bourassa-Sauvé, ça ne fonctionne pas non plus. Je pose des questions, j'aimerais qu'on me réponde aussi parce
que c'est pertinent. Pour faire évoluer la discussion, il faut pouvoir
échanger et avoir des réponses aussi à mes questions.
Alors, on a
un test subjectif et un test objectif relativement à la définition de signes
religieux, c'est très clair, c'est applicable.
Et, vous savez, lorsque la personne croit elle-même qu'elle porte un signe
religieux, c'est interdit. Et, si,
aux yeux d'une personne raisonnable,
ça constitue un signe religieux, c'est interdit aussi. Les critères, je le
répète, ne sont pas cumulatifs. Et je rappelle qu'il y a une clause de
droits acquis dans un souci de compromis.
La
Présidente (Mme Soucy) :
Vous avez terminé, M. le ministre? Merci. Alors, pour respecter la rotation des
droits de parole, je vais inviter le député de Jean-Lesage à prendre la parole.
M. Zanetti : Merci, Mme
la Présidente. Alors, c'est un
véritable marathon. J'aime les marathons, les courses de demi-fond, les
courses à relais, mais là j'ai l'impression que, sur mon amendement, peut-être
qu'on est un petit peu à bout de course, de
peur peut-être d'user trop nos souliers. Je pense qu'on pourrait
en venir à voir ce que la commission
pense de cet amendement. Alors, je réitère,
étant donné que j'en ai fait le développement il y a quand
même un certain temps, l'objectif
de cet amendement-là et les injustices et les problèmes...
(Interruption)
M. Zanetti : C'est parce qu'il
y a le téléphone de quelqu'un qui... C'est pour ça.
La Présidente (Mme Soucy) :
...et à les mettre sur la vibration. Allez-y, M. le député.
M. Zanetti : Oui. Merci. Alors, voilà, l'objectif
de cet amendement est de faire en sorte qu'on oublie... de faire en
sorte de s'assurer qu'on n'oublie pas, qu'on ne cause pas, quand il y aura
une différence entre la perception subjective de ce qu'est un signe religieux pour la personne qui le porte et le jugement qu'on prétend objectif
mais qui, selon nous, n'est pas objectif,
la personne raisonnable qui devra juger d'un tel signe, s'il a un caractère
religieux ou non, quand il y aura une différence entre les deux et qu'il
faudra trancher à savoir est-ce qu'on priorise l'interprétation de ladite
personne raisonnable, qui ne pensera pas toujours
la même chose, ou encore celle de la personne qui porte le signe, donc qui sait
très bien s'il y a une valeur religieuse à ce qu'elle porte...
Nous, on veut qu'il soit clair dans la
loi, qu'est-ce qui est priorisé, parce qu'en ce moment ça ne l'est pas.
Alors, on veut que ce soit clair que,
lorsqu'il y a un conflit entre les deux, une contradiction, que
ce soit le signe, le critère subjectif qui
soit retenu, c'est-à-dire que ce soit la personne qui évalue le caractère
religieux ou non du signe qu'elle porte, pour être sûr d'éviter toute forme d'injustice dans l'application par les personnes
qui auront à appliquer ça, de cette définition
et de cette loi... projet de loi n° 21.
Alors, j'aimerais, si
possible, peut-être qu'on mette ça aux voix, là, s'il n'y a pas d'objection.
La
Présidente (Mme Soucy) :
Si les gens sont d'accord, nous allons mettre l'article... c'est-à-dire l'amendement de l'article 6 aux voix, du député de Jean-Lesage, à moins qu'il y ait d'autres
interventions. Alors, est-ce que l'amendement déposé par le député de Jean-Lesage
est accepté?
Des voix :
Rejeté.
M. Zanetti :
Est-ce que je pourrais avoir... Je demanderais le vote nominal, s'il vous plaît.
La
Présidente (Mme Soucy) :
Ça prend cinq députés, M. le député de Jean-Lesage, pour... Alors, qu'on appelle les députés.
Une voix :
...
La Présidente (Mme Soucy) : Bien, vous avez demandé un vote nominal. C'est
bien ça que vous avez demandé?
Une voix :
...
La Présidente (Mme Soucy) : Nous allons appeler les députés, si vous demandez
un vote nominal. C'est fait. Alors, nous attendons les députés.
• (15 h 28 — 15
h 41) •
La Présidente (Mme Soucy) : Alors, nous reprenons les travaux. Nous avons eu
la demande d'un vote nominal.
Donc,
les députés qui sont en faveur de l'amendement sur l'article 6 déposé par le député de
Jean-Lesage veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Zanetti
(Jean-Lesage).
M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão
(Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme David
(Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Melançon (Verdun),
Mme Ménard (Laporte), M. Fortin (Pontiac),
Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé),
M. Kelley (Jacques-Cartier), M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger),
Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Ciccone
(Marquette).
M. Bérubé
(Matane-Matapédia), M. Ouellet (René-Lévesque), M. Arseneau
(Îles-de-la-Madeleine).
La Présidente (Mme Soucy) : Les députés qui
sont contre l'amendement veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Jolin-Barrette (Borduas),
M. Laframboise (Blainville), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay), M. Girard (Groulx),
Mme McCann (Sanguinet), Mme Roy (Montarville), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny),
M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme LeBel (Champlain),
Mme Lachance (Bellechasse),
M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson),
M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Lefebvre
(Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi),
Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), Mme Hébert (Saint-François),
M. Dufour (Abitibi-Est), M. Lacombe (Papineau), Mme Charest
(Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), M. Julien (Charlesbourg), M. Boulet
(Trois-Rivières), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud),
M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle
(Huntingdon), M. Chassin
(Saint-Jérôme), Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger
(Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte
(Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau
(Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin (Rousseau),
M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau
(Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice),
M. Caron (Portneuf), Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean), Mme Lecours
(Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe
(Ungava), M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé),
Mme Guillemette (Roberval), M. Provençal (Beauce-Nord),
M. Jacques (Mégantic).
La Présidente (Mme Soucy) : Y
a-t-il des abstentions?
Alors, le résultat du vote : 25 pour,
58 contre, 0... 56 contre, 0 abstention.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Soucy) :
Rejeté. Alors, l'amendement est rejeté.
Oui,
M. le leader adjoint du gouvernement. Non? Alors, nous poursuivons nos travaux.
Une voix : ...
La
Présidente (Mme Soucy) : Oui. Alors, je suspends
les travaux quelques instants.
(Suspension de
la séance à 15 h 43)
(Reprise à 15 h 50)
La
Présidente (Mme Soucy) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Nous sommes toujours à l'article 6
du projet de loi n° 21. Alors, est-ce qu'il y a des interventions? Mme la
députée de Marguerite-Bourgeoys, la parole est à vous.
Mme
David : Oui, Mme la Présidente. M. le ministre tout à
l'heure a voulu faire des comparaisons de chiffres, 80, 82, alors j'aimerais ça qu'il me dise, une
question très, très simple, qu'il réponde à... ce n'est même pas un quiz, c'est
une petite question toute simple. 32 plus 27, ça fait combien, d'après vous?
M.
Jolin-Barrette : Ça fait 59.
Cela étant dit, cela étant dit, en mathématiques, on arrondit toujours au plus
haut. Et c'est 59 minutes et...
non, 59 heures et plusieurs minutes. Si vous voulez, je peux vous revenir
avec le chiffre précis, précis, précis, avec le nombre de minutes et le
nombre de secondes. Le souhaitez-vous?
La Présidente (Mme
Soucy) : Merci, M. le ministre. Oui, Mme la députée?
Mme David : Oui, on s'amuse, là,
c'est juste pour... Puis, j'imagine, le ministre s'amusait aussi en parlant de
80, 82, alors, hein?
La Présidente (Mme
Soucy) : ...article 6 maintenant.
Mme
David : Mais il y avait un ministre de l'Enseignement supérieur et de
l'Éducation qui était critique et qui était
virulent contre l'arrondissement des notes et pour les augmenter pour les
bulletins, si vous vous souvenez bien. Alors, vous parlerez à votre
collègue, votre cher ami voisin, le ministre de l'Éducation et de
l'Enseignement supérieur.
Mais on va
revenir à des choses qui sont fondamentales et on n'est plus dans les
mathématiques, on s'en va dans un
cours de philosophie, si vous permettez, parce que, derrière ce projet de loi,
c'est une vision, et vous l'avez dit très souvent, c'est une vision de la société que vous voulez, disons,
implanter à travers cette loi sur la laïcité. Et, dans cette vision, il y a
un certain nombre de mots qu'il faut définir. Et j'aimerais ça être dans votre
tête des fois, vous le savez, pour comprendre
comment vous fonctionnez. Je pense que j'en comprends plus que j'en comprenais
au début de nos consultations, mais
j'essaie de comprendre pourquoi et comment ça se fait que vous êtes si
confortable avec le deuxième paragraphe de votre amendement, quand vous dites : «Soit raisonnablement
considéré comme référant à une appartenance religieuse». Parce que je sais que vous allez m'apporter la
jurisprudence, c'est quoi, une personne raisonnable, etc., mais, vous savez, il
va y avoir beaucoup d'autorités compétentes qui devront juger de ça.
Donc, des personnes raisonnables, il va y en avoir plus qu'une, parce
qu'il va y avoir plusieurs commissions scolaires, parce qu'il va y avoir
plusieurs directeurs d'école ou autorités
déléguées pour appliquer cette loi, pour faire un jugement. Et puis vous savez
très bien que tous les êtres humains
ne sont pas tous identiques, ne pensent pas tous de la même façon et surtout,
surtout, n'ont pas les mêmes références culturelles, les mêmes
références, connaissances de la religion.
Parce que,
là, il est vraiment question de l'appartenance religieuse. Moi, je peux avoir
une idée de l'appartenance religieuse,
et je sais que vous allez me donner, me décliner comme une belle leçon apprise
votre catéchisme des signes religieux.
Une voix : ...
Mme
David : Alors, je dis volontairement «le catéchisme» parce que vous
vous souvenez... vous avez peut-être appris
le catéchisme, mais peut-être pas, ça dépend, vous êtes trop jeune, je le sais.
Moi, j'ai appris beaucoup le catéchisme, et effectivement, «Où est Dieu? Dieu est partout», etc., il y avait
vraiment beaucoup, beaucoup de choses qu'on apprenait par coeur. Mais, justement, probablement... et
profitons de votre réponse que vous ne connaissez pas le catéchisme, c'est
formidable que vous me donniez cette réponse-là, parce que vous êtes
l'incarnation même de la nouvelle génération, qui a eu quand même beaucoup moins de références
religieuses et qui, selon moi, n'aura aucune idée raisonnablement comment réagir devant quelque chose qu'il ou elle ne
connaît pas parce que... Ce n'est pas par mauvaise volonté, ce n'est pas par
mauvaise foi. Vous ne savez même pas
vous-même c'est quoi, le catéchisme, ou à peu près, ou les 10 commandements.
Alors, écoutez, il y a...
Des voix : ...
Mme David : Bien, non, c'est parce
qu'il m'a répondu sur le catéchisme. En tout cas, arrêtons...
La
Présidente (Mme Soucy) : Je
vous invite à être prudente et continuez votre intervention, Mme la députée.
Mme
David : Le collègue, je savais qu'il dirait ça, alors je vais essayer
de dire tous les mots qui vont faire en sorte qu'il ne saura pas comment
m'interrompre, et ça, c'est presque un défi, hein, qu'on se donne tous les
deux.
Et donc ce
qui est important, c'est que lui et moi, de deux générations différentes, on
incarne le Québec autant l'un que
l'autre, avec des références culturelles différentes, des références scolaires
différentes, des références d'éducation différentes, des références peut-être de lieu de naissance, de parents
catholiques ou pas, de... C'est infini, les différences entre deux êtres
humains qui, pourtant, sont à quelques mètres, ici, de séparation.
Et donc,
imaginez, imaginez quelqu'un qui a la délégation d'autorité, justement, pour
appliquer ça tel qu'on le dit, je crois, à l'article 12 : «Il
appartient à la personne qui exerce la plus haute autorité administrative [...]
de prendre les moyens nécessaires pour
assurer le respect des mesures qui y sont prévues.» D'abord, ça va être une sorte
de patate chaude, et là, la plus
haute autorité, tout le monde va regarder à terre pour ne pas devenir la plus
haute autorité administrative.
Parce qu'on a posé plein de questions sur
l'application de ça. Qui va vouloir aller dire : Je crois que, selon le deuxième alinéa proposé dans la supposée
définition de signe religieux, je suis donc la plus haute autorité
administrative à avoir la formidable
responsabilité et honneur de vous dire, cher collègue, que raisonnablement je
considère que votre signe religieux réfère à une appartenance religieuse
faisant partie des 105, 106, 107 — plus de 100, donc, dans la liste de
Statistique Canada — religions
différentes? Alors, c'est-u la 58e, la 57e?
Il veut
absolument être un bon administrateur à qui on a délégué la plus haute autorité
administrative. Il arrive le matin et
puis là il se fait dire soit par quelqu'un soit qu'il l'observe lui-même, parce
qu'il est un gestionnaire qui veut appliquer
toutes les lois... Et le ministre l'a dit tout à l'heure, nul ne peut prétendre
qu'il ne connaît pas les lois... Là, j'ai besoin de mes collègues
juristes, là, nul...
Une voix : ...
Mme
David : Nul ne peut ignorer la loi. Merci beaucoup, cher collègue. Je
savais qu'il y avait plein de juristes qui
viendraient à mon secours. Nul ne peut ignorer la loi. Donc, cette pauvre haute
autorité administrative qui arrive dans son école un matin puis qui dit : Oupelaïe! Mon collègue vient de
me dire... ou moi, j'observe quelque chose que je n'avais pas observé,
je suis obligé maintenant, la loi est passée.
Et puis là je
peux bien poser la question à la personne et qu'elle me réponde oui ou non,
mais, comme ce n'est pas cumulatif,
c'est alternatif, en tout cas, il s'agit, moi, dans mes mots à moi, que ça soit
un... parce qu'il faut parler au vrai monde
un jour, aussi, pas juste aux juristes, que ça soit soit l'un soit l'autre, et
non pas les deux. Et je pense que le conseiller du ministre trouve que j'ai raison dans ma définition. Donc, c'est soit
l'un soit l'autre, et non pas les deux. Donc, O.K., admettons que ce n'est pas le premier. Mais là il
lui reste juste le deuxième. Puis, le deuxième, bien là, il va où pour se
guider dans ce qu'il a vu ou ce qu'il a entendu dire que peut-être que? Et,
pour rajouter au niveau de complexité, on est pratiquement aux Jeux
olympiques, là, le signe n'est pas visible. Oh là là! Qu'est-ce qu'on fait, en
plus? Le signe n'est pas visible... Bonjour, Mme la Présidente. Je n'avais pas
remarqué qu'il y avait un changement de présidence.
Et donc, là, je
pense qu'il va vouloir retourner chez lui, parce que, là, il va trouver que sa
job est très, très, très difficile. Il faut qu'il décide entre le
premier paragraphe ou le deuxième paragraphe. Il faut que, tout de suite, il
dise : Oh mon Dieu! On m'a délégué
comme étant la plus haute autorité administrative, ce n'est pas vrai! Je pense
que je m'en retourne chez nous.
Deuxièmement, il doit choisir entre 1° et 2°, puis, si c'est le 2°, il
dit : Mais là qu'est-ce que je fais? Puis là, après ça, il faut qu'il aille
vérifier s'il y a vraiment le port d'un signe religieux, parce qu'il est
obligé, selon l'article 12, de
prendre les moyens nécessaires. Aïe! Les moyens nécessaires. C'est quoi, ça,
«les moyens nécessaires»? Parce qu'il faut qu'il porte un jugement, d'abord.
Est-ce qu'il y a vraiment un signe religieux?
• (16 heures) •
Alors là, on
a eu droit à toutes les réponses, alors des réponses qui ont été, après,
contredites et puis qu'un ministre a
dit quelque chose, l'autre ministre a dit autre chose. On ne fera pas de
fouilles à nu. Mais là on fait quoi, là, quand on veut absolument... Parce qu'il a beau dire que les
citoyens vont respecter la loi, mais il y a plein de corps institués qui
sont là pour faire observer la loi. Que ça
soit sur les autoroutes, que ça soit dans n'importe quoi, il faut respecter les
lois.
Alors, il
veut respecter la loi, il veut obéir au ministre. Il est responsable,
ce pauvre directeur d'école ou... puis là
on ne lui a pas donné de ligne directrice. On lui a donné deux amendements
dont le ministre dit, à tort, qu'on les trouve extrêmement formidables, ces amendements.
Mais on ne les trouve pas formidables, ni extrêmement formidables, parce que raisonnablement ils ne sont pas assez clairs.
Puis moi, je suis une personne raisonnable et puis je ne considère pas raisonnablement que je pourrais appliquer la loi
si j'étais un ou une directrice d'école ou une autorité administrative, parce que peut-être que le signe, il n'est pas visible. Puis là le
collègue est venu dire : Tu sais, là, telle collègue, moi, je pense
qu'elle porte un signe religieux. Puis c'est
peut-être une parure, puis c'est peut-être
un vêtement, puis c'est peut-être un bijou,
mais aïe! là, qu'est-ce que c'est qu'on fait, là? Qu'est-ce que c'est qu'on
fait? Puis là conciliabule, puis là le pauvre responsable administratif,
il va aller voir peut-être... il va être super mal à l'aise, mais il va peut-être
aller voir le ou la collègue qui, en
principe... peut-être que oui, peut-être que non, parce
que ce n'est pas visible. Puis, ô problème, ce jour-là, la personne... le signe est devenu invisible parce
que la veille, il était peut-être visible, parce que le vêtement était
différent, porté différemment. Là, il fait quoi? Il dit quoi?
Alors, il
fait signer un serment, un engagement moral? On n'a jamais entendu ces
questions-là, jamais, jamais. Et tout
le temps, tout le temps, tout le temps, le ministre nous dit : Je veux
collaborer, je veux l'améliorer. Mais ce n'est pas vrai parce qu'il s'autosuffit à lui-même, le
ministre. Il trouve que son article 6, tel que modifié, répond à tout. Nous, en
tout respect, on trouve que ça ne répond non seulement pas à tout, mais ça
répond à très peu de choses.
Alors, je
suis très embêtée, d'autant plus embêtée que, si on va chercher dans les dictionnaires,
je l'ai fait, ce qu'est un signe objectif, ils réfèrent toujours... Puis
là je le vois, dans sa tête, le mot «objectif» va apparaître dans quelques secondes. Il va dire que
le deuxième paragraphe, c'est un critère objectif. Mais qu'est-ce que
l'objectivité, M. le ministre, dans notre humble planète? C'est quoi,
l'objectivité? Il n'y en a pas, d'objectivité.
Alors, comment
il va faire? On en a parlé pour la liberté académique, on en a parlé pour
d'autres choses. L'objectivité,
j'aimerais ça, comme vous, que les choses soient claires dans la vie. On se
lève le matin, là, tout est clair. Mais
vous êtes ministre, vous déposez des lois puis vous êtes là pour les défendre,
pour nous les expliquer. On est là pour soumettre à votre attention qu'il y a peut-être des petits mots qui ne
sont pas clairs. Mais, dans ce cas-ci, je suis obligée de vous demander,
sans que vous me répondiez par des mots de juriste, que vous pensiez aux
directeurs d'école, par exemple, qu'est-ce que c'est, voulez-vous bien me dire,
que l'objectivité, en termes d'appartenance religieuse.
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Mme la
Présidente, il y a plusieurs choses dans ce qui a été dit par la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
La première
est au niveau du paragraphe 2° de l'article 6, qui est «soit raisonnablement
considéré comme référant à une
appartenance religieuse». On questionne la notion de personne raisonnable, que
nous avons eu l'occasion d'étudier à
plusieurs reprises dans le cadre de nos travaux. Personne raisonnable : «Personne
fictive qui sert de modèle objectif pour l'analyse de la conduite d'une personne afin de déterminer si elle a
commis une faute qui pourrait engager sa responsabilité civile ou
pénale.
«Modèle auquel
se réfère la loi lorsqu'il y a lieu d'analyser la conduite d'une personne. En
matière contractuelle, personne qui se comporte avec bon sens [et] d'une
manière réfléchie lorsqu'elle contracte avec une autre...»
Ça, c'est le
sens de la personne raisonnable. Notamment, également, la Cour suprême l'a
défini, qu'est-ce que constituait la
personne raisonnable. Écoutez, dans des conventions collectives, notamment dans
le secteur de l'éducation, supposons la CSQ, un emploi convenable : «Un
emploi approprié qui permet à une enseignante ou un enseignant victime d'une lésion professionnelle d'utiliser
sa capacité résiduelle et ses qualifications professionnelles, qui présente une
possibilité raisonnable d'embauche...»
Le critère de
raisonnabilité, de personne raisonnable, c'est un critère avéré par la jurisprudence. Je sais, et c'est présent dans le corpus législatif
aussi, à de nombreuses reprises, on en a fait la démonstration. Alors, c'est un
critère qui est applicable.
Lorsqu'on fait l'analyse, là, de l'article 6,
on m'a demandé de définir ce que constitue un signe religieux. On le dit, c'est un objet. Pour savoir si c'est un
signe religieux, on se met dans... La personne qui porte l'objet, elle-même,
si elle considère que c'est un objet, c'est
interdit durant la prestation de travail. Si la personne dit : Ça ne
constitue pas un objet religieux, un
signe religieux, mais qu'aux yeux de la personne raisonnable c'en est un, c'est
considéré comme un signe religieux et ce n'est pas permis de le porter.
La collègue de Marguerite-Bourgeoys, Mme la
Présidente, tout à l'heure, me disait : Peut-être, le ministre ne connaît pas le catéchisme, et les différents...
les 10 commandements, et, comment je pourrais dire, les composantes des
différentes religions. Je n'ai pas la
prétention, Mme la Présidente, de tout connaître, mais j'ai une connaissance
générale des choses aussi. Mais je
sais très bien que le catéchisme peut servir également à faire le petit
catéchisme de l'électeur aussi.
Alors, c'est un peu un clin d'oeil avec ce qu'on fait aujourd'hui. On adopte la
Loi sur la laïcité pour démontrer que la
société québécoise est pleinement laïque. Or, à l'époque où le crucifix a été
installé par Maurice Duplessis, on distribuait des petits catéchismes de
l'électeur à la campagne électorale de 1935.
Alors,
voyez-vous, c'est un peu ironique, mais c'est un peu une illustration de ce
qu'on fait avec la Loi sur la laïcité de
l'État. On a cheminé, au Québec, d'une façon évolutive, d'une façon
progressive. Mais on a eu un chemin qui nous a amenés à adopter le projet de loi n° 21 relativement à la laïcité
de l'État, relativement à avoir une séparation formelle entre l'État et
les religions.
Au niveau des
moyens nécessaires, à l'article 12, c'est présent couramment dans le
corpus législatif, dans 22 lois, dans 38 règlements,
l'utilisation des moyens nécessaires.
La députée de
Marguerite-Bourgeoys m'a posé beaucoup de questions au salon bleu, ici,
relativement à l'invisibilité des
signes. Elle disait : La croix invisible... Et j'ai toujours dit que la
loi s'applique avec discernement. Ça, c'est fondamental, et chaque personne qui est investie d'appliquer la
loi le fait avec discernement. La personne qui porte un signe religieux,
elle doit se conformer à la loi. Si elle sait que ça constitue pour elle un
signe religieux, elle ne peut le porter durant sa prestation de travail. L'autorité chargée de l'application de la loi
fera preuve de discernement aussi dans l'application des mesures, comme c'est
toujours le cas. Il faut faire confiance aux personnes qui sont chargées de
l'application de la loi, d'autant
plus que ce sont des cadres qui ont des responsabilités importantes, des
gestionnaires, les gens des ressources humaines
souvent. Il y a des cas de complexité à travers les différentes normes en
matière de relations de travail, et ce sont des professionnels.
Alors, les plus hautes autorités responsables,
administratives, se chargeront de l'application de la loi. Et j'ai confiance dans l'intelligence du jugement des
gens, Mme la Présidente. Il faut faire confiance aux gens. Il faut surtout faire confiance au fait que les gens respecteront
la loi. Et l'interprétation de la loi que l'on donne, c'est notre
interprétation, c'est
l'interprétation du législateur. Et je l'ai répété à plusieurs occasions, Mme
la Présidente, à l'effet que c'est très clair que, pour nous, tout signe religieux est interdit. Et on a mis un double critère, qui n'est pas cumulatif,
avec une analyse subjective et une
analyse objective. Alors, les balises sont là pour guider la plus haute
autorité administrative dans le cadre de l'application de la loi. Je
pense que c'est très clair et je pense que nous avons fait le débat sur l'article
6.
La Présidente (Mme Gaudreault) :
Oui, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Vous écoutiez avec passion ce que le ministre
disait, mais moi, je suis toujours déçue parce
que j'ai l'impression qu'on n'avance
pas dans cette réflexion-là parce que vous donnez toujours les mêmes
réponses. Vous allez dire que je pose
toujours les mêmes questions, mais c'est parce que
je n'ai pas les réponses. Alors, à un
moment donné, on finit par... mais là vous m'avez donné quand même
une petite brèche dans vos réponses, et puis comme vous, vous voyez bien les brèches
chez les autres, moi, j'essaie de voir les brèches aussi dans nos
conversations, peut-être une petite lueur où ça va me permettre
d'aller un peu plus loin.
Quand
vous dites que le signe est invisible et que l'autorité fera preuve de
discernement face à la situation, disons ça
comme ça, savez-vous ce qui me venait, M.
le ministre? C'est ce cher directeur
d'école ou directrice d'école, un matin, qui se fait dire : Moi, je ne sais pas, là, M. le directeur, mais
il me semble que ce collègue-là, hier, j'ai vu une croix portée à son cou. Puis là le directeur dit : Que
c'est que je fais avec ça? Puis là finalement la personne
est peut-être convoquée ou alors il
fait semblant d'aller dans classe puis il prétexte quelque chose pour regarder
s'il y a la petite croix. Puis là la croix n'est plus là parce que ce
jour-là l'habillement est différent, et donc ça cache. Bon.
J'entends
de ce que vous dites, mais peut-être que vous allez me préciser votre pensée,
que l'autorité fera preuve de discernement. Ça veut dire quoi, discernement?
Bof! On n'interviendra pas parce qu'on n'est quand même pas pour aller... vous comprenez, je n'ose même pas finir
ma phrase parce que je ne le sais pas comment il va vérifier ça. Il va dire :
J'ai eu la délation de quelqu'un qui est
venu me dire qu'hier tu portais une petite croix, mais là je ne la vois pas,
mais là est-ce que je te demande d'ouvrir le premier bouton de ta
chemise pour regarder s'il y a ça?
• (16 h 10) •
Savez-vous
c'est quoi, la différence entre ce discernement que vous demandez aux
directeurs d'école ou à l'autorité d'appliquer pour quelqu'un qui aurait
un signe invisible, sous-entendu le plus souvent catholique, puis on se
rappelle que la religion pourra discuter de
religion, si vous manquez de connaissances là-dessus, et l'autre qui porte le
hidjab? C'est que vous aurez, dans le discernement... vous n'aurez pas
cette question philosophique importante et morale de dire : Est-ce que je vais lui demander si je peux
vérifier si elle porte un signe invisible? Alors que les signes auxquels vous
aimez tant vous référer, qui sont des
signes visibles, qui sont le hidjab, le turban, la kippa, mais ça, c'est
visible, donc il n'y a pas de question de discernement.
Alors,
quand vous parlez de discernement, j'entends que nous, les signes invisibles,
sous-entendus souvent la croix de ma
grand-mère à laquelle j'ai tant référé, bien là, bien, ce n'est pas grave, on
laissera passer parce qu'on n'est quand même pas pour faire de l'acharnement religieux,
un peu comme l'acharnement thérapeutique, mais de l'acharnement religieux, alors que les signes dits visibles,
d'autres ont parlé d'ostentatoires dans une autre législature, bien, ceux-là,
c'est évident qu'il y a des religions. Et plusieurs spécialistes l'ont dit, il
y a des religions dont les signes, ce n'est pas une mesure comme prendre la température corporelle,
quand on dit : Tu fais de la fièvre, tu ne fais pas de la fièvre, avec nos
enfants ou nous-mêmes. Ce n'est pas parce qu'un signe est visible que la
personne a plus de convictions religieuses que quand le signe est moins visible, comme une croix qui est plus petite,
ou qui peut être portée, ou qui peut même ne pas être portée, mais quelqu'un est très, très, très catholique ou
farouchement provie... Puis ça, on
aura des belles discussions là-dessus
aussi. Mais moi, quand j'entends votre réponse, là, l'autorité fera preuve de
discernement, j'entends les plus visibles, ce sera plus facile, puis les
moins visibles, bien, on laissera passer.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre, est-ce que vous voulez répondre à Mme la
députée?
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, Mme la Présidente, je voudrais juste réitérer à la députée
de Marguerite-Bourgeoys que je
n'ai pas de signe religieux préféré, hein? Parce qu'elle a dit : Les
signes préférés auxquels vous référez. Alors, à chaque fois que j'ai parlé de signe
religieux, Mme la Présidente, c'est suite à une demande du Parti libéral qui me
demandait d'énumérer les signes religieux. Alors, j'ai donné des cas
d'exemples, Mme la Présidente. D'ailleurs, je n'ai toujours pas eu ma
réponse à savoir est-ce qu'on devrait insérer une liste de signes religieux ou
non. La députée de Bourassa-Sauvé, je lui ai posé la question tout à l'heure; j'attends
toujours, Mme la Présidente.
Alors,
plusieurs éléments qui ont été soulignés. Au niveau de l'application de la loi,
la députée de Marguerite-Bourgeoys nous dit : Il va y avoir des
difficultés d'application. Et on semble dire que les agents chargés de
l'application de la loi ne devraient
pas faire preuve de discernement. Mais je veux savoir : Dans le cadre du
projet de loi n° 62, au niveau des accommodements religieux, est-ce que, pour les agents chargés de
l'application, ça prend du discernement, ça prend du jugement?
La
Présidente (Mme Gaudreault) : Est-ce que c'est une question, M. le
ministre? Oui? Alors, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, je sais que c'est le sport préféré du ministre, quand il ne sait
plus où aller dans sa réponse, de
poser une question. C'est vraiment, vraiment tellement... je l'ai vu tellement
souvent que ça en est même un trait de personnalité.
Alors, je n'irai pas là-dessus, évidemment. Mais je veux qu'il continue avec
cette question de discernement, justement, parce que c'est vraiment
important.
Quand le directeur
d'école qui doit appliquer, selon l'article 12, et prendre les mesures...
Vous n'avez pas été capable, jusqu'à
maintenant, de donner un exemple, un exemple, du début à la fin, d'une journée
d'autorité compétente, là, la journée
d'un directeur d'école, là. Il n'y a pas personne, demain matin, qui va se
réveiller avec cette loi, malheureusement
adoptée, qui va savoir quoi faire dans son école. Et ça va être kafkaïen, ça va
être ubuesque, ça va être surréaliste,
tous les adjectifs ont été donnés.
Yves Boisvert, qui dit : «À partir de quand
un objet ou un vêtement devient-il "raisonnablement considéré comme faisant référence à une appartenance
religieuse"?» Agnès Gruda, qui dit : «Faudra-t-il faire appel à des
experts pour
décider si toutes les croix réfèrent forcément au christianisme? Et toutes les
étoiles de David au judaïsme? Si des boucles
d'oreille en forme de croix "réfèrent" ou non à Jésus?» Pourquoi vous
n'aimez pas ça répondre à ces questions-là? Ce n'est même plus moi, là, l'humble députée, qui vous pose la question,
c'est des gens qui font des éditoriaux, c'est des profs d'université que des fois vous aimez,
d'autres fois vous aimez moins. C'est toutes sortes de monde qui vous posent
en toute honnêteté des questions.
Alors, je le
sais, que j'ai fait une faille, là, parce que je sais que c'est juste là-dessus
que vous allez me répondre. Puis vous
pouvez. Ça ne me dérange plus. Mais, quand même, il y a des gens importants dans
la société qui ont ça. Puis vous allez voir, un jour, peut-être qu'on réussira
à se rapprocher puis à avoir des consensus. Mais pour l'instant, tant
que vous n'êtes pas capable, par empathie,
de vous mettre dans la peau de quelqu'un qui aura à appliquer votre loi, je
trouve ça très décevant.
>959 La Présidente (Mme
Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée.
Avant de poursuivre, j'aimerais inviter les
membres qui sont ici aujourd'hui, là, s'il vous plaît, évitez les échanges trop bruyants puisque
ce sont vraiment les membres de la commission qu'on devrait
entendre ici en priorité.
M. le ministre, est-ce que vous vouliez
intervenir à ce point-ci? Alors, la parole est à vous.
M.
Jolin-Barrette : Alors, Mme la Présidente, moi, j'aime tous les professeurs d'université. Cependant,
je ne note pas la même réciprocité de tous les professeurs d'université à mon endroit. Alors, c'est plus ça, la difficulté, je crois, à laquelle on fait référence. Et je ne vise pas la
députée de Marguerite-Bourgeoys ni la députée
de Saint-Laurent. On parle
de professeurs d'université à l'extérieur de cette enceinte.
Deuxièmement, l'article du projet
de loi, avec les critères, le fait de
se mettre dans la position de la plus haute autorité, nous l'avons fait, et,
avec ces critères-là, c'est justement que ça
va permettre à la plus haute autorité
d'appliquer la définition de «signe religieux», comme ça se fait pour
les demandes d'accommodement. Il y a toujours une notion de discernement lorsqu'on applique une norme. Ça
s'applique autant du policier qu'un agent autorisé... par un poursuivant
autorisé. Dans tous les cas, la personne qui est chargée de l'application de la
loi, et ceci, présentement, en matière civile, fait en sorte que, dans le domaine du travail, c'est la plus haute
autorité administrative. Il n'y a pas de difficulté d'application, tel
que c'est soulevé par la collègue de Marguerite-Bourgeoys, avec égards.
Et il faut se rappeler, Mme la Présidente, que
le sens commun, Mme la Présidente, commande et explique l'interdiction des signes religieux. Ce n'est pas nouveau, là. Les
Québécois savent ce qu'est un signe religieux. Il n'y a pas de crainte à avoir, Mme la Présidente. La
définition permet de s'assurer de faire en sorte que les signes religieux
seront interdits. Si la personne perçoit le signe religieux comme un signe
religieux, c'est interdit. Il faut se fier à la bonne foi des gens. Et, lorsqu'on me parle des signes
invisibles, de dire qu'on vise certaines religions plutôt que d'autres, c'est
faux, Mme la Présidente. Toutes les
religions sont traitées équitablement, sur le même pied d'égalité. D'ailleurs,
ça fait même partie de la définition
que nous avons adoptée au niveau de la laïcité, l'égalité de tous les citoyens
et citoyennes, et surtout le respect de la liberté de conscience et la
liberté de religion.
Alors, je
pense qu'avec la définition que nous donnons, avec l'intention du législateur,
il n'y aura pas de difficulté d'application relativement au projet de
loi, à son application et à l'application de l'article 6 tel qu'amendé.
La
Présidente (Mme Gaudreault) :
Avant de poursuivre, je voudrais vous confirmer qu'il vous reste deux minutes
de temps de parole. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
• (16 h 20) •
Mme David : Vous savez, je vais le
faire rapidement, mais je veux référer à mon expérience personnelle de ministre. Un jour, vous ferez ça, vous passerez le
mot à vos collègues, et vous serez plus vieux, et sage, et tout ce qu'on
veut, et vous direz peut-être : Bien, c'est bon, dans des projets de loi,
d'avoir des guides d'accompagnement. On en a beaucoup
discuté. Dans un projet de loi que j'ai fait, les gens ne savaient pas comment
appliquer, entre autres, ce qu'est une violence à caractère sexuel. Il faut des
définitions précises. Puis on demande à des centaines d'institutions
d'appliquer une loi, mais ils
disent : Oui, mais commençons par la définition. Vous, vous êtes un
extraordinaire optimiste, serein par rapport à, peut-être... par rapport
à cette question-là, mais j'ose dire que ce n'est pas partagé du tout, du tout
par ceux qui auront à le faire.
Je donne un
exemple. Quand vous êtes policier puis qu'il faut que vous arrêtiez quelqu'un
qui est en excès de vitesse, on lui fournit quelque chose — je ne sais pas si vous savez comment ça
s'appelle — on lui
fournit quelque chose pour qu'il
puisse mesurer la vitesse. Ça s'appelle un cinémomètre. Alors, avec ça, il peut
vous arrêter, vous, parce que vous
voulez revenir trop vite à la maison. Et là, ce n'est pas votre cas,
évidemment, ce n'est pas vous qui conduisez, mais ça arrive de se faire arrêter, même dans ces
belles voitures là. Et on donne un outil, donc, aux gens pour appliquer les
lois, puis la loi, c'est 100 kilomètres-heure. Tu fais 112,
125, tu te fais arrêter, mais là tu as une preuve.
Là, la preuve
qu'on appartient à une religion ou à une autre, que le signe est religieux ou
pas, j'aimerais ça être dans votre
peau des fois, je dormirais mieux parce que je dirais : Mon Dieu que ça a
l'air simple! Ça a l'air simple, les applications de loi, pour lui. La
religion, ça fait des millénaires que ça dure puis ça a l'air, pour vous...
d'un article de loi, ça décrit... C'est
objectif. Là-dessus, je n'arrive pas à me mettre dans votre cerveau. Là-dessus,
je ne suis pas capable d'empathiser avec la façon presque désinvolte que
vous dites : Ça va être facile. Je ne suis pas sûre.
La Présidente (Mme Gaudreault) :
Mme la députée, malheureusement, je dois vous...
Mme David : Ce n'est pas
gentil, «désinvolte»?
La
Présidente (Mme Gaudreault) : Non, non. Je dois vous interrompre puisque vous n'avez plus de temps de
parole. Est-ce que vous voulez intervenir, M. le ministre? La parole est à
vous.
M. Jolin-Barrette : Oui. Mais
désinvolte, Mme la Présidente, je ne pense pas que c'était très gentil.
Cela étant dit, revenons au policier. Quel est
l'outil pour donner un constat d'infraction? D'ailleurs, je tiens à rassurer la collègue de Marguerite-Bourgeoys, mon
garde du corps respecte les normes, le Code de la sécurité routière. Et
je sais qu'elle le sait.
Mme David : Vous savez qu'on a des
choses en commun.
M. Jolin-Barrette : Oui, plus qu'on pense. Plus qu'on pense. Alors,
revenons au cinémomètre. Le policier qui donne un constat d'infraction ne le donne pas nécessairement en fonction
du cinémomètre, hein? Il n'est pas requis pour... Bien, il peut, mais il n'est pas requis d'avoir un
outil technologique pour le faire. Ça, c'est bien important. Il peut estimer
la vitesse, et son témoignage vaut preuve
aussi. Alors, ça, c'est important aussi de dire ça. Il vaut preuve... Le
policier fait preuve de discernement
dans l'application de la loi. Un agent chargé de l'application de la loi fait
preuve de discernement. Et je pense qu'à tous les jours les gens qui
sont chargés de l'application de la loi le font avec jugement.
Est-ce que je
suis serein? Est-ce que je suis optimiste, Mme la Présidente? Oui, parce que
j'ai confiance dans les gens. Et j'ai
confiance aussi qu'il y a une volonté que le projet de loi soit adopté et
surtout que les gens respectent la loi.
Vous aurez
toujours des situations, et on ne le souhaite pas, où des gens tenteront de
contrevenir à la loi. Ça arrive. Or,
notre travail, c'est d'inviter les gens à respecter la loi et de leur expliquer
l'importance de la loi. Et, dans ce cas-ci, on est face à une situation où l'État québécois, il devient laïque et il y
a des exigences qui sont traduites à travers l'interdiction de porter des signes religieux. Alors, Mme la
Présidente, la définition, elle est claire, et je l'ai proposée en conformité
avec ce qu'on m'a demandé du côté du Parti
libéral. J'ai inséré des critères d'analyse pour faire en sorte de couvrir
toutes les situations et critères d'analyse subjective et objective. Je
pense que nous avons fait le tour de la question.
La
Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le ministre. Je crois que Mme la députée de
Bourassa-Sauvé a demandé à prendre la parole. La parole est à vous.
>17841 Mme Robitaille : Oui, une petite intervention. Bien, j'écoute le ministre.
Je comprends que le directeur d'école raisonnable, c'est quelqu'un qui a
un gros bon sens. Est-ce que c'est ce que je dois comprendre?
La Présidente (Mme Gaudreault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, j'ai eu l'occasion à
plusieurs reprises de parler du critère de la personne raisonnable. Pour fins d'archive, Mme la Présidente, «personne raisonnable» :
«Modèle auquel se réfère la loi lorsqu'il y a lieu d'analyser la conduite d'une personne. En matière
contractuelle, personne qui se comporte avec bon sens et d'une manière réfléchie lorsqu'elle contracte avec une
autre. Personne fictive qui sert de modèle objectif pour l'analyse de la
conduite d'une personne afin de déterminer si elle a commis une faute
qui pourrait engager sa responsabilité civile ou pénale.»
Mme la
Présidente, l'interdiction des signes religieux... On n'est pas la seule
juridiction dans le monde entier à interdire
le port de signes religieux. Et, dans d'autres États, Mme la Présidente, ils
ont des lois, et les lois sont appliquées. Est-ce que le Parti libéral a moins confiance dans les gestionnaires
québécois relativement à leur jugement que dans des gestionnaires européens qui appliquent les lois?
Honnêtement, là, il faut faire confiance à l'intelligence des gens. Et je
pense que, si, dans d'autres juridictions,
c'est possible de le faire, bien ce n'est pas saugrenu non plus de le faire au
Québec lorsqu'on se définit un modèle
propre de laïcité, lorsqu'on décide, là, qu'au Québec il y a une interdiction
du port de signes religieux pour certaines personnes en situation
d'autorité.
Et
d'ailleurs, et d'ailleurs, je pense que c'est fondamental d'aller en ce
sens-là. Ça fait 11 ans, 12 ans qu'on en parle. Dans le rapport Bouchard-Taylor, là, on exprimait le fait que les
personnes qui incarnent l'autorité de l'État, qui exercent un pouvoir de
coercition, devaient être visées par l'interdiction de porter un signe
religieux. Et même M. Bouchard et
M. Taylor disaient — je pense, c'est plus M. Bouchard — disaient : Les administrateurs des
commissions scolaires devraient être visés par l'interdiction du port de
signes religieux.
Alors, on
s'inspire du rapport Bouchard-Taylor. Et, si de grands sociologues comme
M. Bouchard et M. Taylor ont
recommandé l'interdiction du port de signes religieux et que M. Guy
Rocher, éminent sociologue, également professeur émérite à la Faculté de droit de l'Université de Montréal, dit...
Écoutez, avec sa grande sagesse, qui a participé à la rédaction du rapport Parent au début des années 60, qui
a vu la déconfessionnalisation du système scolaire québécois, la sécularisation,
qui a participé à la sécularisation de la
société, peut-être qu'on devrait se référer à M. Rocher, peut-être qu'on
devrait écouter ce qu'il nous dit. Et
qu'est-ce qu'il nous dit, M. Rocher? Il nous dit : Les enseignants ne
devraient pas porter de signes religieux. Et ce n'est pas moi qui le
dis, Mme la Présidente, c'est Guy Rocher.
Alors,
M. Taylor est d'un avis, disons, divergeant. Mais, pour M. Taylor,
son avis change relativement souvent. Alors, en termes de pensée, je
vais me référer à M. Rocher.
La Présidente (Mme Gaudreault) :
Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Robitaille : Oui. Je ferais
juste remarquer que M. Bouchard a jugé ce projet de loi là radical.
M. Jolin-Barrette : Et M. Bouchard a aussi dit que c'était une
erreur de ne pas avoir mis les recommandations de son rapport dans un projet de loi à l'époque où il a été rendu.
Alors, M. Bouchard n'est pas d'accord avec le fait que les enseignants soient visés par l'interdiction du
port de signes religieux, mais M. Bouchard est d'accord avec le reste, par
exemple.
La Présidente
(Mme Gaudreault) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
>17841 Mme
Robitaille : Oui. Alors, M. Bouchard a dit que le projet de loi était
radical. Il a aussi dit que le projet de loi était inapplicable. Alors,
on a un problème. En tout cas, un des coauteurs du rapport Bouchard-Taylor...
M.
Jolin-Barrette : Bien, question intéressante, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme
Gaudreault) : On va laisser Mme la députée terminer, M. le ministre.
Mme
Robitaille : Donc, radical et inapplicable. Alors, on a un problème.
L'homme... le directeur d'école qui a... le directeur d'école
raisonnable, sérieusement, là, sérieusement, pensez-vous que le directeur
d'école raisonnable va se bâdrer d'un signe religieux invisible, même s'il sait
que le gars, il porte une croix en dessous de son chandail? Pensez-vous
vraiment, Mme la Présidente, que le directeur d'école raisonnable va vraiment
se bâdrer de ça?
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : J'aimerais ça qu'on définisse «se bâdrer de ça».
Qu'est-ce qu'on veut dire par là?
La Présidente (Mme
Gaudreault) : Mme la députée.
Mme
Robitaille : Bien oui, oui, avec plaisir. Pensez-vous vraiment que le
directeur d'école va se soucier de cela?
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Du fait qu'une personne porte un signe religieux sous
ses vêtements?
Mme
Robitaille : Oui. Il le sait, on lui a dit. Alors, qu'est-ce que vous
pensez que le directeur d'école raisonnable devrait faire?
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, dans un premier temps, les individus savent qu'ils
ne peuvent pas porter de signes religieux s'ils sont visés par la loi.
Premier élément.
Deuxième
élément, si ça constitue un signe religieux aux yeux d'une personne
raisonnable, il est interdit. La députée de Bourassa-Sauvé aime beaucoup, beaucoup donner des exemples qui sont
hypothétiques. Peut-être, alors, Mme la Présidente, on se retrouve dans
une situation où la définition, elle est claire. Les gens souhaitent se
conformer à la loi. Ça, c'est fondamental.
Je
reviens sur les propos de M. Bouchard. Le projet de loi, il est inapplicable.
La députée de Bourassa-Sauvé dit cela. M. Bouchard soulève des
difficultés, dans son opinion, relativement aux professeurs... aux enseignants,
pardon, aux enseignants. Or, pour le reste
du projet de loi, c'est le contenu de son rapport, notamment. Alors, je doute
que M. Bouchard considère que
l'intégralité du projet de loi est inapplicable, considérant le fait que ce
sont ses propres recommandations que
l'on retrouve dans le cadre du projet de loi. Alors, je pense qu'on devrait
citer M. Bouchard à bon escient et de façon adéquate lorsqu'on invoque
ses propos.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme
Robitaille : Je pense que le ministre ne répond pas à ma question toute
simple, Mme la Présidente. Est-ce que, et
c'est important de le savoir, est-ce que le directeur d'école raisonnable
devrait se soucier du signe religieux qui est porté sous le col roulé de
son enseignant?
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, l'enseignant... le directeur
d'école fait preuve de discernement dans l'application
de la loi. C'est interdit de porter un signe religieux. Durant la prestation de
travail, c'est interdit de porter un signe religieux.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme
Robitaille : O.K. Alors, ce que je comprends, c'est que le directeur
d'école devrait agir parce que son enseignant porte une croix sous son
col roulé. Est-ce que c'est vraiment sérieux? Est-ce que ce n'est pas une perte
de temps?
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre.
• (16 h 30) •
M.
Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, la loi, elle est claire. Ce n'est pas possible de porter un signe
religieux, point, durant les fonctions, si on est visé par la loi. Je ne
peux pas être plus clair que ça, Mme la Présidente.
Alors, je
comprends la députée de Bourassa-Sauvé
de dire : Qui va être chargé de l'application de la loi? Est-ce que
le directeur d'école doit se soucier de cela? Les gens vont respecter la loi.
Et je souhaite que le Parti libéral encourage
les gens à respecter la loi. Honnêtement, je souhaite entendre les membres du Parti libéral inviter les organisations chargées de l'application de la loi aussi à faire appliquer la loi.
Parce qu'au courant de la commission parlementaire
j'ai été un peu déçu, à quelques occasions, alors que certains collègues
ont eu de la difficulté à dire qu'ils
condamnaient la position des commissions
scolaires qui disaient : Nous
n'appliquerons pas la loi ou des municipalités qui disaient : Nous
n'appliquerons pas la loi.
Honnêtement, je pense qu'ici, comme parlementaires, on doit s'assurer de soutenir
l'application de la règle de droit un coup qu'elle est votée à l'Assemblée
nationale. Ça, je m'attends à ça, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Gaudreault) : Mme
la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme
Robitaille : Oui. Alors, je
dois comprendre, et c'est important parce qu'il y a peut-être
des directeurs d'école qui nous
écoutent, alors, que le directeur d'école devra demander à son enseignant
qui... devra vraiment... Est-ce que ce n'est pas un peu l'inquisition si vraiment il faut qu'il pose
des questions puis il essaie de savoir si un individu porte une croix sous son col roulé? Il y a tellement de
problèmes dans les commissions
scolaires actuellement. Dans mon comté, par exemple, il manque beaucoup d'espace. Il y a
toutes sortes de choses qu'ils doivent régler. Est-ce que ça doit être une
priorité? Moi, je pense juste aux signes
religieux invisibles, c'est-à-dire qui sont sous le col roulé d'un enseignant.
Donc, si je comprends bien, le ministre
nous dit : Oui, pour bien faire son travail, le directeur d'école devra vraiment
essayer de savoir, et, s'il y a un doute, s'il y a un soupçon, il devra
agir. Je pose la question.
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, la loi, elle est claire, il est interdit de porter un signe religieux.
La députée de Bourassa-Sauvé souhaite faire une inquisition. La loi sera
appliquée avec discernement.
Alors, Mme la Présidente, j'ai répondu abondamment à cette question-là. Le Parti libéral n'a pas déposé d'amendement
encore. S'il souhaite avoir une précision dans le cadre du projet de loi, s'il
souhaite apporter des bonifications... Mais ça fait
4 h 2 min 46 s qu'on est sur le même article, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Gaudreault) : Mme
la députée.
Mme Robitaille : Bien, oui,
considérant les réponses du ministre, je pense qu'il serait important d'essayer
de parfaire la loi. Et justement mon collègue vous propose un amendement.
La Présidente (Mme Gaudreault) : Alors,
M. le député de Nelligan.
M.
Derraji : Merci, Mme la Présidente. Très heureux de me retrouver encore une fois avec le ministre.
Je pense qu'on commence à faire un bon lien d'échange. Mais, jusqu'à
hier, Mme la Présidente, j'ai cru qu'on s'appréciait mutuellement, mais il m'a oublié, de m'inviter à faire du jogging avec
lui. Donc, je suis un peu déçu. Donc, la prochaine fois, il va penser à
moi.
Donc, Mme la Présidente, j'ai quelque chose à
proposer au ministre. Je pense que, depuis tout à l'heure, mes collègues et
l'ensemble des collègues posaient des questions par rapport à l'applicabilité
de la loi, et je vais déposer l'amendement suivant : Donc, l'article, il
est modifié par l'ajout, à la fin, des alinéas suivants :
«Le ministre
précise par règlement les principes directeurs portant sur l'application de la
définition d'un signe religieux afin d'accompagner les organismes dans
l'application de la présente[...].
«Tout règlement édicté en vertu de cet article
doit faire l'objet d'une étude par la commission compétente de l'Assemblée
nationale dans les trente jours de sa publication.»
Je dépose...
La
Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, M. le député, vous pouvez peut-être nous expliquer ce qui motive
cet amendement en attendant que des copies soient faites pour distribution aux
membres de la commission.
M.
Derraji : Oui, merci, Mme la Présidente. Au fait, le présent
amendement vise justement la réponse à plusieurs, plusieurs questions, mais aussi à inviter le
ministre à un principe qu'il aime beaucoup, c'est le principe de la coopération.
Mais on ajoute aussi un principe de la
transversalité. Moi aussi, j'essaie... le principe de la transversalité. Et le
but, c'est d'accompagner les organismes qui veulent appliquer la loi.
Et, par
rapport à ça, j'ai un document, parce que, tout à l'heure, nous avons eu
l'occasion de parler des écoles, et
je vais... Je ne sais pas, le ministre, s'il a déjà eu l'occasion de voir
l'Observatoire de la laïcité en France, et, au niveau de l'observatoire, on retrouve toute une liste de
documents. Et, depuis le début de nos échanges, Mme la Présidente, avec le ministre, on demande que les organismes soient
accompagnés parce que ce qu'on veut, c'est justement s'assurer de l'applicabilité de la
loi. Quand la collègue de Saint-Laurent, tout à l'heure, posait des questions
au ministre de l'Éducation, ce n'est pas vrai qu'il ne va pas y avoir
des questions.
Le ministre,
Mme la Présidente, proposait que c'est lui, le porteur du projet de la laïcité.
Mais, demain, il faut que quelqu'un
le porte à travers l'ensemble des ministères qui seront impliqués, et
organismes. Et c'est dans ce sens que la proposition de cet amendement
vise à se donner des principes directeurs, et ces principes directeurs vont
aider à, un, l'application de la définition
d'un signe religieux, mais accompagner sur plusieurs niveaux ces individus qui
travaillent au sein de ces
organismes. Le ministre, toujours, fait référence à un point par rapport à la
personne raisonnable, au référent, depuis le début. C'est bien, mais,
encore une fois, le fardeau ne doit pas être sur cet individu.
Donc, j'aimerais bien, avant de continuer mes
arguments, savoir un peu, le ministre, qu'est-ce qu'il pense de l'amendement et
continuer l'échange avec lui.
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, si le député de Nelligan veut faire du sport avec moi, ça va me
faire plaisir de l'inviter à courir
avec moi, mais il va falloir qu'il coure vite parce que je suis rapide. Alors,
pour une remise en forme, j'offre mes services gratuitement au député de
Nelligan. Ça va me faire plaisir.
M. Derraji : Merci, merci, merci!
• (16 h 40) •
M.
Jolin-Barrette : Alors, Mme
la Présidente : «Le ministre précise par règlement les principes
directeurs portant sur l'application
de la définition d'un signe religieux afin d'accompagner les organismes dans
l'application de la présente[...].
«Tout règlement édicté en vertu de cet article
doit faire l'objet d'une étude par la commission compétente de l'Assemblée
nationale dans les trente jours de sa publication.»
Bon, dans un
premier temps, on voit que le deuxième alinéa de l'amendement est issu d'une
idée qui provient d'une autre commission parlementaire, celle de la Commission avec les relations avec les citoyens, et j'ai eu l'occasion de dire à plusieurs occasions qu'il n'est pas
normal, il n'est pas fréquent d'étudier en commission parlementaire les
différents projets de règlement. C'est une exception.
Pour ce qui
est du premier alinéa, le député de Nelligan souhaite qu'on vienne préciser par règlement les
principes directeurs portant sur
l'application de la définition d'un signe religieux. Mme la Présidente, tel que je le dis depuis le début, j'ai inséré une définition pour satisfaire le Parti libéral. Je constate qu'encore une fois le Parti libéral ne veut pas
venir préciser ce que constitue la définition d'un signe religieux. Je
n'ai eu aucune proposition à ce jour, là. Depuis, là, les 60 heures que nous avons eues en commission parlementaire, 59 et plusieurs minutes... Donc, si on
arrondit... C'est des minutes. Mme la Présidente...
La
Présidente (Mme Gaudreault) :
Oui. Je vais vous demander d'éviter de vous interpeler d'un côté et de l'autre.
C'est M. le ministre qui a la parole en ce moment.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Vous
savez, j'ai passé tellement de temps avec la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne également, cette session-ci, et elle voulait toujours
des chiffres. Alors, vous savez, ça m'est rentré dans la tête, il faut que
je produise des chiffres maintenant pour les collègues du Parti libéral.
Alors, Mme la Présidente, l'amendement que nous avons déposé relativement à la
définition de signe religieux, il est
clair. Le Parti libéral n'a proposé aucune définition de ce que constitue
un signe religieux. On veut créer un règlement, avoir des lignes directrices.
Je vous dis qu'il n'est pas nécessaire d'avoir un règlement qui crée des lignes
directrices. L'article, en soi, fait foi et il permet de savoir ce que
constitue un signe religieux.
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le député de Nelligan.
M.
Derraji : Je ne pense pas
que le ministre a bien compris ou bien moi, je n'ai pas très bien
exprimé ce que je voulais dire. Je ne
suis pas là sur la définition du signe religieux, Mme la Présidente, je suis plus sur l'application de la définition du signe
religieux. C'est deux choses différentes. C'est deux choses différentes.
Et donc le ministre
précise, par règlement, les principes directeurs portant sur l'application de
la définition d'un signe religieux. Donc, en quelque sorte, le ministre
nous ramène une définition d'un signe religieux. C'est excellent. Il a fait l'effort de l'amender depuis le début de
son dépôt de projet de loi. Excellent. Ce que je vise et ce que nous visons
avec le dépôt de cet amendement, Mme la
Présidente, c'est se donner des
principes directeurs pour l'application de la définition.
Et tout à l'heure, Mme la Présidente, le ministre a fait référence aux gestionnaires européens.
Quand le ministre parle des
gestionnaires européens, il parle de quels pays précisément?
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : M. le Président... Mme la Présidente, pardon, sur
l'amendement qui est proposé, on parle d'application
des principes directeurs sur l'application des signes religieux. Or, est-ce
dire que le député de Nelligan est d'accord
avec la définition de signe religieux? Parce que ça, c'est fondamental. Avant
même d'amender, là, il faut savoir est-ce
que, sur le contenu, là, on est d'accord. Avant d'appliquer, là... parce que ce
que le député de Nelligan me propose, c'est de dire : Écoutez, on va établir un
règlement qui va dire comment appliquer l'interdiction du port de signes
religieux. Or, si on propose ça, ça
veut dire qu'on est en accord avec le début de l'article, avec les critères,
avec la définition, que c'est un objet, que c'est un signe religieux,
«tout objet, notamment un vêtement, un symbole, un bijou, une parure, un
accessoire ou un couvre-chef», et avec les deux critères, le critère subjectif
et un critère subjectif.
Des voix :
...
M. Jolin-Barrette : Excusez-moi, Mme la Présidente, un critère subjectif et un critère
objectif. Vous savez, rendu à cette
heure-là, après le nombre d'heures, il peut arriver que j'échappe quelques
mots. Vous m'en excuserez, Mme la Présidente.
Une voix :
...
M.
Jolin-Barrette : Pardon? Je suis jeune? Bien, moins qu'avant, moins
qu'avant.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Jolin-Barrette : Vous savez, je suis moins jeune qu'il y a 4 h 13 min,
mais je suis heureux d'avoir vécu cette expérience-là avec vous. C'est un moment privilégié, d'ailleurs celui
avec la députée de Saint-Laurent, parce qu'on n'avait pas eu l'occasion,
depuis son élection, de partager un moment comme celui-là.
Donc, ça voudrait
dire que, si on adoptait le règlement sans que le député de Nelligan soit en
accord avec la définition, bien,
l'application pourrait même être ultra vires, au-delà des compétences, parce
que la base même de l'article, c'est
la définition de signe religieux. Alors, je voudrais savoir est-ce que, pour la
définition de signe religieux, le député de Nelligan, il est d'accord
avec ça, avec ce que j'ai proposé sur cette définition précise.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le député de Nelligan.
M.
Derraji : Merci, Mme la Présidente. Je pense que le ministre, il
maîtrise très bien l'échange et jouer sur les propositions... J'essaie
de faire attention parce que je ne... Hein?
Une voix :
...
M.
Derraji : Ah non! Ce n'est pas grave. Mais vous avez le droit, hein,
vous le savez. Écoutez, vous avez le droit, hein? Vous avez le droit, hein? Moi, je n'émets pas de commentaire à
quelqu'un qui fait un lapsus ou une erreur. Vous avez le droit. Hein?
Une voix :
...
M. Derraji :
Non, non, non! Il ne faut pas juger les collègues.
La Présidente (Mme Gaudreault) : Je vais vous demander d'éviter de vous interpeler
d'un côté et de l'autre, s'il vous plaît. Alors, on revient à
l'amendement. M. le député de Nelligan, est-ce que vous vouliez poursuivre votre
intervention? Merci.
M.
Derraji : Oui, merci, Mme la Présidente. J'aime beaucoup la façon avec
laquelle le ministre ramène sur la table...
pour me dire : Le député de Nelligan, qui ramène un amendement... mais,
comme il ramène un amendement, est-ce qu'il
est d'accord avec ma définition de signe religieux? Bien, écoutez, Mme la
Présidente, je vais être honnête et direct dans ma réponse. Si je propose cet amendement, c'est parce que je veux
ramener de la clarté à l'amendement déjà proposé, c'est parce que... depuis plusieurs heures que
nous essayons de comprendre l'applicabilité de l'article. Mais, malheureusement,
Mme la Présidente, vu l'impasse de l'applicabilité de l'article 6,
l'amendement est venu sur la table.
Donc,
Mme la Présidente, je sollicite, encore une fois, l'intelligence du ministre,
parce qu'il le sait très bien, dans une
autre commission, nous avons évolué ensemble, et il a accepté presque mot par
mot le deuxième paragraphe. Je sais qu'il
a fait une exception, mais il est capable aujourd'hui, rendu à
4 h 15 min de débat, de faire une autre exception parce
que ça va juste bonifier l'article 6.
Maintenant,
je reviens à l'essence même de cet amendement.
J'ai parcouru, Mme la Présidente, plusieurs sites et organismes
étatiques, notamment en France, et, je pense, l'ensemble
de vos collègues, surtout ceux qui ont travaillé sur le projet de loi de la laïcité, ils devraient
être au courant de ces organismes.
Parlons
de l'Observatoire de la laïcité. Est-ce
que ça vous dit quelque chose, M. le ministre, l'Observatoire de la laïcité, au niveau de la République
française?
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Je vous écoute.
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le député de Nelligan.
M.
Derraji : Excellent. Merci pour votre bienveillance. Bien, cet
organisme, ça rejoint l'essence de beaucoup d'échanges que nous avons
eus. Et je pense qu'au niveau de l'applicabilité j'ai une série de guides
insérés, mis à la disposition des
organismes. Et on parle de gestionnaires européens, mais il faut équiper ces
gestionnaires pour s'assurer de l'applicabilité. Est-ce que vous suivez,
avec moi, le raisonnement, M. le ministre?
M. Jolin-Barrette : J'en suis.
• (16 h 50) •
M.
Derraji : Excellent. Mais, à l'intérieur de cet observatoire, on
trouve des guides de la laïcité, collectivités locales; guides laïcité, gestion du fait religieux. On
trouve même des livres laïcité du ministère de l'Éducation nationale et laïcité,
gestion du fait religieux dans les
structures socioéducatives. Donc, quand on parle d'accompagner, bien, le
législateur français accompagne les
organismes. Est-ce que le législateur français, Mme la Présidente, ne fait pas
confiance à ses gestionnaires? On leur donne des outils, Mme la
Présidente.
Et c'est ce
que nous essayons, depuis ce matin, de faire comprendre au ministre, qu'au-delà
de la définition simple de c'est
quoi, un signe religieux, c'est qu'il faut aller au-delà de la définition
stricte du signe religieux. Sur la définition du signe religieux, Mme la Présidente, nous pouvons avoir un accord ou un
désaccord avec le ministre et probablement plus de désaccords que d'accords,
parce que nous avons posé pas mal de questions pour pouvoir bonifier... Mais le
ministre a refusé, et c'est son
droit, de faire le quiz du collègue par rapport aux signes, mais c'est son
droit. Le but, Mme la Présidente, c'est
venir par la suite et dire à ces gestionnaires, à qui... Je répète, M. le
ministre : On fait confiance à l'administration publique québécoise. On fait confiance à ces
femmes et ces hommes qui travaillent dans l'administration publique québécoise.
Et heureusement que nous avons des femmes et des hommes de qualité au sein de
notre administration publique.
Mais, Mme la Présidente, l'amendement que notre
équipe dépose maintenant vient en appui à l'ensemble des organismes qui vont, demain, recevoir l'appel
d'appliquer la loi sur la laïcité. Est-ce que M. le ministre, Mme la Présidente,
est contre accompagner nos gestionnaires? Est-ce
que, Mme la Présidente, le ministre, demain, est prêt, lundi? Si on suit ce que
nous avons vécu hier, la loi doit être appliquée au courant des prochaines
semaines ou jours. Bien, normalement, il faut s'assurer de cette
applicabilité.
Et donc c'est
ça, Mme la Présidente... Et je sais que le ministre aime beaucoup la
coopération, il aime beaucoup la coordination. C'est des mots que nous
avons beaucoup, beaucoup échangés dans un autre projet de loi. Eh bien, là, Mme
la Présidente, la transversalité vise ça. Et c'est ça qu'on vise avec cet
amendement.
Donc, Mme la
Présidente, ma question est très simple : Est-ce que le ministre refuse
d'accompagner et de donner des principes directeurs aux organismes à
qui, demain, il va envoyer l'appel d'appliquer la loi sur la laïcité?
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Bon, Mme la Présidente, on peut bien proposer un amendement sur l'application. Cela étant dit, il faut être en accord avec la définition pour proposer une application. Alors, est-ce que je dois
comprendre que le Parti libéral est en accord avec la définition de «signe
religieux» que j'ai insérée? Ça, c'est le premier critère à savoir.
Au niveau des
outils qui vont être faits et mis en place pour les personnes, la définition,
elle est très claire. On aurait pu
demeurer avec le sens commun. Bien sûr, qu'elle est claire. L'analyse qui en
est faite, c'est un critère subjectif ou un critère objectif. Et je sais
très bien que le député de Pontiac comprend très bien cette définition :
«Au sens du présent article, est un signe
religieux tout objet — et là il y a un "notamment" — notamment un vêtement, un symbole, un
bijou, une parure, un accessoire ou un
couvre-chef...» Mais ce n'est pas limité à cela. C'est un «notamment», Mme la
Présidente, mais on réfère à un objet.
Et je réitère que c'est le port, hein, parce
qu'on a eu cette discussion-là un peu, préalablement, dans d'autres commissions,
donc, c'est le port d'un symbole religieux qui est interdit, que ça «soit porté
en lien avec une conviction [de]
croyance religieuse» — ça, c'est le critère d'analyse
subjective — ou que
ça «soit raisonnablement considéré comme référant à une appartenance religieuse.» L'amendement qui est déposé par
le collègue de Nelligan nous invite à édicter un règlement
d'application, alors que ce qui est prévu, c'est clair, c'est l'interdiction de
signe religieux.
Mme la
Présidente, je le sais, que vous le savez ce que c'est, un signe religieux. Je
le sais, que le député de Nelligan sait ce que c'est, un signe religieux, même
chose pour la députée de Marguerite-Bourgeoys. Alors, s'ils ne le savent
pas, ce que constitue un signe religieux,
Mme la Présidente, je les invite à venir déposer un amendement pour spécifier
ce que constitue un signe religieux
si telle est leur volonté de faire progresser, de pouvoir aller à
l'article 27 pour répondre à la volonté du député de Jean-Lesage.
La
Présidente (Mme Gaudreault) :
Y a-t-il d'autres interventions suite au dépôt de l'amendement proposé par
M. le député de Nelligan? M. le député de Nelligan.
M.
Derraji : Merci, Mme la Présidente. Et je remercie le ministre de me
dire que je sais c'est quoi, la définition du signe religieux, et que lui-même, il sait aussi c'est quoi, la
définition d'un signe religieux. Mais je l'invite aussi à faire un effort avec son premier ministre et faire un
effort de lui expliquer c'est quoi, un signe religieux, parce qu'à un certain
moment il y a eu de la misère ou de la confusion, hein, de la confusion par
rapport à un signe religieux.
Et donc
justement, Mme la Présidente, pour ne pas avoir ce genre de situation, même au
sein de la même équipe, le ministre
porteur du dossier a une définition propre du signe religieux, le premier
ministre a une autre interprétation, et
probablement, si les journalistes s'amusent à poser des questions à l'ensemble
de l'équipe ministérielle, probablement on aura d'autres définitions de c'est quoi, un signe religieux. Donc, justement, pour limiter. Et ça, je l'ai toujours
appris dans ma vie, Mme la Présidente, la
subjectivité et l'objectivité, ça se
limite. Je ne peux pas lancer ça dans le vide et dire : J'ai deux
critères, un objectif, un subjectif.
Et
sérieusement je n'invite pas le ministre à avoir un débat philosophique sur la
subjectivité et l'objectivité. Mon but,
aujourd'hui, avec cet amendement, c'est justement limiter les erreurs liées à
l'objectivité et à la subjectivité. Parce que c'est une interprétation humaine d'une définition. Ce n'est pas des
robots. Et même les robots, à cette heure, s'il manque un programme, ils vont faire autre chose. C'est
des êtres humains, Mme la Présidente, qui vont, demain, appliquer la loi.
Bien, justement, les principes directeurs,
et le ministre peut aller chercher facilement c'est quoi, la définition d'un
principe directeur...
Une voix :
...
M.
Derraji : ...exactement, ça aide, ça accompagne. Et c'est ça qu'on
veut. Et, au contraire, ce qu'on dit depuis le début, on offre notre
collaboration au ministre pour que la loi soit appliquée dès demain.
Je vais arrêter là,
Mme la Présidente, parce que je sais que d'autres collègues veulent intervenir
par rapport à l'amendement. J'aurais
souhaité, à quelques minutes de la fin de ce débat, avoir une dernière
collaboration, mais hélas! Mme la
Présidente, je vais quitter probablement la commission avec une petite
déception, à part celle de sortir tout seul courir demain. Mais, probablement, le ministre n'a pas accepté ma main
tendue, de l'aider à plus donner une définition et des principes directeurs à l'application de la
définition que lui-même a ramenée par rapport aux signes religieux. Merci,
Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre, vous voulez répondre à M. le député de
Nelligan?
M. Jolin-Barrette : Bien, au moins, je dirais au député de Nelligan
qu'il ne perd pas tout, hein, il a gagné une course.
La Présidente (Mme Gaudreault) : Y a-t-il d'autres interventions suite au dépôt de
cet amendement? Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme
Rizqy : Merci, Mme la Présidente. Un peu plus tôt, le ministre faisait
référence à ma relation avec le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur. Il disait qu'il était jaloux,
jaloux de cette belle relation que nous avons développée de par nos
différents échanges lors de d'autres commissions.
Mais justement
parlons-en, de ces autres commissions. On a eu le projet de loi n° 12,
auquel j'ai siégé, notamment, avec le
ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, et il avait accepté ce
type d'amendement parce qu'il avait réalisé qu'effectivement on avait
besoin d'avoir un règlement pour venir apporter des précisions et surtout
d'avoir l'occasion d'échanger encore de
nouveau. Alors, je demande au ministre s'il aura la même ouverture que son
collègue le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Je suis très ouvert, Mme la Présidente, très ouvert. Or, il faut
déposer les amendements en cohérence
avec le texte, et c'est la discussion que nous avions avec le collègue de
Nelligan à l'effet de dire : Est-ce que le Parti libéral est en
accord ou non avec la définition? Il n'y a pas de nécessité d'adopter un
règlement «portant sur l'application de la
définition d'un signe religieux afin d'accompagner les organismes dans
l'application de la présente...» Mme
la Présidente, la définition, elle est là, elle est claire, il n'y a pas de nécessité
d'insérer ça dans la loi, Mme la Présidente. Je ne peux pas en dire
plus.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : Y a-t-il d'autres interventions? Mme la députée de
Saint-Laurent.
• (17 heures) •
Mme
Rizqy : Bien, c'est pour ça qu'on ne vous invite pas nécessairement à
l'insérer dans la loi, là, on vous invite à avoir des lignes directrices dans le règlement. Puis le ministre de
l'Éducation et de l'Enseignement supérieur a vu ça aussi comme une opportunité
de pouvoir aussi continuer à échanger.
Juste
pour précision, le p.l. n° 12, c'était pour les frais chargés aux parents. On
avait une date butoir un peu comme vous,
vous avez en ce moment une date butoir, en fait 32 min 30 s de
temps butoir. Alors, ça nous a donné aussi l'occasion de pouvoir revenir et encore échanger pour avoir
plus de clarté, plus de précision, et je sais que vous n'êtes pas contre
la vertu et que vous aimez la précision.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien sûr que je ne suis pas contre la vertu, Mme la Présidente. Et j'apprécie même le fait que les personnes soient vertueuses.
Je pense que c'est une belle qualité.
Cela
étant dit, sur la proposition du député
de Nelligan, Mme la Présidente, il n'est pas requis, cet amendement-là. La
définition, elle est claire. Si le Parti
libéral trouve que la définition du
signe religieux n'est pas claire, qu'il propose un amendement pour venir
circonscrire, pour venir cerner, pour venir bonifier. Mais, à partir du moment
où la définition, elle est claire, il n'y a
pas nécessité d'adopter un règlement et de donner un pouvoir réglementaire
habilitant.
La
Présidente (Mme Gaudreault) :
Je vous remercie. Y a-t-il d'autres interventions? M. le député de Pontiac.
M. Fortin : Oui, merci,
Mme la Présidente. Bonjour. J'écoute
le ministre depuis tantôt en échange
avec certains collègues, et il nous a
dit, à un moment donné, de lui faire confiance, et je pense qu'on ne demande
pas mieux, mais, à la lueur de certains de ses propos, ce n'est pas
toujours facile, Mme la Présidente.
Alors, je vais quand
même essayer d'identifier une ou deux choses dans ses propos. Il nous a
dit : Faites-moi confiance quant à
l'élaboration, quant à la rédaction de mon projet de loi, il est clair. La
rédaction de son projet de loi, il semble la connaître. J'imagine qu'il
connaît chaque mot de son projet de loi. Oui ou non?
La Présidente (Mme
Gaudreault) : Ah, c'est une question? M. le ministre.
M.
Fortin : Peut-être? O.K.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le député.
M.
Fortin : Mais la rédaction lui appartient. La rédaction, c'est
la sienne, c'est celle du gouvernement de la Coalition avenir Québec, n'est-ce
pas?
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme la Présidente, à partir du moment où un membre formant le
gouvernement dépose un projet de loi, effectivement il est en accord avec le
libellé des dispositions qui sont présentes dans un projet de loi. Et je n'apprendrai rien à ce niveau-là au
collègue de Pontiac, qui a été ministre des Transports. Et d'ailleurs peut-être
pourrait-il nous renseigner relativement aux cinémomètres.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le député de Pontiac.
M. Fortin : On a eu un petit cours de mathématique plus tôt. La députée de
Marguerite-Bourgeoys a fait référence à un cours de philosophie. Plus tôt, aujourd'hui, on a parlé du cours
d'éthique et culture religieuse. Je vais parler de la portion éthique, peut-être. Si, effectivement, le projet
de loi appartient à son gouvernement, j'aimerais savoir est-ce qu'il a
collaboré avec d'autres, peut-être des anciens parlementaires, pour la
rédaction de son projet de loi?
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, on a eu l'occasion de rencontrer en commission
parlementaire des anciens parlementaires
qui sont venus nous présenter leurs propositions, leur vision. Vous savez, on a
lu plusieurs textes aussi dans la rédaction du projet de loi, notamment le
projet de loi n° 94, notamment le projet de loi n° 62, qui avait été
déposé par Mme Vallée, le projet de
loi n° 394, déposé par la députée de Gouin, le projet de loi n° 60,
déposé par le député de Marie-Victorin à l'époque.
Alors,
l'exercice de rédaction d'un projet de loi a fait l'objet d'une grande
réflexion et démontre aujourd'hui, par le biais du projet de loi que nous
avons, une laïcité québécoise, un propre modèle de laïcité québécoise. Et il
s'agit d'un projet de loi qui est modéré et qui répond aux aspirations
des Québécois.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : M. le député de Pontiac.
M. Fortin : Oui, bien, puisqu'on est sur l'amendement de l'article 6, le
ministre veut nous ramener sur l'article 6 lui-même, dit que le député de
Nelligan doit considérer l'article 6 avant l'amendement à
l'article 6, je vais prendre un petit pas de recul, Mme la Présidente, et je pense qu'avant tout, hein, quand
on étudie un article, il faut regarder ce qui englobe la chose. Et ce qui englobe la chose dans le
projet de loi n° 21, c'est les considérants, hein? C'est les premiers mots
du projet de loi. Alors, les premiers
mots du projet de loi, je vais demander au ministre de nous lire le deuxième
considérant, si c'est possible.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre.
M.
Fortin : S'il veut se prêter à l'exercice, bon joueur qu'il
est.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : Est-ce que vous voulez...
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, je crois que le collègue de Pontiac est capable de
nous lire le deuxième considérant.
M.
Fortin : D'accord. Très bien. Je vais le faire.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le député de Pontiac.
M. Fortin : Je croyais le ministre bon joueur, mais je vais l'aider un peu avec la
lecture. Le deuxième considérant, c'est :
«Considérant que l'État du
Québec est fondé sur des assises constitutionnelles enrichies au cours des ans
par l'adoption de plusieurs lois fondamentales.»
Ça, c'est
le deuxième considérant du projet de loi n° 21 présenté par le ministre.
Je vais vous lire, Mme la Présidente, le sixième considérant du projet
de loi n° 191 de Daniel Turp, qui était député de Mercier :
«Considérant que le Québec est fondé sur des
assises constitutionnelles qu'il a enrichies au cours des ans par l'adoption de
plusieurs lois fondamentales...»
Je vais vous lire le considérant du projet de
loi n° 196 de Daniel Turp :
«Considérant que le Québec est fondé sur des
assises constitutionnelles qu'il a enrichies au cours des ans par l'adoption de
plusieurs lois fondamentales...»
Est-ce que le ministre a demandé la permission à
Daniel Turp pour utiliser ses mots exacts?
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, j'invite le député de Pontiac à lire la loi n° 99. Veut-il nous lire la loi 99?
M.
Fortin : ...la lire si vous
voulez. Si vous ne voulez pas vous prêter à mon jeu, je ne me prêterai pas au
vôtre.
M. Jolin-Barrette : Ah, donc vous ne
voulez pas jouer. Alors, dans le deuxième considérant de la loi n° 99 :
«Considérant que l'État du Québec est fondé sur des assises constitutionnelles
qu'il a enrichies au cours des ans par l'adoption de plusieurs lois
fondamentales et par la création d'institutions démocratiques qui lui sont
propres.»
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le député de Pontiac.
M. Fortin :
Est-ce qu'il a demandé à l'auteur de la loi n° 99
s'il pouvait utiliser ses propos?
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, le législateur, au cours des années, il est présent ici parmi nous.
Le législateur, c'est vous, c'est moi, c'est
la députée de Marguerite-Bourgeoys. Alors peut-être, Mme la Présidente, que
j'aurais dû demander la permission au
député de Pontiac. Alors, je vais le faire. M. le député de Pontiac, est-ce
qu'on peut, dans le cadre de notre
projet de loi sur la laïcité de l'État, recourir au même préambule qu'il y
avait à un considérant qui avait lieu dans le préambule de la loi n° 99? Est-ce que le député de Pontiac nous donne la permission d'aller en
ce sens-là? Je lui en saurais gré, de
le faire, parce que je considère qu'il s'agit d'un bon considérant, qui
illustre bien, qui illustre bien... et qui met la table sur l'importante
loi de la laïcité que nous allons adopter aujourd'hui.
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le député de Pontiac.
M.
Fortin : Je ne doute
aucunement, Mme la Présidente, que le ministre croie que c'est un bon
considérant, mais la moindre des
choses, la moindre des choses, ce serait de demander à la personne, à l'auteur
des lignes de considérer... d'être
conseillé par l'auteur de ces lignes, de demander la permission ou, dans le cas
où on ne le fait pas, de donner une partie
du crédit pour le projet de loi n° 21, parce que les considérants mettent
la table au Parti québécois, au Parti québécois qui ont écrit ces mots
au tout début. Peut-être qu'il accepterait, peut-être qu'il voudrait, peut-être
qu'il aimerait, le Parti québécois — le chef est ici présent — peut-être qu'il aimerait une partie du
crédit pour le projet de loi n° 21. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Je serais curieux de savoir la position du Parti libéral relativement à la contestation de la loi n° 99, Mme la Présidente. Est-ce que le député
de Pontiac est en faveur du fait de
défendre la loi n° 99? Est-ce
que le député de Pontiac est d'accord
avec la loi sur la clarté référendaire, qui a été adoptée
par Stéphane Dion? Ça, j'aimerais ça l'entendre là-dessus. Est-ce qu'il considère que la loi n° 99 est dans le champ de juridiction du Québec? Est-ce qu'il considère que la loi n° 99 respecte les balises fixées par la Cour suprême? Et, de façon importante, est-ce
qu'il considère que c'est la loi sur la clarté ou la loi n° 99 qui a primauté pour décider de l'avenir du Québec?
Quelle est sa réponse, à ce
niveau-là?
Parce que c'est fort important, on vient définir
ici, dans la Loi sur la laïcité, la conception de l'État, que l'État québécois,
il est laïque. Et la laïcité, c'est une des valeurs importantes
de l'État québécois. Pourquoi? Parce que la société québécoise,
elle est distincte. Et, peu importent les opinions politiques
ou les options politiques que nous avons ici, en cette Chambre, qu'on soit fédéraliste, souverainiste ou nationaliste, il y a des choses
qui doivent se décider ici, à l'Assemblée nationale, par les élus du peuple québécois, comme la laïcité. Mais
notamment l'avenir du Québec, ça doit être décidé par des lois à l'Assemblée nationale du Québec, par le
peuple québécois, et non pas par une loi sur la clarté qui a été fixée
par le fédéral.
Alors, je
voudrais entendre du député de Pontiac, député élu à l'Assemblée nationale du
Québec, est-ce qu'il est d'accord
avec la contestation qui a cours présentement à la loi n° 99.
Est-il d'accord avec la loi sur la clarté ou il appuie le projet de loi n° 99? Ça, c'est une question
qui est fondamentale. C'est une question qui est importante, surtout si on y
fait référence.
Alors, j'aimerais avoir une réponse de la part du député de Pontiac, parce que
le considérant, oui, il vient de la
loi n° 99. Il s'agit d'une loi importante pour la nation
québécoise, très importante. Et, comme Québécois, on devrait soutenir l'application de la loi n° 99. Alors, je serais curieux de l'entendre sur sa conception et sur le
recours à l'utilisation d'un des considérants de la loi n° 99
dans le cadre de la loi n° 21.
• (17 h 10) •
La Présidente (Mme Gaudreault) : Je
vous remercie. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Et je vais précisément sur la question posée par le collègue leader. Je vais précisément sur sa demande quant à la clarté. Mon intervention va se lier au thème
de la clarté appliqué à l'article 6 de son projet de loi, qui n'est clairement
pas clair.
Alors, la
non-clarté, parlons-en, Mme la
Présidente. Il y a l'amendement, le sujet de l'amendement, on l'a devant nous, qui est proposé, qui vise justement
à faciliter la vie, par exemple, cas d'application, des directeurs, directrices d'école, qui devront juger au cas par cas. Puis,
dans certaines commissions scolaires, ça n'arrivera pas régulièrement, mais, dans
d'autres commissions scolaires, Marguerite-Bourgeoys, commission
scolaire Pointe-de-l'Île, ma commission scolaire, également autres commissions
scolaires, il y aura des cas qui seront plus litigieux. Et,
quand on dit litigieux, il n'y a pas une
clause «nonobstant» qui va pouvoir éviter une contestation d'une décision
individuelle prise qui limite les droits. Ce n'est pas la loi, mais c'est la décision individuelle. La clause
«nonobstant» ne peut pas venir couvrir l'exercice discrétionnaire — pas arbitraire, mais discrétionnaire — qui pourrait, par ailleurs, être contesté dû
à sa non-raisonnabilité, parce que ça
ne participerait pas, on pourrait plaider, d'un signe religieux. Ce que je
porte là, ce n'est pas un signe religieux, mais, pour la directrice sur
le terrain, c'est un signe religieux.
Alors, sur
cette question très précise là, comment le ministre compte-t-il, de façon
précise... Parce que ce n'est réellement
pas clair. Puis, je veux dire, si d'aventure il y avait eu, il y a quelques
jours, un directeur d'école qui aurait eu le même nom que le premier ministre
du Québec, je pense qu'il aurait fait face à certaines plaintes dans
l'application de la loi, parce que,
pendant à peu près quatre, cinq heures, Mme la Présidente, les alliances
étaient visées par les signes religieux, mais finalement, après quelques
heures, elles ne l'étaient plus. Alors, on a vécu au Québec sous un régime, pendant quelques heures, où les alliances étaient
un signe religieux, mais par la suite, le ministre l'a dit, le ministre a
dit : Les alliances ne sont pas
visées par le projet de loi n° 21. Et ça, bien, je ne dirais pas qu'il recadrait,
là, ce ne serait pas correct de ma part, il ne recadrait pas le premier
ministre, mais, chose certaine...
Je me rappelle de l'analogie, il ne faut pas
s'enfarger dans les fleurs du tapis, effectivement, le premier qui se sera, de façon très tangible, enfargé dans les
fleurs du tapis, puis je le dis en tout respect, c'est le premier ministre.
Alors, si le premier ministre
s'enfarge là-dedans, comment s'assurer qu'au lendemain, sans plus de clarté...
Parce qu'il parlait de la loi sur la
clarté. Je lui demanderais que sa loi, elle aussi, elle ait de la clarté.
Comment s'assurer que les directeurs, directrices,
elles et eux, également de bonne foi, comme le premier ministre, qui a commis
une erreur, qui a été recadré, comment, eux, s'assurer qu'ils ne
commettront pas ces erreurs-là?
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Je pense
que le député de Jean-Lesage voulait poser une question aussi, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Gaudreault) :
Vous ne voulez pas intervenir à ce point-ci?
M. Jolin-Barrette : Non.
La Présidente (Mme Gaudreault) :
Très bien.
M. Tanguay : Bien, voyons
donc!
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci, Mme la
Présidente. Je viens intervenir au sujet de...
Des voix : ...
M.
Zanetti : ... — ça va? O.K. — de la loi n° 99. Évidemment, bien, je suis intéressé par,
disons, l'intérêt que porte le
ministre à la loi n° 99 et à la souveraineté, si partielle soit-elle,
du Québec en ce moment, là. J'avais une question. En même temps, il y a comme
une espèce de paradoxe là-dedans. Parce qu'évidemment nous, on est pour que le
Québec décide de tout ce qui se passe
sur son territoire. Ce qui ne veut pas dire qu'on est d'accord avec toutes les
décisions que prendraient tous les gouvernements possibles. Mais, dans
ce cas-ci, qu'est-ce qui va arriver? Dans le fond, j'aimerais amener le ministre un peu sur la question, disons,
constitutionnelle puis des limites du régime canadien, là, plutôt que sur le projet de loi en tant que tel. Mais, si
jamais le projet de loi... le Canada tentait d'empêcher l'application du projet
de loi, p.l. n° 21,
là, j'imagine, par des recours judiciaires ou constitutionnels que j'ignore ou
que peut-être nous n'avons pas encore imaginés, mais, si jamais le
Canada décidait de faire ça, quelle serait la réaction du ministre? Est-ce
qu'il déciderait, par exemple, de se
conformer aux codes constitutionnels canadiens, au régime canadien et à ses
exigences, ou est-ce qu'il mettrait au défi le système canadien et le
gouvernement canadien pour pouvoir appliquer la loi?
La Présidente (Mme
Gaudreault) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Alors, Mme
la Présidente, dans le cadre du projet de loi, nous avons recours notamment aux
dispositions de dérogation, ce qui fait en
sorte que c'est au Parlement à déterminer de quelle façon vont s'organiser les
rapports entre la religion et l'État, et ce n'est pas aux tribunaux.
Le député
de Jean-Lesage me pose la question
suivante : Qu'arrive-t-il si le gouvernement
fédéral intervient dans le cadre d'un
recours à l'encontre du projet de loi
n° 21? Qu'arrive-t-il s'il y a
une contestation du projet de loi
n° 21? Le gouvernement du Québec sera présent pour assurer la validité de sa loi,
pour défendre une loi qui aura été adoptée par l'Assemblée
nationale, soyez-en certains. À ce
stade-ci, Mme la Présidente, la question du député
de Jean-Lesage, elle est
hypothétique. Et, bien entendu, le gouvernement
du Québec est d'avis que la laïcité
de l'État ne relève qu'uniquement de l'État québécois,
qu'uniquement de l'État québécois,
et le gouvernement du Québec
défendra toujours cette position devant les cours de justice
si jamais la loi n° 21 serait contestée devant les
tribunaux.
Cela étant
dit, et ce qu'il est important de comprendre, c'est qu'il est légitime pour la
nation québécoise de décider de quelle façon la laïcité s'applique sur son territoire, à ses
institutions, à ses institutions parlementaires, à ses institutions judiciaires, à ses institutions gouvernementales. Et il n'appartient qu'à l'Assemblée
nationale du Québec
de déterminer comment se traduisent
les exigences de la laïcité et il
n'appartient qu'à l'Assemblée nationale de définir quelles sont les exigences de la laïcité au Québec. Le projet de
loi que nous avons, c'est un projet de loi qui est à l'intérieur des
compétences du Québec, qu'il est
légitime d'adopter, et surtout qui répond à la volonté de la nation québécoise.
Là-dessus, Mme la Présidente, la position du gouvernement du Québec,
elle est très claire.
Une fois que
nous avons dit cela, nous ne pouvons prévoir ce qui se passera dans le futur.
Mais je suis convaincu de la validité
et du bien-fondé de la loi n° 21, et notamment que son adoption est faite dans
l'intérêt collectif de la nation québécoise et de la société québécoise.
Et surtout il n'appartient qu'aux députés élus à l'Assemblée nationale de définir ce que contient la laïcité de l'État, et
j'aimerais savoir si je peux compter sur l'appui du député de Jean-Lesage
sur ce point.
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Nous, on va toujours
défendre la souveraineté du Québec, mais pas nécessairement le projet de loi
n° 21, qu'on n'appuie pas.
J'ai une question
par rapport à ça et je nous amène sur le terrain de la liberté de conscience, la liberté de
religion, au fond. On a eu cette
discussion-là plus tôt, mais, bon, le contexte faisait qu'on n'a pas pu
approfondir tant que ça. Selon plusieurs constitutionnalistes, dont...
C'est quoi, son prénom?
Une voix : ...
• (17 h 20) •
M. Zanetti :
L'ancien collègue... Voyons, excusez! O.K., j'ai un blanc de mémoire. Je n'ai
pas beaucoup dormi cette nuit,
mais... Bien, M. Taillon et M. Cloutier, dont... O.K., Alexandre Cloutier, oui,
ancien parlementaire ici. Excusez! La
question du serment à la reine d'Angleterre, qui est aussi chef de l'Église
anglicane — donc il
n'est pas très laïque, disons, pour
des parlementaires, d'être obligés ou de se faire obliger à prêter serment à un
chef religieux — cette
question-là relève, selon eux, de la
constitution interne du Québec, parce que, même si c'est écrit dans l'Acte
d'Amérique du Nord britannique, qui
a, selon les Canadiens, une valeur supralégislative, selon eux, ça relève de
ça, mais même si c'est dans l'Acte d'Amérique du Nord britannique, il y
a bien des choses, dans l'Acte d'Amérique du Nord britannique, qui aujourd'hui ne sont plus appliquées puis que tout
simplement, unilatéralement, le Québec, parce que ça fait partie de sa constitution interne, il a décidé de ne plus
l'utiliser, de ne plus le faire. Entre autres, on peut faire référence à
l'abolition du Sénat.
S'il est vrai
que la pratique du serment relevait de la constitution interne du Québec, thèse
qu'on appuie, est-ce que le ministre est ouvert à remplir une autre des
promesses de la Coalition avenir Québec, qui était d'appeler des projets de loi de l'opposition et d'appeler le projet de
loi que j'ai déposé plus tôt, cette année, qui vise à abolir l'obligation de
prêter serment à la reine, parce qu'il me semble que ça irait dans le
sens d'une meilleure laïcité, un meilleur respect de la liberté de conscience, et ce serait plus cohérent, justement, avec
cet État laïque qu'il veut bâtir? Alors, voilà ma question pour le
ministre.
La Présidente (Mme Gaudreault) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, on revient à la reine. Alors, on est un peu éloignés de
l'article 6, mais ça va me faire plaisir de répondre quand même, parce que
j'apprécie ces échanges avec le député de Jean-Lesage.
Alors, Mme la
Présidente, il me demande : Est-ce que je vais appeler le projet de loi
qu'il a déposé relativement au serment de loyauté à la reine lorsqu'un
député est assermenté? D'ailleurs, l'ensemble des députés de sa formation
politique ont prêté serment à la reine, en privé, avec celle-ci...
La Présidente (Mme Gaudreault) :
Oui, Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme Rizqy : J'ai déjà regardé ce
film-là lorsqu'il y a eu des échanges en commission. Là, on a déposé un amendement pour avoir des lignes directrices. J'apprécierais
vraiment, là, qu'on se concentre sur les lignes directrices, parce qu'au final, en
définitive, ceux qui devront appliquer ça... Je vais reprendre les paroles de
la députée de Montarville, qui a dit
la chose suivante en 2016 : «Parce qu'au final ce sont les personnes en
position d'autorité, les administrateurs, les enseignants, les directeurs d'école, les directeurs des ressources
humaines, les directeurs [qui devront appliquer la loi]», et c'est eux
qui se feront poser des questions. Et à ce moment-là, en 2016, elle demandait
des lignes directrices.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : ...Mme la députée. Alors, je vais inviter M. le
ministre, M. le député de Jean-Lesage à
revenir à l'amendement déposé par M. le député de Nelligan, puisqu'il nous
reste très peu de temps encore. Alors, revenons à l'amendement déposé
par M. le député de Nelligan. Y a-t-il d'autres interventions à ce sujet? Oui,
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : On me demande de répondre aux questions. Je suis interpelé par le
député de Jean-Lesage. Alors, je réponds au député de Jean-Lesage.
La Présidente (Mme
Gaudreault) : ...je vais quand même vous ramener, s'il vous plaît, à
la pertinence de l'amendement déposé par M.
le député de Nelligan. Est-ce qu'il y a d'autres interventions par rapport à
cet amendement?
M.
Jolin-Barrette : Pour moi, Mme la Présidente, j'ai dit ce que j'avais
à dire. Pour ce qui est du député de Jean-Lesage...
La Présidente (Mme
Gaudreault) : Très bien. Alors, je crois qu'il y a d'autres de vos
collègues qui veulent intervenir sur
l'amendement déposé par M. le député de Nelligan, et je crois que c'est le cas
de M. le député de LaFontaine.
M.
Tanguay : Oui. Merci beaucoup. Merci, Mme la Présidente.
Effectivement, je vois que, sur l'amendement, le ministre nous envoie
toute indication que l'amendement, pour lui, il n'est pas acceptable.
L'amendement, il ne le considère pas
pertinent. Pourtant, je pense que c'est important de relire l'amendement, et
ça, ça participe de tout le sérieux. Parce
qu'on a beau dire : Oui, ça prend du temps, je veux dire, le processus législatif prend du temps. Avant le bâillon, on avait 32 heures de faites, y incluant les
suspensions, Mme la Présidente. Alors, on était autour, réellement, d'un 30 heures de fait.
Et puis je ne vous ressortirai pas les cas où il y avait eu beaucoup
plus de temps. Il n'y avait pas d'éléments de charte des droits et libertés qui étaient amendés et de droits qui
étaient retirés. Il n'y avait pas de clause dérogatoire. Et évidemment il n'y
avait pas...
Une
clause dérogatoire, là, ça veut dire : Clause qui suspend les droits et
libertés de tous les Québécois, toutes les
Québécoises. 1 à 38, on les met tous dans le même panier. Puis le collègue de
Pontiac a eu l'occasion de les lire. Et là les gens ont pu, à la lecture, Mme la Présidente, constater que ce qui
était suspendu, c'étaient tous les droits et libertés en vertu de notre charte
québécoise, qui a été adoptée unanimement en 1975 et qui garantit des droits et
libertés essentiels, primaires. Et, lorsque l'on vient jouer là-dedans,
ce n'est pas anodin. Lorsqu'on vient jouer là-dedans...
Mme
la Présidente, dans un échange ultérieur avec le ministre, j'ai eu l'occasion
de citer le mémoire de M. Pierre
Bosset, qui, lui, a dit qu'historiquement, lorsque l'on est venu affecter les
droits substantifs, les droits 1 à 38, les articles 1 à 38, il y avait des cas d'espèce où c'était unanime,
c'était la très grande majorité. Juste à deux occasions, ça n'avait pas été... Excusez-moi, pas la majorité,
l'unanimité. Juste à deux occasions, ça n'avait pas été l'unanimité, ça avait
été... Deux députés avaient voté contre à
une occasion et un autre avait voté contre à l'autre occasion, sur une Chambre
qui constituait à peu près 110 députés.
Notre collègue vice-président, avant vous, Mme la Présidente, qui présidait nos
travaux, a eu l'occasion de nous le confirmer. Alors, ça, ce n'est pas anodin.
Là, ce dont on parle,
on parle de l'article 6. Et, l'amendement, je le relis :
«Le
ministre précise par règlement les principes directeurs portant sur
l'application de la définition d'un signe religieux afin d'accompagner
les organismes dans l'application de la présente loi.
«Tout règlement
édicté en vertu de cet article doit faire l'objet d'une étude par la commission
compétente de l'Assemblée nationale dans les trente jours de sa publication.»
Fin de la citation.
L'article 6
du projet de loi, Mme la Présidente, il nous a été présenté, dès son dépôt,
comme étant uniquement... et je le cite : «Le port d'un signe
religieux est interdit dans l'exercice de leurs fonctions aux personnes
énumérées à l'annexe II.»
L'annexe II, on le sait, elle est très large. Et malheureusement on n'aura
pas l'occasion d'y aller, parce que je le sais, qu'il y a des collègues,
entre autres du Parti québécois, qui avaient des choses à dire — même
si on n'est pas d'accord, ils ont voix au
chapitre puis qu'on fasse le débat — également de Québec solidaire, avaient des
choses à dire, et, le cas échéant,
les députés indépendants, et évidemment, au premier titre, l'opposition
officielle. Lorsque l'on limite des
droits et libertés, ça requiert un minimum de clarté. Je pourrais même
extensionner, j'ai eu l'occasion de le faire ce matin, un minimum de débats, de un, pas bâillon parce que ce n'est pas,
selon nous, respectueusement, justifié en l'espèce, mais, de deux, de ne
pas faire en sorte, d'éviter qu'il y ait un rééquilibrage par nos tribunaux.
Le
ministre a cité... a tenté de nous donner un exemple ce matin avec le projet de
loi n° 78, qui requérait, lors de manifestations,
un minimum d'information qui devait être donnée aux autorités. Bien, il n'y
avait pas de clause dérogatoire. Oui,
il y avait eu un bâillon, puis ça, je lui ai concédé. Mais ce que je lui
demandais, c'est un exemple où il y avait comme, en l'espèce, trois
choses : limitation des droits, bâillon, clause «nonobstant». Il n'y avait
pas de clause «nonobstant». Il n'y avait pas
de clause dérogatoire, Mme la Présidente. Ça veut dire que le projet de loi n° 78 a eu l'occasion d'avoir son
test par les tribunaux, puis il y a eu une contestation judiciaire, puis il y a
eu des jugements, Mme la Présidente, qui est venu modeler le tout. Donc,
ça, ça participe de notre démocratie.
Et, en ce sens-là, ce dont on parle, c'est un droit de manifester, c'est
un droit important, mais là on parle d'une liberté, droits et liberté, qui est enchâssé, entre autres, à l'article 2 de la Charte
canadienne, enchâssé à l'intérieur de notre charte québécoise des droits et libertés, et qui fait
en sorte que... deux choses — celles et ceux qui nous écoutent à la maison : vous avez toujours,
au Québec en 2019, la liberté de conscience et de religion.
Ça, c'est un choix individuel que l'État — c'est
un des fondements de notre société de droit — doit
respecter. Et ça, ça veut dire aussi, par extension, que l'on ne peut
pas discriminer sur cette base-là, on ne peut pas vous refuser un emploi parce
que vous êtes catholique, parce que vous
êtes musulman, parce que vous êtes juif, on ne peut pas faire ça, au Québec,
ce n'est pas un motif, on ne peut pas discriminer et dire : Tu
n'auras pas d'emploi, en ce sens-là.
L'un
des effets, puis l'un des effets, puis le ministre le reconnaît, puis je
ne pense pas faire outrage à son propos en paraphrasant de la façon suivante, c'est de mettre de côté... Parce
que c'est ce qui est fait de façon très tangible, on prend la liberté de croyance... Vous êtes
catholique, vous dites : Bien, moi, je suis catholique, j'ai une croix
catholique au cou ou j'ai un bijou
avec une croix catholique, ou même si vous ne l'êtes pas, au niveau
de la subjectivité... Parce que l'article 6,
je suis précisément sur la clarté nécessaire, l'article 6, et l'amendement, fait en sorte que, si vous êtes enseignant ou enseignante, vous avez un bijou avec une croix,
le ministre vous dit : On ne sortira pas le «tape» à
mesurer, ouvrez les guillemets,
fermez les guillemets, et il n'est pas question d'avoir ce que le Parti québécois, à l'époque...
Puis ça avait été décrié, la définition de l'article 5 du p.l. n° 60 du Parti québécois n'était pas suffisamment claire,
puis moi, je l'avais décrié. Et même j'invite le collègue ministre, Mme la
Présidente, d'aller retrouver ce que disait sa collègue de Montarville, aujourd'hui ministre de la Culture dans le gouvernement de la Coalition avenir Québec, qui, à l'époque, en 2013... Je me rappelle, elle était assise du même
côté que moi, et nous, elle et moi, pas toujours sur le même ton, pas toujours sur
les mêmes points, nous avions des différends, et là, notre ex-collègue
qui était Bernard Drainville, on lui disait : Ce n'est pas
clair, ce n'est pas praticable, et même elle, à ce moment-là, précisait qu'il y
avait un élément de subjectivité qu'elle condamnait dans l'application de
l'article 5 du projet de loi n° 60. Elle avait
dit : Dans cette loi-là — je la paraphrase — il y
a un élément de subjectivité dans cette définition-là, et moi, je ne suis pas à
l'aise avec ça. On ne peut pas avoir de
subjectivité, Mme la Présidente, quand je m'apprête à vous retirer vos droits,
basé sur mon interprétation.
• (17 h 30) •
Là,
le ministre nous dit, à minuit moins cinq... et là tout ce
qui a été dit, Mme la Présidente, depuis le dépôt du projet de loi jusqu'au moment... Il y a
32 heures de vie parlementaire, maintenant 36 heures de vie parlementaire
en article par article. On ne peut pas nous dire : Bien, depuis ce
temps-là, on a parlé de ces concepts-là depuis tout ce temps-là. Non. À minuit moins cinq, nous avons eu un amendement
qui a été déposé, un amendement majeur qui tente, là, qui tente... Puis celles et
ceux qui nous écoutent à la maison, là, un signe religieux, c'est quoi?
C'est un «objet, notamment un vêtement, un symbole, un bijou, une parure, un accessoire ou un couvre-chef qui
est — là, vous avez un critère objectif — soit porté en lien avec une conviction ou une croyance religieuse» ou — parce que je n'ai pas besoin... ce n'est pas
cumulatif — «soit
raisonnablement considéré comme référant à
une appartenance religieuse.» Celles et ceux qui nous écoutent à la maison,
Mme la Présidente, je pense qu'elles ne
méritent pas et ne veulent pas être jugées sur des critères subjectifs où il
n'y a pas de balise nécessaire et
tomber dans le piège qu'est tombé le premier ministre, Mme la Présidente, il y
a quatre jours, où, là, une alliance, c'est un signe religieux puis c'est interdit.
La Présidente
(Mme Gaudreault) : Alors, M. le député de LaFontaine...
Le temps imparti à la
commission plénière étant écoulé, je remercie celles et ceux qui y ont
participé.
Et,
pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je suspends les travaux quelques
instants et je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de bien
vouloir le faire immédiatement. Les travaux sont suspendus.
(Suspension de la séance à
17 h 32)
(Reprise à 17 h 36)
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Nous reprenons nos travaux, et je cède la
parole à M. le député de Richmond.
M. Bachand
(président de la commission plénière) : Mme la Présidente, j'ai
l'honneur de vous faire part que la commission plénière a étudié en détail le projet
de loi n° 21,
Loi sur la laïcité de l'État, et qu'elle n'a pas complété l'étude.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député de Richmond.
Et je rappelle aux membres de cette Assemblée que, conformément à l'article 257.6
du règlement, tout député dispose d'au plus une heure pour transmettre au bureau du secrétaire général copie des amendements qu'il entend proposer à ce rapport. Cet article prévoit également que
le débat débute au plus tôt une heure après l'écoulement de ce délai.
Je
suspends donc les travaux de cette Assemblée pour une période d'au moins deux
heures. Les cloches sonneront pour vous aviser de la reprise de la
séance. Et je suspends nos travaux.
(Suspension de la séance à
17 h 37)
(Reprise à 19 h 39)
Prise en considération du
rapport de la commission plénière
qui en a fait l'étude détaillée et des amendements transmis
Le Vice-Président
(M. Picard) : L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission
plénière sur le projet
de loi n° 21,
Loi sur la laïcité de l'État, ainsi que les amendements transmis par M. le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, Mme la
députée de Marguerite-Bourgeoys, M. le député de Jean-Lesage et le M.
le chef du troisième groupe d'opposition.
Je déclare
ces amendements recevables, à l'exception de l'amendement au titre du projet de loi proposé par la députée de Marguerite-Bourgeoys, qui est irrecevable puisque la jurisprudence parlementaire considère que les amendements au titre d'un projet de loi ne sont
recevables que dans la mesure où ils découlent de ceux apportés aux articles
du projet
de loi. Or, en l'espèce, les
changements proposés au titre par amendement ne découlent pas d'amendements adoptés
lors de l'étude détaillée. En effet,
les dispositions relatives à l'interdiction du port de signes religieux pour certaines personnes dans l'exercice de leurs fonctions
existaient initialement dans le projet de loi.
• (19 h 40) •
Je vous
rappelle que, conformément au troisième paragraphe de l'article
257.1, la durée du débat sur la prise
en considération du rapport de la commission plénière sur le projet de
loi n° 21, Loi sur la laïcité de l'État, et sur les amendements proposés est d'une heure. La
répartition du temps de parole pour ce débat restreint a été établie comme
suit : 29 min 15 s sont allouées au groupe
parlementaire formant le gouvernement, 17 min 40 s sont allouées
au groupe parlementaire formant l'opposition
officielle, 6 min 6 s sont allouées au deuxième groupe
d'opposition, 5 min 29 s sont allouées au troisième
groupe d'opposition.
Chaque député
indépendant dispose d'un temps de parole de 45 secondes. Toutefois,
lorsqu'un seul député indépendant
participe à un débat, il dispose d'un temps de parole d'une minute. Dans le
cadre de ces débats, le temps non utilisé
par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera
redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment. Mis à part ces consignes,
les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.
Enfin, je
rappelle aux députés indépendants que, s'ils souhaitent intervenir au cours du
débat, ils ont 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser la
présidence.
Y a-t-il des interventions? M. le ministre de
l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, chers collègues, nous voilà
rendus à l'étape importante de la prise en considération, soit la
dernière étape avant l'adoption du projet de loi n° 21,
la Loi sur la laïcité de l'État.
Il y a lieu
d'abord de rappeler l'objectif premier de ce projet de loi, soit celui
d'affirmer, et ce, pour la première fois de notre histoire, la laïcité
de l'État dans nos lois.
Depuis 2010,
il s'agit du septième projet de loi à porter sur la même question. Initiés par des
parlementaires de toutes les
formations politiques, ces projets
de loi témoignent du fait indéniable
que la laïcité de l'État est un enjeu important pour tous les Québécois.
Ce projet de loi est la réponse logique à cette vaste réflexion
qui anime le Québec depuis tant d'années.
Le projet de loi vient spécifier les quatre principes sur lesquels repose la laïcité de l'État, à savoir la séparation de l'État
et des religions, la neutralité religieuse de l'État, l'égalité de tous les citoyens et citoyennes et la
liberté de conscience et de religion.
Le projet de
loi n° 21 contient principalement trois mesures, soit
l'introduction, dans notre droit, du principe de laïcité, l'interdiction de porter des signes religieux pour des employés
de l'État en position d'autorité et l'obligation de donner un service public à visage découvert et de
le recevoir à visage découvert lorsque cela est nécessaire pour des raisons
d'identification et de sécurité.
Ce projet de
loi est modéré, et pragmatique, et surtout applicable. Il vient établir le
juste équilibre entre les droits collectifs et les droits individuels,
en plus de refléter le plus large consensus au sein de la société québécoise.
Tout d'abord,
mentionnons la quasi-unanimité sur la pertinence de la laïcité comme enjeu
gouvernemental. Il devient de plus en plus clair qu'inscrire la laïcité
dans nos lois est un puissant générateur de consensus.
Ensuite, le
projet de loi n° 21 propose d'interdire le port de signes religieux
à certaines catégories d'employés seulement,
durant leurs heures de travail uniquement et en prévoyant une clause de
maintien en emploi. Parmi les fonctions concernées, il y a les policiers, les agents de services correctionnels,
les procureurs, les directeurs et les directeurs adjoints d'écoles ainsi que les enseignants. Il ne fait
aucun doute que les enseignants jouent un rôle de modèle et qu'ils sont une
figure d'autorité dans la vie de nos
enfants. Tous ces employés doivent faire preuve, vu les fonctions qu'ils
occupent, de neutralité et de réserve en fait et en apparence.
Enfin, le
projet de loi n° 21 prévoit l'obligation de donner et de recevoir
des services publics à visage découvert. Je me permets de souligner une
fois de plus le consensus qui s'est dégagé sur cette question lors des
consultations particulières. Tous veulent
que les employés de l'État travaillent et offrent des services publics à visage
découvert. Il en va de même pour les
personnes bénéficiaires de tels services lorsque des motifs de sécurité ou
d'identification l'imposent. Aussi,
il est prévu qu'aucun accommodement ne pourra être accordé en ce qui a trait à
l'interdiction de porter un signe religieux, au service à visage
découvert et au devoir de neutralité religieuse.
M. le Président, le Parlement du
Québec souhaite ici réorganiser les rapports entre l'État et les religions. Il
refuse de laisser ainsi les tribunaux
fixer seuls les termes du débat sur la laïcité de l'État. Le Québec, et c'est
un fait reconnu et établi, est une
société distincte. Ce modèle dont il entend se doter est unique et propre au
Québec, fidèle à ses valeurs et à son
histoire. C'est pourquoi des dispositions dérogatoires sont introduites au
projet de loi. Cette approche est légitime, prévue dans nos lois et
fréquemment utilisée par le gouvernement québécois.
Le Québec a eu
recours à ces dispositions à plus d'une centaine de reprises depuis 1975,
presque toujours de façon préventive. Avec
le projet de loi n° 21, nous ne dérogeons pas aux règles entourant
l'usage de ces dispositions. Non seulement ces dispositions nous
permettront d'affirmer la souveraineté parlementaire et de définir nous-mêmes
une laïcité typiquement québécoise, mais elles nous permettront également de
sécuriser sur le plan juridique le projet de loi n° 21,
et ainsi enfin de passer à autre chose.
Le
projet de loi n° 21 est attendu depuis trop longtemps, et les
Québécoises et les Québécois nous ont demandé, en octobre dernier, d'agir dans ce dossier. Votre gouvernement prend donc
les moyens qui s'imposent pour respecter sa parole et répondre aux
attentes de la population.
Enfin,
M. le Président, soulignons que nous avons déposé une série d'amendements
visant à bonifier le projet de loi. Le
gouvernement, depuis le début du débat, a tendu la main aux oppositions pour
faire adopter le projet de loi de façon consensuelle. Aujourd'hui, nous avons eu recours à la procédure
législative d'exception parce que les Québécois souhaitaient que le
projet de loi sur la laïcité soit adopté.
Après 11 ans de
débats, M. le Président, il était temps d'agir. Le gouvernement du Québec a
agi, a rempli ses engagements et a rempli sa
parole auprès des Québécois. Enfin, le gouvernement du Québec agit au nom des
Québécois.
Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
Mme Hélène
David
Mme David :
Merci, M. le Président. Eh bien, nous arrivons au bout d'un parcours très
difficile, très fatigant, très exigeant, autant intellectuellement, que
moralement, qu'éthiquement. Nous avons travaillé très, très fort en commission
parlementaire pendant les quelques heures
que nous avons eues. Je le répète : Quelques heures que nous avons eues.
Et ça se termine aujourd'hui de façon
assez décevante, M. le Président. Je suis forcée d'être déçue par la réponse
que nous avons reçue à notre appel de tenir ce débat dans la sérénité,
la rigueur et la hauteur qu'il appelait.
Tout
au long de l'étude détaillée, nous avons dû travailler avec un ministre plutôt
pressé. Il est très pressé dans la
vie, ce ministre, tenant un débat en superficialité, qui n'a pas fait preuve de
réelle intention de travailler dans l'ouverture, le dialogue et la collaboration. Ce débat d'une si
grande importance aurait mérité davantage de rigueur et de profondeur de la
part du ministre et du gouvernement, que ce
soient les questions sur les concepts d'autorité, de signes religieux, de
lignes directrices, et plusieurs autres.
Tout
au long de l'étude, le ministre a refusé de répondre avec précision à nos
questions, et Dieu sait qu'on en a eu, aussi
légitimes soient-elles. Il a refusé de répondre aux questions que se posent des
milliers de Québécois et Québécoises depuis le dépôt de son projet de loi, des
questions que devront forcément se poser des centaines de directeurs
d'école après l'adoption forcée du projet de loi, ce soir.
Le
projet de loi devant nous a été écrit dans l'improvisation,
c'est clair, et avec beaucoup d'incohérence. C'est ce qui est ressorti, tant dans les consultations
parlementaires que lors de l'étude détaillée. Des commissions scolaires, la ville de Montréal, des syndicats ont
mentionné que le projet de loi serait totalement inapplicable tel que rédigé,
un véritable fardeau administratif dans d'autres cas. Une loi floue qui
risquerait de mener à une application inégale, voire arbitraire.
Dès
le départ, notre position, au Parti libéral du Québec, a été claire. Suite au
dépôt du projet de loi n° 21, le 28 mars, le ministre a choisi de
ne l'étudier qu'à partir du 11 juin dernier, je le mentionne. C'est très, très
peu dans une vie parlementaire, très peu. Je me suis chargée d'être la voix de
tous les Québécois, et particulièrement des Québécoises touchées par ce projet de loi, celles qui, demain matin, subiront les
conséquences directes de ce projet de loi. Je me suis efforcée d'aborder
le débat avec humanité, sensibilité, ouverture et respect.
Notre
objectif, lors de l'étude du projet de loi — d'ailleurs, moi et tous mes collègues, que
je remercie infiniment de leur
collaboration, infiniment, encore aujourd'hui jusqu'à tout à l'heure, merci
beaucoup — était
donc de faire tout en notre possible pour que le ministre explique les
tenants et aboutissants de sa loi, qu'il en explique son application et réponde aux questions des citoyens touchés. J'ai
souhaité aussi que le gouvernement fasse preuve d'humanité, d'humanité,
l'a-t-on assez dit, et fasse réellement preuve d'ouverture. Nous avons souhaité
que le ministre accompagne vraiment, vraiment les organismes forcés d'appliquer
sa loi avec la diffusion de lignes directrices ou d'un règlement. Rien d'impossible, M. le Président, des lignes
directrices. Ils vont être laissés à eux-mêmes complètement, je ne sais pas
comment ils vont faire.
• (19 h 50) •
L'absence
totale de sens donné à la notion de signes religieux, est-ce qu'on a besoin de
répéter les quelques heures pendant
lesquelles le premier ministre a dit une chose et son ministre, le contraire?
A-t-on besoin de le répéter? Puis une tentative de définition à la toute
dernière minute, vraiment à la toute dernière minute, qui mènera à une
application complètement, complètement
inégale, voire même arbitraire. La définition proposée par le ministre ne règle
en rien la problématique. En fait, on pourrait plutôt dire qu'elle
l'aggrave.
Le
ministre se décharge du fardeau de définir la cadre d'application de sa loi
pour le lancer dans les cours des organismes
visés. Nous avons voulu en assurer une application qui soit juste et
non-arbitraire, mais le ministre ne s'en est même pas soucié.
Nous
avons évidemment souhaité que la loi s'applique au moins grand nombre de
personnes possible. Malheureusement, le
ministre est resté totalement campé dans ses positions. Le plus important pour
nous était assurément de protéger les gens
actuellement en emploi avec un véritable droit acquis, même si le concept d'un
droit acquis sur des droits fondamentaux
est quelque chose d'assez dissonant. Nous voulions que la protection soit
attachée à la personne et non à la fonction.
Combien, combien de personnes ont demandé ça, de partis ont demandé ça? Pas de
réponse. Pas de réponse et pas de modifications.
Dans
la formule actuelle, cette disposition est carrément inhumaine. Comment peut-on faire choisir une personne entre
sa carrière et ses croyances personnelles? Il était impossible pour moi de
concevoir que les étudiants aussi, et Dieu sait qu'on en a parlé cet
après-midi, que les étudiants actuellement inscrits à une formation menant à une
profession ne soient pas protégés par la disposition dite de droits
acquis. Ils ne le savaient pas, en choisissant ce métier qu'ils voulaient
pratiquer, à quoi ils s'attendaient, et maintenant
ils sont en deuxième, troisième, quatrième année d'université, on leur
dit : Non, tu ne pourras pas.
Nous
étions totalement contre certains aspects de ce projet de loi, qui est, selon nous, totalement illégitime. Prenons, par exemple, les deux dispositions de dérogation, les deux dispositions, pas une, deux dispositions. C'est du jamais-vu, on l'a dit malheureusement trop souvent. Avec celles-ci, le ministre
veut suspendre l'application des droits fondamentaux. Seulement pour
la charte québécoise, seulement pour la charte québécoise, c'est plus de
38 droits qui seront suspendus, 38. Pas un, pas deux, 38. Ils ont été lus de un à 38 par le collègue le
député de Pontiac tout à l'heure. Et des éminents juristes ont
dit : Savez-vous quoi? Ça donne le vertige. Il faut le faire!
Le
ministre peut tenter de convaincre que c'est une utilisation banale. Il l'a beaucoup,
beaucoup dit et répété, mais, bien au
contraire, ces dispositions demeurent et doivent demeurer des outils
d'exception. La majorité ne peut s'en servir selon son vouloir pour écraser les droits des minorités. Je le
répète : La majorité ne peut s'en servir selon son vouloir pour
écraser les droits des minorités.
Avant
que le ministre bâillonne les parlementaires de cette Chambre, il nous restait
de nombreux aspects à aborder. Nous aurions apprécié que le ministre les
étudie réellement avec ouverture. On était disponibles, M. le Président, on l'était. Notre chef l'a dit ce matin, une célèbre
loi, dont le ministre s'enorgueillit énormément, où ils ont passé l'été, tout
ça pour éviter le bâillon, tout ça. Ici, on
est pressés. Ce n'est pas grave, le bâillon. Ce n'est pas grave, de bafouer les
droits.
Ce
n'est pas parce que le ministre répète à chaque occasion que sa loi est
applicable, pragmatique et modérée, il vient de le redire, que cela
devient vrai pour autant. Et savez-vous quoi? Il a exactement employé cette
phrase-là tout à l'heure pour nous répondre
en disant : Ce n'est pas parce qu'on répète 15 fois quelque chose que
ça devient une vérité. Alors, M. le
ministre, je vous renvoie la balle avec exactement la même phrase. Ce n'est pas
parce que le ministre répète à chaque
occasion que sa loi est applicable, pragmatique et modérée que cela devient
vrai pour autant. Ce n'est pas parce que
le ministre dépose un amendement prétendant préciser sa loi que c'est
nécessairement le cas. Dans le contexte actuel, il nous était impossible d'approuver le reste des articles du projet de
loi dans ce contexte de bâillon. Ces changements sont trop importants
pour les adopter sous une pareille procédure d'exception.
Je
réitère que le ministre avait le choix. Le gouvernement avait le choix. Il n'y
avait aucune urgence, aucune. Le ministre
aurait pu prendre le temps de répondre à chacune de nos questions, des
questions soulevées par les gens visés par
son projet de loi. Il aurait pu étudier chacun de nos amendements. Il a plutôt
choisi d'y mettre fin et d'imposer son projet de loi aux Québécois. Il a
choisi la fermeture au dialogue, il a choisi l'artillerie lourde à la sérénité.
C'est
un jour triste, où le ministre aura choisi de couper court au débat, aura
préféré précipiter l'adoption de sa loi pour éviter d'en expliquer l'ensemble des impacts. Il aura choisi de
laisser des questions sans réponse, et ce, dans l'unique but de servir
son agenda politique.
Le
Québec se souviendra, M. le
Président, de ce triste jour, ce jour
où certains de nos concitoyens et concitoyennes ne
se sentiront plus vraiment chez eux au Québec, ce Québec
qui jusqu'ici, jusqu'à maintenant, a
été une terre d'accueil et de tolérance.
Je laisse la parole à
mon collègue le député de LaFontaine.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je suis
maintenant prêt à reconnaître M. le député de Jean-Lesage.
M. Sol
Zanetti
M. Zanetti :
Les Athéniens avaient-ils raison de condamner à mort Socrate? Cette question
soulève l'enjeu de la volonté de la
majorité en démocratie. Un des arguments, je dirais, fallacieux que nous avons
entendu énormément tout au long de
l'étude de ce projet de loi et avant se nomme l'appel à la majorité. Confrontés
à une difficulté, confrontés à l'évidence
de l'inapplicabilité de ce projet de loi, confrontés à l'évidence du fait qu'il
allait brimer nos droits et nuire à l'unité
nationale, on nous répondait du côté du gouvernement : La majorité des
Québécoises et Québécois ont voulu ceci, nous ont élus pour ça, et nous
allons le faire.
Premièrement,
ce n'est pas parce que la majorité du monde, nécessairement, tout le temps,
veut quelque chose que c'est une
bonne chose. Je pense que la condamnation à mort de Socrate est un exemple
assez irréfutable. Aussi démocrates que nous soyons, on est pour la
démocratie, la démocratie suppose aussi la protection des minorités.
Alors, d'une
part, dire : Nous le faisons parce que la majorité des gens le veulent, ce
n'est pas un bon argument pour orienter une politique publique. Si, demain
matin, la majorité des gens voulaient la peine de mort, si, demain matin,
la majorité des gens voulaient remettre en cause le droit
à l'avortement, voulaient remettre en cause ces choses-là, devrions-nous le
faire? La réponse est évidente : Non.
Mais l'affaire là-dedans, c'est que ce n'est
même pas vrai que la majorité des Québécoises et des Québécois veulent ça. Ce n'est pas vrai que ce
gouvernement-là a eu la majorité des voix. Ce gouvernement a eu l'appui de
25 % des électeurs inscrits sur
la liste électorale. 75 % des gens n'ont pas voté pour ce gouvernement. Et
on est dans un monde de sondages, et
d'image, et tout ça, là. Alors, chaque fois, on nous disait : Tant de
pourcentage des Québécoises et Québécois sont d'accord.
• (20 heures) •
Souvent,
quand on pose la question différemment, on obtient un résultat différent. Il y
a aussi un sondage qui est arrivé un peu plus tard qui disait que,
lorsqu'on demandait aux Québécoises et Québécois s'ils étaient d'accord avec ces interdictions des signes religieux si ça
compromettait les droits et libertés de la personne, l'appui fondait de 20 %. On se retrouvait avec un appui de 39 % pour, 41 % contre,
disons l'égalité statistique, et le reste en refus de répondre, indécis. Alors, non seulement l'appel à la majorité
ne suffit pas — il suffit pour bien des choses, il suffit
pour faire un projet de transport en
commun, il suffit pour amener des politiques publiques, mais il ne suffit pas
pour aller brimer les droits et
libertés de la personne — non seulement ça, mais en plus la majorité des Québécoises et
Québécois n'appuient pas ce projet de loi.
On nous dit
que nous allons passer à autre chose. Je ne sais pas comment on s'imagine que
ça va magiquement se passer, mais, la tension sociale que nous vivons ici, nous
ne sommes pas les seuls, c'est un phénomène qui se passe partout en Occident, et les solutions législatives
d'interdiction des signes religieux qui ont été utilisées ailleurs, différentes
de celles proposées par le gouvernement, j'en
conviens, elles n'ont pas donné comme résultat une fin du débat, un abaissement des tensions, une meilleure unité
nationale, une cohésion ni même, je dirais, une fierté et un rehaussement
du sentiment d'appartenance. L'exemple de la
France est marquant. Leurs législations sont différentes, ce n'est pas pareil,
mais, ces femmes qu'on voulait protéger en
leur interdisant les signes religieux à l'école, 15 ans plus tard,
qu'est-ce qui se passe? Elles sont
moins autonomes, plus à la maison, ont plus d'enfants, ce qui n'est pas un
problème en soi, là, avoir plus d'enfants, mais, je veux dire, elles
sont moins autonomes, elles sont moins sur le marché du travail, elles ne sont
pas plus émancipées comme on le prétendait.
C'est rare que la coercition libère, qu'en disant à quelqu'un de ne pas faire
ceci puis ne pas faire cela on le rend plus libre.
Il y a une
menace à l'identité québécoise dont on ne parle pas souvent, et elle est liée
intrinsèquement au régime politique
dans lequel on est. Ce qui nous menace, c'est le fait que nous ne prenons pas
l'ensemble de nos décisions par nous-mêmes,
et ça, ça s'appelle l'aliénation politique. À force de voir notre avenir dirigé
par les choix des autres, nous perdons
une part de notre identité. Ça, c'est grave. Ça, c'est urgent. Ça, ça nécessite
une action immédiate. Et cette action-là, ce n'est pas l'interdiction
des signes religieux, c'est, entre autres, l'indépendance du Québec. Merci.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Je reconnais
maintenant M. le chef du troisième groupe d'opposition.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé :
Merci, M. le Président. Pour la prise en considération, c'est un privilège pour
moi de parler au nom du caucus des
fiers députés du Parti québécois, de ses milliers de membres, de toutes ces
personnes qui ont de l'estime pour nous pour réaffirmer quelque chose de
solennel : Le Québec, c'est bien plus qu'une société distincte, c'est une nation, et une nation normale prend des décisions
pour le vivre-ensemble, pour prévoir l'avenir et aussi parce qu'elle en a
le droit. Elle en a le droit parce que l'Assemblée nationale, c'est notre
Parlement national. C'est important.
Je ne serai
pas très long. Il y aurait beaucoup de choses à réitérer. Bien sûr,
l'enjeu, ce n'est pas d'aller plus loin, c'est la cohérence. Bien sûr, il y aura des suites, des gens contesteront cette loi,
mais il faudra réaffirmer la souveraineté de notre Parlement national,
notre seule institution où on peut parler pleinement de ce qu'on est.
Le Québec,
il est fort de ses décisions. Lorsqu'en 1977 on a voté pour la loi 101, il
s'est trouvé des parlementaires pour voter contre. Maintenant, tout le
monde se réclame de cette grande loi.
Cette loi, nous aurions aimé la voter. La
première formation politique qui a voulu légiférer en ce sens, c'est le Parti
québécois, en 2013, dans un contexte
minoritaire. Nous aurions aimé que cette question soit réglée ou puisse avancer
sous le gouvernement libéral, ce ne
fut pas le cas. Le gouvernement propose un projet de loi qui est légitime
et nécessaire et qui permet de
prévoir l'avenir et la pluralité religieuse du Québec. Nous n'avons pas peur,
nous avons confiance en notre jugement. Nous avons confiance qu'en
l'absence de règles tout est possible.
Et je me
questionne sur ce retour du religieux dans notre société, M. le Président. Pourquoi accepterait-on le retour du religieux? Pourquoi le
retour du religieux et des signes ostentatoires aurait préséance sur la liberté
de conscience, notamment des enfants et de leurs parents? Je me pose cette
question.
Je suis
heureux que le gouvernement ait accepté notre proposition pour inclure les
directeurs d'école, on n'en a pas parlé beaucoup. J'aurais aimé que
les éducateurs, éducatrices en CPE fassent partie de la loi, c'est des gens en
autorité. J'aurais aimé que les écoles privées soient assujetties aussi, ça n'a
pas été fait. J'aurais aimé un cadre plus clair quant à la modification du cours d'Éthique et culture religieuse, ce
n'est pas le cas. Mais, ce matin, lorsque j'ai posé des questions au premier ministre, j'ai été
heureux de l'écoute et de l'accueil qu'il m'a réservé à chacune de ces trois
questions. Le Parti québécois était là avant sur ces questions-là, mais l'important pour la suite des
choses, bien au-delà du cadre dans lequel on débat, qui est un cadre
d'exception, bien au-delà de ça, c'est le résultat. Et la volonté des députés
du Parti québécois, c'est d'adopter la meilleure loi possible, d'y contribuer
positivement.
Notre
position, elle est connue depuis 2017. C'était notre position avant l'élection,
c'était notre position pendant l'élection,
c'est toujours notre position. Authenticité et conviction. Nous
croyons qu'une société normale peut prendre ses décisions. Nous croyons que le gouvernement pose un geste, un
geste qui l'engage et un geste qui nous engagera à partir du vote final.
J'en appelle à l'ensemble des membres de l'Assemblée
nationale, une fois que le verdict sera connu, de faire respecter cette loi, parce que le vent soufflera fort, des gens voudront
invalider cette loi, des gens appelleront à la désobéissance. Mais, quand ça arrivera, M. le Président, vous pourrez compter sur le Parti
québécois pour faire respecter les
lois du Québec, même les lois avec lesquelles on n'est pas
d'accord, on a voté contre. Ce Parlement, c'est notre maison, c'est ici que se
prennent les décisions de la nation, nous le respectons énormément. Nous avons
une riche histoire, M. le Président, démocratique,
mais nous avons un bel avenir devant nous. Et aujourd'hui je veux annoncer
au nom du Parti québécois que
nous voterons en faveur de cette prise en considération. Merci.
>655 Le Vice-Président (M. Picard) : Merci,
M. le député. Je cède maintenant
la parole à M. le député de Bourget.
M. Richard Campeau
M.
Campeau : Merci, M. le Président. Comme vous savez, je suis député de
la région de Montréal, et, en fait, plus de l'est de Montréal, et je suis vraiment fier d'avoir la chance de
prendre la parole aujourd'hui pour un projet
de loi aussi important que le
projet de loi n° 21 sur la laïcité.
Tous les partis ont des recherchistes qui nous
aident à préparer nos textes quand on vient en Chambre, mais quiconque me connaît un tant soit peu sait très
bien qu'il n'y a personne qui m'empêcherait de dire vraiment ce que je pense profondément. C'est une raison de plus pour
être heureux et fier d'avoir l'occasion de parler de ce projet de loi sur la
laïcité.
J'ai été
identifié bien avant le 1er octobre dernier, un an avant, dans les tout
premiers candidats, et déjà, dans le porte-à-porte,
on me disait : Ne lâchez pas, continuez, maintenez votre position. Ça fait
déjà longtemps. Ce projet de loi là a fait
couler beaucoup d'encre, et même encore actuellement on a le même message. Mon
expérience, là, c'est que la division qu'on
entend ici, qu'on entend lors de la commission parlementaire, ce n'est pas ce
que j'entends dans mon comté, ce n'est
pas ça. Les gens nous disent avoir un désir d'en finir une fois pour toutes, il
y a un ras-le-bol de cette discussion qu'on a depuis trop longtemps sur
la laïcité.
La laïcité
qui est proposée par le projet de loi n° 21, ce n'est pas un rejet de qui
que ce soit, c'est simplement une façon de vivre ensemble. C'est une
manière de tracer des lignes législatives pour éviter que des personnes en
position d'autorité exercent une influence
religieuse ou d'apparence religieuse dans leurs fonctions, pour protéger la
liberté de conscience et, bien sûr, surtout auprès de nos enfants.
Il y en a qui ne sont pas d'accord, mais je sens
qu'il y a une vaste majorité de Québécois qui nous appuient. L'opposition, les diverses oppositions ont demandé
plus de temps pour discuter du projet de loi. Quant à moi, ça fait 11 ans
qu'on en parle, je pense qu'on en a assez parlé. On ne fait que se répéter.
Je suis vu
comme quelqu'un de terre à terre, de pratique, de pragmatique et je trouve
extrêmement décevant de voir qu'on a un rapport qui a été sorti il y a
10, 11 ans et qui fait juste prendre la poussière. Parler de ça un
dimanche soir au salon bleu, bien, je n'en reviens pas. Si on avait bougé, il y
a 10, 11 ans, on n'aurait pas besoin de faire ça.
Cet exercice, il y a un historique en arrière...
• (20 h 10) •
Des voix : ...
Le
Vice-Président (M. Picard) : ...M. le député. Il y a une personne qui
a le droit de parole ici, et c'est le député de Bourget, s'il vous
plaît. Allez-y.
M.
Campeau : Cet exercice qu'on
vit, il y a un processus, une tendance en arrière. L'idée de la séparation
de l'État et de l'Église figurait dans les demandes des Patriotes de
1838. L'histoire de l'émancipation du Québec, via la Révolution tranquille, on a aussi séparé la religion dans l'appareil
étatique. La sécularisation, c'est-à-dire se distancer, les instances politiques, de
celles religieuses, était exprimée par la création du ministère de l'Éducation
suite aux recommandations du rapport Parent, que tout le monde connaît. Avant cette commission, les institutions d'enseignement
supérieur étaient vraiment sous la gouverne du clergé, et maintenant on a
séparé ça, à ce moment-là, d'une façon confessionnelle,
en commissions scolaires catholiques et protestantes. Une quarantaine d'années
plus tard, l'Assemblée nationale, en
juin 2000, adoptait la loi n° 128 où on abrogeait le
statut confessionnel des écoles, et elles devenaient, à ce moment-là,
des commissions scolaires linguistiques, anglophones et francophones.
Et on en
arrive finalement à notre point d'orgue, la Commission de consultation sur les
pratiques d'accommodements reliées aux différences culturelles, en fait
la commission Bouchard-Taylor, qui ouvrait la voie à une piste de solution.
En 2014, il y
a un sociologue, François Rocher qui disait que moins de 40 % des
recommandations avaient été appliquées
et les autres, les plus importantes, avaient été mises de côté. Depuis ce
temps-là, il y a eu encore une évolution que nous savons tous. Le Parti québécois, comme ce qui vient d'être
mentionné par le chef de la troisième opposition, en 2013, parlait d'une charte affirmant les
valeurs de laïcité, de neutralité religieuse de l'État ainsi que d'égalité
entre les hommes et les femmes et
encadrant les demandes d'accommodement. On sait que le Parti québécois n'a pas
réussi, dans les circonstances, à
faire adopter cette charte des valeurs, et on est resté bloqué avec le
problème. Le Parti libéral a tenté à plusieurs
reprises, depuis 2008, d'aller de l'avant, la dernière mouture étant la loi n° 62, dont nous nous souvenons, qui malheureusement n'a pas fait long feu, étant
devenue inapplicable, car actuellement suspendue par la Cour supérieure
du Québec.
La CAQ a promis, en étant élue, de faire un mouvement
dans ce sens-là, a exprimé sa position depuis longtemps. En fait, même si je n'avais pas été élu, je suis
avec la CAQ depuis le tout début, depuis 2012, je suis très bien placé pour
dire qu'on défend la même position, la même
position de compromis, depuis 2013. L'heure est venue de poser un geste
d'affirmation en faveur de la laïcité de l'État et de tourner la page. La
proposition de la CAQ m'apparaît réellement modérée
et ainsi applicable à une majorité de la population, et ça demeure un compromis
inspiré du rapport Bouchard-Taylor.
On
a dit souvent que c'est faire preuve de courage politique que d'aller dans
cette direction-là. Oui, si on avait eu
plus de courage, il y a 10, 11 ans, on n'en serait pas là. Actuellement,
je ne suis pas certain qu'on a besoin de beaucoup de courage politique.
La population nous le demande, les gens nous le demandent, on nous dit de ne
pas reculer.
La
laïcité québécoise n'est pas la première au monde et n'est pas la dernière.
Nous ne sommes pas des pionniers, on ne se dirige pas vers l'inconnu. La
semaine dernière, j'ai eu l'occasion, avec un collègue, de rencontrer un
journaliste espagnol originaire d'Uruguay et
j'ai appris que l'Uruguay est laïque — je vois que mon collègue s'en souvient — est laïque depuis maintenant
100 ans, depuis 1919. Ils trouvent notre débat bien compliqué.
Je
pense que nous prenons une décision éclairée, qui respecte les valeurs de nos
citoyens et qui nous permettra de
passer à autre chose, d'autres débats tout aussi importants. La laïcité, c'est
une décision, une position dans notre premier mandat, c'est une étape à franchir avant de s'attaquer à d'autres
problèmes tout aussi importants. Je suis fier d'être un membre de ce gouvernement qui va finalement
trancher la question de la laïcité, un gouvernement qui se dit un gouvernement d'action et de pragmatisme et qui
tente, je le pense, profondément à tous les jours de montrer cet aspect
actif et pragmatique.
Encore
une fois, un tout petit peu d'historique, en finissant. Le Québec est
résolument francophone depuis 1977. On
se souvient tous des paroles de Robert Bourassa : «Quoi qu'on dise,
quoi qu'on fasse, le Québec est, aujourd'hui et pour toujours, une société distincte, libre et capable d'assumer son
destin et son développement.» 42 ans après l'adoption de la loi 101, nous allons nous doter d'un
État laïque. C'est une autre affirmation de notre caractère distinct à
l'échelle canadienne et
nord-américaine. C'est un débat qui a déchiré le Québec pendant tant d'années
et qui est sur le point de prendre fin, enfin. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci, M. le député. J'indique au troisième groupe
d'opposition qu'il reste 1 min 15 s au groupe parlementaire. Et
je cède la parole à M. le député de LaFontaine, en lui indiquant qu'il reste
7 min 15 s.
M.
Marc Tanguay
M. Tanguay : Et ma deuxième question était — vous avez répondu à la première :
Est-ce que le gouvernement compte utiliser tout son temps, M. le
Président?
Une voix :
...
• (20 h 20) •
M.
Tanguay : Alors, M. le Président, je vais prendre la balle au
bond, du collègue de Bourget. Et c'est là, je pense... Et il a dit, il a prononcé ces paroles, je pense,
en toute bonne foi, il a dit : On met fin à un débat, et, après ce soir,
après l'adoption, si d'aventure l'Assemblée nationale vote le projet de loi n° 21, ce sera terminé, ce débat-là. M. le Président, il sera loin
d'être terminé, ce débat-là.
Présentement,
au Québec, celles et ceux qui nous écoutent à la maison peuvent en témoigner,
il n'y a pas de crise sociale, il n'y
a pas d'atteinte à la paix sociale. Et les effets du projet de loi n° 21 seront justement aux antipodes de ce qu'on nous plaide pour qu'on vote pour, ce sera de créer, M. le
Président, de la chicane, créer également, et il ne faut pas le
diminuer, et ce n'est pas galvaudé, comme expression, mais créer... si ce n'est
pas des dilemmes, on pourra jusqu'à certains
cas créer des drames humains, M. le Président, lorsqu'on vous demandera, pour
accepter un changement de poste, une
promotion, un transfert pour vous rapprocher de votre famille, par exemple, de
votre conjoint ou conjointe, de vos enfants... lorsqu'on vous
dira : Parfait, vous pourrez le faire mais au prix de vos convictions les
plus intimes, les plus profondes, votre conscience et votre liberté de religion.
Bien, lorsqu'on vous demandera de payer ce prix-là, des femmes et des hommes seront devant ce dilemme, M. le Président, qui n'est pas un dilemme en face duquel une assemblée nationale qui a à coeur le respect
des droits et libertés de tous et chacun ne doit l'imposer, M. le Président.
Et
je me rappellerai toujours que le ministre, et le débat va se clore vraisemblablement dans les prochaines heures, le ministre de l'Immigration, leader
du gouvernement, avait souhaité au départ, lors du dépôt du projet de loi, le
28 mars 2019 — ça
ne fait pas tellement longtemps, ça, 28 mars 2019 — un
débat serein, respectueux et rigoureux, et
force est de constater, M. le
Président, et je le dis en tout
respect, que, sur ces trois aspects-là, je pense qu'il s'agit d'un échec. On n'a pas eu la rigueur du débat parce
qu'on n'a pas eu le temps de débattre, on n'a pas eu le temps, M. le Président, de faire valoir, de part et
d'autre, nos arguments, et ça, c'est un échec. Le respect, la sérénité, lorsque
l'on nous impose, oui, clause
«nonobstant» mais un bâillon, M. le
Président, on ne peut pas parler de
respect et de sérénité. Oui, ça existe, la procédure extraordinaire,
mais pas sur une loi, M. le Président, qui vient diminuer vos droits et
libertés comme Québécois et Québécoises, qui vous impose une clause «nonobstant», autrement dit qui vous interdit tout recours judiciaire, vous êtes pieds et poings liés en ce qui a trait à
la perte de ces droits et libertés. Et, lorsqu'on rajoute la dernière couche,
c'est le bâillon, M. le Président, où l'on ne peut pas, comme députés, faire
notre travail.
M. le Président, je vais annoncer aux collègues ici, autour de la table... Puis je suis certain,
je suis certain, puis si je ne suis
pas, M. le Président... qu'on me détrompe si j'ai tort, mais, si les collègues
de la banquette ministérielle avaient été
mis au courant des amendements qui s'en viennent, là il faudrait vraiment
parler de deux poids, deux mesures. Je vais vous informer de trois amendements
nouveaux.
Je ne veux
pas vous informer du premier amendement, qui est arrivé pas plus tard qu'il y a
cinq jours, qui était une nouvelle
définition... c'est-à-dire qu'il n'y avait pas de définition, mais c'était
une définition des signes religieux. Puis
je n'irai pas dans le sensationnalisme et parler de l'épisode, le triste
épisode, je le dis en tout respect, de notre premier ministre qui, pendant quelques heures, selon son
interprétation de l'interdiction des signes
religieux, un jonc, un jonc de
mariage est un signe religieux, et on devait le retirer, on devait l'enlever. C'est correct, le ministre
chargé de l'application de la loi a
dit : Non, non, non, ce n'est pas ça. Ça, c'est révélateur, M. le Président, du fait que c'est extrêmement nébuleux. Si le premier ministre du Québec, qui dit que ça fait des années qu'on en parle,
que lui, il est au coeur du débat, a fait cette erreur-là, imaginez-vous la directrice d'école, le directeur d'école
lorsqu'il devra refuser, la croix, est-ce qu'elle est là, est-ce qu'elle est suffisamment visible, est-ce
qu'elle est invisible. Parce qu'on nous a même dit, M. le Président, je ne veux même pas faire de
farce là-dessus... on nous a même dit que les signes invisibles étaient
interdits, M. le Président. Ce n'est pas applicable, ça ne tient pas
la route.
Je vais
informer cette Assemblée puis les collègues, mes collègues de l'opposition
officielle, des autres oppositions
puis, je suis persuadé... sinon il y aurait
eu deux poids, deux mesures dans la communication d'une information importante pour
le législateur, pour qu'on puisse statuer, de l'introduction
de trois nouveaux amendements qui seront votés dans les prochaines
minutes, M. le Président, un premier amendement qui vise à préciser... On en a
parlé. Dans les palais de justice, il y a 11 palais de justice qui
comportent, à l'heure actuelle, 17 crucifix. La ministre de la Justice
était sortie récemment pour dire : Ils
seront retirés. Bien, à sa face même, on nous détromperait si on faisait le
débat, mais il y aura un amendement qui sera déposé qui fait en sorte... Et je cite
la dernière phrase du premier alinéa : «Toutefois, une institution peut, de sa propre initiative, retirer ou modifier un immeuble ou un tel bien
meuble.» Ici, on parlait d'un bien meuble, un crucifix, qui avait une
teneur, évidemment, religieuse. Alors, une fois que la ministre de la Justice a
dit ça : Ils seront retirés, là, force
est de constater qu'on en rajoute une couche aux décideurs locaux, de
dire : Bien, vous, vous déciderez, on vous donnera ce pouvoir
discrétionnaire là, sans vous donner
plus de balises. Et ça, Mme la
Présidente, c'est un élément
qui va ajouter à la confusion.
Deuxième élément, les pénalités, on n'avait jamais
parlé de pénalités. La vice-première ministre avait parlé d'envoyer la police rapidement, puis c'est
correct, ça arrive, on en fait tous, des erreurs politiques. Là, on dit :
Non, ce n'est pas ça, on va présumer
de la bonne foi des gens, puis ils appliqueront. Il y aura un amendement, tout à l'heure, qui sera voté, je vous en informe, chers
collègues : «La personne visée à l'article 6 — 6, c'est le signe religieux — ou au premier alinéa de l'article 8 s'expose, en cas de manquement aux mesures
qui y sont prévues, à une mesure disciplinaire...» Ça, on va voter là-dessus. Ils useront de leur majorité
parlementaire pour le passer, mais ça, mesure disciplinaire, ce n'est pas
anodin. Puis ça, quand on me dit qu'on veut
renforcer la paix sociale, ça, on vient, Mme la Présidente, y toucher à son
propre coeur.
Et, le dernier, je ne veux même pas faire de
farce là-dessus, il y aura : «Un ministre peut — un
amendement à 11.1 — de concert avec le ministre responsable de
l'application[...], [...]désigner par écrit une personne [...] chargée
de [la] vérification [du respect de cette loi].» Autrement dit, autrement dit...
Des voix : ...
M. Tanguay :
Il me reste... J'ai 7 min 15 s, Mme la Présidente. Autrement dit...
Et exiger tout document, renseignement
jugé nécessaire pour procéder à la vérification et, tenez-vous bien, requérir
de l'organisme... On pourrait dire,
puis ce n'est même pas drôle... on pourrait dire la police, Mme la Présidente.
Alors, la police de la laïcité pourrait, en somme — ça fait
une page et demie, cet amendement-là — pourrait le soumettre... Il devra,
l'organisme, se soumettre à toute autre mesure exigée par cette police.
Alors, Mme la
Présidente, le leader disait, dans son livre de 2018 : «La justice est un
univers où l'arbitraire n'a pas sa place et où les gens ont la possibilité
d'être soutenus dans la défense de leurs droits.» Mme la Présidente, à la face
de cette citation, c'est un échec total.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Je suis prête à
entendre un autre intervenant. Mme la députée de Roberval.
Mme Nancy Guillemette
Mme
Guillemette : Merci, Mme la
Présidente. La première fois que je me suis levée ici, en cette Chambre, pour
m'adresser à vous, c'était lors de mon
arrivée. Donc, je suis fière, aujourd'hui, pour une seconde fois de m'adresser
à vous, de pouvoir vous entretenir du projet de loi n° 21, le
projet de loi sur la laïcité.
Originaire de
la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean,
les implications dans ma région et ma perspective sur le sujet diffèrent
sûrement de celles des grands centres. Là, la diversité de religion est
marquée, est plus visible.
L'idée de la séparation de l'État et des Églises
figurait déjà dans la déclaration d'indépendance de 1838. Mme la Présidente, après quatre projets de loi,
une commission publique sur les accommodements raisonnables et un projet
de la charte des valeurs québécoises, nous
sommes enfin, oui, enfin, aujourd'hui, rendus à l'aboutissement de la volonté
de la population québécoise, une volonté qui
a longtemps été reportée. La patience est une vertu, mais la vertu a ses
limites.
Les nombreux débats qui ont eu lieu au
sein même des murs de cette Assemblée au cours des dernières années m'ont permis de me questionner sur le concept de
la laïcité. Quand on s'arrête sur l'étymologie du mot «laïque», on se surprend à y découvrir la source des débats, car
le mot lui-même est assujetti à une variété d'interprétations : du grec
«laikos» qui signifie «peuple», au
sens de «qui concerne l'ensemble du peuple», considéré comme un tout
indifférencié; «laicus», laïc au sens
de «qui n'a pas reçu les ordres de cléricature»; et «laïque», qui est qualifié
de «ce qui est indépendant de toute religion».
Nous
voulons qu'elle favorise la liberté de conscience, la liberté de religion, deux
principes de la charte des droits et libertés. Cela signifie, pour chaque homme
et chaque femme, le droit de croire ou de ne pas croire, le droit de
choisir en toute liberté son option
spirituelle, qu'elle soit religieuse, athée, agnostique ou même voire
l'indifférence à toute religion. C'est
par respect pour cette liberté qu'il est important aujourd'hui que nous allions
de l'avant avec l'interdiction des signes religieux pour les personnes
en position d'autorité.
• (20 h 30) •
Il
est intéressant d'appliquer cette liberté d'interprétation aux religions pour
comprendre comment elles peuvent aller de pair avec notre laïcité. Vous
conviendrez, Mme la Présidente, que la religion s'exprime différemment d'une personne à une autre. Contrairement aux grands
principes, le sens commun que l'on donne à ce mot est donc la séparation
entre les religions, séparation relevant de la vie privée et des institutions
publiques, l'État indépendant de l'Église.
Définir comment cette
laïcité s'exprime sur le plan législatif, c'est le défi auquel on fait face
dans le projet de loi n° 21. Ce à quoi le projet de
loi n° 21 aspire, c'est de solidifier définitivement
une laïcité québécoise.
Certains
diront qu'au Québec nous n'avons pas de vrai problème avec les signes religieux,
pas de vrai problème avec les
accommodements raisonnables, pas de vrai problème non plus de racisme, et c'est
tant mieux, Mme la Présidente. C'est donc le moment opportun et
pertinent pour y voir.
La
laïcité québécoise, nous la voulons universelle, un principe qui favorise le
respect, le mieux-vivre ensemble qui
doivent être appliqués à tous et être justes, la religion, pour être vécue
beaucoup plus librement par ceux qui la pratiquent, et ce, même au sein d'une même religion, comme
beaucoup de personnes se disent croyantes et d'autres croyantes non pratiquantes. Comme vous le savez, Mme la
Présidente, la religion n'est pas quelque chose qui nous est imposé mais plutôt
quelque chose que l'on choisit. Croire à une
religion, c'est de s'identifier à certains principes, à certaines valeurs,
c'est un cas type, qui est connu et
compris par beaucoup de Québécois. Chaque individu choisit comment il veut
vivre sa religion, comment il veut vivre sa spiritualité.
Il
y a quelques semaines, pendant les travaux de la commission sur le projet de
loi n° 21, j'ai eu la chance de faire une annonce au nom de ma collègue
la ministre du Tourisme, un spectacle multimédia de calibre international, l'Ermitage Saint-Antoine du Lac-Bouchette, un lieu de culte, un
site enchanteur, un sanctuaire national. Ce lieu est visité par de nombreux
pèlerins. Il est fondé et animé encore aujourd'hui par des Frères capucins.
Au
fil de mes rencontres et discussions, j'ai rencontré un citoyen.
Celui-ci m'a abordée en félicitant l'initiative
du gouvernement sur le projet de la laïcité. Il m'a entretenue de sa vision de
la religion, la spiritualité, toutes croyances confondues, jusqu'à ce que je me rende compte, Mme la Présidente, qu'il
était un moine résident et qui ne portait pas la coule, le vêtement des moines. Il m'a fait part, à l'occasion, de sa
vision de la religion, de son interprétation des symboles religieux, dont celui de la croix et de son habit,
qu'il investit d'un sens très personnel et très différent. Il m'a répondu que,
pour lui, l'important, c'est la cohésion, la cohésion du coeur, de l'esprit et
de la tête.
Ce
que je retiens de cette rencontre, Mme la Présidente, c'est la capacité
d'adaptation de la spiritualité, c'est la flexibilité nécessaire de la
religion, qui est vécue différemment d'une personne à une autre, d'un endroit à
un autre. Interdire les signes religieux
pour les personnes en position d'autorité demandera une adaptation certaine
pour ceux dont la spiritualité les
appelle à porter des signes dans la sphère publique. Dans l'absolu, on ne leur
demande pas de s'éloigner de leur
religion. On ne leur demande pas d'arrêter de porter les signes religieux dans
leur vie privée. On leur demande, du moins
à ceux qui exercent une position d'autorité, que ce soit celle d'enseignant, de
policier, de juge ou autre, on leur demande de faire preuve de flexibilité,
d'adapter leur interprétation religieuse à l'environnement dans lequel ils
évoluent, un environnement laïque, un environnement ouvert et un
environnement inclusif.
Le
compromis est un principe essentiel de la vie en démocratie. Je considère que
celui proposé par notre gouvernement sur la question de la laïcité est juste,
modéré et équilibré. Le projet de loi n° 21 sur la laïcité est
un pas vers l'avant pour la société
québécoise. Comme le dit si bien notre premier ministre, notre gouvernement est
un de pragmatique, mais j'ajouterais
également de courageux, Mme la Présidente. Nous l'avons démontré hier, et c'est
ce que nous faisons encore aujourd'hui. En octobre dernier, la
population nous a envoyé un message clair, un message fort, un message important de mieux vivre ensemble. Et c'est ce que
nous nous efforçons de faire aujourd'hui, et je suis fière et heureuse
du gouvernement qui l'adoptera aujourd'hui, et je suis fière et heureuse de
léguer un État laïque à mes enfants et petits-enfants.
C'est
un moment important, un moment pour nos valeurs québécoises, un moment pour la
population qui attend depuis déjà trop longtemps. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Mme la députée d'Argenteuil.
Des voix :
...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Ah? Alors, Mme la députée des
Plaines.
Mme Lucie
Lecours
Mme Lecours (Les Plaines) : C'est
moi!
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Allez-y.
Mme Lecours
(Les Plaines) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. À l'instar du ministre, j'ai le goût de commencer par une évidence. Le Québec
est véritablement mûr pour affirmer cette valeur fondamentale dans ses lois
qu'est la laïcité. C'est pourquoi nous
nous sommes engagés à le faire. C'est également pourquoi nous le faisons en
adoptant aujourd'hui le projet de loi n° 21, la Loi sur la laïcité
de l'État.
Eh oui, je
vais le répéter, parce que je pense que c'est important qu'on le redise,
qu'on fasse un peu d'histoire : il
y a plus de 10 ans, la Commission de
consultation sur les pratiques d'accommodement reliées aux différences
culturelles, mieux connue sous le nom
de la commission Bouchard-Taylor, déposait son rapport final en ouvrant la voie
sur des pistes de solution pour le Québec en matière de laïcité. Le
problème, Mme la Présidente, c'est que, depuis, la volonté des Québécois
d'en arriver à une solution sur le plan des accommodements religieux et de la laïcité
de l'État est restée lettre morte. Et pourtant les Québécois veulent la
vraie laïcité encore et plus que jamais.
Je voudrais
revenir un peu en arrière et vous rappeler aussi que le Parti québécois a présenté, en novembre 2013, le projet de charte affirmant la valeur
de laïcité et de neutralité religieuse de l'État ainsi que
l'égalité entre les hommes et les femmes en encadrant les demandes
d'accommodement. La Coalition avenir Québec, à ce moment-là, avait alors tendu la main au Parti québécois, visant un
compromis, acceptable pour la population, inspiré du rapport Bouchard-Taylor, mais le Parti québécois a refusé et échoué dans son souhait de le faire adopter. Il y a
également le Parti libéral du Québec,
lequel a échoué à plusieurs reprises depuis
2008 à régler ce dossier. Le projet
de loi n° 62 est leur dernier
échec en la matière, une loi inapplicable, actuellement suspendue par la
Cour supérieure du Québec.
Pendant ce
temps, Mme la Présidente, la population attend encore que cette question soit réglée.
Nous sommes 75 élus de la Coalition avenir Québec ici, à l'Assemblée
nationale, et, je vous le dis, il ne
se passe pas une seule journée sans
que nous recevions une panoplie de témoignages en ce sens. Les gens veulent que
l'État soit véritablement laïque, pas
un État irrespectueux, pas un État intolérant, pas un État inhumain, comme
certains se sont plaît à le dire, mais un État laïque, véritablement et
tout simplement.
Ainsi donc, Mme la Présidente, nous, les députés de la CAQ, représentants de la population
du Québec, avons été élus pour réussir là où les
autres n'ont pas réussi. Nous défendons la même position de compromis depuis
2013. Notre position n'a jamais changé. Il
s'agit d'ailleurs de la position de la majorité des Québécois.
L'heure est donc venue de poser un
geste d'affirmation en faveur de la laïcité de l'État et enfin de tourner la page sur ce pan
de notre histoire.
Après nous
être dotés d'un État résolument francophone en 1977, il est maintenant
temps, 42 ans plus tard, de nous doter
d'un État véritablement laïque. Pourquoi?
Entre autres, parce qu'il s'agit d'une façon pour nous d'affirmer notre
caractère distinctif à l'échelle canadienne et nord-américaine.
En tant que
membre de ce Parlement, en tant qu'élue d'une nouvelle circonscription sur
l'échiquier québécois, je vous avoue,
Mme la Présidente, ma grande fierté de prendre part à la rédaction de cette
page de l'histoire en ce 16 juin 2019. Je considère que l'inscription de la laïcité de l'État dans la charte
québécoise des droits et libertés est fondamentale. Et non seulement
elle est fondamentale, mais elle est également réalisable, malgré ce que
plusieurs constitutionnalistes et juristes peuvent prétendre.
Vous savez,
Mme la Présidente, alors que certains s'y opposent, d'autres nous appuient.
Alors, ce n'est pas juste noir ou
blanc, ce n'est pas juste un certain nombre de juristes qui ont raison ou un
certain nombre d'autres qui ont tort. Ce
qu'il importe, c'est d'écouter l'ensemble des points de vue juridiques en la
matière et de faire part des choses entre les opinions purement
émotives...
• (20 h 40) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Le temps est
écoulé. Merci, Mme la députée. Ceci met
fin à la prise en considération du rapport de la commission plénière sur le
projet de loi n° 21, Loi sur la laïcité de l'État.
Mise aux voix des
amendements du ministre
L'article 257.7
du règlement prévoit que la présidence doit donner lecture de chacun des
amendements proposés avant la mise aux voix et que chacun des votes se
fait à main levée. Alors, nous allons débuter par la mise aux voix des amendements... alors, les amendements
présentés par M. le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de
l'Inclusion.
Est-ce que
l'amendement proposé à l'article 4, qui... se lit comme suit :
Ajouter, à la fin de l'article 4, l'alinéa suivant :
«La laïcité
de l'État exige également que toute personne ait droit à des institutions
parlementaires, gouvernementales et judiciaires laïques ainsi qu'à des
services publics laïques, et ce, dans la mesure prévue par la présente loi et
par la Loi favorisant le respect de la
neutralité religieuse de l'État et visant notamment à encadrer les demandes
d'accommodements pour un motif religieux dans certains organismes.»
Est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, maintenant, nous allons procéder
à la mise aux voix... présenté toujours par le ministre de
l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion...
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Oui?
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
J'ai dit : Adopté, mais peut-être trop rapidement. Alors, cette motion...
cet amendement est adopté à l'unanimité.
Des voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
À la majorité, excusez, à la majorité. Majorité. Il est tard. Oui, M. le leader de l'opposition officielle.
M. Proulx : Juste pour la bonne
gouverne de nos travaux, Mme la Présidente. Au moment des votes, si nous
disons : Rejeté, vous allez dire : Adopté à la majorité, et, s'il est
adopté à l'unanimité, vous le direz. Voilà?
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
C'est bien, monsieur. Merci. Il faut peut-être le dire un peu plus fort, par exemple, pour que j'entende. Là,
j'entends juste le ministre, la voix du ministre.
Alors, maintenant, nous sommes rendus à l'amendement
à l'article 6, qui se lit comme suit :
À l'article 6
du projet de loi tel qu'amendé, remplacer, dans le deuxième alinéa, les mots
«qui est» par «, qui est», ajoutant une virgule. Alors, est-ce que cet amendement
proposé à l'article 6 est adopté?
Des voix : Adopté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Rejeté. Alors, adopté sur division. À la majorité? Sur
division, c'est correct?
Alors, c'est correct, sur division.
Alors, maintenant, l'amendement à
l'article 11.1.
Insérer, après l'article 11, le
suivant :
«11.1. Un ministre peut, de concert avec le
ministre responsable de l'application de la présente loi, vérifier l'application des mesures prévues à la présente
loi dans un organisme énuméré à [l'article] I ou auprès d'une personne
visée au paragraphe 11° de l'annexe III qui relève de [la]
responsabilité ou qui est [...] domaine de sa compétence. Il peut également désigner par écrit une personne qui sera chargée de cette
vérification.»
Une voix : ...
La Vice-Présidente (Mme
Soucy) : Oui?
Une voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : C'est l'annexe I? Oui? Ah! pardon,
oui, c'est l'annexe I, tout à fait. Alors, je
reprends à partir de ce...
«...énuméré à l'annexe I ou
auprès d'une personne visée au paragraphe 11° de l'annexe III qui
relève de sa responsabilité ou qui est du
domaine de sa compétence. Il peut également désigner par écrit une personne qui
sera chargée de cette vérification.
L'organisme ou la personne qui est visé par la vérification doit, sur demande
du ministre concerné ou de la personne chargée de la vérification, lui
transmettre ou autrement mettre à sa disposition tout document ou renseignement
jugé nécessaire pour procéder à la vérification.
«Le ministre concerné peut, par
écrit et dans les délais qu'il indique, requérir que l'organisme ou la personne
apporte des mesures [correctives], effectue les suivis adéquats et se soumette
à toute autre mesure, dont des mesures de surveillance et d'accompagnement.
«Pour l'application du présent
article, sont notamment du domaine de la compétence des ministres énumérés
ci-après les organismes et personnes suivants :
«1°
les organismes énumérés au paragraphe 5° de l'annexe I : le
ministre des Affaires municipales, des Régions et de
l'Occupation du territoire;
«2° les organismes énumérés au
paragraphe 6° de cette annexe : le ministre des Transports;
«3°
les organismes énumérés aux paragraphes 7° et 12° de cette annexe : le
ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport ou, selon le cas, le ministre de
l'Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie,
selon leurs responsabilités respectives;
«4°
les organismes énumérés aux paragraphes 8° et 13° de cette annexe :
le ministre de la Santé et des Services sociaux;
«5°
les organismes énumérés au paragraphe 11° de l'annexe I et la
personne visée au paragraphe 11° de l'annexe III : le ministre de la Famille, des Aînés et de la Condition féminine.
«Le présent article ne s'applique pas aux institutions
parlementaires et aux institutions judiciaires visées à l'un ou l'autre des paragraphes 1° ou 3° du deuxième alinéa de
l'article 3.»
Est-ce que l'amendement proposé à
l'article 11.1 est adopté?
Des voix :
Adopté.
La Vice-Présidente (Mme
Soucy) : M. le leader du deuxième groupe d'opposition.
Demande d'inscription au procès-verbal de la
dissidence des députés de Québec solidaire
M.
Nadeau-Dubois : Mme la Présidente, en vertu de l'article 228 de notre règlement, je vous demande
d'inscrire au procès-verbal de
l'Assemblée la dissidence de la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, la dissidence du député de
Gouin, de la députée de Mercier, du député de Rosemont, députés de Laurier-Dorion, d'Hochelaga-Maisonneuve, de Jean-Lesage et de Taschereau.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Merci, M. le leader du deuxième
groupe d'opposition, alors ce sera
fait. Alors, cet amendement est adopté sous division.
Maintenant, à l'article 12. Ajouter, à la
fin de l'article 12, l'alinéa suivant :
«La personne
visée à l'article 6 ou au premier alinéa de l'article 8 s'expose, en
cas de manquement aux mesures [et] qui y sont prévues, à une mesure
disciplinaire ou, le cas échéant, à toute autre mesure découlant de l'application
des règles régissant l'exercice de ses fonctions.»
Est-ce que cet amendement proposé à
l'article 12 est adopté?
Des voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M.
le leader du deuxième groupe d'opposition.
M. Nadeau-Dubois : Même demande que tout
à l'heure, Mme la Présidente, en vertu de l'article 128 du règlement,
s'il vous plaît, inscrire au procès-verbal la dissidence des
députés de Sainte-Marie—Saint-Jacques, Gouin, Mercier, Rosemont, Laurier-Dorion, Hochelaga-Maisonneuve,
Jean-Lesage et Taschereau. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Ce sera fait, M. le leader. Alors, cet amendement est adopté sous
division.
Alors, nous allons passer à l'amendement à
l'article 16.
• (20 h 50) •
Des voix : ...
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Oui, c'est ce
que j'ai dit, c'est adopté sous division, effectivement. Alors, à
l'article 16. Remplacer l'article 16 par le suivant :
«16. Les
articles 1 à 3 ne peuvent être interprétés comme ayant pour effet d'exiger
[qu']une institution visée à l'article 3
qu'elle retire ou modifie un immeuble ou un bien meuble qui orne un immeuble.
Toutefois, une institution peut, de sa propre initiative, retirer ou
modifier un immeuble ou un tel bien meuble.
«Ces articles ne peuvent non plus être
interprétés comme ayant un effet sur la toponymie, sur la dénomination d'une institution
visée à l'article 3 ou sur une dénomination que celle-ci emploie.»
Est-ce que l'amendement proposé à
l'article 16 est adopté?
Des voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Adopté sous division.
Alors, nous allons passer à l'article 20.1.
Insérer, après l'article 20, le suivant :
L'article 2 de cette loi est modifié, dans
le premier alinéa :
1° par
l'insertion, à la fin du paragraphe 2°, de «, de même que les organismes dont
le fonds social fait partie du domaine de l'État»;
2° par l'insertion, dans le paragraphe 5°,
après «municipaux», de «et [de] régionaux»;
3° par
l'insertion, dans le paragraphe 7°, après la «Loi sur [les instructions publiques]
(chapitre [1.]13.3)», de «, la commission scolaire du Littoral
constituée par la [...] Commission scolaire du Littoral ([1996-1997], chapitre
125)»;
L'article 4, maintenant :
4° par la suppression, dans l'article 9°,
de «ou l'une de ses commissions».
Alors, est-ce que l'amendement à
l'article 20.1 est adopté?
Des voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : L'amendement
sur l'article 20.1 est adopté sur division.
L'article 20.2 :
Insérer,
après l'article 20.1, le suivant :
20.2. L'article 7 de cette loi est
modifié :
1° par le remplacement, dans le texte anglais, de
«any person [of] partnership with whom it has — désolée pour mon anglais — entered» par
«any persons or partnerships with whom or which it enters»;
2° par le remplacement de «de service ou une entente de subvention»
par «ou à laquelle il octroie une aide financière»;
3° par le remplacement de «ou [par] cette
entente» par «ou l'octroi de cette aide financière»; et maintenant
4° par le
remplacement de «cet organisme ou exécutés sur les lieux de
travail de son personnel» par «l'organisme ou lorsque les services sont
exécutés sur les lieux de travail du personnel [et] de cet organisme».
Est-ce que l'amendement proposé à l'article 20.2
est adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La
Vice-
Présidente (Mme Soucy) : Donc, adopté sur division.
Alors, l'article 23.1 : Insérer, après l'article
23, l'article suivant :
23.1. L'article 16 de cette loi est abrogé.
Est-ce que l'amendement proposé à l'article 23.1
est adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La
Vice-
Présidente (Mme Soucy) : Alors, adopté sur division.
Alors, nous sommes rendus à l'article... Alors,
c'est annexe II, paragraphes 6° à 8° :
Modifier l'annexe II :
1° par le remplacement du paragraphe 6° par le
suivant :
«6° le
ministre de la Justice et procureur général, le directeur des poursuites
criminelles et pénales, ainsi qu'une personne
qui exerce la fonction d'avocat, de notaire ou de procureur aux poursuites
criminelles et pénales, y compris un cadre juridique qui supervise le travail
de ces personnes ou celui [d'un cadre juridique], et qui relève d'un ministère,
du Directeur des poursuites criminelles et pénales, de l'Assemblée nationale,
d'une personne nommée ou désignée par l'Assemblée
nationale pour exercer une fonction qui en relève, d'un organisme visé au
paragraphe 3°, de l'Autorité des marchés financiers, de l'Autorité des
marchés publics, de la Commission des droits de la personne et des droits de la
jeunesse, de Revenu Québec ou [...]
organisme [...] personne dont le personnel est nommé suivant la Loi sur la
fonction publique, à l'exception du Centre de services partagés du
Québec, du Conseil de gestion de l'assurance parentale, de [l'institution] de la statistique du Québec, de La
Financière agricole du Québec, de la Société d'habitation du Québec et de
Transition énergétique Québec;»;
2° par la suppression, dans l'article 7, du mot
«tel»;
3° par l'insertion, dans le paragraphe 8° et
après «...paragraphe 3°,», de «l'Autorité des marchés financiers, l'Autorité des marchés publics, la Commission des
droits de la personne et des droits de la jeunesse, Revenu Québec, un organisme ou une personne dont le personnel est
nommé suivant la Loi sur la fonction publique, à l'exception du Centre de services partagés du Québec, du Conseil de [la]
gestion de l'assurance parentale, de l'Institut de la statistique du Québec,
de La Financière agricole du Québec, de la Société d'habitation du Québec et de
Transition énergétique Québec,».
Est-ce que l'annexe II, paragraphes 6° à 8°...
l'amendement, annexe II, paragraphes 6° à 8°, est adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La
Vice-
Présidente (Mme Soucy) : Alors, adopté sur division.
Maintenant, nous sommes rendus à l'amendement,
annexe III, paragraphe 3°.
Insérer, dans le paragraphe 3° de
l'annexe III et avant «un membre du personnel», «un membre du personnel d'un cabinet au sens de la section [XI].2 de la
Loi sur l'exécutif (chapitre E-18), un membre du personnel d'un cabinet
ou [...] un député au sens de la section III.1...
Une voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
... — excusez,
madame, juste garder le silence, s'il
vous plaît, merci — ...du
chapitre IV de la Loi sur l'Assemblée nationale, de même [que]».
Alors, est-ce que l'amendement annexe III, paragraphe 3°,
est adopté?
Des voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté,
sous division.
Mise
aux voix des amendements de la
députée de Marguerite-Bourgeoys
Maintenant, nous sommes rendus aux amendements
de la députée de Marguerite-Bourgeoys. Je mets maintenant
les amendements présentés par Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys... Est-ce
que l'amendement proposé à l'article 3, qui se lit comme suit...
L'article 3 du projet de loi est modifié
par l'ajout, à la fin de l'article 3, des alinéas suivants :
«Le ministre établit des lignes directrices
portant sur l'exigence du respect des principes énoncés à l'article 2.
«Ces lignes
directrices sont publiées sur le site Internet du ministère
responsable de l'application de la présente loi dans les 60 jours
suivant la sanction de la loi.»
Alors, est-ce que l'amendement de l'article 3
est adopté?
Des voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, rejeté. Rejeté. Alors, l'amendement proposé à l'article 4...
Des voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Oui, il faudrait... Écoutez, je l'ai dit, le «rejeté». Il faut juste suivre.
Je ne le répéterai pas 15 fois.
Alors, l'amendement à l'article 4.
L'article 4
du projet de loi est modifié par l'insertion, après les mots «la laïcité
de l'État», des mots «du Québec».
Alors, est-ce que l'amendement à l'article 4
est adopté?
Des voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, rejeté. Maintenant, nous sommes rendus à l'amendement de l'article 6.
L'article est modifié par l'ajout, à la fin, des
alinéas suivants :
«Le ministre
précise par règlement les principes directeurs portant sur l'application de la définition d'un signe
religieux afin d'accompagner les organismes dans l'application de la présente
loi.
«Tout règlement édicté en vertu de cet article
doit faire l'objet d'une étude par la commission compétente de l'Assemblée
nationale dans les trente jours de sa publication.»
Est-ce que l'amendement proposé à l'article 6
est adopté?
Des voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, l'amendement est rejeté. Alors, nous poursuivons avec l'amendement à l'article 8.
L'article 8
du projet de loi est modifié par l'insertion, après les mots «ne
peut recevoir le service qu'elle demande, le cas échéant», des mots
«sauf en cas d'urgence».
Est-ce que l'amendement proposé à l'article 8
est adopté?
Des voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, l'amendement est rejeté. Bon, avec l'article 12, l'amendement à l'article 12.
L'article 12
du projet de loi est modifié par l'insertion, après les mots «à
une personne au sein», des mots «du personnel d'encadrement».
Alors, est-ce que l'amendement proposé à
l'article 12 est adopté?
• (21 heures) •
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, l'amendement est rejeté.
Alors, l'amendement proposé à l'article 15 du projet
de loi est modifié par l'ajout, à la
fin, de l'alinéa suivant :
«Cet article
ne s'applique pas à une convention collective, entente collective ou contrat
relatif à des conditions de travail en vigueur à la date de la sanction
de la présente loi.»
Est-ce que l'amendement proposé à l'article 15
est adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Alors, l'amendement est rejeté.
L'amendement proposé à l'article 16 du projet de loi est modifié par
l'insertion, après les mots «de son parcours historique», des mots «et
de sa diversité».
Est-ce que
l'amendement proposé à l'article 16 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Alors, l'amendement est rejeté.
Alors,
nous sommes rendus à l'amendement à l'article 25 du projet de loi, créant
l'article 17.1 de la Loi favorisant le
respect de la neutralité religieuse de l'État et visant notamment à encadrer
les demandes d'accommodements pour un motif
religieux dans certains organismes... est modifié par l'insertion, après les
mots «à une personne au sein», des mots «du personnel d'encadrement».
Est-ce que l'amendement
proposé à l'article 25 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Alors, l'amendement est rejeté.
Alors, nous
poursuivons avec l'amendement à l'article 26, proposé à l'article 26 du projet
de loi, modifiant l'article 19 de la Loi
favorisant le respect de la neutralité religieuse de l'État et visant notamment
à encadrer les demandes d'accommodements
pour un motif religieux dans certains organismes... est modifié par le
remplacement des mots «Le ministre désigné par le gouvernement» par les
mots «Le premier ministre du Québec».
Est-ce que l'amendement
proposé à l'article 26 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Alors, l'amendement à l'article 26 est rejeté.
Alors, le premier amendement
à l'article 27 du projet de loi... est modifié par :
1° le
remplacement, dans son premier paragraphe, des mots «qui précède celle de la
présentation» par les mots «de la sanction»;
2° la suppression, dans son premier paragraphe, des
mots «et ce, tant qu'elle exerce la même fonction au sein de la même
organisation»;
3°
le remplacement, dans son deuxième paragraphe, des mots «qui précède celle de
la présentation» par les mots «de la sanction»;
4° la suppression,
dans son deuxième paragraphe, des mots «et ce, jusqu'à la fin de leur mandat»;
5°
le remplacement, dans son troisième paragraphe, des mots «qui précède celle de
la présentation» par les mots «de la sanction»;
6°
la suppression, dans son troisième paragraphe, des mots «et ce, tant qu'elle
exerce la même fonction et qu'elle relève de la même organisation»;
7°
la suppression, dans son quatrième paragraphe, des mots «sauf si le contrat est
renouvelé après cette date»;
8°
le remplacement, dans son cinquième paragraphe, des mots «qui précède celle de
la présentation» par les mots «de la sanction»; et
9°
la suppression, dans son cinquième paragraphe, des mots «et ce, tant qu'elle
exerce la même fonction au sein de la même commission scolaire».
Est-ce que le premier
amendement de l'article 27 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Alors, l'amendement est rejeté.
Alors,
le deuxième amendement proposé à l'article 27 du projet de loi est modifié par
l'ajout, à la fin, du paragraphe suivant :
«6°
à une personne ayant entamé une formation qualifiante menant à l'occupation de
l'un des emplois ou fonctions visés par les paragraphes 2°,
3°, 4°, 5°, 6°,
7°, 8°, 9° et 10°
de l'annexe II avant le (indiquer la date de la sanction de la présente loi).»
Est-ce
que l'amendement... du deuxième amendement de l'article 27 est adopté ?
Des voix :
Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Alors, l'amendement est rejeté. Alors, l'amendement
proposé à l'article 31 du
projet de loi est modifié par le remplacement des mots : «Le ministre
désigné par le gouvernement» par les mots : «Le premier ministre du
Québec».
Est-ce
que l'amendement proposé à l'article 31 est adopté ?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, l'amendement est rejeté.
Mise aux voix des amendements du député de
Jean-Lesage
Alors, je vais mettre aux voix les amendements présentés par
M. le député de Jean-Lesage. Est-ce que l'amendement
proposé à l'article 8, qui se lit comme suit :
Le premier alinéa de l'article 8 est modifié par l'ajout,
après les mots «visage découvert», des mots «lorsque ces vêtements contreviennent à un des quatre critères
suivants : prosélytisme, devoir de réserve, exercice de la profession et
norme de sécurité».
Est-ce
que l'amendement proposé à l'article 8 est adopté ?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors,
l'amendement est rejeté. Alors, l'amendement à l'article 27 du projet de loi est modifié par :
La
suppression, au paragraphe 1°, des mots «et ce, tant
qu'elle exerce la même fonction au sein de la même organisation»;
La
suppression, au paragraphe 2°, des mots «et ce, jusqu'à la
fin de leur mandat»;
La suppression, au paragraphe 3°,
des mots «et ce, tant qu'elle exerce la même fonction et qu'elle relève de la même organisation»;
La
suppression, au paragraphe 4°, des mots «...si ce contrat
est renouvelé après cette date»;
La
suppression, au paragraphe 5°, des mots «et ce, tant
qu'elle exerce la même fonction au sein de la même commission scolaire»;
L'ajout au paragraphe 6° : «à une personne ayant
commencé, avant la sanction de la présente loi, une formation post secondaire menant à une profession similaire à celle visée dans
l'ensemble du présent article.»
Est-ce
que l'amendement proposé à l'article 27 est adopté ?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : L'amendement est rejeté.
Mise aux voix des amendements du député de
Matane-Matapédia
Maintenant, je vais mettre aux voix les amendements
présentés par M. le chef du troisième groupe d'opposition. Est-ce que l'amendement proposé à l'article 3, qui se lit comme
suit :
L'article
3 est modifié :
1° en ajoutant au premier alinéa, après «les
institutions parlementaires, gouvernementales [...] judiciaires», de «, ainsi que les autres organismes» ;
2° après le troisième paragraphe du deuxième
alinéa, le suivant : «"Autres organismes" : les organismes
énumérés aux paragraphes 11° à 13° de l'annexe I.»
Est-ce
que l'amendement proposé à l'article 3 est adopté ?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, l'amendement est rejeté.
Maintenant,
nous sommes... un amendement à l'article 16 :
Ajouter,
après l'article 16, le suivant :
«16.1.
Le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur a la responsabilité
de modifier la partie Culture religieuse du cours d'éthique et culture religieuse des programmes
scolaires un an après la date de sanction de la présente loi.»
Est-ce que l'amendement proposé à
l'article 16 est adopté ?
Des voix :
Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : L'amendement est rejeté.
Maintenant, l'amendement à
l'annexe II. L'annexe II est modifiée :
1° par
l'ajout au paragraphe 10°, après «adjoint», de «, un
employé des services de garde,»;
2° un ajout, après le
paragraphe 10°, des suivants :
«11° un
directeur, un directeur adjoint ainsi qu'un enseignant d'un établissement
d'enseignement sous la compétence d'une
commission scolaire instituée en vertu de la Loi sur l'enseignement privé
(chapitre E-9.1) et les institutions dont le régime d'enseignement est
l'objet d'une entente internationale au sens de la Loi sur le ministère des
Relations internationales (chapitre M-25.1.1);
«12° une
personne reconnue à titre de responsable d'un centre de la petite enfance en
vertu de la Loi sur les services de garde éducatifs à
l'enfance (chapitre S-4.1.1) et les personnes qu'elle dirige;».
Est-ce que l'amendement proposé à
l'annexe II est adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Alors, l'amendement est rejeté.
Conformément
à l'article 257.7 du règlement, je vais maintenant mettre aux voix les
articles ainsi amendés, les articles dont la commission n'a pas disposé et les autres éléments du
projet de loi. Ils seront mis aux voix un à un, sans que la présidence
en donne lecture, et chacun des votes se fera à main levée.
Mise aux voix des articles amendés
Mise
aux voix des articles amendés. Je vais maintenant mettre aux voix les articles
tel qu'amendés. Est-ce que l'article 4, tel
qu'amendé, est adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
• (21 h 10) •
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sous division.
Maintenant,
je vais mettre aux voix l'article 6 tel qu'amendé. Est-ce que
l'article 6, tels qu'amendé, est adopté ?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sous division.
Maintenant, l'article 12, tel
qu'amendé, est-il adopté ?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sous division... sur division.
Est-ce que l'article 16, tel
qu'amendé, est adopté ?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Mise aux voix des articles non adoptés par la commission
Mise aux voix des articles dont la
commission n'a pas disposé maintenant. Est-ce que l'article 7 est
adopté ?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté
sur division.
Est-ce
que l'article 8 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce
que l'article 9 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce
que l'article 10 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce
que l'article 11 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce
que l'article 13 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce
que l'article 14 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce
que l'article 15 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce
que l'article 17 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce
que l'article 18 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article 19 est
adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article 20 est
adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article 21 est
adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article 22 est
adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article 23 est
adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article 24 est
adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article 25 est
adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article 26 est
adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article 27 est
adopté?
Des voix : Adopté.
Des voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article 28
est adopté?
Des voix : Adopté.
Des
voix : Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article
29 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article
30 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article
31 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'article
32 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'annexe I
est adoptée?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'annexe
II, telle qu'amendée, est adoptée?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que l'annexe
III, telle qu'amendée, est adoptée?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Est-ce que le
préambule est... M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette :
Je crois que vous avez oublié de mettre aux voix l'article 11.1.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : L'amendement introduisant l'article
11.1 était... oui, a été adopté. Donc, il est adopté.
Une voix :
...
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Sur division, oui, mais il était déjà inscrit.
Mise aux voix du préambule
Alors, maintenant, est-ce que le préambule est
adopté?
Des
voix : Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Mise aux voix des intitulés des chapitres
Est-ce que les
intitulés des chapitres sont adoptés?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Mise aux voix du titre
Est-ce que le titre
du projet de loi est adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Mise aux voix de la motion de renumérotation
Est-ce que la motion
de renumérotation... est-elle adoptée?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Mise aux voix de la motion d'ajustement des références
Est-ce que la motion
d'ajustement des références est adoptée?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division.
Maintenant,
je mets maintenant aux voix le rapport de la commission plénière sur le projet
de loi n° 21, Loi sur la laïcité de l'État. Ce rapport, tel
qu'amendé, est-il adopté?
Des voix :
Adopté.
Des voix :
Rejeté.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Adopté sur division. M. le leader de l'opposition
officielle.
M. Proulx :
Merci, Mme la Présidente. Je vous demanderais un vote par appel nominal.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Alors, nous avons une demande de vote par appel
nominal.
Mise aux voix du
rapport amendé
Que
les députés qui sont en faveur de cet amendement veuillent bien se lever... de
ce rapport. Que les députés qui sont en faveur de ce rapport veuillent
bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Legault (L'Assomption),
M. Jolin-Barrette (Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville),
Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay), M. Girard
(Groulx), Mme McCann (Sanguinet), Mme Roy (Montarville), M. Simard (Montmorency),
Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme LeBel (Champlain), M. Lévesque
(Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette
(Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon),
Mme Blais (Prévost), M. Caire (La Peltrie), M. Lefebvre
(Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi),
Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Skeete
(Sainte-Rose), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est),
M. Lacombe (Papineau), Mme Charest (Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs),
M. Julien (Charlesbourg), M. Boulet (Trois-Rivières), Mme Proulx (Côte-du-Sud), M. Lafrenière (Vachon),
M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand
(Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme),
Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger (Orford), Mme Picard
(Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid
(Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau),
M. Thouin (Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais
(Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf), Mme Grondin
(Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean), Mme Lecours
(Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava), M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé),
Mme Guillemette (Roberval), M. Provençal (Beauce-Nord),
M. Jacques (Mégantic).
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Que les députés qui sont contre...
Des
voix : ...
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Ah! pour? Il faut se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Bérubé
(Matane-Matapédia), M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski),
Mme Richard (Duplessis), Mme Hivon (Joliette), M. Gaudreault
(Jonquière), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).
Mme Perry Mélançon (Gaspé).
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Que les députés contre ce rapport
veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Arcand (Mont-Royal—Outremont),
M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière),
Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee),
Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme David
(Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit
(Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun), Mme Ménard (Laporte),
Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne),
M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols (Vaudreuil), Mme Charbonneau
(Mille-Îles), Mme Robitaille
(Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis),
M. Benjamin (Viau),
M. Derraji (Nelligan), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy
(Saint-Laurent), M. Ciccone (Marquette).
Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), M. Nadeau-Dubois (Gouin),
Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont),
M. Fontecilla (Laurier-Dorion), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion
(Taschereau), M. Zanetti (Jean-Lesage).
La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Y a-t-il
des abstentions? M. le Secrétaire général, pour le résultat du vote.
Le
Secrétaire : Pour : 73
Contre : 35
Abstentions :
0
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, M. le Secrétaire général. Ce rapport
est adopté. Le rapport est donc adopté tel qu'amendé.
M. le leader de l'opposition officielle.
M. Proulx :
Oui, Mme la Présidente, juste pour la bonne conduite de nos travaux, puis je
suis convaincu que ce n'était pas
volontaire ou souhaité, mais le député de Papineau n'était pas assis à sa
banquette au moment du prononcé du
déroulement du vote. Alors, j'apprécierais, Mme la Présidente, pour que vous
puissiez suivre correctement nos travaux, que, lorsqu'on exerce ce vote,
on soit assis à notre siège. Merci.
• (21 h 20) •
La Vice-Présidente (Mme Soucy) :
Tout à fait. Alors, chaque député doit être assis à sa banquette. Merci, M. le
leader de l'opposition officielle.
Adoption
Nous en
sommes maintenant rendus à l'étape de l'adoption du projet de loi. M. le
ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion propose
l'adoption du projet de loi n° 21, Loi sur la laïcité
de l'État.
Je vous
rappelle que, conformément au paragraphe 4° de l'article 257.1, la
durée du débat sur l'adoption du projet de loi est d'une heure.
La
répartition du temps de parole pour ce débat restreint a été établie comme
suit : 29 min 15 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement,
17 min 40 s sont allouées au groupe parlementaire formant
l'opposition officielle,
6 min 6 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition,
5 min 29 s sont allouées au troisième groupe d'opposition.
Chaque député
indépendant dispose d'un temps de parole de 45 secondes. Toutefois,
lorsqu'un député indépendant participe à un débat, il dispose d'un temps
de parole d'une minute.
Dans le cadre
de ces débats, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un
des groupes parlementaires
sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions
établies précédemment.
Mis à part ces consignes, les interventions ne
seront pas soumises à aucune limite de temps.
Enfin, je
rappelle aux députés indépendants que, s'ils souhaitent intervenir au cours de
ce débat, ils ont 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser
la présidence.
Est-ce qu'il y a des interventions sur ce projet
de loi? M. le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, la
parole est à vous.
M. Simon
Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, c'est avec une immense
fierté que je prendrai part au vote sur l'adoption finale du projet
de loi n° 21,
la Loi sur la laïcité de l'État. J'ai envie de dire, Mme la Présidente : Enfin! Enfin, les Québécois auront été entendus
et écoutés. Enfin, le gouvernement que vous avez élu a eu le courage d'agir. Enfin,
la laïcité fera partie de nos lois.
Lors des consultations particulières qui se sont
tenues au cours des dernières semaines, nous avons entendu 36 groupes qui ont présenté diverses opinions,
différentes positions. Certains considèrent que nous allons trop loin, et
d'autres auraient souhaité que nous
allions moins loin. Un constat général est toutefois ressorti : la laïcité
de l'État est fondamentale au Québec.
Le projet de loi n° 21 représente un juste équilibre, il est
pragmatique, modéré et surtout applicable. Concrètement, Mme la Présidente, la nouvelle loi affirmera que l'État québécois est laïque et que cette laïcité repose sur quatre grands
principes : la séparation de l'État et
des religions, la neutralité religieuse de l'État, l'égalité de tous les
citoyens et citoyennes, la liberté de conscience et la liberté de
religion.
Le projet de
loi fera en sorte d'inscrire la laïcité de l'État comme principe formel, comme
valeur fondamentale et comme outil
d'interprétation des lois du Québec dans la Charte des droits et libertés de la
personne, que nos institutions parlementaires, gouvernementales et
judiciaires respectent le concept de laïcité de l'État, d'interdire le port de
signes religieux aux personnes en position
d'autorité, y compris les enseignants, qu'au Québec les services publics soient
donnés et reçus à visage découvert et
qu'il n'existe pas d'accommodement religieux possible lorsqu'on traite de la
laïcité de l'État, notamment pour la réception de services à visage
découvert.
Afin d'éviter les pertes d'emploi et d'obtenir
l'adhésion du plus grand nombre, la loi prévoit aussi une clause de droits acquis pour les gens déjà en fonction au
moment du dépôt du projet de loi. La clause s'applique pour la même fonction au sein de la même organisation. Cette
approche est cohérente avec le cheminement historique du Québec à l'égard
de la religion, qui s'est fait résolument,
mais aussi progressivement. La mesure permet une transition harmonieuse vers la
laïcité.
Évidemment,
j'aurais souhaité que le projet de loi n° 21, un projet de loi
tant attendu au Québec, puisse être adopté en suivant le processus régulier, sans procédure législative
d'exception, mais vous me permettrez, Mme la Présidente, lorsque le Parti
libéral est même contre le titre du projet de loi, lorsqu'il vote contre la loi
sur la laïcité de l'État, le titre de la loi, vous comprendrez que
c'était difficile de le faire adopter.
Par contre, Mme la Présidente, je ne regrette
pas une seconde d'avoir placé les intérêts supérieurs du Québec devant les bagarres entre les partis politiques.
Les Québécois ont assez attendu. Déjà 11 ans depuis le dépôt du rapport
Bouchard-Taylor. Les débats ont été faits et refaits.
Nous avons
dit dès le départ que notre objectif était d'adopter le projet de loi sur la laïcité
de l'État avant la fin de la session. Nous ne nous en sommes jamais cachés. J'aurais espéré
plus d'ouverture, plus de collaboration des oppositions. Après tout, nous avons tous le même
grand objectif : le bien-être de tous les Québécois. Et ce soir les Québécois
ont un gouvernement qui respecte ses engagements,
un gouvernement qui respecte la volonté de la nation québécoise
et surtout un gouvernement qui propose un projet de loi modéré, pragmatique et rassembleur, un projet de loi qui reflète l'évolution de la société québécoise sur ces enjeux.
Un long
chemin a été parcouru par nos grands-parents et nos parents pour en arriver
ici. Il y a déjà plus de 50 ans que le Québec progresse sur
la voie de la laïcité et de la sécularisation de la société. La laïcité de l'État
est la suite logique de la Révolution tranquille et de la déconfessionnalisation du système
scolaire québécois. Maintenant, Mme la
Présidente, c'est à notre tour de faire honneur au travail entamé par les
générations qui nous ont précédés et de le poursuivre. À cet égard, Mme la Présidente, j'invite
tous les parlementaires à véhiculer les principes de laïcité
de l'État dans le calme et dans le respect.
J'aimerais
remercier plusieurs personnes qui, d'une façon ou d'une autre, ont
participé à ce moment important
pour le Québec. Tout d'abord, un remerciement au premier
ministre du Québec
pour sa confiance, pour son courage et sa passion du Québec.
Ensuite, Mme la Présidente, à tous mes collègues
qui ont été à mes côtés depuis le début de cette aventure, un grand merci à
vous toutes et à vous tous. Merci.
J'ai une
pensée particulière pour tous ceux qui ont siégé avec moi à la Commission des institutions. Tout
d'abord les membres permanents de la commission : M. le député d'Ungava, M. le
député de Vachon, M. le président et député de Richmond, M. le député de Saint-Jean, Mme la députée de Bellechasse,
Mme la députée des Plaines, M. le député de Nicolet-Bécancour, M. le
député de Chapleau, ainsi qu'aux députés qui ont été présents lors des
consultations et en étude détaillée :
M. le député de Sainte-Rose, M. le député du Lac-Saint-Jean, M. le député de
Maskinongé, Mme la députée de
Lotbinière-Frontenac, M. le député de Mégantic, M. le député de Chauveau,
M. le député de Beauce-Sud, Mme la députée d'Argenteuil, M. le député de Bourget, Mme la députée de Verchères, M. le
député de Rivière-du-Loup—Témiscouata,
Mme la députée de Laviolette—Saint-Maurice,
Mme la députée de Huntingdon.
Ensuite,
Mme la Présidente, je souhaite remercier chaleureusement l'ensemble des
juristes et des fonctionnaires de
l'équipe du ministère du Conseil exécutif qui ont contribué à l'élaboration de
ce projet de loi. Ils sont avec nous, dans les tribunes, ici, ce soir. M. Martin-Philippe Côté, secrétaire
général associé à l'accès à l'information et à la réforme des institutions démocratiques au ministère du Conseil
exécutif, M. Olivier Lavoie, directeur de la Direction de la réforme
des institutions démocratiques, Me Pierre
Vallée, avocat à la Direction de la réforme des institutions démocratiques, Me Annie Blais Delagrave, avocate à la Direction de
la réforme des institutions démocratiques, Marc-André Turcotte,
professionnel expert à la Direction de la réforme des institutions
démocratiques, Me Rachel Pominville, avocate et anciennement à la Direction de la réforme des institutions
démocratiques, et puis Me Élise Labrecque, Me Jean-Philippe Lebrun et Me Amélie
Pelletier Desrosiers, avocats au ministère de la Justice. Un grand merci à vous
toutes et à vous tous.
Enfin,
un merci particulier à l'ensemble des employés de l'Assemblée nationale, qui
nous ont accompagnés pendant tous ces travaux.
Je
souhaite remercier, Mme la Présidente, également l'ensemble des membres de mon
équipe au niveau du cabinet ministériel,
ainsi que les membres du cabinet du leader, qui nous ont accompagnés durant
toute cette étape. Un grand merci à vous toutes et à vous tous.
Un
merci particulier, Mme la Présidente, également à Me Guillaume Rousseau,
qui a accepté de se joindre à nous, à notre équipe, et qui nous a
accompagnés...
Et
en terminant, Mme la Présidente, le Québec est une nation. Plus personne ne
conteste cette réalité et notre droit fondamental de décider de notre
avenir et des orientations de notre société. Il revient au gouvernement du
Québec de déterminer de quelle façon
s'organisent les relations entre l'État et la religion. Il est de notre devoir
d'assumer notre caractère distinct,
nos spécificités et de faire respecter nos choix collectifs. Aujourd'hui, nous
avons agi et répondu à la volonté de
la nation québécoise. Cette loi représente une avancée historique pour le
Québec, elle est le résultat d'un parcours et d'un processus évolutif propres au Québec. La laïcité fait partie de
notre identité et aujourd'hui, enfin, Mme la Présidente, elle est
pleinement assumée, nous pouvons tous et toutes en être fiers. Merci.
• (21 h 30) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le ministre.
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, la parole est à vous.
Mme Hélène David
Mme David :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. La journée, et encore plus la soirée, à
cause des amendements déposés sans discussion, est encore...
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Nous allons suspendre quelques secondes.
(Interruption)
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : ...de Marguerite-Bourgeoys, vous pouvez poursuivre
votre intervention.
Mme David :
Cette journée, à cause des amendements, entre autres, est encore plus triste
que prévu. On ajoute non seulement
l'insulte à l'injure avec ces amendements, mais on ajoute l'inacceptable. Des
mesures disciplinaires, des surveillants de l'application de la loi,
c'est difficile d'aller plus loin dans la honte et la tristesse.
Vous
savez, M. le Président, le ministre aurait pu s'inscrire dans l'histoire et
faire adopter un projet de loi qui soit important pour le Québec. En inscrivant explicitement dans nos lois la
laïcité, il préfère aller trop loin en utilisant ce concept fondamental
pour restreindre l'accès en emploi de travailleurs et travailleuses qualifiés
et dévoués.
Je
veux le répéter, la laïcité n'exige en rien l'interdiction de signes religieux,
c'est un choix que fait le ministre, et, selon nous, ce choix n'est pas le bon. Il n'est pas le bon parce que
profondément injuste, parce qu'il empêchera l'accès à l'emploi de femmes
et d'hommes passionnés et qualifiés, et, en plus, au moment où nous faisons
face à une pénurie de main-d'oeuvre
importante. Injuste parce que des femmes devront faire le choix entre une
promotion, leur carrière ou une
conviction profonde et sincère. Injuste parce que le Québec est une terre
accueillante et ouverte et que ce projet de loi s'apprête à créer deux classes de citoyens. Injuste parce que le
ministre se croit légitime de restreindre les droits les plus fondamentaux des citoyens et, de surcroît, soustraire
sa loi du contrepoids essentiel des tribunaux, injuste parce qu'il semble
prôner une laïcité antireligieuse plutôt
qu'une neutralité, injuste parce que vraiment incohérent et dicté par des choix
politiques.
Depuis
le 28 mars, le ministre tente de nous convaincre que son projet de loi est
modéré, applicable et pragmatique. Il
n'en est rien, M. le Président. D'abord, si c'était vraiment le cas, les
critiques à l'égard du projet auraient été nettement différentes. De plus, le
ministre ne nous imposerait pas une adoption par bâillon aujourd'hui. Rappelons
que Gérard Bouchard lui-même a
qualifié de projet de loi de radical. Le Pr Pierre Bosset dit que la preuve du
fait qu'il est radical, c'est qu'on a ressenti le besoin de recourir à
la dérogation.
Le
projet de loi du ministre produit une discrimination indirecte envers les
femmes et les minorités religieuses. Il prétend s'adresser à tous, mais
ce sont ses impacts qu'il faut regarder. Le véritable affront de ce projet de
loi, c'est l'inclusion des enseignants, des
enseignantes, devrait-on dire. D'abord, si une chose doit être répétée et
claire, c'est qu'il n'existe aucune
littérature scientifique suggérant que les enseignantes portant un signe
religieux ne pourront respecter leur
devoir de réserve et succomberont au prosélytisme dans l'exercice de leurs
fonctions. Les enseignants et les enseignants, comme tout employé de
l'État, doivent respecter un devoir de réserve dans l'exercice de leurs
fonctions.
Permettez-moi
de rappeler, encore une fois, la mise en garde de Gérard Bouchard :
«M. Legault erre gravement — ou cède à la démagogie? — en
assimilant le pouvoir extraordinaire de coercition à l'autorité pédagogique que
détient le personnel[...]. C'est une confusion regrettable qu'il importe de
dissiper.
«[...]La
restriction ou la suppression d'un droit fondamental n'est admissible que si
elle s'appuie sur un motif d'ordre supérieur reconnu par les tribunaux.
«Dans le cas
présent, ce genre d'argument ne peut pas être invoqué, faute de données
rigoureuses. Il n'a aucunement été
démontré, par exemple, que le port du hidjab est une forme de prosélytisme,
qu'il perturbe les enfants ou entrave la démarche pédagogique.» Fin de
la citation, et je répète, de Gérard Bouchard.
La clause de
droits acquis que le ministre a incluse dans son projet de loi est
insuffisante. Nous avons tenté de le convaincre,
nous lui avons proposé des amendements pour faire de cette clause une véritable
protection pour des gens déjà à
l'emploi ou aux études, mais, encore là, un refus définitif. Suivant
l'article 27 du projet de loi, les gens visés par l'article 6 qui
étaient en poste au 27 mars 2019 pourront continuer de porter un signe
religieux, mais, comme l'illustrent plusieurs,
cette autorisation est loin de correspondre à un compromis adéquat. Cette
clause est tout simplement inhumaine.
Il est clair
que nous sommes en désaccord avec de grands pans de ce projet de loi, Mme la
Présidente. Mais, le plus choquant et
inquiétant demeure le recours aux dispositions de dérogation. Ce faisant, le
ministre choisit de soustraire son projet
de loi au contrepoids essentiel des tribunaux. Le gouvernement aime dire que
son projet de loi est démocratique car appuyé
de la majorité. Mais la démocratie comme nous la connaissons, et ce n'est pas
que le pouvoir de la majorité, c'est aussi la protection des minorités
et le droit fondamental de s'adresser aux tribunaux.
Dans son
mémoire présenté à la commission, le professeur de droit Me Pierre Bosset
faisait remarquer que le projet de
loi ne faisait pas que déroger au droit à la liberté religieuse, mais également
à l'entièreté des droits et libertés protégés par la charte québécoise. Comme il le souligne bien, la liste des droits
et libertés touchés par ces dérogations donne le vertige, on ne le
répétera jamais assez.
L'honorable Louise Arbour disait, et je la
cite : «Il est facile de dénoncer le pouvoir décisionnel des juges ou de tourner en ridicule les méandres des analyses
juridiques. Pourtant, le concept de droit fondamental est plutôt simple.
Avoir des droits, c'est un peu comme avoir
un parapluie. C'est surtout utile quand il pleut. La liberté de religion ne
veut rien dire si elle est
complètement privatisée et donc à peu près jamais menacée. Il en va de même de
tous les autres droits fondamentaux.
En fait, le plus difficile dans la reconnaissance des droits, c'est de leur
donner effet quand cela dérange, et plus cela dérange, plus on doit être
prudent avant de les écarter. Pour bien vivre en société, il faut faire preuve
d'une certaine empathie politique qui nous amène à véritablement voir le
monde du point de vue des autres.»
Vous savez, faire le choix du vivre-ensemble, de
l'acceptation et de l'ouverture, c'est sûrement un choix plus exigeant que celui
de prôner l'interdiction, Mme la Présidente, exigeant comme choix, mais noble
choix. Alors que beaucoup de sociétés sont actuellement traversées par des
positions d'exclusion et d'intolérance, les choix que nous faisons ne sont pas
banals. Les opinions passent, mais les chartes et leurs droits fondamentaux
traversent le temps et les décennies.
Je suis inquiète des conséquences qu'aura ce projet
de loi sur les minorités. Certaines dispositions risquent de contribuer à une détérioration du climat social, déjà
difficile par moments. Il aura entre
autres des conséquences désastreuses
sur la place que notre société accorde aux
femmes. Il est tard ce soir, dimanche le 16 juin 2019, une bien triste
date qui vient d'entrer dans les
livres d'histoire du Québec, une date qui marquera pour toujours
une vision du Québec qui divise plutôt que rassemble, qui
exclut plutôt qu'inclut, qui stigmatise plutôt que de rapprocher, une date de
tristesse, une note discordante que nous
venons d'inclure dans une partition jusque-là harmonieuse et inclusive que les
citoyens et citoyennes du Québec avaient, à ce jour, jouée tous
ensemble.
Nous
venons de créer une fausse note emprisonnée dans une loi et, qui plus est,
assortie de dispositions de dérogation aux
chartes québécoise et canadienne des droits et libertés sous le coup
d'une procédure parlementaire exceptionnelle, communément appelée un bâillon.
Hier, c'était l'immigration. Aujourd'hui, ce sont les signes religieux. Une
soirée bien triste, Mme la Présidente. Une bien triste soirée qui s'achève dans le noir, la noirceur qui fait
peur, qui nous désoriente, qui
provoque de mauvais rêves. Plusieurs vont se réveiller demain en ne se sentant
plus les mêmes Québécois qu'hier, ceux et celles dont les droits
étaient jusqu'ici respectés, ceux-là mêmes pour lesquels l'Assemblée nationale
s'était mobilisée en 1975 pour les protéger,
ces droits qui ont permis de si belles avancées pour notre nation, celles de
donner les mêmes droits et libertés sans distinction, exclusion ou préférence
fondée sur la race, la couleur, le sexe, l'état civil, la religion, les convictions politiques, la langue,
l'origine ethnique ou nationale, la condition sociale, puis plus tard viendra
l'orientation sexuelle, la grossesse, l'identité ou l'expression de genre, le
handicap, et j'en passe.
• (21 h 40) •
Le 27 juin 1975 fut une journée magnifique
à marquer dans les annales de l'histoire du Québec, un jour où, à l'unanimité, les parlementaires ont clairement fait le choix pour le Québec d'être inclusif, de
donner les droits égaux à toutes les races, les couleurs de peau, les
différentes expressions de conviction religieuse et encore plus, ce jour où le Québec, ses citoyens et citoyennes ont dit oui à
un vivre-ensemble d'inclusion, de tolérance et de respect, un jour où le
Québec s'est résolument tourné vers son avenir en se faisant confiance, en
traitant tous ses citoyens sur le même pied d'égalité
et en disant bienvenue à tous ceux et celles qui voulaient rejoindre les rangs
de notre fière nation québécoise, un jour
où le Québec n'a pas eu peur de voter pour ses convictions humanistes, pour son
ouverture à toutes les minorités, pour sa foi en un avenir construit sur une
mosaïque qui brille quel que soit l'angle sous lequel se jette notre regard, un
jour où le Québec s'est refusé à la
discrimination et a décidé, en toute connaissance de cause, de construire une
société pour tous les Québécois et les Québécoises.
Ce jour du
27 juin 1975 est bien loin de nous en ce triste soir du 16 juin 2019,
presque 44 ans, jour pour jour, après l'adoption de cette Charte des
droits et libertés qui fait, depuis cette date, la fierté du Québec pour son
inclusion et sa tolérance. Ce soir, l'heure n'est ni à la fierté ni à l'inclusion.
En ce 16 juin 2019, l'heure est plutôt à la tristesse et à l'inquiétude. Des Québécois et beaucoup de
Québécoises vont s'éveiller tout à l'heure avec le goût amer de perdre un droit
fondamental jusque-là protégé par nos chartes, avec en plus l'impossibilité de
contester ces mesures par le recours aux dispositions de dérogation,
auquel s'ajoute l'odieux d'un bâillon parlementaire.
Ce soir, le
Québec se replie sur lui-même, sur ce lui-même d'un «nous» qui ne veut plus
rien dire, un «nous» dont on vient de soustraire des hommes, mais
surtout des femmes, qui seront maintenant jugés comme faisant partie de la catégorie «exclus de ce nous», du «nous» qui,
jusque-là, incluait toute la nation québécoise. Ce «nous» vient de changer
de contour. Dans quelques heures, ce «nous»
ne sera plus jamais le même. Ce «nous» devra être expliqué à nos concitoyens
qui perdront des droits. Il devra être
expliqué à leurs familles, à leurs enfants. Ce nouveau «nous», qui n'en est
plus vraiment un, blessera beaucoup
d'hommes et de femmes qui avaient choisi le Québec pour sa tolérance, son
accueil et son inclusion, sa joie de vivre, de vivre tous ensemble.
Le
gouvernement a fait un choix qui déclare officiellement à certains Québécois
qu'ils ne sont plus protégés par la charte qui a fait la fierté du
Québec jusqu'à ce jour et qu'ils n'auront même pas le droit de recourir au
pilier fondamental de notre société, de toute société démocratique, devrais-je
dire, qu'est le recours aux tribunaux. Aucune possibilité
de se défendre, leurs paroles et leurs recours sont bâillonnés. Plusieurs
groupes, organisations, juristes, chroniqueurs,
citoyens et institutions ont tenté de venir à leur secours. Ils ont écrit des
mémoires. Quelques-uns ont eu le privilège
d'être aussi entendus en commission parlementaire. Plusieurs ont pris la parole
publiquement, ont écrit dans les journaux ou sur les réseaux sociaux.
Mais rien de cela n'a fait fléchir le ministre.
L'adoption
plus que précipitée de ce projet de
loi sert un agenda politique,
que cela soit clair, le recours au bâillon également. «C'est ce que les Québécois
veulent» est une phrase employée jusqu'à ce jour comme rempart à toute critique. Non, ce ne sont pas ce que tous les Québécois
et Québécoises veulent, et le prétendre, l'utiliser pour justifier
des prises de décision arbitraires est absolument inacceptable.
Il est plus
qu'évident qu'aucun consensus social n'a été dégagé autour de ce projet de loi. Par ailleurs, lors des consultations particulières,
de nombreux groupes et personnes sont venus manifester, sur fond d'arguments
solides, leur profond désaccord.
Donc, je le
répète, ce n'est pas ce que les Québécois veulent. La rapidité et la facilité avec
lesquelles leurs plaidoyers ont été
écartés du débat démontrent parfaitement que nous nous sommes toutes et tous
retrouvés à prendre part à un exercice démocratique bien décevant.
Le ministre s'est plu à dire, tout au long de
nos travaux, que cela faisait 10 ans que nous discutions de cette question
de laïcité. 10 ans, comme si c'était une éternité. Qu'est-ce
que 10 ans pour écrire un morceau de l'histoire d'un peuple? Si ce débat était si consensuel, prêt à
être clôturé, nous n'en parlerions plus, autant de personnes qui ne s'y opposeraient pas, les résistances ne seraient pas
aussi vigoureuses. Rappelons au ministre et à la population qu'on ne parle pas de 10 ans ici. Dans la
forme actuelle du projet de loi, on parle de quelques mois, car jamais
il n'a été question de contrevenir outrageusement aux chartes des droits
et libertés. Comment, au regard de notre histoire, le ministre
peut-il dire que 10 ans, ou plutôt quelques mois dans ce cas-ci,
sont une éternité?
C'est de
droits humains fondamentaux dont on parle en cette Chambre. Nous sommes
125 personnes très privilégiées
ici, entre ces murs, mais nous ne sommes pas là pour servir nos intérêts,
nos agendas politiques respectifs. Nous sommes là pour le bien
commun et devons faire preuve d'abnégation. Jamais nous ne devrions nous rendre
coupables de divisions ou de fractures au
sein de la société que nous servons. Au contraire, nous devrions
nous assurer, en tout premier lieu,
afin de servir le bien commun et la volonté générale, de contribuer activement
au maintien d'un climat social
serein, paisible et accueillant. La laïcité doit servir la poursuite de conscience et de
religion et non l'empêcher ou la limiter.
En cette aube
du 17 juin 2019, l'histoire du Québec s'écrit sans ceux et celles qui ont cru au Québec,
qui s'y sont installés, qui ont cru en nous, en notre avenir, en notre société.
Ils ont laissé un pays d'origine, une culture, une famille, des racines, un passé. Ils nous ont fait
confiance, et ce soir nous les décevons cruellement, nous les enfermons dans la
catégorie du «eux», les rejetés d'un «nous» imaginaire qui se referme et se
durcit.
En ces
dernières heures du 16 juin 2019, le Québec se souviendra. D'une part,
il se souviendra qu'il s'est construit avec
les forces, les convictions, la détermination et les compétences de toute une
nation, des gens venus s'installer pour bâtir cette société fière et inclusive. Mais le Québec
se souviendra aussi qu'à partir d'aujourd'hui notre «nous», celui de tous les Québécois
et les Québécoises, a volé en éclats.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le
député de Jean-Lesage, la parole est à vous.
M. Sol Zanetti
M. Zanetti : Merci, Mme
la Présidente. Nous, à Québec solidaire, on est venu ici pour faire un pays, un pays libre, bien sûr,
beau, démocratique, féministe, juste, fondé avec les autochtones
et non plus à leurs dépens, un pays où tout
le monde se sent bien, un pays auquel tous et toutes sont
fiers d'appartenir. Toutes les députées et tous les députés de cette Assemblée n'ont pas cette ambition collective. Ils
et elles sont encore nombreux à s'accommoder de notre subordination politique et des décisions canadiennes qui nuisent à notre
avenir. Le gouvernement actuel ne rêve pas de ce pays que nous
voulons et qui aurait tant à apporter à l'humanité.
Mais, pour
celles et ceux qui aspirent à la liberté de notre peuple, l'unité et le
sentiment d'appartenance à notre collectivité devraient être une
priorité, car elle est la fondation nécessaire à la construction du pays que
nous voulons. Je sais qu'un jour nous allons
arrêter de fissurer ces fondations, les fondations de nos rêves, tout le temps, qu'un jour nous considérerons prioritaire que chaque personne
qui arrive au Québec se sente Québécoise à part entière.
• (21 h 50) •
Comme le gouvernement refuse de nous laisser débattre de ce projet de loi comme il est
d'usage de le faire dans cette institution, je vais utiliser le peu de temps qui m'est
alloué pour m'adresser aux personnes qui seront touchées par le projet de loi n° 21. Ces personnes sont principalement issues de l'immigration et elles ont
choisi le Québec pour s'enraciner, construire leur avenir et notre avenir. Je voudrais partager avec elles
et avec eux un poème de Gaston Miron. Il l'a composé au lendemain de la défaite référendaire de 1980. Ce référendum visait notre
liberté collective. On a essuyé une défaite ce soir-là. Aujourd'hui, on essuie une autre défaite collective parce que
chaque fois qu'on attaque les libertés individuelles sans raison, c'est une défaite collective. Je vous
partage ce poème, car il a été écrit pour donner du courage. C'est un poème
pour les jours où on perd une bataille, mais où on décide de ne pas abandonner,
de rester debout, de garder espoir et de continuer à se battre pour la
liberté, la liberté de son peuple et de chacun des humains qui le composent.
Et je vais
vous faire une confidence. Je ne sais pas à quoi vous pensez, vous, quand le
président nous demande de nous
recueillir, mais moi, c'est ce poème-là que je pense... que je récite dans ma
tête. Ce n'est pas assez long, je n'ai jamais
le temps de finir. Je me suis dit
qu'un jour j'allais le faire ici. Et j'aime ce poème parce qu'il parle de notre identité. L'identité
d'un peuple est marquée par les actions qu'il fait. Et ce qui caractérise plus
que tout notre peuple à travers les époques, à travers son histoire,
c'est cette capacité que nous avons à perdre des batailles sans abandonner, des
fois un petit peu, pas longtemps, à moitié, mais on se relève. Puis c'est ce que
je nous invite à faire aujourd'hui, et c'est pour ça que je vous adresse... que je
partage ce poème-là avec tous ceux qui aujourd'hui sentent qu'ils ont perdu une bataille :
«Ça ne pourra pas toujours ne pas arriver
Nous entrerons là où nous sommes déjà
Ça ne pourra pas car il n'est pas question
De laisser tomber notre espérance.
«Partir de rien, parce qu'on n'est rien d'autre
Alors, où est-ce qu'on va, qu'est-ce qu'on fait
Errant en ce peuple, et dans sa langue errante
Ce peuple qui n'en finit plus de ne pas naître.
«Ça ne pourra pas toujours ne pas arriver
Nous entrerons là où nous sommes déjà
Ça ne pourra pas car il n'est pas question
De laisser tomber notre espérance.
«C'est rien qu'un jour, un jour de plus
Ou un jour de moins, dans notre vie
Où le vent est un vent qu'on ne démêle pas de
l'âme
Et sans lui le corps ne tient pas debout.
«Ça ne pourra pas toujours ne pas arriver
Nous entrerons là où nous sommes déjà
Ça ne pourra pas car il n'est pas question
De laisser tomber notre espérance.»
Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Je rappelle que, dans le salon bleu, on ne doit
pas prendre de photos, sauf les photographes qui sont assignés. Alors,
M. le chef du troisième groupe d'opposition.
M. Pascal Bérubé
M. Bérubé : Merci,
Mme la Présidente. C'est à moi que
revient le privilège de m'exprimer au nom du caucus des fiers députés
du Parti québécois, au nom de ses membres, au nom de cette grande tradition, de
ce grand parti, le Parti québécois, le parti de Gérald Godin.
Tout au long
des travaux qui nous ont animés, qui nous ont occupés, nous avions en tête deux
choses : la cohérence et la
constance. Et aussi la nécessité, parce que de débattre et de légiférer sur la
laïcité, c'est légitime et c'est nécessaire. Un peuple normal prend des décisions collectives dans son Parlement
national. C'est là que s'expriment ses députés dans des moments clés de
son histoire.
Lorsqu'en 1977 le Parti québécois, le parti de
René Lévesque, a fait adopter la Charte de la langue française, ce n'était pas
unanime. Et aujourd'hui, de ces personnes qui nous font croire que la décision
qu'on va prendre sera si négative et néfaste
pour notre peuple, je me souviens que
ces mêmes personnes ont voté contre cette loi avant, bien des années
plus tard, de s'en faire les fiduciaires.
Mme la Présidente, ce parlement, ce bâtiment, c'est bien plus que des pierres, bien plus
que des symboles, bien plus que des
traditions. C'est notre lieu de décision commun, et nous avons le droit de
prendre ces décisions. Nous avons le droit de débattre ici, chez nous. Bien
sûr, on ne s'entend pas toujours. Sur ce projet, nous avions des propositions à
faire pour rendre ça plus cohérent, pour rendre ça plus
praticable, plus prévisible pour la suite des choses. Le gouvernement n'a pas accueilli nos propositions. Mais il pose un geste, il met au jeu un projet de loi qui est la suite des efforts qui ont été consacrés par d'autres. Je
suis fier d'avoir fait partie du gouvernement de la première
ministre Pauline Marois, qui a
eu ce courage et cette volonté de faire
adopter une législation. Je suis fier de ce travail que nous avons fait, qui se
poursuit. Et aujourd'hui je sens que notre formation politique, même si
elle n'en a pas l'initiative, peut y contribuer à sa façon.
Je note,
comme plusieurs, un retour du religieux, qu'il faudrait associer à une forme de
progressisme incontestable. Je ne
suis pas de cette école. Entre l'affichage de ses convictions religieuses à
travers des symboles, des vêtements et la liberté de conscience, oui, nous faisons un choix, celui de la liberté
de conscience, liberté de conscience des citoyens, liberté de conscience des élèves, liberté de conscience
des parents, parce qu'avec des règles
communes pour tous, c'est l'égalité pour
tous. La spiritualité, la religion, ça se vit d'abord intérieurement. Les
symboles n'ont pas à précéder, et ça se respecte.
En adoptant une loi comme celle-ci, nous avons
une grande responsabilité, et je me permets à dire au premier ministre qu'elle est maintenant partagée par
l'Assemblée nationale. Nous devons en être dignes, parce que les efforts que
nous avons à consacrer sont importants pour
bien accueillir les nouveaux arrivants au Québec et leur dire que les règles,
elles sont égales pour tout le monde, qu'ils sont bienvenus chez nous.
Alors, Mme la Présidente, ce que je veux dire
aux collègues de l'Assemblée nationale et au gouvernement qui a pris l'initiative de ce projet de loi, c'est
que le moment est venu pour notre Assemblée nationale de poser un geste collectif fort, et nous allons poser ce geste, et
nous allons contribuer à l'adoption de cette pièce législative. Mais il y aura
un «après». Et, lorsque le vent
soufflera pour nous dire que le Québec ne peut pas, le Québec n'est pas
capable, le Québec ne devrait pas, bien, il faudra faire respecter les
prérogatives de l'Assemblée nationale, parce que ce Parlement, c'est nous. La
nation québécoise vibre à travers ses murs. Et le Parti québécois, toujours
épris de liberté et de faire respecter le peuple québécois, fera
également respecter les lois du Québec lorsqu'on voudra les attaquer.
Mme la Présidente, aujourd'hui, le caucus des
députés du Parti québécois se joint au gouvernement pour adopter une loi en matière de laïcité. Nous le
faisons selon nos convictions, nous le faisons avec le sentiment que nous
aurions pu faire mieux, mais nous le faisons
surtout avec le sentiment que c'est une pièce importante qui est le début d'une
nouvelle affirmation du Québec à travers ses choix collectifs. Merci, Mme la
Présidente.
• (22 heures) •
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Je vous remercie, M. le chef du troisième groupe d'opposition.
Y a-t-il d'autres interventions? Mme la députée d'Argenteuil,
la parole est à vous.
Mme Agnès Grondin
Mme
Grondin : Mme la Présidente, je me considère privilégiée de prendre la parole ce soir pour vous
expliquer pourquoi j'appuie un projet de loi marquant, notre projet de
loi sur la laïcité de l'État.
Un mot pour vous dire d'abord d'où je viens. Mes
25 ans de pratique en environnement me confirment qu'un principe vital pour préserver la nature et
respecter sa précieuse biodiversité est de défendre une volonté d'agir dont les
intérêts vivifient et priorisent le bien commun. Pour que l'idée d'un projet de loi sur la laïcité de l'État puisse être
défendue, croyez-moi, Mme la
Présidente, cette idée se révèle naturellement défendable. Il importe à mes
yeux que son essence soit pour servir le bien-être collectif et pour
fortifier le vivre-ensemble.
Pour bien
préciser ces concepts, permettez-moi, Mme la Présidente, de les mettre en
image. Mon opinion reflète l'expression
de mon entourage. Dans ma famille, ma mère est favorable au projet de loi du
gouvernement, tout comme ma fille et
moi. Trois générations distinctes, trois femmes aux réalités bien différentes
les unes des autres partageant un appui
pour un même projet, une photo de famille dans laquelle on arrive à trouver
l'harmonie, Mme la Présidente, c'est, pour moi, la racine même du
vivre-ensemble. Le Québec est une terre aux cultures plurielles, aux valeurs
multiples et aux enjeux diversifiés. Trois
générations ne s'entendront jamais toujours sur tout mais peuvent aspirer à
établir des liens sereins, à partager des principes unificateurs. Comme
chaque famille possède ses règles de bonne entente, chaque société démocratique se doit d'établir des bases
législatives pour représenter justement ses citoyens, et ce, dans le respect
de ses croyances et de ses valeurs.
La
conciliation, Mme la Présidente, est à la base de toute société démocratique.
Le Québec est une terre d'ouverture, peu
importe que les gens croient ou ne croient pas, peu importe qu'ils pratiquent
ou qu'ils ne pratiquent pas. Je souhaite, Mme la Présidente, que mon arbre généalogique s'enracine et s'épanouisse
dans un État juste, un État laïque. Dans notre grande famille québécoise
diverse, inclusive, ouverte, magnifique, nous devons prendre les mesures nécessaires
pour que les principes de liberté et d'égalité soient préservés afin d'assurer
le respect de ce vivre-ensemble.
Le Québec
s'est historiquement démarqué par sa transformation rapide au cours des
années 60, période au cours de
laquelle il s'est permis de croire en ses propres principes pour établir les
règles qui définiraient ses lendemains. C'est désormais à notre tour de prendre
les décisions qui détermineront le visage du Québec de demain. Pourquoi?
Parce que les temps ont changé, parce que de nouveaux débats se sont formés sur
la place publique et que le vivre-ensemble en a payé le prix. Choisir l'inaction, lorsque confrontés à
l'adversité, Mme la Présidente, est, selon moi, une recette qui garantit l'échec.
Ignorer un débat qui a enflammé le Québec il y a
plus de 10 ans et qui continue de se faufiler depuis, de se tracer un
chemin jusqu'aux premières pages des journaux sur une base régulière, c'est une
conduite à laquelle, Mme la
Présidente, je refuse d'adhérer. Nous
devons mettre en place les balises nécessaires pour que chacun et chacune
sachent ce que la collectivité entend
des individus qui la constituent. Pour cela, nous souhaitons par ce projet de loi que les représentants de
l'État, les personnes en position d'autorité puissent refléter la neutralité
que se doit d'incarner le Québec. Cette neutralité, elle unit trois femmes de la photo de famille que je vous évoquais plus
tôt ainsi que tant d'autres personnes dans tant d'autres photos de familles québécoises. Le but de cette
neutralité n'est pas d'évacuer la personnalité propre des individus de la sphère publique, comme on le prétend si facilement.
Mes collègues du côté de cette Chambre et moi sommes fiers du Québec
dans toutes ses couleurs et ses mélodies. Nous ne souhaitons aucunement, Mme la Présidente, les ternir ou les rendre muettes.
Ce que nous
désirons promouvoir ici par ce projet de loi se veut une affirmation collective
par laquelle une nette ligne distingue la responsabilité de neutralité
religieuse de l'État québécois de l'individualité de ses représentants. Je suis fière d'appartenir à un État où nous avons le
droit de pratiquer une religion ou non, et surtout où l'État n'impose aucune
religion à ses citoyens, car il est laïque.
Je suis persuadée que notre projet de
loi est une piste de solution pour
rétablir cette sérénité collective qui s'est érodée depuis plusieurs
années sous le marnage des vagues d'un débat identitaire qui n'a jamais connu de conclusion. C'est l'heure, Mme la Présidente, de calmer la tempête, le moment d'agir et de laisser le temps
suivre son cours pour faire face, braver, s'attaquer à d'autres enjeux tout
aussi substantiels.
Aujourd'hui,
nous avons le pouvoir de trancher pour éteindre une discorde qui dure depuis
trop longtemps. Il serait irresponsable
de ne pas se saisir de ce pouvoir. Je suis convaincue que la décision que nous
prenons est la bonne pour ma mère,
pour ma fille et moi et tous les Québécois et Québécoise qui choisissent de faire confiance à cette
affirmation sur la laïcité de l'État. Les institutions dont nous nous
sommes dotés découlent d'une suite logique. D'entre elles, nous avons évacué le
divin tranquillement, paisiblement, sereinement, et ceci représente beaucoup
plus qu'une métaphore.
Hier n'était
pas une journée triste, Mme la Présidente, pas plus qu'aujourd'hui. Achevons,
Mme la Présidente, la construction de
la dernière colonne du temple des idées qui forme la base de l'égalité pour
tous. S'il vous plaît, chers collègues, enchâssons la laïcité de l'État
dans notre livre de lois. Merci.
• (22 h 10) •
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous
remercie, Mme la députée d'Argenteuil. Et maintenant je vais céder la
parole à M. le député de Vachon.
M. Ian Lafrenière
M.
Lafrenière : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Aujourd'hui, dans les
médias, j'ai vu Le Grand Défi Pierre-Lavoie
et je dois vous avouer que je trouve que ce qu'on a vécu ce week-end, ça
ressemble un petit peu à un grand défi aussi. Beaucoup d'heures en groupe. On a
appris à se connaître. Eux, ils ont eu des montages, des descentes. Nous, on a eu nos bas. Mais au final, peu
importent nos opinions, peu importent nos positions, de tout le monde ici, dans
cette salle, tout comme les participants au
Défi Pierre-Lavoie, on l'a fait pour nos enfants puis pour les enfants de nos enfants. Avec un peu d'imagination, je vous dirais
même qu'on peut prendre un instant puis s'imaginer qu'on rentre, nous aussi,
dans le Stade olympique aujourd'hui avec les applaudissements de tous. Ça, en
passant, c'est un «cue» pour des applaudissements, mais c'est correct,
c'est dimanche, puis il est 22 heures.
Vous savez, Mme la Présidente, la motion de suspension des
règles que nous avons utilisée aujourd'hui, ce n'est pas quelque chose qui existe depuis hier, ça
existe depuis le dernier siècle. À cette époque-là, ça devait être adopté à
l'unanimité des parlementaires. Au
fil des années, les règles ont changé. Dans les années 40, la règle du
consentement unanime disparaît. À
cette époque-là, il n'y a aucune limite de temps, ça ne restreignait pas le
débat. Dans les années 70, la règle est, encore une fois, modifiée, l'étape de la motion contenant
un exposé de motifs prouvant l'urgence est éliminée. Toutefois, les motifs
devaient tout de même être inclus dans le
texte de motion de suspension des règles. Dans les années 80, avec la
constitution d'un nouveau règlement,
qui vaut encore essentiellement aujourd'hui, l'exposé de motifs justifiant
l'urgence n'est plus exigé. Ainsi, le
leader du gouvernement peut désormais proposer sans préavis une motion de
suspension des règles simplement en mentionnant qu'il y a urgence.
Mais, même si nous n'avons pas à le prouver, Mme la
Présidente, on s'entend qu'on ne se serait pas embarqués dans une telle procédure ici en fin de semaine
sans qu'il y ait une réelle urgence d'agir. Ce n'est pas seulement nous qui le
disons, ce sont également les Québécois. Et, je l'ai mentionné hier, les gens
nous arrêtent sur la rue, nous le disent : Continuez. Les Québécois qui nous ont élus pour régler la question
de la laïcité de l'État, qui traîne depuis trop longtemps,
10 ans, ils nous disent : N'arrêtez
pas, on vous a mis en place, faites votre job. On va donc la régler aujourd'hui avec un projet de loi
modéré, à l'image des Québécois, qui forment un peuple modéré.
Avec ce projet de loi, que nous adoptons aujourd'hui, on va d'abord inscrire le principe de la laïcité
dans la charte québécoise des droits et libertés parce que c'est là qu'on est rendus, au Québec,
on va également interdire le port de signes religieux pour les employés de l'État en autorité comme on
s'était engagés à le faire, mais on fait un compromis avec une clause de droits acquis pour susciter l'adhésion
du plus grand nombre de personnes à notre projet de loi : on ne va
pas congédier personne.
De plus, les services publics devront être donnés à visage découvert, sans exception. Pour la réception des services de l'État, en ce qui concerne les citoyens,
le visage découvert sera exigé pour des raisons d'identification ou
de sécurité. Et puis on a décidé d'appliquer
dès le départ la clause dérogatoire pour éviter des guérillas juridiques sans fin.
On ne doit pas être gênés d'utiliser ces dispositions-là, prévues dans la Constitution canadienne, et de marcher dans les
pas de René Lévesque et de Robert Bourassa. Pour ceux qui en doutaient encore,
ceci est pourtant la démonstration de notre modération et de l'esprit de
compromis dans lequel on s'inscrit.
J'aimerais
conclure en apportant des précisions au sujet de l'interdiction des signes religieux pour les personnes en
autorité parce que j'estime qu'il est important de bien comprendre le fond de ce projet de loi. Certains nous ont accusés de
réduire les garanties légales relatives à la liberté de conscience et de
religion et de nous attaquer ainsi aux minorités culturelles. D'autres ont soulevé... à l'égard des personnes qui ne
sont pas visées par le projet de loi. Mme la
Présidente, la laïcité doit
s'affirmer en fait et en apparence. Les employés de l'État pour lesquels nous avons
décidé d'imposer une interdiction au port de
signes religieux détiennent un pouvoir de coercition ou encore un
pouvoir de contrainte sur la liberté de
leurs concitoyens. Pour certains, ce sont des enfants. Par la délégation de
pouvoirs qu'ils sont conférés, ils incarnent, en quelque sorte, le bras de l'État, d'où l'obligation pour eux d'incarner en fait et en apparence la laïcité.
Vous savez, ce volet est important... de ce projet de loi, il s'applique aux policiers. Et, Mme la Présidente, pour avoir fait ce travail pendant plus de 26 ans, pour aimer et respecter ce métier, pour croire dans l'importance
du meilleur service au citoyen, avec toute impartialité et apparence d'impartialité — parce qu'on sait, Mme la Présidente, avec ce job
qu'on fait ici, de politicien,
on sait très bien à quel point les
apparences deviennent parfois des faits — alors,
pour toutes ces raisons, je suis très satisfait.
Le
gouvernement s'apprête à franchir une nouvelle étape dans la
poursuite du projet de société que le Québec
s'est donné depuis la Révolution tranquille,
et je suis fier d'être ici aujourd'hui pour y participer. Maintenant que ce dossier, qui
a traîné pendant plus de 10 ans, est rendu à ce niveau, nous pourrons, dès cet
automne, travailler sur des dossiers tellement importants. Comme pour Pierre Lavoie, que j'ai mentionné en
début de mon discours, il y a plusieurs dossiers pour
le bien de nos enfants : le projet
de loi n° 2,
sur l'accès au cannabis; maternelles
quatre ans; la commission
sur la protection de la jeunesse; la commission
spéciale sur l'exploitation sexuelle des enfants. Mme la Présidente, oui, le Québec se souviendra de ce jour, les Québécois
vont se souvenir que finalement le gouvernement a écouté les Québécois et a fait sa job,
on fait quelque chose.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député de Vachon.
Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de Sainte-Rose.
Et je vous indique qu'il vous reste un temps de parole de 5 min 50 s.
M. Christopher
Skeete
M.
Skeete : Merci beaucoup, Mme la Présidente. «Bornés», ils nous disent. «Pressés», disent
d'autres. Ils nous répètent qu'on
n'écoute pas. Mais c'est eux qui n'écoutent pas. 67 % des parlementaires, élus dans 84 comtés sur 125, venant de toutes les régions du Québec, voteront pour le projet de loi n° 21. Ça
fait 10 ans que les Québécois demandent à la classe politique d'agir, et
on agit.
La
laïcité existe déjà, nous disent-ils. Pourtant, la Charte canadienne
mentionne Dieu et pas la laïcité. Les Québécois
sont modérés. Ils ne seraient pas derrière
un gouvernement qui ne le serait pas. Lors des commissions parlementaires, on a reçu la fraternité des polices et on a parlé de
l'habillement des policiers. Étant anciennement un douanier, je me souviens
de la transformation d'uniforme des
douaniers au bleu pâle au bleu foncé. Et la raison qui a précipité cette
nécessité-là était simple. Des études psychologiques ont démontré, Mme la Présidente, que, lorsqu'on porte un habillement plus foncé, il y a plus de
chances que les gens vont nous écouter. Et ce n'est pas juste par fait. De
l'autre côté, les gens vont nous percevoir
comme étant plus agressifs. Depuis que les policiers et les douaniers portent
des uniformes plus foncés, on voit deux choses : plus de plaintes
policières, et aussi on voit une réduction au nombre d'arrestations qui
nécessitent une force. Alors, dans les deux
cas, ça s'est avéré véridique. Pourquoi je vous conte cette histoire-là? Mais
c'est simple. Ce qu'on porte va avoir une influence sur la façon qu'on
est perçu. C'est humain.
In 1961, a royal commission was drawn
together to talk about the different ways in which we school our children, and one of the things that we
looked at was whether or not we should remove religion from our schools. Now,
after many years, it was decided that
the best thing to do was to remove priests and nuns from our institutions. That
was in 1961. And, of course, the
priests didn't appreciate that. They made it known, that they didn't appreciate
that. So, as a compromise, we assured
these religious individuals and the religious establishments that they can keep
confessional confessional schools. It
wasn't until Bill 118 from the Bouchard Government, in 2000, where we finally removed religion from
our school board system.
And, of course, here we are in 2019 taking another step to truly remove
religion from our public institutions. Now, I hear the argument made by those who talk about freedom of religion, but
it must balance with the notion that we have a right to be free from
religion.
• (22 h 20) •
Vous
brimez les droits, nous disent-ils, comme si la clause dérogatoire n'existe pas
exactement pour cette raison, comme si ce n'est pas un droit d'être libre de la religion. Vivre une
transaction de manière neutre avec l'État est un droit. Je considère important ce que le gouvernement du Québec
s'apprête à faire aujourd'hui. Je considère que c'est nécessaire et je ne suis pas d'avis qu'on brime
des droits. Je pense, au contraire, on affirme une perspective, une notion
importante et philosophique qu'on doit préserver : la neutralité de
l'État. Et la neutralité de l'État, chers collègues, c'est primordial pour la crédibilité de l'État. Il est, pour moi,
important de prendre les étapes qu'on prend aujourd'hui, pas parce que tout
le monde va être d'accord, parce qu'on se
souvient qu'en 1977 les mêmes voix s'élevaient et revendiquaient les mêmes critiques,
qu'on brimait des droits, puis, après ça, ça a été validé en cour. Mais c'était
important de protéger la nation québécoise,
de protéger notre langue. Et ici, encore une fois, leader en Amérique du Nord,
le Québec va implanter la neutralité de l'État.
Alors,
j'aimerais ça prendre un moment pour féliciter le premier ministre, féliciter
mon collègue le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion.
Merci d'avoir apporté ce projet de loi tant requis et tellement souhaité
par la population québécoise. C'est vraiment
important, ce qu'on fait aujourd'hui, et c'est tout à votre honneur. Chers
collègues, merci d'avoir défendu ce projet de loi. Ce n'était pas toujours
facile. Ça requiert beaucoup d'énergie et de patience.
Mais je suis avec vous et je suis fier de vous. Et je parle, en ce moment, à
mes citoyens de Sainte-Rose. Vous m'avez
écrit nombreux pour demander qu'on ne lâche pas. Bien, nous voilà, ça va être
réglé, on va livrer tel que promis. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de
Sainte-Rose. Et maintenant je vais reconnaître Mme la cheffe du deuxième groupe
d'opposition, et vous disposez d'un temps de parole d'une minute.
Mme
Manon Massé
Mme
Massé : Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, il n'y avait
aucune urgence, aucune urgence. La cohabitation, le vivre-ensemble, ça ne se
fait jamais dans l'exclusion. L'exclusion crée du mal-être, crée du malaise,
ça ne facilite pas la cohabitation.
Vous savez,
être Québécois, vivre ensemble, cohabiter, l'unité nationale, ce n'est pas être
tous pareils, c'est d'être tous
ensemble, ensemble. Je ne peux pas vous définir dans quel état je suis
présentement, mais, je peux vous dire une
chose, j'ai mal à mon Québec.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition. Alors, ceci met fin au débat.
Mise aux voix
Je mets maintenant
aux voix la motion de M. le ministre
de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion proposant l'adoption du projet de loi
n° 21, Loi sur la laïcité de l'État. Cette motion est-elle adoptée? M. le
leader de l'opposition officielle.
M. Proulx : Merci, Mme la
Présidente. Je vous demanderais un vote par appel nominal, s'il vous plaît.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, nous avons une demande de vote par appel nominal.
Et, maintenant, que les députés en faveur de
cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint : M. Legault (L'Assomption),
M. Jolin-Barrette (Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville),
Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay), M. Girard
(Groulx), Mme McCann (Sanguinet),
Mme Roy (Montarville), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée
(Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme LeBel (Champlain),
M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette
(Deux-Montagnes), M. Lamontagne
(Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Caire
(La Peltrie), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé
(La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau
(Pointe-aux-Trembles), M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Hébert
(Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est), M. Lacombe (Papineau),
Mme Charest (Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), M. Julien (Charlesbourg), M. Boulet (Trois-Rivières),
Mme Proulx (Côte-du-Sud), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin
(Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond),
Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger (Orford),
Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif
(Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin
(Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau
(Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin (Rousseau),
M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau
(Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf),
Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean),
Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava), M. Bussière (Gatineau),
M. Allaire (Maskinongé), Mme Guillemette (Roberval),
M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).
M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Ouellet
(René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Richard (Duplessis),
Mme Hivon (Joliette),
M. Gaudreault (Jonquière), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine),
Mme Perry Mélançon (Gaspé).
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Maintenant, que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.
• (22 h 30) •
Le Secrétaire adjoint : M. Arcand (Mont-Royal—Outremont),
M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière),
Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee),
Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme David
(Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit
(Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun), Mme Ménard (Laporte),
Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne),
M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols (Vaudreuil), Mme Charbonneau
(Mille-Îles), Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé), M. Kelley
(Jacques-Cartier), Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan),
Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent),
M. Ciccone (Marquette).
Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), M. Nadeau-Dubois (Gouin),
Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont),
M. Fontecilla (Laurier-Dorion), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve),
Mme Dorion (Taschereau), M. Zanetti (Jean-Lesage).
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Avant de
passer au résultat du vote; vous savez très bien que vous ne pouvez poser le geste que vous venez de faire.
Alors, c'est un moment solennel que l'on vit aujourd'hui. Je pense que les
discours en ont fait l'état, mais je pense
qu'il faudrait que vous soyez un peu plus prudents dans votre façon de voter
lorsque nous posons ce geste ultime ici, au salon bleu.
Maintenant, y a-t-il
des abstentions? Pour le résultat du vote, M. le secrétaire général.
Le
Secrétaire : Pour : 73
Contre :
35
Abstentions :
0
La Vice-Présidente (Mme
Gaudreault) : Alors, la motion est adoptée. En conséquence, le projet
de loi n° 21, Loi sur la laïcité de l'État, est
adopté.
Des voix : ...
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Ce n'est pas terminé encore.
Ajournement au 17 septembre
2019
Alors, l'Assemblée ayant terminé l'étude des affaires pour lesquelles elle a été
convoquée, j'ajourne les travaux au mardi 17 septembre, à
13 h 40.
(Fin de la séance à 22 h 33)