(Quatorze heures cinq minutes)
Le Président: Nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.
Merci. Si vous voulez bien vous asseoir.
Présence de la consule générale du Costa Rica à Montréal, Mme Patricia Gudino Fernandez
J'ai d'abord le grand plaisir de souligner la présence dans les tribunes de la consule générale du Costa Rica à Montréal, Mme Patricia Gudino Fernandez.
Affaires courantes
Aux affaires courantes, il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.
M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article d de notre feuilleton.
Projet de loi n° 15
Le Président: À l'article d du feuilleton, M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes présente le projet de loi n° 15, Loi concernant la mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur. M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, ce projet de loi prévoit l'approbation par le Parlement du Québec de l'Accord sur le commerce intérieur. Il modifie aussi la Loi sur les agents de voyages afin d'assurer la conformité à l'Accord de certaines dispositions de cette loi.
Mise aux voix
Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?
Une voix: Oui.
Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.
M. Bélanger: Je vous demanderais de prendre en considération, M. le Président, l'article e de notre feuilleton.
Projet de loi n° 17
Le Président: À l'article e du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales présente le projet de loi n° 17, Loi abrogeant la Loi concernant les environs du parc du Mont Sainte-Anne. M. le ministre des Affaires municipales.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: M. le Président, c'est avec plaisir que je dépose le projet de loi n° 17, donc, Loi abrogeant la Loi concernant les environs du parc du Mont Sainte-Anne. Et ce projet de loi abroge la Loi concernant les environs du parc du Mont Sainte-Anne pour que les règlements de construction et de zonage des municipalités de Saint-Joachim et de Saint-Ferréol-les-Neiges et des villes de Beaupré et de Sainte-Anne-de-Beaupré s'appliquent sur le territoire du parc du Mont Sainte-Anne.
Ce projet de loi prévoit également l'interdiction, à partir du jour de sa présentation, des nouvelles utilisations du sol et des nouvelles constructions dans la partie du territoire de la ville de Beaupré, la municipalité de Saint-Ferréol-les-Neiges comprise dans le territoire du parc du Mont Sainte-Anne jusqu'à ce que la municipalité modifie ses règlements ou publie un avis indiquant que ses règlements n'ont pas à être modifiés.
Mise aux voix
Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?
Une voix: ...
Le Président: Alors, adopté. M. le leader du gouvernement.
M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article f de notre feuilleton.
Projet de loi n° 16
Le Président: À l'article f du feuilleton, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune présente le projet de loi n° 16, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.
M. David Cliche
M. Cliche: Merci, M. le Président. J'ai le plaisir de présenter le projet de loi n° 16, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune.
Ce projet de loi modifie la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune afin d'en faciliter l'application. C'est ainsi qu'il prévoit expressément que le terme «animal» peut comprendre ses parties ou sa chair, notamment dans le but de pouvoir interdire le commerce de certaines parties d'animal. Le projet élargit également le pouvoir d'inspection des agents de conservation de la faune et confère au ministre de l'Environnement et de la Faune le pouvoir d'augmenter le nombre de permis fixé par règlement et celui de modifier ou d'annuler une période de chasse ou de piégeage déterminée par règlement.
De plus, le projet de loi prévoit que le ministre pourra acquérir des améliorations ou des constructions utiles à la gestion d'une zone d'exploitation contrôlée et autoriser un organisme gestionnaire d'une zone d'exploitation contrôlée ou zec à acquérir de tels immeubles. Le ministre pourra aussi transférer la propriété de ces immeubles, aux conditions qu'il détermine, à ces organismes ainsi qu'aux personnes, associations ou organismes qui fournissent des services ou organisent des activités dans les réserves et les refuges fauniques.
Par ailleurs, le projet de loi confère au ministre le pouvoir de classifier, par règlement, les permis de pêche prévus dans une législation fédérale relative aux pêches et, notamment, de fixer leur coût de délivrance.
Enfin, le projet de loi prévoit que le plan triennal de la Fondation de la faune du Québec sera dorénavant soumis à l'approbation du ministre au lieu du gouvernement.
Je vous remercie, M. le Président.
Mise aux voix
Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.
(14 h 10)
Au dépôt de documents. Oui, M. le leader de l'opposition officielle.
M. Paradis: Oui, au niveau du dépôt de projets de loi, nous serait-il permis d'offrir, à ce moment-ci, notre consentement au gouvernement pour qu'il donne suite à ce qui paraissait dans un quotidien ce matin, le dépôt d'une loi anti-déficit?
Une voix: Par respect pour l'Assemblée...
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bélanger: M. le Président, patience, patience. Je constate la même impatience que celle d'entendre notre budget. Alors, on va faire ce qu'on a promis de faire...
Une voix: ...et ce qui n'a pas été fait par l'autre parti.
M. Bélanger: ...et, évidemment, ce qui n'a pas été fait par le gouvernement précédent...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bélanger: ...et que mon collège se rassure, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Président: Au dépôt de documents.
Dépôt de rapports de commissions
Au dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission des institutions. À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! M. le président de la commission des institutions.
Étude détaillée du projet de loi 51
M. Landry (Bonaventure): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des institutions qui a siégé le 1er mai 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 51, Loi concernant la mise en oeuvre des accords de commerce international. La commission a adopté le projet de loi avec amendements.
Le Président: Ce rapport est déposé.
Dépôt de pétitions
Dépôt de pétitions. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Maintenir certains services à l'Hôpital général LaSalle
Mme Frulla: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition à l'Assemblée nationale par 5 600 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de LaSalle et de ses environs.
Les faits invoqués sont les suivants:
«Attendu qu'un budget d'au-delà de 25 000 000 $ ainsi que plusieurs dons d'entreprises et de citoyennes et citoyens ont été investis pour agrandir l'Hôpital général LaSalle;
«Attendu qu'avec le projet d'agrandissement nous avions confiance d'avoir enfin les soins dont nous avons besoin;
«Attendu que la transformation de la vocation de l'hôpital constituerait un réel gaspillage des fonds publics et une perte importante de services en soins intensifs, en soins intermédiaires et d'urgence, en orthopédie, de laboratoire, en clinique externe, en radiologie, en physiothérapie et en chirurgie pour la population de ville LaSalle et de ses environs;
«Attendu que ces changements auraient des impacts importants sur le service offert, puisqu'ils obligeraient la population à se déplacer pour avoir des soins dont ils ont besoin alors que plusieurs départements neufs resteront inutilisés à LaSalle, un hôpital fonctionnel et dont la taille permet de prodiguer des soins humains et personnalisés;
«Attendu que la population de la ville de LaSalle est jeune et a beaucoup plus besoin de soins de courte durée que de longue durée;
«Attendu que de telles décisions sont incompatibles avec un système de santé qui se veut centré sur les personnes;»
Et l'intervention réclamée se résume ainsi:
«Les citoyens et citoyennes de LaSalle et de ses environs, signataires de la présente pétition, demandent à l'Assemblée nationale du Québec d'accéder à leur demande de maintenir les services essentiels ci-haut mentionnés à l'Hôpital général LaSalle, et ce, dans le meilleur intérêt de la population et conformément à ses besoins.»
Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.
Le Président: Cette pétition est déposée.
Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.
Je vous avise que, après la période des questions et des réponses orales, sera tenu le vote reporté sur la motion de M. le député de Sauvé présentée hier aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.
Questions et réponses orales
Nous en arrivons maintenant à la période des questions et des réponses orales. M. le leader de l'opposition officielle.
M. Paradis: Oui. Juste avant la période, M. le Président, est-ce que le leader du gouvernement pourrait informer cette Chambre de la raison des absences des ministres suivants? On ne questionne pas l'absence...
Le Président: Je m'excuse, vous savez très bien que la règle, c'est de ne pas indiquer et de ne pas invoquer l'absence de qui que ce soit en cette Chambre pour ne pas prêter de motif.
M. Bélanger: M. le Président... Non, non...
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bélanger: M. le Président, afin de donner toute l'information nécessaire à l'opposition officielle, il me fait plaisir de dire que le ministre de la Justice est à une rencontre, présentement, fédérale-provinciale des ministres de la Justice; alors, le ministre de l'Agriculture, quant à lui, a une importante rencontre relativement à l'agriculture, et nous avions d'ailleurs avisé l'opposition de son absence; le ministre d'État de l'Économie et des Finances, on le sait, est présentement occupé à préparer le budget pour cet après-midi; quant au ministre de la Sécurité publique, M. le Président, il est lui aussi à Ottawa, en train d'assister à la Conférence fédérale-provinciale des ministres de la Justice.
Le Président: Très bien. Alors, on en est à la période des questions et des réponses orales. M. le chef de l'opposition... Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, en principale.
Rejet de la candidature de M. Yves Ryan à l'Agence métropolitaine de transport de Montréal pour conflit d'intérêts
Mme Frulla: Merci, M. le Président. Cinq mois après l'adoption de la loi 102, la Loi sur l'Agence métropolitaine de transport, une agence, d'ailleurs, toujours inexistante malgré qu'on nous avait imposé le bâillon en décembre dernier, compte tenu de l'urgence de la situation, le ministre d'État à la Métropole décide d'en retarder encore l'implantation.
En décembre dernier, un premier consensus a été atteint alors que la Table des préfets et des maires déposait, dans un effort de collaboration et de bonne volonté, une proposition, telle que demandée par le premier ministre des Transports; résultat, ce consensus fut rejeté du revers de la main par le deuxième ministre des Transports, créant un sentiment de méfiance au sein des élus municipaux de Montréal.
Les mois se suivent, et, sous la pression du troisième responsable du dossier, soit le ministre d'État à la Métropole, les élus de l'île de Montréal, tout en donnant la chance au coureur, ont fait contre mauvaise fortune bon coeur et en sont arrivés à un nouveau consensus en choisissant celui qui les représenterait à l'Agence métropolitaine, soit le maire de Montréal-Nord, M. Yves Ryan, président de la STCUM, gestionnaire réputé, reconnu pour son intégrité et sa large expérience dans le domaine du transport en commun.
Question, M. le Président: Comment le ministre d'État à la Métropole, le grand rassembleur, le catalyseur pour la promotion des intérêts de la métropole, tel que décrit...
Des voix: Bravo!
Une voix: Attendez, attendez. Il va en avoir besoin...
Mme Frulla: ...le prophète du bonheur, le prophète du bonheur, comment celui-ci peut-il expliquer que, dans le tout premier mandat qu'il doit accomplir, il décide de ne pas respecter le consensus établi par les élus municipaux, rejette la candidature soumise en disant que ce n'est pas la bonne personne pour faire le travail et impose aux élus de refaire leurs devoirs en leur laissant le sentiment qu'ils sont mis sous tutelle?
Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole.
M. Ménard: Alors, j'ai justement téléphoné à M. Yves Ryan ce matin pour lui expliquer les problèmes que l'on m'avait signalés relativement à sa nomination sur le conseil d'administration de l'Agence métropolitaine de transport. Je lui ai dit, et je peux le répéter publiquement, que, quant à moi, je suis convaincu que, personnellement, il avait toutes les capacités, et ça aurait été mon choix, puisque telle était la suggestion qui avait été faite par l'ensemble des maires de l'île de Montréal, malgré, remarquez, l'opposition du maire de Montréal lui-même, qui, je pense, se serait rangé par rapport aux autres nominations qui seront faites.
Cependant, l'on m'a signalé depuis qu'il y aurait un conflit d'intérêts institutionnel à ce que le président de la Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal siège sur le conseil d'administration de l'Agence métropolitaine de transport. J'ai donc demandé à ce qu'une opinion légale soit présentée à cet effet. Elle semblait assez compliquée à faire. J'ai demandé au contentieux du ministère des Transports. L'opinion m'est arrivée par fax ce matin, partiellement, et il semble que, effectivement, l'on voit qu'il y a une situation de conflit d'intérêts. M. Ryan l'a reconnu lui-même. Il croit cependant que cette situation de conflit d'intérêts institutionnel ne vise évidemment pas sa personne mais simplement la situation dans laquelle il serait, étant président d'un organisme qui serait bénéficiaire de sommes qui seraient versées par l'Agence métropolitaine de transport en concurrence avec d'autres organismes qui n'auraient pas de représentations, et puis aussi des contrats qui seraient donnés à cet organisme.
(14 h 20)
Je pense que cette question légale doit être étudiée. Je ne voudrais pas que des décisions soient prises par l'Agence métropolitaine de transport qui soient plus tard contestées avec succès devant les tribunaux. Mais je pense que le deuxième point demande réflexion et demande une opinion, encore, des avocats du ministère de la Justice.
Le Président: Mme la députée.
Connaissance de la situation de conflit d'intérêts de M. Yves Ryan
Mme Frulla: En principale, M. le Président: Comment le ministre peut expliquer sa grande prudence aujourd'hui alors que... Et là je cite une lettre qui lui a été envoyée par le président de la Conférence des maires de la banlieue de Montréal, envoyée le 7 mai 1996 par le maire de Westmount, qui dit ceci, en parlant justement de ce nouveau scénario, si on peut dire: «Si ce scénario devait se concrétiser, vous comprendrez mon étonnement et mon incompréhension, disait M. Trent. D'une part, ni le texte de la loi 102 ni d'une autre loi n'imposait des restrictions dans la désignation des représentants des municipalités.
«D'autre part, tout au cours du long et difficile processus que nous avons poursuivi au CECUM afin de désigner un tel représentant, en aucun cas il ne nous fut signifié qu'un tel avis était en préparation ou qu'il y avait des restrictions dans l'éligibilité d'une candidature. Cette mise en candidature soumise à votre attention par le CECUM fut d'ailleurs rendue publique.»
Alors, comment le ministre peut-il expliquer qu'aujourd'hui il se réveille, cinq mois et demi après que l'Agence aurait dû être implantée, et qu'il est obligé, maintenant, de balayer du revers de la main un consensus comme on a balayé du revers de la main un autre consensus en décembre dernier, lui, le grand catalyseur?
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole.
M. Ménard: Je suis effectivement étonné moi-même que ces difficultés aient d'abord été soulevées par un de mes attachés politiques, avocat de son métier et donc plus à même d'apprécier les risques légaux que pouvait courir l'Agence métropolitaine de transport. J'estime cependant qu'avant de prendre une décision de cette importance il est important de la soumettre aux légistes du gouvernement. Remarquez que, dès que j'ai su qu'il y avait problème et que je n'aurais pas une opinion rapidement, j'en ai immédiatement informé les autorités de la CUM, de sorte qu'elles sont au courant depuis un certain temps. Mais, effectivement, j'ai soumis le problème dès que je l'ai connu moi-même, dès que j'ai pu l'apprécier.
Je dois dire que je n'ai toujours pas lu, hein, l'opinion légale assez longue qui m'a été envoyée par fax ce matin. Et, quand j'ai quitté mon bureau, tout n'était pas encore arrivé. Alors, je pense que tout le monde comprendra qu'il est dans l'intérêt de cette Agence qu'elle ne soit pas attaquée avec succès devant les tribunaux. Et, dans un cas comme celui-là, la prudence est de mise.
Quant aux faits, je ne me suis pas traîné les pieds depuis cinq mois et demi. Cette Agence ne devait pas être mise sur pied le 1er janvier. Ce qui prenait fin le 1er janvier, c'était le mode de financement qui devait être remplacé par un autre. Et, depuis, j'ai expliqué ce que j'ai fait avec cet...
Le Président: M. le ministre... Je vous rappellerais encore une fois, comme je l'ai déjà fait cette semaine, que j'ai eu une tolérance pour la députée de Marguerite-Bourgeoys, pour cette question, et aussi pour la réponse du ministre, à l'égard du temps, mais qu'il y a des limites à ne pas dépasser, sinon, finalement, on déséquilibre tout l'ensemble de notre mécanisme. Alors, Mme la députée.
Crédibilité de l'Agence métropolitaine de transport de Montréal
Mme Frulla: En principale, encore, M. le Président. Comment concilier la réponse, présentement, du ministre par rapport au projet de loi qui a été étudié par tous les avocats que nous avons ici, au Parlement, par le bâillon aussi, il ne faut pas oublier, au mois de décembre, quand son prédécesseur nous avait tout simplement dit qu'il y avait une urgence, comment concilier ceci, la réponse disant qu'il y a peut-être peut-être! possibilité de conflit d'intérêts par rapport aux maires qui ont essayé de faire consensus et par rapport aussi à la réponse des maires et à l'avertissement que les maires donnent au nouveau ministre d'État à la Métropole en disant ceci, qu'«une telle décision en parlant du rejet, justement, du candidat de votre part, apparaît contradictoire avec le contexte et le climat de collaboration et de coopération que vous cherchez à établir présentement avec les autorités locales de l'ensemble du milieu. Plus encore, une telle décision laisse présager de sérieuses difficultés de démarrage de la nouvelle agence, ainsi que le développement potentiel de rapports de méfiance entre les représentants de l'AMT, les responsables des autorités organisatrices de transport, les élus locaux ainsi que les citoyens qu'ils représentent»? Ça part mal, M. le Président, pour la nouvelle agence.
Le Président: M. le ministre.
M. Ménard: Alors, c'est très simple à concilier. D'abord, les gens de l'île de Montréal ont pris un certain temps avant de faire une recommandation. Évidemment, avant qu'ils ne me fassent connaître leur choix, je ne pouvais apprécier la situation potentielle de conflit d'intérêts, avant de connaître le candidat qu'on me suggérerait. Ça n'est évidemment qu'à partir du moment où j'ai envisagé... Et, encore une fois, je répète que j'estime que cette personne avait toutes les capacités et que, si elle n'était pas dans cette situation, déjà, sa nomination serait dans le processus gouvernemental, pour être annoncée avec la personne qui présidera l'Agence, bientôt. Donc, c'est ça qui explique... Mais, à partir du moment où ce problème m'a été soulevé, et il m'a été soulevé peu de temps après que je connaisse le nom de la personne qu'on me suggérait, il fallait que j'attende l'opinion des légistes du gouvernement avant de prendre une décision. Car le pire qui pourrait arriver à l'Agence métropolitaine de transport, c'est de prendre des décisions qui seraient, par la suite, annulées par les tribunaux, et je pense bien que tout le monde le reconnaîtra.
Le Président: En principale ou en complémentaire?
M. Vallières: En principale.
Le Président: M. le député de Richmond, en principale.
Mandat des secrétaires régionaux
M. Vallières: Oui, M. le Président. Je questionnais, en décembre dernier, le gouvernement sur la pertinence de maintenir la structure des délégués régionaux, qui s'est inscrite, comme je l'indiquais, dans une vaste opération de séduction de l'électorat aux frais des contribuables québécois pour favoriser la séparation du Québec. L'actuel premier ministre l'a reconnu et a aboli cette structure mise en place pour préparer le référendum pour la remplacer par celle des secrétaires régionaux, chacun agissant à titre d'adjoint parlementaire d'un ministre désigné par le premier ministre pour chacune des régions du Québec.
Est-ce que le premier ministre peut nous indiquer si, depuis leur nomination, les secrétaires régionaux se sont vu préciser des règles quant aux frais, de représentation ou de dépenses, additionnels à ceux qu'ils touchent à titre de députés?
Le Président: M. le ministre responsable du Développement des régions.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. C'est à titre de vice-président du comité ministériel sur le développement des régions que je réponds à la question. Oui, M. le Président, les adjoints parlementaires aux ministres sectoriels présentent leurs comptes à leur ministre sectoriel, à leur ministère sectoriel, tout comme le fait un adjoint parlementaire régulier. C'est un adjoint parlementaire d'abord, dont la responsabilité est aussi de seconder le ministre désigné dans chacune des régions dans sa tâche.
Le Président: M. le député de Richmond.
M. Vallières: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre, qui est vice-président de la table dont on parle, peut nous faire le dépôt des règles dont se servent les différents ministres qui ont été désignés par le premier ministre pour accepter ces comptes de dépenses?
Le Président: M. le ministre.
M. Chevrette: M. le Président, la règle est normale, elle est admise et elle est de tout temps, en ce sens suivant: le ministre envoie son secrétaire régional le représenter à tel endroit; l'adjoint parlementaire présente son coût de millage ou de frais de repas s'il y en a eu dans l'exercice de sa fonction d'adjoint parlementaire, pas plus, pas moins.
Le Président: M. le député de Richmond.
M. Vallières: M. le Président, après plusieurs mois de fonctionnement, est-ce que le premier ministre peut nous indiquer s'il a émis quelque document que ce soit vis-à-vis des responsabilités des secrétaires régionaux vis-à-vis de cette structure qu'il a lui-même créée?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bouchard: M. le Président, il s'agit d'une expérience nouvelle qui est en marche. Je ne sache pas que nous ayons émis de document qui détermine de façon précise et fonctionnelle l'activité du secrétaire régional. Cependant, le cadre du travail a été énoncé dans des discours que j'ai prononcés, dans le discours inaugural en particulier. Ça a été rappelé de façon régulière sur un plan verbal. Je rencontre régulièrement des secrétaires régionaux sur une base individuelle, qui me parlent des dossiers. J'en parle également avec le ministre responsable. Nous avons l'intention, me signale le ministre à l'instant, vers la fin du mois de mai, début du mois de juin, de formaliser les modes de fonctionnement par un document écrit.
Le Président: M. le député de Richmond.
M. Vallières: M. le Président, est-ce que le premier ministre sait que le député de Dubuc, lui-même secrétaire régional, déclarait tout dernièrement en commission parlementaire, et je veux le citer comme suite aux propos que lui-même vient de tenir. Il disait: «Moi-même, je suis secrétaire régional. Je n'ai jamais entendu parler de quoi que ce soit. Peut-être que certains ministres le font, mais je dois quand même avouer ma totale ignorance, d'abord du rôle d'un secrétaire et des frais auxquels il peut avoir droit.»
M. le Président, est-ce que le premier ministre trouve ça normal que les secrétaires régionaux ne sachent pas encore, après plusieurs mois d'opération, en quoi consiste leur travail?
(14 h 30)
Le Président: Je vous rappelle que le temps file pour la période de questions. M. le ministre.
M. Chevrette: Oui, M. le Président, vous venez de constater que ce n'est pas du mur-à-mur.
Effectivement, le secrétaire régional a l'autorité ou la latitude que lui confie son ministre désigné. Il n'y a pas un ministre qui fonctionne de la même façon. Et j'ai connu de multiples adjoints parlementaires sous le régime libéral qui ne savaient même pas, à la fin du régime, qu'ils avaient été adjoints parlementaires.
Le Président: M. le député de Richmond.
M. Vallières: M. le Président, maintenant que le premier ministre sait, et c'est confirmé par son ministre responsable du Développement des régions, que certains ministres ignorent, mais totalement, l'existence même des secrétaires régionaux, qui n'ont d'autorité que celle que veut bien leur confier le ministre désigné par le premier ministre dans chacune des régions, compte-t-il, M. le Président, abolir cette structure, aller au-delà du discours et véritablement s'occuper du développement des régions?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bouchard: M. le Président, ce que je sais du fonctionnement de cette structure, c'est qu'à sa façon, sans être encadré de façon bureaucratique et dans des modèles uniformes, chaque secrétaire régional joue un rôle extrêmement important dans l'activité régionale, la structure ayant permis en particulier, M. le Président, de donner à chaque région un accès direct... la structure nouvelle permettant à chaque région de bénéficier d'un accès ministériel direct au Conseil des ministres avec l'appui d'un adjoint parlementaire, que nous avons dénommé secrétaire régional, ce qui fonctionne très bien.
Nous allons même, à l'usage de l'expérience que nous avons vécue, comme le ministre du territoire régional vient de l'indiquer, nous allons même, forts de l'expérience que nous avons acquise maintenant, formaliser de façon écrite le mode de fonctionnement.
Le Président: M. le député de Robert-Baldwin, en principale.
Patients en attente de chirurgie cardiaque
M. Marsan: M. le Président, présentement, 1 000 patients sont en attente d'une chirurgie cardiaque, et les médecins de ces 1 000 patients ont averti le ministre depuis longtemps qu'ils ne pouvaient plus opérer à cause de ses politiques restrictives. Malgré cela, nous apprenons qu'à compter du mercredi 15 mai prochain seuls les patients dont l'état cardiaque est extrêmement urgent pourront être opérés.
Qu'est-ce que le ministre de la Santé entend faire concrètement, et dans les prochaines heures et avant le 15 mai, pour que ces patients puissent être opérés?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Rochon: M. le Président, la rémunération des médecins qui sont des chirurgiens cardiaques, comme de tous les médecins, fait partie d'une entente qui a été négociée avec la Fédération des médecins spécialistes. Les médecins, certains chirurgiens cardiaques, ont allégué et soutiennent que le partage de la masse salariale devrait être autrement pour tenir compte de leur situation, et c'est en négociations et en discussion avec la Fédération.
Il y a des pistes de solution qui sont sur la table dans le cadre de l'entente. Il y a aussi d'entrepris avec les chirurgiens cardiaques un groupe de travail pour revoir, comme on le fait avec les neurochirurgiens, beaucoup d'éléments de l'organisation de la chirurgie cardiaque il y a des problèmes organisationnels, en plus de la rémunération et c'est un travail qui progresse très bien.
Je reconnais et je peux comprendre que, dans un contexte où on discute à l'intérieur d'un régime de négociation, il y a des pressions qui se font de part et d'autre, mais j'ai très confiance, M. le Président, au sens de l'éthique et au sens des responsabilités de tout le monde là-dedans pour que la sécurité et, surtout, la vie des patients ne soient pas mises en danger pendant ce processus qui va régler le problème, M. le Président.
Le Président: M. le député de Robert-Baldwin.
M. Marsan: M. le Président, pourquoi le ministre se cache-t-il en arrière des fédérations médicales, alors que sa responsabilité première, c'est de s'assurer que les patients soient soignés?
Une voix: C'est ça.
M. Marsan: Et la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux prévoit, à l'article 3.1, lui dit bien son devoir: il doit voir à l'amélioration de l'état de santé des individus et non pas à la détérioration de l'état de santé des individus, M. le Président.
Une voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Rochon: M. le Président, c'est exactement ce qu'on fait à tous les jours et, en général, ça marche plutôt bien dans le réseau de la santé et des services sociaux. Le député de Robert-Baldwin n'aura peut-être pas remarqué, mais, depuis un an et demi maintenant, tous les changements qui ont été faits et qui se mettent en place présentement sont faits en collaboration. Le ministre ne se cache pas derrière, le ministre travaille avec les intervenants du réseau et du milieu.
Le Président: En principale, M. le député d'Orford.
Frais imposés aux chasseurs pour l'utilisation de caches
M. Benoit: Oui, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre de l'Environnement et grand ami des chasseurs du Québec: Le ministre peut-il confirmer à cette Chambre que les chasseurs du Québec, au-delà du permis de chasse, devront, en 1996, payer pour une cache, une petite cache de deux pieds par deux pieds? Et, bien sûr, c'est une taxe déguisée, M. le Président.
Alors, j'aimerais savoir du ministre et ami des chasseurs... J'aimerais savoir du ministre...
Des voix: ...
M. Benoit: M. le Président, j'aimerais savoir du ministre, l'ami des chasseurs, quel sera le coût pour une cache, au Québec, pour un chasseur, et combien cette mesure rapportera à l'État québécois.
Le Président: M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.
M. Cliche: Le seul cas que je connaisse, en ce qui concerne des frais pour des caches, est celui de zecs où les membres de l'administration des zones d'exploitation contrôlée ont décidé, dans certains cas, de facturer certains frais aux usagers de l'utilisation de ces zones d'exploitation contrôlée. C'est le seul cas que je sache, à moins qu'il y en ait d'autres. Mais, en ce qui concerne une politique de mon gouvernement qui viserait à facturer la mise en place de caches, je veux rassurer, M. le Président, le député d'Orford, que ce n'est pas le cas.
Le Président: M. le député.
M. Benoit: En additionnelle, M. le Président, est-ce que la ministre déléguée responsable des terres du Québec peut nous confirmer qu'une telle mesure a été annoncée, en ce qui a trait aux caches, au Québec?
Des voix: Ha, ha, ha!
Des voix: Oh! Oh!
M. Chevrette: Oui, M. le Président, je demanderais au député de reformuler sa question.
Le Président: M. le député.
M. Benoit: Oui, la question que je posais, M. le Président, je la repose: Est-ce qu'il est exact qu'au Québec les chasseurs qui auront des caches deux pieds par deux pieds, au bout d'un arbre, pour voir le gibier venir est-ce qu'il est vrai que, quand ces caches seront installées sur des terrains publics de l'État, il y aura maintenant des frais? Une petite cache de deux pieds par deux pieds, M. le Président.
Le Président: M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.
M. Cliche: M. le Président, à ma connaissance, c'est faux. Le seul cas que je connaisse, je répète, c'est dans les cas de zones d'exploitation contrôlée où les chasseurs étant moi-même un chasseur... Il y a maintenant une vogue de caches permanentes sur pilotis, chauffées, avec des poêles, des fauteuils, des fenêtres...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cliche: ...des divans. Et ces caches...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cliche: ...ces caches...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cliche: ...ces caches sur pilotis sont de véritables chalets montés sur échasses. Or, les zecs ont décidé de facturer à ces chalets sur échasses la même facturation que les chalets sur terre, M. le Président.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: En additionnelle? M. le député de Dubuc, d'abord, en principale.
Projet de facturation des services de la Garde côtière canadienne à la navigation commerciale
M. Morin (Dubuc): Alors, merci, M. le Président. Tout le monde reconnaît que le réseau portuaire et maritime du Saguenay et du Saint-Laurent constitue un élément essentiel de la capacité concurrentielle de la grande industrie, tels l'aluminium, les mines et les produits forestiers. Rappelons aussi que Montréal est le deuxième port à conteneurs de la Côte-Est américaine. Sa présence est donc vitale pour l'économie métropolitaine et l'ouverture du Québec sur le monde.
(14 h 40)
Cependant, les représentants du secteur industriel, ceux des armateurs et de nombreux représentants socioéconomiques québécois sont unanimes pour dénoncer le projet de facturation des services offerts à la navigation commerciale par la Garde côtière canadienne. Ces représentants soulignent tous les conséquences que pourrait avoir ce projet sur leur position concurrentielle et la possibilité de pertes d'emplois. D'ailleurs, ce matin, les journaux rapportent que la décision de la Garde côtière canadienne de réduire ses activités à Québec entraînerait une perte de 50 à 60 emplois directs...
Le Président: Votre question, M. le député de Dubuc.
M. Morin (Dubuc): Alors, je comprends que vous tenez à ce que je la pose immédiatement.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Morin (Dubuc): Alors, elle s'adressera au ministre des Transports.
Des voix: Ah!
M. Morin (Dubuc): L'opposition avait compris.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: Partiellement.
M. Morin (Dubuc): Compte tenu de l'unanimité des représentations des milieux québécois à l'égard du projet fédéral et de l'ampleur des enjeux économiques, le ministre peut-il faire part à cette Assemblée...
Une voix: ...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Je peux comprendre que, parfois, les députés aient besoin d'un certain moment de répit et de détente, mais il ne faut pas abuser des bonnes choses. Alors, M. le député, en terminant.
M. Morin (Dubuc): Merci. Mais il faut surtout profiter des bonnes choses lorsqu'elles se présentent.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Morin (Dubuc): Alors, je voudrais demander au ministre des Transports de faire part à cette Assemblée, évidemment, de l'état de la situation et, de façon plus précise, nous faire part de ce qui en est de l'impact...
Le Président: M. le député de Dubuc, au-delà d'un préambule, la question doit être posée directement, brièvement, de telle sorte que... À moins que le ministre n'ait pas compris la question...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: ...je demanderais au ministre de répondre.
M. Brassard: M. le Président, je voudrais remercier mon secrétaire régional...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Alors, sur ce moment de détente peut-être bien mérité, sur le fond des choses, M. le ministre.
M. Brassard: ...M. le Président, qui, soit dit en passant, n'a pas besoin de directives pour travailler au développement de la région du SaguenayLac-Saint-Jean. Alors, je pense que c'est une question importante qui concerne toute l'économie du Saint-Laurent et que j'ai essayé de traiter en cette Chambre à deux reprises. Malheureusement, je n'ai jamais eu le consentement de l'opposition pour présenter une motion sur cette question, ça ne semblait pas les intéresser.
Mais, pourtant, c'est une question vitale, puisque la Garde côtière canadienne, on le sait, malgré des démarches multiples de ma part et de la part d'une très vaste coalition qui s'est constituée au Québec et à laquelle a fait référence le député de Dubuc, a l'intention bien arrêtée d'imposer des tarifs sur les services qu'elle offre à la navigation commerciale sans avoir auparavant évalué l'impact que ça peut avoir sur les coûts de transport dans le couloir du Saint-Laurent. Et il est clair que ça préoccupe beaucoup, ça inquiète beaucoup les industries qui ont recours au transport maritime, les armateurs, les ports aussi, les villes portuaires, parce que, des hausses de coûts suite à cette tarification, ça pourrait avoir des effets néfastes et entraîner une diminution des activités maritimes dans le Saint-Laurent.
Malheureusement, malgré des doléances, revendications, déclarations multiples, démarches nombreuses auprès de M. Mifflin, qui est le ministre fédéral responsable de ce dossier, rien n'a été fait. Le gouvernement fédéral a fait la sourde oreille à toutes ces revendications jusqu'à maintenant.
Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole, pour un complément de réponse?
Une voix: Oui.
Le Président: Je m'excuse, mais le temps qui était imparti à la réponse était largement écoulé. Alors, je regrette.
M. le député de Dubuc, en complémentaire et, cette fois-ci, selon les règles.
M. Morin (Dubuc): Oui. Est-ce que je peux poser une principale? Non?
Des voix: Non.
M. Morin (Dubuc): Bien, c'est ce qu'on fait fréquemment.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Tantôt, les gens pouvaient comprendre, mais là je pense qu'on dépasse les limites. M. le député de Dubuc, en complémentaire, et rapidement.
M. Morin (Dubuc): Alors, devant les démarches qui se sont avérées vaines vis-à-vis du fédéral, est-ce que le ministre entend, à partir d'aujourd'hui, prendre des mesures musclées face à cette situation quand même déplorable?
Le Président: M. le ministre.
M. Brassard: M. le Président, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, il s'est formé, il s'est constitué une très vaste coalition au Québec. Nous sommes intervenus à plusieurs reprises. Certains de ces intervenants ont comparu devant le comité de la Chambre des communes qui traitait de cette question. Je pense que toutes les démarches moi-même, comme ministre, je suis intervenu à plusieurs reprises auprès de M. Mifflin ont été faites pour faire entendre raison au gouvernement fédéral.
Malheureusement, il faut dire que, dans ce dossier, le ministre fédéral s'est comporté de façon arrogante, méprisante à l'égard du gouvernement du Québec. Je n'ai jamais eu de réponse et il n'a jamais indiqué de moment où on pourrait se rencontrer, parce que c'est ça que je lui demandais, qu'on puisse se rencontrer pour expliquer les raisons et les motifs qui poussent la coalition à exiger de façon très raisonnable une étude des impacts avant d'imposer un tarif. Mon collègue ministre d'État à la Métropole a fait la même chose du côté de Montréal. Malheureusement, c'est la sourde oreille, et on m'annonce qu'aujourd'hui même il semble que M. Mifflin, le ministre fédéral, rendrait une décision. Son personnel avait contacté le mien et il devait au moins me parler au téléphone avant de prendre une décision. Je n'ai jamais pu lui dire un seul mot. Il est en train de prendre sa décision sans tenir compte de nos revendications, avec un profond mépris à l'égard d'un gouvernement et de l'ensemble de l'industrie maritime au Québec.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député de Verdun, en principale?
M. Gautrin: M. le Président, brièvement, en commission parlementaire...
Le Président: Je m'excuse, M. le député. M. le député de Sainte-MarieSaint-Jacques, en complémentaire?
M. Boulerice: Complémentaire.
Le Président: Rapidement.
M. Boulerice: Rapidement, est-ce que le ministre d'État à la Métropole pourrait nous préciser en détail les actions qu'il a entreprises dans ce cas, puisque Montréal est le plus important port du Québec?
Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole.
M. Ménard: J'aimerais brièvement rappeler, M. le Président, que cette situation est dramatique aussi pour le port de Montréal et que, notamment, elle diminue sa compétitivité vis-à-vis des ports américains de Boston, de New York. À mon avis, tous les élus de Montréal, à quelque niveau de gouvernement que ce soit, devraient s'unir pour demander au ministre des Transports ce que nous avons demandé avec les autorités de la CUM et tous les gens de Montréal: d'attendre au moins le résultat des études d'impact avant de rendre une décision qui pourrait être aussi mauvaise pour le port de Montréal. Merci.
(14 h 50)
Le Président: M. le député de Verdun.
Hausse du taux de cotisation au Régime de rentes du Québec
M. Gautrin: Merci, M. le Président. En commission parlementaire, la ministre de l'Emploi nous avait annoncé qu'elle s'apprêtait à augmenter le taux de cotisation du Régime de rentes du Québec de 5,6 % à quelque chose, pour 1997.
Alors, est-ce qu'elle peut nous dire quel est le taux de cotisation pour 1997 et, surtout, combien de dizaines de millions elle va aller chercher par ce mécanisme-là dans la poche des Québécois et des Québécoises?
Le Président: Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.
Mme Harel: M. le Président, il faut avoir du culot, comme semble en avoir le député de Verdun, après neuf années de négligence, neuf années, neuf années où le taux de cotisation à la Régie des rentes du Québec, comme celui, d'ailleurs, au Régime de pensions du Canada, est resté à 0,2 %, bien en deçà de ce qui est nécessaire pour financer le Régime et s'assurer qu'il n'y ait pas d'injustice intergénérationnelle, que nos jeunes n'aient pas à payer de façon inconsidérée nos propres pensions. Eh bien, il faut comprendre, oui, que nous sommes à examiner sérieusement une façon d'assurer, de garantir qu'il n'y ait pas cette injustice intergénérationnelle et de garantir qu'il y ait suffisamment de capitalisation pour que notre Régime soit en bonne santé.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député.
M. Gautrin: Merci. Ma question n'était pas de savoir comment fonctionnait le Régime de rentes, ce n'est pas ça, c'est de savoir de combien vous allez augmenter le taux de cotisation et ça correspond à quelle ponction dans la poche des Québécois et des Québécoises. C'est de deux chiffres. Bref, quel est le taux pour 1997, et ça correspond à quelle ponction en termes de millions de dollars?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Harel: M. le Président, je vous rappelle que le fédéral mène présentement, suite au budget Martin, ici même, au Québec, une consultation sur une hausse de cotisations au Régime de pensions du Canada, avec lequel, depuis 30 ans maintenant, le Régime de rentes du Québec a été harmonisé. Ces propositions du fédéral sont à l'effet d'augmenter d'ici les six prochaines années le taux de cotisation à 10,9 % tout en baissant de presque 10 % les bénéfices aux prestataires. Cela n'est pas notre intention, M. le Président, il n'est pas de notre intention de nous inspirer de ce que veut faire le fédéral, et nous étudions une proposition qui soit québéco-québécoise et qui nous permette en même temps de garantir la santé financière de la Régie des rentes, qui, heureusement, depuis sa création, a toujours été bien gérée et qui a pu compter sur la Caisse de dépôt et placement du Québec. 80 % de ce que gère la Caisse de dépôt et placement du Québec l'est grâce à la Régie des rentes du Québec.
Alors, nous allons donc pouvoir faire des propositions qui rassureront les membres de cette Assemblée et surtout nos concitoyens, aînés et plus jeunes. Nous allons pouvoir faire des propositions qui garantissent la sécurité financière et maintiennent le niveau des bénéfices.
Des voix: Bravo!
Le Président: En principale? M. le député de Bourassa, en principale.
Modifications administratives possibles à la SQDM
M. Charbonneau (Bourassa): Oui, M. le Président. Il y a à peu près quatre ans a été mise sur pied la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, qui est dirigée par un conseil d'administration 18 personnes constitué de trois collèges électoraux tripartite, donc avec partenariat comme marque de commerce, si on veut. La SQDM est présente en région sous forme de sociétés québécoises de développement de la main-d'oeuvre régionales dirigées aussi par des conseils d'administration. La SQDM est dotée d'un personnel propre et d'un budget propre. On sait aujourd'hui, par des déclarations, que des partenaires majeurs membres du C.A. de la SQDM, partenaires de la ministre de l'Emploi, ont dénoncé publiquement certains changements très substantiels, certains chambardements très importants qui seraient, disent-ils, préparés en catimini par la ministre.
Est-ce que la ministre de l'Emploi peut nous confirmer qu'elle envisage de faire disparaître la SQDM sous sa forme actuelle propos qu'elle a tenus, d'ailleurs, en commission parlementaire le 23 avril, devant nous qu'elle envisage de remplacer le conseil d'administration tripartite par une forme de commission nationale consultative, selon l'ancien programme du PQ? Est-ce qu'elle peut expliquer à quelles consultations auprès de ses partenaires elle s'est livrée pour en arriver à des idées aussi saugrenues? Et peut-elle nous expliquer comment la disparition du C.A. de la SQDM va renforcer le partenariat, M. le Président?
Le Président: Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.
Mme Harel: Alors, M. le Président, je m'attendais bien que, après l'article sensationnaliste qui a été publié dans le journal La Presse , j'aie enfin ma première question depuis un mois et demi de la publication du rapport Bouchard-Fortin, puisque cette recommandation de mettre en place des centres locaux pour l'emploi est une des recommandations majeures, qui est à la fois convergente dans le rapport Bouchard et dans le rapport Fortin.
Alors, je voudrais, M. le Président, d'une part, déposer l'extrait du rapport Bouchard et Fortin qui porte sur le chapitre s'intitulant: «Le centre local d'emploi et le Plan local d'action collective pour l'emploi».
D'autre part, M. le Président, j'aimerais déposer le document produit par la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre pour fins de discussion, et qui s'intitule: «La politique active du marché du travail: ébauche d'un réseau de services intégré et décentralisé». J'ai reçu une invitation d'en discuter avec le conseil d'administration de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre le jeudi 23 mai, que je me suis empressée, il y a déjà un mois, d'accepter. De même, M. le Président, puisque ça intéresse beaucoup le député de Bourassa, la proposition principale déposée par l'exécutif national du Parti québécois en avril dernier, proposition qui sera étudiée dans le cadre des congrès de comtés, de régions et du congrès national, et qui porte également, M. le Président, sur les commissions de développement et des centres locaux de l'emploi.
Alors, M. le Président, j'espère qu'une fois ces documents étudiés par le député de Bourassa il verra qu'il y a urgence au Québec de sortir du statu quo dans lequel on est et de la gestion de l'exclusion d'environ 800 000 personnes sans emploi.
Le Président: M. le député de Bourassa.
M. Charbonneau (Bourassa): M. le Président, je vais répéter, en additionnelle, l'essentiel de la question que j'ai posée tout à l'heure qui consistait à obtenir de la part de la ministre la confirmation des propos qu'elle a tenus devant la commission des affaires sociales le 23 avril à 15 h 50, où elle nous a dit qu'elle avait l'intention de transformer...
Le Président: M. le député de Bourassa, est-ce qu'il y aurait possibilité... Je comprends le sens de votre intervention, mais je crois que vous devriez formuler votre question complémentaire en ne répétant pas le préambule que vous avez fait tantôt.
M. Charbonneau (Bourassa): Est-ce qu'elle maintient l'affirmation qu'elle faisait le 23 avril de transformer le conseil d'administration de la SQDM en une commission de l'économie et de l'emploi, selon le programme du Parti québécois? Et on sait que c'est un organisme consultatif. Est-ce qu'elle maintient cette orientation-là?
Le Président: Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.
Mme Harel: Alors, M. le Président, j'ai effectivement évoqué que le programme du Parti québécois est à cet effet, mais nous avons justement un congrès qui pourra examiner une proposition principale modifiée, M. le Président. Mais je voudrais indiquer ceci: moi, dans les structures, je ne pratique aucune autre religion que celle d'avoir des résultats concrets pour du vrai monde. Et, à cet effet, les principes qui devraient nous guider sont les suivants, M. le Président: simplifier les structures, impliquer les partenaires, les impliquer comme je l'ai fait depuis un an que je suis dans ce dossier, les impliquer, M. le Président, avec un pouvoir de décider, comme c'est le cas. Alors, je pense que l'opposition n'a rien à nous reprocher, M. le Président, puisqu'on a corrigé la situation qui régnait à la SQDM lorsque c'est eux qui géraient. Et puis se rapprocher le plus possible de là où on peut faire du développement local et économique...
Le Président: M. le député de Bourassa.
Propos de la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité concernant la SQDM
M. Charbonneau (Bourassa): M. le Président, une question principale à M. le premier ministre. La ministre de l'Emploi souhaite profondément faire disparaître le conseil d'administration de la SQDM et le remplacer par une commission de type consultatif. On a des documents, M. le Président...
Une voix: Il est en principale, là.
Le Président: Il y aurait moins de problèmes à l'Assemblée si les députés laissaient le président faire son travail. M. le député de Bourassa.
M. Charbonneau (Bourassa): M. le Président, nous avons aussi en main des projets de livre vert préparés pour le compte de la ministre de l'Emploi, où on dit que la structure de la SQDM est désuète, parce que les négociations avec le fédéral en matière d'emploi et de main-d'oeuvre ne fonctionnent pas, M. le Président.
(15 heures)
Est-ce que le premier ministre est conscient que des propos comme ceux de sa ministre de l'Emploi envoient un message très négatif face à toute possibilité d'arrimage avec le fédéral en matière de politique d'emploi et de main-d'oeuvre, étant donné que le conseil d'administration de la SQDM avait été envisagé comme un lieu possible de cet arrimage entre les deux niveaux d'administration?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bouchard: M. le Président, la ministre a posé un diagnostic extrêmement exact sur l'état de la situation. Il y a absolue nécessité, dans ce dossier, de simplifier les structures. Nous avons présentement 138 centres Travail-Québec, 86 centres d'emploi du Canada et 48 points de service à la SQDM. Il est temps de simplifier la situation. Nous avons une solution qui a été proposée par le rapport Fortin-Bouchard qui propose la fusion des trois structures. C'est une solution possible. La ministre publiera un livre vert, il y aura une consultation, et on verra ce qui sortira de là. Mais l'important, c'est de simplifier ce fouillis. Il faut, enfin, qu'on puisse faire des choses correctes avec l'argent, au lieu de le gaspiller.
Une voix: Bravo!
Le Président: C'est la fin de la période de questions et de réponses orales.
Il n'y a pas de réponses différées.
Votes reportés
Nous en arrivons maintenant aux votes reportés, tel qu'annoncé précédemment.
Motion proposant que l'Assemblée dénonce la perception du rôle des aînés véhiculée par le gouvernement pour justifier l'augmentation de leur fardeau financier
Je mets maintenant aux voix la motion de M. le député de Sauvé présentée hier aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Cette motion se lit comme suit:
«Que l'Assemblée nationale dénonce le gouvernement du Parti québécois qui véhicule une perception fausse et irrespectueuse du rôle de nos aînés dans la société pour justifier, malgré son engagement, l'augmentation de leur fardeau financier par différentes mesures.»
Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Thérien (Bertrand), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-HenriSainte-Anne), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Charbonneau (Bourassa), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Kelley (Jacques-Cartier).
Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Bélanger (Anjou), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Trudel (Rouyn-NorandaTémiscamingue), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bertrand (Portneuf), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Cliche (Vimont), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-MarieSaint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Rivard (Limoilou), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Paillé (Prévost), M. Létourneau (Ungava), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), M. Dion (Saint-Hyacinthe), Mme Charest (Rimouski), M. Désilets (Maskinongé).
Le Président: Y a-t-il des abstentions?
Le Secrétaire: Pour:40
Contre:58
Abstentions:0
Le Président: Alors, la motion est rejetée.
Motions sans préavis
Aux motions sans préavis, M. le député de Pointe-aux-Trembles.
Souligner la campagne annuelle de l'oeillet de la sclérose en plaques
M. Bourdon: Je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante, et je souligne la présence dans les tribunes de Mme Arlette Cousture:
«Que l'Assemblée nationale souligne la campagne annuelle de l'oeillet de la sclérose en plaques qui se déroulera les 9, 10 et 11 mai afin de sensibiliser la population à l'importance d'appuyer les efforts de la section québécoise de la Société canadienne de la sclérose en plaques et les milliers de bénévoles qui se dévouent quotidiennement pour cette cause.»
Mise aux voix
Le Président: Alors, je crois qu'il est superflu de demander s'il y a un consentement pour débattre de cette motion. Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Avis touchant les travaux des commissions
Le Président: Aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.
M. Bélanger: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des institutions poursuivra les consultations générales sur le document du Directeur général des élections intitulé: «Document de réflexion: amendements à la Loi électorale» le mardi 14 mai 1996, de 10 heures à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif.
Le Président: Aux avis touchant les travaux des commissions, de mon côté, je vous avise que la commission de l'aménagement et des équipements se réunira en séance de travail en présence du Vérificateur général du Québec le mardi 14 mai, de 10 heures à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau de l'hôtel du Parlement.
Je vous avise également que la commission de la culture se réunira en séance de travail le mardi 14 mai prochain, de 10 heures à 13 heures, à la salle RC.171 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de finaliser le document de consultation sur l'autoroute de l'information.
Je vous avise enfin que la commission des affaires sociales se réunira, de son côté, le mardi 14 mai, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de procéder à des consultations particulières et de tenir des audiences publiques afin d'étudier le fonctionnement des organismes ayant une influence sur la consommation de médicaments au Québec.
(15 h 10)
Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 143 du règlement, concernant l'horaire des travaux des commissions? Alors, il y a consentement.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, M. le leader du gouvernement.
M. Bélanger: M. le Président, compte tenu de la présentation du budget par le ministre des Finances, cet après-midi, à 16 heures, je propose qu'avec le consentement de l'Assemblée et malgré l'article 308 de notre règlement nous procédions dès la fin des affaires courantes à la tenue des débats de fin de séance demandés par le député de Laurier-Dorion, concernant l'utilisation de langues autres que le français et l'anglais dans les communications avec les citoyens, et par le député d'Orford, concernant la participation de 75 fonctionnaires à l'ÉcoSommet à Montréal.
Au terme de ces débats de fin de séance, ou au plus tard à 15 h 45, l'Assemblée suspendra ses travaux jusqu'à 15 h 55 pour permettre au ministre des Finances de prononcer le discours du budget.
Les travaux de l'Assemblée se poursuivront au-delà de 18 heures, si nécessaire, afin de permettre l'application de l'article 271 du règlement de l'Assemblée nationale.
Je propose que nous en fassions un ordre de la Chambre.
Le Président: M. le leader du gouvernement, je voudrais aviser les membres de l'Assemblée que j'ai reçu aujourd'hui, à la période des questions, en fait, un avis qui indique que le député d'Orford souhaiterait, lui également, entreprendre un débat de fin de séance avec le ministre de l'Environnement et de la Faune concernant les coûts exigés pour des caches sur les terres publiques pour les chasseurs.
Est-ce que le leader du gouvernement, à ce moment-ci, veut inclure ou est prêt à inclure...
M. Bélanger: Oui.
Le Président: ...cette demande du député d'Orford dans sa motion?
M. Bélanger: Oui, M. le Président. C'est conforme à l'entente intervenue entre les deux leaders à l'effet que, tant que nous nous conformons au 15 h 45, il n'y a pas de problème, à ce moment-là, qu'il y ait un troisième débat de fin de séance qui pourra se tenir à la suite des deux que j'ai mentionnés.
Le Président: La présentation de cette motion du leader du gouvernement requiert le consentement unanime de l'Assemblée pour déroger aux articles 53, 188, 308 et 309. Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à ces articles?
Des voix: Consentement.
Le Président: Alors, il y a consentement. La motion du leader du gouvernement est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Alors, je vous rappelle que l'interpellation de demain, le vendredi 10 mai, portera sur le sujet suivant: La politique du gouvernement du Québec en matière de développement régional. M. le député de Richmond s'adressera alors à M. le ministre responsable du Développement des régions.
À l'ordre, s'il vous plaît! Je vous avise également que l'interpellation prévue pour le vendredi 17 mai prochain portera sur le sujet suivant: L'assurance-médicaments. M. le député de Robert-Baldwin s'adressera alors à M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
Débats de fin de séance
Utilisation de langues autres que le français et l'anglais dans les communications avec les citoyens
Conformément à l'ordre adopté précédemment, nous allons maintenant procéder immédiatement aux trois débats de fin de séance. Le premier débat concerne l'utilisation de langues autres que le français et l'anglais dans les communications avec les citoyens. La question de M. le député de Laurier-Dorion s'adresse à M. le premier ministre.
Permettez-moi de vous rappeler le temps de parole pour ce débat. M. le député de Laurier-Dorion a droit à une première intervention de cinq minutes. Ensuite, le représentant du gouvernement a également droit à une intervention de cinq minutes. Et, finalement, M. le député de Laurier-Dorion a droit à une réplique de deux minutes.
M. le député de Laurier-Dorion.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci, M. le Président. M. le Président, hier, le premier ministre nous a fait une excellente démonstration de sa grande capacité de défoncer des portes ouvertes. Je constate que le premier ministre nous a quittés, a laissé à sa place la ministre de la langue. Mais il ne s'agit aucunement, M. le Président, d'un dossier de langue.
Hier, le premier ministre nous a affirmé, sur le ton qu'on lui connaît, qu'il n'y a au Québec qu'une seule langue officielle, le français, comme si quelqu'un avait mis ça en cause, M. le Président, comme si c'était en danger, ce fait, M. le Président, comme s'il n'y avait pas eu d'énormes progrès reconnus par tous, justement sur ce fait, M. le Président.
Je ne questionnais pas sur les droits qu'auraient des minorités à utiliser ou exiger des services. Et, là encore, le premier ministre a fait une grande démonstration de cette capacité de défoncer des portes ouvertes. Il disait: Demandez-nous pas d'avoir des droits de cette façon-là! Mais personne ne lui avait demandé ça, M. le Président, personne! Au contraire, une fois cette porte ouverte défoncée par le premier ministre, il se tourne de bord et claque cette même porte sur le nez d'une pratique vieille d'au moins une génération, ici, au Québec, M. le Président, qui était la démonstration concrète de cette capacité de la société québécoise de faire une preuve concrète, tangible de sa générosité, de sa capacité de comprendre les relations interculturelles dans leur vraie réalité, en mettant sur pied des programmes d'information envers des clientèles spécifiques, pour des problèmes spécifiques ou des droits fondamentaux, que ce soit, par exemple, le ministère de la Justice, qui publie encore aujourd'hui dans différentes langues un pamphlet expliquant aux personnes comment, par exemple, enregistrer un nouveau-né.
Prenant prétexte de ce besoin qu'il ressent, lui, M. le Président, comme premier ministre du Parti québécois, de monter sur le cheval de la langue pour calmer ses troupes, il balaie du revers de la main une pratique qui a conduit à ce que ce même gouvernement, il n'y a pas plus loin que six mois, décerne un prix de rapprochement interculturel au Directeur général des élections, faisant ainsi la démonstration magnifique de cette capacité que notre premier ministre a de tout dire sans rien dire, tout en disant une chose et son contraire en même temps, M. le Président. C'est exactement ce qu'il a fait, parce qu'il nous a affirmé qu'il n'y a que le français ici, au Québec, quand personne ne lui demandait que ce soit autrement.
On a tous, de part et d'autre, fait des efforts, et depuis 15 ans j'en ai fait également, M. le Président, au niveau du rapprochement interculturel autour du fait français. Mais là, prenant prétexte, comme je disais, de ses besoins partisans, il nous indique que, dorénavant, l'appareil de l'État, ses organismes et tout ce qui dépend de lui devrait envoyer un signal clair qu'il n'y a, au Québec, qu'une seule langue officielle, et personne n'avait remis ça en cause. Mais, agissant ainsi, il donne un signal, M. le Président, quant à la capacité d'étroitesse d'esprit du Parti québécois. Il donne un signal qu'il va indiquer à tout l'appareil gouvernemental que, dorénavant, fini cet effort qu'on pourrait faire pour démontrer notre capacité, comme société, comme Québécois, d'être généreux. Mais on ne peut pas, M. le Président, continuellement dire qu'on est généreux, tout en disant des choses qui démontrent le contraire. Personne n'a demandé qu'on inscrive dans nos lois des droits à un multilinguisme.
Pourquoi donc le premier ministre n'a pas pu agir comme un chef d'État, comme le responsable de toutes les composantes de la société et comprendre qu'il y a une réalité pluriculturelle, plutôt que de se laisser effrayer par cet imaginaire épouvantail qu'ils érigent eux-mêmes devant eux pour le combattre, M. le Président, le multiculturalisme? On n'a pas de multiculturalisme, au Québec. Il y a une politique d'interculturalisme qu'on a adoptée il y a déjà plusieurs années, sous notre gouvernement, qui a été reprise par le gouvernement précédent. Et ce n'est pas parce qu'ils se trouvent dans une tourmente linguistique, à l'intérieur de leur propre parti, qu'ils ont le droit, et c'est pour ça que c'était honteux hier, de voir le premier ministre utiliser un dossier humanitaire, de problèmes et préoccupations réelles de la part de gens dans leur vie quotidienne, pour régler des problèmes politiques. C'était honteux; ça l'est toujours.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre de la Culture et des Communications et ministre responsable de la Charte de la langue française.
Mme Louise Beaudoin
Mme Beaudoin: Merci.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la ministre.
Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Je ne répondrai pas à l'insulte par l'injure parce que la question oui, vous avez terminé, M. le député, là-dessus qui est soulevée est une question importante, et c'est opportun, en effet, de faire le point sur l'utilisation d'une autre langue que le français par l'administration. Le français est la seule langue officielle au Québec, vous l'avez remarqué, vous l'avez compris et vous l'avez accepté. Cependant, la loi 101, je vous rappellerai, M. le Président, que, au moment où elle a été adoptée, en 1977, le chef actuel du Parti libéral du Québec s'était prononcé, avec 326 autres personnalités, contre son adoption et de façon extrêmement vigoureuse dans tous les journaux du Québec, dans des publicités qui dénonçaient la loi 101 et, donc, le fait que le français soit la langue officielle au Québec, puisque c'était inclus, bien sûr, et que c'était le cadre principal de la loi 101.
Le premier ministre, hier, a rappelé, ici même, la position du gouvernement, et je le cite: Au Québec, la langue officielle et commune est le français, et il appartient au gouvernement et à ses instances administratives de donner l'exemple à cet égard. En effet, c'est l'objet principal de la consultation que nous menons actuellement sur les mesures que nous avons annoncées en vue d'assurer la promotion du français.
En matière de langue et de culture, la politique du gouvernement est donc sans ambiguïté et les orientations sont claires. Le français est donc la langue officielle et commune, la communauté anglaise et les nations autochtones ont des droits qui leur sont propres, et, à l'égard des membres des autres communautés culturelles, la politique d'intégration à la culture publique est nettement affirmée depuis l'adoption, notamment, de la Charte de la langue française, en 1977.
Quant à l'emploi d'autres langues par l'administration publique, l'article 15 de la Charte le définit très bien. L'administration rédige et publie dans la langue officielle ses textes et ses documents, donc en français. C'est la règle générale.
Mais le même article, M. le Président, prévoit des exceptions, particulièrement en matière de communications avec les personnes physiques qui s'adressent à l'administration dans une autre langue que le français. Le caractère exceptionnel de l'emploi d'autres langues est inscrit dans la pratique de l'administration publique. L'interprétation du recours à l'exception a été l'objet d'une préoccupation constante dans les ministères et les organismes, et tout particulièrement au ministère responsable des relations avec les communautés culturelles. Ce ministère s'est donné une politique définissant le cadre linguistique de ses communications avec les immigrants, notamment en amont de leur apprentissage du français. C'est ainsi que ce ministère, M. le Président, publie des documents à l'intention des nouveaux arrivants dans les diverses langues officielles de l'Organisation des Nations unies.
En 1993, donc du temps où le Parti libéral était au pouvoir, un comité interministériel a étendu l'effort de définition de balises et publié un rapport sous le titre «Balises justement sur la valorisation du français et l'usage d'autres langues lors des contacts avec les Québécois des communautés culturelles». Et je le fais mien, ce rapport, M. le Président, donc en 1993, qui dit un certain nombre de choses, que vous pourrez relire, sur la connaissance du français et sur l'usage des autres langues.
(15 h 20)
Mais ce rapport n'a pas eu de suite, celui de 1993, ce rapport du comité interministériel préparé par nos amis d'en face du temps où ils étaient au gouvernement. Alors, je ne sais pas trop pourquoi, ou peut-être encore que je pourrais le savoir. Mais, en fait, quant à nous, ce rapport va dans le sens de nos recommandations et des 40 mesures que l'on retrouve actuellement sur la table pour la consultation publique.
M. le Président, la volonté du gouvernement, dorénavant, elle est très ferme: c'est de faire respecter la Charte, la loi 101, les politiques interministérielles qui ont été adoptées, la politique d'intégration concernant les communautés culturelles, qui date de 1991. Et, je le répète, l'administration doit être, et le sera, exemplaire en matière d'usage et de promotion de la langue française, parce que notre objectif de renforcer, consolider et moderniser l'usage du français, nous le poursuivrons avec énergie. Merci.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Laurier-Dorion pour deux minutes.
M. Christos Sirros (réplique)
M. Sirros: Merci, M. le Président. Ne remontons pas très loin, remontons à il y a six mois. Ce même gouvernement, qui parlait d'un côté de la bouche, disait bravo au Directeur général des élections: On vous félicite, on vous donne un prix, vous faites un formidable travail de rapprochement interculturel. Et, de l'autre côté de la bouche, on lui dit: Aïe! vous êtes allé trop loin. Ça suffit! Il n'y a pas de ça dans la loi 101, ce n'est donc pas permis.
J'aimerais comprendre quel est le vrai message qu'on veut nous faire croire. Quel est le vrai message qu'on veut donner aux gens? Est-ce que ce n'est pas normal, dans une société pluraliste, généreuse et compréhensible par rapport aux réalités, de pouvoir faire des accommodements pour des personnes qui vivent des situations particulières et de faire abstraction d'un débat linguistique? Pourquoi ce n'est pas le ministre responsable des Relations avec les citoyens qui répond et c'est la ministre de la langue? Ce n'est pas un dossier linguistique. Personne ne remet en cause le fait français, personne n'exige des amendements à la loi 101. C'est des besoins partisans de ce parti avec un premier ministre qui veut utiliser même l'Assemblée nationale pour passer son message, qui ne donne aucune considération aux effets à moyen et à long terme sur la société, sur la vision que nous voulons avoir de ce Québec.
Est-ce que c'est un Québec ouvert? Comme le disait le président du Conseil des communautés culturelles et de l'immigration, est-ce qu'on veut vraiment être une société d'accueil avec des immigrants? Est-ce qu'on veut vraiment accepter qu'il y ait des immigrants? Parce que, si c'est oui, il y a des conséquences, disait le président du Conseil nommé par ce gouvernement; ce même gouvernement qui félicitait le Directeur général par des éloges sur le travail qu'il avait fait et qui, aujourd'hui, trouve qu'il est allé trop loin.
Et que le premier ministre utilise la Chambre pour donner des instructions à l'État de rétrécir son ouverture d'esprit, c'est la démonstration du vrai état d'esprit qui règne au Parti québécois.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion.
Participation de fonctionnaires à l'ÉcoSommet, à Montréal
Nous allons aborder maintenant le deuxième débat, qui concerne la participation de 75 fonctionnaires à l'ÉcoSommet à Montréal. M. le ministre de l'Environnement et de la Faune répondra à M. le député d'Orford. M. le député d'Orford, vous disposez d'un temps de parole de cinq minutes. M. le député.
M. Robert Benoit
M. Benoit: Merci, M. le Président. Hier, à la période de questions, nous avons demandé au ministre de nous expliquer un peu combien de gens de son ministère assistaient à ce que nous appelons, au Québec, l'ÉcoSommet. L'ÉcoSommet, le ministre, sûrement, dans son cinq minutes, va nous expliquer l'importance de l'ÉcoSommet, la quantité de gens qui sont à l'ÉcoSommet. Il y a sûrement une partie de vérité là-dedans. Nous aussi, on est pour un plan de développement durable pour le Québec. L'ex-ministre de l'Environnement est à mes côtés. On sait comment Mme Bacon a été une ministre extraordinaire, elle qui a été vice-première ministre du Québec. On sait comment M. Clifford Lincoln a donné une impulsion à ce ministère-là. Alors, de notre côté, certainement, nous sommes pour l'environnement et nous allons nous battre, nous allons nous battre jour après jour, autant dans la production porcine que dans d'autres sujets. Nous allons nous battre, nous allons aider l'environnement du Québec.
D'autre part, nous devons aussi nous battre contre les dépenses débridées de l'État québécois dans toutes sortes de secteurs, et c'est l'ouvrage de l'opposition de le faire. Alors, la question que nous avons posée, hier, au ministre de l'Environnement: Est-ce qu'il est exact que 75 personnes assistent à ce sommet? On pourra nous dire que c'est le plus gros puis que c'est le plus grand puis que c'est le meilleur de tous ces sommets-là, mais, le ministre, il doit aussi reconnaître qu'il y en a une quantité, de ce genre de congrès là, en ce moment, à la grandeur du Québec. Il y en avait un à Saint-Hyacinthe il n'y a pas si longtemps; il y en avait un autre à Sherbrooke il y a quelques jours; il y en a un maintenant à Montréal, et ça continue.
Alors, question qu'on pose au ministre: Avez-vous une idée, M. le ministre, de comment vos gens dépensent en voyages? Exemple, l'année passée, en voyages hors du Québec, bien, je me suis amusé, ce matin, à compiler ça, M. le ministre. Dans ce ministère-là, dans un an, du 1er avril au 31 mars, du 1er avril 1995 au 31 mars 1996, bien, c'est 163 000 $ de voyages dans un an à l'extérieur du Québec.
Mais là, aujourd'hui, je ne veux pas vous parler des voyages à l'extérieur du Québec alors que dans 15 minutes on va nous annoncer des coupures tous azimuts: on va nous annoncer probablement des 2 $ dans les parcs pour rentrer; on va nous annoncer que, pour mettre ma petite chaloupe sur le lac Saint-Jean, je devrai payer; on va m'annoncer, tantôt, que ça coûte 63 $ pour mettre une cache sur une terre publique pour aller chasser. C'est ça qu'on est après nous annoncer à la grandeur du Québec.
Eh bien, au même moment, M. le Président, au même moment, 75 fonctionnaires et le ministre n'a jamais dédit ça, hier sont en congrès à Montréal. D'ailleurs Foglia, ce matin, je pense qu'il avait raison avec son en-tête «Le bonheur des technocrates». Petit voyage par là, petit voyage par ici. Et le ministre lui-même le disait, hier, dans ses réponses: Ils sont fiers de travailler avec moi. Bien sûr, à coups de voyages comme ça, moi aussi, je serais fier de travailler pour le ministre de l'Environnement! Mais 75 fonctionnaires à Montréal en même temps, savez-vous ce que ça représente dans un ministère de l'Environnement? Ça représente tous les cadres du ministère sans exception, si je prends l'organigramme du ministère. Tous les cadres incluant les secrétaires seraient là, si c'est la liste. D'ailleurs, on va demander la liste de ces gens-là.
La question qu'on se pose, de ce côté-ci: Qui est-ce qui approuve ces affaires-là? Qui contrôle ces dépenses-là? Qui est-ce qui a décidé qu'il y aurait 75 personnes qui seraient là? Ça n'a pas de bon sens! Et là j'ai fait un petit calcul. Je me suis dit: Le transport, on va prendre une moyenne à partir de Québec, c'est la capitale nationale; on va prendre les repas pour trois jours, 120 $, c'est ça qu'on permet; les hôtels, 315 $ on a appelé à l'hôtel, c'est à peu près ça que ça coûte les stationnements, 30 $; les inscriptions, 200 $; on multiplie tout ça par 75, trois jours, enlevez-en un petit peu, mettez-en un petit peu, vous allez arriver à 60 000 $ pour un seul congrès alors qu'on finance déjà ce congrès-là.
(15 h 30)
Où est-ce qu'on arrête ça, alors que, dans quelques minutes, on va nous annoncer des coupures dans tous les secteurs de l'État québécois? Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre de l'Environnement et de la Faune. M. le ministre.
M. David Cliche
M. Cliche: M. le Président, je vous remercie. Je tiens à remercier le critique officiel de l'opposition de sa vigilance. Jusqu'à ce jour, nous avons eu de bonnes relations et j'entends les maintenir. Et je tiens à le féliciter pour sa vigilance, parce que c'est son travail, M. le Président, de s'assurer que l'utilisation des fonds publics soit faite correctement dans ces temps difficiles.
Effectivement, il a raison, il se passe des choses importantes à Montréal. Et, ce matin, il y avait un autre représentant du ministère de l'Environnement et de la Faune à cet important ÉcoSommet, et c'était le ministre, M. le Président, parce que je me suis rendu ce matin et j'ai vu moi-même les inscrits qui étaient là. Il y avait à cet ÉcoSommet, M. le Président, 750 inscrits représentant les secteurs privés, les secteurs industriels, le secteur de l'aluminerie, le secteur des compagnies forestières, le secteur de la métallurgie, le secteur de l'agriculture. Tous les secteurs économiques du Québec étaient représentés. J'ai également vu des représentants du secteur municipal et j'ai vu, comme il se doit, compte tenu de l'importance de cet ÉcoSommet, qui est le point culminant d'un long processus qui a amené cette collaboration de partenaires pour la mise en place d'une politique de développement durable et qui a surtout amené les régions à se prendre en main, et les conseils régionaux de l'environnement à déterminer, avec les partenaires des régions, des projets précis de développement durable et de création d'emplois...
J'ai maintenant les chiffres pour répondre à la question du critique officiel de l'opposition. C'est vrai que mon ministère y est présent, et ce qui aurait été inquiétant, ça aurait été l'absence de mon ministère à cet important ÉcoSommet qui représente un exemple classique, un bel exemple de partenariat entre les partenaires dans le développement du Québec. Et ce ne sont pas 75 représentants de mon ministère qui y sont, il y a 56 représentants de mon ministère: 36 y sont inscrits pour la durée de l'ÉcoSommet et une vingtaine n'y sont que pour seulement une journée, le temps de travailler spécifiquement à des ateliers.
Il faut comprendre qu'à cet ÉcoSommet, qui représente l'aboutissement de travail dans toutes les régions du Québec, il est normal qu'il y ait au moins un représentant de mon ministère pour chacune des régions. Et, comme mon ministère est présent dans les 16 régions du Québec, en partant, déjà là, ce sont 16 représentants. Et j'aime mieux les voir là, à participer à cet important événement qui cristallise le partenariat et qui confirme la lancée de notre ministère dans le partenariat pour le développement durable, j'aime beaucoup mieux les voir là que les voir dans leurs bureaux à attendre ou à lire des rapports dans les journaux de cet ÉcoSommet. Il faut s'habituer à voir de plus en plus les gens de mon ministère à l'extérieur de leurs bureaux, à participer à ce genre de rencontres qui sont importantes et qui confirment notre volonté de partenariat avec tous les milieux économiques.
Quant aux coûts, M. le Président, qui sont estimés par le critique officiel de l'opposition à 60 000 $, je réalise que le critique officiel de l'opposition calcule encore de la façon dont le Parti libéral calculait, M. le Président, parce que ce n'est pas 60 000 $, nous, que ça coûte à notre ministère d'être là, mais c'est un peu plus de 20 000 $. Voici un bel exemple de calcul d'un gouvernement, des coûts affectés d'un gouvernement responsable que nous sommes, et de la façon dont l'ancien gouvernement calculait. Alors qu'il estimait, selon sa façon de voir les choses, le coût à 60 000 $, j'ai exactement les coûts ici, M. le Président: les inscriptions, c'est 8 420 $; il y a même eu six de mes professionnels qui ont été invités gratuitement, qui ont décidé qu'ils ne pouvaient pas payer, qu'ils ne voulaient pas payer mais qui ont été invités gratuitement compte tenu de l'importance de la présentation qu'ils devaient faire; l'ensemble des dépenses du voyage, c'est 14 000 $; le total, 22 420 $.
C'est beaucoup d'argent, M. le Président, mais c'est un investissement rentable, c'est un investissement à partir duquel mes fonctionnaires pourront participer à l'importance de ces partenaires. Et il se passe quelque chose à Montréal, et j'aurais aimé voir un représentant de l'opposition pour que lui aussi puisse... elle aussi, l'opposition, puisse venir à la vitesse de croisière avec cette nouvelle façon de faire les choses au Québec, cette nouvelle façon de protéger l'environnement et de voir au développement durable du Québec, M. le Président. Merci.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre. M. le député d'Orford, vous avez deux minutes de réplique. M. le député.
M. Robert Benoit (réplique)
M. Benoit: M. le Président, on n'a jamais dit que les gens du gouvernement ne devaient pas être près de la société, ça va de soi, voyons! Que le ministre nous dise que c'est 22 000 $, que j'aie dit que c'est 60 000 $, nous le verrons lors des prochains crédits, M. le Président, et je vous assure que ça sera beaucoup plus près de 60 000 $ que de 22 000 $. Mais, même à 22 000 $, M. le Président, réalisez-vous que c'est le salaire de beaucoup de familles au Québec, ça, en ce moment, alors qu'aujourd'hui on va nous annoncer des coupures tous azimuts, que, chez nous, on parle de fermer des hôpitaux, qu'il y a des écoles qu'on ne veut plus ouvrir, qu'on était prêt à enlever la parité dans l'aide sociale, etc.? M. le Président, c'est des sommes d'argent absolument éhontées à ce point-ci, M. le Président.
Ceci dit, ceci dit, on n'a rien contre les gens qui assistent à ces réunions-là, loin de là. Ils doivent participer dans la société québécoise à part entière, mais de là à en envoyer 75, M. le Président... Moi, je ne sais pas, si cinq, six avaient écrit un beau résumé au ministre, fait circuler ça dans le ministère... Tu fais une petite rencontre, ensuite, à l'intérieur du ministère, tu expliques tout ça à tout le monde. Je veux dire, moi qui arrive de l'entreprise privée, j'étais avec une des grandes institutions financières du monde, et jamais je ne me souviens d'un seul congrès où notre institution financière a envoyé 75 personnes, et Dieu sait qu'on avait les moyens de le faire, dans cette institution-là. Jamais! Et on avait bien au-dessus de 3 000 employés, M. le Président. J'ai de la misère à comprendre qu'on ait envoyé 75 personnes.
Et la question que je pose: Qui approuve ces choses-là dans la société québécoise? Qui approuve ça? Qui permet à des gens de tout le Québec de se ramasser là alors qu'on a déjà payé pour le congrès? Donc, jamais je ne croirai qu'on n'aurait pu avoir un résumé de ce qui se passait là, M. le Président.
J'arrête ici. Je vous dis que c'est une dépense éhontée, démesurée, alors qu'on est après couper à la grandeur du Québec.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Dans les débats de... Pardon?
M. Cliche: Question de règlement, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Question de règlement. Sur quel point?
M. Cliche: C'est en vertu du règlement, 212, pour des propos mal compris et déformés.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le débat de fin de séance est limité par le temps, tel que prévu au règlement.
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Brouillet): Dans le cadre des débats, mais... Ici, en définitive, on appelle ça un débat, mais c'est un peu le prolongement de la période de questions. Et, dans une période de questions, il n'y a pas, si vous voulez, cet appel à ce point de règlement 212, qui est un point de règlement qui se situe à l'intérieur des périodes de débat que sont les affaires du jour. Et le débat de fin de séance, c'est après les affaires du jour, une fois qu'on a terminé les affaires du jour. Alors, ça s'apparente à la période de questions.
M. Cliche: ...
Le Vice-Président (M. Brouillet): Non. M. le ministre, vous ne pouvez pas, comme ça, intervenir à l'encontre du président quand il est debout. J'ai toléré quelques minutes, mais vous avez persisté un peu trop au-delà de la tolérance possible et raisonnable.
Frais imposés aux chasseurs pour l'utilisation de caches
Alors, le troisième débat de fin de séance concerne les coûts exigés pour des caches sur les terres publiques pour les chasseurs. M. le ministre de l'Environnement et de la Faune répondra à M. le député d'Orford. M. le député d'Orford, pour une intervention maximale de cinq minutes.
M. Robert Benoit
M. Benoit: Merci, M. le Président. Pour ceux qui ont suivi la période de questions, une question a été adressée au ministre de l'Environnement, l'ami des chasseurs du Québec. Nous lui demandions s'il était exact que, sur les terres publiques du Québec, il y aurait, effectivement, pour les caches... Vous savez, ce qu'on appelle des miradors, c'est à peu près quatre pieds carrés, c'est grand comme mon bureau, M. le Président, où les gens attachés après un arbre attendent que les animaux arrivent pour les chasser.
Alors, on sait que, déjà, on va nous charger pour descendre nos chaloupes dans le Lac-Saint-Jean. On sait qu'on va maintenant nous charger, avec notre famille, le dimanche, quand on veut prendre une petite marche, respirer l'air et écouter les oiseaux, dans les parcs du Québec, on va nous charger un 2 $. Là, on apprend, M. le Président, que, quand vous allez vouloir vous attacher après un arbre pour chasser, vous allez devoir payer. Vous allez devoir payer quelque chose comme 63 $ et, à ça, vous allez devoir payer la TVQ et la TPS, ce qui va vous amener quelque part aux alentours de 74 $; 71,79 $ exactement, M. le Président.
Nous avons posé la question au ministre tantôt, l'ami des chasseurs, et il m'a répondu, je vous le lis textuellement: «Mais, en ce qui concerne une politique de mon gouvernement qui viserait à facturer la mise en place de caches, je peux rassurer le député d'Orford [...] que ce n'est pas le cas.» Et, plus loin, il disait: «À ma connaissance, c'est faux, M. le Président.»
Eh bien, M. le Président, j'aurais souhaité ne pas avoir raison et nos relations sont très agréables, le ministre de l'Environnement et moi j'aurais souhaité ne pas avoir raison, j'aurais souhaité que les chasseurs du Québec puissent aller sur les terres publiques, et que je me sois trompé, sans payer, M. le Président.
Je vais déposer le décret laissez-moi vous le lire, je l'ai ici dont Mme Violette Verville, le 12 mars 1996, disait: Vous trouverez ci-joint, etc., et, à l'article 8 et à l'article 25, là, 63 $, M. le Président.
(15 h 40)
Alors, non seulement le ministre, qui est supposé défendre les chasseurs du Québec, ne le savait pas, mais, quand nous avons parlé à sa consoeur qui, elle, a demandé au ministre en titre de le conseiller, là, c'était évident qu'il n'y avait plus personne qui ne savait rien là-dedans, ni le ministre en titre, ni le ministre délégué, ni le ministre de la chasse. Qui c'est qui mène dans ce gouvernement-là quand on parle des chasseurs, M. le Président? Où est-ce qu'on arrête ça, ces situations-là? On va payer pour nos chaloupes, on va payer pour marcher dans le parc du Mont-Orford puis, là, on va payer pour se tenir après un arbre pour chasser, M. le Président, 63 $. Il faut arrêter ça quelque part. Puis, dans 15 minutes, on va nous annoncer des coupures à la grandeur du Québec. Ça n'a pas d'allure, il faut arrêter ça.
Alors, on ne fera pas une grosse guerre là-dessus, est-ce que le ministre veut c'est la question que je lui pose d'abord admettre qu'il n'a pas eu raison et s'engager à abolir rapidement, auprès du ministre en titre et du ministre délégué, ce 63 $ pour les caches, pour les gens qui veulent aller chasser sur les terres publiques du Québec? Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député d'Orford. M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.
M. David Cliche
M. Cliche: Merci, M. le Président. Le ministre responsable de la chasse et de la pêche au Québec, c'est votre humble serviteur, M. le Président. Il n'est pas question de facturer pour les caches. Ceci étant dit, étant moi-même un chasseur, j'ai vu, au cours des dernières années, l'évolution de la notion de cache. M. le député d'Orford, qui vit dans un magnifique comté où abonde le cerf de Virginie, s'il voyait un cerf de Virginie de sa maison et qu'il abattait le cerf de Virginie de sa maison, est-ce que sa maison deviendrait une cache parce qu'il a abattu ce magnifique gibier à partir de sa maison? Et c'est là toute la question. De plus en plus, les chasseurs se construisent ce qu'ils appellent des caches, mais ce sont de véritables habitations, M. le Président. C'est ça, la question. Les zones d'exploitation contrôlée, les zecs, face à la prolifération d'installations permanentes... Et les petites caches, les caches traditionnelles auxquelles fait référence le député d'Orford, temporaires, dans un arbre, il faut être raisonnable, il n'y a aucune idée de facturer une cache pour aller à la chasse.
Ceci étant dit, des chasseurs se construisent des installations permanentes non seulement dans les zecs, mais dans les terres publiques. Et, là, ce qu'on appelle permanent, c'est: toit, murs, fenêtres, balcon, divan, poêle à l'intérieur, etc. Et, lorsque se présentent soit les gestionnaires de la zec ou les responsables de la gestion des terres publiques et qu'ils s'interrogent sur la présence des ces habitations permanentes, de ces installations permanentes, ils se font dire par trop de chasseurs: Ceci est une cache, M. le Président. Il faut être raisonnable. Une cache, c'est une cache, c'est un équipement qu'on utilise pour se cacher du gibier. Il n'y a pas du tout, dans l'interprétation de cache, une notion de permanence, parce que la chasse, c'est suivre un gibier qui est nomade. Donc, les outils et les équipements qu'on utilise doivent, eux aussi, se déplacer pour suivre le gibier qui est lui-même nomade. Lorsqu'on met, à la place, des équipements permanents avec toit, fenêtres, murs, divan, poêle, lavabo, chaise berçante, ce n'est plus une cache, M. le Président, ça s'appelle un camp. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Alors, pour terminer ces débats de fin de séance, M. le député d'Orford, pour un maximum de deux minutes.
M. Robert Benoit (réplique)
M. Benoit: M. le Président, une cache, c'est une cache. Ça a 4 pi² dans un arbre. Ici, on a une lettre d'un monsieur qui nous écrit, là, et puis il dit: Écoutez, moi, ma cache, elle a à peu près 4 pi². Le ministre, il dit: Elle a peut-être 5,25 pi². On ne s'obstinera pas longtemps si elle avait 5,25 pi² ou 4 pi², la cache. Le gars qui m'écrit, moi, il dit: J'ai une cache dans un arbre, un mirador. Je me tiens après l'arbre parce que ce n'est pas trop solide, cette cache-là, en plus. Puis, là, il dit: Je viens de recevoir la facture, là, 63 $ plus TVQ, plus TPS, 71,79 $. C'est ça qu'il me dit, le monsieur qui m'écrit, M. le Président, et puis je sais qu'ils ont rencontré la ministre déléguée à ce sujet-là.
Alors, quand on est rendu à essayer de décider si, à une cache, il faudrait qu'il y ait un garage double ou l'eau, puis... Arrêtons, M. le Président! Une cache, c'est une cache. Ça a 4 pi², c'est attaché après un arbre, puis on ne devrait pas charger aux chasseurs du Québec pour monter dans une cache. C'est ça qui est le débat, M. le Président. Merci beaucoup.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci à tous. Alors, conformément à l'ordre adopté précédemment concernant l'organisation des travaux de l'Assemblée pour aujourd'hui, la séance est suspendue jusqu'à 15 h 55. À la reprise des travaux, M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances prononcera le discours sur le budget. Alors, nous suspendons.
(Suspension de la séance à 15 h 45)
(Reprise à 16 h 2)
Le Président: Alors, veuillez vous asseoir.
L'Assemblée reprend ses travaux.
Affaires du jour
Affaires prioritaires
Discours sur le budget
Nous en étions aux affaires du jour, et, conformément à l'ordre adopté précédemment concernant l'organisation des travaux de l'Assemblée pour aujourd'hui, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances prononcera maintenant le discours sur le budget. M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.
M. Bernard Landry
M. Landry (Verchères): M. le Président, le 29 janvier dernier, dans son discours d'assermentation, notre premier ministre établissait les priorités essentielles de son gouvernement dans les termes suivants: «Dans l'année qui s'ouvre, ce gouvernement va se concentrer sur un certain nombre de tâches capitales et va inviter les Québécoises et les Québécois à forger de nouveaux consensus. Premier dossier: la relance de l'emploi et l'assainissement des finances publiques.»
Le premier ministre m'a confié la tâche de coordonner la poursuite de ce double objectif crucial. Car redressement économique et redressement financier vont évidemment de pair. Le désordre des finances publiques, au Canada comme au Québec, entrave lourdement la marche de l'économie. Par ailleurs, c'est par le retour de la prospérité que passe nécessairement la reconstruction de la capacité de notre État de s'acquitter de ses tâches essentielles dont, au premier chef, le maintien des grandes solidarités sociales. En effet, se dire social-démocrate sans avoir les moyens matériels de son discours peut vite tourner au concept creux et à l'incantation.
Le présent budget constitue une feuille de route exigeante vers nos espoirs sociaux et économiques les plus légitimes. Ce n'est pas un document inspiré par la facilité. Je veux cependant souligner deux facteurs d'encouragement très précieux: les résultats de l'exercice 1995-1996 et le formidable consensus sur l'élimination du déficit exprimé à la conférence de Québec.
D'abord, en 1995-1996, pour la première fois depuis au moins 25 ans, les dépenses de programmes du gouvernement du Québec ont baissé. Alors que depuis plusieurs années le tocsin avait été entendu partout au Canada et que la plupart des provinces réduisaient leurs dépenses à bon rythme dès 1993, le Québec continuait à voguer vers les récifs, ses dirigeants restant, dirait-on, aveugles à toutes les balises et sourds à toutes les alarmes.
Pour reprendre enfin une course plus sécuritaire, il a fallu que l'un des très grands ministres des Finances de notre histoire, M. Jacques Parizeau, devienne premier ministre et que les députés de Taillon et de Labelle, qui se sont succédé à la présidence du Conseil du trésor, tiennent le cap avec vigilance et fermeté. Ils ont réussi la première étape d'un rétablissement beaucoup trop longtemps différé.
Autre aspect positif: l'objectif de réduction du déficit annoncé l'an dernier a été atteint. Partant du sommet historique de 5 700 000 000 $ où nos prédécesseurs nous avaient hissés, nous sommes déjà redescendus à 3 900 000 000 $. Il y a un an jour pour jour, le député de Crémazie nous a fixé cet objectif ambitieux. Ce qu'il avait promis est aujourd'hui réalité.
Des voix: Bravo!
M. Landry (Verchères): Cette contribution est particulièrement précieuse quand on sait que les agences de cotation de crédit ont par le passé décoté le Québec surtout pour ne pas avoir respecté ses engagements en matière de déficit. Depuis le début des années quatre-vingt-dix, nos prédécesseurs, année après année, ont miné la confiance des investisseurs envers le Québec. Ces décotes ont des conséquences graves: elles affectent tout autant l'ensemble de l'économie que le gouvernement, car les cotes du gouvernement servent de référence pour beaucoup d'autres emprunteurs québécois.
Avec l'aide experte des gestionnaires des Finances et du Conseil du trésor, nous avons donc réussi à rompre le cercle vicieux des promesses non tenues qui mènent à l'alourdissement du fardeau financier. Le cercle vicieux enfin rompu, les partenaires socioéconomiques réunis à la conférence de Québec ont donné au présent budget son second grand encouragement: ils ont choisi le cercle vertueux de l'élimination du déficit menant à la santé financière et économique. C'est là le passage obligé vers la prospérité durable autant que vers l'équité entre les générations, toutes deux compromises par notre situation financière.
En même temps, une volonté tout aussi forte de s'attaquer rigoureusement au fléau du chômage et à son cortège de misères s'est fait jour de tous les horizons représentés à la grande table de concertation. C'est tout le Québec, en fait, qui, au cours des prochains mois, va s'engager dans un vigoureux effort de réflexion et d'action pour reprendre en main son avenir et redonner l'espoir aux centaines de milliers de Québécoises et de Québécois qui commençaient à en manquer. Le présent budget s'inscrit donc dans cette grande démarche collective. Il modifie profondément notre approche et nos façons d'agir.
Au chapitre des finances, tous maintenant en conviennent, nous devons éliminer le déficit selon un calendrier précis qui nous mènera à zéro pour l'an 2000. Une loi viendra encadrer étroitement ce plan d'élimination du déficit et obligera, par la suite, le gouvernement à maintenir son budget en équilibre.
(16 h 10)
Ce calendrier sera particulièrement exigeant cette année et l'an prochain. C'est ainsi que, pour atteindre notre objectif de déficit en 1996-1997, il aura fallu un effort budgétaire de plus de 3 000 000 000 $. L'an prochain, encore, nous devrons fournir un effort d'une ampleur comparable.
Mais dès 1998-1999, nous commencerons à récolter les fruits de notre détermination. Nous aurons pris notre élan. À partir de là, l'effort à fournir sera moitié moindre. Et, quand nous serons au bout de nos peines, nous aurons redonné à notre État la pleine capacité de stimuler l'économie, de protéger les citoyens, de corriger les injustices.
D'ici là, tout ce qui peut être fait pour ne pas alourdir le fardeau des plus démunis le sera. C'est dans cet esprit qu'ont été réalisées les compressions de dépenses où porte, cette année, l'essentiel de notre effort.
Le plan budgétaire pour cette année réduit les dépenses de programmes de 4 $ pour chaque dollar de mesures augmentant les revenus.
Le taux de la taxe de vente ne sera pas relevé, bien qu'il y fut songé, un temps. En fait, ce budget n'augmente aucun taux d'impôt ni de taxe.
Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!
M. Landry (Verchères): J'annoncerai aujourd'hui des resserrements dans les avantages fiscaux des entreprises et des personnes, mais rien dans ces mesures n'affectera, sinon marginalement dans quelques cas, les contribuables moins fortunés, ceux qui gagnent moins de 26 000 $ de revenu net par an.
De plus, nous percevrons mieux l'argent qui nous est dû, sans aucune indulgence pour ceux qui tentent de frauder le fisc. Au moment où un nombre effarant de Québécois et de Québécoises sont victimes du chômage et de la pauvreté, la solidarité est plus essentielle que jamais.
Les sociétés d'État et les grandes entreprises seront aussi appelées à contribuer à l'effort collectif de redressement des finances publiques.
Au chapitre de la gestion de l'économie, ce budget propose aussi une nouvelle approche. Tout le monde sait qu'il serait vain, dans les circonstances présentes, de tenter une relance par des dépenses publiques massives. On ne peut pas dépenser l'argent qu'on n'a pas. Il faudrait soit l'emprunter, et ainsi alourdir le déficit, soit augmenter les impôts et les taxes. À coup sûr, ce serait faire plus de mal que de bien et contribuer à étouffer une économie qui s'essouffle.
Nous allons donc mieux cibler les priorités d'action et mieux utiliser les moyens dont nous disposons. À cet égard, ce budget s'adresse plus particulièrement aux besoins des jeunes, des petites et moyennes entreprises et des exportateurs.
Les jeunes portent notre avenir; il faut qu'ils aient les moyens de démarrer leurs projets, de se tailler une place solide dans l'économie et de faire valoir leurs compétences.
Les petites et moyennes entreprises sont les principales créatrices d'emplois; il faut encourager leur dynamisme.
Les exportateurs sont le pilier de notre croissance depuis trois ans; il faut qu'ils se multiplient.
Pour les soutenir tous convenablement sans débourser trop, nous utiliserons surtout l'aval de l'État et la garantie de prêts. La coopération, omniprésente avec les secteurs privés et associatifs, décuplera nos actions.
Ce budget ouvre aussi une voie prometteuse au développement de l'économie sociale, au bénéfice des groupes communautaires et des travailleurs impliqués.
La formidable solidarité exprimée à la conférence de Québec ne sera pas le moindre de nos atouts. Ainsi, nous poursuivrons la pratique et le raffinement du modèle québécois de gestion des affaires publiques et de développement économique. Cette concertation, inaugurée à Pointe-au-Pic par René Lévesque, en 1977, a été malencontreusement mise en sommeil, sauf pour quelques initiatives méritoires du député démissionnaire d'Outremont. Elle connaît maintenant une seconde jeunesse sous l'impulsion du premier ministre.
Bien sûr, les interventions étatiques lourdes qui pouvaient se justifier à l'époque de la Révolution tranquille ne sont plus de mise, et nos partenaires le savent. Pour autant, nous ne sacrifierons pas à la mode néolibérale qui fait des ravages chez tant de nos voisins: notre gouvernement croit encore à l'action collective dans le développement économique et social.
Nul ne conteste les vertus de l'économie de marché et de la libre entreprise comme instruments éprouvés de création de richesse et de quête du progrès. Toutefois, s'en remettre entièrement à cette implacable main invisible du marché, décrite par Adam Smith il y a deux siècles, est aussi pernicieux qu'ont pu l'être les idéologies de planification centrale autoritaire qui n'ont laissé que ruines dans leur sillage.
Ni dirigiste ni démissionnaire, l'État moderne doit tracer la voie et coordonner le développement dans le respect de toutes les libertés, mais en se portant garant d'une solidarité qui est aussi l'apanage des sociétés évoluées.
Nous avons donc commencé à assainir les finances publiques et nous allons continuer. Cette oeuvre de salut public relève de la plus élémentaire justice envers les jeunes générations.
Par rapport à sa population, le Québec est aujourd'hui la plus endettée des provinces canadiennes. Le 31 mars 1995, chacune des Québécoises et chacun des Québécois se retrouvait avec une dette de 10 200 $, empruntée en son nom par le gouvernement du Québec. Or, près de la moitié de cette dette a servi à payer des dépenses courantes l'épicerie, comme on dit et non des investissements durables dont pourraient profiter nos descendants sous forme d'un patrimoine d'équipements collectifs transmissibles.
Nous avons consommé; nos enfants paieront pour nous. Une telle vision des choses n'est pas acceptable dans une société fondée sur l'éthique et la solidarité. Il faudra, en toute honnêteté et dès aujourd'hui, ne pas oublier ces réalités quand se présenteront de façon concrète les sacrifices nécessaires à la correction de la situation.
Nos concitoyennes et concitoyens sont de plus en plus nombreux à se demander où va l'argent de leurs impôts et taxes. Comment s'étonner de leur frustration: 16 % de ce qu'ils paient à Québec et 36 % à Ottawa ne servent qu'à payer des intérêts sur l'immense dette accumulée par les gouvernements! Tout cela se traduit par d'autant moins de services ou par une fiscalité excessive.
À cette frustration de payeurs fatigués s'ajoute celle de voir que le poids de l'endettement du secteur public, résultat des déficits accumulés au cours des années, entrave dramatiquement la création d'emplois. En effet, le financement de la dette entraîne pour l'économie des conséquences tragiques: plus le gouvernement s'endette, moins il reste d'épargne disponible pour les projets d'investissement ou de consommation, générateurs d'emplois; l'endettement génère un accroissement des impôts et taxes, ce qui augmente les prix de nos produits, rend nos entreprises moins concurrentielles et réduit donc leur capacité de créer des emplois; pour ce qui est des charges fiscales imposées plus directement aux entreprises, elles viennent diminuer la rentabilité de leurs investissements. L'intérêt des entreprises à investir s'en trouve affaibli, avec pour conséquence un niveau moins élevé d'emplois. En outre, plus le fardeau fiscal au Québec sera élevé, moins les entreprises étrangères viendront y investir et y créer des emplois.
On connaît le vieux dicton: trop d'impôts tue l'impôt. On voit ici que trop d'impôts tue l'emploi. Poursuivre dans la voie de l'accumulation des déficits, véritables impôts et taxes différés, ne peut qu'accentuer, dans l'avenir, les problèmes que je viens d'évoquer.
(16 h 20)
De plus, nous ne devons pas attendre que survienne la prochaine récession. Les économies fluctuent; de temps à autre, elles régressent et la croissance passe sous zéro. Il faut que notre rétablissement soit réussi avant que la croissance ne s'arrête. Nous courons en avant d'un orage, il ne faut pas qu'il nous rattrape.
À court terme, notre effort de redressement engendrera forcément des difficultés d'ajustement. Mais, si nous faisons bien dès maintenant ce que nous avons à faire, nous encaisserons en temps voulu les bénéfices de notre détermination sous forme d'un plus grand pouvoir d'achat, d'un niveau de vie plus élevé, de meilleures possibilités d'épargne en vue d'une sécurité plus grande aujourd'hui comme demain.
Déjà, après seulement un an et demi d'efforts, nous commençons à récolter une partie des fruits de notre action. Nos prêteurs ont pris acte de notre nouvelle façon de gouverner et de notre détermination à réduire le déficit. Les écarts de taux d'intérêt entre les titres du Québec et ceux des autres provinces ont commencé à se réduire. Nous faisons déjà des économies sensibles sur nos emprunts.
Pour être plus sûrs de persévérer dans cette voie nouvelle, nous allons nous donner un dispositif de sécurité, comme l'ont suggéré nos partenaires socioéconomiques.
Je déposerai donc sous peu un projet de loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire, pour être plus sûr, donc, de persévérer dans cette voie. Cette loi nous permettra, dès cette année, d'encadrer le calendrier d'élimination du déficit et, par la suite, elle empêchera les gouvernements de déséquilibrer à nouveau les finances publiques.
La loi fixera tout d'abord le rythme d'élimination du déficit. De 3 275 000 000 $ cette année, le déficit sera ramené à 2 200 000 000 $ en 1997-1998, puis à 1 200 000 000 $ en 1998-1999. Et, l'année suivante, lorsque se profileront les trois zéros du troisième millénaire, notre déficit sera précisément rendu à zéro. Ensuite, la loi imposera au gouvernement l'obligation de maintenir son budget en équilibre. La séquence de notre marche vers cet objectif est difficile à tenir, mais facile à mémoriser: 3,2, 2,2, 1,2, et, finalement, zéro.
À moins de circonstances exceptionnelles, comme une détérioration importante des conditions économiques ou des coupures massives dans les transferts fédéraux, le gouvernement ne pourra s'écarter des objectifs fixés. La loi encadrera de façon rigoureuse la possibilité pour le gouvernement d'invoquer de telles circonstances. Elle l'obligera à poser des gestes significatifs afin d'éviter la fuite en avant, comme ce fut si souvent le cas dans le passé. Tout écart par rapport aux objectifs devra être résorbé.
Il sera donc possible au gouvernement d'adapter la règle du déficit zéro à l'évolution de la conjoncture. En ce sens, nous mettrons vraiment et intégralement en pratique la doctrine de John Maynard Keynes, qui consiste, on l'a oublié trop souvent, à emprunter pour augmenter la dépense publique et, partant, la fameuse demande globale en période de mauvaise conjoncture, mais à rembourser les dettes contractées pour ce faire quand le beau temps est revenu. Lord Keynes a eu de bien mauvais disciples, qui, de diverses manières, ont perverti sa pensée. Nous ne serons pas du nombre.
Dans l'immédiat, et tel que convenu à la conférence de Québec, il nous faut cette année ramener le déficit à 3 275 000 000 $. Compte tenu des perspectives économiques, cela requiert un effort considérable.
Dans l'ensemble, les analystes du secteur privé s'attendent à ce que la situation économique s'améliore graduellement au cours de cette année et l'an prochain. Les deux principaux facteurs à l'origine du ralentissement observé au Québec et au Canada en 1995 ont en effet évolué de manière favorable récemment.
D'une part, les taux d'intérêt à court terme ont reculé de trois points de pourcentage au Canada depuis un an. D'autre part, le redressement de l'économie américaine tend à se confirmer et se combine à un taux de change favorable.
De plus, je l'ai dit, notre gouvernement a choisi de ne pas augmenter le taux de la TVQ, ce qui aurait pu miner la confiance des consommateurs.
Néanmoins, un certain nombre de facteurs, comme l'endettement élevé des ménages, les surplus dans le marché de l'habitation et les mesures de redressement budgétaire des gouvernements, viendront limiter la croissance économique au cours des deux prochaines années.
Le présent budget est donc basé sur une hypothèse de croissance économique de 1 % en 1996 au Québec. Cette hypothèse est très conservatrice par rapport à la prévision des experts du secteur privé, qui est plutôt de 1,4 %. Nous ne voulons pas qu'une mauvaise surprise vienne, en cours d'année, nous empêcher d'atteindre notre objectif exigeant de réduction du déficit.
Pour tenir, cette année, notre objectif de déficit, il a fallu faire des choix difficiles. Mes collègues et moi-même avons répondu à l'appel du premier ministre et nous avons osé poser les gestes nécessaires.
L'essentiel de l'effort requis découle des réductions de dépenses de 2 200 000 000 $ annoncées lors du dépôt des crédits en mars dernier.
En outre, nous mettrons en place un fonds spécial pour le financement des travaux routiers, qui permettra de capitaliser les investissements requis et d'étaler les dépenses en fonction de la durée de vie utile des travaux réalisés. Cela permettra de prendre de meilleures décisions et d'accroître l'efficacité de la gestion gouvernementale. Ce nouveau mécanisme nous permettra de faire plus de travaux sur le terrain, même s'il aura pour effet de réduire le montant des dépenses budgétaires de 246 000 000 $ cette année. De plus, les initiatives additionnelles que j'annonce aujourd'hui n'augmenteront pas le niveau global des dépenses, parce qu'elles seront financées par des réaménagements budgétaires à l'intérieur des enveloppes existantes.
Le présent budget porte donc à 2 500 000 000 $ l'effort réalisé du côté des dépenses de programmes.
On ne déclenche pas un tel mouvement sans demander à tout le monde d'y participer à la mesure de ses moyens. Victor Hugo disait: «On peut avoir des raisons de se plaindre et n'avoir pas raison de se plaindre.» C'est précisément parce que chacun fera sa part de l'effort collectif que personne n'aura véritablement raison de se plaindre.
Je donnerai comme exemple la transformation du réseau de la santé si consciencieusement et courageusement menée par notre collègue de la Santé et des Services sociaux, qui a d'ailleurs reçu de son prédécesseur un appui aussi lucide qu'inattendu. L'actuel député de Charlesbourg a réussi à mener une réforme difficile en gardant la confiance de la population, qui a compris que ce virage était non seulement nécessaire, mais effectué de façon équitable. C'est pourquoi, même si certains avaient de compréhensibles raisons de se plaindre, le changement fut globalement bien accepté.
Cette réforme serait encore mieux perçue si les usagers avaient une meilleure idée du coût des services de santé qu'ils reçoivent. L'illusion de leur gratuité ne favorise pas toujours une utilisation optimale des services de santé. C'est pourquoi le ministre de la Santé et des Services sociaux préparera d'ici la fin de l'année un plan d'action qui visera à fournir les informations appropriées pour sensibiliser les citoyens aux coûts des programmes publics de santé assumés par la collectivité.
Des voix: Bravo!
M. Landry (Verchères): Depuis plusieurs années, les résultats financiers des sociétés d'État se retrouvent dans le budget du gouvernement, comme l'exigent les règles comptables modernes. Ainsi, une détérioration de leurs résultats engendre automatiquement une baisse des revenus de l'État. On ne peut donc songer à redresser les finances publiques sans se préoccuper du niveau de rentabilité des entreprises publiques à vocation industrielle et commerciale.
Pour les besoins du budget que je dépose aujourd'hui, des sociétés d'État contribueront pour 151 000 000 $ de plus à l'effort collectif de redressement des finances publiques.
(16 h 30)
Hydro-Québec, la plus importante de nos sociétés d'État, est aussi celle dont les profits ont le plus baissé récemment, et il est clair qu'un sérieux redressement s'impose. Le député de Joliette et ministre d'État des Ressources naturelles a déjà vigoureusement amorcé le travail pour ramener ce grand navire amiral sur une course et un cap conformes à son prestigieux passé et aux intérêts du Québec tout entier. Cela nécessitera un effort majeur de ses dirigeants, de ses cadres et de tous ses employés.
Parlons maintenant d'une situation aussi peu sympathique que trop répandue: l'évasion frauduleuse des impôts et des taxes et le retrait égoïste des solidarités communes qu'ils servent à financer. Les dépenses de l'État du Québec sont essentiellement consacrées à la santé, à l'éducation et à l'aide sociale. Percevoir des ressources à ces fins est une tâche noble. Au contraire, frauder le fisc ne peut être qu'une action éminemment antisociale. Nous serons donc sans indulgence pour ceux qui tentent d'échapper à leurs obligations fiscales.
L'an dernier, nous avons mis en marche un ensemble de programmes spéciaux de vérification et de perception des revenus qui se sont avérés très efficaces. Ils seront non seulement reconduits, mais intensifiés, avec un objectif de revenus supplémentaires de 313 000 000 $. À cette fin, je propose qu'un montant additionnel de 40 000 000 $ soit affecté en 1996-1997 à des programmes de vérification et de perception plus performants.
Le ministère du Revenu procédera notamment à des croisements de fichiers avec d'autres ministères ou organismes pour valider les informations qu'il a en sa possession et identifier les personnes qui ne produisent pas de déclaration de revenus.
Je salue, à ce propos, le sens des responsabilités des parlementaires membres de la commission du budget et de l'administration, qui ont approuvé notre démarche en adoptant à l'unanimité une recommandation en ce sens.
En effet, comme le Vérificateur général l'a indiqué récemment, il y a place à améliorer l'utilisation des informations disponibles. Il serait, par exemple, légitime de demander des comptes à un individu qui fournit une adresse au Québec pour obtenir sa carte d'assurance-maladie mais se déclare non-résident quand il s'agit de remplir une déclaration de revenus. Même chose pour celui qui immatricule une Rolls-Royce et deux Mercedes tout en déclarant chaque année 7 000 $ de revenus.
Cependant, dans cette opération, nous aurons à concilier l'impératif de protéger la vie privée des individus avec celui de protéger les citoyens honnêtes qui en sont réduits à payer plus de taxes parce que d'autres ne paient pas les leurs.
Sous le contrôle vigilant de la Commission d'accès à l'information, nous procéderons avec rigueur et dans le respect des citoyens, qui ont le droit de savoir à quoi peuvent être utilisées les informations qu'ils transmettent au gouvernement.
Une des critiques importantes à l'endroit du régime fiscal concerne les avantages fiscaux qui permettent à un certain nombre de contribuables fortunés de réduire sensiblement leur fardeau fiscal et, parfois même, de l'amener légalement à zéro.
De l'avis général, le niveau des impôts et taxes a atteint au Québec la limite du tolérable. Les opinions sont beaucoup plus partagées quand il s'agit d'identifier les groupes qui ne feraient pas suffisamment leur part et ceux qui contribueraient au-delà de ce qui est juste et équitable. Elles sont partagées aussi concernant d'autres caractéristiques du régime fiscal, comme, par exemple, son efficacité et sa capacité de soutenir la création d'emplois.
Voilà pourquoi, au moment de la conférence de Québec du mois de mars, nous avons mis en route une démarche particulière pour mieux approfondir ces questions: une commission sur la fiscalité et le financement des services publics. La CSN nous le demandait depuis longtemps, ainsi que les autres centrales syndicales et nombre de citoyens.
Dans un premier temps, le gouvernement publiera donc une série de documents sur ces sujets. Le projet de loi sur l'élimination du déficit sera aussi à l'étude et on examinera les implications d'un éventuel fonds de remboursement de la dette.
Le maximum d'information ayant ainsi été mis sur la place publique, une commission nationale itinérante recueillera les opinions dans tout le Québec et animera cette réflexion essentielle à de judicieuses réformes fiscales. Le sommet de l'automne prochain devrait être le lieu pour dégager les consensus nécessaires à l'action décisive qui viendrait lors du prochain budget. En attendant, nous ne sommes pas libérés de notre obligation de gouverner et nous devons quand même apporter les correctifs immédiats que requièrent tant nos impératifs budgétaires que le souci constant de parfaire l'équité.
Du côté des entreprises, le crédit remboursable pour pertes permet au gouvernement de fournir de la liquidité aux entreprises qui font des pertes dans une année donnée. Ce mécanisme est d'une utilité douteuse pour les grandes entreprises, qui peuvent mieux que les petites obtenir des institutions financières les liquidités nécessaires pour traverser une mauvaise année. J'annonce donc qu'à compter d'aujourd'hui le crédit d'impôt remboursable pour pertes sera limité aux seules petites entreprises. Les finances publiques y gagneront 20 000 000 $ par année.
Deux autres dispositions fiscales permettent aux professionnels et aux entreprises de réduire, parfois de façon abusive, leur impôt sur le revenu, ce sont la déduction pour frais de représentation et la déduction pour les dépenses reliées à l'utilisation d'une résidence personnelle. Aucune de ces dispositions n'étant accessible aux salariés, la simple équité nous oblige à nous montrer très restrictifs quand nous les accordons, ce que nous ferons. L'annexe sur les mesures fiscales et budgétaires, qui fait partie intégrante du présent discours, donne les détails techniques de ces mesures.
Quant au régime de la taxe sur le capital, il n'est pas tout à fait étanche non plus. Par exemple, les caisses d'épargne et de crédit et les fonds de travailleurs ont été historiquement exemptés de la taxe sur le capital parce qu'ils poursuivaient des objectifs sociaux que l'État encourage. Pendant ce temps, les taux de la taxe sur le capital étaient augmentés pour les autres entreprises, notamment les banques, dont nous avons accru la contribution annuelle de 60 000 000 $ l'an dernier.
Le capital constitue un outil de production et, en toute équité concurrentielle, il devrait être taxé pour toutes les institutions financières. À compter d'aujourd'hui, les caisses d'épargne et de crédit et les fonds de travailleurs deviendront assujettis à la taxe sur le capital. Quel que soit notre degré de sympathie pour les uns et pour les autres, tous, sans exception, sont conviés à l'effort collectif.
Nous résoudrons aussi le problème d'équité que pose la taxe sur le capital des compagnies d'assurance de personnes, dont le taux n'a pas bougé depuis près d'un demi-siècle, alors qu'il augmentait pour les autres institutions financières. Une mesure compensatoire leur sera appliquée et rapportera 20 000 000 $ par année au trésor public.
De plus, ce budget introduit plusieurs resserrements dans les avantages fiscaux des particuliers. Toutefois, je le souligne, il ne touche pas, sauf marginalement, les contribuables dont le revenu net est inférieur à 26 000 $ par an.
La catégorie la plus importante d'avantages fiscaux est celle des crédits pour personnes à charge, principalement le conjoint et les enfants. Ce budget ne touche à aucun des crédits pour personnes à charge ni à aucun des avantages spécifiques en faveur des familles. L'appui du gouvernement aux familles québécoises, et particulièrement à celles à faibles revenus, est donc réaffirmé dans ce budget.
J'insisterai d'ailleurs pour que la Commission sur la fiscalité accorde une attention particulière au rôle de la fiscalité comme instrument de la politique familiale et comme partie intégrante de la politique de sécurité du revenu au Québec.
À cet égard, la situation du financement des services de garde nous préoccupe au plus haut point. Nous avons au Québec un généreux crédit d'impôt remboursable pour frais de garde d'enfants. Dans les mois à venir, comme l'a indiqué ma collègue ministre de l'Éducation et ministre responsable des services de garde, nous proposerons un réaménagement des modalités de ce crédit d'impôt de façon à assurer une aide adéquate aux parents à plus faibles revenus qui ont recours aux services de garde et à dégager une marge de manoeuvre à l'État pour financer plus adéquatement ces services.
(16 h 40)
J'en profite pour souligner qu'à compter du 1er mai prochain nous procéderons à la défiscalisation des pensions alimentaires pour les enfants. Ainsi, pour tout jugement rendu et pour tout accord conclu après cette date, un parent ne paiera plus d'impôt sur une pension alimentaire reçue pour un enfant. En revanche, cette pension ne sera plus déductible dans le calcul du revenu de celui qui la verse. Je confirme, de plus, notre intention de recycler au bénéfice des familles du Québec les revenus résultant de cette mesure. Nous mettrons aussi en place un modèle de calcul des pensions alimentaires à payer qui sera adapté aux besoins spécifiques de la population du Québec.
Plusieurs avantages fiscaux visent, à des fins d'équité, à tenir compte de certaines situations particulières. Par exemple, le crédit d'impôt pour personnes vivant seules vient alléger leur charge fiscale parce qu'elles doivent normalement assumer des dépenses plus élevées que celles qui partagent leur logement.
Ce crédit sera donc intégralement maintenu pour les contribuables les moins fortunés. Par contre, à partir d'un certain niveau de revenus, ce genre d'avantages fiscaux devient difficilement justifiable.
Dans le même ordre d'idées, depuis deux ans, le gouvernement fédéral module le crédit d'impôt en raison d'âge en fonction du revenu des contribuables auxquels il accorde cet avantage fiscal. Nous en ferons autant. La justice sociale, ce n'est pas de favoriser tout le monde passé un certain âge, mais de venir en aide aux plus démunis.
Il nous faut aussi considérer l'équité de traitement entre les revenus d'emploi et les revenus de retraite. La situation est particulièrement injuste dans le cas des personnes qui touchent une double rémunération: une pension et un salaire, par exemple. De plus, il n'y a aucune raison que des contribuables plus fortunés bénéficient d'avantages fiscaux conçus pour soutenir les personnes âgées les plus démunies.
C'est pourquoi j'annonce que le crédit d'impôt pour personne vivant seule, le crédit d'impôt en raison d'âge et le crédit d'impôt pour revenus de retraite cesseront progressivement d'être accordés aux contribuables à partir d'un revenu net de 26 000 $ par an. Ces nouvelles dispositions entreront en vigueur à plein taux à compter de l'année d'imposition 1997. Étant donné que l'année 1996 est déjà commencée, ces resserrements ne s'appliqueront, cette année, qu'à demi-taux.
La déduction pour cotisations syndicales et professionnelles constitue, elle aussi, un avantage fiscal important. Malheureusement, puisqu'il s'agit d'une déduction, pour un même dollar de cotisation, elle rapporte plus aux contribuables à revenus plus élevés qu'aux contribuables à faibles revenus. Ce budget corrigera cette situation en transformant la déduction en crédit d'impôt à compter de l'an prochain.
Les fonds de capital de risque de travailleurs sont maintenant bien connus du public. En raison même de leur succès, ces fonds n'ont plus besoin du même soutien gouvernemental qu'à l'époque de leur lancement.
C'est pourquoi j'annonce que, comme l'a fait Ottawa, nous ramenons le taux du crédit d'impôt pour ces fonds de 20 % à 15 %. De plus, le montant maximum d'actions donnant droit au crédit sera réduit de 5 000 $ à 3 500 $ par année, bien que les modalités de ce resserrement soient plus souples que celles adoptées par le gouvernement fédéral.
Cela dit, la franchise m'oblige à souligner qu'il y a un domaine où nous ne réduisons pas les avantages fiscaux, au contraire. C'est celui de la culture. Et ma collègue la députée de Chambly n'a eu aucun mal à nous convaincre d'agir ainsi. Si nous assainissons les finances publiques, c'est pour que notre société soit plus forte et dispose de moyens plus puissants pour l'avenir. Nous n'aurions rien gagné si nous le faisions en affaiblissant notre culture, en affaiblissant l'âme même de notre collectivité. Une société matériellement riche et culturellement pauvre est globalement pauvre. Ce n'est pas l'idéal québécois.
Voilà pourquoi j'annonce aujourd'hui un nouveau crédit d'impôt pour le bénéfice de la production de titres multimédias. Ce crédit, qui s'ajoute au crédit d'impôt pour les productions cinématographiques, sera fonction des dépenses de main-d'oeuvre. De plus, le nouveau crédit d'impôt comportera une prime à l'utilisation du français et une prime à la performance basée sur les recettes d'exploitation. Enracinement et ouverture vers l'extérieur, telle est l'originalité de cet instrument.
J'annonce aussi que les abonnements à des concerts, à des opéras et à des spectacles de danse et de théâtre seront non seulement épargnés du resserrement que j'ai indiqué précédemment en matière de frais de représentation, mais profiteront du retour de la pleine déductibilité dont les avaient privés nos prédécesseurs.
Quant au cas spécial de l'Orchestre symphonique de Montréal, qui porte magnifiquement les couleurs du Québec dans le monde mais qui, malheureusement, éprouve quelques difficultés financières, j'ai demandé à Loto-Québec de faire en sorte, par une commandite accrue, que le maestro Dutoit puisse continuer à se concentrer totalement sur sa partition.
Des voix: Bravo!
M. Landry (Verchères): De plus, notre gouvernement se doit à tout prix de protéger la culture et la langue française dans le domaine des technologies de l'information. Il faut que les Québécoises et les Québécois aient accès, sur l'autoroute de l'information, à des services d'utilisation courante et à une masse critique de produits disponibles en français. Le Fonds de l'autoroute de l'information, sur lequel je reviendrai tout à l'heure, demeurera l'instrument privilégié pour favoriser la création de contenus et de services électroniques permettant notamment à la population québécoise de travailler, de se divertir, de s'instruire et d'avoir accès à des services culturels de source québécoise en français.
Le milieu culturel a également pris l'initiative d'un fonds d'investissement de la culture et des communications. Le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec et la Société de développement des entreprises culturelles se sont unis pour assurer son capital de départ. Une somme de 5 000 000 $ sera accordée à la SODEC pour financer cet engagement. Reste à appuyer les dépenses de fonctionnement du fonds, que le gouvernement devrait prendre à sa charge. J'annonce donc l'octroi d'une somme de 1 500 000 $ à cette fin pour les cinq prochaines années.
Par ailleurs, toute culture existe et s'incarne à travers une langue qui la transmet, l'exprime et l'enrichit. Majoritaire au Québec, la langue française se retrouve très minoritaire sur un continent anglophone et hispanophone. C'est pourquoi notre gouvernement s'est engagé à définir, au terme de la consultation en cours, un éventail de mesures visant à faire avancer le français partout: dans l'éducation, l'économie, au travail, dans la rue, dans les commerces, sur nos ordinateurs et, en particulier, évidemment, dans la métropole. Cette action tous azimuts nécessite des moyens nouveaux. C'est pourquoi une somme additionnelle de 5 000 000 $ sera consacrée à la mise en oeuvre des mesures retenues, qui accroissent les moyens requis pour la défense et l'illustration de la langue française.
Pour en revenir à la fiscalité, un resserrement majeur du présent budget concerne l'impôt minimum.
Les avantages fiscaux ont été mis en place par les gouvernements pour atteindre certains objectifs économiques et sociaux. Mais, quand un contribuable à revenus élevés réussit, en les utilisant au maximum, à ne payer aucun impôt, il y a manifestement un problème de justice sociale.
On reproche parfois au Québec de ne pas prélever d'impôt minimum sur les profits des entreprises, comme le fait, par exemple, l'Ontario. Ceux qui nous adressent cette critique oublient qu'il existe déjà au Québec deux impôts minimums pour les entreprises: la taxe sur le capital et la cotisation au Fonds des services de santé, calculée sur les salaires. Dans les deux cas, les taux du Québec sont déjà le double des taux ontariens.
Créer au Québec un troisième type d'impôt minimum sur les entreprises serait contraire à nos intérêts économiques.
(16 h 50)
Du côté de l'impôt sur le revenu des particuliers, il existe aussi un impôt minimum. Après analyse, cependant, on constate qu'il joue mal le rôle qu'il devrait jouer: à certains égards, il manque de sévérité, tandis qu'il pénalise parfois des contribuables qui ne devraient pas l'être.
Le mécanisme actuel peut entraîner des situations extrêmement pénibles pour certains travailleurs mis prématurément à la retraite ou licenciés. Ce budget vient corriger ce problème en excluant du calcul de l'impôt minimum les allocations de retraite versées en de telles circonstances lorsqu'elles sont transférées dans un REER.
Par ailleurs, ce budget vient donner beaucoup plus de rigueur à l'impôt minimum. Présentement, un particulier peut déduire des avantages fiscaux jusqu'à concurrence de 40 000 $ dans une année donnée, ce qui est beaucoup trop.
J'annonce donc qu'aucun particulier ne pourra désormais en déduire plus de 25 000 $. De cette façon, un individu à revenus élevés qui aurait cotisé le maximum à un REER ne pourra placer plus de 11 500 $ dans d'autres abris fiscaux sans être frappé par l'impôt minimum.
Les diverses restrictions apportées aujourd'hui aux avantages fiscaux ne produiront leur plein impact qu'à partir de l'an prochain afin d'éviter, bien entendu, toute forme de rétroactivité. Or, dès cette année, nous devons réduire le déficit. C'est pourquoi je demanderai aux grandes entreprises d'assumer momentanément une plus grande partie du fardeau de l'assainissement des finances publiques. Je dis bien «momentanément», car nous sommes conscients de la nécessité d'assurer aux entreprises un environnement fiscal compétitif.
On sait que les grandes entreprises devaient avoir droit au plein remboursement de la TVQ payée sur leurs intrants à compter du 30 novembre prochain. La date d'entrée en vigueur de cette réforme nécessaire sera décalée de quatre mois, c'est-à-dire jusqu'au 31 mars 1997. L'effort particulier de solidarité qui est demandé à ces acteurs essentiels de notre économie entraînera des revenus de 150 000 000 $.
Dans un secteur plus particulier, les entreprises du Québec contribueront aussi à l'effort de redressement. La forêt constitue l'une de nos ressources naturelles les plus importantes. L'État se doit d'en obtenir la juste rente lorsqu'il s'en départit. L'augmentation des redevances forestières du 1er avril dernier, basée sur la valeur marchande du bois sur pied provenant de la forêt privée, générera des revenus additionnels de 55 000 000 $ en 1996-1997.
Les décisions que j'annonce aujourd'hui nous engagent fermement sur la voie du redressement des finances publiques. Les équilibres financiers qui découlent de ce budget en témoignent éloquemment.
Je le répète, nous avons réduit le déficit du tiers en une seule année, alors que le gouvernement fédéral aura mis trois ans pour en faire autant.
Et nous avons atteint, l'an dernier, l'objectif de dépenses de programmes de 36 198 000 000 $, une première diminution depuis au moins un quart de siècle.
Des voix: Bravo!
M. Landry (Verchères): Et je dépose, M. le Président, le tableau suivant qui présente les résultats préliminaires des opérations financières du gouvernement pour 1995-1996. (Voir annexe).
C'est avec la même détermination que nous devons attaquer la prochaine étape qui nous conduira, une année à la fois, au déficit zéro en 1999-2000. Pour ce faire, nous ramènerons d'abord le déficit à 3 275 000 000 $ en 1996-1997.
Réduire le déficit de 700 000 000 $ représente un défi de taille lorsque les revenus du gouvernement diminuent, comme c'est le cas cette année, en raison de la baisse des transferts fédéraux de 1 500 000 000 $ et que l'on ne veut augmenter ni les impôts ni les taxes.
Mais les conséquences néfastes des décisions fédérales sur les finances publiques du Québec ne se limitent pas aux coupures dans les transferts aux provinces.
Par exemple, les réformes successives appliquées au programme fédéral d'assurance-chômage, en rendant plus difficile l'accès aux prestations tout en réduisant leur durée et leur générosité, ont poussé un nombre important de Québécoises et de Québécois vers l'aide sociale, ce qui nous coûte très cher.
Comme l'écrit le journaliste Miville Tremblay dans son livre «Le pays en otage», «les Québécois, quelle que soit leur allégeance référendaire, ont en commun l'intérêt d'avoir des finances publiques saines, mais le partage des juridictions dans le régime actuel rend l'exercice plus compliqué et plus frustrant». Fin de la citation.
En même temps, les sommes économisées par le gouvernement fédéral lui servent souvent à financer de nouvelles intrusions dans nos champs de compétence exclusive. C'est un comble. Avec la dette qu'il a, le gouvernement central devrait au moins se limiter à se mêler de ses affaires!
Ainsi, il est aberrant de constater que le gouvernement fédéral, après avoir effectué l'an dernier des coupures qui totaliseront 7 000 000 000 $ d'ici 1997-1998 dans les transferts aux provinces, proposait encore récemment de dépenser dans la recherche en santé, dans les écoles, dans les bibliothèques, dans le domaine des valeurs mobilières, et j'en passe, autant de domaines de compétence exclusive des provinces.
Il est clair désormais que notre effort d'assainissement des finances publiques devra se poursuivre sous la menace constante de nouvelles coupures dans les transferts fédéraux et de nouvelles décisions fédérales susceptibles de rendre encore plus ardue l'atteinte de nos objectifs.
C'est pour mettre fin à cette situation intenable que le Québec a proposé un nouveau partage des ressources fiscales avec le gouvernement fédéral. Le Québec a demandé à Ottawa de se retirer du financement des programmes sociaux et de lui transférer, en contrepartie, des points d'impôt sur le revenu des particuliers.
En plus de protéger le Québec contre de nouvelles coupures fédérales, cela nous permettait de disposer d'un financement prévisible dont l'évolution suivrait celle de l'économie. Le gouvernement fédéral serait forcé de chercher dans ses propres activités, plutôt que dans la réduction des transferts aux provinces, les moyens d'assainir ses finances.
Il ne s'agit pas d'échapper à nos responsabilités, mais de les assumer de façon rationnelle. Qu'Ottawa cesse ses empiètements, reste dans ses champs de compétence et nous laisse nos impôts et le soin de régler nos affaires nous-mêmes.
On sait que le gouvernement fédéral a catégoriquement refusé une telle demande, pourtant fondée sur la Constitution et le bon sens. La députée de Taillon, qui a fait cette requête quand elle était ministre des Finances, a subi la même rebuffade que moi-même. Nous pouvons toujours nous consoler l'un et l'autre en songeant que Daniel Johnson père, avec son fameux «100-100-100», s'était vu opposer par Ottawa la même fin de non-recevoir. Nous devrons donc continuer à vivre pour un temps limité, je l'espère face au mur d'incompréhension, exposés au risque de nouvelles formes de désengagement fédéral.
Malgré les coupures dans les transferts fédéraux et notre hypothèse de croissance économique prudente, nous maintenons donc le cap sur la réduction du déficit. Nous nous sommes engagés à ramener, cette année, le déficit à 3 200 000 000 $ et nous avons pris les moyens pour y parvenir sans augmenter la TVQ.
L'effet combiné de l'effort annoncé lors du dépôt des crédits et des mesures du présent budget aboutit à des réductions de dépenses de 2 500 000 000 $. Du côté des sociétés d'État, les efforts pour comprimer les charges d'exploitation et améliorer les bénéfices rapporteront des revenus additionnels de 151 000 000 $. L'effort renouvelé de perception des revenus dus au gouvernement générera 313 000 000 $. Les mesures de tarification amèneront des revenus supplémentaires de 55 000 000 $. Enfin, les autres décisions du budget affectant les revenus, dont le resserrement des avantages fiscaux et l'effort de solidarité demandé aux grandes entreprises, rapporteront 132 000 000 $.
Pris globalement, c'est-à-dire en tenant compte des mesures du budget et de celles annoncées lors du dépôt des crédits, l'effort budgétaire totalise 3 200 000 000 $. C'est donc dire que, pour chaque dollar de mesures augmentant les revenus, les dépenses de programmes ont été réduites de 4 $.
(17 heures)
Il est important de souligner que, même si nous avons posé des gestes vigoureux pour réduire les dépenses, le gouvernement n'a pas sombré dans l'immobilisme. Nous avons injecté de l'argent neuf dans des secteurs stratégiques pour le développement économique et social du Québec. Le nécessaire assainissement des finances publiques ne nous condamne pas à l'inaction.
Je dépose ici, M. le Président, ces tableaux qui représentent les prévisions des équilibres financiers du gouvernement pour 1996-1997. (Voir annexes).
À terme, notre but est de réduire progressivement le déficit à zéro, je l'ai dit, en 1999-2000, conformément au large consensus intervenu lors de la conférence de Québec. Pour y parvenir, il nous reste une année cruciale à traverser, 1997-1998. Tel qu'annoncé dans le budget de l'an dernier, les dépenses de programmes seront alors réduites de 1 200 000 000 $, un effort à peu près comparable à celui de cette année. Cependant, même avec cet effort, il restera un écart de quelque 300 000 000 $ à résorber pour atteindre notre objectif de déficit de 2 200 000 000 $.
Cela sera possible du côté des revenus, même si les augmentations d'impôts ou de taxes sont exclues. L'intensification des efforts de perception des revenus qui échappent actuellement au gouvernement sera certainement à l'ordre du jour. On travaillera encore à améliorer la rentabilité des sociétés d'État. En outre, un resserrement additionnel des avantages fiscaux pourrait découler des travaux de la Commission sur la fiscalité, qui déposera son rapport à l'automne.
Le sommet d'octobre prochain, dois-je le rappeler, permettra de prendre acte du résultat des réflexions amorcées dans les secteurs clés comme l'éducation, la sécurité du revenu et l'habitation sociale. Ce «sommet de la décision» constituera une occasion privilégiée pour la société québécoise de forger les consensus nécessaires sur les moyens à mettre en oeuvre pour concrétiser le calendrier d'élimination du déficit déjà convenu à la conférence de Québec.
Dès 1998-1999, nous commencerons à récolter les fruits de nos efforts. La période de décroissance des dépenses sera terminée et nous pourrons atteindre notre objectif de déficit zéro en 1999-2000 en maintenant le niveau des dépenses de programmes.
Abordons maintenant le second volet du défi qui s'impose au Québec aujourd'hui, celui de la création d'emplois et de l'atteinte de son potentiel économique, que je crois beaucoup plus élevé que ne le montre l'ensemble de nos résultats actuels. J'ai la profonde conviction qu'aller au bout de nos extraordinaires capacités économiques constitue la vraie solution à long terme pour créer un Québec riche et solidaire.
Le Québec peut s'enorgueillir d'avoir été un des rouages importants de l'intégration économique nord-américaine. Notre choix d'ouverture des frontières, tous partis confondus, d'ailleurs, est largement validé aujourd'hui. Les exportations québécoises ont augmenté de 20 % par an au cours des trois dernières années. Elles ont littéralement traîné notre économie vers l'avant. L'année 1995 est une année record: nous avons vendu à l'étranger pour près de 50 000 000 000 $.
Malgré cette performance le Mexique, c'est pour l'an prochain nous savons, hélas, que nous sommes loin de créer assez et suffisamment d'emplois.
Nous faisons face au même dilemme que tous les pays industrialisés: nous misons sur la hausse de notre savoir-faire plutôt que sur la baisse des salaires. Comme le constate le secrétaire américain au Travail, Robert Reich, «la mondialisation est en train de créer, dans nos démocraties industrielles, une sorte de sous-classe de gens démoralisés et appauvris». Le même constat tragique s'est dégagé du dernier Forum de Davos et à la rencontre du G 7 à Lille, le mois dernier.
Le défi qui se pose donc ici comme dans tout le monde industrialisé, c'est de permettre à chacun de profiter des bénéfices de la mondialisation en minimisant les inconvénients de ces bouleversements qui échappent à notre contrôle. Ce passage délicat exige une dose élevée de solidarité entre les citoyens et de concertation économique pour laquelle, nous l'avons vu, le Québec a pris une avance certaine sur la plupart des autres pays concurrents.
Tout au long de la route qui a mené de Pointe-au-Pic à Québec, le modèle québécois s'est affirmé et raffermi. L'État ne cherche pas à tout faire lui-même. Il définit une vision globale et s'efforce de coordonner l'action des entreprises, des travailleurs et des agents communautaires afin de provoquer les synergies créatrices et les solidarités nécessaires.
En matière de concertation, les sociétés d'État du Québec doivent donner l'exemple. Leur chiffre d'affaires consolidé totalise maintenant 12 000 000 000 $, ce qui représente un formidable instrument de développement économique au service de notre collectivité.
Une de leurs fonctions majeures consiste à lancer des projets d'investissement en partenariat avec le secteur privé. Notre gouvernement entend s'assurer que cela demeure une priorité.
Jusqu'à ce jour, par ailleurs, nos sociétés d'État ont agi plutôt indépendamment les unes des autres. Ce faisant, elles se sont privées de la pleine synergie qui aurait pu résulter de la mise en commun de leurs efforts. C'est une omission que nous devons corriger.
J'ai donc formé récemment un regroupement permanent des dirigeants des sociétés d'État afin d'assurer la cohésion de leurs actions, aussi bien entre elles qu'avec les orientations économiques du gouvernement, de stimuler le potentiel de synergie de leurs interventions et de les doter, si nécessaire, de services communs à des fins d'efficacité et d'économies d'échelle pour mieux affronter la mondialisation.
Nous allons amener le secteur public, industriel et commercial à travailler un peu à la manière de ces grands «keiretsu» japonais: agir de concert tout en conservant la liberté d'action de chaque entreprise.
Contrairement à l'entreprise privée qui doit, parfois sous peine de faillite, être rentable d'un trimestre à l'autre, l'État, lui, dispose de plus de temps et de plus de perspective sur les événements. C'est d'ailleurs ce qu'évoque brillamment le titre de l'ouvrage de Philippe Delmas «Le maître des horloges». L'État étant assuré de durer dans le temps, il est de son essence comme de son devoir d'assurer les liens entre les individus, d'assurer le bien commun, pour les gens d'aujourd'hui comme pour ceux de demain.
Notre entreprise de concertation est encore imparfaite. Le présent budget contribue, à sa manière, à la compléter et à la concrétiser. On sait que l'État ne peut plus et ne doit pas chercher à relancer l'économie à coup de millions générateurs d'emprunts ou de taxes néfastes. Il faut repenser complètement notre régime d'aide aux entreprises. Il faut redéployer nos moyens d'intervention et cibler beaucoup plus finement nos actions. Voilà pourquoi l'ensemble des mesures d'appui au développement économique que je m'apprête à annoncer utilisent davantage la dose homéopathique que l'injection massive et cherchent le maximum d'impact pour un minimum de dépenses.
Notre gouvernement va donc consacrer à des actions économiques stratégiques 42 000 000 $ de dépenses directes. Dans plusieurs cas, les formules de garanties de prêts que nous financerons produiront un effet de levier majeur sur l'activité économique. Notre objectif premier consiste à donner les encouragements absolument nécessaires pour: favoriser les jeunes, leur esprit d'entreprise et leur insertion sur le marché du travail; encourager les petites et moyennes entreprises créatrices d'emplois; appuyer les entreprises sur les marchés d'exportation et la prospection d'investissements étrangers; soutenir le développement des régions; stimuler l'économie locale.
Les résultats ultimes viendront beaucoup plus du dynamisme des entreprises, de leur capacité à innover et de leur excellence que de toutes les mesures que je pourrais annoncer aujourd'hui. Mais, dans les créneaux que je viens de mentionner, l'appui collectif s'avère quand même indispensable.
C'est aussi le cas pour assurer à nos entreprises, comme à l'ensemble de la population, un accès à l'autoroute de l'information qui accroisse leur capacité de se développer et de faire face à la concurrence, dans la foulée des initiatives prises par le gouvernement au cours des dernières années.
(17 h 10)
Pour réaliser ces objectifs, notre gouvernement poursuivra, sous la direction de notre collègue de la Culture et des Communications, les activités du Fonds de l'autoroute de l'information. J'annonce que le Fonds disposera de 20 000 000 $ additionnels pour chacune des trois années prochaines.
Des voix: Bravo!
M. Landry (Verchères): Cette aide servira à soutenir des projets innovateurs susceptibles de développer des entreprises et de créer des emplois dans le domaine des technologies de l'information. Elle contribuera à améliorer la compétitivité des entreprises, particulièrement des PME en région, le ministère de l'Industrie et du Commerce participant à l'émergence de ces projets prometteurs.
L'entrée des jeunes sur le marché du travail présente parfois d'énormes difficultés. Nous avons voulu, dans ce budget, leur accorder une attention particulière, par notre orientation générale tout d'abord, qui est de réduire l'endettement collectif qu'ils auront à assumer, mais aussi par des mesures dont ils seront les premiers bénéficiaires.
Notre gouvernement compte énormément sur le développement des capacités d'entrepreneurship des Québécois et des Québécoises pour stimuler la création d'emplois. Nous savons que ce talent est particulièrement répandu chez les jeunes. À preuve, les moins de 35 ans ont créé près de la moitié des quelque 10 000 nouvelles entreprises mises en marche avec l'aide du plan Paillé, lancé par le député de Prévost.
Des voix: Bravo!
M. Landry (Verchères): Rappelons que ces nouvelles entreprises auront contribué d'ici trois ans à la création de 52 000 emplois; 10 000 entreprises, 52 000 emplois, voilà un succès phénoménal!
Cet élan doit être poursuivi et encouragé. Je propose donc aujourd'hui d'aller plus loin pour soutenir l'entrepreneurship au Québec et en particulier celui des jeunes.
C'est ainsi que le budget annuel du programme Jeunes promoteurs sera augmenté de 2 500 000 $ au cours des trois prochaines années. En outre, le plafond de 100 000 $, qui limite présentement le coût des projets admissibles, sera éliminé.
De plus, j'annonce qu'à compter d'aujourd'hui toutes les nouvelles petites et moyennes entreprises bénéficieront d'un congé fiscal de trois ans en matière de cotisation au Fonds des services de santé. Désormais, donc, aucun impôt ne sera exigé d'une nouvelle petite entreprise pendant ses trois premières années d'existence.
Des voix: Bravo!
M. Landry (Verchères): Par ailleurs, tous les intervenants en démarrage d'entreprises sont unanimes à reconnaître les défis que doivent relever les entreprises nouvellement créées. Elles ont besoin d'un soutien technique et financier pour traverser leur première phase de croissance.
D'une part, j'annonce l'octroi de ressources additionnelles de 2 500 000 $ annuellement pour trois ans aux services d'aide aux jeunes entrepreneurs, les SAJE, que nous avons créés en 1985 et qui ont connu un très grand succès. Avec ce budget, ils pourront assurer le suivi adéquat d'un plus grand nombre d'entreprises dans toutes les régions du Québec.
D'autre part, une enveloppe de garanties de prêts de 20 000 000 $ sera consacrée par la SDI à des entreprises particulièrement montantes et dynamiques ayant déjà bénéficié de notre plan de démarrage d'entreprises et ayant atteint les objectifs de leur plan d'affaires initial. Nous leur viendrons ainsi en aide à une étape de leur croissance où le financement est souvent difficile à obtenir. Cela s'appelle reconnaître l'excellence.
Des voix: Bravo!
M. Landry (Verchères): Je désire en outre simplifier la vie aux personnes qui souhaitent démarrer une entreprise. C'est pourquoi j'ai demandé à la Fondation québécoise de l'entrepreneurship et à son président, M. Paul-Arthur Fortin, de procéder, avec notre aide, à la création d'un groupe de vigie de la réglementation relative au démarrage des entreprises.
Notre gouvernement entend de plus poursuivre ses efforts pour faciliter l'intégration des jeunes au marché du travail. Rappelons que le Québec s'est doté d'un crédit d'impôt pour les stages en entreprise dont le mérite est d'établir des ponts entre l'école et l'emploi. J'annonce qu'il sera élargi pour couvrir les stagiaires inscrits au secondaire dans des cheminements particuliers de formation qui visent l'insertion sociale et professionnelle des jeunes.
Enfin, nous bonifierons le Programme de soutien à l'emploi stratégique, le fameux PSES, qui facilite l'insertion dans les entreprises de personnel scientifique et technologique, en grande partie des jeunes diplômés. C'est un programme qui a fait ses preuves mais qui devait prendre fin. Il sera prolongé, et les crédits nécessaires seront accordés pour créer 600 emplois additionnels en 1996-1997.
L'État, on le sait, se doit de créer un environnement favorable au développement des PME, parce qu'elles sont les plus grandes créatrices d'emplois.
La réglementation impose aujourd'hui des exigences énormes aux PME, sous forme de permis à obtenir, de paperasse à remplir, de délais d'autorisation et de contrôles à subir.
Ce fardeau nuit à la compétitivité des petites et moyennes entreprises et décourage l'entrepreneurship et la création d'emplois. Notre gouvernement est fermement déterminé à supprimer les entraves injustifiées et à réduire au minimum les irritants administratifs, sans sacrifier cependant les grands objectifs d'équité, de santé, de sécurité et de protection des travailleurs, des consommateurs ou de l'environnement.
J'annonce donc, à cet effet, notre engagement à éliminer d'ici deux ans un demi-million de permis et autorisations.
Ainsi, la Régie du bâtiment éliminera environ 100 000 permis accordés annuellement pour des travaux en électricité. De son côté, la Régie des alcools, des courses et des jeux réduira de 32 000 à 24 000 le nombre de ses permis émis aux restaurants, épiceries, dépanneurs et bars.
Dans le cadre de cette opération majeure d'allégement réglementaire et administratif, notre gouvernement fusionnera certains permis et instaurera des guichets uniques de perception des droits dans les ministères ou organismes concernés. C'est ainsi que le ministère des Transports, avec la collaboration de la Commission des transports du Québec et de la Société de l'assurance automobile du Québec, mettra en place un guichet unique qui facilitera la vie aux transporteurs.
Par ailleurs, les délais actuels pour obtenir un certificat d'autorisation en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement retardent les projets d'implantation, d'expansion ou de modernisation de nombreuses entreprises. Mon collègue le ministre de l'Environnement et de la Faune a pris les dispositions nécessaires pour remédier à la situation. Dorénavant, la plupart des certificats d'autorisation seront délivrés dans un délai maximal de 90 jours suivant le dépôt de la demande, sauf pour les projets nécessitant une expertise technique particulière et ceux assujettis à la procédure d'examen et d'évaluation des impacts sur l'environnement.
De plus, notre gouvernement a entrepris un effort particulier pour simplifier l'aide aux entreprises: il s'agit d'éviter le cumul d'aide et les situations de chevauchement entre les programmes. Les entreprises ne se perdront plus dans des dédales administratifs. Soulignons, par exemple, qu'avec cette réforme le nombre de programmes d'aide passe de 125 l'an dernier à 36 cette année. Les choix budgétaires ont été difficiles, mais je suis heureux de dire qu'ils ont permis de préserver tout le soutien nécessaire aux petites et moyennes entreprises.
La Société de développement industriel sera réformée dans le même esprit.
J'annonce aujourd'hui que le nombre de programmes de la SDI passera de huit à deux, l'un pour les entreprises, l'autre pour les coopératives. La Société s'occupera en priorité des PME en croissance et de la création de nouvelles entreprises.
Désormais, ses interventions se feront principalement sous forme de garanties de prêts plutôt que de prêts participatifs. Ainsi, l'intervention gouvernementale en faveur des PME sera basée sur un partage de risque avec les institutions financières. Ces dernières, grâce à leur réseau de succursales, rapprocheront donc la SDI des entreprises dans toutes les régions du Québec.
Le gouvernement du Québec procède actuellement à la révision de sa politique en science et en technologie, ce qui n'avait pas été fait depuis 1982, c'est-à-dire depuis la publication du «Virage technologique». Les orientations de la nouvelle politique seront dévoilées en juin prochain, après consultation du Conseil de la science et de la technologie.
(17 h 20)
Toutefois, parce que certains volets du crédit d'impôt pour la recherche et le développement viennent à échéance le 31 décembre 1996, je me dois d'informer immédiatement les milieux industriels et scientifiques des règles qui s'appliqueront. Je confirme donc dès maintenant que le crédit d'impôt pour la recherche et le développement demeurera la pierre angulaire de notre stratégie d'intervention en matière de science et de technologie.
J'annonce qu'à compter d'aujourd'hui le crédit d'impôt pour la recherche et le développement deviendra permanent, qu'il sera pleinement remboursable et qu'il sera bonifié à l'intention des entreprises de taille moyenne.
En effet, pour les entreprises qui effectuent la recherche et le développement à l'interne, le taux de 40 % n'est présentement octroyé qu'à celles dont l'actif est inférieur à 25 000 000 $. Les autres ont droit à 20 %. À l'avenir, les entreprises de taille moyenne bénéficieront de taux de crédit d'impôt qui s'échelonneront de 20 % à 40 % lorsque leur actif s'établira entre 50 000 000 $ et 25 000 000 $.
Ces mesures permettront notamment d'appuyer les efforts de la Société générale de financement pour implanter ici une industrie de fabrication de semi-conducteurs ainsi que des industries connexes du domaine de la microélectronique.
Les vignerons québécois ont prouvé que l'on pouvait, par de courageux efforts et de judicieuses techniques, produire ici du vin, et qu'il pouvait être justifié d'appeler autrefois l'île d'Orléans l'île de Bacchus. Sans avoir la prétention de faire du Québec une puissance vinicole, ce budget apporte des modifications qui visent à leur donner un meilleur accès aux marchés de consommation.
Ainsi, les consommateurs pourront déguster sur place les produits des producteurs artisans et des microbrasseurs sans que ces derniers soient obligés d'obtenir un permis de restaurant. Les producteurs artisans pourront également vendre leurs produits aux établissements accrédités de leur région touristique et lors d'événements régionaux à caractère agroalimentaire sans devoir subir la majoration appliquée par la Société des alcools.
Il ne manquerait plus, après l'aide que nous apportons aujourd'hui au vin, que le gouvernement fédéral, en une grossière atteinte au bon goût, nous coupe le fromage...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Landry (Verchères): ...et vienne faire disparaître plus d'artisans fromagers que nous n'allons créer d'artisans vignerons.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Landry (Verchères): Ce budget apporte aussi un soutien particulier aux exportateurs. Notre économie, nous le savons, est résolument tournée vers l'extérieur. C'est ainsi que les exportations internationales de marchandises sont passées de 17 % du PIB à 28 % au cours des cinq dernières années. Actuellement, 3 000 PME manufacturières québécoises exportent. C'est peu par rapport à des économies de taille comparable comme la Suède ou la Finlande. Notre gouvernement s'est donc donné comme objectif d'amener 2 000 nouvelles PME à exporter d'ici l'an 2000.
Nous entendons cibler en priorité les PME, mais sans oublier, on le verra, les besoins spécifiques des autres entreprises, même des grandes, d'autant plus que leurs succès rejaillissent sur les PME sous-traitantes qui exportent par leur intermédiaire.
J'annonce tout d'abord qu'avec la collaboration de la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce je procéderai à une reconfiguration des services offerts aux exportateurs.
À la base, il s'agit de pousser au maximum le travail de sensibilisation pour intéresser plus d'entreprises à l'exportation. Ce travail s'appuiera sur les bureaux régionaux du ministère et sur les commissaires à l'exportation en région, donc le plus près possible de ceux que nous voulons rejoindre. De plus, nous mettrons en place un système informatisé de gestion de l'information nécessaire aux exportateurs. À ce niveau, le gouvernement créera une porte d'entrée unique pour toutes les entreprises désirant avoir accès à son expertise et à ses services en commerce international.
À l'étranger, on sait qu'à notre grand regret nous avons dû fermer 13 des représentations du Québec. Nous utiliserons désormais des moyens plus modestes, mais aussi plus novateurs: formation d'un réseau de personnes-contacts à l'étranger chargées sur base contractuelle de représenter nos intérêts, participation accrue à des missions et à des expositions à l'étranger, partage de locaux et de moyens avec le gouvernement fédéral et l'entreprise privée.
C'est ainsi que nous avons négocié une entente de collaboration avec la Banque Nationale du Canada pour les postes d'Atlanta, de Boston, de Chicago, de Los Angeles et de Milan et une autre avec la Caisse de dépôt et placement du Québec pour le Viêt-nam. Le député de Richelieu et ministre des Relations internationales nous aidera à poursuivre dans cette voie, pour maintenir la présence québécoise à l'étranger sur de nouvelles bases, mais au même niveau d'intensité qu'auparavant. En ce qui concerne notre entente avec la Banque Nationale, les bureaux que je viens d'énumérer seront ouverts demain matin pour faire affaire avec la clientèle.
Une voix: Bravo!
M. Landry (Verchères): Pour accroître les exportations, la présence de personnel qualifié constitue un préalable pour sensibiliser et préparer les entreprises ayant peu d'expérience dans ce domaine.
Nous encourageons donc les entreprises à recruter des experts en marketing international en ajoutant un volet au programme PSES. Nous favoriserons l'embauche de commissaires à l'exportation dans les associations sectorielles et dans les régions qui en expriment le besoin, pour ajouter aux sept postes que nous avons créés depuis 15 mois. Nous organiserons des stages au Bureau de promotion des exportations pour les diplômés en commerce international.
Un autre volet majeur de notre politique concerne le financement. Tous les pays exportateurs sérieux appuient leurs entreprises avec des organismes de financement. Nous devons nous assurer que nos entreprises seront aussi bien, voire mieux placées que n'importe quel concurrent dans le monde.
J'annonce donc la création, au sein de la Société de développement industriel, d'une entité spécialisée, vouée spécifiquement au financement des exportations, qui agira en complémentarité avec les organismes fédéraux déjà à l'oeuvre dans ce domaine. Cette entité pourra garantir annuellement 50 000 000 $ de prêts, ce qui permettra de soutenir pour 1 000 000 000 $ d'exportations sur trois ans et de créer ou maintenir des milliers d'emplois.
Les mesures que j'annonce aujourd'hui pour favoriser les exportations nécessiteront des crédits additionnels de 18 000 000 $ en 1996-1997 et de 23 000 000 $ en 1997-1998.
Par ailleurs, partout dans le monde les pays appuient leur industrie aéronautique, généralement en facilitant l'obtention d'un financement avantageux aux acheteurs des appareils qu'elle fabrique. Nous devons donner à l'industrie aéronautique québécoise, dont l'importance est stratégique pour le développement économique de Montréal en particulier, les moyens de lutter à armes égales.
J'annonce donc la mise en place prochaine d'un montage financier, établi en partenariat avec le secteur privé, qui facilitera la vente d'appareils construits au Québec et le maintien de nombreux emplois de grande qualité.
Sans incidence budgétaire à court terme et à moyen terme, l'instrument financier que nous avons développé permettra à une entreprise bien de chez nous de vendre jusqu'à 75 appareils, d'une valeur totale de 1 800 000 000 $.
Nous faisons des avions depuis longtemps, mais des bateaux depuis toujours. Cependant, on ne le sait que trop, l'industrie de la construction navale du Québec peut de moins en moins compter sur le gouvernement fédéral. C'est pourquoi le présent budget vient mettre en place une véritable politique maritime qui permettra au Québec de tirer son épingle du jeu sur les marchés internationaux.
J'annonce tout d'abord l'instauration d'un nouveau crédit d'impôt pour la construction de navires dans les chantiers maritimes du Québec. De plus, je confie à la SDI le soin d'administrer un programme de soutien financier pour l'acquisition de navires construits au Québec, qui s'inspire de celui appliqué avec succès par les États-Unis. Ces navires donneront aussi droit à un congé de taxe sur le capital s'ils sont utilisés pour le commerce international. Enfin, j'annonce la mise en place d'un congé fiscal pour les marins québécois qui travaillent sur un navire affecté au marché international. Il ne sera pas dit que le Québec a oublié qu'il est le pays du «fleuve aux grandes eaux».
Des voix: Bravo!
M. Landry (Verchères): Par ailleurs, attirer ici des entreprises transnationales constitue très souvent une excellente façon de créer des emplois: non seulement des emplois directs, mais aussi une foule d'emplois indirects grâce à l'impact de leur technologie, leur dynamisme et leurs achats dans nos PME.
(17 h 30)
Une des faiblesses du Québec dans la prospection des investissements est la multiplicité des répondants, dont beaucoup ne peuvent réagir en temps utile faute de réels pouvoirs de décision. Un investisseur éventuel doit se débrouiller tout seul à travers le dédale des ministères et organismes susceptibles de lui fournir de l'aide ou exiger de lui un permis, un droit ou une redevance.
Pour y remédier, j'annonce la création d'une équipe de choc qui prospectera des investissements étrangers, sous la responsabilité du ministère de l'Industrie et du Commerce, et qui pourra prendre des engagements au nom du gouvernement.
Nous lui fournirons les instruments de travail les plus modernes. Les informations nécessaires seront disponibles sur support électronique et évidemment sur le réseau Internet, pour nos représentants comme pour leurs interlocuteurs.
Tout bon vendeur qui va voir un client sait que, pour conclure la vente, il doit avoir tous ses dépliants dans sa valise. Nos émissaires à l'étranger auront dans la leur toute l'information nécessaire pour vendre aux investisseurs le potentiel et les attraits du Québec. Nous aurons alors complété la valise diplomatique par une valise économique.
On sait que la qualité des infrastructures de transport constitue un élément stratégique pour toute économie ouverte vers l'extérieur. À ce titre, il est essentiel de disposer d'un réseau routier adéquat et sécuritaire.
Après concertation avec notre collègue des Transports, une enveloppe additionnelle de 75 000 000 $ par rapport à ce qui était prévu dans le livre des crédits sera ajoutée au budget du nouveau fonds spécial de conservation et d'amélioration du réseau routier. On doublera ainsi le nombre de kilomètres de route faisant l'objet de travaux. La création du fonds spécial et les travaux routiers supplémentaires annoncés aujourd'hui constituent donc une première étape vers l'élaboration d'un plan d'investissement visant à doter le Québec d'un réseau routier de la qualité requise pour favoriser le commerce et les déplacements.
L'agriculture constitue une industrie d'importance majeure dans plusieurs régions du Québec. C'est pourquoi le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation mettra en place un programme de garantie de prêt aux coopératives de producteurs de bovins de boucherie. Cette mesure augmentera l'autonomie et la diversification des entreprises agricoles tout en favorisant le développement régional.
L'industrie minière est, elle aussi, stratégique pour plusieurs régions du Québec. C'est pourquoi j'annonce la prolongation pour deux ans du régime des actions accréditives, qui vise à faciliter son financement.
Une voix: Bravo! Bravo!
Une voix: Très beau!
M. Landry (Verchères): De plus, je suis heureux d'annoncer que, dorénavant, l'aide fiscale accordée à l'exploration pétrolière et gazière sera bonifiée pour l'amener au même niveau que l'aide à l'industrie minière, la déduction passant de 125 % à 175 %.
Certaines régions du Québec font face à d'importantes difficultés. Dans ces milieux économiquement faibles, un coup de pouce bien adapté à certaines initiatives peut créer un impact significatif. J'annonce donc que le ministre responsable du Développement des régions disposera de 15 000 000 $ additionnels sur trois ans pour appuyer des projets créateurs d'emplois dans les villes, municipalités et quartiers défavorisés du Québec.
D'autres régions s'en tirent par ailleurs très bien. Un certain nombre de localités, misant sur leurs ressources et leurs compétences, ont réussi à enclencher et à soutenir un processus de développement dynamique qui les amène parfois même au plein emploi. Il existe certainement des facteurs communs pour expliquer leur succès.
À ma demande, M. Jacques Proulx, président de Solidarité rurale, a accepté de mettre en place un groupe de travail qui identifiera ces facteurs de succès et proposera des moyens concrets d'en faire bénéficier le plus grand nombre possible de communautés locales et de dépister les projets en gestation. Cette opération appelée «Villages prospères» vise à rendre contagieuse la réussite des communautés locales qui ont éliminé le chômage.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Landry (Verchères): La région la plus importante pour le développement économique du Québec est celle de Montréal. La table de travail particulière sur Montréal, issue de la conférence de Québec, servira, en ce sens, le Québec tout entier.
Le ministre d'État à la Métropole, dont la nomination fut si positivement saluée, est parfaitement placé pour appuyer ces travaux. C'est pourquoi nous proposons un projet de loi par lequel le ministre agira comme catalyseur et rassembleur dans toutes les actions concernant la métropole. Il disposera des moyens d'assurer la cohérence des actions gouvernementales et le pouvoir d'élaborer des orientations politiques favorables à son épanouissement.
On se souviendra que le concept d'une place financière internationale à Montréal est né en 1982 d'une concertation entre le monde des affaires et le gouvernement du Québec pour relancer le rôle de Montréal comme pôle financier. Les centres financiers internationaux permettent d'effectuer des transactions financières à caractère international en bénéficiant de certains privilèges fiscaux. On peut maintenant se féliciter du fait que les 38 CFI accrédités actuellement emploient 400 personnes.
Mais il faut donner un second souffle à ce concept pour canaliser vers Montréal le plus d'activités financières possible et pour que s'y développent diverses expertises dans le domaine financier. C'est pourquoi je déposerai prochainement un projet de loi relatif aux centres financiers internationaux. Non seulement nous allons élargir et mieux cibler les activités qui peuvent être porteuses d'avenir pour le développement de Montréal, mais nous allons préciser les règles d'application aux centres financiers internationaux et mieux encadrer leur fonctionnement.
Cet exercice sera également l'occasion de réaménager la fiscalité qui les régit pour qu'elle encourage plus fortement le développement et le maintien d'activités financières à caractère international à Montréal.
Une voix: Bravo!
M. Landry (Verchères): Ce projet ne produira cependant les dividendes escomptés que si, contrairement à ce qui s'est passé il y a 10 ans, le gouvernement fédéral accorde cette fois-ci toute sa collaboration au niveau de la fiscalité et de la réglementation des institutions financières.
Comme je l'ai souligné précédemment, c'est tout le Québec qui, au cours des prochains mois, doit s'engager dans un effort confiant et optimiste de lutte au chômage. Le chantier sur l'économie et l'emploi, inauguré lors de la conférence de Québec, ainsi que les trois tables de travail formées à cette occasion constituent des manifestations concrètes de notre volonté commune de créer des emplois. Nous savons gré à MM. Béland, Bérard et Coutu et à Mme Neamtan d'avoir accepté de servir la nation en assumant leurs présidences respectives. Ce budget vient ouvrir une voie que nous croyons prometteuse pour l'une de ces tables en particulier.
Notre société subit des transformations profondes qui créent de nombreux besoins en matière de services à domicile tels que l'entretien ménager, la garde d'enfants ou de parents âgés et les tâches généralement associées au maintien à domicile. Mais les mécanismes traditionnels de l'économie de marché sont mal adaptés à la création des emplois permettant de répondre à ces nouveaux besoins. Actuellement, ils sont comblés tantôt par le bénévolat, tantôt par des emplois précaires, tantôt par du travail au noir.
Les participants à la conférence de Québec ont reconnu l'importance de corriger les faiblesses et de capitaliser sur les forces de ce secteur en gestation, l'économie sociale, en créant un table de concertation sur la question.
Notre gouvernement entend soutenir ces travaux en proposant un moyen concret pour faciliter la création d'emplois dans ce secteur: le chèque emploi service, qui est à la fois un mode de paiement très simplifié pour l'employeur et un instrument de couverture sociale pour l'employé. Nous croyons que beaucoup de contribuables qui emploient au noir un jardinier ou une gardienne, par exemple, ne tiennent pas à frauder le fisc mais veulent surtout éviter les tracasseries administratives liées au statut d'employeur.
Le chèque emploi service, tel qu'il fonctionne avec succès en France, est aussi simple à utiliser qu'un chèque en deux volets: l'employeur paie son employé avec la première partie du chèque, établie au montant de son salaire net; il remplit la deuxième partie du chèque en inscrivant simplement le nom, le numéro d'assurance sociale et la rémunération de l'employé et l'envoie à un centre de traitement qui joue pour lui le rôle d'un service de paie. C'est cette institution qui honore le chèque émis au salarié, calcule et verse au gouvernement les charges sociales, s'assurant ainsi que le travailleur bénéficie de la protection sociale qui en découle en matière d'accidents de travail, de chômage et de retraite.
(17 h 40)
Une voix: Bravo!
M. Landry (Verchères): J'annonce, avec la collaboration d'institutions financières qui ont déjà accepté de participer au projet, que nous avons l'intention de mettre en place un mécanisme de ce type. Dans un premier temps, nous souhaitons le mettre dès cet automne à la disposition des personnes qui reçoivent du gouvernement une allocation de maintien à domicile. Ce chèque emploi service pourrait devenir rapidement un instrument majeur au service du développement de l'économie sociale, pour le plus grand bénéfice des groupes communautaires, des travailleurs impliqués et de ceux qui les emploient. L'allégement des exigences administratives facilitera la création d'emplois. En même temps, nous cesserons toute complicité, même indirecte, avec l'embauche de personnel au noir, évitant ainsi de rendre l'économie sociale antisociale.
Voilà une piste, donc, pour les travaux de Mme Neamtan et de son groupe. Le grand chantier de l'économie et de l'emploi lancé à la conférence de Québec en explorera beaucoup d'autres qui lui sont suggérées de toutes parts. La Commission sur la fiscalité contribuera à réunir les conditions favorables à la création d'emplois, au partage du travail, et à libérer autant que possible les énergies créatrices des entreprises. Ce foisonnement d'idées et de réflexions débouchera au sommet de l'automne sur un plan d'action qui enclenchera une série de réformes et de réajustements pour faire reculer le chômage partout au Québec.
Pour nous, souverainistes, l'assainissement des finances publiques, ce n'est pas une fin en soi, c'est un passage obligé pour continuer sur la voie du progrès collectif. Nous sommes en politique parce que nous aimons notre patrie, nous souhaitons la faire entrer dans le concert des nations et nous voulons que tous ses enfants puissent se réaliser dans la dignité. La création et le partage de l'emploi sont une condition de cette dignité. La préservation des solidarités sociales en est une autre.
Nous allons faire le grand ménage dans les finances publiques pour que l'argent disponible serve à investir dans l'emploi et non à financer le déficit; pour que l'impôt ne s'alourdisse pas au point de tuer l'emploi; pour que la menace des décotes et des compressions budgétaires à répétition cesse d'assombrir notre avenir et celui de nos enfants. Éliminer le déficit ne nous obligera pas à démanteler nos solidarités essentielles, au contraire. Passer en revue toute la fiscalité, par exemple, doit être une occasion de faire progresser l'équité et la justice sociale.
Nous avons devant nous deux années budgétaires pénibles à traverser. Elles testeront le modèle québécois. Le Québec tout entier peut en sortir gagnant, plus dynamique, plus performant, plus solidaire et mieux préparé encore à assumer sa pleine souveraineté.
Motion proposant que l'Assemblée nationale approuve la politique budgétaire du gouvernement
Je propose donc que l'Assemblée nationale approuve la politique budgétaire du gouvernement. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo! Bravo!
Commentaires de l'opposition
Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le député de Laporte et porte-parole de l'opposition officielle pour ses commentaires. M. le député de Laporte.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: M. le Président, le budget présenté aujourd'hui aurait pu recevoir l'appui de l'opposition officielle si le gouvernement n'avait pas choisi la voie de la facilité pour atteindre ses objectifs de réduction du déficit. Autant l'opposition supporte l'effort de réduction du déficit, autant elle dénonce la pluie de nouveaux tarifs, de nouvelles taxes déguisées qui s'abat aujourd'hui ou qui s'abattra demain à l'égard des particuliers et des entreprises québécoises.
En effet, après l'annonce de la hausse de 2,5 % des tarifs d'électricité, après s'être approprié ou avoir enlevé aux municipalités 115 000 000 $, les obligeant à augmenter les taxes municipales, après avoir forcé les commissions scolaires à augmenter les taxes foncières de 77 000 000 $, après avoir imposé une nouvelle taxe-médicaments de 196 000 000 $ à compter du 1er janvier prochain, voilà que le gouvernement, au mépris de ses promesses, vient s'attaquer aux personnes seules et aux personnes âgées en annulant, à partir de 26 000 $, les crédits d'impôt pour personne vivant seule, en raison d'âge et pour revenus de retraite et en limitant ceux pour frais médicaux. Mais pourquoi le gouvernement a-t-il décidé de s'attaquer aux personnes âgées plutôt qu'aux autres? Mince consolation, cette pluie de taxes ne s'abattra sur elles que l'an prochain ou encore après les prochaines élections.
La grande déception de ce budget est sans contredit le déficit d'idées pour la relance de l'économie et surtout de l'emploi. Face à une croissance économique quasi nulle, le gouvernement Bouchard baisse les bras. Le gouvernement ne consacre cette année que 42 000 000 $ de plus à l'emploi et à l'économie, soit un millième de ses dépenses. Autrement dit, moins que rien.
Que dire du discours vide et creux sur l'avenir de Montréal, qui ne permet en rien la relance de la métropole. Le gouvernement avoue qu'il ne peut pas marcher et mâcher de la gomme en même temps et ne peut pas, en même temps, s'attaquer au redressement des finances publiques et à la création d'emplois. Le gouvernement a donc abandonné les Québécois à leur chômage. Prétendant que l'assainissement des finances publiques est une condition nécessaire à la création d'emplois, il annonce pour l'avenir, dans ses perspectives économiques détaillées, une augmentation du taux de chômage à tous les ans, si bien qu'il avoue candidement que, même après l'opération assainissement des finances publiques, le taux de chômage au Québec sera toujours aussi élevé qu'aujourd'hui. Au fond, ce gouvernement annonce que l'emploi n'est pas sa préoccupation, du moins pas avant le prochain millénaire. M. le Président, les Québécois ont le coeur à l'ouvrage, mais certainement pas leur gouvernement.
Le Discours sur le budget foisonne d'aveux troublants quant aux perspectives économiques. L'Annexe D, page 4, nous informe de l'indice de confiance des consommateurs. On y dit que «la confiance des ménages, après avoir affiché une certaine remontée en 1994 sous un autre gouvernement est retombée à des niveaux rappelant ceux observés lors de la récession de 1990-1991». L'instabilité politique a directement contribué à l'effritement de la confiance des Québécois, et cela se traduit malheureusement par un recul de 280 000 000 $ des revenus anticipés provenant de la taxe de vente au détail pour le gouvernement. Quel aveu! La prévision de croissance du produit intérieur brut de 1 % anticipée par le ministre des Finances n'est pas une prévision conservatrice, elle est d'abord le constat implacable d'une économie québécoise qui n'atteint pas son plein potentiel.
(17 h 50)
Quant aux entreprises du Québec, on doit constater qu'elles ont été leurrées par le gouvernement péquiste. Après leur avoir promis, dans le budget de l'an dernier, le plein remboursement de la TVQ sur les intrants pour cette année, aujourd'hui le gouvernement Bouchard fait marche arrière, rompt avec la parole donnée et reporte à l'an prochain la moitié de cet engagement budgétaire. Résultat: 150 000 000 $ de moins pour les entreprises du Québec aujourd'hui.
Sénèque aurait pu dire: Qui a beaucoup voyagé a beaucoup retenu. Le ministre des Finances, ex-grand commis voyageur de l'État, a retenu, pour son fonds spécial d'amélioration du réseau routier, une formule ancienne servie à la moderne: Pavez aujourd'hui, payez plus tard. 250 000 000 $ pour un bonheur d'occasion, le financement à long terme d'une dépense qui en a toujours été une d'opérations courantes. Tant qu'à y être, ce gouvernement va-t-il pousser le ridicule jusqu'à financer sur cinq ans les billets d'avion du ministre des Finances sous prétexte que ses voyages risquent de générer certains bénéfices à long terme?
M. le Président, au chapitre des revenus autonomes du gouvernement, en matière d'impôt sur les revenus des particuliers et des sociétés, comment peut-on expliquer que, avec une croissance de 1,8 % du PIB, ses revenus ont augmenté de 4 % l'an dernier et que, cette année, une croissance réduite à 1 % procurerait des revenus additionnels de près de 6 %? 6%, j'ai bien dit. N'y a-t-il pas là un autre de ces débordements d'optimisme qui caractérisaient le budget de l'an dernier?
Dans le budget de l'an dernier, M. le Président, le ministre des Finances avait gravement surestimé les revenus autonomes du gouvernement, c'est-à-dire les impôts sur les revenus et les taxes de vente, manquant le coche par plus de 700 000 000 $. Et seuls les baisses des taux d'intérêt et, surtout surtout les transferts du gouvernement fédéral, en hausse de 564 000 000 $ par rapport aux prévisions, ont permis au gouvernement du Parti québécois de respecter ses objectifs budgétaires. Quel retour des choses! Les mécanismes du fédéralisme canadien viennent au secours des finances du Québec. Le jeu de la péréquation et d'autres programmes canadiens transfèrent 564 000 000 $ de plus que prévu au Québec et viennent corriger les erreurs de calcul de l'ex-ministre des Finances pour l'année écoulée. Et dire que le gouvernement du Parti québécois voudrait mettre un terme à l'expérience canadienne, renoncer à cette police d'assurance, à cette police d'assurance qui transfère près de 4 000 000 000 $ chaque année dans les coffres du Québec, soit plus de 10 % de ses revenus.
M. le Président, par ce budget, le gouvernement tente, trop timidement, de réparer les dommages qu'il a lui-même causés à l'économie québécoise, bref, de réparer ses pots cassés. Et comment? Tout d'abord, en négligeant de gouverner le Québec pendant plus d'un an, c'est-à-dire jusqu'au référendum; ensuite, en augmentant outrageusement les taxes sur la masse salariale dans le budget de l'an dernier, pour plus de 500 000 000 $, avant d'asséner le coup de grâce avec la taxe de 1 % sur les salaires pour l'adaptation de la main-d'oeuvre. Et, surtout, dommage suprême causé à l'économie québécoise par ce gouvernement et le parti dont il est issu, la menace constante, depuis plusieurs années, de séparer le Québec du Canada, véritable cancer qui ronge notre économie, fait fuir les investissements, provoque les fermetures d'usines, les déménagements de sièges sociaux, les déménagements d'entreprises et d'individus avec leurs cerveaux et avec leurs capitaux.
M. le Président, si le gouvernement, par ses propres actes ou par son inaction, n'avait pas lui-même assassiné l'économie québécoise, il n'aurait pas besoin d'investir aujourd'hui pour tenter de réanimer le moribond. Si on devait identifier une seule mesure miracle, une seule, pour relancer l'économie du Québec sur la voie de la prospérité, c'est bien celle-là. Si on voulait d'un seul coup faire surgir les emplois, la richesse, la prospérité au Québec, on n'aurait pas besoin de baguette magique. Faites disparaître pour de bon la menace de la séparation du Québec du Canada, faites disparaître l'incertitude et l'instabilité politique qu'elle génère, et vous n'aurez besoin d'aucune autre mesure pour stimuler l'économie, créer des emplois à profusion.
Des voix: Bravo!
M. Bourbeau: Le Québec deviendrait rapidement un véritable Eldorado.
Des voix: Ah!
M. Bourbeau: Mais nos amis d'en face n'aiment pas assez le Québec et les Québécois pour mettre fin à ce long chemin de croix que nous parcourons collectivement depuis 20 ans. Pendant combien de temps encore devrons-nous payer le prix de l'instabilité politique, de l'incertitude provoquée par cette épée de Damoclès qui pend au-dessus de nos têtes?
M. le Président, et je termine là-dessus, le plus tôt le Québec sera débarrassé de cette menace, le plus tôt nous redeviendrons prospères. Oui, merci.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à mardi prochain, 14 heures.
Le Président: Cette motion est adoptée? Alors, je voudrais, avant que les députés quittent l'Assemblée, vous rappeler les règles de décorum qui prévalent maintenant dans cette Assemblée.
(Fin de la séance à 17 h 59)