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(Onze heures huit minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Mmes, MM. les députés.
Nous allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
M. René Serge Larouche, député
indépendant
Avant de débuter nos travaux, je ferai part à
l'Assemblée que j'ai reçu de M. le député d'Anjou
la lettre suivante, dont je vous donne lecture. "M. le Président, j'ai
l'honneur de vous informer de ma décision de siéger
dorénavant comme député indépendant
représentant la population du comté d'Anjou a l'Assemblée
nationale du Québec. "Vous avez déjà reçu, comme
tous les autres collègues de cette Assemblée, copie de ma lettre
au premier ministre et chef du Parti libéral du Québec exposant
les raisons principales de ma démission du groupe parlementaire
ministériel. "En comptant sur votre bienveillance active habituelle pour
que mes droits et privilèges de député indépendant
soient respectés, je vous prie de recevoir, M. le Président,
l'expression de mes sentiments les plus cordiaux." Et c'est signé: M.
René Serge Larouche. Je dépose donc cette lettre.
M. le leader du gouvernement.
Entente intervenue entre les membres de
l'Assemblée nationale
M. Michel Pagé
M. Pagé: M. le Président, je voudrais, avant de
procéder aux affaires courantes et avec le consentement de cette
Chambre, vous faire part d'une entente intervenue entre les membres de
l'Assemblée nationale pour déroger à notre
règlement et fixer l'ordre et la procédure des travaux dans le
cadre de la séance spéciale convoquée à la demande
du premier ministre.
Selon l'entente intervenue, M. le Président, les travaux se
dérouleront dans l'ordre suivant pour ce jeudi, 30 août 1990. Aux
affaires courantes, nous entendrons une déclaration ministérielle
de M. le ministre des Finances. M. le ministre des Finances interviendra pour
une période de 15 minutes. Le porte-parole de l'Opposition officielle
interviendra pour une période de 20 minutes. M. le député
de Jacques-Cartier, pour 5 minutes. M. le député d'Anjou, pour 5
minutes. Et la réplique du ministre des Finances sera de 10 minutes.
Je procéderai, évidemment, immédiatement
après, à une motion... Je déposerai une motion sans
préavis concernant l'attribution d'un mandat à la commission du
budget et de l'administration avec entente comme quoi cette motion sera
adoptée sans débat.
À la présentation de projets de loi, M. le ministre
délégué aux Transports présentera le projet de loi
82, Loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre
Châteauguay et Sainte-Catherine.
Nous aborderons ensuite les dépôts de documents, de
rapports de commissions, de pétitions, qui sont conformes au
règlement de l'Assemblée nationale. Nous procéderons, par
la suite, à la période de questions et de réponses orales
des députés et des ministres. Votes reportés, avis
touchant les travaux des commissions, si nécessaire, et renseignements
sur les travaux de l'Assemblée.
Aux affaires du jour, nous aborderons l'étude en deuxième
lecture du projet de loi 82 concernant la construction du tronçon de
l'autoroute 30. Dans un premier temps, l'adoption du principe. Nous nous sommes
entendus sur l'alternance et le cadre des interventions où notre groupe
politique aura 120 minutes, l'Opposition officielle aura 120 minutes, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce aura 15 minutes, M. le
député d'Anjou aura 20 minutes et le ministre
délégué aux Transports procédera à sa
réplique.
La commission plénière nous conviera pour deux heures
d'étude et d'analyse en comité plénier. Nous
procéderons ensuite à la mise aux voix en commission
plénière des articles et des amendements dont la commission
n'aurait pas disposé, y compris les amendements que le ministre, qui
présente le projet de loi, n'aurait pas pu proposer en cours
d'étude. nous procéderons ensuite au rapport verbal à
vous, m. le président de l'assemblée, pour procéder
ensuite à l'adoption, en troisième lecture, du projet de loi.
nous nous sommes entendus que les intervenants par alternance, un
représentant du gouvernement, un représentant de l'opposition
officielle, m. le député de westmount pour cinq minutes et la
réplique du ministre.
Il y aura alors ajournement des travaux à une séance
subséquente au cours de laquelle l'Assemblée complétera
l'examen des affaires spécifiques pour lesquelles elle a
été convoquée en séance extraordinaire.
Il a été convenu, M. le Président, que les
dispositions du règlement de l'Assemblée nationale qui concernent
les mesures suivantes ne s'appliqueront pas. Les motions sans préavis,
sauf celle concernant l'attribution d'un mandat à la commission du
budget et de l'administration, les motions de censure, les débats
d'urgence, les
débats de fin de séance, les motions de scission, les
motions de report, les motions d'ajournement du débat à
l'Assemblée, ainsi que les motions d'ajournement du débat et de
suspension du débat en commission plénière, sauf dans tous
ces cas, celles que pourraient présenter le leader du gouvernement, un
leader adjoint ou un ministre.
Les motions proposant l'ajournement de l'Assemblée pour plus de
15 jours, sauf celles que pourraient présenter le leader du
gouvernement, un leader adjoint ou un ministre.
M. le Président, je dépose ce document pour que ça
puisse devenir un ordre de l'Assemblée.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement au
dépôt de ce document?
Des voix: Consentement.
Le Président: Consentement. Le document est
déposé.
M. Holden: M. le Président.
Le Président: Oui, M. le député de
Westmount.
M. Holden: Question de précision, M. le Président.
J'ai cru comprendre que l'entente vaut uniquement pour la loi 82 et que, pour
les prochaines étapes, il y aura d'autres consentements de
déposés.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: L'ordre de la Chambre d'aujourd'hui se
réfère à deux sujets inscrits à l'ordre du jour et,
d'ailleurs, qui sont prévus dans l'avis donné par le premier
ministre: l'étude du projet de loi 82 et son adoption et la
déclaration ministérielle du ministre des Finances, les
répliques et la motion d'envoi à la commission du budget et de
l'administration. À la fin du document que je viens de déposer
à l'Assemblée, j'ai dit qu'en fin de séance, aujourd'hui,
nous allions ajourner nos travaux à une journée
subséquente et je me propose, avec la bonne collaboration des
députés indépendants, de déposer un document - je
l'espère bien - analogue à celui que j'ai déposé
aujourd'hui, au cours de cette prochaine séance.
Le Président: Ça va? Maintenant, est-ce qu'il y a
consentement à la présentation de la motion du leader du
gouvernement aux fins de fixer l'ordre et la procédure des travaux en
séance extraordinaire, conformément au document
déposé? Y a-t-il consentement?
M. Chevrette: Consentement.
Le Président: Consentement. Est-ce que cette motion est
adoptée? Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Je constate donc que, du
consentement de l'Assemblée, sur la motion du leader du gouvernement, le
document déposé constitue un ordre de l'Assemblée
relativement à l'ordre du jour de la séance extraordinaire pour
ce jeudi 30 août 1990 et que c'est la règle de procédure
qui s'appliquera malgré toute disposition du règlement
inconciliable. Nous allons donc procéder à nos travaux
immédiatement.
Affaires courantes, déclarations ministérielles. Je vais
reconnaître M. le ministre des Finances.
Administration de la TPS et réforme des taxes
à la consommation au Québec
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque: M. le Président, lors du discours sur le
budget prononcé en cette Assemblée le 26 avril dernier, j'avais
indiqué que le gouvernement du Québec explorait, avec le
gouvernement fédéral, les solutions susceptibles
d'atténuer les problèmes sérieux de complexité
administrative posés par la coexistence, d'une part, du régime
québécois des taxes à la consommation et, d'autre part, du
régime de la taxe sur les produits et services, mieux connue comme TPS,
que le gouvernement fédéral entend mettre en place à
compter du 1 er janvier 1991.
Le 12 juillet dernier, le ministre des Finances par intérim, le
député de Vaudreuil, annonçait par voie de
communiqué que des progrès importants avaient été
réalisés dans les discussions avec le gouvernement
fédéral, mais que des études plus approfondies
s'avéraient nécessaires. Parmi ces études, nous avons
voulu examiner avec soin les voies qui s'offraient au Québec ainsi que
les conséquences qui en découlaient. Une de ces voies aurait pu
être de ne rien faire pour ajuster notre régime des taxes à
la consommation à l'introduction de la TPS, mais les dépenses et
les énergies improductives que cette voie aurait entraînées
pour les entreprises, à cause justement de la complexité et de la
confusion qui en aurait résulté, nous l'a fait rapidement
rejeter.
La possibilité d'attendre avant d'agir a aussi été
examinée. Dans cette optique, certains ajustements à notre
système de taxes à la consommation auraient pu être
apportés pour en éliminer les irritants mineurs en regard de sa
coexistence avec le régime de la TPS. Bien sûr, cela aurait pu
diminuer quelques problèmes de complexité et certains coûts
pour les entreprises. Tout en laissant des coûts d'ajustement importants
pour les entreprises, cette approche risquait de placer le Québec dans
une situation où il aurait été forcé d'agir par
suite de la mise
en place éventuelle d'une harmonisation substantielle à la
TPS de la part de certaines provinces. Le Québec aurait pu être
désavantagé par une telle approche, car il est loin d'être
évident que les systèmes de taxation et les ententes entre les
autres provinces et le gouvernement fédéral auraient
été bien adaptés aux institutions et au contexte
québécois.
Le gouvernement du Québec a donc décidé de
s'engager dans une voie qui, non seulement protégera les
intérêts économiques des Québécois, mais
consacrera la maîtrise du Québec sur l'orientation et la gestion
des politiques fiscales sur son territoire. Cette décision nous
amène à poser des gestes d'une importance capitale. Ainsi,
considérant l'urgence de préciser dès maintenant aux
entreprises le cadre dans lequel elles auront à appliquer, le 1er
janvier 1991, les régimes fédéral et
québécois des taxes à la consommation, je vous fais part
aujourd'hui même des résultats de nos négociations avec le
gouvernement fédéral et des modifications qui seront
apportées au régime québécois des taxes à la
consommation. (11 h 20)
En effet, nos négociations avec le gouvernement
fédéral dans le but de simplifier substantiellement
l'administration des taxes à la consommation au Québec se sont
avérées un succès. Je suis ainsi eh mesure d'annoncer
aujourd'hui qu'à compter du 1er janvier 1992, c'est le ministère
du Revenu du Québec qui administrera la TPS sur le territoire
québécois pour le compte du gouvernement fédéral,
conformément à un protocole d'entente entre les deux
gouvernements, qui sera signé au cours des prochaines heures.
En fait, dès que possible cet automne, le ministère du
Revenu du Québec procédera à l'embauche du personnel
additionnel nécessaire à l'administration unifiée des
régimes fédéral et québécois, personnel qui
sera prêté à Revenu Canada jusqu'au transfert complet le
1er janvier 1992. Quant aux employés fédéraux travaillant
dans le cadre de la TPS au Québec au 31 décembre 1991, ils seront
assurés d'un emploi équivalent au sein du ministère du
Revenu du Québec dès le transfert des opérations. De plus,
l'administration unifiée permettra des économies
d'opération pour les deux gouvernements de l'ordre de 35 000 000 $
annuellement.
Ce transfert de l'administration de la TPS constitue un geste de
délégation fédérale sans précédent en
matière fiscale. Il permettra, en plus de procurer des économies
aux deux gouvernements, de simplifier considérablement l'application des
taxes à la consommation au Québec. Les entreprises n'auront alors
à transiger qu'avec une seule administration et elles auront à
gérer des systèmes de prélèvement similaires. Ce
sera le premier pas essentiel vers la simplification recherchée.
Le second pas, indissociable du premier si l'on désire
réellement simplifier le régime fiscal et donner tout son sens
à une administration unifiée, proviendra de la réforme du
régime de taxation québécois pour l'harmoniser
substantiellement à celui du gouvernement fédéral.
J'annonce donc la mise en place à compter du 1er janvier 1992 d'un
nouveau système de taxe de vente. La nouvelle taxe de vente sera
imposée à l'acheteur sur la plupart des biens et services
assujettis à la TPS, dans les limites cependant de nos pouvoirs
constitutionnels en matière de taxation. Étant d'application plus
large, le nouveau régime permettra de réduire à 7 % le
taux des taxes à la consommation au Québec. Il remplacera ainsi
l'actuelle taxe de vente de 9 %, celle de 10 % sur les repas, et celle de 9 %
sur les télécommunications. Ces modifications sont
décrites plus en détail à l'annexe jointe à la
présente déclaration ministérielle et qui en fait partie
intégrante. Avec le consentement de cette Assemblée, M. le
Président, je dépose deux copies du document intitulé
"Annexe à la déclaration ministérielle concernant
l'administration de la TPS et la réforme des taxes à la
consommation au Québec." (Voir annexe).
Une voix: Consentement.
Le Président: Consentement. Les documents sont
déposés.
M. Levesque: Afin d'éliminer la taxation en cascade qu'on
retrouve actuellement dans notre régime de taxation et de rendre les
produits québécois plus concurrentiels sur tous les
marchés, la nouvelle taxe de vente comportera un mécanisme de
remboursement aux entreprises pour les taxes payées sur leurs
achats.
Le gouvernement a ainsi opté pour un système
québécois de taxe à la consommation comportant un taux
unique plutôt que des taux différenciés entre les produits.
Il nous est apparu, étant donné la coexistence de la TPS et de la
taxe de vente du Québec, qu'un tel système était beaucoup
moins complexe à administrer, tant pour les entreprises que pour le
gouvernement. de plus, nos études ont démontré qu'un taux
réduit ou une exemption de taxe sur certains biens ou services
constituait une façon inutilement coûteuse de protéger les
ménages à faible revenu car cela profitait principalement aux
ménages à plus haut revenu. en effet, par exemple, pour
l'exemption actuelle des vêtements et chaussures, les ménages
gagnant moins de 31,500 $, lesquels représentent 40 % de l'ensemble des
ménages, ne tirent profit que de 16 % des bénéfices totaux
de cette exemption, alors que les ménages gagnant plus de 48,200 $,
lesquels représentent aussi 40 % de l'ensemble des ménages, soit
les plus fortunés, profitent de 67 % des bénéfices de
cette exemption.
Enfin, les systèmes de taxes à taux va-
riables que plusieurs pays européens ont mis en place sont
actuellement remis en cause dans le cadre du marché commun
européen, démontrant ainsi les limites qu'apporte au
régime fiscal la mobilité des biens et des services dans une
économie ouverte. de plus, afin d'améliorer
l'équité du régime fiscal, un mécanisme important
est mis en place, soit un crédit d'impôt remboursable pour la taxe
de vente à l'intention des contribuables à faible revenu. ce
crédit fera en sorte que non seulement ceux-ci n'auront pas à
subir de hausse de fardeau fiscal, mais ils verront ce fardeau diminuer. aussi,
afin de protéger complètement le pouvoir d'achat des
contribuables, j'annonce pour 1992 l'indexation au taux de 4,5 % des
crédits d'impôt sur le revenu et des barèmes des programmes
apte et apport. je peux assurer les contribuables que cette réforme
s'inscrit dans les préoccupations qu'a toujours eues le gouvernement au
cours des dernières années à l'égard des familles
et des ménages à faibles et à moyens revenus.
En effet, par exemple, pour un célibataire vivant seul,
bénéficiaire de l'aide sociale, la hausse de ses prestations de
140 $, représentant la valeur du crédit d'impôt
remboursable, équivaut à plus du double de l'impact du montant de
la taxe de vente supplémentaire, soit de 68 $ par année. Dans le
cas où ce célibataire bénéficie également de
l'indexation de ses prestations du programme APTE pour un montant de 272 $, son
revenu disponible sera ainsi majoré de 344 $. Si le
bénéficiaire est inapte, il profitera de l'indexation automatique
déjà prévue dans le régime de la
sécurité du revenu.
L'ensemble des mesures annoncées aujourd'hui se traduira aussi
par des gains importants pour les familles gagnant jusqu'à 50 000 $ par
année. Ainsi, un couple avec deux enfants gagnant 25 000 $ se verra
accordé un crédit d'impôt remboursable de 230 $, lequel
fera plus que compenser l'impact de la taxe de vente supplémentaire, de
147 $. Lorsqu'on ajoute la baisse d'impôt de 309 $ par suite de
l'indexation des besoins essentiels, son fardeau fiscal est réduit de
392 $ à la suite des mesures que je viens d'annoncer. Pour une telle
famille gagnant 40 000 $, soit un niveau de revenu voisin du revenu familial
moyen, son fardeau fiscal sera réduit de 207 $. M. le Président,
ces gains pour les familles à revenu moyen s'ajoutent aux baisses
d'impôt que nous avons apportées à chacune des
années depuis 1985, si bien que l'impôt d'une telle famille
à revenu moyen est passé de 6401 $ en 1985 à 4129 $ en
1991, soit une baisse de 35 %. Et, à la suite des mesures que j'annonce
aujourd'hui, l'allégement du fardeau fiscal se poursuivra en 1992. (11 h
30)
De plus, dans le but de protéger les équilibres financiers
du gouvernement et compte tenu de l'impact substantiel de la réforme sur
l'amélioration de la position concurrentielle des entreprises
québécoises, il apparaît approprié et non
préjudiciable de modifier les impôts de ces entreprises à
compter du 1er janvier 1992. Sur une pleine année, cette modification
des taux augmentera le fardeau fiscal des entreprises de 297 000 000 $.
En outre, comme je l'ai indiqué, la nouvelle taxe de vente du
Québec commencera à s'appliquer le 1er janvier 1992, en
même temps que l'administration unifiée de la TPS
fédérale et la taxe québécoise. Au cours de
l'année 1991, la TPS fédérale sera en vigueur, mais elle
sera provisoirement administrée par Revenu Canada.
L'année 1991 sera donc une année de transition.
Étant donné notre objectif de simplifier l'administration des
taxes à la consommation, notre gouvernement a cherché à
assurer une harmonisation maximale des deux régimes, au moins au niveau
du commerce de détail des biens, et ce, dès le 1er janvier
prochain. C'est pourquoi j'annonce qu'à l'égard du commerce de
détail, les biens mobiliers assujettis à la TPS feront aussi
l'objet de la taxe de vente du Québec à compter du 1er janvier
1991. Il s'agit là d'un élargissement de l'assiette imposable, de
sorte qu'il nous sera possible d'abaisser, dès ce moment, de 9 %
à 8 % les taux de la taxe de vente et de la taxe sur les
télécommunications, et de 10 % à 8 % le taux de la taxe
sur les repas et l'hôtellerie.
Au total, sur la pleine année 1992, les mesures annoncées
aujourd'hui auront pour effet de diminuer le fardeau fiscal des contribuables
de 523 000 000 $. Quant à l'impact sur les équilibres financiers,
il s'élève à 77 000 000 $ pour l'année 1990-1991 et
représente un manque à gagner global de 19 000 000 $ pour les
trois années, 1990-1991, 1991-1992 et 1992-1993. Les estimations des
impacts étant très avancées au moment du discours sur le
budget, ces montants ont été inclus aux équilibres
budgétaires déposés le 26 avril dernier, de sorte que les
revenus et les dépenses, ainsi que le solde des opérations
budgétaires alors présentés n'ont pas à être
révisés.
M. le Président, non seulement cette réforme
permettra-t-elle de simplifier le régime fiscal, mais elle permettra
aussi de l'améliorer afin de mieux l'adapter aux impératifs de
l'environnement économique international de plus en plus
compétitif. De plus, par les mécanismes de compensation qu'elle
comporte, cette réforme permettra de poursuivre l'effort du gouvernement
fait au cours des dernières années en vue d'améliorer la
situation des ménages à faibles et moyens revenus et
particulièrement celle des familles.
Enfin, M. le Président, étant donné les
circonstances exceptionnelles de la déclaration d'aujourd'hui, je vous
fais part de mon intention de discuter plus à fond de cette
réforme dès que possible. Mon collègue, le leader
parlementaire du
gouvernement, proposera donc que l'Assemblée nationale confie un
mandat à cet effet à la commission du budget et de
l'administration. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président: Je reconnais maintenant le
représentant de l'Opposition officielle, M. le député de
Labelle.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, le ministre des
Finances vient de nous lire une déclaration ministérielle qui
coûtera aux Québécois, en 1991, au moins 329 000 000 $ net
et qui va imposer une taxe de plus de 15 %, à partir du 1er janvier
1991, sur les livres, les imprimés, les journaux, les chaussures, les
vêtements qui n'étaient pas taxés jusqu'ici. De plus, les
appareils ménagers et les meubles subiront la taxe de vente du
Québec par-dessus le fédéral. M. le Président,
c'est ça, sa déclaration ministérielle, même si le
ministre des Finances a parlé surtout de 1992 et qu'il a gommé
1991.
Je voudrais, M. le Président, dans un premier point, vous dire
que nous n'acceptons pas le procédé qui est employé ce
matin. Il s'agit d'une déclaration ministérielle du ministre des
Finances, qui comporte des modifications profondes au système de la
fiscalité du Québec. Par le biais d'une déclaration
ministérielle, il évite d'avoir un débat normal qui aurait
dû avoir lieu sur un tel sujet et qui aurait dû durer huit heures
au moins. Il l'évite. Il nous limite à une réplique de
quelques minutes, 20 minutes au maximum, sur un sujet fondamental, qui a
amené un large débat, en particulier, à la Chambre des
communes d'Ottawa. Le gouvernement fédéral, le 15 juin 1987, a
déposé un livre blanc sur la fiscalité et tout le monde en
a parié dans le pays. Ils en ont parlé lors de leurs
élections. Mais, ici, c'est une simple déclaration
ministérielle avec un droit de réplique de 20 minutes.
Une voix: Scandaleux!
M. Léonard: Nous nous élevons contre ce
procédé, M. le Président, en plein été,
à l'occasion de la convocation de la Chambre pour adopter une loi
spéciale en rapport avec la crise de Kahnawake et d'Oka. M. le
Président, le procédé est inqualifiable. Et je vois aussi,
je note aussi, que, dans cette Chambre, aujourd'hui, le ministre du Revenu
n'est pas présent. Et je pense qu'il faut se rappeler, le printemps
dernier, les débats et les déclarations qui ont eu cours à
ce sujet au Québec.
Je voudrais simplement rappeler ici, dans les Débats de
l'Assemblée nationale, une déclaration qui a été
faite par le premier ministre du Québec - et je la lirai. M. le
Président, si vous le permettez - en réponse à une
question du chef de l'Opposition. "M. le Président, on connaît la
réputation de frugalité du gouvernement que j'ai l'honneur de
diriger. Cela étant dit, je vais répondre au chef de l'Opposition
que j'ai mentionné, il y a quelques instants à peine, les propos
du ministre du Revenu vis-à-vis de la TPS, qui reprenaient ceux que nous
avions tenus, que le ministre des Finances avait tenus, que nous avions
endossés à la conférence interprovinciale des premiers
ministres en août dernier à Québec. Nous avons eu
l'occasion, à de très nombreuses reprises, de dénoncer le
caractère régressif, notamment, de cette taxe." Le premier
ministre du Québec, le 15 mars 1990.
Des voix: Deux discours!
M. Léonard: M. le Président, il y a des
débats qui doivent avoir lieu dans la société
québécoise et qui doivent commencer ici à
l'Assemblée nationale, et on les escamote aujourd'hui par une
déclaration ministérielle.
D'autre part, le ministre des Finances dit ce matin, nous apprend ce
matin qu'il avait déjà prévu, aux équilibres
financiers, l'impact de l'harmonisation de la taxe de vente du Québec
à la TPS fédérale. Je crois qu'au lieu d'une
déclaration d'intention d'étudier la question de l'harmonisation
avec la TPS fédérale dans son discours sur le budget il aurait
dû avoir la franchise de dire et d'indiquer les impacts de cette taxe et
de cette harmonisation qu'il avait déjà inclus à ses
équilibres financiers, mais dont il n'a pas parlé dans son
discours sur le budget comme tel. (11 h 40)
Je pense que, là aussi, le procédé est
inqualifiable, parce que personne n'avait imaginé que les impacts
financiers d'une telle harmonisation étaient déjà inclus
aux états financiers. Nous avions noté, à l'époque,
que ie taux de rendement des taxes à la consommation augmentait
considérablement, qu'il passait à 7,7 % cette année. Et
nous nous étions interrogés parce que, normalement, en
période de récession, on s'en tient, tout au plus, à
l'inflation. Mais personne, et surtout pas le ministre des Finances, ne nous a
indiqué qu'il s'agissait de l'harmonisation et des coûts de
l'harmonisation pour l'année 1990-1991 et 1991-1992. M. le
Président, il s'agit là de camouflage qu'on découvre
après coup. Même si on dit qu'on étudie, on n'a jamais
indiqué que les impacts financiers étaient là.
Alors, quels sont les impacts, aujourd'hui, pour les contribuables? Il y
a des biens qui étaient exemptés aux deux paliers de
gouvernement, au Québec et au fédéral. Ces biens sont les
vivres, les imprimés, les journaux, ce qui touche la culture en gros,
l'information. Ces biens sont les vêtements, ce sont les chaussures qui
ne portaient de taxe ni au fédéral ni ici au Québec,
aucune taxe. Ce que le ministre des Finances fait ce matin, c'est que,
par-dessus la
taxe fédérale de 7 %, on ajoutera 8 % sur les 7 %. La taxe
réelle sera de 15,56 % à partir du 1er janvier 1991. À
partir du 1er janvier 1991, de 0 % à 15,56 %. Les meubles étaient
déjà taxés au fédéral, mais, ici, on y
ajoute 8 % à partir du 1er janvier.
M. le Président, il s'agit là d'une modification
considérable et, dès le 1er janvier 1992, tous les services
seront imposés, TPS fédérale et TPS
québécoise composées. Alors, il s'agit d'une augmentation
considérable aussi pour tous ces services. Chez le coiffeur, 14,49 % de
plus; chez les taxis, 14,49 % de plus. Lorsque vous irez chez le nettoyeur,
14,49 % de plus tout le temps. Lorsque vous irez chez votre comptable, chez
votre notaire, chez votre avocat, toujours 14,49 % de plus.
M. le Président, nous n'avons pas eu le temps de passer à
travers cette déclaration ministérielle parce que, au-delà
des six pages que le ministre nous a lues, il y a 93 pages de texte et de
tableaux, ici, 93 pages que nous avons dû lire en vitesse ce matin. Je
suppose bien que l'impact réel, nous allons le découvrir dans les
tableaux qui vont concerner en particulier la classe moyenne au Québec,
celle qui travaille à des salaires réduits, mais qui n'a pas
accès au crédit de taxe sur les ventes, sur la consommation.
Celle-là va payer. C'est celle-là qui va payer partout. Nous
aurons le loisir, ultérieurement, de regarder ces questions, mais,
évidemment, nous ne pourrons pas revenir en Chambre parce que le
débat sera terminé. Après les mots que je vous dis, c'est
terminé sur le plan politique, sur le plan public. M. le
Président, il y a beaucoup de choses à y voir.
Quant aux impacts financiers, je pense que cela mérite examen
quelque peu. Je prierais les parlementaires d'aller voir à la page 58 de
leur document, ce matin, parce qu'il comporte les vrais...
Des voix: On ne l'a pas eu.
M. Léonard: On ne l'a pas, très bien. Alors, ceci
dit...
Une voix: Bâillonnés!
M. Léonard: ...les revenus additionnels du gouvernement en
1990-1991,92 000 000 $.
Une voix: C'est encore plus grave.
M. Léonard: Les revenus additionnels du gouvernement en
1991-1992, 323 000 000 $. Le total de ces deux années, 415 000 000 $,
moins les indexations qui, pour certaines, auraient été faites
automatiquement, 86 000 000 $. L'impact net sur l'année 1991: 329 000
000 $ que le gouvernement, au passage de la réforme, met dans sa poche.
C'est ça, l'annonce de ce matin. 329 000 000 $! Parce que, quand vous
aurez le tableau, vous verrez qu'en 1991 il n'y a pas de crédit
d'impôt remboursable pour la taxe de vente; pour toute l'année
1991, il n'y en a pas. il n'y a pas d'indexation de 4,5 % du régime
d'imposition des allocations familiales; il n'y en a pas, c'est zéro.
alors, pour 1991, le gouvernement empoche, net, au moins 329 000 000 $.
M. le Président, il faut revenir, finalement, à ce
discours sur le budget du printemps dernier et rappeler ce que nous avions dit.
Ce gouvernement fait un budget morceau par morceau, il a annoncé des
taxes avant le discours sur le budget. Total de ces taxes sur l'impact du
budget de cette année: 505 000 000 $. Il a annoncé des taxes
durant son discours sur le budget, pour 340 000 000 $, celles dont il a
parlé, et, par la suite, il en a additionné d'autres. Une dont
vous n'avez pas entendu parler, celle qui a été annoncée
par le ministre des Transports le 28 juin dernier, au lendemain de la
commission parlementaire: 148 000 000 $ additionnels. Personne ne l'a su, en
plein été, en pleines vacances. Les permis de conduire sont
passés de 11 $ à 20 $ et l'immatriculation, de 55 $ à 90
$; vous n'en avez pas entendu parler. La cachette, des taxes après le
discours sur le budget! Pourquoi cela n'a-t-il pas été dit au
discours sur le budget?
Ce matin, pour l'année 1990, on doit ajouter 77 000 000 $, plus
252 000 000 $ - les 329 000 000 $ dont je parlais - qui portent globalement sur
l'année 1991. Alors, une autre cachette, une autre façon de
camoufler, tout en parlant de l'année 1992. On nous a parlé de
l'année 1992, tout le temps de l'année 1992! Un seul paragraphe,
un seul, à la page 6 de la déclaration ministérielle
traite de l'année 1991, de la période de transition qui
coûte 329 000 000 $ net aux contribuables québécois. C'est
tout ça dont on nous parle, ce matin.
M. le Président, ce que nous regrettons, c'est que le
débat sur un changement aussi fondamental de la fiscalité
québécoise n'ait pas lieu, qu'on le glisse maintenant à la
commission du budget et de l'administration au lieu de le faire ici, devant
l'Assemblée nationale, comme il aurait été normal de le
faire. On le fait d'un coup, derrière, en refilant le tout à la
commission du budget et de l'administration.
M. le Président, je pense que les Québécois vont se
rendre compte des attitudes de ce gouvernement que je qualifie d'hypocrite,
finalement, parce qu'on n'a pas, dans le budget... Quand on lit le discours sur
le budget du printemps, on n'a rien de tout ce qui s'est passé
finalement autour. Merci.
Des voix: Bravo!
Le Président: Je cède maintenant la parole à
M. le député de Jacques-Cartier.
M. Neil Cameron
M. Cameron: Merci, M. le Président. Recent events help
remind us of the ancient saying that the only things that are really inevitable
are death and taxes. The federal Goods and Services Tax now appears to be one
demonstration of this inevitability, so the Québec Government policy of
harmonization with provincial sales taxes is obviously a good idea both in
reducing the cost and complexity of administrating these taxes and reducing the
paperwork burden for businesses. If I understand the proposal correctly, for
example, it should mean that small businesses will not have to change all their
cash registers, over which there will be many sighs of relief. Québec
should be doing everything in its power to encourage small business, which will
be at the heart of future economic development. If we cannot afford to abolish
these taxes, we may at least slightly reduce the pain. (11 h 50)
I would like to add three brief comments, however. The first is that it
is certainly about time this announcement be made. We have had two years in
which business people in Québec have been kept in suspense as to just
how Québec intended to deal with the GST issue. If more time-tabling
problems arise, for example as a result of Senate delaying tactics, we hope the
Government will show more speed in indicating what it intends to do next.
Secondly, it appears that the full implementation of the harmonized
system will not take place until 1992, with the year in-between in which
Revenue Canada officials are responsible for administrating the tax, though a
whole lot of them are then to be shifted over to Revenue Québec once
everything has been set up. It is surely likely that this transfer of personnel
will raise all kinds of interesting problems, notably in adjusting civil
service ranks and working out arrangements will the civil service unions. We
can only hope the resulting tangles do not themselves make the tax collection
procès a great deal messier than it sounds in the ministerial
statement.
Finally, it is always useful to remind governments and Parliamentary
Assemblies that they should not be too filled with a sense of self-satisfaction
because they have succeeded in finding a more efficient and streamlined way of
getting money from businesses and private citizens that they would not need so
much had they not spent too freely in the first place.
The real fear that most of us have of all valuate taxes is not so much
of the type of tax itself as for its great capacity to be steadily increased,
year by year, until it becomes an unbearable burden. We would have a better
cause for celebration if it can be announced in future that this tax rate is to
be reduced rather than increased. I hope this noble objective will always be
kept before the eyes of the Finance Minister and the Government. Merci, M. le
Président.
Le Président: Je cède maintenant la parole à
M. le député d'Anjou.
M. René Serge Larouche
M. Larouche: M. le Président, dans un premier temps, il
faut bien établir que la TPS, l'instauration de la taxe sur les produits
et services est une décision fédérale que nous devons
subir, pour laquelle nous n'avons aucun choix. Alors, peu importe, je pense, ce
qu'on pourrait en dire quant à sa validité, quant au niveau de la
taxe, la décision a été prise par le gouvernement
fédéral.
Alors, on sait que le gouvernement fédéral est en faillite
technique. On sait aussi que le gouvernement conservateur, en 1985, a mis sur
pied le comité Nelson pour mettre de l'ordre dans les affaires
fédérales et qu'on s'est dépêché de placer
sous le couvert les recommandations intelligentes de ce rapport. Alors, on en
subit, en 1990, les conséquences et on doit payer les dettes.
Je vais donner mon accord à la proposition, à la
déclaration ministérielle qui demande de référer
à la commission du budget et de l'administration cette étude,
cette taxe. Je suis d'accord parce que, tout simplement, la formule, à
mon point de vue, vise à protéger tes intérêts
économiques du Québec et des Québécois. Elle
renforce aussi la position du Québec dans la gestion de ses politiques
fiscales. Alors, j'espère que ce sera mieux examiné en
commission. Je suis d'accord aussi parce qu'elle assure une harmonisation de la
fiscalité. Elle évite des dédoublements coûteux. On
sait qu'il y en a des dédoublements entre le Québec et Ottawa.
Alors, au moins pour l'application de cette taxe, il me semble que
l'harmonisation s'impose. Elle évite, je l'espère, des conflits.
Elle assure aussi aux employés fédéraux, aux
employés québécois qui travaillent pour le gouvernement
fédéral, qu'ils seront réintégrés au
ministère du Revenu du Québec dès que les
opérations seront sous la responsabilité complète du
Québec, en janvier 1992.
Quant au système de taxe de vente, je ne peux pas être en
désaccord de réduire à 7 % le taux actuel de la taxe qui
est à 9 % et à 10 % sur les repas. Je ne peux pas être en
désaccord non plus avec mon collègue Léonard concernant
une augmentation indirecte de taxes. Mais c'est clair qu'en bout de ligne il y
a quelqu'un qui doit payer la note et on est condamné à la payer
pour des extravagances fédérales en particulier. Je suis d'accord
aussi parce qu'on rendra les produits et services du Québec plus
concurrentiels sur les marchés locaux comme internationaux.
Et, enfin, je crois sur parole le ministre
des Finances qui nous rassure quant à l'amélioration de
l'équité du régime fiscal par l'instauration d'un
crédit d'impôt personnel remboursable pour la taxe de vente et
surtout à l'intention des contribuables à faible revenu. Alors,
ça permet de simplifier le régime fiscal, d'harmoniser nos deux
politiques. Et, pour ces raisons, considérant surtout que ça sera
examiné par la commission du budget et de l'administration, je ne peux
pas refuser mon accord à un examen par cette commission. Merci, M. le
Président.
Le Président: Je cède la parole à M. le
ministre des Finances pour l'exercice de son droit de réplique.
M. Gérard D. Levesque (réplique)
M. Levesque: M. le Président, brièvement, je
voudrais tout d'abord remercier ceux qui sont intervenus à la suite de
la déclaration. J'arrive à la conclusion que, sur le fond, il
semble y avoir un certain consensus, sinon l'unanimité parfaite. Et
ça ne...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Levesque: ...me surprend pas, M. le Président. Je pense
que nous vivons aujourd'hui un moment important. Nous allons, dans quelques
instants, signer une entente que je pourrais qualifier d'historique. Dans le
domaine fiscal, il s'agit d'un précédent à l'avantage d'un
Québec qui a de plus en plus la maîtrise de son avenir. Et je
comprends, évidemment, que le critique financier de l'Opposition
officielle se soit principalement penché sur certaines modalités,
parce que, dans le fond, il est bien difficile pour lui d'attaquer quelque
chose qui fait partie du programme du Parti québécois. Et je vais
expliquer que, dans certaines modalités, il y a des différences,
mais, s'il y a quelqu'un qui a un doute là-dessus, justement, j'ai ici
le programme lui-même qui mentionne l'abolition des autres taxes de vente
pour en faire une TVA dans la souveraineté, évidemment à
des taux multiples. Mais, évidemment...
Des voix: Ah! Ah!
M. Levesque: Ah oui! Lorsque je suis transparent, on crie. Et,
lorsqu'on pense que ce n'est pas assez transparent, on crie. De l'autre
côté, on semble crier pas mal souvent. Mais, voici, c'est que nous
avons présentement, je pense, et très sérieusement,
franchi un pas important dans l'autonomie du Québec, une autonomie
fiscale qui s'est imposée. Ne vous imaginez pas que ça
été facile, tous ces mois de négociations avec le
gouvernement fédéral, le gouvernement fédéral qui
accepte qu'une taxe qui est la sienne soit administrée par le
gouvernement du Québec. Ça ne s'est jamais fait et j'avais
mentionné, il y a même trois ans, au gouvernement
fédéral, que, si on pensait à une taxe unifiée,
ça ne serait certainement pas le gouvernement fédéral qui
en aurait l'administration et que jamais le gouvernement fédéral
n'administrerait les taxes au Québec. Et c'est le contraire qui est
arrivé et nous avons réussi, au cours de ces négociations,
à justement être en mesure maintenant de signer cette entente
historique.
Deuxièmement, je remercie également les autres
intervenants. Je les remercie de l'espoir et de la confiance qu'ils mettent
dans le ministre des Finances et dans la politique mise de l'avant par le
gouvernement. Et, quant aux modalités - parce qu'il ne me reste que
quelques minutes - relevées par le député de Labelle, le
député de Labelle s'insurge parce qu'il y a une augmentation des
revenus en 1991. Mais il doit prendre les trois années: 1991, 1992,
1993. Et, pour ces trois années, tout cet exercice-là fait perdre
des revenus au gouvernement de 19 000 000 $. Alors, qu'on ne vienne pas nous
dire qu'il y a là un profit pour le gouvernement. Au contraire, il
s'agit d'une opération relativement neutre sur le plan des revenus. (12
heures)
Deuxièmement, il parle du premier ministre qui s'était
objecté? Oui, il s'est objecté parce que la TPS
fédérale, telle que proposée, était inacceptable,
et ça, pour quatre raisons principales: premièrement, à
cause des effets négatifs sur l'économie. À 9 %,
c'était inacceptable, une TPS, et nous l'avons fait réduire
à 7 %. Deuxièmement...
Des voix:...
M. Levesque: Deuxièmement, il y avait là des effets
négatifs pour le Québec, pour les finances du Québec,
particulièrement dans le domaine des loteries, particulièrement
dans le domaine des municipalités, particulièrement dans le
domaine des commissions scolaires, particulièrement dans le domaine des
hôpitaux et, dans tous ces cas, incluant les universités, nous
sommes intervenus et nous avons réussi à faire en sorte que ces
effets négatifs disparaissent.
Troisièmement, nous nous sommes opposés également
au fait qu'il y avait là un envahissement d'un champ traditionnellement
occupé par les provinces. À ce propos-là, nous avons
réussi à avoir une déclaration que je pourrai montrer
à cette Chambre, en commission parlementaire ou lorsqu'on jugera
à propos de le faire, où le gouvernement fédéral,
par la voix du ministre des Finances, indique son intention de ne pas laisser
le champ être envahi par le gouvernement fédéral, mais de
garder cette taxe le plus bas possible. Quatrièmement, la
complexité qui était dénoncée par tout le monde et
même par plusieurs de nos amis d'en face, eh bien, nous avons
réussi justement à faire sauter cette
complexité en prenant le leadership dans tout ce dossier et en
faisant en sorte que ce soit le Québec qui constitue l'administration
unique de toutes les taxes à la consommation, fédérale et
provinciale.
Finalement, lorsque le député de Labelle s'inquiète
de ce qui arrive dans certains domaines qui n'étaient pas taxés
et qui le seront, il oublie de mentionner que nous avons une compensation qui
est plus importante que ce que n'auront à supporter la plupart des
contribuables. Tous les gens qui sont dans les moins bien nantis, toutes les
familles, même jusqu'à 50 000 $ et 75 000 $, pas seulement les
moins bien nantis, même la classe moyenne sera
protégée.
Qu'on regarde les documents, et j'espère qu'on aura l'occasion de
les étudier en commission parlementaire. On verra que, justement, les
contribuables à faible et à moyen revenu sont amplement
protégés par les mesures que nous prenons par le remboursement
que nous allons faire aux contribuables concernés.
M. le Président, le député de Labelle mentionne:
C'est bien beau, c'est pour 1992, mais, en 1991, il n'y a pas de remboursement.
Mais c'est faux. Nous commençons les remboursements dès le 1er
janvier 1991. S'il a mal lu les documents, qu'il les relise et il verra que
c'est une compensation qui commence dès 1991. Évidemment, en
1992, il y a une compensation qui tient compte des changements additionnels qui
seront faits. Il y a une période transitoire: 1991; 1992, c'est la
pleine réforme. Je pense que, s'il regarde bien les choses, il verra que
les remboursements commencent dès le moment où les contribuables
sont affectés. finalement, je remercie cependant tous les gens qui sont
intervenus parce que, dans le fond, ils ne peuvent pas s'objecter à une
diminution du fardeau fiscal de 523 000 000 $. ils ne peuvent pas nous
féliciter mais, dans le fond de leur coeur, ils nous félicitent
pour avoir pris ce leadership, ils nous félicitent d'avoir pu, par ces
négociations, faire en sorte que le gouvernement fédéral
assume les 20 000 000 $ que coûte l'implantation du régime et ils
nous félicitent encore implicitement, lorsqu'ils se rendent compte que
cette politique, cette mesure qui est prise aujourd'hui fait en sorte que, par
rapport à ce qui serait arrivé si nous avions attendu, nous avons
une économie pour le québec de 35 000 000 $ annuellement, quelque
chose de récurrent. ça, c'est la preuve très claire d'une
négociation réussie et je suis persuadé que cette chambre
sera de plus en plus convaincue de la justesse de notre approche. encore une
fois, je remercie tous ceux qui sont intervenus, et je suis convaincu que
l'assemblée entière va être très heureuse de pouvoir
appuyer cette mesure, qui sera sûrement une mesure qui, même chez
nos successeurs... dans combien d'années? soyons généreux:
dans une vingtaine d'années. ils seront les derniers à vouloir
toucher à cela, parce qu'ils seront fiers d'avoir cet
instrument-là entre les mains d'un gouvernement du Québec. Merci,
M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Président: Je reconnais maintenant M. le leader du
gouvernement pour la présentation d'une motion sans préavis.
Examen de l'annexe à la déclaration
ministérielle sur la TPS
M. Pagé: Alors, merci, M. le Président. Je fais
motion pour que jeudi, le 6 septembre 1990, de 10 heures à 13 heures et
de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la
commission du budget et de l'administration tienne une séance afin de
procéder à l'examen de l'annexe à la déclaration
ministérielle du ministère des Finances concernant
l'administration de la taxe sur les produits et services et la réforme
des taxes à la consommation au Québec. Il va de soi que je fais
motion pour que le ministre des Finances soit membre de ladite commission pour
la durée du mandat.
Le Président: Alors, est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Projet de loi 82
Le Président: maintenant au niveau de la
présentation de projets de loi, m. le ministre
délégué aux transports présente le projet de loi
82, loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre
châteauguay et sainte-catherine. m. le ministre
délégué aux transports.
M. Yvon Vallières
M. Vallières: M. le Président, ce projet de loi a
pour but d'accorder au ministre des Transports les pouvoirs lui permettant de
procéder dans des délais réduits à l'acquisition de
tous les biens qu'il juge nécessaires à la construction du
tronçon de l'autoroute 30 reliant les villes de Châteauguay et de
Sainte-Catherine.
À cette fin, il établit les règles devant
régir les expropriations visées par la loi ainsi que celles
relatives à la fixation des indemnités provisionnelles et
définitives. À défaut d'entente avec l'exproprié
sur l'indemnité définitive, les parties pourront s'adresser
à la Chambre de l'expropriation pour faire fixer cette
indemnité.
Ce projet de loi contient par ailleurs des dispositions
dérogatoires visant à faciliter l'application des mesures
établies et prévoit que certaines dispositions ont
été faites à compter de la date d'autorisation initiale
des travaux routiers.
Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte
d'être saisie de ce projet de loi? Adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Dépôt de
documents.
Décision du Bureau de
l'Assemblée
Je dépose la décision 372 du Bureau de l'Assemblée
nationale.
Dépôt de rapports de commissions.
Demande de budget supplémentaire
J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de
l'Assemblée nationale qui a siégé le 10 août 1990
afin de statuer sur une demande du comité directeur de la commission du
budget et de l'administration en vue d'obtenir un budget supplémentaire.
Je dépose donc ce document.
Dépôt de pétitions, M. le député de
Shef-ford.
Services de chimiothérapie au Centre
hospitalier de Granby
M. Paré: Oui, merci, M. le Président. Je
dépose l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée nationale par 4125 pétitionnaires, citoyens et
citoyennes principalement du comté de Shefford.
Les faits invoqués sont les suivants: considérant que les
personnes atteintes du cancer veulent vaincre la maladie; considérant
que pour ces personnes la chimiothérapie est un espoir de survie;
considérant que ces personnes ont déjà suffisamment de
soucis et que leur état de santé ne supporte pas le
déplacement de Montréal à Granby ou de Sherbrooke à
Granby après le traitement.
L'intervention réclamée se résume ainsi:
Que l'Assemblée nationale exige du ministère de la
Santé et des Services sociaux qu'il octroie au Centre hospitalier de
Granby les budgets suffisants pour fournir les services de
chimiothérapie à tous les patients dont l'état de
santé nécessite ce traitement et qui en font la demande.
Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à
l'original de la pétition.
Le Président: alors, cette pétition est
déposée. nous allons maintenant procéder à la
période de questions et réponses orales. je reconnais en
première question principale m. le chef de l'opposition.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
L'objet des négociations qui se
déroulent à Dorval
M. Parizeau: M. le Président, je suis certain que tous les
membres de cette Chambre, comme la population du Québec, d'ailleurs, ont
appris avec soulagement hier que l'armée avait commencé à
démanteler les barricades, sans affrontement violent. (12 h 10)
J'ai noté aussi que le premier ministre a dit très
clairement, hier, que ce démantèlement des barricades fait par
l'armée était assez indépendant des négociations
qui avaient lieu d'autre part à Dorval. Alors, je voudrais lui poser la
question - puisque, enfin, nous siégeons - la première question,
au fond: Qu'est-ce qu'on discute à Dorval? De quoi s'agit-il? De quel
sujet? Sur quel sujet portent les négociations de Dorval pendant que
l'armée a l'air de s'entendre, à l'heure actuelle, avec les
Mohawks pour le démantèlement? De quoi s'agit-il?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, je suis heureux de
retrouver, évidemment, le chef de l'Opposition, même si les
circonstances ne sont pas idéales. Je suis évidemment d'accord
avec lui, avec la situation qui s'est nettement améliorée dans la
région de Châteauguay, hier. Le ministre
délégué aux Affaires autochtones, qui est ici
présent - il pourra compléter ma réponse - a, comme c'est
sa responsabilité, accepté une demande de discussion de la part
d'un groupe d'autochtones, d'une confédération d'autochtones, qui
sont impliqués, d'une certaine façon, dans le dossier.
J'ai dit hier - et c'est la réalité - que les
négociations sont indépendantes de l'action militaire. Lundi,
j'avais demandé à l'armée canadienne, puisqu'en vertu de
la Loi sur la défense nationale, lorsque nous invoquons cette loi,
l'armée reçoit les instructions du gouvernement du Québec.
Après la suspension ou la rupture des négociations avec les
interlocuteurs qui existaient à ce moment-là, qui étaient
les interlocuteurs des deux gouvernements, j'ai demandé à
l'armée canadienne de démanteler les barricades, dans toute la
mesure du possible sans recourir à la violence. Ce qui est fait depuis
hier.
À Dorval, actuellement, on discute des possibilités d'une
entente, du retour à la normalité. Nous souhaitons pouvoir nous
entendre avec les Mohawks de manière à favoriser un retour
à une situation normale dans notre collaboration avec les groupes
autochtones. Pour ce qui a trait au contenu ou au détail des
négociations, en tenant compte, toutefois, qu'il est difficile pour le
ministre d'élaborer, étant
donné que les discussions sont en cours, que ces discussions
impliquent un autre gouvernement et que rien n'est encore signé, je
demanderais quand même au ministre de compléter ma
réponse.
Le Président: M. le ministre délégué
aux Affaires autochtones.
M. Ciaccia: M. le Président, les activités de
l'armée peuvent solutionner les questions des barricades, mais
l'armée ne peut pas solutionner les revendications des autochtones. Et
dans le présent conflit, il ne faut ménager aucun effort pour
trouver une solution pacifique et honorable, car les enjeux pour notre
société sont trop importants.
Alors, nous discutons de certaines revendications, certains
problèmes des Mohawks.
Le Président: En question complémentaire.
M. Parizeau: M. le Président, je pense que quand cette
crise-là sera terminée, on dira à quel point - et
là, je demande encore au premier ministre - il aura été
difficile d'obtenir du premier ministre et du gouvernement de savoir ce qui se
passe. La réponse du premier ministre m'amène, comme celle
d'ailleurs du ministre, à reposer la même question. Est-ce qu'on
peut nous dire sur quel sujet on est en train de discuter à Dorval? Je
ne veux pas des abstractions. Je voudrais savoir de quel sujet
spécifiquement discute-t-on? Est-ce qu'on discute des revendications
territoriales? Est-ce qu'on est en train de discuter des poursuites
judiciaires? De quel sujet parle-t-on?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition, qui
a suivi, comme c'était son devoir, la crise depuis 50 jours, est au
courant de la position du gouvernement, qui a été
énoncée le 27 juillet, pour ce qui a trait au dépôt
des armes, pour ce qui a trait à la question des terres qui
relève, on le sait, du gouvernement fédéral. Cela a
été la position du gouvernement, des différents points qui
ont été soumis à ce moment-là. Alors, c'est
évident que les discussions qui ont lieu ont trait aux propositions qui
ont été faites par le gouvernement du Québec, en
collaboration avec le gouvernement fédéral, et qui ont
été rendues publiques.
Le Président: En question complémentaire, M. le
chef de l'Opposition.
M. Parizeau: M. le Président, je demande au premier
ministre d'être un peu plus concret. Est-ce que le premier ministre ne
convient pas que le succès obtenu par l'armée canadienne,
jusqu'à maintenant, est largement dû à la transparence de
ses prises de position? Est-ce qu'il ne convient pas que l'armée
canadienne qui, manifestement, à l'heure actuelle, est un
élément important de solution de la crise, a pu jouer ce
rôle parce que, au lieu de considérer le public comme des
imbéciles, elle a essayé d'expliquer de quoi il s'agissait et
qu'est-ce qu'elle allait chercher à faire? Est-ce qu'il ne convient pas
que son gouvernement, à travers cette crise, pourrait montrer autant de
transparence?
M. Bourassa: M. le Président...
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: ...est-ce que le chef de l'Opposition ne convient
pas que l'explication d'une opération militaire, avec des objectifs et
des moyens qu'on peut facilement identifier, le nombre de troupes,
l'utilisation de telles armes, est une opération qui est
différente que lorsque nous devons négocier avec des
interlocuteurs qui ne sont pas toujours les mêmes et dont les opinions
peuvent évoluer?
Je dis au chef de l'Opposition que la position du gouvernement du
Québec a été clairement exprimée. Je prends
l'exemple de l'amnistie, qu'il n'était pas question d'accorder
l'amnistie. Nous avons toujours maintenu cette position. Le Procureur
général l'a répétée à plusieurs
reprises. Pour la question des terres, ça relève du gouvernement
fédéral. Sur tous les points, nous avons énoncé la
position du Québec et nous discutons avec des interlocuteurs. Les
interlocuteurs qui discutent actuellement avec le gouvernement
fédéral et le gouvernement du Québec ne sont pas les
mêmes que la semaine dernière, du moins, dans une très
bonne partie.
Alors, la situation... On ne peut pas comparer - si je puis dire au chef
de l'Opposition - les détails concrets et précis d'une
opération militaire qui est faite, forcément, en collaboration
avec le gouvernement du Québec. L'opération... Le chef de
l'état-major l'a dit à plusieurs reprises, il reçoit ses
instructions, pour ce qui a trait aux objectifs, du gouvernement du
Québec. Nous avons demandé l'intervention de l'armée. Nous
avons demandé le déplacement de l'armée dans les
régions de Châteauguay et d'Oka. Nous avons demandé
à l'armée de remplacer la Sûreté du Québec
aux barricades et nous avons demandé à l'armée de
démanteler les barricades.
L'action concrète, les moyens précis, ce sont des moyens
de nature militaire qui peuvent très bien être exprimés,
quoique, à l'occasion, les dirigeants militaires ont refusé de
dévoiler - ça se comprend tout à fait - certains
éléments de leur action. Mais quant aux négociations, qui
durent depuis des décennies ou même des siècles, on ne peut
pas demander au gouvernement du Québec de régler un
problème qui a été créé par une
décision du roi Louis XV.
Alors, ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que ce
problème dure depuis des siècles. Les revendications
territoriales existent depuis des siècles et nous essayons - dans une
situation très complexe - d'arriver à une solution pacifique.
Le Président: Toujours en question complémentaire,
M. le chef de l'Opposition.
M. Parizeaù: M. le Président, puisque deux membres
au moins du gouvernement ont indiqué qu'à l'occasion des
négociations qui ont marqué la signature d'une entente par deux
ministres, un juge en chef et un Warrior masqué, le gouvernement avait
été entraîné dans un traquenard, puisque, dans la
seconde ronde de négociations, les négociateurs de Québec
et d'Ottawa, lorsqu'ils ont rompu les négociations, ont
présenté ces négociations comme une sorte de bouffonnerie,
est-ce que le premier ministre trouve anormal qu'à l'occasion de cette
troisième ronde de négociations, pas seulement nous, mais nous au
nom du public, nous lui demandions: Voulez-vous nous dire ce qui se passe?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Par ses questions mêmes, le chef de
l'Opposition met lui-même en relief la complexité de la situation,
en ce sens qu'il y a des changements d'interlocuteurs et qu'à cause du
changement des interlocuteurs, de l'évolution des positions ou du
changement des points de vue et des contradictions mêmes, à
l'occasion, entre différents groupes, la situation du côté
des deux gouvernements n'est pas simplifiée. Il vient de le
démontrer lui-même, mais comme nous voulions arriver - et je pense
qu'on représentait la très grande majorité de la
population - à une solution du conflit sans affrontement armé, il
était évident que ça prendrait un certain temps pour en
arriver à cette solution pacifique, sans affrontement armé. Il
aurait été facile, pour le gouvernement, il y a quelques
semaines, de demander à l'armée d'intervenir d'une façon
directe et en risquant un affrontement armé. (12 h 20)
Je demande au chef de l'Opposition de ne pas oublier qu'il y a quand
même eu une victime, le caporal Lemay, et, dès ce
moment-là, les risques de tout affrontement devenaient par
eux-mêmes extrêmement sérieux. Il y avait également
eu deux victimes dans un affrontement à Akwasasne il y a quelques
semaines. Alors, ce n'est pas un contexte normal. C'est une situation tout
à fait particulière, avec des risques incalculables dans toutes
les décisions qui étaient prises et qui étaient
compliquées par les changements d'interlocuteurs. C'est pourquoi,
actuellement, avec ces nouveaux interlocuteurs, nous discutons toujours de la
position du gouvernement du Québec. Il y a deux semaines, il y a une
semaine, on pariait des propositions du 27 juillet; on parie encore des
propositions du 27 juillet. de notre côté, la position a toujours
été la même. malheureusement, je ne peux pas faire la
même affirmation pour nos interlocuteurs.
Le Président: En question complémentaire, M. le
député de Duplessis.
M. Perron: Oui, M. le Président, en complémentaire.
Face aux interlocuteurs, est-ce que le ministre délégué
aux Affaires autochtones peut nous dire si, à la table de
négociation qui se tient à Dorval actuellement ou qui s'est tenue
à Dorval, il y avait des négociateurs seulement du Québec
ou s'il y en avait d'autres qui provenaient de l'Ontario ou de l'État de
New York?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Affaires autochtones.
M. Ciaccia: M. le Président, la
Confédération des six nations iroquoises a demandé
d'intervenir afin que nous puissions discuter avec elle pour essayer de trouver
une solution au conflit. Alors la Confédération des six nations
iroquoises, ce ne sont pas seulement celles du Québec, mais elle
représente l'ensemble des Mohawks et des autres nations iroquoises en
Ontario, dans l'État de New York et au Québec. À la table
de négociation, de discussion qui a eu lieu à Dorval, elle s'est
impliquée, mais en présence majoritairement des
représentants de Khanawake et de Kanesatake, d'Oka. Alors, les
discussions qui ont eu lieu à la table avant-hier et jusqu'à
tôt ce matin, se passaient avec les représentants de ces deux
communautés, je pourrais dire, chapeautées par cette
Confédération qui cherche une solution pacifique et qui cherche
à solutionner beaucoup de problèmes qui existent dans les
communautés mohawks présentement.
Le Président: En question complémentaire, M. le
député de Westmount.
M. Holden: Thank you, Mr. Speaker. My supplementary question is
for the Premier. Has the government contemplated setting up a judicial inquiry
to study the police violence and the mob violence which has been happening
these days in and around Montréal and particularly which started with
the ill-fated attack by the Québec police Force on July 11th, 1990?
Le Président: Alors, M. le premier ministre.
M. Bourassa: le ministre de la justice a fait plusieurs
déclarations sur les incidents qui sont survenus à quelques
reprises. alors, je lui demanderais de compléter la réponse.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Rémillard: M. le Président, ma position est la
même que celle que j'avais au lendemain du 11 juillet. Personne n'est
au-dessus de la loi. La loi doit s'appliquer peu importe la race, la langue, la
religion ou tout autre élément. Comme ministre de la Justice, je
peux appartenir à un gouvernement. Comme Procureur
général, je n'appartiens à aucun gouvernement, aucun parti
politique, et mes décisions sont prises, en mon âme et conscience,
en fonction des éléments de preuve qu'on présente devant
moi. Au fur et à mesure que ces éléments de preuve nous
sont présentés, nous les étudions; plusieurs dossiers ont
été ouverts et la justice va suivre son cours d'une façon
exactement semblable à celui qu'elle doit suivre dans tous les autres
cas où on enfreint des éléments qui sont fondamentaux au
respect de notre liberté et de notre démocratie,
c'est-à-dire notre règle de droit; que ce soit d'un
côté ou de l'autre des barricades, peu importent les citoyens, la
justice va s'appliquer.
Le Président: En question principale, M. le leader de
l'Opposition.
Trafic d'armes à Kahnawake et Akwesasne
M. Chevrette: M. le Président, partant
précisément du principe que tout le monde est égal devant
la loi, je voudrais demander... Ma question s'adressera au ministre de la
Sécurité publique. Le 16 août dernier, on apprenait, par la
voie des médias, que les Warriors amassaient des stocks d'armes
importants à Kahnawake et à Akwesasne. Comment se fait-il...
Ça a été confirmé également par le premier
ministre du Québec qu'ils étaient au courant depuis au moins
trois ans. Ma question s'adresse au ministre de la Sécurité
publique. Comment se fait-il qu'il ne sort pas intervenu préalablement
pour désarmer, pour saisir les armes, si c'est vrai, votre principe de
justice: Tout le monde est égal?
M. Bourassa: M. le Président, je vais laisser... Le
ministre pourra compléter, mais, puisque le leader parlementaire m'a
impliqué, tout le monde savait, et c'était de
notoriété publique, qu'il y avait du trafic d'armes qui se
faisait. Il y a même eu des incidents à Akwesasne à cet
égard-là. Le problème s'est compliqué par le fait
qu'il y avait quatre juridictions: il y avait les Etats-Unis, il y avait la
Sûreté du Québec, la Gendarmerie royale et la police de
l'Ontario. Donc, il faut faire une distinction entre reconnaître qu'il y
a un trafic d'armes, qui ne se fait pas en. plein jour, et la connaissance de
l'ampleur qui, elle, a pu être beaucoup plus récente. Et il faut
quand même tenir compte aussi qu'il y a quatre juridictions qui
étaient impliquées, ce qui suppose la collaboration des quatre
juridictions pour assurer la pleine efficacité de l'action. Alors, je
demanderais au ministre de compléter ma réponse.
Le Président: M. le ministre de la Sécurité
publique.
M. Elkas: M. le Président, pour compléter la
réponse du premier ministre, je devrais mentionner que nous avons conclu
une entente avec Akwesasne, il n'y a pas longtemps, ainsi qu'avec les Hurons,
à l'effet que l'on devait avoir une force policière à
l'interne, conformément à nos lois. J'ai discuté avec le
chef Joe Norton, ce printemps, d'une entente semblable. On voulait conclure
celle d'Akwesasne. On a toujours voulu, évidemment, l'autonomie pour ces
gens. On voulait respecter cette autonomie, mais on voulait absolument
s'assurer qu'il y ait une force policière qui respecte les lois du
Québec.
Le Président: En complémentaire, M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: En additionnelle, M. le Président. M. le
Président, le premier ministre vient d'invoquer des questions
juridictionnelles, des conflits de juridictions. N'est-il pas exact qu'à
l'article 39 du Code criminel la Sûreté du Québec est
responsable, sur le territoire, de garder la paix, notamment sous le chapitre
des armes prohibées? Comment expliquer que vous sachiez tout ça
depuis trois ans et que vous n'ayez pas détaché des policiers
pour saisir ces armes et faire en sorte qu'on ne se retrouve pas avec la crise
qu'on vient de vivre?
Le Président: M. le ministre de la Sécurité
publique.
M. Elkas: Très facile de le dire, M. le Président.
Vous étiez là, entre 1976 et 1985; je me demande quelle sorte
d'action vous avez prise. Nous, faisant face à des caches d'armes, on
n'avait pas nécessairement d'informations au niveau du volume d'armes.
On savait qu'il y avait des armes. D'ailleurs, nos interventions auprès
du chef Norton, du chef Mitchell d'Akwesasne, c'était pour
contrôler ces armes. Les ententes, c'était pour s'assurer qu'on
ait des forces policières à l'intérieur qui pourraient
s'assurer qu'il n'y en ait pas. (12 h 30)
D'ailleurs, lorsqu'on regarde la situation à Akwesasne, c'est
très simple: On a 75 policiers sur les lieux et il n'y a pas d'armes.
C'est un peu ça les raisons pour lesquelles les gens d'Akwesasne sont
intervenus à Oka. Ils veulent que la Sûreté du
Québec se déplace d'Akwesasne pour qu'il y ait un trafic d'armes
et toute autre chose. La présence de notre police est là. On a
fait notre job. Elle va se maintenir là tant et aussi longtemps qu'on va
avoir un corps policier sur place qui va s'assurer que la loi est
respectée.
Le Président: En complémentaire, M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, quand le ministre de la
Sécurité publique a été mis au courant du trafic
d'armes, quelles dispositions a-t-il prises pour que ce trafic cesse? Quelles
dispositions a-t-il prises pour en faire la saisie? Quelles dispositions a-t-il
prises - ça, ce n'est pas la juridiction du fédéral, c'est
provincial - et quelles actions concrètes, à part discuter avec
M. Norton, a-t-il prises pour protéger le public?
Le Président: M. le ministre de la Sécurité
publique.
M. Elkas: M. le Président, les dispositions qu'on a
prises, ce sont des discussions avec les deux chefs. On s'est assis avec le
chef Mitchell d'Akwesasne pour s'assurer que ces gens-là aient en place
une force policière qui fera respecter la loi. J'ai envoyé... On
a "dispatché", on a dépêché des gens de la
Sûreté du Québec pour s'assurer que les lois, soient
respectées. C'est un peu quand on a su qu'il y avait des caches d'armes,
des armes qui se transportaient entre les US et le Canada, c'est là
qu'on a agi et on a agi d'une façon très responsable.
M. Chevrette: M. le Président...
Le Président: dernière question additionnelle, m.
le leader de l'opposition.
M. Chevrette: ...il ne faut pas prendre les gens pour des
valises. est-ce que le ministre peut confirmer que, depuis trois ans, il sait
qu'il y a un trafic d'armes? est-ce qu'il peut confirmer...
Une voix: II l'a dit.
M. Chevrette: ...qu'il discutait avec le chef Norton pour
installer une police amérindienne, tout en restant tout à fait
inactif sur le plan de la responsabilité du Québec, de
protéger les citoyens, non pas en vertu des juridictions, en vertu du
Code criminel qui s'applique au Québec?
Le Président: M. le ministre.
M. Elkas: m. le président, à savoir si
j'étais au courant qu'il y avait des caches d'armes depuis trois ans,
j'étais maire de la ville de kirkland dans ce temps-là, alors...
je suis ici depuis 10 mois.
M. Chevrette: Le ministre peut bien avoir admis qu'il
s'était fait avoir, M. le Président.
Le Président: Un instant, un instant! Alors, question
additionnelle.
M. Chevrette: La responsabilité, M. le Président,
vous comprendrez qu'elle est au gouvernement. On sait qu'il est là
depuis un an et il a bien hâte de partir. Ce n'est pas ça qu'on
veut savoir.
Le Président: Votre question, s'il vous plaît.
M. Chevrette: Ce qu'on veut savoir de sa part: depuis un an,
qu'a-t-il fait auprès de la Sûreté du Québec pour la
mandater spécifiquement pour contrer ce trafic d'armes et mettre ainsi
en danger une population, créer une crise de 50 jours, créer une
insécurité totale? Qu'a-t-il fait comme action
concrète?
Le Président: Alors, M. le ministre de la
Sécurité publique.
M. Elkas: M. le Président, on a envoyé 75 policiers
de la Sûreté du Québec à Akwesasne pour
régler la question des armes.
M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le
ministre...
Le Président: Dernière question additionnelle.
M. Chevrette: ...peut nous dire quand il a envoyé 75
policiers de la Sûreté du Québec à Akwesasne?
À quelle occasion? Est-ce que c'était pour contrer la crise - il
n'a rien fait - ou s'il admet explicitement ou implicitement que, dans le fond,
il n'a rien fait pour désarmer ces gens?
Une voix: II y avait deux morts.
Le Président: M. le ministre de la Sécurité
publique.
M. Elkas: Six mois après mon arrivée.
Le Président: À l'ordre! Question principale, M. le
député de Duplessis.
Suites données à la résolution du
20 mars 1985 reconnaissant les nations autochtones
M. Perron: Oui, M. le Président. Le 9 février 1983,
le Conseil des ministres du gouvernement du Parti québécois
répondait aux demandes formulées par les autochtones du
Québec en 1982 et adoptait 15 principes énonçant la
politique du Québec à leur égard. Le 20 mars 1985, le
regretté M. René Lévesque présentait à
l'Assemblée nationale une motion qui était adoptée,
reconnaissant l'existence des nations autochtones du Québec, ainsi que
leurs droits, s'appuyant sur les 15 principes déjà
mentionnés. On se rappellera que cette résolution était
rejetée par tous les députés de l'Opposition de
l'époque, au
nombre de 44. Lors de son intervention en Chambre, l'actuel ministre
délégué aux Affaires autochtones demandait au gouvernement
de retirer cette résolution, la qualifiant de très limitative et
disant qu'elle restreindrait et affaiblirait considérablement la
position des autochtones. Lors de la conférence constitutionnelle
d'avril portant sur les droits des autochtones, il concluait en soulignant que
l'adoption de cette résolution serait très disgracieuse envers
les autochtones, malgré que les autochtones étaient d'accord.
Après avoir plongé le Québec dans une crise sans
précédent et en être venu à un doigt de la
catastrophe, le ministre délégué aux Affaires autochtones
peut-il nous dire ce que son gouvernement a fait depuis 1985 face à
cette résolution du 20 mars 1985 et face aux 15 principes de 1983?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Affaires autochtones.
M. Ciaccia: M. le Président, premièrement, je
voudrais rectifier une des affirmations du député de Duplessis,
quand il dit que les autochtones étaient d'accord avec la
résolution. Ce n'est pas exact, pour ne pas dire que c'est absolument
faux. Et la raison pour laquelle nous avions voté contre la
résolution, c'est que nous avions obtenu des représentations de
toutes les communautés autochtones du Québec contre cette
résolution et je vais vous dire pour quelle raison. Parce que votre
résolution n'allait pas dans le sens d'enchâsser les droits des
autochtones dans la constitution canadienne, parce que le programme de votre
parti n'acceptait pas la constitution canadienne. Et nous - c'était
avant le lac Meech, je dois vous le souligner - nous acceptions de discuter et
nous acceptions le principe que ces droits pouvaient être
enchâssés. C'est pour ces raisons que nous avons été
contre cette résolution, et c'est pour cette raison que les autochtones
eux-mêmes étaient contre la résolution que vous aviez
déposée à l'Assemblée nationale.
En ce qui concerne ce que nous avons fait depuis, je peux vous dire que
nous sommes allés beaucoup plus loin. Nous avons été
beaucoup plus loin en répondant aux attentes des autochtones.
Écoutez, si vous voulez faire de la petite politique...
Le Président: Un instant, s'il vous plaît! Pour le
bon ordre de l'Assemblée, si on veut que le ministre réponde
à la question posée, je vous demanderais de lui laisser la
parole. Si vous avez des commentaires, vous pourrez les manifester dans
d'autres questions complémentaires. En conclusion, M. le ministre. S'il
vous plaît!
M. Ciaccia: Nous...
Le Président: S'il vous plaît! M. le ministre,
rapidement en conclusion, s'il vous plaît.
M. Ciaccia: Alors, rapidement, M. le Président. Nous avons
entrepris avec les autochtones des discussions sur le gouvernement autonome.
C'est ça qu'ils voulaient et nous avons des décisions du Conseil
des ministres nous autorisant à poursuivre ces discussions. C'est
ça le vrai problème des groupes autochtones de vouloir discuter
sur ces sujets, ce que nous faisons et ce que nous sommes prêts à
continuer et à poursuivre et à régler avec les groupes
autochtones au Québec.
Le Président: En question complémentaire, M. le
député de Duplessis.
M. Perron: M. le Président, est-ce que le ministre
délégué aux Affaires autochtones peut s'engager à
tenir très prochainement une commission parlementaire afin d'examiner
les suites données depuis cinq ans à la résolution du 20
mars 1985, ainsi que les ententes qui auraient été conclues avec
certaines nations autochtones du Québec depuis la présence des
libéraux au pouvoir?
Le Président: M. le ministre.
M. Ciaccia: M. le Président, je suis prêt en tout
temps et en toute transparence à discuter de tous les actes que le
gouvernement libéral a pris envers les autochtones, incluant l'entente
de la Baie James qui n'a pas été respectée à
certains égards entre 1965 et 1985. Mais, en ce qui concerne la tenue
d'une commission parlementaire, je vais examiner la proposition du
député de Duplessis et je lui laisserai savoir en temps et lieu
si c'est le vrai forum pour en discuter. Parce qu'une des accusations - et
peut-être que vous n'avez pas encore appris cette leçon - que nous
avons c'est qu'on discute ces choses-là entre nous. Le problème
des autochtones, ce n'est pas à la commission parlementaire. Le
problème des autochtones, c'est dans leurs communautés, leurs
problèmes sociaux, leurs problèmes économiques. Il faut
répondre à leurs revendications sur le terrain et ce n'est pas
seulement en discutant dans une commission parlementaire, en faisant de la
partisanerie d'un côté ou de l'autre et en les utilisant, les
autochtones, pour des fins politiques, comme vous semblez le faire aujourd'hui,
qu'on va résoudre les problèmes. (12 h 40)
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: En question complémentaire, M. le
député de Duplessis.
M. Perron: Oui, M. le Président. Puisque le ministre
délégué aux Affaires autochtones a parlé
d'ententes qui auraient été conclues avec certaines
nations autochtones du Québec depuis la présence de son
gouvernement, est-ce que le ministre peut déposer, en cette Chambre, les
ententes qui auraient été conclues, pour qu'on puisse être
bien informés de la situation actuelle et, aussi, de ce qui a
amené les problèmes que nous avons actuellement?
Le Président: M. le ministre.
M. Ciaccia: C'est avec grand plaisir que nous allons
déposer les ententes qui ont été conclues. Vous allez voir
que c'est la solution; dans ces ententes qui ont été
acceptées par les autochtones, nous avons répondu à leurs
attentes.
Le Président: Une question additionnelle, M. le
député de D'Arcy-McGee.
M. Ubman: Merci, M. le Président. C'est pour la ministre
de l'Énergie et des Ressources. La ministre peut-elle laisser savoir
à l'Assemblée nationale quel est le statut ou quelles sont ses
intentions vis-à-vis des audiences impartiales sur l'impact
environnemental de la Baie James II qui, sûrement, va avoir un impact sur
nos peuples autochtones?
Le Président: M. le député, je regrette. Je
ne crois pas qu'on puisse rattacher cette question à la question
principale. Ce pourrait être une question principale
ultérieurement que nous pourrions reconnaître. En question
principale maintenant, M. le député de Labelle.
M. Léonard: M. le Président... Le
Président: Oui. Un instant.
M. Ciaccia: Un complément d'information au
député de Duplessis.
Le Président: Alors, un complément d'information.
Est-ce qu'il y a consentement? M. le ministre délégué aux
Affaires autochtones.
M. Ciaccia: Les ententes signées auxquelles vous avez fait
référence ont déjà été
déposées par le gouvernement à l'étude des
crédits, mais ça va me faire un plaisir de vous en envoyer
d'autres copies.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Alors, M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais demander une
question additionnelle pour rectifier la réponse qui vient d'être
donnée.
Le Président: Alors, une question addition- nelle.
M. Chevrette: Ce qu'on veut savoir, M. le Président,
c'est: Est-ce que le ministre s'engage à parler un jour de ce qui se
trame à Dorval? Va-t-il déposer les ententes qu'il est en train
de conclure? C'est ça, fondamentalement. On dit: Les autres
ententes.
M. Perron: Les autres.
M. Ciaccia: M. le Président...
M. Perron: Pas celles qu'on connaît déjà.
Le Président: Un instant. Votre question est
complémentaire, évidemment, parce qu'elle s'ajoute à la
question du député de Duplessis. M. le ministre.
M. Ciaccia: M. le Président, ne commençons pas
à jouer avec les mots et à changer la question du
député de Duplessis. Le député de Duplessis m'a
demandé de déposer les ententes signées; il n'a pas fait
référence aux ententes en discussion. Je me suis engagé
à le faire et j'ai porté à son attention le fait que les
ententes auxquelles il faisait référence ont déjà
été déposées aux crédits, et je suis
prêt à les lui renvoyer encore. S'il y en a qui n'ont pas
été déposées, M. le député de
Duplessis... On m'informe qu'elles ont été
déposées, mais ça va me faire un grand plaisir de les
redéposer et de vous en donner des copies.
Une voix: Parfait.
Le Président: En question principale, M. le
député de Labelle.
Impact de la TPS en 1991
M. Léonard: Oui, M. le Président. Ma question
s'adresse au ministre des Finances qui nous a déposé ce matin un
document de 93 pages comportant de multiples tableaux, comme je disais, et que
les parlementaires viennent tout juste de recevoir. Évidemment, ces
tableaux portent sur l'année 1992 dont il a traité longuement
dans sa déclaration ministérielle. Mais il y a aussi quelques
renseignements sur les budgets 1990-1991 et 1991-1992. En particulier, il a
fait longuement état des bénéfices, paraît-il de sa
déclaration ministérielle, mais il faut voir tout de suite, dans
ces tableaux, qu'il a inclus l'indexation de 4,5 % du régime
d'imposition et des allocations familiales et l'indexation aussi des programmes
de sécurité du revenu, ce qui fait que ça comporte tout de
suite 381 000 000 $ qui n'ont rien à voir avec l'ensemble du tableau,
avec la question de la TPS comme telle, parce que cette indexation aurait eu
lieu de toute façon.
M. le Président, pour les années 1990-1991 et 1991-1992,
c'est-à-dire l'impact de l'imposition de la TPS en 1991 le ministre
peut-il nous confirmer que l'impact sera de 329 000 000 $, le coût net,
d'au moins 329 000 000 $ aux contribuables québécois?
Le Président: Alors, M. le ministre des Finances.
M. Levesque: M. le Président, la question du
député de Labelle me permet d'ajouter quelques
éléments, je pense, qui vont intéresser cette Chambre.
D'abord, on parle de l'indexation pour 1992 dont j'ai fait part,
évidemment, dans les documents auxquels il fait allusion. Je pense qu'il
était important de faire connaître immédiatement à
cette Chambre et à la population nos intentions quant à
l'indexation de 1992. Et je reprends une phrase du député de
Labelle, qui dit: Cette indexation aurait eu lieu de toute façon. Or, M.
le Président, il ne faut pas retourner bien loin au cours des
années où l'honorable député faisait partie d'un
gouvernement qui, à certains moments, a oublié d'indexer ou qui
n'a pas voulu indexer. Alors, il était important pour nous d'indiquer
que nous avions l'intention de continuer la politique que nous avons maintenue
depuis notre arrivée au pouvoir; c'est-à-dire, chaque
année, cette année comme les autres et l'année 1992
également, nous avons indexé et nous continuerons d'indexer et
les allocations familiales, et le régime d'impôt, et les APTE, et
les APPORT. Nous allons continuer de le faire et nous avons même
donné le montant d'indexation que nous allions annoncer, et nous l'avons
fait tout de suite.
Deuxièmement, il était important, parce que nous parlions
justement de TPS et des taxes à la consommation du Québec,
d'indiquer que nous ne ferions pas comme le gouvernement fédéral.
Il indexe, oui, mais il indexe à l'IPC moins 3 %. Ce qui veut dire
à peu près, quoi, 1 1/2 %. Nous, au Québec, nous allons
avoir une indexation pleine et entière de 4,5 %.
Des voix: Bravo!
Le Président: Alors, je demanderais la collaboration des
députés, s'il vous plaît. Alors, en question additionnelle,
M. le député de Labelle.
M. Léonard: M. le Président, pourquoi le ministre
refuse-t-il de répondre à la question qui porte, pour les
années 1990-1991 et 1991-1992, sur l'impact de sa déclaration,
qui est de 329 000 000 $? Et pourquoi, lui qui fait des tableaux pour
l'année 1992, lorsqu'il a fait son discours sur le budget, a-t-il
camouflé ce fait que cet impact était déjà compris
dans les impacts financiers du discours sur le budget?
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Levesque: M. le Président, le député de
Labelle utilise un vocabulaire assez fort pour simplement poser une question!
C'est clair, M. le Président, et je l'ai mentionné tout à
l'heure dans ma déclaration, que pour les trois ans, 1990-1991,
1991-1992 et 1992-1993, le résultat net, le "bottom line* pour employer
un mot chez nos amis d'Égalité, c'était moins 19 000 000
$. C'est ça, M. le Président. Si on prend une année, on
peut dire l'année 1991-1992, il y a là un plus, c'est vrai, mais
il y a un moins à peu près semblable en 1992-1993. Alors, ce que
nous disons, c'est que dans ces trois années-là - parce que je
pense qu'il faut prendre une certaine période pour voir les effets - les
effets, pour le gouvernement, c'est moins 19 000 000 $. Je dis donc que c'est
un effet neutre au point de vue des revenus du gouvernement.
Alors, je réponds: Oui, mais en même temps, tenez compte de
l'ensemble des trois. Et l'ensemble des trois donne ce moins 19 000 000 $, je
pense. Donc, autrement dit, c'est un effet neutre.
Le Président: Question principale, Mme la
députée de Taillon.
Taxe imposée sur les ventes de biens
essentiels
Mme Marois: Merci, M. le Président. On se souviendra que
le gouvernement du Parti québécois avait aboli la taxe de vente
sur des biens essentiels, entre autres sur les chaussures, les meubles, les
appareils électroménagers de base, de même que les
vêtements. Tous s'étaient entendus, à ce moment-là,
pour dire que cette décision avait eu un impact sur les secteurs
manufacturiers concernés, soit dans le cadre d'une relance de ces
secteurs-là, ou soit dans le cadre du maintien de ces secteurs
économiques qui, on le sait, sont, dans l'économie
québécoise, des secteurs fragiles.
Est-ce qu'on doit comprendre, M. le Président, que le ministre
des Finances, en choisissant de taxer ces biens, nous dit qu'il laisse tomber,
qu'il abandonne un soutien important à ces industries qui donnent du
travail à des dizaines de milliers de travailleurs et de travailleuses
au Québec, M. le Président? (12 h 50)
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Levesque: M. le Président, je suis heureux de la
question posée par Mme la députée parce que ça me
permet justement de faire une précision à cet effet.
D'abord, on peut prendre les contribuables, et, deuxièmement, les
entreprises. Quant aux contribuables, j'ai eu l'occasion de mentionner deux
choses importantes. Premièrement, ces
exemptions profitaient beaucoup plus aux mieux nantis qu'aux moins bien
nantis. Et j'ai mentionné, justement, des chiffres qui sont une preuve
éclatante à cet effet. Deuxièmement, même dans ce
cas-là, les crédits d'impôt remboursables que j'ai
annoncés font en sorte que les gens de revenus bas et moyens vont
être protégés.
Quant à l'entreprise, c'est là la question de Mme la
députée: Est-ce que ça va avoir un impact sur les
entreprises elles-mêmes? Or, M. le Président, il ne faut pas
oublier de distinguer entre le genre de taxe à la consommation que nous
avons de 9 % actuelle, par rapport à ce qui est présenté
dans notre projet et qui fait en sorte que les intrants seront exemptés
de taxe. De sorte que, prenez par exemple dans le cas du meuble, la TPS
remplace une taxe, qui était déjà là, de 13 %. Bon.
Et, deuxièmement, notre propre taxe de 1992, le nouveau genre qui va
remplacer les 9 %, mais qui sera de 7 % - sera remboursée au niveau de
l'entreprise, de sorte que pour l'entreprise elle-même, d'après
les études qui ont été faites au ministère des
Finances - parce que nous n'avons pas fait ça, vous savez, d'une
façon absolument aveugle, je l'espère du moins - en me fiant sur
le rapport des économistes qui ont fait ces études-là,
l'impact sur les meubles sera positif plutôt que négatif, comme le
craint Mme la députée, et presque sans effet du côté
des vêtements.
Le Président: En question complémentaire, Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: M. le Président, si des études d'impact
ont été faites, si effectivement le ministre nous affirme ici
qu'il n'y aura pas d'impact sur ces secteurs, donc, pas de perte d'emplois ou
si peu, semble-t-il nous dire, dans ces secteurs industriels, est-ce qu'il peut
nous déposer ces études d'impact, ici, à
l'Assemblée nationale?
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Levesque: Je suis heureux, M. le Président, de pouvoir
dire à Mme la députée que je la convie à la
commission parlementaire, le 6 septembre prochain. J'aurai là
l'expertise nécessaire pour répondre justement et déposer,
s'il y a lieu, les documents pertinents.
Le Président: En question additionnelle, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: M. le Président, est-ce que la ministre des
Affaires culturelles est au courant de l'étude fédérale,
canadienne qui prouve que la TPS Wilson va faire chuter, dans le domaine de
l'édition, les ventes de 17,5 % et que celle de son collègue va
les faire chuter de 20 % additionnels, donc en tout de 40 %? Est-ce que la
ministre est d'accord, oui ou non, avec la nouvelle taxe qui s'ajoute avec la
décision de son collègue, le ministre des Finances?
Le Président: Mme la ministre des Affaires
culturelles.
Mme Robillard: M. le Président, je suis très
consciente de l'impact de la TPS sur différentes activités
culturelles au Québec. En particulier, on sait que, dans certaines
industries culturelles, on peut avoir des impacts. L'industrie du livre est une
des industries qu'on doit suivre de très près. Il ne faut pas
oublier non plus que, d'un côté, il y a de fait la TPS qui va
être appliquée à l'industrie du livre, mais, d'un autre
côté, les industries culturelles vont pouvoir
bénéficier aussi de crédits à l'intrant. Alors,
dans ce sens-là, nous sommes en train d'analyser cela, avec nos
collègues des Finances d'ailleurs, pour en connaître vraiment les
impacts réels. En fin de compte, quel sera l'écart dans le
domaine de l'industrie du livre? De plus, on peut peut-être supposer que,
dans le domaine de l'exportation, il pourra y avoir des
bénéfices. Alors, je veux assurer cette Chambre que je suis ce
dossier de très près et que nous pourrons réajuster nos
mesures en conséquence.
Des voix: Très bien.
Le Président: Alors, c'est la fin de la période des
questions.
Il n'y a pas de vote reporté.
Avis touchant les travaux des commissions.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
Je demanderais la collaboration des députés, s'il vous
plaît. Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît.
Projet de loi 82 Adoption du principe
Nous allons maintenant procéder aux affaires du jour suivant
l'ordre adopté par la Chambre. M. le ministre
délégué aux Transports propose maintenant la motion
d'adoption du principe du projet de loi 82, Loi concernant la construction d'un
tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine.
Alors, je vais maintenant reconnaître M. le ministre
délégué aux Transports.
M. Yvon Vallières
M. Vallières: M. le Président, la population de la
région de Châteauguay fait face à une situation sans
précédent, le gouvernement du Québec en est fort
conscient. Les événements qui perdurent depuis une cinquantaine
de jours sont venus contribuer à une situation problématique
au niveau des déplacements quotidiens d'un bassin de population
de la rive sud de Montréal de plus en plus considérable. Cette
population a vécu des moments extrêmement difficiles et
pénibles. Peu de citoyens au Québec ont eu à vivre une
situation aussi délicate, aussi explosive. Ces gens, M. le
Président, ont été privés pendant une cinquantaine
de jours de leur lien direct et principal avec IHe de Montréal, ce qui
leur a occasionné des détours de plusieurs dizaines de
kilomètres. Ces personnes ont également subi de profonds
désagréments, autant au niveau financier qu'au niveau de
l'emploi. Je vous le dis avec toute la vigueur que je peux mettre dans mon
intervention, M. le Président, il ne faut plus que ce genre de situation
se reproduise.
La construction de ce tronçon de l'autoroute 30 entre
Châteauguay et Sainte-Catherine doit se faire dans les plus brefs
délais. Même si aujourd'hui la situation semble se
résorber, il nous faut apporter des solutions permanentes. C'est
pourquoi le gouvernement du Québec, par l'intermédiaire du
ministère des Transports, a décidé d'intervenir rapidement
et efficacement.
Nous nous devions d'apporter une solution permanente et réaliste
aux problèmes de circulation que vit quotidiennement la population de ce
secteur de la rive sud de Montréal. Je le répète, M. le
Président, c'est la notion d'efficacité qui a guidé le
ministère des Transports dans sa décision de devancer les travaux
de construction de l'autoroute 30 afin de contourner la réserve
amérindienne de Kahnawake. J'aimerais d'ailleurs, M. le
Président, à ce stade-ci, saluer cette population et ses
représentants qui sont présents dans les tribunes pour l'esprit
d'ouverture et de tolérance qu'ils ont démontré dans une
situation, il faut bien le dire, très difficile à accepter, une
situation extrêmement difficile, complexe et inédite. Comme le
soulignait notre premier ministre, je ne crois pas qu'on puisse trouver de
précédent d'un gouvernement et d'une population qui, presque dans
un centre-ville, doivent compter avec un très grand nombre de personnes
armées qui défient ouvertement l'ordre public. C'est à
cette population que je veux aujourd'hui signifier notre volonté
très ferme de lui livrer ce lien routier indispensable qu'est
l'autoroute 30. Je voudrais ajouter que le projet de l'autoroute 30, dans son
ensemble, se veut un projet prioritaire d'une voie de contournement rapide et
efficace de l'île de Montréal.
Permettez-moi maintenant, M. le Président, de brosser
brièvement le tableau de la situation qui prévaut. Le 9
août dernier, mon collègue ministre des Transports et ministre de
la Sécurité publique annonçait qu'il amorçait
toutes les démarches nécessaires afin de réaliser,
dès cette année, un tronçon de 8,5 kilomètres de
l'autoroute 30 reliant le boulevard Ford, à Châteauguay, à
la route 132, à Sainte-Catherine, sur la rive sud de Montréal.
Évalué à près de 10 000 000 $, ce projet consiste
à construire d'abord une chaussée à deux voies de
circulation. Dès l'an prochain, les travaux se poursuivront afin de
compléter la deuxième chaussée, les étagements et
les échangeurs. Il a également été
décidé que le ministère des Transports procédera,
toujours l'an prochain, à la construction de deux chaussées
d'autoroute entre le boulevard Ford et la route 138, à
Châteauguay. On parle donc, M. le Président, d'un projet
autoroutier de 12,5 kilomètres, évalué à 43 800 000
$, qui reliera la route 138, à Châteauguay, et la route 132,
à Sainte-Catherine. (13 heures)
Nous avons également décidé récemment de
procéder dès cette année à la première phase
du tronçon entre la route 138, à Châteauguay, et le rang
Sainte-Marguerite, à Mercier. Cette première phase aura comme
conséquence de soulager la circulation urbaine de Châteauguay et
profitera grandement aux usagers en provenance de Châteauguay, de Mercier
et des villes plus à l'ouest, comme Léry, Maple Grove et
Beauhar-nois. Je suis convaincu, M. le Président, qu'il s'agit là
d'une mesure additionnelle considérable qui contribuera grandement
à améliorer la circulation routière au
bénéfice de la population de toute cette région.
Par ailleurs, pour procéder à la réalisation de ce
projet autoroutier le plus rapidement possible, le Conseil des ministres a
autorisé, lors de sa séance du 15 août dernier, que le
projet soit soustrait de la procédure d'évaluation et d'examen
des impacts sur l'environnement, prévue à la section IV. 1 du
chapitre I de la Loi sur la qualité de l'environnement.
La loi stipule que, lorsque la réalisation dans les meilleurs
délais d'un tel projet de construction routière est requise afin
de prévenir les dommages d'une catastrophe réelle ou
appréhendée, le gouvernement peut, sans avis, soustraire ce
projet de la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur
l'environnement. Le gouvernement doit, dans ce cas, "délivrer un
certificat d'autorisation pour le projet et l'assortir des conditions qu'il
juge nécessaires pour protéger l'environnement." C'est ce que
nous avons fait, M. le Président.
Toujours à la même séance du 15 août, le
Conseil des ministres a également ordonné, par décret, que
soit enclenché le processus d'expropriation visant la réalisation
de ce projet autoroutier. Je tiens ici à rappeler que ces deux
décrets sur l'environnement et l'expropriation visent la totalité
du tronçon de l'autoroute 30, entre la route 138 à
Châteauguay et la route 132 à Sainte-Catherine, soit 12,5
kilomètres. D'ailleurs, la teneur de ces deux décrets
ministériels est reconduite dans le présent projet de loi
spécial.
Aujourd'hui, M. le Président, je présente aux membres de
cette Assemblée un projet de loi qui a pour objectif
d'accélérer le processus d'acquisition des immeubles
nécessaires à la
construction de l'autoroute 30 entre les municipalités de
Châteauguay et de Sainte-Catherine et à l'extérieur de la
réserve de Kahnawake. La décision de présenter ce projet
de loi a été prise le 22 août par le Conseil des
ministres.
Les membres de cette Chambre savent tous que la loi actuelle sur
l'expropriation prévoit différents avis et délais
procéduraux, et que l'exercice de certains recours, avant qu'un
expropriant puisse prendre possession d'un bien exproprié, occasionne
des délais additionnels. Sous l'actuelle loi, l'application des
délais et recours aurait pour effet, dans la meilleure des
hypothèses, de reporter le début des travaux de construction de
ce tronçon de l'autoroute 30 au début de novembre 1990. Devant ce
constat, nous avons donc voulu présenter un projet de loi spécial
sur l'expropriation, qui contient quelques modifications quant à la loi
actuelle. Nous avons donc comme objectif, grâce à ce projet de loi
spécial, M. le Président, de permettre une procédure tout
aussi spéciale d'expropriation afin de réduire au maximum les
délais qu'impose la loi actuelle d'expropriation.
Cependant - et il est important de le noter - des mesures
d'atténuation des inconvénients que pourraient subir les
personnes expropriées seront mises de l'avant. Pour illustrer mon
propos, M. le Président, et à titre d'exemple, le
ministère des Transports devra, avant de prendre possession d'un bien
exproprié, verser une indemnité substantielle à
l'exproprié afin de lui éviter tout inconvénient de nature
financière. De plus, les garanties de juste indemnisation de la loi
actuelle seront maintenues, puisque la Chambre de l'expropriation sera
appelée à fixer l'indemnité définitive comme c'est
le cas présentement. Bien que ce jugement de la Chambre de
l'expropriation deviendra exécutoire, puisqu'il sera homologué
par la Cour supérieure, la personne visée par l'expropriation
aura toujours la possibilité d'aller devant la Cour d'appel contester
cette indemnité, si elle la juge inappropriée ou insuffisante. Il
devient donc évident, M. le Président, que notre action s'inscrit
dans une démarche qui vise l'amélioration non seulement de la
circulation routière sur la rive sud de Montréal, mais
également de la qualité de vie de ces citoyens et citoyennes dont
la patience et la bonne volonté sont appréciées par tous
les membres en cette Assemblée.
Le projet de loi spécial que nous étudions aujourd'hui
donnera certains pouvoirs additionnels au ministre des Transports. Ces pouvoirs
ne seront utilisés par le ministre des Transports que pour le
tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine.
Je suis persuadé que les membres de cette Chambre ont compris que de
tels pouvoirs ne seront exercés par le ministre qu'en fonction de
l'intérêt et pour le mieux-être de la population
concernée. Il est important de noter, M. le Président, que le
projet de loi spécial que je présente aujourd'hui à
l'Assemblée nationale est une loi d'ordre très technique. Nous
discuterons donc simplement des moyens et des procédures à
appliquer afin d'arriver à accélérer le processus
d'acquisition des terrains qui sont requis afin de procéder aux travaux
sur l'autoroute 30.
Ainsi, M. le Président, ce projet de loi m'autorisera à
procéder à la construction du tronçon projeté et
à exercer à cette fin les pouvoirs prévus dans la Loi sur
la voirie, de même qu'à acquérir à l'amiable ou par
expropriation les biens que nous jugerons nécessaires. La loi
spéciale nous permettra également d'acquérir à
l'amiable ou par expropriation les biens que nous jugerons nécessaires
à la relocalisation des lignes d'Hydro-Québec et de mettre
à la disposition d'Hydro-Québec les biens ainsi acquis.
D'autre part, la loi spéciale permettra que les actes concernant
la construction du tronçon, plus particulièrement en ce qui
concerne les servitudes de drainage et la relocalisation des lignes
d'Hydro-Québec, soient soustraits de l'application de la Loi sur la
protection du territoire agricole. De plus, grâce à cette loi
spéciale, certains ajustements seront apportés aux
procédures d'expropriation de manière à garantir le plus
possible les droits des personnes expropriées et de tous ceux qui
seraient susceptibles de subir un dommage du fait de ces expropriations,
notamment les locataires et les occupants de bonne foi.
Le réseau routier de cette région de la rive sud de
Montréal profitera grandement de cette amélioration. Pour la
population de cette région, il s'agit là d'un outil essentiel
à une meilleure circulation vers les autres liens qui unissent la rive
sud à l'île de Montréal. M. le Président, outre
l'amélioration de la qualité de vie de la population de cette
région, la réalisation de ce tronçon de l'autoroute 30
viendra également contribuer au développement économique
de tout ce secteur de la rive sud.
Notre projet de loi spécial est conditionné par la
nécessité d'offrir rapidement à la population de
Châteauguay et des environs une alternative valable, sécuritaire
et permanente. Peu importe ce que nous réserve l'avenir, M. le
Président, les gens de cette région de la rive sud doivent
pouvoir compter sur une solution de rechange. Et, pour donner à cette
population ce qui lui revient, le gouvernement doit agir vite et efficacement.
Voilà ce qui nous motive à présenter aujourd'hui ce projet
de loi spécial.
Je me permettrai de vous faire remarquer, M. le Président, que ce
projet de construction de l'autoroute 30 entre Châteauguay et
Sainte-Catherine ne vient pas de tomber sur nos planches à dessin. Il
était d'ailleurs déjà programmé au ministère
des Transports. Ce que nous faisons aujourd'hui, c'est tout simplement devancer
sa construction. Je suis convaincu que les membres de cette Assemblée
sont tous bien conscients des raisons qui nous guident à devan-
cer nos travaux. À mes yeux, le bien-fondé de notre
décision est irréfutable.
Au même titre que la population de Châ-teauguay et des
environs, nous faisons face, aujourd'hui, à une situation
délicate et complexe, une situation qui commande de grandes
précautions, autant qu'une action efficace et bien
préparée de la part du ministère des Transports du
Québec. (13 h 10)
À ce sujet, vous me permettrez, M. le Président, de saluer
publiquement les efforts de notre premier ministre et des ministres
impliqués dans cette difficile situation. Grâce à leur
travail, à leur sens exceptionnel de l'intérêt public et
aux qualités évidentes de grand démocrate de notre premier
ministre, le gouvernement du Québec aura agi selon les assises
essentielles à toute nation dont l'objectif primordial est le
bien-être de sa population. Bien peu de sociétés, M. le
Président, auraient eu le courage et la sagesse d'épuiser tous
les moyens démocratiques à sa disposition pour en arriver
à un règlement dans un tel conflit. Notre administration a encore
une fois démontré non seulement à la population
québécoise, mais également aux leaders d'opinion
internationaux sa capacité d'oeuvrer sous d'énormes pressions
dans le sens du bien commun de tous les Québécois et de toutes
les Québécoises. Le premier ministre du Québec a fait face
à la situation avec la prudence, la fermeté et, surtout, la
lucidité qui le caractérisent.
La population de Châteauguay et de ses environs a
considérablement souffert d'être privée de son lien routier
principal vers l'île de Montréal. J'ai d'ailleurs
rencontré, dimanche dernier, en compagnie de la députée de
Châteauguay, les maires de la municipalité régionale du
comté de Roussillon. Ces élus, qui représentent un bassin
de population évalué à plus de 110 000 personnes et qui
atteint les 200 000 personnes si on ajoute la population environnante, m'ont
fait part avec beaucoup de justesse de leur situation. J'ai d'ailleurs
apprécié cette rencontre lors de laquelle les maires de la MRC de
Roussillon m'ont proposé d'accélérer si possible la
première phase des travaux de construction de l'autoroute 30 entre la
route 138 et le boulevard Ford, à Châteauguay. Je m'étais
engagé à étudier sérieusement cette proposition et
c'est pourquoi, mardi dernier, j'ai annoncé que le ministère des
Transports y donnerait suite en débutant, dans toute la mesure du
possible, dès la semaine prochaine, la première phase de ce
tronçon entre le boulevard Ford, à Châteauguay, et le rang
Sainte-Marguerite, à Mercier, ce qui permettra de soulager grandement le
débit de circulation urbain dans les limites de Châteauguay.
Par ailleurs, depuis l'annonce, le 9 août dernier, de nos
intentions de procéder à la construction de l'autoroute 30 en
contournant la réserve de Kahnawake, certaines personnes, dont le
député de La Prairie, ont semblé être en
désaccord avec le tracé proposé, sous prétexte que
ce dernier devait passer sur des terres appartenant à un résident
de Kahnawake. Le député de La Prairie a même
suggéré que le ministère des Transports modifie le
tracé de l'autoroute 30 entre le boulevard Ford, à
Châteauguay, et la route 132, à Sainte-Catherine. À mon
avis, il s'agissait là d'une proposition que nous devons rejeter, comme
en témoignent d'ailleurs les nombreuses demandes qui m'ont
été faites par le milieu de procéder sur le tracé
actuel. C'est tout à fait impensable, à moins que l'on souhaite,
au détriment d'une population déjà victime d'une situation
peu enviable, de reporter le début de ces travaux tant attendus de
plusieurs mois, voire même, M. le Président, de plus d'une
année.
Le ministère des Transports avait d'ailleurs arrêté
le tracé de l'autoroute 30 à cet endroit, en collaboration
étroite avec la Commission de protection du territoire agricole du
Québec qui nous demandait de rapprocher le tracé le plus possible
de la réserve afin de protéger les terres agricoles de grande
qualité.
Je voudrais également rappeler que, toujours dans le but d'agir
efficacement et le plus rapidement possible, nous accorderons trois contrats
à trois entrepreneurs différents pour ce tronçon de
l'autoroute 30. Pour ce faire, nous inviterons des entrepreneurs à nous
présenter des soumissions pour les trois sections de l'autoroute. Les
entrepreneurs ainsi choisis pourront effectuer leurs travaux de façon
simultanée, ce qui accélérera grandement la
réalisation de ce tronçon de l'autoroute 30. C'est, en fait, ce
qui nous permet d'avancer que ces travaux seront terminés vers la fin de
la présente année.
Il faut comprendre, M. le Président, que les
événements que nous avons connus et qu'a subis la population de
Châteauguay et de ses environs lui occasionnent de grands
désagréments. On n'a qu'à penser au détour
considérable qu'a provoqué la fermeture du pont Mercier et des
routes 132 et 138. La construction de cette section de l'autoroute 30 vient
s'ajouter aux autres mesures que le gouvernement du Québec a mises en
place. Je crois pertinent de le rappeler, M. le Président: en raison de
la fermeture du pont Mercier et des routes 138 et 132 aux abords de la
réserve de Kahnawake, le ministère des Transports a mis en place
un service de trains de banlieue et de navettes d'autobus qui permettent aux
citoyens des municipalités de la rive sud de contourner ce secteur.
J'ajoute, M. le Président, la ligne ferroviaire temporaire Saint-Isidore
- gare centrale, qui connaît une immense popularité et qui relie
sur une distance de 45 kilomètres en une heure, via les voies du
Canadien National et du pont Victoria.
Il n'y a pas d'arrêt sur le parcours et nous sommes d'ailleurs
à prévoir une augmentation de ce service. De plus, un service de
navette
d'autobus qui converge au terminus de la Société des
transports de la Rive-Sud de Montréal, à Brossard, permet aux
usagers des commissions de transport du sud-ouest d'avoir accès sans
frais supplémentaire à la voie réservée du pont
Champlain et aux stations de métro de Montréal via les autobus de
la STRSM. Par ailleurs, nous sommes également à aménager
une voie destinée au transport des personnes sur la jetée de la
voie maritime jusqu'à l'estacade longeant le pont Champlain. Ces travaux
urgents et prioritaires ont été amorcés le 18 août
dernier et seront terminés pour l'ouverture de cette voie aux usagers
dès la semaine prochaine. Nous avons donc aménagé une voie
réservée aux automobilistes pratiquant le covoiturage aux taxis,
aux autobus ainsi qu'aux véhicules d'urgence. Cette importante mesure
vise à offrir une voie d'accès supplémentaire à
Montréal via l'île des Soeurs.
À toutes ces mesures d'urgence vient donc s'ajouter une
alternative permanente, M. le Président. Il faut bien garder à
l'esprit que la construction de l'autoroute 30 dans ce secteur n'est pas une
solution temporaire. C'est plutôt un acquis de grande valeur qui
profitera à toute la population de la région et j'ajouterais
à toute la population du Grand Montréal. La réalisation de
ce tronçon autoroutier, entre la route 138 à Châteauguay et
la route 132 à Sainte-Catherine, devient donc, à mes yeux,
primordiale et surtout dans les délais les plus courts possible.
Le projet de loi spécial que nous adopterons aujourd'hui a donc
justement pour but de réduire au maximum ces délais. Le
bien-être d'un important bassin de la population en dépend, M. le
Président. C'est pourquoi je propose à l'Assemblée
nationale l'adoption de ce projet de loi spécial sur
l'expropriation.
Je compte évidemment, M. le Président, sur la
collaboration de tous les membres de cette Assemblée, y incluant
l'Opposition qui nous a déjà permis, grâce à sa
collaboration, de pouvoir procéder à l'intérieur d'une
même journée de calendrier afin d'accélérer tout le
processus d'expropriation et l'adoption, donc, de cette loi. Je compte sur leur
collaboration et sur l'ensemble des membres en cette Chambre.
J'ai également indiqué, M. le Président, que seule
l'application de cette loi spéciale permettra au ministère des
Transports de débuter et de réaliser ces importants travaux de
construction routière avant la fin de la présente
année.
Je vous remercie, M. le Président, et, comme je vous l'indiquais
tout à l'heure, je suis persuadé que tous les membres de cette
Assemblée pourront contribuer à nos efforts afin de doter la
population de cette région d'un axe routier considéré
comme étant vital et primordial. Je vous remercie.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre
délégué aux Transports. Je reconnais maintenant le
prochain intervenant, M. le leader de l'Opposition officielle et
député de Joliette. M. le leader de l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. D'un terrain de golf
de neuf trous, on se ramasse convoqués à l'Assemblée
nationale avec une route pour parler d'une crise qui marquera, qu'on le veuille
ou non, l'histoire du Québec.
M. le Président, si j'ai donné mon consentement au nom de
l'Opposition, c'est à cause de la population de la rive sud de
Montréal, de Châteauguay et des environs. Population victime, M.
le Président, de l'inertie, de l'inaction, de l'improvisation et de
l'incompétence la plus totale. Jamais on n'aura assisté, pendant
sept longues semaines, à autant d'improvisation. Jamais! Un ministre qui
s'en va annoncer, M. le Président, qu'il s'est fait flouer
littéralement par les Warriors; un autre qui signe une entente alors
qu'il y a des gens masqués; un autre qui dit que, depuis trois ans, il
sait que les Warriors sont armés. M. le Président, jamais il n'y
a eu autant d'incompétence étalée au si grand jour, jamais
autant d'improvisation, jamais autant de manque de capacité de
gouverner, puisque gouverner, c'est l'art de prévoir. Gouverner, ce
n'est pas de gérer les crises. Il y a plus d'honneur, de
compétence, de lucidité dans le fait d'essayer d'empêcher
les crises que d'essayer de récupérer les fins de crises, M. le
Président. Quelqu'un qui se tient debout, se tient debout d'abord avant
les crises plutôt que d'essayer de se tenir debout pendant les crises ou
dans les fins de crises, M. le Président. (13 h 20)
Cela dit, oui, j'ai donné des consentements, au nom de notre
formation politique, M. le Président, pour la population qui est
victime, depuis 49 jours, population qui a été patiente - on ne
peut pas le dire, le mot - population qui a été brimée
dans ses droits les plus fondamentaux, population à qui on a
laissé croire toutes sortes de choses. Mais avant de donner mon
consentement, même mardi, M. le Président, au nom de notre
formation politique, on s'est assurés auprès des élus
municipaux que le projet que présenterait le ministre des Transports
soit quelque chose qui règle des problèmes, pas une
béquille à court terme.
On voulait faire un projet sans faire de bretelle qui donnait
accès; 24 000, 25 000 véhicules, par jour, auraient pu emprunter
des rues d'un quartier domiciliaire; imaginez-vous! Et on disait aux gens: On
va régler ça. M. le Président, de l'improvisation, de
l'incompétence, de l'inertie, de l'inaction qui va coûter cher sur
le plan des mentalités au Québec, M. le Président. Et je
voudrais m'exprimer pendant quelques minutes là-dessus, M. le
Président.
Personnellement, j'ai vécu cette crise, M. le Président,
avec beaucoup d'angoisse. Il y a eu mort d'homme. Il y a eu mort d'homme, dans
ce dossier, M. le Président. Et quand j'ai appris, un certain dimanche
soir, que le premier ministre du Québec savait depuis trois ans que ces
gens-là ¦ trafiquaient des armes - et c'était durant la
crise qu'on apprenait ça, M. le Président - j'avais la chair de
poule. Je me disais: Mais il n'y a pas de gouvernement, bonne mère!
C'est quoi, gouverner? C'est d'assurer la sécurité d'une
population, M. le Président.
Quand j'ai vu, une semaine avant, un ministre responsable signer une
entente avec quelqu'un masqué, j'ai dit: Qu'est-ce qui se passe?
Où est-ce qu'on s'en va? Le gouvernement du Québec est
inexistant. Ça n'a pas d'allure? Ça n'a pas de bon sens.
N'importe qui ailleurs aurait démissionné de son poste et se
serait caché. Mais non, on discute, M. le Président, avec
tellement d'efficacité que l'armée canadienne a été
plus efficace que tous ceux qui ont discuté avant, de par le dialogue et
sans violence, M. le Président. Moi, je n'en reviens pas.
La mentalité, au Québec, tantôt, ça va
être: Fais-toi justice toi-même. C'est ça, fondamentalement,
qui va arriver. Chaque groupe va vouloir prendre des moyens, alors que
l'État est là, fondamentalement, pour faire respecter les lois,
les règlements, pour prévenir des crises, entamer des dialogues
avant, non pas pendant et après une crise. C'est ça, gouverner,
M. le Président. Là, on arrive, M. le Président, et on
nous dit: On convoque l'Assemblée nationale, pour essayer, bien
sûr, de corriger une situation, à laquelle nous allons concourir.
Nous avons déjà concouru et nous avons dit, aux élus
municipaux: Oui, nous allons accepter la convocation de la Chambre; oui, nous
allons voter pour la loi; oui, cependant, ils vont vous donner un projet qui a
de l'allure, qui ne crée pas d'autres problèmes monstres, dans
votre région. Et c'est pour ça qu'on a obtenu qu'il y ait une
bretelle, une fois pour toutes, pour au moins qu'on ait accès à
ces huit kilomètres. Parce que, là, c'aurait été la
farce: bâtir huit kilomètres de route, M. le Président,
puis, pas d'accès ou pratiquement pas d'accès, par les petites
rues de quartier. Imaginez-vous.
C'est quoi, gouverner, M. le Président? C'est de solutionner les
problèmes, pas d'en créer d'autres. Oui, nous avons
accepté, M. le Président, d'en discuter. Mais je vous avoue,
personnellement, que je crois fondamentalement qu'on est sur une très
mauvaise pente présentement, au gouvernement du Québec, M. le
Président. Ça n'a pas de bon sens de laisser s'instaurer ce
fameux climat où quelque groupe que ce soit puisse s'armer, poser des
barricades, puis exiger, le revolver sur la tempe, et: Donne-moi ça ou
je marche, je fais une crise. Ça n'a pas d'allure de fonctionner de
même, M. le Président. Ça n'a pas de bon sens.
Et on sera surpris après, M. le Président.
On sera surpris après que des groupes utilisent des moyens
similaires ou comparables. On sera surpris que s'installe, dans la population,
cette idée de se faire justice soi-même. Quand on n'a pas un
gouvernement qui voit à faire respecter ses législations, qui
doit se tenir informé quotidiennement, qui doit quotidiennement
être au courant de ce qui se passe dans la collectivité
québécoise. Ce n'est pas de gérants de crise dont on a
besoin à l'Assemblée nationale, ce n'est pas de gens qui
cherchent à récupérer les fins de crise dont on a besoin
à l'Assemblée nationale, c'est d'un gouvernement qui doit
gouverner en essayant d'éviter les crises, précisément. Je
répète qu'il y a beaucoup plus d'honneur, d'intelligence dans le
fait d'éviter une crise que dans le fait d'essayer de la gérer
tout croche, tout de travers, en improvisant quotidiennement, 24 heures par
jour, M. le Président.
J'ai donné des exemples d'improvisations et je pourrrais
continuer. On n'a pas informé le public, M. le Président.
Qu'est-ce qu'on discute? Vous avez remarqué les réponses comme
moi ce matin et je sais, M. le Président, que vous avez pu observer...
Et puis encore là, on ne sait même pas ce qui se discute. Oui, on
est heureux qu'il y ait un début de dénouement, il faut le dire,
mais, si on n'est pas capable d'informer la population sur les enjeux
fondamentaux, si on n'est pas capable de dire à cette même
population: II y a des principes qui seront intouchables dans ces
négociations-là, il y a des actes que nous ne tolérerons
plus au Québec, il y a des gestes que nous ne poserons plus ou que nous
n'accepterons plus de voir posés... Nous allons discuter dans un cadre
d'une démocratie éclairée, M. le Président.
Fondamentalement, l'Assemblée nationale aurait pu être
convoquée beaucoup plus avant pour avoir des discussions de fond sur ce
qui est en train de se créer comme mentalité au Québec.
Ces gens-là, à ce moment-là, sortiront le bâton et
ils diront: "C'est-u" effrayant, la mentalité qui est en train de
s'installer au Québec! Ils y auront contribué, M. le
Président, parce que ce sont des gérants de crise et non pas des
administrateurs d'État, parce que ce sont des gens qui
préfèrent gérer des crises au lieu d'essayer de les
éviter, M. le Président.
Moi, je vous dis que ça avait l'air d'une vraie débandade
à la télévision, ce qu'on a vécu cette
année; ce qu'on a lu dans les journaux quotidiennement; ça
faisait pitié. Ça faisait pitié, un ministre responsable
de la Sécurité publique qui s'en va dire: Bien, je me suis fait
avoir. Aie! c'est rassurant pour une population! C'est lui qui a la
responsabilité ultime de la sécurité publique. Tu en vois
un autre qui signe une entente avec un gars masqué. On ne sait
même pas; il aurait pu signer le nom de n'importe quel
député ici. Il ne lui voyait pas la face. Signer une entente pour
un gouvernement, pensez-y 30 secondes, avec quelqu'un de masqué, puis
c'est encore ministre au moment où on se parle, puis ça
trafique encore dans les corridors d'hôtel dans une
négociation.
M. le Président, ça fait pitié. Ça fait
pitié quand le premier citoyen du Québec, le premier ministre
annonce à la télévision que ça fait trois ans qu'il
sait que les armes circulent de même, qu'on amasse des stocks d'armes. M.
le Président, comment se fait-il qu'en vertu du Code criminel canadien,
à l'article 39, c'est la police, la sécurité publique, la
Sûreté du Québec ici qui a le mandat d'assurer la paix, la
sécurité et qui a spécifiquement un rôle face aux
armes prohibées? Ce que l'armée nous a montré à la
télé, c'était à en faire peur à plusieurs,
n'est-ce pas? Un vrai arsenal, M. le Président, de quoi défoncer
des blindés. Rien de fait avant, M. le Président.
Où est-ce qu'on s'en va? Où est-ce qu'on va avec ce
gouvernement, M. le Président? Que les gens de Châteauguay
maintenant, M. le Président, puissent compter sur une décision de
l'Assemblée nationale, je dois leur dire que cette
décision-là - s'il y en a ici - est pas mal plus sûre, pas
mal plus juste qu'une proposition du gouvernement actuel, parce que là,
c'est un mandat de l'Assemblée nationale qu'il aura pour réaliser
des choses. Ils ont été victimes pendant sept semaines, M. le
Président, sept longues semaines. Je peux vous dire une chose, M. le
Président, ces gens-là ne sont pas près d'oublier ce
qu'ils ont vécu. Je ne le souhaite à aucune autre population du
Québec, ce que ces gens-là ont vécu, mais c'est
peut-être le moment de se dire des choses ici, par exemple. Gouverner,
c'est l'art de prévoir et non pas de gérer des crises. (13 h
30)
Cette population de Châteauguay pourra compter sur un moyen de
circulation plus efficace, plus rapide et c'est pour ça qu'on va y
adhérer, parce qu'elle est une victime. Je n'aurais pas
été surpris, par exemple, qu'on nous convoque pour
récompenser autre chose, parce que, je vais vous dire très
honnêtement, ce qui est en train de s'installer comme mentalité,
c'est que le crime paie, au Québec. Et je me serais opposé
à des motions à l'Assemblée nationale qui auraient
amnistié, par exemple, qui auraient posé des gestes fondamentaux
vis-à-vis ce qu'on défend comme société
démocratique. C'est parce que ce sont des victimes que j'ai
accepté, au nom de notre formation politique, M. le Président, de
siéger aujourd'hui, de faire fi de certaines règles pour
permettre l'adoption de ce projet de loi là aujourd'hui.
M. le Président, je voudrais dire au ministre des Transports et
au gouvernement libéral que, cependant, j'arriverai, tantôt, avec
une proposition au niveau du comité plénier. L'objectif n'est pas
de retarder les travaux. À l'intérieur du délai qui est
confié en comité plénier, j'ai l'intention de
suggérer un préambule pour bien démontrer que c'est
à cause d'une crise spécifique, que ce n'est pas une règle
générale qu'on va établir, qu'on veut voter, ce matin.
Je veux, au niveau du préambule de cette loi, que ce soit
très clair, M. le Président, que ça ne doit pas
constituer, pour aucun motif, un précédent. Il existe des
législations de portée générale qui ont fait leurs
preuves, qui présentent des inconvénients mais qui assurent, M.
le Président, le respect d'un processus fondamentalement
démocratique, ce que cette Assemblée nationale a voulu,
d'ailleurs. Qu'on parle en matière d'expropriation, de consultation,
d'étude d'impact ou d'évaluation environnementale, on a voulu,
comme peuple du Québec, se doter, par l'Assemblée nationale, de
mécanismes précis. Et le fait de suspendre les effets de ces
mécanismes à ce stade-ci, M. le Président, ne doit en
aucun temps être interprété comme étant une
volonté de faire d'une exception une règle
générale. C'est une crise profonde qu'on a vécue, je le
reconnais. Et on ne doit considérer ce projet de loi que dans le cadre
d'une crise très profonde, où une population bien
identifiée, bien située, bien identifiable, a été
victime pendant sept longues semaines. C'est dans ce contexte et dans cet
unique contexte qu'on accepte de dévier aux règles normales
établies, tant en matière d'expropriation qu'en matière de
contrôle d'impact environnemental ou de qualité de
l'environnement. J'espère que c'est bien compris.
Et je demande au ministre des Transports de bien étudier le
préambule que je lui ferai parvenir dans les prochaines minutes, pour
que cette volonté soit clairement exprimée dans le projet de loi,
clairement exprimée. Parce que si on ne manifeste pas publiquement notre
point de vue à ce stade-ci, qu'est-ce qu'on ferait, comme Parlement?
Quel geste poserions-nous, comme Parlement? On dirait: Écoutez, quand
vous n'avez pas justice à un de vos points, vous n'avez seulement
qu'à vous monter une crise. Ça, ça ne peut pas marcher.
Ça ne doit pas marcher. C'est inacceptable, c'est inconcevable. C'est
ça qu'il faut dire clairement à la population du Québec.
Il faut se comporter comme des hommes et des femmes élus, responsables,
pas comme des gérants de crise à la pièce, pas comme des
improvisateurs à toutes les dix minutes, M. le Président. Pas
poser des gestes qu'un enfant le moindrement intelligent ne poserait même
pas, s'il avait conscience de ce que c'est que siéger dans un
État, que d'être membre d'un gouvernement. Pas avoir
assisté à ce à quoi on a assisté depuis sept
semaines.
Je sais que, du groupe ministériel, vous ne pourrez jamais dire
ce que je peux dire. Je sais que, par solidarité ministérielle,
vous allez être obligés de vous la fermer. Mais, fondamentalement,
les citoyens de vos comtés n'ont pas voté pour des hommes et des
femmes qui ne prévoyaient rien. Ils ont voté pour des hommes et
des femmes qui avaient le devoir de prévenir, au lieu du devoir de
gérer des crises. Fondamentalement, vous vous êtes fait dire, tout
comme
dans nos comtés, qui que vous soyez en cette Chambre: Mais
pourquoi avoir attendu sept semaines? Mais pourquoi n'avez-vous pas pu
prévoir ça? Aviez-vous des renseignements? Vous ne pouviez
même pas répondre ça, parce que votre premier ministre vous
a dit qu'il le savait depuis trois ans. Qu'est-ce que vous pouviez
répondre au sujet du geste du ministre responsable des autochtones qui a
signé une entente avec un mouchoir? Qu'est-ce que vous pouviez
répondre, quand vous avez votre propre ministre de la
Sécurité publique qui dit: Je me suis fait avoir?
Vous ne pouviez rien répondre. Je suis convaincu que ça a
été très dur pour vous autres. Mais c'est ça,
fondamentalement, que les citoyens veulent. Ils veulent un gouvernement qui se
tient debout, avant les élections et après les élections.
Ils ne veulent pas d'hommes et de femmes qui se contentent de laisser faire les
choses, qui se contentent d'improviser, qui se contentent de gérer
à la pièce sans vision globale de ce qu'est la
société québécoise. On avait des outils en main
depuis 1983 et 1984 pour aborder ce problème dans un contexte de
quiétude, non pas dans un contexte de crise où là on
"s'effervesce".
Je me rappelle que le même monsieur le ministre
délégué aux Affaires autochtones avait voté contre
une motion s'adressant aux autochtones, présentée par M.
Lévesque, en 15 points. Ça ne va pas assez loin, disait-il. On
vote contre. Vous aviez voté contre, le temps que vous étiez ici
à l'Assemblée nationale et que vous aviez un rôle
d'Opposition. Ça n'allait pas assez loin. Vous n'avez rien fait de
concret, si bien que l'exaspération a conduit à une crise et que
la conjoncture a aidé la crise en plus. Faites une analyse un tant soit
peu rigoureuse et vous allez vous rendre compte que l'improvisation, l'inertie,
l'inaction et l'incompétence ont pris place. Puis on est surpris, M. le
Président, que des citoyens posent les gestes qui ont été
posés.
Je trouvais ça épouvantable, M. le Président, moi,
de voir qu'il y avait des réactions aussi violentes, mais, tout en les
trouvant épouvantables, je comprenais, parce qu'un citoyen qui n'a pas
un gouvernement pour le protéger, qui n'a pas un gouvernement pour
défendre ses intérêts, qui n'a pas un gouvernement pour
faire respecter ses législations et ses règlements, qui n'a pas
un gouvernement pour administrer et qui se contente de gérer, ce
citoyen-là, devant quoi est-il placé?
On a vécu dans un contexte d'anarchie au Québec, M. le
Président, et nous, l'Opposition, nous avons ménagé nos
interventions durant toute cette crise. On les a ménagées parce
que, dans le fin fond, on est des citoyens pareils comme les autres au
Québec. On avait les mêmes réactions. Nous demeurons des
hommes et des femmes, même si on est élus ici. Et nous avions les
mêmes réactions que la population en général.
On se disait: Ils vont peut-être se réveiller, ils vont
peut-être prendre des moyens, mais le réveil est venu tard. Quand
on gouverne au sondage et qu'on attend que la population soit tellement
exaspérée que là il soit possible de poser un geste, eh
bien là, on agit, M. le Président. C'est ce qui arrive. On ne
gouverne pas par sondage, quand on a des principes fondamentaux. S'il avait
fallu gouverner par sondage, jamais cette Assemblée nationale n'aurait
voté la Loi sur l'assurance automobile. Si on avait gouverné par
sondage, jamais on n'aurait passé la Loi sur la protection du territoire
agricole. Pourquoi? Parce qu'on est arrivé là avec des
convictions et des principes et on a dit: Ce sont ces
législations-là que nous allons faire voter parce que nous y
croyons. C'est une orientation qu'on donne au peuple québécois.
On ne nous élit pas pour suivre, mais on nous élit pour les
précéder, les gens. C'est ça, un leader. C'est ça
que les gens attendent d'un homme ou d'une femme élue. C'est de savoir
ce que tu penses, où est-ce que tu t'en vas. Ois-nous où tu veux
aller et pourquoi tu veux y aller. C'est ça, fondamentalement.
J'avais honte, M. le Président, du gouvernement du Québec,
une honte quasi inexplicable. Ce matin, M. le Président, je suis heureux
au moins de livrer ce que j'ai ressenti durant toute cette crise: une
incapacité chronique permanente à prendre des décisions au
bon moment. On est des gérants de crise, M. le Président. Je
n'accepte pas cela. Ça se sentait venir, M. le Président. J'ai lu
du courrier échangé avec le ministre délégué
aux Affaires autochtones du mois de mars. Depuis le mois de mars qu'il y avait
des mouvements! On a attendu pour s'écraser après que la crise
ait été déclenchée. C'est aberrant, c'est
inacceptable, ça ne mériterait même pas de siéger au
Parlement et de se dire au pouvoir pour pouvoir véritablement
gérer les choses de l'État. (13 h 40)
M. le Président. Je comprends l'exaspération des gens. En
général, la population est très claire, d'ailleurs. C'est
inacceptable la façon dont ça a été conduit. Mais
ce n'est pas parce que c'est inacceptable la façon dont ça a
été conduit qu'il faudrait se payer le luxe de pénaliser
encore davantage des gens qui ont subi sept semaines intensives de
préjudice: préjudice de faire des heures . et des heures
d'automobile, préjudice de vivre une tension parce qu'on connaissait
plus ou moins les résultats, imprévisibles parce qu'on ne savait
jamais ce qui se passait.
M. le Président, on a été mieux informés -
ce n'est pas des farces - sur ses agissements par l'armée canadienne et
sur sa volonté d'agir en toute transparence qu'on l'a été
du gouvernement du Québec. Totalement inacceptable, et c'est là
le sentiment de honte, M. le Président, que j'ai présentement. Un
sentiment
d'appartenir à une Assemblée nationale gouvernée
par des gens qui administrent à la petite semaine, à la
pièce, comme s'ils avaient été mandatés pour se
créer une crise pour pouvoir la gérer au lieu d'avoir compris
fondamentalement que le rôle premier d'un député dans cette
Chambre, le rôle premier d'un ministre dans cette Chambre, c'est
d'assumer, justement, ses responsabilités, créer une
quiétude, créer une paix sociale; c'est ça
fondamentalement.
Je ne me suis pas permis de le faire publiquement, M. le
Président, mais, ce matin, j'ai le goût de le faire. J'ai le
goût de faire un parallèle du mandat 1970-1973 avec le mandat
1985-1989. Mon Dieu que plus ça change, plus c'est pareil avec ces
gens-là, M. le Président. La débandade au deuxième
mandat comme ce n'est pas possible: débandade dans les prises de
décision; débandade dans la perspective d'avenir du
développement du Québec; une TPS en pleine crise, ce matin. 329
000 000 $ de plus, M. le Président! 329 000 000 $ de plus qu'on va
chercher dans les poches des contribuables québécois en 1991, en
pleine crise. Des citoyens qui auront à payer une facture prohibitive de
tout ce gâchis qu'on n'a même pas tenté d'éviter, M.
le Président. Je trouve ça inconcevable.
Je termine, M. le Président - vous me faites signe - en disant
que l'Opposition officielle, d'une façon très responsable, dans
un but non pas de créer un précédent à
l'Assemblée nationale mais dans un but bien précis de rendre
justice à une population victime... nous serons là
précisément pour les représenter si jamais on dévie
d'un iota des volontés politiques exprimées. C'est le rôle
fondamental de l'Opposition et permettez-moi de souhaiter, M. le
Président, que le message sans équivoque, clair que je veux
passer à cette Assemblée c'est de faire en sorte qu'au
Québec on aille le plus rapidement possible vers l'électorat et
qu'on leur demande de s'élire un gouvernement responsable.
Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, m. le leader de
l'opposition officielle. je reconnais maintenant le prochain intervenant, m. le
député de la prairie. m. le député.
M. Denis Lazure
M. Lazure: Merci, M. le Président. Les remarques
exprimées par le ministre délégué aux Transports
tout à l'heure sont à l'effet qu'étant donné un
état de crise nous devons... cette Assemblée nationale doit
approuver un projet de loi qui suspend les règles normales de
procédure à divers égards. Le leader de l'Opposition vient
de le dire officiellement et je répète: Nous allons voter pour ce
projet de loi mais, en même temps, M. le Président, nous allons
déplorer que l'imprévoyance de ce gouvernement,
l'incompétence de ce gouvernement fait en sorte qu'il est obligé
de convoquer une session spéciale pour accomplir des travaux de voirie
qu'il devait accomplir depuis des années.
Le parachèvement de l'autoroute 30 apparaissait au programme des
engagements électoraux du Parti libéral en 1985 pour être
complété, disait-on, en 1990. En 1989, à la campagne
électorale, aucune lueur de début de travaux, M. le
Président, dans la région, que ce soit dans le comté que
je représente ici, le comté de La Prairie, ou dans le
comté de Châteauguay ou dans le comté de
Beauharnois-Huntingdon, dans toute cette sous-région de la
Montérégie. Aucun début des travaux en 1989. Par
conséquent, le Parti libéral suit un peu la doctrine de M.
Duplessis: un pont, une route, c'est bon pour trois élections.
Le Parti libéral revient à la charge et repromet,
notamment la candidate qui est devenue députée de
Châteauguay repromet le parachèvement de l'autoroute 30, repromet.
Cependant, il y a quatre ou cinq mois, le ministre des Transports - on ne sait
plus lequel est le vrai ministre des Transports; est-ce que c'est l'ancien
maire de Kirkland ou si c'est le député de Richmond? - mais,
à tout événement, un des ministres des Transports, il y a
cinq ou six mois, vient annoncer dans la région: On n'est pas
prêts pour l'autoroute 30. Ça nous prend encore des études
qui vont durer un an, un an et demi, deux ans, a-t-on dit officiellement, il y
a quatre ou cinq mois dans la région, M. le Président.
Ce qu'il faut que la population comprenne, c'est que, si ce gouvernement
avait respecté ses engagements électoraux de 1985 et de 1989 en
matière de voirie, en matière de parachèvement de
l'autoroute 30, nous n'aurions pas eu besoin d'être convoqués pour
une assemblée spéciale aujourd'hui. Ce qu'il faut que la
population comprenne, c'est que ce gouvernement ne prend des décisions
que quand il est acculé au mur, que quand il est en état de
crise.
On a entendu ce matin le premier ministre dire tout béatement:
Bien écoutez, c'est complexe, les négociations avec les Mohawks.
Par conséquent, on ne peut pas vous en parler. Comme si, à partir
du moment où un problème est complexe, ce gouvernement ne serait
plus habile, ne serait plus apte à gouverner, ne serait plus apte
à renseigner la population!
M. le Président, le principal reproche que les gens de mon
comté, Sainte-Catherine, Saint-Constant, Delson en particulier, qui ont
été touchés de façon immédiate par la
crise... Parce que ce n'est pas seulement les gens de Châteauguay qui ont
été touchés par la crise. On a surtout parlé de
Châteauguay parce que la ville de Châteauguay est plus
considérable que la ville de Saint-Constant ou la ville de
Sainte-Catherine, mais les gens de mon comté ont été
directement touchés par cette crise. Le reproche principal que la
population exprimait, c'était: Pourquoi le premier ministre, comme chef
d'État, ne vient-il pas nous expliquer ce qui se passe
ou, tout au moins, pourquoi le premier ministre n'envoie-t-il pas un
ministre rencontrer la population et expliquer à la population les
enjeux de la crise, les raisons de la crise, ce que le gouvernement essaie de
faire? Les gens sont raisonnables, les gens sont intelligents. Ils auraient
compris pourquoi le gouvernement agissait de telle ou telle façon si on
lui avait expliqué.
Il y a des ministres qui sont venus. Ah oui! Il y a des ministres qui
sont venus, mais ils se sont contentés de rencontrer les maires. C'est
déjà beaucoup, c'est déjà beaucoup parce que les
maires représentent la population, mais la population aurait
souhaité que, lors des assemblées publiques, un ministre ou une
ministre ose se présenter et répondre aux questions du public.
Personne n'est venu le faire, personne. Je vous assure que, lorsque la
population est gardée dans l'ignorance, c'est à ce
moment-là qu'on voit des réactions d'insécurité,
des réactions de colère. (13 h 50)
II ne faut pas être surpris si la population a eu des
réactions de colère. On la tenait dans l'ignorance des faits,
dans l'ignorance des plans de ce gouvernement, si jamais il y avait des plans.
Il faut le répéter, l'armée canadienne a donné
l'exemple à ce gouvernement, en matière d'information à la
population. La population de cette région, surtout celle du comté
de La Prairie et du comté de Châteauguay, a souffert des
préjudices considérables, depuis 50 jours. Dans ces
préjudices considérables, bien sûr, il y aura des
compensations financières. Bravo! Bien sûr, on devance le
parachèvement de ce tronçon de 12,5 kilomètres. Bravo!
Je dirai au ministre, qui a fait allusion tantôt à une
remarque que je faisais il y a deux semaines, que, si j'ai
suggéré, il y a deux semaines, que le trajet de ce tronçon
soit légèrement modifié, c'était dans le but
d'éviter que le trajet passe sur quelques terres achetées par des
Mohawks. On m'a répondu: II n'y a pas de problème, les Mohawks en
question vont collaborer. Espérons-le. Mais je voudrais que ce soit
clair que ma suggestion n'avait pas pour but de retarder le projet. Au
contraire, ma suggestion avait pour but d'éviter une impasse,
d'éviter qu'en passant sur des terres appartenant à des Mohawks,
le ministère soit obligé de faire face à certaines
tactiques d'obstruction. C'est ça qu'était l'intention de ma
suggestion.
M. le Président, les candidats du Parti québécois,
lors de l'élection de 1989, se sont prononcés, prioritairement,
pour le parachèvement de l'autoroute 30; non seulement le petit
tronçon de 12 kilomètres dont il est question aujourd'hui, M. le
Président, mais le parachèvement de ville Brossard jusqu'à
Châteauguay. Et je répète, M. le Président, qu'on
n'a pas besoin de nous convaincre, de ce côté-ci de la Chambre, de
la nécessité de parachever cette autoroute. Et, à cet
égard, je pense que le ministre fait une erreur s'il ne prolonge pas,
s'il ne complète pas les 12,5 kilomètres du tronçon. Il a
commencé par 8,5 kilomètres et, si je comprends bien, là,
il est rendu à 10,5 kilomètres. Mais, M. le Président, ce
n'est pas pour 2 kilomètres de plus ou de moins qu'on va prendre la
chance d'avoir une oeuvre mal réussie, mal fignolée. Alors, dans
le texte de loi, il s'agit de la distance située entre
Châteauguay, la route 138, et Sainte-Catherine, la route 132. Alors, de
grâce, mettons tout en oeuvre pour compléter ces 12,5
kilomètres avant la fin de l'année 1990. Et je donne avis tout de
suite au ministre que, tantôt, en comité plénier, je
proposerai un amendement pour que nous puissions obtenir l'engagement de
l'Assemblée et du gouvernement pour que ce tronçon de 12,5
kilomètres sera complété d'ici la fin de l'année
1990.
Il y a deux semaines, lorsque la position du gouvernement a
été rendue publique, à savoir que, par décret, le
Conseil des ministres avait décidé de se soustraire aux
obligations de la Loi sur la protection de l'environnement, de la Loi sur la
protection du territoire agricole, de la Loi sur les expropriations et de la
mécanique habituelle, les appels d'offres publics, nous avons aussi
déploré le fait que ce bout de route soit construit sans qu'il y
ait d'audiences publiques. Bien sûr, l'étude d'impact sur
l'environnement a été faite et il y a eu, au printemps, au mois
d'avril et au mois de mai, M. le Président, un certain nombre de
consultations dans la région, il restait la dernière
étape, qui est celle des audiences publiques. Nous avons dit et nous
répétons que, si le gouvernement avait gouverné avec
prévoyance, il aurait pu, il y a quelques mois, organiser un certain
nombre d'audiences publiques, limitées dans le temps afin de ne pas
retarder les travaux. Personne ne veut retarder ces travaux-là. Mais,
par contre, c'est important de respecter des lois de l'Assemblée
nationale, surtout en matière d'environnement. J'espère, M. le
Président, qu'au moins le ministre responsable du projet de loi qui nous
est présenté aujourd'hui, va s'assurer, comme promoteur du
projet, que les mesures d'atténuation qui sont contenues dans
l'étude d'impact, que ces mesures d'atténuation vont être
observées. Autrement dit, que le moins d'effets néfastes possible
sera infligé à l'environnement.
M. le Président, il est normal que cette population qui, pendant
sept semaines, a subi des préjudices graves, pas seulement en devant
prendre deux fois ou trois plus de temps que d'habitude pour se rendre à
son travail, ça va plus loin que ça... Il y a des gens qui ont
perdu leur emploi. Il y a des gens qui ont dû déménager,
pas seulement dans la région d'Oka mais dans la région de
Kahnawake. À Sainte-Catherine, notamment, dans mon comté, il y a
des gens qui ont dû déménager, se rendre avec leur famille
dans des motels. Il y a des gens qui ont vu leur vie familiale
complètement perturbée, M.
le Président. Or, il est normal que le gouvernement, sous forme
d'une certaine compensation, accélère ces travaux-là. Et,
encore une fois, on doit lui reprocher amèrement de ne pas avoir tenu
ses engagements électoraux, ce qui aurait pu éviter cette session
spéciale.
Les autochtones de Kahnawake, les Blancs de Sainte-Catherine, de
Châteauguay, de Saint-Constant, vont devoir continuer de vivre comme
voisins. Et j'espère que ce gouvernement-ci va se préoccuper non
seulement du tronçon de 12,5 kilomètres et des compensations
financières aux individus et aux commerces, mais va s'occuper aussi de
favoriser, par une assistance financière, le rapprochement entre ces
voisins, entre la population autochtone et la population blanche. On ne peut
pas laisser ce climat de méfiance et de colère réciproque,
mutuel, se développer. Et, M. le Président, moi je suis un peu
pessimiste quand on sait que ce gouvernement avait voté contre des
résolutions qui étaient de nature à donner aux autochtones
une plus grande influence dans la conduite de leurs propres affaires, un plus
grand pouvoir. Le ministre délégué aux Affaires
autochtones nous a répondu toutes sortes de choses ce matin. Mais la
principale chose qu'il faut retenir de ses réponses, M. le
Président, c'est qu'il n'avait rien prévu. Il n'avait rien
prévu depuis 1985. De 1985 à 1990 il ne s'est rien passé
entre ce gouvernement et les populations autochtones.
Alors, M. le Président, on n'a pas besoin de nous convaincre de
ce côté-ci de la Chambre, encore une fois, de l'importance de
compléter ce tronçon le plus rapidement possible. Et j'insiste
pour que ce tronçon soit de 12,5 kilomètres, non pas de 8,5 ou de
10,5, mais de 12,5 kilomètres, et qu'il soit complété
avant la fin de l'année 1990, comme d'ailleurs le réclament les
11 maires de la municipalité régionale de Roussillon. (14
heures)
Et je veux aussi ajouter, M. le Président, une autre remarque
quant à la nécessité de compléter ce
tronçon. Ce n'est pas seulement pour permettre aux gens d'avoir une
solution de rechange, c'est-à-dire en contournant la réserve
Kahnawake, de pouvoir se rendre à Montréal, soit par le pont
Champlain, soit par le pont de l'estacade qui pourra être atteint par la
digue de la voie maritime, mais il y a aussi l'hôpital de
Châteauguay, le centre hospitalier Anna-Laberge à
Châteauguay qui a été construit par un gouvernement qui
était prévoyant, celui-là, le gouvernement du Parti
québécois. Et cet hôpital, malheureusement, à cause
des routes secondaires, est très peu accessible à une bonne
partie de la population, surtout celle de Saint-Constant, Sainte-Catherine,
Delson. Alors, M. le Président, en complétant les 12,5
kilomètres, on pourra rendre plus facilement accessible cet
hôpital qui est censé être au service de la population non
pas seulement de Châteauguay, mais aussi d'une bonne partie du
comté de La Prairie.
En terminant, je veux répéter que l'Opposition va apporter
sa collaboration à l'adoption de ce projet de loi le plus rapidement
possible. Je veux répéter aussi que la population de mon
comté regrette que ce gouvernement-ci ait attendu cette crise
interminable pour, enfin, respecter son engagement électoral. En
terminant, je voudrais aussi répéter que ce gouvernement, qui est
un gouvernement dépassé lorsqu'il s'agit de prendre des grandes
décisions, devra apprendre à communiquer avec la population,
sinon il sera rejeté par cette population. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de La Prairie. Je reconnais maintenant le prochain
intervenant, M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité
du revenu et de la Formation professionnelle. M. le ministre.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Par-delà le
contexte particulier qui préside à la présentation de ce
projet de loi spécial, il ne faut surtout pas oublier l'objet premier,
c'est-à-dire le prolongement de l'autoroute 30 en
Montérégie. Et, en cela, le gouvernement pose aujourd'hui un
important geste de développement régional et
économique.
En tant que ministre responsable de la Montérégie, je
voudrais expliquer ici le véritable sens de cette intervention du
gouvernement. De région quasiment dortoir qu'elle était il y a
une vingtaine d'années, la Montérégie est devenue
aujourd'hui une force industrielle et économique de premier ordre. Elle
connaît une croissance économique soutenue et même, ce qui
est exceptionnel au Québec présentement, une véritable
croissance démographique.
La Montérégie, c'est une région de production, de
services, de recherche et d'exportation. Depuis plusieurs années, les
leaders du développement économique de la région ont
signalé, et aux deux ordres de gouvernement, que le maintien de la
croissance des emplois et la poursuite de l'essor économique
nécessitent des améliorations substantielles au réseau
routier qui dessert la région de la Montérégie.
Cette nécessité devient encore plus criante dans un
contexte de libre-échange. Peu de gens savent que c'est en
Montérégie que se réalise plus de 40 % de toute la
recherche-développement au Québec. Cet atout, lié à
la proximité du marché américain, fait que notre
région occupe une position stratégique pour intensifier la
présence de nos entreprises et de nos produits chez nos voisins du
Sud.
Mais pour que ce potentiel se transforme en réalisations
concrètes, il faut que les entreprises exportatrices de chez nous
puissent acheminer rapidement et efficacement leurs produits, et donc, qu'elles
puissent compter sur un réseau
moderne d'autoroutes. Lors de la tenue du sommet socio-économique
de 1987, en Montérégie, il s'est rapidement dégagé
un large consensus sur la nécessité de doter cette région
d'un réseau d'autoroutes capable de soutenir adéquatement le
développement économique de la région et d'y insuffler une
vigueur encore plus grande.
La première priorité dégagée par les
participants au sommet socio-économique de 1987 concernait
précisément l'autoroute 30 dont nous parlons aujourd'hui. Nous
avions même précisé que la première phase du
prolongement de cette autoroute devait débuter à
Châteauguay et que le tracé aurait notamment pour effet de
contourner la réserve de Kahnawake. Notre gouvernement s'est
associé à ce consensus et il a placé en haut de ses
priorités la réalisation de l'autoroute 30. Dans le plan d'action
que le ministre des Transports a déposé à
l'été 1988 pour la grande région métropolitaine de
Montréal, le prolongement de l'autoroute 30 figurait au rang des
ouvrages pressants à réaliser et à mettre en chantier.
Tout le monde sait que les difficultés budgétaires auxquelles le
gouvernement a été confronté ces dernières
années ne nous ont pas permis de réaliser aussi vite que nous
l'aurions souhaité les travaux d'aménagement routier. En
rationalisant les dépenses budgétaires, le gouvernement n'en
reconnaissait pas moins que des projets comme celui de l'autoroute 30
conservaient toute leur pertinence. Nous en avons simplement
différé la construction afin d'atténuer les pressions sur
les finances publiques.
Les événements des dernières semaines ont rendu la
réalisation de l'autoroute 30 encore plus imperative. Nous faisons en
sorte que les travaux qui devaient être exécutés soient
devancés par rapport aux échéanciers fixés il y a
quelques mois. Quoi qu'en dise et quoi qu'en pense le député de
La Prairie qui, il y a une semaine encore, s'opposait à la construction
urgente de ce tronçon de l'autoroute 30, qui demandait que non seulement
on en diffère la construction, mais qu'on change le tracé et qui
vient de nous dire le contraire il y a quelques minutes, ce qu'il faut
comprendre, M. le Président, c'est que l'autoroute 30, ce n'est
certainement pas un truc que le gouvernement invente tout à coup
à cause d'une crise. Ce n'est pas un geste improvisé, une
dépense de 10 000 000 $ que l'on consent pour acheter la paix en temps
de crise. L'autoroute 30, c'est la réponse du gouvernement
déjà prévue à court terme dans le plan de transport
à un problème criant d'accessibilité et de mobilité
d'une population urbaine de plus de 150 000 personnes qui est
littéralement enclavée dans un territoire, avec ou sans le
passage sur le pont Mercier.
Nous avions reconnu ce fait, nous avions également reconnu ce
problème avant la crise et nous avions annoncé des travaux
imminents en ce qui concernait l'autoroute 30. Le projet de loi que nous
déposons aujourd'hui ne fait donc qu'accélérer des travaux
qui étaient déjà prévus. Nous répondons
à une situation d'urgence par une décision exceptionnelle,
c'est-à-dire par une loi d'urgence. Voilà, M. le
Président, un gouvernement qui agit, un gouvernement qui ne se
traîne pas les pieds et qui sait répondre rapidement et s'ajuster
à la conjoncture. Les événements des dernières
semaines ont donc rendu la construction de l'autoroute 30 plus imminente et
plus imperative.
M. le Président, lors du sommet socio-économique de 1987,
le projet prioritaire de l'autoroute 30, ça a été le
résultat de la solidarité et de la cohésion des
décideurs de la Montérégie qui ont été
capables, à cette occasion-là, de s'élever au-dessus des
intérêts immédiats et ponctuels de chacune de leur
localité respective. Pour concevoir une vision régionale de
développement économique, au lieu de dresser une liste exhaustive
de multiples petits projets de construction de routes locales, les agents
socio-économiques et les élus de la région ont opté
pour un aménagement structurant qui contribuera à l'expansion
économique de la Montérégie dans les années
quatre-vingt-dix.
Le prolongement de l'autoroute 30, c'est aussi le fruit de la
persévérance des députés ministériels de la
Montérégie qui ont travaillé sans relâche pour que
se matérialise cet investissement essentiel du gouvernement dans la
région. (14 h 10)
Je tiens, M. le Président, à les remercier pour leur appui
indéfectible. Et, plus précisément, je tiens à
féliciter la députée de Châteauguay qui, au cours
des dernières semaines, a fait preuve d'un dévouement et d'une
persévérance à toute épreuve à l'endroit de
sa population et de ses électeurs.
La reprise imminente des travaux sur l'autoroute 30 signifie
également une amélioration de la qualité de vie des
résidents de Châteauguay, des municipalités avoisinantes et
de toute la région de la Montérégie. Je suis convaincu
qu'ils soutiennent énergiquement, ces gens-là, la décision
du gouvernement de procéder sans délai et d'une façon
urgente au prolongement de l'autoroute 30.
C'est en leur nom, M. le Président, de même 'qu'au nom du
développement économique de la Montérégie, que je
voterai en faveur du projet de loi 82. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le ministre. M.
le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Gordon Atkinson
M. Atkinson: M. le Président, I speak to the legislation
before the House with mixed feelings. On the one hand, it is imperative that
free access to and from the island of Montréal be unrestricted. On the
other hand, I question the wisdom of what can only be described as a
panic situation in light of the blockades created by the
native peoples of Kahnawake, all because of nine holes of golf on land in Oka
claimed for over 200 years by the native people to be their inheritance.
La question d'une route secondaire pour Itle de
Montréal a fait l'objet de nombreuses discussions depuis la
dernière année et aucune décision n'a été
prise. Maintenant, tout à coup, à cause d'inconvénients
subis par les usagers de la rive sud-ouest, nous avons à faire face
à des dépenses de plusieurs millions de dollars. Les
problèmes du pont Mercier existent depuis des dizaines d'années
et sont dus à une augmentation du nombre d'usagers suite à des
développements domiciliaires créés sans examiner la
question de l'accessibilité du noyau central pour le travail,
c'est-à-dire la ville de Montréal et ses environs.
In March of this year, the native peoples in the Oka region
erected a barricade to prevent the town of Oka and those who favoured an
extension of the Oka Golf course from trespassing on what the native peoples
considered their land. The problem was exacerbated when the Québec
Provincial Police was ordered to remove the barricades. That action resulted in
the death of one of their officers.
The loss of a Provincial Police officer's life was indeed a
high cost to pay, all for the sake of nine extra holes of golf. The situation
escalated to other regions, mainly with respect to the Mercier bridge, which
has nothing whatsoever to do with the central argument of who owns the disputed
land in Oka.
Alors, ce qui aurait dû être une simple
question pour s'asseoir et discuter a été enflammé par le
gouvernement et par les autochtones. Jusqu'à très tard hier
après-midi, nous avions à faire face à une guerre possible
dans la région de Châteauguay. Et, même au moment où
je vous parle, il n'y a aucun règlement à Oka. Tout cela pour
neuf trous de plus au terrain de golf d'Oka. C'est inconcevable pour une
personne sensée.
Les autochtones ont depuis environ 200 ans contesté
la vente de cette parcelle de terre. Cependant, personne ne s'est occupé
de leurs revendications qui ont mené à la présente
situation. When all seemed hopeless, the Government of Québec appealed
for help from the Federal Government, for Canadian Armed Forces intervention.
The call for assistance of the military is the last court of resort after all
reasonable dialogue has been exhausted and from which there can be no backing
away, for the armed forces of our nation cannot be allowed to lose any
confrontation. For such is the role of the military.
Faire appel à l'armée canadienne, cela veut
dire que ceux qui ont opté pour cette solution sont également
prêts à accepter les conséquences des actions d'un soldat
bien entraîné. Les membres des forces armées, bien que
citoyens du pays, ont également le pouvoir de réprimer toute
insurrection ou présumée insurrection. L'armée a le
pouvoir de tirer et une fois qu'elle a le mandat d'agir, un changement d'avis
politique ne peut la maîtriser. En fait, une fois que vous avez
appelé l'armée, vous avez lâché les chiens de guerre
et vous ne devez pas vous plaindre ou gémir si elle remplit la fonction
pour laquelle vous l'avez demandée.
As the stand-off continues at Oka, the scene of one death
already, it is to be hoped there will be no further loss of life. But if such
be the case, then so be it. Any death or injury then rests squarely on the
heads of those who issued the call for the assistance, including the despicable
act of Tuesday, when a convoy of women, children and elderly was stoned by
vandals as these people were being evacuated from the Kahnawake region.
No person, whether they be a member of the native
population or the mainstream of the population, is above the law of the nation.
That is the reason for bringing in the troops. If those troops then employ the
firepower of the military tanks, then they are but fulfilling the orders
implicitly handed them by the political infrastructure.
Je dis tout cela, parce que j'ai été membre
au cours de deux guerres des forces de l'infanterie canadienne et je sais ce
que c'est que d'avoir à exécuter un ordre qui, dans certains cas,
est déplaisant, mais qui a été jugé
nécessaire par ceux qui tiennent les commandes. Je dis tout cela
également, parce que j'ai en horreur et je condamne cet appel à
l'intervention militaire, probablement parce que je sais plus que tout autre
qui siège dans cette Chambre, les implications de la
responsabilité du militaire une fois les ordres reçus. Les
retombées politiques seraient énormes, si les Forces
armées canadiennes devaient exécuter avec rigidité le
mandat qu'elles ont reçu.
This is all a preamble to the reason for the urgent
building of a bypass highway on the south-shore. The building of this alternate
route will do little to discourage any further confrontational stand. The only
resolution must be between the government and the native peoples. If anyone
believes that a bypass autoroute is the solution has not thought through the
implications of protest. In some parts of Canada, the railway lines are being
blockaded, the highways disrupted, bridges being burned, all because we could
not resolve the question of a tiny piece of land under dispute for the creation
of an extra 9 holes of golf. Our priorities, Mr. President, are indeed askew,
if we believe the extension of highway 30 is the panacea for all our ills. (14
h 20)
Le prolongement de l'autoroute 30 est une solution de
pansement à un problème qui couve depuis longtemps au
Québec. Dans les circonstances, si le gouvernement n'a pas
réalisé la sévérité du problème,
laissez-moi lui dire qu'on
doit s'attendre à ce que l'extension du projet de la Baie James
II fasse l'objet de sérieuses interruptions par les autochtones du Nord
s'il n'y a aucun règlement de ce qu'on peut décrire comme un des
petits problèmes entre le gouvernement du Québec et les
autochtones. i fully support the government's intention to finally accept the
inevitability for the need to construct highway 30. the traffic that presently
flows through the major core of greater montreal is intolerable. but to now
reach this conclusion because we could not settle the problem of an extra nine
holes of golf is indeed a farcical situation. however, autoroute 30 between
sainte-catherine and châteauguay does not alleviate the problem of
traffic attempting to circumvent the island of montréal by the south
shore. this extension should continue westward until it joins up with the
macdonald-cartier highway commonly known as highway 401.
The cost of this mini autoroute bandaid is pegged at some 10 000 000 $
to 20 000 000 $. That is however but the tip of the iceberg of the cost to the
Québec taxpayers. When the cost of this bypass is calculated into the
costs of the military and police force intervention, along with the indemnity
costs to the citizens, promised by the government, I would be surprised indeed
if the cost of the autoroute 30 would not closer approach the figure of 300 000
000 $ or 400 000 000 $. That, M. le Président, is an incredibly high
cost to pay, all because we could not or would not listen to the native peoples
of Oka and halted the extension of an extra nine holes of golf. ii n'y aura
aucune paix tant que les deux gouvernements, fédéral et
provincial, ne se seront pas assis pour discuter sérieusement de ces
problèmes. merci, m. le président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce. Mme la députée
de Taillon.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors,
malheureusement, les étés se suivent et se ressemblent. Je le dis
parce que c'est malheureux pour la population qui, depuis quelques
années, à tous les étés, est littéralement
prise en otage, prise dans une situation absolument inextricable causée
par l'incapacité de prévoir et d'agir de ce gouvernement.
D'ailleurs, il y a à peu près unanimité chez tous
les commentateurs politiques, chez tous les analystes de la vie politique pour
dire qu'il y a, à Québec, absence de gouvernement. Il faudrait se
souvenir, l'année dernière, de la saga des BPC alors que pendant
des semaines on a insécurisé une population qui ne savait plus ce
qui allait lui arriver, qui ne savait plus si des familles allaient pouvoir
continuer à demeurer dans leur maison à cause d'un
règlement que ce gouvernement n'avait pas eu le courage d'appliquer, de
mettre en oeuvre à cause, encore une fois, de l'improvisation de ce
gouvernement.
Cette fois-ci, évidemment, c'est encore plus ¦grave,
à mon point de vue, parce que, par cette attitude on a
négligé de résoudre les problèmes au fur et
à mesure qu'ils se présentaient, on a négligé de
faire en sorte que nos relations avec les autochtones soient de plus en plus
saines, permettant d'établir, effectivement, un processus continu de
négociations. D'ailleurs, l'Assemblée nationale avait
adopté ici une résolution en ce sens lorsque nous étions
au pouvoir et lorsque M. René Lévesque était chef de ce
gouvernement. Pas de suivi dans le sens de cette négociation continue.
On attend, comme toujours, la situation de crise avec les résultats
absolument malheureux auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui, avec
des manifestations inacceptables d'agressivité envers une
communauté, envers des personnes qui ne le méritent pas; et
ça, j'en tiens responsable le gouvernement qui est devant nous.
Quand j'entends le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle nous parler
d'un gouvernement qui ne se traîne pas les pieds et qui répond
à la conjoncture, qui nous dit: Nous répondons à l'urgence
de la situation, bien, M. le Président, je suis absolument
sidérée. Comment un ministre, député de la rive
sud, député de la Montérégie, responsable pour son
gouvernement de ce qui peut se coordonner, des actions qui peuvent se concerter
sur ce territoire, peut-il affirmer devant les membres de cette
Assemblée qu'il ne s'agit pas d'improvisation, mais qu'il s'agit, tout
simplement, de répondre à la conjoncture, comme s'il ne
s'était rien passé? Mais sur quelle planète vivons-nous,
M. le Président?
Voyez-vous, à ce que je puisse me souvenir, c'est en 1985 - pas
en 1989 pendant les élections, mais pendant les élections de 1985
- que ce gouvernement s'était engagé par une promesse
électorale... Parce que, dans leur cas, ce sont des promesses et non des
engagements; et ils ne les tiennent pas, de toute façon, on le constate
encore aujourd'hui. Alors, en 1985, on s'était engagé, en pleine
campagne électorale, à finaliser le prolongement de l'autoroute
30; pas celui dont on parle aujourd'hui, pas le petit tronçon dont on
parle aujourd'hui, mais le prolongement de l'autoroute 30 entre Brossard et
Valleyfield. Où était-il, M. le Président, ce ministre et
où étaient ses collègues de la Montérégie
pendant les quatre années et demie où le gouvernement du Parti
libéral a été au pouvoir? Comment ose-t-il nous dire
aujourd'hui, M. le Président, qu'il répond à une
planification, à un grand plan fait par le ministère des
Transports? Savait-il de quoi il parlait, en 1985, lorsqu'il a pris cet
engagement?
Si on regarde les budgets qui ont été
alloués aux routes, à l'entretien routier pendant les
années où le Parti libéral était au pouvoir, on
constate que non seulement on ne réussit pas à entretenir les
routes, mais on investit moins que notre gouvernement, que l'on critiquait
à ce moment-là, ne le faisait lorsque nous y étions, en
essayant, justement, de planifier les investissements et de faire en sorte
qu'on ne se retrouve pas dans des situations de crise comme celle dans laquelle
on se trouve aujourd'hui. Alors, qu'on vienne me dire aujourd'hui que tout
ça est normal, je ne le prends pas, M. le Président. Ce n'est
absolument pas normal. Je suis absolument estomaquée et je n'accepte pas
qu'à la fin du mois d'août on improvise tout d'un coup sur une loi
qui concerne une autoroute dont on parle depuis des années et qu'on nous
amène à cautionner un tel processus. C'est ridiculiser,
finalement, à mon point de vue, tout le processus démocratique
dans lequel on s'inscrit comme membres de l'Assemblée nationale.
Je dois vous dire que je m'opposerais avec véhémence
à ce projet-là si je ne savais qu'il finit par enfin
répondre à des besoins exprimés depuis longtemps par des
citoyens et des citoyennes de la rive sud. Mais j'ose croire que ça ne
leur fera pas oublier - et je mets le mot entre guillemets, mais je n'en pense
pas moins pour autant - le merdier dans lequel on s'est retrouvé depuis
quelques mois et qui m'apparaît carrément inacceptable pour un
gouvernement qui dit se respecter et qui dit vouloir répondre aux
besoins de la population. Alors, effectivement, si ce n'était dans
l'intérêt de la population, des personnes qui vivent autour du
pont Mercier, si ce n'était dans l'intérêt des personnes
qui vont utiliser cette route et qui en ont besoin, je m'opposerais à
l'adoption de cette loi. (H h 30)
II faut se rappeler, M. le Président, qu'on suspend aussi les
règles en ce qui a trait aux consultations exigées en
matière environnementale. Il faut se le dire. Il ne faut pas se cacher
en dessous de nos pupitres, parce que, c'est ça, aussi, le projet de loi
qui est devant nous. On fait ça à la fin du mois d'août.
Est-ce que c'est pour se disculper, pour dire aux gens de la région de
Châteauguay, aux gens de Sainte-Catherine, aux gens de Saint-Constant:
Nous sommes un bon gouvernement, nous nous occupons de vous? Nous nous occupons
de vous! Vous irez les voir, parce que effectivement - mon collègue de
La Prairie le mentionnait tout à l'heure - est-ce qu'on est allé
rencontrer ces populations? Est-ce qu'on est allé leur expliquer le
processus dans lequel on était engagé comme gouvernement? Est-ce
qu'on est allé leur présenter une possibilité d'ouverture
au bout du tunnel? Absolument pas, M. le Président. Alors, on se
retrouve encore une fois avec une réponse improvisée à un
problème connu depuis un bon moment, pour lequel ce gouvernement avait
pris des engagements très clairs à l'égard de la
population, et tout ça, dans un processus absolument catastrophé
où on met de côté des lois fondamentales en ce qui concerne
la gestion du territoire, ce qui m'apparaît carrément
inacceptable.
Je veux donc bien préciser que c'est pour la seule raison que ce
projet va répondre aux besoins d'une population qui est absolument prise
au dépourvu et en otage, actuellement, que j'accepterai de voter pour un
projet comme celui-là, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la
députée de Taillon. Je vais maintenant reconnaître Mme la
députée de Châteauguay.
Mme Pierrette Cardinal
Mme Cardinal: Merci, M. le Président. Inutile de vous
exprimer mon soulagement et ma satisfaction d'intervenir dans le débat
sur le présent projet de loi. Le gouvernement québécois a
choisi la voie d'une loi spéciale afin de dénouer une impasse
qui, à plusieurs égards, était rendue complexe et
délicate à la fois. À n'en pas douter, les
événements de Châteauguay parlent d'eux-mêmes. Et, si
j'avais plus de temps, je pourrais en causer longuement. Ils témoignent
de la frustration de la population concernée devant les
difficultés de déplacement quotidien, un droit des plus
légitimes.
À cet égard, vous me permettrez de vous résumer en
quelques mots les sentiments que j'ai vécus à titre de
députée du comté de Châteauguay depuis le
début de ce conflit. J'aimerais d'abord insister, avant même que
soit réglé ce dossier, sur les conséquences
économiques et sociales ressenties par l'ensemble de la population de
Châteauguay. Il m'est très difficile de vous décrire en
quelques minutes, en des termes simples et concrets, l'intensité des
émotions et des tensions ressenties dans le milieu depuis plus de 50
jours. Les médias d'information, tant parlés qu'écrits,
ont reflété le mieux possible la frustration qui s'est
installée dans le milieu dès le mois de juillet dernier. Nous
avions déjà subi, il faut s'en souvenir, une expérience
antérieure. La réalité est simple: la population s'est
littéralement sentie désemparée et lésée
dans ses droits les plus fondamentaux. En effet, les inconvénients subis
ont impliqué pas moins d'une centaine de milliers de personnes;
directement et indirectement concernées, ça pourrait couvrir
jusqu'à 150 000 personnes. Je parle ici d'inconvénients à
court terme, puisque l'on devra, un jour ou l'autre, dresser un bilan des
pertes totales qui finiront, si l'on n'y prend garde, par crever le tissu
social actuel.
Voilà la véritable portée du conflit vécu
aussi bien à Châteauguay que dans les autres régions
impliquées de près ou de loin dans le conflit autochtone. Et
j'irai plus loin en disant que ma priorité sera de refaire, voire
même de
reconstruire le tissu social sérieusement entaché depuis
plusieurs mois. (14 h 40)
Je ne saurais continuer sans rendre hommage à la population de
Châteauguay et des environs, qui a fait preuve d'une immense patience.
Malgré les nombreux inconvénients vécus, ils ont
conservé, à quelques exceptions près, leur patience, leur
tolérance et leur dignité. Également, mon
appréciation au premier ministre, aux ministres concernés et
à leur personnel pour leur constant appui dans un conflit si difficile.
J'ai également reçu l'appui de la Chambre de commerce de
Châteauguay et de la SODEQ. Merci à tous ceux qui, de près
ou de loin, m'ont soutenue dans ce conflit.
M. le Président, que dire de la collaboration de tous les
instants du maire de Châteauguay, du préfet et des maires de la
MRC de Roussillon? Merci à vous tous. Mais je veux
particulièrement remercier ma famille que j'ai mise dans des situations
plus que difficiles, mon personnel qui a été disponible et est
toujours disponible 7 jours semaine, 24 heures par jour et ça, depuis le
début du conflit. J'en suis très fière, c'est ce qui m'a
aidée à passer au travers. À Rollande, à
Françoise, à Normand, merci et ma reconnaissance.
Aujourd'hui, les membres de l'Assemblée nationale sont
appelés à solutionner un élément essentiel pour
l'avenir de Châteauguay et des environs. D'ailleurs, le projet de loi
fait suite à une annonce, le 9 août dernier, alors que le ministre
des Transports annonçait qu'il amorçait les démarches
nécessaires afin de réaliser dès cette année un
tronçon de 8,5 kilomètres de l'autoroute 30 reliant le boulevard
Ford, à Châteauguay, et la route 132, à
Sainte-Catherine.
Le gouvernement dépose ce projet de loi afin
d'accélérer le processus d'acquisition des immeubles
nécessaires à la construction de l'autoroute 30 entre les villes
mentionnées. Ce projet aura un impact bénéfique et concret
pour l'ensemble de la région puisque, dès l'automne prochain, les
travaux seront achevés, soit un projet de l'ordre de 10 000 000 $, alors
qu'une chaussée à deux voies de circulation aura
été construite. Et on parle également du tronçon
entre la 138 et le boulevard Ford, du boulevard Ford au rang Sainte-Marguerite
à Mercier. L'an prochain, on complétera le projet autoroutier de
12,5 kilomètres qui coûtera 43 800 000 $.
Le processus d'expropriation comportant certains délais à
respecter, il a été décidé, au Conseil des
ministres, le 22 août dernier, de déposer ce projet de loi
spécial à l'Assemblée nationale afin
d'accélérer ce processus. Cette procédure spéciale
d'expropriation devait être prévue afin de réduire au
minimum les délais qu'impose la loi actuelle. Cependant, des mesures
d'atténuation des inconvénients que pourraient subir les
expropriés seront mises de l'avant.
Les travaux devraient s'échelonner sur environ deux mois de
calendrier. Ainsi, dans la perspective de l'adoption rapide de cette loi
spéciale au début de septembre, ce qui nécessitera la
bonne collaboration de tous les membres de l'Assemblée nationale, nous
assisterons, une semaine plus tard, au début des travaux tant
attendus.
L'adoption d'une loi spéciale apparaît nécessaire
pour rencontrer l'objectif du gouvernement de mettre à la disposition de
la population de Châteauguay une voie de contoumement de la
réserve de Kahnawake. À coup sûr, il s'agit là d'une
mesure que l'on peut qualifier de considérable qui contribuera à
améliorer la circulation routière. Quand on sait que 80 % de la
population transite entre les villes avoisinan-tes et Montréal et ce,
sur une base quotidienne, vous pouvez imaginer les inconvénients puisque
nous n'avions qu'une seule voie d'accès. Je vous laisse le loisir
d'imaginer les inconvénients vécus depuis le début de ce
conflit alors que toute la circulation automobile fut détournée,
provoquant des coûts et des retards importants se reflétant sur la
santé et la sécurité des gens.
D'ailleurs, le projet de l'autoroute 30 n'est pas né
spontanément dans le sillon du présent conflit. On se rappellera
en effet que, depuis plus de 20 ans, on parle de ce dossier de façon
abondante et seul l'espoir semblait constituer la réalité. De
plus, le dossier de l'autoroute 30 a fait l'objet d'études dans le cadre
du dernier sommet socio-économique de la Montérégie,
dossier qui fut d'ailleurs retenu parmi les priorités d'action et qui
devra être complété dans son entier et sans
interruption.
La présentation de ce projet de loi aura ceci de
bénéfique en ce qu'il rassurera la population de la région
puisque la réalisation de cette autoroute constituera une alternative
efficace pour les déplacements de la population et assurera la relance
économique de notre région.
Je n'ai pas à insister, M. le Président, le gouvernement
libéral accorde une importance certaine au développement
régional dont le raffermissement du réseau routier constitue une
priorité et assure un lien essentiel entre les différentes
régions du Québec. Quant à la gestion globale de ce
présent dossier, je tiens à souligner que le gouvernement
québécois a assumé le leadership nécessaire au
règlement de ce conflit dans la paix et surtout d'une façon
pacifique afin d'assurer à ma population la sécurité
nécessaire à son développement.
Les développements récents furent rendus
nécessaires parce qu'à un moment donné, dans toutes les
négociations, il y a une limite qu'un État moderne doit assumer
pleinement, soit lorsque les interlocuteurs menacent la sécurité
d'une population civile. Somme toute, les avantages de l'adoption de cette loi
spéciale sont concrets et se situent dans une perspective d'une
solution à un problème de développement
régional.
D'abord, le délai initial de 105 jours en ce qui a trait à
l'expropriation est réduit à 45 jours. De plus, le début
des travaux pourrait s'effectuer dès le début du mois de
septembre. Espérons-le. En second lieu, la population se sentira
sécurisée en ce sens qu'une alternative est enfin trouvée
pour assurer une circulation plus normale, plus efficace entre la ville de
Châteauguay et ses environs et la ville de Montréal. En
troisième lieu, la réalisation de ce projet constitue une
réponse du gouvernement à un engagement pris dans le cadre de la
dernière campagne électorale, engagement qui se retrouvait dans
notre programme officiel.
Il est donc important de souligner que, dans le cas
d'accélération de ces travaux, le Conseil des ministres a fait en
sorte que le projet soit soustrait de la procédure d'évaluation
et d'examen des impacts sur l'environnement, tel que prévu dans la Loi
sur la qualité de l'environnement. À cette même
séance du Conseil des ministres du 15 août dernier, il a
été ordonné par décret que soit enclenché le
processus d'expropriation visant la réalisation de ce projet
autoroutier.
On retiendra également que le gouvernement
québécois était confronté à un dilemme
important par rapport à l'ensemble du dossier. D'une part, il s'est vite
aperçu que la population souffrait d'inconvénients majeurs
à cause de ce chaos social créé depuis ces 50 derniers
jours. D'autre part, le gouvernement a toujours estimé les demandes
formulées par les autochtones comme étant légitimes dans
la mesure où les négociations sont gérées dans un
processus normal d'échanges entre différents partenaires. Et,
quand on y pense bien, ce projet d'autoroute témoigne d'un respect
certain du gouvernement à l'égard des autochtones puisque
celle-ci contournera la réserve.
La solution retenue aujourd'hui tient également compte des
inconvénients vécus par la population de Châteauguay et de
ses environs. Vous comprendrez, M. le Président, qu'il y a certainement
une considération humaine qui a été prise en ligne de
compte lorsque est venu le moment de solutionner ce problème et cette
solution s'inscrit dans la perspective d'une action légitime de la part
du gouvernement à l'égard de la population visée.
Cette action s'inscrit dans un processus visant à
améliorer la qualité de vie des citoyens et citoyennes durement
éprouvés, dont la patience et la bonne volonté, et je leur
en rends hommage, méritent d'être soulignées à
nouveau. Mais cette action s'inscrit également dans un processus
d'amélioration de la circulation routière sur la rive sud de
Montréal. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la
députée de Châteauguay. M. le député de
Duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. Encore une fois, le
gouvernement du Parti libéral invoque l'urgence pour nous amener en
catastrophe ici, en Chambre, en plein été, afin de régler
un problème qu'il a lui-même créé. Le projet de loi
82 concernant l'autoroute 30 a bien sûr son importance aujourd'hui pour
le gouvernement libéral. Cependant, il n'avait pas beaucoup d'importance
pour ce même gouvernement au cours des cinq dernières
années. Et tout ça parce que le gouvernement libéral du
Québec a pratiqué l'Incurie dans la gestion du dossier
autochtone.
M. le Président, je voudrais vous rappeler en passant et rappeler
aux membres de cette Chambre que le fameux dossier du terrain de golf à
Oka existe sur la place publique depuis janvier 1989. Au cours de
l'été 1989, il y a eu des protestations qui ont été
fartes par les Mohawks de Kanesatake et d'Oka afin que ce terrain de golf ne
soit pas construit. Au cours des mois qui sont suivi, à aller jusqu'en
mars dernier, c'est-à-dire jusqu'à mars 1990, où
d'ailleurs on s'est ramassé avec les barricades à Oka, ce
gouvernement aurait pu très bien agir, soit en négociant
directement avec la municipalité, soit encore en
légiférant si c'était nécessaire pour ne pas
permettre à la municipalité la construction d'un terrain de golf,
voire même en entamant des négociations avec le Français
Rousseau. D'autre part, il n'est pas question pour l'Opposition de blâmer
la municipalité d'Oka ou quelque autre municipalité que ce soit
dans l'affaire des Mohawks, et en particulier dans l'affaire des Warriors,
parce que le gouvernement n'est pas intervenu au bon moment.
Aujourd'hui, on fait face à une loi qui déroge
carrément aux coutumes habituelles, aux étapes normales du
cheminement d'un dossier comme celui de l'autoroute 30. Les audiences
publiques, on s'en balance. La protection du territoire agricole, par-dessus
bord. Le processus normal d'expropriation, chez le diable, et l'octroi des
contrats, sur le bras.
Tout ça pour vous dire, M. le Président, que ce
gouvernement, en particulier l'équipe ministérielle,
c'est-à-dire les gens, les personnes qui sont ministres dans ce
gouvernement, ne savent pas gouverner. Comme le plaidait mon collègue,
le leader de l'Opposition en Chambre, on dirait que ce gouvernement cherche
à créer des crises pour ensuite gérer ces crises, pour se
faire du travail à faire, pour se faire une crise à gérer.
On dirait que ce gouvernement attend le dernier moment propice pour agir en
conséquence, c'est-à-dire pour régler le problème
des autochtones.
Et j'entendais, ce matin, le ministre délégué aux
Affaires autochtones qui semblait dire en
cette Chambre que son gouvernement avait réglé plusieurs
dossiers autochtones au cours des cinq dernières années. S'il
avait mis en application les 15 principes de 1983, qui ont conduit par la suite
à la fameuse motion à l'Assemblée nationale, à
cette fameuse résolution de l'Assemblée nationale reconnaissant
toutes les nations autochtones du Québec, en les nommant une par une, en
passant, comme des nations, en leur reconnaissant même l'autonomie
gouvernementale à l'intérieur de leur territoire, en particulier
les territoires de catégorie I, ce que je puis vous dire c'est que le
problème, on ne l'aurait pas sur les bras aujourd'hui. On ne serait
sûrement pas ici en cette Chambre. (14 h 50)
Quant à moi, je n'ai jamais accepté... Lorsque est
arrivée, le fameux 11 mars, la levée des barricades à Oka,
je me demande pourquoi le gouvernement, à ce moment-là, lorsqu'il
y avait peut-être 10 à 15 Warriors en arrière des
barricades et sur les barricades, n'a pas permis que la Sûreté du
Québec intervienne. Et pourquoi être intervenu quatre mois plus
tard lorsqu'il y avait peut-être 150, 200 Warriors de l'autre bord des
barricades? Et l'intervention faite par la Sûreté du
Québec, je voudrais bien connaître la personne dans ce
gouvernement, au niveau ministériel, qui a donné l'autorisation
et l'ordre à la Sûreté du Québec d'intervenir face
à des gens qui étaient armés jusqu'aux dents, qui
étaient armés jusqu'aux oreilles, même jusque par-dessus la
tête, si on s'en tient aux découvertes qui ont été
faites par l'armée. Je ne comprends pas cette attitude gouvernementale
qui a fait en sorte qu'un des plus beaux corps de police que nous avons au
Québec, communément appelé la Sûreté du
Québec, intervienne comme des gens qui font partie de l'armée
canadienne ou de l'armée québécoise, appelez ça
comme vous voulez, et armé même avec des armes de l'armée
canadienne. Ce n'était pas leur travail. Le travail, à ce
moment-là, aurait dû être fait, dans un premier temps, dans
les jours qui ont suivi le 11 mars ou, encore, le travail aurait dû
être fait par l'armée et non pas par la Sûreté du
Québec. C'est un grand reproche que je fais au gouvernement
libéral d'avoir donné l'ordre à la Sûreté du
Québec d'intervenir quatre mois plus tard et, en passant, quatre mois
trop tard.
Si on se ramasse aujourd'hui, en cette Assemblée nationale, et si
on s'est ramassés au cours des 50 derniers jours avec les
problèmes qu'ont connus des populations du Québec et qui ont eu
d'ailleurs des répercussions dans l'ensemble de tous les territoires
québécois dans toutes les régions du Québec...
Qu'on se rappelle le blocage de la route 138 par les Montagnais de Betsiamites;
qu'on se rappelle la manifestation des Montagnais de Sept-îles; qu'on se
rappelle ce qui est arrivé tout dernièrement avec les Micmacs;
qu'on se rappelle ce qui se passe dans le dossier des autochtones dans le cas
des Algon- quins du lac Barrière et ça, depuis plusieurs
années; qu'on se rappelle ce qui se passe au niveau des
négociations avec les Attikameks-Montagnais.
Moi, ce que je peux vous dire, c'est que ce gouvernement, au cours des
cinq dernières années, n'a vraiment rien fait pour régler
la question des autochtones. Et là, au moment où on se parle,
encore une fois, comme ça a été fait en 1970, il s'est
allié l'armée pour venir au Québec et, en passant, il faut
admettre cependant que, n'eût été de l'armée, il y
aurait eu de la casse pas mal plus qu'il y en a eu. Comme on paye pour cette
armée, je ne vois pas pourquoi cette armée n'était pas
venue ici antérieurement sur une commande du premier ministre du
Québec pour régler ce problème de fond, pour régler
ce problème qui nous est amené même de l'extérieur
du Québec, soit de l'Ontario ou encore de l'État de New York. Je
ne comprends pas que ce gouvernement se soit reculé et ait
regardé le train passer au lieu d'embarquer dedans et en prenant les
bonnes décisions qui s'imposaient dans le temps.
De plus, et j'écoutais la députée de
Châ-teauguay, avec tout le respect que j'ai pour cette dame qui a
vécu probablement des moments extrêmement difficiles et,
ça, je le regrette, mais, si elle a vécu des moments difficiles,
c'est justement à cause de l'incurie de son gouvernement, de l'absence
de son gouvernement malgré les promesses qui avaient été
faites en 1985 - et ça, elle a oublié de le dire tout à
l'heure - de régler la question de l'autoroute 30. Promesse qui a
été renouvelée, en passant, comme l'a dit la
députée de Châteauguay, en 1989, encore une fois, au cours
de la campagne électorale. Bien là, c'est rendu que vous faites
à peu près la même chose que ce que Duplessis faisait
lorsqu'il était au pouvoir, lorsqu'il voulait gagner une
élection. Il disait à ses lieutenants: Vous promettez dans une
première élection, vous montrez les plans et devis dans une
deuxième élection et, à la troisième
élection, vous travaillez sur le terrain pour construire la route. Bien,
les attitudes que vous avez, vous, les libéraux en cette Chambre qui
représentez le gouvernement et la population du Québec, ça
me rappelle exactement ces attitudes qui étaient prises par l'ancien
premier ministre du Québec, M. Duplessis. Vous faites des promesses et
vous ne les tenez jamais.
M. le Président, en conclusion... Il est vrai que je suis
d'accord aujourd'hui avec la construction de l'autoroute 30. Il vrai que je
suis d'accord. Mais je suis d'accord non pas parce que le gouvernement a
apporté le projet ici en cette Chambre, mais parce que ce sont des
besoins exprimés par la population de Châteauguay et de ses
environs, la population de la rive sud. Et j'espère que nous n'aurons
pas à revenir en cette Chambre pour régler à la
pièce des problèmes comme ceux-là, à travers le
Québec.
II fallait la signature d'un document avec
un Warrior. Il fallait des barricades à Kanesata-ke, à
Kahnawake et au pont Mercier. Il fallait la présence de l'armée.
Il fallait que le gouvernement libéral pousse la Sûreté du
Québec à agir. Là, on a pris une mauvaise décision,
et ça, je trouve ça extrêmement dommage. Il fallait aussi
des manifestations blanches face aux agissements illégaux qui ont
été amenés par les Warriors et par certains Mohawks. Cette
population blanche, je crois, tout comme une grande partie de la nation mohawk,
a été lésée dans ses droits parce que le
gouvernement n'a pas su agir au moment propice pour régler les
problèmes de l'ensemble des autochtones du Québec ainsi que de
l'ensemble de la nation mohawk. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Duplessis. Prochain intervenant, M. le
député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, M. le Président. Je ne peux pas,
même si, en ce qui me concerne, ce n'est pas un des plus beaux jours de
cette Assemblée... Mais ce n'est pas la première fois, depuis ce
gouvernement-là, qu'on se retrouve devant une loi spéciale. Et,
comme je le mentionnais tantôt, ce n'est pas de gaieté de coeur
que je dois y aller de quelques considérations. Il est certain, je
pense, que nous avons vécu cet été une des plus difficiles
crises que le Québec aura jamais connues. Ce qui est malheureux,
déplorable, dénonçable, c'est d'être obligés
de faire ça en une convocation spéciale d'urgence. Imaginez qu'on
le fait sur un projet de loi qui se termine par une question - excusez
l'expression - de "garnotte". Et j'expliquerai pourquoi c'est tellement honteux
et décevant d'être obligés d'en arriver là.
Ma collègue disait tantôt que ce n'est pas parce que ce
gouvernement-là nous a habitués à l'indécision
chronique qu'on doit se réjouir d'être convoqués
aujourd'hui pour une loi spéciale, concernant un projet de loi pour se
soustraire à une série de mesures qui sont les nôtres
depuis plusieurs années, que ce soit concernant la protection du
territoire agricole, que ce soit concernant les normes d'études d'impact
lorsqu'on fait un projet de cette envergure-là, concernant aussi les
droits à l'expropriation. Ce n'est pas grave, on met ça
par-dessus bord et on procède.
On a eu droit à la saga des BPC, on a eu droit à la saga
des pneus de Saint-Amable, on a eu droit à la saga des heures
d'affaires. Il s'agit juste de faire un aparté. Moi, je le vis chez
nous. C'est à peine appliqué que, déjà, on est dans
une situation absolument intenable, invivable, encore là, parce que le
gouvernement s'est traîné les savates, s'est traîné
les pieds, n'a pas eu l'heur de prendre une décision et, finalement, n'a
pas tranché. Mi-chair, mi-poisson, comme d'habitude, une loi un peu
entre les deux, qui fait que ça crée de l'insatisfaction presque
partout. Mais qu'est-ce que vous voulez? Depuis quatre ans, depuis 1985, on
dirait que la caractéristique principale de ce gouvernement-là,
c'est de laisser pourrir les problèmes, pourrir les situations et,
après ça, justifier une action par loi spéciale ou
autrement.
La crise que nous avons vécue cet été est une crise
majeure, d'envergure, difficile, qui méritait effectivement d'être
gérée avec beaucoup de circonspection, beaucoup de parcimonie,
compte tenu des conséquences qu'elle peut avoir sur l'avenir de cette
nation québécoise et de l'image que nous avons à
l'étranger. Mais ce n'est pas une mince affaire, quand un des leurs est
obligé de démissionner pour indiquer combien il a eu honte. Et
c'est principalement pour ça que j'interviens. J'ai rarement eu aussi
honte que cet été, M. le Président, de voir la caricature
que ce gouvernement-là a faite de ce que c'est, un gouvernement qui
prend des décisions, un gouvernement qui a le respect de certaines
règles qui sont établies. (15 heures)
J'entendais le ministre de la Justice, avec ses beaux principes et ses
déclarations: II ne peut pas y avoir deux types de justice et il ne peut
pas y avoir des avantages pour les uns et quand ça ne fait pas leur
affaire, à ce moment-là, ils ne les prennent pas. Moi, je vais
faire appliquer la justice pour tout le monde. Alors qu'on sait très
bien que ces gens-là savaient depuis au moins trois ans que, en
particulier, les Warriors étaient des gens qui agissaient
illégalement. Je n'ai rien contre la nation mohawk, je n'ai rien contre
les nations amérindiennes, mais j'en ai contre les Warriors parce que
ces gens-là étaient dans l'illégalité, ces
gens-là pratiquaient l'illégalité. Le gouvernement le
savait et on a toujours laissé faire.
Essayez donc, vous, M. le Président, de ne pas payer votre compte
d'Hydro pour voir ce qui va vous arriver. Moi, comme député de
comté, constamment, je suis obligé de faire des interventions
pour des citoyens qui sont sur l'aide sociale avec une loi de fou - on va en
parler tantôt dans quelques minutes - et qui sont incapables,
complètement incapables de faire face à leurs obligations. Je
vous dis que la discussion n'est pas longue. La discussion n'est pas bien bien
longue parce qu'ils sont obligés de payer, eux autres, leur
mensualité, leur dû à HydroQuébec. Et on dit
ça en pleine télévision. Il y a des gens qui ne paient pas
leur électricité depuis deux ans, deux ans et demi même
s'ils s'en servent comme s'ils avaient des privilèges auxquels nous, on
n'aurait pas droit. À un moment donné, le ministre de la
Sécurité publique - bien sûr qu'il ne porte que le nom en
ce qui me concerne - est obligé de dire, membre
d'un Conseil des ministres: On s'est fait rouler sur toute la ligne. On
s'est fait avoir sur toute la ligne, alors que ça faisait des mois que
la population... Et n'importe lequel parlementaire le moindrement averti,
ça ne prenait même pas un parlementaire, ça prenait juste
quelqu'un qui a un gros bon sens commun pour se rendre compte que le
gouvernement est en train de se faire avoir sur toute la ligne. Mais, à
un moment donné, il arrive au Conseil des ministres et il l'a dit avant
qu'il ne décide de se cacher parce que ce matin on apprend que je vous
dis qu'ils sont bien moins montrables qu'ils l'étaient... C'est un
gouvernement qui se cache. On n'a qu'à regarder dans les journaux
là. Ils aimaient ça passer par la porte principale quand ils
entraient au Conseil des ministres au début de leur mandat. Mais je vous
dis qu'il n'y en a plus bien bien qui ont le courage de passer par la bonne
porte.
M. Pagé: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, avec le consentement de
mon collègue et bon ami, M. le député d'Abitibi, il me
permettra très certainement de porter à son attention un fait
auquel, j'en suis persuadé, il a déjà été
associé, à savoir que le mercredi, lorsque le Conseil des
ministres est à 10 heures en matinée, le Comité
ministériel du développement régional, le Comité
ministériel du développement économique et celui du
développement social se réunissent avant. Le problème
auquel vous référez, c'est que, au-delà de quatorze
ministres étaient présents dans ces comités au Conseil des
ministres hier, comme tous les mercredis, depuis 8 heures le matin. Le
problème, c'est que notre ami, Normand Girard, arrive vers 10
heures.
Une voix: Oups!
Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, merci de votre
intervention, mais je ne crois pas que c'était une question de
règlement. Alors, M. le député...
M. Gendron: ...M. le Président, c'est plutôt rare
que j'entends dire d'un membre du Parti libéral qu'il a des
problèmes avec leur ami, comme il vient de le dire, M. Normand Girard.
C'est très rare que j'entends ça, je veux dire, en tout cas...
Alors là, j'en apprends une bonne. Tant mieux. Mais au-delà de
ça, M. le Président, très sérieusement, quand le
ministre de la Sécurité publique indique qu'on s'est fait avoir,
c'est parce qu'il voulait traduire lui aussi le sentiment de l'ensemble de la
population du Québec qu'on avait éprouvé lorsqu'un membre
de ce gouvernement, surtout responsable du dossier des affaires autochtones,
s'en va signer en pleine télévision un document avec des gens
masqués, des gens anonymes, et on ne sait même pas qui ils sont
véritablement. Là, on venait de donner l'image publique que, pour
eux autres, entre ce qu'ils disaient et l'action de leur gouvernement, il y
avait un monde de différence.
Et on a raison, je pense, de rappeler ces faits-là, M. le
Président, surtout quand on entend ce qu'on a entendu, pas plus tard
qu'il y a quelques minutes. C'est vrai qu'il faut avoir du culot et Dieu sait
si celui qui l'a dit en a, le ministre de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu. Je vous dis que c'en est un qui est bien
culotté, ça, pour avoir le culot de dire: Nous, on est un
gouvernement qui agit, qui prend ses responsabilités, qui ne se
traîne pas les pieds et qui répond en termes de gestion à
des éléments de conjoncture. Qu'est-ce qu'il venait de dire, M.
le Président? Il venait de nous dire que ce gouvernement-là
gère suivant la lecture qu'il fait de la conjoncture, alors que j'ai
toujours appris que gouverner, c'est un peu prévoir des situations. Or,
cette situation-là était prévisible depuis des mois,
depuis plusieurs mois et il est absolument impensable, inconcevable qu'on ait
aujourd'hui le culot de venir dire dans une loi spéciale que c'est un
gouvernement qui assume ses responsabilités, qui prend les
décisions au bon moment, surtout quand on en rajoute.
Moi aussi, j'ai eu beaucoup de sympathie, je suis sincère, pour
ce que la députée de Château-guay doit avoir vécu
cet été. Ça ne doit pas avoir été
drôle, ce qu'elle a vécu. Mais moi, je n'aurais pas
félicité, par flatterie, mon premier ministre. Ça, ce
n'est pas vrai, je n'aurais pas été capable. Je n'aurais pas
été capable d'avoir cette attitude qui ne peut pas correspondre
aux faits. Je n'aurais pas été capable d'avoir l'attitude de
continuer sa phrase quand elle a dit, et je la cite au texte: "Pour notre
gouvernement, il est important, c'est capital, de se préoccuper du
développement régional, surtout quand on le lie au réseau
routier." C'est une farce monumentale. J'ai failli m'éclater de rire,
mais c'est trop triste, quand on sait que son collègue, le ministre des
Finances, n'a pas mis une cenne dans le budget de cette année pour le
développement du réseau routier, pas une cenne. Est-ce qu'il va
falloir faire des barricades partout? Est-ce qu'il va falloir annoncer que
c'est nos industriels qui vont prendre leurs tracteurs, leurs camions? Nous
aussi, on a droit à des routes.
Pensez-vous qu'aujourd'hui c'est intéressant pour un
régionaliste d'être d'accord avec la loi 82? Ça n'a pas de
bon sens. Ça n'a pas de bon sens pantoute sur le plan des faits, parce
que moi, je n'ai pas une cenne cette année, même si je me
promène avec une lettre de l'ancien ministre des Transports qui me
disait il y a un an: Oui, on va dépenser 400 000 $ à tel endroit.
Une lettre de ministre de ce gouvernement-là ne vaut même plus
rien. Ça ne veut rien dire. J'en ai une autre du ministre actuel.
Ça ne veut
encore rien dire parce qu'il ne s'est rien fait et je le sais, qu'il ne
se fera rien. Au niveau de la loi 82, bien sûr qu'on va être
obligés d'être d'accord sur la loi 82, parce qu'il faut au moins
offrir une alternative aux gens de Châteauguay qui, effectivement, se
sont comportés en suscitant beaucoup, beaucoup d'admiration dans ce
dossier-là, quand tu te fais écoeurer pendant 50 jours. Il faut
leur offrir une alternative parce que ça fait tellement longtemps qu'ils
sont susceptibles d'être complètement à la merci du
comportement de certains éléments terroristes à
l'intérieur de certaines bandes amérindiennes qui ont comme
conséquence de bloquer le pont Mercier, et ça, c'est leur seul
lien routier pour accéder...
Mais, comme on n'a pas beaucoup de temps, je vais conclure en disant
ceci, et ma conclusion est, je pense, capitale: Nous allons exiger, lorsqu'on
sera rendus au comité plénier, certains amendements à ce
projet de loi là. Je tiens à terminer en vous lisant les trois
considérants suivants parce que c'est à cette seule
condition-là qu'il nous apparaît que le projet de loi 82
concernant l'autoroute 30 est convenable un peu: considérant que des
événements extraordinaires et d'une extrême gravité
impliquant divers éléments de la communauté mohawk vivant
principalement à Oka, à Kanesatake et à Kah-nawake ont
dégénéré depuis le 11 juillet 1990 en un conflit
armé et ont ainsi contraint une large partie de la population de la rive
sud de Montréal de vivre sous un véritable régime de
guerre; considérant que ce conflit armé a privé, pendant
plus de 50 jours, cette population de l'accès à 111e de
Montréal par le pont Mercier; considérant que malgré que
l'accès au pont Mercier soit redevenu possible depuis le 30 août
1990... Mais ne pensez pas que c'est utilisable. Ne pensez pas qu'on peut
circuler sur le pont Mercier, qu'on va pouvoir le faire demain et
après-demain. Il y a une barricade qui a été levée
et il y en a 30. Alors, pensez-vous que le pont Mercier va être
utilisable dans les prochains jours? Bien non. Considérant qu'il y a
lieu de mettre sur pied des mesures extraordinaires et de déployer des
efforts exceptionnels et sans précédent pour améliorer
rapidement les déplacements des citoyens de la rive sud et de
l'île de Montréal...
Voilà des considérants, voilà un préambule
qui devrait être inscrit pour ce qui est du projet de loi 82, pour
montrer son caractère unique, exceptionnel, particulier, et
j'espère qu'on n'aura plus jamais à revenir en Chambre pour
passer des législations spéciales de "garnottes" pour
régler un problème de 50 jours, parce qu'un gouvernement a
été ridicule, a été complètement incapable
de prendre les décisions au bon moment, s'est traîné les
pieds. C'est ça qui arrive quand on pratique l'indécision pendant
quatre ans et demi. Quand le moment est venu de prendre une décision,
bien, on est dépourvu, on est démuni, on n'est pas capable, on
panique et ça donne des situations comme celle-là.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le leader adjoint
de l'Opposition. Le prochain intervenant, M. le député d'Anjou.
(15 h 10)
M. René Serge Larouche
M. Larouche: M. le Président, évidemment, je suis
d'accord qu'on construise le plus rapidement possible ce tronçon de
l'autoroute 30. J'ai l'idée de commencer mon intervention par une
citation de Lord Durham, du fameux rapport Durham, en 1839, que j'ai lu in
extenso. J'ai lu la copie du premier ministre Chauveau qui est à la
Bibliothèque, ici. Alors j'ai fait une photocopie quand même parce
que le livre est assez sec. Je vous donne la citation à la page 63. Il
dit: Je suis très surpris de l'importance indue qui est donnée
ici en regard des travaux publics. En parlant du caractère d'un
gouvernement, ses mérites semblent être évalués en
fonction de la quantité de travaux publics qu'il met en marche. Si on
questionne un individu sur la performance de son Assemblée
législative, il se référera généralement au
nombre de routes ou de ponts qui ont été construits dans son
comté. Si on le consulte sur des changements constitutionnels à
apporter, il évaluera les changements proposés en
considérant si de tels changements lui donneront de meilleures routes ou
de meilleurs ponts que dans le système actuel.
Alors, c'est clair que les questions de routes et de ponts sont
importantes depuis longtemps au Québec et dans le Bas-Canada. Mais la
question de la route 30 revêt une importance particulière parce
qu'on en parle depuis 30 ans; heureusement que ce n'est pas la route 45.
Je rencontrais tantôt le maire, M. Bosco Bourcier, de
Châteauguay. J'ai eu l'occasion de me rendre sur les lieux et je l'ai
félicité en mon nom personnel concernant la conduite des citoyens
de Châteauguay, des citoyens d'Oka aussi, qu'il ne faut pas oublier dans
ce terrible conflit qui est alimenté au moyen de différents
procédés qu'il serait trop long d'expliquer ici, mais qui font
référence à la psychologie, qui font
référence à des moyens d'alimenter les plus basses
passions humaines. Il est clair que, lorsqu'on voit, à la
télévision, des gens qui tirent des pierres contre des voitures,
on peut se poser la question: Mais pourquoi donc les voitures passaient-elles
à ce moment-là? A-t-on invité les gens à se poster
au même endroit où ils devaient recevoir des roches? Alors, j'ai
une foule de petites questions comme ça, mais je pense que ce n'est pas
le temps ni le lieu d'en parler.
Vous savez que le conflit qui oppose les Québécois,
racistes et intolérants, selon l'ensemble des médias du Canada,
selon l'ensemble
des médias internationaux - et j'ai fait faire un relevé
qui touche autant le Japon, l'Espagne, l'ensemble des États-Unis - les
Québécois racistes et intolérants qui veulent
écraser les Indiens... Dans l'ensemble du Canada, on ne parle jamais des
Warriors, on parle toujours des Québécois qui sont contre les
Indiens.
Il existe des conflits partout dans le monde. Il existe des moyens de
résoudre les conflits. Je pense que ça vaut la peine ici de
regarder... Prenons en Irlande, il y a des "patterns" de conflits qui durent
depuis des dizaines d'années, par exemple, entre les catholiques et les
protestants. Je vais vous en lister un bon nombre et vous allez arriver
à la conclusion. En Belgique, entre les Flamands et les Wallons; en
Espagne, ça touche les Basques; au Moyen-Orient, les arabes et
Israël; au Royaume-Uni, les Écossais et les Gallois; au Soudan, les
musulmans et les chrétiens; au Burundi, les Tutsi et les Hutu; en
Egypte, les coptes chrétiens et les musulmans; en Yougoslavie, les
Serbes et les Croates; au Ceylan, les Singalais et les Tamouls; au Liban, des
musulmans et des chrétiens; à Chypre, les Grecs et les Turcs.
Dans cette liste où on donne tous les conflits, on disait: Pour le
Québec, c'était les francophones et les anglophones. Mais, depuis
le 10 juillet, c'est les francophones contre les Indiens.
Un conflit, ça se fabrique, un conflit, ça s'alimente.
J'ai eu l'occasion personnellement d'étudier cette question. J'ai
préparé des textes qui s'appellent, par exemple, Les images
transnationales et les conflits. J'ai eu l'occasion d'enseigner à
plusieurs groupes à l'École nationale d'administration publique
et il existe des "patterns" très bien établis dans
l'agrandissement d'un conflit. Le maire Bosco Bourcier me disait
tantôt... Et on le sait tous; on connaît des gens qui allaient
acheter des cigarettes chez les Mohawks, des gens qui allaient se reposer
à Oka. Ce qui est dommage de voir, de dire, c'est que, depuis 50 jours,
on veut écraser tout le monde. Je vais me limiter à ça
concernant le conflit entre le Québec et les autochtones, pour en
arriver à la loi elle-même.
Il est bien clair qu'il est rare qu'il y ait des lois qui touchent les
autoroutes. J'en ai fait sortir deux. Il y avait la loi 10, qui a
été sanctionnée le 21 février 1957, sur la
création d'un office de l'autoroute Montréal-Laurentides. Et une
deuxième, qui était la loi 61, Loi concernant le boulevard
Métropolitain, le 27 avril 1961, question de clarifier la
répartition des coûts et le remboursement de la part du
Québec avec la Corporation du Montréal métropolitain, dans
le temps. Moi, j'ai toujours insisté pour que, lorsque des gens se
voient pris psychologiquement et sans porte de sortie, on puisse en ouvrir une
le plus rapidement possible. Je crois personnellement que ce n'était pas
nécessaire de faire une loi pour ça. D'accord, il y a des
considérations au niveau, par exemple, des lois sur l'expropriation, et
on parie de versement d'une indemnité supplémentaire. Mais je
crois qu'en cas de catastrophe réelle ou appréhendée,
comme le disait tantôt le ministre des Transports, le gouvernement peut
agir de façon ultrarapide.
M. Raymond Giroux, un éditorialiste du Soleil, disait ce
matin: "La convocation extraordinaire de l'Assemblée nationale pour
assurer la construction d'une route de contournement évitant la
réserve de Kahnawake donne l'impression d'un monde kafkaïen,
complètement décroché de tout sens moral. Hypocrisie
majeure que cette session d'aujourd'hui." Je ne sais pas pourquoi il en rajoute
tant que ça. Mais moi, personnellement, je crois qu'il n'aurait pas
été nécessaire de faire une loi. Alors, je suis d'accord
quand même avec ce qui nous est présenté. Il y a
certainement des détails techniques qui m'échappent, des
détails qui touchent d'autres législations ou qui contournent
certaines difficultés pour accélérer les choses mais, en
gros, je félicite le gouvernement, enfin, d'ouvrir le plus rapidement
possible cette autoroute 30 qui, déjà, faisait partie du plan de
transport de la région de Montréal, je crois, et qui est
demandée aussi par l'ensemble des intervenants économiques de la
rive sud. Alors, ce plan de transport, justement, prévoit aussi
l'autoroute 25, vers le nord, pour décrocher éventuellement
à Laval. C'est clair qu'en situation de crise ça peut être
plus facile d'obtenir une route. Mais, vraiment, cette situation
nécessitait la passation de cette loi.
Alors, sur ces mots, je donne mon accord à cette loi. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Anjou. Je reconnais maintenant M. le
député de Salaberry-Soulanges. M. le député.
M. Serge Marcil
M. Marcil: Merci, M. le Président. C'est certain que cette
séance extraordinaire qui a été appelée pour
adopter la loi spéciale visant à effectuer le prolongement de
l'autoroute 30 de la ville de Châteauguay à la ville de
Sainte-Catherine, c'est assez exceptionnel. On n'a pas besoin de revenir sur
l'urgence d'adopter une telle loi aujourd'hui, au moment où le
Québec vit une des situations les plus tristes de son histoire.
Cependant, il est important de vous rappeler que la construction de l'autoroute
30 et son parachèvement ne datent pas du 11 juillet. J'aimerais vous
résumer l'historique de l'autoroute 30, en Montérégie,
surtout pour démontrer qu'indépendamment de la prise d'otage de
la population de Châteauguay au sud-ouest de la Montérégie
cette autoroute est essentielle, oui, pour le développement
économique, mais aussi pour des raisons de sécurité
puisque la Montérégie ne bénéficie que d'un seul
réseau routier. (15 h 20)
Pour situer les gens dans le contexte, la 132 part des lignes
américaines dans le sud-ouest du Québec pour se terminer dans
l'est du Québec et lorsque l'on passe dans Châteauguay, la 132
passe sur la réserve. Donc, c'est la seule route qui permet à
près de 100 000 de population de sortir de la région de
Châteauguay, soit pour se rendre sur l'île de Montréal, soit
pour aller vers l'ouest du Québec. Donc, quand cette route est
bloquée et, comme elle est sur un territoire amérindien, il
risque déjà d'y avoir deux blocages, il est sûr et certain
qu'on ne peut plus vivre une telle situation. On ne peut plus faire vivre
à cette population une telle situation.
Je vous rappelle que la construction de cette autoroute a
été revendiquée par les autorités municipales et
par la population depuis 1960. Nous avions assez de problèmes de
congestion, de nombreux accidents, des problèmes de circulation et,
dès ce moment, le gouvernement a été sensibilisé
à ce dossier et a déjà commencé les études,
envisageant la construction de ce réseau routier. J'aimerais juste vous
résumer un peu, en ordre chronologique, les faits qui sont
rattachés, justement, à ce projet. D'abord, le début des
travaux qui était prévu pour 1964-1965, à la hauteur de la
20 jusqu'à la 116 sur la rive sud de Montréal pour
améliorer le flot de circulation sur la rive sud, en prévision de
l'Exposition universelle de 1967. Entre 1970 et 1976, un tronçon
important fut aménagé entre Sorel et l'autoroute 20 à la
hauteur de la rive sud et, de 1979 à 1980, de la 20 jusqu'à
l'autoroute des Cantons-de-l'Est, ce qui signifie environ huit
kilomètres. Plusieurs embûches, autant administratives que
politiques, sont venues interrompre la poursuite de l'autoroute. Ainsi, pour le
tronçon qui nous concerne, M. le Président, celui de
Châteauguay à la ville de Sainte-Catherine, l'histoire remonte aux
années mil neuf cent soixante-dix où le ministère des
Transports a suggéré que l'autoroute 30 sort
aménagée à l'intérieur même de la
réserve amérindienne pour la poursuivre jusqu'à
Valleyfield. Les négociations avec les gens de la réserve ont
amené le gouvernement, seulement en 1977, à proposer un
tracé afin de contourner cette réserve. Cependant, avec la venue
de la loi agricole, la Loi sur la protection du territoire agricole, le
corridor Châteauguay-Saint-Thimotée disparaît et l'on
rétrocède les terres aux agriculteurs. Le tracé du
contournement de Kahnawake a donc été modifié à
cinq reprises: en 1970, en 1976, en 1981, en 1986 et, finalement, en 1988.
Cette volonté s'est clairement exprimée lors du sommet
socio-économique de la Montérégie où le ministre
des Transports du temps, M. Marc-Yvan Côté, a
déclaré: oui à l'autoroute 30 et nous allons
procéder par phases. Et là, je m'explique.
Tantôt j'écoutais le député de La Prairie qui
disait à la population du Québec, qui nous disait, il y a
quelques minutes, aux gens ici en cette Chambre, également à la
population de Châteauguay, à la population de
Beauharnois-Huntingdon, à la population de Salaberry-Soulanges, à
la population de La Prairie, ceci: Si le gouvernement actuel avait
été prévisible ou avait réalisé ce
tronçon de l'autoroute 30, on aurait évité le
problème actuel. Pourtant, le député de La Prairie a
été député de Chambly de 1976 à 1985. Si je
me souviens bien, il était ministre à l'époque. Il faisait
partie du Conseil des ministres avec le premier ministre, M. René
Lévesque, qui, lui, était député de Taillon,
également un comté de la Montérégie. Il y avait
aussi un dénommé Pierre Marois, qui était ministre de
Marie-Victorin, un autre comté de la Montérégie. Il y
avait aussi un dénommé Maurice Martel, ministre du Revenu, si ma
mémoire est bonne, qui était député de Richelieu,
un autre comté de la Montérégie. La question que je me
pose, c'est quelle était la position du gouvernement du Parti
québécois quant à l'avenir du réseau routier dans
la région de Montréal, de 1976 à 1985? C'était
quoi, la position de ces ministres, de ce gouvernement, concernant l'autoroute
30?
Je vais vous en parler, moi. D'abord... Là, je me sers du
mémoire qui avait été déposé à la
commission parlementaire sur le plan de transport, mémoire qui
s'intitule "Le parachèvement de l'autoroute 30, la seule direction
souhaitable", mémoire présenté à la commission
parlementaire de l'aménagement et des équipements par le
comité du parachèvement de l'autoroute 30 sur lequel
siégeaient à peu près tous les maires de la
Montérégie, les députés de la
Montérégie, les membres de différents organismes, chambres
de commerce et ainsi de suite.
Et dans leur introduction, justement, on pariait de l'historique de
l'autoroute 30. Et je cite un paragraphe, parce qu'on dit que le dossier
s'acheminait à la vitesse des camions devant les... Donc, on faisait
beaucoup d'images dans le texte. Et à la fin de la page 1, on dit: Peu
s'en fallut pour que l'on s'emballe. Mais moins de deux ans plus tard, c'est un
retour à la case de départ, parce qu'à l'époque, le
ministre Paul Berthiaume avait annoncé cette autoroute 30. En avril
1978, le ministre délégué à l'Aménagement -
le ministre à l'époque, c'était Jacques Léonard
qui, aujourd'hui, est député de Labelle - déclarait, et je
cite, qu'il n'y aura pas d'autoroute 30 dans le sud-ouest suite à la
politique gouvernementale de mettre l'accent sur l'extension du réseau
de transport en commun. C'était ça, leur position à
l'époque.
Des voix: Bravo!
M. Marcil: Le transport collectif devait prendre le dessus sur le
transport routier partout dans la grande région métropolitaine.
Pourtant, jamais le ministre n'a envisagé d'étendre ou de
développer ce réseau dans le sud-ouest. Bien
plus, on ignorait totalement le transport des marchandises. Au
début des années 1980, le ministre des Transports, M. Denis de
Belleval, réentérine à ce moment-là... Là,
il avait décidé de changer, parce qu'il y avait eu des
propositions d'élargir la 132 à la place, au lieu de faire une
autoroute. Lui, il a dit: On accepte le principe de prolonger l'autoroute 30.
Le premier ministre du temps, René Lévesque, a même
donné son accord de principe. Pourtant, le dossier était encore
en panne sèche lors du sommet socio-économique de la
Montérégie en 1987.
On a pris le pouvoir le 2 décembre 1985, disons, janvier 1986,
pour être plus pratique, parce que je ne pense pas qu'entre le 2
décembre 1985 et janvier 1986, on aurait réalisé
l'autoroute 30. On avait, dans notre programme électoral... C'est ce que
les gens disaient tantôt et c'est vrai. On s'est engagés à
terminer l'autoroute 30 dans son entier et je pense que cet
engagement-là est encore présent et plus présent que
jamais.
On a mis sur pied une table de concertation au niveau de la
Montérégie. On a préparé le sommet
socio-économique de 1987 et on l'a répété depuis
tantôt. Tous les intervenants en parlent. On a décidé que
la priorité, c'était de parachever l'autoroute 30 dans son
entier. Il y avait la phase 1 qu'il fallait compléter pour laquelle on
avait engagé une trentaine de millions, tout près de 40 000 000
$.
La phase 1, c'était de réaliser, premièrement, le
tronçon de Kahnawake, c'est-à-dire contourner la réserve
de Kahnawake. La phase 2, c'était de terminer, de Brossard à la
10, et la phase 3, c'était de réaliser le dossier de
Châ-teauguay jusqu'à la 20. Effectivement, tout le monde s'est mis
au travail. En 1988, le ministre dépose un plan de transport pour tout
le grand Montréal métropolitain, donc qui touche environ 3 000
000 de personnes, plan de transport qu'on amène en commission
parlementaire. Et, là, on invite tous les organismes à intervenir
également en commission parlementaire.
Et on avait des dates bien précises dans
l'échéancier. Le contournement de la réserve de Kahnawake
était prévu, de 1988 à 1993. La finalisation du dossier de
Châteauguay à Val-leyfield, 1993-1998. Ça, c'est
écrit noir sur blanc et je pense que tout le monde l'a lu et le
tronçon de Brossard à la 10, 1988-1993. Tout le monde est
d'accord, on s'en va en commission parlementaire. On questionne les gens. Tout
le monde nous arrive. Il y avait deux positions différentes, deux
philosophies différentes. (15 h 30)
II est entendu que le maire Doré de l'île de
Montréal ne préconisait pas une voie de contournement ou des
voies de contournement de ffle de Montréal. Il était contre
l'étalement urbain, donc, contre la réalisation de la 440 dans la
région de Laval et la réalisation de l'autoroute 30. Le
député de Lévis, qui était le porte-parole aux
transports, était contre l'autoroute 30 également et il
était contre la 440 aussi. Donc, là, on commençait
à ressentir un peu la position du Parti québécois
concernant les voies de contournement de l'île de Montréal. On se
fichait bien des problèmes du réseau routier sur l'île de
Montréal, du boulevard Métropolitain. Ça, ce
n'était pas grave, mais on ne voulait pas faire des autoroutes autour de
IHe de Montréal, quand on sait que toutes les grandes villes
américaines sont toutes équipées de grandes routes de
contournement.
Là, ça va, jusque là. Tout le monde est d'accord.
Bon, on met le plan de transport en marche. Des études se font. Dans la
région de Châteauguay, il y a des négociations très
sérieuses qui se font entre les agriculteurs et la ville de
Châteauguay. Comme président du caucus de la
Montérégie, avec Mme Cardinal, députée de
Châteauguay, et d'autres députés de la
Montérégie, on a assisté à des rencontres avec le
maire de Châteauguay, M. Bosco Bourcier, de même qu'avec le
commissaire industriel de Châteauguay et les agriculteurs, pour qu'il y
ait une entente sur le fameux tracé. Ça a pris du temps,
ça aussi, parce que les agriculteurs voulaient quelque chose et la
municipalité de Châteauguay, avec raison aussi, voulait
protéger son parc industriel. Ça a pris du temps avant qu'ils
s'entendent. Au moment où ils se sont entendus, la machine s'est
enclenchée.
On a eu la biennale, en mai 1990, pour faire le point sur le sommet
socio-économique. À cette biennale, le président de la
Société monté-régienne de développement pose
la question à Mme la ministre responsable du développement
régional, Mme Bacon, et dit: Mme Bacon, qu'est-ce qui arrive avec cet
engagement de l'autoroute 30? Où en sommes-nous rendus? Et Mme la
ministre répond. Là, quand on veut savoir si l'autoroute 30 vient
des limbes, c'est tout simplement pour vous dire que nous avions
enclenché le mouvement et qu'on était prêts à faire
le travail comme tel. Je cite. Ce ne sera pas long. C'est Mme la ministre qui
parle: "L'ensemble du prolongement de l'autoroute 30 à une
chaussée, entre Brossard et Valleyfield, est inclus parmi les projets de
développement du réseau routier du plan d'action de 1988-1998
pour la région de Montréal. Ce tronçon Brossard-Candiac et
le contournement de la réserve de Kahnawake y sont prévus pour la
période de 1988-1993 - toujours en référence au plan de
transport - pour un total d'environ 44 000 000 $. Pour le tronçon
Brossard-Candiac, le ministre a obtenu un accord des municipalités
concernées sur un tracé d'avant-projet préliminaire. "Dans
le cas du contournement de la réserve de Kahnawake, les plans
d'avant-projet sont terminés. Le ministère a obtenu l'accord des
municipalités concernées ainsi que l'autorisation de la
Commission de protection du territoire agricole du Québec. Au plan
technique, l'échéan-
cier qu'on va vous donner - donc, on donnait l'information à ceux
qui ont participé à cette biennale - est considéré
toujours pour les deux tronçons. D'abord, pour Brossard-Candiac,
dépôt de l'étude d'impact en novembre 1990; obtention du
certificat d'autorisation de réalisation, novembre 1981; expropriation
et plans et devis, février 1992; appel d'offres, avril 1992.
Tour ce qui est du contournement de Kahnawake, dépôt de
l'étude d'impact, juillet 1989 - c'est ce qui a été fait -
obtention du certificat d'autorisation de réalisation, juin 1990;
expropriation et plans et devis, décembre 1991; appel d'offres en avril
1992." Elle ajoutait: "C'est évident que la tenue des audiences
publiques sur l'un ou l'autre des tronçons viendrait certainement
décaler l'échéancier d'environ 6 à 12 mois." Mais,
là, on suit la Loi sur la protection du territoire agricole.
Effectivement, les études ont été affichées
pendant 45 jours. Il y a eu des groupes qui se sont inscrits pour pouvoir se
faire entendre aux audiences publiques. La crise a fait en sorte que le
problème du réseau routier était de plus en plus
évident. Tout ce qu'on fait aujourd'hui, c'est qu'on dit qu'au lieu de
commencer les travaux en 1992 on les décale pour les commencer en 1990.
C'est ce qui se fait aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle on est ici.
Mais, tout simplement pour vous montrer encore l'incohérence des
membres de l'Opposition, en mai 1990, il y a eu une commission parlementaire du
budget et de l'administration où on a étudié les
crédits et le député de Labelle, qui est le porte-parole,
a clairement dit, encore, qu'il était contre l'autoroute 30, qu'il
était contre la 440, qu'il était contre l'étalement de la
population. Encore en mai 1990, et aujourd'hui, on vient nous dire: On est pour
l'autoroute 30. Là, il nous disait ça en mai 1990. Deux minutes
après qu'il eut parlé, le député de La Prairie
entre en commission parlementaire et vient dire le contraire. Lui, il dit: II
faut réaliser l'autoroute 30. Encore là, on ne sait plus quelle
est la position de ce parti.
Une voix: Qui dit vrai?
M. Marcil: Qui dit vrai? Oui, ce serait une très belle
émission.
Aujourd'hui, on accuse le gouvernement actuel d'inertie face au dossier
de l'autoroute 30. En l'espace de quatre ans, on a réengagé la
machine, on a rembarqué les gens dans une table de concertation. On
prévoyait le début des travaux en 1992. Lorsqu'on se
réfère au rapport Vallières, quand il disait qu'entre le
moment où on décide de faire une route et le moment où on
la réalise il se passe 13 ans. On aurait réussi à
commencer les travaux en l'espace de six ans, et là, on va le faire en
l'espace de quatre ans.
M. le Président, j'aurais aimé que le débat soit un
petit peu moins partisan. J'aurais préféré que les gens
essaient plutôt de mettre en évidence l'importance de
réaliser ce réseau routier, l'importance pour les gens de la
région du sud-ouest et pour toute la grande région
métropolitaine, parce qu'on touche quand même 3 000 000 de
personnes. C'est sûr que la crise actuelle a posé des
problèmes énormes à la population de Châteauguay,
à la population du comté de Salaberry-Soulanges,
particulièrement, aussi, à la population de
Beauharnois-Huntingdon, et également à la population du
comté de Deux-Montagnes. Ces gens-là ont vécu quelque
chose d'assez spécial et, comme le disait tantôt le leader de
l'Opposition, on ne le souhaite à personne.
Moi, je suis profondément peiné de cette situation et
probablement aussi de mon impuissance comme député à
intervenir pour régler ce problème, mais je tiens quand
même à rendre hommage à cette population qui a
été très tolérante; ils se sont conduit en gens
civilisés. Je ne parle pas des cas isolés qu'on s'acharne
à montrer toujours sur les écrans de télévision ou
à mettre dans les journaux. Cette population a vécu un
problème majeur et les séquelles vont être longues à
régler. Il va falloir, justement, comme gouvernement, qu'on intervienne
pour aider cette région à se prendre en main.
J'aimerais également rendre hommage à Mme la
députée de Châteauguay, Mme Cardinal, qui pendant ces 50
jours-là a été disponible, a été au service
de la population. Ça n'a pas été drôle, ce qu'elle a
vécu. Le député de Deux-Montagnes a vécu le
même problème, également, à Oka. Ce sont des
situations presque intenables. Malgré tout ça, ces gens-là
se sont tenus debout et ils ont réussi quand même à
communiquer un certain calme auprès de la population. Et probablement
que le résultat, aujourd'hui, de la négociation, où on
voit un peu la fin de ce dossier-là, la fin du problème, est
dû au travail que ces deux députés ont
réalisé.
Il y a une autre personne à qui j'aimerais rendre hommage: le
maire de Châteauguay, le maire Bosco Bourcier. Être maire d'une
ville de 40 000 de population et vivre ce qu'il a vécu... Il l'a
vécu quand même dans un climat serein, intérieurement. Ce
gars-là n'a jamais perdu le contrôle, il a toujours
été calme, dans cette situation-là. Il a réussi
quand même à garder toute sa population derrière lui. Je
tiens à lui rendre hommage et j'espère que les gens de cette
région vont l'évaluer dans ce qu'il a fait. Je suis convaincu
que, pour une région de ce coin-là, avoir un maire comme
ça, c'est déjà une sécurité pour l'avenir de
la ville de Châteauguay. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le
député de Bertrand.
M. François Beaulne
M. Beaulne: Merci, M. le Président. J'ai pris bonne note
des efforts louables du député de Salaberry-Soulanges pour
justifier l'immobilisme du gouvernement dans le prolongement de l'autoroute 30.
Indépendamment des faits qu'il a cités, j'aimerais
néanmoins souligner qu'une des raisons qui nous amènent
aujourd'hui en session spéciale, c'est que le budget du gouvernement du
Québec ne prévoyait pas de fonds, à courte
échéance, pour la construction de l'autoroute 30. Ce fait a
été souligné de façon tout à fait
éloquente lors de la biennale de la Société
montérégienne de développement, qui s'est tenue en
février dernier, où le dossier du prolongement de l'autoroute 30
ainsi que d'autres dossiers majeurs ont été évincés
des dossiers prioritaires.
M. le Président, à titre de président du caucus des
députés du Parti québécois de la
Montérégie, je ne puis que féliciter le gouvernement de
prendre la décision de prolonger l'autoroute 30. Bien sûr, je vais
appuyer cette décision, ainsi que tous mes collègues qui
représentent les comtés avoisinants de la région. (15 h
40)
J'aimerais quand même souligner la forme sous laquelle cette
décision est prise et, également, le contexte dans lequel nous
prenons cette décision. Bien que nous nous félicitions tous du
prolongement de l'autoroute 30, outil indispensable au développement
régional de la Montérégie, outil indispensable aux
investissements économiques et outil indispensable à l'avenir de
cette région, il demeure que la forme et le contexte dans lequel cette
décision est prise me paraissent un peu tristes.
Pour obtenir ce que les députés gouvernementaux, de
même que les députés du Parti québécois, que
les candidats du Parti québécois, au cours des dernières
élections, s'étaient engagés à apporter à la
population de la région, il nous a fallu une situation de crise qui a
démontré l'impuissance du gouvernement face finalement, à
une mise en tutelle, par quelque 450 individus masqués et armés,
de toute une population d'une quarantaine de milliers d'habitants. Il est
regrettable que le prolongement de l'autoroute 30 soit le résultat d'une
situation de crise plutôt que le résultat d'une saine
planification de la part du gouvernement et plutôt que le
résultat, tout simplement, de la livraison d'une promesse
électorale faite par les candidats du Parti libéral au cours des
dernières élections et d'ailleurs reprise par les
députés de ma propre formation.
Il est regrettable que cette décision soit prise dans un contexte
où l'image du Québec se trouve ternie, où on laisse
sous-entendre que la meilleure façon d'obtenir quelque chose du
gouvernement, surtout dans des dossiers majeurs, c'est par l'intimidation, le
chantage, l'utilisation et la menace de la force. Ce contexte est inacceptable.
Et même si nous sommes ici d'accord avec la mesure d'urgence que propose
le gouvernement, nous sommes tout à fait en désaccord avec le
contexte dans lequel elle se prend.
Si vous avez lu comme moi, aujourd'hui, les revues de presse, vous vous
êtes aperçus que le Québec sort perdant, dans son ensemble,
de toute cette situation. Notre image a été ternie sur le plan
international et il est regrettable qu'il en soit ainsi parce que, s'il y a un
État ou une province au Canada qui ne méritait pas de se faire
traîner dans la boue, sur la place publique internationale quant au
traitement qu'il réserve à sa population indigène, c'est
bien le Québec. Et pourtant, comme l'a souligné d'ailleurs le
député d'Anjou, c'est nous, maintenant, qui sommes accusés
de racisme, c'est nous qui sommes traînés dans la boue, sur le
plan international, comme si nous ne savions pas traiter de façon
civilisée les populations autochtones de ce pays, ce qui est tout
à fait faux; les dossiers sont là pour le prouver. Mon
collègue, le député de Duplessis, a mentionné, ce
matin, à la période de questions, les efforts qui avaient
été faits sous le gouvernement de M. René Lévesque
pour reconnaître la dignité, l'existence et les droits des
populations autochtones. Ce pas avait été franchi, au
Québec, et le dialogue avait été amorcé de
façon convenable. Cette crise est venue tout ternir.
Mais vous me permettrez, M. le Président, de m'interroger sur le
contexte dans lequel tout ça se développe. Il est un peu
mystérieux que cette situation arrive au moment où nous avons
assisté à l'échec de l'entente du lac Meech, à un
moment où les sondages nous révèlent qu'il existe au
Québec une sorte de consensus sur une refonte des structures
fédérales, sur une remise en question de notre appartenance au
fédéralisme canadien traditionnel. Il est assez curieux, alors
que ce consensus existait au Québec, que tout à coup, une action
comme celle-là vienne, somme toute, mettre en question la
capacité des Québécois de régler par
eux-mêmes un problème de chez eux; et c'est là que je
regrette d'autant plus le contexte dans lequel cette décision se
prend.
Je pense que, si l'action avait été bien menée et
bien coordonnée, la Sûreté du Québec aurait
dû, normalement, être en mesure de mettre de l'ordre dans les
barricades et d'intervenir de façon que le conflit ne prenne pas les
proportions qu'il a prises. Quelles que soient les raisons de l'échec de
la Sûreté du Québec, il demeure qu'en dernière
analyse nous avons dû faire appel à l'armée
fédérale pour régler ce conflit. Je trouve que le
gouvernement du Québec et, du même coup, tous les
Québécois, nous sortons un peu diminués de cette crise
parce que nous avons donné l'image que nous ne pouvons pas régler
nos propres problèmes par nous-mêmes. Bien sûr que nous
avons droit à Tinter-
vention de l'armée fédérale, puisque nous en payons
une partie des frais, mais il aurait été
préférable, si le gouvernement avait eu un peu plus de leadership
dans le dossier, que nous réglions cette affaire entre nous-mêmes
sans avoir la proportion internationale que le conflit a prise.
M. le Président, dans le contexte actuel, le prolongement de
l'autoroute 30 est une question qui, à mon avis, fait l'assentiment de
la majorité des deux côtés de cette Chambre. Bien
sûr, certains collègues des deux côtés de la Chambre
vont s'opposer à la méthode qui est utilisée ici pour que,
dans la grande région de Montréal, en périphérie de
Montréal, on obtienne la construction d'une route alors que des
investissements routiers sont indispensables dans d'autres régions du
Québec. Je comprends ceux qui se sentent un peu frustrés de voir
que, malgré les efforts qu'ils poursuivent depuis des années, ils
n'aboutissent pas à obtenir des raccordements routiers qui s'imposent
dans leur région. Sur ce point, je pense que nous convenons tous - le
premier ministre l'a déclaré, le chef de l'Opposition l'a
également déclaré - que jamais le gouvernement du
Québec ou les gouvernements du Québec, ni même le
gouvernement fédéral, ne céderont au chantage d'une bande
armée pour obtenir le règlement de nos dossiers. Mais il demeure
que nous sommes face à une situation qu'aucun d'entre nous n'a voulue,
j'en suis sûr.
Dans ce contexte, il m'apparaît que le prolongement de l'autoroute
30 ne vient pas récompenser ceux qui font de la
désobéissance civile, ne vient pas récompenser ceux qui
prennent les armes pour obtenir les revendications de leurs droits; il vient
plutôt accorder une certaine compensation à une population qui,
malgré elle, a été la victime d'une situation qu'elle n'a
pas cherchée.
M. le Président, nous disons oui au prolongement de l'autoroute
30, mais nous disons également oui, à la suite de ce qui vient de
se passer, au dialogue, à la reprise du dialogue avec les populations
autochtones, avec les Mohawks de la grande région de la
Montérégie, et nous disons oui, également, à la fin
de la montée de cette intransigeance qui est devenue l'apanage des
situations de crise. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le
député de Laviolette. M. le député de Laviolette,
la parole est à vous.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. D'entrée de
jeu, je vais vous dire - vous n'en serez certainement pas surpris, M. le
Président, ni les membres de cette Assemblée - que l'ensemble des
députés de cette formation politique que je représente et
ceux de l'autre côté auront l'oc- casion de voter ce projet de
loi. Donc, nous sommes devant le fait que c'est inévitable; avec les
accords de part et d'autre, nous allons voter le projet de loi. Cependant, vous
me permettrez, par ma voix, de peut-être faire sentir qu'il y a une
partie des gens qui sont - aussi bien de ma formation politique que de l'autre
côté - en désaccord sur le projet de loi comme tel.
Qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, les décisions que
nous prenons aujourd'hui auront des conséquences très difficiles
à supporter dans le futur. On prend pour acquis que, même si on
parle - comme mon collègue vient de le dire -d'une forme de compensation
pour des gens qui ont subi des préjudices pendant un état de
crise, on en arrive à obtenir pour nos régions des routes ou
d'autres choses que des routes simplement parce qu'il y a eu crise et qu'au
bout de la course on donne un peu le message à tout le monde - que ce
soient les gens du gouvernement actuel ou même nous, comme membres de
l'Opposition, qui désirons et souhaitons, le plus rapidement possible,
former le gouvernement - que nous cédons à des formes... aussi
difficiles à accepter que celle-là. (15 h 50)
II est évident que le message qui peut être ressenti par
des gens... C'est peut-être pour ça qu'en exprimant une part de ce
désaccord j'indiquerais, à ce moment-là qu'on devrait bien
regarder à donner un message autre que celui-là à
l'ensemble de la population.
J'ai eu l'occasion de suivre, comme responsable et critique de
l'Opposition en matière de forêts, le problème que le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche a eu à vivre dans
sa propre région quand des gens ont décidé de couper des
arbres sur un territoire qui appartenait au gouvernement du Québec, au
ministère de l'Énergie et des Ressources, parce qu'ils avaient
l'intention d'obtenir du gouvernement du Québec les subventions
nécessaires pour faire une station de ski. On a vu que c'est une chose
qui s'est produite et pour laquelle je n'étais pas d'accord. Mais le
ministre a décidé, comme ministre responsable, de donner - et on
a vu de quelle façon - à ces gens-là une sorte
d'absolution. Les gens sont en train de construire, suite à ces
ententes-là, leur station de ski.
Vous avez des gens qui sont des Algonquins - et j'ai eu l'occasion, avec
mon collègue de Duplessis, de les rencontrer au lac Barrière -
qui posent des conditions semblables dans un contexte où ils disent: II
y a des contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier qui
doivent être donnés et ces contrats d'approvisionnement et
d'aménagement forestier ne seront pas exécutés parce que
nous allons barrer les routes d'accès à cette ressource
forestière.
Vous voyez donc, M. le Président, un cheminement qui semble
être celui de ce gouvernement de céder sous la pression dans des
états de crises qui sont plus ou moins fortes. Nous en
avons vécu une, durant l'été, qui était
très forte et nous sommes réunis aujourd'hui dans un contexte
où on décide d'une route alors qu'on aurait dû fort
probablement être réunis bien avant pour obtenir beaucoup plus de
renseignements et, ensemble, comme Assemblée nationale, essayer de
dénouer la crise qui était devant nous. Dans d'autres Parlements
à travers le monde, ça fait longtemps qu'ils auraient
été réunis d'urgence pour en arriver à former une
coalition des membres de l'Assemblée nationale devant des gens
armés qui menaçaient la sécurité publique d'une
large proportion de la population.
Mais je ne peux pas, M. le Président, accorder mon accord sans
regarder aussi ce qui se passe chez moi. On parle de l'autoroute 30. Je ne
ferai pas comme le député du parti ministériel qui a
précédé, à savoir dire qui a tort et qui a raison.
Je vous dirai simplement, M. le Président, que, nous aussi, on a eu un
sommet économique dans notre région, que, nous aussi, on a eu des
demandes, que, nous aussi, on dit dans nos documents qu'il devrait y avoir, de
la part du gouvernement, et c'est écrit comme tel dans nos documents
"prolongement de l'autoroute 30 jusqu'à Nicolet, 5,5 kilomètres".
Le député de Nicolet-Yamaska n'est pas ici aujourd'hui, parce que
je sais qu'il a aussi d'autres préoccupations et d'autres occupations
aujourd'hui. Mais je sais que lui-même est préoccupé par
cette demande qu'ils ont eux-mêmes acceptée et on disait: On
pourrait débuter les travaux à la fin de l'automne ou au
début de l'hiver 1989. Nous sommes en 1990 et il n'y a rien de fait
encore. m. le président, une route que vous connaissez très bien,
la route 155 entre matawin et rivière-aux-rats, section 160. même
affaire, même résultat: rien de fait encore. et, nous autres
aussi, on a des études d'impact et, nous aussi, on est, avec la
journée d'aujourd'hui, devant le bureau d'audiences publiques, et on va
savoir, dans les jours qui viennent, s'il y aura des audiences publiques ou
pas. nous aussi, on a des demandes importantes. je ne peux pas, pour ma
population, laisser ça de côté et ne pas le dire. je
regarde, pendant le sommet économique, ceux qui y ont assisté, le
ministre de l'époque de l'office de planification et de
développement du québec, avec la verve qu'on lui connaît,
nous a fait des remontrances, aux gens du sommet économique, pour ne pas
avoir pensé à des routes d'accès aux communautés
attikameks dans mon coin. moi, j'en ai trois, m. le président:
obedjiwan, weymontachie et manouan. trois réserves indiennes dans mon
comté qui ont des problèmes de routes, moi aussi.
Puis, je peux vous dire qu'au moment où je vous parle,
d'après les renseignements que j'ai pris, ce n'est pas à
régler non plus. Pourtant, le ministre nous a fait des remontrances en
nous disant qu'on ne s'était pas préoccupé d'eux autres.
Bien, je peux vous dire qu'on s'en était préoccupé. Le
seul problème, c'est qu'on n'avait pas les garanties nécessaires
qu'on l'obtiendrait et, à la fin du sommet économique, en grande
pompe, on nous a dit: Moi, comme ministre, je vais leur donner ça.
Ça, c'était en 1989. Depuis ce temps-là, M. le
Président, rien. Rien n'est réglé encore actuellement.
Puis, moi, je vais accepter de cautionner que, par des moyens de
pression, on puisse obtenir des choses? J'en suis incapable, M. le
Président, et je voulais le dire. Je sais qu'on va voter la loi, je sais
que, de part et d'autre, des deux côtés de la Chambre, il y a des
gens qui, comme moi, disent qu'il y a des précédents importants,
dangereux qu'on est en train de créer. Mais, compte tenu des
circonstances, il est évident que nous allons voter pour. Dans mon
humble conscience, M. le Président, je serais porté à dire
non. Pas pour la route, mais pour les moyens utilisés, pour les
circonstances dans lesquelles nous sommes plongés parce que je ne
voudrais pas que dans mon coin on puisse dire: Bien, écoute, le seul
moyen, Jean-Pierre, d'obtenir quelque chose, ça serait de faire des
barricades, ça serait de s'organiser pour que, finalement, on attire
l'attention. Les tentations, M. le Président...
Il parlait de la seule route entre un lieu et un autre, en passant par
la réserve. Je peux vous dire que la seule route entre Grand-Mère
et La Tuque, vous la connaissez très bien. Il y a des camionneurs qui
ont pensé, fort longtemps, à bloquer cette route. Je les avais
empêchés. La Chambre de commerce de La Tuque leur avait dit: Ce
n'est pas le moyen, essayons plutôt d'y aller tranquillement et de
persuader. Et, au moment où je vous parle, je ne sais même pas si
on va faire une graine de travaux l'année prochaine. Pas cette
année parce qu'il n'y en a pas, mais l'année prochaine.
Aujourd'hui, moi, je me tairais, je ne protégerais pas ma
population, je ne dirais pas ce que je pense! M. le Président, j'en suis
incapable. Je parle avec mes tripes et mon émotion dans un contexte
où, chez nous comme ailleurs... Et il y a des députés, de
l'autre formation politique comme de la mienne, qui le pensent. Devant les
circonstances où nous sommes placés, compte tenu des
circonstances - qui ont été peut-être provoquées ou
non, ça n'a pas d'importance - il y a une chose qui est certaine, c'est
que nous sommes devant un état de fait et nous sommes placés pour
prendre une décision. Elle n'est pas facile, M. le Président,
cette décision. Elle est plus facile pour les gens qui se trouvent
là-bas, qui vivent là-bas. Il faut donc les appuyer. Mais, d'un
autre côté, pour nous, ce n'est pas facile. Les gens vont dire:
Cette année, pas de travaux dans notre région. Parce qu'on leur a
dit que c'était sur le boulevard Métropolitain que ça se
passait.
Le député de Nicolet-Yamaska a répondu à ma
question dans les journaux et à la radio, la semaine passée,
quand il disait que le
1 700 000 000 $, c'était normal qu'il n'y en ait pas eu cette
année, parce que c'est l'année prochaine que ça commence.
Moi, je n'en suis pas encore sûr, parce que, avec les millions qu'on a
dépensés pour la crise et avec les millions qu'on va mettre
ailleurs, je ne sais pas ce qu'il va rester pour notre région
l'année prochaine. C'est ça que je veux défendre. Je veux
m'assurer que l'an prochain, M. le Président, dans ma région
comme dans d'autres régions au Québec, il y ait des travaux aussi
urgents et aussi importants. Parce que, quand on parle de désenclaver
les réserves indiennes chez moi, pour des gens qui vivent en accord avec
nous, même si, des fois, il y a des difficultés, il va falloir
leur donner raison un jour ou l'autre et les faire, les routes. Quand on a un
trafic lourd important, des centaines et des centaines de camions sur la route
de La Tuque qui amènent de la pitoune, comme on dit chez nous, vers
Trois-Rivières, il va falloir qu'on donne les sommes d'argent
nécessaires pour la faire, la maudite réfection. C'est ça
que je voulais dire. C'est mes gens, que j'ai le devoir de protéger,
tout en pensant à mes collègues et à ceux qui vivent
là-bas, dans le coin de Châteauguay. Il faut peut-être aussi
leur donner raison, mais pas au détriment de nous, M. le
Président.
Dans ce contexte-là, le message que je veux lancer au
gouvernement: premièrement, il faut arrêter de céder au
chantage et à la pression comme on les a vécus mais,
deuxièmement, il faut planifier et s'assurer que toutes les
régions auront leur part de gâteau. Je voulais le dire, je l'ai
dit, M. le Président.
Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, m. le
député de laviolette. je reconnais maintenant le prochain
intervenant, m. le député de shef-ford. m. le
député, vous avez la parole.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci, M. le Président. Moi aussi,
étant un député de la Montérégie, je tenais
absolument à intervenir sur ce projet de loi, le projet de loi 82. Je
dis que je suis heureux qu'enfin il y ait un bout de la 30 qui se construise.
Et je vais vous dire qu'il doit y avoir bien des intervenants dans la
Montérégie présentement qui pensent comme ça. Je
vais vous dire pourquoi. C'est bien simple, c'est que c'était un des
sujets prioritaires retenus au niveau du sommet socio-économique de 1987
en Montérégie. Donc, si c'était important en 1987,
imaginez-vous comment c'est important en 1990. Sauf, par contre, que j'aurais
aimé que ça se passe dans un autre contexte. Je dois vous dire
que c'est plutôt gênant pour un gouvernement de se ramasser
à l'Assemblée nationale avec un projet de loi qui se lit: Loi
concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre
Châteauguay et Sainte-Catherine. C'est aberrant, M. le Président,
que la deputation soit appelée d'urgence pour voter un bout de route.
Ça, c'est de l'inconscience, c'est un manque de planification et c'est
surtout à l'image d'un gouvernement sans parole. Parce qu'il faut se
rappeler que la 30, c'était l'engagement majeur des candidats
libéraux à l'élection de 1985 en Montérégie.
En 1985! (16 heures)
Au sommet socio-économique de 1987, c'était le
deuxième projet retenu par l'ensemble des centaines d'intervenants en
Montérégie dont, évidemment, les élus municipaux et
spécialement les élus municipaux de la région
concernée. C'était le deuxième projet majeur en 1987.
C'était encore l'engagement électoral prioritaire au niveau de
l'élection de 1989. C'était redevenu un projet important et
majeur à la biennale de février 1990 et on n'avait encore rien
fait. On n'avait encore rien planifié, rien annoncé, rien
budgeté après tous ces engagements. Et on se retrouve aujourd'hui
avec un nouveau tracé et une loi spéciale pour en faire un bout.
Je dois vous dire que c'est presque aberrant et inacceptable.
Les deux projets majeurs du sommet de 1987 en Montérégie,
les pneus de Saint-Amable et l'autoroute 30... Les pneus de Saint-Amable,
ça s'est réglé par un incendie dernièrement qui va
nous coûter des millions. Et, la 30, c'est ce qu'on est en train de faire
aujourd'hui, on va en faire un bout par une loi spéciale. Donc, oui, je
suis heureux qu'il s'en fasse un bout. Et on va voter pour. Au moins, ça
va faire avancer la cause. Ça va faire avancer le dossier. Il y a un
bout d'asphalte qui va se faire. Tant mieux. Sauf que c'a pris une catastrophe
sociale. Je trouve tout simplement lamentable et pitoyable qu'on doive passer
une loi semblable dans un climat de crise. Imaginez-vous, c'a pris 50 jours de
tension, d'insécurité, d'instabilité et de violence pour
que le gouvernement se décide à régler une situation qui
était pourtant un engagement qui date de cinq ans. C'est incroyable.
Comme je vous disais tantôt, M. le Président, si le
gouvernement d'en face avait tenu parole, avait tenu ses engagements et avait
construit des routes et celles qui étaient des promesses
électorales, - la route 30 en est une dans la Montérégie,
- on ne serait pas ici aujourd'hui en train de passer une loi spéciale
pour un bout de route. Parce que ça ferait longtemps que ce serait
réalisé ou ce serait, selon l'échéancier de 1987,
en voie de parachèvement. Bien non, c'est un commencement d'urgence. Ce
n'est pas du tout la même chose. Donc, c'est incroyable. On est ici parce
qu'on n'a pas tenu parole. On est ici parce qu'on n'a pas tenu parole et c'a
pris un état de crise. Et dans ce dossier ici, ce qu'il y a de plus
pitoyable, on l'a dit souvent et on l'a vu souvent dans des crises, le
gouvernement Bourassa, le gouvernement actuel, joue aux pompiers. Il
éteint des
feux. Et là, je ne parie pas au figuré de
Saint-Basile-le-Grand et de Saint-Amable, c'est deux parmi tant d'autres. Il
joue aux pompiers. Mais dans le cas qui nous intéresse, dans la crise
actuelle, non seulement il est pompier, il est le pyromane. Parce que c'est lui
qui a allumé le feu. C'est lui qui a fait en sorte qu'on soit en crise
sociale au Québec, avec l'année dans les rues. Parce que c'est
lui qui, depuis 1985, a refusé de travailler sur la motion votée
à l'Assemblée nationale par rapport à la situation des
autochtones au Québec. Il ne s'est rien passé de valable depuis,
ce qui a fait en sorte que la pression a monté et qu'on se retrouve dans
une situation où les autochtones manifestent par des moyens
violents.
Il a fait quoi ensuite? Qu'on se rappelle en 1988 quand le pont a
été bloqué pour une première fois à cause
des cigarettes vendues sans taxe. Le gouvernement a envoyé la police et
l'a retirée et il a laissé faire. Donc, il a commencé
à allumer l'incendie. Le bingo illégal, le printemps dernier. Il
a envoyé la Sûreté du Québec. Il l'a retirée.
Les Indiens se sont dit: Bien, c'est la façon de gagner. Et, finalement,
les bingos continuent. Et là, maintenant, eh bien, c'est la crise qu'on
connaît. J'espère que ça ne viendra pas salir, pour les
années à venir, la réputation des Québécois.
Parce que, effectivement, les Québécois sont des gens ouverts et
généreux. C'est prouvé. C'est reconnu au niveau mondial.
Et si, aujourd'hui, il y a des comportements qui sont plus violents, c'est
à cause de la frustration des citoyens, frustration qui est
occasionnée par le manque d'autorité de ce gouvernement, le
laisser-faire, le manque de planification qui fait en sorte qu'on ne sait plus
où on va.
C'est tellement vrai que les gens manquent maintenant de confiance en ce
gouvernement et en son premier ministre que même les maires des
municipalités, à qui on avait promis la route 30, ont jugé
indispensable d'aller commencer les travaux eux-mêmes pour s'assurer que
le gouvernement ne reviendrait pas sur son engagement. Imaginez-vous, le manque
de confiance des élus municipaux par rapport à leur gouvernement
au point où, d'une façon qui n'est pas normale, qui n'est pas
légale, les maires s'installent sur des "bulls" pour aller faire le
tracé de la route pour être sûrs que le gouvernement ne
reculera pas. Il faut le faire, on ne voit pas ça souvent dans des
sociétés. Donc, c'est qu'on est rendu vraiment dans une situation
qui est grave, qui est grave non seulement par rapport à ce qu'on vit
comme insécurité, mais aussi par rapport à ce que
ça va venir ternir l'image du Québec parce que les
Québécois n'ont pas changé comme tels, même s'ils
ont vécu des moments troublés, troublants. Mais les
Québécois sont encore les mêmes et ils espèrent
qu'on va être capable de régler ça rapidement. Mais on a
terni l'image du Québec.
On a réussi à faire en sorte que l'autorité soit
mise en doute et c'est pour ça qu'on voit des routes bloquées un
peu partout. On a laissé une situation inacceptable perdurer pendant 50
jours. Ça, c'est dangereux pour une société. On a
compromis le respect de l'autorité. On a même réussi
à compromettre ce qui n'était même pas une image, mais une
réalité, la fierté qu'on avait de la Sûreté
du Québec. On a réussi, pendant quelques jours en plus, à
faire en sorte que l'armée, qui est un instrument offensif et d'attaque,
devienne quelque chose d'un peu risible. On a réussi à aller
aussi loin que ça comme société. Ça, c'est
lamentable et pitoyable. C'est pour ça que les gens sont un peu perdus,
parce qu'une société aussi moderne que la nôtre, aussi
efficace, aussi avancée, mais surtout aussi paisible, qui se ramasse
dans une situation semblable, ce n'est pas explicable et ce n'est pas
acceptable.
C'est pour ça que les gens se questionnent et c'est pour
ça que les gens, finalement, surtout dans la situation des gens de
Châteauguay et de Sainte-Catherine, ont décidé, eux autres,
d'aller de l'avant. Ils ont raison et c'est pour ça qu'on ne peut pas
faire autrement qu'être pour le projet de loi aujourd'hui, même si
on est très déçus des raisons qui nous amènent ici.
On est très déçus. Mais ça n'a pas de bon sens que
toute cette population de la région de Châteauguay, de Beauhamois,
de Mercier et de Sainte-Catherine soit victime et pénalisée plus
longtemps à cause de l'incohérence et de l'incapacité du
gouvernement d'en face de prendre ses responsabilités.
Je conclus là-dessus, parce que vous me dites que j'ai fini mon
temps, M. le Président, en disant ou en montrant toute l'insignifiance
de cette situation. Imaginez-vous! Le tout a commencé par un terrain de
golf, dans le nord, à Oka, et ça se termine ici, à
l'Assemblée nationale, par un bout d'autouroute dans le sud, à
Châteauguay. Ça nous montre toute l'incohérence et toute
l'insignifiance de cette situation à cause d'un gouvernement qui n'a pas
su prendre ses responsabilités parce qu'il n'a jamais eu d'objectif, de
plan précis d'intervention quand il posait des gestes. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Shefford. M. le ministre, voulez-vous utiliser votre
droit de réplique? M. le ministre délégué aux
Transports.
M. Yvon Vallières (réplique)
M. Vallières: Oui, M. le Président. Vous me
permettrez rapidement de clore cette partie de notre débat. Je constate,
et ça me rappelle certains souvenirs, que, quand on est dans
l'Opposition, souvent on se doit d'intervenir sur les projets de loi en faveur
desquels on est, mais qu'on doit aussi parler contre. Il faut dire qu'à
la longue on développe une certaine habileté à le faire,
habileté plus particulière de l'Opposition. À
écouter récemment tout particulièrement le
député de Shefford, j'ai l'impression qu'il a déjà
réussi à bien développer cette qualité et que
probablement il risque de devenir très habile, tout au long des
années en cette Chambre, dans l'Opposition, j'espère.
M. le Président, vous me permettrez également d'indiquer
que je reconnais d'une façon générale l'appui massif, pour
ne pas dire unanime, des députés qui se sont exprimés sur
ce projet de loi, même si certains émettent quelques
réserves à l'endroit non pas du contenu du projet de loi, parce
que très peu, à part mes collègues ministériels qui
ont parlé du contenu du projet, très peu de gens de l'Opposition
nous ont parlé de son contenu... Il faut indiquer également que
certains nous ont annoncé des amendements qui pourraient être
présentés lors du comité plénier. On est
prêts à regarder cela. Je constate que, dans l'ensemble, les
propos qui ont été tenus par l'Opposition parlent plutôt du
contexte général, du climat, de l'atmosphère, de
l'armée, de l'action comme telle, du conflit ou de la crise comme telle
qui a sévi dans la région de Châteauguay plus
particulièrement, mais très peu du contenu de la loi. (16 h
10)
Je comprends la prudence de l'Opposition qui est très
certainement bien informée de l'appui massif de la population
régionale, de tous les maires en particulier et de la MRC de Roussillon
au projet de loi spécial déposé ici en cette Chambre, et
plus particulièrement à l'intention du gouvernement du
Québec d'intervenir rapidement et avec efficacité pour la
reconstruction du tronçon de l'autoroute 30 dont il est question et qui
est visée dans le projet de loi 82.
Donc, vous me voyez réjoui de cette attitude positive dans le
contexte dans lequel nous vivons. Je suis persuadé que les minutes qui
nous attendent en comité plénier nous permettront de voir avec
davantage de détails toutes les précautions que prend le
gouvernement du Québec et en particulier le ministère des
Transports afin de s'assurer qu'on puisse donner suite et qu'on puisse
appliquer cette loi si indispensable afin de donner aux citoyens de la grande
région de Châteauguay une route attendue depuis fort longtemps. On
pourrait longtemps parler du pourquoi des attentes que l'on a dans certains
dossiers.
J'aurais aimé pouvoir - probablement que si le
député de Lévis avait été là, on
aurait fait une bonne partie du débat là-dessus - connaître
le contexte budgétaire qui nous mène dans certains dossiers
à retarder les échéanciers face au contexte
budgétaire que nous a légué le gouvernement
précédent, dans un contexte qui se redresse avec le dernier
budget du ministre des Finances qui vient injecter des fonds additionnels au
ministère des Transports, sur une base maintenant quinquennale, avec un
budget de base qui nous permettra de donner suite à plusieurs projets et
de répondre, je vais l'ajouter, favorablement à de nombreuses
demandes qui nous parviennent tant des députés de l'Opposition
que des députés ministériels. Je pense en particulier au
député de Laviolette qui a défendu avec beaucoup
d'intérêt sa région. Je vais immédiatement lui
indiquer qu'il n'est pas le seul en cette Chambre à avoir des besoins
considérables dans le domaine des transports. J'ose espérer qu'on
pourra, dans sa région comme dans d'autres, intervenir de façon
favorable au cours des prochains mois, des prochaines années.
Le leader de l'Opposition et député de Joliette a
annoncé son intention de proposer en comité plénier
l'ajout en particulier d'un préambule au projet de loi, faisant
état de la situation de crise à laquelle le projet de loi se veut
une réponse. J'ai regardé ça tantôt avec attention.
On le regardera avec plus de détails tantôt en comité
plénier. Dès à présent, cependant, j'inviterais
l'Opposition à évaluer juridiquement les effets d'un tel
préambule sur l'interprétation des autres dispositions que
ça pourrait avoir sur la loi que nous présentons. Nous voulons
que la loi qui est devant nous s'applique et que, juridiquement, elle
prête le moins possible le flanc à la contestation ou à
l'interprétation. Cela dit, M. le Président, je me réjouis
de l'appui massif que l'on reçoit face à notre projet de loi
spécial et je vous convie maintenant en comité plénier
pour l'étude article par article.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre.
Est-ce que la motion du ministre délégué aux Transports
proposant l'adoption du principe du projet de loi 82, Loi concernant la
construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et
Sainte-Catherine, est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Pagé: m. le président, je fais motion pour que
la chambre se transforme en comité plénier pour l'étude du
projet de loi, article par article.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion du
leader du gouvernement est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors,
cette Assemblée se transforme en commission plénière.
(Suspension de la séance à 16 h 15)
(Reprise à 16 h 19)
Commission plénière Étude
détaillée
M. Cannon (président de la commission plénière):
À l'ordre, s'il vous plaît! Nous sommes effectivement en
commission plénière pour étudier le projet de loi 82. Je
rappellerai aux intervenants que, tel qu'il a été stipulé
ce matin par ordre de la Chambre, la commission plénière a une
durée de deux heures. Alors, pour ce qui est des remarques
préliminaires, je vais maintenant entendre le ministre
délégué aux Transports. M. le ministre.
M. Vallières: Oui. M. le Président, j'aimerais que
l'on aborde immédiatement l'article 1 de ce projet de loi. Je ne sais
pas si la coutume veut que vous le lisiez et que par la suite nous en
discutions...
Le Président (M. Cannon): M. le leader de l'Opposition,
remarques préliminaires.
M. Chevrette: Je n'ai pas de remarques préliminaires moi
non plus. Je pense qu'on a abondamment discuté, au niveau du principe,
et on a dit ce qu'on pensait de la situation. Cependant, j'ai une question
d'ordre technique. Étant donné que j'ai avancé la
possibilité d'un amendement dans le préambule, est-ce qu'on
touche immédiatement au préambule, ou si on y vient à la
fin? C'est juste technique. Je veux savoir.
Le Président (M. Cannon): M. le leader de l'Opposition, la
jurisprudence, à l'égard de la présentation d'une motion
préliminaire au niveau du préambule... Je cite l'article 244, au
niveau de l'étude détaillée d'un projet de loi, et je cite
la décision du président Richard, le 9 décembre 1986. Je
vous mets en contexte. Avant d'entreprendre l'étude de l'article 1, un
député de l'Opposition propose d'ajouter un préambule au
projet de loi public. Alors, restait à savoir si cette motion
préliminaire était recevable.
La décision qui a été rendue était à
cet effet que la motion était irrecevable, puisque lorsqu'un projet de
loi public contient un préambule, ce dernier doit être
étudié après tous les articles du projet de loi et avant
l'étude du titre. Dès lors, une motion proposant de joindre un
préambule à un projet de loi public qui n'en contenait pas
à l'origine est irrecevable.
M. Chevrette: Je m'en doutais bien, M. le Président, mais
c'était une façon de rappeler que j'avais un amendement sur le
préambule.
Le Président (M. Cannon): Alors, est-ce qu'on est
prêts à commencer avec...
M. Chevrette: Article 1.
Le Président (M. Cannon): ...l'article 1?
M. Vallières: Oui.
Le Président (M. Cannon): Alors, s'il y a consentement, je
peux faire la lecture ou si vous le jugez bon, vous pouvez...
M. Chevrette: Moi, je n'ai pas d'objection. Pour les fins du
procès-verbal, en tout cas, je pense qu'étant donné que le
ministre m'a annoncé que les motifs étaient d'ordre assez
technique, personnellement, je ne détesterais pas, étant
donné que c'est technique, qu'ils soient lus, pour qu'on puisse les
consigner également aux procès-verbaux.
Le Président (M. Cannon): Alors, s'il y a consentement de
part et d'autre, je vais procéder à la lecture de l'article 1.
Donc, le Parlement du Québec décrète ce qui suit à
l'article 1: "Le ministre des Transports est autorisé à
construire ou à faire construire un tronçon de l'autoroute 30
reliant la route 138 à Châteauguay et la route 132 à
Sainte-Catherine et peut exercer, pour cette route, les pouvoirs
énumérés aux paragraphes 1° à 5° de
l'article 10 de la Loi sur la voirie (chapitre V-8 des Lois refondues du
Québec)." M. le ministre.
M. Vallières: M. le Président, cette disposition
énonce le champ d'application du projet de loi qu'il convient de
préciser, particulièrement en raison de son caractère
exceptionnel. De plus, elle confère au ministre des Transports, en
regard de ce champ d'application, l'autorisation nécessaire pour agir.
Voilà, en résumé, M. le Président, la justification
du présent article.
Le Président (M. Cannon): M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, quand je lis que c'est pour
relier un tronçon de l'autoroute entre les deux routes, 132 et 138,
est-ce que, de facto, - je pose la question pour être bien certain que
j'ai compris - ça inclut les travaux en ce qui regarde l'accès
à cette autoroute?
Le Président (M. Cannon): M. le ministre.
M. Vallières: Là, ça va me prendre des
précisions. Je ne sais pas si vous faites allusion actuellement à
ce que plusieurs ont qualifié de bretelle entre une section qui est
située plus particulièrement dans Mercier, qui donnerait
accès au boulevard Ford en particulier. Oui, effectivement - je
l'annonçais tantôt dans mon allocution sur l'adoption du principe
de la loi - nous prévoyons intervenir rapidement, peut-être
même plus rapidement sur ce tronçon
où, si tout allait bien, nous pourrions débuter les
travaux dès la semaine prochaine. Alors...
M. Chevrette: J'avais...
M. Vallières: ...ça confirme ce dont vous venez de
me parler.
M. Chevrette: Mais dans la description technique, quand vous
parlez du tronçon de l'autoroute entre 132 et 138, est-ce que vous vous
donnez les pouvoirs... Est-ce que c'est suffisamment large, suffisamment vaste
pour inclure tous les travaux de relais ou de bretelle ou, appelons ça
comme on voudra, de liaison?
M. Vallières: Oui, tous les travaux qui sont situés
sur le corridor de notre autoroute effectivement, c'est prévu.
M. Chevrette: Question. Les travaux que vous annoncez pour la
liaison, qui ne faisaient pas partie de la première déclaration
que vous avez déjà faite en ce qui regarde le tronçon de
l'autoroute, est-ce que ce sont des travaux conformes aux directives, aux
normes en usage ou si ce sont des travaux en régie?
M. Vallières: Ces travaux, afin de s'assurer qu'on puisse
intervenir rapidement et compte tenu aussi de la nature des travaux qui, au
départ, lors des discussions que j'ai eues avec, en particulier, les
maires de la MRC de Roussil-lon, devaient être des travaux de nature
temporaire qui étaient, à ce moment-là,
évalués à quelques centaines de milliers de dollars, et
qui vont maintenant être des travaux de nature permanente.
C'est-à-dire que les travaux qu'on va effectuer cette année, ce
n'est pas de l'argent perdu, ce sont des travaux qui, de toute manière,
auraient été effectués l'an prochain. Alors, c'est donc
indiqué qu'on procédera cette année et les travaux seront
effectivement effectués en régie. C'est donc dire que c'est le
ministère des Transports du Québec qui, lui-même,
effectuera ces travaux ou les fera faire par des entreprises, en vertu du
manuel des charges qu'on connaît.
Le Président (M. Cannon): Alors, est-ce que l'article 1
est adopté?
M. Chevrette: Non.
M. Lazure: Non. M. le Président.
M. Chevrette: L'amendement.
Le Président (M. Cannon): Oui, je m'excuse, M. le
député de...
M. Lazure: Avant de formuler l'amendement que j'ai à
présenter, on m'a informé tout à l'heure... Le maire
Lazure de la ville de Mercier, qui est présent ici, dans les galeries,
m'informait que, techniquement parlant, dans l'article 1, quand on dit:
"...reliant la route 138, à Château-guay, et la route 132,
à Sainte-Catherine", il semble que la partie de la 138, à cet
endroit-là, n'est pas dans Châteauguay, mais bien dans la ville de
Mercier. C'est une information très technique, mais je pense que le
maire de Mercier est la personne la mieux placée. Le maire de
Châteauguay était là aussi et les deux concouraient pour
dire que la partie de 138 en question est située véritablement
dans la ville de Mercier. Alors, si tel est le cas, il faudrait peut-être
le corriger dans la version finale du projet.
M. Chevrette: II faut faire un amendement.
M. Lazure: Alors, si tel est le cas, je propose
l'amendement...
M. Chevrette: On va poser la question différemment.
M. Lazure: Je vois que le ministre est en train de
vérifier avec ses adjoints si l'affirmation du maire de la ville de
Mercier est véridique, oui ou non.
M. Vallières: L'information qu'on me donne est à
l'effet que la section qui est visée est située dans la
municipalité de Châteauguay...
M. Lazure: Alors, écoutez, si tel est le cas...
M. Vallières: ...selon la carte que j'ai à ma
disposition.
M. Lazure: ...je laisse tomber l'amendement. L'amendement que je
veux proposer est le suivant. Ça viendrait, si vous voulez, modifier,
par l'insertion, après l'article 1, de l'article suivant: "Le
gouvernement doit tout mettre en oeuvre, sur le plan des ressources
financières, humaines et matérielles, afin que le ministre puisse
compléter les travaux de construction de ce tronçon d'autoroute
d'ici le 31 décembre 1990." Je m'explique.
Le Président (M. Cannon): Simplement pour avoir une copie,
s'il vous plaît, M. le député de La Prairie.
M. Lazure: Oui.
M. Chevrette: M. le Président, il y a une question
toujours technique. Je suppose que, si on dit l'article 1.1, on doit adopter
l'article 1 avant et y aller, après, sur une complémentaire.
Le Président (M. Cannon): C'est exact.
M. Chevrette: Donc, moi, l'article 1, je
veux y revenir, dans ce cas-là.
Le Président (M. Cannon): Oui.
M. Chevrette: Est-ce qu'on a la certitude que c'est Mercier ou
c'est Châteauguay? On dit qu'on a des informations que... Mais c'est
sérieux, ça. Si on arrive avec une législation et si on
n'est pas dans fa bonne paroisse, vous savez ce que ça fait,
juridiquement. Moi, je veux avoir la certitude, avant de voter l'article 1, que
c'est bien ou dans Mercier ou bien dans Châteauguay.
Une voix: C'est dans Mercier.
M. Lazure: c'est dans mercier. alors, les maires le disent, ils
sont là, m. le ministre. les deux maires en question sont là,
alors, ils doivent le savoir.
M. Vallières: Ce qu'on va faire, dans les minutes qui vont
suivre, on pourra le vérifier de façon...
M. Chevrette: Donc, je propose...
M. Vallières: Je pense que c'est important qu'on le
sache.
M. Chevrette: ...qu'on le mette en suspens.
Le Président (M. Cannon): Oui. Et je pourrais vous
indiquer également, M. le ministre, que, si vous le désirez, je
ne vois aucune espèce d'objection à ce que MM. les maires ou les
représentants viennent s'asseoir ici et vérifier la carte avec
vous.
M. Chevrette: Pas d'objection.
Le Président (M. Cannon): Alors, tel que demandé,
on va suspendre peut-être deux ou trois minutes afin... Non?
M. Chevrette: Non. On pourrait suspendre l'article et les
vérifications pourraient se faire. Et on reviendra à l'article
1...
Le Président (M. Cannon): Oui, d'accord. M. Chevrette:
...au moment où...
Le Président (M. Cannon): Alors, l'article 1 est suspendu.
Donc, nous allons porter nos discussions sur l'amendement
présenté par M. le député de La Prairie qui devient
l'article 1.1. (16 h 30)
M. Lazure: Deux mots d'explication sur l'amendement, M. le
Président. La raison pour laquelle on a été
convoqués à cette session spéciale, c'est le
caractère urgent, le caractère de crise qui fait que, pour
construire ce tronçon, le gouvernement doit mettre en veilleuse ses lois
habituelles dans quatre secteurs, si vous voulez: la Loi sur la qualité
de l'environnement, la Loi sur la protection du territoire agricole, la Loi
concernant l'expropriation et, la quatrième n'étant pas une loi
mais une pratique, la pratique des appels d'offres publics.
Nous avons dit tantôt que nous comprenions cette situation de
crise, cette situation d'urgence et, par conséquent, nous votons pour le
projet de loi et nous acceptons que le Conseil des ministres, le 15 août
dernier, ait passé un décret qui disait, justement à cause
de l'aspect de crise: On doit mettre de côté les quatre
procédures, dont je viens de parler.
Avec ce point de départ, cette prémisse qu'il s'agit d'une
situation de crise, donc d'une situation urgente, il me paraît tout
à fait normal que dans l'article 1 on mette une date quelconque. Si le
31 décembre paraît irréaliste, qu'on nous le dise, qu'on
nous le fasse comprendre et ça pourrait être le mois de janvier,
mais il nous paraît normal de mettre une date parce que, si l'article 1
reste vague comme ça, sans échéance précise, bien,
à notre avis, ça enlève le caractère de crise et le
caractère d'urgence de tout le projet de loi. Autrement dit, si on est
pour laisser au ministre le soin de bâtir ce tronçon de 12,5
kilomètres au rythme qu'il voudra bien utiliser, bien, à ce
moment-là, ça entre en contradiction avec l'hypothèse de
base qu'il s'agit d'une situation critique, qu'il s'agit d'une situation
d'urgence.
Alors, M. le Président, pour tous ces motifs-là, nous
pensons qu'il est important qu'une date soit retenue et nous proposons le 31
décembre 1990. D'ailleurs, le ministre a toujours parlé de
décembre, avant la fin de l'année 1990. Il nous apparaît
important, donc, d'avoir cette date-là pour l'ensemble du tronçon
de 12,5 kilomètres.
Le Président (M. Cannon): M. le ministre.
M. Vallières: M. le Président, je loue les bonnes
intentions du député de La Prairie. Il comprendra cependant,
comme moi... Je partage les objectifs, j'y souscris volontiers, qu'il
aimerait... J'ai déjà indiqué que mon intention
était de procéder dans les meilleurs délais au cours de la
présente année. On a même réservé des sommes
égales à 10 000 000 $ afin d'intervenir cette année en
priorité sur un tronçon originalement de 8,5 kilomètres
auquel on vient d'ajouter une autre section afin de pouvoir être
relié par le boulevard Sainte-Marguerite au boulevard Ford.
C'est donc dire que celui qui vous parie a l'intention de tout mettre en
oeuvre au plan des ressources humaines, matérielles et
financières, comme le dit d'ailleurs ce que vous proposez comme
amendement, mais, malheureusement, je dois vous indiquer que le type de
proposition que
vous faites ressemble beaucoup plus à une motion qu'à un
amendement que l'on doit retrouver à l'intérieur d'un projet de
loi. Je trouve aussi énormément dangereux, et vous allez me
comprendre parce que vous avez aussi fait des lois à l'époque,
comme ministre, de coucher officiellement dans un article de loi une date
finale pour la construction d'un tronçon routier. Avec tous les
imprévus que comportent pareils travaux, je pense que ça ne
serait véritablement pas prudent de procéder de la sorte.
J'apprécie, par ailleurs, cette proposition d'amendement du
député, même si je pense qu'elle n'est pas recevable parce
qu'elle attire, à tout le moins, l'attention sur la volonté du
législateur et, je vous le répète, cette volonté de
procéder dans les plus brefs délais possible et de tout mettre en
oeuvre pour que, au cours de la présente année, les
tronçons dont on parle soient entièrement
complétés, tel que nous l'avons annoncé.
Mais, à ce moment-ci, je veux vous indiquer que je ne pense pas,
à la face même de l'amendement que vous proposez, qu'il soit
recevable et qu'il soit intégré dans un projet de loi. De toute
manière, s'il était jugé recevable, je veux vous indiquer
que je ne partage pas le point de vue de l'intégrer comme tel à
l'intérieur du projet de loi que nous présentons ici
aujourd'hui.
Le Président (M. Cannon): Au fait, simplement pour
clarifier, M. le ministre, quant à moi, cet amendement-là, il est
bel et bien recevable. Alors, M. le député de...
M. Lazure: Juste une dernière remarque avant qu'on puisse
passer au vote peut-être, puisqu'il semble bien que le ministre n'est pas
disposé à l'accepter, cet amendement qui paraît fort
raisonnable. . Je lui rappelle que l'amendement ne dit pas que le
tronçon doit être terminé le 31 décembre.
L'amendement, lisez-le bien, M. le ministre, dit que le gouvernement doit tout
mettre en oeuvre. S'il s'avérait que c'est humainement impossible, on
comprendra. Tout le monde va comprendre, y compris la députée de
Chome-dey, tout le monde va comprendre qu'il s'agit de tout mettre en oeuvre
sur le plan des ressources financières, humaines et matérielles.
C'est ça que l'amendement dit. Il ne faut pas lui faire dire ce qu'il ne
dit pas.
Le Président (M. Cannon): M. le ministre.
M. Vallières: M. le Président, l'amendement dit
également qu'il faut que le ministre puisse compléter les travaux
de construction du tronçon de l'autoroute d'ici le 31 décembre
1990. Alors, moi, je veux simplement vous indiquer que je ne prendrai pas le
risque de placer de pareils amendements à l'intérieur d'un projet
de loi, compte tenu de tous les différents imprévus qu'on peut
rencontrer sur un chantier de construction: l'élément
température, entre autres, et bien d'autres facteurs qui ne sont pas
sous le contrôle du ministère des Transports. Ce qui est sous
notre contrôle, c'est la volonté ferme de procéder dans les
meilleurs délais, et je pense que les moyens, tous les moyens, toute
cette série de moyens que l'on retrouve à l'intérieur de
notre projet de loi démontre non seulement la volonté mais le
sérieux du ministère des Transports, qui se donne mais alors tous
les moyens possibles et imaginables pour être sur le terrain dans les
plus brefs délais et réaliser ce tronçon d'autoroute.
Le Président (M. Cannon): M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, je dois vous dire que je ne
comprends pas l'argumentation. L'amendement vise à officialiser, dans un
cadre très exceptionnel, une volonté politique claire, sans
équivoque, de réaliser le tout pour le 31 décembre. Il ne
dit pas que les travaux doivent être terminés, mais que l'on doit
prendre tous les moyens pour qu'ils soient terminés. Refuser d'inclure
cette volonté politique dans le projet de loi...
Une voix: II n'y a plus d'urgence.
M. Chevrette: ...signifie, à mon point de vue, par le
rejet de cet amendement, purement et simplement, qu'on va le réaliser,
mais qu'on n'est pas prêt à dire qu'on prendra tous les moyens.
Ça m'apparaît dangereux. On n'est pas dans le cadre normal de
législation. On a convoqué l'Assemblée nationale d'une
façon tout à fait extraordinaire pour voter une loi sur une
autoroute et on n'est pas prêts à accepter de mettre tous les
moyens en oeuvre pour qu'elle se réalise. Moi, je vous avoue, M. le
Président, que mon latin, je l'ai perdu. Je voudrais qu'on me dise
carrément comment on peut dire qu'il y a une volonté politique
très ferme et refuser du même souffle de prendre tous les moyens
pour le faire. Il y a quelque chose que je ne comprends pas et que je voudrais
qu'on m'explique.
Le Président (M. Cannon): M. le ministre.
M. Vallières: M. le Président, je pense que la
seule convocation de l'Assemblée nationale aujourd'hui témoigne
de notre intention de procéder rapidement. L'amendement qui est
proposé, à mon humble avis, constitue tout simplement un
énoncé politique, un objectif. Pour moi, il ne s'agit pas
là d'un article législatif. J'ai de la difficulté à
voir comment on peut intégrer ça dans un projet de loi. Il s'agit
là, selon moi, purement et simplement, d'une déclaration
d'intention. C'est bon dans les discours, remarquez, mais pas dans un projet de
loi, à mon humble avis. Donc, je suis, évidemment, contre cet
amendement.
Le Président (M. Cannon): Yes, M. le député
de Westmount.
M. Holden: M. le Président, j'arrive un peu en retard,
mais je lis l'amendement comme le leader de l'Opposition officielle. Il n'y a
rien de forçant dans l'amendement. Ce n'est qu'une déclaration
d'intention du gouvernement. Il n'y a rien qui empêche un
législateur de dire qu'il a l'intention de compléter ce qu'il
commence pour une certaine date. Il n'y a rien dans la loi non plus qui dit
qu'il y a des amendes ou quoi que ce soit si on n'arrive pas à faire
compléter la route. Mais quand même, M. le Président, quand
on est ici en plein été à cause d'une crise incroyable, on
veut faire quelque chose pour essayer de régler cette crise. Le
gouvernement n'a pas le courage de dire: Oui, on va la compléter pour
telle date. Essayons de compléter ça pour une date fixe. Je
trouve que, forcément... D'abord, l'amendement est non seulement tout
à fart acceptable, mais le gouvernement devrait avoir ça dans la
loi. Il devrait être content de l'avoir dans la loi, pour qu'il puisse
dire au contracteur: Écoutez, la loi dit que le 31... Qu'est-ce que vous
faites là? Alors je suis tout à fait en faveur de cet amendement,
M. le Président.
M. Chevrette: M. le Président... (16 h 40)
Le Président (M. Cannon): M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: ...plus encore, je voudrais ajouter, le fait de
refuser d'introduire cette volonté, de l'officialiser, peut être
interprété, très clairement, M. le Président, comme
un somnifère à court terme. On vous endort. On vous dit qu'on va
la faire, mais on refuse de l'écrire. Moi, je m'excuse, mais il n'y a
pas de sanction, comme le disait le député de Westmount, il n'y a
aucune sanction, mais on vous dit: Vous avez déplacé les
parlementaires. Vous les avez convoqués à une séance
extraordinaire. Vous dites, au niveau du discours, que vous voulez
réaliser avant le 31, mais vous refusez d'incorporer à votre
projet de loi l'officialisation de cette volonté politique qui peut
devenir même intéressante et une arme pour le ministre des
Transports. Parce que s'il n'a pas l'argent, il va être obligé de
dire: Écoutez, je m'excuse, mais je me suis lié dans une
déclaration officielle incluse dans le projet de loi à l'effet
que je veux le réaliser. La, le lendemain matin, on va retourner
à Châteauguay. Et ça "voudrait-u" dire que le 1er
décembre les travaux arrêtent et qu'ils recommenceront au mois de
janvier, mars, pour toutes sortes de raisons? Il n'y a rien qui l'oblige
à les finaliser ou à les continuer. Il n'a même pas
à prouver sa bonne foi. Il n'a même pas à prouver sa bonne
foi si les travaux sont arrêtés ou discontinués ou... On ne
force pas les gens à le faire. Moi, je pense très clairement que
c'est un test de bonne foi. C'est un test de bonne foi. Si le ministre n'est
pas capable de se lier sur un amendement qui l'aide auprès du
Trésor, qui l'aide auprès des contracteurs et qui rassure aussi
la population... Vous avez convoqué pour aider à un
dénouement de crise et vous n'êtes même pas capable
d'écrire que votre objectif, c'est de finir à telle date. Et
ça, ça m'apparaît très, très faible.
Le Président (M. Cannon): Alors, s'il n'y a aucun autre
intervenant, nous allons passer à la mise aux voix de l'article 1.1. M.
le ministre, avez-vous une réaction?
M. Vallières: Non, M. le Président, j'ai
déjà fait mon point là-dessus. Le présent projet de
loi se veut le plus précis possible. Et ce qu'on veut mettre à
l'intérieur d'un projet de loi, ce sont des règles
précises. C'est ce qu'il contient. Je n'ai pas l'intention d'y mettre
des intentions comme celles qui sont soulignées ici. Ce qui
n'enlève en rien à la volonté très ferme du
gouvernement de procéder dans les plus brefs délais, de donner
suite. Et, pour ce qui est des 10 000 000 $ qui sont nécessaires, j'ai
immédiatement... Le député de Joliette sait pertinemment
bien que quand le Conseil des ministres a approuvé le projet, il y avait
dans les coffres les fonds requis pour y donner suite.
Le Président (M. Cannon): Alors, nous allons donc passer
à la mise aux voix de l'article 1.1. Je le relis: "Le gouvernement doit
tout mettre en oeuvre sur le plan des ressources financières, humaines
et matérielles afin que le ministre puisse compléter les travaux
de construction de ce tronçon d'autoroute d'ici le 31 décembre
1990." Est-ce que cet amendement est adopté?
M. Chevrette: Adopté. Une voix:...
Le Président (M. Cannon): Contre. Donc, sur division.
Des voix: Rejeté.
Le Président (M. Cannon): Rejeté, pardon. Alors,
est-ce que nous sommes prêts à revenir à l'article 1?
Est-ce que des clarifications sont apportées?
M. Chevrette: Avez-vous de l'information? Donc, il faudrait qu'il
y ait un amendement formel, je suppose.
M. Vallières: Effectivement, les travaux qu'on
prévoit faire en régie, dont on parlait au tout début, sur
une section de deux kilomètres
afin de permettre le lien avec le boulevard Ford, sont situés
dans la municipalité de Mercier et Châteauguay, à
l'extrémité est près du boulevard Sainte-Marguerite.
M. Chevrette: Vous proposez quel type d'amendement pour vous
rendre conforme?
Le Président (M. Cannon): On peut poursuivre avec la
suspension, toujours, de l'article 1. Je pense qu'on...
M. Chevrette: On est prêt.
Le Président (M. Cannon): Oui, voilà. Mais il nous
faut un amendement effectivement à la table.
M. Chevrette: Donc, on peut le suspendre à nouveau?
Le Président (M. Cannon): Oui. Et à noter qu'il y a
eu un certain progrès fait de ce côté-là.
Une voix: Ah oui.
Le Président (M. Cannon): À l'article 2, 2.1: "Le
ministre peut acquérir à l'amiable ou par expropriation,
même sans l'autorisation du gouvernement: "1° tout immeuble ou droit
réel immobilier, y compris les servitudes visées à
l'article 12 de la Loi sur la voirie, qu'il juge nécessaire en vue de la
construction du tronçon de l'autoroute 30 ou en vue de l'exercice, pour
cette route, des pouvoirs énumérés aux paragraphes 4°
et 5° de l'article 10 de cette loi, du rétablissement de la
situation de terrains morcelés, du déplacement de constructions
ou de la réduction du coût d'acquisition de l'emprise."
M. le ministre.
M. Vallières: Oui, vous pourriez lire tout l'article, M.
le Président, et je vais y revenir.
Le Président (M. Cannon): Est-ce que ça va? Oui? On
peut continuer? Alors, "2° tout immeuble ou droit réel immobilier
qu'il juge nécessaire à la relocalisation des lignes, postes de
transformation ou tout autre équipement pour le transport ou la
distribution d'électricité appartenant à
Hydro-Québec et situés sur le tronçon à construire
ou à proximité de celui-ci; "3° tout immeuble situé
entre le tronçon à construire et la réserve de Kahnawake
ainsi que tout droit réel grevant un tel immeuble. "L'acquisition
à l'amiable ou par expropriation peut porter sur des biens meubles
lorsqu'ils sont des accessoires de l'immeuble à acquérir."
M. Vallières: M. le Président, le premier
alinéa accorde au ministre des Transports l'autorisation de
procéder à l'acquisition des biens visés aux paragraphes
premier et troisième en procédant à l'amiable ou par voie
d'expropriation, et ce, sans être tenu d'obtenir un décret, de
façon à réduire au maximum les délais. Il est
nécessaire d'utiliser l'expression "même sans l'autorisation du
gouvernement" parce que les expropriations commencées avant l'adoption
du projet de loi l'ont été avec autorisation. Dans le cadre des
expropriations faites en vertu de la loi spéciale, comme cette loi
écarte l'article 36 de la Loi sur l'expropriation qui prévoit une
autorisation, il faut mentionner que le ministre peut procéder sans
autorisation.
Il convient de spécifier que les immeubles ou droits réels
immobiliers pouvant être expropriés sont ceux nécessaires a
la construction du tronçon de l'autoroute 30 et qu'à cette fin le
ministre peut également exercer tous les pouvoirs
énumérés aux paragraphes 4° et 5° de l'article 10
de la Loi sur la voirie ainsi qu'à l'article 12, lequel porte sur les
servitudes.
Au second paragraphe, en raison de la nécessité de
réduire au maximum tous les délais, il convient d'accorder au
ministre des Transports le pouvoir d'acquérir tous les immeubles
nécessaires aux fins de relocaliser les lignes d'Hydro-Québec qui
se trouvent sur le tracé même du tronçon projeté. Le
projet prévoit, à l'article 3, que le ministre devra, par la
suite, mettre à la disposition d'Hydro-Québec les biens ainsi
acquis.
Au troisième paragraphe, comme les terres situées entre le
tronçon projeté et la réserve indienne ne sont pas
nécessaires à la construction du tronçon, il
s'avère essentiel d'accorder au ministre des Transports le pouvoir de
les exproprier, de même que tout droit réel pouvant grever ces
immeubles, de façon à pouvoir s'assurer, par l'octroi de baux ou
autrement, de la continuation d'activités agricoles sur ces
résidus.
Le dernier alinéa, enfin, vise le pouvoir prévu à
l'article 38 de la Loi sur l'expropriation qui est requis dans le projet de loi
en raison du deuxième alinéa qui, lui, exclut le titre II de la
Loi sur l'expropriation, dont l'article 38. De plus, comme le premier
alinéa prévoit l'acquisition d'immeubles et de droits
réels immobiliers, il y a lieu d'étendre également ce
pouvoir d'acquisition à l'amiable aux meubles.
Le Président (M. Cannon): M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: Sur le paragraphe 1°, le ministre a lu dans son
commentaire "pour les travaux nécessaires à la construction du
tronçon". Est-ce que ce pouvoir ne serait pas aussi important et
indispensable pour la bretelle, ou si vous ne vous donnez pas les pouvoirs
d'expropriation au niveau de la bretelle?
M. Vallières: La bretelle à laquelle fait
allusion le député de joliette est située sur le
tronçon de la route. ça fait partie de l'autoroute comme telle.
donc, la question ne se pose pas parce que...
M. Chevrette: Vous n'avez besoin d'aucune expropriation pour
réaliser les liaisons?
M. Vallières: Non, non. On donne sur une route
déjà existante.
M. Chevrette: Non, c'est parce que vous aviez
spécifié dans votre exposé "tronçon". Je craignais
qu'il ne pourrait y avoir des expropriations...
M. Vallières: Non.
M. Chevrette: ...pour bien faire le raccordement et donc, on
n'aurait pas eu de pouvoir en ce qui regarde le raccordement. C'est ça
qui me...
M. Vallières: Non, on a pris nos précautions de ce
côté.
M. Chevrette: C'est de ça que j'avais peur.
M. Lazure: Sur le paragraphe 2° concernant
Hydro-Québec, est-ce que le ministre pourrait nous donner un peu plus de
détails, l'ampleur de ce qui devra être relocalisé?
M. Vallières: En fait, ce sont quelques tours
d'Hydro-Québec et postes de transformation. C'est un déplacement
mineur...
M. Lazure: Mineur?
M. Vallières: Mais ils sont actuellement dans le
tracé de l'autoroute, ce qui fait qu'on devra les relocaliser et c'est
le ministère des Transports qui le fera, qui expropriera et le tout
sera, par la suite, remis à Hydro-Québec.
M. Chevrette: Les meubles. Donnez-moi donc un exemple ou deux de
l'obligation d'inclure les immeubles et les meubles, pour bien faire saisir...
Parce qu'on parle d'accessoires dans le projet de loi; dans l'exposé,
vous parlez de meubles. C'est la première fois que je vois ça au
niveau d'un projet de loi. (16 h 50)
M. Vallières: On vient de me dire que là où
on va travailler, c'est surtout sur des exploitations agricoles, et que
certains équipements qui devront être expropriés sont
considérés comme étant des biens meubles.
M. Chevrette: Des quoi? Des caveaux, des... M.
Vallières: Des silos.
M. Chevrette: Des silos?
M. Vallières: On m'indique qu'un silo, peut être
considéré comme ça. On me fart remarquer qu'un silo
ça se déménage. Ça peut être
considéré comme un bien meuble. Evidemment, ce n'est pas comme
une table de cuisine, mais ça se déménage.
Le Président (M. Cannon): Est-ce que ça va pour
l'article 2? M. le ministre, est-ce que vous avez un complément de
renseignements à fournir?
M. Vallières: Non, ça va.
Le Président (M. Cannon): Oui. M. le député,
ça va? Donc, l'article 2 est adopté?
M. Vallières: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Adopté. J'appelle
l'article 3. "Le ministre peut céder, louer, échanger tout bien
construit, établi ou acquis en application de l'article 1 ou de
l'article 2 ou en disposer de la manière qu'il juge appropriée;
toutefois, il doit mettre à la disposition d'Hydro-Québec les
biens acquis en application du paragraphe 2° du premier alinéa de
l'article 2, aux conditions que détermine le gouvernement." M. le
ministre.
M. Vallières: M. le Président, les pouvoirs
prévus à l'article 3 ne sont pas nouveaux, puisqu'on retrouve une
disposition semblable au paragraphe 6 de l'article 10 de la Loi sur la voirie.
La reprise d'une telle disposition plutôt qu'un renvoi au paragraphe 6 de
l'article 10 s'avère nécessaire, compte tenu du paragraphe 3,
où le ministre doit pouvoir disposer comme bon lui semble des immeubles
limitrophes à la réserve indienne.
Quant à Hydro-Québec, qui est une société de
la couronne, on ne pouvait lui céder des biens qui, par ailleurs, sont
devenus du domaine public du fait de leur acquisition par le ministre des
Transports, d'où l'expression "mettre à la disposition
d'Hydro-Québec les biens acquis"; expression que l'on retrouve
d'ailleurs à l'article 32 de la Loi sur Hydro-Québec.
En effet, les biens d'Hydro-Québec étant des biens de la
couronne, celle-ci ne peut faire cession à elle-même de ce qui lui
appartient.
Le Président (M. Cannon): M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, moi, ici, je ne comprends
pas pourquoi le ministre se donne un pouvoir en dérogation avec les
procédures normales existant au gouvernement. L'urgence, c'est
d'exproprier pour construire une route.
Mais profiter d'une loi d'exception pour se donner un pouvoir allant en
dérogation au système en cours, je ne comprends pas l'objectif de
la loi. Je pense que, lorsqu'on veut vendre des parcelles de terrain, il y a
des procédures, il y a des appels d'offres publics, il y a des gens qui
peuvent soumissionner, on peut vendre à la meilleure offre. Mais, au
niveau de la législation, pourquoi s'approprier une procédure
qui, elle, ne crée aucune urgence, dans les circonstances? L'urgence ne
réside pas dans le fait de céder les meubles accessoires, elle
est dans la façon de construire. Je voudrais qu'on me donne les motifs,
les raisons qui font que l'on va jusqu'à mettre de côté
toutes les procédures de vente, par exemple, tous les baux de location
alors, que ça ne se justifie pas en fonction de la situation. Il y a
quelque chose qui accroche, là.
M. Vallières: M. le Président, on reconduit ici des
dispositions qui sont déjà, comme je l'ai indiqué,
contenues dans la loi. Mais compte tenu qu'on est en loi spéciale, ici,
les effets de la loi générale tombent. On a été
obligés de reconduire dans la loi spéciale les
éléments que l'on retrouve. Ce qu'on indique ici c'est que l'on
peut céder, louer, échanger tout bien ainsi établi ou
acquis, ou en disposer de la manière que l'on juge appropriée.
C'est ce qu'on retrouvait dans l'ancien article, l'article 10, à
l'alinéa 7.
M. Chevrette: Mais si c'est la reconduction, M. le ministre,
pourquoi ne dites-vous pas, purement et simplement, que l'on pourra disposer
des excédents et de tout ce qui serait en surplus conformément
à la politique du ministère? Pourquoi sent-on le besoin de mettre
une clause plus particulière, laissant au ministre une discrétion
totale, alors qu'il y a des procédures établies qui sont connues
par les gens, par les citoyens en général? Moi, personnellement,
je suis perplexe devant ce bout de phrase, parce que ça peut donner
ouverture à n'importe quoi: au changement de procédure, au
changement de formule... Le ministre s'est donné un pouvoir seul, alors
qu'il y a des procédures existantes, il y a des normes existantes, il y
a des cahiers qui font état de ça et c'est connu du public. Moi
je ne vois pas en quoi c'est relié à la loi d'exception, sinon de
prêter flanc après à n'importe quoi.
Le Président (M. Cannon): M. le ministre.
M. Holden: M. le Président, pour ajouter à ce que
le leader a dit.
Le Président (M. Cannon): Oui, si c'est sur le même
sujet, évidemment, je vais permettre votre intervention.
M. Holden: Oui. J'abonde justement, M. le Président, dans
le même sens que le leader de l'Opposition officielle parce que, à
la limite, cet article pourrait même amener quelqu'un à disposer
de ces objets ou de ces terrains sans aucune espèce de contrôle.
Et qui sait qui pourrait être acheteur. Ça pourrait amener
justement des problèmes légaux et politiques. Si je comprends
bien, ce ne sont pas des terrains qui vont empêcher que la route soit
construite. Ce sont des terrains accessoires qui vont être vendus ou
cédés. Alors, la route va procéder malgré la vente
de ces terrains-là. Est-ce que je me trompe, M. le ministre?
M. Vallières: Non, je pense que vous ne vous trompez pas,
mais je vais demander à Me Drolet, qui m'accompagne, de vous donner tous
les détails pertinents. Comme je vous l'indiquais tantôt, il y a
des technicités qui sont importantes. On se réfère
à des articles de la loi existante, qui doivent être reconduits
à l'intérieur de la présente loi. Et H y a aussi des
dispositions qui visent à donner certains pouvoirs au ministre
d'acquérir et de remise, à ces conditions, de certaines parcelles
de terrains. Je laisserai M. Drolet vous expliquer la mécanique qui
entoure ce pouvoir.
M. Chevrette: Si vous me le permettez, avant que martre...
Le Président (M. Cannon): Oui, simplement, M. le leader de
l'Opposition, pour vous aviser qu'il est clair que si M. Orolet prend la
parole, il la prend en votre nom et ça prend le consentement des membres
de la commission aussi.
M. Chevrette: Non, non, je n'ai pas d'objection.
Le Président (M. Cannon): O.K.
M. Chevrette: Je vais poser une question en tout cas plus
complète quant à donner la parole à M. Orolet pour qu'il
nous réponde. Lorsque le gouvernement acquiert par expropriation,
ça devient une propriété du ministère des
Transports. Pourquoi, à ce moment-là, les biens acquis à
cause de l'urgence ne deviennent-ils pas la propriété du
ministère des Transports et ne seraient-ils pas liquidés
conformément aux politiques, aux règles de fonctionnement
édictées par le ministère des Transports? C'est ça
que je ne comprends pas.
Le Président (M. Cannon): M. Drolet.
M. Drolet: Si vous permettez, M. le Président, à
l'heure actuelle, les biens qui sont acquis en application de la Loi sur la
voirie deviennent propriété du gouvernement, de l'État et
lorsque ces biens ne sont plus requis, l'article 7 de la Loi sur la voirie
s'applique et le ministre peut céder, louer, échanger tout bien
ainsi établi ou
acquis, ou en disposer de la manière qu'il juge
appropriée. C'est l'état actuel. Le ministre se soumet, à
ce moment-là, au règlement sur la disposition des immeubles
excédentaires.
Dans le cas présent, vous avez des pouvoirs spéciaux
d'acquisition qui sont donnés par la loi spéciale et qui nous
obligent, comme on donne ces pouvoirs spéciaux dans la loi
spéciale, à donner le même pouvoir correspondant de cession
ou de location, ou d'échange d'un bien acquis et, en particulier,
lorsque vous parlez des immeubles qui sont situés entre le
tronçon à construire, comme te dit l'article 2, et l'autoroute
30, il faut pouvoir s'assurer que ces immeubles pourront continuer d'être
utilisés à des fins agricoles, ce qu'on ne pourrait pas faire si
nous devions nous soumettre à la procédure du règlement
sur la disposition des immeubles excédentaires. De sorte que la partie
de terre qui sera acquise pourra être consentie à nouveau à
un exploitant agricole pour qu'il continue l'exploitation et c'est pour
ça qu'on a besoin du pouvoir spécial qui est donné
là et qui, encore une fois, est la répétition du
paragraphe 7 de l'article 10 de la Loi sur la voirie.
M. Chevrette: M. le Président, c'est une autre question
d'ordre technique.
Le Président (M. Cannon): Oui, M. le leader. (17
heures)
M. Chevrette: En renouvelant, en réitérant dans ce
projet de loi spécial le pouvoir normalement dévolu dans la loi
de portée générale-Dans la loi de portée
générale, tous les biens acquis deviennent assujettis à
des règles administratives et la façon de procéder,
ça peut être selon une procédure établie par le
gouvernement. Avec ce pouvoir spécial que vous donnez au ministre, qui
est peut-être indispensable pour pouvoir en disposer, pourquoi ne
dites-vous pas, cependant, que ça sera soumis aux mêmes directives
et mêmes règles que ceux que le ministère des Transports
utilise dans les cas normaux? Pourquoi ne le mettez-vous pas, d'abord?
M. Drolet: À l'heure actuelle, le pouvoir du paragraphe
7° de l'article 10 de la Loi sur la voirie est un pouvoir
discrétionnaire du ministre de disposer de la manière qu'il juge
appropriée. C'est le ministre des Transports qui a décidé
de se soumettre à la réglementation sur la disposition des
immeubles excédentaires en temps normal, mais il n'est pas obligé
de la suivre. Mais il le fait pratiquement toujours dans tous Jes cas et cette
procédure prévoit d'abord l'offre de ces immeubles
excédentaires là à certains organismes, dont des
municipalités. Or, dans le cas présent, ce qu'il est possible de
faire, ce qui est fait par le paragraphe 2° de l'article 2, c'est notamment
d'acquérir des immeubles qui seraient situés entre le
tronçon et la réserve. Mais comme il s'agit de terres agricoles
et qu'on est intéressés, par suite de la décision de la
Commission de protection du territoire agricole, qui confirme d'ailleurs qu'il
s'agit de terres arables très riches, le ministre des Transports est
intéressé à ce que ces exploitations-là ou ces
terrains-là puissent continuer à être utilisés
à des fins agricoles, il a besoin de ce pouvoir spécial là
pour non pas céder nécessairement aux municipalités mais
aux exploitants agricoles un bail pour qu'ils continuent l'exploitation.
M. Chevrette: Si je comprends bien, on demande un peu plus loin
d'être relevé des obligations, par exemple, de consulter la
population, on demande d'être relevé de l'obligation d'aller
à la CPTAQ, etc., et là, vous manifestez une intention... Dans
votre réponse, vous dites: II y a une intention de garder agricoles, par
exemple, les terres que nous nous trouverons à dézoner de par le
projet de loi. Mais si le ministre ne restreint pas dans son projet de loi
spécial, ne se limite pas à garder intactes les vocations des
terrains qu'il acquiert - avec le pouvoir de portée
générale que vous vous donnez, il peut tout faire - il pourrait
donc... Même sur les terres de Kahnawake qui ont été
achetées par les Mohawks, il pourrait très bien dire:
Dorénavant, ça ne sera pas de l'agriculture. Comme il a
l'intention de dire que c'est de l'agriculture, mais le pouvoir qu'il se donne
sans le limiter, avec la suspension des droits que vous obligez aux citoyens,
si on ne le limite pas du tout, il va pouvoir en disposer d'une façon
très discrétionnaire, comme il veut. C'est bien ça que
j'ai compris dans votre réponse?
M. Drolet: II a, de toute façon, ce pouvoir à
l'heure actuelle en vertu de la Loi sur la voirie si on n'adoptait pas une loi
spéciale.
M. Chevrette: II l'a de toute façon, mais, avant de porter
un jugement discrétionnaire libre, il serait obligé de se
soumettre à la Loi sur la qualité de l'environnement, il serait
obligé de se soumettre à la Loi sur la protection du territoire
agricole et il serait obligé de consulter la population comme telle.
Après ça, dépendant de ce que les instances lui diraient,
il aurait une pression politique sur lui de sorte qu'il ne pourrait pas faire
ce qu'il veut. Là, vous vous donnez un pouvoir discrétionnaire
illimité et on suspend en plus les mécanismes, ce à quoi
on est bien prêts à adhérer, mais vous comprendrez que le
pouvoir de portée générale que vous vous donnez, quand tu
as enlevé toutes les contraintes de gens qui auraient pu influencer le
jugement du ministre par la suite... Parce que quand vous y allez d'une
façon normale, le ministre est nécessairement influencé
dans la façon ¦ de céder les biens parce qu'il a
écouté les auditions publiques, parce qu'il y a une étude
d'impact qui
est terminée, parce que la commission de protection du territoire
agricole a négocié un tracé ou un changement de
tracé ou a proposé des choses différentes. mais là,
vous lui donnez le pouvoir de portée générale en
suspendant tout mécanisme qui pourrait dire: allez-vous, au moins, vous
lier d'ores et déjà à garder intactes toutes les parcelles
de sol agricole qui vont rester? allez-vous changer ça en du commercial?
allez-vous changer ça en du domiciliaire? tout est permis, vous me
l'avez dit. je le savais. je savais que vous répétiez le
paragraphe t de l'article 16 de la loi du ministère. je savais
ça. ce que je veux vous faire comprendre, c'est que vous
répétez un pouvoir qui, d'après moi, est essentiel en ce
qui regarde le fait de céder, mais, comme il n'y a pas eu d'audience, il
n'y a pas eu de ci, il n'a pas eu de ça, puis on les suspend, peut-on au
moins assujettir le tout à la procédure normale du
ministère des transports, qui implique un peu de monde dans le
décor, avant de procéder à vendre les biens? je comprends
que là c'est plus technique, c'est vraiment politique, mais c'est
à partir d'une politique du ministère.
M. Vallières: II importe entre autres, M. le
Président, de mentionner que, si le tracé se retrouve là
où il est présentement, dans le corridor que nous utilisons,
c'est suite à une recommandation de la Commission de protection du
territoire agricole du Québec, qui nous a demandé de nous
rapprocher au maximum de la réserve, et l'objectif que nous poursuivons,
c'est qu'au maximum on puisse conserver la vocation des terres qui sont
situées entre le tracé et la réserve. C'est l'objectif que
nous poursuivons. Maintenant, je pense que Me Drolet vous indiquait la
façon dont on va procéder pour liquider ces parcelles qui
seraient acquises, mais toujours en fonction de l'objectif de poursuite de la
vocation actuelle du territoire sur lequel on est.
Il y a l'article 15 qui va regrouper ça tantôt, qui va
recouper cette question-là également.
M. Chevrette: C'est correct. Allez-y.
Le Président (M. Cannon): Est-ce que l'article 3 est
adopté?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Adopté. L'article 4: "Les
articles 5 à 12 s'appliquent à toute expropriation
autorisée par la présente loi et pour laquelle aucun avis
d'expropriation n'a été signifié en application de
l'article 40 de la Loi sur l'expropriation (L.R.Q., chapitre E-24) avant le
(indiquer ici la date de la sanction de la présente loi). "Sauf
disposition contraire de la présente loi, le titre II de la Loi sur
l'expropriation ne s'applique pas à une telle expropriation." M. le
ministre.
M. Vallières: M. le Président, il importe par cette
disposition de s'assurer que les articles 5 à 12 du projet, en ce qu'ils
prévoient des mesures exceptionnelles, ne vont s'appliquer qu'aux
expropriations qui seront commencées à l'entrée en vigueur
de la présente loi. Aux extrémités du tronçon
projeté, des expropriations sont déjà en cours, pour
lesquelles il y a lieu de continuer d'appliquer les procédures de la Loi
sur l'expropriation. Le second alinéa, quant à lui,
prévoit l'exclusion du titre II de la Loi sur l'expropriation, puisque
les articles 5 à 12, par leur contenu souvent incompatible, se trouvent
à écarter implicitement les dispositions prévues dans ce
titre.
M. Chevrette: Combien y-a-t-il d'expropriations en cours, par
rapport à celles qui pourraient venir, en proportion?
M. Vallières: Bon, alors on m'indique qu'il y a 100
expropriations qui ont été faites sous la loi actuelle, non pas
la loi spéciale, dont 80 ont été complétées,
donc 20 qui resteraient à transiger en fonction de la loi
spéciale. La loi spéciale comme telle, que nous avons devant
nous, vise quelque 65 expropriations.
M. Chevrette: Est-ce qu'il y en a qui contestent encore le droit
d'expropriation, dans les 20?
M. Vallières: Non, il n'y a pas de contestation du droit
d'expropriation. Il y a certaines discussions pour les indemnités, par
ailleurs, et tantôt on va retoucher ça dans d'autres paragraphes
du projet de loi.
M. Chevrette: C'est beau.
Le Président (M. Cannon): Ça va pour l'article 4?
L'article 4 est donc adopté. L'article 5: "L'expropriation commence par
le dépôt, au bureau d'enregistrement de la division où sont
situés les immeubles et droits réels immobiliers à
exproprier, d'un plan général de ces biens signé par un
arpenteur-géomètre. Ce plan doit être accompagné
d'une description sommaire et d'une évaluation globale des immeubles et
droits réels immobiliers à exproprier. "La description sommaire
contient la mention des numéros de lots sur lesquels des droits sont
acquis par expropriation, la nature de ces droits ainsi que la superficie sur
laquelle porte l'expropriation. "Le ministre peut, en tout temps, modifier le
plan et les descriptions déposés; toutefois, il ne peut retirer
tout ou partie des documents déposés concernant un bien ou y
apporter d'autres modifications après le transfert de
propriété de ce bien. "une copie de tout document
déposé au bureau d'enregistrement doit être
déposée auprès de la chambre de l'expropriation de la cour
du québec." m. le ministre. (17 h 10)
M. Vallières: M. le Président, le fait d'initier la
procédure d'expropriation par le simple dépôt d'un plan
général des biens à exproprier, accompagné d'une
description sommaire et d'une évaluation globale de ces biens, a pour
effet d'éliminer tous les délais relatifs à la
signification et à la contestation de l'avis d'expropriation. Il
apparaît nécessaire, en raison des aléas reliés
à toute la procédure, même régulière,
d'expropriation, de permettre à l'expropriant de pouvoir modifier le
plan initialement déposé et même de lui permettre de ne
plus retenir le bien exproprié, pour autant que le transfert de
propriété n'ait pas eu lieu. Il s'agit ici de la procédure
de désistement à l'égard de l'expropriant qu'autorise la
Loi sur l'expropriation, mais sans qu'il soit nécessaire d'obtenir
l'autorisation de la Chambre de l'expropriation.
Quant au troisième alinéa, il va de soi que la Chambre de
l'expropriation puisse être saisie des plans, des descriptions et
évaluations des biens à exproprier en vertu du présent
projet de loi, puisqu'elle aura, cette Chambre de l'expropriation, à
fixer l'indemnité définitive.
M. Chevrette: M. le Président, je n'ai pas de
question.
M. Vallières: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Alors, ça va? Donc,
l'article 5 est maintenant adopté.
L'article 6. "Le ministre dépose, pour le compte de
l'exproprié, au greffe de la Cour supérieure du district
où est situé l'immeuble ou le droit réel immobilier
à exproprier, une indemnité provisionnelle d'au moins 70 % de
l'évaluation municipale de ce bien ou, si le ministre le juge à
propos, d'au moins 70 % de l'évaluation qu'il en a faite. "Le
protonotaire de la Cour supérieure délivre au ministre un
récépissé du document de l'indemnité
provisionnelle; le récépissé mentionne le numéro de
lot correspondant au dépôt de l'indemnité et le nom de
l'exproprié pour le compte duquel ce dépôt a
été effectué. Le protonotaire remplit en outre les
obligations prévues au premier alinéa de l'article 53.15 de la
Loi sur l'expropriation." M. le ministre.
M. Vallières: alors, le dépôt de
l'indemnité provisionnelle au greffe de la cour supérieure et la
norme de 70 % de la valeur des biens sont déjà prévu dans
la loi actuelle. toutefois, en raison de l'urgence et de l'expertise du
ministère en matière d'évaluation, il n'y aura pas lieu de
tenir compte, dans certains cas, de l'évaluation municipale qui,
parfois, en matière agricole plus particulièrement,
s'avère inférieure à celle proposée par le
gouvernement. Or, les biens visés par le présent projet sont,
pour la plupart, des terres agricoles.
La délivrance d'un récépissé par le
protonotaire s'avère d'abord une mesure de preuve qui aura aussi un
effet important, soit celui de transférer la propriété du
bien à exproprier à la couronne par le seul enregistrement de ce
récépissé. C'est pourquoi le
récépissé doit faire mention du numéro de lot, du
montant de l'indemnité provisionnelle et du nom de l'exproprié.
Enfin, il est également prévu que le protonotaire doit aussi
accomplir les obligations prévues par la loi actuelle,
c'est-à-dire celles, en l'espèce, relatives aux charges grevant
les immeubles expropriés, en particulier les taxes foncières.
Le Président (M. Cannon): Juste avant de continuer, je
demanderais aux collègues de vouloir poursuivre leur caucus à
l'extérieur de la commission plénière, parce qu'on a de la
misère à comprendre. M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, j'ai une question. Je
voudrais savoir pourquoi vous avez enlevé la notion d'évaluation
municipale qu'on retrouve dans la Loi sur l'expropriation.
M. Vallières: Un peu, comme je l'indiquais...
M. Chevrette: Parce que, dans l'avant-projet, il me semblait
qu'on était... À toutes fins pratiques, si vous décidez
que vous jugez trop cher une ferme... Vous décidez vous autres
mêmes que c'est trop cher. Vous faites faire votre évaluation
à vous. Il m'apparaH que, maintenant, les municipalités ont
toutes des rôles d'évaluation scientifiques; c'est très
sérieux. C'était un paramètre qui était connu et
qui figure dans la Loi sur l'évaluation municipale, alors que vous
l'enlevez dans le projet final.
M. Vallières: En fait, ce qu'on introduit ici, c'est une
disposition où le ministre a le choix. Il peut choisir entre
l'évaluation municipale ou celle que le ministère a
établie. La coutume ou la façon dont on procède...
L'expertise acquise par le ministère nous indique que, quand ce sont des
terres agricoles, de façon générale, ou bien la valeur
municipale est beaucoup trop réduite, ce qui fait que notre offre de 70
% ne serait pas bonne, et là, on préfère choisir celle du
ministère parce qu'elle est plus élevée, ou bien, dans
d'autres cas, pour question fiscale, la valeur de la ferme est trop forte par
rapport à sa valeur réelle. À ce moment-là, quand
arrive le versement de l'indemnité finale, si on se basait sur
l'évaluation municipale, l'exproprié devrait rembourser un
montant. Donc, on essaie plutôt d'y aller en fonction de la formule la
plus
avantageuse pour l'exproprié. C'est la raison pour laquelle on
introduit ici le double choix.
Le Président (M. Cannon): Ça va. Donc, l'article 6
est adopté? Adopté.
L'article 7. "Le ministre transmet, par la poste ou par le moyen qu'il
juge le plus approprié, un avis à l'exproprié de la
procédure d'expropriation contenant: "1° les règles de
transfert de propriété prévues à l'article 8;
"2° une demande à l'exproprié de déclarer par
écrit au ministre les noms et adresses de ses locataires, la nature, la
date, la durée et le loyer de chaque bail ainsi que les noms et adresses
des occupants de bonne foi et les conditions auxquelles ils occupent les
lieux."
M. le ministre.
M. Chevrette: M. le Président, je ne demanderai pas au
ministre de me l'expliquer, il est tellement clair, sauf que je lui demanderais
d'apporter un amendement: Qu'il écrive au moins "par poste
recommandée". Parce que, avec les problèmes qu'on peut vivre, il
me semble que c'est un minimum de s'assurer que les gens l'aient reçu.
C'est quasiment un non-sens d'écrire "poste" de même. On a assez
de problèmes, comme députés, avec la poste. Il me semble
qu'on peut comprendre ça tout de suite.
Le Président (M. Cannon): Au fait, M. le leader...
M. Chevrette: Je peux comprendre les objectifs, mais...
Le Président (M. Cannon): Si j'ai bien compris, M. le
leader, j'aurais pu m'empêcher de le lire, parce qu'il était
très clair.
M. Chevrette: Oui, effectivement. Mais je pense que, pour les
fins du procès-verbal, je comprends.
Le Président (M. Cannon): Non, non. Ça va.
M. Chevrette: Mais là...
M. Vallières: M. le Président, on serait d'accord
avec un ajout...
Le Président (M. Cannon): Oui.
M. Vallières:...qui serait "par poste recommandée
ou certifiée".
M. Chevrette: Ou certifiée. C'est correct. Le
Président (M. Cannon): O.K.
M. Vallières: Alors, nous allons faire une
rédaction.
M. Chevrette: D'accord. On va la mettre en suspens et on
l'ajoutera tantôt.
Le Président (M. Cannon): Alors, on va suspendre cet
article-là en attendant le nouvel amendement.
Une voix: Oui, oui.
Le Président (M. Cannon): Alors, on peut procéder
maintenant à l'article 8. "La couronne du chef du Québec devient
propriétaire du bien exproprié par l'enregistrement, par
dépôt au bureau d'enregistrement de la division où est
situé ce bien, du récépissé du dépôt
de l'indemnité provisionnelle et la possession de ce bien est
immédiatement dévolue au ministre."
Au cas de résistance à la prise de possession, l'article
56 de la Loi sur l'expropriation s'applique."
M. le ministre.
M. Vallières: Cet article, M. le Président,
s'inspire d'anciennes dispositions du Code de procédure civile, à
la différence que le transfert des propriétés et la prise
de possession ne peuvent être effectifs qu'après le
dépôt de l'indemnité provisionnelle et l'enregistrement du
récépissé de dépôt, de manière
à éviter de placer les expropriés dans un embarras
financier.
La propriété, étant dévolue à la
couronne, suivant le droit public, il convient de préciser qu'il s'agit
de la couronne du chef du Québec en la manière prévue dans
les autres lois. Voir article 4 de la Loi sur la Caisse de dépôt
et placement du Québec.
Au second alinéa, il importe de prévoir qu'une
résistance à la prise de possession puisse être
contestée devant les tribunaux suivant la procédure d'urgence
prévue par la loi actuelle.
M. Chevrette: J'aurais le goût de faire un long discours
sur cet article, M. le Président, parce que, ici, c'est clairement
enlever aux individus le droit de contester le droit à l'expropriation.
Mais, qui plus est, on prévoit, par exemple, que les individus ne
pourraient pas contester la légalité de cette législation
par rapport à la constitution.
On enlève tout droit de contester. C'est ce que je comprends. Le
transfert est automatique. En tout cas, c'est de même qu'on en fait la
lecture. Puis, les deux dernières lignes en haut, l'article 56, je
m'abstiendrai, pour le moment, de tout commentaire.
Le Président (M. Cannon): M. le ministre.
M. Chevrette: Parce que l'article 56, si on le connaît
bien, c'est pour empêcher que se produisent des choses qui sont en action
présentement.
M. Vallières: m. le président, on m'indique, au
niveau légal, que cet article ne vient pas enlever la possibilité
de contester le droit à l'expropriation.
M. Chevrette: Vous êtes en train de me dire, M. le
ministre... Je vais vous poser la question bien comme il faut. Êtes-vous
en train de me dire que le droit de contester l'expropriation de 30 jours est
toujours dans la loi, est toujours possible? À moins qu'on ne fasse pas
la même lecture.
M. Vallières: Non, non. Il n'y a plus de délai de
30 jours.
M. Chevrette: Donc, si on enlève le délai du droit
à l'expropriation, y a-t-il un droit de contester le droit
d'expropriation? Ça serait... Depuis quand donne-t-on 30 jours à
quelqu'un pour contester un droit et qu'on dit: Dorénavant, tu n'a plus
30 jours? Je conclus, à moins que ma méthodologie du travail
intellectuel soit à l'envers, que, si on m'enlève le
délai, c'est bien qu'on vient de m'enlever le droit. Et, à ce
moment-là, si je suivais le raisonnement encore plus loin, si je peux
contester le droit à l'expropriation, pourquoi votez-vous une loi?
M. Vallières: alors, me bilodeau, qui m'accompagne, pourra
répondre avec plus de détails. c'est un point important. je pense
qu'on doit y répondre.
Le Président (M. Cannon): Est-ce qu'on a le consentement
pour écouter Me Bilodeau?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Cannon): Oui. Alors allez, madame.
Mme Bilodeau (Anne-Marie): Alors cette disposition-là qui
vient déclarer la propriété...
M. Chevrette: Je n'ai pas compris, madame, je m'excuse.
Mme Bilodeau: ...qui vient déclarer la
propriété...
M. Chevrette: Un instant. J'entends beaucoup de "chuchotages". Je
m'excuse l'acoutisque n'est pas bon aujourd'hui dans cette Chambre.
Le Président (M. Cannon): Pourriez-vous peut-être
baisser un peu le micro devant vous, madame? Bon, voilà!
Mme Bilodeau: Alors cette disposition, qui vient déclarer
la propriété à la couronne suivant la procédure de
dépôt au bureau d'enregistrement du récépissé
du dépôt de l'indemnité provision- nelle, fait simplement
déclarer la propriété à un moment bien
précis. Ça n'empêche pas l'exproprié de contester le
droit à l'expropriation, que ce soit pour un motif de droit
administratif, de droit constitutionnel suivant les chartes des droits et
libertés. Il pourrait toujours présenter, en principe, des
recours qui sont actuellement connus, les recours extraordinaires, les actions
en nullité, pour des motifs qu'on connaît...
M. Chevrette: ...de 30 jours.
Mme Bilodeau: II n'y a pas de délai comme nous
connaissons, les 30 jours dont vous faites mention, dans la loi.
M. Chevrette: L'article 44 existe toujours? Mme Bilodeau:
Non. M. Chevrette: Donc...
Mme Bilodeau: la loi spéciale a pour effet
d'écarter le titre ii de la loi sur l'expropriation, à
l'exception des articles dont on verra plus loin qu'on les rend
applicables.
M. Chevrette: Mais si l'exproprié conserve le droit de
contester, non pas par la Loi sur l'expropriation, mais de contester par des
mesures extraordinaires - c'est ça que vous me dites, prendre une
injonction, prendre un bref ou bien en appeler devant la Cour supérieure
sur un jugement déclaratoire ou je ne sais pas trop quoi, rendant la loi
nulle et inhabile à cause de la constitution canadienne - je me demande
à ce moment-là quelle est l'utilité de faire sauter un
article par lequel, au moins, vous connaissiez d'avance la procédure qui
avait lieu. Je ne comprends pas.
Mme Bilodeau: C'est que ça nous permet quand même de
réduire les délais procéduraux. Je m'explique. Par la loi
actuelle, il en prend un minimum de 109 jours entre la signification d'un avis
d'expropriation et la prise de possession. C'est un délai minimal, si on
compute tous les délais que nous avons dans la loi. La procédure
que vous avez ici, c'est une procédure beaucoup plus réduite,
beaucoup plus simplifiée qui nous permettrait de prendre possession plus
rapidement. C'est évident qu'on ne peut pas, sur un plan strictement de
chartes prépondérantes, écarter les recours.
M. Chevrette: M. le Président, je demande une suspension
d'une minute.
Le Président (M. Cannon): Oui, nous allons suspendre pour
des questions hydrauliques.
(Suspension de la séance à 17 h 24)
(Reprise à 17 h 28)
Le Président (M. Cannon): Alors nous en étions...
M. le ministre.
M. Vallières: Nous en étions à l'article 8,
M. le Président. Me Bilodeau venait d'expliquer la justification de
l'article 8 comme tel, en réponse au député de
Joliette.
M. Chevrette: M. le Président, j'aurais une remarque. Je
comprends l'explication de Me Bilodeau, mais je dois vous dire que la loi vient
donc faire encore bien plus mal au citoyen exproprié, parce que la
procédure qui lui est offerte, c'est par la voie des tribunaux civils et
non plus par le processus d'expropriation contenu dans la Loi sur
l'expropriation. Donc, quand on allait devant le tribunal d'expropriation, le
notaire, le procureur, les évaluateurs étaient payés
à même le processus d'expropriation normal dans la loi, et
là vous laissez tout l'odieux de la contestation à l'individu,
à ses frais. Est-ce que je fais erreur?
Le Président (M. Cannon): Me Bilodeau.
Mme Bilodeau: Ce sont aussi les règles usuelles,
c'est-à-dire que la contestation d'un droit à l'expropriation,
c'est toujours présenté devant la Cour supérieure, aux
termes de la Loi sur l'expropriation, par exemple. La chambre de
l'expropriation a compétence pour fixer les indemnités et
entendre les experts, évaluateurs, arpenteurs, etc. C'est toujours aux
frais de l'exproprié, sauf en ce qui concerne l'indemnité. C'est
aux frais de l'exproprié.
Le Président (M. Cannon): M. le leader. Ça va?
M. Vallières: l'article 8, adopté, M. le
Président.
Le Président (M. Cannon): Est-ce que l'article 8 est
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Adopté. L'article 9: "Le
ministre doit, dans les 30 jours de la réception d'un avis l'informant
qu'un locataire ou un occupant de bonne foi occupe le bien exproprié,
déposer, pour le compte de celui-ci, au greffe de la Cour
supérieure du district où est situé ce bien un montant
forfaitaire équivalant à trois mois de loyer selon
l'évaluation de la valeur locative du bien exproprié faite par le
ministre, auquel peut s'ajouter, dans le cas d'une telle exploitation agricole,
commerciale ou industrielle, un montant fixé par le ministre." M. le
ministre.
M. Vallières: M. le Président, il convient de
prévoir que les locataires et occupants de bonne foi puissent aussi
être indemnisés provisoirement d'une somme forfaitaire de trois
mois dans le cas d'un bail d'habitation et, lorsqu'il s'agit d'un bail
commercial, agricole ou industriel, que l'exploitant puisse recevoir une
indemnité provisoire plus élevée en attendant que soit
fixée l'indemnité définitive.
M. Chevrette: Fixée par le ministre? Avez-vous des
explications à donner sur... Pourquoi vous vous donnez... Pourquoi
ça ne serait pas fixé par le tribunal, par exemple, si ça
va au tribunal?
M. Vallières: C'est un type d'avance, un
dépôt qui est fait officiellement. C'est un avantage dont jouit
l'exproprié et même, ici, on l'ajoute, on le prévoit pour
les locataires et les occupants de bonne foi.
La loi actuelle prévoit trois mois de loyer automatique qui sont
versés lors du dépôt sans aller au tribunal. Donc,
ça devient plus avantageux, cette proposition, parce que, en plus du
procédé que je viens de vous expliquer, compte tenu du
caractère exceptionnel, on donne une avance qui est encore plus
importante que celle généralement versée.
M. Chevrette: Si vous prenez l'article 53.13 de la loi actuelle,
quel lien faites-vous entre l'article 53.13 et votre article? Il me semble
qu'on vise à peu près les mêmes genres d'entreprises?
M. Vallières: Me Bilodeau va pouvoir compléter ma
réponse ou encore Me Michel Leclerc, qui est un spécialiste en la
matière.
Le Président (M. Cannon): Alors, pour écouter Me
Leclerc, il y a consentement. Alors, Me Leclerc, vous pouvez
procéder.
M. Leclerc (Michel): L'article 53.12 vise les baux
résidentiels; l'article 53.13 vise les commerçants, les
industries et les exploitations agricoles et ne vise pas simplement les
locataires. Il vise aussi les propriétaires. À défaut
d'entente, on va devant la chambre pour l'article 53.13. Mais, lorsqu'on a un
locataire résidentiel, en matière d'expropriation, on peut
déposer trois mois de loyer comme indemnité provisionnelle, un
montant forfaitaire équivalant à trois mois de loyer. On n'a pas
besoin de s'adresser à la Chambre de l'expropriation pour faire
ça.
M. Chevrette: À l'article 53.13, on dit: Malgré les
articles 53.11 et 53.12.
M. Leclerc (Michel): Oui, en matières commerciale,
agricole et industrielle, si on n'a pas d'entente avec ces gens-là, on
doit s'adresser
à la Chambre pour foire fixer. Actuellement, l'article 9
prévoit justement que, si on est en matières agricole,
industrielle ou commerciale, on va ajouter un montant pour ces gens-là
pour sauver les délais de la Chambre.
M. Chevrette: Je comprends. Mais il reste que là c'est un
autre pouvoir discrétionnaire que le ministre se donne alors que, dans
les mêmes types d'exploitation à l'article 53.13, vous dites:
C'est la Chambre de l'expropriation qui fixe le montant forfaitaire des trois
mois.
M. Leclerc (Michel): L'article 53.13 est d'application assez
restreinte. Il s'applique uniquement dans les cas où il n'y a pas
d'entente avec les expropriés; dans la grande majorité des cas,
il y a des ententes au niveau de l'indemnité provisionnelle. C'est
uniquement dans des cas très exceptionnels qu'on va devant la Chambre,
dans ces cas-là où il n'y a pas eu d'entente.
Le Président (M. Cannon): M. le ministre.
M. Vallières: On vient de m'indiquer ici que c'est une
mesure d'atténuation finalement. Le ministre vient bonifier ce qui
était déjà prévu, les trois mois de loyer.
M. Chevrette: Mais là il y a quelque chose qui n'est pas
clair. Dans le cas du locataire, l'article 53.12 est très clair. Je
pense qu'on peut le relire: Dans les cas du locataire et de l'occupant de bonne
foi, l'indemnité provisionnelle est un montant forfaitaire
équivalant à trois mois; c'est fixé, ça. Quand vous
tombez à l'article 53.13, malgré ça, malgré le fait
que vous ayez les articles 53.11 et 53.12, c'est dit que dans le cas d'une
entreprise spécifique, c'est la Chambre qui fixe. Quand vous
écrivez votre article 9, vous faites une amalgamation des articles 53.12
et 53.13 et vous vous donnez un pouvoir discrétionnaire sur le tout.
J'essaie de voir la logique et je ne la comprends pas.
Le Président (M. Cannon): Me Leclerc.
M. Leclerc (Michel): Ceci évite sûrement les
délais d'application. Si on avait à appliquer un article comme
53.13, il y aurait tous les délais pour s'adresser à la Chambre
de l'expropriation.
M. Chevrette: Ce n'est pas ça que vous m'avez
répondu tantôt. Vous m'avez dit que vous étiez un
spécialiste en droit. Donc, en tant que spécialiste de droit,
vous ne m'avez pas parlé de - délai dans votre première
réponse. Là, vous venez de me donner une raison, c'est les
délais. Ce n'est pas ça que je vous avais posé comme
question. Je ne vous ai pas demandé de patiner, j'ai demandé
pourquoi les articles 53.12 et 53.13 étaient d'une clarté... Dans
les cas de location, c'est le forfaitaire. Dans les cas d'une entreprise, vous
allez devant la Chambre et vous vous faites fixer. Vous voulez sauver des
délais devant la Chambre juste pour établir un quantum
provisionnel?
M. Vallières: M. le Président, Me Drolet, à
ma droite, va tenter d'éclaircir la situation. Je pense que c'est
important que le député de Joliette comprenne très bien ce
qu'on veut signifier à l'intérieur de cet article.
M. Drolet: Les règles actuelles font en sorte que, pour
les baux d'habitation, la loi fixe forfaitairement à trois mois de loyer
l'indemnité provisionnelle. Ça ne bouge pas, c'est trois mois de
loyer. Si vous avez un locataire qui a non pas un bail d'habitation, mais un
bail commercial, par exemple, qui exploite un commerce, là vous vous
prévalez de l'article 53.13 et vous allez devant la Chambre de
l'expropriation pour faire fixer l'indemnité provisionnelle, dans des
cas qui, dans la pratique, s'avèrent très rares parce que,
effectivement, l'expropriant s'entend avec l'exproprié.
Lorsqu'on prend, par exemple, un commerce, qu'on doit le
déplacer, vous comprendrez sûrement que, effectivement, il y a des
dommages beaucoup plus considérables que s'il s'agit simplement d'une
maison d'habitation. Pour vous reloger en tant que locataire, c'est plus facile
de le faire que si vous voulez reloger un commerce qui, lui, a tout son
environnement et sa clientèle. Alors, l'indemnité, à ce
moment-là, la loi actuelle prévoit qu'elle est fixée par
le Tribunal de l'expropriation. L'indemnité provisionnelle.
Pour ne pas avoir à nous présenter devant le Tribunal ou
la Chambre de l'expropriation, dans le cas où nous avons à
déplacer un commerce ou une exploitation agricole ou industrielle, en
plus des trois mois de loyer, parce que les trois mois de loyer, dans ce
cas-là, c'est une somme insuffisante pour couvrir les dommages ou les
déboursés immédiats du locataire, nous prévoyons
l'addition d'un montant additionnel qui sera déterminé par le
ministre plutôt que par la Chambre, parce que le ministre est conscient
qu'une exploitation commerciale entraîne des déboursés
immédiats beaucoup plus considérables que le déplacement
d'une personne qui habite un loyer.
Mais, au lieu d'être la Chambre qui fixe le montant, dans ce
cas-là ce sera le ministre. Il y a effectivement un pouvoir
discrétionnaire qui est donné, mais c'est que dans la plupart des
cas, dans la pratique, on ne se rend même pas à la Chambre de
l'expropriation parce qu'il y a entente entre l'expropriant et
l'exproprié. Mais il s'agirait qu'on ait un cas où on devrait
aller à la Chambre de l'expropriation pour le fixer, parce qu'on ne
s'entend pas pour une différence de 1000 $ ou 2000 $, où on
serait obligé d'aller à la Chambre de l'expropriation, pour
retarder les
travaux. On dit que c'est le ministre, à ce moment-là, qui
va le fixer.
M. Chevrette: Est-ce que vous êtes après me dire que
ça retarderait les travaux? (17 h 40)
M. Drolet: Ça pourrait éventuellement retarder les
travaux.
M. Chevrette: à cause de quoi, quand vous avez fait le
transfert de propriété, que vous avez donné 70 % et que
vous vous êtes...? en quoi?
M. Drolet: Oui, mais, là, c'est que nous
déplaçons le locataire. Nous avons donné
l'indemnité provisionnelle sur le bien exproprié au
propriétaire, mais le locataire, lui, il faut s'en occuper aussi. Comme
il a des déboursés, dans le cas d'un bail d'habitation, pour se
reloger, on lui verse trois mois. Dans le cas d'un bail pour une exploitation
commerciale, on lui dit: Ça va être tes trois mois, mais on va
t'ajouter un montant supplémentaire qui sera fixé par le ministre
et non pas par la Chambre, comme on le prévoit à l'heure
actuelle, parce que, pour aller plus vite, pour accélérer le
processus, c'est le ministre qui va déterminer le montant à
verser. Je rappelle que, comme indemnité provisionnelle, ça ne
change rien à l'indemnité finale qui, elle, sera fixée par
la Chambre de l'expropriation.
M. Vallières: Ce qu'on va voir à l'article 11, si
ma mémoire est bonne.
M. Drolet: C'est ça.
M. Chevrette: Donc, la réponse, c'est celle-là que
je dois prendre.
M. Vallières: Oui. M. Chevrette: O.K.
Le Président (M. Cannon): Est-ce que l'article 9 est
adopté?
M. Vallières: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Adopté. L'article 10:
"Lorsque le bien exproprié est grevé de droits réels
enregistrés, ceux-ci sont purgés par l'enregistrement du
récépissé du dépôt de l'indemnité
provisionnelle; il en est de même des actions en résolution, en
revendication ou autres actions réelles qui sont transformées en
créances personnelles contre l'exproprié. "Les effets de toute
clause de déchéance du terme, y compris la clause de dation en
paiement et la clause résolutoire, sont éteints par
l'enregistrement du récépissé du dépôt. "Le
registrateur est tenu de radier les droits purgés. Le protonotaire doit
distribuer l'indemnité provisionnelle de la manière prévue
à l'article 53.15 de la Loi sur l'expropriation et l'article 53.16 de
cette loi s'applique à cette distribution."
M. le ministre.
M. Vallières: cet article, m. le président, reprend
substantiellement, en les adaptant au contexte d'une procédure
spéciale, les articles 53.17 et 55.2 de la loi actuelle, qui, tout en
s'avérant essentiels, constituent des mesures tout à fait
normales et usuelles en matière d'expropriation.
M. Chevrette: M. le Président, juste une petite remarque.
Quand la procédure de la loi actuelle fonctionne, on peut se permettre
de s'y référer. Pourquoi ne pas s'être
référé, tantôt, dans le cas de la cession des biens,
à la procédure existante, à ce moment-là?
M. Vallières: Me Drolet aurait le goût de vous
répondre, sauf que je pense qu'on a clarifié cet
article-là quand on est passés dessus. Je peux peut-être le
demander quand même. Si ça vous...
M. Chevrette: non. c'était plutôt une allusion. je
n'ai pas demandé un renseignement technique, c'est une allusion
politique que j'ai faite.
Le Président (M. Cannon): Alors, est-ce que l'article 10
est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Adopté. L'article 11:
"À défaut d'entente avec l'exproprié sur
l'indemnité définitive dans les 90 jours du transfert de
propriété, le ministre ou l'exproprié peuvent s'adresser
à la Chambre de l'expropriation pour faire fixer cette indemnité.
"Le locataire ou l'occupant de bonne foi d'un bien exproprié peuvent
s'adresser à la Chambre de l'expropriation pour faire fixer
l'indemnité qui leur est due en raison des dommages résultant
directement de l'expropriation. "Les articles 58, 59, 64, 67, 67.1 et 68 de la
Loi sur l'expropriation s'appliquent à la fixation de
l'indemnité, compte tenu des adaptations nécessaires; pour
l'application de l'article 64, la réserve qui y est prévue en est
une aux dispositions des articles 4 à 12 de la présente loi; pour
l'application de l'article 67.1, l'expression "avis d'expropriation"
désigne l'avis prévu à l'article 7 de la présente
loi." M. le ministre.
M. Vallières: Oui, alors, ayant exclu l'application du
titre II de la Loi sur l'expropriation, il y a lieu de préciser que la
Chambre de l'expropriation constitue néanmoins le tribunal
compétent aux fins d'entendre toute partie
intéressée concernant une indemnité
définitive à être versée à la suite d'une
expropriation effectuée en vertu de la présente loi. Il y a lieu
également de se référer aux articles pertinents de la Loi
sur l'expropriation pour la fixation de l'indemnité définitive,
de manière à garantir aux expropriés le droit à une
juste indemnité.
M. Chevrette: Vous avez ajouté l'article 64 par rapport
à votre avant-projet que vous nous aviez envoyé. Je suppose que
c'est parce que vous avez l'intention de vous servir des biens meubles
déjà acquis par le ministère des Transports pour faire des
échanges avec les biens meubles que vous allez acquérir en vertu
de la présente loi.
M. Vallières: ...D'immeubles, non pas de biens
meubles.
M. Chevrette: J'aurais pu dire "immeubles", M. le ministre.
C'était juste pour vous montrer que cette fois-ci, ça joue dans
le sens inverse de ce que je vous demandais tantôt. Il y a un petit peu
de cohérence de notre côté, aussi, dans l'étude du
projet de loi.
M. Vallières: On recherche tous les moyens les plus
efficaces possible d'arriver à la reconstruction de la route le plus
rapidement possible.
Le Président (M. Cannon): Alors, ça va, M. le
leader?
M. Chevrette: Oui. Dans le droit actuel - là, ma question,
c'est vraiment à un avocat - est-ce qu'un type peut y aller... Au tout
début, à l'article 11, on a 90 jours. Parce que là, si
j'ai bien compris, il n'y a aucune possibilité d'y aller avant 90 jours.
Est-ce qu'il peut y aller en bas de 90 jours dans le droit actuel? Me... va
nous le dire.
M. Vallières: on cherche, là, mais on m'indique
qu'actuellement, en vertu de la présente loi, c'est seulement
après un délai de 90 jours. mais, auparavant, c'eût
été possible avant 90 jours.
M. Chevrette: C'était possible avant? M.
Vallières: Oui.
M. Chevrette: Mais pourquoi mettre 90 jours dans cette loi-ci,
alors que, déjà, on fait sauter un peu tout, on suspend un peu
tout? L'individu, au moment où lui pourrait avoir un avantage, au moins
à garder, quant au délai, la Loi sur l'expropriation, pourquoi
vous... Vous auriez pu mettre au moins 60, je ne sais pas, quant
à...
M. Vallières: L'indemnité définitive
n'empêche nullement la réalisation des travaux.
M. Chevrette: ii ne peut pas aller devant la chambre avant 90
jours, puis dans 90 jours vos travaux seront finis, si tout roule sur des
roulettes! vous auriez pu mettre 60!
Une voix: Ça n'affecte pas les travaux.
M. Chevrette: Mais en quoi l'indemnité va affecter les
travaux? Vous lui avez envoyé un chèque de 70 %...
M. Vallières: Non. Définitivement, ça
n'affecte pas les travaux.
M. Chevrette: Bon, bien, pourquoi, à ce moment-là,
le pénaliser à 90 jours, si l'ancienne loi lui donnait la
possibilité d'y aller avant? Là, vous créez l'obligation
de ne pas y aller, si j'ai bien compris.
M. Vallières: M. le Président, nous aurions
aimé... En tout cas, on peut mettre 60, on n'a pas d'objection, sauf
qu'on pense qu'on peut étendre le délai de négociation sur
90 jours.
M. Chevrette: Oui, mais là, M. le ministre, on va bien se
comprendre. La loi de portée générale ne crée aucun
problème par rapport à l'exécution des travaux. On se
comprend? Bon. À partir de ça, au moment où l'individu est
déjà bousculé par les événements, on lui
enlève une prérogative qui n'est pas reliée aux travaux.
Il me semble qu'on pourrait ou laisser le pouvoir qui était dans la loi
de portée générale d'expropriation, ou
rétrécir le délai quant à la permission au moins
d'y aller. Il me semble que, là, c'est superfétatoire, comme
disait Camille Morin.
Le Président (M. Cannon): Claude Morin ou Camille
Laurin?
M. le ministre.
M. Pagé: Superfétatoire! Les lettres de mon ami Guy
qui sortent.
Mme Robillard: La culture!
M. Pagé: Tu n'as pas siégé, toi, avec
Camille Laurin.
Le Président (M. Cannon): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: On n'avait pas suspendu? Le Président
(M. Cannon): Non.
M. Chevrette: Peut-être que je devrais faire une suggestion
à Me Leclerc. Si on disait: À défaut d'entente, n'importe
qui pourra se présenter au tribunal, ça donne exactement la
portée du droit qui est dans la loi générale. On
pourrait
peut-être le rédiger de cette façon-là et...
Moi, personnellement, je n'accepte pas - et je veux bien me faire comprendre -
qu'on pénalise potentiellement un individu quand on sait que ce n'est
pas relié, en aucune façon, aux gestes que l'on pose. Il me
semble qu'on pourrait peut-être le mettre en suspens et demander une
rédaction autre que celle-ci.
Le Président (M. Cannon): Alors, M. le ministre, est-ce
que vous consentez à ce que nous suspendions l'article 11?
M. Vallières: Non. Il faudrait qu'on l'explique
maintenant. On a des explications.
Le Président (M. Cannon): Oui, d'accord.
M. Vallières: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Cannon): M. le ministre.
M. Vallières: Me Bilodeau va vous donner quelques
explications sur ce délai de 90 jours requis dans la loi.
Mme Bilodeau: On m'informe qu'en pratique le délai de 90
jours est justifié dans la mesure où, pour s'adresser à la
Chambre de l'expropriation pour faire fixer l'indemnité, ça
nécessite des rapports d'évaluation d'évaluateurs
agréés, il y a un temps qui est requis et il n'est pas trop de
passer à 90 jours, par rapport à un délai de 60 jours,
pour obtenir ces rapports d'experts là. C'est la situation pratique dont
on m'informe.
Le Président (M. Cannon): M. le leader.
M. Chevrette: Mme Bilodeau, vous savez pertinemment que ça
ne répond en rien à ma question ou à mes remarques. J'ai
posé une question. Me Leclerc ne l'a pas dit au micro parce qu'il n'a
pas répondu, mais je lui ai demandé si c'était
relié aux travaux, si ça pouvait nuire aux travaux. Il a dit:
Non, ce n'est pas relié comme ça aux travaux. Et il fart encore
signe que non. (17 h 50)
À partir de là, vous allez m'expliquer, à part que
sur le plan politique... Et ça a paru que ce n'était pas sur le
plan du droit que vous avez répondu: On m'informe que, il paraît
que... Ce n'est pas ça, ma question. La question est fondamentale.
Pourquoi, dans une loi d'exception, une loi spéciale, une loi
extraordinaire, on vient limiter un individu qui a un droit dans la loi de
portée générale qui, elle, n'a pas de limite? Ne
m'expliquez pas ça par: On m'informe que les délais, en
pratique... Sur le plan du droit, oui ou non, est-ce que vous limitez la loi de
portée générale par votre loi d'exception? C'est
ça, la question.
Le Président (M. Cannon): M. le ministre.
M. Vallières: M. le Président, le
député de Joliette est convaincant. C'est la preuve que, des
fois, ça peut être utile d'argumenter. Alors, on m'indique qu'on
pourrait simplement rayer ce délai de 90 jours. Je prends pour acquis
que ça n'a aucun effet sur nos travaux à être
effectués. Alors, je pense qu'on pourrait...
M. Chevrette: Ce n'est pas la question que j'ai posée
à Me Leclerc. Ça m'apparaît un petit peu outrancier,
même, pour l'individu qui a un pouvoir de portée
générale et qui se le voit limité dans une loi d'exception
alors que ça n'a aucune incidence sur l'objet même de la
législation. C'est ça que...
M. Vallières: M. le Président, on prépare
l'amendement. On va suspendre l'article. On va le soumettre tout à
l'heure.
Le Président (M. Cannon): D'accord. Alors, l'article 11
est suspendu. On passe à l'article 12: "Lorsque le dépôt de
l'indemnité provisionnelle n'a pas suffi pour acquitter les
créances garanties par droits réels enregistrés avant
l'enregistrement du récépissé de ce dépôt, le
ministre peut déposer le solde de l'indemnité au greffe de la
Cour supérieure; dans ce cas, le protonotaire continue la distribution
de la manière prévue à l'article 53.15 de la Loi sur
l'expropriation." M. le ministre.
M. Vallières: Cet article reprend substantiellement
l'article 55.3 de la Loi sur l'expropriation. Adopté.
Le Président (M. Cannon): Ça va. Adopté.
Article 13: "Pour l'application des dispositions du Code civil du Bas-Canada
aux expropriations faites selon les articles 5 à 12 de la
présente loi, un renvoi à la Loi sur l'expropriation est un
renvoi à la présente loi." Adopté?
M. Chevrette: Un instant.
Le Président (M. Cannon): Non?
M. Chevrette: Ce n'était pas dans l'avant-projet, cet
article-là, à moins que je ne m'abuse. Pourriez-vous me donner
les motifs de droit pour lesquels on l'a inséré?
M. Vallières: La disposition suivante en est une de
concordance, puisqu'il s'avère essentiel qu'un renvoi à la loi
actuelle dans le Code civil soit un renvoi au projet de loi qui, en
l'espèce, a préséance. C'était nécessaire de
l'indiquer. Me Bilodeau pourrait peut-être donner quelques explications
additionnelles.
Mme Bilodeau: Étant donné que nous
sommes dans une loi spéciale qui a pour effet d'écarter
l'application des lois générales y compris le Code civil... Le
Code civil contient quelques dispositions relativement à
l'expropriation, lesquelles dispositions, comme l'article 1649 qui est relatif
au bail d'imputation, font référence à la Loi sur
l'expropriation. Alors, à ce moment-là, on rend applicables
certaines dispositions du Code civil et on indique qu'un renvoi à la Loi
sur l'expropriation est un renvoi à la présente loi.
Le Président (M. Cannon): Ça va? M. Chevrette:
D'accord, M. le Président.
Le Président (M. Cannon): L'article 13 est adopté.
L'article 14: "La Loi sur l'aménagement et l'urbanisme (L.R.Q., chapitre
A-19.1) ne s'applique pas à l'égard de toute intervention du
gouvernement ou du ministre des Transports au sens de l'article 149 de cette
loi et résultant de l'application de la présente loi. Il en est
de même de toute intervention d'Hydro-Québec relative à la
relocalisation de lignes, postes de transformation ou tout autre
équipement pour le transport ou la distribution
d'électricité, visée au paragraphe 2° du premier
alinéa de l'article 2." M. le ministre.
M. Vallières: M. le Président, il est
nécessaire d'écarter l'application de la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme en ce qui a trait aux avis d'intervention,
afin d'éviter tout ce qui pourrait servir de prétexte à
une contestation, d'autant qu'elle porterait sur des points non fondamentaux.
Le dimanche 26 août 1990, les maires de la MRC de Roussillon ont
été avisés officiellement de nos prochaines interventions.
Ils ont exprimé, séance tenante, leur accord par
résolution, pressant même le ministre des Transports d'agir dans
les meilleurs délais.
M. Chevrette: Ça non plus, ça n'existait pas dans
l'avant-projet, à moins que je ne m'abuse. Quand vous dites que vous
vous soustrayez de toute la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme,
"à l'égard de toute intervention du gouvernement et du ministre
des Transports au sens de l'article 149 de cette loi et résultant de
l'application la présente loi", la présente loi ne va pas
seulement jusqu'à faire construire une autoroute; elle vous donne les
pouvoirs, et selon votre discrétion, de faire tout ce que vous voulez
avec ce que vous acquérez. Est-ce que ce n'est pas une porte ouverte
très, très large pour changer même des... Par exemple,
Hydro-Québec pourrait instituer un poste de - comment t'appelles
ça? - transmission indépendamment de toute négociation
avec la MRC ou avec une municipalité. La municipalité pourrait
dire: Moi, j'avais conçu dans mon plan d'urbanisme ce qui était
là, mais là, vous venez de vous dérober à toute
cette loi-là.
Une voix: C'est les lignes.
M. Chevrette: Écoutez, je veux bien lire:
"d'Hydro-Québec relative à la relocalisation de lignes, postes de
transformation..." Ce n'est pas moi qui l'ai inventé. C'est
marqué tel quel là "postes de transformation".
Le Président (M. Cannon): M. le ministre.
M. Vallières: M. le Président, des consultations
ont déjà été menées auprès du
ministère des Affaires municipales relativement à l'article qu'on
a ici, à la disposition qui vise finalement à se soustraire
à l'application de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. On
m'indique également que pour certains équipements auxquels on se
réfère, comme ceux d'Hydro-Québec, il était
nécessaire, dans le contexte d'une loi spéciale et des
délais, là encore, qu'on pourrait encourir, que l'on puisse
procéder de la sorte. J'ai néanmoins pris la précaution de
soumettre le tout à la MRC de qui dépend finalement
l'autorisation requise et qui nous a autorisés, après
vérification des intentions du ministère des Transports. On veut
tout simplement être très prudent pour éviter que des
délais ne soient encourus suite à l'application de cette loi.
Le Président (m. cannon): ça va? donc, l'article 14
est adopté. l'article 15. "la loi sur la protection du territoire
agricole (lois refondues du québec, chapitre p-41.1) ne s'applique pas
aux aliénations en faveur de la couronne du chef du québec ou en
faveur d'hydro-québec, aux lotissements, aux utilisations à des
fins autres que l'agriculture et aux autres actes autrement régis par
cette loi, s'ils sont faits en vue de la réalisation de travaux,
ouvrages ou constructions visés par la présente loi, y compris
ceux relatifs à la relocalisation de lignes, postes de transformation ou
tout autre équipement pour le transport ou la distribution
d'électricité, ou s'ils résultent de leur
réalisation."
M. Vailières: Alors, il s'avère nécessaire,
en raison de l'urgence de la situation, d'écarter expressément de
l'application de la Loi sur la protection du territoire agricole certains actes
dont il n'est pas fait mention dans la décision de la Commission
relative au tracé de l'autoroute 30, plus particulièrement ceux
relatifs - on y a fait allusion précédemment - à la
relocalisation des lignes d'Hydro-Québec et aux travaux de drainage qui
n'avaient pas été prévus originellement dans
l'autorisation obtenue de la CPTAQ. J'ai pris la précaution de demander
un avis au président de la Commission qui écrivait à mon
collègue ministre délégué à l'Agriculture,
aux Pêcheries et à l'Alimentation et qui consent à ce que
l'on procède de la façon présente dans le climat
d'exception qu'on connaît. (18 heures)
Le Président (M. Cannon): M. le leader.
M. Chevrette: Est-ce que l'avis est un avis public? La semaine
passée, en commission parlementaire, il y avait autant de
téléphones que d'avis avec la CPTAQ. J'aimerais savoir si vous
avez un avis écrit et si vous êtes consentant à le
déposer.
M. Vallières: Je peux même vous le lire.
M. Chevrette: Ah bien, ce n'est peut-être pas
nécessaire. Il n'y a pas de problème.
M. Vallières: oui, je peux le déposer, oui, il n'y
a pas de problème.
M. Chevrette: D'accord.
Le Président (M. Cannon): II y a consentement pour le
dépôt.
M. Chevrette: Vous aviez dit tantôt, Me Bilodeau, je crois
- peut-être que je fais erreur sur la personne - mais il y a quelqu'un
qui a dit que vous aviez reçu au préalable au ministère un
avis de la CPTAQ. Est-ce que vous faisiez référence à
celui-ci ou aux négociations antérieures sur...
M. Vallières: Non, c'est une négociation
antérieure sur le tronçon routier comme tel.
M. Chevrette: Est-ce que cet avis antérieur était
écrit ou si c'était un avis verbal?
M. Vallières: C'est une décision, un certificat qui
a été émis par la CPTAQ.
M. Chevrette: Mais qui ne tenait pas compte de deux, trois
éléments dont vous avez parlé.
M. Vallières: C'est ça, dont les
déplacements des lignes et des servitudes concernant le drainage
agricole.
M. Chevrette: Est-ce qu'il y a possibilité que vous
m'envoyiez les deux ensemble?
M. Vallières: Oui, on peut vous faire parvenir les
deux.
Le Président (M. Cannon): Très bien, pour le
dépôt de ce document, oui, il y a consentement.
M. Vallières: Celui-ci et l'autre qui va suivre
ultérieurement, qu'on n'a pas en notre possession.
Le Président (M. Cannon): Ce sera inscrit au
procès-verbal. Alors, est-ce que l'article 15 est adopté, M. le
leader?
M. Chevrette: Juste deux minutes.
Le Président (M. Cannon): Oui, d'accord.
M. Vallières: M. le Président, on va déposer
également le certificat de la CPTAQ, on l'a en notre possession.
M. Chevrette: Le certificat autorisant le dézonage.
M. Vallières: C'est un document daté du 27 novembre
1989 émis effectivement par le vice-président de la Commission.
J'en fais dépôt, M. le Président, avec le consentement.
M. Chevrette: Merci.
Le Président (M. Cannon): D'accord. Il y a consentement
pour le dépôt de ce document? Consentement. Le document est
maintenant déposé. M. le leader de l'Opposition vous aviez
d'autres questions relatives à l'article 15?
M. Chevrette: Non.
Le Président (M. Cannon): Non? Ça va. L'article 15
est donc adopté.
M. Vallières: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Adopté. L'article 16. "La
Loi sur la qualité de l'environnement (L.R.Q., chapitre Q-2) ne
s'applique pas aux travaux, ouvrages et constructions visés par la
présente loi, y compris ceux relatifs à la relocalisation de
lignes, postes de transformation ou tout autre équipement pour le
transport ou la distribution d'électricité." M. le ministre.
M. Vallières: II importe, M. le Président,
d'écarter, au moyen d'une disposition législative, et ce, en
raison de l'urgence de la situation, les dispositions de la Loi sur la
qualité de l'environnement pouvant avoir une incidence sur les travaux,
ouvrages et constructions, de même qu'à la relocalisation des
lignes d'Hydro-Québec.
M. Chevrette: si j'ai bien compris, m. le président, le
ministre vient nous dire par cet article qu'il doutait de la validité
juridique du décret, basé sur l'article des catastrophes.
M. Vallières: M. le Président, je
préférais l'inclure dans la loi spéciale, afin que tout
soit bien armé.
M. Chevrette: Pour être sûr qu'il y ait une assise
juridique plus forte que celle existant dans l'autre. C'est ça?
Le Président (M. Cannon): Alors, l'article 16 est donc
adopté?
M. Chevrette: Non, mais je voudrais dire que c'est une
catastrophe... J'ai deux ou trois questions, par exemple, relatives au
décret et non pas à la loi. C'est parce que dans votre
décret, M. le ministre, vous posiez certaines... Vous vous créez
des obligations, en vertu de votre décret, par exemple, d'informer sur
une base régulière, de faire des rapports, etc. Est-ce que ces
conditions, qui ont été écrites dans le décret...
Étant donné que vous doutiez de la force ou de la validité
de votre décret, est-ce qu'au moins les obligations que vous avez
créées à partir d'un décret sont maintenues,
même si vous substituez à ce décret un article 16 de cette
loi d'exception?
M. Vallières: Oui, M. le Président. C'est un
engagement qu'on prend, à partir du moment où on a accepté
de procéder de la façon dont on agit présentement, et j'ai
indiqué tantôt... Je pense que certains de mes collègues se
posaient cette interrogation, dont le député de La Prairie, je
crois. Il posait la question à savoir si on allait tenir compte des
mesures de mitigation que notre propre ministère avait
identifiées. Effectivement, nous allons, dans toute la mesure du
possible, tout faire pour que ce soit respecté.
M. Chevrette: Mais étant donné que c'est l'article
de loi qui prévaut, si j'ai bien compris... Le décret n'existe
plus, au sens juridique, à partir du moment où nous votons
l'article 16, c'est bien ça?
M. Vallières: Oui.
M. Chevrette: En vertu de ça, les obligations
créées par décret, théoriquement, sont dans le
vide. Vous me dites cependant que vous maintenez les orientations et les
obligations que vous avez établies par décret,
indépendamment que le décret sort assis sur du juridique assez
fort. Vous transposez les obligations que vous vous faisiez en vertu d'un
décret et vous les faites vôtres à partir de l'article 16
de la loi.
M. Vallières: Exactement. M. Chevrette: Merci.
M. Vallières: C'est ça.
Le Président (M. Cannon): Ça va? L'article 16 est
adopté, M. le leader?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Adopté. À
l'article 17: "les articles 1 à 3, 15 et 16 ont effet depuis le 30
août 1989." Est-ce que cet article est adopté?
M. Chevrette: C'est l'article qui me répugne beaucoup, M.
le Président, parce qu'il a un caractère rétroactif, vous
savez. C'est là la notion de rétroactivité dans la loi.
Moi, je vous avoue que je comprends mais sur le plan des principes, ça
m'a toujours répugné de légiférer
rétroactivement. Je dirai: sur division.
Le Président (M. Cannon): Est-ce que l'article 17 est
adopté sur division?
M. Vallières: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Sur division. L'article 18: "La
présente loi entre en vigueur le..." Ici, on indique la date de la
sanction de la présente loi. Alors, est-ce que c'est adopté?
Articles en suspens
M. Vallières: On revient sur l'article 1, M. le
Président.
Le Président (M. Cannon): Alors, si vous le
désirez, on peut revenir à l'article 1. M. le ministre.
M. Chevrette: Sur l'article 1, il n'y a pas d'amendement, si j'ai
bien compris? Après les informations que vous nous avez données,
ça l'incluait et ce n'était pas nécessaire de
l'écrire. M. le Président, ça pourrait être
adopté si les explications qu'on nous donne sont...
M. Vallières: Oui. Adopté.
Le Président (M. Cannon): Alors, est-ce que l'article 1
est adopté?
M. Chevrette: Adopté. M. Vallières:
Adopté.
Le Président (M. Cannon): Alors, on procède
maintenant à l'article 7. Et à l'article 7, l'amendement qui est
proposé est de remplacer, dans la première ligne de l'article 7,
les mots "la poste" par les mots "courrier recommandé ou
certifié".
M. Chevrette: Adopté. M. Vallières:
Adopté.
Le Président (M. Cannon): Alors, cet amendement est donc
adopté. Est-ce que l'article 7 est adopté?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Adopté. Nous
procédons donc à l'article 11 qui avait été
suspendu et l'amendement qui est introduit vise, à la première
ligne du premier alinéa de l'article 11, les mots "avec
l'exproprié". Deuxièmement, à la première ligne du
premier alinéa de l'article 11, les mots "dans les 90 jours du transfert
de propriété". Est-ce qu'il y a des questions?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Alors, est-ce que l'amendement
est adopté?
M. Vallières: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Est-ce que l'article, tel
qu'amendé, est adopté?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Est-ce que le titre du projet de
loi est adopté?
M. Chevrette: Dans le préambule, vous avez annoncé
quelque chose à deux reprises.
Le Président (M. Cannon): Les notes explicatives.
M. Chevrette: Oui. Est-ce que vous me permettez, M. le
Président, de...?
Le Président (M. Cannon): Je peux vous permettre, M. le
leader. Je peux bien vous permettre. Oui. Allez. Je vais vous écouter.
(18 h 10)
M. Chevrette: Parce qu'on a déjà amendé des
préambules de lois. On a déjà modifié... Le
ministre des Finances a modifié complètement les notes
explicatives de son projet de loi. Il y a du monde qui se le rappelle, ici.
Moi, M. le Président, je pense que toute ma plaidoirie de ce matin en
deuxième lecture portait expressément sur le caractère
d'urgence, le caractère exceptionnel, sur un caractère qui ne
doit pas servir de précédent, qui ne doit pas être un
exemple à suivre, parce qu'on suspend des droits fondamentaux, une
procédure démocratique à l'intérieur de laquelle le
peuple a le droit de s'exprimer. On est obligé d'aller jouer dans ces
droits-là, qu'on s'était donnés par l'Assemblée
nationale du Québec, et on écarte des lois, des
prérogatives qu'on donnait aux citoyens. Et je voudrais que ce projet de
loi ait un caractère, mais véritablement exceptionnel et qu'il y
ait un message . dedans, on dit pourquoi.
C'est dans ce contexte-là que j'ai soumis un texte au ministre
des Transports et c'est un projet de loi qui... Je dis ceci, M. le
Président, c'est un amendement: Le projet de loi 82, Loi concernant la
construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et
Sainte-
Catherine, est modifié par l'insertion, après le titre de
la loi, du préambule suivant... J'ajouterais un préambule:
Considérant que les événements extraordinaires et d'une
extrême gravité impliquant divers éléments de la
communauté mohawk vivant principalement à Oka, Kanesatake et
Kahnawake ont dégénéré depuis le 11 juillet 1990 en
un conflit armé et ainsi contraint une large partie de la population de
la rive sud de Montréal à vivre sous un véritable
régime de guerre; considérant que ce conflit armé a
privé pendant plus de 50 jours cette population de l'accès
à IHe de Montréal par le pont Mercier, entraînant ainsi une
dégradation majeure des conditions de vie de dizaines de milliers de
citoyens et citoyennes concernés; considérant, malgré que
l'accès du pont Mercier soit redevenu possible depuis le 30 août
1990, que le pont lui-même restera inutilisable pour un temps
indéterminé; considérant qu'il y a lieu de mettre sur pied
des mesures extraordinaires et de déployer des efforts exceptionnels et
sans précédent pour améliorer rapidement les
déplacements des citoyens entre la rive sud et l'île de
Montréal; considérant que l'une de ces mesures exceptionnelles
consiste en l'accélération des travaux de construction d'un
tronçon déjà prévu de l'autoroute 30 entre
Châteauguay et Sainte-Catherine, par l'abolition ou la réduction
des délais légaux prévus dans des lois d'application
générale; le Parlement décrète donc...
Cela donne toute la situation, le contexte d'exception. Ça
justifie au moins le caractère exceptionnel et ce n'est pas vrai,
à mon point de vue, comme Parlement, qu'on peut laisser faire une
législation comme celle-là sans indiquer aux citoyens du
Québec que c'est une procédure d'exception, qui ne doit nullement
être perçue comme un précédent de quelque nature que
ce soit.
Le Président (M. Cannon): Je suis prêt, moi,
à me prononcer sur la recevabilité de l'amendement, mais si vous
voulez plaider la recevabilité ou l'irrecevabilité, M. le
ministre, je suis prêt à vous écouter.
M. Vallières: non, M. le président, je n'ai pas
l'intention de plaider sur la recevabilité ou la
non-recevabilité. je vais vous laisser vous exprimer
là-dessus.
Le Président (M. Cannon): Alors, en fait, j'ai eu
l'occasion plus tôt au cours du débat en commission
plénière de vous indiquer la référence à
l'article 244 et la décision qui avait été rendue par le
président Richard. J'attire notamment votre attention aux doctrines qui
avaient été invoquées à cette occasion: Beauchesne,
le numéro 779, où il est clairement dit, en regard des
préambules: "II n'est pas loisible au comité de joindre un
préambule à un projet de loi ou à une proposition de loi
qui n'en comporterait pas
à l'origine." et, que je sache, ce projet de loi ne comporte pas
de préambule. alors, pour ces raisons, évidemment, l'amendement
qui est proposé par m. le leader de l'opposition est irrecevable. nous
pouvons donc poursuivre. je vous demanderais si le titre du projet de loi est
adopté.
M. Vallières: Adopté.
Le Président (m. cannon): m. le leader de l'opposition...
je considère donc que le titre du projet de loi est adopté.
est-ce que le projet de loi 82, loi concernant la construction d'un
tronçon de l'autoroute 30 entre châteauguay et sainte-catherine,
est adopté?
M. Chevrette: M. le Président.
Le Président (M. Cannon): M. le leader.
M. Chevrette: Vous avez interprété la
recevabilité. Vous me permettrez de vous dire que je pourrais
très bien demander au ministre...
Le Président (M. Cannon): Comment?
M. Chevrette: Je pourrais très bien demander au ministre,
sans que vous ayez à vous prononcer sur la recevabilité, si, de
consentement, il accepte d'introduire un préambule et la nature du
préambule. Vous n'auriez pas à vous prononcer sur la
recevabilité, puisque personne ne vous l'aurait demandé.
Le Président (M. Cannon): Vous êtes tout à
fait dans votre droit de le lui demander, sauf que, dans votre démarche
et dans vos explications plus tôt, vous ne l'avez pas fait, donc j'ai
conclu que...
M. Chevrette: Non, mais...
Le Président (M. Cannon): J'attendais...
M. Chevrette: ...j'avais envoyé...
Le Président (M. Cannon): Juste pour compléter, M.
le leader de l'Opposition, j'attendais, de ce côté, si
effectivement il y avait des interventions quant à la
recevabilité de cet amendement. Puisqu'il n'y en avait aucun de ce
côté-là et que vous, vous aviez complété
votre argumentation, j'ai donc jugé utile de me prononcer sur la
recevabilité. Maintenant, si vous demandez au ministre s'il est
prêt à introduire un préambule dans son projet de loi, vous
pouvez procéder, M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Je vais le lui demander sûrement, au
ministre, parce qu'il y va de l'intérêt de tout le Parlement. Ce
n'est pas une question de formation politique, ça. Les gestes qu'on pose
à l'Assemblée nationale ont des portées, peuvent modifier
énormément les mentalités. On ne légifère
pas en fonction de créer des précédents, on
légifère en fonction d'une mesure à l'intérieur
d'une crise. Comment le ministre qui règle un conflit, M. le
Président, à l'intérieur d'une crise plus
qu'extraordinaire... C'est une crise armée, besoin de l'armée
pour contrer des individus, c'est grave, ça. Là, je ne voudrais
pas, le lendemain matin, qu'on se ramasse avec l'autoroute de Rimouski, puis
l'autoroute de ci et l'autoroute de ça.
C'est quoi? Est-ce qu'on légifère dans le cadre de la
crise actuelle et on ne dit rien? On laisse constituer un
précédent par l'Assemblée nationale? Si c'est ça,
votre façon de gouverner, c'est correct. Mais, moi, ça
m'apparaît pour le moins inélégant de ne même pas
situer le projet de loi dans le cadre d'une crise exceptionnelle, inacceptable
et puis bien spécifique, dans un contexte bien précis. Je ne
comprends pas. Et on continuera à accréditer le fait qu'au
Québec bougez et vous allez avoir de quoi. Moi, en tout cas, je n'en
reviens pas.
Le Président (M. Cannon): M. le ministre.
M. Vallières: Alors, j'ai remarqué, tout au long
des différents exposés de tous les collègues qui sont
intervenus sur le projet de loi, que beaucoup - et j'en faisais mention dans ma
réplique - de gens ont parlé du contexte, de la situation qui
prévalait, du climat spécial qui entourait l'adoption de ce
projet de loi. Je pense que le point a suffisamment été
marqué et personne ne pourra se dissocier du caractère
exceptionnel dans lequel se situe l'adoption de ce projet de loi.
Mais je n'ai pas l'intention, pour ma part, de donner mon accord
à ce que l'on introduise, à l'intérieur du projet de loi,
un préambule de la nature de celui qu'on retrouve ici, où on fait
allusion à tout ce qui a été dit tantôt, dans de
nombreuses allocutions. Ce n'est pas la coutume non plus qu'on le fasse. Je
sais que de nombreux projets de loi spéciaux ont été
votés ici, en cette Chambre, et à ma connaissance il n'y a pas de
préambule, de façon coutumière, qui les accompagne.
L'objet de notre projet de loi ? je l'ai indiqué au
début, dans mon allocution en deuxième lecture - vise à
nous donner une procédure, donne des pouvoirs au ministre afin de
procéder dans des délais réduits pour l'acquisition de
tous les biens qu'il juge nécessaires afin de réaliser le projet
autoroutier dont il est question. À cette fin, le projet de loi vient
établir des règles devant régir, en particulier, les
expropriations qui sont visées par la loi, de même que celles qui
sont relatives à la taxation, à la fixation des indemnités
provisionnelles et puis définitives. Alors, je n'ai aucun mandat, non
plus, autre que
celui qui m'a été confié de défendre ce
projet de toi à l'Assemblée nationale et, donc, n'en
déplaise au député de Joliette, je n'ai pas l'intention de
souscrire à son intention d'introduire son préambule à
l'intérieur du projet de loi.
Le Président (M. Cannon): Messieurs, le temps qui nous
avait été alloué par l'ordre de la Chambre est maintenant
terminé, et je répète, il reste effectivement deux
adoptions... Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?
M. Vallières: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Adopté. Est-ce que le
projet de loi 82, Loi concernant la construction d'un tronçon de
l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine, est
adopté?
M. Vallières: Adopté.
Le Président (M. Cannon): Adopté. En
conséquence, la commission plénière met fin à ses
travaux. Je remercie celles et ceux qui y ont participé, et, pour
permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je prie
toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire
immédiatement.
(Suspension de la séance à 18 h 21)
(Reprise à 18 h 26)
Le Président: Mesdames et messieurs les
députés, veuillez prendre place, s'il vous plaît. M. le
Président de la commission plénière.
M. Cannon (président de la commission plénière):
M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission
plénière a étudié en détail le projet de loi
82, Loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre
Châteauguay et Sainte-Catherine, et qu'il a été
adopté avec amendements.
Le Président: Ce rapport est-il adopté? Une
voix: Adopté.
Adoption
Le Président: Adopté. Nous allons maintenant
procéder à l'étape suivante de l'étude du projet de
loi. En conséquence, M. le ministre délégué aux
Transports propose la motion d'adoption du projet de loi 82, Loi concernant la
construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et
Sainte-Catherine. Je vais donc reconnaître M. le ministre
délégué aux Transports.
M. Yvon Vallières
M. Vallières: Merci, M. le Président. Nous voici
maintenant rendus à l'étape de l'adoption du projet de loi
spécial sur l'expropriation. La nécessité d'agir
rapidement et efficacement à l'intérieur de ce projet de loi a pu
être démontrée.
Je veux, M. le Président, en premier lieu, féliciter et
remercier mes collègues qui ont participé tout au long de cette
journée à faire en sorte qu'on puisse procéder sans
délai, sans délai afin de donner à la population de la
région de Châteauguay, à cet important bassin de la
population de la rive sud, un lien tant désiré et le plus direct
possible avec l'île de Montréal. Plusieurs de mes
collègues, M. le Président, ont insisté sur la pertinence
de ce projet de loi. Sans exception, les députés à
s'adresser à cette Assemblée ont approuvé, avec des
niveaux différents cependant de persuasion, avec certaines
réticences dans certains cas, réticences venant plus
particulièrement de certains députés de l'Opposition... Je
veux néanmoins, M. le Président, les féliciter du niveau
du débat qui a été tenu et qui permet à cette
Chambre de se doter d'une pièce législative qui va permettre hors
de tout doute de faire en sorte qu'on puisse livrer la marchandise à une
population qui, au cours des quelque 50 derniers jours, dans cette
région, a été fortement mise à
l'épreuve.
Je veux de façon particulière profiter de cette occasion
et de la fin de ce débat afin de rendre un hommage particulier et public
à toutes ces personnes du secteur public, les représentants de la
population du secteur concerné, pour la grande lucidité dont ils
ont fait preuve, et également le sang-froid, le sens du devoir qui les a
animés tout au long des circonstances particulières qui ont
amené l'étude de ce projet de loi à l'Assemblée
nationale. Je pense en particulier à mes collègues, à tous
mes collègues à l'Assemblée nationale, d'un
côté ou de l'autre de cette Chambre, mais aussi aux nombreux
maires des municipalités des régions directement
affectées, et également à la population en
général, qui a hâte et bien hâte que le gouvernement
du Québec, une fois pour toutes, soit sur le terrain.
La réalisation de ce tronçon de l'autoroute 30, comme
l'ont souligné le milieu, les députés et les maires de
cette région, en plus de désenclaver en cas de crise toute une
région, viendra, M. le Président, contribuer à l'essor
économique de cette région et vous m'en voyez réjoui.
Je veux, M. le Président, également indiquer que c'est
avec plaisir qu'on a accepté quelques modifications en comité
plénier, qui nous ont été apportées par
l'Opposition, visant à bonifier notre projet de loi. Je veux
également vous indiquer que, hors de tout doute et même si un des
éléments qui a fait l'objet de discussions en comité
plénier visait à apporter un amendement, un ajout à la loi
afin que le gouvernement du
Québec, le ministère des Transports soit sur le terrain
dans les meilleurs délais possible... On parlait d'une date qui est le
31 décembre, ce que je me suis refusé à introduire dans la
loi. Mais je veux déclarer, M. le Président, pour mettre toute
I'"emphase" requise là-dessus, que la volonté ferme du
gouvernement du Québec - et c'est l'objet de la loi qu'on a devant nous,
d'accélérer la procédure - c'est d'être sur le
terrain dans les meilleurs délais et de compléter nos travaux
dans les meilleurs délais. Je veux donc, M. le Président,
féliciter mes collègues qui ont permis l'adoption de ce projet de
loi, les assurer de ma plus entière collaboration afin que les objectifs
qui sont poursuivis par cette loi soient non seulement adoptés en cette
Chambre mais soient également réalisés sur le terrain. Je
vous remercie beaucoup.
Le Président: Je cède maintenant la parole à
M. le leader de l'Opposition et député de Joliette.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je serai bref,
également. Je voudrais rappeler que l'Opposition officielle a
collaboré à ce projet de loi, M. le Président, et a
accepté, à la demande du gouvernement, de suspendre des
délais afin de permettre à une population qui, depuis neuf
semaines, je pense, vit des malaises extraordinaires... C'est vraiment parce
que ces gens sont victimes d'une situation qu'ils n'ont pas voulue, qu'ils
n'ont jamais recherchée que l'Opposition officielle s'est rangée
derrière ce projet de loi pour dire à ces victimes: On vous
comprend. On sait que ce n'est pas un cadeau. On sait que ce n'est pas de votre
faute.
J'ai souligné ce matin et je voudrais le refaire... De même
que le ministre vient d'afficher sa volonté de réaliser les
travaux, moi, M. le Président, je veux réitérer qu'en
aucune façon on se doit de continuer à oeuvrer de la façon
dont on oeuvre. On ne peut pas continuellement convoquer l'Assemblée
nationale pour légiférer suite a des gestes. On ne peut pas faire
ainsi d'une mesure exceptionnelle un précédent qui deviendrait
quelque chose d'usuel dans notre société
québécoise. Ça m'inquiète drôlement comme
élu du peuple d'avoir à légiférer dans des
conditions aussi aberrantes que celles que nous vivons présentement. Je
pense, M. le Président, que gouverner, je le disais ce matin, c'est
l'art de prévoir, c'est l'art d'éviter des choses, c'est l'art de
régler les problèmes à leur source même avant que
ces problèmes ne dégénèrent en crise. On n'est pas
des élus du peuple pour gérer des crises; on est là pour
éviter des crises.
Et je suis persuadé, M. le Président, qu'à cause de
l'improvisation - il faut que je le dise comme je le pense, ça
ressemblait à une ligue d'improvisation - jamais on n'aura vu en si peu
de temps des ministres d'un gouvernement afficher une impuissance totale devant
une population alors que la population, nous élit
précisément pour qu'on prenne les rênes, qu'on assume un
leadership et qu'on dise à cette même population où est-ce
qu'on va. C'est la première fois que je vois un ministre aller afficher
carrément qu'il s'est fait berner, leurrer, qu'il s'est fait flouer,
qu'il s'est fait avoir. C'est la première fois de ma vie que je vois un
élu du peuple, un responsable ministériel aller signer des
documents, au vu et au su de la population, d'une façon tout à
fait inacceptable pour une société dite civilisée. C'est
la première fois que je vois un gouvernement dire que ça fait
trois ans qu'il est au courant d'un fait et ne pas avoir contribué, en
appliquant les législations, à désarmer des individus
avant que ne se produisent des événements, alors qu'on sait que
c'est anticipé depuis fort longtemps.
C'est la première fois que je vois ça et je trouve
ça tout à fait inacceptable, inconcevable, sauf que pour ce
projet de loi je comprends, M. le Président, que la population de la
rive sud de Montréal et plus spécifiquement de Châteauguay,
de Mercier et de tout le secteur entre la 132 et la 138 avait besoin d'une
soupape pour décompresser. Quand des élus municipaux sont,
à toutes fins pratiques, contraints d'expliquer à leurs gens:
Bien, le gouvernement va faire quoi? et qu'on tergiverse entre les
juridictions, le citoyen ne nous a pas demandé de tergiverser sur des
juridictions, c'est de régler les problèmes. C'est ça
fondamentalement qu'il demande.
À ce compte-là, M. le Président, j'espère,
je souhaite et je formule le voeu de tout coeur qu'on n'ait plus à
légiférer dans de telles circonstances. Ça n'a pas de bon
sens. Je souhaite également, même si je l'ai dit ce matin, que
cette mentalité qui est en train de s'instaurer au Québec: bouge,
place le gouvernement devant une situation tout à fait affolante, mais
on va régler quelque chose... Il ne faut pas que cette mentalité
gagne du terrain. Il nous faut développer chez nos concitoyens
québécois une mentalité du respect des droits et du
respect des règlements, sinon on vit dans une société
anarchique et une société anarchique, on en connaît tous
les soirs dans les bulletins de nouvelles à la télé. Vous
le savez pertinemment, il y a des sociétés qui
littéralement s'affrontent et se confrontent entre elles, qui cherchent
à se faire justice et qui font fi des lois du pays, du gouvernement.
Ça n'a pas de bon sens.
Je souhaite, M. le Président, que la présente crise fasse
suffisamment mûrir les Québécois pour bien comprendre que
c'est dans l'ordre minimal qu'on doit régler nos problèmes sur le
plan démocratique avec nos institutions, mais qu'elle fasse comprendre
aussi au gouvernement que l'art de gérer un État, d'administrer
un gouvernement, une société, ce n'est pas de gérer les
crises, c'est de faire en sorte d'attaquer les
problèmes dès qu'ils surgissent. il y a autant d'honneur,
de gloire et d'intelligence à éviter une crise que de la
gérer et de tenter de la récupérer. merci, m. le
président.
Le Président: Je cède maintenant la parole à
M. le député de Westmount.
M. Richard B. Holden
M. Holden: Merci, M. le Président. Mr. Speaker, we are
faced with legislation in a forum of crisis. The legislation has been passed
because of the crisis that we all are aware of, a crisis which could have been
avoided, a crisis which, as a matter of fact, the minister who is in charge of
Indian Affairs tried fruitlessly to avoid and whose efforts we praise. We give
all the credit in the world to the member for Mont-Royal for his efforts in
trying to avoid this crisis but he could not do it.
The crisis was precipitated, Mr. Speaker, because the
Sûreté du Québec is out of control. The Sûreté
du Québec acted without political guidance, it acted without legal
guidance, and it acted in a manner which eventually lead to the problems that
we have today. The Sûreté du Québec is one of the prime
problems in our society today and it's got to be controlled.
I am suggesting, Mr. Speaker, that we have a judicial inquiry as soon as
this crisis is over. The judicial inquiry should concentrate on: Why did we
have police violence? Why did we have mob violence? What has happened to the
political control and the legal control of the Sûreté du
Québec?
Mr. Speaker, these are questions that have to be answered and it cannot
be answered by... I asked the question today to the Minister of Justice. All he
said: Yes, we are going to prosecute all these nasty people who threw stones
and these... That is not the way. Mr. Speaker, you and I know that judicial
inquiry is the only avenue whereby we can find out what is really happening in
the Sûreté du Québec. It troubles me greatly, it troubles
my colleagues, and I think it troubles all the members of this House.
The people of Québec, of course, want to know why all of this
crisis, as arisen as the result of somebody wanting to increase a golf club
from 9 to 18 holes. They could have walked around twice and that would have
solved the problem. But no. We have this problem. We want to know, first of
all, why this occurred, what the violence in our society means and we want to
know, Mr. Speaker, what the future holds, whether there will be peaceful
relations between our native people and the residents of Québec.
Quebecers want to know what the future holds for their relations with the
native community. And so, I say to you, Mr. Speaker, obviously, we support the
law. It is part of the cost of the crisis. We are certainly going to vote for
it if there is a vote but it is not the way legislation should be carried on. I
am sure the government does not like being under the gun this way. And we say
to you, Mr. Speaker, and through you, to the Premier and to the minister of
Justice: after this is all over, there has to be a full judicial inquiry to
find out what happened and why.
Merci, M. le Président.
Le Président: Le débat est terminé. En
conséquence, est-ce que la motion de M. le ministre
délégué aux Transports proposant l'adoption du projet de
loi 82, Loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30
entre Châteauguay et Sainte-Catherine, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: Alors, M. le Président, avant que certains
de mes collègues et moi n'allions à la sanction par le
lieutenant-gouverneur de ce projet de loi, je voudrais faire motion pour que
nous ajournions nos travaux à mardi, le 4 septembre, à 13
heures.
Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?
Adopté. En conséquence, l'Assemblée ajourne ses travaux
à mardi, le 4 septembre prochain, à 13 heures.
(Fin de la séance à 18 h 42)