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(Dix heures quatorze minutes)
Le Président: À l'ordre, mesdames et messieurs!
Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Période de questions orales.
M. le député de Jean-Talon.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
Manifestation des étudiants des
cégeps
M. Garneau: M. le Président, comme on le sait, il y a eu
une manifestation des étudiants de cégeps devant le parlement
hier. Je voudrais poser deux questions au ministre de l'Éducation. La
première: On se rappellera qu'au cours des années passées,
alors que l'actuel député de Sauvé siégeait dans
l'Opposition, lorsqu'il y avait des manifestations devant le parlement il
s'empressait d'aller rencontrer les manifestants.
M. Levesque (Bonaventure): Pour les encourager.
M. Garneau: Pour les encourager, justement. Est-ce que le
ministre de l'Éducation s'est rendu devant le parlement pour rencontrer
les étudiants? Et ma deuxième question... Je vais attendre sa
première réponse et je poserai peut-être ma deuxième
question plus tard.
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Morin (Sauvé): Effectivement, dans le passé,
mais non invariablement, je me suis fait un devoir d'aller rencontrer les
étudiants lorsqu'ils me paraissaient défendre des causes
valables. Je continue également de fréquenter
régulièrement les étudiants de tous les niveaux de
l'enseignement. Il n'y a pas si longtemps, j'ai rencontré les
étudiants de plusieurs cégeps et universités auxquels je
suis allé m'adresser.
Des voix: Ce n'est pas cela la question! Oui ou non?
M. Morin (Sauvé): Hier soir, M. le Président, je
siégeais dans un comité interministériel et je
n'étais pas présent au parlement.
M. Caron: Cela a adonné comme cela!
M. Garneau: M. le Président, le ministre de
l'Éducation vient de nous dire qu'il se rendait rencontrer les
étudiants lorsqu'il s'agissait de causes valables.
Étant donné que les étudiants ne réclament
ni plus ni moins que ce que le Parti québécois a promis au cours
de la dernière campagne électorale, est-ce que je dois conclure
que le programme du Parti québécois n'était pas valable?
C'était ma première question et, deuxième question:
Étant donné que c'est justement le programme électoral du
Parti québécois qui est à l'origine des demandes des
étudiants, puisqu'on demande ce qui a été promis, quels
gestes concrets le ministre a-t-il l'intention de poser pour désamorcer
ce conflit qui est engagé depuis un mois et qui dure depuis un peu plus
de deux semaines et pour permettre aux étudiants de sauver leur session
d'études?
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il conviendrait
qu'il fût clair qu'au cours de la dernière campagne
électorale le Parti québécois n'avait pas inscrit la
gratuité scolaire parmi ce qu'on appelle vulgairement ses "promesses
électorales ". Le député de Jean-Talon, je pense, confond
le programme proprement dit et la campagne électorale. Le programme pour
nous demeure, aux articles 14 et 15, un objectif à atteindre. Dans la
mesure où la collectivité disposera des moyens, nous
réaliserons un jour cet objectif du programme, comme d'ailleurs tous les
autres.
Pour ce qui est maintenant de ce que l'État pourrait faire pour
répondre aux questions que nous posent les étudiants, j'ai
déjà dit dans cette Chambre, et je le répéterai
volontiers ce matin, que nous tentons de corriger certaines lacunes du
régime actuel, de façon qu'il corresponde davantage aux besoins
réels des étudiants. Nous reconnaissons je l'ai dit
déjà deux fois ou trois fois dans cette Chambre que le
régime des prêts-bourses n'est pas parfait. La semaine
dernière le Conseil des ministres m'a demandé d'étudier un
certain nombre d'hypothèses. En ce moment, nous terminons l'étude
de quatre ou cinq hypothèses qui sont les suivantes: la réduction
de la contribution des parents; la réduction de la contribution des
étudiants, particulièrement lorsqu'ils sont en chômage
l'été; troisièmement, la possibilité
d'égaliser les frais de subsistance qui sont accordés aux
collégiens et ceux qui sont accordés aux étudiants
universitaires; quatrièmement, la question des familles dites
"monoparentales", c'est-à-dire des étudiants ou étudiantes
qui, bien qu'ayant charge d'enfants, désirent revenir aux
études.
Sur tous ces points, M. le Président, j'aurai sans doute des
choses à annoncer ces jours-ci, mais le Conseil des ministres doit
d'abord se
pencher sur ces hypothèses et en évaluer le coût de
façon très exacte; on m'a demandé d'évaluer toutes
celles-ci à la quatrième décimale, tout simplement parce
que le Québec, à l'heure actuelle, a de nombreuses
priorités dans le domaine économique dans le domaine social et
dans le domaine culturel. Les étudiants doivent prendre leur juste place
parmi ces priorités.
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous venons
d'être témoins de propos tenus par le ministre de
l'Éducation...
M. Lavoie: Additionnelle, mais oui.
M. Levesque (Bonaventure): Elle est additionnelle à la
première, mais elle fait suite à la réponse que je viens
de recevoir.
M. Charron: Elle y fait suite, mais vous n'avez pas droit
à un préambule.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, est-ce que
nous allons assister au genre d'interruptions que nous avons connues hier soir
jusqu'à très tard dans la nuit? M. le Président, ma
question additionnelle est celle-ci et je dois dire que, comme moi, vous avez
entendu la distinction entre campagne et programme: Est-ce que le ministre de
l'Éducation, par cette distinction très subtile et
intéressante qu'il vient de donner à la Chambre entre ce qu'il
appelle la campagne et le programme...
M. Fontaine: Le bon patronage et le mauvais patronage.
M. Levesque (Bonaventure): Pardon?
M. Morin (Sauvé): Désirez-vous des
explications?
M. Levesque (Bonaventure): Non, un instant. Vous êtes bien
nerveux ce matin.
M. Morin (Sauvé): C'est facile, je puis vous en
donner.
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Levesque (Bonaventure): Nous avons toute la journée.
Est-ce que le ministre de l'Éducation voulait dire par là,
lorsqu'il a fait cette distinction, que c'était une distinction qui
pourrait s'apparenter à celle-ci: la campagne,
fédéralisme; le programme, séparatisme? C'est cela? C'est
ce genre de distinction? Est-ce que le ministre de l'Éducation pourrait
nous dire si c'est ce qui se trouve dans le programme ou dans la campagne qui
fera la base des suggestions qu'il doit faire au Conseil des ministres?
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je pense que le
chef de l'Union... le chef de l'Opposition, dis-je...
M. Levesque (Bonaventure): ... ce matin.
M. Morin (Sauvé): C'est tout simplement qu'il me semble
que, par moments, vous tenez des raisonnements dont on a avantage l'habitude de
ce côté-là.
M. le Président, le chef de l'Opposition sait très bien,
lui qui est dans la vie politique depuis sans doute trop longtemps, qu'il y a
des objectifs qui se situent à l'horizon de quatre ans ou davantage et
qui constituent le programme d'un parti politique. Par exemple, si pendant
votre dernier mandat, vous aviez exécuté tout ce que contient
votre programme politique, vous ne seriez pas de ce côté-là
de la Chambre. N'est-ce pas?
M. Garneau: ... vous autres non plus.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, est-ce que je
dois comprendre des propos que vient de tenir le ministre de l'Éducation
qu'il approuve entièrement le programme du Parti libéral?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il y a des
éléments dans le programme du Parti libéral qui, s'ils
étaient sincères et s'ils avaient été mis en
oeuvre, feraient en sorte que vous seriez peut-être encore de ce
côté-ci. Cependant, vous n'avez pas, que je sache, mis en oeuvre
tout votre programme. Eh bien! dans une campagne électorale, il y a des
objectifs immédiats, des engagements précis que prend un
gouvernement. Voulez-vous que je vous donne des exemples d'engagements
précis que nous avions pris au cours de la dernière campagne
électorale?
M. le Président, premièrement, des caisses
électorales propres; deuxièmement, l'assurance automobile!
Troisièmement...
Le Président: M. le ministre de l'Éducation!
M. Morin (Sauvé): ... la protection des terres
agricoles.
Le Président: M. le ministre de l'Éducation,
puis-je vous inviter à tirer les conclusions immédiatement.
M. Morin (Sauvé): Quatrièmement, M. le
Président, l'abolition des tests linguistiques;
cinquièmement...
Le Président: M. le ministre de l'Éducation,
à l'ordre, s'il vous plaît! Il y a des députés,
même parmi vos collègues, qui voudraient formuler des questions ce
matin et je voudrais qu'on raccourcisse un peu.
M. Morin (Sauvé): Je pourrais continuer
l'énumération. Nous avions pris sept ou huit engage-
ments, promesses électorales, comme on les appelle
communément, mais nous les avons tenues. Notre plus grande promesse,
c'était de régler la question de la
souveraineté-association, évidemment; et cela viendra à
l'heure qui conviendra.
M. le Président, ceci pour dire qu'on doit faire une distinction
entre les objectifs immédiats qu'on se propose de réaliser dans
les deux premières années de son mandat et les impératifs
d'un programme qu'on peut très bien réaliser dans un délai
de quatre ou de six ans.
Le Président: M. le député de Jean-Talon.
Une dernière question.
M. Garneau: M. le Président, l'assurance automobile qui a
été promise n'est pas celle qui a été
réalisée.
M. Levesque (Bonaventure): C'est vrai.
M. Garneau: C'est exactement ce qui s'est produit. On pourrait
reprendre chacun...
M. Lévesque (Taillon): Sur une question de
privilège, je pense, qui est indiquée, c'est que je me souviens
d'avoir véhiculé ces engagements que vient d'évoquer le
ministre de l'Éducation et justement, on avait dû, en
première étape déjà adapter dans cet engagement ce
qui apparaît au programme du parti. Je me souviens d'avoir parlé
partout, d'abord et avant tout d'une étape en ce qui concerne les
dommages corporels, et c'est celle qui est faite.
M. Garneau: On peut reprendre le débat sur l'assurance
automobile. Il serait facile...
Le Président: M. le député de
Jean-Talon.
M. Garneau: II serait facile de contredire ce que le premier
ministre vient de dire. Il s'agit de relire les journaux.
Le Président: M. le député de Jean-Talon,
s'il vous plaît, on est loin des cégeps, ce matin.
M. Garneau: On est loin des cégeps, mais c'est le ministre
de l'Éducation qui a ouvert le débat. Personnellement, je serais
prêt à le reprendre sur presque chacun des articles,
peut-être à l'exception d'un. Qu'il ne vienne pas me dire que les
tests linguistiques ont été réglés avec sa loi
telle qu'il l'a présentée. Je voudrais revenir, M. le
Président, aux cégeps. Le ministre vient de nous dire qu'il ne
s'agissait pas d'un engagement précis. M. le Président,
dès l'année dernière alors qu'ils étaient au
pouvoir... Oui, mais il nous dit que c'est un engagement à long
terme.
M. Lavoie: Quand même, il y a toujours une limite.
M. Garneau: Lors de l'étude des crédits de 1977, le
ministre disait qu'il était à étudier ces questions dont
il parle aujourd'hui. Lors de l'étude des crédits de la
dernière année où il a été dans
l'Opposition, il nous disait que $40 millions pour la gratuité scolaire,
c'était une "peanut". S'il y a deux ans, c'était possible,
pourquoi ne le réalise-t-il pas dans son programme électoral
cette année? Ce n'étaient pas des objectifs dans dix ans
cela!
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, si le
député de Jean-Talon peut trouver dans les Débats la
phrase où j'affirme que $40 millions, ce sont des "peanuts", je le mets
au défi de la citer. Je n'ai jamais dit cela.
M. Garneau: Est-ce que M. le ministre me donne cinq minutes pour
aller chercher sa citation?
M. Morin (Sauvé): M. le Président...
M. Garneau: Est-ce que le ministre me donne cinq minutes pour
aller chercher sa citation?
M. Morin (Sauvé): Si le député de Jean-Talon
veut soutenir que la question des tests linguistiques n'est pas
réglée, je suis prêt également à souteni r le
débat. La question des tests linguistiques est réglée
puisqu'il n'y en a plus. C'est aussi simple que cela.
Le Président: Mme le député de L'Acadie.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, me
permettez-vous d'ajouter encore une chose? Le député de
Jean-Talon a fait dévier quelque peu le débat. Me permettez-vous
d'ajouter que, si le député de Jean-Talon veut
reconsidérer son vote sur l'assurance automobile, il est le
bienvenu?
M. Garneau: M. le Président, je voudrais simplement
revenir à ma question parce que le débat, si vous le permettez,
on peut l'ouvrir à l'ensemble des programmes électoraux. Je
serais prêt personnellement, ayant débattu ces questions en 1976,
à les reprendre avec le député de Sauvé. Mais,
étant donné que ce sont les cégeps qui sont en cause
présentement, que notre période des questions ne nous permet pas
de s'étendre trop trop là-dessus, je voudrais revenir à ma
question.
Étant donné que le ministre a déjà dit que
$40 millions dans le budget de l'Éducation c'était quand
même minime, est-ce que le ministre ne pourrait pas aujourd'hui
compléter, au nom de son gouvernement, cet engagement qu'il a pris alors
qu'il était dans l'Opposition et qu'il a semblé vouloir dire
être à l'étude en 1977 cela fait déjà
presque deux ans et est-ce que le ministre n'aurait pas quelque chose
à dire bientôt pour permettre de désamorcer ce conflit?
Parce qu'on peut bien arrêter les chicanes politiques, mais il faut quand
même que ce conflit soit désamorcé si on ne veut pas que
les étudiants perdent leur
année. Lui qui avait toutes les solutions lorsqu'il
siégeait de ce côté-ci, il devrait en trouver une. (10 h
30)
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je me trouverai
d'accord avec le député de Jean-Talon pour dire qu'il est grand
temps que ces événements prennent fin et que les étudiants
retrouvent le chemin de leurs salles de cours. Je pense que tous les
étudiants consciencieux, les parents dans tout le Québec et les
éducateurs le souhaitent également. La décision, je l'ai
dit hier, est entre les mains des étudiants en ce moment. Ce sont eux
qui prennent les décisions quant à leur avenir, celle-là
comme les autres.
M. le Président, je me permettrai de poser une question au
député de Jean-Talon.
Une voix: M. le Président!
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Morin (Sauvé): II a l'air de penser que nous devrions,
sans scruter les chiffres, répondre par un oui massif. Appuie-t-il les
demandes de l'ANEQ?
M. Garneau: M. le Président, le député de
Sauvé m'a posé une question, je vais lui répondre ceci: Au
moment où on était de l'autre côté, on a
apporté les réponses qui étaient les plus
appropriées. Vous n'avez pas cru dans ces réponses et vous avez
fait des promesses irresponsables. Bien, respectez-les aujourd'hui, c'est votre
engagement à vous.
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Morin (Sauvé): Le député de Jean-Talon
j'utiliserai le langage de l'Opposition n'a pas répondu
à ma question.
M. Garneau: Je vais répondre à sa question, M. le
Président.
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Garneau: Ce n'est plus nous autres qui sommes au pouvoir, ce
sont les gens du Parti québécois et je vais lui dire ceci. Alors
qu'on était au pouvoir on a tenu des propos sérieux, que vous
tenez maintenant, et alors que vous étiez dans l'Opposition, vous avez
promis mer et monde. La Commission des jeunes libéraux du Québec
a fait connaître notre position là-dessus et nous n'appuyons pas
les demandes telles que formulées par l'ANEQ, demandes qui correspondent
à votre programme électoral de 1976.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, non, tout de
même! Cette dernière affirmation du député passe les
bornes.
Une voix: À l'ordre, à l'ordre, cela va faire,
là!
Le Président: M. le ministre de l'Éducation, on ne
va pas changer de côté.
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme Lavoie-Roux: Additionnelle, M. le Président.
Le Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Grenier: Additionnelle, M. le Président.
Le Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Grenier: En additionnelle, M. le Président.
Le Président: Pas en additionnelle, question
principale.
M. Grenier: M. le Président, j'ai droit à une
question additionnelle...
Le Président: M. le député de
Mégantic-Compton, parce que votre collègue, le
député de Nicolet-Yamaska, m'a demandé aujourd'hui
lui-même de lui réserver du temps, précisément pour
pouvoir rejoindre le député de Bellechasse, pour cette raison je
veux couper les questions additionnelles, y compris pour Mme le
député de L'Acadie.
M. Grenier: L'événement qui s'est produit hier soir
dans notre Parlement mérite d'être signalé au ministre.
Je vais soulever une question de règlement, si vous ne me
permettez pas une question, M. le Président.
Le Président: M. le député de
Mégantic-Compton, vous pouvez poser une question additionnelle.
Mme Lavoie-Roux: Vous m'avez refusé une question
additionnelle.
M. Grenier: D'abord, je voudrais corriger le propos du
député de Jean-Talon. Le ministre, lorsqu'il s'est engagé
pour 40 millions de "peanuts ", a dû dire dans le temps des arachides.
C'est à propos de l'événement qui s'est produit hier soir
ici. Alors qu'on s'était engagé bien honnêtement dans le
programme, aux articles 14 et 15, à la gratuité scolaire, on n'en
tient pas compte. L'autre engagement que ce gouvernement a pris, c'était
que le parlement était la maison des Québécois. Pourquoi,
sur un ordre du ministre de la Justice, hier soir, manu militari, a-ton
expulsé du parlement l'exécutif de l'ANEQ? Manu militari.
M. Bédard: Franchement, vous employez des expressions pour
faire image.
M. Grenier: Non, non, non! La tète sur les marches, les
étudiants, hier soir.
M. Burns: À l'ordre, À l'ordre!
M. Bédard: Laissez-moi répondre. Hier, il y avait
une manifestation et plusieurs centaines de manifestants. Dans ce
cas-là, comme dans n'importe quel autre cas, il y a eu des mesures de
sécurité normales qui ont été prises dans les
circonstances.
Le Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: J'ai une question principale à poser au
ministre des Affaires municipales. C'est une question qui touche la
construction...
Le Président: À l'ordre! M. le député
de Notre-Dame-de-Grâce.
Logements pour personnes âgées ou
à faible revenu
M. Scowen: ... et surtout la construction des logements. C'est
une question qui touche également les promesses du Parti
québécois, les promesses électorales dont a parlé
le ministre de l'Éducation tantôt. Avant et après
l'élection, le Parti québécois s'engageait à
créer un programme accéléré pour la construction de
logements pour les personnes âgées et les personnes à
faible revenu. Il l'avait chiffré, d'une façon très
précise, à 7 000 logements par année. C'est en plus des
nouveaux logements du secteur privé et les rénovations. 7 000 par
année, programme accéléré. Pour 1977, on en a
complété 3200 à peu près et, cette année,
pendant les dix premiers mois, on en a complété 1085.
Une voix: Grosse augmentation!
M. Scowen: Quand j'ai posé des questions là-dessus
au ministre, récemment, il parlait de mise en chantier. Il dit que cela
prend du temps à faire la construction. Mais cela fait
déjà deux ans et ce n'est pas à cause du
fédéral ni du Parti libéral. Sur la question de la mise en
chantier, le ministre disait qu'il en avait mis en chantier cette année
5010, et une semaine après, le premier ministre disait qu'il en avait
mis entre 8000 et 10 000 en chantier. J'ai trois questions, M. le
Président. La première est: Avec 1085 logements
complétés pendant les dix premiers mois de 1978, combien en
prévoyez-vous pour l'année complète de 1978; combien de
logements nouveaux pour les personnes âgées et les personnes
à faible revenu seront complétés cette année?
Deuxièmement, quel est le vrai chiffre de mises en chantier; celui du
premier ministre qui est de 8000 à 10 000 ou le vôtre qui est de
5010? Troisièmement, puisque les gens ne peuvent pas vivre dans un
chantier de construction, combien seront complétés en 1979?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Tardif: M. le Président, hormis de donner des ordres de
grandeur, je vais prendre avis de la question pour donner des chiffres
précis au député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: M. le Président...
Le Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Les chiffres que j'ai cités ce matin sont, au
complet, les chiffres qui m'ont été donnés par le
ministre, il y a trois semaines, lors d'une question avec débat.
M. Tardif: M. le Président...
Une voix: Question de règlement.
M. Léger: Ce n'est pas une question de
règlement.
Une voix: C'est le ministre qui a la parole!
M. Tardif: II ne s'agit pas d'une question de règlement ni
d'une question de privilège. Le député de
Notre-Dame-de-Grâce a déjà eu réponse à
toutes ces questions lors de l'interpellation, un vendredi matin. Notre
règlement dit bien que lorsque des recherches sont requises pour fournir
des données précises, à une unité près, je
ne suis pas en mesure de les donner maintenant puisque, encore la semaine
dernière, 400 logements étaient mis en chantier dont 200
précisément sur le territoire de l'île de Montréal,
une centaine dans la région de l'Estrie et d'autres unités dans
la région de Québec. Or, j'ai dit: Pour donner des chiffres
précis. Ce que je peux donner, ce sont des ordres de grandeur
présentement et dire qu'actuellement le stock ou le parc immobilier de
la Société d'habitation du Québec de logements sociaux se
compose de 24 500 unités de logement. Lorsque nous sommes
arrivés, il y a deux ans, il était de 19 700. Ce sont les
logements occupables. Il y a donc eu une augmentation d'à peu
près 5000 logements sociaux.
Une voix: Vous les avez achetés, vous ne les avez pas
bâtis!
M. Tardif: Cela exclut le projet Val-Martin. Il y a eu un achat
inclus, précisément. Deuxième élément de
réponse, il y a présentement en chantier, au moment où
nous nous parlons, à peu près 100 chantiers de construction au
Québec, plus de 5000 logements sociaux en chantier, cela ne s'est jamais
vu au Québec.
Troisième élément de la réponse, il y a
présentement dans le moulin le député de Laval
préfère parler de la machine à saucisses; c'est vrai que
c'est connu de même dans le milieu plus de 10 000 logements
à divers stades, dont ceux de l'acquisition de terrains, de la
préparation de plans et devis et autres. Ce que je voudrais souligner
ici, ce sont les moyens utilisés pour écourter ces délais.
L'un d'eux a été la préfabrication, évidemment, et
d'autres méthodes, comme celle de la
répétition de projets, qui ont été
utilisées. J'en veux comme preuve un seul élément
récent, à savoir que des logements mis en chantier en 1977 dans
un cas sont maintenant habitables et que des logements annoncés dans le
comté de Bellechasse pour la programmation de 1978, au mois de juin
dernier, sont en chantier aujourd'hui. Il y a eu une accélération
de la production de logements. Il y a des phases, cependant, et je voudrais
terminer là-dessus... (10 h 40)
C'est faux, il n'y a jamais eu autant de logements que cela construits
au Québec. Il y en aura plus en l'espace de quatre ans que dans les dix
années antérieures. Je voudrais terminer, M. le Président,
en disant qu'une des phases qui effectivement prend du temps, aussi paradoxal
que cela parraisse, ce n'est pas la phase construction; c'est la phase de
l'acquisition de terrains. C'est terrible, ce qu'il peut y avoir de
grenouillage pour nous suggérer des terrains, à tel point que le
ministre des Affaires municipales, après avoir demandé aux
municipalités de nous fournir trois hypothèses de terrains pour
l'implantation d'un HLM, a finalement décidé de demander en sus
toutes les transactions dont ces terrains avaient fait l'objet au cours des
cinq dernières années, le nom des acquéreurs et le prix.
Nous avons eu tout à coup des municipalités qui ont changé
leurs suggestions de terrains.
Le Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: La question que j'ai posée était
relative à deux choses, les besoins réels et les promesses. En ce
qui concerne les besoins réels, M. le Président, il existe
aujourd'hui 20 000 personnes sur la liste d'attente pour ces logements, 20 000
personnes à faible revenu et des personnes âgées. Les
promesses étaient de 7000 par année. La réalisation: en
janvier, nulle; en février, 105...
Le Président: Puis-je vous inviter à formuler votre
question?
M. Scowen: ... en mars, 197. La question que je pose et je la
repose: Par rapport à votre promesse de 7000 logements par année,
combien allez-vous en compléter en 1998. Quel est le chiffre? Un seul
chiffre, c'est suffisant.
Une voix: 1978.
M. Scowen: Cette année, 1978. Combien pour l'année
prochaine? Sur votre promesse de 7000, combien il y en aura cette année
et combien l'année prochaine?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales,
brièvement.
M. Tardif: M. le Président, évidemment, on sera
encore là à ce moment et on pourra produire exactement le nombre
de logements requis, plutôt que de sortir notre boule de cristal
et...
Une voix: II fait de l'humour, il est drôle.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le ministre des Affaires municipales.
M. Tardif: Le député de Notre-Dame-de-Grâce a
parlé de promesses de construction de 7000 logements par le Parti
québécois, en campagne électorale. Je vais lui
prêter un minimum d'intelligence et lui demander...
Une voix: Ah!...
M. Tardif: Oui, c'est cela. Parce que je lui ai expliqué
tout cela en commission parlementaire et il ne semble pas comprendre que les
chiffres de 7000 logements utilisés en 1976 étaient basés
sur des projections démographiques du Québec au cours des
dernières années. Or, ces projections démographiques,
quant au nombre de besoins de logements, ne sont plus les mêmes
aujourd'hui qu'elles étaient il y a quelques années. La
population du Québec plafonne. L'accroissement des logements a
continué pendant un certain temps, indépendamment de la baisse,
c'est-à-dire de la diminution de l'augmentation de la population en
raison de ce qu'on appelle la formation des ménages non familiaux. Mais
cela aussi plafonne, M. le Président, de sorte que les besoins en
logements ne sont plus les mêmes qu'ils étaient à ce
moment-là. Il suffit de voir certains surplus dans des
sous-marchés précis de logements pour constater que les besoins
ne sont pas de cet ordre de grandeur.
M. Scowen: Question additionnelle, M. le Président.
Le Président: Je regrette. Il y a trente minutes
d'écoulées et l'Union Nationale n'a pas encore eu de question.
Alors, je suis obligé de passer à l'Union Nationale.
M. le député de Bellechasse.
Activité des chantiers maritimes
M. Goulet: Merci, M. le Président. Nous savons que,
présentement, les chantiers maritimes Davie, de Lauzon, emploient 1100
ouvriers sur une possibilité de 2500. Si le carnet de commandes ne
grossit pas, on craint des mises à pied sous peu. On sait
également, M. le Président, que Marine Industrie, de Sorel,
à laquelle le gouvernement est directement intéressé par
le biais de la SGF, fonctionne à pleine capacité avec environ
2700 hommes. L'an passé, à pareille date, en réponse
à l'une de mes questions concernant les difficultés
éprouvées par la Davie et dues au manque de contrats de
fabrication, le ministre d'État au développement
économique terminait sa réponse en disant: "II y a
également le ministère des Transports du Québec qui est le
ministère de tutelle de la Société des traversiers du
Québec que nous avons alerté à ce sujet et qui serait
susceptible de fournir du travail à la Davie.
M. le Président, je veux savoir du ministre s'il est au courant
que l'on vit actuellement le même problème à la Davie que
l'an passé et si c'est son intention de faire pression auprès de
son collègue, le ministre des Transports, afin qu'il octroie à la
Davie de Lauzon le contrat pour la traverse de Tadoussac, contrat que le
gouvernement québécois doit octroyer sous peu pour la
construction de deux bateaux passeurs d'une valeur de $5 millions chacun.
Le Président: M. le ministre d'État au
développement économique.
M. Landry: On épargnerait le temps de la Chambre si le
principal intéressé répondait directement. Je pense que la
question s'adresse plus au ministre des Transports, bien que nous soyons
conscients de l'importance économique de la question soulevée par
le député.
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Lessard: M. le Président, il est exact que le
ministère des Transports a l'intention de donner à contrat la
construction de deux bateaux soit par l'une ou l'autre des deux compagnies
existantes actuellement, soit Marine Industrie ou Davie Shipbuilding.
Actuellement, les plans et devis de chacun de ces contrats ont
été transmis aux deux compagnies intéressées et
nous attendons des soumissions.
Le Président: M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: M. le Président, au mois de septembre dernier,
la Société des traversiers du Québec demandait à
ces compagnies de produire des plans. Dernièrement, la Davie de Lauzon a
produit des plans, c'est-à-dire que le représentant de la
société faisait savoir aux gens de la Davie, de façon non
équivoque, que les plans et la soumission de la Davie décrivaient
adéquatement et exactement le type de navires qu'ils
désiraient.
Or, le seul concurrent de Davie étant Marine Industrie, le
ministre peut-il nous assurer que Davie ne sera pas défavorisée
par le fait que le gouvernement du Québec, qui assumera le coût de
ces deux navires, soit en même temps propriétaire du concurrent de
la Davie? C'est ce que je voudrais savoir du ministre.
M. Lessard: Je suis prêt, au nom du gouvernement du
Québec, à donner cette assurance que Davie Shipbuilding ne sera
pas pénalisée vis-à-vis de Marine Industrie.
Le Président: M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Question additionnelle. Le ministre ne croit-il pas
qu'il serait inacceptable pour la Davie, qui a dépensé
près de $100 000 pour la conception et l'étude technique de ces
navires, de les voir construire ailleurs à même ses propres plans
et devis? Le ministre ne croit-il pas égale- ment que l'octroi de ce
contrat compenserait pour le manque à gagner de la Davie alors que son
concurrent, propriété du gouvernement, bénéficiera
d'une subvention de $140 millions que lui accordera éventuellement la
loi 108? Le ministre ne croit-il pas que le gouvernement devrait
également penser aux travailleurs de Lauzon, de Lévis, de
Bellechasse et des comtés avoisinants qui, eux aussi, ont droit au
travail, même s'ils ne travaillent pas pour une société
d'État?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Lessard: M. le Président, de même que j'ai
annoncé que Davie Shipbuilding ne serait pas pénalisée
vis-à-vis de Marine Industrie, j'annonce aussi que Marine Industrie ne
pourra être pénalisée vis-à-vis de Davie
Shipbuilding.
Le Président: M. le député de
Pointe-Claire.
Exode des diplômés anglophones et
francophones
M. Shaw: Mr President, my question is addressed to the minister
responsible for cultural development who recently deposited a report suggesting
that 39% of anglophone graduates from the province of Québec were
leaving and 5% of francophone graduates were also leaving the province. These
figures are far lower than those of the test studies that we have done; for
example, an anglophone graduate, our test studies have shown an excess of 65%
of anglophone graduates leaving the province and, among francophone graduates,
an excess of 17,5%. Could the minister, please, deposit the source material of
his study and try to explain to me why there is such a differential between the
two studies? (10 h 50)
Le Président: M. le ministre d'État au
développement culturel.
M. Laurin: M. le Président, ces études sont
basées sur des recherches subventionnées par l'Office de la
langue française. D'ailleurs, elles sont conduites depuis plusieurs
années et elles vont se continuer parce que nous avons besoin de faire
l'état, de temps à autre, de la situation. Je dirais qu'il est
difficile, à première vue, d'expliquer cet écart, mais je
pense qu'il est connu, il est de notoriété publique que McGill a
toujours reçu des étudiants des autres provinces canadiennes et
des États-Unis. Il a toujours été connu qu'une fois
reçus ces diplômés retournent souvent dans les provinces
canadiennes ou aux États-Unis. Par ailleurs, même pour les
diplômés anglophones québécois qui vont poursuivre
leurs études à McGill, il est toujours entendu qu'ayant un
diplôme de McGill en poche il est plus facile d'obtenir des emplois bien
rémunérés, prestigieux dans les autres usines ou
entreprises canadiennes ou américaines.
En conclusion, les diplômés anglophones sont beaucoup plus
mobiles que les diplômés
francophones en raison de ce circuit d'information
privilégié dont M. Arnaud Sales a parlé dans des
études qui ont été publiées l'an dernier et qui
fait que, dans cette sorte de "family compact" des entreprises anglophones au
Canada, il est beaucoup plus faciie pour un diplômé anglophone,
surtout venant d'une université prestigieuse, de se trouver des postes
à la mesure de ses goûts ou à la mesure de ses ambitions
dans tout le marché canadien et nord-américain. Je pense que
c'est l'explication la plus plausible pour cet écart. Il y a une autre
dimension, évidemment, qu'il importe de considérer. Il reste que
tous ces diplômés, tous ces étudiants poursuivent leurs
études à McGill à même les fonds des contribuables
québécois. Il y a là un élément de
responsabilité qu'il importe d'examiner de plus près, que nous
étudions actuellement, sur lequel nous n'avons pas encore de conclusions
à apporter, mais c'est sûrement une dimension sérieuse
qu'il importe de considérer.
Le Président: M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: In following the same line, the study has shown that 65%
of these anglophone graduates leaving have a better than working knowledge of
French. Is the Government interested, is it going to demonstrate in any way
that any of the areas of "la fonction publique, la Sûreté du
Québec", the public corporations such as SIDBEC-DOSCO or the large
Hydro-Québec, are opening, going to be made available for these
anglophone graduates to work in Québec even though they are
bilingual?
Le Président: M. le ministre d'État au
développement culturel.
M. Laurin: Je ne suis pas aussi sûr que le
député de Pointe-Claire que tous ces diplômés ont
une connaissance d'usage de la langue française. Je pense qu'ils sont
convaincus maintenant de la rentabilité du français, du
caractère essentiel et indispensable du français pour travailler
dans les entreprises québécoises. J'espère que leur
conviction va s'enraciner au cours des prochaines années. À cette
condition je l'ai déjà dit et je le répète
il n'y a aucune objection à ce que ces diplômés
trouvent leur place dans tous les organismes d'État et dans la fonction
publique. Ils sont les bienvenus. Nous espérons qu'ils seront de plus en
plus nombreux. Il n'y a jamais eu de numerus clausus de ce côté.
Du côté de la fonction publique, nous avons mis sur pied un
comité avec mon collègue de la Fonction publique actuellement
pour faciliter cette intégration de la population, des
diplômés anglophones dans la fonction publique.
Nous serions très heureux que cela s'effectue, mais il faut
admettre que, jusqu'ici, les diplômés anglophones ne manifestaient
pas un très grand intérêt pour la fonction publique
québécoise et même pour les organismes d'État,
étant donné que le secteur privé, en raison de cette
mobilité dont je vous parlais tout à l'heure et de ce cicuit
d'information privilégié, leur était largement ouvert.
C'est parce que ce marché commence peut-être à être
quelque peu saturé que maintenant ils commencent à regarder vers
d'autres secteurs. Ils sont les bienvenus et nous faciliterons de toutes les
façons possibles leur intégration.
Le Président: M. le député de
Deux-Montagnes.
Grève au Montreal Star
M. de Bellefeuille: M. le Président, je désire
poser une question au ministre du Travail. Depuis six mois, à cause d'un
conflit de travail au Montreal Star, la population de la métropole est
privée d'un de ses principaux moyens d'information. Je voudrais demander
au ministre du Travail s'il pourrait nous dire quel est l'état du
dossier de cette grève qui perdure.
Le Président: M. le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre.
M. Johnson: M. le Président, je comprends que le
député de Deux-Montagnes, rédacteur du Montreal Star, est
préoccupé...
M. de Bellefeuille: Question de privilège, M. le
Président. Je suis collaborateur à la Gazette de Montréal
et non pas au Star.
M. Johnson: Raison de plus pour voir là un conflit
d'intérêts.
M. le Président, sérieusement, pour revenir à la
question du Montreal Star, on sait que c est un conflit en effet qui implique
les pressiers. On sait également je ne sais pas si je l'ai
évoqué dans cette Chambre, la semaine dernière
qu'il semble que l'immense majorité des pressiers du Montreal Star
soient en ce moment à l'emploi du journal La Gazette, ce qui,
évidemment, ne simplifie pas le rapport de force, entre guillemets, qui
puisse exister entre le Star et la Gazette. D'autre part, les changements
technologiques, encore une fois, comme on l'a déjà dit, sont au
centre de ce problème dans la négociation, c'est-à-dire
les conséquences, finalement, en termes de mise à pied, de
sécurité d'emploi pour les pressiers, à cause de la venue
d'une technologie nouvelle.
Une voix: .. à cause des pressiers.
M. Johnson: Nous travaillons pour faire en sorte que ce soit
réglé, sauf que pas plus là que dans d'autres conflits, le
ministère ne peut prendre la place des parties. M. Valois, du
ministère, a consacré presque exclusivement le dernier mois
à tenter de ramener les parties à la table et à se parler
un peu. Je pense qu'il fait plus que le travail qu'on peut s'attendre
normalement d'un conciliateur, d'une part. Deuxièmement, au moment
où nous nous parlons, la direction du Star rencontrait le syndicat des
pressiers en présence de notre conciliateur à compter de 10 h 25,
ce matin.
Le Président: M. le député de
Saint-Hyacinthe.
Réforme de la fiscalité
municipale
M. Cordeau: Ma question s'adressait au ministre des Finances,
mais étant donné qu'il n'est pas là, je m'adresserai au
ministre des Affaires municipales.
Dans le cadre de la réforme de la fiscalité municipale, un
comité conjoint à été formé en vue
d'établir les principes d'une nouvelle répartition de
l'impôt foncier. Cedit comité devait vous remettre ce rapport pour
le 1er décembre dernier. M. le ministre, nous aimerions savoir si ce
rapport vous a été soumis. Dans l'affirmative, quel en est son
contenu? Avez-vous l'intention de rendre public ce document final
rédigé par ce comité conjoint, qu'il soit favorable ou non
à la thèse mise de l'avant par le gouvernement?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Tardif: M. le Président, il me fait plaisir d'informer
cette Chambre qu'effectivement, le comité a terminé son travail
vendredi dernier, que le rapport a été paraphé par les
deux principales associations intéressées du monde municipal,
à savoir l'Union des municipalités et l'Union des conseils de
comté, que le rapport est sous presse et que, d'après mon agenda,
il me sera remis à midi le vendredi 8 décembre.
Le Président: M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Est-ce que vous avez l'intention de le rendre
public?
M. Tardif: II me paraît évident que c'est un
document qui doit être rendu public le plus rapidement possible et le
plus complètement possible.
Le Président: Fin de la période... M. Cordeau:
Une petite question.
Le Président: Dernière question, M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Merci, M. le Président. Est-il exact que les
problèmes de subventions, tant aux petites municipalités qu'aux
très grandes communautés régionales, ont été
confiés à un nouveau comité? Dans l'affirmative, le
ministre peut-il nous informer qui fera partie de ce comité, quel sera
son mandat et à quelle date il devrait faire rapport?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Tardif: Je crois avoir dit qu'on ne m'a pas remis le rapport
encore. Je sais qu'on en est arrivé à un accord sur l'essentiel
et que le rapport me sera remis officiellement le vendredi 8 décembre
à 12 heures. Je ne connais donc pas les conclusions. Je sais qu'il y a
quelques fils qui pendent encore. Le comité est d'avis que, de toute
façon, que l'on ait réglé ou ficelé, toutes les
cordes ou qu'il y en ait encore qui pendent, il est préférable
que ce comité puisse continuer de se réunir. Mais, encore une
fois, ce serait préjuger pour moi. Le député semble avoir
des renseignements de bonne source. J'ai laissé entière
liberté à ce comité pour faire son travail. Je n'ai donc
pas reçu officiellement ce rapport, je l'aurai vendredi, et j'invite
même le député de Saint-Hyacinthe à être
présent à la remise, si cela l'intéresse.
Le Président: Fin de la période de questions. Nous
en sommes aux motions non annoncées.
M. Grenier: M. le Président, avant la période des
motions non annoncées, je pense que le ministre de la Justice est
prêt à entrer dans une seconde, le premier ministre s'est
engagé hier à faire rapport au ministre de la Justice. J'aimerais
savoir, dans le cas de Jeanne ou Claude Valence, si le ministre peut fournir de
plus amples informations à ma question d'hier. (11 heures)
Le Président: Êtes-vous disposé à
fournir un complément de réponse, M. le ministre de la
Justice?
M. Bédard: Concernant la question qui a été
posée par le député de Mégantic-Compton, je
désire, M. le Président, me prévaloir du paragraphe 1er de
l'article 172 de notre règlement, étant donné qu'il s'agit
d'une question qui porte, à l'heure actuelle, sur une affaire qui est
actuellement devant les tribunaux. Je ne vois pas comment je pourrais faire de
commentaire.
Le Président: Motions non annoncées.
Enregistrement des noms sur les votes en suspens.
Nous en sommes aux réponses aux questions du feuilleton.
Mme le député de L'Acadie.
Travaux parlementaires
Mme Lavoie-Roux: En vertu de l'article 34, j'aimerais demander au
leader du gouvernement si, à quelques heures du début du
débat en deuxième lecture de la loi 84, il a l'intention
d'appeler une commission parlementaire, suite à cette deuxième
lecture.
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Charron: La décision sera prise par le Conseil des
ministres dans quelques minutes, puisque nous nous réunissons
après la période de questions. J'informe Mme le
député que je ferai
une recommandation favorable pour qu'il y ait au moins une
journée de commission parlementaire sur ce projet de loi, pour inviter
ceux qui se sont exprimés.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président. Le
Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Je crois que nous devons nous
réjouir de cette recommandation du leader parlementaire du gouvernement.
Nous lui avions déjà fait connaître nos intentions à
ce sujet et je pense que nous devons en effet dire que nous sommes satisfaits,
que la nuit porte conseil et que le gouvernement a jugé à propos
d'entendre ces gens en commission parlementaire.
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales, en
vertu de l'article 34?
M. Lazure: Pour compléter l'intervention du leader, nous
nous sommes consultés ce matin. Contrairement au projet de loi 103 pour
lequel l'Opposition, la nuit dernière, demandait une commission
parlementaire qui n'était réclamée par personne, dans le
cas du projet de loi 84, où il y a un regroupement qui demande une
commission parlementaire, nous acceptons avec plaisir, dans un cadre
réduit, c'est-à-dire au cours d'une journée, de recevoir
les quatre groupements intéressés qui ont manifesté,
à l'intérieur d'un front commun, le désir de nous
rencontrer.
M. Levesque (Bonaventure): J'espère que le ministre ne
veut pas dire, par cadre réduit, que cette réduction va faire en
sorte que c'est le ministre qui décidera des personnes, du temps, etc.
Un instant!
M. Charron: Si je peux compléter ma réponse, cadre
réduit veut dire ceci: II n'y aura pas de délai de convocation,
etc., nous allons simplement et je le ferai en cours de séance
aujourd'hui après le Conseil des ministres indiquer quelle
journée, d'ici le 21 décembre, nous réservons pour
entendre les quatre organismes qui se sont exprimés et qui sont les
seuls, jusqu'à ce jour, à avoir demandé une commission
parlementaire.
Le Président: M. le député de
Maskinongé, en vertu des dispositions de l'article 34.
M. Picotte: En vertu de l'article 34, j'avais demandé au
leader parlementaire, il y a une quinzaine de jours, s'il avait l'intention
d'entendre tel qu'ils l'avaient demandé les organismes
concernant la loi 71 avant la deuxième lecture. Il m'a dit qu'il
consulterait son collègue, le leader adjoint. Conservation de la faune.
Est-ce qu'il peut me donner une réponse maintenant, si une
décision a été prise à cet effet? A-t-il
l'intention d'entendre les parties?
M. Charron: Non, nous appellerons avant la fin du mois,
également, cette loi en deuxième lecture. Le ministre aura
l'occasion, dans son intervention, d'expliquer pourquoi, après toute la
large consultation qui a été faite avant de l'amener sous forme
législative devant l'Assemblée, nous n'avons pas l'intention
d'aller en commission parlementaire.
Le Président: M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: J'aimerais savoir ceci du leader parlementaire, vu
qu'il semble qu'on se dirige vers un consensus pour une commission, en vue du
projet de loi 84, pour écouter les principaux représentants. Le
projet de loi 103 qu'on a laissé en suspens cette nuit, après
quelques heures de... Il semblait qu'il n'y aurait pas de commission pour
entendre des gens; il y en avait quand même qui voulaient être
entendus, c'était Roger et Bruno vous vous souvenez hier soir
Bruno et Grégoire! Étant donné qu'on ne recevra pas
ces personnes qui étaient venues ici au feu de la Saint-Jean, est-ce que
ce sera possible qu'on reprenne dès ce matin l'étude de la loi
103?
M. Charron: Non, ce ne sera pas ce matin, j'allais en donner
l'avis, mais ce sera dans le courant de la journée que nous
achèverons la loi 103.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: Puisque j'en suis aux avis, comme j'en avais
prévenu l'Opposition hier, nous allons entamer dans quelques secondes,
après avoir liquidé trois troisièmes lectures de projets
de loi qui ont déjà été étudiés
article par article, la deuxième lecture de la loi 69 au nom de mon
collègue, le ministre délégué à
l'Environnement. Le programme est le suivant. Lorsque cette deuxième
lecture sera achevée, nous entamerons alors la fin de la deuxième
lecture de la loi 103 qui a déjà été
débattue hier et, selon l'heure, évidemment, ce seront les
projets de loi au nom du ministre des Affaires municipales, ce qui concerne
certaines municipalités dans l'Outaouais, ce qui concerne
l'évaluation foncière et la loi qui concerne la ville de
Saint-Eustache, je ne sais trop dans quel ordre, on verra en cours de route,
mais disons qu'une fois la Loi sur la qualité de l'environnement
terminée en deuxième lecture, l'ordre des travaux est le suivant:
fin du projet de loi 103 et les lois au nom du ministre des Affaires
municipales.
Pendant ce temps, M. le Président, je veux en faire motion, se
réunira au salon rouge, tout de suite, jusqu'à 13 heures, de 15
heures à 18 heures et de 20 heures à minuit ce soir, la
commission de l'agriculture afin d'entendre les gens qui ont été
invités à s'exprimer sur la loi 90 concernant la protection des
terres agricoles. Pendant ce temps, à la salle 81-A, trois commissions
successives se réuniront. Dans la séance de ce matin, c'est celle
de la justice afin d'étudier article par article le
projet de loi 76 concernant l'entraide judiciaire entre la France et le
Québec. Cet après-midi, à la même salle, la
commission de la justice sera remplacée par la commission de
l'Assemblée nationale qui, pendant trois heures, donc jusqu'à 18
heures, se réunira pour faire un premier tour d'horizon, comme l'avait
demandé l'Opposition ce sont les termes de la demande qui nous
avait été formulée et que nous avions accueillie un
premier tour d'horizon, dis-je, des différents partis politiques sur le
projet de refonte des districts électoraux du Québec. Le
gouvernement sera évidemment représenté à cette
commission par le ministre d'État à la réforme
électorale et parlementaire. Ce soir, de 20 heures à 24 heures,
cette commission cédera sa place, également à la
même salle 81-A, à celle des consommateurs pour que celle-ci
reprenne son étude article par article de la loi 72. C'est donc la
motion que je fais pour les travaux aujourd'hui, M. le Président.
Le Président: Est-ce que cette motion sera
adoptée?
M. Lavoie: Adopté. Le Président:
Adopté.
Questions inscrites au feuilleton
M. Charron: Réponses à des questions au feuilleton,
M. le Président. Brièvement. À la question no 32), de M.
Grenier, la réponse doit venir de M. Duhaime. Je fais motion pour que
cette réponse soit transformée en dépôt de
document.
Le Vice-Président: Cette motion sera-t-elle
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le ministre.
M. Duhaime: Je dépose le document, M. le
Président.
Le Vice-Président: Le dépôt est
reçu.
M. Charron: À la question no 106), de M. Picotte, la
réponse c'est une motion plutôt le document doit
être déposé par M. Léonard.
Le Vice-Président: Cette motion sera-t-elle
adoptée?
Une voix: Adopté.
M. Léonard: Document déposé, M. le
Président.
Le Vice-Président: Dépôt reçu.
M. Charron: Finalement, à la motion no 111), au nom de M.
Roy, la réponse viendra par un dépôt de document de M.
Duhaime.
Le Vice-Président: M. le ministre.
M. Duhaime: Je dépose le document, M. le
Président.
Le Vice-Président: Le dépôt est
reçu.
M. Charron: M. le Président, je vous prierais d'appeler
maintenant l'article 121) de notre feuilleton d'aujourd'hui.
Le Vice-Président: Nous sommes aux affaires du jour.
Projet de loi no 104
Troisième
lecture
M. le ministre des Affaires municipales propose que soit lu, pour une
troisième fois, le projet de loi 104, Loi concernant la
Communauté urbaine de
Montréal.
M. le ministre des Affaires municipales.
M. Tardif: Tout a été dit sur cette loi, M. le
Président.
Le Vice-Président: Est-ce que cette motion de
troisième lecture est adoptée?
M. Lavoie: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Ce projet de loi est
adopté et voté.
M. Charron: L'article 119) de notre feuilleton, M. le
Président. (11 h 10)
Projet de loi no 66
Troisième lecture
Le Vice-Président: Le même ministre des Affaires
municipales propose la troisième lecture du projet de loi 66, Loi
modifiant la Loi autorisant les municipalités à percevoir un
droit sur les mutations immobilières.
M. le ministre.
M. Gratton: M. le Président...
Le Vice-Président: Oui, M. le député de
Gatineau.
M. Michel Gratton
M. Gratton: Très brièvement, M. le
Président, pour vous dire que nous voterons à l'appui de cette
motion de troisième lecture, même si nous ne retrouvons pas dans
le projet de loi no 66 tous les éléments que nous aurions
préféré y retrouver, notamment l'utilisation de
l'évaluation municipale comme base de calcul pour ces droits qu'imposent
les municipalités, aussi bien que certaines dispositions qui nous
avaient été suggérées par des praticiens qui sont
en contact avec l'appli-
cation de cette loi de façon régulière et que le
ministre n'a pas retenues, je pense à raison, parce que les
représentations n'avaient pas été faites de façon
convenable, entre autres, par la Chambre des notaires. Nous appuyons donc la
troisième lecture du projet de loi quitte à revenir
éventuellement avec une autre loi qui pourrait venir à nouveau
modifier cette loi.
Le Vice-Président: Est-ce que cette motion sera
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté.
M. le leader parlementaire du gouvernement.
M. Charron: L'article 120), M. le Président.
Projet de loi no 79
Troisième lecture
Le Vice-Président: M. le ministre des Affaires municipales
propose que soit lu une troisième fois le projet de loi no 79, Loi
concernant les régimes de retraite des maires et des conseillers des
cités et des villes.
M. le ministre.
M. Tardif: Beaucoup de maires et de conseillers municipaux
attendent ce projet de loi.
Le Vice-Président: Adopté?
M. Gratton: M. le Président, on n'a pas de discours
à faire; on veut que cela aille vite.
M. Cordeau: M. le Président, nous aussi, nous
l'adoptons.
Le Vice-Président: Alors, le projet de loi est
adopté.
M. le leader parlementaire du gouvernement.
M. Charron: L'article 128), M. le Président.
Projet de loi no 69
Deuxième lecture
Le Vice-Président: Juste un instant. M. le ministre
délégué à l'Environnement propose la
deuxième lecture du projet de loi 69, Loi modifiant la Loi de la
qualité de l'environnement.
M. le ministre délégué à
l'Environnement.
M. Marcel Léger
M. Léger: M. le Président, la bataille de
l'environnement ne pourra pas se gagner sans la complicité des 6
millions de Québécois. C'est la raison pour laquelle avec la loi
no 69 nous avons tenté d'impliquer le citoyen de façon à
lui donner les pouvoirs et les droits nécessaires, de façon aussi
à obtenir, que chacun des Québécois soit de plus en plus
conscientisé à la valeur qu'est son milieu de vie. La loi 69, M.
le Président, va donc donner à tous les citoyens du Québec
des droits en même temps que les moyens pour les faire respecter.
La Loi de la qualité de l'environnement, c'est un enfant qui est
né en 1972. Il porte le nom de Loi de la qualité de
l'environnement qui lui a été donné par son père,
le député de D'Arcy McGee. Six ans après, les
premières dents apparaissent, ce qui fait dire aux groupes patronaux et
aux groupes industriels que l'enfant sera un monstre, tandis que les mouvements
écologiques craignent que ses dents ne soient déjà
cariées. Les dents de cette loi, c'est le projet de loi 69 modifiant la
loi de 1972 que je présente ce matin et qui prévoit notamment
qu'un citoyen pourra demander une injonction pour faire cesser des
activités illégales qui affecteraient son environnement, tandis
que des études d'impact complètes seront nécessaires avant
que soient mis en chantier des développements majeurs.
L'esprit de cette présentation ne vient pas de moi; je l'ai pris
dans un article de Québec Science qui parlait justement de la loi 69 que
nous présentons aujourd'hui. La présente session, M. le
Président, pourra passer à l'histoire comme étant celle
des lois de protection: protection des consommateurs, protection du territoire
agricole et protection de l'environnement. L'objectif du présent projet
de loi vise à permettre aux personnes et aux groupes de jouer un
rôle actif dans la protection de l'environnement qui, selon l'ancienne
loi, était la seule responsabilité du gouvernement et de ses
fonctionnaires. J'insiste donc sur ce point, parce qu'il m'apparaît
fondamental. Nous voulons consacrer de nouveaux droits à
l'environnement, droits qui entraîneront nécessairement des
citoyens plus responsables face à leur environnement. On a voulu opposer
développement économique et protection de l'environnement ou
développement écologique.
Ces débats sont des débats théoriques. Il n'existe
pas vraiment, dans notre société, des écologistes purs,
ceux qu'un certain maire a baptisés "d'oiseaulogues", tout comme il
n'existe pas, M. le Président, à proprement parler,
d'économistes purs. Pour alimenter la polémique, on a toutefois
créé l'opposition entre l'écologie et l'économie.
Je pense bien qu'on ne peut pas déterminer un débat avec une
notion comme celle de l'écologie qui se bat contre l'économie.
Depuis mon arrivée au ministère, je répète que le
véritable progrès économique doit tenir compte de la
protection de l'environnement. Je veux m'expliquer encore une fois
là-dessus.
Il y a beaucoup de citoyens qui regardent ce débat. Un
progrès qui détruit les richesses naturelles, qui entraîne
le gaspillage, qui provoque de la pollution, ce n'est pas un progrès;
c'est un recul. Pour être un progrès, il faudrait que les biens
produits soient de plus grande importance et de plus grande qualité que
les richesses naturelles qu'on va détruire. Il faudrait que l'avantage
qu'en retireront les citoyens soit supérieur à la perte de
la qualité de l'environnement. L'environnement, c'est un bien
collectif, mais c'est une responsabilité individuelle. Comment se
fait-il que ce ne soit pas évident pour tous les citoyens qu'il faille
protéger l'environnement? Comment se fait-il que ce ne soit pas
évident pour tous les développeurs qu'il faille tenir compte de
l'environnement? Cela fait partie de notre éducation où on n'a
jamais mis de l'avant l'importance de protéger le patrimoine qui nous
appartient.
Dernièrement, j'ai fait un voyage en Suède et en Allemagne
où les lois sont d'avant-garde, où des projets de
dépollution sont déjà réglés depuis
longtemps. J'ai vu des cours d'eau qui sont dépollués à
90%, alors qu'ici c'est l'inverse. Je demandais aux responsables, aux ministres
responsables dans ces différents pays comment ils avaient réussi
à faire tant et si vite. Ils m'ont dit que si, aujourd'hui, on est rendu
si loin dans la protection de l'environnement, c'est parce qu'il y a vingt ans,
dans des cours au secondaire, à l'élémentaire, à
l'université et même dans des cours aux adultes, on a donné
une dimension de l'environnement à l'intérieur des cours. Ce qui
fait que ces gens-là, qui étaient sur les bancs d'école il
y a vingt ans, sont maintenant rendus dans des milieux de décisions,
soit décisions au niveau syndical, décisions au niveau patronal,
décisions au niveau universitaire, décisions au niveau des
gouvernements municipaux, provinciaux ou fédéraux,
décisions au niveau des groupes financiers. (11 h 20)
Ces gens-là qui ont à la base, dans leurs valeurs
quotidiennes, une dimension environnementale sont les mieux placés
après cela pour être des faiseurs d'opinion auprès de la
population, qui accepte facilement qu'on dépense des sommes pour
protéger l'environnement, qu'on dépense des sommes aussi pour
dépolluer les cours d'eau. Cela se fait d'une façon unanime parce
que tous les citoyens, dans leurs valeurs quotidiennes, ont comme choses
importantes, en premier lieu, l'écologie et leur patrimoine.
C'est donc la raison, M. le Président, pour laquelle j'ai
poussé davantage, à la suite de ce témoignage
éloquent que j'ai entendu dans les pays d'Europe, pour dire qu'il faut
au Québec avoir une loi d'avant-garde permettant de ne plus être
uniquement des gens qui combattent la pollution; quand on combat la pollution,
on est déjà en retard. Il ne s'agit pas uniquement de
protéger l'environnement. On est juste à jour. Il s'agit de
créer chez tous les citoyens un comportement, un réflexe
environnemental permettant à tous les citoyens, quel que soit l'endroit
où ils soient, d'être des défenseurs de la qualité
de leur milieu de vie. C'est pour cela qu'aujourd'hui, avec la loi 69, on va
donner aux citoyens les moyens de défendre leur milieu de vie.
M. le Président, depuis toujours, on a eu, dans notre
système juridique au Québec, le besoin de ne confier qu'à
l'État de protéger l'environnement. Cela a fait quoi? Pendant que
dans nos lois on donnait des droits aux citoyens pour protéger leur
propriété individuelle, on ne mettait pas dans nos lois la
possibilité de donner à des citoyens le pouvoir et le droit de
défendre le bien collectif. On a fait une génération de
citoyens égoïstes qui ne font que défendre leur
propriété, mais personne ne se lève pour défendre
le bien collectif, parce qu'on ne pense pas avoir cette
responsabilité.
La loi 69 va donner aux citoyens des droits nouveaux. D'abord, un droit
à l'information. Les citoyens, par ce projet de loi, seront maintenant
informés parce que c'est une obligation, pour tous les membres d'un
gouvernement comme pour les industries, d'informer les citoyens sur la
qualité de l'air, la qualité de l'eau, la qualité des
richesses naturelles, de donner l'état de la situation. Droit à
l'information aussi pour que chaque projet d'un promoteur soit soumis avant
d'être réalisé s'il y a des conséquences sur
l'environnement. Les citoyens qui pourraient en subir les conséquences
écologiques doivent être renseignés.
Donc, droit à l'information sur la situation de la pollution,
droit à l'information sur des projets qui pourraient déranger le
système écologique et qui pourraient apporter des
conséquences sur l'environnement et droit aussi aux citoyens à la
participation, c'est-à-dire le droit d'être entendus pour exprimer
leur point de vue de façon qu'ils puissent faire partie du
mécanisme de prise de décision dans un domaine qui concerne leur
vie quotidienne. Depuis trop longtemps, on a vu des citoyens se rendre compte
d'un projet qui dérangeait leur milieu de vie alors que les bulldozers
entraient dans la cour arrière de leur maison. Ils apprenaient qu'il y
avait quelque chose qui se passait et ils n'avaient même pas
été inclus à l'intérieur d'un processus de
décision. Avec la loi 69 je fais le pari avec les citoyens que
maintenant le développement se fera d'une façon beaucoup plus
harmonieuse, parce qu'ils seront associés à la prise de
décision.
Finalement, le droit à tout citoyen de poursuivre un pollueur, un
droit à tout citoyen d'être capable de défendre le bien
collectif. Dernièrement, je rencontrais une dame qui me disait: Je
passais près de mon lac sur lequel j'ai mon chalet et j'ai vu, tout
à coup, sur une route qui aboutissait à mon lac, un citoyen qui
arrive avec un camion et qui déverse ses déchets directement dans
le lac. Je lui ai dit: Monsieur, qu'est-ce que vous faites là? Vous
allez polluer le lac. Et le conducteur du camion lui a répondu:
Écoutez, madame, ce n'est pas vos affaires. La dame me
répète après cela: Vous savez, j'étais
gênée, je ne me mêlais pas de mes affaires. J'ai dit:
Madame, c'était votre affaire. Lui, ce n'était pas son droit de
faire cela. C'est lui qui est dans l'erreur. Il faisait des choses
illégales. Mais c'était votre droit. C'était votre
affaire. Mais on est tellement habitué de penser que le bien collectif,
"ils" vont s'en occuper! D'autres vont prendre la responsabilité. On
espère que d'autres vont s'occuper de cela alors que c'est notre
responsabilité.
La loi 69, M. le Président, va rendre chaque citoyen responsable
de la portion de son petit Québec qui lui est confiée,
c'est-à-dire, son entourage, c'est-à-dire l'endroit où il
sera au Québec,
l'endroit où il pourra, comme tout citoyen propriétaire du
sol du Québec, défendre le bien collectif. Il n'est pas
nécessaire d'être propriétaire d'un terrain pour dire: Je
dois défendre mon terrain. C'est un petit peu égoïste. C'est
le réflexe naturel.
M. le Président, cette loi va permettre à chaque citoyen
d'avoir les possibilités d'être le défenseur de la richesse
collective des Québécois. M. le Président,
l'environnement, c'est un bien collectif, mais c'est une responsabilité
individuelle. Un promoteur a-t-il plus de droit sur l'air, a-t-il plus de droit
sur les cours d'eau qu'un autre citoyen? À cette question, M. le
Président, je pourrais peut-être répondre oui dans la
mesure où ce promoteur crée des emplois, fabrique des biens ou
rend des services. Mais je répondrais non, M. le Président, si ce
promoteur ou ce développeur ne prend pas les dispositions voulues pour
utiliser les richesses naturelles au meilleur de ses connaissances
technologiques, en réduisant le gaspillage au maximum et en
protégeant le milieu de vie.
C'est d'ailleurs en se comportant de cette façon, en utilisant la
meilleure technologie qu'il tirera le maximum de profit de sa production. Ce
que je dis, M. le Président, peut sembler théorique et pourtant
Cela se vérifie dossier après dossier. Vous savez, M. le
Président, on se demande souvent qu'est-ce que l'environnement, ce qu'on
veut protéger. C'est quelque chose de très théorique et
cela ne retient pas trop souvent la présence de citoyens parce que pour
eux l'environnement, c'est quelque chose de tellement vague. M. le
Président, l'environnement, ce n'est pas uniquement vague.
L'environnement, c'est notre milieu de vie. L'environnement, c'est la
qualité de l'air qu'on respire. C'est la beauté de la nature, de
l'espace qui nous entoure. C'est la qualité de l'eau qu'on boit. C'est
la qualité de l'eau dans laquelle on se baigne.
Il y a tellement de plages autour de Montréal qui ont
été fermées à cause de la pollution que les gens
ont même perdu la notion que Montréal est une île, parce
qu'on a perdu les usages qui étaient la richesse des
Québécois. C'est dans ces cours d'eau que vivent les plantes, que
vivent les poissons. Tout cela, c'est primordial, M. le Président, pour
la qualité de la vie des citoyens, pour leur santé, pour leur
bien-être. La qualité de l'environnement, M. le Président,
conditionne la possibilité des loisirs, conditionne pour les gens leurs
rapports avec la nature et conditionne aussi une très grande partie de
leur mode de vie. Le soin qu'on met aujourd'hui à protéger notre
environnement détermine les conditions de survie des
générations à venir. Plus on agresse l'air, plus on
agresse le sol, plus on agresse l'eau, plus on agresse la vie de chacun des
citoyens et la survie de la nation. Chacun de nous a une responsabilité
envers notre patrimoine naturel. M. le Président, chaque
Québécois doit en prendre conscience.
Il y a trop de gens indifférents face à l'environnement.
Tant qu'ils peuvent se tirer d'affaire en ayant accès à des
espaces encore agréables à vivre ou à fréquenter,
ils ne se préoccupent pas de l'environnement. Ils ne réagissent
pas, M. le Président, aux agressions qui se passent ailleurs. On va se
choquer quand cela se passe chez nous. Ils ne se rendent pas compte, ceux qui
sont indifférents envers l'environnement, qu'un jour ou l'autre les
modifications qu'on fait subir à l'environnement pourront avoir des
répercussions jusque chez eux. Quand l'ennemi est à nos portes,
M. le Président, la bataille est déjà aux trois quarts
perdue. Il faut donc prévenir. Il ne s'agit pas d'empêcher la
réalisation de tout projet, mais de faire en sorte que cela se fasse
d'une façon harmonieuse et que le progrès économique
n'engendre pas un recul écologique. (11 h 30)
Le projet de loi no 69, M. le Président, son essence, c'est de
donner des outils aux citoyens pour qu'ils puissent protéger
efficacement leur milieu de vie, Défendre l'environnement, c'est
défendre la vie, car l'environnement, c'est la base et le reflet de
toute la vie.
Plusieurs diront: C'est quand même poétique,
l'environnement, c'est fait pour ceux qui parlent des petits oiseaux, c'est
fait pour ceux qui sont à la campagne. C'est plus que cela. Parler de
grands principes, c'est beau, mais parler de la truite que mon père
pêchait ici à côté, parler de la plage que ma
mère fréquentait au bout de l'île, c'est de
l'environnement. Parler du grand parc où on a pris des photos de noces,
il y a 25 ans, qui a été remplacé par une tour remplie
d'asphalte qui a fait disparaître des espaces verts, parler de l'air
vicié et pollué causé par des usines chimiques, c'est
cela, de l'environnement. Parler de l'air souvent insoutenable et toxique ou
des eaux où les bactéries coliformes totales combattent les
bactéries coliformes fécales, c'est simplement parce que cela
sent, les cours d'eau. Ce sont des millions qu'il faut engouffrer pour
construire des usines d'épuration et de filtration. Très souvent,
combattre en retard et faire de la dépollution, c'est déplacer la
pollution pour l'envoyer ailleurs, alors qu'il aurait été
beaucoup plus simple de la prévenir.
Quand on dépense $433 millions pour un intercepteur
d'égout pour le côté nord de la ville de Montréal,
quand on dépense $40 millions, comme je l'ai annoncé avant-hier,
dans le ville de Laval pour son intercepteur d'égout, c'est
qu'aujourd'hui on paie des millions pour les imprévoyances de nos
prédécesseurs. Allons-nous continuer à ne nous occuper que
de dépollution sans prévenir pour la génération
future, de façon qu'on ne lègue pas à la
génération qui va nous suivre uniquement des problèmes?
C'est l'insouciance des gens qui nous ont précédés qui
nous oblige à consacrer à cela de l'argent énorme pris
à même mon budget. La pollution coûte très cher. Elle
a un coût social très cher, mais la dépollution a un
coût économique extraordinairement important qui hypothèque
nos possibilités de mettre cet argent ailleurs d'une façon
positive.
Si on se rendait parfois à la logique des développeurs
à tout prix, qui n'ont aucun sens de la protection de l'environnement,
il faudrait
peut-être, un jour, penser à paver le fleuve Saint-Laurent,
cela irait beaucoup plus vite pour aller de Montréal à
Québec, si on veut aller avec la logique aussi forte qui nous est
présentée. Les citoyens sont trop souvent des otages, à
l'intérieur des projets de développeurs anarchiques.
Le projet de loi no 69 va donner aux citoyens des droits, alors qu'ayant
les citoyens n'avaient que des devoirs. J'aimerais en profiter pour vous dire
que ce projet de loi fait suite à des consultations diverses tant
auprès des organismes consultatifs du milieu qu'auprès des
industries et des citoyens qui m'ont transmis leurs préoccupations et
qui attendent impatiemment que le gouvernement les aide à
protéger leur environnement.
Ils attendent impatiemment que le gouvernement leur donne des outils
nécessaires dans cette lutte quotidienne pour une meilleure
qualité de vie, une meilleure qualité d'air, une meilleure
qualité de l'eau et du sol. Je crois que ce projet de loi reflète
fidèlement la volonté du présent gouvernement de suivre
les indications d'une volonté populaire des citoyens du Québec
qui désirent de plus en plus se préoccuper eux-mêmes de ce
qui leur appartient, de ce qui représente pour le plus grand nombre le
seul héritage qu'ils pourront laisser aux générations
futures et à leurs enfants.
Je voudrais aussi, au stade de la deuxième lecture, rappeler les
actes qui m'ont aidé dans la mise au point de l'actuel projet de loi. Je
vous le rappelle parce que j'entends que ces actes demeurent les
critères de jugement dans l'interprétation des interventions qui
pourront venir.
Il s'agit d'abord, premièrement, du concept d'équilibre
dans la notion d'environnement. Parce que la base de l'environnement, c'est une
notion d'équilibre entre le développement et la protection. Le
deuxième principe, c'est le concept de participation du citoyen. Ce
projet de loi témoigne de l'importance que le gouvernement accorde au
citoyen ordinaire dans ce combat que notre société doit livrer
pour assurer à ses membres un environnement qui va de pair avec le
progrès économique, avec le progrès social et le
progrès culturel de notre société.
M. le Président, à trois reprises, avec des moyens de
fortune, c'est-à-dire avant que ce projet de loi soit adopté,
j'ai fait tenir des audiences publiques à la demande de groupes de
citoyens, depuis ma nomination comme ministre délégué
à l'Environnement. À Valleyfield, à Saint-Jean-de-Matha et
à Beauport, j'ai fait tenir des audiences publiques pour que les
citoyens puissent s'exprimer. Il s'agissait, avec les moyens de fortune de ce
moment-là, et très souvent au moment où les dossiers
étaient très avancés, sinon presque terminés, de
faire une expérience, de permettre aux citoyens de venir donner leur
point de vue sur des projets. Il s'agissait, pour les citoyens, de recours
ultimes pour s'opposer soit à des travaux municipaux presque
terminés, comme c'était le cas à Valleyfield, soit
à un projet très avancé de ligne de l'Hydro-Québec
à Saint-Jean-de-Matha, ou soit le projet de l'autoroute des battures de
Beauport, à Beauport.
L'expérience que j'ai faite était risquée,
c'était faire le pari que les citoyens joueraient un rôle
important, et aussi éclairer tous ceux qui ont des décisions
à prendre. Il faut admettre aujourd'hui clairement que les projets sur
lesquels se tenaient ces audiences publiques étaient très
avancés. À ce moment-là, c'était placer les groupes
de citoyens sur la défensive. C'était les confiner à un
rôle négatif, le seul possible avec la situation avant mon projet
de loi 69.
Ce qui revient à dire que si le projet de loi 69 avait
été en vigueur avant les projets sur les battures de Beauport, il
n'y aurait pas eu de problème sur les battures de Beauport, parce que
les audiences auraient été tenues avant que les plans, les
projets et les gestes soient posés. On plaçait les comités
de citoyens, aussi bien à Beauport, à Saint-Jean-de-Matha
qu'à Valleyfield, dans une attitude négative, puisque les projets
étaient très avancés et que beaucoup d'investissements
avaient été faits.
Avec la loi 69, avec la création du Bureau d'audiences publiques,
le rôle du citoyen deviendra maintenant un rôle positif,
contrairement à ce qui s'est passé dans les trois audiences que
je viens de mentionner. On peut dire qu'à Valleyfield les citoyens qui
ont fait valoir leur point de vue ont gagné certains points, mais le
projet était déjà terminé. La participation des
citoyens a permis au ministère de l'Environnement de faire des
correctifs et d'obliger la municipalité, qui s'est conformée aux
normes émises par le ministère de l'Environnement, à
apporter des correctifs à une situation qui était
terminée. C'était déjà tard, mais la participation
des citoyens a permis d'amener un certain équilibre et d'apporter les
correctifs après. Cela aurait été mieux si ceia avait
été fait avant.
Deuxièmement, à Saint-Jean-de-Matha, contre tout espoir,
cela a permis, dans cette bataille, au comité de citoyens de
Saint-Jean-de-Matha de gagner sur toute la ligne contre l'Hydro-Québec,
qui voulait passer ses lignes à l'intérieur d'un territoire
contesté par les citoyens du milieu. Les citoyens du milieu ont
été aidés par les services de protection de
l'environnement sur le plan technique, sur le plan financier. Ils sont venus
à la commission d'audiences que j'avais décrétée et
ils ont exprimé leur point de vue avec des dossiers
étoffés. L'Hydro-Québec qui, habituellement, a aussi des
dossiers étoffés, a été émerveillée
devant la qualité des interventions des citoyens de Saint-Jean-de-Matha.
L'Hydro-Québec a accepté, suite à la décision du
ministère de l'Environnement, de corriger son tir et de traverser ses
lignes ailleurs que dans le territoire que les citoyens de la région
voulaient protéger. C'est une victoire totale pour les citoyens de
Saint-Jean-de-Matha. (11 h 40)
À Beauport, le projet était tellement avancé que
l'audience publique n'a permis que de faire entendre les citoyens et de
créer un moratoire sur ce qui restait à faire. C'est sûr
que, quand on consulte des citoyens, ce n'est pas pour leur demander de prendre
la décision à notre place. On ne se décharge pas de notre
responsabilité parce
que les citoyens vont venir s'exprimer. Au contraire. C'est pour donner
aux citoyens un poids égal aux promoteurs. À ce moment-là,
cela permet de faire un débat basé sur une connaissance
égale du point de vue des citoyens comme du point de vue des promoteurs.
Par la suite, nous devons trancher. Cela ne veut pas dire que je laisse ma
position de ministre pour que les citoyens décident. Je leur dis: Je
veux que vous me donniez des points de vue qui me permettent de défendre
votre thèse.
Nécessairement, il y a, dans chacun des cas, des décisions
à prendre qui, parfois, sont 100% pour les citoyens, parfois à
80%, parfois à 50%. Mais jamais, dorénavant, les citoyens ne
perdront complètement. Maintenant, les citoyens auront voix au chapitre
et pourront, la plupart du temps, gagner complètement parce que cela va
se passer avant que les projets ne soient présentés. Mais il
arrive parfois, quand les projets sont trop avancés, comme c'est le cas
à Beauport, qu'ils pourront gagner sur l'avenir. Je garantis que nous
allons protéger le reste des battures de Beauport, c'est-à-dire
l'estuaire qui n'est pas encore touché.
Il y a des citoyens que je comprends; si j'étais à leur
place, je dirais la même chose. Mas je fais partie d'un gouvernement qui
a le contrôle et la protection des deniers publics. Il y a de $16
millions à $18 millions de déjà investis dans le
tracé qui est dans le fleuve. C'est une folie. On le sait, je l'ai
déjà dit. Cependant, comme ministre responsable ce n'est
pas moi qui construis l'autoroute ce n'est pas à moi de dire
qu'on peut rejeter à l'eau ces $16 millions investis! Il y a des
citoyens qui aimeraient cela. Ils ont le droit de le dire, mais je pense que
ces $16 millions ont été investis, malheureusement, par l'ancien
gouvernement il faut quand même tenir compte de cet aspect
et c'est nécessairement notre devoir de protéger les
investissements des citoyens. Le ministre de l'Environnement a tenu des
audiences pour entendre les points de vue des citoyens et j'ai pris une
décision qui touche l'avenir parce que, pour moi, cela aurait
été plus grave de rejeter $16 millions qui avaient
été investis par le gouvernement.
M. Mailloux: Question de privilège.
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! Question de privilège, M. le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: Je voudrais demander à l'honorable ministre
qui nous livre ses propos, quand il accuse le précédent
gouvernement d'avoir décidé le tronçon
Dufferin-Montmorency, s'il est au courant que le gouvernement
précédent n'a fait que continuer une décision prise en
1968. Si ce gouvernement-là n'avait pas pris cette décision,
quand j'ai pris charge du ministère, je l'aurais décidé
moi-même et au même endroit.
Le Vice-Président: M. le ministre
délégué à l'Environnement.
M. Léger: Je ne voudrais pas embarquer dans ce
débat mais je voudrais simplement dire: Qui n'a pas péché
lance la première pierre.
Le Vice-Président: D'accord. Non, il n'y a pas de
débat.
M. Léger: M. le Président, il est bien important de
comprendre que la loi 69 va permettre d'éviter des erreurs que vous avez
continuées, le gouvernement libéral du temps!
M. Mailloux: Je vous en reparlerai tantôt!
M. Léger: D'accord. Ce qui est sûr et certain, c'est
que ce n'était pas le meilleur projet. Deuxièmement, comme je le
disais tantôt, aller à l'extrême, on peut faire une route
directement sur le fleuve. Si on fait un pavé tout le long, cela va
aller plus vite de Montréal à Québec. Mais,
nécessairement, ce n'était pas le projet idéal, mais dans
ce temps-là... Il faut dire que la mentalité des
Québécois a évolué sur le plan de la protection de
l'environnement. Si cette loi avait existé, il est tout probable que
pour les projets conçus par les autres gouvernements avant, aussi bien
de l'Union Nationale que du Parti libéral, il aurait pu y avoir des gens
qui auraient dit: Peut-être que l'autoroute est bonne, mais ce n'est pas
là qu'il faut qu'elle passe.
M. le Président, de plus, le citoyen pourra assurer son
rôle de protecteur de son environnement dans les cas ultimes, en ayant un
recours civil en injonction et un recours pénal contre ceux qui
contreviennent à la loi ou à des engagements qui auront fait
l'objet d'ententes ou d'ordonnances. Il est important de bien comprendre les
changements qu'apporte la loi 69.
Le citoyen seul et préférablement le groupe de citoyens
auront l'occasion de se faire entendre. Leur apport, ajouté à
celui des fonctionnaires de l'Environnement, sera un élément
important de la décision qui sera finalement prise au Conseil des
ministres de procéder ou non avec un projet de développement
important. Autrement dit, le point de vue des citoyens va être mis dans
la balance avant qu'un projet qui a des conséquences sur l'environnement
ne soit accepté. La décision se prendra maintenant au Conseil des
ministres où se fera l'arbitrage, où chacun des ministres qui a
une responsabilité dans un secteur particulier pourra donner son point
de vue, mais avec la lumière, pour la première fois, de ce que le
citoyen qui demeure en ce milieu-là, pense. Nécessairement, il
faut tenir compte que lors de la commission parlementaire en septembre, nous
avons entendu le cri de détresse de beaucoup de citoyens aux prises avec
d'épineux problèmes de pollution, les craintes de certains qui
s'inquiètent devant le nouveau rôle que joueront les citoyens dans
la protection de l'environnement, les craintes des développeurs.
C'est ici. M. le Président, que doit apparaître le fameux
concept d'équilibre. J'ai dit tantôt que le
projet avait deux concepts de base: un concept d'équilibre et,
deuxièmement, un concept de participation des citoyens. Quand nous
parlons d'environnement, nous parlons d'harmonie ou d'équilibre.
L'environnement, c'est le rapport dynamique de différents
systèmes qui vont de la vie biologique à l'humain et de l'humain
au social, en passant par l'eau, l'air et le sol. C'est un concept qui en plus
évolue constamment, soit d'une part à cause de la
conscientisation de plus en plus grande des citoyens et, d'autre part, face au
développement technologique, parce que de plus en plus on a
découvert des méthodes technologiques soit de polluer davantage,
soit de dépolluer davantage, ou des nouvelles techniques permettant
d'éviter de polluer davantage.
La nature a ses lois. La nature a son organisation propre, sa structure.
En les oubliant on va vers des catastrophes. Une eau polluée, un sol en
érosion, des espèces menacées, il faut protéger
tout cela par cette loi. L'homme a besoin pour sa survie d'une eau pure, d'un
air sain et d'un contact vivifiant avec la nature.
Quelquefois les citoyens devraient prendre conscience de cette
réalité en regardant mourir des rivières qui autrefois
fleurissaient, comme la rivière de l'Achigan, la rivière
l'Assomption, la rivière Yamaska, la rivière Bécancour.
Nous pouvons maintenant contrôler les conséquences de certaines
activités technologiques et industrielles. Hier, nous ne pouvions le
faire et chacun prenait son mal en patience. Si, maintenant, nous pouvons le
faire, nous devons le faire. L'environnement, M. le Président, repose
sur l'équilibre et l'harmonie de l'ensemble des systèmes
physique, biologique et humain. S'il y a des économistes purs qui ne
pensent qu'en termes de rentabilité économique, à court
terme, sous prétexte qu'il faut produire et consommer tout de suite, ces
gens oublient qu'ils handicapent à tout jamais l'avenir de nos
enfants.
J'aimerais, des fois, que les promoteurs de projets purement
économiques ou technologiques soient tenus de travailler, de vivre et de
prendre leurs vacances dans les conditions environnementales qu'ils imposent
aux autres. Peut-être changeraient-ils d'avis.
D'autres ne voient dans l'environnement que le loisir et ne veulent que
l'accès immédiat à toute partie du territoire, tandis que
d'autres souhaitent un retour à l'état sauvage, à une
nature qui exclut l'homme. Notre approche est plus équilibrée.
Nous voulons au Québec un développement éclairé et
nous comptons sur une loi comme le projet de loi no 69 pour donner une place
aux citoyens dans la protection de l'environnement et amener les grands
aménageurs, privés ou publics, à intégrer les
préoccupations environnementales à l'intérieur de leur
processus de prise de décisions. La clé, M. le Président,
c'est cela. Il faut, avant qu'on fasse un développement au
Québec, qu'on tienne compte de la qualité du milieu de vie qu'on
va perturber de manière à éviter cela au maximum. (11 h
50)
C'est pour cela que j'ai toujours dit que le développement du
Québec ne peut pas se faire en ne tenant pas compte de l'environnement.
Quelqu'un disait: Ah! l'environnement; vous voulez vous opposer au
progrès, vous allez créer du chômage. M. le
Président, un sondage a été fait dernièrement, soit
en septembre 1978, par la compagnie CROP au profit d'Environnement Canada; cela
n'a pas été fait au Québec, mais à travers le
Canada. Il a été noté que les citoyens, dans leur grande
totalité, ne font aucun lien entre des pertes d'emploi ou du
chômage et des mesures gouvernementales qui obligent les
développeurs à protéger l'environnement. Les citoyens ne
voient pas cela. Pourquoi les oiseaux de malheur pourraient-ils dire tout
simplement que protéger l'environnement va être un danger pour
l'économie? M. le Président, j'ai toujours dit que nous, à
l'Environnement, ne devons pas nous opposer aveuglément au
progrès, mais qu'il faut nous opposer, par exemple, au progrès
aveugle.
Le deuxième point, c'est le concept de la participation. Au plan
de la participation, j'ai pu constater à de très nombreuses
reprises le désir intense des citoyens. Je pense, à ce
moment-là, aux 200 000 citoyens, membres d'associations pour la
protection de l'environnement de leurs lacs. Je pense aux groupes de citoyens
qui veulent protéger les espaces verts. Je pense aux groupes de citoyens
qui veulent participer, avec certaines industries, à des moyens de
contrôle de la pollution de l'environnement. Je pense justement au
comté du député de Bourassa où les citoyens,
à la suite de ma rencontre avec les dirigeants de l'entreprise, ont
décidé de former un comité pour protéger leur
environnement. Je pense à tous ces citoyens qui font partie de groupes
et qui ont décidé de donner le ton et d'embarquer dans la
protection de leur milieu de vie. Je pense à eux aujourd'hui quand je me
dis: Ils veulent passer du stade "d'écrivailleurs de lettres" à
un stade de participation à des décisions qui influent sur leur
avenir pour qu'ils le sachent au moins avant que les bulldozers entrent dans
leur cour.
Les citoyens ont déploré avec véhémence que
l'ancienne loi était, à son premier stade, une loi
négative. C'était une loi qu'il était important de
présenter à cette époque, mais elle ne faisait que dire:
Nul ne peut faire telle chose, nul ne peut faire cela. Il faut arrêter.
C'était une loi qui combattait la pollution. Il faut maintenant passer
au stade positif. La loi 69 est maintenant le stade positif,
c'est-à-dire celui qui donne la possibilité de prévenir,
de planifier, de poser des gestes positifs qui empêcheront la
dégradation du milieu.
Le citoyen a un rôle actif dans ce domaine-là et il faut
qu'il devienne une personne responsable. L'Environnement va permettre au
citoyen de devenir un partenaire indispensable dans le processus de prise de
décisions afin de déboucher sur des modifications quant à
la qualité de son milieu de vie. Lors de la commission parlementaire de
septembre, nous avons entendu des groupes qui nous ont apporté
différents sons de cloche dont nous
entendons tenir compte. J'ai été à même,
à cette commission parlementaire, de constater l'intérêt
des députés et notamment de ceux de l'Opposition,
spécialement le député de D'Arcy McGee et le
député de Saint-Hyacinthe, pour les préoccupations
manifestées par les citoyens du Québec pour la protection et la
sauvegarde de l'environnement. J'ai apprécié leur appui et les
recommandations qu'ils ont faites pour bonifier cette loi. C'était
réellement une commission parlementaire où on sentait que chacun
des membres tentait de bonifier la loi et que chacun avait une
préoccupation pour l'environnement.
À cette époque où le citoyen ordinaire est trop
souvent impuissant devant les grandes machines des développeurs et les
grands appareils de l'État, nous sommes tous convaincus, je crois, de la
nécessité d'ouvrir notre administration et notre
législation sur le citoyen, de lui donner des droits et des recours et
d'obliger les grands aménageurs à planifier leurs projets de
sorte qu'ils tiennent compte de la protection de l'environnement. Nous avons
étudié attentivement les suggestions du grand public et des
partis de l'Opposition. Je suis en mesure de proposer certains amendements lors
de l'étude du projet de loi, article par article. Ces amendements
porteront essentiellement sur les points suivants.
Le premier type d'amendements, c'est la reconnaissance du droit du
public à l'information. Beaucoup de gens se sont plaints de la
difficulté d'obtenir de l'information dans le domaine de
l'environnement. Or, une information large et accessible est, selon nous, un
prérequis à l'exercice par les citoyens de leur liberté
démocratique. Ceci s'applique, évidemment au domaine de
l'environnement. Je présenterai donc en commission parlementaire, et je
ferai parvenir les documents aux députés de l'Opposition
après cette deuxième lecture, des amendements qui toucheront
l'information, qui amèneront la disponibilité de l'information
aux citoyens concernant la pollution causée par tout pollueur.
Deuxièmement, ils amèneront de l'information sur les certificats
d'autorisation délivrés en vertu de la Loi de la qualité
de l'environnement; troisièmement, de l'information sur les demandes de
certificats d'autorisation soumises en vertu de la loi et,
quatrièmement, de l'information aux citoyens sur les ordonnances
émises en vertu de la loi ainsi que d'autres décisions
administratives.
Les citoyens seront également informés au moyen d'avis
publics et d'avis préalables; cinquièmement, de rémission
d'ordonnances et des appels interjetés à la suite de certaines
décisions du directeur des services de protection de
l'environnement.
La deuxième série d'amendements que j'apporte au projet de
loi est pour une accentuation de la présence du citoyen dans le
processus administratif. Je proposerai donc en commission parlementaire des
amendements qui permettront au citoyen de jouer un rôle lorsque le
directeur des services de protection de l'environnement émettra une
ordonnance qui requiert un avis préalable.
Lorsqu'une personne ou une municipalité portera en appel une
décision du directeur des services de protection de l'environnement et
lorsque je serai appelé à approuver un programme de
dépollution soumis par un pollueur, la population sera alors avertie au
moyen d'avis publics et certains documents seront mis à la disposition
du public afin de lui permettre de jouer un rôle utile.
M. le Président, la troisième série d'amendements
que j'apporterai à ma loi, ce seront des ajustements destinés
à prévenir des poursuites dans le cas de celui qui exécute
un programme de dépollution. Ce sont des amendements qui seront
introduits afin de protéger celui qui a soumis et fait approuver un
programme de dépollution et qui le respecte fidèlement. Je pense
que ce sont des propositions qui ont été présentées
par des députés de l'Opposition.
M. le Président, un journaliste aujourd'hui a semblé dire
que, si on présentait cet amendement, cela pourrait être une sorte
de concession faite à l'entreprise. Au contraire. Je pense que c'est une
façon de stimuler les industries qui polluent à commencer
immédiatement à se doter d'un programme de dépollution
puisqu'en même temps, elles vont poser un geste positif de
s'équiper pour dépolluer et, en même temps, pendant le
programme, les citoyens sauront que cette industrie fait des gestes positifs,
parce que les citoyens, on ne leur donne pas le droit de poursuivre uniquement
pour avoir le plaisir de poursuivre, c'est pour atteindre des objectifs. Ce qui
compte, c'est justement que des décisions soient prises par les
entreprises. Cet amendement va stimuler les industries à se doter d'un
programme avec le gouvernement de dépollution.
La quatrième série des amendements, M. le
Président, c'est sur la clarification du rôle du Conseil
consultatif de l'environnement. Enfin, nous présenterons des amendements
qui auront pour effet de permettre aux citoyens d'avoir accès
directement au conseil consultatif, dont le rôle sera
précisé, afin d'éviter tout chevauchement avec les
fonctions qu'accomplira le bureau d'audiences publiques sur l'environnement.
Ainsi, les citoyens pourront s'adresser au Conseil consultatif d'environnement
afin de le saisir d'un problème concernant des politiques de protection
de l'environnement alors que le bureau d'audiences publiques sur
l'environnement s'occupera des projets ponctuels, notamment ceux qui sont
assujettis à la procédure d'évaluation des impacts sur
l'environnement.
M. le Président, j'aimerais aussi ajouter qu'en 1972 le
gouvernement a sanctionné une loi pour protéger l'environnement
et mettait sur pied les SPE. Depuis le 15 novembre 1976, avec un ministre
à temps plein, des ressources humaines et financières un peu plus
élevées, la bataille de l'environnement prend de l'ampleur au
Québec. Les groupes écologiques qui, avant le 15 novembre,
prêchaient souvent dans le désert, ont beaucoup
espéré de la loi 69. (12 heures)
Je crois qu'à force d'en parler on va main-
tenant sensibiliser davantage les six millions de
Québécois. On est encore loin des six millions d'inspecteurs, M.
le Président; je pense que c'était optimiste de penser que les
six millions d'inspecteurs deviendraient immédiatement
préoccupés au même degré par l'environnement. Je
pense qu'avec ce genre de société dans laquelle nous vivons il
faut expliquer un peu comment il se fait que ce n'est pas évident pour
tout le monde, l'environnement. M. le Président. Ce manque de
motivation, je dirais que c'est le système économique actuel qui
en est la cause. Le système économique dans lequel nous vivons
prône, dans son échelle de valeurs, que bonheur équivaut
à consommation.
Plus on consomme, plus c'est du bonheur. M. le Président,
à partir de cette définition du bonheur, les citoyens ont pour
principale ambition de gagner plus d'argent afin de consommer le plus possible,
sans tenir compte des coûts sociaux engendrés par leur
manière de vivre. Par exemple, l'individu qui s'achète une
motoneige ou une motocyclette ne se préoccupe pas du tout de la
pollution atmosphérique et de la pollution par le bruit qu'il cause
à son environnement parce que, pour lui, il y a du bonheur dans ce qu'il
vient de se procurer. Mais, à leur tour, ses voisins, ceux qui subissent
cette pollution s'énervent et s'emportent contre l'agresseur de leur
milieu et, pour retrouver l'équilibre, on s'en retourne dans son petit
chalet de campagne sur le bord de l'eau; on s'achète un énorme
bateau à moteur et on fait du bruit sur le bateau pour s'échapper
de la pollution de la ville.
De son côté, M. le Président, l'industrie qui
produit les biens de consommation a très souvent des équipements
sous-utilisés qui produisent de la pollution. Prenons, par exemple, le
cas d'une compagnie dans mon comté, que je ne nommerai pas, mais qui
émet des odeurs désagréables intolérables. Si, par
hasard, une autorité, comme les Services de protection de
l'environnement, soit de Québec ou de Montréal, l'oblige à
installer des équipements antipollution, elle se conforme, mais elle va
négliger par la suite d'entretenir ces équipements en n'engageant
pas des personnes qualifiées. Pourquoi cette compagnie se
préoccuperait-elle de vivre en harmonie avec les citoyens du quartier?
Les propriétaires de cette compagnie veulent faire plus de profits pour
pouvoir consommer plus eux aussi à satiété comme les
autres citoyens.
Comment faire pour assurer, M. le Président, le changement d
attitude et de comportement face à la protection de l'environnement? Je
crois qu'il n'y a qu'une seule façon de réussir à prouver
à la population et aux gouvernements, municipal, provincial et
fédéral, que la protection de l'environnement ne va pas à
l'encontre du développement économique et qu'elle ne vise surtout
pas à créer des chômeurs, notre problème no 1, mais
bien plutôt à préserver nos ressources naturelles qui ne
sont pas illimitées et à augmenter la qualité de la vie
des citoyens grâce à des éléments naturels, sains,
qu'on n'a pas besoin d'acheter sur le marché. C'est un combat
perpétuel que nous devons gagner si nous voulons nous assurer
qu'à long terme nos enfants n'hériteront pas d'un monde inhumain
où la verdure sera devenue une denrée rare et où le soleil
ne réussira plus que simplement à filtrer à travers les
fumées polluantes de nos usines.
M. le Président, c'est sûr que notre projet de loi va
présenter une notion nouvelle. Mais cette loi est tellement à
l'avant-garde que même la Chambre de commerce du Québec est venue
dire qu'elle était d'accord avec un projet de cette envergure. M. le
Président, c'est tellement à l'avant-garde qu'hier soir il y
avait à Toronto une assemblée qui regroupe tous les membres de
l'Association canadienne du droit de l'environnement. Le directeur de mon
contentieux est allé hier soir donner des explications aux
représentants des dix provinces canadiennes qui é aient
là, les responsables du droit à l'environnement. M. le
Président, savez-vous ce que l'interlocuteur de Toronto, un avocat, a
dit, suite au projet de loi que nous présentons aujourd'hui? Il a dit:
Si le Québec se dote d'une loi environnementale aussi dynamique que le
projet de loi no 69, il n'y a aucune raison pour nous de refuser
l'association.
M. le Président, il est vrai que l'environnement est une notion
relativement nouvelle; et comme toutes les idées nouvelles, elle ne
s'impose pas automatiquement. Pourtant, il faut comprendre et accepter, le plus
rapidement possible, que cette notion est une notion d'avenir, que c'est une
notion de civilisation et de la civilisation qui se prépare. On peut
l'intégrer progressivement ou être un jour forcé de s'y
soumettre, mais ceci n'est pas nécessairement le signe d'une grande
prévoyance. Il m'arrive quelquefois de constater que le dossier de
l'environnement ne s'impose pas facilement, malgré les arguments solides
dont il est constitué.
Je vois à cela deux raisons. La première, ce sont nos
vieilles habitudes de gaspillage et, disons le mot, de malpropreté.
Ajoutons à cela une certaine paresse et une certaine insouciance dans la
recherche d'un profit rapide. La deuxième, c'est l'image négative
qui faisait de l'environnement un ensemble de déchets, d'égouts,
de pollution. Mais, si on revient au vrai sens des mots, l'environnement, c'est
davantage le cadre de la vie ou, encore mieux, la qualité de ce cadre de
vie, qui dépend de la qualité de chacun des milieux ambiant de ce
cadre de vie.
L'environnement c'est davantage aussi cette aspiration de l'homme
à vivre en harmonie et en intelligence avec la nature que la recherche
d'artifices et de robots qui ne peuvent conduire qu'à une
déshumanisation complète à plus ou moins long terme. Il
est bien important de réaliser que l'environnement n'est pas l'affaire
de poètes. Je ne suis pas un homme de théorie. Je suis et je veux
être un homme de résultats et de réalisations. Pour moi, la
participation des citoyens n'est pas une idée, c'est une façon
d'être plus efficace.
Depuis mon arrivée aux services de l'Environnement, j'insiste sur
la participation. Je demande aux 6 millions de Québécois de se
faire les pro-
tecteurs de l'environnement et je veux que cette phrase ne soit pas
uniquement une formule, mais qu'elle débouche sur la
réalité. Le travail d'un ministre de l'Environnement s'apparente
beaucoup à celui que doit faire un participant à une course
à obstacles. Nous sommes, au Conseil des ministres, deux douzaines de
machines lancées dans une course, et certaines donnent souvent
l'impression d'exister uniquement pour donner une jambette aux autres. C'est
peut-être un peu l'image de l'Environnement à travers tous les
ministres développeurs. Mais l'Environnement réussira à
atteindre ses objectifs à une condition toutefois; c'est que la
population s'impose comme priorité au gouvernement. L'environnement ne
deviendra une priorité de n'importe quel gouvernement, que ce soit le
gouvernement du Parti québécois, ou un gouvernement du Parti
libéral, de l'Union Nationale ou des créditistes, quel que soit
le style ou le type de gouvernement, que quand il aura été
d'abord une priorité des citoyens.
Le ministre peut faire un bout de chemin, mais il a besoin de tous les
Québécois dans une large mesure, parce qu'un ministre de
l'Environnement sans les citoyens ne reste pas longtemps ministre de
l'Environnement. Avec l'aide des citoyens, je suis intervenu au Lac-Saint-Jean,
constatant au passage la nécessité d'études d'impact avant
de prendre des décisions. Je suis intervenu à Rouyn-Noranda,
où il s'agissait d'impliquer des représentants et des groupes de
citoyens et de prendre conscience de la mauvaise qualité de
l'environnement. Je suis intervenu avec des citoyens aux
Îles-de-la-Madeleine où une expérience pilote de
participation structurée se poursuit. À la suite de plaintes
fondées, je suis intervenu à Valleyfield et à
Saint-Jean-de-Matha. Il faut maintenant reprendre le temps perdu. Il est
inutile de chercher à se donner un pays souverain pour un gouvernement
souverainiste, à moins que ce pays ne soit également sain, que la
qualité de la vie ne soit élevée, que le milieux ambiants
ne soient bien gérés. Ce sera notre tâche, au cours de la
prochaine année.
Je crois que l'environnement doit être pris en charge par tous les
citoyens. Nous vivons chacun dans un cadre donné. Nous avons chacun nos
rêves personnels. Certains se voient dans des rôles de
défricheurs, de développeurs, de protecteurs. Je crois que le
progrès économique, pour être un véritable
progrès, pour être rentable, pour produire de vraies richesses
doit se concilier la protection de l'environnement. L'un ne va pas sans
l'autre. Une société ne s'enrichit pas parce que certains
individus font d'énormes profits en produisant n'importe quoi, n'importe
comment. Là aussi ma conviction est profonde. Je refuse même de
discuter d'une opposition entre le développement économique et la
protection de l'environnement. Le progrès économique qui massacre
et gaspille nos richesses naturelles les plus essentielles à la vie, ce
n'est pas un progrès, c'est un recul. (12 h 10)
Le projet de loi ne va peut-être pas assez loin, mais c'est une
étape, une étape qui permettra de fixer, après qu'elle
sera adoptée, un nouveau point de départ. Les règles du
jeu ne seront plus tout à fait les mêmes après. Je termine
en disant que. lors de la commission parlementaire, nous avons entendu des
représentants du secteur manufacturier, notamment la compagnie General
Motors, admettre que son entreprise est florissante aux États-Unis et,
notamment, dans l'État du Michigan où elle a 30 usines
d'automobiles.
Je tiens à souligner à cette Assemblée que le
Michigan, qui possède les 30 usines de General Motors, possède
une législation de protection de l'environnement qui accorde aux
citoyens un pouvoir encore plus redoutable que celui de la loi 69. D'autres
États américains et même nos voisins de l'Ontario nous
regardent actuellement parce qu'ils espèrent beaucoup que nous adoptions
une législation d'avant-garde.
L'adoption du projet de loi ne fera que placer le Québec dans la
communauté des États progressistes pour qui l'homme, sa vie et
son bien-être viennent en tête des préoccupations à
protéger à tout prix à l'aide d'une loi
équilibrée et dynamique. Cette loi, qui crée la charte des
droits du citoyen à l'environnement, c'est, je pense, le plus beau
cadeau que notre génération peut léguer aux autres groupes
et aux générations futures qui vont nous suivre. Je vous
remercie. Étant pris par mon contenu, j'ai oublié de dire la
formule habituelle, peut-être parce qu'elle est passée de mode,
mais elle est encore là. Le lieutenant-gouverneur a pris connaissance,
avant mon discours, de ce projet de loi et il était tellement heureux
qu'il en recommande l'étude à l'Assemblée.
Mme le Vice-Président: Avant de donner la parole à
M. le député de D'Arcy McGee, je demanderais au ministre s'il a
des objections à ce que l'on corrige les "monsieur" par "madame" dans la
dernière partie de son intervention.
M. le député de D'Arcy McGee.
M. Victor Goldbloom
M. Goldbloom: Mme la Présidente, il me semble que ce
très long discours que nous venons d'entendre devrait porter un titre au
journal des Débats. Je me demande, cependant, si ce titre devrait
être: "L'épître de Léger aux Québécois"
ou bien "Un nouveau chapitre des fables de LaFontai-ne".
Mme Lavoie-Roux: La grenouille qui veut se faire aussi grosse que
le boeuf.
M. Goldbloom: Mme la Présidente, j'ai linten-tion de
parler beaucoup moins longtemps que le ministre. Après tout, j'ai
passé presque six années a parcourir cette province en essayant
d'éveiller la population à la nécessité de
protéger notre environnement. Il ne faudra pas aujourd'hui
l'endormir.
Le député de Lafontaine, ministre
délégué à l'Environnement, se fait aujourd'hui
l'architecte d'un étage qui s'ajoute à une structure que j'ai eu
I'honneur d'ériger en 1972. Le style architectural
est différent. Cela arrive des fois, quand on fait appel à
un deuxième architecte pour ajouter un élément à un
édifice déjà construit. L'harmonie, à mon sens,
n'est pas parfaite. Je trouve que ce nouvel étage est un peu trop,
élaboré, un peu trop lourd pour l'édifice qui le supporte.
Quand même, nous de l'Opposition officielle, nous du Parti libéral
du Québec, étant autant que les ministériels
préoccupés par la protection de l'environnement, nous avons
l'intention de voter en faveur de la deuxième lecture de ce projet de
loi.
J'ai dit que ce projet de loi nous paraît aller un peu trop loin.
Je voudrais en prendre seulement deux exemples. Il y a des choses qu'il est
très difficile de critiquer, Mme la Présidente, et ce n'est pas
mon intention de les critiquer quant à leur fond, mais plutôt
quant à leurs implications.
Le projet de loi établit par exemple un droit à la
protection de l'environnement, un droit à un environnement sain. Il est
impossible de parler contre le désir d'un gouvernement d'assurer
à ses citoyens un environnement sain. Mais quand on érige un
droit dans nos lois, on va loin, Mme la Présidente, parce que, quand on
l'établit, on doit en prévoir les modalités de l'exercice.
On doit prévoir des recours, si ce droit n'est pas respecté,
n'est pas obtenu.
Il nous paraît qu'en ce moment de notre histoire, aller aussi loin
que définir dans les statuts du Québec un tel droit absolu, c'est
aller au devant de la réalité de ce qui peut être offert
aux Québécois dans le contexte des problèmes que nous
connaissons.
Je répète que ce n'est pas une raison suffisante pour nous
de vouloir refuser l'adoption du projet de loi. Nous poursuivrons une
discussion sur chaque élément, chaque article, comme il se doit,
en commission parlementaire. Mais nous nous interrogeons sur
l'opportunité d'aller aussi loin.
Il est facile de parler de droits de cette nature. On parle du droit
à la santé, du droit à l'habitation, maintenant du droit
à un environnement sain. Dans chacun de ces cas, il y a un objectif que
nous voulons tous viser.
Nous voudrions tous que la santé des Québécois soit
non seulement aussi bonne que possible, mais également qu'elle soit
aussi bien protégée que possible, par tous les mécanismes
que l'État, la collectivité, peut mettre à contribution
pour améliorer et protéger cette santé. La
réalité est que l'on n'est pas en mesure, aujourd'hui, en 1978,
de réussir tout ce que nous voudrions réussir pour la protection
et l'amélioration de la santé des Québécois.
Il en est de même de l'habitation. On peut déclarer un
droit à l'habitation, mais, aujourd'hui même, il y a eu des
échanges ici, en cette Chambre, au sujet des problèmes qui
existent et du fait que ce droit n'est pas à la portée d'un
nombre important de citoyens. Il faut trouver de meilleures mesures pour
permettre à ces citoyens d'obtenir, d'exercer ce droit, si nous voulons
que ce droit existe réellement dans la vie des gens de chez nous.
Il en est de même de l'environnement, Mme la Présidente.
Nous pouvons déclarer qu'un droit existe, mais cette déclaration
ne fera pas que, demain matin, avec l'adoption du projet de loi no 69, ce droit
aura une réalité dans la vie quotidienne des
Québécois. (12 h 20)
II y a un deuxième élément du projet de loi et,
dans ce cas également, il est impossible de parler fondamentalement
contre ce que propose le ministre, mais il implique par ce projet de loi les
six millions de citoyens dans l'activité importante de protéger
l'environnement.
Ce n'est pas une mauvaise chose; au contraire, c'est une bonne chose.
Mais, en termes de modalités d'application de ces mesures, je
résume d'une façon très simple notre pensée. Le
ministre, dans ses fréquentes envolées oratoires, a souvent
parlé de faire des Québécois six millions d'inspecteurs de
l'environnement. Je voudrais lui dire amicalement qu'il est bon que les
Québécois deviennent tous et chacun des inspecteurs de
l'environnement, mais il ne faudrait quand même pas que nous ayons au
Québec six millions de ministres de l'Environnement. C'est autre chose.
Je ne suis pas convaincu que ce projet de loi ne va pas aussi loin que de
créer un gouvernement parallèle avec six millions de ministres de
l'Environnement.
J'ai dit que je ne parlerais pas très longtemps et je n'ai pas en
ce moment d'autres critiques négatives à faire de ce projet de
loi; celles que je viens de faire ne sont même pas négatives, ce
sont plutôt des mises en garde. Je voudrais dire tout simplement que,
lorsque le ministre vers la fin de son discours a dit: Notre approche est
équilibrée, je n'ai pu m'empêcher la réflexion:
À chacun son équilibre. Le mien aurait été
légèrement différent, mais, je répète encore
une fois, ce n'est pas une raison suffisante pour nous amener à refuser
d'appuyer le ministre et le gouvernement dans l'adoption de ce projet de
loi.
Après tout, Mme la Présidente, il serait passablement
inutile que nous poursuivions de part et d'autre une concurrence pour
déterminer qui est le plus dédié, le plus convaincu, le
plus énergique quant à la protection de l'environnement. Nous
sommes tous d'accord. Nous ne parlons que de modalités, nous ne parlons
que d'approches sur le plan législatif. Il est normal que nous puissions
différer légèrement d'approches.
Nous avons l'intention de faire un essai loyal de ce projet de loi, d'en
faire des critiques constructives au fur et à mesure que nous
observerons son application dans les faits, dans la vie des gens et des
organismes. Nous avons l'intention de continuer comme nous le faisons depuis la
fin de 1970, quand pour la première fois un gouvernement du
Québec a créé les Services de protection de
l'environnement. Nous avons l'intention de poursuivre loyalement et de
façon constructive nos efforts pour assurer à tous les
Québécois un environnement de la meilleure qualité
réalisable dans le contexte que nous devons vivre. Ce contexte n'est pas
facile. Nous n'atteindrons
pas la perfection, mais nous devrons l'avoir comme objectif. Et, puisque
nous avons la perfection comme objectif, nous allons voter favorablement
à l'adoption de la deuxième lecture de ce projet de loi.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Fabien Cordeau
M. Cordeau: Mme la Présidente, le 25 septembre dernier, la
commission permanente de l'environnement se réunissait pour entendre
quelque 34 mémoires provenant de différentes couches de la
société, depuis des groupes de citoyens jusqu'aux
représentants des grandes entreprises. L'Union Nationale, sans se
désister de l'objectif du projet de loi 69, Loi modifiant la Loi de la
qualité de l'environnement, avait, à ce moment-là,
apporté des commentaires et critiques quant aux moyens choisis par le
ministre pour atteindre ses objectifs.
Ces commentaires se présentaient sous la forme d'une
inquiétude face aux forces actuellement en présence dans notre
société, soit les puristes en matière environnementale et
les industries, deux mondes bien différents. Notre inquiétude
avait également porté sur la lourdeur administrative et
bureaucratique d'un tel projet de loi, sans oublier les tracasseries
administratives et juridiques pour protéger l'environnement. L'Union
Nationale est consciente qu'augmenter la lourdeur administrative d'un appareil
déjà assez pesant, c'est contribuer à
l'inefficacité des décisions. L'Union Nationale
s'inquiétait également des six millions d'inspecteurs que cette
loi créait. On a mentionné qu'elle faisait des
Québécois des policiers de l'environnement et qu'elle ne les
rendait pas obligatoirement responsables de leurs propres actions.
Il faut bien se rendre à l'évidence que nous ne ferons pas
du jour au lendemain des Québécois des citoyens
émérites quant à la protection de l'environnement, parce
que nous avons trop souvent été irrespectueux envers cette
qualité pourtant primordiale dans une société. L'Union
Nationale avait également beaucoup insisté sur la
nécessité de l'éducation de la population à la base
d'une politique de protection de l'environnement. Il doit y avoir
l'éducation, c'est-à-dire une cons-cientisation
générale de la population à la protection de
l'environnement. D'ailleurs, c'était pour nous l'occasion de dire au
ministre qu'il avait préféré punir
sévèrement plutôt que d'éduquer consciemment.
Finalement, nous nous étions interrogés sur la
portée que pourrait avoir le recours en injonction au moment même
où le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre doute de cet outil
comme moyen de rétablir un certain équilibre dans le rapport des
forces qui s'affrontent.
Voilà, en résumé, Mme la Présidente, la
position que l'Union Nationale avait prise lors de l'étude des
mémoires en commission parlementaire le 25 septembre dernier. Je
répète que nous sommes toujours un peu méfiants face
à un projet de loi-cadre de cette envergure, puisque nous n'avons pas
reçu la réglementation, ce qui ne nous permet pas d'en juger
convenablement toute l'intensité.
Ce matin, le ministre a apporté des suggestions à la suite
de l'audition des 34 mémoires et également des suggestions
positives des membres de l'Opposition lors de cette commission parlementaire.
Je remercie le ministre de ces amendements. Sans aucun doute, je n'en ai pas
pris connaissance à fond, étant donné qu'on ne nous les a
pas encore distribués. Par contre, je puis dire à ce stade-ci
qu'en deuxième lecture, c'est-à-dire lorsque nous
étudierons ce projet de loi article par article, nous aurons encore des
propositions ou des amendements positifs à vous proposer, M. le
ministre, afin de bonifier votre projet de loi.
J'ai eu l'occasion de mentionner précédemment que l'Union
Nationale avait insisté en commission parlementaire sur la
nécessité d'éduquer la population sur la protection de
l'environnement, de conscientiser, de sensibiliser les Québécois
de tous les âges à la qualité de l'environnement. Je pense
qu'à ce stade-ci de la deuxième lecture, il s'impose que l'on
revienne sur ce point fondamental afin que tous les Québécois qui
nous regardent actuellement en saisissent toute l'importance et y portent toute
l'attention que Ion doit lui accorder. (12 h 30)
Ce matin, j'ai été heureux d'entendre le ministre dire
que, lors de son voyage en Europe, il a constaté l'attitude positive des
gens qu'il a visités concernant leur responsabilité envers
l'environnement. Et le ministre d'ajouter que, dans ces pays, les jeunes,
dès qu'ils vont à l'école, commencent à entendre
parler de l'environnement et, toute leur vie, ils y sont sensibilisés et
en prennent soin.
En effet, Mme le Président, le ministre
délégué à I Environnement, dans une intention fort
louable, a choisi d'impliquer les citoyens du Québec dans la gestion de
la qualité de l'environnement. Constatant le besoin pressant qui se fait
sentir actuellement à la suite de la dégradation constante de
notre milieu de vie, le ministre s'est certainement dit: C'est assez, il faut
agir et, cette fois, je prends les grands moyens. Enfin, le ministre a choisi
des moyens qui lui permettaient, selon son optique, d'arriver à des
résultats concrets très rapidement. À travers cette charte
du citoyen, on ne peut s empêcher de penser à tout
l'intérêt politique que le gouvernement en retire. Mais cela est
une histoire que je ne veux pas aborder dans le cadre de ce débat. Je
disais que le ministre a opté pour des solutions draconiennes, voire
même coercitives contre les éventuels pollueurs.
On a voulu pallier à un problème sur une brève
échéance, mais on n'a pas pensé au long terme. C'est
à se demander même si on a identifié le vrai
problème qui existe au Québec face à l'environnement.
Certes, il y a des cours d'eau qui sont pollués. Nous respirons un air,
malsain, etc. Mais a-t-on au moins pensé à ceux qui causaient
toute cette catastrophe? Certains me diront: Ce sont les entreprises et
dorénavant nous les aurons
à l'oeil. D'autres me diront que les citoyens, inconscients du
souci de leur environnement, sont eux aussi bien gardés; avec six
millions d'inspecteurs, cela va marcher rondement. Mais a-t-on pensé au
moins un instant que ces Québécois qui dénonceront les
pollueurs pourront tout aussi bien polluer quelques jours après parce
que, précisément, on a institué un système de
gardiennage, mais on n'a pas implanté avec cela un système
d'autoresponsabilité des actions de chaque Québécois.
Mme la Présidente, il est évident qu'une loi de la
protection de l'environnement sans une politique éducative, c'est tout
simplement peine perdue. On peut remédier à certains maux, mais
seulement à court terme. Mais, si on planifie pour une meilleure
qualité de vie sur une longue échelle, je ne vois pas comment on
peut se passer d'une éducation à la population et ce n'est pas
dans dix ans qu'il faut commencer, c'est immédiatement. À ce
sujet, j'aimerais me référer à un article paru dans le
journal Le Soleil du 8 novembre dernier, qui s'intitule: "Environnement,
éducation d'abord ". Cet article reproduit une déclaration en
douze points élaborée au cinquième symposium du Conseil
québécois de l'environnement qui s'intitulait:
"Déclaration sur l'éducation mésologique", ce qui signifie
éducation relative à l'environnement. Permettez-moi ici de vous
mentionner deux points de cette déclaration: "L'éducation
relative à l'environnement doit être dispensée à
tous les âges et à tous les niveaux d'éducation formelle ou
non formelle. Les moyens de communication de masse ont la grande
responsabilité de mettre leurs ressources au service de cette mission
éducative. "
Je continue. "La cinquième position du Conseil
québécois de l'environnement estime enfin qu'une
réorientation de l'éducation s'impose et que la tragédie
en vue d'intégrer l'esprit de l'éducation mésologique dans
tous les domaines devrait être considérée avec un
très haut degré de priorité. Dès que les
Québécois seront pleinement conscients de la signification des
actes qu'ils posent, ce sera une partie gagnée et il sera inutile par
conséquent de prendre des mesures coerciti-ves qui finalement n'ont
jamais d'effet réellement bénéfique. " Cette
sensibilisation par l'éducation peut donner d'excellents
résultats à très court terme, du moins, des
résultats beaucoup plus tangibles que ceux dont on apportera les moyens
utilisés par le projet de loi 69.
Pour illustrer jusqu'à quel point l'éducation en
environnement est primordiale, je prendrai le cas des battures de Beauport
où un ministère, en l'occurrence le minitère des
Transports, a ignoré les directives émises par les services de
protection de l'environnement. Pourtant, s'il y en a qui devraient donner
l'exemple, ce sont les ministères du gouvernement
québécois. Un autre exemple, Mme le Président, concerne
encore une fois le même ministère, qui épand des pesticides
pour nettoyer les abords des routes provinciales, alors que l'on sait
très bien que cette utilisation constitue une contribution additionnelle
à la pollution des eaux.
Ce sont ces gens, Mme le Président, qui crient à qui veut
l'entendre qu'ils ont à coeur la protection des Québécois.
C'est à se demander parfois s'ils sont sincères. Quoi qu'il en
soit, je pense que notre position est maintenant bien connue, comme on l'a
exprimé en commission parlementaire à l'occasion de cette
deuxième lecture, à savoir que ce projet de loi de nature
coercitive ne réglera rien puisqu'il saute une étape essentielle
dans l'élaboration d'une politique de protection de l'environnement, et
c'est, bien sûr, celle de l'éducation.
Mme le Président, le projet de loi no 69 avait été
présenté la première fois par le député de
D'Arcy McGee et, actuellement, le ministre en fonction nous présente la
Loi modifiant la Loi de la qualité de l'environnement. Je suis presque
assuré, Mme le Président, que ce sera l'Union Nationale qui, la
prochaine fois, viendra y apporter des amendements. Je vous remercie.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Camil Samson
M. Samson: Merci, Mme le Président. Des propos du ministre
dans son discours de deuxième lecture, j'ai retenu sa volonté
ferme de vouloir faire des Québécois, et c'est ainsi qu'il les a
appelés, les complices de la protection de l'environnement. J'imagine,
Mme le Président, qu'il voulait dire qu'il voulait plutôt
s'associer les six millions de Québécois pour en faire des
protecteurs de l'environnement, ce avec quoi, Mme le Président, je
serais d'accord. Je serais d'accord que par des méthodes que nous
n'avons pas suffisamment utilisées dans le passé, par des
méthodes qui visent à faire de l'éducation, en fait les
six millions de Québécois puissent savoir qu'ils ont
intérêt à protéger eux-mêmes la partie de
l'environnement qui les concerne plus particulièrement. Mais, de la
façon dont c'est présenté, je me demande, un peu comme l'a
fait mon collègue de l'Union Nationale, avec les six millions
d'inspecteurs qu'a mentionnés le ministre tantôt, ce qui arrivera
une fois qu'il y aura six millions d'inspecteurs à l'environnement au
Québec. (12 h 40)
Est-ce qu'il restera quelqu'un à inspecter s'il y a six millions
d'inspecteurs? Je dois honnêtement reconnaître que le ministre veut
faire quelque chose pour protéger la qualité de l'environnement,
mais il y a un problème d'équilibre là-dedans qui est le
suivant. Tout en se voulant un projet de loi pour protéger la
qualité de l'environnement de chacun des citoyens, jusqu'à quel
point, dans le déséquilibre qu'on risque de voir s'instaurer, le
citoyen n'en arrivera-t-il pas à avoir un problème
économique suffisamment fort qu'il n'y aura plus de qualité
d'environnement à protéger, parce qu'il n'y aura plus de
situation économique qui intéressera le Québécois
à demeurer au Québec?
C'est un problème qu'il nous faut regarder bien en face. J'ai
entendu le ministre parler de ses
intrusions ou, comme il les a appelées, ses interventions dans
différentes régions. Il a mentionné la région de
Rouyn-Noranda. Je pense que le ministre a raison de mentionner cette
région, car il est venu y faire un tour. Il a tenu des propos, à
cette occasion, qui ont fait fureur, devant une assemblée de partisans,
bien sûr. Il a mentionné à peu près en ces termes
que la mine Noranda était le pollueur no 1 du Québec.
Évidemment, il a sûrement reçu des applaudissements
chaleureux de ses partisans. Je dis bien de ses partisans. Mais la
réalité est tout autre. La réalité est la suivante:
C est que dans cette région, comme dans d'autres régions du
Québec, il y a les industries que Ion appelle les industries moteurs. Si
nous faisons tout en notre pouvoir pour leur placer des bois dans les roues,
ces industries moteurs trouveront preneurs dans d'autres régions, dans
d'autres provinces. Elles trouveront preneurs ailleurs. Les capitaux qu'elles
ont à investir ne sont pas nécessairement attachés.
M. Russell: Dans d'autres pays aussi.
M. Samson: Elles pourront aussi aller dans d'autres pays. Or la
population fait face à ce problème qu'a mentionné le
ministre tantôt, la protection de l'environnement versus
l'économie. Elle a le choix. D'une part, une industrie moteur bien
vivante, et pouvoir y arracher des salaires pour faire vivre sa famille. Ces
industries moteurs sont multiplicateurs d'emplois; à titre d'exemple,
l'industrie minière est multiplicateur d'emplois par le chiffre 6. Quand
on a un emploi dans l'industrie minière, cela veut dire six autres
emplois dans des industries secondaires et tertiaires. Évidemment on
retrouve beaucoup plus de gens dans les comités antipollution, dans ces
régions, qui ne gagnent pas leur vie dans l'industrie primaire comme
telle; ils la gagnent par un salaire qui leur vient de I industrie tertiaire ou
même gouvernementale. C'est donc dire que ceux qui sont toujours
prêts à mettre en boîte l'industrie par des mesures, comme
celles que nous avons vues, de pressions, de contestations, ce ne sont pas
ceux-là qui perdront leur gagne-pain si l'industrie en souffre.
Je pense qu'il est important que nous fassions savoir que la population
en général, lorsqu'elle est concernée, veut bien faire son
possible pour protéger son environnement. On ne peut pas, de ce
côté-là, accuser personne de vouloir polluer ou, du moins,
de polluer sans qu'on regarde autour de soi ce qui pourrait être
progété.
Mme le Président, il y a aussi cet esprit de conservation.
Conservation de l'environnement, oui, mais conservation de son salaire pour
être capable de conserver sa vie, cela est également important. Je
pense que de ce côté-là, il y a un manque
d'équilibre. Le ministre a eu un écart de langage à
Rouyn-Noranda lorsqu'il est venu. D'ailleurs, il a reconnu un peu plus tard que
ce n'était peut-être pas tout à fait cela qu'il avait voulu
dire. Mais, comme conséquence et comme coïncidence, il arrive que
depuis qu'il est venu chez nous, il y a des emplois en moins; des
employés ont perdu leur emploi et lorsqu'on a un emploi qui se perd dans
l'industrie minière, cela veut dire six autres ailleurs. Il y en a eu
environ 200 depuis ce temps-là, 250, je pense.
Il est intéressant de regarder de ce côté-là,
et aussi, de tenter de maintenir un équilibre quand on fait une
intervention quelque part en matière d'environnement. J'ai retenu, bien
sûr, le gag des oiseaulogues ", qui s'applique très bien dans
plusieurs cas. Quand on parle de ces générateurs de protection de
l'environnement, il arrive que souvent, on va très loin. J'ai
déjà entendu, il y a quelques années, des gens, à
la radio, nous parler aussi des petits oiseaux sur la route 73. Parce que cela
pourrait déranger les petits oiseaux de faire une nouvelle route,
paraît-il qu'il ne fallait pas la faire. Le progrès et le
développement exigent des choses. Cela exige, par exemple, si on doit
faire une route, et que ma maison est placée sur le tracé de la
route, que je la déplace. Si je dois me déplacer, comme
être humain, je ne vois pas pourquoi un petit oseau ne pourrait pas se
déplacer lui non plus si c'est pour le progrès. C'est le monde
à I envers que de placer les oiseaux avant les êtres humains.
M. Russell: La vie des poissons avant la vie des êtres
humains.
M. Samson: Oui, justement. On a un petit témoignage ici,
juste pour faire remarquer au ministre qu'il doit y avoir une question
d'équilibre en toute chose, dans le journal Dimanche-Matin du 19
novembre. Cela ne fait pas longtemps. L'eau du lac était trop
salée, le sel sera remplacé par la "garnotte" et là, on
voit une affiche: "Protection de I'environnement, aucun épandage de sel
sur deux kilomètres ". L'Office des autoroutes vient installer des
affiches avisant les automobilistes qu'il n'y aura aucun épandage de sel
cet hiver sur une distance de deux kilomètres sur l'autoroute des
Laurentides, aux abords du lac à la Truite, près de
Sainte-Agathe. C'est dans ce lac que la municipalité de
Sainte-Agathe-Sud, qui compte 1000 habitants, s'alimente en eau potable et,
tous les hivers, l'eau de l'aqueduc affiche un degré de salinité
particulièrement élevé, alors que l'égouttement de
l'autoroute amène le calcium déposé sur la chaussée
directement dans le lac à la Truite.
Cet hiver, le calcium sera remplacé par de petites pierres, mais,
comme on ne sait pas trop ce qui arrivera lors des tempêtes, on invite
les automobilistes à diminuer considérablement de vitesse sur ce
tronçon. C'est bien beau, Mme le Président. Mais imaginez-vous
que, premièrement, il n'aurait pas été nécessaire
de placer ces panneaux et d'empêcher d'épandre du calcium sur deux
kilomètres. Il n'y aurait eu qu'à consulter les autorités
du ministère des Transports et tous auraient pu nous dire qu'il y aurait
eu moyen de faire en sorte que l'égouttement de cette partie de la route
aille ailleurs que dans le lac. Donc, on a pris là une mesure inutile.
Si on avait consulté qui de droit, cela aurait pu se régler
autrement. Mais il y a une chose qu'on a oubliée, Mme la
Présidente. C'est que si un automobiliste roule à 100
kilomètres à l'heure sur l'autoroute des Laurentides où,
évi-
demment, c'est permis de rouler à 100 kilomètres à
l'heure, et qu'il arrive dans cette section de deux kilomètres,
savez-vous qu'il risque gros de ne pas voir cette pancarte? Il risque gros
d'arriver sur un tronçon glacé, il risque gros d'avoir un
accident. On risque de voir des personnes perdre la vie sur ce tronçon.
Il paraît que, selon ce qui est écrit là-dessus, c'est
moins important de perdre des vies en automobile que d'avoir des truites qui
boivent un peu d'eau salée. (12 h 50)
Mme la Présidente, je soutiens, pour ceux qui me crient dans le
dos, que cela aurait pu être réglé. Je ne dis pas qu'on
doive envoyer le calcium dans le lac, au contraire. Ce n'est pas cela que j'ai
dit. J'ai dit que cela aurait pu être réglé en faisant en
sorte que les égouttements se fassent autrement et que les égouts
pluviaux n'aillent pas dans ce lac. En cette matière, le
ministère des Transports aurait pu régler ce problème
facilement alors qu'on a trouvé bon de faire de la publicité pour
le ministère de l'Environnement sur l'autoroute des Laurentides.
Ce ministère-là est de bonne foi, de bonne volonté,
mais cela s'adonne qu'il a un ministre qui aime bien la publicité. Donc,
une fois de plus, il s'est fait installer un panneau pour montrer que
c'était le ministère de l'Environnement qui était
intervenu là-dedans, comme à tous les jours, presque, durant un
an ou deux, il a sorti des communiqués de presse pour nous dire, par
exemple, que dans telle région du Bas-du-Fleuve, l'inspecteur avait
changé son numéro de téléphone. Qu'est-ce que vous
voulez que cela nous foute, dans le Nord-Ouest québécois, que
l'inspecteur de Gaspé ait changé son numéro de
téléphone? Qu'est-ce que vous voulez que cela foute aux gens de
Québec que l'inspecteur de l'Environnement dans la région des
Laurentides, ait changé son numéro de téléphone?
Cela sortait à pleins communiqués de presse. Tous les
députés ont reçu copie de cela, Mme le
Président.
Mme Lavoie-Roux: C'est vrai!
M. Samson: C'est le genre de choses qu'on fait au
ministère de l'Environnement. C'est un ministère de
publicité, le ministre est friand de publicité. Il aime la
publicité à un point tel qu'il en fait deux ou trois
communiqués par jour. Ce sont des choses comme celles-là. Moi, je
dis: L'équilibre dont il a été fait mention tantôt,
c'est cet équilibre dont nous avons besoin. On ne doit pas bloquer le
progrès parce qu'il y a dans le décor des personnes qui ont une
âme de poète.
Le progrès doit être considéré, et surtout
dans cette période que nous vivons, dans cette période où
les industries ont tendance à se sauver un peu du Québec, parce
qu'il y a des problèmes sérieux d'incertitude,
d'inquiétude. Les capitaux qui sont fragiles, qui sont nerveux ont
tendance à s'en aller vers l'extérieur, vers l'Ontario, vers
d'autres pays. Combien de nos concitoyens québécois exportent des
capitaux vers la Floride, vont investir en Floride plutôt que d'investir
ici au Québec, présen- tement! C'est dans cette période
difficile, dans cette période au taux de chômage assez
élevé que l'on vient nous dire qu'on va faire des
Québécois 6 millions de policiers, 6 millions, en quelque sorte
le ministre ne l'a pas dit comme cela, mais cela veut dire à peu
près cela de délateurs, de gens qui vont se surveiller les
uns les autres et on donne c'est là que je ne suis pas d'accord
avec le projet de loi à chaque citoyen le pouvoir de poursuivre
son voisin. Si l'on considère que l'environnement, que la pollution,
cela peut être une forme de crime, comment se fait-il que quand le
gouvernement a à poursuivre des criminels, ce n'est pas un citoyen qui
fait la poursuite, c'est le ministère public qui fait les poursuites au
nom du gouvernement, c'est le procureur général ou l'adjoint au
procureur général qui fait les poursuites au nom du gouvernement.
Pour quelle raison, dans le cas particulier de la Loi sur la protection de
l'environnement, ce ne serait pas le ministère public comme pour les
autres cas, ce ne serait pas le procureur général comme dans les
autres cas qui ferait les poursuites, de sorte qu'il y aurait une étude
préliminaire avant de lancer une poursuite contre quelqu'un? Ce qu'il y
a de dangereux dans ce projet de loi, c'est qu'il y aura 6 millions de
personnes qui auront le pouvoir de se poursuivre entre elles.
Quelle sorte de situation cela va-t-il apporter? Quelle sorte de
société cela va-t-il nous apporter? Mme le Président, il y
a des pays totalitaires qui ne sont pas aussi avancés que cela en
matière de délation. Je dis que c'est une partie de la loi qui
est inacceptable. Je veux bien dire au ministre que je suis d'accord avec lui
en matière de protection de l'environnement. Je veux bien dire au
ministre que je suis d'accord avec lui pour l'aider à tenter de trouver
les meilleures solutions possible. Je veux bien dire au ministre que je suis
d'accord avec lui pour que nous puissions étudier des crédits
à la prochaine occasion pour lui permettre de faire l'éducation
à partir de l'âge. L'éducation en matière de
protection de la qualité de l'environnement commence à partir du
jeune âge dans les écoles.
Je veux bien dire tout cela au ministre, mais je veux me garder une
réserve, car on dit dans cette loi que n'importe qui pourra poursuivre
n'importe qui. C'est aller trop loin, c'est le déséquilibre. Je
veux de l'équilibre et, parce que je veux de l'équilibre, je
maintiendrai cette réserve jusqu'à ce que le ministre nous dise
dans sa réplique j'espère en deuxième
lecture qu'il a l'intention de modifier cette partie-là. Si cette
partie-là est modifiée pour qu'on ait un sain équilibre,
je pense que je serai d'accord avec le projet de loi. Mais parce que le projet
de loi est omnibus, parce que le projet de loi contient une portion qui est
inacceptable, à ce moment-ci, je me réserve le droit de dire non
à ce projet de loi, mais en espérant qu'il y aura une
modification d'annoncée pour que je puisse dire oui parce que je suis
d'accord avec la protection de l'environnement.
M. Laplante: Mme la Présidente, je demande la suspension
du débat, s'il vous plaît!
Mme le Vice-Président: M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: Je demande la suspension du débat, Mme la
Présidente.
Mme le Vice-Président: M. le député, vous
aurez la parole au moment de la reprise du débat.
M. le leader, vous aviez une communication à faire?
M. Bertrand: Oui, Mme la Présidente. Je voudrais demander
aux partis de l'Opposition s'ils accorderaient leur consentement pour qu'on
modifie l'avis qui est en appendice à notre feuilleton aujourd'hui et
qui prévoit la tenue de la commission parlementaire permanente des
affaires municipales. Déjà, hier, on avait ajouté la ville
de Sherbrooke même si la période de sept jours n'était pas
respectée; on était à six jours hier. Il y a la ville de
Beauport maintenant qui aimerait bien être entendue dès lundi
prochain. Je demanderais, à ce moment-là, le consentement pour
modifier l'avis.
M. Lamontagne: Mme la Présidente, avant d'accorder le
consentement, je veux poser une question. Prévoyez-vous d'autres villes?
Il semble y en avoir une par jour.
M. Bertrand: La ville de Beauport était la
dernière.
M. Lamontagne: Consentement.
M. Bellemare: Mme le Président, non.
Mme le Vice-Président: Consentement. M. le leader.
M. Bellemare: Je ne dis pas oui parce qu'on est en tran
d'égrener toute la structure de notre parlementarisme. Un instant. Aux
derniers moments, on peut donner des acquiescements. D'accord, sur certaines
choses qui sont passables, mais je dis non pour la ville de Beauport qui suit
son...
Une voix: Ce n'est pas un discours qu'on vous demande de
faire.
M. Bellemare: Regardez donc ce bel innocent, le
député de Lac Saint-Jean qui se mêle, mon cher monsieur,
d'une affaire qu'il ne connaît pas.
M. Brassard: Question de privilège, Mme le
Président.
M. Bellemare: Quelle innocence!
M. Brassard: C'est bien beau, le doyen!
Mme le Vice-Président: M. le député de Lac
Saint-Jean, aviez-vous une intervention?
M. Brassard: Non. Je me préparais à lui demander de
retirer ses paroles, mais cela n'en vaut pas la peine.
Une voix: C'est le bouffon de la "gang". Mme le
Vice-Président: À l'ordre!
M. Lamontagne: Mme la Présidente, j'ai une suggestion
à faire au leader adjoint. Il serait peut-être souhaitable que les
leaders se rencontrent avant le début des travaux pour essayer de
régler ce problème.
M. Bertrand: C'est cela. En l'absence de consentement, je pense
bien que c'est la meilleure chose de réunir le syndicat des leaders. On
verra ce qu'il y a moyen de faire pour régler ce petit problème
qui, dans le fond, n'en est pas un très gros. D'accord. On verra ce
qu'il y a lieu de faire pour Beauport.
Mme le Vice-Président: Cette Assemblée suspend ses
travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprise de la séance à 15 h 6)
Le Vice-Président: Au moment de la suspension, M. le
député de Bourassa avait demandé le droit de parole.
M. le député de Bourassa.
M. Laplante: M. le Président, je vous remercie de me
donner l'occasion de prendre la parole sur le projet de loi no 69, Loi
modifiant la Loi de la qualité de l'environnement.
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! Mme le ministre.
Mme Payette: M. le Président, est-ce que votre
présidence n'a pas été prévenue que je
m'apprêtais à faire une déclaration
ministérielle?
Le Vice-Président: Madame, officiellement non. Du
consentement de toute l'Assemblée cela pourrait se faire, mais la
présidence ne peut pas en décider seule.
M. Lalonde: Je voudrais avoir un renseignement à ce
moment. Est-ce qu'une copie a été transmise à
l'Opposition?
M. Grenier: M. le Président, je ne sais pas si le ministre
accepterait de laisser passer une quinzaine de minutes. Je pense que cela s'est
fait à la toute dernière minute avant 15 heures pour les deux
formations politiques.
Mme Payette: Volontiers, M. le Président.
Le Vice-Président: Dans ce cas, est-ce qu'on pourrait
s'entendre sur ceci: M. le député de Bourassa fera son discours
et, ensuite du consentement unanime, Mme le ministre fera sa
déclaration? D'accord? Merci.
M. le député de Bourassa.
M. Patrice Laplante
M. Laplante: Merci, M. le Président. Je suis d'autant plus
heureux que j'ai eu, si on peut appeler cela ainsi, la chance de
présider les séances où on a reçu des
mémoires sur le projet de loi no 69. Il y avait un climat dans cette
commission très favorable à cette loi et des idées
constructives ont pu en sortir de la part de l'Opposition libérale et de
l'Union Nationale. J'ai ce qu'on appelle le comté à peu
près le plus pollué de la province à cause de la
rivière des Prairies et des deux cimenteries qui s'y trouvent, Francon
et Miron. L'Opposition actuellement a beaucoup peur de ce qu'on appelle les six
millions d'inspecteurs dans la province qui s'occuperaient de pollution. Pour
nous autres, on a voulu le prendre d'une façon tout à fait
constructive. J'ai dans mon comté des groupements antipollution, ce
qu'on appelle le groupe antipollution de Saint-Michel, j'ai la conservation du
Sault-au-Récollet, le groupe philanthropique de Saint-Michel et les
groupes d'horticulture de Saint-Michel. Les quatre groupes ont voulu se
rencontrer et se servir justement des six millions d'inspecteurs
québécois pour pouvoir constituer un comité unique afin
d'aller parler avec les entreprises. On a suivi ce que le ministre nous avait
suggéré lors d'une rencontre en janvier dernier à la
fabrique Miron. Le comité, il y a une semaine, a été mis
sur pied et sept citoyens ont pu en faire partie, dont trois membres de ces
groupes représentant les associations et quatre citoyens qui
représentent en somme les 6 millions dont on parle.
L'objectif de ce comité n'est pas de fermer ces industries.
Certaines de ces industries émanent beaucoup de pollution, soit par
poussière ou dynamitage, dans le comté de Bourassa. L'objectif du
comité est de rencontrer la compagnie, soit Francon, soit Miron, afin de
discuter des possibilités de diminuer ce genre de pollution. On l'a pris
sur un aspect très constructif pour que les compagnies puissent nous
déléguer elles-mêmes une personne à
l'intérieur du comité, ce qu'elles ont accepté au cours de
l'année, et on souhaite commencer au cours de janvier. (15 h 10)
Maintenant, il y a aussi la CUM qui a une très grande
responsabilité. Son projet sur l'environnement n'est pas encore
décrété. Elle a un pouvoir unique sur la pollution. On
s'attend, dans les jours qui viennent, à ce que la CUM puisse promulguer
son règlement.
Il n'y a pas que les compagnies qui sont un peu responsables. Si on
prend l'annonce du ministre, avec ses $40 millions à la ville de Laval
pour l'assainissement des eaux, je me demande très sérieurement
s'il n'y a pas d'autres politiques de responsabilité des villes qui
pourraient s'attacher à cela. Si on parle de la rivière des
Prairies, on dit que c'est la plus polluée de la province. Elle sert
aussi de dépotoir à neige l'hiver. On dirait que ces
municipalités, autant à Montréal que la
municipalité que j'habite, attendent encore des décrets,
attendent encore des lois du gouvernement pour arrêter ce
dépotoir. On sait les quantités énormes de calcium qu'il
peut y avoir dans ces dépotoirs à neige. Mais les villes ont le
défaut d'attendre que cela vienne encore du gouvernement. Après,
on se plaint que le gouvernement veut administrer les villes. Ce serait un bon
geste à faire actuellement que la ville de Montréal arrête
elle-même ces dépotoirs à neige sur le bord de la
rivière des Prairies, ainsi que la ville de Montréal-Nord.
Si on regarde, par exemple, la ville de Montréal avec ses
dépotoirs à neige, on en a un presque en plein centre de la
ville, à côté des cimenteries. Qu'arrive-t-il? Le
printemps, disons au mois de juin, dans les grands vents, on a toute la
poussière de cette cimenterie plus la poussière de ces tas de
neige qui ont fondu. La ville, après, prend des actions contre ces
compagnies-là à cause de la pollution.
Nous, comme citoyens, avons très peu de moyens contre la ville,
soit par action, soit par injonction, ce qu'on ne pouvait pas avoir auparavant.
Mais le projet de loi 69 nous donne actuellement la possibilité de
prendre nos responsabilités comme citoyens, ce qui fait partie des 6
millions d'inspecteurs. La ville pourra être attaquée aussi, selon
les mêmes considérations, comme une usine.
Tout ce que l'on peut faire ici, comme gouvernement, c'est de voter ces
lois, d'essayer d'édu-quer les gens à prendre chacun leurs
responsabilités. J'insiste énormément, et pas seulement
sur Montréal. Il y a plusieurs autres municipalités qui ont des
dépotoirs le long des cours d'eau, j'ai vu à plusieurs reprises
ces dépotoirs. Il faudra que les municipalités se sensibilisent
aussi, qu'elles prennent parti avec le gouvernement; les lois que l'on fait,
c'est une façon de sensibiliser la population. Ce n'est pas toujours
heureux d'être obligé d'édu-quer la population par une loi
semblable. Il faut dire à chacun: Fais attention à ton bien,
à ta santé. En somme, c'est ce que l'on fait actuellement par la
loi 69, protéger notre environnement, notre vie à nous. Il me
paraît, dans une société civilisée, superflu que
nous ayons à pousser des lois aussi loin que cela.
Dans le projet de loi actuel, ce que je trouve très bon, c'est
qu'il n'y aura plus de développement sauvage dans certains milieux. Il
faudra qu'il y ait une analyse d'impact; à ce moment-là, les
usines qui polluent beaucoup ne pourront obtenir de permis pour s'installer
dans les secteurs domiciliaires à forte concentration.
Pour terminer, M. le Président, depuis au moins 20 ans les gens
se sensibilisent, ils commencent à voir que la perte de la santé,
par l'environnement, ne fait que s'accentuer. Ce que l'on peut faire nous,
comme citoyens, comme groupe-
ment ou industrie, c'est de continuer à se parler, à se
sensibiliser, dans toutes les associations. La présente loi donne, en
somme, des dents additionnelles au point de vue des amendes.
Auparavant, une compagnie se faisait arrêter pour de la pollution
mais elle avait des amendes d'à peu près $50, $100, $200,
c'était la limite. Il aurait fallu qu'il y ait beaucoup d'offenses pour
aller jusqu'à ce point. Aujourd'hui, avec les dents que cette loi peut
avoir, elle impose les amendes jusqu'à $5000 et $10 000 et si on
récidive, cela peut aller jusqu'à $20 000. Pour les compagnies et
les individus, pour qui les amendes sont moins fortes, selon leur richesse,
tout ce que j'espère, c'est qu'on n'ait pas à se servir de cette
loi. Que chacun ait une conscience personnelle, un respect des autres et le
Québec ne pourra que mieux s'en porter. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président: Suivant l'entente... Un instant! Je
vous reconnaîtrai immédiatement après. Suivant l'entente,
dis-je, je vais donner la parole à Mme le ministre des Consommateurs,
Coopératives et Institutions financières.
M. Bellemare: Pourriez-vous me donner... Le
Vice-Président: Certainement, oui.
M. Bellemare: M. le député de Laval vient de passer
en me disant qu'il y avait une entente pour 16 heures. Le chef de l'Union
Nationale vient de partir après qu'on lui eut dit que ce serait vers 16
heures. Qu'est-ce qui arrive?
Le Vice-Président: Excusez-moi. Tantôt...
Mme Payette: M. le Président, de consentement, si vous
voulez bien agréer cette demande, je ferai cette déclaration
à 16 heures.
Le Vice-Président: De consentement, à 16 heures?
D'accord. Nous allons tous nous entendre: à 16 heures il y aura cette
déclaration ministérielle.
M. le député de Charlevoix.
M. Raymond Mailloux
M. Mailloux: M. le Président, en intervenant sur le projet
de loi 69, c'est mon intention de parler principalement de certaines parties
des notes explicatives auxquelles fait référence le ministre de
l'Environnement dans la présentation de ce projet de loi, soit
"reconnaître à toute personne le droit à la qualité
de l'environnement et à la sauvegarde des espèces vivantes... de
permettre d'ordonner le réaménagement des carrières et
sablières existantes étant donné les occupations
que j'avais précédemment ... et de permettre au ministre
d'intervenir pour nettoyer ou ramasser des contaminants jetés dans
l'environnement".
Il est indiscutable que mes paroles paraîtront peut-être
décousues, mais il est fort possible qu'en raison du débat que
l'on retrouve dans tous les médias d'information de la région de
Québec et des paroles qu'a prononcées ce matin le ministre de
l'Environnement au sujet de la construction de l'autoroute Dufferin-Montmorency
et de l'habitat naturel des oiseaux migrateurs, je revienne de temps en temps
sur ce sujet, qui est une des raisons qui amènent le ministre de
l'Environnement, s'il y a eu des erreurs, à tâcher de faire en
sorte que dans l'avenir on puisse les corriger, au moins en partie.
Depuis 1955, la province de Québec de I'après-guerre a
subi un développement où l'urbanisation a été celle
qu'on a connue, une province où le phénomène de
l'industralisation s'est accentué dans la période
d'après-guerre. Les gouvernements en place, que ce soit l'Union
Nationale ou que ce soit le Parti libéral, ont dû faire face
à des obligations nouvelles. Nous avons été
obligés, un gouvernement ou l'autre, de donner des réseaux de
communications intraprovinciaux entre les grandes agglomérations puisque
les gens se déplaçaient vu cette industrialisation et cette
urbanisation. On peut nous reprocher aujourd'hui que tout cela s'est fait
à l'encontre des lois de l'environnement, qu'il n'y avait pas une
nécessité de mettre en place un réseau routier qui couvre
aujourd'hui 44 000 milles dans l'ensemble de la province de Québec. Mais
je suis de ceux qui croient que, dans les impératifs qu'a aujourd'hui le
gouvernement, si la Transcanadienne n'existait pas, il faudrait la mettre en
place, parce que je vois des ministres de l'autre côté qui s'en
servent et s'en servent même en dehors des réglementations et des
lois de la sécurité. Il y a toutes les autres autoroutes dont on
parle, quel que soit I'endroit du Québec où elles ont
été construites. Dans les deux dernières décennies
au cours desquelles tout le monde a pu assister aux doléances du public,
on a vu un parc automobile, qui était à peu près
inexistant en 1945, et partir d'environ 200 000 et monter à 3 500 000 de
véhicules; d'où les obligations que cela a
entraînées.
M. le Président, est-ce que cela s'est fait sans tenir compte des
lois de l'environnement? Je dois bien confesser qu'il y a des disciplines qui
en ont profité largement, de cette urbanisation et de cette
industrialisation. On n'a qu'à penser à deux disciplines, les
ingénieurs et les architectes, qui devant l'ensemble des besoins qui
sont nés de la guerre ont vécu largement et on poussé
après les gouvernements pour faire accepter des plans plus audacieux les
uns que les autres. Cela a été un phénomène qu'on a
connu, qu'on doit confesser; ce sont deux disciplines qui ont eu les portes
larges ouvertes devant tous les gouvernements. (15 h 20)
Aujourd'hui, on retrouve d'autres disciplines qui naissent de besoins
nouveaux, de la protection de l'environnement. Je ne reprendrai pas les paroles
de mon ancien collègue de Beauport qui les appelle les "oiseaulogues "
ceux qui sont préoccupés par l'écologie. Les biologistes
sont également préoccupés par les retombées des
travaux sur l'habitat des oiseaux migrateurs ou
d'autres espèces qu'on veut protéger. Je pense que
là il y a une préoccupation qui mérite qu'on lui porte
attention.
Comme on reproche aujourd'hui leurs erreurs aux architectes et aux
ingénieurs, il faudra surveiller ces deux disciplines dans la
décennie qui s'en vient, car on voudra faire croire n'importe quoi au
public.
Il s'agira peut-être, entre-temps, pour les hommes publics, s'il y
a eu des erreurs dans le passé devant le phénomène de
l'industrialisation qu'on a connue, qu'on leur fasse comprendre, ainsi qu'aux
écologistes, aux biologistes et aux autres "istes " que, certainement,
il y a un juste milieu à atteindre et que nous devons tenir compte de
certains impératifs et trouver le juste milieu qui satisfasse à
l'ensemble de ce qui est demandé à un gouvernement.
M. le Président, on a beaucoup parlé du boulevard
Dufferin-Montmorency et des dangers qui ont été apportés
à l'habitat naturel des oies blanches et des outardes. Je regrette que
ce débat arrive un peu à l'improviste devant moi, car j'aurais
apporté au ministre délégué à
l'Environnement certaines cartes marines et autres de l'environnement couvert
par le boulevard Dufferin-Montmorency dans les années 1947, 1949, 1950
et 1952. Qu'est-ce que c'était, à ce moment-là, les
battures de Beauport? Depuis combien de temps des gens, des
propriétaires riverains se sont-ils emparés graduellement des
battures de Beauport pour des fins d'agrandissement de terrain ainsi que pour
des fins commerciales et industrielles. Qu'on se rappelle également que
sous le gouvernement Taschereau, une partie des battures de Beauport ou de
Montmorency a été occupée par le terre-plein qu'il fallait
mettre en place pour assurer un lien entre les deux rives, l'île
d'Orléans et la terre ferme, vers les usines de Dominion Textile
à Montmorency.
La décision de construire le boulevard Dufferin-Montmorency a
été discutée au Conseil des ministres alors que votre
premier ministre actuel était même membre du gouvernement, en 1964
et en 1965. Ce sont les prémisses de la décision de construire un
lien non pas pour l'agrandissement du port de Québec, mais pour la
desserte de Beauport, de Giffard, de la rive nord du Saint-Laurent, des
comtés de Charlevoix, Saguenay et Duplessis. Ultérieurement, sous
le gouvernement de l'Union Nationale, en 1968, il y a eu une décision de
mettre de l'avant un lien pour satisfaire aux exigences du trafic qui allait
vers la rive nord du Saint-Laurent.
M. le Président, depuis seize ans, comme tous ceux qui ont
à oeuvrer dans la région de Giffard-Beauport, votre serviteur a
circulé vers le centre-ville de Québec et vers le parlement. Je
fais ce trajet depuis seize ans et je me rappelle, avant que la route
Dufferin-Montmorency soit construite, toutes les doléances qui
arrivaient à notre ministère par l'ensemble des secteurs public
et parapublic. On ne nous demandait pas si on allait charcuter quelques maisons
dans la basse-ville de Québec ou si on allait s'emparer de quelques bat-
tures de Beauport, on nous montrait le portrait d'un travailleur qui, soir et
matin, aux heures de pointe, devait, en partant du parlement ou des environs,
se rendre jusqu'où est Woolco aujourd'hui. Cela prenait une heure ou une
heure et cinq minutes durant les heures de pointe, entre 16 h 30 et 17 h
30.
C'était cela, la réalité de la circulation urbaine,
soir et matin. C'était près de quatre heures pour un circuit qui
a à peu près six ou sept milles de longueur. Je l'ai vécu,
ce phénomène, pendant près de seize ans. Comme tout le
monde, j'avais, de pare-chocs à pare-chocs, à attendre, sur le
boulevard des Capucins, le boulevard Sainte-Anne, que l'heure de pointe soit
passée pour pouvoir me rendre chez moi. Aujourd'hui, je constate que
ceux même du Parti québécois qui se servent
du boulevard Dufferin-Montmorency, qu'on appelle l'hérésie du
siècle, entre le parlement et Woolco, prennent exactement quatre
minutes. Le soir et le matin, cela a pas mal amoindri les problèmes de
retour ou d'aller au travail.
Est-ce que cela a été une erreur d'architecture
lamentable? M. le Président, je ne suis pas un spécialiste dans
ces disciplines, mais je constate que la géographie de la ville de
Québec, la topographie du terrain est un peu spéciale dans le
Québec; cela ressemble un peu à Charlevoix, la colline
parlementaire. La décision qu'avaient à prendre nos
prédécesseurs dans le tracé Dufferin-Montmorency, qui a
tellement bousculé l'environnement, était la suivante. Est-ce
qu'on devait, ou est-ce que vous deviez charcuter pour faire un lien un peu
plus direct vers des populations qui en avaient besoin? Est-ce qu'on devait
charcuter le carré d'Youville, charcuter l'ensemble du boulevard des
Capucins? Est-ce qu'on devait charcuter deux autres quartiers?
Une voix: La gare du CPR.
M. Mailloux: Est-ce qu'on devait charcuter la gare du CPR avec
tout ce qu'elle a de nostalgique, d'historique? M. le Président, je
conviens que, quand le tracé a été définitif, on
s'aperçut qu'à l'église ici en bas, aux magasins
d'alimentation la clientèle disparaîtrait parce qu'il fallait
forcément enlever quelques constructions pour faire sur pilotis un
boulevard qui ne charcutait pas dans l'ensemble tous ces quartiers.
On aurait eu beau demander aux ingénieurs de faire des voies
beaucoup plus étroites. On n'avait qu'à améliorer le
boulevard des Capucins, les approches de la rue Saint-Paul et les approches,
malgré l'élévation, vers le carré d'Youville. Cela
aurait donné une rue un peu élargie, mais qui n'aurait pas
correspondu aux 25 000 ou 30 000 véhicules qui, soir et matin, devaient
se rendre vers Limoilou et vers la rive nord du Saint-Laurent. Je n'ai jamais
aimé la structure qui fait que cette artère est forcément
un obstacle pour tous ceux qui ont à la traverser près du
carré d'Youville. Ce n'est pas une structure plaisante à voir
quand on est près du Vieux Québec ou qu'on est dans la rue
Saint-Paul ou près de la gare. Ce n'est pas beau à voir,
mais c'était l'endroit où cela charcutait le moins.
Il fallait également traverser les voies des chemins de fer en
hauteur pour ne pas être également un obstacle à cette
route, avec les voies dont on a parlé si longtemps. On arrivait, M. le
Président, près des installations de la rive et l'on occupait une
partie des battures qui étaient déjà occupées par
le remplissage qu'on a connu d'année en année. Peut-être
qu'en 1949 on aurait pu sauver à La Bastogne un phare qui était
construit depuis les premiers temps de la colonisation. On n'était pas
en 1949, on était en 1968 et c'était tout rempli. M. le
Président, je me rappelle, pour y avoir circulé à des
milliers de reprises, que la batture de Beauport qu'on a occupée, aux
approches du pont de l'île d'Orléans, était
déjà pas mal remplie par l'ensemble des contribuables qu'il y
avait dans cette région. Et si on monte un peu en amont, il y avait
également des terrains près de Pilote Construction qui
étaient déjà remplis avant la décision de la
construction de la route.
M. le Président, cela donne à peu près quoi la
partie qui a été occupée par le boulevard Montmorency? Je
comprends le ministre actuel de l'Environnement de dire que quand on arrive
à la jonction de la rivière Beauport, il faudrait peut-être
repenser les plans d'une route qui est en terre-plein pour permettre que le
flux et le reflux de la mer qui entre dans la rivière Beauport se fasse
comme à l'accoutumée et continue son action naturelle. Je pense
que c'est normal qu'on le fasse, qu'on révise ces plans. C'est un
phénomène qui a peut-être échappé à
l'attention des ingénieurs qui ont conçu ces plans. Je pense que
c'est là quelque chose que j'accepte qui soit revu. M. le
Président, ce que je voudrais faire comprendre, c'est que l'optique
première d'une décision de construire ce boulevard, ce
n'était pas un port à agrandir. Ce n'était pas cela le but
premier.
C'était la desserte de Beauport, de Giffard et d'une population
importante qu'il fallait desservir par un réseau routier, avec les
méthodes modernes qu'on connaissait, pour la circulation moderne qu'on
connaissait. C'était aussi la desserte des trois comtés de la
rive nord. Le port est arrivé en cours de route, l'agrandissement du
port. M. le Président, quant au phénomène des oiseaux
migrateurs qui y séjournaient, il ne faudrait quand même pas trop
se cacher la vérité longtemps parce que je vis dans une
région où les oies et les outardes, on connaît cela mieux
que les gens de Montréal. Pas mal mieux. Quand les oies sauvages font
leur périple, c'est quoi ce voyage? Elles arrivent de la Caroline vers
le 15 avril. Peut-être quelques-uns d'entre vous ont-ils vu un programme
très valable à la télévision l'autre soir. Le 15
avril. Elles repartent pour la Terre de Baffin vers le 15 mai. Elles reviennent
vers le 15 octobre et repartent pour l'hivernement vers la Caroline. (15 h
30)
C'est peut-être de ceux-là dont voulait parler mon
ex-collègue, M. Bédard, quand il parlait des oiseaulogues ".
L'habitat naturel qu'ils perdent dans la partie de Dufferin-Montmorency qui est
concernée, c'est indiscutable que c'est une partie de l'habitat naturel
dont se servent ces oiseaux migrateurs. Mais dans mon esprit à moi,
c'est le millième de la partie dont ils ont besoin pour assurer leur
alimentation. M. le Président, je fais référence aux
années que j'ai passées dans la navigation côtière
quand, circulant dans le chenal nord entre l'île d'Orléans et la
terre ferme, pendant dix ans, j'ai vu agir les oiseaux migrateurs à ces
deux périodes de l'année. Quand ils arrivent pour passer une
période de l'année ici dans le Québec, ils n'atterrissent
pas au boulevard Dufferin-Montmorency. Leur habitat naturel, c'est le Cap
Tourmente, sur les battures de Saint-Joachim, jusqu'à
Sainte-Anne-de-Beaupré. Il est là, l'habitat naturel.
D'accord immédiatement que l'habitat naturel n'est pas suffisant
pour l'ensemble du volier, qui peut se situer à 100 000, 200 000. Je
vois le député de Mercier qui a regardé la
télévision l'autre soir.
Il y a d'autres raisons qui font que le volier va vivre. Il va
être important s'il y a assez d'alimentation, s'il a eu le temps de faire
sa couvée et s'il a eu le temps de montrer aux petits à voler
dans les quelques mois qu'ils passent dans la terre de Baffin pour faire les
1700 milles de retour. Si la température est moins favorable entre les
deux parties, il y a une chance que le volier diminue. Je pense que tout le
monde a compris cela. L'alimentation, on vous a démontré de
quelle façon l'outarde allait la chercher dans la racine de l'algue
marine. Est-ce qu'elle la prend seulement dans l'algue marine qu'on voit le
long des battures de Beauport et principalement dans Saint-Joachim et
Sainte-Anne? Archifaux: Vous voyez des oies sauvages qui vont d'abord là
et qui se répartissent sur un ensemble de territoires.
Elles sont drôles à voir agir dans leur nature. Je
naviguais des fois et, à un moment donné, quand on arrivait au
Banc Brûlé, on arrêtait le moteur d'un navire de 150 pieds,
puis on laissait aller le navire dans le volier. Il y en avait des fois 20 000,
30 000, 35 000. Est-ce que c'est bien sauvage, une oie sauvage? Ce n'est pas
trop sauvage, parce que, en vous plaçant à l'avant du bateau avec
une gaffe vous pouviez en piquer une à dix pieds en avant du navire,
parce que dans cet environnement de Cap-Tourmente, elles étaient
habituées à ce que personne ne tire sur elles. Elles
étaient en sécurité. Elles savaient qu'elles
étaient en sécurité. On pouvait en piquer une avec une
gaffe à l'avant du navire. Cela veut dire qu'elles se sentaient dans
leur habitat.
M. le ministre de l'Environnement, est-ce que vous voyez bien des
chasseurs qui ont été sur les battures de Beauport, en
arrière de La Bastogne ou près du pont de l'île
d'Orléans pour tuer des oies sauvages? En avez-vous déjà
bien vu? Dans mon esprit, c'est l'infime partie des oies blanches qui se
tiennent sur les battures de Beauport et près du boulevard
Dufferin-Montmorency. Quand je dis que c'est le millième, que vos
spécialistes viennent me prouver le contraire. Les oies se
répartissent sur toutes les battures de la région de Montmorency,
dans tout le comté de Montmagny, dans une partie de L'Islet.
Quand le temps devient bas, brumeux, elles
s'en vont de là. Savez-vous où elles vont? Je vous invite
comme ministre de l'Environnement à venir faire un tour dans Charlevoix,
l'automne prochain ou le printemps prochain, je vous ferai visiter l'ensemble
des lacs de Charlevoix. Il y en a des centaines et des centaines. Quand le
temps devient bas, des algues marines, il y en a également ailleurs et
elles s'en vont là.
Effectivement, dans le dernier voyage qu'elles ont fait, j'assistais
à une chasse à la perdrix et au lièvre, puis, à un
moment donné, en arrivant près d'un lac, on en a
écrasé trois avec l'automobile. Elles ne sont pas trop sauvages
de ce temps, elles étaient sur la route même. C'est assez
exceptionnel, parce que normalement elles viennent amerrir sur le lac. Qu'on
aille au lac des Cygnes, qu'on aille au lac des Mets, qu'on aille sur
l'ensemble des lacs où il y a des marécages, c'est là
qu'elles vont chercher la nourriture dont elles ont besoin et non pas seulement
au cap Tourmente et le long de la côte de Beaupré.
M. le Président, j'entends parler de cela depuis des mois; on dit
que c'est une hémorragie, l'habitat naturel qu'on a enlevé aux
oies sauvages. Arrêtons de charrier, puis allez donc poser la question,
non pas aux spécialistes qui ont des intérêts à
protéger, mais aux chasseurs également de
l'Île-aux-Coudres, de Petite-Rivière-Saint-François, de
Montmagny. Allez donc voir de quelle façon ils réagissent.
Dans le programme dont je vous parlais, en Caroline ou en Virginie,
pourquoi est-ce qu'on vous dit qu'elles s'en vont dans un tel endroit?
Même les biologistes commencent à faire brûler pour
éviter qu'elles aient à enlever les "cageux" avant d'aller
chercher la nourriture. Lorsqu'elles en manquent, pourquoi vont-elles dans les
champs également? Les champs ensemencés? On vous a montré
cela à la télévision. Cela prouve qu'en dehors de l'algue
marine, il y a d'autre chose où elles peuvent trouver leur subsistance
également.
Ceci dit, M. le Président, j'ai présidé à la
fin de l'exécution d'un contrat que je n'ai pas eu à
décider; c'est mon prédécesseur qui a tout mis en marche.
J'en ai à peu près terminé la réalisation, sauf un
petit bout qui manque. Je trouve curieuses les attitudes du Parti
québécois et je vais vous dire pourquoi. Actuellement, on dit que
la construction du boulevard Dufferin-Montmorency est l'hérésie
du siècle. Je trouve, pour ma part, qu'il y a bien du monde qui s'en
sert efficacement. Malgré les quelques erreurs d'esthétique,
même ceux qui sont contre ne passent pas en dessous, ils passent dessus.
Ils s'en servent drôlement. Mais le Parti québécois est en
drôle de contradiction, et le ministre actuel, avec le programme du Parti
québécois dans Charlevoix, en 1976.
Le Vice-Président: Je m'excuse, M. le député
de Charlevoix, est-ce que vous parlez comme représentant officiel de
votre parti?
M. Mailloux: Non, mais j'ai l'intention de terminer...
Le Vice-Président: Dans ce cas-là...
M. Mailloux: Je pense qu'il me reste trois minutes.
Le Vice-Président: Ah non! je vous en prie.
M. Goldbloom: Consentement pour trois minutes.
M. Mailloux: Je pense qu'on m'a quand même assez
charrié, depuis un certain temps, que je pourrais quand même
apporter quelques réflexions...
M. Léger: Je suis d'accord pour donner mon consentement,
parce qu'il y a des "oiseaulogues" et des oiseaux le "fun".
Le Vice-Président: II y a consentement, M. le
député de Charlevoix, mais je voulais quand même
prévenir votre parti.
M. Mailloux: Peut-être que le ministre n'aimera pas cela,
mais...
M. Godin: À une condition, c'est qu'il poursuive sur son
évocation poétique de sa vie de marin et non pas sur le programme
du parti.
M. Mailloux: ... en 1976...
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! D'accord. M. le député de Charlevoix, tout le monde
est d'accord pour vous accorder trois minutes.
M. Mailloux: Je ne parlerai pas longtemps du programme du Parti
québécois, parce que ce n'est pas le programme
général, c'est le programme du candidat du Parti
québécois pour Charlevoix. Il m'avait un peu estomaqué, le
premier article du programme. Ayant été titulaire du
ministère des Transports pendant quelques années, on critiquait
déjà le boulevard Dufferin-Montmorency, comme les
députés de la région le savent. Je me demande qui avait
présidé à la préparation de ce programme-là.
En même temps qu'on avait fait Dufferin-Montmorency, j'avais
moi-même ordonné l'élargissement du boulevard Sainte-Anne
jusqu'à la basilique de Sainte-Anne de Beaupré. Je m'étais
servi des emprises qui appartenaient au ministère des Transports pour
éviter d'avoir à charcuter davantage.
Dans le programme du Parti québécois, lors du premier
discours de mon adversaire, en 1976, on me reproche d'avoir élargi le
boulevard Sainte-Anne en disant que l'endroit naturel pour conduire une route
jusqu'à Beaupré, c'était sur les battures du fleuve
Saint-Laurent. J'imagine qu'il était au moins en contradiction flagrante
avec les énoncés de principes de mes amis d'en face.
Je voulais aussi apporter deux ou trois autres observations sur les
carrières. Je conviens que, lorsqu'il y a eu un développement
assez sauvage,
dans le Québec, pour la construction de routes et d'autoroutes,
il a fallu faire des charcuteries assez importantes un peu partout au
Québec, et cela a amené des problèmes. Il faudra
forcément remettre en place la verdure qui a disparu, avec la
charcuterie qu'on connaît. Ce n'est pas tellement esthétique. Je
me rappelle une remarque que faisait le ministre français des
transports, lors d'une visite que je faisais à Paris. Il disait ceci: On
est pris avec toutes les exigences d'un public qui veut être satisfait
sur toutes les facettes de la vie, et il faut, en France comme partout
ailleurs, construire des routes. Il parlait des agrégats dont on a
besoin pour construire des routes, et les écologistes de là-bas,
les biologistes et les autres se plaignaient amèrement, il y a quatre ou
cinq ans, des effets sur la nature de toutes ces carrières qu'on voyait
là. Il disait aux Français ceci: Vous allez devoir choisir,
à un moment donné. Si vous voulez des routes, il va falloir que
je prenne les agrégats quelque part, sinon, on va protéger I9S
autres facettes de la vie. Le choix des Français? Ils ont fait quelques
accommodations, mais ils ont eu la preuve que si les agrégats dont on a
besoin à un certain moment, on ne peut pas les prendre à cinq
milles ou à 20 milles d'un travail, s'il faut les prendre à 40 et
50 milles, il va falloir que le public en paie la note. À ce
moment-là, cela devient extrêmement dispendieux pour faire quelque
chose.
M. le Président, la dernière observation que je fais est
la suivante, et je pense que le ministre de l'Environnement, dans son ardeur au
travail, a des raisons d'aller de l'avant. En faisant référence
à mon passage dans le cabotage du Saint-Laurent pour le
député de Mercier, je lui dirai que la situation a beaucoup
évolué depuis une trentaine d'années. J'écoutais
certains spécialistes qui sont venus aux auditions et qui nous disaient
ce qu'apportaient, pour replacer les choses dans leur nature, les marées
montante et descendante; on est parti de loin. En 1935 ou 1937 les
réseaux d'aqueduc et d'égout n'existaient pas beaucoup dans le
Québec. Les marins qui circulaient sur le Saint-Laurent, ne vous mettez
pas dans la tête qu'ils prenaient l'eau à chacun des quais du
Québec. Savez-vous où ils prenaient l'eau potable à ce
moment-là? Ils la prenaient à la hauteur du quai de
Saint-Laurent; tout ce qu'il y avait de bateaux qui circulaient sur le
Saint-Laurent, à la hauteur du quai de Saint-Laurent. L'eau salée
et l'eau douce, on fait de petites erreurs, cela se partage à la pointe
est, à peu près, de l'île d'Orléans. Il y a une
partie du salin qui vient un peu plus loin; pour être dans l'eau à
peu près potable, il fallait la prendre à peu près au quai
de Saint-Laurent.
J'avais déjà dit, devant mon collègue des Affaires
municipales, qui n'avait pas aimé cela parce qu'il est un
spécialiste en la matière, que cette eau n'était quand
même pas trop mauvaise, parce que les marins de Charlevoix, de
l'Île-aux-Coudres et des Éboulements ont tous vécu
longtemps comme mon père jusqu'à 94 ans, mon oncle à 96
ans. Ce n'est pas l'eau qui les a fait mourir. Mais dans ce temps-là,
forcément, il y avait moins de détergent qu'aujourd'hui. Il y
avait moins d'huile, de gaz qui étaient jetés dans l'eau; quand
l'eau était reposée, on pouvait la boire. Cela ne m'a pas
arrêté de vieilir non plus d'ailleurs, après en avoir bu
pendant quelques années.
Ce que je voulais dire c'est qu'au ministère des Transports on a
vu que l'action des vendeurs d'automobiles usagées était
complètement nocive pour la protection de l'environnement. J'avais,
pendant deux ans, fait le nécessaire pour tâcher d'enlever toutes
les carcasses qu'on retrouvait, dans tout le Québec, aux abords des
rivières, avec l'huile qui s'en dégageait. Je pense que c'est une
action positive qu'a faite le ministère des Transports à ce
moment-là. De toute façon, M. le Président, je conclus en
disant ceci: II est toujours facile de critiquer l'ensemble des autoroutes et
des travaux qui ont été faits par les gouvernements
précédents. Comme on n'en a plus à faire, ou à peu
près, c'est facile de dire que les autres ont tout mal fait. Ce que je
constate par contre c'est qu'on s'en sert drôlement, à quelque
parti qu'on appartienne, mais il y a des correctifs à apporter. Autant
les ingénieurs et les architectes ont pu pousser des gouvernements dans
le sens du développement sauvage, autant, peut-être, aujourd'hui,
on peut faire le nécessaire dans ce gouvernement vis-à-vis des
autres spécialistes qui voient venir la manne. Qu'on fasse un juste
milieu entre les premiers et les seconds, et à ce moment-là je
pense que l'action du ministère sera positive.
Le Vice-Président: M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Armand Russell
M. Russell: M. le Président, vous me permettrez d
intervenir quelques minutes sur ce projet de loi 69 qui a été
déposé en deuxième lecture ce matin. Vu
l'expérience que j'ai vécue, étant natif d'une
région rurale et ayant représenté comme
député, depuis une vingtaine d'années, une même
région, et vu l'expérience que j'ai eue comme administrateur
municipal, vous allez comprendre que je suis un peu touché de voir un
projet de loi aussi important déposé devant nous après
avoir entendu le ministre faire un exposé sans toucher les points
principaux de ce projet de loi.
Évidemment, je comprends bien le ministre, qui est entouré
d'un personnel assez imposant de spécialistes, de naturalistes et de
"zoiseaulogistes", comme le dirait mon collègue de
Mégantic-Compton; il peut, de temps en temps, être
impressionné. Je comprends aussi qu'avec son expérience et
l'étude qu'il a faite dans ce domaine il peut faire un plaidoyer avec
beaucoup plus d'éloquence sur ce projet de loi que je ne le peux.
Vous allez comprendre que je vais tenter de démontrer les
faiblesses de cette loi. Je sais que le député de D'Arcy McGee a
dû intervenir pour défendre ce projet de loi, qui est d'ailleurs
le sien. Il a été préparé par lui et
déposé par le ministre actuel. Cela semble être une
continuité dans les
mêmes voies, et je le comprends aussi. Un bon médecin de
chez nous me disait un jour...
M. Léger: M. le Président, j'invoque le
règlement.
Le Vice-Président: Un instant.
M. le ministre délégué à
l'Environnement.
M. Léger: Je pense qu'il faut rétablir les faits.
Même si le député de D'Arcy McGee a l'honneur d'avoir
préparé le projet de loi de 1972, ce projet de loi que nous avons
devant la Chambre je dois corriger les faits provient uniquement
de l'administration actuelle.
M. Russell: M. le Président.
Le Vice-Président: Oui, monsieur, je m'attendais à
cette réaction.
M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Russell: Je suis heureux de la mise au point. Cela me console
un peu, cela me soulage un peu. Je tente de comprendre le geste et les paroles
du député de D'Arcy McGee. Je peux comprendre un peu, comme me le
disait mon médecin comme il est médecin, je peux faire le
même raisonnement avec lui qui soutenait que la meilleure
assurance contre la maladie, c'est la santé. C'est un peu cela le projet
de loi. La meilleure assurance pour éviter la pollution, c'est de tout
barrer partout. C'est ce que disait le ministre, ce matin, quand il faisait
appel aux 6 millions d'inspecteurs. C'est évidemment presque un
État policier, quand on lit la loi. Je lui dis bien amicalement cet
après-midi que ce n'est pas tout à fait cela qui est
nécessaire dans le contexte économique actuel de la province de
Québec. Je préférerais de beaucoup adopter l'attitude du
député de Saint-Hyacinthe qui, lui, a supplié le ministre
d'apporter des mesures pour tâcher de faire l'éducation de la
population, mais non la menacer de prison. C'est ce qui semble être dans
ce projet de loi.
Je vais tenter de vous exposer mes points de vue là-dessus dans
le domaine agricole. On vit actuellement cet état de choses qui fait
qu'il y a des gens qui sont frappés par une loi existante qui est
beaucoup moins imposante que celle-là. On rencontre aussi des gens qui
se plaignent des exigences des inspecteurs. On tâche d'arriver avec des
normes pour une porcherie et on dit que ce sont des normes minimales, mais on
s'en vient avec des normes beaucoup plus difficiles que celles-là. On
arrivera avec des périodes où l'on pourra épandre ses
déchets, des périodes bien précises. Pour éviter
quoi? La pollution. On bâtit aussi dans une certaine orientation afin que
cela ne soit pas dans le sens du vent pour ne pas gêner les autres
voisins qui sont déjà construits ou qui ont construit
après que la porcherie a été installée. Mais tout
cela, ce sont des gens qui sont malheureux d'une telle situation. Ce sont
souvent des gens de la ville qui sont venus s'installer à la campagne,
c'est leur privilège. Certainement, lorsqu'on vient s'installer à
la campagne, il faut être prêt à endurer les
inconvénients de la campagne avec tous les avantages que cela peut
apporter. Mais, par cette loi, chaque citoyen va pouvoir se plaindre. C'est une
loi de tracasseries. Je voudrais voir les procédures qu'il faudra suivre
afin d'essayer de libérer ce pauvre cultivateur, lorsqu'on va faire une
plainte contre lui et qu'il va être obligé d'agir. Le fardeau que
cela lui imposera si, parfois, cela ne répond pas exactement aux normes
de monsieur l'inspecteur, ou aux règlements qui n'existent pas encore,
qu'on ne connaît pas. Que le ministre ne soit pas surpris que je sois
difficilement favorable à cette loi. Il a dit lui-même, il a
exposé brièvement les amendements que lui-même va apporter,
qu'il va proposer en comité plénier et aussi les
règlements qu'on devrait avoir pour étudier intelligemment cette
loi. À plusieurs reprises on dit: Suivant les règlements
établis. Je vais vous en donner tout simplement un exemple. Les
automobiles ne pourront pas être vendues excepté si elles
répondent à certaines normes. Elles ne pourront pas être
utilisées à moins qu'elles ne répondent à certaines
normes. Vous regardez après les amendes qui vont être
imposées à l'individu, qui n'est pas très conscient des
normes, qui pourrait se faire arrêter par un inspecteur. Je ne dis pas
que cela va arriver, mais ce sont des choses qui sont placées à
la disposition de l'inspecteur, du ministre ou de la commission. Imaginez-vous
la loi de tracas, à moins qu'on nous garantisse qu'il y aura des
délais raisonnables pour s'y conformer! Je suis bien d'accord que si
c'est une vieille auto qui est un danger public, cela ne devrait pas être
la loi de l'environnement qui contrôle cela. Il y a d'autres lois qui
interviennent dans ces cas, mais pas la loi de l'environnement, parce qu'on
sait actuellement que dans l'environnement, quand on parle de pollution, on se
réfère au bruit, on se réfère aux égouts,
naturellement, aux gaz, aux fumées, aux dépotoirs, à la
poussière, et cela n'achève plus. Ce sont toutes ces choses, et
j'en passe, qu'on tâche de réglementer par une loi dans quelques
paragraphes, avec des dents, comme dirait le ministre, pour pouvoir tasser le
gars et l'amener là où l'on veut. On donne la liberté
à chaque citoyen de porter une plainte et à celui de qui on se
plaint la responsabilité de se défendre. (15 h 50)
M. le Président, quand vous aurez été dans
l'administration publique aussi longtemps que je l'ai été, vous
connaîtrez les conflits de personnalités, les petites rancunes
qu'il peut y avoir entre voisins et vous verrez les tracas que cela peut
créer. Je demanderais au ministre de bien vouloir, pour rassurer ceux de
ce côté-ci de la Chambre qui représentent la population,
les gens silencieux, déposer au moins les règlements qui nous
donneront une meilleure interprétation des droits du citoyen. Il y a
seulement celui-là qui va se plaindre de la pollution qui a des droits.
Les autres n'en ont pas; ils ont simplement des amendes à payer et,
s'ils ne paient pas les amendes, il y a l'emprisonnement. C'est cela qui est
grave. Ah! je sais qu'on va se lever et dire: Vous savez bien qu'il n'y a pas
de danger, mais, s'il n'y a pas de danger,
qu'on le mette dans la loi et dans les règlements.
Imaginez-vous que cela frappe beaucoup de monde. Ce ne sont pas
simplement les égouts des villes qui sont frappés. Cela va
beaucoup plus loin que cela. On ne pourra plus construire une industrie sans
obtenir un permis. Là, on va demander et on peut exiger qu'on fasse une
étude d'impact sur les problèmes que cela peut créer
à l'environnement. Cela peut devenir drôlement onéreux. Il
faut que cela reçoive l'approbation des bureaucrates, des techniciens
qu'on a devant nous aujourd'hui. Quand je me réfère au temps que
cela prend pour qu'un cultivateur obtienne un simple permis pour la
construction d'une porcherie dans la province de Québec, je me demande
combien de temps cela prendra pour un industriel après qu'on aura fait
une étude d'impact dans le contexte actuel.
M. le Président, je dis que cette loi va beaucoup trop loin. Elle
n'est pas assez claire, elle n'est pas assez explicite et elle donne la
responsabilité simplement à celui qu'on accusera de polluer de
porter le fardeau. Imaginez-vous, M. le Président, dans le contexte
actuel, quand on parle de bruit, si ce sera facile d'exploiter une scierie
suivant les normes dont certains inspecteurs m'ont parlé. Je ne veux pas
entrer dans les détails techniques; ce serait trop long et je n'aurais
pas le temps de vous les exposer. Y aura-t-il un Québécois
capable d'exploiter une scierie suivant les normes actuelles, si on veut
réellement appliquer à la lettre la réglementation? Je dis
aucun, à moins qu'on organise des scieries silencieuses et je n'en
connais pas tellement. J'ai pas mal voyagé, j'ai visité beaucoup
de scieries et je n'ai pas tellement connu de scieries silencieuses. Donc, cela
veut dire que ce sera l'élimination graduelle des scieries.
On parle d'autos, on parle de gaz, mais, mon Dieu, si on veut
arrêter cette pollution des autos, c'est bien facile. Si on veut
retourner à l'état naturel, à l'état sauvage, comme
le disait le ministre ce matin, c'est simple: on va fermer toutes les routes.
Ce serait beaucoup moins polluant si on se promenait à pied plutôt
que de se promener en auto. C'est aussi simple que cela, si c'est là
qu'on veut aller. Comme le disait le député de Charlevoix, on
hérite de la situation actuelle. Quand on a un malade, ce n'est pas le
fait de lui donner une pilule pour le faire mourir qui va régler le
problème; il faut commencer à le soigner graduellement et c'est
là notre responsabilité. Je suis d'accord avec le grand principe;
tout le monde est pour la pureté. Mais c'est la façon de
l'obtenir, cette pureté.
Vous savez, je ne pensais pas parler là-dessus aujourd'hui parce
que j'aurais apporté un rapport que j'ai chez nous, qui a
été établi par un grand spécialiste
américain qui disait que ce qui pollue le plus dans le monde
aujourd'hui, c'est justement la cigarette, la fumée, celui qui fume la
cigarette ou la pipe. Cela est plus polluant que tout autre polluant qui
existe. Que je sache, le ministre fait lui-même partie de ce groupe de
fumeurs. Je comprends que le député de D'Arcy McGee peut parler,
lui, parce qu'il ne fume pas. Mais est-ce qu'on va adopter une loi pour
arrêter tout le monde de fumer? Ce sont réellement des gens qui
commettent ce crime de polluer. Qu'on commence par dépolluer
personnellement si on veut être si sévère. Comment va-t-on
réagir quand on parlera de poussière? Un voisin a construit une
belle petite maison et sa dame fait son lavage le lundi et létend sur la
corde. De l'autre côté, son voisin, un cultivateur a une coupe. Un
coup de vent vient et la poussière parce qu'il n'y a pas d'arbre
sur une "bank" qui a été coupée, si vous voulez l'appeler
ainsi va salir le lavage de la dame. C'est insultant, je suis bien
d'accord. Mais elle a le droit de se plaindre à l'Environnement. On va
exiger du cultivateur de faire quoi?
M. Grenier: Une plantation.
M. Russell: Là, il va faire une plantation. Ce sera
coûteux. Ce sont des problèmes qui peuvent exister en campagne. Je
suis d'accord avec certaines mesures qui doivent être prises. Je pense
que le ministre a les pouvoirs actuellement pour le faire dans des
régions comme la ville de Montréal où les correctifs ont
été apportés assez rapidement. Ils sont assez
coûteux, je suis complètement d'accord.
Je suis aussi d'accord qu'on doit prendre des mesures pour corriger bien
des situations dans les municipalités dans mon comté, j'en
ai: Cowansville, Waterloo, Granby et les autres plutôt que
d'exiger comme on veut le faire dans la ville de Waterloo.
Je vais vous donner un exemple, M. le Président. On veut exiger
la construction d'une usine qui va coûter quelques millions de dollars.
C'est facile pour les spécialistes de dire: Pour épurer tous ces
égouts, cela prend une usine de telle grosseur. Je ne parlerai pas du
coût de l'usine, mais simplement du coût de l'opération de
l'usine. La ville de Waterloo, comme bien d'autres n'a pas les moyens de payer
le coût d'opération. C'est une petite ville. Je pense qu'il y a
d'autres moyens de régler le problème que celui-là. Dans
une ville comme Waterloo, il y a une douzaine d'usines. On pourra commencer par
des traitements primaires, et avoir plutôt des usines d'épuration
beaucoup moins grosses que celles qu'ils veulent implanter dans une ville comme
Waterloo et qui serait presque automatiques. Mais cela ne répond pas aux
normes des grands penseurs, des théoriciens qui prennent un crayon et
qui disent: Au cas où la ville de Waterloo aurait, à un moment
donné. 20 000 ou 25 000 d'habitants, il faut bâtir en
conséquence. Il faut être capable parce que les usines sont
là et ont des droits acquis, elles sont habituées de jeter des
déchets dans les égouts de répondre à cette
demande.
Je dis non. Il faut commencer à corriger par étapes et le
faire graduellement, suivant nos moyens. C'est là qu'est notre gros
problème aujourd'hui. On est en train d'imposer des mesures qu'on n'a
pas les moyens de se payer, avec les excuses de cette pureté. Ce n'est
pas demain,
lorsqu'on sera tous en faillite, qu'il sera temps de reconsidérer
cela. C'est peut-être plus grave que ne le pensent bien des gens,
beaucoup plus grave que bien des gens le pensent. Actuellement, si on veut
parler de ce domaine, on est placé dans une situation
économiquement désastreuse parce que le coût
d'opération des "jobs" sans revenu sont trop nombreuses pour celles qui
rapportent. Je ne leur en veux pas, je sais que des fonctionnaires municipaux,
provinciaux et d'autres sont nécessaires. Mais il ne faut pas, tous les
jours, accumuler et mettre sur le dos de celui qui travaille ce fardeau.
Demain, il n'aura pas le moyen de le payer. On est rendu là, parce qu'on
tourne en rond actuellement.
J'ai peur qu'une loi comme celle-là apporte un joli fardeau, pas
simplement en inspecteurs. Je sais que le ministre compte sur les six millions
d inspecteurs. Je sais qu'il va y avoir quelques centaines de
spécialistes. Les six millions ne fonctionneront pas comme il le pense.
Ah! je lui souhaiterais bien que les gens se donnent la main pour tâcher
de corriger la situation et qu'on puisse trouver une façon
d'éduquer les gens dans ce domaine. C'est important. Mais qu'on fasse ce
premier pas. Et si les gens ne veulent pas se prêter à ce jeu, on
prendra d'autres mesures. Mais ne pas y aller de la façon qu'on le fait
actuellement avec cette loi qui tâche de ruiner notre économie
dans le domaine industriel.
Je vous parle actuellement d'industrie. C'est un domaine que je connais,
dans lequel je vis tous les jours. On voudrait amener chez nous l'industrie de
la pétrochimie. On veut l'augmenter. Mais avec des lois comme
celle-là, je ne suis pas sûr qu'on va tellement les encourager.
Imaginez-vous quelqu'un qui va arriver et à qui on va exiger des mesures
comme celle-là. Je ne suis pas sûr qu'il va se retourner de bord,
qu'il va regarder où les mesures sont moins draconniennes et qui ne
pollueraient pas plus qu'ici. Vous savez, ce n'est pas Tannée de la
fortune de l'industrie. Le ministre a été aussi loin que dire, ce
matin, que les gros profits, c'est fini. Les gros profits dans l'industrie
n'existent plus. Tenez cela pour acquis. Et je prends le ministre des Finances
à témoin. Il sait, comme ministre du Revenu, combien les
industries font de l'argent. Vous pouvez le consulter et vous allez voir que
les gros revenus et les gros profits n'existent pas. Ce sont les petits profits
et la grosse misère qui existent actuellement dans le domaine
industriel. C'est plutôt cela. Aujourd'hui, on est rendu à un
point qu'on va amener juste la misère. Et là. cela va
déménager. Pas parce qu'ils vont vouloir déménager,
mais ils vont être obligés de déménager. Ils vont
être obligés de fermer si on ne change pas certaines de nos
politiques.
Je ne dis pas cela parce que c'est un gouvernement PQ qui est devant
nous. Je dis cela au gouvernement qui a la responsabilité d'administrer.
Je sais qu'on se retourne de temps en temps et qu'on garroche tous les
péchés sur le gouvernement précédent. C'est la
façon la plus facile de trouver des excuses. Après deux ans dans
l'administration, on a eu le temps de se recycler et de prendre ses
responsabilités, d'agir de façon à corriger une situation
qui peut devenir draconienne. Je sais que le ministre des Finances ou du Revenu
comprend de quoi je parle. (16 heures)
Je ne voudrais pas embarquer là-dedans pour qu'on dise que
j'enfreins le règlement. Je sais qu'on parle de la pollution, mais cela
a un effet direct sur le domaine industriel. Ce n'est pas parce qu'il y a eu
des erreurs dans le passé. Comme je le disais tout à l'heure avec
la question du malade: Pour le guérir, on lui donne une pilule pour le
tuer; du Kool-Aid, comme dirait le député de
Mégantic-Compton. Mais ce n'est pas la façon de régler
notre problème. Je dis qu'on doit graduellement prendre des mesures pour
corriger ce problème. Vous savez, premièrement, il y a une chose
qui arrive. Le ministre peut dans certains cas, s'il le veut, par la loi,
être plus indulgent avec les uns qu'avec les autres. On peut. Le ministre
peut, dans des cas particuliers. Je voudrais entendre la réplique tout
à l'heure et il nous expliquera dans quels cas il a l'intention de faire
cela.
J'ai l'intention de construire. Je sais que demain matin, si la loi est
adoptée, je vais être obligé de me retourner vers le
ministre et venir demander un permis pour la construction. Oui, et faire une
étude de la région pour voir toute la pollution qui va augmenter
chez nous. Si je n'ai pas cela, je n'aurai pas mon permis. Appelez, n'appelez
pas, cela ne dérange personne. Eux autres sont là, ils ne sont
pas pressés parce que, en fin de semaine, ils ont leur paie eux autres.
Ils ne sont pas responsables de créer des revenus pour payer les
employés. Donc, cela prendra le temps que cela voudra. Cela ne presse
pas parce qu'aujourd'hui ils ont autre chose à faire. Quand on sera
prêt à vous le donner, on vous le donnera. C'est de la
façon qu'on reçoit les industriels, dans bien des milieux.
Là on attend la décision à être prise par les
services. Je ne dis pas que c'est le ministre. Le ministre ne peut pas voir
chacun de ces cas. C'est impossible. Ce sont ses représentants qu'il n'a
pas le temps de suivre lui-même au jour le jour pour chaque cas. Je dis
au ministre de tâcher, si parfois on est obligé de subir cette
loi, et il semble bien que cela va arriver, ils ont la majorité... Pour
son exposé de ce matin, qui était très éloquent, je
le félicite; il a bien fait cela, mais il n'a parlé d'aucun des
problèmes de la loi, Simplement des bienfaits de la loi. À vol
d'oiseau, je ne l'accuse pas à ce moment d'être un
spécialiste dans ce domaine, mais cela paraît bien. Mme la
Présidente, ce ne sera pas long.
Il y a juste un petit coin que je voudrais... Je sais qu'il est
même allé jusqu'en Europe. Moi aussi j'ai voyagé en Europe;
l'Angleterre, la France, la Belgique, la Hollande, l'Allemagne, l'Italie, etc.,
j'ai voyagé par là. J'ai vu ce qui se passait là aussi.
J'ai visité des industries. J'ai visité des municipalités.
J'ai aussi vu des cours d'eau et je ne voudrais pas que nos cours d'eau
deviennent aussi pollués que ceux de l'Europe. C'est certain. Mais il y
a une chose qui est différente, par exemple. Le territoire de la France
représente quoi?
35% du territoire du Québec? Ils sont 50 millions de population
et quelle est la différence dans les industries comparativement à
celles du Québec? Regardez la façon dont ils fonctionnent. Vous
allez voir que c'est pas mal plus polluant là-bas. Des cours d'eau non
pollués, ne vous faites pas d'idées, vous n'en avez pas beaucoup.
Prenez, en France, la Seine, le Rhin en Allemagne, aussi bien que la Tamise en
Angleterre. C'est pollué à l'extrême. Mais cela fait des
années et des années que l'industrie jette ses déchets
là-dedans. Je ne recommande pas cela.
Ce n'est pas cela que je veux du tout. Mais il y a des mesures qui se
prennent en France, par exemple. Elles sont commencées actuellement. Et
en Allemagne aussi. On demande à l'industrie d'apporter des correctifs
elle-même avec de l'aide du gouvernement parce que, si on exige trop de
l'industrie, c'est elle-même qui va être obligée de sortir.
C'est ce qu'on a tendance à faire ici. Mme le Président, je sais
que vous voulez que je termine, c'est dommage. J'aurais tellement d'autres
points à couvrir. Mme la Présidente, je ne sais pas si cela va
faire plaisir...
Mme le Vice-Président: En effet, le temps dont vous
disposez est déjà écoulé, M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Russell: ... au ministre, mais on m'informe que je pourrais
parler au nom du parti et qu'il me resterait encore quelques minutes.
M. Grenier: Pour un homme qui connaît cela, cela vaut la
peine.
M. Russell: On pourrait peut-être vous parler un petit peu,
on pourrait peut-être compléter la tournée d'Europe. Le
député de Saint-Hyacinthe a parlé 20 minutes, je crois. 15
minutes
Mme le Vice-Président: Faites-vous une idée, M. le
député.
M. Russell: Mme le Président, je sais que le
député de Saint-Hyacinthe a parlé, lui, a prié le
ministre d'avoir un système éducatif pour la population du
Québec dans ce domaine bien particulier. Je pense que c'est positif
mais, si je regarde la loi, je lis: Les petits gars, vous allez vous mettre
à genou, vous allez marcher comme je vous le dis, autrement vous allez
payer. Si vous ne payez pas, vous allez avoir la prison.
M. Charron: Mme le Président.
Mme le Vice-Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: Je voudrais demander au député de
Shefford de m'excuser.
Mme le Vice-Président: De Brome-Missisquoi. M. Charron:
De Brome-Missisquoi, pardon.
M. Russell: Cela me fait bien plaisir de me faire appeler le
député de Shefford, mais je ne voudrais pas représenter
deux comtés.
M. Charron: Oui, c'est parce que je l'ai connu à une autre
époque où il était député de Shefford. Cela
ne nous rajeunit pas personne, vous allez me dire, mais...
Je voudrais demander au député qui vient de choisir de
parler au nom de son parti c'est nullement mon intention de le brimer
s'il ne nous accorderait pas ce que j'avais obtenu du chef de son parti
et du chef de l'Opposition officielle, d'arrêter ici pour quelques
minutes la discussion de ce projet de loi, afin de procéder à une
déclaration ministérielle, avec le consentement unanime de
l'Assemblée.
M. Russell: Avec plaisir, Mme la Présidente, je
réponds à la demande du leader parlementaire du gouvernement.
M. Charron: Mme le Président, je remercie le
député.
J'ai contacté, à l'heure du lunch, le chef parlementaire
du Parti libéral et le chef de l'Union Nationale et l'un et l'autre
m'ont accordé leur consentement afin que Mme le ministre des
Consommateurs, Coopératives et Institutions financières puisse
faire une brève déclaration ministérielle qui est,
à l'heure actuelle, d'intérêt public pour le
Québec.
Mme le Vice-Président: Mme le ministre des Consommateurs,
Coopératives et Institutions financières.
Déclaration ministérielle
Offre d'achat des actions du Crédit foncier
franco-canadien
Mme Lise Payette
Mme Payette: Mme la Présidente, j'ai été
informée que la compagnie Central and Eastern Trust s'apprête
à faire une offre d'achat visant à acquérir la
majorité des actions émises du Crédit foncier
franco-canadien. Il s'agit d'une institution financière
créée en vertu d'une loi québécoise et qui est
l'une des plus importantes au Québec. Je désire informer cette
Chambre que le Conseil des ministres, ce matin, a décidé de
présenter prochainement à l'Assemblée nationale une loi
qui prendra effet à compter d'aujourd'hui, et, par conséquent,
s'appliquera à l'offre en cours et permettra, à compter de
maintenant, au gouvernement de déterminer au préalable si des
transactions de cette nature touchant ce genre d'institutions
financières sont dans l'intérêt du Québec et doivent
être autorisées. Merci, Mme la Présidente.
Mme le Vice-Président: M. le député
d'Outremont.
M. André Raynauld
M. Raynauld: Merci, Mme le Président. Cette
déclaration soulève des problèmes extrêmement
intéressants et d'une grande portée, il va sans dire. En premier
lieu, je pense qu'on ne peut pas manquer de souligner l'ironie d'une situation
poussant le gouvernement à vouloir bloquer la vente à des
Canadiens d'une entreprise étrangère, d'une entreprise, en
réalité, dont les actions sont détenues pour 75% en
France. C'est donc dire qu'on préfère des intérêts
français à des intérêts canadiens, des
intérêts français à des résidents du
Nouveau-Brunswick, suivant mes informations. Il faut savoir que le
Crédit foncier n'est une entreprise québécoise que par la
loi qui l'a constitué vers 1880.
M. Joron: ... la direction?
M. Raynauld: Geler la situation n'en fera pas en soi une
entreprise québécoise, mais française comme elle l'a
toujours été.
On ne peut pas manquer en deuxième lieu de souligner l'ironie
aussi d'une situation dans laquelle une grande entreprise française, la
Banque de Paris et des Pays-Bas, veut se départir de ses
intérêts au Québec, alors que le premier ministre et
plusieurs ministres, à sa suite ou le précédant, vont en
France pour stimuler les investissements français au Québec,
stimuler les investissements de nature financière en particulier. On est
obligé de penser que le message du gouvernement du Québec semble
bien passer de l'autre côté de l'Atlantique.
En troisième lieu, sur le fond, je dirai que nous devrons, bien
entendu, attendre le dépôt du projet de loi pour nous prononcer.
Ce projet de loi semble comporter des implications qui vont bien
au-delà, si on lit attentivement la déclaration, du cas
particulier qui nous occupe cet après-midi et qui a donné
l'occasion au gouvernement de présenter cette déclaration. (16 h
10)
Cependant, je pense qu'on peut tout de même poser quelques
questions. Est-ce qu'il s'agira, par exemple, d'interventions ad hoc qui ont
été, en ce qui concerne le gouvernement fédéral,
déplorées de façon continuelle par les ministres de ce
gouvernement? S'agira-t-il de politiques cas par cas, comme le ministre
d'État au développement économique a caricaturé la
politique fédérale de tamisage des investissements
étrangers? S'agira-t-il, comme le ministre de l'Industrie et du Commerce
l'a dit l'autre jour en parlant toujours de cette politique
fédérale relative aux investissements étrangers, d'une
politique de broche à foin?
Or, la déclaration qui nous est présentée cet
après-midi dit expressément que le projet de loi portera à
la fois sur des problèmes à plus long terme, semble-t-il tout au
moins, et sur le cas particulier qui nous occupe. En effet, on dit que ce
projet de loi va s'appliquer à la transaction dont il est question et
qu'il s'agit même d'un projet de loi qui prend effet aujourd'hui, ce qui
est assez inusité, pour ne pas dire plus. De là l'importance de
savoir de la part du gouvernement et du ministre quand ce projet de loi sera
déposé, puisque les transactions, à l'heure actuelle,
sont, à toutes fins utiles, suspendues et à Montréal et
à Paris. S'agira-t-il, ensuite, d'autorisations que le gouvernement
voudra étendre à l'ensemble des institutions financières?
S'agira-t-il de restrictions qui iront au-delà de. la diffusion de la
propriété? S'agira-t-il de contrôles visant
spécifiquement les non-résidents du Québec? S'agira-t-il
d'une accélération de l'application du programme du Parti
québécois où l'on dit, au chapitre des institutions
financières, qu'on adaptera essentiellement le régime canadien
à la situation québécoise, ce qui doit s'entendre comme
étant une politique restreignant à des résidents
québécois la propriété des institutions
financières, exception faite de 25% du capital-actions pour des
non-résidents? Est-ce qu'il s'agit, dans ce projet de loi, d'appliquer
dès maintenant une politique comme celle-là, d'appliquer,
autrement dit, une politique qui ne devrait s'appliquer, en toute
équité, qu'après avoir consulté la population du
Québec sur l'indépendance du Québec, qui devrait
s'appliquer, donc, dans des circonstances tout à fait différentes
de celles que nous connaissons aujourd'hui et pour laquelle, d'ailleurs, le
gouvernement n'a aucune autorité sur le plan politique pour
procéder?
Donc, cette déclaration, encore une fois, soulève des
problèmes très importants. Je demanderai au gouvernement de faire
diligence pour déposer ce projet de loi, puisque je pense que des
intérêts sont en jeu et qu'ils ne devraient pas être
indûment sacrifiés à la définition de politiques
générales qui sont, de toute façon,
prématurées compte tenu du mandat que le gouvernement a à
sa disposition maintenant.
Mme le Vice-Président: M. le chef de l'Union
Nationale.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: Mme la Présidente, il s'agit ici d'une
très courte déclaration ministérielle de la part du
ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions
financières, mais elle est très importante. Tout comme le
député d'Outremont, je me pose aussi de nombreuses questions,
parce que la déclaration, en fait, ouvre des portes à des
questions sans nombre à propos de l'orientation de la politique
économique du gouvernement dans le domaine de l'épargne en
particulier. On a déjà eu des déclarations de la part du
ministre de l'Industrie et du Commerce j'avais posé des questions
là-dessus que je n'avais pas trop aimées, à propos
d'une certaine nationalisation de l'épargne, d'une direction voulant
qu'on puisse se servir davantage de l'épargne de la part du gouvernement
du Québec.
On pourrait se servir davantage de l'épargne de la part du
gouvernement du Québec. Je ne veux pas juger des décisions du
ministre des Consommateurs, des Coopératives et Institutions finan-
cières, mais j'aimerais quand même en savoir un peu plus
sur les intentions du ministre vis-à-vis de l'orientation du
gouvernement dans ce qu'elle nous proposera comme projet de loi. Je note, Mme
la Présidente, qu'il est important que le gouvernement du Québec
agisse dans ce domaine-là tout comme le gouvernement canadien a agi dans
le même domaine, il y a déjà plusieurs années. Selon
les lois canadiennes concernant les banques, un individu ou une corporation ne
peut détenir plus de 10% du capital-actions des banques, alors que dans
le cas des sociétés de fiducie comme celle dont nous discutons
présentement, il n'y a pas de limites, en tout cas au Québec. Ce
serait temps que nous mettions une certaine limite là-dessus.
Dans le cas du gouvernement canadien, si mes informations sont justes,
aussi pour les sociétés de fiducie, c'est limité à
15%. Des sociétés de fiducie qui opèrent au Québec
se sont limitées elles-mêmes, à travers leurs
règlements généraux, à 15%, alors que la
société dont nous discutons, le Crédit foncier, n'a jamais
voulu se limiter elle-même, après plusieurs demandes, pourtant, de
la part de certains des dirigeants québécois ou canadiens de
cette société de fiducie. Les actionnaires et les membres du
conseil d'administration qui étaient majoritairement de
l'extérieur du Québec et du Canada n'ont jamais voulu accepter un
règlement interne pour leur propre société. C'est
sûr que, dans certains cas, comme cela, c'est important que nos
gouvernements agissent dans ce sens.
D'autant plus que le Crédit foncier est la septième
société de fiducie en importance au Canada, et la
quatrième au point de vue du capital. Je crois que c'est important que
nous protégions une telle société. D'un autre
côté, c'est une des sociétés les plus actives au
Québec puisque 35% de ses actifs sont au Québec, 65% à
l'extérieur du Québec. Ce qu'il y a d'important, c'est que 50%
des investissements dans le domaine immobilier sont au Québec. C'est un
chiffre très important pour un investissement d'une
société de cette taille, surtout si on considère que ces
immeubles, pour la plupart, sont dépréciés ou
sous-évalués, et que la valeur aux livres de ses immeubles, qui
apparaît à $108 millions, serait en réalité beaucoup
plus près de $200 millions. Ce sont des sommes d'argent très
importantes pour ceux qui sont les actionnaires, à l'heure actuelle,
dans ces entreprises, en plus d'avoir un siège social à
Montréal.
J'ai vérifié aussi en Nouvelle-Écosse où on
nous disait que le siège social de Central Industry and Trust devait
être. Apparemment, ce n'est pas en Nouvelle-Écosse, mais
plutôt à Moncton, au Nouveau-Brunswick. En Nouvelle-Écosse,
il y a une loi qui limite à 15% par individu ou corporation la
propriété des actions d'une telle entreprise, alors qu'il n'y a
pas de loi semblable au Nouveau-Brunswick. On voit que certaines corporations
peuvent changer leur siège social d'un endroit à l'autre tout
simplement pour faire face à des demandes différentes de la part
de différentes provinces ou de différents pays.
Maintenant, on note que le crédit foncier est détenu
à 25% par des actionnaires canadiens, à peu près
éparpillés dans tout le pays, et à 75% par des
actionnaires européens et surtout français. Moi aussi, comme le
député d'Outremont, je trouve que c'est un paradoxe de voir que
nos amis français ne font pas confiance au Québec, alors qu'on
dépense des milliers et des milliers de dollars pour faire la cour
à ces gens-là. Il semble que ces gens soient beaucoup plus
intéressés à faire affaires avec nous sur les questions de
langue et de culture. Lorsqu'il est question d'économie, de dollars ou
de création d'emplois, nos amis français nous laissent tomber
chaque fois. J'irais même jusqu'à dire que cette fois-ci les
Français veulent nous vendre aux Anglais. Est-ce la même chose qui
serait arrivée dans le passé? Ce sont des questions que l'on peut
poser, bien sérieusement, sur cette situation très
importante.
Avant de terminer, je voudrais quand même demander au ministre si
elle pourrait nous apporter d'autres éclaircissements sur la
portée financière de cette loi qu'elle se propose de nous
présenter. Est-ce que la loi sera présentée avant
l'ajournement? Et est-ce qu'elle s'attend à demander le consentement
unanime de la Chambre pour passer les première, deuxième et
troisième lectures d'un tel projet de loi? Est-ce que ce projet de loi
sera une loi spécifique concernant le cas du Crédit foncier, ou
si ce sera une loi-cadre qui pourra couvrir toutes les entreprises qui oeuvrent
dans le domaine de la finance? Si le ministre veut agir dans les meilleurs
intérêts des Québécois, elle aura sûrement
notre appui. Mais nous ne voulons pas non plus que ce soit encore une fois une
intervention directe de l'État dans un secteur qui relève du
secteur privé. Il faut véritablement que ce soit une loi-cadre
qui laisse une certaine latitude à l'entreprise privée et aux
individus. (16 h 20)
Encore une fois, je l'encouragerai à vouloir avoir un plus grand
contenu canadien dans une telle société, plutôt que d'avoir
un contenu français, parce qu'à l'heure actuelle il semble qu'on
ne peut pas se fier à nos amis français.
Mme le Vice-Président: Mme le ministre. Mme Lise
Payette
M. Payette: Mme la Présidente, parmi les questions qui ont
été posées, aussi bien par le député
d'Outremont que par le chef de l'Union Nationale, certaines sont
extrêmement valables, et je les comprends parfaitement. D'autres sont un
tantinet exagérées. Le texte de la déclaration
ministérielle dit bien qu'il s'agit d'intervenir dans ce genre
d'institutions; cela me paraît assez clair que notre intention ne va pas
plus loin. Je pense qu'il est bon également que cette Chambre se
souvienne que le ministre des Finances fédéral doit se prononcer
sur l'achat d'actions de Central Trust. Ce que nous faisons finalement, c'est
de nous engager dans une voie analogue pour l'instant. Je prends l'engagement,
Mme la Présidente, de faire diligence en ce qui concerne ce projet
de
loi. Nous serons très certainement en mesure de le déposer
très rapidement dans les jours qui viennent. J'espère pouvoir
effectivement compter sur le consentement de cette Assemblée pour
permettre à ce projet de loi de suivre son évolution normale dans
les jours et les semaines qui viennent.
M. Charron: Je m'excuse encore auprès de mon
collègue et ami de Brome-Missisquoi, je voudrais communiquer un dernier
avis qui était resté incomplet ce matin. Le Conseil des ministres
a décidé, ce matin même, de tenir une commission
parlementaire sur le projet de loi 84 limitée aux organismes qui,
réunis hier en conférence de presse, en avaient fait la demande.
Cette réunion de la commission des affaires sociales aura lieu le lundi
11 décembre prochain, à 10 heures.
Deuxième lecture du projet de loi no 69
(suite)
Mme le Vice-Président: C'est donc la reprise du
débat sur la motion de deuxième lecture du projet de loi
modifiant la Loi de la qualité de l'environnement. M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Armand Russell (suite)
M. Russell: Mme la Présidente, je disais que je prendrais
ce privilège que j'ai de parler au nom du parti qui me permet de
prolonger le temps de cet exposé, et je vais tâcher de ne pas
abuser. Si ce n'est pas nécessaire de prendre l'heure, je le ferai.
J'arrêterai aussi rapidement que je peux le faire, mais je crois que ce
projet de loi a une importance capitale. Parce qu'on parle de sièges
sociaux qui déménagent du Québec, il ne faudrait pas
commencer à penser que les industries vont déménager.
Souvent, dans le domaine industriel, c'est plus facile de fermer que d'ouvrir.
Je disais qu'en Europe même si le ministre a voyagé en
Europe, d'autres y sont allés aussi on est arrivé avec des
formules pour tâcher d'aider l'industriel et non pas l'apeurer, parce que
l'industriel en Europe a les mêmes problèmes que celui du
Québec et que celui du Canada. Je pense que plutôt que d'arriver
avec un projet de loi comme celui-là qui a tendance à faire peur
à l'industriel et qui peut devenir mêlant pour lui, on devrait
arriver avec des mesures et dire: Dans ce domaine, les services ou les
municipalités ont le pouvoir d'agir et de faire en sorte qu'on pourra
tâcher de coopérer avec l'industriel pour s'il y a un
système polluant dans son industrie corriger cette situation.
L'industrie du sciage est une des industries les plus importantes du
Québec. S'il fallait appliquer la loi telle que rédigée,
la presque totalité des scieries seraient obligées de fermer, et
non pas simplement par le bruit, par la fumée qui peut être
créée par des brûleurs et par d'autres choses. Les
déchets, je ne veux pas en faire la nomenclature, ils sont nombreux ceux
qui sont créés par une scierie. J'ai recommandé ceci
à maintes reprises au gouvernement. Plutôt de payer des millions
et des millions en chômage ou en bien-être social, cela serait
préférable d'utiliser ces millions de concert avec l'industrie du
sciage et du papier pour qu'on puisse éliminer cette contamination et
construire quelque chose comme on le fait en Europe. Il y aurait là un
bel exemple, parce qu'ils n'en font pas de gaspillage dans les scieries. Cela
serait un exemple que l'on pourrait prendre sur eux si on veut corriger une
situation dans le domaine de la pollution. Cela serait beaucoup plus pratique
que de tâcher d'essayer de les apeurer, comme on le fait là. Se
conformer à cette loi, comme je le disais tout à l'heure, je ne
connais pas tellement de scieries qui vont pouvoir le faire, à moins
qu'elles n'obtiennent une tolérance, soit de l'inspecteur ou directement
du ministre.
Un autre domaine est bien particulier. Vous avez plusieurs industries
qui fonctionnent dans les domaines de la pétrochimie ou d'autres, sous
licence. Actuellement, par cette loi, on pourrait forcer l'industriel à
déclarer la composition de sa formule, et je parle en connaissance de
cause. Si ceci arrivait à certains industriels qui ont une licence, ils
seraient pris entre deux cas bien difficiles. Ou ils seraient obligés de
répondre au ministre dans le domaine de l'environnement en faisant la
déclaration totale de la composition de leur formule ou de payer une
amende qui pourrait les amener à la porte de la faillite. On n'a pas
pensé à cela quand on a rédigé la loi. Cela n'est
pas prévu. C'est simplement celui qui se plaint qui a raison. Ce sont
des choses qui devraient être prévues dans la loi, au moins dans
les règlements. Mais je dis que les règlements me font peur. Cela
peut être modifié par le Conseil des ministres. L'autre jour, je
disais que je ne connaissais aucun ministre qui soit un industriel. Je pense
que dans l'histoire du Québec, c'est la première fois que je vois
un gouvernement qui a composé un cabinet sans avoir au moins un
industriel ou un gars qui connaît ce domaine. Imaginez-vous qu'il peut se
passer des mesures qui ne sont pas tellement impressionnantes pour les
industriels. Si au moins il y en avait un pour les représenter et dire:
Attention, dans certains cas, cela peut être désastreux
économiquement pour ce domaine bien particulier.
Je disais, Mme la Présidente que dans le domaine industriel il
faut y aller avec beaucoup de précaution et beaucoup d'attention. Je
disais tout à l'heure que, contrairement à ce que le ministre
dit, pour de gros profits, il n'a pas à s'inquiéter.
Actuellement, ce ne sont pas de gros profits qui existent dans le domaine
industriel; ce sont de gros déficits. Ce qui fait que plusieurs, comme
on en connaît quelques-uns, Marine Industrie, Fora-no, Volcano, SGF,
fonctionnent à perte, à un point tel que si le gouvernement
n'arrive pas avec des millions de dollars pour les aider, ils vont être
obligés de mettre la clef dans la porte. Ils vont dépolluer,
c'est certain, il n'y aura plus de danger. Eux ne créeront plus de
pollution, mais ils vont créer du chômage. Est-ce qu'on a le moyen
au Québec de faire face à d'autre chômage que celui qu'on
vit actuellement?
Ce sont simplement des remarques que je
voulais faire dans ce domaine bien particulier. Il y aura bien d'autres
points que je pourrais couvrir et donner des exemples au ministre pour lui
dire: Allez-y donc avez beaucoup de précaution. Mme la
Présidente, par votre intermédiaire, je voudrais demander au
ministre de tâcher de demander à ses inspecteurs, à ses
fonctionnaires, d'être un peu plus rapides pour répondre à
certaines demandes et de tâcher d'être un peu plus
compréhensifs, même dans le domaine agricole.
J'ai vécu certains exemples qui me semblent injustifiés,
qui placent les cultivateurs dans des situations vulnérables, et ce
n'est pas nécessaire. Je pourrais citer des cas énormes, mais je
ne le ferai pas pour ne pas faire perdre le temps de la Chambre. Je sais que le
ministre comprend, mais s'il ne comprend pas, je les lui donnerai dans
le particulier ou à son secrétaire. Je suis intervenu
quelques fois et je ne peux comprendre, si aujourd'hui cela prend trois mois
pour obtenir un permis de l'Environnement, combien de temps cela va prendre
avec cette loi s'il faut l'appliquer à la lettre. (16 h 30)
Dans le domaine des municipalités j'en ai parlé
brièvement tout à l'heure c'est un problème bien
difficile et cela peut créer des problèmes énormes pour
les contribuables. C'est beau d'arriver avec des mesures bienfaisantes. Cela
paraît bien politiquement à la face du public, mais allez donc
demander aux administrateurs municipaux quels sont leurs moyens pour rencontrer
ces obligations.
Je vais prendre un domaine que je connais et lui aussi le connaît.
Je pourrais examiner avec lui ou avec vous, Mme la Présidente, la
situation de la rivière Yamaska. Je sais que ce n'est pas tellement
reluisant. Je sais qu'il y a là des problèmes. J'ai cité
la ville de Waterloo tout à l'heure. Je vous dis qu'ils n'auront pas les
moyens de payer l'opération à moins de mettre la ville à
la porte de la tutelle. Je pourais vous parler de la municipalité de
Lac-Brome qui va être placée dans la même situation si on
agit dans le même sens. Je pourrais vous parler de la ville de
Cowansville, là où on a exigé des municipalités de
se mettre ensemble pour bâtir un dépotoir. Elles ont
écouté le gouvernement. Et, là, on leur a promis de l'aide
de tous bords et de tous côtés. On ne veut même pas les
aider à construire la route pour se rendre au dépotoir. Tout
à l'heure, vous savez qu'il va y en avoir, des gens qui vont se
plaindre, parce que la route n'est pas pavée et il y a un paquet de
camions qui passent dessus. Les voisins vont se mettre à appeler et vont
faire des plaintes au bureau de l'Environnement. Il va falloir que les
municipalités agissent et mettent du calcium. Ce n'est pas une route
provinciale. Ce seront les municipalités qui vont être
obligées de mettre du calcium. Cela a été fait à la
demande du gouvernement. C'est la responsabilité des
municipalités. Le gouvernement s'en fout. Agissez, vous autres! Payez!
Vous êtes quatre ou cinq, payez. Mais il y a une limite à la
capacité de payer du contribuable. Il est saturé actuellement de
taxes.
Je comprends que le ministre peut me dire: Moi, j'arrive là. Cela
fait seulement deux ans. Il y a eu les administrations
précédentes. Est-ce parce qu'il y a eu des erreurs dans le
passé qu'on doit continuer à suivre la même voie des
erreurs? Je voudrais que la loi soit plus flexible, quelle donne plus de
flexibilité au ministre, parce qu'il va être placé dans des
situations très difficiles tout à
I heure. Vous savez, pour la ville de Waterloo comme pour la ville de
Cowansville. il y a des moyens beaucoup plus économiques de
régler cela que ceux qui sont projetés. Vous avez vu un exemple.
Sur la Yamaska, on a fait un barrage qui a coûté on me dit
enre $20 millions et $25 millions. Je n'ai pas fait le relevé des
dépenses. Cela aurait pu se régler pour beaucoup moins que cela
et d'une façon beaucoup plus complète que cela. On va me dire:
Cela aurait été réglé seulement pour 20 ou 25 ans,
mais, dans 20 ou 25 ans. on aurait pu trouver d'autres moyens de financer ces
changements, plutôt que de les imposer immédiatement et de faire
un travail qui est à moitié fait. C'est cela qui est le
problème actuel. On s'impose des obligations et on n a pas les moyens de
payer. Qu'est-ce qu'on fait? On demande aux municipalités de payer.
Donc, il va falloir commencer à couper quelque part et je pense que le
ministre de l'Environnement doit faire sa part, ne pas arriver avec des
obligations additionnelles pour chacune des municipalités de la province
de Québec.
Mme la Présidente, on a parlé brièvement tout
à l'heure du domaine agricole. J'ai dit que je pouvais lui donner bien
des noms, au ministre. Il n'y a pas simplement les cultivateurs qui sont
affectés.
II y a aussi des résidents de villages qu'on peut placer dans des
situations assez difficiles par cette loi en leur donnant des obligations
qu'ils n'auront pas le moyen de rencontrer. Par les exigences de la loi
actuelle, on tente d'obtenir des Cadillac quand on n'a pas le moyen de se payer
une Chevelle. Donc, c'est cela qui va arriver avec les normes qu'on a
actuellement. C'est un peu comme la construction de routes. Dans des milieux
ruraux où il n'y a pas tellement de circulation, mais où il faut
réellement une amélioration de la route, on arrive avec des
normes et on construit des routes pour recevoir une circulation lourde qui ne
passera peut-être jamais sur ces routes. Mais ce sont des coûts
beaucoup trop onéreux pour le contribuable du Québec. On pourrait
corriger ces situations à des coûts beaucoup moindres. Cette loi
est exigeante pour le contribuable rural, pas simplement pour le cultivateur,
mais pour celui qui demeure dans des régions rurales. Elle est
très exigeante pour les municipalités et désastreuse pour
I industriel si on veut l'imposer telle qu'elle se présente. Dans tout
cela, ce qui me surprend, c'est qu'il y a un côté qui a des
droits, ce sont ceux qui se plaignent.
Ceux qui ont à répondre peuvent faire appel à une
commission pour se faire entendre, c'est au moins une amélioration. Mais
cela va prendre combien de temps, si tout le monde commence à se
plaindre, à se faire entendre? Mais en attendant
qu'on se fasse entendre, on fait quoi? La loi ne le dit pas. Est-ce
qu'on ferme la porte? Il faudrait que le ministre réponde à cela
et dise aux citoyens du Québec, aux industriels: Écoutez, s'il y
a une plainte, si vous n'êtes pas satisfaits ou si vous trouvez que vous
avez raison, on va vous entendre dans un certain délai, et si on ne peut
pas, vous pourrez continuer à opérer entre-temps.
Mais ce n'est pas cela que dit la loi. La loi peut faire mettre la
clé sur la porte. J'ai dit que c'était l'État policier et
c'est vrai, parce que l'inspecteur peut entrer partout chez nous en n'importe
quel temps. Il a simplement à nous montrer une identification, une
lettre du ministre et nous accuser d'avoir fait quelque chose sans qu'on l'ait
fait et on ne peut pas l'empêcher d'entrer. Là on est
obligé de répondre à toutes ses questions, lui fournir
toute l'information qu'il exige. Tout ce qu'il dit. Son seul mandat, c'est une
lettre. C'est rendu grave.
Autant que je sache, le zonage fait la même chose. J'espère
qu'on ne répétera pas les bêtises qu'on a faites dans la
loi du zonage agricole. Je sais ce que je dis. C'est devenu un État
policier. On doit avoir des droits de propriété, il me semble,
meilleurs que ceux-là. Je voudrais bien être maître chez
nous. Oui, mais avec vous autres, on ne le sera pas. Si vous continuez à
apporter des lois comme celle-là et celle du zonage, ce n'est pas nous
qui allons être maîtres, cela va être vos inspecteurs. Eux
autres, ils vont se promener et ils vont aller fouiller et on n'a rien à
dire.
Vous savez, c'est même pire que la loi du revenu. Je pensais
qu'elle était grave celle-là. Au moins, eux autres, ils demandent
un rendez-vous. Tandis que la loi du zonage agricole et celle là, ils
arrivent quand cela fait leur affaire. Cela peut être 7 heures du matin,
cela peut être 10 heures le soir. On ne fait pas de distinction. C'est
quand cela fait leur affaire. Les inspecteurs du revenu, eux autres, ils ne
sont pas si travaillants que cela. Si vous n'avez pas trop de plaintes, au
moins ils prennent un rendez-vous. Ils viennent et ils sont assez fatigants eux
autres aussi. Oui, cela s'est fait déjà. Soyez sans crainte. Je
les tiens occupés ces gars, je suis obligé. J'ai un bureau chez
moi, Mme le Président, pour l'information des députés,
spécialement pour eux, à leur disposition. Mon contrôleur
ne peut pas fournir. Je perdais assez de temps avec eux que j'ai
été obligé d'engager un assistant. À cela, on
demande qu'on soit satisfait avec les inspecteurs qui viennent chez nous. Ce ne
sont pas des gens qui dérangent personne, vous savez. Vous en avez une
kyrielle de ces gars. Avez-vous déjà essayé de compter
combien il y en a?
Une voix: Quatre dans la même journée.
M. Russell: Quatre dans la même journée quand ils
sont occupés. Vous avez l'inspecteur des bouilloires, l'inspecteur du
revenu, vous avez l'inspecteur du salaire minimum, l'assurance-chômage,
la commission des accidents du travail, etc., etc. Je n'ai pas assez de doigts
dans les mains pour les compter. C'est vrai. C'est ce que je disais, Mme la
Présidente, il ne faudrait pas que cette loi soit pire que cela. Cela va
être un désastre complet. C'est cela que je voudrais que le
ministre comprenne. On va dire que je dramatise. Peut-être qu'il faut
dramatiser pour le faire comprendre au ministre. Comme nous le disait l'ancien
ministre des Transports tout à l'heure, c'est vrai que dans la ville de
Montréal, on voit les problèmes de Montréal. On n'a
peut-être pas vu le problème des oiseaux ici.
On a parcouru beaucoup de chemin depuis 40 à 50 ans. Il ne faut
pas rejeter du revers de la main toute l'administration passée. Les gens
ont agi du mieux qu'ils ont pu avec ce qu'ils possédaient. Il ne faut
pas tasser d'un coup sec, raser tout cela et dire qu'on recommence à
neuf à n'importe quel prix. C'est cela qui est l'erreur actuelle. C'est
à cela qu'il faut faire attention, parce que les gens ont
été placés dans une situation qui était assez
fragile. Cela paraît facile de dire: On adopte une loi, tout le monde va
se soumettre, il n'y a pas d'inconvénient.
Mais dans le domaine pratique, il y a des inconvénients, et ce
qui est le plus dangereux, c'est que ceux qui ont à appliquer cette loi,
souvent, ne connaissent pas le côté pratique de la chose. Ce sont
des gens bien intentionnés, des gens qui ont suivi les meilleurs cours.
Ce sont de bons techniciens. Mais il y a une chose qu'ils ne connaissent pas,
c'est le côté pratique de l'affaire. Quand on arrive à
l'application de la loi, on se fout de cela. On prend le livre et on dit:
À la page 10, paragraphe 8, paragraphe 18 ou 28, c'est cela que la loi
dit et c'est là que vous allez passer. C'est ce que la loi dit
actuellement. Si on ne passe pas là, on peut faire appel à la
commission. On va être entendu quand? Et si on est condamné, on a
seulement à payer. Vous savez qu'on n'y va pas avec le dos de la
cuillère dans les pénalités. (16 h 40)
Une industrie, cela peut lui coûter $20 000 à $25 000 si
parfois on ne se plie pas aux exigences immédiates de l'inspecteur,
parce que les infractions peuvent se multiplier par jour. C'est cela qui est
important.
Mme la Présidente, j'ai pensé que ces quelques remarques
pouvaient être nécessaires pour rappeler au ministre son devoir
qui n'est pas simplement d'être le ministre de l'Environnement. Il est
membre du cabinet et responsable du bien-être, non seulement dans le
domaine de l'environnement, mais du bien-être de la population du
Québec en entier dans tous les domaines, et le bien-être
économique fait partie de cela. Il ne doit pas agir seulement d'un
côté, il doit examiner les deux côtés pour faire en
sorte qu'il impose des lois au fur et à mesure que c'est
nécessaire pour corriger une situation. Là-dessus, on est tous
d'accord. Personne n'est contre cela. Je crois que la meilleure solution nous a
été donnée ce matin par le député de
Saint-Hyacinthe, qui a dit: L'éducation de la population. Faisons appel
aux 6 millions de Québécois. Examinons ensemble notre
problème dans le domaine de la pollution et ensemble on va travailler,
avec les années, pour le corriger, et je vais vous fournir un
mécanisme pour le faire.
Ce n'est pas cela qu'on fait par la loi. Ce
projet de loi, c'est l'épée de Damoclès sur la
tête des 6 millions de Québécois qui ne veulent pas agir.
Ce qu'on donne de plus c'est le droit à un citoyen de se plaindre et de
pousser l'autre, la chicane entre les voisins. Dieu sait que j'ai connu des
chicanes de voisins comme maire d'une petite municipalité; vous savez
les clôtures de ligne, comme on se chicanait. Il y a une kyrielle
d'avocats chez nous. Par appels à la paix, à la bonne entente,
dans l'espace d'une couple d'années on est venu à bout
d'éliminer ces choses. Le ministre fait appel à cela aussi. C'est
exactement ce que dit ce projet de loi. Je voudrais qu'il apporte des
changements.
Il dit non, le ministre, mais demain il va voir... Pardon?
M. Léger: Vous ne l'avez pas lu.
M. Russell: Écoutez, Mme la Présidente, je n'ai pas
lu le projet de loi? Je l'ai lu et je l'ai relu; je n'avais même pas
l'intention de parler, parce que j'étais tellement pour
l'amélioration de l'environnement. Mais quand j'ai lu le projet de loi,
et je prends à témoin mon voisin le député de
Mégantic-Compton, j'en ai quasiment perdu connaissance. J'ai dit: Ce
n'est pas possible.
Une voix: Va prendre un petit coup.
M. Russell: Oui, j'en prendrai un tout à l'heure à
la santé du député.
M. Bellemare: Non, il ne mérite pas cela.
M. Russell: Ce n'est pas possible qu'un gouvernement qui veut
tellement le bien des Québécois, qui voudrait qu'on soit
maître chez nous, nous dépose une loi aussi piquante, aussi
dangereuse, aussi rétrograde.
Une voix: Rétrograde?
M. Russell: J'ai dit rétrograde, oui. Je sais qu'on va me
corriger mes fautes de français, mais cela ne me dérange pas; je
n'ai pas fait de cours de droit, je n'ai pas fait de cours de poète, de
lettres?
Une voix: De mythologie.
Une voix: De phraséologie.
M. Bellemare: Y a-t-il de la pollution jusque-là?
M. Russell: Cela peut être rendu jusque là.
J'ai lu cette loi et j'étais un peu découragé.
C'est là que j'ai demandé au député de
Saint-Hyacinthe: Comment se fait-il que l'on n'a pas contesté cette loi?
Il y a des choses que le ministre n'a certainement pas comprises, il va
falloir, cet après-midi, examiner cela ensemble. Je l'ai relue deux
fois. Là, je l'ai noté. Je peux vous lire les paragraphes que
j'ai notés. Dans le domaine de l'automobile, vous savez, cela m'a fait
peur. J'ai dit: Imaginez-vous, si je perds mon tuyau d'échappement en
route et que je rencontre ces inspecteurs, je ne suis pas sauvé. C'est
ridicule, mais c'est dans la loi. Justement, vous dites que la loi est
ridicule, je n'ai pas d'objection; un membre du Parti québécois
dit que c'est ridicule une loi semblable. Je suis d'accord avec lui, d'avoir
des mesures aussi rétrogrades que cela. C'est cela qui m'a surpris.
M. Lavigne: Question de privilège, Mme la
Présidente.
M. Russell: Et c'est pour cette raison que j'ai pensé, cet
après-midi, que vous me donneriez quelques minutes pour que je puisse
parler bien objectivement au ministre et lui demander de nous apporter...
Mme le Vice-Président: M. le député de
Brome-Missisquoi, vous devez avoir entendu votre voisin. Je m'excuse de vous
arrêter encore une fois.
M. le député de Beauharnois, sur une question de
privilège.
M. Lavigne: Mme la Présidente, je voudrais quand
même faire une mise au point. Le ridicule ne tue pas, parce qu'il y en a
qui mourraient de bonne heure. Ce que j'ai dit, c'est que ce que M. le
député disait était ridicule et non pas que la loi
était ridicule, quand il se sent pourchassé par un inspecteur,
parce qu'il perdrait son tuyau d'échappement.
M. Shaw: Mme le Président, sur une question de
règlement.
Mme le Vice-Président: Sur une question de
règlement, M. le député de Pointe-Claire.
M. Shaw: Our regulations state very clearly that a member who has
not got le droit de parole, doit garder son siège et rester "quiet".
S'il fait des remarques durant cette période, une question de
privilège n'est jamais requise.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Russell: Mme la Présidente, j'ai bien entendu les
propos du député de Beauharnois, qui s'est vanté d'avoir
dit que j'étais ridicule. Si c'est vrai qu'il a dit cela, je lui
demanderais de retirer ses paroles, car c'est antiparlementaire. Je ne pense
pas m'être placé encore dans cette situation, et il doit
être assez gentilhomme pour le faire.
M. Lavigne: M. le Président, on entretient le ridicule. Je
n'ai pas traité le député de ridicule, mais ses propos de
ridicules.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Russell: C'est exactement ce que j'ai dit, que j'étais
d'accord avec le député, à savoir que les propos contenus
dans la loi étaient ridicules. On tombe d'accord, encore. Voyez-vous
comment c'est?... Donc, je vais continuer d'une façon très
sommaire et je voudrais terminer là-dessus.
Mme le Vice-Président: Allez donc!
M. Russell: Je sais que le député de Beauharnois
aimerait parler. Je sais que vous allez être aussi gentille avec lui que
vous l'avez été avec moi. Vous allez lui donner la chance de se
lever, de prendre la parole et d'exposer à la face de la province, en
examinant chacun des articles, ou les passages, comme l'a fait le ministre ce
matin à vol d'oiseau... Je ne l'accuse pas de faire partie de ce
volier-là. En passant, à vol d'oiseau, c'est expliquer à
ses commettants que c'est une bonne loi et que, si on l'applique telle qu'elle
est là, quelles en seront les conséquences. À ce
moment-là, on verra quels sont les propos qui sont ridicules à la
face des électeurs.
Je dis au ministre ceci, et je lui demande, cet après-midi, au
moins de donner à la députation de lOpposition la
réglementation qui va être comprise avec cette loi, afin qu'on
puisse l'étudier en comité article par article, avec les
règlements, afin de s'assurer pour être confortables
que l'économie de la province ne sera pas chambardée comme la loi
le prévoit actuellement. Je fais ces remarques au ministre et
j'espère qu'il se pliera au moins à ces remarques. Je suis
convaincu qu'il est de bonne foi; je ne l'accuse pas de mauvaise foi. Je sais
qu'il veut travailler pour le bien, mais des fois on pousse le bien trop loin
et cela finit par faire du mal. C'est ce que je demande au ministre cet
après-midi, de faire en sorte que la population du Québec soit
fière de cette loi plutôt que d'accepter une loi qui peut faire
mal aux municipalités, aux contribuables et qui dans le domaine
industriel, n'est pas acceptable.
M. Léger: Est-ce que je peux poser une question au
député?
Mme le Vice-Président: M. le député de
Brome-Missisquoi, est-ce que vous permettez la question?
M. Léger: Étant donné que le
député de Saint-Hyacinthe qui est habituellement le porte-parole
en cette matière, semblait, d'après son discours et
d'après ce qu'il a affirmé en commission parlementaire il y a
deux mois, devoir voter pour le principe, est-ce que je peux demander au
député qui semble, lui, se diriger vers une décision
contraire, s'il votera pour ou contre, d'après le contenu de son
discours?
M. Russell: Pour répondre au ministre, on a
étudié la loi et j'ai fait part au ministre qu'à moins d
avoir les règlements, les amendements, ce serait très difficile
pour celui qui parle... Parce que je parle en mon nom personnel et non pas au
nom du député de Saint-Hyacinthe, qui est assez grand pour parler
pour lui-même. Mais ce matin j'ai écouté son discours, je
l'ai suivi. Il n'a pas été aussi clair que je peux l'avoir
été. Il a parlé d'éducation, non pas de prison.
J'ai alors pensé qu'il n'était pas trop satisfait de la loi telle
qu'elle était, pas plus que le député de Brome-Missisquoi.
Ce que l'on veut, ce sont les règlements, les amendements. Si on pouvait
les avoir pour les examiner, on aimerait voter pour la loi.
M. Goulet: ... Mme le Président...
M. Léger: ... vous avez passé des centaines de lois
et les règlements venaient toujours après...
Mme le Vice-Président: M. le ministre. À l'ordre,
s'il vous plaît! M. le député de Bellechasse. S'il vous
plaît! M. le ministre, vous pourrez disposer d'un droit de
réplique, comme vous le savez. M. le député de Champlain
et ensuite M. le député de Pointe-Claire. J'ai d'abord une
question de règlement de la part du leader du gouvernement. M. le
leader.
M. Bertrand: C'est simplement une demande de directive que je
vous adresse, Mme la Présidente. Le député de
Brome-Missisquoi, pour qui j'ai énormément d'estime, parce qu'il
représente un beau et grand comté... (16 h 50)
Une voix: C'est un ancien bleu.
M. Bertrand: C'est un ancien bleu aussi.
Une voix: Non, vous, vous êtes un ancien bleu.
M. Bertrand: ... vient de dire qu'il a parlé en son nom
personnel et que, personnellement, il voterait contre la loi s'il n'a pas les
règlements, etc. À ce moment-là, on lui a reconnu,
d'après nos règlements de l'Assemblée nationale, un droit
de parole dépassant les 20 minutes traditionnelles accordées au
député parce qu'il parlait au nom de son parti. Alors, je
voudrais, Mme la Présidente, vous adresser une demande de directive et
savoir si, dans un contexte comme celui-là, le député de
Brome-Missisquoi qui dit parler en son nom personnel était dans l'ordre
en parlant plus de 20 minutes ou dois-je comprendre que, parlant au nom du
parti, sa position personnelle est devenue celle de l'ensemble du parti?
M. Russell: Mme la Présidente, j'ai au moins une
consolation. Le député de Vanier a compris! Je lui dis simplement
que je n'ai pas de reproche à lui faire. Pour une fois, il y en a un qui
a compris quelque chose.
Mme le Vice-Président: Vous parliez comme
représentant du parti.
M. le député de Champlain.
M. Marcel Gagnon
M. Gagnon: Mme le Président, je vous remercie infiniment
de me donner la parole sur ce projet de loi que je trouve extrêmement
important pour l'ensemble des Québécois. Au tout début,
j'aimerais peut-être adresser quelques reproches, du moins quelques
informations, au député de Brome-Missisquoi. Cela fait maintenant
deux ans que je siège à cette Assemblée nationale et
j'espère encore entendre, à un moment donné, le
député de Brome-Missisquoi se dire d'accord avec quelque chose,
au moins en principe. Si vous l'avez remarqué, à chaque projet de
loi qu'on présente, souvent il va dire qu'il est d'accord en principe,
mais que c'est trop grave, que c'est trop peu, que ce n'est pas assez. Il y a
toujours quelque chose qui accroche et qui l'empêche finalement d'avoir
un discours positif.
Ce qui est encore plus grave, c'est qu'il semble semer la confusion tout
le temps! On l'a entendu dire, encore aujourd'hui: On n'a pas les moyens, on va
mettre les compagnies en faillite, toutes sortes de discours pour semer la
confusion et la crainte chez les gens. Je pense que, lorsqu'on fait face
à un problème aussi grave et important pour l'avenir des
Québécois que la loi sur la protection de l'environnement, on
devrait devenir assez sérieux, même dans l'Opposition, pour
admettre, comme l'a fait le porte-parole du Parti libéral, qu'il y a
quelque chose à faire, qu'on doit agir, même si parfois à
l'intérieur de la loi tout n'est pas parfait. On doit agir, c'est urgent
et c'est pour le bien des Québécois.
C'est assez malheureux parce que j'ai eu l'occasion de l'entendre parler
sur les problèmes de l'agriculture et cela a été la
même chose. À un moment donné, on aura l'occasion de
revenir, lors de la deuxième lecture d'un projet de loi qu'on discutera
prochainement, je l'espère, sur le problème de l'agriculture
où encore, à un moment donné, le député de
Brome-Missisquoi a lancé des faussetés. Compte tenu du fait que
l'information qu'on donne maintenant ici à l'Assemblée nationale
entre dans tous les domiciles québécois, je pense qu'il faudrait
se surveiller de ce côté-là et arrêter de dire des
faussetés.
Je peux vous dire que le député de Saint-Hyacinthe, en
commission parlementaire, avait très bien compris, à mon point de
vue, suivant ses réactions et les questions qu'il a posées,
l'importance de ce projet de loi et il se disait d'accord avec le principe de
ce projet de loi. Il est bien évident que, lorsqu'on présente des
projets de loi pour protéger quelque chose, cela veut dire qu'on ne le
protégeait pas avant. Évidemment, il y a des balises,
évidemment il y a des règlements. Ces règlements viennent
déranger quelques personnes, viennent déranger des gens. En
effet, si on n'avait pas besoin de protéger quelque chose, si on n'avait
pas besoin de protéger l'environnement, il n'y aurait jamais eu de
projet de loi à étudier devant l'Assemblée nationale; on
l'aurait fait tout naturellement.
Ce dont je suis heureux, c'est que notre gouvernement, surtout au cours
de cette session qu'on a appelée la session de la protection, est en
train de protéger le territoire agricole, en train de protéger le
consommateur et tente d améliorer la protection de l'environnement. On
peut vous dire que, tout simplement, on protège le peuple
québécois. Je pense que le peuple du Québec se sent
réellement, depuis deux ans, au pouvoir, parce que ces demandes de
protection, ces lois que le peuple demande depuis longtemps auraient dû
exister depuis longtemps. Cela prenait nous autres pour le faire!
C'est incroyable l'aberration qu'on a pu voir dans le passé.
Là-dessus, je suis d'accord avec le député du Parti
libéral quand il a mentionné qu'on ne peut tout de même pas
tout reprendre les erreurs qui ont été faites. C'est vrai que
lorsqu'on agit, lorsqu'on travaille, lorsqu'on construit des autoroutes, il est
fort probable qu'il y a des erreurs qui se glissent. Je pense que le projet de
loi ne vient pas condamner ce qui a été fait, il vient tout
simplement orienter l'avenir à la réflexion, si vous voulez, des
choses qu'on a faites dans le passé, et là on se rend compte que
ce sont des choses dans lesquelles se sont glissées des erreurs
graves.
Le député de Charlevoix a mentionné que l'autoroute
qui a été construite sur les battures de Beauport sert à
tout le monde. C'est bien évident qu'on ne passera pas à
côté, même si, aujourd'hui, on admet, au sujet de cette
autoroute, qu'il s'est probablement glissé des erreurs. Il ne s'agit pas
de condamner les gens qui l'ont faite, il s'agit de s'orienter dans l'avenir
pour qu'avant qu'on vote pour un projet semblable, on puisse consulter les
citoyens, que les citoyens exercent ce droit de se faire entendre, que ces
citoyens puissent apporter des modifications, bonifier les projets, faire en
sorte que ces projets, tout en rendant service à I'ensemble des
Québécois, tout en rendant service à l'industrie
québécoise, ne viennent pas nuire aux principes fondamentaux de
protection de l'environnement.
Je me souviens, lorsque j'étais sur la route, j'avais vu une
chose qui me paraissait tout de même assez anormale. On avait construit
une école dans une paroisse de mon comté. Pour faire la
construction de cette école, on s'était empressé de faire
venir des béliers mécaniques, des bulldozers, comme on les
appelle normalement, et on a rasé tout ce qu'il y avait sur le terrain.
On a coupé des beaux arbres vieux de 60, 75 ou 100 ans. On a tout
rasé. On a construit une belle école extrêmement moderne et
on a pris la précaution de l'entourer d'asphalte. Une fois que tout ceci
a été fait, on a creusé un trou dans l'asphalte, on a
été chercher de la terre, de la bonne terre, du bon sol arable,
en plein milieu de l'asphalte. On a fait venir le maire et le
député et on a planté un arbre. Vous voyez ce ridicule de
penser qu'on doit absolument détruire pour construire. J'ai l'impression
que la loi que nous étudions actuellement est justement une loi qui
vient nous faire penser, avant de faire un projet, qu'il y a peut-être
possibilité de construire. Il y a sûrement possibilité de
relancer l'industrie, sans nécessairement se sentir obligé de
détruire en même temps.
C'est vrai qu'on a fait des erreurs dans le
passé, c'est vrai qu'il ne faut pas nécessairement, comme
le disait le député de Charlevoix, blâmer les gens qui ont
agi dans le passé pour ces erreurs. On a probablement travaillé
avec la technologie du temps. Mais, à la suite de ces erreurs, et comme
on a la chance aujourd'hui que la technologie soit plus avancée, on
connaît plus l'impact des erreurs du côté de
l'environnement. On a le devoir de faire en sorte que, tout en continuant de
travailler, tout en continuant de créer des emplois, tout en
étant de plus en plus moderne et c'est peut-être être
moderne que de revenir un peu à la nature et de penser un peu à
l'environnement on peut penser à l'ensemble des citoyens qui
auront à vivre autour d'une industrie, d'une autoroute ou d'une
école et ainsi de suite, qui pourront, tout en profitant des avantages
de ce modernisme, aussi profiter des avantages de la vie au grand air et des
services de l'environnement. Au moins, avoir l'avantage de respirer l'air le
plus pur possible et être capable de jouir des beautés que nous
avons au Québec, dans la mesure du possible. Il y a possibilité,
vous savez, de faire avancer la technologie pour régler les
problèmes de l'environnement, sans détruire l'industrie.
Je vais vous donner comme exemple, l'industrie des pâtes et
papiers. Vous savez jusqu'à quel point la Mauricie est polluée,
et en bonne partie, par l'industrie des pâtes et papiers. Vous avez
entendu parler de notre plan de relance des pâtes et papiers. On a
toujours pensé que pour produire du papier à un prix avantageux,
il ne fallait surtout pas surveiller l'environnement, autrement, cela
coûterait trop cher. Mais dans notre plan de relance de l'industrie des
pâtes et papiers, tout en sauvegardant, en conservant les emplois qu'il y
a dans cette industrie et en en créant d'autres, on réglera en
même temps le problème de l'environnement, du moins, en
très grosse partie. (17 heures)
Les industriels dans le domaine des pâtes et papiers sont d'accord
maintenant pour dire que lorsqu'on installe une machine moderne qui
protège l'environnement le plus possible, en même temps on
améliore la rentabilité de l'usine. C'est une façon
moderne de sauvegarder notre environnement. Je vois que la loi que nous avons
devant nous est tout simplement une loi pour obliger ou pour inciter fortement
les Québécois à penser que, tout en s'améliorant,
il faut absolument, si on ne veut pas être la dernière
génération qui foule ce globe, penser à se
protéger, à se moderniser sans se détruire.
J'ai vu des cas. On entend parler du domaine agricole. On a parlé
beaucoup de l'agriculture face aux problèmes de l'environnement. Je peux
vous dire que maintenant et depuis longtemps, dans le domaine agricole,
à l'intérieur de l'Union des producteurs agricoles, vous avez un
comité qui travaille. Ce sont des industriels, ce sont des gens de la
petite et moyenne entreprise, ce sont des gens qui créent de l'emploi et
qui vont aussi conserver leurs industries. Il y a maintenant un comité
qui travaille et un deuxième s'est installé en Mauricie; je peux
vous dire que j'en fais aussi partie. Dans ce deuxième comité,
avec le comité central, on est en train de trouver une façon de
régler les problèmes de l'environnement qui ne créera pas
de préjudice, qui ne causera pas de problèmes à la
rentabilité de l'industrie, mais qui pourrait peut-être devenir
une industrie de l'environnement.
De la part de l'Opposition, face à un problème aussi
sérieux... L'environnement est un problème sérieux et pas
seulement au Québec; il est peut-être temps d'arrêter de
dire: On agira quand les autres auront commencé à agir. Il faut
que les six millions de Québécois, chaque industriel, chaque
municipalité, tout le monde se sentent responsables de la pollution, se
sentent obligatoirement responsables de régler ce problème. Si je
me dis: C'est le voisin qui doit commencer, le jour où il aura
réglé son problème, je réglerai le mien, je peux
penser que le voisin pense exactement la même chose que moi.
Quand le député de Brome-Missisquoi mentionnait
tantôt que ce n'est pas à nous autres de commencer, ce n'est pas
à l'industrie de commencer, ce n'est pas à l'agriculture, c'est
à qui de commencer à protéger l'environnement? C'est
à tout le monde. C'est aux six millions de Québécois.
C'est dans ce sens-là que le ministre a dit que les six millions doivent
devenir des inspecteurs. Évidemment, commencer par se regarder
soi-même; deuxièmement, aider à l'environnement de ceux qui
nous entourent.
En tout cas, c'est cet appel que je fais parce que je crois que c'est
une loi extrêmement positive. Je me plais beaucoup à travailler
avec le ministre délégué à l'Environnement parce
que c'est un homme qui est positif. On a toujours entendu parler
d'environnement en termes négatifs, en termes de barrer des choses. Nous
autres, on parle d'environnement en termes constructifs. On veut
réellement continuer, construire le Québec, mais le construire de
façon logique, pas le construire en se détruisant. Merci.
M. Brassard: Mme le Président...
Mme le Vice-Président: M. le député de
Pointe-Claire d'abord.
M. Brassard: Ah bon!
M. William Frederic Shaw
M. Shaw: Merci, Mme le Président. I would like to take a
few minutes to participate in the debate on this Bill 69 which essentially has,
as its basis, the wish of most Quebecers and most Canadians. That is the
protection of our environment, the establishment of parameters which will
continue to protect it in the future. I also recognize the need of the
government to act in this area to ensure that some of the mistakes that we have
made in the past are not continued in the future, so that the Canada that we
leave for our children will be one which has a more hospitable environment than
the one which we are presently leaving them now. We know, of course, of our
waterways which are polluted with mercury and other pollutants, we know
of our air, we know of various other problems that our children will be
confronted with if action is not taken as soon as possible to reverse what has
happened before.
But, Madam President, I had to respect very highly my colleague, the
member for Brome-Missisquoi, in his appreciation of this law. I can also
respect the member for D'Arcy McGee for not wanting to take any credit for it,
because the purpose, the understanding and the principle of this law is to
protect the environment and to create the agencies which will make this
protection effective.
Obviously, there are things in this law, sections of this law which
would be far more effective if we had cooperation of the federal level of
government in its formation. For example, when we speak of the regulations
concerning automobiles, there is presently regulations concerning automobiles
which have been established by the federal government which obviously is in a
better position to establish parameters as vehicles move from province to
province and indeed out of this country. We also need cooperation with the
federal level of government because of the fact that waterways are their area
of jurisdiction and of course cross the frontiers of the provinces and
therefore require an interprovincial and Canadian type attitude. But most of
all, because of the fact that pollution in its present state is one of the most
expensive tasks that we, as a nation, will have to face in the coming
decade.
I heard yesterday the member for Frontenac spend almost 20 minutes
decrying the duplication of efforts that we have in the area of family
allowances, and yet, we see here tremendous areas of duplication in the
application of the requirements of pollution control. For example, we have the
study committees that are going to do studies as to the impact of certain
industries locating in certain places. For example, if we have an industry that
decides to locate on the Ottawa river, on the Ontario side, its impact is just
as important to those of us who live on this side of the river as it is to
those on the western side. So, Madam President, I would like to see some
evidence, in this law, of cooperation with the other provinces and with the
federal government in establishing a national policy on pollution which could
be far more effective than regional policies.
And third, another error, Madam President, is of course the costs, the
costs of effectively making the change. And these are long term costs involving
for example major changes in water purification systems and sewage treatment
which municipalities, and for that matter, individual areas of towns have
absolutely no means of meeting within their capacity to pay the taxes. The
federal government, if there is a level of government that is in the best
position to begin a program of improving the quality of our environment, I
think, is in the best position in the fiscal sense to make the moves necessary
to effect a better environment for our children in the future.
There is one more aspect of this law that bothers me as well, Madam
President. It is a principle. I saw yesterday in bill 118 a fundamental
principle removed, that is the right of the individual to sustenance from the
state, from the province. And here, we have a new principle. Every person has a
right to a proper quality of the environment and to the protection of the
living species inhabiting it to the extent provided for by this act and the
regulations". (17 h 10)
That is fundamental principle. And there is the principle that every
Quebecer has the right to seek an injunction of the Superior Court and that
this injunction must be acted apart because in section 19e, it is said very
clearly: "Every motion made pursued to this division must be served on the
Attorney-General." In other words, we are giving an incredible amount of power
without restriction, Madam President, to the individual which is not seen in
any other area of our Legislation. We have, as the basis of our law, Madam
President, the British Common Law, which allows any individual who can show
just cause... There is no requirement in this to show just cause.
Any individual who can show just cause under our present legislation has
the right to take action against his neighbours. There is a gigantic
difference, a gigantic difference which make me very weary of that section of
the law. Why is it necessary? Why, when the system of British Common Law is
available in this province, where an individual prior to the passage of this
law who has just cause to complain about his neighbour because a pollution or
an invasion on his ecological right, if you wish, can presently be served and,
if demonstrated, acted upon by the Court? It concerns me, Madam President,
because of an attitude which reverses the British system of justice, and that
is that the person who is accused is presumed innocent until proven guilty and
is also not required to make proof. It is his accuser that is required to make
proof.
And we see here that in this case we can have an individual laying a
complaint which must be served by the Attorney-General and the cost of the
investigation can be held by that person who is being complained against.
Fundamentally, Madam President, I cannot conceive it as being a value in this
law, but perhaps it is part of the new thinking of our new Government, an
attitude that says: We must always use the big stick. We cannot use the
fundamental systems which have been there and are functioning. You can check
right now, Madam President, of the number of cases which are presently being
taken against polluters by individuals under our present system of law. This
access is available but proof must be made and, if proof is not made, then the
individual who is accused has not any consequences except, of course, his need
to be present during the time of his charge.
So, Madam President, again, I see the government acting with a hammer to
kill a fly, with a very noble goal, and that is the goal of achieving a better
ecological environment for our children,
to improve the quality of our air and our water, to remove our recusants
and to move other examples of pollution in our society. But we are doing it in
such way that we are lending too much power to a small group of people who have
too much power to exercise that power. And it always bothers me as every new
piece of legislation is introduced how the number of "enquêteurs"
increases. We have the "enquêteur" de l'Office de la langue
française, we have "l'enquêteur" coming out very shortly with the
immigration law and we have "enquêteurs" now with this new environment
protection law and we have the "enquêteurs" very shortly with "la
protection agricole".
We are surely going to be looking an "enquêteur" concerning
marketing boards. "Enquêteurs", Madam President, what kind of society are
we developing? The "enquêteurs" were never necessary before. Sure, there
are some abuses. Is it the way that the Parti québécois envisages
creating employment? We are going to have so many people as "enquêteurs",
shortly. Madam President, that we will be "enquêteuring" each other.
No, Madam President, I cannot see how a bill which has such genuine
substance and value can be so compromised by misrepresenting the way it should
be applied. Most certainly, fundamentally the law is of value, but the
methodology that is being used in this law is contrary to the fundamental
rights of the individual, contrary to the interests of all Quebecers and will,
in no way, in my opinion, Madam President, improve the quality of our
environment.
I cannot see how I can support a law that has given such a big stick to
achieve such a small amount of gain, when, with certain modifications, in
principle, in the method of its application, it could be of value to all
Quebecers. Thank you. Madam President.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Mme la Présidente, depuis quelques
années, l'opinion publique québécoise est de plus en plus
sensibilisée aux problèmes de l'environnement. Ce n'est
d'ailleurs pas un phénomène exclusivement
québécois, il est, je pense, mondial ou, en tout cas, on le
retrouve dans tous les pays développés.
Nous assistons donc à une prise de conscience de la population
qui va s'élargissant et s'appro-fondissant, prise de conscience
concernant les menaces qui pèsent sur notre environnement et les
dégradations graves de notre milieu de vie. Cette prise de conscience et
ce réveil se traduisent concrètement par des campagnes de
sensibilisation, par des campagnes de lutte contre 1a pollution. Cela se
manifeste également par la création de groupements,
d'associations de citoyens qui sont voués à la protection de
l'environnement. Il y a là ce qu'on pourrait appeler une
révolution au niveau des mentalités. Il y a dix ou quinze ans,
peu de personnes se préoccupaient des conséquences
néfastes, des répercussions néfastes de la
réalisation d'un projet industriel ou d'un projet de construction sur
l'environnement. On considérait d'abord les effets économiques
qui découlaient, par exemple, de la construction d'une usine, mais on ne
se souciait pas ou on se souciait peu des répercussions de cette
construction sur l'environnement. Aujourd'hui, les mentalités ont
évolué, les choses ont changé, ce qui ne signifie pas
qu'on néglige carrément les retombées économiques,
les effets économiques d'un projet ou d'une construction d'usine ou d'un
projet industriel, mais on tient compte aussi de l'influence, de l'impact d'un
projet sur la qualité du milieu, la qualité de
l'environnement.
Pensons, par exemple, aux réactions face au projet de la
Jacques-Cartier, il y a quelques années, ou face au projet de la baie
James. Je pourrais donner comme exemple également ce qui s'est
passé dans notre région, il n'y a pas si longtemps. La population
était heureuse, satisfaite de voir s'implanter dans la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean de grands projets industriels comme l'implantation
d'une usine de pâtes à Saint-Félicien par Donohue, ou la
construction d'une aluminerie à La Baie. (17 h 20)
Elle était satisfaite, elle était heureuse de la
réalisation de ces grands projets industriels, parce que chez nous le
taux de chômage est élevé et que les effets
économiques de tels projets étaient bénéfiques pour
l'économie de la région. Mais la population ne s'est pas
uniquement intéressée aux retombées économiques de
ces projets industriels. Elle s'est également préoccupée
de l'impact de ces constructions, de ces projets sur l'environnement, sur le
milieu. Ce n'aurait sans doute pas été le cas il y a dix ou
quinze ans. Il y a donc une prise de conscience, un changement de
mentalité assez radical chez la population en matière de
protection de l'environnement. Le projet de loi 69 qu'on étudie
présentement vient, en quelque sorte, confirmer, reconnaître cette
évolution de l'opinion publique québécoise. C'est
là, je pense, un trait essentiel de ce projet de loi. La loi
actuellement en vigueur et qu'on amende par ce projet de loi 69 faisait, il
faut en convenir, peu de place à la participation du public aux
décisions concernant la protection de l'environnement.
Bien sûr, cette loi actuellement en vigueur et qu'on veut modifier
prévoyait un Conseil consultatif de l'environnement qui joue un
rôle de conseiller du ministre, qui donne des avis au ministre sur des
questions d'environnement. Mais c'était, il faut en convenir, fort
limité comme forme de participation des citoyens à la protection
de l'environnement. C'était normal, je pense, il fallait à ce
moment-là faire un pas dans ce domaine et, à cette époque,
la volonté de participation des citoyens n'était peut-être
pas assez forte ou assez vigoureuse pour être reconnue dans la loi. Ce
n'est plus le cas maintenant. Cette volonté de
participation existe, elle s'exprime à travers un nombre
important de groupes de citoyens ou d'associations vouées à la
protection de l'environnement.
Le projet de loi 69, donc, reconnaît cette volonté de
participation et lui permet de s'exercer concrètement. À ce
sujet, la création d'un bureau d'audiences publiques sur l'environnement
est d'une importance, à mon sens, capitale. Il ne suffit pas de
proclamer que les citoyens doivent faire entendre leur voix, il ne suffit pas
d'affirmer que les citoyens doivent être appelés à discuter
des problèmes de l'environnement. Encore faut-il qu'on mette en place
des mécanismes qui rendent possible cette prise de la parole par les
citoyens. Encore faut-il qu'on prévoie un processus de participation. Ce
mécanisme, c'est le bureau d'audiences publiques. Ce processus, c'est
l'audience publique. Les avantages de cette participation du public sont
nombreux, M. le Président. Le Conseil consultatif de l'environnement,
dans son rapport 1976-1977, énumère plusieurs des avantages de la
participation.
J'en retiens deux qui m'apparaissent importants. Le Conseil consultatif
de l'environnement dit: Les citoyens qui participent à un processus de
planification peuvent être à l'origine de plusieurs idées
créatrices qui auront échappé aux responsables du projet,
trop souvent préoccupés par des orientations conventionnelles et
administratives.
De l'information additionnelle et même des idées nouvelles
peuvent alors être très utiles aux promoteurs, surtout quand les
valeurs impliquées ne peuvent pas facilement être quantifiables.
C'est là un avantage, je pense, qu'il nous faut considérer. La
participation peut susciter, générer des idées
créatrices, des idées nouvelles, selon le Conseil consultatif de
l'environnement et je suis d'accord avec lui qui peuvent
contribuer à améliorer un projet.
Autre avantage cité par le Conseil consultatif de
l'environnement: la discussion des problèmes dans une procédure
ouverte peut créer une atmosphère de compréhension
mutuelle parmi les groupes en présence et contribuer à la
solution de conflits. C'est là, je pense, un avantage important qu'il
faut souligner. La participation des citoyens aux questions d'environnement
peut avoir pour effet de substituer un climat de compréhension, un
climat de coopération à un climat d'affrontement ou à un
climat de guerre ouverte.
On pourrait donner d'autres avantages. Le conseil consultatif en
énumère six, mais je pense que ces deux-là suffisent pour
justifier l'introduction, dans ce projet de loi, de ce principe fondamental de
l'audience publique sur des questions d'environnement.
Il y a un autre élément, M. le Président, que je
voudrais relever et qui m'apparaît un progrès considérable,
c'est le processus prévu dans le projet de loi pour l'évaluation
des impacts de certains grands projets sur l'environnement. Désormais,
pour les grands projets industriels, pour les grands projets de construction,
pour les grands projets hydroélectriques aussi, il faudra
procéder à une étude d'impact sur l'environnement.
Ensuite, il faudra entreprendre une consultation publique, s'il y a demande,
consultation qui sera tenue par le bureau d'audiences publiques. Enfin, le
gouvernement et non pas seulement le directeur des Services de
protection de l'environnement émettra un certificat
d'autorisation pour la réalisation du projet. Certains
prétendront qu'une telle procédure ralentira la prise de
décision et la compliquera. Or, je pense qu'au contraire un tel
mécanisme et je ne suis pas seul à le penser, le Conseil
consultatif de l'environnement le pense aussi ou que la participation...
et je cite à nouveau le texte du Conseil consultatif de l'environnement:
"La participation permet de découvrir si une étude d'impact sur
l'environnement est bien réalisée et s'il n'y a pas de
conséquences imprévues à l'implantation d'un projet et, de
ce fait, elle évite des dépenses futures pour des corrections
sociales ou environnementales. Une décision prise lentement, en pleine
connaissance de cause, peut donc se révéler économique
à long terme".
Je voudrais, à partir de cette citation, vous citer un exemple
bien concret qui s'est produit dans ma région, le
Saguenay-Lac-Saint-Jean. C'est le cas de l'implantation d'une usine de
pâtes à Saint-Félicien par la compagnie Donohue. On s'est
rendu compte, mais trop tard, que le site choisi et autorisé allait
faire en sorte que les eaux usées de l'usine allaient être
déversées dans la rivière Chamouchouane, mettant ainsi en
danger une ressource faunique importante chez nous, la oua-naniche, dont les
principales frayères se trouvaient précisément dans cette
rivière. Une étude poussée de bilogistes en arrivait
à la conclusion que la survie même de cette espèce
était menacée par le rejet des eaux usées de l'usine
Donohue à Saint-Félicien. Le gouvernement a donc dû
détourner ces eaux, grâce à un tuyau ce qui a
coûté $8 millions à l'État vers un autre
point de déversement. Je suis convaincu que si, à ce
moment-là, nous avions suivi une procédure comme celle qui est
prévue dans le projet de loi 69, étude d'impact, audiences
publiques, autorisations du Conseil des ministres, nous aurions
déterminé, choisi, fort probablement, un autre site pour ce
projet, ce qui aurait évité des dépenses
supplémentaires à l'État. Ce n'est donc pas vrai
et c'est là un exemple bien concret de dire que la
participation ne peut qu'entraîner des dépenses
supplémentaires ou des retards dans la réalisation d'un projet.
Cette procédure prévoyant étude d'impact et audiences
publiques constitue un élément majeur de ce projet de loi et un
projet indiscutable en matière de protection de l'environnement. (17 h
30)
C'est, d'ailleurs, l'opinion de l'auteur de l'étude qui
s'intitule: "Urbanisation et environnement", étude qui avait
été commandée par le groupe de travail qui a produit un
rapport sur l'urbanisation. L'auteur est M. Gourdeau qui écrit ceci: "Le
rap-
port d'impact à l'analyse se révèle le seul
instrument qui ait permis en Amérique du Nord que se cristallisent dans
la cohérence des démarches démocratiques et sociales
axées sur la protection de l'environnement et la qualité de vie
urbaine. La formule implique forcément des délais, mais comment,
en son absence, pourrait-on espérer non seulement prendre des
décisions bien éclairées, mais aussi s'assurer de la
coopération d'une population qui n'aurait pas pu exprimer son opinion en
pleine connaissance de cause?" Il conclut en disant: "II faut donc
considérer le rapport d'impact comme un outil positif, l'exiger dans les
plus brefs délais et prévoir les mécanismes qui lui
permettront de jouer son rôle."
M. le Président, cela sera bientôt chose faite. Cet outil
positif, la loi exigera qu'on l'utilise dorénavant. Édouard
Herriot, homme d'État français, disait qu'on ne pouvait
consolider la démocratie qu'en la maintenant sans cesse en mouvement,
c'est-à-dire en la développant. Or, le projet de loi 69, en
rendant possible une participation active des citoyens aux grandes
décisions concernant l'environnement, constitue sans nul doute une
consolidation et un approfondissement de la démocratie au
Québec.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président: M. le député de Mercier.
M. Gérald Godin
M. Godin: Merci, M. le Président. J'aborderai deux aspects
de cette question et de cette loi 69. Premièrement, seul l'État
peut jouer le rôle de bon père de famille en ce qui concerne
l'écologie, c'est-à-dire tous les aspects de la vie. Par exemple,
il ne faut pas demander à une usine de pâtes et papiers de se
préoccuper des pêcheurs d'anguilles dans le Bas-Saint-Laurent.
Seul l'État peut mettre côte à côte les
données relatives aux pêches d'anguilles et les données
relatives à la pollution qui peut venir d'une usine en amont de la
rivière. C'est la raison pour laquelle le gouvernement qui nous a
précédés avait timidement décidé de jouer
son rôle de père de famille dans ce chantier, car il s'agit d'un
chantier, le chantier de la vie elle-même, mais avec une certaine
timidité, comme je l'ai dit. Nous allons plus loin, parce que nous
sommes pourrais-je le dire plus soucieux d'écologie que
nos prédécesseurs.
Je m'étonne que l'ex-ministre des Transports n'ait pas
mentionné un des aspects positifs d'une voie rapide; c'est qu'il se fait
moins de pollution sur une voie rapide que sur une voie lente. Je pense qu'en
bon écologiste qu'il est apparu, du moins, en ce qui concerne les
outardes les oies et les bernaches, il aurait pu souligner qu'une des
retombées positives d'une voie rapide, c'est que, les voitures roulant
plus rapidement, elles sont moins longtemps immobilisées et, par
conséquent, polluent moins l'atmosphère. L'autre
responsabilité de l'État québécois est
internationale, en ce sens que le fleuve Saint-
Laurent, qui prend sa source dans les Grands Lacs dont une partie est
déjà morte, est également un des principaux lieux de
reproduction de certaines espèces de poissons. Il y a peu de gens qui
savent, qui pensent et qui se soucient du fait que le Québec, avec sa
centaine de rivières à saumon, contribue à nourrir la
population du Groenland ainsi que des pays nordiques qui se nourrissent de
saumons qui viennent naître dans les rivières du Québec,
aussi bien que dans les États atlantiques du Canada.
Il fut un temps où le saumon remontait le fleuve Saint-Laurent
jusqu'à Montréal. Avec les années, à cause de la
pollution industrielle, municipale et autre, le saumon a lentement perdu une
partie du réseau, si vous voulez, hydrologique dans lequel il venait
naître et augmenter le cheptel si on peut l'appeler ainsi
qui va au large du Groenland, contribuer à nourrir des populations dont
on ne parle même pas la langue.
Vu du fond des mers par les saumons ou vu du haut des airs par les
oiseaux, il n'y a pas de pays, il n'y a pas de frontière, il n'y a pas
de débat linguistique, il n'y a pas de gouvernement. Il n'y a qu'un
village global comme disait McLuhan et si quelqu'un comme
disait l'écrivain latin Thucydide urine à la tête
d'une rivière...
Une voix: Qui?
M. Godin: Thucydide.
Une voix: C'est un écrivain latin.
M. Godin: L'écrivain grec disait...
M. Brassard: C'est un Grec.
M. Godin: ... que si...
M. Clair: Effectivement, c'est un Grec.
M. Godin: ... quelqu'un urine à la tête d'une
rivière, il risque d'influencer la vie des personnes qui vivent au bord
de l'océan, peut-être à des milliers de kilomètres
plus loin. On ignorait, à l'époque, par exemple, les effets du
DDT sur l'environnement et sur l'écologie, sur les oeufs pondus par des
oiseaux qui avaient mangé des papillons qui avaient été
arrosés au DDT. On ignorait que cela avait un effet direct sur les
populations humaines. On ignorait aussi, M. le Président, que la
pollution coûte énormément cher à une
société.
J'entendais tout à l'heure nos industriels de profession, dont je
déplore la courte vue comme le député de
Brome-Missisquoi faire état du coût des équipements
antipollution. Ils ne parlent pas, par ailleurs, du coût de la pollution.
Le député de Rouyn-Noranda vient d'une ville qui a
été littéralement envahie par Noranda Mines et qui a
déversé, comme un mauvais citoyen qui viendrait faire ses besoins
ici, ses déchets dans un lac qui était poissonneux, il y a trois
quarts de siècle. Aujourd'hui, ce lac est une poubelle de
couleur rouge dans laquelle rien de vivant ne peut exister. Les citoyens
qui, à l'époque, allaient pêcher dans ce lac, pratiquer les
loisirs sont maintenant obligés de faire des dizaines, des cinquantaines
et des centaines de milles pour trouver un lac non pollué, et ils le
font en voiture en polluant l'environnement. Alors que si les compatriotes et
les concitoyens du député avaient pensé un peu à
l'avenir, ils auraient pris des mesures, à l'époque, pour que la
compagnie minière ne se serve pas d'un lac ou d'une rivière comme
d'une poubelle. Seul l'État, au fond, peut s'assurer que les lacs,
rivières et fleuves d'un pays ne sont pas utilisés comme des
poubelles.
Ce qui me frappe positivement dans le projet de loi, c'est que nous
montrons que nous sommes conscients, en tant que gouvernement, de la
portée internationale, par conséquent de la portée dont je
dirais qu'elle tient de la solidarité humaine, car les saumons qui
viennent naître au Québec je le répète
nourrissent les gens du Groenland et de l'Islande. S'ils ne les pêchent
pas tous, ils vont revenir se reproduire ici, avec le résultat qu'il y a
maintenant un accord limitant la quantité de tonnes de saumons
pêchés dans ces mers froides ainsi que la quantité de
saumons pêchés au Québec, parce que le tout se tient, dans
cet univers.
Si les oies sauvages dont parlait le député de Charlevoix
tout à l'heure sont protégées, la vie des Inuit en est
influencée, car ils s'en nourrissent. Si, en Virginie, en Caroline du
Nord et du Sud, on empêche l'épandage du DDT, les oies sauvages
arrêteront ici, poursuivront leur route et la vie continuera. Il ne faut
pas, par ailleurs je suis d'accord avec certains aspects du discours du
député de Charlevoix tomber dans l'excès contraire
qui consisterait à empêcher tout mouvement, tout progrès,
mais il ne faut pas perdre de vue c'est ce que permettra une
étude d'impact sur l'environnement que dans tout projet
important, nous serons en mesure de prendre des décisions
éclairées, M. le Président. Combien a coûté
à l'État québécois l'arrêt de la pêche
aux anguilles pendant quelques années, dans le Richelieu et dans le
Bas-Saint-Laurent? Combien cela a-t-il coûté? Est-ce que cela
coûte moins cher d'intervenir sur la source de pollution que de payer de
l'aide sociale à des pêcheurs qui n'ont plus d'emplois parce que
le poisson est pollué et n'est pas propre à la consommation. (17
h 40)
Je dois dire que nous n'irons peut-être jamais assez loin dans la
sensibilisation des Québécois à ce problème et que
nous n'irons jamais assez loin dans l'intention d'inspecter toute
décision qui pourrait avoir un impact sur un aspect ou autre de la
chaîne alimentaire de l'humanité ainsi que de tout organisme
vivant, car tout se tient dans notre monde. Le Québec n'est pas un pays
à l'intérieur des terres, où cela aurait moins d'effet. Le
Québec est là où se trouve l'arrivée et la sortie
des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent dans le golfe. Nous sommes par
conséquent au coeur d'un bassin hydrologique qui englobe plusieurs pays
et plusieurs provinces. C'est la raison pour laquelle nous devons plus que
toute autre province au Canada et nous le sommes encore
être soucieux de cette question. Étant soucieux de cette question,
nous nous sommes déjà associés avec les États
voisins qui ont un mot à dire sur notre propre cours d'eau, le fleuve
Saint-Laurent, c'est-à-dire les États-Unis.
Le ministre faisait état tout à l'heure du Michigan. La
vie du Michigan a un effet sur les poissons du Saint-Laurent, par
conséquent sur la santé des Québécois. C'est pour
cela qu'il faut être conscients de cela. On ne reproche à personne
de ne pas en avoir été conscient plus tôt. Cela n'existait
pas, ces connaissances, cette préoccupation. Mais maintenant que ces
connaissances existent sur l'écologie, il serait criminel, M. le
Président, de ne pas être extrêmement exigeants quant
à tout projet qui risque d'avoir une influence quelconque sur je
le répète la solidarité humaine dans son ensemble,
dans tout le bassin atlantique dont nous sommes, en partie, un des gros
propriétaires à cause de l'importance du fleuve Saint-Laurent
comme aire de reproduction de certaines espèces essentielles à
l'alimentation de nos frères du Groenland et d'ailleurs, dont personne
n'a parlé ici et qui, pourtant, nous reprocheraient amèrement de
ne pas penser à eux aussi bien que les Américains devraient
penser à nous, aussi bien que nous pensons également à
eux, puisque nous sommes dans le trajet des oies blanches, des outardes et
autres sauvagines.
Donc je termine là-dessus nous avons une
responsabilité locale, M. le Président, mais également
et cet aspect n'avait pas été mentionné
internationale. C'est la raison pour laquelle je voterai pour cette loi.
Merci.
Des voix: Bravo!
Le Président suppléant (M. Laplante): M. le
ministre.
M. Marcel Léger
M. Léger: M. le Président, je voudrais, en donnant
la réplique, essayer de répondre à certaines
préoccupations de certains députés qui se sont
exprimés dans cette Chambre. Je pourrais quand même dire que le
projet de loi 69 donne nécessairement et c'est le principe de la
loi des droits aux citoyens, parce qu'auparavant les citoyens n'avaient
que des devoirs. Je pense que ce n'était pas juste. Auparavant, les
citoyens devaient se contenter d'accepter des situations puisque, d'une part,
si le gouvernement ne pouvait pas intervenir, ils devaient tout simplement
vivre les expériences qu'ils subissaient. Ce n'était pas juste,
parce qu'ils devaient dire ni plus ni moins merci à chaque fois qu'un
poisson mort de peur aboutissait dans leur assiette, à chaque fois qu'un
verre d'eau qu'on leur donnait ressemblait souvent plus à un verre de
mélasse. Ils devaient dire merci quand il fallait faire des dizaines de
milles pour trouver un brin d'herbe hospitalier.
Je pense, M. le Président, que maintenant, dans le
mécanisme de décision du développement du Québec,
aussi bien par l'entreprise privée que par les organismes
paragouvernementaux ou gouvernementaux, le citoyen a le droit et le devoir de
participer aux décisions, de façon que les mécanismes qui
sont en place permettent un développement en harmonie avec ses besoins.
Je pense que c'est une loi qui protège le citoyen et qu'aujourd'hui,
nous avons les moyens de l'aider à participer à ce processus de
décision. Pour répondre à certaines questions, j'ai
été un petit peu ahuri. D'abord, j'ai été
charmé par la connaissance et la compréhension du projet de loi
qu'ont manifestées le député de D'Arcy McGee et, en
général, le député de Saint-Hyacinthe.
Cependant, j'ai été complètement estomaqué
devant les demandes du député de Brome-Missisquoi ainsi que du
député de Rouyn-Noranda. De toute façon, il semble bien
que le député de Saint-Hyacinthe et le député de
Brome-Missisquoi ne s'étaient pas parlé puisque le
député de Brome-Missisquoi a réclamé le
dépôt des règlements concernant la loi que nous
présentons aujourd'hui, alors que son député de
Saint-Hyacinthe s'était engagé, à la commission
parlementaire sur la loi 30, de ne pas les exiger pour les autres lois, et
spécialement cette loi-ci, si on accordait le dépôt d'un
règlement pour la loi 30 sur les Indiens et les Inuit. Comment cela se
fait-il? Est-ce qu'on se parle dans l'Union Nationale ou si on ne se parle pas?
L'engagement qu'a pris le député de Saint-Hyacinthe était
formel: on ne demanderait pas, pour la loi 69, le dépôt des
règlements puisqu'on savait fort bien que pour la loi 69, on avait
accepté, par la bouche du député de Saint-Hyacinthe, de
voter en faveur du principe de la loi 69.
J'ai l'impression que le député de Brome-Missisquoi n'a
compris ni la loi, ni ce que le député de Saint-Hyacinthe, du
même parti, avait dit. J'irais plus loin que cela, M. le
Président. Je vais quand même essayer, même si j'ai
l'impression que le député de Brome-Missisquoi parlait un langage
de l'année 1867, de répondre à certaines
préoccupations qu'il a mises de l'avant. Pour lui, cela va permettre, la
loi 69, des chicanes entre voisins. Comme je l'ai répondu en commission
parlementaire au député de Saint-Hyacinthe, porte-parole habituel
de l'environnement pour la formation de l'Union Nationale, je lui dirai que
c'est impossible puisque la loi permet uniquement des poursuites en injonction
à un citoyen s'il a obtenu d'un juge de la Cour supérieure la
possibilité d'avoir une injonction. Donc, il est absolument impossible
d'avoir des chicanes de voisins parce que rien de ce qui est frivole ne sera
accepté par un juge. On avait mis cette balise.
Concernant les industries pour lesquelles le député de
Brome-Missisquoi craignait que des obligations d'études d'impact
d'audiences publiques ou de demandes de citoyens puissent empêcher les
industries de s'implanter, je vais répondre ce que j'ai
déjà dit au député de Saint-Hyacinthe qui,
semble-t-il, n'a pas expliqué cela au député de
Brome-Missisquoi, du même parti. C'est impossible puisque,
concernant l'implantation d'une industrie, l'étude d'impact ne sera
demandée que pour certains types d'industries que j'ai
énumérés déjà en commission parlementaire.
En plus de cela, le citoyen ne peut empêcher une industrie de
s'implanter, mais il peut s'exprimer pour demander, par suite des études
d'impact qui ont été faites sur les conséquences
environnementales de l'implantation d'une industrie, certains amendements que
le gouvernement peut accepter ou non.
Donc, cela veut dire que le citoyen ne peut pas empêcher
l'implantation d'une industrie. Que le député de Brome-Missisquoi
dise que cela va être onéreux qu'une industrie soit obligée
de demander un permis, entre vous et moi, je pense qu'on est rendu en 1978 et
qu'il est normal, pour toute l'entreprise qui peut nuire à
l'environnement, qu'il y ait certaines normes. Comme le disaient si bien le
député de Mercier et le député de Lac-Saint-Jean,
les coûts d'implantation d'équipement antipollution ne sont rien
comparativement aux coûts sociaux et les coûts économiques
de la dépollution.
M. le Président, saviez-vous qu'aux États-Unis, avec une
loi semblable à celle-ci, on a, peut-être à cause des
normes, perdu 30 000 emplois, mais on en a créé 200 000 à
cause des mesures et des équipements antipollution? On a augmenté
de 0,4% aux États-Unis les emplois à cause des mesures
antipollution. Essayer d'opposer chômage et mesures pour la protection de
l'environnement, c'est retourner au 19e siècle où, justement en
Angleterre, on affirmait qu'il fallait choisir entre l'industrie et le travail
des enfants de huit ans, douze heures par jour. On faisait choisir les gens,
à ce moment: Voulez-vous qu'on puisse ouvrir une mine pour donner du
travail? Il faut absolument que vous choisissiez entre pas de mine ou laisser
les enfants de huit ans travailler douze heures par jour. On était,
à ce moment, à ce niveau de préoccupations sociales au 19e
siècle. Et aujourd'hui, on vient mettre en opposition simplement le
problème de l'emploi avec le problème de l'environnement. Cela ne
s'oppose pas; cela se complète. (17 h 50)
Le député de Rouyn-Noranda a essayé de dire que,
dans le comté où il demeure, suite à nos visites, il y a
eu moins d'emplois. S'il y a eu une baisse d'emplois dans la région de
Rouyn-Noranda, c'est uniquement dû à la baisse du prix du cuivre
au niveau de l'exploration et de la découverte du cuivre. Il n'y a aucun
lien avec l'environnement. Il ne s'est pas perdu un seul emploi au
Québec à cause de l'environnement. Charrier dans cette direction,
M. le Président, je n'en reviens pas. J'ai entendu la déclaration
du député de Rouyn-Noranda qui a affirmé qu'il avait vu
une affiche sur l'autoroute où on disait que c'était fait par
l'Environnement. On avait mis des affiches pour déterminer qu'il n'y
aurait pas d'épandage de sel et il disait que c'était le ministre
de l'Environnement qui avait fait cela. M. le Président, il devrait
connaître plus que cela son dossier. Vous savez, quand on est devant
la
télévision, un député doit être quand
même responsable. Il n'est pas là actuellement pour qu'on lui
réplique à ce qu'il a dit, c'est malheureux, mais je suis
obligé quand même de corriger cela.
M. le Président, les mesures qui ont été
affichées sur les autoroutes sont faites par un service environnemental
du ministère des Transports. Cela n'a rien à faire avec le
ministère de l'Environnement. Quand il parle d'une baisse de production,
cette baisse de production est reliée à une baisse de la valeur
du cuivre sur le marché mondial. Il n'y a eu aucune perte d'emplois de
ce côté.
M. le Président, un peu plus loin, il semble oublier que non
seulement il n'y a aucun lien entre les pertes d'emplois, le chômage et
le problème de la protection de l'environnement, mais qu'au contraire
cela crée des emplois. Saviez-vous que, pour les mesures antipollution,
les équipements antipollution, pour chaque investissement de $28 000, on
crée un emploi? Dans la ville de Laval où on investit
actuellement pour les prochaines années $61 millions dont $40 millions
du Québec, cela va créer près de 2000 emplois.
Ils commencent donc à se rendre compte que, peut-être,
l'environnement peut créer des emplois. Il y a aussi la question
posée par le député de Saint-Hyacinthe au sujet de
l'éducation sur l'environnement. Il a parfaitement raison de s'en
préoccuper. C'est une préoccupation majeure qu'on a, au
ministère, puisque nous avons mis sur pied un module d'éducation
au niveau de l'environnement. Nous avons, de concert avec le ministre de
l'Éducation, préparé un système pour qu'aux niveaux
élémentaire, secondaire, des cégeps et même
universitaire, il y ait des programmes d'éducation sur l'environnement.
Nous avons aussi mis de l'avant un programme d'éducation pour les
adultes, et on vient justement de rédiger une brochure pour tous les
éducateurs du Québec au niveau de l'éducation sur
l'environnement. Les exemplaires seront distribués bientôt
à travers le Québec pour ceux qui s'occupent de
l'éducation en général, pour ce qui est de la dimension de
l'environnement.
Je tiens aussi à dire qu'il y aura, l'année prochaine, un
programme de publicité sur la défense du milieu de vie et de
l'environnement. Il est grand temps qu'on sache que la préoccupation
environnementale est une préoccupation dont on doit tenir compte. Je
sais que c'est complexe, que certaines personnes ont de la difficulté
à comprendre l'importance qu'il y a dans l'environnement, parce qu'on
n'a pas su retracer les interrelations qui existent entre les
éléments de l'environnement.
C'est vague peut-être pour certaines personnes, mais il faut quand
même admettre ceci. La notion que je voulais mettre de l'avant, dans le
discours d'ouverture en deuxième lecture sur le projet de loi 69,
était l'élément de cette notion d'équilibre qu'est
l'environnement. Notion d'équilibre qui fait qu'il y a une interrelation
qui va de l'eau, du sol à l'air, l'interrelation avec les
végétaux, avec les minéraux, avec les animaux, avec
l'homme, avec la société en général. C'est cette
interrelation, cet équilibre qui font que ce monde est un peu comme une
horloge délicate où le plus petit engrenage porte à un
point précis tout le destin de l'ensemble. Dérégler ce
système de protection de l'environnement, alors qu'il y a tellement
d'interrelations, est très grave. Il faudrait que chacun des
députés de cette Chambre se rende compte que nous avons,
aujourd'hui, une occasion unique de franchir un grand pas dans le domaine de
l'environnement. Le Québec a la chance de faire face aux défits
considérables que connaîtront nos sociétés
industrielles dans les prochaines années.
Donc, je fais appel à la sagesse de tous les
députés et tous les membres de cette Assemblée, pour doter
le Québec d'une loi vigoureuse qui va nous mettre à l'heure des
défis environnementaux de notre époque. Si nos enfants pouvaient
découvrir ce fameux lieu d'équilibre et d'harmonie dans
l'environnement, grâce à nous, chacun se sentant responsable de la
portion du territoire du Québec qu'il doit protéger, si nos
enfants, grâce à nous, pouvaient reconnaître les sentiers de
la solidarité, est-ce que ce ne serait pas formidable si on pouvait
apprendre qu'ils sont devenus, chacun de nos enfants, des gens responsables et
qu'on deviendrait très bientôt quelque chose comme un grand
peuple?
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président: Comme il est presque 18 heures, est-ce
que cette motion sera adoptée?
M. Bellemare: Sur division.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président: Adopté sur division.
M. Léger: Si elle est adoptée sur division, je vais
demander le vote enregistré pour demain.
Le Vice-Président: M. le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, je pense qu'on a compris que
l'Opposition officielle voulait voter pour le principe de ce projet de loi.
Le Vice-Président: Écoutez. S'il y a cinq
députés qui demandent le vote enregistré, que l'on appelle
les députés!
M. le leader parlementaire.
M. Bertrand: Me prévalant des dispositions de notre
règlement, je demanderais que le vote sur cet important projet de loi
présenté par le ministre de l'oxygène national soit
reporté à demain.
Le Vice-Président: D'accord. En vertu des dispositions de
l'article 106, à la demande du leader parlementaire du gouvernement et
utilisant
ma discrétion, j'accepte que le vote soit reporté à
demain, aux affaires courantes.
M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je proposerais qu'on
suspende nos travaux jusqu'à 20 heures. À ce moment-là
nous continuerons l'étude du projet de loi no 103 du ministre des
Affaires sociales.
Le Vice-Président: M. le leader parlementaire de l'Union
Nationale.
M. Bellemare: J'ai reçu un papier m'avisant qu'il y aurait
réunion des leaders, à 18 heures, je ne sais pas où.
M. Bertrand: Nous allons nous enquérir auprès du
leader parlementaire, le député de Saint-Jacques, et je vais
fournir l'information au député de Johnson.
Le Vice-Président: Je peux répondre. C'est au
bureau de M. le président de l'Assemblée nationale.
M. le député de Charlevoix:
M. Mailloux: Est-ce que le leader parlementaire adjoint pourrait
me dire, si par hasard le projet de loi 103 avançait assez valablement
en soirée, quel projet de loi suivrait?
Le Vice-Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: Nous aborderions l'étude du projet de loi 84,
tel que nous l'avions indiqué hier, successivement au projet de loi
103.
Le Vice-Président: Sur ce, les travaux de cette
Assemblée sont suspendus jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 58)
(Reprise de la séance à 20 h 10)
Mme le Vice-Président: À l'ordre! s'il vous
plaît!
Veuillez vous asseoir.
M. le leader parlementaire du gouvernement.
M. Bertrand: Mme la Présidente, je vous demanderais, s'il
vous plaît, d'appeler le projet de loi inscrit au nom du ministre des
Affaires sociales, le projet de loi no 103.
Projet de loi no 103
Deuxième lecture
(suite)
Mme le Vice-Président: Ce sera donc la reprise du
débat sur la motion de deuxième lecture de M. le ministre des
Affaires sociales concernant le projet de loi no 103, Loi modifiant la Loi sur
les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions
législatives.
M. le député de Mégantic-Compton, c'est vous qui
aviez demandé l'ajournement du débat.
M. Fernand Grenier
M. Grenier: Mme le Président, il faut se remettre dans le
bain, bien sûr, après une soirée et une journée
complète qui nous séparent maintenant de la deuxième
lecture de la loi 103. Il n'est pas mauvais, je pense, de rappeler aux gens de
cette Chambre qu'il s'agit là de la reprise de la deuxième
lecture. Des discours ont été faits par le ministre et par le
représentant de l'Opposition officielle et c'était à notre
tour quand est arrivée une motion pour reporter à trois semaines
l'étude en commission parlementaire, plus précisément vers
le 26 décembre prochain, la journée de la fête des Saints
Innocents. Après un débat dur et acharné, viril, qui a
duré au-delà de deux heures, nous en sommes venus au fait que la
Chambre ne siégeant pas le 26 c'était mieux à toutes fins
utiles de ne pas reporter l'étude de ce projet de loi en commission
parlementaire. Mme le Président, j'ai ouï-dire à travers les
branches que le ministre aurait reçu des gens assurés que
nous sommes que le ministre est occupé en Chambre passablement et que
son bureau n'est peut-être pas aussi prêt qu'il le
désirerait ni dans le A ni dans le B. des groupes qui auraient pu
lui demander de discuter en commission parlementaire de cette loi. On a su
aujourd'hui qu'il était possible que certains groupes aient fait cette
demande. Il est sûr que ce projet de loi ayant été
déposé assez tardivement, il a été plus difficile
aux gens d'apprendre ce qu'il contenait, parce qu'il n'était pas connu.
Une fois connu, le temps était limité pour pouvoir parler de
venir ici en commission parlementaire. Quoi qu'il en soit, ce projet de loi est
important. Il est important par toutes ces corrections qu'il apporte à
la loi 65. Il y a des choses quand même, Mme le Président
pour avoir été dans le milieu qui font que les centres de
services de santé de toutes sortes vont être passablement
transformés dans leur administration principalement.
Je vois au tout début, d'abord, le rôle des conseils
régionaux de la santé et des services sociaux. On ajoute au tout
début: "d'exercer, à l'intérieur de son territoire, toute
autre fonction" en plus des fonctions actuelles. Ce n'est pas défini.
J'ai hâte de voir ce que le ministre, en commission, aura à nous
annoncer sur ces toutes autres fonctions qu'on réserve aux conseils
régionaux de la santé et des services sociaux. On connaît
déjà le rôle qui est joué par ces conseils de
santé dans nos régions. Cette institution, qui a
été implantée là, il y a quelque temps, a souvent
été qualifiée de pare-chocs dans des régions
bilingues comme la nôtre, on appelle cela tout simplement un "bumper"
pour éviter que des revendications ne s'en viennent à
Québec, mais aillent se faire au niveau du CRSSS.
Quant à la composition de ce conseil, j'ai eu personnellement
le ministre en a été témoin à
contredire plusieurs de leurs décisions. Ce n'est pas facile pour un
député, ce n'est pas plus facile, bien sûr, cela l'est un
peu moins pour le ministre, de vouloir organiser, décentraliser des
pouvoirs et, en même temps, d'être capable de donner les budgets et
de les faire administrer pour que ce soit décisionnel et pas seulement
des suggestions au gouvernement, au ministère. Ce n'est pas une chose
facile et je le comprends. Mais ces CRSSS mis en place ne répondent
certainement pas adéquatement, dans le moment, aux besoins des
régions. Il y a des efforts de faits. Leur composition elle-même
méritera peut-être d'être repensée parce qu'elle
suscite des problèmes assez aigus au niveau des sous-régions. Je
m'explique.
Je prends celui que je connais le mieux, celui de la région de
l'Estrie, le CRSS de Sherbrooke. Les autres doivent ressembler à
celui-là assez étrangement. J'ai eu à travailler avec
celui de Québec, de la région 03; j'avais une institution dans la
région de Québec et une autre dans la région de L'Estrie.
La région de L'Estrie, entre autres, fait des péchés
mignons. À cause de la forte population de Sherbrooke et du regroupement
d'un grand nombre d'institutions, le CRSSS est noyauté je
n'exagère pas par des gens de la ville de Sherbrooke. Pour des
institutions dans des banlieues de la ville de Sherbrooke, que ce soit Magog,
Asbestos, Weedon, Lac-Mégantic, Cookshire, La Patrie, Coaticook, parce
que tout est raccroché au CRSSS de Sherbrooke, cela devient une vraie
corvée de pouvoir développer certains services en
périphérie de la ville de Sherbrooke.
À la tête de ce groupement, on retrouve des personnes qui
ont compris la décentralisation du ministère, qui sont bien
d'accord là-dessus, mais qui ont assez mal compris la
décentralisation des régions. C'est le problème que nous
avons dans la région de l'Estrie et ce problème peut se trouver
ailleurs.
On accepte très bien de prendre les pouvoirs à
Québec et de les transporter à Sherbrooke, mais on accepte mal de
les rendre à Sherbrooke et de les transporter à Coaticook,
à Weedon, à Lac-Mégantic, à Windsor et à
Asbestos. Cela devient plus pénible. Ce sont des compréhensions
à sens unique qu'on a. Les personnes qui sont nommées là
sont, bien sûr, victimes de plusieurs chicanes locales. Je décris
le cas de Sherbrooke, ce soir, mais je voudrais bien que les gens comprennent
que cela doit être le cas dans certains autres, à cause de la
formation des personnes, à cause du milieu de représentation
qu'il y a là.
C'est un effort important de décentralisation qui a
été fait vers les régions, qui est loin d'être
parfait, et les régions s'en plaignent. J'aurai un peu plus loin, bien
sûr, à intervenir sur des cas plus précis. Je ne voudrais
pas non plus m'accrocher ici à un détail ou à un
problème local et ennuyer la Chambre avec un problème local. Ce
que je désire faire ici, c'est illustrer par un cas, comme on l'a fait
j'avais l'occasion d'en discu- ter avec un député tout
à l'heure ici avec l'école de Chartierville, par exemple.
Ce n'était pas le problème uniquement à Chartierville,
c'était le problème de la déclaration du ministre au
niveau de la dernière école primaire dans les villages, une
école de quartier, qu'on a illustré par le problème de
Chartierville. Non pas qu'on veuille ennuyer les gens avec une région
bien spécifique. C'est mon intention de le faire tout à l'heure
en parlant des permis qui peuvent être émis dans les
hôpitaux, dans les centres d'accueil, dans les familles d'accueil et dans
différents centres de services de santé.
Aux CRSSS, on aura, bien sûr, à vérifier de plus
près la répartition des élus et il y aura peut-être,
en discutant autour de cette loi, une formule à trouver, qui sera plus
adéquate, qui trouvera des personnes peut-être encore plus
intéressées à ce milieu à aller siéger
à l'exécutif régional des CRSSS.
Plus loin, le ministre, dans sa loi, nous parle d'un plan de
redressement. Il n'est pas nouveau, ce plan de redressement et, ici, j'informe
le ministre il le sait, mais je le lui dis publiquement je le
mets en garde de ne pas ici réaliser un plan qui était sur les
tablettes depuis déjà trop d'années et qui fera
peut-être l'affaire de certains hauts fonctionnaires. Je ne suis pas
sûr que, dans quelque temps, cela fera l'affaire du ministre, et je suis
encore moins sûr que cela fera l'affaire des gens qui ont à
profiter des services de santé au niveau des régions. Ce plan de
redressement, bien sûr, devra être soumis au ministère mais,
actuellement, on travaille sur ce plan. Ce n'est pas du nouveau. La loi vient
ici pour dire des choses qui sont en oeuvre depuis déjà pas mal
de mois, pour ne pas dire d'années, dans ce plan de redressement.
On est tous témoins de cela. On travaille à ce plan de
redressement et, encore là, le programme du parti dit qu'on voudrait
sauvegarder les régions, et j'en parlerai tout à l'heure quant
à l'intention de limiter le financement du secteur privé, par
exemple. Le programme du parti parle de sous-régions; combien on est
généreux en campagne électorale pour les
sous-régions. On parle des régions, cela va. On parle
également des sous-régions; comment on est généreux
pour les sous-régions en principe. Quand on arrive dans la pratique, on
ignore cela assez facilement et on passe outre à cela. Je mets en garde
le ministre, ce plan de redressement ne répondra peut-être pas
très bien et à lui et à ceux qui auront à le mettre
en oeuvre dans les différentes régions de la province. Il y a des
régions éloignées qui ont des besoins. Quand on parle de
régions éloignées, on a toujours à l'idée la
Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine, la Côte-Nord, l'Abitibi,
mais il y a des sous-régions qui ont des traitements pas beaucoup mieux
que les grandes régions éloignées. (20 h 20)
Ces sous-régions sont nombreuses dans la province et elles ont
des besoins. Cela s'avère juste en éducation. Cela ne
s'avère pas moins exact au niveau des affaires sociales. Je voudrais que
le ministre sache bien que ces régions ont des
droits; il y a là des contribuables comme il y en a à
Montréal et à Québec, dans toutes les grandes villes, et
il y a là des contribuables qui ont besoin d'avoir les mêmes
services. Je ne parle pas d'une spécialité de fine pointe, mais
ils ont droit à des soins pour malades aigus alors qu'ils sont à
distance des grands centres; ils ont droit à ces services. Dans ses
déclarations, le ministre a eu l'occasion de le spécifier
à plusieurs reprises, mais dans la pratique cela semble ardu. C'est un
système qui semble ardu à mettre en marche dans les
sous-régions. Je le définirai plus clairement avec des exemples
vers la fin.
Le ministre dit en plus dans son préambule qu'il va limiter le
financement au secteur privé. J'ai été fort surpris de
l'entendre dire, au cours de son intervention, qu'il limitera le financement du
secteur privé, c'est-à-dire qu'il n'y aura plus de
développement nouveau dans le secteur privé. On pouvait s'y
attendre mais ce qu'il y avait au programme du Parti québécois
lors de la dernière élection, cela a été loin
d'être aussi clair que cela. Les gens ne savaient pas ce qui les
attendait. Il y a une concurrence loyale de faite par des centres
privés. Le ministre aurait sans doute grand avantage à visiter
des centres privés. Il y en a qui méritent d'être
encouragés, d'être "pavillonnés", si vous le voulez, de
subir certaines transformations. Mais il y a des centres privés qui
donnent l'exemple à pas mal de centres publics, et le ministre aurait
avantage à se rendre visiter ces centres. C'est une économie pour
la province que ces centres privés. Je pense qu'il s'agit d'une saine
concurrence.
La déclaration du ministre cet après-midi m'a un peu
effrayé, quand je l'ai entendu dire qu'il y avait une coupure assez
nette et que c'était pas mal fini. En tout cas, on l'a entendu dire cet
après-midi. Cela fait longtemps qu'on le supposait et qu'on l'imaginait.
On en était à peu près assuré dans le secteur de
l'éducation et, dans le secteur des affaires sociales, cela nous a
été confirmé au cours de la journée. Il n'y aurait
plus de développement qui se ferait de ce côté; on
maintiendrait en place ce qu'il y a là.
On sait que ces gens du secteur privé sont suivis de près
et qu'on ne doit pas faire trop de coches mal taillées avant d'en
entendre parler. On passe peut-être l'éponge plus facilement sur
des centres du secteur public. J'aimerais bien attirer l'attention du ministre,
lui demander de se rendre sur place et visiter des organismes qui sont
privés. Il se rendra compte probablement qu'il y a là un
rôle très efficace à jouer et que cela devient une
concurrence joliment intéressante s'il veut monter un secteur public
correct également.
Il nous parle également en page 3 et cela est assez
important de la fusion des établissements, "sans le consentement
des corporations concernées". Là, j'ai fait un saut, j'ai
été joliment surpris parce que dans le programme du Parti
québécois, ce n'est pas tout à fait cela qu'on disait. Il
dit ici, "sans le consentement des corporations concernées". Je n'ai
jamais entendu parler de cela. Alors qu'on reprochait aux anciens gou-
vernements de ne pas consulter la base, on écrit dans un projet de loi,
ici, "sans le consentement des corporations concernées." Je demanderais
au ministre d'aller voir ses hauts fonctionnaires et leur demander si c'est
bien cela qu'ils veulent dire. Ce n'est pas cela qu'ils nous vendaient il y a
deux ans dans leur programme. Revaloriser le pouvoir local, c'est en page 10 de
leur programme. Ils ont retenu les mêmes choses qu'il y avait là,
à ce moment, "notamment: a) en remettant aux municipalités
il s'agit ici du secteur municipal certains pouvoirs actuellement
exercés par le gouvernement québécois et en augmentant les
ressources financières à leur disposition; b) en favorisant la
création, sur demande, de conseils de quartiers élus au suffrage
universel ayant une responsabilité avec le conseil municipal."
Un peu plus loin, on dit: "Réorganiser les structures municipales
en consultant obligatoirement la population concernée sur tout projet de
restructuration, regroupement ou fusion." Est-ce possible de trouver plus
clair. J'espère qu'on a la même philosophie aux affaires
municipales qu'aux affaires sociales, j'espère que c'est la même
chose. J'espère qu'il n'y a pas noir et blanc dans les deux secteurs, et
j'espère que si c'est vrai pour les municipalités, cela ne doit
pas être moins vrai pour les personnes malades, les personnes qui sont
dans le besoin. Je vous citerai des textes tout à l'heure qui
relèvent des affaires sociales et qui sont un peu pires.
Mme le Président, j'ai été ébahi de lire
cela. Je n'en croyais pas mes yeux, fusionner des institutions. Sous l'ancien
gouvernement le ministre du temps est là il y a eu deux
essais dans le secteur où je travaillais, un à Repentigny et un
à Lac-Mégantic, fusionnement d'institutions. À Repentigny,
le directeur général qui était là, je l'ai connu
à ce moment-là, j'ai eu à le rencontrer, nous
étions les deux seuls qui avions travaillé avec des institutions
regroupées, mais pas comme on le fait ici. On a étudié
cela sur place. L'étude avait été faite. On a
regardé sur place ce qu'il y avait lieu de faire et on a constaté
que, lorsqu'on a affaire à deux conseils d'administration qui sont
composés de gens bénévoles, cela ne coûte pas bien
cher à l'État. On peut peut-être les garder, surtout quand
on dit dans son programme qu'on veut redonner le pouvoir à la base. On
dirige deux institutions de centres d'accueil, un à Repentigny et
l'autre à Lac-Mégantic.
Le gouvernement du temps me confie la responsabilité d'un autre
centre, un deuxième. Alors, on regarde cela de près avec la base,
pas dans des principes et pas dans un programme de parti politique, mais sur
place avec les gens. Selon la recommandation de l'ancien ministre, qui est
là actuellement on regarde à la base et on trouve que ce n'est
pas réalisable. Ce n'est pas possible d'enlever le pouvoir de la base
des gens de Lambton et de le confier à i'un ou l'autre et de former un
conseil entre les deux. Il faudrait payer du transport entre les deux
institutions pour des gens qui voyagent. Il y avait trop de complications. On a
trouvé une formule; le directeur général est
devenu directeur de deux institutions et on a coupé un salaire,
et moi, je suis devenu directeur de deux institutions et on a coupé un
salaire. Je siégeais aux deux conseils d'administration.
Mais ce n'est pas cela, une fusion comme celle dont on parle dans le
programme ici. C'est de ne faire qu'un seul établissement, qu'une seule
direction et cela ne peut pas fonctionner. Ce n'est pas de cela que la base
veut entendre parler, surtout quand on a dans son programme qu'on va consulter
la base, qu'on va retourner à la base. Ce n'est pas ce qu'on dit ici:
Sans le consentement des corporations concernées, des corporations
bénévoles, des conseils d'administration bénévoles.
Vous n'avez pas un mot à dire, vous autres. Ce n'est pas municipal;
c'est les Affaires sociales, le projet de loi no 103. Vous n'avez pas un mot
à dire là-dedans; c'est nous autres qui décidons à
Québec. C'est clair, cela? On vous a dit dans notre programme qu'on vous
consulterait, mais ce n'est pas vrai cela. On a une loi et on va la faire
adopter; c'est nous qui réglons cela.
C'est à cela qu'on a à faire face, Mme le
Président. C'est cela qu'on doit rencontrer ce soir. Cette loi, on nous
la propose comme une étude longuement faite et je mets le ministre en
garde. Ce qu'on n'a pas réussi à passer sous l'ancien
gouvernement, on est en train de vous le passer actuellement. On vous passe
cette épinette-là. J'ai dit hier, ici, en Chambre, devant le
ministre de l'Éducation et vous, le ministre des Affaires sociales: II
faut surveiller ces deux ministères. Ce sont les deux plus grosses
boîtes au gouvernement. Pour y voir clair, vous savez que nous l'avons
déjà essayé au ministère de l'Éducation,
nous autres, avec un gros ministre de l'Éducation, qui s'appelait, dans
le temps, M. Cardinal, je pense. Il a essayé cela. Il a trouvé
cela dur.
On est allé chercher un homme qu'on avait pris en dehors de la
députation pour l'emmener comme ministre parce qu'on disait que le gars
aurait de la poigne, qu'il avait fait sa marque ailleurs. Je n'ai pas besoin de
vous rappeler ce que je vous ai déjà dit en cette Chambre,
combien c'était pénible, combien c'était difficile
d'administrer une boîte comme celle-là.
Dans cette loi-ci, on nous dit qu'on va faire des fusions des
établissements sans le consentement des corporations concernées.
On avait dit, dans le programme du PQ, qu'on consulterait la base et on l'a
écrit en toutes lettres. Cela sent une loi préparée par de
hauts fonctionnaires en vue de faire main basse sur des institutions et les
diriger de Québec, parce que cela va mieux que de diriger des
régions. Je mets le ministre en garde. Je lui demanderai certainement,
à l'occasion de la commission parlementaire, un compte rendu
là-dessus Je voudrais mettre en garde aussi les autres
députés des régions périphériques des
grandes villes qui auront probablement le même sort. Fusion des
institutions sans le consentement des corporations.
On parle un peu plus loin, également, que ce sera le ministre des
Consommateurs qui aura à prendre des décisions: "Le ministre des
Consom- mateurs, Coopératives et Institutions financières peut,
avec l'autorisation écrite du ministre, instituer par lettres patentes
des établissements publics de l'une ou de plusieurs des cinq
catégories suivantes: "ce qui était réservé, en
fait, au lieutenant-gouverneur en conseil. Je ne sais pas pourquoi, quand il
est question d'une chose aussi importante que cela, on retire cela du
lieutenant-gouverneur en conseil et on décide de faire prendre la
décision par une seule personne, une personne du Cabinet. Il y a
probablement des raisons que le ministre pourra nous expliquer. Dans le moment,
on peut s'interroger.
Dans son article 6, le ministre arrive avec une raison que je comprends
mal. Il n'y a plus d'usagers. Des usagers d'après les modes
électifs qu'on propose dans ces institutions de la région 10A, il
n'y aura plus d'usagers qui feront partie des conseils d'administration. Je ne
vois pas bien la raison de cela et j'aimerais bien la connaître. Le
ministre aura à nous répondre; c'est en commission parlementaire
qu'on le saura. (20 h 30)
Mais j'espère que ce n'est pas un principe qu'on veut commencer
à mettre comme projet pilote dans une région, parce qu'on a
souvent tendance à cela, et l'étendre ensuite aux régions
de la province. Peut-être bien qu'il s'agit là d'institutions
où c'est difficile d'avoir des personnes. C'est peut-être les
institutions psychiatriques, je ne sais pas. Je n'ai vraiment pas idée
pourquoi on décide qu'il n'y a pas d'usager qui feront partie du conseil
d'administration. J'espère, au moins, que ce n'est pas à cause
d'un programme pilote qu'on est entrain d'établir dans la région
10A pour ensuite étendre cela au secteur provincial après.
Il y a également ce changement qu'on amène dans
l'engagement du personnel. Le directeur général au niveau du
CRSSS est engagé par le conseil d'administration. On ne parle pas de
concours dans la loi. J'espère que c'est compris, au moins, qu'il y aura
un concours de fait. J'espère que c'est convenu que ce n'est pas juste
pour les articles de la loi. Le personnel-cadre est laissé au conseil
d'administration et les autres, au directeur général. Bien
sûr on suppose qu'il y aura des concours, qu'on n'a pas aboli le concours
si on ne le dit pas. On a déjà vu que c'était
mentionné que c'est le règlement qui nous donnera cela, mais ce
sont des espèces de tracasseries qui nous arrivent. S'il y a une raison
pour une loi qui vient changer des choses, c'eût été
l'occasion de nous donner les règlements ici. Ce n'est pas une brique
qu'on nous donne, il a certainement un document de prêt pour cela. On
pourrait nous dire comment cela va se faire.
Dans le moment il y a des choses qu'on peut discuter sur les
élections qui se font dans nos institutions, nos maisons de
santé. On sait à quoi s'en tenir, on connaît très
bien le rodage de cela, mais il me semble que là, ce n'est pas une loi
de fond. On aurait pu nous fournir des règlements pour qu'on sache
comment vont se faire ces choses. On arrivera en commission parlementaire et on
n'en saura pas beaucoup plus long. Comme
le temps est très limité et qu'on a bien l'impression
qu'on devra voter cette loi avant Noël, à ce moment-là, on
sera peut-être obligé d'accepter des choses avec lesquelles on
sera obligé de vivre. Plus tard, on arrivera avec des transformations,
des amendements qu'on pourra apporter dans une autre session, parce que ces
choses seront inapli-cables, encore une fois.
Cela a été justement la raison. On ne le fait pas pour le
zonage agricole, on ne l'a pas fait sur l'assurance automobile, on ne l'a pas
fait sur la loi 101, on ne l'a pas fait sur les grosses lois. On n'a pas
déposé de règlements. Ici, dans une loi qui est technique
pour une bonne partie, il me semble qu'on était en mesure de s'attendre
à avoir la réglementation qui aurait été
déposée avec la loi. L'avoir au moins en main pour en discuter en
commission parlementaire.
Au CRSSS, c'est le lieutenant-gouverneur en conseil qui nomme le
directeur général. Ailleurs, c'est le ministre. C'est du nouveau
cela, c'est le ministre. Je ne sais pas ce que le ministre envisage, mais je
ferai certainement préciser par le ministre pourquoi ces deux personnes
nommées par le lieutenant-gouverneur en conseil jadis sont maintenant
nommées par le ministre. Pourquoi au CRSSS c'est le
lieutenant-gouverneur en conseil et qu'ailleurs c'est le ministre? Il aura
à nous répondre, et j'aimerais qu'il nous le dise dans sa
réplique. J'aimerais qu'il change le système aussi. Pourquoi
arrive-t-on avec cela? Est-ce que c'est après des suggestions faites par
le milieu? On ne le suivait pas, par exemple, mais la loi a été
faite comme cela, avant c'étaient les corps publics, les clubs sociaux,
dans nos régions, qui recommandaient deux personnes par institution pour
être membres du conseil d'administration. On en recommandait deux.
C'était rarement suivi, mais c'était cela pareil. Je l'ai fait
personnellement, parce que j'étais directeur de deux institutions et je
devais m'occuper des clubs sociaux. On avait de la difficulté à
les intéresser à cette cause, on demandait aux clubs sociaux de
nous soumettre des noms. On soumettait les noms au lieutenant-gouverneur en
conseil. Une fois qu'on avait vu les Optimistes, les Aramis, les clubs des
Chevaliers de Colomb et les clubs de l'âge d'or et que tout le monde
avait dit son mot, on envoyait cela là-bas. Là il se faisait un
appel téléphonique entre le président du Parti
libéral, dans le temps, et le cabinet et on nommait deux rouges. On n'en
tenait pas compte ou à peu près pas dans différentes
régions. Cela dépendait si on était bien politisé
ou pas. Mais là ne me demandez pas de mettre des noms, j'aimerais mieux
ne pas en mettre. Cela se faisait comme cela. C'était la coutume dans
les comtés plus politisés. En tout cas, dans les villes
c'était peut-être un peu plus différent. Je ne voudrais pas
que cela soit changé et que ce soit le ministre qui appelle le
président du Parti québécois, maintenant, pour lui
demander de lui suggérer deux noms. Je veux que ce soit autrement que
cela.
Non, cela ne pourra pas être ainsi parce que vous autres vous
êtes des purs. Les anciens partis, ce n'est pas pareil. C'était
censé être de même nous autres. Mais, vous autres, cela ne
se fera pas de même, j'en suis convaincu, parce que le premier ministre,
l'autre jour, ce n'est pas cela qu'il a dit. Il a seulement dit que les gens
c'étaient des péquistes et qu'ils avaient le droit d'être
président d'élection. J'espère que cela ne sera pas comme
cela dans le système des affaires sociales. Vous n'avez pas le droit de
faire cela vous autres. Nous autres on peut le faire. Les impurs,
c'était nous autres dans le temps. On a le droit de se permettre de ces
choses, mais qu'on n'arrive pas avec cela, Mme le Présidente, je
demanderai certainement au ministre comment il va choisir ces deux membres
jadis nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil.
Qu'ils ne viennent pas nous reprocher ce qu'ils ont crié sur
leurs six bureaux pendant trop d'années ici: les nominations faites par
le Parti libéral. Elles auraient peut-être été
faites par l'Union Nationale avant si on avait été là,
mais on n'y était pas dans le temps. C'est cela qu'on nous reprochait
à ce moment-là, et en commission parlementaire je demanderai au
ministre quelle est sa formule pour nommer ces deux personnes. Je lui dirai
à ce moment-là: Peut-être serait-il bon de retourner autour
de la table. Ces deux personnes sont utiles; elles représentent la
population locale, la population régionale. Je demanderai au ministre
quel est son système, mais si ce devait être le système
qu'on avait avant, je le dénoncerai. Il arrive là-dedans des
individus dont on n'a absolument pas besoin. Ils viennent poser, aux
réunions des conseils d'administration, des questions insignifiantes
à caractère politique et dont on n'a pas besoin aux conseils
d'administration. J'ai eu à le faire trop souvent. Je voudrais bien, Mme
le Président, que le ministre se prépare à l'avance pour
nous dire comment il va choisir ces deux personnes. Le vieux système
n'était pas bon. Mais d'eux, les purs qui n'ont jamais
péché, on s'attend à quelque chose de neuf; ce sera
à des gens du milieu qu'ils vont donner une chance. On va attendre cela
en commission parlementaire. Les vieux partis, ce n'est pas pareil. Un a droit
à cela; on avait cette réputation. On les attend. J'ai bien
l'impression que ce sera: Plus ça change, plus c'est pareil, parce que
cela a bien commencé avec les vingt présidents
d'élection.
Mme le Président, nous avons aussi des problèmes dans nos
régions. Quand on lit le programme du parti à la page 31, le
programme que j'ai présentement je pense que c'est le programme
1978 on dit, dans le domaine de la santé on n'est plus
dans les affaires municipales au chapitre IV: Rationaliser,
démocratiser et améliorer la distribution régionale des
établissements de santé et de services sociaux. " On dit ici:
"... améliorer la distribution régionale des
établissements de santé et de services sociaux."
"Améliorer." Un peu plus bas, on dit: "2) par l'affectation de
ressources suffisantes pour assurer le traitement approprié des maladies
mentales, notamment par la création de foyers de groupes et d'ateliers
protégés." Plus bas, on dit: "Humaniser
j'espère que ma définition du mot "humaniser " est
la même que celle du Parti québécois et
améliorer la qualité des services de santé et des services
sociaux." Plus bas encore, on dit: 4b) par l'adoption de mesures visant
à augmenter le nombre des médecins et des employés
spécialisés et en favorisant une meilleure distribution
régionale. " "Une meilleure distribution régionale." Bon!
À ce jour, c'est une plus mauvaise distribution régionale
qu'on a, depuis deux ans, que celle qu'on avait avant. Il y a des
problèmes bien précis qui sont soumis au ministre. Le ministre
sait ce qui se passe dans une région comme la nôtre. Il
connaît le problème qui se vit à Sherbrooke dans le moment
au Centre hospitalier de Sherbrooke. J'aurai à déposer ici, avant
la prorogation de la Chambre, la pétition des gens de la région
de l'Estrie qui veulent maintenir le Centre hospitalier de Sherbrooke, l'ancien
Sherbrooke Hospital. On aura à déposer cette pétition pour
le maintien des services dans ce centre hospitalier. Vous savez la bataille qui
se livre actuellement vous êtes sensibilisé à cela,
j'en suis sûr pour conserver dans son état actuel le Centre
hospitalier de Sherbrooke.
Je me suis rendu au Centre hospitalier de Sherbrooke vendredi matin pour
rencontrer la direction. J'ai rencontré le directeur
général, le président du conseil d'administration, deux
psychiatres qui traitent sur place. La recommandation de la commission qui a
été mise en place dit: Passons donc cela maintenant au Sherbrooke
Hospital. On va faire un hôpital psychiatrique; on va rebâtir
à Sherbrooke une espèce de Saint-Michel-Archange ou
Saint-Jean-de-Dieu. Est-ce que bien du monde veut cela? Est-ce que des
psychiatres veulent cela?
M. Lazure: ... respect pour Saint-Jean-de-Dieu.
M. Grenier: Oui, je m'excuse. Cela va peut-être vous
toucher d'un petit peu plus près. Est-ce que c'est cela qu'on veut
rebâtir dans la région de l'Estrie? Je ne le pense pas. Je pense
que s'il y a des personnes qui endossent un projet comme celui-là, c'est
parce qu'il manque d'une étude en profondeur. On a fait une
recommandation qui répartissait les lits à Saint-Jean-de-Dieu et
à l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul pour un certain nombre de cas
psychiatriques chroniques: quinze ou seize lits par hôpital. Une
commission a recommandé cela. Les lits ont été
autorisés pour ce nombre dans les hôpitaux et la recommandation
n'a jamais été observée.
L'autre commission décide ou certains membres de cette
même commission qui ont été nommé à l'autre
recommande maintenant qu'on transforme le Sherbrooke Hospital en
hôpital psychiatrique chronique au complet. Bien sûr, on va s'y
opposer, pour plusieurs bonnes raisons. Parce que cet hôpital de
Sherbrooke le ministre l'apprendra s'il ne s'y est pas rendu encore
a été un des rares hôpitaux de la région de
l'Estrie qui est allé chercher son argent chez la population
régionale pour s'adapter aux nouveaux services qui se sont
donnés. (20 h 40)
II y a eu un effort collectif local qui mérite d'être
signalé à l'attention de pas mal de monde. À partir de
là, je pense qu'ils ont des droits que d'autres n'ont peut-être
pas, parce qu'ils ont fait avant d'autres ce qu'on aurait eu avantage à
faire dans plusieurs milieux, prendre en main leurs propres problèmes.
J'ai dit à ces gens que je m'occuperais de leurs problèmes
activement et que je m'y rendrais en temps et lieu pour appuyer leurs
efforts.
Ces personnes font le travail qu'elles doivent faire et je pense que le
ministre n'acceptera jamais, non plus, de convertir un tel hôpital, de
faire un ghetto dans cet hôpital de 130 lits pour malades psychiatriques
chroniques. Je pense que le ministre n'acceptera jamais une telle
recommandation. J'espère, au moins, qu'il n'acceptera jamais cela. Ce
n'est pas possible, surtout dans le contexte sherbrookois qu'on connaît,
dont j'ai fait état largement, et plus précisément dans la
région de chez nous qui illustre encore un problème
régional, mais qui est celui de plusieurs sous-régions. Le
ministre est sensibilisé aux problèmes des hôpitaux de la
région de Lac-Mégantic et, de fait, a renouvelé les permis
qui existaient à peu près à l'état actuel
antérieurement.
Le problème de la région de Lac-Mégantic, pour une
fois qu'on peut en parler et qu'on en a le temps cela a toujours
été sous forme de question il faut savoir le dire au
ministre afin de le préparer pour sa venue au mois de janvier. Je lui
fais savoir qu'il y avait, à Lac-Mégantic, une madame qui
était nommée. Depuis la semaine passée, je ne sais plus si
on doit dire directeur général ou directrice
générale, avec ce qu'on a fait ici, en Chambre, pour la
présidente: en tout cas, on l'a appelée le directeur
général de cet hôpital pour soins chroniques. Elle?
Excellente personne, sauf qu'elle a accepté à la lettre de
respecter le plan de redressement du ministère qu'il y avait
déjà. La région de Lac-Mégantic a été
une région pilote pour le plan de redressement du ministère.
Elle l'a fait de concert avec le CRSSS pour les régions que je
mentionnais tout à l'heure qui, lui je l'ai dit et je le redis
à ce moment-ci, parce que le problème est bien particulier
avait accepté la décentralisation pour autant que, lui, il n'ait
pas à en faire chez lui. Il acceptait bien la décentralisation
des autres qui lui revenait sur les épaules, mais il ne voulait pas la
partager avec d'autres, cette décentralisation. C'était cela, le
problème.
Cela fait au-delà d'un an que la région se bat, qu'il y a
eu un comité de citoyens de formé qui a pris les ondes de la
radio et la télévision locale et qui a fait des assemblées
de 800, 900 et 1000 personnes ce n'est pas normal, cela pour se
battre contre deux ou trois fonctionnaires et une dame qui avait
décidé, elle, d'appliquer le plan de redressement. On a fait
croire toutes sortes de choses. On a fait croire que l'édifice
était désuet, était vétuste, en tout cas, il
n'avait que des défauts. On se rend compte, dans le moment, après
étude, que ce n'est pas si mal que cela.
La région s'est battue et, dans d'autres régions,
ce sera la même chose pour que le permis lui soit donné
pour son hôpital de soins aigus, soit l'hôpital Saint-Joseph, et
pour l'hôpital de soins chroniques, soit l'hôpital
Frère-André. Actuellement, les permis ont été
renouvelés dans ce qu'on connaissait, mais c'est toujours en attendant,
pour tenter de regrouper à Sherbrooke, quand le grand plan sera fait
pour la région de L'Estrie, qu'on aura casé, comme on veut le
faire, au Sherbrooke Hospital la psychiatrie et qu'on aura pris, pour remplir
les autres lits des hôpitaux de Sherbrooke une quarantaine de nos lits
pour les transporter là. Est-ce qu'il y aura certains
spécialistes qui décideront de venir à
Lac-Mégan-tic pour 50 lits? Il n'y en aura pas. On a beau faire les
routes très belles pour se rendre à Lac-Mégantic, on sera
toujours à 65 milles de la ville de Sherbrooke. À partir de
là, il y a des soins qui doivent se donner dans des sous-régions
et on doit se battre pour des sous-régions.
Ce gouvernement a dit, comme on l'a écrit dans ce programme,
humaniser et améliorer la qualité des services de santé et
des services sociaux et favoriser une meilleure distribution régionale.
Les gens, chez nous, ont cru à cela et ils ont élu deux
députés du gouvernement à Sherbrooke et à
Saint-François. Ils lui ont donné plusieurs votes dans mon
comté parce qu'ils ont cru à cela, à ce
programme-là, et ce n'est plus celui-là qu'on applique.
Maintenant, on dit fusion et on ne vous consulte plus! Commission à
Québec, vous n'avez plus votre mot à dire, vous autres,
là-dedans. Si on avait vendu cela en campagne électorale, je
n'aurais pas eu besoin de me battre si fort pour gagner et ce n'est pas
sûr que les autres auraient gagné ailleurs, les autres
comtés de Sherbrooke et de Saint-François, si on avait vendu ce
qu'on est en train de faire ici en Chambre. J'espère que j'aurai l'appui
des deux députés de Sherbrooke et de Saint-François pour
défendre cette cause. J'aurai leur appui pour défendre cette
cause.
L'hôpital anglophone, Sherbrooke Hospital, s'est adapté aux
besoins de la région, il dessert actuellement une clientèle
francophone, va en proportion des anglophones qui disparaissent dans les
Cantons de l'Est graduellement. C'est l'hôpital le mieux adapté
dans pas mal grand de notre province. Je suis assuré que j'aurai l'appui
des deux députés péquistes de Sherbrooke et de
Saint-François pour sauvegarder cet hôpital. J'irai rencontrer,
une fois que la session sera terminée ici, les groupes
intéressés de la région pour leur demander de nous venir
en aide. Mais je voudrais bien, avant, que le ministre comprenne plus vite que
cela, qu'on ne soit pas obligé de faire encore ce qu'on a fait à
Lac-Mégantic. C'étaient quasiment des menaces, du chantage pour
être capable de garder les services, quand les gens ont montré
tellement de bonne volonté dans des régions comme la
nôtre.
C'est au ministre à comprendre cela, lui qui était si
près des gens, il n'y a pas si longtemps, près du monde
ordinaire, comme on disait dans les campagnes électorales. Je veux qu'il
continue d'être près, maintenant qu'il est temps de
défendre les projets de loi, de concrétiser le programme du parti
sur lequel il s'est fait élire. Cela semblait un bon programme. En tout
cas, il y a plusieurs personnes qui y ont cru. Maintenant, c'est le temps de
l'appliquer par des lois. On a déjà vu des députés
qui sont pas toujours satisfaits, qui se prononcent parfois contre le
gouvernement. Ce n'est pas si terrible que cela. Ils n'iront pas au purgatoire
plus longtemps que d'autres parce qu'ils ne sont pas toujours avec le
gouvernement. Cela peut se produire dans nos rangs nous aussi. Ils ont leur
opinion, ils l'ont défendue dans le zonage agricole, comme le
député de Rimouski.
J'espère qu'il y en aura deux ou trois qui se détacheront
du groupe, qui viendront nous appuyer dans la région de l'Estrie, et
viendront dire que cela a du bon sens ce qu'on dit. On ne se bat pas seulement
contre un projet de loi. Ce n'est pas cela, l'Opposition. C'est de se coller
à des réalités et défendre les
réalités dans nos régions, dans la province. C'est ce
qu'on tente de faire ici. On n'est pas seulement méchants. On n'est pas
seulement contre. Il n'y a pas seulement de mauvaises choses dans ce projet de
loi. Les choses qui sont bonnes, on sait que le gouvernement va le dire en
masse. L'Opposition, son rôle, c'est de dire ce qui mériterait de
ne pas être retenu d'un projet de loi et on le dénonce. C'est cela
le rôle de l'Opposition. Comme c'est le rôle de l'Opposition de
questionner le gouvernement. Avec la venue du nouveau gouvernement, on se rend
compte que c'est le gouvernement qui questionne, le gouvernement. C'est rare
mais c'est rendu de même, avec la venue de la télévision
principalement. Mais il reste une chose, c'est que l'Opposition tâche de
détecter les erreurs pour une saine administration. C'est notre
rôle. Et dans une loi, c'est de faire ressortir les points faibles de la
loi. C'est ce qu'on acharne à faire de ce côté-ci de la
Chambre avec, j'espère, assez de succès pour convaincre les gens
de l'autre bord de nous seconder.
Les permis de centres d'accueil. Au ministère on a
décidé qu'on ferait ici comme dans d'autres pays européens
et que 6% de nos personnes âgées seraient en hébergement.
Quand on a déjà atteint le chiffre de 6%, c'est un maximum. Pour
cela, il faut ressembler à d'autres pays. On n'a pas le choix, nous
autres. On ne peut pas être personnel. Il faut faire comme d'autres pays.
Les fonctionnaires ont décidé que c'était 6%. C'est vrai
dans tous les autres champs d'activité. À 6%, il n'y a pas de
raison de discuter. Quand on est rendu à 6%, c'est fini.
M. Laplante: Quels pays?
M. Grenier: Vous irez voir, vous visiterez cela. Ce sont des
études qu'on a faites en Europe. C'est assez correct. Cela répond
à des réalités européennes. Quand on a fait cela,
on a dit ce sera 6% pour les personnes âgées. Cela varie dans les
autres pourcentages, pour les soins aigus, bien sûr, et les cas
chroniques, cela varie. Mais pour les
personnes âgées, pour les centres d'accueil, on est
arrêté au chiffre de 6% et à ce moment, on tient compte des
régions mais on ne tient pas compte des sous-régions. Les
régions globalement lorsqu'il arrive des problèmes, c'est qu'on a
souvent, dans une région, un centre bâti dans une grande ville, et
les sous-régions auraient préféré que cela se fasse
dans les sous-régions.
L'Union Nationale y a été pour beaucoup, là-dedans.
Je suis heureux qu'un ministre comme Jean-Paul Cloutier, que nous avons eu, ait
pu répartir régionalement, répartir en tenant compte des
besoins dans les régions. Cela a été une
réalisation de notre parti. Je suis très fier de cette
réalisation. On s'en rend compte dans de petits villages et de moyens
villages. Il y a des députés qui sont arrivés en
politique, peut-être de l'autre côté de la Chambre, et qui
ont vu dans leur comté de petits centres organisés. Cela fait, ce
qu'on avait anciennement, une espèce d'école primaire qui faisait
un centre de vie dans nos villages. C'est un maintien de centre de vie que ces
foyers que nous avons réalisés dans d'importants villages
agricoles. C'est une belle réalisation. Une fois le changement de
gouvernement fait en 1970, on a pris une autre politique, qui n'était
pas mauvaise, qui était bonne sous plusieurs aspects.
On a adapté à ce qui avait été fait, on a
développé des centres de jour qu'on a accrochés
principalement à ces centres d'accueil qui rendent d'excellents
services, M. le Président, dans des petites villes de la province. On
parle ici dans cette Chambre des problèmes des grandes villes et on en
parle d'ailleurs bien trop souvent. Les régions rurales sont rarement
défendues. Et ces problèmes, on ne les touche pas assez souvent.
Ce contexte est un contexte qui va bien dans les centres d'accueil avec les
centres de jour, les services à domicile aussi qu'on développe
dans certaines régions rurales. (20 h 50)
C'est bien fait, cela va bien, sauf qu'on s'est accroché aux 6%.
Voici ce qu'on voudrait faire maintenant et qui semble difficile. Les permis
semblent difficiles à émettre pour les familles d'accueil. Les
familles d'accueil, pour accueillir un total de neuf personnes
âgées, il faut que ce soit une maison. Avec la
régionalisation des écoles, on a eu deux plans biens distincts.
On a bâti des écoles dans des villages pendant une vingtaine
d'années; on est collé dans nos villages ruraux avec un paquet de
bonnes écoles, d'excellentes écoles qui ne servent pas ou qui
servent à 20%. À un endroit c'est une salle pour le conseil
municipal, à un autre c'est une soeur qui vient enseigner de
l'artisanat, et il y a la moitié de l'école qui ne sert pas ou il
y en a les trois quarts, mais on la chauffe partout.
On essaie d'avoir des permis des CSS, et c'est compliqué, Mme le
Président, vous n'avez pas idée. J'aimerais que le ministre
m'entende. Je sais qu'il est ici, mais il est en train de dialoguer, il est
peut-être en train de convaincre le député de Sherbrooke.
Je voudrais qu'il entende ce point précis des familles d'accueil dans
nos écoles rurales. Qu'il débloque ce système. J'en ai
dans ma région, puis si j'en ai chez nous je dis qu'il y en a ailleurs,
je suis convaincu de cela. Il y a au moins une quinzaine de familles d'accueil
prêtes à aller dans d'anciens locaux scolaires. C'est souvent un
plain-pied, il n'y a même pas trois marches à monter pour aller
à l'école. C'est exactement ce qu'il faut pour des personnes
âgées. C'est chauffé, c'est prêt. C'est à peu
de frais que cela pourrait se faire. N'oubliez pas les familles d'accueil en
milieu rural, à Lingwick, à Gould, à Bury, à
Scotstown, à Milan, à Spring Hill. Partout dans les villages de
notre comté, les gens sont rétifs un peu à aller rester
avec Mme Jos. Bleau. Elle est connue depuis longtemps, ce n'est pas sûr,
ma belle-mère m'a déjà dit qu'elle ne savait pas faire
à manger. Il y a des problèmes locaux qu'on ne peut pas
contourner.
Si on arrivait dans un centre indépendant comme une école,
en le disant, on serait capable d'accommoder plusieurs villages avec une
famille d'accueil. Mais ce n'est pas possible, les CSS disent: Cela ne
répond pas à nos normes. Cela n'a pas l'air assez famille. Cela
prendra l'allure d'une famille quand il y aura du monde dedans. C'est bien
sûr que cela va être un éléphant blanc tant qu'il n'y
aura pas une personne là-dedans, qu'il n'y aura pas un rideau de
posé; cela ne donne pas le goût d'y vivre bien bien.
Mais ce sont ces anciennes écoles qui sont là, qui sont
achetées à peu de frais, parce qu'il y a un arrangement entre le
ministère de l'Éducation et les municipalités. Cela
pourrait servir à nos personnes âgées.
Je vois le député de L'Acadie qui est au courant d'un
problème dans son coin parce qu'elle réside dans mon
comté, quand il fait beau; quand c'est l'été elle vient me
voir dans mon comté.
Mme Lavoie-Roux: C'est un beau comté, M. le
député.
M. Grenier: J'espère bien qu'il y aura des
élections à l'été la prochaine fois pour qu'elle
puisse voter pour moi, quand elle sera résidente chez nous.
Dans le coin où elle vient passer quelque temps, il y a là
une école que les gens demandent, au lieu de se transporter et de
transporter leurs vieillards. Ils en ont huit, dix, c'est ce qu'il faut pour
continuer la vie dans ce village de Saint-Herménégilde, un si
beau village de notre comté, choyé de vous avoir comme
résidente d'été.
Mme le Président, ces points que j'ai voulu soulever ici sont les
centres d'accueil, les hôpitaux régionaux, les familles d'accueil;
c'est la vie communautaire régionale.
Cela se reflète partout; j'ai eu l'occasion de visiter une bonne
partie de la province, pour ne pas dire toute la province. J'ai visité
à l'occasion chacun des comtés. Mais j'ai eu l'occasion, comme
président de l'Association des directeurs des centres d'accueil du
Québec, de visiter chacune des institutions privées ou publiques,
et je sais
que ce problème est vécu dans chacune de nos
régions de la province. Ce serait important, dans chacun de nos
comtés, que le ministre donne des ordres aux CSS, qu'il leur dise:
Changez votre politique un peu et tâchez de vous adapter aux
écoles qui sont existantes, aux édifices pubics dans vos
villages. Les personnes âgées vont préférer rester
en face de leur église. Cela existe encore. On n'en parle pas souvent
ici, mais il y a encore du monde qui aime aller à l'église; ils
ne haïssent pas cela, aller à l'église de temps en temps,
aller chercher leur courrier au bureau de poste et aller à la
coopérative. Cela existe encore. Hélas! On en entend rarement
parler dans cette Chambre, mais ces institutions au centre de nos villages, qui
existent déjà, ces écoles, on pourrait les remplir; cela
se ferait à peu de frais. On pourrait garder là des personnes qui
ne seraient pas des cas lourds, comme on les catalogue, des Al ou A2 au
maximum, dans ces endroits. Ce serait l'endroit idéal. Ensuite, on les
dirigerait vers de petits centres quand on exigera plus de services. Ce serait
l'idéal, ce serait reprendre la vie au niveau de nos
municipalités, au niveau de nos villages.
Mme le Président, j'attends du ministre des réponses
à certaines questions. Si on n'a pas nos réponses
là-dessus, eh bien, on attendra en commission parlementaire pour y
apporter des modifications, assurés que le ministre a une oreille
attentive aux recommandations qu'on lui fait.
Cela est fait, bien sûr, en terminant, non pas pour critiquer et
être négatif. Il est bien sûr que si des
améliorations importantes ne sont pas faites à cette loi, je
voterai contre. Notre formation politique votera contre cette loi. S'il y a des
améliorations majeures, oui, mais qu'on ne vienne pas nous passer un
coup de kleenex sur la loi et nous dire: On l'a bien transformée. Ce
n'est pas vrai. Si des améliorations majeures sont faites,
peut-être qu'on obtera pour la loi. Sinon nous voterons contre, dans le
contexte actuel. On ne se fera pas passer un sapin de se faire dire qu'on est
un gouvernement qui voulait la régionalisation et la
décentralisation et, au moment d'appliquer la loi, on n'a jamais vu de
loi aussi centralisatrice. Merci, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Pointe-Claire.
M. Forget: À qui avez-vous donné la parole?
Mme le Vice-Président: À M. le député
de Pointe-Claire, M. le député.
M. William Frederic Shaw
M. Shaw: Merci, Mme le Président. Je vais prendre un peu
de temps sur ce projet de loi parce qu'à mon avis, c'est un autre projet
de loi qui essaie de cacher certaines vérités qui sont
très importantes pour la population du Québec. On vit
présentement, dans tout le réseau des Affaires sociales, une
démoralisation que nous n'avons jamais vue, soit dans les centres de
services sociaux, dans les centres hospitaliers ou les centres d'accueil pour
les personnes âgées, soit privés ou publics; une situation
dans laquelle le gouvernement n'est plus attentif aux demandes, aux
responsabilités, à leurs besoins et, effectivement, il s'agit de
tout le réseau des Affaires sociales.
On voit dans ce projet de loi beaucoup de changements qui sont vraiment
majeurs. On dit au début que maintenant, le gouvernement est plus en
mesure de juger l'application des soins dans les centres hospitaliers.
Imaginez-vous! Et on arrive avec des situations comme celle du Sherbrooke
Hospital, à Sherbrooke. On voit partout qu'avec la
démoralisation, avec le manque de fonds, avec tous les autres
problèmes que vivent les hôpitaux de notre province, soit la
diminution du nombre de lits, soit la perte des professionnels... et cela
n'arrive pas dans une petite mesure... Dans notre hôpital, ce sont les
quatre orthopédistes, le chef du département de chirurgie, son
adjoint, le chef du département d'anesthésie, et cela arrive
aussi dans beaucoup d'hôpitaux au Québec, non seulement ceux qui
sont anglophones.
On a vu aussi un changement d'attitude du gouvernement envers
l'entraînement des internes et des résidents qui a presque
totalement changé le système d'éducation secondaire pour
les médecins au Québec, et, franchement, provoqué des
attitudes réciproques dans les autres provinces du Canada et aux
États-Unis, parce que, pour un long temps, la ville de Montréal a
été un centre d'éducation secondaire pour les
médecins de l'Amérique du Nord, une chose dont nous devons
être fiers.
Nous avons vu l'application de cette fameuse mesure des 20% de lits pour
les soins chroniques dans les hôpitaux généraux du
Québec. Si vous n'avez jamais vu une situation dans laquelle vous placez
des personnes âgées dans les centres hospitaliers au lieu d'un
centre d'accueil spécialisé pour leurs soins, c'est franchement
immoral. Ces patients ont l'impression d'aller dans ces hôpitaux pour y
mourir, non pour y vivre. (21 heures)
Quand nous plaçons des patients, des clients vraiment dans une
situation hospitalière au lieu de les envoyer dans un centre d'accueil,
c'est un acte immoral. Mais on voit même la détérioration
dans les services sociaux. Mme le Président, on voit ici qu'il y a cinq
points très importants. Il y a un changement d'attitude du gouvernement
qui va maintenant essayer d'appliquer ses pouvoirs dans le domaine des "letters
patent" pour enlever la direction des institutions privées.
Imaginez-vous Mme le Président, qu'une institution privée qui a
eu des subventions du gouvernement pour un bout de temps, c'est vrai, peut
maintenant perdre sans son consentement son pouvoir de gestion.
Mme le Président, nous avons parlé l'année
passée, au mois de décembre, de la fermeture des centres
d'accueil. Nous avons vu et j'en ai parlé aux journalistes avant
ces fermetures que c'est
une forme de meurtre administratif. J'ai dit le jour avant la fermeture
que, si le gouvernement essaie de faire fermer cette institution, le "trauma de
cette délocation" va tuer quelqu'un. C'est arrivé. Ce n'est pas
la première fois que c'est arrivé, parce qu'avec la fermeture
d'autres foyers d'usagers privés on dit clandestins la
même chose est arrivée. Mais ici, Mme le Président, on a
d'autres pouvoirs pour continuer cette politique.
Madam President, I have to speak of bill 103, because I am actually
surprised that the people of the social affairs "réseau", if you wish,
have not been more vocal about the implications of this law, the implications,
for example, that give the decisionary powers as to the application and the
numbers of staff to the department of Social Affairs in Québec. There
has never been such a lack of confidence in the department of Social Affairs
and its minister than we have seen in the last two years in our hospitals in
Québec. We have seen the progress of cut-backs in funding which have
resulted in bed closures and cut-backs of staff, an actual reduction in primary
care, expanding lenghts of waiting lists for active and even acute treatment,
depressed moral among the staff. And now they ask the same group of people to
provide the government with an organization plan which they and their
fonctionnaires are more than capable of evaluating. The purpose of which, Mr
President, is also to suggest that the government may, at a given time, begin
selective moves of personnel which might be better located in a different area.
Mr President, this government has been accused of being socialist and
interventionist. And this is a gigantic step in that direction. Yes, we require
skilled and trained personnel in other than urban areas of our province. But we
will never achieve this end by coercion and by closure of hospital staffs.
Governments, previously, have been approached even by hospital staffs
themselves to effect the closure of staffs. But the principle has always been
that if a specialist in a region felt that he could compete in that region to
provide services and that the public would benefit by this competition and the
quality of services would improve... Instead of which, Mr President, there is
now a reversal in this attitude where we are suggesting to the young physician:
Well, that hospital has got a closed staff so you cannot go there. It would be
very handy for those who are on staff. The suggestion was made by the minister
in his opening remarks that up to now, because of the fact that we could not
dismiss members of staffs of hospitals unless they committed a criminal offence
or had taken some gross act of negligence this is totally unproved. Because the
responsibility for the supervision of the medical act is that of the Council of
Physicians and Dentists and of the orders responsible for their profession, and
they have been doing their job. No, Mr President, this is a direct intervention
in the free movement of professionnals in hospital centres.
A second very concerning aspect of this law is the right that says, and
I quote: "To provide that. where the majority of the funds used for the
acquisition of property of a corporation which maintains a public establishment
come from subsidies of the government or public subscription, the minister will
be able to obtain letters patent from the ministre des Consommateurs.
Coopératives et Institutions financières to convert or amalgamate
the corporation maintaining such an establishment without the consent of the
corporations concerned." Mr President, what a powerful weapon of intervention!
Imagine the private institutions, because they are private. When people make
donations to Weredale House or the Royal Victoria Hospital with its very large
endowment, they make it to that institution, not to the government of province
of Québec. When the Government engages, as it did when it began the
"régie", the Hospital Act, to meet a responsibility to pay for services
rendered in private institutions and that is what the law effectively
did. And the people of Québec paid for these services. They did not, in
any way, commit the government to ownership of these institutions, but in this
article the government is usurping a fondamental right of a private institution
by suggesting that these grants have been public subsidies and, therefore,
those institutions belong to the state.
Another article that is very disconcerting is the amendments to the
existing provisions for the issuing of permits. Last year, at this time, I
suggested to the minister, with 8000 senior citizens crying for reception
centres, that the public sector will never be able to meet the need and the
only way that this need could effectively be met is by establishing rigid but
effective licencing regulations for the private sector. But, no, the program of
"pavilionization" was continuing. And. the program of "pavilionization" was so
intimidating the private sector, or so-called clandestine homes, that their
quality was falling. It was not only that intimidation but direct intervention
by the social service centres who impeded the transfer of patients, who would
be deteriorated from classes A-1 and A-2 to classes A-3 and A-4, to other
institutions and if... (21 h 10)
Mr President, I am prepared to back this in fact that social service
institutions have caused the retention of A-3 and A-4 cases in private
detention centres because of the lack of access to these centres inflicted upon
them because they were classified as clandestine centres. Instead of trying to
improve these centres, instead of trying to encourage people to provide a
"centre d'accueil" for senior citizens, which is the method that is being used
throughout this North American continent very effectively, with sound
supervision and licencing, this government was to reverse what is happening and
make it a totally public service. So, both people will suffer: the senior
citizens, who will never get into the senior citizens home, and the whole
service because of a negative attitude of the government.
Mr President, I also would like to take a moment to discuss the article
suggesting that the
minister is going to begin to limit the financing of private
institutions who presently have fixed payments or contracts with the
government. It is so evident that wherever the government is providing the
service, the cost of providing that service is three times that of the private
sector providing the same service. And that we have, in spite of bill 65, some
of the private services remaining is a miracle, but we do and some of them are
excellent services. But the government is now instituting part of its program
of totally removing the private sector from the social services field.
When you do this, Mr President, you do three things. First of all, you
remove the so-called "bénévole" help that is associated with the
private institutions. Private institutions have people who volunteer their time
and work freely and effectively at their job. The second thing you do: you
remove local supplementary funding, that is to say that when there is a private
institution, the private institution has the means to seek additional funding
from the community to try and maintain a good level of services. We see this in
the St. Patrick's Orphanage. We see this in the Sherbrooke Hospital who could
go to the people and get additional funding. We see this in my own hospital at
the Lakeshore General, who depends on local funding for support.
The third thing, Mr President, is identity, identity that people relate
to their private institutions very well. I remember when I first was elected to
office it was suggested to me that it was wrong that the Jewish Community
services were separated from the Ville-Marie social services. I had a
conversation with its director and he made it quite clear to me, and I agreed,
that a social service centre that relates and identifies with the clientele it
is serving is more effective, more efficient, receives more support from its
own community and does its job better than one that is just a group of numbers.
This, again, Mr President, is the direction that the Department of Social
Affairs is taking in intimidating the three social service centres in the City
of Montréal to become regionalized instead of identified.
Mr President, this bill is a kind of omnibus bill which gives certain
powers which are incredible to the government. That we pass over it lightly,
that every member of this House is not taking the time to read it and to
understand it is a measure perhaps, at this time of the year, it is a measure
perhaps of the load of legislation that we have to deal with in this stage of
the session.
But it is also perhaps a measure of research services, or what have you
that should be reviewing the legislation for the real difficulties that are
being built into it. I challenge this legislation, Mr President, as an
additional evidence that this government is attempting, through social
intervention, to destroy the very fabric of the social welfare system, of the
social aid system and the social services system of our province. Everyone, in
the medium, is aware of the pressures under which they are being placed, and
the morale is low and the quality of services is deteriorating because of it. I
think this is due entirely to the negative attitude of the present minister who
can take no credit for any quality of service improvement during the period of
ten years that he has had in this ministry, and this is an example of the lack
of conscience and responsibility that he has placed in his responsibility of
minister in this portfolio.
Therefore, I will speak strongly against this bill and I hope others, in
this Assembly, will take the time to read into it its truth so they too will
know that this is another act of interventionist socialism that will only
deteriorate the quality of services and of medical care that this province has
known
Thank you very much, Mr President.
Le Vice-Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Claude Forget
M. Forget: M. le Président, je n'ai pas l'intention,
contrairement à ceux qui m'ont précédé, de tenter
même de faire des commentaires sur l'ensemble des dispositions de ce
projet de loi qui en comprend un très grand nombre. Nous aurons, lors de
l'étude en commission parlementaire article par article, l'occasion de
commenter plusieurs de ces nouvelles dispositions législatives que
propose le ministre des Affaires sociales et qui appartiennent, pour la
plupart, à une catégorie de dispositions quasi administratives
qui ont bien sûr leur importance mais dont la discussion
détaillée dépasse le cadre de ce débat de
deuxième lecture où seulement les faits les plus saillants, les
principes principaux doivent faire l'objet de débat. Même
au-delà de cela, je m'abstiendrai de faire des commentaires sur les
fusions forcées que le ministre propose d'effectuer ou, du moins, du
pouvoir qu'il veut s'arroger d'effectuer de telles fusions forcées.
Mon collègue de Mégantic-Compton tout à l'heure a
eu à ce sujet des propos que j'approuve entièrement et je n'ai
donc pas l'intention de les répéter. Je n'ai pas non plus
l'intention de m'étendre sur la prohibition que comporte le projet de
loi d'émission de permis à des établissements
privés. Je pense que ce qui a été dit là-dessus
exprime également notre sentiment. Il s'agit d'une mesure qui est par
trop arbitraire et absolue mais je laisse cela de côté pour
essayer, dans les quelques minutes qui sont à ma disposition, de faire
le point sur ce qui est sans aucun doute l'aspect le plus significatif,
à mes yeux du moins, de ce projet de loi, celui qui est de nature
à modifier de la façon la plus sensible et la plus profonde, une
des caractéristiques importantes de notre régime de services de
santé.
Je pense, bien entendu, à ce contingentement des postes de
médecins à l'intérieur de nos hôpitaux, qui est
envisagé par le projet de loi. C'est une mesure nouvelle. J'aimerais
faire un peu l'historique du problème pour permettre à ceux qui
ne sont pas familiers avec le milieu hospitalier,
mais qui sont malgré tout des citoyens intéressés
par la qualité des services, de situer le genre de solution que propose
le ministre des Affaires sociales, le problème que l'on prétend
résoudre, sa véritable envergure et les inconvénients de
la solution proposée et même, je dirais, ces déficiences.
(21 h 20)
L'historique du problème peut se faire en quelques mots. Il y a
environ une dizaine d'années et cela depuis un passé
immémorial, les hôpitaux au Québec comme un peu partout
dans le monde étaient essentiellement des établissements
privés qui fonctionnaient selon les règles qu'ils se donnaient
eux-mêmes tant au plan de l'administration qu'au plan de la question de
déterminer qui parmi l'ensemble des médecins qui ont le droit de
pratiquer au Québec était admis à pratiquer son art
à l'intérieur des murs d'un hôpital donné.
Même après l'introduction de l'assurance-hospitalisation en
1961, les hôpitaux ont conservé ce pouvoir, parce qu'ils
étaient des institutions privées, de décider qui serait
admis pour pratiquer la chirurgie ou la médecine, ou une branche
quelconque de la médecine ou de la chirurgie à l'intérieur
d'un hôpital. Bien sûr, un certain nombre de médecins et
d'autres personnes qui étaient les dirigeants des hôpitaux
à l'époque avaient le dernier mot sur cette question. Une
situation comme celle-là, on peut s'en douter, alors que le
gouvernement, à même les impôts, finance le fonctionnement
des hôpitaux et même leur construction, a donné lieu
à de nombreuses critiques puisqu'un certain nombre de médecins se
voyaient devant des portes closes. La porte de certains hôpitaux
où ils avaient tous les droits d'espérer être admis pour y
pratiquer se trouvait fermée. Il y avait, bien sûr, de la part de
ceux qui étaient déjà à l'intérieur, un
certain malthusianisme, un certain protectionnisme et on pouvait assez
facilement dire dans certains cas du moins ce n'est pas tous les cas,
mais des cas trop nombreux que ces hôpitaux, ces conseils de
médecins se comportaient un peu comme des clubs privés et que
c'était désormais un comportement qui répugnait au
caractère essentiellement public du financement des hôpitaux.
C'est ce qu'a observé la commission Caston-guay-Nepveu qui, comme
on le sait, a produit son rapport en 1970. C'est une constatation qu'elle a pu
faire, une plainte qu'elle a reçue de la part d'un certain nombre de
groupes et d'individus. À la suite de cela, la loi 65, celle que nous
amendons par ce projet de loi, M. le Président, fut adoptée. Le
remède qui fut adopté alors a été un remède
radical. Au lieu de procéder par toute autre espèce de moyen, on
a tout simplement décrété à l'article 92 de la loi
que tout médecin quel qu'il soit au Québec avait le droit de
demander son admission comme membre du personnel médical d'un
hôpital et que cet hôpital ne pouvait pas le refuser à moins
de pouvoir alléguer que le comportement du médecin en question,
sa compétence ou effectivement des choses qu'on peut alléguer sur
le plan de son honnêteté, de son intégrité profes-
sionnelle et de son comportement, par exemple qu'il était soit
narcomane, soit alcoolique, etc., le rendaient inapte à pratiquer. De
toute façon, si on ne pouvait pas invoquer ces raisons très
étroitement définies, tout médecin avait le droit de venir
pratiquer dans n'importe quel hôpital.
La situation était donc radicalement transformée. Tout le
monde poussa un soupir de soulagement. On s'est dit: Voilà un nouveau
régime qui résout les problèmes du passé.
Malheureusement, les problèmes du passé étaient
résolus, mais de nouveaux problèmes ont surgi, comme c'est
parfois le cas. En particulier, dans les hôpitaux d'enseignement, on
s'est rendu compte qu'on était maintenant la cible d'un pléthore
de demandes d'admission, puisqu'il s'attache naturellement maintenant un
certain prestige pour le médecin qui est admis à faire partie du
personnel médical de tel ou tel hôpital prestigieux ou
hôpital d'enseignement. Devant un tel afflux de candidatures, ces
hôpitaux étaient dans une position difficile pour assurer un
fonctionnement normal, pour donner à tous ces médecins une chance
égale d'effectivement pratiquer la médecine à
l'intérieur de leurs murs, mais surtout, ce qui est peut-être plus
important, pour assurer que les standards de qualité d'une institution
qui se veut non seulement une institution de santé mais aussi une
institution d'enseignement clinique, puissent être atteints par quiconque
se présentait ainsi.
En effet, il en est de la médecine comme de n'importe quelle
autre profession. Il y en a qui réussissent avec brio leurs examens, qui
sont des premiers de classe et se méritent une certaine position dans
leur profession, méritent qu'on les considère comme capables
d'enseigner, de transmettre leurs connaissances. D'autres sont tout juste
capables de réussir les examens, sont malgré tout admis, mais on
peut se poser à leur égard des questions sérieuses quant
à leurs capacités d'assumer des responsabilités autres que
les responsabilités minimales, bien sûr, qui vont de pair avec
leur appartenance professionnelle.
Il était donc clair qu'il y avait une nécessité de
faire quelque chose. Pendant un certain temps, devant l'état de la loi,
les hôpitaux d'enseignement ont essayé d'argumenter devant les
tribunaux les exigences particulières que leur imposait leur statut
d'institution d'enseignement. Il en est résulté des litiges
très longs devant les tribunaux, devant la Commission des affaires
sociales et on a dû se rendre à l'évidence que, devant
l'état de la loi, ces prétentions légitimes des
hôpitaux d'enseignement ne pouvaient pas avoir gain de cause.
Un amendement introduit en 1974 par votre humble serviteur, qui ajoutait
certaines qualifications additionnelles dans le texte de l'article 92, à
l'expérience encore devant les tribunaux, ne s'est pas
avéré suffisant, ce qui fait qu'on se trouvait donc devant la
nécessité d'agir et d'agir législativement dans une
certaine mesure au moins. C'est ce qui justifie, je pense, pour une part au
moins, l'action actuelle du ministre des Affaires sociales.
Il y a plusieurs façons cependant d'agir, et c'est à ce
moment que des choix s'offrent, que des
options sont possibles. C'est à ce moment que les chemins se
divisent, en quelque sorte, entre la voie, d'une part, prise par le ministre
actuel, ce qui pourrait, à nos yeux, au moins, apparaître comme
une solution plus raisonnable, plus appropriée à la nature et
à l'envergure du problème. La solution suggérée
consiste dans une exigence nouvelle de la loi, à savoir que le plan
d'organisation, si on veut, l'organigramme d'un hôpital doit comporter un
plan d'organisation des départements cliniques, c'est-à-dire des
différents départements de chirurgie et de médecine qui
sont énumérés, ceux qui doivent exister dans cet
hôpital, étant donné ses ressources, ses capacités,
ses aspirations, son rôle dans une région donnée. Ce plan
d'organisation, selon la proposition du ministre, doit en plus être
soumis à l'approbation du ministre.
C'est donc dire que la solution envisagée dans ce projet de loi
fait reposer sur les épaules du ministre personnage qui n'est pas
un personnage imaginaire, c'est non seulement le ministre personnellement, mais
l'ensemble, l'appareil bureaucratique du ministère de trancher du
nombre de médecins et de l'organisation clinique de chacun des quelque
250 hôpitaux au Québec. C'est la solution du gouvernement.
On peut cependant se poser la question à savoir s'il ne serait
pas plus raisonnable, étant donné que le problème s'est
posé de façon aiguë seulement du côté des
hôpitaux d'enseignement, de restreindre une telle obligation aux
hôpitaux d'enseignement puisque ce sont ces hôpitaux d'enseignement
seuls ou largement seuls qui sont la cible d'un afflux de demandes d'admission
considérables, qui gêne d'ailleurs leur fonction d'enseignement
beaucoup plus qu'elle ne peut gêner leurs fonctions cliniques proprement
dites, de restreindre, donc, aux hôpitaux d'enseignement l'exigence d'un
plan d'organisation du personnel clinique avec l'énumération du
nombre de postes qui est prévu. (21 h 30)
Étant donné que le mobile qui devrait nous animer dans
tout ceci, c'est de rendre compatible le principe général
d'admissibilité des médecins aux hôpitaux avec les
impératifs de l'enseignement, ne serait-il pas raisonnable de
prévoir une consultation des facultés de médecine, mais
dans le texte de loi, pas seulement au niveau des intentions verbales; et de
prévoir, pour les conseils régionaux où existent les
hôpitaux d'enseignement et les facultés de médecine, un
rôle de décision ou d'allocation de distribution? Autrement dit,
d'éliminer la tutelle directe du ministre dans une question comme
celle-là, puisqu'elle n'est rigoureusement pas nécessaire pour
que les arbitrages, les décisions se fassent. Le conseil régional
est au courant des ressources globales des centres hospitaliers d'enseignement.
La faculté de médecine est bien au courant de la
nécessité d'organiser, de façon rationnelle, un certain
enseignement clinique et de le faire avec des standards de qualité les
plus élevés possible quant aux médecins qui sont
appelés à collaborer à cet enseignement clinique. Il y a
donc là tous les élé- ments nécessaires qui sont
connus à ce niveau et il ne nous semble pas du tout nécessaire de
faire intervenir le ministère comme tel.
Pour ce qui est des autres hôpitaux, il n'est pas du tout
évident qu'un contingentement quelconque soit nécessaire; du
moins, il serait souhaitable d'en faire la preuve et de régler d'abord
le problème des hôpitaux d'enseignement et de voir plus tard si
c'est vraiment nécessaire de franchir une étape de plus. Rien ne
nous indique qu'une deuxième étape est nécessaire. Par
contre, elle accorderait la liberté à la fois aux
établissements de déterminer, avec un minimum de contraintes,
leur organisation clinique et, aux médecins, de déterminer
également la répartition de leurs efforts, leur style de
pratique, leur choix quant au lieu de pratique, avec un maximum de
liberté, avec tout ce que cela implique à la fois de
liberté pour les médecins qui sont déjà en pratique
médicale, mais tout ce que cela implique également de
liberté pour les jeunes médecins qui arrivent pour la
première fois, en quelque sorte "sur le marché du travail". Ils
sont, à juste titre, inquiets de l'espèce d'embrigadement auquel
on veut désormais, et pour la première fois, les soumettre. Il
est bien évident, M. le Président, que ce genre de mesures va
toucher d'abord et avant tout ceux qui ne sont pas déjà membres
du personnel clinique, membres du Conseil des médecins et dentistes de
nos hôpitaux. Ceux qui arrivent pour la première fois, ceux qui
font pour la première fois une demande d'admission sont ceux qui sont
exclus.
C'est donc une réglementation qui a un impact assez
inégal, qui est en quelque sorte je ne veux pas dramatiser, mais,
malgré tout, c'est le seul mot qu'on peut utiliser
discriminatoire par rapport aux nouveaux arrivants et qui n'est pas, encore une
fois, nécessaire, d'après les indications que l'on peut avoir sur
cette question. D'ailleurs, dans les bulletins de la Corporation
professionnelle des médecins pour 1977, on nous donnait la distribution
géographique des médecins et on ne trouve pas au moins au
niveau des omnipraticiens, c'est quand même un groupe important, surtout
lorsqu'on pense aux régions éloignées du Québec,
aux régions excentriques une disparité telle qu'il faille
des moyens aussi énergiques que ceux qui sont envisagés pour
redresser la situation. Même s'il fallait des moyens plus
énergiques, il faut rappeler ici que les ententes conclues en 1976,
à la fois avec la Fédération des médecins
omnipraticiens et la Fédération des médecins
spécialistes, prévoient explicitement des ententes
supplémentaires et des mécanismes de collaboration entre ces
fédérations et le ministère des Affaires sociales pour
corriger, mais de façon conjointe et coopérative, les
disparités qui peuvent apparaître des sources sérieuses de
difficultés et de faible accessibilité à certains services
médicaux dans certaines régions.
Il y a donc des instruments qui sont déjà à la
portée du ministre, qui n'ont pas, j'en ai bien l'impression et j'en ai
bien peur, été adéquatement utilisés, et
voilà qu'au lieu d'utiliser des moyens consensuels, des moyens
contractuels qui sont
déjà prévus, auxquels la porte est
déjà ouverte, on veut utiliser une méthode
impérative, une méthode législative dont on n'a pas fait
la preuve du besoin.
M. le Président, cette solution du ministre est sérieuse
par ses implications. J'ai essayé de l'illustrer, parce qu'elle est une
dimension absolument nouvelle, sans précédent au Québec et
sans guère de précédent hors du Québec, du moins en
Amérique du Nord, quant à la façon d'intégrer dans
le fonctionnement de nos établissements de santé la profession
médicale.
Jusqu'à maintenant, fort heureusement, malgré des tensions
parfois évidentes et des moments difficiles, l'évolution rapide
des mesures sociales, des mesures sociales particulièrement dans le
domaine de la santé, depuis environ dix ans, l'introduction de
l'assurance-maladie et d'autres mesures telles que la législation que
nous sommes en train d'amender, tout cela s'est fait avec, malgré tout,
une harmonie somme toute assez bonne, une entente somme toute satisfaisante
pour les deux côtés, à la fois le côté
gouvernemental et le côté professionnel.
Il ne faudrait pas faire, dans le domaine des affaires sociales, dans le
domaine de la santé, ce que l'on a parfois reproché à ceux
qui ont fait la réforme de l'éducation, soit de faire cette
réforme contre les professionnels qui doivent assumer le principal du
fardeau dans ce secteur.
J'ai l'impression, parfois, à entendre certaines remarques du
côté gouvernemental je pense en particulier à ce que
nous avons entendu hier de la part du député de Mercier
qu'il y a une espèce de rancoeur, une espèce de haine
vis-à-vis de la profession médicale. On a cité avec un
plaisir évident, on a mordu dans les mots de
"privilégiés", comme si la situation qui est faite aux
médecins au Québec était si loin de celle qui est faite
à de nombreux autres groupes professionnels, comme si ce groupe
professionnel était une espèce de mafia qu'il faut absolument
écraser, comme si ce n'est pas avec le plein assentiment et d'accord
avec l'ensemble de la collectivité québécoise que ce
statut et ces revenus puisqu'il faut le dire sont ceux de la
profession. Il n'y a jamais eu, à mon avis, de malaise ou de critique
généralisée, sauf dans certains milieux marginaux, mais il
semble que ces milieux marginaux aient une oreille particulièrement
attentive de la part du ministre actuellement.
M. Guay: M. le Président, j'invoque le
règlement.
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Taschereau.
M. Guay: Je m'excuse, je ne voudrais pas interrompre le
député de Saint-Laurent au milieu d'une phrase, mais comme ses
phrases sont longues et que cela fait, je pense, 20 minutes qu'il parle...
Le Vice-Président: Oui, M. le député de
Saint-Laurent, vous avez déjà dépassé votre temps.
Je vous demanderais de terminer, s'il vous plaît!
M. Forget: Je vais terminer très rapidement, M. le
Président.
Ces propos, cette haine, ce ressentiment que l'on sent, de façon
voilée, mais de façon très sensible, malgré tout,
dans certains propos des députés ministériels, sont
inquiétants dans la mesure où on peut croire qu'ils inspirent les
actions du gouvernement.
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! Oui, M. le député de Charlesbourg.
M. de Belleval: J'en ferai en même temps, M. le
Président, une demande de directive, parce que je ne suis pas un expert
du règlement dans cette Chambre, mais je crois qu'il y a un article,
dans notre règlement, qui interdit à un député de
prêter des sentiments ou des intentions à un autre
député. J'ai écouté, depuis deux minutes, le
député de Saint-Laurent, dire que le député de
Mercier qui n'est pas en cette Chambre actuellement
éprouverait une haine envers les médecins. Je suis certain que ce
sont des propos, à toutes fins utiles, calomniateurs, diffamatoires.
Mais est-ce que, à votre avis, M. le Président, c'est
parlementaire et c'est conforme à notre règlement d'imputer de
tels sentiments à un député de la part du
député de Saint-Laurent?
Le Vice-Président: II y a deux choses qui sont, d'une
part, des termes qui ne seraient pas parlementaires; je ne les reconnais pas
dans les termes qu'a employés M. le député de
Saint-Laurent. Si le député impliqué était
là, il aurait pu, en vertu de l'article 49, alinéa 2, soulever
une question de privilège. Il pourrait le faire, avec un avis, s'il le
désire, à la prochaine séance.
M. le député de Saint-Laurent, en vous priant, s'il vous
plaît, de terminer. (21 h 40)
M. Forget: Je termine, M. le Président, en mentionnant une
seule chose. Hier, nous avons eu des propos qui n'étaient pas
très polis pour des gens qui ont voulu se faire entendre en commission
parlementaire. On s'est amusé à faire de I humour, un humour
douteux.
Le Vice-Président: À l'ordre! À l'ordre! Je
l'ai déjà dit, il y a plus d'un an: Je ne sais pas ce qui se
passe en commission parlementaire.
Mme Lavoie-Roux: C'est à l'Assemblée nationale.
Le Vice-Président: Vous avez dit en commission
parlementaire.
M. Forget: Ils voulaient se faire entendre en commission.
Le Vice-Président: D'accord.
M. Forget: On a fait des gorges chaudes, même du
côté de l'Union Nationale, je regrette de le dire, avec deux
personnes qui parlaient non pas en leur nom personnel, mais au nom des
organis-
mes qui sont tout à fait justifiés d'invoquer le droit
d'être entendus: le Regroupement des étudiants en médecine
de l'Université Laval et des étudiants...
Le Vice-Président: M. le député de
Saint-Laurent, je vous ai dit déjà que le temps est
dépassé. Je vois difficilement quelle est la pertinence de cette
fameuse lettre d'hier soir avec le débat que nous poursuivons. Soyons
quand même gentilshommes. Je vous prierais de terminer. Je vous permets
une dernière phrase.
M. Forget: M. le Président, je voulais simplement, en
terminant, mentionner que les problèmes qui ont été
soulevés par cette loi et ceux auxquels j'ai fait allusion dans mon
intervention sont suffisamment sérieux pour qu'une consultation ait
lieu, pour qu'on entende les intéressés. Il n'y a
véritablement pas eu, contrairement à ce que nous a dit le
ministre, la consultation à laquelle nous serions en droit de nous
attendre. Il n'y a pas eu de consultation auprès des facultés de
médecine. Il n'y a pas eu de consultation auprès des
regroupements d'internes et de résidents, et cela mérite
d'être dit à ce moment-ci.
M. Lazure: Une question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président: Un instant. Avant votre question de
privilège, je veux rappeler que l'amendement de Mme le
député de L'Acadie a été rejeté. Je ne sais
pas s'il reste une question de privilège.
M. Lazure: Très brièvement, M. le
Président.
Le Vice-Président: C'est une question de privilège
ou votre réplique?
M. Lazure: Oui, pour rectifier les faits, parce que le
député de Saint-Laurent, comme il le fait souvent, induit la
Chambre en erreur quand il prétend que le ministre des Affaires sociales
n'a pas consulté les groupements. Hier soir, j'ai donné une liste
partielle que je vais compléter ce soir. Je voulais tout de suite
rectifier les faits, M. le Président.
Le Vice-Président: D'accord.
M. Forget: Une question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président: Oui, M. le député de
Saint-Laurent, sur une question de privilège.
M. Forget: Nous n'affirmons pas sans l'avoir
vérifié nous-mêmes que, par exemple, les groupes que j'ai
mentionnés n'ont effectivement pas été
consultés.
Le Vice-Président: À l'ordre! M. le
député de Sherbrooke.
M. Gérard Gosselin
M. Gosselin: M. le Président, je veux dire quelques mots
sur le projet no 103 pour signifier que je vais voter pour cette loi, en
signalant en même temps certaines critiques ou certaines interrogations
qui me restent et qui restent dans le public à propos des
réformes de fond et des transformations de l'exercice de la
responsabilité publique dans le secteur des affaires sociales. Ce n'est
pas une chose qu'on peut réaliser d'un seul coup. C'est
nécessaire dans un monde en évolution, pas seulement pour cette
année, mais pour les prochaines années où on devra
connaître des transformations encore plus fondamentales que celles que
nous entreprenons un peu à la pièce, malheureusement, par des
projets de loi comme le projet de loi no 103.
Je voudrais dire qu'on a trop maintenu le secteur des affaires sociales
au Québec dans un attentisme qui n'a plus sa place, cet attentisme qui
fait souvent passer l'intérêt de groupes particuliers avant le
service aux patients, cet attentisme qui permet d'institutionnaliser certaines
pratiques dans les milieux de la santé, qu'on sait tous, d'entendement
commun, être parfois contraires à l'intérêt le plus
élémentaire des clientèles, cet attentisme qui permet
d'assister en maints endroits à des dédoublements de services
intolérables ou, en tout cas, qu'on ne tolérerait pas
aisément dans le secteur privé.
Cet attentisme permet de laisser vide la satisfaction de besoins
à tout prix élémentaires dans la population parce que
l'organisation traditionnelle, à certains endroits, privilégie,
par la volonté des équipes qui sont là, par l'absence de
concertation véritable, l'absence de pouvoirs coercitifs, d'autres
formes de pratique déjà surabondantes.
Je voudrais signaler, entre autres, qu'au Québec,
présentement, on connaît un vide absolument navrant, avec le
vieillissement de nos populations, de soins adéquats aux malades
chroniques et aux malades psychiatriques. À cause de l'attentisme de nos
lois, il arrive qu'on fasse, pendant des années c'est le cas un
peu chez nous des discours stériles, des
répétitions de préoccupation qui aboutissent difficilement
à créer les ressources, à forcer l'organisation
conséquente des services pour la satisfaction de ces besoins. Cette loi
s'impose au nom même d'une saine gestion des deniers publics et d'une
organisation plus fonctionnelle des services à la population. C'est
consacrer des scrupules malhonnêtes que de ne pas reconnaître
à l'autorité publique certains pouvoirs de réglementation.
Quant aux exigences relatives à la délivrance des permis,
relatives à l'établissement de critères fermes et reconnus
universellement quant aux traitements de certaines maladies dans certains
départements avec des équipes professionnelles en quantité
voulue. Je pense qu'on a par trop assisté jusqu'à présent
à un laxisme et à une forme de démission, jusqu'à
un certain point, dans l'exercice concret et immédiat, dans nos
institutions et dans nos régions, de ce
que doivent véritablement exiger la reconnaissance des besoins et
l'évolution de ces besoins et la satisfaction de ces besoins pour la
population.
Je voudrais dire un mot sur le cas du Sherbrooke Hospital parce que le
député de Mégantic-Compton en a fait l'essentiel de son
exposé de tout à l'heure et qu'il a largement
débordé la pertinence du débat. Vous me permettez de
déborder la pertinence du débat deux minutes. Je crois me situer,
de toute manière, dans la pertinence du débat pour corriger
certains faits relativement au Sherbrooke Hospital. Effectivement, dans la
région 05, dans la région de l'Estrie, cela fait des
années qu'on parle de la nécessité d'organiser des soins
conséquents pour les malades chroniques et psychiatriques. Cela fait des
années qu'on fait des forums à ce sujet, qu'on se
répète, au Conseil régional des services sociaux et de la
santé, dans les institutions, dans le public, par des reportages, que
c'est fondamentalement important d'organiser ces soins-là et qu'il
n'existe pas, malgré qu'on ait des ressources importantes chez nous
qu'on ait un Centre hospitalier universitaire et un certain nombre
d'institutions voisines de ressources franchement conséquentes
pour cette clientèle des malades chroniques et psychiatriques. Cela fait
des années qu'on en parle. Jamais on n'a encore réussi à
arrêter une décision. Jamais on n'a encore réussi,
malgré tous les efforts de concertation qui se sont faits, ni du
côté du ministère, ni du côté du conseil
régional qui, de toute manière, n'a pas les pouvoirs coercitifs
voulus pour trancher. Cela fait donc des années qu'on reconnaît ce
problème et qu'on n'a pas réussi à trouver une solution
parce qu'on se maintient dans l'attentisme, on attend le jour où tout le
monde acceptera des institutions qu'elles libèrent d'office des budgets
par leur seule et unique bonne volonté. On attend toujours cette heure
et on va attendre longtemps. Pendant ce temps-là, il va se
développer d'autres besoins dans la population et on ne les satisfera
pas, si l'autorité publique n'a pas le pouvoir d'agir. (21 h 50)
Bien évidemment, il faut agir dans la consultation. Sur les
services psychiatriques chroniques, à Sherbrooke, cela fait trois ans
qu'il y a de la consultation. Il y a eu un comité de travail que le
conseil régional des services sociaux et de la santé a mis sur
pied. Il impliquait des représentants de toutes les institutions et il a
formulé un rapport, lequel rapport n'avait même pas
été officiellement reçu par le CRSSS au moment où
il a été rendu public dans les media d'information. Je pense que
c'est important de dire cela. Ce rapport n'a pas encore été
endossé par le CRSSS. Il n'a pas encore été discuté
au conseil régional des services sociaux et de la santé.
On semble vouloir faire un cas du Sherbrooke Hospital parce que le
comité sur l'organisation des services chroniques psychiatriques
recommandait qu'une partie du Sherbrooke Hospital serve dorénavant
à organiser une unité de soins pour les malades chroniques
psychiatriques. Cette recommandation n'a pas été officiellement
discutée au conseil régional des services sociaux et de la
santé. Le conseil régional des services sociaux et de
santé a annoncé qu'il prolongeait la consultation jusqu'en
janvier et qu'il consultait systématiquement les cinq institutions du
milieu. Donc, consultation sur l'organisation des services chroniques
psychiatriques à Sherbrooke. Cette recommandation n'a pas encore
été discutée au niveau du conseil régional des
services sociaux et de la santé. C'est faire beaucoup de
démagogie à ce moment-ci, de la part du député de
Mégantic-Compton et d'autres, que de laisser entendre que le conseil
régional des services sociaux et de la santé a mal
procédé dans ce dossier.
Le Vice-Président: Question de privilège, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, d'abord, je n'ai jamais dit
que le conseil régional des services de santé avait mal... Le
député n'a certainement pas suivi mon intervention. J'ai
demandé la collaboration pour que le centre Sherbrooke Hospital ne
devienne pas uniquement un centre de psychiatrie chronique. C'est ce que j'ai
demandé dans mon intervention. Le député aurait dû
saisir également, dans les interventions que j'ai faites à la
presse la semaine dernière, et ce soir si je ne l'ai pas
cité de façon spécifique que je suis conscient
qu'il faut faire une relocalisation des services de santé. Je suis
conscient de cela mais je n'ai jamais prétendu, par exemple, que le
CRSSS avait fait... Je sais aussi que la recommandation va être
portée devant le CRSSS au mois de janvier, mais on prévient, par
un mouvement, que cela se fasse comme cela. C'est absolument inadéquat
que ce centre le devienne. C'est la rectification que je voulais faire.
Le Vice-Président: D'accord. M. le député de
Sherbrooke.
M. Gosselin: J'ai aussi dit, M. le député de
Mégantic-Compton je pense que vous allez partager mon opinion
que les responsabilités d'organisation de soins nouveaux comme
ceux-là, de départements de gériatrie ou de
départements de soins pour les malades chroniques, psychiatrique ou
autres, ces responsabilités ne sont jamais l'apanage d'un seul
organisme. Ils doivent toujours être la responsabilité conjointe
de tout un milieu et, en l'occurrence, d'une région. L'organisme
régional accrédité, en l'occurrence, c'est le conseil
régional des services sociaux et de la santé. On peut parfois se
plaindre du type de démocratie représentative qui existe dans ces
organismes mais je pense que ce serait saboter nos seuls instruments
d'intervention et de démocratie dans le secteur des affaires sociales
que de discréditer les rouages normaux de consultation qui ont cours par
les conseils régionaux des services sociaux et de la santé.
En disant cela, je ne veux pas dire que j'endosse la position du
comité de travail technique qui a formulé au conseil
d'administration du
CRSSS cette recommandation, mais je veux dire que cela fait partie des
mécanismes normaux de consultation. Je n'ai pas l'intention, quant
à moi, comme député, de m'interposer là-dedans pour
poser des jugements prématurés avant que cette consultation qui
se continue n'ait un terme par une décision formelle. Dans deux mois,
quand cette consultation sera terminée, je vais demander, par exemple,
que les décisions se prennent. On ne recommencera pas une autre ronde de
consultation trois ans de temps. Ce n'est pas vrai. Il va falloir avoir la
décence, un jour, de satisfaire vraiment aux besoins de la
population.
Ceci dit, sans préjudice à la vocation du Sherbrooke
Hospital parce que les décisions ne sont pas rendues, les consultations
ont toujours cours. Ce que je voulais ajouter dans certains
éléments de critique, je pense, c'est qu'on doit
reconnaître que cette loi 103, ce n'est pas la fin du monde, qu'elle
donne simplement certains pouvoirs coercitifs absolument
élémentaires au nom d'une saine gestion des services de
santé dans l'organisation des conseils régionaux et des
institutions. Il y a une interrogation qui pour moi reste encore ouverte. C'est
celle des pouvoirs relatifs qu'auront les régions dans une perspective
de décentralisation administrative par rapport aux pouvoirs qui
reviendront toujours au ministre.
Évidemment, un gouvernement élu répond totalement
de tous ses actes, même à travers ses organismes
intermédiaires, parce que c'est l'instance démocratique ultime.
Il est normal donc que ce soit le ministre qui, en dernière instance,
ait à approuver les budgets et à établir les
spécifications quant aux permis ou autres. Mais dans une perspective
véritable de décentralisation administrative
l'expérience est tout près de s'engager chez nous selon les
engagements qui ont été pris je pense qu'il faudra donner
aux organismes régionaux des pouvoirs beaucoup supérieurs
à ceux que nos lois actuelles leur donnent. Je pense que la loi 103
à cet égard ne donne pas, ne détaille pas ces nouveaux
pouvoirs qui devraient survenir dans une véritable
décentralisation administrative.
Je pense que d'autres dispositions législatives devront s'ajouter
dans les prochaines années, dans la cohérence avec le projet de
décentralisation du gouvernement pour mieux consacrer les pouvoirs
véritables des organismes régionaux, des institutions
régionales représentatives. J'étais hier à une
assemblée générale du Conseil régional de la
santé et des services sociaux de l'Estrie où il y avait plus de
250 personnes, dont la moitié était de simples usagers et l'autre
moitié un petit peu le personnel clinique ou médical des
institutions hospitalières. C'était une assemblée
très réussie où on a discuté abondamment à
la fois des priorités régionales et à la fois de la
conception qu'on se fait de la démocratie dans le secteur des affaires
sociales. Il y avait vraiment dans tous les ateliers, une expression unanime et
cela non plus n'apparaît pas ultimement, idéalement, dans tout ce
qu'on pourrait en souhaiter, dans le projet de loi no 103.
C'est pour cela que le projet de loi no 103 pour moi est une
étape. Il devrait y en avoir d'autres. C'est tout cet aspect de la
participation du public, la participation de la population. On a noté,
je pense, à juste titre d'ailleurs, que la notion d'usager dans un
hôpital est fort restrictive. Actuellement seule la personne qui a le
bénéfice ou l'avantage d'avoir été
hospitalisée si on peut appeler cela un avantage dans un
hôpital a le droit de se présenter et de siéger dans un
conseil d'administration. On notait, à juste titre, que cette notion
d'usager était particulièrement restrictive. On notait aussi que
les usagers dans un conseil d'administration, c'est-à-dire les
représentants de la population, avaient somme toute assez peu de
pouvoirs et étaient souvent perdus, n'avaient pas le temps de vivre les
expériences qui leur étaient nécessaires pour affirmer une
véritable représentation du public là-dessus.
On a espéré voir s'améliorer le processus de
désignation des représentants de la population dans les
organismes de santé et voir augmenter substantiellement leur nombre dans
la proportion des élus de ces conseils d'administration. Je crois que
c'est une démarche fondamentale de démocratisation qui est encore
à faire. Peu importent les contraintes que l'amélioration de nos
lois amène, y compris les améliorations très sensibles
qu'apporte le projet de loi 103, il faut se dire, et je pense qu'on en est
à l'avance convaincu, que cela va bien aller, dans le secteur de la
santé au Québec, le jour où les gens s'en sentiront
pleinement responsables, le jour où il y aura une vigilance consciente
et agissante d'un public réel, organisé, chargé de
surveiller ses intérêts autour des institutions de santé ou
des affaires sociales. (22 heures)
Ce pouvoir est encore à donner au public. Il est encore à
consacrer par des lois, il est à reconnaître dans une
opération de démocratisation des structures qui, je
l'espère, sera une étape complémentaire au projet de loi
no 103. Merci beaucoup.
Le Vice-Président: M. le député de D'Arcy
McGee, je vous reconnais même à travers vos confrères.
M. Victor Goldbloom
M. Goldbloom: Merci, M. le Président. C'est vrai à
part cela.
M. le Président, je voudrais dire quelques mots avant que nous
procédions à la mise aux voix de ce projet de loi. Je voudrais
revenir d'abord à quelque chose que j'ai soulevé hier. Dans les
commentaires du ministre sur ce projet de loi, je vous rappelle qu'il a offert
des statistiques. Il a dit que, dans certaines régions
éloignées il a mentionné la Gaspésie et le
Nord-Ouest québécois le rapport médecin/population
est d'un médecin pour 3000 citoyens, tandis que, dans la région
métropolitaine de Montréal, c'est d'un médecin par 400
citoyens. J'ai souligné la différence qui existe dans un grand
centre métro-
politain quant à la disponibilité des médecins. Je
voudrais demander au ministre si dans sa réplique il peut nous informer
sur un aspect qui, pour moi, est fondamental. J'ai dit hier, Mme la
Présidente, que l'intéressé le plus important, c'est le
malade. Quand on parle du rapport médecin/population, on parle de la
disponibilité de médecins. J'aimerais que le ministre nous dise
s'il est plus facile pour le malade d'obtenir un rendez-vous avec un
médecin, dans diverses spécialités à
Montréal avec un rapport de 1 à 400 que dans des régions
excentriques avec un rapport de 1 à 3000. Je ne suis pas convaincu que
tel est le cas.
Je suis encore, dans une faible mesure, actif dans l'exercice de ma
profession. Je connais les difficultés qu'éprouvent des citoyens
montréalais à obtenir des rendez-vous avec des
spécialistes dans divers domaines. Mme la Présidente, si le
ministre, à l'appui de sa demande du pouvoir exécutoire
d'approuver ou de désapprouver des plans d'organisation des
départements cliniques des hôpitaux, veut nous dire que c'est
parce qu'il y a une pénurie effective de médecins dans certaines
régions éloignées et que c'est pour remédier
à cette pénurie qu'il veut intervenir d'autorité avec le
pouvoir qu'il demande par ce projet de loi, il me semble qu'il devrait faire la
démonstration que vraiment il y a trop de médecins à
certains endroits et qu'il est facile pour la population d'avoir accès
à ces médecins au lieu de se contenter des chiffres bruts, parce
que les chiffres n'expriment pas ce qui arrive quand le malade prend le
téléphone et compose le numéro du cabinet de consultation
du médecin.
Deuxième point, Mme la Présidente, je voudrais
réagir à des commentaires faits il y a quelques instants par le
député de Sherbrooke, qui, à l'appui de la demande du
ministre d'obtenir par ce projet de loi des pouvoirs exécutoires, des
pouvoirs, à mon sens, exceptionnels, a invoqué le
dédoublement d'équipement dans certains établissements de
santé. Là aussi j'en sais quelque chose; je connais la
fierté, pour ne pas dire l'orgueil qui a amené des institutions
à vouloir se doter d'équipement qui était quand même
disponible dans d'autres établissements de la même
région.
Je me rappelle aussi fort bien qu'au début des années
soixante, précisément en 1961 et 1962, le gouvernement
fédéral, si mes amis d'en face m'excusent d'en parler, a
créé une Commission royale d'enquête sur les services de
santé au Canada, commission présidée par le juge Emmett
Hall. Quand cette commission a siégé à Montréal, il
y a eu certains témoignages qui ont été, pour moi,
extrêmement intéressants, en particulier celui de certains de nos
grands hôpitaux, un en particulier, qui parlait de l'expérience
vécue après une année de régime d'assurance
hospitalisation. Cet hôpital rapportait que le nombre d'admissions
à l'hôpital avait augmenté de 7% dans cette première
année de l'existence du régime d'assurance hospitalisation,
tandis que les tests de laboratoires, notamment en radiologie et en biochimie,
avaient augmentés de 25%.
Je suis conscient de cela, mais, quand même, si, dans un effort de
rationaliser la disponibilité d'équipement, de rationaliser les
dépenses, on place le malade dans une situation où son
médecin traitant est inquiet et veut procéder à certains
tests et se fait dire: II n'y a pas moyen, parce que l'on a
dépassé la norme établie au ministère des Affaires
sociales, ce n'est pas, à mon sens, dans l'intérêt du
malade que l'on aille jusque-là. Je ne veux pas exagérer, je ne
veux pas dramatiser, je veux souligner une inquiétude qui, pour moi, est
réelle, et cette inquiétude est fondamentale, parce qu'elle
concerne la bureaucratisation des soins. C'est aussi simple et aussi
fondamental que cela.
J'en arrive à mon troisième point, je veux parler de ce
qui est prévu à l'article 12. Je ne parlerai pas de l'article,
mais simplement je veux souligner une considération par rapport à
cette question de l'approbation du ministre des effectifs dans les
départements cliniques. Si le ministre réclame ce pouvoir, c'est
parce qu'il estime que la situation actuelle n'est pas satisfaisante. Si elle
n'est pas satisfaisante, de deux choses l'une: ou bien il y a des
établissements où il y a trop de médecins, ou bien il y en
a où il n'y en a pas assez. Peut-être que le ministre me dira que
les deux cas existent au Québec, qu'il y en a où il y en a trop
et d'autres où il n'y en a pas assez. (22 h 10)
Mais il y a plus que cela, Mme la Présidente. Il est
évident et je parle toujours dans l'intérêt des
malades que, s'il n'y a pas assez de médecins, il va sans dire
que les malades ne recevront pas les soins auxquels ils auront droit. S'il y en
a trop, le problème se pose différemment, mais au moins il y aura
une disponibilité de personnel professionnel. Il y a aussi une question
fort délicate, il n'est pas facile d'en parler, mais tout comme dans un
parti politique, par exemple, il faut un minimum de compatibilité entre
les membres de la formation pour qu'elle puisse fonctionner en équipe;
la même chose existe dans un hôpital.
Oui, Mme la Présidente, il y a eu, et probablement qu'il y en a
encore, des chasses gardées au Québec dans les hôpitaux.
J'en suis bien conscient; ce n'est pas pour rien que j'ai été
quatre années gouverneur de ce qui était, à
l'époque, le Collège des médecins et chirurgiens du
Québec, qui s'appelle aujourd'hui corporation professionnelle. J'en suis
bien conscient, au moins pour le passé; je suis moins renseigné
sur la situation qui peut exister aujourd'hui. Je sais qu'il y a eu des chasses
gardées, peut-être qu'il y en a encore. Mais substituer à
l'évaluation des candidatures par les gens qui sont sur place et qui
sont en mesure, au moins, de voir à ce que l'équipe puisse
fonctionner comme équipe, substituer à cela l'autorité du
ministre, je suis loin d'être convaincu que c'est dans
l'intérêt de la collectivité. Il me semble que là
aussi, si le ministre réclame de tels pouvoirs, il devrait les justifier
plus précisément qu'il ne l'a fait jusqu'à maintenant.
Mon collègue de Saint-Laurent a parlé de la fonction
enseignement qui est la particularité de nos hôpitaux
affiliés aux universités. Mme la
Présidente, je voudrais vous dire bien simplement que je ne suis
pas de ceux qui voudraient que l'enseignement devienne un prétexte pour
faire d'un hôpital universitaire une chasse gardée. Non seulement
cela, si l'on dit qu'il y a des médecins je parle toujours des
médecins, parce que j'en suis un, mais la même
considération serait pertinente pour d'autres professions de la
santé qui, de par leur formation et leur expérience,
méritent d'être absorbés dans le personnel d'un
hôpital universitaire, il y en a d'autres qui n'ont pas les
capacités, n'ont pas l'expérience qui justifieraient leur
acceptation comme membre d'une telle équipe, il me semble que l'on
condamne ceux qui se trouvent dans cette deuxième catégorie
à une permanence de déficience.
Si de tels médecins avaient le contact quotidien de ceux qui sont
les plus spécialisés, qui font de l'enseignement, qui sont
à la fine pointe du progrès médical, ce contact, cette
osmose leur serait bénéfique.
Je suis bien conscient de cela, mais, soyons francs, le problème
se pose surtout dans les grands centres. Si l'on prend l'île de
Montréal, combien y a-t-il de centaines, même de milliers de
médecins?
Est-ce que dans une telle région on dirait que tous les
médecins peuvent faire partie du personnel médical de tous les
hôpitaux, de chacun des hôpitaux, de n'importe quel hôpital?
Ce serait fort compliqué.
Je ne dis pas que le système actuel est parfait, loin de
là. Je connais ses imperfections. Je ne suis pas convaincu cependant que
la substitution de l'approbation du ministre va nécessairement
améliorer les choses. J'aimerais que le ministre nous dise plus
précisément quelles sont les améliorations qu'il voudrait
apporter en exerçant ce pouvoir qu'il demande.
Je voudrais dire un mot de ce qui paraît si ma mémoire est
fidèle, à l'article 28 un autre pouvoir qui, à mon sens,
est exorbitant. Le ministre réclame le pouvoir de fusionner des
institutions sans la participation des responsables actuels à la prise
de cette décision.
Le ministre actuel est ici depuis seulement novembre 1976. Son voisin de
gauche est ici depuis plus longtemps. Son voisin de gauche a fait ce que le
ministre n'a pas été en mesure de faire. Il s'est
élevé à combien de reprises contre les fusions
forcées? Et voici que son collègue, qui a peut-être
oublié de le consulter, je ne le sais pas. demande le pouvoir de forcer
des fusions. Mme la Président, il me semble que ce parti, qui
réclamait toujours des référendums, la participation des
intéressés, l'expression de l'avis des intéressés
sur l'opportunité de faire ou de ne pas faire une fusion, devrait
insérer dans son projet de loi au moins un mécanisme de
consultation formalisée que l'on pourrait appeler
référendum. À d'autres égards, on demande à
des membres du personnel, à des malades, à d'anciens malades ou
à des parents de malades de choisir, d'élire des membres du
conseil d'administration. Et l'on fait tout ce processus démocratique
pour arriver au point où ses personnes élues
démocratiquement sont privées du droit de s'exprimer sur
l'opportunité de la fusion de leur institution avec une autre; le
ministre s'arroge le pouvoir de décider lui-même. Il me semble que
cette demande n'est pas compatible avec le visage qu'a voulu nous
présenter, dans le passé, le parti qui aujourd'hui a les
responsabilités du pouvoir au Québec.
Aussi, Mme le Présidente, j'aimerais que le ministre me
réponde sur un point que j'ai soulevé hier dans le contexte du
débat sur une motion de report. L'article 32 permet au ministre de
comptabiliser les services bénévoles. C'est à quelle fin
exactement? J'aimerais que le ministre nous explique cela. Est-ce pour pouvoir
diminuer la contribution gouvernementale à l'institution dans la mesure
où des services auraient été fournis gratuitement par des
bénévoles? Il serait important que les institutions en question
le sachent. (22 h 20)
Nous avons devant nous un projet de loi qui est important. Le
gouvernement semble nous faire croire que c'est un projet de loi qui vraiment
n'est pas très grave, qui ne va pas très loin, qui ne
mérite pas la convocation de la commission parlementaire. À cet
égard, Mme le Président, je ne referai pas le débat
d'hier, sauf que j'aimerais vous dire que la fonction normale, légitime
et démocratique de l'Opposition dans notre système, c'est
d'alerter l'opinion publique qui, peut-être, n'a pas, au moment où
l'on en parle, réagi suffisamment pour réclamer l'occasion de
s'exprimer devant une commission parlementaire, seul endroit où cette
opinion publique peut parler directement aux élus.
Mme la Présidente, je termine mon intervention en disant ceci au
nom de mes collègues. Dans un domaine comme celui des services de
santé et de bien-être social, il serait désirable que
l'unanimité se fasse en cette Chambre. Nous sommes conscients de cela.
Nous aimerions pouvoir offrir cette unanimité au gouvernement; mais,
à cause des inquiétudes que nous inspire ce projet de loi, je
suis obligé de dire, au nom de mes collègues du Parti
libéral du Québec, que nous ne nous trouvons pas en mesure de
voter en faveur de ce projet de loi en deuxième lecture. Nous allons non
seulement écouter attentivement la réplique du ministre, mais
nous allons travailler en commission parlementaire pour obtenir des
améliorations. En fonction de ce que le gouvernement acceptera de
modifier, peut-être serons-nous en mesure de voter favorablement en
troisième lecture, mais ce n'est pas un engagement que nous sommes en
mesure de donner ce soir.
Mme le Vice-Président: La réplique de M. le
ministre des Affaires sociales.
M. Denis Lazure
M. Lazure: Mme la Présidente, je veux d'abord remercier
tous les intervenants de toutes les formations politiques, surtout les
intervenants qui ont fait des suggestions concrètes, constructives
ou qui ont posé des questions pertinentes. En particulier, je
veux souligner la contribution du député de Sherbrooke ce soir et
l'assurer que, bien évidemment, ce projet de loi n'a pas la
prétention d'aller aussi loin dans les réformes importantes qu'il
faudra un jour apporter à cette loi qui a été longtemps
connue sous le terme de bill 65 ou loi 65.
Cette loi est sans prétention, Mme la Présidente, et elle
vise essentiellement à améliorer la coordination entre les divers
éléments de cet immense réseau de 1500
établissements qui relèvent de la juridiction du ministre des
Affaires sociales. Ce projet de loi vise aussi à faire en sorte que les
régions éloignées du Québec connaissent une
meilleure qualité de soins, une plus grande quantité de soins et
qu'il y ait une meilleure répartition des effectifs médicaux
à travers le Québec.
Je vais d'abord rappeler à cette Assemblée, contrairement
à ce que plusieurs députés, en particulier, le
député de L'Acadie et le député de Saint-Laurent,
ont voulu insinuer, que ce projet de loi, au cours de sa préparation, a
été accompagné de plusieurs consultations et plus
spécialement à partir du mois de juin.
Les groupes suivants ont été rencontrés par
moi-même et par un groupe de fonctionnaires de mon ministère: La
Fédération des omnipratiens du Québec; la
Fédération des spécialistes du Québec; la
Fédération des résidents internes du Québec; les
grandes centrales syndicales oeuvrant dans le milieu des affaires sociales; le
conseil d'administration de l'Association des hôpitaux du Québec;
la conférence des conseils régionaux des services de santé
et de services sociaux.
Quand certains députés de l'Opposition du Parti
libéral essaient de faire croire à cette Assemblée, et
à la population, par ricochet, que le ministre des Affaires sociales a
procédé de façon expéditive et autoritaire, ces
députés sont de mauvaise foi et ils essaient d'induire la
population en erreur.
Quant aux deux étudiants porte-parole de deux groupements qui ont
déposé ou fait déposer hier soir une demande de commission
parlementaire sur mon pupitre, je les ai rencontrés hier soir et nous
avons convenu d'une rencontre de travail au cours de la semaine prochaine.
Contrairement aux insinuations du député de Saint-Laurent, jamais
je n'ai refusé une consultation.
Puisque j'ai parlé de l'Association des hôpitaux du
Québec, je dirai tout de suite, au départ, que cette association,
qui regroupe tous les hôpitaux du Québec, non seulement a
été consultée mais nous a présenté, au mois
d'août 1978, un document intitulé: La révision de la Loi
sur les services de santé et les services sociaux du Québec. Je
me permets de lire la recommandation no 34, puisqu'elle touche un des articles
de ce projet de loi qui a fait l'objet de plusieurs remarques négatives
de la part des partis d'Opposition. Recommandation no 34: "L'AHPQ, Association
des hôpitaux, recommande de modifier l'article 92a de la loi actuelle
afin de permettre aux centres hospitaliers, à chaque hôpital de
refuser la candidature d'un médecin, en plus des motifs
déjà énoncés, c'est-à-dire
incompétence ou malhonnêteté, pour des raisons de
provisions budgétaires insuffisantes en fonction du volume de soins
dispensés, en fonction de la vocation de l'hôpital et des diverses
disciplines pratiquées dans l'établissement".
En somme, un des articles de ce projet de loi les plus contestés
par certains membres de l'Opposition, surtout de l'Opposition officielle, a
été pratiquement transcrit mot à mot du rapport annuel de
l'Association des hôpitaux du Québec. C'est peut-être ce qui
explique qu'à part la demande des deux étudiants en
médecine représentant un certain nombre d'étudiants,
à part cette demande je le répète encore une fois
nous n'avons reçu aucune demande pour tenir une commission
parlementaire, absolument aucune. Je veux rassurer le député de
Mégantic-Compton, puisqu'il y a fait allusion au cours de son allocution
ce soir, nous n'avons reçu aucune autre demande, sauf celle des deux
étudiants en médecine.
Aussi bien, puisqu'on parle de l'Association des hôpitaux, tout de
suite toucher à l'autre article du projet de loi qui a retenu
l'attention de plusieurs intervenants: c'est celui touchant la fusion
obligatoire, dans certains cas exceptionnels. Or, l'association recommande aux
autorités compétente d'envisager la constitution d'entités
corporatives avec juridiction légale et administrative sur un groupe
d'établissements à services complémentaires. En termes
plus simples, cette recommandation, l'Association des hôpitaux en a fait
un des sujets principaux de son congrès cette année. (22 h
30)
En termes très clairs, cette recommandation nous dit, au
ministère, au gouvernement: De grâce, prenez les moyens pour qu'il
y ait une meilleure articulation allant jusqu'à la fusion puisque dans
plusieurs régions du Québec nous assistons à un gaspillage
d'argent, un gaspillage d'énergies parce que nous avons eu depuis une
dizaine d'années une multiplication excessive et inutile d'un tas de
corporations alors que les mêmes services que l'on retrouve dans deux,
trois ou quatre établissements pourraient être dispensés
par une seule corporation. Je reviendrai tantôt sur cette question de
fusion.
Mme la Présidente, hier soir on a dit plusieurs choses sur cette
question du contingentement, qu'on devrait appeler de façon plus juste
une question d'une meilleure répartition géographique des
médecins à travers le Québec. On a dit par exemple: C'est
une mesure qui va à l'encontre du libre choix par le patient de son
médecin.
Mme la Présidente, je vous soumets humblement que ces gens qui
essaient de faire peur au monde par une telle remarque ignorent que dans
plusieurs régions du Québec des milliers et des milliers de
citoyennes et de citoyens n'ont qu'un seul médecin, que ce soit sur la
Côte-Nord, que ce soit en Gaspésie, que ce soit en Abitibi. Je
pense qu'il faut dégonfler ce ballon, il faut détruire ce
mythe qu'évoquaient Mme le député de L'Acadie et M.
le député de Saint-Laurent et qu'évoquent parfois mes
confrères médecins, à savoir qu'en voulant exercer un
certain contrôle sur l'entrée massive de médecins dans
certains hôpitaux de grandes villes nous allons soi-disant priver la
population des grandes villes de libre choix du médecin. Je dis que des
milliers et des milliers de citoyens et citoyennes n'ont pas ce libre choix,
n'ont même pas le choix de se soigner eux-mêmes ou de se faire
soigner par un médecin.
Ils doivent se soigner eux-mêmes dans bien des cas. Je
répète aussi que le gouvernement du Québec dépense,
à même les deniers publics, au-delà de $2 milliards dans le
réseau des hôpitaux du Québec, au-delà de $600
millions pour les professionnels de la santé. Il me semble que la
population va comprendre que cette somme énorme, nous avons l'obligation
de faire en sorte que l'ensemble de la population du Québec en ait des
retombées justes et équitables. Que cette somme excessivement
grande, si vous voulez, cet argent qui est particulièrement rare ces
années-ci, que cet argent profite équitablement et justement aux
citoyens du Québec, qu'ils habitent en Gaspésie, en Abitibi ou
sur la Côte-Nord.
Le député de D'Arcy McGee et le député de
Saint-Laurent se posaient des questions tantôt, est-ce qu'il y a vraiment
beaucoup d'hôpitaux où on retrouve trop de médecins? La
réponse, c'est oui, et catégoriquement. Non seulement les
hôpitaux universitaires, et il faut dire que c'est dans ceux-là
où on retrouve les abus ou les excès les plus flagrants en nombre
de médecins.
Un exemple: Un hôpital de Montréal, hôpital
général avec département de psychiatrie contenant environ
85 lits, a actuellement au-delà de 50 psychiatres à temps complet
ou l'équivalent de temps complet, à son service. Sur la
Côte-Nord, aucun psychiatre. En Abitibi, un psychiatre. Un autre
hôpital de Montréal, Mme la Présidente, a parmi ses
effectifs médicaux, très nombreux, 82 pédiatres à
temps complet, ou équivalent de temps complet, pour un hôpital
pédiatrique pouvant hospitaliser environ 250 enfants. Sur la
Côte-Nord, aucun pédiatre. En Abitibi, un pédiatre. En
Gaspésie, au Bas-Saint-Laurent, quelques pédiatres.
Je pense que l'ensemble de la population va comprendre le
bien-fondé de cette mesure. Le député de Saint-Laurent a
lui-même avoué que la législation antérieure
à il y a une dizaine d'années était telle que dans
beaucoup d'hôpitaux les médecins avaient établi une
espèce de chasse gardée, une boutique fermée, boutique qui
comportait plusieurs privilèges que ces médecins ne voulaient pas
partager avec des confrères.
Le député de Saint-Laurent a même avoué que
la nouvelle loi, depuis 1970, 1971, a probablement ouvert trop grandes les
portes des hôpitaux. Moi, je dis que certainement cette loi a ouvert trop
grandes les portes des hôpitaux, et, encore une fois, au détriment
des régions éloignées.
La qualité des soins a été évoquée
par quel- ques intervenants, spécialement le député de
D'Arcy McGee. Il s'agit là, encore une fois, d'un beau prétexte
pour vouloir maintenir le statu quo. Personne n'a démontré que la
qualité des soins était synonyme de quantité de personnel
ou de quantité de médecins. Au contraire, comme le
député de Mégantic-Compton se plaît à le dire
avec raison, souvent c'est dans de petits hôpitaux où il y a peu
de personnel et peu de médecins que souvent on retrouve une excellente
qualité de soins.
Il est bien évident que les partis de l'Opposition, en
particulier les représentants de l'Opposition officielle, tentent de
discréditer ce projet de loi, tentent de faire peur à la
population. Nous pensons, de notre côté, qu'il était temps
que le gouvernement prenne ses responsabilités vis-à-vis d'une
répartition si injuste pour des centaines de milliers de citoyens de
notre Québec.
Quant aux fusions, il est bien évident que dans la très
grande majorité des cas, ces fusions recommandées par
l'Association des hôpitaux se feront sur une base volontaire, selon le
processus normal de consultation. On a eu des exemples ce soir, autant par
l'intervention du député de Mégantic-Compton que par celle
du député de Sherbrooke, que des consultations se
déroulent constamment dans toutes les régions du Québec,
que ce soit pour un changement de vocation d'un établissement ou que ce
soit pour une fusion.
Cependant, je pense qu'il est normal, toujours dans l'optique d'une
meilleure répartition des effectifs, d'une plus grande efficacité
administrative, tel que recommandé par l'Association des hôpitaux,
que le gouvernement non pas le ministre des Affaires sociales, comme on
l'a dit en faisant erreur tantôt après une consultation
obligatoire avec le conseil régional, puisse et c'est dans le
texte de loi, M. le député de D'Arcy McGee, consultation
obligatoire avec le conseil régional dans certains cas
procéder à une fusion obligatoire quand les deux parties en cause
n'arrivent pas à une entente et que cette entente est entravée
par des intérêts particuliers aux dépens du bien
public.
Mme la Présidente, en ce qui concerne les établissements
privés, ce projet de loi ne vise pas à discontinuer le
financement public des établissements privés. Ce projet de loi
vise simplement à limiter au nombre qui existe actuellement les centres
d'accueil privés ou les hôpitaux privés, à les
limiter et à favoriser, plutôt du côté du
réseau public, le développement de nouveaux services. Je trouve
un peu curieux que le député de Saint-Laurent ait la
mémoire si courte quand il dénonce une telle mesure, puisque tout
le monde le sait, c'était déjà une pratique établie
par le gouvernement antérieur.
Nous pensons que le soin aux personnes âgées ou aux enfants
handicapés ne doit pas faire l'objet d'une poursuite de profit
matériel. Nous continuons de financer les établissements actuels
et nous continuons aussi d'émettre des permis à des nouveaux
établissements privés qui sont prêts à
s'autofinancer. Je pense que la distinction est
importante et il faut que la population soit bien renseignée.
(22 h 40)
Mme la Présidente, il y a plusieurs autres inexactitudes ou
plusieurs faussetés qui ont été apportées au cours
de ce débat. Le temps ne me permet pas de les relever toutes; je
retourne à l'essentiel. L'expérience des dix dernières
années a démontré que ce projet de loi était
absolument nécessaire, car il est normal, au sujet de cette
réforme de la santé initiée par le rapport
Caston-guay-Nepveu, qu'en cours d'usage, avec l'expérience, on se rende
compte qu'il y a des choses à rajuster. C'est ce que nous faisons, mais
ce n'est pas un projet de loi ambitieux. Je pense qu'il faudra bientôt
envisager une réforme majeure de la loi actuelle sur les services de
santé et les services sociaux, surtout en ce qui concerne la composition
des conseils d'administration. Je pense que cette réforme-là
devrait faire partie d'un projet gouvernemental de décentralisation plus
général.
Je pense qu'il faut retenir que ce projet de loi est largement
désiré, largement accepté non seulement par l'ensemble de
la population, mais par l'ensemble des associations qui oeuvrent dans le
réseau des affaires sociales. Il va apporter une meilleure distribution
des soins à la population et il va aussi apporter des mesures
d'économie, chose qui n'est pas négligeable à
l'époque de difficultés économiques que nous connaissons.
Merci.
Mme le Vice-Président: La motion du ministre des Affaires
sociales proposant la deuxième lecture du projet de loi no 103, Loi
modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et
d'autres dispositions législatives, est-elle adoptée?
M. Lavoie: Mme le Président, nous désirons un vote
enregistré, mais, pour ne pas retarder les travaux, je pense qu'en vertu
de nos règlements on pourrait reporter ce vote à demain,
après la période des questions, s'il y a accord avec tous les
partis dans cette Chambre.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: C'était également notre intention de
demander un vote enregistré sur cette deuxième lecture et ce
serait parfait qu'on le fasse demain au cours de la journée.
Mme le Vice-Président: M. le leader parlementaire adjoint
du gouvernement.
M. Bertrand: D'accord, nous allons obtempérer à la
demande faite par les partis de l'Opposition afin de reporter ce vote à
demain.
Mme le Vice-Président: Puisque vous me le demandez, M. le
leader du gouvernement, nous enregistrerons les noms sur ce vote demain, au
moment de l'enregistrement des voix.
M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement.
M. Bertrand: À ce moment-ci, avant d'appeler le prochain
article, je voudrais simplement poser la question à nos collègues
de l'Opposition. Nous avions discuté tout à l'heure de la
possibilité je le dis à l'ensemble des membres de
l'Assemblée nationale, car nous en avions discuté à
l'extérieur de la Chambre d'étudier, dès ce soir,
les projets de loi no 106 et 112, l'un portant sur la ville de Saint-Eustache
et l'autre étant la Loi modifiant la Loi sur l'évaluation
foncière. Nous aurions adopté ces deux lois ce soir et
discuté du projet de loi sur les municipalités de l'Outaouais
à une autre séance de l'Assemblée nationale. J'avais
obtenu un consentement...
M. Levesque (Bonaventure): Si M. le député me le
permet, je voudrais indiquer notre collaboration la plus entière. Je
pense qu'il y a quelques instants, pendant que nous étions en Chambre,
le ministre des Affaires municipales a eu une conversation avec notre critique
en matière municipale et on pourrait peut-être commencer par le
projet de loi no 112.
M. Bertrand: D'accord. Est-ce que cela suppose aussi qu'une fois
ce projet de loi adopté on pourra passer immédiatement à
celui de Saint-Eustache et l'adopter ce soir?
M. Levesque (Bonaventure): Oui, mais on pourra peut-être
à ce moment-là, après le discours du ministre, juger de
l'à-propos de continuer.
M. Bertrand: Bon, alors, très bien. À ce moment-ci,
j'appelle l'article 150).
Projet de loi no 112 Deuxième lecture
Mme le Vice-Président: M. le ministre des Affaires
municipales propose que soit maintenant lu la deuxième fois le projet de
loi no 112, Loi modifiant la Loi sur l'évaluation foncière et
modifiant d'autres dispositions législatives. M. le ministre des
Affaires municipales.
M. Guy Tardif
M. Tardif: Mme le Président, le projet de loi no 112 donne
suite à certains éléments des deux derniers discours sur
le budget et apporte des modifications de nature à assurer que le rythme
d'implantation des rôles d'évaluation annuels, faits
conformément à la Loi sur l'évaluation foncière,
soit celui qui convienne le mieux à chaque municipalité du
Québec.
Ce projet de loi n'apporte pas d'amendement vraiment majeur à la
Loi de l'évaluation foncière. Une révision plus importante
de cette loi est toutefois envisagée, à l'occasion de la
réforme de la fiscalité municipale, laquelle devrait être
mise en oeuvre à compter du 1er janvier 1980.
En ce qui concerne les mesures découlant du discours du budget
1977/78, en raison de diverses contraintes relatives à l'agencement des
travaux de cette Chambre, certaines mesures annoncées dans le discours
du budget 1977/78, qui concerne la Loi sur l'évaluation fdncière,
n'ont pu être traduites en texte législatif, au cours de la
session dernière, non plus qu'au cours de la première partie de
la présente session. Ces mesures concernent la taxation foncière
des maisons mobiles et l'imposition d'une surtaxe sur les terrains vagues
desservis par les réseaux publics d'aqueduc et d'égout.
En rapport avec les maisons mobiles, d'abord, dans son discours sur le
budget 1977/78, mon collègue, le ministre des Finances, disait ceci: "La
maison mobile constitue une forme d'habitation de plus en plus répandue
et, comme je l'indiquais plus tôt, il serait normal de la
considérer comme telle, au niveau de la taxation. Aussi, continuait le
ministre des Finances, la Loi sur l'évaluation foncière
sera-t-elle modifiée de façon à permettre une imposition
des maisons mobiles qui s'apparentera à une véritable taxation
foncière." Plus loin il ajoutait: "Cette mesure fait partie d'un
programme de consolidation et d'amélioration de l'assiette
foncière, qui se poursuivra pendant quelques années encore et
dont la pierre angulaire est la réforme du processus d'évaluation
foncière."
Le projet de loi no 112 fait donc en sorte que les maisons mobiles ou,
plus exactement, les roulottes pour utiliser les termes mêmes de
la Loi sur l'évaluation foncière soient inscrites au
rôle d'évaluation, si elles ont acquis un caractère
d'immobilité, selon les critères édictés par le
Code civil. Quant à celles qui conservent leur caractère de
mobilité, elles continueront d'être assujetties à un permis
et à une compensation pour services municipaux, cela en vertu de
l'article 107 de la Loi sur l'évaluation foncière.
Il est à remarquer que le projet de loi no 112 ne crée pas
entièrement du droit nouveau dans ce domaine; une bonne partie de la
jurisprudence du Bureau de révision de l'évaluation
foncière et des tribunaux de droit commun est déjà
à l'effet qu'une roulotte, qui est devenue un immeuble, perd sa
qualité de roulotte et, par conséquent, doit être inscrite
au rôle d'évaluation et taxée foncièrement,
plutôt qu'assujettie au régime du permis et de la
compensation.
Ce que le projet de loi fait, c'est de clarifier les définitions
d'immeuble et de roulotte dans le sens même de cette jurisprudence.
Cependant, le projet de loi édicte une règle particulière
dans le cas des roulottes, devenues immeubles, qui sont placées sur le
terrain d'autrui. Normalement, ces roulottes devraient être
évaluées comme un tout, avec le terrain sur lequel elles sont
situées et devraient être inscrites au nom du propriétaire
du terrain. (22 h 50)
On voit d'ici les conséquences par exemple pour les
propriétaires de parcs de maisons mobiles qui devraient payer la taxe
foncière, non seulement pour le terrain dont ils sont
propriétaires, mais également pour toutes les roulottes
situées dessus et inscrites à leur nom.
Le projet de loi 112 prévoit donc que ces roulottes constituent
des immeubles distincts du terrain sur lequel elles sont placées et sont
inscrites au nom de leur propriétaire. Ainsi, chaque propriétaire
de roulotte recevra-t-il directement son compte de taxe foncière et en
sera-t-il responsable, comme n'importe lequel propriétaire
d'immeuble.
Deuxièmement, Mme la Présidente, la surtaxe sur les
terrains vagues desservis. Avec la sanction des chapitres 52 et 53 des lois de
1977 le 15 décembre 1977 les municipalités du
Québec obtenaient en principe le pouvoir d'imposer une surtaxe sur les
terrains vagues desservis, c'est-à-dire les terrains sur lesquels il n'y
a pas de bâtiment dont la valeur est d'au moins 10% de celle du terrain
et qui sont adjacents à une rue publique en bordure de laquelle les
services d'aqueduc et d'égouts sanitaires sont disponibles. Cette
législation faisait suite au discours sur le budget 1977/78 et visait
à favoriser une meilleure utilisation du territoire desservi, à
améliorer la planification du développement urbain et à
atténuer, jusqu'à un certain point, la spéculation
foncière. Toutefois en vertu des articles 521a de la Loi des
cités et villes et 696b du Code municipal, édictés par les
chapitres susmentionnés, pour que la surtaxe soit applicable il faut que
les terrains vagues desservis soient identifiés comme tels sur le
rôle d'évaluation à la date de l'entrée en vigueur
de ce rôle.
Le projet de loi 112 vise donc à rendre effectif le pouvoir
donné aux municipalités d'imposer une surtaxe sur les terrains
vagues desservis et pour ce faire il modifie la Loi sur l'évaluation
foncière de façon à donner à l'évaluateur le
pouvoir de faire, sur le rôle d'évaluation, les inscriptions
nécessaires concernant les immeubles pouvant être assujettis
à cette surtaxe. Il instaure par ailleurs une certaine souplesse afin
d'éviter que l'estimateur procède inutilement à des
recherches et analyses. Il n'a le devoir de faire ces inscriptions que s'il en
a été requis par la corporation municipale au moins sept mois
avant la date prévue pour le dépôt du rôle devant
contenir ces inscriptions. Afin que la surtaxe puisse être imposée
dès l'exercice financier municipal commencé en 1979,
considérant la période de l'année, le projet de loi
écarte provisoirement la règle concernant la date où les
inscriptions au rôle doivent être faites et celle concernant le
délai pour requérir de l'estimateur de procéder à
ces inscriptions. Voilà, Mme le Président, les mesures contenues
dans le projet de loi 112 et découlant du discours du budget
1977/78.
La deuxième série de mesures proposées par le
projet de loi 112 découle du discours sur le budget 1978/79. Plusieurs
des mesures concernant l'évaluation foncière annoncée dans
ces discours du budget sont des mesures qui seront mises en oeuvre uniquement
lors de la révision globale de la Loi sur l'évaluation
foncière. Toutefois, il est souhaitable que certaines d'entre elles
soient dès maintenant traduites sous forme de lois. C'est le cas du
nouveau régime fiscal des entreprises de
télécommunication, de la hausse
du plafond de la compensation tenant lieu de taxe pour certains
immeubles et du pouvoir du ministre des Affaires municipales de prescrire la
forme et le contenu minimal de certains documents qui s'adressent aux
contribuables.
Concernant d'abord les entreprises de télécommunication,
en vertu de la loi actuelle, Mme la Présidente, les immeubles d'un
réseau de télévision par câble sont portés au
rôle d'évaluation et donc assujettis aux taxes foncières.
Par contre, les immeubles de tout autre réseau de
télécommunication, à l'exception d'une station de
radiodiffusion ou de télévision, ne sont pas portés au
rôle. L'exploitant de ce réseau paie, à titre de taxes
foncières pour ces immeubles, une taxe égale à 10% de ses
revenus nets provenant de l'exploitation du réseau au Québec au
cours de son dernier exercice financier. Pour faire suite au discours sur le
budget 1978/79 et aux consultations qui l'ont suivi entre le gouvernement,
d'une part, et les représentants du secteur des
télécommunications, d'autre part, le projet de loi 112 apporte
des changements à ce régime fiscal.
Ainsi, les immeubles faisant partie d'un réseau de
télévision par câble ne sont plus portés au
rôle et l'exploitant d'un tel réseau est soumis dorénavant
aux mêmes règles que l'exploitant d'un autre réseau de
télécommunication. Un tel exploitant paie, à titre de
taxes foncières, une taxe basée sur son revenu brut imposable
pour son exercice financier précédent. La notion de revenu brut
imposable est définie dans le projet de loi. Le taux de cette taxe est
variable. Dans le cas d'un exploitant de réseau de
télévision par câble, c'est 2% de la première
tranche de $5 millions de revenu brut imposable et 3% pour l'excédent,
alors que dans les autres cas c'est 3% pour la première tranche de $5
millions et 5% pour l'excédent.
La raison de cette assimilation du cas du réseau de
télévision par câble à celui des autres
réseaux de télécommunication est une raison
d'uniformité et de simplification. En effet, il s'avère que
l'évaluation des immeubles faisant partie d'un réseau de
télécommunication est aussi difficile à faire que celle
des immeubles faisant partie des autres réseaux. Quant au fait de passer
d'un régime de taxation basé sur les revenus nets à un
régime basé sur des revenus bruts imposables, il appert que ce
dernier permet, d'une part, une meilleure coordination avec le régime
applicable en Ontario et s'apparente le mieux à ce que paieraient ces
exploitants en taxes foncières si leurs immeubles étaient
portés au rôle.
En corollaire, Mme la Présidente, le projet de loi 112 apporte
des changements pour favoriser la perception et le recouvrement des taxes
imposées aux exploitants de réseaux de
télécommunication et de distribution par câble, notamment
en prévoyant que les états de revenus et le paiement de la taxe
doivent être transmis au ministre du revenu dans les six mois de la fin
de l'exercice financier concerné et en prévoyant le transfert de
la dette lorsqu'une corporation débitrice de la taxe cesse d'exister
avant de l'avoir payée. De plus, le projet de loi 112 supprime certains
pouvoirs donnés dans des chartes municipales permettant d'imposer une
taxe supplémentaire aux utilisateurs ou exploitants des services ou
appareils téléphoniques.
Tel qu'annoncé dans le discours du budget 1978/79, Mme la
Présidente, le taux maximal de la compensation pour services municipaux
qu'une municipalité peut exiger des propriétaires d'immeubles
exempts de taxes foncières, comme les écoles, les hôpitaux
et les centres d'accueil, est porté de $0.30 à $0.50 par $100
d'évaluation sans, évidemment, qu'il puisse excéder le
taux de la taxe foncière générale dans ces
municipalités. Cette hausse est rétroactive au début de
I'exercice financier municipal commencé en 1978. (23 heures)
Cette modification est, bien sûr, due à la croissance du
coût des services municipaux et vise à aider les
municipalités à récupérer une plus grande partie
des frais encourus pour fournir les services municipaux aux immeubles exempts
de la taxe foncière.
Quant à la mesure concernant la prescription que le ministre des
Affaires municipales peut avoir quant à la forme et au contenu de
certains documents relatifs à la perception de la taxe foncière,
le projet de loi no 112 donne en effet au ministre des Affaires municipales le
pouvoir de prescrire par règlement la forme et le contenu minimal de
certains documents comme le compte de taxe foncière
générale, l'avis d'évaluation et le certificat de
l'évaluateur modifiant un rôle.
Ceci se situe dans le cadre d'une politique d'information du
contribuable afin de faciliter sa compréhension et d'améliorer sa
perception de l'administration locale. Cette innovation s'inscrit
également dans la recherche d'une plus grande transparence au niveau
local et d'une plus grande démocratisation de l'appareil administratif
municipal. Les travaux nécessaires à l'adoption du
règlement en question vont bon train et un projet est en voie
d'élaboration. Des consultations sont actuellement menées
auprès de quelques municipalités et nous prévoyons pouvoir
adopter le règlement vers la fin de janvier 1979. Nous envisageons la
possibilité de publier ce règlement vers cette date mais de ne le
mettre en vigueur qu'à compter du 1er janvier 1980 de sorte que les
municipalités pourraient facultativement s'y conformer en 1979.
Le projet de loi no 112 contient d'autres amendements à la Loi
sur l'évaluation foncière qui ne découlent pas des deux
derniers discours du budget. Certes, le plus important de ces amendements
est-il celui qui assure l'implantation des rôles annuels dits de nouvelle
génération, selon le rythme le plus convenable pour chaque
municipalité du Québec.
Dans l'état actuel de la Loi sur l'évaluation
foncière, le ministre des Affaires municipales a le pouvoir par
ordonnance de fixer le premier exercice financier pour lequel le premier
rôle annuel des corporations municipales doit être fait. Le 11 mars
1977, le ministre a signé une ordonnance s'adres-sant à toutes
les corporations municipales à
l'exception de celles faisant partie d'une corporation de comté
et fixant non pas un exercice financier précis pour l'application du
premier rôle annuel mais plutôt une échéance ultime,
soit l'exercice financier commençant en 1984. Cette ordonnance est
entrée en vigueur le 15 avril 1977. Donc, à compter de cette
date, ces corporations municipales sont devenues visées par une
ordonnance ministérielle même si celle-ci leur laissait le choix
de l'exercice financier pour lequel leur premier rôle annuel devait
être fait.
Cependant, l'article de la Loi sur l'évaluation foncière,
qui dit que l'évaluateur doit faire le rôle pour chaque exercice
financier, donc, qui lui impose l'obligation de faire un rôle annuel,
prend effet à compter de la date où la corporation municipale est
visée par une ordonnance. L'ensemble des corporations municipales ayant
été visé par une ordonnance le 15 avril 1977, les
évaluateurs du Québec avaient donc l'obligation de
préparer un rôle annuel à compter de cette date. Ainsi,
tous les rôles de ces corporations, pour leur exercice financier
commençant en 1978, auraient dû être des rôles
annuels.
On voit donc la contradiction entre l'ordonnance qui visait à
respecter l'esprit général de la loi et cet esprit, Mme la
Présidente j'insiste pour dire qu'il était de ne pas
obliger les municipalités à procéder toutes ensembles et
dans des délais très courts à la confection des nouveaux
rôles d'évaluation et à étaler ceci sur une
période de cinq ans cet esprit, dis-je, venait en contradiction
avec un passage particulier de la loi. Le projet de loi no 112 vise donc
à corriger cette contradiction et opte pour l'esprit que sous-tendait le
projet de loi qui avait été adopté à
l'époque. En effet, il est inconcevable que ces corporations municipales
soient tenues d'avoir des rôles annuels depuis 1978. La réforme
serait beaucoup trop brusque pour avoir les effets bénéfiques
escomptés. La somme de travail exigée des évaluateurs
serait beaucoup trop grande. Les coûts de préparation des nouveaux
rôles seraient beaucoup trop élevés.
Ainsi, le projet de loi corrige donc la Loi sur l'évaluation et
une autre disposition pertinente de façon que le rythme d'implantation
des nouveaux rôles soit le plus conforme possible aux moyens et à
la volonté de chaque municipalité. Le pouvoir du ministre de ne
fixer par ordonnance que l'exercice financier ultime pour lequel doit
être fait le premier rôle annuel est donc confirmé. Le
pouvoir de chaque municipalité de choisir, si elle le veut, un exercice
financier antérieur à celui fixé par l'ordonnance est
introduit. L'obligation pour l'évaluateur de faire un rôle annuel
prend effet au début de l'exercice financier qui précède
celui fixé par l'ordonnance ou choisi par la municipalité selon
le cas.
Toutes les autres modifications de concordance sont faites pour
éviter toute confusion. Ces corrections ont un effet rétroactif
à la date de la signature de la première ordonnance, mais les
rôles annuels faits entre cette date et l'entrée en vigueur du
projet de loi sont validés.
Enfin, Mme la Présidente, la question tou- chant les ententes
concernant les services municipaux. Dans l'état actuel du droit, la
compensation que paient les propriétaires d'immeubles exempts de taxes
foncières remplace toute autre taxe ou compensation pour les services
municipaux qui pourraient être exigés d'eux. Malgré la
hausse de $0.30 à $0.50 les $100 d'évaluation que propose le
projet de loi no 112 concernant le maximum du taux de cette compensation, il
reste que dans bien des cas cette compensation est grandement inadéquate
pour éviter à la municipalité des pertes
considérables occasionnées par la fourniture de services
municipaux à un immeuble exempt de taxes foncières.
Aussi, Mme la Présidente, ce projet de loi no 112 permet-il
à la municipalité et au propriétaire d'un tel immeuble de
s'entendre pour que ce dernier paie une somme d'argent en sus de la
compensation exigible en contrepartie des services municipaux dont
bénéficie son immeuble.
Dernier point, Mme la Présidente. Actuellement, la Loi sur
l'évaluation foncière prévoit que, lorsqu'un immeuble d'un
gouvernement étranger est déclaré exempt de taxes
foncières par le gouvernement du Québec, il est automatiquement
assujetti à la compensation dont on vient de parler, laquelle est
plafonnée. Toutefois, dans les faits, en vertu d'accords de
réciprocité, il arrive que le gouvernement paie à la place
du gouvernement étranger, nous dit le gouvernement du Québec,
paie à la place du gouvernement étranger le plein montant non
limité de la compensation exigée pour un service municipal, comme
un contribuable ordinaire.
Le projet de loi no 112, afin de valider et d'encourager cette situation
et de maintenir les revenus ainsi obtenus par les municipalités,
enlève la règle voulant qu'un immeuble d'un gouvernement
étranger déclaré exempt de taxes foncières soit
automatiquement assujetti à la compensation plafonnée. Mme la
Présidente, ce projet de loi vivement attendu par le monde municipal,
qui a déjà commencé dans certains cas à se
prévaloir de certaines mesures, notamment la surtaxe sur les terrains
vagues desservis, répond à un besoin, d'autant plus que, dans
certains cas, elle permet de taxer le gouvernement du Québec,
rétroactivement au 1er janvier dernier. Je vous remercie. (23 h 40)
M. Gratton: Mme la Présidente.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Gatineau.
M. Michel Gratton
M. Gratton: Le moins que l'on puisse dire, c'est que le projet de
loi à caractère plutôt technique que le ministre des
Affaires municipales nous demande d'étudier, nous vient à une
heure quand même assez tardive, compte tenu qu'il est 23 h 10. Je
prendrai donc le moins de temps possible pour exprimer les réserves que
l'Opposition officielle a par rapport à ce projet de loi no 112, Loi qui
modifie la Loi sur l'évaluation foncière
et qui modifie également d'autres dispositions
législatives.
Il faut dire qu'on ne retrouve rien de bien nouveau dans ce projet de
loi, puisque, comme le ministre l'a dit, il s'agit de modifier la Loi de
l'évaluation foncière pour tenir compte de certaines
propositions, de certaines décisions qui nous avaient été
annoncées dans les budgets de 1977/78 et 1978/79.
Quant à la première considération, soit celle de
taxer les roulottes qui ont un caractère d'immobilité au
même titre que les habitations normales, cela constitue, bien entendu,
une source de revenus additionnelle pour les municipalités.
Forcément, cela constitue par le fait même une hausse des taxes
foncières que devront payer les personnes qui habitent lesdites
roulottes. Cela donne suite, comme l'a dit le ministre, au budget de 1977/78.
Quant à nous, M. le Président, ce n'est pas un principe sur
lequel nous nous battrons bien longtemps, sauf qu'en commission parlementaire,
nous pourrons peut-être formuler certaines suggestions au ministre.
Quant à la surtaxe de 50% que les municipalités peuvent
imposer aux propriétaires de terrains vacants, mais pour lesquels les
services municipaux sont disponibles, on sait que l'an dernier cette
Assemblée nationale avait adopté les projets de loi qui
modifiaient la Loi des cités et villes et le Code municipal pour
permettre aux municipalités d'imposer cette surtaxe. Il s'agit ici d'un
article, à toutes fins utiles, de concordance, qui indiquera aux
municipalités de quelle façon elles pourront se prévaloir
de ces pouvoirs qui lui ont été accordés l'an dernier lors
de l'adoption de ces projets de loi. Encore là, il s'agit d'une
proposition qui était contenue dans le budget de 1977/78 et qui, selon
les indications que nous a fournies le gouvernement, a pour objectif de faire
en sorte que les terrains vacants, dans les municipalités du
Québec, terrains où les services municipaux tels les
égouts et les aqueducs sont disponibles... Cette proposition voulait
motiver les propriétaires de ces terrains vacants à les
exploiter, à faire des constructions le plus tôt possible
plutôt que de perpétuer cette tendance qu'il y a pour les gens de
déménager en banlieue.
Or, il faut bien faire remarquer que l'imposition d'une telle surtaxe
peut bien avoir exactement le résultat contraire de l'objectif que l'on
recherche. Effectivement, ce n'est pas nécessairement pour strictement
des fins de spéculation que certains spéculateurs sont
propriétaires de terrains vacants dans les centre-ville ou dans le
périmètre, dans les parties plus urbanisées d'une ville.
Assez souvent, le propriétaire d'un terrain vacant ne trouve pas
à cause des coûts inhérents, taxes, entretien, etc.
d'acheteur pour le prix minimum qu'il doit obtenir pour réussir à
couvrir ses frais. Imposer une surtaxe de 50% ne fera que rendre encore plus
critique la situation, c'est-à-dire qu'en augmentant les coûts, il
sera encore plus difficile pour ce propriétaire d'en disposer.
Forcément, la municipalité qui se prévaut de cette
disposition le fera sans doute et dans tous les cas, toutes les
municipalités s'en prévaudront parce que, justement, il est
question, dans toutes ces mesures que le projet de loi no 112 contient, de
fournir des sources de revenus additionnels aux municipalités. Rares
seront celles qui ne les imposeront pas.
Quant à la taxe pour les compagnies de
télécommunications, encore là, il s'agit d'une mesure qui
nous avait été annoncée dans le budget de 1978/79. Le
principe de taxer sur la base du revenu brut, M. le Président,
plutôt que sur la base du revenu net, comme c'était le cas, comme
c'est encore le cas, jusqu'à l'adoption de ce projet de loi, nous
apparaît dangereux. En effet, les compagnies de
télécommunications et les autres, peuvent fort bien fonctionner
sans réaliser de bénéfices nets et cette notion de taxer,
même si on réduit le pourcentage de 10% qui est imposé sur
le revenu net, comme l'a expliqué le ministre dans le cas de la
télévision par cable, à 2% sur le revenu brut,
jusqu'à concurrence de $5 millions, de 3% sur l'excédent et,
quant aux autres compagnies, de 3% du revenu net jusqu'à $5 millions et
de 5% pour l'excédent, cette notion fera en sorte, je présume en
tout cas, que les compagnies qui réalisent des bénéfices
moindres présentement subiront effectivement une augmentation de
taxes.
On peut bien se limiter à dire que de taxer une compagnie de
distribution par cable, par exemple, n'a rien de répréhensible en
soi, sauf qu'il faut pousser la logique jusqu'à la réalité
à savoir que plus les compagnies de cablodistribution paieront des
taxes, forcément plus les usagers des services fournis par ces
compagnies devront payer, puisqu'il sera tout à fait normal et logique
que ces compagnies ajustent leurs taux, leurs factures, pour prendre en
considération ces hausses de taxes.
Il y a un autre élément, quant à cette partie du
projet de loi, que le ministre n'a pas touché. C'est la disposition que
l'on retrouve dans le projet 112 quant à la répartition des
revenus qui découleront de cette mesure. La loi, présentement,
stipule que la totalité des revenus les revenus provenant de
l'application de l'article 100 après déduction de leurs
frais de perception, sont répartis entre les corporations municipales.
Or, le projet de loi 112 propose qu'on amende la formule de répartition,
en disant que la totalité ou une partie des revenus provenant de
l'application de l'article 100 sont répartis entre les corporations
municipales. (23 h 20)
Je pense, M. le Président, qu'il y a lieu de poser la question au
ministre. Est-ce qu'effectivement, du fait d'avoir fait sauter la partie de
l'article de la loi actuelle qui exige que le gouvernement du Québec
fasse la répatition de la totalité des revenus de cette taxe,
après déduction des frais de perception, puisque le projet de loi
no 112 nous propose maintenant un article qui n'obligera pas le gouvernement
à remettre la totalité de ses revenus aux municipalités,
il y a lieu de se demander, M. le Président, si l'intention du
gouvernement n'est pas de se servir de ces revenus, à répartir
parmi les municipalités, pour fins de négo-
ciations, quant à l'ensemble de la réforme fiscale qui est
annoncée et dont nous verrons sûrement les effets très
prochainement? Présentement, je le répète, le gouvernement
doit remettre aux municipalités, l'ensemble des revenus qui proviennent
de cette taxe, après déduction des frais de perception. Or, le
projet de loi 112, s'il est adopté, fera en sorte que le gouvernement
n'aura aucune obligation de remettre la totalité de ces revenus, mais il
pourra le faire en partie. À ce moment, il est important que les maires
et conseillers d'une municipalité sachent que, si on leur donne une
façon d'aller chercher des revenus additionnels auprès de ces
compagnies de télécommunications, ce n'est pas
nécessairement vrai, à moins que le ministre ne nous l'affirme au
moment de sa réplique. À ce moment, s'il devait nous l'affirmer,
nous insisterions, bien entendu, en commission parlementaire, pour que la
rédaction de l'article en question soit faite en conséquence et
pour qu'il n'y ait d'ambiguïté pour personne.
Quant à la mesure qui touche la compensation que les
municipalités reçoivent des propriétaires
d'édifices, tels que les édifices gouvernementaux, écoles,
hôpitaux, etc., compensation que les municipalités
reçoivent en remplacement de la taxe foncière que ces
institutions ne paient pas, le projet de loi propose que le maximum qu'il est
permissible aux municipalités d'exiger, qui est présentement de
$0.30 les $100 d'évaluation, passe à $0.50. La disposition du
projet de loi qui permet à une municipalité, s'il y a entente
avec le propriétaire dudit édifice ce pourrait être
le gouvernement du Québec aussi bien que le gouvernement
fédéral ferait en sorte que la municipalité puisse
imposer ou puisse percevoir un montant supérieur à ces $0.50
d'évaluation.
On nous dit qu'il s'agit là d'une mesure que le ministre des
Finances avait promise, lors de la conférence
Québec-municipalités de juin dernier.
Concernant les immeubles étrangers ou immeubles qui appartiennent
à des gouvernements étrangers dans la loi actuelle, c'est le
lieutenant-gouverneur en conseil qui détermine quels sont ces immeubles,
mais la compensation prévue à l'article 5 du projet de loi ne
s'applique pas nécessairement. C'est ainsi que, si le projet de loi no
112 est adopté tel quel, le lieutenant-gouverneur en conseil pourra
déterminer quels immeubles de gouvernements étrangers seront
assujettis à cette taxe de $0.30 et lesquels ne le seront pas. Cela
permettra à titre d'exemple, M. le Président au
lieutenant-gouverneur en conseil de décréter que la France, par
exemple, n'a pas à payer de compensation à la
municipalité, là où son ambassade est située, et
possiblement qu'on pourrait imposer au propriétaire, la Grande-Bretagne
ou un autre pays, cette taxe de $0.30
Bien entendu, M. le Président, il n'y a rien là pour nous
énerver outre mesure, mais c'est à se demander pourquoi le
gouvernement juge utile, à ce moment, de déroger à la loi
que tous connaissent, à la loi telle qu'elle existe présentement
en cette matière.
Il y a une autre question à laquelle j'aimerais que le ministre
nous fournisse une réponse lors de sa réplique. On retrouve au
projet de loi deux annexes qui constituent une liste de municipalités.
Je pense deviner de quoi il s'agit, M. le Président, mais j'aimerais que
le ministre explique les raisons de ces deux annexes.
Finalement, on sait qu'il y a environ 10% des municipalités qui
ne relèvent pas du bureau de révision de l'évaluation
municipale quant aux appels sur l'évaluation. Le ministre des Affaires
municipales nous avait dit, au moment de l'étude des crédits en
mai 1978, et je cite le ruban 2389 du journal des Débats, M. le
Président: "II est prévu en effet que le bureau de
révision de l'évaluation foncière deviendra l'instance
d'appel pour toutes les municipalités au Québec." J'aimerais que
le ministre nous dise pourquoi il ne saisit pas l'occasion qu'il a avec ce
projet de loi no 112 pour concrétiser cette affirmation, cet engagement
qu'il prenait en mai dernier, c'est-à-dire de faire en sorte que
l'ensemble des municipalités, les 10% environ des
municipalités qui ne relèvent pas du bureau de
l'évaluation, relèvent de ce bureau comme toutes les autres.
En conséquence et en résumé, ce projet de loi, de
nature plutôt technique, vise à fournir aux municipalités
un certain nombre de sources de revenu additionnelles; par contre, il institue
des principes qui, dans certains cas, sont loin de recueillir l'appui de
l'Opposition officielle et c'est plutôt en commission parlementaire, au
moment de l'étude article par article, que nous pourrons débattre
avec le ministre du bien-fondé de certaines de ces dispositions.
Le Vice-Président: M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Fabien Cordeau
M. Cordeau: M. le Président, le projet de loi 112 que nous
devons étudier actuellement, à 23 h 30, en deuxième
lecture, et qui a pour titre: Loi modifiant la Loi sur l'évaluation
foncière et modifiant d'autres dispositions législatives, je
crois, s'inscrit dans le cadre de la réforme fiscale telle que
présentée par le ministre en juin dernier à la
conférence Québec-municipalités. M. le Président,
on ne peut s'opposer à des mesures qui visent à redonner, du
moins pour le moment, une répartition de revenu plus
élevée pour les municipalités dans une autonomie relative
accrue. Par ce projet de loi, les maisons mobiles, qui seront devenues des
immeubles, seront inscrites au rôle d'évaluation des corporations
municipales et assujetties au paiement de taxes sur immeubles.
Un autre aspect de ce projet de loi a pour but d'indiquer au rôle
d'évaluation les immeubles pouvant être assujettis à la
surtaxe sur les terrains vagues desservis et dont l'imposition est
prévue par la loi des cités et villes et le Code municipal.
Nul doute que cette imposition incitera les propriétaires de
terrains vagues actuellement desservis par les services d'aqueduc et
d'égouts à se départir de leurs terrains, et cela, pour le
plus
grand bien de la municipalité qui y trouvera, pour la
construction d'immeubles, des revenus accrus. (23 h 30)
Concernant les terrains vagues, je crois que le projet de loi 90 sur la
protection du territoire agricole créera en milieux urbain ou
semi-urbain une rareté de terrains étant donné que le
projet de loi 90 interdit la construction de maisons le long des routes en zone
agricole où les services d'égouts et d'aqueduc ne sont pas en
place. Afin d'éviter, en milieux urbain ou semi-urbain, une hausse
galopante du prix des terrains, je demande au ministre des Affaires municipales
d'accorder aux municipalités le pouvoir d'acquérir des terrains
aux fins d'habitation. Actuellement, les municipalités ont le pouvoir
d'acquérir des terrains pour fins industrielles ou commerciales.
Pourquoi ne pourraient-elles pas avoir le pouvoir d'acquérir des
terrains aux fins d'habitation? Un tel pouvoir accordé aux
municipalités leur permettrait de mettre à la disposition de
leurs citoyens des terrains pour un prix raisonnable.
M. le Président, je crois sincèrement que personne ne
s'opposera à ce que les propriétaires de certains immeubles
publics ou parapublics, exempts de taxes foncières, aient à payer
une compensation de $0.50 par $100 d'évaluation. De plus, ce projet de
loi permet, moyennant entente, le paiement de sommes d'argent
supplémentaires en contrepartie des services municipaux dont
bénéficient ces immeubles.
Est-ce que le ministre pourrait nous faire part sur quelle base les
parties en cause pourront discuter pour s'entendre sur ce sujet?
En terminant, je ne peux m'empêcher de souligner que ces revenus
additionnels pour les municipalités seront certainement les bienvenus,
mais en contrepartie il ne faut pas oublier que ces sommes d'argent
proviendront, en définitive, toujours du même endroit, soit le
citoyen. Par contre, tantôt M. le ministre a fait allusion au fait qu'il
voulait uniformiser les privilèges accordés à certaines
villes soit en leur enlevant certains privilèges qui leur furent
accordés par certaines lois spéciales. À regret, M. le
Président, je dois vous dire que, à l'article 19, la ville de
Saint-Hyacinthe y est mentionnée et, à cause de cet article, elle
perdra $111 000 de revenus l'an prochain. Nous fournirons en commission
parlementaire les chiffres dont le ministre aura sans aucun doute besoin.
On me demande si je vais voter en faveur.
Une voix: Comme conseiller municipal, cela ne vous touche
pas.
M. Cordeau: Également, on parle dans le projet de loi
d'une taxe, c'est-à-dire d'un changement à la taxation sur les
entreprises de télévision par câble. Là aussi, il ne
faut pas oublier que ce qui sera imposé aux compagnies sera par
après imposé aux citoyens pour les services qu'il recevra. Je
vous remercie.
Le Président suppléant (M. Jolivet): M. le
ministre.
M. Guy Tardif
M. Tardif: M. le Président, je vais tenter d'apporter un
certain nombre de réponses aux questions soulevées. Je pense que
l'essentiel pourra cependant être fait lors de l'étude article par
article, puisqu'il ne s'agit pas d'objection sur le principe même de la
loi mais bien sur certains passages. En conséquence, pour certaines
réponses, il faudra attendre en commission parlementaire lors de
l'étude article par article.
Je voudrais tout simplement dire ceci concernant la taxe sur les
roulottes. Si, d'une part, celles-ci, devenues immobiles, privées de
leurs roues, mises sur une assise de béton ou autrement sont rendues
fixes, elles vont être taxées dorénavant comme des
immeubles. Par ailleurs, il faut penser que le discours du budget qui
annonçait cela annonçait également que ces immeubles
nouveaux allaient être dorénavant exemptés de la taxe de
vente. C'est quand même la contrepartie; à partir du moment
où ce n'est plus un bien meuble mais un bien immeuble, on exempte de la
taxe de vente de 8% et, à la place, il y a celle-là. Ce ne sont
donc pas deux mesures où, enfin, un type d'habitat qui serait
taxé deux fois.
Deuxième élément, c'est la surtaxe sur les terrains
vagues desservis. Je voudrais simplement rappeler certains chiffres que je
citais à l'occasion de mon discours en deuxième lecture sur le
projet de loi 90, sur la protection des territoires agricoles, à savoir
que, pour viabiliser un terrain, faire passer devant ce terrain des tuyaux
d'égout, d'aqueduc, des rues et des trottoirs, il en coûte
au-delà de $110 le pied linéaire; pour un terrain de 60 pieds de
façade, il en coûte à peu près, actuellement, $6700.
Lorsqu'on pense que, dans certaines municipalités, il peut y avoir 500
000 terrains viabilisés, c'est-à-dire desservis, pour lesquels il
a coûté à la collectivité $6700 chacun s'ils ont
été viabilisés au cours des deux ou trois dernières
années, ces coûts sont assumés par l'ensemble de la
population...
À ce moment-là, que le propriétaire devant le
terrain duquel passent ces immeubles se décide et qu'il construise son
immeuble ou, peut-être, qu'il construise sur son terrain et qu'il le
vende...
En ce qui concerne les entreprises de télécommunication,
le député de Gatineau a dit: C'est dangereux, parce que certaines
de ces entreprises pourraient ne pas faire de revenus nets, c'est-à-dire
une fois toutes les dépenses payées... je vous rappellerai que
cette mesure touchant les entreprises de télécommunication ne
s'adresse pas aux petites entreprises que des individus ordinaires
possèdent; il s'agit d'entreprises comme la compagnie de
téléphone Bell, il s'agit d'entreprises comme CNCP. D'autre part,
ces entreprises paient, en Ontario, sur la base de leurs revenus bruts, ce qui
rapporte à peu près $25 millions de plus en Ontario qu'au
Québec. C'est donc dire, étant donné que ce sont les
mêmes compagnies qui font affaires toutes les deux, que nous
subventionnons la compagnie de téléphone Bell pour des taxes
qu'elle paie en Ontario. Je pense que cela
est beaucoup plus malsain et qu'il y a lieu de corriger cette
situation.
Quant à l'article 100 j'y arriverai lors de l'étude
article par article je voudrais tout simplement dire que l'ancien
article 101, qui disait comment étaient réparties les sommes,
prévoyait quand même que le ministère du Revenu qui les
percevait pouvait garder des frais de perception. Ce n'est plus formulé
de la même manière. Il faudra voir si la totalité ou la
partie s'applique précisément aux frais de perception. Je veux
bien vérifier cela avec le ministre des Finances et du Revenu pour
donner la réponse en commission parlementaire.
La question posée, c'est: Pourquoi ne profite-t-on pas de
l'occasion pour rendre le BREF, le Bureau de révision
d'évaluation foncière, universel, sur tout le territoire du
Québec. Ce bureau, qui a été créé par la Loi
d'évaluation foncière, a quand même pris un certain rythme
de croisière et c'est à l'occasion de la grande réforme de
la loi d'évaluation que nous voudrions étendre sa
compétence. Nous avons plutôt ici tenté de parer au plus
pressé en donnant effet au discours du budget. Il est bien
évident qu'avec la réforme de la fiscalité municipale, la
loi devra être refondue presque entièrement. (23 h 40)
Dernière remarque concernant les interventions du
député de Saint-Hyacinthe. Il a raison de dire que cette mesure
s'inscrit dans le sens de la réforme fiscale en ce sens que les biens
gouvernementaux, qui étaient taxés à un taux de $0.30 des
$100, le seront maintenant à $0.50 plus une compensation de services,
c'est-à-dire une espèce de tarification pour les services et que
c'est un pas dans la direction qui consiste à faire en sorte, ou vers
l'objectif qui consiste à faire payer au gouvernement une taxation
à pleine valeur de ses biens comme tout autre contribuable. C'est donc
un pas dans cette direction, le reste venant avec la réforme de la
fiscalité.
Maintenant, M. le Président, le député de
Saint-Hyacinthe posait la question: Mais alors, sur quelle base pourraient
négocier les municipalités avec le gouvernement ou les
propriétaires de l'immeuble exempt des services? Cela peut être
sur différentes bases. Cela peut être sur le coût
réel d'installation des services, par exemple, pour rendre un tuyau
d'égout et d'aqueduc à un cégep, à un hôpital
situé à un quart de mille à l'extérieur. Cela peut
s'évaluer, ces coûts-là. Cela peut être sur une base
de tarification, tant du gallonnage. Enfin, la base n'est pas
précisée dans la loi. Les municipalités peuvent la
déterminer selon leurs coûts réels, leurs coûts
effectifs. Je voudrais terminer, M. le Président, en disant que j'ai
pris bonne note de la suggestion du député de Saint-Hyacinthe sur
la création de réserves foncières pour des fins
d'habitation par les municipalités.
Actuellement, au Québec, c'est vrai, il n'y a que six
municipalités qui ont ce pouvoir d'acquérir des immeubles pour
des fins autres que municipales. Montréal en est une, Sainte-Foy en est
une autre; il y en a six seulement qui ont ce pouvoir dans leurs charges. Je
pense qu'effectivement nous devrions nous orienter vers une politique
foncière où les municipalités pourraient ou bien se porter
acquéreurs de terrains pour des fins d'habitation ou bien, en tout cas,
en faciliter l'utilisation pour ces fins. Je dois dire qu'au niveau des
principes je suis tout à fait d'accord. J'ai une équipe qui est
au travail là-dessus. C'est une question complexe. On comprendra qu'on
ne veut pas que les municipalités se servent des deniers publics pour
acheter des terrains à prix chers pour ensuite les céder à
vil prix à des promoteurs.
Je pense qu'avec les balises qui pourraient être contenues dans un
tel projet de loi... Au niveau du principe, je suis totalement d'accord et
j'inviterais le député de Saint-Hyacinthe à s'en souvenir
lorsqu'un projet de loi à cet effet sera déposé devant
cette Chambre. Merci.
Le Vice-Président: Est-ce que la motion de deuxième
lecture du projet de loi no 112, Loi modifiant la Loi sur l'évaluation
foncière, sera adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture du projet
de loi.
Le Vice-Président: Sur division? Adopté sur
division. Oui, adopté sur division.
M. le leader parlementaire suppléant.
Renvoi à la commission des affaires
municipales
M. Lessard: M. le Président, je voudrais faire une motion
de renvoi à la commission parlementaire des affaires municipales.
Le Vice-Président: Cette motion sera-t-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté.
M. Lessard: M. le Président, j'appellerais l'article
140...
M. Lamontagne: Question de règlement.
Le Vice-Président: Oui, M. le député de
Roberval.
M. Lamontagne: C'est à vous que je voudrais m'adresser, M.
le Président. Depuis quelques jours, nous réclamons, quant
à nous, une réunion des leaders de tous les partis à
l'Assemblée nationale pour essayer de mieux coordonner nos travaux. Je
ne crois pas, M. le Président, qu'il soit tout à fait normal de
commencer un projet de loi, l'étude d'un projet de loi important
à minuit moins quart. La meilleure preuve c'est que le ministre des
Transports, je lui en sais gré, doit agir ce soir
à titre de leader du gouvernement, les trois sont mêmes
absents. Je sollicite que dès demain il y ait une meilleure organisation
des travaux et que vous-même, M. le Président, vous
suggériez fortement à tous les membres de cette Assemblée
de prendre ce soir une bonne nuit de repos. Nous avons commencé un
nouvel horaire lundi avec une journée de tempête. Les
députés ont eu de la difficulté à venir ici,
jusqu'à 12 h 45 mardi, jusqu'à 1 h 45 ce soir, on commence, 23 h
45, pour peut-être se rendre jusqu'à 2 heures. Je
suggérerais, dès demain matin, une réunion des leaders
pour essayer de voir comment nous pourrons faire fonctionner nos travaux parce
que tout le long de la semaine et les semaines subséquentes nous aurons,
l'Union Nationale, nous-mêmes et d'autres à donner notre
consentement continuel pour la bonne marche des travaux.
Nous vous assurons dès à présent notre
collaboration, mais nous voudrions également demander à la
présidence de voir à une bonne marche régulière des
travaux pour une fin de session sans exagération. J'ai l'impression
qu'on est en train d'exagérer.
M. Lessard: M. le Président.
Le Vice-Président: M. le leader parlementaire
suppléant.
M. Lessard: Je pense qu'il y a quand même eu des
discussions entre les leaders parlementaires pour que nous puissions engager la
discussion, ce soir, sur le projet de loi no 106 concernant la ville de
Saint-Eustache. D'ailleurs les représentants de la ville de
Saint-Eustache sont ici. Je pense que c'était entendu entre les
différents leaders et c'est pourquoi nous appelons l'article 140, soit
le projet de loi no 106 concernant Saint-Eustache.
Le Vice-Président: M. le député de Roberval,
pour répondre à votre question, vous pouvez être
assuré...
M. Lamontagne: Question de règlement, M. le
Président; je voudrais informer, par votre intermédiaire, le
leader et tous ceux qui agissent comme leaders adjoints, que dès demain
matin, à toutes les fois que vous nous demanderez notre consentement
et vous savez combien de fois vous aurez à le demander
dès demain, nous y songerons sérieusement. Tout le long de la
journée, depuis hier soir, nos travaux ont été
modifiés. Hier soir, on nous a informés des travaux; lisez le
journal des Débats et ce ne sont pas ceux sur lesquels nous discutons
aujourd'hui. Nous arrivons avec différents projets de loi, mais ce que
je porte à l'attention du ministre des Transports, c'est qu'à
cette heure, quel que soit l'arrangement... La commission va arrêter
à minuit, il me semble que rendu à minuit, au lieu d'offrir une
augmentation de salaire aux députés par un projet de loi
déposé, mettez-les en temps supplémentaire.
M. Lessard: M. le Président, je soulève une
question de règlement. Jusqu'ici on a tenté quand même
d'avoir la collaboration de l'Opposition. Depuis deux ans, nous avons toujours
essayé de siéger ici à l'Assemblée nationale selon
des heures normales, mais nous n'avons pas connu la même situation dans
le passé. Parce que, comme ancien député, je peux dire que
j'ai eu l'occasion de siéger jusqu'à 5 heures et 6 heures du
matin.
Le Vice-Président: Un instant! À minuit moins douze
il y en a trois qui se lèvent.
M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement.
M. Bertrand: Très calmement, M. le Président, et
pour tenter de répondre au député de Lamontagne, mon bon
ami le député de Roberval...
M. Lamontagne: Même vous, là...
M. Bertrand: On peut même commettre des impairs. Le
député laissera peut-être un jour son nom au comté
dont il est le député en ce moment.
M. Lamontagne: Je ne me rendrai pas jusque-là.
Le Vice-Président: S'il vous plaît!
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais simplement
indiquer que le député de Roberval laisse sous-entendre que nous
avons un certain nombre de problèmes au niveau de l'organisation du
travail à l'Assemblée nationale. Je voudrais simplement indiquer
que cet après-midi, j'avais dit qu'après avoir
étudié le projet de loi no 103 déposé par le
ministre des Affaires sociales, après avoir étudié ce
projet de loi, nous entreprendrions l'étude du projet de loi no 84.
C'est ce que j'avais dit. Une entente est intervenue à l'heure du
souper, à la faveur d'ailleurs de l'Opposition officielle qui a
donné son accord total pour que la commission parlementaire des affaires
municipales siège sur le projet de loi no 84 lundi et que les discours
en deuxième lecture aient lieu mardi, entente conclue à la
satisfaction de l'Opposition officielle.
Ce soir, nous avions un ordre de travail qui était le suivant;
Nous poursuivions l'examen du projet de loi du ministre des Affaires sociales,
et par la suite, nous entreprenions l'étude du projet de loi sur les
municipalités de l'Outaouais, par la suite sur la ville de
Saint-Eustache, et par la suite sur l'évaluation foncière. Je me
suis fait dire par l'Opposition officielle que si nous avions, par malheur pour
nous-mêmes, semble-t-il, l'audace d'entreprendre l'étude du projet
de loi sur les municipalités de l'Outaouais, que cela pourrait chauffer.
J'ai accepté, à ce moment, de faire un certain nombre de
propositions au ministre des Affaires municipales, à la suggestion de
l'Opposition officielle, pour que nous étudiions les projets de loi de
Saint-Eustache et celui sur l'évalua-
tion foncière, ce qui fut fait, ce qui fut conclu à
l'entendement de l'ensemble des Partis, libéral, Union Nationale, Parti
québécois, à 9 h 50. À 10 h 20 le consentement
était retiré. (23 h 50)
L'Opposition officielle pouvait avoir ses raisons, mais, à ce
moment-là, vous comprendrez que nous nous trouvions dans une situation
passablement délicate, ayant obtenu un consentement et nous trouvant
placés dans une situation où le ministre ne se trouvait plus
capable de savoir exactement ce que l'Opposition voulait discuter avec nous:
évaluation, Saint-Eustache, Buckingham, etc. Dans un tel contexte, nous
avons entrepris, avec l'accord de l'Opposition officielle, l'étude du
projet de loi sur l'évaluation foncière, nous l'avons
adopté. Nous pensons qu'à ce stade-ci, nous pouvons entreprendre
l'étude du projet de loi sur la ville de Saint-Eustache, d'autant plus
que l'Opposition officielle avait offert sa collaboration là-dessus.
Je veux simplement indiquer par là, que loin de nous de vouloir
empêcher la collaboration, nous l'avons tellement offerte, autant sur le
projet de loi 84 que sur le projet de loi touchant les municipalités de
l'Outaouais, que sur le projet de loi 103, que je ne comprends pas
l'intervention du député de Roberval qui dit: Où s'en va
le gouvernement dans toute son organisation de travail? Je dis, au contraire:
Pourquoi l'Opposition nous refuse-t-elle des consentements une demi-heure
après nous les avoir accordés, alors que déjà,
à cette heure-ci, nous aurions terminé l'étude des projets
de loi sur l'évaluation foncière et sur la ville de
Saint-Eustache, n'eussent été des problèmes que nous avons
rencontrés, qui n'étaient certainement pas causés par la
mauvaise volonté du gouvernement.
M. le Président, à cause de cela, j'appelle effectivement
l'article 140 du projet de loi no 106, inscrit au nom du ministre des Affaires
municipales et modifiant la Charte de la municipalité de
Saint-Eustache.
Le Vice-Président: D'accord, Mme le député
de L'Acadie, question de règlement?
Mme Lavoie-Roux: Question de règlement, M. le
Président. Le leader adjoint...
Le Vice-Président: S'il vous plaît!
Mme Lavoie-Roux: Je pourrais faire passer un examen aux gens de
l'autre côté de la Chambre aussi, sur les différents
articles de notre règlement Le leader adjoint du gouvernement a
laissé entendre qu'il nous avait fait une concession à
l'égard du projet de loi 84. Je voudrais quand même vous dire que
c'est le gouvernement qui nous a offert le choix d'en reporter l'étude
à mardi, après l'audition en commission parlementaire des groupes
qui veulent se faire entendre sur le projet de loi no 84, ce qui est beaucoup
plus normal que de le faire après une deuxième lecture et aussi,
avec l'entente qu'à ce moment-là, le nombre d'interventions du
côté de l'Opposition serait limité à quelques-unes.
Ce sont des conditions qui ont été mises de l'avant et, à
ce moment-ci, vous nous apportez cela comme étant une faveur que vous
nous avez accordée. Je pense que le donnant donnant était
à partir du nombre d'interventions que nous ferions en deuxième
lecture sur le projet de loi 84. Je tenais à rectifier cela.
Le Vice-Président: D'accord. À supposer que ce soit
une question de règlement. M. le député de
Mégantic-Compton, question de règlement aussi?
M. Grenier: Je n'ai quasiment plus de ressorts. On nous dit qu'on
a donné notre consentement sur bien des choses. Bien honnêtement,
depuis 17 ou 18 heures ce soir, on nous informe des décisions qui sont
prises entre le gouvernement et le Parti libéral. On dit: Oui et on dit:
Oui et, des fois, on dit: "Noui", on ne le sait pas.
Hier, je n'ai pas l'impression qu'on a servi la cause du Québec
pendant de nombreuses heures dans la soirée, mais, aujourd'hui, je pense
qu'on a fait une bonne journée de travail et il semble bien que, rendu
à cette heure-là, il est 23 h 55, on est sur pieds depuis 7
heures ce matin... Le meilleur de mes lumières a été
donné à l'avantage des Québécois, je peux vous dire
cela, et je ne vois pas ce que l'on peut donner de bien fort à partir de
24 h, il faudra être encore sur pieds demain matin à 8 heures. On
n'est pas encore rendus au 20 décembre et j'aimerais qu'on aille se
coucher, ce serait une bien bonne affaire.
Le Vice-Président: Je vais donner une chance à M.
le leader parlementaire adjoint.
M. Bertrand: En toute légitimité pour le
député de L'Acadie, je voudrais lui donner raison sur les
précisions qu'elle a apportées. Il y a eu, effectivement,
négociation et je pense qu'il y avait du donnant donnant, je vous
l'accorde.
Mme Lavoie-Roux: Merci.
M. Bertrand: Très bien. Ceci étant dit, je voudrais
dire au député de Mégantic-Compton que nous avons
bénéficié de ses lumières dans l'étude des
quatre projets de loi du ministre des Affaires sociales; je pense qu'il y a eu
un effort majeur du député de Mégantic-Compton, au cours
des deux dernières journées, mais vous avez peut-être
remarqué que, ce soir, mercredi, troisième journée de
cette semaine, c'est la soirée où cela va le mieux; cela va
tellement bien que, le député de Mégantic-Compton ayant
épuisé toutes les lumières dont il disposait, nous
pourrions peut-être maintenant transporter les feux de la rampe sur le
député de Saint-Hyacinthe qui, lui, n'en manque pas...
M. Grenier: Les multiples lumières de l'arbre de
Noël!
M. Bertrand: ... et est tout à fait disposé
à apporter un éclairage sur le projet de loi que le
ministre va maintenant présenter en deuxième lecture, soit
celui touchant la ville de Saint-Eustache.
Le Vice-Président: Un instant! M. le député
de Mont-Royal, une question de règlement?
M. Ciaccia: M. le Président, à l'article 49.2...
Le Vice-Président: Question de privilège? M. Ciaccia:
Oui, M. le Président.
Le Vice-Président: Je comprends cela tout de suite,
même à cette heure-ci!
M. Ciaccia: Merci pour votre courtoisie, M. le Président;
vous êtes toujours courtois.
M. le Président, le député de Saguenay a
laissé entendre que c'est seulement quand le gouvernement libéral
était au pouvoir qu'on siégeait après minuit...
Une voix: Ce n'est pas une question de privilège.
M. Ciaccia: ... il a aussi laissé entendre que le
gouvernement actuel ne nous a pas laissés siéger. Ne nous a pas
fait siéger après minuit. Je voudrais rectifier ce fait. Au mois
de juin de cette année, avant l'ajournement d'été, nous
avons siégé une fois jusqu'à 4 h 45 du matin et une autre
fois jusqu'à 5 heures du matin. Je crois que c'était sur des
projets de loi introduits par le ministre des Affaires municipales. Alors, je
crois que les propos du député de Saguenay ne sont pas
exacts.
Le Vice-Président: D'accord, le message est
passé.
M. le député de Gatineau.
M. Lessard: On siégeait plus souvent quand les
libéraux étaient de ce côté-ci de la Chambre.
Le Vice-Président: D'accord, M. le député de
Gatineau, question de privilège ou de règlement?
M. Gratton: La même question de règlement, M. le
Président; pourquoi n'y irais-je pas moi aussi?
Le Vice-Président: À cette heure-ci?
M. Gratton: Le leader adjoint du gouvernement a mentionné
une espèce d'entente qui, a-t-il dit, a eu lieu vers 9 h 50, ce soir,
à savoir qu'on étudierait d'abord le projet de loi 112 et ensuite
le projet de loi 106. J'en conviens, j'étais partie à cette
entente. Sauf qu'à 21 h 50, on s'imaginait bien que ce ne serait pas
à minuit qu'on nous appellerait le projet de loi 106 pour étude
en deuxième lecture. J'ai l'habitude d'être franc et je dis tout
de suite au leader adjoint que si le ministre des Affaires municipales veut
faire son discours, tant mieux, on l'écoutera avec grande attention.
Quant à moi, je n'ai pas l'intention d'intervenir en deuxième
lecture et, étant critique officiel de l'Opposition officielle, en
matières d'affaires municipales, je ne le ferai pas. Si je dois
m'exécuter, M. le Président, je présenterai une motion
d'ajournement qu'on débattra, on convoquera le quorum et on exigera
qu'il existe en tout temps et je promets une très bonne nuit à
tout le monde, du côté du gouvernement.
M. le Président, en terminant, j'ajouterai que si c'est cela la
revalorisation du rôle du député, la réforme
parlementaire que ce gouvernement nous prône et nous crie dans les
oreilles depuis deux ans, si c'est cela de commencer l'étude d'un projet
de loi, qui met en cause non seulement la municipalité dont le maire est
ici, pourquoi ne pas adopter aussi le projet de loi 119 sur la
municipalité de Buckingham, parce que, justement, le maire de Buckingham
est également ici? S'il y en avait un autre, on pourrait peut-être
trouver un autre projet de loi.
M. le Président, ce n'est pas revaloriser le rôle du
député...
M. Tardif: M. le Président, j'accepte la suggestion du
député de Gatineau, je suis prêt à passer aux
deux.
M. Gratton: M. le ministre des Affaires municipales fait de
l'humour, M. le Président, c'est très drôle!
Le Vice-Président: À l'ordre!
M. Gratton: Je n'ai pas fini, M. le Président, je dis donc
que si c'est cela, la réforme parlementaire et la revalorisation de nos
institutions parlementaires, que de demander à des députés
d'entreprendre l'étude du projet de loi qui est important, non seulement
pour la municipalité de Saint-Eustache, mais qui est important pour un
grand nombre de personnes dans cette municipalité et qui crée, en
quelque sorte, un certain précédent, moi, je ne marche pas et je
dis au gouvernement qu'il en subira les conséquences.
Le Vice-Président: M. le leader parlementaire adjoint du
gouvernement.
M. Tardif: M. le Président.
Le Vice-Président: Un instant!
M. le ministre des Affaires municipales. (minuit)
M. Tardif: Est-ce que je dois comprendre, par l'intervention du
député de Gatineau, qu'il préférerait qu'on aborde
le projet de loi touchant une municipalité de sa région avant
celui de Saint-Eustache, auquel cas je suis également prêt,
c'est-à-dire le projet de loi touchant Buckingham?
M. Lamontagne: M. le Président, je pense...
Le Vice-Président: Un instant. M. le député
de Roberval. Un instant.
M. Gratton: M. le Président, la question m'est
posée, je vais répondre tout de suite.
Le Vice-Président: D'accord.
M. Gratton: Ce n'est pas du tout ce que j'ai dit. J'ai dit
qu'à minuit, on ne commençait pas l'étude d'un projet de
loi, surtout pas celui de Buckingham, et le ministre en est fort conscient. Je
ne le trouve pas drôle encore cette fois-ci.
M. Bertrand: M. le Président, avant de vous...
Le Vice-Président: M. le leader parlementaire adjoint du
gouvernement.
M. Bertrand: ... inviter de nouveau, comme nous l'avons fait vers
11 h 45, à appeler l'article 140, je voudrais tout simplement dire au
député de Gatineau qu'avec tout le respect que je lui dois, et je
pense que je vais respecter ce genre d'obligation que nous fait le
règlement de l'Assemblée nationale, il admettra que nous n'avons
certainement pas manqué de bonne volonté, parce qu'à
l'heure où l'on se parle, justement, et à l'heure où il
dit qu'il est un peu tard pour appeler le projet de loi sur la ville de
Saint-Eustache, nous serions en train de discuter du projet de loi de la ville
de Buckingham, n'eût été notre bonne volonté et de
notre effort pour organiser le travail...
M. Gratton: C'est faux, c'est faux. M. le Président...
Le Vice-Président: Comme nous sommes rendus
déjà à demain, je vous accorde votre question de
privilège.
M. Gratton: M. le Président, si le gouvernement s'est
rendu à notre demande de ne pas aborder l'étude du projet de loi
119 sur la ville de Buckingham, c'est qu'il sait qu'on a l'intention de faire
une bataille à mort sur le projet.
Le Vice-Président: À l'ordre!
M. Lamontagne: Les commissions ne siègent plus à
partir de minuit. Appelez les députés pour le quorum.
Le Vice-Président: C'est exact, M. le député
de Roberval. Que l'on appelle les députés.
Mme le Vice-Président: À l'ordre! Nous avons
effectivement quorum. S'il vous plaît! M. le député de
Saint-Hyacinthe, M. le député de Lac-Saint-Jean, M. le
député de Sainte-Anne, M. le député de
Mégantic-Compton, ora pro nobis, à l'ordre, s'il vous
plaît! M. le ministre des Affaires municipales. M. le whip en chef du
parti ministériel, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous avons effectivement quorum. M. le leader adjoint du gouvernement,
quel article appeliez-vous, s'il vous plaît?
M. Bertrand: Toujours le même depuis 11 h 45, Mme la
Présidente; l'article 140).
Projet de loi no 106
Deuxième
lecture
Mme le Vice-Président: À l'article 140), M. le
ministre des Affaires municipales propose la deuxième lecture du projet
de loi 106, Loi concernant la ville de Saint-Eustache.
M. le ministre.
M. Guy Tardif
M. Tardif: Mme la Présidente, au cours du mois d'avril
1978, des émanations de vapeur gazeuse causées par l'infiltration
de produits pétroliers ont été détectées
dans la ville de Saint-Eustache. À la suite de deux explosions qui se
sont produites les 11 et 12 avril 1978, la station de pompage de la ville,
ayant été en grande partie détruite et quatre personnes
ayant été blessées, le conseil de la ville de
Saint-Eustache a dû prendre certaines mesures urgentes afin de
protéger sa population. Ces mesures ont consisté notamment en
l'évacuation des personnes habitant dans la zone dangereuse et à
leur relogement dans un autre secteur de la ville, en l'exécution de
travaux visant à déterminer la quantité et la localisation
de produits pétroliers répandus sur la nappe phréatique
ainsi qu'à leur élimination et à l'engagement de
consultants à ces fins. Accessoirement, le conseil a mis sur pied et
assuré les frais de subsistance d'une équipe de
bénévoles qui assistaient les policiers pour la surveillance de
la zone évacuée. Il est à noter qu'aucun acte de
vandalisme n'a été rapporté dans la zone ainsi
évacuée et surveillée.
Devant l'impossibilité de la ville de Saint-Eustache
d'éliminer entièrement les produits pétroliers ainsi
infiltrés dans son sous-sol, des travaux ont été entrepris
afin d'éviter de revivre l'expérience du printemps dernier. Sur
le plan strictement légal, le conseil de la ville de Saint-Eustache a
posé, dans le cadre de l'état d'urgence et en toute bonne foi,
dans le but de protéger les personnes et les biens, des gestes pour
lesquels il n'avait aucune habilitation législative. De plus, la
situation exigeant une intervention rapide, le conseil a procédé
sans observer les formalités prescrites par la loi. (0 h 10)
Le présent projet de loi empêche donc que soit
fondée sur des motifs de l'absence d'inhabili-tation législative
l'omission d'une formalité même impérative et de
l'inobservation d'une disposition législative, une action en
inhabilité ou en responsabilité civile ou pénale contre un
membre du conseil de la ville de Saint-Eustache ou un fonctionnaire de celle-ci
en raison d'actes accomplis concernant l'état d'urgence qui a
prévalu au printemps 1978 dans cette ville. Le projet de loi
empêche également qu'un règlement ou une réso-
lution du conseil soit cassé ou annulé pour les
mêmes motifs.
Il importe de souligner ici, cependant, que ce projet de loi
n'empêche aucunement les recours en dommages-intérêts
fondés sur des motifs autres que ceux qui y sont
énumérés. De plus, la ville de Saint-Eustache nous
informait que les travaux effectués présentement ne comportent
pas toutes les garanties que la situation ne pourra pas se reproduire le
printemps prochain. À cet effet, le ministre de la Justice, responsable
de la protection civile, et le ministre délégué à
l'Environnement sont bien au fait de la situation et peuvent assurer cette
municipalité de leur intervention rapide si des événements
similaires devaient se reproduire.
Parmi les autres éléments à ajouter, il y a d'abord
le fait que cette loi a un effet rétroactif au 11 avril 1978, que cette
loi est déposée à la suite d'une résolution du
conseil de la ville de Saint-Eustache priant le gouvernement d'adopter cette
loi, résolution no 78408 adoptée le 10 juillet 1978 et que nous
aurions pu procéder, dans ce cas, par voie de projet de loi
privé. Si nous avons jugé préférable de le faire
par une loi publique, c'est qu'il nous semblait bon d'éviter aux
contribuables les frais d'un projet de loi privé pour rectifier, somme
toute, une situation qui n'est pas de leur volonté, ni de leur
responsabilité.
Des représentations ont été faites à mon
cabinet par le procureur de cette municipalité quant au libellé
d'un article. J'ai fait donner l'assurance par les membres de mon cabinet que,
lors de l'étude en commission parlementaire article par article,
j'étais tout à fait ouvert à la reformulation de l'article
en question. Enfin, il me semble que ce projet de loi, qui vise en quelque
sorte à régulariser une série de gestes posés par
cette municipalité en période d'urgence, devrait être
adopté sans difficulté. Merci.
M. Fontaine: Est-ce que le ministre me permettrait une question
qui pourrait peut-être faire avancer le débat, si le ministre peut
y répondre? Selon nos renseignements, il y aurait contre la ville
actuellement des poursuites pour $2 514 000. Est-ce que la loi aura pour effet
de mettre fin à ces poursuites et d'en empêcher de futures? On
sait qu'on a deux ans pour réclamer en dommages-intérêts.
Est-ce que cette loi va empêcher ces poursuites?
Mme le Vice-Président: M. le ministre.
M. Tardif: La loi, Mme le Président, vise en effet
à assurer aux membres du conseil et à la municipalité, en
fait, une protection contre toute poursuite pour les gestes qu'ils ont
posés de bonne foi dans cet état d'urgence.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Roberval.
M. Lamontagne: Question additionnelle, Mme la Présidente.
Pour un meilleur éclairage, est-ce que la municipalité de
Saint-Eustache avait des polices d'assurance contre de tels
événements?
Mme le Vice-Président: M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Tardif: Mme la Présidente, c'est une question qui est
peut-être une réponse dans le dossier que j'ai ici. Je ne saurais
immédiatement la donner, mais je présume que toutes les
municipalités ont généralement des polices d'assurances
pour réclamation en responsabilité.
M. Lamontagne: Est-ce que vous pourriez avoir cette information
en quelques minutes, dune façon ou d'une autre?
M. Tardif: À cette heure, il n'y a plus beaucoup de
fonctionnaires.
M. Lamontagne: C'est très important.
M. Tardif: Je peux m'engager à la fournir en commission
parlementaire.
M. Lamontagne: C'est la base même du débat que vous
proposez.
M. Tardif: À cette heure, cela m'est impossible de le
faire.
M. Lamontagne: ... que je vous disais tout à l'heure.
Question fort importante.
Mme le Vice-Président: Alors, M. le ministre, vous avez
terminé votre intervention?
M. Lavoie: Une question, madame, pour accélérer le
débat.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Laval.
M. Lavoie: Le ministre des Affaires municipales nous a
parlé d'un certain amendement qu'il désirait proposer. Est-ce que
vous avez dit, dans votre intervention, que vous avez l'intention de soumettre
un amendement qui pourrait clarifier certains articles?
M. Tardif: Non, Mme la Présidente. J'ai dit que
j'étais ouvert à une reformulation d'un article, plus
précisément, en fait, l'article 2, et qu'un texte devait nous
être soumis, mais il me semblait que, ceci ne devant pas changer le
principe même du projet de loi, ce n'était pas à ce
moment-ci que nous pouvions l'adopter. Maintenant, Mme la Présidente, je
tiens à préciser qu'une foule de gestes ont été
posés, tels que l'adoption d'un règlement d'emprunt, des mesures
et des dépenses ont été faites pour reloger,
déplacer des gens, évacuer 544 familles. Ce sont tous des gestes
que, normalement, une municipalité n'a pas le pouvoir de poser en vertu
de la Loi des cités et villes.
Il s'agit donc, encore une fois, de faire en sorte que ce qui a
été fait à l'occasion de cet état
d'urgence, c'est-à-dire le déplacement de ces 544
familles, de ces quelque 40 commerces qui ont été temporairement
fermés, ne soit pas, encore une fois, entaché de poursuite.
M. Lalonde: Mme la Présidente.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je voudrais demander, si le ministre le permet encore
une fois dans un effort de faire accélérer les travaux, est-ce
que le terme qu'il est prêt à modifier ou enfin qu'il fait
examiner serait la fin du premier alinéa de l'article 2, à
savoir, l'inobservation d'une disposition législative?
M. Tardif: C'est exact.
M. Lalonde: Mme le Président, j'aurais une question de
règlement à soulever ici. Le ministre vient de dire: C'est exact.
Je ne sais pas si cela a été enregistré. Donc, la
réponse du ministre confirme qu'un des principes il y en a
quelques-uns dans ce projet de loi comme dans tout projet de loi un des
principes, un principe important, à savoir que l'inobservation d'une
disposition législative pourrait être excusée par ce projet
de loi, est appelé à être changé par le ministre,
à un moment donné, je ne sais pas quand exactement, cette nuit ou
au moment de l'étude article par article.
Mme la Présidente, ma question de règlement est la
suivante: Comment pouvons-nous, à cette Assemblée, faire un
débat sur le principe de ce projet de loi, alors que le ministre vient
de nous dire qu'un des principes de ce projet de loi est sujet à
changement. Je ne veux pas en faire une question de procédure, mais
j'inviterais le leader adjoint du gouvernement à considérer la
possibilité de soit reporter l'étude de ce projet de loi à
demain, ou enfin à bientôt, une fois que le ministre aura fait son
lit aujourd'hui, parce qu'on est rendu à 24 h 20 et qu'il
saura exactement ce qu'il veut nous offrir comme principe. Je demande au leader
adjoint du gouvernement de réagir à cette suggestion.
Mme le Vice-Président: M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Bertrand: Mme la Présidente, je réagis ainsi
à ce que vient de dire le député de Marguerite-Bourgeoys.
Comme l'a indiqué le ministre, il a l'intention d'apporter en commission
parlementaire, au moment de l'étude article par article, une
modification, comme le disait le député de Marguerite-Bourgeoys,
sur les derniers mots du premier paragraphe de l'article 2. (0 h 20)
Comme le député de Marguerite-Bourgeoys est
déjà au courant que le ministre compte apporter une modification
et que le ministre est sans doute en mesure de dire dans quel sens cette
modification serait apportée, je pense que l'As- semblée
nationale jouit à ce moment d'une information suffisamment importante
pour être en mesure de savoir quelles sont les intentions du gouvernement
et surtout d'avoir l'assurance qu'au moment de l'étude article par
article en commission parlementaire, effectivement et précisément
à cet endroit, il y aura possibilité d'une discussion sur le
genre d'amendement qui sera apporté et sur lequel, je pense, le ministre
ne s'est pas caché pour dévoiler ses intentions. Dans un tel
contexte, Mme la Présidente, sur un projet de loi qui a cinq articles et
dans lequel projet de loi, dans le fond, l'Opposition sait fort bien quelle est
l'intention visée par le gouvernement pour répondre aux demandes
de la ville de Saint-Eustache, je pense qu'à ce moment-ci on pourrait
fort bien disposer en deuxième lecture du projet de loi, en sachant
d'avance sur quoi exactement va porter l'amendement qui sera apporté en
commission parlementaire, parce que le ministre l'a indiqué et que ses
intentions sont très claires à ce point de vue.
Alors, je pense qu'il n'y a aucun problème, il s'agit simplement
de se rendre en commission parlementaire et de faire la modification, sans
doute avec peut-être une précision que l'Opposition officielle va
nous apporter sur le sens qui devrait être donné à
l'amendement apporté par le gouvernement. Là-dessus, nous n'avons
aucune objection de poursuivre le débat en ce moment sur la façon
dont l'Opposition officielle voit cet amendement pour aider le ministre au
moment de la formulation en commission parlementaire.
M. Lalonde: Sur la question de règlement, Mme la
Présidente, avant que vous nous disiez quelle est votre décision,
à savoir si cette Assemblée est habilitée actuellement
à discuter en deuxième lecture de ce projet de loi. Les propos
que j'ai écoutés attentivement du député de Vanier
sont clairs. Le ministre a décidé de changer d'idée sur un
principe, et nous l'acceptons. Mais c'est sur une partie importante qui,
d'après moi, d'ailleurs je le soumets à votre jugement, est un
des principes de ce projet de loi. Nous savons que le ministre a
décidé de changer d'idée, mais nous ne savons pas quel
principe il va nous offrir, il va nous proposer en échange. Comment
pouvons-nous, à ce moment, discuter en toute connaissance de cause, Mme
la Présidente? C'est la question que je vous pose.
M. Lessard: Question de règlement.
M. de Bellefeuille: Mme le Président, sur une question de
règlement.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: J'estime, Mme la Présidente, que le
principe de ce projet de loi c'est de savoir si la ville de Saint-Eustache a eu
raison d'agir vite ou bien si elle aurait dû se traîner les pieds
sous prétexte qu'il y avait des exigences, des règlements
à faire adopter, etc. C'est cela le
principe. Je pense que personne ne peut douter du bien-fondé du
principe de ce projet de loi.
M. Forget: Mme la Présidente, sur cette question.
M. Lessard: Mme le Président, je soulève une
question de règlement.
Mme le Vice-Président: J'entendrai les deux questions de
règlement de ceux qui veulent intervenir maintenant, mais ce sera
suffisant ensuite.
M. le ministre des Transports.
M. Lessard: Mme le Président, nous sommes actuellement en
deuxième lecture d'un projet de loi. Le ministre des Affaires
municipales a fait son discours de deuxième lecture et il est normal,
comme on l'a fait dans le passé, que des amendements soient
apportés au niveau de la commission parlementaire, soit par le ministre
des Affaires municipales ou soit par l'Opposition. Maintenant, c'est que nous
en sommes rendus actuellement à une période de questions. Je dois
vous dire que, si les députés de l'Opposition officielle veulent
faire un discours sur la deuxième lecture, qu'ils le fassent, c'est leur
droit, nous allons les écouter, nous sommes à ce niveau
actuellement, au niveau du discours de deuxième lecture. En ce qui
concerne la commission parlementaire et les questions qui peuvent être
posées au ministre des Affaires municipales, il pourra y répondre
en temps et lieu.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Je ne suis pas un légiste, mais je suis quand
même capable, je pense, de comprendre qu'il y a au moins deux principes
dans l'article 2 de ce projet de loi. Il y a d'abord un principe qui fait que
les irrégularités formelles qui ont pu être commises,
c'est-à-dire la non-approbation par la Commission municipale, par le
ministre des Affaires municipales etc., ne vicient pas les actes posés,
c'est un premier principe qui me semble incorporé dans le
deuxième alinéa de l'article 2. Et l'autre principe semble
être un pardon rétroactif donné à toute erreur qui
aurait pu être commise, même si les actes sont techniquement
valables. Toute erreur, toute responsabilité de la municipalité
ou d'un fonctionnaire qui aurait pu être engagé est ipso facto
considérée comme ne s'étant pas produite et ne donne pas
ouverture au recours ordinaire de la loi. Ce principe il est modifié de
façon importante par la déclaration hypothétique que vient
de formuler le ministre des Affaires municipales et nous rend incapables de
juger si oui ou non nous pouvons approuver en deuxième lecture le projet
de loi.
Mme le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le ministre des Affaires municipales voudrait-il intervenir?
J'accepterais une seule intervention maintenant.
M. Tardif: Mme la Présidente, ce qu'il est important, je
pense, de répéter ici, c'est que ce que le député
de Saint-Laurent appelle une espèce de pardon général pour
tous les faits et gestes qui auraient été posés par des
fonctionnaires ou employés de la municipalité, c'est toujours
uniquement en rapport avec les événements survenus. C'est ce que
dit l'article 2, et si ce n'était pas assez précis, je
présume que le député de Marguerite-Bourgeoys pourrait
nous faire part en commission parlementaire de ses lumières pour mieux
cerner encore le libellé. Mais c'est bien évident que si
quelqu'un, à l'occasion des événements en question, avait
dérogé à l'une quelconque des dispositions du Code
pénal, avait commis des actes, ou des infractions frauduleuses,
criminelles, il ne serait pas à l'abri des poursuites qui pourraient
être intentées contre lui. Je parle des fonctionnaires et
conseillers municipaux qui, de bonne foi, ont engagé les deniers publics
contrairement aux stipulations de la Loi des cités et villes, de la Loi
des travaux municipaux, de la Loi de la commission municipale. Encore une fois,
je pense que, sur le plan du principe, il a été
énoncé assez clairement, jusqu'à maintenant, qu'il ne
devrait pas y avoir de discussion, mais j'ai dit que j'étais ouvert. Aux
procureurs de la municipalité je ne les ai pas rencontrés
personnellement, les gens de mon cabinet les ont rencontrés j'ai
dit que j'étais ouvert à une reformulation de cet article qui
vise justement à mieux cerner encore de quoi il s'agit. J'en donne ma
parole devant cette Chambre. En commission parlementaire il me fera plaisir
d'accepter les suggestions de l'Opposition pour parvenir aux fins
souhaitées.
Mme le Vice-Président: M. le leader de l'Opposition
officielle, j'avais dit que je n'accepterais plus d'intervention, à
moins que vous n'apportiez un élément tout à fait
nouveau... Oui? Alors, M. le leader parlementaire, je vous entendrai.
M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente,
j'écoute un peu comme spectateur et observateur les échanges. Je
me demande si nous n'avons pas devant nous le cas de l'étude d'un projet
de loi qui, à mon sens, aurait dû être étudié
en commission parlementaire avant qu'on ait à se prononcer sur le
principe et sur la deuxième lecture. Je vous souligne qu'une loi
concernant une ville, ordinairement et souvent, est étudiée
après la première lecture, pour que ces détails, assez
importants même qui touchent un principe important puissent
recevoir le plus de lumières possible, et ces lumières-là
viennent normalement en commission parlementaire. Même si on en discutait
toute la soirée et toute la nuit, on ne pourrait peut-être pas
arriver à une conclusion. Est-ce que ce ne serait pas un
règlement honorable que de pouvoir entendre le ministre, au moins, ou
d'autres témoins, si la commission le juge à propos, et à
ce moment-là on pourrait peut-être être en meilleur... Je
donnerais mon consentement et je pense bien que l'Opposition officielle
donne-
rait son consentement pour avoir, dès demain matin, une courte
commission parlementaire, pour que ces échanges puissent avoir lieu et
que le libellé, peut-être, puisse être modifié. C'est
une suggestion que je fais, je n'y tiens pas plus que cela. Mme la
Présidente, vous m'avez demandé si j'avais un
élément nouveau. Humblement, modestement, c'est un
élément nouveau que je voulais apporter.
M. Bertrand: Mme la Présidente...
Mme le Vice-Président: Écoutez, c'est quand
même un projet de loi public. En deuxième lecture, nous discutons
sur les principes, le bien-fondé, là-propos d'un projet de loi.
En commission parlementaire, M. le ministre parle d'un amendement. (0 h 30)
Ce n'est pas à moi de décider quelle sorte d'amendement il
proposera. Cette commission parlementaire des affaires municipales pourrait
accepter ou refuser cet amendement. Ce n'est pas à moi de décider
de ce que fera la commission parlementaire. Je pense que la question est
purement hypothétique.
M. Bertrand: Je vais même aller plus loin que cela; je vais
donner mon consentement à l'interprétation donnée par la
présidence en qui j'ai une confiance absolument totale. Je pense que le
jugement rendu est on ne peut plus convenable dans les circonstances, juste et
raisonnable pour l'Opposition. Je donne mon consentement à
l'interprétation que vient de donner madame la présidente.
Mme le Vice-Président: Je l'espère bien, M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. de Bellefeuille: Mme la Présidente, je désire
non pas intervenir à propos du règlement, mais dire deux mots
dans le débat en deuxième lecture de ce projet de loi.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Le ministre a rappelé les
circonstances. Je voudrais juste ajouter, puisque j'habite moi-même
à Saint-Eustache, un témoignage de quelqu'un qui a vu ces
événements se dérouler. Cela a été pour la
population de Saint-Eustache, comme vous pouvez l'imaginer, un grand
dérangement; il y a eu un moment de très grande
inquiétude. Il n'y a pas matière à rire; je ne vois pas
pourquoi certains de nos collègues en rient. Je tiens, dans les
circonstances...
M. Lavoie: Écoutez là!
M. Levesque (Bonaventure): Question de privilège.
Mme le Vice-Président: Sur une question de
privilège.
M. Levesque (Bonaventure): Je demanderais au député
de Deux-Montagnes d'identifier ceux qui rient ou qui ont ri et c'est
peut-être de son côté qu'il trouvera ceux qui ricanent le
plus.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Mme la Présidente, je ne
m'arrêterai pas, vu l'heure tardive, à ce petit
"débaticule". Je tiens, Mme la Présidente, à
féliciter la ville de Saint-Eustache d'avoir agi vite, puisque c'est
cela, le principe du projet de loi; il s'agit de faire en sorte que la ville de
Saint-Eustache ne soit nullement pénalisée, ne se trouve
nullement dans l'illégalité parce qu'elle a agi vite. Non
seulement elle a agi vite; elle a agi de façon efficace et elle a agi
avec beaucoup d'humanité. Les dirigeants de la ville, les services
gouvernementaux qui ont apporté leur concours, les
bénévoles ont fait en sorte que la population de Saint-Eustache a
pu traverser cette épreuve de la façon la plus paisible, la plus
harmonieuse possible dans les circonstances. Je tiens à
féliciter, en particulier, le maire de la ville de Saint-Eustache, Me
Guy Bélisle, qui, dans ces circonstances, s'est
révélé un organisateur hors pair, un animateur qui a
été constamment présent auprès des familles
évacuées, dont une certaine proportion n'ont pu
réintégrer leur foyer que tard durant l'été. Vu que
je suis convaincu que les autorités de la ville de Saint-Eustache ont
bien agi, comme il faut agir dans des circonstances d'urgence, je voterai en
faveur de ce projet de loi en deuxième lecture.
Mme le Vice-Président: Vous désirez intervenir, M.
le député de Gatineau?
M. Gratton: Mme la Présidente, je pense que vous devinez
bien ce que je vais faire compte tenu des propos que j'ai tenus il y a un
moment sur une question de règlement, alors que j'ai dit au leader
adjoint du gouvernement que je ferais motion d'ajournement du débat si
je me voyais dans l'obligation d'intervenir sur ce projet de loi. Je n'ai pas
l'intention de faire le contraire de ce que j'ai déjà
annoncé que je ferais, Mme la Présidente. Je fais donc une motion
d'ajournement du débat en vertu de l'article 77 et je vous expliquerai
pourquoi je fais cette motion. D'abord...
Mme le Vice-Président: J'ai presque envie de vous faire
une taquinerie, M. le député, mais une motion en vertu de
l'article 77 est une motion non annoncée. Je me demanderais presque si
elle est recevable. De toute façon, allez-y donc!
M. Gratton: Je pense que, entre vous et moi, on sait qu'elle est
recevable, Mme la Présidente. Je dirais donc...
M. Bertrand: Mme le Président...
Mme le Vice-Président: N'intervenez pas sur des questions
de règlement. Je pense que je peux les avoir suscitées, M. le
leader.
M. Bertrand: Douze secondes, c'est simplement pour m'assurer
qu'à compter de maintenant, étant donné que la motion
vient de nous être présentée, les dix minutes du
député de Gatineau sont comptées?
Mme le Vice-Président: Évidemment. M. le
député de Gatineau...
M. Gratton: Vous pensez peut-être que le secrétaire
général de l'Assemblée nationale est ici strictement parce
que le débat l'intéresse?
Mme le Vice-Président: ... vous avez dix minutes
pour...
M. Gratton: ... qu'il n'est pas ici pour prendre également
note du temps où je commence à parler?
Mme le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Gratton: II faudrait peut-être lui demander ce qu'il en
pense de ce débat, Mme le Président.
Mme le Vice-Président: Sur cette motion...
Motion d'ajournement du débat
M. Michel Gratton
M. Gratton: Je fais donc motion pour ajourner ce débat,
Mme la Présidente, pour une raison bien simple. C'est que demander
à l'Assemblée nationale d'entreprendre l'étude d'un projet
de loi en deuxième lecture, alors qu'il est déjà minuit
et demie maintenant, mais au moment où on a abordé
l'étude du projet de loi, il était minuit, Mme la
Présidente pour ce même gouvernement qui se gargarise
depuis deux ans qu'il est le gouvernement de la réforme
électorale je note d'ailleurs l'absence ce soir du ministre des
Consommateurs, on sait ce qu'elle pense de l'institution parlementaire et j'ai
hâte de la rencontrer demain pour lui demander ce qu'elle pense de la
manoeuvre...
Des voix: Règlement!
Mme le Vice-Président: À l'ordre!
M. Gratton: II y a une question de règlement quelque
part?
Mme le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre!
M. Gratton: Vous avez une question de règlement, M. le
ministre des Affaires municipales?
Mme le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Gratton: C'est une motion d'ajournement du débat, M. le
ministre des Affaires municipales, j'ai l'intention de dire ce que j'ai
à dire, quoi que vous en pensiez.
Le député de Deux-Montagnes, Mme la Présidente,
disait tantôt: Le principe du projet de loi, c'est strictement de savoir
si oui ou non le conseil municipal de Saint-Eustache a bien agi en agissant
vite, au moment de cet état d'urgence, ou s'il aurait dû se
traîner les pieds et laisser tout le monde, en quelque sorte, crever en
attendant l'approbation de la commission municipale, en attendant la demande
de...
M. Lessard: ... Mme la Présidente.
M Gratton: ... soumission pour des contrats...
Mme le Vice-Président: M. le ministre des Transports,
est-ce que je présume de vos intentions en me disant que vous allez
faire appel à la pertinence du débat?
M. Lessard: Oui, exactement, Mme la Présidente, s'il
s'agit de...
Mme le Vice-Président: Bon, alors, je pense que votre
intervention pourrait être superflue, à moins que vous n'y teniez
absolument.
M. Lessard: Je n'y tiens pas plus que cela, Mme la
Présidente, en autant que...
Mme le Vice-Président: Alors, si vous voulez... M.
Lessard: ... suivre la pertinence du débat.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Gatineau, je vous demanderais de nous dire pourquoi vous voulez que nous
ajournions le débat.
M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente, question de
règlement. Je pense que les auteurs sont unanimes là-dessus, il y
a une latitude assez forte, si l'on veut, lorsqu'il s'agit d'un débat
sur l'ajournement d'un débat. À ce moment-là, Mme la
Présidente, on ne parle pas du fond de la question, on parle d'une
façon générale de l'opportunité de mettre fin au
débat, mais il y a beaucoup de latitude à ce moment-là, il
n'y a pas de projet de loi devant nous d'une façon particulière.
On peut demander l'ajournement d'un débat et on peut demander
l'ajournement de la Chambre et alors, je pense, la présidence est tenue
par les règles ordinaires de la procédure parlementaire qui
permet à l'opinant d'avoir des propos qui débordent largement,
évidemment, le débat, qui devrait être plus restreint que
sur une motion de deuxième lecture. Je pense bien que le
député de Gatineau est parfaitement dans l'ordre de pouvoir
établir, de la façon dont il l'entend il n'a que dix
minutes pour le faire les raisons qui demandent l'ajournement du
débat.
M. Bertrand: Je demande une directive, Mme le
Président.
Mme le Vice-Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: Suite à cette intervention du
député de Bonaventure, chef de l'Opposition parlementaire, je
vous demande de rendre une directive interprétant l'article 77 qui,
quant à nous, signifie que le député de Gatineau peut
forcément parce que le règlement le lui permet, parler dix
minutes pour l'ajournement du débat et que le débat qui est en
cours est relatif à un projet de loi fort précis qui concerne la
ville de Saint-Eustache et qu'il ne saurait être question que cet
ajournement sur la nécessité d'ajourner le débat, et non
sur le projet de loi de la ville de Saint-Eustache, se fasse en
conformité avec ce débat et non pas d'autres débats que
nous aurions pu avoir ce soir. Je vous demande de rendre une directive
immédiatement, Mme la Présidente, conformément au
règlement. (0 h 40)
Mme le Vice-Président: Vous aviez droit à dix
minutes pour intervenir sur une motion d'ajournement du débat. Je vous
demanderais de nous dire pourquoi vous voulez que nous ajournions maintenant ce
débat sur le projet de loi concernant la ville de Sainte-Eustache.
M. le député de Gatineau.
M. Gratton: Mme le Président, je propose l'ajournement du
débat même si je suis complètement d'accord que le conseil
municipal de Saint-Eustache a agi de la meilleure façon possible,
même si je considère que le conseil municipal de Saint-Eustache
n'avait pas le choix de faire autrement, dans la mesure où on a pu
l'établir, bien entendu, sans vérification policière.
Même si nous sommes d'accord avec ce principe, il n'en demeure pas moins
qu'il y a un deuxième principe dans ce projet de loi, principe qu'ont
évoqué les députés de Saint-Laurent et de
Marguerite-Bourgeoys, et sur lequel il nous est impossible de nous prononcer ce
soir, compte tenu de l'indication que le ministre des Affaires municipales a
donnée concernant un amendement qu'il pourrait possiblement apporter
dont nous ne connaissons pas la nature exacte.
C'est donc, parmi plusieurs raisons, les principales. Il est 0 h 40 le
lendemain du début de cette séance, bien entendu, nous sommes
là depuis 15 heures, nous avons débattu plusieurs projets de loi,
certains de mes collègues ont passé la journée en
commission parlementaire par exemple, sur le projet de loi 90 sur la
protection du territoire agricole et nous sommes là...
Une voix: ...
M. Gratton: Les sans-culottes ont quelque chose à
dire?
Une voix: Pertinence du débat.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Sainte-Marie, M. le député de Gatineau a dix minutes... À
l'ordre, s'il vous plaît! M. le député d'Arthabaska, s'il
vous plaît! À l'ordre! M. le député de Gatineau.
M. Gratton: Je disais donc, Mme la Présidente, que, alors
que nous sommes là depuis 15 heures, le gouvernement je ne sais
pour quelles raisons probablement par entêtement du leader adjoint
du gouvernement qui veut laisser sa marque dans la grande réforme
parlementaire entreprise par ce gouvernement, nous oblige à, non pas
débattre cette motion d'ajournement, mais étudier un projet de
loi dont les implications sont fort importantes pour un très grand
nombre de personnes, où possiblement on créera un
précédent juridique dont, personnellement je l'admets en
toute candeur, Mme la Présidente je ne suis pas en mesure de
mesurer toute l'importance à ce moment-ci.
C'est la principale raison pour laquelle je propose que
l'Assemblée nationale ajourne non pas à demain, mais à ce
matin, dix heures, c'est-à-dire dans environ neuf heures et quinze
minutes, ce qui permettra au ministre de consulter ses légistes quant
à la nature de l'amendement qu'il pourrait nous apporter et qui pourrait
possiblement nous permettre d'adopter le projet de loi en deuxième
lecture à ce moment-là. On n'aura pas perdu de temps puisque, au
moins, on se sera assuré du côté de l'Opposition il
me semble que cela devrait être aussi important pour le côté
ministériel qu'en adoptant le projet de loi 112 on ne crée
pas un précédent qu'on pourrait regretter
éventuellement.
Mme le Vice-Président: 106.
M. Gratton: On a demandé au ministre des Affaires
municipales de nous dire si la municipalité avait une police d'assurance
qui donnerait une certaine garantie pour ceux qui auraient des recours contre
la municipalité. Le ministre nous a dit: Comment voulez-vous que je vous
réponde à cette heure-ci? Je ne peux rejoindre personne. Mais
comment voulez-vous que nous, de l'Opposition, qui n'avons pas collaboré
à la préparation du projet de loi, qui n'avons participé
d'aucune façon à la réaction de ce projet de loi,
puissions, si le ministre ne peut pas nous donner ces informations des plus
sommaires et des plus...
Une voix: Elémentaires.
M. Gratton: ... élémentaires, continuer ce
débat, d'adopter un principe dangereux sans prendre au moins la peine de
présenter cette motion d'ajournement du débat que nous ne pouvons
faire qu'une fois, mais peut-être bien qu'on trouvera autre chose plus
tard, si le gouvernement continue à s'entêter.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Nicolet-Yamaska, dix minutes vous sont allouées.
M. Serge Fontaine
M. Fontaine: Merci, Mme la Présidente. Si je me
lève, c'est en vertu de l'article 77 de notre
règlement qui permet à chaque parti d'intervenir pendant
dix minutes sur une motion d'ajournement. Je voudrais vous dire que je ne
comprends pas l'acharnement du gouvernement à vouloir faire adopter
cette loi à tout prix, ce matin, à une heure moins le quart. Je
pense que véritablement le gouvernement veut essayer de nous passer un
sapin. L'Opposition ne se laissera pas faire ce soir, même s'il est
tard.
Nous avons siégé toute la journée à
l'Assemblée nationale et en commission et je pense que les
députés de l'Opposition ont collaboré avec le gouvernement
pour essayer de faire adopter le plus de lois possible. En commission
parlementaire nous avons entendu des témoins et étudié des
projets de loi article par article; même sur la réforme de la
carte électorale, nous avons passé trois heures, assidus, cet
après-midi, pour étudier cette nouvelle réforme.
Je pense que les députés ont donné des heures
convenables de travail, d'un travail soutenu pendant toute la journée et
qu'il serait raisonnable, ce soir, surtout devant un projet de loi qui, quand
même, aborde une question aussi fondamentale, de consentement, d'ajourner
nos travaux pour continuer demain à discuter de ce projet de loi
à tête reposée. À ce moment, peut-être que le
ministre des Affaires municipales pourra nous apporter d'autres arguments que
ceux qu'il nous a apportés tantôt, ainsi peut-être que les
amendements dont il nous a parlé et les renseignements qu'on lui a
demandés.
J'appuie la motion d'ajournement, parce qu'on veut nous faire aborder
une question fondamentale, à cette période de la nuit, qui serait
le principe de cautionner une ingérence du législatif dans le
judiciaire. Le ministre nous a dit tout à l'heure qu'on devrait
abandonner certaines poursuites contre la municipalité. C'est une
question fondamentale, et je ne pense pas que ce soit l'heure ce soir pour
aborder ce problème.
Le ministre n'est pas prêt non plus à nous présenter
son projet de loi. En deuxième lecture, il nous dit: J'aurai un
amendement à vous présenter. Il ne nous dit pas ce que c'est,
mais à force de l'interroger, on s'aperçoit que c'est un
amendement qui porte sur le principe même de la loi. J'étais
d'accord avec la suggestion du chef de l'Opposition officielle tantôt,
lorsqu'il nous disait que ce projet de loi aurait dû être
étudié en commission parlementaire, immédiatement
après la première lecture. Cela nous aurait permis d'avoir ces
amendements et de savoir véritablement de quel principe on discutait.
Nous ne sommes pas prêts à discuter ce projet de loi, parce que
l'amendement n'est pas formulé. Nous ne savons pas exactement sur quel
principe on discutera. Également, le ministre manque de documentation.
On lui a posé une question concernant les assurances. Il n'a pas
été capable de nous répondre. C'est tout de même
fondamental, pour savoir quelle position l'Opposition adoptera face à
l'étude de ce projet de loi.
Mme le Président, je veux vous dire que si on veut penser que les
autorités de Saint-Eustache ont bien agi en agissant rapidement, avec
célérité, nous, les députés de
l'Assemblée nationale, nous ne sommes pas obligés d'en faire
autant. Il n'y a pas de sinistre ce soir, ici, à l'Assemblée
nationale. Nous n'étudions pas le projet de loi no 94. Nous avons
amplement de temps devant nous, jusqu'au 21 décembre, pour
étudier ce projet de loi et avec la collaboration, tant du ministre que
du leader adjoint du gouvernement, on pourra certainement régler cette
question. Si le ministre nous informe que, par exemple, il a des modifications
à apporter à l'article 2, qui pourraient régler les
interrogations de l'Opposition, nous serions certainement en mesure de le
faire, surtout s'il y avait, comme on l'a suggéré tout à
l'heure, une commission parlementaire avant de continuer la deuxième
lecture. À ce moment, le leader du gouvernement pourrait certainement
être assuré de la collaboration de l'Opposition et on
épargnerait énormément de temps et d'argent à la
population du Québec et aux députés. (0 h 50)
Le Président: M. le député de Vanier.
M. Jean-François Bertrand
M. Bertrand: M. le Président, je veux simplement dire aux
députés de l'Opposition que la seule raison fondamentale... et je
pense que c'est tout à l'honneur du gouvernement et c'est sans doute en
même temps pour satisfaire la municipalité de Saint-Eustache pour
laquelle on apporte ce projet de loi devant l'Assemblée nationale, dans
un bill public, dans le fond, qui épargne de l'argent à la
municipalité, soit à peu près $400, sans compter les frais
d'avocats qui seraient nécessaires pour défendre ce projet de loi
devant une commission parlementaire en bill privé. Dans un contexte
comme celui-là, si le projet de loi que nous avons devant nous, qui est
à peu près du type de ceux qu'on se voit présenter par les
municipalités à chaque session... Ce sont des projets de loi
comme ceux-là qu'on se voit présenter, Beauport, Sherbrooke,
Laval va nous arriver tantôt...
M. Lavoie: M. le Président, question de règlement.
On a invoqué tout à l'heure à l'égard du
député de Gatineau une question de règlement. Je voudrais
bien que la pertinence du débat soit respectée par l'honorable
député de Vanier. Qu'il nous dise pourquoi, à une heure du
matin, on doit continuer le débat. C'est cela la pertinence du
débat.
Le Président: M. le député de Vanier, vous
devez nous expliquer pourquoi nous sommes encore ici.
M. Bertrand: M. le Président, ma réponse à
votre question sera très simple et je sais que ce n'est pas parce que
vous vouliez vous impliquer dans le débat que vous avez posé la
question. Loin de vous, dans la neutralité de votre poste, d'inter-
venir dans ce débat, j'en suis convaincu. N'eût
été le refus de l'Opposition officielle de consentir, lorsque
nous disposions de ces projets de loi dans un contexte où il y avait
effectivement une négociation avec l'Opposition officielle, il ne serait
pas 0 h 50... On serait déjà rendu tout le monde dans nos
chambres, et on aurait quitté cette Chambre et les projets de loi
seraient adoptés. Alors, ce n'est certainement pas à l'Opposition
de dire au gouvernement qu'il est responsable de la situation qui existe en ce
moment.
Pour revenir à la pertinence du débat... Non, c'est la
faute du Parti libéral. Pour revenir à la pertinence du
débat, M. le Président, je disais et je répète, et
c'est tout à fait dans le cadre des arguments qui doivent être
invoqués pour refuser cette motion d'ajournement du débat, je
disais que ce projet de loi no 106, Loi concernant la ville de Saint-Eustache,
aurait pu être étudié très facilement en commission
parlementaire comme n'importe quel autre bill privé qui est
présenté par des municipalités. Nous l'avons fait sous
forme de bill public, de projet de loi public, pour épargner des frais
à la municipalité. Dans le fond, en commission parlementaire,
quand vous allez étudier ce projet de loi no 106, article par article,
vous allez faire exactement la même chose que ce que vous faites quand un
projet de loi de municipalité vient devant une commission parlementaire
et non pas devant l'Assemblée nationale, on en discute le fond...
Je parle de l'ajournement du débat. Qu'on en discute le fond et
la forme et chacun des articles pris individuellement et c'est ce qu'on vous
offre de faire. C'est la raison pour laquelle on vous dit: Adoptez
immédiatement ce projet de loi. N'ajournons pas inutilement un
débat qui pourrait se terminer dans cinq minutes avec la satisfaction de
savoir que nous avons une commission parlementaire assurée d'avance qui
va nous permettre de prendre chacun de ces articles et même l'ensemble du
projet de loi et de le regarder dans son fond, dans sa forme, dans chacun de
ses articles et de disposer d'un projet de loi qui, j'en suis convaincu, ne
fait absolument pas problème pour l'Opposition officielle. Le
député de Gatineau vient de dire lui-même qu'il est
d'accord avec le principe de ce projet de loi, mais il ne sait pas exactement
quel est l'amendement que le ministre va apporter.
Comme on sait fort bien que le ministre va l'apporter en commission
parlementaire, que donc il va être discuté, que donc il va y avoir
un débat sur la recevabilité, que donc tous les arguments
pourront être apportés, je ne vois vraiment pas de quoi on se
formalise au niveau de l'Opposition officielle quand on demande l'ajournement
d'un débat qui pourrait être ajourné forcément d'ici
cinq minutes si l'Opposition décidait qu'on en dispose et qu'à ce
moment on se transporte en commission parlementaire et qu'on termine notre
travail.
Il n'y a pas là le début d'un commencement de discussion
possible sur l'ajournement du débat. Je me demande dans le fond pourquoi
l'Opposition officielle a fait une telle motion. Vous savez fort bien qu'avec
toute la bonne volonté du monde on peut en disposer
immédiatement. C'est véritablement une motion dilatoire. Dans le
fond, si vous voulez veiller encore plus tard et faire des motions dilatoires,
ce n'est pas le gouvernement qui va vous y encourager. Nous autres, nous sommes
prêts immédiatement, il est une heure moins cinq, dans une minute,
on est prêt à clore tout le débat, à se transporter
en commission parlementaire, à voir tout cela avec le ministre des
Affaires municipales, en sachant d'avance que tout est possible et, mon Dieu,
on pourra tous s'en aller chacun dans nos chambres individuelles et quitter
cette Chambre collective. On vous en fait la proposition, nous sommes
prêts immédiatement à le faire. Je pense que l'Opposition
est prête à collaborer. Vous aviez offert un consentement à
dix heures moins dix; ce qu'il s'agirait dans le fond, c'est que maintenant, 55
minutes après l'heure qu'on s'était fixée pour terminer
tout ce débat, on décide que dans le fond effectivement cela vaut
la peine de le terminer tout ce débat, on décide que dans le fond
effectivement cela vaut la peine de le terminer immédiatement avec
toutes les assurances qu'on vous donne.
M. Lavoie: M. le Président.
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition
officielle.
Merci, M. le député de Vanier.
M. Lavoie: Je voudrais intervenir quelques minutes en vertu de
l'article 77, M. le Président, au nom de l'Opposition...
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition
officielle, avant de vous permettre d'intervenir, vous allez m'expliquer en
vertu de quoi. Je vous souligne que l'article 77 du règlement dit: "Une
motion non annoncée d'ajournement du débat peut être faite
en tout temps; une telle motion, sauf si elle est faite par un ministre ne peut
être faite qu'une seule fois au cours d'une séance. Elle est mise
aux voix sans amendement à la suite d'un débat restreint au cours
duquel un représentant de chaque parti reconnu peut prononcer un
discours de dix minutes, le proposeur pouvant exercer un droit de
réplique de même durée." Si je comprends bien les
dispositions de l'article 77, c'est un représentant de chaque parti
reconnu, ce qui signifie un représentant de l'Opposition officielle, un
représentant de l'Union Nationale et, bien sûr, un
représentant de la majorité ministérielle. L'article me
paraît clair. S'il y a une jurisprudence contraire, je voudrais que vous
me la citiez avec la date si possible.
M. Jean-Noël Lavoie
M. Lavoie: M. le Président, très brièvement,
pour vous dire qu'un cas de la sorte, des cas apparentés à ceci
sont arrivés quelquefois dans le passé. Je ne peux pas vous
donner les dates. Vous
rendrez votre décision dans le sens que vous voudrez. Je pourrai
vous la produire demain matin.
M. le Président, c'est arrivé dans le passé et le
ministre des Transports va s'en rappeler. La décision du
président à l'époque avait été la suivante,
à l'effet qu'une motion d'ajournement est faite à titre personnel
par un député. Elle est faite à titre personnel par un
député qui a le droit de faire une motion dans le sens d'ajourner
le débat. Le parti n'est pas nécessairement d'accord et cela a
été la décision qui a été rendue, à
quelques reprises. Je ne vous dis pas à dix reprises mais, à deux
ou trois : reprises, c'est arrivé. Je vois sourire le ministre des
Transports, lors de certains "filibusters" mémorables du Parti
québécois, ce que nous n'avons pas du tout l'intention de faire
ce soir. C'est la même chose que si la motion d'ajournement avait
été faite à titre personnel par le député de
Pointe-Claire qui n'est pas membre d'un parti reconnu. Si vous voulez consulter
le secrétaire général de l'Assemblée ce serait
peut-être très facile de trouver la date et la jurisprudence
à cet effet. Je vous dis sous ma parole de député, ma
parole d'honneur, qu'il y a eu des décisions dans ce sens à
l'effet que cette motion est faite à titre personnel par un
député et il n'est pas nécessairement, conjointement et
solidairement, le parti auquel il appartient n'est pas nécessairement
solidaire et conjointement solidaire de la décision ou du choix d'un
député de faire une telle motion. (1 heure)
M. Bertrand: Sur la question de règlement, M. le
Président.
Le Président: M. le député de Roberval, un
représentant par parti sur la question de règlement.
M. Lamontagne: C'est strictement à titre
d'ex-vice-président de l'Assemblée nationale que je vous confirme
la même chose; des décisions ont été rendues...
Le Président: En quelle année?
M. Lavoie: En 1970, en 1973 et en 1976.
M. Lamontagne: ... si je me souviens bien, c'est le ministre
délégué à l'Environnement actuel qui avait
parlé contre la motion de son collègue.
M. Lavoie: Mettez votre siège en jeu.
Le Président: M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: C'est une question de directive. Si j'ai bien
compris la lecture du texte de l'article 77 dont vous nous avez informé
et l'explication fournie par le député de Laval sur des
décisions précédentes, je comprends que le maximum
d'interventions possibles, c'est quatre, dans les circonstances, puisqu'il y a
trois partis reconnus. Si le député de Laval veut
interpréter que le député de Gatineau est intervenu
à titre personnel, ses dix minutes qu'il a utilisées, s'il ne les
a pas utilisées pour le Parti libéral, est-ce que c'était
son droit de réplique avant? Il semble que de toute façon, il y a
une période de dix minutes qui a été utilisée et
que le maximum, même dans l'interprétation du député
de Laval, c'est quatre interventions. Alors, où en est-on rendu? Peu
importe qu'on accepte l'intervention du député de Laval, on sera,
de toute façon, obligé de refuser le droit de réplique du
député puisqu'il a déjà pris dix minutes au moment
où il a fait sa motion.
Le Président: M. le leader adjoint... M. le
député de Vanier.
M. Bertrand: Je pense que vous devez être dans une
situation drôlement facile; je ne voudrais pas appuyer le
député de Laval dans sa proposition, parce qu'il vous dit, au
fond: Le député de Gatineau a fait cela à titre personnel
pour arriver à ce que le parti ne soit pas d'accord avec la proposition
qui a été faite par le député de Gatineau. Je ne
veux pas encourager la scission au sein du Parti libéral, je trouverais
cela malsain. Il y en a déjà beaucoup et il ne faut pas que cela
se poursuive à l'Assemblée nationale, comme on sent que cela se
déroule à l'extérieur de l'Assemblée nationale. Je
pense que vous devez appliquer l'article 77 tel que rédigé. Le
proposeur, le député de Gatineau...
Le Président: Le député de Gatineau a son
droit de réplique, cela ne fait aucun doute.
M. Bertrand: ... peut exercer un droit de réplique de
même durée et pour le reste, c'est un représentant de
chaque parti reconnu. Je pense que le député de Gatineau...
Le Président: M. le député de Vanier...
M. Bertrand: ... hors de tout doute, est encore membre du Parti
libéral, membre d'un parti reconnu et je ne voudrais pas que le
député de Gatineau, à cause du député de
Laval, soit mis dans une situation de ne pas être reconnu comme un
député légitimement élu au sein de sa formation
politique.
M. Lavoie: M. le Président... M. Gratton:
Juste...
Le Président: M. le député de Vanier, me
permettez-vous de vous poser une question pour avoir un éclairage
additionnel? Si la motion d'ajournement avait été soumise par le
député de Beauce-Sud, admettriez-vous qu'il y aurait eu trois
représentants de parti reconnu qui auraient eu le droit
d'intervenir?
M. Bertrand: Effectivement, je reconnais que si la proposition
avait été faite par le député de Beauce-Sud, il y
aurait eu une intervention de l'Union Nationale, du Parti libéral, du
Parti québé-
cois, avec un droit de réplique du député de
Beauce-Sud, comme proposeur de la motion. Mais comme le député de
Gatineau est membre du même parti politique reconnu que le
député de Laval qui voudrait se mettre en contradiction avec le
député de Gatineau, je pense que dans un cas aussi
spécifique que celui qui nous est présenté ce soir, il est
clair que le proposeur étant le député de Gatineau, membre
d'un parti politique reconnu qui est le même parti politique reconnu que
celui du député de Laval, c'est le député de
Gatineau qui doit exercer son droit de réplique.
Le Président: Puisqu'on m'affirme qu'il y a une
jurisprudence à ce sujet, je pense que la prudence
élémentaire consiste à consulter la jurisprudence. Je vais
donc suspendre les travaux pour quelques minutes seulement, histoire de
consulter la jurisprudence.
Suspension de la séance à 1 h 5
Reprise à 1 h 15
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît,
messieurs!
J'ai analysé soigneusement les dispositions de l'article 77, le
droit et également les faits. Nous avons essayé de retrouver,
dans la jurisprudence, aux procès-verbaux depuis l'adoption du nouveau
règlement, une jurisprudence permettant de fournir un éclairage
sur l'article 77; malheureusement, nous n'avons trouvé aucun
procès-verbal qui rapportait cette jurisprudence. Sans doute que le cas
s'est déjà soulevé, mais je signale une chose, c'est que,
manifestement, le député de Gatineau intervenait, quand il a pris
la parole la dernière fois, comme représentant de l'Opposition
officielle. D'ailleurs, lui-même et cela apparaît au journal
des Débats avait annoncé qu'il était le critique
officiel de son parti sur ce projet de loi en particulier. En
conséquence, je ne crois pas qu'il soit possible de faire une
distinction et je pense que, quand le député de Gatineau a
demandé l'ajournement du débat, il intervenait manifestement
aussi comme représentant de son parti. Suivant les dispositions de
l'article 77, cela ne permet pas d'autres interventions de l'Opposition
officielle, comme cela ne permettrait pas d'autres interventions de d'autres
formations politiques, sauf que M. le député de Gatineau peut
exercer son droit de réplique de dix minutes.
M. le député de Gatineau.
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, j'exercerais volontiers mon
droit de réplique si je soupçonnais, pour un seul instant, qu'il
reste encore des téléspectateurs qui nous guettent. À ce
moment, je pourrais au moins m'exprimer de façon à ce que
quelqu'un me comprenne parce que, de l'autre côté, personne du
parti ministériel ne semble m'avoir compris, ne semble avoir compris les
raisons pour lesquel- les on s'oppose vigoureusement à étudier
des projets de loi, à en débuter l'étude en
deuxième lecture après minuit.
M. le Président, devant l'incompréhension totale, devant
surtout l'entêtement du ministre des Affaires municipales ce n'est pas la
première fois que I'ex-membre de la Gendarmerie royale canadienne impose
ses volontés...
M. Pagé: Mais c'est une des dernières, par
exemple!
M. Gratton: C'est probablement l'une des dernières fois,
justement, qu'il le fait à titre de ministre des Affaires municipales;
l'avenir le dira, M. le Président. Quant à moi, je n'ai pas
l'intention de perdre mon temps plus longtemps, je termine donc là mon
droit de réplique.
Mise aux voix de la motion
Le Président: Est-ce que la motion d'ajournement de M. le
député de Gatineau sera adoptée?
Vote à main levée, suivant les dispositions de notre
règlement. Que tous ceux qui sont en faveur de la motion d'ajournement
veuillent bien lever la main, s'il vous plaît!
Que ceux qui sont contre cette motion d'ajournement veuillent bien lever
la main.
Que ceux qui désirent s'abstenir veuillent bien lever la
main.
La motion est rejetée.
M. le député de Vanier. (1 h 20)
M. Bertrand: M. le Président, voulant donner suite
à ce que je disais tantôt et là-dessus, je donne
vraiment suite aux propos tenus par le député de
Marguerite-Bourgeoys, qui posait un certain nombre de questions fort
pertinentes au ministre des Affaires municipales et qui, dans le fond, à
la suite de certains autres intervenants, commençait déjà
le débat de commission parlementaire sur ce projet de loi je
m'avance d'un pas prudent mais, jusqu'à un certain point, avec une
certaine audace en utilisant le règlement sessionnel qui a
été adopté, l'article 10, qui amende l'article 119 de
notre règlement. Ce règlement dit que: "À moins que cinq
députés ne s'y opposent, le leader parlementaire du gouvernement
peut, par une motion non annoncée qui n'est pas susceptible de
débat ni d'amendement, proposer que la motion de deuxième lecture
d'un projet de loi soit mise aux voix sans débat. " À ce
moment-ci, je demande si l'Opposition consent à ce qu'on puisse
immédiatement mettre aux voix ce projet de loi présenté
par le ministre des Affaires municipales et, ensuite, débattre de toute
la question en commission parlementaire, article par article.
Deuxième lecture (suite) M. Jean-Noël
Lavoie
M. Lavoie: M. le Président, très brièvement,
sur cette motion de deuxième lecture, nous n'ac-
ceptons pas votre proposition, c'est clair? Je veux parler quelques
minutes pour...
M. Lessard: Avez-vous cinq personnes qui sont contre?
M. Lavoie: Je parle sur la motion. Le débat de
deuxième lecture est amorcé actuellement, le ministre a fait son
discours de deuxième lecture et j'ai l'intention de participer à
ce débat de deuxième lecture.
Assez brièvement, M. le Président, la raison pour laquelle
je crois que l'Opposition officielle va s'abstenir de voter en deuxième
lecture je vais l'expliquer bien calmement c'est que, suite aux
demandes que nous avons faites tout à l'heure lors de la
présentation du projet de loi et une raison, également, je crois,
pour laquelle le député de Gatineau a demandé
l'ajournement du débat, c'est que nous trouvons dans ce projet de loi
une question de principe. Or, c'est plutôt rare et très rare
à l'Assemblée nationale que celle-ci semble se substituer aux
tribunaux.
Le ministre nous a dit dans son intervention de deuxième lecture
qu'il y a actuellement devant les tribunaux des poursuites de quelques millions
de dollars. Est-ce que je me trompe en disant $5 millions ou $6 millions? Bon,
$3 millions, $4 millions.
Une voix: $2 millions.
M. Lavoie: Ou $6 millions. Je me pose des questions et j'aurais
aimé avoir plus de renseignements avant de voter le principe de ce
projet de loi. Est-ce que l'Assemblée nationale a le droit de se
substituer...
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition
officielle, excusez-moi d'interrompre le fil de votre discours, mais je dois
vous signaler, aux termes de l'article 119 je croyais que vous
interveniez là-dessus proprio motu, je dois le faire comme
président, mais je pense que la motion du député de Vanier
était irrecevable, parce que le débat était amorcé.
Comme le débat était donc déjà amorcé, M. le
député de Vanier, parce que le ministre des Affaires municipales
avait engagé le débat, l'article 119a ne peut s'appliquer que
lorsque le débat n'est pas amorcé, et, proprio motu, je dois le
dire.
M. Lavoie: Je continue, M. le Président, et...
M. Grenier: Question de règlement. Il semble qu'on
s'engage pour passer une partie de la nuit dans notre Chambre commune. Je vous
demande, M. le Président, si vous ne pourriez pas, de votre
autorité, faire ouvrir quelque endroit afin qu'on puisse manger sur
place, prendre un café au moins, parce que je n'ai pas envie d'avaler le
poulet de la Guyane ce soir.
Le Président: Sans vouloir passer de commerciaux à
la télévision, M. le député de Mégantic-
Compton, je vous suggère de faire appel à un restaurant
qui fait la livraison. Ce n'est pas un commercial que de vous
référer aux pages jaunes. M. le leader parlementaire de
l'Opposition officielle.
M. Lavoie: M. le Président, j'ai l'intention de continuer
mon intervention. Je disais donc qu'avant de m'exprimer sur le principe, la
portée, la valeur intrinsèque de ce projet de loi, j'aurais
aimé de même que plusieurs députés de
l'Opposition libérale avoir plus de renseignements. Souvent, pour
les projets de loi privés où il y a beaucoup moins d'implications
que $5 millions ou $6 millions, il y a des auditions, il y a des avis dans les
journaux pour inviter les gens qui auraient des droits brimés à
pouvoir s'exprimer devant l'Assemblée nationale. En l'occurrence, ici,
on nous dit qu'il y a plusieurs personnes, à tort ou à raison
ce n'est pas à moi de juger de la valeur des poursuites qu'ils
ont intentées contre la ville, contre le maire ou contre les conseillers
municipaux... Ce n'est pas à moi de juger du bien-fondé de ces
poursuites. Mais avant, par un vote par mon vote en
deuxième lecture, que l'Assemblée nationale mette fin à
ces procès sans qu'on puisse entendre les parties qui ont intenté
ces actions, je crois que c'est très exceptionnel.
On le sait, il y a la séparation des pouvoirs: il y a
l'exécutif, il y a le législatif et il y a le judiciaire. Dans
notre vote de deuxième lecture, le législatif se substitue au
judiciaire. On ne veut pas faire un chiard, on ne veut pas faire un
débat; on a tenté, avant que le ministre entreprenne son
débat de deuxième lecture, d'amorcer une rencontre. On ne veut
pas retarder les travaux de l'Assemblée, mais je crois qu'on n'a pas le
droit de trancher, à main levée ou par un vote enregistré,
des questions devant les tribunaux. Il peut y avoir des dommages terribles
qu'on peut provoquer et qu'on peut causer par notre vote. On aurait
aimé... Je me permets encore de faire un appel, M. le Président,
au ministre des Affaires municipales. Je lui proposerais qu'on suspende ce
débat, s'il y a un consentement, qu'il y ait une rencontre sans
commission parlementaire avec le député de Gatineau ou un autre
député de notre côté qui a porté une
attention particulière à ce dossier et qui s'occupe des projets
de loi sur les questions municipales, avec un représentant de l'Union
Nationale, avec le ministre des Affaires municipales et d'autres
députés peut-être le député de
Deux-Montagnes qui pourraient nous éclairer sur la portée
de notre vote.
On ne voudrait pas voter à l'aveuglette. Un autre point, M. le
Président. C'est une loi rétroactive au 11 avril 1978. On replace
les parties à six mois passés. On veut féliciter
également les autorités de la ville de Saint-Eustache d'avoir
pris les moyens pour secourir les citoyens, etc. Mais on veut en savoir un peu
plus long avant de voter aveuglément. Je pense qu'on ne serait pas des
parlementaires sérieux si on n'obtenait pas le peu de renseignements
qu'on désire du ministre des Affaires municipales. Il est au courant du
dossier.
C'est le ministre des Affaires municipales qui le propose. Il le
connaît, il pourrait nous dire: M. Untel a pris une action de tant de
milliers de dollars contre le maire, contre le secrétaire de la
municipalité, contre le gérant, contre les conseillers
municipaux. Pour quelles raisons ces actions ont-elles été
prises? Vraiment, je ne suis pas en état ce soir de voter oui ou non. Je
n'ai pas assez d'information. Je pense que, si le ministre des Affaires
municipales et les députés d'en face se trouvaient dans ma
situation, ils feraient la même chose que moi, autrement la population
serait déçue de ses représentants. C'est tout ce qu'on a
à dire. (1 h 30)
C'est tout, je termine. C'est la raison pour laquelle, de notre
côté, nous ne pouvons pas nous exprimer. Nous allons nous
abstenir. Nous ne pourrons pas participer au vote de deuxième lecture.
Nous obtiendrons les renseignements en commission, il est vrai, et nous
voterons en troisième lecture, pour ou contre, mais parce que nous
aurons eu les renseignements dont nous avons besoin. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président: M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Je voudrais, à
mon tour...
M. Bertrand: Sur une question de règlement, M. le
Président.
Le Président: Je m'excuse, M. le député de
Nicolet-Yamaska. Sur une question de règlement, M. le
député de Vanier.
M. Bertrand: Simplement, avant que le député de
Nicolet-Yamaska ne fasse son intervention, il aimerait peut-être avoir le
renseignement que je suis prêt à donner au député de
Laval, relativement à la proposition qu'il a faite au ministre des
Affaires municipales. Nous sommes tout à fait disposés à
ce que, en commission parlementaire, les gens de la municipalité soient
présents, comme c'est le cas habituellement devant les commissions
parlementaires où un projet de loi privé est
étudié. Nous sommes tout à fait disposés à
ce qu'ils soient là.
Je voudrais simplement rappeler au député de Laval
qu'à 21 h 50, quand il y a eu un consentement, il ne semblait pas y
avoir de problème sur le projet de loi de la ville de Saint-Eustache, ce
projet de loi est déjà au feuilleton depuis le 21 novembre de
cette année, donc il y a plus de deux semaines.
M. Lavoie: Une question de privilège.
M. Bertrand: Vous aviez tout le temps pour obtenir les
informations.
Le Président: M. le leader parlementaire de I'Opposition
officielle.
M. Lavoie: Je veux dire ceci: Le député de Vanier
semble dire que j'ai donné un consentement à 21 h 50. Est-ce que
le député de Vanier reconnaît que je n'ai pas donné
de consentement à 21 h 50? De toute façon, le président en
est témoin, il devait y avoir une conférence, avec le
député de Saint-Jacques, des leaders parlementaires du
gouvernement, vers 18 heures. Je me suis rendu à votre bureau, M. le
Président. J'ai vu le député de Johnson pour parler des
travaux de l'Assemblée, mais cette rencontre n'a pas eu lieu, parce que
le député de Saint-Jacques n'était pas disponible à
cette heure-là.
C'est ma question de privilège, je ne voudrais pas que vous
laissiez entendre que j'ai donné un consentement que je retire
aujourd'hui, parce que ce n'est pas dans mes habitudes et ce n'est pas
aujourd'hui que je vais commencer une telle chose.
M. Bertrand: M. le Président...
Le Président: M. le député de Gatineau, une
question de privilège.
M. Gratton: Oui, parce que le leader adjoint du gouvernement a
fait référence à une entente qu'il y aurait eue.
Effectivement, j'ai rencontré le ministre des Affaires municipales, en
compagnie du leader adjoint du gouvernement. À ce moment, il
était dans notre intention, selon les indications que nous avions, qu'il
pourrait être assez facile de voter le principe du projet de loi,
c'est-à-dire le premier des deux principes qu'on a
évoqués, sauf qu'à la suite de cette rencontre, on m'a
remis une copie du dossier qui a été adressé au ministre
des Affaires municipales par les procureurs d'une des personnes
impliquées dans toute cette affaire, qui fait état de
requête en dommages dépassant $6 millions et qu'il y a un doute
dans l'esprit de certaines personnes... Oui, c'est ce que j'ai ici. C'est
adressé au ministre des Affaires municipales. C'est une copie.
Si le ministre n'a pas vu ce dossier, ce n'est pas mon problème.
C'est d'ailleurs ce qui explique pourquoi je ne l'ai pas vu avant ce soir non
plus. C'est ce qui explique pourquoi, à ce moment-ci, nous ne sommes
plus dans les mêmes dispositions qu'au moment où nous nous sommes
rencontrés à 21 h 50.
Le Président: M. le député de Vanier.
M. Bertrand: Deux éléments d'information. Tout
d'abord, c'est exact que le député de Laval n'était pas de
cette entente. C'est exact qu'à ce moment l'entente avait
été conclue avec le député de Roberval,
après consultation, entre autres, avec le député de D'Arcy
McGee et le député de Gatineau. Là-dessus, je veux
rectifier les faits.
Deuxièmement, si le député de Gatineau, en
apportant justement les éléments d'information qu'il apporte,
veut simplement indiquer au gouvernement qu'il serait peut-être
très avantageux, pour que les députés se fassent une
idée exacte de ce
projet de loi et de ses implications en commission parlementaire, les
gens qui mériteraient d'être entendus, pas simplement ceux de la
ville de Saint-Eustache, mais ceux dont vous semblez faire mention dans le
document que vous possédez, je pense que le ministre n'aura aucune
objection à ce que ces gens puissent se faire entendre en commission
parlementaire.
En d'autres mots, qu'on puisse disposer immédiatement de la
deuxième lecture, aller en commission parlementaire, comme on le fait au
moment d'un projet de loi privé et se donner toutes les latitudes pour
en discuter de façon appropriée et revenir en troisième
lecture et voir exactement comment on peut voter.
M. Tardif: M. le Président, une simple petite
question.
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Tardif: Est-ce qu'ils nous laissent entendre...
M. Fontaine: Une question de règlement, M. le
Président.
Le Président: M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Vous m'aviez donné la parole sur le discours
de deuxième lecture et je veux ercer-cer mon droit de parole, M. le
Président. Je pense que j'ai le droit de le faire, comme les autres
députés en cette Chambre. Si on veut se poser des questions ou
faire des caucus, qu'on aille derrière, dans l'antichambre, comme on l'a
fait tout au cours de la soirée, mais cela n'a pas donné
grand-chose.
Le Président: M. le député de
Nicolet-Yamaska, vous avez la parole.
M. Serge Fontaine
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Le leader du
gouvernement choisit les moyens pour faire adopter ses projets de loi et
l'Opposition a à juger si les moyens qu'il décide d'adopter sont
les meilleurs. Il nous offre, maintenant que cela fait deux heures qu'on
discute sur des questions de règlement, de convoquer des gens en
commission parlementaire pour qu'ils puissent venir donner leur position quant
au principe de ce projet de loi qui sera déjà voté
à l'Assemblée nationale. Ce qu'on a suggéré tout
à l'heure, c'était plutôt d'aller en commission
parlementaire avant qu'on étudie le projet de loi en deuxième
lecture, et cela aurait été logique, mais pas d'y aller
après que le principe du projet de loi aura été
adopté en deuxième lecture.
Je pense qu'il n'y a aucun député en cette Chambre qui
peut d'une façon sincère voter pour ce projet de loi, puisqu'il
ne peut pas en connaître véritablement toutes les
conséquences. Il y a de nombreuses poursuites dans cette affaire.
Même si le député de Gatineau nous dit qu'il a reçu
un document au cours de la soirée, je pense que n'importe qui, en
faisant la lecture de différents journaux depuis quelque temps, sait
que, par exemple, la ville de Saint-Eustache a poursuivi une certaine personne
pour $2 600 000 et sait également qu'il y a 21 personnes au moins,
à ma connaissance, qui ont poursuivi la ville de Saint-Eustache et les
officiers de la ville de Saint-Eustache.
Le Président: À l'ordre!
M. Fontaine: M. le Président, je pense que le gouvernement
n'est pas sérieux dans sa façon de vouloir faire adopter ce
projet de loi. Si le projet de loi no 94 que nous avons commencé
à étudier cette semaine à l'Assemblée nationale
avait été adopté le 11 avril 1978, c'est bien sûr
que les gens de Saint-Eustache auraient pu se prévaloir de ce projet de
loi et que cela aurait peut-être réglé une bonne partie des
problèmes. Mais tel n'est pas le cas. La loi concernant les sinistres
n'est pas adoptée et ils sont obligés, bien sûr, de venir
devant l'Assemblée nationale aujourd'hui. On ne peut blâmer, en
tant que députés, le conseil municipal de Saint-Eustache d'avoir
agi de la façon dont il a agi dans les circonstances, bien
sûr.
Si le gouvernement ne nous demandait aujourd'hui que de ratifier, par
exemple, des règlements ou des résolutions que le conseil
municipal aurait adoptés, je pense qu'on n'aurait pas d'objection du
tout à adopter un tel projet de loi. Mais le gouvernement nous
présente un projet de loi d'exception, un projet de loi avec des
procédures spéciales. Les députés de
l'Assemblée nationale, avec les informations qu'ils ont
présentement sur le dossier, s'aperçoivent que c'est une atteinte
véritablement au pouvoir judiciaire. Il y a des poursuites
d'intentées et ce projet de loi fait véritablement une intrusion
du pouvoir législatif dans le pouvoir judiciaire. Pour que les
députés puissent se prononcer sur ce principe, il aurait fallu
qu'ils aient les explications nécessaires avant de pouvoir le faire. Je
pense qu'il n'y a aucun député dans cette Chambre qui pourrait
consciencieusement voter pour ce projet de loi parce qu'on n'a pas les
informations. C'est une loi d'exception qui crée en même temps des
modifications au Code civil, M. le Président. Il y a des poursuites
d'intentées et on connaît le Code civil à son article 1053
qui dit que "toute personne capable de discerner le bien du mal est responsable
du dommage causé par sa faute à autrui, soit par son fait, soit
par son imprudence, négligence ou inhabilité ".
On sait, M. le Président, que les personnes qui ont de telles
réclamations ont deux ans pour intenter une poursuite. Du seul fait
qu'on veuille rendre ce projet de loi rétroactif et annuler les
poursuites contre ces personnes, je pense qu'on modifie, premièrement,
le Code civil et qu'on cautionne une intrusion du pouvoir législatif
dans le pouvoir judiciaire. (1 h 40)
Également du fait de la rétroactivité, je pense
qu'encore là c'est inacceptable. Le député de
Deux-Montagnes, dans un billet du député qu'il avait signé
lors de la victoire du 9 novembre 1978, expliquait le projet de loi qu'on
présentait à l'Assemblée nationale et disait: Du point de
vue juridique cependant, il faut s'assurer que les engagements financiers que
la ville a pris sont valables. C'est le but principal de la loi
spéciale. Si ce n'était que cela, M. le Président, nous
n'aurions aucune espèce d'objection à voter immédiatement
pour ce projet de loi. Mais le député de Deux-Montagnes a
oublié de mentionner l'autre partie de la loi qui consiste à
annuler purement et simplement des procédures judiciaires qui sont
déjà intentées ou des procédures judiciaires qui
peuvent être intentées dans les deux années qui
viennent.
M. le Président, je ne veux pas faire un débat à
n'en plus finir là-dessus, mais il y a un principe fondamental qui n'est
pas respecté et l'Union Nationale et l'Opposition officielle
l'ont dit tout à l'heure on ne pourra certainement pas voter pour
un projet de loi semblable, tout au plus pourrons-nous également nous
abstenir de voter. Si je ne me retenais pas, M. le Président, je
voterais purement et simplement contre un tel projet de loi.
Le Vice-Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Fernand Lalonde
M. Lalonde: M. le Président, j'ai reçu moi aussi
une copie des documents qui ont été confiés au ministre.
Ces documents comprennent, entre autres, copies de poursuites qui ont
été entreprises par des citoyens. Il y a ici dans une cause par
exemple que je viens de découvrir, parce que je les ai reçus ce
soir en même temps que le ministre... Dans la cause devant la Cour
supérieure du district de Terrebonne, no 700-05-002185-787, il y a 34
citoyens et citoyennes qui ont poursuivi deux défendeurs que je ne
nommerai pas, la ville de Saint-Eustache qui, le ministre en conviendra, n'est
pas excusée par ce projet de loi de façon directe, et le
Procureur général de la province de Québec
représentant Sa Majesté le chef de la province, donc
représentant le gouvernement dont fait partie le ministre. Il y a une
allégation ici que je vais vous lire dans cette demande.
Au paragraphe 12, on dit: "Le ministère des Richesses naturelles
n'a pas pris les moyens nécessaires pour veiller à l'application
de la loi et des règlements sur le commerce des produits
pétroliers et ce, de manière à éviter un tel
sinistre".
C'est une allégation, je n'en connais pas la valeur. Ce sera au
tribunal et il appartiendra aux parties de l'établir. Mais il reste que
le gouvernement est pris à partie dans cette action. Si on lit
attentivement le projet de loi, à l'article 2, on dit: "Aucune action en
déclaration d'inhabilité d'un membre du conseil ou d'un
fonctionnaire munici- pal mettons cela de côté pour
l'instant aucune action en responsabilité civile ensuite
on dit, en troisième partie ni aucune action pouvant
entraîner une condamnation à une amende contre un membre du
conseil ou un fonctionnaire municipal"... Troisième partie de la phrase.
Reprenons la deuxième: "Aucune action en responsabilité civile
je saute le reste qui n'est pas nécessaire ne peut
être fondée sur le motif de l'inobservation d'une disposition
législative".
On vient de donner un pardon, non pas seulement à la
municipalité, au maire et aux conseillers ou aux fonctionnaires, on
vient d'empêcher des citoyens de poursuivre le gouvernement qui nous
demande ce pardon ce soir. C'est une interprétation que le ministre peut
contester, que d'autres pourraient contester, mais je vous dis qu'à
première vue, à deux heures moins quart du matin, je pense que
c'est assez sérieux pour que des ministres et des députés
ministériels se posent des questions.
Qu'est-ce qu'on est en train de faire voter ce soir? Non, je ne pense
pas... Je ne veux pas en faire un plat, cela a peut-être
échappé au ministre, c'est le danger d'ailleurs de prendre un
projet de loi privé sous sa responsabilité. Il a voulu le faire,
naturellement, pour le bon motif. Il dit que c'est pour éviter des frais
aux contribuables. Je lui accorde le bénéfice du doute
là-dessus, mais voici qu'on nous propose ce soir d'enlever des droits
qui existent, qui ont déjà commencé à être
exercés devant les tribunaux par de simples citoyens contre le
gouvernement. Cela friserait l'indécence, M. le Président, si je
ne croyais pas qu'au fond, cela est passé inaperçu au ministre.
Je lui donne le bénéfice du doute et je ne veux pas lui en tenir
rigueur, mais je pense que je peux, au-dessus de la partisanerie, faire appel
au ministre des Affaires municipales, compte tenu de cette
interprétation qui est valable, qui, à première vue, se
tient debout. Je pense qu'il devrait immédiatement retirer ce projet de
loi de cette Assemblée et le faire examiner plus
sérieusement.
Est-ce que ce serait je viens de le découvrir une
abstention qu'on devrait faire devant cette... Je suis encore prêt
à m'abstenir modestement, en présumant que mon
interprétation est contestable, quoique je croie que ce soit valable. Le
minimum qu'on peut demander au gouvernement, actuellement, au leader adjoint,
qui a la responsabilité des travaux de cette Chambre, et surtout au
ministre qui propose ce projet de loi, c'est la prudence. Étant
donné que je suis convaincu qu'il n'a pas l'intention, par ce projet de
loi, de donner un pardon au gouvernement pour ce qu'il a pu faire ou omettre de
faire dans cet événement, je pense que le minimum de
décence, c'est de s'abstenir de demander aux députés de
voter sur ce projet de loi. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: M. le ministre des Affaires
municipales, c'est votre réplique.
M. Goldbloom: Non, M. le Président.
Le Vice-Président: Un instant! Vous êtes deux du
même parti. M. le député de Gatineau.
M. Michel Gratton
M. Gratton: II y en a un debout, l'autre est assis.
Je désire intervenir sur cette motion de deuxième lecture
du projet de loi no 106. J'interviendrai, bien entendu, seulement sur le
premier principe, soit celui qui entérine les décisions qu'a
prises le conseil municipal, lors des événements que l'on
connaît, en avril 1978. Je répéterai que le
député de Deux-Montagnes a posé la question et la
réponse, quant à nous, dans la mesure où on a pu
vérifier, est qu'effectivement le conseil municipal de Saint-Eustache a
agi comme tout bon gouvernement responsable se devait d'agir dans les
circonstances, c'est-à-dire qu'il ne s'est pas interrogé sur la
nécessité d'obtenir des approbations de la Commission municipale,
de procéder par soumissions publiques comme l'exige la Loi des
cités et villes pour faire exécuter les contrats qui
étaient de nature urgente, de ne pas attendre tout le processus qui est
normalement suivi pour adopter un règlement d'emprunt pour subvenir ou
pour payer les dépenses encourues, bref, le conseil municipal a fait ce
qu'il était urgent et nécessaire de faire pour assurer la
sécurité des citoyens. Donc, on n'a qu'à le
féliciter, dans la mesure où nous connaissons tous les gestes
posés, toutes les raisons qui ont pu motiver le conseil de les
poser.
Il y a un fait à noter dans tout cela, c'est que, contrairement
à ce qu'a prétendu le ministre des Affaires municipales lundi, au
moment où il intervenait en deuxième lecture sur le projet de loi
no 94 du ministre de la Justice, loi qui concerne les mesures d'urgence en cas
de sinistre, le ministre affirmait que si la ville de Saint-Eustache, si le
projet de loi no 94 avait été adopté à ce moment,
il n'aurait pas été nécessaire de revenir devant
l'Assemblée nationale pour faire entériner les gestes que la
municipalité a posés et qui sont les mêmes que ceux qu'on
autorise par le biais du projet de loi no 94. (1 h 50)
II y a une objection à cela, M. le Président, c'est
qu'effectivement, même si la loi 94 était dans nos statuts, il
serait encore nécessaire, dans le cas spécifique de
Saint-Eustache, de revenir devant l'Assemblée nationale avec un projet
de loi, puisque nulle part, dans le projet de loi no 94, retrouvons-nous une
disposition qui permettrait à la municipalité de contracter un
règlement d'emprunt, sans suivre la procédure normale
prévue dans la Loi des cités et villes, si un tel
règlement d'emprunt était nécessaire pour défrayer
les dépenses encourues au cours de l'état d'urgence.
Le projet de loi no 106, M. le Président, entérine,
à toutes fins utiles et on l'a répété assez
de fois pour qu'il ne soit pas nécessaire que j'en parle très
longuement les actes du conseil municipal, notamment les travaux
donnés en régie sans soumissions et, de façon
générale, les dépenses encourues.
Ce que nous demanderons au ministre de nous fournir, lors de
l'étude en commission parlementaire, ce seront, bien entendu, les
montants impliqués dans ces contrats donnés sans soumission, dans
ces règlements d'emprunt qui n'ont pas suivi le processus normal.
On retrouve d'ailleurs, dans le projet de loi no 94 qui est devant cette
Chambre, un article, le no 38, qui permettrait, si ce projet de loi
était déjà adopté, au gouvernement de venir en aide
financièrement à la municipalité. Nous tenterons donc de
savoir du ministre des Affaires municipales, en commission parlementaire, si,
d'abord, le gouvernement est venu en aide financièrement à la
municipalité de Saint-Eustache et s'il est dans son intention de le
faire à l'avenir.
M. le Président, je répète que, quant au
deuxième principe inhérent du projet de loi, celui qui
exonère les membres du conseil municipal aussi bien que les
fonctionnaires pour tout acte qu'ils ont pu poser... Je répète
que je ne suis pas avocat, je ne suis pas juriste, je ne suis pas en mesure,
surtout pas à 1 h 55 du matin, de juger de la valeur des arguments qui
ont été présentés de part et d'autre. Il me semble,
par contre, qu'il s'agit là d'un principe fondamental, sur lequel les
membres de cette Assemblée ne devraient pas être appelés
à voter à la légère, surtout à un moment
où nous n'avons même pas quorum en cette Assemblée.
Le Vice-Président: En êtes-vous sûr?
M. Gratton: Je vous demande de faire le compte, M. le
Président.
Le Vice-Président: II y a maintenant quorum.
M. Gratton: M. le Président, je dis donc que, sur ce
deuxième principe, il nous est impossible, à la lumière
des informations que nous n'avons pas ce soir, de nous prononcer en toute
connaissance de cause. Il nous est d'ailleurs impossible de le faire, en grande
partie parce que le ministre n'est pas capable de nous dire si la
municipalité possède des assurances de responsabilité
publique qui donneraient quand même une certaine garantie à ceux
qui peuvent avoir des recours contre la municipalité de ne pas
être brimés dans leur droit d'exercer ces recours.
On a fait état des nombreuses intentions de poursuites qui
peuvent s'adresser tant à la municipalité qu'à d'autres
personnes impliquées. Il s'agit d'un montant de plus de $6 millions. Il
semble que certaines personnes ont tenu pour acquis qu'il y a une personne, un
garagiste, dans la ville de Saint-Eustache, qui est le seul responsable de ces
incidents.
Or, M. le Président, aucun tribunal n'a encore statué
là-dessus. Mais si cette personne devait être reconnue coupable,
selon nos informations, elle possède une assurance de $1 million. C'est
donc dire que les réclamants, ceux qui exerceront des recours,
pourraient se voir rembourser pour les dommages subis à peine 20% de
leur réclamation.
C'est pour toutes ces raisons, M. le Président, que l'Opposition
officielle se doit de s'abstenir sur la deuxième lecture de ce projet de
loi, tant et aussi longtemps que le ministre et le gouvernement ne nous auront
pas fourni les renseignements essentiels pour que nous puissions nous prononcer
de façon positive ou négative.
M. Goldbloom: M. le Président...
Le Vice-Président: M. le député de
D'Arcy-McGee.
M. Victor Goldbloom
M. Goldbloom: ... j'interviens brièvement sur ce projet de
loi. Je ne voudrais pas adresser des critiques au ministre, mais je voudrais
dire en toute sincérité que je crois que nous avons devant nous
de la mauvaise législation.
Je m'explique, M. le Président. Hier c'est maintenant
avant-hier mardi de cette semaine, la commission parlementaire des
Affaires municipales a étudié six projets de loi privés, a
entendu les témoins qui ont fait valoir leurs points de vue, ont fait
valoir les raisons pour lesquelles l'Assemblée nationale devait leur
accorder certains pouvoirs ou certaines autorisations.
Voici, M. le Président, un projet de loi qui, à mon sens,
se situe dans le domaine privé. Mais, puisque le ministre a choisi de le
présenter sous la forme d'un projet de loi public, c'est lui-même
qui en assume la responsabilité; c'est à lui que nous devons
adresser nos questions, questions de détail, pour obtenir les
renseignements pertinents et nécessaires à la prise d'une
décision de notre part. Si c'était un projet de loi privé,
M. le Président, la responsabilité de fournir les réponses
n'appartiendrait pas au ministre mais, plutôt, aux témoins qui
viendraient et expliqueraient pourquoi une situation d'exception s'était
produite, des actions avaient dû être prises et, donc, une certaine
considération devrait être donnée au fait que les
formalités requises par la loi n'étaient pas toutes
accomplies.
M. Verreault: M. le Président, question de
règlement.
Le Président suppléant (M. Marcoux): Oui, M. le
député de Shefford.
M. Verreault: Je m'excuse auprès de mon collègue,
mais je vous demanderais de vérifier, pour la nième fois, le
quorum.
Le Président suppléant (M. Marcoux): Nous avons
maintenant quorum.
La parole est au député de D'Arcy-McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, je disais que si ce projet
de loi était à caractère privé, les témoins
seraient obligés de nous fournir les renseignements... (2 heures)
M. Proulx: Question de privilège, M. le Président.
Il n'y a aucun membre de l'Union Nationale à l'heure actuelle, et
seulement deux membres du Parti libéral.
Le Président suppléant (M. Marcoux): Ce n'est pas
une question de privilège.
M. Cordeau: M. le Président, je veux bien croire qu'il se
fait tard, mais M. le député de Saint-Jean devrait s'ouvrir les
yeux.
M. Proulx: C'est une apparition.
Le Président suppléant (M. Marcoux): À
l'ordre! À l'ordre!
M. Proulx: Question de règlement, M. le
Président.
M. Cordeau: M. le Président, il y avait quelqu'un de
l'Union Nationale.
Le Président suppléant (M. Marcoux): La parole est
au député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais soumettre
à votre considération deux choses. D'abord, la suggestion a
été faite, au cours de ce débat, que des témoins
puissent intervenir en commission parlementaire, après l'adoption en
deuxième lecture du projet de loi, par mesure d'exception parce que,
normalement, quand la commission parlementaire siège après la
deuxième lecture, ce n'est pas pour entendre des témoins. La
proposition a néanmoins été faite.
Je n'ai pas besoin de vous le rappeler, mais par votre
intermédiaire je rappelle aux autres membres de cette Chambre, dont
certains semblent l'avoir oublié, que quand une commission parlementaire
siège pour entendre des témoins, normalement il y a des avis qui
permettent aux intéressés non seulement de savoir qu'il y aura
séance de la commission parlementaire et qu'ils auraient le droit, s'ils
le désiraient, de se présenter devant cette commission et
s'exprimer, mais aussi à quel moment siégerait cette commission
parlementaire.
Le Président suppléant (M. Marcoux): À
l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais un peu de silence pour pouvoir
écouter le député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, si l'on nous suggère
que parce que certaines personnes sont ici et pourraient, au cours de cette
journée déjà commencée, s'exprimer devant la
commission parlementaire, j'attire votre attention sur le fait qu'il y a
sûrement d'autres intéressés qui ne sont pas ici et qui ne
seraient pas en mesure de venir à si peu d'avis et s'exprimer, et que la
commission parlementaire n'aurait pas l'éclairage valable qu'elle
devrait avoir pour pouvoir se prononcer sur un tel projet de loi.
Deuxième considération, M. le Président, qui est,
à mon sens, encore plus grave. S'il s'agissait d'un projet de loi
à caractère privé, l'attitude normale et historique de
l'Assemblée nationale, exprimée normalement par les membres de la
commission parlementaire qui siégerait pour entendre les témoins,
serait: Nous ne nous substituerons pas aux tribunaux, nous n'interviendrons pas
là où il y a des causes pendantes devant les tribunaux et,
pourtant, voici une situation... Je ne dis pas, M. le Président, avant
que ne me le rappellent certains collègues, qu'il n'y a pas de
précédent, que l'Assemblée nationale n'est jamais
intervenue là où il y avait des causes pendantes devant les
tribunaux. Mais, M. le Président, c'est un mauvais principe. C'est une
chose à éviter à tout prix. Je pense que mon
collègue de Marguerite-Bourgeoys a offert des preuves de l'intervention
intempestive de l'Assemblée nationale dans une situation où les
tribunaux devraient avoir la liberté de trancher des questions.
Enfin, M. le Président, il y a ce paradoxe d'un gouvernement qui,
d'un côté, présente un projet de loi général
et, en même temps, pour un cas particulier, présente un projet de
loi public, particulier et rétroactif.
Quand on regarde ce que le même gouvernement nous propose comme
régime général, je fais allusion au projet de loi no 94,
Mme la Présidente, pour fins de comparaison, je constate qu'une personne
qui aurait participé à l'application de mesures d'urgence serait
exemptée des responsabilités du dommage causé de bonne foi
à autrui qui résulte de sa participation. C'est plus
général, c'est beaucoup moins précis que ce que nous
propose le projet de loi sur la ville de Saint-Eustache. De deux choses l'une.
Ou bien ce qui est proposé dans le projet de loi particulier de
Saint-Eustache est le genre de mesures qui devraient être
appliquées à toutes les municipalités. On sait qu'à
tous les jours, au Québec, il y a des sinistres qui se produisent au
Québec, si on pense par exemple, aux incendies dont quelques-uns
prennent la proportion de conflagration. Les autorités municipales
doivent intervenir d'urgence et peuvent être tenues responsables d'une
action mal jugée ou mal inspirée, peuvent être au moins
poursuivies avec la prétention, de la part de la personne qui prend la
poursuite, qu'il y ait eu un mauvais jugement, une action mal
inspirée.
Ou bien ce qu'on nous propose pour Saint-Eustache devrait se retrouver
dans une loi générale, qui s'appliquerait à tous les
maires et à tous les conseillers municipaux du Québec, ou bien le
ministre devrait prendre ce que son gouvernement propose dans le projet de loi
no 94 et remplacer ce qui se trouve dans le projet de loi no 106 par ce que la
loi générale donnerait comme protection aux maires et aux
conseillers.
Mme la Présidente, je n'ai pas l'intention de me
désolidariser de mon parti, mais je vous avoue que j'ai la tentation
personnelle non pas de m'abstenir, mais de voter contre le projet de loi,
à cause des lacunes, des failles que j'ai exposées dans cette
brève intervention.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Mégantic-Compton.
Une voix: Bravo! Bravo! M. Grenier: Mme le
Président... M. Jolivet: Cela prend du courage! M. Fernand
Grenier
M. Grenier: Continuez, foule en délire! À 2 h 10 du
matin, j'ai déjà dit que mes lumières étaient
basses, mais elles se maintiennent quand même un peu allumées. Je
vois passer devant nous un projet de loi qui mérite qu'on redouble
d'énergie à cette heure de la nuit et qu'on se dise qu'on ne se
fera pas passer un pareil sapin! Cela doit appeler sur le fauteuil le
président qui s'approche. On le fera venir.
Il y a trop de choses inconnues dans ce projet de loi. Nous ne sommes
pas en Guyane ici pour se faire passer du "Kool-Aid", M. le ministre!
Les avocats qui poursuivent les membres du conseil de ville de
Saint-Eustache...
M. Jolivet: Consentement, consentement.
M. Grenier: ... on ne sait pas encore de quel ordre. J'imagine
que le maire est encore dans les galeries, puisque quelqu'un a les yeux vers
cette galerie. J'ai l'impression qu'ils ne se touchent pas du coude tant ils
sont nombreux! On le signalait tout à l'heure. On ne savait pas s'il y
avait des gens de I Union Nationale qui étaient présents ou non.
Je peux vous dire que, si dans mon comté on apprenait qu'il y a encore
des gens en Chambre à 2 h 10 du matin, on rirait de nous. Je n'ai pas de
honte à dire qu'il n'y a pas beaucoup de gens ici.
Mme le Président, il y a trop de choses qui ne sont pas comprises
dans ce projet de loi. On tente de nous passer une loi en nous disant:
Écoutez, on ne le sait pas trop, finalement, ce qu'il y a
là-dedans. On ne sait pas trop ce qu'il y a dans cette loi, mais votez
donc pour cela ce soir. C'est la course au leader parlementaire. On a
décidé qu'on ne reculerait pas. On a un échantillon de loi
qu'on nous a présenté ce matin, une journée qui va assez
bien, et on a décidé qu'on ne reculerait pas. (2 h 10)
On a fait son lit sur ce projet de loi ce soir, et on décide,
correct ou pas, après tant d'arguments qu'on aura donnés du
côté de l'Opposition, qu'on ne recule pas, même si cela n'a
pas de bon sens. Vous parlez d'une histoire!
Si on n'a pas là-dedans l'information requise pour voter sur ce
projet de loi, il me semble qu'on aurait pu au moins avoir la décence de
changer pour un autre qui était plus complet. On était en train
de se convaincre tout à l'heure qu'on s'abstiendrait de voter, et on en
est presque rendu à vouloir voter contre tant on découvre
à chaque quart d'heure et remarquez bien que là, on n'a
personne qui peut nous donner des renseigne-
ments, et on faiblit, on n'a même plus rien pour se sustenter, on
a l'air pris en conclave ici qu'il y a des poursuites intentées
contre le gouvernement. Je pense que le ministre ne peut même pas nous
dire de quel ordre elles sont, il ne peut même pas nous établir un
ordre des poursuites qui sont intentées.
Du même coup, dans ce projet de loi, ce projet de loi qui est
rétroactif, on passe l'éponge sur la période entre le 11
avril 1978 et le 15 août 1978. On n'a aucun renseignement ce sur quoi on
veut effacer cette période du 11 avril au 15 août, blanchissage
complet. L'époque de Mme Blancheville, au cours de l'été.
On ne sait pas ce qui s'est passé, mais votez pour cela quand
même, on vous informera de cela en commission parlementaire. Là,
on est prêt à nous amener tout le monde dont on a besoin en
commission parlementaire. Savez-vous que si on tenait la commission
parlementaire avec ces gens qu'on invite à venir nous rencontrer, qui
nous fourniront des renseignements, j'ai la conviction que quand on reviendrait
en chambre, il n'y aurait pas beaucoup d'intervenants. Ce ne serait pas long
avant de passer à la deuxième lecture et de voter ici, en
Chambre, une fois qu'on aurait eu, en commission parlementaire, les
renseignements dont on a besoin.
Le député de Vanier, qui a la responsabilité, ce
soir en Chambre, au nom du gouvernement, devrait comprendre, il me semble. Il
est brillant, ce petit gars-là. Il y a des bouts de temps où il
nous fait voir qu'il a de l'intelligence...
M. Jolivet: ... de la lumière.
M. Grenier: ... et ce soir, il se bute à vouloir faire
adopter ce projet de loi. On n'a pas l'information dont on a besoin. Le
député de Deux-Montagnes se fend en quatre pour nous dire comment
le maire de Saint-Eustache est un homme compétent et tout cela, et hier
matin, il était en train d'avoir des insinuations à l'endroit de
la Régie de l'assurance-récolte, il me semble que cela a
été un spectacle intéressant à la commission.
M. de Bellefeuille: Question de règlement. Je pense que
nous ne savons pas ce qui se passe dans les commissions, Mme le
Président!
M. Grenier: Oui, mais on en a une bonne idée quand c'est
le même monde qui siège en haut et qui siège en bas. On
n'est peut-être pas supposés en être informés
légalement, mais quand on a mis le nez dans les commissions
parlementaires, on sait pas mal à quoi s'en tenir. Ces divergences
d'opinions qu'il y avait hier matin entre le député de
Deux-Montagnes avec ses insinuations... Oui, mais Mme le Président, on
est en train de dire que tout est parfait et on a laissé porter des
doutes sur des personnes hier matin, mais là, on trouve que tout est
correct. On donne des bénédictions à deux mains, si c'est
possible. Dépêchez-vous et votez-nous cela, l'Opposition.
On ne votera pas tout de suite! On veut avoir plus d'information que
cela avant de voter. On est assez nombreux ici pour demander de l'information
au gouvernement. Ce n'est pas parce qu'on suppose que la pureté est d'un
bord et l'impureté de l'autre qu'on va décider d'un coup sec
qu'on fait confiance à tout ce monde.
On nous présente un projet de loi qui est incomplet et sur lequel
il nous manque plusieurs renseignements, et cela va grandissant à chaque
quart d'heure. Demain matin, on va se faire reprocher par la population d'avoir
endossé ce projet qui nous est présenté par le ministre
des Affaires municipales. On ne vous demande pas d'avoir la perfection, on vous
demande d'avoir du bon sens et de ne pas apprendre aux poissons à nager
à reculons.
Faites siéger la commission, donnez-nous l'information en
commission, demain! Ces gens sont prêts à venir témoigner
devant la commission et de fournir aux membres de la commission, aux
députés, les renseignements dont on a besoin. Et la
deuxième lecture, cela va passer comme du beurre dans la poêle,
parce qu'on aura eu, en commission, l'information dont on a besoin. Ce qu'on
vous demande, on ne peut pas l'avoir ce soir. C'est évident, on nous l'a
dit tout à l'heure. Les bureaux sont fermés partout, on ne peut
plus avoir aucun détail. C'est évident que l'Opposition, n'a pas
envie de voter pour le projet de loi. Est-ce qu'on va continuer à se
dire des choses comme cela jusqu'à 6 heures ce matin seulement pour le
plaisir de dire qu'on adopte le projet de loi, pour dire que le gouvernement a
raison contre l'Opposition, ou que l'Opposition ne laissera pas adopter ce
projet de loi par le gouvernement? Je trouve qu'il est tôt dans le mois
de décembre pour commencer à nous faire veiller jusqu'à 6
heures du matin. On pourrait peut-être attendre d'être plus proche
des Fêtes un peu. Je suis bien prêt à passer des nuits, mais
pas commencer cela dans la première semaine, cela commence mal.
Il pourrait y avoir de la bonne volonté de la part du
gouvernement. On ne perdra pas la face. On ne le dira pas. Il n'y a pas un
journal qui va écrire quoi que ce soit, il est 2 h 15. Il n'y aura pas
une ligne d'écrite dans le journal demain. Il n'y a personne qui aura
perdu la face.
Allons donc se coucher. Demain matin on reprendra cela à
tête reposée. Les bureaux seront ouverts, on aura l'information
dont on aura besoin et on sera capable, à ce moment-là,
lucidement, de voter pour ou contre ce projet de loi, mais on saura pourquoi on
vote. On est en train de vouloir s'abstenir, parce qu'on ne sait pas ce qu'il y
a dans ce projet de loi. Le gouvernement s'entête tout simplement
à dire: On va l'adopter, on va adopter la loi ce soir. On va en adopter
deux ou cela va aller mal. Ce n'est quand même pas comme cela qu'on a
envie de piloter les projets de loi d'ici au 21 décembre,
j'espère.
Un acte de générosité... Que le ministre, qui est
en train d'avoir un conciliabule avec le député de Vanier,
reprenne son fauteuil et nous dise: Oui, vous avez raison. Vous avez
passablement de jugement, M le député de Mégantic-Compton,
à
2 h 15 du matin. Vous avez plus de lumière qu'on ne
pensait...
M. Jolivet: Belle lumière! Belle lumière!
M. Grenier: On retire notre projet et on remet cela à
demain. Demain matin on votera avec plus de clarté sur le projet de loi.
Je suis convaincu que cela ferait l'affaire de passablement de personnes et
personne ne perdrait la face. En tout cas, s'il y en a qui perdent la face,
cela ne sera dit nulle part, vous pouvez en être sûrs, il n'y a
plus personne qui surveille nos débats. Pour l'intérêt
qu'il y a là...
Mme le Vice-Président: M. le député de
Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Mme le Président, depuis que nous avons
commencé à discuter du projet de loi, il me semble que de
nouveaux faits ont été dévoilés à
l'Assemblée nationale. On a découvert, au fur et à mesure,
des discussions, des actes, des événements qui nous portent
à vraiment nous poser des questions sur les principes fondamentaux de ce
projet de loi. Mon collègue, le député de
Marguerite-Bourgeoys, en a soulevé une quant au gouvernement du
Québec qui n'aurait pas de responsabilité vis-à-vis des
actions qui ont été prises non seulement contre la
municipalité, mais aussi contre, je crois, le procureur
général du Québec.
Le ministre nous a expliqué que le projet de loi ne concernait
que les individus, le maire et les conseillers et ne devait pas toucher la
municipalité. Je crois que cette interprétation n'est pas exacte,
parce que, si on lit le projet de loi, on peut voir que, sur deux plans, pour
deux raisons, il y a disculpation de la municipalité. Je sais que le
ministre a dit que ce n'était pas son intention.
Je lis l'article 2. Je ne lirai pas tout l'article, mais je lirai
l'interprétation, les parties de cet article qui pourraient enlever la
responsabilité de la municipalité: "... aucune action en
responsabilité civile,... en rapport avec un acte accompli lors de
l'état d'urgence,... ne peut être fondée... sur le motif de
l'inobservation d'une disposition législative."
Il n'y a pas seulement la question de l'interprétation. L'article
2 du projet de loi le dit clairement. Vous définissez, vous donnez une
définition de l'état d'urgence: c'est la situation causée
par des infiltrations suprêmes de produits pétroliers qui a
commencé le 11 avril 1978 et qui s'est terminée le 15 août
1978. Vous dites qu'à l'égard des actes qui ont été
accomplis durant cet état d'urgence, il n'y aura pas de
responsabilité. Vous ne limitez pas cela au maire, aux conseillers, cela
peut être n'importe qui. Cela va même plus loin que disculper la
ville, cela peut même disculper n'importe quel citoyen qui peut
être considéré dans les termes de cet article. C'est un
article complètement général qui non seulement affecte le
maire, les conseillers, mais la ville, le gouver- nement. Cela peut même
affecter des individus et les disculper.
En plus des arguments qui ont été apportés par mes
collègues quant à l'ingérence du pouvoir législatif
dans le pouvoir judiciaire, nous avons clairement ici une clause, une
interprétation qui peut enlever cette responsabilité. Je serais
presque d'accord avec mon collègue de D'Arcy McGee. (2 h 20)
On va être solidaires de ce côté-ci, mes
collègues de l'Opposition officielle et moi-même, mais vraiment,
ce qu'on devrait faire, c'est, sinon voter contre, du moins convaincre le
gouvernement de reporter à demain ou à un jour ou deux
l'étude de ce projet de loi parce que ce sont des principes absolument
fondamentaux qui sont en jeu. On ne fait pas de l'opposition pour le plaisir
d'en faire. Ce n'est pas à 2 h 20 du matin qu'on va parler contre le
gouvernement pour ne rien dire. Lorsque le gouvernement on l'a
prouvé dans le passé a pris une position qui
n'était même pas trop populaire à certains égards,
et qu'on l'a jugée acceptable, on a appuyé le gouvernement.
Mais dans une question comme celle-ci, je pense que même le
ministre des Affaires municipales doit se rendre compte du pétrin dans
lequel le gouvernement s'est placé en présentant la
deuxième lecture de ce projet de loi, et je vais être charitable
envers le ministre. Je veux rappeler à ce dernier... je me demande
pourquoi cela arrive toujours au ministre des Affaires municipales.
Il y a eu le projet de loi 31, je crois. Le même problème
quant aux principes fondamentaux s'est posé. Le ministre a
cédé. On a été obligé de discuter jusqu'aux
petites heures du matin. Il y a eu le projet de loi 44. Encore le ministre des
Affaires municipales. On a continué jusqu'à 5 heures moins quart
le matin.
Alors, je me demande... ou le ministre doit changer les conseillers qui
rédigent les projets de loi pour lui, ou il doit être un peu plus
soigneux dans la lecture qu'il fait lui-même de ses projets de loi avant
de les présenter à l'Assemblée nationale. Je voudrais
faire appel à la bonne volonté et à la
responsabilité du gouvernement pour qu'il retire la deuxième
lecture, pour qu'il la reporte, soit à plus tard aujourd'hui, soit
à demain, pour faire les changements que même le ministre veut
faire, mais il ne peut les faire après la deuxième lecture parce
que lorsqu'on va en commission parlementaire après la deuxième
lecture, les principes sont acceptés.
On ne peut pas poser de questions et dire qu'à l'article 2 on
devrait enlever les mots "... sur le motif de l'inobservation d'une disposition
législative... " La réponse qu'on va se faire donner est que ce
principe a été accepté en deuxième lecture. Alors,
même nos suggestions, nos recommandations, nos motions d'amendement
seront irrecevables. Si ce n'est pas l'intention du ministre, s'il est vraiment
de bonne foi et qu'il dit que la seule intention qu'il a par ce projet de loi
est de s'assurer que les gens, le maire et les conseillers qui ont agi de bonne
foi ne devraient pas être
pénalisés et que la ville, qui a agi d'une façon
responsable et qui a posé certains gestes pour aider la population, ne
devrait pas être pénalisée, nous sommes d'accord sur ces
principes, mais ce ne sont pas ces principes que nous voyons dans le projet de
loi.
Nous n'avons pas l'information nécessaire. Non seulement nous
n'avons pas l'information nécessaire, mais nous avons un projet de loi
qui va à l'encontre même de tous les principes et même de
nos lois, des principes fondamentaux de notre loi.
Alors, je ferais appel je ne veux pas éterniser le
débat... Je pourrais parler... si cela était vraiment notre
intention de faire un "filibuster". Cela ne l'est pas. Je veux assurer le
ministre de cela. Je pourrais continuer le débat pendant encore dix ou
quinze minutes, mais je veux seulement porter à l'attention du ministre
exactement ce que dit ce projet de loi, ses implications, ses
conséquences. Je demanderais au gouvernement de démontrer
vraiment sa responsabilité en reportant l'étude de ce projet de
loi.
On aurait pu faire une motion de report de 48 heures ou de 24 heures, si
on a voulu faire des procédures, ce n'était pas notre intention.
À moins, Mme le Président, que le ministre nous indique qu'il est
complètement fermé à toutes les suggestions que nous lui
faisons, qu'il ne nous écoute pas et qu'il ne veut même pas
considérer la possibilité de retarder l'étude en
deuxième lecture.
Mme le Président, pour ces raisons, je demanderais, avec
responsabilité et sincérité... Nous avons aussi le
même souci que vous de s'assurer que les gens qui ont agi de bonne foi
à Saint-Eustache ne soient pas pénalisés, mais ce n'est
pas avec ce projet de loi que vous allez accomplir cela. La raison pour
laquelle je vous ai référé aux deux autres projets de loi
que vous avez présentés à cette Chambre dans les deux
dernières années, c'est que les mêmes choses se sont
produites. Finalement, après six, sept, huit heures de discussions, vous
avez cédé. Je pense, qu'en raison de votre peu
d'expérience, on pouvait vous pardonner à la première
session. Vous étiez nouvellement arrivé à votre
ministère. On pouvait excuser cela mais je pense que vous avez dû
prendre un peu d'expérience depuis ce temps-là, ne pas
répéter les mêmes erreurs et dire: C'est vrai, quelqu'un...
Ce n'est pas vous qui avez rédigé personnellement ce projet de
loi; ce sont vos légistes, ce sont vos juristes et quelqu'un a commis
des erreurs fondamentales dans cette rédaction. Cela ne nous arrive pas
seulement dans ce projet de loi-ci. Hier, j'étais en commission
parlementaire et les modifications qu'on nous apporte des fois sont plus
nombreuses que le projet de loi original.
Alors, je fais appel, en terminant, Mme le Président, à la
bonne volonté du ministre, à son sens des responsabilités
et je demanderais tout bonnement qu'il reporte l'étude de ce projet de
loi, Mme le Président, et j'en fais motion.
M. Forget: Mme le Président, est-ce qu'on demande la
parole?
Mme le Vice-Président: M. le leader du gouvernement.
M. Lavoie: Le leader a déjà parlé sur cette
motion. On demande la parole.
M. Lessard: Mme le Président.
Mme le Vice-Président: M. le ministre des Transports et M.
le député de Saint-Laurent ensuite.
M. Lucien Lessard
M. Lessard: Mme le Président, j'aimerais parler sur le
projet de loi 106 et préciser un peu dans quel sens ce projet de loi a
été déposé. Je pense que ce projet de loi est
très clair et n'a pas pour but, en fait, d'empêcher toute
procédure contre le conseil municipal de la ville de Saint-Eustache,
mais a pour but, Mme le Président, de protéger un certain nombre
de personnes. Il faut bien se situer dans le contexte.
En effet, le 11 avril 1978, une situation d'urgence se présente
dans la ville de Saint-Eustache qui touchait l'infiltration souterraine de
produits pétroliers. À ce moment-là les citoyens
étaient vraiment dans une situation où leur seule
possibilité était de demander au conseil municipal d'intervenir.
Et en même temps, le conseil municipal n'avait pas tous les pouvoirs
d'intervention. Il fallait qu'il prenne les moyens nécessaires pour
faire face à la situation. Les membres du conseil municipal ont dû
prendre ces moyens.
C'est exact que toutes les lois n'avaient pas été
prévues pour faire face à une telle situation. Il est exact que,
comme membres du conseil municipal, ces gens-là n'avaient pas toute la
protection nécessaire en vertu des lois du Québec mais, Mme le
Président, quand il y a des gens qui sont en danger, quand la vie
humaine des citoyens est en danger, il faut quand même...
M. Grenier: Je demanderais le quorum.
Mme le Vice-Président: Nous allons compter le nombre de
députés. Voulez-vous vérifier le nombre de
députés dans cette Assemblée, s'il vous plaît? (2 h
20)
M. le ministre des Transports, nous avons maintenant quorum.
M. le ministre.
M. Lessard: Mme le Président, la vie de citoyens
était en danger le 11 avril 1978. Les lois du Québec n'avaient
pas entièrement prévu des situations comme celle qui se
présentait à Saint-Eustache. Ces gens ne pouvaient pas convoquer
l'Assemblée nationale pour demander que ces procédures puissent
être adoptées ici. Comme membres du conseil municipal, ils
étaient appelés par l'ensemble de leurs citoyens à prendre
des mesures pour protéger la vie personnelle, et je dis bien, la vie
personnelle des citoyens de Saint-Eustache.
Les membres du conseil municipal ont entamé ces
procédures, ont pris ces moyens, conscients de leurs
responsabilités, mais conscients en même temps qu'ils couraient
des risques. Sans se préoccuper des risques personnels qu'ils couraient
à cette occasion, ils ont décidé quand même de faire
des gestes pour protéger la vie de leurs citoyens. Gestes qui
n'étaient pas nécessairement acceptés en vertu de leurs
lois, parce qu'ils ont dû engager des fonds municipaux pour
protéger la vie de leurs citoyens.
Est-ce qu'aujourd'hui, on peut condamner ces individus? Est-ce
qu'aujourd'hui, on peut permettre à des citoyens de prendre des
procédures contre des gens qui ont été élus
démocratiquement, contre des gens qui ont pris en même temps les
moyens nécessaires pour sauver des vies humaines?
Mme la Présidente, la loi qui vous est proposée ici ce
soir a simplement comme objectif et pour but d'empêcher que des
procédures soient prises contre ces individus, membres du conseil
municipal, contre des personnes, individuellement. Je n'ai pas le droit,
à l'occasion de la deuxième lecture, de lire textuellement un
article du projet de loi, mais je voudrais quand même vous donner un
article qui explique le principe de ce projet de loi. Cet article n'a pas pour
but d'empêcher que des procédures civiles soient prises contre
l'ensemble du conseil municipal. Cet article a pour but d'empêcher que
des individus membres du conseil municipal soient poursuivis en tant
qu'individus. En effet, on définit dans ce projet de loi l'état
d'urgence...
M. Lavoie: Mme la Présidente...
Mme le Vice-Président: Question de règlement, M. le
leader.
M. Lavoie: ... je m'excuse d'interrompre le ministre des
Transports dans cette grande envolée, mais je voudrais, à 2 h 35,
vous rappeler qu'il n'y a pas quorum, nous sommes 26 députés
environ.
Le Président (Mme Cuerrier): Commencez par compter les
députés, M. le leader. Vous pouvez continuer, M. le ministre des
Transports, nous avons maintenant quorum.
M. Lessard: Mme la Présidente, l'objectif de ce projet de
loi est d'empêcher qu'aucune action en déclaration
d'inhabileté d'un membre du conseil ou d'un fonctionnaire municipal,
qu'aucune action en responsabilité civile ni aucune action pouvant
entraîner une condamnation à une amende contre un membre du
conseil ou un fonctionnaire municipal, en rapport avec un acte accompli lors de
l'état d'urgence, au moment où des vies humaines sont en danger;
qu'aucune de ces actions ne peut être fondée sur le motif de
l'omission d'une formalité même impérative ou sur le motif
de l'inobservation d'une disposition législative.
Quand on parle de disposition législative, il y a des fonds qui
ont été engagés à ce moment-là par la
municipalité, pour sauver des vies humaines. Est-ce qu'on peut
actuellement condamner ou accepter que des gens soient condamnés parce
qu'un état d'urgence s'est présenté et Mme la
Présidente, l'état d'urgence est décrit dans le projet de
loi soit la situation causée par des infiltrations souterraines
de produits pétroliers.
On sait que les puits des individus, des citoyens de Saint-Eustache,
avaient été envahis par du pétrole. Il y avait une
situation où les membres du conseil municipal devaient intervenir.
L'objectif de ce projet de loi est tout simplement de dire ce soir que ces
gens-là, que nous devrions d'ailleurs féliciter de leur action,
parce que sans considérer les risques dans lesquels ils s'engageaient,
sans considérer leurs risques personnels et sans consultation avec le
gouvernement du Québec, ces gens-là, membres d un conseil
municipal, ont pris les moyens nécessaires pour sauver des vies
humaines.
Et aujourd'hui, Mme le Président, on hésiterait, nous,
membres de l'Assemblée nationale, à prendre les moyens
nécessaires pour empêcher que ces individus, que ces personnes,
membres d'un conseil municipal, pour empêcher qu'ils soient sujets
à des procédures individuelles, par des citoyens, par des
organismes, par des compagnies; nous, on va éviter un projet de loi qui
empêche ces procédures?
Mme le Président, je dis qu'il y a des situations
spéciales, il y a des situations anormales qui se présentent et,
à ce moment-là, il y a des citoyens qui sont obligés de
prendre les moyens nécessaires pour sauver des vies humaines.
Je vous dis, en conclusion, Mme le Président, que ce projet de
loi n'a pas pour but d'empêcher toute procédure au civil contre le
conseil municipal comme tel, mais a tout simplement pour but d'empêcher
que des individus soient obligés de payer, à même leurs
propres deniers, à même leur propre argent et plus que cela, Mme
le Président, à même leur vie personnelle, qu'ils soient
obligés de payer de leur propre situation financière parce qu'ils
ont pris les moyens nécessaires pour sauver la vie de leurs
concitoyens.
Mme le Président, je pense que nous sommes d'accord, même
à trois heures moins vingt du matin, pour passer un projet de loi comme
celui-là, et nous allons le passer.
Mme le Vice-Président: M. le député de
Saint-Laurent. (2 h 40)
M. Claude Forget
M. Forget: Mme le Président, l'envolée que nous
venons d'entendre de la part du ministre des Transports est basée
essentiellement sur un argument qui est insuffisant. L'argument est à
peu près celui-ci; l'intention du ministre, ou l'intention du Conseil
des ministres, dans la préparation et la présentation de ce
projet de loi était une intention louable. On nous présente cette
loi un peu comme
une loi du bon Samaritain, une loi qui cherche à exonérer
de toute responsabilité des gens qui sont venus au secours d'autrui
à leurs propres risques. Et dans la mesure où ce serait là
le seul effet de la loi, on pourrait, bien sûr, être d'accord avec
le gouvernement, être d'accord avec le ministre des Transports. Mais
comme il le sait peut-être puisqu'il est avocat, la question de
l'intention du législateur ne se résout pas...
Une voix: Qui est avocat? Il n'est pas avocat.
M. Forget: II n'est pas avocat? Ah! Il va peut-être
l'apprendre, à ce moment-là.
M. Lessard: Heureusement!
M. Forget: La question de l'intention du législateur n'est
pas identique à la question de savoir quelle est l'intention du
ministre. Quand les tribunaux sont amenés à interpréter
une loi, ils ne sont même pas tenus et il y a une pratique
effectivement contraire de consulter les déclarations du ministre
à l'Assemblée nationale ou à l'extérieur de
l'Assemblée nationale. Il y a même une pratique qui veut que l'on
ne regarde pas ces déclarations parce qu'elles ne nous renseignent pas
sur la véritable intention du législateur au sens de la loi.
Cette intention du législateur, il faut la déduire du sens
ordinaire des mots dans un texte de loi. C'est en regardant ce que les mots
veulent dire, dans le dictionnaire, que l'on en déduit une intention, un
sens. Quand on se livre à cette opération, on peut, bien
sûr, retrouver le sens que le ministre des Transports et le ministre des
Affaires municipales y retrouvent. Mais on y retrouve aussi un certain nombre
d'autres sens possibles.
L'intention que nous avons de ce côté-ci de
l'Assemblée nationale n'est pas de frustrer le gouvernement dans son
louable désir d'aider les bons Samaritains qu'ont été les
membres du conseil municipal de la ville de Saint-Eustache, mais c'est
d'éviter que des conséquences imprévues, apparemment
imprévues par le gouvernement et indésirables, ne se
réalisent.
Et pour voir ces autres conséquences, il est nécessaire de
décomposer, en quelque sorte, dans ses parties constituantes, l'ensemble
des décisions prises par le conseil municipal qui pourraient donner
ouverture à des actions en justice, sous prétexte de
responsabilité civile, sous prétexte de responsabilité
pénale, parce que certaines lois auraient été
enfreintes.
Quand on fait cela, on a un certain nombre de distinctions à
faire.
M. Bertrand: M. le Président...
Le Président: M. le député de Vanier.
M. Bertrand: C'est simplement une question de règlement
à ce stade-ci. Je ne sais pas si le député de
Saint-Laurent me permettra de l'interrompre.
M. Forget: C'est déjà fait.
Nouvelle motion d'ajournement du débat
M. Jean-François Bertrand
M. Bertrand: C'est fait.
M. le Président, je voudrais faire une proposition à ce
moment-ci à l'Opposition, aux deux Oppositions. Étant
donné que, de part et d'autre, des arguments fort valables ont
été apportés, que ce soit par le ministre des Transports,
le ministre des Affaires municipales ou les députés de
l'Opposition, relativement à ce projet de loi, et que, de part et
d'autre, on sent fort bien que l'ardeur dans notre dynamisme à
poursuivre le débat ne s'estompera pas, même faute de combattants,
je demanderais à ce moment-ci si l'Opposition acquiescerait à une
proposition qui serait la suivante: Ce serait de faire motion pour suspendre
l'étude de ce projet de loi en deuxième lecture, de suspendre le
débat sur ce projet de loi en deuxième lecture, de donner avis
immédiatement à la Chambre que le projet de loi est
déféré à la commission parlementaire des Affaires
municipales, pour qu'on y regarde tous les aspects juridiques et autres
relatifs à ce projet de loi.
Que par contre, l'Opposition nous donne son consentement pour que le
délai de sept jours habituellement requis entre la publication de l'avis
au feuilleton et la tenue de la commission ne soit pas respecté, et
qu'en plus, il soit possible que ce projet de loi puisse être
étudié en commission parlementaire dès lundi, au moment
où d'autres projets de loi du même ministère seront
appelés, pour qu'ainsi l'organisation de nos travaux ne soit pas
bouleversée inutilement et qu'après avoir obtenu les
renseignements requis par l'Opposition pour être en mesure de poser un
jugement éclairé sur ce projet de loi, nous revenions ensuite
à l'Assemblée nationale, que nous disposions du projet de loi en
deuxième lecture, je crois, sans même qu'il soit utile d'avoir un
véritable débat, puisqu'il aura sans doute eu lieu en commission
parlementaire, et qu'ensuite, nous procédions selon les
règlements, habituellement prévus à l'Assemblée
nationale, soit de le déférer de nouveau pour étude
article par article avec d'autres projets de loi du ministère des
Affaires municipales, et enfin, vote en troisième lecture à
l'Assemblée nationale puis sanction par le lieutenant-gouverneur.
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition
officielle.
M. Lavoie: M. le Président, je crois qu'on peut
résumer cette proposition; elle me paraît acceptable pour
l'Opposition libérale. Je présume qu'il y a demande d'ajournement
du débat. Pour résumer, il y aura déférence du
projet de loi en commission parlementaire des affaires municipales pour lundi,
retour à la Chambre pour la fin du débat de deuxième
lecture je prévois que le débat ne sera pas tellement long
et procédures normales.
Je remercie le leader adjoint du gouvernement d'accéder à
la demande de l'Opposition libérale et de l'Union Nationale. Cela nous
convient. Une simple technicité, je crois que l'ajournement du
débat ne pourra pas être fait, en vertu de l'article 77, par le
député de Vanier. Il faut qu'il soit fait nécessairement
par un ministre, soit le ministre des Transports ou le ministre des Affaires
municipales, les seuls ministres présents en Chambre actuellement.
M. Tardif: M. le Président, il me fait plaisir de demander
la suspension du débat, l'ajournement, si l'on préfère,
aux termes et sous réserve des conditions évoquées par le
leader.
Le Président: M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, cela me tenterait quasiment
à 2 h 50 de dire que cela ne nous va pas, quand on sait que c'est une
proposition qui a été faite sous le coup de 23 heures, hier soir,
et qu'on en arrive exactement aux mêmes fins. Ce serait tentant de dire
que cela ne nous va pas, quand on voit maintenant que le gouvernement a
retraité là-dessus et qu'il a décidé d'accepter la
proposition tout à fait correcte qui a été faite par les
deux Oppositions. Nous donnons notre consentement.
Le Président: La formule la plus simple, M. le
député de Vanier, à mon humble avis, compte tenu du fait
qu'il semble y avoir un consentement unanime, c'est qu'on accepte, par
consentement, que M. le député de Saint-Laurent propose
l'ajournement du débat. C'est la formule la plus simple, enfin,
techniquement... Est-ce qu'il y a consentement à ce que la motion
d'ajournement...
M. Lavoie: Consentement que ce soit fait par le ministre des
Affaires municipales.
Renvoi à la commission des affaires
municipales
Le Président: D'accord. Cette motion est adoptée.
Il faudrait peut-être une motion de renvoi à la commission des
affaires municipales, proposée par M. le député de Vanier.
Est-ce que cette motion de renvoi à la commission des affaires
municipales sera adoptée?
Travaux parlementaires
M. Lavoie: Adopté.
Je voudrais bien qu'on s'entende sur cette question. Au début, il
n'y avait qu'un projet de loi à être étudié par la
commission des affaires municipales, lundi, puis, c'était deux, plus
tard, cela a été trois et maintenant, c'est quatre. Il y en a eu
un autre de déféré...
M. Bertrand: Consentement. Sherbrooke. Sur Beauport, il n'y a pas
eu consentement, le leader de l'Opposition de l'Union Nationale a refusé
son consentement.
(2 h 50)
M. Lavoie: Je voudrais bien, quand même, qu'il y ait
priorité pour étudier le bill privé de la ville de Laval,
lundi matin en commission parlementaire.
M. Tardif: On verra.
M. Lavoie: M. le ministre, je vous le demande bien gentiment,
sans agressivité. C'est prioritaire.
M. Tardif: Cela me fera plaisir d'examiner cela.
M. Lavoie: Pourrais-je avoir, quand même, votre
acquiescement à cela?
Le Président: M. le ministre.
M. Tardif: II ne m'appartient pas de décider ici, à
ce moment, de l'ordre dans lequel seront appelés les projets de loi qui
seront étudiés. La commission est maîtresse de son
calendrier de travail. Sur les projets qui ont été
étudiés hier, pas plus tard qu'hier, cinq bills privés,
nous avons convenu d'une entente entre tous les partis. Je suis ouvert à
la discusion là-dessus, mais je ne voudrais pas ici...
Généralement, on les prend par ordre croissant de
difficultés. On commence par les choses les plus faciles de façon
à libérer les gens le plus rapidement et on termine par les
choses les plus complexes.
M. Lavoie: Je suis convaincu que, dans ce cas, nous allons
commencer par la ville de Laval parce que nos arguments sont assez puissants
pour convaincre très rapidement le ministre. On pourra donc
procéder, en premier lieu, par le projet de loi de la ville de
Laval.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition
officielle et M. le ministre des Affaires municipales, je peux vous
suggérer un compromis très facile. On pourrait commencer par
Beauport.
M. Bertrand: M. le Président on s'excuse infiniment parce
qu'on a voulu vraiment vous aider dans cette cause très noble pour aider
la municipalité de Beauport, mais le leader de l'Union Nationale nous a
refusé son consentement pour que Beauport soit inscrit à la
commission des affaires municipales pour lundi. Je suis totalement d'accord
avec le député de Laval. On peut effectivement commencer par le
projet de loi relatif à la ville de Saint-Eustache. Je suis totalement
d'accord avec le député de Laval.
M. Levesque (Bonaventure): Ce n'est pas ce qu'il a dit.
M. Gratton: Ce n'est pas ce qu'il a dit. Il a dit le
contraire.
M. Lavoie: Voulez-vous qu'on continue?
M. Bertrand: Je le sais. C'est justement pour cela que je le dis.
Là-dessus, étant donné que la commission est
maîtresse de ses travaux, je pense qu'on peut attendre à lundi
matin pour discuter de cette chose, vers 10 h, 10 h 30 ou 11 heures; cela
serait peut-être préférable. C'est, d'ailleurs, à 10
heures que la commission est prévue.
Une voix: Y a-t-il autre chose?
M. Bertrand: Oui, il y a autre chose.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...
Le Président: M. le chef parlementaire de l'Opposition
officielle.
M. Levesque (Bonaventure): ... vous me permettrez à ce
moment-ci de rappeler simplement un détail. Le député de
Saint-Laurent avait la parole. Je pense bien que le consentement doit
comprendre le fait que le député de Saint-Laurent pourra
continuer, s'il y a lieu, en deuxième lecture.
M. Bertrand: Oui.
M. Levesque (Bonaventure): S'il y a lieu.
Lé Président: C'était le sens de la
suggestion que j'ai faite tout à l'heure. Il y aura consentement. Alors,
on tiendra pour acquis, M. le député de Saint-Laurent, s'il y a
lieu, le cas échéant, que vous avez demandé l'ajournement
du débat.
M. le député de Vanier.
M. Bertrand: II me fait plaisir de dire que, dans sept heures
à compter de maintenant, nous reprendrons nos travaux à
l'Assemblée nationale. Après la période des questions,
nous aborderons l'étude du projet de loi no 116, Loi modifiant la Loi
sur la mise en marché des produits agricoles.
Il y a entente pour qu'il y ait discours...
M. Fontaine: il n'y a pas d'entente.
M. Bertrand: Un instant! Il y a entente pour qu'il y ait discours
du ministre de l'Agriculture en deuxième lecture sur son projet de loi.
Il y a entente pour que le Parti libéral tienne son discours en
réponse au ministre de l'Agriculture. Il y a entente pour qu'il y ait
ajournement ensuite du débat pour que l'Union Nationale puisse
préparer son discours...
Une voix: Non. Non.
M. Bertrand: ... et le tenir quand elle sera disposée
à le faire et qu'ensuite nous passions au projet de loi no 123, Loi
modifiant la Loi électorale.
M. Lavoie: Bien calmement...
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition
officielle.
M. Lavoie: ... car ce n'est pas l'heure d'être agressif,
pourrais-je vous demander avec qui vous avez eu une entente du
côté libéral? Avec qui?
M. Bertrand: Le leader parlementaire de l'Opposition officielle
sait fort bien qu'en dehors de la possibilité d'avoir des
conférences de leaders à l'occasion, pour justement
prévoir ce travail, il y a souvent coopération entre des
fonctionnaires de chacune des formations politiques qui ont, jusqu'à un
certain point, le mandat de communiquer avec leurs députés pour
qu'on puisse établir notre travail.
J'ai ici, me venant du leader du gouvernement, une note disant, de
façon très explicite que des représentants du Parti
libéral, et je pense que vous savez de qui je parle, ont accepté
de donner la réplique au ministre de l'Agriculture sur ce projet de loi
des marchés agricoles, et qu'ensuite il y ait ajournement du
débat pour que l'Union Nationale puisse se préparer à
tenir son discours et que, pendant ce temps, nous passions à
l'étude du projet de loi no 123.
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition
officielle.
M. Lavoie: Je m'excuse auprès du député de
Mégantic-Compton. Je vous ai posé la question parce que,
premièrement, je n'étais pas concerné. Le chef du parti
à ma droite me dit qu'il n'a jamais eu connaissance de cette entente. Le
whip du parti est là également et d'autres députés.
Il y a deux personnes ici qui appartiennent au bureau de recherches au cabinet
de l'Opposition, je vais les nommer, M. Rivest et M. Pitre, qui sont
attachés, l'un au chef du parti et l'autre au cabinet du leader, et ils
me font signe qu'il n'y a pas eu de telle entente. Je voudrais bien savoir avec
qui vous avez... Écoutez. Je vais vous dire pourquoi. La simple raison,
c'est que le porte-parole de l'Opposition officielle, l'Opposition
libérale, dans les lois sur l'agriculture, c'est le député
de Montmagny-L'Islet qui, depuis quelques jours, siège d'une
manière très intense, à la commission de l'agriculture sur
la loi du zonage agricole. Le député de Montmagny-L'Islet me dit
que son dossier n'est pas à point pour répondre au ministre. En
ce qui nous concerne, nous ne sommes pas prêts à étudier ce
projet de loi demain matin, c'est impensable.
M. Grenier: M. le Président, j'aimerais vous faire part
également...
Le Président: M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: ... que le leader du parti n'a pas été
informé et que personne de notre formation
politique n'a entendu parler de cette proposition. Il est bien
évident que s'il y avait eu une espèce de demi-entente, à
savoir qu'on répondrait au ministre de l'Agriculture, de même que
le porte-parole du Parti libéral, c'est bien évident que notre
porte-parole aurait été aussi prêt que tous ceux-là.
On a le même problème. Notre porte-parole, le député
de Huntingdon, siège à la commission du zonage agricole et le
dossier n'est pas prêt pour demain. Je ne vois pas ce qui presse tant que
cela, sauf une que tout le monde soupçonne pour demain soir, à
l'heure du souper, mais ce n'est pas une urgence nationale.
Le Président: M. le député de Vanier, est-ce
qu'il y a entente pour admettre qu'il n'y a pas d'entente?
M. Bertrand: À trois heures moins trois, M. le
Président, je suis tellement heureux de savoir que, dans quelques
minutes, je me retrouverai à l'intérieur d'une chambre beaucoup
plus accueillante que celle-ci, qu'il me fait plaisir, à ce moment-ci,
de dire que quelque indication que ce soit sur l'organisation de nos travaux
demain sera donnée par le député de Saint-Jacques. Vous
apprendrez de sa bouche que c'est le projet de loi 116 ou un autre projet de
loi qui sera appelé, et dans l'état, dans la forme qui
prévaudra en cette Assemblée nationale, je pense que nous serons
prêts à donner des accords que nous ne donnerons pas à
trois heures moins trois.
Le Président: M. le ministre des Transports, puis-je vous
suggérer de proposer l'ajournement des travaux de la Chambre.
M. Lessard: Merci, M. le Président. Je propose la
suspension des travaux...
Le Président: L'ajournement.
M. Lessard: ... l'ajournement de nos travaux.
Le Président: Adopté? Adopté. Alors,
l'Assemblée ajourne ses travaux à aujourd'hui 10 heures.
Fin de la séance à 2 h 59