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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le vendredi 26 août 1977 - Vol. 19 N° 101

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures vingt et une minutes)

M. Richard (président): A l'ordre, mesdames et messieurs!

Affaires courantes.

Dépôt de rapports de commissions élues.

M. le député de Jeanne-Mance.

Rapport sur le projet de loi no 49

M. Laberge: M. le Président, conformément à notre règlement, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission élue permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières qui s'est réunie le 25 août 1977 pour étudier, article par article, le projet de loi no 49, intitulé Loi constituant la Régie de l'assurance automobile du Québec.

Le Président: Y a-t-il consentement, M. le leader parlementaire du gouvernement, pour agréer ce rapport immédiatement?

M. Burns: M. le Président, lors des motions non annoncées, et à la suite d'une consultation que j'ai tenue avec les représentants de l'Opposition, j'aurai une motion à faire pour nous permettre de faire avancer les travaux de la Chambre dans le cours de la journée. Mais, je pense qu'il y a consentement au dépôt du rapport.

Le Président: Rapport déposé. M. Lavoie: Rapport adopté.

Le Président: Rapport adopté. M. le député de Champlain.

Rapport sur le projet de loi privé no 240

M. Gagnon: M. le Président, conformément aux dispositions de notre règlement, qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission élue permanente de la justice qui a étudié, le mercredi 10 août et le jeudi 25 août 1977, article par article, le projet de loi privé no 240 intitulé: Loi annulant une servitude grevant certains lots du cadastre de la paroisse du Cap-de-la-Madeleine.

Le Président: Est-ce que ce rapport sera agréé?

M. Burns: Agréé. M. Lavoie: Agréé.

Le Président: M. le député de Lac-Saint-Jean.

Rapport sur le projet de loi no 43

M. Brassard: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission élue permanente de l'agriculture qui s'est réunie le 25 août 1977 pour étudier, article par article, le projet de loi no 43, intitulé Loi modifiant la Loi sur les produits agricoles et les aliments.

Le Président: Est-ce que ce rapport sera agréé?

M. Lavoie: Consentement.

Le Président: Consentement. Adopté.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de motions non annoncées. M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: M. le Président, j'ai à faire motion, à ce moment-ci, et c'est à la suite de consultations que j'ai eues avec les représentants de l'Opposition; je m'excuse auprès du député de Rouyn-Noranda, c'est le seul que je n'ai pas pu rejoindre, mais je connais son sens de la collaboration.

M. Samson: Est-ce que je peux, au moins, avoir une chance qu'on m'explique ce que c'est?

M. Burns: Je vais vous le dire. "Watchez-vous" bien, cela s'en vient!

M. Samson: Je vous écoute.

M. Burns: M. le Président, il semble qu'il y a une espèce de consensus qu'on essaie loyalement de terminer — il ne s'agit pas d'imposer une fin de session aujourd'hui — de tout mettre de notre côté pour terminer aujourd'hui. Il semblerait que les projets de loi dont, entre autres...

M. Samson: M. le Président, est-ce que je pourrais l'arrêter immédiatement? C'est cela la bonne nouvelle?

M. Burns: C'est cela la bonne nouvelle. M. Samson: D'accord? M. Burns: Oui.

Motion visant à suspendre l'application de certains règlements de la Chambre

M. Burns: Comme il serait possible — en tout cas, à la suite d'un certain nombre de consultations, et là-dessus j'en ai eu avec le député de Rouyn-Noranda — que l'Assemblée nationale puisse terminer ses travaux aujourd'hui, comme il y a un certain nombre de projets de loi qui sont au stade du rapport, il serait peut-être normal de penser mettre de côté, du consentement de tous les partis représentés à l'Assemblée nationale, les règles habituelles de la Chambre. Ainsi, nous pourrions au fur et à mesure qu'ils sont présentés — j'en fais motion, M. le Président, pour que

cela devienne un ordre de la Chambre — considérer les rapports des commissions et tenir, durant la même séance, le débat sur la troisième lecture. J'en fais motion, M. le Président.

M. Roy: Est-ce que, parmi les raisons qui sont invoquées par le leader du gouvernement, il y a en a une qui tient compte du fait que le feuilleton de l'Assemblée d'aujourd'hui porte le numéro 101?

M. Burns: Je n'avais pas remarqué cela. Cette motion sera-t-elle adoptée?

M. Brochu: Consentement. Le Président: Motion adoptée.

M. Lavoie: Je pense qu'il faudrait les mentionner.

M. Burns: Les seules lois qui sont actuellement en discussion, je peux les nommer, si vous voulez. Il s'agit du projet de loi no 49, du projet de loi no 43, du projet de loi no 2, du projet de loi privé no 240 concernant la ville du Cap-de-la-Madeleine.

Je ne crois pas en oublier, ce sont les seuls, les projets de loi 43, 49, 2. Le projet de loi 101 est déjà régulièrement devant la Chambre en troisième lecture aujourd'hui, je n'ai pas à l'inclure dans la motion.

M. Lavoie: Où est le projet de loi 1 en passant?

M. Burns: Le projet de loi 1, j'ai l'intention de l'appeler immédiatement après ces affaires.

M. Samson: En quatrième lecture? M. Lavoie: Adopté, M. le Président.

M. Burns: Je ne pense pas en oublier, M. le Président.

Le Président: Motion adoptée.

M. Burns: J'aurais, M. le Président, également, après avis qui m'a été donné par le ministre du Travail, une motion...

M. Lavoie: Pour ce qui concerne les avis, une correction.

M. Burns: Oui, vous avez remarqué qu'un certain nombre d'avis de commissions parlementaires apparaissent en appendice à notre feuilleton de ce matin. Après consultation avec le ministre du Travail concernant les dates qui sont données en avis pour la commission du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration, c'est-à-dire les 13, 14 et 15 septembre, à 10 heures, relativement au projet de loi 45, le ministre du Travail m'a convaincu, comme il est habituellement très convaincant, qu'il fallait remettre à plus tard l'étude du projet de loi no 45 en commission parlementaire article par article, de sorte que je fais motion pour que l'avis qui apparaît à la page 9 de notre feuilleton relativement à la Loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre soit radié.

Le Président: Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

M. Burns: L'article f), M. le Président.

Projet de loi no 64 Première lecture

Le Président: M. le ministre de la Justice propose la première lecture de la Loi concernant la poursuite d'infractions par le Procureur général et l'application de règlements relatifs au stationnement et à la circulation et modifiant la Loi du ministère de la Justice.

M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, j'ai l'honneur de présenter le projet de loi no 64, Loi concernant la poursuite d'infractions par le Procureur général et l'application de règlements relatifs au stationnement et à la circulation et modifiant la Loi du ministère de la Justice.

Le présent projet de loi vise à modifier la Loi des cités et villes, le Code municipal et le Code de la route afin de faciliter l'application du Code de la route et des règlements municipaux relatifs au stationnement.

L'article 1 du projet modifie la Loi des cités et villes et l'article 2 modifie le Code municipal pour permettre aux municipalités d'engager des agents spéciaux pour émettre des contraventions en matière de stationnement.

L'article 3 modifie le Code de la route pour y prévoir des autorisations de signatures.

L'article 4 modifie le Code de la route et établit la procédure selon laquelle une municipalité peut renoncer, en faveur du Procureur général, à poursuivre certaines infractions.

L'article 5 modifie la Loi du ministère de la Justice afin de permettre le versement au fonds consolidé du revenu ou au fonds d'un organisme public des honoraires que reçoivent les avocats et notaires à l'emploi du gouvernement ou d'un organisme.

L'article 6 établit une concordance avec l'article 4 en abrogeant les dispositions sur les ententes prévues par le chapitre 37 des Lois de 1974, tout en maintenant en vigueur les ententes déjà intervenues en vertu de cette loi.

Le Président: Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

M. Lavoie: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Président: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. Burns: C'est cela. Je vous demanderais maintenant M. le Président, d'appeler l'article g).

Projet de loi no 65 Première lecture

Le Président: M. le ministre de la Justice propose la première lecture de la Loi modifiant le Code civil et concernant certains recours en matière de responsabilité médicale.

Le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, j'ai l'honneur de présenter le projet de loi no 65, Loi modifiant le Code civil et concernant certains recours en matière de responsabilité médicale.

Le projet de loi propose des modifications au Code civil et introduit des dispositions concernant certains recours en matière de responsabilité médicale. Les modifications au Code civil visent à substituer l'autorité parentale à la puissance paternelle.

L'article 5 en consacre le principe, prévoit que la déchéance de ce droit peut être prononcée, permet qu'un différend survenu dans l'exercice de cette autorité soit déféré au juge et crée la présomption voulant qu'à l'égard des tiers de bonne foi, le père ou la mère qui pose un acte d'autorité à l'égard de son enfant agisse avec le consentement de l'autre.

Les articles 1 à 4, 7, 8 et 9 sont des articles de concordance.

L'article 6 donne au juge le pouvoir d'autoriser le placement en fidéicommis de sommes d'argent appartenant à un enfant mineur.

L'article 10 vise à faire revivre un droit d'action en matière de responsabilité médicale ou hospitalière.

L'article 11 vise à donner un effet rétroactif à la modification apportée au Code civil par l'article 6 du projet de loi.

Le Président: Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

M. Lavoie: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Président: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

M. Gratton: M. le Président, si on me le permet, j'ai demandé, lundi et mardi de cette semaine, au leader du gouvernement si à l'article e) il entendait donner suite au voeu du conseil municipal de Gatineau qui a demandé de retirer le projet de loi privé. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu pour le leader du gouvernement de faire en sorte que ce soit rayé du feuilleton, retiré complètement, quitte à le réinscrire à l'automne, lorsque le temps sera venu?

M. Burns: Pouvez-vous patienter? Je suis prêt à m'engager à vous donner une réponse définitive dans le courant de la journée.

M. Gratton: J'accepte volontiers, mais je ferai remarquer au ministre que c'est la réponse qu'il m'a faite lundi et mardi derniers.

M. Burns: Je reconnais que c'est la troisième fois que vous me posez cette question et que c'est la troisième fois que je vous demande de patienter, mais, maintenant, je prends l'engagement de vous donner une réponse dans le courant de la séance. Si l'Assemblée nationale accepte que nous retirions ce projet de loi du feuilleton, en cours de séance, même si ce n'est pas prévu par les procédures, si c'est la décision que nous prenons, je le ferai avec le consentement de l'Assemblée nationale. Il me reste une dernière et toute petite vérification à faire.

M. Gratton: Si vous avez de la difficulté à rejoindre le député de Papineau, je pourrais vous donner un numéro de téléphone où vous pourriez l'atteindre.

M. Lavoie: Juste une courte remarque. Ce n'est pas à l'Assemblée de décider si on doit le retirer, ce n'est pas au leader, ce n'est pas au député de Papineau...

M. Burns: C'est au pétitionnaire.

M. Lavoie: Un projet de loi privé appartient au pétitionnaire et vous avez un document en main selon lequel il désire le retirer. C'est ce que je voudrais souligner.

M. Burns: C'est pour cela qu'il est fort probable que dans le courant de la journée je vous demande de radier cet article du feuilleton. Il est fort probable. Vous allez quand même reconnaître qu'il y a un minimum de décence qui doit être respecté dans l'utilisation de ces formules. Je pense que le député de Laval me comprend très bien là-dessus.

Le Président: Déclarations ministérielles.

Dépôt de documents.

M. le ministre d'Etat à la réforme électorale.

DÉPÔT DE DOCUMENTS

Rapport sur la diffusion des travaux parlementaires

M. Burns: J'ai l'honneur de déposer le rapport

sur la diffusion des délibérations parlementaires dont une copie a été remise aux représentants de l'Opposition qui siègent à la sous-commission de l'Assemblée nationale. C'est vrai que je n'ai pas le droit de faire des commentaires à ce moment-ci, mais je veux particulièrement souligner et remercier le travail du comité ministériel qui a donné cette brique en quatre tomes qui, j'espère, nous aidera à nous diriger dès l'automne vers la diffusion des délibérations parlementaires. Je veux particulièrement souligner le travail important que le député de Mercier a fait à ma place, parce que je ne pouvais participer directement aux délibérations de ce groupe de travail. Je remercie personnellement le député de Mercier.

Le Président: Rapport déposé. M. le leader parlementaire du gouvernement, au nom du ministre de l'Education.

Document sur l'éducation chrétienne

M. Burns: M. le Président, je voudrais, au nom du ministre de l'Education, déposer le plan de développement relatif à l'éducation chrétienne dans les écoles confessionnelles du Québec reconnues comme catholiques, 1977-1980.

Le Président: Document déposé.

M. le ministre délégué au haut-commissariat.

Rapport sur l'équipement du Village olympique

M. Charron: M. le Président, je voudrais déposer le rapport faisant état de la façon dont nous avons distribué pour plus de $2 millions et demi d'équipement du Village olympique à plus d'une centaine d'organismes sans but lucratif.

Des Voix: Bravo!

Le Président: Document déposé.

Période des questions orales.

Le député de Marguerite-Bourgeoys.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS Complot contre le premier ministre

M. Lalonde: M. le Président, avant de laisser le ministre de la Justice répondre aux nombreuses questions qui lui ont été posées depuis quelques semaines concernant le juge en chef, je voudrais lui poser, ce matin, une question à propos d'une nouvelle qui paraît à la une du Soleil, avec comme titre "Complot contre Lévesque". A la lecture de la nouvelle, on s'aperçoit qu'il s'agit du premier ministre. M. le Président, je voudrais demander au ministre de la Justice s'il est exact qu'un complot a été tramé, s'il y a eu enquête et quels sont les résultats de l'enquête, étant donné le mutisme du ministre qui, d'après la nouvelle, aurait simplement dit aux journalistes: "Faites votre devoir de journalistes, mais je ne puis, comme ministre de la

Justice, dire autre chose que: Pas de commentaires."

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, pour ce qui est du résultat du complot, je pense que le député est à même de constater que le premier ministre est ici, de même que toutes les autres personnes qui sont mentionnées dans la nouvelle. La seule chose que j'ai à dire, c'est que, comme toutes les informations de cette nature concernant la sécurité d'un membre de l'Assemblée nationale, qui peuvent être acheminées à mon cabinet, certains faits qui sont allégués dans l'article de journal auquel fait référence le député de Marguerite-Bourgeoys ont été transmis à la direction de la sécurité de la Sûreté du Québec.

Je puis vous dire qu'une vérification et une enquête minutieuses, ont été faites. Après enquête approfondie, ces faits se sont révélés sans fondement sérieux et le dossier est maintenant considéré comme clos depuis le 23 mars dernier.

M. Lalonde: M. le Président, s'il est exact qu'il s'agit d'une nouvelle sans fondement, donc qu'il n'y a pas eu de complot — s'il y avait eu complot, il y aurait eu poursuite — pourquoi le ministre a-t-il simplement dit aux journalistes: Faites votre devoir de journalistes, mais je ne puis, comme ministre de la Justice, dire autre chose que: Pas de commentaires. Est-ce qu'il se rend compte qu'en laissant publier une nouvelle comme celle-ci, il peut participer à la manipulation de l'opinion publique?

Une Voix: Ou il y a quelque chose ou il n'y a rien.

M. Bédard: Si je commence à me confier aux journalistes et à dire toutes les nouvelles dont je suis au courant, vous allez m'accuser également de manipuler la presse. Je pense que la responsabilité d'un ministre, dans les circonstances, c'était de dire ce que j'ai dit: Pas de commentaires. Sinon, vous entrez dans un sens ou vous entrez dans l'autre, vous confirmez certains allégués, vous entrez dans une discussion avec les journalistes. C'est évident que c'est le travail des journalistes de tenter d'obtenir des renseignements de ma part, mais je crois que ma responsabilité ministérielle, à ce moment, était de dire: Pas de commentaires. Je ne suis quand même pas là pour empêcher des journalistes de faire leur travail.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question additionnelle. Le ministre se rend-il compte que s'il avait répondu, comme il vient de le faire en Chambre, que cette nouvelle ou cette rumeur n'avait pas de fondement sérieux, est-ce qu'il pense que dans le Soleil d'aujourd'hui, il y aurait eu cette manchette et cette page complète qui a été consacrée à cet incident qui n'était même pas existant? Le devoir du ministre de la Justice n'était-il pas, à ce moment, d'informer la

presse afin que l'opinion publique ne soit pas saisie comme eJle l'est ce matin par une nouvelle complètement sans fondement?

M. de Bellefeuille: Un discours!

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je voudrais simplement rappeler au chef de l'Opposition que s'il se donne la peine de lire l'article qui suit le titre flamboyant en première page, il constatera que j'ai pris sur moi, hier, à partir du peu que j'en savais — parce qu'au cours du mois de janvier, à un moment donné, il avait été constaté que cela semblait être relativement peu sérieux, cette histoire — que je me suis permis, hier, pendant une rencontre d'à peu près quinze minutes avec deux des journalistes qui signent l'article de leur dire qu'autant qu'on ait pu savoir — cela venait d'une conversation avec le ministre après les Fêtes— cela ne semblait pas sérieux.

Si le chef de l'Opposition se donne la peine de lire l'article, il va trouver cette précision, qui était la seule que je pouvais donner. La rencontre a duré à peu près quinze minutes pour voir s'il n'y avait pas moyen — on n'a pas à manipuler la presse ni dans un sens ni dans l'autre — de réduire cette histoire à ses proportions exactes. Les auteurs de l'article ont jugé bon de le publier, on n'a pas à intervenir là-dedans, mais je ferai remarquer au chef de l'Opposition, encore une fois, qu'on a essayé d'atténuer cela. On n'a pas réussi, c'est tout.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question additionnelle. Je reviens à la déclaration du premier ministre. Dans la question que nous avons posée au ministre de la Justice, nous n'avons pas indiqué quoi que ce soit en ce qui concerne le premier ministre. Maintenant que celui-ci a fait ces déclarations, de la façon qu'il les a faites, et le temps qu'il a passé avec les journalistes, tout cela jumelé à la réponse qu'a donnée le ministre de la Justice...

M. Duhaime: Question...

M. Levesque (Bonaventure): ... aux journalistes, ne croit-il pas que cette attitude, un peu molle, si l'on peut dire...

M. Godin: ... liberté de la presse. Vous voulez la censure?

M. Levesque (Bonaventure): Ces réponses ne sont-elles pas de la nature de celles qu'on a reprochées à d'autres, ce qu'on a appelé le coup de la Brink's?

M. de Bellefeuille: M. le député de Bonaventure...

M. Lévesque (Taillon): Comme dirait le ministre de l'Education: Allons donc!

M. Levesque (Bonaventure): Cessez donc de manipuler. C'est bien beau!

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je me sentais parfaitement libre, à partir du tout petit peu que je savais de cette histoire, de discuter. D'ailleurs, il ne s'est pas agi seulement de cela...

M. Levesque (Bonaventure): ... qu'il n'y a pas de fondement. Pourquoi ne pas dire qu'il n'y a pas de fondement?

M. Lévesque (Taillon): Si le chef de l'Opposition le permet, je vais lui répondre très tranquillement. Je me sentais parfaitement libre — à partir du fait que je ne savais absolument rien sauf ce qu'on m'avait dit, que ce n'était pas sérieux — de discuter avec les journalistes pour essayer d'atténuer cela à partir de là, sans aller plus loin. De la même façon, je considère que le ministre de la Justice avait parfaitement raison, lui qui connaît le peu de dossiers qu'il peut y avoir. Il n'avait pas à entrer dans des discussions détaillées, il avait parfaitement raison de dire: Pas de commentaires. On a essayé de notre mieux, chacun à sa façon, d'atténuer cela. Le résultat est là et on n'y peut rien.

M. Levesque (Bonaventure): Ce n'est pas ce qu'il aurait dû dire. Il aurait dû dire qu'il n'y avait pas de fondement.

M. Charbonneau: Question additionnelle... M. Levesque (Bonaventure): ... de la presse. M. Bédard: Non, pardon! Le Président: M. le député de Gatineau...

M. Bédard: Une autre question, je m'excuse, M. le Président. Si le chef de l'Opposition officielle a des accusations formelles à formuler, qu'il le fasse correctement. Ce que je lui ai dit c'est que, face à des questions qui m'étaient posées, je ne pouvais faire autrement que de dire: Pas de commentaires. Si j'entre le moindrement dans les faits, je suis obligé de confirmer qu'effectivement il y a eu des plaintes de faites dans ce sens, formulées au ministère de la Justice. Je suis obligé d'entrer dans les détails et, à ce moment, d'accréditer beaucoup plus une nouvelle dans le sens de celle qui paraît ce matin. Je voudrais demander au chef de l'Opposition de bien considérer que, si il y avait eu quelque tentative que ce soit de vouloir — pour employer son expression — manipuler la presse, il me semble qu'il aurait été facile au ministre de la Justice de laisser filtrer quoi que ce soit avant aujourd'hui.

Or, tel que je vous l'ai dit, ce dossier qui remonte au début de décembre a été fermé le 23 mars dernier, c'est considéré comme clos.

M. Charbonneau: Question additionnelle inutile, le dossier est fermé.

M. Levesque (Bonaventure): Question additionnelle au ministre de la Justice. Ne croit-il pas qu'en disant: Pas de commentaires, faites votre devoir de journalistes! à ce moment-là, il ouvrait

grande la porte, au lieu de dire simplement: Cette question n'a pas de convenance...

M. Charbonneau: Question additionnelle, M. le Président.

Une Voix: Le dossier était fermé! M. Bédard: Lisez donc l'article!

M. Gratton: Question additionnelle, M. le Président. En supposant qu'on accepte que le ministre n'ait pas voulu faire de commentaires, ne croit-il pas qu'il aurait pu, au moins à titre privé, rassurer le ministre des Finances pour qu'il ne se sente pas obligé de se réfugier en Amérique du Sud pendant un mois?

M. Charbonneau: M. le Président, question additionnelle au ministre de la Justice. Devant l'importance d'un dossier de ce genre et devant aussi la conclusion à laquelle est arrivé le ministre de la Justice, peut-il aujourd'hui qualifier le travail des services de sécurité et de renseignements de la Sûreté du Québec?

M. Bédard: Je puis vous dire que les autorités de la Sûreté du Québec et les membres de la Sûreté du Québec jouissent de la pleine confiance non seulement du ministre de la Justice, mais également de tous les membres du gouvernement.

Le Président: Mme le député de L'Acadie. M. Gratton: M. le Président.

Enseignement de l'anglais à la CECM

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ma question s'adresse au ministre d'Etat au développement culturel. Ce matin, les quotidiens annonçaient que la Commission des écoles catholiques de Montréal entend mettre sur pied des écoles pilotes où débutera, en première année, l'enseignement de l'anglais. Ceci est possible en vertu de l'article 12 du règlement 7 du ministère de l'Education. Néanmoins, avant de mettre à exécution ce projet, elle doit obtenir l'approbation du ministère. Est-ce l'intention du ministère d'accorder son appui à ce projet de langue seconde?

M. Laurin: M. le Président, évidemment, je parle aujourd'hui à titre de ministre suppléant de l'Education. Renseignements pris, il semble que la CECM a le droit de prendre la décision qu'elle a prise hier soir et qui est conforme à d'autres décisions prises antérieurement par une quinzaine d'autres commissions scolaires qui, déjà, dispensent l'enseignement en anglais à partir de la première année ou à partir de la troisième année lorsque le nombre d'élèves le justifie. Le nombre justifiable est actuellement de 27, et les autorisations sont données pour des classes et non pour des écoles. Donc, il semble bien qu'en vertu des politiques antérieures établies par le ministère de l'Education, la CECM aurait le droit de prendre la décision qu'elle vient de prendre. Cependant, cette décision paraît très ample puisqu'il s'agit de dix écoles pilotes. Etant donné cette ampleur, cette dimension de l'expérimentation que la CECM voudrait conduire, il nous paraît important que cette décision fasse l'objet de consultations entre la CECM et le ministère de l'Education.

Le ministère n'avait pas été informé de cette décision. Dès ce matin, les fonctionnaires du ministère de l'Education communiquent avec les autorités de la CECM pour avoir les renseignements pertinents. Par exemple, on ne sait pas si cet enseignement serait dispensé à des élèves francophones ou à des élèves allophones. S'agit-il d'enseigner l'anglais à des allophones qui ont manifesté leur réticence à aller vers l'école française ou qui y sont allés contre leur gré ou leur volonté, conformément à certaines opinions exprimées par certains leaders d'opinion dans la communauté al-lophone?

Ou, au contraire, s'agit-il de dispenser l'enseignement en langue anglaise à des enfants francophones, à la suite d'un sondage qui aurait révélé que 70% des parents francophones désireraient que l'enseignement en anglais commence plus tôt?

D'autres questions également font problèmes. Est-ce que la CECM dispose d'un personnel suffisant de professeurs spécialisés en langue anglaise pour pouvoir véritablement dispenser un enseignement efficace en langue anglaise à partir de la première année? Est-ce que les directions régionales administratives ont été consultées et sont d'accord, etc.? Il y a donc plusieurs questions qui se posent actuellement, et le ministère de l'Education est en contact avec les autorités pour avoir les informations nécessaires.

Donc, pour résumer, il semble que la CECM ait le droit d'adopter la position qu'elle vient de prendre, mais, étant donné l'ampleur du problème, il semble qu'il soit adéquat, sinon nécessaire, que le ministère de l'Education soit plus amplement informé et donne éventuellement son approbation.

Mme Lavoie-Roux: Question accessoire, M. le Président. Le ministre de l'Education peut-il nous dire si c'est l'intention du ministère de maintenir les politiques antérieures auxquelles il a fait allusion?

Deuxièmement, on peut déduire un peu de sa réponse qu'il y aurait peut-être une décision différente de prise selon que la demande s'appliquerait à des enfants allophones ou à des enfants francophones. Pense-t-il que ceci doit être un facteur qui entre en ligne de compte dans les décisions éventuellement prises par le ministère de l'Education?

En terminant, je voudrais seulement lui dire que dix écoles peuvent lui sembler une expérience très ample, mais la CECM a plus de 300 écoles élémentaires. Dix sur 300, c'est quand même minime.

M. Laurin: M. le Président, le ministère en est simplement à la période de la cueillette des informations et, avant qu'une décision soit prise, il fau-

dra que ces informations soient corrigées et analysées.

Qu'en est-il maintenant de la politique du ministère de l'Education, en l'occurrence? Cette politique sera-t-elle la même que celle qui était appliquée précédemment? Je voudrais rappeler au député de L'Acadie que cette question a été amplement étudiée au cours des derniers mois, au sein du ministère de l'Education et du comité interministériel, qu'un livre vert va être publié incessamment et va faire état de ces réflexions, des hypothèses qu'étudie actuellement le ministère de l'Education, que ce livre vert sera soumis à la consultation publique, que le ministère de l'Education recueillera les opinions du milieu et qu'une décision, quant aux politiques éventuelles, sera prise dans les quelques mois qui viennent.

Je rappelle encore une fois au député de L'Acadie que l'enseignement de la langue anglaise, dans les écoles françaises, constitue une priorité pour l'année qui vient, pour le ministère de l'Education, mais qu'il reste à décider selon quel principe, selon quelle modalité cette priorité s'accomplira ou s'effectuera.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, question accessoire. Le ministre d'Etat au développement culturel peut-il nous assurer que ce livre vert va être déposé? Il a dit incessamment, mais il ne faut pas oublier qu'au mois de mars, il nous a été promis pour le mois de mai, au mois de mai pour le mois de juin, au mois de juin pour le mois d'août, et au mois d'août pour avant la fin de la session. Je m'étonne qu'il ne puisse pas nous donner de détails plus précis quant aux intentions du gouvernement sur l'enseignement de la langue seconde puisque, justement, le livre vert les contient.

M. Laurin: Oui, je peux assurer le député de L'Acadie que le livre vert paraîtra sûrement au cours des deux prochaines semaines.

Le Président: M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Question additionnelle, M. le Président. Le ministre pourrait-il nous informer, suite à la décision prise par la CECM, s'il s'arrête surtout sur cette école de pensée qui fait que la langue seconde s'apprend mieux en bas âge qu'au niveau du secondaire? Les preuves de l'échec de l'apprentissage de la langue seconde étant faites au Québec depuis déjà plusieurs centaines d'années, le ministère se dirige-t-il vers l'adoption de cette école de pensée qui fait que la langue seconde s'apprend mieux au niveau primaire?

M. Laurin: C'est une question trop complexe qui comporte des aspects pédagogiques aussi bien que linguistiques, aussi bien que politiques dans le grand sens du terme pour qu'on puisse la trancher dans une seule réponse. Le député sait très bien qu'il en a été amplement discuté lors de la présentation des mémoires, lors de l'étude du projet de loi no 1.

Nous en avons nous-mêmes longuement discuté, comme je le disais tout à l'heure, au comité. La question est véritablement trop complexe pour que je puisse la trancher en quelques commentaires. Je pense qu'il vaut mieux attendre la discussion qui s'élaborera autour du livre vert. Mon opinion personnelle est faite, mais je pense que ce n'est pas mon opinion personnelle qui intéresse le député de Mégantic-Compton.

Le Président: M. le député d'Iberville, est-ce qu'il s'agit d'une question additionnelle?

M. Beauséjour: Une question principale.

Le Président: M. le député de Nicolet-Yamaska.

Juge en chef de la Cour des sessions de la paix à Montréal

M. Fontaine: Ma question s'adresse au ministre de la Justice et concerne l'affaire du juge Fabien. Au début de la semaine, les journaux nous rapportaient que l'enquête blanchissait le juge Fabien. Hier et aujourd'hui, on nous rapporte que ce serait le contraire. Je voudrais, sans animosité, demander au ministre de la Justice s'il peut faire le point sur cette affaire, aujourd'hui, devant cette Assemblée.

M. Bédard: M. le Président, pour l'information de mes collègues de l'Assemblée nationale, je dois dire que mardi soir, lors d'une rencontre avec la Sûreté du Québec, on m'a remis une synthèse du dossier. Jeudi après-midi, un rapport détaillé a été déposé au ministère de la Justice. D'autres renseignements supplémentaires ont été fournis lundi de cette semaine. Maintenant, dès la fin de semaine, vendredi et samedi, j'ai procédé à l'étude du dossier avec des officiers supérieurs du ministère de la Justice. Compte tenu de la nature des faits, j'ai demandé aux officiers du ministère et à des procureurs-conseils de procéder à une analyse en profondeur des faits en question afin de me permettre de faire le point dans les meilleurs délais possible. J'estime, d'ailleurs, que l'importance des principes et des institutions en cause justifie amplement de prendre le délai nécessaire à cette analyse.

Je dois vous dire également que, ce matin, j'ai communiqué avec le juge en chef et que j'attends une communication de sa part, d'ici midi. Ce seraient les seuls commentaires que je pourrais faire à ce stade-ci.

Le Président: M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Une question additionnelle, M. le Président.

Je comprends que cette communication doit être probablement pour demander au juge de suspendre ses activités en attendant que le ministre reçoive des avis plus complets qu'il a demandés.

M. Bédard: C'est exact. C'est une communication concernant l'opportunité pour le juge en chef de continuer à siéger dans le contexte actuel.

M. Fontaine: Une question supplémentaire.

Le Président: M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Est-ce qu'il est exact que le rapport ferait référence à d'autres juges des Sessions de la paix?

M. Bédard: Je ne crois pas d'intérêt public de répondre à la question. Cela n'infirme pas, cela ne confirme pas, mais, s'il fallait que le ministre de la Justice commence, dans tous les dossiers, à faire état du fait que le nom d'une personne est mentionné dans un dossier, je pense qu'à partir de ce moment on en viendrait à créer une situation qui serait inacceptable.

Le Président: Question principale, M. le député de Beauce-Sud?

M. Roy: Non.

Le Président: Alors, la question principale est au député de Rouyn-Noranda.

Services de Radio-Québec dans l'Abitibi-Témiscamingue

M. Samson: M. le Président, en décembre dernier, j'avais l'occasion de poser une question au ministre des Communications relativement à l'opportunité pour Radio-Québec d'étendre ses services vers la région de l'Abitibi-Témiscamingue. Devant la réponse encourageante du ministre, à ce moment, je voudrais, ce matin, lui demander s'il est en mesure de faire le point sur ce dossier et de nous dire vers quel moment il croit que la région de l'Abitibi-Témiscamingue pourrait bénéficier des services de Radio-Québec.

Le Président: M. le ministre des Communications.

M. O'Neill: M. le Président, d'après les renseignements les plus récents qu'on m'a transmis à ce sujet, il semble que les travaux vont bon train.

On suit le programme prévu. Je sais qu'une étape est en train d'être franchie actuellement, celle qui consiste à délimiter avec une meilleure précision l'expansion du territoire qui doit être couvert. Là-dessus, de l'avis, du moins, de certains ingénieurs de notre ministère qui suivent le dossier conjointement, il y aura besoin de faire un certain nombre de réajustements. Dans l'ensemble, je puis assurer M. le député de Rouyn-Noranda que le programme semble bien se dérouler tel que prévu; même si je n'ai pas de date à lui donner, il peut mettre beaucoup d'espoir dans le développement de ce projet.

Le Président: M. le député de Beauce-Sud.

Conflit chez les camionneurs artisans

M. Roy: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse à l'honorable ministre de la Justice et a trait au rôle que joue la Sûreté du Québec dans le conflit qui oppose actuellement Day and Ross compagnie de transport aux 112 camionneurs artisans du Québec. J'aimerais savoir pendant combien de temps la Sûreté du Québec devra escorter les camions qui traversent le Québec, qui ne sont qu'en transit, pour protéger les intérêts d'une compagnie à l'extérieur du Québec dans le cadre d'un conflit de travail qui oppose des travailleurs québécois. J'aimerais savoir pour quelle raison la Sûreté du Québec n'aurait pas plutôt laissé ou forcé cette entreprise à avoir recours à des agences privées pour se protéger plutôt que de se faire protéger aux frais de la province.

M. Bédard: Je ne peux pas répondre très précisément à la question, à savoir pendant combien de temps la Sûreté du Québec va continuer d'accompagner ou d'escorter ces camions. Il s'agit d'un conflit de camionneurs artisans; pour le moment, je prendrai avis de la question afin de donner une réponse plus précise.

M. Roy: Comme c'est le dernier jour de la session, je me demande de quelle façon on pourra avoir une réponse si le ministre en prend avis.

M. Bédard: ...s'il sait quand finit la session!

M. Roy: J'aimerais savoir si le ministre est au courant du dossier. Si le ministre n'est pas au courant du dossier du tout, je ne lui en ferai pas grief, mais j'aimerais savoir s'il est au courant de cette situation.

Deuxièmement, lorsqu'il aura pris connaissance de la situation, entend-il prendre les mesures qui s'imposent?

M. Bédard: II y a eu les faits que vous connaissez, ils ont demandé l'aide des policiers, cette aide leur est fournie. Tel que je vous le dis, je ne peux répondre à la question: Durant combien de temps cette situation va-t-elle durer? Je ne suis quand même pas maître du fait que la session peut se terminer aujourd'hui ou demain; je pourrai, si je ne puis le faire demain parce que la session est terminée, dans le courant de la journée donner au moins personnellement au député de Beauce-Sud les informations auxquelles il a droit.

Le Président: M. le député d'Iberville.

Conflit de travail à la Volcano de Saint-Hyacinthe

M. Beauséjour: Ma question s'adresse au ministre du Travail. C'est au sujet du conflit à la Volcano, à Saint-Hyacinthe, qui touche aussi trois travailleurs à Trois-Rivières et à Montréal. Le lock-out dure depuis neuf semaines et j'ai su d'un travailleur une information, qui n'est pas vérifiée, à l'effet qu'une agence de sécurité aurait été engagée avec

tout ce qui est nécessaire. Je voudrais savoir où en sont rendues les négociations et si, à la Volcano, c'est exact qu'une agence de sécurité s'occupe de l'ordre.

M. Johnson: D'abord, je voudrais remercier le député d'Iberville de m'avoir donné un préavis de sa question, préavis, d'ailleurs, que m'avait donné également le député de Saint-Hyacinthe et à qui j'ai répondu par une lettre manuscrite hier à l'occasion du débat sur le projet de loi no 45. En effet, la compagnie Volcano est en lock-out depuis au-delà de 70 jours; c'est un conflit qui implique 133 travailleurs salariés. M. Raymond Désilets, le directeur du service de conciliation du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre a rencontré, lundi dernier, la partie syndicale à Saint-Hyacinthe. Il convoquait, hier, à Montréal, la partie patronale et je sais qu'il doit rencontrer aujourd'hui et lundi la partie syndicale.

On m'informe, au niveau du service de conciliation, qu'il y a une négociation qui va bon train. Faute de pouvoir affirmer qu'il y a un espoir que ce conflit se règle immédiatement, les négociations vont bon train. Quant à l'autre question du député au sujet d'une agence de sécurité, je n'ai malheureusement aucune connaissance de l'existence de tels services à l'usine de Saint-Hyacinthe.

M. Beauséjour: Question additionnelle, M. le Président. Est-ce que le ministre peut vérifier cela?

M. Johnson: Oui. Je peux bien.

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Biron: Est-ce que le ministre du Travail s'attend à recevoir des directives du gouvernement vis-à-vis des entreprises d'Etat, en particulier les entreprises de la SGF ou d'autres entreprises, afin que cessent ces lock-out d'entreprises d'Etat? On a eu l'an dernier le conflit de SIDBEC, qui était un lock-out, et on en a encore un maintenant. Est-ce qu'il y a certaines directives que le ministre du Travail va émettre ou que le gouvernement émettra dans cette direction?

M. Johnson: Je pense qu'à part de répondre par des généralités je suis dans une position un peu ambiguë face à cela. Le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, par son service de conciliation, par la réglementation et la législation dont il est responsable de l'application, joue en principe dans le secteur privé une sorte de rôle d'arbitre, un rôle de présence neutre, d'une présence qui tente essentiellement de favoriser un rapprochement des parties quand il y a des problèmes. Quand il s'agit de sociétés d'Etat, la chose est un peu plus délicate. Il est bien évident que le problème qui perdure à la Société de cartographie est l'exemple type de ce double chapeau que le ministre doit coiffer. En plus d'être membre d'un gouvernement qui a une politique en matière salariale et en matière de conditions de travail, il est, d'autre part, titulaire du ministère qui est là pour rapprocher les parties. En ce qui a trait spécifique- ment aux sociétés d'Etat, je pense qu'il ne faudrait pas oublier que les sociétés d'Etat sont régies par des lois qui leur confèrent une très grande autonomie. Elles ont des conseils d'administration auxquels siègent des gens qui sont habituellement du secteur privé et quelques-uns qui proviennent de la fonction publique. Ce sont des sociétés dans lesquelles il faut intervenir le moins possible, je pense, au niveau des décisions qu'elles prennent. Ceci dit, en ce qui a trait à Volcano par exemple, dans la mesure où celle-ci relève de la Société générale de financement, qui est elle-même un organisme avec une participation majoritaire de l'Etat, il est bien évident que le ministre de l'Industrie et du Commerce peut émettre, à titre de conseil et de suggestion, certaines opinions auprès des membres du conseil d'administration de la SGF. A moins que nous procédions avant le coup à une refonte en profondeur de toutes les relations de travail au Québec, il ne faut pas intervenir directement auprès de sociétés à qui les lois confèrent une autonomie.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

Travaux de voirie

M. Russell: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports. Il est maintenant de notoriété publique que les grands travaux se font attendre pour démarrer aussi bien que plusieurs petits travaux de voirie qui sont la source de plusieurs emplois saisonniers pour ceux qui n'ont pas de travail cette année et pour d'autres qui en auront peu. Est-ce que le ministre pourra, ce mois-ci, confirmer ou infirmer que cela dépend des directives du ministre des Finances en vue d'augmenter les crédits périmés?

M. Lessard: M. le Président, j'ai donné certaines indications. En date de la fin de juillet, il y avait eu plus de contrats, 76 contrats de plus, d'accordés, signés, qu'à la même date l'an dernier, pour une somme totale de $13 millions de plus. Il est certain que dans le premier trimestre il y a eu des montants de versés qui ont été inférieurs à ceux de l'an dernier, des montants qui ont été versés aux entrepreneurs. Mais, en date du mois de juillet, nous avons versé $39 millions à des entrepreneurs, ce qui correspond à peu près au même montant qui a été versé l'an dernier. Nous aurons cette année en fait, comme travaux, plus de $50 millions de plus que l'an dernier. J'espère avoir un montant, j'attends un montant de $5 millions du ministre des Finances, pour un programme de création d'emplois et qui iront dans des travaux régionaux.

Il n'y aura pas, cette année, comme travaux du ministère des Transports, de montants inférieurs à ceux de l'an dernier. Nous espérons en avoir plus. Si le ministre des Finances a encore $5 millions ou $6 millions à mettre à la disposition du ministre des Transports pour engager, si vous voulez, des travaux dans les régions, j'en serai particulièrement heureux, parce que le ministère des Trans-

ports est peut-être le ministère le plus déconcentré. Ceci lui permet de pouvoir dépenser beaucoup plus vite de l'argent qui serait de l'argent provenant de crédits périmés.

Le Président: M. le député de Mégantic-Compton, brièvement.

M. Grenier: M. le Président, une question additionnelle au ministre des Transports. Est-ce que le ministre des Transports pourrait nous renseigner sur la lettre de directive qui venait de son ministère — je pense que ce n'était pas le ministre qui la signait —au sujet des montants d'argent de petite voirie donnés au niveau de tous les comtés ruraux. Après avoir appris des hauts fonctionnaires que quand ces montants étaient inférieurs à $10 000, les travaux étaient dans la même année — d'ailleurs, j'ai prévenu le ministre de ma question — on a reçu une directive qui fait que quand c'est plus de $2000, déjà c'est réparti sur deux ans, et quand c'est plus de $5000, cela peut être réparti sur trois ans. Plusieurs municipalités sont un peu surprises de cela. Je me demande si le ministre n'a pas de nouvelles à nous donner à ce sujet.

M. Lessard: II faudrait quand même expliquer que les montants avaient été engagés avant les élections. Normalement, il y a $16 millions qui sont prévus pour les municipalités, pour des travaux d'amélioration de réseaux municipaux. Or, il ne restait que $4,5 millions pour cette année, puisque les montants avaient été engagés au cours des années précédentes. En vue d'aider les députés, comme les municipalités, comme les régions, j'ai engagé cette année un montant de $4,5 millions sur l'année à venir et un montant de $1,5 million sur l'année 1979/80. Je comprends que cela crée des problèmes. Les députés de l'Opposition, mais aussi les députés du gouvernement m'en ont informé. A la suite du retour de M. Pari-zeau, j'ai l'intention de lui demander une somme de $1,5 million, ce qui me permettrait, au lieu de payer sur trois ans, de payer au moins sur deux ans. Si j'obtenais ces $1,5 million, cela réglerait peut-être tout le problème des petites municipalités qui reçoivent un montant de $10 000 versé sur une période de trois ans. Si on avait $1,5 million, on pourrait peut-être régler le problème de ces municipalités et verser le montant sur une période d'un an, ou, en tout cas, sur une période de deux ans au maximum.

M. Russell: M. le Président, une question additionnelle très courte. Le ministre est au courant, lorsqu'il parle de contrats de travaux de voirie, qu'il y en a plus d'émis que dans les années passées. Il sait que c'est la coutume que certains entrepreneurs accumulent des contrats et commencent les travaux un an après, ce qui n'aide pas à la situation actuelle. Est-ce vrai que le ministre soit en train de réviser ses structures pour faire en sorte qu'un seul entrepreneur ne puisse accumuler les travaux et créer la situation qu'on connaît actuellement?

M. Lessard: Dans les prochains contrats qui seront accordés, nous avons l'intention de tenir compte de la performance de l'entrepreneur, à savoir du respect de l'échéancier. Un entrepreneur qui n'aura pas respecté son échéancier pourra être pénalisé. Il y aura un certain nombre d'éléments, de critères qui nous permettront justement de vérifier si un entrepreneur a respecté son échéancier et s'il a respecté aussi les plans et devis du contrat. A ma connaissance — j'ai vérifié hier — les contrats ne sont pas retardés actuellement.

Le Président: M. le député de Verdun.

M. Caron: M. le Président, ma question s'adressait au premier ministre, mais vu qu'il n'est pas là, est-ce que je pourrais être reconnu un peu plus tard? Le premier ministre est sorti.

M. Burns: II va être ici tout à l'heure. Il est absent actuellement.

M. Caron: Oui, c'est ce que je. dis. Il n'est pas là...

M. Charron: Je vais prendre avis et je vous répondrai au début de la prochaine session.

M. Caron: Alors, je vais passer la parole à mon collègue de D'Arcy McGee.

Le Président: M. le député de D'Arcy McGee.

Rapport sur la restructuration scolaire sur l'île de Montréal

M. Goldbloom: M. le Président, je vais adresser ma question au leader parlementaire du gouvernement qui, tout à l'heure, a fait office de ministre de l'Education pour déposer un document.

Peut-il informer cette Chambre pour quelle raison le rapport du conseil scolaire de l'île de Montréal, sur la restructuration du système scolaire sur l'île n'a pas encore été déposé malgré le fait que la loi exigeait ce dépôt pour le mois de décembre dernier? Il est vrai qu'il y a eu un certain retard à recevoir ce document de la part du conseil scolaire, mais nous sommes quand même à la fin d'un débat sur l'éducation, la langue de l'enseignement; il y a eu aujourd'hui des questions sur l'enseignement de la langue seconde, des décisions ont été prises par une commission scolaire. Ce document serait une pièce importante à tout ce dossier et nous ne l'avons pas.

M. Burns: M. le Président, et le député le comprendra, je vais prendre avis de sa question et je vais déployer tous les efforts pour pouvoir lui donner une réponse aujourd'hui même et si c'est possible, si on m'informe au ministère de l'Education que c'est possible, je demanderai même le consentement de l'Assemblée nationale pour me permettre de déposer ce document dans le courant de la séance, si le document est disponible.

M. Goldbloom: De toute évidence, M. le Président, ce consentement serait facilement accordé par l'Opposition officielle. J'aimerais prier le ministre, en même temps qu'il fera ces vérifications, de bien vouloir consulter les autorités du ministère de l'Education afin de pouvoir éclairer la Chambre sur les intentions du gouvernement quant à la décision qu'il lui reviendra de prendre sur cette importante question. Pourrait-il nous informer vers quel moment le gouvernement aurait l'intention de se prononcer sur cette question, de prendre une décision et passer à l'action?

M. Burns: Je prends également avis de cette question.

Le Président: M. le député de Pointe-Claire.

Centres d'accueil pour adolescents

M. Shaw: M. le Président, ma question devrait être posée au ministre des Affaires sociales, mais il est évident qu'il n'est pas ici. Le leader adjoint du gouvernement pourrait peut-être me donner le renseignement sur la question d'un dossier qui traîne depuis quatre mois sur la situation des 212 adolescents anglophones qui ne sont pas encore placés dans des centres d'accueil dans la province de Québec. Nous avons fait un arrangement avec le centre d'accueil Boys' Farm, nous avons prévu des dépenses annuelles de $1 200 000 et nous sommes venus au gouvernement pour demander une subvention de $200 000 pour effectuer ce programme. Pouvez-vous me donner des renseignements? L'année scolaire commence dans une semaine et si ce programme ne commence pas tout de suite, les enfants seront éparpillés partout dans la province. Ce montant de $200 000 est un montant minime, si on considère qu'il y a 212 adolescents qui attendent leur placement et 41 sont des adolescents qui doivent être dans un système fermé. Pouvez-vous me donner des renseignements sur ce dossier et me dire si le montant de $200 000 s'applique?

M. Martel: En l'absence du ministre des Affaires sociales, je prends avis de cette importante question, je m'informe au ministère dès ce matin et, cet après-midi, j'essaierai de communiquer la réponse au député de Pointe-Claire.

M. Charron: Question, M. le Président.

Le Président: Fin de la période de questions.

Je voudrais profiter de ce petit moment de répit pour souligner la présence dans les galeries du député fédéral de Richmond, le collègue de notre ami, le député de Richmond, M. Lionel Beaudoin.

Projet de loi no 45

M. Charron: M. le Président, comme convenu hier, en fin de séance... ou plutôt ce matin, avec le chef de l'Opposition officielle et le chef de l'Union Nationale, nous devrions procéder immédiatement à la mise aux voix de la deuxième lecture du projet de loi 45 au nom du ministre du Travail. Je demande un vote enregistré, M. le Président.

Le Président: Qu'on appelle les députés.

A l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: II y a eu tout à l'heure, en quelque sorte, ce que l'on appellerait en bon français un "gentlemen's agreement" quant à la question de mon collègue de Verdun. Si le premier ministre arrive en Chambre, permettrez-vous à mon collègue de poser sa question à ce moment-là?

M. Charron: Qu'il la pose à un autre ministre. Qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse?

M. Caron: M. le Président, ma question, je voulais la poser hier, mais le premier ministre n'y était pas; je ne dis pas que c'est sa faute. Mais, là, ce matin, il est reparti. S'il arrive, il me semble que c'est tout à fait normal, c'est à lui que je dois la poser. Si je la pose à un autre ministre, on va prendre avis de la question. Cela ne donne rien de le demander à un autre.

M. Charron: Je regrette, M. le Président.

Une Voix: Voulez-vous savoir ce qu'il fait ce midi?

Le Président: Qu'on appelle les députés!

Vote de deuxième lecture

Le Président: Nous allons maintenant mettre aux voix la motion de M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre qui se lit comme suit: — il s'agit d'une motion de deuxième lecture — Que la loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre soit maintenant lue la deuxième fois. Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Burns, Cardinal, Bédard, Laurin, Couture, Johnson, O'Neill, Mme Ouellette, M. de Belleval, Mme Payette, MM. Lessard, Proulx, Charron, Duhaime, Tardif, Garon, Chevrette, Michaud, Paquette, Vaillancourt (Jonquière), Marcoux, Vaugeois, Martel, Fallu, Rancourt, Mme Leblanc, MM. Grégoire, Bertrand, Godin, Laplante, Bisaillon, de Bellefeuille, Guay, Mercier, Laberge. Marquis, Lacoste, Ouellet, Perron, Brassard, Clair, Gosselin, Lefebvre, Dussault, Charbonneau, Beauséjour, Desbiens, Baril, Bordeleau, Boucher, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gagnon, Jolivet, Biron, Grenier, Russell, Goulet, Fontaine, Brochu, Shaw, Le Moignan, Dubois.

Le Président: Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure), Lavoie, Lalonde, Forget, Garneau, Goldbloom, Saindon, Saint-Germain, Mme Lavoie-Roux, MM. Lamontagne, Giasson, Blank, Caron, O'Gallagher, Ciaccia, Gratton, Pagé, Verreault, Springate, Samson, Roy.

Le Président: Que ceux et celles qui désirent s'abstenir veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire: Pour: 63 — Contre: 21 — Abstentions: 0

Le Président: La motion est adoptée.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

M. Burns: M. le Président, je fais maintenant motion pour que la commission de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales se réunisse à midi quinze.

M. Levesque (Bonaventure): Midi quinze.

Motion de renvoi à la commission du travail

M. Burns: Je propose également avant cela que le projet de loi no 45 soit déféré à la commission parlementaire permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration pour étude article par article. Comme je l'ai mentionné, ce matin, le projet de loi ne sera pas étudié à la date que nous avions prévue, c'est-à-dire le 12 septembre, mais possiblement un mois plus tard, vers la mi-octobre. Je fais donc cette motion, M. le Président, avant de faire la motion pour faire siéger la commission.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

M. Lavoie: Adopté. Le Président: Adopté.

M. Burns: M. le Président, je reviens donc à la motion que je m'apprêtais à faire, que la commission de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales se réunisse à midi quinze à la salle 81-A pour poursuivre l'examen article par article du projet de loi no 2.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

M. Lavoie: Adopté. Le Président: Adopté.

M. Brochu: Est-ce que le leader du gouvernement me permettrait une question en vertu de l'article 34? Les projets de loi qui ont été déposés en première lecture au nom du ministre de la Justice ce matin, est-ce que cela signifie qu'on a l'inten- tion de les appeler au cours de la journée, pour discussion, ou si c'est simplement pour les inscrire?

M. Burns: Non, nous n'avons pas du tout l'intention de les appeler au cours de la journée. Si la Chambre ajourne ses travaux aujourd'hui, ces projets de loi relativement au ministère de la Justice seront appelés au moment de la reprise de nos travaux quelque part en octobre.

M. le Président, je vous demanderais donc maintenant d'appeler l'article 3.

Le Président: Je pense que ce serait plutôt l'article 2.

M. Burns: L'article 2, excusez-moi. L'article 3, c'est fait déjà.

Le Président: Reprise du débat en troisième lecture sur la Charte de la langue française.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président...

Le Président: A l'ordre!

Je m'excuse, M. le premier ministre, je souligne que c'est le ministre d'Etat au développement culturel qui propose la troisième lecture de ce projet de loi.

M. le premier ministre, je vous cède la parole.

Projet de loi no 101 Troisième lecture M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je ne sais pas quel relent de caporalisme manifeste cette intervention de nos amis d'en face. Mais, dès le début de cette brève intervention, il y a deux choses que je voudrais souligner, surtout celle-ci, en premier lieu. Quelles que soient les possibles provocations, je n'ai ni de près ni de loin l'intention, ni le goût de transformer cette intervention en charge partisane.

Pendant une quarantaine de jours de séance, et maintenant quelque 200 heures de débat, ici ou en commission, cela a été marqué par de durs affrontements, à l'occasion, qui ont même été virulents. C'était inévitable parce qu'il n'y a pas de sujet plus chargé, plus explosif — cela fait une dizaine d'années qu'on en fait l'expérience — que celui de la langue puisque, chez nous, il est relié de si près à l'identité de deux communautés humaines. Justement parce que c'est très délicat, que c'est très proche des fibres, espérons que ce texte qui, après tout ce temps, va nous quitter dans quelques heures pour devenir la loi du Québec, espérons qu'on lui permettra — nous autres ici, en tout cas, nous le ferons pendant les quelques heures qui nous restent — d'amorcer sa carrière dans les moins mauvaises conditions possibles, dans un climat qui donne lui aussi — comme on l'a souvent dit ces derniers temps — à ce texte la chance du coureur.

D'ailleurs, c'est passablement sur ce ton, sauf erreur, qu'hier le chef de l'Opposition a réussi à s'exprimer. Je tiens à l'en remercier en espérant que cela se terminera de la même façon.

La deuxième chose que je voudrais dire, très rapidement, très brièvement, c'est que je vais peut-être m'éloigner un peu des règles strictes de la troisième lecture. Dès le départ, je vous demande à ce propos, M. le Président, votre indulgence et celle de nos collègues d'en face, ou, comme dit le whip, votre clémence.

Nous voici donc pour la troisième fois, en une dizaine d'années, devant une loi sur la langue, une loi qui est faite pour la défense et la promotion de l'instrument communautaire de tout un peuple, son instrument fondamental de culture, l'instrument même de son identité; pour la défense et l'illustration de la langue d'un peuple qui est ici la majorité, mais tout en tâchant aussi — cela semble parfois la quadrature du cercle — de préserver des droits que nous reconnaissons, et largement, je crois, à la minorité anglophone qui vit avec nous dans ce même Québec.

Vous savez, on n'est pas très nombreux dans le monde à être dans cette situation; sauf erreur, seules les sociétés nationales qui sont minoritaires et dépendantes dans le contexte où elles ont à vivre en viennent à se sentir acculées à ce genre d'obligation. Il n'y en a pas beaucoup qui ont fait partie de ce petit nombre; c'est pour cela que pour ma part j'ai eu souvent le goût dédire — je me suis même permis de le dire — que je me sentais, comme homme, comme membre de ce peuple du Québec français, humilié — cela fait une dizaine d'années que cela dure et ce n'est pas fini— d'une certaine façon, dans mes propres fondements, d'être devant cette obligation parce qu'elle reflète tout un contexte économique et politique qui, à mon humble avis, est et va demeurer, aussi longtemps qu'il va être comme il est, inacceptable. En tout cas, jusqu'à nouvel ordre, on est dans ce cas-là.

Etant donné la façon dont on a abordé ce cas-là, avec le projet de loi no 1 et ensuite le projet de loi no 101, certains ont prétendu y voir et prétendent encore y voir qu'à partir de ce souci collectif que doit refléter la loi 101, nous aurions exagéré dans le texte et même qu'il y aurait quelque chose de revanchard dans ce projet de loi. Pour ma part, en conscience et au nom du gouvernement tout entier, sans être capable de sonder les reins et les coeurs — cela, il n'y a personne qui peut y arriver — j'ai nettement la conviction et je peux le dire à l'Assemblée nationale au moment où le débat va s'achever bientôt, que sur ce dernier point, quand on prétend qu'il y a eu quelque chose de revanchard dans le travail de préparation de ce projet de loi et tout ce qui l'a accompagné depuis le début des débats, quant à nous, c'est strictement faux. La loi 101 n'est faite contre quiconque; nulle part, jamais, dans aucune de nos intentions, dans les interventions qui, de notre côté, ont accompagné ce laborieux cheminement, nulle part j'ai senti qu'il y avait, au fond de nous, quelque hostilité que ce soit ou quelque esprit de revanche que ce soit contre qui que ce soit.

Très fermement, on a voulu faire — et il n'y a pas à le cacher — quelque chose d'équitable, de ferme aussi, de vigoureux, en essayant de tenir compte des leçons qui sont venues des efforts antérieurs; on a essayé très fermement de faire quelque chose pour nous, comme majorité française au Québec et comme entité nationale qui a parfaitement le droit de se prémunir contre des dangers que tout le monde admet. Est-ce qu'on a réussi à les baliser aussi précisément qu'on le voulait? C'est à l'usage qu'on verra cela. Mais, une chose certaine, c'est que, tout en n'étant contre personne, il est évident — je pense que tout le monde dans cette Assemblée va le reconnaître — qu'un peuple qui représente un Nord-Américain sur 40, un peuple qui, par conséquent, est exposé à tous les immenses courants d'un continent d'au-delà de 240 millions de gens qui ne parlent pas notre langue et dont la culture, dont les moyens de communication, dont toutes les influences et tous les impacts viennent battre contre nous, c'est-à-dire ce quarantième d'une autre langue, d'une autre identité culturelle, dans un contexte comme celui-là, il est évident que, sans quoi que ce soit qui puisse être hostile, puisqu'on fait partie du continent et que nous sommes, nous aussi, des Nord-Américains, qui puisse être hostile contre quiconque, c'était non seulement notre droit, mais c'est notre devoir, dans le contexte où nous avons à vivre, de penser à la défense et à l'illustration de l'instrument essentiel de notre identité, qui est la langue française. Est-ce qu'on a exagéré dans ce souci en excluant toute idée de revanche contre qui que ce soit? Je ne le sais pas, je ne le sais pas, je le dis très franchement, parce qu'il est évident que personne ne peut dire qu'une loi comme celle-là est parfaite au départ. C'est seulement, encore une fois, à l'usage, qu'on découvrira les défauts s'il y en a, et moi, je suis assez convaincu qu'on en découvrira. Le cas échéant, on pourra les corriger tout le monde ensemble.

On remarquera d'ailleurs, et, en particulier, le député de Marguerite-Bourgeoys le notera, j'espère, parce que Dieu sait qu'il a insisté là-dessus, mais on notera aussi que l'article qui, au départ, prétendait baliser l'une face à l'autre, dans un certain sens, cela aurait pu devenir l'une contre l'autre, la Charte des droits de la personne et la Charte de la langue française, cet article n'existe plus. Autrement dit, le terrain reste libre, et le terrain est mobile, on le sait. Il s'agit en fait, dans les deux cas, d'un terrain relativement nouveau. Il y a seulement quelques années que, du côté de la langue, on prétend légiférer, dans un contexte extrêmement délicat. Il n'y a pas longtemps non plus que la loi sur les droits de la personne et la commission qui est censée veiller à son application sont également actives dans le paysage. L'interaction de l'une sur l'autre de ces deux chartes, on l'a laissée complètement libre, de façon qu'on puisse voir tous ensemble, et c'est l'un des avertisseurs qu'on aura, qu'on puisse voir tous ensemble si on a réussi à préserver, aussi bien du côté des collectivités qui sont en présence ici au Québec que du côté des individus qui en font partie, si on a réussi à préserver, comme on le voulait et comme

on a tenu à le faire, les droits des uns et des autres.

En tout cas, s'il y a une chose que je n'admettrai jamais, quel que soit le feu des débats, c'est qu'on puisse avoir de part et d'autre, quand on s'affronte sur des sujets comme ceux-là, qu'on puisse prétendre avoir ce qui a été défini comme la possession tranquille de la vérité et, en particulier de ce côté-ci, il faut qu'on fasse attention, on le sait, parce que cela peut vite devenir l'arrogance de la certitude à laquelle le pouvoir risque toujours de nous conduire. On le sait. Mais j'ai vu aussi, depuis une dizaine d'années, comme nous tous, les plaies que ce problème a ouvertes, qu'il a entretenues, les études et les recherches à n'en plus finir qu'il a suscitées, les efforts laborieux et souvent même douloureux qu'on a faits pour le résoudre. Je sais que, dans ce contexte-là, ce n'est pas facile, pas plus facile pour nous que cela ne l'était pour les autres.

Depuis notre arrivée au pouvoir, il n'y a pas tellement de mois, j'ai vu aussi qu'à notre tour, et en partie c'étaient des retombées de la campagne électorale dont on venait de sortir, à notre tour, nous étions aussi, sans tarder, dans l'obligation de nous occuper de ce problème, de tâcher d'en venir à bout sans le laisser traîner encore indéfiniment. Et là, pendant des semaines, j'ai vu le soin avec lequel, d'une version à l'autre de ce texte maintenant final qui est devant nous, le soin et les scrupules avec lesquels le projet de loi a été mis au point.

J'ai vu, et j'y ai participé, la sincérité parfois passionnée, mais toujours scrupuleuse avec laquelle tous ont pioché pour établir dans ce texte, une fois pour toutes espérons-le, cette affirmation — ce que j'appelais la défense et l'illustration du français au Québec, mais dans le respect des droits des autres — pour qu'elle aille aussi loin que l'exige la dignité d'un peuple chez lui, et d'un peuple qui se respecte, mais en cherchant toujours avec la même assiduité — je peux en donner témoignage; cela ne veut pas dire qu'on n'a pas fait d'erreurs — à s'arrêter quand même, dans cette affirmation avant d'atteindre le point où on empêcherait la communauté anglophone, qui est québécoise elle aussi, de se maintenir et de s'exprimer librement.

Tel qu'il est, ce texte, après tout ce travail et tout ce souci que je n'exagère pas, est-ce qu'on peut dire vraiment, dans le contexte québécois, partie du contexte continental que nous connaissons, qu'il brime si peu que ce soit exagérément les droits que nous reconnaissons à nos concitoyens anglophones? Ici, dans certains milieux qui sont voués à être contre ce genre d'effort, on peut prétendre que oui, c'est exagéré.

Dans l'avalanche des choses qui ont été dites et publiées à propos du projet de loi 101 et du projet de loi 1, je prends simplement trois textes que je voudrais citer en partie, sans les tronquer, sans les déformer. Le premier, c'est tout simplement, mais très éloquent, un résumé qui a été fait dans la Presse par Mme Lysiane Gagnon, justement de cette réponse qu'on peut donner, mais très globa- lement, cursivement, à ceux qui prétendent qu'il y a des excès, en tenant compte du contexte non seulement québécois, mais canadien aussi auquel nous appartenons toujours jusqu'à nouvel ordre.

Pour décrire la réalité, comme elle le dit, Mme Gagnon a trouvé ceci: "La réalité, c'est que très peu de minorités à travers le monde peuvent jouir du statut très particulier que conservera aux Anglo-Québécois la future législation: un réseau scolaire complet de la maternelle à l'université inclusivement que pourront fréquenter toutes les générations issues de l'actuelle minorité anglophone; un réseau d'institutions hospitalières et de services sociaux qui continueront, le plus souvent, à fonctionner en anglais — surtout avec les ajustements qui ont été faits tout récemment dans la dernière version du texte — et à qui l'on ne demandera que de traiter en français avec un malade ou un client francophone; un réseau d'institutions culturelles, journaux, radio, télévision, centres d'art, etc., qui continuera de refléter et d'animer une culture qui s'appuie sur un immense bloc de 240 millions ou 250 millions de Nord-Américains, tous ces organismes et institutions étant, le cas échéant, subventionnés par l'Etat québécois sur un pied d'égalité absolu avec leurs équivalents francophones, écoles, universités, hôpitaux, services sociaux, diverses activités culturelles anglophones ayant non seulement droit de cité, mais étant traités par les pouvoirs publics exactement de la même façon que ceux de la majorité." C'est quand même vrai pour la collectivité anglophone. "Si on regarde le revers de la médaille, puisqu'on est toujours au Canada, les minorités francophones des autres provinces aujourd'hui en voie d'extinction très souvent, n'ont jamais eu et n'auront jamais — jusqu'à nouvel ordre, dans la perspective actuelle — l'ombre de ces avantages, elles qui auraient pourtant eu d'autant plus besoin d'une protection gouvernementale qu'elles étaient absolument isolées culturellement et dénuées de tout pouvoir économique."

Du côté des droits individuels maintenant, et je reprends le texte rapidement, juste l'essentiel. "Au chapitre des libertés individuelles — qui, de toute façon, seront balisées éventuellement, si le besoin s'en fait sentir, par des organismes comme la Commission des droits de la personne — la législation respectera pour tout anglophone le droit de communiquer en anglais avec l'administration publique, le droit de plaider sa cause en anglais devant tout tribunal, le droit de contracter et de transiger en anglais dans le secteur privé, le droit de s'exprimer en anglais au Parlement et d'obtenir, sans délai, des divers paliers de l'administration publique, une traduction anglaise des lois, des règlements, etc., le droit de travailler en anglais, à la seule condition que l'usage de cette langue — et encore dans des entreprises d'une certaine taille — ne brime pas le droit des francophones à être servis en français ou à communiquer en français au travail, le droit d'occuper évidemment n'importe quel emploi, n'importe quelle fonction de direction, etc., et à la seule condition — sans qu'il n'y ait rien de racialement défini

là-dedans — de travailler à augmenter, à tous les niveaux, le nombre de Québécois capables de s'exprimer en français.

Je crois que les ouvertures qui ont été faites du côté des sièges sociaux, encore dans la dernière version du projet de loi, pour les entreprises qui ont des activités qui débordent les frontières, montrent à quel point, quand même il a eu un souci de respecter les libertés des gens.

Encore une fois, le revers de la médaille, si on regarde à l'extérieur du Québec, à ce chapitre, celui des droits individuels et de l'exercice des droits — parce que des droits sur le papier, on sait ce que cela vaut quand ils ne sont pas respectés — à ce chapitre, les minorités françaises des autres provinces n'ont qu'un seul droit expressément reconnu par la loi des langues officielles, celui de communiquer en français avec les organismes fédéraux. Mais avez-vous déjà essayé d'acheter des timbres-poste en français à Saskatoon? C'est une question que j'ai oublié de poser à M. Blakeney l'autre jour.

Même chez des gens qui, peut-être, ont un peu plus de recul parce qu'ils vivent à l'extérieur, mais qui se sont un peu donné la peine de regarder le climat dans lequel tout cela se déroulait, même chez des gens du Canada, à l'extérieur du Québec, et je pourrais en citer quelques-uns, enfin j'ai réservé seulement celui-là pour l'intervention que j'avais à faire aujourd'hui, j'ai pu lire, par exemple, comme chacun d'entre vous, dans le Toronto Star — qui est le plus grand journal du Canada anglais — au début d'avril, au moment où il n'y avait pas eu toutes ces retombées et cette espèce d'escalade qui a marqué les débats et certaines répercussions extérieures, donc une impression assez fraîche, j'ai remarqué ceci, que le Toronto Star écrivait: "The Quebec Government is determined to turn the province into a mainly unilingual French society" — si on veut, collectivement le mieux possible — "but its new language policy still shows reasonable respect for the traditional rights of the English speaking minority in Quebec" — et un peu plus loin — "Canadians should understand that Quebec's fears for the future of its French culture in the overwhelming English environment of North America are genuine and also realistic. The proposed new legislation is not some fancy of the separatist movement, but only the latest of many efforts going back many years to strenghten the position of French as the predominant language in all areas of Quebec life."

Sur la lancée initiale de ce qu'était à ce moment le projet de loi no 1, je crois que cette opinion équilibrée, ouverte qu'exprimait le Toronto Star est une chose dont, malheureusement, beaucoup d'autres auraient pu faire leur profit, mais qui s'est un peu perdue dans la tourmente de ces derniers mois.

Je finirai avec une citation qui me paraît très appropriée. Tout le monde se rappellera de cette intervention parce qu'elle vient de quelqu'un qui, Dieu sait, a eu à voir avec ces problèmes, il s'agit de M. Dunton. On se souvient tous de la commission BB qui, du nom de ses présidents, s'appelait la commission Laurendeau-Dunton. A la fin d'avril, M. Dunton, après y avoir pensé, je suppose, avoir examiné cela, puisqu'il a passé quelques années de sa vie littéralement jusqu'au cou dans ce genre de problème, disait ceci, d'après un compte rendu du 20 avril: "Davidson Dunton, ancien coprésident de la Commission sur le bilinguisme et le biculturalisme. Si on ne tient pas compte des propositions spécifiques qu'il contient et de sa rhétorique flamboyante — et je passe le douteux comme le reste — le livre blanc — c'est au moment du livre blanc qui balisait l'éventuel projet de loi — sur la langue se rapproche du point de vue de la majorité des membres de la commission Laurendeau-Dunton.

La commission soutenait que le français devait devenir la langue principale au travail et que plus de francophones devraient pouvoir travailler en français dans les hautes sphères des affaires. Elle soutenait aussi que le français devait être la langue principale du Québec d'une façon visible. Ce sont les principaux objectifs. Mais tant par le ton que par le contenu de son allocution — M. Dunton s'exprimait en public — M. Dunton a invité ses compatriotes de langue anglaise du Québec et d'ailleurs à plus de pondération, à plus de compréhension des aspirations de la nation québécoise, en parlant évidemment du peuple français du Québec.

Qualifiant de nuisibles les cris "alarmistes et hostiles" que lancent les anglophones depuis quelque temps, le professeur de l'Université Carie-ton a affirmé, et je cite: "Même si toutes les mesures prévues dans le livre blanc étaient mises en application, la position de la minorité au Québec serait encore plus confortable que ne l'a été celle des minorités francophones par le passé, et même qu'elle ne l'est présentement étant donné la lenteur des changements." Indiscutablement, il y a cette lenteur des changements — en dehors de toute visée politique directe dont l'avenir saura s'occuper — en ce qui concerne nos congénères culturels et ceux que l'immigration, la mobilité actuelle amèneront a les rejoindre là où ils survivent tant bien que mal ailleurs au Canada. C'est pour essayer de débloquer cette lenteur évidemment, je l'admets, in extremis, en ce qui concerne ce débat, que nous avons tâché de trouver une ouverture par la voie de ces accords de réciprocité dont on a parlé depuis quelque temps qui font maintenant et qui vont continuer à faire partie de la loi 101.

Du côté de la fameuse dimension canadienne, ce que nous offrons là — il ne faudrait tout de même pas oublier de le noter — c'est quelque chose que, constitutionnellement, le Québec a parfaitement le droit de ne pas offrir. On connaît les facteurs démographiques qui affectent en particulier la région métropolitaine de Montréal, ce qu'on appelle le West Island et certaines parties du Québec qui vont jusqu'aux frontières de l'Ouest; on connaît les facteurs démographiques qui affectent ces portions extraordinairement importantes, quand même, du territoire québécois. Il s'agissait là, pour nous, d'un risque calculé — il est là dans la loi; s'il y en a qui veulent s'en prévaloir, libre à eux — qu'on a mis là dans le seul but

d'essayer de débloquer cette lenteur que des gens comme Dunton et d'autres ont notée dans le reste du Canada depuis trop longtemps. On l'a fait dans le but d'une équité correspondante des deux côtés, et sous quelque statut politique que ce soit, dans le but aussi d'un bon voisinage et de bonnes relations entre des groupes différents. Nous offrons et nous continuons d'offrir de laisser les enfants de tous les citoyens anglophones s'inscrire dans un réseau qui, de la maternelle à l'université, du côté anglophone, est le plus complet de tous les réseaux minoritaires possibles, et imaginables au Canada en ce moment. La seule condition est qu'éventuellement et en pratique, pas simplement sur le papier, il y ait au moins un effort vers une équivalence de plus en plus grande des services disponibles pour les nôtres quand ils vont ailleurs.

Et en attendant que cela mûrisse — et j'ai l'impression, j'ai l'espoir que cela va mûrir — sur ce plan, on notera aussi tout de même que, sur une base temporaire mais de façon extrêmement généreuse qui peut aller jusqu'à six ans, ce même droit de liberté d'inscription pour leurs enfants est accordé à tous ceux que leurs fonctions, leur emploi, leurs études, un stage quelconque de leur carrière mais un stage quelque peu prolongé amènent au Québec. Sur ce double plan de l'offre générale qui est faite, à condition qu'elle soit sur une base de réciprocité, et sur cette ouverture, sur des stages jusqu'à six ans d'emploi, de fonctions, d'études, etc., je crois qu'on pouvait difficilement demander davantage, tenant compte des contraintes auxquelles est exposé lui-même le peuple québécois de quelque cinq millions d'habitants que nous formons, le peuple québécois francophone.

Un point sur lequel je voudrais un peu insister, en sautant d'un secteur à un autre, parce que la loi elle-même s'en préoccupe fortement, c'est l'impact économique — et Dieu sait qu'on en a parlé!— quelle pourrait avoir. Il y a une chose qu'il faut peut-être noter au départ, en essayant de l'oublier temporairement, parce que je sais bien qu'on ne l'oubliera pas complètement et que, pendant les jours qui viennent, au moment de la rentrée scolaire, cela va redevenir très fortement d'actualité, mais, pendant quelques instants, est-ce qu'on pourrait admettre entre nous — quant à moi, je le crois profondément — que l'infériorisa-tion du français au Québec, ce phénomène de minorisation psychologique et culturelle à laquelle on a été exposé, à laquelle on est encore exposé, que ce n'est pas l'école, à quelque niveau que ce soit, qui en est la cause.

En particulier, quand il s'agit de l'assimilation galopante des immigrants ni francophones ni anglophones qui viennent chez nous, cette assimilation traditionnelle qu'il fallait enrayer, je pense que les gouvernements antérieurs étaient du même avis que nous. L'école, à ce point de vue, est l'effet d'une situation. S'il y a cette "attractivité" incroyable pour neuf sur dix à peu près des immigrants allophones, pour employer le jargon courant, qui viennent chez nous, c'est que, d'abord et avant tout, il y a une situation d'infériorité économique de la collectivité française du Québec, une infériorité que l'histoire lui a imposée et, pour plus largement plus que sa part, que le régime politique actuel contribue à maintenir. Dans les limites de ce régime, puisqu'on y est encore, et sans s'imaginer qu'une loi, dans un secteur particulier, compartimenté nécessairement comme peut l'être une loi spécifique sur une question comme la langue, sans s'imaginer qu'une telle loi puisse fournir une panacée, il fallait tout de même s'occuper et il faut continuer à s'occuper, par le biais linguistique comme par d'autres, de la promotion économique, d'un relèvement économique de cette majorité que nous formons au Québec.

Dès le rapport de la commission Gendron, j'ai remarqué que ce souci devait être central et qu'il l'avait parfaitement bien identifié. Le fait de s'occuper directement dans une loi comme le texte que nous avons devant nous, par des programmes de francisation, par une insistance que devra baliser tout le long du chemin l'Office de la langue française, désormais, comme la régie l'avait commencé avant, le fait de s'occuper directement, par le biais linguistique, de cette promotion économique par étapes, qui doit évidemment s'ajouter à beaucoup d'autres mesures que le Québec aura à prendre, est-ce qu'on peut vraiment, sérieusement, prétendre que cela peut donner des résultats qui confineraient à la catastrophe, comme certains refrains qu'on a entendus? Et je ne parle pas uniquement, ni même d'abord et avant tout de ce qu'on a entendu ou ce qu'on a vu à l'Assemblée nationale, mais de ces retombées extraordinairement catastrophiques, littéralement annonciatrices de l'Apocalypse qu'on a pu voir pendant les quelques mois qu'a duré ce débat. Est-ce qu'on peut s'attendre à ce genre de catastrophe à cause d'une loi de promotion de la langue, d'une majorité chez elle? Prenons ce qui s'est passé pendant le débat. C'est quand même un fait qu'au moment où tout cela se déroulait, Statistique Canada, qui ne doit pas être particulièrement portée à tronquer les chiffres ou à les biaiser en faveur du Québec, Statistique Canada, la dernière évaluation qu'elle a faite pour l'année courante des intentions d'investissements, de la confirmation de ces intentions, en deuxième période de l'année, nous a appris quand même, jusqu'à preuve du contraire que, dans l'ensemble, les investissements se portent mieux au Québec, en dépit de tous ces débats et tous ces refrains apocalyptiques, en ce moment — Dieu sait que ce n'est pas le paradis! loin de là — que dans le reste du Canada.

Les intentions d'investissements se sont mieux maintenues en 1977, pendant ces mois qui ont été parsemés de toutes ces terreurs verbales, et se portent mieux quand même que dans le reste du Canada. De là à dire que cela va comme cela devrait aller, c'est autre chose, mais c'est un fait. J'ai lu tout récemment — cela non plus n'a pas été démenti — qu'en particulier dans les secteurs dynamiques, les secteurs de production qui sont en pointe chez nous, les exportations avaient effectué une reprise qui dépassait largement ce qu'on avait pu espérer, six mois ou huit mois auparavant.

Autrement dit, nous sommes dans une conjoncture générale de stagnation ou de stagna-

tion comme l'une poussant l'autre, l'inflation et le chômage, et qui est quelque chose de désastreux, on peut dire à l'échelle du monde occidental et très spécifiquement à l'échelle de tout le Canada, dans ce contexte qui a été d'ailleurs alimenté par une immense imprévoyance qui dure depuis une vingtaine d'années — je ne vise personne spécifiquement dans l'Assemblée nationale — je me réfère aux secteurs mous, comme on dit couramment, ces secteurs qui sont en train d'achever de se dégrader et sur lesquels il faut mettre un effort particulier qui devrait commencer d'ailleurs à un autre niveau de gouvernement, la chaussure, le textile, le vêtement, le meuble.

Dans ce contexte donc de stagnation généralisée, de reprise laborieuse partout et alimentée ou encore empirée chez nous par tant d'années d'imprévoyance par plusieurs des secteurs clés de notre première évolution industrielle, on peut dire que le débat sur la langue, le projet de loi no 101, à mon humble avis, si on veut être de bonne foi les uns et les autres, n'a pas visiblement affecté quoi que ce soit dans le paysage économique.

Très franchement, et comme je le pense, je dois dire que ni de près, ni de loin, quant à moi, j'aperçois les écrans que dresse ou tente de dresser la propagande — une propagande qui, d'ailleurs, vise, j'en ai l'impression, beaucoup plus l'option politique du gouvernement que sa politique sur la langue — mais derrière ces écrans que la propagande s'acharne à dresser, nulle part je ne peux voir, je n'ai aperçu jusqu'ici que le projet de loi no 101 puisse vraiment affecter à terme notre évolution économique d'aucune façon.

Pour montrer par l'exemple, d'ailleurs, rapidement à quel point cela peut être faux, ces terreurs coloniales qu'on essaie de nous inspirer continuellement à propos de sujets fondamentaux comme notre identité culturelle, notre identité linguistique, à quel point cela peut être artificiel, en regardant l'exemple de ce qui s'est passé ailleurs, et à quel point on joue sur nos nerfs de coloniaux, de père en fils, depuis trop longtemps, je voudrais juste évoquer celui du pays wallon et du pays flamand. Je ne le ferai pas en mes termes, je vais prendre un texte d'un monsieur qui s'appelle Meyer Nuremberger, et qui a publié cela dans Mac-Lean, version anglaise, le MacLean anglais qui, sauf erreur, est publié à Toronto. M. Nuremberger, de Toronto, écrit dans le MacLean Magazine.

Tout le monde sait que la Belgique est un pays aussi où il y a deux communautés culturelles et linguistiques. Dans le passé, c'étaient les Wallons qui dominaient, les Wallons qui parlent français comme nous. C'était la domination d'une majorité wallonne politiquement, économiquement, culturellement, à tout point de vue, et numériquement. Peu à peu, l'ordre de grandeur s'est renversé et, aujourd'hui, ce sont les Wallons qui se sentent mal pris, ce sont les Flamands qui ont avancé. Voici ce qu'écrit M. Nuremberger— et cela est en plein dans le monde occidental, dans un contexte de marché commun, d'hyperconcurrence entre les sociétés. Je vais le traduire à l'oeil, de mon mieux. Ce n'est pas pour éviter de parler anglais à quelques reprises à l'Assemblée nationale, je veux rassurer tout de suite le député de Pointe-Claire, c'est simplement parce que je pense qu'un peu d'hésitation permet une meilleure compréhension d'un phénomène dont on devrait tenir compte chez nous, en évaluant les risques et les promesses de l'avenir. La menace du chaos économique n'a jamais marché — c'est une référence au début de l'article, qui parlait justement du projet de loi au Québec: What does the French Quebecer want, nothing more than what is due to him," c'est le titre de l'article — n'a jamais fonctionné dans des conditions semblables. Le plus frappant exemple de l'inefficacité de ce genre de chantage, c'est celui de la Belgique. Il y a 40 ans, le pays flamand — il n'y a pas de correspondance internationale, sauf en Hollande, et encore il s'agit de deux dialectes, pour le flamand langue — était pauvre et bilingue. Aujourd'hui, il est unilinguistiquement flamand ou hollando-flamand. Les Flamands ont rejeté l'universalité soi-disant de la langue française dans leur contexte en faveur de leur propre dialecte.

Il n'y a plus d'écoles françaises au pays flamand de Belgique et pourtant, paradoxalement, ce pays flamand est devenu le coin le plus prospère de toute la Belgique et le seul coin du pays où les Américains et les Allemands en particulier acceptent d'investir où, enfin, se précipitent pour investir. Je termine la citation.

Je pourrais ajouter—je pense que tout le monde est au courant de cela—que ce pays flamand unilingue, sans correspondance linguistique internationale comme peut nous en assurer la langue française qui demeure une langue internationale, dans un contexte extraordinairement dynamique, mais, en même temps, difficile comme celui du développement des pays du Marché commun, est aujourd'hui probablement en pointe, avec certains coins de l'Allemagne, pour toute l'Europe au point de vue du développement économique. Je n'irai pas jusqu'à dire que ce progrès a été causé par ces décisions linguistiques, mais je pense qu'en toute bonne foi on admettra que ces décisions linguistiques n'ont pas empêché ce progrès.

Tout cela pour dire très simplement, pour répéter ce que je disais au début, qu'en dépit de toutes les propagandes qui s'adressent essentiellement à notre bon vieux fond colonial qui a toujours eu peur quelque peu des changements, surtout des changements qu'il oserait faire lui-même, en dépit de tous ces assauts de la propagande, la loi sur la langue française peut accompagner un progrès aussi bien qu'elle l'a fait dans des cas beaucoup plus extrêmes, beaucoup plus excessifs que toutes les décisions qu'on a prises ici, par exemple dans ce coin du monde que je viens d'évoquer.

Il y aurait encore bien des choses à dire, mais j'ai dit que j'essaierais d'être bref. Je suis sûr que le parrain de la loi, le ministre d'Etat au développement culturel, sera capable de s'en charger avant la fin du débat, avec la même sérénité et ce même souci minutieux de l'équilibre dont, malgré tous les assauts qui sont venus de toute part, il ne s'est pas départi depuis bien des mois.

Pour ma part, je voudrais terminer très rapi-

dement en rappelant à nouveau que, pour la troisième fois en une dizaine d'années, c'est un gros défi que nous tâchons de relever, un défi malaisé entre tous dans une société comme la nôtre, placée comme elle l'est dans ce pays canadien et sur ce continent. Est-ce que, cette fois-ci, nous allons réussir mieux que les autres fois? Tout ce que je peux dire, c'est que du fond du coeur je l'espère. Au-delà des divisions partisanes qui se maintiendront, qui doivent se maintenir, dans l'intérêt du Québec tout entier, il me semble que nous devons tous espérer que cela réussira convenablement. Je peux m'engager en tout cas, du côté de ceux qui pendant une certaine période d'années auront à appliquer cette loi, à ce que nous fassions notre possible pour qu'en dépit de ses imperfections elle s'avère non seulement vivable, mais qu'elle produire aussi les effets féconds qu'on espère d'elle. Tout ce que je demande, c'est qu'on lui donne sa chance raisonnable de faire sa carrière, disons un essai loyal pendant un an ou deux ans qui permettra de voir, avec toutes les balises qui sont aussi là pour protéger les gens contre des excès, si enfin cela peut marcher convenablement. En tout cas, au nom du gouvernement qui sera, comme il l'a été depuis le début, très ferme sur les principes et sur les articulations essentielles de cette loi, je peux m'engager devant l'Assemblée nationale et devant tous les Québécois aussi, en ce qui concerne les modalités d'application de la loi, à toute la flexibilité qui pourra paraître indiquée et à une attitude ouverte au maximum à condition de ne pas lâcher sur l'essentiel. Tout cela — je tiens à le dire, à le souligner en terminant — en attendant le jour où peut-être — pour ma part, j'en suis sûr — un peuple, qui sera vraiment maître chez lui, pourra mettre de côté la plupart des soucis, qui sont vraiment existentiels, que lui impose actuellement son statut politique et que devait, jusqu'à ce que cela soit changé, refléter cette législation.

Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: M. le Président, j'aurais une question au leader du gouvernement. Pourriez-vous changer l'ordre de la convocation de la commission sur le projet de loi no 2 pour cet après-midi au lieu de midi?

M. Burns: Vu l'heure, et comme j'avais mentionné que le projet de loi no 2 serait étudié à la commission de la présidence du conseil dès 12 h 15 — et la raison du retard de cette commission est bien évidente, les membres de la commission en général voulant entendre les propos du premier ministre — je pense bien qu'il serait inutile de faire siéger la commission à ce moment-ci. Si la Chambre était consentante, je proposerais que nous reprenions les travaux de cette commission à 2 h 30 à la salle 81-A pour pouvoir poursuivre nos travaux article par article, relativement au projet de loi no 2.

Le Président: Est-ce que de consentement unanime je dois en faire motion...

Des Voix: Adopté.

Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle, vous avez la parole.

M. Gérard-D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention l'intervention de l'honorable premier ministre, relativement à l'étude du projet de loi no 101 en troisième lecture. Je dois lui dire que je suis favorablement impressionné par l'ouverture d'esprit qu'il manifeste, les bonnes intentions qu'il véhicule. Mais je dois également lui rappeler que nous ne pourrons pas vivre, dès demain, avec les bonnes intentions d'un premier ministre, si réelles soient-elles. Nous devrons vivre avec un texte de loi et nous devrons vivre avec des fonctionnaires dont c'est l'obligation et le rôle de mettre à exécution ce que cette Assemblée aura décidé.

Entre les intentions manifestées par le premier ministre, entre l'ouverture dont il fait preuve aujourd'hui, comme il l'a d'ailleurs fait dans le passé, et entre la mise en application de cette loi, il peut y avoir un fossé et un fossé assez profond. Le premier ministre demande qu'on donne la chance au coureur quant à la mise en oeuvre du projet de loi no 101. C'est beaucoup demander quand on n'a pas vu son application. Tout ce que je puis formuler, c'est que le climat social ne soit pas perturbé, que la loi puisse être appliquée avec la plus grande ouverture d'esprit, avec l'interprétation la plus généreuse, et avec le plus de souplesse et le moins de rigidité possible. Mais c'est simplement un voeu que je peux exprimer, à ce moment-ci, comme d'ailleurs l'a dit implicitement le premier ministre, si j'ai bien lu ou entendu ce qu'il a voulu exprimer.

Le projet de loi no 101 a la prétention de faire du français la langue officielle du Québec. Or, M. le Président, il ne faudrait pas oublier que nous n'avons pas ici un projet de loi qui n'a pas eu d'antécédents. Le premier ministre l'a d'ailleurs mentionné en disant que c'était la troisième fois en dix ans que nous avions à nous pencher sur un projet de loi de nature linguistique au Québec. Mais je fais remarquer au premier ministre qu'il aurait pu souligner que, par la loi 22, cette Assemblée faisait du français, pour la première fois dans l'histoire du Québec, la langue officielle au Québec.

Il aurait été bon de rappeler également que ce projet de loi soulignait d'une façon non équivoque la prééminence du français et le rang que nous voulions accorder sans aucune équivoque au français. Nous avons réussi à le faire dans le projet de loi 22 tout en respectant, comme il se doit, les droits historiques de la minorité anglophone. Nous l'avons fait en mettant en avant cette préoccupation qui était la nôtre de la priorité du français, du français partout, et dans le monde de

l'administration et dans le monde des affaires et dans le monde du travail et dans l'étiquetage et dans l'affichage, etc.

Je dis que ce gouvernement aurait été mieux inspiré s'il avait apporté une contribution très positive en amendant cette loi qui est encore la loi du Québec jusqu'à bientôt. Il a préféré se donner une sorte de paternité par une loi complètement nouvelle, mais une loi ou un projet de loi, jusqu'à maintenant, qui comporte des réserves que nous devons exprimer même si nous savons que, dans quelques minutes ou dans quelques heures, nous aurons à voir cette loi être la loi du Québec.

Ce projet de loi a pour objet d'assurer la prééminence du français dans la législation et la justice, l'administration publique et les organismes parapublics, dans le monde du travail, du commerce et des affaires ainsi que dans celui de l'enseignement.

M. le Président, depuis le moment du dépôt du livre blanc sur la langue française jusqu'à ce jour, c'est-à-dire au moment où nous étudions en troisième lecture le projet de loi 101, le Québec est confronté avec ce projet de loi linguistique que j'avais qualifié, dès la deuxième lecture, d'inutile, excessif. J'avais même dit qu'il était hypocrite. J'avais expliqué pourquoi. J'avais dit qu'il était séparatiste, possiblement anticonstitutionnel et comportant sans doute des coûts incalculables sur le plan économique et sur le plan social.

De toute évidence, le gouvernement est le premier à craindre les effets d'un pareil projet de loi. Pour les semaines qui suivront on a annoncé le blitz. On aura à expliquer aux Québécois, alors que le Québec connaît des difficultés économiques considérables, pourquoi on a décidé de consacrer la majeure partie de son temps depuis l'accession au pouvoir à faire adopter par l'Assemblée nationale un projet de loi comme celui-ci, aussi inutile et excessif et auquel on aurait pu fort bien substituer une série d'amendements au projet de loi no 22, tout en respectant les droits des uns et des autres.

De toute évidence, M. le Président, loin de favoriser l'émergence d'une authentique solidarité entre tous les Québécois, ce projet de loi, malheureusement, ne réussira — et j'espère que je me trompe, je l'espère en toute honnêteté — qu'à diviser les Québécois entre eux. Il faut bien comprendre qu'ici nous sommes à l'Assemblée nationale dans un climat relativement serein. Mais lorsqu'on arrivera à mettre en application certaines dispositions de cette loi, avec des citoyens dans un milieu donné, on aura peut-être des surprises que je ne souhaite pas, mais que je dois cependant évoquer, sans sûrement vouloir que le temps me donne raison.

Je dis que cela réussira peut-être à diviser et entraîner des injustices flagrantes. Dans le journal Le Soleil d'hier, en manchettes, sur huit colonnes, on pouvait déjà lire: Bill 101: 25 policiers dépêchés à Fort Chimo.

Je comprends que ce n'est pas par cette manchette qu'on peut déterminer immédiatement ce que sera l'application d'un projet de loi comme celui-là, mais tout de même, c'est assez surpre- nant. C'est peut-être le début d'un temps nouveau. J'espère que ce n'est pas le début d'un temps d'intolérance et d'injustice. Je ne voudrais pas voir un projet de loi qui isolerait le Québec. Je ne voudrais pas être obligé de conclure que, parce qu'on ne peut plus compter sur son gouvernement, il faudra maintenant que ce soient les Québécois eux-mêmes qui prennent individuellement la responsabilité de continuer de faire du Québec cette société ouverte et accueillante qu'il a toujours été.

Je voudrais, à cette étape décisive de l'adoption par cette Assemblée d'un tel projet de loi, dire à tous ceux qui, au Canada et à l'étranger, sont des amis du Québec que ce projet de loi, dans son esprit et dans ce que nous avons décrit comme étant de la mesquinerie, est aux antipodes de ce que veulent les, Québécois et sûrement l'immense majorité de ceux-ci. Je voudrais leur dire qu'il se trouve toujours au Québec — et j'ai la conviction qu'il s'en trouvera de plus en plus — des Québécois qui continueront de témoigner de ces valeurs d'ouverture et d'accueil qui sont depuis toujours inscrites dans la tradition de notre peuple. Ces Québécois, j'en ai la conviction, veulent, bien sûr, que le Québec français existe, qu'il continue de s'affirmer avec de plus en plus de vigueur à l'intérieur du Canada.

J'entendais le premier ministre parler tout à l'heure de l'affirmation, mais une affirmation qui doit s'arrêter avant qu'on attaque ou qu'on brime les droits des minorités. Je suis convaincu que le premier ministre pense cela. Je puis lui en rendre le témoignage. Je le connais depuis assez longtemps pour savoir qu'il n'y a pas chez lui de ces sentiments qui nous inquiètent quant à l'application de ce projet de loi, parce que ce projet de loi contient des germes qui permettent justement une application mesquine et intolérante. Ces Québécois veulent que ce Québec français existe tout en étant une société qui accueille avec ouverture et générosité tous ceux des autres horizons culturels qui choisissent de venir ici partager avec nous notre condition de Québécois et de Canadiens.

Le projet de loi 101 pourrait être considéré comme un geste de repli et d'abandon, et si c'était le cas et si c'était ainsi qu'il était perçu au Québec, les Québécois ne pourraient y souscrire.

M. le Président, ce projet de loi 101 n'est certainement pas cet acte de générosité dont a si souvent parlé le premier ministre lorsqu'il évoquait les droits historiques et légitimes de la minorité anglaise du Québec. Je pense en particulier à une citation que le député de Jean-Talon a faite hier relativement à des déclarations du premier ministre et qui remontaient à 1969. La façon avec laquelle le premier ministre abordait cette question très délicate et, comme il le dit, souvent explosive, n'est pas répétée dans l'esprit qui semble se dégager de ce projet de loi. On pourrait dire: Le premier ministre n'était pas sincère. Non, je ne le crois pas; je pense qu'il était sincère, mais je pense qu'il a dû céder devant les pressions de l'aile plus radicale de son parti. Au moment où cette Assemblée s'apprête, hélas! à adopter un tel projet de loi, j'ai encore en mémoire la déclaration

du premier ministre lors de l'ouverture de la session lorsqu'il disait, en parlant de la charte du français au Québec: "Cette loi devra d'abord être une affirmation claire, vigoureuse et sans détour de la primauté absolument normale de la langue française en territoire québécois, mais elle devra en même temps refléter la confiance en soi et l'esprit de tolérance adulte d'une nation qui sait aujourd'hui qu'elle n'a pas besoin de former un ghetto pour s'affirmer et s'épanouir. Aussi— poursuivait le premier ministre — pour ces minorités actuelles de notre peuple qui sont d'autres souches et qui ont conservé ou adopté l'anglais comme langue principale, la loi devra également, avec sérénité et pourquoi pas avec générosité, leur permettre de maintenir à l'école et ailleurs leur propre identité".

De quelle confiance en soi s'agit-il, M. le Pré-'sident, lorsqu'on a ainsi recours à certains artifices et à tous les pointillismes imaginables pour s'assurer que ceci ou cela se fera bien en français? De quel esprit de tolérance adulte s'agit-il, lorsque l'on invoque, ainsi qu'on le fait, les injustices passées faites ici, au Québec, ou dans les autres provinces canadiennes, aux groupes francophones pour justifier ce qui pourrait être "de nouvelles injustices" que l'on s'apprête à commettre à l'endroit de plus d'un million de Québécois? De quelle tolérance adulte s'agit-il lorsqu'on pourrait possiblement condamner au chômage les travailleurs occasionnels du gouvernement parce qu'ils ne satisferaient pas aux exigences linguistiques qu'on leur impose? Et la tolérance dont il s'agit, de quelle sérénité s'agit-il encore, lorsque l'on a rejeté ainsi avec autant d'arrogance et, devrais-je dire, de mépris les propositions de 326 éminents Québécois francophones qui ont osé imaginer dire à ce gouvernement leur désaccord? De quelle sérénité s'agit-il lorsque, pour toute réponse, on a recours à l'injure en les accusant d'être des inféodés de l'establishment anglo-saxon? De quelle générosité, enfin, s'agit-il, lorsque l'on voit qu'à l'endroit de la minorité on mesure au compte-gouttes les droits de la langue, à l'Assemblée nationale, devant les tribunaux, dans les institutions de santé et de services sociaux, dans le monde du travail, des affaires et du commerce? De quelle générosité s'agit-il lorsque l'on subordonne la reconnaissance de droits des Canadiens de langue anglaise — qui viendront s'installer au Québec, dans leur propre pays — futurs Québécois, aux aléas d'une conférence interprovinciale?

Petit à petit, tout au long du débat linguistique que nous venons de vivre, le premier ministre lui-même a répondu à ces questions lorsqu'il disait, en rappelant son option indépendantiste dans une conférence de presse le 28 avril 1977, et je cite le Devoir du 29 avril 1977: "J'ai déjà dit à certains membres du parti qui sont trop intensément préoccupés du moindre détail de la protection linguistique que c'était comme s'ils étaient résignés à rester provinciaux à jamais. Si tel est le cas, aussi bien ériger un mur de papier et de règlements autour du Québec pour assurer cette protection linguistique."

Face au texte actuel du projet de loi 101, on peut certainement et légitimement poser au premier ministre la question de savoir s'il a été bien compris des membres de son parti, si ce n'est pas eux, en fin de compte, qui ont imposé au premier ministre leurs vues et si le projet de loi 101 n'est pas, en fait, ce mur de papier et de règlements que l'on veut ériger autour du Québec. Le 19 mai 1977, le premier ministre encore déclarait au journaliste Gilles Lesage, du Soleil, en se référant à la clause-Québec défendue par le ministre d'Etat au développement culturel qu'il se posait toujours des questions concernant la langue d'enseignement et qu'il n'écartait pas des adoucissements de dernière heure.

Je cite le premier ministre: "Nous voulons une nouvelle association avec le reste du Canada. Le Québec n'aura pas de mur de Berlin autour de ses frontières ".

En dépit de l'improvisation des accords de réciprocité, il semble bien que d'autres que le premier ministre se sont chargés d'ériger sans lui ou avec lui, nous ne le savons pas, ce mur de Berlin linguistique dont a parlé le premier ministre.

M. le Président, lorsqu'on prend connaissance de ce que contient aujourd'hui le projet de loi 101 et que l'on se réfère aux engagements répétés du premier ministre d'apporter des amendements substantiels au projet linguistique du gouvernement, une question se pose. Ce n'est pas avec plaisir que je la pose, mais je dois me poser cette question: Qui dirige, qui mène ce gouvernement?

M. le Président, que contient donc ce projet de loi 101 que l'Assemblée s'apprête à voter? Ce projet de loi exprime, à mon avis, un entêtement évident, et qui a paru évident à tous les membres de la commission parlementaire d'une façon particulière, entêtement dont a fait preuve le ministre d'Etat au développement culturel depuis le dépôt du livre blanc, malgré les exhortations publiques du premier ministre, malgré les représentations nombreuses et répétées des groupes et des individus qui ont présenté mémoire sur mémoire à la commission parlementaire et malgré les efforts responsables que l'Opposition officielle a faits en cette Chambre et que d'autres Oppositions, également ont faits en commission et en Chambre pour tenter d'amener le gouvernement à faire preuve de plus de justice, d'équité et de clairvoyance. Qui en cette Chambre pourra soutenir avec sérieux que le gouvernement s'est montré réceptif aux représentations des groupes et des individus qui ont pris la peine de soumettre des mémoires à la commission parlementaire?

Je voudrais simplement souligner ici, en considérant le contenu présent du projet de loi no 101, les appels de groupes aussi responsables que ce groupe que j'ai évoqué tout à l'heure de 326 éminents Québécois francophones, celui du Positive Action Committee et celui des autochtones. Qu'est-ce que l'on retrouve de tout cela dans le présent projet de loi 101? Est-ce que l'on peut vraiment dire que ces groupes et tous les autres qui ont fait l'effort de présenter des points de vue sérieux ont aujourd'hui l'impression d'avoir été accueillis avec ouverture de la part du gouvernement? Poser la question, c'est y répondre.

De la même façon, alors que l'Opposition officielle s'est refusée à suivre l'approche stérile et négative qui avait été celle du Parti québécois au moment de l'adoption de la loi 22, est-ce que l'on peut dire, en considérant l'état actuel du projet de loi 101, que le gouvernement a vraiment permis aux parlementaires d'apporter une contribution positive à l'étude de ce projet de loi?

La commission parlementaire a étudié près de cinquante articles. Nous avons présenté environ 80 amendements, même plus que cela. Quant aux amendements relatifs au chapitre de la langue d'enseignement, un seul a été accueilli favorablement, celui concernant les handicapés.

Comme le rappelait ma collègue, le député de L'Acadie, il aura fallu à l'Opposition un débat de cinq heures pour convaincre le gouvernement d'un tel amendement, alors que tout ce que nous avons en réalité obtenu, ce n'est qu'un engagement plutôt moral du gouvernement. De toute évidence, c'est avec un hermétisme absolu que le gouvernement a mené, du commencement jusqu'à la fin, la discussion du projet de loi no 101.

Il faudrait retourner à ce que disait, il y a un instant, le premier ministre: Attention à cette possession tranquille de la vérité qui pourrait tellement rapidement se transformer en une arrogance, arrogance qui est déjà ici.

M. le Président, une seule suggestion de l'Opposition a été, en fait, retenue par le gouvernement, dans une autre partie de ce projet de loi, cela a été d'accepter de créer dans le projet de loi, et non pas par l'initiative du gouvernement, la commission d'appel prévue à l'article 79. Sur tout le reste, et en particulier au chapitre de la législation et de la justice et de l'administration, les amendements que nous avons proposés ont tous été rejetés alors qu'ils visaient essentiellement non pas à embarrasser le gouvernement, mais bien plutôt à faire en sorte que le projet de loi no 101 reflète vraiment la réalité vécue du Québec et que soient fermées toutes portes à l'injustice et à la discrimination que comporte, hélas! toujours le projet de loi no 101. On se rappellera l'insistance que nous avons apportée à cette question des jugements pour la protection du justiciable. On a fait passer avant la justice des préoccupations qui n'aidaient pas à la promotion du français, qui avaient comme effet, comme perception, du moins, de brimer les droits d'une des communautés.

Quand je dis d'une des communautés, je reviens au premier mot du premier ministre, lors de son allocution, lorsqu'il reconnaissait les deux communautés humaines qui forment le Québec. Ce sont les principes que nous avons toujours défendus dans l'étude de ce projet de loi. C'est pour cela qu'on a dit que le projet de loi était hypocrite. D'abord, il fallait reconnaître l'existence, comme l'a fait le premier ministre — mais il l'a fait à la troisième lecture, que voulez-vous — si on avait compris le message du premier ministre, de deux communautés humaines, deux grandes communautés linguistiques. C'est cela qui était à la base même de notre philosophie et de notre approche dans la discussion du projet de loi no 101.

Le projet de loi no 101 n'écarte plus l'application de la Charte des droits et libertés de la personne, le premier ministre l'a rappelé. L'Opposition officielle a mené à cet égard un combat de tous les instants. Elle a réussi heureusement à faire retraiter le gouvernement sur la position absolument indéfendable qu'il avait adoptée. De même, nous avons pu faire sauter du préambule du projet de loi une disposition qui niait le droit des citoyens québécois non francophones de prétendre être, eux aussi, de vrais et authentiques québécois.

Le simple fait que nous ayons eu à mener des luttes de cette nature jour après jour et des semaines de temps simplement pour faire reconnaître le statut de Québécois à tous les Québécois, cela vous donne une idée assez juste du degré d'ouverture d'esprit de ce gouvernement.

Il n'en reste pas moins que, malheureusement, le projet de loi no 101 contient encore de nombreuses dispositions qui limitent les droits et libertés individuelles des Québécois. Je rappelle, à cet égard, l'avis de la Commission des droits de la personne qui demandait au gouvernement d'inclure dans son projet de loi des éléments de souplesse et des mesures transitoires à l'application de sa loi. Je rappelle les recommandations de la commission en ce qui concerne le droit des individus membres de la minorité anglophone de pouvoir communiquer entre eux dans leur langue, de s'adresser dans leur langue aux tribunaux, à l'administration et aux organismes parapublics et de recevoir une réponse dans cette langue. Toutes sortes d'explications nous ont été fournies à cet égard pour rejeter les amendements que nous avons proposés. Ces explications témoignent sûrement soit d'un hermétisme absolu ou d'une mesquinerie. C'est illustré brutalement même — lorsque j'ai parlé d'un projet de loi hypocrite — par cette hypocrisie dont le gouvernement fait preuve en employant continuellement le vocable "une autre langue" au lieu de le dire clairement, et en toute transparence, comme l'a dit au tout début de ses remarques le premier ministre lorsqu'il a parlé des deux grandes communautés humaines au Québec, les deux communautés linguistiques française et anglaise. Pourquoi ne pas dire clairement qu'il s'agit de la langue anglaise, qui est la langue de plus d'un million de Québécois? Pourquoi cette pudeur? C'est de l'hypocrisie, je suis obligé de le dire. Que la loi, que le texte le dise.

Nous avons entendu un discours du premier ministre en troisième lecture qui indiquait une ouverture d'esprit qui l'honore, mais, diable, ce n'est pas ce que nous adoptons en troisième lecture, c'est un texte de loi. Je rappelle enfin, toujours en me référant à l'avis de la Commission des droits de la personne, les recommandations particulières de cette commission en ce qui concerne la langue de la justice et des tribunaux, la langue du commerce et des affaires, la langue de l'affichage et, d'une façon générale, la trop grande discrétion accordée aux organismes administratifs de contrôle, de surveillance et d'enquête créés par cette loi.

II restera donc aux Québécois qui se sentiront brimés dans leurs droits individuels par la loi 101 de se prévaloir des dispositions de la Charte des droits et libertés de la personne pour obtenir une justice qu'un gouvernement aurait pu facilement prévoir, mais qu'il a préféré refuser jusqu'à la fin.

Au chapitre de la langue d'enseignement, le projet de loi 101 renferme toujours des dispositions qui constituent ni plus ni moins que du séparatisme linguistique, dans la mesure où, contrairement aux promesses et engagements formels du premier ministre, le gouvernement élève autour du Québec une barrière linguistique, pour reprendre l'expression employée par un journaliste de la prestigieuse revue américaine Business Week.

Tout a, pour ainsi dire, été dit à ce sujet. Le premier ministre a paru se battre pour empêcher cela. Nous ne pouvons que regretter qu'il se soit avéré incapable d'imposer ses vues à l'aile radicale de son parti. J'ai évoqué au début de mes remarques le fait que le présent gouvernement était absolument incapable, ou paraissait l'être du moins, de s'attaquer aux vraies priorités du Québec qui, à notre sens, sont essentiellement d'ordre économique. On connaît le taux de chômage actuel du Québec et on vient d'apprendre qu'au mois de juillet aucune construction commerciale et industrielle n'a été entreprise dans le territoire de la Communauté urbaine de Montréal. Comment, dans un tel contexte, ne pas évoquer ici l'insouciance et l'irresponsabilité d'un gouvernement qui a toujours refusé d'engager une discussion sérieuse autour du problème crucial des conséquences économiques et sociales d'un projet de loi linguistique aussi dangereux et souvent injuste.

Il est d'ores et déjà évident que le projet de loi 101 portera au caractère international d'une ville comme Montréal un coup très dur. On a souligné dans de nombreux milieux que le projet de loi 101 priverait Montréal de l'implantation de nombreux sièges sociaux et que des services entiers de ceux-ci qui y sont présentement seront transportés ailleurs. La seule réponse que l'on a toujours donnée à ce problème crucial, c'était qu'il s'agissait là de chantage. Que de cris d'indignation n'a-t-on pas lancés à ce sujet! Comme si ces cris pouvaient changer une réalité pourtant bien réelle. Or, voilà que dans le dernier tournant, d'une façon tellement plus hypocrite que transparente, on semble reconnaître que le problème existe. Presque à la cachette, au milieu d'une liasse d'amendements mineurs, on amène des adoucissements pour les sièges sociaux, qui s'inspirent de l'expérience acquise en vertu de la loi 22. Ces adoucissements seront-ils suffisants pour changer vraiment les choses?

Est-ce que l'on peut sérieusement soutenir que le comportement du gouvernement à cet égard est de nature à inspirer la confiance, lui qui a persisté jusqu'à la fin à nier l'existence d'un problème?

M. le Président, je pourrais terminer à peu près dans trois minutes si on me le permettait.

M. Burns: D'accord.

Le Président: II y a consentement.

M. Levesque (Bonaventure): Pour ne pas avoir à revenir, trois à cinq minutes, je vais essayer de terminer le plus tôt possible. Est-ce qu'on peut sérieusement soutenir que le comportement du gouvernement à cet égard est de nature à nous inspirer la confiance nécessaire? Est-ce que l'on peut sérieusement soutenir que ces aboutissements ultimes apportent une réponse quelconque au problème de la mobilité du personnel dans les sièges sociaux alors que le chapitre de la langue d'enseignement demeure inchangé, sauf pour des changements transitoires et temporaires? Qu'est-ce que ces aboutissements apporteront de concret face à l'hypothèque toujours là du projet d'indépendance ou du référendum pour ce gouvernement, projet d'indépendance et de séparation? On verra bien.

M. le Président, nous savons tous que les grandes entreprises industrielles, commerciales et financières disposent de plus de moyens pour s'adapter aux conditions nouvelles. Nous aurions souhaité que le gouvernement considère également l'impact de sa législation sur l'avenir des petites et moyennes entreprises québécoises. Ce sont le plus souvent des entreprises familiales, des commerces et des industries qui emploient 10, 15, 25, 50 employés. Ce sont des entreprises dont le crédit est limité, dont les marchés ont été durement conquis et qui demeurent toujours bien fragiles. Dans quelle position seront placées ces entreprises lorsque les grands inquisiteurs de l'intégrité linguistique se présenteront à elles pour leur dicter dans un délai donné ce qu'elles doivent faire pour satisfaire aux prescriptions de la loi 101? Je ne comprends absolument pas que le gouvernement à cet égard fasse preuve d'autant d'irresponsabilité alors que le processus de la francisation des entreprises était déjà bien en marche à la suite de l'adoption de la loi 22 qui, on le sait, prévoyait une approche beaucoup plus réaliste et raisonnable à cet égard et qui avait déjà permis de réaliser, avec le concours en particulier du député de Marguerite-Bourgeoys, alors ministre responsable de la mise en vigueur du projet de loi 22, relativement à la langue des affaires, qui avait déjà permis de réaliser, dis-je, sur le plan de la promotion du français des progrès remarquables et incontestables.

Ce que je reproche au gouvernement c'est que, tout au long de ce débat linguistique, il s'est toujours refusé à aborder franchement et directement le problème crucial de l'impact de sa loi linguistique sur la vie économique du Québec. On a même eu à l'endroit des milieux économiques une attitude indifférente, pour ne pas dire négative, alors qu'on s'est employé de façon abondante à littéralement inonder le débat d'une pluie de données démographiques.

Pourquoi le gouvernement s'est-il ainsi refusé à fournir à l'Assemblée nationale et à l'opinion publique les informations qu'il pouvait obtenir sur les conséquences de sa loi linguistique sur le plan du progrès et du développement de l'économie québécoise?

Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas eu ce minimum de transparence pour, au moins, donner l'impression qu'il se préoccupait de cet aspect de la question et qu'il faisait les efforts nécessaires pour en connaître les implications?

Nous savons bien que ce gouvernement, depuis neuf mois, est profondément négligent en ce qui concerne les problèmes économiques du Québec. Nous ne pensions jamais qu'il pousserait cette négligence au point de se désintéresser de ce qui va réellement arriver dans les milieux économiques à la suite de l'adoption du projet de loi 101.

Or, M. le Président, s'il y a un problème qui devrait préoccuper au plus haut point le présent gouvernement, pourtant c'est bel et bien celui de la présente situation économique. Si le gouvernement est d'avis qu'il y a un coût économique à l'adoption d'une loi linguistique, eh bien qu'il le dise et surtout qu'il ait le minimum d'honnêteté nécessaire pour chercher à savoir quel est le coût et qu'il ait un minimum de transparence et de courage pour en informer la population. Une chose est certaine, c'est que le moment choisi par le gouvernement pour faire adopter une loi aussi générale dans le domaine de la langue, s'il était peut-être politiquement bien choisi, est sans conteste, sur le plan économique, le pire moment qu'on pouvait choisir.

En terminant, M. le Président, je voudrais adresser, bien sincèrement, mes remerciements à nos quatre collègues de l'Opposition officielle et aux autres qui, de temps à autre, les ont rejoints, qui, tout au long de ce débat, ont accompli un travail vraiment extraordinaire. J'ai la conviction qu'ils sont même parvenus, grâce à leur ténacité et à leur sérieux, à se mériter l'estime de nos collègues en cette Chambre qui ont travaillé avec eux au niveau de la commission parlementaire de l'éducation.

M. le Président, le Parti libéral du Québec a été le principal artisan de la construction du Québec moderne. C'est le Parti libéral qui a fait du français la langue officielle du Québec. Nous sommes donc pleinement acquis à l'idée de la sauvegarde et de la promotion du caractère fondamentalement français du Québec. Nous croyons que c'est là un impératif tout à fait normal et légitime. Nous croyons que ce Québec français non seulement doit exister pour les Québécois eux-mêmes, mais encore parce qu'il constitue, dans une perspective canadienne, un apport précieux et inestimable à l'affirmation d'une personnalité canadienne authentique dans l'univers culturel nord-américain. Notre désaccord fondamental avec le gouvernement sur la question linguistique, c'est que nous croyons fermement que tous les Québécois, sans distinction, sont tous des citoyens à part entière du Québec et que l'Etat ne peut s'arroger des pouvoirs aussi excessifs et arbitraires que ceux que l'on retrouve dans le projet de loi no 101 pour ainsi compromettre l'équilibre fondamental qui doit exister entre les libertés individuelles et les libertés collectives dans une société qui a à coeur de servir l'idéal démocratique et de se développer avec confiance et en mainte- nant l'ouverture d'esprit qu'appelle aujourd'hui l'interdépendance de plus en plus grande et féconde des peuples et des nations de la terre.

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Biron: M. le Président, je voudrais proposer la suspension du débat à 15 heures cet après-midi.

Rapport du Conseil scolaire de l'île de Montréal

M. Burns: D'accord, M. le Président. Avant de proposer — en fait, je n'ai pas besoin de le faire, c'est automatique à ce moment-ci — je m'étais engagé ce matin, envers le député de D'Arcy McGee, à lui donner une réponse relativement au rapport du conseil scolaire de l'île de Montréal. Après toutes les vérifications que j'ai prises, il me paraît, et il paraît également aux conseillers juridiques qui m'ont donné les renseignements, qu'il n'y a pas d'obligation — en vertu du chapitre 60 des Lois de 1975 — de la part du ministre de l'Education de déposer le rapport du conseil de l'île. Cependant, il n'y a pas d'objection, de la part du ministre, à déposer ce rapport.

D'autre part, comme cela n'était pas prévu à ce moment-ci, nous ne sommes pas en mesure de le déposer immédiatement. J'ajoute également que ce rapport, étant donné qu'il a été fait par le Conseil scolaire de l'île de Montréal, est déjà public. Maintenant, si vous voulez le formaliser quant au dépôt à l'Assemblée nationale, on m'informe que le ministre de I Education n'a pas d'objection, dans les meilleurs délais, à le déposer.

Quant à la deuxième partie de la question du député de D'Arcy McGee, on m'informe que les hauts fonctionnaires du ministère de l'Education sont actuellement — et j'ai parlé à nul autre qu'au sous-ministre lui-même qui me l'a confirmé, M. Pierre Martin — à faire l'analyse du document et que le ministre indiquera également dans les meilleurs délais exactement quelles orientations le gouvernement entend suivre à la suite de l'analyse qui sera faite et des conseils qui seront donnés par les hauts fonctionnaires du ministère.

En tout cas, je m'étais engagé à répondre à cette question du député de D'Arcy McGee; j'espère que cela répond tout au moins partiellement à sa question.

Retrait du projet de loi de la ville de Gatineau

M. Burns: Deuxièmement, je m'étais engagé à tenir un certain nombre de consultations relativement à la demande trois fois répétées par le député de Gatineau quant au projet de loi privé qui apparaît à l'article e). A la suite de ces consultations, je suis en mesure, si la Chambre me permet de le faire, de proposer que l'article e) du feuilleton soit radié. D'accord?

M. Gratton: Complètement d'accord.

Le Président: Adopté.

La Chambre suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 17)

Reprise de la séance à 15 h 7

Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Le chef de l'Union Nationale, vous avez la parole.

Travaux parlementaires

M. Charron: Je m'excuse, vous pourrez toujours reprendre les applaudissements à un autre moment. Avec le consentement du chef de l'Union Nationale, je voudrais informer les membres de l'Assemblée de l'allure des travaux pour cet après-midi qui, j'espère, est le dernier avant l'ajournement de la session. Nous allons poursuivre, comme prévu et comme engagé à l'appel du leader parlementaire ce matin, l'étude finale du projet de loi no 101. Par la suite, nous procéderons à la troisième lecture des projets de loi qui doivent être adoptés avant l'ajournement de la session. Si nos collègues de la commission de la présidence du conseil chargés d'étudier le projet de loi no 2 ont à ce moment achevé leurs travaux, nous enchaînerons immédiatement par la prise en considération du rapport de ces collègues et la troisième lecture du projet de loi no 2. Cela achèvera la saison estivale de notre Assemblée nationale.

Une Voix: Première période.

M. Charron: Par contre, si nos collègues n'ont pas achevé les travaux au moment où nous aurons terminé ce qui nous concerne, nous suspendrons momentanément les travaux de l'Assemblée et, sur convocation des leaders dans chacun des groupes, nous reviendrons par la suite pour achever à l'Assemblée nationale...

M. Proulx: Excellent.

Projet de loi no 101 Troisième lecture (suite)

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, j'allais saluer le seul député libéral en Chambre, le député de Maskinongé; je crois que je vais le faire. C'est peut-être parce qu'il a manqué quelques heures un bon après-midi d'été.

M. le Président, c'est un Québécois, un vrai Québécois, fier de l'être et conscient de la page d'histoire qui s'écrit aujourd'hui, qui se lève en tant que député de Lotbinière et à titre de chef d'un parti politique authentiquement québécois qui il y a 41 ans aujourd'hui, était élu pour la première fois à l'Assemblée nationale, l'Assemblée législative à l'époque, pour vous dire sa volonté de vivre dans un Québec français, dans un Québec aussi essentiellement français que l'Ontario est anglais.

M. le Président, plus jamais le Québec ne doit être celui du bill 63. Plus jamais le Québec ne doit être celui du bill 22.

Jamais non plus le Québec ne devrait être celui de l'intransigeance ou de l'intolérance. L'Union Nationale, riche des leçons de son passé, lucide devant l'avenir, se loge dans un parti-pris pour la prééminence du français au Québec, a l'enseigne de ceux qui, au Québec, affichent le français d'abord. Nos pères, nos aïeuls ont trop donné d'eux-mêmes à ce coin de terre française d'Amérique pour que nous ayons peur, aujourd'hui, de donner un solide coup de barre en avant dans la réforme linguistique qui s'impose au Québec. Trop de nos frères, ailleurs au Canada ou même au sud du 45e parallèle, attendent de nous que nous contribuions au rayonnement de la cause du fait français en Amérique pour que nous ayons peur aujourd'hui de nous affirmer, la tête haute, et en laissant parler notre coeur, en tant que fils et héritiers d'une culture française, en tant que légataires de l'héritage d'un des deux peuples fondateurs de notre pays.

Il n'est pas de fin de session, il n'est pas de rouleau compresseur, il n'est pas de guillotine qui puissent nous faire oublier un seul instant que nous avons tous le devoir, ici, en cette enceinte parlementaire, et, de quelque milieu culturel, social ou démocratique que nous soyons, de faire du français la langue du vécu dans toutes les sphères d'activité au Québec. Tous les gens d'ici, francophones, anglophones, allophones, Amérindiens et Inuit doivent vivre dans l'harmonie et la solidarité, le défi collectif qui est nôtre, la mission qui est celle du Québec, à savoir le défi et la mission d'être essentiellement français. Plus jamais devra-t-il être nécessaire à un Québécois de se taire en tant que Québécois, de se taire en tant que francophone, pour avoir sa place au soleil chez nous, au Québec, au Canada.

L'Union Nationale trouve normal, pertinent et opportun qu'un gouvernement québécois, qu'un Parlement québécois légifère à ce moment précis de notre histoire en une matière aussi vitale que celle de l'avenir collectif du Québec et des Québécois car c'est bien de cela qu'il s'agit quand on légifère chez nous sur une matière comme la langue; la langue véhicule de communication, la langue véhicule de pensée, la langue véhicule de vie.

Arrêter une loi sur la langue qui veuille vraiment dire quelque chose, c'est dessiner une réforme non seulement culturelle, mais sociale et économique. Bien plus qu'à une loi, c'est à un changement d'attitude que sont appelés à obéir tous les Québécois à part entière que sont tous ceux, de quelque origine ethnique qu'ils soient, qui vivent au Québec. Un réel changement d'attitude de tous les Québécois. Plus jamais, M. le Président, le Québec ne doit être le même. Au moment où tous les yeux au Canada sont tournés vers nous aujourd'hui, au moment où toutes les oreilles au Canada sont tendues vers nous, nous devons avoir le courage de dire: Vive le Québec français et vive un Canada qui fasse davantage place au français!

Il nous est loisible et possible de parler ainsi sans calcul politique aucun, sans sentiment revanchard aucun, imbibés du seul sentiment, en tant que Québécois, de vouloir, en tant qu'individus et en tant que collectivité, dorénavant être bien dans notre peau de francophones. C'est dans cet esprit de gens d'ici, c'est dans cet esprit de vivre à deux le Canada, dans une recherche donc de l'égalité linguistique que l'Union Nationale a abordé le futur défunt projet de loi no 1 et l'actuel projet de loi no 101.

On voudra bien noter ici que tous les membres du caucus de l'Union Nationale et en particulier ceux d'entre eux qui ont siégé au sein de la commission de l'éducation, des affaires culturelles et des communications... Ici, je veux rendre un hommage particulier aux deux représentants de l'Union Nationale au sein de cette commission qui ont fait un travail magnifique et formidable pour bien présenter les différents amendements, les différentes améliorations que notre parti voulait voir apporter par le gouvernement au bill 101.

Je rends donc hommage au député de Mégantic-Compton pour son excellent travail et je veux aussi rendre hommage au député de Gaspé. Mme le Président, je veux aussi rendre un hommage particulier à notre personnel de soutien, personnel de recherche, collaborateurs qui ont adopté tout au long de l'étude du projet de loi une attitude positive, constructive et un comportement digne du sérieux du sujet de la langue, attitude et comportement que tous les Québécois, de quelque option politique qu'ils soient, applaudiront sans hésitation, attitude et comportement que tous les observateurs de la scène politique ont déjà pu apprécier, attitude, comportement et performance, notamment par notre fameux cahier bleu, qui nous a valu de faire accepter un certain nombre, quoique insuffisant, de nos propositions d'amendements par les ministériels.

L'Union Nationale, Mme le Président, a reconnu dès le départ et reconnaît encore aujourd'hui que des dispositions législatives peuvent et doivent être prises pour privilégier le français au Québec. L'Union Nationale admet qu'une charte linguistique au Québec doit reconnaître explicitement dans des articles déclaratoires des droits linguistiques fondamentaux aux Québécois francophones.

L'Union Nationale, sans hésitation aucune, dit oui, toute personne a le droit que communiquent en français avec elle l'administration, les services de santé, les services sociaux, les entreprises d'utilité publique, les ordres professionnels, les associations de salariés et les diverses entreprises exerçant au Québec. Oui, Mme le Président, en assemblée délibérante, toute personne a le droit de s'exprimer en français. Oui, Mme le Président, les travailleurs ont le droit d'exercer leurs activités en français. Oui, le consommateur de biens et de services a le droit d'être informé et servi en français. Oui, toute personne admissible à l'enseignement au Québec a le droit de recevoir cet enseignement en français. Plus précisément encore, nous disons qu'en matière de langue de la législa-

tion et de la justice, tout en réclamant la reconnaissance, par souci d'équité et de justice, des besoins et des droits des membres de la communauté anglophone du Québec de recourir dans leur langue à des outils aussi essentiels que la législation et la justice, il faut consacrer ici le statut officiel de la langue française.

En matière de langue d'administration, il n'est que normal et légitime, à la condition que ce ne soit pas complètement exclusif, que nos institutions publiques et parapubliques affichent un visage essentiellement français et assurent à tous les Québécois les services disponibles dans leur langue française.

En matière de langue de travail, il faut établir la prééminence de la langue française dans le monde du travail en donnant aux travailleurs québécois les moyens et les garanties qui leur permettront d'exercer leurs activités en français, de gagner leur pain et celui de leur famille en français. Nous ajoutons, Mme le Président, qu'en matière de langue du commerce et des affaires il nous faut nous prononcer en faveur du français comme langue vécue plutôt que comme seul véhicule de communication. S'il est un domaine, tout en étant bien réalistes dans l'application, dans l'échéancier, où il faut vivre en français, c'est bien celui du commerce et des affaires, c'est bien celui qui, dans les faits quotidiens, va rendre viable crédible et authentique le visage essentiellement francophone du Québec.

En matière de langue d'enseignement, il est important d'avoir une position claire, nette et précise. Pour cela, dans notre programme d'octobre 1976, il est clairement dit que l'Union Nationale reconnaît la prééminence du français au Québec, dans le respect des autres cultures. Il est également dit, compte tenu de la situation sociale qui prévaut au Québec, qu'il faut prévoir l'intégration à la communauté francophone de tous les immigrants non anglophones à venir. Le 16 avril 1977, dans une volonté de clarifier et d'expliciter ce que nous entendions par prééminence de la langue française, nous avons convenu de surseoir à l'application du principe du libre choix de la langue d'enseignement. Cela veut dire concrètement, pour nous, que le francophone n'aura plus la liberté de faire inscrire ses enfants dans une école de langue anglaise et que l'anglophone, qu'il soit déjà au Québec ou qu'il soit un immigrant, conservera, à notre point de vue, le libre choix de se faire instruire dans sa langue ou dans la langue de la majorité.

Mme le Président, nous nous sommes également entendus, le 16 avril dernier, pour que les al-lophones vivant au Québec, s'ils avaient opté pour l'école anglaise, puissent soit y demeurer, y compris leurs frères et soeurs cadets, soit opter pour l'école française.

Cependant, les immigrants non anglophones à venir devraient s'intégrer à la communauté francophone. Donc, pour eux comme pour les francophones, pas de liberté de choix de l'école. Enfin, nous nous sommes déjà engagés, au niveau du chapitre sur la langue d'enseignement, à réclamer et à obtenir, en plus d'une meilleure qualité de l'enseignement de la langue française, des garanties précises pour un enseignement accru et de meilleure qualité: premièrement, de la langue française dans les écoles anglaises, et, deuxièmement, de la langue anglaise comme langue seconde dans les écoles françaises. Là-dessus, à la commission parlementaire, le ministre de l'Education nous a dit qu'il appuyait notre amendement mais qu'il ne pouvait l'inscrire dans le projet de loi 101. Nous le déplorons fortement car, pour nous, il était essentiel que dans un projet de loi de cette importance nous donnions les garanties nécessaires à la population du Québec d'une formation adéquate convenable à tous les enfants du Québec qui étudient dans les écoles du Québec. Là-dessus, nous reviendrons au cours des prochaines sessions pour demander au ministre de l'Education de bien vouloir nous faire connaître clairement dans un texte de loi cette volonté qu'il est venu affirmer à l'occasion de la commission parlementaire qui étudiait le projet de loi 101. Ce que la population du Québec veut, autant en instruction qu'en éducation de langue seconde dans toutes les écoles du Québec, c'est une garantie de la part du gouvernement que cette qualité et cette quantité de la langue seconde, nous l'aurons partout dans toutes les écoles du Québec.

Mme le Président, qu'on se tienne donc pour dit et pour sûr, hier, aujourd'hui et demain, et sur toutes les tribunes, que l'Union Nationale, dans sa politique et dans l'articulation de sa politique, préconise, comme je viens de le démontrer clairement, la prééminence du français au Québec.

Our first and fundamental principle is that the essentially French character of Quebec may become a reality in the everyday life of all Quebecers.

Le ministre d'Etat au développement culturel, à qui je veux bien reconnaître ici des qualités réelles de coeur et d'esprit ainsi qu'une ardeur au travail peu commune perçoit peut-être plus que tout autre combien l'Union Nationale, tout en étant vigilante, marque première d'un parti d'Opposition, a su et sait jouer le rôle que les Québécois attendent d'elle, celui d'une bonne et vraie Opposition québécoise. Là-dessus, j'étais heureux d'entendre le premier ministre nous expliquer sa philosophie d'une politique sur la langue au Québec.

J'aurais aimé entendre le premier ministre, en deuxième lecture, faire part de ses principes à l'Assemblée nationale et spécialement au ministre d'Etat au développement culturel et aux membres du parti ministériel.

J'aurais aimé que le premier ministre puisse imprimer son leadership et sa façon de concevoir une politique de la langue à son gouvernement, à son parti. J'ai été heureux d'entendre sa voix et ses principes, combien plus modérés, qu'il a énoncés ce matin à comparer à ceux que nous avons dans le projet de loi no 101. Là-dessus, je veux aussi ajouter que je me souviens qu'au début de la commission parlementaire qui étudiait le projet de loi no 101, le leader parlementaire adjoint et ministre délégué au Haut-Commissariat à

la jeunesse, aux loisirs et aux sports nous a conviés à un défi de mesurer la qualité de nos amendements, la philosophie de chacun des partis politiques concernant le problème de la langue au Québec, de mesurer notre philosophie et nos amendements à ceux du gouvernement.

L'Union Nationale, à l'époque et encore aujourd'hui, lui a répondu que nous étions prêts, et la preuve est que notre contreprojet d'amendements a été présenté en public, a été présenté au gouvernement, à l'Opposition officielle, et nous avons voulu relever le défi qui nous était lancé par le leader adjoint du gouvernement, nous étions prêts à aller au bout de ce défi pour le relever, mais c'est le gouvernement lui-même qui a changé d'idée, qui n'a pas voulu continuer à mesurer chacun de ses amendements aux amendements proposés par l'Union Nationale dans son livre bleu.

L'Union Nationale n'a jamais eu honte de ses politiques sur la langue et, en fait, nous les avons rendues publiques très tôt dans ce grand débat sur cette question qui préoccupe véritablement la grande majorité de nos Québécois.

Dans l'analyse du projet de loi no 101 qui a été nôtre, dans l'appréciation que nous faisons encore aujourd'hui de la Charte de la langue française, jamais nous n'avons voulu ou ne voulons nous afficher comme le parti des Anglais ou comme le parti des minorités, ni, par ailleurs, comme le parti de la majorité ou des francophones, sachant fort bien que les minorités d'ici sont la majorité ailleurs et que la majorité d'ici est minorité ailleurs. Nous nous identifions, dans le présent débat, comme le parti du bon sens, comme le parti de la justice, comme le parti de l'équité, qualités et vertus dont se réclame à bon droit l'ensemble des Québécois.

Bon sens, justice et équité, voilà incidemment les critères qui nous ont fait, à l'Union Nationale, et ce sans intention de marchandage et sans recherche d'un "bargaining power", appuyer spontanément le principe de la clause de réciprocité que le premier ministre du Québec est allé offrir récemment à ses homologues des autres provinces canadiennes, à St. Andrews, au Nouveau-Brunswick. Le 12 août dernier, avant la conférence des premiers ministres, à Moncton, je disais, et je tiens à le rappeler ici: "Je lance un appel à tous les premiers ministres provinciaux qui seront appelés à se prononcer à St. Andrews sur les accords de réciprocité en matière d'éducation proposés par le gouvernement Lévesque pour qu'ils affirment sans hésitation et avec fermeté leur intention de maintenir intacte leur compétence exclusive dans le domaine de l'éducation et pour qu'ils opposent une fin de non-recevoir au gouvernement fédéral relativement au transfert par les provinces de leurs responsabilités constitutionnelles en ce qui concerne les droits à l'éducation des minorités sur leur territoire." J'ajoutais: "Je demande aussi aux premiers ministres des provinces d'écouter avec ouverture d'esprit les propositions du Québec et d'y penser deux fois avant de les rejeter."

Voilà, Mme le Président, jusqu'où va notre goût du Québec, jusqu'où va notre goût du fait français, jusqu'où va notre engagement pour la primauté du français au Québec, pour le rayonnement du français hors du Québec et pour l'égalité linguistique au Canada. Oui, nous sommes Québécois à la recherche d'une charte linguistique d'ici qui consacre le français langue officielle, langue première, langue prééminente au Québec; à la recherche d'une charte linguistique d'ici, recherche imprégnée de bon sens, de justice et d'équité.

Nous n'avons pas le droit pour autant de nier des réalités d'ici. Nous n'avons pas le droit, par exemple, de nier l'impact d'une mesure législative sur des réalités économiques qui n'ont que faire des tracasseries administratives. Nous n'avons pas le droit, Mme le Président, surtout de limiter l'appellation de Québécois aux seuls francophones d'ici, encore moins aux seuls partisans d'une thèse donnée.

Nous n'avons pas le droit de nier 200 ans d'histoire. Nous n'avons pas le droit de nier formellement et juridiquement l'existence d'une communauté anglophone articulée au Québec, que le premier ministre lui-même se plaît à reconnaître.

Nous n'avons pas le droit, ce faisant, de nier les droits les plus élémentaires d'individus qui, même anglophones, sont et doivent être des Québécois à part entière, pas plus que nous n'avons osé nier les droits antérieurs aux nôtres, ici, des Amérindiens et des Inuit. Nous n'avons pas le droit, ni le mandat, pas encore, de nier l'existence du Canada comme pays des Québécois, ni l'existence du Québec comme province au sein de la fédération canadienne dont nous sommes les premiers, par ailleurs, à reconnaître qu'elle doit être renouvelée dans son essence même.

Aujourd'hui, j'accuse les ministériels de se refuser, dans leur suffisance, à admettre le mauvais impact du projet de loi no 101 sur la vie économique du Québec. Ce que disait le premier ministre ce matin, quant au pays flamand en Belgique, ce n'est pas le fait français qui effraie les investisseurs, et ce ne sera jamais le fait français qui effraiera les investisseurs, c'est l'attitude du gouvernement, c'est une attitude revancharde, c'est une attitude d'entêtement, c'est une attitude mesquine qui peut effrayer les investisseurs. Ce ne sera jamais le fait français qui effraiera les investisseurs qui veulent venir au Québec.

Ici, qu'il me suffise de vous rappeler l'exode des francophones du Québec à la fin des années dix-huit cent lorsque, par milliers, par dizaines de milliers, nos ancêtres laissaient le Québec pour s'exiler vers les Etats-Unis où, là-bas, la langue était la langue anglaise. Si les francophones du Québec partaient en exil, c'est à cause de la situation économique, c'est parce qu'ils voulaient travailler, c'est parce qu'ils voulaient gagner du pain pour mettre sur la table de leur famille; c'est cela qui est important.

Aujourd'hui, j'accuse les ministériels de créer, dans leur arrogance, deux catégories de citoyens au Québec. Aujourd'hui, j'accuse les ministériels

de nier, dans un esprit revanchard, deux siècles d'histoire au Québec.

M. O'Neill: Au contraire, on est fidèle à l'histoire.

M. Biron: Aujourd'hui, je dois accuser les ministériels de ne pas vouloir reconnaître suffisamment, formellement et juridiquement, dans le texte de la loi 101, l'existence pourtant bien réelle, et reconnue par le premier ministre encore une fois ce matin, d'une communauté anglophone bien articulée au Québec. Nous nous serions attendus que l'anglais, plus formellement encore qu'on ne l'a fait, ait davantage droit de cité, au moins dans les quelques municipalités et commissions scolaires dont les administrés sont à majorité anglophone.

Aujourd'hui, je dois accuser les ministériels d'avoir manqué de sens juridique, de justice et d'équité et d'avoir hypothéqué le droit de recours à des outils aussi universels que la justice et l'équité en ne reconnaissant pas, à la langue de la législation et de la justice, domaines intimement reliés, le principe du droit des parties par leur refus, lorsqu'un jugement sera rendu en anglais, d'y accorder le statut de version officielle, même si ce jugement représente la version originale des notes d'un juge.

Aujourd'hui, j'accuse les ministériels, dans l'usurpation qu'ils font du mandat réel qu'ils ont sollicité et obtenu le 15 novembre dernier, de nier la réalité canadienne, de nier même le sentiment majoritaire au Québec en refusant cavalièrement et brutalement à la fois, même tiraillés, l'option Canada au chapitre de la langue d'enseignement. Se refuser à admettre à l'école anglaise les enfants de Canadiens de culture et d'expression anglaises des provinces soeurs du Québec, c'est, premièrement, agir comme si le Québec était déjà séparé du reste du Canada. Quel type de pays fermé sur lui-même est-on en train de dessiner pour le Québec?

Deuxièmement, c'est témoigner d'une peur maladive et anachronique d'être assimilé. Allons donc, comme dirait le ministre de l'Education! Troisièmement, c'est avoir bien peu de foi dans les effets d'entraînement des autres dispositions du projet de loi 101 qui, pourtant, convergent toutes vers l'ultime but d'oeuvrer à la francisation du Québec.

Au total, Mme le Président, j'accuse donc les ministériels de nier des réalités, de ne pas reconnaître toutes les réalités d'ici. Voilà pour notre plaidoyer. Le peuple du Québec, en temps et lieu, jugera. C'est à lui que revient le jugement. On peut tromper les Québécois quelque temps surtout, on peut peut-être tromper les Québécois tout le temps sur quelques points particuliers, mais on ne peut pas tromper les Québécois tout le temps, sur tout. Quant à nous de l'Union Nationale, nous avons un parti pris pour...

M. O'Neill: C'est tellement ce qu'on dit.

M. Biron: ... la prééminence du français au

Québec, je pense avoir été précis là-dessus. Mais la Charte de la langue française est trop loin, à notre avis, d'avoir la nature d'un projet collectif et ne reconnaît pas toutes les réalités d'ici, toutes les réalités du Québec, toute la réalité du Québec. Mes collègues de Mégantic-Compton, de Brome-Missisquoi, de Pointe-Claire, de Richmond, de Nicolet-Yamaska, de Bellechasse, de Gaspé, d'Huntingdon, de Saint-Hyacinthe et celui qui vous parle comme député de Lotbinière et comme chef de l'Union Nationale, nous aurions aimé appuyer un projet collectif sur la langue, un projet qui répondrait véritablement aux aspirations et aux besoins de tout le peuple du Québec. Mais malheureusement, à cause de ce que je vous ai cité précédemment, Mme le Président, nous allons devoir voter, bien à regret, contre ce projet de loi 101 en troisième lecture et dernière étape de son étude.

En terminant, je souhaite de toutes mes énergies qu'à compter de la reprise de nos activités parlementaires à l'automne le gouvernement nous présente en priorité des solutions concrètes au problème no 1 au Québec, qui est l'état actuel de l'économie. Nous voulons du travail vraiment bien mérité pour tous nos Québécois. Il faut répondre à l'aspiration de nos Québécois de pouvoir finalement travailler et faire cesser ces craintes de nos chefs de famille de ne pouvoir travailler et attendre des emplois qui ne viennent jamais.

C'est ça qui est important et nous espérons qu'à la rentrée cet automne nous pourrons apporter des solutions concrètes à ce problème du chômage et du manque d'activité économique au Québec. J'invite, en tant que-chef d'un parti politique typiquement québécois et responsable, tous et chacun des Québécois, de quelque origine ethnique qu'ils soient et quelle que soit leur réaction immédiate à la suite de l'adoption de la loi 101, à agir en tant que citoyens responsables. Loin de braver ou de désobéir à cette loi et pour ne pas ajouter aux nombreux problèmes qu'elle pose ou qu'elle posera, j'invite tous nos concitoyens du Québec à collaborer à sa mise en application en favorisant notamment une rentrée scolaire calme et ordonnée, avec l'espoir qu'un jour le gouvernement actuel comprendra que qui trop embrasse mal étreint.

Mme le Président, c'est cette même fierté qui me faisait commencer cet exposé, fierté d'être Québécois francophone, fierté d'être Canadien de langue et d'origine française et fierté que partout à travers mon pays, à travers l'Amérique du Nord, à travers l'Amérique latine et dans plusieurs pays d'Europe où je suis allé j'ai toujours exprimé librement et fièrement ce fait que je sois de langue et d'origine française, ce fait que je sois un Québécois francophone, ce fait que je sois un Canadien français, c'est cette même fierté, dis-je, Mme le Président, qui m'anime toujours et que je voudrais pouvoir faire rayonner par tous nos Québécois. Partout à travers notre pays, de l'Atlantique au Pacifique, partout où je suis allé...

M. O'Neill: ...

M. Biron: ... j'ai essayé justement que ces

gens que je rencontrais à l'extérieur du Québec puissent m'apprécier comme j'étais, puissent m'aimer comme j'étais, avec ma langue française, avec mon origine française, avec ma fierté de venir du Québec, avec ma fierté de venir du Canada et d'être un Canadien français. C'est cette fierté que je voudrais que tous mes concitoyens du Québec sans exception puissent aussi comprendre réellement et puissent mettre en application partout à travers notre province et notre pays. C'est cette fierté, Mme le Président, qui me fait dire en terminant: Vive le Québec! Vive le Canada!

Mme le Vice-Président: M. le député de Beauce-Sud.

M. Fabien Roy

M. Roy: Merci, Mme le Président. Contrairement à ceux qui m'ont précédé, je serai malheureusement limité à dix minutes, comme le veulent les dispositions de l'article 94 de notre règlement, pour exprimer mon point de vue sur un sujet d'une aussi grande importance, surtout si on considère le stade où en sont rendus nos travaux et où en est rendue l'Assemblée nationale du Québec.

Mme le Président, nous sommes rendus aujourd'hui à la troisième lecture du projet de la Charte de la langue française au Québec. Depuis plus de dix ans, le moins que l'on puisse dire, c'est que le débat sur cette question a fait couler beaucoup d'encre et de salive au Québec, et il n'est pas terminé. Malgré toutes ces discussions et malgré les nombreuses semaines que nous venons de passer sur le projet de loi no 101, je me vois obligé de dire, et ce sans porter aucun jugement sur l'attitude des partis de l'Opposition ou du parti ministériel, que ce projet de loi n'a pas été suffisamment approfondi. Même si le débat a été très long, cela n'aurait pas dû amener le gouvernement à brusquer sa fin, parce que les débats que nous avons ici même à l'Assemblée nationale sont le reflet de la réalité québécoise, que ce soit sur le plan politique, économique ou social.

Si l'Assemblée nationale est divisée sur cette question, c'est que les citoyens du Québec aussi le sont. Le projet de loi actuel, dans sa formulation finale, ne donne pas l'impression au public qu'il a été mûrement réfléchi. Mme le Président, les 60 amendements de dernière heure du Parti québécois sont la preuve de l'incertitude du gouvernement et de ses hésitations sur les modalités à suivre pour atteindre les objectifs fixés.

En effet, sur une question de cette importance, et compte tenu de la situation actuelle du Québec, le gouvernement aurait dû faire preuve de plus de diligence et prendre toutes les mesures nécessaires pour que ce projet de loi soit le plus complet possible. Si tel avait été le cas, nous aurions pu étudier tous les articles de cette loi, même si nous avions été obligés de faire rapport à l'Assemblée nationale et d'en accepter certains chapitres, compte tenu de l'urgence de certaines situations, notamment dans l'éducation, pour tâcher que ce projet de loi puisse être mis en application.

Mais je dis que nous aurions pu étudier tous les articles de ce projet de loi, ce qui aurait eu pour effet d'atteindre un certain consensus indispensable à l'application d'une telle loi. Tel n'a pas été le cas, et le gouvernement risque fort de se retrouver victime de sa propre stratégie, car je ne vois vraiment pas comment, et je le dis en toute sincérité sur le plan pratique, cette loi pourra être appliquée et acceptée intégralement.

Cette difficulté d'application, Mme le Président, on la retrouvera surtout, dans le domaine de la langue des affaires et des entreprises. D'ailleurs, mardi soir dernier, je le rappelle à l'honorable ministre, juste avant la tombée de la guillotine en commission parlementaire, je demandais au ministre d'Etat au développement culturel, parrain du projet de loi, s'il avait étudié le cas des entreprises qui opèrent au Québec, sans que, pour autant, elles aient un quelconque bureau ou place d'affaires au Québec, et qui emploient des travailleurs du Québec dans le territoire du Québec.

Cette situation, on sait très bien qu'elle existe, et c'est ce qui fait que ces entreprises concurrencent directement nos entreprises québécoises et même plus, avec la nouvelle loi 101, elles ne seront même pas assujetties aux exigences de la loi. Voici ce que le ministre m'a répondu: "Ces problèmes nous ont été signalés, mais il nous apparaît bien difficile de les régler par le biais d'une politique linguistique, car nous vivons dans un système capitaliste."

Je dois dire que, sur le dernier mot qu'a utilisé le ministre, je suis demeuré perplexe. Faudra-t-il avoir recours à un système socialiste pour garder notre culture? Et le ministre de poursuivre: "II nous apparaît véritablement impossible, à l'heure actuelle" — et cela, je ne le contredis pas, Mme le Président — "d'affecter des remèdes vraiment efficaces aux problèmes que soulève le député de Beauce-Sud et surtout pas par une politique linguistique. Actuellement, j'avoue qu'en raison de la philosophie qui inspire tout le secteur privé et en raison de la politique actuelle du gouvernement, je ne vois pas quel correctif nous pourrions instaurer pour empêcher pareille concurrence indue. C'est ce qui explique la situation dans laquelle vont se retrouver le monde des affaires, le milieu économique du Québec qui sont en concurrence avec le contexte et le contexte nord-américain".

Mme le Président, que les droits du français soient reconnus et garantis sur tout le territoire, ceci est un projet national et tout peuple qui se respecte et veut se faire respecter doit pouvoir participer à cette édification. C'est donc dire que, pour une entreprise de cette envergure, il n'y a pas de place pour l'improvisation. Je le répète, Mme le Présideht, il n'y a pas de place pour l'improvisation. Avant d'adopter une politique que l'on veut faire adopter par une population, il est essentiel que cette politique soit d'abord respectée par cette même population et qu'ensuite cette politique réponde à ses attentes.

Si, Mme le Président, à cause des inquiétudes qu'elle suscite chez nombre de députés, la nouvelle politique linguistique ne rallie pas l'unanimité de cette Assemblée, je dis qu'il y a danger que

cette loi rate l'objectif recherché. Il était donc indispensable que nous trouvions des formules pouvant faire un certain consensus, et je ne dis pas un consensus certain, sinon, nous risquons que la loi soit bafouée et je vois mal que le gouvernement du Québec poursuive ses propres citoyens, citoyens par qui il a lui-même été mandaté, parce que ceux-ci auront utilisé, entre autres, certains modes d'expression, que ce soit dans l'affichage, dans la publicité, etc., qui ne correspondent pas tout à fait aux normes édictées dans la loi, mais qui correspondent cependant à la réalité dans laquelle vivent ces citoyens. C'est intentionnellement, à cause de cette réalité, Mme le Président, que je n'ai présenté que quelques amendements au projet de loi, amendements qui se voulaient des soupapes d'équilibre, amendements présentés dans un contexte extrêmement difficile, voire impossible à discuteretàdéciderde façon sereine. C'est pourquoi après avoir présenté, 20, 30, 40 amendements, cela n'aurait absolument rien changé; j'ai donc voulu concentrer mes efforts sur un point particulier.

Je tiens à dire, Mme le Président, que dans tous les pays du monde, et cela de tout temps, les exigences de l'économie sont telles qu'on ne doit pas les ignorer, parce qu'elles sont intimement liées à la survie et à l'épanouissement d'un peuple. J'espère que l'actuel gouvernement comprend bien tout le sens de cette réalité, car à ceux qui ont la responsabilité de nous gouverner, s'ils ne sont pas conscients de ce fait, je dis que l'illusion ne peut jamais remplacer la réalité.

Si j'ai approuvé sans hésitation le principe de ce projet de loi en deuxième lecture, je dois dire que ce fut différent et beaucoup plus difficile d'évaluer le pour et le contre quant aux modalités d'application. J'ai parlé des structures administratives à l'intérieur desquelles nombre de fonctionnaires et de technocrates devront travailler. J'ai dénoncé la grande bureaucratisation qui découlerait de l'actuel projet de loi. J'ai parlé de l'énorme pouvoir de réglementation qui en découle aussi et qu'on ne retrouve pas uniquement dans le projet de loi no 101, mais qu'on retrouve également dans les autres projets de loi et qui cause bien des embêtements et des tracasseries à ta population.

Je dis que ce ne sont pas les modalités qui ont fait pencher la balance quant à l'attitude que je vais adopter à l'occasion du vote de troisième lecture. C'est l'objectif qu'on cherche à atteindre, car l'objectif me paraît beaucoup plus important et beaucoup plus fondamental. En effet, sur les modalités — nous sommes quand même ici, à l'Assemblée nationale, 110 députés — nous pourrons interroger le gouvernement, nous pourrons faire des commissions parlementaires, nous pourrons réclamer des amendements, nous pourrons donner des conférences de presse; en somme, nous pourrons travailler pour continuer à améliorer le projet de loi, en ne perdant pas de vue l'objectif qu'on cherche à atteindre. Je ne me réfugierai pas, non plus, derrière deux siècles d'histoire. Malheureusement, je le dis en toute sincérité, on oublie trop souvent qu'il nous, a fallu reconquérir nos droits pouce par pouce, qu'il nous a fallu recon- quérir nos droits miette par miette et que notre fierté a souffert trop souvent et trop longtemps.

En terminant, je lance un appel particulier à tous les francopones du Québec et à leurs amis anglophones et des autres communautés linguistiques. En ce qui a trait à l'objectif recherché, cet objectif doit être celui de tous les hommes et femmes de bonne volonté qui veulent vivre ensemble dans un territoire donné. Il nous appartient à nous et à nous tous, de par notre volonté et notre détermination, de faire en sorte que le Québec demeure un territoire de culture et de tradition françaises.

Mme le Vice-Président: M. le député de Mont-Royal.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Merci, Mme le Président. J'écoutais attentivement les propos du premier ministre sur le projet de loi. Il a tenté, d'une façon très calme, de désamorcer une situation qui risque de causer des tensions sociales et des conflits qui pourraient s'accentuer entre les différentes communautés linguistiques au Québec. Il a tenté de minimiser les conséquences négatives possibles de cette loi, tant sur le plan social que sur le plan économique. Ma première réaction était celle-ci: Si le projet de loi disait ce que le premier ministre a exprimé ce matin, je peux vous assurer que j'aurais voté pour cette loi. S'il était vraiment pour la défense et la promotion de la langue de la majorité d'une façon positive, tout en reconnaissant, tel que l'exprimait le premier ministre, les droits de la minorité anglophone, je serais pour ce projet de loi. Malheureusement, ce n'est pas ce que le projet de loi nous dit.

Le premier ministre nous a dit qu'il n'y a pas d'hostilité de la part du gouvernement, que le projet de loi n'est pas un instrument pour avoir des objectifs politiques. Il est évident que le premier ministre n'a pas assisté aux séances de la commission parlementaire. Il aurait été témoin de l'esprit d'hostilité, à cette commission, des déclarations de plusieurs de ses députés et des déclarations du ministre d'Etat qui disait clairement que les buts du projet de loi étaient des buts politiques. Il est malheureux qu'on utilise la question linguistique pour atteindre des buts politiques. On ne peut et on ne devrait pas utiliser la question linguistique pour des fins politiques.

Il aurait été possible de faire une loi dont nous aurions été tous fiers, une loi qui aurait été positive, qui aurait atteint les objectifs que le premier ministre a exprimés, et qui se serait portée à la défense et à la promotion du fait français au Québec, tout en reconnaissant les droits minoritaires et individuels. Mon approche et l'approche de l'Opposition officielle était de bonifier cette loi, d'essayer d'apporter des amendements pour que les modalités puissent atteindre les objectifs de la loi.

Une loi qui divise une société est une mauvaise loi et cette loi nous divise. Par ses dispositions contraignantes, irréalistes et arbitraires, elle

divise la communauté francophone. En commission parlementaire sur le projet de loi no 1, nous avons été témoins que des groupes francophones se sont opposés aux membres de cette loi qui vont à l'encontre non des anglophones du Québec, mais des intérêts des francophones et de tous les Québécois.

Malgré les déclarations du premier ministre et de son ministre d'Etat, la loi ne reconnaît pas les droits des minorités, et plus particulièrement de la minorité anglophone. En optant pour l'option Québec, elle poursuit un objectif politique. En parlant de réciprocité, on est moins préoccupé par les droits des minorités que par le processus d'établir un précédent pour négocier des ententes avec les autres provinces, prélude à une possible option politique d'association économique.

En limitant l'accès aux écoles anglaises à ceux qui ont fréquenté les écoles anglaises au Québec, on restreint indûment cette collectivité culturelle et on place des contraintes sur son existence comme communauté culturelle.

En ce qui concerne les Néo-Québécois ou les allophones, comme on les appelle maintenant, qui déjà sont ici au Québec — je ne parle pas des immigrants à venir — la loi va à rencontre des promesses faites par le premier ministre et son ministre de l'Education de permettre à ces enfants qui sont ici d'avoir accès aux écoles françaises ou anglaises.

En affectant la langue de la justice, on compromet l'indépendance de la magistrature et on attaque les droits de tous les Québécois. En n'étant pas satisfait d'accepter que les services de santé soient fournis dans les hôpitaux anglophones en anglais et en français, mais en insistant pour créer des mesures affectant la régie interne des hôpitaux, on risque de réduire la qualité des services de santé, et en faisant ceci, on affecte tous les Québécois. En refusant d'accepter certaines recommandations quant aux entreprises ayant leurs sièges sociaux au Québec, on risque de réduire l'activité économique et, en plus, d'affecter le caractère international et le dynamisme d'un centre comme Montréal.

On nous a accusés de représenter les droits des minorités, comme si cela était un péché et ne devait pas se faire. Je peux vous dire que seulement en respectant les droits des minorités, leurs droits individuels, leur droit de survivre comme communauté, la majorité peut garantir ses propres droits, parce qu'après avoir tout examiné, nous sommes tous, d'une façon ou d'une autre, une minorité. Et si nous ne pouvons pas vivre d'une façon harmonieuse avec les minorités au Québec, il sera impossible d'avoir des relations harmonieuses avec les autres Canadiens, peu importe l'option politique que nous choisirons.

Je comprends l'angoisse que va subir la communauté anglophone avec ce projet de loi. Je peux seulement leur suggérer et leur dire que, en s'opposant aux dispositions de ce projet de loi qui vont porter atteinte à leurs droits, ils devront le faire en réagissant de façon modérée, sans s'alarmer. Toute opposition, s'il y a lieu, doit se faire dans le respect de toutes les lois. C'est la base même de notre société.

Il y a un groupe de personnes qui sont particulièrement affectées et pour lesquelles je suis particulièrement peiné; ce sont les autochtones. Malgré les déclarations du ministre d'Etat au développement culturel, ces personnes se voient lésées dans leurs droits linguistiques et culturels.

Je suggérerais fortement au gouvernement de respecter les droits des autochtones. On devrait être au-dessus, dans ce domaine, de toute parti-sanerie. Cela nous a pris trop de temps pour rétablir la paix sociale dans le Nord québécois pour là gâter maintenant par les tracasseries d'un tel projet de loi. Ces personnes ne nous menacent pas. Je supplierais le gouvernement, dans ce cas particulier, d'éviter les confrontations qui pourraient prendre des générations à guérir. Ce n'est pas par la force que vous allez régler le problème des Inuit dans le Nord du Québec. Je vous recommanderais fortement de réévaluer votre position.

En terminant, je pourrais vous dire que les minorités, les Québécois, tous ceux qui s'opposent aux mesures restrictives de ce projet de loi vont continuer à participer à la vie du Québec, à tous les niveaux, à participer à la vie sociale, économique et politique du Québec. Ils doivent et ils vont accepter les lois que ce gouvernement va voter et qui seront dans les intérêts de tous les Québécois. Ils vont continuer à protester et à combattre, légalement, dans la démocratie, dans les droits de la démocratie que nous avons, contre toutes les mesures, contre toutes les lois, incluant les dispositions du projet de loi no 101, qui diminueront la qualité de la vie du Québec et des Québécois, qualité de vie tant au plan intellectuel qu'au plan matériel. Merci, Mme le Président.

Mme le Président: M. le député de Pointe-Claire.

M. William Frederic Shaw

M. Shaw: Merci, Mme le Président. I would like, first of all, to say quite frankly that Mr. Lévesque's speech this morning was exemplary. And if I could relate the speech that was made this morning to projet de loi no 1, I would be one of the first to be standing to vote for this law. But, for some reasons, the spirit and the direction of the speech made by the Prime minister this morning seemed to have great differences with both the approach and the wording of bill 101.

So this is perhaps obviously the last opportunity I have to make an intervention before the enactment of this law. I would like to take the opportunity to thank members of my party with whom I have worked for a long time to try and achieve the kind of balance, to try and achieve the kind of policy that we could take to the parliamentary earings to make the positive input that could, perhaps, have made projet de loi no 1 the kind of law of which the Prime minister spoke this morning. 1 would like specially to thank my colleagues,

the member for Mégantic-Compton, the member for Gaspé, for the time that they have given from their families to be here, commission after commission, working with the researchers to try and make some recommendations to bring humanity, justice and equity into this law.

Because today the bill will be passed and it seems that very little, if any of the recommendations that were made will be represented in its final text. There is one very interesting aspect about this law and that is that it makes a great effort to eliminate any reference to the English language. We see the languages other than the French language; we see a second language. There is a pronounced effort to deny the reality that it is present in Quebec. I am reminded with it over every day when I look at that calendar with the month names removed because they were English. But you see, Madam President, you can try and deny the English fact of Quebec and you can try to deny the English fact of the National Assembly, but I am here, I am an English-speaking Quebecer and I am proud to being so and no removal of month names and no lack of recognition of my character in this province in a piece of legislation will make me disappear.

There is no secret that we are also seing in the regulations. We are seing it in the way that the fonctionnaires are reacting such as was demonstrated for the firing or the lack of hiring of those gentlemen who were working for the Voirie in the county of Pontiac Témiscamingue. We have so many other examples of our young nursing students at John-Abbott, 44% of which could not pass their French test to qualify for their nursing licences, having previously demonstrated so-called working knowledge of French to graduate from highschool.

I know you know that there is an English fact in Quebec. It will be seen, it will be heard and it will be felt; you will see it in your homes, you will see it when you drive on the roads, you will be hearing it on your radios because it cannot be suppressed. It is here, it intends to stay, it intends to be recognized with justice and equity. No law can make that disappear.

We have shown in our party that in working together, both anglophones and francophones can arrive at a posture of justice and equity. I noted that my colleagues are as proud of their history and their culture and their language as any member sitting on that side of the House. They have made a valiant effort, but they would not be listened to. So, the bill will be passed.

But this is not the end, because the government will have the burden of its consequences as a law, and democracy is not dead because democracy is not only this National Assembly. It is the people out there, who respond to the kind of legislation that is passed today. It is the people out there who react to the hypocrisy of a government that is saying something very valiant, very positive, very remarkable indeed in the words of its Prime minister and then turning around and enacting a piece of legislation that is totally contrary to his words.

No, democracy is not dead and it will flourish because more than anything this kind of government makes the people of this country aware that we are deprived of being deprived. We have never wanted it for anything in our present live but we are now being faced with a kind of government who will use a policy of confrontation, will use a policy of intimidation to try into effect a kind of legislation that is not in the interest of any Quebecer being he English-speaking or French-speaking.

Mme le Président, this session of the 31st Legislature of this province will probably go down in history as the time of test, a time of test of everyone's capacity to give, and we will also know this period of history as one which will be the time of demanding and it will be the years between now and the next election which will demonstrate the damage that this kind of attitude will do. And the people will be then called to ask and judge again, Mme le Président, they will judge. Thank you very much.

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Verdun.

M. Lucien Caron

M. Caron: M. le Président, je suis fier de pouvoir donner mes dernières opinions avant que la troisième lecture soit adoptée.

Les représentants du Parti libéral à la commission parlementaire de l'éducation ont tenté d'amener le gouvernement à reconnaître l'importance qu'il y a d'assurer le respect des droits des citoyens québécois; que ce soit au niveau de la langue, de la justice, de l'administration publique et du travail, on a vu comment le gouvernement refuse de reconnaître la valeur des principes que nous avons défendus. J'ai une certaine expérience comme député et comme administrateur municipal de cette volonté que les citoyens ont de participer de plus en plus directement à la conduite des affaires qui les concernent dans leur vie quotidienne.

M. le Président, dans plusieurs municipalités du Québec, sur l'île de Montréal comme dans le Montréal métropolitain, dans certaines localités de la Gaspésie, de l'Outaouais, ou du Nord-Ouest québécois, il y a là des Québécois tout aussi québécois que moi qui sont de langue et de culture anglaises. Je pense que ces gens ont le droit de participer activement à la vie de leur municipalité et qu'ils ont droit à ce que l'administration municipale respecte leur identité culturelle.

Or, le projet de loi 101 est à cet égard extrêmement pointilleux. C'est au compte-gouttes que l'on mesure les droits de ces Québécois, comme s'ils étaient des citoyens de second ordre. Je veux dire aujourd'hui que je ne suis pas d'accord avec cela et que je souhaite que les administrateurs municipaux exercent sur le gouvernement toutes les pressions nécessaires pour l'amener le plus rapidement possible à corriger le caractère hautement restrictif des droits qu'il a consentis aux citoyens de langue anglaise en ce qui concerne les administrations locales.

Je pourrais soutenir la même argumentation dans un domaine tout aussi névralgique de la vie des individus, celui des services de santé et des services sociaux. Je me demande vraiment ce que le gouvernement a pu trouver de menaçant pour l'avenir du français au Québec, dans le fait que des institutions de santé et de services sociaux appelés à fournir des services aussi importants à des Québécois de langue anglaise, soient désormais contraints de s'interroger pour savoir s'ils ont ou non le droit de s'adresser en anglais à leurs clients et de communiquer entre eux dans cette même langue anglaise.

Quand on parle du caractère excessif et mesquin de la loi 101, n'est-ce pas dans des exemples aussi précis que l'on constate toute l'absurdité de cette loi que le gouvernement s'apprête à imposer aux Québécois? Car c'est bien de cela qu'il s'agit; on cherche à imposer cette loi, puisqu'on a recouru au bâillon et, comme cela ne suffisait pas semble-t-il, à la clôture également.

M. le Président, je représente un comté où il y a une majorité de parlant français et une minorité de gens de langue et de culture anglaises, auxquels s'ajoute une autre minorité d'origine ethnique différente. Nous avons toujours vécu dans le comté de Verdun avec cette conviction que nous pouvions faire ensemble beaucoup plus pour le progrès de notre communauté que ce que nous pourrions faire en nous divisant et en nous querellant sur des choses qui soulèvent beaucoup plus d'émotions que de recherches véritables pour la solution des vrais problèmes.

Or, les problèmes des gens de Verdun sont probablement les mêmes que ceux de l'ensemble des Québécois. Ce sont bien plus des problèmes économiques et sociaux que des problèmes de langue.

En terminant, M. le Président, je veux dire que je voterai contre ce projet de loi en troisième lecture, comme je l'ai fait en première et en deuxième, parce que je crois très sincèrement que c'est un projet de loi qui ne va pas dans l'intérêt supérieur des Québécois et qui ne contribuera qu'à diviser les Québécois entre eux, alors que les défis politiques, économiques, sociaux et culturels du Québec d'aujourd'hui exigent, au contraire, que l'on tente de renforcer la solidarité qui doit unir tous les Québécois, si l'on veut vraiment que le Québec puisse continuer de progresser.

Quand j'évoque les problèmes que causera une loi aussi inutile et exhaustive que le projet de loi 101, je pense, à ce moment, à cette manchette du journal Le Soleil d'hier où l'on pouvait lire sur huit colonnes: "Bill 101: 25 policiers dépêchés à Fort-Chimo". Je pense que cette manchette devrait faire réfléchir les membres du gouvernement et leur faire prendre dès maintenant toutes les mesures nécessaires pour éviter ce que personne ne souhaite, c'est-à-dire que le projet de loi 101 soit un facteur de division entre les Québécois, et ce que tout le monde craint, à savoir que ce projet de loi 101 créera, hélas, de l'injustice et toutes ces choses que nous ne pouvons accepter et encore moins favoriser en tant que Québécois.

En terminant, M. le Président, je tiens à dire que je suis fier d'être un citoyen du Québec et aussi fier d'être un Canadien.

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Gaspé.

M. Michel Le Moignan

M. Le Moignan: M. le Président, on finit toujours dans la vie par s'habituer aux personnes et aux choses avec lesquelles nous sommes en contact quotidien. Quand je regarde ce beau tableau de Charles Huot qui nous rappelle un événement de 1793, alors qu'il y avait un débat peut-être plus animé que celui que nous vivons cet après-midi, je suis en mesure d'avouer que cela fait déjà deux siècles et plus que les Canadiens français ou les Canadiens en général doivent livrer ce combat de la langue, ici dans notre pays.

Si je voulais commencer pas le début, la première tentative peut-être dans notre période moderne, c'est le projet de loi 63. On va dire que c'est un échec. On va dire que cela n'a pas été un succès. On va dire même que cela a conduit l'Union Nationale vers l'abîme.

Mais, quand j'écoutais hier le député de Westmount, quand j'écoute aujourd'hui les interventions de nos amis de droite quand ils nous célèbrent toutes les louanges de la loi 22, je me demande, M. le Président, avec une loi aussi bonne, aussi parfaite, comment il se fait qu'elle ait été honnie, qu'elle ait été rejetée non seulement par les anglophones mais même par la majorité des francophones au Québec. Quand le député de Westmount nous disait hier que l'Union Nationale tenait deux langages, quand il a parlé de ceux qui ont voté le 4 août à la salle des commissions...

M. Blank: Qui n'ont pas voté.

M. Le Moignan: ... il a oublié que j'étais absent.

M. Verreault: M. le Président, est-ce que le député de Gaspé me permettrait une question?

M. Le Moignan: Après, je vais vous réserver deux minutes.

Le Président suppléant (M. Marcoux): Je dois préciser que c'est sur votre temps qui est de dix minutes.

M. Le Moignan: Vous m'avertirez à huit minutes, M. le Président.

M. Goulet: Vous répondrez lundi.

M. Le Moignan: Je ne veux pas faire la critique de la loi 22, M. le Président, puisque nous en sommes au projet de loi 101. J'ai assisté, avec le député de Lotbinière et le député de Mégantic-Compton, à l'audition des mémoires. Nous en avons eu de toutes les couleurs, nous en avons eu

qui étaient très favorables, d'autres qui ont apporté des réticenses, mais je crois que, de façon générale, ces auditions furent très constructives. Je tiens à dire qu'elles ont ouvert les yeux du ministre. Je ne peux pas dire qu'elles ont tellement éclairé le gouvernement puisque nous avons constaté, en cours de route, qu'après tous les amendements proposés, après les discours d'éminents orateurs — je ne parle pas de moi, M. le Président, je parle de tous les experts — qui se sont prononcés sur la Charte de la langue française, le gouvernement a écouté, la plupart du temps, d'une oreille très distraite.

Quand, ce matin, le premier ministre nous a parlé sans passion —je dirais, presque, pas assez de passion — il nous a donné quelque chose, j'oserais dire, de très convaincant, quelque chose pour inciter ceux qui seraient encore indécis à voter en faveur du projet de loi. Le premier ministre — et je le considère comme un homme très sincère — je crois qu'il avait comme objectif et qu'il croit que son gouvernement va donner aux Québécois la plus parfaite des lois. Il y a presque dix ans qu'il y a un débat et nous n'aimerions pas que ce débat se prolonge. Si, grâce à Dieu, la Charte de la langue française est de nature à satisfaire non seulement les francophones, mais de nature à créer un climat dans le Québec où les anglophones, les allophones et toutes les autres races et cultures seront heureux de vivre, M. le Président, à ce moment, je serai le premier à chanter toutes les vertus et les mérites de la Charte de la langue française. Mais le premier ministre nous a dit, ce matin, qu'il faudrait peut-être attendre un an, deux ans avant de faire une véritable expérience. Je suis sûr que si la loi n'est pas concluante, le premier ministre, avec toute son honnêteté, j'imagine, apportera, à ce moment, les modifications qui s'imposent.

Nous, de l'Union Nationale, sommes blâmés de prendre uniquement le parti des anglophones. Tout de même, il faut considérer, comme les libéraux le font, qu'il y a dans le Québec au-delà d'un milion d'anglophones ou d'allophones. Nous savons aussi qu'il y a la majorité de cinq millions de Québécois qui parlent le français. Nous voulons que le français se développe au Québec. Nous aimerions voir les Canadiens français occuper la place qui leur revient, non seulement dans le langage parlé sur la rue, mais la place dans les usines, dans les compagnies, dans les multinationales. Nous aimerions que le français puisse rayonner non seulement au Québec, ce serait une stupidité, mais qu'il puisse se répandre au Canada. Que l'influence de cet îlot de Français perdu en Amérique puisse se répercuter dans toute l'Amérique du Nord.

Ce n'est pas la loi 101 qui fera cela, mais c'est le désir collectif de toute une population qui va essayer de donner ce visage français au Québec. Et alors, la Charte de la langue française va rétablir dans leur vraie place les droits respectifs de tous les groupes qui, réellement, composent la collectivité québécoise.

Le député de Lotbinière a parlé de justice, tout à l'heure; je crois que c'est très important dans un projet de loi et c'est ce rapport de justice qui va permettre à chacun l'exercice harmonieux de ses droits dans le respect des droits des autres. On ne peut pas imposer une langue, nous le savons très bien. Pour préserver ici la langue française, il faut essayer d'inciter, d'inviter les anglophones, les allophones à comprendre la nécessité de parler le français.

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Gaspé, il vous reste deux minutes pour conclure.

M. Le Moignan: Je vais conclure, M. le Président.

Le Président suppléant (M. Marcoux):

Permettez-vous la question du député de Westmount?

M. Le Moignan: Je vais faire ma petite conclusion et je lui permettrai après. Mais je suis attristé, dans mon propre comté, de voir des anglophones quitter la région parce qu'ils nourrissent une crainte, ils ont peur et j'essaie de les convaincre.

M. Garon: Cela fait 50 ans qu'ils partent de la région. Cela fait 50 ans qu'il se ferme des maisons en Gaspésie.

M. Le Moignan: J'ai dit que je suis attristé, M. le ministre, quand je les vois quitter le comté. Cela me fait de la peine quand je vois les statistiques qui nous disent qu'avant le 15 novembre, pas depuis le 15 novembre, 386 000 Québécois ont quitté le Québec depuis dix ans. C'était avant le 15 novembre, je ne vous blâme pas, mais il ne faudrait pas que cette chose se répète au cours des années à venir; je parle du passé. Et quand je dis à mes Anglais du comté qu'ils n'ont pas de raison de le quitter parce qu'il y a une Charte de la langue française, je crois que je suis logique, et que j'essaie de leur faire comprendre qu'il y a une réalité chez nous, réalité qu'il faut respecter. Comme j'ai promis à mon ami de Shefford une petite question, je veux être honnête, au moins, dans mes promesses. Je vous remercie, M. le Président.

M. Jolivet: M. le curé.

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Shefford.

M. Verreault: M. le Président, la question que je voulais poser au curé de Gaspé était la suivante. Relativement au projet de loi 22, si son parti a fait élire onze candidats, est-ce à cause de son chef ou à cause du programme électoral qui promettait de revenir au libre choix?

M. Le Moignan: Je vais répondre bien simplement quant au libre choix dont nous avons

parlé à ce moment-là. Le premier ministre a dit qu'il n'y avait que les ânes et...

M. Jolivet: Les sots!

M. Le Moignan: ...les imbéciles qui ne changeaient jamais d'idée. Si le Parti québécois se réserve le privilège de réviser son programme électoral, je crois que l'Union Nationale, comme les autres partis, a aussi le droit de réviser son programme de temps à autre. Ce n'est pas le libre choix qui a... Nous n'avons eu qu'un seul comté anglophone en dépit de notre politique.

M. Goulet: ... dans Bellechasse, ce n'est pas à cause du libre choix.

M. Le Moignan: Non, dans Bellechasse.

Le Président suppléant (M. Marcoux): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Bryce Mackasey

M. Mackasey: Merci, M. le Président. Quelques phrases en anglais. I enjoyed the member from Gaspé and the Union Nationale and my good friend from Pointe-Claire. The only advice I can give that party on their language policy is that people who walk on picks of fence long enough eventually fall off, and you know where that hurts! That is what is going to happen to that party on the language question, but sooner or later we will know where they stand.

In the meantime, I would advise them to get off the pick of fence because it hurts when you fall.

M. le Président, hier, un rédacteur m'a appelé pour me demander quelle était ma position vis-à-vis de Gérard Filion, et cela concerne le projet de loi 101.

Une Voix: 45.

M. Mackasey: M. le Président, j'ai dit au rédacteur: Regardez dans le journal des Débats de l'Assemblée nationale, le 20 juin, alors que je fus le seul député de cette Chambre qui a pris la peine de se porter à la défense de Gérard Filion à l'Assemblée nationale.

M. Goulet: M. le député me permettra it-il une question?

M. Mackasey: Après, s'il vous plaît!

M. Goulet: Après, d'accord!

M. Mackasey: Deux ou trois, si vous voulez.

Le Président suppléant (M. Marcoux): Dans le même respect de notre règlement, à l'intérieur de vos dix minutes.

M. Mackasey: C'est possible. Il faudra demander le...

Le Président suppléant (M. Marcoux): Je vous préviendrai quelques instants plus tôt.

M. Mackasey: M. le Président, je continue. En 1970, à la Chambre des communes — je dis cela sincèrement grâce à un de mes amis qui me l'a rappelé — dans un discours, j'ai défendu les droits du Parti québécois et j'ai attiré l'attention de tous les Canadiens sur la différence entre le Parti québécois et les terroristes de cette époque.

Alors, quand quelqu'un me dit: Voilà la voix d'un anglophone, je n'aime pas cela. Je suis Canadien. Je suis Québécois. Je suis d'origine irlandaise, si vous voulez, mais j'habite le Québec.

M. Laplante: Vous ne croyez pas aux deux nations?

M. Mackasey: Veuillez ne pas m'interrompre.

M. Laplante: Vous ne croyez pas aux deux nations?

M. Mackasey: C'est pour moi un moment très triste dans l'histoire du Canada et je pense que dans 20 ans, on regardera la loi 101 dans le même esprit qu'on voit maintenant la loi du Manitoba et les règlements de l'Ontario qui ont toujours agi contre les intérêts des minorités d'expression française.

Peut-être que cela fera plaisir à quelques-uns du Parti québécois que ce bill 101 est discriminatoire pour les minorités, et je défendrais les minorités si c'étaient les minorités françaises... Pendant quinze ans, je me suis promené dans le pays pour défendre les droits des minorités d'expression française dans toutes les provinces, et je pars bientôt — tout le mois d'octobre — dans le même sens, dans l'Ouest de ce pays.

Alors, quand je défends les droits des minorités, que ce soit la minorité française quand j'étais à Ottawa ou l'anglaise à Québec, c'est parce que je crains toujours les gouvernements. Le gouvernement libéral à Ottawa et le gouvernement du Parti québécois à Québec qui parlent au nom de la collectivité, placent les droits de la collectivité avant les droits des individus.

Ce qu'on a vu dans le projet de loi no 1 avant le projet de loi no 101 dans la section 172, heureusement, n'est pas dans le projet de loi no 101, mais pourquoi? A cause de l'Opposition et surtout à cause de mes quatre copains qui ont siégé à la commission parlementaire.

Ce projet de loi est déjà connu parmi les rédacteurs comme un projet de loi qui pour être applicable aurait besoin d'au moins 100 amendements, 500 règlements et 5000 fonctionnaires additionnels, dans les prochains trois ans. Et on voit le gouvernement qui, d'un autre côté, a imposé une clôture alors que l'étude du projet de loi n'était pas encore complétée et qu'on n'avait pas encore présenté tous les règlements. Néanmoins, I now want to say something to the English-speaking people of Quebec that nothing can be gained by bitterness or by name-calling or aguing.

We are a proud people. We have contributed much to the culture in this province. The English, the Irish, the Scotch, the Jews, the Poles, have all contributed to the culture of the majority people in this province. We are proud. We must remain in this province. It is not by running away, it is not by being bitter, it is not by being hostile, it is not by being agressive, it is not by being violent that we shall, one day, get rid of this bill. It is the majority of the people of this province who will get rid of this bill when it gets rid of his government, because this bill is discriminating. Not only against me, but against the French-speaking Canadians of this province who are denied something important, the freedom of choice, and when you being denying the freedom of choice of individuals in the name of the collectivity, you do not know where you end. Now, it is to help the education; tomorrow, it is to help somebody in the business community. Next week, we will get rid of everybody who has red hair and we never quite know where a government who acts in the name of the collectivity is going to end. That is the frightening thing about what is happening.

We have a bill that can only be rationalized because we have a government and one or two ministers — I will not say it because he is not here to defend himself, but I wish he were — who knows best — Mother Superior does — what is best for the people of this province. They do not know what is best for this province. It is tragic but I can only say, Mme le Président, in the five minutes I have left, that what we need now is to retain la bonne entente qui existe entre les Anglais et les Français. Il faut que cela continue. Il ne faut pas qu'on laisse la victoire ultime au parti au pouvoir de détruire la bonne entente qui existe parmi les ouvriers d'expression française et leurs compagnons qui parlent une autre langue, l'anglais, l'italien ou le grec. Il ne faut pas que cela soit détruit à cause de la loi no 101, qui, comme je le dis, va aller dans les annales de l'histoire du Canada dans le même chapitre que l'Acte du Manitoba et les règlements de l'Ontario qui ont retardé l'unité nationale de ce pays de 50 ans.

On va continuer de se battre pour les droits des minorités d'expression française dans toutes les autres provinces, comme le Nouveau-Brunswick, l'Ontario. Mais, je le demande à mes amis d'en face — j'ai des vrais amis en face — que penserait-on si, demain, l'Ontario disait à un francophone de Québec qui, au mois de décembre, au mois de janvier ou au mois de juin, est transféré par son entreprise: Vous n'avez pas le droit de mettre vos enfants à l'école française en Ontario. On ne peut pas vous enseigner en Ontario, vous n'êtes pas résident; pour vous, ça ne fait rien, M. le ministre, que le ministère le plus raciste que vous avez au cabinet...

M. Lessard: De toute façon, ils ne peuvent pas, ils n'en ont pas d'écoles.

M. Mackasey: Prenez avantage, M. le ministre, de votre position pour voyager un peu et vous regarderez...

Mme le Vice-Président: M. le député, je tentais de vous parler et je le regrette, votre dernière phrase n'est pas enregistrée, et vous ne m'avez pas vue à temps.

M. Mackasey: Je m'excuse, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: J'allais vous dire qu'il vous reste une minute pour terminer votre intervention.

M. Mackasey: J'ai seulement une chose à dire encore aux anglophones de la province de Québec, c'est de maintenir leur respect de la majorité, de la langue de la majorité et de continuer de vivre en paix comme on vit à Notre-Dame-de-Grâce, à Verdun, en Gaspésie, dans la ville de Québec, avec nos concitoyens d'expression française, parce que ce n'est pas la population qui a adopté un projet de loi aussi discriminatoire qui me dit que, en face de mon entreprise, il me faut descendre, il me faut éliminer ma langue maternelle, celle que j'ai toujours parlée depuis 50 ans, depuis que je vis ici dans cette province. C'est regrettable, M. le ministre, mais c'est discriminatoire, et vous le savez, c'est la base de votre projet de loi. Mais la grande histoire pour le ministre, c'est que, si son bill veut créer la haine entre moi et M. Roger, qui vit à côté de moi, il ne réussira pas du tout. Nous continuerons, à Verdun, à Notre-Dame-de-Grâce, à Montréal, de vivre ensemble, de sortir ensemble, d'avoir des loisirs ensemble, de jouer ensemble et même nous marier ensemble. Ce n'est pas le bill 101 qui va détruire les relations entre les Anglais et les Français qui eixtent depuis trois siècles. Merci, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Mme le Président, je voulais demander au député de Notre-Dame-de-Grâce s'il me permettrait une question.

Mme le Vice-Président: M. le député permet-il la question?

M. Mackasey: Oui.

M. Goulet: C'est parce que, suite aux propos qu'a tenus le député de Notre-Dame-de-Grâce à l'égard de l'Union Nationale, je voudrais lui demander sur quelle clôture il était ce matin, lorsqu'a été le temps de voter sur le bill 45.

M. Mackasey: J'étais à l'hôpital pour y voir mon épouse. Cela est une réponse. Cela aurait été plus gentil de votre part de me demander cela en privé.

M. Goulet: C'est parce que je sais qu'il existe...

Mme le Vice-Président: De toute façon, M. le député, nous en sommes aux délibérations sur le projet de loi no 101. Je regrette de devoir vous rappeler à l'ordre.

M. Goulet: C'était simplement pour rétablir un fait, parce que j'aurais aimé lui dire qu'il y a un genre d'oiseaux qui peuvent se brancher, mais quand le danger arrive, ils s'envolent. J'aimerais savoir le nom de ce genre d'oiseaux.

Mme le Vice-Président: M. le député de Westmount.

M. Springate: Mme le Président, je pense que les gens de l'Union Nationale ne sont pas ceux qui devraient parler de ceux qui ont peur de voter.

M. Grenier: A l'ordre! A l'ordre!

M. Springate: Hier, j'ai parlé de certaines personnes qui avaient refusé de voter le 4 août.

NI. Grenier: II a passé dix minutes à parler de l'Union Nationale, hier; je ne tolérerai pas cela aujourd'hui. Je suis en Chambre, là.

M. Springate: Bon, il y a quelqu'un qui s'énerve, là.

M. Grenier: Fermez les portes, on va le poi-gner vivant, celui-là.

Mme le Vice-Président: Je demanderais aux députés de laisser l'intervenant qui a la parole s'exprimer. Nous tâcherons de voir ensemble si le député s'en tient bien à la pertinence du débat. C'est actuellement un débat en troisième lecture.

M. le député de Westmount.

M. George Springate

M. Springate: Madam Speaker, I thank the member from Mégantic-Compton for being very vigilant, but however I must remind him that only those who live in a glass house can throw stones. If he wishes to attack my honourable member and friend from Notre-Dame-de-Grâce because he happened to be absent this morning on a very important and personal nature, one which we, here in the liberal caucus, understand and give a full support, in attending...

M. Grenier: Mme le Président, je soulève un point de règlement.

Mme le Vice-Président: Sur une question de règlement, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Je n'ai pas dit un traître mot du député de Notre-Dame-de-Grâce et je ne permettrai pas que le député de Westmount me dise que j'ai attaqué le député de Notre-Dame-de-Grâce. Rappelez-le à l'ordre et qu'il parle de la loi 101.

M. Springate: Mme le Président, pouvez-vous me dire de quelle façon j'ai attaqué le député de Mégantic-Compton?

Mme le Vice-Président: A l'ordre! M. le dé- puté de Mégantic-Compton, je vous demanderais d'écouter attentivement M. le député de Westmount. Je vous ai promis, M. le député de Mégantic-Compton, d'être bien attentive. Je vous demanderais de ne pas interrompre l'intervenant à moins qu'il ne s'écarte de la pertinence du débat. M. le député de Westmount.

M. Springate: Thank you, Madam Speaker. I would like to say that listening to the important remark that was just addressed by — I will use the word honourable — the honourable member for Mégantic-Compton that I sort of wonder why, in the later days of September and early October, his party was trying, as hard as they could, to have me to come one of their candidates in the November 15 election. And I also state that...

Mme le Vice-Président: M. le député, je vous demanderais d'être bien attentif à parler en troisième lecture. J'espère que votre propos vient à la pertinence du débat.

M. Springate: Merci, madame, vous avez parfaitement raison. Le 1er avril, ce gouvernement a déposé un livre blanc concernant la langue française, ici au Québec. Hier, nous avons vu un autre livre blanc concernant les référendums.

Dans ce livre blanc, nous avons lu les mots qui parlaient de démocratie, une tradition britannique, les mêmes mots que nous avons vus au mois d'avril alors que nous avons lu le livre blanc sur la Charte de la langue française.

Sur le livre blanc, le 1er avril, déposé en cette Chambre, le ministre nous a demandé nos suggestions, a demandé à des Québécois d'apporter des amendements, de faire des critiques. Les Québécois, les membres de cette assemblée qui siègent du côté de l'Opposition, soit de notre parti ou du parti à ma gauche, nous n'avons pas été entendus, nous n'avons pas été écoutés. Seulement 62 des 265 mémoires qui ont été présentés lors de l'étude du bill 1 ont été entendus. Après ça, nous avons eu la trouvaille du siècle quand le gouvernement a décidé de retirer le bill 1 et de nous présenter le bill 101. Finalement, nous avons eu, cette semaine, une motion de fin de session, une autre motion concernant le bâillon. Je peux dire aux députés en face de nous que quant à moi, le bâillon, les motions de fin de session, la clôture, ce n'est pas dans la tradition de la démocratie britannique que nous pouvons lire dans leur livre blanc.

Hier, nous avons vu aussi, dans cette Chambre, amendement après amendement déposés par le gouvernement. Après avoir étudié le bill 1 et le bill 101 pendant presque quatre mois, même hier, ils ne savaient pas exactement ce qu'ils cherchaient dans cette loi 101. Mais il faut le dire, le bill 101, comme le bill 1, comme le livre blanc, n'a pas été accepté par les Québécois. C'est pour ça que le gouvernement essaie, par tous les moyens, toutes les mesures possibles, d'apporter des amendements.

Il faut le dire aussi, Madam Speaker, that this bill is not simply pro-French, it happens to be anti-English. And that, I guess, bothers people the

most, in the part of the province that I represent, is the attitude of this government. It is a vicious bill. We see coercive measures, we see intolerance, we see intransigency and we see a discriminatory peace of legislation that shows that this government is not sensitive to the needs of all Quebecers and truly his lacks in the true words of justice, freedom and democracy.

What comes next? This is the problem, what comes next once Quebec is unilingual? That is what worries most, that is what worries the people on our side of the House. They can talk about controls of radio, television, newspapers and books. This bill, really, has caused many Quebecers to think about their future in this province, to see if they have a future in this province, and I, like the honourable member from Notre-Dame-de-Grâce, Mont-Royal and others who have spoken on our side of the House, urge Quebecers not to leave, urge Quebecers to stand and fight for their rights, urge Quebecers to try and over legally throw this undemocratic government that just does not listen.

Les Québécois savent que ce bill 101, c'est l'élite de notre province contre les travailleurs, l'élite qui a les richesses et le loisir d'avoir l'opportunité d'envoyer ses enfants dans des écoles privées où l'anglais est appris dès la première année.

Les travailleurs n'ont pas les mêmes droits. Ce gouvernement essaie, avec le projet de loi 101, de construire un mur autour de notre province.

M. O'Neill: Le mur de Berlin.

M. Springate: Ils rient. Ils sont bien comiques.

M. Bertrand: Ce sont les Québécois qui vous parlent.

M. Springate: Le futur maire de Québec qui nous parle.

Mme le Vice-Président: A l'ordre! M. Laplante: Ne lâchez pas!

M. Springate: Ils n'ont pas parlé en deuxième lecture et sur la motion du député de Verdun. Ils n'ont pas parlé sur la motion de clôture, sur la motion de fin de session et là ils jappent.

M. Bertrand: C'est parce qu'on travaillait au lieu de bavarder.

Une Voix: On réfléchit. On parle quand cela nous tente.

Mme le Vice-Président: A l'ordre!

M. O'Neill: Allez, allez, vous êtes intéressant.

M. Springate: I will hear them in the elections as right. Peut-être qu'ils veulent parler de leur représentant qui le 15 novembre, dans le comté de Westmount, est arrivé quatrième. Peut-être que c'est de cela qu'ils vont vouloir parler. Je suis prêt. Il n'a obtenu que 3400 votes si je ne me trompe pas. This particular bill, Madam Speaker...

M. Laplante: ... il serait entré quand même.

M. Springate: A few dogs barking in the peanut gallery have never bothered me. This particular bill is too costly a price in human suffering, mental anguish. There are no investments. Our economy is going to pot. We cannot afford those particular costs.

In closing, Madam Speaker, I would like to thank the members of our team who sat on the committee, who worked hard, who voted the way they should and who on august 4th, in committee, voted that the English language should be allowed to be used here in the House and in the courts, unlike my neighbours to the left who refused to vote, who abstained. Thank you.

Mme le Vice-Président: M. le député de Bourassa, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Laplante: C'est une lumière, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de Jacques-Cartier.

M. Noël Saint-Germain

M. Saint-Germain: C'est avec énormément d'attention que j'ai écouté ce matin le premier ministre de cette province nous donner ses opinions sur la loi que nous allons voter dans quelques minutes. Je connais le premier ministre de cette province depuis bien des années; je ne doute pas de ses bonnes intentions et je sais que sa déclaration de ce matin était sincère et reflétait bien le fond de sa pensée.

Malheureusement entre les déclarations du premier ministre et le contenu du projet de loi et les articles que nous allons voter dans quelques minutes, entre la déclaration du premier ministre et le projet de loi 101, je ne voyais aucune relation. Je me demandais si le premier ministre était au courant du contenu de cette loi, s'il en avait réellement étudié les différents articles et s'il avait pris une part réelle dans l'étude de ce projet de loi.

Ceci m'a frappé. Je crois réellement que cette loi est le résultat de certains membres du gouvernement très actifs, extrêmement nationalistes, peu scrupuleux des libertés individuelles et de la sécurité de l'ensemble de la population. A titre de francophone dans cette province, Mme le Président, je n'en suis pas fier aujourd'hui en cette Chambre.

Comme j'ai eu l'occasion de le lire dans le passé, la culture et la langue françaises dans cette province se sont maintenues et développées par la force des individus qui faisaient partie de cette communauté francophone. Elles n'ont jamais été protégées par aucune loi.

Elles ont même eu à combattre des lois ou des autorités qui étaient contre son développement

normal. Pourtant, après des décades, nous parlons encore français dans cette province et nous le parlerons certainement encore longtemps...

M. Perron: A cause de la loi 101.

M. Saint-Germain: Aujourd'hui on a calculé qu'il fallait protéger cette communauté par une loi. Avec les bouleversements sociaux et les changements profonds au point de vue social qui ont pris place dans cette province depuis quelques années, on peut admettre que pour se développer normalement, la francophonie au Québec avait besoin de certaine protection, mais de là à avoir une loi aussi coercitive, de là à avoir une loi si peu sensibilisée à nos traditions, si peu sensibilisée à la tolérance naturelle et légendaire des francophones dans cette province, si peu sensibilisée aux protections individuelles, tout ceci fait, Mme le Président, que je ne suis pas orgueilleux d'être ici aujourd'hui.

M. O'Neill: On vous demande juste d'être fier.

M. Saint-Germain: A titre de membre de cette communauté francophone, je n'admets pas que je suis dans une situation telle que j'ai besoin de ce gouvernement pour me protéger. Je crois que l'ensemble des individus qui forment la communauté francophone sont assez virils, sont assez conscients de la valeur de leurs traditions, assez conscients de la valeur de leur culture, de leur propre échelle de valeurs pour ne pas avoir besoin d'être traités comme des enfants, traités comme des gens qui ont besoin d'une surprotection, des gens qui ont besoin d'avoir, dans cette province, une foule d'inspecteurs, une armée de fonctionnaires, qui verra de jour en jour à ce que la langue française dans cette province soit respectée. Je crois que les individus qui forment la communauté de langue française sont assez virils, sont assez hommes, sont assez conscients de la valeur de leur langue et de leurs traditions pour être capables, au point de vue individuel, dans leur vie de famille, dans leur vie de tous les jours, à leur emploi, dans leur profession, de porter le drapeau et de défendre adéquatement cette culture. De la défendre non pas en étant négatifs, en étant préjugés envers qui que ce soit, mais la défendre simplement par la qualité de leur vie, la qualité de leur travail et le respect qu'ils peuvent attirer et avoir de leur entourage.

J'espère, Mme le Président, comme nous ne pouvons pas vivre dans cette mer anglo-saxone et de langue anglaise de l'Amérique du Nord, que cette loi ne donnera pas à nos minorités, aux provinces comme aux pays qui nous entourent, un faux portrait et une fausse réputation des citoyens de cette province. Je sais pertinemment, après avoir étudié les projets de loi 63, 22, et cette loi en particulier, que la majorité de la population peut être passionnément pour ou contre une loi sans en avoir nécessairement lu l'ensemble ni encore moins l'avoir étudiée.

Je suis convaincu, Mme le Président, que la majorité des citoyens du Québec n'ont pas lu cette loi qui comprend au-delà de 200 articles. Je puis vous affirmer que si la majorité de la population du Québec, si chaque citoyen s'était donné la peine d'étudier cette loi dans le détail, il serait bien difficile pour le gouvernement de nous obliger à voter sur cette loi, aujourd'hui.

J'espère qu'on continuera à avoir dans le Québec malgré cette loi, cette longue tradition de bonne entente entre les populations hétérogènes, qui composent cette province, surtout dans la région économique de Montréal.

J'espère que chaque citoyen pour ou contre la loi s'y soumettra selon la règle de notre démocratie, et que ceux qui auront à la combattre — n'oublions pas qu'il y a des citoyens qui sont bien décidés à combattre cette loi dans l'avenir, à la combattre constamment — je demanderais simplement à ceux-ci de bien vouloir la combattre à l'intérieur de nos lois, à l'intérieur de nos règlements et à l'intérieur du système parlementaire, ce système de liberté que nous avons actuellement, cette liberté québécoise qui fait l'envie de maints pays européens et qui a fait que plusieurs Européens ont décidé de venir vivre chez nous, y vivent déjà depuis longtemps et sont un actif pour le développement de cette province, à tout point de vue.

J'espère bien que cette loi nous permettra tout de même de conserver les bonnes relations qui caractérisent les relations actuelles du Québec entre les différentes couches de la population, quelle que soit la race, quelle que soit la religion ou quelle que soit l'échelle de valeur des divers groupes qui composent notre population. S'il fallait que cette loi crée un déséquilibre dans les relations sociales de cette province, il me semble évident que tous, que nous soyons de langue française, de langue anglaise ou d'une autre langue, ensemble nous aurions à subir des préjudices graves qui pourraient être un handicap et un inconvénient très important dans l'évolution future de cette communauté. Merci.

Mme le Vice-Président: M. le député de Robert-Baldwin.

M. Jolivet: Cela va être beau! M. John O'Gallagher

M. O'Gallagher: Mme le Président, just a few words on this sad occasion for the democracy of this province and a sad occasion for the Prime minister himself. I listened this morning with great interest and amazement to a wonderful speech made by the Premier, a very moderate forceful and ideological speech. Just what he was talking about is hard to decipher, it certainly was not bill 101, probably a very moderate Charte de la langue française, but certainly bill 1, not bill 101 or the rubbish we have now, a bunch of tatters or amendments of bill 101 modified.

Je n'en ai même pas un exemplaire pour mon-

trer aux citoyens de mon comté. Le premier ministre a fait le point dans son discours ce matin, à plusieurs reprises même, disant que ce projet de loi n'était pas revanchard. Who does he think he is kidding. He certainly has not been on the beach all summer. I have been here for five months and he certainly was not in listening. The Prime minister himself as well as his ministers have stated over and over in public during the last eight months — qu'on va mettre les minorités à leur place, on va s'assurer qu'elles vont agir comme de vraies minorités. Et ce n'est pas une revanche?

Et que pensez-vous des résolutions prises par des comités du Parti québécois à Montréal à l'effet qu'on devrait éliminer complètement le système d'écoles anglophones d'ici onze ans? N'est-ce pas cela qui inspire la loi 101?

M. Bertrand: II est paranoïaque, ce n'est pas possible!

M. O'Gallagher: Le premier ministre se dit tiraillé et même humilié d'être obligé de faire adopter une telle loi pour la troisième fois en dix ans. Alors, pourquoi n'ont-ils pas tout simplement corrigé la loi qu'on a dans le moment?

Nous avons ici un gouvernement qui est bien malade. Ce complexe d'infériorité monumental se manifeste dans la loi 101. D'abord, il y a la vengeance envers une partie de la population. Deuxièmement, les membres du gouvernement sont tiraillés. Troisièmement, ils sont humiliés. Ils sont aussi masochistes, car un gouvernement qui se punit pour la troisième fois en dix ans est bien masochiste. Il veut se séparer du reste de la famille canadienne, mais, je le répète: Ce n'est pas la province qui est malade, c'est le gouvernement.

We have a saying in English: 'The lawyer who acts as his own counsel has a fool for a client". I leave you to draw the parallel.

Madam President, in closing, let me simply say that the minorities who will live with this law for as long as it lasts, and I predict that it will not last very long — I do not think it has the moral strength to last — we will live with the hundreds of fonctionnaires, the spies, the inspectors, the informers and the enforcers that the minister will send scurring out around Montreal to seek out and destroy the English menues, the doughnut bags, the traffic signs, even the newspapers ads. Good luck to you, Mr minister, and congratulations! Thank you.

Mme le Vice-Président: M. le député de Vanier, je vous demanderais de prendre votre place.

M. O'Neill: C'est l'enthousiasme qui le fait parler.

Mme le Vice-Président: M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Merci, Mme le Président. C'est aujourd'hui une journée historique, mais...

Mme le Vice-Président: Pour ceux qui ne le sauraient pas, je devrai faire remarquer aux gens qui sont dans les galeries qu'il est de tradition dans cette Chambre qu'on leur demande de ne manifester d'aucune façon, même par des applaudissements.

M. Bertrand: Même une journée historique, Mme le Président?

Mme le Vice-Président: M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Je recommence. C'est aujourd'hui une journée historique...

M. Charron: Mme le Président, il reste huit minutes au député de D'Arcy McGee.

Mme le Vice-Président: A l'ordre! A l'ordre, messieurs! A l'ordre! M. le député.

M. Victor-C. Goldbloom

M. Goldbloom: Mme le Président, j'essayais de parler sérieusement, de dire des choses sérieuses en un moment important de l'histoire du Québec. Je vais continuer dans cette veine.

C'est donc une journée où il faut se dire, entre Québécois, des choses franches et sincères.

J'aurais préféré que le chemin par lequel nous sommes arrivés à ce point tournant ait été celui du vrai dialogue, que le gouvernement ne se soit pas fait si imperméable. A ses propres yeux, il avait toujours raison. Mais personne n'a toujours raison. Vous savez, on peut jouer au tennis en frappant la balle contre un mur, on joue au tennis mais on ne poursuit pas ainsi des relations humaines. De l'autre côté du mur, le gouvernement est resté assis, fasciné par son propre nombril.

Nous nous sentions souvent comme Galiléo Galiléi obligé, force majeure, d'accepter la position des autorités en place, se disant, sotto voce: Eppur, si muove! Et pourtant, la terre se meut.

A l'époque de Galilée, les autorités en place croyaient que notre planète était au centre de l'univers. Nous savons aujourd'hui que tel n'est pas le cas. Le Québec n'est pas au centre de l'univers non plus.

En 1823, le président James Monroe, des Etats-Unis, énonça la doctrine qui porte son nom. Aujourd'hui, le gouvernement énonce, en quelque sorte, la doctrine Laurin par une loi qu'il a faite sur mesure, à sa propre image.

Pourtant, il était, au cours de ce long débat, souvent possible, dès que l'on s'éloignait de la table de la commission parlementaire, d'engager avec les députés ministériels, individuellement, un dialogue intellectuel qui était mutuellement sincère, détendu et valable.

Je m'adresse donc à ces collègues, convaincu de leur décence et leur humanité fondamentale, en leur citant un poète qui, par hasard, portait le nom de Robert Burns: "O would the power the giftie gi'e us to see ourselves as others see us."

Vous savez, Mme le Président, on dit que chacun de nous nourrit le désir secret d'être un dicta-

teur, se disant, en guise de disculpation: mais moi, je serais bienveillant. Je voudrais mettre mes amis en garde contre ce qui existe secrètement en chacun de nous. Je les prie de bien surveiller, avec une ouverture maximale d'esprit, l'application de cette loi.

Un député est, par définition, un symbole, qu'il le veuille ou qu'il ne le veuille pas, des fois même malgré lui. Chacun de nous doit faire sa part pour assurer l'application de cette loi dans les conditions les plus favorables pour tous les Québécois. Personnellement, je n'ai pas besoin de vous le dire, je ferai la mienne.

Il est dans l'intérêt de toute opposition parlementaire que le gouvernement subisse des échecs, mais il est dans l'intérêt de toute la population que cette loi réussisse pour tous les Québécois. Je l'ai combattue, et je pense que j'aurai encore des occasions de combattre cette pensée qui, à mon sens, va trop loin. Mais la loi c'est la loi.

Il faut reconnaître — je le dis en terminant — que cette province et ce pays ne seront jamais plus les mêmes, jamais plus ceux que nous avons connus. Nous sommes en évolution et il faudra que cette évolution soit marquée au coin de l'harmonie et du respect réciproque.

J'ai terminé mon discours, lors de la deuxième lecture de ce projet de loi, en tendant la main à mon confrère le ministre. Je termine celui-ci en lui tendant de nouveau la main, en la tendant à tous mes collègues, des deux côtés de cette Chambre, et, à travers eux, à tout le peuple québécois, à tout le peuple canadien. Il faut que nous puissions vivre ensemble. Celui qui vous parle n'a pas le goût de vivre séparément.

Mme le Vice-Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: Rendu à cette dernière étape de l'étude de ce projet de loi, j'attendais avec beaucoup d'impatience l'intervention du premier ministre ce matin. Ce que le premier ministre a dit, c'était beau à entendre. C'était beau d'entendre le premier ministre, ce matin, dénoncer des attitudes de possession tranquille de la vérité et l'arrogance de la certitude qui s'ensuit inévitablement. Un peu plus et je m'attendais à voir le premier ministre dénoncer son ministre d'Etat au développement culturel pour son attitude dans ce dossier.

Une Voix: II l'a fait en privé.

M. Lalonde: Mais non, le premier ministre a, comme toujours dans ce dossier, fait seulement la moitié du chemin. Il s'est contenté, plaintivement, de se déclarer encore une fois humilié, il a exprimé ses tiraillements et s'est lavé les mains, tel Ponce Pilate, des abus et des exagérations de ce projet de loi. Il dit: Je ne sais pas si on a exagéré, on saura à l'expérience.

Les exagérations, l'intolérance, les abus, l'intransigeance ont été dénoncés par de nombreux

Québécois, autant francophones qu'anglophones, et par tous les partis d'Opposition. Où était alors le premier ministre lorsque ces dénonciations ont été faites? Pas une fois il n'est venu à la commission parlementaire qui a étudié le projet de loi no 101 article par article; il n'est pas venu non plus participer aux débats de la première commission parlementaire qui a étudié le projet de loi no 1; il n'est pas intervenu non plus au débat de deuxième lecture. Pourtant, c'eût été fort utile d'entendre ses propos de ce matin en deuxième lecture. Il me semble que l'appel à l'ouverture qu'il a fait ce matin aurait pu inspirer le gouvernement et tous les membres de cette commission parlementaire dans l'examen que nous avons fait des articles de ce projet de loi et aussi à l'égard des amendements que nous avons proposés dans l'adoption d'une cinquantaine d'articles.

Ce n'est pas en pleurnichant à la troisième lecture que le premier ministre va affirmer son leadership. Il implore un essai loyal de cette loi alors qu'il n'a donné aucune chance à la Loi sur la langue officielle qui est actuellement en vigueur. Il promet de la flexibilité, une attitude ouverte, mais il est trop tard. Un vrai démocrate, un vrai chef de gouvernement devrait insister pour que l'ouverture et la flexibilité soient inscrites dans la loi. Laisser cela au gouvernement, c'est ouvrir la porte à l'arbitraire, au patronage et aux abus politiques.

Le premier ministre a invoqué le rapport Gen-dron. J'ai aimé sa référence au rapport parce que trop peu souvent le ministre d'Etat au développement culturel a fait état de cette étude qui est la plus exaustive sur la situation linguistique au Québec. Oui, c'est vrai, nous sommes d'accord et nous ne pouvons être plus d'accord avec la conclusion du rapport Gendron qu'il faut faire du français une langue nécessaire au Québec. Mais le rapport Gendron a aussi dit dans le même souffle de faire attention, d'y aller avec prudence, de faire appel à l'incitation. C'est là que le gouvernement, pour des raisons que j'aurai l'occasion de mentionner tantôt, a choisi une autre voie.

Nous avons, quant à nous, tout fait pour injecter la tolérance, la justice dans ce projet. Nous nous sommes butés à l'entêtement, à l'hermétisme doctrinaire du gouvernement. Nous l'avons fait au nom de tous les Québécois — au nom de notre conscience — qui sont voués aux valeurs démocratiques de tolérance, de justice et d'équité. Je crois que notre devoir est accompli. Le premier ministre, lui, n'a pas fait son devoir. Il a abandonné ses responsabilités aux éléments doctrinaires et radicaux de son parti. Ce n'est pas les sanglots italiens qu'on a entendus ce matin qui vont changer quelque chose. Cela ne changera pas la loi.

L'absence du premier ministre dans ce débat est tragique, car une grande majorité de ceux qui admirent le premier ministre le font pour sa réputation de respect des droits et des valeurs démocratiques.

Mme le Président, un autre chef de parti a déclaré être pour un Québec français. Il l'a fait dans un long discours; je parle du chef de l'Union Na-

tionale. Je voulais simplement vous dire, Mme le Président, parce qu'on ne peut quand même pas rire du monde comme ça, que le 4 août, d'après le rapport que le député de Deux-Montagnes nous a déposé, lorsque l'article 1 a été mis aux voix, l'article qui fait du français la langue officielle du Québec, tous les membres de la commission qui étaient présents ont voté pour, sauf deux de l'Union Nationale, y compris le chef de l'Union Nationale qui n'a pu avoir la volonté de se décider d'être en faveur du français, langue officielle.

C'est bien la politique de l'Union Nationale, Mme le Président: une langue officielle, two official languages, comme le député de Saint-Jacques l'a déjà dit.

Mme le Président, il faut que le français soit la langue officielle au Québec, il faut que cet objectif soit atteint dans le respect des droits individuels et dans le respect des droits collectifs des gens. C'est ce que fait la loi sur la langue officielle actuelle qu'on veut remplacer sans procès par une loi abusive, injuste, source d'affrontements. C'est un retour en arrière que, quant à nous, nous ne pouvons pas accepter. Il est possible de réconcilier les droits de la majorité avec les droits des minorités. Le gouvernement n'a fait aucun effort pour trouver cet équilibre. Il a plutôt choisi l'affrontement des groupes culturels pour des motifs bassement politiques, espérant ainsi obtenir l'appui des membres de la majorité en exaltant leurs passions.

Je suis sûr que la grande majorité des francophones ne suivra pas le Parti québécois et le gouvernement dans cette voie car ils sont également attachés aux valeurs démocratiques.

Mme le Président, en terminant, je devrai déplorer que le gouvernement ait manqué la chance de mettre un terme à ce long et coûteux débat linguistique au Québec.

Mme le Vice-Président: Mme le député de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Mme le Président, durant les trois derniers mois, l'Opposition officielle n'a ménagé aucun effort pour apporter aux projets de loi 1 et 101 les modifications qu'elle jugeait essentielles. Dans ces dernières minutes consacrées à la loi 101, je ne veux pas faire de nouvelles représentations au ministre d'Etat au développement culturel, mais plutôt, par votre entremise, m'adresser au premier ministre.

Bien que je puisse facilement imaginer les contraintes multiples auxquelles il est soumis, je dois néanmoins regretter qu'il ait été totalement absent des travaux de la commission. Après l'avoir entendu ce matin, je le regrette doublement. Pourtant, ce projet de loi, le gouvernement le jugeait si fondamental qu'il a absorbé des sources d'énergie considérables, à un point tel que la population s'inquiète et s'impatiente.

J'aurais voulu et je voudrais demander par votre entremise au premier ministre, si on lui a dit, lorsque son gouvernement a écarté la clause Ca- nada, que les immigrants allophones, depuis la loi 22, s'intégraient en presque totalité à l'école française, que l'inscription des francophones à l'école anglaise, voie ouverte par la loi 63, s'était à toutes fins pratiques refermée, que l'immigration interprovinciale des enfants entre 1950 et 1975, que l'on a toujours brandie comme une menace à l'équilibre démographique du Québec, s'est toujours soldée, sauf pour trois années, par une perte nette aux dépens du Québec.

J'aurais voulu le demander au premier ministre, et lui dire que la raison véritable pour écarter la clause Canada est le critère de facilité retenu par le gouvernement pour déterminer l'accessibilité à l'école anglaise et qu'il devient pratiquement inapplicable si on doit l'étendre à l'extérieur du Québec parce que, comme nous l'a dit plus d'une fois le parrain de la loi, il devient impossible d'exercer les contrôles requis pour la fréquentation scolaire à l'extérieur du Québec.

Mme le Président, a-t-on dit au premier ministre que lorsqu'on a plaidé avec conviction en faveur des modifications à apporter aux articles 20 et 41, on voulait qu'il n'y ait pas de discrimination à l'égard des travailleurs dans l'embauche ou dans des situations reliées au congédiement et à la rétrogradation. Lorsqu'on a discuté de l'article 13, lui a-t-on dit qu'on voulait que la justice à l'égard des justiciables ait priorité sur la langue? A-t-on dit au premier ministre que lorsqu'on a débattu les articles 17 et 25, nous voulions surtout supprimer des mesures tracassières et mesquines qui ne respectent pas cette approche généreuse, qu'il nous a dit souhaiter à l'égard des institutions de la communauté anglophone. Je pourrais multiplier les exemples.

A ce stade-ci de l'adoption de la loi, il est peut-être plus important de s'arrêter quelques instants sur l'application de cette loi. Aussi, je voudrais, Mme le Président, inviter les membres de cette Assemblée à relire le texte soumis par l'assemblée des évêques du Québec dans son avis sur la loi 101. Ces paroles sont éminemment éducatri-ces à cet égard; je n'en citerai qu'une courte partie, et alors qu'il parle de l'application de la loi dans cet ordre où se poursuit l'accomplissement de la loi dans un au-delà d'elle-même, il y a les gestes qui viennent de l'imagination créatrice, les attentions qui font tomber les appréhensions fondées ou pas, il y a les gestes qui dénouent les solitudes.

Le gouvernement, dans l'application de la loi, saura-t-il s'engager dans cette voie? Je crains qu'il n'ait pas posé dans la loi les jalons indispensables pour assurer une démarche commune des citoyens vers une application humaine et généreuse de la loi. Le gouvernement, par son refus de retenir les amendements que nous lui avons proposés aux articles 13, 20 et 41, pour ne mentionner que ceux-là, a choisi de laisser des portes ouvertes à l'injustice et à la discrimination possibles. Est-ce le fait d'une insécurité profonde ou le fait d'un désir de représailles plus ou moins inconscient chez certains de ces membres?

A tout événement, sa rigidité, son désir de brûler les étapes dans un domaine où l'équilibre entre

le respect des droits de la majorité et ceux de la minorité demeure toujours délicat, dans un domaine où le changement social doit respecter l'évolution des mentalités et assurer une compréhension des objectifs poursuivis, le gouvernement a été plus qu'imprudent. Je dirais même qu'il a fait preuve d'un manque de responsabilité en risquant de provoquer des résultats douteux, résultats qu'il n'a sans doute pas voulus, qu'il n'a pas recherchés et qu'il n'avait pas prévus au départ, mais qui lui ont pourtant été signalés avec le plus de persévérance et de persuasion possible par l'Opposition officielle.

Le gouvernement nous a souvent répété qu'il se sentait fort de l'approbation de la majorité de la population. Soit, la majorité des Québécois veut la primauté du français, mais ce n'est pas exact de penser que la majorité endosse dans une législation ce qui risque de produire des conséquences pratiques qui sont en fait des manifestations de discrimination ou de représailles.

Bien que la loi ouvre la porte à des injustices, je ne puis que souhaiter, personnellement convaincue de l'honnêteté foncière et de la générosité des Québécois, que ceux qui l'appliqueront sauront faire preuve de plus de respect des droits des autres que la loi n'en témoigne à certains égards. Je souhaite qu'on ne soit pas témoin des abus que la loi pourrait provoquer, telle qu'elle sera finalement acceptée par cette Assemblée.

Mon dernier mot, Mme le Président, sera pour mes concitoyens du Québec qui sont de langue ou de culture différentes des miennes. Tout en épousant les principes qui assureraient la primauté du français dans toutes les sphères d'activité au Québec, l'Opposition officielle ne s'est jamais dérobée à sa tâche de faire valoir leurs droits.

Même si des esprits étroits nous en ont fait reproche, nous agirions de nouveau ainsi si l'occasion se représentait, sans aucune hésitation, conscients que cette qualité de vie que nous saurons assurer à nos minorités sera le meilleur gage de la qualité de vie de l'ensemble de la société, que nous acceptons de partager tous ensemble.

Je voudrais également rappeler aux membres de cette Assemblée que, dans une sphère ou une autre de notre vie, nous faisons, à un moment ou à l'autre, également partie de minorités. Les handicapés, à cet égard, étaient une minorité et c'est dans ce sens que nous avons défendu nos minorités. A ceux qui sont ici depuis déjà longtemps et à ceux qui plus tardivement sont venus les rejoindre et ont consenti à bâtir avec nous, les francophones, cette province, nous voulons demander de continuer à travailler sans restriction et loyalement à cet objectif de francisation réelle du Québec, en particulier dans le monde du travail et des entreprises, qui demeurera toujours, à mon point de vue, la clef de voûte de l'affirmation véritable du français dans cette province et dans ce pays. Merci, Mme le Président.

Mme le Vice-Président: M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fernand Grenier

M. Grenier: Mme le Président, très brièvement, ce n'était pas mon intention de revenir cet après-midi, puisque je croyais que c'était ma dernière intervention hier. J'aurais aimé que les débats se terminent ce matin avec la présentation par le premier ministre, le discours du chef de l'Opposition officielle, ceux de l'Union Nationale et du député de Beauce-Sud pour, ensuite, prendre fin avec le ministre. Mais, comme d'autres députés sont intervenus — ce n'est pas un reproche, bien sûr, que je fais — je voudrais, en tant que membre de notre parti et représentant à cette table, faire une dernière intervention qui sera de quelques minutes seulement.

Je dois vous dire qu'en cette journée, que j'ai trouvée fort intéressante à cause des interventions vraiment de fond qui nous ont permis d'entendre un dernier son de cloche sur cette loi à jamais mémorable, j'ai quand même regretté que deux intervenants de l'équipe libérale se soient permis de faire de la petite politique. Tout le monde a reconnu que, si les anglophones étaient représentés par le seul député de Westmount, leur communauté serait mise en danger. Son intervention d'hier sur la loi 101 n'a été que pour attaquer l'Union Nationale. Je pense que ce n'était pas la journée pour faire un pareil débat.

Je comprends mal également que le député de Marguerite-Bourgeoys soit venu contredire tout à l'heure la position que nous avons prises sur l'article 1. Le député de Marguerite-Bourgeoys, qui était le parrain de la loi 22 et qui voyait à son application après son adoption en Chambre, sait fort bien qu'il aurait fallu que notre motion d'amendement, qui est à la page 3 de notre livre bleu et qui est connue de tout le monde, soit adoptée avant la lecture de l'article 1. Bien sûr qu'on a appuyé une seule langue officielle après la défaite de l'amendement que nous avons proposé à cette table. Le député de Marguerite-Bourgeoys le savait. Je le trouve malvenu aujourd'hui de dire cela. S'il y a quelqu'un qui a collaboré après, c'est bien l'Union Nationale, sachant bien que sa motion no 1 avait été battue. Le ministre a été témoin que nous avons mis de côté, à ce moment, notre amendement qui a été battu pour ensuite tenir compte uniquement de la loi avec l'article 1 qui avait été voté autour de cette table. C'était dans la grande logique et dans le respect de l'esprit de notre parti que nous avions présenté l'amendement. Je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys était bien malvenu de souligner cela, surtout que je ne le compare pas au député de Westmount; je pense qu'il voit plus loin et que ce n'aurait pas été l'endroit pour faire cela.

Mme le Président, après cette mise au point, je voudrais vous dire que, dans cette Assemblée nationale, depuis l'ouverture des débats, nous sommes un peu comme des poissons dans un aquarium; nous respirons le même oxygène depuis à peu près deux mois, relativement à cette loi. Dommage, cependant, que nous n'ayons pas eu l'occasion de nous retremper plus profondément

dans le Québec, en retournant dans nos comtés et en faisant des rencontres à plusieurs niveaux. Peut-être que votre position aurait changé; peut-être que la nôtre aussi aurait changé, pas seulement celle du gouvernement. Peut-être que nous aurions transformé notre opinion. Nous n'avons pas eu le temps de retourner dans nos comtés et, parce que c'était le grand débat qui était chaque matin "gazette", on avait des chances d'entendre plus de monde qui en parlait, puisque avant la dernière élection et avant la présentation de ce projet de loi 101, peu de gens pouvaient parler. Les grandes déclarations qui se faisaient à ce moment permettaient à plus de monde de parler de la loi 101 et, si cela s'était fait moins rapidement, nous aurions pu entendre davantage parler nos gens.

Je dois féliciter le ministre d'Etat au développement culturel qui a été, tout le long de la loi, d'un calme remarquable.

Pour avoir été un des représentants de notre parti, je suis obligé de vous dire que c'est un stress qui n'est pas ordinaire que d'être un représentant de son parti à une table de travail de ce genre. J'ai voté des crédits, par le passé, à la salle 81 ou 91, et nous n'avons pas le poids de responsabilité que nous avons comme représentants de parti quand on discute d'un projet aussi important.

Je dois dire que le calme du ministre a largement influencé les travaux de cette table de travail, et je pense que, du côté libéral autant que chez nous, ce calme a évité bien des tempêtes autour de cette table. Jamais le ministre n'a élevé le ton pour se défendre contre les attaques qu'on pouvait faire, de notre côté, au gouvernement. Je pense qu'il faut lui rendre cet hommage. Je dois également lui signaler que la tournée qu'il a faite en province pour sensibiliser la population a été de grande utilité. Bien sûr que ce n'est pas suffisant, bien sûr que nous aurions aimé que plus de monde participe à ces renseignements, mais je pense qu'il faut rendre témoignage au ministre de l'effet intéressant qu'il a fait.

Par contre, il faut également reconnaître que l'intransigeance du gouvernement, qui n'était peut-être pas uniquement celle du ministre mais celle du gouvernement, était vraiment impénétrable. Nous sentions que cette parole qui a été dite par d'autres avant moi: Ego sum via, veritas et vita, c'était du côté du gouvernement, et qu'il n'y avait vraiment pas moyen de la traverser.

Cela a été pénible de travailler, pour l'Opposition, parce que nous avons mené là un vrai combat, que ce soit du côté de l'équipe libérale ou chez nous. Nous avons tenté de mener un vrai combat en présentant plusieurs vrais amendements, un combat bien rangé. Bien sûr, du côté du gouvernement ou d'ailleurs, on pouvait trouver que nos positions, parfois, n'étaient pas trop en concordance avec celles du gouvernement, mais nous tâchions de représenter les 20% de la population qui nous a élus et d'être dans l'esprit de notre programme électoral, même si cela déplaît à certains membres de cette Chambre.

Mme le Président, en terminant, nous avons voulu être, dans nos propositions, dans nos amendements, à l'image du vrai Québec, de tout le Québec. Et l'Union Nationale sera encore là pour tâcher de bonifier cette loi, une fois qu'elle sera votée ici aujourd'hui. C'est connu maintenant que nous voterons, en troisième lecture, contre cette loi, mais notre parti sera encore là pour tâcher de bonifier cette loi, éviter de mettre plus de sable dans l'engrenage, s'il devait y en avoir, et aider à régler des situations qui se présenteront à partir de maintenant. Comptez sur l'Union Nationale qui continuera d'être une Opposition objective et constructive.

Mme le Vice-Président: La réplique de M. le ministre d'Etat au développement culturel.

M. Camille Laurin

M. Laurin: M. le Président, du chantier où on y travaille d'arrache-pied depuis neuf mois, la Charte de la langue française, ce beau navire tout neuf, glissera aujourd'hui même, en ce 101e jour de la présente session de l'Assemblée nationale du Québec, dans le fleuve de l'histoire. La joie intense et profonde que nous ressentons balaie d'un seul coup les fatigues et frustrations accumulées au cours de ce long et âpre combat car le but est maintenant atteint.

Répondant à un appel qui monte du fond des siècles et que la conjoncture ne rendait que plus pressant, le gouvernement du 15 novembre a donné au peuple québécois cette charte qu'il attendait depuis longtemps, qui marque et assure son identité, éloigne les dangers qui le menaçaient, lui procure fierté, dignité et bien-être, lui donne un lieu et les outils dont il a besoin pour faire éclater son dynamisme et travailler à son progrès et son épanouissement. Et il le fait en ce beau mois d'août où, il y a déjà plus de quatre siècles, Jacques-Cartier donnait leur nom à notre grand fleuve et à notre cher pays.

Ce geste capital qui renverse le cours de notre histoire des deux derniers siècles qui oriente dans le sens de la maturité, de la création et de l'ouverture au monde notre existence collective, nous le posons pour les Québécois d'aujourd'hui et les générations de l'avenir. Débarrassé ou presque de ses glaces, le fleuve de notre vie commune coule désormais et à nouveau vers la mer avec ampleur, librement, avec toute sa force. Nos enfants se rappelleront toujours ce moment privilégié, ce moment de mutation et de cristalisation où notre peuple s'est à la fois retrouvé et transformé, où il a pris conscience de sa singularité au moment même où il l'affirmait avec sérénité et assurance, où il a repris possession à la fois de sa langue et de son pays, où il a vibré collectivement à l'évocation d'un passé où il se racine et d'un avenir où il se projette.

Cet avenir nous paraît clair. Dans un Québec désormais et pour toujours français, il est logique de prévoir d'autres reprises en main, d'autres appropriations et d'autres bonds en avant: gestion et aménagement du territoire, développement cultu-

rel, organisation sociale, stratégies économiques et, enfin, souveraineté politique.

C'est avec tous les Québécois que nous assumerons ce destin et le marquerons de notre génie propre car nous entendons y associer, à travers cet instrument de communication collective et de cohésion sociale que deviendra désormais la langue officielle, tous les groupes ethniques qui nous apportent la richesse et la variété d'apports culturels spécifiques qu'ils devront maintenir et développer. Cela vaut en particulier pour la communauté anglophone du Québec.

Comme le disait ce matin le premier ministre, celle-ci conserve tout son réseau d'institutions scolaires, sociales et culturelles. Nous comprenons qu'au cours du débat actuel elle ait voulu défendre ses positions acquises et résister aux changements nécessaires en évoquant des dangers possibles auxquels ses craintes avivées et de solides conditionnements imprimaient un caractère de réalité. Mais c'est la réalité elle-même qui dissipera demain ces craintes hypothétiques et non fondées.

Nous respectons et apprécions trop, en effet, la communauté anglophone du Québec pour ne pas faire montre à son égard de la plus grande amitié et ouverture d'esprit possible, et c'est en ce sens que j'accepte la main tendue du député de D'Arcy McGee. Ce qui nous rapproche est infiniment plus important et précieux que ce qui a paru un moment nous séparer.

Pour notre part, nous entendons identifier nos aspirations et préoccupations communes, nos problèmes communs, jeter des passerelles et travailler ensemble à l'élaboration de solutions qui assureront notre progrès commun. C'est la même approche que nous entendons utiliser à l'endroit des autochtones du Québec. Dans le préambule, nous leur avons garanti le respect et le développement de leur langue et culture d'origine. Nous entendons respecter scrupuleusement les engagements de la convention de la baie James et du Nord québécois. Il me fait plaisir de dire ici que les Inuit de Povungnituk, de Saglouc, d'Ivujivik entendent se dissocier des mouvements factieux des derniers jours dans le Nord du Québec.

Il me fait plaisir aussi de dire que les Cris de la baie James entendent également se dissocier de ce mouvement de protestation qui a son origine seulement, soit dans une mauvaise information ou une mauvaise interprétation de la loi actuelle.

Donc, en ce jour historique où nous allons franchir ensemble une étape cruciale de l'histoire du Québec, permettez-moi d'exprimer à mes collègues ma profonde satisfaction de leur dire jusqu'à quel point je suis fier aujourd'hui d'être membre de l'Assemblée nationale, d'y sentir souffler ce vent de dignité et de fierté, d'y retrouver cette foi en l'avenir de notre peuple et cette détermination à poser enfin ce geste capital qu'il attend de nous.

Ce peuple que nous représentons, il a tellement travaillé et peiné sur ce coin de terre qu'il a bien mérité de se sentir enfin pleinement chez lui et d'y vivre comme il l'entend, d'y parler sa langue dans sa vie quotidienne comme dans toutes les manifestations de sa vie collective. Il a acquis le droit de se reconnaître dans le paysage de son pays et d'y imposer calmement le respect de sa langue, aussi bien aux étrangers de passage et aux entreprises étrangères établies chez lui qu'à tous les nouveaux arrivants sur son territoire.

La Charte de la langue française n'est rien d'autre que le geste d'un peuple qui est résolu à vivre sa vie. Qu'on ne s'y trompe pas. Ce n'est pas au nom d'une vénération inconditionnelle pour la langue française prise comme une abstraction que le Québec se donne maintenant cette loi historique. C'est au nom du respect de soi-même. Comme le dit souvent un fougueux syndicaliste de chez nous, ce qui est important, ce n'est pas de sauver la langue française, mais bien de sauver ceux qui la parlent. Mais justement, nous parlons français et il est temps que le fait de parler français ne soit plus chez nous une occasion d'humiliation ou une entrave au progrès social, économique et scientifique.

Le geste que nous allons bientôt poser aura donc une portée beaucoup plus que symbolique. Il débordera le domaine de la culture, du moins pour autant qu'on la définit de façon étroite. Notre geste aura très profondément une portée socio-économique. Ce sera notamment un geste décisif pour la libération et la promotion des travailleurs québécois. On me permettra d'insister sur cet aspect socio-économique de la charte, car c'est d'abord et avant tout pour les travailleurs, pour les petits cultivateurs, pour les ménagères, pour les consommateurs, pour les locataires et les petits propriétaires, pour toutes les petites gens de chez nous que nous avons proposé ce texte de loi; pour eux beaucoup plus que pour les patrons et les riches.

La langue nationale est une condition de vie. Nous ne pouvons pas, pour la libération et la promotion des travailleurs, nous substituer, certes, aux organisations de lutte qu'ils se sont eux-mêmes données. Mais nous pouvons au moins faire disparaître l'entrave linguistique, les assurer qu'ils peuvent négocier, se défendre et lutter dans leur langue. Nous pouvons au moins les assurer que cet instrument premier de la négociation de leurs conditions de travail que constitue la langue n'aura pas elle-même besoin d'être négociée.

Nous pouvons au moins les assurer qu'il ne sera plus permis ici de se servir de la langue comme d'un moyen de filtrer les promotions au sein des entreprises. Nous ne pouvons pas, pour la libération et la promotion de notre classe agricole, tout faire à la place de ses syndicats professionnels et de son organisation coopérative, mais nous pouvons au moins imposer aux entreprises qui traitent avec eux, comme fournisseurs ou comme acheteurs, de le faire dans la langue du pays.

Pour les ménagères et pour tous les consommateurs, nous allons poser le geste de leur donner un minimum de sécurité en imposant aux entreprises de communiquer avec eux dans la langue du peuple québécois. Le peuple ne nous pardon-

nerait pas de lui assurer sa sécurité en matière de langue que dans la seule mesure où il accepterait de rester confiné à des emplois inférieurs ou à l'usage de techniques artisanales. La langue française en ce pays doit non seulement donner aux travailleurs la possibilité d'être promus à des responsabilités de plus en plus importantes, aux agriculteurs et aux artisans d'avoir accès aux techniques les plus perfectionnées, mais le français doit aussi redevenir chez nous la langue de la science, de la découverte, de l'innovation, de l'invention. La loi ne peut pas tout faire en ce domaine, mais nous aurons au moins, comme législateurs, fait quelque chose pour réduire le fossé artificiel entre les détenteurs patentés du savoir et de la technique, d'une part, et ceux, d'autre part, dont la vie et le travail sont quotidiennement conditionnés par l'évolution de ce savoir et de cette technique.

C'est pour cela, notamment, que nous allons imposer aux membres des ordres professionnels d'avoir non seulement une connaissance d'usage du français, qui leur aurait permis de causer de la pluie et de beau temps, mais aussi une connaissance appropriée à l'exercice de leur profession pour que le français prenne toute sa place dans le monde de la science et de la technique, toute la place qu'il mérite et à laquelle il a droit. C'est pour cela aussi que les programmes de francisation verront à généraliser l'utilisation du français dans les documents de travail des entreprises, notamment, dans les manuels et les catalogues.

C'est pour cela, enfin, que l'Office de la langue française pourra exiger des institutions d'enseignement supérieur un rapport sur la langue des manuels utilisés. En somme, la Charte de la langue française concerne tous les Québécois sans exception; elle leur propose à tous de participer, en français, à la vie et au progrès d'un peuple qui aspire à réaliser son unité dans la fidélité à sa tradition française et dans le plus grand respect de toutes ses composantes.

A ce peuple, qui inaugurera demain une nouvelle ère de son histoire, je dis, en terminant, qu'il a bien mérité de lui-même, qu'il doit maintenant se faire pleinement confiance et qu'il est désormais en mesure de se préparer des lendemains qui chantent.

Le Président: Comme je conçois qu'il y a de ces explosions qui sont difficilement réprimables, je vais demander au public de ne pas se manifester pour le reste de la journée. Mais, comme je suppose aussi qu'on demandera un vote enregistré...

M. Charron: Certainement, M. le Président.

Le Président: ... avant de mettre aux voix la motion de troisième lecture de la loi 101, je voudrais, conformément à la tradition, convier tous les parlementaires, les membres de la Tribune de la presse et le dévoué personnel de l'Assemblée nationale à marquer cette fin de session que j'hésite à appeler estivale, mais enfin!

C'est ainsi que je vous invite tous, tout de suite après l'ajournement, au Parlementaire, où vous sera servi le vin de l'amitié et de la fraternité.

Qu'on appelle les députés!

M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: Je voulais vous demander une directive. N'ayant aucune objection à ouvrir ou à fermer la fenêtre, j'aimerais vous demander si, durant l'intersession, ce bon et ce vrai gouvernement va pouvoir régler le problème des cartographes?

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Avant de procéder à la mise aux voix, je voudrais demander, une fois de plus, au public qui se trouve dans les galeries de ne pas manifester. J'adresse cette demande non seulement au nom de la Présidence, mais au nom également du premier ministre, du chef de l'Opposition et du chef de l'Union Nationale que je viens tout juste de rencontrer.

Si je le fais, ce n'est pas pour être désagréable à l'égard de quiconque. Je vous le demande par respect pour l'institution suprême des Québécois. Une fois n'est pas coutume et je n'ai pas d'objection, à condition que cela ne se reproduise pas avant 100 ans encore. Comme cela s'est produit déjà une fois, une deuxième fois, je pense que ce serait une fois de trop. Je vous remercie à l'avance de votre collaboration.

Vote sur la motion de troisième lecture

J'appelle maintenant la motion de troisième lecture du projet de loi no 101 intitulé: Charte de la langue française. Que ceux qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Burns, Mme Cuerrier, MM. Cardinal, Bédard, Laurin, Couture, Johnson, O'Neill, Mme Ouellette, M. de Belleval, Mme Payette, MM. Lessard, Proulx, Charron, Duhaime, Tardif, Garon, Chevrette, Michaud, Paquette, Vaillancourt (Jonquière), Marcoux, Martel, Fallu, Rancourt, Mme Leblanc, MM. Grégoire, Bertrand, Godin, Laplante, Bisaillon, de Bellefeuille, Guay, Mercier, Laberge, Marquis, Lacoste, Ouellet, Perron, Brassard, Clair, Gosselin, Lefebvre, Dussault, Charbonneau, Beauséjour, Desbiens, Baril, Boucher, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gagnon, Jolivet, Roy.

Le Président: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure), Lavoie, Mackasey, Lalonde, Forget, Garneau, Goldbloom, Saindon, Saint-Germain, Mme Lavoie-Roux, MM. Lamontagne, Giasson, Blank, Caron, O'Gallagher, Picotte, Ciaccia, Marchand, Gratton, Pagé, Verreault, Springate, Biron, Grenier, Russell, Goulet, Fontaine, Brochu, Shaw, Le Moignan, Dubois, Samson.

Le Président: Que ceux qui désirent s'abstenir veuillent bien se lever!

Le Secrétaire: Pour: 54 — Contre: 32 — Abstentions: 0

Le Président: La motion est adoptée.

M. Burns: M. le Président, avec la permission de la Chambre, je demanderais l'unanimité de la Chambre pour que le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières puisse — même si ce n'est pas le moment de le faire habituellement selon nos travaux, mais étant donné qu'il est probable que dans les minutes ou les heures qui suivent, nous puissions ajourner — déposer un rapport relativement à la réforme de l'assurance automobile. Ceci pour en informer l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale ainsi que la population en général.

Le Président: Y a-t-il consentement? M. Lavoie: Consentement accordé. Le Président: Mme le ministre.

Mme Payette: Document déposé, M. le Président. Il s'agit tout simplement d'un petit document questions-réponses pour faciliter la tâche à tout le monde, tâche de compréhension difficile dans un domaine aussi technique.

Le Président: Document déposé.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: Un instant, M. le Président. Cela va vite. D'abord, je tiens à informer nos collègues de l'Assemblée nationale que la commission de la présidence du conseil a terminé ses travaux relativement au projet de loi no 2, et que ce rapport devrait incessament nous être soumis. Il faut quand même donner le temps aux fonctionnaires qui voient à sa rédaction de nous le soumettre, de sorte qu'il y aura peut-être un léger retard quant à la prise en considération du rapport du projet de loi no 2 mais, en principe, cela devrait se faire dans les instants qui suivent.

D'autre part, ce matin, nous avons eu un ordre de la Chambre à l'effet que nous pourrions prendre en considération le rapport de la commission parlementaire de l'agriculture relativement au projet de loi no 43 et je vous demanderais, M. le Président, s'il vous plaît... Ah? Il reste la troisième lecture...

Je vous demanderais alors d'appeler la troisième lecture du projet de loi no 43.

Projet de loi no 43 (suite) Modifications au rapport

Le Président: J'appelle maintenant la motion de troisième lecture de la Loi modifiant la Loi sur les produits agricoles et les aliments, motion de M. le ministre de l'Agriculture.

M. Charron: M. le Président, si vous permettez, sur cette loi en particulier, je voudrais bien clarifier le texte de la loi, car il y a eu erreur dans le rapport adopté ce matin. Avant que les députés ne se prononcent sur la troisième lecture, je voudrais bien qu'on vote sur le texte tel qu'adopté en commission parlementaire.

Il y a deux toutes petites modifications au rapport. La première est à l'article 1, paragraphe h), il faudrait lire: "...à l'exclusion des repas..." ajouter les mots "...ou collation..." C'est le texte que la commission avait adopté.

Et plus loin, à l'article 1, paragraphe j), la commission a adopté le texte suivant: "...détaillant: toute personne qui fait de la vente en détail;" C'est le texte tel qu'adopté et je propose donc la troisième lecture de ce projet de loi.

Le Président: Adopté? Les modifications sont adoptées?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté. M. Lavoie: Adopté.

Le Président: Alors, que ceux qui sont en faveur de cette motion...

M. Dubois: Ce n'est pas adopté.

Le Président: Ah! Vous adoptez... Je croyais que c'étaient les modifications, M. le chef...

M. Dubois: Ce sont les modifications.

Le Président: Je croyais que c'étaient les modifications au rapport que vous aviez adoptées.

L'Union Nationale adopte-t-elle le projet? La troisième lecture?

M. le député de Huntingdon, très brièvement.

Troisième lecture M. Claude Dubois

M. Dubois: Cinq minutes, M. le Président. D'accord? Merci, M. le Président. Le sujet de mon intervention n'a certainement pas l'attrait et n'atteint sûrement pas le peuple québécois dans le plus profond de lui-même comme l'a fait la loi 101 que cette Chambre vient de sanctionner.

Toutefois, le sujet en discussion a quand même beaucoup d'importance. M. le Président, hier nous terminions l'étude du projet de loi no 43, article par article. Cette étude nous a permis de mieux approfondir les principes de cette loi et d'en apprécier davantage les buts précis.

M. le Président, il en ressort que l'essence même de toute cette loi se situe uniquement dans la brique de règlements qui nous fut présentée mercredi et sur lesquels il nous est impossible de porter un jugement valable à l'intérieur d'un laps de temps aussi restreint.

Nous sommes désireux que l'image des petits abattoirs québécois soit rehaussée et nous souhaitons fortement que ces entreprises jouissent d'une meilleure crédibilité auprès du consommateur, mais j'aimerais indiquer au ministre qu'il devra

être très prudent dans l'application des règlements, car il ne faut pas que cette loi devienne un élément incompatible avec le développement accru que l'on désire tous de la commercialisation des viandes de consommation produites au Québec et également de l'économie que représente ce secteur d'activité.

Je dois quand même indiquer que le ministre et ses fonctionnaires ont répondu d'une façon très acceptable aux craintes et aux appréhensions que nous avons exprimées en deuxième lecture. Cette crainte se situait particulièrement au niveau de l'inspection permanente et aussi au niveau de la troisième inspection requise pour les ventes en gros, ce qui aurait pu cheminer vers un lourd processus administratif.

En deuxième lecture, l'Union Nationale avait formulé certaines demandes telles une aide financière sur les déboursés en capitalisation. A ce moment, le ministre a effectivement répondu favorablement et nous en sommes heureux. J'aimerais aussi exprimer le voeu que le ministre accorde un délai raisonnable en ce qui a trait à l'application des nouvelles normes que cette loi mettra en vigueur. Un délai de 18 mois serait assez logique et pourrait permettre à plus de petits abattoirs d'inscrire leur demande de permis ou d'en arriver à une décision finale sur leur avenir.

M. le Président, en dehors de tout ce qui s'est dit depuis la présentation de ce projet de loi, il n'y a, je crois, qu'une seule manière d'appliquer cette loi avec harmonie et justice. M. le Président, à ce moment-ci, j'insiste fortement auprès du ministre pour qu'il nous prouve l'ouverture d'esprit qu'il prétend avoir, à savoir de permettre et recommander l'établissement d'un comité permanent, indépendant, où pourraient se rencontrer périodiquement ou selon les besoins, d'une part, les hauts fonctionnaires rattachés au dossier des abattoirs et, d'autre part, les membres du bureau de direction de l'Association des petits abattoirs du Québec et auxquels pourraient aussi s'ajouter les députés intéressés.

Face à la complexité des règlements ainsi qu'aux difficultés d'interprétation et d'application, la formation d'un tel comité constituerait vraiment un pas très important vers une démocratisation désirable et même nécessaire de l'appareil administratif que constitue le fonctionnarisme. Je remercie donc le ministre d'avoir bien pris note de cette dernière suggestion, laquelle est primordiale pour le succès de ce projet de loi.

En terminant, je désire appuyer fortement sur l'importance économie agro-alimentaire que représentent les viandes dans nos coutumes et dans nos préférences alimentaires. Au Québec, en 1977, notre consommation en aliments et boissons se chiffrera par $5 milliards. Je vous assure qu'il est très peinant de constater que nous ne produisons, actuellement, que 50% de ce chiffre. Effectivement, nous accusons un retard de $2,5 milliards de production ici au Québec, seulement en aliments et boissons. N'est-ce pas une raison suffisante pour nourrir une préoccupation constante en ce qui a trait à notre production, à l'élevage de bestiaux, à la transformation et à la mise en marché de nos produits agricoles?

Je termine en souhaitant ardemment que le ministre mette tout en oeuvre afin de constamment améliorer notre autosuffisance pour le mieux-être de nous tous, Québécois. Merci.

Le Président: Est-ce que cette motion... M. Roy: M. le Président...

Le Président: Je m'excuse, M. le député de Beauce-Sud; je vous cède la parole.

M. Fabien Roy

M. Roy: ...quelques brèves remarques sur un dossier particulier. J'aimerais M. le Président, attirer l'attention du ministre sur quelques points. Malgré tous les travaux et bien que nous soyons près de l'ajournement de la session, alors que nous avons dû voyager d'une commission parlementaire à l'autre, nous avons pu, quand même interroger le ministre et obtenir des informations pertinentes qui ont contribué à nous rassurer et qui contribueront, je pense, à rassurer le milieu.

La loi actuellement en troisième lecture comporte des dispositions qui sont des améliorations et qui permettent de donner des garanties par rapport à la loi précédente. Comme vient de le souligner l'honorable député de Huntingdon et comme nous avons pu le constater hier, au cours de l'étude de ce projet de loi en commission parlementaire, les règlements beaucoup plus que la loi feront en sorte que les petits abattoirs survivront ou devront fermer. Tout dépend de la façon dont la réglementation va être appliquée; c'est là que nous pourrons réellement mesurer l'importance du projet de loi actuel et des buts que le gouvernement, le nouveau ministre veut atteindre.

Le ministre a dit souventefois à l'Assemblée nationale qu'il allait faire l'impossible pour que les petits abattoirs puissent survivre au Québec. Cependant, à la suite des questions que nous avons posées au ministre hier, un certain nombre de points demeurent obscurs, qui auront sûrement des implications quant à la survie des petits abattoirs, puisqu'on n'est pas en mesure de nous répondre actuellement. J'aimerais en citer deux. Même si on nous a donné l'exemple d'un établissement évalué à $70 000 en coûts d'immobilisation, il n'en demeure pas moins qu'on n'a aucune certitude et aucune garantie que ce sera ce type d'entreprises qui sera accepté par ceux qui seront chargés d'appliquer la loi et surtout les règlements auprès des entreprises concernées.

Ce qui n'a pas été déterminé non plus, ce sont les frais d'exploitation d'une telle entreprise pour être en mesure de déterminer si une entreprise de cette nature peut être viable ou non, parce que la survie des petits abattoirs est liée à leur viabilité. Je n'apprends rien à personne à ce moment-là. C'est pourquoi je suggère, suite aux recommandations faites par mon collègue de l'Union Nationale, qu'il serait important — je le dis à l'intention du

ministre qui tient un caucus à l'heure actuelle — que la nouvelle réglementation, qui vient d'être déposée, dans un premier temps, peut-être avant la constitution d'un comité permanent, puisse être examinée en profondeur entre les officiers du ministère et les représentants de l'association pour la conservation des petits abattoirs. Le ministre devrait, aujourd'hui, nous donner une garantie formelle qu'il pourra y avoir des séances au cours desquels les personnes concernées, soit les représentants, les directeurs de l'association des petits abattoirs et leurs procureurs, pourront rencontrer les officiers du ministère, discuter de ces amendements et voir quels sont les correctifs ou les améliorations qui pourraient être apportés.

Je pense qu'il y a plusieurs catégories de permis de prévues, cela pourrait faire également l'objet, puisque le règlements peuvent être adoptés sans l'assentiment de l'Assemblée nationale, d'un examen sérieux lors de ces rencontres. Un problème soulevé à maintes et maintes occasions, c'est le fait que les propriétaires de petits abattoirs qui font le commerce de la viande au détail et en gros seraient obligés de détenir des permis différents et distincts pour pouvoir continuer d'exploiter leur entreprise.

Ces permis distincts impliquent des coûts additionnels et c'est peut-être là toute la différence qu'il y a entre une entreprise qui peut survivre par le fait qu'elle pourrait être rentable et une entreprise qui ne serait pas rentable. Quant à l'inspection, j'aimerais reprendre les propos tenus en commission parlementaire par nos collègues du parti ministériel. Il serait urgent que le ministère de l'Agriculture retienne les services de vétérinaires dans différentes régions afin que, pour les animaux qui sont abattus dans les abattoirs, et dans les abattoirs où l'inspection ne pourra se faire de façon régulière, on puisse disposer de certificats de santé de l'animal où moment où il sera abattu. Trop d'animaux, à l'heure actuelle, condamnés pour toutes sortes de raisons au niveau de la production, que ce soit au niveau de la production laitière ou autre, condamnés pour maladie, prennent le chemin des abattoirs, et pas de petits abattoirs.

Ce sont de gros abattoirs et je dirais des abattoirs Canada Approved. Il y aurait lieu pour le gouvernement du Québec d'être vigilant. Sans multiplier les embêtements pour les propriétaires d'établissement, il devrait y avoir une précaution de prise en vue de protéger le consommateur québécois.

Le Président: M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Julien Giasson

M. Giasson: M. le Président, très brièvement, je voudrais rappeler d'abord que, lorsque le débat de deuxième lecture a été entrepris sur la loi 43, nous venions à l'instant même de recevoir la réglementation qui sert à appliquer la loi et qui a causé beaucoup d'émoi chez les propriétaires de petits abattoirs.

Comme le temps nous a manqué pour faire un examen approfondi de cette réglementation et pouvoir évaluer les conséquences que cela posait au plan financier pour la survie de plusieurs petites entreprises de chez nous, nous avons cru bon, lors du vote de deuxième lecture, de nous prononcer contre parce que cette réglementation nous était déposée trop tard. Il ne nous était pas possible d'évaluer quel serait le cheminement nouveau que connaîtraient les petits abattoirs chez nous.

Cependant, je dois remercier, tant le ministre de l'Agriculture que tous les membres de la commission parlementaire, d'avoir accepté, au-delà des pouvoirs normaux qui sont dévolus à une commission permanente qui procède à l'étude article par article d'une loi, que nous menions un assez long débat sur l'étude de la réglementation nouvelle qu'on nous proposait.

Mais, au-delà de toutes ces choses, je dois dire qu'au moment du vote de troisième lecture je regrette encore que cet élargissement de la loi sur les aliments et produits agricoles ne nous ait pas permis enfin de déboucher sur le principe de l'inspection obligatoire des viandes au Québec. Ainsi, le consommateur québécois pourrait retrouver une confiance aussi grande dans l'achat de ses viandes lorsqu'elles proviennent d'établissements sous inspection provinciale que sous contrôle fédéral.

Cependant, la disposition nouvelle que le ministre a apportée dans cette loi afin de permettre à quelques établissements — je dis bien de rares établissements — de pouvoir fonctionner quand même sans être assujettis à une inspection obligatoire nous indique que dans un temps assez prochain nous pourrons enfin avoir des établissements sous contrôle provincial au Québec qui auront les mêmes cotes d'excellence, qui présenteront les mêmes garanties que ces établissements qui ont été traditionnellement sous contrôle du gouvernement fédéral dans le passé.

Le Président: M. le ministre. M. Jean Garon

M. Garon: Je veux dire seulement un mot, très bref. Je pensais qu'on passerait cet après-midi. Je dois aller souper à Granby — je pense que je vais arriver pour le café — avec l'Association des grossistes en fruits et légumes.

M. Grenier: ...de temps en temps.

M. Garon: Je sais que j'ai de bonnes réserves. L'appétit vient en mangeant, comme vous le savez. Le député de Huntingdon me demandait d'être très prudent. Il faut dire que c'est mon habitude d'être prudent. Le délai raisonnable de 18 mois dont il parlait, c'est exactement ce que j'ai mentionné en commission parlementaire. Le délai que nous envisageons jusqu'à maintenant, c'est un délai minimum de 18 mois pour que les abattoirs aient le temps de se moderniser.

Quant à un comité permanent des petits abat-

toirs, je pense que cela ne sera pas nécessaire. Je dois vous dire par ailleurs que, dès ce matin, le projet de règlement a été expédié aux quatre associations qui travaillent dans le secteur de la viande au Québec, et même dans le secteur de la viande de consommation et aussi à l'Association des fondoirs, c'est-à-dire des viandes impropres à la consommation humaine également.

Nous avons l'intention, dans les prochains jours et semaines, de rencontrer ces associations pour revoir et réviser une dernière fois le règlement avant d'en proposer l'adoption au Conseil des ministres. Toutes les personnes et associations qui sont concernées dans ce secteur pourront poser toutes les questions afin de savoir comment pourrait s'appliquer le règlement et en même temps voir s'il n'y aurait pas des oublis ici et là dans les coins d'un règlement aussi volumineux, comme vous l'avez mentionné.

La proposition du député de Beauce-Sud équivalait à dire que les inspecteurs du Québec devraient quasiment inspecter les abattoirs Approuvé Canada. Je pense que ce n'est peut-être pas dans l'immédiat qu'on va faire cela. Par ailleurs, quand le député de Montmagny-L'Islet dit que le contrôle provincial est inférieur au contrôle fédéral, je dois dire que le contrôle Approuvé Québec va être aussi bon sinon supérieur à celui Approuvé Canada.

Il y a une exception, une tolérance pour des petits abattoirs qui existaient à la date du dépôt de la loi mais, dans notre esprit, il s'agit d'une étape qui permet aux petits abattoirs de se moderniser dans une période un peu plus longue. Nos inspecteurs inspecteront, nos services vétérinaires, dans les différentes régions, vont travailler avec les gens des petits abattoirs pour leur expliquer la loi, le règlement, les indemnités auxquelles ils auront droit s'ils se retirent, comme petits abattoirs non inspectés, et quelles sont les subventions auxquelles aussi ils ont droit pour se moderniser.

Je pense que, jusqu'à maintenant, nous avons travaillé dans ce dossier à la lumière du jour, le plus ouvertement possible, sans cachette, même si le règlement a été donné à l'Opposition à la dernière minute. En fait, on a essayé de le corriger constamment en cours de route. C'est une des premières fois qu'un règlement est donné à l'Opposition avant l'adoption en deuxième lecture. Je m'en réjouis puisque l'étude en commission parlementaire a été, de ce fait, beaucoup plus éclairante pour l'ensemble des députés qui sont concernés par ce secteur.

Je veux remercier tous ceux, encore une fois, qui ont travaillé avec nous sur ce dossier, les fonctionnaires, surtout dans les dernières semaines, plusieurs ont travaillé jusqu'à minuit. Je voudrais également remercier les membres de l'Opposition qui ont eu une attitude positive dans ce dossier lors des études en commission parlementaire.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

M. Lamontagne: Adopté, M. le Président.

M. Burns: Avant que je ne l'oublie, parce qu'en fin de session, souvent, on oublie des choses, j'aimerais, d'une part, dire à nos collègues de l'Assemblée nationale qu'il y aura, à 20 heures, ce soir, sanction de projets de loi chez l'honorable lieutenant-gouverneur.

Evidemment, si on devait siéger un peu plus tard que cela, j'espère que non, ce serait retardé en conséquence.

J'aimerais aussi, M. le Président, que l'Opposition et les députés ministériels permettent, à ce moment, au ministre de la Justice de donner des précisions relatives à des questions qui ont été posées ce matin par, entre autres, le député de Marguerite-Bourgeoys, et le député de Nicolet-Yamaska, et probablement d'autres députés. Je sais que le député de Verchères est très intéressé par ce sujet... Si on avait le consentement, peut-être qu'à ce moment, avant de continuer nos travaux, on pourrait permettre au ministre de la Justice, brièvement, de nous donner des précisions.

Le Président: Le consentement est-il accordé?

M. Brochu: Accordé.

M. Lavoie: Consentement.

Le Président: Accordé, alors M. le ministre de la Justice.

Réponse de M. Bédard

Juge en chef de la

Cour des sessions de la Paix

à Montréal (suite)

M. Bédard: M. le Président, c'est une précision qui fait suite à une question qui a été posée ce matin par le député de Nicolet-Yamaska concernant l'honorable juge en chef Fabien. A sa question j'avais répondu que j'avais communiqué, ce matin, avec l'honorable juge en chef et que j'attendais une réponse de sa part au cours de la journée. Je voudrais simplement, sur ce point, faire la communication suivante: Par une lettre en date du 25 août, remise personnellement au juge en chef André Fabien, ce matin à 7 h 40, à sa résidence, j'ai demandé formellement au juge en chef André Fabien de reconsidérer, dans les circonstances, le bien-fondé de la décision qu'il m'avait communiquée par sa lettre du 22 juillet et de revenir à l'attitude qu'il avait indiquée dans sa lettre du 1er juin, et ce jusqu'à ce que les faits qui ont été révélés et les questions qui ont été soulevées à son sujet aient été éclaircis à la satisfaction du ministre de la Justice par les moyens que celui-ci jugera approprié, dans le meilleur intérêt de la justice.

Dans cette lettre en date du 25 août, j'ai signifié au juge en chef André Fabien que je comptais recevoir aujourd'hui un télégramme m'avisant de sa décision de donner immédiatement suite à ma lettre, à défaut de quoi je devais conclure que le

juge en chef aurait décidé de ne pas y donner suite. Effectivement, M. le Président, j'ai reçu, cet après-midi, un télégramme de l'honorable juge en chef André Fabien indiquant qu'il s'abstiendrait d'exercer ses fonctions jusqu'à ce que la situation ait été entièrement éclaircie.

Conséquemment, le Conseil des ministres a procédé, en fin d'après-midi, à la nomination de M. le juge Yves Mayrand pour remplir temporairement la fonction de juge en chef des sessions à Montréal, conformément à l'article 72 de la Loi des tribunaux judiciaires. Je suis persuadé que la décision du juge Fabien servira mieux les intérêts supérieurs de la justice et contribuera à ce que cette situation soit éclaircie dans un climat serein et plus acceptable pour les justiciables.

C'était la communication que j'avais à faire, M. le Président.

M. Roy: Est-ce que je pourrais demander au ministre de la Justice s'il a pu également, dans le cadre du même privilège qui nous est accordé, examiner la question que je lui ai posée ce matin? Est-il en mesure de donner une réponse?

M. Bédard: Je dois vous dire que je pense que vous comprendrez que j'ai été assez occupé au cours de la journée par certains autres problèmes qui font que je n'ai malheureusement pas eu l'occasion d'avoir les informations nécessaires pour les communiquer au député de Beauce-Sud. Peut-être qu'une fois l'ajournement annoncé, ou peut-être même avant l'ajournement, parce qu'on me dit qu'il y a encore quelque temps avant l'ajournement, je pourrai être en mesure de communiquer le plus rapidement possible avec lui.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Burns: M. le Président, maintenant je pense que nous serions — toujours en vertu de l'ordre de la Chambre de ce matin — prêts à vous demander d'appeler l'article qui n'est pas numéroté mais qui apparaît à la page 5 de notre feuilleton d'aujourd'hui, le projet de loi no 49, quant à sa troisième lecture.

Projet de loi no 49 Troisième lecture

Le Président: Mme le ministre des Consommateurs propose la troisième lecture de la Loi constituant la Régie de l'assurance-automobile du Québec. Cette motion de troisième lecture sera-t-elle adoptée?

Des Voix: Adopté. M. Fontaine: Adopté.

Le Président: M. le député de Jacques-Cartier.

M. Noël Saint-Germain

M. Saint-Germain: Très brièvement. A cette heure tardive, je pense bien que personne ne se permettrait d'entendre de longs discours. Nous avons fait, lors de l'étude en commission parlementaire de ce projet de loi, article par article, les représentations, je crois, qui s'imposaient. J'ai bien reçu, comme tous les députés, cette petite brochure intitulée "La réforme de l'assurance-automobile". Je l'ai lue, il va sans dire, en diagonale. Je crois qu'il sera intéressant pour les citoyens d'en prendre connaissance, mais, comme j'ai un comté dont la moitié de la population est de langue anglaise et que le ministre nous a dit qu'elle pouvait nous procurer d'autres brochures, si on croyait que cela était nécessaire, je lui demanderais si elle a une traduction anglaise de cette communication.

Le Président: Je pense, M. le député de Nicolet-Yamaska, que vous n'aurez pas d'objection à ce que Mme le ministre puisse répondre à cette question. Mme le ministre.

Mme Payette: Cela va être une réponse extrêmement courte. La traduction est effectivement en train d'être faite et, dès qu'elle sera prête, je déposerai les documents et vous en serez informé.

Le Président: M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Serge Fontaine

M. Fontaine: L'Union Nationale est vivement opposée à la création d'une Régie d'assurance-automobile dont la fonction principale est d'assurer la mise en oeuvre d'un régime de couverture des dommages corporels. Les objectifs visés par le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières de justice sociale et de rapidité du règlement des indemnités ne sont pas atteints par la création du régime. L'application du régime étatique par la Commission des accidents du travail est un indice sérieux du fait que les indemnisations ne seront pas payées plus rapidement que sous le régime actuel. Quant à la préoccupation de justice sociale dont parle le ministre, elle ne pourra certes pas être atteinte par un système d'indemnisation selon des tables a rente fixe. On ne peut parler de justice quand on indemnise tous les accidentés de la même façon, indépendamment du préjudice que leur cause cet accident.

L'Union Nationale approuve, cependant, l'intention du gouvernement d'obliger tous les conducteurs d'automobile à être assurés, mais rejette l'étatisation comme solution aux problèmes de la non-indemnisation d'un pourcentage trop élevé d'accidents. Enfin, nous espérons que les organismes du fonds d'indemnisation et de la Corporation des assureurs autorisés sauront jouer un rôle efficace sur le contrôle des compagnies et l'indemnisation de ceux qui ne seraient pas couverts lors d'un accident.

L'Union Nationale votera donc contre ce projet de loi, mais sans mauvaise volonté et en insistant sur le fait qu'elle reconnaît la nécessité d'une action concrète dans le domaine de l'assurance-automobile, mais que la proposition du gouvernement ne lui paraît pas être la bonne. Malgré les amendements qui ont été adoptés en commission parlementaire lors de l'étude, article par article, le projet de loi nous semble vicié. Je dis bien vicié, non pas vicieux, parce que le ministre pourrait être vicieux, mais pas le projet de loi.

Le Président: M. le député de Nicolet-Yamaska, propos antiparlementaires.

Mme Payette: M. le Président, je suis trop fatiguée pour faire une question de privilège.

M. Fontaine: M. le Président, le projet de loi peut être vicié par la réforme de l'assurance automobile qui a été proposée en première lecture et qui sera étudiée lors d'une commission parlementaire au mois de septembre. L'Union Nationale votera contre ce projet de loi en troisième lecture.

Le Président: M. le député de Beauce-Sud. M. Fabien Roy

M. Roy: M. le Président, pour vous rassurer immédiatement, cela va probablement être mon plus court discours.

Entre l'étape de la deuxième lecture et celle de la troisième lecture, même s'il y a eu adoption du rapport, je n'ai pas changé d'opinion pour les mêmes raisons que j'ai invoquées lors de l'adoption de principe de cette loi en deuxième lecture, je maintiens les mêmes opinions, je suis catégoriquement opposé à une régie d'Etat concernant l'assurance-automobile du Québec et cela même dans l'intérêt des contribuables du Québec et des victimes d'accidents d'automobile et de toute la population.

Le Président: Cette motion de troisième lecture sera-t-elle adoptée?

M. Brochu: Sur division, M. le Président.

Le Président: Sur division, la motion est adoptée.

Projet de loi no 240 Deuxième lecture

M. Burns: M. le Président, nous avons également, à la page 6 de notre feuilleton, toujours en vertu de l'ordre de la Chambre de ce matin la possibilité de prendre en considération le rapport de la commission de la Justice qui a étudié le projet de loi 240, Loi annulant une servitude grevant certains lots du cadastre de la paroisse du Cap-de-la-Madeleine. Ce rapport...

Le Président: II a été déposé...

M. Burns: II a été déposé? L'a-t-on pris en considération?

Le Président: Non.

M. Burns: II reste la deuxième lecture et la troisième lecture. Alors, au nom... Bien non, je vois qu'il est ici... Le député de Champlain, je présume, se fera un plaisir de vous proposer la deuxième lecture du projet de loi no 240.

Le Président: M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Je propose l'adoption en troisième lecture, c'est cela...

M. Burns: En deuxième...

M. Gagnon: ...en deuxième lecture du projet de loi no 240.

Le Président: Cette deuxième lecture est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté. Le Président: Adopté.

Troisième lecture

M. Burns: Je présume qu'on est prêt également à faire les écritures et à passer à la troisième lecture...

M. Lavoie: L'honorable député pourrait-il proposer la troisième lecture également?

M. Burns: ...si le député de Champlain veut bien.

Le Président: Troisième lecture...

M. Burns: Si on est prêt, parce que j'ai besoin...

Le Président: ...même séance.

M. Lavoie: On n'a pas d'objection. M. Burns: Cela va?

M. Lavoie: ...si l'honorable député veut se lever et proposer la troisième lecture?

M. Burns: Alors, pour son deuxième discours aujourd'hui, on va écouter le député de Champlain.

M. Gagnon: Vous voulez que je recommence mon boniment pour voir si j'ai bien fait cela? Je propose la troisième lecture du projet de loi no 240, qui modifie — je n'ai pas toutes les explications...

Pouvez-vous venir à mon secours, M. le leader?

M. Burns: Le projet de loi no 240.

M. Gagnon: La loi 240.

Le Président: Cette troisième lecture est-elle adoptée?

Des Voix: Adopté. Le Président: Adopté.

Projet de loi no 2

M. Burns: M. le Président, je vous demanderais, dans les instants qui viennent, de prendre en considération le rapport de la commission de la présidence du Conseil qui a étudié, article par article, le projet de loi no 2. Je demanderais une brève suspension, avant qu'il ne soit déposé, pour faire une dernière vérification sur une question de détail et on comprendra que, comme la commission a cessé de siéger vers les 18 h 15 ou 18 h 20...

M. Lavoie: Etes-vous sûr que la commission est terminée?

M. Burns: On va voir dans quelques minutes! Comme la commission a siégé jusqu'à 18 h 20, je pense qu'on ne peut pas reprocher au rapporteur, le député de Berthier, d'être inefficace puisque son rapport est déjà prêt, et je vous demanderais donc, purement et simplement, une suspension de quelques deux ou trois minutes.

Le Président: Alors, nous allons suspendre pour deux ou trois minutes. Je crois comprendre que le leader parlementaire du gouvernement avait gardé son projet de loi pour le dessert.

(Suspension de la séance à 19 h 5)

Reprise de la séance à 19 h 16

Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Durant cet intermède, je vais faire une exception à la règle et je pense que personne ne m'en voudra. Je vais signaler la présence dans les galeries de toutes les serveuses du Parlementaire. Je pense qu'elles ont compris que tout le monde voulait les remercier.

M. Mackasey: Est-ce qu'on peut leur recommander une augmentation de salaire?

M. Burns: Démagogue, va!

M. le Président, je vous ai indiqué tout à l'heure — c'est ce pourquoi je vous avais demandé une suspension — que nous serions prêts, dans les minutes qui venaient, à soumettre le rapport de la commission de la présidence qui a étudié le projet de loi no 2. Je pense que le député de Berthier est tout fin prêt à faire cette soumission.

Le Président: M. le député de Berthier, nous vous écoutons.

Rapport de la commission élue

M. Mercier: M. le Président, conformément aux dispositions de notre règlement, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission élue permanente de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires gouvernementales qui s'est réunie pour étudier article par article le projet de loi no 2, intitulé Loi régissant le financement des partis politiques et modifiant la Loi électorale.

Le Président: Rapport déposé.

M. Burns: M. le Président, selon l'entente, encore une fois, et l'ordre de la Chambre, je vous demanderais que nous passions immédiatement à la prise en considération du rapport.

Le Président: J'appelle maintenant la prise en considération du rapport. Est-ce que c'est adopté?

M. Blank: Adopté. M. Lavoie: Agréé.

M. Burns: Non. M. le Président, il y a — on comprendra, à cause du court délai que nous avions pour préparer ce rapport — deux corrections qu'il faut apporter au rapport. D'abord, la page 5 de la deuxième partie du rapport, celle qui commence par les mots: "Le total des sommes transférées à ou par une instance du parti ou à l'argent officiel d'un..." doit être modifiée. Je proposerais immédiatement que nous changions cette page et je vous signale simplement qu'une toute petite erreur s'est glissée dans le paragraphe qui commence par les mots suivants c'est-à-dire le nouvel article 82: "Ces rapports doivent être accompagnés d'une copie de chacun..."

C'est-à-dire que le nouvel article 82 est temporairement suspendu. Nous avons tout simplement fait une modification de dernière minute pour respecter ce qui s'est effectivement passé. Il faudrait lire ce paragraphe comme suit, et j'en fais la proposition: "Le nouvel article 82 est temporairement suspendu puis, après discussion, postérieurement adopté tel que proposé". J'en fais la proposition, M. le Président.

Le Président: Cette modification est-elle acceptée?

Des Voix: Adopté. Le Président: Adopté.

M. Burns: Deuxièmement, il y aurait également une modification à la page 9 de la deuxième partie du rapport. Cette modification tient compte des dernières minutes de délibération à la commission. C'était relativement à la possibilité qu'un crédit d'impôt puisse être accordé à un contributeur ou un contribuant — je ne sais pas si c'est le mot exact; un souscripteur, cela pose moins de problèmes — à un souscripteur à l'endroit d'un parti politique. C'était particulièrement

dans le premier alinéa de l'article 585d édicté par l'article 134 du projet de loi. Dans le rapport, on peut lire ceci: "A l'article 134, M. Burns (Maisonneuve) propose de remplacer le premier alinéa de l'article 585d par le suivant". Je cite l'article 585d dans la première version du rapport: "Un particulier, qui est un électeur, peut déduire de son impôt autrement payable, à l'égard d'une contribution faite au cours de l'année, aux représentants officiels des partis politiques autorisés, des associations de comté autorisées ou des candidats autorisés le moindre des montants suivants:" On continue, par la suite, en disant: "L'article 134 est adopté tel qu'actuellement amendé", etc.

Je vous demanderais, M. le Président, conformément aux dispositions que nous avons prises aux toutes dernières minutes de nos discussions en commission, de modifier le texte que je viens de vous lire, à la page 9, et de le remplacer par le suivant. Le premier alinéa de l'article 585d est remplacé par ce qui suit: "585d. Un particulier qui est électeur peut déduire de son impôt autrement payable à l'égard d'une contribution faite au cours de l'année aux représentants officiels des partis politiques autorisés, des associations de comté autorisées ou des candidats autorisés 50% du premier $100 de contribution et 25% du deuxième $100 de contribution". Je pense avoir annoncé cet amendement vers la fin, sauf qu'il était assez difficile, sans passer par nos légistes, d'arriver avec un texte définitif. Je vous demanderais donc, en conséquence, M. le Président, et j'en fais motion, de modifier dans le rapport, à la page 9, quant à sa deuxième partie, le premier alinéa 585d par celui que je viens de citer.

Le Président: Est-ce que cet amendement est adopté?

Des Voix: Adopté. Le Président: Adopté.

M. Burns: Donc, le rapport tel qu'amendé est adopté, je présume?

Des Voix: Adopté.

Le Président: Rapport adopté.

M. Burns: M. le Président, je vous demanderais maintenant d'appeler la troisième lecture du projet de loi no 2.

Troisième lecture

Le Président: M. le ministre d'Etat à la réforme électorale et parlementaire propose la troisième lecture de la Loi régissant le financement des partis politiques et modifiant la Loi électorale.

Cette motion de troisième lecture sera-t-elle acceptée?

M. Robert Burns

M. Burns: En proposant la troisième lecture, j'aurais de très brefs commentaires. D'une part, pour remercier — je le dis de façon véritablement sincère — tous les participants aux travaux de cette commission, tant du côté de l'Opposition que du côté ministériel, qui ont apporté, à mon avis — et je le dis sans aucune restriction — une contribution très solide, très positive. Les amendements que nous avons acceptés en commission n'ont fait que bonifier un projet de loi qui, déjà, avait été remis dans la machine, si je peux utiliser l'expression, à la suite d'un premier dépôt. Même si on nous a critiqués de le faire, je pense que tout le monde s'en trouve mieux.

Je n'ai qu'un seul commentaire; d'une part, c'est de souhaiter que ce projet de loi, de façon très précise et très concrète, nous aide à améliorer la démocratie au Québec. Je souhaite égalemen: que cet esprit de collaboration qui a été démontré au moment de l'étude du projet de loi article par article en commission soit le présage d'une collaboration entre les partis politiques quant à la mise en application de ce projet de loi. La mise en application du projet ou de la loi — elle le sera dans quelques heures ou dans quelques minutes — n'est pas possible sans une collaboration totale.

C'est presque dans l'euphorie que je souhaite que l'Assemblée nationale, de façon unanime, adopte le projet de loi no 2 en troisième lecture.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Jean-Noël Lavoie

M. Lavoie: M. le Président, je n'ai que quelques mots à ajouter; d'ailleurs, je m'étais permis de faire un exposé des plus élaborés lors de la deuxième lecture alors que l'Opposition officielle, le Parti libéral, avait voté favorablement.

Sur les questions de détail, nous avons fait plusieurs suggestions, recommandations et amendements lors de l'étude en commission; un certain nombre de ces amendements ont été bien reçus et adoptés par la commission et nous avons eu la collaboration du ministre. Ce n'est pas une satisfaction totale, je l'ai dit en deuxième lecture, c'est une satisfaction mitigée; je peux aller un cran plus loin en disant que même si ce projet de loi n'a pas notre entier agrément, si je peux m'exprimer ainsi, je crois qu'il est déjà amélioré. C'est du droit nouveau pour le Québec; le ministre s'est d'ailleurs sans doute rendu compte de la complexité de ce projet de loi, du fait qu'on a dû subir une deuxième impression et apporter plusieurs améliorations. Cela explique sans doute l'attitude du gouvernement précédent, auquel je n'appartenais pas, mais dont j'étais solidaire. Je n'ai pas à répéter tout le processus de la réforme démocratique que nous avons vécue depuis une quinzaine d'années au Québec, c'est un jalon de plus.

On comprend peut-être difficilement — mais je le comprends aujourd'hui, le ministre le comprend également — pourquoi ils en étaient rendus à plus d'une dixième rédaction. Je sais que, pour une loi de la sorte, il faut qu'il y ait un consensus général et une collaboration générale pour qu'elle fonc-

tionne bien, surtout au moyen du comité consultatif qui est créé par cette loi. Je suis assuré, le ministre le reconnaît lui-même, que cette loi, très bientôt — ce n'est pas un reproche que je fais au ministre — nécessitera après une certaine période de rodage; certaines améliorations, certains ajustements en cours de route.

Vu qu'il y a eu une certaine amélioration, nous allons, pour être conséquents avec nous-mêmes, offrir notre unanimité, en ce qui concerne notre parti, pour l'adoption de ce projet de loi no 2.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Armand Russell

M. Russell: M. le Président, j'aurais droit à une trentaine de minutes, mais vous allez me permettre d'abréger un peu mes remarques sur l'importance de ce projet de loi. Je ne veux pas faire l'histoire du projet depuis son dépôt, vous avez eu connaissance de l'inquiétude du parti que je représente à l'occasion du dépôt de la loi. Après certaines remarques, certaines études en commission, nous avons eu une deuxième impression et le ministre nous avait promis une ouverture d'esprit pour accepter beaucoup des recommandations que nous avions à faire. Je voudrais ce soir lui rendre cet hommage parce qu'il a eu l'esprit ouvert sur plusieurs amendements que nous avons proposés et plusieurs modifications. Ainsi cette loi est devenue, pas parfaite, mais acceptable et applicable dans une mesure raisonnable.

Je sais que sur le rôle de cette loi et le but visé nous étions d'accord, mais il y avait à intérieur de cette loi des principes que nous ne pouvions pas accepter. Nous n'avons pas obtenu la satisfaction de toutes nos demandes, mais je suis convaincu que le parti que je représente, après le rapport, la connaissance des amendements qui ont été faits, sera d'accord pour faire un essai loyal de cette loi, pour laquelle, j'en suis convaincu, le comité consultatif pourra recommander d'autres amendements qui seront nécessaires, parce qu'il y a des articles qui seront difficiles d'application. Je dis ceci en toute bonne foi. Ce n'est pas facile de faire une loi qui va faire en sorte qu'on va changer complètement les moeurs auxquelles nous étions habitués. Avec la même ouverture d'esprit et si le ministre continue dans la même voie, j'espère qu'on sera chanceux quand on nommera le directeur qui verra à l'application de cette loi.

Une chose qui m'a fait plaisir dans un des amendements, c'est que le ministre a accepté de retirer cette responsabilité qu'il avait de l'application de cette loi. Cela a été une amélioration extraordinaire. Je ne sais pas qui sera responsable à part le directeur, mais l'élargissement de la responsabilité du comité consultatif est un réconfort.

Je fais comme le leader de l'Opposition, je recommande aussi l'adoption de cette loi. L'Union Nationale votera pour la loi.

Le Président: M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Camil Samson

M. Samson: M. le Président, je suis heureux qu'on n'exige pas de ma part de faire un discours pour vous dire que je suis d'accord avec la loi et que j'offre toute ma collaboration pour son application.

Le Président: M. le député de Beauce-Sud. M. Fabien Roy

M. Roy: Ce ne sera pas beaucoup plus long, M. le Président, que tout à l'heure. Je tiens à dire, et je le dis à l'intention du leader du gouvernement, que même si on n'a pas réussi à tout obtenir, parce que le ministre défendait sa chemise envers et contre tous, le moins qu'il puisse dire c'est qu'il en est sorti intact et sa chemise aussi.

J'aimerais lui dire que nous apprécions le fait qu'un grand pas ait été fait entre le projet de loi original et celui qui a été réimprimé, et même aujourd'hui et au cours des séances que nous avons eues en commission parlementaire, pour bonifier ce projet de loi. A l'avance je puis l'assurer, ainsi que tous les autres représentants des partis qui composeront le conseil consultatif, de ma plus entière collaboration pour que cette loi puisse être appliquée, et si c'est nécessaire qu'elle soit amendée pour la rendre encore meilleure, ma collaboration est encore acquise.

M. Burns: M. le Président, j'ai l'intention maintenant de faire une réplique d'à peu près une demi-heure, simplement pour, adresser encore une fois à tous nos collègues de l'Assemblée nationale nos remerciements pour l'adoption que je comprends déjà faite. Je présume M. le Président, que vous mettez la troisième lecture aux voix immédiatement, et je n'ai rien d'autre...

Le Président: Est-ce que la troisième lecture est adoptée?

M. Fontaine: Adopté.

Le Président: Unanimement mais sans euphorie, M. le leader.

Travaux parlementaires (suite)

M. Burns: Je ne vous dirai pas ce que vient de me dire mon patron.

M. le Président, avant de procéder à l'agréable motion que j'aurai à formuler dans quelques instants — c'est la dernière chose que j'ai à faire pour, possiblement, terminer cette partie de la session — je signale à nos collègues qu'un certain nombre de commissions parlementaires sont annoncées au feuilleton d'aujourd'hui. En particulier, sans les nommer, on peut retrouver à la page 9 de notre feuilleton un certain nombre d'avis. Je présume que je n'ai pas à répéter ces avis qui varient à compter du 13 septembre et un peu plus loin.

Je signale, cependant, une certaine difficulté qui se pose à nous aujourd'hui et, si j'avais la col-

laboration de l'Assemblée nationale à ce sujet, peut-être pourrions-nous régler le problème. Il s'agit du projet de loi no 67 qui a été déposé devant l'Assemblée nationale et que nous avons soumis pour fins de réception de mémoires à la commission des consommateurs, coopératives et institutions financières. Or, les dernières informations que j'ai, c'est que l'avis officiel qui est prévu en vertu de notre règlement ne pourra pas être publié avant le 31 août, retardant donc, en conséquence, les auditions possibles là-dessus à, au plus tôt, 30 jours après. Je n'insisterai pas là-dessus, mais je me demande s'il ne pourrait pas y avoir un consentement unanime de l'Assemblée nationale pour que les auditions puissent commencer dès le 20 septembre, qui était la date originelle à laquelle le ministre avait l'intention d'entreprendre ces auditions.

Comme il est déjà de notoriété publique, depuis le dépôt du projet de loi 67, que nous invitons les gens a venir se faire entendre à la commission parlementaire, je présume également que beaucoup de ces gens qui sont intéressés à venir se faire entendre à la commission parlementaire ont déjà formulé leurs recommandations à l'endroit du projet que Mme le ministre nous soumet, je me demande si l'Assemblée nationale ne nous donnerait pas son consentement pour que je puisse donner l'avis, malgré l'avis dans la Gazette officielle qui ne paraîtra que le 31 août, pour que la commission parlementaire des consommations, coopératives et institutions financières puisse commencer ses travaux dès le 20 septembre.

J'ajouterais à cela simplement une dernière remarque. Pour s'assurer véritablement que l'ensemble de la population puisse être contactée, j'irais même au-delà de notre règlement dans ce cas-ci, étant donné que je demande un consentement pour raccourcir le délai, j'irais même jusqu'à faire publier, au nom de Mme le ministre, un avis dans un journal de langue anglaise et un journal de langue française à diffusion générale au Québec, en plus de l'obligation que nous avons normalement, c'est-à-dire de publier dans la Gazette officielle. C'est le consentement que je sollicite, et si on me le donne, cela nous permettrait peut-être de terminer la session sur une deuxième note d'affilée d'unanimité. En tout cas, je pose la question à l'Opposition.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Brochu: Je serais prêt à donner notre consentement. Maintenant, ce serait peut-être encore plus facile si c'était le 27 — je regardais les dates et j'en discutais avec mon collègue ici qui est responsable de la commission — est-ce que ce serait faisable? A ce moment-là, on a une autre commission parlementaire qui va siéger au cours de cette même semaine. Si on les mettait ensemble, est-ce que ce serait possible? C'est une suggestion.

M. Burns: Cela irait, je serais prêt à me rendre là.

Mme Payette: Dans 24 jours, ce sera fait. M. Burns: Le 27 alors?

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Lavoie: Je sais que vous m'en aviez soufflé un mot hier soir ou ce matin, je ne m'en rappelle plus, ou cette nuit. Vous comprendrez que je n'ai pas eu l'occasion d'en discuter avec mes collègues. J'ai, à côté de moi, le député de Jacques-Cartier qui travaille sur ce dossier. Normalement, l'avis paraîtrait le 31 août; nécessairement, il y a les 30 jours, ce qui mènerait à la fin de septembre, et là, la proposition de compromis, au lieu du 20 septembre, ce serait le 27 septembre. Pour le 20, je pense que cela aurait été vraiment difficile à cause de l'importance de ce projet de loi et la préparation du dossier, et avec l'engagement qu'il y aurait assez de publicité en langue française et en langue anglaise, au moins dans les grandes régions, et à cause de l'importance de ce projet de loi. Nous allons donner notre consentement pour le 27 septembre.

M. Burns: Le 27 septembre. Je remercie... M. Samson: Consentement.

M. Roy: Consentement, mais ce n'est pas un vote sur la loi.

M. Burns: Non Non. Ce n'est pas ce que j'ai demandé. Je ferai donc motion pour que cela devienne un ordre de la Chambre pour me donner l'autorité de convoquer cette commission le 27 septembre au selon rouge, à 10 heures du matin.

Des Voix: Consentement.

M. Burns: C'est l'autorité dont j'ai besoin.

M. Brochu: Adopté.

M. Cardinal: II y a déjà quelque chose au selon rouge.

M. Burns: 81-A.

Le Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Brochu: Adopté.

Le Président: Adopté.

Ajournement des travaux de la session au 18 octobre

M. Robert Burns

M. Burns: II me reste l'agréable tâche de proposer l'ajournement de nos travaux à moins que je fasse face à un "filibuster", à une obstruction systématique...

Des Voix: Vote enregistré.

M. Burns: Je tiens cependant, M. le Président, avant de faire cette proposition à dire au nom du gouvernement combien nous sommes reconnaissants pour tous nos collaborateurs, que je ne peux pas désigner nommément, tellement nous en avons. Vous avez signalé, tout à l'heure, M. le Président, la présence dans les galeries de nos collaboratrices au restaurant le Parlementaire.

Je pourrais parler également, entre autres — et je tiens à le souligner de façon très précise — des officiers de la Chambre, du secrétaire général et de ses deux adjoints, du sergent d'armes et de ses adjoints également, de nos anges gardiens, devrais-je dire, que sont les constables de l'Assemblée nationale, de tout le personnel tant du côté de l'Opposition que du côté ministériel qui nous assiste régulièrement parce que, sans aucun doute, nous ne pourrions pas réussir à avoir une telle efficacité à l'Assemblée nationale — et je parle pour les deux côtés de la Chambre — des journalistes avec qui, souvent, nous ne sommes pas d'accord, mais...

M. Lévesque (Taillon):... et le journal des Débats aussi.

M. Burns: ... grâce à qui, dans l'intérêt de la démocratie, nous réussissons à livrer notre message à la population et grâce à qui l'opinion publique peut se former.

Je pense que toute formule de démocratie ne peut agir et ne peut véritablement agir que grâce à cette communication que nous voudrons éventuellement meilleure, peut-être dès l'automne. Etant donné les documents que nous avons déposés, aujourd'hui, on peut vous donner un indice de l'orientation que nous aurons, même si la communication se fait très bien actuellement, grâce à nos collaborateurs. Finalement, M. le Président, tous ceux qui, dans l'ombre, nous aident à faire ce travail; je leur souhaite à tous un repos bien mérité. Je vous souhaite à vous, M. le Président...

Une Voix: Oui, surtout à lui.

M. Burns: ...je vous souhaite à vous, M. le Président, si c'est possible, encore une plus grande sagesse, lors de notre retour. Je souhaite également aux deux vice-présidents qui nous ont assurés régulièrement de leur collaboration de prendre ce repos qui est normal pour nous permettre également... J'achève. C'est ma journée, laissez-la moi.

Je termine, M. le Président, après avoir fait ces voeux à l'endroit de tout le monde, à nos collègues tant du côté ministériel que de l'Opposition, en proposant l'ajournement de nos travaux au mardi, 18 octobre, à 15 heures de l'après-midi.

M. Jean-Noël Lavoie

M. Lavoie: M. le Président, comme tout le monde est au courant que cette motion peut faire l'objet et fera l'objet d'un débat, avec votre permission, les attaques que je porterai à l'adresse de mon vis-à-vis le forcera à exercer son droit de réplique. Je voudrais dire, M. le Président, d'abord que c'est le chef de l'Opposition officielle, le député de Bonaventure, qui m'a demandé d'adresser quelques mots à l'occasion de cette suspension des travaux. Vous l'excuserez du fait qu'il a dû prendre le seul avion qui allait dans ce joli coin de la Baie des Chaleurs dans le comté de Bonaventure. Autrement il perdait une ou deux journées; il est donc parti à la dernière minute vers sept heures.

Je ne doute pas que vous excuserez M. Gérard-D. Levesque, pour qui toute l'équipe, de notre côté, avons beaucoup d'admiration et de respect.

Très brièvement, merci à notre whip qui est absent et qui a un fouet des plus virulents et des plus violents; il a fait un travail extraordianire durant cette partie de la session, ainsi que toute l'équipe que nous représentons, une équipe réduite qui vit actuellement une période uniquement de recyclage et de rodage. C'est peut-être un préavis qu'on vous donne pour la reprise de la session. Ces six mois de travaux nous ont permis de nous transposer, d'une manière temporaire, dans l'Opposition. Mais nous allons apprendre le plus rapidement possible et nous tenterons d'apporter la meilleure contribution au gouvernement, tout en étant, pour le moment, du côté de l'Opposition, mais je ne pense pas que cela puisse durer tellement longtemps.

Je me joins au leader du gouvernement pour remercier tous ceux qui oeuvrent au sein de cette grande institution qu'est l'Assemblée nationale, sans vouloir tous les mentionner. Je voudrais également vous remercier, M. le Président, vous et vos deux vice-présidents, et vous faire part de notre considération pour la manière dont vous avez dirigé les travaux de cette Assemblée. Je ne peux pas donner la même assurance au gouvernement, mais, en ce qui concerne la présidence, vous êtes assuré d'avance de notre collaboration lors de la reprise de la session.

Je ne répéterai pas mes remerciements à tous ceux qui oeuvrent avec nous; je ne voudrais faire aucun oubli. J'aimerais, cependant, souligner le travail du secrétaire général et des secrétaires associés et de tous ceux qui relèvent directement ou indirectement de l'Assemblée nationale. Quant à messieurs, mesdames et mesdemoiselles les journalistes, le leader du gouvernement vous a dit qu'il n'était pas toujours d'accord avec vous; je vais renchérir en disant que nous commençons à être un peu plus d'accord avec vous.

Rapidement, je voudrais souhaiter à tous nos collègues, de tous les points cardinaux de cette Chambre, les meilleures vacances, même à ceux qui les ont déjà commencées. Je ne fais pas d'exception. En terminant, je voudrais faire une remarque au nom de l'Opposition officielle: Cette session, nous l'aurions peut-être souhaitée un peu plus fructueuse, mais nous comprenons que le gouvernement est également en période de rodage.

Comme le mentionnait si bien le premier ministre ce matin, lors de son intervention en troisième lecture sur le projet de loi no 101, il faut donner une chance au coureur. Nous lui accordons cette chanoe, mais, de notre côté, l'Opposition officielle, soyez assurés que nous sommes brûlants d'impatience de voir, enfin, le coureur se mettre en piste, surtout dans le domaine de l'économie. Je vous remercie, M. le Président.

M. Yvon Brochu

M. Brochu: M. le Président, je vous remercie de me donner l'occasion de participer aux débats sur cette motion dilatoire du leader du gouvernement. J'aurai quelques brèves remarques, à ce stade-ci, à adresser aux membres de cette Chambre, pour faire un peu le point sur cette session. J'aurais un amendement de report à trois mois, en terminant mes remarques. Cependant, à bien y penser, j'aurais peur non seulement de perdre des amis, mais également de gagner beaucoup d'ennemis.

Je me limiterai donc à remercier, comme mes collègues, au nom de l'Union Nationale, tous ceux qui ont travaillé, de près ou de loin, à nos travaux parlementaires durant cette session: les officiers, le journal des Débats, les membres de la Tribune de la presse, les membres du café, nos pages, tous ceux qui ont collaboré et qui nous ont aidés dans notre travail. Je veux remercier également tous les députés et les ministres qui ont participé à ces débats, nos recherchistes également. Je veux aussi rendre hommage à cette institution où on a pu se retrouver. Même si on n'était pas toujours d'accord, on a peu au moins croiser nos idées et apporter des pièces de législation.

L'Union Nationale a voulu collaborer d'une façon positive en étant une Opposition typiquement québécoise, une opposition vigilante. M. le Président, j'aimerais, en terminant, souhaiter bonnes vacances à tous, et le meilleur moyen pour que ce voeu se réalise, c'est de cesser de parler, alors, je me joins à tout le monde pour souhaiter bonnes vacances.

Le Président: M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Camil Samson

M. Samson: M. le Président, à la fin de cette Chantaoût, je voudrais m'associer au leader du gouvernement pour appuyer cette motion. Je ne veux pas répéter tout ce qui a été dit parce que je suis d'accord avec ça. Je ne comprends pas ça, M. le Président, tout le monde m'applaudit aujourd'hui.

Je voudrais vous assurer que tous les membres de mon caucus vous souhaitent de bonnes vacances.

Le Président: M. le député de Beauce-Sud. M. Fabien Roy

M. Roy: Merci. Pour ne pas perdre les bonnes habitudes que j'ai commencé à prendre aujourd'hui à cette Assemblée...

Des Voix: Question.

M. Roy: ...à l'effet que je veux faire des discours brefs et être bien compris, je vais en profiter pour souhaiter à tous et à toutes de bonnes, de belles et de joyeuses vacances.

Le Président: M. le premier ministre, vous avez le droit d'intervenir dans le débat.

M. Lavoie: Cela prend le consentement. M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): Je me joins au leader du gouvernement et à tous les autres qui se sont exprimés pour tout simplement réitérer... Je pense que les trois derniers mots du député de Beauce-Sud résument tout, vacances pour ceux qui n'en n'ont pas prises. De toute façon, un bon, un beau et un fructueux repos.

M. Burns: Avant que nous adoptions...

Mme Cuerrier: Question de règlement, M. le Président. On a droit chacun à dix minutes, chaque parti a droit à dix minutes sur une motion d'ajournement. Il ne faudrait plus en accepter d'autres.

M. Burns: Ce n'est pas en vertu de la motion, c'est avant que le vote ne soit pris, donc avant que nous ajournions. Je veux simplement inviter les différents partis à envoyer ou déléguer un représentant à la sanction des projets de loi qui aura lieu dans cinq minutes chez le lieutenant-gouverneur. C'est ce qu'on m'a indiqué, qu'à huit heures il y aura sanction des projets de lois chez le lieutenant-gouverneur. J'invite un représentant de l'Opposition, un représentant de l'Union nationale, un représentant du Parti National populaire et un représentant du Ralliement des créditistes.

M. Samson: Question de règlement, M. le Président, je vais déléguer un de mes députés.

M. Burns: D'accord. C'est tout. Je pense, M. le Président, qu'on peut prendre le vote.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des Voix: Vote non enregistré.

M. Roy: Question de règlement.

Le Président: M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: II faut cinq députés pour demander un vote enregistré. Mais, comme je n'ai pas pu les trouver, je suis prêt à ce qu'on passe à l'adoption de cette motion.

Le Président: Cette motion est adoptée et la présidence veut s'associer aux propos de tous ceux qui ont remercié et souhaité de bonnes vacances à tout le monde. Bonnes vacances. L'Assemblée ajourne ses travaux au mardi 18 octobre, 15 heures.

(Fin de la séance à 19 h 55)

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