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(Douze heures quatre minutes)
Le Président (M. Brouillet): À l'ordre, mesdames et
messieurs!
La commission permanente du travail est réunie pour
étudier article par article le projet de loi 192, Loi constituant le
Fonds de solidarité des travailleurs du Québec.
Les membres de cette commission sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie),
Cusano (Viau), Dean (Prévost), Johnson (Anjou), Mme Harel (Maisonneuve),
M. Lafrenière (Ungava), Mme Lachapelle (Dorion), MM. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce), Marquis (Matapédia), Paradis
(Brome-Missisquoi), Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Gauthier (Roberval).
Les intervenants sont: MM. Bélanger (Mégantic-Compton),
Champagne (Mille-Îles), Fortier (Outremont), Leduc (Fabre), Pagé
(Portneuf), Payne (Vachon), Polak (Sainte-Anne), Proulx (Saint-Jean), Vaugeois
(Trois-Rivières).
Maintenant, il conviendrait de désigner un rapporteur.
Mme Lachapelle: Je propose le député de
Roberval.
Le Président (M. Brouillet): Tout le monde est d'accord
pour que le député de Roberval soit le rapporteur de la
commission. Très bien.
M. Gauthier: Avec deux chefs de l'autre bord, qu'est-ce qu'on va
faire?
Le Président (M. Brouillet): J'invite l'adjoint
parlementaire à nous faire quelques remarques préliminaires.
Remarques préliminaires M. Robert Dean
M. Dean: M. le Président, nous sommes réunis pour
étudier article par article le projet de loi 192, Loi constituant le
Fonds de solidarité des travailleurs du Québec. Il s'agit d'une
initiative privée d'une centrale syndicale québécoise qui
groupe plus de 400 000 adhérents. Ce projet de loi donne suite à
leur demande de créer ce fonds de solidarité qui a pour but,
d'abord, le maintien de l'emploi, en participant au sauvetage d'entreprises en
difficulté et en élaborant des solutions, des projets concrets de
rechange là où les entreprises doivent fermer leurs portes;
deuxièmement, la création d'emplois en participant au financement
d'entreprises en expansion et de grands projets industriels, en proposant la
création d'entreprises nouvelles et en proposant des projets d'expansion
ou de modernisation des entreprises financées; troisièmement,
l'amélioration des conditions de travail, en implantant le respect des
lois régissant l'environnement du travail, comme les normes minimales de
santé et de sécurité, la protection de l'environnement
dans les entreprises financées, en visant à améliorer
constamment, par la suite, les normes minimales imposées;
quatrièmement, le développement économique, en canalisant
une partie des épargnes des travailleurs vers les investissements en
capital de risque, en mettant de l'avant des projets d'investissements viables,
en proposant des stratégies de développement des entreprises dans
leurs secteurs respectifs, s'accordant avec les objectifs de la
stratégie québécoise, et en mettant de l'avant une
politique de plein emploi.
Durant cette étude article par article, nous sommes prêts -
c'est l'objet de cette étape de notre procédure - calmement, sans
passion, à répondre aux questions, à clarifier certaines
choses pour les membres de l'Opposition et à profiter de leur sagesse et
de leur expertise afin de bonifier si possible ce projet de loi.
Pour ce faire - parce que, justement, la grande préoccupation de
tous et de toutes est que ce fonds soit créé, qu'il atteigne les
buts visés et le fasse dans le respect et dans la protection des
intérêts financiers des travailleurs et des travailleuses qui
décideront d'investir dans le fonds de solidarité - je me fais
entourer d'une batterie assez impressionnante, j'espère, d'experts dont
les compétences sont mises à profit et à la disposition de
cette commission. Si vous me le permettez, je les présenterai. D'abord,
Me Jules Brière, qui n'est sûrement pas inconnu de nos amis de
l'Opposition, du bureau Brière, Roy, Gingras et Mailhot, qui s'est
chargé de la rédaction du projet de loi; Me Normand Chatigny,
consultant en ce qui regarde la structure juridique; Me Gérald Lacoste,
du bureau Martineau, Walker et Associés, consultant sur les relations
avec la Commission des valeurs mobilières du Québec; Me
André Laverdière, inspecteur général des
institutions financières, qui se chargera particulièrement
de l'article 2, s'il y a des questions ou des explications
là-dessus; M. Jean-Charles Beaulieu, du ministère des Finances,
qui pourra répondre aux questions sur les avantages fiscaux; M. Denis
Dionne, consultant, qui est en charge des scénarios financiers du fonds;
M. Pierre Laflamme, consultant en matière de relations publiques; M.
Paul-Arthur Fortin. Est-il ici? Excusez-moi, il n'est pas encore ici; M. Claude
Blanchet, consultant au fonds de solidarité; M. Jean-Guy Frenette,
directeur de la recherche à la FTQ et responsable du projet du fonds, et
M. Maurice Prudhomme, coordonnateur du fonds.
Seulement un mot et c'est tout ce que je vais dire là-dessus. Le
projet de loi - je l'ai souligné au début - est une initiative
privée, l'initiative d'un groupe substantiel de citoyens et de
citoyennes du Québec qui veut faire quelque chose de positif et de
concret dans le domaine du développement économique et favoriser
l'investissement des travailleurs et des travailleuses dans le capital de
risque. Le projet de loi, évidemment, existe pour encadrer ce fonds. Le
projet de loi pourvoit à l'organisation du fonds, définit ses
fonctions principales et délimite certaines exigences. Par exemple, le
fonds pourra investir dans toute entreprise, mais il devra consacrer aux
entreprises québécoises au moins 60% de son actif sous une forme
ne comportant pas de garanties ni de cautionnements. Le projet de loi
prévoit aussi la possibilité pour les salariés d'obtenir
de leur employeur individuellement ou par l'intermédiaire d'une
association accréditée la retenue sur leurs salaires de montants
leur permettant d'acquérir des actions du fonds; enfin, le projet de loi
attribue à la Commission des valeurs mobilières du Québec
la fonction de vérifier l'exécution par le fonds des obligations
que lui impose la présente loi.
M. le Président, je pense que toute autre remarque de ma part
serait superflue, parce que les membres de cette Chambre ont beaucoup de
travail à faire si on veut voir l'été un jour à
l'extérieur de l'Assemblée nationale. Je vais terminer
là-dessus en espérant qu'avec la bonne collaboration des membres
de l'Opposition nous pourrons adopter ce projet de loi avant l'ajournement.
Le Président (M. Brouillet): Le porte-parole de
l'Opposition, M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Pierre-J. Paradis
M. Paradis: M. le Président, je ne vous causerai pas une
grande surprise en vous annonçant qu'à cause du carcan au niveau
du temps dans lequel on est placé on n'a pas eu le temps, de faire la
préparation honnête et sérieuse qu'exige, l'étude
article par article, d'un tel projet de loi. Et vous comprenez pourquoi; on a
siégé avec la guillotine jusqu'à 2 heures sur une loi dans
le domaine du travail. C'est possible qu'au cours de l'après-midi on ait
le temps de le faire. Mais je suis content du climat qui s'établit ce
matin au début de nos travaux et qui se différencie ou se
distingue, je pense, avec distinction du climat qui a régné dans
les interventions en Chambre hier soir.
On n'a pas prisé, du côté gouvernemental, les
observations des membres de l'Opposition en Chambre au niveau de la
deuxième lecture. On ne les a pas prisées, parce qu'on n'a pas
compris la grande prudence qui doit animer chacun d'entre nous lorsqu'on parle
de l'argent des travailleurs et des travailleuses du Québec. L'objet du
projet de loi est de constituer un fonds de solidarité des travailleurs
du Québec. L'objet du projet de loi est de prendre une partie du
chèque de paie des travailleurs et des travailleuses de chacun de nos
comtés et de la mettre à la disposition d'un fonds qui va
être contrôlé par la Fédération des
travailleurs du Québec pour l'investir dans le maintien, le soutien et,
possiblement, la création d'emplois. Ce sont les buts avoués du
projet de loi.
En tant qu'Opposition, en tant que députés, en tant que
membres de l'Assemblée nationale et en tant que responsables
vis-à-vis des travailleurs et des travailleuses qu'on représente
ici, on a l'obligation - je vous le soumets respectueusement - d'obtenir des
précisions et des garanties - garanties qui peuvent être d'un ou
de plusieurs ordres -qui peuvent faire en sorte qu'on est assurés comme
parlementaires, en votant pour le projet de loi, que l'argent pris sur le
chèque de paie de notre travailleur, même avec son consentement, -
le capital, du moins - est garanti ou, encore mieux, que le capital et une
partie des intérêts sont garantis. C'est une option. C'est une
vue. Si ce n'est pas là le but du projet de loi de garantir aux
travailleurs que le capital qu'ils investissent va être là quand
ils en auront besoin, c'est de s'assurer que nos travailleurs et nos
travailleuses qui investiront dans ledit fonds auront compris que
l'investissement qu'ils font dans une régime de retraite, ils ne
pourront le toucher que dans des conditions très spécifiques
prévues au projet de loi. Je m'arrête avant de tomber dans
l'étude article par article mais, pour qu'on se comprenne bien, c'est un
investissement qu'ils pourront toucher aux alentours de la retraite. On dit
toujours que quand on sera beaucoup plus vieux, on sera à la retraite.
C'est un investissement qu'ils ne pourront pas toucher avant ce
moment-là. C'est un investissement qui n'aura pas de marché
secondaire, par définition. Ce n'est pas un placement sur lequel on peut
compter - selon
l'âge, mais pour la majorité de ceux qui vont y investir -
obtenir une récupération, toucher de l'argent dans deux, trois,
quatre ou cinq ans pour l'achat d'une maison, l'achat d'une automobile, pour
envoyer les enfants à l'école.
Donc, c'est un fonds de retraite, qui comporte également un
élément de risque. Ce n'est pas un fonds de retraite sur lequel
le régime d'assurance-dépôts garantit que tout le capital
va être là. C'est un fonds de retraite risqué. Si c'est la
volonté des travailleurs et des travailleuses d'y investir en ayant bien
compris cela, c'est notre devoir de parlementaires de l'expliquer même si
le temps est très limité, même si le gouvernement nous a
placé un carcan de quatre jours pour faire toute la lumière
là-dessus. C'est un message qui doit être entendu pour s'assurer
que les travailleurs et les travailleuses du Québec comprennent bien
dans quoi ils investissent. Ce n'est pas de l'épargne avec un rendement
supérieur ou inférieur garanti. C'est un fonds de pension qui va
être investi dans la PME et avec un taux de risque. Cela veut dire qu'il
peut arriver qu'à la retraite le capital souscrit ne soit plus là
dans sa totalité. Il peut arriver que le capital souscrit soit là
dans sa totalité avec des fruits, si les investissements ont
rapporté. Il faut être certain que nos travailleurs et nos
travailleuses, que nous représentons comme députés,
comprennent très clairement où va leur argent, quel est le
risque, quand ils pourront le récupérer et combien de cet
argent-là ils pourront récupérer. C'est le premier
point.
Le deuxième point, c'est un rôle d'éducation, c'est
un rôle de participation des travailleurs à notre système
économique. Ce rôle de participation à notre système
économique peut-il être bien compris par le travailleur qui
n'investira pas un fonds de retraite, de capital de risque, dans sa boîte
à lui, dans son usine à lui, pour préserver son emploi
à lui, pour maintenir son emploi à lui ou celui de ses
confrères ou de ses consoeurs, pour créer des emplois dans sa
boîte à lui où on pourra ajouter, de façon
optimiste, d'autres emplois, mais pour des gens qu'il va connaître? C'est
un fonds qui n'a pas ce degré de personnalité et qui risque
peut-être - c'est une question que j'adresse à l'adjoint
parlementaire au ministre du Travail, parrain du projet de loi - parce qu'il
n'est pas identifiable dans son milieu, de ne pas atteindre cet objectif de
participation dans l'entreprise. Vous comprendrez que, dans de telles
circonstances, les articles qui vont toucher cet aspect du problème
feront l'objet de nos questions.
Pourquoi sauter des étapes? On prend un travailleur, une
travailleuse, qui ne participe pas à la capitalisation de son
entreprise. Au lieu de l'inviter à participer à la capitalisation
de l'entreprise où il retire son gagne-pain, finalement, on l'invite
à participer à la capitalisation d'entreprises qui peuvent, dans
les pires des cas, être éloignées de sa communauté,
qui peuvent dans les pires des cas, être en compétition directe
avec sa "job". Il faut regarder cela et se poser la question froidement. Est-ce
que le projet de loi ne saute pas une étape dans le domaine des
relations du travail? Est-ce qu'en éloignant le fonds du travailleur on
va avoir une implication et une compréhension du mécanisme?
Est-ce que le rôle d'éducation qu'on retrouve dans les notes
explicatives dudit projet de loi va être réalisable dans de telles
circonstances? C'est une question fondamentale.
Est-ce que le travailleur, à qui on aura expliqué qu'il
s'agit d'un fonds de retraite en capital de risque qu'il ne pourra toucher que
lorsqu'il sera aux alentours de sa pension, va être motivé
à offrir une plus grande productivité dans l'entreprise où
il travaille si l'argent qui est pris sur son chèque de paie est investi
ailleurs que dans l'entreprise où il travaille? Est-ce que ce
travailleur va avoir la même motivation à se tenir au courant de
la gestion - je ne dirais pas quotidienne, mais on pourrait parler de mensuelle
ou de trimestrielle - de ce fonds qui, dans la majorité des cas,
n'affectera pas l'entreprise où il travaille? M. le Président,
ces deux premières questions relèvent de l'intérêt
même du travailleur et de la travailleuse qui va investir dans ce fonds,
relèvent des principes fondamentaux de la loi qui est devant nous,
relèvent des objectifs visés par les objectifs fondamentaux qui
sont contenus dans ce projet de loi.
M. le Président, il ne s'agit pas, non plus, de se laisser
impressionner - quand on est législateur, cela ne prend pas beaucoup de
temps à acquérir l'expérience nécessaire -par les
titres ronflants des projets de loi. Souvent, derrière le titre, se
cache la réalité que l'on retrouve dans le mécanisme, dans
les objectifs et qu'on retrouvera dans la pratique, une fois le projet de loi
adopté. Ce projet de loi, on le nomme, on le baptise. C'est
peut-être dans l'intention d'un processus de communication, pour ne pas
dire d'un processus de propagande quand on connaît le gouvernement, nos
amis d'en face. On l'appelle la Loi constituant le Fonds de solidarité
des travailleurs du Québec. Lorsqu'on se retrouvera dans l'application,
on aura tôt fait de réaliser que c'est le fonds de la FTQ. Il faut
être clair. Si la FTQ met sa crédibilité en jeu, si la FTQ
pilote le dossier, si la FTQ administre le fonds, il faudrait que les citoyens
du Québec sachent que c'est le fonds de la FTQ et non pas le Fonds de
solidarité des travailleurs du Québec. C'est le fonds de la FTQ.
Si le conseil d'administration est composé en
majorité de gens de la FTQ, comme c'est prévu
présentement au projet de loi, il faudrait que le titre reflète
ce que le projet de loi est. On va commencer par cela. Si, également,
l'intention de la Fédération des travailleurs du Québec
est de mettre à contribution ses membres, ceux qui volontairement, en
vertu du droit d'association qui est prévu à notre Code du
travail, ont choisi d'adhérer à cette centrale syndicale, si
c'est la clientèle visée par la Fédération des
travailleurs du Québec, il va falloir l'exprimer clairement
également au niveau de la mécanique parce que, dans le cas
où le fonds atteindrait ses objectifs, il faut que ceux et celles qui
ont eu l'idée, qui ont pris des risques en s'embarquant dans un tel
processus en récoltent les dividendes. Autant le travailleur
récoltera son dividende pécuniaire, autant sa centrale syndicale
pourra en récolter les dividendes politiques dans le sens syndical du
terme.
Autant également, si le fonds ne connaît pas, parce qu'il
n'y a pas de garanties suffisantes pour le travailleur et pour la travailleuse,
les succès anticipés, il faudra que la centrale syndicale qui l'a
mis de l'avant en prenne la responsabilité politique au sens syndical.
Il me semble, à la première lecture du projet de loi - parce que,
je vous l'ai dit, on n'a pas eu le temps, article par article, de faire
l'analyse détaillée qui s'impose - évident qu'on doit
faire preuve de transparence dans la rédaction du projet de loi. Il me
semble qu'on doit faire preuve de transparence non pas seulement dans la
rédaction, mais dans l'objectif visé. Il me semble qu'on doit
faire preuve de transparence dans le contrôle du conseil d'administration
du fonds. Il me semble que les travailleurs et les travailleuses de l'ensemble
du Québec qui écoutent nos discours en Chambre sont en droit de
savoir que ce sont prioritairement, sinon exclusivement, les membres de la FTQ
qui contribueront à bâtir financièrement ce fonds.
Si je lance ces appels à la prudence au député de
Prévost, au gouvernement - on me dira qu'il y a des distinctions - et,
dans certains cas, des distinctions fondamentales -c'est que, comme
législateurs, on a déjà, unanimement dans certains cas,
donné notre appui à un mouvement comme le mouvement des caisses
d'entraide économique. Je le dis sous réserve des
distinctions.
On nous a parlé de création d'emplois dans nos milieux,
dans nos communautés, dans nos régions. On nous a parlé de
maintien d'emplois au même endroit. Les expériences vécues
sont des expériences qu'on ne peut ignorer; il faut distinguer ce qu'il
y a à distinguer. Mais il faut également comparer ce qu'il y a
à comparer dans cette expérience. Une des distinctions
fondamentales relève du fait qu'au niveau du mouvement des caisses
d'entraide économique il s'agissait d'une institution prêteuse. Il
ne s'agissait pas d'une institution qui achetait du capital-actions dans des
entreprises. On est conscient de cela. Il y a quand même, au niveau de
l'idéologie de base du mouvement des caisses d'entraide
économique, tout l'aspect création, maintien d'emplois,
stimulation de l'économie dans nos milieux. On connaît les
répercussions. On sait que des centaines de milliers de
Québécois de bonne foi, dans cet esprit de relance
économique, dans cet esprit de création et de maintien d'emplois
dans leurs milieux, ont investi une partie importante, dans plusieurs cas, de
leurs épargnes dans ce mouvement québécois et on sait
aujourd'hui dans quelle situation se retrouvent ces gens. Est-ce qu'on a
analysé froidement le pis-aller, que j'appelle, dans ce dossier pour nos
travailleurs et pour nos travailleuses? (12 h 30)
Cette fois-ci, ce ne sont pas les épargnes qu'on prend; c'est une
partie du chèque de paie. C'est, pour le moins, aussi important que les
épargnes, c'est souvent plus vital que les épargnes. Est-ce qu'on
a analysé, de façon à en tirer des conclusions positives
comme négatives, l'expérience des SODEQ? Est-ce qu'on a fait
l'analyse qui s'imposait pour savoir quels sont les éléments
positifs en comparant ce qui est comparable et en distinguant ce qu'il faut
distinguer? Est-ce qu'on a fait les analyses comparatives et qu'on est
prêt aujourd'hui à nous présenter un tableau clair avant de
nous demander un vote comme parlementaires, en disant: Voici
l'expérience des caisses d'entraide, voici ce qui est comparable et ce
qui ne l'est pas; dans ce qui est comparable, voici les éléments
positifs et les éléments négatifs qu'on a retirés
de l'expérience?
Même tableau dans le cas des SODEQ. Il me reste deux minutes,
j'aurais eu beaucoup de choses à ajouter dans ces notes
préliminaires, mais j'espère que, de l'autre côté de
la table, on comprend qu'en posant ces questions, qu'en convoquant la partie
d'en face à un sommet sur la sécurité de l'argent des
travailleurs et des travailleuses on fait montre d'un grand respect pour cet
argent durement gagné pendant des heures de travail ardu. Ce respect, je
n'accepterai pas, comme parlementaire, qu'on nous le reproche; je vais
plutôt demander, à des parlementaires qui se sont
prononcés, hier soir, en deuxième lecture, sans s'être
posé ces questions fondamentales de penser aux vrais
intérêts des travailleurs et des travailleuses.
Je vais vous dire, M. le Président: C'est impossible d'avoir des
garanties absolues lorsqu'on se lance dans les affaires - et c'est ce que vise
le fonds - mais il y a des garanties minimales qu'on est en droit d'exiger
comme parlementaires, il y a des
garanties minimales que chacun des parlementaires doit exiger avant de
voter pour ou contre un tel projet de loi. Ceux qui se prononcent sans avoir
exigé ou demandé et obtenu ces garanties minimales font preuve
d'irresponsabilité envers les travailleurs et les travailleuses. Ceux
qui sont convaincus, ceux qui ont obtenu ces garanties minimales peuvent
s'exprimer en toute liberté. S'ils sont convaincus que ces garanties
font partie intrinsèque du projet de loi et des amendements qui seront
soumis, etc., c'est leur droit d'expression le plus fondamental de le dire et
de l'expliquer aux autres. Mais que ceux qui ne se sont jamais posé de
questions sur ces garanties fondamentales se taisent, pour le moment, et
participent à nos travaux, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: Merci. Au début, M. le Président, je
veux dire que j'espère que la commission parlementaire va se
dérouler de façon beaucoup plus saine et sereine que le
débat d'hier soir. Personnellement, je n'ai pas apprécié
les discours du député de Prévost, de Joliette et du
ministre de la Main-d'Oeuvre pendant le débat sur la motion de report.
On a été accusés d'être traîtres; le
député de Prévost a invoqué la question du F-18, la
question de l'entente du Nid-de-Corbeau, je ne sais pas quoi, en nous accusant
de ne pas avoir eu à coeur les intérêts des
travailleurs.
Je pense que, s'il a l'intention de continuer la commission
parlementaire dans le même sens chaque fois qu'on soulève une
objection ou une question, les choses ne vont pas aller très loin.
J'espère que ces choses vont cesser. Je pense qu'il n'est pas
antisyndical de poser des questions sur le projet de loi. Je dois dire que la
réunion qu'on a eue ce matin avec les membres et les leaders du syndicat
a été beaucoup plus fructueuse et s'est déroulée
dans un climat beaucoup plus serein et beaucoup plus intéressant que la
démonstration à laquelle on a eu droit hier soir.
Cela étant dit, je répète que j'espère que
personne ne va prendre mes propos dans un sens antisyndical. Nous sommes ici,
aujourd'hui, devant la création de ce qui peut devenir, on
l'espère, une grande institution financière au Québec, une
institution qui va durer longtemps, qui va réussir, qui va inciter la
participation de centaines de milliers de Québécois, dans
laquelle ils vont mettre une partie de leur chèque de paie comme l'a dit
le député de Brome-Missisquoi, de leurs épargnes.
Quand on assiste à la création d'une institution
financière, ce n'est pas antisyndical d'insister pour que le projet de
loi qui la crée - parce que, semble-t-il, c'est une institution
financière qui a besoin d'un projet de loi pour sa création -
soit étudié par tous les moyens possibles dans une ambiance la
plus neutre, la moins partisane possible et par le plus grand nombre de
personnes possible.
Je conviens que le projet a été conçu par un groupe
de personnes qui sont à la fois dévouées à la cause
et très compétentes. Je ne le nie pas; elles ont tous un parti
pris dans l'affaire, elles l'ont à coeur. C'est leur affaire et c'est
normal, elles y ont mis beaucoup d'énergie et elles veulent que ce soit
adopté le plus vite possible, parce que c'est leur enfant et qu'elles
veulent voir la naissance, l'accouchement dans le plus bref délai. J'ai
assisté, j'ai participé à beaucoup de projets
moi-même dans ma vie et je les comprends. C'est leur rôle. Je les
félicite.
Cependant, c'est le rôle de l'Assemblée nationale et de
l'Opposition, si on adopte un projet de loi qui a pour effet de créer
une institution financière permanente au Québec, de s'assurer que
c'est fait d'une façon qui va satisfaire toutes les normes de
sécurité qui sont convenables, qui sont nécessaires dans
ce cas. Ce n'est certainement pas la faute, si vous voulez, de l'Opposition si
le projet de loi a été déposé le 10 juin. L'affaire
traîne avec les personnes qui l'ont conçue depuis longtemps. Les
règles du jeu à l'Assemblée nationale sont bien connues.
Nous sommes au mois de juin devant un nombre important, même impossible
de projets de loi qu'on est obligé d'étudier jour et nuit.
Parfois, il y a des choses qui arrivent; on en a eu des exemples
l'été passé: on adopte les choses à la vapeur qu'on
regrette après, que même le gouvernement regrette. Je me souviens
de la petite affaire du vin dans les épiceries; ce n'était pas
une grosse affaire, cela a été vite réglé, mais
c'est quand même un exemple de quelque chose qui peut arriver. Dans ce
cas-ci, on ne parle pas d'une petite chose comme le vin dans les
épiceries, dans les restaurants. On parle, je le répète,
de la création d'une institution financière qui va durer
longtemps. Si sa réalisation est retardée de quelques semaines ou
de quelques mois pour assurer tout le monde que cela est lancé sur une
base solide, je pense que ce délai, ce retard, sera vite oublié
pendant les trois, quatre, cinq, dix, vingt années à venir, si
l'affaire est une réussite.
Si on accepte de l'adopter à toute vitesse, dans la nuit, et que
cela ne marche pas, les gens vont nous tenir responsables, comme ils l'ont fait
l'été dernier, d'ailleurs, d'avoir manqué à notre
responsabilité pendant l'étude et l'adoption de ces projets de
loi. Je dois vous dire, M. le Président, que je trouve presque
inconcevable qu'on puisse même nous demander d'adopter un tel projet de
loi dans
un délai de trois ou quatre jours. Même la demande, je la
trouve inconcevable. Mais on a accepté de l'étudier, ici, en
commission parlementaire, et on va le faire avec, quant à moi,
personnellement, beaucoup de réserve pour les raisons que j'ai
invoquées.
Le problème des caisses d'entraide, qui est une autre institution
créée par une loi québécoise, a causé un
tort très important en ce qui a trait à la confiance des
investisseurs québécois dans leurs propres institutions. Cette
expérience, qui date de quelques semaines ou de quelques mois seulement,
comme mon collègue l'a souligné, est encore vécue. Avant
de nous permettre de répéter cette expérience, mon Dieu!
j'espère que les membres des syndicats ne vont pas dire que nous sommes
antisyndicaux d'insister pour qu'une institution dans laquelle ils seront
invités à investir leurs épargnes soit examinée
d'une façon appronfondie.
Je peux dire la même chose au sujet des SODEQ. En 1975, j'ai eu le
privilège de participer au début des SODEQ, quand je travaillais
pour le ministre de l'Industrie et du Commerce. Cela a été
étudié, reétudié et analysé. Les SODEQ ont
été lancées finalement en 1979 - si ma mémoire est
bonne - par le gouvernement actuel. Même avec toutes ces études et
analyses, cela a été un échec. Le fonds de
solidarité est quelque chose entre la SODEQ et la caisse d'entraide, qui
sont des échecs.
On propose, d'ici mercredi, que l'on encourage l'accouchement d'une
telle institution. Est-ce qu'on a le droit de poser des questions? Oui. Est-ce
qu'on a la responsabilité de poser des questions? Oui. Est-ce qu'on va
poser des questions? Oui. J'espère que tout le monde va comprendre.
La chose qui m'a frappé, quand j'ai écouté surtout
les créateurs, les instigateurs de ce fonds - il y en a plusieurs -
c'est que nous sommes devant ce que quelqu'un a décrit comme un projet
d'épargne de risque. Même l'idée d'une institution
d'épargne de risque, c'est, en quelque sorte, une contradiction en soi,
parce que, quand les gens pensent à l'épargne, ils pensent
instinctivement à quelque chose qui ne comporte pas beaucoup de risque.
Ceux qui proposent le projet sont confiants; ils peuvent expliquer cette
contradiction possible entre les deux à ceux qui vont investir; ils
peuvent continuer de l'expliquer pendant les années que cela va durer
et, même plus important, ils peuvent administrer un fonds
d'épargne de risque. Mais la preuve n'était pas faite
jusqu'ici.
Je pense qu'on a le droit d'aller en profondeur dans cette
définition et d'avoir une idée de ce que cela veut dire. Je vous
donne juste un exemple, M. le Président, pour soulever les questions de
fond qu'on se pose. Le fonds va être obligé d'investir au moins
60% de son actif dans les actions des
PME. Cela se comprend, c'est la base même de l'idée.
L'objectif, entre autres, c'est de stimuler la connaissance de
l'économie des travailleurs, d'inciter les travailleurs à
s'impliquer davantage dans le succès de l'entreprise, d'inciter les
propriétaires et les administrateurs à s'impliquer davantage dans
le bien-être des travailleurs. Tous ces objectifs, on les partage
à 100% et depuis longtemps, d'ailleurs. (12 h 45)
À titre d'exemple, je suis persuadé que les travailleurs,
même après avoir reçu le bénéfice de l'abri
fiscal, vont commencer à se poser des questions sur la valeur de leurs
parts; c'est normal. Ils vont recevoir, après qu'ils auront investi 1000
$, un certificat indiquant qu'ils détiennent 1000 actions de
catégorie À d'une valeur de 1 $. Chaque trimestre, ou chaque
année le fonds sera obligé de faire un rapport à ses
actionnaires, comme tous les autres fonds, comme toutes les autres
sociétés quant à la valeur de leurs parts. Comment cette
valeur sera-t-elle évaluée, calculée? Comment peut-on
évaluer les parts, les actions dans 300 ou 400 PME? Pour moi, c'est
presque impossible. Il va y avoir beaucoup de pressions sur les administrateurs
du fonds pour présenter un bilan positif dans lequel les parts
progressent, où il y a une augmentation de valeur parce que la
rentrée de fonds est très dépendante de l'augmentation de
valeur.
On a vu cela, d'ailleurs, dans les SODEQ; un des problèmes des
SODEQ était la rentrée de fonds qui était
arrêtée parce que les investisseurs, même avec l'abri fiscal
qui était là et qui est encore là; même si l'abri
fiscal était intéressant, disaient: Écoutez, la valeur des
actions, finalement, c'est la moitié ou le tiers ou même 10% de ce
que nous avons investi. Nous avons des actions de 1 $ et cela vaut 0,10 $, ou
0,15 $, ou 0,30 $. L'effet de cette diminution de valeur des actions a
causé un gel dans la rentrée de fonds; les gens ont
décroché des SODEQ. Quand les gens commencent à
décrocher, il y a un effet psychologique sur la confiance dans
l'institution même. On connaît déjà
l'expérience de ce qui peut arriver quand les gens commencent à
perdre confiance dans leurs institutions financières. On l'a vu avec les
SODEQ et les caisses d'entraide.
Comment le fonds serait-il capable de maintenir cette confiance quand
60% de son actif sont investis dans les PME, dont les actions sont très
difficiles à évaluer? Qui va les évaluer? Sur quelle base?
Est-ce que cela sera fait d'une façon neutre par une tierce partie?
Est-ce que ce sera fait par le fonds même? Est-ce que ce sera toujours
fait d'une façon consistante? Qu'est-ce qui va arriver si, à un
moment donné, pour le rapport annuel, le fonds se trouve dans la
situation où il est obligé, d'après les conseils
de certaines personnes - qui sont loin d'être les seuls conseils
qu'on peut trouver -d'indiquer qu'il y a une baisse dans la valeur des parts,
des actions?
Ils seront devant une situation difficile, car il y a pas une seule
façon d'évaluer la valeur des actions qu'ils vont détenir
dans les PME. Il y aura probablement trois opinions différentes. Qui va
décider? Il y a un conflit d'intérêts possible
là-dedans, car les dirigeants du fonds auront la responsabilité
ou l'autorité d'établir la valeur de leurs actions. C'est un peu
l'expérience qu'on a vécue dans les caisses d'entraide.
Il y a un paquet d'autres questions qui pourraient être
posées aussi. J'indique celles-là simplement comme un
élément clé parce qu'on est devant cette contradiction:
épargne de risque. Il faut rappeler, dans cette affaire, que les
personnes seront capables de retirer leurs parts seulement avec l'approbation
du conseil d'administration; ce n'est pas quelque chose où on va avoir
un marché secondaire. C'est le conseil d'administration qui va
décider, quand la personne prend sa retraite. La personne qui va,
finalement, demander que ses actions soient rachetées, est-ce qu'ils
vont lui accorder toute l'augmentation dans la valeur des PME, s'il y a
augmentation? Est-ce qu'ils vont l'obliger à encaisser les pertes
subies? Est-ce que les gens vont penser qu'ils ont de l'épargne alors
qu'ils ont effectivement, de l'argent investi dans un fonds mutuel? En ce qui
me concerne, ce sont des questions qu'il faut non seulement étudier ici,
mais sur lesquelles il serait très intéressant d'avoir les
opinions des personnes de l'extérieur qui n'ont pas de parti pris ni
d'un côté ni de l'autre, qui n'ont pas une opinion négative
ou positive envers ce principe comme tel, mais qui veulent seulement
considérer froidement l'affaire pour nous en faire connaître les
dangers possibles.
Par exemple, on vient d'adopter un nouveau projet de loi concernant la
Régie de l'assurance-dépôts. Pendant le débat de
deuxième lecture, pendant l'étude article par article, et,
ensuite, à deux ou trois conférences de presse qu'il a
convoquées; le ministre a dit, avec une grande fierté, que le
Québec est maintenant devenu une des régions les plus exigeantes
du Canada quant à la surveillance de nos institutions
financières. Je peux vous référer aux discours et aux
déclarations du ministre vieilles de seulement quelques semaines.
Est-ce que la Régie de l'assurance-dépôts va assurer
les dépôts de cette institution? Si c'est pour de
l'épargne, elle doit certainement le faire. Si c'est pour du capital de
risque, elle ne le doit certainement pas. Si c'est un peu les deux, comment
l'expliquer? Comment tout le monde sera-t-il capable de le comprendre? Le
ministre fait un discours vendredi, dans lequel il se vante de cette nouvelle
rigueur dans les institutions financières du Québec et on fait
suivre ses déclarations d'il y a une semaine par la création
d'une nouvelle institution financière dont les règles du jeu sont
loin d'être claires et où les tierces parties n'ont jamais eu
l'occasion de nous conseiller. Je pense qu'on fera quelque chose
d'irresponsable - je dis "irresponsable" -devant les membres des syndicats
à qui nous dirons avec notre approbation: Allez-y! L'Assemblée
nationale a dit que vous aviez quelque chose de solide.
Avant de donner cette indication aux travailleurs du Québec, je
veux m'assurer -et je suis persuadé que ma formation politique le veut
également - qu'on peut donner cette bénédiction en pleine
connaissance de cause. Merci.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Roberval.
M. Michel Gauthier
M. Gauthier: M. le Président, je dois dire que j'ai
apprécié davantage l'intervention du porte-parole officiel de
l'Opposition que celle du député de Notre-Dame-de-Grâce,
pour un certain nombre de raisons. Tout d'abord, je dois dire que je trouve un
peu décevante cette espèce d'intervention qui brandit des
épouvantails à gauche et à droite et qui fait
référence à des expériences qui n'ont
peut-être pas toujours été heureuses, mais dont on a
retiré une certaine expertise.
Pour revenir à l'intervention du porte-parole officiel de
l'Opposition, le député de Brome-Missisquoi, il y a un certain de
nombre de préoccupations qu'il a émises et auxquelles, je pense,
le gouvernement s'associe très franchement. Quant à sa
première préoccupation, le député de
Brome-Missisquoi nous dit qu'il faudrait faire comprendre aux travailleurs que
c'est un fonds de retraite à risque. M. le Président, je ne sais
pas si le député de Brome-Missisquoi a cru percevoir, dans la
démarche gouvernementale, jusqu'à présent, que nous
essayions, par quelque moyen que ce soit, d'empêcher les travailleurs de
comprendre ou de se rendre compte du genre d'outil qu'on voulait mettre
à leur disposition.
Le gouvernement est tellement prêt à l'expliquer et
à le faire comprendre aux travailleurs - parce qu'on pense qu'ils sont
capables de comprendre ces choses - que, déjà des montants
importants sont prévus par le ministère de la Main-d'Oeuvre et de
la Sécurité du revenu pour procéder à
l'éducation des membres, pour procéder à une vaste
période de formation et d'information au sujet du fonds de
solidarité. C'est déjà là à
l'intérieur même du projet de loi. C'est une mesure qui, à
mon sens, assure
les membres de l'Opposition que le gouvernement veut procéder de
la façon la plus transparente possible, que le gouvernement veut non pas
cacher des choses aux travailleurs, mais les informer et les mettre au courant
de cet outil qu'on met à leur disposition.
Un argument qui est revenu hier soir: le fonds serait investi dans
différentes entreprises qui ne sont pas nécessairement
l'entreprise du travailleur qui y met de l'argent. Cet argument, à mon
avis, est très faible parce que, selon la même logique, on
pourrait très bien inviter les citoyens du Québec ou les
travailleurs du Québec à ne pas investir dans leur caisse
populaire parce que la caisse populaire va probablement prêter ou fournir
des fonds de fonctionnement à une entreprise qui est concurrente de la
leur.
Il faut, tout de même, réaliser une chose... Je n'ai pas
interrompu l'Opposition. Je les ai écoutés avec respect. Vous
devriez le faire plus souvent; peut-être que vous comprendriez, vous
entendriez. On offre un outil aux travailleurs, qui, bien sûr, ne
répond peut-être pas à 100% aux aspirations de chacun des
travailleurs du Québec parce que leurs aspirations sont peut-être
bien différentes de l'un à l'autre, mais c'est un fonds
d'investissement dans des PME québécoises pour soutenir de
l'emploi, pour soutenir de l'activité économique. Il ne faudrait,
tout de même, pas exagérer outre mesure cet argument, mais penser
qu'il est normal que les travailleurs puissent collaborer avec leurs centrales
syndicales ou avec d'autres travailleurs pour faire des investissements, que ce
soit dans leur entreprise ou dans d'autres entreprises.
Je ne pense pas qu'il y ait eu d'exigence de la part des travailleurs -
et ceux qui veulent le faire peuvent le faire, d'ailleurs - d'investir
directement dans leur entreprise. Il y a de plus en plus d'expériences
heureuses à cet effet qui permettent aux travailleurs de prendre part
à leur propre entreprise quand ils le désirent.
Le troisième argument: c'est le fonds de la FTQ plutôt
qu'un véritable fonds de solidarité. Depuis le temps qu'on chante
des deux côtés de la Chambre que les centrales syndicales n'ont
pas toujours joué leur rôle dans le développement
économique, il m'apparaît que la FTQ est arrivée là
avec une excellente idée qu'on doit encourager. C'est une initiative
intéressante. Ce n'est pas sous prétexte que ce ne sont pas
toutes les centrales syndicales qui ont eu l'idée en même temps
qu'on ne doit pas encourager cette initiative.. Il faut faire tout notre
possible pour qu'elle se développe pour permettre aux travailleurs de
faire un pas dans la prise en main de l'économie.
J'achève, M. le Président, parce que le temps nous presse.
Le quatrième argument qui nous a été donné: les
éléments de garanties pour la sécurité des
investissements. Je dois, d'abord, dire qu'il y a dans le projet de loi 6 - on
va les étudier - un certain nombre d'éléments de garanties
importantes pour les travailleurs. C'est évident que, quand on
décide de faire de l'investissement à risque, cela comporte un
élément d'incertitude. On ne peut pas garantir à chaque
personne qui décide de faire des investissements à risque qu'elle
va retrouver son argent parce que ce ne serait plus effectivement des
investissements à risque. Je dois dire là-dessus, en terminant,
que le gouvernement du Québec a procédé depuis quelques
mois à un certain nombre de réformes qui permettent de surveiller
davantage toute l'évolution, tout le fonctionnement de nos institutions
financières. On est de ceux, et j'en suis, qui croient que les
travailleurs du Québec sont capables, comme les hommes d'affaires, de
faire des investissements. Parfois, ils vont faire des investissements moins
heureux, mais d'autres fois aussi ils vont faire des investissements
très heureux. Nous croyons que ces travailleurs ont cette
capacité, ont ces possibilités. Nous croyons également
qu'on peut se servir des expériences passées qui ont
été parfois malheureuses pour ne plus refaire les mêmes
erreurs.
Avec les nouvelles structures d'inspecteur général, avec
la refonte de la Loi sur la commission des valeurs mobilières, avec un
certain nombre de mesures d'encadrement qui sont maintenant dans le
décor, nous croyons que les travailleurs du Québec, avec la
collaboration d'une centrale syndicale, sont nettement en mesure d'entreprendre
une expérience qui est sur une base volontaire, une expérience de
prise en main de leur économie.
Le Président (M. Jolivet): Cela dit, la parole sera au
député de Vaudreuil-Soulanges dès la reprise, à 15
heures.
Une voix: Non, à 20 heures.
Le Président (M. Jolivet): Excusez-moi, je suis dans la
lune.
M. Dean: II y avait une proposition de fonctionner de 15 heures
à 16 h 30 et de 20 heures à 24 heures, moyennant le
consentement.
Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une
autre, il aura la parole dès la reprise qui sera
déterminée par les deux leaders.
(Suspension de la séance à 13 h 01)
(Reprise de la séance à 15 h 53)
La Présidente (Mme Lachapelle): Nous sommes réunis
ici aux fins d'étudier le projet de loi 192, Loi constituant le Fonds de
solidarité des travailleurs du Québec.
Les membres de cette commission sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie),
Cusano (Viau), Dean (Prévost), Johnson (Anjou), Mme Harel (Maisonneuve),
M. Lafrenière (Ungava), Mme Lachapelle (Dorion), MM. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce), Marquis (Matapédia), Paradis
(Brome-Missisquoi), Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Gauthier (Roberval).
Les intervenants à cette commission sont: MM. Bélanger
(Mégantic-Compton), Champagne (Mille-Îles), Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), Leduc (Fabre), Pagé (Portneuf), Payne (Vachon),
Polak (Sainte-Anne), Proulx (Saint-Jean), Vaugeois (Trois-Rivières).
M. Paradis: On était, dans les remarques
préliminaires, Mme la Présidente, au député de
Vaudreuil-Soulanges.
La Présidente (Mme Lachapelle):
Parfait. Alors, la parole est à M. Johnson, député
de Vaudreuil-Soulanges.
M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, Mme la
Présidente. J'ai la surprise de voir que vous pouvez désigner les
députés par leur nom en commission parlementaire contrairement
à ce qui se fait à l'Assemblée nationale. Pas de
problème.
Le projet de loi 192 qui est devant nous - on l'a dit longuement
à l'Assemblée, au salon bleu - est une actualisation de la
concertation sur laquelle le Québec doit compter pour réorienter
son développement économique et va tenir à la
participation de trois agents principaux: les travailleurs, les entreprises et
le gouvernement. Comme je le dis, on a devant nous l'actualisation du
rôle qu'entrevoient les travailleurs ou, à tout le moins, la FTQ
comme preneurs à part entière dans l'entreprise de concertation
qui commence à faire couler beaucoup d'encre. Depuis plusieurs
années, en Amérique du Nord, aux États-Unis très
certainement, un nombre presque incalculable d'auteurs sont en train de
suggérer des façons d'arriver à des politiques
industrielles de réajustement; les changements considérables qui
sont en train de se faire dans les caractéristiques des emplois à
venir, étant donné les mutations que connaissent à peu
près tous les volets du commerce international, les exigences de la
concurrence, etc., vont appeler chaque pays à se doter d'une politique
beaucoup plus cohérente que ce que le monde industriel a pu se donner
jusqu'à aujourd'hui.
Il y a des gens qui en sont conscients, il y a des gens qui n'en sont
pas conscients et, parmi les gens qui en sont conscients, il y en a qui font
quelque chose et il y en a qui ne font rien. Un des acteurs qui manifestement
s'aperçoit qu'il faut faire quelque chose et qui, manifestement, entend
faire quelque chose c'est la FTQ. Mais cela ne règle le problème
qu'au tiers, et même pour une partie du tiers du monde du travail que de
voir le projet de loi 192 devant nous.
Le gouvernement, quant à lui, en appuyant l'initiative qui est
devant nous, semble également manifester son intérêt pour
la concertation. De façon concrète, le gouvernement aurait
dû faire un peu plus qu'appuyer, de façon incidente ou accessoire,
un projet de loi qui est une initiative privée; le député
de Prévost nous l'a répété à bien des
reprises. Cela laisse, dans l'entreprise de concertation nécessaire, un
trou encore passablement grand. On peu juste souhaiter, à ce moment-ci,
que le gouvernement, après tant d'années de rapports de toutes
sortes, de publications de toutes sortes, trouve une façon d'articuler,
de façon cohérente, concrète et appuyée sur un
consensus, son action comme agent de concertation pour qu'on arrive à un
résultat dont on peut tous être fiers.
L'autre trou béant, c'est celui de l'entreprise où on ne
note pas encore la même volonté, exprimée
concrètement par la FTQ, d'une part, où on ne note même pas
le même ferment de discussion qu'on peut voir dans les différents
gouvernements quant à la nécessité pressante de changer un
peu l'orientation de l'économie du Québec. C'est de cela qu'on
discute, ici, à l'Assemblée nationale.
Je disais hier, en terminant le discours de deuxième lecture,
qu'on pouvait espérer que l'initiative de la loi 192 pourrait servir de
locomotive et que, à l'expérience des entreprises où il y
aura participation éventuelle au Fonds de solidarité des
travailleurs du Québec, des entrepreneurs, des propriétaires, le
monde des employeurs, si on veut, verront qu'il y a énormément
d'occasions où, concrètement, par la participation
financière du travailleur - et cela reste à venir, comme je le
dis - par un encadrement et une incitation plus précise, plus
cohérente de la part du gouvernement, l'expérience de
concertation à trois peut réserver des fruits extrêmement
intéressants pour l'avenir et porteurs d'espoir.
J'écoutais, le député de Roberval avant la
suspension; il a voulu critiquer, si j'ai bien compris, les remarques du
député de Brome-Missisquoi, mon collègue. Il a
prétendu que celui-ci a fait preuve de faiblesse dans les articulations
de son argumentation sur les préoccupations que le gouvernement dit
partager. J'écoutais le député de Roberval et je ne voyais
pas, compte tenu des arguments qu'il faisait, valoir, ce qui faisait ressortir
la faiblesse de ce que mon collègue pouvait
avoir dit. On a reproché au député de
Brome-Missisquoi de prétendre que le gouvernement empêchait les
travailleurs de comprendre qu'il s'agissait d'un régime d'épargne
retraite, d'une épargne solidarité ou d'une retraite
solidarité.
Je n'ai jamais compris, lorsqu'on veut soutenir une proposition comme
celle-là, qu'il s'agit de taire la proposition inverse. Je m'explique.
Quant à nous, il y a des manques - on regarde la revue de presse depuis
trois mois - à décrire précisément ce qui devient
de plus en plus clair, soit qu'on parle de l'épargne de risque ou d'un
fonds de retraite relativement de risque. Je cherche vainement les
interventions qui ont pu être faites depuis trois mois et qui
décrivent, pour les travailleurs, quel genre de bateau on est en train
de construire dans lequel ils navigueront avec un peu tout le monde. Je
n'emploie pas le mot "bateau" au sens péjoratif, loin de là. Je
parle d'un nouveau véhicule, d'une nouvelle façon d'intervenir
dans le monde économique pour soutenir l'emploi, etc. Cela manque
beaucoup. Je reviendrai sur la divulgation qui me paraît importante si on
veut recueillir l'adhésion volontaire des travailleurs à ce
programme.
J'entendais le député de Roberval qui disait: Les
libéraux semblent insister sur le fait que les travailleurs devraient
investir dans l'entreprise où ils travaillent. Selon le
député de Roberval, c'était équivalent à
prétendre que les dépôts dans une caisse populaire
devraient être soumis, quant à leur investissement
éventuel, à la volonté universelle des déposants et
qu'on devrait faire des investissements exactement à peu près
dans la même région qui est desservie par la caisse populaire. Ce
n'est pas nécessairement le cas.
On parlait de ce problème, que nous avons soulevé, de la
forme des garanties à l'égard de certains investissements qui,
quand on parle d'épargne, quand on parle de retraite, ne peuvent pas
être complètement absents du portrait. On nous a dit qu'il y a
déjà des garanties. Oui, il y en a quant à la constitution
d'une réserve, par exemple, de 50% des investissements qui sont faits
sans avoir de garantie ou de cautionnement pour les deux ou trois
premières années, de mémoire. Dans ce sens-là, cela
répond en partie aux préoccupations.
Tout cela pour montrer qu'il y a un problème fondamental si on
veut recueillir l'adhésion des travailleurs individuellement. Si on
parle de formation économique des travailleurs, on ne parle pas d'un
cadre où les travailleurs, tout en participant financièrement,
auront délégué la conscience de ce que sont
l'économie et la participation à l'économie à
d'autres, qu'il s'agisse d'agents syndicaux, qu'il s'agisse du conseil
d'administration, qu'il s'agisse des analystes, qu'il s'agisse du fonds de
solidarité tel qu'il est décrit là. Je ne pense pas qu'on
avance ainsi sur la voie de la meilleure compréhension qu'un plus grand
nombre de gens peuvent avoir de la façon dont le système
économique doit fonctionner.
Dans ce sens-là, la divulgation, dont on doit rechercher
l'expression la plus claire possible dans le projet de loi et dans
l'encadrement que la Commission des valeurs mobilières, par exemple,
peut donner à l'émission et au traitement, si on veut, de
façon générale, des actions de catégorie À,
doit s'articuler sur deux pôles. Le premier est la nature des
interventions du fonds. Que va faire le fonds de solidarité? Quels sont
ses objectifs, le plus précisément possible, de sorte que les
travailleurs vont comprendre précisément dans quoi ils sont en
train d'investir? Quel est l'échéancier de son action?
Investit-il à très long terme? Est-ce pour cinq ou dix ans dans
certains cas? Est-ce conditionnel à l'expansion d'une entreprise,
à sa reprise de solidité? Ces fonds seront éventuellement
investis dans des entreprises pour combien de temps et sous quelle forme? Il y
a toute la description possible dans le projet de loi qui permet toutes les
interventions et les aides financières possibles, mais il n'y a pas dans
les objectifs quelque chose qui permet de voir si c'est assimilable à un
fonds mutuel qui rentre et qui sort d'une entreprise, qui va privilégier
un secteur industriel plutôt qu'un autre. Cela m'apparaît
important, si l'on parle de réorienter l'économie du
Québec, que l'on sache à quelle enseigne logent les principes qui
vont présider au conseil d'administration à l'investissement dans
une entreprise ou dans une autre. Au-delà du fait que cela maintient ou
crée des emplois, je pense qu'il faut plus que cela. C'est la nature des
interventions et des préoccupations qu'on a fait valoir. Il faut donc
éliminer ce que j'appellerais les occasions de confusion qui peuvent
s'élever.
Quand on allègue le cas des caisses d'entraide et des SODEQ, ce
n'est pas pour prétendre qu'on est devant un véhicule identique
qui risque, dans quelques années, de connaître le même sort
absolument épouvantable. Ce que l'on fait ressortir, c'est qu'il est
utile de s'inspirer des leçons d'expérience récente pour
s'assurer que les gens qui vont participer avec leurs deniers et leurs retenues
salariales à ce fonds-là vont savoir dans quoi ils s'embarquent.
Je pense qu'on peut dire, aujourd'hui, que les dizaines de milliers de
sociétaires des caisses d'entraide ne savaient pas, c'est bien
évident, dans quoi ils s'embarquaient. Lorsqu'on voit le résultat
final, ils se sont aperçus qu'ils n'avaient pas du tout de certificats
de dépôt garanti par je ne sais quoi, mais ils avaient des titres
qui représentaient une participation assimilable à des actions
ordinaires sur lesquelles ils
n'étaient pas essentiellement certains de recevoir quelque chose
à la fin du compte. Dans ce sens-là, la nature des interventions
du fonds doit faire l'objet d'une discussion un peu plus longue afin qu'on
apprenne quels sont les objectifs du fonds de solidarité à cet
égard-là. Si cela se prêtait à ce qu'on puisse les
inclure dans le projet de loi comme tel, tant mieux, je pense que tous seront
mieux servis.
Ma deuxième remarque porte sur la nature de la participation
même du travailleur. Il devient l'heureux détenteur, le porteur,
le propriétaire de quel genre de titre? Quels sont les qualités
et les caractéristiques de ce titre que sont les actions de
catégorie À? Est-ce qu'il est en train de se constituer un
portefeuille, comme il pourrait avoir le choix de le faire? Est-ce qu'il est en
train de devenir comme d'autres qui ont investi sur le marché public des
actions, souvent de petits montants? Ce n'est pas tout le monde qui a des
portefeuilles de 50 000 $, 100 000 $ ou 500 000 $. Il y a des gens qui ont de
petits portefeuilles et qui font leur éducation économique ainsi.
Est-ce que sa participation est assimilable à l'oeuvre de formation
économique que la Bourse lance par voie de concours dans les
écoles avec des portefeuilles fictifs, que d'autres petits clubs de
placement qui existent dans les cégeps permettent de faire à coup
de mises de fonds de 50$ ou 100 $ constituées à même le
travail d'été d'étudiants qui veulent connnaître le
fonctionnement de la Bourse. Ils se font un petit portefeuille d'environ 2000 $
ou 3000 $, ils sont 30 à 40 qui administrent cela et apprennent ce
qu'est la participation à l'économie, l'économie de
marché, etc. Est-ce assimilable à cela, oui ou non? Cela va
dépendre de ce que le travailleur peut faire avec ce
titre-là.
On a découvert qu'il n'est pas aliénable au même
titre que les actions de compagnies qui sont cotées en Bourse. Cela peut
être un peu ennuyeux pour le travailleur qui est rendu au point où
l'idéal du projet voudrait le voir, c'est-à-dire qu'il comprend
ce qu'est l'économie de marché, il sait ce qu'est une entreprise,
il sait comment en lancer une, il sait comment cela fonctionne. Il a mis, sur 5
ou 6 ans, environ 7000 $ à 8000 $ là-dedans - ce n'est pas
inconcevable - et là il dit: Je vais m'en créer un, commerce,
avec 3 autres personnes et je vais aller chercher mon équité.
J'ai une équité de 6000 $ à 7000 $ dans le fonds de
solidarité et là j'aimerais m'en servir pour fonder une
entreprise ou participer à la formation d'une nouvelle petite
entreprise. Mais là, c'est le conseil d'administration du fonds de
solidarité qui va décider de ce qu'il arrive à son
équité, à son actif à lui. On s'est pas mal entendu
sur le fait que le marché secondaire va être relativement
restreint, c'est le moins qu'on puisse dire. Il n'est donc pas dans les
conditions où cela va être rachetable en vertu du projet de loi et
il n'y a pas de marché secondaire. Il a donc un montant de 6000 $
à 7000 $ de son argent accumulé depuis longtemps qui lui a permis
de participer au maintien et à la création d'emplois, selon les
termes du projet de loi, mais il ne peut plus sortir ce montant. Il ne peut
plus le sortir.
Dans ce sens, il m'apparaît important qu'il y ait des
aménagements dans le genre de réserves ou le genre de
portefeuilles marginaux, dans ce que j'appellerais certains des postes d'actifs
du fonds de solidarité, qui puissent prévoir qu'il y a des
circonstances où le travailleur, les autres autour de lui et
l'économie de son milieu auraient intérêt à pouvoir
retirer les sommes déposées avec d'autres pendant un certain
temps. Il m'apparaît que la loi doit pouvoir refléter cette
réalité, pour ne pas s'apercevoir dans deux ou trois ans qu'on a
créé des retards, qu'il y a des choses non seulement inattendues
qui se sont produites, mais qu'on ne souhaitait pas voir arriver.
C'est à ce moment, et en 48 heures au maximum, que nous sommes
censés trouver les formulations les plus claires qui permettent de
s'assurer que les travailleurs comprennent quel est le véhicule,
comprennent que cela leur appartient tout en comprenant qu'ils ne peuvent pas
aller chercher leur argent. Cela amène la question à savoir si on
ne doit pas élargir un peu les cas de rachat, d'aliénation, etc.
De toute façon, c'est l'étape des remarques préliminaires
qui annoncent un peu la nature de nos préoccupations. De façon
concrète, je pense qu'on peut y donner suite. Il faut s'assurer que le
projet de loi 192 soit formulé et compris, assumé par tous ceux
qui seront guidés par ce qu'il y aura là-dedans d'une
façon telle que le projet de loi sera un excellent garant de la
pérennité de l'institution.
Si on remonte au fait qu'il faut de la concertation et que cela est un
volet ou une sorte d'expression d'un des volets possibles de concertation
tripartite, j'aimerais savoir si cela durera longtemps et qu'on ne se
réserve pas des lendemains douloureux parce que la pierre d'assise qui
est l'adhésion volontaire des travailleurs à ce système
n'a pas été assurée parce que les dispositions
n'étaient pas claires, parce que l'interprétation que le conseil
d'administration ou d'autres agents peuvent en faire d'une façon
ponctuelle est plus large que ce que les travailleurs croyaient. Cela leur
réservera des déceptions. Je ne pense pas que nous ferions une
oeuvre utile en ayant un projet de loi qui créera des déceptions
chez des gens dont on recherche l'adhésion volontaire. "Once bitten,
twice shy", comme disent les anglophones.
Dans ce cas, durant les courtes heures
dont nous disposons, notre devoir est de trouver comment
améliorer, dans la recherche des objectifs de fond, la formulation d'un
projet comme celui-ci; c'est pourquoi nous sommes à l'étude
article par article.
Le Président (M. Brouillet): Très bien, merci. M.
l'adjoint parlementaire.
Réplique de l'adjoint parlementaire
M. Dean: Très brièvement, je pense que toutes les
remarques des trois porte-parole de l'Opposition étaient pour
circonscrire les questions, les soucis, les inquiétudes qu'ils avaient
et leur désir de rendre ce projet de loi le plus acceptable et rassurant
possible. Ce sont des objectifs que nous partageons. Si j'essayais dans une
série de remarques de répondre à toutes les questions ou
à tous les problèmes posés, je risquerais de faire
à l'avance l'étude article par article. Plus courtes seront mes
remarques, plus vite on entreprendra l'étude article par article dans
laquelle on pourra profiter des gens que nous avons ici et qui sont en mesure,
de par leur participation dans la préparation du projet, de mieux
répondre au plus grand nombre de questions de l'Opposition. Je pense que
ce serait faire un travail utile. (16 h 15)
Vous me permettrez peut-être seulement d'essayer de faire quelques
remarques assez larges englobant un certain nombre de sujets soulevés
par l'Opposition. Je reviens au premier principe que c'est un fonds
proposé par un groupe de citoyens et de citoyennes. Certaines des
options ou certains des grands cadres de fonctionnement ou de conception de ce
fonds sont une question de choix. Leurs choix ont été
exprimés dans ce qu'ils ont déjà produit et dans ce qu'ils
vont produire d'ici le moment où on cherche à convaincre les
travailleurs et les travailleuses d'embarquer dans ce fonds. Ces choix peuvent
être contestés à un moment donné. Ils peuvent aussi
être balisés, bonifiés ou modifiés à la suite
de suggestions. C'est, quand même, une approche qui représente
certains choix fondamentaux exercés par la FTQ.
Il faut aussi souligner - je pense que l'unanimité se fait
là-dessus - le courage de la FTQ - je pense qu'on peut employer ce mot -
qui, comme centrale syndicale, sort beaucoup des sentiers battus du
syndicalisme québécois et veut participer de façon
particulière et concrète à ce nouvel élan de
l'économie. Sous réserve de toutes les précisions,
informations et garanties qu'on va essayer de donner au cours de nos
discussions, il ne serait pas exagéré de dire que la meilleure
garantie du sérieux, de la sécurité et du bon
fonctionnement du programme, c'est qu'une centrale syndicale comme la FTQ ne
peut quasiment pas se permettre de ne pas réussir; elle ne peut pas se
permettre de ne pas donner les garanties aux travailleurs et aux travailleuses
avant que ces personnes embarquent dans le fonds.
En disant que la FTQ ne peut pas se permettre de ne pas réussir,
on doit aussi globalement faire confiance à la Commission des valeurs
mobilières, qui a une série de critères et qui est
chargée par le gouvernement, par nos lois, d'exercer une fonction de
surveillance, d'inspection, d'exigence, de rigueur dans tout ce qui regarde -
j'allais dire "de près ou de loin", mais je ne le dirai pas - les
questions d'investissements de valeurs mobilières. Si la Commission des
valeurs mobilières a des exigences d'information préliminaire,
d'explications concrètes à des investisseurs possibles sur la
nature des investissements qu'ils sont appelés à faire, ainsi que
sur des éléments de contrôle, il faut aussi indiquer qu'il
faut quand même faire confiance, tout en balisant des choses, à
cette administration et à ce souci de voir à la bonne gestion de
ce genre de fonds, le plus rapidement possible.
Il faut aussi faire confiance - j'ai appris cela il y a
déjà de nombreuses années aux travailleurs et aux
travailleuses mêmes. J'ai appris depuis longtemps que, lorsqu'il s'agit
de cents et de piastres, cela ne prend pas un cours classique pour être
très astucieux et pour poser plusieurs questions avant de se
départir ou de gaspiller ces dollars. Si nous sommes d'accord qu'il est
aussi arrivé que des gens de bonne volonté, dans le passé,
soit intentionnellement ou par exprès, aient réussi à
faire tourner au vinaigre des bons projets d'investissement et à abuser
de la confiance des gens, il faut aussi dire que les travailleurs qui sont
sollicités vont exiger des renseignements solides, des assurances que
leurs investissements vont être fructueux et rentables.
Évidemment, on parle de capital de risque et je pense, par
définition, que, quand on parle franchement de capital de risque, le mot
"risque" indique qu'il y a des risques. On ne peut pas risquer du capital de
risque sans qu'il y ait risque.
Quant à cette approche, à cause des avantages fiscaux, qui
donne la possibilité de transférer ces actions dans un
régime d'épargne retraite, c'est d'abord pour assurer la
stabilité du fonds que cet aspect de contrôle serré des
entrées et sorties de l'argent est incorporé dans la structure du
fonds. Il y a aussi le fait que pour ce qui est du secteur privé de
l'économie, 75% des travailleurs n'ont pas de fonds de retraite autre
que le Régime de rentes du Québec. Ce n'est pas un mauvais
service à leur rendre, ce n'est pas une mauvaise éducation
à faire aux travailleurs d'englober cette caractéristique de
retraite combinée avec un investissement. Cela peut être une
orientation très utile pour les travailleurs comme individus,
tout en assurant une stabilité à ce fonds.
Je pense à un autre concept. Le député de
Brome-Missisquoi a demandé: Qu'est-ce que je peux dire à un
travailleur d'usine chez nous qui dit: Est-ce que je peux investir mon argent
dans mon usine? C'est un souci bien légitime. Encore là, on a
pris une approche collective, si vous voulez, pour ce fonds parce qu'on a de
mauvais exemples, malheureusement. Si on a de bons exemples de travailleurs qui
ont, dans une situation de crise, investi dans leur usine, des exemples de
réussite dans ce secteur, on a aussi connu, au Québec comme
ailleurs, des situations où des travailleurs investissant dans leur
usine, pour des raisons soit du marché, soit pour mauvaise gestion, soit
à cause de la malchance, soit simplement à cause de
l'inévitabilité de certains échecs économiques, ont
tout perdu et, à cause de cela, ont fini par perdre non seulement leur
argent, mais leur emploi, leur usine, leur sécurité et tout le
"kit". Donc, le fait d'avoir une approche collective assure une
stabilité, un élément de sécurité pour
l'argent des travailleurs, dans ce sens que le travailleur va prendre des
actions dans le fonds et que c'est le fonds, avec son conseil d'administration,
ses conseillers, qui va investir cet argent dans des entreprises.
Évidemment, on peut présumer que, si un groupe de travailleurs,
une majorité de travailleurs des entreprises A, B, C, investit dans le
fonds et que le moment arrive où leur industrie, leur entreprise a
besoin de capitaux ou de différentes formes d'implication
financière qui sont évoquées dans le projet de loi, ces
travailleurs ou leur entreprise vont adresser au fonds des demandes, soumettre
des projets et le fonds va probablement avoir un certain préjugé
favorable à l'égard d'une participation du fonds, mais la
participation dans la compagnie A, B, C, sera une participation par le fonds
qui amène la force d'un investissement collectif. Il y a cet
élément qui distingue. Peut-être que je ne suis pas
très clair et précis, mais on va essayer tantôt
d'être beaucoup plus clair et précis à mesure qu'on
attaquera l'étude article par article.
Vous avez évoqué aussi, avec toutes les raisons au monde -
encore là, on partage le souci de l'Opposition - la question des caisses
d'entraide et des SODEQ. Bien sûr, on a vécu des
expériences malheureuses, douloureuses. Tout en admettant qu'il faut
bien faire notre travail de législateurs, il faut présumer que
ceux et celles qui ont contribué à l'élaboration de ce
projet sont très conscients de ces mêmes échecs, sont
très conscients de ces mêmes problèmes et on peut
espérer qu'ils vont avoir de bonnes réponses à donner
quand on s'attaquera à des questions particulières au cours de
cette étude article par article.
Une dernière note que j'ai ici. Pour ce qui est des remarques du
député de Vaudreuil-Soulanges sur la concertation, je suis on ne
peut plus d'accord avec lui quand on dit: Comme cela prend deux pour danser,
cela prend peut-être trois pour se concerter. Si une centrale manifeste
son désir de participer à la concertation, je suis bien d'accord
qu'il faut éventuellement que le gouvernement implante des structures de
concertation - si j'ai bien saisi ses remarques - sauf que je dis
éventuellement parce que, des fois, ce ne sont pas les structures qui
sont les plus importantes, mais c'est l'esprit, l'expérience dans le
concret. Si cela donne éventuellement des structures, tant mieux, pour
autant que les structures servent l'objectif. Pour ce qui est du monde
patronal, encore là, j'attends avec impatience des preuves
concrètes du monde patronal dans le domaine de la concertation. Je
n'exclus pas les autres centrales syndicales. Je pense que j'exprime mon
complet accord avec le député de Vaudreuil-Soulanges.
Cela dit, je vais toucher à un point inscrit dans mes notes sur
les remarques du début du député de Brome-Missisquoi,
là où il commence à parler du nom du fonds, en
espérant que cela serve d'entrée en matière à
l'étude l'article par article.
Étude article par article
M. Paradis: M. le Président, au niveau du
préambule, qui fait partie du projet de loi, si on pouvait l'attaquer
tout de suite, j'aurais un amendement à proposer.
Préambule
Le Président (M. Brouillet): Vous savez que nous devons
suspendre les travaux à 16 h 30. Je ne sais pas, si vous déposiez
votre amendement tout de suite, il pourrait être
considéré.
M. Paradis: II n'est pas rédigé. Je vais en avertir
immédiatement, pour considération, le député de
Prévost, le rédacteur de l'autre côté. J'ai
expliqué dans quel carcan on avait été placé.
L'amendement aurait pour but de substituer deux mots à
l'avant-dernière ligne du dernier paragraphe des attendus, où on
dit: "Attendu que l'établissement d'un fonds de cette nature requiert
l'adoption de dispositions législatives particulières tant en ce
qui concerne son organisation qu'en ce qui concerne la protection des
épargnants auxquels il fera appel." Je changerais le mot
"épargnants" pour le mot "investisseurs" -justement, on parle, dans le
premier paragraphe, d'un fonds d'investissement -pour que le travailleur n'ait
pas la notion
que c'est de l'épargne sécurisée, mais que c'est de
l'investissement qu'il fait, que c'est du capital de risque qu'il fait. Ce
serait la proposition d'amendement. On peut y revenir.
Le Président (M. Brouillet): On en prend note et on pourra
y revenir au retour, à 20 heures. Peut-être qu'on pourrait
terminer le préambule, les remarques préliminaires.
M. Paradis: Je pensais que c'était terminé.
M. Dean: C'était terminé, sauf que j'aimerais poser
une question au député de Brome-Missisquoi parce qu'il a
évoqué le titre, le nom du fonds.
M. Paradis: Oui.
M. Dean: Est-ce qu'il va y avoir des amendements?
M. Paradis: Je peux vous dire tout de suite ce que je pense, sans
l'avoir par écrit; le rédacteur est à côté
également. À l'article 1: "Une compagnie à fonds social
est constituée sous la dénomination sociale de "Fonds de
solidarité des travailleurs du Québec". Afin de l'identifier
à son créateur, à celui qui l'a mis sur pied, je mettrais
entre parenthèses au bout "FTQ" pour que ce soit bien clair dans la
tête des gens. D'ailleurs, les commentaires que vous avez au bas, nous
indiquent que le gouvernement désire que cela soit réellement
identifié à la FTQ. Et "ci-après appelée" le Fonds,
on l'appellerait "le Fonds (FTQ)".
M. Dean: Je voudrais, avant la suspension, dire qu'on n'est pas
coulé dans le béton, même le béton FTQ-Construction,
là-dessus. Par contre, on va vous exposer du pour et du contre à
la reprise ce soir. Autant on peut être d'accord avec l'objectif de mieux
l'identifier, autant on voit certains dangers dans la façon de le faire.
On va exposer nos points de vue et, après cela, on va...
M. Paradis: Je voulais juste le donner. De toute façon, si
cela avait été coulé dans le béton
complètement, il y a toujours des dangers de saccage.
M. Lalonde: On va régler. "Tu règles ou..."
Le Président (M. Brouillet): Alors, il est 16 h 30. Nous
allons suspendre nos travaux jusqu'à 20 heures, ce soir.
(Suspension de la séance à 16 h 30)
(Reprise de la séance à 20 h 27)
Le Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente du travail reprend l'étude article par
article du projet de loi 192, Loi constituant le Fonds de solidarité des
travailleurs du Québec.
Nous étions rendus aux attendus, au préambule de la loi et
l'Opposition avait proposé un amendement. Il faudrait peut-être
disposer de cet amendement. L'amendement consistait à remplacer,
à l'avant-dernière ligne et à la dernière ligne du
préambule -le mot enjambe les deux lignes - le mot "épargnants"
par le mot "investisseurs".
Est-ce que quelqu'un aurait une intervention sur l'amendement?
M. Dean: Je propose, comme mode de fonctionnement et afin de
sincèrement dépolitiser ou "départisaner" toute
déclaration, de me faire un peu l'animateur et d'utiliser aux fins
d'explication de fait les experts juridiques ou autres qui sont ici et qui ont
travaillé à ce dossier. Ils exposeront cliniquement les options,
les choix, le pourquoi des problèmes évoqués par vos
questions; à la suite de quoi, nous prendrons des décisions. Je
dois dire que, même si certains objets des discussions de ce soir
toucheront peut-être des décisions du gouvernement, le ministre
concerné est près de l'appareil téléphonique et
viendra rapidement, si nécessaire.
Une voix: C'est qui ça?
M. Dean: M. Parizeau. Pas M. Frechette.
M. Paradis: On accepte ce mode de fonctionnement qui va
finalement accélérer le rythme des travaux.
M. Dean: On n'est fermé à rien. M. Brière,
je vous demanderais, en mon nom...
Le Président (M. Brouillet): M. Brière pourrait
peut-être, au nom de l'adjoint, donner quelques explications ou
réactions face à cet amendement.
M. Dean: Remarquez que c'est plus une explication qu'une
réaction. C'est que le terme "épargne" s'inspire de la Loi sur
les valeurs mobilières. Il ne s'agit pas, ici, d'épargnants dans
le sens de déposants dans des comptes d'épargne. Tout le
vocabulaire de la protection du commerce des valeurs mobilières
comporte, comme pierre angulaire, la notion d'épargne. Au fond, on
réglemente l'appel public à l'épargne quand on
réglemente les valeurs mobilières.
Ainsi, le titre II de la Loi sur les valeurs mobilières
s'intitule Appel public à
l'épargne. Tout au long de cette loi, il est question de cette
notion très large de l'épargne. Maintenant, pour ce qui est du
bien-fondé de l'amendement, je ne veux pas me prononcer, mais je voulais
tout simplement donner cette explication. Quelqu'un m'a souligné - et
j'attire votre attention sur ce fait - que dans le texte anglais de ce projet
de loi, au dernier paragraphe, le mot "épargnants" est traduit par
"investors".
M. Paradis: Je suis bien content, car les anglophones pourront
jouir d'une transparence additionnelle.
M. Dean: Cela éclaire ce que je viens de dire: ce ne sont
pas les épargnants au sens de déposants dans un compte
d'épargne. Ceci dit, je laisse au...
M. Paradis: Dans notre francophonie, le mot "épargnant" a
une connotation dans le langage usuel. Sans me référer à
quelque dictionnaire que ce soit mais strictement à la
compréhension qu'un député représentant une
conscription rurale ou semi-rurale peut en avoir, une épargne, c'est
quelque chose qui est garanti. Un investissement, c'est quelque chose qui
inclut la notion de risque. Je pense que des discussions que nous avons pu
avoir jusqu'à maintenant, il est clair, net et précis qu'il y a
une notion de risque qui est impliquée pour le salarier qui va investir
dans ce fonds.
Si on retourne au premier attendu, on voit: "Attendu que la
Fédération des travailleurs du Québec a proposé que
soit constitué un fonds d'investissement..." Qui investit dans un fonds
d'invesstissement? Si ce sont des épargnants, au sens usuel, qui
investissent, ces gens s'attendent à des garanties. Le mot
"épargnant" fait appel à nos notions d'épargnes et nos
épargnes, lorsqu'on les dépose, traditionnellement, on s'attend,
au moins, à ce qu'elles nous reviennent avec des fruits.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, quand tu épargnes
de l'argent, tu "sauves" de l'argent.
M. Paradis: Je ne pense pas, sur le plan juridique -
là-dessus, Me Brière pourra me répondre - que cela pose un
accroc à la Loi sur les valeurs mobilières, mais je pense que,
d'un autre côté, cela peut permettre -là, je m'adresse au
député de Prévost - aux travailleurs de comprendre
davantage ce dont il s'agit; il s'agit d'un investissement. Si on me dit que,
techniquement, cela va en conflit avec la Loi sur les valeurs
mobilières, etc., je serais prêt à entendre cet argument et
le considérer. Mais si cela ne va pas en conflit, je pense, au nom de la
transparence et de la bonne compréhension par les travailleurs de la
nature du fonds, qu'on ne devrait pas les qualifier d'épargnants ou
qualifier l'argent qu'ils y injectent d'épargnes; on doit plutôt
parler d'investissements.
M. Dean: M. le Président, je voudrais demander au
porte-parole de l'Opposition si la question qu'il a évoquée, de
mieux identifier le fonds de solidarité FTQ, s'applique à ce
préambule quant au titre de la loi ou si c'est à l'article 1.
M. Paradis: II y a le titre du préambule qui est
affecté.
M. Dean: D'accord.
M. Paradis: Le titre du préambule, c'est le même
nom, c'est le projet de loi 192, Loi constituant... Je pense que le titre
vient, suivant notre tradition parlementaire, à la fin de l'étude
article par article. Nous allons avoir besoin d'en discuter, à cause de
la rédaction de l'article 1, dès l'article 1, mais je ne pense
pas que ce soit dans le préambule. Je pense que le préambule
commence avec "Attendu" et, à partir de "Attendu", nulle part, on ne se
sert du nom comme tel, du titre; alors, on n'a pas senti le besoin
d'intervenir.
Le Président (M. Brouillet): À la fin, on adoptera
le titre et l'ensemble des sous-titres et, alors, celui-là sera compris
dedans. Une fois qu'on aura vu l'article 1, s'il y a lieu d'amender les titres
et les sous-titres, on le fera à la fin.
M. Dean: Juste à titre d'information, le paragraphe 2 de
l'article 276 de la Loi sur les valeurs mobilières, que vous avez
cité, d'ailleurs, dans les commentaires que vous avez sous les yeux sur
l'article 36, décrit le rôle de la Commission des valeurs
mobilières. Un de ses principaux rôles, c'est d'assurer la
protection des épargnants. Alors, c'est vous dire à quel point ce
terme est utilisé dans le vocabulaire du commerce des valeurs
mobilières. Il n'a pas cette connotation locale que vous lui donnez.
M. Paradis: Encore une fois, je suis certain que l'investisseur
utilise ses épargnes pour investir.
M. Dean: Techniquement je dois vous dire que cela restreint un
peu le sens, mais en tout cas.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, je suis d'accord et il me
semble que c'est avec raison que la suggestion est faite en l'occurrence. Je
comprends que nous parlons des épargnants à l'article 276, mais
ce sont toutes les formes d'investissement et
d'épargne possibles qui sont visées par les actions de la
Commission des valeurs mobilières, alors qu'en l'occurrence c'est un
véhicule d'action de la catégorie À qui est visé
par la loi.
M. Dean: Le gouvernement n'a pas d'objection. On ne tiendra pas
une bataille bien longtemps là-dessus, sauf qu'il y a cette question de
cohérence. Si cela peut bien amorcer nos discussions, allons-y pour
"investisseurs".
Le Président (M. Brouillet): L'amendement est donc
adopté. Adopté.
M. Dean: Est-ce que le préambule est adopté?
Le Président (M. Brouillet): Le préambule, tel
qu'amendé, est-il adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): Le préambule est donc
adopté, tel qu'amendé, sur division.
Nous sommes maintenant à l'article 1.
Constitution et siège social
M. Dean: L'expression "compagnie" indique le caractère
à but lucratif de la corporation créée. Vous avez les
mêmes notes que moi, M. le Président. Le porte-parole de
l'Opposition nous a fourni la même note explicative: un minimum de
discussion et un maximum d'éclaircissements.
M. Paradis: Dans les commentaires qu'on a sur ce qui suit, on lit
en même temps: "L'expression "compagnie" indique le caractère
à but lucratif de la corporation créée." Si on se comprend
bien, cela veut dire que la corporation créée peut faire des
profits, peut faire des pertes, peut avoir des bilans équilibrés.
Toutes les situations d'une compagnie à but lucratif sont
envisagées. On dit également: "Le nom s'apparente à celui
de la Fédération des travailleurs du Québec qui est
l'instigatrice du projet. Ce choix ne risque pas de créer de confusion
avec un autre organisme inscrit chez l'inspecteur général des
institutions financières." Mais, lorsqu'on parle de Fonds de
solidarité des travailleurs du Québec, dans le but d'avoir la
certitude que le nom ne prête pas à confusion, dans le but d'avoir
la certitude que le nom identifie bien le fonds de la FTQ qui est
l'instigatrice «de ce projet de loi - je le dis à titre de
suggestion avant d'en faire un amendement formel - on pourrait
considérer peut-être de l'identifier plus spécifiquement en
disant: Le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (FTQ)
ou le Fonds des travailleurs du Québec
(FTQ), ci-après appelé le fonds. On ajouterait encore une
fois le Fonds FTQ pour que les gens sachent bien à quoi s'en tenir,
qu'il ne s'agit pas d'un fonds de l'ensemble des centrales syndicales. L'un des
documents qu'on nous avait remis - je le cherche, je ne le trouverai pas, j'en
amène toujours trop -parle de l'implication du syndicalisme ou des
syndicats en général; le document de vulgarisation que vous nous
avez remis, M. le député de Prévost, parle des syndicats
en général. Dans le cas qui nous concerne, c'est bien clair, bien
net et bien compris. D'ailleurs, les commentaires que vous nous avez transmis
indiquent que vous voulez, comme gouvernement, que ce soit identifié. En
parlant de Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, je ne
suis pas convaincu que, d'abord, l'ensemble de la population identifiera ce
fonds à la FTQ.
M. Dean: M. le Président, j'inviterai une autre personne
à parler sur les évaluations qui ont été faites. Je
voudrais dire que, du point de vue du marketing, de l'identification, nous
sommes d'accord, en principe, avec le député de Brome-Missisquoi.
Je dois, évidemment, souligner que l'identification FTQ peut se faire
quand même et va se faire par la publicité, le prospectus,
l'information fournie par le fonds aux membres ou aux investisseurs. Par
contre, je dois dire, pour tout dire, qu'on s'est torturé et qu'on a
essayé plusieurs versions de noms pour différentes raisons, pour
que cela ne ressemble pas trop à d'autres noms, pour éviter
autant que possible la confusion. Si le choix a été ainsi fait,
c'est dans le sens que, si on identifie, entre parenthèses (FTQ),
même dans la loi, est-ce que des investisseurs pourraient être
induits en erreur, en croyant que la FTQ assurerait la solidité du fonds
ou garantirait en quelque sorte les investissements?
Il serait mieux de demander à M. Lacoste d'ajouter quelques
commentaires sur les aspects techniques de ce choix.
M. Paradis: Avant l'intervention de M. Lacoste, strictement sur
le plan de la vulgarisation qu'on s'apprête à donner dans la
pratique au projet de loi, dans un document qui s'intitule Fonds de
solidarité, mars 1983, qui est un document de la FTQ, on retrouve
à la deuxième feuille, en page frontispice, le titre, en grosses
lettres noires: Pourquoi il est essentiel que les syndicats - au pluriel
-prennent le leadership de ce type d'intervention. Mais nous savons très
bien, à la suite des informations qui nous ont été
transmises, que c'est le syndicat FTQ qui prend le leadership de ce type
d'intervention. Je pense que la nuance dans ce sens milite en faveur d'une
clarification. Il s'agit bien du fonds de la FTQ, parce que, même dans
les documents de vulgarisation, même sur la
première page, on retrouve FTQ. Là-dessus, j'admets cela,
ils ont mis leur sigle avec leur nom. Lorsqu'on voit un titre: Pourquoi il est
essentiel que les syndicats... si j'étais un lecteur qui n'avait pas eu
l'avantage de participer au débat en deuxième lecture, qui
n'avait pas eu l'avantage d'en discuter avec les parties, je serais
porté à croire que ce sont les syndicats québécois
qui sont impliqués, qui prennent le leadership de ce type
d'intervention, alors que clairement et définitivement c'est la FTQ qui
le prend.
M. Dean: M. le Président, en mon nom, M. Lacoste.
La question du nom, c'est la préoccupation principale de
protection de l'épargne des investisseurs. Il faut se poser la question
pour éviter de créer toute illusion également dans la
tête des gens qui vont investir dans ce fonds sur l'endroit où va
cet argent. Autant c'est important de décrire qui est le promoteur du
fonds, c'est-à-dire la FTQ, autant il faut éviter de tellement
bien le décrire que les gens s'imaginent qu'ils font un
dépôt auprès de la FTQ qui leur garantit de quelque
façon que ce soit leurs épargnes. La crainte qui est
soulevée de ne pas laisser penser que c'est la FTQ devrait normalement
être dissipée lorsqu'on comprend que chaque personne qui sera
invitée à souscrire des actions du fonds se fera remettre un
document qui ne sera pas celui-là - je vais vous expliquer pourquoi
tantôt - et qui sera approuvé par la Commission des valeurs
mobilières. Ce qui est prévu, c'est que le document serait de la
nature de celui qui est remis par ce qu'on appelle communément les fonds
mutuels, les SICAV ou les autres.
La Loi sur les valeurs mobilières défend l'utilisation de
documents qui contiennent des mentions autres que celles qui sont dans le
prospectus, le dossier d'information ou le document qui tient lieu de
prospectus. Ces documents décriront très bien le rôle de la
FTQ par rapport au fonds. Même au niveau de ce qui est prévu, des
assemblées générales ou des souscriptions directes toutes
les personnes qui souscriront au fonds auront eu ce document. (20 h 45)
M. Paradis: Je suis sensible à votre argumentation. Je
suis d'accord que les personnes qui vont souscrire vont toutes avoir
l'information de la Commission des valeurs mobilières dans le sens
où vous l'indiquez, mais elles vont également avoir -parce que je
connais les capacités, les moyens de diffusion et les systèmes
d'impression de la FTQ - en main d'autres documents. Les documents qui
circulent présentement - nous sommes contents qu'ils circulent, cela
prouve qu'on ne veut pas cacher ce qui se passe réellement dans ce
dossier - nous indiquent que ce sont les syndicats qui doivent prendre le
leadership de ce genre d'intervention. Si, au niveau de la
sécurité, vous craignez que les gens pensent que c'est la FTQ qui
garantit les sommes qui sont déposées - nous reviendrons sur les
garanties plus tard - c'est encore plus inquiétant si on pense que ce
sont "les syndicats". Parce que la garantie n'est pas simplement
doublée, mais on ajoute la CSN, on ajoute la CEQ, on ajoute la CSD, on
ajoute les autres grands syndicats, on ajoute même les syndicats de
boutique. Il faut être certain que les gens sachent bien où va
leur argent. Leur argent ne va pas dans les mains des syndicats
québécois; l'argent va dans le fonds qui, suivant les articles
qu'on verra plus tard, est administré par un conseil d'administration
contrôlé par la FTQ. Il s'agit que ce soit clair, pour la personne
qui investit dans ce fonds, que c'est la FTQ qui contrôle son argent et
que la FTQ, avec sa majorité au conseil d'administration, est celle qui,
en dernier recours, va prendre toutes les décisions.
M. Dean: Le seul point que je voulais illustrer - je ne porte pas
de jugement sur le fait de savoir si c'est opportun ou non -c'est que le
risque, en mettant le sigle "FTQ" entre parenthèses ou en mettant "de la
FTQ", c'est qu'on puisse laisser planer l'idée qu'il s'agit d'un fonds
qui appartient à la FTQ. Cette idée peut créer une
illusion de protection qui, d'après moi, est plus néfaste que de
ne pas le dire dans le titre du fonds. Il reste que tous les documents qui vont
le véhiculer vont très bien expliquer le mécanisme de
gestion du fonds et comment il a été constitué ou promu.
C'était uniquement dans ce sens que je disais: II y a peut-être un
risque à laisser penser que c'est un fonds qui appartient à la
FTQ.
M. Paradis: Ce ne seraient pas tous les documents; ce seraient
les documents qui émanent de la Commission des valeurs
mobilières. Vous pouvez vous porter garants de ces documents. Les autres
documents qui vont circuler, comme celui-ci, indiquent quelque chose qui va en
sens contraire.
Quant à la croyance populaire que la FTQ pourrait garantir le
fonds, je vous dirai que le gouvernement, en en faisant un projet de loi,
risque également, en ce qui a trait à la croyance populaire, de
laisser croire aux investisseurs que le gouvernement est derrière - sans
dire garantir - le projet de loi. Cela implique un degré de confiance
chez l'investisseur que le gouvernement supporte, de façon très
ouverte, cette idée. Je pense que la garantie gouvernementale qui peut
être pressentie est encore plus importante que la garantie FTQ.
Soyons le plus clair possible avec les gens, c'est le sens de mon
intervention. Je ne pense pas que la FTQ, comme telle - elle
se met la tête sur le billot, dans un certain sens - ait de
réserve à ce que le fonds, qu'elle va administrer, qu'elle va
contrôler, soit clairement identifié, sans aucun doute, à
la centrale syndicale qui va l'administrer.
M. Dean: M. le Président, je voudrais d'abord apporter un
élément de correction. Je pense que l'expression "les syndicats",
dans ce document, doit être comprise dans le sens que ce sont les
syndicats affiliés à la FTQ. Si on fait de la sémantique,
l'expression, c'est "centrales syndicales"; la FTQ, la CSN, la CSD, ce sont des
centrales syndicales.
Le document publié par le fonds de solidarité que vous
avez en main, je présume que c'est un document préliminaire du
fonds et un document de sensibilisation d'un certain nombre de cadres syndicaux
à savoir s'il est souhaitable de créer un fonds, les objectifs,
les analyses, etc. Mais il faut comprendre les mots dans leur sens et, dans le
sens de ce document, "les syndicats" veut dire, en langage FTQ, les
différentes - ainsi que la CSN les appellerait peut-être
-fédérations syndicales. Il y a plusieurs
fédérations syndicales, dans le sens français du mot, qui
sont affiliées à la FTQ. C'est dans ce sens qu'on devrait
utiliser le nom "syndicats". Deuxièmement, je dois dire que, dans un
souhait, un désir ou un objectif légitime de clarté, de
transparence, il ne faut pas, non plus, risquer de créer d'autres
fausses impressions ou d'autres manques de transparence à l'autre
extrême.
Cela dit, vu qu'il s'agit du titre, je me demande s'il ne serait pas
souhaitable, sans vouloir couper la parole à quiconque, comme on dit
dans le monde des négociations, de mettre l'article 1 sur la glace pour
un certain temps. On verra ce qu'on fait avec le reste et on y reviendra.
Maintenant, est-ce que l'Opposition veut s'exprimer là-dessus?
M. Paradis: Avant qu'on mette cet article sur la glace,
même si on accepte ce principe parce qu'il est directement relié
au titre, il reste que, dans les autres articles, on risque d'adopter les mots
"le fonds" strictement.
M. Dean: Je pense que oui.
M. Paradis: On ferait peut-être mieux de régler le
problème. Je suggère cela, mais en laissant toute ouverture pour
mettre l'article sur la glace. On peut accrocher à plusieurs articles
à cause de l'expression "le fonds".
Il faut voir les titres de journaux et constater de quelle façon
cela a été compris par les journalistes ou par celui qui compose
les titres dans le journal: "Le fonds d'investissement de la FTQ emballe Biron,
mais contrarie le Bureau du commerce." Biron l'identifie bien clairement.
Dans le Devoir: "Le fonds de solidarité des travailleurs compte
investir 200 000 000 $ en trois ans." L'interprétation est
différente. Ce sont deux journalistes du Devoir: le 5 mars, M. Rodolphe
Morissette parle du fonds d'investissement de la FTQ et, le 11 juin, M. Gilles
Lesage, parle du Fonds de solidarité des travailleurs. Il y a
déjà de l'ambiguïté entre les deux. "Fonds de
solidarité: un haut fonctionnaire du gouvernement prêté
à la FTQ". "Fonds de solidarité (FTQ)" les gens disent: Oui, la
FTQ en fait partie, mais est-ce que c'est le tout, l'ensemble, ou s'il n'y a
pas d'autres syndicats?" Feu vert à la création du Fonds de
solidarité de la FTQ." La journaliste de la Presse, Linda Binsse, elle,
l'associe directement à la FTQ. "Le fonds de relance
suggéré par la FTQ." On ne sait pas si c'est le fonds de la FTQ.
Cela, c'est dans Actualités économiques. "FTQ, la loi
créant le fonds de solidarité serait imminente." Est-ce que c'est
le fonds de la FTQ ou si c'est le fonds de l'ensemble des centrales syndicales
et des travailleurs? "Is this fund necessary?" "Aide à la PME."
"Bourassa loue la FTQ." Est-ce que c'est strictement le fonds de
solidarité ou s'il s'agit du fonds de solidarité de la FTQ?
M. Dean: Est-ce bien le M. Bourassa qu'on connaît?
Une voix: C'est le petit Robert.
M. Dean: Ce serait bien la première fois qu'il loue la
FTQ.
M. Paradis: M. le Président, à la suite de son vote
sur les secteurs public et parapublic, je suis certain qu'il ne s'agit pas du
député de Bourassa.
M. Dean: M. le Président, je ne veux pas prolonger la
discussion pour rien. Justement, nos amis les journalistes ne donnent pas
toujours le reflet le plus clair de la voix du peuple non plus. On constate
aussi, souvent, que même un titre ne reflète aucunement l'article
auquel il se rapporte, car il y a deux personnes différentes qui
interviennent. Dans les bonnes conditions de travail négociées
pour les journalistes par les différents syndicats ou par les
différentes centrales syndicales, quelquefois, le même gars n'est
pas là au premier ou au deuxième quart de travail. Il y a une
moitié du travail qui est faite par l'un, et l'autre moitié par
l'autre.
Cela dit, je pense qu'il n'y a aucune façon au monde de s'assurer
qu'un client, qu'une personne, qu'un citoyen n'achète pas, un jour, un
produit GM en croyant que c'est un produit Ford ou n'achète pas ITT
en
croyant que c'est une multinationale. Effectivement, c'est une
incapacité temporaire et totale de la CSST. Cela dit, dans notre
société, malgré les efforts de tous les publicistes,
sémanticiens et de ceux dont la fonction est de clarifier des choses, il
y a quand même des gens qui sont mêlés de toute
façon.
Dans le présent cas, je peux me tromper, mais je pense - et je
suis toujours ouvert à tous les commentaires et à toutes les
suggestions - que ce qui est vraiment important dans tout cela, c'est le
contenu des documents d'information ou des prospectus qui seront fournis en
fonction de la loi, et des ordonnances ou des directives de la Commission des
valeurs mobilières. C'est cela qui sera vraiment déterminant dans
la clarté et la transparence souhaitables vis-à-vis des
investisseurs et c'est cela qui finira par motiver la décision
d'investir ou non, de se retirer après 60 jours, tel que prévu
dans la loi, ou de s'embarquer et de changer d'idée six mois
après, tel que prévu dans la loi, pour arrêter
d'investir.
M. Paradis: Je vais vous poser la colle suivante et je l'annonce
comme telle. On a un fonds de solidarité qui est l'initiative, qui vient
à l'instigation de la FTQ. Supposons -là, nous sommes dans des
hypothèses et le président pourrait refuser ma question, mais je
suis obligé de la poser - qu'une autre centrale syndicale, la CSD par
exemple, nous arrive à l'automne et demande, elle aussi, d'avoir un
fonds de solidarité des travailleurs. De quelle façon, une fois
que le titre est donné à un syndicat de façon globale,
peut-on imaginer que nous allons créer le fonds de solidarité des
travailleurs du Québec II?
M. Dean: M. le Président, en étant un peu au
courant de la gymnastique qu'on a faite pour trouver ce nom-là et pour
que cela ne ressemble pas trop à toutes sortes d'autres organismes ou
"patentes" qui existaient ou qui ont été créés en
cours de route, je dirai qu'il faudrait peut-être que la CSD, la CSN ou
la CEQ sortent leur petit Robert - pas Robert Bourassa - ou le Larousse pour
trouver un autre nom. Si on veut éviter la confusion, il faudrait quand
même faire preuve d'imagination et peut-être trouver un autre titre
qui ne ressemblerait pas trop à celui-là.
M. Paradis: J'émettrai le commentaire suivant. Le titre
qu'on a trouvé est globalisant. Ce que l'on recherche - et cela a
été indiqué dès le début dans nos remarques
préliminaires - c'est la spécificité. Il faut que ce soit
spécifique. Si je suis un travailleur dans une usine et que j'investis
dans le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, il faut
que je sache - il faut que ce soit dit parce que je n'aurai peut-être pas
le temps, à cause de plusieurs préoccupations, d'aller le
vérifier - qui l'administre. Si je ne l'ai pas dans le titre, on
m'appelle à un deuxième raisonnement ou un troisième que
je ne ferai peut-être pas.
Il est dit dans les notes explicatives que le projet de loi est à
l'instigation de la Fédération des travailleurs du Québec.
Soyons consistants. S'il s'agit de la Fédération des travailleurs
du Québec, disons qu'il s'agit du Fonds de solidarité des
travailleurs du Québec ou du Fonds des travailleurs du Québec en
mettant la dénomination FTQ et, lorsqu'on parlera du fonds, on parlera
du Fonds FTQ. Le travailleur qui investira saura que son argent est
administré par la FTQ. Cela peut l'inciter à investir.
M. Dean: Deux petits points et, ensuite, on le mettra vraiment
sur la glace et on ira à l'article 2. Si un autre projet de loi
semblable devait venir dans six mois à l'initiative de la CSN, de la CSD
ou de la CEQ et qu'on proposait de l'appeler le Fonds de solidarité des
travailleurs du Québec CSN ou CSD, je pense qu'avec raison, si le
gouvernement ne le faisait pas de son propre chef, le porte-parole de
l'Opposition pourrait dire: Malgré la petite étiquette, il y a
trop de danger de confusion. Ce titre n'est pas moins spécifique, par
exemple, qu'une entreprise qui s'appelle Asbestos Limited. Cela s'adonne
à être la première qui s'appelle Asbestos Limited, mais
ensuite on n'encourage pas d'autres entreprises à choisir le même
nom. On les empêche même de le faire, d'après mes
connaissances limitées dans ce domaine. On ne peut pas permettre trop
facilement - surtout appuyé par une législation - que deux ou
trois Asbestos Limited différentes se promènent dans le paysage
et concurrencent la loyauté des consommateurs ou des acheteurs. (21
heures)
M. Paradis: On pourrait avoir une Asbestos Limited, une Asbestos
Uranium Limited, une Asbestos Nickel Limited, et on pourrait être
porté à croire que c'est la même maison mère. Dans
le cas qui nous concerne, il s'agit définitivement d'un conseil
d'administration qui va provenir de la maison mère. Je ne pense pas que
la maison mère ait quelque réserve à ce que le fonds soit
clairement étiqueté Fonds de solidarité des travailleurs
du Québec (FTQ).
M. Dean: On le met sur la glace.
Le Président (M. Brouillet): On suspend l'article 1.
Passons à l'article 2.
M. Dean: M. le Président, peut-on convenir que, là
où on trouve le "Fonds" dans les autres articles, cela va être
adopté sous réserve de l'article mis sur la glace?
Le Président (M. Brauillet): Article 2?
M. Dean: L'article vise à rendre applicable la partie IA
de la Loi sur les compagnies au lieu de la partie II de cette loi dont
l'application serait autrement automatique. Il écarte, de plus,
l'application de certaines dispositions de la partie IA parce que non
pertinentes. L'intérêt de rendre la partie IA applicable à
la compagnie réside surtout dans la plus grande souplesse que permettent
ces dispositions législatives plus modernes. Là, il y a un
précédent d'une autre société, qui explique en
détail les raisons de ce précédent.
Le Président (M. Brouillet): Est-ce qu'il y a des
questions, des commentaires sur cet article avant de passer à
l'adoption?
M. Paradis: Oui, parce que, si je recevais un prospectus qui se
lisait comme suit - je suis un peu rouillé dans mes notions de droit
corporatif - j'aurais beaucoup de questions qui me viendraient à
l'esprit: "Malgré l'article 125 de la Loi sur les compagnies (LRQ,
chapitre C-38) les dispositions de cette loi qui sont applicables aux
compagnies constituées par dépôt de statuts s'appliquent,
en les adaptant, au fonds dans la mesure où elles ne sont pas
inconciliables avec la présente loi, sauf l'article 2, le
deuxième alinéa de l'article 46, le paragraphe 1 de l'article 53,
l'article 54, les articles 123.9 à 123.11, 123.21 à 123.28,
123.55, 123.72, 123.82, 123.91 à 123.93, 123.95, 123.96, 123.98 à
123.100, le deuxième alinéa de l'article 123.114 et les articles
123.115 à 123.39. "Le fonds est réputé avoir
été constitué par dépôt de statuts, le
(insérer ici la date de sanction de la présente loi). "Ces
statuts peuvent être modifiés mais le dépôt de
statuts ne peut avoir pour effet de modifier une disposition de la
présente loi."
J'aimerais que, en langage compréhensible, pour ne pas avoir
côte à côte les articles énumérés,
etc., on me dise qu'est-ce que c'est cela.
M. Dean: M. le Président, je me rends volontiers à
la question du porte-parole, le député de Brome-Missisquoi, mais
je veux quand même dire que le député de Brome-Missisquoi a
l'avantage d'être avocat. Il dit que ses notions de droit corporatif sont
rouillées; les miennes n'ont jamais même été
créées, donc elles ne peuvent pas êtrerouillées, mais le fait demeure que, en praticien, j'ai lu plusieurs
lois dans ma vie et ce n'est pas la première fois dans l'histoire du
monde qu'on voit de telles choses.
M. Paradis: Non, je ne critique pas la technique de
rédaction.
M. Dean: Pour le contenu du projet, je demanderais à Me
André Laverdière, représentant de l'inspecteur
général des institutions financières, d'en expliquer le
sens.
Résumer en quelques mots cet article serait peut-être assez
difficile, mais je vais quand même essayer le mieux possible de donner
une explication. Disons, d'abord, que cette compagnie est créée
par une loi spéciale. Si les mots: "Malgré l'article 125 de la
Loi sur les compagnies" n'étaient pas là, cette compagnie serait
régie par la partie II de la Loi sur les compagnies qui s'applique aux
compagnies créées par loi spéciale. Cela n'aurait pas
été tellement avantageux parce que la partie IA qui a
été introduite en 1980 vient, en fait, assouplir et rendre plus
modernes les dispositions du droit corporatif applicables aux compagnies. On a
donc voulu que cette compagnie, quoique créée par loi
spéciale, soit assujettie à la nouvelle partie IA de la Loi sur
les compagnies.
M. Paradis: Dans le but d'assouplir quels mécanismes de
fonctionnement?
M. Dean: Vous me demandez, en fait, l'avantage de la partie IA
sur les autres dispositions?
M. Paradis: Oui. La partie IA dont les articles sont visés
spécifiquement.
M. Dean: C'est-à-dire que toute la partie IA vient
contrôler cette compagnie, vient s'appliquer à cette compagnie,
sauf certains articles parce qu'ils n'étaient pas applicables ou parce
qu'ils étaient inconciliables avec la loi spéciale qu'on veut
créer. Exemple: 123.9 et 123.11 qui parlent de la constitution d'une
compagnie selon la partie IA. Cela ne peut pas être applicable vu qu'on
la constitue par une loi spéciale. Autre exemple, 123.21 à
123.28, sur la dénomination sociale des compagnies. À ce moment,
il n'apparaissait pas opportun que le directeur puisse changer le nom de la
compagnie, par exemple, des choses comme cela. 123.55, c'est relatif au rachat
d'actions dans certains cas.
M. Paradis: II y a des dispositions spécifiques pour les
transactions d'actions qui sont prévues dans la loi.
M. Dean: Disons que toute la loi s'applique. Il y a à peu
près dans la partie IA 160 articles, plus les articles de la partie I -
il y en a au moins une centaine ou 75 -qui vont s'appliquer à cette
compagnie comme à toute compagnie à capital-actions
créée en vertu de la partie IA, sauf des articles qui ne
pourraient pas s'appliquer
parce que c'est une loi spéciale ou encore qui ne pourraient pas
s'appliquer parce que des dispositions similaires sont prévues dans la
loi spéciale ou encore, dans le cas de fusion, par exemple. On n'a pas
fait entrer les articles de fusion parce qu'on ne voulait pas, non plus, que
cette compagnie puisse fusionner une autre compagnie déjà
créée en partie IA ou en partie I, par exemple.
M. Paradis: C'est un point important, quand même.
M. Dean: Je pense que c'est assez important. Elle va rester telle
qu'elle est et, si on veut toucher une disposition de cette loi, cela va
prendre une autre loi. Par ailleurs, on pourra modifier, ajouter des choses qui
ne sont pas inconciliables avec cette loi en déposant des statuts de
modification.
M. Paradis: Est-ce que vous auriez des exemples à ce
titre?
M. Dean: Des exemples.
M. Paradis: De ce qu'on pourrait faire sans passer par
l'Assemblée nationale.
M. Dean: Si on va au capital-actions, il est prévu qu'on
pourra, par exemple, modifier ou ajouter d'autres catégories d'actions.
La loi prévoit la catégorie À. On pourra, par exemple, si
le fonds a besoin d'investissements ou de financement sous forme d'actions
privilégiées, créer des catégories d'actions
privilégiées, ainsi de suite, sans droit de vote. On pourra aussi
ajouter d'autres genres de dispositions, toute autre disposition qui ne serait
pas inconciliable avec cette loi. Un exemple là-dessus: on pourrait
vouloir préciser certains objets, mais l'exemple est peut-être mal
choisi parce que cette compagnie aura tous les pouvoirs d'une personne
physique. Autrement dit, elle peut tout faire, tous les commerces, tout.
Quelles dispositions on pourrait ajouter? Ce seraient des dispositions
plutôt restrictives, je dirais, puisqu'ils ont déjà des
pouvoirs très étendus. Ils pourraient peut-être par statuts
de modification ajouter certaines dispositions qui viendraient restreindre
certaines choses ou préciser certaines formes d'investissement, des
choses comme cela.
M. Paradis: Au niveau de la restriction des pouvoirs, ce n'est
pas ce qui m'inquiète le plus comme législateur. C'est au niveau
de l'élargissement de ce qui est prévu. Vous avez donné
l'exemple de l'émission possible de catégories d'actions
diverses. À première vue - prima facie, comme on dit dans le
vocabulaire - cela me semble permettre l'élargissement de ce qu'on
prévoit.
M. Dean: C'est déjà prévu dans la loi. Ce
n'était peut-être pas un bon exemple dans ce sens-là, mais
on y viendra plus tard.
M. Paradis: Est-ce que, à votre connaissance, il y a
d'autres exemples où on pourrait élargir, par l'interaction de la
partie IA de la Loi sur les compagnies, les pouvoirs que l'on accorde à
ce fonds dans la présente loi?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): S'il a tous les droits d'une
personne physique, c'est bien difficile à élargir.
M. Dean: C'est difficile, mais on pourrait peut-être venir
préciser des choses en le limitant, par exemple, au niveau des
investissements. On pourrait vouloir mentionner, dans des statuts, que
certaines formes d'investissements dans tel genre d'entreprise seront faits
selon telles conditions. Si cela ne contredit pas la loi, cela pourrait
être indiqué. Mais vu qu'il a déjà tous les
pouvoirs, ce serait peut-être plus de la restriction.
M. Paradis: Pour ce qui est des restrictions, cela ne
m'inquiète pas, parce que le cadre qu'on donne...
M. Dean: C'est cela.
M. Paradis: ...s'il est rétréci, finalement, c'est
à la discrétion du conseil d'administration, qui va administrer
le fonds. Ce que je veux, c'est votre parole qu'il n'y a pas
d'élargissement possible.
M. Dean: D'abord, les dispositions de la loi elle-même ne
peuvent pas être modifiées. Vous ne pouvez pas même faire
quelque chose d'inconciliable avec cette loi. Alors, cela étend encore
le principe. Il faut dire, par ailleurs, qu'étant en partie IA elle a
déjà de très grands pouvoirs. Alors, venir élargir
cela par statuts de modification, ce serait difficile parce qu'on ne peut pas
toucher aux normes et aux garanties contenues dans la loi.
Le Président (M. Brouillet): Sur l'article 2, y aurait-il
d'autres questions? L'article 2 est adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division.
Article 3?
M. Dean: Le siège social ne pourrait être
établi en dehors de la Communauté urbaine de Montréal sans
modification à la présente loi. La raison, c'est que la vaste
majorité non seulement de la population du Québec, mais des
adhérents à la centrale
FTQ habite la région. On ne voudrait pas que le fonds
déménage de nuit, comme la fédération des
caisses.
Le Président (M. Brouillet): Est-ce que l'article 3 est
adopté?
M. Paradis: Je me posais une question parce que, dans mes notions
rouillées de droit corporatif, le conseil d'administration peut toujours
décider, à l'intérieur du Québec, de changer son
siège social de municipalité, de territoire, de district
judiciaire, etc. Pourquoi veut-on s'astreindre à une telle chose? C'est
ma seule question.
M. Dean: C'est pour les raisons que je viens d'évoquer.
C'est que, administra-tivement, la vaste majorité de la clientèle
potentielle du fonds habite la région métropolitaine de
Montréal, les administrateurs en bonne partie également. Aussi,
Montréal est un centre financier et on crée une institution
financière.
M. Paradis: Je n'ai pas d'objection de principe, mais je me
demandais, dans ce cas, si on ne s'en remettait pas, comme dans les autres cas,
aux règles usuelles du droit corporatif. C'était ma seule
question.
M. Dean: On me corrige. Les gens de l'Opposition m'ont dit
à plusieurs reprises qu'on créait une institution
financière. Techniquement, paraît-il, ce n'est pas le cas.
J'espère que cela ne soulèvera pas de débat.
Le Président (M. Brouillet): L'article 3 est
adopté?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, en faisant remarquer, M.
le Président, qu'on a fait valoir exactement les mêmes raisons
pour que le siège social de la Société
québécoise des pêches soit à Gaspé
plutôt qu'à Québec et cela a été
rejeté par le gouvernement.
M. Dean: Une fois de plus, vous avez perdu. (21 h 15)
Le Président (M. Brouillet): Article 4?
Administration
M. Dean: Cet article fixe la composition du conseil
d'administration du fonds. La durée du mandat des administrateurs sera
déterminée par règlement du fonds qui pourrait la fixer
à un an pour certains et à deux ans pour d'autres de
manière à assurer une continuité. Selon la Loi sur les
compagnies, la durée maximale d'un mandat d'administrateur est de deux
ans. Cette règle s'appliquera ici à tous les membres du conseil
à l'exception du président-directeur général. Nous
avons à introduire ici un amendement.
Le Président (M. Brouillet): Une minute! Excusez-moi, M.
l'adjoint. Est-ce que vous préférez qu'on l'adopte paragraphe par
paragraphe? C'est préférable habituellement.
M. Dean: Oui, d'accord.
Le Président (M. Brouillet): Quand on arrivera au 2e, on
pourra présenter l'amendement.
M. Dean: D'accord.
Le Président (M. Brouillet): Alors, on dit: Les Affaires
du fonds seront administrées par une administration composée
comme suit: "1° sept personnes nommées par le Conseil
général de la Fédération des travailleurs du
Québec. Est-ce que ce premier paragraphe est adopté?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
J'aurais une question préalablement - encore une fois, mes
notions sont rouillées - sur les deux premières lignes de
l'article 4. Quant aux affaires du fonds - j'essaie de me souvenir - ceux qui
sont quotidiennement proches de cela pourraient-ils me dire la
différence entre "the business of a corporation and the affairs of the
corporation"? Est-ce "the business" ou les affaires du fonds?
M. Dean: C'est la "business".
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est l'appellation
française reconnue qui traduit "the business of the corporation".
M. Dean: Oui.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II y a la notion de "business"
et celle "the affairs" qui sont intervenues.
M. Dean: Non, mais c'est plutôt "business".
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Bon, d'accord.
M. Dean: Dans le texte anglais, je ne sais pas comment on a mis
cela.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Vous avez le texte anglais.
M. Dean: Excusez, je peux ajouter que l'article 83, par exemple,
dit: "Les affaires de la compagnie sont administrées..." J'ai le texte
anglais ici.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Est-ce
que "the affairs" veut dire les affaires internes? Non, c'est la
gestion, c'est la prise de décision politique, etc. Mais "the business"
- j'essayais de me souvenir - il me semble que cela se rattache à la
nature des activités. Ce sont les actionnaires qui décidaient de
cela. Je pensais à la "business of the corporation". C'est dans la
section "affairs", dirait-on, plutôt que dans "business".
M. Dean: Oui, mais je pense que c'est l'expression
consacrée dans les lois, tant dans la loi générale que
dans les lois particulières qui créent des corporations. On parle
des affaires de la compagnie, des affaires de la société etc.
C'est plus dans le sens des affaires courantes. Ce serait "affairs" au sens
où vous l'entendez en anglais plutôt que "business."
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
Comme dans la traduction.
M. Dean: Oui, probablement.
Le Président (M. Brouillet): Est-ce que le premier
paragraphe est adopté?
M. Paradis: M. le Président, même si je consens
à le traiter comme vous le suggérez, il y a des remarques
globales qui s'imposent. Tout cela est interrelié, finalement. On parle
d'un conseil d'administration de treize personnes. À l'alinéa 1,
on parle de sept personnes nommées par le Conseil général
de la Fédération des travailleurs du Québec. On tentera de
le résumer, on ne peut pas sauter le paragraphe 2: "deux personnes
élues par l'assemblée générale des
détenteurs d'actions de catégorie À." Ce sont les
investisseurs qu'on appelle communément. "3 trois personnes
nommées par les membres visés dans les paragraphes 1° et
2° parmi les personnes que ces membres jugent représentatives des
entreprises industrielles pour une, des institutions financières pour
une autre et des agents socio-économiques pour la troisième."
Finalement, on se rend compte que ces trois administrateurs ont le droit de
veto si on peut utiliser cette expression; même plus que cela, le droit
de proposition. Pour les nommés, la majorité appartient aux sept
premiers. Donc, cela fait, si on compte bien, dix administrateurs nommés
par la FTQ. "4° la personne qui est nommée
président-directeur général du fonds par les membres
visés dans les paragraphes 1° , 2° et 3° ". Il s'agit,
encore une fois, de personnes nommées par la FTQ. Pour être clair,
malgré les différences ou les contingences qu'on s'est
fixées de les choisir dans certaines strates de la vie
socio-économique québécoise, il y en a onze sur treize
dont la nomination dépend, finalement, de la FTQ comme telle et il y en
a deux sur treize dont la nomination dépend de l'assemblée
générale des détenteurs d'actions de catégorie
A.
Je comprends fort bien que, la FTQ allant au batte sur ce projet de loi,
veut en avoir le contrôle. Quand tu vas au batte, tu veux savoir ce qui
se passe et tu veux être en mesure, si tu mets ta tête sur le
bûcher, de réagir et de prendre les décisions qui
s'imposent. Nous sommes dans une proportion de onze-deux. Je vous dis
simplement, pour fins de commentaire, M. le député de
Prévost, qu'à onze-deux, cela m'apparaît plus qu'un
contrôle; cela m'apparaît - cela justifiera mon argument sur le
Fonds (FTQ) -quasiment un monopole dans le sens du contrôle du fonds. Les
deux seront très minoritaires. Je ne veux pas par mes propos remettre en
cause la notion de contrôle par la FTQ. Je veux juste souligner les
proportions.
M. Dean: M. le Président, je demanderais à Jean-Guy
Frenette de vous donner quelques éclaircissements en mon nom sur le
raisonnement qui a motivé ces choix-là. J'ajouterai ensuite au
besoin mes propres commentaires.
Pour la FTQ, c'était très clair, et c'était une
condition sine qua non, qu'elle puisse promouvoir la création d'un tel
fonds dans ses rangs si elle en avait le contrôle majoritaire au niveau
du conseil. Cela dit, on tombe dans un problème que je peux appeler de
tuyauterie. Comment, après avoir nommé sept membres, peut-on
s'assurer qu'on a des représentants de l'extérieur du mouvement
syndical, c'est-à-dire des hommes d'affaires, des représentants
des institutions financières et des représentants des groupes
socio-économiques qui ne seront pas des "yes-men", mais des hommes
crédibles, des hommes d'expérience? On veut s'assurer qu'on aura
une expérience de l'extérieur des rangs de la FTQ. C'est cette
garantie qu'on veut avoir et on ne sait pas par quel autre mécanisme on
peut s'assurer cette garantie d'une représentation de personnes du
milieu des finances, du milieu des affaires et des milieux
socio-économiques.
M. Paradis: Vous me permettrez un commentaire?
M. Dean: Puisque l'assemblée générale des
actionnaires sera formée de travailleurs, donc d'actionnaires
ordinaires, il n'y a plus aucun contrôle possible sur une
représentation de l'extérieur si on ne vient pas le
préciser là. C'est un problème de tuyauterie; il faut
s'assurer d'une représentation et d'une expertise extérieure
à nos rangs.
M. Paradis: Même en vous concédant le
contrôle - ce n'est pas là-dessus que j'argumente - vous ne
contrôlez pas simplement le fonds, vous contrôlez le choix de la
personne qui sera représentative des entreprises industrielles, des
institutions financières et des agents socio-économiques. Si vous
désirez un éclairage détaché, pourquoi avez-vous
besoin de prévoir que la nomination de ces personnes sera
contrôlée par la FTQ? Si vous désirez réellement un
éclairage détaché au niveau des entreprises industrielles,
pourquoi ne demandez-vous pas à un organisme qui représente des
entreprises industrielles de vous désigner un administrateur? Pourquoi
ne demandez-vous pas aux institutions financières qui sont clairement
identifiées, qui sont organisées en associations, de vous
désigner un administrateur et ne procédez-vous pas de la
même façon au niveau des agents socio-économiques?
Là, vous ne voulez pas simplement contrôler le fonds ou
l'éclairage distant dont vous nous parlez; vous voulez contrôler
les éclaireurs. Vous pouvez avoir des justifications pour le faire, mais
c'est une approche différente.
M. Dean: On y a pensé sérieusement. Le
problème est, d'abord, de s'assurer d'un représentant des
entreprises industrielles, donc des hommes d'affaires. On a pensé
à nommer des organisations patronales qui pourraient le
déléguer, mais il y en a au moins trois: le Conseil du patronat,
l'Association des manufacturiers et la Fédération canadienne des
entreprises indépendantes.
M. Paradis: Les chambres de commerce.
M. Dean: Les chambres de commerce. Là, ça nous fait
une liste plutôt longue. On est, par contre, déjà en
contact avec une association patronale qui suit le fonds, qui étudie
avec nous, bon, et qui est intéressée. Je n'ai pas à la
mentionner, mais on a déjà, de ce côté, la certitude
qu'on va avoir une représentation véritable et réelle et
une expertise dont on a besoin dans l'entreprise industrielle. Un peu la
même chose du côté des institutions financières. Il y
en a déjà plusieurs et elles ne sont pas regroupées dans
un seul organisme, malheureusement. On a déjà l'appui d'une
organisation financière qui est prête à nous aider. On aura
nécessairement du travail de complémentarité à
faire. On ne sait plus où on s'arrêterait dans
l'énumération de cette liste si on avait à se faire
déléguer quelqu'un par des organismes comme ceux-là.
On a le même problème avec les agents
socio-économiques. Là, on ne peut pas énumérer tous
les organismes socio-économiques. Notre préoccupation, c'est
d'avoir des gens sérieux, des gens qui ont une crédibilité
dans ces milieux et qui nous apportent une expertise extérieure. C'est
évident qu'on va choisir des personnes qui ne seront pas des "yes-men"
parmi les noms qui vont arriver là.
M. Paradis: On peut, comme Opposition, avoir une idée au
niveau des entreprises industrielles à cause de ce qui a filtré
jusqu'à maintenant; on peut également au niveau des institutions
financières avoir une bonne notion également à cause de ce
qui a filtré jusqu'à maintenant. Mais, quand on parle des agents
socio-économiques, je vous prie de me croire que cela commence à
être vaste. À ce niveau, est-ce que vous pourriez laisser filtrer
quelques indications?
M. Dean: M. Frenette, si vous voulez.
On n'a pas encore quelqu'un, mais on voudrait avoir quelqu'un qui
effectivement n'est pas identifié au monde industriel, qui n'est pas
identifié comme tel au monde financier, mais qui a une certaine
ascendance sur la population québécoise dans ses expressions
d'idées, d'opinions et qui assure une certaine transparence aussi du
fonds au niveau de la population.
M. Paradis: C'était une question de 64 000 $, vous l'avez
réduite à 32 000 $. C'est déjà un bel effort. Au
niveau du deuxième alinéa, vous avez choisi d'inclure au projet
de loi "deux personnes élues par l'assemblée
générale des détenteurs d'actions de catégorie A."
Cela me semble être, malgré la rouille qui perdure, bien
spécial. Les actionnaires dans un fonds, normalement, ont plus de voix
au chapitre que l'on n'en retrouve ici. J'oserais même dire que les
actionnaires ont "la" voix au chapitre. On déroge aux habitudes. On
déroge à la Loi sur les compagnies de façon très
profonde. Tenant pour acquis la situation de fait qui devrait normalement se
produire puisque ce sont des travailleurs de la FTQ qui, je pense, dans un
premier temps, pour le moins, vont être les plus directement
impliqués dans le fonds, quelle est la réserve que vous avez
à donner plus de pouvoirs ou à donner, je dirais, des pouvoirs
plus importants à l'assemblée générale des
détenteurs d'actions? Qu'est-ce qui vous incite à les
reléguer dans ce rôle de minorité absolue de deux sur onze,
parce que ce sont eux les propriétaires des actions?
M. Dean: D'abord, nos structures de la FTQ. Je vous donne un
exemple, le Syndicat des métallos compte 35 000 membres; ils
élisent au suffrage universel leur directeur québécois. Ce
même directeur québécois se présente au
congrès de la FTQ et est élu vice-président de la FTQ
parce qu'il représente un très gros secteur. C'est la même
personne, les métallos ont un vice-président à la FTQ et,
hypothétiquement, le
conseil général pourra nommer le directeur des
métallos au fonds. Comme directeur de son syndicat,
vice-président de la FTQ et administrateur du fonds, il va
représenter 40 000 membres par ses deux mandats, le mandat qu'il a comme
directeur de son syndicat élu au suffrage universel et son mandat au
niveau du congrès de la FTQ. Ainsi, quand on aura sept
vice-présidents de nommés, on aura couvert à peu
près, sous forme de représentation syndicale, 90% des membres
déjà affiliés à la FTQ, qui élisent
eux-mêmes leur directeur dans la structure syndicale. (21 h 30)
Déjà, les deux autres actionnaires ordinaires vont venir,
d'une certaine façon, pour ne pas risquer qu'il y ait double
représentation du même syndicat, deux administrateurs qui viennent
du même syndicat, ce qui serait un déséquilibre. Ce sera
vraiment pour s'assurer que ce sont des travailleurs qui sont dans des usines
qui viennent donner une expertise d'usine et de travailleurs. De toute
façon, pour tous les travailleurs affiliés à la FTQ, leur
représentation est déjà assurée syndicalement par
les représentants qui vont être nommés par le conseil
général.
M. Paradis: Je suis très bien votre raisonnement, mais
j'essaie de concilier une logique qui me semble contradictoire non pas dans le
même article, mais dans des articles différents du projet de loi.
À l'article 1, on crée une compagnie à but lucratif qu'on
veut distinguer clairement de la structure de la fédération qui,
je le présume, est incorporée en vertu de la Loi sur les
syndicats professionnels. Non? C'était une présomption juris
tantum et non une présomption juris et de jure, elle n'est pas
irréfragable, vous pouvez la commenter.
M. Dean: La FTQ n'est pas une personne.
M. Paradis: D'accord, c'est une confédération de
syndicats. De toute façon, si elle n'est pas une personne et si elle
n'est pas incorporée en vertu de la Loi sur les syndicats
professionnels, j'aimerais que vous me disiez bien clairement, au point de vue
juridique, ce que c'est. Mais, à l'article 1, vous semblez vouloir
distinguer, de façon très définie, très nette le
fonds de la FTQ en créant une compagnie à but lucratif. C'est le
premier pas; c'est une logique.
Lorsqu'on arrive à l'article 4, vous nous parlez de quelque chose
qui se tient comme argumentation, qui est une autre logique. Vous dites: La
structure syndicale, ta-ta-ta-ta etc., je ne sais pas comment ils vont traduire
cela. Là, je vois deux logiques, à pas beaucoup d'articles de
distance, qui, c'est le moins que je puisse dire, m'apparaissent en
contradiction. Pourquoi?
M. Dean: C'est que l'on voulait bien s'assurer, étant une
compagnie autonome, qu'il soit très clair pour tous les travailleurs et
aussi pour la FTQ que jamais, quelque somme d'argent que va mettre un
travailleur dans le fonds, en aucune façon la FTQ, comme organisation
syndicale, ne peut utiliser ces sommes. Elle ne pourra toucher d'aucune
façon ces sommes; cela ne lui appartient pas.
M. Paradis: Même pour la dépense
professionnelle?
M. Dean: Pour n'importe quelle fin syndicale, aussi
légitime soit-elle et aussi acceptée soit-elle par les
travailleurs comme type d'intervention. Jamais, en aucune façon, la FTQ
ne pourra y toucher. C'est pour cela que nous voulons que ce soit très
séparé et c'est pour cela que nous avons voulu que ce soit une
loi spéciale qui le crée afin que ce soit très clair que
ce sont des sommes qui n'iront qu'au fonds, que cela ne servira qu'au fonds et
que pour ses fins.
M. Paradis: C'est la logique de l'article 1.
M. Dean: Oui, c'est notre principe d'avoir une loi et un fonds
bien distinct de la FTQ, mais, en même temps, ce fonds doit avoir un
contrôle politique et une orientation politique qui doivent lui
être donnés. C'est pour cela que nous voulions que ce soit la FTQ,
comme instance, comme centrale syndicale, qui donne les orientations politiques
et les grands objectifs du fonds, parce que ce sera la centrale qui aura
à faire et à soutenir la promotion du fonds. On veut que cela
reste un fonds qui continuellement corresponde à des objectifs syndicaux
définis par une centrale syndicale. Après que la centrale aura
mis sur pied un fonds de cette nature de 200 000 000 $ qui aura
préservé les orientations syndicales, on ne veut absolument pas
se retrouver dans cinq ans ou dans quatre ans avec une assemblée
d'actionnaires qui décident tout d'un coup d'aller chercher des
administrateurs etc., ici et là et, là, perdre le contrôle
syndical de ce fonds. Si on le met sur pied et qu'on y met des efforts, c'est
effectivement pour pouvoir contrôler son orientation syndicale. On ne
veut pas qu'il l'échappe par le biais d'une assemblée
d'actionnaires qui pourrait par toutes sortes de voies...
M. Paradis: Je ne vous parlais pas de l'échapper. Entre
l'échapper et onze à deux, il y a une marge. Je m'interrogeais
strictement sur l'influence - pas le pouvoir décisionnel parce que,
lorsqu'on n'a pas le
contrôle, le pouvoir décisionnel, on sait ce que c'est, on
vit cela souvent - que peut avoir une représentation plus forte au sein
du conseil d'administration des détenteurs d'actions, simplement
à ce sujet. Onze à deux, vous y allez.
M. Dean: Sept, c'est suffisant. On n'en demande pas plus que sept
nommées par la FTQ, mais seulement nous ne pouvons pas nous assurer que
les représentants qu'on veut avoir du monde des entreprises
industrielles, du monde financier et des agents socio-économiques seront
en permanence au conseil; on ne peut pas s'assurer de cela par le biais d'une
assemblée d'actionnaires. On ne peut pas se l'assurer et on ne peut pas
se donner cette garantie et on veut l'avoir.
M. Paradis: Vous ne seriez pas satisfaits en ajoutant une
condition, en augmentant le nombre au paragraphe 2 et en le diminuant au
paragraphe 1 - c'est strictement hypothétique - mais en posant
l'exigence que la personne détentrice d'actions de catégorie
À soit membre de la FTQ.
M. Dean: Cela touche toute la limitation de tous les
adhérents au fonds. Il faudrait que tous les adhérents, de par
votre suggestion...
M. Paradis: Non, non, strictement les détenteurs.
M. Dean: Au deuxième alinéa, que ce soit uniquement
des détenteurs d'actions ordinaires de catégorie À et que
ces deux élus soient effectivement des membres de la FTQ.
M. Paradis: Non, mais dans le but d'en ajouter plus que
deux...
Une voix: C'est cela, il en remet.
M. Paradis: ...d'en enlever à l'alinéa 1 et d'en
ajouter à l'alinéa 2.
M. Dean: Non.
M. Paradis: Et en posant l'exigence qu'ils soient des
syndicalistes de la FTQ.
M. Dean: Non, c'est inacceptable. M. Paradis:
Pourquoi?
M. Dean: Politiquement, c'est la centrale FTQ, par son conseil
général et par son congrès. Le fonds aura ses
activités, ses assemblées d'actionnaires, mais le congrès
de la FTQ discutera également du fonds, des orientations et des
objectifs aussi. Il y aura les deux structures qui se supporteront l'une et
l'autre continuellement. Le congrès de la FTQ et le conseil
général de la FTQ doivent garder le contrôle du conseil
d'administration du fonds. C'est pour cela que le paragraphe 1 est
intouchable.
M. Paradis: Inviolable. M. Dean: Inviolable.
Le Président (M. Brouillet): Nous sommes revenus au
paragraphe 1. Est-ce que le député de Vaudreuil-Soulanges avait
des considérations générales sur le paragraphe 4?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Non, cela va, c'est sur un
autre.
Le Président (M. Brouillet): Non, cela va. Bon. On peut
procéder maintenant paragraphe par paragraphe.
Une voix: Oui.
Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 1 est-il
adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 2 est-il
adopté?
M. Dean: II y a un amendement là-dessus.
Le Président (M. Brouillet): Ah oui! C'est vrai. Au
paragraphe 2, il y a un amendement que je vous lis: L'article 4 est
modifié par le remplacement, dans la première ligne du paragraphe
2 du premier alinéa, du mot "détenteurs" par le mot "porteurs".
Est-ce que cet amendement est adopté?
M. Paradis: Je veux seulement savoir pourquoi.
M. Dean: Parce que dans la Loi sur les valeurs mobilières
on utilise le mot "porteur".
M. Paradis: Cela va.
Le Président (M. Brouillet): Adopté.
M. Paradis: L'amendement est adopté.
Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 2, tel
qu'amendé, est-il adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): Paragraphe 3?
M. Paradis: Je voudrais seulement bien
comprendre le paragraphe 3. On y dit: trois personnes nommées par
les membres visés dans les paragraphes 1° et 2 - cela va, ils sont
déjà choisis - parmi les personnes que ces membres jugent
représentatives des entreprises industrielles, institutions
financières, agents socio-économiques... De la co...
Des voix: De la cohabitation. M. Paradis: ...cohabitation.
Une voix: De la coordination..
M. Paradis: Les sept personnes du conseil général
et les deux personnes de l'assemblée générale, dans quel
tas de personnes, si vous me permettez l'expression, vont-elles effectuer leur
choix? De la façon dont cela est rédigé, on nous dit:
"Trois personnes nommées par les membres visés dans les
paragraphes 1° et 2°". On sait que ce sont les sept personnes du
conseil général et que ce sont les deux personnes élues
par l'assemblée générale des porteurs d'actions. Elles
choisissent parmi les personnes que ces membres jugent représentatives.
Elles peuvent prendre n'importe quelle personne, "at large".
Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 3 est-il
adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division.
Paragraphe 4?
M. Paradis: Seulement une question concernant la mécanique
avant d'adopter le paragraphe 4. Cela ne touche pas spécifiquement le
paragraphe 4, mais quant à la façon pratique de procéder,
les premiers membres qui seront nommés seront ceux visés au
paragraphe 1?
Une voix: Article 6.
M. Paradis: C'est à l'article 6. D'accord. Cela va. On
n'est pas encore rendu là.
Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 4 est-il
adopté?
M. Paradis: Oui, sur division.
Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division.
Le deuxième alinéa?
M. Paradis: Le deuxième alinéa se lit ainsi: "La
personne visée dans le paragraphe 4 - on parle du P.-D.G. - du premier
alinéa est membre du conseil d'administration pour la durée de
l'exercice de ses fonctions à titre de président-directeur
général".
Quel en est le minimum et quel en est le maximum, tout comme pour la
météo?
M. Dean: Tel qu'écrit ici, il n'y a pas de minimum ni de
maximum. Il appartiendrait aux membres du conseil d'administration de
déterminer la durée du mandat du directeur général.
Il est, pendant la durée de son mandat, administrateur d'office en
quelque sorte.
M. Paradis: II n'y a ni minimum ni maximum.
M. Dean: Non. Pour les autres, il y a un maximum de deux ans en
vertu de la Loi sur les compagnies.
Le Président (M. Brouillet): Le deuxième
alinéa est-il adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division.
L'article 4, tel qu'amendé, est-il adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): Adopté, tel
qu'amendé, sur division. Article 5?
M. Dean: M. le Président, je lirai cet article, si vous le
voulez bien. "S'il survient une vacance parmi les membres du conseil
d'administration visés dans le paragraphe 1 du premier alinéa de
l'article 4, le Conseil général de la Fédération
des travailleurs du Québec peut nommer une personne pour la durée
non écoulée du mandat".
Est-ce que l'article est adopté?
Le Président (M. Brouillet): Y a-t-il des commentaires ou
des questions?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
J'aurais une question.
Le Président (M. Brouillet): Une question? Oui.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II est bien évident que
ceux qui ont le droit de nommer peuvent aussi démettre. Cela
s'appliquait à l'article 4, dans le cas du président-directeur
général. On fait remarquer, dans les notes explicatives, qu'on
doit pourvoir au pouvoir de remplacer, ce qui est différent de ce qui
est prévu dans la Loi sur les compagnies. Présumément, par
l'application des lois générales sur les compagnies, s'il y avait
vacance aux postes d'administrateurs occupés par les personnes
visées au deuxième alinéa de l'article 4,
c'est-à-dire les gens élus par les
actionnaires, c'est le conseil d'administration qui désignerait
le remplaçant.
M. Dean: C'est cela.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): À plus forte raison pour
le troisième alinéa de l'article 4, quant aux trois personnes qui
représentent différents intérêts.
Le Président (M. Brouillet): L'article 5 est-il
adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division.
Article 6?
Une voix: Voilà la mécanique. (21 h 45)
M. Dean: Cette disposition pourvoit aux modalités de
démarrage du fonds. "Les premières personnes nommées
suivant le paragraphe 1 du premier alinéa de l'article 4 peuvent nommer,
pour une période d'au plus un an, deux personnes pour agir comme
administrateurs jusqu'à l'élection des personnes
mentionnées au paragraphe 2 de cet alinéa. "Dès que les
administrateurs visés dans les paragraphes 1 et 2 du premier
alinéa de l'article 4 ont été nommés, deux
exemplaires de la liste de leur nom, prénom, adresse et profession
doivent être déposés auprès de l'inspecteur
général des institutions financières par le
secrétaire général de la Fédération des
travailleurs du Québec. Ces administrateurs entrent en fonction à
compter de la date de ce dépôt."
Cette disposition pourvoit aux modalités de démarrage du
fonds. Elle est nécessaire en raison du fait que le fonds est
constitué par une loi plutôt que par des fondateurs au sens des
articles 123.9 et suivants de la Loi sur les compagnies.
Le Président (M. Brouillet): L'article 6 est-il
adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division.
J'appelle l'article 7.
Capital-actions
M. Dean: L'article 7 se lit comme suit: "Le fonds est
autorisé à émettre des actions de catégorie
À, sans valeur nominale, donnant les droits prévus par l'article
123.40 de la Loi sur les compagnies, le droit d'élire deux
administrateurs suivant le paragraphe 2 de l'article 4 et le droit de rachat
prévu par les articles 10 et 11. "Les administrateurs peuvent en outre,
par statuts de modification, créer, suivant les articles 123.101 et
123.103 de la Loi sur les compagnies, toute autre catégorie d'actions ne
donnant pas le droit de voter à l'assemblée des actionnaires. Les
statuts de modification déterminent les autres droits,
privilèges, conditions et restrictions afférents aux actions de
chaque catégorie."
Si vous voulez bien, je vous lirai l'article 123.40 de la Loi sur les
compagnies: "Le capital-actions d'une compagnie doit comprendre des actions
donnant le droit: "1° de voter à toute assemblée des
actionnaires; "2° de recevoir tout dividende déclaré; et "3
de partager le reliquat des biens lors de la liquidation de la compagnie."
Le Président (M. Brouillet): Est-ce que l'article 7 est
adopté?
M. Paradis: Une seconde!
Le Président (M. Brouillet): Vous avez peut-être
quelques questions ou commentaires avant de l'adopter.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): D'une part, au niveau de la
rédaction, en ce qui concerne le droit d'élire deux
administrateurs suivant le paragraphe 2 de l'article 4, est-ce qu'il n'y a pas
redondance ici d'ajouter que c'est suivant le paragraphe 2 de l'article 4 si la
Loi sur les compagnies s'applique par le biais de l'article 123.40 aux droits
afférents à ces actions-là? La Loi sur les compagnies
prévoit qu'il y ait une assemblée des actionnaires dans certains
délais. Lors de l'assemblée des actionnaires, ceux qui ont le
droit de nommer des actionnaires, de les élire, le font dans le
déroulement normal de l'assemblée. Mais ce qui est
différent par rapport à la loi générale, c'est que
ces actions ne comportent le droit d'élire que deux administrateurs.
C'est tout à fait indépendant du deuxième paragraphe de
l'article 4.
M. Dean: Si le député de Vaudreuil-Soulanges ou si
le porte-parole de Brome-Missisquoi voulait faire cela sous forme d'amendement,
on serait disposés à l'accepter; cela pourrait bonifier le
texte.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
D'accord. De façon plus formelle, renseignements pris, ayant
entendu les conversations sotto voce qui se sont déroulées de
l'autre côté de la table, je soumets la proposition d'amendement
suivante: retrancher les mots "suivant le paragraphe 2 de l'article 4" aux
troisième et quatrième lignes du premier paragraphe de l'article
7 du projet de loi 192.
Une voix: Premier alinéa.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
Premier alinéa.
Le Président (M. Brouillet): J'aimerais que quelqu'un
l'écrive. Je vais vous lire l'amendement. L'article 7 est modifié
par la suppression, dans les troisième et quatrième lignes du
premier alinéa, des mots "suivant le paragraphe 2 de l'article 4."
Adopté?
M. Paradis: Adopté.
Le Président (M. Brouillet): L'article 7 tel
qu'amendé est-il adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): L'article 7 tel
qu'amendé est adopté sur division. L'article 8?
M. Dean: L'article 8 se lit comme suit: "Seule une personne
physique peut acquérir ou détenir une action de catégorie
A. Le porteur d'une action de catégorie A ne peut l'aliéner
qu'avec l'autorisation du conseil d'administration ou d'un comité
composé de personnes désignées à cette fin par ce
dernier." Cet article restreint la possibilité d'acquisition et de
transfert des actions de catégorie A de manière à les
rendre admissibles au crédit d'impôt.
M. Paradis: Dans un premier temps, j'aurais une question au
député de Prévost. La question ne portera pas sur
l'article comme tel. La question va porter sur le commentaire. Cet article
restreint la possibilité d'acquisition et de transfert des actions de
catégorie À de manière à les rendre admissibles au
crédit d'impôt. Est-ce qu'on pourrait avoir des
éclaircissements là-dessus?
M. Dean: Cela fait référence à la
déclaration ministérielle qui a été faite par le
ministre des Finances.
M. Paradis: Ce n'est pas toujours compréhensible, les
déclarations ministérielles du ministre des Finances.
M. Dean: C'est pour cela qu'il y a un expert du ministère
des Financesl
Je vais tenter de répondre par la bouche d'un représentant
du ministère des Finances, M. Beaulieu.
M. Parizeau a annoncé que les particuliers seraient admissibles
à un crédit d'impôt. C'est la raison pour laquelle c'est
limité à des particuliers.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On ne parle pas de cela.
M. Paradis: Cela va sur la limitation à des individus,
à des personnes physiques, autrement dit. Mais c'est la question de
l'implication du transfert là-dedans.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): La restriciton quant au
transfert.
M. Dean: Ce n'est pas transféré à une
personne morale. Ici, c'est tout ce que cela signifie. Les possibilités
de transfert ailleurs sont dans d'autres dispositions.
M. Paradis: Les possibilités de transfert sont
limitées à une personne physique et la personne physique à
qui on transfère jouit-elle d'un crédit d'impôt?
M. Dean: Non, c'est le premier acquéreur. Ce sont les
nouvelles actions émises par la corporation qui donnent droit à
un crédit.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
L'objet de la question est également d'avoir des
éclaircissements sur la condition apparente. De la façon dont le
député de Prévost en a parlé, c'est la restriction
du transfert au sens large, c'est-à-dire que ce n'est pas
alinéable à l'initiative et tout à fait librement par le
travailleur. Le conseil d'administration a un droit d'approbation du transfert.
À l'écoute du commentaire du député de
Prévost, j'ai cru que c'était cette caractéristique qui,
s'ajoutant au fait que seule une personne physique pouvait en être
acquéreur, faisait en sorte que l'action était admissible au
crédit d'impôt. Je peux comprendre que seule une personne physique
peut bénéficier du crédit d'impôt. Je ne vois pas
que ce soit une condition additionnelle que le conseil d'administration soit
obligé d'approuver si, oui ou non, il le transfère, il
l'aliène. Est-ce que le commentaire est mal rédigé ou mal
présenté?
M. Dean: C'est plutôt le commentaire que le texte qui est
mal rédigé.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Donc, l'admissibilité au
crédit d'impôt est réservée aux seules personnes
physiques...
M. Dean: D'accord.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ...en vertu d'une
déclaration ministérielle. Point final. Là-dessus, il n'y
a pas de difficulté; c'est là l'objectif de tout le processus qui
est devant nous. De toute façon, on n'est pas en train de
suggérer qu'il faille élargir cela aux personnes morales ou quoi
que ce soit.
Le deuxième aspect plus important de l'article 8 a,
évidemment, trait aux restrictions sur l'alinéation des actions,
sur le transfert. J'ai évoqué, un peu plus tôt
dans la journée, la possibilité que, au fil des ans, un ou
des travailleurs agissant de concert décident de se lancer en affaires
et veuillent s'assurer qu'ils pourront encaisser l'épargne qu'ils ont
ainsi mise de côté, selon les termes de la loi. N'ayant pas
atteint l'âge de 60 ans, il n'est pas question de racheter, en
l'occurrence, dans l'exemple que je donne, mais il est question de vendre
à quelqu'un pour réaliser leur investissement. Je trouve un peu
exorbitant que le conseil d'administration ait le pouvoir de décider
d'un transfert dans des circonstances comme celle-là. Ceci me porte
à suggérer que le fonds pourrait peut-être se constituer
une espèce de réserve, relativement minime, qui permettrait, dans
des cas comme celui que j'évoque de travailleurs qui veulent
réaliser leur investissement, de rencontrer une exigence de rachat
additionnelle qui irait au-delà de celle qui est prévue à
l'article 10. J'aimerais avoir les commentaires du député de
Prévost sur cette question qui n'est pas tellement hypothétique
à mon sens; dans quelques années, ce ne sera pas
hypothétique.
M. Dean: M. le Président, avant de faire faire des
commentaires plus techniques par M. Frenette, je dois vous dire que je pense
que la possibilité évoquée par le député de
Vaudreuil-Soulanges est certaine. Dans le monde réel, on connaît
des travailleurs qui disent: Je vais faire un bout dans telle usine et mon
rêve, c'est de sortir du bruit de la machine, de la saleté, etc.,
et de...
Une voix: S'acheter un dépanneur.
M. Dean: Oui, un dépanneur! Mais je pense aussi que tout
travailleur ferait bien de suivre ce que je crois être un bon principe de
placement, soit de ne pas mettre tous ses oeufs dans un même panier. Je
peux vous donner l'exemple d'un travailleur de GM, à
Sainte-Thérèse ou à Saint-Eustache où, en vertu de
certaines ententes avec le syndicat, l'entreprise offre aux travailleurs des
actions dans GM. C'est concevable.
Deuxièmement, je voudrais évoquer que, dans la
documentation fournie par le fonds de solidarité, on parle de montants
relativement modestes pour un travailleur; on donne certains exemples, 1% du
salaire, etc. Il est concevable, pour autant que le travailleur soit bien
renseigné et qu'on lui explique bien ce qui arrive à l'argent
qu'il investit, dans ce fonds, qu'il choisisse quand même d'investir
peut-être une partie de ses possibilités d'investissement dans le
fonds de solidarité. S'il travaille à GM et qu'il choisit
d'acheter quelques actions dans son entreprise - pour évoquer une
possibilité -indépendamment du fonds de solidarité et
qu'il achète des obligations du Québec ou des obligations du
Canada pour avoir plus de liquidités, je pense que ce serait tout
à fait souhaitable et même normal pour un travailleur au revenu
assez modeste de viser - je ne sais pas si le mot est approprié - un
portefeuille personnel de placement. Je retourne à un des principes de
base, soit la nécessité d'une certaine stabilité,
solidité et de pas trop de fluctuations dans les dollars qui sont mis
dans le fonds de solidarité afin d'éviter des fluctuations dans
le destin des entreprises où on aura investi cet argent. (22 heures)
Si M. Frenette veut ajouter d'autres commentaires.
Oui. Nous avons plusieurs entreprises en cogestion, en
copropriété où les travailleurs ont des actions. Notre
expérience - c'est ce qu'on applique dans ces cas - nous montre qu'il
doit toujours y avoir des restrictions sur les transferts d'actions. C'est
toujours le même phénomène. Au début d'une
année financière, alors que le travailleur qui aurait investi 100
$ aura touché environ 75% d'exemption et de réduction fiscale sur
ses actions, il peut vouloir les revendre le 1er janvier et que quelqu'un lui
dise: Je te donne 0,25 $ pour chacune parce que tu as eu 75% d'exemption
fiscale, tu as eu 0,75 $ de réduction. Le travailleur dit: Oui, 0,25 $,
d'accord, alors que son action vaut toujours pareillement, dans le fond, 1 $.
On veut éviter ce genre de chose, parce qu'on ne veut pas qu'il y ait de
marché secondaire sur ces actions. Pour éviter le jeu, il n'y a
pas de marché secondaire. On veut que ce soit une épargne stable
et que l'argent soit protégé. Donc, c'est pour cela que les
limitations sur les transferts se feraient dans une perspective positive si le
transfert se fait au moment où l'action se vend à sa valeur
réelle. On ne veut pas que les travailleurs liquident comme cela, au
hasard, des actions qu'ils auraient et qui ont une valeur beaucoup plus
élevée.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Si je peux me permettre, vous
avez prononcé une phrase très importante: On ne veut pas qu'il y
ait de marché secondaire.
M. Dean: C'est cela.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Même avec
approbation?
M. Dean: Surtout, ne pas laisser cela ouvert et ne pas encourager
ce genre de marché secondaire qui, nécessairement, se fait
toujours à rabais sur la valeur des actions.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Pour protéger le
travailleur contre lui-même.
M. Dean: Exactement. Contre des événements de sa
vie que, parfois, il ne
contrôle pas.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Contre lui-même. C'est
loin de l'éducation économique; c'est l'encadrement
personnel.
M. Dean: C'est l'éducation qu'il nous faudra faire. Il
faut qu'il préserve son épargne. Il faut qu'il préserve
ses actions; elles ont une valeur et il ne peut les liquider à
rabais.
Je voudrais ajouter un mot sur vos réticences à
protéger le travailleur contre lui-même. Je me rappelle que,
lors...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est comme cela qu'on
s'exprime,
M. Dean: ...de l'instauration du Régime de rentes du
Québec, les centrales syndicales ensemble publiaient des centaines de
milliers de copies de journaux dans lesquelles elles incitaient les
travailleurs à ne pas liquider leurs régimes antérieurs.
Lors de l'entrée en vigueur du Régime de rentes du Québec,
il y avait une période durant laquelle ils pouvaient liquider des
régimes de rentes antérieurs. On a fait une immense campagne pour
empêcher que les travailleurs ne fassent cette folie. Il y a plusieurs
travailleurs qui ont fait fi de nos recommandations et qui l'ont
regretté amèrement plus tard. Il faut faire de la formation
économique. Cela veut dire qu'une partie de cette formation peut
être d'éviter, comme vous le dites, que le travailleur ne
cède à la tentation de faire certaines erreurs qu'il pourrait
regretter ensuite.
Le Président (M. Brouillet): Mme la députée
de Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, je voudrais poser la question
suivante à M. Frenette: Est-ce que la promotion qui se fera
auprès des travailleurs de ce projet de fonds, vous avez l'intention de
l'axer sur la sécurité à la retraite? Est-ce que cela a
une référence ou une connotation non pas avec un fonds de
retraite, mais avec une épargne qui permet un crédit
d'impôt, mais qui est disponible au moment de la retraite?
M. Dean: Évidemment. C'est là, d'ailleurs, qu'est
l'avantage pour le travailleur de souscrire au fonds. C'est de pouvoir
bénéficier à la fois du crédit d'impôt et de
la réduction fiscale lorsqu'il va transférer cette
action-là dans un REER autogéré. Et ce n'est qu'au moment
du transfert qu'il obtiendra, en moyenne, 40% de réduction fiscale sur
son achat d'actions.
Il est évident que l'objectif du fonds est de préserver la
valeur des actions et d'avoir un rendement, donc de demander au travailleur de
conserver ses actions dans le fonds, puisque le fonds doit avoir une
période de quelques années avant d'atteindre sa
rentabilité. C'est nécessairement sa période de
démarrage. On demande donc au travailleur de conserver ses actions,
parce que ce sera s'il conserve ses actions jusqu'au moment où le fonds
sera rentable et qu'il aura rétabli la valeur des actions que le
travailleur aura alors un intérêt réel, c'est-à-dire
qu'il pourra toucher l'intérêt réel.
Cela ne veut pas dire que le transfert sera impossible. Toutefois, cela
va obliger le travailleur qui voudrait, par exemple un samedi soir à la
taverne, aller vendre et liquider son action à une période de
réflexion. Cela va l'obliger - mais n'importe qui peut le faire à
l'heure actuelle et cela s'est fait abondamment - à une période
de réflexion. Il faut qu'il fasse la demande au conseil et ce dernier
pourra le permettre.
Mme Harel: Est-ce que cela peut éventuellement, par
exemple, vous amener au cours d'une campagne de promotion à inciter des
organisations syndicales ou des travailleurs - puisqu'il y a une disposition,
je pense, qui permet à l'organisation syndicale de décider, je
pense en assemblée générale, de participer au fonds -
à se doter de l'équivalent d'un fonds de retraite?
M. Dean: Tout à fait.
Mme Harel: En fait, vous le concevez dans l'optique d'un fonds de
retraite géré d'une certaine façon par les
travailleurs.
M. Dean: Oui, puisque beaucoup de travailleurs n'ont pas pu se
constituer un fonds de retraite dans le secteur privé et que c'est une
minorité de travailleurs du secteur privé qui a un régime
de retraite privé. Il est donc évident que les
éléments de promotion du fonds sont que les travailleurs puissent
aussi, par le biais d'un investissement dans ce fonds-là, se constituer
- c'est une chose qu'ils n'ont jamais eu l'occasion de faire - un fonds de
retraite; c'est évident. Et ce sera la responsabilité du fonds de
s'assurer que ce fonds de retraite est là et qu'ils pourront toucher la
valeur qu'ils auront investie dans ce fonds plus le rendement du fonds.
Le Président (M. Brouillet): Est-ce qu'il y aurait
d'autres questions ou commentaires sur l'article 8?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
J'essayais de voir en pratique comment fonctionnait la période de
refroidissement qu'évoquait le député de Prévost,
ou M. Frenette, quant au désir d'un travailleur d'aliéner ou de
vendre les actions de catégorie À qu'il a acquises. Après
une simple lecture, nous sommes en train de
découvrir en discutant ce qu'il y a là-dessous. Ce qu'il y
a là-dessous, c'est qu'on ne veut pas qu'il y ait de marché
secondaire trop facile d'accès. Je présume que c'est ce que vous
voulez dire. Vous ne voulez pas dire "pas de marché secondaire";
autrement, il ne pourrait même pas l'aliéner, point final. C'est
bien entendu, il pourrait seulement le racheter plus tard, ou la succession,
etc. J'essaie de comprendre de quelle façon, en pratique, vous envisagez
que cela va fonctionner. Quel genre de cas est-ce en train de couvrir? Vous
pouvez l'aliéner, oui, mais c'est un comité ou le conseil qui va
approuver cela avant que ça se produise.
M. Dean: C'est un comité permanent qui recevra toutes les
demandes et probablement qu'il les accordera aussi. Si cela se fait et qu'on se
rend compte que le tout se passe normalement et qu'il n'y a pas de liquidation
à rabais, c'est l'évaluation que portera le conseil.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Bon, quels sont les
critères qui sont retenus par le comité d'approbation?
M. Dean: On ne les a pas. Ils ne sont pas définis.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
J'essaie de concilier deux objectifs dont l'un très
général et qui m'apparaît important quand on parle de gens
qui font des investissements est celui de conserver le choix de changer le
situs de leurs épargnes dans le sens qu'ils peuvent les vendre. À
un certain moment, au-delà de cesser d'acquérir, comme la loi le
permet - et on le verra plus loin - ils peuvent décider de céder
ce qu'ils ont déjà acquis. Il me semble que c'est un principe
général qui est important quand on a affaire à des
investisseurs.
Le deuxième objectif, c'est celui qui transpire partout ici,
certainement dans vos commentaires, dans la présentation qui a
été faite du projet loi, "de responsabiliser le travailleur"
à l'égard de sa participation au développement
économique. Je trouve - c'est le moins que je puisse dire - très
paternaliste, dans ce contexte-là, la procédure d'approbation par
le conseil d'une décision libre. Vous me dites que c'est moins libre le
samedi soir à la taverne. Je n'admets pas cela. La liberté, c'est
la liberté. Je trouve assez paternaliste de soumettre à une telle
procédure la cession des actions de catégorie À qu'un
travailleur peut avoir acquises. Si on parle vraiment de "cooling off", si on
parle de donner une chance à un travailleur de corriger à temps
une erreur qu'il est en train de commettre, d'accord. Mais l'erreur sera
jugée de l'extérieur; quant à son erreur à lui, il
en devient très responsable. On apprend par nos erreurs. Dans la mesure
où vous semblez dire que le marché des gens auxquels on a affaire
n'ont pas l'habitude de transiger en semblable matière, qu'il faut avoir
un temps d'arrêt institutionnalisé, pourquoi ne pas parler d'un
temps d'arrêt, d'une période de réflexion, d'une
approbation de transfert par le comité dans les 30 jours de la demande,
toute demande étant rétractable dans les 30 jours en question, de
sorte qu'une demande de transfert ne serait pas irrévocable dès
qu'elle est soumise?
Là, on ne voit pas le mécanisme. S'il y a une demande de
transfert l'avant-veille du jour où siège le comité et que
cela semble correct, on l'approuve, comme vous le dites, la plupart du temps.
Mais là, le travailleur change d'idée. Je comprends qu'on le
responsabilise à outrance si on lui laisse faire ses erreurs. Vous me
dites que l'objectif d'empêcher que des erreurs ne soient faites par des
gens moins habitués à ce genre de transaction demeure un objectif
du projet de loi et de toute l'oeuvre de formation à laquelle vous
êtes en train de vous livrer. Il m'aurait semblé que, dans ce
cas-là, institutionnaliser un temps d'arrêt répondrait au
double objectif de laisser un choix aux gens et d'avoir un "back-stop" ou un
temps d'arrêt ou une pause qui fait réfléchir quant au
contenu de l'article 8.
Le Président (M. Brouillet): La députée de
Maisonneuve avait demandé la parole.
Mme Harel: Sur la même question, mais dans un autre ordre
d'idées, je voudrais demander à M. Frenette si l'esprit
général de la loi n'était pas de faire assumer plus
collectivement qu'individuellement cette responsabilité
d'investissement. Puisque le travailleur ne peut pas individuellement demander
de retenir une somme sur son salaire, qu'il faut qu'il y ait au moins 20% ou le
moindre des deux, en fait, 50 employés ou 20%, cela suppose donc, d'une
certaine façon, une espèce de désir collectif. Est-ce que,
dans l'esprit général de la loi finalement, ce n'est pas plus une
responsabilité qui, selon vous doit être assumée
collectivement? C'est à la fois une responsabilité personnelle,
dans un sens, puisque c'est une épargne pour la retraite et une
responsabilité collective, puisque, avec le risque que cela encourt, il
y a contribution au développement économique.
M. Dean: On veut vraiment se donner le temps de pouvoir expliquer
cela au travailleur qui se ferait solliciter, parce que le travailleur peut
être sollicité pour vendre son action et même la vendre
à rabais, à perte par rapport à la valeur qu'elle a aux
livres. Il est possible que la première offre qui lui arriverait serait
le coût net de son action pour le travailleur, soit 0,25 $. La
sollicitation ne se fera qu'à ce niveau. Ceux qui voudraient en
acheter pourraient les récupérer à 0,25 $ environ, alors
qu'elles peuvent valoir effectivement 1 $ aux livres. On veut tout simplement
en profiter pour faire en même temps l'éducation du travailleur,
pour lui dire: Tu veux vendre ton action 0,25 $, tu peux la vendre, mais elle
vaut 1 $ comme valeur aux livres. Après, le travailleur verra. Nous
pourrons lui dire qu'on l'y autorise, tout en le prévenant que son
action vaut 1 $. Cela nous donnera au moins le temps de rappliquer
auprès des travailleurs pour leur dire ce que cela vaut pour qu'ils ne
se fassent pas avoir dans une transaction rapide. Comme les montants seront
minimes, puisque l'objectif est de 125 $ par année - avant qu'on ait eu
le temps de faire l'évaluation des actions, parce qu'il faut savoir ce
que valent leurs actions et comment ils peuvent les revendre ou les
transférer - qu'il n'y aura jamais plus, en moyenne, que 100 $ ou 125 $
par année de contribués par le travailleur. Ce n'est pas avec
cela qu'il pourra se dépanner lors d'un événement
malheureux de sa vie. (22 h 15)
Par contre, si, effectivement, il vend 25 $ chacune ses premières
actions, qu'il a payées 100 $ il dira: Je ne veux plus rien savoir de
cela, j'ai perdu 75 $, alors qu'autrement il aurait eu son crédit
d'impôt. On veut juste se donner le temps de faire cette
éducation-là aux travailleurs en disant: On va vous redire, avant
le transfert dans le fonds, ce que vaut votre action et vous prendrez votre
décision après. S'ils veulent perdre dessus, ce n'est pas plus
grave que cela. C'est un peu l'expérience que l'on vit et que l'on a
vécue dans plusieurs cas; des travailleurs qui ont des actions
d'entreprises, surtout quand ce ne sont pas des montants importants, que c'est
leur première expérience d'actions et qu'ils ont besoin d'un
petit montant d'argent, peuvent très bien être sollicités.
Il peut y avoir d'excellents acheteurs de ces actions à 25 $, la
première année.
Très brièvement, M. le Président, il me semble
qu'il y a aussi un certain lien de concordance ou de logique entre ce qui
paraît un désavantage et - c'est le deuxième volet de cet
investissement - le deuxième avantage fiscal qui y est rattaché,
c'est-à-dire la possibilité de se constituer un fonds de
retraite. Donc, si cela peut paraître un désavantage de
contrôler un peu la liberté de liquidation, il y a aussi une
incitation positive envers le travailleur via le régime
enregistré d'épargne-retraite.
Le Président (M. Brouillet): L'article 8...
M. Paradis: Un petit instant, M. le Président! Sur le
même sujet, dans l'esprit de la période de "cooling-off" - je n'ai
pas de rédaction à proposer, si on le mettait sur la glace, je
pourrais en trouver une et y revenir demain - que je comprends, on veut avoir
le temps, au niveau de la centrale syndicale, d'expliquer cela aux
travailleurs. Cela va, je suis prêt à accepter cette
argumentation, mais qu'on impose l'autorisation sans critère du conseil
d'administration, c'est plus qu'un frein, c'est un "brake" à la
transférabilité des actions.
On pourrait imposer une vente, pas sous condition, mais une vente
suspensive, un délai pendant lequel le travailleur serait obligé
d'aviser le conseil du transfert et pourrait jouir d'une période de 30
ou 60 jours pour se raviser après avoir consulté sa centrale
syndicale. Mais la décision, dans le sens de l'éducation qu'on
veut faire du travailleur, reviendrait, à ce moment-là, au
travailleur comme tel. Là, la décision ne revient pas au
travailleur. Le droit de veto est au conseil d'administration sans aucun
critère.
M. Dean: M. le Président, ceci peut être vrai, mais
il ne faut pas oublier qu'avant d'investir 1 $ le travailleur aura
été amplement informé de cette condition comme d'autres.
Il saura à l'avance ce qui arrive aux dollars qu'il investit, ce qu'il
peut faire et ne pas faire.
En réponse aux commentaires du député de
Vaudreuil-Soulanges, je retourne à mes remarques du début. Il a
des choix à faire et, s'il est bien renseigné à l'avance -
et il doit l'être - il a le choix de ne pas investir s'il n'aime pas
cette restriction sur une partie de ses épargnes. Il n'a qu'à
investir ailleurs et à ne pas accepter.
Si M. Beaulieu voulait ajouter des commentaires là-dessus.
Étant donné qu'on donne un crédit assez important
aux personnes qui acquièrent ces actions, il n'est pas souhaitable pour
le fonds que les acquisitions d'actions soient faites uniquement dans le but de
faire de la planification fiscale. S'il n'y a pas de restriction quant au
transfert, il serait peut-être intéressant pour des personnes
d'acquérir les actions afin de les revendre immédiatement
après, à d'autres qui, elles ne paient pas d'impôt - ce
peut être leur conjoint - simplement pour profiter du
bénéfice fiscal.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je voudrais demander si c'est
le ministère des Finances ou si c'est le ministère du Revenu qui
a insisté sur le deuxième membre de l'article 8 parce que M.
Frenette a fait une défense pleine et entière qui repose sur des
considérations tout autres que ce que vous venez de faire valoir.
M. Dean: Ce sont des considérations,
par ailleurs, qui s'ajoutent à ce que M. Frenette a
déjà dit.
Une voix: Complémentaires. M. Dean: C'est cela.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela tombe bien que la
même formulation rencontre tous ces objectifs-là, si je comprends
bien. C'est plutôt rare.
M. Dean: Effectivement.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Si on travaillait assez
longtemps, on trouverait d'autres raisons que personne ne soupçonne. Je
persiste à croire qu'on ne changerait pas fondamentalement, sauf
à l'égard des commentaires qui viennent d'être faits par le
représentant du ministre des Finances, les objectifs que la FTQ
recherche si on avait une disposition, un ajout dans l'article 8, par exemple,
disant que l'aliénation - ce n'est pas sûr que, dans le contexte,
cela a du bon sens et que cela ne peut pas être mal
interprété - ne prendrait effet que le 30e jour suivant la
demande qui en est faite par le porteur, sauf son droit de changer
d'idée en mot de tous les jours.
Là, on est retourné à la "cooling-off period". Je
pense qu'on maintient la liberté des investisseurs. Ce ne sont pas des
grosses sommes effectivement dans les premières années. Quand on
parle de formation et de responsabilisation des gens, on a atteint tous ces
objectifs-là tout d'un coup. Il y a peut-être le ministre du
Revenu qui va trouver que c'est moins comique pour lui.
M. Dean: Sauf que, lorsqu'on parle de fiscalité, on touche
une décision gouvernementale.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Il n'est pas question ici de
trouver une façon que le crédit d'impôt soit
transférable à chaque nouvel acheteur de l'émission
originale; le crédit d'impôt est accordé de toute
façon. Il y a l'émission d'actions de catégorie A. Il y a
quelqu'un, une personne physique, quelque part, qui en achète et il y a
une personne physique quelque part qui a 35% de crédit d'impôt.
C'est fait. Qu'il la vende demain ou dans 10 ans, à mon sens, cela ne
change strictement rien. Le geste qu'a voulu poser le ministre des Finances
pour inciter les travailleurs à souscrire à ce fonds lui
coûte quelque chose, je le répète que l'action soit
cédée, aliénée le lendemain de l'acquisition ou
à quelque moment que ce soit plus tard.
Ce n'est pas complètement assimilable au Régime
d'épargne-actions où il y avait des exigences de retenir, dans
son portefeuille, les actions admissibles à ce régime. C'est
entendu que l'objectif de planification fiscale était plus
présent à l'esprit des gens qu'on visait à l'origine, en
1979, dans l'instauration du Régime épargne-actions. Ce n'est pas
du tout cela, ici, l'objectif. Il y a une incitation à constituer le
fonds; ce n'est pas une incitation à investir, si vous voyez la nuance;
ce n'est pas exclusivement pour les travailleurs - c'en est une, il n'y a pas
de doute - une incitation à prendre une décision
d'investissement. C'est une incitation, globalement, qui va faciliter la
constitution du fonds de solidarité.
M. Dean: Je reviens à ce que j'ai dit tantôt. Comme
dans toute autre offre d'action, possibilité d'investissement, il y a
des conditions déterminées par celui qui fait l'offre, il y
l'exigence d'une pleine et ample information et il y a un choix qui se fait en
connaissance de cause.
M. Paradis: Ce n'est pas cela qu'on met en doute. Sur cela, on
est entièrement d'accord. Ce qui nous préoccupe, c'est la
philosophie du fonds. On nous dit qu'en plus de faire de la stimulation de
l'économie, de la création et du maintien d'emplois, on veut
faire l'éducation de nos travailleurs et de nos travailleuses au monde
des affaires. Mais si l'on met une condition aussi paternaliste, pour utiliser
un mot déjà utilisé par mon collègue de
Vaudreuil-Soulanges, est-ce qu'on atteint cet objectif-là? C'est la
philosophie qu'on remet en question. On n'a pas senti, dans les propos du
représentant de la Fédération des travailleurs du
Québec, que c'était la philosophie recherchée. Ce que l'on
recherchait, selon ce qu'on a compris, c'est à éviter la vente
à la taverne le samedi soir, qui avait été
mentionnée comme exemple, que le travailleur regrette finalement une
telle décision prise peut-être émotivement tout d'un
coup.
Dans certains cas, cela peut être vrai. Alors, qu'on accorde cette
protection au travailleur ou à la travailleuse, nous sommes parfaitement
d'accord qu'on lui donne une période de "cooling-off", mais de là
à dire qu'il n'y aura strictement d'aliénations qu'avec
l'autorisation du conseil d'administration sans donner aucun critère, il
me semble qu'on va philosophiquement à l'encontre de l'objectif qui est
de donner une éducation d'investissement à ce
travailleur-là. J'accepte votre argument que, lorsqu'il investit de
l'argent, il sait à quoi s'en tenir. Mais, tout cela étant
compris, si l'on recherche la période de "cooling-off", on peut
l'obtenir autrement et de façon beaucoup moins paternaliste. On aura
alors atteint l'objectif et rejoint la philosophie de l'éducation qu'on
veut donner au travailleur.
M. Dean: M. le Président, je voudrais commenter. Je me
pose une question car, si
on énumère à l'avance des critères dans la
la loi, il faudrait qu'un jour on amende la loi si on se rend compte qu'il y a
d'autres critères.
M. Paradis: Ce n'est pas la meilleure des suggestions.
M. Dean: Deuxièmement, c'est peut-être sur une
partie de la philosophie qu'on s'interroge. Lorsqu'on parle de formation des
travailleurs, il ne s'agit pas seulement de la formation uniquement sur cet
élément de l'investissement. C'est plutôt la formation dans
un sens d'implication financière dans l'économie,
c'est-à-dire sur la responsabilité des travailleurs de
s'impliquer par une partie de leurs épargnes dans le soutien et la
création d'emplois, ainsi que dans le développement industriel.
Il s'agit pour les travailleurs de bâtir peut-être un sens
macro-économique, si vous me permettez l'expression, d'appartenance
à l'économie au moyen d'un léger investissement
prélevé à même leur salaire et qui, je le souligne,
serait librement consenti.
Finalement, j'ajouterais qu'un autre élément serait
d'éviter une dévalorisation des actions provoquée souvent
par une vente trop rapide.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Quant à la valeur des
actions, elle est déterminée dans la loi. Le marché
secondaire demeurera toujours bien mince et une occasion ponctuelle pour
certains de peut-être pouvoir céder ce qu'ils ont acquis. Ce n'est
donc pas le meilleur argument que soulève le député de
Prévost, en l'occurrence. C'est pour cela que je le relève. Les
autres, je ne les relève pas parce qu'ils sont très bons. Il n'y
a pas de problème.
M. Dean: On ne peut pas toujours avoir raison.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II y a donc les trois volets -
j'y reviens un peu; vous voyez mon insistance - la liberté de disposer
d'un investissement ou d'un bien, l'objectif de responsabiliser les gens qui
font maintenant affaires dans ces matières-là, comme ils le font
dans le fonds de la FTQ. Je veux bien croire qu'on est parfaitement libre
d'acquérir ou non des actions une fois qu'on a vu dans le prospectus
à quelles conditions on le fait. C'est parfaitement exorbitant de voir
qu'on aura sur le marché une action que les gens vont acheter sachant
pertinemment et clairement, je le répète, qu'ils ne pourront
jamais la vendre. C'est un peu fort, il me semble, sous prétexte
d'empêcher les gens de faire des erreurs. (22 h 30)
Évidemment, je fais partie de l'école de la ligne dure en
matière d'apprendre par nos erreurs. Comme groupe moins habitué
que d'autres à jouer dans les choses financières, jamais on ne
surmontera ce retard ou cette ignorance relative si, chaque fois que l'on
commet une erreur, on est couvert par quelqu'un, on est protégé.
C'est à force de faire des erreurs, de réaliser que l'on n'aurait
pas dû faire cela que, dans l'avenir, on ne le fera pas.
On a passé notre temps, ce matin, à dire: Ah oui, le fonds
FTQ, cela ne sera pas les caisses d'entraide. Moi, je ne suis pas inquiet de
cela. L'expérience est là, justement. On a appris de cette
erreur. À l'époque, on se souvient, d'ailleurs, qu'il y avait
l'école de la ligne dure qui prétendait que, si on voulait
vraiment renforcer l'avenir des institutions financières
québécoises, il ne fallait pas "shooter" 60 000 000 $ ou 90 000
000 $ pour alléger le fardeau de ceux qui avaient fait une erreur
collectivement. Est-ce qu'on a appris aux gens qui ont été
rescapés, grâce à l'intervention de l'État que,
quand il y a du risque, il faut regarder cela de près et, si on fait une
erreur, la prochaine fois on n'en fera pas? Là, chaque fois, on se fait
rescaper et on se fait protéger d'une façon stricte de faire une
erreur. Les sommes sont petites le nombre de gens est petit. Globalement, je ne
pense pas qu'on assiste à des "run on the bank", comme on dit. Ce n'est
pas susceptible d'arriver. On ne peut pas retirer, de toute façon, ce
qui est dans le fonds.
J'entendais autour de la table - à voix basse - tout à
l'heure, que cela assurait la stabilité du fonds. Il n'y a aucune
différence entre celui qui vend l'action qu'il a et celui qui cesse
d'acquérir, qui transmet son avis de 60 jours. Le fonds est
constitué, les sommes déjà versées. Les titres de
propriété ou certificats que les porteurs ont entre les mains,
s'ils se promènent, cela ne fait pas de différence au bilan du
fonds, pas plus que le marché secondaire de la Bourse de
Montréal. Qu'il y ait 1 000 000, 10 000 000, 100 000 000 d'actions qui
se transigent dans une journée, le bilan des sociétés dont
les titres sont transigés ne change pas d'un cent littéralement.
Ce qui change, c'est l'identité du porteur; il y en a qui ont
réalisé sur l'investissement; il y en a d'autres qui ont
acheté quelque chose, qui selon eux sera meilleur plus tard. C'est
ça le marché, c'est ça l'éducation
économique; c'est ainsi que cela fonctionne encore.
Persister à vouloir soumettre à un comité
composé de personnes désignées par le conseil etc., pas
juste les conditions d'exercice d'une cession d'aliénation, mais le
droit strict d'aliéner m'apparaît aller à l'encontre de
l'objectif fondamental de formation économique des travailleurs. Surtout
que cela empiète sur le concept de liberté des gens. C'est
surtout à cela que je
tiens.
M. Dean: J'inviterais Me Lacoste à faire quelques
commentaires.
Si on touche à la question de l'aliénation, sans le
savoir, on risque de toucher à toute la conception de la
réglementation du fonds par la Commission des valeurs mobilières.
J'aurai l'occasion d'en parler plus tard, ce soir. Le régime qui sera
appliqué sera analogue à celui des SICAV, les
sociétés d'investissement à capital variable, qu'on
appelait autrefois les fonds mutuels, ne sera pas un régime par lequel
on prévoit tous les mécanismes du marché secondaire. Par
exemple, on n'appliquera pas cette partie de la loi sur les rapports
d'initiés.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela prendait quelqu'un qui a
10% de...
M. Dean: Non, ce n'est pas nécessairement par 10%; c'est
toute cette partie de l'usage d'information privilégiée. On tombe
dans toute cette question. La raison pour laquelle on arrive à cette
question de l'aliénation est intimement liée aussi au droit de
rachat. D'habitude, le capital-actions permanent n'est pas rachetable, sauf,
dans des cas bien particuliers, par l'entreprise qui a émis les titres.
Si on ne prend pas garde sur cette question de l'aliénation, on risque
de voir, si petit soit-il, un marché secondaire dont le prix, lors de
l'aliénation, variera suivant l'âge de celui qui l'a acquise du
fonds. Plus il sera près de l'âge de la retraite, plus cette
action vaudra cher. Alors, celui qui a 63 ans, lui, pourra avoir environ 0,98 $
pour son action, car elle va être rachetable très bientôt
par le fonds si elle vaut toujours 1 $, alors que le travailleur qui a 25 ans,
lui, il va l'avoir lontemps. Alors, il y a toute cette notion qui entre en
ligne de compte parce qu'on a dit qu'elle n'est pas rachetable, sauf au moment
de la retraite.
Il me semble donc que la façon d'aborder la question, c'est de
dire: Est-ce que celui qui souscrit à l'action, lorsqu'il
l'achète, est vraiment informé de cette restriction
particulière quant à son investissement qui fait qu'il l'aura
pour le temps qui lui reste avant d'atteindre ses 65 ans? La question
d'information réside au niveau de l'acquisition de l'action. Une fois
qu'il est bien informé de cela, il prend une décision. Je ne veux
pas entrer dans le débat sur le mérite, à savoir si on a,
oui ou non, le droit d'aliéner parce que je pense que le problème
est au tout début.
Toutefois, si on laisse une possibilité, qui devrait, selon moi,
être encadrée, à un certain moment, par un règlement
du fonds et approuvée par les actionnaires, etc., pour que ça
soit bien encadré, dans cette période de réflexion, de
"cooling-off", si on dit que c'est normal de permettre un transfert, il
faudrait aussi avoir le temps d'expliquer ou de rappeler au porteur de valeurs,
les conséquences fiscales de l'aliénation. Il va recevoir ses
0,25 $, lui, s'il l'a vend 0,25 $, mais il ne faut pas qu'il oublie que le fisc
va présumer qu'il dispose de son action et, là, il recevra un
feuillet T-4 parce qu'il avait différé l'impôt pendant tout
ce temps-là. Il y a, à ce moment-là, des
conséquences fiscales qui vont varier selon ses revenus. Il y une foule
de choses ou de raisons, non seulement sur la nature de cette action-là,
mais aussi sur les conséquences de l'alinéation, qui font qu'il a
semblé raisonnable de dire qu'il n'y aurait pas de facilité de
transférer.
Si l'on en venait à laisser la libre aliénation, il est
possible, en présumant que le fonds fait d'excellentes affaires, que les
actions valent plus que 5 $. Il est théoriquement possible qu'il y ait
un marché secondaire qui s'active là-dessus. Et s'il y a un
marché secondaire qui s'active, il va falloir revoir le plan qui a
été approuvé ou soumis à la commission et sur
lequel il y a eu un accord de principe où l'on ne réglementait
pas la diffusion d'information privilégiée quant aux
opérations sur les titres.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Vous avez allégué
- j'espère qu'on ne dévie pas trop - les conséquences
fiscales. Cela se rapporte à l'alinénation et cela a
été précédemment évoqué. On a fait
part que le deuxième membre de l'article 8 avait comme raison
additionnelle à celles expliquées par M. Frenette des
considérations d'ordre fiscal.
M. Dean: Cela n'a rien à voir avec le crédit
d'impôt, ce dont je viens de parler. Il s'agit de la déduction
admissible au titre du régime d'épargne-retraite.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, c'est entendu.
M. Dean: Le crédit d'impôt est séparé
du régime d'épargne-retraite. Ce sont deux choses
différentes.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
D'accord. Quelle est l'incidence du crédit d'impôt sur une
aliénation? À court terme, il n'y en a pas. Le crédit
d'impôt, c'est une fois pour toutes.
M. Dean: Le crédit d'impôt est accordé lors
de l'acquisition et il est, d'ailleurs, reportable, d'après la
déclaration ministérielle. Mais la déduction du revenu
imposable dans l'année où le montant est investi dans un
régime d'épargne-retraite, c'est uniquement différer de
l'impôt. Lorsque le travailleur, le souscripteur ou le porteur
les aliène, cela peut faire quelques années qu'il n'a pas
lu le prospectus. Je pense bien qu'il faut, au moins, l'informer des
conséquences de son aliénation parce que, sur les 0,25 $ qu'il
pense recevoir, il aura un compte d'impôt qui va suivre dans
l'année.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Étant donné qu'il
a cherché un abri fiscal dans un REER.
M. Dean: Je voulais souligner ces points-là avant de
toucher plus avant au transfert, parce que cela fait partie d'un tout. Donc,
cette restriction apparente d'aller demander une permission, elle n'est pas
encadrée. Ce n'est pas nécessairement que c'est impossible
d'aliéner, mais c'est certainement une restriction au transfert. On ne
connaît pas les conditions; cela pourra faire l'objet d'un
règlement ou d'une politique du fonds qui pourra être
critiquée à l'assemblée annuelle, etc. Cela pourra se
développer plus tard. Mais il y a quand même des
conséquences pour les travailleurs de retirer toute restriction. Il peut
très bien aliéner ses actions sans en avoir les
conséquences. Je voulais simplement souligner ce point-là.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
D'accord. À l'article 8, au sous-paragraphe 3 capital-actions,
qu'on est en train de discuter, on a établi les droits afférents
aux actions par référence à la Loi sur les compagnies: le
droit d'élire des administrateurs, donc le droit de voter aux
assemblées, à 123.40; le droit au reliquat en cas de liquidation
- personne ne souhaite cela; donc, il n'en est pas question là-dedans -
le droit aux dividendes. Je me demandais où le soulever et il ne
m'apparaît pas que je puisse le soulever ailleurs qu'ici. C'est un des
droits prévus dans la Loi sur les compagnies. Quelle va être la
pratique du fonds essentiellement au titre des dividendes? Là, on a une
action; selon le prospectus, l'investisseur sait qu'il ne peut la céder,
l'aliéner comme il pensait. Par ailleurs, il sait qu'il a le droit de
désigner des administrateurs. On lui dit que, si jamais on liquide le
fonds à un moment X, il aura sa quote-part comme actionnaire. La
question qui se pose est celle des dividendes. Qu'est-ce qu'on va faire avec
cela? Est-ce assimilable à l'aliénation de la valeur du fonds que
de payer des dividendes dans ce cas-là, selon le même
raisonnement? Il détient des actions; il n'a pas le droit de les
aliéner sans approbation, mais la plus-value représentée
par le rendement qu'atteindrait le fonds, traduite sous forme de dividendes
versés aux actionnaires, il pourrait en disposer à sa guise? Il
peut donc disposer du fruit de l'investissement, mais pas du capital.
M. Dean: J'inviterais M. Dionne.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Donc, il ne bâtit pas
vraiment de l'épargne si la politique des dividendes est que cela peut
être versé et que les gens le dépenseront comme ils
voudront. On n'a pas pas bâti de l'épargne, ça ne s'est pas
accumulé; il a seulement accumulé du capital, avec ce que cela
vaut avec l'inflation.
M. Dean: Me Brière va faire un commentaire sur l'aspect
juridique et M. Dionne va vous expliquer un certain nombre de scénarios
financiers pour répondre à votre question.
Je veux simplement vous dire que le versement de dividendes n'a vraiment
rien à voir avec la non-transférabilité des actions sur le
plan juridique. Une action peut être non transférable et valoir
à son porteur un dividende.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je suis parfaitement d'accord
avec vous.
M. Dean: Sur la politique de paiements de dividendes,
peut-être que monsieur, à ma gauche, serait plus compétent
que moi pour répondre.
Quant à la politique de versement de dividendes, elle a
été conçue un peu de la même manière que le
fonctionnement d'un dividende qui est perçu via un régime
d'épargne-retraite, dans le sens où un rendement qui est
accumulé dans le fonds s'accumule à la valeur de l'ensemble des
actions et est réinvesti continuellement dans le fonds. Le porteur de
l'action pourra en toucher le fruit lorsqu'il pourra, à sa retraite, par
exemple, monnayer son action.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): À la retraite.
M. Dean: Suivant les critères qui vont être
déterminés par les administrateurs ou le comité.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Alors, la clef de tout cela,
c'est d'inciter les gens non seulement à souscrire, à
bénéficier du crédit d'impôt, mais
littéralement - et c'est préférable - à
transférer leur action dans un régime d'épargne-retraite
autogéré. Autrement, on ne constitue pas de l'épargne. Si
je comprends bien, on va verser des dividendes quand on le pourra
financièrement, quand ce sera souhaitable etc., et la personne qui
recevra un dividende pourra en disposer à sa guise, essentiellement, si
ce n'est pas dans un régime enregistré
d'épargne-retraite.
M. Dean: Effectivement, il est conçu pour que le porteur
de l'action soit avantagé
à le transférer dans un régime
d'épargne-retraite et, à ce moment, cela va être
préférable pour lui que ses revenus soient réinvestis dans
son fonds d'épargne-retraite pour qu'ils ne soient pas imposables.
Le Président (M. Brouillet): Toujours sur l'article 8,
est-ce que vous seriez prêts...
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Dans la logique de nos
interventions préalables, il me semble que mon collègue de
Brome-Missisquoi a un mot à ajouter.
M. Paradis: Je vais peut-être proposer une modification mal
rédigée - je vous en préviens tout de suite, je l'ai
rédigée à la plume, à côté; elle a
besoin de retouches -mais dans cet esprit et, si on est d'accord sur l'esprit,
on pourra demander à M. Brière de la traduire correctement.
"Seule une personne physique peut acquérir ou détenir une action
de catégorie A." On s'entend là-dessus, on a expliqué
pourquoi, pas de modification, pas de problème. "Le porteur d'une action
de catégorie A..." Au lieu d'une interdiction, au lieu d'indiquer: "ne
peut l'aliéner", pour rejoindre la philosophie de la FTQ, on dirait:
"peut l'aliéner en tout temps. L'aliénation, toutefois, ne prend
effet que 30 jours après la transaction. Pendant cette période,
celui qui offre d'aliéner peut renoncer à la transaction." On
aurait rejoint la philosophie qui est recherchée par les promoteurs du
projet de loi, par la FTQ. (22 h 45)
Je n'ai rien trouvé - je m'excuse, c'est peut-être par
distraction - dans les arguments de fiscalité, qui coûterait plus
cher au gouvernement parce que le crédit d'impôt profite
strictement au premier acquéreur. Le deuxième acquéreur
n'en profite pas et à ce moment on contribuerait davantage - vous
n'aimerez peut-être pas l'expression - à libéraliser
l'apprentissage au monde économique du travailleur et de la
travailleuse.
M. le député de Prévost, j'aimerais que M.
Brière nous répète à haute voix, si c'est possible,
l'argument. J'ai saisi que cet amendement-là n'irait pas à
l'encontre de la philosophie des instigateurs du projet de loi. C'est ce que
j'ai compris à la suite des représentations qui nous ont
été faites. Si cela va contre la philosophie des instigateurs,
j'aimerais qu'on m'indique contre quelle philosophie.
M. Dean: M. le Président, je retourne à des choses
que j'ai déjà dites, soit que le souci de la liberté est
très louable, sauf que la liberté dans ce cas-là s'exerce
avant l'investissement. On reçoit de l'information.
Deuxièmement, vous faites aussi allusion à l'implication
de la formation. J'ai tenté précédemment de mentionner
qu'il y a beaucoup d'autres éléments de formation
économique et financière englobés dans la philosophie
globale de ce projet de loi. Il y a ici certainement une crainte à
savoir que, si l'on ouvre trop la porte, on peut risquer que certaines
personnes n'acquièrent des masses d'actions simplement aux fins de
toucher des avantages fiscaux.
M. Paradis: J'aimerais que vous m'expliquiez cela. C'est cet
aspect-là que je ne saisis pas. C'est peut-être à tort que
je ne saisis pas, mais j'ai compris que l'avantage fiscal appartenait au
premier détenteur, c'est-à-dire à l'acquéreur
original du titre et que, par la suite, le second acquéreur ne jouissait
pas de cet avantage fiscal. C'est ce que j'ai compris. Si je n'ai pas bien
compris, qu'on me l'explique autrement.
M. Dean: Si le deuxième acquéreur n'a pas
d'avantage fiscal, il va acheter l'action à rabais.
M. Paradis: Oui, mais qu'il l'achète à rabais ou
qu'il l'achète à plein prix, cela ne me semble pas être la
principale préoccupation et peut-être que notre travailleur aura
appris ce qu'est un rabais fiscal. Il aura probablement compris cette
notion-là. On m'a donné plus tôt comme argumentation le
facteur âge. Cela vaut peut-être plus pour quelqu'un qui est
près de la retraite, etc. C'est basé sur l'âge. Je ne suis
pas certain que c'est conforme - je sais qu'on suspend la Charte canadienne des
droits et libertés - à la charte québécoise, le
critère basé sur l'âge. Si c'est l'un des critères
dont le conseil d'administration entend tenir compte avant d'autoriser des
transferts, on s'embarque dans de jolis draps.
M. Dean: Je pense que ce n'est pas ce qui a été
dit, monsieur. Il s'agissait plutôt d'une réflexion sur une
statistique probable de ce qui va se produire.
M. Paradis: C'est ainsi que je l'ai compris. Si, au niveau du
conseil, il fallait qu'accidentellement on en fasse un critère et que
notre décision repose là-dessus avant d'autoriser le transfert,
c'est drôlement attaquable. C'est le moins qu'on puisse dire. À ce
moment-là on fait une restriction absolue, sans aucun critère,
alors qu'on veut éduquer le travailleur à l'investissement. Je
suis prêt à partager l'argument de la FTQ, sérieusement. Je
ne veux pas qu'un travailleur qui est en peine ou qui a une complication
économique soudaine, même si ce ne sont pas des montants
importants, prenne une décision spontanée sans avoir le temps d'y
réfléchir. J'achète cet argument. Je l'achète
même à contre-poil, comme on
dit, mais je l'achète. Permettons-lui d'avoir cette
période de réflexion. Inscrivons-le dans la loi. Mais que le
principe, au lieu d'être la non-alinéation, soit
l'aliénation. Je ne peux pas voir en quoi la modification qu'on
suggère pourrait détruire la philosophie qui a été
énoncée par la Fédération des travailleurs du
Québec.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela se rapproche tellement
plus de ce qu'est un investissement en actions. Au moins, il n'y aura pas deux
sortes d'investisseurs dans ce genre d'actions. Déjà, il va y
avoir trois genres. Il va y avoir ceux-là. Il va y avoir les gens qui
vont aller dans les sociétés en voie de développement, le
nouveau "deal" qui a été proposé dans le budget, le REA
qu'on connaît pour certaines autres entreprises. Il y a, finalement,
l'achat habituel d'actions. Il y a même quatre genres d'investisseurs sur
le marché devant des actions qui, quant aux droits, privilèges,
restrictions, à la possibilité de croissance de la valeur du
capital et tout cela, sont toutes semblables et qui, à leur face
même, sont identiques les uns aux autres. Mais il y a quatre genres de
détenteurs qui se promènent dans le portrait avec des
conséquences assez différentes les unes des autres. M. le
Président, si vous voulez noter le droit de parole qui est
exercé.
M. Dean: M. le Président, M. Beaulieu, en mon nom.
Au niveau du crédit d'impôt, c'est le premier
acquéreur, comme on l'a souligné, qui obtient le crédit.
Cependant, le crédit a été accordé dans l'optique
qu'on voulait que les gens qui acquièrent les actions pour le fonds
obtiennent un crédit et non que les gens utilisent le crédit
seulement à titre de planification fiscale, qu'ils acquièrent
l'action pour obtenir le crédit d'impôt et la vendent le lendemain
ou six mois après, seulement pour le bénéfice fiscal.
C'est au moment de l'acquisition que la question se pose. C'est pour cette
raison que la restriction quant au transfert fait en sorte que les gens
n'utiliseront pas l'acquisition d'actions aux seules fins de
bénéficier d'un crédit fiscal. Je pense que, de
façon claire, le coût fiscal pour l'État risque
d'être beaucoup plus grand s'il y a une attraction très large
donnée à tous les investisseurs aux fins de planification
fiscale, alors que le but de ce crédit d'impôt est de permettre au
travailleur d'investir dans du capital de risque. Donc, il y a un certain
coût fiscal qui a sans doute été donné.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui. On s'est informé
auprès du ministre cet après-midi. Il parlait de 7 500 000 $ l'an
prochain, enfin, il faudrait le relire. Il y avait une série de chiffres
là-dessus fondés sur la popularité du programme
auprès des travailleurs sur le montant qui serait investi. Il y a une
relation directe, c'est bien évident.
M. Paradis: Mais je ne peux pas voir comment cela peut - c'est ce
que j'aimerais comprendre - augmenter le coût pour le ministre des
Finances si seulement le premier acquéreur peut en
bénéficier.
M. Dean: II va y en avoir plus.
M. Paradis: II va y en avoir plus? Le fonds va fonctionner mieux?
Si le fonds fonctionne mieux - je vous remercie de la réponse - c'est
peut-être une possibilité, mais je ne pense pas que le ministre
des Finances ait objection à ce que le fonds fonctionne bien, même
qu'il devance ses objectifs. Je ne pense pas que ce soit le cas.
Dans le cas d'un deuxième transfert, de la personne qui l'aura
acquis d'un premier acquéreur et qui, elle, n'aura pas
bénéficié d'un crédit d'impôt, on pourra
peut-être en arriver plus rapidement à la valeur. C'est
peut-être là que je rejoins les préoccupations
énoncées par le député de Notre-Dame-de-Grâce
dans ses remarques préliminaires, ce matin. Je suis certain que, dans la
première transaction, ce ne sera pas la véritable valeur à
cause de l'incidence du crédit d'impôt. Mais, plus il va y avoir
de transferts, plus on sera capable de vérifier, avec le temps - ce
n'est pas créé seulement pour un an - la véritable valeur
de l'action.
Le Président (M. Brouillet): Y a-t-il une réponse
ou un commentaire à donner là-dessus? Est-ce dans la même
veine, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce? Oui.
M. Scowen: Je ne sais pas. Je viens d'arriver. Je m'excuse, mais
j'ignore si cette question a déjà été posée.
Vous prévoyez la création d'un comité
désigné pour prendre les décisions sur les
aliénations. Est-ce que vous avez déjà donné une
idée de l'ampleur et des exemples de cas qui pourront justifier
l'approbation de l'aliénation? Est-ce qu'il a été question
de cela? J'avais compris qu'il n'était pas question d'un marché
secondaire, mais est-ce quelque chose qui se fera souvent? C'est quoi?
Une voix: C'est déjà fait. M. Scowen: C'est
fait.
Le Président (M. Brouillet): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, je tiens seulement à vous signaler que votre
question est recevable, mais cela fait environ une heure que nous
étudions cet article.
M. Scowen: Est-ce que vous avez la
réponse à cette question?
M. Dean: Oui, je pense, M. le Président.
M. Scowen: II n'est pas nécessaire de le
répéter si vous en avez déjà parlé.
Le Président (M. Brouillet): Oui. On a abordé un
peu cette question, mais il peut quand même y répondre. Je vous
dis cela en passant. La question est recevable. Je tenais à vous faire
part du fait que nous avons longuement discuté cet article, mais M.
Frenette peut bien y répondre.
M. Dean: Je vous donne un exemple. Une personne n'a plus d'emploi
et elle doit quitter la région ou quitter le Québec pour aller
travailler ailleurs, aux États-Unis ou n'importe où. Elle n'a
plus d'attache au Québec. C'est fini. Elle demande alors un transfert,
c'est bien évident.
M. Scowen: Elle se trouve mal prise sur le plan financier et a
besoin de son argent.
M. Dean: Pour les trois ou quatre premières années,
on vous l'a dit, le fonds ne fera pas ses frais. Le fonds a besoin d'une
période de maturation. Au cours des trois ou quatre premières
années, il est bien évident que le fonds ne sera pas capable de
maintenir la valeur de l'action. C'est inscrit. C'est très clair. Ce
qu'on ne veut pas, c'est que, au cours de ces trois ou quatre premières
années, les travailleurs liquident une action qui va maturer et trouver
sa pleine valeur dans quelques années. Donc, on ne veut pas que des
pressions soient créées sur un marché secondaire à
rabais où des gens vont être intéressés à
acheter des actions et à en acheter en masse si elles sont offertes
à rabais et en dessous de la valeur réelle inscrite au fonds. Il
y a des gens qui vont pouvoir concentrer ainsi certaines actions et ils vont le
faire au détriment de l'épargnant qui est le travailleur original
à qui on aura fait la promotion du fonds en lui disant que c'est de
l'épargne, que c'est stable, en lui disant de la laisser là et
qu'elle lui rapportera. Les objectifs du fonds sont de toucher
complètement, à la retraite, l'avoir qu'on aura investi
là-dedans, en plus des dividendes que le fonds versera. C'est ce qu'on
va vendre aux travailleurs et c'est ce qu'on veut qu'ils comprennent. Le fait
de pouvoir transférer les actions en tout temps ne constituera jamais un
élément de vente. On ne dira jamais aux travailleurs de faire
cela. On va plutôt leur dire: Non, ne faites pas cela.
M. Scowen: Mais l'article 8 prévoit le transfert d'une
action à une autre personne physique, n'est-ce pas?
M. Dean: C'est cela.
M. Scowen: Est-ce que le comité va garder le droit de
déterminer non seulement le droit à la personne À de
vendre, mais aussi le nom de la personne?
M. Dean: Non, non.
M. Scowen: II peut vendre à n'importe qui?
M. Dean: Oui.
M. Scowen: Une fois que l'approbation est donnée, il aura
le droit de vendre cette action à n'importe qui et au meilleur prix
qu'il peut toucher?
M. Dean: Oui. Ah oui!
M. Scowen: C'est très important.
M. Dean: II n'y a pas de limitation sur la personne comme telle
pour acheter. C'est bien évident.
M. Scowen: Et au prix auquel il peut la vendre. Une fois que
l'approbation est reçue par la personne physique, il peut vendre cette
action au prix du marché.
M. Dean: Oui. (23 heures)
M. Scowen: Je trouve que c'est un élément
très important dans l'affaire. Si vous n'essayez pas de contrôler
le prix auquel cela doit être transféré - je ne sais pas si
c'est possible - vous créez, si vous donnez le droit à plus
qu'à un nombre très limité de personnes de le faire, un
marché secondaire. La personne qui achète, est-ce qu'elle sera
obligée d'aller devant vous pour avoir le droit de la transférer
à une troisième personne?
M. Dean: Oui.
M. Scowen: Elle peut le vendre à n'importe quel prix
aussi?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): En ayant à l'esprit les
bons conseils que vous lui aurez transmis sur l'opportunité de le faire
ou de ne pas le faire.
M. Dean: Tout à fait. On va avoir le temps de leur
expliquer de ne pas poser ce geste, pour le premier.
M. Scowen: Comment définir une personne qui est mal prise
sur le plan financier? Vous allez vous trouver devant toutes sortes de
demandes. Je quitte la
province, c'est une chose. Mais moi je suis mal pris, moi j'ai des
dettes parce que je viens de m'acheter un chalet d'été, diront
d'autres personnes. Il y a un trou là que je trouve très
important. Ce comité peut devenir une affaire très importante et
très active à moins que vous n'ayez une idée très
précise des limitations. Si c'est n'importe qui qui se trouve mal pris
et qu'il veut liquider quelques-uns de ses actifs, à cause de la
justice, de problèmes familiaux et de la séparation d'un homme de
sa femme, vous allez vous trouver avec un paquet d'actions un peu partout.
Non?
M. Dean: J'ai déjà répondu en partie
à ce qu'évoque le député de
Notre-Dame-de-Grâce. C'est un fonds d'investissement, oui. On parle d'une
première. Si ce n'est pas une première mondiale, comme le
député l'a dit hier soir, c'est une deuxième au moins au
Québec. Mais c'est peut-être une première mondiale en
dehors du Québec. Ce n'est quand même pas un fonds
d'investissement tout à fait comme un autre. Il y a un
élément de stabilité qu'on désire établir.
L'individu qui va avoir accès à toute l'information avant de
décider d'investir, exerce une liberté de choix, à ce
moment. Deuxièmement, les montants prévus dans les
scénarios réalistes, ce ne sont pas des montants mirobolants. On
vise peut-être 125 $, 200 $ par travailleur par année. Ce sont des
petits montants.
Aussi, le travailleur a d'autres choix. S'il veut diversifier son
porte-feuille d'actions, il peut acheter des obligations du Québec, des
obligations fédérales, investir dans sa propre compagnie. J'ai
évoqué des possibilités. Il a tout intérêt
à ne pas mettre tous ses investissements nécessairement dans le
fonds de solidarité. Les montants sont relativement restreints aussi.
S'il est mal pris, ce n'est pas la seule source de salut pour lui. Je reviens
à cette approche collective d'investissements où plusieurs petits
mettent leur peu d'argent ensemble pour faire un gros montant pour jouer un
rôle dans l'économie, surtout dans les questions de soutien et de
création d'emplois, de développement économique, de
capital de risque et tout cela.
Il y a une deuxième incitation, soit l'élément
épargne-retraite qui est aussi greffé là-dessus. À
l'objectif stabilité du fonds, ce qui veut dire un minimum de flottement
des investissements, on ajoute une deuxième motivation au travailleur de
laisser son argent afin de se donner un régime d'épargne-retraite
en soulignant que, dans le secteur privé au Québec, 75% des
travailleurs n'ont aucun fonds de retraite autre que le Régime des
rentes du Québec.
M. Scowen: Votre espoir est fondé sur la bonne
volonté des gens de participer à un fonds de solidarité.
Je comprends. Mais c'est drôle comme l'argent est important, une fois que
vous commencez à penser à l'argent comme à quelque chose
à part la solidarité. Moi, je prévois des saisies de
biens, des problèmes familiaux, des décès, toutes sortes
de problèmes. Je pose la question parce qu'il me semble que vous devez
avoir une idée assez précise de l'ampleur de ce comité et
des situations que vous serez prêts à accepter. Juste un exemple,
est-ce que ce sera un seul comité central qui va prendre cette
décision ou si ce sera un comité pour chaque syndicat ou pour
chaque unité?
M. Dean: C'est le fonds. Un règlement du conseil
d'administration présenté, discuté en assemblée
générale et accepté par tous les actionnaires
déterminera les paramètres des transferts.
M. Scowen: Vous avez bien pensé à la réponse
que vous m'avez donnée quand j'ai dit qu'une fois la permission de
vendre accordée à la personne elle aura le droit de le vendre
à n'importe qui à n'importe quel prix? Si, par exemple, vous lui
donnez le droit de le vendre et que le prix, sur le rapport annuel, est de 3 $,
qu'elle essaie de le vendre et n'est pas capable de le vendre au-dessus de 2 $,
tout le monde va comprendre très vite que la valeur réelle est de
2 $, parce que vous créez un marché secondaire avec ce
comité. Même si c'est un petit marché secondaire, vous
allez avoir droit à un article dans Finance ou Les affaires où on
va dire, exactement comme ils ont dit dans le cas des SODEQ, en
Beauce-Appalaches: Les actions se transigent à 0,30 $ sur le dollar. Ce
sera connu. C'est cela, mais cela ne vous dérangerait pas?
M. Dean: En principe, on ne veut pas créer de
marché secondaire. On va faire toute la formation, toute l'information
pour qu'il ne se développe pas de marché secondaire, parce que
nécessairement un marché secondaire va jouer contre le
travailleur.
M. Scowen: Mais vous êtes obligés de le faire.
M. Dean: On peut être obligé de le faire dans
certaines circonstances.
M. Scowen: Vous ne le voulez pas, mais vous le prévoyez
dans la loi.
M. Dean: Oui, là où on ne pourra pas y
échapper.
M. Scowen: Me permettez-vous de mettre un point d'interrogation
à côté de cet article? Je ne sais pas, peut-être que
j'exagère l'importance de cet aspect, mais
jusqu'ici c'était un fonds fermé et maintenant c'est
ouvert.
M. Dean: On veut l'ouvrir le moins possible.
J'étais pour dire cela, M. le Président: Le désir
est de le garder le plus fermé possible, mais au moins, quand
même, parce qu'on ne peut pas prévoir toutes les raisons de toutes
les personnes qui pourraient investir, de laisser une porte ouverte assez bien
contrôlée, verrouillée, mais une porte par laquelle il sera
possible pour un individu de s'en sortir dans des circonstances
exceptionnelles.
Il faut peut-être ajouter, du point de vue juridique, que des
restrictions au transfert d'actions dans des compagnies, c'est assez
fréquent et des restrictions aussi fortes que celles-ci se rencontrent
très souvent.
Une voix: Pas des fonds de 500 000 $. On n'est pas à la
Bourse.
M. Dean: Peut-être pas des familles aussi grandes que celle
de la FTQ.
Le Président (M. Brouillet): Je crois qu'on commence
à revenir sur des choses qui ont été dites plusieurs fois.
Je me dois, en tant que président, de demander si on dispose de cet
article; le temps serait venu.
M. Paradis: On propose l'amendement qu'on a proposé
tantôt: Que l'article 8 se lise comme suit: "Seule une personne physique
peut acquérir ou détenir une action de catégorie A. Le
porteur d'une action de catégorie A peut l'aliéner en tout temps.
L'alinéation ne prend effet que 30 jours après la transaction.
Pendant cette période, celui qui offre d'aliéner peut renoncer
à la transaction."
M. Dean: M. le Président, est-ce qu'on pourrait suspendre
cette question? Je voudrais regarder certains points.
M. Paradis: D'accord.
Le Président (M. Brouillet): Nous suspendons l'amendement
à l'article 8, ainsi que l'article lui-même. Article 9?
M. Dean: L'article 9 se lit comme suit: "Malgré l'article
8, une action de catégorie A peut être transférée
à un fiduciaire ou acquise par celui-ci dans le cadre d'un régime
enregistré d'épargne-retraite dont l'actionnaire est
bénéficiaire. "Le fiduciaire est toutefois assujetti à
l'article 8 à l'égard de tout transfert à une personne
autre que l'actionnaire de qui il a acquis une action de catégorie
A."
Le Président (M. Brouillet): II y a un amendement qui est
proposé à l'article 9. Je vous lis l'amendement: L'article 9 est
modifié par l'insertion à la fin du premier alinéa de ce
qui suit: "Ce dernier est réputé conserver cependant le droit de
vote afférent à l'action ainsi transférée."
M. Dean: C'est pour simplifier le processus de procuration qui,
autrement, devrait être institué. Lorsque l'action est remise
à un bénéficiaire, cela constitue un transfert
juridiquement. Le fiduciaire devient donc titulaire du droit de vote et la
pratique courante démontre que, dans ces cas, le fiduciaire donne
procuration au bénéficiaire. Cette procuration doit autoriser une
autre procuration. Alors, c'est pour simplifier le processus. Comme on avait la
chance de mettre les statuts dans la loi, c'est préférable de
simplifier les choses.
Le Président (M. Brouillet): L'amendement est-il
adopté?
M. Paradis: Cela va.
Le Président (M. Brouillet): L'amendement est
adopté. L'article 9, tel qu'amendé, est-il adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): L'article 9, tel
qu'amendé, est adopté sur division. L'article 10?
Une voix: Je pense qu'ils avaient des amendements et nous en
aurions aussi. Ce serait mieux de le mettre sur la glace.
M. Dean: Si je comprends bien, l'Opposition aurait des
amendements à l'article 10 et nous avons un amendement. Est-ce qu'il y
aurait lieu de suspendre cet article?
Le Président (M. Brouillet): Est-ce que l'Opposition a
effectivement un amendement à proposer?
M. Paradis: M. le Président, comme je l'ai dit au
début de nos travaux, à cause du carcan dans lequel on travaille
présentement, on les discute un à un. On fait notre travail le
plus consciencieusement possible. Je ne dis pas qu'on en a, je ne dis pas qu'on
n'en a pas.
Le Président (M. Brouillet): Vous m'aviez dit au
début qu'on ne suspendrait que les articles sur lesquels vous aviez des
amendements à proposer et qu'on y reviendrait à la fin.
M. Paradis: C'est cela.
Le Président (M. Brouillet): On le regardera et vous
verrez en l'analysant si vous en avez un à proposer.
Une voix: J'en ai un autre ici.
M. Scowen: Les articles 8 et 10 vont jusqu'au bout de la nature
même du fonds. C'est en quelque sorte la définition de ce projet
d'épargne de risque, comme on l'appelle maintenant. J'aurais un paquet
de questions à poser là-dessus, mais qui relèvent de la
nature générale du fonds.
M. Dean: On va commencer par lire l'article.
L'article 1 se lit comme suit: "Une action de catégorie A n'est
rachetable par le fonds que dans les cas suivants: 1° à la demande
de la personne qui l'a acquise du fonds ou, dans le cas de l'article 9, d'un
fiduciaire qu'elle a désigné, si, après avoir atteint
l'âge de 60 ans, elle s'est prévalue d'un droit à la
préretraite ou à la retraite; 2° à la demande d'une
personne qui est porteur de l'action sans l'avoir acquise du fonds, si la
personne qui l'a acquise du fonds a atteint l'âge de 60 ou, en cas de
décès, aurait atteint cet âge si elle avait vécu;
3° à la demande d'une personne à qui une telle action a
été dévolue par succession; 4° à la demande
d'une personne qui l'a acquise du fonds si elle lui en fait la demande par
écrit dans les 60 jours de la date de sa souscription ou, dans le cas
prévu par l'article 31, dans les 60 jours de la première retenue
sur son salaire."
Nous aurons un amendement sauf que c'est écrit à la main.
(23 h 15)
Le Président (M. Brouillet): Alors, il y a un amendement
proposé à l'article 10. Il serait peut-être bon de le voir
immédiatement.
M. Dean: L'article 10 est modifié a) par le remplacement
du paragraphe 1 par le suivant: "1 À la demande de la personne qui l'a
acquise du fonds si, après avoir atteint l'âge de 60 ans, elle
s'est prévalue d'un droit à la préretraite ou à la
retraite ou si elle a atteint l'âge de 65 ans; b) par le remplacement,
dans la troisième ligne du paragraphe 2 , du chiffre "60" par le chiffre
"65"; c) par l'addition de l'alinéa suivant: Dans le cas prévu
par l'article 9, la demande visée dans le paragraphe 1 du premier
alinéa peut être faite par le fiduciaire."
Le Président (M. Brouillet): J'aimerais avoir cet
amendement écrit.
M. Dean: M. le Président, est-ce qu'on pourrait profiter
de la session d'écriture pour s'absenter pour quelques minutes?
Le Président (M. Brouillet): Nous suspendons pour deux ou
trois minutes.
(Suspension de la séance à 23 h 17)
(Reprise de la séance à 23 h 28)
Le Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous revenons à l'amendement à l'article 10. Vous l'avez
entre les mains, on vous a remis le texte de l'amendement. Je vais, si vous me
le permettez, le relire, si vous voulez bien suivre. "L'article 10 est
modifié: a) par le remplacement du paragraphe 1 par le suivant:
"À la demande de la personne qui l'a acquise du fonds si, après
avoir atteint l'âge de 60 ans, elle s'est prévalue d'un droit
à la préretraite ou à la retraite ou si elle atteint
l'âge de 65 ans".
Je vais continuer et l'on reviendra pour adopter chacun de points de
l'amendement, b) par le remplacement, dans la troisième ligne du
paragraphe 2, du chiffre "60" par le chiffre "65". c) par l'addition de
l'alinéa suivant: "Dans le cas prévu par l'article 9, la demande
visée dans le paragraphe 1 du premier alinéa peut être
faite par le fiduciaire".
Nous allons revenir au premier amendement. Est-ce que le premier
amendement est adopté?
M. Paradis: Seulement par curiosité, on a changé
l'âge non seulement dans le premier, mais aussi dans le deuxième
alinéa, soit: "60" par "65". Est-ce que des données statistiques
de quelque nature indiqueraient que c'est préférable d'agir
ainsi?
M. Dean: Non, c'était plutôt pour indiquer que, pour
une personne qui n'a pas droit à la préretraite ou à la
retraite, par exemple un travailleur autonome qui déciderait d'investir
dans le fonds, son droit de rachat s'exerce à l'âge de 65 ans.
Cela signifie aussi une certaine concordance avec les nouvelles stipulations du
Régime de rentes du Québec par-dessus le marché comme
avantages sociaux.
Le Président (M. Brouillet): Cette partie de l'amendement
est-elle adoptée?
M. Paradis: Adopté.
Le Président (M. Brouillet): Adopté. Passons au b)
de l'amendement: "le remplacement, dans la troisième ligne du paragraphe
2, du chiffre "60" par le chiffre "65". Cela va de soi. Est-ce
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Brouillet): Adopté. Passons au c)
de l'amendement, l'addition de l'alinéa suivant que je vous ai lu plus
tôt. Est-ce adopté?
M. Paradis: b) est adopté et c) l'est aussi.
Le Président (M. Brouillet): Adopté.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Sur division, dit le
député d'Ungava, pour exprimer sa dissidence.
Le Président (M. Brouillet): Nous revenons donc à
l'article 10. Le premier alinéa est adopté tel qu'amendé,
étant donné qu'on vient d'adopter l'amendement et que
l'amendement consiste à remplacer complètement le paragraphe.
Alors, le paragraphe est adopté tel qu'amendé.
M. Scowen: Oui. Ah bon! Une voix: Tel que
remplacé.
Le Président (M. Brouillet): Non, non. On appelle cela
"tel qu'amendé". Ce sont les formules consacrées. Adopté
tel qu'amendé. Est-ce que le deuxième est adopté tel
qu'amendé?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): Adopté tel
qu'amendé, sur division. Le troisième est-il adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): Le quatrième?
M. Scowen: Là-dessus, me permettez-vous de semer un peu de
confusion pour quelques minutes?
Le Président (M. Brouillet): Pour quelques minutes,
oui.
M. Scowen: Dans le cas de l'article 8 que nous avons suspendu,
vous avez dit que vous vouliez limiter le transfert d'actions à d'autres
personnes à des cas bien spécifiques, bien définis, par
exemple, quand quelqu'un quitte la province ou quand quelqu'un a vraiment un
problème financier très aigu. Vous voulez aussi à tout
prix éviter un marché secondaire. Il me semble qu'il serait plus
logique, si j'étais d'accord avec la logique de base, de biffer
complètement l'article 8 et de donner le droit au fonds, au paragraphe
4, de racheter à la valeur inscrite aux livres les actions dans les cas
qui sont prévus à l'article 8. Comme cela, vous évitez
complètement les problèmes qui peuvent survenir avec ce
marché secondaire, avec ces personnes qui vont devenir des actionnaires,
mais à un prix moins élevé que le prix inscrit aux livres.
Vous donnez le droit aux personnes qui sont visées par les
critères bien définis de venir faire une demande de rachat au
fonds. Ainsi, le problème de l'article 8 est complètement
réglé parce que cela n'existe plus. Vous avez des cas très
précis où vous avez le droit de racheter.
M. Dean: M. le Président, je souligne, d'abord, que le
quatrième alinéa réfère à des articles qui
viennent plus loin dans le projet de loi et qui traitent de principes
fondamentaux du fonds, soit le droit de rachat, le droit de
reconsidération d'une décision d'investir qui doit être
exercé dans les 60 jours et finalement, le droit de retrait en tout
temps ou d'arrêter de contribuer en tout temps au fonds de
solidarité. Le paragraphe 4 reflète ce principe qui est
englobé à la section IV du projet de loi. Je pense qu'il ne
faudrait pas mêler les choses. Qu'on règle d'abord l'article 8 sur
ses mérites.
M. Scowen: Alors, c'est soit un amendement au paragraphe 4 ou un
paragraphe 5.
M. Dean: Je pense même que les raisons sont
complètement différentes. La problématique de base est
complètement différente d'un cas à l'autre.
M. Scowen: De toute façon, ma suggestion pourrait
être incorporée au paragraphe 4 ou ajoutée à un
autre paragraphe. D'après moi, c'est une solution qui est plus
près de la logique de votre raisonnement. Je ne dis pas que je suis
d'accord avec votre raisonnement, mais, si vous voulez être logique avec
vous-même, c'est une solution qui ne me semble pas mauvaise.
Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 4, tel qu'il
est, est-il adopté?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Un instant! Je comprends qu'on
limite le droit de rachat aux actions acquises depuis 60 jours, les 60 derniers
jours du moment où on se fait une idée qu'on veut demander le
rachat. Pourquoi 60 jours? Pourquoi pas 30, 90 ou quoi que ce soit?
M. Dean: Par les dispositions de la Commission des valeurs
mobilières, les personnes qui veulent acheter une valeur
mobilière ont jusqu'à 60 jours après l'achat pour demander
une annulation possible du rachat. Il y a des dispositions qui peuvent
s'apparenter à cela et il y a une période de
réflexion imposée de 60 jours. On dit: II y aura
effectivement 60 jours pour la personne qui décide volontairement
d'acheter une action et qui peut le faire au moment où elle aura
reçu le document explicatif simplifié, le prospectus
simplifié. La personne décide elle-même d'acheter ses
actions, de contribuer et elle a une période de réflexion de 60
jours. On lui donne une période de 60 jours de réflexion
individuelle et on la rembourse.
M. Scowen: Quel est le sens du mot "souscription"? Est-ce la
première souscription ou n'importe quelle souscription?
M. Dean: La première souscription.
M. Scowen: On ne le dit pas. Ce n'est pas explicite. Une
souscription, c'est quoi?
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
L'action est souscrite.
M. Scowen: Quel est le sens du mot? M. Dean: C'est quand
tu t'inscris.
M. Scowen: Puis-je faire une souscription mensuelle, par
exemple?
M. Dean: Non, c'est ta décision d'embarquer dans le fonds,
je pense bien. Non?
M. Scowen: C'est là le sens du mot?
M. Dean: II faut aller à l'article 24 sur les
modalités de souscription. C'est toute la section IV, autrement dit.
À l'article 24, ce sont les souscriptions individuelles. Les
souscriptions individuelles, ce sera dès qu'il souscrit ou qu'il
commence à souscrire. La personne pourra commencer à souscrire en
1983, si elle le veut. Elle arrête. Après 60 jours, on la
rembourse. Elle veut se faire rembourser, on la rembourse. Si elle recommence
en 1984, il s'agira d'une souscription individuelle encore.
M. Scowen: Une souscription, c'est quelque chose que vous faites
annuellement.
M. Dean: Qui commence. M. Scowen: Annuellement?
M. Dean: Une adhésion. C'est au moment où elle
adhère. Elle demande d'être remboursée en 1983, elle
disparaît. Elle n'est plus actionnaire. Elle disparaît des livres.
Elle peut recommencer.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je pense que l'article 33,
quand on va y arriver, va démontrer quelque chose de différent de
ce qu'on entend. Il m'apparaît - on verra -que l'article 33
prévoit une souscription chaque fois que, le quinzième jour du
mois suivant la retenue sur le salaire, l'employeur verse au fonds les montants
ainsi retenus. À partir de ce moment-là, il y a souscription
d'actions. "Il est réputé avoir souscrit à autant
d'actions de catégorie A du fonds que les montants retenus sur son
salaire permettent d'en acquérir." Il y a une souscription d'actions
chaque fois qu'il y a retenue sur le salaire. Ce n'est pas annuel ou quoi que
ce soit. Il m'apparaît que c'est comme cela que l'article 33 va se lire.
On va les regarder ensemble ou bien on va les suspendre tous les deux pour en
reparler plus tard.
On est en train de se demander, au paragraphe 4 de l'article 10,
à l'égard de quel nombre d'actions et sur quelles actions un
droit de rachat existe sur demande de la part du travailleur. On nous dit que
c'est à l'égard de la première souscription. Un avis de 60
jours, c'est peut-être vrai pour les dix derniers mots: "dans les 60
jours de la première retenue sur son salaire." Il n'y a pas de
problème pour cela. Mais, par la suite, quand cela fait trois ans que le
type ou la "typesse" - est-ce que cela se dit? - la personne, travailleur ou
travailleuse, souscrit de cette façon par retenue sur son salaire
à des actions, je crois comprendre, d'après la première
partie du paragraphe 4 de l'article 10, que ce sont des actions pour lesquelles
il a versé, par voie de retenue sur son salaire, certaines sommes qui
font l'objet de sa demande. Celles qu'il a souscrites depuis 60 jours, les
dernières qu'il a acquises, ce sont celles-là qu'il peut racheter
sur demande. C'est comme cela que je le comprends et il me semble que c'est
comme cela que cela se lit, surtout si on le regarde avec l'article 33.
M. Marois: Si les membres de la commission me permettent
d'intervenir, il faut faire attention. Je comprends que le député
de Notre-Dame-de-Grâce nous a dit, tantôt, qu'il voulait apporter
un peu de confusion. Ce n'est sûrement pas l'intention du
député de Vaudreuil-Soulanges. Je ne pense pas qu'on puisse faire
un lien comme celui qui vient d'être fait, au sens strictement juridique.
L'article 33 est là, c'est une disposition qui vise à faire un
lien juridique entre la retenue sur le salaire par l'employeur et la
souscription d'actions du fonds. Il faut qu'il y ait un article comme
celui-là sur le plan juridique, c'est extrêmement important. Mais
sauter sur le joint, comme le député de Vaudreuil-Soulanges vient
de le faire, pour tenter de cerner une définition de la notion de
souscription, cela m'apparaît donner une portée à l'article
33 qui ne lui est pas inhérente.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, mais qui est
inhérente, par ailleurs, aux notions qu'on trouve dans la Loi sur les
compagnies ou dans la Loi sur les valeurs mobilières. On ne souscrit pas
juste une fois. Des actions sont souscrites, émises et payées
à chaque moment où elles sont souscrites, émises et
payées. Dans ce sens, ce sont toujours les 60 derniers jours à
l'égard desquels des actions ont été souscrites,
émises et payées.
M. Dean: Ce n'est pas clair, on peut peut-être le
clarifier. Peut-être qu'on oublie qu'il y a deux façons de
souscrire à des actions. À titre d'individus ou de particuliers,
vous et moi, on peut acheter des actions. La première partie de la
phrase vise ce cas. Si je souscris à des actions, j'ai 60 jours - un peu
comme si j'achète un aspirateur électrique, j'ai un certain
délai pour changer d'idée - pour obtenir le remboursement. Dans
tous les cas de retenue sur le salaire, les 60 jours commencent à courir
à la date de la première retenue sur le salaire. C'est cela que
ça veut dire.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je peux me permettre de vous
demander où on retrouve la première?
M. Dean: La première est implicite, puisque le fonds n'est
pas fermé et que la seule façon d'acquérir des actions
n'est pas par voie de retenue sur le salaire.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): La section IV est
intitulée Acquisition d'actions de catégorie A par retenue sur le
salaire.
M. Dean: Oui, mais ce n'est pas exclusif.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Ce n'est pas exclusif, pour
autant, que vous me dites.
M. Dean: Si on veut donner la période de réflexion
à tout le monde et non seulement aux travailleurs qui souscrivent par
voie de retenue à la source, il faut prévoir les deux cas, ici
dans l'article 10.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Ou dans le cas prévu
à l'article 31. (23 h 45)
M. Paradis: J'ai une question qui s'applique au paragraphe 4, et
aux autres alinéas. "Une action de catégorie A n'est rachetable
par le fonds que dans les cas suivants." Je vous ai dit que mes notions
étaient très rouillées, mais je me rappelle un certain
débat sur la différence entre une action achetable et une action
rachetable. Sans spécifier, le sens de la question est le suivant: la
demande peut être exercée par les différentes personnes qui
sont nommées aux alinéas. Est-ce que le fonds a l'obligation de
racheter l'action ou si le fonds peut dire: Non, je ne la rachète
pas?
M. Dean: C'est l'article 11 qui prévoit cela.
M. Paradis: D'accord, cela va.
Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 4 est-il
adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division.
L'article 10, tel que...
M. Dean: Là, il y aurait un amendement.
Le Président (M. Brouillet): Excusez, il y a un
amendement.
M. Scowen: Vous n'aimez pas mon idée d'un cinquième
paragraphe? Vous voulez vraiment avoir ce marché secondaire?
M. Dean: Non, M. le Président.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Non, M. Frenette a dit qu'il ne
voulait rien savoir de cela un peu plus tôt.
M. Dean: On ne le veut pas. Mais je pense qu'il faut dire que,
uniquement sur le plan de l'implication juridique de votre suggestion d'un
cinquième paragraphe, pour traduire cette idée, il faudrait
prévoir les cas où c'est rachetable dans la loi.
M. Scowen: Je pense que vous devez le prévoir dans le cas
de l'article 8 aussi.
M. Dean: C'est l'un ou l'autre. Ou on laisse la discrétion
au conseil d'administration ou on prévoit les cas dans la loi. Votre
suggestion conduirait à prévoir les cas dans la loi. En tout cas,
cela me paraîtrait présenter certains désavantages de ne
prévoir que certains cas, on risquerait d'en oublier.
M. Scowen: Excusez-moi, mais pour que ce soit très clair,
dans l'article 8, on dit "avec l'autorisation du conseil d'administration".
M. Dean: Oui, qui définira les conditions exceptionnelles
que vous voudriez qu'on introduise à l'article 10.
M. Scowen: Oui, sur la base des conditions additionnelles qui
seraient déterminées par le conseil d'administration. En effet,
vous transférez les définitions de
l'article 8 à l'article 10.
M. Dean: Si je peux me permettre, si je dis qu'il faudrait
prévoir les cas dans la loi, c'est pour une autre raison. Ici, à
l'article 10, il s'agit de rachat par les compagnies. Du point de vue du
ministère des Finances, la possibilité de rachat de l'action par
le fonds, au gré du conseil d'administration, signifie qu'il n'y a pas
de contrôle quant à la pratique de l'acquisition de l'action par
la compagnie, de sorte qu'on pourrait, en étant méchant, faire
une mauvaise hypothèse selon laquelle le fonds pourrait faire
bénéficier ses actionnaires de crédits d'impôt de
façon systématique en faisant des achats et des ventes. Il faut
bien distinguer l'achat par le fonds de la transférabilité des
actions.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je pense que c'est bien inutile
d'essayer de se prémunir contre cela, étant donné que ce
sont les gens de la FTQ qui vont contrôler le conseil
d'administration.
M. Dean: Oui, c'est sûr, mais en faisant l'hypothèse
d'une grande méchanceté.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Mais c'est pour des
considérations fiscales.
M. Dean: C'est cela.
Le Président (M. Brouillet): L'article 10 est
adopté, tel qu'amendé, sur division.
M. Paradis: Comme vous l'avez dit.
Le Président (M. Brouillet): L'article 11?
M. Dean: L'article 11 se lit comme suit: "Sous réserve du
deuxième alinéa de l'article 123.54 de la Loi sur les compagnies,
le fonds est tenu de racheter toute action de catégorie A lorsque la
demande lui en est faite par une personne suivant l'article 10. "Cette
obligation est exécutée deux fois l'an aux dates
déterminées par le conseil d'administration qui fixe le prix de
rachat des actions sur la base de la valeur du fonds telle qu'établie
par des experts selon les principes comptables généralement
reconnus."
Le Président (M. Brouillet): Adopté?
M. Paradis: Un petit instantl Je suis en train de lire les
commentaires.
Le Président (M. Brouillet): Ah! Très bien, M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Ils sont nombreux. Une voix: Avec raison.
M. Paradis: Dans le premier paragraphe des commentaires, on dit
ce qui suit: "Cette disposition a pour objet d'obliger le fonds à
racheter des actions de catégorie A lorsqu'une personne visée
à l'article 10 le demande, mais à la condition que le test de
solvabilité prévu à la Loi sur les compagnies soit
positif."
M. Marois: Le député de Brome-Missisquoi
connaît par coeur l'article 123.54 de la Loi sur les compagnies.
M. Paradis: Vous êtes arrivé en retard. J'ai
prévenu les amis d'en face dès le début de nos travaux que
mes notions de droit corporatif étaient plus que rouillées.
Chaque fois qu'on a cité un article de la Loi sur les compagnies, j'ai
demandé qu'on dérouille ces notions.
M. Scowen: J'attends mon leader.
Le Président (M. Brouillet): Est-ce que vous êtes
prêt, vous, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, en
attendant le leader?
M. Scowen: Non, non. J'ai un droit de parole de 20 minutes
là-dessus, mais j'attends que mon leader dise quelque chose.
M. Paradis: Quant à l'expertise pour établir le
prix, on nous dit qu'elle est faite deux fois l'an et qu'elle permettra de
fixer le prix de vente des actions de six mois en six mois. À partir de
quels critères va-t-on déterminer le prix de l'action?
M. Dean: II s'agit, évidemment, des critères qui
sont déterminés par les méthodes employées par les
experts-comptables et selon les principes comptables généralement
reconnus. Cela se fait généralement selon la méthode qu'on
appelle la "fair market value" ou la juste valeur marchande. C'est une
méthode qui est couramment utilisée par toutes les firmes
comptables dans les sociétés de "venture capital", de capital de
risque de ce type et qui permet d'évaluer de six mois en six mois ou aux
dates déterminées par le conseil d'administration -ici, ce serait
de six mois en six mois - en procédant à une analyse cas par cas,
la juste valeur de chacun des investissements. En additionnant la juste valeur
de chacun des investissements effectués, donc, on détermine la
juste valeur marchande globale du portefeuille d'investissements.
M. Paradis: Vous dites, finalement, que tous les six mois des
experts effectueront, selon des principes comptables généralement
reconnus, une analyse de la situation de chacune des entreprises, que ce soit
des grandes, des PME ou des TTE, dans le but d'établir la valeur d'une
action au fonds.
M. Dean: C'est exactement la façon de procéder. Il
y a généralement un premier travail qui est fait à
l'interne par la corporation, par les spécialistes en analyse
d'investissements et c'est ensuite vérifié par les comptables
agréés. Il ne manque pas d'exemples de sociétés de
capital de risque où cette procédure est courante et
révisée tous les six mois. Je connais plusieurs
sociétés dont le portefeuille dépasse facilement 50
à 100 investissements et le travail est fait régulièrement
par chacune des firmes pour tenir les actionnaires régulièrement
informés de la valeur du portefeuille.
M. Paradis: Ma prochaine question s'adresse probablement - je dis
probablement - aux juristes. On dit:" La valeur du fonds telle
qu'établie par des experts selon les principes comptables
généralement reconnus." Je saisis de la réponse que ce
sont des comptables qui vont faire cela. La rédaction stipule-t-elle
clairement que cette valeur va être établie par des comptables?
C'est ma première question.
Ma deuxième question est la suivante: S'agit-il, suivant la
rédaction, de comptables à l'interne ou à l'externe?
M. Dean: Pour répondre à la première
question, la rédaction laisse une certaine marge de manoeuvre au conseil
d'administration.
M. Paradis: Vous voulez dire que cela pourrait être des
gens qui ne sont pas des comptables?
M. Dean: Non, je m'excuse. Je répondais à la
première question où vous demandiez si la rédaction est
telle que ce sont des experts qui vont fixer la valeur. Ce que la disposition
dit, c'est que le conseil d'administration fixe le prix, mais sur la base de la
valeur du fonds telle qu'établie par les experts. Le prix est
fixé par le conseil. Si le conseil fixait une valeur différente
de celle à laquelle arrivent les experts, il y a une espèce de
marge d'interprétation qui pourrait permettre de dire: Ce' n'est pas sur
la base de la valeur telle qu'établie par des experts ou c'est sur la
base de cette valeur. Autrement dit, s'il y a un jeu très mince entre
les deux chiffres, je pense que, juridiquement, cela pourrait être
considéré comme valide, mais c'est le conseil d'administration
qui fixe le prix de rachat, comme dans toutes les compagnies. Ce ne sont pas
les tiers qui vont le fixer, n'est-ce pas?
M. Paradis: Non.
M. Dean: Bon! C'est la réponse à la première
question.
M. Paradis: Cela va.
M. Dean: Quant à la deuxième question, à
savoir si ce sont des gens à l'interne ou à l'externe...
M. Paradis: Est-ce que ce sont des comptables? Je maintiens ma
première question.
M. Dean: ...ce sont "des experts selon les principes comptables
généralement reconnus." Ce ne sont pas nécessairement des
comptables agréés, tel que rédigé.
M. Paradis: Ce ne sont pas nécessairement des
comptables?
M. Dean: Non, tel que c'est rédigé là.
M. Paradis: Si ce ne sont pas nécessairement des
comptables...
M. Dean: Mais ils doivent respecter les principes comptables
généralement reconnus.
M. Paradis: ...est-ce que cela peut être fait par des
experts à l'interne, suivant la rédaction qu'on a ici?
M. Dean: Je dois vous dire oui, tel que rédigé.
M. Paradis: Étant donné l'importance de bien
déterminer, avec toutes les difficultés qu'on peut
présumer, la valeur la plus réelle possible du fonds - je pose ma
question au député de Prévost - n'y aurait-il pas lieu de
prévoir que les experts devraient être des comptables, qu'on
devrait imposer cette obligation, et également des comptables à
l'externe pour assurer les travailleurs et les travailleuses qui vont investir
de la plus grande fiabilité possible au niveau des renseignements qu'ils
vont obtenir? Il est certain que cela peut être tentant, dans la pire des
situations - pour reprendre les propos du juriste qui nous parlait tantôt
- à une époque donnée, à cause d'un "timing"
important au niveau de congrès ou je ne sais pas quoi, si tout est fait
à l'interne, de projeter une image très optimiste du fonds. Si
c'était fait par des comptables à l'externe, on a des gens qui
joueraient leur réputation de comptables à l'externe s'ils
acceptaient de la jouer, naturellement, dans un tel dossier.
M. Scowen: Cela veut dire un prix établi par des experts,
que ce soit de l'intérieur ou de l'extérieur, et
vérifié par des comptables agréés. C'est ce qu'il
faut faire. Cela peut être établi par des experts à
l'intérieur de la boîte, mais vérifié et
approuvé par des comptables agréés de l'extérieur.
De cette façon, ce sera propre,
propre, propre.
M. Paradis: M. le Président, avant que l'horloge
n'accroche minuit, sur cet article et sur d'autres, peut-on s'informer
immédiatement de la possibilité d'avoir la présence,
demain, je présume, sur un ordre de la Chambre, du ministre des
Institutions financières ou celui des Finances?
M. Dean: Pour autant que son horaire le permette, je pense que
oui.
M. Paradis: J'adresse la demande tout de suite pour qu'on
effectue les vérifications qui s'imposent.
M. Dean: Oui, d'accord. Pourrais-je, à mon tour, M. le
Président, adresser une demande à mon collègue d'en face?
Demain matin, à l'heure du début de nos travaux ou même
avant, s'il a d'autres amendements, pourrait-il les amener en bloc, si c'est
techniquement possible.
M. Paradis: Ce à quoi je m'engage, c'est à trouver
la personne affectée à la préparation des amendements et
à le lui demander, si la commission sur la CRO est terminée et si
elle n'a point de surcroît de travail. C'est la situation dans laquelle
on est placé. Je vais le faire immédiatement.
Le Président (M. Brouillet): Nous allons ajourner nos
travaux sine die.
M. Dean: L'article 11 est-il adopté?
Le Président (M. Brouillet): Non. L'article 11, je ne l'ai
pas encore soumis parce qu'il y avait encore des questions en suspens. Alors,
nous ajournons nos travaux sine die.
(Fin de la séance à 0 h 01)