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Etude du projet de loi no 45
(Onze heures trente-trois minutes)
Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!
La commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de
l'immigration est réunie pour continuer l'étude article par
article du projet de loi no 45 Loi modifiant le Code du travail et la
Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Les membres de la
commission sont: M. Bellemare (Johnson), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Brochu
(Richmond), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M.
Couture (Saint-Henri) est remplacé par M. Godin (Mercier); M. de
Belle-feuille (Deux-Montagnes), M. Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin
(Sherbrooke) remplacé par M. Gagnon (Champlain); M. Johnson (Anjou), M.
Jolivet (Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplante (Bourassa), M.
Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce), M. Marois (Laporte) remplacé par
M. Mercier (Berthier); M. Pagé (Portneuf), M. Roy (Beauce-Sud).
Lorsque la commission a ajourné ses travaux, nous en
étions à l'étude de l'article 47 du projet de loi no
45.
Une Voix: ... pour l'adopter.
Le Président (M. Clair): L'article 47, le ministre en
propose le retrait.
M. Johnson: C'est-à-dire que je propose le retrait du
projet de loi...
Le Président (M. Clair): L'article 47 est abrogé et
retranché.
M. Forget: Ah bon!
M. Brochu: Pas le retrait du projet de loi, le retrait de
l'article 47.
M. Johnson: Oui. Il faudrait qu'on se comprenne bien. Il s'agit
de retirer du projet de loi l'article 47, et ne pas confondre.
Le Président (M. Clair): L'article 47 du projet de loi 45
est abrogé. Article 48?
M. Johnson: Concernant l'article 48 introduisant les articles 89
et suivants qui sont, en fait, conséquents à ceux que nous avons
adoptés à l'article 46 quant à l'arbitrage, je suis
prêt à passer à l'adoption, à moins que l'Opposition
n'ait des suggestions. Mutatis mutandis...
M. Forget: L'homologation est remplacée par le
dépôt, c'est simplement cela? Adopté.
M. Johnson: Non, il y a quand même des
éléments qui sont peut-être plus frappants
là-dedans, par exemple, "le dépôt en Cour supérieure
de la sentence équivaut", en fait... C'est faire équivaloir la
sentence arbitrale à un jugement de la Cour supérieure. C'est un
des éléments importants.
M. Forget: Oui.
M. Johnson: On a également la possibilité, pour le
tribunal, de réserver sa compétence, c'est-à-dire, par
exemple, de décider qu'un congédiement est injustifié et
qu'un employeur doit tout simplement réembaucher un salarié. Cet
article permet ainsi à l'arbitre de ne rien dire d'autre et de pouvoir,
si les parties ne s'entendent pas sur le montant à payer, décider
alors du montant qui doit être payé, en vertu de sa sentence. On a
également un article qui prévoit que la sentence doit être
déposée à la Cour supérieure et a le même
effet qu'un jugement de telle cour. On a également un nouvel article
pour s'assurer du dépôt de la sentence arbitrale en temps et lieu,
et on en fait une condition pour le paiement des honoraires. C'est
évidemment important pour les arbitres. Finalement, il y a quelques
articles de concordance. J'ajouterai que j'aimerais peut-être qu'on les
prenne en considération l'un après l'autre, rapidement.
Excusez-moi, vous avez raison, je suis à l'article 49. J'étais en
train de vous réciter l'article 49 et non pas l'article 48.
L'article 48 prévoit simplement que la sentence arbitrale est
sans appel et lie les parties, et que l'article 18a s'applique à la
sentence arbitrale, mutatis mutandis.
M. Brochu: Accepté, M. le Président.
Le Président (M. Clair): L'article 48 est-il
adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Clair): Adopté tel
qu'amendé. L'article 49.
M. Johnson: Ce que je viens de résumer, M. le
Président.
M. Forget: Mutatis mutandis. M. Johnson: Mutatis
mutandis.
Décision de la commission d'arbitrage des
griefs
Le Président (M. Clair): Y a-t-il des intervenants sur
l'article 49?
M. Forget: Oui, M. le Président. Une intervention
relativement au paragraphe 89e. On remarquera que ce sont
généralement des articles qui sont presque des règles de
procédure. On ne détermine pas le droit substantif à cet
article. Il a été
déterminé dans les articles précédents,
relativement à l'arbitrage. Il y a plusieurs règles nouvelles de
procédure qui sont fort appropriées. De façon
générale, je pense que c'est un bon texte et une
amélioration dans la mesure où cela se substitue au vide, et une
amélioration sur certaines mesures qui existent déjà dans
le Code du travail.
Il y a la question des délais qui est soulevée par le
Barreau, relativement à 89e. Je vais lire la motion d'amendement que
nous suggèrent les remarques du Barreau sur ce sujet parce que je pense
que c'est probablement plus simple de le faire comme ça. "Que le
paragraphe 89e, de l'article 49, soit modifié en remplaçant, dans
les troisième et quatrième lignes, les mots "90 jours de la
nomination du président du tribunal d'arbitrage" par les mots "60 jours
à compter de la fin de l'audition, y inclus la soumission des notes
écrites ". Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "A
défaut d'un délai fixé à la convention collective,
le tribunal d'arbitrage doit rendre sa sentence dans les 60 jours à
compter de la fin de l'audition, y inclus la soumission des notes
écrites, à moins que les parties ne consentent, par écrit,
avant l'expiration du délai, à accorder un délai
supplémentaire d'un nombre de jours précis."
Evidemment, il n'y a pas simplement une différence dans le nombre
de jours, ce n'est pas substituer 60 jours à 90 jours, c'est de le faire
compter à partir d'un moment différent parce que, étant
donné, surtout, qu'on attache certaines sanctions à la production
dans les délais, le Barreau fait observer, avec raison, que la longueur
de l'audition ne dépend pas... Dans le fond, on ne peut pas blâmer
le tribunal pour la longueur de l'audition; les parties elles-mêmes
peuvent allonger l'audition par des requêtes qu'elles font à cet
effet ou simplement par leur non-disponibilité, etc.; pour que ce soit
un délai qui vraiment s'applique au tribunal d'arbitrage, dans ce qui
dépend de lui seul; étant donné surtout qu'on veut
l'astreindre à ce délai de façon très
sérieuse, il semble, au Barreau, plus approprié et je suis
d'accord avec lui là-dessus que le délai ne compte
qu'à partir de la fin de l'enquête ou de l'audition c'est
la même chose et non à partir de la nomination. A ce
moment, on peut, bien sûr, raccourcir le délai et obtenir, grosso
modo, le même effet, mais de façon peut-être moins
déraisonnable pour les membres du tribunal. Je pense que ça parle
par soi-même, c'est le sens de la motion d'amendement et je me demande
justement, à considérer ce qui suit, relativement au paiement des
honoraires, si ce ne serait pas un changement qui serait opportun.
Le Président (M. Clair): M. le ministre. M. Bisaillon:
M. le Président.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, c'est une question. Si on
traite de l'amendement 89e, est-ce que je dois comprendre que a), b), c) et d)
sont réglés? C'est que j'avais un petit commentaire à
passer à 89c. Est-ce que je peux me permettre de le faire avant?
M. Forget: De consentement, oui.
M. Johnson: Oui.
Le Président (M. Clair): De consentement.
M. Forget: On les discute tous ensemble, je pense, cette fois-ci
parce qu'il y a tellement peu de choses à dire là-dessus.
M. Bisaillon: Vous avez dit "cette fois-ci "?
M. Forget: Oui, cette fois-ci, contrairement à la pratique
établie dans les autres articles.
M. Bisaillon: M. le Président, c'est l'article 89c qui se
lit comme suit: "Tout membre du tribunal d'arbitrage est tenu de garder le
secret du délibéré jusqu à la date de la sentence".
Je comprends que, pendant un certain temps, cette disposition aurait pu
être utile puisqu'il arrivait qu'en cours de
délibéré, les parties étant
représentées par un arbitre patronal et un arbitre syndical, si
le contenu du délibéré était connu par les parties,
certaines parties avaient avantage à retirer leur arbitrage pour
éviter de faire de la jurisprudence ou, se rendant compte qu'elles
étaient en train de perdre l'arbitrage au moment du
délibéré, avaient tendance à retirer l'arbitrage.
Depuis deux ou trois ans, il y a des sentences qui ont été
données qui stipulent qu'à partir du moment où un
arbitrage est en délibéré, une partie ne peut plus retirer
son arbitrage. Il y a une foule de sentences qui ont été
données dans ce sens-là.
Ce que je veux souligner c'est qu'à partir du moment où on
est persuadé que dès le début du
délibéré, l'arbitrage ne peut plus être
retiré, on n'a quasiment pas d'intérêt à conserver
l'article 89c, d'autant plus que cela peut nuire, dans le fond cela ne
nuit pas au délibéré au fonctionnement des
relations du travail dans le sens suivant: Les parties ont, au tribunal
d'arbitrage, un représentant. Alors, comment voulez-vous qu'on
empêche, à toutes fins pratiques, un arbitre patronal de parler
aux gens qu'il représente. On aurait pu le faire au moment où il
y avait des dangers que l'arbitrage soit retiré, mais ce n'est plus le
cas. On ne devrait pas craindre cet aspect.
L'avantage, cependant, à ce qu'un arbitre patronal puisse
continuer à parler avec ses amendements, c'est qu'il peut y avoir,
pendant l'arbitrage, d'autres causes qui s'en viennent et il est utile, pour la
partie patronale, par exemple, de savoir que la cause qu'elle a portée
en arbitrage, en délibéré, est plus ou moins bonne; cela
lui évite d intenter d autres procédures et cela permet de
régler, au niveau local, ces griefs sans qu'ils se rendent en
arbitrage.
Je ne fais pas d'amendement, je souligne seulement le fait que c'est un
texte qui, dans la prati-
que, peut être difficile à respecter et qu'on n'aurait pas
de crainte à enlever, puisqu'il y a déjà des sentences qui
nous indiquent qu'on ne peut plus retirer un arbitrage à partir du
moment où il est en délibéré.
Le Président (M. Clair): Le ministre du Travail.
M. Johnson: M. le Président, rapidement, parce que je
pense que le député de Joliette-Montcalm aussi aura des
commentaires à faire là-dessus. L'objet de ça, tout en
tenant compte du fait que c'est vrai que depuis deux ans, il y a eu certaines
sentences arbitrales qui étaient à l'effet de refuser de retirer
un arbitrage en cours de route; c'est vraiment mettre les arbitres dans une
situation d'arbitre.
On sait qu'il y a eu, en cours de route, on n'a pas à faire le
procès de qui que ce soit, mais on sait que des arbitres parlaient
constamment avec la partie qui les avait nommés, avec le résultat
que ça ne les mettait pas vraiment dans un climat où, compte tenu
des pouvoirs qu'on leur donne, compte tenu du fait que c'est vraiment de nature
quasi judiciaire et les pouvoirs qu'on ajoute au tribunal d'arbitrage,
ça en fait presque un minitribunal. Je pense que l'arbitre devrait
être tenu à la règle du secret jusqu'au moment du
délibéré. De telle sorte qu'il n'y ait pas, en cours de
route, par exemple, d'arbitre patronal ou syndical qui décide, voyant
où s'en va le président du tribunal d'arbitrage, de voir sa
partie, son mandat et de lui dire: Ecoutez, ça s'en va dans tel sens et
ça peut modifier le sens des plaidoyers qui s'en viennent.
C'est vraiment respecter le caractère de tribunal de ces trois
personnes, dans le cas d'un tribunal formé de trois personnes. Une fois
cependant que c'est pris en délibéré, ça ne pose
plus de problème, le délibéré étant la
cessation de l'audition et le moment qu'on prend pour la rédaction afin
de rendre la décision finale.
Le Président (M. Clair): Le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: C'est peut-être une question
d'interprétation, "tout membre du tribunal d'arbitrage est tenu de
garder le secret du délibéré ". Lorsque le
délibéré commence, la preuve est constituée, elle
est faite, le dénouement même de l'arbitrage relève
uniquement des trois personnes.
Dans un premier temps, j'étais porté à faire le
même commentaire que le député de Sainte-Marie. Parce qu'au
cours de l'arbitrage, il est très possible qu'un arbitre suggère
des choses qui font en sorte que ça devienne d'un commun accord; le
tribunal ne fait que ratifier des ententes qui se produisent au cours d'un
arbitrage. A partir du délibéré même, ma
compréhension a changé lorsque j'ai entendu
l'interprétation du délibéré à la sentence.
Il n'y a plus de négociations possibles, parce qu'ils ont fait
l'arbitrage, ils ont fait la preuve évidente devant le tribunal, ce
n'est qu'une publication de la sentence ou du jugement des trois arbitres.
M. Johnson: En fait, disons qu'on veut soustraire les arbitres,
qui, comme on le sait, sont nommés par les parties à l'origine,
de la tentation de faire de la négociation en arbitrage; à partir
du moment où le délibéré est pris, cela ne pose
plus de problème. Ils peuvent faire ce qu'ils veulent.
Mais, avant cela, je pense qu'il faut vraiment qu'ils se confinent dans
un rôle d'arbitre. Il faudra lire cela en conjonction avec 89e, par la
suite.
Est-ce que cela répond aux questions du député de
Sainte-Marie?
M. Bisaillon: M. le Président, mon objectif était
simplement de passer un commentaire. Je pense que c'est fait. J'avais
annoncé que je n'avais pas l'intention de faire un amendement.
Le Président (M. Clair): M. le ministre du Travail, sur la
motion d'amendement du député de Saint-Laurent, à
l'article 49.
M. Johnson: La motion d'amendement du député de
Saint-Laurent vise, finalement, à impartir un délai au tribunal
d'arbitrage à partir du délibré seulement, et non pas
à partir de la nomination des arbitres. C'est vrai que la
conférence des arbitres et le Barreau se sont opposés à
89e que nous introduisons, surtout que la sanction est extrêmement
sévère puisque c'est l'absence d'honoraires pour les
arbitres.
Cependant, ce qui nous a amenés, malgré un débat
très long, de très longues discussions à ce sujet
et on l'a retourné à l'endroit et à l'envers et, entre
autres, dans le sens de la proposition du Barreau à garder le
texte tel qu'il est en ce moment à 89e, c'est que nous nous sommes
inspirés un peu d'une attitude qui a été prise par le juge
en chef de la Cour supérieure récemment et qui a refusé,
dorénavant, qu'on demande des remises en Cour supérieure, et de
façon systématique. Les juges de la Cour supérieure
n'acceptent plus les remises, évidemment, sauf dans des cas qui sont des
cas de force majeure, qui impliqueraient l'ensemble des gens.
C'est inspiré un peu de cela. On sait, en pratique, malgré
les règles que se fixaient les conventions collectives, que les
délais pour rendre les sentences, dans certains cas, peuvent être
extrêmement longs. Celui qui paye, en fin de compte, c'est le
salarié qui est à l'origine du grief que son syndicat a choisi de
porter en arbitrage.
Pour ces raisons, il nous apparaissait nécessaire d'impartir un
délai extrêmement rigoureux et d'avoir une sanction
sévère, pour que ce soit plus qu'incitatif. Cependant, il ne faut
pas oublier qu'à l'article 88, dans la série des articles 88, on
accorde au tribunal d'arbitrage le pouvoir d'exiger d'entendre les parties. Et
si les parties ne se présentent pas, il peut juger ex parte, finalement.
Il faudra donc que les parties elles-mêmes soient diligentes, et non
seulement l'arbitre.
L'arbitre pourra invoquer que, justement, il y a un délai de
rigueur qui est fixé pour lui dans la loi, et que, pour ces raisons, il
décide de procéder ex parte, à moins que les parties
elles-mêmes n'y
consentent par écrit. Cela ne pose pas de problème,
puisqu'on tient pour acquis que, par écrit, elles vont spécifier
dans un document qu'elles sont prêtes à accorder un délai
avec une date fixe et déterminée, tandis qu'aujourd'hui c'est un
peu plus flottant. On se rend compte, par exemple, que le procureur de la
partie syndicale ne peut pas se présenter ou de la partie patronale, et
cela traîne, cela traîne. Aujourd'hui, il n'y aura plus d'excuse
pour que cela traîne, puisque le président du tribunal d'arbitrage
dira: Compte tenu de l'article 89-I je dois rendre ma sentence dans les trois
mois; donc débrouillez-vous pour comparaître. Si, d'un commun
accord, vous êtes prêts à remettre, cela est une autre
chose; mais si c'est une des parties, il faudra qu'elle se débrouille
pour comparaître. Je comprends que c'est sévère,
mais...
M. Forget: M. le Président, je crois que l'intention est
louable et je pense que tout le monde souscrit à l'idée qu'il n'y
ait pas des remises, des délais exagérés. D'un autre
côté, souvenons-nous des paroles de sagesse qu'on a entendues
même de la part du ministre au sujet de l'article 39 et d'autres
dispositions selon lesquelles des dispositions dans la loi qui, en pratique,
s'avèrent inapplicables, c'est comme si on ne les votait pas. J'ai
fortement l'impression qu'on est en face d'une disposition de la loi que l'on
va rendre caduque. On peut même expliquer facilement, tout en respectant
la lettre de la loi, comment on va la rendre caduque. Les membres des tribunaux
d'arbitrage ne sont pas des juges, c'est-à-dire qu'ils ne sont pas
nommés, ils sont choisis. Alors, comme les arbitres savent lire, ils
vont se dire: Maintenant qu'on risque de ne pas être payés pour le
travail qu'on fait, si jamais les délais sont dépassés
et comme il est odieux de se prévaloir d'un pouvoir de faire
entendre les parties, si, pour une raison ou pour une autre, ils ne sont pas
disponibles, ils ne sont pas prêts à comparaître ce
qu'on va faire avant d'être nommés, c'est qu'on va obtenir un
accord, en vertu de la loi qui nous le permet, que les parties consentent par
écrit avant qu'on soit nommés, que les délais ne soient
pas respectés. De cette façon-là, on va être
sûr d'être payés, et qu'il arrive n'importe quoi, on va
être payés. On ne sera pas pénalisés parce que les
parties, à un moment donné, veulent traîner les choses.
C'est vrai qu'ils ont le pouvoir de ne pas les faire traîner, mais s'ils
demandaient à des arbitres dont la subsistance, parfois à 50%,
nous a-t-on dit, des honoraires professionnels de certaines personnes,
dépend des arbitrages qu'ils font, ces gens ne sont pas pour se mettre
tout le monde à dos à partir de demain. Ils dépendent des
parties, ils dépendent de leur collaboration, de leur acceptation.
C'est vrai que la loi leur donne des pouvoirs. La question qui se pose,
c est jusqu'à quel point ils vont vouloir se servir des pouvoirs contre
une partie au préjudice même de l'intérêt de cette
partie, dans un arbitrage, pour être sûrs que eux soient
payés. C'est les placer dans une situation vraiment très
désagréable de dire: "Ecoutez, il faut que je sois payé,
alors vous faites mieux d'arriver ici aujourd'hui, parce qu'il faut que je
donne ma sentence et j'ai d'autres arbitrages. J'ai cette journée de
disponible. Les autres jours, je suis pris dans d'autres arbitrages, etc. Si
vous ne venez pas vendredi, c'est "just too bad", je vais rendre mon
délibéré ex parte. Vous savez que l'article untel me donne
ce pouvoir". Je prédis quelque chose à l'arbitre qui va se
comporter de cette façon. Il ne sera pas arbitre souvent. On va
s'arranger pour que son nom disparaisse de la liste. Il y a une limite à
ce qu'on peut traiter comme un tribunal un organisme qui n'en est pas un.
Vous savez, on a eu cette longue discussion samedi sur
l'immunité. C'en était une illustration. Là, on tombe dans
une autre illustration. C'est vrai que c'est louable que le juge en chef de la
Cour supérieure dise: Finies les remises futiles, pour des motifs
frivoles. Il peut le dire, parce que ces juges sont indépendants. Ils
sont nommés là jusqu'à ce que mort s'ensuive. Ils sont
sûrs de ne pas dépendre de la bonne volonté des parties.
Les arbitres ne sont pas dans cette situation. Peut-être qu'il faudrait
les faire évoluer, mais on ne peut pas changer des choses dans une loi
sans se poser des questions, à savoir si c'est cohérent avec
l'esprit du système. Ici, ce n'est pas cohérent avec l'esprit du
système.
Même si l'intention est bonne, encore une fois et je
souscris à tout ce que le ministre a dit sur l'intérêt que
les choses ne traînent pas en longueur il reste que d'ici quelques
années, si on adopte cela sans changement, on va dire: Vous savez, il y
a eu des difficultés, et finalement, cet article n'est pas
appliqué. L'appliquer aurait causé plus de trouble que cela n'en
donnait de ne pas l'appliquer, donc on a décidé de ne pas
l'appliquer. Cela arrive assez souvent pour qu'on dise, sans être
taxé de faire de la démagogie ou quoi que ce soit, ce n'est pas
cela... Cela arrive que des articles d'une loi ne s'appliquent pas, et c'en est
un qui ne s'appliquera pas. Je ferais un bon pari, avec une bonne certitude de
le gagner en disant: Regardons cela dans trois ans, et vous allez voir qu'il ne
sera pas appliqué. Il y a tellement de lois qui décrètent
des délais impératifs pour rendre des décisions, pour
faire des choses, et dans le fond, l'exception plutôt que la
règle, c'est qu'ils soient respectés, mais la règle, c'est
qu'ils ne le soient pas. Au moins, faisons dépendre le délai de
ce qui concerne strictement l'arbitre. Il n'y a pas d excuse. S'il a 60 jours
pour se décider et pour écrire sa décision, sa sentence,
c'est faisable. Cela dépend de lui seulement de s'organiser pour le
faire. Il travaillera en fin de semaine, s'il le faut, et tout cela, mais il va
le faire. Si on l'oblige à ce que le processus même de l'audition,
qui dépend des parties autant et peut-être plus que de l'arbitre,
étant donné le caractère volontaire de I arbitrage,
volontaire dans un certain sens, pas volontaire volontaire, mais il y a
certainement beaucoup d'aspects de volontariat là-dedans, je pense
qu'à ce moment, on peut plaider contre l'observation de la loi. Si on en
était conscient et si on était d'accord qu'on est conscient que
cela ne sera pas respecté, je pense qu'il ne faudrait pas l'adopter
comme cela. C'est la conviction que j'ai, de toute façon.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez quelques
dernières remarques là-dessus. D'abord, il y a un problème
en ce moment, en ce qui concerne les arbitrages, si on le constate et qu'on
fait le diagnostic de cela, c'est que les délais sont extrêmement
longs. Ces délais sont surtout attribuables à la période
qui s'écoule entre le moment de la nomination du conseil d'arbitrage et
la première audition. A partir du moment où ils sont en audition,
cela va relativement vite. Il y a ensuite le problème du
délibéré. Mais le problème c'est le "time gap" pour
utiliser une expression très française. C'est entre la nomination
et l'audition. Si la loi dit qu'il y a délai strict imparti à
l'arbitre, sa réaction sera de s'arranger pour voir ou pour communiquer
avec les parties le plus rapidement possible, et dire: Voici, messieurs,
quelles sont vos dates. Les miennes sont celles-ci et quelles sont les
vôtres dans le prochain mois et demi ou dans les prochains deux mois? A
partir de là, les parties peuvent s'apercevoir cela va les forcer
à faire cette démarche-là qu'il va effectivement y
avoir des problèmes de disponibilité et elles pourront consentir:
il y a toujours cette soupape du délai que peuvent accorder les parties.
Dans un premier temps, cela va mettre les parties, indépendamment de
l'arbitre, cela va les mettre dans une position où elles sont
obligées, finalement, de s'expliquer, alors que la règle
était de procéder quand on pouvait. Cela va plutôt
être exceptionnel d'accorder un délai.
Deuxièmement, le problème des délais est qu'ils
tuent l'arbitrage. Ce qui est arrivé récemment, par exemple
à Saint-François-d'Assise, n'est pas parfaitement étranger
au fait qu'il y avait une série de griefs qui traînaient depuis
des mois et des mois. Il y a des délais impartis d'un an dans certaines
législations et on voit ce que cela donne dans les secteurs public et
parapublic entre autres. Quand 75 griefs s'accumulent autour d'une question, on
ne s'étonne pas que cela saute quelque part à un certain moment.
On a finalement l'unanimité du conseil consultatif sur cette question.
Je pense que, pour ces raisons, en étant très conscient qu'il y a
toujours cette soupape qui permettra aux parties d'essayer... Puisque la loi
les autorise à trouver un délai plus long, elles seront
obligées de le faire de façon spécifique alors
qu'aujourd'hui c'est presque considéré comme l'affaire normale et
on procède en première audition quand on peut. L'arbitre va alors
dire: Messieurs, je dois procéder au jugement dans les 90 jours. Vous
devez me donner spécifiquement une date à laquelle vous
m'autorisez à rendre mon jugement si cela doit dépasser 90 jours,
et je vous demande de me fournir des motifs. Je pense que cela le
protège d'une certaine façon et c'est le seul moyen de pression
du système sur les parties. Le système ne peut pas faire de
pressions sur les parties, il peut faire des pressions sur l'arbitre. L'arbitre
peut lui-même, à ce moment-là, exiger des justifications de
la part des parties et les mettre dans cette position. Et c'est non seulement
l'avis unanime du conseil consultatif, mais c'est également l'avis de
ceux qui considèrent qu'à moyen terme cela va permettre d'avoir
une plus grande qualité d'arbitrage, puisque ceux qui réussiront
dans les 90 jours et qui réussiront à imposer un rythme aux
parties et on sait qu'il y a une espèce de spécialisation
de fait de certains des arbitres dans certains secteurs, public et parapublic
entre autres on pense que cela devrait, à moyen terme, améliorer
considérablement la qualité expéditive des jugements
d'arbitrage.
Le Président (M. Clair): Le député de
Richmond.
M. Brochu: Dans ce sens-là, pour enchaîner, je pense
qu'on doit viser à ce que les délais soient quand même les
plus courts possible pour éviter aussi ce qui est prévu à
l'article 89h, la sanction qui est prévue là. Je pense que dans
ce sens-là il est important de bien situer le moment où le
délai commence.
A ce chapitre, je pense que le député de Johnson a
clairement établi la position de l'Union Nationale lors de l'audition
des mémoires lorsque M. Bellemare avait indiqué qu'il fallait
absolument maintenir le délai justement à partir de cette
nomination. Il avait, je pense, cette préoccupation à l'esprit
à ce moment.
Dans la première version du projet de loi 45, on avait quand
même 60 jours de délai et maintenant on se retrouve avec 90 jours.
Est-ce que je m'adresse au ministre vous maintenez cette chose
à partir de la règle de nomination.
M. Johnson: C'est 90 jours à partir de la nomination, sauf
l'exception qui est prévue la soupape au dernier
alinéa, que les parties peuvent s'entendre, par écrit, sur une
date spécifique qui excéderait 90 jours.
M. Forget: C'est la seule autre voie possible?
Le Président (M. Clair): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, sur l'amendement, il y a
une partie qui m'inquiète beaucoup; c'est là où on lit: "y
inclus la soumission des notes écrites". La pratique nous
démontre que, dans l'ensemble, lorsqu'il y a des notes écrites
à un dossier, c'est, la plupart du temps, parce que les procureurs, tant
patronaux que syndicaux, se sont trouvés mal pris au moment de
l'arbitrage, et décident de souligner au tribunal qu'ils vont produire
des notes écrites. Or, l'expérience nous démontre aussi
que ces notes écrites sont, la plupart du temps, produites
au-delà des dates où on les avait promises. En douze ans,
ça ne m'est jamais arrivé de voir un procureur déposer ses
notes au moment où il l'avait promis; cela a toujours
dépassé, justement parce que le motif principal des notes
écrites c'est parce qu'on s'est trouvé mal pris au moment de
l'arbitrage. Il me semble que, non seulement ça ne rend pas service aux
parties, mais ça allonge encore indéfiniment la
procédure.
Pour ce qui est du départ du délai qu'on donne, lorsqu'on
parle de l'audition je reprendrai, à ce moment-là, les
propos du ministre il
est clair que ça va amener les parties à ne pas s'imposer
d'entendre les parties le plus rapidement possible. Si on fait partir le
délai de la fin de l'audition, c'est clair qu'on va siéger le
plus tard possible. Par ailleurs, dans l'article tel quel, on fait partir le
délai à compter de la nomination du président du tribunal
d'arbitrage. On sait aussi que, entre la nomination des arbitres et la
nomination du président, il y a aussi un délai; ce qui veut dire
que, quand j'envoie mon grief à l'arbitrage, chaque partie nomme son
arbitre, habituellement cela se fait rapidement, mais il est possible que la
nomination du président puisse prendre un certain temps additionnel qui,
lui aussi, va allonger les 90 jours. Ce qu'il faut mentionner c'est que les 9Q
jours partent de la nomination du président. Cela veut dire que,
à partir du dépôt du grief à l'arbitrage, on peut
facilement se rendre à 120 et 150 jours, du moment où le grief a
été déposé, compte tenu des délais qui
peuvent arriver, au moment de la nomination du président. Il me semble
que ça serait suffisant pour qu'on ait une sentence au bout de la
ligne.
M. Forget: Est-ce que, soit le ministre ou le
député de Sainte-Marie, pourrait me dire si on peut exclure que,
au moment de leur nomination, les arbitres n'exigeront pas, dans les faits, un
consentement d'avance, par écrit, à ce que les délais ne
soient pas invoqués contre eux? Est-ce que ce n'est pas humain et
naturel de demander ça et d'offrir, en contrepartie, de la part de
l'arbitre, qu'il n'invoquera pas non plus son pouvoir de convoquer les parties
en des moments et dans des délais qui ne leur seraient pas acceptables.
Est-ce que, ce n'est pas une entente qu'on peut s'attendre à voir se
répandre, un type d'entente qu'on peut s'attendre à voir
répandre?
M. Johnson: II y a deux choses. Il y a d'abord le fait que, a
priori, je m'attends que des arbitres décideraient, à peu
près automatiquement, au moment de leur nomination, sur une
espèce de formulaire type, d'obtenir un délai, mais on dit bien
que ce délai supplémentaire doit être d'un nombre de jours
précis. Alors, je pense que l'intention du législateur est
très claire à ce niveau-là et cela le met dans une
situation plus difficile. Deuxièmement, quand ils auront fait cela cinq
ou six fois, alors que d'autres réussissent à le faire en
respectant les 90 jours, on assistera à une épuration de fait de
la liste des arbitres. Troisièmement, je pense qu'un arbitre n'a pas le
droit de se priver, par écrit, de dispositions qui lui donnent le
pouvoir de convoquer les parties, d'après la loi. Je pense qu'il ne peut
pas. Evidemment, de fait, il peut dire: Ecoutez, etc., mais cela va
carrément à l'encontre de la loi puisqu'on dit qu'il a le
pouvoir; il ne peut quand même pas abdiquer ce pouvoir sur le
consentement des parties.
M. Forget: Si le ministre en venait à la connaissance de
faits de ce genre-là, est-ce qu'il irait jusqu'à radier du
tableau des arbitres un arbitre qui s'en serait rendu coupable?
M. Johnson: Cette question se situe dans le contexte, de
façon générale, de l'appréciation de la liste des
arbitres et je pense que ce qu'il faut faire, c'est d'amener, entre autres, le
conseil consultatif... Il sera toujours inévitable de trouver, sur la
liste des arbitres, dix personnes avec une tendance nettement syndicale, dix
personnes avec une tendance nettement patronale, et parfois se glissent
à travers cela des gens qui ont vraiment un respect des deux parties et
qui ne posent pas de problème. Mais on dit: Tu me passes Untel et je te
passe Untel. C'est un peu comme cela que cela se fait. Je pense qu'à un
moment donné, il va falloir qu'au CCTMO, avec le temps, on arrête
d'agir un peu comme cela et qu'on essaie de trouver des arbitres qui ne soient
pas nécessairement des mordus d'un côté ou de l'autre.
Deuxièmement, dans le contexte de la première convention
collective, je peux vous dire qu en ce qui me concerne, et j'en suis sûr
en ce qui concernera tous les titulaires qui me suivront à ce
ministère, on va probablement exiger que les membres au CCTMO
qualifient, de façon bien particulière, la compétence de
ceux qu'ils veulent être, de ceux qui pourraient être les arbitres
d'une première convention collective. Il faudra exiger des
qualités assez particulières, je pense, de ces gens-là. Il
faudra qu'ils s'entendent vraiment et qu'ils trouvent, non pas deux candidats
dont les qualités ou les tendances s'annulent, mais deux candidats qui,
eux-mêmes, font un peu une synthèse des deux tendances, dans la
mesure où cela est possible. En fin de compte, il y a également
des plaintes. Il y en a une qui a été formulée
récemment par un groupe, à l'encontre de l'intervention d un
arbitre, et j'ai soumis cette plainte au conseil consultatif. C'était un
arbitre qui avait agi comme procureur d'une partie à une certaine
époque et qui, quelques mois plus tard, était arbitre exactement
dans ce litige, ce qui, même si ce n'est pas interdit formellement par la
loi, m'appa-raît un peu aberrant. Je pense qu'il y a une tendance
à rendre un peu plus sérieux tout le contexte de la nomination
des arbitres. Je pense que c'est essentiellement à partir de directives
et de suggestions que le ministre peut faire au CCTMO. Je ne pense pas que ce
soit par la loi qu'on puisse l'impartir. Il va falloir qu'on puisse
considérer ce groupe comme un groupe vraiment très
qualifié. Ce n'est malheureusement pas le cas de tous les arbitres en ce
moment. Je pense que la partie syndicale et la partie patronale s entendent
pour dire que, depuis trois ou quatre ans, il y a une amélioration
considérable de la qualité au niveau des arbitrages. Je pense
qu'il y a encore beaucoup d'efforts à faire dans ce sens.
M. Forget: Pour terminer sur ce sujet, je voudrais souligner la
signification et l'importance des propos que vient de tenir le ministre. Je
suis sûr que tous les arbitres vont lire le compte rendu du journal des
Débats sur les quelques derniers articles, y compris celui sur lequel
nous délibérons dans le moment. Je pense qu'ils vont probablement
voir dans les propos du ministre un avertis-
sèment. Ce n'est peut-être pas inapproprié. Le
ministre nous dit qu'il n'a peut-être pas l'intention de purger les
arbitres, mais il a sûrement l'intention de purger la liste des arbitres,
et qu'il y a un certain nombre de critères et de facteurs dont il va
tenir compte dans ce processus, en particulier le respect des délais et
des pouvoirs que la loi leur attribue.
Le Président (M. Clair): Le député de
Sainte-Marie. Vous aviez demandé la parole?
M. Chevrette: Oui, avant.
Le Président (M. Clair): Le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: J'ajouterai dans ce cas-là, pour les fins du
journal des Débats, peut-être aussi pour notre gouverne, qu'il y a
beaucoup de retards dans les arbitrages qui ne sont pas dus aux arbitres, mais
bien aux procureurs des parties. Il y a des procureurs qui en prennent beaucoup
plus qu'ils sont capables d'en faire, qui se retrouvent avec un nombre
incalculable d'arbitrages sur les bras et qui ne peuvent pas répondre
nécessairement au rythme fixé par les présidents des
tribunaux, par exemple.
Je pense qu'avec une autorité un peu plus directe, au tribunal
comme tel, cela empêchera les procureurs de s'entendre aussi facilement
entre eux, car les syndicats deviennent même les victimes des procureurs.
Cela, je l'ai vécu dans le domaine de l'éducation à
plusieurs reprises. C'est peut-être un peu farfelu de dire ça,
mais il faut l'avoir vécu. En tout cas, moi, je l'ai vécu pendant
douze ans pour me rendre compte que des procès et des arbitrages
s'étirent indûment, précisément à cause des
procureurs.
Je dois dire, on en a parlé samedi avec le député
de Saint-Laurent, de la nomination des arbitres, que je pense que le monde
ouvrier, autant patronal que syndical, était en train de faire cette
épuration d'arbitres que le gouvernement ne faisait pas. Beaucoup de
syndicats et d'employeurs ont maintenant décidé d'inclure dans
leurs conventions collectives une liste d'arbitres, parce que,
précisément, ils avaient de la difficulté à
s'entendre sur des arbitres nommés. Comme on le disait samedi, le
patronat en présente dix, le syndicat en présente dix; accepte
les dix miens et je vais accepter les dix tiens.
On n'avait peut-être pas cette qualité qu'on recherchait.
Donc, dans le domaine public, par exemple, on sait que c'est une liste incluse
à la convention collective, ce qui a corrigé sensiblement le
système, et qui a fait en sorte qu'on avait des gars plus
spécialisés, sur lesquels les parties s'étaient
entendues.
Je crois que dans plusieurs domaines, même dans le domaine
privé présentement, il y a une légère tendance; ce
n'est pas encore marqué au point de dire que ça s'en vient
majoritaire, mais de plus en plus, les parties s'entendent sur une, deux ou
trois personnes, et ça leur fait un arbitre tou- jours en
disponibilité, des gens qui sont prêts à agir.
A ce moment-là, on a des gens qui se spécialisent, qui
rendent des sentences beaucoup plus appropriées. Il se développe
une jurisprudence au niveau de ce réseau. Les types ne se contredisent
pas d'une sentence à une autre. Je trouve que c'est peut-être la
formule, au niveau de la réforme du Code du travail, qu'on pourra mettre
de l'avant, précisément pour faire en sorte que nos tribunaux
d'arbitrage soient expéditifs et rendent justice aux parties.
Le Président (M. Clair): La motion d'amendement du
député de Saint-Laurent à l'article 49 à l'effet
que le paragraphe 89e de l'article 49 soit modifié en remplaçant
dans les troisième et quatrième lignes, les mots, "90 jours de la
nomination du président du tribunal d'arbitrage", par les mots, "60
jours à compter de la fin de l'audition, y inclus la soumission des
notes écrites", est-elle adoptée?
M. Johnson: Rejeté.
M. Forget: Sur division.
Le Président (M. Clair): Rejeté sur division.
M. Johnson: M. le Président, au paragraphe 89j, simplement
un ajout pour préciser le texte. On dit: "Le greffier ou une personne
dûment autorisée par le commissaire général du
travail peut certifier conforme toute sentence arbitrale déposée
selon l'article 89f". Il faudrait lire: "Le greffier ou, à défaut
de ce dernier, une personne dûment autorisée par le commissaire
général."
M. Forget: Pourquoi cette règle: Si le greffier ne le fait
pas, si quelqu'un d'autre le fait; c'est assez curieux?
M. Johnson: Cette personne est dûment autorisée,
évidemment. L'idée est de ne pas permettre qu'il y ait deux
sources simultanées possibles. En principe, on dit: Le greffier ou une
personne dûment autorisée...
M. Forget: Je comprends le sens d'une modification
récemment introduite, mais il me semble que l'article lui-même est
un peu paradoxal, parce qu'on en fait un document officiel par le certificat du
greffier. Il semble que, dans le fond, il y ait plus qu'une personne aux yeux
du public et des gens non informés des rouages internes du
ministère du Travail. Il reste que le certificat peut émaner de
plus d'une source. Pas en même temps, bien sûr; mais ce n'est pas
nécessairement le greffier.
Donc, en face d'un certificat, on aura peut-être un certain moment
d'hésitation, de doute, en disant: Comment se fait-il que ce ne soit pas
le greffier? S'il y a un greffier adjoint parce que je pense qu'il y a un
greffier adjoint dans les modifications donc, il y a toujours un des
deux qui devrait être capable de certifier les documents officiels qui
appartiennent au tribunal, ou, en fait, au
ministère. Cela me semble une procédure un peu
curieuse.
M. Johnson: En fait, M. le Président, comme me le
rappellent mes juristes, à l'article 33, qui introduit 39d du code
c'est plus un amendement de concordance qu'autre chose où
il est question des décisions du commissaire du travail ou des agents
d'accréditation quant à leur authenticité, la
certification émane du greffier, ou à défaut de ce
dernier, par une personne dûment autorisée par le commissaire
général du travail. Il n'y a pas de greffier adjoint. Cela
provient de là.
En admettant que le greffier est incapable d'agir, pour une raison ou
pour une autre, ou absent, etc., il faut quand même permettre
l'authenticité, la certification des documents. Cela peut être,
par exemple, dans le cas d'un litige qui est devant les tribunaux et où
on a besoin d'une copie conforme d'une décision de l'arbitre.
M. Forget: Oui, mais...
M. Johnson: Evidemment, il s'agit de savoir si c'est une
autorisation générale ou spécifique, parce que le
problème que pose le député de Saint-Laurent est celui de
la spécificité ou non d'une autorisation.
M. Forget: A mon avis, il y a deux points. D'abord, la
référence à 39d est exacte, mais c'est la même
règle. Ce n'est pas une concordance en ce sens que c'est la même
règle. Elle m'a échappé lorsqu'on a examiné
l'article 33. C'est assez peu régulier. Deuxièmement, même
si on insiste pour le faire, à ce moment-là, il me semble qu'on
devrait prévoir, dans le pouvoir réglementaire, l'attribution du
pouvoir de signature de ces certificats, de manière à ce que
toute personne intéressée ait une source officielle, la Gazette
officielle du Québec, pour savoir qu'un tel est autorisé à
certifier des documents.
C'est quand même assez sérieux, certifier des documents. Il
ne me semble pas qu'on devrait pouvoir le faire en vertu d'une autorisation
spécifique donnée par écrit, par lettre, à M.
Untel, mais qu'on devrait le faire par règlement, si on veut
répandre un peu plus largement le pouvoir de certification. Autrement,
je continue à prétendre évidemment, on ne l'avait
pas vu à 39d, c'est exactement la même objection que
maintenant qu'il y a un greffier adjoint... Je me demande si cette
rédaction ne date pas d'avant qu'on ait introduit la notion de greffier
adjoint. Il ne faudrait pas avoir deux remèdes pour le même mal,
maintenant qu'il y a un greffier adjoint. Ordinairement, quand il y a un
greffier adjoint, il y en a un à Québec et il y en a un à
Montréal. Ils sont assez accessibles pour certifier des documents qui
doivent être certifiés.
Je ne voudrais pas qu'on conclue trop rapidement là-dessus, parce
que même si c'est un point de détail, c'est un principe important
que le ministre veut peut-être prendre en délibéré
et y repenser.
M. Johnson: En pratique, le commissaire gé- néral
du travail va certifier les documents. Il y a le greffier qui, maintenant, a
des attributions qui lui sont confiées en vertu d'articles qu'on a
adoptés entre 25 et 40. De fait, l'autorisation fait l'objet d'un
écrit. Cela peut être dans les procédures qu'on
prévoit, par exemple, à l'annexe 1 du code, où c'est
effectivement une sorte de manuel de procédure des décisions qui
sont entre les mains des commissaires-enquêteurs ou du commissaire
général. Cela pourrait être inclus à ce
niveau-là.
Je comprends le problème que soulève le
député de Saint-Laurent. Cela pourrait se faire par une
publication dans la Gazette officielle que telle personne doit être
considérée comme la personne dûment autorisée pour
certifier les documents en l'absence du greffier.
M. Forget: C'est comme le pouvoir de signature, M. le
Président, on a cela dans les ministères maintenant. Pour toutes
les lois des ministères, c'est le ministre qui signe, ou le
sous-ministre, mais toute personne par délégation; à ce
moment-là, cela apparaît dans la Gazette officielle; il y a un
règlement. On dit: Le sous-ministre adjoint en charge de
l'équipement peut accepter l'état des travaux et ordonner le
paiement d'une facture d'un plâtrier ou d'un plombier. Les gens savent
que, si c'est autorisé par ce fonctionnaire, le paiement est
légal et régulier. Autrement, si on dit: Le ministre peut
déléguer à son chef de cabinet ou à sa
secrétaire etc., le pouvoir de certifier les documents, cela va
être un méli-mélo dans l'administration publique. Ces
autorisations peuvent se perdre, être égarées. A un moment
donné, on en retrouve une, cela ne peut être prouvé.
M. Johnson: M. le Président, je veux bien suspendre
l'article 89j. On va essayer de trouver ou une réponse adéquate
ou une modification adéquate pour être bien sûr que cela ne
pose pas de problèmes. En fait, l'article était là
à l'origine. Seulement pour le situer à nouveau dans le contexte,
c'est important, l'article était là à l'origine pour faire
en sorte que la Cour supérieure, par exemple, dans un bref
d'évocation qu'il pourrait y avoir, parce qu'il y a toujours une
possibilité de bref d'évocation si l'arbitre accepte cette
juridiction, quand il y a un bref d'évocation qui va en Cour
supérieur, le juge de la Cour supérieure va dire: Quelle est la
sentence arbitrale sur laquelle il y a un bref d'évocation? On a besoin
du document. On faisait venir alors le commissaire général du
travail, le commissaire-enquêteur chef, M. Plourde. Evidemment, c'est
cela qu'on veut éviter, soit de permettre qu'il y ait un document
certifié. Je suis d'accord avec le député de Saint-Laurent
théoriquement, pour le moment en tout cas je vais en discuter de
nouveau avec les juristes un peu plus tard . Techniquement, c'est que le
juge en Cour supérieure qui verrait que c'est ni le commissaire
général du travail ni le greffier qui ont signé le
document, se poserait la question pour savoir si c'est bien un document
certifié.
Le problème est finalement la signification du "dûment
autorisé". Est-ce que c'est une formule adéquate? On va regarder
cela.
M. Forget: C'est cela!
Le Président (M. Clair): De sorte que je peux en conclure
que l'adoption de l'article 49 est suspendue, sauf en ce qui concerne
l'étude de 89j qui n'est pas terminée.
M. Forget: C'est-à-dire qu'on a sauté d'une place
à l'autre, M. le Président. J'ai une autre question...
Le Président (M. Clair): Cela va! Allez-y!
M. Forget: ... relatif à l'article précédent
dont on n'a pas parlé du tout, à 89i. On dit: Le président
du tribunal d'arbitrage doit conserver le dossier de l'arbitrage pendant deux
ans à compter du dépôt de la sentence. Cela aussi est une
règle que je trouve un peu curieuse. Je comprends que le
président du tribunal, peut être un avocat en pratique
privée, par exemple. C'est à lui qu'on confie la garde du
dossier. Etant donné qu'on a des greffiers et un greffier adjoint, on a,
un greffe qui pourrait avoir ce rôle de conserver les dossiers etc. Le
nom même l'indique, un greffe, dont le rôle est d'émettre
des copies si des copies doivent être émises etc., de constituer
des espèces de plumitifs des causes qui ont été ouvertes
et fermées, etc. Ne serait-il pas plus normal que, si on veut faire
conserver des dossiers j'imagine en cas d'appels éventuels
la garde des dossiers soit publique, soit par un organisme public plutôt
que de garder les dossiers dans des bureaux privés, un peu partout. Les
gens peuvent mourir; leur succession arrive dans le bureau et on dit que ce
sont là de vieilles paperasses. On regarde les décisions qui ont
été rendues, celles qui n'ont pas été rendues. Pour
celles qui ont été rendues on dit: Bon, c'est fini cette
affaire-là, et on met cela au panier. Finalement, le dossier est perdu.
Je ne suis pas sûr si ces gens-là ont des obligations de
confidentialité, de la même façon que les greffiers du
tribunal en ont, etc. Il me semble que ce serait plus normal qu'une fois que la
sentence est rendue, le président du tribunal remet une copie au greffe
de l'original du bref de sa décision, qu'il transmet le dossier et qu'il
obtient, s'il veut un récépissé du greffier disant que le
dossier a été remis. Au moins, ils sont en registre et il ne
devrait y avoir une règle de destruction qu'après cinq ans. Il me
semble que ce serait plus normal d'avoir, maintenant qu'on a un greffier, donc
un greffe, de le conserver de cette façon plutôt que par une
obligation à l'individu.
M. Johnson: Je n'aurai sans doute pas une réponse
parfaitement satisfaisante pour le député de Saint-Laurent sur
cela non plus. Les avocats sont tenus, d'après la Loi du Barreau, de
conserver les dossiers cinq ans avant de procéder à leur
destruction. Comme les arbitres n'étaient pas toujours avocats, certains
avaient pris sur eux de conserver... Quand on parle des dossiers, on ne parle
pas de la sentence, évidemment. Pour la sentence, il n'y a pas de
problème. On parle de l'en- semble des documents relatifs à la
cause en question. Certains des arbitres les conservaient cinq ans, d'autres
deux, et d'autres n'adoptaient absolument aucune règle. Ils avaient
besoin d'une règle de conduite à cet effet. Le désavantage
d'obtenir le dépôt de l'ensemble des pièces au
ministère... On va tout de suite comprendre que quand on parle
d'arbitrage de griefs... L'arbitrage des différends, cela ne poserait
pas trop de problème, parce qu'il y en a relativement peu, mais
l'arbitrage des griefs, on me dit que cela en fait 1500 par année, c'est
beaucoup. Cela veut dire un plumitif, des espaces, du personnel. Cela veut dire
beaucoup de choses, compte tenu du nombre de causes. Pardon?
M. Forget: J'utilisais le stade olympique. Cela pourrait servir
à quelque chose.
M. Johnson: Oui, le stade olympique. Pour ces raisons, il nous
apparaissait normal de donner une règle de conduite aux arbitres, qui en
veulent une d'ailleurs. Ce sont eux qui nous ont fait part de cela. Ils veulent
avoir une directive de la loi quant à cela. Certains les conservaient
cinq ans, certains les détruisaient immédiatement ou
étaient peu soucieux et se demandaient si c'était juste de le
faire. On leur dit: Dorénavant, on présume que le dossier inclut
une copie de la sentence et l'ensemble des pièces concernant cette
sentence. Quant au ministère, il est intéressé à
avoir la sentence qu'il conserve simplement dans un greffe, sans règle
de destruction et sur laquelle on peut faire des recensements de jurisprudence
arbitrale, des recherches, etc. Puisque ces décisions ne sont pas
susceptibles d'appel, cela ne pose pas de problème non plus. On a
trouvé que deux ans, c'était une règle qu'on pouvait
imposer. Deuxièmement, on a jugé qu'il n'était pas utile,
il était même onéreux pour le ministère d'avoir les
copies des 1500 griefs annuels.
M. Forget: Enfin, c'est une façon de voir les choses. Je
n'en ferai pas une guerre de religions. Poser le problème...
Le Président (M. Clair): Oui, le député de
Richmond.
M. Brochu: J'aimerais obtenir une précision de la part du
ministre. C'est plutôt une nuance de termes. Dans la première
version du projet de loi no 45, on maintenait le terme "décision
arbitrale". Voici que maintenant, dans la version révisée, on
parle de sentence arbitrale. J'aimerais demander au ministre pourquoi on a
décidé d'employer cette expression "sentence arbitrale"
plutôt que "décision arbitrale ", comme l'avait d'ailleurs
demandé la conférence des arbitres.
M. Johnson: C'est essentiellement une question de
sémantique juridique. Les lois de 1901, 1909, 1944 deux fois, 1949 et
1964 ont toujours utilisé l'expression "sentence ", en anglais
l'expression "award" et non pas "decision". On a finale-
ment décidé de restaurer la pratique qui veut qu'on parle
de sentence arbitrale et non pas de...
M. Brochu: ... uniforme dans tous les textes. M. Johnson:
C'est cela.
Le Président (M. Clair): Pouvons-nous considérer
l'étude de l'article 49 terminée, à l'exception du
paragraphe 89j?
M. Forget: Oui, M. le Président.
M. Johnson: M. le Président, pour éclairer les
membres de la commission, d'ici 13 heures nous allons procéder à
l'étude des articles 49a et 50 et, par la suite, aborder deux articles
qui étaient en suspens, 15 et 21, je crois.
M. Forget: D'accord.
Le Président (M. Clair): L'article 49a?
M. Johnson: C'est un nouvel article dans lequel on précise
qu'une mésentente qui serait soumise à l'arbitrage par suite de
la volonté des parties est assujettie à tous les articles
précédents relatifs à l'arbitrage des griefs. Donc, on
prend soin de préciser, cependant, qu'un différend,
c'est-à-dire une réouverture des négociations
prévue à l'article 95, ne serait pas assujettie au respect de
cette procédure. L'article 49a du projet de loi se lirait donc comme
suit: "L'article 90 dudit code est remplacé par le suivant: "90. Pendant
la durée d'une convention collective, toute mésentente autre
qu'un grief au sens de l'article 1 ou autre qu'un différend pouvant
résulter de l'application de l'article 95, ne peut être
réglée que de la façon prévue dans la convention et
dans la mesure où elle y pourvoit. Si une telle mésentente est
soumise à l'arbitrage, les articles 88 à 89j s'appliquent".
Je m'excuse. Le mot "réglée " à la quatrième
ligne doit être au féminin singulier. Article 50... L'article
est-il adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Clair): Article 50.
M. Johnson: II s'agit ici simplement d'une question de
concordance. L'article 50 se lit comme suit: "L'article 91 dudit code est
modifié par le remplacement du premier alinéa par le suivant: "Le
lieutenant-gouverneur en conseil détermine, par règlement, la
rémunération des membres du conseil d'arbitrage et du tribunal
d'arbitrage". Cela correspond en fait à l'article 50 du projet de loi,
dans lequel il y a tout simplement une concordance de vocubalaire. L'article 50
est-il adopté?
M. Forget: Adopté. M. Brochu: Adopté.
Le Président (M. Clair): Adopté.
M. Johnson: Nous revenons à l'article 15 du projet de loi,
quant au sous-paragraphe d) de l'article 24a. Il s'agit évidemment de
l'exclusion de certaines personnes on s'en rappellera. Pour simplifier
les choses, il s'agit en fait du calcul de la représentativité ou
de la majorité nécessaire. Il pourrait arriver qu'une association
accréditée ait la majorité, mais à condition qu'on
inclue les personnes qui, elles-mêmes, sont susceptibles d'être
déclarées plus tard, par un commissaire-enquêteur, comme ne
faisant pas partie de l'unité. On clarifierait donc le texte de la
façon suivante, en disant: "peu importe que les personnes sur lesquelles
il n'y a pas accord soient éventuellement, suivant la décision du
commissaire du travail, incluses dans l'unité de négociation ou
qu'elles en soient exclues". En d'autres termes et il faut bien lire
jusqu'à la fin l'amendement que j'apporte parce que le "peu importe"
semble ambigu ce qu'on dit c'est que la majorité est la
majorité réelle de ceux qui seront compris dans l'unité de
négociation une fois que la décision, quant à l'exclusion
de certaines personnes, aura eu lieu.
Je ferais lecture de l'amendement qui se lirait comme suit: "Que le
sous-paragraphe d de l'article 24a proposé par l'article 15 du projet de
loi soit remplacé par le suivant: "d). Si l'agent d'accréditation
constate qu'il y a accord entre l'employeur et l'association sur l'unité
de négociation, mais non sur certaines personnes visées par la
requête, il accrédite néanmoins l'association sur-le-champ
si cette dernière jouit du caractère représentatif pour
l'unité de négociation demandée, peu importe que les
personnes sur lesquelles il n'y a pas accord soient éventuellement,
suivant la décision du commissaire du travail, incluses dans
l'unité de négociation ou qu'elles en soient exclues. En
même temps, l'agent d'accréditation fait un rapport du
désaccord visé ci-dessus au commissaire général du
travail et en transmet une copie aux parties. Le commissaire
général du travail saisit alors un commissaire du travail de
l'affaire. Ce désaccord ne peut avoir pour effet d'empêcher la
conclusion de la convention collective".
M. Forget: M. le Président, quant au fond, cette
rédaction reprend en substance un amendement que nous avions
présenté visant à régler, de façon
absolument explicite, cette question. Nous n'avons certainement pas
d'objection. Au niveau de la rédaction, c'est cependant une assez
curieuse rédaction. Je ne pense pas qu'on ait vraiment
amélioré la rédaction, M. le Président. Sur la
forme, c'est un style assez curieusement... On prend le plus long chemin de a
à b parce qu'on fait un grand détour. Dans le fond, toute une
partie de cet ajout est complètement inutile.
Si les personnes dont on conteste l'inclusion sont incluses, et qu'on
obtient le caractère représentatif de cette façon, il est
clair que, là, on préjugerait du jugement. Donc, ce n'est pas
vraiment ça qu'on vise; on vise le cas où, même si on
exclut ces personnes, on conserve, malgré tout, le carac-
tère représentatif, c'est-à-dire qu'on a,
malgré tout, 50% plus un.
M. Johnson: C'est mon interprétation. Enfin, je pense que,
si on lit lentement le texte, c'est bien ce qu'on dit, c'est que le
caractère représentatif exige que ces personnes ne soient pas
exclues. Si les personnes sont exclues... En d'autres termes, disons que le
nombre de personnes est de 100, que le vote est de 52, mais qu'il y a trois
personnes dont on conteste l'inclusion. S'il y a trois personnes dont on
conteste l'inclusion, le vote n'est plus 52, mais 49, donc ce n'est pas
représentatif.
M. Forget: D'accord, ce n'est pas représentatif. Alors,
c'est seulement dans l'hypothèse où l'exclusion des personnes
contestées fait perdre le caractère représentatif que la
règle est importante?
M. Johnson: C'est ça.
M. Forget: Mais c'est tout ce qu'on a visé, il n'est pas
nécessaire de prévoir deux hypothèses, parce qu'il est
clair que, si on est rendu à 59 ou 60, il n'y a pas de problème,
à les inclure. Ce qu'il s'agit de faire ce n'est pas de les inclure dans
le calcul, il s'agit de les exclure; or, l'amendement, tel que formulé,
suggère que peu importe qu'ils soient inclus ou exclus. Evidemment, ce
n'est pas le problème, s'ils sont inclus, il n'y a pas de
problème; c'est, s'ils sont exclus, qu'il y a un problème.
L'amendement, dans le fond, fait allusion aux deux possibilités, alors
que notre amendement faisait allusion à seulement une
possibilité. C'est pour cela que je dis qu'il y a des mots inutiles dans
le fameux cas du législateur qui ne parle jamais pour ne rien dire; dans
ce cas-là, je pense qu'il dit au moins un bout de phrase pour ne rien
dire.
M. Chevrette: M. le député de Saint-Laurent, vous
disiez que vous vouliez toujours avoir des textes clairs pour que l'ouvrier
puisse comprendre le texte comme il faut. Là, il est très clair,
on dit les deux côtés.
M. Forget: Oui, mais dans l'autre cas aussi il était
clair.
M. Johnson: Oui, mais cependant, M. le Président, c'est
qu'il y a une autre situation possible. Prenons l'exemple où l'employeur
aurait intérêt à considérer que certaines personnes
doivent être incluses dans l'unité de négociation parce
qu'il y a très peu de gens qui sont impliqués, il essaie de faire
inclure deux de ses contremaîtres pour faire changer le caractère
représentatif. Cela devient extrêmement important. En fait, le
syndicat n'a pas intérêt à ce que les contremaîtres
soient considérés parce qu'on pourrait présumer, dans une
hypothèse comme celle-là, qu'ils vont s'arranger pour que ce soit
telle association plutôt que telle autre qui ait un caractère
représentatif. Alors, ce qu'on fait, c'est qu'on dit: Peu importe la
décision, quant à l'exclusion, il faut que le caractère
repré- sentatif soit en fonction de ceux qui sont clairement inclus au
départ et si, par la suite, on décide de les exclure ou de les
inclure, ces personnes qui pourraient être qualifiées de
contremaîtres, pour favoriser une partie ou l'autre, finalement, compte
tenu du contexte, ça ne doit pas avoir de valeur déterminante sur
le caractère représentatif au départ. C'est
extrêmement important, c'est, à la fois, pour protéger
l'employeur qui verrait le syndicat inclure des gens qui ne devraient pas
être membres de l'unité et, de la même façon, pour
protéger le syndicat contre l'employeur qui, lui, voudrait faire inclure
certaines personnes parce qu'il a peut-être des visées qui ne sont
pas louables.
M. Forget: J'ai un autre problème à soumettre. Je
m'excuse, c'est qu'il y a vraiment une question qui se pose et je ne suis pas
sûr qu'on en ait adéquatement traité. Il y a deux
façons de traiter des gens dont l'inclusion, dans l'unité de
négociation, est contestée. On peut regarder le pourcentage de
votes obtenu. C'est toujours un ratio, c'est toujours "tant " sur un total
possible "de", et dire: Dans ce ratio, étant donné que, au
numérateur, apparaissent ceux qui ont souscrit et, au
dénominateur, le nombre total d'employés dans l'unité de
négociation, on va le considérer représentatif si,
même en soustrayant du numérateur les personnes contestées,
on obtient, malgré tout, plus que un demi comme ratio, après
coup.
On peut aussi, selon la rédaction de la loi, envisager qu'on
modifie, à la fois, le numérateur et le dénominateur.
C'est-à-dire que, non seulement on le soustrait du nombre de ceux qui
ont donné leur adhésion, mais on le soustrait de l'unité
de négociation, de manière que et là il faudrait
garder, mathématiquement, toutes les possibilités auxquelles
ça donne lieu, mais, effectivement, si on le soustrait de l'unité
d'adhésion, on peut avoir une majorité malgré tout, dans
les cas où c'est très près. Dans le cas actuel, je pense
qu'il n'est pas très clair... Quelle est l'opération
arithmétique, dans le fond, qu'on essaie de décrire avec des
mots? Est-ce qu'on essaie de décrire simplement une soustraction au
numérateur ou une soustraction à la fois au numérateur et
au dénominateur? Cela n'aura pas le même effet dans des cas
limites, bien sûr. Ma version, ce serait qu'on soustraie du
numérateur et du dénominateur.
M. Johnson: C'est ce que cela permet ici, à mes yeux.
M. Forget: Oui.
M. Johnson: Prenons l'exemple que je donnais tout à
l'heure, l'unité visée, c'est 100. Les adhésions, c'est
52. Il y a 3 personnes qui font l'objet d'une contestation. Alors, c'est 52
moins 3, c'est 49; mais c'est aussi 100 moins 3, cela fait 97. 49 sur 97, cela
donnerait le caractère représentatif quand même.
M. Forget: Je vois. Je pense que cela est très clair. Je
pense que c'est important qu'on le dise au journal des Débats, parce que
ce genre de discus-
sions peut fort bien se reproduire en réalité. D'accord,
M. le Président.
Le Président (M. Clair): L'article 15 est-il
adopté?
Des Voix: Adopté.
Le Président (M. Clair): Adopté.
Nouvelle requête en accréditation
M. Johnson: Article 25, M. le Président.
Le Président (M. Clair): L'article 25, dont l'étude
avait été suspendue.
M. Forget: C'étaient les fusions des entreprises.
M. Johnson: C'est cela.
M. Forget: Nous avions une motion d'amendement que nous n'avions
pas déposée formellement, en attendant une nouvelle formulation
de l'article.
M. Johnson: On maintient le texte, M. le Président, tel
qu'il est là. En fait, ce que je vais faire, c'est produire des
explications. Dans le cas de l'intégration scolaire ou municipale ou
d'une commission de transport, il s'agit de quelque chose qui ne relève
pas du tout des parties, d'aucune des parties, ni même de la
municipalité elle-même, d'une certaine façon, de celui qui
est l'employeur; en d'autres termes, cela ne relève pas
nécessairement de celui qui est l'employeur, tandis que, dans le cas du
secteur privé, par définition, cela relève de la
volonté de la partie qui est l'employeur. Ce qu'on dit, en d'autres
termes, c'est que si, dans le secteur public, par exemple, il y a une
requête en accréditation pour les employés d'une commission
de transport et qu'il y a fusion en cours de requête de cette commission
de transport avec une autre, il peut y avoir un désistement, mais ce
désistement, de la part de ceux qui demandaient l'accréditation,
n'a pas pour effet de leur imposer un délai additionnel de trois mois
pour décider de procéder à une nouvelle requête.
Cependant, dans le secteur privé, dans tous les autres secteurs qui ne
sont pas visés par l'article, on dit... Par exemple, une association
décide d'obtenir l'accréditation pour une unité de telle
compagnie; en cours de route, la compagnie fusionne avec une autre ou
connaît des additions, etc., on va continuer à entendre l'audition
d'accréditation. Cela n'empêche pas le commissaire-enquêteur
de décider que ce n'est pas une idée appropriée, compte
tenu des changements apportés par la fusion; mais s'il y a
désistement, on dit qu'il y a un délai automatique de trois mois
qui est impliqué. Cela pourrait techniquement j'ai un peu de
difficulté à trouver des scénarios précis
mais il semble que ça pourrait, technique- ment, permettre à un
employeur de jouer sur ces fusions.
D'autre part, ça pourrait permettre au syndicat, en anticipation
d'événements déjà annoncés, de
procéder à imposer au commissaire du travail, de venir constater
sur une requête en accréditation, alors qu'ils savent très
bien qu'un mois plus tard, ils vont se désister pour pouvoir
immédiatement reprocéder sur la qualification d'une unité
plus grande ou différente, quant à sa composition à cause
de la fusion.
Mais comme ça ne relève pas de quelque chose de
décidé par la loi, ou de par la loi, de façon indirecte,
par des corps publics, par ce dont il s'agit, on considère que la
règle générale devrait continuer à être celle
qui s'appliquait.
M. Forget: Je pense que c'est une explication qui n'en est pas
une, dans le fond; mais ce n'est pas la faute du ministre. Plus je regarde cet
article, plus je me demande ce qu'il vient faire dans le Code du travail. On
n'en est pas vraiment à des délais de trois mois, dans des
processus comme ceux-là, qu'on applique dans certaines circonstances et
qu'on n'applique pas dans d'autres circonstances. C'est extrêmement
ténu comme distinction, et ça m'apparaît comme un article
du Code du travail qui est de trop. J'ai l'impression que c'est le genre
d'article qui a dû être adopté parce qu'il y a eu un cas,
dans les mois qui ont précédé la rédaction du Code
du travail, où il y a eu un problème et on s'est dit: On va le
régler en prévoyant que ça ne peut pas se reproduire.
Vraiment, je ne vois pas ce qu'on veut régler de fondamental ou
d'important avec ça, un délai de trois mois, à savoir si
on doit recommencer à le recalculer ou pas. De toute manière,
étant donné le temps que ça va prendre pour se retourner
de bord dans ces circonstances, cela n'a pas tellement d'importance.
M. Chevrette: Peut-être, M. le député de
Saint-Laurent, s'il y avait eu un rejet par le commissaire-enquêteur,
quelques mois avant la fusion... On sait que la fusion est prévue en
vertu de l'article 36 du code actuel. Pour éviter qu'il y ait des
problèmes au niveau de la fusion, il est possible qu'un
commissaire-enquêteur ait à nouveau une demande, se prononce sur
le sujet et que l'automaticité de l'article 36 agisse par la suite.
C'est peut-être, comme vous dites, des cas d'exception, d'extrême
exception, mais il reste que je pense que c est peut-être important
qu'elle soit là pour prévoir ces cas.
M. Forget: Mais dans la mesure où c'est important, je suis
encore persuadé que dans tous les cas où il y a des changements
de circonstances, que ce soit dû aux parties ou pas, c'est de toute
façon du côté patronal que ça va se situer. Le
degré de l'implication patronale va varier selon qu'il s'agit de fusion
de commissions scolaires, si on doit encore en connaître, ou de fusions
d'entreprises. C'est une question de degré, de toute façon. Et ce
que l'article dit, c'est qu'une fusion ne doit
pas porter préjudice à l'association de salariés,
sur le plan des délais.
Je me dis, de toute manière, c'est si peu catastrophique et si
peu grave, éliminons l'article ou donnons-lui une application
générale dans tous les cas de fusion.
M. Johnson: Une dernière remarque, M. le Président,
c'est qu'il faut retenir, à la troisième ligne de l'article 31,
dans le cas du désistement. C'est, en fait, essentiellement, pour dire
aux associations qui essaient d'obtenir des accréditations, parfois par
une requête presque futile, qu'elles ne peuvent pas le faire de
façon impunie.
Par exemple, une association accréditée dépose une
demande avec 10%. Cela déclenche tout un processus. On amène un
commissaire-enquêteur dans le dossier, on est obligé de
procéder à la confection des fameuses listes, etc., alors qu'en
fin de compte on sait très bien qu'il n'y a pas de caractères
représentatif, que c'est une série d'efforts... C'est pour cela
qu'on maintient la règle des trois mois, pour ne pas donner lieu
à des abus de demandes d'accréditation qui seraient futiles, sauf
qu'on fait une exception pour les cas où il y a une fusion, à
toutes fins pratiques, imposée par la loi ou par un corps public.
M. Chevrette: Cela pourrait être une stratégie, par
exemple, pour aller chercher la liste des employés.
M. Johnson: C'est cela.
M. Forget: Enfin.
M. Chevrette: Tous les moyens sont bons.
Le Président (M. Clair): L'article 25 est-il
adopté?
M. Johnson: Adopté, M. le Président.
M. Forget: Oui, M. le Président, on ne fera pas non plus
de guerre de religion sur celui-là.
Le Président (M. Clair): Adopté.
Mesures en cas de grève ou de lock-out
M. Johnson: M. le Président, nous allons procéder
à la distribution des articles 51 et 52 et je vais en faire lecture,
sous réserve d'une suspension...
M. le Président, l'article 51 du projet de loi se lirait comme
suit: "Ledit code est modifié par l'insertion, après l'article
97, des suivants: "97a. Il est interdit à un employeur d'utiliser les
services d'une personne pour remplir les fonctions d'un salarié
représenté par une association accréditée qui a
déclaré une grève conformément à l'article
46 et, le cas échéant, à l'article 99, ou d'un
salarié lock-outé, lorsque cette personne a été
embauchée entre le jour où l'avis de négociation a
été donné ou est réputé l'avoir
été et la fin de la grève ou du lock-out; "b) D'utiliser,
dans un établissement où une grève a été
déclarée conformément à l'article 46 et, le cas
échéant, à l'article 99, par une association
accréditée ou dans un établissement où les
salariés sont lock-outés, les services d'un salarié qui
fait partie de l'unité de négociation alors en grève ou en
lock-out à moins: "i. Qu'un accord ne soit intervenu à cet effet
entre les parties et dans la mesure où il y pourvoit. "ii. Qu'une
ordonnance ne soit rendue en vertu de l'article 99 ou qu'une décision ne
soit rendue en vertu d'une loi permettant d'assurer les services essentiels en
cas de conflit de travail et, dans ce dernier cas, dans la mesure où
cette décision y pourvoit. "c) D'utiliser dans un autre de ses
établissements les services d'un salarié représenté
par une association accréditée qui a déclaré une
grève conformément à l'article 46 et, le cas
échéant, à l'article 99, ou d'un salarié
lock-outé. "d) D'utiliser, dans un établissement où une
grève a été déclarée conformément
à l'article 46 et, le cas échéant, à l'article 99,
par une association accréditée ou dans un établissement
où les salariés sont lock-outés, les services de
salariés qu'il emploie dans un autre établissement. "97b. Au cas
de violation par l'association accréditée ou les salariés
qu'elle représente, d'une ordonnance, d'une décision ou d'un
accord visés aux sous-paragraphes i ou ii du paragraphe b de l'article
97a, l'employeur est exempté de l'application de l'article 97a dans la
mesure où cela est nécessaire pour assurer le respect de
l'ordonnance, de la décision ou de l'accord qui a été
violé. "97c. L'application de l'article 97a ne peut avoir pour effet
d'empêcher un employeur de prendre, le cas échéant, les
moyens nécessaires pour éviter la destruction ou la
détérioration grave de ses biens meubles ou immeubles. "Ces
moyens doivent être exclusivement des moyens de conservation et non des
moyens visant à permettre la continuation de la production de biens ou
services que l'article 97a ne permettrait pas autrement. "97d. Sur demande, le
ministre peut dépêcher un enquêteur chargé de
vérifier si les articles 97a, 97b ou 97c sont respectés.
"L'enquêteur peut visiter les lieux de travail, et se faire accompagner
d'une personne désignée par l'association
accréditée ou de toute autre personne dont il juge la
présence nécessaire aux fins de son enquête. "Sitôt
son enquête terminée, l'enquêteur fait rapport au ministre
et envoie une copie de ce rapport aux parties. "L'enquêteur est investi,
aux fins de son enquête, de tous les pouvoirs, immunité et
privilèges d'un commissaire nommé en vertu de la Loi des
commissions d'enquête."
Le Président (M. Clair): M. le ministre, au
deuxième paragraphe de 97d.
M. Johnson: Pardon?
Le Président (M. Clair): Au deuxième paragraphe de
97d, vous avez lu "l'association accréditée ou de toute autre
personne" et dans le texte il apparaît "et de toute autre personne". Au
deuxième alinéa de 97d. Est-ce qu'on doit bien lire "et de toute
autre personne"?
M. Johnson: Oui.
Le Président (M. Clair): Merci.
M. Johnson: Si le député de Saint-Laurent le
permet, qu'on s'approche, il pourrait peut être lire 52.
L'article 52 se lirait comme suit: "Ledit code est modifié par
l'insertion, après l'article 98, du suivant: "98a. A la fin d'une
grève ou d'un lock-out, tout salarié qui a fait grève ou a
été lock-outé a le droit de recouvrer son emploi de
préférence à toute autre personne, à moins que
l'employeur n'ait une cause juste et suffisante, dont la preuve lui incombe, de
ne pas rappeler ce salarié. "Une mésentente entre l'employeur et
l'association accréditée relative au non-rappel au travail d'un
salarié qui a fait grève ou qui a été
lock-outé doit être déférée au tribunal
d'arbitrage comme s'il s'agissait d'un grief dans les six mois de la date
où le salarié aurait dû recouvrer son emploi.
Les articles 38b à 38f et 88 à 89j s'appliquent. '
M. le Président, je demanderais la suspension...
M. Forget: De la conférence de presse.
M. Johnson: ... de nos travaux.
M. Forget: Ah non, pardon! De nos travaux.
Le Président (M. Clair): La commission permanente du
travail et de la main-d'oeuvre et de l'immigration suspend ses travaux
jusqu'à 15 heures aujourd'hui.
(Suspension de la séance à 12 h 56)
Reprise de la séance à 15 h 8
Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!
La commission du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration est
réunie pour continuer l'examen, article par article, du projet de loi no
45, Loi modifiant le Code du travail, et la Loi du ministère du Travail
et de la Main-d'Oeuvre. Au moment où nous avons suspendu nos travaux,
à 13 heures, nous en étions à l'étude de l'article
51. Le ministre du Travail avait procédé à la lecture des
amendements proposés. Cependant, il n'avait pas fait ses remarques
préliminaires de présentation. M. le ministre du Travail
désire-t-il en faire?
M. Johnson: Oui.
Le Président (M. Clair): M. le ministre du Travail.
M. Bellemare: M. le Président, avant que le ministre ne
commence, si je n'étais pas à la commission ce matin, c'est que
j'ai forcément été obligé de rester en Chambre
comme leader parlementaire pour activer les travaux qui, de fait, ont
été très bien. Je suis sûr que je ne suis pas venu
ici pour les entraver non plus.
Le Président (M. Clair): Nous vous en savons gré
dans les deux cas, M. le député de Johnson. M. le ministre du
Travail.
M. Johnson: M. le Président, l'article 51 du projet de loi
a fait l'objet de discussions considérables dans la population,
auprès des premiers intéressés qui sont les agents dans le
monde du travail au Québec, du côté des syndicats comme du
côté des employeurs. Il a fait également l'objet de
discussions à cette commission, à l'intérieur même
du parti qui est en ce moment au pouvoir. Il a fait l'objet de commentaires que
je ne reprendrai pas ici d'un bout à l'autre. Il s'agit d'un article qui
introduit la notion de "briseur de grève" au sens où un briseur
de grève est celui qui n'est pas nécessairement armé et
qui est à la porte d'une propriété, mais au sens où
un briseur de grève est celui qui rend inefficace une grève, dans
la mesure où sa présence permet à l'employeur de faire
comme s'il n'y avait pas de grève, de ne pas payer le prix
économique, que celui qui est, en fait, la personne que ceux qui sont en
grève paient. L'article ne vise pas à définir ce qu'est ou
ce que n'est pas un "scab". Dans sa formulation, il introduit une prohibition
faite à l'employeur d'utiliser les services de certaines personnes.
Cette prohibition est à cette fin de ne pas utiliser une personne qui
est membre du syndicat ou de l'unité représentée par ce
syndicat en grève.
Deuxièmement, de ne pas utiliser les services d'une personne
extérieure qu'il aurait embauchée après la période
prévue pour l'avis de négociation. En pratique, à partir
du moment où on définit ces groupes de négociation, il est
évident que les membres des autres unités ou les membres ne
faisant partie d'aucune unité qui sont chez un employeur ne sont pas
couverts par cette prohibition.
En second lieu, cet article, à partir de 97a, sous-paragraphe b,
avec i) et ii), définit cependant qu'il y a les premières
exceptions à ce principe général. La première
exception est évidemment celle qui prévoit l'existence d'une
entente pour que certains membres de l'unité ou toute autre personne qui
irait à l'encontre de 97a puissent effectivement être
présents et mettre leur service à la disposition de l'employeur.
C'est d'ailleurs en pratique ce qui se passe dans de nombreuses grèves
au Québec, où le syndicat, avec l'employeur, négocie une
sorte de protocole de sortie, dans lequel on s'entend quant à la
présence ou à la possibilité pour certaines personnes
d'entrer sur les lieux du travail pour faire des travaux qui sont de nature
conservatoire, les travaux qui touchent l'entretien, des travaux qui sont
là pour faire en sorte qu'on maintient l'état de
l'équipement ou l'état de l'unité dans laquelle ceux qui
sont en grève travaillent pour ne pas qu'elle soit
détériorée au moment du retour.
La deuxième exception, donc au-delà de l'entente, c'est
celle qui prévoit qu'une ordonnance est rendue à l'occasion d'une
loi qui prévoit des services essentiels en cas de conflit de travail.
Dans ce dernier cas, on précise bien que l'employeur ne pourra utiliser
les services de personne que dans la mesure ou cela est spécifié
dans cette ordonnance. Je m'explique. On pense immédiatement ici aux
services essentiels reliés au secteur public et parapublic. Que ce soit
la loi 253, que ce soit une autre loi puisque nous ne pouvons pas
préjuger, à ce moment-ci, de l'existence, de la non-existence ou
du contenu même de la loi 253, une fois que le gouvernement aura
décidé de faire son lit sur le rapport Martin qui doit être
remis à la fin du mois de janvier ou au début de février,
on pourra avoir la situation suivante où dans le contexte d'une loi par
exemple, on définit que 30 personnes sur 200 assurent les services
essentiels dans un hôpital.
L'effet de la disposition ici est le suivant: On est dans une
institution hospitalière en Abitibi, il fait froid, c'est l'hiver, il y
a une tempête de neige, il y a 30 personnes sur 200 qui sont
censées entrer pour assurer les services essentiels, mais il y en a 20
qui se présentent parce qu'il y en a 10 qui ont décidé de
ne pas venir, parce qu'ils ne veulent pas respecter l'ordonnance, ou encore qui
ne peuvent pas venir pour des raisons physiques ou autres. L'effet de "ii " est
clairement de permettre à l'employeur, dans ces circonstances,
d'utiliser des personnes qu'autrement, il ne pourrait pas utiliser en vertu de
97a, premier et deuxième paragraphes, mais dans la mesure où il
s'agit d'aller chercher le nombre de personnes requis pour que l'ordonnance
puisse s'appliquer. Donc, l'employeur ne pourrait pas faire entrer 200
personnes, il ne pourrait faire entrer que 10 personnes qui sont celles qui
manquent en vertu de l'ordonnance.
Dans le cas des paragraphes c) et d), on prévoit qu'un employeur
ne peut pas utiliser non plus un gréviste dans un autre de ses
établissements, de la même façon qu'on prévoit qu'il
ne peut pas utiliser quelqu'un qui est dans un autre établisse- ment
pour le mettre à l'intérieur d'un établissement où
il y a une grève.
On tombe ensuite à l'article 97b, où on prévoit
qu'une violation de l'entente, de l'ordonnance ou de la décision permet,
dans la mesure où cela est nécessaire, d'assurer le respect de
l'ordonnance, de la décision ou de l'accord qui a été
violé. C'est le scénario que j'ai donné, tout à
l'heure, en anticipant un peu sur 97b.
Le paragraphe 97c prévoit que l'employeur ne peut pas être
empêché, dans l'application de 97a, de prendre, le cas
échéant et l'expression le cas échéant, ici,
fait évidemment de 97c une exception à la règle
générale de 97a les moyens nécessaires pour
éviter la destruction ou la détérioration grave de ses
biens meubles ou immeubles. C'est essentiellement cette clause qui a
été l'objet des discussions récemment et dont on se
rappellera. L'intention du gouvernement et j'ai eu l'occasion de le dire
le 22 novembre, lorsque j'ai déposé l'ensemble des amendements au
projet de loi 45 a toujours été de faire en sorte que 97a
n'amène pas des situations absurdes que personne ne souhaiterait, dans
le fond, mais qui, par le fait de la loi, mettraient l'employeur dans
l'illégalité.
Je ne donnerai qu'un exemple. Prenons une usine où il y a 20
personnes, une usine où on fabrique des produits qui sont des explosifs.
Il y a dans cette usine, dans le texte de la conciliation volontaire, le droit
de grève acquis automatiquement et, à 17 heures, les
salariés décident de faire une grève légale, mais
le gérant de l'usine ou le contremaître du plancher, dans un
contexte d'agressivité particulier, est dans un état tel qu'il
n'obtient pas de collaboration des salariés qui sont là pour
procéder à des opérations de nature vraiment
conservatoire: fermer, par exemple, des tuyaux d'où émanent des
gaz; restaurer un niveau de température dans des cuves contenant des
acides ou des produits volatiles. Un ensemble d'éléments qui, par
la force des choses dans le débrayage, exigent qu'il ait de l'aide. Il
ne peut le faire seul.
Cependant et cela a toujours été l'objectif du
gouvernement nous avons cru nécessaire, compte tenu de la
difficulté réelle d'interpréter ces "moyens
nécessaires " et que cela pourrait donner ouverture à des
contestations judiciaires difficiles, longues, et qui nous mettraient dans une
position telle qu'on n'atteindrait pas l'objectif visé qui est celui de
restaurer, dans certains conflits, un climat de paix et de normalité
minimale même si une grève ou un lock-out, d'une certaine
façon, ce n'est pas un phénomène qui devrait être
coutu-mier, mais il y a un climat qui est nécessaire nous avons
donc précisé au deuxième paragraphe que ces moyens,
permettant à celui qui aura à les interpréter advenant que
quelqu'un viole les dispositions... Ces moyens doivent être exclusivement
des moyens de conservation et non pas des moyens qui visent à permettre
la continuation d'une production de biens ou de services qui autrement ne
serait pas permise.
Quand on dit: "qui autrement ne serait pas
permise", il est évident qu'à 97a, puisque les membres des
autres unités et ceux qui ne sont pas membres d'unités, qui ne
sont pas représentés par syndicat, ne sont pas visés par
la prohibition de 97a, il est concevable qu'une entreprise puisse atteindre une
production minimale dans ce contexte. Ce qu'on dit, c'est que les mesures
conservatoires qu'il prend ne doivent pas lui permettre, ne doivent pas viser
à faire autre chose que ce qui est permis dans 97a, en termes de
production de biens et services.
Quant à 97d, c'est l'introduction d'un enquêteur. Cet
enquêteur, nommé par le ministre, peut faire enquête sur les
lieux de travail et se faire accompagner d'une personne désignée
par l'association accréditée ou toute autre personne. On pense,
entre autres, à des secteurs où il y a un besoin d'expertise
particulier quant à ce qu'est l'entretien par rapport à la
production. Prenons le cas de toute forme d'alambic avec des acides; le
fonctionnement d'un alambic, dans le cas de la fabrication de certains produits
chimiques, est nécessaire 24 heures par jour, 365 jours par
année. Sinon, il y a une fusion des matières et un blocage de
l'ensemble de l'équipement. Dans certains cas, c'est un blocage ou un
problème qui détériore de façon
irrémédiable l'équipement.
Ce qu'il faut faire, c'est de permettre à l'enquêteur
d'entrer sur les lieux, de constater quels sont les moyens utilisés par
l'employeur, de les confronter avec ce deuxième paragraphe que nous
avons ajouté à l'article 97c, et de dire: est-ce que ce sont des
moyens de conservation et non pas des moyens qui visent à une production
qui serait interdite autrement. L'enquêteur fait rapport, après
avoir constaté sur les lieux, en compagnie d'une personne
désignée par l'association accréditée si elle le
juge à propos. Il fait rapport à la fois au ministre et aux deux
parties, de telle sorte que les parties sont conscientes du contenu.
On peut croire que, de façon générale, les
employeurs respecteront la loi telle qu'elle est là, et que, là
où il y aura un litige, cet enquêteur, investi de tous les
pouvoirs d'un commissaire nommé en vertu de la Loi des commissions
d'enquête, par sa seule présence, pourrait amener un employeur
récalcitrant à prendre des moyens qui sont dans le cadre de ce
qui est défini à l'article 97c seulement. Même s'il
persistait, le seul fait du dépôt d'un rapport auprès du
ministre et des autres parties pourrait avoir un effet également quant
à son respect des dispositions. Finalement, il reste toujours ce pouvoir
qui ne peut être ailleurs qu'à la Cour supérieure, en vertu
de nos lois, le pouvoir d'ordonner à quelqu'un de faire quelque
chose.
La Cour supérieure, dans une injonction qui pourrait être
prise par le syndicat, pourrait ordonner à l'employeur de cesser
certaines des mesures qu'il qualifie de conservatoires, mais que
l'enquêteur considérerait être des mesures visant à
la production. Le rapport de l'enquêteur, à ce moment-là,
pourrait servir de preuve, sans doute excellente à priori, devant le
tribunal, sinon juste à sa face même, tout au moins introductive
quant à la description des faits. Donc, l'ensemble de ces dispositions
m'apparaît rejoindre ce qu'a toujours été l'objectif du
gouvernement.
Deuxièmement, cette loi qui est une innovation dans la
matière en Occident, avec deux exceptions, celles du Portugal et du
Mexique, qui ne sont pas des lois tout à fait identiques et dont on ne
connaît pas vraiment les difficultés d'application dans le cas du
Portugal, puisqu'elle remonte à 1974-1975.
Il s'agit d'un morceau de législation qu'on peut qualifier
carrément à l'avant-garde de toute législation similaire
en Amérique du Nord. L'objectif qu'il vise, c'est de dédramatiser
certaines situations. C'est en même temps de respecter la conception que
nous avons, qui n'est pas nécessairement partagée, j'en conviens,
de ce qu'est un véritable équilibre au niveau de l'exercice de ce
droit légal de la grève prévu à l'article 46 et
à l'article 99.
Pour ces raisons, M. le Président, je demanderai l'adoption de
l'article 51 du projet de loi 45.
Une Voix: Adopté.
Le Président (M. Clair): Le député de
Saint-Laurent. Un instant s'il vous plaît. Dans le but de respecter notre
règlement, mais également de donner un cadre de travail le plus
logique et le plus fonctionnel possible, je pense qu'il serait fonctionnel
d'accorder un droit de parole général de 20 minutes sur l'article
51, à chacun des députés. Par la suite, lorsqu'une entente
interviendra, j'imagine, pour discuter de l'article 51, soit par paragraphe ou
autrement, à ce moment-là, on pourra considérer les
amendements un par un.
Est-ce que ça va? Est-ce qu'il y a une entente à l'effet
de considérer d'abord un droit de parole général des
députés sur l'article 51?
M. Bellemare: En vertu de notre règlement, M. le
Président, et de la convention qu'on a faite au début. Je pense
que c'est bien logique, bien raisonnable.
Le Président (M. Clair): Ça va. Le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: Merci, M. le Président. Ce paragraphe ou cet
article du projet de loi 45 est probablement celui qui a fait couler le plus
d'encre, de salive, depuis l'introduction de ce projet de loi, le 29 juillet
dernier.
Il est remarquable, non seulement à cause de l'intensité
de la controverse qui l'a entouré de toutes parts, depuis le
début, mais aussi à cause de son caractère inusité,
unique même dans la législation du travail de tous les pays dont
le Québec qui s'est, de temps à autre, inspiré dans la
rédaction de ses lois du travail. Si, donc, nous en venons un jour, ou
si d'autres que nous passant un jugement sur cette législation à
la lumière de l'expérience, en viennent un jour à juger
que c'est un échec, ils ne pourront pas en attribuer le
démérite à d'autres qu'à celui qui en a pris
l'initiative,
puisqu'il n'avait dans cela aucune expérience analogue, aucun
parallèle qu'il pouvait tirer pour s'inspirer d'un tel projet de
loi.
Mais mes propos de caractère général, M. le
Président, s'adresseront sur deux aspects essentiels de ce projet de
loi, deux aspects du moins, à l'aide desquels on a expliqué ou
justifié l'introduction d'une pareille mesure dans notre Code du
travail. En premier lieu, je parlerai de cette règle "an-tiscab" et des
problèmes de violence lors de conflits de travail, et, en
deuxième lieu, je parlerai de cette même mesure dans le contexte
général des relations du travail, de la réalité des
relations du travail et des autres dispositions du Code du travail.
Quant au premier point, la violence, nous sommes persuadés que
cette règle, soit antibriseur de grèves, aura, tel qu'on en fera
l'expérience dans la réalité des relations de travail
à venir, un effet exactement contraire à celui recherché
par le ministre. Loin de diminuer les conflits ou l'aspect violent des
conflits, nous aurons là une cause nouvelle et importante de conflits
plus féroces entre patrons et syndicats que nous n'avons jamais eus dans
le passé. Cette proposition s'appuie sur une constatation, d'un
écart, d'une divergence profonde et irréconciliable entre la
façon d'interpréter cette clause qui sera celle du mouvement
syndical et la façon d'interpréter cette clause qui sera celle
des employeurs.
Nous allons voir émerger chez les travailleurs, à la suite
de l'effort de persuasion, pour ne pas dire de l'effort de vente, fait par le
ministre et par son parti auprès des travailleurs, de cette mesure, nous
allons voir émerger chez les travailleurs et chez les syndicats une
croyance que la grève doit effectivement interrompre la production ou le
fonctionnement de l'organisme touché par la grève. Ceci sera
désormais, de ce côté de la table des négociations,
considéré comme un principe acquis et proclamé par le
gouvernement, comme une attente que l'on peut former dès lors que la
décision d'aller en grève est prise par le syndicat.
Il n'est pas besoin de dire que, dans une telle situation où, du
côté syndical, une telle croyance existera, le piquetage qui est
effectué lors d'un arrêt de travail, lors d'une grève,
revêtira un aspect nouveau. Il deviendra, en particulier, un moyen de
contrôler l'interprétation syndicale de la signification de cette
loi et amènera les syndicats à prendre tous les moyens qui leur
sembleront appropriés devant l'inefficacité qu'ils attribueront,
à ce moment, à la loi ou à son administration, à
prendre sur eux de s'assurer le respect de ce qu'ils perçoivent, eux,
comme étant l'interprétation correcte d'une loi que le
gouvernement du jour, encore une fois, à leurs yeux, ne voudra pas ou ne
sera pas assez courageux de faire appliquer comme ils la perçoivent.
Du côté patronal, on a ouvert toutes sortes de portes pour
des exceptions et des interprétations. De ce côté non plus,
on n'hésitera pas à se prévaloir, peut-être, de
gardes de sécurité et d'autres moyens physiques pour assurer
l'accès à l'entreprise, de manière à prendre les
mesures conserva- toires qui sont contestables en vertu de la loi, mais qu'on
voudra affirmer avant de les voir contestées par les tribunaux. Donc,
nous aurons là les deux parties dressées l'une contre l'autre, au
moment des conflits de travail; en plus des divergences sur le fond qui sont
déjà suffisantes dans biens des cas pour stimuler et encourager
des abus, de part et d'autre, nous aurons une cause nouvelle de conflits, une
divergence, encore une fois, fondamentale et irréconciliable sur le sens
de nos lois du travail, et sur la façon de les faire respecter. Ni d'un
côté ni de l'autre, les moyens envisagés par le
gouvernement pour faire respecter cette loi n'apparaîtront, dans le cas
précis d'un conflit de travail, comme suffisants. C'est sur
elles-mêmes que les parties devront se reposer, hélas, pour
s'assurer que leur interprétation prévaut. Donc, nous aurons un
effet diamétralement opposé à celui que le gouvernement
recherche.
Encore une fois, cette remarque ne nous est pas inspirée par les
événements qui se sont produits au Québec seulement, mais
par un phénomène et une préoccupation que l'on
décèle dans les discussions analogues à celles que nous
avons actuellement et qui se déroulent dans d'autres pays, en
Grande-Bretagne, par exemple, où il y a un gouvernement travailliste et
qui se pose sérieusement la question de la violence lors des conflits de
travail et de la nécessité, aux yeux de certains membres du
gouvernement travailliste britannique, de disposer d'un code d'éthique
quant à l'utilisation du piquetage et quant à l'utilisation des
gardes de sécurité, deux sujets sur lesquels le projet de loi
actuel est absolument silencieux et qui sont au coeur du problème de la
violence, plutôt qu'en sa périphérie. C'est donc une
absence qu'on doit signaler au moment où on prétend régler
ce problème. On ne le règle pas du tout, au contraire, on y
ajoute. On ajoute à sa gravité, on ajoute une occasion de plus de
conflit, sans rien fournir qui permettra de le régler.
Pour terminer sur ce premier point, je souligne encore une fois que
l'explication qu'a donnée le ministre, surtout au début et
surtout l'été dernier il est devenu, c'est à son
crédit, un peu plus grand, un peu plus prudent dans l'utilisation des
mots la justification que le ministre a donnée,
particulièrement au début, du lien qu'il voyait entre la mesure
antiscab et la violence reposait essentiellement sur un jeu de mots entre
l'expression "briseur de grève " et les autres expressions, puisqu'il y
en a plusieurs, qui sont directement liées à l'usage de la
violence, qu'il s'agisse des fiers-à-bras ou des casseurs de jambes,
etc. "Briseur de grève" ne réfère pas à une
conception physique de l'interruption d'obstacles, placés dans la voie
du syndicat, à ce que la grève soit efficace, mais
réfère essentiellement à un phénomène de
caractère économique. Et la violence n'est pas essentiellement un
phénomène économique, mais un phénomène
essentiellement physique. Ce jeu de mots a malgré tout eu un rôle
non négligeable dans une perception, de la part du public, de ces
mesures qui ne sont pas ajustées au sens véritable des
propositions faites par le gouvernement.
Le deuxième aspect dont je veux parler, c'est tout le
problème du contexte dans lequel vient s'insérer une disposition
comme celle-ci. Contexte qui est constitué d'une part, par la
réalité sociologique et économique dans laquelle se
déroulent les conflits de travail, et d'autre part, par le contexte
beaucoup plus formel des autres dispositions de la loi. A notre avis, la
règle antiscab est une tentative du gouvernement pour donner au syndicat
une garantie contre l'échec. C'est probablement le sens réel que
l'on doit retrouver derrière le fameux préjugé dont s'est
fait un point d'honneur et d'orgueil le gouvernement actuel, façon fort
paradoxale, mais c'est une conception que de donner cette garantie contre
l'échec à un organisme, quel qu'il soit. C'est une conception
sérieusement étriquée de ce que constituent les
conventions collectives et le processus de négociation dans une
économie libre et concurrentielle. Qu'on le veuille ou non, le vote
d'acceptation d'un projet de convention collective ou d'offres patronales n'est
pas le seul moyen, n'est pas la seule façon, pour une association de
salariés, de mettre fin à un conflit de travail.
Cela peut être souhaitable qu'il en soit ainsi,
c'est-à-dire qu'il peut être souhaitable que toutes les
décisions auxquelles, effectivement, en viennent les travailleurs, dans
une entreprise en grève, soient prises de façon très
formelle, par des votes, par un processus très explicite, très
articulé. Toutefois, en pratique, ce n'est pas toujours ainsi, puisque,
dans un conflit de travail, il y a des phénomènes bien humains
auxquels il faut faire la place: il y a des entêtements, il y a le
désir légitime ou non légitime, mais de toute façon
inévitable, de ne pas perdre la face officiellement. Il faut bien se
rendre compte que, très souvent, des conflits cessent, non pas par la
victoire ou l'échec à plate couture d'une des parties, mais par
faute de combattants. Cela se produit aussi selon un mouvement qui est
inévitable et qui, dans le fond, est un mouvement qui vient de la base
par rapport aux recommandations ou aux impératifs d'une structure
syndicale qui peut avoir d'autres raisons de poursuivre un conflit, raisons qui
dépassent une entreprise particulière et une association de
salariés particulière. On assiste souvent à un retour
graduel au travail, alors qu'aucun vote n'a été pris. Les gens
votent souvent avec leur pied et non pas seulement avec leur bulletin de vote,
M. le Président. C'est une réalité qui se manifeste dans
tous les secteurs où des votes sont pris ou devraient être pris.
Le refus d'accepter cette réalité nous amène et
amène surtout le gouvernement à donner un prolongement
législatif à une conception corporatiste du rôle des
syndicats; on tend à en faire des organismes officiels, presque un
prolongement de l'administration publique.
Les centrales syndicales se sont étonnées se sont
même indignées que ce projet de loi 45 comporte des dispositions
sur le vote de grève. A l'intérieur même, la règle
anti-scabs comporte des références aux pouvoirs conservatoires de
l'employeur, comporte des références à une loi sur les
services essentiels. On ne dit plus laquelle, M. le Président, mais on
suppose toujours qu'il y en aura une puisqu'on fait une loi permanente qui
réfère à une loi sur les services essentiels, l'actuelle
ou celle à venir. Les syndicats, dis-je, se sont étonnés
qu'il y ait des dispositions comme celles-là dans un projet de loi, mais
c'est un étonnement qui vient un peu tard parce que ces dispositions
c'est le prix que le syndicat doit payer pour cette conception corporatiste du
rôle qu'il a à jouer dans la vie économique et dans la vie
sociale.
Des mesures comme celles-là, de même que les mesures sur la
formule Rand, imposée par la loi, constituent une prise en charge
graduelle, étape par étapelà-aussi, M. le
Président, il est permis de faire allusion à un "étapisme"
et je dirai pourquoi tout à l'heure de la force du pouvoir des
syndicats, leur récupération pour utiliser un mot qui est
bien connu dans ce milieu par le pouvoir politique. Pas d'un seul coup,
bien sûr, mais en commençant par une première étape
et toujours, évidemment, en s'aidant des meilleures intentions.
L'enfer est pavé de bonnes intentions, M. le Président, et
pour supprimer la violence, pour instaurer la démocratie, pour donner
aux bien-pensants tous les pouvoirs possibles et exclure les "abus", on va,
sans aucun doute, à chaque fois qu'il sera nécessaire,
légiférer pour donner bien sûr certains privilèges,
consacrer certaines réalités, comme on l'a dit, mais
également imposer certaines conditions.
Je crois qu'il est bien naïf de la part des centrales syndicales
d'accepter ce qui les avantage dans une telle approche et de protester
après de ce qui les désavantage. Parce qu'à long terme, ce
qui les avantage ne pèsera pas lourd. Ce qui va les désavantager,
au contraire, c'est une mise au pas graduelle, étapiste, du mouvement
syndical qui ne doit pas être pris en tutelle ou en charge par l'Etat,
quelles que soient les bonnes intentions et quels que soient les motifs. Il n'y
a pas de raison qui peut justifier, M. le Président, dans une
économie libre et concurrentielle, que les syndicats deviennent ce
qu'étaient les guildes moyenâgeuses; des espèces de corps
publics émanant de l'autorité publique et destinés
à protéger un certain nombre de privilégiés.
Ce qui risque fort bien de se produire, grâce à des mesures
comme celle qui est devant nous, c'est un écart grandissant entre
syndiqués et non syndiqués. On construit une machine qui sera
forte, qui sera contrôlée et qui sera restrictive, quoiqu'on en
dise, parce que pour ce qui est des mesures devant favoriser l'accès
à la syndicalisa-tion, nos discussions nous ont assez renseignés,
je pense, pour qu'on puisse en conclure que le mieux qu'on puisse dire de ces
mesures, c'est qu'elles pourraient peut-être avoir un effet sur le taux
de syndicalisation et sur l'accès au syndicalisme.
Mais on serait bien téméraire de prétendre avoir
mis en place les conditions d'un accès plus libre, plus
généreux ou plus facile à la syndicalisation. La seule
mesure qui avait d'ailleurs cette prétention, c'est l'abaissement
à 35% du nombre de
syndiqués ou du nombre de salariés qui peuvent
déclencher un vote, mais on est loin de pouvoir prédire si cette
mesure nouvelle aura quelque effet que ce soit sur le taux de syndicalisation.
Il s'agit d'une conjecture qui ne repose sur aucune étude
sérieuse. Elle ne repose que sur des impressions personnelles. Que
va-t-il arriver?
Brièvement, M. le Président, je pense que l'on peut
déduire que, d'après un certain nombre de justifications
apportées par le ministre, idéalement, il ne se produira rien. En
effet, le ministre et c'est là l'aspect le plus paradoxal de ce
projet de loi chaque fois qu'il a abordé une mesure nouvelle, l'a
fait sur la base d'une concrétisation ou d'une consécration de
pratique généralement observée, qu'il s'agisse des votes
de grève, M. le Président, qu'il s'agisse de la prétendue
formule Rand ou plus exactement du précompte syndical, qu'il s'agisse
même de la règle anti-scab, on les a toujours défendues en
disant que finalement cela ne frappait personne puisque déjà tous
les syndicats sont très démocratiques et prennent toutes leurs
décisions au scrutin secret ce que je ne mets pas en doute, je ne
fais que rappeler les arguments du ministre. On a déjà dit que
85% des salariés syndiqués étaient déjà
couverts par le précompte syndical et on a dit que seulement 27
grèves, sur je ne sais pas combien de centaines, avaient donné
lieu à des violences dans le cas des briseurs de grève.
Donc, dans chacun des cas, M. le Président, on a voulu
alléguer l'insignifiance des effets pour justifier ce projet de loi,
dans la mesure où on abordait un sol nouveau, des mesures nouvelles.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Saint-Laurent, je m'excuse de vous interrompre, vous avez commencé votre
droit de parole à 15 h 26, il est maintenant 15 h 46 passé.
Malheureusement, votre droit de parole est expiré, à moins qu'il
y ait consentement unanime pour qu'on vous accorde du temps pour terminer.
Des Voix: Oui.
M. Forget: M. le Président, ce ne sera pas long, d'autant
plus que la suite...
Le Président (M. Clair): Deux ou trois minutes?
M. Forget: ... va vous indiquer qu'on n'a pas l'intention
d'être très long.
Le Président (M. Clair): Deux ou trois minutes.
M. Forget: Alors, M. le Président, ces arguments à
l'effet que rien ne se produira seraient peut-être la plus belle
justification, en effet, de tous ces amendements, tout en démontrant
leur futilité, puisque si rien ne se passe tel que prévu par le
projet de loi, on peut sérieusement s'interroger sur
l'opportunité de légiférer et de créer une pareille
pagaille à la fois dans la population et à l'intérieur du
parti ministériel, pour si peu de choses.
En fait, je suis persuadé que cette argumentation n'est pas
basée sur la réalité. Effectivement, beaucoup de choses
sont susceptibles de se passer à la suite d'un tel amendement. On donne
des instruments nouveaux, on donne ouverture à des recours d'un nouveau
genre, on crée c'est ce qui est plus important des
expectatives nouvelles, des expectatives de paix sociale qui ne seront pas
exaucées, et on crée, vis-à-vis d'un secteur particulier
de notre économie, c'est-à-dire la petite et moyenne entreprise
dont on a tellement parlé depuis un an, comme si c'était
là la raison d'être de notre prospérité ou notre
plus grande source d'espoir pour l'avenir. A tout événement, on
en a beaucoup parlé et c'est sur elle qu'on fera reposer les assauts
très sérieux auxquels elle peut désormais s'attendre, sur
la base de cette législation.
En conséquence, la férocité des conflits de
travail, comme je l'ai dit au départ, va certainement s'accentuer, ces
attentes très élevées d'une part, les risques de
disparition, puisque ça va jusque là, selon le témoignage
des représentants de la petite et moyenne entreprise, les risques de
disparition que l'on fait planer de l'autre côté vont certainement
aviver les conflits plutôt que les calmer..
C'est ce projet de loi, dans son ensemble et en particulier la mesure
anti-scab me semble un cadeau de Noël passablement empoisonné que
le ministre fait à la population. Vis-à-vis de ça, M. le
Président, c'est là-dessus que je vais terminer, les
interventions que nous avons entendues, pas au conseil national, mais dans la
population et par la voix des porte-parole officiels de tous ceux qui se sont
officiellement exprimés au nom des agents économiques, nous
convainquent que personne ne veut vraiment la règle anti-scab telle
qu'elle est rédigée, et qu'il nous apparaît que le
gouvernement doit, en prenant acte de ces réserves, de ces
réticences ou même de ces objections formelles, effectivement,
retirer l'article 51.
C'est le sens et le seul sens qu'il faut donner à notre
intervention. En effet, je n'ai pas l'intention de présenter
d'amendement, M. le Président, puisque, contrairement aux autres
dispositions du projet de loi où il semblait qu'une discussion positive,
basée sur une perception commune d'un très grand nombre de
principes pouvait amener le ministre à accepter certaines
améliorations quant à la rédaction et à la
formulation de ces objectifs, quant aux instruments choisis pour les atteindre.
Ici, M. le Président, je pense que cette discussion serait inutile.
Il est manifeste que le gouvernement a fait son lit sur ces mesures,
qu'il les a débattues trop intensément à
l'intérieur du parti au pouvoir et ceci, presque publiquement, pour
qu'il puisse désormais écouter les représentations que
nous pourrions faire. Et nous voulons, par-dessus tout, éviter qu'en
présentant des amendements, nous ayons l'air d'approuver, si peu que ce
soit, un principe qui, quant à nous, nous apparaît à la
fois irréaliste et néfaste.
C'est la raison pour laquelle je présenterai une motion visant
à retirer tout simplement cet article du projet de loi, motion qui se
lit très simplement, M. le Président: "Que l'article 51 soit
retranché du projet de loi no 45".
M. Bellemare: M. le Président...
M. Chevrette: Je fais appel au règlement. M. le
Président, est-ce que vous pouvez demander au député de
Saint-Laurent de faire comme d'habitude, d'annoncer sa motion, mais de
permettre aux autres qui veulent intervenir sur le fond...
Le Président (M. Clair): Est-ce qu'il y a un consentement
unanime pour ce faire? La commission est maîtresse de ses travaux. Nous
pourrions convenir de disposer de la motion du député de
Saint-Laurent plus tard, quoique je tiens à souligner aux membres de
cette commission que, même si elle n'est pas encore distribuée,
cette motion du député de Saint-Laurent même si je ne l'ai
pas déclarée recevable, viserait quand même à mettre
un terme immédiatement à nos discussions là-dessus. Je
veux que la commission prenne sa décision, mais en vous indiquant bien,
cependant, que le but de la motion du député de Saint-Laurent
est, à toutes fins pratiques, de mettre un terme à l'étude
de l'article 51.
M. Chevrette: M. le Président, je pense qu'à ce
moment-là, c'est le député de Saint-Laurent qui a le
dernier mot. En ce qui nous regarde...
M. Bellemare: M. le Président, je pense que j'ai mon droit
de parole. Si vous voulez me le permettre...
Le Président (M. Clair): Je retiens effectivement, de ce
qui vient de se passer, que le député de Saint-Laurent ne fait
que nous annoncer qu'il présentera une motion un peu plus tard. Nous
continuons immédiatement le débat général sur
l'article 51. Vous avez 20 minutes, M. le député de Johnson.
M. Bellemare: Merci, M. le Président. Quel pessimisme,
quel défaitisme ai-je entendu de la bouche du député de
Saint-Laurent! On dirait qu'il n'est pas revenu de l'élection du 15
novembre dernier. Il vit encore dans cet esprit.
C'est une mesure, M. le député de Saint-Laurent, qui
marque un pas sûr, dans le plus grand souci qu'on peut avoir
d'équilibre entre les forces en présence. C'est un amendement qui
va rechercher la paix plutôt que la guerre.
Vous avez dit: Cela a fait couler beaucoup d'encre et il y a eu bien...
Oui, sûrement, mais cela a aussi fait couler bien du sang auparavant,
parce qu'il n'y avait pas de critères de base, dans notre Code du
Travail, qui disaient ce que cela devait être. Il faut l'avoir
vécu pour savoir ce que c'est que cette loi anti-scabs. Elle n'est ni
trop sévère ni trop exagérée. Je la trouve
personnellement très opportune. D'abord, on rétablit, dans un des
arti- cles, l'article 99 du code, qui, selon la nécessité, peut
permettre des ordonnances quant à la santé, quant à la
santé publique, quant à l'éducation. C'est un point qu'on
n'avait pas.
M. Forget: C'est l'article en vertu duquel tant d'injonctions ont
été émises.
Le Président (M. Clair): A l'ordre!
M. Bellemare: Si vous voulez, M. le député de
Saint-Laurent, que je vous prenne par la douceur, je vais vous prendre par la
douceur. Mais je ne suis pas capable de m'empêcher, avec tout ce que je
viens d'entendre, d'apprécier tout ce que vous avez vécu et ce
que vous nous avez récité.
Pour ce qui est des services essentiels, c'est vrai que l'amendement du
ministre permet l'utilisation des salariés contrairement à
l'article 97a, dans trois cas. Cela n'existait pas. Ce sont:
premièrement, quand il y a entente entre les parties,
deuxièmement, quand, en vertu de l'article 99, on peut, si l'ordonnance
est favorable; troisièmement, quand une décision est rendue, en
vertu de la loi, qui permet d'amener les services essentiels, que cela soit
dans la loi 253, dont vous avez été le ministre et parrain, ou
que ce soit dans toute autre loi à venir. Rien n'empêchera de se
servir de la loi 253, si on veut s'en servir. Jamais. Ce n'est pas dit non plus
dans la loi.
Il y a une grande différence entre ce que vous avez dit et ce
qu'on a vécu. On cherche un équilibre juste et raisonnable entre
les parties. L'employeur a prouvé qu'il avait eu des torts
considérables à ne pas vouloir suivre l'article 41 du code qui
dit, en toutes lettres: "Après un avis prévu à l'article
précédent, les négociations doivent commencer et se
poursuivre avec diligence et bonne foi. " Cela a été
ajouté par celui qui vous parle, cela n'existait pas dans le code.
C'était un moyen détourné pour essayer de rapprocher les
parties: un employeur qui se niche, pendant des jours et des mois, sans donner
de nouvelles, et un syndicat qui proteste, qui utilise la violence. Elle vient
de là, la violence. Il faut arrêter cela dans la province; il faut
essayer de trouver le climat qui existe entre les parties en Norvège, en
Suède. Mais, pour cela, on a établi là un juste
équilibre. Ces gens n'ont pas été sans l'écrire
dans des lois. Vous relirez le Code du travail de la Norvège et de la
Suède et vous allez y voir des traits, des allusions qui ressemblent
énormément au nôtre, pour la première fois.
M. le Président, il y a assez longtemps qu'on n'est pas capable
de s'entendre et qu'on va aux extrêmes. Qu'on fasse des
délégations de 5000 ou de 10 000 personnes devant le Parlement...
Quand on a le courage et la volonté de bien servir
l'intérêt public, on fait ce qui est dans la loi. De quel
critère, avant aujourd'hui, pouvait-on se servir, sinon celui qui nous
est donné présentement? Il y aura des retouches, il y aura des
questions et cela en est un...
Deuxièmement, ce sont exclusivement des moyens de conservation.
C'est quoi cela? Il faudra
que le ministre nous l'explique, parce que j'ai de la difficulté
à comprendre qu'on utilise dans une loi comme celle-là des termes
aussi vagues: "des moyens de conservation". Un employeur peut dire n'importe
quoi pour se prévaloir de ces deux mots qui sont dans la loi. Je demande
au ministre de m'expliquer cela; je l'écouterai et j'essaierai de
comprendre.
On permet à un enquêteur de visiter les lieux de travail
accompagné d'une personne désignée par l'association
accréditée. Pourquoi ne pas avoir en même temps, pour
rétablir l'équilibre, la présence d'un employeur, d'un
représentant de l'employeur? Pourquoi? Là aussi, il y a un trou,
un manque. On dit: Toute autre personne. Oui, oui, oui, cela peut être
qui et cela va être quoi? Comment va-t-on s'entendre? Tandis que, si
c'est dans la loi, une chose est sûre, c'est qu'en vertu de la loi
l'enquêteur devra être accompagné d'une personne
accréditée, d'un membre d'une association
accréditée. Mais l'employeur, lui "et de toute autre personne",
c'est qui? c'est quoi? On n'a pas le droit de laisser la loi aussi
indifférente vis-à-vis de l'employeur, je ne le pense pas.
Là, on devrait apporter un amendement, je pense bien, qui serait
très simple. Au lieu de: "Toute autre personne", pour rétablir
l'équilibre que recherche le ministre, pour rétablir la justice
distributive, pour éviter d'autres conflits, on devrait ajouter: "Et un
représentant de l'employeur."
Mais, M. le Président, il faut avoir vécu l'obstination de
certains employeurs et la violence qu'a engendrée cette obstination de
la part des syndicats pour savoir que l'amendement que vous apportez est plein
de logique. Vous avez dit que cela n'existait pas nulle part dans aucun code de
l'Amérique du Nord; vous avez raison.
C'est du droit nouveau, c'est vrai. On va l'expérimenter et on
aura dorénavant des critères solides pour dire que cela commence
là et cela finit là. On va avoir plus de conflits? On en a 27 qui
n'ont pas été réglés. Sur les 27, il y en a 14 dont
nous connaissons les causes. Il y en a d'août 1976, il y en a de
décembre 1976. On en a d'avril 1977, et on en a ici d'avril 1976, de mai
1976, de juin 1976. On sait pourquoi. Je peux vous le dire et le ministre
aussi.
Je pense qu'il faut être courageux. On a voté en
deuxième lecture pour la loi. On avait hâte d'avoir les
amendements. On avait hâte de connaître les éclaircissements
et cela n'a pas été pour rien. Si quelqu'un a blâmé
le député de Saint-Laurent d'avoir été long, je ne
dis pas que c'est mal, au contraire; il a explicité sa pensée et
celle de son parti. Je pense que ceux qu'on a présentés ont
été d'emblée acceptés.
Il y a une chose qui reste, c'est que, si on ne réussit pas
à établir des critères dans notre code qui sont des
critères de base sur une loi anti-scabs, on aura beau dire n'importe
quoi à la population... Même si on allait jusqu'à retirer
cet article, je serais contre qu'on la retire. J'ai trop vécu de
conflits extraordinaires où il a coulé de l'encre, où il a
coulé du sang aussi, pour être contre ces amendements qui sont
logiques, intelligents et qui sont précieux pour nous. C'est un gars de
la Brotherhood qui vous parle, un gars de l'union qui a vécu dans les
centrales syndicales et qui a accepté de jouer des rôles
importants dans les centrales syndicales. Je ne suis pas contre les centrales
syndicales et je ne suis pas contre les syndicats, mais je suis pour la paix,
pour une balance réfléchie et un certain équilibre entre
les forces. Qu'est-ce qui arrivera? Je vous le demande. Que le ministre nous le
dise. Qu'est-ce qui arrivera à ceux qui vont faire le piquetage, qui
vont empêcher les cadres d'entrer? Cela aussi, c'est une question de
violence. Je lisais, dans le conseil du patronat... A la recherche de la paix
sociale, il n'est pas dit qu'aucun geste ne puisse être posé.
Entre le parti pris syndical, l'actuel amendement suggéré et
l'inaction, il y a sûrement place pour une loi pondérée et
réaliste.
Que le député de Saint-Laurent comprenne donc qu'on est
des législateurs avant d'être des partisans. Que le
député de Saint-Laurent me pardonne si je l'attaque un peu...
M. Forget: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Saint-Laurent, sur une question de règlement.
M. Forget: M. le Président, je pense que les motifs...
M. Bellemare: II ne me laisse pas terminer. J'allais dire que je
ne l'attaque pas personnellement.
M. Forget: Oui, mais les motifs auxquels fait allusion le
député de Johnson n'ont rien à voir avec la pertinence de
notre débat.
M. Bellemare: Je dis et je répète que c'est
irréaliste. Est-ce que j'ai le droit de le dire?
M. Forget: Je pense qu'en plus de ceta, le député
de Johnson n'a pas à prêter des intentions à qui que ce
soit.
M. Bellemare: Je ne vous en prêterai certainement pas.
M. Forget: Je pourrais facilement en prêter au
député de Johnson, mais je m'en suis abstenu jusqu'à
maintenant.
Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bellemare: Je lis avec beaucoup d'attention: entre le parti
pris syndical, l'actuel amendement suggéré et l'inaction, il y a
sûrement place à une loi pondérée et
réaliste. Est-ce que la population qui est la mienne, qui souffre
énormément dans certains cas, dans des grèves
interminables, mes frères les ouvriers ne sont-ils pas heureux de voir
qu'on apportera véritablement des critères
nouveaux dans un Code du travail, des critères qui n'ont jamais
existé, pas plus de mon temps que du vôtre? Ainsi, par exemple, il
y aurait certes lieu, pour maintenir un meilleur équilibre entre les
parties et éviter des affrontements inutiles, de légiférer
sur le piquetage ou sur le boycottage secondaire, de même que sur les
normes à respecter pour ceux qui sont chargés de la protection de
la propriété privée. M. le ministre, M. le
Président, je pense qu'on devrait y penser très
sérieusement parce que combien d'ordonnances ont été
rendues qui défendaient tout piquetage ou presque et qui ont même
été au désavantage de l'employeur? Quand on n'est pas
capable, surtout dans les syndicats, d'obtenir une certaine
compréhension de l'état de grève dans lequel on est, il
arrive que des gens dépassant la loi de la patience, celle du Code du
travail et celle de la borne, portent des actes qui sont parfois criminels.
Qu'arrivera-t-il pour ceux qui feront du piquetage? Aura-t-on prévu,
comme le demande le Conseil du patronat, un certain droit de regard? Il n'y a
rien dans les amendements que vous nous avez présentés qui en
parle. Je voudrais dire juste une chose. Que le ministre aurait pu faire comme
d'autres, s'éviter les reproches des patrons, s'éviter les
reproches de son Conseil national, des membres de l'Opposition libérale
par exemple...
Une Voix: La seule.
M. Bellemare: Oui, la seule parce que mon... Je ne dis plus
rien... Il aurait pu éviter énormément de choses.
Recherchant sa paix, sa sécurité, son bien-être, il aurait
pu être un ministre complaisant, un ministre qui aurait toujours dit:
Oui, ah oui! Certainement. On verra cela. C'est une des premières fois
que je réagis, à la fin de cette étude du projet de loi
45, pour dire que le ministre a véritablement bien accompli son mandat.
Ce n'est pas facile de faire ce qu'il fait, devant les protestations qui
existent. Mais il a quand même le courage de dire: Je vais essayer
d'établir un juste équilibre. Je vais essayer de rétablir
la paix entre les parties. Ce n'est pas qu'il va y avoir plus de conflits. Non!
Je dis non et je suis sûr que ce qu'on apporte aujourd'hui, c'est une
amélioration, et j'attendais ces améliorations, comparativement
à l'ancien texte du projet de loi 45 et des amendements qui nous avaient
été proposés après.
Je dois dire que, dans les circonstances, ce n'est pas facile, pour le
ministre, de traverser cette crise, qui a l'air d'une crise. Mais on verra que,
lorsqu'on a amendé le Code du travail, nous aussi dans certains cas,
nous avons eu nos déboires et nous avons eu nos épreuves aussi.
Mais quand j'ai eu fini de servir comme ministre du Travail, j'ai eu des
lettres qui ont confirmé que j'avais été un des bons
ministres du Travail depuis la Confédération, et on est venu me
rendre justice dans une grande fête du 25e anniversaire de ma vie
publique, pour le dire. N'ayez crainte, les bruits tomberont. Cela s'apaisera
et on reviendra au bon sens en regardant les articles nouveaux du Code. Je ne
dis pas qu'on n'aura pas à revenir, comme moi-même je suis revenu
après l'établissement des commissaires-enquêteurs et
du Tribunal du travail, dans plusieurs cas, je l'admets mais la loi des
services essentiels, on l'a adoptée ici dans cette chambre, qui a eu le
courage de l'appliquer? Qui était responsable du projet de loi 253 dans
le temps? Qui l'a véritablement mis en action? Là au moins, on a
trois échappatoires permissibles par la loi. Premièrement, quand
il y a une entente entre les parties; deuxièmement quand l'article 99
s'applique; troisièmement, quand on peut se prévaloir de la loi
existante ou d'une certaine loi qui viendra plus tard. Trois
échappatoires pour que l'article 97c ne soit pas appliqué.
J'espère que ma conviction profonde, sans hypocrisie et sans
vouloir servir seulement un parti politique, parce que j'ai vécu
l'expérience et que j'ai été à même de juger
de l'opportunité qu'il y a de mettre dans le Code du travail ces
articles de droit nouveau, je voterai en faveur.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Bellemare: Merci de vos nombreux applaudissements.
M. Chevrette: M. le Président.
M. Forget: Vous avez pourtant bien essayé.
M. Bellemare: M. le Président, je n'endurerai pas cela du
député de Saint-Laurent, il me prête des intentions. Pour
une petite bagatelle, un iota, tout à l'heure, il s'est soulevé.
Là, il vient de me prêter une véritable intention d'avoir
voulu faire mon débat pour avoir les applaudissements. Là il
va... Non, je lui pardonne, allez-y!
Le Président (M. Clair): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: M. le Président, à écouter,
tantôt, le député de Saint-Laurent, j'aurais cru que la
motion visant à retirer l'article 97 serait beaucoup plus large. Je
croyais qu'il allait proposer, purement et simplement, le retrait de la loi 45
puisque, dans son exposé, il a, à toutes fins pratiques,
affirmé que rien n'était bon dans l'ensemble du projet de loi, y
compris la syndicalisation, y compris le précompte syndical, y compris
à peu près tout.
J'ai été surpris qu'il demeure avec nous aussi longtemps,
pour discuter d'aussi longues heures ces points qui n'ont aucun effet, à
toutes fins pratiques, et qui se soldent par une motion de retrait d'un des
éléments les plus importants du projet de loi 45.
M. Forget: Si M. le député de Joliette-Montcalm me
le permet? Je suis d'accord que ce n'est pas la même chose, le reste est
inutile; mais ça, c'est néfaste.
M. Chevrette: Comme cela vous avez beaucoup de temps à
perdre puisque vous avez parlé suffisamment.
II s'est dit surpris de voir que ce projet de loi a été
discuté pendant de longues heures et même contesté
publiquement. Il a même fait des allusions aux discussions internes. Je
me permettrai de parler un peu de ça, parce que, dans une discussion
aussi large, je compte bien sur son sens de la compréhension et
espère qu'il ne m'interrompra pas en disant que je ne parle par sur la
motion d'amendement.
Je pense que, quand on fait du droit nouveau, c'est tout à fait
normal que les discussions soient assez fortes. Je pense que, quand on est
capable de discuter pour en arriver à un consensus, ça
démontre un certain sens de la maturité politique. On n'est plus
à l'ère où le chef dit: Oui, et tout le monde doit courber
la tête et dire: Oui! Je pense que, politiquement, une structure ou une
formation politique, qui est composée d'hommes qui ont des idées,
doit les faire valoir dans le cadre des opportunités qu'elle a de les
faire valoir et, même à la commission, je pense que c'est une des
premières commissions parlementaires depuis un an en tout cas
à laquelle il m'est permis de participer, où les
participants ont eu une chance de s'exprimer et d'échanger très
généreusement entre eux et avec beaucoup de souplesse autant de
la part du ministre-tuteur ou parrain de la loi, que de la part des Oppositions
qui ont apporté des suggestions, qui ont été retenues pour
un bon nombre, qui ont été discutées, qui ont
été expliquées et les rejets n'ont pas été
des rejets catégoriques dans le sens de dire: On est au pouvoir et on
les rejette purement et simplement sans explication. Chose qu'on aurait pu
être tenté de faire après de longues heures, certaines
journées. Je pense que tout le monde a eu la chance de s'exprimer
passablement longtemps, et j'ai aimé la pertinence des débats et
la profondeur des débats, sur plusieurs points de ce projet de loi.
Je vais aborder, dans un premier temps, la violence. On dit que
ça ne réglera pas la violence, mais on a beau regarder les
conflits, analyser les conflits qui ont eu lieu dans le passé. Là
où les affrontements ont été les plus violents, c'est
là où le travailleur constate ou a constaté qu'un intrus
venait prendre sa place. Pensez et je vais déborder le domaine de
la construction. J'ai eu la chance d'analyser un peu plus en profondeur
les plus gros problèmes de violence dans la construction viennent
précisément du fait que, dans la construction, on s'improvise,
quand on veut et n'importe quand, travailleur de la construction. Pour 85 000
ou 90 000 emplois, on a 250 000 inscrits à l'Office de la construction
du Québec. Les vrais travailleurs de carrière qui voient, durant
les vacances, un nombre de professeurs, de pompiers ou de policiers venir
prendre leur place pour quelques centaines d'heures, ce sont des emplois qu'on
enlève aux vrais travailleurs et, quand tu te fais prendre ton emploi,
tu te fais littérallement voler ton emploi, c'est passablement
révoltant et c'est le germe de la violence.
C'est la même chose si je transpose cela dans un conflit, dans une
grève légale, en dehors du secteur de la construction. Quand tu
fais une grève légale, que tu prends la peine de voter pour
t'abstenir de ton salaire et que tu veux, pour une fois, aller chercher des
conditions de travail qui ont de l'allure, qui ont du bon sens, tu te rends
compte que certains employeurs rient dans leur barbe et se disent: Je continue
à produire. Quel est le rapport de force qui peut exister dans une telle
circonstance, quand un employeur peut continuer à produire? J'ai
même vu des hommes payés plus cher que les employés
réguliers pour continuer à produire. Je l'ai vu dans une petite
ville comme Joliette où Coca-Cola était en grève et payait
ses scabs $5 l'heure et ses employés réguliers avant la
grève $3.95 l'heure.
M. Bellemare: De Firestone.
M. Chevrette: Je pourrais parler de Firestone, je pourrais parler
de Gypsum et je pourrais continuer à en citer une liste interminable.
Quand on dit 27 conflits, ce sont peut-être les 27 plus connus, mais
à de nombreux endroits, il y a même eu de la provocation; on a
poussé l'audace jusqu'à payer les scabs plus cher que les
salariés réguliers. Je peux vous certifier que ce n'est pas parce
qu'un cadre passe une ligne de piquetage qu'il agace les employés, mais
quand le cadre entre avec un autobus bondé de scabs ou fait entrer des
scabs avec l'aide de la police, là c'est révoltant pour des
travailleurs et c'est bien souvent dans des mouvements spontanés
qu'éclate la violence. Donc, il faut se donner les armes minimales pour
essayer d'éviter cela. Il n'y a pas beaucoup de conflits qui ont
dégénéré en violence quand il n'y a pas eu
l'utilisation de scabs. Quelques-uns, à cause de la longueur des
conflits, ont peut-être dégénéré en des cas
de violence, mais ce sont surtout au cours de grèves où on a
utilisé des scabs qu'on a connu le plus de violence. Il y a aussi la
longueur des conflits, là où il y a eu utilisation de scabs. La
moyenne est de 171 jours, là où on a utilisé des scabs,
alors qu'elle est de 36 jours dans des conflits normaux. Cela doit être
suffisamment important pour qu'un gouvernement se penche et étudie
sérieusement la situation.
Le fait de se baser sur les statistiques et sur des situations de fait
est suffisant pour qu'un gouvernement se penche très sérieusement
là-dessus. C'est bien sûr que la loi ne règle pas tout,
mais elle met en lumière deux grands principes qu'on a peut-être
oubliés dans nos discussions parce qu'on n'a pas eu la chance, bien
sûr, de l'aborder article par article, mais il reste qu'il y a deux
principes fondamentaux dans l'article 97. D'abord il n'est pas question
d'accepter un principe qui permettrait de détruire les meubles et biens
meubles. Ce n'est pas ce qu'on a dit. On dit: Nous prenons pour acquis que les
travailleurs ne sont pas intéressés à détruire leur
gagne-pain, mais en revanche, pour un rapport de forces
équilibré, ils ne sont pas intéressés, non plus,
à voir la production continuer au même rythme qu'avant
l'arrêt de travail. Ce sont deux principes qui se complètent. Si
on ne veut pas que les travailleurs détruisent le gagne-pain, parce que
cela dégénère en violence, il faut arrêter une
certaine production normale. Comment voulez-vous qu'un conflit prenne fin
si
l'employeur réussit à produire autant qu'avant le conflit?
Comment voulez-vous qu'à la table de négociation le gars puisse
s'assouplir quand les revenus rentrent au même rythme qu'avant? C'est
tout simplement une question d'analyse normale d'une situation. C'est quand un
groupe commence à être affamé qu'il devient un peu plus
compréhensif, que ce soit d'un côté ou de l'autre. Si les
revenus de l'employeur ne rentrent pas, il va dire: II faut bien que je la
règle, il faut que je mette de l'eau dans mon vin un peu. Les
employeurs, après quelques semaines de grève, quand ils n'ont
aucune ressource ou un maigre subside du syndicat, demandent à leurs
officiers d'être un peu plus souples à la table, mais au moins,
les deux parties sont touchées par un arrêt de travail, pas
seulement un.
M. Bellemare: Est-ce que le député me permet une
question?
M. Chevrette: Oui.
M. Bellemare: Est-ce qu'on avait ces critères dans le Code
du travail, autrefois?
M. Chevrette: Si vous parlez de l'article 41, cela n'était
pas suffisant, on ne l'avait pas. C'est du droit nouveau.
M. Bellemare: Pour ce qu'on adopte là, on n'avait pas de
critères avant; maintenant on en a pour éviter ce que vous
dites.
M. Chevrette: Ces quelques mots... C'est un peu une
déception, pour moi aussi, d'avoir entendu l'analyse faite par le
député de Saint-Laurent. Je pense que l'histoire du passé
nous indiquait clairement qu'il fallait faire quelque chose; c'était
urgent. Bien sûr qu'on n'aura pas tout, mais on a tenté d'encadrer
cela aussi. L'article 97 n'est pas isolé dans le projet de loi 45. On a
pris des mesures pour qu'il y ait un cadre suffisamment structuré pour
permettre une saine démocratie, sans la contrôler.
M. Bellemare: Seulement dans les grèves
légales.
M. Chevrette: Bien sûr.
M. Bellemare: Bien entendu.
M. Chevrette: Mais, écoutez, on ne pourra jamais
légiférer pour des grèves spontanées, cela arrive
comme ça.
M. Bellemare: C'est ça. Cela s'appliquera seulement lors
des grèves légales.
M. Chevrette: Bien sûr, et c'est d'ailleurs l'objet d'une
loi. On ne peut légiférer en fonction de quelque chose qui
pourrait se produire.
M. Bellemare: Quand ce sera illégal, qu'est-ce que le
patron fera?
M. Chevrette: II aura les moyens légaux à sa
disposition, les tribunaux d'ordre civil, comme dans n'importe quelle
situation.
M. Bellemare: C'est sûr, mais je voulais vous l'entendre
dire. C'est seulement durant les grèves légales que cela
s'applique.
M. Chevrette: On veut fixer un cadre légal pour qu'il
arrive le moins de choses illégales. C'est ça qu'est l'objectif
d'une loi du travail.
Donc, je pense qu'on met du sérieux autour de cette loi en
exigeant, en permettant, même si ça se fait à 95% ou 98%
des cas... Quand on va jusqu'à demander ou exiger un vote secret, quand
on dit qu'il n'est pas question de permettre la destruction des meubles et des
biens meubles, quand on dit qu'il n'est pas question non plus de permettre la
production normale, je pense qu'on a pris suffisamment de précaution
comme législateur pour s'assurer qu'il y ait là un début,
je dis bien, d'efforts sur le plan législatif pour tâcher de faire
en sorte que nos relations de travail soient un peu plus ordonnées.
M. Bellemare: Est-ce que le député me permet une
autre question?
M. Chevrette: Une autre question.
M. Bellemare: C'est de valeur de vous couper comme ça,
mais ce n'est pas par malice. Est-ce que le député se
souviendrait par coeur de l'article 13 de la loi 253?
M. Chevrette: Je pourrais même vous le lire. M.
Bellemare: J'aimerais bien ça.
M. Chevrette: Je pourrais vous dire que "lorsqu'un accord est
intervenu ou qu'une décision a été rendue en vertu de
l'article 11 de cette même loi 253 l'employeur ne peut,
pour fournir des services non considérés comme essentiels et
habituellement rendus par les salariés de l'établissement,
embaucher d'autres salariés."
M. Bellemare: Ah, qui était ministre?
M. Chevrette: Sur ces mots, M. le Président, je vais
donner la chance à un autre... C'était l'actuel
député de Saint-Laurent, pour répondre à votre
question, qui était alors ministre des Affaires sociales. Sur ces mots,
je voudrais permettre à d'autres confrères de parler
là-dessus. Je vous remercie.
Le Président (M. Clair): Le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, tout comme le
député de Johnson, je ne suis pas ici pour ne représenter
qu'un parti. Je pense que j'avais établi ma position lors de la
première séance de cette commission. C'est dans ce même
esprit et le même sens que je vais intervenir maintenant.
J'ai été surpris et un peu déçu, quoiqu'il
fallait s'y attendre, des premiers propos du député de
Saint-Laurent. Le député de Saint-Laurent nous dit que l'article
51 du projet de loi a fait couler beaucoup d'encre depuis le mois de juillet;
il oublie, entre autres choses, les cinq dernières années. Si le
sujet concerné par l'article 51a fait couler beaucoup d'encre depuis les
cinq dernières années, c'est parce que, il faut l'admettre, le
climat des relations du travail au Québec était
complètement gâté. Il s'était
détérioré de telle façon qu'il n'était plus
"opérable ". Tant du côté patronal que du côté
syndical, on avait commencé à faire des analyses pour voir de
quelle façon on pourrait l'améliorer.
Il ne faut donc pas se surprendre que ce gouvernement propose une
solution qu'il confirme dans une loi.
Cette solution, on l'a dit, vise à rétablir un
équilibre qui était devenu inexistant. Ce n'est pas à
cause de préjugés qu'elle est là, mais à cause
d'une analyse de la situation, de la réalité. Si on veut parler
des préjugés, le député de Saint-Laurent admettra
avec moi qu'on a au moins le courage, quant à nous, d'admettre ceux
qu'on a. Et les nôtres ont été officiellement du
côté des travailleurs.
M. le Président, je voudrais rappeler rapidement quelques-uns des
articles du texte que nous avons devant nous, qui améliorent la
situation par rapport à ce qu'on avait précédemment dans
le Code du travail, faire une légère analyse de ce qui a
amené, dans le concret, ce projet de loi et dernièrement, essayer
de répondre à la question du député de
Saint-Laurent: Qu'est-ce qui va arriver avec cela? Qu'est-ce que cela va
régler? Essayer de voir, dans le futur, ce que cela va donner.
Avant de faire cela, je voudrais au moins répondre à
l'argumentation du député de Saint-Laurent qui voudrait, sous
prétexte que cela n'existe nulle part, qu'on ne légifère
pas. A ce rythme, M. le député de Saint-Laurent, il semble qu'on
serait incapable de ne passer aucune loi. S'il fallait attendre, chaque fois
qu'on a à régler un problème, que d'autres le
règlent, il me semble que notre rôle, ici, au Parlement, serait
inutile.
Ce que je m'attendais à ce que vous me disiez, c'est que le
moment était, tout au contraire, bien choisi pour amener cet
élément dans la loi 45, puisque tantôt, dans les mois qui
viennent, une commission, des personnes seront nommées pour
étudier le Code du travail dans son ensemble. Il y aura au moins, non
seulement un texte de loi à réétudier, mais aussi ce texte
de loi avec son application. On aura déjà appliqué cette
loi au moment où des gens se remettront à étudier le Code
du travail. Ils auront une expertise, alors que tout ce que vous pouvez dire
jusqu'à maintenant et je suis d'accord sur les termes
utilisés par le député de Johnsonpar
défaitisme, pessimisme, exagéré quant à moi, vous
vous prononcez d'une façon très subjective.
Cette commission qui fonctionnera dans les six ou sept prochains mois,
aura au moins une expertise de ce que cela donne, de ce que cela
améliore, en termes de relations du travail.
M. le Président, je voudrais rappeler que dans l'article 97a, ce
qui avait été oublié précédemment a
été corrigé. On oublie souvent de le dire, mais le
paragraphe d) de 97a fait en sorte que cela couvre tous les aspects de ce qu'on
veut couvrir lorsqu'on parle des briseurs de grève, c'est-à-dire
le fait qu'un employeur ne peut pas utiliser des employés d'une autre de
ses usines qui, elle, n'est pas en grève, pour les amener travailler
dans son usine en grève. Cet aspect avait été
oublié, dans un premier temps, et on a refermé la porte à
des abus qui auraient pu survenir éventuellement.
Dans l'article 97b, là aussi on a resserré pour faire en
sorte que l'employeur puisse utiliser les services, pour assurer les services
essentiels, uniquement dans la mesure où les accords l'avaient
prévu dès le départ. Je pense que c'est une autre
amélioration qu'on ne peut nier.
Dans l'article 97c, M. le Président, il est clair et le
texte est parfait dans ce sens que ce qu'on autorise à
l'employeur, c'est la préservation de ses meubles, de ses biens
immeubles. Cette possibilité de conserver en état de
fonctionnement ses biens meubles et immeubles n'a jamais été
contestée à l'employeur. Jamais dans le passé, car un
certain nombre de syndicats réglaient des ententes de services
essentiels avant de déclencher la grève, ou en cours de
grève, et jamais, maintenant non plus, par les intervenants.
Ce qui était désiré cependant, c'était qu'il
soit clairement établi qu'on ne donnait pas de la main gauche pour
reprendre de la main droite. Je pense qu'à ce sujet, l'article 97c est
maintenant clair. Il est entendu que cela n'a pas pour effet de permettre
à l'employeur de continuer sa production, de biens ou de services.
Pour ce qui est de l'enquêteur, je reviendrai sur cet aspect dans
un dernier temps, parce que, effectivement, il y aurait une analyse
sérieuse à faire de son fonctionnement dans les mois qui
viennent.
M. le Président, si on est placés avec cet article, devant
nous aujourd'hui, c'est que la situation nous y a amenés. Comment cela
se passait-il? Ce que je veux préciser avant, c'est que ce qui va faire
le succès de cette formule, ce seront les acteurs, tant patronaux que
syndicaux. Ce sont eux qui, finalement, vont décider, déterminer
si c'est fonctionnel, si cela a des chances de ramener la paix sociale, le
climat social et un juste équilibre dans les relations du travail. Trop
d'employeurs ont négligé à tort de maintenir cet
équilibre entre les parties au moment d'une négociation. Ces
employeurs n'ont rien compris; ils n'ont pas compris qu'ils jouaient contre eux
lorsqu'ils prenaient ces attitudes.
L'objectif d'une négociation est justement, pour un employeur, de
savoir à l'avance quels sont les règles et les critères
qui vont régir son entreprise dans les deux ou trois prochaines
années. C'est pour un employeur de s'assurer une convention collective,
c'est aussi de s'assurer que, pendant deux ans ou trois ans, il va pouvoir
fonctionner en étant assuré qu'il n'y aura aucun problème
extérieur à sa production qui va empêcher le fonctionnement
de son entreprise. Tous les em-
ployeurs qui n'ont pas fonctionné dans ce sens-là ont
joué contre eux, contre eux et contre l'ensemble des employeurs. Il ne
faudrait donc pas blâmer uniquement les syndicats.
Qu'est-ce qui se passait en pratique? C'est que les travailleurs
étaient amenés par le Code du travail même dans un goulot
d'étranglement où, après un certain temps, la seule
décision possible face à un employeur qui refusait toute
discussion au moment d'une convention, de la négociation d'une
convention collective, il ne restait pour les travailleurs qu'une solution
celle de faire la grève. Et, au moment de cette grève,
l'employeur, lui, faisant fi de la loi ou de l'esprit de la loi, engageait
à pleine porte pour remplacer les ouvriers qui étaient sur le
trottoir.
Cela a créé, M. le Président, de la violence, bien
sûr, mais, chaque fois qu'on se réfère à la
violence, on parle de la violence physique. Il y a une autre sorte de violence
dont on ne parle pas, c'est la violence morale. Et c'est peut-être
beaucoup plus grave pour un peuple que la violence physique. On se
relève d'un coup de matraque, on se relève difficilement de
violence morale qu'on subit pendant six mois, un an, deux ans.
Je m'en voudrais de ne pas rappeler, M. le Président, le conflit
de la United Aircraft. Ce conflit selon les propres termes du
député de Saint-Laurent, s'il n'avait pas existé, il
aurait fallu l'inventer, juste pour se donner des exemples. C'est de cette
façon que le député de Saint-Laurent a
caractérisé 2000 travailleurs qui se sont tenus debout pendant 22
mois, en prenant douze votes de grève à scrutin secret
vérifiés par des journalistes. C'est de ces travailleurs que le
député de Saint-Laurent, dans toute son analyse et sa puissance
d'analyse, nous a dit que si cela n'avait pas existé, il aurait fallu
l'inventer, sans cela on aurait plus d'exemple. Dans ce conflit, la violence
morale a été pire que la violence physique. La violence morale a
duré douze mois avant qu'on commence à assister à de la
violence physique.
Je dis, M. le Président, qu'à court, moyen et long terme,
ce sentiment d'impuissance qu'ont les travailleurs devant ce qui est essentiel
pour eux, c'est-à-dire leur travail, les amène aussi à un
sentiment d'impuissance de façon générale dans tout ce qui
les concerne. Cela les oblige entre autres choses, à ne plus avoir
aucune confiance dans le système qui les régit. Cela les
amène aussi à ne plus avoir confiance dans les gouvernements et
dans les gouvernants. C'est cela qu'on a créé comme climat:
violence morale, violence physique, sentiment d'impuissance qu'on a
volontairement créé chez les travailleurs. C'était le
climat qui existait au moment où cette loi arrive...
M. Bellemare: Devant les tribunaux.
M. Bisaillon: ... même devant les tribunaux et surtout
devant les tribunaux.
Le député de Saint-Laurent dit que le piquetage va
changer. Ce n'est pas vrai. Le piquetage va redevenir ce qu'il a toujours
été. Le piquetage, c'est un mouvement symbolique. Par le
piquetage, les travailleurs veulent indiquer de façon symbolique
à d'autres qu'ils ont des problèmes, qu'ils sont en conflit. Le
piquetage autrefois, M. le Président, se faisait avec une, deux ou trois
personnes et c'était juste pour indiquer à la population qu'il y
avait quelque chose qui se passait dans cette usine. C'était pour
attirer l'opinion publique. C'était cela, le piquetage; cela a toujours
été cela. Sauf qu'avec le temps, avec l'action d'employeurs qui
n'ont jamais rien compris à de véritables relations du travail,
on a assisté à du piquetage qui était défensif;
défensif pour empêcher les camions de sortir à pleine
porte; défensif pour empêcher les scabs d'entrer et jusqu'à
un certain point, qu'à un moment donné, on a fait du piquetage
pour empêcher les cadres d'entrer.
Si on en est arrivé là, c'est parce qu'on n'avait plus
aucune confiance dans notre système de relations du travail. Il est
clairement établi, dans l'article 51, que les cadres peuvent entrer dans
l'usine. Je n'ai pas entendu une centrale syndicale s'opposer à cela.
Pourquoi ne se sont-elles pas opposées? Parce qu'elles savent maintenant
qu'il y aura des cadres, je veux dire des barrières pour empêcher
une production excessive...
M. Chevrette: Les cadres juridiques.
M. Bisaillon: Les cadres juridiques, pas les cadres physiques.
C'est cela qui va se passer. Le piquetage va reprendre tout son sens. Le
piquetage va redevenir symbolique. Si, évidemment, chacun des acteurs en
cause applique la loi dans l'esprit avec lequel elle a été
présentée et à la lettre, si les acteurs se
décident à respecter la loi, il n'y aura plus aucun
problème et le piquetage ne sera plus source de violence, mais il sera
source d'information, comme cela aurait toujours dû être. Ce qui va
se présenter maintenant, c'est qu'on aura des conflits de travail qui
pourront justement trouver leurs résultats dans ce à quoi le Code
du travail croit, c'est-à-dire l'équilibre des forces, le rapport
de force entre les parties. C'est ce qu'on rétablit avec l'article
51.
Qu'il y ait une période d'ajustement, que les acteurs, le monde
patronal et le monde syndical, aient à s'ajuster, à discuter
ensemble, c'est bien évident que cela va se passer. Si on me parle des
services essentiels et qu'on me demande ce qui va se passer à l'avenir,
je suis obligé de vous dire qu'à partir de l'expérience et
à partir aussi de ce que je connais des travailleurs, c'est la solution
de l'accord qui va être utilisée, parce qu'un travailleur, quand
il sait qu'il y a des balises et qu'il sera protégé,
reconnaît aussi qu'il ne faut pas qu'il se mette non plus en position de
se faire matraquer. Or, plutôt que des décisions
unilatérales de l'employeur, parce que c'est cela au paragraphe 97c,
quand il n'y a pas d'accord, l'employeur peut lui-même décider que
c'est cela, les services essentiels qu'il applique... Evidemment, cela peut
être vérifié à nouveau par la suite, mais le premier
geste est unilatéral.
Je dis que, dans la pratique, ce qui arrivera, cela sera l'accord. Les
parties vont d'abord s'en-
tendre sur des services essentiels, parce que les travailleurs n'auront
aucun intérêt à ce que cela soit décidé
unilatéralement. Si ce n'est pas comme cela, ce sera ou bien parce que
le syndicat aura été trop entêté ou encore parce que
l'employeur aura préféré prendre la solution de
décider lui-même. Il en subira les conséquences. Il est
là, il y a un enquêteur de prévu qui pourra aller constater
que l'employeur utilise abusivement des pouvoirs qui lui sont donnés
dans la loi, qui lui sont reconnus dans la loi. C'est cela, en pratique, qui,
d'après moi, se passera dès le départ.
Bien sûr, il y en a qui pourront jouer avec cette loi. Exemple,
parce qu'il n'est pas mauvais de donner des exemples: Un employeur pourrait
fort bien se dire: Mes cadres peuvent faire de la production, c'est reconnu
dans la loi. Donc, je vais les utiliser à la production. Si j'ai besoin
de services essentiels, je vais aller demander aux syndiqués de faire
les services essentiels. Il pourrait, évidemment, selon le cadre de la
loi, faire cela. L'enquêteur pourrait aussi dire: Les cadres auraient pu
assumer les services essentiels. Si les employeurs abusaient trop de cette
orientation et utilisaient toujours trop les cadres pour la production et les
syndiqués pour les services essentiels, il pourrait fort bien arriver
que la commission qui se penche sur l'étude du Code du travail
décide, là aussi, de refermer la porte.
Les parties qui sont en présence ont tout intérêt
à aménager le terrain qui leur est donné, à
l'aménager à leur façon et selon leur bon vouloir. Sans
cela, il sera toujours possible de revenir; de la même façon pour
l'enquêteur. Dans l'article 97c, on prévoit un enquêteur qui
ira vérifier si 97c ou 97a, mais prenons 97c a
été utilisé de manière abusive. L'enquêteur
produira un rapport qu'il soumettra aux parties par la suite. Supposons que
l'enquêteur dise: L'employeur a utilisé vingt personnes pour les
services essentiels, et cinq personnes, cela aurait été
suffisant. Le syndicat pourra prendre une injonction pour faire décider
des services essentiels à accorder à l'employeur.
Il est possible que les tribunaux ne prennent pas sérieusement en
considération l'article 97c. Mais il y a aussi un danger à cet
endroit-là, Si, par exemple, il existe trop de temps, un trop long
délai entre le rapport de l'enquêteur et le jugement final, il est
bien possible que là aussi on assiste à un sentiment de
frustration de la part des travailleurs ou de la part des employeurs, mais
surtout de la part des travailleurs, un sentiment de frustration parce que
placés devant une injustice. Parce que les travailleurs fonctionnent
comme cela, ils ont des droits et s'aperçoivent que ces droits-là
sont bafoués, et c'est ce qui les amène à poser d'autres
gestes. Ils pourraient dire: L'enquêteur dit que c'est cinq et il y en a
encore vingt et cela fait un mois. On sera donc peut-être tenté de
retourner aux méthodes d'autrefois et à prendre cela comme on le
prenait autrefois et je le dis entre guillemets pour que le
député de Saint-Laurent me comprenne à les prendre
"sur le bras".
M. Bellemare: Est-ce que le député me permet une
question?
M. Bisaillon: Oui.
M. Bellemare: Pas longue. Est-ce qu'on pourrait aussi avoir un
représentant de l'employeur?
M. Bisaillon: Je pense que le ministre pourra répondre
à cette question-là tantôt, parce que c'est à lui
que vous l'avez posée.
M. Bellemare: Mais votre impression?
M. Bisaillon: M. le député de Johnson, quand j'ai
lu l'article, je comprenais que c'était implicite que cela allait de
soi.
M. Bellemare: Oui, mais si la loi le dit c'est encore bien
mieux.
M. Bisaillon: Je pense que là-dessus le ministre pourra
acquiescer à votre demande lui-même.
M. Bellemare: Merci.
M. Bisaillon: Je termine en disant que c'est de cette
façon et dans ce sens qu'il faut prendre l'article 51, un article qui
vise à rétablir des faits, à rétablir l'ordre,
à remettre un équilibre entre les parties et que cet
équilibre, ce sont les parties qui en sont responsables, et que de la
façon qu'elles vont l'utiliser, dépend le succès ou
l'insuccès de cette mesure. Les responsables de l'insuccès seront
peut-être les premiers plus tard, lorsqu'on sera éventuellement
amené à reserrer encore davantage, à critiquer et à
crier le plus fort.
Mais pour l'instant, c'est ce qu'il faut que les parties se disent; ce
sont elles qui sont responsables de la bonne application de l'article 51 et si
on veut vraiment rétablir un climat qui soit ordonné dans nos
relations du travail, il faut, sans l'ombre d'un doute, endosser l'article
51.
M. Bellemare: Très bien pour un syndicaliste comme
vous.
Le Président (M. Clair): Dans l'ordre, le
député de Berthier, le député de Bourassa et le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. le député de Berthier.
M. Mercier: Je suis tout à fait d'accord que l'utilisation
des briseurs de grève ait pu amener certains conflits à
dégénérer en violence et à retarder la solution de
certains conflits. Ces amendements qu'on apporte aujourd'hui, qui permettent de
maintenir les biens meubles ou immeubles dans l'état où ils
peuvent reprendre le fonctionnement après la grève, je pense que
ces articles sont autant dans l'intérêt des travailleurs que des
patrons. On pourrait se trouver dans des situations où la
détérioration physique des biens meubles ou immeubles pourrait
empêcher toute reprise des activités à l'occasion de la
solution du conflit. Je pense que c'est un élément positif.
D'autre part je tiens à l'exprimer aujourd'hui il
demeurera quand même un certain nombre de situations non couvertes par
notre pro-
jet de loi, et elles se retrouvent dans des situations de "scabs"
à l'envers. Dans certaines entreprises et je le sais pour l'avoir
vécu des entreprises de 25, 50 ou moins de 100 employés,
il arrive des situations où on se retrouve avec les deux tiers ou avec
les trois quarts des ouvriers qui se trouvent des emplois occasionnels à
l'extérieur et parfois à des salaires supérieurs à
ce qu'ils obtiennent à l'entreprise où ils travaillent. Bien
sûr, ces emplois sont saisonniers, occasionnels, mais il demeure que ce
n'est pas de nature à favoriser une véritable rencontre, une
discussion et une solution des conflits. Parce qu'on a trop de gens qui ont des
emplois à l'extérieur qui leur permettent de ne subir aucuns
sévices de cette grève. On est face, là aussi, à un
déséquilibre, mais cette fois-ci, au détriment d'un
certain nombre d'employeurs.
D'autre part, on sait par expérience que des centrales syndicales
ont des stratégies sectorielles de négociation qui les
amènent parfois à attaquer le point le plus faible d'un employeur
dans un secteur d'activités donné, sans trop se soucier de
l'intérêt des travailleurs, à savoir si l'entreprise va
disparaître ou pas mais pour obtenir des conditions de salaire
supérieures aux autres entreprises où des conventions collectives
vont venir à échéance.
Notre projet de loi ne réglera pas ce genre de conflit. Si
ça devait devenir trop fréquent, je pense qu'il faudrait se
pencher là-dessus aussi. Mais, en attendant, je pense que le patronat
devrait comprendre que, sectoriellement parlant, il serait peut-être de
son intérêt de faire front commun pour éviter certaines
situations où un employeur se retrouverait isolé face à un
groupe de syndiqués dont la majorité occuperait un emploi
à l'extérieur, parfois pour des services gouvernementaux
soit dit en passant, j'ai vécu cela On aurait, là aussi,
des conflits interminables au terme desquels certaines entreprises
disparaîtraient, malheureusement, pour certaines
collectivités.
Je tenais à le dire. Je pense que l'expérience de
l'application de ce projet de loi devrait donner, pour la très grande
majorité de ces cas marginaux qui dégénéraient en
violence, d'excellents résultats. Si on devait constater que, dans
certains cas, il y a eu des abus de la nature de ceux que je viens d'exposer,
je pense que le patronat devrait se rendre compte qu'il peut y aller de son
intérêt de se regrouper à son tour pour contrebalancer le
poids des centrales syndicales, quant à l'appui qu'elles peuvent donner
à certains syndicats. D'autre part, je ne sais pas s'il y aurait
possibilité de procéder à des amendements
ultérieurs, si ça prenait beaucoup d'ampleur, pour
rétablir un juste équilibre. Ce que nous recherchons à
travers ce projet de loi pour un meilleur climat des relations du travail.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: Merci, M. le Président. C'est assez difficile
de parler après les députés de Sainte-Marie et de
Joliette-Montcalm. Ils ont résumé ce que chacun des
députés ministériels avait dans son coeur et dans sa
tête. L'appui que je veux donner est un appui total au ministre du
Travail. Il nous a consultés pour toute la loi. On a pu contester les
articles qui ne faisaient pas notre affaire. On a pu en discuter, en parler
à l'extérieur du caucus. Le ministre est revenu nous consulter;
c'est un élément nouveau qu'on croit avoir établi dans ce
gouvernement. Lorsque vous parlez de limpidité, vous en avez un exemple
aujourd'hui avec la loi 45.
J'ai beaucoup aimé le député de Johnson. Il est
resté réellement un vrai syndicaliste. Il a compris qu on pouvait
avoir du droit nouveau dans une loi du travail et, sans réserve, il
appuie l'article 51. Ce que je trouve regrettable, c'est l'attitude du
député de Saint-Laurent. Chaque fois que je suis venu à
cette commission, j'avais cru comprendre que les amendements qu'il apportait
avaient pour but de bonifier cette loi, qu'il voulait une loi nouvelle, la loi
45, quelque chose qui soit nouveau. L'article le plus important
l'article 51 que vous avez vécu vous-même dans la loi 213
est bonifié, est fait pour produire un ordre social meilleur
qu'auparavant. Vous avez vécu les grèves, vous savez ce qui s'est
passé dans l'éducation, dans les services de santé, les
services essentiels, mais la leçon n'a pas eu l'air d'avoir
porté.
M. Forget: Elle a porté, mais comment?
M. Laplante: Non, elle n'a pas porté.
Avec l'avènement de ce droit nouveau j'avais cru que vous auriez
fait un tout autre examen de conscience autour du projet de loi 45. C'est
décevant; ça devrait dépasser la ligne de parti. C'est
pour ça que, sans réserve, j'appuie l'article 51 et encore une
fois, je crois que tous les collègues qui sont autour de la table, le
parti ministériel, partagent mon avis.
M. Forget: Si cela peut aider le député de
Bourassa, je peux lui passer des mouchoirs en papier.
M. Laplante: Non. Vous en auriez peut-être besoin par
exemple.
Le Président (M. Clair): A I'ordre!
M. Bisaillon: Le député de Saint-Laurent n'a pas
besoin de cigarettes, non? Pas encore? Cela va venir.
Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.
Le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: M. le Président, je pense que nous sommes
arrivés à une clause très importante dans ce projet de loi
et je veux vous assurer, M. le Président, M. le ministre, que je pense
que tout membre de la commission, y compris certainement le
député de Saint-Laurent, veut exactement la même chose. On
veut que les ouvriers, dans cette province du Québec, puissent gagner
leur pain avec dignité, avec le moins de violence pos-
sible et que, par l'entremise de négociations, ils puissent
réussir non seulement des profits, etc., d'une entreprise.
J'ai été fort impressionné par le discours du
député de Joliette-Montcalm, et surtout par celui du
député de Sainte-Marie. Je pense que ce n'est pas surprenant que
je partage presque tous leurs sentiments, parce que dans ma vie j'ai agi comme
employeur pendant de nombreuses années, comme employé, comme
membre d'un syndicat pendant 39 ans. Je suis encore d'ailleurs membre d'un
syndicat. J'ai été aussi, comme vous le savez, ministre du
Travail, et avant cela, adjoint parlementaire au ministre du Travail et
même, parfois, j'avais 53 000 employés.
Alors, je pense que je peux parler, si vous me le permettez, sans
partisanerie, parce que c'est vraiment le but d'une commission. Ce n'est pas le
parti gouvernemental contre l'Opposition. Nous sommes membres de cette
commission pour essayer d'améliorer le climat industriel dans notre
province. Je pense que c'est le moment, que c'est nécessaire pour le
Québec, de devenir une province encore plus industrialisée que
jamais. Alors, c'est normal et naturel qu'on fasse des lois qui prennent en
considération les dix ou quinze prochaines années, où nous
aurons un volume d'industries plus considérable. C'est pour cela, par
exemple, M. le ministre, M. le Président, qu'on a touché à
la formule Rand. J'étais complètement d'accord avec le ministre.
Je sais par expérience qu'il n'y a aucun ministère aussi
difficile que celui du Travail, et j'ai passé six ministères.
Même si le projet de loi 45 était parfait, i I y au rait
certainement quelqu'un qui ne serait pas content. Quand j'étais
ministre, on disait toujours, à Ottawa: Mackasey n'a jamais
étudié le livre, il ne connaît même pas les
règlements, il ne connaît pas les articles, et je plaide coupable.
En fin de compte, c'est seulement le bon sens qui règle les conflits,
pas les règlements. Si quelqu'un ne veut pas suivre les
règlements, il ne suit pas les règlements.
Je voudrais parler, un peu plus résieusement, de cet article. Je
reviens, M. le ministre, à ce qu'a dit le député de
Sainte-Marie, lorsqu'il a parlé de violence morale. Il a parlé
très sincèrement. Il n'y a rien de plus triste que de voir des
hommes en grève deux semaines, trois semaines, trois mois, quand les
patrons veulent qu'ils soient en grève. Dans le domaine
fédéral, je me rappelle une grève de la Hudson's Bay,
comment est-ce qu'on dirait cela en français? Mining company.
M. Johnson: Oui.
M. Mackasey: Ils ont provoqué exprès une
grève, parce qu'ils avaient beaucoup de produits à leur
disposition. Ils en avaient pour onze mois. C'était plus simple de
fermer toute la ville de Thompson parce qu'il n'y avait qu'une entreprise
là; le diable emporte les travailleurs. J'ai vu cela. C'est pour
ça que j'avais la réputation, j'étais toujours fier
d'être ami des travailleurs. Je dis ça pour une raison. Même
chose pour les débardeurs à Montréal, quand j'ai
quitté ma fonction de ministre du Travail; c'est le premier groupe qui
est venu me voir pour me remercier; ils m'ont encore envoyé un petit
cadeau pour Noël hier, M. le ministre, les débardeurs de
Montréal. J'espère qu'ils n'ont pas pris ça, par exemple,
from one of the ships.
J'ai vu quelque chose qui est toujours la cause des grèves de
violence...
M. Bisaillon: Est-ce que le député me permettrait
une question?
M. Mackasey: Le député de Sainte-Marie a
parlé...
M. Bisaillon: Est-ce que le député pourrait me
permettre une question? Vous avez parlé de cadeau que vous aviez
reçu; il n'y a pas de directive chez vous pour refuser les cadeaux,
non?
M. Mackasey: Quand je reçois un cadeau des syndicats, je
sais que ça vient du coeur, ils ne sont pas intéressés
à m'influencer. Deuxièmement, je ne suis plus leur ministre, ce
sont des amis, par exemple, ce sont des amis. Votre leader, M. Burns,
était avocat pour eux quand j'étais ministre, alors j'ai tout
passé ces affaires-là. Le député de Johnson ici a
souvent assisté à des conférences
fédérales-provinciales. Mais il y a quelque chose, je pense, M.
le ministre. Cela relève de cet article.
Le député de Sainte-Marie a bien soulevé le
problème du piquetage. Selon la loi, probablement que c'est celui qui
est le plus désavantagé ici, parce que c'est la première
fois, dans le domaine provincial, qu'il est député, mais, au
moins, le piquetage, c'est un moyen d'information, pas plus, pas moins; une
ligne de piquetage n'est pas là pour la violence, ce n'est pas là
pour empêcher une personne qui veut entrer de le faire. La ligne de
piquetage n'a pas le droit d'empêcher un employé, un
salarié qui veut traverser la ligne. Le but du piquetage, c'est
seulement de donner de l'information au public.
J'espère que les travailleurs, les autorités, le ministre
même, diront carrément au syndicat: C'est le but du piquetage,
l'information, pas autre chose. Le député de Sainte-Marie partage
les mêmes points de vue. Mais quand les "scabs" arrivent, c'est difficile
pour quelqu'un qui est en grève depuis trois semaines, trois mois, de ne
pas se servir de la ligne de piquetage pour empêcher les "scabs". Je sais
ce que la violence produit. Alors, c'est mieux de ne pas voir les "scabs".
Finalement, je pense qu'une autre chose, ce sont les injonctions
interlocutoires, je pense que vous dites ça en français,
où le syndicat n'est pas protégé par les avocats,
ça arrive un samedi, un dimanche. Mais, en arrivant à l'article
51, M. le ministre, il y a quelque chose dans la loi, pas le principe, parce
que je suis d'accord avec le principe, mais quelque chose qui ne va pas dans la
loi. J'ai peur que quelques paragraphes de l'article 51, si ce n'est pas bien
implanté ou traduit par les fonctionnaires ou par la cour, au lieu
d'empêcher la violence, vont créer plus de violence.
Par exemple, quand on arrive... Mais j'en parlerai plus tard; là,
je parle seulement en gêné-
rai. Quand on parle des services essentiels, il faut décrire ces
services essentiels. Là, par exemple, vous avez un autre conflit.
Une autre chose, le député de Johnson dit qu'il parle pour
les employeurs. Il faut parler aussi, comme le député de Johnson
l'a dit, pour les employeurs. Tous les employeurs ne sont pas des patrons avec
des millions à la banque, surtout dans le domaine provincial. M. le
ministre, qu'est-ce qui arrive, par exemple, et là je parle par
expérience, parce qu'en 1963, je n'étais pas ministre du Travail,
j'avais démissionné, j'avais pris congé... Mais je suis
allé régler, comme citoyen privé, une grève en
Colombie-Britannique. Cet article s'applique exactement, M. le
Président, quant à la question du député de
Sainte-Marie; au moins, je pense qu'il est intéressé.
C'était une entreprise à Vancouver qui avait exactement
trente employés. La grève était légale. Il y avait
une ligne de piquetage. Tous les 30 employés, au bout de la
première semaine, travaillaient à la compétition de cette
entreprise. Je peux la mentionner, c'est une compagnie bien connue. Tout le
temps qu'ils ont travaillé pour la compétition, il y avait,
quoiqu'on en dise, pas de discussion. Ils m'avaient demandé d'aller de
Montréal à Vancouver pour régler le conflit. Je l'ai
réglé. Mais cette grève durait depuis 11 mois, lorsque je
suis arrivé là. Si cela avait duré 12 mois, l'employeur
aurait été en faillite.
Je me demande, dans votre article, le cas, par exemple, parce que nous
sommes dans un travail, dans les petites entreprises, de quinze
employés, qui s'en vont en grève. Les quinze employés sont
immédiatement engagés comme débardeurs, si vous voulez,
dans le domaine de la construction, si vous voulez. Quelqu'un a
souligné, tout à l'heure, qu'il y en a trop qui travaillent dans
la construction et qui sont des professeurs, qui sont chauffeurs de taxi, qui
sont bien autre chose.
Si ces quinze employés travaillent pour un autre entrepreneur,
dans une entreprise et que le syndicat décide de ne pas négocier,
s'il est défendu à l'employeur, selon la loi, d'engager quelqu'un
pour continuer son entreprise, c'est logique qu'après un mois, deux
mois, trois mois, quatre mois, que cette entreprise soit en faillite.
J'ai écouté le député de Sainte-Marie, mais
je veux l'écouter. Il m'a donné un exemple lorsqu'il arrive au
syndicaliste. On dit, en anglais "too wrong to make a rate". On veut que le
bill 45 soit acceptable pour les deux parties, surtout que l'article 51 soit
accepté des deux côtés.
La première réaction, c'est qu'on en vienne avec une
idée nouvelle. C'est non. Ce n'est pas le statu quo. Quelle protection y
a-t-il, M. le ministre, dans cet article, pour le propriétaire d'une
petite entreprise où tous les salariés travaillent ailleurs et
pour qui le syndicat ne négocie pas, de bonne foi ou non? C'est une
manière très simple pour mettre une petite entreprise en
faillite. Si les douze, quinze ou vingt employés travaillent ailleurs
à cause de peut-être le prix de leur syndicat, que ce soit la CSN,
que ce soit la FTQ, que ce soit les enseignants, que ce soit des teamsters",
surtout qu'il peut y avoir des "teamsters" avec le camionnage.
On va prendre les "teamsters" comme exemple. Si les quinze chauffeurs de
voiture, dans une "connotation" provinciale, décident, en attendant,
d'aller travailler dans un syndicat accrédité
fédéralement, l'employeur est pris avec personne pour faire une
négociation, peut-être pour deux, trois, quatre, cinq, six mois.
Au bout de six mois, le syndicat pourra dire à l'employeur: Nous sommes
prêts maintenant à recommencer les discussions. Si cela ne va pas
à leur goût, ils vont aller en grève pour un autre six
mois.
Je dis ici qu'il y a deux raisons qui m'inquiètent, M. le
ministre. La première, la définition des services essentiels.
Qu'est-ce qu'il y a pour protéger les syndicats? Nous ne savons pas
exactement ce que sont les services essentiels. Deuxièmement, quelle est
la protection, pour une petite entreprise, par l'exemple de ce que je viens de
donner. C'est un exemple d'expérience. Si nécessaire, je donnerai
au ministre ou aux autres membres ici, privément, le nom de cette
entreprise, si nous ne voulons pas que cela paraisse dans les journaux.
Le Président (M. Clair): Le député de
Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je ne voudrais pas
reprendre l'ensemble des arguments apportés par mes collègues,
que ce soit de Joliette-Montcalm ou de Sainte-Marie; je partage
entièrement leur point de vue, sauf peut-être sur un point qui est
le suivant. Ils disaient dans leur argumentation ne pas comprendre la
conclusion à laquelle est arrivé le député de
Saint-Laurent. Ils disaient: On croit qu'il est pessimiste, qu'il est une
personne qui voit de façon négative l'ensemble des amendements
proposés et, même on ajoutait, l'ensemble du projet de loi. Mais
je pense, quant à moi, que c'était tout à fait normal que
ce soit comme cela de sa part.
L'ensemble du projet et, en particulier, l'article 97c comporte deux
points de vue totalement et diamétralement opposés. Nous n'avons
pas craint, comme représentants du gouvernemnt, de garder un
préjugé favorable envers les travailleurs. Le
député de Saint-Laurent, dans les années où il a
été au gouvernement on l'a vu clairement gardait
comme d'autres membres du gouvernement, un préjugé favorable
envers les patrons. On n'a qu'à se rappeler ce climat de
méfiance, de guerre entre les patrons et les ouvriers on n'a qu'à
se rappeler le fameux rapport Fantus qui disait que la façon de
régler l'ensemble du travail pour les patrons, c'était de faire
en sorte de rendre le plus difficile possible la syndicalisation et même
de casser les syndicats ouvriers.
Il y a une chose dans l'ensemble de l'article sur lequel je voudrais
plutôt peser: il va falloir que les patrons comprennent que cet article
est aussi bien dans leur intérêt que dans celui des travailleurs.
Cela devient, je pense, une chose que l'on oublie peut-être de faire
valoir, à l'intérieur de cet article. Quand on dit qu'ils doivent
prendre les
moyens nécessaires pour protéger leurs biens, meubles et
immeubles, en vue de les conserver, non pas en vue de produire, non pas en vue
de sortir la marchandise produite, mais bien en vue de protéger, on n'a
qu'à se rappeler quelques exemples, en particulier, comme celui-ci: une
poissonnerie où il y aurait un frigidaire. Le but n'est pas d'entrer du
poisson, d'en congeler de nouveau, ou d'en sortir. Le but est d'éviter
que le réfrigérateur s'il venait à briser, fasse perdre
l'ensemble de ce qui se trouve actuellement à l'intérieur.
On n'a qu'à se rappeler aussi la Place Ville-Marie. Le but de la
loi n'est pas de permettre que la Place Ville-Marie, si jamais il y avait
à l'intérieur de cette bâtisse une grève des gens
qui s'occupent du chauffage, que le chauffage continue comme il est là.
Il permet simplement d'éviter que, dans un cas où existe à
l'extérieur un climat froid comme on le connaît actuellement, les
tuyaux se brisent, que les tuyaux, comme on dit souvent, "pètent". C'est
simplement pour maintenir un niveau d'utilisation minimale de façon que
le système soit quand même convenable lorsque la grève sera
terminée.
On n'a qu'à se rappeler la question des cuves, que ce soit
l'aluminium ou, dans notre milieu, à Shawinigan aussi, la question de la
Shawinigan Chemicals. Quand les gens faisaient des grèves dans ces
secteurs, avant de quitter, ils s'arrangeaient, parce qu'ils savaient qu'ils
reviendraient un jour, ils s'arrangeaient pour empêcher que les cuves
soient gelées, comme on le dit dans ce secteur.
Le but est de permettre l'utilisation des biens, comme le disait le
député de Berthier, de façon que, quand le travail
reprendra aussi bien de la part des employés que de la part du patron,
l'utilisation des biens soit faite le plus rapidement possible, et dans les
conditions les meilleures.
Donc, la loi comme telle, à l'article qu'on étudie, nous
permet de penser que, aussi bien pour le patron que pour les travailleurs, ce
sera une clause qui permettra une meilleure utilisation, une fois la
grève terminée, des instruments qui se trouvent à
l'intérieur de la bâtisse.
C'est ce que je voulais faire ressortir, en disant que comme
représentants du gouvernement, nous avons définitivement pris
pour nous un préjugé favorable envers les travailleurs, tout en
ne négligeant pas l'autre partie qui est les patrons.
M. Bellemare: Est-ce que je peux répondre? Le
Président (M. Clair): M. le ministre. M. Bellemare: Je vais
répondre.
Le Président (M. Clair): II n'y a pas d'autres
intervenants en lice sur les remarques générales à
l'article 51. M. le ministre du Travail.
M. Bisaillon: M. le Président, la question du
député de Johnson...
M. Bellemare: Je pense qu'il y a deux ques- tions. La
première question, il l'a bien prise en note, c'est celle des moyens de
conservation.
M. Johnson: Oui.
M. Bellemare: C'est assez vaste. La deuxième, c'est que si
l'enquêteur est accompagné d'un des membres...
M. Johnson: Je vais y revenir. Si vous me permettez, je pense
qu'il me reste cinq ou six minutes sur mon temps de vingt minutes. Je vais en
profiter pour résumer un peu certaines choses. C'est vrai que cette loi
risque, en cours de route, de poser dans un cas précis ou dans deux cas
précis des difficultés, et peut-être dans plus de cas. De
façon générale, cependant, je suis d'accord sur l'analyse
qu'en a faite le député de Sainte-Marie tout à l'heure.
C'est la raison pour laquelle, d'ailleurs, il y a cette disposition antibriseur
de grève dans le Code. C'est-à-dire qu'on peut présumer
que des travailleurs qui sont en grève, n'ont pas d'intérêt
à voir leur gagne-pain disparaître. Ils n'ont pas
d'intérêt non plus à voir leurs moyens de production, leurs
outils de travail, au-delà de l'entreprise elle-même, ce dont ils
se servent concrètement dans chacun de leur métier, être
détériorés ou détruits. La plus grande preuve qu'on
a de cela au Québec, c'est peut-être parce qu'on l'oublie trop
souvent, parce qu'on a peut-être une grande faiblesse pour une forme de
jaunisse dans les relations du travail au Québec, 95% des conventions
collectives au Québec sont réglées sans grève ni
lock-out. L'immense majorité des grèves et des lock-out donne
lieu, effectivement, à des ententes de services. Etant donné
cette disposition qui a un peu l'allure d'une épée de
Damoclès sur la tête de l'employeur, je suis d'accord, avec
l'analyse qu'en fait le député de Sainte-Marie, que finalement,
c'est d'abord et avant tout une formule incitative. Elle va l'être par
les faits. Celui qui résistera, s'exposera non seulement à
l'opprobre public du fait du rapport d'un enquêteur qui remarquerait et
confinerait dans un rapport qu'il n'y a pas de respect et s'opposerait
également à la possibilité d'un recours judiciaire par
voie d'injonction, et finalement, il s'oppose, par définition, à
des plaintes pénales qui sont prévues au Code et qui sont
extrêmement sévères. Je pense que, compte tenu de
l'ensemble de ces circonstances, il y a quelque chose de fondamentalement
incitatif dans les dispositions de la loi.
Un autre aspect, c'est l'enquêteur, et je pense que c'est
important. C'est clair que c'est une disposition qui déroge aux
principes généraux qu'on retrouve dans l'économie du Code
du travail, c'est-à-dire une espèce de liberté à
peu près totale des parties. L'imposition de la restriction quant aux
personnes dont un employeur peut utiliser les services est une
dérogation de ce principe général. On remarquera que
l'enquêteur n'a pas un pouvoir coercitif. Et c'est un autre niveau
d'incitation.
Quant à la possibilité de la présence d'un
employeur ou d'un représentant de l'employeur dans cette enquête,
à mes yeux, elle était implicite. Mais
cela vaudrait peut-être effectivement la peine de suivre la
suggestion du député de Johnson. Je voudrais bien faire une
formule, parce qu'on a déjà commencé à
élaborer une formule à partir de ces propos, pour bien
spécifier que l'employeur aussi pourrait avoir quelqu'un qu'il
désigne et qui participe à cette enquête avec
l'enquêteur envoyé par le ministère.
Quant à la notion de conservation, on aurait peut-être
tendance à référer au Code de procédure civile qui
parle des mesures conservatoires mais ce n'est pas du tout ce dont il s'agit.
Les mesures conservatoires dans le Code de procédure civile ont une
signification bien particulière. Elles sont de l'ordre un peu d'un
séquestre judiciaire. Ce n'est pas ce dont il s'agit ici.
On se réfère donc à l'acception
générale de ces termes, au sens commun des termes, et à ce
sujet, on peut se référer au Grand Robert et au Larousse. Le
Larousse, évidemment, n'est jamais particulièrement inspirant. Le
mot conservation est défini comme l'état de ce qui est
conservé. Le Larousse a toujours de ces formules ennuyeuses, mais au mot
conserver, on dit bien qu'il s'agit de maintenir en son état, de garder
avec soin. Dans le Grand Robert, conserver, c'est maintenir en bon état,
préserver de l'altération ou de la destruction. Dans le Grand
Robert également, on parle d'une action de conserver comme du maintien
du bon état. On parle d'entretien, on parle de garde. On donne l'exemple
d'un appareil frigorifique de conservation. On pourrait dire qu'une vie sobre a
pour but de conserver la santé. On pourrait dire que c'est dans
l'acception générale du terme qu'il faut accepter la notion de
conservation. Cette acception générale, on la retrouve dans le
Grand Robert, dans le Larousse même s'il n'est pas très
inspirant C'est ce dont il s'agit.
L'avantage du deuxième paragraphe qu'on introduit aujourd'hui,
c'est qu'au-delà de définir non pas la conservation, mais les
gestes qui doivent être de conservation, il définit ce qu'ils ne
doivent pas être, ce qu'ils ne doivent pas viser. Ils ne doivent pas
viser une production de biens et services qui autrement eût
été interdite par l'article 97a. On a donc un cadre
d'interprétation qui est beaucoup plus simple pour celui qui aura
à l'interpréter.
Qui aura à l'interpréter? Dans un premier temps, on
présume qu'il n'y a pas eu d'entente et pourtant, dans la
majorité des cas, il y en aura. Dans un deuxième temps, ce sera
l'employeur qui, avant de prendre la décision et en ce sens on
respecte l'économie du code... On est réaliste en laissant un
droit d'initiative à l'employeur. On définit, par une
espèce d'intervenant extérieur, compte tenu qu'on est en
conciliation volontaire, compte tenu qu'on ne peut prévoir toutes les
situations dans le Code, qu'il faut laisser un droit d'initiative quelque part
aux parties. Ce droit d'initiative, c'est celui de l'employeur. Mais il est
dans un cadre et fort bien balisé, particulièrement avec le
deuxième paragraphe de l'article 97c.
A la lumière de cette rédaction, M. le Président,
et à la lumière des principes généraux, je suis
d'accord avec le député de Notre-Dame-de-
Grâce qui dit que nous cherchons tous ici un même objectif.
Je ne mettrai jamais en doute les intentions du député de
Saint-Laurent et du député de Notre-Dame-de-Grâce ou du
député de Johnson à cet effet. Je pense qu'on ne peut
faire autrement que de souhaiter la paix sociale. On ne peut pas faire
autrement que de souhaiter qu'on ne vive pas des conflits qui soient
marqués par la violence. C'est une question d'appréciation des
moyens qu'il faut prendre. C'est là, évidemment, que nos
perceptions divergent.
Ma perception, c'est qu'a priori on peut faire confiance aux gens. C'est
vrai qu'il y a des cas problèmes. C'est vrai que, s'il y a une loi,
c'est que la société, par définition, est l'objet de
malentendu. A un moment donné, une société, globalement,
comme je pense que la nôtre est en train de le devenir depuis quelques
années, et je ne dis pas de façon partisane, j'essaie de le
constater parce que je pense que la responsabilité n'était pas
seulement au niveau politique, mais elle était au niveau de l'ensemble
des valeurs et des transformations de valeurs dans notre
société... Mais, de façon générale, je pense
que toute notre société est en train de devenir un immense
malentendu. A un moment donné, il faut partir quelque part quand on fait
une loi. C'est notre rôle ici.
Les dispositions anti-briseurs de grève essaient d'affirmer un
principe de base. Deuxièmement, elles fournissent un cadre juridique
qu'on veut le plus précis possible pour éviter des
guérillas judiciaires. Troisièmement, elles respectent
l'économie générale du Code du travail qui laisse aux
parties d'abord et avant tout l'initiative de ce qu'elles font.
Finalement, ces dispositions partent de la conviction, que nous avons
comme gouvernement, que s'il y a des centaines de milliers de salariés
au Québec qui sont capables de régler leurs conditions de travail
autrement que dans le contexte d'une grève ou d'un lock-out et autrement
que dans un contexte de violence, cela peut s'étendre à partir du
moment où il y a un gouvernement qui dit: La première loi majeure
que nous adoptons comme gouvernement en matière de relations du travail,
c'est une loi qui, a priori, postule la confiance qu'il est possible de mettre
entre les mains des travailleurs syndiqués. C'est pour ces raisons, M.
le Président, que je demanderai qu'on adopte...
M. Mackasey: ... plutôt une question. Je vais
peut-être souligner une faiblesse, pas peut-être mais certainement
une faiblesse à l'article 51. Si on veut que l'article 51 soit
adopté, si ce n'est pas acceptable autant de la part de l'employeur que
de l'employé, le salarié, cela ne fera votre affaire, cela va
produire plus de violence. J'ai traité des cas particuliers où
l'employeur, dans une province, a souvent seulement quinze employés ou
à peine dix, douze ou quinze employés, une petite entreprise,
mais quand même accréditée. Si ces quinze employés
travaillent ailleurs, cela arrive souvent, ils ne seront pas pressés de
négocier? Qu'est-ce que l'employeur peut donc faire dans ce
cas-là? Il
ne peut pas engager quelqu'un. Il va être obligé d'attendre
le moment où le syndicat décidera de renouveler, si vous voulez,
ou continuer les discussions. Les syndicats ne sont pas tous des anges, vous
savez, M. le ministre, il y a des syndicats qui me font honte comme
syndicaliste. Supposons que le syndicat décide qu'il n'aime pas un tel
employeur, qu'il va détruire l'employeur, quelle protection l'employeur
a-t-il maintenant? L'employeur est très mal pris dans le sens de "se
protéger". What pressure is in there to force the Union?
J'ai remarqué qu'il y en a ici qui défendent à
leurs employés qui sont en grève de travailler ailleurs pendant
la grève légale, mais défend-on à l'employeur
d'engager ce qu'on appelle des scabs? L'employé, par exemple, le
salarié, s'il est un vrai syndicaliste, ne prendra pas la place de
quelqu'un qui est en chômage ou de quelqu'un qui est membre d'un autre
syndicat. Je connais beaucoup d'exemples de syndicalistes qui remplacent un
autre syndicaliste qui est en grève. You know, nobody has got any
monopoly on honesty, dishonesty or morality. What is there in this law to
protect the employer in the example I gave, where the employee simply goes and
works somewhere else? The employer is stuck with a business, he is not
necessarily a rich man. He is stuck. What he is expected to do? What is his
recourse under this act, under this section. What is he supposed to do?
M.Johnson: II n'y a pas de recours au sens de la loi telle
qu'elle est rédigée.
M. Mackasey: Pardon?
M. Johnson: II n'y a pas de recours au sens de la loi
présentement.
M. Mackasey: Alors, est-ce que c'est la justice? Do you think
that this is balanced that this is right? I respect your honesty in saying: II
n'y a pas de recours. Mais ne me dites pas qu'on va adopter une loi ici qui
paralyse l'employeur, qui a aussi des droits et à qui on refuse la
justice. I hope you have a better answer than that.
M. Johnson: Ce que je dis et je l'ai dit au début, j'ai
refusé depuis le début de considérer que le pendant des
dispositions anti-briseurs de grève comme le suggéraient
certains, était d'interdire aux salariés de se trouver un travail
ailleurs, parce que non seulement cela peut présenter des
difficultés d'application mais cela, en soi, ce n'est pas une bonne
raison. Mais c'est qu'on ne peut pas les mettre sur un pied
d'égalité, et même si je crois que la majorité des
PME, ce ne sont pas des gros méchants qui veulent exploiter un sous
prolétariat, je connais des gens qui sont dans les PME et qui sont
directeur général, président, seul actionnaire, comptable
et le gars qui tape à la machine de leur entreprise où ils
travaillent quatorze heures par jour pour s'assurer un revenu d'à peu
près $25 000 par année et qui paient des salaires semblables
à ceux d'industries analogues autour d'eux. Ce ne sont pas
nécessairement des méchants. Au niveau des convictions et des
perceptions, j'espère qu'on se comprend là-dessus.
Ceci dit, je pense qu'on ne peut pas mettre une entreprise, en tant
qu'entreprise, sur un pied d'égalité avec un salarié qui,
lui, est en lock-out ou en grève et qui a une allocation de subsistance
de $20 par semaine. Il a une famille à faire vivre. On ne peut pas lui
interdire de travailler ailleurs.
M. Mackasey: S'il veut être le seul patron d'une entreprise
familiale, si tout ce qu'il a à sa disposition est dans cette
entreprise, everything that he built up for 20 years should go down the river
because he has no recourse to the law in the event that 15 employees decided to
put him out of business by going on strike legally, Mr Minister, walking away
for six months, working on an other job, which they all can do. In the
meantime, the employer is helpless, because he cannot hire people to replace
them. There is nothing in there that says that he can appeal to you, let us
say, in good faith. It is an argument that... Il n'agit pas de bonne foi.
The reason that I am against article 51 and must vote against it,
although I approve of the principle of not bringing scabs in, is that it is
unbalanced. It is unbalanced in that in eliminating a potential source of
violence, you are penalizing, placing at the disposal of the Union, if any
Union wants to use it the wrong way, a method of putting out of business a
small business, particularly where you only have 30 employees, or 15. In fact,
a competitor can hire the fifteen in the meantime in order to create a
monopoly, which is the case I happen to know about in British Columbia.
J'ai été fort surpris que les représentants ici,
qui représentent des comtés où il y a de petites
entreprises, ne comprennent pas que l'employeur d'une petite entreprise, pas
nécessairement une corporation, mais une entreprise privée avec
quinze employés, peut être mis en faillite par le syndicat, avec
l'article 51, en trois mois. Je n'ai pas entendu un mot, jusqu'à
maintenant, pour dire que cet employeur a aussi des droits, autant que le
syndicat. C'est facile. C'est pour cela que je suis fort surpris. C'est pour
cela que j'ai dit que nous sommes ici pour avoir la paix industrielle, mais
l'employeur a des droits aussi, surtout dans les petits villages où il
n'y a pas tellement d'entreprises. Avec l'article 51, potentiellement, un
syndicat peut mettre cet homme en faillite en trois mois tout simplement, par
une grève légale; allez au bien-être social, si vous
voulez, mais l'employeur ne peut engager personne pour continuer la production.
Au bout de trois mois, l'homme est en faillite...
Le Président (M. Clair): M. le ministre du Travail.
M. Johnson: Je ferai une dernière remarque
là-dessus, M. le Président, puisque c'est tout le temps qu'il me
reste également. Dans son argumentation, le député de
Notre-Dame-de-Grâce
semble présupposer que les travailleurs ont intérêt
à fermer l'industrie où ils travaillent. Cela pourrait arriver
dans un cas particulier. Ce n'est pas impossible. Cela pourrait arriver qu'on
ait affaire à la collusion avec un compétiteur en face qui engage
les gens de l'autre côté de la rue. Ce n'est pas impossible. Je
vais vous donner un exemple encore plus difficile d'application de cette loi et
de ses dispositions. Il y a au Saguenay-Lac-Saint-Jean, à Chicoutimi et
à Jonquière, 9000 travailleurs de l'aluminium qui
dépendent, pour leur travail, de l'acheminement de bauxite qui est
transportée par une compagnie qui n'a rien à voir avec la
compagnie Alcan et qui s'appelle Roberval-Saguenay. Le jour où les 185
opérateurs de trains qui transportent la bauxite jusqu'à
Chicoutimi et Jonquière font une grève légale, il ne peut
y avoir de scabs et cela veut dire qu'en fin de compte, il risque d'y avoir
9000 chômeurs forcés. Dans ce contexte-là, je pense qu'il
ne faut pas se faire d'illusion sur ce que signifie la solidarité
intersyndicale et la solidarité interpatronale. Ce sont des
mécanismes, dans l'économie, qui jouent; ce sont des
mécanismes à l'intérieur des institutions patronales et
syndicales qui jouent et ce sont des mécanismes qui, à un moment
donné, peuvent toucher les autorités politiques d'une
région.
M. Mackasey: Mais, M. le ministre, l'Alcan n'est pas faible et ce
n'est pas la seule source de production ici, au Québec. Vous parlez de
milliers d'employés, mais vous n'avez pas répondu à ma
question qui est plus fondamentale. Quelle est la protection vis-à-vis
de l'article 51 d'un employeur, we call it a family business, dans un village
qui a seulement quinze employés? Ce n'est pas Alcan, ce n'est pas
General Motors à Sainte-Thérèse, ce ne sont pas ces
compagnies qui ne peuvent pas arriver avec l'article 51, vous le savez autant
que moi. Ils ont assez de moyen. C'est le petit entrepreneur dans un village,
avec quinze employés qui, mis en grève, à part les
salariés accrédités, n'a que lui-même,
peut-être son épouse et peut-être une secrétaire
comme employés. C'est certain qu'ils ne peuvent pas remplacer les quinze
hommes qui sont en grève pour continuer la production. Cet
homme-là est en faillite au bout de trois mois. Vous n'avez qu'à
ajouter un autre amendement à votre article, pour au moins
protéger cet homme, en disant: When in his opinion the Union is not
acting in good faith, that he can go to somebody and get some justice. ce n'est
pas ça, l'article 51 est mal fait, parce qu'il prétend que tous
les problèmes de violence viennent seulement de la part de l'employeur.
We are helping the unions, but, at the same time, we are creating an imbalance.
What have you done in article 51 to balance the employer's rights against abuse
of the new features? That is what is bothering me, philosophically.
M. Johnson: Je le regrette, M. le Président, je ne
dévie pas de la question du député de
Notre-Dame-de-Grâce. Ce que je dis, c'est que l'article 51 est
susceptible de poser des problèmes exac- tement de la nature dont il
parle. Je peux vous dire que, depuis deux mois, on a réfléchi
à différentes formules, on a inventé des scénarios
comme celui que vous décrivez et comme celui que j'ai décrit dans
le cas de Roberval-Saguenay. Sauf qu'à partir du moment où on
choisit de faire un texte de législation et de vivre avec les
conséquences de ce texte, comme gouvernement, on le fait. On n'a pas
trouvé de solution. Si le député de
Notre-Dame-de-Grâce a une solution facile, simple à ça,
j'aimerais qu'il l'élabore. Mais je ne vois pas de solution.
M. Mackasey: M. le ministre...
Le Président (M. Clair): M. le ministre, vous ne devriez
pas poser de question au député de Notre-Dame-de-Grâce,
parce que, malheureusement, il a épuisé son temps.
M. Mackasey: D'accord, mais...
Le Président (M. Clair): Le député de...
M. Mackasey: ... je veux souligner une chose. Le ministre n'a pas
de réponse. En disant qu'il n'a pas de réponse, je peux dire que
le principe de l'article 51 n'est pas valable, parce que ça va
créer an imbalance, un déséquilibre, un manque de
protection pour l'employeur que je viens de décrire. Ils sont bien plus
nombreux, ceux que je viens de décrire, que l'entreprise Alcan.
Le Président (M. Clair): Le député de
Berthier a demandé la parole.
M. Mercier: Dans l'intervention que j'ai faite
précédemment, je crois avoir énoncé ce qui pourrait
être une nypothèse de solution pour faire face à des
situations semblables. Enfin, on a constaté, depuis dix ans ou quinze
ans, un affermissement du pouvoir des centrales syndicales, qui est un support
énorme aux syndicats de base. On n'a pas constaté,
parallèlement à ça, une certaine solidarité
patronale, au moins sectorielle en tout cas. Je pense que ça pourrait
être l'occasion pour le patronat d'essayer de trouver une façon de
se regrouper et de faire face à ces cas extrêmes, parce que des
situations semblables, ça se produit quand même relativement peu
souvent.
Ce serait peut-être l'occasion d'établir des
mécanismes qui pourraient permettre de s'équiper pour faire face
à ces cas ultimes qui peuvent avoir pour origine une certaine
stratégie syndicale sectorielle.
Je pense qu'il y a un contrepoids qui n'existe pas présentement
et probablement que la solution résiderait dans une voie semblable.
M. Mackasey: Ce n'est pas non plus une bonne idée.
Sérieusement, si vous voulez discuter une autre fois avec moi le concept
sectoriel, je connais le pour et le contre of it as well. Dans ce
problème, du côté du patronat, s'il y a 60 patrons, vous
avez deux grèves, la grève entre le patron et les salariés
et la grève entre les patrons et les patrons.
Motion de retrait de l'article 51
Le Président (M. Clair): Messieurs, je n'ai pas d'autre
intervenant concernant l'exposé général sur l'article 51.
Nous en venons maintenant, j'imagine, à la motion du
député de Saint-Laurent intitulée "Motion de retrait de
l'article 51". Voulez-vous en donner lecture vous-même, M. le
député de Saint-Laurent, puisque c'est vous qui la
présentez et non le président.
M. Forget: Ma motion se lit comme suit, il n'y a qu'une seule
ligne, M. le Président, elle est concise: "Que l'article 51 soit
retranché du projet de loi no 45."
M. Johnson: M. le Président, sur la
recevabilité...
Le Président (M. Clair): Le ministre du Travail, sur la
recevabilité.
M. Johnson: II me paraît évident, à la
lumière de notre règlement, que cette motion est irrecevable, et
je pense que le député de Saint-Laurent va en convenir avec moi,
dans la mesure où cette motion va carrément à l'encontre
d'un principe adopté en deuxième lecture, le principe des
dispositions anti-briseurs de grève ayant été
adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, on
ne peut évidemment pas retirer ces dispositions sur une simple motion,
cette possibilité n'appartenant qu'au responsable, qu'au parrain de la
loi qui pourrait, en commission parlementaire, effectivement, retirer les
dispositions. Ce pouvoir n'appartient, évidemment pas, à la
commission.
Le Président (M. Clair): Le député de
Johnson, sur la recevabilité de la motion.
M. Bellemare: Sur la recevabilité. J'adhère
ex-traordinairement, parce que c'est le règlement qui y pourvoit, que la
commission peut amender un projet de loi pourvu que l'amendement ne soit pas
étranger à l'objet du projet.
Imaginez-vous si on regarde le projet lui-même, qui comprend deux
grandes clauses, à mon sens, le précompte et la loi anti-scabs,
ce sont les deux principes sur lesquels on a voté en deuxième
lecture. On ne pourrait pas changer l'ordre de la Chambre, de la
deuxième lecture, aujourd'hui, en votant de retrancher
complètement l'article 45 qui est un des principes fondamentaux de la
loi 45.
Le Président (M. Clair): Sur la recevabilité de la
motion, M. le député de Bourassa.
M. Laplante: Si on regarde l'article 56, cinquième
paragraphe, c'est une motion dilatoire, en somme, dont l'objet est
d'écarter et de différer les considérations d'une affaire
en cause. Vous vous reportez à l'article 154, deuxième
paragraphe. Tout de suite, cela dit par lui-même que cela ne peut
être recevable, sans aller plus loin, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Le député de
Sainte-Marie, sur la recevabilité de la motion.
M. Bisaillon: M. le Président, je ne me poserai sur aucun
article du règlement, mais sur l'intervention du député de
Notre-Dame-de-Grâce qui, dans son intervention, s'est dit d'accord avec
les principes de l'article 51, mais qui différait d'opinion sur une
modalité.
Il me semble que le député de Notre-Dame-de-Grâce a
lui-même admis que le fait de retirer 51, c'était de retirer un
principe.
Le Président (M. Clair): Sur la recevabilité de la
motion, le député de Saint-Laurent. Le député de
Saint-Laurent, sur la recevabilité de la motion.
M. Forget: M. le Président, tout d'abord, c'est
peut-être une plaisanterie de la part du député de
Sainte-Marie, mais c'est évident que ce que le député de
Notre-Dame-de-Grâce a voulu signifier, c'est la même chose que ce
que j'ai dit moi-même...
M. Bisaillon: M. le Président, pourquoi le
député de Saint-Laurent...
M. Forget: Je n'ai pas interrompu le député de
Sainte-Marie dans son interprétation libre de la parole des
autres...
Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bisaillon: Je ne vois pas pourquoi le député me
traite de plaisantin.
Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!
M. le député de Sainte-Marie, sur la question de la
recevabilité de la motion, vous avez indiqué qu'il vous
apparaissait que la motion du député de Saint-Laurent allait
à l'encontre d'un principe...
M. Forget: Oui.
Le Président (M. Clair):... parce que le
député de Notre-Dame-de-Grâce avait...
M. Bisaillon: ... admis le principe.
Le Président (M. Clair): ... selon vous, admis qu'il
s'agissait là d'un principe, mais dans la même mesure, vous
permettrez au député de Saint-Laurent...
M. Bisaillon: Je ne veux pas qu'il me traite de plaisantin.
Le Président (M. Clair): ... d'expliquer si oui ou non, il
s'agit d'un principe. Mais c'est toujours, M. le député de
Saint-Laurent, sur la recevabilité de la motion et non sur le fond, et
dans la même mesure où j'ai permis au député de
Sainte-Marie d'y faire allusion.
M. Forget: Dans la mesure où on cherche à
interpréter les paroles d'un collègue pour y voir là
une admission d'un point qu'on veut faire valoir, qu'on me permette de
dire qu'on peut être en faveur de la vertu ou de la tarte aux pommes,
comme a dit le ministre à une autre occasion, sans pour autant que la
loi légifère la vertu.
C'est la raison pour laquelle, de façon globale, j'ai
indiqué que même si on est en faveur de la vertu, on n'est pas
nécessairement en faveur d'une loi qui dit que tout le monde doit
être vertueux, dans un projet de loi. On peut être en faveur d'un
principe, sans croire qu'il s'agit là d'un principe de
législation. C'est bien différent. A titre de principe de
législation, nous croyons que cet amendement devrait être
retiré. La raison en est que, bien sûr, on peut nous faire des
querelles de procédure, mais sur la base de l'argumentation qui a
été développée, il est exact cependant de croire
que l'article 85 du règlement permet, avec la permission de son auteur,
le retrait d'une motion, ce qui implique qu'effectivement, la motion de retrait
n'est pas nécessairement présentée par l'auteur. Ce que
l'on indique cependant, c'est avec la permission de l'auteur.
Donc, une motion qui origine d'une autre source que de l'auteur d'une
motion peut être considérée, en commission parlementaire.
C'est implicitement contenu dans l'article 85. Bien sûr, on dit qu'il
doit y avoir concours. C'est une autre question. C'est une étape
ultérieure. C'est quand on en viendra au fond que l'auteur pourra nous
dire s'il y concourt ou non. Il dispose d'un droit de veto sur la motion.
Mais, comme de toute manière, celui qui est l'auteur de la motion
est également ministre et commande à la majorité, c'est
une subtilité de forme, mais dans le fond, cela signifie très
clairement que si sa permission est requise, ce n'est donc pas lui qui le fait,
c'est quelqu'un d'autre qui fait la motion.
Pour cette raison, je crois qu'elle est recevable, autant qu'une autre
motion, M. le président; elle n'est pas dilatoire, au contraire. S'il y
a quelque chose qui va au fond d'une motion, c'est bien une motion qui vise
à rejeter quelque chose. Ce n'est certainement pas une motion qui vise
à le faire étudier plus tard, ce qui est proprement la
définition d'une motion dilatoire. On dit qu'il n'y aura pas de moment
plus tard où ce sera approprié; ce n'est jamais le moment
où c'est approprié.
Je pense que c'est assez clair; c'est une motion de fond qui peut
être faite par quelque membre que ce soit de la commission qui devra, au
moment où on en décrira l'attitude de chacun, pour être
passée, recevoir l'admission, bien sûr, du ministre qui dispose
d'un droit de veto sur son adoption. Mais cela c'est une étape
ultérieure, M. le Président, je le soumets humblement; pour
l'instant, je crois que la motion est recevable.
Le Président (M. Clair): Sur la recevabilité, M. le
député de Bourassa.
M. Laplante: Je crois, M. le Président, qu'on ne peut
s'appuyer sur 85, mais qu'on doit s'appliquer seulement sur 154 qui est une
motion en deuxième lecture actuellement à l'étude en
commission parlementaire.
M. Forget: ... fini la deuxième lecture.
Le Président (M. Clair): D'autres intervenants, sur la
recevabilité de la motion du député de Saint-Laurent.
M. Bellemare: Un amendement doit se rapporter directement au
sujet de la motion proposée. Elle ne peut avoir des objets suivants:
retrancher, ajouter les mots et les remplacer par d'autres. Elle est recevable
si son effet est d'écarter la question principale. Alors, c'est 70, M.
le Président.
Décision du président
Le Président (M. Clair): Alors, messieurs. S'il n'y a pas
d'autres intervenants sur la motion du député de Saint-Laurent,
je suis disposé à rendre ma décision. La motion du
député de Saint-Laurent s'intitule "Motion de retrait de
l'article 51". Elle se lit comme suit: Que l'article 51 soit retranché
du projet de loi no 45. Il y a quelque chose qui m'apparaît, à
première vue, discordant à la motion du député de
Saint-Laurent. En effet, elle s'intitule "Motion de retrait de l'article
51".
Or, le langage utilisé dans la motion est le langage d'une motion
d'amendement, et c'est probablement de là que vient la difficulté
d'interprétation sur la recevabilité de cette motion. Si on la
considère d'abord comme une motion de retrait de l'article 51, la
recevabilité de cette motion doit être décidée en
vertu de l'article 85 de notre règlement qui se lit comme suit: "Tant qu
une motion n'a pas été mise en délibération, elle
peut être retirée avec la permission du député qui
l'a présentée ". Après la mise en
délibération, elle peut faire l'objet d'une motion non
annoncée de retrait avec la permission de son auteur. Le proposeur de la
motion de retrait doit se borner à énoncer succinctement ses
motifs, et la motion est mise immédiatement aux voix. Pour que cette
motion de retrait soit reçue en vertu de l'article 85, elle devrait,
premièrement, constituer en soi, par son libellé, une motion de
retrait. Or, le langage utilisé en fait effectivement une motion
d'amendement, premièrement.
Deuxièmement, pour qu'elle soit reçue, cette motion de
retrait devrait, suivant l'interprétation que je fais de l'article 85,
être acceptée par le proposeur de la motion principale qui est la
motion d'adoption de l'article 51 qui a déjà été
formulé par le ministre du Travail, d'une part, et il m'apparaît
qu'il n'y a pas effectivement permission du ministre qui a
présenté la motion d'acceptation de l'article 51 à cet
effet.
De plus, à l'article 85, on mentionne bien: "Tant qu'une motion
n'a pas été mise en délibération". Or, la motion du
ministre du Travail est déjà mise en délibération.
Une telle motion de retrait aurait dû être présentée,
selon moi, dès le départ, dès que la commission a
été saisie de l'étude du paragraphe 51.
M. Forget: A la demande du député de Johnson.
Le Président (M. Clair): De toute façon, il s'agit
là d'un élément qui, dans le cas, n'est pas le seul
déterminant, puisqu'il y a deux autres facteurs que j'ai
mentionnés; premièrement, à sa face même, la motion
constitue non pas une motion de retrait, mais une motion d'amendement. D'autre
part, il n'y a pas permission du député qui l'a
présentée pour qu'elle soit retirée. Si on
considère maintenant la motion comme une motion d'amendement, il
m'apparaît qu'effectivement, c'est beaucoup plus une motion d'amendement.
On doit considérer, à ce moment, la motion d'amendement suivant
les critères qui prévalent pour la recevabilité des
motions d'amendement. L'article qui m'apparaît déterminant, dans
ce cas, est vraiment l'article 70 qui mentionne bien qu'un amendement est
irrecevable si son effet est d'écarter la question principale sur
laquelle il a été proposé. Or, il est bien visible,
à l'oeil nu, que l'effet de la motion du député de
Saint-Laurent, c'est véritablement d'écarter la question
principale sur laquelle elle a été proposée.
De plus, les articles 154 et 158 de notre règlement
spécifient, premièrement, à l'article 158, qu'une
commission ne peut modifier dans son principe une proposition qui a
déjà été acceptée par l'Assemblée.
Or, le principe des dispositions anti-briseurs de grève a
déjà été accepté en deuxième lecture.
Les intervenants de tout les côtés de cette commission ont reconnu
qu'il s'agissait là, effectivement, d'un principe.
Enfin, l'article 154 de notre règlement, dans son deuxième
alinéa, prévoit que la commission peut amender un projet de loi
pourvu que l'amendement ne soit pas étranger à l'objet du projet
de loi, ce qui n'est pas le cas actuellement, et qu'il ne s'oppose pas au
principe affirmé en deuxième lecture, ce qui est le cas
actuellement. Il m'apparaît clairement qu'accepter la motion d'amendement
du député de Saint-Laurent aurait pour effet de s'opposer au
principe affirmé en deuxième lecture. Pour toutes ces raisons, je
déclare irrecevable la motion du député de Saint-Laurent,
à savoir que l'article 51 soit retranché du projet de loi no
45.
Des Voix: Vote.
Reprise du débat
M. Johnson: M. le Président, avant que vous n'appeliez aux
voix de façon nominale l'article 51 du projet de loi, j'aimerais inclure
la suggestion du député de Johnson au deuxième
alinéa de 97d. 97d, en ce moment, se lit comme suit: L'enquêteur
peut visiter les lieux de travail, et se faire accompagner d'une personne
désignée par l'association accréditée et de toute
autre personne dont il juge la présence nécessaire aux fins de
son enquête. La modification aurait pour effet de rendre explicite ce qui
était, évidemment, implicite à mes yeux, que
l'enquêteur peut visiter les lieux de travail, et se faire accompagner
d'une personne désignée par l'association
accréditée, d'une personne désignée par
l'employeur, ainsi que de toute personne dont il juge la présence, etc.,
pour se lire ainsi: "L'enquêteur peut visiter les lieux de travail et se
faire accompagner d'une personne désignée par l'association
accréditée, d'une personne désignée par l'employeur
ainsi que de toute autre personne dont il juge la présence
nécessaire aux fins de son enquête."
M. Bellemare: Cela couvrirait un chimiste, un ingénieur,
un spécialiste de tel ou tel domaine comme les explosifs etc. Merci.
Cela me va.
Une Voix: Vote.
Le Président (M. Clair): L'article 51 tel qu'amendé
est il adopté?
M. Forget: Avant que le vote ne soit demandé, M. le
Président, si des membres de la commission ont des questions ou des
observations à adresser au ministre, cela peut-il être fait?
M. Chevrette: ... au temps de parole. Nos vingt minutes sont
écoulées. A moins que vos vingt minutes ne soient pas
écoulées.
M. Forget: Si je comprends bien, le député de
Joliette-Montcalm insiste pour que le règlement soit suivi à la
lettre en ce sens que, s'il n'y a pas de motion d'amendement, on ne puisse
soulever aucun point.
M. Laplante: Pour ma part, pour autant qu'il n'y ait pas d'abus,
je n'ai pas... Plus on est éclairé, mieux c'est pour une pareille
loi. Je suis d'accord.
Le Président (M. Clair): S'il y a consentement unanime
pour...
M. Johnson: M. le Président...
Le Président (M. Clair): ... qu'on utilise quelques
minutes à cet effet sans rendre de décision sur le
règlement, la commission étant maîtresse de ses travaux.
Si, me dispensant d'interpréter le règlement à cet effet,
il y a un consentement unanime pour que d'ici 18 heures on puisse
continuer.
M. Johnson: Mettre aux voix.
M. Bisaillon: Est-ce que cela suppose que le député
de Saint-Laurent est d'accord pour qu'on vote sur la motion avant 18
heures?
M. Forget: Ecoutez, M. le Président, je ne veux pas
être à cheval sur les règlements, mais je ne voudrais quand
même pas qu'on puisse dire, et je suis sûr que le ministre ne
souhaiterait pas non plus qu'on puisse dire qu'à défaut de
présenter de multiples amendements la discussion d'un article ne peut se
faire régulièrement. Ce serait nous inviter et inviter
l'Opposition dans toutes les occa-
sions à multiplier les amendements en proportion de l'importance
qu'elle veut donner à la discussion d'un sujet. Je pense que cela
dépasserait l'intention de nos règlements qui est de limiter le
débat plutôt que d'encourager sa longueur. Comme on est à
quelques minutes de six heures, ce serait peut-être abusif. D'autant plus
que sur ce point de règlement, l'article 160, à strictement
parler, permettrait, vous autoriserait à parler vingt minutes non
seulement sur chaque article, mais sur chaque paragraphe sans même qu'une
motion soit faite pour amender le projet de loi. Comme ce projet de loi
comporte un nombre de paragraphes que je n'ai pas comptés mais qui sont
substantiels, je pense que même l'interprétation stricte du
règlement nous permettrait une discussion de vingt minutes sur chacun
des paragraphes.
M. Bellemare: M. le Président...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Johnson.
M. Bellemare: M. le Président, je n'ai aucune objection
à ce que le député de Saint-Laurent puisse faire valoir
ses arguments quant aux articles et aux sous-paragraphes. Tout à
l'heure, dans mon tour d'horizon, j'ai signalé quelques articles qui
n'étaient pas clairs... Le ministre m'a répondu au sujet des
moyens de conservation et particulièrement en ce qui concerne le fait
que l'enquêteur soit accompagné d'un représentant de
l'employeur.
Si l'honorable député de Saint-Laurent a des questions
générales dans ce sens-là, je n'aurais pas d'objection.
Mais on a eu l'avantage de parcourir presque entièrement tous les
amendements qui nous ont été donnés, dans notre
intervention. Je suis bien heureux si le député de Saint-Laurent
a de nouveau des questions ou des explications sur certaines définitions
à demander, mais que cela ne soit pas un recommencement de tout le
débat.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: M. le Président, j'aurais bien aimé
avoir la chance de me prononcer sur l'article, parce que je dois quitter dans
une minute pour une mission, mais, pour les fins du procès-verbal, qu'il
soit noté que je suis d'accord avec l'amendement déposé
par le ministre.
M. Johnson: M. le Président, je ne m'oppose nullement
à ce que le député de Saint-Laurent nous adresse ses
quelques remarques, qu'il pose ses questions. J'aimerais que nous puissions
quand même passer aux voix avant 18 heures.
M. Forget: M. le Président, le ministre me fait des
réticences pour la discussion de cette mesure. J'ai dit ce que je
pensais que le règlement signifiait, quelles étaient les
possibilités de discussion que le règlement nous permet. Je vous
demandais simplement de vous prononcer, de donner une directive. Je persiste
à croire que nous avons le droit de discuter sur chacun des paragraphes.
Maintenant, si le ministre s'y objecte, vous avez à trancher entre les
deux interprétations. Vous connaissez notre pensée
là-dessus. Je ne vais pas me répéter. Je vous laisse cette
responsabilité.
Le Président (M. Clair): Messieurs, puisqu'il n'y a pas de
consentement...
M. Bellemare: Avant que vous rendiez votre décision,
est-ce que je n'ai pas entendu tout à l'heure l'honorable
député de Saint-Laurent dire: Je n'aurai pas d'autres amendements
que celui-là?
M. Laplante: Exactement.
M. Bellemare: Est-ce qu'il n'a pas dit cela dans son
discours?
M. Bisaillon: Oui. Il a même dit que discuter dans le
détail, c'était quasiment l'approuver en principe, et comme il ne
l'approuvait pas en principe, il ne le discuterait pas en détail.
M. Bellemare: S'il l'a dit... L'Opposition...
M. Forget: Le député de Sainte-Marie fait des
romans, chaque fois qu'on parle, il fait des interprétations. J'ai dit
qu'on ne présenterait pas d'amendements...
Le Président (M. Clair): A l'ordre!
M. Forget: ... mais on réclame le droit de le discuter en
détail. C'est clair, cela.
Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît,
messieurs! A l'ordre, s'il vous plaît.
M. Bisaillon: Cela doit être parce que vous prêtez
flanc au roman.
Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bisaillon: Du calme, du calme! Le Président (M.
Clair): Messieurs...
M. Forget: Bornez-vous à parler pour vous-même.
Le Président (M. Clair): ... en vertu de l'article 160 de
notre règlement, un député peut prendre la parole sur le
même point aussi souvent qu'il lui plaît à condition de ne
parler plus de vingt minutes en tout sur un même article, un même
paragraphe, une même motion ou une même question d'ordre ou de
règlement. J'aurais aimé qu'une entente intervienne pour limiter
le débat, puisque c'est beaucoup plus facile à ce
moment-là pour le président de déterminer le temps de
parole, et pour aucune autre raison. Dans les circonstances,
parce qu'il n'y a pas d'entente spécifique pour une durée
du débat, j'appliquerai à la lettre notre règlement.
Je demanderai donc au député de Saint-Laurent de bien
vouloir spécifier, justement pour me faciliter la tâche à
tenir son temps de parole, avant qu'il ne prenne la parole, sur quel
paragraphe, sur quel article ou sur quelle motion ou question de
règlement il entend prendre la parole. M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, je voudrais comprendre votre
question. Est-ce que vous me demandez d'avance de vous dire tous les
paragraphes sur lesquels je veux parler ou, chaque fois que je prendrai la
parole, de vous dire clairement sur quel paragraphe je prends la parole?
Le Président (M. Clair): Chaque fois, M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: Chaque fois. Je ne vois aucune objection, M. le
Président, à procéder de cette façon. Je ne sais
pas si mon collègue a des objections, mais je pense que c'est une
procédure tout à fait régulière.
M. Mackasey: Non, c'est parfait.
M. Forget: M. le Président, comme il est 17 h 55, je me
demande si on pourrait considérer l'ajournement avant que l'on n'aborde
une de ces questions.
M. Johnson: Prenez au moins ces cinq minutes.
M. Forget: Volontiers. M. le Président, mes remarques
porteront... Avant, il serait peut-être bon de faire une remarque
préliminaire, étant donné votre directive, M. le
Président, qui me demande de vous indiquer précisément le
paragraphe. Pourvu que nous ne revenions pas deux fois au même
paragraphe, je présume qu'il n'est pas strictement essentiel de les
aborder dans l'ordre dans lesquels ils figurent, c'est-à-dire que si je
saute, pour donner un exemple, au quatrième paragraphe, un autre membre
de la commission pourrait, après moi, invoquer son droit de parole sur
le premier ou le deuxième. Sinon il faudrait s'entendre d'avance et
dresser un agenda.
M. Bellemare: Alors, là, M. le Président, je n'ai
rien à dire sur tout l'article. Je parle en mon nom personnel.
Le Président (M. Clair): Alors, M. le député
de Saint-Laurent, en réponse à votre question, effectivement,
dans notre règlement, il n'est pas prévu d'ordre
spécifique dans lequel on peut exercer son droit de parole sur un
même paragraphe. Tout ce que je vous demanderais, encore une fois dans le
but de faciliter la tâche du président, c'est de tâcher,
autant que faire se peut, de vous entendre avec les autres intervenants de
votre formation dans le but de me permettre, autant que faire se peut, de tenir
le temps de parole adéquatement.
M. Laplante: Une question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Bourassa, sur une question de règlement.
M. Laplante: Au début, il y a eu une entente pour
procéder, paragraphe par paragraphe, ensuite de passer au vote sur
l'article de la loi. Si j'ai bien compris, après l'exposé du
ministreparce qu'il a commencé, paragraphe par paragraphe
dans ma tête, tous les articles avant le c) étaient
déjà adoptés en principe.
Si on le suit, le député de Saint-Laurent a
préféré tout de suite aller au paragraphe c), cela veut
dire que les paragraphes c) et d) seraient à discuter. Quant à
revenir en arrière, sur les paragraphes a) et b) et c), je crois qu'on
ne le peut plus, si on suit l'entente qui s'est faite à cette table. Ce
serait bon de la respecter jusqu'au bout. Je ne peux nier le droit de parole
d'aucun des membres de cette commission, sur tous les autres articles à
venir.
Actuellement, on a voté sur l'élimination de l'article 51
au complet, que le député de Saint-Laurent avait proposée
comme motion. Mais auparavant aussi, on avait discuté des autres
articles et il a préféré aller au paragraphe c) tout de
suite. Je crois que ce serait au paragraphe d) et aux autres articles qu'on
pourrait parler vingt minutes sur tous les paragraphes.
M. Bellemare: Si je comprends bien le député de
Bourassa, si on adopte tout de suite l'article 97a, il sera adopté,
l'article 97b, l'article 97c aussi...
M. Laplante: C'est fait déjà.
M. Bellemare: II reste... non, non.
M. Laplante: On a discuté seulement du paragraphe c),
jusqu'à maintenant.
M. Bellemare: Le président a donné le droit de
parole sur chacun des paragraphes. Moi, j'ai dit que je n'avais rien à
dire sur tout...
M. Laplante: D'accord.
M. Bellemare: Mais si on adopte tout de suite les paragraphes a),
b), c), il restera le paragraphe d).
M. Laplante: D'accord.
M. Bellemare: Alors, là, on pourra s'exprimer sur le
paragraphe d), si on veut.
M. Laplante: D'accord.
M. Bellemare: Ce sera fait jusque là.
M. Johnson: M. le Président, je vais demander la
suspension de nos travaux, étant donné qu'il est 18 heures.
Le Président (M. Clair): La commission suspend ses travaux
jusqu'à 20 heures.
(Fin de la séance à 18 h)
Reprise de la séance à 20 h 10
Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!
La commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de
l'immigration est réunie pour continuer l'examen, article par article,
du projet de loi 45. Au moment où nous avions suspendu nos travaux, nous
avions presque terminé l'étude de l'article 51. Le
député de Saint-Laurent nous avait prévenu qu'il allait
demander la parole.
M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: Merci, M. le Président. Je vais ouvrir mon
cahier pour savoir où je me retrouve. M. le Président, je vais
poser une question circonstanciée au ministre sur le paragraphe 97a,
sous-paragraphe b).
Cette disposition vise, par référence, à la
possibilité d'un accord ou à la possibilité d'une
ordonnance ou d'une décision rendue, en vertu de l'article 99 ou en
vertu de la Loi sur les services essentiels, à des dérogations
à la règle générale selon laquelle il est interdit
à un employeur d'utiliser les membres d'une association
accréditée alors qu'il y a une grève.
Tant que le ministre... que des accords peuvent intervenir, il est
implicite que ces accords porteraient présumément sur des mesures
conservatoires ou des services essentiels, selon le cas. Donc, il est implicite
que des accords pourraient intervenir, qu'advenant que ces accords
interviennent, ils seraient respectés, ils seraient observés par
les deux parties. Ou alors que des ordonnances soient rendues en vertu de
l'article 99 ou d'une loi, ou qu'une décision soit rendue en vertu d'une
loi sur les services essentiels et que, le cas échéant, cette
ordonnance ou cette décision soit respectée.
Il s'agit là d'une hypothèse qui est lourde de
conséquences, puisque, à défaut de ne pas être
respectés, ces accords, cette ordonnance ou cette décision,
créeront une situation de fait que ne prévoient pas du tout
l'article 97 ou les articles suivants, notamment, les obligations auxquelles
est astreint l'employeur demeurent les mêmes, que l'association
accréditée se plie ou non à l'accord qu'elle a conclu,
qu'elle accepte ou non d'obtempérer à l'ordonnance ou à la
décision.
Or, M. le Président, pour un peu emprunter l'expression que j'ai
trouvé fort touchante du député de Sainte-Marie, tout va
bien aller si le monde se laisse guider par l'esprit du ministre, un esprit
qui, sans aucun doute est fort généreux et fort bien
intentionné, autrement dit, si les gens ont tous le livre du
maître, cela va bien aller. Disons qu'avec le cahier de
l'élève il y a des chances qu'on ait quelques
difficultés.
M. Johnson: Cela, c'est la partie qui n'est pas dans la loi.
M. Forget: C'est la partie qui n'est pas dans la loi. Elle est
toute implicite, la possibilité que ces choses interviennent et qu'elles
soient suivies d'effets. Il serait intéressant de savoir sur quelle
base
on prévoit que tout va bien aller, que l'esprit du maître
va imprégner l'élève au point où on n'ait aucune
espèce de problème. Parce qu'on a quand même des
expériences qui sont paradoxalement fort pertinentes, à la fois
des accords, des ententes en dehors de tout cadre législatif et aussi
d'accords conclus à l'intérieur d'ententes ou,
c'est-à-dire à l'intérieur de lois, la Loi sur les
services essentiels, et également on a l'expérience de la
non-observance et des uns et des autres.
Je fais le rappel suivant. En 1972, pour être bien clair, et dans
le monde hospitalier, à une époque où je n'avais aucune
responsabilité sur cette question, c'est une époque dont je parle
avec beaucoup de détachement, il y a eu un conflit dans le secteur
hospitalier qui a conduit à des arrêts de travail importants et
à la privation de services essentiels. Ces faits sont de commune
renommée, je pense. On n'a pas besoin de les prouver davantage.
Après ces événements, l'Association des hôpitaux
avait fait un relevé des cas où des ententes étaient
intervenues, je dirais spontanément, à ce moment-là, sans
que la loi oblige à de telles ententes sur les services essentiels, de
même que les cas où il n'y avait pas eu d'entente sur le maintien
des services essentiels. Les constatations qu'on avait pu faire à
l'époque étaient extrêmement troublantes.
Premièrement, le taux d'insuccès des cas où il n'y
avait pas eu d'entente était de 45%. Dans 45% des hôpitaux
où il n'y avait pas d'entente sur la fourniture des services essentiels,
effectivement, les services n'avaient pas été fournis ou il y
avait eu des difficultés sérieuses pour les fournir. Dans les
autres cas où il y avait eu des ententes entre le patron et le syndicat
pour la fourniture des services essentiels, ce n'est pas 45% de
difficultés qu'on avait expérimenté, c'était 55%.
C'est-à-dire que même là où des efforts particuliers
avaient été faits pour en arriver à des règles de
jeu, les règles du jeu avaient été observées moins
souvent, et les services essentiels avaient été fournis moins
souvent que dans les cas où il n'y avait pas eu de telles ententes.
Cette expérience, jointe au refus opposé par les centrales
syndicales dans l'amorce des négociations de 1975-1976, refus de
discuter même la question des services essentiels, avait poussé le
gouvernement de l'époque à présenter une loi dont j'ai,
d'ailleurs, été le parrain on l'a souligné cet
après-midipour prévoir un mécanisme à deux
paliers de négociation de services essentiels, et de décision par
l'équivalent d'un commissaire du travail adjoint dans les cas où
une entente n'intervenait pas. Nous avions, effectivement, assorti cette
invitation pressante à des ententes sur les services essentiels d'une
clause dont on a fait le rappel aujourd'hui, et qui, dans ce cadre
d'obligations mutuelles, précisait que les ententes devaient porter sur
le niveau de fonctionnement d'un centre hospitalier ou d'un centre de services
sociaux. C'est-à-dire que les parties étaient invitées
à s'entendre sur un fonctionnement à 20% ou 25%, et une fois
l'entente ainsi conclue, non seulement le syndicat s'engageait-il à
fournir le personnel nécessaire pour permettre ce fonctionnement, mais
l'employeur s'engageait, de la même façon à ne pas chercher
à fonctionner à un taux plus élevé. Il y avait donc
là un élément de réciprocité, un
élément qu'on peut, si l'on veut rapprocher de la loi
anti-briseur de grève, mais qui découlait d'un esprit
différent, dans la mesure où c'était un effet
recherché, dans un cadre contractuel d'abord et avant tout, et où
les obligations se faisaient "pendant", lors d'une décision.
Malgré ce cadre législatif qui ressemble en bien des
aspects à celui qui est contenu à 97a et suivants, nous avons
observé, de façon générale, une stratégie
globale de contestation, non pas comme telle des services essentiels, mais de
tout effort pour définir des services essentiels autrement que par la
décision unilatérale de l'association de salariés.
Ce n'est un système pour personne de dire que le mouvement
syndical jusqu'à aujourd'hui a toujours prétendu qu'il
était intolérable que des lois ou des ententes viennent
préciser l'envergure des services essentiels et que, lorsqu'il a
été placé dans la situation de mettre à
l'épreuve des ententes comme en 1972, ou des lois là-dessus,
même si les lois prévoyaient des ententes et même si les
lois prévoyaient l'interdiction pour l'employeur de fonctionner à
un niveau différent de celui qui avait fait l'objet d'une entente, alors
à ce moment, le syndicat a donné suite à sa conception de
ce qui doit être la définition de tels services,
c'est-à-dire une définition absolument et inconditionnellement
unilatérale.
Riche, si l'on peut dire, de cette expérience, comment peut-on
croire que les dispositions de l'article 97b pourront résulter en autre
chose qu'une situation de facto, où ni 97a paragraphe b, i) et ii) ne
seront respectés? C'est-à-dire en clair, dans des situations
où les syndicats, soit se refuseront à conclure des ententes,
soit, les ayant conclues, ne les respecteront pas, puisqu'il sera toujours
possible de croire qu'il est plus payant de ne pas les respecter; certainement
que les moyens de pression que l'on a quand on ne les respecte pas sont plus
forts que lorsqu'on les respecte. Ou deuxièmement, s'il ne s'agit pas
d'entente, le syndicat trouvera toujours plus payant, à court terme, de
ne pas obtempérer à une injonction demandée selon
l'article 99 ou à une décision d'un arbitre ou d'un personnage
quelconque, d'un commissaire quelconque chargé de déterminer des
services essentiels.
Dans une telle circonstance, alors que tous les raisonnements se basent
sur des hypothèses que l'expérience a démontré
fausses, comment ne pas conclure que cet article nous amènera
inévitablement dans une situation d'irrégularité de la
part du syndicat, de la part de la grève qui dépassera
manifestement le cadre prévu par l'article 97a et contre laquelle
irrégularité la loi ne prévoit aucun recours autre que
l'injonction.
Il y a déjà eu, dans le passé, une utilisation de
l'injonction dans les conflits de travail. Je n'ai pas besoin de vous dire que
l'utilisation de l'injonction n'a pas été un succès
éclatant. Bien pire, les tri-
bunaux eux-mêmes et le président de la Cour d'appel du
Québec a déclaré sans ambiguïté, dans un
jugement qui a reçu une vaste publicité, qu'il trouvait
inapproprié que les relations de travail trouvent un aboutissement
habituel et coutumier dans des injonctions.
Je peux comprendre ce raisonnement, je le partage moi-même sur le
plan des principes, mais je ne peux pas faire autrement que de constater que la
loi qui est proposée aujourd'hui relativement à ce sujet, au
maintien de mesures conservatoires ou au maintien des services essentiels, va
forcément nous amener devant une situation où l'employeur sera
sans recours, sauf l'injonction. Bien sûr, le ministre pourra dire:
L'employeur dans le cas des mesures conservatoires, mais non pas dans le cas
des services essentiels, aura toujours le recours de se faire justice
lui-même en prenant des mesures conservatoires et en invitant le ministre
à faire enquête.
Cependant, je crois que nous aurons à ce moment-là des
injonctions venant de l'autre côté, ce qui laisse anticiper une
guerre d'injonctions autour de la double question des activités
conservatoires et des services essentiels. Je ne vois absolument pas de raison
de croire qu'il peut en être autrement. L'expérience vécue
au Québec, dans un cadre très semblable à celui qui est
envisagé ici, n'a pas donné d'autres résultats que
celui-là et les centrales syndicales qui ont toujours prétendu
avoir le droit de déterminer par elles-mêmes et
unilatéralement ce que constituent les services essentiels, tiendront
certainement le même langage vis-à-vis des mesures conservatoires,
et qui plus est, ces mêmes centrales protestent contre l'inclusion dans
la loi 97 et dans ses dispositions contre les briseurs de grève de ces
restrictions à ce qu'ils voient comme une interdiction
générale et globale de production, sujets simplement aux
concessions qu'ils se disent prêts à faire dans les deux cas
visés.
Je crois que nous avons encore une fois, inévitablement, cette
perspective d'un affrontement, d'une guerre d'injonctions, et on n'a pas du
tout expliqué en quoi la pratique pourrait s'avérer
différente, sauf bien entendu, si on prend les arguments du
député de Sainte-Marie, qui fait allusion à l'esprit dans
lequel tout ceci doit être fait. Mais des invocations à un esprit
nouveau, à la bonne entente et à la vertu, n'ont jamais
changé les comportements en dehors de facteurs concrets et qui peuvent
faire sentir leur poids, puisque les attitudes découlent, à mon
avis, beaucoup plus souvent des comportements que l'inverse. Il n'y a rien que
l'on fait ici pour changer les comportements. On se borne à invoquer de
nouvelles attitudes.
Enfin, et je terminerai là-dessus, M. le Président,
comment prendre au sérieux un gouvernement qui n'a rien eu de plus
pressé, relativement à la question des services essentiels, que
de manifester sa solidarité, prétendument aux objectifs
syndicaux, et son absence d'intérêt à donner suite à
des poursuites valablement prises en vertu d'une loi qui, encore une fois, par
bien des aspects, ressemble à la loi 97a et aux exceptions qui y sont
mentionnées, loi qui avait été votée à
l'unanimité de toutes les formations politiques à
l'Assemblée nationale, quelles qu'aient été les
réserves et les récriminations de certains militants de certains
partis. Elle avait été votée à l'unanimité
de tous les partis à l'Assemblée nationale et non seulement
à l'unanimité de tous les partis, mais avec les
félicitations qu'il me ferait plaisir de vous citer, si on en doute, des
deux formations de l'Opposition de l'époque, y compris le
député de Saint-Jacques qui, à la suite d'amendements
apportés, à sa suggestion, à la loi avait
déclaré que cette loi, si le gouvernement de l'époque ne
l'avait pas lui-même apportée et fait adopter, il aurait fallu que
l'Opposition en fasse la proposition et en prenne l'initiative. Cela avait
été aussi loin que cela, M. le Président.
Que le gouvernement actuel nous dise que rien de cela n'est susceptible
de se produire, que les lois sont respectées et que si elles ne le sont
pas, des injonctions le seront, alors que, manifestement, dans le passé,
on a voulu faire généreux, on a voulu faire libéral, mais
on a ainsi irrévocablement compromis la probabilité qu'une loi ou
une injonction soit respectée. Il y aura toujours, dans l'esprit de ce
qui sera l'objet de poursuite en vertu de lois analogues à
celle-là, la notion que, peut-être, à la faveur d'un
scrutin provincial, il sera possible de faire des pressions pour obtenir, d'un
parti ou d'un autre, une promesse d'exemption et d'immunité.
C'est la décision qu'on a prise pour faire
généreux, pour donner suite aux préjugés qu'on
voudra. Mais je pense qu'en prenant cette décision on a
hypothéqué grandement cette voie de solution. Je veux bien
l'hypothéquer, M. le Président, je veux bien qu'on ait des
méthodes non répressives, non contraignantes, mais c'est faire un
pari impossible pour citer une expression célèbre ces
temps-ci sur le bon "ententisme", sur la volonté des gens de
fonctionner en se servant seulement du livre du maître et non pas du
cahier de l'élève, en faisant appel à l'esprit qui doit
animer les lois et les bons citoyens plutôt qu'aux calculs qu'ils font de
ce qui est dans leur intérêt dans une stratégie de conflit,
au moment où peut-être la violation d'une loi ou d'une ordonnance
est susceptible d'apporter quelques avantages supérieurs à leur
respect.
A ce moment-là, M. le Président, il faut qu'un
gouvernement, quel qu'il soit, prenne ses responsabilités. Je ne suis
pas du tout persuadé que le gouvernement actuel soit en mesure de
prendre ses responsabilités, étant donné les positions
qu'il a prises dans un passé encore tout chaud, tout récent.
M. Johnson: M. le Président, j'aurai une réponse au
texte, pour le député de Saint-Laurent à partir de la
situation qu'il décrit comme possible. 97a, premier paragraphe,
c'est-à-dire le paragraphe qui commence par a, interdit à un
employeur d'utiliser certaines personnes. C'est la règle. b, i et ii
prévoient cependant qu'il peut quand même utiliser des membres de
cette unité, si une entente y pourvoit. En effet, si on n'avait pas b,
i, on dirait: D'une part, l'employeur ne peut utiliser
les services de quelqu'un de l'unité qui est en grève. Si
on arrêtait là, même s'il y avait une entente entre les
parties, cela demeurerait illégal, puisque la loi dit qu'il n'a pas le
droit.
Donc, on prévoit une exception à l'intérieur d'un
cadre de fonctionnement possible.
Je réfère maintenant le député de
Saint-Laurent à 97b. 97b nous dit: "Au cas de violation par
l'association accréditée ou les salariés qu'elle
représente d'une ordonnance d'une décision ou d'un accord
visé au sous-paragraphe i ou ii du paragraphe b de 97a, l'employeur est
exempté de l'application de 97a dans la mesure où cela est
nécessaire pour assurer le respect de l'ordonnance, de la
décision ou de l'accord qui a été violé.
Par exemple, et cela s'applique dans tous les cas où le Code du
travail est la loi de référence, vous avez une entreprise
où il y a 60 personnes qui travaillent. Lors de la signature de la
convention collective, on prévoit que douze personnes entrent pour faire
certaines tâches et on signe un protocole d'entente à cet effet.
Deux ans plus tard, on assiste à une grève légale. De deux
choses l'une, ou les douze personnes entrent et là il n'y a pas de
problème, ou, de ces douze personnes, il y en a qui n'entrent pas. Pour
celles qui n'entrent pas, on regarde l'article 97b, il y a violation par
l'association ou les salariés du sous-paragraphe i) du paragraphe b) de
97a. Et que dit-on comme effet? On dit comme effet que l'employeur est
exempté de 97a dans ce cas. Donc, s'il y a six personnes qui sont
entrées, il peut engager six autres personnes puisqu'il s'agit "dans la
mesure où l'entente y pourvoit'.
Donc, il y a une initiative possible de l'employeur à ce
niveau-là. C'est la même chose dans le cas d'une ordonnance
émise en vertu de l'article 99 du code ou encore d'une décision
prise à l'occasion d'une loi de services essentiels qui pourrait
être celle qui existerait si jamais le gouvernement décidait d
abroger 253 et de la remplacer, et on a la réponse.
On n'a pas la réponse sociologique du problème et de
l'atmosphère: Est-ce que, oui ou non, la ligne de piquetage permettra
à ces six personnes d'entrer? C'est un autre problème. Mais
l'employeur est dans une situation de droit. Il a le droit d'obtenir que les
personnes qui sont soumises à l'entente pénètrent dans son
usine pour assurer le maintien... etc. Cela n'a rien à voir avec les
mesures conservatoires. C'est en soi faire appliquer l'ordonnance. Il peut
faire appliquer l'ordonnance en obtenant effectivement une injonction contre
ceux qui y étaient soumis ou encore carrément en faisant entrer
des personnes extérieures. Rien n'empêche de le faire.
L'article 97c dit: "Nonobstant tout ceci, indépendamment de tout
ceci, il demeure quand même que 97a ne peut avoir pour effet
d'empêcher l'employeur de prendre les moyens nécessaires ". Ces
moyens sont qualifiés, dans le deuxième paragraphe, comme des
moyens de mesures conservatoires.
Donc, je pense que l'hypothèse du député de
Saint-Laurent n'est pas vraiment celle qui est posée dans la loi,
bien que je reconnaisse que, dans le cas du non-respect d'une ordonnance, d'une
décision ou d'une entente, l'employeur qui procéderait
unilatéralement à l'engagement de personnes extérieures
pour remplir les postes contenus dans cette entente qui n'est pas
respectée, cela se ferait dans un contexte qui est le genre de contexte
qu'on a connu. Encore tout récemment dans le cas de l'Institut Pinel,
dans le cas des services de la Croix-Rouge, il y a eu des attitudes agressives
sur la ligne de piquetage.
Donc, sur le plan formel, cela ne pose pas de problème à
cause de 97b qui dit que l'employeur est soustrait de l'application de la Loi
anti-briseurs de grève, des dispositions anti-briseurs de grève,
dans la mesure où tout ce qu'il fait, c'est engager des personnes qui
exécutent ou, en termes de contenu, voient à l'application de
l'ordonnance, de la décision ou de l'entente qui est prévue
à 99a, paragraphe b), sous-paragraphe i).
Dans le deuxième cas, il a toujours ce recours pour les mesures
conservatoires, qui est indépendant de celui de 97b.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Johnson.
M. Bellemare: M. le Président, supposons que l'accord ne
se fasse pas et qu'il y ait un problème, 97a y pourvoit, sauf si, en
vertu de 99, une ordonnance est émise. C'est le seul endroit. Je ne
pense pas que cette loi, qui établit véritablement le
critère de base pour forcer les syndicats à accepter des accords,
vaille beaucoup mieux que les services essentiels qu'on a votés à
253. C'est tout. C'est ma conception.
Le Président (M. Clair): Le député de
Beauharnois avait demandé la parole.
M. Lavigne: M. le Président, c'est avec regret que je n'ai
pas pu mettre un peu mon grain de sel dans le courant de la matinée en
ce qui a trait à l'article 51, qui touche essentiellement les mesures
anti-briseurs de grève. Je trouve que, si on regarde le tout de la loi
45, c'est peut-être l'article qui est le plus propre. Si j'en parle
ainsi, c'est parce que, trop souvent, on a vu, lors des négociations,
des situations s'envenimer justement par le fait que, pendant que les
travailleurs avaient laissé leur emploi, par une grève ou par un
lock-out, il n'y avait rien qui défendait, à ce moment, au
patron, à part sa bonne conscience, d'engager d'autres travailleurs qui
prenaient la place de ceux qui étaient en grève. C'est à
partir de ces situations qu'on envenimait la situation et qu'on
commençait à connaître de la casse, de l'agressivité
chez les travailleurs et qu'il y avait du cassage de gueule ou du brisage de
biens, que ce soit la bâtisse ou l'outillage du patron.
Maintenant, à partir du moment où on insère
l'article 51 dans la loi 45, je pense que cela permet un équilibre. On
arrive, avec cet article, non sans difficulté d'ailleurs, à
circonscrire quand même les
droits du patron et les droits du syndicat. Je pense que c'est assez
bien expliqué, c'est assez clair pour qu'il n'y ait pas de confusion,
quoique je fasse quand même, malgré cet article, appel à la
bonne volonté du patron et des syndiqués, des travailleurs, pour
que tout se déroule dans un cadre harmonieux. Des lois, on aura beau en
adopter autant qu'on voudra, s'il y a de la mauvaise volonté de la part
des gens qui sont tenus de les respecter, on n'arrivera jamais à tout
dire et à tout penser d'avance et à obliger les gens à des
conditions qu'ils n'accepteraient pas.
Je pense que cette loi, comparativement à ce qu'on avait
précédemment dans le Code du travail, ne permet pas à
l'employeur d'engager des travailleurs qui prendraient la place de ceux qui
sont en grève ou en lock-out. Déjà, c'est un gros point.
Cela lui permet d'avoir une entente avec le syndicat pour voir aux services
essentiels. C'est encore un point très important. Si, toutefois, le
syndicat ne voulait pas souscrire, lors d'un déclenchement de
grève ou d'un lock-out, aux services essentiels qui avaient
été discutés au préalable, on permet au patron,
à ce moment, d'intervenir auprès de gens qui ne font pas partie
de cette accréditation. Je pense qu'il est couvert par l'article 97b,
comme le ministre vient de le dire. Je pense qu'il n'y a pas à paniquer
devant le fait que l'association ne respecterait pas les services essentiels.
Ce qu'on vise essentiellement par cela, c'est que la grève puisse se
dérouler normalement, sans que les travailleurs en grève perdent
leur "job", et que, pendant ce temps, par contre, la production soit
arrêtée et que le patron ne se fasse pas briser ses biens et
immeubles.
Quand on passe l'article 51, de 97a à la fin, on a fait le tour
de la question. On a eu un peu de difficulté, je vous l'avoue, à
écrire ce texte de façon qu'il y ait le moins de trous possibles.
En tout cas, je m'en contente très bien. On l'a vu et revu,
étudié et réétudié. Je pense que le texte
présenté ici, actuellement, est un texte qui nous convient, qui
correspond essentiellement à ce que je voulais en ce qui a trait
à l'article qui touche les "anti-scabs ", comme on le dit souvent. Je
pense qu'avec cet article, on va permettre beaucoup plus d'harmonie, de
sérénité, lors des discussions qu'il y aura autour des
tables de négociations lors d'une grève ou d'un lock-out, parce
que, justement, pendant ce temps, le patron n'aura pas le droit d'aller
chercher des travailleurs en dehors des cadres de ce groupement
d'employés. C'est cela qui envenimait la situation. On circonscrit ce
problème avec l'article 51.
Je voterai, bien sûr, en faveur de cet article, pour les
différentes raisons que je viens de mentionner. J'en suis très
heureux. Je regarde, dans mon comté, le grand nombre d'usines. Je pense
que les travailleurs vont être heureux d'en prendre connaissance. Ils ont
grincé un peu des dents avec le premier article, sur la façon
qu'on l'avait écrit la première fois, particulièrement le
97c, essentiellement, parce qu'il y avait un trou dedans qui permettait,
à travers les pouvoirs qu'on donnait au patron de protéger ses
biens et immeubles, il y avait une porte ouverte qui permettait au patron
d'engager aussi du monde. Dans la façon décrite au début,
on faisait tomber l'article 97a. Et c'est à travers cela que le patron
pouvait aller engager des "scabs". Je pense que les travailleurs ont eu raison
d'être contre le 97c, tel qu'il avait été écrit au
début. Dans sa nouvelle formulation, je pense qu'on répond
exactement à ce que les travailleurs au Québec voulaient avoir
comme loi anti-briseurs de grève et je pense que les syndicats et les
travailleurs vont s'en réjouir et les patrons aussi.
Je pense qu'il n'est pas question de partir en guerre, pas plus contre
les syndicats que contre les patrons. Ce que je vise particulièrement
dans cet article, ce sont les travailleurs. Les gars qui ont à partir
tous les matins avec leur boîte à lunch pour gagner leur vie, et
je pense que c'est un outil qu'on vient de leur donner qui va faire en sorte
que les patrons seront tenus de respecter les conditions humaines et
raisonnables que ces travailleurs devont connaître et vivre lors des
négociations. On leur donne par le fait même des outils qui leur
permettront de travailler lors des grèves et des lock-out, en toute
sérénité, et sans avoir l'inquiétude de se faire
voler leur "job" par des "scabs".
M. Forget: Est-ce que le député de Beauharnois me
permettrait une ou deux questions? Le député a dit qu'il fallait
essentiellement baser cela sur la bonne foi des parties, que si on essayait de
faire des lois pour viser des situations où les gens ne sont de bonne
foi, on n'a pas tellement besoin de cette loi et s'ils ne sont pas de bonne
foi, on en a besoin.
M. Lavigne: Je pense qu'il n'y a rien qui nous empêche de
faire une loi en tenant pour acquis qu'il va y avoir un gros pourcentage des
gens qui vont respecter la loi...
M. Forget: C'est toujours le cas...
M. Lavigne: On leur donne quand même un outil légal
entre les mains et il est bien sûr qu'il y aura toujours des gens qui
passeront sur les feux rouges et qui ne respecteront pas la loi et il y aura
toujours des détenteurs de permis d'alcools qui fermeront après
l'heure, mais il n'en reste pas moins qu'il y a une loi qui dit que c'est
à telle heure qu'on doit fermer. C'est la même chose pour ce qui
est de ces conditions-là.
On ne doit pas partir en pensant aux cas d'exception pour éviter
de faire des lois, autrement on n'en ferait jamais, on marcherait toujours sur
la bonne foi des gens. Je pense qu'il faut circonscrire des problèmes
à l'intérieur des lois, en pensant que la grosse majorité
des gens vont les respecter et en déplorant le fait qu'il y aura
toujours des gens qui passeront à côté des lois. Il y en a
qui disent que les lois sont faites pour être outrepassées.
Malheureusement, à ce moment-là c'est peut-être que le
législateur ne légifère pas bien, mais on essaie de
légiférer le mieux possible pour
circonscrire les problèmes à l'intérieur des lois
et en souhaitant que les gens l'appliquent et la respectent.
M. Forget: Mais il reste qu'il est important qu'on ait une
réponse si les gens n'appliquent pas la loi d'eux-mêmes. Que
va-t-il arriver si les syndicats refusent de négocier, comme c'est
arrivé souvent dans le passé. C'est l'expérience qu'on a.
Ils refusent de négocier, refusent de restreindre leurs moyens de
pression par une négociation, soit sur les services essentiels, ou les
mesures conservatoires. J'aimerais savoir du député ce qu'il
pense qui va arriver à ce moment-là? Il va dire,
évidemment le patron va prendre le droit en ses propres mains et va se
donner les moyens de respecter les services essentiels ou les mesures
conservatoires. Mais ne pense-t-il pas qu'on est justement dans cette situation
maintenant et que la loi ne sera donc pas efficace, pourvu qu'il y ait
quelqu'un qui veuille ne pas la respecter, c'est comme s'il n'y en avait
pas.
M. Lavigne: Je ne peux pas argumenter sur la question que vous me
posez en tenant pour acquis qu'il va y avoir des gens qui ne la respecteront
pas. Je tiens pour acquis que les gens vont respecter la loi.
M. Forget: Est-ce qu'il y en a qui ne la respecteront pas?
M. Lavigne: C'est possible.
M. Forget: Que va-t-il arriver à ce moment-là?
M. Lavigne: Actuellement, qu'arrivait-il avec le Code du travail
qu'on avait, avant qu'on le modifie par le projet de loi 45? A ce
moment-là, le même argument aurait pu être servi à
ceux qui ont préparé le Code du travail anciennement. Chaque fois
qu'on aura à présenter une loi, quelle qu'elle soit, vous pourrez
toujours poser la même question. Ce sera toujours une question bien
placée à partir du moment où on considère que tous
ceux qui, avant même de légiférer ou d'adopter la loi,
s'arrêtaient l'idée qu'il y en a qui vont l'outrepasser. A ce
moment-là, on ne ferait plus de lois.
M. Forget: Non, on fait seulement des lois qui peuvent se faire
respecter. C'est pour cela qu'on suggère le retrait de cette disposition
parce qu'on ne peut pas s'assurer qu'elle soit respectée sans
créer une situation pire que celle qui est dans le moment.
M. Lavigne: A ce moment-là, il ne faudrait pas commencer
à énumérer les lois qui étaient difficilement
respectables, en passant par la 23 entre autres. Vous savez ce qu'on en a
fait.
M. Forget: Ce n'est pas une raison pour en ajouter du même
genre.
M. Lavigne: Je ne veux pas argumenter, M. le député
de Saint-Laurent, plus longuement sur cette idée que, parce qu'on vote
une loi, il faut penser à ceux qui outrepasseront la loi. Je pense aux
gens qui vont la respecter. C'est d'ailleurs à partir de cela que
j'invite tous les travailleurs, toutes les parties qui auront à
négocier, d'y aller de bonne foi. Je pense que c'est important.
Le Président (M. Clair): Le député de
Notre-Dame-de-Grâce avait demandé la parole.
M. Mackasey: Merci, M. le Président. Je
réfère à 97a et à toutes les sections
naturellement. Il y en a plusieurs. Je reviens encore, M. le Président,
au problème j'y ai songé à l'heure du dîner
du petit entrepreneur. J'ai toujours tendance à penser au peuple.
Selon moi, nous avons l'obligation de prendre en considération les biens
du petit entrepreneur.
On parlait de l'Alcan tout à l'heure. L'Alcan, ce n'est pas
exactement une entreprise pauvre ou faible. Cet article 51 pose un
problème sérieux à une entreprise comme Alcan au point que
cela lui coûte très cher, mais il y a beaucoup de solutions pour
elle. Elle peut simplement transférer sa production dans une autre
province, un autre pays. C'est vrai pour beaucoup d'entreprises au
Québec comme dans les autres provinces. Les multinationales vont tout
simplement fermer boutique ou leur entreprise pendant six ou huit mois, si
nécessaire. Elles vont vendre les produits qu'elles produisent encore
dans une autre province, dans un autre pays, outre-mer même, si vous
voulez, comme a fait d'ailleurs Westinghouse ou la compagnie White qui
remplacera Westinghouse bientôt, ou General Electric, une grève
à London, en Ontario... Qu'est-ce qu'elles font? Elles transportent leur
usine aux Etats-Unis.
Mais ce qui me frappe dans cette loi, M. le ministre, même si le
but est d'éliminer autant que possible la violence, de protéger
autant que possible le pauvre ouvrier qui a vraiment besoin d'une protection
valable, c'est qu'on ne puisse trouver une formule pour atteindre ce but sans,
possiblement, au moins, faire de la discrimination contre le petit entrepreneur
c'est regrettable.
Je reviens encore sur ce que j'ai traité avant le dîner, le
problème des petits entrepreneurs. Au Québec, il y a beaucoup de
petits entrepreneurs, pas seulement dans le vêtement, pas seulement dans
la chaussure, souvent, par exemple, chez les manufacturiers du meuble, ou,
comme on dit en anglais: "window sashes". Des petits commerçants, des
petits entrepreneurs qui ont peut-être une entreprise de famille depuis
deux ou trois générations de quinze ou vingt employés.
J'y reviens encore, M. le ministre. Je vois ici un grand danger qu'une
grève légale, après avoir rempli toutes les conditions de
l'article 46, cela concerne 99 pour le moment, je ne parle pas des services
publics, je parle du petit entrepreneur qui a quinze ou vingt
employés...
Si ses employés désirent vraiment mettre cet homme en
faillite, peut-être pour des raisons, des fins qui existent, parce qu'ils
avaient décidé, au début, qu'ils ne voulaient pas
d'accréditation, pas de syndicat, et d'autres raisons. C'est très
simple.
On écarte une grève légale. Les quinze
employés s'en vont et trouvent de l'ouvrage ailleurs. L'entrepreneur qui
est tout seul avec son épouse, peut-être son garçon,
peut-être une fille au bureau, est obligé d'exprimer son droit,
d'essayer de continuer à remplir les commandes pour Noël, pour les
fêtes, les contrats fermes avec les grands magasins à
Montréal. Il ne peut pas engager des salariés, sauf ceux du
syndicat, et le syndicat ne veut pas négocier de bonne foi. Il s'en va
tout simplement en disant: Si on revient dans trois ou quatre mois, l'employeur
va nous donner tout ce qu'on désire, parce que le choix est simple, il
va aller en faillite.
C'est une question à laquelle on ne peut pas me répondre,
comme a dit le ministre avant le dîner; on ne peut pas trouver de
solution. Si on ne peut pas trouver de solution, on ne devrait pas créer
de problème. En essayant d'aider le syndicat, de minimiser la violence,
d'établir, par ce nouveau concept, une aide en faveur du syndicat, cela
serait peut-être nécessaire en ce sens qu'au moins, cela permettra
aux syndicats de réviser la vraie raison d'une ligne de piquetage. Selon
la loi, c'est tout simplement pour donner l'information au public et non pas
pour empêcher une entreprise de survivre ou même de continuer son
ouvrage. Je ne parle pas d'engagement de "scabs", comme on dit.
Mais si un syndicat décide tout simplement de ne pas discuter, de
ne pas négocier, lorsque la grève est légale, comment
voulez-vous que cette entreprise survive? C'est la question que je me pose. Ce
n'est pas un problème pour Alcan. Ce n'est pas un problème pour
beaucoup de grandes entreprises à Montréal. Mais cela devrait
être un problème qui touche les députés qui ne
représentent peut-être pas les comtés de l'île de
Montréal, mais dans les Cantons de l'Est, Sherbrooke, où il y a
beaucoup de petites entreprises qui sont importantes, qui engagent
peut-être quinze, vingt ou même trente employés.
Une grève va éclater, le syndicat décide de ne pas
négocier, l'employeur va aller en faillite; il n'a pas le choix. Tout
ça, pour des salariés accrédités, à peine
trois, quatre ou cinq au plus, qui travaillent dans cette entreprise. Je ne dis
pas qu'il devrait être permis d'engager des "scabs". Mais je pense qu'il
devrait au moins y avoir, dans cet article, quelque chose qui oblige le
syndicat à négocier de bonne foi avec l'entrepreneur. C'est ce
qui manque. Ce n'est pas assez pour moi de dire: On ne peut pas trouver une
solution. Le petit entrepreneur, le petit employeur, pas quelqu'un qui a son
entreprise cotée à la bourse ou qui a des millions de dollars
à la banque ou un crédit à la banque de $800 000 ou qui a
des entreprises à travers la province, à travers le Canada, qui
peut toujours survivre, mais je parle d'un homme qui est gérant ou
propriétaire. Je pense à la petite entreprise dans un petit
village, dans une petite ville. Lui, il ne peut pas survivre à une
grève qui dure deux, trois ou quatre mois. Ce n'est pas assez de dire:
II va être content de régler la grève car il va aller en
faillite. Souvent le syndicat décide que c'est préférable
de le mettre en faillite.
Je ne suis pas pour commencer à raconter des cas spéciaux.
On en a sans doute tous ici. Il me semble qu'en essayant d'assister les
syndicats, d'assister, si vous voulez, sur le concept de minimisation de la
violence, d'accélération de la signature d'une convention
collective, on risque ici...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, je m'excuse de vous interrompre, mais étant
donné que vous parlez sur un sujet sur lequel vous avez
déjà parlé, avant 18 heures; malheureusement, votre temps
est expiré. Je veux bien vous donner deux ou trois minutes pour
conclure.
M. Mackasey: Je parlerai au prochain article.
Le Président (M. Clair): Vous en aurez le loisir.
M. Mackasey: Je vais continuer sur... Je viens de parler sur
l'article 97b, alors je vais parler sur l'article 97c. C'est la même
chose; l'un relève de l'autre.
Le Président (M. Clair): Je ne veux pas vous brusquer,
comme je l'ai dit. Vous avez droit à quelques minutes pour conclure,
puisqu'effectivement, au départ, nous avions dépassé de
deux ou trois minutes pour quelques intervenants. Vous avez la parole.
M. Mackasey: D'accord. Premièrement, je veux dire que
cette loi est défectueuse, dans le sens qu'on ne décrit pas ce
que sont les services essentiels. Le ministre, par son amendement, a dit
carrément: That will no longer, depend on law 253, we are going to talk
now about a new law, and obviously, if 253 did not satisfy some of the
representations, the new law is going to be much more limited in defining an
essential service. The minister said: No... Would he say that out loud for his
members because if it is going to be even more extensive...
M. Johnson: I said not necessarily. M. Mackasey: D'accord,
but...
M. Johnson: The deputy of Notre-Dame-de-Grâce is strictly
speculating.
M. Mackasey: Yes, I agree, because, is there any choice? If you
were the judge, if you were the jury... and you made my point better than I can
make it, this law leaves nothing else but speculation; you say: A law, without,
at this moment, specifying what is an essential service. You leave the
implication that law 253 will disappear. It is no longer mentioned. So, it is
speculative. A judge would have to speculate, an arbitrator would have to
speculate. What is an essential service, Mr Minister?
M. Johnson: M. le Président, je ne sais pas si le
député de Notre-Dame-de-Grâce me le permet,
mais je pense que le texte de loi est extrêmement clair.
M. Mackasey: Quelle loi?
M. Johnson: Le texte du projet de loi 45 qu'il a devant lui est
très clair. Il dit: Une loi couvrant les services essentiels lors d'un
conflit de travail.
M. Mackasey: Quelle loi, M. le ministre?
M. Johnson: Au moment où on se parle, par
définition, c'est la loi 253.
M. Mackasey: Est-ce que...
M. Johnson: Si la loi 253 est abrogée et remplacée
par une autre, ce sera l'autre. S'il n'y en a pas, il n'y en aura pas.
M. Mackasey: Alors pourquoi ne lavez-vous pas laissé telle
qu'elle était au début et ne pas amender le projet de loi 253
tout à l'heure?
M. Johnson: Entre autres, pour ne pas être obligé,
si jamais la loi 253 était abrogée, de mentionner qu'on abroge
ces dispositions ou ne pas être obligé de modifier le Code du
travail au moment où une autre loi, possiblement, pourrait être
adoptée, en matière de services essentiels.
M. Mackasey: I am surprised, Mr Minister, that you use that
argument on me. If you had left bill 253 in this section and if you were to
amend 253 next year, whatever the amendment of 253 would be, it would apply in
here without having to change this at all. I think you will have to agree with
me on that. You have only got to amend 253 later, and if 253 remained in this
paragraph, the conditions of the revised 253 would apply here.
M. Johnson: Oui, mais si on abroge la loi 253, si on fait une
autre loi en matière de services essentiels...
M. Mackasey: C'est cela que je veux dire.
M. Johnson:... il va falloir modifier le Code du travail.
M. Mackasey: I am saying. Mr Minister...
M. Johnson: Ce qu'on dit, c'est que c'est plus simple
d'écrire: Une loi en matière de services essentiels dans le cadre
d'un conflit de travail.
M. Mackasey: Then, you could say, you could be a little more
specific. Anyway, permit me to be suspicious and speculative. I have that right
to point out, but I come back and I have to conclude with this, that this
article 52, because exactly of the ambiguity which you have introduce all the
way through here, will end up delaying collective agreements rather than
speeding them up. You may satisfy in a short term the Unions by convincing them
we will... Do not be too upset. In six months from now, we will bring a new law
which will be very specific as to what essential services are. Right now, it is
vague, it's hypothetical.
It is certainly, on 253, not acceptable to the Union. I think you will
agree with that. Le député de Sainte-Marie peut me dire la
même chose.
Les services essentiels, tels que décrits dans la loi 253, ne
sont pas acceptables pour les syndicats. C'est clair, lorsqu'on parle d'une loi
prochaine où les définitions de services essentiels seraient
acceptables pour les syndicats. Je n'ai pas dit que c'était mauvais. Je
n'ai pas dit cela du tout. Je dis que les services essentiels, tels que
décrits à l'heure actuelle dans le projet de loi 253 ne sont pas
acceptables pour les syndicats. Ce n'est pas un secret, c'est dans les
journaux. On a fait ce changement.
Une autre raison pour laquelle je dis que cet amendement ne m'est pas
acceptable, c'est que la seule victime de cette loi, c'est le petit
entrepreneur, qui n'a aucune protection. C'est regrettable, parce qu'on a des
milliers de petits industries ici, au Québec, qui peuvent aller en
faillite à cause de cet article. Ce ne sont pas les grandes entreprises.
Ce n'est pas l'Alcan.
Par exemple, dans l'hôtellerie, M. le ministre, à l'heure
actuelle, toutes les fins de semaine et pour les fêtes, on est
obligé d'engager 50, 100, 500 employés occasionnels. Supposons
qu'il y ait une grève légale quelque part, à un
hôtel comme le Ritz, le Quatre-Saisons, le Reine-Elizabeth. Est-ce qu'on
va les empêcher, durant la grève légale, d'engager ces
occasionnels qu'on engage presque à chaque fête? Est-ce qu'ils
vont être reconnus comme des scabs? C'est une question à laquelle
j'aimerais avoir une réponse tout à l'heure. Ils ne sont pas
reconnus comme des scabs en ce moment. Est-ce qu'ils seront reconnus comme des
scabs, s'il y a une grève dans un hôtel? Au Méridien, il y
en a une. Mais prenons le Reinie-Elizabeth, le Ritz, le Quatre-Saisons. Il y a
une grève légale. Le gérant peut continuer un peu. Les
fêtes arrivent, comme Noël et Pâques. Normalement, il engage
des occasionnels. Est-ce que cela va être défendu? Est-ce qu'on va
dire: Ces occasionnels sont des scabs? Ils ne peuvent pas traverser les lignes
de piquetage. Est-ce qu'on a songé à ce problème?
J'aimerais avoir une réponse, parce que cela est très important
pour l'industrie du tourisme.
I am making a case that, periodically, hotels, by their very nature,
must have occasional help for weekends, for holidays. They are doing it this
weekend. Let us suppose hotels are being stuck legally, not illegally. But they
are able, without hiring extra regular help, to continue operations and
holidays come during that period. Are they going to be permitted, as always, to
hire these occasionals? Are they going to be allowed, Mr Minister, to continue
bringing in the occasional workers, these casual workers for the weekend, or
will they be considered as scabs?
It is very important in the hotel industry to
know this, unless we want to take all the rights of the employers away,
vainly, in the idea or concept that, by bringing in this anti-scabs law, we are
going to create labor peace. What we are going to create now is labor peace, we
are going to drive half of the industries of this province out of business. Not
because the principle is not there, the principle is to reduce labor violence
and speed up certification, and we adop that principle. But if the principle is
that this has to be done at the cost of small industries, a small private owner
of a sash factory in a small village, who has no protection, there is nothing
in the law that he can even plead to the minister about the union, that they
are acting in bad faith.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, je m'excuse de vous interrompre à nouveau.
Tantôt je vous ai indiqué que je vous accordais deux ou trois
minutes de plus pour parler sur l'article 97a, mais j'ai...
M. Mackasey: Je vous remercie pour votre gentillesse. Vous
êtes sans doute le meilleur président de toutes les commissions
où j'ai siégé jusqu'à maintenant. Il y en a
d'autres à cette table qui pourraient profiter beaucoup de votre
expérience.
Le Président (M. Clair): Je vous remercie du compliment.
Cependant, je vous indique que votre temps de parole, sur 97a, est bel et bien
expiré.
L'article 51 du projet de loi 45 est-il adopté?
Des Voix: Adopté.
M. Forget: Sur division, M. le Président.
M. Bisaillon: Vote enregistré, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Adopté. Vote nominal
appelé.
M. Bisaillon: Vote enregistré.
Le Président (M. Clair): Vote enregistré. Les
membres de la commission étaient aujourd'hui... j'appelle les noms des
députés. M. Bellemare (Johnson)...
M. Bellemare: Une minute...
Le Président (M. Clair): La motion est en fait la motion
du ministre du Travail...
M. Mackasey: Je voudrais poser une question au ministre. Est-ce
que le ministre peut répondre à cette question and I will not go
anymore? I just want to know what would be the status of occasional week-end
workers?
M. Jonhson: II faut regarder le texte de loi. Sont-ce des gens
qui remplacent ceux qui sont en grève? Non, puisque, de toute
façon, à ce moment-là, un employeur a, disons, quinze
personnes qui travaillent pour lui, sauf qu'à certaines époques
de l'année, il en a 50. Il est bien évident que la
différence entre 50 et 15, ce ne sont pas des gens qui sont
touchés et, de toute façon, ce ne sont pas des gens qui sont
salariés.
M. Mackasey: Supplementary, let us take this week-end, because I
hope we will be in the same hotel, maybe we will not be, but let us say that,
this week-end. New Year's Eve, let us take New Year's Eve, the normal staff,
let us say, of the Ritz-Carlton, we will take a hundred as a small figure, they
have to and always hire 50 extras for the Holidays. Let us say that, nex year,
there is a strike, a legal strike, will they be allowed to hire those 50 people
during the strike, even if a hundred are on strike, but somehow they are
managing to keep their business going?
M. Johnson: Ce que vise 97a, c'est d'exclure l'embauche de
personnes qui prendraient la place de ceux qui exercent légalement leur
grève, et pas d'autres qui, eux, de toute façon, n'auraient pas
fait grève puisque, de toute façon, ils n'auraient pas
été là a priori. Je pense donc que le problème que
pose le député de Notre-Dame-de-Grâce trouve sa
réponse.
M. Mackasey: They would not be considered as scabs. Ils ne
remplacent pas ceux...
M. Johnson: Je me permets de douter que le syndicat ne les
considérerait pas comme des scabs.
M. Mackasey: Mais, vous, would you consider them as scabs?
M. Johnson: Non.
M. Mackasey: Pas de scabs. D'accord.
Le Président (M. Clair): Messieurs, la motion sur laquelle
vous êtes maintenant appelés à voter est la motion que fait
le ministre du Travail proposant l'adoption de l'article 51, tel que
modifié, c'est-à-dire tel que le ministre du Travail en a
donné lecture il y a un certain temps, en n'oubliant pas que l'article
97d, au second alinéa, se lit comme suit: "L'enquêteur peut
visiter les lieux de travail et se faire accompagner d'une personne
désignée par l'association accréditée, d'une
personne désignée par l'employeur et de toute autre personne dont
il juge la présence nécessaire aux fins de son
enquête".
M. Johnson: Ce n'est pas "et", c'est "ainsi que de toute autre
personne".
Le Président (M. Clair): C'est ce que j'ai dit.
M. Johnson: Vous avez dit "et de toute autre...", c'est "ainsi
que de toute autre personne".
Le Président (M. Clair): "... ainsi que de toute autre
personne dont il juge la présence nécessaire aux fins de son
enquête".
M. Johnson: Vous pourriez appeler les noms, M. le
Président.
Le Président (M. Clair): La motion est donc
celle-là. Pour ou contre la motion: M. Bellemare (Jonhson).
M. Bellemare: Oui.
Le Président (M. Clair): M. Bisaillon (Sainte-Marie).
M. Bisaillon: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Brochu (Richmond), M. Ciaccia
(Mont-Royal), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Godin (Mercier), M. de
Bel-lefeuille (Deux-Montagnes), M. Forget (Saint-Laurent).
M. Forget: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Gagnon (Champlain), M. Johnson
(Anjou).
M. Johnson: Pour, M. le Président.
Le Président (M. Clair): M. Jolivet (Laviolette).
M. Jolivet: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Lacoste (Sainte-Anne).
M. Lacoste: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Laplante (Bourassa).
M. Laplante: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Lavigne (Beauharnois).
M. Lavigne: Pour, M. le Président, avec un grand
frisson.
Le Président (M. Clair): M. Mackasey
(Notre-Dame-de-Grâce).
M. Mackasey: Contre, parce que c'est anti-syndical et
anti-entrepreneur.
Le Président (M. Clair): A l'ordre, M. le
député de Beauharnois et M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce! On n'a pas à justifier son vote. Je vous ai
rappelés tous les deux à l'ordre pour cette raison.
M. Mackasey: ...
Le Président (M. Clair): M. Mercier (Berthier).
M. Mercier: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Pagé (Portneuf), M. Roy
(Beauce-Sud).
Pour l'adoption de l'article 51: 8 Contre: 2.
M. Johnson: L'article 52, M. le Président. Le
Président (M. Clair): J'appelle l'article 52. Recouvrement d'un
emploi
M. Johnson: M. le Président, l'article 52 du projet de loi
visant à introduire l'article 98a au code. J'ai passé tout
à l'heure... Est-ce que tous les membres de la commission ont entre les
mains la version définitive. "A la fin d'un grève ou d'un
lock-out, tout salarié qui a fait grève ou a été
lock-outé a le droit de recouvrer son emploi de préférence
à toute autre personne, à moins que l'employeur n'ait une cause
juste et suffisante dont la preuve lui incombe de ne pas rappeler ce
salarié. Une mésentente entre l'employeur, et l'association
accréditée relative au non-rappel au travail d'un salarié
qui a fait grève ou qui a été lock-outé doit
être déférée au tribunal d'arbitrage comme s'il
s'agissait d'un grief dans les six mois de la date où le salarié
aurait dû recouvrer son emploi. " Les articles 38b à 38f et 88
à 89j s'appliquent. Adopté, M. le Président?
Le Président (M. Clair): L'article 52 est-il
adopté?
M. Forget: Non, M. le Président, on a demandé le
droit de parole.
Le Président (M. Clair): Je m'excuse, j'avais cru
comprendre le contraire. Le député de Saint-Laurent sur l'article
52.
M. Forget: M. le Président, on ne peut pas ne pas
remarquer les modifications successives qui sont intervenues dans le texte de
cet article. Le ministre, dans ses remarques, a été on ne peut
plus concis, même bref à l'excès, M. le Président,
puisqu'il n'a pas relevé les motifs qui l'amènent à
modifier ou qualifier successivement les termes employés pour consacrer
ce que la jurisprudence de toute manière avait déjà
acquis. C'est-à-dire que dans une très large mesure, on peut
même dire comDlètement, la règle de droit qui est
énoncée à 98a est un acquis de la jurisprudence et ne
vient que confirmer ce que les tribunaux ont déjà jugé,
conformément, d'ailleurs, M. le Président, à l'article 98
actuel du Code du travail.
Donc, ce n'est que mettre les points sur les "i" et ce n'est pas
essentiellement, contrairement à d'autres dispositions du droit nouveau,
comme on se plaît à le dire.
Cependant, le ministre a modifié le texte du projet 45
déposé l'été dernier en ajoutant au premier
paragraphe une qualification importante, que certains du côté
syndical ont vu comme une diminution déplorable de la reconnaissance de
ce droit
en particulier. Je fais référence aux trois
dernières lignes où l'on dit: "A moins que l'employeur n'ait une
cause juste et suffisante dont la preuve lui incombe de ne pas rappeler ce
salarié". Il y a donc là, M. le Président, une porte que
l'on ouvre au patron, d'expliquer son geste par toutes sortes de circonstances,
ce que le texte initial ne prévoyait pas. Il serait sans doute
intéressant d'entendre le ministre élaborer sur ce sujet, et
peut-être le député de Sainte-Marie, mais on va se limiter
à la demande au ministre, M. le Président.
M. Bellemare: S'il n'y a pas d'objection, le député
de Johnson va donner son opinion.
M. Johnson: Je pourrais peut-être laisser... M. le
Président... Est-ce que le député de Saint-Laurent avait
terminé?
M. Forget: J'avais d'autres remarques, mais j'aime autant cela
là. Ce sera plus simple. En effet, répondez donc tout de suite,
si cela vous plaît, puisque ce sera plus simple pour la suite.
M. Johnson: M. le Président, l'article 98a c'est vrai, est
en fait une précision à partir, entre autres, de la jurisprudence
créée en vertu de 98 qui affirme qu'on ne perd pas son statut de
salarié pour la seule raison qu'on a fait une grève ou on a subi
un lock-out. L'article est différent de 97a dans la mesure où il
ne prévoit pas qu'il s'agit d'une grève dans le contexte de 46 ou
99 du code. C'est exact.
On a effectivement éliminé cette nécessité
de se conformer à 46, entre autres, pour référer
fondamentalement à ceux qui, de bonne foi, pourraient être dans
une situation où ils ont déclenché "illégalement "
une grève parce qu'ils sont sortis une heure avant l'heure
autorisée techniquement, parce qu'ils ont été dans des
circonstances où on ne leur permettait pas, de fait, comme c'est
arrivé dans certains conflits récemment, d'intégrer leur
lieu de travail à cause d'une atmosphère sur une ligne de
piquetage, etc. Et finalement, on considère que la règle, c'est
vrai, permettrait en principe à celui qui, de mauvaise foi, a fait la
grève, de tenter de s'en prévaloir. Mais, même là,
il faudrait voir ce que la jurisprudence dira, étant donné que
l'article 98 demeure et, d'autre part, celui qui est de bonne foi, lui, pourra
évidemment se prévaloir de 98a.
M. Bellemare: M. le Président...
Le Président (M. Clair): M. le député de
Johnson.
M. Bellemare: ... je trouve qu'en étant "nonobstant
l'article 14", qui prévoit le congédiement pour activités
syndicales... On le laisse dans la loi, mais il y aurait une chose qu'il
faudrait bien... Je suis prêt aussi...
M. Johnson: Je m'excuse, oui, oui. M. Bellemare: Mais dans
la loi...
M. Johnson: Oui, l'article 14 reste toujours là.
M. Bellemare: L'article 14 reste dans la loi tel qu'il est, le
congédiement syndical. Il faudrait bien définir que c'est une
grève légale. N'oubliez pas cela.
M. Forget: M. le Président, je croyais que l'intervention
du député de Johnson se situait dans le même contexte. Je
suis d'accord que le point qu'il soulève est pertinent, mais, afin de ne
pas nous mélanger dans nos interventions...
M. Bellemare: C'est l'article 98...
Le Président (M. Clair): Messieurs, pour éviter
toute confusion, voici ce qui s'est passé. Le ministre du Travail a fait
la présentation de l'article 52. Le député de
Saint-Laurent a commencé des commentaires...
M. Bellemare: J'ai demandé la parole et je ne l'ai pas
eue.
Le Président (M. Clair): Effectivement, mais regardez
bien, M. le député de Johnson. C'est que le député
de Saint-Laurent n'avait pas terminé ses commentaires, du moins dans ce
que j'en ai compris, et le ministre a décidé de répondre
immédiatement à une interrogation du député de
Saint-Laurent qui n'avait pas terminé son premier commentaire.
M. Forget: C'est cela, M. le Président.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Johnson, je vous reconnaîtrai immédiatement après le
député de Saint-Laurent.
M. Bellemare: Je n'ai pas besoin. Il va le dire à ma
place, c'est sûr. Je n'aurai pas besoin d'intervenir.
M. Forget: Cela vous donnera le plaisir, M. le
député de Johnson, de nous appuyer. C'est un plaisir qui est, de
toute façon, intense de notre côté, d'autant plus qu'il est
très rare.
M. Bellemare: Vous n'aviez pas besoin d'ajouter qu'il est
très rare.
M. Forget: Est-ce que je dois comprendre des explications du
ministre que les modifications qu'il a fait subir au premier paragraphe de 98
ont pour but de tenir compte des circonstances où le patron conteste le
réengagement, sous prétexte ou pour la raison qu'il y a eu un
arrêt de travail illégal? Est-ce essentiellement cela qu'a dit le
ministre?
M. Johnson: Oui. C'est-à-dire que le patron ne pourrait
pas invoquer que l'arrêt de travail est illégal pour ne pas
réengager puisque 98, de toute façon, et l'interprétation
qu'en a donnée la jurisprudence, c'est que le contrat de travail
subsiste
et on ne perd pas son statut de salarié même quand on fait
la grève, et le mot "grève" a été
interprété par la jurisprudence du travail comme signifiant toute
forme d'arrêt de travail, y compris un arrêt illégal. Ce
serait, en fait, revenir sur des dispositions antérieures à
celles de 1964 que d'exiger cela. Cependant, on peut présumer que, dans
un contexte précis, l'individu qui serait de mauvaise foi et qui aurait
eu un comportement à cet égard qui est manifeste serait
susceptible de subir un non-réengagement pour cause juste et suffisante
et là, la jurisprudence interpréterait. Mais 98 a
déjà donné une interprétation jurispru-dentielle
qui ne tient pas compte de la "légalité" de la grève.
M. Forget: Je m'aiderai de la précision qu'a donnée
le ministre pour proposer un amendement tout à l'heure. Mais, avant d'en
venir à une proposition d'amendement, M. le Président, j'aimerais
soulever une question que le député de Johnson a
déjà mentionnée incidemment, c'est-à-dire
l'élimination, dans la toute dernière version, de la
référence à l'article 14. L'article 14 est celui qui
ordonne une réintégration ou le versement d'une indemnité
au bénéfice de l'employé qui a été
congédié pour raisons syndicales. L'élimination d'une
référence à l'article 14 est l'indication que la
mésentente doit être réglée par un recours au
tribunal d'arbitrage comme s'il s'agissait d'un grief et laisse croire qu'il
s'agit d'un droit beaucoup moins fort que le droit d'un salarié à
obtenir la réintégration à la suite d'un
congédiement pour activités syndicales. Cependant, le langage
utilisé laisse subsister une certaine imprécision sur ce que l'on
veut, exactement, parce qu'il serait simple de dire, dans le deuxième
article, non seulement d'enlever le "nonobstant", mais de dire: "une
mésentente... entre les parties dans le sujet visé par l'article
est réglée conformément à l'article 14."
Si c'est l'intention qu'on avait, mais on n'a pas cette intention et je
dois dire que la fine nuance, la gradation des recours, de la force des
recours, dans une telle circonstance, ce sont des nuances qui échappent
aux non avertis et j'aimerais que le ministre nous explique vraiment comment il
conçoit cette distinction.
M. Johnson: Est-ce que le temps que je prends à
répondre aux questions du député de Saint-Laurent est pris
sur ses vingt minutes? Parce que je pourrais peut-être, à la
fin...
M. Forget: Ordinairement pas.
M. Johnson: Je pourrais peut-être, en fait, lui demander de
poser ses questions, écouter le député de Johnson et
ensuite résumer l'interprétation que je donne à
l'article.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Johnson.
M. Bellemare: Est-ce que le député de Saint-Laurent
a terminé?
M. Forget: J'ai terminé mes questions. J'aurai un petit
bout par la suite pour proposer un amendement.
M. Bellemare: Je ne comprends pas pourquoi on enlève le
mot "nonobstant", à l'article 14. Je ne comprends pas cela parce que
celui qui aura à référer au Code du travail, quel qu'il
soit, un simple conciliateur ou un commissaire-enquêteur, est
obligé de regarder dans la loi où cela mène. Je suis
d'accord avec le député de Saint-Laurent pour dire que
l'explication qu'on retrouvait dans le premier amendement que nous avait
suggéré le ministre après le dépôt de la loi
45: Nonobstant l'article 14, une mésentente entre les parties
relativement etc., etc.
C'était une nouvelle formulation et elle était, à
mon sens, beaucoup plus claire et elle atteignait véritablement les
grèves qui ne sont pas légales, même si le ministre me dit
que la jurisprudence établit que le congédiement pour
activités syndicales dans une grève illégale peut
être reconsidérée. Je pense que le bon sens même,
même si la jurisprudence l'établit, doit être
réellement légal pour une grève ou un lock-out. Alors, je
pense qu'on devrait insérer à quelque part: relativement à
l'article 14.
M. Johnson: M. le Président, est-ce que le
député de Johnson a terminé?
M. Bellemare: Probablement, parce qu'il y a seulement cela que
j'ai à dire. Je trouve que là j'y verrais peut-être pas une
difficulté, mais des recherches qui seraient bien plus claires pour ceux
qui ont à consulter le code.
M. Johnson: En supprimant la référence à
l'article 14, il ne faut pas oublier qu'on ne supprime pas le recours
prévu à l'article 14. C'est cela qui est important au niveau de
la rédaction du texte et on l'a vu et revu avec les juristes. L'article
14 est toujours là. L'article 14 concerne le congédiement pour
activité syndicale. Donc, le salarié peut se plaindre au
commissaire-enquêteur qu'il a été congédié
pour activités syndicales, à tout événement,
quelles que soient les circonstances.
M. Bellemare: ... une grève illégale.
M. Johnson: Non, un salarié qui est
congédié...
M. Bellemare: D'accord.
M. Johnson:... en vertu de 14, peut prétendre, et s'il
gagne devant le commissaire enquêteur tant mieux pour lui et sinon tant
pis pour lui... un individu congédié peut prétendre qu'il
est congédié pour activités syndicales. Cela s'applique
toujours. Ce qu'on dit c'est qu'au moment du retour de la fin d'une
grève ou d'un lock-out, on ne fait aucune référence
à l'article 14, puisque l'article 14 est dans le code et subsiste. On
permet cependant à l'association accréditée de faire en
sorte qu'elle
exige, au-delà de l'article 14. Ce n'est plus un recours du
salarié congédié pour activités syndicales. Elle
exige que l'employeur fasse la démonstration, car c'est lui qui a le
fardeau de la preuve, qu'il a congédié cette personne pour une
cause juste et suffisante. Cela s'en va devant un tribunal d'arbitrage. Or, on
sait, pour les amendements qu'on a adoptés aux articles 88 et 89 que le
tribunal d'arbitrage a aussi le pouvoir de modifier une décision prise
par un employeur. Même si l'employeur fait la démonstration qu'il
y avait cause juste et suffisante pour congédier cette personne, et on
sait par définition qu'une cause juste et suffisante cela ne peut pas
être une activité syndicale, disons qu'il a une autre raison,
même s'il fait cette démonstration, l'arbitre pourrait quand
même décider que le congédiement est une sanction
inappropriée et que la sanction appropriée devrait être
deux mois de suspension ou quelque chose de cet ordre.
Or, cela a beaucoup de flexibilité. Loin de ne pas
reconnaître un recours aux salariés; au contraire, cela lui donne
un recours, en tant que salarié, en vertu de 14, si, effectivement, il
pense qu'il y a matière à l'application de 14,
c'est-à-dire congédiement pour activités syndicales, et,
deuxièmement, l'association accréditée peut, en fait,
porter ce grief en arbitrage, en invoquant qu'il n'y a pas cause juste et
suffisante, que l'employeur doit d'ailleurs démontrer car il a le
fardeau de la preuve.
M. Forget: M. le Président, je ne sais pas si cela
répond aux questions du député de Johnson.
M. Bellemare: On prétend, mon meilleur conseiller me dit
qu'il serait plus clair, qu'il y aurait moins de tiraillements, que cela serait
plus exécutoire. Moi, ce qui ne fait pas mon affaire, c'est que nulle
part, dans cela, on dit que cela sera en vertu... Si quelqu'un fait des
activités syndicales, qu'il provoque une grève illégale et
est congédié après, qu'est-ce qui arrive?
M. Forget: II a deux subsidiaires d'un coup. Il a deux
recours.
M. Johnson: II y a techniquement deux recours. Il s'agit qu'il
aille à 14. Peut-être que l'employeur pourra démontrer,
devant le commissaire-enquêteur, qu'il avait une autre raison que des
activités syndicales pour le congédier. A ce moment-là, il
serait congédié, en vertu de cela.
Il y a un autre recours, qui est le recours par le syndicat
lui-même, devant un arbitre, pour décider s'il y a cause juste et
suffisante, une démonstration qu'il appartient à l'employeur de
faire, c'est-à-dire qu'il y avait cause juste et suffisante de le
congédier.
Je me réfère à la jurisprudence. La jurisprudence,
autour de 98, tel qu'il existe depuis 1964, prévoit que la participation
à une grève, qui n'est pas déclarée
conformément à 46 et à 99, n'est pas
considérée comme privant le salarié des droits qui lui
sont reconnus, à partir de la notion de contrat collectif qui existe
entre lui et l'employeur.
Le Président (M. Clair): Le député de
Saint-Laurent.
M. Johnson: Cependant, évidemment, il s'expose à
des pénalités, comme toute personne qui enfreint les dispositions
du Code du travail.
Le Président (M. Clair): Le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Personnellement, M. le Président, je suis
satisfait des explications sur le deuxième alinéa. Il y avait des
problèmes au deuxième alinéa, qui est relatif à la
procédure pour se prévaloir du premier alinéa. Son
interprétation, en corrélation avec l'article 14, quant à
moi, me satisfait. Il y a effectivement deux recours. Je pense bien qu'ils ne
pourraient pas être utilisés en même temps, mais il y a une
espèce de première possibilité d'utiliser une
présomption de congédiement pour activités syndicales et
une autre possibilité, au cas où c'est un autre motif que le
patron allègue avec succès.
Il reste que toute cette question du droit lui-même plutôt
que de son exercice, qui est dans le premier paragraphe de 98 et, d'une
certaine manière, qui est dans l'article 98 du code lui-même,
soulève un point de fond, c'est-à-dire jusqu'à quel point
une grève, qui se fait en dehors du cadre prévu par la loi,
permet de garder ouvert le droit de réintégrer un poste en vertu
du contrat de travail qui est censé durer.
En effet, ce que l'article 98 et la jurisprudence indiquent, c'est la
permanence ou, plus correctement, la continuité du lien de droit, du
lien contractuel entre le salarié et son employeur. Ce lien contractuel
ne cesse pas, cela demeure un contrat valable qui n'est pas rendu caduc par la
grève ou le lock-out.
Ceci peut demeurer vrai, sans toutefois que le contrat puisse produire
automatiquement tous ces effets pour chacune des parties, quelles que soient
les circonstances. En effet, dans un contrat même valable, une des
parties peut faire défaut de remplir les obligations que prévoit
le contrat. A ce moment-là, le Code civil lui-même prévoit
qu'en cas de défaut par une partie de remplir ses obligations, l'autre
partie peut mettre en demeure la partie défaillante, peut même,
dans certains cas, suspendre elle-même la prestation, ce à quoi le
contrat l'oblige.
Dans le cas d'un locataire qui ne paie pas son loyer, après un
certain temps, etc., il y a possibilité d'éviction, etc. Et on
peut dire que, justement parce que le contrat de travail demeure en vigueur
entre les parties lors d'une grève, les obligations que le contrat
impose à l'une et l'autre partie demeurent des obligations auxquelles
elles sont tenues et à défaut pour les parties de ne pas s'en
acquitter, des sanctions peuvent être prévues.
Il n'y a donc aucune incompatibilité entre l'affirmation de la
continuité du lien juridique et, d'au-
tre part, la possibilité d'invoquer le non-respect du contrat par
l'une des parties pour que l'autre partie puisse à son tour dire: Comme
on n'a pas respecté le contrat, telle ou telle obligation que nous avons
en vertu de ce contrat est elle-même caduque. C'est ce que 98a, premier
alinéa, à mon avis, devrait faire. Il devrait prévoir que
le contrat demeurant en vigueur, la possibilité pour le salarié
de se prévaloir de ce lien juridique n'existe que dans la mesure
où, collectivement ce contrat a été respecté. Ce
qui ne veut pas du tout dire que tous les salariés seraient
automatiquement congédiés au moment d'un grève, bien
sûr. Cela voudrait cependant dire qu'à ce moment-là le
patron pourrait invoquer le non-respect de l'obligation des salariés
pour, à son tour, faire des exceptions basées sur le comportement
des salariés, sur la façon dont ils ont posé un geste
comme celui d'aller en grève.
C'est la raison pour laquelle je crois qu'il est tout à fait
compatible, à la fois avec la législation dans son état
actuel et l'interprétation qu'en a faite la jurisprudence, de
préciser par un amendement dans quel sens le droit de retrouver son
emploi doit être interprété. Cela pourrait prendre
l'aspectje dis "cela pourrait" parce qu'il y a là une question
d'expression, de forme et sous réserve puisque ce ne sont pas des
experts en loi qui ont rédigé cet amendement, mais sous
réserve des questions de forme, ce serait probablement possible
d'améliorer l'expression de tout cela cela prendrait l'aspect
suivant: "Que le premier alinéa du paragraphe 98a de l'article 52 soit
modifié en ajoutant dans la première ligne, après le mot
lock-out, les mots "et s'il s'agit d'une grève déclarée
conformément à l'article 46 et, le cas échéant,
à l'article 99."
L'alinéa amendé se lirait comme suit: 98a. "A la fin d'une
grève ou d'un lock-out et s'il s'agit d'une grève
déclarée conformément à l'article 46 et, le cas
échéant, à l'article 99, tout salarié qui a fait la
grève ou a été lock-outé a le droit de retrouver
son emploi de préférence à toute autre personne, à
moins que l'employeur n'ait une cause juste et suffisante dont la preuve lui
incombe de ne pas rappeler ce salarié."
Il faut dire que ce paragraphe comme celui auquel il se substituerait en
partie, n'abrogerait pas pour autant l'article 14. Donc, des protections
continueraient d'exister pour le salarié: d'abord la persistance du lien
juridique que le salarié pourrait aussi invoquer dans une certaine
mesure sous condition et finalement, pour la même raison de la permanence
du lien juridique, la possibilité d'invoquer l'article 14,
c'est-à-dire le congédiement pour activités
syndicales.
Il me semble qu'il serait plus logique, plus normal de dire: Bon, il y a
un contrat, contrat qui dure indépendamment de la grève ou du
lock-out qui sont permis par la loi et, en vertu de ce contrat qui dure, le
travailleur a le droit de réclamer, de préférence à
toute autre personne, d'être restitué dans son emploi.
Cependant, si la grève ne se fait pas dans le cadre prévu
dans la loi, il ne s'agit plus d'un droit strict et absolu, il s'agit d'un
droit relatif et sujet, de la part de l'employeur, aux dispositions relatives
au congédiement pour activités syndicales. Il me semble que ceci
permettrait d'être plus cohérent et d'affirmer encore une fois le
principe que nul ne devrait pouvoir utiliser la loi, à moins de
lui-même la respecter, ce qui me semble, dans le domaine d'une loi qui
veut régir les comportements, une exigence première et
fondamentale de toute personne qui veut se prévaloir du Code du travail,
devoir s'acquitter elle-même de toutes ses obligations en vertu du
même Code.
Le Président (M. Clair): Le ministre du Travail.
M. Johnson: M. le Président, sur la motion d'amendement du
député de Saint-Laurent... On m'affirme qu'en 1964, au moment de
la rédaction de 98, on prévoyait effectivement parmi les
premiers projets on prévoyait la notion de grève
légale et elle a été retranchée de ces projets.
Pourquoi?
Il faut regarder comment cela se passe en pratique. C'est ce que la
jurisprudence nous dit aussi. Une grève, c'est un
phénomène collectif. Une grève peut être
déclenchée de bonne foi, en respectant l'ensemble des
dispositions du code, particulièrement 46 et 99, le cas
échéant. Une grève peut-être
décrétée toujours de bonne foi dans ce contexte de 46,
mais avec une erreur concrète de délai, débrayer, par
exemple, quelques heures avant l'heure normale qui donne ouverture au droit de
46 d'exercer la grève.
Une grève peut aussi être déclenchée de bonne
foi, mais absolument sans rapport avec 46, quand il s'agit d'un
phénomène spontané qu'on peut retrouver dans une usine,
par exemple, où des événements viennent troubler les
activités normales. Ces événements peuvent être un
incident, un accident, la présence d'une personne qui, sur le plan des
relations humaines, est incapable de garder une atmosphère harmonieuse.
Cela peut aussi être carrément de la provocation de la part d'un
employeur. Cela peut se produire. Il ne faut pas dire non plus que les
syndicats sont des saintes nitouches. Dans certains cas, la provocation peut
venir du syndicat pour provoquer des événements
désagréables. Cela joue dans les deux sens.
Le Code du travail est là pourquoi dans le fond? Je pense qu'il
faut se référer à l'analyse des 25 dernières
années de syndicalisme au Québec. Les syndiqués ont
acquis, à force de revendications et de contestation, des droits. On ne
poura, à moins que cette société, comme d'autres l'ont
fait, ne change de façon extrêmement profonde quant à
l'évaluation des rapports entre les personnes, y compris des notions
aussi fondamentales que le droit de propriété, à moins que
notre société ne change, ce sera, à mon avis, toujours le
devoir du législateur de faire en sorte qu'on ne revienne pas sur ce
type de droit qui a été acquis chèrement par les
travailleurs.
On a toujours considéré qu'un débrayage
spontané en cours de convention collective pouvait être un
événement fait de bonne foi, pouvait être un
événement provoqué, par exemple, par un employeur. Si on
acceptait l'amendement du dé-
puté de Saint-Laurent, on serait dans une situation juridique
précise qui interdirait ce type de recours en vertu de 98a, alors que
ceux qui l'ont exercé l'ont fait de bonne foi.
Un autre exemple de cela, c'est l'entraînement à un
débrayage illégal. Je pense que l'histoire récente dans le
syndicalisme, dans certains secteurs, est assez manifeste à ce sujet. Il
existe des salariés qui, à un moment donné,
débraient parce qu'ils se sentent pressés de le faire par des
gens qui, eux, n'ont peut-être pas le souci de respecter les dispositions
du Code du travail. Est-ce qu'on devrait les mettre dans une situation
juridique telle qu'ils ne pourraient pas revendiquer ce droit de 98a, que 98a
vient reconnaître en complétant 98 qui a été
interprété par la jurisprudence du travail comme créant
une sorte de régime d'exception pour les salariés? Je pense
qu'à ce titre il faudra rejeter l'amendement du député de
Saint-Laurent.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Johnson.
M. Bellemare: M. le Président, les arguments qu'emploie le
ministre sont des arguments de 25 années d'application et de
jurisprudence, mais le Parlement, étant souverain, a le droit d'ignorer
cela comme un article de bon sens. Ce n'est pas une jurisprudence de 25
années qui peut me faire croire qu'il n'y a pas une
nécessité évidente de le déclarer aujourd'hui.
Ce n'est pas plus pour protéger l'employeur que le syndicaliste,
mais il reste qu'on revient à ce que je disais tout à l'heure,
dans ma première réflexion, au sujet de la grève
légale ou illégale. Est-ce qu'on a le droit, nous comme
législateurs, de ne pas prévoir ces grèves
illégales? Est-ce qu'on aurait le droit de dire dans un article de la
loi: La jurisprudence a déclaré que les grévistes qui ont
fait des grèves illégales sont soumis à cet article, ils
ont le droit, en vertu de l'article 14, de demander la
réintégration de l'employé, avec tous les dommages que
cela comporte?
Pour une fois, l'amendement répond à ma philosophie du
renouveau qu'on doit apporter dans ces articles à double sens, où
la jurisprudence est venue s'ajouter à des jugements de cour pour dire
qu'un gréviste qui était illégalement en grève doit
se servir de l'article 14 ou d'un recours pour obtenir sa
réinstallation. Je pense, M. le ministre, que l'amendement qui est
devant vous est très simple, mais très sérieux. Il
mérite une attention bien particulière, parce qu'on
déclare véritablement qu'il s'agit d'une grève
déclarée, conformément à l'article 46. Que dit
l'article 46? Si l'intervention d'un conciliateur... On l'a amendé cette
année. Au lieu de 60 jours, c'est 90 jours. Je ne vois pas l'explication
du ministre, même s'il prétend que, théoriquement, il
faudrait suivre le vieux chemin battu et essayer de trouver une sortie pour
ceux qui, illégalement, vont faire une grève. A la fin d'une
grève ou d'un lock-out, il s'agit d'une grève
déclarée conformément à l'article 46... Je plaide
devant un ministre qui ne m'entend pas.
M. Johnson: Je m'excuse. Mes excuses...
M. Bellemare: Oui, je vous excuse.
M. Johnson: ... M. le député de Johnson, qui sait
que je l'écoute toujours attentivement, sauf qu'il y a parfois, à
travers 56 heures de débats, des minutes de distraction.
M. Bellemare: Je trouve cet amendement sérieux, je le
trouve approprié. Je trouve que si on a vécu dans
l'illégalité, même avec une loi qui semblait
protéger les gens qui, illégalement, étaient dans une
grève, on pouvait se servir de l'article 14 pour tâcher de se
faire réinstaller. Si on a vécu 25 ans dans cette double forme
d'illégalité, en permettant qu'un gréviste qui a
déclaré une grève illégale puisse
réintégrer son emploi, je pense que si on ne le déclare
pas dans cet article, cela va rester encore de la jurisprudence, cela va rester
encore le vieux tandem de dire: La loi l'a dit, la loi le protège, la
loi le veut, la jurisprudence est ceci... Puisqu'on fait véritablement
un amendement, on devrait le faire dans le sens de dire que toute grève
illégale est illégale, puisque c'est notre devoir d'agir mieux
que nos prédécesseurs, de formuler quelque chose qui soit
véritablement en accord avec la pensée qu'on a, celui de
déclarer que, conformément à l'article 46, et là,
on l'a amélioré, on l'a mis à 90 jours... Je voterai en
faveur de l'amendement. Je ne veux pas être plus long que cela.
Le Président (M. Clair): Le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: Je pense en trente secondes, appuyer ce que le
député a dit, et aussi le député de Johnson.
L'amendement est clair. C'est positif. C'est important. C'est de ne pas dire
dans le sens qu'on décrit quelqu'un qui est allé en grève
contre son droit, après avoir suivi les conditions de l'article 46, ce
qui s'applique à l'article 99, qui dit carrément qu'ils ont agi
selon la loi et à cause de cela, la grève est maintenant
terminée et ils ont tous leurs droits, comme un salarié qui a agi
selon la loi et pas contre la loi.
Je ne pense pas que le ministre veuille garder l'ambiguïté
qui existait auparavant. On ne devrait pas avoir honte de dire carrément
que nous avons le droit d'aller en grève, selon les conditions
précisées à l'article 47, c'est-à-dire que la
grève est maintenant terminée et que vous avez tous les droits
que vous aviez avant la grève.
Cet amendement veut dire que vous avez le droit, comme citoyen dans un
pays libre, d'aller en grève légalement et que vous n'avez rien
à craindre parce que vous utilisez votre droit légitime, comme
citoyen, comme salarié. C'est ce que ça dit, comme le
député de Johnson l'a noté. Tout ce que l'amendement dit,
c'est plus clair, plus simple, plus positif que ce que l'article 98a dit, selon
le ministre.
Ce qu'on dit ici... Je ne peux pas comprendre que quelqu'un de cette
commission puisse être contre l'article 98a. C'est positif, c'est clair,
ça reprend le droit de l'employé, le droit du salarié
d'aller en grève, si cette grève est légale,
naturelle-
ment. On demande que le monde suive la loi, pas seulement l'employeur,
mais l'employé, tout le monde, les députés. On n'est pas
pour pénaliser un homme qui va aller en grève légalement.
Tout ce qu'on reprend ici, pour l'employeur, pour tout le monde, c'est le droit
d'un salarié, membre d'un syndicat, d'aller en grève, si c'est
nécessaire.
Mais il faut respecter la loi, il faut aller en grève
légalement, selon l'article 46. Si les salariés suivent la loi,
ils sont protégés par le même Code du travail; tous leurs
droits, en tant qu'employé, sont protégés. C'est tout ce
que ça dit, l'article 98a, en ce moment. Si vous ne partagez pas ce
sentiment, cela m'étonne. On a souvent, pendant que j'étais ici,
fait des nuances sur beaucoup des amendements du député de
Saint-Laurent mais je pense, finalement, que la philosophie du
député de Saint-Laurent est prosyndicaliste, "projustice"
plutôt, c'est un meilleur mot, parce que la loi ne devrait pas prendre
parti ni d'un côté, ni de l'autre. L'article 98a dit aux ouvriers:
si c'est nécessaire, selon votre désir, d'aller en grève
légalement pour arrêter les injustices ou pour avoir une
augmentation de salaire, ou des causes valables...
Si vous avez suivi la loi, conformément à l'article 46 par
exemple, ou à l'article 99 si vous êtes un fonctionnaire; si vous
avez suivi la loi, vous avez le droit d'aller en grève légale,
rien ne traîne parce que vous avez suivi la loi. Seulement ceux qui ne
suivent pas la loi devraient avoir quelque chose à craindre dans notre
société. Si nous avons peur, en tant que membres de
l'Assemblée nationale, de dire aux ouvriers, comme aux patrons, si vous
enfreignez la loi, si vous agissez illégalement, vous allez payer en
conséquence. Sans ça, il n'y aura plus de justice, il n'y aura
plus de conventions collectives, il n'y aura plus de syndicat. Le public va se
prononcer, il va forcer les députés, les ministres à faire
des lois antisyndicales.
Je pense que la meilleure défense pour un membre du syndicat,
c'est de suivre la loi. Tout ce que le député de Saint-Laurent
dit, comme le député de Johnson l'a souligné, c'est que si
vous agissez selon la loi, vous n'avez rien à craindre. Ce n'est pas
plus compliqué que ça.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Le député de
Bourassa.
M. Laplante: M. le Président, me servir de l'article 46,
tel que proposé par le député de Saint-Laurent,
j'hésiterais beaucoup... Non. L'article 46, tel qu'il le propose,
à la fin d'une grève ou d'un lock-out... Il s'agit d'une
grève déclarée conformément à l'article 46.
J'aurais de la misère moi-même à déclarer si une
grève peut être légale ou illégale. Si je prends un
cas, disons d'un chantier de construction, même si l'ouvrier aujourd'hui,
lorsqu'il ne se sent pas en sécurité dans une position, s'il y a
danger pour sa santé, danger pour sa vie, il peut refuser d'exercer un
emploi. A un moment donné, cela peut-être collectif sur un
chantier de construction.
Si vous prenez une grosse construction à côté d'un
vieil immeuble qui a été démoli et que les ou- vriers
jugent entre eux qu'il y a un danger très prononcé qu'un mur
s'effondre à côté d'eux. Le patron se met dans la
tête de dire: Ce n'est pas vrai, le mur est encore solide. Vous avez
cinquante ouvriers dans le trou et la peur les prend. Le patron ne veut rien
savoir. On fait une grève.
M. Bellemare: Elle est illégale.
M. Laplante: Je ne peux pas dire qu'elle est illégale et
je ne peux pas dire qu'elle est légale non plus. L'ouvrier a jugé
qu'il y avait un grand danger. Il n'a pas pu avertir 90 jours d'avance. Il n'a
pas pu avertir, 90 jours à l'avance, qu'il faisait la grève,
parce que le mur a le temps de tomber d'ici ce temps-là.
Comment saurez-vous si c'est légal ou non? J'aime beaucoup mieux
la première présentation du ministre: il y a un recours. Si le
patron veut dire à ces ouvriers: D'après moi, c'était
illégal, je te congédie ou autres sanctions. Automatiquement, le
patron sera obligé d'en faire la preuve. Il sera obligé d'amener
ses experts au sujet de ce mur. Mais est-ce qu'on peut douter du jugement de
l'ouvrier qui est là?
M. Bellemare: Vous iriez mettre cela dans une loi, qu'une
grève est illégale?
M. Laplante: Non, je ne mettrais pas cela dans une loi. Ce n'est
pas spécifié ici non plus, dans l'amendement.
M. Bellemare: Pourquoi a-t-on eu tant de difficulté
jusqu'à maintenant, M. le député de Bourassa? Justement,
parce que l'article n'était pas clair. Pourquoi y a-t-il eu tant de
jurisprudence établie, qu'il y a tant de jugements rendus, alors que
c'était une grève légale ou illégale, en faveur
d'un gréviste qui voulait se faire réintégrer dans son
emploi en vertu de l'article 14? Justement parce que l'article 98a qu'on amende
aujourd'hui n'était pas clair. On en est à un article qui a
amené je ne sais combien de jurisprudence et de débats en cour.
On l'a devant nous, parce que ce n'est pas clair. L'amendement le clarifie
d'une manière définitive. Cela va être fini, ce
côté-là. On va le savoir si c'est légal ou non. Il
n'y aura plus de débats et il n'y aura plus de jurisprudence. L'article
est clair.
M. Laplante: II n'y a plus de débats dans l'article du
ministre.
M. Bellemare: Les grèves illégales ne sont pas
reconnues. Je ne voterai pas pour une grève illégale.
M. Laplante: Parce que la preuve se fait par le patron.
Là, on s'en va directement, par l'amendement, à l'article 46.
Tout de suite, on la déclare. On prend position. Ce n'est pas à
nous de prendre position, à ce moment-là. C'est au patron de
prendre position pour dire oui ou non, dans le cas de cet ouvrier, s'il y a
matière à congédiement.
M. Bellemare: Oui, mais M. le député de
Bourassa...
M. Laplante: Parce qu'il sera toujours dans le même dilemme
de ne pas être capable de préparer sa défense ou donner un
ordre de grève de 90 jours, en suivant l'article 46. Il ne sera jamais
capable de le faire, dans le cas d'une grève instantanée.
M. Bellemare: L'article 46 a été
amélioré. Au lieu de 60 jours, on a mis 90 jours.
M. Mackasey: Si je peux me permettre une petite observation au
député. Je félicite le ministre pour l'article 46 qui est
très simple. Cela élimine beaucoup d'étapes qui
étaient ambiguës auparavant. L'article 46 dit maintenant qu'une
grève est légale après 90 jours. C'est simple. Cet
amendement est logique maintenant. Ce n'était peut-être pas
logique auparavant, lorsqu'on avait tellement d'étapes à franchir
avant d'aller en grève légale.
Mais l'article 46 précise que 90 jours après avoir
avisé le ministère, vous avez le droit d'aller en grève.
C'est fait comme cela. Tout ce qu'on dit ici...
M. Laplante: ... normale d'une convention collective, l'article
46 est là.
M. Mackasey: Certain qu'il est là, on a voté pour
l'article 46.
M. Johnson: M. le Président, si le député de
Notre-Dame-de-Grâce me le permet et je suis sûr que le
député de Johnson va être sensible à cet argument
je pense que tous les deux savent, pour avoir été
ministres du Travail, l'un à Ottawa et l'un ici, au Québec, que
les lois du travail, c'est une espèce d'effort afin de concilier ce qui
relève du droit collectif et ce qui relève de la vie
concrète des hommes et des femmes qui sont couverts par le Code du
travail.
C'est un but essentiel et je dois vous dire que ma première
approche à cet article, quand j'ai procédé à
l'analyse de différents éléments du projet de loi 45,
était un peu comme celle du député de Saint-Laurent.
Pourquoi, dans le fond, ne devrait-on pas soumettre cela carrément
à la légalité de la grève un tel droit de retour au
travail?
Ma première attitude a été cela et, à un
moment donné, j'ai fouillé et je me suis rendu compte que,
fondamentalement, l'article 98a, comme nous le présentons, a
essentiellement pour but d'humaniser le code, de l'humaniser dans la situation
concrète du salarié Untel qui s'est fait pousser dans le dos par
deux organisateurs syndicaux pour sortir ce jour-là, alors que
c'était une grève illégale, de ne pas le mettre dans une
situation où il risque de ne pas être capable de reprendre son
emploi, d'humaniser le cadre pour le gars qui, à un moment donné,
s'est aperçu, dans son usine, qu'il y avait quelque chose de dangereux.
Ils se sont mis quinze et ils ont dit: Nous autres, on sort tant que le patron
ne réparera pas cela. Cela peut arriver, des situations comme cela. Ce
n'est pas la façon idéale de les régler.
Tout le monde sait que les relations du travail, ce sera toujours un peu
comme cela. On peut souhaiter que notre société évoluera
et que tout cela se fera par des ententes, etc., mais, à un moment
donné, il y a des événements dans la vie du travail qui
sont des phénomènes de spontanéité. Je ne parle pas
de grèves sauvages multiples; je ne parle pas d'efforts concertés
par une centrale syndicale d'ébranler son monde à telle
époque précise pour paralyser l'économie, etc.; je parle
concrètement de ce qui peut arriver à un salarié de bonne
foi qui, à un moment donné, n'en peut plus. Je parle du
salarié qui s'est fait entraîner par des gars un peu plus
militants que lui. Je dis qu'on ne doit pas lui... C'est pour cela que la
jurisprudence, à un moment donné, a dit que l'article 98, dans
deux causes, il faut l'interpréter comme s'appliquant à tout
arrêt de travail. Probablement que c'étaient des
considérations humanitaires dans ce cas-là.
Ceci dit, cela n'empêche pas que, si on a affaire à un
débrayage qui est de mauvaise foi, manifestement, accompagné
d'actes et d'attitudes qui peuvent donner une cause juste et suffisante,
peut-être, la jurisprudence l'interprétera-t-elle à ce
moment-là, face à M. Untel qui a pris quinze personnes en les
forçant littéralement à sortir. Mais pourquoi serait-ce le
simple salarié qui, tout à fait de bonne foi, serait
impliqué dans un mouvement? Pourquoi serait-ce lui qui perdrait cette
couverture?
M. Bellemare: Parce qu'il n'a pas d'autres moyens.
M. Johnson: Je trouve que c'est une approche beaucoup trop
théorique que de soumettre cela à l'article 46.
M. Bellemare: Vous pensez qu'il n'y a pas d'autres moyens pour
arriver à la même fin?
M. Johnson: On en a cherché. M. Bellemare: Oui,
mais...
M. Johnson: On en a cherché. Je comprends les propos du
député de Johnson, on en a cherché.
M. Bellemare: Parce que là...
M. Johnson: Ce qu'on a trouvé, c'est cela.
M. Bellemare: Déclarer une grève illégale,
on y est habitué en vertu de l'article 14.
M. Forget: J'ai l'impression que le ministre mélange un
peu un certain nombre de choses. Il y a d'abord un problème dans sa
description des problèmes ou des situations qu'il veut régler par
la loi, il y a énormément de paternalisme. L'idée qu'il
faille protéger le travailleur qui, de bonne foi, se sent
entraîner par les autres, etc.
M. Johnson: Oui.
M. Forget: ... c'est du paternalisme, M. le Président.
M. Johnson: Ce n'est pas du paternalisme, mais je pense que c'est
le souci du législateur.
M. Forget: ... parce que, s'il vous plaît, on a basé
un tas de dispositions dans le Code du travail sur la proposition suivante:
C'étaient des organismes responsables, des organismes
démocratiques. Une idée dont il faudra se départir, si on
veut soutenir, de façon crédible, la notion que ce sont des
organismes responsables et démocratiques, c'est que, quand il y a des
erreurs qui se font, il n'y a personne qui paie pour ces erreurs. Ne nous
attendons pas qu'il y ait des comportements responsables quand les
décisions ont été prises par un organisme qui semble
descendu du ciel. C'est tout le monde qui en est la victime. Il n'y a personne
qui a décidé. Finalement, on enlève toutes les sanctions
ou toutes les contreparties à des droits cela s'appelle les
obligations sous prétexte que ce sont d'autres qui ont
décidé.
Je pense que cela fait partie d'une maturation et d'un effort de
démocratisation syndicale de se dire: Lorsqu'il y a des décisions
qui sont prises au nom de tous, tous sont dans le même bateau, tous
doivent savoir qu'il y a des conséquences à des gestes qu'on pose
librement par des votes démocratiques. C'est essentiel.
D'autre part, il y a des exemples qu'à la fois, le
député de Bourassa et le ministre ont repris, en termes de
sécurité au travail, etc. C'est bien clair que c'est une
préoccupation importante, mais ne prétendons pas, par le Code du
travail, régler tous les problèmes à la fois. Il y a une
loi qu'on nous promet, qui va venir et qui va nécessairement je
le sais parce que c'est une loi qui est depuis longtemps en préparation,
qui était même en préparation avant le gouvernement actuel
devoir prévoir, justement, dans le cas où des conditions
de travail mettent en danger la sécurité, ou la vie, ou la
santé des employés, où le caractère urgent du
danger est tel qu'ils doivent s'y soustraire rapidement; il va aussi falloir
prévoir, dans ces lois, des mécanismes spéciaux, mais
orientés vers des buts spécifiques de protection de la
santé. Ce n'est pas n'importe quel genre de grève à ce
moment-là.
Ce ne sera pas fait dans le cadre du Code du travail, ce sera fait dans
le cadre d'une loi sur la santé et la sécurité des
travailleurs. Il va y avoir des mécanismes appropriés
là-dedans, mais qu'on n'invoque pas la santé et la protection de
la vie des gens lorsqu'il est question d'intérêt
économique. Il est question d'intérêt économique et
de défense d'intérêt économique dans le cas du Code
du travail. C'est pour cela que cela existe, ce n'est pas pour défendre
la vie de qui que ce soit, parce que si c'était cela, on attendrait
longtemps.
On a, effectivement, attendu longtemps, parce que malheureusement, et ce
n'est pas un reproche qui s'adresse plus aux syndicats qu'aux patrons, la
priorité donnée à la sécurité et à la
santé a été très basse dans le cahier des
priorités à la fois des syndicats et des patrons. On a
donné, c'était peut-être inévitable, dans une
société relativement pauvre à une autre période, la
préférence au gagne-pain et à la possibilité de
faire vivre sa famille plutôt qu'à des considérations de
sécurité. C'est inévitable, mais cela s'est produit comme
cela. Alors, ne prétendons pas maintenant qu'il y a là un vice
fondamental du Code du travail. Ce n'est pas par ce moyen qu'on va le
régler.
Alors, il y a la question de responsabilité qu'il faut asseoir
sur une conception réelle de ce que le Code du travail peut donner. Je
suis le dernier à suggérer qu'on ait recours aux mesures
pénales. A mon avis, un Code du travail devrait se faire presque sans
pénalité, sans amende, mais il y a une proposition qui devrait
être la première inscrite dans un Code du travail, c'est que nul
ne peut se prévaloir de droit au nom du droit du travail, à moins
de souscrire aux obligations qu'il a lui-même.
Il n'est pas question de mettre personne à l'amende, mais de
dire: Si vous voulez réclamer des droits, assurez-vous d'abord d'avoir
respecté la même loi de la même façon. Ce n'est pas
la seule loi qui régit les comportements et les droits collectifs. On
pourrait citer la Loi électorale et c'est un très bon exemple. On
ne permet à personne de se prévaloir de la Loi électorale
de façon à se déclarer élu dans un comté,
à moins d'avoir satisfait aux obligations de la loi électorale.
Si on n'a pas satisfait aux obligations de la Loi électorale, on a beau
avoir été de bonne foi, on n'a pas son mandat, on n'est pas
éligible ou on est déchu de son mandat, si on s'est fait
élire, par ailleurs.
Je pense que c'est un principe qui est extrêmement sain. Nul ne
peut profiter de la loi, à moins d'y souscrire lui-même, de
souscrire lui-même à ses obligations. C'est seulement cela qu'on
demande. On ne demande pas de pénalité. On demande seulement la
cohérence.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez,
concrètement, et je pense que les propos du député de
Saint-Laurent démontrent une certaine absence de sensibilité
à la "quotidienneté" de ce que sont les relations du travail pour
les salariés. Je ne lui fais pas un procès d'intention, mais je
trouve que son approche sur le plan théorique, et que je partage
entièrement si on vivait dans une société
idéale..., il n'y aurait pas de problème. On ne vit pas dans une
société idéale.
Je sais aussi qu'au Québec, par exemple, ce n'est pas tous les
employeurs qui tiennent pour acquis que le syndicalisme, ce n'est pas une
affaire à démolir a priori. Il y a encore bien des employeurs au
Québec qui voient le syndicalisme comme une menace. Comme départ,
cela peut donner des situations, ou, effectivement plutôt que de prendre
cela comme un problème de gestion, on prend cela comme une guerre
à faire. Quand on prend cela comme une guerre à faire, comme
employeur, on crée parfois des situations qui mettent les gens de bonne
foi, comme salariés, dans des situations difficiles à
supporter.
Je ne reprendrai pas les arguments sur la
santé et la sécurité, je suis d'accord avec le
député de Saint-Laurent. Une loi générale sur la
santé et la sécurité pourrait prévoir,
effectivement, ces situations. C'est ce vers quoi ce gouvernement se
dirige.
Cela n'empêche que je pense que ce serait inique dans le Code du
travail de faire en sorte que des gens qui, de bonne foi, ont été
dans une situation où la grève était techniquement
illégale, pour les raisons de l'article 46, ne pourraient pas se
prévaloir de cet article pour qu'on puisse affirmer leur droit à
réintégrer leur travail.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Johnson.
M. Bellemare: M. le Président, le ministre jusqu'à
aujourd'hui s'est comporté comme un vrai législateur. Là,
il devient un ministre qui est émotif, qui se laisse saisir par ce qu'on
appelle le tragique. Oui, c'est vrai. On est tous conscients de cela. On a
cité quelques cas, le député de Bourassa et d'autres.
Est-ce que, dans une loi, on va permettre que les gens puissent se servir de
cet article pour justement lock-outer ou pour faire une grève
illégale, et dire: Le ministre a dit cela va être
reporté dans les débats il y a des cas particuliers,
où il faut le reconnaître... Ecoutez, je ne peux quand même
pas... Je ne me rendrai pas là. Cela m'a sauté aux yeux au
début.
Mais plus ça va, plus je me raisonne. On n'a pas le droit de
donner, dans un Code du travail qui va être une loi, cette chance
à des gens de faire des grèves illégales. Par l'amendement
de l'honorable député de Saint-Laurent, on couvre le sujet, on
ferme la porte et on dit: Si vous avez des revendications à faire,
à l'occasion du renouvellement de la convention collective, vous les
ferez valoir; là ce sera le temps de les faire valoir. Un mur qui tombe,
un gars qui est sur une poutrelle et qui tombe parce qu'on n'a pas mis de
garde, là c'est la sécurité qui doit y pourvoir et il y a
des agents pour cela, il y a des agents de sécurité qui doivent
voir à ça dans le Code du travail.
M. le Président, quelle différence peut-il y avoir entre
les attitudes qu'a prises le ministre jusqu'à maintenant pour faire
respecter la loi, lui qui est le ministre responsable du Code du travail?... Si
quelqu'un arrive, demain matin, avec le journal des Débats, et qu'il est
justement dans une grève illégale et qu'il dit: M. le ministre,
vous vous souvenez de ce qui a été écrit ici; vous, vous
allez m'appuyer. Vous allez dire: Non, jamais ce n'est pas la loi, la loi ne
prévoit pas ça. Elle dit plutôt: "... une
mésentente, à la fin d'une grève ou d'un lock-out, le
salarié..." vous allez lui citer votre article. Mais si, par exemple,
vous lui citez l'amendement qui a été voté à
l'unanimité ou plutôt avec majorité l'amendement du
député de Saint-Laurent qu'est-ce qu'il va dire? Vous
allez certainement être ému; c'est du drame, c'est du
sen-sationnalisme, mais ce n'est pas ça; la loi, c'est la loi: dura lex,
lex...
M. Johnson: Dura lex, sed lex.
Le Président (M. Clair): C'est cela.
M. Bellemare: Sed lex, oui, j'ai passé un mot. Mais la loi
est dure comme ça. On ne fait pas une loi seulement par émotion
et sensiblerie pour dire, il peut y avoir un...
M. Johnson: M. le Président, si le député de
Johnson me le permet?
M. Bellemare: Je vous le permets certainement.
M. Johnson: Plutôt que de me faire prêter des vertus
de sensiblerie, je préférerais simplement évoquer
c'est ce que j'ai évoqué dans mon propos qu'il y a des
situations, même si techniquement il faudrait s'entendre sur ce qu'est
l'illégalité d'une grève au Québec...
L'illégalité est définie en fonction de l'article 46, du
respect du délai. Il peut fort bien se présenter des situations
où, de bonne foi, on permet à un arbitre de tenir compte de la
bonne foi. C'est aussi simple que ça. Les salariés, au
Québec, ne sont pas des ordinateurs avec l'article 46 dans leur
tête et on l'a clairement...
M. Bellemare: L'article 41.
M. Johnson: ... affirmé dans le cas, cependant, des
dispositions anti-briseurs de grève. C'est clair que c'est seulement une
grève qui respecte l'article 46 parce que, là, ça implique
l'ensemble des personnes, pas seulement une personne. Mais ce à quoi on
réfère, c'est à un cas précis. Je ne nie pas
étant donné la rédaction que nous donnons à
l'article 98a je ne nie pas qu'il serait possible que quelqu'un, dans un
acte de grève illégale, avec une intention spécifique de
commettre des gestes qui rendent une grève illégale, tenterait de
s'en prévaloir. Mais ce que je dis, c'est que ceux-là, s'ils ont
commis des gestes de sorte que l'arbitre considère qu'il y a une cause
juste et raisonnable pour les congédier, ils pourraient être
congédiés s'ils sont engagés, et tant pis s'ils sont
réengagés d'une certaine façon. Mais celui qui, de bonne
foi, a été entraîné, celui qui, de bonne foi, est
sorti trois heures avant, celui qui, de bonne foi, a été dans une
situation où il s'est senti obligé de sortir parce que, à
un moment donné, il y a peut-être quelqu'un qui lui poussait un
peu trop fort dans le dos et que ça n'avait pas de sens; pourquoi
interdirait-on à l'arbitre d'employer des critères qui soient des
critères d'humanité, pas seulement des critères juridiques
du délai de 90 jours prévu à 46? Il y a des situations
humaines qui, je pense, commandent cette souplesse et on ne vit pas encore dans
une société idéale où tous les salariés,
où tous les citoyens sont hyperconscients, de minute en minute, d'une
décision découlant du fait qu'ils n'ont pas respecté
l'article 46. Voyons donc!
M. Bellemare: M. le Président, quand...
M. Johnson: Le député de Johnson lui-même,
alors qu'il était ministre du Travail, qu'il a modifié le code
deux fois, n'a jamais introduit la notion de ce qu'était une
grève illégale, pour les fins du congédiement pour
activité syndicale.
M. Bellemare: Oui, c'est vrai, je l'ai dit et je l'ai
répété et j'ai posé un geste de bonne foi il y a
dix ans, et qu'est-ce qui a été fait à l'article 41?
Parlez-moi en donc de la bonne foi. Qu'est-ce qui a été fait
depuis 1968, depuis qu'on a apporté l'amendement à l'article 41,
qu'ils devraient négocier immédiatement avec beaucoup de
diligence et de bonne foi. Cela a été écrit dans la loi.
Comment ont-ils respecté la bonne foi? Ne venez pas me parler de bonne
foi. Aujourd'hui c'est "other days, other ways", certainement.
Le Président (M. Clair): Le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: M. le ministre, c'est regrettable, that you and I
are going to have a battle, a philosophical battle, I can not go through a stop
sign and say that I did it in good faith. The law is the law. The law and the
way you... Permettez. Let me finish because I am coming back to your point.
M. Johnson: You will get a ticket for $10, you will not lose your
job. That is the difference.
M. Mackasey: What you are saying is that the penalty is too dear,
but what is more important, and the point has to be made for your good and for
everybody's good... I am talking of the simple member, nothing more, with no
apologies to make for my concern for the working people. Now, you cannot, under
any circumstances, justify breaking the law, in no way. There are no nuances;
you cannot say in good faith, you cannot excuse anybody for breaking the law if
you are going to help the Trade Union movement. Now I am going to come back to
this very important...
You did the right thing, one month ago, when you said to tne workers who
were on strike in Montreal, legally or illegally, whatever, in transportation.
You made it very clear to those workers that if they broke the law or went on
strike legally or illegally, they would have to pay the consequences, and I
think you knew, and I knew, that the majority did not want to go on strike and
they went on strike for two or three weeks. M. le ministre, un mois
peut-être, deux semaines, whatever they got nothing more when they
came back than when they went on strike. The importance of what you did was
this: You made the average worker in that Union, who has an obligation to
participate, to go to his meetings, to tell the leaders: We want to work
according to the law, we do not want an illegal strike, you forced these
workers out of their front room because they lost two weeks pay, whereas in the
past, after two days, in the name of essential services or discomfort of the
public, you or somebody else would have rescued them from being penalized. This
is important, because again here, you have a handful of leaders who say to the
workers: You must go on strike, even if it is illegal. Really, the person who
does not want to go to the meeting and stand up and have the courage to say to
the leaders: I am not breaking the law, there are other ways, in the Labor
Code, to handle this grievance or this injustice being done to me by the
employer... But certainly, the way of redressing the grievances caused by the
injustice on the part of the employer is not to break the law. However you are
saying, in your article 52, that, under certain circumstances, acting illegally
is permissible, and that is an astounding philosophy. For instance, two weeks
ago, in Toronto, 382 people, out of 6000, caused an illegal strike. The people
who where guilty, as far as I am concerned, were not the 382, but the 5000 that
stayed home.
My point, Mr Minister, is that the law is the law and the proper way for
you to act, and for us to act, and for the Labor Code to insist upon is that
everybody, employer and employee work within the law. If the law is wrong,
amend the law, if the law is deficient, amend the law, and that is what we are
doing tonight. But for goodness'sake, even by inference, we cannot condone
illegal acts or illegal strikes. You must tell your workers, after a strike,
you must tell your employer, after a strike, that if he is acting unjustly or,
as you suggested if I get a $10 fine for going through a stop sign, the fact
still remains that I broke the law and I am penalized whether the penalty is
too much or not enough, this is another story. If you want to limit through...
I just stopped because I want your attention. If you want to put parameters on
the penalty, that's another thing. If you want to say to a person who goes on
strike illegally, and the argument of 300 and that is the point I want
to come back to if 300 people can put 3000 people out of work, there is
something wrong with the law that we do not protect these 3000 against the 300,
which comes back to the secret vote and everything else. What has been missing
in this code, since I have been sitting here is an unwillingness on the part of
the government to spell out, specifically, sanctions against people who break
the law. We say, because the people want the secret vote, tout you're saying
secret vote according to whom? According to the Constitution, not according to
the Labour Code. You do not define the secret vote.
M. Johnson: Chapitre 8 du Code du travail: "Celui qui participe
à un arrêt illégal de travail est soumis aux sanctions
pénales prévues au chapitre 8".
M. Mackasey: Mr. Minister, all we are doing here, in this
amendment...
M. Bellemare: Vous remettez les amendes après.
M. Mackasey: ... is stating clearly that a person who respects
the law is entitled to the protection of the law. That is all we are saying. We
are saying that if you respect the law and go on
strike legally, then nobody can penalize you, discriminate against you,
take your job away from you, because we will protect you by reason of the very
fact that your action was within the law. However, when you come along with an
article and infer that under certain circumstances, an illegal strike is
acceptable, you are inviting trouble, you are inviting people at the head of
the Union to say: We'll take a chance on the emotion to this thing, we'll take
a chance, after all, the nuances of the commission were that, under certain
circumstances, a strike can't be illegal even when it is against the law. That
is an astounding statement from you. You should say clearly: The law is the law
and under no circumstances, can we break the law. I have seen cases where the
law has been an ass in the sense that it rendered injustice temporarily. When I
was in your position, in certain cities across Canada, where there was
discrimination against the worker on the job sight, I nevertheless suspended
those people for going on strike illegally. Even though their cause was right,
they had taken the wrong method of rectifying it.
All this amendment says is: You respect the law, and we will protect you
for respecting the law. But your amendment does not say that; your amendment is
saying that, under certain circumstances, you can act illegally and not be
penalized. In fact, you are putting the onus on the employer. You are putting
the onus on the employer to prove that a man whom, you admit, could, under
certain circumstances, be on strike illegally were on strike. Come back to your
argument about the stop sign. If $10 is too much or not enough, you have
recourse. If the employer takes action against someone who has acted illegally
and it is too much or not enough, you have a grievance. The purpose here is not
to penalize the people who have been on strike illegally, the purpose is to
force the general membership, to make sure that a handful of the leaders do not
act illegally and force them out. The only way you are going to have industrial
peace, in this province or this country, is for the masses, who are within the
Union, to assume their moral obligations as individuals, attend their meetings,
be in the majority and make sure that their leaders act according to the law.
But do not ask us to be part of any piece of legislation that contains, even
unintentionally or through nuances, any situation that would condone a person,
an employer, a Union or a member of a Union to act illegally be on the groung,
through there are certain extennating circumstances where he can work
illegally... If so, get rid of your grievance procedure, get rid of your
arbitration procedure, get rid of court and appeal to emotion. But as long as
you have got alternatives, in conclusion, to illegal acts, which is what the
grievance procedure is all about, then there is no alternative but to act
accordingly. And if an employer lays people off because they acted illegally,
there are procedures within the code to make certain that that man has his day
in court and has his day to have justice rendered.
I am surprised, in conclusion, and I don't hope and I am going to
fight publicly on this thing that there should be nothing in this code
that infers that anybody in this province, employer or employee, has any right
to break the law. Now, you spelled the law out, you defined what is a legal
strike and what is an illegal strike; you cannot condone anybody on the grounds
that he does not understand.
Le Président (M. Clair: Le député de
Laviolette.
M. Jolivet: M. le Président, cette dernière
intervention, ainsi que d'autres, me donne encore l'occasion de dire qu'on part
toujours du même postulat. C'est que le syndicat et les syndiqués
sont des gens qui votent dans l'illégalité. On part de ce
postulat en disant que ce sont eux seuls, pour affirmer qu'on a parlé de
grève. On a parlé de grève illégale, on n'a pas
parlé de lock-out illégal jusqu'à maintenant. Bien
entendu, vous allez me répéter...
M. Forget: S'il y a un lock-out illégal, le droit est
préservé pour les salariés, sans condition.
M. Jolivet: Est-ce que je peux parler?
Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!
M. Jolivet: Je ne vous ai pas dérangé?
Le Président (M. Clair): M. le député de
Laviolette, vous avez la parole.
M. Jolivet: Quand je regarde cela, chaque fois, jusqu'à
maintenant, que vous avez repris l'argumentation, ce fut toujours sur la
question de grève illégale; vous n'avez même pas
parlé de lock-out illégal.
M. Bellemare: ...
M. Jolivet: Je sais que c'est compris dedans. Mais ce que je veux
dire, c'est que chaque fois que vous avez fait de l'argumentation
jusqu'à maintenant, ce fut toujours la partie de grève
illégale. On part toujours du postulat que seuls les employés
vont être, un jour ou l'autre, dans l'illégalité, parce que
ce sont eux seuls qui vont l'utiliser. D'un autre côté, on n'a pas
parlé de la possibilité je ne parlerai pas des grosses
industries, je parlerai des petites où l'employeur qui va essayer
de faire...
Une Voix: ...
M. Jolivet: Voulez-vous me laisser parler?
Une Voix: Oui.
M. Jolivet: Ce que l'employeur va essayer de faire, à
partir du texte tel qu'amendé, va être justement de faire en sorte
que les gens viennent tellement exaspérés, qu'au bout de la
course, on va
les forcer, par la force de Faction-entreprise de harcèlement par
l'employeur, à peut-être utiliser, un jour ou l'autre, des moyens
illégaux pour faire valoir leurs points. Le rôle du
syndiqué est de se faire respecter. Pas d'accepter tout ce que le patron
veut, mais bien de se faire respecter. Quand on donne aux patrons, par
l'intermédiaire de l'amendement, une possibilité de faire en
sorte de harceler tellement le monde, qu'au bout de la course, ils vont devenir
dans l'illégalité, je dis que si ces choses-là arrivent,
réglons-les par un autre chapitre, mais pas par cet
article-là.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: M. le Président, j'évoque le
règlement, seulement pour tuer la tension du député, pour
qui j'ai beaucoup de respect, où j'avais souligné que ce
n'était pas seulement l'employé ou le salarié, mais
j'avais souligné dans tous mes débats que c'était autant
l'employeur aue l'employé. Si c'est l'employeur, cela veut dire le
lockout. Je l'ai mentionné au moins quinze fois.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, vous avez fait la mise au point que vous vouliez
faire par un appel au règlement. M. le député de
Laviolette, je vous redonne la parole.
M. Jolivet: Cette philosophie-là, quant à moi, fait
mention de l'autre partie quand on dit qu'une comparaison est toujours
boiteuse. La comparaison prise par le député de Saint-Laurent,
celle de la loi électorale en regard des relations du travail,
malheureusement ne se compare pas. Cela n'est pas comparable dans le
système actuel. Et le faire, c'est vraiment prendre des moyens de ne pas
regarder face à face ce que nous, comme syndiqués, avons eu
à vivre dans la réalité de chaque jour, dans chacune des
usines ou ailleurs. Il y a eu des moments où l'employeur, par
l'intermédiaire des conventions collectives, conservait certains
privilèges qui lui appartiennent comme droit de gérance. Mais on
a eu des exemples où des personnes ont été même
mutées, même congédiées, même en dehors des
lois permises dans le code au niveau de l'enseignement, de telle sorte que
même le juge a pu, par l'intermédiaire d'un article de la
convention collective, déterminer, de façon plus humaine,
pourquoi la personne qui avait été congédiée ne
devait pas l'être.
Or, l'article, tel que présenté par le ministre, propose
cette formule qui est beaucoup plus humaine que l'autre qui est provocatrice.
Dans ce sens, je suis assuré qu'on pourra procéder à
l'acceptation de l'article, tel que présenté par le ministre.
Le Président (M. Clair): La motion d'amendement du
député de Saint-Laurent à l'article 52, aux fins que le
premier alinéa du paragraphe 98 a) de cet article 52 soit
modifié, en ajoutant à la première ligne, après le
mot "lock-out" les mots "et s'il s'agit d'une grève
déclarée conformément à l'article 46 et le cas
échéant à l'article 99", est-elle adoptée?
M. Johnson: Rejeté.
M. Forget: Vote enregistré, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Sur un vote enregistré,
concernant la motion d'amendement du député de Saint-Laurent,
pour ou contre la motion? M. Bellemare (Johnson)?
M. Bellemare: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Bisaillon (Sainte-Marie)?
M. Bisaillon: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Brochu (Richmond)? M. Ciaccia
(Mont-Royal)? M. Chevrette (Joliette-Montcalm)? M. Godin (Mercier)? M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes)? M. Forget (Saint-Laurent?
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Gagnon (Champlain)?
M. Gagnon: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Johnson (Anjou)?
M. Johnson: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Jolivet (Laviolette)?
M. Jolivet: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Lacoste (Sainte-Anne)?
M. Lacoste: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Laplante (Bourassa)?
M. Laplante: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Lavigne (Beauharnois)?
M. Lavigne: Contre.
Le Président (M. Clair): M. Mackasey
(Notre-Dame-de-Grâce)?
M. Mackasey: Pour.
Le Président (M. Clair): M. Mercier (Berthier)? M.
Pagé (Portneuf)? M. Roy (Beauce-Sud)?
Le Président (M. Clair): Pour la motion d'amendement: 3.
Contre la motion d'amendement: 7. La motion est rejetée.
M. Johnson: M. le Président, je demanderais la suspension.
Est-ce que l'article 52 est adopté?
M. Bellemare: Sur division. M. Forget: Sur division.
Le Président (M. Clair): Adopté sur division, tel
qu'amendé.
M. Johnson: Je demanderais la suspension pour cinq minutes, M. le
Président.
M. Mackasey: Vous avez l'intention de siéger
jusqu'à quelle heure ce soir?
M. Johnson: Jusqu'à minuit.
Le Président (M. Clair): En vertu du règlement,
nous allons jusqu'à minuit.
M. Johnson: C'est cela. Si on pouvait terminer ce soir, tant
mieux.
M. Mackasey: Vous voulez votre bill ce soir.
M. Johnson: De toute évidence, quant à moi,
j'aurais voulu qu'on termine il y a une semaine. Mais je pense qu'il en
dépend surtout de l'Opposition.
M. Mackasey: Je vous suggère de ne pas trop prendre... do
not take too many recesses.
M. Johnson: Non, pour cinq minutes.
Le Président (M. Clair): La commission du travail suspend
ses travaux pour cinq minutes.
(Suspension de la séance à 22 h 26)
Reprise de la séance à 22 h 38
Le Président (M. Clair): La commission permanente du
travail reprend ses travaux. J'appelle l'article 53.
Une Voix: Adopté.
Le Président (M. Clair): Adopté. Article 53.
M. Johnson: M. le Président, un retour à l'article
49, si vous permettez, à 88j.
Le Président (M. Clair): L'article 53 a quand même
été déclaré adopté.
M. Johnson: L'article 53 est adopté. Alors l'article 49.
Il s'agit, M. le Président, de l'introduction de l'article 89j. Le
député de Saint-Laurent avait évoqué le
problème: "à défaut de ce dernier, la personne
dûment autorisée, après vérification..." C'est vrai
qu'il existe un pouvoir de délégation spécifique dans la
loi et bien encadré dans le cas de la signature du ministre ou du
sous-ministre et dans la mesure où ces signatures engagent le
ministère.
Ce dont il s'agit ici, c'est simplement l'authen-tification de documents
et il s'agit de procéder, quand on parle de dûment
autorisée, probablement d'une lettre c'est comme cela que
ça se manifeste si jamais une question se posait par un tribunal
signée par le greffier ou le commissaire général du
travail qui autorise spécifiquement une personne à
décerner ces certificats.
M. Bellemare: C'est prévu dans la loi. A défaut de
ce dernier, une personne dûment autorisée. Cela le
complète.
M. Johnson: C'est cela. M. Bellemare: Très
bien.
M. Johnson: Est-ce que l'article 49 serait adopté, M. le
Président?
Le Président (M. Clair): L'article 49 est-il
adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Clair): Adopté, tel
qu'amendé.
Pouvoir de réglementation du commissaire
général du travail
M. Johnson: L'article 54, M. le Président. On distribue un
texte pour cet article. On remplace le paragraphe b de l'article 115
proposé par l'article 54, par le suivant...
M. Bellemare: C'est sur les délais?
M. Johnson: Oui, sur les délais. L'article 54 se lirait
comme suit: "115. Le commissaire général du travail, après
consultation du conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, peut
faire tout règlement qu'il juge approprié pour donner effet aux
dispositions du présent code dans les matières de son ressort ou
du ressort des commissaires du travail ou des enquêteurs et, en
particulier, pour: a) la délivrance des permis prévus aux
articles 8 et 9; b) se lirait comme suit pourvoir à un
régime d'accréditation approprié au caractère
temporaire et saisonnier des exploitations forestières et industries de
la pêche et de la préparation du poisson et, en particulier,
décider que la période de 30 jours prévue au paragraphe d)
de l'article 21 se situe à un autre moment".
M. Bellemare: C'est cela qui est nouveau.
M. Johnson: C'est cela qui est nouveau, effectivement.
Le Président (M. Clair): L'article 54 est-il
adopté?
M. Bellemare: Adopté.
Le Président (M. Clair): Article 54, adopté tel
qu'amendé. Article 55.
M. Bellemare: Concordance.
Le Président (M. Clair): A l'article 55, est-ce que le
ministre propose toujours le remplacement du paragraphe a par le suivant: a)
par la suppression, dans les 6e et 7e lignes, des mots "un arbitre des
griefs".
M. Johnson: C'est cela. Une Voix: Oui.
Le Président (M. Clair): L'article, tel qu'amendé,
est-il...
M. Forget: M. le Président, est-ce qu'il n'y a pas une
autre concordance à effectuer? Le paragraphe a) dit: le remplacement des
mots "un tribunal" par les mots "une commission". Est-ce que le ministre n'est
pas revenu à la notion de tribunal d'arbitrage?
M. Johnson: Non, mais c'est le paragraphe qu'on remplace par la
série d'amendements. Il faudrait lire a) de la façon suivante: a)
par la suppression, dans les 6e et 7e lignes, des mots "un arbitre des griefs",
simplement.
M. Bellemare: C'est cela qui est la concordance.
M. Johnson: On a distribué le texte.
M. Bellemare: C'est cela qui est la concordance.
M. Johnson: C'est cela. Je vais reprendre pour les fins du
Journal des débats. L'article 55 du projet de loi se lirait comme suit:
"L'article 121 dudit code, remplacé par l'article 38 du chapitre 48 des
lois de 1969, est modifié: ...
M. Bellemare: ... pression.
M. Forget: II y a quelque chose qui ne va pas, M. le
Président.
M. Johnson: Vous avez parfaitement raison, cela n'est pas
clair.
M. Forget: Cela remplace des mots qui ne sont pas là.
M. Johnson: Ici, c'est la 7e ligne, les mots "arbitre des
griefs". Est-ce la 7e ligne de l'article 121?
M. Bellemare: De 121.
M. Johnson: C'est cela. Il s'agit, M. le Président... Je
recommence. "L'article 121 du code est modifié de la façon
suivante: a) par la suppres- sion, dans les 6e et 7e lignes, des mots "un
arbitre des griefs"; b) par ce qui suit: ...
NI. Forget: Cela va très bien. C'est parce qu'il y a deux
paragraphes qui se modifient l'un et l'autre.
M. Bellemare: C'est l'article 121 du code.
Le Président (M. Clair): L'article 55 est-il
adopté?
M. Forget: Adopté. M. Bellemare: Adopté.
Le Président (M. Clair): Adopté, tel
qu'amendé.
M. Johnson: M. le Président, tel qu'amendé.
Le Président (M. Clair): L'article 56?
M. Bellemare: L'article 56...
M. Johnson: Concordance, M. le Président.
Le Président (M. Clair): L'article 56 est-il
adopté?
M. Bellemare: Un instant...
M. Johnson: Je m'excuse, cela n'est pas concordant, ce n'est pas
celui-là. C'est l'amende de $1000 dans le cas du non-respect de 97a.
M. Forget: ...
M. Bellemare: Pourquoi c'est $1000 et non pas $500, comme cela
existe un peu plus loin à l'article 58?
M. Forget: C'est l'indexation.
M. Bellemare: ...
M. Forget: Ce n'est pas cela? Excusez-moi.
M. Bellemare: II doit y avoir une raison.
M. Forget: Parce que l'indexation des impôts s'en
vient.
M. Bellemare: C'est vrai.
M. Forget: On s'habitue; il faut s'habituer à
l'idée.
M. Bellemare: L'article 58 est la cause "d'an-tiscabs" et
l'autre, c'est le retour au travail.
M. Johnson: On pourrait toujours essayer de trouver des
justifications...
M. Bellemare: C'est le contraire.
M. Johnson: ... théoriques dans la mesure où, dans
le cas de 97a, cela touche une mesure collective; dans le cas de 98a, cela
concerne les individus. C'est variable. Le député de Johnson sait
très bien que c'est absolument arbitraire, les sanctions. $1000 semble
une sanction particulièrement "désincitative" à ne pas
respecter 97a.
Est-ce que l'article 56 est adopté, M. le Président?
Le Président (M. Clair): L'article 56 est-il
adopté?
M. Bellemare: Adopté.
M. Forget: Adopté.
M. Johnson: L'article 57, M. le Président?
Le Président (M. Clair): L'article 57 est-il
adopté?
M. Bellemare: Augmentation des amendes, je suis bien
d'accord.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Clair): Adopté.
M. Johnson: L'article 58, M. le Président?
Le Président (M. Clair): L'article 58 est-il
adopté?
M. Bellemare: C'est l'article 14, congédiement pour
activités syndicales, et l'article 98...
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Clair): Adopté.
M. Johnson: L'article 59.
Le Président (M. Clair): L'article 59 est-il
adopté?
M. Bellemare: Adopté.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Clair): Adopté.
M. Bellemare: On ajoute "le procureur général", par
exemple.
M. Johnson: C'est cela.
Le Président (M. Clair): L'article 60 est-il
adopté?
M. Bellemare: L'article 60, un instant. On remplace... changement
de terminologie. D'accord.
Le Président (M. Clair): Adopté.
M. Forget: On supprime dans les délais le calcul des jours
fériés.
M. Johnson: Parce que cela revient à 61.
M. Bellemare: Cela revient à 61; ici, à 61, on les
a tout au long.
M. Forget: D'accord. Adopté.
Le Président (M. Clair): Article 60 adopté.
M. Johnson: Article 61, M. le Président?
Le Président (M. Clair): L'article 61 est-il
adopté?
M. Johnson: II faudrait bien préciser qu'il s'agit de
l'article 61 tel que formulé dans les amendements datés du 22
novembre.
M. Bellemare: Oui, c'est 6 et 7 du Code de procédure
civile. N'oubliez pas cela.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Clair): Larticle 61 tel qu'amendé
est-il adopté?
M. Bellemare: Adopté.
Le Président (M. Clair): Adopté tel
qu'amendé.
M. Johnson: Article 61 seulement, on n'est pas rendu à
62.
Le Président (M. Clair): L'article 61 est effectivement
adopté tel qu'amendé.
M. Johnson: L'article 61 est adopté?
Le Président (M. Clair): L'article 61 est
adopté.
M. Johnson: M. le Président, 61a qui ne figure pas dans
nos cahiers...
M. Mackasey: A 61, ne pourrait-on pas ajouter une fête, le
17 mars?
M. Bellemare: Ah! C'est la Saint-Patrick. M. Johnson: Le
17 mars, oui!
M. Mackasey: La Saint-Patrick. Je propose un tel amendement
à 61, soit qu'on ajoute une autre fête le 17 mars.
M. Bellemare: Ou le 1er juillet.
Le Président (M. Clair): Irrecevable, cela va à
l'encontre des principes adoptés par le projet de loi.
M. Mackasey: D'accord, je proposerai cela à la Chambre
demain.
M. Johnson: Anyway, the Code will be printed in green. Article
61a.
Le Président (M. Clair): L'article 61a.
M. Johnson: M. le Président, il s'agit ici d'une
série de dispositions transitoires qui prévoient finalement le
passage des dispositions du Code du travail actuel au Code du travail tel
qu'amendé par le projet de loi 45. Cela touche la question de
l'accréditation et, comme on a changé considérablement les
procédures d'accréditation, il faut quand même s'accorder
des délais raisonnables. L'article 61a se lirait comme suit: "Les
modifications apportées aux articles 14 et 18 dudit code et à
l'article 18a dudit code s'appliquent aux décisions rendues à
compter du jour de l'entrée en vigueur des articles 6 et 7 de la
présente loi."
M. Bellemare: Quand entreront-ils en vigueur?
M. Johnson: Les articles 6 et 7 de la présente loi
entreront en vigueur sur proclamation du lieutenant-gouverneur en conseil.
L'intention, en principe, est approximativement de 30 jours.
M. Bellemare: 30 jours, c'est-à-dire avant le 15 janvier
1978.
M. Johnson: Je ne voudrais pas affirmer que ce sera avant le 15
janvier, cela dépend du nombre de réunions du Cabinet qu'il y
aura. Etant donné que c'est à l'époque des Fêtes et
que, d'autre part, je serai absent, vu que j'assiste à la
Conférence fédérale-provinciale des ministres de la
main-d'oeuvre le 14, à Vancouver...
M. Bellemare: Oh! Oh! On a été bien reçu
à Ottawa déjà!
M. Johnson: Cela peut aller.
M. Mackasey: On commence à prendre un peu notre
partie.
M. Bellemare: II y avait eu une belle réception et on
avait bien de la compréhension dans ce temps-là.
Le Président (M. Clair): L'article 61a est-il
adopté?
Des Voix: Adopté.
M. Johnson: Article 62, M. le Président. Il faut se
référer à la fois au texte du projet de loi 45, mais
remplacer à partir de la septième ligne les mots "dans les 90
jours suivants l'entrée en vigueur de la présente loi" par les
mots "après le 31 mai 1978".
M. Bellemare: Pourquoi?
M. Johnson: II s'agit d'une concordance avec la conciliation
volontaire. Comme je l'ai déjà expliqué à
l'occasion des articles où nous traitions de la conciliation volontaire,
certains officiers du ministère considèrent qu'un délai de
trois mois serait peut-être insuffisant. Il ne faut quand même pas
mettre le ministère dans une situation telle qu'il n'est plus
informé sur les conflits. Il faudra, entre autres, mettre sur pied toute
la technique des avis de 48 heures, des avis en cours de grève ou en
cours de lock-out... Article 62 adopté, M. le Président?
Le Président (M. Clair): L'article 62 est-il
adopté?
M. Bellemare: Compris.
Le Président (M. Clair): Adopté.
M. Forget: C'est passionnant, M. le Président.
M. Johnson: Article 63.
Le Président (M. Clair): L'article 63 est-il
adopté?
M. Bellemare: Encore des délais.
M. Johnson: II faudrait remplacer l'article 63 prévu au
Code par le texte qui est entre vos mains, donc remplacer l'article 63 par le
suivant: 63, "Un droit d'entrée payé à une association
après le 31 mai 1977 est considéré jusqu'à
concurrence de $1 comme une cotisation syndicale au sens du paragraphe c) de
l'article 24j dudit code aux fins de toute requête en
accréditation déposée ou mise à la poste par le
courrier recommandé ou certifié avant le 31 mai 1978.
M. Bellemare: Pourquoi le 31 mai 1978?
M. Forget: Avec des amendements comme cela, je pense que le
ministre est en train de faire de l'obstruction.
M. Johnson: L'article 63 est-il adopté, M. le
Président?
M. Bellemare: Non, mais pourquoi mai 1977? M. Bisaillon:
... en haut.
M. Johnson: On a déjà vu à l'article 24j que
la cotisation était de $2, mais par année. Comme il y aura
l'entrée en vigueur à cause des phénomènes
d'accréditation, de conciliation volontaire, etc.
M. Bellemare: L'article de transition. M. Johnson: C'est
ça. M. Bellemare: C'est ça.
M. Johnson: $1 versé en 1977, $1 versé en 1978.
M. Bellemare: Adopté.
M. Johnson: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Clair): Adopté tel
qu'amendé.
M. Johnson: L'article 64, M. le Président, est
également remplacé par le suivant, "les modifications
apportées par la présente loi aux articles 20, 24a, 24c, 25, 30,
31 et 32 du Code du travail s'appliquent aux seules requêtes
déposées à compter du jour de l'entrée en vigueur
des articles 10, 15, 16, 23, 24, 25 et 26 de la présente loi. L'article
est-il adopté, M. le Président?
M. Forget: Adopté.
M. Bellemare: Adopté. On enlève une grande partie
de ce qui avait été prévu comme amendement; je pense qu'on
tient compte de la loi générale.
M. Johnson: A l'article 65, M. le Président, il s'agit de
retrancher l'article 65 du projet de loi.
M. Bellemare: Tout abrogé.
Le Président (M. Clair): L'article 65 est
abrogé.
M. Forget: Je ne soulèverai pas la recevabilité, M.
le Président.
Le Président (M. Clair): L'article 65 est
retranché, abrogé.
M. Bellemare: Même l'amendement du ministre est
retranché.
M. Johnson: Non, il n'y avait pas d'amendement, à
l'article 65.
M. Bellemare: II y en avait un, 45. Le Président (M.
Clair): Article 65. M. Johnson: A l'article 66.
M. Bellemare: A l'article 65, il y avait un amendement du
ministre qui avait été suggéré d'abord et il vient
d'être retranché. Il disait ceci: "Statuts et règlements,
cet article a été annulé par le ministre. Les statuts et
règlements d'une association de salariés doivent prévoir
quelles sont les personnes exemptes de fonctions", et le reste. C'est un
amendement du projet de loi 45.
M. Bisaillon: C'est parti, ça.
M. Bellemare: Ecoutez, il n'y a pas de ah non.
M. Bisaillon: Non, c'est parti.
Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît,
messieurs. De toute façon, l'article 65 est abrogé. Article
66.
M. Bellemare: Article 66.
M. Johnson: L'article 66, M. le Président, doit se lire
comme suit; c'est l'article 66 du projet de loi 45. Il faut ignorer le document
que j'avais passé le 22 novembre qui remplaçait quelques mots et
il faut donc considérer l'article 66 tel quel, au projet de loi 45, avec
cependant la modification suivante: remplacer, dans les cinquième et
sixième lignes, les mots "l'entrée en vigueur de la
présente loi", par les mots "avant le 1er juin 1978".
Le Président (M. Clair): L'article 66 est-il
adopté?
M. Johnson: Tel qu'amendé. M. Bellemare: Oui.
Le Président (M. Clair): Adopté tel
qu'amendé. Article 67.
M. Johnson: L'article 67, M. le Président, tel quel dans
le projet de loi... Non, je m'excuse. Tel quel dans le projet de loi,
cependant, il faut remplacer le premier alinéa de cet article par le
suivant: "67. La section III, chapitre IV dudit Code, tel qu'il se lisait avant
sa modification par les articles 46 à 49 de la présente loi,
continue de s'appliquer dans le cas d'un grief dont l'audition est
commencée dans les 90 jours qui suivent le jour de l'entrée en
vigueur de la présente loi."
Deuxième paragraphe, "aux fins du présent article,
l'audition d'un grief est présumée avoir commencé le jour
de la première séance d'arbitrage du grief."
M. Bellemare: Cela demeure, ça. M. Johnson:
Oui.
M. Bellemare: Le deuxième paragraphe demeure.
M. Johnson: C'est ça.
Le Président (M. Clair): L'article 67 est-il
adopté? Adopté tel qu'amendé. Article 68.
M. Johnson: Non, M. le Président, l'article 67a.
Le Président (M. Clair): Article 67a.
M. Johnson: ... se lisant comme suit, l'article 67a "Les articles
134a, 134b, 134c, 134d dudit code s'appliquant aux requêtes ou plaintes
faites ou aux décisions rendues à compter du jour de
l'entrée en vigueur de l'article 61 de la présente loi.
M. Bellemare: C'est sous un couvert d'enquête
générale.
M. Johnson: L'article 67a est-il adopté, M. le
Président?
Des Voix: Oui.
Le Président (M. Clair): L'article 67a est
adopté.
M. Bellemare: Article 68.
M. Johnson: M. le Président, l'article 68 est tel qu'il
figure en ce moment au projet de loi 45 imprimé après
deuxième lecture auquel il faut ajouter cependant, à la fin de
l'article 3a du ministère du Travail proposé par cet article 58
du projet de loi, l'alinéa suivant: "Le ministre, ou un fonctionnaire
qu'il désigne, peut enquêter sur toute plainte qui lui est
adressée relativement à l'application de lois qui relèvent
de sa compétence".
M. Forget: Est-ce que le ministre pourrait nous expliquer
pourquoi, ayant le pouvoir de nommer, proprio motu, un conciliateur, en vertu
du Code du travail, il amende maintenant la loi du ministère, de
manière à se donner, dans le fond, un pouvoir
équivalent?
M. Johnson: M. le Président, il s'agit de ce que j'ai
déjà évoqué, de ce qu'on appelle la
médiation préventive, où, sur le plan administratif, les
personnes qui pourraient être impliquées dans ce type de
démarche risquent d'être des personnes différentes des
conciliateurs. Cela n'empêche pas que cela puisse être des
conciliateurs, mais on pense qu'il faut que ce soit inscrit dans la loi du
ministère et non pas dans le Code du travail, en dehors d'un conflit de
travail, puisque, de toute façon, le code régit l'univers des
conflits de travail.
M. Mackasey: M. le ministre une observation. C'est une
amélioration, je suis d'accord. Mais je veux quand même souligner
que j'avais suggéré cela, qu'on décide cela pour la
première conciliation de l'unité des salariés, j'avais
suggéré un "Conciliation Board" suivi par...
M. Johnson: Malheureuxement, le député de
Notre-Dame-de-Grâce était absent quand on a discuté de
l'article de l'arbitrage de la première convention collective. On a
retenu, sans y donner le même nom, la suggestion, à toutes fins
pratiques, qu'il faisait, d'un "Conciliation Board".
M. Mackasey: J'étais ici. J'ai compris ce que vous avez
dit du "Conciliation Board", parce que ce n'était pas quelque chose qui
existait auparavant ici. Je ne veux pas recommencer ce débat.
M. Johnson: D'accord.
M. Mackasey: J'avais suggéré, si je me rappelle, un
"Conciliation Board" pour avoir l'information, suivi par un médiateur.
Vous avez au moins maintenant le pouvoir de désigner une personne pour
favoriser l'établissement, etc. J'espère que vous savez qui
seront ces personnes. Est-ce que ce seront des fonctionnaires ou si vous avez
la liberté d'aller en dehors de votre ministère pour une telle
personne? Pouvez-vous prendre quelqu'un qui se spécialise...
M. Johnson: Toute personne. M. le Président, avant de
passer à l'adoption, je voudrais faire quand même la lecture de
l'article 68, pour être sûr qu'il n'y a pas de confusion. "68. La
Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre (1968, chapitre 43)
est modifiée par l'insertion, après l'article 3, de l'article
suivant: "3a. En tout temps, le ministre peut désigner une personne pour
favoriser l'établissement ou le maintien de bonnes relations entre un
employeur et ses salariés, ou l'association qui les représente.
Cette personne fait rapport au ministre sur demande. "Le ministre ou un
fonctionnaire qu'il désigne peut enquêter sur toute plainte qui
lui est adressée relativement à l'application d'une loi qui
relève de sa compétence."
L'article 68 est-il adopté, M. le Président?
M. Forget: M. le Président...
M. Beliemare: Seulement une question au ministre. Toute plainte,
qui provient de qui que ce soit, peut être exécutée? Toute
plainte?
M. Johnson: Le ministre peut, sur toute plainte. En pratique
et je pense que le député de Johnson va comprendre
très bien ce à quoi je fais allusion c'est le service des
enquêtes spéciales du ministère.
M. Beliemare: Oui.
M. Johnson: Nous avons huit enquêteurs spéciaux mais
qui, en fait, n'ont aucune attribution. Il n'y a pas un seul texte en vertu
duquel, techniquement, le ministre peut autoriser ces gens à aller
enquêter sur un événement.
Or, nous avons découvert, avec la pratique, et c'est ce qu'on
nous dit à la direction générale des relations du travail,
que ces gens ont presque un rôle d'ombudsman dans certains cas, qu'ils
permettent de régler un tas de problèmes de syndiqués
comme de non-syndiqués. Maintenant, on pourra les nommer en vertu de la
Loi du ministère du travail.
M. Mackasey: Même durant la convention...
M. Johnson: Oui, même durant la convention. C'est
exactement cela, c'est en tout temps.
M. Mackasey: Vous avez parlé de preventive mediation. Je
suis d'accord complètement. Est-ce que c'est votre intention "to have at
your disposal specialized mediators in particular fields like..."
M. Johnson: On pourra avoir ça effectivement, en vertu de
3a, premier paragraphe.
M. Mackasey: I know you can do it, but I am
wondering when you will be doing it. I am trying it to say yes, this is
a good idea, Because I have seen it working.
M. Johnson: It is a few months' time.
M. Bellemare: Vous trouvez cela normal d'amender une loi du
ministère, dans le Code du travail, comme on le fait là? Ce n'est
pas normal.
M. Johnson: Non. C'est-à-dire que cela ne suit pas...
M. Bellemare: Celui qui va avoir à faire les
références...
M. Forget: Ce n'est pas normal.
M. Bellemare: Celui qui va avoir à faire les
références, il va falloir qu'il retombe dans le Code du travail
pour voir si, véritablement, la plainte qui a été
portée mérite une fermeture...
M. Johnson: Cependant, M. le Président, le titre de la
loi, c'est Loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du
Travail et de la Main-d'Oeuvre.
M. Bellemare: Et de la Main-d'Oeuvre, oui, j'ai vu cela.
M. Forget: M. le Président, relativement à cet
article et au premier alinéa de 3a, il y a là un pouvoir de
nomination qui n'est qualifié d'aucune manière, dans le sens que
c'est l'absolue discrétion du ministre qui détermine si, oui ou
non, une personne doit être nommée pour favoriser
l'établissement ou le maintien de bonne relations. Ne serait-il pas
souhaitable que le ministre n'ait pas à choisir d'intervenir,
indépendamment d'une demande qui peut lui être faite à cet
effet par l'une des parties? Après tout, le ministre a dit souvent qu'il
ne voulait pas politiser indûment les relations du travail.
Souvenons-nous que nous sommes ici devant une situation où il n'y a pas
de différend et on n'est pas dans une situation de négociation.
Il n'y a pas une procédure de grief formel engagée, ou du moins
pas nécessairement. Il peut s'agir d'une situation qui est normale, en
ce sens au moins qu'elle échappe à toutes les catégories
connues des lois du travail et, proprio motu, le ministre décide qu'il
est approprié, opportun, sage, intéressant ou Dieu sait quoi, de
nommer quelqu'un pour intervenir sans que personne ne lui en ait fait la
demande. Il me semble que ce n'est pas, a priori, une bonne idée.
M. Johnson: M. le Président, si vous le permettez, il y a
quand même deux choses différentes à 3a et au texte qu'on
ajoute à la fin et que j'ai lu tout à l'heure. A 3a, la loi du
ministère prévoit qu'en tout temps, le ministre peut
désigner une personne qui n'a aucun pouvoir, soit dit en passant, pour
favoriser l'établissement ou le maintien de bonnes relations. Exemple:
On saurait que, dans six mois, c'est l'échéance de la convention
collective du secteur des pâtes et papiers. On pourrait envoyer ces
personnages qu'on va qualifier de médiateurs préventifs pour les
fins d'aller identifier les sources de problèmes possibles dans cette
négociation, identifier des données dans le cadre de la
création, entre autres, de l'office ou de l'institut de recherche sur
les conditions de travail au Québec. Je pense que cela deviendra
très utile. C'est, de fait, l'assise de la nomination de gens qui font
de la médiation préventive et on ne peut pas le faire en vertu du
code, en ce moment, et je pense que la loi du ministère est la loi
appropriée pour asseoir cette possibilité. Dans le cas,
cependant, du fonctionnaire qui peut enquêter sur une plainte, il s'agit
bel et bien d'enquêter sur une plainte spécifique, touchant une
personne, ce qui est fort différent. Dans le premier cas, c'est
conférer une forme de statut à nos médiateurs
préventifs; dans le deuxième cas, c'est simplement
d'enquêter sur des plaintes individuelles.
M. Forget: Oui, je comprends bien la distinction, mais il reste
que... Mettons de côté le cas des plaintes. Je ne comprends pas
l'affirmation du ministre quand il dit: On ne peut pas nommer quelqu'un et, en
même temps, il dit que cette personne-là n'a pas de pouvoir. A mon
avis et je voudrais bien qu'on me démontre le contraire un
ministre, dans l'exécution des devoirs de sa fonction, peut
déléguer, à quelque fonctionnaire qu'il désire, le
soin d'aller s'enquérir de faits, etc. Tant et aussi longtemps que cette
personne-là n'a pas de pouvoir, il n'y a rien qui limite le pouvoir du
ministre de nommer la moitié de l'humanité pour surveiller
l'autre moitié, s'il le désire. C'est un pouvoir, dans le fond,
tout simplement, qui découle des pouvoirs ministériels et des
obligations qui s'attachent à sa fonction. Dans la mesure où ces
gens-là n'ont pas de pouvoir, de toute manière, qui est-ce qui
peut contester cela? Dès qu'ils ont des pouvoirs, bien sûr,
dès qu'ils veulent s'arroger des pouvoirs, ils doivent avoir une
autorité bien fermement assise dans une loi. Même là, en
tant que délégué et fondé de pouvoir du ministre,
il y a un tas de choses qu'ils pourraient faire parce que le ministre
lui-même est autorisé à le faire.
Mettant cela de côté, je ne vois pas en quoi cela peut
être nécessaire, puisque, effectivement, il nomme quelqu'un qui
n'a pas de pouvoir et qui va pouvoir être efficace seulement dans la
mesure où il est accepté par les parties, et son acceptation ne
dépendra pas de l'article de loi qui va être invoqué, mais
des circonstances de l'affaire.
M. Johnson: Cependant, sa seule présence sera beaucoup
plus justifiée par le fait qu'il y a une autorisation spécifique
dans la loi du ministère pour que le ministre nomme une telle personne.
Le député de Saint-Laurent a raison de dire que le ministre,
actuellement, peut nommer une personne pour aller voir ce qui se passe à
un endroit et, même, à la rigueur, surveiller la moitié de
l'humanité, mais, si cela va sans dire, cela va mieux en le disant et,
en vertu de la loi du ministère je pense que cela doit être
marqué clairement. Je pense
qu'on arrivera éventuellement à des raffinements de ce
type de formule à moyen terme et probablement qu'on aura à
prévoir, si on pense à la négociation sectorielle, une
évolution de ces personnages qui seront nommés en vertu de
3a.
M. Mackasey: Si vous permettez, nous terminerons, M. le ministre
bientôt...
We will soon be finished, Mr Minister, but because I happen to like this
clause, for personal reasons, since I found them very effective, I would
suggest, in order to avoid the confusion of terminology, that instead of
calling them preventive mediators, you call them industry specialists. You
know, the reason I say industry specialists... Permit me to spend ten minutes,
at least, on this clause, because I think it is an exciting concept*"dans le
sens qu'on nomme quatre ou cinq personnes spécialistes dans une
industrie donnée, mais qu'on défende à ces hommes
d'être présents quand il y a des négociations entre le
patron et le salarié, pour qu'ils gardent toujours leur
crédibilité des deux côtés. Je trouve que
c'était bénéfique pour le ministre et le ministère
d'avoir des "industry specialists " dans le domaine de l'aviation, si vous
voulez. Il y en a à travers le monde.
C'est important, quelquefois, de connaître ou de comprendre les
conventions collectives des autres pays, des autres "airlines". Comment, par
exemple, aux Etats-Unis, règle-t-on un tel problème, un tel
conflit?
So, if you had industry specialists who would not be involved in
mediation, would not be involved in negotiation, but nevertheless would be
specialists to whom both sides could refer for specialized information, even in
preparing their negotiations, have access to computers "M. le ministre", so
that they can provide both sides with impartial information which goes beyond
the normal function of your regular staff, I think this is why "en terminant",
in order to create no confusion between mediators and mediators, we should call
them industry specialists and limit their work between parties to anytime other
than the opened period when negotiations are going on. Otherwise, they would be
useless after the first or second negotiation.
I simply think that I could accept article 68 on article 3a with that
type of understanding that they would not be mediators, "mais des
spécialistes, par exemple, en transport, des spécialistes dans un
autre domaine, des spécialistes, si vous voulez, en ambiance "whatever "
des spécialistes acceptables par l'employeur, acceptables par le
syndicat, plus qu'acceptables, mais qui auraient, à leur disposition une
connaissance très profonde de cette industrie dans ce domaine. Je pense
que, dans cette optique, l'article 68 est avantageux, mais si, par exemple, on
leur donne le monde "médiateur" "in provincial mediation", cela peut
créer une ambiguïté avec la médiation durant un
conflit. Je pense que le ministre préfère avoir une
médiation liant "a continuous dialogue between management and labour
outside of the negotiation period."
Je ne sais pas si c'est vraiment ce que le ministre a...
M. Johnson: M. le Président, si le député de
Notre-Dame-de-Grâce me permet cela va peut-être couper court
un peu à son exposé effectivement, l'intention
administrative du ministère, c'est de les appeler des
spécialistes. Leur classification: à partir de la description de
tâches qu'on en a faite depuis quelques mois, à la fonction
publique, on a l'intention de les classifier à titre de
spécialistes.
De fait, ce sera des spécialistes par secteurs industriels ou
encore par types de problèmes.
M. Mackasey: Alors...
M. Johnson: L'article 3, cependant, n'en parle pas comme
étant des conciliateurs, il les nomme simplement comme des personnes,
pour le moment.
M. Bellemare: M. le Président, dans la Loi du
ministère du Travail que nous avons adoptée en 1968, les devoirs
et les pouvoirs du ministre étaient bien décrits à
l'article 3. Je ne pense pas que cela contredise véritablement le but
pour lequel elle a été adoptée. "Les fonctions, pouvoirs
et devoirs du ministre sont: a) de favoriser des relations de travail
harmonieuses entre employeurs et salariés; b) de faire effectuer des
études particulières par des recherchistes qu'il juge utiles et
nécessaires; c) d'adopter, en collaboration avec les autres ministres
responsables, des mesures qu'il juge à propos pour faciliter la
formation professionnelle; d) de compiler, d'analyser, de publier des
renseignements disponibles relatifs au salaire ou aux conditions de travail
et aujourd'hui, on ajoute en tout temps le ministre peut
désigner une personne pour favoriser l'établissement ou le
maintien de bonnes relations entre... Cela entre dans l'esprit du
législateur du temps et aujourd'hui, cela renforce même les
pouvoirs du ministre. Seulement, mon objection est que cela devrait être
placé dans la loi du ministère plutôt que dans le Code du
travail qu'on améliore. C'est cela qui n'est pas raisonnable. Il aurait
dû avoir un amendement spécial pour donner au ministre, dans
l'article 68.3, pour dire qu'à 3a, dans la loi du ministère, on a
ajouté cela... Oui, mais on va faire un amendement dans le Code du
travail et on va le transférer dans une autre loi.
M. Johnson: Non, ce n'est pas dans le Code du travail.
L'intitulé de l'article 68 est bel et bien "la loi du ministère
est modifiée". Et non pas le Code du travail. C'est ce qu'on fait. On
introduit un article 3a dans la loi du ministère.
M. Bellemare: On fait cela dans le Code du travail pour dire
qu'on transférera cela dans l'autre.
M. Johnson: On le fait dans le projet de loi 45. M. Bellemare:
Adopté.
M. Johnson: Adopté?
Le Président (M. Clair): L'article 68 est-il adopté
tel qu'amendé?
M. Forget: Oui, M. le Président. M. Johnson:
Adopté tel qu'amendé.
Le Président (M. Clair): Adopté tel
qu'amendé. L'article 69.
M. Johnson: J'aurais un amendement strictement de forme à
faire où il faudrait remplacer, à la fin du deuxième
alinéa du paragraphe 1, les mots "1977, chapitre... insérer ici
le numéro de chapitre du projet de loi numéro 3", par les mots
"1965, première session, chapitre 14". L'article 69 est-il
adopté, M. le Président?
M. Forget: M. le Président, il y a une chose qui devrait
être signalée là-dedans. Cela prend la forme d'une motion
d'amendement, mais c'est toujours plus rapide de le faire comme cela. Que le
paragraphe 11 de l'article 69 soit modifié en ajoutant un
cinquième paragraphe qui se lirait comme suit: Pour les fins du
présent article, le mot "fonctionnaire" ne comprend pas les agents
à l'accréditation, les commissaires du travail et le commissaire
général du travail nommé en vertu de l'article 21a. Je
pense que le sens de cela est assez clair. Il est question, toujours, de nommer
des gens pour faire des enquêtes en dehors de la période couverte
de négociation. Il semblerait plus normal qu'il n'y ait pas de confusion
entre ces activités prévues dans le cadre de toutes les
interventions au titre du Code du travail, de manière à ne pas
mélanger les rôles et à ne pas diminuer la
crédibilité des gens qui viennent, au nom du ministre, intervenir
pour différents objets.
M. Johnson: ... enquêteurs. M. Forget: Oui.
M. Johnson: Agent d'accréditation. Vous n'avez pas mis
"agent d'accréditation ".
M. Forget: Non. Il y a eu un lapsus. Il faut corriger à la
main "enquêteur" par "agent d'accréditation". Excusez-moi,
j'aurais dû le signaler mais cela a été
préparé il y a un certain temps et c'est un oubli.
M. Laplante: ... dans le projet de loi.
M. Forget: II y a les présidents du tribunal
d'arbitrage.
M. Laplante: Ce n'est pas indu là-dedans.
M. Forget: Ce ne sont pas des fonctionnaires. Pour quand
quelqu'un arrive pour chercher des renseignements, on ne le prenne pas pour un
commissaire du travail ou, qu'il n'y ait pas de confusion dans les
rôles.
M. Johnson: M. le Président, juste pour être
sûrs que ça ne poserait pas de problème, effectivement on
pourrait faire nôtre cet amendement, dans la mesure où,
effectivement, les agents d'accréditation, le commissaire du travail ou
le commissaire général du travail n'ont jamais ce type de
problème ça vaut peut-être la peine de le
spécifier cependant, évidemment je tiens compte du fait
qu'on dit: Agent d'accréditation et non enquêteur.
Deuxièmement, on pourrait tout mettre au singulier puisque ça
comprend le pluriel et ce serait, en termes de technique de rédaction,
plus exact. Ce serait: "Pour les fins du présent article, le mot
fonctionnaire ne comprend pas un agent d'accréditation, un commissaire
du travail ou le commissaire général du travail nommés en
vertu de l'article 21a". Est-ce que ça va?
Je vais relire, pour les fins du journal des Débats. Le
paragraphe 11, de l'article 69, serait modifié en ajoutant, un
cinquième paragraphe qui se lirait comme suit: "5. Pour les fins du
présent article, le mot fonctionnaire ne comprend pas un agent
d'accréditation, un commissaire du travail et le commissaire
général du travail nommés en vertu de l'article 21a du
Code du travail".
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Clair): Si vous voulez m'attendre un
instant.
M. Forget: Maintenant c'est le président qui fait de
l'obstruction!
M. Johnson: Chacun son tour.
L'article 69 est-il adopté, M. le Président?
Le Président (M. Clair): Adopté.
M. Johnson: L'article 69a, dans les amendements du 22 novembre,
la motion est à l'effet d'ajouter, après l'article 69, du projet
de loi 45, le suivant: "69a. Dans toute loi ou proclamation ainsi que dans tout
arrêté en conseil, contrat ou document un renvoi à l'un des
articles du Code du travail modifiés ou remplacés par la
présente loi est un renvoi à l'article équivalent dudit
code tel que modifié ou remplacé par la présente loi".
M. Bellemare: C'est normal. Le Président (M. Clair):
Adopté?
M. Johnson: Adopté. L'article 70 est-il adopté?
M. Mackasey: Je pense qu'on a droit à un discours de 20
minutes? Oui, on a tous 20 minutes et un amendement...
M. Johnson: Non, c'est que j'aime peut-être mieux...
M. Mackasey: ... un discours sur l'article 70. Cela vous tente
Maurice? Vous déciderez.
M. Johnson: M. le Président, si le député de
Notre-Dame-de-Grâce permet, c'est parce qu'on aura une autre motion,
à faire adopter, qui est en fait la motion de renumérotation de
tout le projet, étant donné qu'on a abrogé certains
articles, et sur laquelle, comme dernière motion, le
député de Notre-Dame-de-Grâce pourra nous livrer sa savante
orose jusqu'à minuit.
M. Mackasey: Sérieusement, est-ce qu'il y a des
règlements qui sont nécessaires à cause de plusieurs
changements? Will there be regulations needed?
M. Johnson: Oui, je comprends. Non, il n'y aura, essentiellement,
que des concordances avec la réglementation actuelle, plus
l'exploitation forestière et un autre sujet: les pêcheries et un
troisième sujet, que j'ai évoqué, au sujet de
l'accréditation, au sujet des 35%.
L'article 70 est-il adopté, M. le Président?
Le Président (M. Clair): L'article 70, tel
qu'amendé, est-il adopté?
M. Bellemare: Adopté. M. Forget: Adopté.
M. Johnson: M. le Président, je fais donc motion de
renumérotation. Je pourrais en faire la lecture. Non? Est-ce qu'on peut
donc considérer, pour les fins de cette motion, que le président
et le rapporteur pourront renuméroter le projet de loi 45?
M. Bellemare: Le réimprimer?
M. Johnson: Non, parce que finalement cela va prendre la forme du
dépôt du rapport de la commission à l'Assemblée
nationale demain matin. Ce rapport contiendra probablement une copie conforme
de la motion de renumérotation.
M. Mackasey: Après les fêtes, au mois de mars?
M. Bisaillon: On verra.
M. Johnson: Les projets du gouvernement et du leader sont de
procéder à la troisième lecture un peu plus rapidement
qu'après les Fêtes, à moins, évidemment, que nos
amis de l'Opposition tiennent absolument à ce que cela soit après
Noël. Nous n'avons, personnellement, aucune objection.
Le Président (M. Clair): Pour les fins de la
renumérotation, il suffit qu'il y ait un consentement recommandant
à l'Assemblée nationale la renumérotation. Je comprends
qu'il y a un tel consentement.
M. Forget: Le consentement est accordé, M. le
Président.
Le Président (M. Clair): La commission per- manente du
travail et de la main-d'oeuvre et de l'immigration...
M. Bisaillon: M. le Président, avant que vous...
M. Bellemare: M. le Président, avant que vous ne
terminiez...
M. Bisaillon: Moi aussi, M. le Président, avant que vous
ne terminiez...
M. Bellemare: ... je voudrais vous annoncer une nouvelle
sensationnelle qui vient d'être dite à Radio Canada par le
président de la CSN, M. Rodrigue, lui-même. Il est en parfait
accord avec les amendements 87a, b), c) et d). M. Rodrigue vient d'annoncer
cela à 22 h 30 à la suite d'un interview qu'il vient de donner.
Si cela peut consoler certaines gens ou en faire pleurer d'autres, moi, cela me
réjouit de voir le président de la CSN emboîter les
arguments que mon collègue de Sainte-Marie et mes autres
collègues particulièrement ont pris.
Je remercie particulièrement le ministre d'avoir voulu adopter
certains de nos amendements et d'avoir été très
sérieux dans l'étude de tous ces amendements qui ont presque
changé complètement les principes de la loi. Je pense
qu'après avoir soumis, à mon caucus demain matin, le rapport
officiel de ce qui s'est passé, on appuiera en troisième lecture
le projet de loi 45.
Le Président (M. Clair): Le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, je comprends
qu'étant donné qu'on a voté article par article, il n'est
pas nécessaire de prendre un vote global sur l'ensemble du projet de loi
45.
A ce moment-ci, je n'aurais pas de motion particulière à
faire, mais j'aurais au moins une demande à adresser au ministre, une
demande qu'il pourra d'ailleurs considérer dans les deux ou trois mois
qui viennent. Je pense que, même si on est à la commission du
travail, il ne faut pas perdre de vue non plus la réforme parlementaire,
d'autant plus que si cette réforme parlementaire nous permet dans
l'avenir d'étudier plus en profondeur et avec peut-être plus de
qualité les prochaines lois du travail qui pourraient nous être
présentées.
Le ministre a annoncé, à parlé, a mentionné
à plusieurs reprises qu'une commission d'étude serait
bientôt nommée, ou que des personnes seraient bientôt
nommées pour évaluer l'ensemble du Code du travail, pour se
pencher sur l'étude complète, sur la refonte de l'ensemble du
Code du travail. Il me semble, M. le ministre, que ce serait-peut-être
une excellente idée qu'une fois cette commission ou ce groupe
d'étude en fonctionnement on prenne à un moment donné un
temps d'arrêt pour que la commission puisse rencontrer les membres de la
commission parlementaire permanente du travail et de la main-d'oeuvre et
discuter avec eux des grandes orientations qui semblent se dessiner, des
hypothèses de travail qu'ils ont afin, au moins, que lorsque le travail
du comité d'étude sera terminé, les membres de la
commission aient pu faire une première discussion
préalable.
Ma suggestion, ce n'est pas une motion, c'est seulement une suggestion,
va dans le sens d'une meilleure compréhension des problèmes de
relations du travail par les membres de la commission et aussi dans le sens
d'une plus grande participation de l'ensemble des députés
à l'élaboration des mesures législatives.
M. Bellemare: Vous parlez aussi pour le bill 53.
M. Bisaillon: ... pour l'instant!
M. Johnson: M. le Président, je prends bonne note de la
suggestion du député de Sainte-Marie. Je pourrais même
ajouter qu'il y a en ce moment un autre groupe qui est en train de revoir une
loi assez importante qui touche le ministère du Travail. Il s'agit de la
commission Hébert sur la refonte de la Loi régissant les
relations du travail dans l'industrie de la construction. S'il apparaissait
opportun et souhaitable, dans le cadre des efforts, faute de changements de
structure dans le cadre de la réforme parlementaire, d'organiser des
rencontres avec ies membres de la commission, nous y procéderons.
Le Président (M. Clair): Le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: M. le Président, vous me demandez de prendre
la parole pour quelques minutes. Je ne suis pas pour faire ce soir, le discours
que j'ai préparé pour la troisième lecture, mais je veux
sincèrement féliciter le président. Je pense que sans ce
geste du président et je le dis sincèrement cela
n'aurait pas...
Dans ce domaine, où on traite avec des citoyens ordinaires, je
pense que c'est nécessaire d'oublier, autant que possible, qu'on
représente tel ou tel parti. C'est un type de réforme qu'on
devrait faire, autant que possible, ensemble, pour le bien-être de tous
les citoyens.
J'ai un regret et je partage le sentiment du député
de "Sainte-Marie that we must revise the whole Labor Code it is
my observation because every time you make amendments, you affect some
other part of the Code and you unbalance it.
My one regret is that in the anti-scabs section, as far as I am
concerned, it satifies neither the Unions, nor the employers, and my one
regret, which I will have to go on record in saying and I hope it is in
the report is that the people who are going to suffer most, by this
piece of legislation, are the small employers, the small businessmen, with a
small number of unionized people, who have little or no protection against
certain sections of this law which, if, taken advantage of my appeal to the
Union, are not to take complete advantage of one of those sections which could
very well force the very small employers into bankrupcy in a very short period
of time.
M. Johnson: M. le Président, en terminant,
j'aimerais...
Le Président (M. Clair): Le député de
Saint-Laurent avait demandé la parole. M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, je serai très bref. Le
député de Sainte-Marie a fait allusion à une
possibilité que la commission soit appelée à collaborer,
d'une certaine façon, aux travaux d'élaboration d'un nouveau Code
du travail. Je vais certainement souscrire à ce voeu également,
de la part de l'Opposition officielle, en notant que malgré tout, ce
n'est qu'un minimum, je pense, si l'on veut que les lois du travail aient le
genre de crédibilité et soient reçues comme étant
l'expression de l'ensemble de l'Assemblée nationale. C'est très
important pour l'efficacité des lois que certaines d'entre elles, au
moins, soient élaborées, avec la plus large mesure de consensus
possible.
Je me permets, en terminant, de rappeler que j'aurais souhaité,
nous aurions souhaité, de notre côté, aller plus loin que
cela, et que le travail de révision du Code du travail soit
confié, non pas à des experts "de l'extérieur", mais aux
parlementaires eux-mêmes. Je crois qu'ils en sont capables, pourvu qu'on
leur donne les moyens nécessaires, sur le plan de l'aide technique, de
faire un travail aussi rapidement, et peut-être mieux que n'importe quel
autre groupe.
Cependant, quelle que soit la mesure envisagée par le ministre,
pour nous permettre de participer à l'élaboration de cette
révision d'ensemble, il nous fera plaisir de nous y joindre.
Le Président (M. Clair): Le ministre du travail.
M. Johnson: M. le Président, en terminant, cette
commission, qui a duré au-delà de 60 heures, nous a permis de
brasser non seulement un texte législatif et de l'aborder de
façon technique ce que nous avons fait d'emblée puisque
c'est un rôle qui est dévolu à ceux qui font la
législation mais également de brasser des principes assez
fondamentaux, d'échanger des perceptions, des convictions.
J'aimerais d'abord vous remercier de votre patience et de votre attitude
toujours correcte et également remercier l'ensemble des membres de cette
commission d'avoir participé à l'élaboration du projet de
loi 45.
Le Président (M. Clair): Messieurs, la commission
permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration a
étudié article par article le projet de loi no 45,
intitulé Loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère
du Travail et de la Main-d'Oeuvre, et l'a adopté avec des amendements.
La commission termine donc ici ses travaux et ajourne sine die. Merci.
(Fin de la séance à 23 h 30)