(Onze heures quarante-six minutes)
Le Président (M. Provençal)
: Bonjour. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je souhaite la
bienvenue...
Des voix : ...
Le Président (M. Provençal)
: Et je vais demander aussi le silence en même temps. Et je
demande à toutes les personnes de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
appareils électroniques.
La commission est réunie afin de poursuivre les
consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi
n° 11, Loi visant à augmenter l'offre de services de première ligne par
les médecins omnipraticiens et à améliorer la gestion de cette offre.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Non, M. le
Président.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Ce matin, nous entendrons par
visioconférence le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux
de la Capitale-Nationale, représenté par M. Michel Delamarre et la
Dre Isabelle Samson.
Comme la
séance a débuté avec un petit peu de retard, y a-t-il consentement pour
poursuivre au-delà de l'heure prévue, c'est-à-dire jusqu'à
12 h 30?
Des voix : Consentement.
Auditions (suite)
Le
Président (M. Provençal)
: Merci. Je souhaite la bienvenue aux représentants
du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la
Capitale-Nationale. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à débuter votre
exposé. Merci.
Centre intégré
universitaire de santé et de services sociaux
de la Capitale-Nationale (CIUSSS—Capitale-Nationale)
M. Delamarre (Michel) : M. le
Président, Mmes, MM. les députés, membres de la commission, merci de nous
recevoir aujourd'hui dans le cadre des auditions publiques sur le projet de loi
n° 11. Je suis Michel Delamarre, P.D.G.
du CIUSSS—Capitale-Nationale.
Je suis accompagné de la Dre Isabelle Samson, directrice des services
professionnels et aussi médecin de famille au GMF-U Quatre-Bourgeois,
dans la région de la Capitale-Nationale. Dre Samson est aussi responsable de
l'équipe de soutien du DRMG.
Le CIUSSS—Capitale-Nationale est certainement
une des plus grandes organisations de soins de santé et de services sociaux de première ligne, et on est très
fiers de nos quatre instituts universitaires, quatre centres de recherche
FRQ, dont l'institut de première ligne en santé et services sociaux et son
centre de recherche VITAM.
D'entrée de jeu, nous tenons à saluer
l'intention du gouvernement d'améliorer l'équité d'accès à un médecin de
famille via un guichet, d'améliorer la connaissance de l'offre par la
population via un système de rendez-vous et de soutenir la cogestion
médico-administrative via les données. On va parler d'une offre de soins et
services publics intégrée, interdisciplinaire, dont font partie les GMF,
accessible et équitable, pour laquelle nous avons un devoir de témoigner, de rendre compte à la population de sa
performance, que cette offre de soins et services soit explicite, palpable
pour la population et les décideurs, une offre de soins et services
interdisciplinaire qui met à contribution toutes les compétences des différents
professionnels dès le premier contact, au bon moment, l'importance de
l'adhésion et de la mobilisation des
médecins, qui favorisent la cogestion entre les établissements, les DRMG et les
responsables de GMF basée sur des données.
Maintenant,
je vous laisse aux bons soins de la Dre Samson pour la présentation des faits
saillants de notre mémoire.
Mme Samson
(Isabelle) : Merci beaucoup,
M. Delamarre. Bonjour, tout le monde. Aujourd'hui, nous souhaitons vous
présenter notre mémoire sous trois grands volets. Le premier volet, c'est
l'accès aux données. Pour nous, il est crucial que les établissements, en
partenariat avec les médecins de famille, puissent avoir un accès aux données
afin d'améliorer l'accès aux services de première ligne
en pertinence et en interdisciplinarité. On parle ici des données, oui, de la
RAMQ mais aussi des données qui pourraient être générées grâce aux plateformes
de rendez-vous en ligne. Selon nous, ces données-là devraient être rendues
disponibles en tout premier lieu aux médecins de famille, qui sont sur le
terrain, afin d'alimenter la pratique réflexive. Je m'explique.
Aujourd'hui, pendant que je vous parle, j'ai
peut-être deux ou trois patients qui sont en train d'appeler à la clinique où
je travaille et de tenter d'avoir un rendez-vous avec moi. Peut-être que ces
patients-là ne seront pas en mesure d'avoir un rendez-vous comme ils l'auraient
souhaité. Et ce qui est triste là-dedans, c'est que je ne le saurai jamais. Donc, pour le clinicien, d'avoir accès à
cette information-là, d'avoir des indicateurs qui lui permettent d'apprécier
l'accès à ses propres services, ça lui permettra de faire une réelle différence
et d'optimiser sa contribution à l'offre de services, parce que c'est ce que
les médecins de famille souhaitent fondamentalement, c'est donner accès à leurs
patients et offrir des bons soins.
Ces données-là devraient aussi, à notre avis,
être mises à la disposition des GMF et des cogestionnaires, hein, de nos
gestionnaires d'établissement, qui travaillent avec ces GMF-là, afin de pouvoir
mieux répartir l'offre de services et répondre aux besoins de la population. Et
finalement les chefs de DRMG ainsi que les hauts dirigeants des organisations
travaillent quotidiennement, en lien avec les effectifs, en lien avec
l'ajustement de l'offre et de la demande en première ligne, à répondre de mieux
en mieux aux besoins de la population.
Nous avons besoin de données pour accomplir ce
rôle-là, car ça fait partie de notre mission fondamentale et c'est la porte
d'entrée, la base de notre système de santé. Donc, pour nous, une décentralisation
de ces données-là pour nous donner les outils de travail au quotidien, ce
serait très précieux. Et les données, plus elles seront interdisciplinaires,
plus nous aurons une vision complète de l'offre de services en première ligne.
• (11 h 50) •
Le deuxième volet, c'est un accès équitable à un
rendez-vous pertinent pour nos citoyens via une plateforme numérique. J'ai
parlé d'interdisciplinarité dans le cadre du premier volet. Vous comprendrez
que le thème reviendra dans le second volet aussi, parce qu'une de nos
recommandations, c'est d'élargir l'offre de rendez-vous en ligne aux autres
professionnels.
Il y a deux objectifs qui sont poursuivis par
cette recommandation-là, premièrement, pour éviter que le médecin de famille
devienne un goulot dans l'accès au rendez-vous à un autre professionnel. Et là,
encore une fois, je vous donne un exemple concret. Hier, je regardais mon
horaire de bureau de cet après-midi — ça tombe que, cet après-midi,
je suis en clinique — et
je voyais, dans mon horaire, un patient qui avait pris rendez-vous en ligne, et
l'objectif de sa rencontre est un suivi de son hypertension. Il trouvait que sa
pression était trop élevée, donc il a pris rendez-vous avec son médecin. Bien
évidemment, quand j'ai vu ça, bien, je me suis dit : Bien, je ne suis pas
le meilleur professionnel pour répondre à ce besoin-là. C'est probablement le
pharmacien qui est le mieux placé, ou l'infirmière, pour répondre aux besoins
du patient. Donc, on a dû rappeler le patient et aiguiller le patient vers le
bon professionnel. Si le patient avait eu la possibilité, en ligne, de prendre
rendez-vous directement avec le pharmacien ou avec l'infirmière, je crois que
tout le monde aurait gagné au change.
L'objectif, aussi, d'élargir les plateformes de
prise de rendez-vous aux autres professionnels, bien, c'est de pouvoir générer
des données qui sont cohérentes pour l'ensemble des professionnels qui
travaillent dans la même équipe, c'est de
pouvoir évaluer la qualité de l'accès, oui, aux médecins de famille mais aussi
à tous ses collègues qui travaillent avec lui pour offrir une gamme de services
qui est accessible en temps opportun à notre population en GMF.
Finalement, le troisième volet, bien, c'est
l'accès équitable à l'inscription au médecin de famille et à l'équipe
interprofessionnelle. Les guichets d'accès à un médecin de famille sont le
meilleur moyen dont on dispose pour assurer
l'équité d'accès à l'inscription. Comme médecin de famille, ce soir, si je fais
du sans rendez-vous populationnel, que je vois un patient orphelin, je
peux décider de l'inscrire, peu importe le nombre de jours, de mois ou d'années
qu'il est orphelin. En choisissant de l'inscrire, bien, je choisis de le
prioriser sur plusieurs patients qui peuvent être en attente depuis des mois, des
années au guichet et qui sont possiblement plus vulnérables. Donc, pour nous,
le fait d'inciter les médecins de famille à inscrire les patients sur le
guichet, c'est quelque chose qui est très positif. Et on est, par contre,
convaincus qu'il faut travailler sur les exceptions en collaboration avec les
médecins pour que ça demeure cohérent pour notre population puis que... par
exemple, on a parlé des familles, là, vous avez pu l'aborder plus tôt dans la
commission, qu'on puisse faire des exceptions pour ces gens-là.
Je termine et je repasserai la parole à mon
P.D.G., mais je termine avec le volet universitaire de notre établissement, qui
nous tient grandement à coeur. Pour nous, il est important que les grands
changements qui pourraient être engendrés par ce projet de loi soient évalués,
qu'il y ait un processus évaluatif. Et, si on pouvait générer des connaissances
qui pourront servir à l'amélioration de notre système et d'autres systèmes de
santé dans le monde, bien, je pense qu'on aurait une portée très intéressante.
M. Delamarre (Michel) : Donc,
en conclusion, on est très disposés à répondre à vos questions dans les
prochaines minutes. Le CIUSSS—Capitale-Nationale
réitère au gouvernement son appui aux intentions du projet de loi n° 11. La nécessité pour
les médecins d'utiliser le guichet permettra de renforcer l'équité pour l'accès
via l'inscription à un médecin de famille. Nous insistons sur le fait
que ce projet de loi est une opportunité de documenter et de valoriser l'accès à une équipe interdisciplinaire
tout en permettant beaucoup d'agilité dans la gestion des disponibilités
et de l'accès à l'offre de services des médecins et des équipes
interdisciplinaires en cogestion. Cette agilité sera possible si les données
sont partagées avec les médecins et si ceux-ci sont outillés à la pratique
réflexive et partenaires du changement. Il
est important que les solutions mises en place soient à l'échelle locale, avec
le soutien du DRMG et des établissements.
Donc,
merci, pour... Ça mettrait fin à notre présentation. Et nous sommes ouverts,
maintenant, pour les questions.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie beaucoup pour votre exposé. Nous allons
débuter cette période d'échange avec M. le ministre. Alors, je vous cède la
parole, M. le ministre.
M. Dubé : Merci beaucoup, M. le Président. Alors,
M. Delamarre et Mme Samson, très content de vous avoir avec
nous ce matin.
J'aimerais peut-être partager avec mes collègues
ici, mes collègues parlementaires, une petite information peut-être privée sur
M. Delamarre. M. Delamarre a commencé sa carrière au ministère, il y
a 41 ans, comme préposé à l'accueil
pour finir sa carrière, dans quelques mois, comme P.D.G. de probablement... je
vais le dire, là, à la jalousie de quelques-uns, d'un des meilleurs
CIUSSS qu'on a au Québec, très bien géré. Alors, je tiens à vous remercier d'avoir pris le temps d'être avec nous aujourd'hui
puis de... en profiter pour vous remercier. Mais vous êtes vraiment... Vous avez une carrière exemplaire qu'il est
possible de conduire dans le réseau public, puis je pense que c'est important
de le noter, M. Delamarre. J'ai
peut-être pris une minute de mon temps, je pense que mes collègues
m'excuseront, mais je tiens à le remercier.
Peut-être, Mme Samson, j'irai tout de suite
dans le vif du sujet, parce que, quand... Je vais aller plutôt sur la question
des rendez-vous puis je reviendrai sur les données, parce que, les données, on
pourrait s'en parler beaucoup. Hier,
j'écoutais la Vérificatrice générale, puis elle est d'accord avec la partie des
données. Ça, elle était très, très claire. Mais elle avait quand même
certaines inquiétudes sur la fiabilité des réseaux, des systèmes informatiques,
je ne sais pas si vous l'avez entendue,
parce qu'effectivement peut-être qu'au ministère de la Santé on a eu, comme
dans d'autres ministères, des fois,
des endroits où ça n'allait pas toujours bien dans l'implantation d'un nouveau
système. Puis d'ailleurs les premiers balbutiements de Rendez-vous santé n'ont
peut-être pas été exemplaires, je vais le dire comme ça.
Mais vous,
vous avez vécu, avec la vaccination... puis je dis «vous», là... Le CIUSSS de
Québec... de la Capitale-Nationale a passé de l'âge du fax à un système
pas mal avancé, la vaccination, puis j'aimerais ça que vous... vous disiez en
quelques mots comment vous avez pu faire ça dans un si court laps de temps,
pour qu'on puisse passer, justement, de l'âge de pierre ou du fax à un réseau
intégré d'information qui vous permettait de suivre la prise de rendez-vous,
incluant l'interdisciplinarité, parce qu'à la fin il n'y avait pas juste les
vaccinateurs avec qui on pouvait prendre rendez-vous, mais on pouvait prendre
rendez-vous avec les pharmaciens aussi. J'aimerais ça que vous nous dites
comment ça s'est fait, rapidement, pour qu'on puisse, après ça, faire un
parallèle, de dire : Bien, ce qu'on est
en train d'essayer de faire pour la prise de rendez-vous, là, ce n'est pas
d'aller sur la lune, on l'a fait dans un temps assez court avec la vaccination.
J'aimerais ça que vous en parliez, si vous êtes à l'aise d'en parler quelques
minutes.
Mme Samson (Isabelle) : ...je
laisserai mon P.D.G. répondre à la question.
M. Delamarre (Michel) : ...M.
le ministre, merci pour vos bons mots. C'est une minute très bien investie,
pour ma part. Merci beaucoup.
Écoutez, pour la... Je pense qu'il y a quelques
ingrédients, pour répondre à votre question. D'abord, ça prend une solution qui est agile, hein, l'application
comme telle, elle doit être agile, mais ça prend aussi une mobilisation puis
une croyance qu'on peut y arriver rapidement. Chez nous, ça a été une solution
qu'on a eue qui est agile, mais aussi des personnes impliquées pour s'assurer
d'une pleine utilisation, justement, de cette application-là. Et c'est ce qui a
fait la différence.
Donc, en peu de temps, on était à même,
effectivement, d'utiliser une solution, de la mettre en oeuvre, d'avoir une
équipe interdisciplinaire, justement, qui a permis... on va rester dans le
thème, qui a permis de faire en sorte qu'on
en fasse une utilisation optimale le plus rapidement possible. C'est des
ingrédients de base, c'est la technologie, l'agilité et l'équipe
interdisciplinaire, justement, pour s'assurer qu'on utilise vraiment cette
solution-là.
M. Dubé : Puis vous, dans
votre... dans votre CIUSSS, ici, à la Capitale-Nationale, là, vous avez quand
même un très grand nombre de GMF, d'endroits qu'on doit connecter. Vous avez
quelques systèmes de prise de rendez-vous. Vous avez Rendez-vous santé, vous en
avez d'autres. Est-ce que vous voyez que ça se dirige dans la bonne direction, là, ce qui est en train de se
faire puis qui... Parce qu'il nous manque encore les données des médecins
dans nos systèmes, mais les systèmes... Je ne sais pas combien de GMF vous avez
de connectés qui sont prêts à recevoir les données, là.
• (12 heures) •
M. Delamarre (Michel) : Oui. Je
vais laisser Dre Samson peut-être répondre à la question, mais il faut quand
même se dire qu'on est... Je parlais tantôt d'une offre de services publics
intégrée, avec des systèmes qui... un système, dans les GMF, qui est propre à
chacun des GMF, avec nos systèmes d'information qui ne sont pas les mêmes. Donc, à la base même, il y a une certaine
difficulté de communication pour avoir des données intégrées, pour une offre de services aussi importante que l'offre
de services de première ligne, dans un premier temps. Et je laisserais
Dre Samson parler peut-être davantage là où on en est par rapport à la
connectivité.
Mme Samson (Isabelle) : Oui.
Nous avons 33 GMF sur le territoire de la Capitale-Nationale, et puis ils
sont tous... Ils ont tous signé, là, leur approbation pour participer à
l'orchestrateur. Nous sommes présentement branchés avec RVSQ pour 18 de ces GMF
là, et les arrimages sont en cours, là, pour le partage de données.
Je
vous dirais que ce qui va être très important pour nous dans cet effort de
mobilisation là vers l'orchestrateur, c'est le fait que les médecins de
famille y voient une valeur ajoutée pour leurs patients et pour les
professionnels avec lesquels ils
travaillent. Je pense que c'est en... La notion de l'interdisciplinarité qu'on
a portée aujourd'hui, je pense que
c'est une des valeurs ajoutées que les médecins voient, parce que c'est sûr que
c'est... Comment dire? Quand une plage de rendez-vous est utilisée pour
un patient qui veut un suivi pour sa pression, qui a pris rendez-vous en ligne,
l'exemple que j'ai donné tout à l'heure,
bien, le médecin ne sent pas nécessairement qu'il joue pleinement son rôle.
Donc, que la plateforme puisse être adaptée aux besoins des cliniciens,
et qu'elle puisse générer des données, si on peut aller là, puis qu'elle peut nous donner des façons de s'améliorer
nous-mêmes, bien là, assurément que c'est des éléments qui vont
favoriser l'adhésion des cliniques.
M. Dubé : Bien, c'est pour ça.
Non, mais je comprends. Puis je ne veux pas prendre trop de temps là-dessus, mais c'est important de rentrer la notion
d'interdisciplinarité. Puis c'est pour ça que je faisais le lien entre la
vaccination, qui se faisait soit dans
les centres de traitement, dans les centres de vaccination ou dans les pharmacies.
Donc, le fameux intégrateur peut se faire avec plusieurs
disciplinarités. O.K. Je pense que ça, c'est clair.
Je ne sais pas si c'est vous ou
M. Delamarre qui veut parler des données. Mais vous, vous êtes DRMG, hein?
C'est ce qu'on... Vous n'êtes pas DRMG.
C'est quoi, exactement, votre rôle par rapport au DRMG qu'on connaît, là, dans
un... J'ai peut-être mal compris. Expliquez-moi donc votre rôle.
M. Delamarre (Michel) : Vas-y.
Mme Samson
(Isabelle) : Je suis
directrice des services professionnels, donc je suis responsable des
700 médecins, dentistes,
pharmaciens qui travaillent au CIUSSS de la Capitale-Nationale, dont
350 médecins de famille qui sont dans l'établissement. Mon équipe
de gestionnaires est responsable de 23 des 33 GMF, donc tous les GMF qui
sont dans la région de Québec métro, là. Les ressources, les professionnels qui
sont là relèvent de mon équipe de gestion, qui, elle, est en cogestion quotidienne avec les médecins responsables de ces
GMF là et... (panne de son) ...tous les étages de cogestion. Le chef du DRMG est en cogestion avec
ma directrice adjointe. Donc, on est vraiment toujours en interface avec
le DRMG. On travaille en collaboration, en cogestion, à tous les niveaux.
M. Dubé : Et vous... Puis là je
vais revenir sur l'importance, parce que vous l'avez bien fait dans votre
présentation, l'importance des données pour mieux planifier, justement. Est-ce
que les médecins sont surchargés ou... Comment... Donnez-moi un exemple pratique,
là, que... Si vous aviez... vous avez utilisé le mot «décentraliser», donc, des
données décentralisées, dans vos... pour donner à votre DRMG, donnez-moi des
exemples de ce que ça pourrait vous aider à mieux gérer.
Mme Samson (Isabelle) : Je peux
vous donner des exemples très contemporains de la pandémie. Donc, dans le cadre
de la pandémie, on avait besoin des médecins pour venir nous aider en zone
chaude, hein, on devait soigner les patients. Les médecins devaient diminuer
leurs activités un peu en première ligne pour pouvoir venir nous aider. Et, à
ce moment-là, on a fait le tour de nos GMF et on demandait : Bien, est-ce
que vous pouvez libérer un médecin pour venir? Bien, ce que les GMF nous ont
demandé, à ce moment-là, ont dit : Bien, est-ce qu'on peut avoir une idée
de comment chacun des GMF contribue? Quelle est l'offre de services actuelle de
chacun des GMF, pour pouvoir savoir lequel a le plus de capacités puis pourrait
dégager quelqu'un pour venir travailler en zone chaude? C'est les GMF qui nous
l'ont demandé, par principe d'équité, c'est tout à fait légitime, et, à ce
moment-là, bien, on ne pouvait pas leur répondre. Mais, si on avait les
données, ça pourrait aider les médecins comme ça, avec notre soutien, à se
gouverner puis à pouvoir répartir le travail de façon plus équitable.
M. Dubé : Vous le savez, là,
puis je ne ferai pas de commentaire là-dessus, mais on voit que cette demande
de données là qu'on fait pour être capables de mieux gérer, ça peut être vu
comme uniquement pour fins de contrôle, mais, je le dis, c'est pour fins de
gestion. Et ça, vous êtes d'accord avec ce principe-là pour être capables de
mieux gérer votre portefeuille ou votre bassin de presque, quoi, 700 médecins,
là, si je compte l'ensemble de ce que vous dites, là. C'est ça?
M. Delamarre (Michel) : Tout à
fait.
M. Dubé : Allez-y,
M. Delamarre.
M. Delamarre (Michel) : Puis
peut-être que je ferais un autre bout, M. Dubé. Vous avez parlé de mes
41 années de service, mais, je vous dirais, moi, je suis très fier de la
qualité des médecins et des professionnels qu'on a dans le réseau. Je pense que
ce qu'on touche actuellement, c'est une organisation intégrée publique, hein, les
GMF font partie d'une organisation intégrée publique, et la donnée est
certainement... puis je n'ai pas à vous convaincre là-dessus, la donnée est un
élément fondamental pour la quête et la recherche de la qualité des services,
dont l'accès en fait partie. Elle est en mesure d'assurer une équité, de voir
comment est répartie notre offre de services. Et on a l'obligation de témoigner
à la population de la performance de notre réseau public, qui inclut des GMF.
Dans ce
cadre-là, la donnée, elle est fondamentale. Et ce qu'on met de l'avant, c'est,
oui, les données de la RAMQ, mais, aussi, avoir un portrait de la façon
dont on utilise, justement, nos plages de rendez-vous pour la population, pour moi, c'est crucial. Et il faut le voir dans une
dynamique d'amélioration, tout en respectant la donnée puis ce qui appartient à
chacun des GMF, mais chacun des GMF a besoin. Le DRMG a besoin de savoir,
exemple, où on en est rendus par rapport à
la mise en oeuvre de l'accès adapté dans chacun des GMF. C'est très variable
d'un GMF à l'autre, l'organisation adaptée interdisciplinaire.
M. Dubé :
Ça, j'aimerais ça... Je m'excuse, M. Delamarre. Il me reste encore du
temps, M. le Président?
Le Président (M.
Provençal)
: ...
M. Dubé :
O.K. Parlez-moi-z-en un petit peu, de la... de différents niveaux d'accès
adapté. On a eu une très bonne présentation, hier, d'une dame qui a un doctorat
en... j'allais dire presque en accès adapté, là, mais qui a fait une excellente
présentation. Parlez-moi-z-en un peu, du différent niveau de... que ce n'est
pas tous les GMF qui sont rendus au même endroit en accès adapté. Puis quel
impact... Quel est le potentiel qu'on pourrait avoir sur notre fameux cas de
GAMF, là, du guichet d'accès, où on a 900 000 patients? Dans la
région de Québec, c'est combien, le nombre de patients qui sont sur le GAMF,
pour la Capitale-Nationale? C'est à peu près combien?
M. Delamarre
(Michel) : Vas-y, Isabelle.
Mme Samson
(Isabelle) : 108 000 patients.
M. Dubé :
108 000 patients, pour la Capitale-Nationale, qui n'ont pas un
médecin de famille. Parlez-moi de l'accès
adapté. Est-ce que ça pourrait avoir un impact? Si tout le monde était au
meilleur niveau d'accès adapté, est-ce que ça pourrait faire une
différence importante pour la région de Québec?
M. Delamarre
(Michel) : Moi, je pense, ça ferait toute la différence,
effectivement, parce que c'est là toute la force des compétences de
l'interdisciplinarité. Elle n'est pas optimale au moment où on se parle. Elle
est très variable d'un GMF à l'autre. On a des GMF qui réussissent et se
rapprochent d'une organisation interdisciplinaire, en accès adapté, optimale,
mais c'est très variable. Et on a... On peut... Et, en même temps, je vous dis
ça, je peux...
M. Dubé :
Vous en avez... Oui, excusez-moi.
M. Delamarre
(Michel) : Oui. Mais, en même temps que je dis ça, j'ai très peu de
données pour soutenir ce que je vous dis, parce que je n'ai pas la donnée. Je
ne le sais pas, où on en est, je ne sais pas, chacun des GMF. Je crois,
certaines expériences... J'ai été voir dans des GMF. Je sais qu'il y en a qui
travaillent très fort pour une organisation vraiment intégrée accès adapté,
mais, en même temps, je n'ai pas de donnée. Et c'est de valeur, parce que, même
pour les GMF, pour l'ensemble de la communauté des médecins, pour nous, on
pourrait témoigner à la population de notre performance. Oui, il y a de
l'amélioration, beaucoup, mais on pourrait avoir, à tout le moins, l'évolution.
Et je suis convaincu qu'il y a un impact incroyable si on travaillait dans ce
sens-là. Je vais laisser Isabelle... Dre Samson.
M. Dubé : Oui, allez-y. Non, c'est... Allez-y, Isabelle... excusez-moi,
Dre Samson. Excusez-moi, excusez-moi.
Mme Samson
(Isabelle) : Il n'y a pas de problème. Mais effectivement, là, la
récurrence de la donnée, c'est clair que ce serait éclairant, puis pour les
médecins de famille aussi. Comme je vous disais, là, d'avoir des indicateurs
qui nous permettent, à nous... On parlait du troisième rendez-vous disponible.
Bien, si chaque médecin dans la région pouvait connaître son troisième
rendez-vous disponible, connaître la cible, bien, à ce moment-là, ce qui est
intéressant, c'est que cette pratique réflexive là, donc, de donner au clinicien
de l'information sur sa propre pratique, information qu'il n'a pas présentement
parce qu'elle n'est pas perçue, bien, c'est clair que c'est mobilisant puis
qu'on veut s'améliorer. Donc, ça amène un changement intrinsèque sans qu'on ait
besoin d'imposer des façons de faire.
Donc, pour moi, là,
plus on est capables de donner des indicateurs, plus les médecins vont vouloir
aller vers l'accès adapté avec les autres professionnels qui sont dans leur
équipe et mieux servir leurs patients.
M. Dubé :
Juste une dernière... Juste une dernière question, parce que celle-là me
préoccupe un peu, là. Vous avez parlé de l'accès équitable. Vous dites que la
priorité devrait être sur ceux qui sont sur le GAMF avant les autres, mais
qu'il devrait y avoir des exceptions, j'ai bien compris, notamment les membres
d'une même famille. Est-ce que vous pensez
qu'on peut garder cet équilibre-là, prioriser les gens sur le GAMF pour les
prendre, parce qu'ils attendent, des fois, depuis deux, trois, quatre,
cinq ans, mais, en même temps, donner au... que le médecin puisse faire
preuve de jugement? C'est un peu ça que vous me dites, là, il faudrait trouver
l'équilibre entre les deux.
• (12 h 10) •
Mme Samson
(Isabelle) : Tout à fait. C'est à discuter en collaboration avec les
médecins puis de convenir des exceptions qui font le plus de sens pour la
population.
M. Dubé : Vous seriez moins
sur... moins drastique, là, par rapport à l'utilisation du GAMF pour certaines
exceptions. C'est ça que je comprends. O.K.
Mme Samson (Isabelle) : Il
serait... Bien, l'utiliser le plus possible. Maintenant, définir les exceptions
ensemble, tout à fait.
M. Dubé : Je vois que je manque de temps, mais, encore une fois, à vous deux,
merci beaucoup pour vos bonnes explications. Très apprécié. Merci
beaucoup.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci, M. le
ministre. Nous allons poursuivre avec le député de Nelligan.
M. Derraji :
Merci, M. le Président. Dre Samson, M. Delamarre, merci beaucoup pour
votre rapport. C'est très, très clair. Vous avez mentionné quelque chose que
j'ai vraiment aimé. Hier, nous avons eu des échanges avec le ministre sur le
triage. Et, tout à l'heure, et corrigez-moi si je me trompe, vous avez dit que
vous avez reçu un appel pour prendre un rendez-vous avec vous, mais, si le
travail était bien fait avant, le patient sera dirigé vers un autre
professionnel de la santé beaucoup plus rapidement pour régler son problème de
pression artérielle. J'ai bien résumé le cas? O.K.
Si on revient en
amont, et vous êtes responsable de pas mal de GMF, vous avez la vision macro et
micro, pensez-vous, au-delà de la qualité des données, que, si on met l'emphase
sur le triage, ça peut améliorer les résultats en amont?
Mme Samson
(Isabelle) : Bien, en fait, le triage... Bien, il y a le projet GAP,
là, dont vous allez entendre parler plus tard aujourd'hui, qui est un peu sur
ce principe-là. Assurément, la pertinence de l'utilisation des services de santé en première ligne, pour moi, comme
directrice des services professionnels qui est en cogestion avec le DRMG,
c'est quelque chose qui peut faire une
grande différence. Le défi que nous avons, c'est que nous avons des citoyens
qui souhaitent avoir accès à un outil en ligne et que, présentement, en
ligne, ce triage-là est beaucoup plus difficile.
L'autre défi qu'on a
comme établissement, c'est que, si on place systématiquement une infirmière en
amont des consultations, on va manquer d'infirmières à quelque part.
M. Derraji :
Non, non, vous avez raison, vous avez raison. Ce n'est pas mon but. La
technologie, et j'ai en face de moi un ministre qui croit beaucoup à la
technologie... En fait, nous avons le bon forum. Lui, il réfléchit par rapport au triage, moi, j'essaie d'utiliser les
tribunes que j'ai pour dire : Écoutez, prenons le temps de réfléchir sur
le triage. Parce que vous l'avez très bien mentionné, M. Delamarre, tout
à l'heure, vous avez dit : Je n'ai pas les données pour pouvoir dire est-ce que c'est bon ou pas bon.
C'est une excellente réponse, parce que c'est un cercle vicieux. Mais ma
crainte, ce n'est pas uniquement les
données, c'est passer à côté du triage. Et là, maintenant, il y a des
technologies qui existent, utilisant
des algorithmes, de l'intelligence artificielle, que... On ne peut pas
uniquement mobiliser un professionnel de la santé pour faire le triage.
C'est une perte. Je préfère que ce professionnel s'occupe de regarder les
patients.
Ma question est très
simple. Nous sommes en train d'étudier ce projet de loi. Je ne veux pas juste
que le législateur se concentre sur les
données, on oublie l'amont. Moi, ma crainte, c'est que... Vous l'avez très bien
mentionné, la cogestion, l'intervention de plusieurs professionnels,
qu'on valorise l'intervention des autres professionnels, mais j'aimerais bien
vous entendre sur le triage. Est-ce que vous avez des remarques ou des
commentaires à nous, les élus, par rapport à ça?
M. Delamarre (Michel) : J'ai peut-être un élément, que Dre Samson
pourra peut-être parler un peu davantage, qui va dans le même sens. Il y a une question d'enseignement,
d'éducation à la population. Et une utilisation des algorithmes, justement... On a un projet pilote actuellement,
dans un... le secteur de la Capitale-Nationale, qui va aussi dans ce sens-là. On a un projet pilote aussi où on a développé des algorithmes.
La réceptionniste, avec des algorithmes qui ont été développés, peut déjà orienter davantage la
personne au bon professionnel. On parlait d'algorithmes, je suis très content
d'entendre ça.
Donc,
dès le début, il y a des algorithmes. La personne appelle pour telle chose. On
peut enseigner à la population de dire : J'appelle pour ajuster un
médicament, est-ce que je pourrais prendre un rendez-vous avec un pharmacien
direct?, plutôt que faire comme Dre Samson a vécu hier, je vais prendre
mon rendez-vous avec mon médecin de famille. Donc, c'est d'avoir des
algorithmes. Et ça, on peut même les mettre en ligne. La réceptionniste peut se
servir des algorithmes et travailler avec l'infirmière qui est à côté d'elle ou
l'IPS, et même le médecin, pour le diriger à la bonne place rapidement.
Je pense qu'il y a
des solutions qu'on doit discuter avec nos... en cogestion avec nos médecins
responsables, nos médecins. Et il y a plein de solutions que je vois. Comme je
vous dis, on a deux projets pilotes actuellement et on est convaincus qu'entre
autres l'ajustement de médicaments va passer directement au pharmacien, sans
passer par le médecin.
M. Derraji :
Bien, en fait, c'est justement... M. Delamarre, vous évoquez... Merci
d'être là, parce que c'est du concret. On parle d'indicateurs, mais, au bout de
la ligne, le souhait de tous les élus, c'est qu'on règle cette problématique
d'accès à la première ligne. Les moyens technologiques existent. Je ne veux
juste surtout pas qu'on passe à côté d'une opportunité.
J'aimerais bien... Je
suis curieux de savoir, ce projet pilote, il est où. Si vous avez des résultats
préliminaires à nous partager, si ce n'est pas secret, envoyez ça aux membres
de la commission. Parce qu'on n'a pas encore commencé l'étude détaillée, mais
ça va nous éclairer et nous donner des idées par rapport... comment on peut
vous aider au niveau du triage.
Parlons, justement, de
l'ajustement de médicaments. Je reviens à la patiente qui vous a appelée,
Dre Samson. Si, en amont, on avait cet algorithme, c'est un de moins dans
le réseau. Et un de moins, c'est des listes, et des listes, et des listes
d'attente. Donc, pensez-vous que le législateur doit vous guider par rapport à
ces algorithmes ou vous pouvez nous dire aujourd'hui : Chers élus, ce
n'est pas votre responsabilité, au niveau de la direction, on s'en occupe?
Comme ce que vous avez fait au niveau des ordonnances collectives. Il y avait
une directive au niveau du ministère. Après,
chaque région, hein, chaque région s'est adaptée en fonction du contexte local.
Est-ce que vous encouragez les élus, aujourd'hui, à aller dans le détail
du triage? Si c'est oui, donnez-nous des exemples. Si c'est non, dites-moi
pourquoi.
Mme Samson (Isabelle) : Juste pour
clarifier un élément, la patiente avait pris rendez-vous en ligne. Parce que, si elle avait appelé à la clinique, on
l'aurait aiguillée vers le bon professionnel, parce que, les pratiques d'accès
adapté que mon P.D.G. vient de vous énoncer, on les applique dans notre milieu.
Donc, la patiente n'aurait pas abouti dans mon horaire si elle avait
pris un rendez-vous via la secrétaire. Elle avait pris son rendez-vous en
ligne, ce qui a nécessité qu'on vienne ajuster par la suite.
Maintenant,
est-ce que le législateur devrait, comment dire, cadrer davantage les attentes,
les outils, les façons de travailler en accès adapté? À ce point ici, je vous
dirais, nous avons développé beaucoup d'outils au Québec dans les dernières années, beaucoup de connaissances en
accès adapté. Personnellement, je ne crois pas que les outils de triage ou les algorithmes de triage doivent passer par un
cadre législatif. Ce sont des pratiques. Par contre, que ce soit encouragé,
qu'on ait des guides provinciaux, qu'on ait des cadres de référence, je pense
que ça peut être très intéressant et puis ça peut nous donner des façons de
faire plus uniformes.
M. Derraji : Donc, un exemple, qu'on
encourage le gouvernement du Québec à mettre un cadre de référence pour le triage à l'image de ce qui a été fait au
niveau des ordonnances collectives, et qu'il y a une adaptation au niveau
de chaque région ou à la tête de chaque CIUSSS, est-ce que c'est une option
pour vous, et travailler sur des bonnes pratiques de triage?
Mme Samson
(Isabelle) : Bien, en fait,
il faudrait parler du libellé, là, parce que le triage... Je ne suis pas sûre
que j'adhère au terme «triage». C'est très... très complexe dans notre milieu,
là. Le triage est fait exclusivement par les infirmières. Donc, je pense que je
ne pourrais pas affirmer que je suis en accord avec ce que vous venez de dire,
mais je comprends...
M. Derraji : Oui. Vous êtes très
prudente, et je le vois depuis le début. Ce n'est pas grave. Et je n'essaie pas
de vous mettre des mots dans la bouche. Mais
je retire... Pas le mot «triage». Ce n'est pas une infirmière qui va le faire.
Moi, je pousse, le ministre sait très bien,
où je loge depuis hier, pour de la technologie derrière le triage, des
algorithmes automatiques. Je ne veux
pas mobiliser un professionnel. Je veux faciliter l'accès aux professionnels
sans mobiliser de professionnels en amont. Est-ce que je suis clair?
M. Delamarre (Michel) : Bien, M. le
député, peut-être juste, M. le député... Juste pour faire une petite nuance, je
pense qu'on comprend très bien ce que vous venez de nous dire. C'est juste que
le terme «triage», dans notre jargon, à tout le moins, réseau, amène quand même
des protocoles et des professionnels dédiés à ce type d'activité de triage, qui est comme une activité spécifique en soit.
Mais on comprend très bien. Dans le fond, c'est d'être sûr qu'on va bien analyser le besoin de la
personne pour le diriger directement au bon professionnel à partir
d'algorithmes. Je n'utiliserais pas le mot «triage» mais davantage...
M. Derraji : Gérer la porte
d'entrée.
M. Delamarre (Michel) : ...justement.
M. Derraji : Gérer la porte d'entrée
au système. O.K. Gérer la porte d'entrée.
M.
Delamarre (Michel) : Tout à
fait. C'est juste que le triage, c'est le mot réservé à une activité très
spécifique pour laquelle les professionnels sont mobilisés. Puis le triage en
soi n'atteindrait peut-être pas l'objectif que vous souhaitez, qu'on
souhaite, tout le monde, mais davantage une bonne évaluation du besoin de la
personne et le diriger vers le bon
professionnel dès le premier contact avec ce professionnel-là. Ce que je vous
disais tantôt, premier contact, le bon professionnel, c'est ce qu'on
recherche, avec toutes sortes d'algorithmes et d'outils qui vont nous permettre
d'y arriver, incluant la prise de rendez-vous directement bien faite, soit par
téléphone ou en ligne.
M. Derraji : O.K. Donc, on se...
• (12 h 20) •
Mme Samson (Isabelle) : Tout à fait.
Si ce que vous proposez, c'est un outil basé sur l'intelligence artificielle, en ligne, qui permettrait aux
patients d'être orientés, grâce à cette intelligence-là, vers le bon
professionnel en ligne, assurément que ça aurait empêché ma patiente de
se retrouver dans mon horaire cet après-midi. Ça aurait été bon pour la patiente, ça aurait généré de la capacité pour moi,
comme médecin de famille. Donc, ça, oui, c'est un besoin, assurément.
M. Derraji :
Vous avez très bien compris, et c'est une très bonne réponse. Dernière...
Le Président (M. Provençal)
: 30 secondes.
M.
Derraji : 30 secondes.
Dernière. Vous êtes médecin de famille. L'accès à la première ligne, vous le
voyez comment? Uniquement réservé aux médecins de famille ou bien, maintenant,
2022, c'est accès à n'importe quel professionnel de la santé qui peut répondre
aux besoins?
Mme Samson
(Isabelle) : C'est clair que
c'est la deuxième option. On est des équipes. C'est comme ça qu'on travaille, nous, dans nos milieux de travail aussi,
et les patients ont accès à la personne qu'ils doivent voir, au moment
où ils doivent le voir.
M. Derraji : O.K. Merci à vous deux.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le député. Nous poursuivons avec le député de
Rosemont.
M.
Marissal : Merci, M. le
Président. Oui. Dre Samson, M. Delamarre, merci d'être là. Je vais
faire court parce que je n'ai pas
beaucoup de temps. Dre Samson, 700 médecins, vous avez dit, dont vous avez
la... bon, qui sont sous votre supervision, je vais dire ça comme ça.
C'est ça? Ce sont des omnis, ça? Pas tous?
Mme Samson (Isabelle) : 350 médecins
de famille puis 350 spécialistes.
M. Marissal : O.K. Vous avez entendu
la FMOQ comme moi. Vos omnis sont nécessairement membres de la FMOQ, puis vous
aussi, si vous êtes omni. Je ne veux pas vous mettre sur le «hot seat», là,
mais vous n'êtes pas en train de vous faire
des amis dans votre ordre professionnel, là. Comment on va gérer ça, là, pour
les faire embarquer, mettons, là,
qu'on s'entend sur une façon d'ouvrir la première ligne? Vous avez des bonnes
idées. Je ne suis pas sûr que je les partage toutes, mais ça, ça n'a pas
d'importance. Comment on fait embarquer les médecins de famille là-dedans?
Mme Samson (Isabelle) : Bien, à mon
sens, c'est d'abord en ouvrant le dialogue. Puis c'est un peu l'objectif de
notre mémoire, aussi, de mentionner que, pour nous, on doit travailler. Il est
crucial d'avoir la mobilisation et la collaboration des médecins de famille à
l'échelle régionale.
Mais, vous le mentionnez très bien, c'est clair
que les dynamiques provinciales influencent notre capacité de mobiliser les gens sur le terrain. On a de grands
défis en première ligne. Pas plus tard qu'hier, j'avais la chance de faire
un Zoom avec les 1 000 médecins de la région de Québec qui sont sous
la responsabilité du DRMG, et c'est ce que je leur ai dit. Je leur ai dit que
je souhaitais qu'on puisse continuer à avancer ensemble malgré la situation
qu'on vit présentement puis le climat qui est peut-être plus difficile.
Mais je suis
convaincue qu'en ramenant la notion de la décentralisation avec l'«empowerment»
qu'on propose, des médecins de famille, pour qu'eux-mêmes puissent avoir accès
à leurs données pour s'autogérer avant même qu'on puisse venir leur demander de faire autrement,
pour moi, ça, c'est quelque chose qui est très porteur. Puis c'est pour ça
qu'on a voulu vraiment le camper, là, en début de présentation.
M. Delamarre (Michel) : Peut-être,
M. le député, j'ajouterais...
M. Marissal : Rapidement, s'il vous
plaît.
M. Delamarre (Michel) : Oui.
Regardez, rapidement, ce que j'ajouterais, on l'a dit dans notre mémoire, c'est
une responsabilité partagée du gouvernement et de la FMOQ pour tout ce qu'on
vient de dire, et aller chercher l'adhésion et la mobilisation des médecins.
Tous les médecins ont avantage, je crois, dans leur milieu propre à eux, de leur GMF, comme nous, DRMG et cogestionnaires,
d'avoir les données qu'il faut pour être en mesure de témoigner, justement, de la performance de notre réseau et
surtout travailler à améliorer notre offre de services intégrée de première
ligne.
M. Marissal : Je pense que je n'ai
plus beaucoup de temps. Une minute, quand même. Mme Samson, un Zoom avec
1 000 médecins, ça, ça doit être un record du monde, ça. Je ne suis
pas sûr que je vous envie beaucoup.
Mme Samson (Isabelle) : Ils
travaillent très fort puis...
M.
Marissal : Page 5 de votre
mémoire : «Bien que nous soyons en accord avec les intentions du
gouvernement, nous sommes préoccupés des impacts potentiels de ce projet
de loi sur la mobilisation médicale et le recrutement de futurs médecins de famille.» On l'a beaucoup
entendu. Il vous reste à peu près 25 secondes pour commenter là-dessus.
Mme Samson (Isabelle) : Bien, c'est
clair que la valorisation de la médecine de famille, c'est crucial, là. Il nous
faut des médecins de famille. Il faut qu'ils puissent travailler avec tous les
outils nécessaires pour pouvoir bien soigner leurs patients. Notre travail, c'est
d'essayer de les appuyer le mieux possible et de travailler en cogestion puis en collaboration avec eux, et à tous les niveaux de
notre système. Tous les gestes de collaboration qui pourront être posés dans
cette dynamique de cogestion et de partenariat, ça va nous aider, sur le
terrain, à faire notre travail.
M. Marissal :
Merci.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci
beaucoup, M. le député. Alors, on termine cet échange avec le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau :
Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour votre présentation. Je vais
continuer sur la même thématique. Vous parlez, dans votre mémoire, des
retraites qui s'en viennent, 74 médecins. La FMOQ nous a dit qu'avec un
projet de loi comme celui-là on va accélérer les prises de retraite puis on va
avoir plus de difficultés à attirer des gens à la médecine de famille. Comment
est-ce qu'on s'en sort? Je vous entends sur l'idée qu'il faut les mobiliser,
mais ce qu'ils nous disent, c'est : Il n'y a rien de plus démobilisant que
le projet de loi actuel. On s'en sort comment?
M. Delamarre
(Michel) : Peut-être, je vous ferais une petite parenthèse avant. Moi,
je pense, au contraire, que, dans la mesure où on a de la donnée pertinente
pour faire les bons choix et témoigner de la performance de notre offre de
services de première ligne... moi, je pense que c'est très encourageant pour
les professionnels et les médecins qui y travaillent. Je pense que le plus dur
actuellement, c'est de ne pas avoir cette donnée-là... et de nous permettre,
justement, de travailler à l'amélioration, et axer sur les bonnes pratiques, et
témoigner qu'on a mis en place l'accès
adapté de façon optimale, qu'on a mis en place les leviers, les outils qu'on
avait besoin pour un meilleur accès à la population. Moi, je pense que
ça peut faire peur au départ, mais je suis convaincu que la donnée bien
utilisée, en cogestion avec les médecins, va être davantage une valeur ajoutée
pour tout le monde.
M. Arseneau :
Je vais vous poser une question un peu délicate, mais ce qu'ils semblent
sous-tendre, le projet de loi puis certains propos qu'on a entendus, dont le
premier ministre, c'est qu'il y a des médecins qui ne font pas un bon travail — c'est
sa citation — qui
ne travaillent pas suffisamment, qui ne sont pas assez productifs. Est-ce que
c'est votre point de vue?
M. Delamarre
(Michel) : Bien, moi, je vais vous dire, je vais le reprendre
différemment. Je vous le disais tantôt d'emblée, on n'a rien à envier, à
travers le monde, de la compétence de nos médecins et de nos professionnels. On
est très bien...
M. Arseneau :
On ne parle pas de compétence, on parle de productivité, là, à l'heure
actuelle.
M. Delamarre (Michel) : Oui, mais j'en viens à ça. Ce que me disent,
justement, les professionnels interdisciplinaires, c'est, justement, la
façon dont on s'organise et la façon dont on peut rendre accessibles les outils
qu'on a et les leviers qu'on a pour faire une bonne organisation de services.
La compétence est là...
M. Arseneau :
Maintenant, vous parlez beaucoup... Je m'excuse, je manque de temps. Vous
parlez beaucoup des médecins. Vous n'avez pas parlé d'un modèle qui nous a été
présenté, notamment, par les IPS, Archimède. C'est sur votre territoire. Est-ce
que je me trompe?
M. Delamarre
(Michel) : Oui, tout à fait. Bien, c'est ce que je faisais référence un
petit peu tantôt...
M. Arseneau :
Pourquoi est-ce qu'on ne fait pas une trentaine d'Archimède sur le territoire
puis qu'on règle une bonne partie du problème? Parce qu'on parle beaucoup
d'interdisciplinarité, mais on a juste entendu parler des médecins.
M. Delamarre
(Michel) : Oui, mais... Bien, je pense qu'on a parlé beaucoup de
l'interdisciplinarité et de l'importance des
autres professionnels. Et Archimède va clairement dans le sens qu'on a... qu'on
vous dit depuis tantôt et qu'on a mis dans notre...
M. Arseneau :
Reproduire le modèle Archimède.
M. Delamarre
(Michel) : Bien, en fait, Archimède, c'est... je vais laisser Isabelle
en parler pour les quelques minutes, là, je passerais la parole, mais ça va
exactement dans le sens qu'on vous dit.
Mme Samson
(Isabelle) : On a plusieurs modèles actuellement qui sont en cours
d'étude sur notre territoire. Il y a le projet Oscar, qui vise à mettre à
profit l'ensemble des professionnels du GMF pour prendre en charge les patients
des médecins qui s'en vont à la retraite. Donc, pour éviter de remettre les
patients sur le guichet quand le médecin prend sa retraite, on demande à
l'équipe interprofessionnelle : Pouvez-vous prendre en charge globalement
les patients et demander, si requis, la contribution ponctuelle d'un des
médecins du groupe? Et ça fonctionne. Maintenant, on va
avoir les données plus formelles au mois de juin, donc on ne peut vous les
faire parvenir pour l'instant.
Puis pour ce
qui est d'Archimède, c'est vraiment un modèle qui est plus révolutionnaire. Ça
fait que je pense qu'on peut voir l'ensemble des modèles qu'on développe
sur un continuum.
M. Arseneau : ...faire une
minirévolution, allons-y.
Mme Samson (Isabelle) : Absolument.
Mais je pense à un continuum. Puis, pour offrir les modèles...
M. Arseneau : Je n'ai plus de temps,
malheureusement. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, je remercie Dre Samson et
M. Delamarre pour votre contribution. J'en profite en même temps pour vous féliciter, M. Delamarre, pour votre
parcours professionnel. C'est... Vous êtes vraiment un modèle pour bien
des gens. Merci beaucoup. Alors, j'invite les membres à demeurer en place...
Oui?
M. Marissal : Vous permettez?
Le Président (M. Provençal)
: Oui.
M. Marissal : Bien, je veux faire
amende honorable, juste «for the record», comme on dit en latin. Là, tout à
l'heure, j'ai dit à Dre Samson que son ordre ne serait pas heureux, je
voulais dire le syndicat. Alors, juste pour ne pas qu'on me le reproche un
jour. Parce que la langue m'a fourchu, dans le peu de temps que j'avais. Alors,
voilà.
Le Président (M. Provençal)
: Je suis convaincu que Dre Samson avait très bien
compris la nuance.
M. Marissal : Je voudrais
éviter d'être mal cité.
• (12 h 30) •
Le
Président (M. Provençal)
:
Pas de problème. Alors, j'invite les membres à demeurer en place. Merci
beaucoup à vous deux.
Organisation des travaux
Avant de suspendre les travaux, nous allons
mettre aux voix les motions d'organisation des travaux de la commission.
Motion proposant de constituer
un comité directeur
La... prorogation, excusez-moi, de la première
session de la 42e législation a mis fin à tous les ordres et à tous les
mandats qui avaient été adoptés par la commission. En conséquence, je vous
propose, afin de créer le comité directeur de la commission, la motion
suivante :
«Que la Commission de la santé et des services sociaux, conformément à l'article 4 des Règles de
fonctionnement, constitue un comité directeur composé du président, de
la vice-présidente [ainsi que] de la secrétaire.»
Mise aux voix
Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Provençal)
: Merci.
Motion concernant les
frais de repas
...que la commission se réunira parfois à
l'heure des repas en séance de travail et également à l'occasion des réunions
de son comité directeur;
Je vous propose la motion suivante :
«Que les repas pris à l'occasion des réunions du
comité directeur et des séances de travail soient payés à même le budget de la
commission.»
Mise aux voix
Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix : Adopté.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci beaucoup. Je
vous remercie.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
14 heures. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 12 h 31)
(Reprise à 14 h 05)
Le
Président (M. Provençal)
: Bonjour à tous.
Bienvenue à la Commission de la santé et des services sociaux.
La commission est réunie afin de poursuivre les
consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi
n° 11, Loi visant à augmenter l'offre de services de première ligne par
les médecins omnipraticiens et à améliorer la gestion de cette offre.
Auditions (suite)
Cet après-midi, nous entendrons par
visioconférence les groupes suivants : le Centre intégré de santé et de
services sociaux du Bas-Saint-Laurent et le Collège québécois des médecins de
famille. J'en profite pour rappeler que le
Centre intégré de santé et des services sociaux du Bas-Saint-Laurent avait
déposé sur Greffier un mémoire, bien entendu,
et ils ont déposé aussi un PowerPoint. Alors, c'était pour en informer
l'ensemble des membres de la commission.
Je souhaite
maintenant la bienvenue aux représentants du Centre intégré de santé et
services sociaux du Bas-Saint-Laurent. Vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons aux échanges avec les membres
de la commission. Alors, je vous cède la parole.
Centre intégré de santé
et de services sociaux du Bas-Saint-Laurent
(CISSS—Bas-Saint-Laurent)
Mme Malo
(Isabelle) : Bonjour.
Bonjour, M. le Président, distingués membres de la Commission de santé et de
services sociaux. Alors, je me présente, je suis Isabelle Malo,
présidente-directrice générale du CISSS du Bas-Saint-Laurent, et je vais vous présenter les collègues qui
m'accompagnent aujourd'hui. Donc, je vais commencer par Dr Jean-Christophe Carvalho,
président-directeur général adjoint de notre établissement, de même que
Dr Simon Delisle, directeur des services professionnels adjoint du
CISSS, ainsi que Dr Éric Lavoie, qui est président du département régional
de médecine générale. Et c'est principalement Dr Lavoie qui aura le
privilège de vous faire la présentation cet après-midi.
Alors, c'est pour nous un grand privilège de
pouvoir être des vôtres. Et on vous remercie de l'invitation afin de vous
présenter, en toute humilité, mais également parce que nous en sommes très
fiers, notre projet d'accès à la première ligne, dans le fond, qui vise à
faciliter une meilleure prise en charge, particulièrement pour les personnes
qui sont inscrites au guichet d'accès aux médecins de famille, donc qui sont en
attente de se voir offrir la possibilité d'être inscrits auprès d'un groupe de
médecine familiale.
Ce projet-là a pris racine en 2019, parce que
nos équipes médicales cliniques sur le terrain ont réalisé que, malgré le fait
que, dans la région du Bas-Saint-Laurent, 90 % des citoyens de notre
région ont accès à un médecin de famille, il n'en demeure pas moins qu'il reste
toujours un certain pourcentage de personnes qui ne se voient pas attribuer un
médecin de famille. Parce que, vous le savez, il y a continuellement des
départs, des arrivées, une fluctuation dans les effectifs médicaux, et on doit
aussi considérer le fait qu'on est en manque de médecins. Donc, on a trouvé des stratégies qu'on veut vous partager
cet après-midi pour faciliter cet accès-là et surtout répondre aux besoins
de nos citoyens.
On va particulièrement vous parler, évidemment,
d'accès, mais on va également vous parler de pertinence, d'évaluation des
besoins avant orientation, de filtre dans l'accès. Et on pense qu'avec ces
stratégies-là qui sont extrêmement
intéressantes, et on va vous partager également des résultats, vous allez voir
qu'il y a possibilité, malgré le fait que 100 % des citoyens
n'aient pas accès à un médecin de famille, qu'on soit en capacité de leur
donner une excellente réponse à leurs besoins. Alors, sans plus tarder, je
laisse la parole à Dr Lavoie.
M. Lavoie
(Éric) : Alors, bonjour à
tous et à toutes. Merci de nous inviter. Alors, vous avez reçu deux documents,
un mémoire et un PowerPoint. On croyait
pouvoir projeter le PowerPoint, mais finalement on sait que vous l'avez en
main. On va le suivre ensemble, et puis ça va être le mot d'entrée en
soutien avec ce PowerPoint.
Alors, on va
parler du Guichet d'accès de première ligne, c'est le GAP, là, au Bas-Saint-Laurent. On va parler du constat de l'accès médical puis de la nécessité
et de la pertinence. On va vous parler du projet bas-laurentien, évidemment,
avec ses missions, ses objectifs, le guichet lui-même puis les données et les
résultats.
On a fait des constats que... Le contexte des
ententes actuellement, c'est que l'accès médical est fondé sur l'équation du
taux d'assiduité. Le taux d'assiduité, c'est ce qui régit actuellement, je
dirais, la motivation à faire des bonnes visites.
Une bonne visite, c'est une visite à un patient qui est inscrit. Alors, on nous
incite à inscrire des patients et on
nous incite aussi à avoir de la fidélisation envers ces patients-là qui sont
inscrits. Ça, c'est le numérateur de l'équation.
Le dénominateur, c'est les visites qui se font
ailleurs, pas dans le même groupe de médecins puis pas auprès du médecin, puis
ces visites-là sont comme un peu dévalorisées. Alors, si on veut être un bon
médecin ou une bonne clinique, il faut valoriser le numérateur.
Si
vous remarquez, dans cette équation-là, il n'y a pas de place pour les
orphelins, puis les orphelins sont relayés à solliciter des services ou des
rendez-vous qui ne sont pas à l'intérieur de cette équation-là. Alors, on pense
que c'est un équilibre qui est en faveur des inscrits et puis que les orphelins
sont privés de services. C'est une bonne équation qui a fait ses preuves pour
les inscrits. Il reste maintenant à trouver de la place pour les orphelins.
• (14 h 10) •
Dans le PowerPoint,
la diapo suivante, on met en lumière le fait qu'il y a maintenant une
disparité. Il y a deux sortes de clientèles.
Il y a la clientèle inscrite, qui bénéficie maintenant, au Québec, de 85 %
d'assiduité, puis un bon nombre de
patients qui sont non inscrits, qui, eux, il faut l'admettre, ont 0 %
d'assiduité. Alors, c'est ça qu'on veut corriger et adresser.
La diapo suivante, on
parle de la pénurie de médecins. Alors, il faut admettre que plus il y a de
pénurie de ressources, plus on doit adresser
une pertinence de la consommation si on veut donner un service au plus grand
nombre... (panne de son) ...bien équilibré.
La
diapo suivante, c'est que, pour adresser la notion de pertinence, on a choisi
d'introduire la notion de filtre. On met un filtre entre la demande et
l'offre, puis pour bien capter les demandes et bien aiguiller la suite.
La diapo suivante,
c'est un schéma où, finalement, on met en relation les demandes et les offres.
Puis les offres sont de nature médicale et de nature non médicale. Alors, la demande,
c'est un patient ou un citoyen qui choisit
de téléphoner, parce qu'on leur offre un numéro de téléphone, les patients qui
n'ont pas de médecin de famille, puis, dans son esprit, sent le besoin de
parler ou d'avoir une relation thérapeutique avec un médecin de famille.
Alors là, ce téléphone-là est capté par une centrale, le GAP, le Guichet
d'accès de première ligne. C'est là que se situe le filtre de pertinence, avec du personnel administratif et du personnel
infirmier. Là, c'est à ce moment-là que la demande est appréciée puis, finalement, bien filtrée et
bien aiguillée. Et puis c'est là qu'on l'achemine soit à une offre médicale
ou une offre non médicale.
Le projet
bas-laurentien, si je vais à la diapo suivante et l'autre après, c'est que,
dans le fond, on voulait offrir à la clientèle, évidemment, un accès adapté et
étendu aux services de proximité, puis évidemment en adéquation avec leurs
besoins.
La diapo suivante
mentionne qu'on veut favoriser un accès équitable aux services de première
ligne pour la population... (panne de son) ...on veut garantir la pertinence
des demandes acheminées en clinique médicale puis on veut optimiser
l'utilisation des ressources.
La
diapo suivante mentionne le parcours temporel qu'on a suivi pour ce projet-là,
qui s'étend du printemps 2019 jusqu'à
aujourd'hui. C'est un projet pilote qu'on a déposé... La demande... C'est un
projet pilote de deux ans pour lequel on a eu une acceptation puis qui
porte maintenant ses fruits.
La
diapo suivante parle des trajectoires des appels. Alors, on a une centrale
d'appel avec un numéro de téléphone unique
pour lequel... Ce numéro de téléphone là est fourni à la patientèle, et puis
les patients, à ce moment-là, appellent quand ils pensent avoir besoin d'un médecin de famille. L'évaluation du
besoin se fait par les agentes et des infirmières. Puis vous voyez que
la case du bas, c'est la gamme de services étendue qu'on peut leur offrir.
Il
faut savoir que le système de santé, c'est un système qui est très complexe,
puis, quand on n'est pas un initié ou même quand on est un initié, c'est
difficile de s'y retrouver. Puis on pense que le fait d'avoir un accompagnement
pour choisir le bon service, ça nous permet d'offrir le meilleur service à la
clientèle.
La diapo suivante, on
va parler de l'évolution. Alors, quand on regarde à l'autre diapo, c'est qu'on
se rend compte que, dans 100 % des cas, les patients qui veulent avoir ce
service-là de médecine de famille, quand on les filtre de façon appropriée,
bien, finalement, il y a... dans 50 % des cas, on réussit à trouver une
offre alternative à une offre médicale. Puis on a de très hauts taux de succès
ou de satisfaction à ça. Alors, la patientèle appelle, puis dans 50 % des cas, effectivement, c'est un besoin
qui nécessite la visite d'un médecin, puis dans la moitié des cas, l'autre
50 %, c'est une autre offre. Par exemple, avec le projet de loi
n° 31, les pharmaciens font une bonne part du travail, les IPS et
l'interprofessionnalisme.
La diapo suivante,
c'est pour faire, je dirais, la gestion entre l'offre et la demande. Au début
du projet, le Bas-Saint-Laurent comporte 10 % de non inscrits, puis on
pensait qu'il allait générer une demande de 10 %, et on avait
demandé à nos GMF et nos cliniques de dégager une offre de 10 %
correspondante.
Ce qu'on se rend
compte, à la diapo suivante, c'est que, dans le fond, le profil de consommation
des patients qui n'ont pas de médecin de
famille est différent d'un profil de consommation qui ont un médecin de
famille. Ceux qui sont inscrits à un
médecin de famille consomment 1,9 visite par année, ceux qui sont non
inscrits génèrent 0,6 appel et nécessitent
0,3 visite, c'est-à-dire que, par strate de 1 000 patients, ça
génère 600 appels, puis, par strate de 1 000 patients, ça
génère 300 visites auprès des médecins de famille.
Quand
on regarde, au final, la demande réelle par rapport à la force de travail
totale des médecins en première ligne
au Bas-Saint-Laurent, on se rend compte que ce que doivent dégager les
médecins de famille oscille plus autour de 1,5 % à 2 %, et non
pas 10 %, comme c'était anticipé.
L'avant-dernière
diapo, on parle de satisfaction globale. La satisfaction globale auprès du
guichet est très intéressante. On a une satisfaction de plus de 92 %. Les
gens sont très satisfaits d'avoir une écoute rapide. La journée même, on répond
au téléphone pour eux s'ils appellent entre 8 heures et 18 heures.
Sinon, en soirée, on capte l'appel, on
retourne l'appel dès le lendemain. Alors, à l'intérieur de 24 heures,
l'appel est répondu, puis, à l'intérieur de deux semaines, le service
est rendu. Les services sont rendus avec des délais plus ou moins rapprochés,
ça dépend de la nature de la demande. Et puis, si la demande est une demande
pressante, on doit offrir un service plus rapide, et, moins pressante, on offre
un service qui est un peu étalé dans le temps.
Alors, ça complète le
soutien qu'on avait avec le PowerPoint, et puis on est prêts à recevoir... à
être en échange avec vous.
Le Président (M. Provençal)
: Bien, je vous remercie beaucoup pour cette présentation. Nous allons
débuter, effectivement, cet échange avec M. le ministre. À vous.
M. Dubé :
Merci beaucoup, M. le Président. Alors, Mme Malo, bonjour. Content de vous
voir dans notre coin de pays. J'espère que la route était belle pour venir du Bas-Saint-Laurent, ce n'était pas trop enneigé. Alors, merci de...
Mme Malo (Isabelle) : Bien, on est au Bas-Saint-Laurent, M. le ministre. On n'a pas bougé du
Bas-Saint-Laurent, nous, aujourd'hui.
Puis, de toute façon, avec la météo qu'on avait ce matin, ça aurait été
laborieux de se rendre à Québec.
M. Dubé :
Bon, bien, c'est pour ça. Vous me rassurez, là. Je me demandais si vous aviez
pris la route. Alors, puis à vos collègues, Dr Lavoie, M. Carvalho,
M. Delisle, merci beaucoup d'avoir pris le temps d'être avec nous.
Moi, je vous avais
rencontrés l'automne dernier, quand j'ai entendu parler de votre projet, parce
qu'en fait, quand... Je ne me rappelais pas
que ça remontait déjà à 2019. Je sais qu'on s'était parlé au téléphone au tout
début de votre projet, puis, quand je
suis passé par le Bas-Saint-Laurent l'automne dernier, je suis allé vous voir.
Puis c'est sûr que, là, il y a
beaucoup de monde qui parle de vous, là, puis pour les bonnes raisons, je
pense. Alors, je veux vous féliciter d'avoir eu le leadership de mettre ce projet-là, puis je pense que le ministère
a bien fait d'investir dans l'appui à ce projet-là qui, à mon sens...
même plus projet pilote, dans ma tête, là. Pour moi, c'est déjà parti, puis on
oublie ça, la partie du projet pilote, là. La machine est partie.
Deux
choses que j'aimerais vous demander pour que les gens... Je vais essayer de ne
pas parler aujourd'hui parce que je veux vous donner le temps maximum de
répondre à... expliquer un peu ce que vous faites. La personne qui prend
l'appel... Moi, j'ai rencontré, là-bas... On appelait des agents administratifs
ou, des fois, des infirmières. Dites-moi c'est qui qui prend cet appel-là pour
donner des... les gens comprennent qu'est-ce qu'il est, le GAP, là, comment ça fonctionne. C'est qui qui... Physiquement, vous
avez combien de personnes? Juste me parler un peu du processus de... on ne veut pas l'appeler triage, là... de filtre,
vous l'avez appelé le filtre. C'est qui qui fait ça? Puis vous êtes combien de
personnes pour la grande région de... c'est quoi, Rimouski, Rivière-du-Loup, en
gros?
Mme Malo
(Isabelle) : Le Bas-Saint-Laurent au complet.
M. Dubé :
Le Bas-Saint-Laurent au complet. Bon.
Mme Malo (Isabelle) :
Le Bas-Saint-Laurent au complet. Donc, je vais laisser Dr Lavoie.
M. Dubé :
Alors, vous avez combien de personnes? Puis c'est quoi, leurs qualifications?
C'est des infirmières? C'est quoi? S'il vous plaît.
M. Lavoie
(Éric) : Pour le Bas-Saint-Laurent au complet, il y a
15 000 patients sur le GAMF, hein, il y a 15 000 patients
qui se sont inscrits au GAMF. Pour ces 15 000 patients-là, ça
nécessite trois agentes administratives, c'est-à-dire trois secrétaires qui
répondent à l'appel. Alors, la personne qui répond à l'appel en premier, c'est
une secrétaire. Elle prend les coordonnées.
Elle s'assure que les coordonnées coïncident avec ce qui est dans le GAMF, que
le patient n'a pas de médecin de famille,
puis prend la nature du besoin. Et, à son niveau à elle, parfois, elle est en
mesure de soit aiguiller tout de
suite ou, si ça nécessite un jugement clinique, à ce moment-là, l'appel est
basculé à des infirmières cliniciennes. Il y a quatre infirmières
cliniciennes.
Les
temps d'appel pour les secrétaires, c'est à peu près 10 à 12 minutes par
appel, puis le temps d'appel pour les infirmières
cliniciennes, le temps de faire leur jugement ou d'exprimer leur jugement
clinique, c'est à peu près 20 par appel.
M. Dubé :
Puis vous, vous avez 15 000 personnes qui sont sur le... donc,
15 000 patients orphelins pour... C'est ça que vous avez dit?
M. Lavoie (Éric) : Oui. Au
Bas-Saint-Laurent, sur 200 000 de population, il y a
20 000 personnes qui n'ont pas de médecin de famille. Sur les
20 000, il y en a 15 000 qui sont inscrits au GAMF.
M. Dubé :
Qui sont inscrits au GAMF. Les personnes reçoivent combien d'appels par jour à
peu près, là? En moyenne, c'est quoi?
M. Lavoie
(Éric) : Ça dépend. Si on calcule... Il faut le déterminer par rapport
à... On a reçu 9 000 appels la première année.
M. Dubé :
Première année. O.K.
• (14 h 20) •
M. Lavoie (Éric) : Oui, c'est ça. Ça fait que 9 000 appels la première année.
C'est ouvert cinq jours par semaine, de 8 heures jusqu'à
18 heures.
M. Dubé :
O.K. Puis là... Oui, allez-y. Excusez-moi.
M. Lavoie (Éric) : Au
début, c'est sûr qu'on a commencé... Dans l'implantation, c'était une gestion
de changement. Alors, on l'a fait MRC
par MRC, puis, petit à petit, le nombre d'appels a augmenté, là, pour être en
vitesse de croisière.
M. Dubé :
Puis la vitesse de croisière, on va dire, 900 à 1 000 appels par mois
peut-être, là, si je regarde ça, là. C'est à peu
près ça, là?
Mme Malo
(Isabelle) : On a même atteint 1 200, M. le ministre. On a
atteint 1 200, là, il y a quelques mois. En janvier... Encore en janvier,
tout dernièrement, on a fini le mois avec plus de 1 000 appels. Je
vous dirais que ça varie d'une journée à l'autre, entre 35 et 65 à peu près,
appels, là, qu'on reçoit.
M. Dubé :
Puis est-ce que vous êtes capables de... Parce qu'on a parlé beaucoup des...
autres personnes qu'on a rencontrées, que vous êtes capables de... On veut
étudier qui... On veut avoir des statistiques, qui appelle, ils appellent
pourquoi, etc., là. Vous me dites, vous avez
été capables d'éliminer 50 % des appels aux médecins pour qu'ils puissent
se concentrer sur d'autres clientèles. Est-ce que c'est toujours les mêmes gens
qui appellent ou vous êtes capables de voir si vous avez du renouveau dans les
gens qui viennent... qui augmentent le nombre de personnes qui s'intéressent
aux services?
M. Lavoie
(Éric) : Oui, tout à fait. Alors, on disait que, pour chaque strate de
1 000 patients, là, susceptibles d'appeler,
on a 600 appels qui se font dans l'année. Puis, parmi ces 600 là, ce n'est
pas... la majorité n'appelle qu'une seule
fois. Et puis les consommateurs qui consomment, qui... on parle de
consommateurs, mais, de citoyens qui appellent
plus qu'une fois, là, on en a quelques-uns, puis, ceux qui appellent trois,
quatre, cinq fois, on en a, là... on les compte... une dizaine, là.
M. Dubé :
O.K. Donc, c'est vraiment quelqu'un qui vient une et même peut-être, des fois,
deux fois par année, mais c'est vraiment quelqu'un qui a un besoin
spécifique, qui passe par vous puis que vous redirigez. Les gens...
Parlez-moi du Web.
Parce que, là, vous avez bien dit que les gens appellent, mais est-ce que votre
filtre peut fonctionner avec le Web ou, en ce moment, vous êtes limités au
téléphone?
M. Lavoie
(Éric) : Actuellement, on a choisi la voie téléphonique. Il faut
savoir qu'il n'y a aucune clinique qui est branchée, là, pour... bien, toutes
les cliniques sont branchées au RVSQ, au système de rendez-vous québécois, et au hub, c'est-à-dire l'orchestrateur. Les cliniques
sont toutes branchées. Puis notre personnel du GAP, là, utilise ces
plateformes-là pour redistribuer les appels qu'ils reçoivent, là. Les
rendez-vous sont... Les appels sont captés puis sont retransférés sous forme de rendez-vous via le Web. Sauf que le Web
est, actuellement, aux yeux de la population... il est occulte aux yeux de la
population. La population ne voit pas les plages qui sont disponibles. Parce
que nous, on croit à la pertinence
puis on croit, justement, à la notion de filtre. Alors, c'est le personnel soit
de l'urgence, via les P4, P5, des infirmières d'urgence qui utilisent le
système du Web ou le GAP, c'est-à-dire le personnel qui a déjà fait une portion
de triage et de préévaluation. À ce
moment-là, on est en mesure d'utiliser nos ressources Web pour prendre les
plages qui sont... que les médecins disponibilisent.
M. Dubé :
O.K. Mais je veux juste bien comprendre, là, parce que c'est important, là,
les... Il y a beaucoup de Québécois qui
disent : Quel genre de magie qu'ils font à Rimouski, là? Je veux juste
bien le comprendre. Une personne appelle, elle va le faire par
téléphone, elle va parler à un agent administratif ou à une infirmière qui va
dire : Oui, dans votre cas, vous avez besoin de voir un médecin. Cette
personne-là va entrer sur... on va l'appeler l'intégrateur ou le hub, pour aller voir sur RVSQ s'il y a un
rendez-vous de disponible. C'est bien ça? Ce n'est pas la personne qui a appelé
qui rentre dans le système, donc, c'est l'infirmière qui fait le travail. C'est
ça? Et est-ce qu'elle lui confirme au téléphone qu'elle a un
rendez-vous?
M. Lavoie
(Éric) : Alors, ce qui se passe, c'est qu'on a demandé à nos GMF de
nous offrir des plages de rendez-vous. On
capte l'appel, puis, nous, là, l'infirmière ou la secrétaire place une demande
au GMF. Cette demande-là, une fois qu'elle est placée auprès du GMF,
c'est le GMF qui rappelle la personne. Et puis...
M. Dubé : Directement
le patient.
M. Lavoie
(Éric) : Oui. L'évaluation se fait par le GMF sur le délai qui doit
être offert au patient. Alors, par exemple, si c'est un formulaire, on sait que
ce n'est pas pressant, ça peut attendre une semaine. Si c'est une infection qui
donne une souffrance, bon, bien là, le rendez-vous peut se donner la journée
même ou le lendemain.
Alors là, hier,
Dre Mylaine Breton vous a parlé de l'accès adapté. Alors, nos GMF, au
Bas-Saint-Laurent, ont appliqué les principes d'accès adapté et, dépendamment
de la nature du problème, sont en mesure de bien répartir, on appelle ça lisser
l'offre, de bien répartir dans le temps. Alors, dépendamment de la nature du
problème, soit le patient est placé tout de
suite, a un rendez-vous la journée même ou peut être placé, maximum... C'est
souvent, là, maximum neuf jours qu'on parle, là.
M.
Dubé : O.K. Ça fait que ce n'est pas toujours à
l'intérieur de ce qu'on appelle, des fois, un 36 heures. Il y a une
évaluation de l'importance du besoin pour, des fois, le placer, puis le patient
est d'accord d'attendre une semaine pour un formulaire de CNESST ou quelque
chose comme ça. O.K. Je comprends.
Parlez-moi
de votre GAMF, parce qu'on en a vu... Puis là peut-être que... Je ne sais pas
si vous connaissez ces statistiques-là, mais il y a plusieurs personnes dans
votre groupe, là, qui ont l'air d'être férues de statistiques. Ça a été quoi, l'augmentation de votre GAMF depuis
deux ans, s'ils regardent, là, qu'est-ce que c'était il y a deux ans? Là,
vous dites que vous avez à peu près
15 000 Québécois, dans votre région, qui sont en attente. Est-ce
qu'il y a une croissance importante?
M. Lavoie (Éric) : Bien, si on recule dans
le temps, là, on a eu un GAMF... Excusez, j'utilise le mot «GAMF», là,
mais c'est le guichet d'accès en médecine de famille. Alors, on avait un GAMF à
12 000 personnes. On a eu ça quelques années. Bien, c'était
9 000, ça a monté à 12 000, puis finalement, depuis quelques mois,
c'est rendu à 15 000. Par contre, au Bas-Saint-Laurent, si on... tu sais,
mettons, on prend le portrait du 1er janvier 2020, le portrait du 1er janvier 2021, il y a toujours
12 000 sur le GAMF, sauf qu'entre les deux il y a eu
8 500 inscriptions. Alors, il y a un renouvellement de la
clientèle. Les médecins de famille, au Bas-Saint-Laurent, inscrivent
l'équivalent d'à peu près 600,
700 patients par mois, hein, sauf que le GAMF, c'est un portrait qui... Le
chiffre ne bouge pas beaucoup dans le temps. Il y a eu...
M. Dubé : C'est quand même incroyable, parce que le GAMF, si
je regarde à l'échelle du Québec, il a plus que doublé, puis vous, vous me dites que vous n'avez peut-être même pas eu
20 % d'augmentation dans deux ans. C'est ça que je comprends, là.
M. Lavoie
(Éric) : Oui. Bien, ça dépend de...
M. Dubé : Grâce
à...
M. Lavoie (Éric) : Oui. Ça dépend,
effectivement, de retraites, là. C'est pour ça que ça a augmenté un petit peu.
Mais finalement on réussit à inscrire...
M. Dubé : Retraites de médecins, vous voulez dire, par
exemple, d'omnis. Mais dites-moi une chose. Qu'est-ce qui peut... Ça, c'est vrai, puis je suis certain
que mes collègues, là, vont pouvoir continuer à poser des... Il me
reste, quoi, deux minutes? Parce que moi,
j'entendais que, lorsque les gens passent par votre service, ils sont
satisfaits. Vous m'avez même dit, l'automne dernier, qu'il y a des gens
qui n'en veulent pas, de médecin de famille. Ils trouvent qu'il y a un meilleur
service de passer par le GAP.
M. Lavoie
(Éric) : Oui. Non, mais il y a des anecdotes comme ça. On avait
offert... Il y avait un patient, par exemple,
que ça faisait huit ou neuf fois qu'il consultait. Alors, nous, quand ça fait
cinq fois qu'il y a une consultation, on déclenche un mécanisme. On
appelle un coordonnateur, qui, lui... On doit le prioriser, hein, pour avoir un
médecin de famille. Et puis il y a un patient, on lui a offert un médecin de
famille, il disait : Non, non, écoutez, j'ai un trop bon service avec le
GAP. Ça, c'est une anecdote, là, mais ça ne correspond pas à tous les patients.
Il y a des patients qui ont besoin de suivi puis qui veulent avoir le même professionnel.
Alors, dépendamment du besoin... Oui, pour
cette anecdote-là, là, mais finalement... Il y a certaines conditions que ça ne
fait pas de différence si c'est un médecin ou l'autre, mais il y a
certaines conditions qu'il y a besoin de continuité. Il faut avoir la
discrimination de tout ça.
M. Dubé : Non,
non. Puis je comprends. Puis c'est d'ailleurs ce qu'on veut, c'est qu'il y ait
une espèce... je vais le dire dans mes mots,
une combinaison et de prise en charge et de bons services pour ceux qui n'ont
pas un médecin. Ça, c'est l'avantage
du GAP, c'est d'avoir les deux. On va baisser le guichet d'accès, mais on peut
aussi bien servir ceux qui n'en ont pas encore. C'est ça que le GAP
permet de faire.
Est-ce que le fait
que quelqu'un passe par le GAP puis rencontre un... puis là je dis un médecin,
on reviendra aux autres professionnels, est-ce que ça permet, des fois, à des
médecins de dire : Bien, ça, ce patient-là, je vais le prendre en charge?
Avez-vous ces statistiques-là de ce que ça a contribué à... des fois, à aider
un médecin de famille de dire : Bien, celui-là, ce patient-là, je vais
essayer de le convaincre de venir dans ma liste de clientèle? Est-ce que ça
arrive?
M. Lavoie (Éric) : Les mesures qu'on a faites, les coups de sonde qu'on a faits, parce
qu'on fait de l'extraction, là, les extractions qu'on a faites sur
l'échantillonnage montrent qu'une fois sur 10 ça se... l'entrevue se solde par
une inscription.
• (14 h 30) •
M. Dubé :
Une fois sur 10.
M. Lavoie
(Éric) : Oui, une fois sur 10. Alors, via le mécanisme du GAP, dans
une fois sur 10, le patient va avoir un médecin de famille qui va...
l'inscription va se produire. Sinon, les autres mécanismes, là, qui sont
propres au GAMF fonctionnent toujours,
l'inscription en lot, l'inscription individuelle. Il y a d'autres mécanismes
qui font que les patients sont inscrits.
M. Dubé :
O.K. Je ne sais pas...
Mme Malo (Isabelle) : Si je peux me
permettre, M. le ministre...
M. Dubé : Oui,
allez-y, Mme Malo.
Mme Malo (Isabelle) : Oui. Je veux
juste... Justement, ce matin, j'avais une conversation avec un médecin
omnipraticien de la région, puis il me disait : Bien oui, quand je reçois,
justement, une référence du GAP, des fois, je vois la personne une fois, mais, des
fois, je vais la revoir deux puis trois fois. Même si je ne l'inscris pas, je
vais la voir deux, trois fois, parce que sa condition peut nécessiter que je
revoie cette personne-là dans le temps, sur quelques semaines ou quelques mois.
Donc, il y a vraiment quand même un suivi qui s'installe, là. Ce n'est pas de
dire : Vous avez un rendez-vous une fois, puis, après ça, c'est terminé,
retournez au GAP si vous voulez avoir une continuité de service. Dépendamment
de la condition clinique, il peut y avoir un certain suivi qui est offert.
M. Dubé : O.K. Ah! ça, c'est important.
Puis, comme... Merci, Mme Malo. Puis, comme il me reste quelques secondes,
je vais poser une question, puis peut-être que mes collègues pourront
continuer. Je voudrais juste bien comprendre l'importance des données, parce
que c'est une des pièces maîtresses du projet de loi. Vous avez accès à des
données pour être capables de faire ça? Comment vous... Vous avez collaboré
avec les médecins? Comment vous avez fait pour avoir les données de ceux qui
pouvaient en prendre plus, moins? Comment vous avez fait ça? Puis peut-être
que, si je me fais couper, bien, quelqu'un pourra...
Le Président (M. Provençal)
: Une réponse rapide, s'il vous plaît.
M. Lavoie (Éric) : On a des données
macro via les rapports, le rapport 8, entre autres, sur les GMF, les
données sur les PREM aussi. Alors, avec ces données macro là, on réussit à
faire de la planification, de la modélisation. Ensuite de ça, il y a le dossier
médical électronique qui nous permet... (panne de son) ...d'extraction et la
permission des GMF de faire un suivi. Et puis, bientôt, le hub, l'orchestrateur
va nous permettre, en temps réel, cette fois-ci, d'avoir une idée de l'offre et
de la demande, là.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
M. Dubé : O.K. On pourra
revenir là-dessus. O.K.
Le Président (M. Provençal)
: Nous poursuivons avec le député de Nelligan. À vous.
M. Derraji : Merci, M. le Président.
Madame, messieurs, à Rimouski, vous avez déjà le plus beau coucher de soleil,
mais je peux dire aujourd'hui qu'au-delà de ça vous avez aussi un excellent
projet. Donc, mes félicitations, je vois des beaux résultats.
On a l'habitude d'utiliser des algorithmes et
d'en rire. Moi, j'ai pris beaucoup de notes. Mais, pour une fois, je vois
quelque chose de très simple, de très, très simple. Moi, je vois ça et je me
dis... Je me demande : Est-ce qu'on a besoin du projet de loi n° 11
pour votre région? Si c'est oui, pourquoi?
Je ne dis pas que le projet de loi... Je vais
reformuler ma phrase parce que je ne veux pas vous mettre mal à l'aise. Je ne
dis pas que, le projet de loi n° 11, on n'en a pas besoin, mais, quand je
vois le résultat, je vois le filtre de pertinence... Merci pour l'ajout. Je
pense que c'est un bon ajout. Mais de quoi avez-vous besoin, aujourd'hui, pour qu'on vous facilite plus la tâche, en tant que
législateurs? Vous avez pris le leadership nécessaire au sein de la région.
Vous avez innové localement, avec une solution locale qui marche très bien.
Comment on peut vous aider davantage?
Mme Malo (Isabelle) : Si je peux
commencer à initier une réponse, puis je laisserai mes collègues compléter, je
pense qu'on a parlé de l'accès à la donnée. L'accès à la donnée, elle est très
importante. D'ailleurs, on produit énormément de données à partir de cette
initiative-ci, là, qui est le guichet d'accès pertinence. On a développé des
tableaux de bord. Puis, on le sait, là, dans le réseau de la santé et des
services sociaux, là, on a cruellement souffert, au cours des dernières années,
de manque de données. Donc, l'accès à la donnée, c'est important. Je ne veux
pas qualifier le type de données dont on a besoin, mais l'accès à la donnée
pour être capables de voir d'où on part,
quels sont les écarts, comment on pourrait, même, mieux travailler et mieux
soutenir nos professionnels de la santé, ça, ça nous apparaît important.
Au niveau de l'accès...
M. Derraji : Avez-vous des exemples?
Avez-vous des exemples? Désolé. Parce que je n'ai pas beaucoup de temps, comme
le ministre. Avez-vous des exemples? Et, du moment que vous travaillez déjà en
collégialité avec les médecins de famille dans votre région... Vous avez vu la
première présentation de notre commission, au nom de la FMOQ. Vous avez ce qui
circule. Vous avez la nouvelle définition de la première ligne. Éclairez-nous,
parce qu'on ne veut pas qu'après le projet
de loi n° 11 on tombe dans des faux problèmes, surtout que ça marche très
bien à Rimouski, d'après ce que je viens de voir.
Mme Malo (Isabelle) : Je peux
laisser mes collègues compléter. Éric, veux-tu y aller? Mais sinon je...
M. Lavoie
(Éric) : Oui, oui. Bien, c'est certain qu'on ne serait pas
devant vous aujourd'hui si on n'avait pas fait de la gestion à partir de
données existantes. Ça, c'est certain qu'on ne serait pas là aujourd'hui. Par
contre, ce qu'il nous
manque pour le... en gestion, là, si on veut faire l'adéquation demande-offre
et l'ajustement fin au «day-to-day», là,
excusez pour l'anglicisme, là, bien, c'est un accès à la donnée. Ce qui fait
peur, c'est le contrôle et puis... par rapport aux médecins, par
exemple.
Alors, une utilisation judicieuse des données,
bien pondérée, permet une gestion. Puis ça se fait de façon transparente avec
les médecins. Les médecins, actuellement, ne se sont pas sentis menacés par le
projet ni par les données qui en étaient extraites. Ça se fait de façon
transparente, mais, comme disait Mme Malo, je veux dire, ça fait partie
intégrante du projet.
L'autre
élément, c'est la motivation à participer au projet. Pour l'instant, les
médecins ont tous répondu présent et ont disponibilisé des plages. Je ne vous
dis pas que... Parfois, ça demande de la négociation avec les cliniques
médicales. On génère de la pertinence externe, on appelle ça de la pertinence
externe, c'est-à-dire qu'on gère l'offre... on gère la demande, là, pour bien
l'aiguiller, puis on leur demande, en contrepartie, quand ils libèrent de
l'offre, de générer de la pertinence interne. Il y a de la pertinence interne à
générer même dans les GMF.
M. Derraji : En fait, donc, ce que
le projet de loi n° 11 compte faire, vous l'avez quand même déjà initié
sans le projet de loi n° 11. Et il y avait, je dirais, l'écho sur le
terrain. Il y avait quand même une bonne collaboration. Vous avez eu accès à
quelques données. Donc, il n'y avait pas de réticence par rapport... de la part
des médecins généralistes.
Mme Malo (Isabelle) : Non, mais je
pense que je vais me permettre de dire que c'est beaucoup dans l'approche qu'on a préconisée. C'est une approche
de collaboration, c'est une approche de confiance également. Quand on a
des données sensibles, tout se joue dans la confiance, et je pense que cette
confiance-là, elle est présente.
Vous avez
posé la question : Comment on pourrait vous aider pour aller encore plus
loin? Je vais oser nommer une chose.
Si on voulait aller encore plus loin, et dégager de l'offre, et libérer nos
médecins, il faudrait que la notion de filtre puisse être élargie aux clients
inscrits également, parce qu'on le sait, souvent, dans les clients inscrits, et
avec l'assiduité qui est suivie de
très, très près, souvent, il y a des rendez-vous qui sont pris qui auraient pu
être orientés à un autre professionnel de la santé. Donc, la notion de
filtre serait également extrêmement pertinente à étendre même aux clients
inscrits.
M. Derraji : Je suis très d'accord
avec vous. Au début, je mentionnais le triage. Je sais que je ne vais pas
utiliser le triage, mais je vais plus utiliser le filtre. Et vous étiez d'une
extrême précision, de mentionner le filtre de pertinence,
et vous... Au niveau de ce filtre de pertinence, ce que j'ai aimé tout à
l'heure, c'est que c'est des secrétaires et aussi un jugement clinique
par quatre infirmières cliniciennes. Donc, si on prend votre modèle, qui est,
pour moi, un modèle... C'est un succès au
niveau régional. Et on dit qu'on doit s'inspirer du terrain si on veut le
réussir. Est-ce que vous nous suggérez aujourd'hui, avec le projet de
loi n° 11, qu'on doit ajouter le filtre de pertinence et, après le filtre
de pertinence, bien, libérer, libérer aussi les moyens et les ressources
nécessaires? Pour vous...
Mme Malo (Isabelle) : Absolument, absolument.
C'est important d'avoir les ressources nécessaires. On peut utiliser... Puis
nous, on recherche à essayer de continuer de se consolider en ajoutant de
l'intelligence d'affaires, mais il y a peu de produits matures sur le marché à
ce moment-ci. Donc, on pense que ça pourrait nous permettre éventuellement de
limiter le besoin en ressources humaines ou en ressources professionnelles si
on était capables d'avoir un complément avec de l'intelligence d'affaires.
M. Derraji : Et c'est exactement ce
que je disais hier par rapport à l'intelligence artificielle derrière le
filtre. Mais moi, je veux juste vraiment... Parce que vous êtes, pour moi,
l'exemple parfait qui va aider ce projet de loi. Vous, aujourd'hui, en
commission parlementaire, vous insistez sur le filtre de pertinence, peu
importe ce qu'on va faire en tant que législateurs, à vous accompagner, mais
pas uniquement vous mais l'ensemble du territoire. Pour vous, c'est une clé.
Mme Malo (Isabelle) : Absolument.
M. Derraji : O.K. Maintenant, une
fois... On a réglé cette première partie de l'entrée dans le système. Ce que
j'ai aimé avec votre approche, vous parlez beaucoup de la multidisciplinarité.
Le ministre insiste depuis le début :
Ce n'est pas le projet de loi pour parler de la multidisciplinarité. Donc, je
vais prendre pour acquis que, sur le terrain, ça marche, la
multidisciplinarité. Au niveau des patients ou les gros consommateurs... Vous
avez dit «consommateurs». Dans le langage, on utilise beaucoup
«consommateurs», que ce soient gros consommateurs ou les consommateurs
occasionnels. Pensez-vous qu'il y a cette ouverture, que, peu importe le
professionnel de la santé, la qualité, mais pas la qualité de soins, le patient
est content, ce consommateur du système de santé est content juste de recevoir
le service, peu importe cette personne qui offre le service, pharmacien,
infirmière clinicienne, IPS ou autre?
Mme Malo (Isabelle) : Bien, en fait,
le citoyen qui a un besoin, il veut qu'on réponde à son besoin, et, à partir du
moment où on répond à son besoin, le dispensateur de services devient presque
accessoire. Ça ne veut pas dire que cette personne-là ne souhaitera plus avoir
accès éventuellement ou être inscrite auprès d'un médecin de famille. La
personne va probablement poursuivre sa démarche dans le GAP. Mais ce que le
citoyen veut, c'est qu'on réponde à son besoin et que son besoin soit bien
évalué.
M.
Derraji : Si je vous dis que... les conditions de succès,
d'extrapolation de votre projet ailleurs, pas uniquement à Rimouski...
• (14 h 40) •
M. Lavoie (Éric) : Alors, je dirais
que c'est la réplication du lien de collaboration qu'on a eu avec nos différents professionnels, les différents
médecins, les GMF, les cliniques médicales. Ça prend des éléments de motivation
pour dégager de l'offre médicale,
évidemment, puisqu'on demande... (panne de son) ...patients qui n'ont pas de
médecin de famille. Il faut une offre médicale correspondante à ça.
Il faut,
évidemment, du personnel qui est au niveau du filtre. Le personnel qui
constitue le filtre de pertinence, il faut qu'il soit du personnel habilité,
stable, qui connaît bien le terrain, qui est en mesure de bien aiguiller.
Le lien de confiance... Quand le patient ou le citoyen appelle, s'il est mal
aiguillé, il ne rappellera pas. Ça fait qu'il faut qu'il soit bien aiguillé,
avec du personnel qui connaît les services, connaît le terrain, connaît les
professionnels, puis, à ce moment-là,
c'est... On a des hauts taux de succès, là. On a de 92 %... au-dessus de
92 % de satisfaction. Alors, on a travaillé beaucoup sur les
algorithmes du filtre pour bien aiguiller les patients.
Alors, dégager de l'offre, avoir un bon filtre,
du personnel stable, garder les liens de confiance puis...
Mme Malo (Isabelle) : Beaucoup d'arrimage
intrarégional, beaucoup d'arrimage intrarégional, que ce soit avec les
pharmacies communautaires, les organismes partenaires, les guichets d'accès en
santé mentale, Info-Santé, Info-Social. Il y a beaucoup de travail préalable
pour faire les arrimages requis.
M. Lavoie (Éric) : Permettez-moi...
M. Derraji : Il ne me reste pas
beaucoup de temps, mais je suis très curieux. Si vous pouvez envoyer aux membres de la commission les algorithmes de votre
filtre de pertinence avant qu'on commence l'étude détaillée, je vous
remercie d'avance, parce que je pense que ça va nous aider.
Un dernier
point sur la collaboration. Pensez-vous que ce qu'on a dans le projet n° 11 envoie un beau message aux gens qui est sur le terrain,
surtout les médecins généralistes, qu'on est en mode collaboration, parce qu'on
a besoin d'eux? Le ministre insiste beaucoup
qu'on ne veut pas faire de la microgestion... ou bien votre suggestion qu'on
doit améliorer ça.
M. Lavoie (Éric) : Bien, écoutez, il
y a des éléments de motivation qui doivent être sollicités pour avoir une offre
qui se dégage auprès des médecins, ça, c'est clair. On ne peut pas implanter ce
projet-là s'il n'y a pas des offres qui se dégagent. Alors, quelles sont les
meilleures méthodes pour dégager de l'offre? Je laisse ça à la discrétion des
autorités négociantes et des parlementaires. Mais nous, on peut fonctionner
avec ce projet-là s'il y a une offre correspondante, c'est clair, pour répondre
aux différentes demandes.
Je
reviendrais sur les conditions de succès. La donnée, avoir des bons systèmes
informationnels, des systèmes informationnels qui sont harmonisés avec les
différents outils de travail dont on dispose, un dossier clinique, un
dossier médical électronique, le DSQ, des dossiers harmonisés pour ne pas faire
de double saisie, pour bien capter puis savoir à qui on parle, quel citoyen on...
tu sais, tous ces éléments informationnels là sont précieux, l'orchestrateur très précieux dans l'aspect de bien... d'avoir une
idée, une vue sur l'offre disponible et bien capter les demandes. Écoutez,
ça fait partie des ingrédients, là, qui, je pense... qui sont nécessaires pour
exporter...
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
M. Derraji : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, la suite de cet échange est
avec le député de Rosemont.
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Merci à vous quatre d'être là. C'est intéressant, ce matin, en
blague, au ministre, je lui disais qu'on allait enfin percer le mystère de
Rimouski cet après-midi. Bon, on n'a pas tout percé, je pense, là, mais on
avance. On avance, puis je vous remercie de la présentation.
Cela dit, sans vouloir chercher des bibittes,
les comparaisons, parfois, ont leurs limites, puis ce qui est bon pour pitou n'est pas toujours bon pour minou.
Votre système, là, qui marche bien chez vous, est-ce qu'il est en tous points
exportable dans des régions comme Montréal ou Québec, à plus forte raison à
Montréal, que je connais mieux, là, évidemment,
par la force des choses, où la clientèle n'est pas la même? Il y a beaucoup
d'immigrants, beaucoup de ce que les travailleurs sociaux appellent les
multipoqués, gros phénomène d'itinérance. Il y en a partout, maintenant, au
Québec, des itinérants, mais, par la force des choses, il y en a plus à
Montréal.
Vous êtes
aussi partis avec un bel avantage. Vous aviez déjà 90 % d'inscriptions aux
médecins de famille... non, pas
d'inscriptions, de médecins de famille... de patients ayant un médecin de
famille. Au Québec, la moyenne, c'est 80 %. Ça fait que je présume
que, dans certains coins, au Québec, c'est en bas de 80 %. Donc, tout ça,
quand on met ça dans le boulier, là, quels numéros on tire quand on fait
descendre des boules? Puis est-ce que c'est exportable? Est-ce que c'est une combinaison
gagnante, autrement dit, pour toutes les régions?
M. Lavoie (Éric) : On tire une
boule gagnante. C'est que, dans le fond, plus il y a de pénuries de ressources,
plus la notion de pertinence prend de l'importance. La notion d'accompagner le
citoyen dans la recherche de soins pour répondre de façon
la plus adéquate à son besoin, c'est une notion qui est primordiale. Puis
d'ailleurs, en région cosmopolitaine, là où il y a des immigrés ou des
immigrants, là où il y a des citoyens qui ont moins la chance d'avoir un accès
aux soins, alors, on doit de plus en plus les accompagner pour bien avoir le
bon service à leurs besoins, sinon, ces personnes-là se retrouvent à l'urgence,
vous le savez.
M. Marissal : O.K. Ça, c'est
pour un des premiers points. J'ai fait une recherche assez rapide, là, puis je
ne vous cherche pas des poux, je veux juste voir s'il y a des limites à votre
système. Vous avez une proportion de médecins de famille supérieure à la
moyenne du Québec, là, certainement supérieure à Montréal, par exemple. Si on
fait une petite règle de trois, là, il y a un manque de médecins à Montréal. De
toute façon, ça, c'est assez connu et documenté. Vous en avez plus. Par contre,
vous nous dites, puis ça, c'est là où ça devient intéressant, que, peut-être, vous les utilisez moins systématiquement,
c'est-à-dire que vous les envoyez ailleurs. Ça, j'avoue que c'est une avenue
qui est vraiment intéressante. Vous avez parlé des pharmaciens. On nous parle
tout le temps des pharmaciens. On nous parle
beaucoup des IPS. Dans vos équipes, là, sur le terrain, avez-vous d'autres
types de professionnels de la santé? Moi, j'entends beaucoup parler des
physios, par exemple, qui veulent s'impliquer en première ligne. Parlez-moi
donc un petit peu de ça, à qui vous faites appel, à part, évidemment, aux
médecins de famille, pharmaciens et IPS.
M. Lavoie (Éric) : Bien, à ce
moment-là... Tu sais, un appel sur six concerne la médication. Alors, les
pharmaciens ont une grosse part. Les IPS sont impliquées dans... déjà dans les
groupes de médecine de famille, puis les médecins, on le sait. Sinon, c'est les
arrimages qu'on a faits avec les guichets de santé mentale, parce qu'il y a des
notions de santé mentale là-dedans. Différents... Des fois, on réfère au 8-1-1,
des fois, on fait seulement donner des conseils. Le fait de répondre, de donner
des conseils à la personne, là, c'est déjà un bon pourcentage aussi puis ça
coupe... On n'a pas besoin de référer au médecin à ce moment-là. Après, ça se
décline en une série... Quand on regarde, là, les données, là, il y a une série
d'orientations qui se fait, qui sont de toute nature, puis ça rejoint de très
petits pourcentages, mais finalement, au total, font une bonne part du travail,
d'où la notion d'importance que le filtre connaisse bien les services qui sont
disponibles. Et ça dépasse, là...
M. Marissal : ...intéressant
dans ce que vous dites, c'est qu'on parle d'algorithmes, on parle de données, puis, oui, c'est vrai, on arrive là, là, on
n'arrêtera pas le progrès, mais vous, vous avez remis des humains au bout d'une
ligne téléphonique, puis ça marche. Je
retiens ça pour la suite des choses puis je vous remercie pour votre
témoignage.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, M. le député. Nous allons terminer cet
échange avec le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci beaucoup.
J'aime beaucoup parler à des gens de l'Est du Québec qui innovent et qui
semblent avoir trouvé une solution sans attendre le projet de loi n° 11.
En fait, c'est un petit peu ça qui me frappe et c'est un petit peu ce que les
médecins de la FMOQ avaient mentionné, que le guichet... En fait, l'accès
réseau pertinence puis le guichet d'accès en première ligne devaient suffire à
leurs yeux, puis c'est ce qui pouvait, justement, les motiver à embarquer, qui
pouvait générer de la confiance, comme vous l'avez mentionné, et de la
collaboration. Alors, je reviens sur votre déclaration, Mme Malo. Est-ce
que vous ne craignez pas un peu que cette peur du contrôle des médecins, ça fasse
un peu capoter votre système si on utilise, comme les médecins semblent vouloir
le dire, la coercition?
Mme Malo (Isabelle) : Je ne
penserais pas, pas dans une région comme la nôtre, parce que le GAP est quand
même implanté, là, depuis maintenant 16, 17 mois, puis il y a une culture
qui s'est développée. Mais ça a demandé du travail, je ne vous le cacherai pas.
Alors, je pense que... Je n'ai pas de crainte, moi, que, demain matin,
arriveraient des paramètres législatifs... que ça ferait tout basculer, parce
qu'il y a une culture qui est après se développer,
il y a une adhésion. Puis on mise... On a misé... On mise encore sur l'adhésion
volontaire, et la collaboration avec les GMF, et la collaboration
interprofessionnelle aussi, là, qu'on veut mettre au coeur de ce projet-là.
Alors, moi, je laisse le législateur prendre ses
décisions. Je n'ai pas de crainte pour ce qu'on a initié. Mais, Dr Lavoie
l'a mentionné tout à l'heure, c'est du travail de façon continue pour discuter
avec les groupes de médecine familiale, trouver les ajustements lorsque ça
fonctionne moins bien et puis négocier une offre de services, là, qui est fondamentale. Le GAP ne peut fonctionner que si
l'ensemble des groupes de médecine familiale collaborent et offrent des
plages.
• (14 h 50) •
M. Arseneau : Le mystère de la
Caramilk qu'on essaie de trouver depuis le début des consultations, c'est de
quel type de données vous auriez besoin, parce que vous parlez, vous aussi,
d'accès à la donnée. Sans tomber dans ce qui pourrait faire peur aux médecins,
là, puis qui pourrait, justement, miner la confiance que vous avez réussi à
établir, j'aimerais savoir... Puis on parlait aussi de l'utilisation des
données. Mais, vous, là, quelle est la donnée que vous voyez, que vous n'avez pas, que vous pourriez obtenir avec le
projet de loi n° 11, par exemple, qui vous aiderait à améliorer le
système?
Mme Malo (Isabelle) : Bien, je pense
que le Dr Lavoie l'a déjà dit, là, lui, comme chef du DRMG, il a quand
même accès à un certain nombre de données de la RAMQ puis il est capable
d'observer, dans le fond, l'offre, le volume d'activité, même, passablement, le
nombre de personnes inscrites auprès de chaque médecin. Mais cet outil-là, c'est un outil, justement, qui nous sert à
objectiver l'information qui nous est transmise, parfois, d'offrir un espace de
dialogue avec les médecins pour discuter puis négocier l'offre de services.
M. Arseneau : Juste une dernière
petite question. J'ai 30 secondes seulement.
Mme Malo (Isabelle) : Donc, vous me
demandez si je suis en faveur de la coercition. Je vais vous répondre non. Puis je pense qu'il y a moyen de travailler
avec les fédérations médicales, surtout avec l'ensemble de nos médecins,
pour trouver le bon équilibre dans l'accès à la donnée, mais que cette
donnée-là reste une donnée confidentielle, puis qu'on ne l'utilisera pas à
mauvais escient.
M. Arseneau : D'accord. Est-ce que
j'ai... Juste pour voir... Parce que le 50 % de patientèle que vous
détournez vers d'autres spécialités, ça, est-ce qu'il a fallu réaménager le
système ou ça fonctionne bien? Parce qu'on parle de réaménager la première
ligne. C'est encore à travers les GMF?
M. Lavoie (Éric) : Ces patients-là
étaient déjà référés vers ces mêmes professionnels là. C'est seulement que
c'est le médecin de famille qui le faisait. Le médecin de famille est
positionné comme porte d'entrée et comme chef d'orchestre. Alors, une
consultation auprès de ce médecin-là générait une demande de consultation pour
les autres professionnels. C'est ça qu'on vient améliorer, puis libérer le
médecin de famille.
M. Arseneau : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: ...beaucoup pour cet échange.
Alors, nous allons suspendre temporairement nos
travaux pour donner place au prochain groupe, mais je tiens à vous féliciter
puis à vous remercier d'être inventifs et créatifs pour améliorer le système.
Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 14 h 53)
(Reprise à 14 h 56)
Le
Président (M. Provençal)
: Nous reprenons nos
travaux. Je souhaite la bienvenue à la Dre Caroline Laberge, du
Collège québécois des médecins de famille. Je vous rappelle, madame, que vous
aurez 10 minutes pour votre exposé. Par
la suite, nous procéderons à un échange avec les membres de la commission. Je
vous cède immédiatement la parole.
Collège québécois des
médecins de famille (CQMF)
Mme Laberge (Caroline) : Parfait.
Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup de nous recevoir. Ça nous fait
plaisir de venir vous présenter les éléments qui ressortent à nos yeux en lien
avec le projet de loi n° 11.
D'abord, laissez-moi vous présenter le Collège
québécois des médecins de famille. Le CQMF est une organisation à but non
lucratif qui regroupe 4 500 membres au Québec, des médecins de
famille, des résidents et des étudiants en médecine, qui a pour mission
d'inspirer et de soutenir les médecins de famille et leurs partenaires dans
l'adoption des meilleures pratiques au bénéfice de la santé de la population.
Nos actions s'articulent, entre autres, dans le
développement d'outils pour accompagner les médecins de famille au quotidien,
par exemple, le concept d'eConsult, dont la mouture québécoise a été initiée
par le CQMF et portée pendant plus de quatre ans avant de devenir ce qu'on
connaît maintenant comme le conseil numérique. Nous avons également créé
l'événement du Symposium sur les innovations justement pour créer des synergies
et mettre en lumière des innovations porteuses pour la première ligne. Le CQMF
est le leader, au Québec, de la campagne Choisir avec soin, qui porte sur la
réduction des examens et des traitements inutiles en santé. Nous chapeautons
également la Communauté de pratique des médecins en CHSLD, qui a été créée dans
la pandémie de COVID-19 par des médecins
engagés sur le terrain pour partager, soutenir et diffuser les meilleures
pratiques en soins de longue durée.
Le soutien à la relève et le programme de
mentorat sont d'autres services incontournables à notre communauté médicale,
qui visent, entre autres, la valorisation de la médecine de famille et le
soutien entre les pairs. Les membres engagés du CQMF sont des médecins de
famille en exercice dans différents milieux, qui reflètent le vécu du terrain
et qui travaillent sans relâche pour améliorer les soins aux patients. De mon
côté, je suis médecin de famille en pratique ici, à Québec. Je travaille et
j'enseigne au GMF universitaire Laurier et je fais des accouchements au CHUL.
Le CQMF dit oui à l'accès. Nous déplorons, tout
comme le gouvernement, que de nombreux Québécois et Québécoises n'aient pas de
médecin de famille, sachant tous les bénéfices pour la santé, à court, moyen et
long terme, que ça apporte. C'est donc avec
cette vision terrain que nous vous amenons nos suggestions et que nous
souhaitons participer aux prochaines étapes de la refonte de notre
système de santé.
D'entrée de jeu, pour améliorer l'accès, c'est
important de comprendre et rétablir l'équilibre entre l'offre et la demande des
rendez-vous en première ligne, quantifier l'offre, soit, mais ce n'est pas ça
qui va l'augmenter. Pour augmenter l'offre de services en première ligne, il
faut plus de travail de collaboration, et ça passe, selon nous, par des équipes interprofessionnelles mieux garnies. En
augmentant le nombre d'infirmières dans les GMF, le travail de collaboration et
la délégation des suivis permettront d'augmenter le nombre de patients inscrits
par médecin de famille.
Dans les GMF actuels,
il y a, en moyenne, une infirmière pour huit à neuf médecins. Dans mon GMF-U,
par exemple, nous avons quatre infirmières
cliniciennes pour 20 médecins et 24 résidents. Elles font toutes des
soins polyvalents, de la petite
enfance aux troubles neurocognitifs majeurs, en passant par le diabète et le
TDAH. Leur apport est inestimable. Si je pouvais avoir une infirmière
jumelée avec moi à temps plein, je pourrais suivre beaucoup plus de patients.
Parmi les autres
professionnels, citons les travailleurs sociaux et les pharmaciens qui ont été
intégrés aux équipes GMF. Ça facilite grandement le travail de collaboration et
l'accès direct pour les patients du GMF.
Cependant, les équipes interprofessionnelles
gagneraient à s'agrandir en nombre et en diversité professionnelle pour
mieux répondre aux besoins identifiés selon les communautés et en proximité
autour du patient.
C'est important aussi
de reconnaître l'offre de services des médecins de famille québécois en
deuxième et en troisième ligne, qui est cruciale pour notre réseau de santé.
C'est sûr qu'en passant une portion significative de son temps à l'urgence, en
salle d'accouchement ou à l'hospitalisation le médecin de famille est moins
présent au cabinet. C'est pourquoi le support et la délégation aux ordres
professionnels au bureau prend tout son sens.
C'est aussi important
de noter que la carrière d'un médecin de famille évolue au fil du temps. Plus
de temps est consacré à l'hôpital en début
de carrière puis plus au bureau vers la fin. On ne peut pas s'attendre à la
même taille de cohorte de patients
pour le jeune diplômé que pour le médecin à la retraite, simplement parce
qu'une patientèle, ça se bâtit au fil du temps.
Prendre en charge un
patient, ça veut dire établir et développer une relation de confiance et de
partenariat entre le médecin et le patient, c'est assurer une continuité dans
des soins globaux et complets, puis c'est tellement gratifiant. Répondre oui pour accepter de suivre d'autres membres de la
famille ou encore débuter cette relation quand on rencontre un patient
sans médecin dans un contexte de sans rendez-vous, à l'hospitalisation ou lors
d'un suivi de grossesse, par exemple, c'est légitime et c'est l'essence même de
la médecine de famille. Ce serait vraiment nuisible d'interdire cette façon de
faire toute naturelle en limitant l'inscription de nouveaux patients aux seules
références du guichet d'accès aux médecins de famille, tel que proposé dans le
projet de loi n° 11. Ceci ajouterait une lourdeur administrative indue,
amènerait une perte de temps et une limitation de l'accès.
• (15 heures) •
Permettre aussi une
transition graduelle de pratique pour les médecins plus âgés qui souhaiteraient
déléguer leur clientèle à la relève tout en
continuant de rendre des services à un rythme plus raisonnable, ça éviterait la
coupure et l'accumulation des patients sur le guichet. Pour que cette
transition naturelle puisse se produire, ça prend deux éléments :
premièrement, de la relève, c'est-à-dire réussir à combler toutes nos places en
résidence, et ensuite garder la motivation et la flamme des médecins en
pratique. La valorisation de notre profession est le nerf de la guerre ici. Je
sais que plusieurs de mes collègues en ont parlé dans les derniers jours. Le
CQMF travaille d'arrache-pied avec de multiples acteurs pour redorer l'image de
notre profession, malmenée par le gouvernement dans les dernières années.
La
reconnaissance des efforts constants déployés par les médecins de famille
passerait d'abord par un changement de ton du gouvernement. Un exemple
de ton qui porte préjudice à notre profession est le libellé du projet de loi,
qui sous-entend que le ministre pourrait imposer des plages de rendez-vous à
des médecins individuels. Cette modalité serait la goutte qui ferait déborder
le vase pour de multiples médecins au bord de l'épuisement. Les contrats GMF
stipulent déjà à l'heure actuelle les heures d'ouverture à assumer en groupe le
soir et les fins de semaine.
Maintenant, dans cet
équilibre offre-demande, il faut également regarder la demande. La médecine
s'est modifiée au fil des années.
L'augmentation de la longévité, le fait de vivre avec des maladies chroniques,
l'augmentation des enjeux de santé mentale, on constate que les besoins
de la population changent. Le suivi en continuité offre une qualité de soins
beaucoup plus grande que des soins ponctuels. La durée des rendez-vous médicaux
doit refléter cette complexité, les médecins de famille adressant l'ensemble
des enjeux de santé de son patient.
Donc, la demande
change, et il faut y répondre adéquatement. Ceci signifie d'effectuer un
travail en amont du rendez-vous médical pour cerner les besoins du patient et
s'assurer d'y répondre par le bon professionnel au bon moment. C'est ça, le concept de l'accès adapté. Ça ne repose pas juste
sur les épaules du médecin de famille. Le projet pilote du Guichet d'accès à la première ligne du Bas-Saint-Laurent est
éloquent. Vous venez de les entendre. Un système de rendez-vous en ligne proposé dans le projet de loi n° 11
pourrait ainsi proposer plus de solutions pour le patient qu'un simple
rendez-vous médical. Si on dotait ce système-là d'algorithmes d'intelligence
artificielle, les renseignements entrés par
le patient permettraient, par exemple, de le diriger à un guide d'autosoins, ou
à l'orienter vers son pharmacien, une infirmière, ou offrir un
rendez-vous médical lorsque c'est requis.
D'autre
part, la demande est augmentée par les soins eux-mêmes. Je parle ici du
phénomène de surmédicalisation dans
la société. On a de plus en plus l'impression de pouvoir tout comprendre par
des tests d'imagerie ou de laboratoire. C'est vrai que ça donne beaucoup
d'information, mais cette information-là est parfois trompeuse, et ça n'aide
pas toujours à soigner. L'utilisation accrue amène son lot de surdiagnostics,
de surtraitements, et tout ça peut nuire à la santé
du patient, que ce soit par les effets secondaires des médicaments ou les
inconvénients qui découlent des tests. Ça amène aussi à une grande
dépendance à la médecine pour tenter d'expliquer tout ce qui nous arrive, et on
peut confondre prendre soin de sa santé versus chercher des maladies.
Il y a aussi une
incitation de la part de compagnies pharmaceutiques de chercher et traiter des
maladies qui n'auraient peut-être pas dérangé la personne. Pensons à cette
fameuse publicité sur l'onychomycose. Nous voyons, depuis cette publicité, un
nombre incalculable de consultations pour des ongles d'orteil d'aspect
différent. J'aimerais bien qu'on étudie ce
phénomène et qu'on quantifie la pression mise sur la première ligne et sur les
laboratoires par des publicités de ce genre.
Un autre aspect qui permet
de comprendre l'accès plus difficile aux soins est le temps consacré par les
médecins à la paperasse, entre autres, les suivis de prises de sang,
d'imageries, préparer des formulaires de référence pour diriger un patient en
spécialité ou au CLSC, tous les formulaires pour les compagnies d'assurance, la
CNESST, pour mettre de la crème sur les fesses des poupons à la garderie.
Chaque médecin de famille consacre de deux à trois demi-journées, voire plus,
par semaine à ces tâches administratives pendant lesquelles il ne peut pas voir
de patients.
Comment faire
abstraction aussi de cette pandémie de COVID-19 qui, depuis deux ans, a affecté
autant l'offre que la demande? Les médecins de famille sont allés prêter
main-forte partout dans le réseau pour traiter des patients infectés. Les
infirmières de première ligne ont été délestées des GMF. Et cette pandémie a
augmenté la détresse tant chez nos patients que chez les soignants.
En
conclusion, notre objectif commun est d'offrir des soins de qualité à toute la
population. Le projet de loi n° 11, tel que libellé, propose de regarder une seule
partie de l'offre et tente de presser le citron pour obtenir quelques gouttes
de plus, ceci sans augmenter l'offre globale par d'autres mécanismes et sans
comprendre la croissance de la demande. Si vous
me permettez l'analogie, tout traitement en médecine amène des avantages et des
inconvénients ou des bienfaits escomptés et des effets secondaires.
C'est important de bien estimer les deux pour prendre une décision éclairée. De
combien estime-t-on l'augmentation de l'offre avec les mesures proposées par le
projet de loi n° 11 et avec quels effets
secondaires ou à quel prix sur le moral des troupes, les départs et le
non-recrutement de la relève? Ce qu'il faut se
demander ultimement, c'est : Est-ce que les citoyens auront des meilleurs
soins de santé? C'est ça qu'il faut peser dans la balance avant d'aller de l'avant avec ce projet de loi dans sa facture
actuelle. Le CQMF veut faire partie de la discussion du plan santé.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup pour votre
présentation. Alors, nous allons débuter cet échange avec M. le ministre. Je
vous cède la parole, M. le ministre.
M. Dubé : Très bien. Alors, merci,
M. le Président. Dre Théberge, merci beaucoup pour votre témoignage. Juste pour
qu'on se comprenne bien sur... Vous avez soulevé plusieurs points, mais,
lorsqu'on parle de... Vous avez dit que les médecins de famille, effectivement,
que vous représentez ont beaucoup de travaux qui sont en dehors de la prise en
charge. Vous avez nommé les travaux en hôpitaux, aux urgences, puis etc. Puis,
une des raisons pour lesquelles on veut des données de gestion, puis, tout à
l'heure avec, justement, le groupe de Rimouski, on en parlait, c'était pour
bien comprendre quelle est cette charge de travail là qu'ils ont. Parce que,
souvent, comme vous savez, les données que l'on a, qui sont très, très
primaires, je vais le dire comme ça, dans les régions, c'est qu'on voit qu'il y
a un médecin de famille, mais on ne le sait pas, en tant que gestionnaire, il y
a quelle portion de son travail qui est, par exemple, aux urgences. Puis la
seule façon, par exemple, de le savoir, c'est de dire : Est-ce qu'il a
facturé ou pas la RAMQ? Mais ça ne nous donne pas une grande connaissance de,
cette personne-là, est-ce qu'elle fait 20 heures par semaine à l'urgence
ou est ce qu'elle est à temps plein. Vous me suivez?
Ça fait que je veux juste vous rassurer, parce
que c'est difficile, dans une courte présentation puis lorsqu'on n'a pas la...
on voit un article de loi que les légistes s'appliquent à rendre bien
compliqué. Mais ce que je voulais vous dire, c'est que l'objectif de bien
comprendre l'offre, que vous avez dit, surtout avec les médecins de famille,
c'est de comprendre ce qu'ils font, pas pour les contrôler mais pour être
capable de dire : J'ai peut-être 10 médecins dans ma région, mais j'en ai vraiment sept qui peuvent prendre la prise
en charge. Est-ce que vous, vous êtes d'accord avec moi? Parce que, ce manque
d'information là, je ne suis pas le premier à le dire, là. Et je veux juste que
les gens comprennent que l'information de gestion qu'on a besoin, c'est
de savoir qui fait quoi, parce que, malheureusement, cette donnée-là n'est pas
dans la région. On se comprend bien? O.K.
Mme
Laberge (Caroline) : Oui. J'entends bien ça puis je comprends tout à
fait, comme gestionnaire, que vous ayez besoin de cette information-là
pour mieux planifier les effectifs. C'est tout à fait légitime...
M. Dubé : Planifier les effectifs,
puis effectivement parce que... Bon, parlons de ça, parce que vous, vous en
représentez pas mal. Quand on arrive au fameux PREM, à chaque année, bien, moi,
j'aimerais bien ça savoir que, pour telle raison, oui, j'ai 10 médecins...
ou, tiens, je vais dire un chiffre, j'en ai 100 en Montérégie, mais j'en ai
vraiment juste 50 qui font de la prise en charge. Alors, pour être capable de
savoir si je devrais en mettre plus sur l'île de Montréal ou en Montérégie, un
des facteurs serait de bien comprendre cette donnée-là sur une base régionale. Mais je voulais juste donner cette... Puis vous
êtes d'accord avec ça, là? Parce que, quand on... Quand j'entends la réaction
de dire : On veut tout contrôler, ce n'est pas ça du tout. Ce qu'on veut,
c'est être capables d'avoir une donnée de gestion. Je suis content qu'on
s'entende là-dessus.
Mme Laberge (Caroline) : Si je peux
me permettre, M. le ministre, juste un petit commentaire, par contre.
M. Dubé : Bien oui.
Mme Laberge (Caroline) : La façon
dont c'est libellé actuellement dans le projet de loi, on comprend que c'est
les plages horaires offertes en cabinet que vous allez monitorer, mais vous ne
saurez pas plus qu'est-ce que le médecin fait les autres jours de la semaine.
M. Dubé : Deuxième chose...
Mme Laberge (Caroline) : Ça
fait que cette donnée-là devra être complétée par d'autres informations ou
d'autres façons d'avoir l'information véritable.
• (15 h 10) •
M. Dubé :
Oui, mais ça... Non, non, mais c'est un bon point, Dre Théberge, c'est un
bon point. Vous avez un raisonnement scientifique. J'aime ça, là.
Alors, je vais juste
revenir un peu. Il y a deux choses dans le projet de loi. On demande de
l'information pour fins de gestion, je viens
de donner l'exemple, pour bien comprendre qui offre quoi. Et la deuxième
question, c'est la prise de rendez-vous. Pour moi, c'est deux choses
complètement différentes.
Maintenant, je vais
répondre tout de suite à votre question, parce que je voulais y venir, vous
l'avez souligné. Quand, tout à l'heure, on écoutait Mme Malo, qui nous
parlait de Rimouski, de l'exemple du GAP, elle a dit... Parce qu'on le sait,
là, le hub, je vais l'appeler, le système de rendez-vous, il est très évolué à
Rimouski. Ça fait longtemps, là, que les médecins mettent déjà leur bassin de
rendez-vous dedans. Ils seront rendus pas mal plus loin que bien des gens.
C'est d'ailleurs pour ça que le GAP fonctionne très bien.
Puis là je vais dire
la partie rendez-vous. Elle a bien dit... Puis le docteur... comment qu'il
s'appelle, notre docteur... Lavoie a dit tout à l'heure... Dr Lavoie a
dit : Mais moi, j'ai besoin d'un effet de levier, je suis prêt à vous
donner des meilleures données, hein, je suis prêt à vous donner une meilleure
offre, donc je vais avoir filtré, puis, en échange, en échange, vous allez me
donner plus de rendez-vous. On se comprend bien?
Alors, ce que je veux
dire, c'est que la prise de rendez-vous qu'on parle dans le projet de loi n° 11, c'est celle-là. Ce n'est pas pour contrôler, mais
c'est pour dire : Parce que je vous ai envoyé moins de clients ou des
clients plus pertinents — je
peux-tu dire ça? — en
échange, donnez-moi donc... Puis il n'a pas parlé de 20 % des rendez-vous,
il a parlé de 1,5 % des rendez-vous. Ça, ça veut dire, un médecin... Un
médecin de famille, ça voit combien de patients par semaine si vous faites
trois jours, quatre jours ou cinq jours? Combien que vous voyez
de patients par jour? Les Québécois aimeraient ça savoir ça, à peu près. 15?
20?
Mme Laberge
(Caroline) : Bien, c'est très variable selon le type de clientèle.
Souvent, on va calculer notre temps par demi-journée, grosso modo. Souvent, on
est attitrés à différentes activités à la demi-journée. Je vous dirais,
probablement, entre 6 et 10, selon la lourdeur des cas.
M. Dubé :
De demi-journées, de demi-journées. O.K.
Mme Laberge
(Caroline) : Par demi-journée, oui.
M. Dubé :
Bon, mais admettons que je vais prendre un exemple, six demi-journées à 10,
60 rendez-vous. Le nombre de rendez-vous additionnels que le GAP demande
en échange, c'est deux ou trois rendez-vous sur 60. C'est ça qu'il demande.
Parce qu'il dit : Je vais vous donner une offre beaucoup filtrée, puis, en
échange, vous allez me donner un ou deux rendez-vous par médecin pour que je sois
capable de répondre à ceux qui n'ont pas de médecin de famille.
Alors, c'est juste
que je veux faire attention, parce que, souvent, la perception... Puis
malheureusement moi, je dis que c'est la faute des avocats qui écrivent des
textes qui sont compliqués. C'est moi qui dis ça, mais je suis juste un
comptable. Mais ce que je vous dis, c'est que l'objectif de la loi, c'est de
faire exactement ce qui se fait à Rimouski,
c'est : Donnez-nous 1 % ou 2 % de plus de vos rendez-vous, puis,
quand on va appeler ou quand le patient va appeler, bien, il va être
capable d'avoir un rendez-vous, alors qu'en ce moment il n'est pas capable de
le prendre. Ça fait que je voulais juste faire cette clarification-là entre les
données de gestion et la prise de rendez-vous, qui sont deux éléments, à mon
avis, excessivement importants du projet de loi mais qui sont séparés. Est-ce
que je suis plus clair? Mais, si vous voulez commenter...
Mme Laberge
(Caroline) : Je vous entends bien puis je l'avais compris aussi, que
c'était comme deux éléments séparés. La façon dont c'est libellé actuellement,
par exemple, ce n'est pas si clair que c'est deux choses différentes. Ça fait
que je pense que ça gagnera, ça...
M. Dubé :
...parler aux avocats de ça, ça, je vous le promets.
Mme Laberge
(Caroline) : Oui. Puis l'autre affaire, c'est que, malheureusement, en
étant libellé de façon peut-être difficile à comprendre pour un comptable ou
pour un médecin de famille, ce que ça laisse sous-entendre, c'est que ça semble menaçant. Ce n'est pas bien
reçu par nos collègues, dans le sens qu'on a l'impression que vous allez
vouloir gérer à quelle heure on voit qui, là.
M. Dubé : Oui, mais ils nous écoutent aujourd'hui, là, Dre Théberge, ils nous
écoutent aujourd'hui, là. Ça fait que je suis sûr que ça aide à
comprendre...
Mme Laberge
(Caroline) : Mon nom, c'est... Excusez, mon nom, c'est Dre Laberge.
M. Dubé :
Je ne sais pas pourquoi...
Mme Laberge (Caroline) :
...Théberge, Théberge. C'est Laberge.
M. Dubé :
Non seulement je ne sais pas compter, mais je ne sais pas écrire. Excusez-moi,
Dre Laberge, excusez-moi, excusez-moi. Parlez-moi de la... Oui, j'ai beaucoup
aimé votre exemple des pharmacies, là, avec les ongles d'orteil. C'est épouvantable, cette publicité-là, ça n'a pas de
bon sens. Juste... Est-ce qu'on devrait faire plus de... une meilleure
communication pour faire comprendre aux gens... Parce que, oui, il y a le
projet de loi, là, c'est une chose, je pense, qu'on va préciser puis on va
s'assurer qu'on fait les correctifs, mais est-ce qu'on ne devrait pas faire
plus de publicités, de communications aux Québécois pour leur expliquer,
justement, qu'est-ce qu'on essaie de faire? Parce
que je suis certain qu'il y a bien des gens qui... la journée qu'on aurait ce
système d'appels là un petit peu partout, le fameux GAP dont on a
entendu parler... qu'il me semble que ça devient évident que ça va vous aider,
vous, les médecins, à avoir des patients qui
viennent pour les bonnes raisons. Mais on ne se fait pas de... Puis là je nous
parle... au ministère, là. Moi, ça ne
fait pas longtemps que je suis à la Santé. Mais pensez-vous qu'on devrait faire
plus de publicités pour... enlever les ongles d'orteils puis parler plus
de la prise de rendez-vous?
Mme Laberge (Caroline) :
Bien, définitivement. Puis c'est une des choses qu'on proposait dans notre mémoire, d'éduquer un peu la population sur c'est
quoi, le bon moment d'aller consulter le médecin. Des fois, on voit quelqu'un
dans notre... On a un système de rendez-vous qui fonctionne bien, qui offre un
accès très rapide, ça fait que, des fois, on voit des gens, ça fait quatre
heures qu'ils font de la fièvre. Ce n'est pas pertinent de venir nous voir à ce
moment-ci. On ne sait pas s'il va se développer une otite dans trois ou quatre
jours ou une pneumonie dans une semaine. Mais d'être capable d'autogérer un
petit peu ses symptômes, initialement, ce serait fort pertinent.
M. Dubé :
En tout cas, j'ai pris bonne note. Puis je ne sais pas... Il me reste combien
de temps, M. le Président?
Le Président (M.
Provençal)
: ...
M. Dubé :
Six minutes? Mon Dieu! Je vais... Bon, vous avez le droit de dire ce que vous
pensez. Vous avez parlé de presser le
citron. Moi, ce n'est pas mon objectif de presser le citron. Je ne sais pas
beaucoup cuisiner, ça fait que je ne suis pas sûr que je le mettrais au
bon endroit. Mais il y a une chose que je vous dirais que j'ai entendue, qui
est importante, ce que vous avez dit, deux à trois demi-journées de temps
administratif. Oh! ça, ça me dérange.
Mme Laberge
(Caroline) : C'est énorme, hein?
M. Dubé :
Dans le personnel... Vous avez vu les annonces qu'on a faites il y a quelques
mois. Parce que ça, j'y crois beaucoup,
qu'on devrait être mieux informatisés, hein, ça, j'en parle souvent, que les
systèmes informatiques font partie du plan de relance, mais, en même
temps, on ne pourra pas avoir ces systèmes-là demain matin, là. Ça va nous prendre du temps. On y travaille, mais je
peux vous dire... On l'a vu, là, ça a bien fonctionné dans la vaccination,
avec des systèmes performants de prise de
rendez-vous, mais, avant qu'on ait ça partout au Québec, on a... En attendant,
on a annoncé l'engagement d'à peu près 2 000 postes administratifs,
des agents administratifs. Vous êtes supposés en avoir qui vont rentrer en
février. Ça, c'est ce mois-ci. Est-ce que vous en avez entendu parler pour vos
GMF? Est-ce que vous êtes au courant de ça?
Mme Laberge
(Caroline) : J'en ai entendu parler dans des contextes hospitaliers
actuellement. Mais les deux à trois demi-journées auxquelles je faisais
allusion tout à l'heure, ce n'est pas nécessairement quelque chose qui pourrait
être fait par une adjointe administrative. Par exemple...
M. Dubé :
...quoi, est-ce que c'est les papiers de la RAMQ? Non, là, habituellement, il y
a des services bureau qui... C'est quoi, le temps...
Mme Laberge
(Caroline) : Non. Ça, c'est... Souvent, on va avoir des agences de
facturation qui s'occupent de ça pour nous.
M. Dubé :
Bien, c'est ça.
Mme Laberge (Caroline) : Bien, pour vous donner un
exemple, tu sais, si on veut envoyer passer un examen comme un TACO, bien, on a
une feuille à remplir pour indiquer les éléments qu'on recherche et les
contre-indications, les indications. Ça fait que ça, ça peut prendre
deux minutes, par exemple, à compléter. Si on veut envoyer...
M. Dubé :
Puis ça, un agent administratif ne peut pas faire ça, Dre Laberge?
Mme Laberge
(Caroline) : Non, parce que ça, c'est des informations médicales. Il
ne pourrait pas savoir. Puis, tu sais, un
exemple, par exemple, dans plusieurs spécialités, pour référer un patient, par
exemple, dans une clinique de la douleur, c'est des formulaires de
quatre pages qu'il faut compléter...
M. Dubé :
Quatre pages.
Mme Laberge (Caroline) : ...pour
expliquer toute l'histoire du patient, qu'est-ce qui s'est passé, qu'est-ce
qu'on a essayé comme médicament, pourquoi ça
n'a pas marché, où est-ce qu'on en est maintenant. Tu sais, en psychiatrie,
en clinique de la
douleur, en physiatrie, dans de multiples spécialités, on ne peut pas
dire : S'il vous plaît, voyez mon patient. Il faut remplir les
formulaires.
M. Dubé :
Ah! O.K. Quand vous faites le transfert pour passer au CRDS, que vous me dites,
là, par exemple? C'est ça?
Mme Laberge (Caroline) : Bien, CRDS, c'est un
exemple. Il y en a d'autres qui ont des formulaires spécialisés pour
chacune de leurs petites cliniques. Ça fait que ça, c'est des... de la
paperasse à remplir, là.
M. Dubé :
Puis, ça non plus, vous ne pouvez pas passer par les... vous ne pouvez pas
passer par du personnel administratif?
Mme Laberge
(Caroline) : Non, malheureusement. Puis il faut connaître notre
patient, il faut être capable de détailler
tout ça. Ça fait que ça, c'est le type d'exemple aussi... J'ai un cas, par
exemple, dont je veux discuter avec un collègue spécialiste, bien, il
faut que j'essaie de le faire signaler une demi-journée où je vais pouvoir
prendre son appel, quand il va me rappeler.
Ça fait que, là, c'est des demi-journées. Je ne peux pas être en pleine
clinique puis essayer d'appeler quelqu'un. Ça va me prendre une
demi-heure réussir peut-être à avoir la ligne, parler au spécialiste. Avec le
conseil numérique, ça, c'est grandement facilité, par exemple, on peut poser
des questions asynchrones.
M. Dubé :
Bien, c'est ça. Le Dr Oliva en a parlé, de ça. Je ne sais pas si vous l'avez
écouté quand il était ici, il y a quelques jours, donc, parce que...
Mme Laberge
(Caroline) : Pas encore. Je vais écouter ça ce soir.
M. Dubé :
Comment vous dites?
Mme Laberge (Caroline) : Excusez,
je n'ai pas suivi les travaux de la commission. Je vais les lire... je vais les
écouter ce soir en rafale.
M. Dubé :
Bien, vous allez voir, c'est superintéressant, je vais vous dire, c'est
fascinant. En tout cas, on apprend beaucoup. Mais, non, mais, sérieusement...
Parce que ça, ça me préoccupe. Quand j'entends des gens de votre expertise passer autant de temps administratif,
alors que vous pourriez voir des patients, il va falloir trouver de la...
Puis une des choses que le docteur Oliva m'avait dite, même avant la commission...
Ils ont dit : On est rendus à 600 000, 700 000 rendez-vous
qui ont été pris par les omnis, envoyés vers les spécialistes, qui ne sont pas
répondus. Ça, ça veut dire... Je ne veux pas
vous décourager, là, mais c'est des documents que vous avez complétés, que vous
avez pris des heures à compléter puis qui dorment à quelque part parce
qu'il y a quelqu'un qui ne les traite pas. Ça ne marche pas, là.
Mme Laberge (Caroline) : On sait les délais. Puis,
pendant ce temps-là, les patients, le problème, c'est que leur problème,
il reste là en attendant de voir le spécialiste. Ça fait que, si on attend la réponse
du spécialiste, des fois, on va revoir notre patient une fois, deux fois, trois
fois.
M. Dubé : Mais
ça, je dois vous dire, le p.l. n° 11 ne le réglera
pas, là, on s'entend...
• (15 h 20) •
Mme Laberge
(Caroline) : Non, c'est ça.
M. Dubé :
...je ne pense pas. Mais il faudrait au moins suivre cette inefficacité-là,
surtout que vous me dites que vous passez autant de temps administratif dans
une semaine. En tout cas, moi, j'aimerais ça que vous soyez mon médecin de
famille. Je vous trouverais du temps, là, écoutez... En tout cas, écoutez, je
veux juste vous rassurer que... En tout cas, je pense que je l'ai dit souvent,
puis mes collègues ici, il n'y a pas personne qui est en train de regarder le
p.l. n° 11 pour rajouter de la paperasse. Ça, je
veux... O.K.?
Mme Laberge
(Caroline) : Le guichet d'accès aux médecins de famille, je peux vous
dire que c'en est, de la paperasse.
M. Dubé : Bien,
c'est pour ça qu'il faut l'enlever.
Mme Laberge
(Caroline) : Ce n'est pas très efficace, ce système-là.
M. Dubé : Bien, c'est ça. Bien, effectivement. Puis là on
est rendus à presque 1 million de personnes là-dessus. C'est pour
ça qu'il faut le vider, hein, c'est...
Mme Laberge
(Caroline) : Absolument.
M.
Dubé : Puis je pense... En tout cas, je dis ça, là, parce
que ce sera une autre étape, mais d'avoir de l'intelligence artificielle
sur le GAMF aussi, avant que les gens s'inscrivent... En tout cas, ça, on
pourra... hein, on pourra parler de ça. M. le Président, je... Merci beaucoup.
Puis je m'excuse d'avoir mal prononcé votre nom, Dre Laberge.
Mme Laberge (Caroline) : Pas de
problème. Merci beaucoup.
M. Dubé : Merci beaucoup. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le ministre. Nous
poursuivons avec le député de Nelligan.
M. Derraji : Merci, M. le Président.
Dre Laberge, merci beaucoup pour votre rapport. J'espère que je ne me suis pas
trompé. C'est Dre Laberge, c'est ça?
Mme Laberge (Caroline) : Oui, c'est
bien ça.
M.
Derraji : O.K. Excellent, excellent, excellent. Écoutez, je
ne sais pas par quel bout commencer mon échange avec vous, mais je vais
le prendre du côté du patient. Vous faites partie de la solution, mais j'ai un
problème, j'ai 1 million de patients qui sont en attente d'un médecin de
famille. Il y avait 400 000 en 2018. Je ne veux pas revenir sur les causes, mais j'en suis sûr et certain, que
vous pouvez éclairer les membres de la commission du pourquoi. 2022, le
ministre pense que... son hypothèse, c'est : En ayant accès à des données,
on va régler une partie du problème.
Deuxième partie, et je ne sais pas si vous
l'avez remarqué, l'accès à la première ligne, avec une définition qui inclut
plusieurs professionnels. Donc ça, c'est la mise en contexte.
J'aimerais bien vous entendre sur comment, vous,
en tant que professionnels de la santé, nous, en tant que législateurs, on peut
réduire la liste des patients qui nous écoutent, qui nous suivent maintenant et
qui attendent des résultats. Donc, au-delà du projet de loi n° 11, vous faites
partie de la solution, maintenant, c'est quoi, votre solution pour diminuer la liste
d'attente de 1 million à un taux raisonnable?
Mme Laberge (Caroline) : Merci, M.
le député. Je ne sais pas qu'est-ce qui serait un taux raisonnable. En fait,
dans un monde idéal, tout le monde qui souhaite avoir un médecin de famille
doit en avoir un. On a présenté, dans notre mémoire puis dans l'allocution que
je viens de faire, plusieurs avenues qu'on trouve absolument prometteuses. Puis
c'est sûr que le travail en équipes interprofessionnelles est le gros du bout.
Un petit mot, peut-être, pour expliquer
l'augmentation des patients qui s'inscrivent, qui se sont inscrits au guichet
dans les dernières années. Il y a possiblement la meilleure connaissance du
guichet, donc le fait de savoir que, si on n'a pas de médecin de famille, on
peut s'inscrire sur ce guichet-là. C'est une des possibilités qui cause
l'augmentation, et ça, c'est une bonne nouvelle.
L'autre aspect, par contre, c'est qu'il y a
aussi plusieurs médecins de famille qui ont pris leur retraite. Puis vous
n'êtes pas sans savoir qu'une grosse proportion de la cohorte de médecins de
famille arrive à un âge très raisonnable, proche de la retraite. Je ne me
souviens pas des chiffres exacts, je ne veux pas m'avancer dans les
statistiques, mais on a... on va avoir un gros problème dans les prochaines
années si les gens prennent leur retraite subitement, soit parce qu'ils sont
trop fatigués parce qu'on leur demande une productivité qu'ils n'ont plus le
goût de faire rendus à 65, 67 ans ou encore s'ils sentent qu'ils n'ont pas
de relève.
Ça fait que c'est crucial de former la relève
puis de permettre cette transition douce là pour éviter que les gens se ramassent que leurs médecins partent à la
retraite, qu'il n'y a personne dans la clinique qui peut les reprendre parce que
tout le monde a des grosses, grosses cohortes de patients, qu'on n'a pas de
support, par exemple, des infirmières.
M. Derraji : Je peux vous interpeler
sur ce point?
Mme Laberge (Caroline) : Oui.
M. Derraji : Vous êtes à la tête du
Collège québécois des médecins de famille. Demain, vous êtes ministre de la Santé... Hier, ça m'a surpris, une réponse,
qu'on n'a aucune information si un médecin part à la retraite. On n'a pas
d'information, donc, après deux ans...
Mme Laberge (Caroline) : Qui n'a pas
l'information?
M. Derraji : ...pas de
facturation... Les données, en fait, les...
Mme
Laberge (Caroline) : Mais
c'est quand même connu. Le Collège
des médecins du Québec tient le
compte de qui est retraité puis qui est activement en pratique.
M.
Derraji : Oui, le collège.
Mais, je dirais, au niveau du ministère de la Santé, s'il n'y a pas de la
facturation, on ne peut pas savoir s'il y a des patients orphelins dans une
région. Donc, en fait, j'essaie, avec vous, de savoir comment nous, on
peut naviguer dans ce projet de loi. Mais, de l'autre côté, j'entends le
ministre et le ministère qui nous informent qu'on n'a pas assez de données pour
pouvoir agir en amont.
Je
comprends l'attractivité. C'est un bon point. La mauvaise presse par rapport à
la médecine familiale, je vous le donne. Pendant les trois dernières années,
mais plusieurs années, il y a des gens qui ne s'inscrivent pas dans la
discipline en tant que médecins de famille. Il y a aussi les départs à la
retraite. Mais on n'a pas assez de données par
rapport... Et je comprends le travail d'un médecin de famille entre GMF,
hôpital. Il y a beaucoup de choses. Vous faites beaucoup de choses. Mais, au bout de la ligne, ce qui nous guide
à l'intérieur de cette commission, j'ai 1 million de patients qui
veulent et... qui nous suivent et qui veulent avoir les réponses.
Donc, vous êtes,
demain, à la place du ministre. Ce serait quoi, votre première action, si vous
me dites aujourd'hui que... Écoutez, moi, j'ai lu votre rapport. J'ai vos
propositions. J'ai lu surtout les enjeux du p.l. n° 11.
Donc, j'ai l'impression qu'on ne s'y prend pas de la bonne façon. Donc, si on
veut aller de la bonne façon, ce serait quoi, la bonne façon, selon vous?
Mme Laberge
(Caroline) : En fait, la première des choses, ce serait peut-être
d'arrêter de faire miroiter qu'un coup de baguette magique va soudainement tout
régler. Quand on a l'impression que le problème, il est très simple puis qu'on
peut le régler par une réponse simple, bien, en général, c'est que cette
réponse-là, elle est fausse. Ça fait que c'est... Notre système de santé, il
est excessivement complexe, et puis le résultat où on en est aujourd'hui, c'est l'évolution des 20 dernières années,
des 30 dernières années qui l'a amené aussi ici aujourd'hui. Notre
organisation particulière...
M. Derraji :
Oui, mais on ne peut pas refaire... On ne peut pas, malheureusement, refaire le
passé, mais je regarde vers le futur. O.K. Ça, c'est un fait. Maintenant, j'ai
1 million de patients. Vous êtes à la place du ministre. On vous
interpelle. Comment on peut réduire la liste d'attente de ces patients? Si on
ne s'y prend pas avec ce que le ministre propose aujourd'hui, comment, comment
on peut baisser ça, cette liste?
Mme Laberge
(Caroline) : En fait, je ne sais pas si vous êtes au courant, et les
autres membres de la commission, dans le
libellé de la RAMQ, jusqu'à il y a tout récemment, c'était spécifiquement
indiqué que le médecin devait faire lui-même tous les actes, et cette
prémisse-là empêchait tout travail de délégation et tout travail en équipe. Ça a été modifié récemment, puis le travail
interprofessionnel commence à s'organiser un peu plus dans les GMF au cours
des cinq à 10 dernières années. C'est une belle percée, mais il faut
l'augmenter davantage.
M. Derraji :
Excellent. Donc...
Mme Laberge (Caroline) : Ça fait que ça, c'est une volonté politique que
ça prend, de dire que c'est ça, la solution.
M. Derraji :
Donc... Excellent. Donc, je reformule. Pour vous, l'accès à la première ligne,
ce n'est plus l'affaire d'un médecin de famille ou un médecin généraliste dans
un GMF, c'est plus un ensemble de professions, l'ensemble des professions de la
santé. Est-ce que j'ai bien...
Mme Laberge
(Caroline) : En fait, on trouve que c'est important que tout le monde
ait accès à un médecin de famille, mais ce médecin de famille là ne doit pas
travailler tout seul, il ne doit pas travailler tout seul dans son sous-sol,
ça, c'est sûr. Il doit travailler en équipe avec d'autres médecins et avec
d'autres professionnels aussi pour le supporter. Par exemple, quand je
travaille avec une infirmière, si on fait un suivi d'enfant ensemble, je peux
voir le petit bébé à trois semaines, l'infirmière peut le voir à deux mois, je
peux le revoir seulement à six mois s'il y a quelque chose. Les parents savent
qu'ils peuvent appeler. Ils peuvent prendre un rendez-vous entre-temps. Ça
permet de libérer des plages horaires dans le bureau du médecin pour vraiment
voir les cas, par exemple, des personnes qui seraient malades, éviter de faire
tous les rendez-vous de suivi quand la situation, elle est stable. Ça peut être
fait super bien par les infirmières cliniciennes.
M. Derraji :
Oui. Je prends ce que vous venez de dire et je vais vous relire le nom du
projet de loi : Loi visant à augmenter l'offre de services de première
ligne par les médecins omnipraticiens et à améliorer la gestion de cette offre.
Pensez-vous que même le nom du projet de loi met beaucoup de pression sur vos épaules,
alors que vous venez de me dire que la première ligne, ce n'est pas juste moi,
ce n'est pas juste moi? Donc, si on veut envoyer un message, le législateur
doit envoyer un message, c'est que la première ligne, ce n'est plus
l'exclusivité d'un médecin de famille. Est-ce que vous partagez ce constat?
Mme Laberge (Caroline) : En fait, je trouve que le titre, il semble
annonciateur d'un projet superintéressant. Puis après, quand on lit le projet, il n'a pas l'air de répondre au
titre. Puis l'autre problème dans le titre, effectivement, comme vous le
dites, c'est de faire reposer la responsabilité uniquement sur les épaules des
médecins. Puis j'irais même un petit peu plus loin. Je suis au Collège
québécois des médecins de famille. On est des médecins de famille. On est plus
que des omnipraticiens, on est des spécialistes en médecine de famille.
M. Derraji :
Absolument, et vous avez raison. Combien il me reste, monsieur...
Le Président (M.
Provençal)
: Une minute.
M.
Derraji : Une minute, oui. Dernière question par rapport aux données.
J'ai senti de l'inquiétude. J'ai senti... Le
ministre a utilisé «presser le citron». Moi, j'aime le citron, je le presse
assez souvent pour boire le jus. Mais vous pensez qu'on vous presse et qu'on n'est
pas en mode collaboration... mais pas en mode collaboration avec vous?
Mme Laberge
(Caroline) : La façon dont le projet de loi est libellé, on ne lit pas
beaucoup de collaboration dans cette formulation-là. Tout à l'heure, le
ministre Dubé proposait des publicités du gouvernement. Puis je pense que ce
serait une excellente idée, de un, pour outiller les Québécois à savoir quand
consulter puis quand gérer leurs problèmes de santé.
Puis, de l'autre, je
pense que ça prend vraiment des publicités avec un ton inclusif du ministre. Il
faut qu'il soit fier des médecins de famille, il faut qu'il soit fier de la
première ligne au Québec. Parce que, peu importe ce qu'on en dise puis les ratés
qu'on observe, il est excellent, notre système de santé. On est parmi les
meilleurs systèmes de santé en Amérique du Nord, puis des gens de partout dans
le monde s'inspirent du système de santé québécois. Donc, c'est sûr qu'on peut
le bonifier, c'est sûr qu'on peut l'améliorer, mais je crois qu'on peut être
superfiers de ce qu'on a comme système de santé au Québec.
• (15 h 30) •
M. Derraji : Vous
avez raison de parler, de partager, parce que j'ai l'impression, comme vous,
depuis que je suis dans ce Parlement, que le
Québec n'a rien fait pour le système de santé. Oui, on peut l'améliorer, mais,
à certains moments, il faut reconnaître, au minimum, qu'on a quand même
un bon système de santé et il faut en être fiers. Je vous remercie, Dre
Laberge. Merci pour votre passage en commission.
Mme Laberge
(Caroline) : Merci, M. le député.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci,
M. le député. La parole est maintenant au député de Rosemont.
M. Marissal :
Merci, M. le Président. Bonjour... Dre Laberge, pour ne pas me tromper à mon
tour. Moi, je lis vos recommandations, notamment, puis j'ai lu le reste aussi,
là, évidemment. Là, j'ai l'impression, et c'est une impression assez générale,
depuis trois... Deux jours? On est quoi aujourd'hui? Jeudi? Ça fait trois
jours, hein, qu'on fait ça? Ça fait trois jours, oui. En plus d'être la
dernière... C'est toujours ingrat, on s'en excuse. On est peut-être un peu
fatigués. En tout cas, je vais parler pour moi. C'est une impression assez
générale que j'ai, là, que pas mal tout le monde s'entend sur la destination,
mais plusieurs, dont vous, ont un problème avec le véhicule, le véhicule étant
le projet de loi n° 11, évidemment. Puis effectivement c'est vrai que ça peut
porter... On peut avoir l'impression que le véhicule
n'est peut-être pas tout à fait adapté ou même, pire, qu'il va peut-être nous
amener ailleurs que la destination voulue. Je pense bien vous lire
là-dedans. Puis vos collègues, là, de la FMOQ aussi nous ont pas mal dit ça.
Puis il y a comme un
éléphant dans la pièce, ici, là. Puis moi, je l'ai dit, je le redis, là, je ne
parle pas pour les médecins de famille, pas
plus que pour les spécialistes. Vous avez les moyens de vous faire entendre.
Moi, je travaille pour la population, en particulier les gens qui m'ont élu,
mais pour tout le monde ici, à l'Assemblée nationale. Par contre, je
n'ai pas tellement envie non plus de vous casser du sucre sur le dos, là, puis
de faire une bataille politique contre les médecins. Je pense que ce serait
contre-productif. Ça a été essayé, d'ailleurs, dans le passé, puis on a vu ce
que ça a donné.
Mon collègue vient
d'en parler un peu, mais je vous en reparle. Vous dites, ici : «Le
ministre peut utiliser les renseignements recueillis en application des
deuxième et troisième alinéas à toute autre fin en plus de celle qui y est
prévue, lorsque cette utilisation est nécessaire à l'exercice de ses
fonctions.» Bon, tu sais, quand je vous dis qu'il y a un éléphant dans la
pièce, là, c'est la cueillette, et le traitement des données, et même la nature
de ces données. Je vous laisse le temps
qu'il me reste, c'est-à-dire probablement autour d'une minute et demie, pour
répondre à ça : Quelles sont vos inquiétudes, là, spécifiquement
quant à la cueillette de données? Et comment peut-on faire autrement?
Mme Laberge
(Caroline) : Bien, avant de définir quelle cueillette de données est
nécessaire, il faut savoir qu'est-ce qu'on a besoin comme information puis
qu'est-ce qu'on va faire avec les données qu'on va recueillir. On peut
recueillir des données à l'infini, mais, si on ne les interprète pas
adéquatement, bien, ça ne sert à rien. Si ça donne seulement un portrait, par
exemple, du nombre de rendez-vous par demi-journée par un médecin X, Y ou Z,
est-il nommé ou pas dans les données, on ne le saura pas, c'est sûr que ça peut
être perçu comme menaçant de la part des médecins.
On n'est pas...
(panne de son) ...on travaille très fort. S'il y a des gens qui ont des
horaires qui ont l'air légers, s'ils ont
juste quatre patients par demi-journée, c'est peut-être parce que leurs
patients sont d'une complexité incroyable, puis, plutôt que de les faire
revenir 10 fois, ils vont régler en une fois tous leurs problèmes de
santé. Donc, je pense qu'il faut vraiment définir où est-ce qu'on s'en va, de
quelle information on a besoin.
Puis je trouve ça
fascinant et très étonnant, à vrai dire, que le ministère n'ait pas les données
de qu'est-ce que les médecins font, parce que, pour notre part, comme médecins
sur le terrain, on passe notre temps à dire à tout plein de monde qu'est-ce
qu'on fait, où on est. Les établissements savent sur quelle liste de garde on
est, le DRMG sait qu'est-ce qu'on fait, la FMOQ nous demande qu'est-ce qu'on fait,
le Collège des médecins nous dit qu'est-ce qu'on fait. À chaque année, on répond à des sondages sur notre
pratique puis qu'est-ce qu'elle implique. Ça fait que c'est possiblement
par la loi de la confidentialité que ces
données-là ne se rendent jamais au bon endroit. Mais je pense que je comprends,
je comprends la demande légitime du
ministère de la Santé de savoir... d'avoir accès aux bonnes données pour savoir
ce que font les gens. J'avais l'impression, bien naïvement peut-être...
Je ne travaille pas au DRMG de ma région, mais je pensais que le DRMG les
avait, ces données-là, puis, dans ma tête, le DRMG fait partie du ministère.
Ça
fait que, tu sais, est-ce que l'éléphant dans la pièce, c'est que le système de
santé est très, très, très complexe puis qu'il y a tellement de ramifications
et de sous, sous, sous-étages que finalement personne ne sait ce qui se passe à
quel étage de la bâtisse? Il vient peut-être plus de là, le problème, que de
donner l'accès à l'horaire minute par minute du médecin quand il fait du
bureau.
M. Marissal :
O.K. Oui, il est grand, le mystère de l'informatique, au ministère de la
Santé, ça, c'est un fait. Ça fait longtemps qu'on l'a remarqué. Je vous
remercie, Dre Laberge.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci
beaucoup, M. le député. Alors, on conclut cet échange avec le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau :
Merci beaucoup, M. le Président.
Merci, Dre Laberge. Moi, je trouve que c'est une conclusion heureuse à ces
trois jours de consultations. Puis j'aimerais vous demander quel est votre état
d'esprit à l'heure actuelle. Vous
avez peut-être entendu les... tous ceux qui ont défilé à la commission. Vous
représentez les médecins de famille. Est-ce que vous êtes optimiste pour
la profession, en quelques mots?
Mme Laberge (Caroline) : Oui. En fait, je suis
très optimiste pour la profession. Je ne sais pas si vous l'avez senti, mais j'adore ma profession. Je trouve qu'on
a le plus beau métier du monde. Je suis gratifiée à tous les jours par mes patients, par mes collègues. C'est une
spécialité extraordinaire. Et puis je pense... Je suis confiante et je suis
contente du ton du ministre, si je veux... le permettre.
Maintenant, il va
juste falloir que toute cette bonne volonté se traduise par une affirmation
politique de ce qu'on veut, puis de faire attention aux écrits, parce
qu'au-delà de la bonne volonté, ce sont des écrits qui vont rester. Puis les libellés du projet de loi n° 11,
comme de d'autres projets de loi, comme, de même, tout le manuel de la RAMQ,
c'est d'une complexité épouvantable, et puis, au final, ça n'envoie pas le bon
message, ces mots-là.
M. Arseneau :
Vous avez entendu la présentation, tout à l'heure, des gens de Rimouski,
peut-être, du CISSS du Bas-Saint-Laurent. Est-ce que vous pensez que ce
modèle-là est transposable? Parce que la FMOQ semble dire que le guichet d'accès pertinence ou le réseau
accès pertinence, c'est intéressant, tout ça, ça repose sur la collaboration,
la confiance. Vous faites... Vous partagez cette opinion-là?
Mme Laberge (Caroline) : Absolument. Je sais que
c'est en train de se développer ici, dans la Capitale-Nationale. Je
connais bien la personne qui est responsable de ce dossier-là dans le CIUSSS de
la Capitale-Nationale. C'est un projet qui
est extrêmement porteur, qui pourrait être une piste de solution temporaire
pour les gens qui sont sans médecin de
famille actuellement puis inscrits sur le guichet. Mais, dans un monde idéal,
pour dégager de la place dans les horaires des médecins pour voir les
patients qui n'ont pas de médecin de famille puis, idéalement, pour les suivre
par la suite, c'est que ce triage-là... ou
cette décision-là de la pertinence devrait être appliquée à tous les patients,
là, qu'ils aient ou pas un médecin de famille. C'est la question qu'on
devrait se poser à la base : Avons-nous besoin d'un rendez-vous médical
pour cette question-là ou cette condition-là?
M. Arseneau :
Bien, c'est ça, j'ai peu de temps, là, il y a une différence entre avoir un
médecin de famille puis rencontrer son médecin de famille. Tranche de vie,
depuis trois ans, j'ai un médecin de famille. Je ne l'ai jamais rencontré.
Mais, en ayant un médecin de famille, j'ai réussi à pouvoir rencontrer une IPS,
qui fait très bien le travail à chaque fois, et je l'ai rencontrée à quelques
reprises. Il me semble qu'il y a une question de pertinence là.
Est-ce que vous étiez
surprise de voir que, dans les statistiques de Rimouski, 50 % des cas sont
détournés vers d'autres spécialistes,
d'autres professionnels? Puis, l'idée d'étendre ça à ceux qui sont inscrits à
un médecin de famille, est-ce que vous voyez ça d'un bon oeil?
Mme Laberge
(Caroline) : Absolument, absolument. Ce serait formidable. C'est sûr
que, si le médecin de famille... On essaie de
le faire, là. Je ne sais pas si vous êtes familier avec le concept d'accès
adapté. Moi, mes rendez-vous offrent, sur une période de deux à trois
semaines... Mes patients peuvent toujours appeler pour prendre un rendez-vous
avec moi. Si je n'ai plus de plage disponible, la secrétaire m'envoie un petit
message pour dire : Oh! il manque de
places un petit peu ces temps-ci, et puis j'offre des plages supplémentaires.
Puis, s'il y a des questions dans la
journée même, on a un système de dépannage aussi pour les urgences urgentes,
urgentes, des journées où je ne suis pas au bureau, comme aujourd'hui.
Ça
fait que c'est sûr que cette... bien, cette notion-là nécessite de voir pourquoi
la personne veut voir son médecin de famille. Puis, par exemple, si
c'est pour un problème de mal de dos, la secrétaire, elle peut diriger le
patient au physiothérapeute avec qui je
travaille. J'ai des patients, des fois, qui se blessent à une épaule, qui se
blessent dans le dos, qui vont rencontrer directement la
physiothérapeute, puis que je vais les voir dans un deuxième temps, seulement
s'il y a une condition médicale à évaluer ou s'ils ont besoin de prescription
de quelque chose.
M. Arseneau :
Merci. Merci beaucoup.
Mme Laberge
(Caroline) : Merci à vous.
Le Président (M.
Provençal)
: Dre Laberge,
je vous remercie pour votre participation, votre contribution à nos travaux et
pour les échanges que nous avons eus avec vous.
Mémoires déposés
Avant de conclure les auditions, je procède au
dépôt des mémoires des organismes et des personnes qui n'ont pas été entendus
lors des auditions publiques.
Je vous remercie pour votre collaboration. Je
tiens surtout à vous féliciter sur le ton qu'on a eu pendant ces trois jours
d'échanges.
La
commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux au mardi
8 février, à 9 h 45, où elle entreprendra un nouveau
mandat. Merci à tous. Bon retour dans vos petits coins. Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 15 h 40)