Journal des débats (Hansard) of the Select Committee on the Impacts of Screens and Social Media on Young People’s Health and Development
Version préliminaire
43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Thursday, September 12, 2024
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Vol. 47 N° 1
Special consultations and public hearings on the Impacts of Screens and Social Media on Young People’s Health and Development
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11 h 30 (version non révisée)
(Onze heures trente-huit minutes)
La Présidente (Mme Dionne) : ...Commission
spéciale sur les impacts des écrans et des réseaux sociaux chez les jeunes
ouverte.
Je vous souhaite la bienvenue, et je
demande à toute personne dans la salle de fermer son cellulaire. Merci
beaucoup.
Alors, la commission spéciale est réunie
afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur
les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement
de nos jeunes.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Non, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : D'accord.
Comme la séance a débuté un peu plus tard, y a-t-il consentement pour poursuive
nos travaux au-delà de l'heure prévue, soit vers 12 h 15, 12 h 20?
Des voix : Consentement.
La Présidente (Mme Dionne) : Consentement.
Donc, je souhaite la bienvenue à ceux et celles qui casseront la glace avec
nous pour ces travaux, donc la Fédération des comités de parents du Québec.
Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour nous faire votre exposé et, par la suite, nous allons procéder à la
période d'échange avec l'ensemble des membres de la commission.
Donc, je vous cède la parole, vous pouvez
commencer avec une présentation pour chacun.
Mme Laviolette (Mélanie) :
Merci, Mme la Présidente. Bonjour aux membres de la commission. Merci de nous
recevoir. Mon nom est Mélanie Laviolette, présidente de la Fédération des
comités de parents du Québec, parent bénévole depuis 12 ans maintenant,
impliquée dans les instances scolaires. Je suis accompagnée de Jérôme Maltais, vice-président
de la fédération, qui est un membre parent bénévole depuis 14 ans
maintenant, de Corinne Payne, directrice générale de la fédération, et de
Stéphanie Rochon, directrice des communications et des affaires publiques.
• (11 h 40) •
Depuis 50 ans, notre fédération a
pour mission de promouvoir et de défendre les droits et les intérêts des
parents et des élèves qui fréquentent l'école publique québécoise. La FCPQ
soutient ses membres, soit les comités de parents, de 90 %...
Mme Laviolette (Mélanie) : ...des
centres de services scolaires. Des milliers de parents québécois s'impliquent
dans les instances de participation du milieu scolaire telles que le comité de
parents, les conseils d'établissement, le Comité consultatif des services aux
élèves ayant des besoins particuliers, et ce dans un seul but, favoriser la
réussite des élèves.
D'entrée de jeu, je tiens à vous remercier
d'avoir créé cette commission de façon transpartisane et d'avoir l'intention
d'aller visiter des écoles dans plusieurs régions pour parler aux jeunes.
L'impact des écrans et des réseaux sociaux est un sujet qui intéresse
grandement les parents et qui les inquiète à la fois.
Avant la pandémie de COVID-19, on parlait
peu des écrans, à la fédération, et on y pensait relativement peu en tant que
parents, également.
En mai 2020, plus de
43 000 parents ont participé à un sondage en ligne de la fédération.
La plupart sont préoccupés par le peu d'encadrement qu'ils sont en mesure
d'offrir à leurs enfants dans un contexte d'enseignement à la maison, ne se
sentent pas suffisamment outillés pour comprendre et gérer les outils
nécessaires à cet apprentissage.
À partir de 2021, les parents nous font
part de leurs préoccupations concernant le temps d'écran. Les parents ont
identifié le temps d'écran comme leur principal défi en 2021, 2022, 2023
également dans un sondage réalisé avec la firme Léger pour la FCPQ.
Encore une fois en janvier 2024, dans une
commission nationale réalisée avec l'Association des comités de parents
anglophones du Québec et Dre Mélissa Généreux, les résultats de cette enquête
démontrent que les jeunes qui passent 4 h et plus par jour sur leurs
écrans sont deux fois plus enclins à avoir une faible qualité de vie.
Nous partageons aujourd'hui les constats
et les conclusions des parents tirés des enquêtes déployées à l'échelle
provinciale et des ateliers réalisés à notre conseil général, où siègent des
parents délégués de toutes les régions du Québec. Nous sommes... Nous nous
sommes concentrés sur les sujets qui sont dans notre sphère d'action, comme les
décisions prises dans les milieux scolaires, selon notre expérience de parents
engagés.
Vous recevrez plusieurs scientifiques et
experts ici au cours des prochaines semaines. Et c'est extrêmement important
car nous entendons de nombreuses opinions concernant les impacts des écrans et
des réseaux sociaux dans l'espace public et dans les médias, et il est parfois
difficile de différencier le vrai du raccourci. Nous nous fions au consensus
scientifique, lorsqu'il existe, et nous nous attendons à ce que les
recommandations formulées à la suite de la commission soient basées sur la
science et soient prises dans le meilleur intérêt des enfants.
D'abord, les parents veulent faire partie
de la solution. Les parents ne veulent pas seulement être informés lorsque la
décision est prise. Ils ne veulent pas être considérés comme des problèmes à
régler. On veut être impliqués. On veut travailler ensemble pour trouver des
mesures qui fonctionnent et qui seront utiles pour aider nos enfants et pour
les protéger des personnes qui leur veulent du mal, mais également des
mégacompagnies qui les voient seulement comme des numéros.
On a beaucoup parlé dans la dernière année
de la responsabilisation des parents, que ce soit par rapport à la discipline,
à la prévention de la violence et de l'intimidation, même des lunchs. Eh bien,
quand les parents sont les bienvenus, sont inclus et sollicités pour collaborer
et prendre des décisions, sont traités en participants et non en spectateurs,
l'adhésion et l'appropriation du projet sont facilitées.
C'est vrai pour les parents, c'est tout
aussi vrai pour les jeunes. Quand on prend le temps de consulter les parents,
on apprend que des jeunes ayant des besoins particuliers ou des enjeux de santé
se sentent stigmatisés parce qu'ils peuvent utiliser leur ordinateur pour faire
des travaux ou garder leur cellulaire ou leur montre pour suivre leur glycémie
ou la pulsation cardiaque, alors que les autres jeunes n'ont pas droit d'avoir
accès à ces outils. C'est un problème à ne pas prendre à la légère quand une
élève pense laisser sa montre cardiaque dans son casier pour ne pas être
pointée du doigt.
Mais parlons d'initiatives ayant eu la
contribution des parents. Une école a décidé, en collaboration avec son conseil
d'établissement, d'interdire les cellulaires sur deux étages, mais de le
permettre sur le premier. Une autre école secondaire a interdit les cellulaires
dans l'école pour les élèves de premier cycle, mais un téléphone en
libre-service est disponible au secrétariat en cas de besoin. C'est un projet
qui a été mis en place parce que l'école a écouté les préoccupations mais
également les propositions des parents. Le Comité de parents des Bois-Francs a
exprimé sa préoccupation auprès de son centre de services scolaire concernant
l'utilisation des écrans récompenses. Cette préoccupation a mené à
l'élaboration d'un guide présentant des pistes d'action et des alternatives à
cette pratique. En conseil général, les délégués de la FCPQ avaient des
réactions partagées à la possibilité de recommander d'interdire les écrans
récompenses dans les écoles. Les discussions se sont plutôt orientées sur la
nécessité de les encadrer et éviter qu'ils soient utilisés de façon exagérée à
de nombreux endroits, selon les parents. Les écrans récompenses devraient
rester exceptionnel. Les parents souhaitent privilégier d'autres activités lors
des loisirs, comme des activités sportives, artistiques ou des jeux de société.
Le guide du centre de services des...
Mme Laviolette (Mélanie) : ...le
service des Bois-Francs peut être une inspiration, mais c'est important de
laisser chaque milieu jouer son rôle décisionnel.
M. Maltais (Jérôme) : Donc,
laissez chaque milieu jouer son rôle décisionnel et respecter la...
subsidiarité - excusez - c'est une recommandation que la fédération répète
depuis plusieurs années. Les décisions doivent être prises près des élèves
parce que chaque milieu a ses besoins et ses particularités. Les décisions ne
devraient pas être prises de façon mur à mur pour une école de 30 élèves en
Gaspésie et une polyvalente de 2500 élèves sur l'île de Montréal, que ce soit
pour les écrans et les cellulaires ou pour la discipline et toute autre règle
de conduite.
Nous avons d'ailleurs une instance pour
prendre ces décisions : le conseil d'établissement. Le conseil... La Loi
sur l'instruction publique prévoit l'institution d'un conseil d'établissement
dans chaque école publique. Le conseil d'établissement est composé de parents,
de membres du personnel ainsi que des élèves pour les écoles secondaires. Il
détermine les grandes orientations de l'école et prend des décisions qui ont
des impacts directs sur la vie quotidienne des élèves. Il faut mieux connaître
et respecter son rôle. De nombreux conseils d'établissement ont déjà adopté des
mesures encadrant les écrans et les cellulaires dans leurs écoles, basées sur
la réalité de leur milieu. Qu'est-ce qu'on leur communique comme message, si on
prend des décisions nationales qui annulent ces décisions locales? Au-delà des
décisions locales ou nationales, les parents privilégient l'éducation plutôt
que l'interdiction. Et, quand on dit éducation, ça ne veut pas seulement dire à
l'école, on parle de l'école, de la maison ainsi que de la société en général.
Les parents sont les premiers éducateurs
de leurs enfants. Si vous êtes parents, vous le savez tous comme moi. Nous nous
devons d'être informés sur les questions d'éducation numérique pour pouvoir
être des modèles pour nos enfants. Mais les parents ne se sentent pas tous à
l'aise dans ce rôle. Nous avons demandé aux parents s'ils se sentaient
suffisamment outillés pour discuter des différents enjeux avec leurs enfants.
Le top trois des sujets pour lesquels ils ne se sentent pas suffisamment
outillés sont : prévenir la cyberdépendance, protéger la vie privée sur
les plateformes numériques et encadrer l'utilisation des réseaux sociaux. Des
parents nous ont dit : C'est difficile de discuter, contrôler et encadrer
quelque chose que je ne connais pas, auquel je n'ai pas accès. Et, même en tant
que parent, je me sens dépendante de la technologie et pressée de répondre.
C'est un peu hypocrite de dire aux enfants de rester loin des écrans. La
prévention, la formation, l'éducation pour tous est de mise si nous souhaitons
que nos enfants apprennent à utiliser les outils numériques de façon saine et
éthique.
Nous avons d'ailleurs... Excusez-moi...
La Présidente (Mme Dionne) : Juste...
Moins d'une minute.
M. Maltais (Jérôme) : Pas de
problème.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
M. Maltais (Jérôme) : J'y vais
assez vite. Il faut changer la culture et les discours. Ce qui se passe à
l'école entre 7 h et 15 h et ce qui se passe à la maison entre 15 h et 7 h, ce
n'est pas si différent. Il faut arrêter de considérer l'école et la maison
comme étant totalement séparées et il faut que tous les adultes travaillent
ensemble dans l'intérêt des enfants.
Mme Laviolette (Mélanie) : En
bref, voici nos quatre grandes conclusions. Les parents et les enfants doivent
faire partie de la solution, notamment en les consultant et en les impliquant
dans les décisions pour les milieux scolaires. En deux, le recours aux écrans
récompenses doit être encadré dans les écoles. En trois, les décisions
influençant la vie des élèves doit respecter les besoins et les particularités
des milieux ainsi que les pouvoirs des conseils d'établissement. Et,
finalement, l'éducation et la sensibilisation aux écrans, aux réseaux sociaux et
leur utilisation saine et éthique doivent être privilégiées plutôt que
l'interdiction. Les écrans sont là pour rester. Éduquons nos enfants et
éduquons-nous pour mieux apprendre à les utiliser de façon positive. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup pour ces échanges. Donc, nous disposons maintenant de 35 minutes pour
les périodes d'échange de questions. Je vous rappelle, c'est une commission qui
est transpartisane, donc, ce sera à la discrétion de la présidence. J'ai déjà
la députée de Hull qui m'avait signifié pouvoir poser une question, puis on ira
avec le député de Marquette, et ainsi de suite. Merci.
Alors, Mme la députée, la parole est à
vous.
• (11 h 50) •
Mme Tremblay : Bonjour.
Alors, je vous remercie d'être là. Vous êtes le premier groupe qu'on...
Mme Tremblay : ...cette
importante commission puis je pense que c'est important de le souligner. Puis
vous l'avez dit vous-même, vous avez un rôle important, puis vous confiez aux
écoles, chaque matin, vos jeunes, vos enfants, aux enseignants, aux
enseignantes puis à l'ensemble du personnel de l'école. Ça fait que d'être ici
le premier groupe ce matin, je pense que c'est d'autant plus important et vous
l'avez signifié, vous voulez collaborer dans tout le processus qu'on met en
place à l'heure actuelle. Vous dites que, bon, c'est important de privilégier
l'éducation, la sensibilisation aux écrans, ça va aussi... Puis vous connaissez
très bien, hein, la mission de l'école québécoise, hein, qui est d'instruire,
socialiser, qualifier. Alors, et vous avez fait un important travail de
terrain. Et quand on parle de sensibiliser les jeunes, les parents, la société
a tout ce rôle-là, des écrans, puis on va aborder ça plus large, différent,
plus largement. Moi, ce que j'aimerais savoir, les parents, parce qu'il faut,
il faut qu'il y ait une cohésion, hein, entre l'école, les parents et, vous
savez, on envoie beaucoup d'informations aux parents, vous êtes surchargés
d'informations. Les politiques de l'école, le code de vie, là bon, les
règlements, bon, peu importe. Moi, ce que j'aimerais savoir : Comment...
Comment on fait pour atteindre les parents, justement parce que vous êtes des
parents impliqués. Il y a des parents qui sont plus extérieurs, qui s'engagent
moins pour différentes raisons. Mais comment on peut travailler? C'est quoi vos
solutions que vous proposez parce que vous êtes impliqué depuis longtemps pour
justement, quand on prend des décisions, puis on va prendre des peut-être,
bien, on verra qu'est-ce qui va en ressortir au final. Puis vous voulez être
impliqués là-dedans? Alors, comment on atteint ces parents-là, faire ensemble
que tout le monde... la meilleure façon finalement de difficulté... de
divulguer l'information, aux parents de les atteindre? Et, en second lieu, dans
ma question, j'aimerais savoir : moi ce que je comprends, c'est qu'on peut
avoir des grandes balises, mais vous voulez qu'on laisse le choix aux écoles,
les couleurs, les modalités finalement d'application. C'est ce que je
comprends. Merci.
Mme Laviolette (Mélanie) :
Merci. En fait, je crois que le meilleur moyen d'acquérir l'adhésion des
parents dans un projet comme celui-là, c'est de bien faire comprendre les
raisons derrière. Quand on fait juste dire: on ne peut pas. C'est un peu comme
avec nos enfants, on ne peut pas répondre juste «parce que». Donc, les parents
ont besoin d'avoir les raisons qui motivent cette... cette... cette règle-là.
Mieux connaître les codes de vie, c'est important. Comme vous le disiez en
début d'année scolaire, on reçoit une quantité astronomique d'informations,
peut-être de s'assurer que ça soit dans un envoi séparé ou un envoi différent,
et pas dans une dizaine de pièces jointes qu'on peut avoir à l'intérieur d'un
même courriel. Je comprends que c'est plus de travail, mais c'est une bonne
façon de le distinguer. On parlait des conseils d'établissement. Les parents
siègent sur ces conseils d'établissement là, de promouvoir les assemblées
générales également auprès de l'ensemble des parents. On sait que la participation
est difficile, mais ça reste un bon moyen de faire passer l'information, de
faire comprendre ce qui se passe dans les milieux scolaires de nos enfants et
d'aller chercher cette adhésion-là également. Puis rappelez-moi juste votre
sous-question parce que je réfléchissais à la première, en fait...
Mme Tremblay : Oui, c'était
en lien, là... parce que j'ai dit beaucoup d'informations... mais c'était en
lien, ma sous-question, avec les... Vous voulez les grandes balises, hein? Si,
mettons, on prend des décisions collectives, là, mais moi, ce que je comprends,
puis vous l'avez dit en Gaspésie versus une école de Montréal de trois... ça
fait que moi, je veux bien comprendre votre rôle après. Comment vous voulez...
vous laissez des couleurs, finalement, des modalités d'application, c'est ce
que je comprends.
Mme Laviolette (Mélanie) :
Exactement. Tout à fait, pardon. Alors, les conseils d'établissement sont les
mieux placés pour comprendre la réalité terrain. Il y a des enseignants qui
aiment utiliser les outils électroniques dans un cadre pédagogique où ça
peut... ça peut être intéressant également. On a des réserves au niveau de
l'écran récompense parce qu'on ne comprend pas la valeur pédagogique ou
d'enseignement derrière cela. Cependant, chaque milieu connaît ses jeunes et
c'est important de parler avec eux également, de parler avec les parents et de
comprendre, est-ce qu'il y a des réels enjeux pour eux sur l'utilisation, la
surutilisation des écrans dans la vie quotidienne. Et ce travail-là, en partenariat
entre les écoles et les parents, va permettre de baliser l'ensemble des
secteurs où nos jeunes se retrouvent et pas juste l'école ou pas juste la
maison.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci. Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à notre vice-président, M.
le député de Marquette.
M. Ciccone :
Merci beaucoup. Merci beaucoup pour votre exposé. Je ressens une fébrilité dans
l'air parce qu'il y a beaucoup de parents ici, là. Puis être parent, ça ne
vient pas qu'il y a un manuel, là, d'instructions. Puis là, à un moment donné,
en cours de route, il nous est arrivé une problématique possible. Et on le voit
évidemment, là, les écrans, les jeux vidéo, puis là on dirait qu'on tente de
naviguer là-dedans puis on ne sait plus où donner de la tête. Ça fait que pour
moi, cette commission-là, puis je le sens dans vos propos, là, dans votre
exposé, que c'est une bonne chose. C'est une bonne chose d'avoir cette
commission-là...
M. Ciccone :...Je vois également que vous voulez vous impliquer
énormément. Puis ma première question comme vous dites dans votre... Vous
l'avez dit dans votre exposé, mais vous l'avez dit également dans votre mémoire
que vous voulez être impliqué dans les prises de décisions concernant les
écrans. Comment vous voulez vous impliquer dans la prise de décision? À quel
niveau? Parce que vous savez qu'on va émettre un rapport ici, là, puis on ne
sait pas qu'est-ce que ça va donner, ça va peut-être... À un moment donné, si
ça va donner une législation on non, on ne le sait pas, là. Mais comment
êtes-vous capable d'amener de l'eau au moulin? Juste par expérience comme
parent? Ou avez-vous une expertise quelconque pour la prise de décision?
Mme Laviolette (Mélanie) : Notre
expertise, c'est d'être en mesure de rejoindre ces parents-là, auxquels vous
vous adressez avec une commission comme celle-ci. On est une riche source
d'informations. Donc, on est en mesure d'aller chercher le pouls des parents,
mais le pouls de leurs enfants, qui sont les premiers impliqués, hein, par
cette commission-là, mais toujours dans le but de les protéger. Mais quand on
parle d'éducation ou de travailler ensemble, c'est beaucoup au niveau de la
sensibilisation aussi. Il y a une certaine immaturité parfois chez nos jeunes
qui va faire qu'ils ne vont pas comprendre nécessairement l'implication des
partages sur les réseaux sociaux, s'ils en font, et la protection de la vie
privée, on en parlait également. Donc, c'est important que les parents
comprennent. Nous aussi, on a besoin d'être éduqués à quelque part sur une
saine utilisation des réseaux sociaux parce qu'on... ou même de la technologie
en général, parce qu'on a tous ce téléphone-là dans nos poches, qui nous suit
pratiquement 24 heures par jour. Donc, nous, on a, nous aussi, un examen de
conscience à faire par rapport à cette utilisation-là. Et de travailler en
partenariat avec le milieu scolaire, les parents ensemble, l'adhésion sera plus
facile si le message et le langage est le même des deux côtés, que ce soit à
l'école ou à la maison.
M. Ciccone :Une dernière petite question. Je vais laisser la chance
aux... à mes autres collègues, là. Vous dites également : Prévoir un moyen
de communication entre les élèves et leurs parents en cas de besoin. Là, il y a
des générations différentes, là, tu sais, la mienne, là. Pourquoi
aujourd'hui... À l'époque, là, nous, si on voulait rejoindre nos parents...
J'ai 54 ans. Je ne vous demanderai pas votre age, inquiétez-vous pas. Moi, si
je voulais rejoindre nos parents, on était capable de les rejoindre. Pourquoi
c'est si important aujourd'hui? Puis là je me fais l'avocat du diable, là. Je
ne dis pas que je suis d'accord ou non. Pourquoi il faudrait que les jeunes
aient un cellulaire? Parce que c'est les parents qui veulent rejoindre leurs enfants
ou c'est le contraire? Pourquoi c'est si important aujourd'hui, alors qu'à
l'époque on était capable de rejoindre les parents comme on voulait? Pourquoi
est ce que ça fait partie de votre mémoire, ça?
Mme Laviolette (Mélanie) : Ça
a effectivement changé avec les années. Je fais partie de cette génération-là,
où on avait d'autres moyens de rejoindre les parents aussi. Mais je vous dirais
que c'est une préoccupation de certains parents. Peut être est ce qu'on protège
mieux nos enfants. Ça nous rassure, nous comme parents, d'être en mesure de
rejoindre notre enfant. Je vous l'accorde, ça fait partie des préoccupations.
Tout à fait. C'est des choses que nous avons entendues.
Mme Payne (Corinne) : C'est
ça aussi, il faut réaliser qu'il y a notre système d'éducation n'est pas
qu'est-ce que c'était à notre époque.
M. Ciccone :Pardon? N'est pas...
Mme Payne (Corinne) : Il
n'est pas comme à notre époque. Il y a des bris de service aux services de
garde, il y a des bris de service en transport, il y a des bris de service
parce qu'il n'y a pas d'enseignants en classe. Alors, les enfants, on fait quoi
avec? Il y a des inquiétudes. On n'est pas comme aux États-Unis, mais il y a
les inquiétudes sur la sécurité dans les écoles. C'est vraiment triste qu'on
est rendus là comme société, mais c'est la réalité. Et il y a cette ligne-là
qui a besoin d'être ouverte. Puis moi, je ne pense pas que l'enfant a besoin
d'être... Si, dans une classe au Québec, nos enfants ne sont pas sûrs, on doit
poser une question pour une société. Mais entre les classes, le transport, le
service de garde, le ci puis ça, il y a peut-être nécessité qu'un parent puis
un enfant a besoin de sécurité. Et puis il faut que, si c'est le cellulaire qui
est dans le casier, bien, il y ait un autre moyen... ou il est à la maison, il
y ait un autre moyen de communiquer avec parents comme... à leur enfant.
M. Ciccone :Merci beaucoup votre réponse. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Je cède maintenant la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous. Excellent mémoire. Merci de votre contribution. Je
veux être vraiment certain de comprendre votre message, mais j'ai l'impression
qu'il est quand même très clair. Vous, le mur-à-mur, ça ne vous intéresse pas
vraiment, là.
• (12 heures) •
Mme Laviolette (Mélanie) : Le
mur-à-mur est difficilement applicable en tenant compte des réalités de chacune
des régions. On en parlait, la réalité de l'Abitibi et de Montréal n'est pas la
même et l'application qu'on peut en faire n'est pas la même nécessairement non
plus. Je ne suis pas certaine que d'une interdiction mur à mur apporterait quoi
que ce soit au niveau de la compréhension de l'éducation, au niveau de l'utilisation
des outils technologiques et numériques. Le plus important, c'est de faire
comprendre aux parents, à leurs enfants également, la bonne façon de
l'utiliser, le réel outil que ça peut être, et non pas de s'en servir comme
d'une arme ou d'un outil pour aller acquérir une certaine notoriété, comme on
peut le voir parfois. Il faut simplement s'assurer...
12 h (version non révisée)
Mme Laviolette (Mélanie) : ...que
nous donnons le bon message et que nous donnons le bon exemple, également. Et
ça, ça peut se décider localement, au sein des conseils d'établissement.
M. Leduc : C'était ça ma
question de suivi. Donc, si ce n'est pas le Québec qui est la bonne unité de
mesure, mettons, est-ce que c'est quelque chose que... Là, on parle, mettons,
de l'interdiction de cellulaire. Est-ce qu'il faut l'appliquer à l'intérieur du
centre de services scolaire, à l'intérieur d'une école, à l'intérieur d'une
classe? C'est lequel de ces trois... de ces trois degrés-là... lequel de ces
trois degrés est le bon, selon vous?
Mme Laviolette (Mélanie) : Je
ramènerais ça à la hauteur de l'école.
M. Leduc : À l'école.
Mme Laviolette (Mélanie) : Je
le ramènerais à la hauteur de l'école parce que, sur le conseil d'établissement,
il y a des parents qui siègent, sur les écoles secondaires, il y a des élèves,
également, qui siègent, qui viennent du conseil étudiant, il y a des membres du
personnel. Donc, je pense qu'il y a une bonne représentativité de la clientèle
pour être en mesure de déterminer quelles sont les bonnes pratiques à utiliser
dans un milieu et, par la suite, bien, ça s'applique au reste de l'école.
M. Leduc : Donc là, classe
par classe, ça serait trop pointu, tandis qu'à l'échelle d'une commission
scolaire... je dis encore «commission scolaire», je pense que je vais le dire
jusqu'à ma mort.
Mme Laviolette (Mélanie) : On
se trompe tous.
M. Leduc : Le centre de
services scolaire, là, ça commence à être un peu trop large, des fois, c'est un
gros territoire.
Mme Laviolette (Mélanie) : Exactement.
M. Leduc : O.K.. Dernière
question sur... connexe un peu. Il y a des gens qui parlent beaucoup de majorité
numérique. Est-ce que vous voyez des défis d'applicabilité? Puis je peux même
poser la même question d'applicabilité, quand même, pour des interdictions de
cellulaire à l'échelle d'une école, comme on vient d'en discuter, à quel point
on peut peut-être... Est-ce que c'est une chimère de dire : Oui, oui, on
va mettre une majorité de... Comment on va réussir à l'appliquer? Quelles sont,
selon vous, les choses qu'on devrait avoir en tête dans cette réflexion-là sur
l'applicabilité de ces mesures-là?
Mme Laviolette (Mélanie) : On
n'a pas abordé ce sujet spécifiquement avec nos membres, c'est difficile pour
moi d'apporter un peu la vision de la fédération par rapport à ça. Il y a... il
y a une limite à ce que nos points de vue... On représente quand même une
grande... 90 % des centres de services scolaires de toutes les régions du
Québec, ça représente quand même un vaste, un vaste territoire, puis les points
de vue ne concordent pas nécessairement tout le temps. C'est difficile d'aller
chercher un consensus par rapport à ça, puis on n'a pas d'expertise
scientifique qui nous dirige, non plus, dans notre réflexion. On préfère, pour
l'instant, se fier aux experts pour savoir ce qu'ils en... ce qu'ils en
considèrent.
M. Leduc : Merci beaucoup.
Mme Laviolette (Mélanie) : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Merci. Bienvenue
à l'Assemblée nationale. L'an dernier, à peu près à la même période, il y a eu
cette consigne du ministre sur l'interdiction du cellulaire en classe. Est-ce
que vous étiez en faveur de cette décision?
Mme Laviolette (Mélanie) : On
était en faveur de cette décision parce que notre priorité principale était d'enlever
les perturbateurs dans la classe, qu'est-ce qui peut empêcher notre enfant de
se concentrer, toujours dans une optique d'améliorer ses capacités d'apprentissage.
Donc, ça enlevait la distraction.
Mme Payne (Corinne) : Bien,
je vais ajouter que qu'est-ce qui n'a été pas respecté, dans la directive de la
ministre, c'est que les conseils d'établissements dans tous les milieux n'étaient
pas consultés ou parties de la prise de la décision, puis ça, c'est vraiment
triste. Puis, comme on a répété, c'est important que chaque conseil d'établissement,
dans chaque école du Québec, joue son rôle décisionnel pour prendre qu'est-ce
qui est le meilleur intérêt des élèves dans son école.
M. Bérubé : D'accord. C'est
une décision nationale du ministre. Moi, je l'ai acceptée. Elle s'applique
partout au Québec. J'ajouterais qu'il n'y a plus d'élu, hein, vous êtes là, les
élèves sont là, mais il n'y a plus d'élu. Alors, ça change la dynamique, pour
un député, en tout cas. On n'a pas accès à vous si facilement. Même les listes
des parents ne sont pas si facilement accessibles pour les élus. Le
gouvernement a déjà fait ça pour les lieux de prière aussi, une consigne
nationale qui a été appliquée, qui n'a pas vraiment fait... de problème.
Donc, pour la suite, je comprends que si
le fruit des recommandations devenait des politiques, ou des consignes, ou des
indications claires du ministre, vous voulez vraiment que ça ne soit pas
national, que ce soit par centre scolaire ou par école? Alors, vous comprenez
que, dans un même quartier, il pourrait y avoir une application différente, on
pourrait même avoir des gens qui choisissent leur école en fonction des
politiques applicables. Êtes-vous conscientes de ça? Si l'enfant, lui, il veut
avoir son cellulaire : Je vais aller à l'autre école.
Mme Payne (Corinne) : Bien,
je vais utiliser un exemple que j'ai rencontré, une enseignante, l'année
passée, quand cette directive-là est tombée puis... Elle a dit : Moi, dans
mon cours de sciences, j'utilise le téléphone cellulaire comme un outil
pédagogique. Parce que, quand un enfant me pose une question aujourd'hui, je ne
sais pas toujours la réponse parce qu'il y en a tellement, d'informations, je
vais lui dire : Cherchez, vous tous, sur votre téléphone, puis on va
comparer. Est-ce que votre source est bonne? Est-ce que l'information est
bonne? Est -e que c'est fidèle? Puis on peut discuter ensemble. Puis ça, c'est
un exemple concret comme... comment on peut utiliser un outil pour éduquer nos
enfants comment utiliser l'outil éthiquement. Alors, voilà.
M. Bérubé : O.K. Avez-vous l'impression
que c'est plutôt l'exception? Quand je suis allé remplacer dans une école
secondaire, on donnait le choix — une école secondaire de Matane — certains
pouvaient le permettre, les enseignants, dans la classe, d'autres non. Dans
certains cas, ils me disaient : Si je le...
M. Bérubé : ...je vais avoir
des cas de discipline à gérer, ça fait que j'aime mieux les laisser faire. Ça
existe, et ce n'était pas pour des applications scientifiques, c'était pour
TikTok, pour Instagram, pour différentes applications qui n'ont rien à voir
avec l'école. Donc, ces cas-là, ils sont fabuleux, celui que vous évoquez, j'ai
l'impression qu'ils sont très minoritaires.
Mme Payne (Corinne) : Bien,
qu'est-ce qui arrive, c'est, cette enseignante-là, qu'est-ce qu'elle m'a dit,
c'est, elle n'était même pas dans la discussion de direction ou, je ne sais pas
qui, elle a décidé : Ça va être comme ça, puis on ne peut... Je ne peux
même pas utiliser cet outil-là.
Alors, oui, c'est une exception, mais dans
chaque milieu, puis, je pense, Mme Laviolette a bien dit, dans chaque milieu,
il faut prendre les décisions pour ce milieu-là.
M. Bérubé : En terminant, je
vous suggère que, par exemple, la politique qui est annoncée par le ministère,
c'est interdit et qui a le fardeau de dire : Oui, mais il pourrait avoir
des exceptions qu'on est capable de démontrer. Ça, c'est ... Est-ce que vous
seriez à l'aise avec ça?
Mme Payne (Corinne) : Bien,
c'est comme ça, la directive a été écrite l'année passée, mais le milieu, il
n'était pas pas dans la discussion, partout.
M. Bérubé : Oui, mais
l'application n'est pas tout à fait comme ça. Oui. D'accord. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Châteauguay.
Mme Gendron : Merci beaucoup,
mesdames, monsieur, d'être avec nous aujourd'hui et, en tout cas, un gros merci
pour votre mémoire que vous avez partagé. J'avais des questions. J'ai bien
entendu que vous voulez préconiser l'éducation à l'interdiction, donc, je
comprends bien votre point de vue, et puis aussi que les parents ne se sentent
pas outillés face aux réseaux sociaux de leurs enfants, souvent, par
méconnaissance aussi de ce qui se passe sur les plateformes, et tout ça. Donc,
vous avez mentionné : Éduquons-nous en tant qu'adultes.
J'avais deux volets à ma question :
De quelle façon vous verriez, justement, cette forme d'éducation là pour les
adultes et pour les jeunes? Est-ce que... De quelle façon on pourrait aborder
ça? Avez-vous déjà songé ou discuté de la manière, oui, de rejoindre les
parents, ça, je le comprends, mais de quelle façon ça pourrait être fait auprès
des parents?
Mme Laviolette (Mélanie) : On
utilise souvent, la fédération, des webinaires où on fait venir des experts qui
vont s'adresser aux parents qui le souhaitent, sur inscription, souvent,
gratuit d'ailleurs, pour leur permettre de comprendre différents enjeux. Ça
peut être... Justement -on parlait des conseils d'établissement - pour
comprendre aux parents l'importance et l'influence qu'ils peuvent avoir à
s'impliquer dans ces instances-là, mais ça pourrait être des formations qui
sont plutôt ciblées sur ce type d'enjeu là. On rejoint quand même plusieurs,
plusieurs parents de cette façon-là. D'avoir une meilleure diffusion auprès des
écoles également, pour inviter les parents à se joindre à ces formations-là
quand c'est ouvert. Parce qu'il n'y a pas de limite, des formations en ligne,
on peut... on être le nombre qu'on veut, c'est ça qui est merveilleux.
De rejoindre les parents avec des experts
qui connaissent les réseaux sociaux, aussi, à nos jeunes parce que ça va très
vite. Et les enfants, nos enfants ne sont pas sur Facebook - le réseaux sociaux
qu'on connaît le mieux - ils sont ailleurs. Il faut qu'on les trouve, il faut
qu'on comprenne comment ces réseaux-là fonctionnent également pour être en
mesure de faire la prévention qui est nécessaire.
Mme Payne (Corinne) : Puis je
pense que ça prend une place où les parents peut aller conseiller, puis avoir
confiance et les bons conseils, puis avoir la bonne information. Je veux aussi
dire l'exemple Allô prof, tout le monde ici sait c'est quoi, Allô prof? Est-ce
que ça... Allô prof, parent aussi. Tu sais, ça prend, Allô aidez-moi avec les
médias sociaux, parce que je ne comprends pas c'est quoi, TikTok puis la
prochaine nouvelle qui va arriver. Mais ça prend une place que les parents peut
appeler comme Info-Santé. Je ne sais pas, vous autres, mais quand j'ai accouché
la première enfant, là, je pense que j'avais de la ligne directe à Info-Santé.
Le nez coule, si ça...
Alors, c'est une place fidèle où on peut
appeler puis avoir des informations justes, pas juste à l'école. Puis, je
pense, ça, c'est important, on ne veut pas que tout le fardeau, ça tombe à
l'école, il faut que ça tombe à toute la société québécoise.
Mme Gendron : C'est
intéressant, parce que vous parlez justement d'une application pour... en tout
cas, tu sais, consulter une application pour finalement trouver un moyen de ne
pas utiliser les réseaux sociaux. Mais je comprends très bien votre point de
vue, mais c'est la réalité d'aujourd'hui. C'est ça.
Mme Payne (Corinne) : Les
écrans, ils ne partent pas demain, hein?
• (12 h 10) •
Mme Gendron : Oui,
exactement. Mais j'ai une autre question par rapport à ça. Vous aviez parlé du
conseil d'établissement, puis je comprends, puis je m'en vais un peu sur la
même lignée que mon collègue de Matane. En fait, si vous dites qu'un professeur,
lui, dans sa classe, utilise justement des applications, quelque chose, même si
le conseil d'établissement fait une réglementation à même l'école, donc, chaque
professeur pourrait avoir sa façon de fonctionner, donc, certains professeurs
auraient accès. Donc, de quelle façon, vous pourriez penser que le conseil
d'établissement pourrait vraiment faire une règle? Est-ce que vous pensez que
ça peut se faire? Et puis, si toutes les parties prenantes, parents, enfants...
Mme Gendron : ...puis tous
le... les soutiens, pourrait être d'accord avec la décision du conseil
d'établissement.
Mme Payne (Corinne) : Mais
une école, c'est une démocratie aussi, hein? C'est un milieu de vie. Puis, oui,
il y a des moyens qui peuvent... dans chaque école du Québec, il y ait un code,
de code de vie qui dit que vous ne pouvez pas laisser vos sacs à dos dans tel
coin de l'école. J'exagère, là, mais... Aussi, ça peut être instauré dans le
code de vie de l'école. Puis il peut faire un référendum dans une école et faire
des élections dans des écoles secondaires pour choisir le... le député de
chaque classe. Alors, il peut demander c'est quoi. Puis si 80 %,
90 %, 75 % veulent telle affaire, mais c'est ça qui va... notre
règle. Puis il faut apprendre... faire apprendre nos jeunes que la démocratie,
ça se mette en place. Vous avez votre... vos mots à dire. On va faire une
commission dans notre école pour vous qu'est ce qu'on veut puis après on va
mettre en place les règles que la majorité de la démocratie décide qui vont être
mises en place. Je pense... et ça va être un service à faire à nos jeunes qui
apprennent ça, puis ils prennent acte, puis ils sont participatifs de qu'est-ce
qui se passe dans leur école. Mme Laviolette a dit : La pire chose
que tu peux dire, c'est de présenter quelque chose quand c'est tout fait puis
canné. Vous êtes les premiers, je pense, les députés, que si n'importe qui qui
vous présente quelque chose tout canné, vous allez la critiquer de tous les
bords puis tous les côtés. Alors, les enfants ou des humains sont comme ça, il
faut les mettre partie prenante dans les décisions puis il va y avoir plus
d'adhésion, je suis sûre.
Mme Gendron : C'est très
intéressant. J'ai sûrement plusieurs autres questions, mais je pense que je
vais laisser la parole à... à mes collègues. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de
Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Bonjour à vous. Donc, effectivement, comme mon collègue le
mentionnait, je pense qu'il y a une belle effervescence aujourd'hui alors qu'on
commence les travaux. Donc, je pense que ce n'est pas anodin que vous soyez le
premier groupe qu'on entend aujourd'hui, ce que... On le sait, donc, les parents,
donc, vous êtes donc les premiers vecteurs, donc, de cette éducation.
Ma question, ma première question,
s'enlignait, mais en fait dans la... dans la même ligne que ma collègue, donc,
de Châteauguay, donc sur le comment outiller les parents. Je pense que vous
avez quand même, bon, répondu. Dans le fond, donc, vous souhaiteriez, donc,
avoir soit, donc, un organisme ou une institution, donc une... une... une
ligne, là, à laquelle, donc, vous pourriez appeler, donc en laquelle vous
auriez confiance, pour être capable, donc, d'être outillés sur les... les
différents points... Vous classez les enjeux de sentiment de compétence, donc
la cyberdépendance, la vie privée, l'utilisation des réseaux sociaux. Donc, ça,
ça semble clair.
Ensuite, j'aimerais peut-être vous
entendre sur les... la question des écrans récompenses, parce que notre mandat
s'est peu penché sur cette question-ci quand on le définissait. Mais, dans
votre mémoire, vous vous êtes quand même posé la question puis vous avez...
vous avez sondé vos membres sur cet enjeu-là. D'abord, vous entendre sur la
prévalence de l'enjeu des écrans récompenses. Puis, ensuite, quand vous dites
que vous ne souhaiteriez pas nécessairement l'interdire parce qu'il n'y a pas
de consensus là-dessus, mais l'encadrer. À ce moment-là, donc, comment
l'encadrer? Est ce que ce serait aussi au niveau des conseils d'établissement
avec... ou une directive plus nationale? Donc, j'aimerais vous entendre
là-dessus.
Mme Laviolette (Mélanie) : Je
vous dirais que l'écran récompense était, à une certaine époque, une activité
spéciale. C'était le vendredi avant qu'on soit... avant le congé de Noël ou
dans la dernière semaine de classe. Ce qu'on entend maintenant,
malheureusement, c'est que ça devient une habitude. C'est les vendredis
après-midi, c'est il manque un enseignant, c'est un suppléant va passer un
film, va regarder des vidéos. Pendant qu'il passe des feuilles, vous pouvez
regarder un vidéo sur votre téléphone. C'est... c'est rendu la norme. Et puis
on en discutait ce matin en préparation de venir vous rencontrer puis on se
disait : On... on n'apprend plus à nos enfants à se gérer ou à gérer leur
temps. C'est comme si on se devait de les occuper constamment à temps plein.
Puis ça a du bon pour eux de s'ennuyer un petit peu ou de se trouver une
alternative pour s'occuper au lieu de... de se pencher vers l'écran. Puis je le
dis en toute humilité : On le fait tous comme parent. C'est le premier
réflexe qu'on a, de se pencher la tête, de regarder notre téléphone au lieu de
discuter, d'échanger, de socialiser, de dialoguer avec nos pairs. Donc,
c'est... c'est à ce niveau-là.
L'écran récompense, c'est bien, c'est une
activité spéciale, c'est festif, c'est joyeux. Il ne faut pas que ça remplace
un cursus scolaire, il ne faut pas que ça bouche des trous dans l'apprentissage
de nos enfants. Il y a d'autres moyens de les occuper.
Mme Cadet : Et là, donc,
puisque vous dites que vous souhaitez l'encadrer, donc ce serait aussi au
niveau des conseils d'établissement que vous préfériez le... le faire.
Mme Laviolette (Mélanie) : Il
faudrait qu'une directive claire arrive des... des conseils d'établissement,
mais peut-être que ça... ça doit être un message qui est passé. Est-ce que ça
doit être une interdiction aux écoles, de procéder de cette façon-là? À voir.
Mais une sensibilisation claire officiellement devrait être faite.
Mme Cadet : Au niveau... au
niveau du gouvernement du Québec, là, vous avez vraiment cette ouverture-là...
Mme Laviolette (Mélanie) : Oui,
il faut sensibiliser les gens à la... à la surutilisation des écrans quand ce
n'est pas nécessaire.
Mme Payne (Corinne) : ...
Mme Payne (Corinne) : ...parce
que le comité de parents avec le centre de services de Bois-Francs, ils ont
déjà fait un guide. Alors, espérer... utilisez-le comme un gabarit pour aider
les autres. On n'a pas besoin de réinventer la roue 72 fois pour chaque
centre de services, chaque commission scolaire, ni 2 500 fois pour chacune des écoles, inspirer
des bonnes pratiques et des outils qui sont déjà créés.
Mme Cadet : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Il nous reste six, sept minutes et j'avais la députée de D'Arcy-McGee et le
député de Gaspé. Alors, Mme la députée.
Mme Prass : Merci. Merci de votre
présence, de votre mémoire, présentation. Ma question est un petit peu sur le
même sujet que celle de ma collègue. Donc, si je comprends bien, est-ce que
vous diriez que l'idée de l'écran récompense ne devrait juste pas être présente
dans les écoles? Parce que, là, on renforce l'idée que l'ultime récompense,
c'est d'avoir son téléphone. Et c'est comme si... on... bien, c'est ça, on
renforce cette idée que justement on ne veut pas que nos jeunes aient. Et,
comme vous dites, qu'ils s'ennuient ou qu'ils sortent à l'extérieur ou qu'ils
vont à la bibliothèque, peut-être, c'est ça, leur récompense, plutôt que le
téléphone. Donc, est-ce que vous prendrez que ça ne devrait juste pas faire
partie de la réalité dans les écoles?
Mme Laviolette (Mélanie) : Je
vais faire un parallèle avec l'alimentation. C'est de faire comprendre à nos
enfants qu'un yogourt aux fraises, c'est une aussi belle récompense que le
suçon. Tu sais, finalement, il faut juste changer ça un petit peu, changer le
focus qu'on met sur l'écran. Puis c'est moins... Nos enfants sont habitués de
l'avoir entre les mains, on les console, ils ont la télévision, ils ont les
ordinateurs, ils ont les cellulaires dans leur poche. C'est moins... c'est
moins une surprise ou c'est moins magique que ça pouvait l'être à l'époque où
ce n'était pas aussi accessible, mais il faut juste leur faire comprendre qu'il
y a des récompenses qui sont intéressantes aussi. Puis c'est surtout que ça ne
devienne pas une gardienne, un... je vais dire, un bouche-trou ou un bouche
temps dans le cursus scolaire de nos élèves. Le film est toujours intéressant,
et c'est intéressant parce que ça n'arrive pas souvent. Quand ça devient... Il
y a des enfants qui nous le disent, il y a des jeunes qui nous le disent, même
eux trouvent que c'est trop parfois, parce qu'ils aimeraient faire autre chose.
Alors, c'est peut-être le temps de les écouter aussi ces enfants-là. On dit
souvent que c'est eux, le problème, parce qu'ils veulent les utiliser. On leur
ouvre grand la porte. Mais, si on prend la peine de les écouter, même eux sont
conscients que ça a un impact sur leur apprentissage et sur leur capacité à
socialiser.
Mme Prass : Oui. Puis je vous
dirais même, mon fils vient de commencer à une nouvelle école, puis ça lui est
arrivé la semaine dernière. Il avait une remplaçante. Bien, en fait, le prof
n'était pas là, puis ils leur ont dit : Bien, vous avez votre téléphone,
ça fait que vous pouvez passer le cours là-dessus. Puis il m'a dit : Je
trouve ça poche, je ne comprends pas, je suis à l'école, puis on m'a dit que je
peux aller sur mon téléphone, tandis que, tu sais, il y a d'autres choses à
faire. Donc, je pense que... comme j'ai dit, pour moi, renforcer cette idée que
la récompense ultime, c'est le téléphone, on fait le contraire justement de ce
qu'on voudrait que nos enfants reconnaissent.
Mme Laviolette (Mélanie) : Ils
l'ont toujours... ils sont... pour eux, ce n'est pas une récompense, c'est...
nous, on le voit comme une récompense, mais pour eux ce n'en est pas tant une,
parce qu'ils l'ont toujours avec eux, de toute façon. Alors, c'est de trouver
une récompense qui les intéresse, et pour ça les sonder et leur parler, c'est
important. Ils vont nous le dire eux, ce qui les intéresse et ce qu'ils ont
envie de faire.
Mme Prass : Merci beaucoup.
Mme Laviolette (Mélanie) : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
M. le député de Gaspé.
M. Sainte-Croix : ...d'abord
vous remercier de votre présence, de participer à l'exercice. Très intéressant,
toujours stimulant, là, d'entendre les gens qui sont sur le terrain avec nos...
nos enjeux. Si vous le permettez, moi, j'aimerais sortir un peu de l'école,
dans le sens où vous l'avez dit, hein, nous sommes plusieurs parents ici
aujourd'hui, donc on a une relation à l'école, mais on a aussi une relation
d'école à la maison. Comment vous voyez la responsabilité parentale en dehors
du circuit de l'école avec les enfants sur le sujet des écrans?
Mme Laviolette (Mélanie) : Je
vais faire un parallèle avec l'autre sujet qui nous interpelle beaucoup, qui
est la violence et l'intimidation. C'est important de parler à nos enfants pour
leur... pour leur expliquer l'impact que ça a, une surutilisation des écrans.
Il y a également l'impact que ça peut avoir sur la diffusion qu'ils font des
informations, que ce soient leurs informations personnelles, mais également des
vidéos partagées. C'est important pour eux de comprendre l'impact que ça peut
avoir sur le collègue à l'école. C'est à nous aussi, comme parents, de donner
l'exemple. On a le droit de s'accorder une pause de déconnexion des écrans, de
passer du temps avec eux. On le mentionnait, on ne peut pas dire à nos
enfants : Lâche les écrans pendant que nous, on regarde notre cellulaire.
Ça n'a aucun sens. On se doit, nous aussi, comme... comme société en général,
de porter un regard sur notre surutilisation des écrans et des réseaux sociaux.
Puis il faut qu'on parle à nos enfants. La
priorité est là. On éduque nos enfants sur plein de sujets, on les éduque à ce
niveau-là aussi. Mais la préoccupation des parents, tu sais, je veux bien le
faire, mais je ne sais pas encore comment. Donc, c'est... Il faut trouver des
outils, des solutions pour les outiller. Ils sont prêts à le faire, ils ne
savent juste pas comment l'aborder.
• (12 h 20) •
Mme Payne (Corinne) : On a
trouvé le moyen comment parler avec nos enfants sur le...
Mme Payne (Corinne) : ...sur
les drogues, sur les relations sexuelles. Alors, je pense, on peut trouver le
moyen aussi, si on est équipés nous-mêmes, avec, je vais dire, les bonnes
campagnes de sensibilisation de : Juste dis non. Je ne sais pas s'il y
avait cette campagne-là, mais, dans mon époque, c'était : Juste dis non.
Alors, je pense, c'est de trouver la façon pour les parents puis toute la
société de réaliser qu'est-ce qu'on est en train de faire.
M. Sainte-Croix : Notre
réflexion devrait donc plus largement toucher les parents aussi, les parents
dans le quotidien, et non pas simplement le réseau scolaire, la dynamique
scolaire, la pédagogie, le loisir, la récompense, j'accroche beaucoup sur la
récompense, et plus largement toucher aussi nos relations comme parents, dans
un contexte familial, et la gestion de cette information-là avec nos enfants.
Vous jugez que c'est important si on veut cheminer.
Mme Laviolette (Mélanie) : J'ai
tendance à être en accord avec vous sur cette affirmation parce qu'on...
l'éducation et l'instruction, c'est deux choses, mais c'est interrelié. Quand
on parle d'éducation, c'est à tous les niveaux. On doit travailler ensemble, et
ça doit se transposer d'un côté à l'autre. On ramène souvent le message de
l'importance de la communication, que ça soit dans les deux sens, que l'école
communique avec le parent, mais que le parent soit en mesure de communiquer avec
l'école aussi. Si on est concertés, si on travaille ensemble, si on est à
l'écoute l'un de l'autre, c'est sûr qu'il y a de belles choses qui vont sortir
de là. Mais oui, il faut... il faut faire la prévention auprès des parents,
leur faire comprendre l'importance que ça a de s'intéresser à l'enjeu des
écrans chez leurs enfants et d'amener le message qu'il faut travailler avec
l'école aussi. Ce n'est pas... Il faut... Il faut arrêter de travailler en
silo. Il faut vraiment qu'on s'habitue à travailler ensemble.
M. Sainte-Croix : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Il
reste 20 secondes. Le mot de la fin? Oui, M. le député de Jonquière, allez-y.
M. Gagnon : Je veux juste
vous poser une question. J'y vais rapidement. Un conseil d'établissement
connaît son milieu, veut prendre sa propre prise de décision. On l'a bien
entendu. Est-ce qu'il serait intéressant, avant une prise de décision, qu'on
aille de l'avant vers une... du moins pour les conseils d'établissement, vers
une formation nationale tout de même?
Mme Laviolette (Mélanie) : Oui.
Oui. C'est...
M. Gagnon : Parfait.
Mme Laviolette (Mélanie) : La
réponse ne peut pas être plus claire que ça.
M. Gagnon : Parfait.
Mme Laviolette (Mélanie) : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
à tous pour votre contribution. Donc, la commission spéciale suspend ses
travaux jusqu'à 14 h. Et j'en profite pour souhaiter un joyeux anniversaire à
notre collègue députée d'Iberville. Alors, bonne fête, madame. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 23)
14 h (version non révisée)
(Reprise à 14 h 02)
La Présidente (Mme Dionne) : Donc,
bon après-midi à tous. Nous sommes ici de retour en Commission spéciale sur les
impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement des
jeunes. Et alors, nous reprenons nos travaux. Je demande à tous ceux et celles
qui ont des portables ou appareils électroniques de bien vouloir éteindre la
sonnerie. Donc, nous poursuivons les consultations particulières cet après-midi
avec... Dans le fond, nous accueillons aujourd'hui le Centre pour l'intelligence
émotionnelle en ligne, l'Association des entreprises pour le développement des
technologies éducatives au Québec et la Confédération des syndicats nationaux.
Donc, je souhaite la bienvenue à notre
représentante du Centre pour l'intelligence émotionnelle en ligne, Emmanuelle.
Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour nous faire votre exposé.
Suite à cela, nous disposerons de 35 minutes d'échanges et de questions
avec les membres de la commission. Alors vous pouvez d'entrée de jeu vous
présenter et nous transmettre votre exposé.
Mme Parent (Emmanuelle) : Oui.
Alors, merci vraiment de me recevoir. Donc, oui, mon nom était Emmanuelle
Parent. Je suis cofondatrice, directrice générale du Centre pour l'intelligence
émotionnelle en ligne. Je suis aussi docteure en communication... une recherche
sur les réseaux sociaux chez les jeunes. Et puis la mission du CIEL, donc, c'est
le petit surnom du Centre pour l'intelligence émotionnelle en ligne, c'est de
faire de la sensibilisation et de l'éducation sur les enjeux du numérique qui
touchent notre bien-être. Puis on le fait particulièrement avec un programme de
prévention, d'ateliers pour prévenir les méfaits des écrans dans les écoles
primaires et secondaires.
Donc, on fait ça depuis 2020. Depuis 2020,
on a parlé à plus de 28 000 ados entre 12 et 17 ans. Et depuis
la dernière année, on a parlé aussi à plus de 9 000 enfants dans les
écoles primaires. Donc c'est un honneur pour moi aujourd'hui de pouvoir vous
ramener qu'est-ce qu'on entend dans les classes, qu'est-ce que les jeunes
disent de leur relation avec les jeux vidéo, les réseaux sociaux.
Bon, j'ai huit leçons pour vous aujourd'hui,
mais on va commencer avec une très importante. On entend : Les jeunes sont
tout le temps sur leur cellulaire. Les jeunes, ils veulent tout le temps aller
vers les écrans. Ça ne se parle plus. Ça ne se voit plus en face à face. Durant
cette commission, on voit qu'on va mettre nos jugements de côté, en fait, pour
une première leçon qui est : Les écrans sont un problème d'adulte, pas
juste une responsabilité sur les épaules des enfants. Puis on doit assumer,
donc, en tant qu'adulte, la responsabilité d'avoir incité, encouragé, offert
ces outils technologiques là aux enfants, puis de les avoir aussi punis et
maintenant jugés pour ce qu'on a accompli. Donc, je vais avoir l'air de vous
chicaner un peu, mais ça va finir positif, promis.
Donc, ce que je veux dire par là, c'est
que ce sont... Quand tu dis que c'est un problème d'adultes, c'est que ce sont
des adultes qui ont développé un modèle d'affaires qui est basé sur la collecte
de données, qui capitalise sur l'attention des jeunes. C'est aussi des adultes
qui n'ont pas régulé, hein, ce milieu-là et qui fait qu'on appelle ça des fois
le Far West des grandes technologies. C'est aussi des adultes qui achètent le
premier téléphone intelligent aux enfants. C'est des adultes qui décident si on
donne des iPad ou des Chromebook dans les écoles. C'est aussi des adultes dans
les milieux de travail qui demandent à d'autres adultes de regarder leurs
courriels le soir, puis des adultes qui, à l'heure du souper, ils sortent leur
téléphone sous les yeux des enfants qui nous en parlent dans les classes. C'est
des adultes qui emploient des enfants, des... bien, des enfants, non... mais
des ados, des jeunes et qui les textent, qui essaient de les contacter sur les
heures scolaires. Puis nous, on enseigne aux enfants puis aux ados que c'est
important de se réunir en face à face. Mais c'est aussi des adultes qui se
plaignent que les jeunes jouent au hockey dans la rue, puis des municipalités
qui envisagent de...
Mme Parent (Emmanuelle) : ...d'enfreindre
ça, ces jeux-là. c'est aussi des adultes, dans les lieux publics, qui jugent
que les enfants sont bruyants, mais qui jugent aussi les enfants quand ils ont
la tête dans leurs écrans, c'est des adultes... Tu sais, nous, on enseigne aux
enfants que c'est important, une heure d'activité physique par jour, mais c'est
aussi des adultes qui décident de baliser ce nombre d'activités physiques par
jour là dans le système scolaire. Puis, quand nous, on enseigne aux jeunes
d'aller chercher de l'aide, c'est nous, en tant qu'adultes, qui sommes
responsables du système de santé, qui leur répond... peut-être une liste
d'attente de six mois avant qu'on puisse répondre à... puis donner des soins
psychologiques. Comme j'ai dit, je ne dis pas ça pour vous chicaner. Le but, ce
n'est pas de culpabiliser, c'est de se responsabiliser. On a un pouvoir énorme
sur l'utilisation du numérique chez les jeunes puis on est capable, de façon
transversale, en ne parlant pas juste d'écran, mais aussi de santé physique, de
santé psychologique, de vie privée, de faire un changement dans leurs vies.
On part avec les... on part avec les
leçons. Je vais vous donner des témoignages d'enfants puis d'ados pour chacune
de celles-là. Numéro un, les jeunes voient les adultes. Ce qu'on entend le plus
chez les enfants quand on leur demande : Qu'est-ce que vous voulez qu'on
dise aux décideurs, aux parents, c'est : Oui, oui, oui, la petite main
dans les airs : Dites à mes parents de lâcher leurs téléphones. Dites à
mes parents de ne pas prendre leurs téléphones quand je leur parle en même
temps. Chez les ados, on ne voit pas cette candeur de vouloir l'attention des
adultes, on se justifie, on dit : Bien, si les parents sont devant la
télé, si les parents jouent à Candy Crush, sont sur leur cell, sur Facebook, ce
réseau social de vieux, n'est-ce pas, eh bien, nous aussi, on va l'être, sur
les écrans. Donc, les études le montrent aussi que le temps d'écran, en fait,
chez les parents, peut être un prédicteur de plus haut temps d'écran chez les
jeunes.
Bonne nouvelle, cependant, c'est que,
selon un dernier sondage de... mené par Léger en 2024, il y a 90 % des
parents qui sont prêts à réduire leur temps d'écran, mais il faut les aider,
37 % d'entre eux disent que ça va être pas mal difficile.
Leçon numéro deux, les jeunes
reconnaissent que l'utilisation des plateformes, bien, oui, c'est difficile à
réguler. Ils vont nous dire : Quand tu entres dans Tik Tok, tu ne sors pas
de Tik Tok. Ou... ça, c'est un jeune au secondaire ou un jeune au primaire qui
me dit : Bien, ma X Box est dans ma chambre, je regardais des vidéos
dessus avant de me coucher, puis même si j'étais fatigué, je voulais vraiment
savoir c'était quoi, la prochaine. Donc, c'est difficile de se réguler. Les
jeunes, ils le savent, que c'est difficile de lâcher Fortnite, de lâcher son
cell, de lâcher Tik Tok, les reels, les shorts YouTube, on les nomme tous , puis
ils sont irrités par cette perte de contrôle. On les fait regarder leur temps
d'écran dans les classes. Ils ont honte, parfois, ils ne veulent pas nous
communiquer le temps qu'ils passent sur leurs téléphones, ils sentent qu'il y a
un jugement des adultes.
Même si je viens dire que c'est difficile
à réguler, leçon numéro trois, les jeunes ne sont quand même pas des
utilisateurs passifs des écrans, ils mettent en place des stratégies pour
s'aider. Donc, il y a des jeunes qui nous disent : Bien, moi, en période
d'examens, je supprime mes réseaux sociaux. Il y en a qui disent : Moi, je
n'ai pas du tout Tik Tok, c'est trop addictif. D'autres qui disent : Je me
suis mis une limite de une heure sur mon application, sur Instagram, pour
essayer de passer moins de temps là-dessus. Et chez les enfants, pour faire
plaisir aux parents, quand on leur demande c'est quoi leur truc, ils vont
nommer leurs parents, ils disent : Je n'ai pas le goût de passer toute la
soirée devant mon jeu vidéo ou devant les écrans, ça fait que mes parents, ils
m'aident vraiment à dire : O.K., là, c'est assez ou, O.K., on s'en va
faire autre chose. Leçon numéro quatre, les jeunes veulent être sur les écrans
pour être en contact avec leurs amis. Quand on leur demande pourquoi tu as téléchargé
les réseaux sociaux, ils nous nomment : Pour parler avec mes amis. Quand
on veut les séparer de leurs téléphones, ce qui les inquiète, ce n'est pas
nécessairement : oh! non, je n'ai plus cet appareil technologique,
c'est : oh! non, je ne pourrai plus être en contact tout le temps avec mes
amis, se parler. Et ils se parlent sur Snapchat, un peu sur Instagram, un peu
sur Messenger. Le but, c'est justement de continuer cette socialisation-là, qui
est tellement importante quand on est en plein développement de notre autonomie
relationnelle, qu'on se définit de plus en plus par nos amitiés, à l'âge... tu
sais, à l'âge scolaire.
Puis j'aimerais aussi apporter votre
attention sur deux citations où les jeunes vont vraiment chercher du soutien,
donc, ce n'est pas juste de la socialisation, du soutien en ligne. Un jeune de
secondaire I nous dit : La situation familiale de mon ami est difficile,
en ce moment, puis, quand on se connecte pour jouer, c'est son moment pour nous
parler, on l'écoute puis après on se change les idées. Donc, quand ils jouent
en ligne, les jeunes, ils ne font pas juste dire : O.K., tasse-toi, il y
en a un qui arrive, ils se parlent aussi de leurs problèmes et ils permettent
de s'ouvrir.
Celle-là est un peu plus difficile. Il y a
un jeune de 16 ans qui nous dit : J'ai reçu des menaces de mort sur
Instagram à cause que je fais des dessins de manga. Il vit de l'intimidation.
Il dit : Je l'ai dit à mes profs, on m'a suggéré de retirer les réseaux
sociaux, mais je veux rester sur Instagram parce que c'est la seule place où on
ne me niaise pas, j'ai une communauté qui m'encourage dans ce que je fais puis
qui m'inspire. Donc, pour des jeunes qui ont des intérêts, qui seraient
marginalisés ou qui sont marginalisés, donc, je pense aux femmes, je pense aux
jeunes racisés, aux jeunes de la communauté LGBT, les réseaux sociaux, les
communautés en ligne deviennent vraiment un soutien que peut-être qu'ils n'ont
pas dans la vie, en face à face, parce qu'ils vivent certaines discriminations.
• (14 h 10) •
Leçon numéro cinq... oui, elle, elle est
longue, mais les autres sont plus courtes. Les...
Mme Parent (Emmanuelle) : ...les
jeunes ont besoin d'outils de signalement plus efficaces que ceux qui sont déjà
en place. Les jeunes veulent plus de contrôle dans les plateformes.
Celle aussi... Celle-là aussi est «tough».
Un jeune du primaire qui est venu voir une de nos animatrices pour lui
dire : Mme, comment je fais pour ne plus voir de vidéos de fusillades dans
les écoles aux États-Unis sur mon TikTok, comment je fais pour ne pas voir des
photos... des photos, des vidéos de guerre en Ukraine, en Palestine? Eux, ils
vont là-dessus pour se distraire puis ils n'arrivent pas à contrôler le
contenu. Puis les parents, même bien intentionnés, ils n'arriveront pas
contrôler ce contenu-là non plus.
Une autre ado dit : Je suis tannée de
me faire proposer des pubs de diète, je ne veux pas maigrir, je me suis abonnée
à des bons comptes, mais c'est ça qui s'offre à moi dans les publicités. Puis
les jeunes disent aussi : Si tu publies sur les réseaux sociaux, assume
que tu peux avoir de la haine. Ça, ça nous fait de la peine parce que, bien,
c'est très normalisé, donc, en ligne.
Puis maintenant plus sur les jeux vidéo.
Des ados de secondaire I, II, nous dit : Bien je me fais
régulièrement demander mon Insta et mon numéro de téléphone, quand je «game,
quand on entend que j'ai une voix de fille. Puis même des garçons de
secondaire II m'avaient raconté qu'ils avaient changé leur avatar de
garçon à fille. Donc, leur personnage s'affichait comme féminin, puis il a
dit : Aït! Je ne veux plus jamais ça, je recevais bien trop de messages
de... d'étrangers, d'adultes sur... pendant que je joue. Donc les jeunes
apprennent à naviguer là-dedans, à contourner ça, mais ils veulent plus de
contrôle.
Leçon 6. Les jeunes détournent les
contrôles parentaux. Ils disent qu'ils écoutent des vidéos YouTube pour savoir
comment réactiver le wifi, comment amener un téléphone à l'école, qui n'est pas
le leur, pour le mettre dans la pochette.
Leçon numéro sept. Les jeunes se
sentent... ne veulent pas se sentir jugés au moment d'aller chercher de l'aide.
Donc, ils disent : Je n'ai pas dit à mes parents que j'avais publié sur
TikTok par accident parce que je ne voulais pas me faire chicaner - donc là ils
sont allés vers une autre personne de confiance - ou : Mes profs vont
dire : Ah! encore une affaire de réseaux sociaux. Donc, je ne dis pas que
les profs vont juger, pas du tout. Je pense qu'ils accueilleraient bien ces
problématiques-là. Mais les jeunes se sentent jugés, et ça les effraie d'aller
consulter puis d'aller chercher de l'aide pour ça.
Puis, huitième leçon. Les jeunes sont
prêts à aborder la question du numérique, mais avec nuances et bienveillance.
Si on arrive avec un ton paternaliste et moralisateur, ils vont probablement
être sur la défensive puis vous nommer tous les bienfaits des réseaux sociaux.
Alors que, si on arrive avec une écoute ouverte, ça va.
Trois recommandations à l'issue de ces
leçons.
La Présidente (Mme Dionne) : Il
vous reste une seconde mais je... voulez-vous poursuivre?
Mme Parent (Emmanuelle) : Ou
vous pouvez...
La Présidente (Mme Dionne) : ...mais
on va vous laisser terminer, hein? C'est très intéressant. D'accord. Allez-y.
Continuez.
Mme Parent (Emmanuelle) : Merci.
Merci pour ces secondes supplémentaires.
Donc la recommandation numéro :
l'éducation et la sensibilisation. Les jeunes, je dis qu'ils ont des outils,
mais ils n'en ont pas tous - ils n'ont pas tous des connaissances sur leur...
la vie privée, c'est quoi les signalements qu'ils peuvent faire, etc. - donc
vraiment les informer. Informer aussi les adultes autour d'eux qui peuvent les
aider, les parents, personnels scolaires, etc.
Deuxièmement, deuxième
recommandation : bien, parler de bien-être associé au numérique chez les
jeunes, c'est parler de bien-être global. Ça fait que quand on développe des
parcs, qu'on met des parcs dans des villes, ça diminue le temps d'écran des
tout-petits, quand on a des activités abordables, accessibles autour de chez
eux, ça leur offre des alternatives aux écrans.
Puis la troisième recommandation, c'est
que, tu sais, je vous ai dit que les jeunes, ils avaient honte, des fois, de
nous dire leur temps d'écran, bien, c'est que la honte, là, là, il faut qu'elle
change de temps... il faut qu'elle change de camp. Ce n'est plus les enfants
puis les ados, là, qui doivent avoir honte de venir vers nous quand ils ont des
difficultés, mais c'est plus ceux et celles qui exploitent les vulnérabilités psychologiques,
les vulnérabilités des jeunes pour faire des profits qui, eux, devraient avoir
honte.
En ce moment, les plateformes comme Meta
et Alphabet, qui ont Google, Snap Inc... ils se vantent, là, à coups de
communiqués de presse, de toutes les initiatives qu'ils font pour le bien-être
des enfants, mais on le sait qu'il faut qu'ils répondent à des incitatifs
financiers. Je... oui, moi, Emmanuelle, mais est-ce qu'on leur fait vraiment
confiance pour prendre en charge le bien-être des enfants? Bien non. Ça fait
qu'on est mieux de réguler les plateformes numériques et l'industrie du jeu
vidéo.
Donc voilà, c'est tout. Ça fait que,
chaque adulte, prenons responsabilité avec empathie pour les jeunes, mais aussi
avec beaucoup, beaucoup de courage pour aller cogner aux portes des grandes
entreprises. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, Emmanuelle, pour ces partages de jeunes qui sont nos... notre
clientèle première de cette commission. Alors je donnerais la patronne
maintenant à la députée d'Iberville... oui, Iberville, oui. Tout à fait. Allez.
Mme Bogemans : Merci.
Avez-vous des exemples précis? Le dernier point que vous avez nommé justement,
être capable de mieux réguler les plateformes, les jeux vidéo, des mesures
concrètes, ça serait quoi?
Mme Parent (Emmanuelle) : Absolument.
Je vais prendre un exemple d'un projet... Il y a plusieurs projets de loi
actuellement, que ce soit surtout au Royaume-Uni, en Europe, aux États-Unis ou
en Australie. C'est les quatre qu'on nomme le plus souvent, dont on peut
s'inspirer. Celui aux États-Unis, par exemple, qui est le Kids Online Safety
Act, puis il y a aussi un «privacy», bon, pour la vie privée, va aller dans
différents points.
Un premier, c'est...
Mme Parent (Emmanuelle) : ...le
premier, c'est d'implémenter des fonctionnalités davantage, tu sais, pour
réguler les plateformes, donc demander de mettre plus de fonctionnalités pour
des signalements, pour prévenir les problèmes associés à la haine, à
l'exploitation sexuelle, pour que les jeunes puissent appeler à l'aide pour, tu
sais, direct signaler si quelqu'un leur semble louche puis que ce n'est pas le
réseau social qui leur répond : Non, non, cette personne qui s'appelle
X823 ne contrevient pas aux règles de la communauté, même si elle vous a dit
salut. Tu sais. Donc, des meilleures fonctionnalités.
Deuxièmement, c'est des fonctionnalités
par défaut pour les mineurs. Donc, toute personne qui a sous 18 ans ou
sous 16 ans, elle aurait des communications restrictives. Donc, il y a
moins d'inconnus qui peuvent entrer en contact avec toi, ils n'ont aucun accès,
disons, à tes données personnelles. Il y a possibilité de supprimer ton compte
et les données qui y sont associées sur le réseau social.
Puis un troisième point, c'est plus
d'outils pour les parents aussi, lorsqu'une personne mineure crée un compte,
que ce soit sur les jeux vidéo, là, en ligne ou réseaux sociaux, que ça
permette aux parents de pouvoir plus gérer la vie privée, réduire les achats
qui peuvent être faits, qu'il y ait des mécanismes de signalement aussi pour
les parents qui s'inquiètent.
Puis le dernier point, c'est des rapports
de transparence. Donc, combien de comptes ont été retirés? Combien d'adultes,
là, ont été signalés pour parler... tu sais, des inconnus qui parlent à des
enfants? Puis est-ce que les données peuvent être transmises à la recherche
pour qu'on puisse mieux comprendre à quoi ça ressemble une utilisation
problématique? Tu sais, concrètement, là. Donc, ça, c'est des lois, un projet
de loi qui est mis en place.
Puis au Royaume-Uni, justement, je donne
ce petit exemple-là, puis je vais prendre vos questions, là, mais, récemment,
ça a justement fait reculé une nouvelle fonctionnalité de TikTok qui visait à
ce que les utilisateurs, même mineurs, cumul des points. Donc, moi, si j'ai
14 ans, j'ai 13 ans, je suis sur TikTok, à chaque fois que je like
quelque chose, que je regarde des contenus, que je commente, j'accumulerais des
points. Puis là, ces points-là peuvent être transférables en points Amazon ou
transférables sur PayPal ou des des points TikTok. Donc, vous voyez, tu sais,
c'est une mécanique marketing. Mais là, donc, le fait qu'il y a un projet de
loi qui ressemble à ce que je viens d'énumérer a fait que ça n'a pas passé,
puis, en ce moment, ça a été retiré.
Mme Bogemans : La meilleure
façon d'aiguiser le sens critique des jeunes par rapport à ce que vous venez de
nommer, ce serait quoi?
Mme Parent (Emmanuelle) : Une
première étape, je pense que ça commence par une introspection. Très important,
c'est un problème complexe puis il n'y a pas deux jeunes qui sont pareils. Il y
en a qui sont plus des gamers, il y en a qui sont plus sur les réseaux sociaux.
Même parmi ceux qui sont sur les réseaux sociaux, il y en a qui adorent regarder
des vidéos, tandis qu'il y en a d'autres que c'est plus un stress associé à
écrire à leurs amis ou à vivre justement de la haine en ligne. Donc, c'est
vraiment de commencer avec du cas par cas puis d'amener les jeunes à se poser
des questions sur leur propre utilisation, parce , tu sais, ils sont nés
là-dedans, ça fait que souvent ils prennent pour acquis.
Mme Bogemans : L'introspection.
La Présidente (Mme Dionne) : La
députée de Hull avait une question, ensuite le député de Marquette.
Mme Tremblay : Toujours dans
la même ligne de ce que vous venez de mentionner, ça a un lien... bien, tout
dans la régulation, là. Au niveau de... Tu sais, tantôt, vous avez parlé...
hein, ils reçoivent des images, des vidéos ou du contenu qui s'adresse à eux,
mais qu'ils ne souhaitent pas nécessairement voir. Donc, est-ce que ça va...
Est-ce que ça serait une autre façon de réguler les plateformes? Est-ce que, ça
aussi, ça se fait ailleurs dans le monde?
Mme Parent (Emmanuelle) : 10
sur 10. Oui.
Mme Tremblay : Ça se fait
aussi. Vous ne l'avez pas nommé, mais...
Mme Parent (Emmanuelle) : Ça
se fait. Non, je ne l'ai pas nommé, en effet, puis c'est une bonne façon. En
fait, justement, avec le projet de loi au Royaume-Uni, entre 2017-2024, là, il
y a plus de 120 fonctionnalités comme ça, là, qui ont été retirés ou qui
ont été mises à jour, tu sais que... Puis une d'entre elles, c'est justement ce
que vous venez de nommer, de dire qu'il y a des inconnus qui ne peuvent pas
nous envoyer de photos. Ou sur Snapchat, par exemple, un inconnu ne peut pas
m'ajouter, à moins qu'on ait un grand nombre d'amis en commun. Donc, là, pour
faciliter que quelqu'un dans ma classe peut m'ajouter, mais quelqu'un qui ne me
connaît pas du tout ne puisse pas m'ajouter, parce que ça, c'est une des
stratégies que les jeunes nous ont rapportées des adultes qui leur
disent : Ah! mais je connais... je connais ton ami. Puis il y a des
données personnelles même sur les enfants, là, qui... donc on peut savoir, bon,
ils vont à quelle école, ils sont dans l'équipe de soccer. Donc, ça sème un
doute pour les jeunes, ça.
Donc, quand il y a des fonctionnalités
comme ça où c'est nécessaire, tu sais, de le suivre d'avance ou d'avoir des
amis en commun, bien, ça devrait prévenir normalement ce genre d'interactions
là.
Mme Tremblay : O.K. Puis même
chose pour le contenu, il faudrait mieux contrôler ce qu'ils voient aussi. Et
l'âge numérique... Parce que, vous savez, c'est déjà... Bon, certaines
plateformes disent : Pas avant tel âge, et là on voit, bon, est-ce que
c'est vraiment respecté? Bon, pas tout le temps, on le voit fréquemment, vous
l'avez... sûrement que les jeunes vous l'ont nommé dans les écoles également.
Donc, on se questionne là-dessus aussi. Est-ce qu'on doit imposer un âge
numérique? Et comment on peut obliger les plateformes, justement, le respect de
cet âge-là, numérique, là, qui est là, là, mais qui n'est totalement pas
respecté?
• (14 h 20) •
Mme Parent (Emmanuelle) : Oui,
parce que, présentement, vous le nommez, ce n'est pas respecté. On le voit...
Mme Parent (Emmanuelle) : ...dans
les classes, là. On est en quatrième année puis on manque : Qui, ici, a
Tiktok? Puis il y a plein de mains qui sont levées. Puis on demande aux
jeunes : Savez-vous c'est quoi, l'âge minimum pour ça? Puis là, c'est
comme : 16, 15, 13, 12, tu sais, ils ne savent pas nécessairement. Puis
quand on se crée un compte, on nous demande notre âge, mais il n'y a pas de
vérification.
Dès qu'on tombe dans la vérification, puis
là je ne serai pas la seule experte à vous dire ça dans les prochaines
semaines, c'est qu'on tombe en enjeu de vie privée. Donc, c'est de dire :
Bien, comment est-ce qu'on fait pour vérifier l'âge? Est-ce qu'il faut mettre
une preuve, je ne sais pas, de notre âge? Est-ce qu'il faut que les parents
partagent une vérification quelconque, etc.? Ça, c'est les questions que
l'Australie, la France, et tous se posent actuellement. Parce que c'est
vraiment le défi avec l'âge minimal. Ça fait que ça, c'est le côté technique de
l'applicabilité, mettons.
Un autre côté de l'applicabilité, c'est...
je vous l'ai dit, c'était ma leçon numéro... attendez, six. Les jeunes sont
très bons pour... pour contourner les contrôles. Tu sais, en Corée du Sud, ils
avaient mis un couvre-feu la nuit de minuit à 6 h du matin, puis ils l'ont
retiré, parce que, finalement, les jeunes qui veulent vraiment jouer, ils
trouvent une manière de jouer. Tu sais, c'est très difficile. Je ne dis pas que
c'est impossible, mais c'est très difficile. Puis voilà, les jeunes, tu sais,
tu es brillant à 16 ans, là, vraiment, même à 14, 13, les jeunes, là, sont
impressionnants. Donc, c'est ça.
Maintenant, ça, du côté technique, le
côté, bon... puis finalement, c'est que, si on met, disons... tu sais, la
question de l'âge, elle est importante, je la trouve difficile, mais, si on
met, disons, une interdiction de réseaux sociaux avant 16 ans, bien, tu
sais, quand j'ai parlé, là, ma leçon sept, là, les jeunes ne veulent pas se
sentir jugés. C'est sûr que, si c'est interdit pour toi d'aller sur les réseaux
sociaux, puis que, là, tu te fais parler par un inconnu où que tu as joint un
groupe quelconque, que tu as des doutes, bien, c'est sûr que ça peut être plus
difficile aller chercher de l'aide à ce moment-là. Puis il y a aussi que ce
n'est pas nécessairement reconnaître l'autonomie des jeunes dans leur capacité,
quand même, à avoir un équilibre puis à profiter des bienfaits des réseaux
sociaux... tu sais, ce qu'ils veulent, ce n'est pas nécessairement pas avoir
TikTok, c'est juste que ça soit moins addictif, puis qu'ils puissent contrôler
plus le contenu puis plus les personnes qui rentrent en contact avec eux. Donc,
est-ce que ça répond à votre question?
Mme Tremblay : Ça répond très
bien à ma question. Je vais passer maintenant la parole à une autre personne.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, Mme la députée. M. le député de Marquette.
M. Ciccone :Merci beaucoup. Merci d'être là, Dre Parent. Hier, on s'est
parlé, on en aurait pris pas mal plus, mais merci d'être là encore aujourd'hui.
On a beaucoup de questions, puis là on va aller dans tous les... toutes les
sphères puis dans tous les lieux, là. Mais à la base, là, pour régler un
problème selon moi, là, puis corrigez-moi si j'ai tort, mais il faut vraiment
aller à la base pour régler un problème. Puis êtes-vous d'accord pour dire que
le problème, là, ça commence par les adultes, puis ce n'est pas les jeunes, là,
c'est les adultes? Est-ce que je me trompe quand je dis ça?
Mme Parent (Emmanuelle) : Je
suis tellement d'accord. C'est le titre de notre mémoire. Je suis vraiment
d'accord. Est-ce que votre question était plus adressée, mettons, aux parents
ou au personnel scolaire? Parce que, disons, ce qui aide... mais ces adultes-là
qui gravitent dans la vie des enfants, c'est qu'eux aussi, ils ne connaissent
pas nécessairement le numérique, là. Donc, d'avoir des campagnes de
sensibilisation, on les informe. On commence à voir un... tu sais, des
connaissances scientifiques quand même, là, je disais bon, quand les parents ne
sont pas sur les écrans, ça aide, etc. Donc, il faut leur transmettre... Donc,
pour des personnes dans la recherche comme moi, ça... ça devient frustrant
parce qu'on ne veut pas que ce soit hermétique. On veut transmettre les bonnes
pratiques au milieu scolaire, au milieu de la santé pour qu'ils puissent au
moins avoir la capacité de les mettre en application.
M. Ciccone :Avez-vous, lors de vos recherches, justement, tenté cette
expérience-là avec une famille? Par exemple, dire : Bien, pour les
prochains mois, les parents, on laisse les écrans de côté, téléphone, puis on
va évaluer, voir le temps d'écran des jeunes, si, comme modèles, ils vous
regardent puis ils voient que vous n'avez pas votre téléphone dans les mains ou
vous faites d'autres activités, le temps d'écran va... va descendre. Avez-vous
tenté cette expérience-là?
Mme Parent (Emmanuelle) : Vous
allez recevoir...
M. Ciccone :...des chiffres là-dessus, oui?
Mme Parent (Emmanuelle) : Oui,
vous allez recevoir des experts qui ont fait exactement ces études-là, qui vont
pouvoir mieux répondre à vos questions que moi. Moi, par contre, ce que je peux
vous nommer, c'est vraiment l'inconfort des jeunes, là, qui est unanime, là.
Mais, quand je dis unanime, le feu pogne, là, dans les classes, au moment où on
parle de l'utilisation des écrans. Ça fait qu'au-delà des chiffres, au-delà des
pourcentages des jeunes, au-delà... Dans chaque classe qu'on visite, les jeunes
mentionnent qu'ils veulent l'attention de leurs parents. Donc, c'est... c'est
vraiment flagrant, là.
M. Ciccone :Dernière question pour moi, vous avez... dans vos
conclusions puis vos recommandations, là, vous dites : «Favoriser le
bien-être numérique en déployant des activités alternatives.» Vous avez dit
dans votre énoncé initial, vous avez parlé d'une heure d'activité physique par
jour. Ça, pour moi, c'est de la musique à mes oreilles. Il y a le dicton qui
dit : Ça prend un village pour élever un enfant, là, est-ce que ça prend
l'aide de tous les ministères? Par exemple, puis... puis ne pas avoir comme
complice... puis là je vous...
M. Ciccone :...une sous-question, là. Quand... Quand vous voyez des
écoles qui vont offrir des programmes de e-sport dans les écoles puis quand, je
vous dis, là, c'est des tactiques Fortnite, parce qu'éventuellement il y a les
Jeux olympiques de jeux vidéo qui s'en viennent, il faut préparer les jeunes,
est-ce que notre réseau scolaire... puis, même, à plusieurs... plusieurs
égards, privé, là, ne sont pas des complices de la problématique avec ces
offres de programmes là?
Mme Parent (Emmanuelle) : Vous
avez raison, c'est une grosse sous-question, donc je vais les aborder les deux
séparément.
Premièrement, au sujet de les... des activités
alternatives, comme facteur de protection de... tu sais, quand je dis que les
jeunes perdent le... disent perdre le contrôle parfois, quand ils posent leurs
téléphones, ce qui les aide, c'est de savoir qu'ils ont quelque chose d'autre à
faire. Je parlais à une adolescente qui me dit : Samedi passé, j'ai
supprimé TikTok, plus capable de passer du temps là-dessus. Cinq minutes plus
tard, je l'ai retéléchargé. J'étais comme : Mais pourquoi? Elle dit :
Bien, je ne savais pas quoi faire.
Donc, oui, que ce soit de l'activité
physique, la phrase que vous nommez : Ça prend un village pour élever un
enfant, c'est clair que c'est des facteurs protecteurs. Puis même les experts
de cyberdépendance, que vous allez, encore une fois, recevoir dans les prochaines
semaines, misent sur la diversité d'activités. Puis on l'entend. Les jeunes qui
ont plusieurs activités, bien, les écrans en font partie, limite les
encouragent. Ils aiment le soccer, ils regardent des vidéos sur le soccer, ça
les incite à faire des activités en vrai. Décidément, ça a un impact.
Après, pour le e-sport, c'est... dans les
écoles... encore une fois, il va y avoir plus des experts de e-sport que moi
qui vont venir parler ici, mais je peux nommer quand même que, quand c'est
dans... encadré dans le milieu scolaire, habituellement les jeunes reçoivent
aussi des cours sur les saines habitudes de vie. Donc, c'est très encadré
justement parce qu'ils connaissent tous les problèmes de cyberdépendance. Donc,
je... c'est ça, je ne m'avancerais pas trop là-dessus, mais, de mon expérience,
quand je suis allée dans des écoles qui avaient des programmes de e-sport,
c'étaient les premiers à recevoir nos ateliers, parce que, tu sais, justement,
on ne veut pas qu'il y ait de... c'est ça, de... que ça... que ça vire mal, là,
oui.
M. Ciccone :Mais on n'augmente pas le nombre d'heures sur les écrans,
justement, tu sais, un élément qui est potentiellement dépendant, dans les
écoles? Parce qu'on serait naïfs de dire : Bien là, on l'encadre à
l'école. Quand ils retournent à la maison, ils vont retourner quand même sur
leurs jeux vidéo, là. On n'ajoute pas des heures?
Mme Parent (Emmanuelle) : Oui,
c'est possible.
M. Ciccone :Ce n'est pas la mission de notre système d'éducation, ça,
non?
Mme Parent (Emmanuelle) : Là,
ce n'est pas à moi de dire c'est quoi, la mission de notre système d'éducation.
Mais, quand même, les jeunes, qu'est-ce qu'ils vont chercher dans le jeu vidéo
parfois, ce n'est pas juste une fuite, là. Tu sais, des fois... Tu sais, parce
qu'on... Ce n'est pas juste une fuite, c'est de la coopération, de la
valorisation, du travail d'équipe... Dans le e-sport, les jeunes travaillent en
groupe, donc ils vont s'encourager, ils sont suivis par un coach. Donc, ça
devient plus... C'est sûr qu'il n'y a pas la partie physique, là, de bouger,
mais ça devient vraiment compétitif comme un sport, ce qui est très, très
valorisant. Puis j'imagine que vous le savez, ça, là. Mais, quand même, ça vaut
la peine de se pencher là-dessus. Puis, c'est ça, il y a d'autres personnes qui
vont pouvoir peut-être vous en parler dans... d'autres termes que moi.
M. Ciccone :Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : ...la Présidente.
Bonjour de nouveau. Je reviens un peu sur la question de la majorité numérique.
Considérant les défis d'applicabilité, que vous avez bien résumés, est-ce que
c'est souhaitable de faire ça?
Mme Parent (Emmanuelle) : Je
vais dire que, si c'est la seule initiative, c'est insuffisant, vraiment. Je ne
pense pas que c'est souhaitable pour les jeunes qui veulent aller chercher de
l'aide puis qui vont se sentir jugés, peut-être, par cette interdiction, qui ne
voudront pas mal faire, pas du tout. Je ne pense pas que c'est souhaitable non
plus pour les jeunes qui vont chercher beaucoup de soutien social sur les
réseaux sociaux, dans les communautés en ligne. Je ne pense pas que ça va
régler les problèmes de cyberintimidation non plus. Je veux dire, les personnes
qui travaillent dans les écoles le savent, là, les insultes, ça peut très bien
être sur Teams ou par texto, là, ça n'a pas juste lieu sur Snapchat puis
Instagram. Puis je ne pense pas non plus que ça peut régler le problème de...
perdre le contrôle en regardant des vidéos, parce que, bon, disons que, les
réseaux sociaux, on définit ça comme TikTok, Instagram, Snapchat, bien, que
fait-on de Disney Plus et Netflix, qui emboîtent le pas aussi avec des vidéos
au format court? Donc, il y a des défis, vraiment, de définition à ça, puis...
Voilà.
Donc, je ne pense pas nécessairement qu'en
ce sens-là c'est souhaitable puis... Donc, si on décide que la majorité
numérique est à 16 ans, bien moi, je vais revenir ici puis je vais quand même
être inquiète des jeunes de 16 ans qui arrivent sur ces plateformes-là qu'on
n'a pas régulées, où est-ce qu'ils voient encore des pubs de diètes, des pubs
qui peuvent leur... bien, du contenu qui peuvent leur parler de troubles de
comportement alimentaire. Donc, ça ne règle pas nécessairement le problème à sa
source.
M. Leduc : Est-ce qu'on peut
dire alors que c'est une fausse bonne idée?
Mme Parent (Emmanuelle) : Ça
peut donner un faux sentiment de sécurité, oui.
• (14 h 30) •
M. Leduc : O.K. Toujours dans
l'applicabilité...
14 h 30 (version non révisée)
M. Leduc : Moi, je reste
marqué par la bataille entre le gouvernement fédéral et Facebook, notamment,
sur la présence des médias. Il n'est d'ailleurs toujours pas possible de faire
des références à des articles sur ce réseau social là. C'est quoi la capacité
réelle d'un État de droit comme le Québec par rapport à des exemples que vous
avez vus ailleurs, de faire plier une multinationale comme Facebook? Mais là on
parle de Snapchat et autres. C'est quoi notre réel rapport de force qu'on a
avec eux?
Mme Parent (Emmanuelle) : C'est
que... Je pense que c'est... C'est qu'ils soient tous dans les mêmes règles.
Parce qu'une personne qui... Tu sais, mettons que je suis bienveillante, O.K.?
Les personnes qui travaillent chez Meta, ils ne veulent pas que les enfants se
fassent contacter par l'exploitation sexuelle, ils ne veulent pas que les ados
se mettent à avoir du contenu qui est vraiment inapproprié. Donc, si je crois
en la... Si on croit en la, quand même, la bienveillance de ces compagnies-là,
bien, c'est tout à leur avantage de... de jouer dans les mêmes règles de jeu.
Parce que si, demain matin, TikTok décide de décourager tout le... la
recommandation de contenu qui suscite beaucoup d'engagement, mais que les
autres plateformes ne le font pas, bien, ils vont peut-être moins avoir l'attention
des consommateurs, moins avoir l'attention des gens sur les réseaux sociaux.
Donc, ça les rend moins compétitifs. Tandis que si l'avantage pour les
plateformes, c'est de dire : Bon, bien, on joue tous dans les mêmes règles
de compétition en ce moment.
M. Leduc : Ça, je
comprends que c'est comme... Entre elles, elles peuvent se dire ça, mais l'État,
lui, il peut appliquer des lois. Puis, dans votre expérience, ce que vous avez
vu, ça fonctionne bien? Les plateformes se plient aux nouvelles directives qui
peuvent être adoptées par différents états?
Mme Parent (Emmanuelle) : Bien,
dans les exemples que j'ai nommés, là, avec le online... le kit online, etc.,
les plateformes ont collaboré.
M. Leduc : O.K. Donc, on
ne risque pas de revoir ce qu'on est en train de vivre depuis un peu plus d'un
an maintenant avec Facebook et les médias.
Mme Parent (Emmanuelle) : Bien,
je n'ai pas de boule de cristal, mais en même temps, quel autre choix sinon? On
va se dire : On n'est pas capables. Ah non, les jeunes... Aïe! Quand tu
verras une vidéo de fusillade, tu viendras m'en parler?
M. Leduc : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme
la Présidente. Bonjour, Dre Parent. C'est toujours très fascinant de vous
entendre. Merci beaucoup pour votre expertise puis merci de nous la partager.
Je vous écoute depuis tantôt et puis, bon, il y a quelques-unes, donc, de mes
questions qui ont été répondues, là, ici, notamment sur la majorité numérique.
Mais si on avait à faire un continuum, là, au niveau de vos recommandations, ce
que j'entends, c'est qu'au niveau de l'individu, au niveau du jeune, notre
rôle, le cadre que, vous, vous recommandez, c'est un cadre de sensibilisation,
c'est un cadre de responsabilisation du jeune, s'assurer donc de développer son
sens critique et de l'aiguiser. Ensuite, c'est de voir comment est-ce qu'on
peut donc développer donc, des politiques publiques qui encadrent donc, les
adultes autour de ça. Et ce que vous le dites dans votre mémoire, bien, les
écrans, c'est aussi un problème d'adulte. Et là où est-ce qu'on est plus dans
la coercition ou l'interdiction, ce n'est pas, donc, au niveau du jeune. Donc,
on a dit, la majorité numérique, peut-être une fausse bonne idée, mais beaucoup
plus au niveau des plateformes. Est-ce que c'est un continuum qui reflète bien
vos propos?
Mme Parent (Emmanuelle) : Oui,
je trouve que vous avez bien résumé ça. Je trouve que vous avez bien résumé ça.
Le petit aspect qui manque peut-être, c'est cette notion de : Le numérique
c'est transversal. C'est vraiment de dire... Comme tantôt vous parliez de :
Est-ce qu'il va falloir qu'on soit plusieurs ministères là-dessus? C'est qu'en
effet, si tu as des activités abordables dans ta ville, que tu as des
alternatives d'activités, ça aussi, ça fait une différence dans les écrans.
Parce que même si on dit demain matin : O.K. Instagram, TikTok, vous êtes
obligés d'être en noir et blanc, vous êtes obligés de mettre un certain nombre
de temps pour les jeunes. Bien, on leur enlève quelque chose qui répondait à un
besoin de socialisation. On leur enlève quelque chose qui répondait à un besoin
de distraction. Puis par quoi est-ce qu'on le remplace? Donc là, c'est là que c'est
intéressant de dire : Bien, O.K., on va peut-être investir ou, en tout
cas, dans les écoles, O.K., on dit : Peut-être moins téléphone, mais en
même temps on va être plus là pour eux. Donc c'est peut-être ça qui complète le
continuum là, si je peux ajouter.
Mme Cadet : Merci.
Ensuite, bien, plus tôt, vous parliez, donc, de... Bien, en fait, que c'est
important pour le jeune de se poser des questions sur son utilisation. Puis
vous avez quand même fait, donc, la part des choses dont une utilisation
positive ou jugée positive, puis une autre, donc, qui serait peut-être, donc,
plus néfaste quant aux contenus. Donc j'aimerais ça donc vous entendre
peut-être pour le bénéfice de tous sur la qualité de ce que... Bien, en fait de
l'information qu'on... donc de... le contenu, donc, qui est présenté aux
jeunes, puis la quantité d'heures, parce qu'en en fait, quand tu nous... en
fait, vous nous parliez hier, donc, vous nous disiez, donc, oui, c'est bien,
vous, d'avoir des lignes directrices sur la quantité de temps passé sur les
écrans, parce qu'on se pose beaucoup ces questions-là sur le temps passé sur
les écrans, c'est beaucoup d'heures, beaucoup d'heures. Mais quand on
décortique le temps passé sur les écrans pour chaque jeune, l'expérience est
différente. Puis il y a ce sens critique là à développer, oui, pour les jeunes,
mais aussi pour l'adulte. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme Parent (Emmanuelle) : Oui.
En fait, pour réfléchir au-delà du temps d'écran, parce que les jeunes vont
vous le dire, deux jeunes qui passent trois heures, disons, sur les écrans pour
le loisir par jour, ne feront pas nécessairement les mêmes activités. Alors des
fois, ils nous disent, donc : J'ai lu...
Mme Parent (Emmanuelle) : ...un
livre sur ma tablette. Après, j'ai écouté des vidéos, etc. Puis ce n'est pas
toutes les utilisations qui vont avoir le même impact sur le bien-être. Donc,
oui, on veut regarder le temps. C'est clair que ça, c'est un indicateur de
quelque chose, parce que si un jeune passe 12 heures par jour sur les
écrans, on se dit : O.K. Bien là, qu'en est-il du sommeil, de l'école, des
relations, de l'hygiène, de l'activité physique, etc. Donc, oui, le temps,
c'est important.
Deuxième chose sur quatre : le
contenu. Donc, le contenu, comme je disais, peut être que ça a pris une
seconde, là, ou quelques-unes, pour qu'un jeune voit, quand il ouvre YouTube,
puis ça, c'est une vraie histoire, le jeune a dit : Je n'aime pas ça, ces
temps-ci, il y a une bande-annonce de film d'horreur, ça me fait peur, je
n'aime pas ça, là, c'est La Nonne, elle me fait peur, et tout. Donc là,
l'enfant me raconte ça. Ça fait qu'il n'a même pas écouté une vidéo, ça fait
peur. Donc, le contenu compte. Des initiatives comme Passe-Partout, ici, bon,
on voit que... ce que... Pour des contenus éducatifs, il y a des fois des
comportements prosociaux, donc, chez les jeunes, là, parce qu'ils ont appris ça
devant un écran.
Troisièmement, il y a le contexte. Donc,
c'est quoi le contexte? Est-ce que t'es seul quand tu regardes du contenu? Mais
ou est-ce que c'est une activité sociale? Parce que, si c'est une activité
sociale, ça va être bon pour nos relations, bon pour la socialisation. Si ça se
trouve, on écoute Grey's Anatomy. Il y a une adolescente qui me disait qu'elle
écoutait Grey's Anatomy avec sa mère. J'étais comme : Wow! C'est parce que
vous en avez pour 20 saisons, là, d'histoires de... Tu sais, je me
disais : C'est bon ça!
Et finalement, c'est la vulnérabilité
de... du jeune lui-même. Puis là je donnais l'exemple hier, de... dans le cadre
de ma thèse, j'ai parlé à deux adolescentes, individuellement et anonymement,
qui sont amies. Et les deux me parlaient qu'elles suivent une influenceuse à
succès qui vend des costumes de bain, elles en parlent à l'école avec leurs
copines. C'est leur stat, c'est leur référent culturel. Elles en parlent. Il y
en a une, elle m'en parle en disant : Ça l'inspire. Elle veut poursuivre
ses études au HEC, elle aussi, elle veut être entrepreneure. La seconde me
dit : Je ne veux pas arrêter des suivre parce qu'on en parle à l'école,
puis c'est le fun, mais chaque fois que je tombe sur le profil, je me trouve
moche puis je trouve que la personne est plus belle que moi. Puis cette
jeune-là se compare négativement. Donc, dans ce cas-ci, c'est embêtant, hein,
parce qu'on a le même temps d'écran, le même contenu, le même contexte, mais
l'impact est vraiment plus difficile pour une que pour l'autre.
Une voix : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
M. le député de Jonquière.
M. Gagnon : Oui. Bonjour, Dre
Parent... Hier, vous avez dit quelque chose, quand même, qui fait un petit peu
de peine, c'est-à-dire on a une spécialiste comme vous au Québec, puis quand
vous rentrez dans une école, avec votre titre, les jeunes disent : Ah non,
on va se faire chicaner. Hier, ça m'a marqué. Puis quand je lisais votre
mémoire, puis je l'ai revu une deuxième fois, vous faites part d'un outil
qui... moi, je crois énormément, c'est la réduction des méfaits. Et vous l'expliquez
bien dans votre rapport. La question est en lien avec la réduction des méfaits,
c'est-à-dire : Bien, si on veut amener le jeune à réduire son geste qui...
ou à réduire le méfait, est-ce que vous pensez que c'est plus le parent à
l'école qui doit venir baliser, réglementer pour l'apporter à réduire, à
réduire son geste, sa consommation, ou c'est plus une formation directe aux
jeunes, qui va l'amener à prendre conscience lui-même de l'outil, du nombre
d'heures, du contenu?
Mme Parent (Emmanuelle) : Je
trouve que c'est deux très belles avenues, ce que vous venez de nommer. Puis la
manière dont elles vont s'articuler, ça dépend beaucoup de l'âge de l'enfant.
Donc, vous allez peut-être entendre parler de l'approche évolutive. Quand on
parle de rapport aux écrans, évidemment, on ne parle pas du même temps d'écran
chez un enfant de deux ans, de huit ans, de 12 ou de 17. Donc, les parents,
l'école jouent vraiment un beau rôle d'alliés surtout. Moi, je vous parle de ce
que j'entends des enfants. Les enfants nous parlent beaucoup de leurs parents
et de l'école dans les quatrièmes, cinquièmes ou sixièmes années. Ça les aide.
En train de travailler leur autonomie, en train de se dire : O.K., là, il
faudrait peut-être que j'aille me coucher. Donc, ils apprennent ça, ils ont
besoin... Même si, moi, je vais faire un atelier genre toutes les semaines avec
un enfant, puis je leur dis : Il faut que tu fasses dodo à telle heure
puis que tu lâches les écrans une heure avant d'aller te coucher. Bien,
peut-être qu'il va trouver ça difficile parce qu'il n'est pas là dans son
développement encore. Donc, les parents, l'école sont vraiment importants.
Mais c'est clair que chez les 16,
17 ans qui connaissent peut-être plus leur utilisation, qui sont plus
autonomes, bien là, leur donner des outils, c'est plus réaliste que dire :
Bien, tes parents vont aller voir dans tes messages vérifier que personne ne te
parle. Donc, ça dépend beaucoup de l'âge, mais les deux, c'est deux bonnes
idées qui... qui amènent un changement d'habitudes. En fait, c'est ça qu'on
cherche, là, en réduction de méfaits aussi. Pour prévenir une utilisation qui
est excessive, c'est que, quand je commence à voir que ça déborde un peu, bien,
je prends des nouvelles habitudes pour essayer de diminuer puis d'avoir plus un
équilibre.
M. Gagnon : Merci.
• (14 h 40) •
La Présidente (Mme Dionne) : La
beauté d'une connaissance spéciale... Je me permets une question. Alors, moi,
je m'intéresse depuis beaucoup d'années, justement, à la gestion des émotions,
à l'intelligence émotionnelle chez les enfants. Il y a des spécialistes même
qui nous recommandent peut-être d'intégrer éventuellement dans... à l'école la
gestion... les cours en gestion...
La Présidente (Mme Dionne) : ...émotions
en santé mentale. Je me questionne, à savoir est-ce que l'arrivée des réseaux
sociaux, des écrans, et tout ça a un impact quelconque sur la gestion des
émotions chez les enfants? Bon, on parle des jeux vidéo, qui, peut-être, là,
augmente un peu l'aspect colérique des enfants, là, quand ils jouent, mais
c'est quoi, votre avis là-dessus?
Mme Parent (Emmanuelle) : Oui,
vous avez encore une fois une super spécialiste qui vient de publier un article
là-dessus. Je vais la laisser en parler. Je vais prendre l'angle de ce que les
jeunes nous racontent, O.K.? L'action, là, beaucoup, on la voit, nous, en
secondaire I, II, avec les 13 ans, et tout. C'est à ce moment-là, plus, qu'ils
vont jouer à Fortnite, des jeux comme ça, FIFA, etc. Puis ils vont nous parler
beaucoup. On leur dit : Est-ce que vous ragez? Puis ils disent : Oui,
on rage. Est-ce qu'il y en a ici qui ont déjà brisé des manettes? Il y en a
quelques-uns : Oui, j'ai déjà lancé ma manette. Oui, j'ai déjà, moi... tu
sais, c'est quoi vos... c'est quoi, ces émotions-là que vous vivez? Puis les
raisons qu'ils nous nomment, c'est associé beaucoup à la compétition : Il
y a quelqu'un qui trichait, Mme, ça m'a fâché. Bien, je le comprends, tu sais,
on peut tout comprendre ça. Ça fait des heures que tu pratiques, quelqu'un triche,
ça ruine tes statistiques que tu essaies de monter. Mon équipe... Je n'étais
pas bon, cette journée-là, ça allait... c'était plus difficile. Bon. L'autre
équipe était meilleure ou on... ça ne marchait pas, notre travail d'équipe
cette journée-là, ça n'allait pas. Donc, il y a plein de raisons pour
lesquelles ça peut susciter des émotions, jouer à des jeux vidéo.
Après, ça dépend comment on régule ces
émotions-là. Quand on demande aux enfants... bien, aux enfants, aux ados,
préados, comment est-ce qu'ils font, ils vont me nommer : Bien là, j'ai
crié dans un coussin. Moi, j'ai fait des tours dans mon salon, moi, je vais en
parler avec mes parents. Ça fait que c'est pour ça, moi, j'imagine les parents
qui cuisinent, puis là, tout d'un coup : Il s'est passé telle affaire,
puis là ta ta ta... Donc, les enfants nous racontent que ça, c'est leurs
méthodes, mais, avec eux, on travaille à leur nommer : Bien, quand tu
ressens de la rage comme ça, il est peut-être temps de prendre une pause puis
d'aller justement vers ces outils-là que tu as développés, qui sont sains, pour
ne pas qu'il y ait des conséquences durables, négatives, genre briser sa
manette, ça coûte des sous, genre briser les plantes de ses parents, tout ça,
c'est des vrais exemples. Et, quand tu es fâché. Donc, oui, il y a des émotions
qui ressortent beaucoup, beaucoup de ça, et, bien, il faut... on essaie d'aider
les jeunes pour leur donner des bons moyens d'intervenir.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Je cède maintenant la parole à Mme la députée de D'Arcy-McGee.
Mme Prass : Merci. Merci de
votre présence encore aujourd'hui. Moi, j'ai deux questions. Vous avez parlé de
l'aspect positif de la présence sur les écrans, alors trouver une communauté,
socialisation, etc., mais on sait qu'il y a aussi beaucoup d'enjeux de
cyberintimidation, puis, justement, ça peut vite changer, qu'on est entre amis,
tout va bien, puis là on dit quelque chose, les gens ne trouvent pas que c'est
correct, poche, quoi que ce soit, puis les gens tournent... se tournent envers
nous, puis ça devient... ce n'est plus positif, ça devient négatif. Comment...
Puis vous n'avez pas vraiment beaucoup touché sur ça ni hier soir ni
aujourd'hui, donc je voudrais juste vous entendre un petit peu là-dessus.
Mme Parent (Emmanuelle) : Oui.
Merci de poser cette question-là, c'est vrai. Et puis je vais me fier à une
étude qui a été faite par Habilo médias sur les méchancetés en ligne, donc,
eux, les insultes, et tout. Puis eux, ils en venaient à la conclusion que, chez
les préadolescents canadiens, canadiennes, il y a environ... c'est dans les
30 %, là, un jeune, environ, sur trois qui a reçu des méchancetés en
ligne, O.K.? Lorsqu'on demande à ces jeunes-là : Où est-ce que vous avez
reçu les méchancetés?, en premier, c'est sur les jeux vidéo, quand on se parle
en ligne avec les micros. Donc, ça, c'est vraiment cohérent avec qu'est-ce
qu'on entend, nous, dans les classes. S'insulter, ça fait partie du plaisir,
parce qu'on teste les limites, on a le sentiment d'être protégé derrière notre
casque d'écoute. Et là je parle plus de... tu sais, secondaire I, II, fin
primaire, là. À 17 ans, ce n'est pas vraiment ce qu'on entend, là, bon, ils ont
passé comme à autre chose, on dirait, là, peut-être pas tous, mais. En tout
cas, donc c'est surtout quelque chose qu'on voit dans ces âges-là.
Ensuite, c'est dans les messages
personnels, donc ce n'est pas dans les commentaires, le lieu où ils reçoivent
des méchancetés. Et ça, bien, les écoles vont pouvoir témoigner que, dans les
Teams de l'école, des fois, c'est là que ça se déroule. Puis, avec les
enfants, on travaille à reconnaître qu'est-ce qui est de la violence. Ce
commentaire-là que tu t'es fait envoyer, en effet, c'était une méchanceté, puis
ce n'est pas parce que c'est virtuel que ce n'est pas vrai.
Donc, vous me permettez de faire un point
important, la vie réelle et la vie virtuelle, on ne parle plus en ces termes-là
parce que c'est comme dire que ce qui se passe sur le virtuel est moins grave,
alors que, si un jeune reçoit des insultes en ligne, c'est grave, tu sais, on
veut qu'il en parle à un adulte puis qu'il y ait une intervention.
Puis le troisième lieu, c'est... où il y a
des méchancetés, c'est dans les commentaires, donc, sur les réseaux sociaux.
Donc, ce qu'on amène, ce qu'on dit aux jeunes, dans ce temps-là, c'est d'en
parler avec un adulte pour qu'il y ait une intervention. Il y a des protocoles,
dans les écoles, il y a des personnes enseignantes qui font un super travail,
mais c'est sûr que, là où des jeunes entrent en liens sociaux, bien, puis il
peut y avoir des situations comme ça, conflictuelles.
Mme Prass : Puis ma prochaine
question...
Mme Prass : ...c'est... Le
groupe qui a témoigné avant vous, ils ont parlé de... du phénomène des écrans
récompenses dans les écoles. Et moi, je me posais la question si, justement, ce
n'est pas le contraire qu'on devrait faire, parce qu'en faisant ça, c'est
comme... ça devient la récompense ultime plutôt que d'aller à la bibliothèque,
ou faire du sport, ou quoi que ce soit, puis je voulais juste savoir si vous
aviez une opinion là-dessus, puis dans le... dans le sens de : est-ce que
ça devrait être interdit à l'école? Bien, est-ce que les écoles ne devraient
pas offrir les écrans comme récompense? Parce que ça... ça renforce cette idée
auprès des jeunes.
La Présidente (Mme Dionne) : En
cinq secondes.
Mme Parent (Emmanuelle) : Oui.
En 30 secondes?
La Présidente (Mme Dionne) : Cinq.
Mme Parent (Emmanuelle) : Cinq?
Ce n'est pas une opinion, c'est des études scientifiques qui démontrent ce que
vous venez de nommer. Vous l'avez très bien expliqué, je ne vais pas le redire.
Mais c'est vrai que ça met les écrans sur un piédestal lorsqu'on les met dans
les récompenses ou des punitions. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est des études
publiées à ce sujet-là.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, Emmanuelle, merci à tous pour ces échanges. Donc, je suspends les
travaux quelques instants pour accueillir notre prochain groupe.
(Suspension de la séance à 14 h 46)
(Reprise à 14 h 51)
La Présidente (Mme Dionne) : Alors,
membres de la commission, nous allons reprendre nos travaux. Donc, je souhaite
maintenant la bienvenue à l'Association des entreprises pour le développement
des technologies éducatives du Québec.
Donc, je vous rappelle que vous avez
10 minutes pour nous faire part de votre exposé. Je vous demanderais
d'entrée de jeu de vous présenter et nous faire part, par la suite, de vos
commentaires. Et nous procéderons par la suite à une période d'échange avec les
membres de la commission. Alors, la parole est à vous.
M. Young (Shawn) : Excellent.
Bien, je me présente, Shawn Young. Merci de nous accueillir, membres de la
commission. On est très, très heureux d'être là aujourd'hui. Je me présente
aujourd'hui en tant que président de l'Association EDTEQ, mais je travaille
dans le numérique, depuis 20 ans, éducatif. Je suis aujourd'hui
vice-président senior au développement d'expérience pédagogique numérique pour
HMH, on sert 55 millions d'élèves avec des solutions numériques. Je suis
aussi vice-président de l'école Branchée, qui est la référence en formation
continue aux enseignants à l'ère du numérique. Je suis aussi membre du comité
aviseur... qui regroupe des gouvernements, des OBNL, des compagnies, dont
UNICEF, pour créer des politiques et des pratiques en éducation d'intelligence
artificielle à l'école. Ça fait cinq ans que je suis chargé de cours invité à
la maîtrise en éducation à Harvard. Je suis ambassadeur de la faculté
d'éducation de l'Université de Sherbrooke. J'ai été co-président du groupe de
travail UNESCO sur le développement des compétences socioémotionnelles par le
biais d'outils numériques. Donc, c'est vraiment... c'est long, là, je ne veux
pas trop me vanter, mais c'est pour vous dire que ça fait longtemps qu'on
réfléchit à la question dans le contexte scolaire.
On a entendu beaucoup de commentaires qui
ont été fort pertinents avant nous. Nous, on s'intéresse vraiment à la question
dans les écoles. Puis l'Association EDTEQ... je vous présente ça, puis, après
ça, je cède la parole à ma collègue, on regroupe une centaine d'organisations
dédiées à l'intégration des technologies numériques dans le domaine
d'éducation. Vous avez peut-être entendu parler d'Antidote, Alloprof, c'est ça,
donc membres de notre organisation. Ça fait plusieurs années qu'on travaille
dans des écoles avec des enseignants, des élèves pour développer et soutenir
des solutions technologiques qui enrichissent l'enseignement et l'apprentissage.
Notre vision repose sur l'importance d'encadrer l'utilisation des outils
numériques pour maximiser leur potentiel pédagogique, tout en assurant un usage
responsable. Donc, je cède la parole à ma collègue, Annie Gagné.
Mme Gagné (Anny) : Donc,
bonjour, Mme la Présidente, les gens de la commission. Donc, ça fait bientôt
15 ans que je suis dans le milieu éducatif à titre d'enseignante, de
conseillère pédagogique, de conceptrice de formation en ligne. Et j'ai aussi
baigné dans les start-ups en technologies éducatives à titre de vice-présidente
aux opérations. Mais, aujourd'hui, je suis ici à titre de directrice générale
de l'Association EDTEQ. Donc, vous voyez, mon introduction est un peu plus
courte que celle de Shawn, là, je vous épargne.
Donc, je suis ici aujourd'hui pour
présenter notre position. Donc, cette position-là, elle est très claire. Les
outils numériques sont des leviers indispensables pour enrichir l'expérience
d'apprentissage des élèves et personnaliser l'enseignement selon leurs besoins.
Lorsqu'elles sont bien encadrées, les technologies apportent des solutions
concrètes aux défis actuels de l'éducation. Elles permettent de différencier
l'enseignement, de créer des parcours personnalisés et d'offrir un soutien
ciblé, particulièrement pour les élèves en difficulté.
Par exemple, des outils comme la
reconnaissance vocale et la lecture assistée sont non seulement bénéfiques pour
les élèves ayant des besoins particuliers, mais profitent également à tous les
élèves, rendant ainsi l'éducation plus inclusive. Les outils numériques offrent
une opportunité sans précédent pour renforcer l'autonomie des élèves, tout en
permettant aux enseignants de recueillir des données en temps réel pour adapter
leur pédagogie de manière plus efficace.
Les technologies de l'information
permettent de suivre le progrès des élèves, d'offrir des retours immédiats et
d'ajuster les stratégies pédagogiques pour maximiser...
Mme Gagné (Anny) : ...les
apprentissages. Les recherches démontrent d'ailleurs que l'intégration de
technologies dans les classes favorise une participation accrue des élèves et
améliore leurs résultats scolaires. L'accès à des ressources pédagogiques
variées, la possibilité de participer à des projets collaboratifs à distance et
la richesse des contenus en ligne font partie des avantages que nous devons
reconnaître et encourager. La pandémie de la COVID-19 nous a bien démontré
l'importance cruciale de ces technologies pour garantir la continuité et
l'accès à l'éducation. Pendant cette période, ces outils numériques ont permis
aux élèves de rester connectés à leurs enseignants mais aussi à leurs pairs, et
ce, malgré les contraintes géographiques. C'est un atout majeur pour assurer un
accès équitable à une éducation de... de qualité, particulièrement pour les
élèves en régions éloignées. Nous reconnaissons toutefois que nous devons
encadrer l'usage des écrans et favoriser un usage pédagogique. Contrairement à
l'usage récréatif des écrans, l'utilisation des outils numériques en classe est
contrôlée et dirigée par des enseignants formés. C'est dans ce cadre structuré
que les jeunes apprendront à utiliser les technologies de manière responsable.
Nous croyons fermement que l'école est l'endroit idéal pour enseigner aux
jeunes les habitudes numériques saines afin de ne pas laisser toute cette
charge et cette responsabilité de gérer l'utilisation des écrans aux parents.
Nous reconnaissons l'importance de maintenir un équilibre entre l'innovation
technologique et la protection des jeunes. C'est pourquoi nous formulons quatre
grandes recommandations et je cède la parole à M. Young pour vous les
présenter.
M. Young (Shawn) : Donc,
premièrement, notre point de vue, c'est que l'école, c'est un... c'est le lieu
idéal pour bien former nos jeunes, bien encadrer ça, utiliser le numérique à
bon escient. Puis pour faire ça, évidemment, il faut encourager la formation
continue des enseignants. Une des raisons que les enseignants peuvent utiliser
le numérique à mauvais escient, on a parlé de récompense tantôt, c'est qu'ils
sont mal formés, ils ne savent pas c'est quoi :des bons usages du
numérique, ils ne savent pas c'est quoi la vision d'un bon citoyen numérique,
ils ne savent pas quels outils proposer aux enfants pour pouvoir justement
faire ce genre de bon usage là? Donc on a besoin de former nos enseignants, de
les appuyer par rapport à ça. Deuxièmement, l'éducation numérique aux élèves et
aux parents. Donc, évidemment, tu sais, à l'instar d'un guide alimentaire
pour... pour la malbouffe, bien, c'est la même chose pour le numérique.
Actuellement, les parents sont sans... ils n'ont pas de barèmes, ils se
comparent entre eux, ils essaient de trouver c'est quoi des bonnes solutions?
Chacun fait sa propre affaire. Est-ce qu'on ne peut pas guider les parents, les
aider à poursuivre la mission d'éducation qu'on a, mais d'outiller les parents
pour faire ça, donner des recommandations, par exemple. On pense aussi que
c'est quand même de la responsabilité des écoles. Donc, la mise en place, par
exemple, à l'instar des politiques que les écoles ont pour la lutte à
l'intimidation, ça fait plusieurs années que je siège sur un conseil
d'établissement, bien, on... à chaque année, on entérine et on signe des
politiques, par rapport à... un exemple, il y en a plusieurs, là, mais un exemple,
c'est la lutte à l'intimidation. Les écoles devraient se doter d'une politique
par rapport au bon usage dans leur établissement, par rapport au numérique.
C'est une question de communauté et de société. Donc, les conseils
d'établissement sont créés pour ça. Puis finalement, on propose aussi de
l'encouragement de solutions numériques à valeur ajoutée. Évidemment, tout
n'est pas égal dans le temps d'écran puis vous allez nous entendre dans les
questions, dire : Bon, bien, écoutez, le temps d'écran comme métrique,
c'est un peu une drôle de métrique, parce que la personne avant nous en a
parlé. Ça dépend vraiment de ce que tu fais, mais il y a plein d'outils qui
sont conçus pour l'école au Québec pour favoriser le développement des jeunes.
Il y a plein de recherches qui montrent qu'ils sont efficaces. Est- ce qu'on ne
peut pas favoriser la mise en application de ces outils-là dans les écoles pour
favoriser le développement des jeunes, faciliter la vie des enseignants puis
évidemment soutenir les besoins des enfants à besoins spécialisés? Donc, c'est
ce qu'on vous propose aujourd'hui. L'intégration des technologies dans les
salles de classe, c'est non seulement nécessaire, mais c'est dans la mission de
l'école d'éduquer les jeunes à la société dans laquelle ils vont évoluer. Puis
ça fait partie d'une société numérique, donc, on doit favoriser ça, mais ça
doit être réalisé de manière réfléchie, de manière responsable, puis c'est un
débat, c'est comme on disait juste tantôt, là, ça fait des années que EDTEQ on
réclame, qu'on parle de tout ça de façon pas réactionnaire mais de façon
réfléchie, qu'on fasse nos devoirs qu'on ait un débat de société comme on le
fait aujourd'hui. Donc, on salue le travail de la commission. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci beaucoup. Donc nous allons débuter les échanges avec M. le député de
Joliette.
• (15 heures) •
M. St-Louis : Merci beaucoup,
Mme la Présidente...
15 h (version non révisée)
M. St-Louis : ...exposé très
intéressant. Assurément, avec la formation qu'on a reçue hier du Dr Parent, on
comprend bien que vous êtes du bon côté de la force. Mais je pense que ce
qui... ce qui nous inquiète tous comme parents, c'est le mauvais côté de la
force, justement. On a des algorithmes qui reconnaissent qui on est, on se
demande pourquoi il n'y a pas d'algorithmes qui reconnaissent que c'est un
enfant qui a la tablette ou le téléphone dans les mains justement pour protéger
cet enfant-là. Je nommais hier que pour moi le danger de la centralisation d'un
téléphone intelligent, c'est... bon, c'est ma photothèque, c'est mes souvenirs
de vacances, c'est toute ma musique, c'est mes communications courriels, donc
écrites. Tout est là. Tout est là. Puis de dire que, bon, bien là, je passe 1 h
à apprendre sur mon téléphone, c'est parfait, mais en même temps, j'ai toujours
la tentation peut-être du réseau social ou de la plateforme ou du jeu, qui est
à même le même appareil. Donc, à problèmes numériques, est-ce que vous avez des
solutions numériques?
M. Young (Shawn) : Bien, il y
a plusieurs solutions. C'est sûr qu'on peut réfléchir... Tu sais, nous, c'est
sûr qu'on réfléchit toujours dans le contexte scolaire en premier. Donc, c'est
sûr qu'il y a des appareils qui sont fournis par les écoles, qui sont
configurés par les écoles, sur lesquels les logiciels qui sont dans ces
appareils-là sont contrôlés puis qui sont décidés par les écoles, tant pour
leurs bienfaits pédagogiques que, tu sais, par les protections par exemple des
données des enfants via l'application de la loi no 25. C'est toutes des
choses qui sont beaucoup plus faciles à faire si on accepte le fait numérique
dans l'école puis qu'on l'encadre puis on le structure. Après ça, tu sais, dans
les écoles, on est capables aussi de contrôler l'accès à des sites internet,
etc. Donc tout... tout n'est pas rose sur Internet.
Ceci dit, il y a plein de bonnes
ressources qui méritent d'être bien encadrées, bien utilisées. Puis on est
capables de faire ça à l'école. Justement, il y a des solutions numériques dans
un... dans une approche par laquelle on prend le taureau par les cornes. Puis
on dit... Plutôt que de dire : On va laisser rentrer, par exemple, n'importe
quel appareil, bien, l'école va les fournir, puis on va gérer ça comme il faut,
là.
Mme Gagné (Anny) : Je pense
que ce n'est pas juste une question aussi de restreindre, là. Je pense qu'il y
a aussi une question d'éduquer qui est importante, là. Si on veut que les
choses évoluent puis que les élèves soient en mesure de prendre des bonnes
décisions, ça doit beaucoup passer par l'éducation de l'utilisation de ces
écrans-là.
M. St-Louis : Naturellement.
Je comprends qu'une des solutions proposées serait que le contrôle se fasse par
des appareils qui sont vraiment contrôlés par le centre de services ou l'école
elle-même et le professeur titulaire et non l'appareil fourni par papa et
maman.
M. Young (Shawn) : C'est une
approche. Parce qu'évidemment, tu sais, beaucoup des enjeux qu'on... dont le
docteur qui était avant nous a discuté, c'est lié à l'accès aux réseaux
sociaux, c'est lié à l'accès, par exemple, à des jeux «freemium». Tu sais, on
pourra parler de jeux vidéo si vous voulez, mais ils ne sont pas tous égaux non
plus. L'enjeu, c'est les approches mercantiles liées aux plateformes gratuites,
qui... leur seul intérêt c'est qu'on revienne et qu'on passe du temps là. Après
ça, si on est dans un contexte où est-ce que ce n'est pas ça, le modèle d'affaires,
bien là, l'utilisation des outils devient moins... le modèle commercial qui est
derrière, il n'est pas du tout lié à ça, là.
Je vous donne un exemple, Antidote, bien,
tu achètes Antidote une fois, Antidote ne va pas essayer que tu l'utilises le
plus souvent possible puis créer des mécaniques addictives pour que tu utilises
Antidote. Bien, c'est un... Mais, mais ce n'est pas ça le modèle d'affaires de
par exemple Fortnite ou Roblox. Puis c'est la même chose avec Mario Bros, par
exemple. Bien, un coup qu'ils t'ont vendu Mario Bros, bien, ce n'est pas grave
pour Nintendo si tu rejoues ou pas, ils te l'ont... ils l'ont fait, leur
argent. Les jeux en ligne qui sont conçus pour garder l'attention, bien là, il
y a une approche mercantile qui est derrière ça, puis c'est ça... c'est ça qui
crée l'addiction, ultimement, là. Puis c'est la même chose avec les médias
sociaux.
Ça fait que, oui, effectivement, le
contrôle des appareils dans les écoles pourrait faire partie d'une solution
éventuelle à ce problème-là. Mais comme disait ma collègue, ce n'est pas assez.
C'est sûr que, si on passe seulement par une solution, je vais dire hardware,
bien là, on passe à côté de plein de choses comme une méchante bonne
opportunité d'éduquer les enfants sur c'est quoi des habitudes saines. Si on
fait ça, on n'est pas en train nécessairement de développer leur esprit
critique par rapport à comment déceler de la... par exemple de la mauvaise
information sur internet, on n'est pas non plus en train de discuter avec eux d'habitudes
saines de vie, on n'est pas non plus en train de discuter avec eux de comment
développer des habitudes numériques, des... Tu sais, par exemple, apprendre à
utiliser une suite de bureautique, c'est peut-être pertinent. Ça... Peut-être
ça vaut la peine de prendre du temps là-dessus, parce que c'est quelque chose
qu'ils vont avoir besoin de faire dans leur profil de sortie de l'école...
M. Young (Shawn) : ...de
l'école. Ça fait qu'il faut se questionner aussi sur qu'est-ce qu'on veut que
l'école nous donne comme profil de sortie, d'enfants à la sortie. Puis, par
rapport au numérique, puis comment est-ce qu'on peut créer des programmes, des
approches, des recommandations pour nous mener vers ce profil-là, là?
M. St-Louis : Donc, mettons
que je retiens qu'au-delà du côté académique, il faut faire... il faut faire
éduquer et faire confiance à nos enfants. Donc, je vous remercie. Je cède la
parole.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. M. le député de Gaspé.
M. Sainte-Croix : Merci, Mme
la Présidente. M., Mme, bonjour. Très heureux d'être avec vous aujourd'hui pour
écouter votre propos drôlement pertinent. Je suis de ceux qui pensent que
l'école de demain, c'est aujourd'hui. Et l'école d'aujourd'hui ne peut pas,
tant qu'à moi, ne pas concevoir l'aspect numérique en termes de pédagogie. Ce
matin ou... Oui, ce matin, nous avions un regroupement de comités de parents
qui disaient, dans la dynamique de gouvernance de nos écoles, que ce serait
compliqué d'avoir une vision d'ensemble de l'ensemble du réseau et que nous
devrions faire confiance au conseil d'établissement et laisser la gouvernance,
à savoir, tantôt, on est favorable, tantôt, on ne l'est pas, dépendamment des
écoles, à une utilisation du numérique, principalement par la voie du
téléphone.
Vous n'êtes pas sans savoir que
l'utilisation du numérique en termes pédagogiques ne fait pas nécessairement
consensus, tant ici chez nous qu'ailleurs dans le monde. Comment on fait ça,
avec qui on fait ça? Dans l'optique où je pense qu'on ne peut pas avoir un
système d'éducation dans notre province qui tantôt dit oui, tantôt laisse
faire, tantôt dit non. Donc, je pense qu'il faut arriver avec une politique
publique qui se tient, qui favorise tant qu'à moi l'utilisation du numérique en
termes pédagogiques. Parce que la société d'aujourd'hui et de demain ne fera
pas abstraction de l'utilisation du numérique. Donc, on veut former des
citoyens à l'école, des gens avec un sens critique. Et je pense aussi que ça
passe par nous d'une certaine façon.
Comment on fait ça? Avec qui on fait ça?
Puis dans quelle perspective on amène ce changement-là? Parce que je pense que
c'en est un majeur. Tu sais, on parle de nos problématiques de pénurie de
main-d'oeuvre, de formation, hein, des enseignants, puis quelque part, quand un
jeune grandit de plus en plus vite dans le sens où la jeunesse n'est plus ce
qu'elle était à mon âge. J'aimerais vous entendre.
Mme Gagné (Anny) : Bien, en
fait, juste ajuster un peu le propos, là, je pense que les jeunes ne
grandissent pas plus vite, là, ils grandissent au même rythme. Je vous rassure.
Peut-être que le monde, par exemple, de l'éducation, a complètement changé par
rapport à ce qu'on a vécu, nous. Au lieu d'être un regroupement au parc et...
ou parler pendant des heures avec son ami au téléphone, ils sont plus en train
de texter, hein, c'est comme ça qu'eux ils créent leurs relations avec leurs
pairs.
La technologie, elle est là, dans nos
écoles, elle est là dans nos vies, elle ne va pas disparaître. Alors, oui,
effectivement, il faut apprendre à les éduquer puis à les utiliser de façon
adéquate à ces élèves-là. Comment est-ce qu'on fait ça? Telle est la question,
hein? Donc, oui, je pense qu'une politique serait une bonne approche, d'avoir
une politique au niveau de l'utilisation du numérique. Par contre, oui, il y a
quand même des nuances à avoir au niveau de chaque école et chaque... chaque
centre de services, j'allais dire «commission scolaire», ça... ça trahit mon
âge, mais centre de services. Donc, je pense qu'il y a quand même toujours à
avoir des nuances. Tu sais, c'est impossible d'arriver avec une solution qui va
fonctionner pour tous. Ils ont des réalités différentes selon les régions dans
lesquelles ils sont. Et ça, je pense qu'on ne peut pas passer à côté. Par
contre, une politique serait, je crois, une bonne solution.
• (15 h 10) •
M. Young (Shawn) : C'est sûr
qu'on peut baliser comment les écoles peuvent faire ces politiques-là, comme
par exemple on a pour les politiques d'intimidation. Ceci dit, tu sais, il faut
effectivement qu'il y ait de la latitude dans ces balises-là pour que les
écoles puissent adapter ça à leur propre réalité. C'est sûr que, quand on pense
aussi à la loi sur l'enseignement public, il y a beaucoup de ces choix-là qui
reviennent aux enseignants par la loi, quels outils numériques ils vont...
quels outils ils vont utiliser pour enseigner, c'est quoi, leur stratégie
pédagogique, etc. C'est des choix de l'enseignant au Québec. On pourrait
regarder ailleurs, ce n'est pas nécessairement le cas, mais ici c'est ça. Donc,
on a besoin de faire des politiques qui vont guider les enseignants, qui vont
faire qu'ils vont faire des choix, des bons choix, mais il demeure néanmoins
qu'ils ont des choix à faire, puis que ça revient à... aux enseignants aussi de...
d'exercer leur jugement professionnel, puis de pouvoir prendre ces
décisions-là. Mais après ça, il faut qu'on puisse les outiller pour les
prendre, puis il faut qu'on leur donne des ressources pour qu'ils puissent
avoir des choix. Souvent, les enseignants, ils n'ont pas de ressources
numériques, ça fait qu'ils se rabattent sur des... des plateformes gratuites,
des plateformes américaines, des plateformes en anglais. On voit...
M. Young (Shawn) : ...on voit
des... tu sais, je peux vous en nommer tout plein qui sont dans nos écoles
aujourd'hui, qui n'ont pas été conçus pour l'école québécoise, qui n'ont pas
nécessairement été conçus pour l'école tout court. Puis, après ça, on applique
ça dans nos écoles, parce que, bon, bien, c'est ça qu'on a gratuitement. C'est
sûr, qu'on est dans un contexte numérique dans l'école qui n'est pas
nécessairement très financée. Bien, dans ce contexte-là, les enseignants, ils
travaillent avec ce qu'ils peuvent.
M. Sainte-Croix : ...
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. Pardon, pardon, M. le député.
M. Sainte-Croix : Je vais
faire ça vite. Plus ou moins balisé aussi, donc, d'une certaine façon. Tu sais,
est-ce que vous jugez que le profil d'un enseignant qui sort de son cheminement
universitaire, aujourd'hui, a la capacité, les compétences pour faire ce
travail-là de façon professionnelle et efficiente?
M. Young (Shawn) : Bien,
écoutez, sur le conseil facultaire de l'Université de Sherbrooke à la faculté
d'éducation, on se pose justement ces questions-là sur comment est-ce qu'on
doit adapter nos programmes de formation d'enseignants, pour les outiller
justement par rapport au numérique. Il n'y a pas tant de formations dans un bac
en éducation, beaucoup de choses à apprendre. De plus en plus, ça prend... ça
prend de la place. Le danger avec ça, par contre, c'est de former sur des
outils... les outils changent, les pratiques changent. Ça fait que ce qu'on
veut faire, c'est donner... former des enseignants.
Et il y a 12 compétences professionnelles
dans le numérique pour les enseignants. Ces compétences-là sont par rapport à
pouvoir apprendre à utiliser le numérique, pouvoir, par exemple, utiliser
l'intelligence artificielle. Donc, moins utiliser certains outils, mais plutôt
avoir les compétences pour faire ces choix-là. Puis ça, ça commence de plus en
plus à faire partie des programmes de formation, mais, tu sais, toujours un
délai. On forme un jeune enseignant, enseignante qui a 19 ans aujourd'hui,
bien, avant qu'elle enseigne à temps plein dans une commission scolaire à nos
enfants, bien, c'est dans 10 ans. Donc, il y a quand même... Oui, ça fait
partie de la solution, mais il faut quand même travailler sur le terrain
aujourd'hui, là.
M. Sainte-Croix : Le centre
de services.
M. Young (Shawn) : Oui.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. Je vais passer la parole au député de Marquette. Alors, il y a
beaucoup de questions de la part de nos membres.
M. Ciccone :Oui. Merci beaucoup. Bonjour à vous deux. M. Young, avec
tous vos titres, j'ai quasiment le goût de vous demander : Avez-vous le
temps de dormir?
M. Young (Shawn) : Hé! Je
suis rendu que je dors six heures par nuit, là. Ce n'est pas pire...
M. Ciccone :Formidable.
M. Young (Shawn) : ...mais,
pendant longtemps c'était quatre heures et demie.
M. Ciccone :Good. O.K. C'est des habitudes de vie...
M. Young (Shawn) : ...
M. Ciccone :...c'est des habitudes de vie, n'oubliez pas ça.
M. Young (Shawn) : Oui,
exactement.
M. Ciccone :On va revenir au sérieux. Vous parlez des plateformes
numériques d'apprentissage qui sont indispensables, je pense qu'on a tous
quelqu'un dans notre entourage, un petit bonhomme ou une jeune fille qui a eu
un plan d'intervention, là. Puis c'était... je veux dire, c'est indispensable
pour eux. Mais cependant, dans votre... puis là je vais essayer de comprendre.
Vous parlez dans votre mémoire d'un temps d'écran encadré, comment est-ce qu'on
fait pour séparer les deux? Parce qu'à l'école, ces jeunes-là... des
difficultés d'apprentissage ont les yeux sur un écran. Est-ce qu'on peut
calculer le temps d'écran, quand ils reviennent à la maison, quand ils prennent
leur téléphone, les outils numériques à la maison, jeux vidéo? Est-ce que vous
séparez les deux? Parce que le temps d'écran, pour vous, c'est quoi, le temps,
justement, que vous mentionnez ici?
M. Young (Shawn) : ...notre
point de vue, c'est que c'est un peu une mesure galvaudée, le temps d'écran. La
question du numérique est importante. Un enfant qui est en train de travailler
un texte sur Antidote puis qui apprend à écrire, qui apprend à corriger, qui
est dyslexique, puis ça l'aide, peut-être qu'il va être en train de travailler
pendant une heure de façon concentrée. Si on dit : Ah! Bien, il a une
heure de temps d'écran dans la journée, on s'entend que faire ça puis scroller
sur TikTok pendant une heure, ce n'est aucunement la même affaire, là.
Puis c'est pour ça que de tout mettre ensemble
dans une métrique simple comme ça, c'est pour ça qu'on parle de temps encadré,
de temps de qualité de temps dans lequel on utilise le numérique à bon escient.
Il faut faire la part des choses entre qualité et quantité, là. Puis, tu sais,
c'est comme, par exemple, si on comptait les calories. Bien, oui, O.K., il y a
des calories, etc. Mais ça ne veut pas dire que tous les aliments sont
également nutritifs juste parce qu'un aliment est bas en calories, ça ne veut
pas dire qu'il est bon pour la santé. On peut penser, par exemple, des liqueurs
à zéro sucre, il n'y a pas de calorie, mais ce n'est pas super pour la santé
non plus. Ça fait que d'avoir une métrique simple comme ça, bon, bien, ça nous
permet de simplifier le débat. Mais d'un autre côté, on parle de la nuance, là.
Mme Gagné (Anny) : Je ne
pense pas que c'est une question de quantité de temps, mais de qualité de temps
d'écran. Quand on essaie de simplifier ça, on va mettre 1 h maximum par jour,
on passe à côté de : À quoi ça sert, cet écran-là? Tu sais, si, au niveau
pédagogique, cet enfant-là, elle a besoin de trois, si on la limite à un, c'est
quoi, les conséquences? Tu sais, il y a quand même des conséquences aussi, là,
tu sais. Il faut penser pas juste au nombre d'heures d'écran, mais à quoi il
sert...
Mme Gagné (Anny) : ...cet écran-là,
puis ça va être quoi, les conséquences, si on le limite, aussi? Parce qu'il y a
du positif, pas juste du négatif, dans le temps d'écran, là.
M. Ciccone :Dernière question. Vous avez parlé, tantôt, des plateformes
éducatives gratuites. Avez-vous une mise en garde pour les parents qui veulent
utiliser une plateforme gratuite sur Internet? Est-ce qu'il y a un danger là?
Est-ce que certaines plateformes gratuites pourraient utiliser les mêmes
stratagèmes, par exemple, que les réseaux sociaux pour attirer, accrocher les
jeunes? Avez-vous une mise en garde, là-dessus, de faire attention, ou...
M. Young (Shawn) : Bien,
oui... Bien là, c'est... Vous parlez précisément des plateformes éducatives
gratuites, oui?
M. Ciccone :Oui, exactement. Gratuites, là.
M. Young (Shawn) : Bien,
c'est intéressant, parce que, quand on regarde le marché du numérique éducatif,
il y a deux clients possibles. Il y a les écoles et les enseignants, puis il y
a les parents. Tu sais, beaucoup des plateformes qu'on va retrouver dans les
écoles sont conçues pour des milieux scolaires, dans des contextes scolaires.
Il y a tout un marché d'outils, de plateformes que moi, comme parent, je
pourrais vouloir acheter pour, par exemple, que mon enfant apprenne à coder, ou
que je pourrais... Un autre exemple, Duolingo, par exemple. Tu sais, qui n'aime
pas Duolingo? Crime, c'est cool, c'est le fun, j'apprends une nouvelle langue,
nanana. Mais, en arrière de ça, il y a des mécanismes d'addiction pour vendre
la souscription, l'abonnement premium, là. Puis on revient à cette notion là
de...
Moi, je pense qu'il y a une éducation à
faire, sociétairement, à reconnaître les modèles d'affaires sous-jacents. On
n'est pas très nécessairement exposés à ça, on ne réfléchit pas nécessairement
à ça, comme citoyens, mais, ultimement, la façon que l'application fait de
l'argent va changer la façon qu'elle interagit avec l'utilisateur, de façon
assez dramatique, là. Puis je suis un grand fan de Duolingo, c'est cool, je
n'ai pas de problème avec ça, mais je suis critique par rapport à ça. J'ai un
fils de 10 ans qui tripe là-dessus, mais je suis comme : Regarde, là,
pourquoi t'as des vies dans Duolingo? Tu sais, tu as trois vies, puis là, si tu
fais trois erreurs, tu ne peux plus jouer pour le reste de la journée, là. Je
suis comme : S'il voulait vraiment que tu apprennes l'espagnol, il ne
t'empêcherait pas, là. Pourquoi t'as des vies? Ça fait que c'est des
conversations qu'on a besoin d'avoir avec nos jeunes.
Mon jeune, il a commencé à jouer à
Fortnite. On a beaucoup de discussions par rapport à ça. «Aïe! papa, là, il
faut absolument que j'achète tel équipement, il va disparaître du magasin
aujourd'hui.» «Bien, voyons, pourquoi il va disparaître du magasin aujourd'hui?
C'est juste pour te contrôler.» Ça fait que... des conversations au niveau des
faux sentiments de rareté, des... «Regarde où est ce qu'ils essaient de te
faire revenir. Pourquoi est-ce qu'il y a des notifications qui, à chaque jour,
apparaissent dans ta tablette, pour que tu retournes jouer?» On a besoin de se
sensibiliser à ça, mais, aussi, les parents. Tu sais, tout ça, c'est vrai pour
les adultes, qu'on est exposés à plein de plateformes qui ont exactement la
même stratégie, là.
Puis, dans certains cas, ils vendent des
abonnements; dans d'autres cas, c'est de la publicité, là. Puis les médias
sociaux, c'est des beaux exemples de ça, c'est des machines à publicités.
Est-ce que ce genre de machines à publicités là devrait être dans nos écoles?
Probablement pas. Est-ce que ça veut dire qu'on devrait limiter le temps
d'écran dans les écoles ou empêcher le numérique dans les écoles? Pas
nécessairement non plus. C'est ça.
M. Ciccone :Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Mme
la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. M. Young, Mme Gagné, merci beaucoup pour votre exposé. Ma première
question est en fait un peu dans la lignée de mon prédécesseur. Puis, en fait,
moi, je me demandais... parce que je vous ai écoutés puis je me dis :
Est-ce que c'est une erreur de comptabiliser le temps d'écran à des fins
pédagogiques avec le temps d'écran à des fins récréatives? Est-ce que vous...
Vous nous mentionnez, bon, le temps d'écran, il n'y a pas juste ça, mais, dans
le fond... On va pouvoir parler de la qualité, là, mais, si je vous entends
bien, nous autres, il faudrait qu'on... en fait, qu'on arrête un peu... ou
qu'on émette quelques nuances, tu sais, face au concept de temps d'écran, qui
est beaucoup la première ligne, là.
Quand on s'intéresse à ce sujet là, la
première chose qui nous vient, ce sont les directives en matière de temps
d'écran, puis, ensuite, on creuse puis on voit qu'il y a de la recherche sur
bien d'autres thématiques. Mais ce que vous nous dites, c'est que la première ligne
qu'on a comme source d'information, comme parent, comme élu, comme citoyen, sur
le temps d'écran, là-dessus, il faudrait qu'on puisse émettre des nuances, puis
qu'on ne le pense pas en termes de comptabilisation de temps, tout simplement.
M. Young (Shawn) : Tout à
fait.
• (15 h 20) •
Mme Gagné (Anny) : Bien oui.
En fait, je crois que c'est un peu passer à côté du fond du problème, qui n'est
pas le temps d'écran en soi, mais d'avoir un jugement critique face à cette
utilisation-là de l'écran. C'est plus là que le bobo saigne, là, je crois, et
non pas en termes d'utilisation de temps. Puis, de toute façon, même si... Il y
a un côté récréatif et pédagogique. C'est clair qu'on va mettre de l'avant que
le pédagogique est la solution qu'on devrait aller de l'avant. Par contre, ça
ne veut pas dire que c'est mal, aussi, d'avoir du temps d'écran récréatif.
C'est d'avoir cet équilibre-là, comme dans toute...
Mme Gagné (Anny) : ...de la
vie, mais il faut apprendre à le trouver, cet équilibre-là. Comment est-ce
qu'on y arrive? Pour ça, il faut qu'ils soient éduqués sur les conséquences
d'avoir trop de temps d'écran, les conséquences d'utiliser telle source plutôt
que telle autre source. Et, en ce moment, je pense que c'est plus ça qui est
manquant.
M. Young (Shawn) : Puis la
façon qu'on en... tu sais... puis même si on va dans le... puis, effectivement,
100 % ça. Je donne un exemple de ma jeunesse. Moi, j'ai grandi avec des
jeux vidéo, je joue encore à des jeux vidéo, je l'avoue, je l'avoue.
Mme Gagné (Anny) : Ce n'est
pas des saines habitudes de vie...
M. Young (Shawn) : Non. Oui,
c'est ça, donnez-moi pas en exemple. Mais moi, quand j'étais jeune, on n'avait
pas le droit de jouer la semaine, c'était ça, la règle, mais la fin de semaine,
on ne contrôlait pas ça, mais là on avait un comportement totalement boulimique
par rapport à ça, là. On ne jouait pas la semaine, mais là, la fin de semaine,
12 heures de suite de Mario Bros., là.
Ça fait qu'il y a aussi cette idée-là de
dire, bon, bien, c'est quoi... c'est quoi, une notion équilibrée par rapport à
ça, là? Parce qu'on peut le dire, on peut réduire ça au maximum, mais là tu
crées un sentiment de rareté. Tu n'as pas le droit de manger de bonbons, bien,
qu'est-ce que ça fait, un enfant, dans ce temps-là? Ça fait juste penser à des
bonbons, là. Ça fait que comment est-ce qu'on peut proposer ça? Il y a... La
prédécesseure parlait de proposer des activités alternatives, justement, là.
Après ça, nous, on a le rôle, comme parents, comme adultes dans la pièce, de
dire : Ce n'est pas tout mauvais, je vais t'aider à voir ce qui est bon et
mauvais là-dedans, mais je veux aussi que tu fasses d'autres choses puis je
vais te proposer des choses à faire, là.
Mme Cadet : Ça fait que, même
quand vous dites, sur le temps d'écran à des fins récréatives, ce n'est pas
nécessairement... ce n'est pas nécessairement mauvais en tant que tel, il
faut... je pense qu'il y a aussi... et j'aimerais vous entendre aussi sur
l'aspect, parce que quand on nous... on entend ces recommandations-là, on a
l'impression, bon, si on est entre deux et cinq ans, puis que c'est, je pense,
bon, deux heures par jour, disons, s'il passe deux heures et ne minute... Ah
mon Dieu! J'ai brûlé un neurone à mon enfant, que ce n'est pas nécessairement
ça, mais c'est aussi la comptabilisation du coût d'opportunité, donc de
qu'est-ce que l'enfant pourrait faire d'autre dans ce temps-là puis que,
manifestement, le... s'il dépasse les recommandations visées, c'est parce qu'il
est en train de ne pas réaliser une autre tâche qui pourrait être plus
productive ou qui pourrait être plus bénéfique pour ses saines habitudes de
vie. Donc, ce coût d'opportunité là, il est là-dedans.
M. Young (Shawn) : Oui, bien,
bénéfique pour les habitudes de vie, oui, là. Il faut faire attention à...
c'est un jugement de valeur de dire que c'est productif ou pas, là, tu sais. Je
vous donne un exemple'étais avec le gouvernement du Bhoutan, justement, sur
cette question-là, puis l'exemple que j'ai sorti, c'est... tu sais, eux, leur
grosse question, c'est : Les jeux vidéo, ça rend sédentaire. On pourrait
dire : Ah oui! mais, crime, il a été assis là pendant trois heures. Moi,
je suis un grand lecteur, je lis plus que 100 livres par année depuis que
je suis au secondaire, mais je passe plein de temps sédentaire à lire des
livres, là. Je passe quatre heures assis à lire un livre. Est-ce que, là, on
pourrait dire : Bien, crime! C'est donc bien sédentaire, quelle mauvaise
habitude de vie? Mais on ne dit pas ça à un jeune qui lit, qui se clanche la
moitié d'un Harry Potter, on va dire : Eh! C'est le fun, ce jeune-là, il
aime lire, c'est super! S'il fait la même affaire dans un jeu vidéo, là, on va
dire : Ah! c'est donc bien mauvais, etc.
Puis ça, ça fait partie... parce qu'on
n'est pas dans une optique de qu'est-ce qu'on apprend, tu sais. Tantôt, notre
prédécesseure, elle a parlé de qu'est-ce que les jeunes apprennent en jouant à
des jeux vidéo : la collaboration, le sentiment de persévérance, la notion
d'autocompétence, que, si je mets des efforts, je peux réussir, la
collaboration. Tout ça, c'est des apprentissages qui peuvent venir par le jeu
mais dans lesquels... On ne le fait pas. Comme parents, on ne s'assoit pas avec
nos jeunes pour dire : Eh! Regarde, tu as travaillé fort, tu as réussi,
etc., qu'est-ce que tu as appris en jouant à ça? On s'en sert pour se départir
de nos responsabilités, peut-être, parfois, d'éducateur.
Ça fait que je veux juste... tu sais,
cette notion-là de productivité, il faut faire attention, là. Est-ce qu'un
jeune doit être productif? À quel âge on s'attend à ce qu'un enfant devienne
productif? C'est un peu... Ça fait que, excusez, je réagis fortement à ce
terme-là, mais ça fait partie des jugements de valeur qu'on a par rapport au
numérique, que c'est une perte de temps, alors que la plupart de ce que les
enfants font, c'est une perte de temps, là, ils jouent, ils vont dehors, ils ne
sont pas en train de travailler, là, justement, là.
Mme Gagné (Anny) : Puis ce
n'est pas nécessairement sédentaire non plus, hein, même quand on parle de jeux
vidéo, là, il peut y avoir des interactions. Ils peuvent se parler ensemble en
ligne, ils peuvent aller dans une quête ensemble, développer des stratégies
ensemble. Et, contrairement à la vie réelle, là, si on peut dire ça, là, tu
sais, quand ils vivent un échec, c'est beaucoup moins difficile à intégrer
parce que tu n'as pas tout le monde qui juge alentour. Donc, tu peux apprendre
aussi à vivre avec cet échec-là, qui est peut-être moins difficile. Donc, il y
a quand même aussi des bons côtés, là, ce n'est pas juste sédentaire, zombie
devant un écran, là.
Mme Cadet : Merci. J'ai-tu
droit à une autre question ou je...
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
allez-y.
Mme Cadet : Oui. Merci. Juste
plus tôt... parce qu'on parlait d'encadrement d'usage des outils pédagogiques.
Comment est-ce qu'on encadre, donc, l'usage périphérique des outils, là? On
parlait plus tôt...
Mme Cadet : ...donc,
d'utiliser, donc, les appareils, bon, donc, de l'école pour ne pas avoir accès
à d'autres sites internet. Mais, par exemple, les espaces de clavardage, là,
qui peuvent être intégrés, donc, sur des appareils, donc, de l'école, comment
est-ce qu'on encadrerait ça pour ne pas qu'il y ait cet usage périphérique
pourrait, lui, être néfaste, donc, sur...
M. Young (Shawn) : C'est une
bonne question. On en parlait justement tantôt. Tu sais, une des premières
places où est-ce qu'il y a de l'intimidation numérique, c'est dans les chats de
Google Docs, là, où carrément, là, là, il y a des écoles qui sont capables
d'enlever... tu sais, tu peux chatter dans le côté, tu peux enlever ça. Mais
Google Docs lui-même, c'est un espace de chat, là. Tu peux écrire des choses,
l'autre le voit en temps réel, tu peux y répondre puis tu peux... Toute la
classe peut être en train de dire : Shawn, c'est un maudit niaiseux, puis
moi, je ne le sais pas puis... Puis c'est des dynamiques qui sont possibles,
mais c'est des dynamiques qui seraient possibles sans numérique aussi, là. Ça
fait qu'il faut faire attention de dire : Bon, bien, c'est à cause de
l'outil que ça, ça se passe. En fait, des jeunes qui chuchotent tout le monde
sur l'autre jeune, ça se peut. Après ça, encore une fois, on parle d'éduquer
les jeunes à bien se comporter, le respect de l'autre, de... Ça fait que là, tu
sais, on est dans comment est-ce qu'on fait pour contrôler ça, ça, c'est une
chose, mais comment est-ce qu'on fait pour éduquer les jeunes à ce qu'ils ne
fassent pas ce genre de trucs là. Puis là, là on parle vraiment de développer
des compétences socioémotionnelles, on parle d'avoir une approche bienveillante
à l'école, on parle de renforcement positif, de mettre des attentes claires,
positives puis faire du renforcement positif par rapport à ça. Donc, toutes ces
approches-là, dans lesquelles on veut former les jeunes à du savoir-être, bien,
ça s'applique aussi dans le monde du numérique parce que c'est là qu'ils
évoluent aussi, là.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Moi, je vais vous ramener à l'équilibre. On entend encore... Je vais vous
amener au niveau des jeunes aux études supérieures. On entend encore
aujourd'hui, même après la pandémie, des programmes universitaires qui sont
100 % en ligne. J'ai une jeune dans mon entourage qui vient de commencer
dans un centre de formation professionnelle, et son cours est en technique du
bâtiment et c'est 100 % en ligne. Oui, le numérique, mais j'aimerais avoir
votre position là-dessus, votre opinion. Parce qu'il y a beaucoup de
spécialistes qui nous disent : Bien, ça ne devrait pas être la première
façon de... pédagogique d'enseigner aux jeunes. Maintenant, comment qu'on
arrive à cet équilibre-là quand on a encore des cours qui sont quand même 100 %
en ligne? J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Young (Shawn) : Bien, j'ai
une opinion là-dessus, c'est sûr.
Mme Gagné (Anny) : Bien,
vas-y, dans ce cas-là.
M. Young (Shawn) : Bien,
évidemment, qui dit en ligne, ce n'est pas tout égal, là. Encore une fois, on
revient à la notion de qualité. Tu peux suivre un cours en ligne qui est... Tu
sais, par exemple, là, la maîtrise en éducation à Harvard, il y a une grosse
partie qui est en ligne. Mais ce que tu fais en ligne, c'est... Tu sais, c'est
sûr que, si ton cours en ligne, c'est : je partage mon écran sur des
PowerPoint et je parle de... ça, ce n'est pas super. Mais ça, ce n'est pas non
plus super en vrai, là. On a tous été à des cours en présentiel que c'était ça.
Puis on se dit : Crime, pourquoi je suis là, je pourrais juste avoir les
diapos puis je vais venir à l'examen. Ça fait que c'est sûr que si tu as une
pédagogie qui est... qui laisse à désirer, bien, ça va autant laisser à désirer
dans un espace virtuel que dans un espace présentiel. Après ça, c'est sûr que,
bon, c'est plus facile par exemple de créer des liens entre les étudiants quand
ils sont en présentiel, par exemple, de leur faire travailler en équipe, etc.
Mais il y a des opportunités superintéressantes que tu peux avoir, par exemple
dans des cours 100 % à distance comme ça, par exemple par rapport à des
activités interactives que tu pourrais faire, par exemple à l'accès. Tu sais,
il y a tout un enjeu d'accès qui est superimportant là-dedans. On pense aux
régions, mais on pense aussi aux gens qui sont en... qui travaillent déjà, etc.
Moi, j'ai fait une maîtrise en éducation 100 % virtuelle, puis ça a
complètement changé ma façon... J'étais enseignant pendant neuf ans puis,
pendant que j'étais enseignant, je suivais cette maîtrise-là. Puis au jour le
jour j'appliquais ce que je voyais, tu sais, dans ma maîtrise en ligne, dans ma
pratique. Ça fait qu'il y a moyen, avec ce genre de cours là, de faire un
jumelage entre la pratique. Parce que tu n'es pas nécessairement physiquement à
des cours, tu peux te pratiquer dans la vraie vie à faire ces choses-là. Ça
fait qu'il y a moyen de structurer ça. Mais je suis d'accord avec vous que très
souvent on n'a pas innové pédagogiquement dans ces cours-là. Puis
effectivement, bien, il y a une perte, là, quand... quand que c'est le cas, là.
• (15 h 30) •
Mme Gagné (Anny) : Je ne
pense pas que tant l'outil mais encore une fois comment qu'on l'utilise. Puis
je pense qu'ici c'est plus une question que l'enseignant, dans ce cas-ci,
peut-être au niveau pédagogique, n'utilisait pas les meilleures approches.
Parce que pour avoir moi-même enseigné dans une classe à moitié à distance et à
moitié physiquement dans la classe, je ne pense pas que ceux à distance se
sentaient exclus et...
15 h 30 (version non révisée)
Mme Gagné (Anny) : ...se
sentait exclus moins part de la classe. C'est une question d'utiliser des
stratégies pédagogiques pour les inclure. Je comprends que ça pose plus de
limitations, plus de défis, définitivement. Mais je pense qu'on peut donner
tout un aussi bon cours à distance qu'en personne, comme on peut donner un
cours en personne complètement désastreux, là.
M. Young (Shawn) : C'est
toute la notion de l'asynchrone. Tu sais, dans des cours en présentiel, c'est
nécessairement synchrone on est, on ne maximise pas l'usage d'outils puis d'approches
asynchrones. Ça, c'est intéressant parce que tu peux apprendre à ton propre
rythme quand c'est asynchrone, puis c'est beaucoup plus facile de faire ça dans
des cours virtuels, là. Ça fait que... Il y a des pours et des contres, là.
La Présidente (Mme Dionne) : Encore
faut-il que les jeunes n'aient pas de troubles d'attention, des choses comme
ça. Je pense que ça peut peut-être devenir plus difficile dans ces... dans des
cas comme ça.
M. Young (Shawn) : Bien, c'est
certain. C'est certain, mais ça c'est comme tous... tous les choix éducatifs qu'on
fait pour soi-même ou pour nos enfants, il faut aller vers des solutions qui
sont propres à nos besoins, tu sais. Un élève qui a des difficultés d'apprentissage
mais qu'on veut à tout prix, qu'il aille au privé, dans lequel il n'y a aucune
ressource d'orthopédagogie, par exemple. Bien, c'est-tu vraiment le meilleur
milieu pour lui. Oui, mais je veux vraiment qu'il aille au privé alors, que ces
ressources-là existent dans le système public. Tu sais, c'est ce genre de
questionnement là qu'on doit faire, là.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. Alors, je laisse la parole à mes collègues, Mme la députée de D'Arcy-McGee.
Mme Prass : Merci. J'allais
vous poser une question dans le même sens, parce que je connais des gens qui
ont commencé, par exemple, au cégep ou à l'université durant la pandémie, tous
les cours étaient en ligne et il y avait très peu d'interactions entre les étudiants
et les profs. Il y avait une certaine hésitation de poser une question. Puis j'imagine
que c'est aussi vrai aujourd'hui pour les cours en ligne. Tu sais, tu as des
gens qui, pendant que le cours et le cours... pendant le cours, ils vont aller
faire quelque chose d'autre en ligne, ils vont être distraits, ils ne vont pas
faire attention, ils ne développent pas de relations avec les autres élèves,
ils ne développent pas de relation avec le prof. Comme je l'ai dit, il y a une
certaine hésitation pour parler. Moi, mon fils qui est... bien, il est au
primaire à ce moment-là, lui quand ils ont fait l'école de façon virtuelle, c'était
32 enfants avec un prof pendant 1 h, puis c'était le chaos. Puis il y avait des
élèves qui n'arrêtaient pas de parler, mais la majorité ne parlait pas parce qu'il
y en avait qui n'arrêtaient pas de parler. Puis c'était. Moi j'ai trouvé ça
très chaotique. Puis lui aussi a trouvé ça chaotique. Donc, est-ce qu'il y a
une façon, parce que là, vous vous dites ça dépend comment le prof va présenter
le cours, etc. Mais encore une fois, est-ce qu'il y a des formations ou des
balises qu'on peut offrir au prof pour dire : si ça va être en ligne, bien
voici comment assurer l'interaction et l'intérêt des élèves et des étudiants.
M. Young (Shawn) : Je vais
vous dire : la meilleure façon de rater des cours en ligne, là, c'est de
prendre toute une société, puis du jour au lendemain, vous donner des cours en
ligne sans aucune formation, ni des outils, là.
Mme Gagné (Anny) : Le temps
de préparation, là.
M. Young (Shawn) : C'est sûr
que si on regarde ce qui s'est passé dans la COVID tout le monde, nos yeux
saignaient, là, c'était comme ayoye, mais c'était de l'improvisation, là. C'est
certain que si tu dis : Bon bien, là, attends, là, je vais prendre le
temps de me dire comment je pourrais donner le meilleur cours possible en
ligne. Que les établissements après ça disent : O.K., on va te donner des
outils, on va donner de la formation pour le faire, on va avoir un autre niveau
de qualité, là. Après ça, tu sais, là, on parle des études supérieures, c'est
une chose. L'école primaire, l'école secondaire a un rôle de socialisation qui
fait partie de sa mission, là. Ça fait que est-ce qu'on devrait, tu sais... je
travaille beaucoup aux États-Unis, aux États-Unis, croyez-le ou non, il y a des
écoles virtuelles qui partent de la maternelle puis qui vont jusqu'à la fin du
secondaire. Un petit bout de maternelle tout seuls chez eux à faire des cours
en ligne, ça fait pitié... Oui, c'est ça que j'ai envie de faire... Ça fait que
est-ce que, tu sais, ce qu'on dit là, tu sais, ça s'applique à certains groupes
d'âge. Il faut faire une nuance. Je ne suis en train de dire que ça pourrait
être une bonne approche, par exemple, pour nos enfants d'âge primaire, au début
du secondaire, au contraire. Une des missions principales de l'école, c'est de
former à la socialisation, puis le rôle de l'école. Pourquoi est-ce qu'on le...
Tu sais, pourquoi est-ce qu'on a des bâtiments physiques auxquels on envoie les
enfants? Bien, premièrement, on a besoin d'aller travailler, puis il faut les
mettre à quelque part. Mais la raison éducative, c'est ça, là, c'est de les
mettre en contact avec d'autres jeunes, puis qu'ils apprennent à socialiser,
puis évidemment, c'est perdu dans des cours en ligne, ça fait que ça ne devrait
pas être quelque chose qu'on favorise de façon générale pour les enfants.
Mme Gagné (Anny) : Idéalement,
quand on donne un cours en ligne, on est formés pour donner un cours en ligne.
Là, les enseignants étaient pris du jour au lendemain à donner une formation en
ligne sans outils. C'est sûr que les résultats n'étaient pas là. Par contre,
comme je disais tout à l'heure, il y a des... il y a des façons pédagogiques d'amener
les élèves à participer, même si on est en ligne. Ça se fait des sous-groupes,
tu peux les avoir dans des sous-groupes qui communiquent ensemble. Ils ont des
tableaux interactifs où ils peuvent communiquer des dessins. Tu sais, je veux
dire, l'interaction est toujours possible en ligne. C'est juste un manque de
savoirs...
Mme Gagné (Anny) : ...des gens
qui le...
La Présidente (Mme Dionne) : C'est
malheureusement tout le temps qu'on... qu'on a. Merci beaucoup pour ces
échanges à cette commission.
Donc, je suspends les travaux quelques
instants pour accueillir notre prochain groupe.
(Suspension de la séance à 15 h 35)
(Reprise à 15 h 40)
La Présidente (Mme Dionne) : Nous
reprenons maintenant les travaux. Donc, je souhaite maintenant la bienvenue à
la Confédération des syndicats nationaux. Alors, je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes...
La Présidente (Mme Dionne) : ...pour
nous transmettre votre exposé. Suite à cela, il y aura une période d'échanges
et de questions avec les membres de la commission. Donc, peut-être vous
présenter au début et nous faire part de vos commentaires. Merci. Je vous
laisse la parole.
Mme Lelièvre (Katia) : Merci
beaucoup. Donc, bonjour, moi, je m'appelle Katia Lelièvre, je suis
vice-présidente de la CSN, entre autres responsables du dossier de l'éducation,
là, puis de l'enseignement supérieur. La CSN, c'est une centrale syndicale qui
représente près de 1 600 syndicats,
330 000 membres de tous
les secteurs d'activité sur l'ensemble du territoire québécois. On compte trois
fédérations, plus spécifiquement dans le domaine de l'éducation et de
l'enseignement supérieur. Et je suis accompagnée par des représentants de deux
des trois fédérations. Donc, M. Frédéric Brun, qui est président de la
Fédération des employés de services publics, ainsi que Léandre Lapointe, qui
est vice-président de la FNEEQ, la Fédération nationale des enseignants,
enseignantes du Québec, CSN tous les deux, évidemment. Il y a aussi la
Fédération des professionnels qui représente des professeurs d'université et
plus... plusieurs professionnels en enseignement supérieur. Aujourd'hui,
m'accompagne aussi, Julie Audet, qui est conseillère au service de recherche et
de condition féminine pour la CSN, spécialisée en éducation et en enseignement
supérieur. Donc, on souhaite vous remercier de nous avoir invités à partager
notre opinion à la commission.
On accueille aussi favorablement la
création d'une commission spéciale sur les impacts des écrans et des réseaux
sociaux sur la santé des jeunes et leur développement. On croit que l'approche
transpartisane, ça devrait favoriser l'identification des pistes d'action qui
vont être consensuelles. C'est nécessaire, considérant... puis on a entendu
depuis tantôt, là, les préoccupations sociétales qui entourent la présence des
technologies numériques qui seraient, elles, de plus en plus grande auprès de
nos jeunes, sans qu'un encadrement légal et adéquat n'ait été mis en place de
quelconque façon.
Pour cette consultation, on a ciblé trois
questions qui touchent directement les lieux d'éducation et d'enseignement
supérieur. Donc, les trois questions sont les suivantes : À quelles fins
recourir aux technologies numériques dans les classes? Comment encadrer
l'utilisation des technologies numériques et le temps... d'écran, pardon, en
milieu scolaire? Comment bien outiller les jeunes et le personnel scolaire pour
qu'ils développent les... les compétences et un regard critique nécessaire à
une utilisation éclairée des technologies numériques?
Pour la CSN, la réussite éducative et
l'accessibilité à un enseignement de qualité à tous les niveaux doivent être
les bases sur lesquelles prendront assises les balises qui encadreront le
recours aux technologies numériques en classe. Selon nous, cette réflexion
devrait s'inscrire dans la poursuite de deux grands objectifs, soit soutenir
les apprentissages et la réussite éducative et améliorer le fonctionnement des
établissements d'enseignement. L'innovation n'est pas nécessairement un gage de
succès et, jusqu'à présent, les preuves de résultats concrets positifs sur
l'apprentissage des enfants et des jeunes restent encore à faire, alors qu'on a
une pléiade de risques qui ont été démontrés, tant sur leur santé que sur leur
développement. Considérant les incertitudes, nous préconisons que toute prise
de décision concernant l'utilisation ou non de ce type d'outils fasse... soit
faite selon un principe de précaution.
Le deuxième thème, il aborde l'encadrement
du temps-écran et s'inscrit dans un contexte plus large de baliser le recours à
ces technologies numériques et à la formation à distance. On croit que c'est
important et pressant de concevoir un cadre de référence à l'intention des milieux
éducatifs afin de baliser l'utilisation des écrans.
Enfin, le troisième volet de notre
réflexion concerne les moyens d'acquérir une meilleure compréhension des
technologies numériques, et ce, tant pour les élèves que pour le personnel
scolaire. Actuellement, on observe des inégalités numériques, c'est-à-dire des
différences au niveau du plan de la familiarité, de l'habileté ou de l'accès.
Le milieu scolaire a donc un rôle important à jouer pour réduire ces disparités
et former des citoyennes et citoyens éclairés, capables d'avoir une pensée
critique. Je vais donc céder la parole à mes collègues, parce qu'ils
travaillent avec ces gens-là qui oeuvrent sur le terrain auprès de nos jeunes
et ils vont donc pouvoir nous parler de ce qui se passe avec nos jeunes et
comment on devrait implanter des balises et gérer les technologies numériques
dans nos classes et dans nos milieux d'apprentissage.
M. Lapointe (Léandre) : Oui.
Alors, bien, bonjour, tout le monde! Donc. à la Fédération nationale des
enseignantes et des enseignants du Québec, on représente
40 000 enseignants, ça, c'est du préscolaire jusqu'à l'université, donc
principalement, là, au collégial, les chargés de cours université, mais surtout
47 syndicats d'établissements d'enseignement privés qui ont été quand même
particulièrement impliqués dans l'utilisation des technologies dans les classes
dès le... dès le début. Je pense que la tenue, là, puis Katia l'a bien dit, de
cette commission parlementaire là, elle est importante, parce qu'il est le
temps d'identifier les dérives, d'encadrer l'utilisation des technologies pour
le bien... le bien-être des jeunes, dans l'objectif ultime d'assurer la
réussite éducative de nos... de nos jeunes. Les dérives... il existe en
éducation, les écrans sont de plus en plus présents dans les... dans les
classes et le temps d'utilisation croît avec...
M. Lapointe (Léandre) : ...l'usage,
notamment dans les établissements d'enseignement privés, où plusieurs
établissements ont mis de l'avant les technologies, hein, pour se présenter une
façade d'innovation, dans des réseaux où la compétition entre les
établissements, elle est grande, et ce souci-là d'attirer de la clientèle,
comme ils disent, mettant de côté, malheureusement, des approches pédagogiques
signifiantes à certains égards. Une fois que la technologie est implantée dans
l'école, bien, les enseignantes et les enseignants reçoivent de la pression de
toutes parts : des directions, des parents, des élèves mêmes, qui
souhaitent avoir une plus grande utilisation de ces écrans-là, qui souhaitent
multiplier les activités, on a des parents qui souhaitent rentabiliser l'achat
qu'ils ont fait, et ça souvent, malheureusement, sans égard aux apprentissages,
aux bonnes activités pédagogiques ou à l'utilité de la technologie et à l'autonomie...
l'autonomie professionnelle de l'enseignante et de l'enseignant qui sait
discréditer la bonne de la moins bonne utilisation en pédagogie des
technologies.
Puis, si on regarde en enseignement
supérieur, c'est la même chose, la multiplication de l'enseignement à distance,
hein, qui... par exemple, pour compenser le manque d'espace, le manque de
locaux, pour compenser le manque de financement et pour élargir ce qu'ils
appellent, les établissements d'enseignement supérieur, le marché étudiant, au
détriment, là, d'une relation pédagogique humaine.
C'est d'ailleurs les orientations de la
stratégie québécoise sur l'utilisation des écrans où, dans l'analyse des
recommandations par l'INSPQ... qui nous dit que les écrans devraient servir
dans l'objectif unique pédagogique, devraient être utilisés seulement
lorsqu'ils améliorent l'enseignement et les apprentissages.
Les impacts sur la santé, ils existent.
Vous allez en entendre parler par les divers experts que vous allez rencontrer.
Ce qu'on sait maintenant, et ça, c'est important de le dire, c'est que toutes
les utilisations doivent s'additionner. Que l'utilisation de la technologie
soit bonne, pour le... le divertissement ou la mauvaise utilisation, on doit
maintenant faire la somme de toutes ces heures-là et non pas soustraire celles
de la bonne utilisation. L'OCDE l'a dit également : Une plus grande
utilisation des technologies ne se traduit pas automatiquement par des
meilleurs résultats scolaires.
On a souhaité, nous, être positifs, amener
des solutions, et vous allez le retrouver dans notre... dans notre mémoire, là,
à la page 13 et 14, où on vous a présenté un tableau des... je cherche mes mots
ici, désolé, des principes directeurs sur l'encadrement. Ce qu'on souhaite
faire, puis vous allez le voir, c'est qu'on souhaite replacer l'être humain au
centre de la relation pédagogique. On souhaite valoriser cette approche-là, que
l'outil soit utilisé par l'humain, que les acteurs soient au centre des
décisions et adopter un principe de précaution dans le seul et unique but
d'assurer le bien-être de nos jeunes et leur réussite éducative.
M. Brun (Frédéric) : Bonjour
à vous. Je représente la Fédération des employées et employés de services
publics. Donc, on représente plusieurs secteurs, mais dont le personnel de
soutien, le personnel de soutien scolaire, quand on parle dans les centres de
services scolaires, dans les commissions scolaires anglophones, le personnel de
soutien dans les collèges et le personnel de soutien dans les universités. On
parle ici d'environ 45 000 travailleurs et travailleuses, là, qui
travaillent en soutien aux étudiants de différents âges.
Léandre l'a placé d'entrée de jeu par
rapport à la... les écoles privées, le fait... l'accès à la technologie, le...
l'utilisation grandissante. On n'est pas nécessairement à la même place quand
on parle dans le réseau public, puis dépendamment où est-ce qu'on se retrouve
dans le réseau public. Donc, c'est sûr qu'aujourd'hui on veut amener aussi la
réflexion de dire : les chances égales de pouvoir se servir de ces
différents médias là, de ces différents écrans là.
On l'a vécu. Tantôt, j'entendais, plus
tôt, là, parler de la période de COVID, de l'intégration, comment ça s'est fait
d'un coup, tout ça. On a des régions au Québec où ce que ces jeunes-là
n'avaient pas accès à Internet, qu'on a été obligés de donner des puces pour
qu'ils réussissent à avoir du réseau, qui n'avaient pas nécessairement les bons
outils à ce moment-là. Ça existe, ça existe, puis pas juste en temps de pandémie,
ça existe de manière générale où ce que ce n'est pas chaque foyer au Québec qui
a les aménagements pour être capable de se servir des écrans comme ça, d'avoir
les bons écrans, puis d'être capable de se servir, à ce moment-là, de tous les
services qui viennent avec.
Donc, on parle ici de chances égales,
hein, peu importe le milieu d'où on vient. Puis la commission va servir aussi à
réfléchir à vers quoi qu'on peut s'en aller puis quelle est l'utilité, puis
pour le bien-être de tout le monde.
• (15 h 50) •
Quand on parle de technologies numériques
supportées par les écrans, oui, on parle de temps d'écran, mais il faut
départager le temps d'écran. Il y a certains élèves pour qui que ce temps
d'écran là est nécessaire à leur réussite. Quand on parle d'élèves qui ont des
problèmes de dyslexie...
M. Brun (Frédéric) : ...s'orthographie,
qui on le droit du tiers de temps de plus pour des... faire des examens, et
tout ça, on doit le compter, c'est du temps d'écran. Par contre, ce temps-là ne
sert pas à la même chose, sert à la réussite, hein? On est vraiment là où
est-ce qu'on en a de besoin.
La Présidente (Mme Dionne) : Désolé.
Oui, je faisais des... des simagrées. Désolé. Le temps est terminé, mais est-ce
qu'il y a consentement pour laisser terminer M.? Allez-y, continuez pour...
Concluez
M. Brun (Frédéric) : Donc,
c'est ça. Ça fait que tout en respectant le besoin des élèves puis de se servir
des bons outils, hein, pour faire le... pour le cheminement scolaire de chacun
des élèves. Quand on parle d'aussi des... On vient toucher l'intelligence
artificielle, il y a certains systèmes qui servent présentement un peu, Vigo,
on le voit intégré dans les écoles, avec des questionnements pour les élèves.
Il faut garder en tête, Léandre l'a placée, là, la relation avec l'humain, la
prévention, l'observation, l'orientation de ces élèves-là pour travailler
autant des comportements que de faire de la prévention pour les amener un petit
peu plus loin. Je vais m'arrêter là, je vais laisser les questions, puis je pourrai
continuer.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup pour ces informations. Donc, nous allons débuter la période d'échange
avec le député de Marquette.
M. Ciccone :Ah, merci beaucoup. Bonjour à vous quatre. Merci beaucoup
d'être là. Je vais citer une partie de... de votre mémoire :
«Actuellement, des pressions sont exercées pour accélérer le recours aux
nouvelles technologies dans les écoles et pour devenir des leaders numériques.
Une impulsion selon laquelle l'innovation est un gage de succès». Vous l'avez
dit tantôt, et j'avais une question : Est-ce que ça met de la pression sur
vos membres? Vous avez dit oui. Cependant, est-ce que vos membres, bien
outillés, sont ouverts à cette nouvelle technologie pédagogique là?
M. Lapointe (Léandre) : Oui.
Bien, notre position, nous, c'est qu'on n'est pas technophiles, mais on n'est
pas technophobes non plus. Donc, on est technocritiques, c'est-à-dire que les
enseignants sont à même de connaître la bonne utilisation de la technologie.
Il y a des technologies qui aident en
éducation, qui accélèrent les apprentissages et qui les rendent signifiants,
c'est-à-dire qui vont rester. Je vais vous donner des exemples. L'écriture
collaborative. Des fois, les enseignants vont vouloir faire écrire un texte à
plusieurs, tu sais, pour apprendre le sujet amené, sujet divisé. Donc, on va
placer... Anciennement, on plaçait trois élèves, quatre élèves autour d'une
feuille, puis avec un crayon, ça n'écrivait pas facilement. Maintenant, on
peut, avec les plateformes, être à plusieurs à écrire un texte, chacun a son
curseur, et on peut construire, co-construire un texte, et c'est ça, une bonne
utilisation de la technologie, où à la sortie de cette activité-là, le jeune va
avoir mieux appris puis il va ressortir une meilleure compréhension d'une
structure de texte. Il va y avoir d'autres technologies. Je vous dis : Il
y en a plusieurs, là, mais qui sont des moins bonnes utilisations. Météormath
où, dans le fond, on fait des additions, puis là il y a des feux d'artifice,
des explosions où qu'il n'y a pas de plus-value à utiliser la technologie.
Donc, on est en train de... d'activer un facteur motivationnel, un intérêt qui
ne perdure pas dans le temps. Ça, c'est important de le savoir. Donc, qu'est-ce
qu'on gagne à utiliser? Donc, on vient d'ajouter du temps d'écran pourquoi,
dans le fond? Alors, c'est ça qu'il faut faire à chaque fois, se dire :
Ça, c'est une bonne utilisation, une moins bonne. C'est pour ça qu'on en... on
s'en remet aux acteurs des milieux de l'éducation à faire justement ces choix
stratégiques pertinents parce qu'on sait que la somme des heures, elle est
comptée, donc c'est encore plus pertinent de bien les utiliser.
M. Ciccone :Est-ce que vous sentez que... ou est ce que vous attendez,
de la part de vos membres, qu'ils sont bien formés pour la nouvelle technologie
pédagogique dans les écoles?
M. Lapointe (Léandre) : Bien,
de plus en plus. Malheureusement, on est formés à utiliser les outils, on nous
apprend les nouvelles plateformes, les nouvelles applications, les nouveaux...
Puis bon, ces plateformes là, même quand on les conçoit et même qu'on les
utilise, elles évoluent dans le temps, à un moment donné, tu vois des icônes
apparaître dans des applications que tu utilises depuis longtemps, mais on
n'apprend jamais les... les effets sur la santé, qu'est ce que ça peut avoir
comme effets négatifs? Je n'ai eu... moi, ça fait 21 ans que j'enseigne au
secondaire, en troisième secondaire en sciences, je n'ai jamais eu une rencontre
dans une journée pédagogique où on m'a dit : Faites attention que, les
écrans, si on les utilise trop, ça va avoir ça comme conséquence. Jamais. Mais
on me parle de ce que ça aide, qu'est ce que ça fait, par exemple. Donc, on a
un discours qui n'est pas... qui n'est pas tempéré sur les... les technologies.
Donc, on doit former nos... nos directions d'école et nos enseignantes et nos
enseignants à tout ça parce qu'il y a des impacts. Puis on vient tout juste
d'apprendre, puis moi, ça fait 10 ans que j'utilise les technologies dans
ma classe, puis on vient tout juste de se faire expliquer que les technologies
pourraient avoir des impacts. Alors, je pense qu'il y a un rattrapage important
à faire, de ce côté-là.
M. Ciccone :Dernière question, Mme la Présidente. Vous avez parlé...
encore sur les outils pédagogiques, là, vous avez dit qu'il n'y a pas de
meilleurs résultats scolaires avec les outils pédagogiques, est-ce que j'ai
bien compris?
M. Lapointe (Léandre) : Avec
les technologies, la science le démontre, hein, au primaire, on nous dit que
l'enseignement à distance et l'utilisation des technologies peut nuire à... à
l'apprentissage. On nous a dit que la lecture à l'écran peut nuire à la
compréhension d'un texte. Puis on nous dit que la prise de notes à l'écran n'a
aucun avantage. Donc, oui.
M. Ciccone :O.K., mais ça n'inclut pas, ça, les jeunes qui sont en
difficulté d'apprentissage avec des plans d'intervention, avec les outils
pédagogiques, Antidote, et autres. Vous ne parlez pas de ça, là?
M. Lapointe (Léandre) : Non,
c'est... Vous avez raison, il y a des outils spécialisés pour certaines
problématiques qui sont très efficaces, ça... ça... Tout à fait.
M. Ciccone :Parfait. Merci beaucoup...
M. Brun (Frédéric) : ...peut-être,
si je peux me permettre de revenir, quand on parle de formation, là, quand on
parle du personnel en éducation, on parle des services en adaptation scolaire,
les milieux... en services de garde dans le milieu scolaire. La formation, ça
évolue vite. Quelqu'un qui n'est pas habitué de se servir de cette technologie
là, il y a un manque de formation. Puis cette formation-là... Plus tôt, là,
j'entendais l'avant-dernière personne qui intervenait dire : Bien, tout ce
qui est de la prévention, de la... de savoir qu'est-ce qui en est, comment s'en
servir, puis comment mettre des balises au travers de ça. Je pense qu'il faut
aussi équiper les travailleurs puis les travailleuses qui interviennent avec
ces jeunes là, puis pas juste à l'intérieur de la classe. Parce que, quand on
sort à l'extérieur de la classe, là, on tombe avec tous les réseaux sociaux,
ces choses-là.
À la Commission scolaire de Montréal, il y
a une intervenante que son travail, c'est vraiment d'être avec les jeunes, de
faire de la prévention et de voir aux réseaux sociaux qu'est-ce qui se passe
pour faire un suivi avec les élèves. Et son travail... elle dit : Je ne
peux pas me déconnecter à 16 h 30 parce que ça continue. Les murs de
l'école ne sont pas étanches, ça continue en dehors des heures d'école. Donc,
il faut le garder en tête, puis ces formations-là sont nécessaires pour tout le
monde. Puis on est capable de dire comment ça a évolué, là. J'ai fait une
quarantaine, il n'y avait rien, mes filles en avaient plus. Puis, aujourd'hui,
quand on regarde un enfant qui a cinq, six ans, il prend ton téléphone, puis il
t'a vu faire, puis il... Donc, c'est cette évolution-là qu'il faut former les
gens parce que ça évolue trop vite, là, par exemple.
M. Ciccone :Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. Je passe maintenant la parole à la députée de Hull.
Mme Tremblay : Oui, bonjour.
Vous avez parlé du personnel de soutien. Ça inclut aussi... les éducateurs
spécialisés, TTS, ça en fait partie. Je vais me concentrer beaucoup sur eux
dans ma prochaine question parce qu'ils sont des intervenants importants dans
une école. C'est eux souvent qui vont recevoir les jeunes, notamment qui
pourraient avoir peut-être de la dépendance. Souvent, quand ça ne fonctionne
pas dans la classe, notamment parce qu'ils ont utilisé trop leur téléphone puis
que c'est répétitif, c'est eux qui vont... tu sais, qui vont souvent agir
derrière l'enseignant. Puis l'enseignant, leur rôle est tellement important.
Moi, j'aimerais ça voir dans l'expérience
que vous avez, parce que vous les représenter, dans une école, eux, c'est quoi
leur vision? Est-ce qu'ils ont mis des bons mécanismes de prévention, de
sensibilisation? C'est quoi, leur position? Puis quand on prend des décisions,
par exemple, vous savez, là, dans la classe, on sait, maintenant, l'utilisation
du cellulaire n'est plus autorisée, et ça a quoi comme impact pour eux sur leur
charge de travail, mais aussi dans leur... pas juste dans leur charge, mais
dans leur travail auprès des jeunes? Ça fait que je veux voir un peu la
position de ce personnel-là, qui est un... qui ont un rôle très... qui sont un
des premiers intervenants auprès des jeunes aussi.
M. Brun (Frédéric) : Je vais
essayer de reprendre parce qu'il y a beaucoup, beaucoup d'éléments dans ce que
vous amenez là.
Mme Tremblay : Je vais vite,
hein?
M. Brun (Frédéric) : On va
parler de prévention, puis là vous nous amenez aussi sur le fait que, bon, il y
a une règle qui est descendue, là, depuis le printemps dernier, de plus
d'utilisation dans les écoles. Il y a des équipes-écoles qui ont une expertise,
à savoir c'est quoi, l'utilisation qui devrait être faite puis comment qu'elle
devrait être faite. Il y a une règle générale, mais chaque milieu est
différent, là. J'entendais plus tôt la même chose, il n'y a pas un milieu qui
est identique, donc il faut le garder en tête. De faire de la prévention, de
dire qu'il y a des règles, puis d'appliquer ces règles-là, si... Il y a des
écoles présentement, cette année, qui ont interdit d'emblée le cellulaire à
l'école. Je veux dire, tout le monde est au courant. Il y a des élèves qui ont
été orientés dans ces écoles-là et qui l'ont appris le matin même. Ces
élèves-là... sûrement que ça a été dit, mais comme plusieurs élèves, sûrement
plusieurs parents qui sont pressés, puis j'ai été de ceux-là, on a écouté à
moitié, puis c'est correct, c'est une rentrée scolaire un peu comme les autres,
il y a des... ça génère des réactions chez ces jeunes-là. Donc, il faut faire
de la prévention puis il faut être capable de faire le travail sur le terrain.
• (16 heures) •
Puis, vous l'avez dit, si les heures de
l'équipe, hein, qui est là, qui est complémentaire, parce que le personnel de
soutien, le personnel enseignant, le personnel professionnel sont
complémentaires un envers les autres, il faut qu'ils aient le temps de pouvoir
faire ce travail-là. Donc, il faut leur donner le temps de peut-être expliquer,
faire la prévention, être en support dans la classe. Puis peut-être qu'il y a
certains élèves, étudiants, étudiantes, pour qui c'est plus difficile que leur
réalité personnelle, que leurs défis personnels font en sorte que de se faire
dire : Tu ne peux pas entrer à l'école avec un cellulaire ou tu ne peux
pas l'avoir en classe... Parce qu'il ne faut pas se cacher, là, ça fait
longtemps que certains regroupements, c'est un moyen pour certains élèves de se
calmer, de se recentrer, que ce soit pour écouter de la musique, que ce soit un
jeu de patience... De formation, je suis éducateur spécialisé, là, j'ai
travaillé dans des classes avec des jeunes avec...
16 h (version non révisée)
M. Brun (Frédéric) : ...des
problèmes en psychopathologie, bien, ça faisait partie. Tantôt... quand on
entend de dire c'est... les écrans faisaient partie de quelque chose qui était
calmant. Puis il faut savoir à quoi ça sert, exactement, puis leur donner le
temps d'intervenir puis de faire des groupes avec ces élèves-là. Peut-être que
ces éducatrices spécialisées là, ces techniciennes en travail social là,
doivent avoir du temps pour rencontrer ces élèves-là en dehors de la classe,
faire des groupes. Puis il y a peut-être, pour certains élèves, qu'il faut
mettre en place d'autres moyens pour faire en sorte que l'adaptation se fasse
puis qu'on puisse faire un travail avec eux, et non pas juste être, je vais
dire, dans la répression, de dire : Bien, il n'y a plus de cellulaire à l'école
où il n'y en a plus en classe. C'est plus compliqué que ça.
Mme Tremblay : Merci. J'aurais
une dernière question. Vous avez parlé de... bon, de la technologie, des outils
pédagogiques. Il faut que ça... que ça apporte un plus à l'enseignement. Donc,
tu sais, on n'est pas dans les feux d'artifice, là, vous l'avez bien nommé, là,
ce n'est pas... ce n'est pas ça, par rapport au contexte d'écriture que vous
avez nommé, qui était très pertinent pour nous faire comprendre qu'est-ce qu'il
en est, donc. Puis, bon, l'INSPQ va dans le même sens, hein, ça ne doit pas
être des méthodes d'enseignement par défaut. Il y a également, là, même l'UNESCO,
là, qui a dit qu'il y a peu de preuves de valeur ajoutée de la technologie en éducation,
tu sais. Puis c'est des réflexions récentes, hein? Ça avance très, très vite.
Puis là vous venez avec un cadre de
référence, vous dites : Bien, écoute, ça serait bien qu'il y ait des
balises. Ce matin, on a reçu, là, des parents, les comités de parents. Eux
aussi disaient : Oui, tu sais, des balises, des grandes lignes, mais, en
même temps, ils nous mentionnaient que c'était important de laisser, après ça,
à chaque école, à partir de ces balises-là, de discuter des modalités, parce
que chaque milieu est différent. Il y a des milieux ruraux, il y a des milieux
plus au centre-ville, il y a des écoles de 3000 élèves. Donc, tu sais, il y
a... bon, ça peut être très différent. Vous, vous en pensez quoi, donc? Oui,
pour le cadre de référence, j'ai compris que vous êtes en accord, mais, après
ça, de permettre, justement, une marge de manœuvre dans chacune des écoles,
comment vous voyez ça?
Mme Lelièvre (Katia) : Bien,
je vais laisser Léandre continuer mon bout, mais je vais commencer en disant
que, pour nous, c'est évident que chaque école est différente. Puis les
enseignants, ils ont des classes aussi différentes, des matières différentes,
ça fait que ça va même au-delà de la classe. On n'enseigne pas le français de
la même façon qu'on enseigne, par exemple, l'histoire, ou la géographie, ou les
mathématiques. Donc, au-delà... C'est plus que le milieu, c'est même de...
chacun des professeurs devrait avoir la liberté puis la latitude de regarder,
mais selon des balises qui sont établies.
M. Lapointe (Léandre) : Bien,
exactement, on est tout à fait d'accord avec ça. C'est que chaque école, chaque
milieu, chaque équipe-école doit, à partir de principes d'encadrement, établir
quelle sera la politique locale, je pense. Parce que ce n'est pas vrai que les
enjeux en Gaspésie, au Lac-Saint-Jean ou dans Rosemont Petite Patrie, ce seront
les mêmes enjeux, dans l'utilisation de l'écran, les problématiques que ces
écrans -vont créer chez leurs jeunes. Donc, c'est à eux, qui seront à même d'identifier
quelles sont nos problématiques, qu'est-ce qu'on fait ici, quel sera le type d'utilisation.
Ça fait qu'on est tout à fait en accord avec ça.
Mme Tremblay : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Je passe maintenant la parole à M. le député de Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Je fais un bout de chemin sur ce que vous venez d'échanger.
Donc, tantôt, j'ai aussi posé la question : C'est quoi, la bonne échelle?
Là, je comprends que dites : Si on est pour faire des politiques publiques
d'interdiction, par exemple, ce n'est pas tant la classe, ou la commission
scolaire, ou le Québec, mais plutôt l'école qui est le bon dénominateur commun
à choisir?
M. Lapointe (Léandre) : Bien,
moi, je pense qu'il devrait y avoir des encadrements à tous les niveaux. Je
pense que l'éducation, par exemple, c'est pour tous, c'est pour tout le monde,
dans le sens que, tu sais, je nous entendais discuter tout à l'heure sur, bien,
c'est quoi, le rôle, là, pour limiter les GAFA ou les plateformes? Qu'est-ce
que... c'est quoi notre... Bien, je pense que, derrière tout ça, il faut... il
faut outiller nos jeunes à se protéger, à comprendre puis à manipuler eux-mêmes
les algorithmes qui essaient de les manipuler, se sortir des chambres d'écho de
leurs réseaux sociaux puis devenir intelligents à l'utilisation. J'entendais ce
matin une dame dire : Bien, je ne suis pas capable... une jeune dire :
Je ne suis pas capable... Je veux arrêter de voir des vidéos de guerre. Bien,
quelqu'un qui comprend l'algorithme de Tik Tok est capable de le manipuler,
puis il n'y en aura plus, de vidéos, c'est très simple. Il s'agit de savoir,
puis on manipule l'algorithme, puis on devient maître du réseau social. Donc,
ça, ça passe par l'éducation.
Donc, une fois que j'ai dit ça, je pense
qu'il doit y avoir des règles, là, générales, mais, ensuite, localement, il
doit y avoir une latitude où... par exemple, à Montréal-Nord, on souhaiterait
intervenir sur telle utilisation, telle problématique, versus une région. Donc
là, je pense que les milieux, les réseaux et les acteurs locaux devront avoir
la latitude de pouvoir aller sur quelque chose de plus pointu qu'une autre
personne, donc une espèce d'encadrement qui peut... qui est souple, je vais
utiliser un très bon mot.
M. Leduc : Est-ce que j'en
déduis, donc, que vous n'êtes pas tellement dans l'interdiction...
M. Leduc : ...par
exemple, le cellulaire en classe.
M. Lapointe (Léandre) : Bien
oui, on pense qu'il doit y avoir quand même des règles qui aident certains
milieux, mais tout ça doit passer par l'éducation, tu sais. Avant d'interdire,
on doit expliquer pourquoi on interdit.
M. Leduc : Bien sûr.
Mais donc pas de fermeture non plus à l'interdiction en classe?
M. Lapointe (Léandre) : Bien
sûr que non.
M. Leduc : Puis là, dans
une... une interdiction totale dans une école, là, est-ce que ça va un peu trop
loin? Tantôt, il y avait peut-être une piste de réflexion là-dessus?
M. Brun (Frédéric) : Bien,
non. Mais ce n'est pas tant qu'il y ait l'interdiction totale, c'est comment on
le fait. Puis peut-être que, pour ce milieu-là, c'était la bonne chose à faire,
puis c'était le bon choix. Je ferais le parallèle avec quand on recule de
25 ans, les écoles n'étaient pas nécessairement dotées d'un plan de lutte
à l'intimidation, comme qu'on vit aujourd'hui, hein? Ça a évolué.
Aujourd'hui, systématiquement, chaque
école, centre de services scolaire, commission scolaire, développe son plan de
lutte. C'est peut-être la même chose qu'il faut réfléchir par rapport à tout ce
qui est... Si on prend l'exemple du cellulaire ou de la tablette, les écrans,
de voir où est-ce que c'est accessible, dans quel moment qu'on peut s'en servir
puis à quelle hauteur. Parce qu'on a tendance à le réfléchir comme on parle de
polyvalentes avec des élèves sans difficulté particulière, mais on peut parler
d'écoles où est-ce que c'est des jeunes avec un trouble du spectre de
l'autisme, avec une déficience intellectuelle, puis l'utilisation qui est faite
de ces écrans-là n'est vraiment pas à la même place que dans une classe
régulière avec même un élève qui fait de la dyslexie ou de la dysorthographie.
Je vais vous donner l'exemple d'avoir été
dans une de ces écoles-là. Ils ont des animaux dans la classe, qu'ils font
venir, des lézards, entre autres. C'est des jeunes que les sensations sont
difficiles, hein, le chaud, le froid, la texture. L'intervenante prend la
tablette, met la tablette en avant du lézard, le jeune flatte la tablette,
enlève la tablette puis il continue à flatter le lézard. C'est un outil de
travail. Pourtant, durant la journée, il se sert de cette tablette-là, plus
qu'une fois. Il est devant un écran. Il regarde, il fait des actions, il fait
des gestes, il évolue au travers de ça, mais c'est un besoin. Dans cette
école-là, de dire : On ne peut pas s'en servir, c'est non, mur à mur. Ça
ne ferait pas de sens.
M. Leduc : Donc là, je
déduis que vous y allez plus au niveau d'une école. Si un ministre
disait : J'interdis ça à la grandeur du Québec. On n'irait pas dans la
bonne direction, là.
M. Brun (Frédéric) : Je
ne crois pas.
M. Leduc : Est-ce qu'il
y a encore du temps? Oui?
M. Lapointe (Léandre) : Si
je peux ajouter là-dessus...
La Présidente (Mme Dionne) :
Allez-y. Allez-y.
M. Leduc : Allez-y donc.
M. Lapointe (Léandre) : Je
pense que les interdictions actuelles, par exemple, c'est quand même... On dit
que si c'est pour la pédagogie, tu sais...
M. Leduc : Oui, oui,
oui. C'est balisé quand même.
M. Lapointe (Léandre) : Exactement.
M. Leduc : O.K. Mais
plus que ça, on commence à aller peut-être un peu trop loin.
M. Lapointe (Léandre) : Ce
qui est important... c'est que n'importe quelle interdiction doit s'accompagner
d'une compréhension de l'interdiction. C'est hyper important. Si on veut
susciter l'adhésion d'une interdiction, on doit la comprendre. Donc, si la
science est derrière pour nous dire voici pourquoi qu'on place ça aux jeunes.
Si, dans nos écoles, on interdit les cellulaires, mais les enseignants, ils ont
un cellulaire sur leur bureau, puis là il y a des jeunes qui ne comprennent
pas, bien, il faut l'expliquer, ça. Bien, pourquoi? Parce que, s'il y a une
urgence, là, moi, j'ai le 911, là, au bout de mon... Je peux... Si quelqu'un
s'évanouit puis que j'ai besoin d'aide, j'ai besoin de ça. Tu sais, il y a des
raisons qui expliquent. Puis quand le jeune comprend ça, c'est fini. Puis ça
fait qu'il faut expliquer l'interdiction pour faire susciter l'adhésion, tout
simplement. Et ça, c'est pour tout.
M. Leduc : L'autre débat
qui est sous-jacent ce thème-là, c'est la majorité numérique. Il y en a qui
disent 16 ans, 14 ans. Il y a des initiatives un peu partout dans le
monde. Avez-vous une position là-dessus?
Une voix : On l'a...
M. Lapointe (Léandre) : Bien,
nous, on a une expérience empirique, là. Je vous dirais qu'on s'en remet... on
s'en remet à la science pour ces réponses-là. Je vous dirais que, nous, c'est
ce qu'on veut. On a besoin de savoir parce qu'on les voit, les impacts, puis on
les voit que pour un... d'un jeune à l'autre, il n'y a pas le même impact. Ça
fait que la science, elle est hyper importante pour nous guider dans tout ça.
Puis on va la suivre.
M. Leduc : Il faut faire
attention à des solutions mur à mur appliquées, là, pour tout le monde. Il faut
de la nuance... Merci.
Mme Lelièvre (Katia) : Puis
si je peux me permettre, il en va... Il en va de même aussi avec l'IA, hein?
L'IA, c'est parce que le développement est très, très rapide puis il n'y a pas
d'encadrement? Puis là ça amène aussi la question nos jeunes à qui on essaye de
donner un sens critique, de dire une capacité de penser par eux autres mêmes,
puis de réflexion. Donc, l'IA, on n'a pas tant que ça parlé de ça dans notre...
dans notre mémoire parce qu'on s'est cantonné à l'école. Mais ça amène toute la
réflexion. L'école a le rôle de former des citoyens, des gens qui sont capables
de réfléchir. Et si on ne balise pas l'ensemble de l'IA, bien, ces gens-là sont
exposés à toutes sortes de faussetés, d'informations qui ne sont absolument pas
vraies et qui remettent en cause la pensée critique puis, possiblement, même
beaucoup plus de choses que ça.
• (16 h 10) •
Donc, je voulais juste prendre le temps de
dire qu'il y a la technologie numérique, là, mais l'IA, il faut trouver une
façon aussi de l'encadrer parce que ça va très, très vite et actuellement
c'est... c'est ça, l'encadrement est très limité, malgré que tout le secteur de
l'éducation et de l'enseignement supérieur lève la main...
Mme Lelièvre (Katia) : ...depuis
deux ans, pour dire : ça nous prend des balises rapidement, des balises
rapidement.
M. Leduc : Peut-être une
petite dernière, rapide, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
allez-y.
M. Leduc : Est-ce que
l'arrivée des tablettes, téléphones, et autres a eu des impacts sur le droit du
travail pour les gens que vous représentez? Y a-tu des nouveaux... nouvelles
sortes de griefs qui sont déposés, ou... Qu'est-ce que ça peut avoir comme
impact? Peut-être qu'il n'y en a pas, là. Je vous pose la question.
M. Lapointe (Léandre) : Bien
oui. C'est parce qu'on reçoit maintenant... Donc, vous ne serez pas surpris
d'entendre que, dans les conventions collectives, on veut faire rentrer des
principes comme le droit à la déconnexion. Donc, maintenant, avec la
messagerie... Avant, c'était les courriels. Maintenant, on a la messagerie
instantanée, où les jeunes peuvent entrer en contact avec leur enseignante et
enseignant un samedi matin, puis tu as une notification, donc. Puis est-ce que
je réponds, est-ce que je réponds maintenant, si je ne réponds pas, si je
réponds à un autre... tu sais. Alors, il y a ce principe-là où est-ce que,
bien, il faut se protéger. Une question de santé et sécurité derrière, où
est-ce que, oui, on a besoin aussi de se déconnecter, puis pour l'élève aussi.
Donc, le jeune, là, qui est stressé, un
samedi matin, puis qui écrit à son enseignante pour avoir une réponse
immédiatement, là, qu'est-ce qui se passe, tu sais? Donc, il y a tout ça. Ça
fait que, oui, il y a des inquiétudes et des griefs sur l'hyperconnectivité et
l'hypertravail qui est lié à l'entrée massive des technologies dans notre
travail.
M. Brun (Frédéric) : On fait
juste prendre l'évolution dans les 10 dernières années. Quand on regarde,
souvent... Tantôt, on parlait d'intervenants, là, des techniciennes en
éducation spécialisée, techniciennes en travail social, qui, voilà environ 10
ans, s'ouvraient un compte Facebook, intervenant, pour... avec les élèves, être
en contact avec les parents. Il n'y a plus de limite, là non plus, à un moment
donné, parce que, s'il est arrivé quelque chose, le jeune arrive à la maison,
le parent écrit le soir, le jeune veut écrire le soir, il va avoir... «je vis
de l'anxiété, j'ai des difficultés». C'est en continu. Donc, où est-ce que je
l'ai vu, ça exerce une pression sur nos membres, sur les travailleuses puis les
travailleurs, de dire : Bien, il m'a écrit, est-ce que je réponds, je ne
réponds pas? On est samedi, on est jeudi soir, qu'est-ce qu'on en fait, avec
ça?
Je pense que ces balises-là... puis se
donner les bons outils. Puis les bons outils, il faut aussi faire attention.
Plutôt que de se dire, par rapport à l'intelligence artificielle... de ne pas
juste se servir de plateformes d'intelligence artificielle, parce qu'on n'est
plus dans... je l'ai dit au début, là, on n'est plus dans la prévention, dans
l'observation, pour faire en sorte d'amener un élève... de le faire cheminer.
Il y a une nuance entre quelqu'un qui voit qu'il a des difficultés puis je veux
aller me chercher de l'aide, puis là il y a plein de types d'aide qui arrivent,
puis versus l'humain qui observe, qui dit : Cette personne-là a besoin
d'aide, je vais l'approcher, je vais créer un contact, créer une relation de
confiance, puis, à partir de là, être capables d'évoluer.
Donc, il faut garder... je pense que
l'important... puis... de le placer, là, mais de garder l'humain au milieu de
ça. Oui, il y a les temps d'écran, le temps qu'on accorde à la technologie,
mais l'humain, qu'est-ce qu'on fait, les relations sociales? Ces personnes-là,
ces humains-là, là, quand ils vont arriver dans la société, bien, il faut
qu'ils soient capables d'interagir avec les autres, puis je pense que le milieu
scolaire, le milieu de l'éducation sert à ça, à créer les citoyens de demain,
là.
La Présidente (Mme Dionne) : Est
ce qu'il y a d'autres questions de la part des membres? Oui, Mme la députée.
Mme Prass : Moi, j'ai deux
questions. Dans les suggestions que vous avez faites, les principes directeurs,
vous parlez de mettre en place un processus d'évaluation. C'est quoi, au juste,
que vous voudriez évaluer? Est-ce que c'est l'aspect positif, par exemple, des
outils, des écrans, etc.? Je voudrais juste savoir c'est sur quoi vous voulez
vraiment vous concentrer à cet égard là?
Mme Lelièvre (Katia) : C'est
le dernier.
Mme Audet (Julie) : Oui,
c'est le dernier, parce que ça vient un peu... Quand... Lorsqu'on met en place
un processus ou un projet pilote où on utilise... on l'a vu, même, avec les
tablettes numériques dans les écoles privées... à un moment donné, on s'est
rendu compte que... les écoles privées se rendent compte que ça ne fonctionne
plus, et ils reculent maintenant, il y en a qui ont arrêté de l'utiliser. Donc,
avoir un processus d'évaluation, c'est-à-dire : On a pris une nouvelle
application, est-ce que ça fonctionne, est-ce que ça ne fonctionne pas, est-ce
qu'on l'a bien encadrée, est-ce qu'on a donné les outils nécessaires? Donc, le
processus d'évaluation doit se faire pendant la mise en œuvre, mais aussi
après, pour voir une rétroaction. Donc, est-ce qu'on continue, est-ce qu'on
améliore, ou on arrête, parce que ce n'était pas un bon choix numérique qu'on
vient de faire?
Donc, c'est ça, l'idée d'avoir un
processus d'évaluation. Il va se faire aussi selon : Est-ce que ça s'est
fait... le choix s'est fait au niveau de la classe, s'est fait au niveau de
l'école, du centre de services scolaire, ou au national? Puis c'est un peu ça,
les principes directeurs, c'est : peu importe où on met nos lignes
directrices... parce je crois qu'il peut... selon l'ampleur, ça peut être au
niveau national... il va y avoir certains enjeux qu'on va vouloir baliser d'une
manière, même, légale. Des fois, ça peut être des grandes lignes ministérielles
ou de centres de services scolaires, d'autres disent : applications qui
deviennent, vraiment, plus ponctuelles. Puis là on se dit...
Mme Audet (Julie) : ...ces
lignes directrices là, on va les appliquer à l'école. Donc, l'évaluation, elle
se fait à chacun des niveaux.
Mme Prass : Et est-ce que,
par exemple, dans le cas... Vous avez dit : Il y a des écoles qui ont
reculé. Est-ce que c'était par exemple qu'on ne voyait pas une progression des
notes? Ma question, c'est plus : Concrètement, qu'est ce que vous allez
regarder dans le cadre de l'évaluation pour juger si c'est réussi ou non?
Mme Audet (Julie) : Bien, en
fait, l'objectif qu'on disait lorsqu'on recourt, c'est... c'est le bien-être
puis c'est la réussite éducative. Donc, est-ce qu'on a vu que les jeunes, ça
les aidait? Puis la réussite éducative, ce n'est pas juste la réussite
scolaire, donc ce n'est pas juste une question de notes, mais c'est aussi un
autre impact sur la socialisation, sur l'anxiété, tout ça, donc c'est ce qu'on
va évaluer. Est-ce que, vraiment, on voit que les jeunes, dans la classe, ça
les aide ou pas? Puis on revient un peu à l'essence : C'était quoi, notre
objectif? Si l'objectif au début n'était pas le bon, puis c'était faire de l'argent,
bien, peut-être que ça sera un autre processus d'évaluation, mais ce n'est pas
là où on veut aller, là. Donc, c'est reprendre la base des choses.
Mme Prass : O.K. Merci.
M. Lapointe (Léandre) : Peut-être
vous donner un exemple concret.
Mme Prass : Oui.
M. Lapointe (Léandre) : Dans
le fond, c'est d'avoir des boucles de rétroaction, hein, l'évaluation. C'est
qu'une technologie, on pense qu'elle va être utile, et elle l'est, puis, à
force de l'utiliser, on s'aperçoit qu'elle amène des dérives qu'on n'avait pas
prévues. Donc, ces évaluations le permettent.
Je vous donne un exemple, l'agenda
électronique qu'il y a dans certaines écoles, où par exemple, moi, je suis un
prof de sciences puis je donne un devoir à mes élèves. Ils n'ont pas à
l'écrire, je publie mon devoir dans tous les agendas de tous les jeunes. Ça
fait que c'est magnifique, ça va vite, il n'y a plus un jeune qui peut me
dire : Ah! je ne l'ai pas écrit dans mon agenda, c'est pour ça que je n'ai
pas fait mon devoir. Ça fait que c'est magnifique, les gens aiment ça, ça
accélère, on avance. Bon.
On s'aperçoit avec les années que, oh! il
y a des gens qui se désinvestissent, qui planifient moins bien leurs
apprentissages, qui... qui... L'agenda est rendu quelque chose... Ils ne sont
plus... Quand tu planifies, quand tu prends et tu fais le geste d'écrire dans
ton agenda, tu vois ce qui s'en vient, et ça... ça forge la planification des
apprentissages, ce qu'on... ce qu'on perd avec l'agenda électronique.
Ça fait que ces évaluations-là, ces
boucles de rétroaction nous permettent d'ajuster, justement, comme Julie l'a
très bien dit.
Mme Prass : Parfait. Puis mon
autre question... On discutait un petit peu avant avec des... un autre groupe
le concept des écrans comme récompense, et ma question, c'était : Est-ce
que, justement, on ne... on ne renforce pas cette idée que l'écran, c'est le...
le... c'est l'ultime récompense, justement, et donc on donne le mauvais
exemple? Ça devrait plutôt être aller au... peut-être dans la gymnastique, au
gymnase, aller à l'extérieur, quoi que ce soit, donc, parce que... Dans les
écoles, est-ce que, vous, vous serez contre l'idée des écrans comme récompense?
M. Lapointe (Léandre) : Bien,
nous, comme la réponse que vous avez eue tantôt, on va s'en remettre à la
science. Mais, maintenant, ce qu'on... ce qu'on... ce qu'on réfléchit, c'est
qu'on se dit : Quand on fait une récompense, quelle est-elle, cette
récompense-là? S'il faut la mettre au divertissement, bien, il doit y avoir plusieurs
sortes de divertissement qui peut appartenir à un jeune, si c'est de l'activité
physique, si c'est des arts. Peut-être que la tablette peut rentrer là-dedans,
mais il va falloir que la tablette soit... Bien, c'est quoi? Combien d'heures
il y a eu dans la journée? Est-ce que les... Tu sais, il faudrait que ce soit
balisé si c'est un des divertissements. Mais, si la science nous dit que ça
valorise une utilisation qui devient peut-être... qui projette vers la
dépendance ou vers des... nous, on n'embarquera pas. Ça fait que c'est pour ça
que... Voilà.
Mme Prass : Merci.
M. Brun (Frédéric) : Il y a
quand même une... il y a quand même une évolution, là, quand on regarde, là. Ça
a été, si on revient dans le passé, des locaux d'informatique ouverts à l'heure
du dîner. Comme activité, ça n'existe plus, hein. Des périodes récompenses, ou
cadeaux, ou mérite du vendredi qui étaient... Les quatre ordinateurs dans la
classe à gérer, 12 minutes chaque, pour être sûr que tout le monde a pu aller y
toucher puis tout ça. Ça a évolué. Après ça, Léandre l'a placé, là,
l'accessibilité aussi autour à qu'est-ce qu'on donne comme activité, puis tout
ça. Est-ce qu'on a des... du personnel en loisir qui est là pour l'heure du
dîner pour mettre des activités aussi diverses qu'elles peuvent être pour
rejoindre plein de jeunes? Bien, c'est un peu la même chose quand on arrive...
Peut-être que l'évolution va faire en sorte que la période de récompense ne
sera pas pour tout le monde la dernière période le vendredi, parce que le
gymnase, il risque de ne pas être accessible à beaucoup d'élèves. Donc, tu
sais, c'est ça aussi, des fois, c'est de... de réinventer un peu puis de le
réfléchir autrement, là.
Mme Prass : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Mme
la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Merci à vous d'être avec nous aujourd'hui. Justement sur la
question d'écrans récompenses, juste pour continuer, est-ce que vous avez une
idée, donc, de la prévalence du phénomène? Je pense que ce matin, donc, le
groupe qui est venu nous en parler, donc, semblait dire, donc, parfois qu'on
utilisait donc l'écran comme une gardienne ou qu'on n'était plus dans la notion
de récompense comme élément, donc, de... donc plus ponctuel, mais qu'il y avait
une mécanique plus... plus prépondérante. Est-ce que c'est votre analyse, dans
le réseau?
• (16 h 20) •
M. Brun (Frédéric) : Ce
serait dur, là, de dire comment c'est... Je reprendrais des mots qu'on a dits
tantôt, de dire : chaque...
M. Brun (Frédéric) : école a
une expertise puis un fonctionnement dans chacune des écoles, là. Donc, c'est
dur de faire un portrait qui est général un petit peu partout à comment que les
écrans sont utilisés, en termes de récompense, là, si on parle de récompense,
là. Puis je ferais un parallèle avec nos milieux de services de garde scolaire
qu'à l'époque, c'était commun d'écouter un film une fois par semaine puis
d'avoir accès à ça. C'était une récompense du service de garde. Aujourd'hui,
nos milieux de services de garde éducatifs, du temps d'ordinateur, du... un
film, ça n'existe peu ou pas, où on va jouer dans des occasions, Noël, Pâques,
la fin de l'année, une fête. Donc, ça serait dur de se prononcer sur vraiment
comment que c'est géré, là.
Mme Cadet : Et, dans ce
cadre-là, puisque plutôt, donc, on nous disait donc... évidemment, on
disait : Est-ce que le gouvernement du Québec devrait mettre une
directive? Est-ce que c'est quelque chose qui devrait être déployé et être à la
discrétion des conseils d'établissement? Est-ce que vous, vous avez une opinion
sur le rôle que l'État, donc, devrait jouer dans l'établissement de balises
pour les écrans récompense?
M. Lapointe (Léandre) : Bien,
on va répéter un peu ce qu'on a dit tantôt, là, des balises qui soient... puis
qu'on s'en remet au milieu. Je pense, les activités au milieu... les activités
récompense écran, ça a évalué... évolué beaucoup, on en voit de moins en moins,
là. Les jeunes, pour eux, ils sont tellement habitués aux écrans, bon. Ce qu'on
voit, c'est des Kahoot!, là, qui vont être faits. Je ne sais pas si vous
êtes... c'est que, dans le fond, c'est comme un sondage, là, puis bon, on fait
des jeux avec ça des fois un vendredi pour... mais ce n'est pas... le jeune...
puis on a eu ça, hein, 2014, 2013, quand les tablettes sont rentrées en classe,
là, puis là c'était... quand c'était permis tous azimuts là, puis on se
retrouvait avec des jeunes qui jouaient sur l'heure du midi à... puis à des
affaires, puis tout de suite les milieux ont réagi. Et ça n'existe peu ou pas
aujourd'hui. Ça fait que... ces dérives-là n'existent pas, pas celles-là, en
tout cas.
Mme Cadet : O.K. Merci. Puis
sur... en fait, dans votre exposé, initialement donc, vous avez pris la peine,
donc, de souligner qu'à l'inverse, donc, en fait, du groupe précédent, donc
vous dites : Donc, tout temps d'écran doit être comptabilisé, donc, il n'y
a pas, donc, de distinction à faire entre du bon temps d'écran ou du mauvais
temps d'écran. J'aimerais que vous élaboriez là-dessus.
M. Lapointe (Léandre) : Oui.
Bien, écoutez, 2016-2017, hein, quand on se référait aux experts pour connaître
la bonne utilisation, on nous parlait de ça. Quand c'était de la bonne
utilisation en classe, on n'avait pas à compter le nombre d'heures. Maintenant,
aujourd'hui, ce n'est plus ça. On additionne toutes les heures, que ce soit en
classe pour une bonne utilisation, ou sur... à l'extérieur. Donc, ça a changé
la perspective. Ce qui justifie encore plus, je vous dirais, que ce temps-là
doit être bien utilisé, donc, qui justifie encore plus le fait que... bien
qu'on soit informé de ça, puis que, bien, le temps qu'on aura, si les experts
nous disent que ça ne doit pas dépasser de telle heure à... tel nombre d'heures
pour tel groupe d'âge, bien il va falloir que les équipes-écoles s'assurent que
ce temps-là soit bien utilisé, puis à bon escient.
Mme Cadet : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : 20 secondes.
Alors, si quelqu'un veut conclure, ou vous avez d'autres questions, Mme la députée.
Mme Cadet : Ça va pour moi.
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Est-ce
que vous aimeriez dire le mot de la fin?
Mme Lelièvre (Katia) : Bien,
en fait, quoi que ce soit... quelle que soit la technologie qu'on met dans nos
écoles, il faut se souvenir que ces jeunes-là qui arrivent, ils ont besoin des
humains pour les encadrer. On ne peut pas encadrer l'éducation avec des
tablettes, avec des technologies numériques. Puis, tout à l'heure, ça sera
peut-être des lunettes ou des... On ne sait pas où est-ce qu'on va être rendus.
D'ailleurs, on n'utilisait pas beaucoup le terme-écran parce que pour nous
c'est des technologies numériques. L'écran, ce n'est qu'un support. Ça fait que
je pense qu'il faut garder l'école à échelle humaine et l'objectif... Puis il y
a... il y a des choses qu'il n'y a que les humains qui vont comprendre, jamais
une machine ne pourra arriver à donner la même éducation qu'un être humain.
La Présidente (Mme Dionne) : Vous
avez bien raison. Alors, merci beaucoup pour votre contribution à cette
commission. Pour notre part, bien, la commission ajoute ces travaux jusqu'au
lundi 16 septembre, 14 h. Merci à tous et bonne fin de journée.
(Fin de la séance à 16 h 24)