To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts

Version finale

31st Legislature, 2nd Session
(March 8, 1977 au December 22, 1977)

Thursday, April 21, 1977 - Vol. 19 N° 34

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits relevant du ministre délégué à l'énergie


Journal des débats

 

Etude des crédits relevant du ministre

délégué à l'énergie

(Vingt heures douze minutes)

Le Président (M. Clair): A l'ordre s'il vous plaît!

La commission des richesses naturelles et des terres et forêts, commission élue permanente, est réunie ce soir pour étudier les crédits budgétaires du ministère des Richesses naturelles, tout particulièrement ceux qui ont trait à l'énergie et qui relèvent du ministre délégué à l'énergie. Les membres de la commission aujourd'hui sont — s'il y avait des remplaçants, vous voudrez bien me les faire connaître au fur et à mesure — M. Baril (Arthabaska), M. Bérubé (Matane), M. Bordeleau (Abitibi-Est), B. Brochu (Richmond), M. Desbiens (Dubuc), M. Garneau (Jean-Talon), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe) en remplacement de M. Goulet (Bellechasse), M. Grégoire (Frontenac), M. Joron (Mille-Iles), M. La-rivière (Pontiac), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Marcoux (Rimouski), M. Marquis (Matapédia), M. Mercier (M. Berthier), M. O'Gallagher (Robert-Baldwin), M. Perron (Duplessis).

M. Larivière: M. le Président, vous avez oublié la moitié de mon comté, c'est Pontiac-Témiscamingue.

M. Garneau: C'est la moitié qui ne peut plus couper l'herbe sur le bord de la route, parce qu'ils parlent anglais.

Le Président (M. Clair): J'ai fait la correction. Il y aurait lieu maintenant de nommer un rapporteur. Est-ce que quelqu'un aurait une suggestion à faire? M. Baril, accepteriez-vous d'agir comme rapporteur pour la commission? Alors, M. Baril (Arthabaska) agira comme rapporteur. Avant d'entamer l'étude de l'élément 1 du programme 1, je demanderais au ministre s'il a des remarques préliminaires et générales à faire à cette commission. M. le ministre.

Remarques préliminaires du ministre (M. Guy Joron)

M. Joron: Merci, M. le Président. Je voudrais faire une suggestion au départ et, si cela vous convient, on pourra peut-être organiser l'ordre de nos travaux. Les crédits que nous avons à adopter sont relativement restreints. Malheureusement, le député de Saint-Laurent me disait qu'il n'avait pas reçu le document qu'on avait tenté de faire parvenir la semaine dernière, expliquant en détail et de façon beaucoup plus fouillée que le livre des crédits ne l'explicite, chaque programme. Toutes les explications étaient données. J'avais pensé, évi- demment, que le fait d'envoyer cela à l'avance aurait pu faciliter et accélérer peut-être l'étude de nos crédits. C'est dommage, peut-être, que vous ne l'ayez pas eu à temps, mais enfin.

Est-ce que cela vous conviendrait que nous fassions la partie technique de notre travail, c'est-à-dire, l'adoption des crédits comme tels, quitte à réserver le vote, et faire la discussion sur le fond, s'il doit y en avoir une, après l'étude des chiffres, car il n'y a que deux programmes, les programmes 7 et 8 du ministère des Richesses naturelles?

Si cela vous convenait, je vous suggérerais peut-être que l'on passe cette partie comptable d'abord et qu'ensuite on se réserve le temps que l'on voudra à discuter de n'importe quel autre sujet avant de procéder à l'adoption des crédits comme tels. Enfin, je lance cela, si cela vous convient.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: M. le Président, quant à moi, comme les sommes en cause sont relativement minimes, à l'exception du nouveau bureau de l'économie sur l'énergie, sur lequel j'aurais peut-être quelques questions, ce ne sera pas là-dessus qu'il y aura des questions. Si l'on suivait la procédure habituelle de faire une discussion générale, quand on arrivera à l'adoption des crédits en ce qui regarde les montants d'argent, pour moi il n'y aura pas de questions bien longues.

M. Joron: Ce n'est pas là le problème, mais vous préférez faire la discussion générale d'abord.

M. Garneau: En ce qui me concerne il n'y aura pas de questions bien longues sur les chiffres.

M. Joron: D'accord.

Le Président (M. Clair): Si je comprends bien, la proposition est l'inverse de celle du ministre.

M. Garneau: Cela revient pas mal au même.

Le Président (M. Clair): On arrive pas mal au même résultat.

M. Forget: Selon une tradition parlementaire, M. le Président, la discussion générale a souvent lieu sur le premier article, et le reste, après, procède assez rapidement. De toute façon, l'Opposition n'a pas l'intention de traîner en longueur l'étude de ces crédits.

M. Joron: D'accord. Puisqu'il en est ainsi, M. le Président...

Le Président (M. Clair): Le représentant de l'Union Nationale voudrait-il s'exprimer sur ce su-jet?

M. Brochu: En ce qui me concerne, sauf pour quelques remarques d'ordre général et quelques questions, je ne vois pas d'objection à procéder d'une façon ou de l'autre.

M. Joron: Alors, procédons de la façon traditionnelle, si vous voulez. En guise de remarques préliminaires, parce que je serai relativement bref, c'est peut-être la discussion qui s'engagera par la suite et les questions qui seront de plus d'intérêt.

Nous nous trouvons réunis à peu près deux mois après la commission parlementaire qui a siégé au mois de février pour entendre différents acteurs et témoins de la scène énergétique québécoise nous présenter leur appréciation du présent et leur vision de l'avenir.

Cette commission parlementaire, comme on l'avait indiqué à l'époque, devait être la première étape de notre cheminement au cours de l'année. A partir des témoignages entendus, le gouvernement s'est engagé à définir au cours de l'année une politique énergétique globale qui sera contenue dans un livre blanc, quelque part à l'automne.

Je veux dire que ce travail, ce processus est en marche. Donc, si vous me permettez de résumer les trois champs d'activité ou les trois priorités qui occuperont la Direction générale de l'énergie, cette année, on pourrait les résumer ainsi.

Cela ne couvre pas tout, mais les points saillants sont les suivants. Premièrement, c'est la mise sur pied du bureau d'économie de l'énergie. Nous ne sommes pas, au moment où on se parle, en mesure encore d'annoncer des choses très spécifiques. Nous sommes à la recherche de personnel et, évidemment, cette étape est préalable à ce qui va s'ensuivre, le plus rapidement je l'espère bien, c'est-à-dire la définition du problème, la définition des objectifs, ensuite des moyens pour atteindre ces objectifs.

Tout cela, normalement, devrait nous occuper et ceci n'est pas conditionnel à la publication du livre blanc à l'automne. Le Conseil des ministres a déjà approuvé la création du bureau d'économie de l'énergie, il a déjà approuvé cette politique, c'est-à-dire qu'on mette un tel programme en marche.

Nous allons nous occuper à cela, simultanément, mais ce que je veux dire c'est que nous n'attendrons pas nécessairement la publication du livre blanc avant d'agir dans ce secteur. Aussitôt que nous aurons un minimum de personnel requis, tout cela sera déjà en marche.

Le deuxième point qui nous occupera au cours de l'année, c'est la structuration de la Direction générale de l'énergie. Je serai en mesure très bientôt, enfin dans moins d'un mois probablement, d'annoncer la nomination d'un sous- ministre qui, juridiquement ou hiérarchiquement, appartient — si on peut employer l'expression — au ministère des Richesses naturelles mais qui sera délégué spécifiquement à l'énergie.

Comme il y a un ministre délégué à l'énergie, il y aura un sous-ministre, tant que la direction générale de l'énergie ne sera pas mutée en ministère, qui sera spécifiquement assigné à l'énergie.

Vous l'avez peut-être appris par les journaux, il y a des concours de postes de cadres supérieurs qui s'ouvrent en ce moment, à la direction générale de l'énergie. Parmi les principaux postes, on trouve celui du directeur du bureau de l'économie de l'énergie, celui du directeur de l'analyse et de la planification, celui du directeur des hydrocarbures et celui du directeur de l'électricité.

Il y a aussi quelques autres postes: gaz et pétrole, le service de projets dans l'électricité, l'analyse économique et la planification. Ce n'est peut-être pas exhaustif, mais nous sommes donc dans le processus de remplir les principaux cadres qui seront les piliers de la direction générale de l'énergie. Comme vous le savez tous, c'est une préoccupation relativement nouvelle au Québec. Nous avons passablement de retard à rattraper par rapport à certains autres pays du monde et à certaines provinces canadiennes qui ont agi plus rapidement que nous à la suite de la crise du pétrole de 1973, à la suite de quoi la plupart des pays industriels ont développé une préoccupation énergétique. On a vu apparaître des ministères de l'énergie un peu partout. C'est ce qui se passe au Québec, cette année, avec un petit peu de retard peut-être, mais enfin! Voilà, donc notre deuxième priorité, ou préoccupation.

La troisième, c'est évidemment la rédaction du livre blanc et la définition de cette politique énergétique globale pour le Québec dont nous avons, tous ensemble d'ailleurs, commencé à parler en commission parlementaire au mois de février. Nous sommes à la tâche à cet égard. Est-il trop tôt pour indiquer peut-être quelques orientations générales?

Je ne le crois pas, surtout à la lumière de ce qui a été annoncé aux Etats-Unis cette semaine. Il serait peut-être bon de dire que nous voyons la question, le problème jusqu'ici avec la même gravité, si vous voulez, ou le même réalisme dont a semblé faire preuve le président des Etats-Unis cette semaine. Je pense qu'il n'y est pas allé par quatre chemins; il a décidé de prendre le taureau par les cornes et d'affronter le problème de plein front. C'est tout à fait dans cet esprit que nous sommes depuis quelques mois. Je peux vous dire que nous allons aborder la question avec sans doute le même réalisme, conscients que ce problème de l'énergie est probablement le problème le plus grave et le plus difficile auquel les sociétés industrielles auront à faire face d'ici à la fin du siècle. Nous en sommes tout à fait conscients.

Il n'est pas trop tôt pour dire qu'il y aura des étapes là-dedans. La première, bien entendu, ira dans le sens de ce qui a été annoncé aux Etats-Unis. Dans une première période, qui durera on ne sait pas encore combien d'années, l'effort maxi-

mal portera sur l'économie d'énergie ou, si on veut l'exprimer autrement, la rationalisation de notre utilisation énergétique. Nous sommes, malheureusement, un des pays qui ont la consommation, per capita, la plus forte au monde. Je dis malheureusement dans le sens que nous sommes peut-être l'un des pays les plus gaspilleurs d'énergie au monde. Il y a beaucoup, beaucoup de chemin à faire avant d'apprendre à utiliser nos ressources énergétiques de façon rationnelle. J'ai l'impression que cela va nous occuper pour un bon nombre d'années, mais, une fois cette étape franchie, évidemment, elle ne se répétera pas par la suite. Une fois le gaspillage éliminé, si vous voulez, on ne peut l'éliminer une deuxième fois.

Donc, il faut également prévoir ce qui va suivre. Comme on sait aussi que les décisions en matière énergétique doivent souvent être prises huit, dix ou même douze ans à l'avance, ce qui arrivera après la période que j'appelle de rationalisation doit aussi être pensé dès cette année et impliquera probablement des décisions à la fin de cette année, peut-être l'année prochaine ou dans les années subséquentes. Cela nous oblige à travailler sur deux plans à la fois, un plan qui est opérationnel immédiatement, à court et à moyen terme, qui est celui que je rattache à l'idée de rationalisation, et un deuxième volet qui est la planification de l'avenir, de ce qui va venir par la suite.

Evidemment, les questions sont beaucoup plus difficiles, sont beaucoup plus larges, parce qu'elles impliquent des remises en cause, tant de nos habitudes de consommation, de la façon dont nous avons aménagé notre territoire, de notre structure industrielle, enfin de tous ces aspects, de la structure de notre consommation, finalement. C'est presque remettre en cause tout un type de société ou même l'échelle de valeurs qui la sous-tend.

Je pense que si on veut prendre des décisions en pleine lumière ou en plein éclairage, on ne peut éviter de poser ces questions et de présenter des alternatives. C'est à la lumière de ce grand éclairage que nous tenterons, dans le livre blanc, de définir cette deuxième étape. A cet égard, sans parler de la nature de ce qui sera suggéré, on peut peut-être dire que nous nous trouverons à aller plus loin que ce qu'on a vu, que ce qui a été annoncé aux Etats-Unis, cette semaine, qui couvre une certaine étape, qui parle de conservation, de mise en exploitation d'une nouvelle source énergétique, mais qui ne définit pas beaucoup l'avenir au-delà, peut-être, de dix ans.

Enfin, nous voulons nous efforcer de faire cet effort. Voilà, en quelques mots, nos principales préoccupations et ce qui nous occupera au cours de l'année.

Le Président (M. Clair): Je vous remercie. M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: M. le Président, concernant l'ensemble du problème de l'énergie, je pense qu'il n'y a pas, en ce qui me concerne du moins, de propos différents de ceux que je tenais à l'ouverture de la commission parlementaire qui a entendu les nombreux mémoires des différentes entreprises, des différents groupes qui sont venus nous entretenir sur l'énergie.

M. le Président, je voudrais demander au ministre, je n'ai pas bien saisi tout à l'heure, à quel moment il entend publier son livre blanc.

M. Joron: A l'automne.

M. Garneau: C'est remis à l'automne, maintenant.

M. Joron: Cela a toujours été cela.

M. Garneau: Vous n'avez pas dit que c'était au mois de juin, à un moment donné?

M. Joron: Non.

M. Garneau: A quel mois à l'automne, le savez-vous? Sur la fin de l'automne 1977 ou le printemps seulement?

M. Joron: Je vous dirai honnêtement, j'espère...

M. Garneau: L'automne finit quelle date, le 21 décembre?

M. Joron: L'automne commence le 21 septembre.

M. Garneau: Cela finit le 21 décembre. Le ministre dit qu'il va le déposer avant le 21 décembre.

M. Joron: J'espère tôt, à l'automne. Tôt, au début de l'automne, si possible.

M. Garneau: Est-ce que le livre blanc dont nous parle le ministre va couvrir — il nous a parlé pratiquement uniquement de l'énergie en termes d'hydrocarbure — la question de l'énergie électrique? Allez-vous toucher également ce plan?

M. Joron: Oui, bien...

M. Garneau: La question nucléaire et...

M. Joron: Oui.

M. Garneau: ... l'ensemble du problème?

M. Joron: Oui.

M. Garneau: Je ne sais pas si, dans notre discussion, on peut subdiviser le problème de l'énergie et aborder la question de l'énergie hydroélectrique, dans un premier temps. Ma question serait la suivante: Dans le discours du budget, le ministre des Finances nous a indiqué que l'intention de l'Hydro-Québec, en termes d'investissements pour l'année 1977, était de $2,2 milliards. Je demanderais au ministre quel a été le montant effectivement investi à la baie James par l'ensemble de

l'Hydro-Québec en 1976. Je ne sais pas s'il a le chiffre, ce n'est peut-être pas ce qui avait été annoncé dans le budget, à cause des problèmes qu'il y a eu dans la construction et les problèmes syndicaux. Quel a été le montant effectivement investi en 1976?

M. Joron: II a effectivement été un peu moindre que le budget adopté par le gouvernement au début de l'année. Je peux avoir les chiffres, ici. Je vais devoir vous fournir la réponse à un autre moment, à moins qu'on ne les retrace.

M. Garneau: Si la commission devait terminer ses travaux avant la reprise de demain à l'Assemblée nationale, est-ce que le ministre peut s'engager à nous les faire parvenir?

M. Joron: Bien sûr.

M. Garneau: L'autre question que j'aimerais poser est: Quelle est la part de l'autofinancement...

M. Joron: Qui est prévue cette année.

M. Garneau: Cette année et l'an passé également.

M. Joron: Pour l'an passé, on va attendre d'avoir le tableau complet. Pour cette année, les investissements, à la fois de l'Hydro-Québec et de la SEBJ, prévus sont de l'ordre d'à peu près $2,2 milliards, c'est-à-dire un peu moins.

M. Garneau: $2,2 milliards.

M. Joron: $2,172 milliards, je ne sais pas si c'est le chiffre exact; c'est quelque chose comme cela.

M. Joron: La part de l'autofinancement est voisine de 20%, à 1% près.

M. Garneau: En fait, le ministre pourra nous donner le chiffre précis et pour 1977 et pour 1976. Egalement, le programme d'emprunt attribuable à l'année 1976 et à l'année 1977; ce qui a été fait avant le 31 décembre et ce qui est prévu...

M. Joron: D'accord.

M. Garneau: ... pour l'année 1977.

M. Joron: Ce qui est prévu être fait en 1977, le ministre des Finances l'a indiqué, est de l'ordre de $1 milliard.

M. Garneau: La raison pour laquelle je demande ces chiffres, c'est que, en soi, le programme d'emprunt cette année m'intéresse moins que le programme d'emprunt effectif de l'an dernier...

M. Joron: Effectué l'an dernier.

M. Garneau: ... et si on pouvait avoir, donc les investissements en 1976 effectués réellement...

M. Joron: Et les emprunts.

M. Garneau: ... et l'autofinancement de chacune des deux années et les emprunts. En fait cela compléterait les questions que j'ai à poser là-dessus.

M. Joron: D'accord. L'Hydro-Québec n'a pas encore soumis son rapport annuel, cela devrait venir bientôt.

M. Garneau: J'aimerais également savoir, si le ministre, dans la réponse à ces questions, pouvait ajouter comme information, puisqu'il n'y a pas eu d'emprunt depuis un certain temps, quel est le montant réellement investi à ce jour, dans le projet de la baie James, parce que dans les $2,2 milliards il doit y avoir encore des projets qui ne sont pas complétés sur la Côte-Nord, mais ce que je veux savoir...

M. Joron: A l'extérieur de la baie James.

M. Garneau: ... c'est sur le site de la baie James, parce que les prospectus des années passées nous donnaient quand même des sommes mais...

M. Joron: Oui, oui, d'accord. Non, cela je peux vous dire, pour l'année qui vient?

M. Garneau: Non, non, le total cumulatif d'investi depuis l'ouverture des chantiers de la baie James, non seulement en termes de barrage, mais en termes de construction de route, d'aéroport...

M. Joron: Oui d'accord, d'infrastructure.

M. Garneau: ... d'infrastructure. D'ailleurs c'était séparé, mais si le ministre pouvait nous donner ces chiffres, ils me seraient utiles. Je ne sais pas si les autres ont des questions à poser sur la baie James ou d'autres sujets concernant l'hydro-électrique.

M. Forget: Sur d'autres sujets.

Le Président (M. Clair): Si vous permettez, M. le député de Saint-Laurent, le député de Richmond avait demandé la parole avant vous, à moins que le ministre ait des réponses à fournir immédiatement à la question. Alors, M. le député de Richmond.

Commentaires de M. Yvon Brochu

M. Brochu: J'avais l'impression qu'on en était venu à la décision tout à l'heure d'avoir un commentaire d'ordre général avant d'entrer dans l'étude plus en détail, je n'ai pas voulu interrompre le député de Jean-Talon à ce sujet, mais j'aimerais peut-être à ce stade-ci, au nom de l'Union Nationale, aussi faire certaines remarques en ce qui

concerne les crédits dans leur ensemble, peut-être la réflexion à laquelle nous amène la situation actuellement.

C'est peut-être la première fois, puis c'est peut-être la dernière fois en même temps que le ministre présente les crédits sans être titulaire d'un ministère dûment formé. J'ai l'impression que peut-être au cours de la prochaine année, des précisions nécessaires seront apportées à ce sujet. C'est peut-être souhaitable d'autant plus dans le sens des remarques que le ministre a faites tout à l'heure, à l'effet que la question énergétique prend de plus en plus d'importance et que chaque jour de délai supplémentaire qui est accordé à notre plaisir ou à notre possibilité de s'attarder directement au problème énergétique est pour nous une acceptation du fait que le problème grandit et qu'on aura à y faire face tôt ou tard d'une façon peut-être plus cuisante.

Le ministre dans les commentaires qu'il vient de nous faire ne nous a peut-être pas annoncé tellement de choses nouvelles, sauf celles qu'on avait apprises à la commission parlementaire en ce qui concerne son programme d'action qu'il entend mettre en application pour la prochaine année. En ce qui concerne plus précisément la commission parlementaire, je pense que le but qu'elle s'était fixé, c'était peut-être de faire une évaluation de la situation d'une part et peut-être aussi d'arriver à une prise de conscience de la situation comme telle, en vue, comme le soulignait aussi SOQUIP, et comme l'a accepté le ministre puis les différents participants à la commission, de prendre les actions de façon immédiate dans le domaine et certains ont souligné cette prise de conscience, de l'urgence de passer à l'action en matière énergétique.

C'est pourquoi, lorsque j'ai vu les crédits dans leur ensemble, j'ai été peut-être un peu surpris aussi, parce qu'il m'a semblé que cela ne s'inscrivait pas tout à fait dans cette ligne de préoccupations, c'est-à-dire qu'on démarrait quand même de façon progressive, lente, pour arriver à établir le ministère, arriver au livre blanc, arriver à remplir les engagements que le ministre s'était fixés au cours de la prochaine année et cela malgré les impératifs qui semblent être maintenant sur la table, de façon beaucoup plus aiguë qu'ils ne l'étaient même encore au moment de la commission.

On se rend compte par là que la situation évolue très rapidement. On se rend compte de l'urgence encore plus grande aujourd'hui, même comparativement au moment de la commission parlementaire, de passer à l'action directement. C'est ce qui m'a un peu dérouté en voyant les crédits. En effet, je m'attendais à voir beaucoup plus d'ampleur, beaucoup plus d'importance accordée aux crédits de l'énergie. Même si le ministère n'était pas encore dûment formé et constitué, on aurait pu peut-être, dans un premier temps, lui donner les budgets nécessaires pour se mettre en place très rapidement et, en même temps aussi, peut-être, mettre en application des mesures immédiates que la situation nécessite.

En même temps — peut-être que le ministre pourra en faire mention au cours des réponses qu'il donnera à nos questions tantôt — j'aurais aimé que le ministre nous annonce certaines mesures immédiates en matière énergétique, soit en matière de recherche ou en matière de conservation, pour donner à cette prise de conscience à laquelle devait donner lieu la commission parlementaire un sens vraiment pratique immédiat. Je m'étonne un peu qu'à ce stade-ci le ministre n'ait pas profité de l'occasion pour annoncer certaines mesures ou certaines intentions de recherche de façon plus particulière, soit dans les formes d'énergie autres que celles que l'on connaît ou dans d'autres secteurs pouvant nous aider à ce chapitre.

Il reste quand même un fait, c'est qu'il s'est dégagé de la commission parlementaire que le Québec est extrêmement dépendant en matière énergétique et que, même en augmentant le potentiel de production énergétique du Québec comme tel, on n'arrivera jamais à une autosuffisance en la matière. Même, dans une très large proportion, nous allons continuer à dépendre de l'extérieur, de l'Ouest canadien et des pays exportateurs de pétrole, par exemple. Même l'Hydro-Québec dans son champ d'activité ne réussira pas à suffire à nos besoins d'ici quelques années.

Donc, le problème s'est posé de façon entière et je m'attendais qu'à partir de là on puisse peut-être entrevoir des possibilités immédiates, soit au niveau du budget ou soit au niveau des déclarations du ministre, qui nous auraient laissé croire qu'on puisse espérer, au cours de la prochaine année, des actions plus immédiates dans ce sens, non seulement au niveau de la structuration, mais au niveau de l'action comme telle.

Je suis d'accord pour que le bureau de conservation soit mis de l'avant le plus tôt possible. Je pense que c'est une urgence de plus en plus grande. J'aurais peut-être quelques souhaits à émettre à ce stade-ci. Il faudrait peut-être prévoir immédiatement une diversification dans nos sources d'approvisionnement en ce qui concerne surtout le pétrole pour éviter les problèmes possibles au niveau des situations dont j'ai fait état à différentes occasions, en particulier la situation au Moyen-Orient. Je pense que la situation au Moyen-Orient risque de se gâter d'une journée à l'autre. On est dépendant dans une très large proportion des pays exportateurs de pétrole, en ce sens. Notre vulnérabilité à ce sujet peut se révéler à très brève échéance. Si du jour au lendemain, la situation devait s'aggraver et que les pays arabes décidaient de se servir du pétrole comme d'une arme politique internationale pour amener les autres pays à prendre des engagements particuliers, soit par rapport à Israël ou à d'autres pays, nous serions dans une position de faiblesse extrême.

Je pense qu'il convient de souligner cette importance qu'il y aurait pour nous maintenant de diversifier nos sources d'approvisionnement. D'ailleurs, à ce sujet-là aussi, j'aimerais souligner au ministre que, depuis la commission parlementaire, la situation a quand même évolué très rapidement

en ce qui concerne la question du pétrole. Simplement à titre d'exemple, le ministre connaît sûrement, comme nous, les rapports qui ont été soumis au gouvernement fédéral à ce sujet, indiquant que les réserves de gaz et de pétrole sont déjà beaucoup moins grandes que les estimations qu'on avait faites.

Même la proportion de différence est énorme et cela, c'est révélé dans deux rapports. Le premier s'appelle "Les sources du Canada en pétrole et en gaz naturel 1976" et le deuxième, "Les sables bitumineux et pétrole lourd, perspective" qu'a publié, en date du 17 mars, je crois, le ministre de l'Energie, des Mines et des Ressources d'Ottawa.

On a dit qu'ici, en 1973, les réserves potentielles étaient évaluées à 92,2 milliards de barils de pétrole brut, et à 782,9 billions de pieds cubes de gaz naturel, et on estime maintenant, très probablement à 90%, que les réserves canadiennes atteignent 25 milliards de barils de pétrole brut et 229 billions de pieds cubes de gaz naturel.

Ceci pour souligner, M. le Président, que même dans les estimations qu'on avait faites au niveau de la commission parlementaire, où on avait misé sur ces réserves énormes du Canada, déjà il y avait une marge d'erreur. Dans un très court laps de temps, on se rend compte maintenant que l'hypothèse de travail qui basait nos réserves comme un supplément d'appoint, pour nous, important est déjà beaucoup moins grand qu'on l'avait estimé, ce qui nous place encore dans une situation peut-être plus délicate, compte tenu de la situation du Moyen-Orient, d'un autre côté.

Ceci pour dire que la situation évolue très rapidement, et que même les données qui nous étaient accessibles ont été passablement modifiées depuis ce temps.

Donc diversifier, à mon sens, nos sources d'approvisionnement en pétrole, peut-être arriver aussi, le plus possible, à des évaluations plus précises, même, de ce qui peut être disponible sur le territoire québécois comme tel.

D'un autre côté, j'aimerais que le ministre nous indique s'il était possible, c'est une suggestion que je lui fais aussi, d'en arriver à un plus grand entreposage des produits pétroliers au Québec.

Certaines entreprises, lors de la commission parlementaire, sont venues indiquer les risques que j'ai mentionnés tout à l'heure, en ce qui concerne le Moyen-Orient, et en indiquant que, du jour au lendemain, leurs sources d'approvisionnement pourraient être passablement perturbées.

D'un autre côté, j'avais posé la question à ce moment à ceux qui sont chargés des stockages de matières pétrolières, ici au Québec, et les réserves qu'on a en cette matière sont très minimes, de sorte que nos marges de manoeuvre sont à peu près nulles. C'est une politique d'entreposage presque au jour le jour, simplement ce qui peut être utilisé dans les semaines à venir.

J'avais posé la question: Est-ce que ce serait possible de stocker davantage de matière pétrolière afin de nous assurer une certaine indépen- dance, du moins à court terme, à ce sujet? On m'a dit que ce serait possible, sauf que c'est une question financière qui empêche de réaliser cet entreposage. Or, nous avons vu, par la crise américaine aux Etats-Unis, l'hiver dernier, que même les plus grands, les Etats-Unis, qui n'avaient pas prévu en cette matière, ont été aux prises avec des difficultés majeures énormes qu'ils ont eu peine à surmonter.

C'est ce qui m'amène à faire cette réflexion qu'on devrait peut-être immédiatement songer à soutenir d'une certaine façon les entreprises d'entreposage de produits pétroliers, de sorte que nous ne soyons pas à la merci d'une crise rapide qui pourrait se produire, ou d'autres situations qui pourraient nous plonger du jour au lendemain à l'intérieur d'un problème grave dont on aurait beaucoup de difficulté à se sortir puisque les sources alternatives ne sont pas encore développées du tout.

Supposons, par exemple, en période hivernale ou dans un temps difficile comme celui-là, qu'un conflit éclate de façon plus particulière au Moyen-Orient ou que d'autres problèmes majeurs se posent et qu'on soit coupé de nos sources d'approvisionnement, ou que, par exemple, les Etats-Unis, où passe quand même notre conduite d'arrivée de pétrole, décident, du jour au lendemain, soit parce qu'ils sont pris eux mêmes à l'intérieur d'une crise possible, à un moment donné, décident de garder pour eux ce dont ils ont besoin d'abord en produits pétroliers, le Canada et le Québec se retrouveraient dans une situation tout à fait précaire où il n'y aurait vraiment pas de porte de sortie.

Je pense que c'est notre responsabilité et notre devoir de réaliser cette situation et de voir les faits tels qu'ils sont. C'est ce qui m'amène à suggérer au ministre d'entrevoir des solutions à court terme dans ces domaines.

J'aurais même aimé, dans le budget qui a été présenté, à ce chapitre, voir le ministre apporter des solutions ou des sommes d'argent qui puissent être consacrées à l'entreposage des produits pétroliers. A ce moment, cela ne devient plus une question d'entreprise privée, c'est quand même une responsabilité nationale de prévoir. Je me mets dans la peau de l'entreprise privée responsable de l'entreposage. Elle est limitée dans sa marge de manoeuvre en ce qui concerne ses crédits, ses avoirs, ses profits, etc. Par contre, au point de départ, elle n'a pas la responsabilité première de prévoir pour une nation ou pour un gouvernement, mais l'Etat doit avoir comme préoccupation de prévoir pour l'ensemble de ses citoyens. C'est dans ce sens que je suggérerais au ministre d'intervenir et d'aider, par des crédits additionnels peut-être, l'entreposage qui pourrait nous assurer une sécurité minimale afin que s'il y avait un conflit on puisse, pendant une certaine période, avoir le temps de réagir et de réorganiser.

J'aurais aimé par ailleurs, aussi, après les différents mémoires qui ont été soumis à la commission parlementaire, voir certains crédits affectés de façon plus large à tout secteur de la recherche

des sources alternatives. On a présenté plusieurs mémoires extrêmement constructifs desquels on pourrait tirer beaucoup de profit et auxquels on devrait s'intéresser. Je suis un peu surpris de constater, par exemple, que dans tout le Canada on a un projet de $500 000 en recherches sur l'énergie alternative, alors qu'on s'en va vers des échéances bien précises en ce qui concerne le problème énergétique. Pendant ce temps, on n'a pas le moyen de trouver plus de $500 000, dans son ensemble, pour les sources alternatives en ce qui concerne les matières énergétiques.

Etant donné l'urgence de la situation — et je pense que la position américaine est éloquente dans ce sens — si on n'est pas capable, à ce stade-ci, d'investir les sommes nécessaires pour la recherche, comment peut-on espérer être capables, dans le domaine nucléaire, de passer peut-être à des milliards? Je pense qu'il y a quand même, une différence de grandeur et de priorité là-dedans et cela peut nous laisser songeurs. D'ailleurs, à ce sujet, juste une parenthèse. J'ai été content d'apprendre, selon mes informations, qu'en ce qui concerne l'énergie nucléaire l'Hydro-Québec aurait maintenant pris la décision, non annoncée peut-être, de ne pas mettre en application ses projets d'implantation du nucléaire tout au long du Saint-Laurent, comme à Sainte-Croix, et aux autres centrales qu'elle voulait établir de ce côté.

D'après les informations que j'ai pu obtenir, la décision serait maintenant prise par l'Hydro-Québec de laisser tomber ce projet peut-être pour aller ailleurs, selon d'autres plans. Disons que c'est quand même cette étape de franchie. Je ferme maintenant la parenthèse pour revenir à mon commentaire qui est plutôt d'ordre général.

J'aimerais aussi que le ministre nous dise, tout à l'heure ou au cours des crédits, s'il ne serait pas possible, immédiatement, de faire une étude pratique de la situation et des suggestions pratiques qui ont été faites lors de la commission en ce qui concerne les façons d'économiser l'énergie. Entre autres, je pense à ASHRAE, qui nous avait soumis des points bien importants applicables immédiatement, si je me rappelle bien, aux systèmes de chauffage des édifices, aux systèmes d'air et de refroidissement, etc. Je pense que ce seraient des mesures immédiates qu'on pourrait appliquer et dont les recherches sont faites actuellement. Les suggestions nous ont été faites. Tout est là sur la table.

Il y a aussi — j'ai le mémoire ici — la compagnie Albert qui avait beaucoup de systèmes pour économiser l'énergie à tous points de vue et beaucoup de prototypes sont à l'essai actuellement. Certains sont même mis sur le marché. D'autres ne peuvent pas l'être comme, par exemple, ce qu'ils appellent l'échangeur de chaleur de cheminée qui économise un certain nombre de BTU. Apparemment, si ma mémoire est bonne, ils ne peuvent pas le mettre sur le marché à cause de certaines lois désuètes qui empêchent de fermer l'ouverture des cheminées. Alors, c'est aussi bête que cela. C'est un système qui pourrait rendre d'énormes services à ceux qui voudraient se le procurer, s'il y avait la moindre campagne de publicité faite à ce sujet. J'imagine que la compagnie serait prête à l'assumer.

Si on pouvait changer une loi désuète pour mettre en application, par exemple, un système comme celui-là, on aurait des mesures immédiates pour économiser l'énergie et lancer un programme d'action pour non seulement rendre conscients les gens de la crise énergétique, mais aussi pour leur permettre de participer aussi à l'application de la politique pour conserver l'énergie et faire face à la crise qui nous assaille actuellement.

J'aimerais aussi, c'est une suggestion que je fais, que le gouvernement du Québec puisse avoir la sagesse de profiter de l'expérience des autres dans ce domaine. Actuellement, on est en train de mettre sur pied un organisme, une structure, un ministère. On est en train de travailler sur la présentation d'un livre blanc qui va venir, mais, pendant ce temps, il reste qu'il y a quand même d'autres pays qui sont aux prises avec la même crise parce que cette course, comme je l'ai appelée, à l'énergie s'étend maintenant sur le plan mondial. D'autres, à certains égards, sont beaucoup plus avancés qu'on peut l'être actuellement et qu'on le sera peut-être, avant qu'il soit trop tard. Parce que certains autres ont quand même investi des sommes considérables dans des recherches. Je me demande à ce moment si ce ne serait pas la sagesse que le gouvernement du Québec puisse profiter de l'expérience des autres dans ce domaine, et, par exemple, profiter de l'expérience américaine, entre autres, qui parlait de sources alternatives d'énergie douce, par exemple. Je remarque ici, dans les articles qui viennent de paraître à la suite de la déclaration du président des Etats-Unis, que parmi les mesures que le président préconise on cite celle-ci: des crédits d'impôt à l'installation d'appareils captant et utilisant l'énergie solaire ainsi qu'un programme s'élevant jusqu'à $100 millions qui permettra d'équiper les administrations de ces appareils au cours des trois prochaines années.

C'est donc dire, M. le Président, que déjà les Etats-Unis se sont préoccupés de la possibilité de travailler avec l'énergie solaire. Ils ont certaines recherches de faites à ce jour. Ils sont prêts à fonctionner dans une certaine mesure. J'aimerais ici que le gouvernement du Québec puisse avoir immédiatement cette sagesse d'aller chercher, si c'est possible, les informations dont il a besoin pour avancer et passer à l'action dans un avenir le plus rapproché possible.

Certains ont peut-être souri lorsqu'à la commission parlementaire, des individus sont venus présenter ces sources alternatives d'énergie; mais de plus en plus, je pense que les événements donnent raison à ces gens ou tout au moins nous permettent de nous arrêter et de réaliser qu'on doit accorder une certaine importance à ce qui nous a été présenté et qu'on doit actuellement aujourd'hui regarder de beaucoup plus près, même d'aller y voir.

D'ailleurs à ce sujet, M. le Président, j'aimerais aussi souligner en ce qui concerne les recherches qui sont faites par d'autres pays actuellement et auxquelles on devrait s'intéresser pour apporter des mesures immédiates, que l'Australie aussi de son côté a déjà passé à l'action dans ce domaine. J'aimerais ici citer un article de journal qui a paru le 12 février 1977 dans le Soleil à ce sujet, sous le titre: L'Australie aurait mis au point un capteur sans pareil. Des savants australiens seraient sur le pointd'annoncerdes progrès révolutionnaires dans l'utilisation de l'énergie solaire, selon le journal Daily Express qui cite comme source d'information le physicien australien Harry Messel. En effet, il semble qu'une équipe de savants de l'Université de Sydney, en Australie, aurait réussi à mettre au point un capteur capable de transformer 50% des radiations solaires en énergie utilisable. C'est une proportion nettement supérieure au 10% actuel. Selon le professeur Harry Messel qui était de passage à Londres, ce type d'énergie pourrait fournir entre 25% et 40% des besoins de la plupart des pays industrialisés. Il a ajouté que le nouveau système constituait un pas de géant dans les recherches pour la "désalaison" à bon marché de l'eau de mer. Le nouveau système australien reposerait sur des panneaux de cuivre... et on explique de quelle façon ce système a été mis au point et la façon de le faire fonctionner.

Tout ceci pour dire, M. le Président, qu'on devrait immédiatement, et ce ne sont pas des mesures excessivement coûteuses, avoir la clairvoyance d'aller voir immédiatement dans ces données, auxquelles il nous est possible d'avoir accès, pour aller chercher les informations dont a besoin, et qu'on pourrait mettre en application immédiatement.

Je pense, dans ce sens, M. le Président, que dans l'ensemble, la récente déclaration du président Carter a quand même mis à jour tout le problème énergétique, l'urgence de la question, aussi l'envergure de la question. Ce qui me faisait dire aussi, à l'ouverture de la commission parlementaire, que la crise de l'énergie, ce n'est pas un phénomène temporaire, mais c'est vraiment une réalité permanente avec laquelle on a maintenant à vivre. Mais, pour dire aussi ce qu'on doit souligner à ce moment-ci, c'est qu'on n'a peut-être pas à vivre non plus des dizaines d'années avec la crise énergétique sans devoir trouver certaines solutions rapides et à court terme. Il y a eu un temps pour la philosophie en matière énergétique, il y a maintenant un temps pour une action plus immédiate dans ce domaine, et à tous les niveaux où il nous sera possible de trouver des solutions logiques, pas nécessairement les plus coûteuses, mais peut-être des solutions qui pourront nous apporter des parcelles de réconfort, puis d'espérance de ce côté.

Je pense qu'à cet égard la déclaration du président américain devrait être pour nous, actuellement, un signal d'alarme dans la situation, pour nous faire réaliser que la crise énergétique est une réalité présente et qu'on ne passera pas au travers sans qu'on ait à prendre des décisions, et le plus tôt possible.

D'ailleurs, à ce sujet, cela m'a frappé de voir aussi, par exemple, que ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on en parle. Mais il faudra arrêter d'en parler avant longtemps...

M. Garneau: Des propos très pertinents.

M. Brochu: Oui, je conserve vos énergies, durant ce temps, M. le député de Jean-Talon. Je regardais, l'autre jour, ici, lorsque...

Le Président (M. Clair): J'aimerais vous souligner que, dans une minute, on pourra dire que vous dépassez d'au moins une minute la durée de vingt minutes consécutives, qui est normalement allouée à un député sur une question précise. Je voulais simplement vous souligner le fait. Je pense que vous vous apprêtiez à conclure.

M. Brochu: D'accord, M. le Président, je vais me soumettre à votre directive. Je veux mentionner simplement que le ministre a dit qu'il partageait le réalisme du président Carter. Je suis d'accord, mais je pense qu'il doit se sentir un peu mal à l'aise, quand même, avec le budget qui lui est accordé maintenant. D'un côté, on peut partager le réalisme d'une personne, mais, par contre, le ministre doit partager le réalisme de son budget qui est passablement mince actuellement. J'ai l'impression que le ministre a eu une belle plante en cadeau, mais que maintenant il n'a plus rien pour l'arroser. C'est un peu la situation dans laquelle le ministre se trouve actuellement. Cela peut être difficile, parce que les grands objectifs que le ministre a tracés sont difficilement attei-gnables, même à court terme, dans le délai à l'intérieur duquel on devrait manoeuvrer pour les atteindre.

J'ai l'impression que le ministère fait son petit bonhomme de chemin, pendant que la situation elle, évolue beaucoup plus rapidement. J'aurais espéré, dans ce sens, M. le Président, pour terminer, que la commission parlementaire qu'on a vécue il n'y a pas longtemps donne lieu peut-être à une prise de conscience plus grande de la situation comme telle et de l'urgence vraiment de passer à l'action. C'est sur cette réflexion que je laisse le ministre. J'aurai l'occasion d'y revenir et de faire d'autres suggestions. Mais je voulais, à ce stade-ci, apporter certaines recommandations à partir d'une réflexion générale sur la situation et souligner aussi, d'une façon plus particulière, que, si le président des Etats-Unis lui-même met, jusqu'à un certain point, sa tête à prix sur la question énergétique, après que d'autres présidents avant lui n'en ont que parlé, je pense que c'est quand même significatif de l'urgence réelle d'une situation.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

Réplique du ministre

M. Joron: M. le Président, si vous me le permettez, j'aimerais peut-être apporter quelques précisions à quelques-unes des questions qu'a

soulevées le député de Richmond, en commençant peut-être par lui rappeler qu'il est membre d'un parti qui s'est engagé à réduire les dépenses gouvernementales, non pas à les augmenter. Je conçois qu'il est plein d'enthousiasme pour le dossier de l'énergie, les questions énergétiques. J'espère, d'ailleurs, que cet enthousiasme et même cette fougue seront manifestes et présentes au moment où on sortira le livre blanc à l'automne, quand viendra le temps de pousser les mesures concrètes.

Ceci posé, j'aimerais peut-être glisser un mot sur l'ampleur des crédits. J'ai soumis, au départ, que c'était l'année du lancement de la préoccupation énergétique, au niveau du gouvernement du Québec. Evidemment, on ne veut pas brûler les étapes. Il aurait été prétentieux peut-être de demander des budgets faramineux avant d'être outillé en personnel, en objectifs, etc., pour dépenser ces sommes d'argent. On veut agir le plus rapidement possible, mais suivre les étapes normales, c'est-à-dire, d'abord, mesurer exactement où on s'en va avant de requérir des sommes plus considérables, ce qui viendra sûrement dans les années subséquentes. Cela ne me fait pas l'ombre d'un doute. D'autre part aussi, il ne faudrait pas relier le budget aux seuls crédits que nous avons à adopter aujourd'hui tout l'effort énergétique, si on peut l'appeler comme cela, qui se fait au Québec.

Si le budget de la direction générale de l'énergie est modeste, il ne faut pas oublier aussi que relève du ministre délégué à l'énergie, et la préoccupation énergétique du gouvernement, un ensemble de sociétés d'Etat, dont l'Hydro-Québec, dont SOQUIP, dont la Société de développement de la baie James, dont l'addition des budgets dépasse, pour cette année, probablement $3 milliards plus — je vais en glisser un mot tout à l'heure — des instituts de recherche qui ne paraissent pas au budget de la direction générale de l'énergie, mais qui consacrent des fonds à la recherche énergétique. Je pense à l'IREQ, l'Institut de recherche de l'Hydro-Québec, l'INRS, enfin, à plusieurs universités, à d'autres instituts, etc. L'effort énergétique consenti au Québec, si vous voulez, est de beaucoup supérieur à ce qui paraît devant nous aujourd'hui.

Un mot de plus sur les mesures immédiates que le député de Richmond nous invite à entreprendre dans le domaine de la conservation de l'énergie. Même si, comme je le disais tout à l'heure, on va structurer notre département ou le bureau de l'économie de l'énergie avant de se lancer dans l'action, il reste qu'on a déjà identifié et annoncé des sujets prioritaires comme, par exemple, les édifices publics et parapublics. A cet égard, on a déjà formé un comité interministériel, groupant des sous-ministres, visant à étudier l'action que le gouvernement, d'abord, par l'exemple, doit donner. Je vais être le premier, évidemment, à me soucier de l'économie de l'énergie, à définir ce qui peut être fait. Cela peut donner des suites, je crois, dans un mois ou deux, cela peut être beaucoup plus rapide qu'on pense. Encore une fois, cela ne paraît pas au livre des crédits, mais ce sont des mesures qui peuvent être prises très rapidement. Donc, ce qui relève du public et du parapublic.

Ensuite, dans le domaine des transports, il y a des mesures qui peuvent être prises par le ministre des Transports et qui pourraient avoir des effets sur l'économie d'énergie. Dans le domaine des résidences particulières, dans le domaine du comportement de l'industrie en général, un programme avec l'industrie pour les aider à identifier les pertes possibles d'énergie, les mesures à prendre, etc. Un programme qui n'est pas extrêmement coûteux, qui permet, dans certains cas — on le voit, il existe en Ontario depuis quelque temps — d'identifier très rapidement, par une visite relativement rapide, des pertes d'énergie et de suggérer au propriétaire de l'usine ou de l'entreprise les moyens de parer à cela, chose à quoi, d'ailleurs, les entrepreneurs sont évidemment très ouverts parce qu'il y va de leur intérêt financier immédiat de faire baisser leur facture énergétique.

Finalement, il y a le comportement des consommateurs. C'est peut-être plus aléatoire, dans un sens, cela va impliquer des campagnes d'information, de publicité et ainsi de suite, mais à cet égard, même si n'apparaît pas un budget d'information ou de publicité, si on veut l'appeler comme cela, comme tel très détaillé dans nos crédits à nous, il ne faut pas oublier non plus que l'Hydro-Québec a un budget d'information et de publicité considérable. Il est évident que leurs programmes s'ajusteront ou devront s'ajuster aux nôtres, dans ce sens-là. Cela n'apparaît pas, encore une fois, à nos crédits à nous, qu'on regarde ce soir, mais cela peut impliquer un effort considérable qui va être fait.

Quant aux suggestions qui ont été faites à la commission, à l'égard de l'économie de l'énergie, on en a eu également beaucoup d'autres qui nous ont été soumises depuis la commission parlementaire. C'est un feu roulant, ça n'arrête pas. A chaque semaine, il y a des gens qui viennent nous voir. Evidemment, on collige tout cela et cela ne restera pas lettre morte. Cela ne tombe pas dans l'oreille de sourds. On se tient également au courant de tout ce qui se passe dans les autres pays. J'ai personnellement rencontré l'ambassadeur de la Grande-Bretagne, l'ambassadeur de la Suède à qui j'ai demandé, à titre d'exemple — ce sont les plus récents dont je me rappelle — les programmes qu'il y avait dans ces pays.

La Suède, entre autres, qui est un des pays qui a fait parmi les premiers un effort de rationalisation de sa consommation énergétique des plus substantiels organise justement un colloque d'information au mois de mai pour montrer tout ce qui a été fait là-bas. De toutes ces choses évidemment, on est au courant et on se tient au courant.

Je voudrais brièvement répondre à quelques autres points qu'a soulevés le député de Richmond. En ce qui concerne l'entreposage, le députe de Richmond semblait en faire un cas très urgent et très important relié à la possibilité d'interruption des approvisionnements provenant du Moyen-Orient si jamais la situation politique là-bas

se développait d'une façon fâcheuse et nous privait. Il faut d'abord rappeler qu'il n'y a peut-être pas une capacité de stockage dit stratégique considérable au Québec, mais que l'inventaire normal, dans le cours des affaires des distributeurs de produits pétroliers, représente en moyenne environ 45 jours de consommation, un mois et demi. Cela peut aller jusqu'à deux mois dans certains cas. Donc, on ne serait pas, dans l'optique d'une interruption, pris les culottes baissées, si vous me passez l'expression, du jour au lendemain. Il y a presque deux mois de jeu.

D'autre part, nos sources actuelles d'approvisionnement, temporairement j'en conviens, pour quelques années encore, viennent partiellement, pour à peu près 40%, de l'Ouest canadien à l'heure actuelle. Les raffineries de Montréal seront reliées à l'oléoduc interprovincial qui a été prolongé récemment de Toronto jusqu'à Montréal. Pour le moment cela représente un petit peu moins que la moitié de l'approvisionnement des raffineries montréalaises, mais cela pourrait être augmenté par une allocation des ressources en cas de crise. C'est la raison première pour laquelle le gouvernement fédéral a insisté pour construire cette extension du pipe-line. Ainsi, en véritable période de pénurie, d'embargo, le danger de ne pas avoir d'huile à chauffage et de geler, théoriquement j'imagine que les exportations canadiennes vers les Etats-Unis seraient suspendues, parce que la sécurité pancanadienne exigerait que ce débit soit dirigé vers Montréal et le pipe-line a la capacité de fournir les raffineries de Montréal.

Donc, il y a une protection de ce côté-là. Finalement, il faut bien comprendre que cette partie des approvisionnements en pétrole brut qui arrivent à Montréal qui viennent d'outre-mer, si vous voulez, et qui ne sont pas de sources canadiennes ne viennent pas essentiellement du Moyen-Orient. Cela vient du Venezuela, cela vient du Golfe du Mexique, cela vient de Trinidad, cela vient du Nigeria, cela vient d'un peu partout. Alors, si la situation politique au Moyen-Orient aboutissait à une interruption des livraisons venant de cette source, il reste qu'il y a bien des sources alternatives dans le monde qui sont déjà des fournisseurs des raffineries de Montréal.

Alors, la marge de manoeuvre est quand même assez grande. C'est sous cette lumière qu'il faut évaluer le coût additionnel de créer du stockage stratégique. Je ne suis pas sûr vraiment que ce serait le meilleur investissement qu'on peut faire, parce que le danger d'interruption, et on pense évidemment à l'hiver, n'est finalement pas si grand que cela, parce qu'il y a des possibilités de replis de toutes sortes de côtés. Ceci dit vous avez quand même raison à plus long terme de nous inviter à diversifier nos sources d'approvisionnement.

Au Québec, l'approvisionnement en énergie dépend à 70% du pétrole. C'est un chiffre assez élevé quand on pense que c'est une ressource dont le prix va être probablement "astronomique" avant peu de temps, sans parler du fait qu'on ne sera peut-être plus assuré d'ici cinq, six ou sept ans, peut-être même pas plus, des approvisionne- ments comme tels. Alors cela est évident et a été répété en commission parlementaire. C'est en tenant compte de cette situation qu'on élabore notre politique énergétique.

Nous sommes à la recherche de sources alternatives qui incluent non seulement le développement de nos sources énergétiques autochtones, c'est-à-dire, l'électricité, mais qui comportent une diversification des sources pétrolières plus, aussi, probablement une participation plus grande dans notre bilan énergétique du gaz naturel dont les sources sont dans l'Ouest canadien, dans l'Arctique et également un peu partout à travers le monde. Cela peut venir sous forme liquifiée ou par méthanier.

Enfin, un dernier point peut-être; des recherches dans des sources alternatives. Je n'ai pas tout à fait compris. Vous disiez qu'il ne se dépense pas beaucoup d'argent au Canada, j'ai entendu le chiffre de $500 000, mais c'est beaucoup plus que cela. Au Québec même, c'est plusieurs millions. Il y a INRS, IREQ, Brace Institute. C'est $8 millions pour l'IREQ seul. Je ne vous dis pas que cela est suffisant. Quand on aura défini exactement ce qu'on l'on veut encourager et pousser on pourra donner le feu vert et donner le coup d'accélérateur. Il ne faut pas minimiser l'effort qui est déjà fait. D'ailleurs à cet égard on a formé un comité qui regroupe tous les centres de recherche, universitaire, para-universitaire, industriel ou autre qui font de la recherche dans le domaine énergétique. On a créé un comité pour regrouper ces gens de façon à faire un programme commun pour ne pas, sans que l'on sache, qu'il se fasse du dédoublement ou un petit bout de recherche dans un coin, et un bout dans l'autre et ainsi de suite, pour que tout le monde sache à quoi tout le monde travaille et que l'on partage les tâches de la façon la plus efficace possible en demandant à tous ces gens impliqués dans la recherche des sources alternatives de préparer à ce comité un programme de leurs projets pour les cinq années à venir de façon à être en mesure de bien évaluer tout ce qui est en train de se faire et ainsi pouvoir identifier ce qui ne se fait pas et, dans un deuxième temps, pouvoir y suppléer.

En gros, ce sont les dépenses et les précisions que je voulais apporter aux remarques du député de Richmond.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent, si vous acceptez de remplacer votre collègue M. Giasson de Montmagny-L'Islet, il me fera plaisir de vous accorder la parole.

M. Forget: J'accepte moyennant votre acceptation.

Le Président (M. Clair): Allez-y!

Commentaires de M. Claude Forget

M. Forget: J'écoutais tantôt le député de Richmond et en commençant, j'aimerais devant l'abondance et la prolixité de ses suggestions, suggérer au ministre qu'il voudra peut-être le

considérer comme un des candidats au concours qu'il vient d'annoncer comme sous-ministre délégué à l'énergie.

Je vais essayer d'être bref. J'ai essentiellement deux points sur lesquels j'aimerais faire un très court commentaire, mais surtout poser des questions qui nous aideront à comprendre j'espère, un peu mieux le sens du projet du ministre de créer un ministère de l'énergie. Mon premier point sera plus agréable et le deuxième, un peu moins. Je pense que c'est un bon équilibre.

Premièrement, relativement à cette décision que symbolise d'abord la nomination du ministre délégué à l'énergie et la création du ministère, je pense que l'on peut très spontanément et sincèrement féliciter le gouvernement et féliciter le ministre de l'intérêt visible qu'il accorde à ce dossier très important. Contrairement au propos que l'on vient d'entendre de la part du porte-parole de l'Union Nationale, je ne ferai pas grief au gouvernement d'avoir un budget modeste relativement à cette question, non seulement pour les raisons qu'il vient d'indiquer, mais parce que, essentiellement, on ne peut pas juger d'une politique de l'énergie, puis d'un ministère de l'énergie, par l'importance de son budget. Ce n'est pas, si je comprends bien, un ministère qui donne des services, mais un organisme qui doit aider à articuler une politique. Loin de croire que c'est trop peu, j'ai l'impression que, quand on parle d'une somme de près de $3 millions, si elle est bien dépensée, si le ministre a du succès dans le recrutement où il est engagé, j'ai connu cette expérience de recrutement et je sais que c'est là le plus grand défi qu'il a à relever, alors il aura largement assez de $3 millions pour élaborer une politique de l'énergie.

S'il en avait trois fois plus, les chances de confusion et les difficultés de coordination seraient probablement plus considérables que les bienfaits additionnels qu'il pourrait en tirer.

D'ailleurs, c'est un peu le sens de la remarque que je veux faire, tout en applaudissant au désir du gouvernement d'accorder une importance marquée au dossier de l'énergie.

Je ne peux pas m'empêcher, ayant un peu connu l'administration publique, de toutes sortes de façons d'ailleurs, pendant quelques années, de constater que l'on a parfois cette tentation dans l'administration publique de faire un peu de l'administration ou de changer les structures par un certain engouement.

On ne compte plus les modifications structurelles au gouvernement du Québec. Pourtant, cela ne fait pas des siècles qu'il y a une fonction publique bien organisée.

Ce qui est un peu inquiétant, c'est que, évidemment, il faut s'attendre dans l'avenir qu'un dossier particulier prenne tout à coup de l'importance et qu'on veuille, symboliquement, mais aussi réellement lui accorder plus d'importance. A ce moment, on fait tout un chambardement et on crée des structures. Il y a, dans ce jeu de chaise musicale, des gens qui ont fait carrière au sein de la fonction publique qui se retrouvent parfois sans fauteuil et que les règles de la fonction publique obligent d'une certaine façon à caser ailleurs.

Je pense que c'est là un problème très sérieux, c'est un problème avec lequel on va continuer à vivre. Les gouvernements vont se succéder les uns aux autres et on va continuer à vivre avec cela.

Encore une fois, en approuvant totalement le gouvernement parce que ce sont les seules façons d'agir dont on dispose à l'heure actuelle, peut-être par défaut d'imagination — personne n'a jamais suggéré une autre façon de le faire — je dis qu'on impose une espèce de fardeau à l'administration publique en faisant cela de cette façon ce qui, à long terme, est fort coûteux, mais, enfin, je n'ai pas de cure miracle. Je remarque que cela se fait cette fois; cela va se refaire dans l'avenir.

Pour nous aider à comprendre les crédits qui nous sont soumis et dans l'optique de la création d'un ministère de l'énergie, je vais poser quelques questions. Le ministre pourra y répondre tout de suite, s'il le veut, ou il pourra les accumuler. Ce sont des questions qui sont assez factuelles. Nous avons deux programmes, 7 et 8. J'ai l'impression — c'est la première question — quand on regarde ces deux programmes, qu'il y a dans le futur ministère d'autres éléments qui vont venir s'ajouter, parce qu'il y a un programme que nous n'étudierons pas ici, tout de suite du moins, qui s'appelle gestion interne et soutien.

Il y a donc une partie, j'imagine, de l'administration, dans le sens étroit du mot, du ministère des Richesses naturelles qui va être détachée et qui va venir grossir le budget de l'éventuel ministère.

Ou, alors, est-ce que le ministre a l'intention, lors de la présentation d'une loi créant le ministère, de dire: Les dépenses nécessaires pour la mise en application de la présente loi sont prises dans les crédits, dans le fonds consolidé? Ce qui veut dire: Est-ce qu'il y aura des dépenses autres que celles qu'on examine dans le moment? Cela, c'est la première question.

M. Joron: Voulez-vous que j'y réponde tout de suite?

M. Forget: Bien oui.

M. Joron: II est déjà détaché du ministère des Richesses naturelles. Ce qui n'est peut-être pas détaché et qui s'ajouterait si la Direction générale de l'énergie devenait un ministère, c'est par exemple, le support financier, quelque chose comme le directeur du personnel, le directeur des communications ou des choses comme cela. Il y a du support technique qui viendrait s'ajouter.

M. Forget: Et qui apparaît au programme 3, dans le moment, comme budget?

M. Joron: Pas complètement.

M. Forget: Je remarque quelque chose de curieux; entre 1976/77 et 1977/78, vous avez, dans ce programme, une diminution de coûts et cela, ça ne se voit pas dans une période d'inflation, ne serait-ce que par l'augmentation des salaires. Alors, vous avez opéré une ponction sur le programme 3, si je comprends bien, pour accroître le programme 7. Est-ce cela que vous me dites?

M. Joron: Le programme 3 des Richesses naturelles?

M. Forget: Oui.

M. Joron: Ah bon! attendez un peu.

M. Forget: C'est parce que je présumais que, dans gestion interne et soutien, les comptables et les gens du personnel, etc., seraient détachés et viendraient s'ajouter au programme 7 et 8 pour faire le budget du ministère de l'énergie.

M. Joron: Si vous le permettez, je peux peut-être demander au sous-ministre, M. Tremblay, de vous expliquer le détail de ce point.

Oui, en fait, l'augmentation que vous voyez de 1976 à 1977, qui est de $822 000 à $1,6 million, essentiellement, ce sont les salaires prévus des sept cadres dont les concours ont été annoncés dans les journaux récemment.

M. Forget: Ah bon! Ces concours sont couverts par cela.

M. Joron: La fraction des traitements pour 25%, 10% ou 50% du personnel, fonctions financières, fonctions de contrôle, etc. qui sont aux Richesses naturelles n'apparaissent pas ici. Elles apparaissent dans le budget de gestion interne des Richesses naturelles.

M. Forget: Je vois... qui pourtant lui-même affiche une diminution cette année par rapport à l'année dernière. Alors, je me demandais si c'était parce que vous aviez enlevé le quart qui appartiendra à l'énergie.

M. Joron: Non.

M. Forget: II est encore là, malgré tout.

M. Joron: II y a d'autres raisons.

M. Forget: II y a ce point. J'aimerais aussi, puisque le ministre y a fait allusion, qu'il nous donne peut-être l'énumération des autres provinces. Il dit que les autres provinces se sont déjà dotées de ministères de l'Energie. J'imagine que l'Alberta, depuis longtemps, pour des raisons évidentes, s'est équipée de cela. Peut-être l'Ontario aussi. Est-ce qu'il peut, de mémoire, mentionner d'autres provinces?

M. Joron: L'Alberta évidemment et l'Ontario sont les deux provinces avec lesquelles on a peut-être eu le plus de discussions. D'autres pro- vinces cumulent les richesses naturelles, l'électricité et l'énergie. L'énergie seule, comme telle, il n'y a, si ma mémoire est fidèle, que l'Alberta et l'Ontario.

M. Forget: Je vois.

M. Joron: Même pas l'Alberta, les ressources minières également sont combinées avec l'énergie...

M. Forget: On n'est pas si en retard que cela.

M. Joron: Dans ce sens, oui et non. En retard? C'est relatif. En retard d'un an ou de 18 mois, dans certains cas. L'Ontario a des programmes de conservation de l'énergie qui sont déjà en marche depuis presque deux ans. Nous serons en retard de deux ans.

M. Forget: Alors, pour ce qui est donc de la création du ministère, en général j'y souscris sans peine et, encore une fois, je crois que cela illustre un problème général de l'administration publique. J'encourage le ministre à maintenir un profil bas sur le plan des dépenses, parce que je pense qu'un ministère d'études et d'analyses, c'est peut-être la dernière chose qu'on peut mentionner et qui reflète assez bien le caractère de ce futur ministère. Actuellement, le titre du programme c'est "Etudes et recherches concernant les hydrocarbures et l'électricité".

Dans l'esprit du ministre, ces deux expressions vont le mieux caractériser les objectifs du ministère, en ce sens qu'il n'y a pas d'opération à gérer, il y a essentiellement de l'étude et de la recherche.

M. Joron: C'est peut-être incomplet. Disons que c'est la catégorie ou le langage classique. Evidemment, si on pense aux sources d'énergie dites nouvelles, ou ainsi de suite, cela devrait normalement couvrir cela. L'expression est peut-être inadéquate, elle pourrait être plus large, effectivement.

M. Forget: Pour aller un peu plus loin, est-ce que vous envisagez, par exemple, de disposer d'un fonds pour la recherche commanditée? Parce qu'on pourrait imaginer qu'en plus d'un certain nombre d'analystes qui suivent la situation dans le domaine des hydrocarbures et de l'électricité, vous y voyiez des secteurs comme, par exemple, toute la question de l'isolation thermique, que vous disiez: II faut vraiment mettre $20 millions dans un programme de recherche intensif. Ou alors, ce serait mon autre question, il y a une autre possibilité, c'est qu'à vos crédits émargent également des subventions. On pourrait dire, par exemple, qu'on va offrir $500 à tout propriétaire de maison qui décide d'isoler alors qu'elle ne l'est pas. Ce sont des choses possibles, qui sont vraisemblables.

M. Joron: ...qui sont possibles mais qui ne sont pas déterminées, à l'heure actuelle. Ce n'est

pas clair dans mon esprit, si la gestion des fonds en question doit nécessairement appartenir au ministère de l'énergie ou si un autre organisme ou un autre ministère ne pourrait pas être chargé de l'application.

M. Forget: Comme les Affaires municipales, ou quelque chose comme cela.

M. Joron: Je pense qu'en gros on peut dire que l'éventuel ministère de l'énergie restera probablement toujours un ministère très léger qui fera évidemment des recherches, des études, de la planification d'où sortiront des programmes, des suggestions, des directives et des propositions mais dont l'application dans les faits et les budgets qui y sont attachés pourront fort bien apparaître dans beaucoup d'autres organismes, mais pas nécessairement chez nous.

M. Forget: Cela est très clair. Ma deuxième remarque est un peu moins agréable, peut-être, à formuler, et peut-être surtout à écouter; elle a trait à la question du livre blanc.

J'ai participé avec plusieurs de nos collègues à cette commission. Il est évident que cela a suscité, de tous ceux qui ont participé à la commission, beaucoup de réflexions fort utiles et fort productives. Par ailleurs, comme le député de Richmond le disait tout à l'heure, l'annonce qu'a faite cette semaine le président des Etats-Unis nous permet de souligner un fait qui, je pense, est assez important pour qu'on insiste. Je le fais, parce qu'autrement mes remarques pourraient avoir l'air injuste. Mon objectif, en abordant ce sujet, est de souligner que la date de publication prévue par le ministre pour le livre blanc me semble très tardive. C'est pour cela que je dis que cela pourrait avoir l'air d'une critique injuste puisque je comprends très bien qu'on pourrait me dire, d'un autre côté: Nous ne faisons qu'arriver au gouvernement avec un dossier à monter et une expertise et un ministère à installer.

Dans le fond, l'exemple américain est intéressant à ce point de vue. Le président américain a pris le pouvoir le 20 janvier, et non pas le 26 novembre; vous aviez deux mois d'avance sur lui. Il n'a pas fait campagne là-dessus, que je sache, il n'avait pas dans son programme explicitement — d'ailleurs, je pense que cela aurait peut-être pu faire peur aux gens de le dire d'avance — une politique de l'énergie très fracassante. Il n'en a pas parlé. Cependant, deux mois après il a déjà toute une série de mesures qu'il annonce, et, évidemment, qu'il a dû élaborer depuis, au plus tôt, le mois de décembre.

Vous êtes déjà là, malgré tout, depuis un certain temps avec, depuis deux ans dans le programme de votre parti, un engagement de faire des recherches à l'intérieur du parti avant même de venir au gouvernement et de prendre position sur ce problème. Je pense que le ministre a déjà, d'ailleurs, gagné ses épaulettes sur un plan plus personnel relativement à cette question. Deux mois après qu'a siégé la commission parlementaire sur l'énergie, on nous promet le livre blanc à un mo- ment ou l'autre de l'automne; je comprends qu'on ne peut pas préciser de semaine à ce moment-ci. Il ne semble pas y avoir, entre l'importance que le gouvernement attache visiblement, par tout ce qu'il a fait, au problème et le calendrier qu'il s'est donné, une bonne correspondance. Surtout quand on compare à l'exemple américain où la prise de pouvoir, etc., est encore plus serrée au point de vue du programme.

Est-ce que c'est une indication qu'on va avoir vraiment des difficultés à formuler cette politique et après à l'appliquer? Je pense qu'effectivement il y a et je le dis un peu avec le sourire, des choses que le ministre, il va s'en rendre compte, peut faire peut-être plus facilement cette année que dans les années à venir. C'est une occasion qu'il ne devrait pas manquer dans l'intérêt même de la population, puisque tout le monde est humain dans ces choses. Il reste que, si des gestes énergétiques doivent être posés, je suis sûr qu'il trouvera plus facile de le faire cette année que s'il attend plus tard, en étant tout à fait franc avec lui.

Ceci étant dit, il y a également des choses que le ministre a dites qui me préoccupent un peu. Par exemple, je retrouve un peu trop souvent à mon goût la notion ou le mot "gaspillage". Je comprends que c'est un mot qui fait image, mais cela peut nous lancer sur une fausse piste. Dans une question si peu émotive que l'utilisation de l'énergie, les gens ne font pas cela pour s'amuser ou par sport, c'est une décision qu'ils prennent tous les jours en fonction de l'environnement dans lequel ils se trouvent. Le gaspillage, cela n'existe pas. C'est une notion moralisatrice, qui n'a pas de signification. On gaspille, si on veut employer ce mot à tout prix, tout ce qui n'est pas cher dans la vie, y compris l'eau, et on économise les choses qui sont chères. C'est seulement en se plaçant dans un autre contexte, complètement pas réel, en dehors d'une situation donnée, qu'on peut dire: Dans un autre monde, ce genre de comportement s'appellerait du gaspillage.

Mais ce à quoi je veux en arriver, et la fausse piste contre laquelle je veux peut-être mettre le ministre en garde, c'est que s'il prend cette tangente du gaspillage, il sera amené dans son livre blanc à faire des recommandations qui sont basées sur une prise de conscience par le public des problèmes de l'énergie par les efforts d'information, publicité, etc., en somme, à culpabiliser le public pour un comportement qui est tout à fait normal, étant donné l'engagement qu'on lui a donné à ce public. La véritable responsabilité du gouvernement, et là où cela va être évidemment difficile — je sympathise évidemment avec ceux qui ont ces responsabilités — cela va être de changer l'environnement, ne pas changer la perception que les gens en ont, mais changer véritablement l'environnement dans lequel ils prennent des décisions.

J'aimerais aussi, cela n'est pas un souci que j'ai, si le ministre le juge opportun, qu'il nous dise si dans la réflexion qu'il a faite jusqu'à maintenant, il a conclu à l'opportunité que le livre blanc, que la politique gouvernementale touche à deux sujets — dans le fond c'est un seul et même su-

jet — auxquels mon collègue a fait indirectement allusion. D'une part, on a parlé d'autofinancement, l'autofinancement des projets d'investissements dans le domaine énergétique. Est-ce que le livre blanc comportera un objectif relativement à l'autofinancement? Dans le moment, il s'agit d'un résultat émanant d'autres décisions, mais ce n'est pas nécessaire qu'il en soit ainsi vis-à-vis des industries d'Etat ou des sociétés d'Etat. Plusieurs gouvernements à travers le monde ont des objectifs d'autofinancement pour les industries dont ils sont les seuls actionnaires.

Deuxièmement, et toujours relativement à l'Hydro-Québec, puisque c'est ce que cela touche, cela touche aussi SOQUEM, mais c'est un autre domaine, le ministre a dit — cela nous ramène peut-être un peu à la conscientisation puis les efforts de publicité — qu'il y a des budgets de publicité à l'Hydro-Québec, il y a des budgets d'information à l'Hydro-Québec. Il n'est pas exclu — je crois que le ministre a dit qu'il était spécifiquement prévisible — que ces budgets d'information pourraient servir à la mise en oeuvre d'une politique énergétique. Là aussi, j'aimerais bien que le livre blanc nous dise si, dans l'intention du gouvernement, il y aura une modification à la charte de l'Hydro-Québec, parce que sur un plan strictement légal, et ceci va devenir de plus en plus important, on n'a pas de tradition très forte au Québec de respecter l'esprit des lois qui s'appliquent à l'intérieur du secteur public. On y va assez largement, on n'a pas un esprit juridique comme nos cousins français où il faut un texte pour justifier le moindre geste, mais malgré tout, les textes, on doit les respecter.

Actuellement, dans la charte de l'Hydro-Québec, il y a une seule responsabilité, c'est de produire autant d'électricité que les gens en demandent, à moins que le gouvernement veuille changer cela, il n'y aura pas beaucoup d'espoir d'avoir une influence sur l'Hydro-Québec, parce que dans le fond, c'est clair, sa responsabilité, une fois qu'il s'en acquitte, il n'y a plus personne qui a le droit de faire une seule critique sur l'Hydro-Québec. C'est tout à fait légitime, d'ailleurs, à ce point de vue. Je crois que comme c'est nécessaire, comme c'est souhaitable, on respecte parfaitement l'Hydro-Québec, son autonomie, etc. Cela ne veut pas dire qu'on ne change pas son mandat. L'Etat est tout à fait justifié de le faire. S'il change son mandat, il va falloir faire bien attention de préciser si l'Hydro doit aussi, non seulement produire l'électricité, mais produire de l'information. L'Hydro-Québec n'a pas été produite, conçue comme un instrument d'information. Je n'emploie pas les mots qu'on pourrait employer de façon démagogique: un instrument de propagande. Dans mon intention, il ne s'agit pas du tout de cela. Mais s'il y a une information qui doit se faire, il faudra se poser la question, à savoir si ce n'est pas au gouvernement qu'il revient de la faire plutôt qu'à un organisme délégué.

M. le Président, je conclus là-dessus, ce sont des inquiétudes, je ne sais pas si le ministre veut réagir, mais de ce côté, du côté du livre blanc, contrairement à la question de la création du mi- nistère, je suis un peu déçu de l'échéancier et je me pose un certain nombre de questions sur son contenu éventuel.

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

Réplique du ministre

M. Joron: Je veux bien tenter de répondre aux principales questions qu'a soulevées le député de Saint-Laurent. D'abord, je ne voudrais pas être méchant, moi non plus, mais je voudrais dire ceci: Si le président Carter a pu publier ou annoncer plus rapidement que le nouveau gouvernement du Québec sa politique énergétique, il faut bien comprendre qu'il y avait en place, à Washington, sous l'ancien gouvernement, l'ERDA, toute une équipe d'experts et de techniciens qui avaient préparé des programmes et des alternatives que devait sans doute également considérer le président Ford avant lui. Je vous avouerai qu'on n'a pas trouvé, en arrivant au pouvoir au mois de novembre, beaucoup de matériel accumulé à ce sujet. Je ne veux pas jeter le blâme sur le travail qui a été fait avant, mais il faut quand même se rendre compte que, si le président Carter a pu agir plus rapidement, peut-être est-ce parce qu'il y avait eu du travail préalable de fait, travail qui n'était pas aussi extensif au Québec.

Il faut bien dire que la situation, dans un sens, est peut-être plus pressante aux Etats-Unis. Il était peut-être opportun, politiquement, pour le président américain d'annoncer son programme à ce moment-ci, alors que l'opinion publique a été conditionnée, au cours de l'hiver, à des pénuries énergétiques qui ont été très cruelles dans certains endroits des Etats-Unis, ce qui a possiblement accéléré sa décision de rendre public son programme à ce moment-ci, plutôt qu'à un moment qui serait peut-être venu plus tard.

D'autre part, il faut bien considérer aussi que les moyens d'action qu'a le gouvernement américain sur la situation énergétique domestique des Etats-Unis n'ont pas grand-chose à voir avec les moyens d'action que le Québec a, pour la raison suivante: le gouvernement de Washington contrôle, dirige ou influence la production de multiples formes d'énergie. Il n'y a pas seulement l'électricité, ce sont des producteurs de gaz naturel, ce sont des producteurs de pétrole. C'est le gouvernement de Washington qui contrôle les exportations et les importations de pétrole et tout cela. Ils ont tout ce champ d'action, alors que le champ d'action énergétique du Québec est limité, finalement, à l'électricité. Si on produisait du pétrole ici ou du gaz naturel, d'abord, probablement qu'on aurait développé plus d'expertise énergétique qu'on ne l'a fait jusqu'à présent.

Il faut bien se rendre compte que, dans le cadre constitutionnel actuel, la question des exportations et des importations ne relève pas de la juridiction du gouvernement du Québec, ce n'est pas un domaine sur lequel on peut agir. Qu'est-ce qui reste à part les mesures incitatrices, d'information ou, enfin, tout ce qui peut avoir trait à des programmes d'économie de l'énergie? Mais, en ce

qui concerne les décisions liées à la production de l'énergie comme telle, il n'y a finalement que l'électricité. A cet égard, les décisions déjà prises sont en marche, sont en voie d'accomplissement, en voie de déroulement et on ne peut que dans une marge très restreinte modifier le programme d'équipement de l'Hydro-Québec pour les sept ou huit prochaines années. C'est déjà en marche.

Egalement, le gouvernement américain a des moyens d'action qu'on n'a pas. S'il décide d'agir, par exemple, sur l'industrie automobile pour imposer des normes aux manufacturiers d'automobiles et leur dire, par exemple: Vos véhicules, d'ici X temps, devront rencontrer telles normes au point de vue du millage par gallon, ainsi de suite, il peut le faire, alors que nous n'avons aucun contrôle sur les manufacturiers d'automobiles. Il n'y en a pas au Québec. Il y en a un, mais c'est plus de l'assemblage que de la fabrication complète de véhicules.

D'ailleurs cela ne compte que pour une partie relativement petite de notre marché. Alors ce sont tous des instruments qui nous échappent, mais je pense qu'on n'a pas besoin d'attendre — je l'ai déjà indiqué — le livre blanc, à l'automne, pour commencer à agir tout de suite dans le domaine de l'économie de l'énergie, et j'ai indiqué qu'il y a des choses déjà en marche. D'accord, je ne suis pas en mesure de vous les annoncer, mais cela va être relativement bientôt, le directeur du bureau de l'économie de l'énergie, ainsi de suite, le personnel qui sera recruté tout cela. Même si le directeur comme tel n'a pas été nommé, il y a du travail préalable qui a été fait, des priorités qui ont été désignées et que je vous ai soulignées tout à l'heure. Il y a un comité interministériel qui travaille à une de ces priorités, ainsi de suite.

Il y a des choses qui se font. On n'attendra pas le livre blanc à l'automne. Au fur et à mesure qu'on aura des éléments de programme à rendre publics ou à mettre en marche, on n'est pas lié à la date du livre blanc pour cela. D'ailleurs, il n'y a pas de contradiction là-dedans. On l'a vu à la commission parlementaire. Evidemment, tout le monde nous a recommandé de pratiquer l'économie de l'énergie et d'y mettre des programmes en marche à cet égard. Tout le monde, en somme, venait faire son acte de foi. Ils sont tous en faveur de la vertu et de la maternité. On n'a pas besoin de politique énergétique globale pour savoir que s'il y a moyen d'économiser on va les prendre, ces moyens. Alors, il n'est pas exact de dire que rien ne se passera tant que le livre blanc, à l'automne, ne sera pas publié. Il y a des choses qui vont se passer avant.

Ceci dit, parlant d'économie d'énergie, cela m'amène à un autre point que le député de Saint-Laurent soulevait, lorsqu'il m'invitait à éviter l'expression de gaspillage. Je suis peut-être d'accord avec lui, je ne me chicanerai pas là-dessus, le terme n'est peut-être pas opportun. On devrait peut-être plutôt parler de mauvaise utilisation de nos ressources énergétiques, en fait, d'utilisation inefficace de l'énergie plutôt que du gaspillage comme tel. C'est bien sûr que je ne veux pas, en employant ce terme, adresser un blâme aux consommateurs en général. Je sais bien que le comportement des consommateurs est conditionné par une foule de choses, mais ce n'est pas par un choix comme tel de gaspillage qu'ils ont le comportement qu'ils ont.

C'est tout un cadre, c'est toute une ambiance culturelle dans laquelle toute l'Amérique, d'ailleurs, baigne depuis des années qui a conduit à cela. Souvent, ce que j'ai appelé le gaspillage, ce qu'il serait peut-être préférable d'appeler la mauvaise utilisation, vient tout simplement de la mésinformation. Il y a des moyens de soutirer la même quantité d'énergie c'est-à-dire d'avoir le même résultat avec une quantité moindre d'énergie.

Alors il va falloir prendre les moyens, évidemment, pour indiquer aux consommateurs de tous ordres, industriels, résidentiels, etc., quels sont ces moyens et comment s'en servir. Vous disiez qu'employer la notion de gaspillage avait un petit côté moralisateur. Et même si je viens de vous dire que l'expression était peut-être inappropriée, quand même je ne recule pas complètement devant la tentation d'être un petit peu moralisateur aussi.

Je pense bien qu'il faut amener les gens à être conscients que pas seulement dans le domaine de l'énergie, j'étends la notion à un peu tout le comportement de notre système de consommation. Nous sommes gaspilleurs à bien des égards. On ne s'en rend pas compte, mais je ne le sais pas, quand on va à l'épicerie, au magasin, on met un petit objet, enveloppé dans du carton, dans un petit sac de papier qu'on remet dans un plus grand sac de papier qu'on met dans un double sac pour ne pas que cela défonce, puis on met tout cela dans une boîte de carton. C'est du gaspillage, cela. Il n'y a pas de doute là-dessus. On ne s'en rend peut-être pas compte, mais il suffit de le dire pour se dire: Ma foi, c'est vrai, cela n'a pas de bon sens de gaspiller! Ce sont des arbres qu'on gaspille avec des comportements semblables.

J'emploie cet exemple, on peut les multiplier vous savez par combien de fois.

On a juste à regarder ce qu'on fait dans une maison dans une journée, à l'intérieur des murs d'une maison. Cela n'a pas de sens à quelle fréquence on utilise l'eau à tout propos. On la laisse couler pour rien. La façon dont on se sert de Kleenex, par exemple, à tout propos, on les jette.

Ce n'est pas seulement nous, mais toute l'Amérique. Le comportement des Européens est quand même différent à cet égard parce qu'ils n'ont pas eu l'abondance de ressources que nous avons eue. Ils ont eu des périodes de privation que nous n'avons pas connues. Les Nords-Américains ont toujours tenu pour acquis que les ressources étaient très abondantes, inépuisables. Finalement, cela nous conduisait presque à une absurdité; plus on gaspillait, plus on encourageait la production d'objets ou de biens qui allaient les remplacer. Ainsi on générait de l'activité économique.

C'est créer une illusion de croissance économique qui, à mon avis, est bien dangereuse. Je dis cela et je ne voudrais pas que l'on ouvre un autre débat, mais je pense qu'il ne faut pas se gêner aussi pour...

M. Garneau: ... mouchoir.

M. Joron: II y a toutes ces questions. A bien d'autres égards, nous — et quand je dis nous ce n'est pas particulièrement les Québécois, et je ne pense pas seulement au secteur énergétique — l'Amérique du Nord gaspille beaucoup.

M. Forget: Si on me permet de faire remarquer au ministre qu'il y a un autre exemple exactement dans le même esprit mais qui fait ressortir le caractère subjectif de cette évaluation. Depuis qu'on a inventé l'imprimerie on lit beaucoup plus aussi.

M. Joron: En fin de compte depuis qu'on a inventé le Kleenex on se mouche plus.

M. Forget: C'est un gaspillage aussi. Dans ce sens, quand les ressources sont disponibles on les utilise. C'est tout ce que cela veut dire.

M. Joron: Peut-être et finalement, quand elles ne le sont plus, on se rajuste. C'est ce que l'on connaîtra dans les années à venir.

M. Forget: L'homme est adaptable.

M. Joron: Enfin, pour en venir plus précisément aux questions que vous avez soulevées, je vais vous répondre brièvement à deux derniers points au sujet de l'Hydro-Québec. Vous demandiez si la question du pourcentage d'autofinancement de l'Hydro-Québec sera déterminée dans le livre blanc. Indirectement je dirais oui, dans ce sens que le livre blanc se penchera sur la question de tarification et remettra probablement en cause les principes de base qui ont présidé à l'établissement de la tarification et qui n'ont pas été modifiés depuis plusieurs décennies. Un des principes est de rendre le coût de l'énergie meilleur marché plus on en consomme, mais il y a des structures de tarification dans des pays qui ont connu avant nous la pénurie possible d'énergie et qui ont inversé le principe. Alors, ce sont ces questions que nous débattons actuellement. Notre lit n'est pas fait, loin de là, à ce sujet. Il y aura quelque chose à ce sujet dans le livre blanc, et cela peut avoir une incidence sur la question de l'autofinancement de l'Hydro-Québec.

Par contre, je dois dire aussi que nous avons déjà indiqué — le premier ministre lui-même l'a fait à quelques reprises, je pense que le ministre des Finances l'a fait aussi, je l'ai indiqué aussi — que nous ne pensions pas remettre en cause les principes généraux qui ont guidé la conduite financière de l'Hydro-Québec. Je parle des grands principes, par exemple, le taux de couverture des intérêts, la nécessité de maintenir un pourcentage d'autofinancement, etc. Ces principes vont conti- nuer d'être la base à partir de laquelle nous envisagions la gestion financière de l'Hydro-Québec.

A cet égard il n'y a pas de modification spectaculaire avec les critères qui ont présidé dans le passé. Finalement, et cela est un point très important, je peux vous répondre tout de suite là-dessus, vous souleviez la question des relations entre le gouvernement et l'Hydro-Québec. Vous évoquiez le mandat de I'Hydro et vous demandiez s'il allait y avoir modification à ce mandat.

Je pourrais vous répondre certainement qu'il y aura modification au mandat de l'Hydro. Elle n'attendra pas nécessairement le livre blanc, bien que même si cela retardait à l'automne, cela ne changerait pas grand-chose dans les faits, puisque c'est à la fin de l'année, quand on pense au cycle budgétaire, que cela pourrait avoir un effet sur le programme d'immobilisation de l'année à venir.

Cela pourrait attendre à l'automne, mais on l'a indiqué tout de suite que, effectivement, le mandat serait modifié et, dans le sens suivant. Vous l'avez très bien décrit, l'Hydro, dans son mandat actuel, en fait, effectivement établit la politique énergétique elle-même du Québec, en ce sens, comme son mandat lui commande de satisfaire à la demande et forcément de prévoir celle-là de construire les installations nécessaires pour la combler, ceci équivaut à laisser un blanc-seing à l'Hydro-Québec. Cela lui permet d'établir elle-même le quantum des installations, ou enfin, la quantité de nouvelles sources de production à l'avenir.

Le gouvernement, dans le cadre de ce mandat, se contentant annuellement d'approuver le budget d'immobilisation, ce qui devient un contrôle fort théorique, parce que si, d'une part, le mandat de par la loi commande à l'Hydro de satisfaire à la demande et qu'elle nous dit: pour remplir notre mandat il nous faut tel programme d'immobilisation, comment voulez-vous refuser alors? Cela devient plus ou moins du "rubber stamping". Il est clair que maintenant, dorénavant, le programme d'investissement de l'Hydro-Québec sera établi par le gouvernement, en ce sens que cela devient une responsabilité de la direction générale de l'énergie ou éventuellement du ministère de l'énergie, en se servant bien entendu de l'expertise de l'Hydro-Québec, mais d'évaluer ce qui est la demande et finalement de fixer ce que sera l'offre.

Le mandat de l'Hydro deviendra celui de remplir le programme d'investissement qui découle de cette évaluation, de ce choix qu'aura fait le ministère de l'énergie. C'est à cet égard, substantiellement différent, pour ne pas dire radicalement, de la situation actuelle .

Le Président (M. Clair): M. le député de Pontiac-Témiscamingue avait demandé la parole avant M. le député de Jean-Talon.

M. Larivière: M. le Président, on sait qu'il reste encore beaucoup de ressources hydrauliques à développer au Québec. C'est dans ce domaine où l'Hydro-Québec est experte et on sait aussi que c'est une des énergies la plus économique à long terme.

Je pense à une de ces ressources qui est le

lac Kipawa où l'Hydro-Québec a fait des études depuis une dizaine d'années et où tous les terrains sont gelés sur le bord de ce lac par le ministère des Terres et Forêts depuis longtemps.

Je me demande ce qu'attend l'Hydro-Québec pour développer ces ressources qui restent au Québec. Vous allez peut-être me dire que c'est un problème financier, mais je pense que possiblement le gouvernement pourrait donner à l'entreprise privée de développer ces ressources quitte à être contrôlée par l'Hydro-Québec.

M. Joron: Je vous avoue que, la question du lac Kipawa, vous êtes le premier à me la soulever, je n'ai pas de réponse immédiate à vous donner, je pense...

M. Larivière: ...mais il y en a d'autres... M. Joron: ...peut-être à un autre moment...

M. Larivière: Je pense qu'ils nous ont dit qu'il y avait 27% encore des ressources à développer au Québec.

M. Joron: II reste que, sur cette question, je peux vous répondre. A l'heure actuelle, la capacité de production de l'Hydro-Québec, la puissance disponible, est de 10 000 mégawatts plus 5000 qui sont sous contrat de Churchill Falls pour une longue période, ce qui fait qu'au moment où on se parle on dispose de 15 000 mégawatts.

Au moment où la baie James sera terminée, en 1985, plus Gentilly 2, plus Outardes 2 ou 3, je ne me souviens plus, et quelques autres projets semblables, le total ne sera pas loin de 30 000 mégawatts, 28, 29, environ, pas loin de 30 000.

Donc déjà dans huit ans, nous aurons deux fois la puissance disponible que nous avons aujourd'hui.

On passe donc de 15 000 à 30 000 mégawatts. Qu'est-ce qu'il reste, par la suite, de potentiel hydraulique aménageable? L'Hydro-Québec l'estime, en ce moment, entre 15 000 et 25 000 mégawatts, prétendant que ce qui est économiquement aménageable là-dedans est probablement quelque part entre les deux, disons 20 000 mégawatts. Economiquement aménageable, il faut bien comprendre que c'est tel que vu aujourd'hui, en comparant le prix des formes alternatives d'énergie. Cela paraît économiquement aménageable aujourd'hui parce que, par exemple, le prix du pétrole est à tel niveau et que telle autre chose coûte tel autre prix.

Evidemment, si le prix des autres formes d'énergie montaient considérablement dans l'avenir, il se peut que des sources hydrauliques qui ne paraissent pas économiquement aménageables aujourd'hui le deviennent. En d'autres mots, il est possible en théorie qu'on passe de 15 000 mégawatts aujourd'hui à 30 000 approximativement en 1985. Avant la fin du siècle, on pourrait se rendre à 60 000, peut-être, en tout cas, quelque part entre 50 000 et 60 000, ce serait déjà quatre fois ce qui est disponible aujourd'hui. Donc, il y a une grande marge de manoeuvre. Il y a peu de pays au monde qui disposent d'une marge de manoeuvre aussi grande que cela, c'est indiscutable. Non seulement il y en a peu, mais il n'y en a pas.

Au-delà de cela, il y a des projets de plus petite envergure qui n'entrent pas dans ces chiffres et qui ne paraissent pas économiquement aménageables parce qu'ils sont trop petits: des petites rivières, des petits sites, etc. Il n'y a rien qui dit qu'en 1990, en 1995 et peut-être même avant, cela ne pourrait pas être économique d'aménager de plus petits sites.

Je suis optimiste à cet égard. J'ai l'impression qu'on a pas mal de marge de manoeuvre. Dans un sens, si on pense que les Arabes aujourd'hui ou les Albertains, au Canada, nos blue-eyed Arabs, sont très fortunés d'être assis sur des sources d'énergie considérables, il reste que, si j'avais à faire un troc et à changer de place avec ces gens, je garderais en tête que leurs sources d'énergie ne sont pas renouvelables et que les nôtres le sont. A long terme, je pense qu'on est assez bien pourvu.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jean-Talon.

M. Garneau: Est-ce que le ministre pourrait nous présenter les gens qui l'entourent, nous indiquer leurs fonctions et nous dire depuis combien de temps ils sont au ministère?

M. Joron: D'accord. Je vais demander à M. Yvon Tremblay, que vous connaissez et qui est sous-ministre, de faire les présentations.

M. Garneau: Je vais concourir avec le ministre pour laisser M. Tremblay faire cela, parce que je ne veux pas lui jouer le tour qu'un des anciens députés de cette Chambre m'avait fait en m'obligeant à nommer les personnes moi-même pour être bien certain que je connaissais mes hauts fonctionnaires. Je vais laisser faire M. Tremblay.

M. Joron: Pendant qu'il le fait, je vais voir combien j'en aurai oublié. Alors, il y a M. Jacques Ruelland, qui était directeur général par intérim à l'énergie et qui est actuellement conseiller spécial du sous-ministre; M. Claude Turgeon qui est responsable des modules, c'est-à-dire qu'en attendant que le ministère de l'énergie soit créé, la Direction générale de l'énergie regroupe le travail des professionnels par thèmes de travail pour la rédaction du livre blanc. Ensuite, vous avez M. Jean Servais qui est le directeur général du service de distribution au niveau du pétrole. De l'autre côté, vous avez les gens du ministère des Richesses naturelles qui sont prêtés à l'énergie; M. Fil-lion qui est prêté à l'énergie pour tous les problèmes administratifs; Mlle Monette qui est le directeur du budget des Richesses naturelles et qui nous assiste aussi dans le budget de la Direction générale de l'énergie; M. Gagné qui est l'adjoint de M. Fillion pour tous les problèmes administratifs de la direction de l'énergie.

Une Voix: Y a-t-il quelqu'un d'autre?

M. Joron: II y a M. Gagnon qui suit les dossiers de l'électricité. M. Dumas, mon chef de cabinet.

M. Garneau: Si je comprends bien tous ces gens sont là depuis un certain temps et même avant l'arrivée du ministre.

L'objet de la question, M. le Président, c'était de revenir sur deux points. Ce n'est pas pour rien que je posais cette question, vu que le ministre, en fait, a donné tellement d'espoirs dans sa politique de l'énergie. Tout à l'heure, il nous a dit qu'il n'y avait pas grand-chose de fait avant qu'il arrive. Je m'aperçois que, s'il fait son livre blanc, il va être obligé de le faire avec le personnel qui était là, puisqu'il est encore dans la période de recrutement.

J'imagine mal que la Commission de la fonction publique ait à ce point accéléré son processus de décision, depuis le temps où le nouveau gouvernement est arrivé au pouvoir, que vous allez être pris, messieurs en arrière du ministre, vous allez être pris pour l'écrire, le livre blanc.

M. Forget: Je ne sais pas s'il ne faudrait pas vérifier le procès-verbal pour savoir, si c'est ce septembre-ci ou l'autre.

M. Garneau: Tout cela pour bien mentionner qu'évidemment le ministre délégué à l'énergie fait assez bon marché du travail qui a été fait antérieurement. Mais ce n'est pas l'objectif principal de mes remarques à ce moment-ci. Surtout la confession qu'il vient de faire, à toutes fins utiles, que tout ce grand palabre qu'on a fait sur une politique de l'énergie, on cause. Dans le fond c'est cela que vous nous avez dit.

C'est bien agréable de parler de politique d'énergie, mais finalement qu'est-ce qu'on a? On dit, la production de l'énergie électrique, c'est une expertise qui a été développée à l'Hydro-Québec depuis un certain temps. La décision de construire la baie James n'a pas été remise en question et on sait que cela va aller jusqu'en 1985. Donc, pas grand chose qu'on peut faire de ce côté. Même si on change le mandat de la Commission hydroélectrique, toute la baie James étant en place, il n'y a rien de changé. Même en changeant le mandat, de toute façon, les problèmes vont se poser de la même façon, au moment où il va falloir décider d'investir à un endroit ou l'autre, reprendre un peu la situation qu'on a eue en 1970 lorsqu'on a décidé d'entrer dans le développement hydroélectrique de la baie James. L'électricité étant, à toutes fins utiles, réglée pour une dizaine d'années à venir, le ministre a répondu tout à l'heure au député de Richmond que le stockage de pétrole et de gaz pour lui ce n'était pas une chose qui lui apparaissait prioritaire.

Finalement, il nous a dit que ce n'est pas nécessaire d'attendre le livre blanc pour prendre des mesures d'économie d'énergie. Il nous a dit également qu'il ne contrôlait pas le gaz ou le pétrole. Finalement qu'aura-t-il dans son livre blanc? Je badine à peine, parce que ce genre de conversation, il y a peut-être des fonctionnaires, derrière vous qui m'ont déjà entendu tenir ce genre de propos. Je me demande si, dans le fond, au Québec, et le nouveau gouvernement comme peut-être aussi au temps de l'ancien, en parlant abondamment d'une politique d'énergie, si on ne fait pas des vocalises sans jamais monter sur la scène pour chanter le premier rôle de ténor.

Il y a un point précis que je voudrais demander au ministre. Comme il nous a décrit que sa seule façon d'agir c'était sur l'aspect de l'économie et que ce n'était pas nécessaire d'attendre le livre blanc pour le faire, je demanderais au ministre quel genre d'action il entend privilégier en termes d'économie de l'énergie? Est-ce que en dehors des panneaux-réclame ou quelques émissions de télévision qui pourraient vanter les bons avantages d'économiser l'énergie, il a l'intention de privilégier ce qu'on appellerait le mécanisme des marchés, ou s'il a l'intention d'utiliser d'autres façons qui seraient une intervention directe dans le mode de vie des gens, en disant: A partir de dix heures, fermez vos lumières, parce que même si vous tournez le bouton, il n'en reste plus? J'exagère, évidemment, mais ce sont deux extrêmes. Est-ce que c'est par une augmentation des prix, un peu comme l'indiquait le président Carter, ou si c'est par des mécanismes de contrôle plus directs sur la façon que les gens ont d'utiliser les différentes formes d'énergie qui sont mises à leur disposition?

M. Joron: A divers degrés, il va y avoir un peu de tout cela. Je ne suis pas en mesure, ce soir, de vous dire quels sont nos choix là-dedans. J'ai l'impression qu'on va retrouver un peu, à différents degrés, avec plus ou moins d'insistance, les principales formes, toutes les formes d'interventions que vous avez mentionnées. Je pense que cela va être un "package deal", si vous voulez, qui ne négligera rien. Il n'y a rien d'exclu dans mon esprit, au départ. On va mesurer tout cela, évidemment, dans le cadre d'un programme, pas aller à l'aveuglette complètement.

On comprend très bien qu'il y a des choses qui bouleversent plus que d'autres les habitudes des consommateurs, et qu'il est non seulement opportun, dans un pays qui a une tradition démocratique, mais il s'impose, dans un premier temps, par l'information, par l'incitation, d'amener les gens à participer eux-mêmes à cet effort, à comprendre pourquoi on fait cela, et avoir le goût de le faire, justement, de ne pas se le voir imposer, de le choisir. Je dis cela simplement pour souligner qu'il y a des étapes là-dedans.

On n'arrivera pas bang! d'un coup sec, dès le départ, cela va être graduel. Je pense qu'il faut tenir compte, si vous voulez, de notre culture politique, de la résistance ou du degré possible de collaboration des consommateurs. Mais rien n'est exclu de toutes les formes d'intervention que vous avez mentionnées, sauf que ce n'est pas tout de suite que je peux vous le dire. J'espère que cela va être très bientôt. Cela n'a pas besoin d'attendre le livre blanc.

Je voudrais ajouter deux choses que vos remarques m'amènent à commenter sur ce qui a été

fait au niveau de l'énergie, au gouvernement du Québec, avant que nous devenions le gouvernement. Je ne veux, d'aucune façon, laisser entendre que le travail qui a été fait par la Direction générale de l'énergie, antérieurement à notre arrivée, ne servait à rien. Bien au contraire, ils se sont occupés à toutes sortes de choses. On va le voir quand on va étudier les différents programmes, le contrôle de la distribution, le service d'inspection de l'essence, il y a la Régie de l'électricité et du gaz, enfin il y a tous les problèmes courants qui se sont présentés sur lesquels, évidemment, ils ont toujours été actifs. Et même, je dirais, en ce qui concerne une politique énergétique du Québec, cela fait longtemps en diable que les gens qui travaillent à la Direction générale de l'énergie attendent d'en pondre une, même que l'oeuf commençait à être pas mal chaud. Quand je dis que je n'ai rien trouvé quand je suis arrivé là, je voudrais préciser. Beaucoup de travail préalable a été fait dans le sens de l'analyse de la situation actuelle, dans le sens de la prévision de l'avenir et ainsi de suite. Mais ce qui manquait, et ce n'est pas aux fonctionnaires de choisir cela, c'est l'orientation politique qui fait des choix. C'est bien beau savoir ce qui se passe, ce qui s'est passé et prévoir ce qui peut se passer, mais la décision politique au bout de la ligne, c'est de faire un choix et décider ce qui va se passer. Il n'y avait pas grand-chose qui avait été décidé à cet égard.

Je n'en fais pas un reproche nécessairement. Chaque dossier ou chaque problème a son importance, selon le contexte. Puis il est vrai que le contexte, dans le passé, n'était pas aussi urgent dans ce secteur qu'il le devient, et cela très rapidement. Presque de semaine en semaine, de mois en mois, cela devient de plus en plus urgent. Enfin, c'est ce que j'ai voulu dire. La définition de politique énergétique, encore une fois, est une responsabilité des gouvernants et non des fonctionnaires. Il n'y avait pas eu grand-chose de décidé jusqu'à ce point.

Finalement, il y a un dernier point que je veux soulever. Vous avez dit: Qu'est-ce qu'il va y avoir dans le livre blanc finalement, quand vous nous dites que tout ce qu'il y a au Québec, c'est de l'électricité, que les programmes de développement de l'Hydro-Québec sont déjà connus pour les huit ou dix ans à venir? Finalement, vous ne contrôlez pas le pétrole, vous ne contrôlez pas le gaz; qu'est-ce que vous allez mettre dans votre livre blanc?

Voici essentiellement ce qu'il va y avoir de nouveau dans notre livre blanc, dans notre politique énergétique, et en cela, on va aller passablement plus loin que le président Carter. Ce que Carter a annoncé, c'est un programme à court et moyen termes qui vise à rationaliser l'utilisation de l'énergie, qui impose des mesures de conservation, qui essaie de mettre en développement des ressources comme le charbon et ainsi de suite. Mais ce n'est pas un programme qui prévoit à ce point-ci — je veux dire il l'a peut-être derrière la tête, c'est son problème à lui, sa stratégie à lui de l'annoncer au moment où il le jugera oppor- tun — il n'y a pas grand-chose qui prévoit ce qui va venir dans dix ans dans ce que Carter a annoncé. Précisément, notre livre blanc va aller beaucoup plus loin que la plupart des politiques qu'on a pu annoncer à ce jour, mais il y a nombre d'autres pays qui travaillent exactement dans le même sens que nous. On pourrait parler, par exemple, de ce qui se passe dans plusieurs pays européens, ils vont très loin. Les Etats-Unis annonceront peut-être d'autre chose avant peu.

La partie peut-être la plus importante éventuellement qui va découler du livre blanc, c'est justement ce portrait de l'avenir.

Alors que dans le passé, les politiques énergétiques étaient constituées principalement de prévisions de la demande et comportaient des mécanismes d'ajustement, de façon que l'offre puisse correspondre à cette demande. J'ai l'impression que la philosophie qui va nous guider va être complètement à l'inverse de cela. Compte tenu de nos moyens, de nos capacités financières, compte tenu aussi de choix qui impliquent des décisions qui ne sont pas, à proprement parler, énergétiques, choix dans le domaine des transports, choix dans le domaine de l'aménagement du territoire, choix dans le domaine du développement économique, nous allons proposer un objectif cible de l'offre de l'énergie disponible pour une date ou pour des dates données, disant: Voici la quantité d'énergie que nous penserions souhaitable de mettre à la disposition des consommateurs en telle année. A partir de là — ce n'est pas gelé à 1% près, cette affaire, mais plus qu'un ordre de grandeur, une cible assez précise — nous allons être amenés à nous demander: Comment allons-nous nous rendre, comment cette offre se décompose-t-elle, quelle est la part de l'électricité là-dedans?

Là, il y a un choix à faire sur la part que l'on souhaite dans le total. De ce choix découleront des programmes d'investissements de l'Hydro-Québec pour les années après la baie James, pour les années après 1985. Nous allons faire un choix également, en ce qui concerne les hydrocarbures, entre la proportion à établir entre le pétrole et le gaz naturel, ce qui va nous conduire à chercher des sources d'approvisionnement et des mécanismes d'approvisionnement différents peut-être de ceux qu'on connaît dans le moment. Si on décide qu'il faut équilibrer le gaz naturel et le pétrole, plus équitablement, dans notre bilan, cela nous conduirait à des actions dans le domaine de la distribution du gaz, etc. Finalement, la place qu'on voudra faire à ce qu'on appelle les énergies nouvelles, cela aussi, il va falloir essayer de la quantifier. Compte tenu de la place et de l'importance qu'on voudra y donner, il va en découler des programmes de recherche, des programmes de développement, un effort financier qui sera plus ou moins important selon ce qu'on aura choisi.

Finalement, dans le domaine électrique, il n'y a pas que... J'ai mentionné, au départ, qu'il y aurait à essayer de déterminer la part que l'on veut donner à l'électricité dans l'ensemble du bilan, mais il y a aussi d'autres choix sous-jacents à ceux-là. Quelle forme de production d'électricité,

hydraulique, nucléaire, thermique? Même hydraulique, il y a de multiples choix. Il y a les grandes centrales sur les grandes rivières, il y a les petites centrales. Il y a toutes sortes de choix à faire là-dedans qui n'apparaissent peut-être pas au même moment, dans le temps, qui seront peut-être décalés. Il y a tous ces choix sans parler, évidemment, de ce que j'ai dit sur la tarification, sans parler de chapitres sur la protection du consommateur, la protection de l'environnement, et j'en oublie. J'ai l'impression qu'il va y avoir, dans le livre blanc, de quoi vous satisfaire, M. le député de Jean-Talon, et de quoi susciter des discussions et d'autres débats fort intéressants.

M. Garneau: D'après ce que je peux voir, il y en aura pour nos enfants aussi si vous prévoyez jusqu'à l'an 2025.

M. Joron: Je ne sais pas si on peut aller aussi loin que cela.

M. Garneau: Dans le fond, j'écoute le ministre parler et je ne veux pas être négatif totalement, mais, tout ce qu'il vient de nous dire confirme un peu les propos qu'il avait mentionnés devant cette commission avant les questions que je lui ai posées ou les émissions d'opinions que j'avais faites. Dans le fond, à part l'électricité, le reste devient un peu du roman fiction. Lorsqu'il nous dit, par exemple: On déterminera la composante électricité dans le bilan énergétique et que tout le reste pourrait s'ensuivre, évidemment, tout le monde peut en faire des hypothèses.

Mais il faut vivre dans la réalité. C'est bien beau de dire qu'on prendra 20% de plus de gaz, mais, évidemment, je serais plus content si le ministre nous disait, demain matin, qu'on a décidé d'augmenter les crédits de SOQUIP de $10 millions pour la prospection au Québec. Je m'aperçois qu'ils sont au même niveau qu'au cours de l'année passée. Mais, dans le fond, tout le reste devient une thèse sur laquelle il est très agréable de causer et de philosopher.

Ce dont le ministre peut nous parler et ce dont il peut parler aux Québécois demain, dans cinq ans, dans dix ans, c'est d'électricité, mais à moins qu'on ne trouve d'autres formes de production de l'énergie au Québec, pour tout le reste, je me dis, moi, qu'on cause.

M. Joron: Non, mais c'est plus que...

M. Garneau: Je suis bien prêt à le faire; je trouve cela intéressant.

M. Joron: ...du causage. A nouveau, je répète que, quand on aura fixé un bilan cible, si on veut l'appeler comme cela, il va découler de cela des contraintes qui vont nous obliger à des actions. En effet, si on veut l'atteindre, ce bilan cible ou ce bilan souhaitable, il va falloir mettre en oeuvre des moyens d'action. Cela va impliquer, évidemment, des décisions, des gestes à poser et bien au-delà du ministère de l'énergie. Si, à travers cela, on choisit tel avenir énergétique pour l'an 2000, parce qu'on pense que c'est celui qui est à notre portée, que c'est celui-là qui est désirable, ainsi de suite, selon le choix fait, un des principaux aspects, quand je dis cela, c'est la quantité d'énergie. Autrefois, c'était facile. C'est vrai que c'était de la causette autrefois, quand on parlait d'énergie, parce qu'on se disait: Bon, faisons des spéculations sur ce que sera la demande à telle époque. Si la demande est cela, bien, il faudra un petit peu plus de gaz, un petit plus d'autre chose. Si la demande est un peu moins grande, là on économisera à telle place. Si elle est plus forte, il faudrait développer davantage. Mais là, ce n'est plus de cela que je parle. Je ne parle pas de faire de la spéculation sur ce que va être la demande et, en cours de route, gentiment de s'y adapter. En fait, il n'y a plus un pays au monde qui peut se permettre de laisser ce qu'on pourrait appeler les forces libres de la nature marcher toutes seules à cet égard. Il faut intervenir, parce qu'autrement j'ai l'impression que, si on laisse ces forces-là libres, si vous voulez, et si on ne les contraint pas, si on ne fait pas des choix, la question énergétique peut conduire,— là, je ne parle pas seulement du Québec, mais de l'ensemble des pays industriels — à une catastrophe économique, à une catastrophe financière comme on n'en a jamais vu dans l'histoire de l'humanité. Cela, je le crois fermement. Le président Carter semble le croire également et bien d'autres experts, que ce soient ceux de l'OCDE ou ainsi de suite, le prévoient également.

Alors, les gens qui réfléchissent depuis plus longtemps à cette question énergétique vous disent tous que la question à décider, c'est l'obligation de choisir très bientôt ce qu'on pourrait appeler le type de société dans laquelle on va choisir de vivre dans 20 ou 25 ans, parce que les ressources énergétiques ne peuvent pas nous permettre n'importe quoi. Cela veut dire que, si on accepte cela et si on fait un choix, de là découlera qu'il va falloir, cette fois-là — et cela découlera de la politique de l'énergie — entreprendre des actions sectorielles dans une foule d'autres domaines, dans le domaine de l'aménagement du territoire. Cela va obliger les autres ministères à agir et à s'ajuster en conséquence.

Cela va donner lieu à un vaste débat, j'en conviens, et cela va forcer, si vous voulez, le domaine du développement économique, ou la structure industrielle du Québec à se rajuster.

M. Garneau: Le ministre est mieux de s'arrêter parce qu'on n'aura pas le livre blanc au mois de septembre. Qui trop embrasse manque son train. Maintenant, je voudrais juste poser une dernière question en ce qui me concerne. Je vais attendre le volumineux rapport, parce qu'il va y avoir bien des pages dedans, si le ministre couvre tout ce champ. Il y a une seule autre question que je voudrais poser là-dessus, avant de laisser la parole à d'autres. Tantôt, le ministre a parlé de la tarification de l'Hydro-Québec et, évidemment, on peut comprendre les objectifs qu'il vise. Je pourrais reprendre ici tout le détail des taux d'électricité, par

exemple, dans les périodes de pointe où la capacité est demandée totalement, puis dans la période d'été où l'eau coule par-dessus le barrage.

De toute façon, même si on le vendait à 10 cents moins cher, il n'y aurait pas preneur. A l'exception de cet aspect technique de la méthode de tarification, je voudrais poser une question au ministre. Tout à l'heure, quand je lui ai posé la question sur l'aspect de l'autofinancement des années 1976/77, le ministre a sorti d'une façon très rapide un taux de 20% à 22%, si ma mémoire est fidèle, d'autofinancement. Si le ministre a réagi aussi rapidement c'est, j'imagine, que dans son subconscient, il a dû réfléchir à cela puisqu'il ne connaissait pas les autres chiffres et il connaissait ceux-là. Je voudrais demander au ministre qu'elle est la partie, d'après lui, qui devrait être la partie autofinancée de l'Hydro-Québec, et quel serait, dans le cadre de ce qu'il a dit, le maintien de la couverture des taux d'intérêts de l'Hydro? Il a dit qu'il voulait maintenir les standards. J'imagine qu'il compte maintenir 1,25. Si tel était le cas, comment évolueraient, au cours des prochaines années, les taux d'électricité?

M. Joron: Comme l'Hydro nous l'a présenté à la commission parlementaire, l'année dernière.

M. Garneau: 10% par année?

M. Joron: Non, plus que cela dans les trois années à venir. Si la couverture doit être maintenue à 1,25... Commençons par le 20%. Si j'ai réagi aussi rapidement au 20%, c'est à peu près historiquement ce qui s'est passé, et ce qui se passe en ce moment. C'est ce que l'on entrevoit pour l'immédiat. Sauf que si les tarifs ne sont pas ajustés dans le sens... C'était le sens de la proposition de l'Hydro. L'Hydro disait: Si vous voulez maintenir ce 20% qui, vu d'une autre façon, correspond à peu près au 1,25, il vous faudrait augmenter dans les trois années à venir les tarifs de 17% par année pendant trois ans. Par la suite, quelque chose voisin du taux annuel d'inflation prévue. Elle s'annonce, l'inflation qu'on a connue, à quelque part autour de 8% ou 10% par année dans les années subséquentes.

Compte tenu du programme d'investissement de l'Hydro déjà connu pour les huit années à venir, et là cela devient un calcul mathématique facile, si vous voulez réaliser ces investissements et rencontrer la couverture d'intérêt de 1,25, c'est l'effet mathématique que cela produit sur les thèses.

M. Garneau: Est-ce que le ministre veut dire que les consommateurs d'électricité devraient envisager une hausse des tarifs au début de l'année 1978 ou avant?

M. Joron: Non, il n'est pas prévu de hausse avant le début de 1978. On aura, au cours de l'année, à déterminer cela, c'est certain. On ne peut pas y échapper.

M. Garneau: Le ministre a parlé d'une chose.

Cela m'a fait penser à un autre aspect de la question. Je ne sais pas si le ministre a déjà eu la possibilité de discuter de cette question avec les gens de l'Hydro-Québec. Lorsqu'on parle de la couverture de 1,25 des taux d'intérêt, on tient pour acquis que les charges d'intérêt sur la baie James, même si elles sont capitalisées en termes de coûts, on en tient compte lorsqu'on arrive à calculer ce fameux ratio de 1,25. Je ne sais pas si le ministre a eu l'occasion d'en discuter avec les gens dé l'Hydro à savoir s'il n'y aurait pas possibilité...

M. Joron: De ne pas tenir compte, oui.

M. Garneau: ... de ne pas présenter... Evidemment, c'est tout le problème de la structure de l'Hydro-Québec que j'aborde parce qu'elles sont majoritaires et doivent présenter un bilan consolidé. Mais dans cette analyse des changements des structures et pour peut-être épargner, tout en maintenant la bonne, disons, au point de vue financier, la cote de l'Hydro, est-ce que le ministre a déjà eu l'occasion de parler aux gens de l'Hydro de cette possibilité, en changeant la structure, de faire porter par le projet de la baie James, qui est un projet, normalement, qui aurait été autonome parce qu'il est sous le contrôle de la SEBJ, s'il n'y aurait pas possibilité, dans ce changement de structure, de faire en sorte que l'intérêt qui, de toute façon, est capitalisé au coût de la baie James, puisse être séparé des opérations de l'Hydro-Québec, de telle sorte que la couverture de l'Hydro, en termes d'intérêts, pas les opérations elles sont largement couvertes... Je sais que c'est un problème qui, au niveau de l'Hydro-Québec, je pense, frappe le coeur de tout ce qu'il y a à l'Hydro-Québec de vouloir considérer la Société de développement énergétique de la baie James comme étant une chose qui ne leur appartient pas en propre, en termes de présentation, mais surtout de l'évolution des prix, pour les consommateurs québécois. Peut-être que le ministre sera plus chanceux que moi, c'est pour cela que je lui suggère cela.

M. Joron: En fait, je pense qu'un des aspects qu'il faut considérer là-dedans c'est comment réagiraient les marchés financiers à un changement de cette nature.

M. Garneau: J'aimerais mieux poser la question: Comment réagirait Roland Giroux avant?

M. Joron: Je vous avoue qu'on a exploré le sujet mais...

M. Garneau: Parfois il y a des rapports entre les deux.

M. Joron: Nous avons exploré le sujet plutôt en en faisant le tour, en l'évoquant.

M. Garneau: Je m'excuse, pour les fins du journal des Débats, M. Roland Giroux, parce que je ne l'ai jamais appelé par son prénom.

M. Joron: La question a été discutée et n'a pas été tranchée. Elle n'est pas facilement tran-chable non plus parce que c'est une question...

M. Garneau: Cela impliquerait peut-être que le gouvernement devrait prendre la majorité des actions de la Société d'énergie de la baie James et non pas l'Hydro-Québec.

M. Joron: Oui mais, pour ce qui est du point de vue des marchés financiers, en fait c'est un peu bonnet blanc, blanc bonnet finalement parce que les prospectus que l'Hydro doit présenter évidemment...

M. Garneau: Surtout des contrats déjà signés.

M. Joron: Oui, et les états des deux sociétés. Finalement, je ne sais pas si on changerait grand-chose.

Le Président (M. Clair): Etant donné qu'il n'y a pas d'autres intervenants qui ont demandé la parole j'appelle immédiatement l'élément 1 du programme 7 des crédits budgétaires du ministère des Richesses naturelles pour adoption. L'élément 1 du programme 7 sera-t-il adopté?

Recherches d'hydrocarbures

M. Garneau: Dans la recherche d'hydrocarbures, en attendant je pourrais peut-être vous poser une première question. Comment s'explique la baisse de $410 600 à $330 200? Qu'est-ce que c'est? Est-ce tout simplement une question de coûts qui ont été chargés en 1976 qui augmenterait d'une façon artificielle la comparaison entre les deux?

M. Joron: On retrouve l'explication de cela dans le détail qu'on vous a fourni dans les autres pages. C'est un projet de l'OPDQ qu'engageait la Direction générale de l'énergie. Vous avez des relevés électromagnétiques aux Iles-de-la-Madeleine. C'est un projet terminé et qui ne se répète pas.

Le Président (M. Clair): L'élément 1 du programme 7 sera-t-il adopté?

M. Saint-Germain: Adopté. M. Garneau: Adopté quant à moi.

Etudes et gestion interne

Le Président (M. Clair): L'élément 2 du programme 7 sera-t-il adopté?

M. Garneau: C'est là que se trouvent les crédits du futur bureau de...

M. Joron: C'est cela.

M. Garneau: Mon collègue de Saint-Laurent...

M. Joron: Enfin, qui ne sont pas identifiés comme bureau d'économie comme tel, évidemment. Les fonds qui correspondent aux activités du bureau d'économie d'énergie, il y a là-dedans des salaires et ainsi de suite; des salaires, des services, montants prévus pour les études, même de la publicité. C'est effectivement là, oui, que vous les retrouvez. C'est ce qui explique l'augmentation assez importante par rapport à l'année précédente.

M. Forget: Je remarque, M. le Président, que c'est dans la supercatégorie services, je crois, qu'on a probablement la plus grosse composante d'augmentation. Dans une des pages qu'on nous a remises. Pour cette supercatégorie, on a une ventilation, un montant de $700 000...

M. Joron: Oui.

M. Forget: J'aimerais poser quelques questions là-dessus. D'abord il y a l'élément A, qui est un montant de $500 000, donc c'est la grosse masse là-dedans, pour un programme de publicité et d'étude pour le bureau de l'économie de l'énergie. Est-ce qu'on pourrait nous donner des explications sur le but de cette dépense de publicité, le contexte dans lequel on va l'utiliser?

M. Joron: II y a peut-être quelque...

M. Garneau: A part cela que je ne pouvais pas donner cela à Pierre Tremblay. C'est le cousin de...

M. Joron: II y a peut-être quelque chose qui aurait dû être mieux précisé: ce qui est étude et ce qui est publicité là-dedans n'est pas déterminé. Je vous dis honnêtement que le partage entre les deux, on ne l'a pas fait encore. Mon impression, c'est que cela va être plus étude que publicité pour la première année, parce qu'évidemment quand l'affaire démarre il faut rédiger les programmes et définir les objectifs. C'est forcément une nécessité des études, et ainsi de suite. A titre d'exemple, qu'est-ce que cela peut comporter ces études? Quels sont les secteurs qu'on va étudier et qui sont visés par l'économie de l'énergie? Le secteur du transport. Elaboration de normes régissant la vitesse des véhicules automobiles appartenant au gouvernement du Québec. Elaboration de normes régissant les modes de déplacements intercités du personnel à l'emploi du gouvernement du Québec. Elaboration de normes dans la structure de flottes de transport appartenant au gouvernement du Québec.

Secteur de la construction. Etude du coût de l'énergie dans les bâtiments publics et du potentiel de la conservation en particulier par analyse thermographique. Etude d'impact des normes de confort du service de la protection de l'environnement dans les édifices à bureaux et les édifices gouvernementaux. Ce sont toutes des choses applicables à l'intérieur du gouvernement, que je lis. Emission des directives concernant l'éclairage des bâtiments aux heures de travail, etc.

Le secteur scolaire et universitaire. La diffusion de programmes de conservation de l'énergie. Rencontre des administrateurs scolaires et universitaires en vue de les sensibiliser à la question et d'identifier leurs besoins pour adapter les locaux en vue d'épargner l'énergie.

Analyse globale de la consommation énergétique du potentiel du secteur hospitalier. Dans le secteur manufacturier, dans le secteur de la construction, dans le secteur du transport...

M. Forget: Je félicite M. le ministre pour avoir une bonne liste.

M. Garneau: C'est toute une série d'études qui couvrent une multitude de domaines.

M. Forget: D'accord!

Je vais préciser ma question parce qu'on touche un point qui, sur le plan politique, peut être d'une très grande importance. Je vais aller directement à ce qui me préoccupe. La direction générale de l'énergie, selon le moment où sera publié le livre blanc, va avoir à faire une certaine diffusion du livre blanc et ceci se comprend. C'est ordinairement dans les budgets d'information du ministère. Il est cependant très important — et j'aimerais avoir l'engagement du ministre là-dessus — que le livre blanc qui va malgré tout être — et je pense que cela est normal, le ministre l'a bien indiqué qu'il y a eu derrière lui des choix politiques qui ont été faits — et demeurer un document du gouvernement, dans le fond. Ce sera un document politique dans le sens étroit en même temps que dans le sens large du mot. C'est le sens étroit qui me préoccupe. Je crois que c'est une question d'éthique tout simplement. Si on retourne à quelques années dans le passé, même à une dizaine d'années lorsque les programmes d'information ont commencé au gouvernement, on a beaucoup insisté là-dessus que les budgets d'information des ministères ne servaient pas à faire de la publicité alentour de projets gouvernementaux ou de politiques gouvernementales comme tels, à moins que, bien sûr, on adopte une loi à l'Assemblée nationale qui dise... Par exemple, on fait un programme de soins dentaires pour les personnes âgées, il faut bien le dire qu'on le fait, et on avertit la population.

Autrement dit, il faut qu'il y ait une loi pour autoriser la dépense de fonds publics, y compris pour les fins d'information. Or, le livre blanc va peut-être déboucher sur des lois dans un, deux ou trois ans, mais dans les six mois de sa publication, il n'y aura pas de lois. A ce moment-ci, les crédits qu'on nous demande d'adopter constitueraient la seule base législative pour dépenser des fonds publics pour faire de la publicité. Alors, on veut être bien sûr, pour des raisons évidentes, et on se contenterait là-dessus de l'engagement du ministre, que ces fonds, s'il y a $12 500 pour l'impression et la distribution du livre blanc, on n'a vraiment pas d'objection à ce sujet. Principalement, ce sont des études et, très certainement, le ministre n'a pas l'intention d'utiliser $100 000, $200 000 ou $300 000 pour faire la publicité du livre blanc.

M. Joron: Je suis bien de votre avis. Je partage également le même souci. On ne parle pas du livre blanc comme tel, on parle du bureau de l'économie de l'énergie.

On se chicanera peut-être sur les moyens, mais tout le monde a déjà, d'ailleurs, souscrit au principe qu'il faut trouver des moyens d'économiser l'énergie. Je ne sais pas s'il s'agit d'adresser un feuillet à tous les consommateurs ou à chaque résidence au Québec, leur décrivant, comme le gouvernement fédéral le fait d'ailleurs, les moyens les plus économiques, ou les plus faciles pour faire baisser leurs comptes d'électricité ou de chauffage, leur expliquant les problèmes ou les aspects de l'isolation dans les maisons, tout cela. Je ne pense pas que ces choses soient de nature politique au sens étroit du mot.

Il peut y avoir des sommes affectées à des fins semblables, mais elles sont déjà bien identifiées ici comme étant reliées au programme d'économie d'énergie et non pas à ce qu'on pourrait appeler la propagande politique du livre blanc; c'est autre chose.

M. Forget: Je suis content d'avoir l'assurance du ministre à cet effet. Evidemment, s'il y a un programme ad hoc pour dire aux gens: Ecoutez, vous pourriez peut-être payer un peu moins pour vos factures d'électricité en isolant votre maison, je n'ai, évidemment, aucune espèce d'objection et je me contente de l'affirmation du ministre.

Le deuxième élément traite d'un sujet qui est susceptible de faire l'objet de commentaires dans le livre blanc. Son apparition, évidemment, comme dépense suscite immédiatement la curiosité au moins. Il s'agit de la complétion d'une étude. Aurait-il été possible pour le nouveau gouvernement de mettre fin à l'étude, sans la continuer en y consacrant $100 000?

M. Joron: Je pense qu'en ce qui nous concerne, nous, c'est en vertu, encore une fois, d'un engagement pris avec l'OPDQ. C'était une étude dont le montant global original était de $450 000, tel qu'approuvé au Conseil du trésor, le 20 août 1975, et dont le partage était le suivant: c'était défrayé par le ministère des Richesses naturelles pour $200 000, par le ministère des Transports pour $200 000 et par le ministère de l'Industrie et du Commerce pour $50 000. Si je comprends bien, la partie qui nous échouait, qui reste à payer là-dedans, serait de $100 000.

M. Forget: C'est une étude qui est exécutée par qui?

M. Joron: Le solde qu'il nous reste à payer au ministère des Richesses naturelles, à l'heure actuelle, est exactement de $97 000, qui va être payé d'ici à la fin de juin. C'est la compagnie Lamarre, Valois.

M. Forget: Est-ce que l'étude est terminée? Il s'agit de régler un compte.

M. Joron: Le rapport, apparemment, a été

présenté par la firme. On serait rendu à l'étape de l'analyse par un comité interministériel. Je vous lis une décision du groupe ministériel des affaires économiques et du développement régional, en date du 9 juillet 1975, qui dit ceci: "Le groupe ministériel des affaires économiques et du développement régional accepte la recommandation du comité interministériel sur la politique portuaire pour que les études relatives à la localisation d'un port en eau profonde pour vrac et liquide soient confiées à la firme Lalonde, Valois, Lamarre, Valois et Associés. Cette firme doit travailler en association avec les consultants Van Houten de New York." Apparemment, la firme a déposé son rapport. Il reste à l'évaluer pour voir si le comité interministériel en est satisfait et à payer le compte.

M. Forget: Est-ce que le ministre accepterait, étant donné que ce sont des fonds publics, de mettre l'étude — je ne parle pas des commentaires du comité ministériel — elle-même à la disposition des membres de la commission qui s'intéressent aux questions d'énergie?

M. Joron: Remarquez, ce n'est pas, je pense, à moi de répondre à cette question, parce que cela relève du comité ministériel des affaires économiques et du développement régional. Je pourrais bien vous répondre oui, mais cela ne relève pas de mon autorité.

M. Forget: C'est quel ministre, le ministre Léonard?

M. Joron: C'est l'ancien comité...

M. Garneau: J'en faisais partie, je vous dis oui.

M. Joron: L'avez-vous eu, le rapport?

M. Garneau: Non, je ne l'ai pas vu, mais comme vous dites que cela appartient au comité, je dis oui.

M. Joron: II sera donc soumis au comité de développement économique, qui est dirigé par Bernard Landry, et ce sera probablement à lui d'en décider.

Je peux lui transmettre votre question.

M. Forget: II n'a pas de crédits à défendre, et c'est la première occasion qu'on a de poser la question.

M. Joron: C'est effectivement une situation curieuse, parce que les crédits sont partagés par trois ministères, alors la même question pourrait être posée trois fois puis aucun des trois n'en est responsable. C'est un peu curieux.

M. Forget: Je pourrais toujours le demander directement, mais j'apprécierais si le ministre pouvait se faire notre porte-parole pour demander cette étude au ministre responsable du comité, parce qu'enfin, tous les partis vont vouloir évidemment prendreconnaissance de tous les documents susceptibles de les éclairer dans la préparation de leur propre évaluation du problème de l'énergie. C'en est un, quoique ce soit un peu sur le périphérique, mais il reste que c'est potentiellement assez important.

M. Joron: Je le ferai.

M. Garneau: Surtout pour les députés du Bas-du-Fleuve, c'est très important. Est-ce que le ministre lui-même en a pris connaissance ou s'il n'a pas eu l'occasion de le faire?

M. Joron: Non, je n'ai pas eu l'occasion de le faire.

M. Garneau: Tant mieux pour lui. Je n'ai pas d'autres questions, il s'en sauve avec cela. Mais évidemment c'est tout le problème de la localisation éventuelle d'un port en vrac liquide à l'Est de Québec. C'est pour cela que la question du député de Saint-Laurent va certainement revenir sur le tapis. Si elle ne l'est pas par nous, elle va l'être certainement par les députés qui représentent ces coins. Cela a fait des débats énormes.

Le Président (M. Clair): Elément 2, du programme 7, sera-t-il adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Clair): Adopté. L'élément 3 du programme 7 sera-t-il adopté?

Contrôle et surveillance des distributeurs de produits pétroliers

M. Garneau: Juste une question. Le programme 3, c'est l'application de la loi. Est-ce que ce n'est pas relié à la coloration du tout? Cela relève du ministère du Revenu. Ce sont les établissements qui vendent du pétrole.

M. Joron: La sécurité des installations, ces choses-là.

Le Président (M. Clair): Elément 3 du programme 7 sera-t-il adopté?

M. Garneau: Adopté.

Le Président (M. Clair): Adopté. Programme 8, l'élément 1 du programme 8.

Régie de l'électricité et du gaz

M. Forget: M. le Président, moi, j'aurais une question sur ce programme. C'est le programme, si je me souviens bien, qui est relatif à la Régie de l'électricité et du gaz. J'aimerais, sans prendre trop de temps, que le ministre nous éclaire sur sa philosophie quant aux organismes de régulation des prix. C'est une longue habitude que tous les

gouvernements ont prise, il y a 30 ans ou 40 ans, d'avoir de ces organismes qui reflétaient la philosophie économique de l'époque, de faire une espèce de surveillance de bon père de famille, alors, à ce moment, de l'entreprise privée, effectivement, pour s'assurer qu'il n'y avait pas, dans les secteurs de services publics, de profits excessifs, pour s'assurer qu'il y avait une accessibilité générale aux services des monopoles naturels, dans le fond.

Mais à peu près personne n'est content de la façon dont fonctionnent ces choses de façon générale. C'est, dans le fond, presque des "lobbies" internes pour les industries réglementées dans la plupart des pays. Cela n'applique plus une politique vraiment très clairement articulée relativement à la tarification. Dans le cas, en particulier, d'entreprises qui ont été prises en charge par l'Etat, on se demande un peu ce que cela vient faire étant donné que le gouvernement va approuver des tarifs d'électricité qui après, de façon théorique, devraient être soumis à des régies pour décider si ce sont les bons tarifs ou pas.

Enfin, j'ai posé ma question: Quelle est votre philosophie vis-à-vis de cela?

M. Joron: Ce que l'on voit là, comme vous dites, est la reconduction du passé. La philosophie qui avait présidé à l'établissement de la Régie de l'électricité et du gaz n'a pas été remise en cause depuis passablement longtemps. A toutes fins pratiques, c'est plus gaz qu'électricité, en vérité, parce que pour l'électricité, comme vous l'avez signalé, les tarifs sont maintenant établis par le gouvernement. Donc, il est certain que cela me paraît inadéquat aujourd'hui et cela a paru inadéquat à la plupart des gens qui sont venus parler de ce sujet, vous vous en souviendrez, à la commission parlementaire, au mois de février. Ainsi, dans le livre blanc, il y aura probablement à l'intérieur du chapitre de la protection du consommateur, du nouveau, soit une modification du rôle de l'actuelle Régie de l'électricité et du gaz, l'élargissement, peut-être, de son mandat ou alors possiblement un nouvel organisme.

Quant à répondre précisément à votre question: Quelle philosophie nous guidera là-dedans? on peut parler d'une philosophie générale, évidemment, qui est celle du souci qui n'existait peut-être pas de la même façon il y a 20 ou 30 ans, de protection du consommateur. Ce sont des préoccupations sociales qui se sont développées plus récemment; non seulement le souci de la protection du consommateur, mais également — et cela peut déboucher là-dessus aussi — la possibilité pour le consommateur de faire des représentations, de se faire entendre. Enfin, un canal de participation; on n'a pas cela, à l'heure actuelle, et il est fort possible qu'on doive, au Québec, se doter d'un organisme qui permettrait tout cela.

C'est dans ce sens. Evidemment, il faut être de notre époque et il va falloir faire quelque chose dans ce sens. C'est compte tenu de ce souci, si vous voulez — est-ce qu'on peut appeler cela une philosophie — et de ce contexte nouveau qu'on va revoir toute cette question du rôle et du mandat de la régie. Pour être plus spécifique, je vous avoue qu'il est trop tôt.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Je voudrais demander à M. le ministre, s'il a l'intention, afin de protéger le consommateur, de voir la façon dont l'Hydro-Québec facture le consommateur. Souvent le consommateur reçoit son relevé de compte, puis il monte sensiblement, il est sensiblement plus élevé que le mois précédent et ainsi de suite; pour l'abonné qui a un budget assez serré, bien, cela ne marche plus.

M. Joron: Non, vous avez parfaitement raison. Depuis surtout la grève de l'année dernière qui a affecté l'Hydro-Québec, il s'est accumulé des problèmes dont on vit encore les séquelles aujourd'hui, en ce qui concerne la facturation. Moi dès le départ, j'ai eu beaucoup de plaintes à cet effet, j'ai demandé à l'Hydro de faire diligence, d'essayer le plus rapidement possible quitte à mettre des équipes supplémentaires de vider cela, enfin, le plus rapidement possible. Vous comprendrez que l'accumulation fait que ce n'est pas encore parfait. Il n'est pas besoin d'entrer cette question dans des livres blancs et d'attendre des choses semblables. C'est une question de gestion interne de l'Hydro.

On sera appelé à en faire des suggestions plus spécifiques encore. Je pense que je serais facilement d'accord pour dire qu'on pourrait avoir une facturation qui protège — si on peut appeler cela de la protection, parce que le compte il faut toujours le payer un jour ou l'autre — qui facilite davantage la possibilité de paiement des consommateurs. Je suis bien d'accord avec vous pour dire que ce n'est pas satisfaisant. On travaille là-dessus, l'Hydro travaille là-dessus, on lui a demandé de le faire, elle s'y est mise. On aura probablement des résultats au cours de l'année.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, j'aimerais poser des questions qui sont de pure information, c'est un domaine peut-être un peu obscur, mais cela me semble assez curieux. Je lis la description du programme 8, dans le cahier des crédits et cela a beau être seulement cinq lignes, cela soulève toutes sortes d'interrogations. On dit: Ce programme vise à assurer la protection en matière de prévention d'accidents. Effectivement il y a l'élément 2 de sécurité publique. Je m'excuse, M. le Président, si je saute un peu dans l'ordre, dans le contexte de la protection d'accidents. Est-ce un des domaines qu'on pourrait décrire tantôt? Est-ce un des domaines qui pourrait être rapatrié dans un contexte d'une législation d'ensemble sur la sécurité? Il y a une autre allusion à l'expropriation.

Or, il y a une loi qui a été adoptée il y a deux

ou trois ans, créant un tribunal d'expropriation. Est-ce qu'il y a des juridictions mélangées là-dedans ou est-ce qu'on pourrait nous décrire un peu ce que ces gens-là font?

M. Joron: Je ne pourrais vous dire quelle est l'origine de ce mandat donné à la Régie d'électricité et du gaz; en ce qui concerne les accidents en fait, c'est un service d'inspection de sécurité des installations de distribution de gaz naturel, les tuyaux, enfin, les canalisations de distribution et puis toutes ces choses. Il y a une équipe qui fait l'inspection, soit à la demande du consommateur, j'imagine, enfin, je ne sais pas exactement comment le processus fonctionne, mais c'est par rapport à la sécurité, en ce qui concerne le gaz naturel.

Pour ce qui est de l'expropriation, je vous avoue que je n'ai pas la réponse immédiatement.

M. Forget: C'est mystérieux.

M. Joron: Malheureusement, et je m'en excuse d'ailleurs, compte tenu du fait qu'on a appris à la fin de l'après-midi que nous siégions ce soir, j'ai essayé de contacter les gens de la Régie de l'électricité et du gaz qui sont à Montréal pour les amener ici en catastrophe. Evidemment, on n'a pas pu dans le délai trop court les avoir ici. Ils ne sont pas présents ici, ce soir. Je le regrette.

M. Forget: Enfin, ce n'est pas d'une très grande urgence. C'est peut-être dans la liste des choses qui devraient être examinées, si c'est vraiment une juridiction partagée. Cela me paraît doublement anachronique. Est-ce qu'il y a, relativement à la sécurité et à la prévention des accidents, des revenus qui viennent en défalcation des sommes? Cela me semble un peu aberrant. C'est la première fois que j'en suis conscient, c'est la première fois que je regarde ces crédits, il faut dire. C'est quel ordre de grandeur?

M. Joron: Dans le même ordre de grandeur que leur budget, dans une proportion d'à peu près 80%.

M. Forget: Qui couvre le coût de l'inspection, parce qu'on a affaire à des monopoles naturels dans le fond. Il serait assez normal de leur demander le coût des inspections.

M. Joron: Cela ne paraît pas dans les crédits.

M. Garneau: Non, parce qu'on fonctionne au brut.

M. Joron: C'est autofinancé à 80%. C'était ce qu'on appelait un remboursement de l'épargne, mais cela n'existe plus.

M. Forget: Bon.

Le Président (M. Blais): L'élément 1 du programme 8 sera-t-il adopté?

M. Garneau: J'ai seulement une question à poser là-dessus. Est-ce que le ministre pourrait nous dire si c'est l'intention de son gouvernement, concernant la tarification, de soumettre l'Hydro-Québec à des auditions publiques, en donnant soit à cette régie ou à une autre à être constituée le pouvoir de se prononcer sur les demandes d'augmentations de tarifs, ou si c'est l'intention du gouvernement de maintenir le statu quo concernant les augmentations et les demandes d'augmentations de tarifs de l'Hydro?

M. Joron: On n'a pas décidé cela encore. C'est un problème sans doute très délicat, comme vous le savez, dans la mesure où cela peut avoir...

M. Garneau: Vous l'aviez décidé quand vous étiez dans l'Opposition, d'après les questions que vous nous posiez.

M. Joron: Je n'ai pas été dans la toute dernière Opposition.

M. Garneau: On nous demandait cela souvent si on allait soumettre l'Hydro à une régie. Cela avait l'air que l'Opposition péquiste du temps avait décidé à toutes fins utiles...

M. Joron: Ils le demandaient comme vous le faites ce soir, mais, en me le demandant, vous ne m'avez pas dit votre opinion.

M. Garneau: Je n'ai pas le temps de revoir les galées, mais ma mémoire, je pense, ne me trompe pas trop.

M. Joron: Je sais. C'est une question très importante. J'imagine que ce n'est peut-être pas aussi complètement blanc ou complètement noir; il y a peut-être...

M. Garneau: Quand on passe au pouvoir on s'assagit, vous savez. Les questions ne sont jamais noires ou blanches, il y a du gris.

M. Joron: Oui, il y a du gris. Il faut en convenir. On étudie cette question. Il y a deux contraintes, l'une qu'on veut, bien sûr, atteindre la protection du consommateur, c'est évident. D'autre part, ne pas inutilement nuire au financement de l'Hydro-Québec. On a plusieurs milliards à emprunter, dans les années à venir, pour doubler notre capacité de production électrique, dont nous aurons un grand besoin. Il faut rencontrer cela aussi.

Le Président (M. Clair): M. le député de Richmond.

M. Brochu: Je m'excuse, M. le Président, de revenir sur la question de la facturation de l'Hydro-Québec. J'avais l'impression que le député de Saint-Laurent continuait sur le même sujet. Le ministre pourrait-il nous dire, à ce stade, à quel moment il prévoit être capable de renormaliser, en fait, le mode de facturation de l'Hydro-Québec?

M. Joron: A quel moment? C'est difficile d'être très précis, d'autant plus que cela fait partie, si vous voulez, de la gestion interne de l'Hydro-Québec. Ils m'ont assuré pouvoir corriger la situation, qui mérite d'être corrigée, le plus rapidement possible. Qu'est-ce que cela veut dire? J'espérais bien y arriver au cours de l'année.

M. Brochu: Puis-je demander aussi s'il y a eu des représentations faites de la part du ministre responsable de l'Office de la protection du consommateur à cet égard? Je sais que la question a été soulevée. Je pense que le ministre a souligné son intention, peut-être, de participer à cette décision, ou du moins de participer au débat sur la question pour faire en sorte que ce soit corrigé le plus tôt possible.

M. Joron: Ils nous ont fait part, évidemment, de leur intérêt pour le sujet. Nous n'avons pas eu de suggestions précises encore, mais...

M. Brochu: Si je ne me trompe, le ministre a indiqué son intention, à ce moment, de demander que soit incluse dans son champ de responsabilité la question de la facturation de l'Hydro-Québec. Est-ce exact? En a-t-il été question?

M. Joron: Je ne me souviens pas de cela, exactement dans ces termes, dans mon champ de responsabilité, cela l'est toujours indirectement, la facturation reste la responsabilité de l'Hydro-Québec, cela va de soi. Le ministre délégué à l'énergie est responsable de l'Hydro-Québec, mais...

M. Brochu: La décision vous appartient.

M. Joron: En vérité, non. C'est une décision autonome que l'Hydro-Québec pourrait prendre, mais, bien entendu, nous pouvons communiquera l'Hydro-Québec nos souhaits ou nos indications.

Poussés à la limite, si on était en opposition fondamentale sur la méthode de facturation, peut-être que le ministre responsable de la protection du consommateur voudrait légiférer à ce sujet. A ce moment, il serait obligé de s'y plier, c'est évident. On est loin d'en être rendus là. Jusqu'à maintenant, on a eu une grande collaboration de la part de l'Hydro-Québec et je pense que cela va se régler.

M. Brochu: C'est parce que le problème avait été soulevé. D'après les informations que j'ai, le ministre responsable de la protection du consommateur avait indiqué son intention, si la situation ne se réglait pas, d'intervenir pour donner suite aux nombreuses demandes faites en ce sens. C'est dans ce sens que je soulevais la question, pour savoir s'il y avait eu des relations entre vous deux, à ce sujet, et si vous aviez l'intention d'intervenir directement, et si vous aviez aussi le pouvoir de le faire. Vous me dites que non.

M. Joron: Non. En fait, non.

Le Président (M. Clair): L'élément 1 du programme 8 sera-t-il adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Clair): Adopté. L'élément 2 du programme 8 sera-t-il adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Clair): La commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts termine ici l'étude des crédits budgétaires prévus aux programmes 7 et 8 du ministère des Richesses naturelles. Je remercie chacun des membres de cette commission pour leur participation et leur diligence. Je demande au rapporteur de faire rapport à l'Assemblée nationale, au moment venu.

M. Joron: M. le Président, si vous me le permettez, avant de se quitter, au nom de tous les membres de la commission, comme le suggère le député de Jean-Talon, je voudrais aussi vous remercier personnellement de votre participation à nos travaux de ce soir. En votre nom, nous voulons tous remercier les fonctionnaires qui nous ont assistés et qui nous ont fourni les renseignements que vous avez jugé utiles de demander. Je le répète, c'est la deuxième fois qu'on se réunit; on a siégé trois semaines au mois de février ensemble et ce furent des débats extrêmement agréables pour tout le monde, ce soir encore. J'ose espérer que dans l'avenir, où on aura encore des débats de plus en plus importants, le même esprit continuera de nous animer.

M. Garneau: J'imagine que le ministre a pris note des questions du début et qu'il va nous transmettre par écrit les réponses.

M. Forget: D'ailleurs, vous savez, M. le Président, qu'on doit avoir commencé à appliquer le plan d'économie de l'énergie. Si on avait continué, on aurait fait ce que les Anglais appellent "to burn midnight oil". A ce moment-là, cela aurait probablement entraîné une dépense supérieure d'énergie.

Le Président (M. Clair): Merci. La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 1)

Document(s) related to the sitting