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(Quatorze heures six minutes)
Etude de la situation énergétique du
Québec
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, mesdames et
messieurs!
Reprise des travaux de la commission de l'énergie.
Les membres de la commission aujourd'hui sont: M. Baril (Arthabaska), M.
Bérubé (Matane), M. Bordeleau (Abitibi-Est), M. Brassard
(Lac-Saint-Jean), M. Brochu (Richmond), M. Garneau (Jean-Talon) remplacé
par M. Forget (Saint-Laurent), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M. Goulet
(Bellechasse), M. Grégoire (Frontenac), M. Johnson (Anjou), M. Joron
(Mille-Iles), M. Landry (Fabre), M. Larivière
(Pontiac-Témiscamingue) remplacé par M. Vaillancourt (Orford), M.
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Marcoux (Rimouski), M.
Mercier (Berthier), M. O'Gallagher (Robert Baldwin).
Le premier groupe que nous recevons est Gaz Métropolitain Inc.,
suivi de la Société pour vaincre la pollution, l'Office de
Protection du Consommateur, la Coalition pour le contrôle des prix de
l'énergie, STOP et Calex. J'appelle Gaz Métropolitain, s'il vous
plaît. Messieurs, vous avez environ 45 minutes pour la
présentation de votre mémoire et la période des questions.
Si vous voulez identifier, s'il vous plaît, les personnes qui vous
accompagnent.
Gaz Métropolitain
M. Beauchamp (Jacques): M. le Président, M. le ministre,
messieurs, je représente Gaz Métropolitain, je suis Jacques
Beauchamp, président. Les membres qui m'accompagnent, à ma
droite, M. Jacques Courtois, président du conseil, à mon
extrême gauche, Me Fortier, secrétaire et chef du contentieux, M.
Joseph Baladi, vice-président à la planification, à
l'approvisionnement et aux ventes, et M. Barbeau, vice-président
à l'approvisionnement et à la planification
générale. Messieurs, vous n'avez pas d'objection à ce que
je reste assis?
Le Président (M. Laplante): Non.
M. Beauchamp: Merci, monsieur. Nous tenons tout d'abord à
vous exprimer nos remerciements pour l'occasion qui nous est offerte
aujourd'hui d'exprimer notre point de vue à votre commission sur la
définition des orientations que devrait prendre le Québec en
matière d'énergie.
A titre d'acteur important dans le secteur ga-zier au Québec, et
conscient de l'importance vitale de l'énergie et de son rôle dans
presque tous les secteurs d'activité, tant économiques que
sociaux, Gaz Métropolitain désire apporter une contribution aux
présentes délibérations en se mettant à la
disposition de votre commission pour répondre aux diverses questions
concernant les activités, les principaux développements ainsi que
les perspectives d'avenir et le rôle que devrait assumer notre compagnie
dans le secteur énergétique.
Conformément à l'invitation qui nous a été
faite le 29 septembre 1976, nous vous avons soumis un mémoire qui se
veut être un apport technique aux présentes
délibérations. Dans ce document, nous nous sommes principalement
attardés aux six points mentionnés dans la lettre d'invitation,
à savoir: la sécurité des approvisionnements; la
protection du consommateur; le développement économique;
l'investissement optimal; le prix de l'énergie, et la protection de
l'environnement.
Cependant, et en dépit du fait que notre connaissance porte
principalement sur le gaz naturel, nous avons cru souhaitable de situer nos
commentaires, sur les six points, dans un cadre théorique
élargi.
Le but d'une telle forme de présentation est de montrer
l'interrelation qui existe nécessairement entre les différentes
formes d'énergie et l'impact qu'elles ont eu et continueront d'avoir,
tant les unes sur les autres que sur le développement économique
du Québec en fonction des diverses politiques de l'énergie.
Nous avons donc au départ énuméré
chronologiquement, jusqu'en 1976, les diverses politiques de l'énergie
ayant affecté le secteur de l'industrie énergétique afin
de mieux comprendre la situation actuelle et de montrer la
nécessité qu'il y a à définir une nouvelle
politique de l'énergie pour le Québec.
Par la suite, nous avons tenté de définir les nouveaux
objectifs que nous croyons réalistes et souhaitables.
Une nouvelle approche a donc été définie dans ces
grandes lignes et nous lui avons adjoint certains moyens à prendre pour
la concrétiser.
Nous n'avons pas la prétention de croire que cet exercice soit le
meilleur qui existe. Par contre, nous pensons que l'implantation d'une
politique cohérente et intégrée de l'énergie au
Québec ne peut que servir l'ensemble de la collectivité en
permettant une plus grande contribution de l'industrie
énergétique au développement provincial.
Avant de passer à certains détails concernant nos
propositions sur une politique de l'énergie, j'aimerais, pour un court
moment, passer en revue révolution et les réalisations de Gaz
Métropolitain.
Nous exploitons présentement un réseau de distribution par
canalisation dans le territoire qui nous est accordé par la loi et qui
comprend l'île de Montréal, les municipalités ou parties de
municipalités situées dans un rayon de 15 milles de l'île,
et les comtés de Verchères et de Richelieu qui sont situés
sur la rive sud du fleuve Saint-Laurent. De plus, nous exploitons une usine de
coke à ville LaSalle.
En prévision du raccordement de notre réseau avec
Trans-Canada Pipe Lines Limited et de la conversion du système de
distribution pour le rendre apte à l'usage du gaz naturel, Gaz
Métropo-
litain construisait, en 1957, 34 milles de canalisation partant d'un
point de raccordement à Senne-ville vers l'extrémité est
de la ville de Montréal. En 1959, 45 milles de conduite ont
été ajoutés pour desservir des zones industrielles,
commerciales et résidentielles en pleine expansion sur la rive sud du
fleuve Saint-Laurent. En 1962, un nouveau prolongement du réseau nous a
amenés à desservir Tracy et Saint-Joseph-de-Sorel, 18 milles en
aval de Contrecoeur. En 1969, le réseau était à nouveau
augmenté d'une conduite pour desservir le potentiel industriel et
commercial dans la région de Valleyfield et enfin, en 1972, Gaz
Métropolitain installait un gazoduc d'environ 40 milles pour desservir
les installations de réduction du minerai de fer de la compagnie SIDBEC,
à Contrecoeur.
Au cours de 1974, la compagnie a parachevé la phase finale de la
construction de l'usine de liquéfaction portant sa capacité de
vaporisation à 240 millions de pieds cubes par jour. Ces installations
d'une capacité d'emmagasinage de 2 milliards de pieds cubes nous
permettent de mieux satisfaire la demande en période de pointe et
d'assurer une meilleure continuité de service.
Au 31 décembre 1976, le réseau de distribution de la
compagnie comprenait 919 milles de conduites d'acier enrobées, 670
milles de conduites de fonte, 25 milles de conduites en plastique et 91 334
branchements de service, dont 2144 en plastique et environ 212 000 compteurs
chez les clients.
Le marché et la clientèle. Le territoire que la compagnie
est présentement autorisée à desservir comprend une
population globale de plus de 3 millions de personnes. Un total de 52
municipalités et les régions hautement industrialisées de
la rive sud du Saint-Laurent jouissent du service au gaz naturel.
Nous fournissons le gaz naturel à une clientèle
domiciliaire pour la cuisson, le chauffage de l'eau, le chauffage des locaux et
autres; à une clientèle commerciale telle que des édifices
à bureaux, hôtels, restaurants et magasins et à une
clientèle industrielle variée composée de grandes et
petites entreprises.
Concurrence et accroissement des ventes. En réaction à
l'apparition en 1958 du gaz naturel sur le marché de Montréal,
les prix de l'huile ont été ajustés à la baisse,
à l'intérieur du territoire accordé à Gaz
Métropolitain. Bien que ces réductions aient profité aux
consommateurs montréalais, elles ont créé une situation
précaire pour l'industrie du gaz naturel. La situation financière
de notre société a été encore aggravée en
1961 par suite de la mise en vigueur d'une nouvelle politique nationale du
pétrole créant une ligne de démarcation imaginaire
la Ligne Borden laissant le Québec et l'est du pays tributaires
de sources d'approvisionnement étrangères.
Parmi les marchés canadiens du gaz naturel, celui de
Montréal a été le seul à subir la concurrence
directe des huiles résiduelles et du pétrole brut
importés. Jusqu'en 1971, l'avantage concurrentiel de l'huile sur le gaz
s'est maintenu entre 15% et 40%. Les faibles taux de pénétration
et de saturation du gaz naturel sur le marché montréalais sont
les effets de cette concurrence. De plus, au cours de la dernière
décennie, est venu se greffer un problème qui ne relevait pas des
forces normales du marché libre. En effet, l'huile à chauffage
était déjà disponible à prix réduit sur le
marché montréalais lorsqu'en 1961 la taxe qui était alors
de 6% sur la vente de ce combustible fut abolie, mais non pas sur la vente du
gaz naturel utilisé aux mêmes fins. De plus, le 17 mars 1967,
cette taxe a été portée à 8%, défavorisant,
encore une fois, l'usage du gaz naturel.
En 1975, suite à l'implantation de la Loi sur l'administration du
pétrole par le gouvernement fédéral, le prix du gaz
naturel à Montréal a été indexé à
celui du pétrole brut canadien à Toronto. Cette situation
continue à soumettre le gaz naturel à une concurrence encore plus
difficile vis-à-vis du pétrole brut importé et des huiles
à chauffage excédentaires qui sont couramment
commercialisés à Montréal à des prix fortement
réduits.
Au cours des quinze dernières années, Gaz
Métropolitain a augmenté ses volumes de vente de 315%, passant de
18,4 milliards de pieds cubes en 1961 à 76,4 milliards de pieds cubes en
1976 et dessert plus de 176 600 clients. Mais, malgré cet état de
fait, la part du gaz naturel dans le bilan énergétique du
Québec se situe toujours à un niveau extrêmement faible, de
l'ordre de 5%.
Approvisionnements de gaz. Le principal fournisseur de gaz à la
compagnie des TransCanada Pipe Lines Limited. Cette compagnie prend possession
de son gaz en Alberta, à proximité de la frontière de la
Saskatchewan, et le livre aux différentes stations de mesurage de Gaz
Métropolitain.
Au cours de 1974, Trans-Canada Pipe Lines Limited n'a pas
été en mesure de fournir les quantités
supplémentaires de gaz dont nous avions besoin. A la suite de
négociations fructueuses, Gaz Métropolitain a reçu ses
premières livraisons de Pan Alberta Company Limited le 1er novembre
1974. Ces quantités supplémentaires ont porté la demande
contractuelle globale de notre compagnie à 256,7 millions de pieds cubes
par jour. De plus, le 27 juin 1975, la compagnie a signé une entente
avec l'Union Gas d'Ontario pour l'entreposage, dans les installations
souterraines de cette dernière, de 2 milliards de pieds cubes de gaz en
1975 et de 4,5 milliards de pieds cubes de gaz annuellement jusqu'au 31 mars
1995. Cette entente nous a permis de raccorder de nouveaux clients et
d'atteindre des coefficients d'utilisation quotidiens et annuels plus
élevés vis-à-vis de nos approvisionnements et de
l'utilisation de notre réseau.
Des volumes additionnels de 16,3 millions de pieds cubes par jour seront
livrés, à compter du 1er novembre 1977. La plus grande part de
ces volumes a été assignée pour satisfaire les besoins de
SIDBEC.
Le premier novembre 1977, la demande contractuelle de Gaz
Métropolitain, avec ses fournisseurs, atteindra 273 millions de pieds
cubes par jour.
La compagnie s'efforce toujours d'obtenir des
quantités additionnelles de gaz pour desservir son marché
en expansion et participe activement aux audiences devant l'Office national de
l'énergie sur les demandes présentées par d'autres pour la
construction d'un gazoduc, afin d'acheminer le gaz du delta du Mackenzie vers
les marchés québécois. Gaz Métropolitain croit
qu'une décision prochaine est essentielle pour assurer la
disponibilité du gaz frontalier le plus tôt possible, permettant
ainsi de pouvoir répondre aux besoins croissants du Québec.
Une nouvelle politique de l'énergie au Québec. Face
à la nécessité d'une plus grande participation du gaz
naturel au bilan énergétique québécois, Gaz
Métropolitain a entrepris, depuis 1967, de nombreuses études de
marché pour établir la demande et les moyens nécessaires
à prendre pour commencer une extension des réseaux vers l'est de
la province, mais le développement s'est heurté principalement
à trois problèmes: de 1967 à 1972, une situation
concurrentielle difficile; deuxièmement, depuis 1973, des
approvisionnements restreints suivis d'une amélioration en 1976;
troisièmement, une hausse vertigineuse des prix du gaz naturel suite aux
ententes entre les gouvernements fédéral et de l'Alberta, les
coûts du gaz étant passés de $0.47 le MPC en 1973 à
$1.55 le MPC le 1er janvier 1977.
Gaz Métropolitain a exprimé son désaccord sur le
principe de l'indexation particulièrement lorsque le prix du gaz
à Montréal est indexé à celui du pétrole
à Toronto.
Malgré l'amélioration au niveau des réserves de
gaz, nous soumettons qu'il est nécessaire que des ressouces
additionnelles soient développées afin de répondre
à la demande canadienne et québécoise, en particulier
à long terme. Eu égard à cette situation, nous avons
continué, en 1976, à appuyer le projet présenté par
la compagnie Canadian Arctic Gas Pipeline Limited à l'Office national de
l'énergie comme étant l'option la plus techniquement
réalisable et économique pour livrer les volumes de gaz
disponible des zones frontalières du delta du Mackenzie vers les
marchés québécois au début des années
1980.
A cet état de faits sont venus se greffer les changements
suivants encourus depuis 1972: 1-Une prise de contrôle accrue par les
pays producteurs de pétrole tant au niveau des prix qu'au niveau du flux
du produit brut; une situation défavorable quant à la
sécurité des approvisionnements pétroliers
vis-à-vis du Québec. 2-Un rôle accru du gouvernement
fédéral dans toutes les transactions concernant le secteur
énergie, soit au niveau du charbon, pétrole, gaz naturel et
même exportation de l'électricité. 3-L'énergie prend
un rôle de plus en plus important dans l'économie et le
développement industriel des provinces. 4- Une croissance à un
taux considérable dans l'utilisation de l'électricité au
Québec et qui a nécessité des investissements
considérables de la part de l'Hydro-Québec.
Ces constatations nous amènent à croire que certains des
objectifs de la politique québécoise de l'énergie
publiés en 1972 sont peut-être en eux-mêmes toujours
valables, mais devraient être modifiés ainsi que les moyens
nécessaires à prendre pour atteindre ces objectifs tout en tenant
compte du contexte présent et de ce que l'avenir pourrait nous
réserver dans le secteur de l'énergie.
Nous soumettons que la nouvelle politique dans le domaine de
l'énergie au Québec devrait prendre les orientations suivantes:
optimiser les prix des différentes formes d'énergie tout en
minimisant le niveau des investissements entrepris par la collectivité
québécoise dans le secteur de l'énergie; améliorer
le niveau de disponibilité, accessibilité et continuité de
nos approvisionnements à moyen et à long termes; atteindre une
meilleure répartition entre les différentes sources et formes
d'énergie dans le Québec en mettant l'accent sur une
pénétration accrue du gaz naturel, une croissance
modérée du secteur électrique et une utilisation
rationnelle du pétrole; conserver l'énergie par une utilisation
rationnelle et s'assurer d'une croissance modérée de la demande,
tout en protégeant l'environnement.
Les opportunités et orientations possibles de Gaz
Métropolitain.
A ce point-ci, nous aimerions nous attarder quelques instants sur les
opportunités et les orientations possibles qui s'offrent à Gaz
Métropolitain.
La nécessité d'un programme d'expansion hors du territoire
présentement desservi provient de plusieurs exigences immédiates
et d'objectifs à long terme. Ces motifs sont les suivants:
Le programme d'expansion que nous projetons dans la province nous
permettra de réaliser la croissance qui nous est indispensable afin
d'établir une bonne stabilité financière à long
terme tout en maintenant le prix de vente du gaz aux usagers du Québec
au plus bas niveau possible.
Le programme d'expansion serait conforme à la nouvelle
orientation que nous désirons donner à la politique
d'énergie du Québec, soit une répartition plus
équilibrée entre les différentes sources et formes
d'énergie et plus spécifiquement un rôle accru pour le gaz
naturel que nous considérons comme une source d'énergie
canadienne disponible et assurée aux Québécois.
Notre programme d'expansion vise à rendre le gaz disponible dans
le plus bref délai aux différentes industries existantes et
projetées et qui sont situées à différents endroits
où une expansion pourrait être entreprise sur une base
rentable.
Présentement, le Québec dépend en majeure partie du
pétrole importé pour satisfaire ses besoins en énergie.
Cet approvisionnement se révèle instable à la fois quant
à sa disponibilité et à son prix.
Dans cette optique, dès 1973, Gaz Métropolitain a
entrepris de difficiles négociations afin d'obtenir des
approvisionnements adéquats et a réussi à sensibiliser les
autorités responsables, tel que nous l'avons mentionné
précédemment. Il est donc important que Gaz Métropolitain
obtienne les autorisations nécessaires pour lui permettre d'obtenir ces
approvisionnements futurs en gaz et ainsi concrétiser son programme
d'expansion.
Nous croyons que ce programme d'expansion pourrait être entrepris
avec succès par Gaz Métropolitain. Tel que mentionné
précédemment, Gaz Métropolitain sera avantagé sur
le plan économique, et ceci se reflétera sur les consommateurs
dans le maintien de tarifs avantageux vis-à-vis de la concurrence.
La création de plus d'une entreprise de gaz pour entreprendre un
tel programme d'expansion serait moins économique pour les raisons
suivantes: 1)Le dédoublement de plusieurs frais irait à rencontre
du maintien de tarifs avantageux pour le consommateur; 2)Une répartition
équilibrée des ventes de gaz entre les divers groupes de clients
étant un élément important, plusieurs petites entreprises
ne peuvent établir une répartition adéquate et le
coût associé à une telle opération ainsi que la
disponibilité du gaz s'en trouveraient affectés au point d'en
compromettre la rentabilité. 3)Une entreprise unique pourra plus
facilement niveler ses pointes à cause de la flexibilité
disponible à même une utilisation accrue de ses installations
d'emmagasinage. 4) De plus, Gaz Métropolitain possède le
personnel qualifié pour une réalisation rapide et
économique d'une telle expansion à travers un réseau
intégré.
Cette expansion pourrait amener le gaz naturel à atteindre, d'ici
vingt ans, une pénétration de l'ordre de 15% à 20% dans le
bilan énergétique de la province de Québec, à
l'exclusion du secteur du transport.
Les moyens nécessaires. Ayant établi la
nécessité qu'une entreprise unique devrait être la
façon la plus rentable de faire l'expansion dans la province, examinons
maintenant les moyens nécessaires à mettre en place pour
entreprendre une telle expansion et ainsi rencontrer le but visé, soit
un développement important du gaz naturel au Québec.
Le gaz naturel offre les garanties d'approvisionnement, soit la
continuité, l'accessibilité et la disponibilité. C'est une
forme d'énergie canadienne disponible à moyen et long terme. De
plus, le système de transmission, partant de l'Alberta et s'acheminant
à Montréal, permet de livrer le gaz naturel en n'ayant recours
qu'à un minimum d'investissements de la part du consommateur
québécois.
Pour le consommateur, les avantages sont nombreux. Aucun stockage n'est
requis par le client qui est assuré d'avoir l'énergie disponible
par le biais d'un système de distribution souterrain, sécuritaire
et continu. De plus, cet investissement qu'entreprend le distributeur pour
desservir les clients correspond à une obligation de service à
long terme.
Cette participation accrue au bilan énergétique du
Québec améliorerait le taux de saturation par marchés et
régions desservis. Cela se traduirait par le plus bas coût de
service à l'usager, accompagné d'une utilisation efficace du
système de distribution.
La protection du consommateur et de l'entreprise. Contrairement à
la situation qui prévaut dans l'industrie pétrolière, et
à l'instar de toutes les autres compagnies d'industries gazières,
nous devons faire approuver nos tarifs par la Régie de
l'électricité et du gaz. Cette politique, tout en
protégeant le consommateur, permet à Gaz Métropolitain
d'offrir à ses clients un approvisionnement assuré en gaz naturel
à des tarifs justes et raisonnables.
Des systèmes de réglementation tarifaire doivent non
seulement protéger le client des prix injustes ou non raisonnables, mais
également le protéger de la perte ou de la baisse de
qualité du service due à la détérioration de la
situation financière de l'entreprise qui fournit le service.
Le prix du gaz naturel a l'usager. Gaz Métropolitain croit qu'un
avantage concurrentiel de 10% à 15%, dépendant des applications,
est nécessaire pour établir cette participation accrue du gaz
naturel dans le bilan énergétique de la province. Si on veut
permettre une croissance souhaitable dans la province, le prix du gaz naturel
fixé à l'arrivée au Québec doit être
établi selon les caractéristiques des marchés et
régions desservis au Québec, et non pas ceux de Toronto, tout en
prenant en considération la possibilité d'obtenir un taux de
développement pendant une période donnée de la part du
transporteur. Ce moyen pourrait toujours être conforme aux dispositions
de la Loi sur l'administration du pétrole et ce, jusqu'à ce qu'un
équilibre acceptable soit maintenu entre les prix des diverses sources
d'énergie.
La conservation de l'énergie. La conservation de l'énergie
doit être encouragée par des mesures obligatoires et
incitatives.
Recherche et développement. La recherche et le
développement devraient être dirigés vers une
amélioration dans l'efficacité de l'utilisation, la protection et
le transport de l'énergie, tout aussi bien que dans le
développement de nouvelles sources d'énergie.
Les investissements entrepris par les utilités publiques dans ce
domaine devraient être encouragés et souhaitables; tel que le
développement d'appareils à chauffage à meilleure
efficacité et, encore plus important, le développement de
stockage souterrain dans la province.
Le régime fiscal. Dans le passé et présentement, le
régime fiscal semble favoriser certaines formes d'énergie plus
que d'autres, tant au niveau des investissements que des profits ou de la
vente.
Il est essentiel que les politiques fiscales encouragent les
investissements nécessaires pour augmenter la part du gaz naturel dans
le bilan énergétique et que les usagers présents et futurs
du gaz naturel bénéficient des mêmes avantages que les
usagers d'autres formes d'énergie.
Nous recommandons d'abandonner la taxe de vente de 8% sur le gaz
naturel.
En conclusion, nous soumettons que le gaz naturel offre aux
Québécois l'opportunité d'atteindre une meilleure
répartition entre les différentes formes d'énergie, tout
en s'assurant d'une plus grande sécurité d'approvisionnement
vis-à-vis du
pétrole et de son utilisation et, du même coup, une
valorisation de l'environnement, le tout à un coût raisonnable qui
reflétera, au fur et à mesure, la croissance au niveau de la
consommation.
L'obtention des volumes de gaz requis, le maintien d'une situation
concurrentielle favorable qui permettra la pénétration
souhaitée, la création et le maintien d'un climat de
réglementation favorisant les investissements nécessaires
à l'expansion à travers le Québec, à l'exploration
et au développement de nouvelles sources de gaz et de zones de stockage
souterrain sont tous des points vitaux que Gaz Métropolitain se doit de
franchir pour son plein épanouissement et pour amener ainsi le gaz
naturel à jouer un rôle accru dans le bilan
énergétique du Québec pour en assurer l'expansion
économique.
Cependant, les objectifs ne pourront être atteints qu'avec l'appui
du gouvernement du Québec, par l'implantation d'une politique de
l'énergie pour le long terme, dotée de moyens nécessaires
et vitaux à la réussite d'une telle politique.
M. le Président, M. le ministre, je vous remercie. Maintenant,
nous répondrons à vos questions.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le
ministre.
M. Joron: M. Beauchamp, avant de peut-être en venir aux
questions principales que votre mémoire soulève, entre autres la
recommandation de l'expansion considérable du rôle du gaz naturel
au Québec, puis-je vous demander quel est, en ce moment, ce qu'on
pourrait appeler le coefficient de pénétration du gaz naturel
à l'intérieur de la franchise dans laquelle vous opérez en
ce moment?
M. Beauchamp: Environ de 25% à 30% de coefficient.
M. Joron: Ce qui veut dire que théoriquement, vous aurez
la capacité de presque quadrupler vos ventes à l'intérieur
du territoire actuel et avec les canalisations actuelles?
M. Beauchamp: Environ, oui. A l'intérieur de la franchise
existante.
M. Joron: Puis-je vous demander ce qui a empêché...
Je sais que vous l'évoquez, mais, c'est parce que je vois quelque chose
de curieux. Vous nous dites, d'une part: Permettez-nous d'étendre le
réseau au-delà de Montréal et de ses environs
immédiats vers tout le reste, au moins, de la vallée du
Saint-Laurent. Or, il me semble qu'avant d'aller desservir un marché peu
dense, j'imagine que cela doit être beaucoup plus coûteux de partir
de Montréal, faire un raccordement, s'en aller dans une ville de moyenne
importance, je suppose Saint-Hyacinthe pu Sherbrooke, que d'augmenter vos
ventes à l'intérieur d'un territoire très dense. D'autre
part, vous prévoyez même, dans une vingtaine d'années, de
faire une pénétration du gaz à 15% ou 20%. Pourriez-vous
nous dire ce qui empêche, depuis un bout de temps, l'expansion à
l'intérieur même de la franchise existante?
M. Beauchamp: M. le ministre, ce qui empêche l'expansion de
gaz à l'extérieur de notre franchise...
M. Joron: A l'intérieur.
M. Beauchamp: ...à l'intérieur de notre franchise,
nous avons atteint présentement un degré de saturation où
tout ce que nous pouvons faire, c'est une augmentation limitée à
l'intérieur de notre franchise.
M. Joron: C'est en raison de quoi, cela?
M. Beauchamp: Entre autres, les clients se servant d'autres
énergies. On n'a pas les moyens incitatifs pour leur faire changer leur
système; en un mot, cela prend un investissement quand même assez
raisonnable pour changer un système d'un autre type d'énergie au
gaz; donc, c'est limité. Tout ce que nous pouvons obtenir à
l'intérieur de notre franchise, ce sont les nouveaux projets qui se
développent.
M. Joron: Vous avez évoqué aussi le facteur du
prix. Les prix ne sont pas concurrentiels vis-à-vis du pétrole ou
vis-à-vis du chauffage électrique, par exemple, pour ce qui est
des maisons privées. Mais, partant de cela, justement, il me semble
qu'il y a une contradiction. On a de la misère à
pénétrer à l'intérieur d'une zone, parce que... Et
vous évoquez, je pense, à la page 14 de votre mémoire,
que, dès 1973, vous avez entrepris de difficiles négociations
avant d'obtenir des approvisionnements adéquats et ainsi de suite. Cela
n'a pas l'air facile d'avoir des approvisionnements, le prix n'a l'air
guère concurrentiel, mais vous nous dites: On va passer de 5% du bilan
à 20%. Je trouve qu'à première vue, il y a une
contradiction.
M. Beauchamp: M. le ministre, c'est en entreprenant l'expansion
à l'extérieur de la franchise, en étendant notre
réseau et en même temps en augmentant la saturation dans la
franchise existante que Gaz métropolitain va pouvoir justement arriver
à cette fin. Autrement, dans la franchise existante, il est impossible
d'obtenir une grande croissance lorsque nous sommes obligés d'attendre
que les clients soient prêts à changer le système et tout
simplement en allant chercher un certain pourcentage des nouveaux projets. Cela
reste trop limité, il faut entreprendre éventuellement une
expansion pour que Gaz métropolitain parvienne à quelque
chose.
M. Joron: D'autre part, pour que le prix soit concurrentiel, vous
nous recommandez l'abolition de la taxe de vente sur le gaz. Mais
au-delà de cela, il y a un facteur plus fondamental, c'est le fait que
le prix du gaz est maintenant indexé à celui du pétrole
brut. Le jour où le pétrole brut canadien
va rejoindre les prix internationaux, votre position concurrentielle va
suivre. En somme, les deux prix vont se suivre. Ils sont à 85%, à
l'heure actuelle, du pétrole brut. Ce phénomène ne
relève pas du gouvernement du Québec. S'ils en viennent à
100%, cela va être encore plus difficile à soutenir, la
concurrence du gaz naturel.
M. Beauchamp: Oui, ce serait certainement plus difficile. C'est
justement ce que nous essayons de débattre devant l'Office national de
l'énergie. La relation qu'il fait, 85% sur le marché de Toronto,
ne correspond pas à la situation qui existe au Québec. Cette
différence est beaucoup plus grande.
M. Joron: Etant donné que l'écart au Québec
est plus grand qu'il l'est à Toronto...
M. Beauchamp: C'est cela. En un mot...
M. Joron: ... pour permettre la pénétration du gaz
naturel.
M. Beauchamp: Exactement.
M. Joron: II me semble qu'il peut y avoir un certain risque. On
parle d'un programme d'expansion qui nécessiterait probablement des
investissements considérables. Mais, qu'est-ce qui est la poule et
qu'est-ce qu'est l'oeuf? Qu'est-ce qui vient avant? C'est cela que j'ai de la
misère à comprendre. D'abord je vais vous demander quelles sont
les ressources financières? Comment Gaz Métro penserait financer
cette expansion des canalisations, ces investissements, d'une part. C'est une
question, le financement de ces investissements. Faut-il commencer ces
investissements, même si vous en avez les moyens, sans être
sûr de la relation du prix entre le gaz naturel et les autres formes
d'énergie, et sans être sûr aussi des approvisionnements? Je
vous demanderais d'élaborer un peu sur la garantie d'approvisionnement.
Si on parle de tripler et de quadrupler le volume de gaz, il faut être
sûr qu'on va en avoir avant de se lancer là-dedans.
M. Beauchamp: M. le ministre, la première chose que nous
devons faire, c'est un approvisionnement à long terme de gaz. C'est la
première chose.
M. Joron: Voulez-vous expliquer comment cela s'arrange une
affaire comme cela? Comment on arrive à avoir un approvisionnement
semblable et quelle est la capacité de transport de TransCanada Pipe
Line Ltd? Qu'est-ce que cela implique?
M. Beauchamp: D'accord. Lorsque TransCanada ou autres
fournisseurs seront en mesure de nous donner ou de nous fournir du gaz à
long terme.
M. Joron: Par un contrat...
M. Beauchamp: Par un contrat, absolument.
M. Joron: ... de fourniture à long terme, une
garantie.
M. Beauchamp: Un approvisionnement de gaz à long terme,
Gaz Métropolitain est en mesure d'entreprendre, à ce
moment-là, l'expansion.
M. Joron: Maintenant, que faites-vous, en ce moment, en vue...
quelles sont les étapes? Avez-vous commencé ces
négociations? Que faut-il pour que le mécanisme s'enclenche?
M. Beauchamp: Présentement, M. le ministre,
l'approvisionnement n'est pas disponible. C'est très limité, ce
que les fournisseurs peuvent nous donner et ils ne s'engageront pas à
long terme. Nous croyons et nous espérons qu'une décision
à l'Office national d'énergie pourra faire déboucher cette
situation concernant le gaz frontalier.
M. Joron: C'est la clé de toute l'affaire.
M. Beauchamp: Exactement. A ce moment, il n'y a aucun doute que
l'Alberta aura du gaz disponible, parce qu'elle le sait, à ce moment, il
sera remplacé par le frontalier. Dès ce moment, Trans-Canada ou
les autres fournisseurs pourront nous offrir le gaz afin d'entreprendre
l'expansion que nous préconisons.
M. Joron: Une fois que vous aurez ce contrat ou cette garantie
d'approvisionnement à long terme, le financement devient possible et
l'expansion du réseau commence. Alors, finalement, tout est lié
à cette décision de faire venir le gaz du Mackenzie ou non? D'ici
là, qu'est-ce qu'on fait?
M. Beauchamp: Sinon, Gaz Métropolitain a des
disponibilités limitées. Par exemple, nous avons obtenu de Union
Gas en Ontario de faire du stockage. Nous avons passé de 2 milliards de
pieds cubes à 4,5 milliards de pieds cubes, ce qui nous donne des
disponibilités pour augmenter la vente de gaz, mais cela reste quand
même limité. Pour entreprendre, on ne peut se fier sur une
quantité aussi limitée que celle-là. Nous avons
également, par le truchement d'un autre fournisseur, le 1er novembre
1977, une augmentation pour fournir Sidbec, mais les autres fournisseurs,
Trans-Canada ou autres, ne nous donnent ou ne sont pas en mesure de nous donner
un contrat d'approvisionnement à long terme pour pouvoir entreprendre
l'expansion présentement.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Merci, M. le Président. J'aimerais revenir sur
le même sujet que vous avez abordé avec le ministre, cette
question de développement, du degré de pénétration
du gaz au Québec et dans le bilan énergétique du
Québec. Tout le monde en a parlé, en votre absence. Vous
êtes les premiers
intéressés et je crois que la discussion d'aujourd'hui
nous donne une occasion d'aller un peu plus loin. Jusqu'à maintenant,
tout le monde a dit qu'en 1995 il serait souhaitable que le gaz
représente non plus je crois que c'est 6% ou 5% du bilan
énergétique, mais 15%. Vous êtes plus optimistes que la
plupart des observateurs qui ont parlé de vous. Vous parlez de 20%.
Le ministre vient de vous poser la question, est-ce qu'il est
physiquement possible de le faire à même votre réseau
existant? Avez-vous des réserves? Il y a, bien sûr, du
côté des réserves, une restriction. Mais supposons que
cette restriction soit levée. Les réponses que vous avez
données laissent beaucoup à désirer jusqu'à
maintenant. Qu'il s'agisse de votre franchise actuelle ou d'une franchise plus
étendue, l'objection que vous avez formulée à l'effet que
les utilisateurs, à un moment donné, ont un investissement qui
n'est pas complètement amorti dans des installations qu'utilise, par
exemple, soit l'électricité, soit le pétrole, et qui ne
sont pas intéressés à changer, à faire un
investissement majeur, pour devenir des utilisateurs de gaz quand la
différence est de seulement 15%, cela vaut autant pour les nouveaux
territoires que vous pourriez desservir, bien sûr, que pour le territoire
actuel.
Le ministre vous a dirigé, par ses questions, à plaider la
cause d'une différence plus élevée entre le pétrole
et le gaz naturel. Est-ce que vous rejetez, par cela, implicitement, d'autres
possibilités où, dans sa politique énergétique, le
gouvernement déterminerait quels sont les secteurs de l'économie
québécoise qui peuvent le plus efficacement, dans une optique de
conservation d'énergie, utiliser le gaz, et qui consentent non pas une
réduction uniforme à tous les utilisateurs, même ceux qui
sont déjà reliés au réseau, mais à tous les
utilisateurs d'une certaine catégorie qui se raccorderaient au
réseau pour la première fois, soit à un taux
préférentiel dit de développement ou autre, ou alors,
même, une subvention pour les réaménagements en capital,
les investissements nécessaires pour la transformation des
systèmes? C'est une autre approche qui serait peut-être un peu
plus aggressive pour faire du gaz un élément important dans le
bilan énergétique. Est-ce que vous rejetez cela ou si cela ne
vous apparaît pas pratique ou pas désirable?
M. Beauchamp: Au contraire, M. le député, c'est
dans notre mémoire, en fait. Gaz Métropolitain, lorsque nous
parlons d'expansion, dans l'analyse d'un marché, doit absolument, sur un
certain terme et ceci, par zones, déterminer quelle serait la
rentabilité en assumant un degré de saturation domiciliaire,
commerciale et industrielle. C'est entendu qu'on ne peut pas entreprendre une
expansion vers un district où nous savons qu'il y a, par exemple,
strictement un groupe de résidences très limité, sans
expansion. Il faut absolument se diriger vers des districts où il y a un
potentiel intéressant, mais résidentiel, commercial et
industriel.
M. Forget: Oui, je comprends très bien cela, mais ce n'est
pas la question que je vous pose. Je comprends bien que, pour rentabiliser un
investissement, qu'il s'agisse d'un nouveau réseau ou autre chose, il
faut qu'il y ait une certaine densité d'utilisateurs prévue pour
le rendre possible. Ce qui me préoccupe surtout, et c'est
peut-être cela que le ministre a à l'esprit parce qu'il a
suggéré que ce n'est peut-être pas rentable, même sur
un plan social, d'encourager votre entreprise ou n'importe quelle autre
entreprise à étendre son réseau à travers tout le
Québec; donc, on peut voir là l'idée qu'il y a
peut-être une nécessité d'un certain zonage
énergétique. Un zonage énergétique pourrait prendre
la forme, évidemment, d'une restriction de l'accessibilité au gaz
naturel dans certaines parties du territoire, mais cela pourrait aussi prendre
l'aspect, en allant un peu plus loin, d'une incitation, peut-être
même financière, à certains types d'utilisateurs pour
transformer les systèmes et devenir des utilisateurs de gaz naturel.
Plutôt que de dire: Bien, tout le monde va payer 50% de
l'équivalent thermique du pétrole, il va y avoir des subventions
pour permettre à certains types d'utilisateurs qui peuvent faire un bon
usage du gaz naturel, qui peuvent peut-être écrêter la
demande au point de vue d'énergie électrique, sur cela, il y a
toutes sortes de calculs qui peuvent se faire, et c'est ceux-là, qu'on
va aider à se brancher au réseau de gaz naturel. Dans un contexte
comme celui-là, votre compagnie accueillerait-elle cela favorablement ou
aurait-elle des suggestions à faire dans ce sens-là?
M. Beauchamp: Oui. En fait, M. le député, dans
notre mémoire, à la page 26, justement, nous parlons de cette
situation et dans le développement des marchés, l'ampleur des
marchés, la localisation des marchés, la vocation des
marchés et, finalement, la demande de pointe. Cela veut dire qu'il n'y a
pas d'erreur que, par ceci, nous entendons un certain zonage. Autrement, je ne
crois pas qu'en entreprenant l'expansion de Gaz Métropolitain nous
puissions être en mesure d'aller partout. Ce serait à peu
près impossible lorsque l'électricité et l'huile seraient
beaucoup plus disponibles, comparativement au gaz, en installant un
réseau qui ne pourrait desservir que quelques clients. Donc, un zonage,
en ce qui nous concerne, est définitivement la solution.
M. Forget: Dans votre mémoire cela ne sort pas
très clairement vous faites allusion au fait que, depuis 1972, la
situation désavantageuse qui vous a été faite
vis-à-vis du pétrole a été renversée
à votre avantage. On ne retrouve pas du moins, je n'en ai pas
retrouvé, c'est peut-être parce que j'ai mal lu
d'indications à l'effet que depuis 1972 cela fait quand
même quatre ans il y ait eu un développement plus
marqué de vos ventes à l'intérieur de votre franchise
actuelle. La différence a été de 40% en votre
défaveur; elle est maintenant de 15% en votre faveur. C'est quand
même une très forte marge, 55% de changement dans le ratio. Est-ce
que cela a déjà eu un effet sur le marché, dans la
franchise que vous occupez?
M. Beauchamp: Oui, cela a eu un effet, mais,
tel que je le mentionnais tantôt, il faut également
réaliser que, dans la franchise existant dans le Montréal
métropolitain, nous avons atteint quand même un degré de
saturation, ce qui veut dire que nous prenons une partie des nouveaux projets.
Mais, dans les habitations existantes, nous ne pouvons que les attraper
lorsqu'ils sont prêts à changer leur système.
M. Forget: Pourriez-vous nous indiquer, pour la période de
1973 à 1975 ou 1976, justement, par opposition à une
période analogue avant 1972, le pourcentage de nouveaux projets que vous
avez atteints dans les deux périodes, de façon à voir si,
effectivement, sans faire autre chose, il n'y a pas un mouvement naturel qui va
nous amener à un taux de saturation plus élevé?
M. Beauchamp: J'aimerais inviter M. Barbeau à vous donner
plus de détails sur cela, M. le député.
M. Barbeau (Gilles): Une chose peut-être
intéressante à regarder depuis 1969, pour répondre
à votre question, c'est l'augmentation de nos ventes. Vous avez
mentionné tout à l'heure qu'effectivement, depuis 1972, on
n'avait peut-être pas nécessairement profité d'une
situation avantageuse pour nous. Jusqu'en 1972, on a augmenté nos ventes
d'environ 2 milliards de pieds cubes par année. C'est à peu
près ce qui s'est passé entre 1969 et 1972. Autrement dit, en
1969, on avait vendu 48 milliards de pieds cubes et, en 1972, on en a vendu 54
milliards. En 1973, on en a vendu 60 milliards de pieds cubes, c'est
déjà une augmentation, je pense, assez substantielle
comparativement aux années précédentes. En 1974, 74
milliards de pieds cubes, comparativement à 60 milliards l'année
auparavant et, en 1975, 78 milliards. Déjà, on a certainement
profité de la situation et les ventes démontrent ce qui s'est
passé. Evidemment, en 1975/76, comme tout le monde le sait, on n'a pas
été en mesure d'augmenter nos volumes de gaz contractés
avec nos fournisseurs de la même façon qu'on les augmentait
auparavant. Alors, c'est peut-être pour cela qu'en 1974 et 1975 la
différence n'est pas aussi grande qu'elle ne l'a été en
1972 et 1974. Mais certainement il y a là un avantage marqué et
on en a profité, nous, dans la mesure de nos moyens.
Il y a une autre chose que j'aimerais... Oui, pardon.
M. Forget: Avant que vous alliez plus loin pour aider, parce
qu'il y a plusieurs chiffres qui viennent rapidement, l'augmentation moyenne de
1973 et 1974 serait de combien de milliards?
M. Barbeau: Je vais vous donner les chiffres, si vous voulez, par
année. Peut-être que cela va aider. En 1969, on avait vendu 48
milliards de pieds cubes; en 1970, 49 milliards; en 1971, 52,25 milliards; en
1972, 54,7 milliards; en 1973, 60,8 milliards; 1974, 74,2 milliards et 1975, 78
milliards. En 1976, j'ai les chiffres, même s'ils ne sont pas sortis
officiellement, on en a vendu 76 milliards, puis je vais vous dire pourquoi. La
seule raison c'est qu'il y a eu, l'été passé je
n'ai pas le mot tellement français pour cela un dumping d'huile
dans les marchés de Montréal à des prix très bas.
Evidemment, nous avons eu certains problèmes à vendre notre gaz
aux consommateurs en service interrup-tible, comparativement à ce qu'on
faisait les années antérieures. Cela a un peu fait fléchir
la demande. Maintenant, il y a une chose qu'il ne faut pas oublier dans tout
cela, c'est qu'on a quand même augmenté le nombre de nos clients,
c'est-à-dire le nombre de nos nouveaux clients, à ce moment.
Je voudrais quand même revenir un peu à la question du
ministre Joron, tout à l'heure, sur laquelle vous êtes revenu
vous-même, par la suite, concernant la pénétration à
l'intérieur des franchises. Vous dites: Oui, vous avez une franchise et
vous avez seulement une saturation actuellement de 25% et vous parlez d'aller
dans l'ensemble de la province et d'avoir peut-être, encore là,
15% ou 20%. C'est vrai.
Il y a une chose à laquelle il faut penser, si vous regardez
toutes les compagnies de gaz dans l'Est du Canada. Je ne parle pas de
l'Alberta, où le coût est tellement bas que cela prendrait une
personne pas tellement intelligente pour sauter sur d'autre chose que le gaz
là-bas. Ici, dans l'Est, il reste que la pénétration dans
les provinces est de l'ordre d'à peu près 20%. Cela ne veut pas
dire qu'à Toronto, par exemple, il y a 80% de pénétration,
s'il y a 30% de pénétration en Ontario. Il y a, à ce
moment-là, une pénétration de l'ordre de 30% ou 40%
dépendant des régions. Mais vous n'avez pas une
pénétration à plein de 80%.
La raison pour cela, évidemment, à Montréal
à l'intérieur de notre franchise, nous n'avons pas de lignes
partout, un système de distribution. Pour étendre ce
système de distribution à l'intérieur de la franchise,
vous allez devoir aller dans des secteurs où il y a seulement des
domiciles, par exemple. A ce moment-là, ce n'est pas rentable pour nous,
pour étendre un système assez loin, je ne sais pas, je vous vous
donner un exemple. Il y a seulement le coin de Rivière-des-Prairies, de
l'île de Montréal, où nous n'allons pas
présentement. Aller là, actuellement, il n'y a pas tellement
d'industries dans ce coin. Ce ne serait absolument pas rentable. Cela veut dire
que les autres clients paieraient pour cela. Normalement, ce qui favorise
l'expansion d'un réseau de gaz, au tout début, c'est un parc
industriel où des industries vont prendre un volume considérable
pour supporter la ligne jusqu'à temps que vous ayez une
pénétration suffisante dans les dix autres secteurs
résidentiel et commercial.
A ce moment-là, votre réseau va devenir rentable. Mais il
y a une période de temps où il ne l'est pas, il faut quand
même que vous ayez un volume intéressant et cela prend de
l'industrie pour partir.
Dans la région de Montréal, vous ne trouverez pas beaucoup
de parcs industriels ou de régions industrialisées à
l'intérieur de notre franchise où le
gaz naturel n'est pas. Nous sommes à Tracy, Contrecoeur,
Varennes, Verchères, Candiac, Bou-cherville, Laval. Toutes les places
où il y a de l'industrie, on est là. Evidemment, quand on parle
d'expansion dans la province, notre premier but serait évidemment de
trouver des coins où l'industrie nous faciliterait la tâche.
Il y a une chose qu'il faudrait ajouter, aussi. En 1976, quand je disais
que les volumes vendus ont été réduits à 76
milliards, comparativement à 78 milliards en 1975, il y a eu la
grève de l'industrie SIDBEC qui nous a quand même
empêché de vendre 4,7 milliards. Déjà là, on
aurait été au moins à 81 milliards, donc plus
élevé que l'an passé à cause de nouveaux
clients.
M. Joron: A cette question-là, si le député
de Saint-Laurent et le président me le permettent, j'aimerais juste
poser une petite sous-question. Vous parlez des volumes vendus des
différentes années, le saut considérable qu'il y a de 1973
à 1974, il y a quand même une relation très directe avec
les prix.
C'est qu'avant la crise du pétrole et avant que le pétrole
passe de deux à dix dollars le baril tout d'un coup, le gaz naturel
était resté à un prix très bas et ce n'est qu'un an
plus tard qu'il a été ramené en relation avec le nouveau
prix du pétrole. Si bien que vous avez joui, pendant presque un an, d'un
avantage concurrentiel artificiel qui a fait probablement...
M. Barbeau: Entre autres, et c'est exactement pour cela que M.
Beauchamp vous a dit tout à l'heure qu'avec un bon avantage
concurrentiel on pouvait pénétrer les marchés.
M. Forget: La réponse que nous venons d'avoir relativement
à l'importance d'usagers industriels pour amorcer la
pénétration des marchés me porte c'est ma
dernière question, M. le Président à vous demander
de nous expliquer un peu la structure de vos tarifs parce qu'un peu plus tard,
aujourd'hui, on aura un autre groupe qui soulèvera le problème de
la structure des tarifs. Je sais que c'est un peu en dehors du domaine de la
préoccupation de cette commission qui s'intéresse à
l'approvisionnement en énergie. Il y a la Régie de
l'électricité et du gaz qui est un organisme gouvernemental qui
approuve vos taux. Donc, il doit y avoir une raison aux yeux de
l'intérêt public qui est valable. Mais, de toute façon, peu
importe cette question, je pense que la commission peut au moins faire la
lumière sur la question des tarifs imposés aux usagers
domestiques contre les usagers industriels. On déclare, dans certains
mémoires qui nous ont été transmis, que cette
différence est abusive et que ce sont les usagers domestiques qui
subventionnent l'usager industriel. Vous avez donné une explication qui
est une explication tirée de la nécessité de rentabiliser
un nouvel investissement Une fois que c'est rentabilisé, on pourrait
peut-être poser la question: Est-ce que le coût relatif de
fournitures ou les profils de consommation justifient des différences
comme celles-là?
M. Barbeau: Oui, les détails des tarifs, disons que, si
vous voulez en parler plus à fond au point de vue du coût dollars
par 1000 pieds cubes, M. Baladi a les détails. Il pourrait vous donner
toutes les informations que vous voulez là-dessus. Il n'y a qu'un
principe en partant que je voudrais mentionner. Les gens disent beaucoup: Les
clients domestiques supportent les clients industriels parce qu'ils paient le
gaz plus cher. C'est facile à dire, mais c'est faux, pour plusieurs
raisons. Premièrement, vous avez un client industriel qui paie moins
cher. C'est vrai. Comme quelqu'un m'a déjà dit une fois: Si vous
achetez 100 000 chandails chez Eaton, vous les paierez moins cher que si vous
n'en achetez qu'un. C'est tout à fait normal.
Maintenant, la question du prix; c'est que les clients
résidentiels, actuellement, d'après nos études de
coût de service parce que nous avons nos coûts et nous les
répartissons à l'ensemble des abonnés se supportent
à peine, actuellement. Autrement dit, le rendement qu'ils nous donnent
est très minime. Alors que le client industriel, même s'il paie
son gaz moins cher, actuellement, donne un meilleur rendement, effectivement,
dans notre base totale de tarification, et supporte le client
résidentiel. C'est l'inverse qui se passe. C'est bien sûr que, si
on disait: Même à cela, on n'est pas d'accord pour que
l'industriel paie moins cher... Si vous essayez de vendre du gaz à
SIDBEC, par exemple, qui en prend 16 millions de pieds cubes par jour, au
même prix que le client résidentiel, SIDBEC va fermer ses portes
demain matin, parce qu'elle ne sera plus capable de concurrencer qui que ce
soit avec son produit. Il y a une question de concurrence pour ces industries
et, pour nous, il y a une question de vente de volume suffisant pour supporter
notre système.
Le client résidentiel nous apporte la stabilité dont on a
besoin pour toujours être sûr d'avoir un volume de gaz vendu
régulièrement. L'industriel, lui, nous permet d'étendre
notre marché et nous permet aussi de vendre un plus gros volume de gaz
qui est un bénéfice, à ce moment, pour tous les usagers.
Peut-être que M. Baladi voudrait ajouter quelque chose à cela,
concernant les tarifs.
M. Baladi: Seulement, peut-être, un point de détail
concernant les études du coût de service que l'on entreprend. Au
niveau de l'industriel, le taux de rendement se situe aux alentours de 20%
vis-à-vis des investissements qui sont entrepris pour desservir la
classe industrielle dans nos tarifs, alors qu'au niveau résidentiel, le
taux de rendement se situe aux alentours de 2% à 3%. Au niveau du
secteur commercial, le taux de rendement se situe aux alentours de 15%. Donc,
même si le client résidentiel paie un taux plus
élevé par unité consommée, il ne contribue pas,
d'une façon juste et raisonnable, au taux de rendement que la compagnie
recherche. Il est, en fait, aidé par la contribution qui est faite par
les industries.
M. Beauchamp: C'est pour cela que nous mentionnions tantôt
qu'il est impossible d'avoir strictement un groupe résidentiel sans
avoir un complexe industriel. Si on prend l'exemple de
Montréal, le domiciliaire nous donne cette stabilité.
Pendant douze mois, nous savons qu'il prend chauffage, chauffe-eau et cuisson,
ce qui est très limité, mais quand même. L'industriel ne
nous donne pas cette garantie du domiciliaire, mais le mélange, la
mixture de ces deux groupes donne cette stabilité à la
distribution du gaz.
M. Forget: Une question découle de la réponse que
vous venez de nous donner. Enfin, j'accepte vos chiffres tels que vous les
faites. Cependant, est-ce qu'il n'est pas vrai de dire que quand vous calculez
les taux de rendement pour différents types d'usagers dans une industrie
comme la vôtre, il y a un certain élément d'arbitraire dans
l'imputation des coûts, parce que ce sont des coûts conjoints pour
le réseau, etc? Pourriez-vous au moins nous décrire comment vous
imputez les coûts d'investissement, les coûts de service pour
arriver à des conclusions comme celles-là, parce
qu'évidemment, c'est crucial? On peut arriver à des taux de
rendement probablement très différents en se servant d'une autre
formule d'imputation.
M. Baladi: Si vous me permettez de faire un commentaire
là-dessus, les normes ou les critères qui sont utilisés
sont des critères qui sont connus dans l'industrie du gaz, et lorsque
nous nous sommes présentés devant la Régie de
l'électricité et du gaz l'été dernier, nous avons
eu un intervenant qui a soumis sa propre étude du coût de service.
Or, ces résultats sont encore beaucoup plus défavorables pour
l'industriel, c'est-à-dire que sa part du jugement qu'il a émis
démontre que l'industriel atteint parfois des taux de rendement allant
jusqu'à 50%, et il a fait la preuve que la contribution de l'industriel
vis-à-vis du résidentiel est beaucoup plus forte que
l'étude qu'on a soumise. Cette étude est présentement
devant la régie, en délibéré et on attend un
jugement là-dessus.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Ce qui me frappe dans votre mémoire, c'est
que vous liez le programme d'expansion du réseau gazier à un
approvisionnement suffisant, comme vous l'avez mentionné tantôt,
ce qui n'est pas une condition existante actuellement. Mais vous ajoutez
également une autre condition. Cela m'apparaît étonnant de
la part d'une entreprise privée, parce que les entreprises
privées qui ont défilé devant cette commission ont toutes,
jusqu'à maintenant, défendu le régime de concurrence ou de
soi-disant concurrence, alors que vous, vous demandez, en fait, et vous liez
ça au programme d'expansion, un monopole. C'est à la page 15, de
votre mémoire. Cela m'apparaît très clair. Enfin, vous
n'utilisez pas le terme monopole, mais cela revient au même.
Vous souhaitez une entreprise unique dans le secteur gazier. Vous
trouvez non souhaitable la création de plus d'une entreprise de gaz.
Donc, il ne faut pas avoir peur des mots, vous demandez le monopole de la
distribution du gaz au Québec, et si la condition de l'approvisionnement
suffisant se trouve remplie à un moment ou l'autre, dans les
années qui viennent, ce n'est pas l'unique condition à votre
programme d'expansion, il y a une autre condition également, c'est que
l'on vous accorde le monopole de la distribution du gaz au Québec. Ce
qui signifie par conséquent qu'un projet comme celui de SOQUIP
les représentants de SOQUIP en ont parlé quelque peu lorsqu'ils
sont venus la semaine dernière d'exploitation du gisement de gaz
de je ne sais où au sud de Québec, Sainte-Flavie, je pense
pour alimenter la région de Québec, la ville de
Québec, vous ne voyez pas cela d'un très bon oeil, parce que,
évidemment, cela serait l'apparition d'une deuxième entreprise
dans le secteur de la distribution du gaz.
M. Beauchamp: A partir...
M. Brassard: Vous demandez le monopole alors que les compagnies
pétrolières qui ont défilé devant nous
défendent le régime de concurrence dans le secteur
pétrolier. Vous autres, dans le secteur du gaz, vous croyez que la
meilleure situation est une situation de monopole.
M. Beauchamp: II faut réaliser que le gaz est
réglemepté et que les autres produits ne le sont pas. L'huile,
entre autres, n'est pas réglementée, elle est entièrement
libre ou à peu près.
D'un autre côté, nous disons qu'à partir d'un
réseau comme celui de Montréal, qui est quand même
très important, l'expansion se fait certainement plus facilement
à partir d'un réseau déjà existant, avec un
personnel déjà en place, et nous avons tous les moyens pour
entreprendre de l'expansion dans tout le Québec et, naturellement, la
création de plusieurs entreprises, il y a des doublages de frais qui
seraient, en fait, considérables.
M. Brassard: Cela compromettrait selon vous, plusieurs
entreprises dans le secteur du gaz, cela compromettrait une expansion possible
de la distribution du gaz au Québec.
M. Beauchamp: Compromettrait, et j'irais plus loin que cela.
M. Brassard: II serait plus difficile d'atteindre les 20% dont
vous parliez tout à l'heure, dont vous parlez dans votre
mémoire.
M. Beauchamp: Plusieurs petites industries ne pourraient pas et
n'auraient pas les facilités d'obtenir les approvisionnements, ne
pourraient pas faire une distribution adéquate, obtenir un rendement,
comparativement à Gaz Métropolitain qui est déjà en
place, et entreprendre une expansion considérable.
M. Brassard: Plusieurs petites, mais deux ou trois moyennes?
M. Beauchamp: Certainement si... Vous avez mentionné
SOQUIP. Si SOQUIP voulait le faire au Québec, justement dans la ville de
Québec, nous n'aurions aucune objection, parce que, naturellement, dans
le plan d'expansion que nous avons, en fait, préconisé, et
même déposé devant l'Office national de l'énergie,
basé sur la possibilité d'approvisionnement, nous avons
déterminé des dates ou des années où, en
entreprenant l'expansion, nous pourrions y parvenir. Mais SOQUIP pourrait
desservir la ville de Québec si elle décidait de l'entreprendre,
avec du gaz indigène, naturellement.
M. Barbeau: D'ailleurs, il faut faire bien attention à
cela, si je peux ajouter quelque chose. Evidemment, SOQUIP pourrait
actuellement servir une partie de la ville Québec avec les volumes
qu'elle a, mais si plusieurs compagnies, même deux, partent dans
différentes directions, à un moment donné, lorsqu'il n'y
aurait plus d'approvisionnement, ici au Québec... Il reste quand
même que le volume de Saint-Flavien est loin d'être énorme.
Il n'est même pas la moitié de ce que nous vendons par
année, alors il faut y penser sérieusement avant de s'embarquer
dans cela. On n'a rien contre, remarquez bien, mais il reste qu'à un
moment donné, lorsque les puits sont taris, par exemple, et que vous
avez des consommateurs qui sont sur un réseau, qu'est-ce que vous
faites? Il faut que quelqu'un décide de rendre une ligne... Vu qu'on
parle de possibilités, admettons la possibilité que
Montréal soit servie par Gaz Métropolitain, que, par exemple, une
partie de Québec soit servie par SOQUIP, et que dans cinq ans il n'y ait
plus de gaz. Cela veut dire qu'il y a un pipe-line qui doit se construire de
Montréal à Québec s'il n'a pas été fait
à ce moment-là. A quel coût, à quelle
rentabilité? Il n'y a plus de rentabilité possible. C'est pour
cela qu'un plus gros distributeur qui s'étend graduellement, nous
pensons que c'est mieux que de commencer à deux extrêmes et ne pas
savoir comment faire pour les rattacher à un moment donné. Il
faut faire attention à cela. La seule chose qu'on veut faire ici c'est
une mise en garde, tout simplement.
Le Président (M. Laplante): M. Marcoux.
M. Marcoux: Ma première question concerne le stockage,
dont vous parlez dans votre mémoire. Vous parlez des possibilités
de stockage en Ontario. Ce stockage pourrait durer combien de mois, advenant
une mesure d'urgence? Parce que, d'autre part, on nous a suggéré
de prévoir qu'un des rôles du gouvernement pourrait être de
prendre des précautions advenant des situations d'urgence. Les
capacités de stockage en Ontario sont pour combien de semaines ou de
mois pour le gaz, pour nous approvisionner en ce qui nous concerne?
Deuxième question, liée au stockage également. Vous
proposez que le Québec prenne des mesures pour faire un stockage
souterrain. J'aimerais avoir une idée de ce que ça pourrait
coûter. D'après les projets que vous pouvez avoir, ça
pourrait être un stockage qui pourrait être bon pour combien de
temps, quatre semaines, deux mois, trois mois, quoi?
M. Beauchamp: Le stockage que nous avons en Ontario est un
arrangement que nous avons avec l'Union Gas qui nous permet de sortir un volume
limité selon l'entente, à partir du 1er novembre jusqu'au 1er
avril. C'est la période où nous avons besoin d'un volume
additionnel de gaz, ce qui nous a évité de "contracter" du gaz
annuel avec Trans-Canada ou un autre fournisseur, en un mot. Aussi bien,
d'ailleurs, que les 2 milliards de pieds cubes de gaz liquifié dont nous
nous servons en période de pointe. En ce qui nous concerne, le stockage
est indispensable et doit servir en périodes de pointe, entre autres. En
un mot nous avons 4,5 milliards de pieds cubes, mais le stockage global de
l'Union Gas est de 86 milliards, ce qui veut dire qu'elle peut s'en servir
douze mois par année.
C'est pour ça que nous disons: Si, au Québec, il y avait
possibilité de découvrir justement cette possibilité, on
pourrait emmagasiner du gaz et, à ce moment-là, il serait
disponible à tout moment, douze mois par année.
M. Marcoux: Deuxième partie de la question: Quelle sorte
de coût implique un stockage souterrain?
M. Beauchamp: Nous ne sommes pas en mesure de vous donner un prix
pour développer un stockage de cette envergure. Sincèrement, il
faudrait vérifier avec, entre autres, Union Gas, mais nous ne sommes pas
en mesure de vous donner l'investissement que cela prend.
M. Marcoux: Ce n'est pas un plan...
M. Barbeau: Le problème, c'est qu'on ne sait pas où
il est. Pour le développer, il y a des coûts qu'Union Gas
connaît, par exemple, mais, nous, du Gaz Métropolitain, nous avons
déjà dépensé $1 million près de ville de
Laval pour trouver du stockage et on n'en a pas trouvé. C'est $1 million
qui est passé vite. Je pense qu'on peut dépenser plusieurs
millions avant de trouver un endroit qui peut sembler fournir une bonne
formation pour permettre le stockage.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Bellechasse, dernière intervention.
M. Goulet: Merci, M. le Président. Dans un
précédent rapport, il est recommandé d'étatiser les
compagnies de distribution de gaz. Je présume que vous n'êtes pas
pour cela. Mais j'aimerais quand même que vous fassiez voir à
cette commission les désavantages d'une politique semblable,
brièvement.
M. Beauchamp: En premier lieu, les sources d'approvisionnement
viennent de l'extérieur. Pourquoi étatiser une compagnie de
distribution? Lorsqu'il y aura approvisionnement de gaz, nous
sommes en mesure d'entreprendre une expansion basée sur une
politique énergétique établie par le gouvernement. Quel
serait l'avantage? Nous ne trouvons aucun avantage à étatiser un
distributeur de gaz.
Nous sommes en place et nous pouvons, selon la politique
énergétique, lorsque l'approvisionnement de gaz sera disponible,
l'entreprendre.
M. Goulet: Vous pouvez affirmer devant cette commission que, pour
les mêmes services, il n'y aurait aucun avantage à
étatiser?
M. Beauchamp: Aucun avantage.
M. Goulet: Ni pour le consommateur, ni pour le gouvernement?
M. Beauchamp: Nous n'en voyons pas.
Le Président (M. Laplante): Messieurs, les membres de
cette commission vous remercient du témoignage que vous avez bien voulu
leur apporter.
M. Beauchamp: Messieurs, puis-je me permettre de vous faire
parvenir le plus tôt possible les chiffres que nous vous avons
rappelés il y a quelques instants concernant notre dernier rapport
annuel? Des statistiques y sont incluses. Je peux laisser, entre autres, ces
deux rapports et en envoyer un autre groupe demain ou le plus tôt
possible.
Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs. M.
Beauchamp: Merci.
Société pour vaincre la
pollution
Le Président (M. Laplante): La Société pour
vaincre la pollution. Je remarque que vous avez un mémoire assez
épais. Il n'y a pas d'introduction, je veux dire, comme
résumé. Le résumé qu'on vient tout juste de
recevoir contient encore 33 pages. Quarante-cinq minutes, ce n'est pas beaucoup
pour lire 33 pages. Je ne sais pas si vous seriez capable de résumer
verbalement les principaux points de votre mémoire avec les
recommandations.
M. Lacombe (Pierre): On va tenter de résumer le
résumé...
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît!
M. Lacombe: ... le plus rapidement possible. Je vous
présente les personnes qui sont avec moi, à ma gauche, Mme
Solange Vincent et, à ma droite, M. Jacques Boucher. Mon nom est Pierre
Lacombe. Je suis président de la Société pour vaincre la
pollution.
Une courte présentation de ce qu'on est. On se considère
des citoyens ordinaires informés, non pas des spécialistes, bien
qu'on consulte beaucoup de spécialistes via les livres et les articles
qui sont écrits un peu partout dans le monde.
En ce qui concerne le mémoire que vous avez reçu,
malgré des délais trop courts et des conditions souvent adverses,
nous avons tenu à vous présenter quand même quelques
réflexions sur la problématique énergétique du
Québec. Vous excuserez les fautes de français et les coquilles,
qu'on n'a pas eu le temps de corriger, de même que les sauts que nous
vous obligerons à faire quelquefois d'un chapitre à l'autre.
On va tenter, dans la présentation du mémoire, de
remédier à ce manque d'enchaînement, parce qu'on est quand
même convaincu que les éléments qui y sont
présentés sont intimement interreliés.
Vous nous excuserez aussi de ne pas avoir pris un ton effacé
à quelques reprises et aussi peut-être de ne pas avoir
effacé à plusieurs reprises. C'est que nous avons le sujet
à coeur, et comme le temps nous a pressés, le devoir nous a
obligés à entrer en scène sans maquillage.
Nous sommes conscients qu'en présentant un mémoire qui
laisse les sentiers battus, nous quittons aussi les remparts de la
sécurité, ou si vous préférez, nous travaillons
sans filet. Nous considérons que l'importance, pour ne pas dire la
gravité de la situation nous impose une démarche qui ne se soucie
pas de ces risques. D'ailleurs, comme tous les micro-organismes, nous avons la
vie dure. Afin d'éviter des redondances inutiles, nous tenterons de
faire une présentation actualisée de notre mémoire en
insistant surtout sur des points ou des approches qui n'ont pas
été soulevés ou approfondis par les
précédentes présentations.
Donc, je réfère les gens de la commission au
résumé. Examinons tout d'abord rapidement quelques aspects de la
situation actuelle. Nous prions ceux qui voudraient en connaître
davantage de se référer à la partie 1 de notre
mémoire.
D'abord l'utilisation des fonds de recherche. Non seulement les sommes
nécessaires à la recherche et au développement de
ressources renouvelables ne sont pas engagées au niveau de l'Hydro et de
l'IREQ, mais encore ces organismes n'ont jamais envisagé
sérieusement cette alternative, puisque c'est le programme
d'implantation de centrales nucléaires qui retient toute l'attention et
la majorité des fonds. Peut-on compter sur l'INRS pour compenser cette
lacune?
L'Hydro, d'un côté, se dit prête à modifier
ses objectifs de développement, advenant, par exemple, un moratoire sur
le nucléaire, et, de l'autre côté, ne sera même pas
en mesure de proposer d'autres solutions étudiées que l'option
nucléaire. Dans une situation de monopole entre privilégier une
solution et l'imposer, la marge est plutôt mince.
Comment justifier de tels agissements, quand l'option nucléaire
est loin de faire l'unanimité et que plusieurs pays et experts envient
notre situation énergétique et notre marge de jeu?
M. Haunes Alfven, prix Nobel de physique, nous aide à
répondre à cette question: "A l'échelle du monde et
à long terme, l'énergie nucléaire
n'est pas nécessaire. Elle est de plus extrêmement
dangereuse pour l'humanité. Des sommes considérables et le
prestige scientifique ont été investis dans la recherche qui ne
visait pas à la découverte des moyens de satisfaire les besoins
énergétiques, mais plutôt à trouver comment utiliser
la technologie nucléaire qui avait servi à l'élaboration
de la bombe atomique. Il en résulte que nous sommes placés dans
une situation où la gent nucléaire peut propager l'idée
que l'énergie nucléaire est la seule réponse à nos
besoins énergitiques".
L'option nucléaire: L'industrie pétrolière, qui
n'est pas réputée pour son manque de fonds, n'arrive pas,
malgré l'aide des gouvernements, à enrayer les naufrages des
pétroliers, et encore moins à réparer les
dégâts. Que penser lorsque de grands spécialistes viennent
nous dire que les mesures de sécurité, dans le cas du
nucléaire, seront telles que tout se passera sans incident pour les 25
000 prochaines années, et que, par conséquent, si nous nous
sommes sentis insécurisés durant quelques instants, c'est tout
simplement que nous n'étions pas bien informés?
L'exploitation de l'énergie nucléaire au Québec ne
comporte pas seulement des dangers, elle présente aussi plusieurs
désavantages. Tout d'abord, c'est une technologie qui fait appel
à une ressource non renouvelable, l'uranium. Au rythme actuel, les
réserves connues et anticipées d'uranium seront
épuisées dans moins de 50 ans, mais les déchets
radioactifs, eux, nous tiendront compagnie plus longtemps.
Nous dépendons d'autres provinces pour nos approvisionnements en
uranium. Nous ne possédons pas, au Québec, la technologie de
pointe en matière de nucléaire. Nous serons donc longtemps
dépendants d'autres volontés et d'autres pays comme les
Etats-Unis, enrichissement de l'uranium, traitement des déchets,
surgénérateurs, fusion, etc., même si le CANDU
diffère des centrales américaines et françaises. De plus,
aux dernières nouvelles, les coûts de construction et
l'exploitation des centrales nucléaires sont, eux aussi, soumis à
l'inflation. Gentilly 2 coûtera au moins $1,1 milliard. Comme le
nucléaire est, pour les financiers aussi, plus risqué que
l'hydroélectrique, par exemple, il nous en coûtera d'autant plus
cher pour financer le nucléaire. En effet, les banques sont
réticentes à financer la construction de centrales
nucléaires, entre autres à cause de l'escalade vertigineuse des
coûts. Les centrales nucléaires n'ont pas la réputation de
créer beaucoup d'emplois à long terme. La transformation de
mégawatts thermiques en mégawatts électriques par
l'énergie nucléaire est l'une des plus inefficaces qui soient
avec des pertes de l'ordre de deux tiers de chaleur. C'est cette chaleur
intense qui nous amène le problème du réchauffement des
eaux, dont les conséquences écologiques sont encore mal
connues.
Les normes sécuritaires strictes qui entourent le maniement de
l'atome vont nous amener un renforcement des contrôles et de la
surveillance policière, d'où une réduction en
conséquence des libertés individuelles et un coût
supplémentaire à attacher au nucléaire.
Or, au mois d'août 1976, l'Hydro-Québec annonce le projet
de construction de 30 à 40 centrales nucléaires à
dômes pour les 25 prochaines années, au coût de
tenez-vous bien! $51 milliards. Alors, comme l'Hydro-Québec ne
s'autofinance qu'à 30% environ, cela signifie des emprunts de l'ordre de
$3 milliards par année d'ici 1985, et de l'ordre de $3,5 milliards
à $5 milliards par année de 1985 à 1990.
Nous croyons que ce sont des charges démesurées pour les
Québécois. Même si on parle de plus en plus de conservation
d'énergie, il ne faut pas oublier que le paiement du nucléaire
repose non seulement sur une augmentation des tarifs, mais surtout sur une
augmentation considérable des ventes d'électricité. De
là à dire que programmes de conservation et programmes
nucléaires créent une situation conflictuelle, il n'y a qu'un
pas, et nous le franchissons, car un programme sérieux et
intégré de conservation d'énergie pourrait compromettre,
par sa réussite, les entrées de fonds devant servir à
payer la facture nucléaire.
Essayons de tirer les leçons qui s'imposent dans le cas du
développement hydroélectrique de la baie James, pour les
appliquer à nos futures décisions en matière de
nucléaire notamment. Nous verrons que plus un projet est ambitieux, plus
le temps de construction sera long et plus la période d'exploitation
nécessaire pour amortir son coût s'allongera dans le futur, plus
les risques d'accidents et de conflits de travail augmenteront, de même
que la liste des imprévus, sans oublier les intérêts qui
courent, l'inflation qui joue et les probabilités de découvertes
technologiques qui rendraient d'autres formes d'énergie plus
économiques.
Je saute à la page 6 pour deux rapides citations, la
première de M. Amory Lovins, qui nous dit: "C'est pourquoi nous croyons
que les avis politiques devraient maintenant commencer à venir de ceux
qui ont essayé de prévenir nos difficultés
présentes et non uniquement de ceux qui les ont causées et qui
dominent encore la planification énergétique. Ceux qui pensent
essentiellement en termes d'extrapolation économétrique, de
centimes marginaux par kilowatt-heure, et d'électrifica-tion
centralisée, ne sont pas les planificateurs qui peuvent traiter de nos
problèmes énergétiques de la façon la plus
constructive. De plus, les enjeux importants de la stratégie
énergétiques ne sont pas techniques et économiques, mais
plutôt sociaux et éthiques; ils ne peuvent être
convenablement perçus par ceux dont la vision est purement technique".
Et, d'ajouter M. Ivan Illich, "leur croyance en l'efficacité de la
puissance les aveugle et les empêche de voir la plus grande
efficacité de sa non-utilisation."
Page 8: II est évident qu'une politique de conservation de
l'énergie doit tenir compte du gaspillage d'énergie relié
à notre production de biens non durables, souvent inutiles, que l'on est
obligé de ramasser, d'enfouir, de brûler, et qui non seulement
épuisent nos ressources naturelles non renouvelables, mais aussi
polluent notre environnement, ce qui implique une nouvelle dépense
d'énergie pour dépolluer.
Ces habitudes de production qui alimentent et découlent aussi de
nos habitudes de consommation doivent absolument être remises en
question, sinon toute politique de recyclage et de conservation ne fera que
jeter de l'huile sur le feu et reportera le problème fondamental de
quelques années, en laissant croire à une manne providentielle.
C'est notre système de valeurs, dont les principales
caractéristiques sont de ne pas être un système
c'est-à-dire de ne pas faire de liens entre ses éléments
et de comprendre de moins en moins de valeurs, qu'il faut changer ou
créer. La superconsommation individuelle de biens et de services a
passé sur nos valeurs et besoins fondamentaux comme un rouleau
compresseur. On est tellement occupé à acheter et à
utiliser nos bebelles qu'on en oublie notre santé, le calme, la
dégradation de notre milieu, les autres, etc. Attention au choc du
futur!
Pourtant, la bonne vieille méthode d'essais et d'erreurs nous a
appris que nous ne pourrons pas continuer longtemps dans la voie où nous
sommes engagés collectivement, surtout au rythme où nous
allons.
En fait, notre situation actuelle dépend en grande partie du
hasard des inventions du siècle dernier et du début de ce
siècle-ci. Or, on tente de nous présenter ce style de
développement comme découlant d'une planification qui aurait
exploré toutes les avenues de choix possibles pour en déterminer
la meilleure. Jusqu'à maintenant, l'homme a réussi tant bien que
mal à s'adapter à ses découvertes technologiques. Ceci
pourrait changer sous peu car, avec les multiples agressions polluantes et les
pressions de notre société de consommation, notre capacité
d'adaptation physique et psychique est sérieusement mise à
l'épreuve et rien n'indique que nous gagnerons la partie.
Notre conservatisme devient dangereux dans la situation actuelle, car il
nous empêche d'envisager ou même d'imaginer une
société qui serait différente de celle que nous
connaissons maintenant. Une société décentralisée
basée sur l'indépendance et l'autosuffisance de groupes moins
nombreux pourrait être une solution nouvelle.
Sans élaborer davantage sur cette alternative, retenons que les
décisions prises actuellement en matière d'énergie et
d'urbanisation vont dans le sens contraire, c'est-à-dire dans le sens
d'une dépendance toujours plus grande des citoyens par rapport à
leurs sources d'énergie (grandes centrales contrôlées par
un petit nombre de personnes, technologie complexe, ressources
importées) leur alimentation, leurs services en général.
Sans présumer d'une solution, il faut au moins se rendre compte que des
choix existent et que des décisions sont prises pour nous tous les
jours.
Ce serait une révolution si le public cessait de croire que les
gouvernements font une réelle planification à long terme. Dans ce
domaine, seules les très grandes entreprises planifient plus loin que
cinq ans et, évidemment, en fonction de leur expansion et de leurs
intérêts. Entre des gouvernements embourbés dans des
impératifs électoraux et des entreprises qui veulent optimiser
leurs profits, il ne reste aux citoyens qu'une solution: Prendre leur
destinée en main et faire preuve de cohérence et de courage pour
résister aux soubresauts de l'actualité quotidienne. Ils devront
se servir de leurs représentants, mais s'en méfier aussi. Sinon,
que les citoyens ne se surprennent pas de voir leurs rêves s'envoler en
fumée et d'assister à une détérioration constante
de la qualité de la vie.
Les citoyens doivent donc chercher au fond d'eux-mêmes ce qu'ils
considèrent être les valeurs essentielles qui doivent guider leur
destinée. Il serait très rafraîchissant pour le
Québec d'innover en trouvant et en appliquant des solutions originales
aux problèmes posés par les limites à la croissance
industrielle. Cela nous changerait de toujours copier ce qui se fait ailleurs
sans discerner les bons apports des mauvais.
Si nous laissons aller les choses, nous allons, par notre silence,
alimenter un système économique et social basé sur une
politique de gaspillage énergétique. Actuellement, le
système industriel se frappe à un problème de
marché. Il faut produire et vendre toujours davantage à un
marché qui a tendance à se stabiliser. Les gens qui
crèvent de faim ne sont pas des gros acheteurs de brosses à dents
électriques. Donc, il faut que la minorité mondiale qui est
capable de se payer les gadgets produits en consomme toujours plus. Vous avez
intérêt à ne pas les faire trop solides, messieurs de
l'industrie. Outre l'augmentation de la consommation à outrance et du
gaspillage énergétique industriel et domestique, l'implantation
de dizaines de centrales nucléaires avec tous les dangers et les
aléas que nous leur connaissons ainsi qu'une augmentation
accélérée de toutes les formes de pollution connues et la
"découverte" probable d'autres formes de pollution seront des
conséquences directes de l'extrapolation des tendances actuelles.
Arrêter le gaspillage, tout le monde est d'accord, mais il ne faut
pas oublier que cela signifie que nous devrons changer radicalement le
système actuel qui est basé sur la croissance économique
continue, et à tout prix, la croissance de la superconsommation, le
jetable après usage, les produits irréparables et l'obsolescence
planifiée; donc, le gaspillage.
En terminant, rappelons que notre eau, notre air et notre sol sont nos
plus grandes richesses dans un monde où la rareté de l'eau
potable, de la nourriture et de l'air non vicié s'accentue
dramatiquement chaque année.
La destruction de la nature est un exemple parfait des contradictions de
notre système industriel qui, suivant le principe de rareté
relative, a réussi à mettre un prix de plus en plus
élevé sur les richesses naturelles les plus répandues:
l'eau, l'air, le sol. Ceci permet de nous vendre le chalet dans le nord, le
grand air, les grands espaces, l'eau propre, les produits "naturels", etc.
En extrapolant continuellement les données du présent et
du passé dans l'avenir, il ne faut pas oublier que non seulement on se
condamne à répéter les erreurs du passé, mais
à les extrapoler aussi.
A ceux qui s'en foutent ou qui trouvent ces propos alarmistes, nous
disons: Vous avez la liberté de ne pas participer à la recherche
de solutions, mais que des solutions soient trouvées ou non, qui que
vous soyez et où que vous soyez, vous n'aurez pas la liberté
d'échapper aux conséquences.
Je passerai maintenant la parole à Mme Solange Vincent.
Mme Vincent: Nous avons consacré la première partie
de cette présentation à un constat de quelques aspects de la
situation énergétique au Québec. Dans cette seconde partie
nous tenterons d'introduire de nouveaux choix énergétiques qui
découlent d'une vision de la société de demain,
basée sur un réaménagement des valeurs prioritaires.
Nouvelles valeurs, nouvelle société. Notre
réflexion sur l'ensemble de ce dossier fort complexe nous amène
à souligner le fait que nos divergences de vues au niveau des solutions
techniques à apporter au problème énergétique des
Québécois ne sont que les conséquences de nos divergences
sur l'orientation de la société et son développement
économique.
Dans une étude intitulée "Réflexions sur les choix
énergétiques français," des chercheurs de l'Institut
économique et juridique de Grenoble expliquent bien cette chronologie
des choix. "Il est impossible de définir à niveau technique une
quelconque politique de l'énergie; celle-ci n'a de sens que par rapport
au projet politique auquel elle appartient. Nous avons montré en
particulier que la demande d'énergie telle qu'elle était
prévue actuellement n'était qu'une extrapolation des tendances du
passé... Lorsqu'on cherche à prévoir les besoins futurs en
énergie, il est fondamental de se demander auparavant quel type de
société nous voulons construire, quel type de croissance nous
souhaitons, quel type de relations nous voulons établir avec les pays du
Tiers-Monde. Ce débat est un débat politique sans lequel aucune
politique de l'énergie à long terme ne peut être
définie."
Donc, définissons quels pourraient être les principaux
traits de ce nouveau visage de la société. Tout d'abord, nous
croyons qu'une renégociation du "contrat" entre l'homme et le milieu
naturel permettra aux deux parties de maximiser la qualité de leurs
relations et d'en tirer des avantages insoupçonnés à long
terme. Il faut donc cesser de planifier la destruction du milieu naturel, sinon
nous risquons de prendre dramatiquement conscience des limites de la
planète.
L'utopie, c'est de croire que l'on pourrait continuer longtemps la
façon dont nous fonctionnons présentement. Ensuite, la
société future devra être beaucoup plus
décentralisée afin que soient ranimées les relations
humaines qui s'asphyxient graduellement dans nos grandes agglomérations.
Ceci implique une plus grande prise en charge de l'individu par lui-même
pour une plus grande autonomie.
De plus, cette qualité de la vie, dont on nous parle tant, doit,
selon nous, emprunter le chemin de l'enrichissement du travail. C'est au
travail que la majorité des citoyens passent une grande partie de leur
vie. Il faut donc que la relation homme travail laisse une trace de
satisfaction.
Il faut aussi, dans une société à construire,
réhabiliter les mots créativité et motivation, au niveau
individuel et collectif, et, en même temps, puisque nous devons
réapprendre à marcher, profitons donc de ce nouvel
équilibre pour faire les choses plus simplement.
Nous ne prônons pas un retour au passé, mais nous croyons
que la démarche vers le futur peut prendre l'allure d'un escalier en
colimaçon. On a l'impression de revenir à la même place,
mais, en fait, on se trouve à un palier différent de celui que
l'on vient de quitter et les nouvelles relations ne peuvent plus être les
mêmes que les précédentes.
La conservation. Aucune technologie ou technique ne peut plus
sûrement que la conservation nous permettre d'envisager et de
résoudre le problème de l'épuisement exponentiel de nos
ressources énergétiques non renouvelables. La réduction de
la croissance de la demande par la conservation représente justement la
clef de voûte énergétique du futur. Ici, je voudrais
démontrer que c'est étrange que l'on nous parle de conservation
dans le mémoire de l'Hydro-Québec, mais cela ne réduit pas
le pourcentage de la croissance de la demande. Alors, ce sera pourquoi la
conservation? C'est le même pourcentage de 7 3/4% auquel on se
réfère dans le mémoire de l'Hydro-Québec que celui
de sa participation à la commission parlementaire de cet
été. Alors, la conservation on a fait une pieuse remarque
sur la conservation cela ne s'est pas reflété dans les
investissements proposés, ni dans la réduction de la croissance
de la demande.
La conservation nous permet d'envisager le scénario
énergétique des cinquante prochaines années d'une
façon complètement différente. Les investissements dans la
conservation concurrencent, dans cette nouvelle optique, les investissements
dans de futurs projets hydroélectriques ou nucléaires. Ceci
signifie que la conservation nous permettrait, en ménageant nos sous, de
franchir l'étape de transition vers la seule utilisation des ressources
énergétiques renouvelables et moins polluantes.
Mais ce n'est pas tout de parler de conservation d'énergie,
encore faut-il être consistant entre l'importance du rôle
accordé à la conservation dans la politique
énergétique et les sommes allouées pour qu'elle puisse
remplir ce rôle. Il est certain que la conservation demande des
ajustements techniques dans plusieurs domaines et qu'il faudra faire des
investissements à ces niveaux.
M. Amery Lovins, physicien et spécialiste des questions
énergétiques, arrive à la conclusion que la conservation
représente une solution suffisante en elle-même qui nous
permettrait de faire l'économie de programmes hydroélectriques ou
électro-nucléaires fort coûteux qui doivent être
amortis à long terme. M. Lovins, qui affirme que vouloir satisfaire aux
besoins énergétiques au jour le jour nous amène à
une impasse, utilise une période de cinquante ans pour établir
son scénario énergétique. D'après lui, une
société de conserva-
tion n'accroîterait sa demande globale d'énergie que de
moins de 20% en 50 ans.
Son scénario tient compte de mesures d'isolation,
d'amélioration de rendement des appareils électriques, de
récupération thermique dans les secteurs commercial et
industriel, d'augmentation du transport en commun, de rationalisation des
horaires du transport aérien, d'économie des programmes
coûteux, d'exploration du pétrole et du gaz.
Cela, c'est une question à laquelle on ne réfléchit
pas beaucoup, le bilan énergétique, ce que ça prend
d'énergie pour développer des programmes nucléaires.
Quand, effectivement, a-t-on un retour d'énergie? Surtout quand il y a
accélération de ces programmes nucléaires, avec ce que
ça prend pour les construire par rapport à ce que cela donne, et
surtout pendant une période de temps donnée. Il est très
important de savoir que plusieurs programmes électro-nucléaires
en Europe ne donneront de l'énergie, en fait, que vers les années
2000.
M. Lovins prévoit le recours graduel au solaire et l'utilisation
d'alcool de bois, méthanol et étha-nol, pour remplacer le
pétrole et le gaz. Comme nous sommes en période de transition, M.
Lovins prévoit dans son scénario le recours à des
équipements énergétiques moins rentables à long
terme, mais beaucoup moins coûteux que les superprojets. En effet, des
investissements massifs à long terme rendront difficiles la conversion
à des ressources renouvelables et à des technologies moins
complexes lorsque, techniquement, ces ressources et technologies deviendront
plus économiques.
Ce qui veut dire que ce n'est pas vrai qu'on peut faire du shopping et
se donner un peu de nucléaire, un peu de toutes sortes de choses. Quand
on s'engage dans le nucléaire, ça ferme la porte à
d'autres solutions.
M. Robert Boyd, commissaire à l'Hydro-Québec, a
déclaré qu'une réduction de la croissance de la demande
à 4,5% au lieu de 7,5% pourrait reporter de quelques années
l'avènement du nucléaire. Fort bien, c'est de ça que nous
avons besoin, de temps. Ce qu'il est important de retenir, c'est la ligne de
force qui se dégage des possibilités de la conservation. Il est
beaucoup plus rentable, à tous les points de vue, d'épuiser la
conservation avant d'épuiser les ressources non renouvelables et avant
de se lancer dans des grands projets de développement
énergétiques voraces en énergie et en capitaux.
Il ne faut pas oublier, en terminant, que la valeur de la conservation
dépend de la philosophie qui l'anime et des objectifs poursuivis. Quand
le Conseil des sciences du Canada, par exemple, nous présente sa version
de la conservation, on ne peut que s'étonner de
l'irresponsabilité de sa démarche. Ces messieurs voudraient
bâtir cette société de conservation sur le dos des
démunis en réservant aux privilégiés d'ici et du
reste du monde occidental l'accès aux ressources en mettant celles-ci
hors de la portée des économiquement faibles par le processus
d'augmentation abusive des prix.
La SVP veut se démarquer de cette approche de la conservation qui
nous semble aberrante. Les hausses des taux d'électricité
annoncées par l'Hydro-Québec, 75% en quatre ans, s'inscrivent
dans cette approche. Les plus pauvres vont devoir se priver ou même se
faire couper le courant alors que cela n'affectera en rien les riches.
Ressources renouvelables et technologies douces.
Est-ce qu'il faut passer plus rapidement, je ne sais pas...
Le Président (M. Laplante): C'est parce qu'il reste dix
minutes. Vous avez un rapport drôlement intéressant. Si vous
étiez capable de réduire le reste pour qu'on puisse poser des
questions.
M. Lacombe (Pierre): On va essayer d'accoucher, M. le
Président, dans cette enceinte centenaire. On va essayer de prendre
l'avion, même si ce n'est pas très bon, pour survoler.
A la page 16, vous avez les ressources renouvelables et technologies
douces. Comme vous pouvez vous en douter, on est un peu pour cela. Le
recyclage, on considère que c'est extrêmement intéressant
également, d'autant plus que cela permettrait l'apparition de beaucoup
d'entreprises québécoises dans ce domaine.
L'optimisation du système actuel, c'est aussi une chose
très importante dans une politique énergétique, parce que,
comme vous le savez de toute façon, on a évalué à
l'heure actuelle qu'il suffit de 70% du réseau actuel pour
répondre à la demande de base d'environ 95% de la consommation,
alors que 30% de la puissance installée ne servent qu'à fournir
5% des besoins. Tout est là, l'optimisation du système, c'est
d'aller vers des centrales dites à réserve pompée, vers
l'hydrogène, le stockage d'hydrogène. On rejoint, avec le
stockage d'hydrogène, une façon de régler notre
problème d'exportation d'énergie vers les Etats-Unis. On pourrait
peut-être la stocker ici plutôt que de la leur vendre à des
prix très réduits.
Politique de recherche scientifiqe. Rapidement, il faut absolument
qu'elle soit réorientée parce que les présentations faites
par l'INRS et l'IREQ nous ont laissé, pour le moins, songeurs. Avec la
fusion nucléaire, en 2025, on ne va pas tellement loin avec cela. Cela
ne résout pas grand-chose et, même s'ils sont en contact avec tous
les laboratoires qu'il y a dans le monde, si nous ne sommes pas prêts
à faire la transition aux ressources renouvelables, cela ne servira
à rien de savoir que les autres les appliquent.
J'en passe une tonne. La fusion, ce n'est pas une panacée. Il y a
énormément d'inconnues. Au niveau de la recherche, on ne sait pas
ce que cela va donner. Au début, on pensait que le nucléaire
allait régler tous nos problèmes. Il ne faut pas tomber dans le
même raisonnement, en pensant que la fusion va régler tous nos
problèmes. Il y a énormément de points d'interrogation
avec la fusion et il faudrait y voir de plus près.
En ce qui concerne les scientifiques, il faut noter qu'au Québec
ils ne se manifestent jamais. Tout le monde en parle, tout le monde s'en
sert,
mais les scientifiques, on ne les entend que rarement. On trouve qu'il
serait important qu'ils jouent leur rôle dans la société et
qu'ils se fassent entendre. Quand il y a des décisions qui sont prises,
s'ils ne sont pas d'accord, je pense que, socialement, c'est important qu'ils
le disent. Il serait peut-être intéressant aussi de s'arranger
pour qu'ils ne soient pas dans une situation de conflit d'intérêts
permanent.
Vu qu'ils sont obligés de signer certains codes d'éthique,
ils ne peuvent rien dire, en fin de compte. Ils sont pris à la gorge,
parce que, s'ils commencent à parler, ils ont juste à se chercher
un emploi ailleurs.
L'attitude c'est intéressant de
l'Hydro-Québec quand elle nous parle, par exemple, du problème
des déchets radioactifs. Ces gens-là sont certains qu'on va
trouver des solutions au problème des déchets. Ils ont une
attitude très positive face au problème des déchets, mais
ils ont, par contre, une attitude tout à fait différente face aux
technologies douces. C'est un peu bizarre. S'ils avaient la même attitude
face aux technologies douces, ce serait peut-être intéressant de
voir ce qu'on peut faire de ce côté-là.
Décentralisation énergétique. Evidemment, ce n'est
pas en faisant le superprojet de la baie d'Un-gava et en essayant de construire
des compagnies autour qu'on va aller bien loin. La décentralisation
énergétique a énormément d'avantages, entre autres
celui que les gens se sentent un peu plus en possession de leurs moyens
énergétiques. Ce serait peut-être plus facile de leur
parler de conservation que de leur en parler quand ils entendent parler de la
baie James où la plupart des gens n'iront jamais, de leur parler d'une
production beaucoup plus locale, beaucoup plus près de chez eux.
Psychologiquement, le lien se ferait beaucoup plus facilement.
L'autosuffisance énergétique. Encore là, on
considère que, en termes d'autosuffisance, il s'agit de voir qu'on
dépend du pétrole, du gaz. Il s'agit de se tourner vers des
ressources qu'on a ici. Il y en a, ce n'est pas cela qui manque, pour couvrir
l'ensemble de nos besoins, d'ailleurs.
Nouvelle optique de tarification. Les critères qui devraient
soutenir une nouvelle tarification de l'électricité sont, selon
nous: le contrôle de l'offre, l'incitation au développement ou non
d'un secteur de notre économie, et la durabilité et/ou
l'utilité sociale des biens et services fournis. Evidemment,
l'application de ces critères demande qu'une orientation
économique et sociale ait été définie avant.
Dans le domaine de l'agriculture, ce serait intéressant,
peut-être par une tarification, d'encourager ce domaine parce que c'est
en train de péricliter au Québec.
Il est à souligner aussi qu'un des domaines où le
gaspillage énergétique est le plus élevé, c'est le
domaine de l'alimentation. Vous avez des taux de... Quand vous faites un boeuf,
si vous prenez les mêmes grains de provende, vous pouvez nourrir beaucoup
plus de gens. Tout le réseau de transport, tout ce qui concerne
l'alimentation, cela n'a pas été touche. On n'aura pas le temps
d'y toucher nous non plus, mais il y a énormément à faire
de ce côté aussi, strictement au point de vue
énergétique.
L'évaluation de la durabilité et de l'utilité d'un
produit, en accord avec les priorités qui vont être
définies, doublées d'une analyse énergétique,
quantité d'énergie nécessaire tout au long du cycle du
produit, permettrait d'en arriver à avoir des taux
d'électricité croissants, plus un produit jugé non-durable
ou inutile, d'autant plus si la production de ce produit est
énergivore.
Vers une stratégie énergétique
québécoise. A la page 28, je pense que cela vous
intéresse. Le gouvernement du Québec a annoncé qu'il
définirait sa politique énergétique d'ici la fin de la
présente année. Mais pour définir une politique
énergétique judicieuse et permanente pour les trois ou quatre
années à venir, il faut tout d'abord jeter un coup d'oeil
à long terme, au moins cinquante ans, pour essayer d'actualiser dans le
futur, compte tenu des données et des contraintes connues aujourd'hui,
ce que nous voudrions y retrouver quand nous serons rendus là.
Ensuite, nous pourrons établir une politique
énergétique consistante en fonction d'où nous voulons
aller et non en fonction uniquement d'où nous sommes rendus. C'est
pourquoi nous parlons de stratégie énergétique quand nous
faisons référence à cette démarche du futur vers le
présent, qui est employée d'ailleurs par M. Amory Lovins. Dans
cette démarche, il faut distinguer trois étapes: la
période présente, la période de transition
énergétique et la période d'utilisation de ressources
renouvelables, non dommageables pour le milieu naturel et
économique.
Il faut donc accepter un chevauchement et une diversification des
ressources énergétiques qui tiennent compte de ces étapes
en plus d'orienter notre recherche en fonction de ces étapes. Il faut,
de plus, ne pas investir tous nos fonds dans des projets qui prennent 10 ans
à se construire et de 25 à 30 ans de plus pour s'amortir. C'est
assez évident, je pense.
Afin de pouvoir financer la conservation, la recherche et le
développement, il faudrait pouvoir peut-être contrôler
davantage l'épargne des Québécois et la canaliser vers ces
domaines au lieu d'aller emprunter sur les marchés étrangers.
Si le gouvernement veut inciter les citoyens à réduire
leur consommation d'électricité en augmentant les prix, nous
croyons que cette mesure ne servira pas à grand-chose on parle
des prix domestiques si nous ne réussissons pas à faire
comprendre aux citoyens la nécessité de réduire leur
consommation. Si on prend l'exemple de la hausse du prix des paquets de
cigarettes ou l'augmentation du prix du pétrole, cela n'a pas
empêché les Québécois de continuer à fumer
autant, sinon plus, et cela n'a pas empêché GM, en 1976, de vendre
de grosses voitures comme elle n'en a jamais vendu. On ne fait pas appel
à un calcul rationnel, on fait appel à des habitudes et aussi
à une pression publicitaire. Il faut se rendre compte de cela.
Il faut éviter un transfert massif du pétrole à
l'électronucléaire ou à l'hydroélectricité,
parce
que ces engagements financiers nous mettraient dans une situation
d'impossibilité d'action au niveau de la période de
transition.
Le pétrole peut être remplacé par les alcools de
bois, méthanol, éthanol; le métane, tiré des
déchets organiques; l'hydrogène qui nous vient de
l'électrolyse de l'eau.
Pour mener à bien une politique énergétique, il
faut que le gouvernement ait le contrôle sur la production
énergétique québécoise, c'est-à-dire, pour
le moment, sur l'Hydro-Québec. Il faut absolument éclaircir la
situation de qui contrôle qui, ceci, dans l'intérêt du
gouvernement, de l'Hydro-Québec et de tout le public, parce que des
guerres internes comme celles qui ont eu lieu lors du projet de
développement de la baie James, il ne faudrait pas que cela se
reproduise, parce que c'est nettement au-dessus de nos moyens financiers et du
temps qui nous reste. C'est une longue marche que nous entreprenons. Le jeu des
moyens ne doit pas nous faire oublier la discussion des objectifs. Nous croyons
qu'une approche plus humaine des problèmes de production et de
conservation d'énergie a toutes les chances de succès dans ce
monde de "surhommes" de la consommation et de la technologie.
Le Président (M. Laplante): Bon.
Mme Vincent: ... une petite conclusion. Nous croyons qu'il faut
maintenant ouvrir le dossier de l'énergie à toute la population.
Nous sommes à une époque décisive de notre histoire dans
ce domaine et l'on note une carence importante d'information chez les citoyens
à ce sujet. Il est donc urgent de commencer à sensibiliser la
population sur les enjeux des décisions que nous allons prendre sur le
plan énergétique. Il est important aussi d'en faire un
véritable débat public, pas uniquement réservé aux
spécialistes, mais ouvert à toute la population, comme il s'en
est tenu un en Suède durant deux ans. Nous croyons que cette mission
pourrait fort bien être remplie par le futur bureau de conservation de
l'énergie, que M. le ministre Guy Joron, a eu le mandat de mettre sur
pied. Une telle mission implique que des moyens techniques et des ressources
humaines proportionnels à la population visée et à
l'importance du sujet seront mis en branle afin de permettre une prise de
décision éclairée.
Si on accordait les mêmes sommes à l'information sur les
ressources renouvelables que celles dépensées pour la promotion
du nucléaire (le tout-à-l'électricité) les
Québécois posséderaient une information plus
complète pour juger de la situation. En ce qui concerne l'option
nucléaire, nous vous rappelons que, d'après l'enquête de
l'Association nucléaire canadienne, rendue publique à l'automne,
les industriels, les fonctionnaires et les politiciens figurent parmi les gens
les moins informés sur cette option et... les plus en faveur. Toujours
d'après cette étude, la population possède très peu
d'information sur les ressources énergétiques renouvelables et
sur les dangers du nucléaire. En effet, 83% des personnes
interrogées ont été incapables de mentionner une source
d'électricité autre que l'hydroélectricité, les
combustibles fossiles et le nucléaire. De plus, seulement 23% de la
population interrogée attribue un risque aux déchets radioactifs.
Si un référendum sur l'énergie nucléaire se tient,
il faudra donc s'assurer au préalable que la population et les
dirigeants ont été suffisamment et complètement
informés.
De plus, il ne faut pas restreindre le débat public à la
stricte question énergétique car les discussions à ce
niveau n'ont de sens qu'à la lumière de décisions beaucoup
plus fondamentales sur la société et l'économie de demain.
Donc, il faut se donner le temps de bien s'informer et de bien informer la
population des perspectives énergétiques et de leurs
conséquences respectives en termes de coût, de pollution, de
dépendance et de type de société engendrée. C'est
pourquoi la Société pour vaincre la pollution demande à la
population du Québec et à son gouvernement la tenue d'un
moratoire sur l'implantation des centrales nucléaires au Québec,
de même que sur les superprojets hydroélectriques prévus
à la baie d'Hudson, à la baie d'Ungava, avec détournements
de rivières et inondations de forêts.
M. Lacombe: C'est dans une période... Trente secondes, M.
le Président, on arrive. C'est dans une période où les
perspectives économiques sont qualifiées d'inquiétantes
qu'il faut prendre conscience de notre richesse, car notre véritable
richesse se trouve dans notre manière de façonner l'avenir, dans
la créativité dont nous ferons preuve collectivement. C'est aussi
dans un moment où le taux de chômage est élevé que
nous devons réaliser l'ampleur du travail à accomplir. Cette
tâche pourra, par contre, être enrichie par l'amélioration
de la qualité des emplois. En ce sens, nous offrons notre collaboration
au nouveau gouvernement et aux organisations impliquées dans la solution
du problème énergétique, en tant que groupe qui rallie
toujours plus de citoyens autour d'une vision de l'avenir qui prend racine dans
l'homme et la nature.
Des citoyens qui commencent à trouver important de partager les
mêmes valeurs fondamentales et qui sont prêts à ressentir
plus définitivement et à vivre une société nouvelle
qui aurait affiché "cul-de-sac" sur les avenues de "l'individualisation"
et de la cancérisation des structures, de la consommation, de la
croissance et de la technologie.
Nous avons dit!
Le Président (M. Laplante): Bon! Je vous remercie. Il y
aura trois questions qui seront posées, parce que le temps nous manque
actuellement. On aurait aimé, honnêtement, en poser beaucoup plus
que ça. M. le ministre.
M. Joron: Madame, messieurs, je comprends que vous aviez
énormément de choses à dire et que vous auriez aimé
pouvoir les dire toutes in extenso. Je vous comprends d'autant mieux que
moi, je me suis livré un peu au même exercice avant les
élections et ai mis trois ou quatre mois pour écrire un petit
bouquin sur les mêmes sujets. Peut-être parce que je suis en grande
partie d'accord avec ce que vous avez dit, j'allais vous dire que, quant
à moi, en tout cas, je prends le risque, même si ça peut
peut-être ne pas paraître gentil pour les autres qui ont
déposé avant vous, de vous dire mon appréciation
personnelle. J'estime que c'est le mémoire le plus intéressant
qu'il nous a été donné d'entendre jusqu'à
maintenant. Vous n'êtes pas les seuls à avoir tourné autour
de la question, mais peut-être les premiers à l'avoir mise
carrément sur la table et à en avoir ouvert toutes les
facettes.
Vous savez, quand on a convoqué cette commission, d'une part,
dans une démarche qui nous conduit à la définition d'une
politique énergétique pour le Québec, on a dit, à
ce moment et tout le monde ne l'a pas compris qu'il ne s'agissait
pas d'un exercice pour savoir si on allait avoir trois barils de pétrole
de moins, quatre barils de pétrole de plus, si, à l'avenir, il
viendrait de telle place ou plutôt de telle autre place, quel prix cela
allait coûter, si le taux de croissance allait être de 7,7% ou bien
de 6,2%. Finalement, ce n'était pas ça du tout, l'exercice vers
lequel on s'en allait. C'est pourquoi, hier soir, d'ailleurs, je qualifiais
d'un peu décevants les mémoires des pétroliers, parce que,
comme d'autres, tous ces gens prennent tout simplement la situation du
passé et la projettent vers l'avenir.
Vous, vous nous dites, en somme, que si on s'apprête, pour la
première fois, à définir une politique
énergétique au Québec, c'est le problème global de
l'orientation future de toute notre société que pose le
problème énergétique. Moi, c'est toujours dans ce sens que
je l'ai compris. Les travaux de cette commission, de même que les travaux
que le ministère entreprendra dans la rédaction de son livre
blanc, nous conduisent exactement à ça. Ce qu'on a à
débattre, avant qu'on accouche de cette politique
énergétique, c'est justement ça. Combien de croissance,
quel type de croissance on veut dans l'avenir, quel type de
société? Ce qui, comme vous l'avez souligné, implique des
enjeux sociaux considérables, une réorganisation de tout
l'aménagement de notre territoire, de la façon dont on construit
nos villes, nos réseaux de transport, le type de croissance industrielle
aussi, de développement économique ou industriel qu'on veut
poursuivre. C'est tout ça. C'est ça la grosse question.
La grosse question, en somme, à mon avis, ce n'est pas de savoir
si le nucléaire va arriver en 1993 ou en 2003, selon que le taux de
croissance aura varié de quelques décimales. La question
fondamentale, finalement, porte sur le quantum de l'énergie qu'on veut
utiliser. Et quand on a dit que le quantum, la quantité doit être
telle, c'est parce qu'on a une idée des besoins, de l'utilisation
à laquelle cette énergie va servir. Donc, on a défini les
besoins, et, en définissant les besoins, ce qu'on se trouve à
faire, finalement, c'est définir un mode de vie et une
société.
Vous avez posé le problème de front et je vous en
félicite. Ceci dit, ça n'a pas réglé notre
problème. On ne sait pas comment on va arriver à tout ça
et comment on va l'articuler, cette politique. J'ai des questions à vous
poser. Mais avant de vous poser ces questions, je voudrais dire quelques mots
à la décharge de l'Hydro-Québec.
Vous êtes très sévère vis-à-vis de
l'Hydro-Québec dans votre présentation, et parfois, je pense, un
peu injustement. Parce qu'il ne faut pas prendre l'Hydro-Québec pour le
ministère de l'Energie. Il ne faut pas lui mettre tous les
péchés du monde sur le dos.
L'Hydro-Québec, d'après les pouvoirs que la Loi
d'Hydro-Québec lui confère, n'a pour mandat que de vendre
l'électricité que les consommateurs lui demandent. C'est tout.
Elle n'a pas le mandat de faire la planification énergétique du
Québec, ni de décider combien d'électricité on
devrait avoir à telle époque. L'Hydro-Québec, selon le
principe de l'ancienne loi, n'a qu'à s'organiser pour ne pas manquer
d'électricité quand les consommateurs lui en demandent.
Alors, tant que la loi n'est pas modifiée, c'est évident,
elle continue de fonctionner selon ce mandat. On ne peut pas lui reprocher de
faire des projections de différents taux de croissance, même si
cela mène, comme vous le dites, parfois à des investissements
financiers d'une telle ampleur que cela devient absolument effarant. C'est une
chose que je voulais dire. L'Hydro-Québec sait très bien que,
maintenant que nous sommes dans une situation énergétique, depuis
la crise des deux ou trois dernières années, radicalement
différente, il ne pourra plus en être dans le futur comme il en a
été dans le passé.
Elle sait très bien aussi, si vous voulez individualiser la
chose, que celui qui détermine la politique énergétique du
Québec, ce n'est pas l'Hydro-Québec, mais le ministre
délégué à l'énergie. C'est nouveau et, avant
d'établir cela, on est ici justement pour définir tous ensemble
cette politique.
Seulement une petite chose aussi pour ne pas faire apparaître
l'IREQ, l'institut de recherche de l'Hydro-Québec, comme une
espèce de boîte à démons qui font des complots
nucléaires; il faut bien mentionner que les trois quarts des fonds de
l'IREQ vont à des problèmes comme la transmission de
l'électricité, les transformateurs, les
génératrices, l'étude, l'analyse, les tests de tout cela,
les problèmes de transport, de réseaux, de tension et toutes ces
choses.
Il n'y a finalement qu'une très faible partie qui va au
nucléaire, encore que la principale porte sur la fusion et non pas la
fission. Je ne voudrais pas que subsiste l'idée que l'IREQ consacre tous
ses fonds à la recherche de la fission nucléaire. Ce n'est pas
exact.
Ceci posé, revenons aux questions principales que soulève
votre mémoire. Je commencerai par une question très
générale, si vous voulez. Vous avez décrit la situation de
l'avenir en trois étapes. Partant de la situation actuelle, vous nous
dites: II va y avoir une période de transition basée sur la
conservation. La conservation me fait penser à une autre chose,
me rappelle une autre chose que vous avez dite au sujet de
l'Hydro-Québec. Vous dites: L'Hydro-Québec, tout en nous parlant
de conservation, n'a pas l'air d'y croire parce que, d'un autre
côté, elle nous dit aussi qu'il y aura un taux de croissance
très élevé.
Mais là, il ne faut pas oublier deux choses. Ce n'est pas que
l'Hydro-Québec ne croit pas à la conservation. C'est qu'en
même temps l'Hydro-Québec vise un pourcentage plus grand dans le
bilan énergétique total. Alors, il peut y avoir conservation tout
en ayant une croissance considérable de l'Hydro-Québec parce
qu'elle pourrait être appelée à remplir un plus grand
pourcentage du bilan énergétique total. Ce n'est pas une
croissance pour la croissance à ce moment. C'est de la substitution.
Mais je reviens à ma question principale, les trois
étapes: l'étape présente, l'étape de transition et
l'étape que vous avez appelée la période d'utilisation des
ressources renouvelables.
J'aimerais vous demander de les cerner un peu dans le temps. Combien
d'années voyez-vous à chacune de ces étapes et, à
l'intérieur de chacune de ces étapes, comment se modifient,
graduellement, les sources énergétiques qui composent le bilan
total énergétique? Comment cela se modifie-t-il entre-temps?
Comment graduellement diminue le pétrole du bilan? Qu'est-ce qui
le remplace à partir de telle date, etc? Vous avez été
pressé. Si vous aviez eu le temps de tout le lire cela aurait
peut-être fourni la réponse à ma question.
Pourriez-vous nous cerner cet aspect de votre mémoire, qui me
semble fondamental?
M. Lacombe: Vous relevez le fait qu'on est dur avec
l'Hydro-Québec. Permettez-moi de relever le fait que le nucléaire
est une technologie dure aussi. En ce qui concerne l'IREQ, on n'a jamais eu
d'information à l'effet... Je pense que je me suis peut-être mal
exprimé tantôt, mais je parlais effectivement de fusion.
Absolument pas de fission.
Les trois étapes. L'étape actuelle, c'est celle où
le gouvernement du Québec va établir sa politique
énergétique, c'est l'étape de consultation, de mise en
branle et de constat de la situation, regarder ce qu'on a et ce qu'on n'a pas.
Je vais essayer de donner une réponse courte, parce qu'il y a quand
même des éléments assez importants de la réponse qui
se trouvent dans le mémoire, pas le résumé, dans le
mémoire complet. L'étape de transition devrait commencer le plus
tôt possible et se terminer, selon les efforts qu'on va y mettre. Si on
veut ménager le chou et la chèvre et qu'on veut faire plaisir
à tout le monde et qu'on ne veut pas, par exemple, du point de vue des
emplois, fermer des industries extrêmement énergivores et prendre
cette énergie pour peut-être créer deux fois plus
d'emplois, cela va dépendre du courage parce que je pense que
c'est comme cela que cela va s'appeler du gouvernement face aux
décisions concernant l'énergie.
M. Joron: Si vous permettez, il n'y a pas seulement une question
de courage, comme vous dites, là-dedans, il y a la question de savoir,
si on enlève quelque chose, en l'enlevant, s'il y a quelque chose qui
peut le remplacer tout de suite, parce qu'on ne peut pas laisser le vacuum. Des
fois ce n'est pas seulement une question de courage, c'est la question d'avoir
un substitut qui prend la place de l'autre affaire tout de suite. On ne peut
pas laisser le monde en chômage.
M. Lacombe: D'accord.
Mme Vincent: J'aimerais dire, à ce niveau-ci, que pour
faire une conversion c'est possible. La conversion d'une énergie de
temps de paix à une énergie de temps de guerre s'est faite en
neuf mois aux Etats-Unis. C'est possible quand la volonté y est.
M. Lacombe: Donc, je continue assez rapidement, tout en sachant
que la réponse que je vais vous donner est incomplète; ne me le
dites pas, je vous le dis.
La période de transition, donc, va dépendre des
énergies qu'on va y mettre. On peut l'évaluer peut-être au
tournant du siècle. Si on regarde les scénarios de Amory Lovins,
si on regarde les scénarios de la fondation Ford, on peut
l'évaluer peut-être à 25 ans, mais cela dépend,
encore là, de la recherche que nous allons faire ici. Parce que les
ressources renouvelables ne peuvent pas s'appliquer du jour au lendemain. On va
commencer, on va peut-être en utiliser un centième et ensuite on
va grossir, parce que cela prend des expériences. L'expérience de
La Macaza est tout à fait intéressante du point de vue du
solaire. Cela va dépendre donc des fonds de recherche, parce que ce
n'est pas le temps de décourager la recherche et dire: On retourne
à la chandelle. C'est justement le contraire. Il faut encourager la
recherche et il faut l'orienter. Cela aussi va être un critère
très important dans la longueur de la période de transition. Il y
a des découvertes importantes à peu près à tous les
mois, dans le monde, sur les technologies douces. Les Australiens viennent de
sortir quelque chose d'assez révolutionnaire concernant le solaire, qui
augmente le rendement du solaire. C'est un impondérable, le rythme de
découvertes concernant les technologies douces qui vont se faire dans le
monde et qu'on va pouvoir appliquer ici, acheter le "know how" comme on le fait
pour le nucléaire. Soit dit en passant, pour le nucléaire, on n'a
pas le "know how". On achète tout ou presque à
l'extérieur, sauf le mode d'emploi en français qu'on nous donne
pour construire les centrales, mais c'est à peu près tout.
Il est difficile d'avancer des chiffres, parce qu'on pose un paquet
d'hypothèses, ce qui nous amène peut-être vers 2025
à passer le cap, c'est-à-dire à fonctionner plus avec des
énergies nouvelles que des énergies conventionnelles, à
basculer, en fin de compte.
Mais des découvertes fondamentales dans les
quinze prochaines années et peut-être deux ou trois crises
du pétrole vont simplement accélérer ce
phénomène. Parce que quand les Américains ou les Russes ou
d'autres vont s'y mettre, ça va aller assez vite.
Je m'excuse d'être obligé de répondre dans ces
termes, parce que tout ce qu'on peut faire pour répondre à une
question comme ça, c'est de répondre avec un scénario,
deux scénarios, dix scénarios.
M. Joron: Si vous permettez, est-ce que je vous résumerais
correctement si je disais ceci? A partir d'aujourd'hui ou du moment ou une
politique énergétique globale comme ça entre en
application jusqu'à la fin du siècle, par exemple, jusqu'en l'an
2000, une génération, ce serait une période de transition
où on passerait des énergies dures vers les énergies
douces, une période qui serait au départ fondée
essentiellement sur l'économie d'énergie, la rationalisation de
son utilisation, donc avec un abaissement graduel du taux de croissance, la
demande globale énergétique tendant progressivement vers
zéro, 1% ou quelque chose comme ça, la nouvelle période
commençant avec le XXIe siècle. Ce serait une période
pendant laquelle vous nous donnez une génération, en somme, pour
modifier nos habitudes, nos valeurs, notre façon de vivre, notre
façon d'aménager nos villes, notre façon de bâtir
notre économie, de réorienter notre développement
économique et de refaire la structure industrielle du Québec.
C'est à peu près ça le projet que vous nous tracez
jusqu'à l'an 2000?
M. Lacombe: Non, ce n'est pas ça. Si on situe à
2025 la période où la balançoire va changer de bord,
ça donne quand même un peu moins de cinquante ans. Or, dans
cinquante ans, un peu par construction mentale, on arrive à une
période où on fonctionne encore à environ 50% avec des
énergies conventionnelles, et j'inclus l'hydroélectricité
là-dedans. Cela nous mène à plus... on a le temps de faire
plus d'un enfant en 50 ans.
Mme Vincent: J'aimerais ajouter ceci. Pendant cette
période, il n'y a pas que la conservation d'énergie, les
ajustements techniques et tout ça; il y a aussi l'introduction des
technologies douces, comme déjà certaines provinces ont
commencé à le faire. La Nouvelle-Ecosse et Nle-du-Prince-Edouard
ont refusé de participer à la construction du nucléaire de
Pointe Lepreau au Nouveau-Brunswick. A ce moment, elles ont
décidé de développer ce qui est particulier chez elles,
c'est-à-dire le vent, l'énergie du vent. Les gens peuvent se
brancher sur le réseau. De cette façon, c'est économique
à la fois au point de vue de l'énergie, mais c'est
économique pour les gens, ça leur fait faire des
économies. Ils se trouvent à donner de l'énergie au
réseau quand il y a des périodes de vent et à en prendre
quand ça devient plus calme.
Ensuite, ces technologies douces vont être introduites
graduellement. Donc, on ne compte pas seulement sur la conservation pour faire
la transition.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Merci, M. le Président, je vais essayer de
prendre le moins de temps possible. Je ne veux pas faire un long exposé,
mais j'aimerais quand même dire que j'ai assisté presque sans
interruption, depuis le début, à ces séances pendant
près de six jours maintenant, et l'impression qui se dégage d'un
très grand nombre de contributions, c'est malgré tout un certain
pessimisme. On a évidemment des problèmes et des solutions
à court terme, qu'il s'agisse de n'importe quelle des formes
traditionnelles d'énergie, mais si on se fie à l'ensemble des
mémoires je pense bien que ce n'est pas dû à la
fatigue de ceux qui siègent à la commission, mais c'est vraiment
un fait observable dans les mémoires il y a, sur un horizon de 25
ou 30 ans, beaucoup d'incertitude, c'est le moins qu'on puisse dire,
peut-être même la probabilité d'une espèce de
catastrophe, parce que la demande et les ressources disponibles ne semblent pas
compatibles.
Votre mémoire, dans le fond, nous donne une très forte
raison d'espérer. Il y a beaucoup d'optimisme qui se dégage de ce
que vous dites, puisque vous dites qu'il faut avoir confiance que la recherche,
dans les domaines de technologie douce, les nouvelles formules d'utilisation et
de production d'énergie, va nous donner une solution à ce qui,
autrement, a l'air d'un dilemme absolument irrécupérable.
Je pense que c'est une contribution très valable, ne serait-ce
que par les raisons qu'elle nous donne d'espérer que la recherche, en
particulier, va nous permettre de trouver une solution...
Je voudrais insister sur le fait que certaines personnes qui vont
prendre connaissance de votre mémoire vont être portées
à dire: C'est de la rêvasserie, ce sont toutes des
hypothèses, des suppositions. Dans le fond, on n'est pas sûr de
tout cela. C'est vrai, mais ce n'est pas une critique valable de votre
contribution, si je la comprends bien, parce que vous indiquez tout simplement
qu'il y a une dimension de futur, d'avenir. Il ne faut pas seulement se fier
à ce qu'on connaît, à des méthodes
éprouvées et à des vieilles habitudes. C'est absolument
essentiel comme ingrédient d'une politique d'énergie.
J'aimerais, dans ce contexte, et pour parler de la période de
transition au sujet de laquelle vous avez fait un certain développement,
mettre en ordre, en quelque sorte, dans mon esprit, au moins, vos
priorités. Il semble assez clair que votre première
priorité, ce sur quoi vous insistez au départ, c'est la
conservation. Cela va bien. Deuxièmement, comme je le disais
tantôt, la recherche, l'expérimentation, le développement
de nouvelles technologies qui sont plus respectueuses de l'environnement et qui
sont basées sur des ressources renouvelables. Cela va bien aussi.
Mais dans la période de transition, il apparaît assez
clairement, du moins je pense, qu'il y a, malgré tout, une perspective
de croissance, peut-être réduite mais continue, des besoins
d'énergie. Il y a aussi un facteur d'incertitude, il faut bien
l'avouer. Vous avez dit que les scientifiques ne se sont pas beaucoup
prononcés. Il y en a malgré tout quelques-uns qui sont venus ici
et qui nous ont dit: Ecoutez, les hypothèses sur l'économie
possible avec l'utilisation du solaire pour le chauffage des maisons, ce n'est
pas si élevé qu'on pense, etc. Donc, il y a une incertitude.
Pour combler l'incertitude quant à la possibilité de se
satisfaire des sources traditionnelles sans expansion et de la croissance,
malgré tout, problématique à court terme, de nouvelles
technologies douces, il y a un ordre de priorités à respecter
dans le développement des méthodes plus traditionnelles de
produire l'énergie électrique, par exemple.
Dans votre mémoire, il n'apparaît pas très
clairement si, oui ou non, vous considérez effectivement sur le
même pied l'hydroélectricité et le nucléaire. Vous
condamnez les deux à cause de leurs effets sur l'environnement. Est-ce
que, effectivement, pour vous, les deux formes de production
d'électricité sont aussi nocives ou à rejeter l'une que
l'autre?
M. Lacombe: Non. C'est-à-dire, oui pour le
nucléaire et non pour l'hydroélectricité. Ce qu'on
reproche à l'hydroélectricité, c'est cette espèce
de développement sauvage qui se fait. Je ne sais pas si vous êtes
allé faire un petit tour à la baie James, pour voir ce que
l'aménagement du territoire avait l'air. C'est assez fantastique
à voir. Nous sommes surtout contre ces superprojets qui prennent
énormément de notre argent, énormément de notre
temps aussi, parce qu'il faut les construire. Nous ne sommes pas contre
l'hydroélectricité, j'irais même jusqu'à dire qu'on
est plutôt pour. Mais on voudrait que ces projets interviennent de
façon décentralisée.
Il y a eu un temps, au Québec, avant la nationalisation de
l'électricité, où il y avait beaucoup de petits barrages
qui existaient et qui fonctionnaient. Peut-être qu'avec des petits
barrages, on ne peut pas fournir toute l'électricité
nécessaire, mais cela fera au moins cela de rentré.
Il y a des compagnies, par exemple, l'Alcan, qui utilisent des barrages.
Je ne vois pas pourquoi des villes n'en utiliseraient pas. Il y a
énormément de possibilités, du point de vue de la
décentralisation, avec l'hydroélectricité. Si vous n'avez
pas un barrage qui fournit des milliers de mégawatts, tout le monde se
met à rire et dit que ce n'est pas rentable.
Qu'est-ce que c'est la rentabilité économique? C'est un
projet comme la baie James, qu'on annonce à $5,8 milliards et qui va
nous coûter $20 milliards? Si c'est cela, il faudrait peut-être se
poser des questions. On n'a pas suivi les mêmes cours d'économie
par correspondance. Il y a quelque chose qui ne marche pas.
En ce qui concerne les technologies douces, il y a peut-être une
chose très importante à souligner; c'est que les technologies
douces, dans leur application, sont plus créatrices d'emplois, à
long terme, que les technologies dures. Par exemple, vous avez les chauffe-eau
solaires. La France, dans les trois prochaines années, entrevoit mettre
sur le marché 150 000 chauffe-eau solaires, en France,
évidemment. Donc, il faut les produire. Cela prend de la main-d'oeuvre.
Vous n'avez pas besoin d'entreprises énormes; simplement avec de petites
entreprises, avec des coopératives, vous pourrez produire les
éléments nécessaires à la production de ces
chauffe-eau solaires, parce qu'il y a différents trucs, des morceaux qui
existent, que vous ajoutez à un système et qui vous permettent de
conserver l'énergie.
Qu'est-ce qu'on va faire? Va-t-on importer cela ou si on va le produire
ici? Je pense qu'on devrait le produire ici. Il y a quelques chômeurs qui
traînent encore. Il faut considérer cela, c'est important.
Mme Vincent: Justement, dans cette même ligne
d'idée, c'est que, quand on parle de technologies douces, les
découvertes ne sont pas toutes à faire. Il y a bien des choses
prêtes à être mises en application maintenant. Il y a
d'autres moyens aussi, comme les pompes à chaleur, qu'on pourrait mettre
sur le marché demain.
M. Forget: Pour revenir à cette question de
l'électronucléaire et de l'hydroélectricité, votre
opposition à l'électronucléaire est, dans le fond,
beaucoup plus fondamentale et profonde. Sur l'hydroélectricité,
vous êtes plutôt contre la façon dont certains
développements se sont faits plutôt que contre l'utilisation de
cette source d'électricité.
J'aimerais enchaîner là-dessus parce que vous avez fait
allusion... Dans votre mémoire, il est vaguement question d'une
consultation populaire ou d'un référendum sur la question de
l'électronucléaire. Je crois que c'est le ministre qui y a fait
allusion. D'ailleurs, je ne peux pas m'empêcher de remarquer que les
propos fort bienveillants du ministre à votre endroit et à
l'endroit de votre mémoire ne devraient pas vous créer
d'illusion. Je pense que le ministre a véritablement l'intention de
pousser la formule nucléaire; enfin, on le verra. Je ne peux pas
m'empêcher non plus de contraster son style très conciliant
d'aujourd'hui avec celui d'hier.
M. Joron: Vous m'apprenez des choses, M. Forget.
M. Forget: Enfin, l'avenir le dira! L'explication du comportement
du ministre, aujourd'hui vis-à-vis de vous et son comportement d'hier
vis-à-vis d'un autre groupe vous auriez dû le voir hier, il
crachait le feu c'est peut-être qu'hier il consommait de
l'énergie dure et, aujourd'hui, il consomme de l'énergie douce.
C'est peut-être une démonstration de l'intérêt de
changer la source d'énergie. Mais, dans cette consultation populaire, si
elle doit se tenir, avez-vous le sentiment que, pour être sûr que
ce débat va se faire de façon absolument impartiale, au point de
vue de l'information au public, des groupes comme le vôtre ou
peut-être un regroupement de sociétés ou de
groupes volontaires comme le vôtre, qui s'opposent à
l'électronucléaire, devraient peut-être, à cette
occasion, bénéficier d'un certain appui financier gouvernemental
pour leur permettre de diffuser auprès de la population un certain
nombre de leurs préoccupations et de l'information qui devrait
être mise à la disposition du public? Parce que j'ai un peu
l'impression que soit l'Hydro-Québec, soit le gouvernement, advenant un
tel référendum, serait évidemment mis à
contribution pour propager la thèse opposée.
Mme Vincent: Je pense que c'est très important de
définir ce qu'on veut dire par de l'information. Ce qui est certain,
c'est que la campagne est déjà engagée. On voit, dans les
journaux, la propagande de l'Hydro qui est fort bien faite. En cas de panne,
c'est encadré dans du noir. La campagne psychologique est
déjà à l'oeuvre.
Ce que nous voudrions qu'il existe, c'est justement, oui, la
possibilité des moyens. Il faut bien comprendre que, au départ,
l'Hydro part avec plusieurs mesures d'avance. C'est possible de dire aux gens:
Vous avez besoin d'électricité. Autrement, au gouvernement
précédent, on disait: Les hôpitaux vont fermer, les
écoles vont fermer. Ils ont fermé quand même, mais ce
n'était pas à cause du manque de courant. Ce qui est important
dans cette question, c'est que, justement, c'est là que des
scientifiques devront apparaître et se découvrir une conscience au
lieu d'un contrat. Là, ce serait important.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Richmond, dernière intervention.
M. Brochu: Merci, M. le Président. Le travail que la
société nous présente est considérable. Pour ma
part, je le trouve particulièrement intéressant aussi. Je pense
que cela nous démontre l'éventail des préoccupations de
votre société. En fait, vous élargissez le débat de
la question énergétique à tout son ensemble. Vous touchez,
par le biais de votre présentation, une foule de points, à la
chaîne alimentaire, à l'attitude des consommateurs, à
l'agriculture, aux réserves limitées d'énergie habituelle,
aux sources d'énergie douce. Vous touchez aussi aux conditions
différentes d'un pays à l'autre ou d'un continent à
l'autre. Cela touche aussi, je pense, à l'ensemble de la
problématique. J'avais mentionné au début de cette
commission que c'était peut-être fini la période de douce
tranquillité ou de fausse tranquillité où un pays comme
les Etats-Unis, avec 6% de la population mondiale, pouvait tranquillement
consommer 30% des ressources énergétiques. Je pense que vous avez
touché indirectement cet aspect.
Maintenant, dans l'ensemble de votre mémoire, il se dégage
que vous faites appel quand même à toute une nouvelle façon
de voir la question dans son enveloppe globale, et vous faites en même
temps appel, disons-le directement, à un nouveau type de
société, en définitive, à cause de tous les aspects
que vous touchez, là où vous situez la question. Cela est une
nouvelle forme de société et un nouveau type de
société complète- ment différent de celui dans
lequel on vit actuellement. Ma question serait la suivante: Est-ce possible,
dans ce contexte, d'arriver à renverser la vapeur de la situation que
vous décrivez dans votre mémoire et qu'on peut aussi
compléter par une foule de données qui sont réelles, qui
sont autour de nous autres? Est-ce qu'il est possible de renverser cette vapeur
dans le sens que vous dites, compte tenu des échéances qui
existent dans les différents secteurs auxquels vous touchez? Est-ce que,
dans votre optique, c'est possible d'y arriver et, un peu, de quelle
façon? Je comprends que cela étend peut-être la question de
façon encore plus large, mais j'aimerais entendre votre opinion à
ce sujet.
M. Lacombe: Je vais essayer de vous répondre. Vous faites
allusion à des possibilités suivant la situation actuelle et une
situation qu'on voudrait voir dans le futur, voir un peu ce qui se passerait du
point de vue économique. Si on dit qu'on veut renverser la vapeur, en
fin de compte, oui, on veut peut-être économiser un peu de vapeur
dans toute cette histoire. Dans l'optique qu'on a présentée quand
on dit: Nouvelles valeurs, nouvelle société, je pense qu'il y a
un point fondamental probablement que M. le ministre aurait aimé
poser cette question qui rejoint votre point, c'est que parler de
croissance économique, suivant le schème traditionnel. Cela peut
sembler contradictoire, parce que nous autres, on propose de changer les
fondements de ce système. Si on essaie de suivre l'idée, de voir
un peu ce que cela peut donner, on affirme qu'après une période
d'ajustement la croissance économique réelle suivrait à
peu près l'augmentation de la population, mais le taux de consommation
d'énergie aurait chuté radicalement auparavant et s'ajusterait
ensuite lui aussi à la croissance de la population. Le produit national
brut ne voudrait plus dire la même chose, puisqu'on lui aurait
substitué une réalité beaucoup plus qualitative. Son
augmentation ne serait plus un but en soi. On s'attarderait plutôt
à son amélioration. Donc, un nouvel équilibre entre la
croissance énergétique et la croissance économique
s'établirait selon nous autres à un autre niveau. Durant ce
cheminement, la période de transition, par ce nouvel équilibre,
on peut raisonnablement penser que la croissance économique telle que
définie peut continuer à augmenter en même temps que la
croissance énergétique continuera de décroître.
M. Brochu: Tout ceci, d'accord, comme conséquence de la
mise en application de ce que vous proposez jusqu'à un certain point,
mais ce type de société nouvelle, dasn son ensemble, devra quand
même commencer quelque part. Est-ce que, dans votre esprit, cela devrait
être par des mesures incitatives au niveau de la publicité d'abord
ou par des mesures coercitives qu'on devrait arriver à le mettre en
application? Il ne faut pas non plus négliger la réalité
où l'ensemble d'une population a ses habitudes de consommation, a
également ses schèmes de références en termes
d'énergie ou en termes d'habitudes de vie.
Je pense que c'est là que vous situez le point de départ
de tout votre changement, et c'est là quand même qu'est le noeud
de tout le débat. On fait appel, à ce moment-là, à
une conscience populaire dans l'ensemble. Où va-t-on commencer et de
quelle façon va-t-on arriver à conscientiser toute une population
à un problème donné qui est devant nous pour s'en sortir
collectivement?
Mme Vincent: L'information qui doit rejoindre les gens, c'est que
les ressources sont épuisables, contrairement à ce qu'on avait
cru. Donc, certaines ressources sont épuisables. Il y en a qui sont
renouvelables, mais les ressources conventionnelles sont épuisables.
Mais ça, je pense que, déjà, c'est amorcé dans la
population. Les gens se rendent compte qu'il y a des choses qui ne pourront
demeurer. Je pense que, pour le pétrole, c'est connu maintenant, nous
arrivons à une période où on peut voir la fin de cette
ressource; pas seulement le pétrole, il y a aussi le gaz, il y a aussi
l'uranium. Bon! Alors, ce qui est absolument aberrant, c'est de penser qu'avec
des ressources qui vont finir on met en place des programmes de
développement qui utilisent ces ressources. Cela me paraît
curieux. Mais c'est cette information qu'il faut donner au public. D'abord,
prendre conscience qu'il y a certaines ressources qui sont épuisables.
Après ça, ce qui serait impossible, ce serait de continuer le
développement tel qu'il a existé jusqu'à maintenant. Il
faut d'abord se rendre compte que ça, c'est impossible. Cette
voie-là, elle est bouchée. Donc, il faut en trouver d'autres,
mais il faut d'abord prendre conscience de ça. Je pense que, dans
certains mémoires que j'ai entendus, on n'en est pas du tout conscient
encore.
Le Président (M. Laplante): Madame, messieurs...
M. Lacombe: Pour compléter la réponse, ce ne sera
pas long. Que les mesures soient incitatives ou coercitives, je pense qu'il
faut évidemment expliquer cela à la population et, si possible,
directement, pas en passant par douze intermédiaires. Il faut lui faire
comprendre d'abord et lui faire prendre conscience de ce qui se passe. Mais il
faut éviter que ces mesures ne soient injustes. Parce que, si les gens
ont l'impression que ces mesures ne sont pas les mêmes pour tout le
monde, qu'elles soient coercitives ou qu'elles soient incitatives, elles sont
vouées à l'échec.
M. Brochu: M. le Président, si vous me le permettez, pour
compléter le sujet rapidement. Compte tenu de ce qu'on nous a dit, ce
que différents mémoires nous ont laissé entendre, qu'on
avait des limites dans le temps, dans le processus que vous entrevoyez pour
l'établissement de cette forme de société nouvelle, est-ce
que vous voyez des échéanciers fixes, c'est-à-dire
même des points de non-retour à l'intérieur desquels il
faudrait absolument manoeuvrer pour transformer cette mentalité?
Autrement dit, est-ce que vous vous donnez des délais maximaux, compte
tenu des situations auxquelles on a à faire face?
M. Lacombe: Les délais vont nous être imposés
par l'épuisement des ressources, et ça, ça ne
dépend pas seulement de nous. Encore une fois, comme dans les dizaines
d'exemples qu'on a donnés, ça dépend de
l'extérieur, ça dépend des pays. On vit sur une
planète qui est finie. On ne pourra pas changer de planète. Si
l'épuisement des ressources nous amène à des points de
non-retour dans 50 ans, ce sera dans 50 ans, mais, comme c'est là, ce ne
sera pas dans 50 ans, ça va être dans 25 ans.
M. Brochu: En tout cas, il semblerait être visible.
Maintenant, en terminant, est-ce que vous pourriez me dire si vous êtes
d'accord j'imagine que vous le seriez, à ce moment sur
l'éventualité, qui a été soulevée par
certains intervenants, d'établir une commission spéciale en
matière énergétique? A ce moment-là, est-ce que
vous seriez d'accord pour élargir le débat dans son contexte
global, tel que vous le proposez actuellement, en faisant venir, par exemple,
les scientifiques dont vous faisiez mention tout à l'heure?
M. Lacombe: Oui, je pense que ça peut être une
idée intéressante. On n'a pas insisté tellement
là-dessus, mais, si vous la proposez et pouvez la défendre, je
pense que ça peut être applicable. Cela veut dire qu'il faudrait
que cette commission n'oublie pas d'inviter peut-être des agents
très importants qui représentent les citoyens. Il ne faut pas que
le débat soit seulement scientifique, parce que je pense qu'il y a
énormément de choses qu'on peut expliquer si on fait un effort,
mais, si on ne va jamais dans ce sens, on va toujours dire: Les gens ne peuvent
pas comprendre.
Le Président (M. Laplante): Je regrette, c'est tout.
Madame, messieurs, je vous remercie de la coopération que vous avez
voulu apporter à cette commission.
M. Lacombe: En terminant, comme c'est l'habitude dans certains
pays, on ne vient pas en visite sans apporter de cadeaux. On a apporté
aux membres de la commission un petit cadeau et on espère que ça
va être utile pour vos discussions avec l'Hydro-Québec,
peut-être pour essayer d'épater vos confrères de
l'Assemblée nationale.
Ce document s'appelle: "Tout ce que vous aimeriez ne pas savoir sur
l'énergie nucléaire et que l'on ne voudrait pas non plus vous
dire".
Ce petit cadeau de la SVP sera distribué par...
Le Président (M. Laplante): Monsieur... M. Lacombe: Je
vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Laplante): ...merci de votre cadeau.
Maintenant, j'appelle le groupe Coalition pour le contrôle des prix de
l'énergie.
Vous pouvez prendre vos places en avant, s'il vous plaît.
Cela fait plaisir aux membres de la commission de vous recevoir. Il y a
un autre accueil tout
spécial que j'aimerais faire au nom de tous les membres de la
commission. Il y a, dans cette salle, 150 à 200 personnes du club de
l'Age d'Or. On vous souhaite la bienvenue. On espère que vous reviendrez
à votre gouvernement pour venir voir ce qui se passe. Prenez-en
l'habitude. Le chemin entre Montréal et Québec n'est pas
long.
Coalition pour le contrôle des prix de l'énergie
Mme Moorehead (Susan): Nous représentons la Coalition pour
le contrôle des prix de l'énergie. Je m'appelle Susan Moorehead et
je vous présente, à ma gauche, Claudette Drennan, et
Gérard Lafleur; à ma droite, il y a Mme Maureen Ryan, Linda Vance
qui vont présenter notre mémoire et répondre aux
questions. Je vous présente également, à mon extrême
droite, Yolande Landry qui va faire la traduction des procédures.
Les augmentations des prix de l'énergie concernent tous les
travailleurs du Québec, francophones et anglophones. Donc, la Coalition
considère important que tous les membres présents ici suivent les
procédures.
We represent the Coalition Energy Price Control. Those people on my left
and right who I have just introduced will present our brief and answer
questions. On my extreme right, Yolande Landry will translate the proceedings.
Energy price increases concern all working people of Quebec, both French
speaking and English speaking. The Coalition, therefore, considers it important
that our members here today follow the proceedings.
Mme Drennan.
Mme Drennan (Claudette): Tout d'abord, nous tenons à
dénoncer la façon dont la commission parlementaire est
organisée. Nous avons adressé à la commission une demande
pour que les audiences soient tenues à Montréal. Cela aurait
permis, entre autres, à un plus grand nombre de consommateurs de pouvoir
participer à la commission parlementaire et aurait évité
une dépense d'énergie considérable occasionnée par
le déplacement de 250 personnes qui sont présentes.
Nous croyons que le gouvernement devrait adopter une nouvelle pratique
relativement aux commissions parlementaires et tenir des audiences publiques
dans les grandes villes du Québec.
Pour un gouvernement qui dit vouloir écouter la population qui
l'a élu, c'est le minimum. Compte tenu que le gouvernement n'a pas voulu
adopter une nouvelle pratique, soit rendre les commissions parlementaires plus
accessibles aux travailleurs, il nous fait plaisir de vous présenter les
pétitions de plusieurs milliers de signatures de tous ceux qui auraient
été présents à la commission, si les audiences
avaient été tenues à Montréal. Nous attachons
à ces pétitions la facture des autobus affectés au
déplacement des personnes qui ont compris l'importance de cette audience
et qui n'ont pas hésité, elles, à laisser derrière
elles les responsabilités de jeunes enfants confiés à des
garderies, des repas qui ne seront pas préparés à cause de
l'absence d'une mère, des travailleurs qui ont choisi de manquer une
journée de travail pour venir ici aujourd'hui défendre une cause
à laquelle ils croient profondément, c'est-à-dire de geler
les prix et non pas le peuple.
Mme Ryan (Maureen): The Coalition for energy price control
protests the hearings being held in Quebec City, making the hearings
inaccessible and extremely inconvenient to the majority. You realize the
hardships imposed upon us, mothers who came, leaving children for dinner and
supper to working husbands or otherwise having to pay babysitters. Members who
lost work therefore lose money to be here today. That is how important it is
for us. We trust it will not fall on deaf wears. Since this venture cost us a
lot of money we can ill afford, we have presented you with the bill for our
transportation. You would not come to us so therefore there was not any
alternative. We also are presenting you with petitions signed by thousands
supporting our demands who would have been here had the hearings been in
Montreal.
Le Président (M. Laplante): II y a quelques places encore
ici dans le côté s'il y a des gens qui veulent s'asseoir.
Une Voix: Est-ce qu'on peut produire nos pétitions?
Le Président (M. Laplante): Oui, monsieur...
Mme Drennan: Au mois d'avril 1976, plusieurs groupes populaires
de la région métropolitaine se sont réunis pour former la
Coalition pour le contrôle des prix de l'énergie, dans le but de
mettre fin à l'exploitation des consommateurs domestiques de gaz et
d'électricité. Cette exploitation, qui s'exerce par des prix
croissants et des services décroissants, a servi, par le passé,
les intérêts des entreprises de services publics et de l'industrie
en général. Le nouveau gouvernement doit se révéler
différent de ses prédécesseurs et répondre aux
besoins de la population en modifiant la situation. Déjà, le
nouveau gouvernement suit les traces de l'ancien gouvernement en permettant
à la Régie de l'électricité et du gaz du
Québec d'accorder une autre augmentation de 11% à Gaz
Métropolitain. Plusieurs des thèses que cette commission entendra
et plusieurs des problèmes qu'elle sera appelée à
résoudre n'auront que peu impact immédiat sur la population. Ce
que nous voulons, toutefois, c'est qu'une attention immédiate soit
accordée aux questions qui nous touchent en tant que consommateurs
résidentiels. C'est pourquoi notre bref exposé traitera de deux
domaines principaux. Premièrement, l'injustice et la discrimination dans
les politiques et pratiques des compagnies. Deuxièmement, les structures
tarifaires du gaz et de l'électricité et la question de la
responsabilité sociale.
Nous savons que le but de cette commission est de former une politique
d'énergie à long terme.
En représentant les travailleurs du Québec, nous avons des
besoins immédiats et des revendications immédiates à moyen
et à court terme auxquels le gouvernement peut donner suite.
Mme Ryan: During your campaign, you presented yourself as the
working's men party. Well, we are the workers who voted you in. We trust we
will be seing immediate result and not have to wait years for an energy program
to be developped before you deal with our essential needs.
The Coalition for Energy Price Control was formed in April 1976 by
popular groups from the Montreal area who wanted to put an end to the
exploitation of residential consumers of gas and electricity. This
exploitation, in the form of increased prices for decreased services, has in
past years served the interests of both the utility companies and industry. The
new government must show itself to be different from its predecessor and
respond to the needs of the people by reversing the pattern. Already, the new
government sat idly by while the Gas and Electricity Board gave Gas
Metropolitan another 11% increase last week.
Many of the submissions that this commission will hear and problems it
will be called upon to solve will have little immediate impact on the
population. What we want, however, is that immediate attention be given to the
issues which effect us now as residential consumers. Therefore, our brief
addresses itself to two main areas, first, discriminatory and unjust policies
and practices. Second, gas and electricity rate structures and the question of
public accountability.
Mme Drennan: L'injustice et la discrimination dans les politiques
et pratiques des compagnies. La conservation de l'énergie et les
augmentations de prix. Dans le Devoir du lundi 17 janvier 1977,le ministre
délégué à l'Energie déclare que les
dernières hausses de tarif annoncées par l'Hydro-Québec
peuvent être acceptables parce qu'elles forceront les consommateurs
à être plus prudents et plus soucieux d'économiser
l'énergie. Cet argument est de toute évidence basé sur une
fausse hypothèse: Les consommateurs domestiques sont les seuls
responsables du gaspillage de l'énergie. Ce n'est pas vrai. Pour la
majorité, l'électricité et le gaz ne sont utilisés
que pour des besoins essentiels: le chauffage, la préparation des repas,
l'éclairage, l'eau chaude, les appareils ménagers essentiels.
Evidemment, si les prix ne cessent d'augmenter, nous serons
forcés "d'économiser", mais ce genre d'économie implique
de "geler dans le noir". Plusieurs, sinon la plupart d'entre nous, sont
victimes de notre environnement. Dans une ville comme Montréal,
où 80% de la population est locataire, nos choix sont limités. Si
nos logements sont mal isolés, donc exposés aux courants d'air,
tout ce que nous pouvons faire est de fermer une ou deux pièces pendant
le jour et augmenter le chauffage.
Rien ne peut inciter un propriétaire à mieux isoler ses
logements, même si le locataire ne paye pas directement les coûts
du chauffage. Le propriétaire peut très facilement
intégrer les augmentations de prix d'huile ou du gaz au coût de
location du logement. Par ailleurs, il ne sert à rien de se tourner vers
d'autres sources d'énergie quand les coûts de l'une deviennent
trop élevés, tous les prix augmentent rapidement dans ce secteur.
Que faire alors pour éviter de gaspiller l'énergie? Cesser de
prendre des bains, manger des repas froids, lire à la chandelle ou
peut-être dormir quatre dans un lit pour se réchauffer? Il est
clair que le gaspillage de l'énergie ne s'arrêtera pas simplement
à cause de l'augmentation des prix. Les familles riches qui peuvent se
permettre l'achat de jeux et de commodités électriques de toutes
sortes ont les moyens de payer un prix plus élevé pour leur
consommation domestique. Nous ne sommes pas non plus à la veille de voir
s'éteindre les lumières des édifices de
l'Hydro-Québec, de la place Du-puis et de la place Desjardins durant la
nuit.
Nos revendications ne sont pas exagérées: les mesures
d'incitation à la conservation de l'énergie, sous forme
d'augmentation généralisée des prix, sont à la fois
injustes et irréalistes pour les consommateurs domestiques. Les tarifs
sont déjà au-dessus de nos moyens. L'Hydro-Québec a
augmenté ses prix de 10,3% en 1976, de 9,6% en 1977 et réclame
maintenant un autre 17% pour les années 1978, 1979 et 1980. Gaz
Métropolitain s'est vu accorder huit augmentations de tarifs depuis
1973, avec l'augmentation du 20 janvier, en plus de la dernière
approuvée la semaine dernière, ce qui donne un total de 10.
Les gouvernements libéraux fédéral et provincial
ont exercé un contrôle serré de nos salaires, grâce
à leurs mesures soi-disant antiinflationnistes. Nous ne sommes pas
opposés en principe aux mesures de conservation de l'énergie,
nous sommes très conscients du fait que, selon les dernières
statistiques, les combustibles fossiles disparaissent rapidement. Nous savons
qu'à moins d'une réduction de notre consommation d'énergie
ou du développement d'autres sources énergétiques, nous
pourrons être obligés de recourir à l'énergie
nucléaire.
Nous sommes fermement opposés à cette
éventualité. Ce que nous demandons, par conséquent, c'est
un programme de conservation de l'énergie bien planifié et
cohérent, programme qui verra à partager, de manière juste
et pratique, la responsabilité d'une réduction de la consommation
d'énergie entre toutes les couches de la population plutôt
qu'à élargir l'écart déjà
considérable entre les catégories de revenus ainsi qu'entre
l'industrie et les consommateurs domestiques.
Mrs. Ryan: Discriminatory and unjust policies and practices.
First, conservation and prices increases. In Le Devoir of January 17th 1977 ,
the Energy minister is quoted as saying that the latest rate increases
announced by Hydro-Québec need not be disallowed because they will make
consumers more cautious and more inclined to conserve energy. This statement is
evidently based on the false assumption that residential consumers are solely
responsible for the wasting of energy.
This is not true. For the majority, electricity or gas is used only for
essential needs: home, hot water heating, cooking, lighting, necessary
appliances, etc. Certainly, if prices rise enormously, we will have to
conserve. But that kind of conservation means freezing in the dark. Many, if
not most of us, are victims of our environment.
In a city like Montréal, where close to 80% of the population
lives in rented dwellings, our choices are limited. If our flats are drafty and
poorly insulated, all we can do is shut off one or two rooms during the day and
turn up the heat.
There are no incentives for landlords to provide better insulation: even
if the tenant does not directly pay for the heating, the landlord can pass on
higher fuel costs in the form of higher rents. Nor is there any point in
turning to other sources of energy when the cost of one becomes too high, all
are rapidly rising in price. What, then, are we supposed to do to avoid wasting
energy: forego bathing, eat cold food, read by candlelight and sleep four in a
bed?
Those that do waste energy will not stop simply because prices increase:
the affluent family that can afford a vast array of electronic entertainments
and comforts can afford to pay higher prices to power them. Nor are we likely
to see the lights of Hydro-Québec, Place Dupuis and Place Desjardins go
out at night.
Our claims are not exaggerated: conservation incentives in the form of
across-the-board price increases are unfair and impractical for the average
residential consumer. Prices have already risen beyond our means.
Hydro-Québec raised our bills by 10,3% in 1976, 9,6% in 1977 and now
wants an additional 17% for 1978, 1979 and 1980. Gaz Métropolitain has
been granted with the increase of January 20th and the last one approved last
week, 10 rate increases since 1973.
Meanwhile, the federal and provincial Liberals have clamped controls on
our wages through their so-called anti-inflation measures. We support
conservation methods in principe. We are well aware of reports that fossil
fuels are rapidly disappearing. We know that unless our energy consumption
decreases or other energy sources are developed, we may have nuclear energy
forced on us and we strongly oppose that move.
What we are therefore demanding is a coherent, well thought-out
conservation scheme which distributes the responsibility for reduced
consumption throughout the consuming population in an equitable fashion rather
than widening the already broad gap between income groups and between industry
and residential consumers.
Mme Drennan: Les coupures de services. La pratique des coupures
de services, lorsque les comptes ne sont pas payés, pratique
utilisée par l'Hydro-Québec et par Gaz Métropolitain, doit
également cesser. D'autres créanciers n'ont pas ce pouvoir
unilatéral d'exiger la collecte de leur dû sur un simple avis de
48 heures (Gaz Métropolitain ne donne même pas d'avis) mais ils
doivent d'abord inscrire une poursuite devant la cour et, à tout le
moins, prouver que la dette existe vraiment. Les fournitures de gaz et
d'électricité, qui constituent des services essentiels, devraient
être soumises aux mêmes règles, sinon à des
règlements plus stricts.
Aux Etats-Unis, les cours de justice ont adopté, depuis quelques
années, une politique à l'effet qu'une coupure de services doit
être précédée d'une requête devant les
tribunaux. Cette requête doit démontrer que non seulement le
compte est échu, mais également que le client est en mesure de
payer et refuse de le faire sans raison valable.
En Ontario, la loi interdit toute coupure de services entre les mois de
septembre et avril. Nous croyons que ces deux positions représentent un
pas dans la bonne direction.
Mrs. Ryan: Gas and electricity cut-offs. The practice of cutting
off service when accounts are unpaid, employed by both Hydro-Québec and
Gaz Métropolitain, must be stopped immediately. Other creditors do not
have the unilateral power to force collection of their debts upon 48 hours
notice or, in the case of Gaz Métropolitain, with no notice at all, but
must first petition the courts, and at least show that the debt really exists.
Gaz and electricity, which are essential services, must be subject to the same,
if not more stringent requirements.
In the United States, the courts have, in recent years, formulated a
policy that no cut-offs can be legally made unless they are preceded by a
petition to the courts, which shows not only that the account is overdue but
also that the customer is able to pay and has refused to do so without a valid
reason. In Ontario, legislation forbids interruption of service between
September and April. We feel that both these solutions are a step in the right
direction.
Mme Drennan: Les dépôts à Gaz
Métropolitain.
Le Président (M. Marcoux): Pourrais-je faire une
suggestion? Si vous voulez que les membres de la commission aient le loisir de
vous poser des questions, veuillez résumer des parties de votre
mémoire ou en lire alternativement une partie en anglais et une partie
en français, parce que, si vous prenez tout le temps pour la lecture, il
ne restera plus de temps pour les membres qui désirent soulever des
questions.
Procédez comme vous voulez, soit en résumant votre
mémoire ou soit en lisant une partie en français et une partie en
anglais, sinon nous n'aurons pas le temps d'entendre peut-être même
tout votre mémoire.
Mme Landry: The President has just said that giving a time
structured it will be necessary either to shorten our presentation or else to
alternate between French and English in our presentation, rather than reading
everything in both languages.
Mme Drennan: D'accord, M. le Président, on va
procéder.
Les dépôts à Gaz Métropolitain. En plus de
ses tarifs exorbitants, Gaz Métropolitain a trouvé une autre
façon tout aussi discriminatoire d'augmenter ses revenus. Les
consommateurs domestiques qui demeurent dans des quartiers à faibles
revenus sont tenus de payer un dépôt avant l'installation du
service. Dans plusieurs cas, ces dépôts peuvent s'élever
jusqu'à $100. Si un client ne peut payer ce dépôt, le
service ne lui sera pas fourni; s'il le peut, il devra payer les comptes de gaz
avant la date limite pendant toute une année pour établir son
crédit. Alors seulement il pourra être remboursé de ce
montant avec un intérêt de 6%. Seuls les clients à faibles
revenus ou les résidents des quartiers à faibles revenus sont
obligés de fournir ce genre de prêt bon marché à Gaz
Métropolitain. Par conséquent, à Montréal, la Cour
provinciale a jugé cette pratique illégale et discriminatoire.
Toutefois, parce que les poursuites collectives ne sont pas admises au
Québec, cette décision ne concerne qu'un cas particulier et la
compagnie a porté la cause en appel. Cette situation exige de toute
évidence des mesures législatives.
Mme Ryan: Billing practices. Linked to both cut-offs and deposits
are the billing practices of Gaz Métropolitain and Hydro-Québec,
which can only be described as sloppy. Both companies often fail to read meters
for months at a time. Sometimes estimated bills will be sent, sometimes none at
all. When a correct reading is finally taken, the resulting bill can be
staggering, and yet the time given to pay it, unless special arrangements are
made, is the same as for a regular bill. For a customer who has been forced to
pay a deposit to Gaz Métropolitain, inability to pay by the due date
means the deposit will not be returned. For both gas and hydro, if the bill is
high enough and the customer poor enough, inability to pay may result in a
cut-off of service. We see no reason why we should suffer for these companies
mistakes.
Residential consumers of gaz and electricity, faced with one of the
coldest winters on record, cannot afford to wait months while an energy policy
is formulated. Many of our problems can be solved by immediate legislative
action, and do not require extensive deliberation.
Therefore, the Coalition for Energy Price Control demands: 1.A freeze on
the price of gas and electricity. 2. No cut-offs gas and electricity are
essential services that must be maintained. 3. No deposit why should we
have to provide cheap loan to Gaz Métropolitain? 4.Regular meter
readings and regular billings.
Mme Drennan: Les structures tarifaires du gaz et de
l'électricité, la question de la responsabilité sociale.
Nous sommes conscients que ces deux questions ne peuvent être
résolues du jour au lendemain, mais on doit, néanmoins, leur
accorder une très haute priorité. On ne peut s'attendre que les
consommateurs domestiques continuent de tolérer les conséquences
d'une structure tarifaire qui profite de façon évidente à
l'industrie, pas plus qu'on ne peut permettre à l'Hydro-Québec de
continuer sa mascarade de service public, alors que la population n'exerce
aucun contrôle sur ses politiques et ses pratiques.
Les structures tarifaires du gaz et de l'électricité.
Pendant que les prix du gaz et de l'électricité augmentent
considérablement, l'écart entre les tarifs industriels et
domestiques suit la même courbe. En 1974, les consommateurs
d'électricité de la catégorie domestique
représentent 22,2% des ventes de l'Hydro-Québec et lui assurent,
par contre, 34,7% de ses revenus. Nous avons ici des tableaux qui illustrent la
structure tarifaire. Si vous voulez les étudier, vous pouvez les trouver
dans l'annexe A, intitulée L'histoire du profit.
Le Président (M. Marcoux): Les membres de la commission
ont ces tableaux.
Mme Drennan: Parallèlement, les clients de Gaz
Métropolitain de la même catégorie représentent
21,4% du total des ventes et versent à la compagnie 33,7% de ses
revenus. Les consommateurs de la catégorie industrielle ont
utilisé, toutefois, plus d'énergie et déboursé
comparativement moins d'argent pour la même période de temps. Les
statistiques de l'Hydro-Québec relatives à ce groupe de clients
leur attribuent 34,9% des ventes et seulement 25,9% des revenus; pour le gaz,
65,9% des ventes et 50,7% des revenus.
L'injustice est encore plus éclatante lorsque ces chiffres sont
exprimés en cents et en dollars. Les abonnés domestiques de
l'Hydro-Québec ont payé en moyenne $1.56 par 100
kilowatts-heures, alors que les clients industriels ont payé $0.74. Les
consommateurs domestiques de Gaz Métropolitain ont payé $1.69 par
1000 pieds cubes, alors que les industriels ont payé $0.85. Dans les
deux cas, les petits consommateurs domestiques paient pratiquement le double du
prix du gros consommateur industriel. Dans le cas de l'Hydro-Québec, les
tarifs à l'exportation sont aussi discriminatoires et injustes. Plus de
19% des ventes de l'Hydro-Québec en 1974 ont été
consacrées à l'exportation, mais la compagnie n'en a
retiré que 10% de ses revenus. Le client étranger paie une
moyenne de $0.51 par 100 kilowatts-heures, un tiers du prix exigé de
l'abonné domestique. Quoique la pratique d'exportation du surplus
d'électricité durant les mois d'été puisse
être juste en théorie, nous nous demandons pourquoi les prix sont
si bas, compte tenu des coûts accrus de transport pour une telle
entreprise.
Il y a 20 ans, on aurait sans doute pu justifier l'écart entre ce
qu'il en coûte à l'abonné domestique, d'une part, et
à l'abonné industriel, d'autre part. A cette époque, les
coûts excédentaires, le coût de production d'une
unité supplémentaire étaient moins élevés
que les coûts moyens. Puisqu'il était ainsi moins coûteux de
répondre aux besoins des gros consommateurs, il était logique de
leur demander un prix moins élevé. La même logique
expliquait la structure de groupe décroissante, servant de base au
barème tarifaire
des divers groupes d'abonnés. Maintenant, toutefois, les experts
en services publics et les économistes s'entendent, en
général, pour affirmer que les coûts excédentaires,
particulièrement dans l'industrie de l'énergie électrique,
atteignent ou même dépassent le niveau des coûts moyens. Par
conséquent, il n'y a plus de raison d'accorder des taux
préférentiels aux abonnés industriels ou de baser les prix
sur le principe: Consommez plus et payez moins.
Nous avons inclus en annexe une proposition relative à une
nouvelle structure tarifaire pour le groupe d'abonnés domestiques. Nous
croyons que cette proposition représente plus équitablement les
coûts de services aux consommateurs et, par la même occasion,
incitent à une utilisation plus économe de
l'électricité.
A part la question des coûts, un des arguments les plus souvent
utilisés pour justifier les bas tarifs des clients industriels, vu que
de tels.ta-rifs encouragent le développement industriel ou,
négativement, que des tarifs plus élevés pour le gaz et
l'électricité vont forcer les industries à quitter la
province. Cette dernière menace, l'exode massif des industries, a
maintes fois, par le passé, été agitée comme un
épouvantail devant la population québécoise, afin de la
rendre plus réticente face aux changements. Mais les changements se sont
produits et les industries sont toujours là. Des études
menées aux Etats-Unis ont démontré que les coûts de
l'énergie ne sont pas un facteur très important dans les
affaires. D'ailleurs, dans des régions où les coûts de
l'énergie se sont élevés bien au-dessus de la moyenne
nationale, aucune fermeture d'usine ni aucune relocalisation n'est attribuable
à ce seul facteur. En dernier lieu, même si l'industrie exige
éventuellement des subventions pour maintenir une saine situation
d'affaires, on peut trouver de meilleures sources de revenu que les
portefeuilles des consommateurs domestiques.
Mme Ryan: Public accountability. We believe that since Gaz
Métropolitain and Hydro-Quebec have monopolies on essential public
services, citizens must have access to all information concerning their
operations and be allowed to challenge their rate increases. Hydro-Quebec
especially has been immune from public scrutiny for too long. We demand
therefore that the government set up public hearings into the operations of Gaz
Métropolitain and Hydro-Québec. We propose that all deliberations
and hearings be open to the public and be preceeded by public notice; that in
any application for rate increases, the effect of such increases on each class
of customers be analysed in terms of both financial and social costs and that
transcripts of all proceedings relating to increases be made available at
nominal cost. We also feel that as consumers we should be given the right to be
heard and be allowed to ask questions whenever rate increases are proposed.
Therefore, the Coalition for Energy Price Control demands: 1) A new rate
structure under which residential consumers do not subsidize industry and un-
der which residential consumers pay according to their ability to pay. 2) Since
Gaz Métropolitain and Hydro-Québec have monopolies on essential
public services, then: a)That citizens have access to all information
concerning the operations of Hydro-Québec and Gaz Métropolitain
and b) That public hearings be held annually, at which Hydro-Québec and
Gaz Métropolitain would account to the public for their use of our
natural resources and that these hearings allow public questioning of these two
companies.
Mme Drennan: Voici la conclusion. Durant les années
passées, par le biais de ses politiques d'énergie, le
gouvernement du Québec a appuyé de façon
systématique les consommateurs de la grande industrie dans
l'exploitation des travailleurs québécois, consommateurs
domestiques de gaz et d'électricité, et ce dans
l'intérêt de l'expansion et des profits des corporations. Cette
exploitation est nettement manifeste dans les structures tarifaires de Gaz
Métropolitain et de l'Hydro-Québec. Ces structures ont
été approuvées par le gouvernement du Québec et
elles obligent les petits consommateurs domestiques à subventionner la
grande industrie. De plus, à cause des politiques d'énergie du
gouvernement québécois, Gaz Métropolitain et
l'Hydro-Québec ont acquis des privilèges de monopoles au niveau
de services publics essentiels. On leur a de plus fourni les moyens de
maintenir et défendre leurs pouvoirs: hausses illimitées de prix
en dépit des contrôles sur les salaires, exemptions de fait de
toute forme de responsabilité sociale, prêts à faible taux
d'intérêt sous forme de dépôts, droit d'utiliser des
pratiques de facturation qui ne seraient même pas tolérées
par la plupart des industries et, bien entendu, l'arme ultime à utiliser
contre ceux qui refusent ou qui ne peuvent se permettre de subventionner
l'expansion et les profits des corporations, le droit d'interrompre un service
essentiel, même en plein hiver. Tout cet arsenal de moyens porte le sceau
du gouvernement du Québec.
Tant que le gouvernement et l'industrie, y compris l'industrie de
l'énergie, feront passer l'expansion et les profits avant les besoins
des travailleurs, cette exploitation se poursuivra. Toutefois, ce nouveau
gouvernement est en mesure de corriger quelques-uns des abus les plus flagrants
du passé, à condition de répondre rapidement et clairement
à nos demandes, qui représentent les intérêts des
travailleurs du Québec.
Le Président (M. Laplante): Merci.
A l'ordre, s'il vous plaît! Merci, mesdames.
Le ministre.
M. Joron: Mesdames, messieurs, je tiens à vous remercier
de vous être déplacés pour venir nous faire part des griefs
que vous aviez a nous soumettre et je tiens à vous dire qu'on est
là, justement, pour les recevoir.
Si on n'a peut-être pas pu, dans les délais assez brefs,
depuis le temps des fêtes, qu'on avait
pour organiser les séances de cette commission, qui est quand
même, peut-être, la commission qui aura entendu le plus de
mémoires depuis de nombreuses années et devant laquelle la
participation du public et de nombreux organismes représentant toutes
sortes d'intérêts différents dans le public auront eu la
chance de se faire entendre...
Dans vos remarques d'ouverture, vous déploriez le fait que cette
commission n'était pas itinérante. C'est un peu injuste dans un
sens parce que, dans les délais concernés, on n'avait pas le
temps d'organiser tout cela et vous vous rendez compte que cela demande une
organisation quand même assez considérable pour préparer
des commissions itinérantes qui tiennent des auditions un peu partout
dans le Québec, mais je veux vous souligner que c'est une intention
déjà annoncée du nouveau gouvernement de favoriser au
maximum ce genre d'exercice.
Cela ne relève pas, évidemment, de mon ministère.
Cela relève du ministère d'Etat à la réforme
parlementaire et leader du gouvernement, M. Burns, qui a déjà
indiqué qu'on essaie de moderniser la façon de fonctionner de
l'Assemblée nationale et, dans cet effort de modernisation, de tenter
aussi, par toutes sortes de moyens, dont les commissions itinérantes, de
favoriser au maximum la participation du public.
Alors, je veux vous assurer que, même si cela n'a pu être
fait dans les brefs délais, encore une fois, que nous avions pour
organiser les séances de cette commission-ci, c'est un des premiers
soucis du gouvernement. Evidemment, il y a des contraintes de temps,
d'organisation, etc. On n'arrivera pas à une situation idéale
immédiatement, mais je veux vous assurer que c'est un de nos soucis.
Maintenant, pour reprendre... Je voudrais faire quelques commentaires
sur le contenu de votre mémoire. Je commencerai peut-être par une
citation que vous relevez d'un reportage du Devoir du 17 janvier, qui donnait
suite à une interview que j'avais donnée au Devoir où vous
disiez et vous avez fondé une partie de votre argumentation
là-dessus que je considérais que la hausse de 10% dans les
tarifs d'électricité, le 1er janvier dernier, pouvait avoir comme
incidence d'amener les consommateurs à économiser davantage
l'énergie. Vous en concluez que je faisais de cela la base du principe
du programme d'économie ou de conservation que l'on entend engager, en
ajoutant que ce raisonnement était fondé sur le fait que les
consommateurs domestiques étaient les principaux gaspilleurs
d'énergie.
Je pense que c'est une interprétation complètement abusive
de ce que j'ai dit et sortie de son contexte parce que j'ai, en fait, dit tout
le contraire. Le programme d'économie qu'on envisage n'est pas
fondé du tout sur des hausses de prix pour inciter les consommateurs
à épargner parce que privés de moyens pour pouvoir se
procurer l'énergie.
J'ai indiqué toutes les façons dont on entendait
procéder, mesures d'isolation, modifications au Code du bâtiment,
réglementation qui va viser les constructeurs, incitation fiscale
peut-être aux propriétaires pour faire les transformations
nécessaires.
J'ai indiqué que, dans cette politique de conservation, et
là, je parle seulement du domaine du chauffage, je ne veux pas
m'étendre sur le domaine du transport et des économies d'essence
et ainsi de suite, on n'entend pas procéder à partir d'une hausse
de prix. C'est par une multitude d'autres moyens qu'on veut amener les gens
à une utilisation plus rationnelle et plus économe de
l'énergie. J'ai aussi indiqué, dans ce même article, que la
tarification allait être modifiée, je ne vous dis pas
précisément tel que vous le demandez, mais exactement dans le
sens de ce que vous venez de dire. J'ai déclaré souvent que la
structure de tarification actuelle, qui n'a pas été
changée depuis très longtemps, encourageait justement les gros
consommateurs, faisait que, plus on en consommait, moins cela coûtait
cher et que c'était cela qu'il fallait renverser. J'ai
déjà dit tout cela, exactement ce que vous nous avez servi cet
après-midi. C'est une de nos intentions, et cela fait partie de cette
politique globale de l'énergie, de revoir complètement la
tarification actuelle de l'Hydro-Québec. C'est quelque chose qu'on a
l'intention de faire au cours de cette année.
Là, j'essaie d'aller vite, sur quelques points principaux, en
essayant de répondre à des griefs que vous avez soumis. Vous avez
mentionné, par exemple, la facturation. On sait que
l'Hydro-Québec est débordée dans ce domaine-là,
à l'heure actuelle. Je sais que ce n'est pas idéal du tout, la
façon dont la facturation se fait dans le moment. L'Hydro-Québec
a de sérieux problèmes qui datent à peu près de
l'été passé; au moment où, à cause de la
grève, il y avait un manque de personnel, des retards se sont
accumulés et là ils sont débordés, ils n'arrivent
peut-être pas à rattraper tout le temps perdu.
Je leur ai demandé de faire diligence le plus rapidement possible
pour essayer de régler les cas les plus immédiats jusqu'à
ce qu'on puisse en arriver et l'Hydro-Québec travaille
là-dessus en ce moment à un nouveau système de
facturation qui ne serait pas basé, comme le système actuel, sur
les estimations et les relevés qui sont faits à des
périodes trop distancées les unes des autres. Vous n'avez pas de
compte pendant six mois et, à un moment donné, bang, il vous
arrive un compte énorme. Evidemment, quand on a un budget familial, je
sais très bien que c'est difficile. Ces choses-là sont en voie de
correction.
Quant aux mécanismes de participation du public que quelqu'un
d'autre évoquait aussi pour pouvoir se faire entendre face aux hausses
de tarifs et à ces affaires-là, j'ai également
indiqué, sans pouvoir préciser exactement quelle forme cela va
prendre, que le livre blanc sur la politique énergétique, que
nous voulons déposer cette année, contiendra des
mécanismes de protection du consommateur au sens large, mais des
mécanismes justement de participation semblable. Je ne suis pas en
mesure du tout de vous dire aujourd'hui quel office, quelle régie,
quelle structure
va faire cela et comment cela va fonctionner au jour le jour, mais ce
souci, nous l'avons et cela va être inclus dans le livre blanc dont j'ai
parlé tout à l'heure.
Il y a un dernier point qui me semble peut-être le plus important.
En gros, je voudrais vous dire qu'au sujet de la plupart des points que vous
avez soulevés nous partageons ces préoccupations. J'ai
déjà même annoncé qu'on commençait à
travailler dans tous ces domaines pour essayer d'apporter satisfaction quant
aux points que vous avez soulevés. Il y en a un, cependant je
voudrais terminer peut-être là-dessus, parce que je ne veux pas,
à mon tour, faire un grand exposé qui se rattache à
une de vos recommandations, c'est le gel des prix du gaz et de
l'électricité. Le problème est le suivant. Vous savez,
théoriquement, cela peut se faire. On peut geler les prix de
l'électricité. Plus jamais d'augmentation de tarifs, sauf que
bien entendu l'Hydro-Québec va avoir à faire face à des
coûts d'opération qui augmentent d'année en année,
les salaires de ses employés, les fournitures de matériaux
qu'elle achète, ainsi de suite. Alors, ils vont être
obligés de les rencontrer d'une façon ou d'une autre. Elle a
à faire face aussi à des besoins d'argent pour augmenter la
production d'électricité, parce que la demande augmente. Alors,
on pourrait imaginer que les tarifs ne bougent plus et que le gouvernement,
à ce moment-là, serait obligé de subventionner
l'Hydro-Québec ou d'emprunter ou que l'Hydro-Québec serait
obligée d'emprunter si elle n'arrive pas elle-même à
générer une partie de l'argent dont elle a besoin pour financer
les nouveaux barrages et les nouvelles constructions.
On va dire: D'accord on baisse les tarifs, vous n'avez plus cette marge
d'autofinancement, donc tout ce que vous allez investir, vous allez l'emprunter
exclusivement ou alors le gouvernement va vous subventionner. Mais ça ne
changera rien dans la poche du consommateur, parce que ce que vous ne paierez
pas en tarif d'électricité élevé à ce
moment-là, vous allez le payer en impôt sur le revenu. Si le
gouvernement est obligé de subventionner l'Hydro-Québec, il va
falloir que le gouvernement trouve l'argent quelque part ou si
l'Hydro-Québec est obligée d'emprunter pour payer des
intérêts, il va falloir qu'on trouve l'argent quelque part pour
payer l'intérêt sur ces emprunts.
Il n'y a pas de façon de s'en sortir facilement. Ce sont ou bien
des augmentations de tarif ou bien des augmentations d'impôt, d'emprunts
qui équivalent éventuellement à des augmentations
d'impôt. C'est illusoire de croire que, si on n'augmente pas les prix aux
consommateurs, c'est quelqu'un d'autre ailleurs, par magie, qui va payer la
différence. Si on était dans une période où les
coûts ne montent pas, où il n'y a pas d'augmentation de salaire
d'une année à l'autre, il n'y a pas d'inflation, les prix restent
toujours stables et qu'en plus on n'ait pas besoin de bâtir de nouveaux
barrages, là, c'est sûr, les prix resteraient gelés pour
l'éternité.
Mme Landry: M. le ministre, je m'excuse, je me demande si je
pourrais traduire un peu ce que vous avez dit, parce qu'une bonne partie des
gens qui sont ici sont de langue anglaise. Ils aimeraient avoir un petit
résumé de ce que vous avez dit, parce qu'ils commencent à
être un peu impatients.
M. Joron: Si vous voulez, je vais terminer ma phrase...
Mme Landry: Vous achevez.
M. Joron: ... et après ça, si vous voulez le faire,
d'accord. J'aurais pu le faire aussi, mais en tout cas, qu'est-ce que vous
voulez!
Mme Landry: Si vous voulez le faire vous-même, c'est
parfait.
M. Joron: Sur cette question du gel des prix, j'ai l'impression
que ça m'apparaît illusoire. Regardez ce qui arriverait, et c'est
le point fondamental peut-être. Si on gèle les prix de
l'électricité, qui sont déjà meilleur marché
au point de vue du chauffage aujourd'hui que le gaz ou le pétrole, si
l'électricité n'augmente plus, on ne peut pas geler les prix du
pétrole, parce que le pétrole ne vient pas d'ici. Ce sont les
Arabes qui décident du prix du pétrole, on n'a pas le
contrôle là-dessus. Ces prix-là ont augmenté
terriblement depuis quelques années, vous le savez, et ils vont
continuer d'augmenter dans l'avenir. Si vous avez des prix
d'électricité qui ne bougent plus et des prix de pétrole
qui n'arrêtent pas de monter, il n'y a évidemment plus un homme ou
une femme sur la terre, au Québec en tout cas, qui voudra se chauffer
à l'huile. Ils vont tous vouloir se chauffer à
l'électricité. Si tout le monde passe, à cause de cette
différence de prix, immédiatement de l'huile à chauffage
au chauffage électrique, comment pensez-vous que l'Hydro-Québec
peut répondre à toute cette demande? Cela a comme effet
immédiat sur l'Hydro-Québec de l'obliger à construire de
nouveaux barrages, donc à trouver encore plus d'argent, en emprunter
davantage; il y a un cercle vicieux. Comme on dit en anglais, "you can't have
your cake and eat it too". C'est l'un ou l'autre.
Sur la question du gel des prix, je pense qu'étant donné
un besoin croissant de demandes d'énergie qui nécessite de
l'électricité tout au moins, et en partie à cause de la
substitution d'autres formes d'énergie, ça appelle
automatiquement des investissements nouveaux. Appelant des investissements
nouveaux, ça veut dire qu'il faut trouver de l'argent quelque part.
Comme je vous le disais, si on ne le prend pas dans la poche des gens qui
payent leur compte d'électricité, on va le prendre dans votre
poche droite au lieu de le prendre dans la poche gauche, à titre de
contribuable. Cela va venir d'une place ou de l'autre. Autrement, on
déciderait d'arrêter l'expansion.
En plus de ça, vous vous dites opposé au
développement nucléaire et vous nous encouragez à
développer de nouvelles sources d'énergie. Développer de
nouvelles sources d'énergie, ça veut dire de nouveaux
investissements, ça implique des augmentations de tarif.
On est en plus dans un monde où il y a infla-
tion d'une année à l'autre, les salaires augmentent, les
prix des biens et des choses augmentent d'une année à l'autre;
alors il est inévitable que ces coûts augmentent. Seulement, on
veut bien essayer de s'arranger pour que cette hausse soit au minimum, juste
pour répondre aux besoins c'est un objectif, c'est bien sûr
et qu'elle ne pèse pas aussi lourdement sur les usagers les plus
faibles économiquement, mais peut-être plus lourdement sur ceux
qui ont les moyens de le faire. Comme je disais tout à l'heure, c'est
dans cette optique qu'on cherche à revoir toute la tarification de
l'Hydro-Québec. C'est vers quelque chose comme ça qu'on s'en
va.
For the benefit of the English-speaking people in the audience, I would
just like to point this out, I will not translate word for word what I just
said, but might I just go to one major point?
One of the principal recommendations in your submission is the freeze on
prices for electricity and gas. What I just pointed out is that it is entirely
illusory to think that we can freeze prices on electricity forever, for two
basic reasons: First, Hydro-Québec has to meet rising costs, operational
costs that are forever rising, salaries, wages to its employees, the price it
has to pay for the goods and services that it buys every year, etc.
Therefore, to meet those rising operational costs, it needs, year after
year, a little more money. That is one thing.
Secondly, because there is a rise in the demand for electricity, even
more so now that electric heating has become cheeper than oil heating, which
puts a heavier load on the need for new investments in the production of
electricity, that means that Hydro-Québec has to raise money to finance
not only James Bay, but whatever might come after James Bay.
So, there are two ways of raising money. Either Hydro raises part of its
money through profits that it makes on its customers or it borrows the money
entirely. But even if it does borrow the money entirely, it still has to pay
interests on those loans. Therefore, how are they to finance the payment of
those interests?
So, basically, it is a question, as you have two choices. One can think
that if there is a total freeze on electric prices, somebody else will pay by
magic, for those investments or for those rising operational costs of
Hydro-Québec. It would be the government that would have to finance it.
And how would the government finance it, if Hydro cannot? By raising taxes.
So, what I am saying basically is that what now comes out of your left
pocket, if it does not come out from that pocket, it will have to come out from
the right pocket. Basically, it is the people that are financing our collective
rising need for electricity.
What I said finally is that what we are working on now is a new tariff
structure for Hydro-Québec. We are working on that now, precisely in the
sense, in the same vein as one of the recommendations in your submission. What
we are working is a new tariff structure that will discourage over- consumption
by the fact that the tariff structure now makes it cheeper, the more you
consume, the cheeper it is, whereas we could possibly think of the reverse.
Therefore, we are working on that now and I have indicated publicly
before that we plan to come out this year with a new tariff structure that, we
hope, will impose a lighter load on the shoulders of those that can
economically less support it and a heavier load on those who can. That is the
direction where we are working now.
I also said at the beginning, but I do not want to come back to all and
each individual point that I made, that most of the recommendations in your
submission were basically in the same spirit. We are looking at the problems,
starting from the same premisses and the same principles. That is what we are
working on now, to have a new tariff structure, in the sense that you are
talking about. What is it going to be exactly, I could not tell you at this
moment, and a conservation program that is not based strictly on raising
prices, but that will be based on regulations, incentives and financial
assistance for those who would like, for example, better insulate their homes
and things like that.
I think, on the whole, we are more or less, more than less, on the same
wave-length. I want to assure you that we are looking at the problems that you
described in the sense that you presented them to us, except though that I
think it is completely impossible to envisage a total freeze on prices of
electricity and gas. That, I think, is absolutely impossible, because, like I
said before, if the money does not flow to Hydro-Québec to meet its
rising demands and rising needs, financial needs, if it does not flow from
higher terrace, it will have to flow from higher taxes coming from the
Government. So, it is either one or the other.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Robert-Baldwin.
M. O'Gallagher: M. le Président, I sympathize with your
concern for those people cut-off supply of gas and electricity, specially
during the winter months, I can understand that it can be a terrible
catastrophe, as well if it is done by such a drastic measure or such drastic
decision was made by a company employee. But, do you have a solution that you
could offer to this committee that would prevent any unjustice made to real
causes? You can understand that, if we just give free electricity to everyone
who did not pay their bills there could be injustice to you and to me and to
everybody else who do pay their bills. Do you have any suggestion that you can
make to this committee that would alleviate this particular problem?
M. Lafleur: J'aimerais répondre particulièrement
aux commentaires qu'a formulés M. le ministre.
Le Président (M. Laplante): Si vous voulez, pour ne pas se
mélanger, on va lui laisser répondre à la question du
député de Robert-Baldwin.
Après cela, je vous donnerai un temps pour répondre au
ministre. D'accord? Pour ne pas mélanger les...
Mme Landry: J'aimerais donner la traduction en français.
Le député de Robert-Baldwin vient de dire qu'il sympathise avec
les demandes, quant aux interruptions de service pour les gens qui seraient en
retard pour payer leurs comptes, mais qu'il ne voit pas réellement une
solution qui serait ouverte à ce qu'une proposition, une solution vienne
de nous pour régler ce problème, parce que ce ne serait pas
équitable de permettre que les gens ne paient pas leurs comptes.
M. Lafleur: Je peux essayer, si vous voulez, de répondre
à l'ensemble des questions, quitte à ce que d'autres
complètent. La première réaction, c'est de dire que nous
sommes extrêmement heureux de constater que le ministre
délégué à l'Energie partage les
préoccupations fondamentales des gens qui sont venus présenter le
mémoire à la commission parlementaire, à la fois
concernant la participation du public aux différentes commissions
parlementaires, à la fois sur la nécessité de modifier la
tarification; également, sur les procédés de facturation,
à la fois à l'Hydro-Québec et à Gaz
Métropolitain, ainsi que sur la nécessité de consultations
publiques face, par exemple, aux demandes d'augmentation de tarifs de Gaz
Métropolitain ou de l'Hydro-Québec.
Concernant la participation du public aux commissions parlementaires, il
pourrait être intéressant de rappeler que, sans que ce soient des
commissions parlementaires, il y a quand même des initiatives en ce sens
qui ont été prises antérieurement, entre autres, par le
gouvernement libéral qui, par son ministre L'Allier, avait
organisé, à l'époque, une série de consultations
régionales au niveau des politiques sur la câblodistribution. Mme
Bacon a fait la même chose au niveau des politiques à
établir concernant les garderies et Radio-Québec avait
procédé de même par rapport à son projet d'expansion
et de régionalisation. Il y a des précédents dans ce sens
qui ont été créés qui sont très
intéressants.
Le message sur ces points on semble relativement bien s'entendre
qu'on veut laisser cet après-midi, c'est que les gens qui sont
venus ici ont compris que le ministre délégué à
l'Energie avait les mêmes préoccupations que nous.
Nous sommes venus lui dire que nous allions suivre avec
extrêmement d'intérêt, et en attente de politique, nous
allons suivre avec beaucoup d'intérêt les initiatives qu'il
prendra. Pour nous, ces différentes revendications sont des choses sur
lesquelles le gouvernement et le ministre délégué à
l'Energie pourraient agir relativement à court terme, d'après
nous. Donc, nous sommes en attente et nous allons lire les journaux.
J'aimerais connaître, par ailleurs, peut-être dans une
deuxième étape, la position du ministre
délégué à l'Energie concernant deux points qu'il
n'a pas traités, soit la question des coupures de service par
l'Hydro-Québec et par Gaz Métropoli- tain, ainsi que la question
des dépôts exigés par la compagnie Gaz
Métropolitain.
Concernant le gel des prix, le sens de notre proposition est le suivant:
Nous établissons des gains ou des revendications à court terme et
des revendications à moyen terme. Quand nous parlons de gel des prix, il
est clair pour nous qu'il est impossible de geler les prix
définitivement sans que les consommateurs n'aient plus jamais à
payer quoi que ce soit de supplémentaire par rapport aux taux
d'électricité et de gaz. Cela me semble relativement utopique. Ce
que nous disons actuellement, c'est que les taux, les tarifs
d'électricité et de gaz sont devenus très
élevés et qu'en attendant une nouvelle tarification, celle que le
ministre délégué à l'Energie s'apprête
à mettre de l'avant, en attendant cette nouvelle tarification qui
devrait davantage privilégier le consommateur et davantage permettre aux
compagnies de payer une part supplémentaire, en attendant cette nouvelle
tarification, nous demandons que, pour les consommateurs résidentiels,
les prix soient gelés, quitte à ce que, par la suite, à
partir d'une nouvelle tarification beaucoup plus juste, les prix augmentent
progressivement, à la fois pour les industries et pour le consommateur
résidentiel.
D'autre part, il me semble que le raisonnement qui veut qu'en
n'augmentant pas le prix de l'électric ité et du gaz, on en
arrive au même résultat, parce que, d'une part, on donne d'une
main, et de l'autre part, on reprend de l'autre, je crois que ce raisonnement
peut être juste en partie mais, à mon sens, il est faux
également en partie, dans la mesure où, en gelant les prix, au
fond, ou si je reprends autrement, quand on demande des prix pour
l'électricité, on taxe un besoin, alors que, quand on parle
d'impôt, à ce moment, on fait appel au revenu. Alors, je ne crois
pas qu'il serait juste de dire que l'ensemble des revenus du gouvernement du
Québec vienne uniquement des poches des consommateurs
résidentiels. Donc, entre une taxe sur le besoin et une taxe sur le
revenu, il y a quand même une différence essentielle.
Concernant la question des coupures de service, notre position sur cette
question est relativement claire. Nous demandons qu'il n'y ait pas du tout de
coupure de service. Il y a des expériences, comme on l'a dit dans le
mémoire, qui ont été faites en Ontario où les
coupures de service sont défendues à certaines périodes de
l'année. Cela n'a pas donné jusqu'à maintenant de
résultats désastreux. Nous, on considère qu'il y a une
responsabilité sociale que les Québécois ont de payer
leurs factures, et il y a une confiance que le gouvernement du Parti
québécois doit mettre dans les gens. Les gens vont payer leurs
factures.
Maintenant, le problème qui se pose actuellement, c'est que le
prix de l'électricité et du gaz sont extrêmement
élevés. Il y a des gens qui ne peuvent pas effectivement payer.
On a des exemples concrets de familles à très faible revenu qui
sont coupées en plein hiver. Evidemment, à l'Assemblée
nationale, c'est difficile peut-être de percevoir ces
réalités, mais cela existe, des familles de quatre ou cinq
enfants à qui, en plein hiver, à 20
ou 30 degrés sous zéro, Gaz Métropolitain a
coupé le gaz sans avertissement.
Je pense que ce genre de pratique doit être banni
définitivement.
M. Joron: Sur les deux derniers points que vous venez de
soulever, les dépôts et les coupures, ce sont des points qui
soulèvent des aspects légaux et qui impliquent une action du
ministère de la Justice.
M. Lafleur: Excusez-moi! Toujours pour permettre à
l'ensemble des gens de suivre le débat, est-ce qu'on pourrait permettre
une traduction?
Mme Landry: Au sujet des commissions itinérantes, il a
été dit qu'il y a eu des précédents... I'm sorry!
About the itinerant commissions that were requested by the committee, it was
said that there have been precedents; for instance, when Mme Bacon was
minister, she did travel around the province on the subject of day-care centers
to solicit opinions from the population.
About all the things that the minister said earlier, this coalition
expressed the strong desire that he would put these things into action very
soon. About cutting off service and billing problems, there was more
disagreement, it seems, with the conclusions. It is clear that we are not so
Utopian as to think that there will be no raises, but we do request that, until
a new rate structure is built up, as the minister has said would be that the
rates be frozen during that interim period, at least for residential consumers,
and that also, to talk about the argument of if not out of one pocket, then out
of the other, this is partially true and partially false, because people should
not be taxed for something that is a need at the same level from their revenue.
In other words, there would be other portions of the population that could be
taxed.
Now, on cut-offs, this is totally unacceptable, and if Ontario is
managing to function having eliminated them, we should trust that most people
will pay their bills and that there is a small number who really cannot. This
government should pledge itself to eliminate this policy of cut-offs. That is
all.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, en
réponse.
M. Joron: Deux mots rapidement sur les dernières
interventions, sur les coupures et les dépôts. Les
dépôts à Gaz Métropolitain. La Loi de la
Régie de l'électricité et du gaz n'autorise pas
expressément, explicitement, ces dépôts, ce qui a conduit
à l'interprétation, par plusieurs... C'est une question
juridique. Je ne voudrais pas me mêler des affaires de mon
collègue de la Justice. Je ne suis pas trop ferré en droit et
dans ces matières, mais c'est ce qui a conduit à
l'interprétation que ces dépôts étaient
illégaux et pouvaient être contestés. D'autre part, dans le
mémoire, vous mentionnez que, malheureusement, le "class action", qu'on
appelle, n'existait pas au Québec. Je peux vous dire là-dessus
que ça ne relève pas de moi. Cela n'existe pas, c'est vrai, mais
ça s'en vient. C'est une des préoccupations que le ministre
d'Etat au développement social et le ministre de la Justice ont
déjà indiquées. Il va y avoir ce recours.
Quant aux coupures, peut-être aussi que ça implique des
aspects légaux, je ne sais pas. Mais je peux vous dire que,
effectivement, on est à ce moment-ci à étudier ce qui
existe aux Etats-Unis et en Ontario, particulièrement. Encore une fois,
on arrivera, en temps utile, au cours de cette année très
certainement, avec une position sur ce sujet.
Le Président (M. Laplante): Mesdames, messieurs, cela nous
aurait fait plaisir... Vous voulez une traduction? D'accord, madame.
Mme Landry: The Minister has answered that the law does not
explicitly authorize the deposits this has led to the interpretation
they were illegal as for the class action, which has been mentioned in
our brief, that the Ministry of Justice is about to introduce class action as
an available means in Quebec which perhaps could be used for this type of
complaint, and also that the Government is actively studying legislation of
Ontario and United States about the cut off aspect of our complaint and should
be coming to some decision on it quite soon.
Le Président (M. Laplante): Mesdames, messieurs, on aurait
aimé vous accorder encore plus de temps. On vous remercie de la
coopération que vous avez voulu apporter à cette commission.
Bonsoir.
J'appellerais maintenant l'Office de la protection du consommateur.
M. Meunier. Y aurait-il possibilité pour vous de
synthétiser dans dix ou douze minutes votre mémoire pour qu'on
puisse suspendre les travaux et revenir à 20 heures?
Voulez-vous présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous
plaît?
Office de la protection du Consommateur
M. Meunier (Pierre): On va essayer, autant que faire se peut, de
synthétiser. On s'est aperçu que cela paraissait être une
entreprise difficile. Enfin, on va tout de même essayer.
Je veux tout d'abord vous présenter, à ma droite, M.
Jacques Brochu qui est un des huit responsables régionaux de l'Office de
la protection du consommateur. C'est le responsable régional pour le
bureau de Trois-Rivières et, à ma gauche, M. Rafic Nammour, qui
est le directeur de la recherche, M. Daniel Couture, qui travaille au service
des plaintes, M. Claude Bélanger, qui est le directeur des relations
publiques, et M. Donald Bouchard, qui est du service de l'information.
Je pense qu'après ce que vous venez d'entendre aujourd'hui et
après ce que vous avez entendu depuis le début de la commission,
la preuve n'est plus à faire que l'énergie constitue un service
essentiel.
C'est un peu dans ce contexte qu'à l'office nous avons voulu,
puisqu'il s'agit directement, dans un sens, de protection du consommateur, vous
présenter un mémoire. Nos fonctions, comme vous le savez, sont de
protéger et de représenter le consommateur. Nous avons, entre
autres, comme mission prévue par la loi, celle de traiter les plaintes
des consommateurs, d'éduquer et de renseigner le consommateur, de faire
des études et des recommandations sur la protection du consommateur. A
la lumière de ces fonctions que la loi nous assigne, nos
préoccupations, face à la politique énergétique du
Québec, sont de deux ordres. Tout d'abord, à long terme, les
conditions générales de l'aménagement de la consommation
de l'énergie et plus particulièrement la conservation, la
sécurité, l'accessibilité, la disponibilité, la
protection de l'environnement, sujets qui ont été abondamment
traités par des groupes et des organisations qui ont probablement une
expertise plus poussée que la nôtre sur le sujet. Mais c'est
surtout de nos préoccupations à plus court terme que nous voulons
vous entretenir, à savoir la protection du consommateur quotidiennement
lorsqu'il est lésé à l'occasion de fourniture
d'énergie. Pour ce faire, nous voulons aborder rapidement les
problèmes qui se présentent au consommateur dans la fourniture
d'énergie et les solutions que nous proposons.
Je pourrais peut-être rappeler immédiatement que, depuis le
mois d'avril 1976 jusqu'à la fin de janvier 1977, nous avons reçu
un total de 1611 plaintes de consommateurs relativement à la fourniture
d'énergie, dont 885 concernant l'Hydro-Québec et ce, même
si, dans la loi constituante de l'office, nous n'avons pas juridiction
directement sur les problèmes de fourniture d'électricité.
Or, permettez-nous de réviser les principales catégories de
problèmes qui se présentent relativement, d'abord, à la
fourniture d'électricité, deuxièmement relativement
à la fourniture du gaz naturel, troisièmement à la
fourniture de l'huile à chauffage et, quatrièmement, à la
fourniture des carburants pour véhicules.
Tout d'abord, dans le cas de la fourniture d'électricité,
on doit dire que les plaintes sont nombreuses à toutes les étapes
de l'exécution du contrat et ce, particulièrement en ce qui
concerne l'Hydro-Québec, d'autant plus que, dans le cas de
l'Hydro-Québec, le consommateur ne dispose d'aucun recours administratif
puisque, lorsqu'on se plaint à l'Hydro-Québec, celle-ci rend une
décision qui est exécutoire, c'est-à-dire qu'elle est
à la fois juge et partie.
Dans le cas des compagnies privées d'électricité,
c'est la Régie de l'électricité et du gaz qui a
juridiction. Je n'insisterai pas plus longuement sur les types de plaintes,
mais je vais cependant les énumérer puisqu'elles ont
été illustrées, je pense, par le groupe
précédent. Tout d'abord, la question de la tarification.
En effet, comme on vous l'a dit et comme vous le savez, les tarifs sont
établis par le Conseil exécutif suivant un rapport qui est fait
et on peut difficilement se plaindre ou faire des recomman- dations quant
à ces tarifs. Quant à la facturation, je pense que l'on vous a
soulevé également les problèmes du relevé des
compteurs, d'estimations en plus ou en moins que cela pouvait entraîner,
de fréquence plus ou moins grande et aussi l'irrégularité
de la facturation avec les problèmes que ça peut
entraîner.
Le deuxième type de problème que l'on rencontre ou le
troisième, c'est celui de la pénalité financière,
c'est-à-dire le consommateur qui est lésé ou à qui
on impose une pénalité de 10% s'il ne paye pas dans les 14 jours
de la réception de la facture. Or, nous avons calculé que,
même si on appelle ça des frais administratifs, ça se
trouve à être, en d'autres termes, de l'intérêt plus
ou moins déguisé et un intérêt d'un taux exorbitant
si le consommateur paye le quinzième jour. On pourrait, si on veut
calculer le taux d'intérêt du consommateur qui paye le
quinzième jour, l'établir à 240%, ce qui évidemment
est un peu exagéré.
On peut aussi, dans le cas d'une absence de paiement, en arriver, comme
vous le savez, à l'interruption du service. Il s'agit là d'un
service essentiel et nous pensons, comme il a été souligné
précédemment, que la procédure d'interruption du service
doit être révisée.
Finalement, permettez-moi d'ajouter, dans le cas de la fourniture
d'électricité, plus particulièrement dans le cas de
l'Hydro-Québec, que nous avons reçu plusieurs plaintes sur la
qualité du service à la clientèle. Il est difficile dans
plusieurs cas, et surtout en milieu urbain, de rejoindre les
préposés du service à la clientèle de
l'Hydro-Québec. Il est difficile, peu importe l'urgence du
problème que l'on a à soumettre à l'Hydro-Québec,
de rejoindre les préposés à la clientèle et, de
plus, on se plaint régulièrement de longs délais pour
l'installation ou les raccordements.
Ce qui m'amène à traiter du deuxième grand titre de
fournitures d'énergie, la fourniture du gaz. Il s'agit d'un secteur qui
est contrôlé par la Régie de l'électricité et
du gaz, où l'on retrouve essentiellement le même type de
problème que dans la catégorie précédente,
c'est-à-dire qu'on a des problèmes au niveau de la facturation,
de la même façon que dans le cas de l'Hydro, les lectures et les
envois de factures, la pénalité financière existe
là aussi et il y a, dans ce cas-là, et cela a été
illustré assez longuement, le dépôt que l'on exige de
certains consommateurs, qui va de $15 à $50, et on parlait, au groupe
précédent, de dépôts qui allaient jusqu'à
$100, alors même que je pense que le ministre l'a fait remarquer
il n'y a rien dans la loi qui autorise un tel dépôt.
Il y a là aussi le problème des suspensions. Nous avons
finalement, dans le cas du gaz naturel, tout le problème des hausses de
prix. En effet, plusieurs plaintes sur les hausses de prix sont
formulées par les consommateurs et la loi de la régie contraint
celle-ci à accepter toutes les augmentations de tarif reconnues
nécessaires au bon fonctionnement de Gaz Métropolitain.
Par conséquent, lorsque l'Office national de l'énergie du
Canada autorise la compagnie Trans-Canada Pipe Lines qui approvisionne Gaz
Métropolitain à augmenter ses prix, la Régie de
l'électricité et du gaz ne peut qu'entériner les
augmentations de prix que Gaz Métropolitain reporte automatiquement sur
la facture de ses clients.
Troisièmement, les fournitures d'huile à chauffage. Le
commentaire principal que l'on peut faire quant à ce type de fourniture
d'énergie est qu'il s'agit là d'un secteur qui souffre d'une
déficience manifeste de la réglementation et d'une absence de
contrôle efficace, de sorte qu'il y a presque autant de pratiques
anarchiques qu'il existe d'entreprises de distribution.
On peut mentionner, parmi les types de plaintes que l'on reçoit
dans cette catégorie de fournitures d'énergie, des sollicitations
de la part des fournisseurs d'huile à chauffage pour des prix
inférieurs pour la première livraison, ce qui incite le
consommateur à signer un contrat à plus long terme pour un prix
différent.
Des difficultés au niveau de la facturation, également,
c'est-à-dire l'impossibilité pour le consommateur de faire
certaines vérifications, des plaintes également en ce qui a trait
à la qualité de l'huile, lesquelles plaintes sont assez
difficiles à apporter et pour lesquelles il est assez difficile
d'obtenir des poursuites contre la compagnie en question, puisque cela prend
des analyses scientifiques poussées et que, même si l'on obtient
une condamnation pénale, il n'est pas sûr c'est loin
d'être sûr que le consommateur obtiendra une
réparation civile pour la qualité ou la moins bonne
qualité qu'il a eue et, finalement, les problèmes liés
à la fourniture du carburant pour véhicules.
Ces problèmes sont surtout de deux types depuis que l'on a
adopté non pas la nouvelle loi, mais la loi qui traite du commerce des
produits pétroliers. Il s'agit des différences entre les prix qui
sont affichés à l'entrée des garages et le prix qui est
facturé à la pompe à essence. Il peut y avoir et il
y a eu des plaintes à cet effet une différence de prix et,
de la même façon, dans le cas des libres-services, il y a eu
également une différence de prix entre le montant qui
était affiché à la pompe à essence et le montant
qui était affiché à I intérieur, à la
caisse.
Ce problème a été prévu par la loi
fédérale qui oblige le détaillant à percevoir du
client le moindre des deux prix.
Finalement, pour terminer sur la fourniture de carburant pour
véhicules, je pense qu'on peut également traiter du
problème qui se pose pour les détaillants d'essence depuis que
les compagnies pétrolières intégrées ont
pénétré sur le marché de détail en
multipliant les libres-services. Cette intrusion sur le marché affecte
considérablement la compétitivité des détaillants
installés à leur compte et accentue le danger d'amener ceux-ci
à compenser ce qu'ils perdent d'un côté par un
accroissement proportionnel des prix de leur service d'entretien et de
réparation.
En conclusion sur ces problèmes, je pense qu'on peut noter tout
d'abord une première déficience en ce qui a trait au
contrôle de la distribu- tion de l'énergie, c'est-à-dire
l'éparpillement des organismes de contrôle et le morcellement de
la loi et de la réglementation en vigueur dans ce domaine.
La deuxième carence, c'est l'absence de mécanismes
efficaces de protection du consommateur d'énergie. Pour remédier
à cette double situation, nous suggérons un véritable
réaménagement d'ordre institutionnel qui nous paraît devoir
s'imposer en vue d'établir, d'une part, un pouvoir unique de
réglementation sur l'ensemble des réseaux de distribution
d'énergie, et d'autre part, une voie unique de recours pour les
consommateurs lésés.
Plus particulièrement, nous proposons, tout d'abord, que soit
confié a un seul organisme le pouvoir de réglementer et
contrôler l'activité de tous les réseaux de distribution
d'énergie, y compris l'Hydro-Québec. Cet organisme serait, en
quelque sorte, un office québécois de l'énergie.
Deuxièmement, que soit confié à un seul organisme
représentatif des intérêts des consommateurs le mandat de
recevoir les plaintes. Nous suggérons l'Office de la protection du
consommateur, mais l'organisme n'a pas d'importance comme tel. Il importe
seulement qu'il y ait un organisme qui puisse être efficace et qui puisse
avoir les ressources nécessaires pour pouvoir recevoir les plaintes des
consommateurs qui se proient lésés et exercer dans un premier
temps une fonction de médiation entre le consommateur et le fournisseur
d'énergie. Si aucun accord de règlement n'intervenait à la
suite de cette médiation, l'organisme habilité porterait la cause
du consommateur devant l'Office de l'énergie et agirait alors en tant
que représentant du consommateur.
Les avantages d'une telle consolidation législative et
administrative sont manifestes. En plus d'assurer une meilleure
cohérence des mesures réglementaires et une
homogénéité accrue dans les formes contractuelles,
l'intégration faciliterait aux consommateurs lésés les
procédures de recours, puisque celui-ci n'aurait qu'à s'adresser
à un seul organisme.
Quoi qu'il en soit, il nous paraît extrêmement urgent que
des mesures énergiques soient adoptées pour corriger les carences
du système actuel et assurer à l'ensemble des citoyens les
services d'utilité publique qu'ils sont en droit d'attendre. Les mesures
spécifiques que nous proposons ci-après s'inspirent des
problèmes de consommation que nous avons relevés
brièvement et visent à leur apporter une solution concrète
acceptable.
Tant pour la fourniture d'électricité que pour la
fourniture du gaz, il y aurait lieu de rendre obligatoire la conclusion d'un
contrat en bonne et due forme dans lequel seraient énoncés les
droits et obligations des deux parties. Le contrat type serait
préalablement approuvé par l'Office de l'énergie.
L'exigence d'un dépôt en argent pour le raccordement au
service ou le rétablissement de celui-ci devrait être abolie
définitivement et dans tous les cas.
La facturation de l'électricité et du gaz devrait
être effectuée à une fréquence
régulière, de même
que les relevés au compteur, de façon à
éviter les décalages excessifs qu'on connaît actuellement
et qui causent tant de problèmes aux usagers. Pour ce qui est des
délais de paiement, la pratique en cours devrait être
complètement modifiée. Le client devrait avoir droit à un
délai de 30 jours et les frais financiers ou administratifs, en cas de
dépassement de ce délai, ne devraient pas excéder ceux
normalement exigés par les banques ou les établissements
commerciaux qui accordent un crédit variable.
Excepté dans les circonstances hors de tout contrôle, il ne
devrait pas être toléré que le distributeur interrompe
délibérément le service. En cas de refus ou
d'incapacité de payer du client, l'organisme habilité pour
défendre les intérêts des consommateurs exercerait sa
fonction de médiation et, en cas d'insuccès, la cause serait
portée devant l'office de l'énergie. En d'autres termes, on ne
pourrait interrompre le service des consommateurs avant que la cause ou le
problème ait été, finalement, exposé devant cet
office de l'énergie ou devant une instance supérieure qui
pourrait réviser le cas. Des moyens pratiques de contrôle
devraient être élaborés pour éviter que des factures
non acquittées par un propriétaire ou un locataire
précédent ne soient reportées indûment sur le
propriétaire ou locataire suivant, de même que pour éviter
qu'un usager ne reçoive des factures pour l'électricité
fournie à son ancien logement après son départ. L'exigence
d'un contrat formel de service serait tout indiquée à cet
effet.
Quant au secteur de la distribution d'huile à chauffage, il
devrait être réglementé sévèrement, en
imposant tout d'abord un contrat type, ensuite des mesures uniformes de
tarification et de facturation. Considérant l'importance vitale du
chauffage dans la vie des citoyens, les prix eux-mêmes devraient
être contrôlés et sujets à l'approbation de l'office
de l'énergie. Ce contrôle devrait même s'étendre aux
prix de gros exigés par les compa- gnies pétrolières
majeures des distributeurs indépendants, afin de favoriser une saine
concurrence dont l'avantage rejaillirait en définitive sur le
consommateur.
Nous concluons en espérant avoir réussi à
convaincre les responsables de la politique québécoise de
l'énergie de l'acuité des problèmes auxquels sont
confrontés les consommateurs et de la nécessité d'y
remédier le plus rapidement possible, notre souci primordial
étant d'en arriver à une distribution des ressources
énergétiques qui soit plus efficace et plus respectueuse des
droits et des besoins des consommateurs.
Si je puis me permettre d'ajouter un très bref post-scriptum
à cette conclusion, parce que nous avions dit que nous concluions, je
vous dirais tout simplement que nous avons remarqué, dans les
déclarations du ministre aux groupes qui ont
précédé la sensibilisation que le ministre avait à
ces problèmes. Nous avons quand même cru bon de devoir les
répéter étant donné les problèmes qui nous
ont été soumis par différents groupes de consommateurs et
nous avons également été heureux de savoir que, plusieurs
des problèmes soulevés, on travaillait à les
résoudre, notamment le cas de la facturation à
l'Hydro-Québec.
Dans ce cas, et je pense bien dans tous les autres et notre
présence ici le prouve je tiens à réitérer
notre disponibilité pour collaborer à la solution de ces
problèmes.
Je vous remercie.
Le Président (M. Lapante): Merci, M. Meunier. La
commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures, et on passera à
la période des questions parce que c'est un mémoire trop
important qui concerne le consommateur pour le passer à la vapeur. Il y
a de bonnes questions à poser.
Merci.
(Suspension de la séance à 18 h 11)
Reprise de la séance à 20 h 5
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, messieurs!
Reprise des travaux. Vu l'absence du ministre, je vais laisser la parole
au député de Rimouski.
M. Marcoux: Le ministre vous prie d'excuser son absence. En fait,
il doit participer à la prolongation de la réunion du cabinet,
réunion qui se tient normalement le mercredi et qui est
prolongée, ce soir, de 6 h 30 à quelques heures cette nuit,
probablement. Il s'excuse de ne pouvoir participer à la séance de
ce soir.
Le ministre a déjà précisé, lors du
précédent mémoire, dans quelle perspective il abordait les
problèmes du consommateur, liés au problème de
l'énergie. Je pense qu'il a donné les grands principes sur
lesquels il entendait fonder l'attitude de son éventuel ministère
ou des organismes qu'il mettrait sur pied, face aux consommateurs qui doivent
s'approvisionner en énergie.
Je crois que l'attrait particulier de votre mémoire, c'est que le
premier mémoire de tantôt posait très bien les
problèmes. Il les posait de façon vécue. On sentait que,
sous chaque phrase, il y avait des exemples concrets. Il y avait de la vie
humaine. Il y avait quelque chose de senti en arrière de chaque phrase.
Ce que vous avez ajouté à ceci, ce sont des hypothèses
il y en avait déjà dans d'autres mémoires
également de solutions qui pourraient rejoindre chacun des cas
spécifiques. Je crois que, quant à ces hypothèses de
solutions, le ministre a précisé tantôt qu'il en retenait
la plus grande partie ou qu'il retenait l'esprit de ces solutions. C'est
pourquoi je n'entends pas revenir sur chacun de ces aspects.
J'aurais deux questions à vous poser. Une première
concerne le rôle que vous voudriez voir jouer à l'Office de la
protection du consommateur dans la défense des consommateurs par rapport
à l'énergie. Vous voudriez que l'office reçoive les
plaintes des consommateurs, fasse le rôle de consiliation entre
l'Hydro-Québec ou la Régie du gaz ou même pour l'huile
à chauffage avec les compagnies, etc. Si cette étape
échoue, vous deviendriez les défenseurs face à
l'éventuel office de l'énergie.
Quel est l'avantage? Vous ne trouvez pas cela ambigu? Si on se place par
rapport au secteur du travail, à un moment donné, quelqu'un qui
joue le rôle de conciliateur, en tout cas, dans le secteur du travail, ne
peut pas jouer, dans une deuxième étape, le rôle de
défenseur d'une des parties. Vous prétendez pouvoir jouer ce
double rôle de façon utile et efficace.
Est-ce que d'autres hypothèses ne pourraient pas être plus
utiles par rapport aux consommateurs que ce double aspect? Deuxième
question, je la formulerai par la suite, c'est une question de détail
par rapport à l'ensemble.
M. Meunier: Je ne sais pas si vous êtes avocat ou si vous
avez de l'expérience en droit du travail. En écrivant le
mémoire, nous avons peut-être pé- ché par le choix
des termes, c'est l'idée plutôt que le mot comme tel, que ce soit
médiation, conciliation ou arbitrage qu'il faut retenir. L'idée,
essentiellement, est celle-ci: l'office est un organisme voué à
la défense des consommateurs et, comme tel, ce qu'on voudrait, c'est que
l'office ou un autre organisme voué à la défense des
consommateurs, puisse, dans un premier temps, représenter le
consommateur d'énergie, directement, face aux fournisseurs
d'énergie. On peut appeler ça, si vous voulez, médiation,
conciliation ou d'un autre terme, mais c'est qu'il y ait un trait d'union entre
le consommateur et le fournisseur d'énergie, et que ce trait d'union,
qui sera un représentant du consommateur, fasse valoir le point de vue
du consommateur.
Cette première étape est faite pour qu'on puisse, le plus
possible, dégager l'organisme qui siégera, c'est peut-être
mal exprimer la chose que de dire en appel, mais l'organisme qui aura la
décision finale, pour qu'on puisse régler le cas au niveau d'une
discussion avec le fournisseur d'énergie. S'il n'y a pas moyen, à
ce moment-là, on passe à la deuxième étape,
auprès de l'organisme qui aurait la décision finale dans cette
affaire, qui sera possiblement l'office québécois de
l'énergie.
On a peut-être appelé ça médiation, il
existe, dans ce sens, une formule de médiation en Suède. C'est
peut-être de là qu'on s'est inspiré, et on n'a
peut-être pas assez inscrit ça dans le contexte
québécois, c'est-à-dire la signification du mot
médiation ici. Ce que je veux faire comprendre, c'est l'esprit et la
procédure, première étape, donc, solution directe avec le
fournisseur, un représentant du consommateur qui serait ou l'office ou
un autre organisme voué à la défense des consommateurs; si
échec, appel ou discussion de la cause devant l'organisme qui a le
pouvoir de décision finale.
M. Marcoux: En résumé, vous ne voyez que des
avantages au fait que ce soit le même organisme, si on fait
l'hypothèse que c'est l'Office de la protection du consommateur, qui
joue le rôle aux deux étapes avec le consommateur. Dans la
première étape, qui fait de la médiation entre le client
et la compagnie et, dans la deuxième étape, entre l'office et le
consommateur.
M. Meunier: C'est qu'il nous semble que cela apporterait
peut-être une plus grande continuité. L'Office de la protection du
consommateur, spécialisé ou non, connaîtrait le dossier et
serait en mesure d'aller peut-être plus rapidement défendre le
dossier devant cet autre organisme.
M. Marcoux: Ça va. La deuxième question porte sur
un point très spécifique. Cela concerne le paiement des factures
à l'Hydro ou à la compagnie de gaz. Vous proposez qu'au lieu de
quinze jours, le délai soit d'un mois. Je pense que c'est une
amélioration normale qui pourrait aller de soi. Ce que vous proposez,
dans un deuxième moment, c'est que la pénalité soit
équivalente à 1% d'intérêt par mois ou environ 10%
par année, quelque chose du genre, au lieu de la pénalité
actuelle qui est évidemment beaucoup plus forte.
Je parle d'une réaction, une observation bien simple que j'ai pu
faire lorsque j'étais tout jeune. Tout le temps que j'ai
été chez nous, je constatais que ma mère, à chaque
mois, lorsqu'elle recevait le compte, le mettait sur la tablette. Une chose est
certaine, c'est qu'elle n'oubliait jamais, au douzième, treizième
ou quatorzième jour, une, deux ou trois heures avant, de payer le compte
si elle ne voulait pas payer $2 ou $3 de plus sur un compte, beaucoup plus
petit dans ce temps-là, mais cela comptait beaucoup. C'était un
"dead line" qui s'imposait et qui était efficace.
Advenant le cas où on prenne votre hypothèse, vous ne
croyez pas que la conséquence sera qu'il va falloir que ces compagnies
ou l'Hydro mettent sur pied toute une série de moyens ou engagent tout
un personnel pour percevoir ou faire des pressions pour finalement recouvrer,
parce que la pénalité serait très faible?
En fait, ce que je crains c'est que pour une mesure qui, actuellement,
incite peut-être 90% ou 95% des gens et qui est très
efficace à payer d'eux-mêmes, sans sollicitation
supplémentaire, leur compte, et qui cause des problèmes à
une partie assez infime de consommateurs de ces produits, la solution que vous
proposez risque de causer de sérieux embêtements à
l'ensemble des consommateurs.
M. Meunier: Je pense que ces compagnies je parle des
fournisseurs d'énergie ont déjà un service de
perception assez bien outillé, d'une part.
D'autre part, il s'agit d'une exception vraiment particulière
dans le cas de fournisseurs de services. A notre connaissance, il n'existe pas
d'autres fournisseurs de services qui ont des moyens de représailles de
cette envergure. L'interruption dont on a parlé, et évidemment
cette pénalité monétaire, on trouve que c'est vraiment
exagéré. Si les commerçants dans leur ensemble ne
facturent pas des montants de cette nature, pourquoi accorderait-on à
des société d'Etat ou d'autres des pouvoirs exorbitants de la vie
commerciale normale?
Le Président (M. Laplante): Le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Vous mentionnez dans votre mémoire qu'un
contrat en bonne et due forme dans lequel seraient clairement
énoncés les droits et les obligations des deux parties devrait
être conclu entre le fournisseur d'électricité ou de gaz et
le consommateur. Même plus loin également, vous souhaitez un
contrat semblable entre le distributeur d'huile à chauffage et le
consommateur. Pourriez-vous expliquer un peu ce contrat que vous souhaitez
entre les deux parties et que vous souhaitez même obligatoire? Quels
seraient les droits et obligations qui pourraient en faire partie?
M. Meunier: Quels seraient les droits et obligations qui
pourraient en faire partie? Je pense qu'on pourrait prévoir certaines
choses comme...
M. Brassard: La facturation, par exemple.
M. Meunier: ...la facturation, ce qui arrive en cas de
délai, préciser les règles du jeu, de façon
très claire, dès le début de la fourniture des services,
les obligations respectives du consommateur et du fournisseur, de la même
façon que cela existe dans un autre secteur d'activité, celui du
logement, où il existe un bail type. Il pourrait y exister un contrat
type en matière d'énergie.
M. Brassard: Cela faciliterait sans doute le travail de l'Office
de l'énergie lorsqu'il aurait à rendre des décisions. Ces
décisions se prendraient à partir de ces droits et
obligations.
M. Meunier: Oui, cela, je pense, non seulement faciliterait le
travail de l'office de l'énergie, mais également la
compréhension du consommateur dans les services qu'il achète,
d'une part, et, d'autre part, facilitant ainsi la compréhension du
consommateur, je pense que cela aurait pour effet accessoire d'améliorer
les relations entre consommateur et fournisseur. Cela clarifierait la
situation.
Le Président (M. Laplante): Le député
d'Arthabaska.
M. Baril: On dit que les compagnies ou les sociétés
n'auraient pas le droit de couper le gaz ou l'huile, et tout cela. Je comprends
que pour le client ce n'est pas facile. Au point de vue humain, ce n'est pas
drôle non plus. Si on se réfère à un exemple, on
sait que les ambulanciers je connais le problème dans mon
comté ont une énorme difficulté à faire
payer leurs factures, leurs comptes. En ayant ce problème, ils savent
qu'il y en a qui ne sont pas récupérables. Quelqu'un qui n'a
rien, tu ne peux pas le saisir, il n'a rien. Qu'est-ce que tu veux faire? Je ne
sais pas à quelle solution vous pouvez penser pour cela. Pour les
ambulances, ce sont les bons, ni plus ni moins, qui paient pour les
méchants parce qu'ils sont obligés de remonter les tarifs de ceux
qui normalement paient pour ceux qui ne paient pas. Je ne sais pas si vous avez
une solution miracle à cela ou si ceux qui ont de l'argent doivent payer
pour ceux qui n'en ont pas. Je ne sais pas s'il n'y aurait pas aussi, dans un
sens, peut-être un abus de ceux qui, ordinairement, ne paient pas.
M. Meunier: Ecoutez, vous êtes bien gentil de penser qu'on
pourrait avoir une solution miracle. Je ne vous surprendrai pas en vous disant
qu'on n'en a pas. Pour ce qui est, cependant, de la comparaison que vous faites
dans le cas des ambulances, je ne veux pas entrer dans ce sujet, parce que ce
n'est pas le propos de la commission, mais il n'en demeure pas moins qu'il
s'agit là d'un problème assez sérieux. Je ne suis pas
sûr qu'on le résolve à la satisfaction du consommateur, si
on demande au consommateur de payer alors qu'il est étendu sur la route,
avant de monter dans l'ambulance. En tout cas, c'est une autre
question. Pour ce qui est de l'interruption des services, on ne dit pas
de façon absolue qu'il faut empêcher l'interruption de services.
Ce que l'on dit au mémoire, essentiellement, c'est qu'il faudra qu'il y
ait eu cette médiation ou cette première étape et il
faudra qu'il y ait eu appel à cet organisme décisionnel
final.
Cet organisme décisionnel final, et cet organisme
déterminera des cas exceptionnels où ça pourra se faire.
Mais, même à ça, je pense, ou enfin, j'espère que
vous avouerez avec moi qu'il s'agit d'une mesure de représailles
draconienne face à un service essentiel, mesure de représailles
qui n'existe pas dans d'autres secteurs d'activités commerciales. Et le
problème avec lequel on est confronté, c'est qu'il s'agit d'un
service essentiel.
M. Baril: Je l'admets, mais ce qu'il faut réaliser aussi,
c'est qu'il y en a, parmi la population, qui n'ont pas les moyens de le payer,
mais ils trouvent quand même une façon de le payer. Je me dis,
moi: Disons qu'on enlève ça, peut-être qu'il y aura des
abus, je ne sais pas.
M. Meunier: Ecoutez. Je pense que la soupape pourra exister au
niveau de cet organisme, Office québécois de l'énergie,
qui pourra apprécier les cas exceptionnels. Mais les
inconvénients sont tels qu'il nous faut protéger l'ensemble des
consommateurs qui ont peut-être plus à subir
d'inconvénients que ceux qui pourraient abuser. Je pense que c'est un
peu ça qu'il faut évaluer, et ce sera précisément
le rôle, ou enfin, un des rôles de cet organisme. Cela pourrait
être un des rôles de cet organisme de décision finale de
l'apprécier.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Vous avez fait allusion à la
nécessité d'un contrat de services entre ceux qui étaient
les pourvoyeurs d'énergie à une clientèle donnée,
services qui seraient consentis moyennant telle et telle condition. J'en suis.
Mais cependant, à l'intérieur de ce contrat de services, qui sera
très bien défini dans le document signé entre les deux
parties, est-ce que vous acceptez le principe, tout de même,
qu'après un délai donné, si le consommateur fait
défaut de respecter ce délai, il y a une pénalité,
qui peut être de 10%, de 12%, peu importe. Est-ce que vous acceptez au
moins ce principe?
M. Meunier: Bien, écoutez! Je ne vois pas pourquoi vous
dites: Au moins, mais, en tout cas, il est bien sûr, je pense bien,
que...
M. Giasson: Je dis: Au moins, parce que dans la
société qui est nôtre, à moins qu'on la change,
cette société, si vous, vous faites défaut de payer vos
impôts, vous savez ce qui vous attend. Si vous faites des transactions
dans d'autres secteurs et que vous ne respectez pas les délais, vous
savez ce qui vous attend. Je sais bien que moi, je fais des affaires, et si,
à telle date donnée, je n'ai pas répondu aux obligations
auxquelles je m'étais engagé, je paie la note.
M. Meunier: Mais, ce n'est pas ça qu'on dit. On dit que
les pénalités pécuniaires qui sont exigées
actuellement sont exorbitantes. L'interruption du service est un moyen de
représailles exorbitant. On ne dit pas qu'il ne doit pas y avoir une
certaine pénalité qui soit exigée. Mais on dit que cette
pénalité devrait être au moins...
M. Giasson: Etalée sur un délai plus long ou
quoi?
M. Meunier: D'une part, étalée sur un délai
plus long et, d'autre part, le taux d'intérêt, même si on ne
veut pas appeler cela de l'intérêt, devrait être plus
raisonnable.
M. Giasson: Mais quel est le taux d'intérêt
raisonnable pour celui qui attend toujours à la dernière minute?
Il faudrait prendre les gens tels qu'ils sont. Il y a celui qui attend toujours
à la dernière minute, qui attend le dernier délai et qui
s'organise pour être obligé de payer une pénalité.
Où tout cela s'arrête-t-il?
M. Meunier: Ecoutez, je ne veux pas reprendre...
M. Giasson: Je comprends que vous devez protéger le
consommateur contre ceux qui abusent, contre les requins, contre les
profiteurs, contre les chevaliers, mais, de temps en temps, ne devriez-vous pas
protéger le consommateur contre lui-même, pour un type de
consommateur donné?
M. Meunier: Je pense qu'il serait peut-être opportun
d'étudier quel serait le taux d'intérêt, si vous voulez
parler de taux d'intérêt. Il y a un taux d'intérêt
qui peut courir, ordinairement... Vous avez fait allusion à certaines
expériences d'affaires ou à d'autres types d'activités,
que cela soit l'impôt ou d'autres. Il y a un taux d'intérêt
qui court quand on est en défaut, mais le taux d'intérêt
n'est pas nécessairement aussi élevé que celui-là.
Il y a un taux d'intérêt qui court sur le crédit variable
aussi, mais il est loin d'être aussi élevé que
celui-là.
On ne dit pas qu'il ne doit pas y avoir de pénalité du
tout, mais que cette dernière devrait être ramenée à
un taux d'intérêt qui soit plus conforme aux activités
commerciales usuelles.
M. Giasson: Je suis bien d'accord, mais si vous mettez votre taux
d'intérêt trop bas, vous allez être pris encore avec des
gens qui vont profiter d'un taux d'intérêt trop bas parce qu'ils
vont toujours attendre le dernier délai.
M. Meunier: D'accord. Il n'est pas question de financer à
long terme la fourniture d'électricité. Je pense qu'il est
question d'avoir un taux d'intérêt qui puisse être
raisonnable dans les circonstan-
ces. C'est tout. Mais vous ne me demandez pas de déterminer un
taux précis ici ce soir, je pense bien. Je pense qu'on est à la
recherche d'une pénalité qui puisse atteindre un sain
équilibre.
M. Giasson: Mais sans le déterminer de façon
précise, vous devez avoir un ordre de grandeur.
M. Meunier: On a fait allusion au taux qui est exigé en
matière de crédit variable. Sans dire qu'on est d'accord sur
cela, cela peut être une indication d'une limite ou cela peut être
une balise qu'on peut utiliser qui est beaucoup plus raisonnable, si on peut
appeler cela raisonnable, si on le compare au taux actuellement utilisé
par ces compagnies.
Le Président (M. Laplante): Le député
d'Orford.
M. Vaillancourt (Orford): M. Meunier, j'aimerais avoir une
précision en ce qui concerne le taux d'intérêt qui est
exigé sur les factures, soit de gaz ou d'électricité. Je
pense que ce n'est pas un intérêt; c'est plutôt un escompte
qui est accordé. Si on calcule la facture, il y a tant de kilowatts
à tant, celafait X montant. Si vous payez à l'intérieur de
tant de jours, on vous donne un escompte de 10%, 15% ou 20%, selon le cas.
Est-ce que ce n'est pas plutôt un escompte qu'on perd qu'un
intérêt qui est exigé par les compagnies, par l'Hydro?
M. Meunier: Ecoutez, on peut appeler cela un escompte; on peut
appeler cela des frais administratifs, mais il n'en demeure pas moins que cela
ressemble à un intérêt assez sérieux. La
réalité peut être appelée de différents noms;
cela peut être appelé intérêt, escompte, frais
administratifs. D'après ce qu'on voit, on pense que c'est plus de
l'intérêt qu'un escompte.
M. Vaillancourt (Orford): II n'y a pas plusieurs compagnies de
distribution d'électricité, mais il y a l'Hydro-Québec et
il y a plusieurs villes qui font la distribution de
l'électricité. Il y a des villes qui vendent leur
électricité à un taux sans escompte et d'autres avec
escompte afin de percevoir leurs paiements le plus vite possible. Je pense que
c'est plutôt un escompte qu'un intérêt.
M. Meunier: Je vais peut-être laisser la parole à M.
Brochu qui vit cela dans sa région.
M. Brochu: J'ai vérifié hier avec
l'Hydro-Québec, pour répondre à votre question. C'est
qu'après la tarification exacte pour le nombre de kilowatts courus
pendant soixante jours, on ajoute 10%. On ne donne pas un escompte. On ajoute
10%. Si on ajoute les 10% pour une période de quinze jours, si le
consommateur va au bout de sa période, cela fait 240%
d'intérêt. Alors, c'est là-dessus qu'on insiste.
M. Vaillancourt (Orford): Vous l'avez vérifié?
M. Brochu: Oui, j'ai vérifié hier moi-même.
M. Vaillancourt (Orford): Cela répond à ma
question.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Rimouski.
M. Marcoux: Deux questions et un commentaire. Ce n'est pas tous
les jours qu'on a l'occasion de rencontrer l'Office de la protection du
consommateur .Voici ma première question: Actuellement ce ne
paraît pas lié, mais je pense que c'est un peu lié
votre réseau d'implantation à travers le Québec, c'est
quoi? Vous êtes installés, si on exclut Québec et
Montréal, dans l'ensemble de l'Est du Québec. Quel est votre
réseau?
Une deuxième question qui est liée à votre
mémoire. Vous proposez qu'il y ait des contrats on en a
parlé tantôt établis entre le client et chaque
compagnie distributrice d'énergie. Une des choses qu'on entend de plus
en plus dire, comme députés, c'est que tout est
bureaucratisé et de plus en plus bureaucratisé. Cela prend un
contrat pour ceci et pour cela; tu achètes pour $20 et cela te
coûte $60 de contrat. Ne pensez-vous pas que des réglementations
uniformes et qui s'appliquent de façon générale ne
pourraient pas pallier les grands inconvénients et que les cas vraiment
particuliers pourraient être réglés autrement? Au lieu de
multiplier tous les types de contrat, que ce soit pour le chauffage,
l'électricité, le gaz, même si on dit qu'ils sont
uniformes, c'est de la bureaucratie. Souvent, on pense protéger les
consommateurs, mais ils ont tellement de papier à lire, à un
moment donné, qu'ils ne retrouvent rien.
Dernier commentaire, je suis bien conscient que, par nos questions, on a
touché des points particuliers, peut-être pas l'essentiel, de
votre rapport. Mais je reviens encore à ce qu'on a dit au début.
Je pense que tous les membres de la commission sont conscients que tout ce qui
s'est dit est lié avec ce qui s'est dit cet après-midi. Vu qu'on
avait touché l'essentiel cet après-midi, on s'est peut-être
attardé à des points très précis.
M. Meunier: Mais il n'y a pas de difficultés
là-dessus.
Je vais répondre à votre dernière question pour
commencer. Quand vous craignez la bureaucratie, les exigences additionnelles,
les tracasseries additionnelles pour les commerçants d'une part, et,
d'autre part, que les consommateurs ne s'y retrouvent plus, je vous suis
à 100%. Mais il n'est pas question de ça. Actuellement, sans
qu'il y ait de contrat type... je ne vais pas faire de "juridisme" ici, mais
vous savez que les contrats peuvent être écrits et qu'ils peuvent
être oraux. Il y a toujours un contrat entre un consommateur et un
vendeur de quoi que ce soit, c'est un contrat écrit ou c'est un contrat
verbal.
Maintenant, il y a moyen de faire des contrats types qui soient simples
et faciles de compréhension, même si on n'est pas avocat. C'est
comme ça que les contrats devraient être faits, je pense
qu'à ce moment-là, ce n'est pas une tracasserie additionnelle, ce
n'est pas de la bureaucratie, mais
c'est une oeuvre d'éducation qui permet au consommateur de se
retrouver beaucoup plus facilement, de connaître ses droits et de
connaître aussi ses obligations.
Je pense que l'expérience, par exemple, du bail type ce
n'est plus une expérience, c'est une réalité maintenant
à cet égard a été assez
révélatrice. On peut avoir des restrictions sur certaines clauses
qui sont à l'intérieur du bail type, mais chose certaine, elles
sont assez bien compréhensibles et, de plus en plus, c'est ça
qu'on retrouve dans les baux actuellement au Québec. Les consommateurs
commencent à s'habituer, commencent à comprendre un peu plus ce
qui se passe. De la même façon, je pense que cela pourrait
s'appliquer également aux contrats de fourniture d'énergie.
Pour ce qui est du réseau, malheureusement, je dois vous dire
qu'à l'heure actuelle, il est plus réduit qu'on ne le voudrait;
mais je vais quand même répondre à votre question et vous
dire qu'en plus des bureaux de Montréal et Québec, il y a le
bureau de Trois-Rivières qui est sous la responsabilité de
Jacques Brochu, à ma droite il y a le bureau de Sherbrooke, le bureau de
Hull, le bureau de Jonquière et le bureau de Rimouski. Je pense que je
les ai tous nommés, ça fait huit au total, Je m'excuse, j'ai
oublié Rouyn-Noranda.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Je pense que dans votre mémoire, vous avez
fait allusion à un protocole intervenu entre l'Hydro-Québec et le
service de l'aide sociale de la région de Montréal. Depuis que ce
protocole existe, avez-vous effectivement reçu des plaintes de
consommateurs bénéficiaires de l'aide sociale de la région
de Montréal disant que l'Hydro-Québec n'aurait pas
respecté ce protocole?
M. Nammour (Rafic): On n'a pas reçu de plaintes
directement à ce sujet, mais le protocole s'applique uniquement à
la région de Montréal et aux assistés sociaux. On ne peut
pas juger vraiment de son impact à l'échelle plus
généralisée.
M. Giasson: Mais à l'intérieur de la région
de Montréal, depuis l'existence du protocole 72, il n'y a pas de plainte
venant de consommateurs bénéficiaires de l'aide sociale?
M. Nammour: II existe des plaintes encore, mais on n'a pas pu les
rattacher aux assistés sociaux qui se seraient encore plaints,
étant donné qu'il y a déjà un mécanisme pour
les aider, mais on continue à recevoir des plaintes au sujet de
l'Hydro-Québec, même dans la région de Montréal.
M. Giasson: Par contre, à l'extérieur de la
région de Montréal, est-ce que l'Hydro-Québec a des
comportements qui provoquent chez vous beaucoup de plaintes dans une attitude
radicale à l'ef- fet de couper, sans préavis, le service
d'électricité?
M. Meunier: Je pense qu'à l'extérieur de
Montréal, les plaintes demeurent et ces plaintes étaient valables
aussi pour la région de Montréal. Vous n'avez qu'à vous
reporter au témoignage des gens qui nous ont
précédés. On n'est pas en mesure actuellement,
d'après nos statistiques, de vous dire si les assistés sociaux,
comme groupes, ne se plaignent plus à la suite de ce protocole
d'entente. On sait qu'on a encore beaucoup de plaintes concernant la fourniture
d'énergie à Montréal. Mais vous dire ou vérifier
l'impact spécial du protocole sur la population des assistés
sociaux à Montréal, on n'est pas en mesure de vous le dire. On
peut vérifier et vous fournir la réponse si ça vous
intéresse, par exemple.
Le Président (M. Laplante): Dernière intervention,
le député de Champlain.
M. Gagnon: Je voudrais savoir si vous avez les pourcentages
peut-être que vous les avez donnés au début de votre
mémoire, malheureusement, je n'y étais pas cet après-midi
des clients dans une région comme Trois-Rivières, qui sont
affectés par la pénalité que vous trouvez
exagérée et, dans ce pourcentage, ça se situe à peu
près dans quelle classe de la société.
Si, par exemple, il y en a 5%, est-ce que ce sont nécessairement
tous des gens qui se retrouvent chez les assistés sociaux ou s'il y a un
pourcentage pour qui ce serait tout simplement par négligence? Si vous y
avez déjà répondu, je vais me passer de la
réponse.
M. Brochu (Jacques): Non, nous n'y avons pas répondu. Cela
me fait plaisir d'y répondre, l'honorable député de
Champlain. A Trois-Rivières, pour les six derniers mois, nous avons eu
155 plaintes concernant spécifiquement l'Hydro.
Sur ce nombre de plaintes, nous avons eu 85% qui regardent
spécifiquement la facturation, un rajustement sur la facturation. Cela
veut dire qu'on a facturé le consommateur, on a un exemple dans le
mémoire, pour $670. On l'a facturé pour $120 trois fois et on a
rajusté par la suite pour en venir à un montant de $670. C'est
fréquent. Le montant de $670 est peut-être le plus poussé.
Il y a aussi des majorations de $250, $300 ou $400. C'est grave. Aller
peut-être un peu plus loin est important aussi. Le pauvre gars qui doit
payer $670 d'un coup, qu'il ne s'attendait pas à payer et qui n'a pas
les économies pour les payer, voulant économiser les 10% et ne
pas se faire couper, qu'est-ce qu'il va faire? Il va emprunter quelquefois
à des taux qui sont assez élevés. Cela majore encore le
prix.
M. Gagnon: Est-ce que d'après votre expérience ces
155 plaintes, c'étaient des gens qui vivaient surtout de l'assistance
sociale?
M. Brochu (Jacques): Malheureusement là-
dessus, je n'ai pas de statistiques spécifiques, mais
d'après l'expérience, les rencontres avec les gens avec qui je
transige, que je vois, je dirais arbitrairement qu'environ 10% de gens sont
assistés sociaux et le reste des plaignants se situerait plutôt
dans la classe moyenne. La majorité, c'est dans la classe moyenne.
M. Gagnon: Cela veut dire qu'ils ont été
pénalisés à cause d'une certaine négligence?
M. Brochu (Jacques): Exact.
Le Président (M. Laplante): Messieurs, les membres de la
commission vous remercient de votre participation. Sachez que cela nous fait
toujours plaisir, surtout comme nouveaux députés, de recevoir un
office gouvernemental. C'est le premier contact que nous avons avec vous et
cela nous a plu énormément.
M. Meunier: Nous de même, M. le Président, nous vous
remercions bien.
Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs.
J'appellerais maintenant le groupe STOP. Bonsoir messieurs.
M. Roab (Karl): Bonsoir.
Le Président (M. Laplante): Si vous étiez capable
de résumer le plus possible votre exposé. Vous disposez d'environ
45 minutes pour nous le présenter, y inclus la période de
questions. Je vous remercie. Voulez-vous vous identifier, s'il vous
plaît!
Society to Overcome Pollution
M. Roab (Karl): M. le Président, MM. les
députés, mon nom est Karl Roab et je suis accompagné ce
soir par le Dr John Dealy. Incorporée à Québec en 1970
à titre d'organisme écologique formé de citoyens, STOP
oeuvre pour la protection de l'environnement et la rationalisation de
l'exploitation et de la consommation des ressources naturelles.
Le temps mis à notre disposition est malheureusement un peu court
pour faire notre présentation en français, ce dont nous nous
excusons. Il nous fera plaisir de remettre notre texte en français d'ici
quelques jours, à M. Guy Joron, pour qu'il le fasse distribuer aux
membres de cette commission.
Ce mémoire contient, premièrement, divers aspects de la
conservation de l'énergie, deuxièmement, différents modes
de protection de l'énergie. Nous terminons notre mémoire par
quelques recommandations, notamment sur la nécessité pour tous
les services gouvernementaux de travailler étroitement ensemble pour
remédier à la pénurie d'énergie qui s'annonce pour
le Québec également. M. Dealy.
M. Dealy (John): M. le Président, MM. les
députés, we are now faced with an important deci- sion. Will we
throw away our natural energy advantage by squandering energy today and letting
the financial and environmental costs fall on future generations? Or will we
use it as the basis of a uniquely Québécois energy policy which
will make it possible to avoid an overwhelming dependence on imported fuels on
the one hand and the hazards of nuclear energy on the other?
In the past, increasing our use of energy has been associated with an
improvement in the quality of life. Since its founding in 1970, STOP has taken
the position that this is no longer true. It is not just a matter of diminished
returns, but of negative returns. This view is based not just on the tremendous
capital and operating costs of new energy installations of all types, but also
on the heavy taxes imposed on our environment by these installations. The
Government of Quebec is taking steps to preserve our cultural heritage for the
benefit of generations to come. At the same time, it is necessary to take steps
to ensure the preservation of the quality of our physical environment so that
our children will have pleasant and healthful surroundings in which to enjoy
their rich and unique culture.
We believe that it is possible to ensure a reasonable quality of life
for ourselves and our children without building nuclear power plants and
without increasing our dependence on oil. We believe this can be done by a
combination of a drastic reduction in our waste of energy and a development of
alternative energy technologies. These steps will require large capital
investment, but when compared with the alternative of investing in new energy
generating capacity, we feel it is the only logical choice.
Let us look at each section of our society to see what can be done.
First, we consider energy use in industry. It is often argued that we should
use our energy resources to attract new industry to Quebec, so that new jobs
can be created. We believe that this has not always work to the desire
advantage. First, those industries which are the most energy intensive tend to
be the least labor intensive. Secondly, the attractive utility rates offered to
industrial users means that they pay less than their share of the costs
associated with increasing our hydroelectric generating capacity. It is the
smallest user who pays a disproportionate share of these huge costs.
Those industries now operating in Quebec should be encouraged to reduce
their energy consumption. There is lots of room for improvement here. In the
United States, the chemical industry sets as its goal the overall reduction in
its energy use of 15% by 1980, and a 9% reduction has already been achieved.
Here in Quebec, a titanium dioxide manufacturer reduced his large energy
requirements to operate a kiln by 8% by use of a small digital computer to
control the process. Of course such improvements in energy-use-efficiency
require capital investment, but this must be measured against the capital
investment in new energy generating capacity. Furthermore, modifications to a
plant to increase the efficiency of energy use generates employment and often
in-
volves a simultaneous reduction in air or water pollution.
The Government can encourage industrial energy conservation by allowing
tax deductions for the capital investment involved, although this should not be
necessary in many cases because the return, in the form of cost savings, can
often justify the investment. Through its own research laboratories and its
program of research grants to universities, the Government of Quebec can
promote the development of sophisticated energy saving techniques. This could
provide the basis of a lively sector of the Quebec economy because energy
conservation is going to be a very big business in the near future.
A seemingly minor point, which is nonetheless important because it
involves no capital cost, is the provision in the labor code for a maximum and
minimum temperature in the work place. Few people can work comfortably at
temperatures much above 21 degrees Celsius. Overheated offices and plants
should be outlawed.
Whether the possibilities for Energy Conservation in the Transportation
Sector. Transportation offers the chance for important energy savings. The
Energy Policy Project of the Ford Foundation estimates that more than one-fifth
of the energy savings achievable by the year 2000 are in transportation.
Control of the use of private automobiles will be the dominant factor in any
successful effort to reduce the energy demand of the transportation sector.
Automobiles consume one-fifth of Quebec's imported oil supply.
We usually think of Quebec as being well served by public transport. In
1973, public transport was reported available to a higher percentage of
commuters in Quebec than in any other region of Canada. Further, where public
transport was available, its use was highest in Quebec. However, Statistics
Canada reports that both of these figures are decreasing. Moreover, the rates
of decrease in Quebec are far greater than in any other region more than
twice the national average. These decreases in availability and usage of
services have been recorded during the three years since the so-called "energy
crisis". Quebec must act now to stop both of these regressive trends and indeed
reverse them.
Clearly, subsidies must support existing public transport services. New
services, however, should be considered very carefully. An expensive
underground system may not necessarily attract motorists out of their cars.
Rather, it may only provide a more comfortable ride for present public transit
users.
A better use of public subsidies would be to invest in innovative,
low-cost improvements in existing bus and rail services. This could be done on
a short time scale to provide for gradual conversion to more appropriate
technologies such as electric trains. Such money would be well spent. Dr. Josef
Kates, Chairman of the Science Council of Canada, has predicted that an energy
saving of $2 annually could result from every dollar capital investment in
public transit.
Provision of public transit services alone will not suffice to increase
usage, however. Improvements in services must be accompanied by strong
discouragement of private transit commuters. A combination of severe
restrictions of access to, and parking in, the city, establishment of buslanes,
straggered working hours, significantly increased automobile and fuel taxes,
and higher highway and bridge tools are essential elements in any program to
increase public transit usage. More efficient use of private automobiles can be
achieved by limiting speeds, increasing fuel taxes, changing liability laws to
encourage car pooling and imposing fuel economy standards. There is nothing new
about these things; they are practiced in cities around the world from Ottawa
to Osaka.
Subsidies to private automobile transit are generally not recognized as
such. They are hidden in roads, police budgets, health care costs and
environmental degradation. These subsidies must be shifted to public transit if
we are to reverse the wasteful trends presently developing.
Our society is in many ways structured around the daily use of a private
automobile. Long term planning should seek to decrease the reliance on the
automobile for recreation as well as for commuting. This means protecting
existing urban playgrounds such as Terre des Hommes, cleaning up the rivers and
adopting the Un fleuve Un parc concept. All new communities should be planned
to prohibit automobile usage in the center. Discouragements are not enough.
Many undeveloped lots now dotting Montreal should be converted from parking
lots to park or community gardens.
Finally, the leaders of government must indicate a strong, personal
commitment to reducing private energy consumption. More can be accomplished by
ministers walking, cycling or taking public transit to work, as does the
Governor of Massachusetts, than the most eleborate advertising campaigns.
The potentially positive effects of these suggestions upon the quality
of the urban environment are obvious. Most new transportation technologies
combine both increased energy efficiency and decreased environmental impact.
One exception is the supersonic transport. Although its total impact on
Quebec's fuel supply would be small, SST service would compromise the
credibility of a government commited to energy conservation in the
transportation sector.
Now, I would like to discuss briefly the potential for energy savings in
the way we design our buildings. The Canada Council has estimated that a 25%
saving in space heating can be obtained by retrofitting of existing homes and
that 50% can be saved by setting appropriate standards for new housing. Another
way in which substantial savings can be made is to increase the efficiency of
operation of oil-burning furnaces. Existing units should be able to achieve
operating efficiencies of 75%, and the best new furnaces can operate at 90%
efficiency. But many furnaces operate with efficiencies as low as 40%. These
furnaces were supposedly being maintained by the service departments
of fuel oil suppliers. Steps should be taken to ensure that oil-burning
furnaces are properly cleaned and adjusted for maximum efficiency.
Even more dramatic savings are possible in the case of commercial
buildings. Buildings recently constructed in our cities have been designed with
little attention to the efficiency of energy utilisation. In most cases they
are built by one company to be used or operated by another so that the builder
has little incentive to invest in systems which will minimize operating costs.
An exception to this rule is the new CP Telecommunications building in
Montreal. Using the best traditional design technics, this building was
designed for efficient use of energy and uses about 20% less energy than
buildings designed along traditional lines. Another example of what can be done
is provided by the new Ontario Hydro Building in Toronto which uses many
advanced energy saving concepts.
While, as has been pointed out above, substantial savings can be
achieved by use of existing commercially available technology, we should be
developing new technology which will permit further large savings. For example,
in the ventilating of a large commercial building, large amounts of energy are
lost in the large volumes of warm, relatively moist air which are continually
exhausted. Processes for transferring a substantial part of the heat and
moisture from the exhaust air to the inlet air have been demonstrated in the
laboratory, but commercialization will not come until there is more of an
incentive for builders to make the additional capital investment required to
use advanced energy-saving concepts.
Whatever the design of our residential buildings, the amount of energy
used will be significantly affected by the habits of those who live in these
buildings. Each resident must see a tangible relationship between his energy
use habit and his energy cost.
Mastermetering of electricity in apartment buildings should be
prohibited, as this completely eliminates any such relationship. Hydro rate
structures should be revised so that the marginal cost of electricity does not
decrease as use increases. I was much encouraged this afternoon to hear the
minister annouce that he was already considering such a change. Indeed, to
prevent an inequitable allocation of energy costs to low-income families, there
should be a minimal rate for the basic amount of electricity needed by a family
on a modest income which uses its energy wisely. Such a scheme is called
"lifeline" pricing and is already in use in some communities in the United
States.
In Selecting appliances, citizens should have the information necessary
to choose wisely. It should be made mandatory that all new electrical
applicances carry a tag giving their energy requirements in a meaningful
way.
Energy intensive packaging techniques must be prohibited. In many cases,
this will imply the use of returnable or refillable containers for foods,
leverages and other consumer goods. In Oregon, where non returnable beverage
containers have been illegal for several years, it is estimated that the annual
energy savings are sufficient to heat 50 000 homes. Furthermore, bottle and can
litter has been reduced 83%. Did this step result in a loss of jobs in Oregon?
On the contrary, it is estimated that it has resulted in a net gain of 365
jobs.
Certain types of energy conservation techniques, particularly waste heat
recovery, can only be put into use when there is close coordination between the
various sectors of our society. In its most elementary form, this is
illustrated by the incineration of municipal solid wastes to generate steam
which can be used for space heating or in industry. For example, the solid
waste incinerator recently built by the city of Québec sells steam to a
neighboring paper-mill. On the other hand, the heat generated by Montreal's
modern incinerator is currently used only to heat a municipal garage because it
is not part of a coordinated energy complex.
Industrial-urban integration schemes are largely non existent in North
America, although well established in Europe. In particular, data available
from Sweden indicate the range of savins from fairly simple integrations such
as combined heat-electricity systems or combinations involving
thermal-generation and industrial use. In other parts of Europe, more complex
idustrial-utility-urban integration schemes yield dramatic energy savings, as
well as greater value added per unit of energy consumed. Quite aside from the
significant increase in the total energy efficiency of the system, the
combination provides net positive benefits for each of the partners and
reinforces mutual interests. The oil
refinery-utility-urban-industry-aquaculture complex in Hamburg is an
illustration of what can be done.
The central position of the oil refinery and other industrial partners
in these integration schemes derives from the constancy of their energy demand
overcoming the purely seasonal demand of residential-commercial heating
demands. Almost all the major partners become both producers an consumers of
energy. Moreover, the major partners producing fuels or heat and electricity
achieve significantly higher orders of efficiency and flexibility.
Now, we turn to the important question of nuclear energy. STOP opposes
the construction of nuclear reactors. Our position on this important issue is
based not on emotion, but on a consideration of the potential benefits and
hazards of this technology. It is not sufficient to say simply that you are
"for" or "against" nuclear energy. Therefore, we will review briefly the key
arguments for and against.
The CANDU reactor system is an outstanding piece of development work. It
has many advantages over competitive reactor systems. For example, as
originally conceived, it does not require reprocessing of spent fuel an it can
use as fuel natural uranium rather than enriched uranium. However, all large
scale nuclear fission operations pose a serious threat to the health of the
community in which they are located and CANDU is no exception to this rule.
This is not due to the likelihood of a nuclear
explosion of the type which occurs when a nuclear bomb is detonated,
because it is hard to imagine how a critical mass of fissionable material could
be assembled as the result of any type of reactor accident. The more likely
danger is from the release of radioactive substances in the environment as a
result of mechanical failures or human errors. Although few deaths have been
attributed directly to nuclear reactors, it is difficult to assess the
incidence of disease resulting from the generation and release of radionuclides
which inevitably accompany the operation of reactors. That accidental releases
of substantial quantities of radioactive materials can and do occur is well
documented. There is no way to guarantee that these will not occur except to
avoid altogether the operation of nuclear reactors.
A very distressing feature of nuclear power generation, which is not
associated with the possibility of an accident at the reactor during operation,
is the necessity of disposing of the radionuclides created in the fission
process. In its simplest form, this is a problem of storing spent fuel rods
under controlled conditions for many years.
However, if the spent fuel is to be reprocessed to extract the plutonium
which has been formed in it, as is now proposed in Canada, large volumes of
highly radioactive liquids and gases are produced and these are many times more
difficult to control than the spent fuel itself. The technology employed in
fuel reprocessing is quite unreliable, and in spite of many years of study of
the problem, no long-term solution to the waste disposal problem has been
found.
The key features of nuclear wastes which make them an especially
sinister threat to our health and that of future generations, is that there is
no way to limit their effect either geographically or in time. Once released
they are easily spread by wind and the movement of river waters. There is no
way to "deactivate" them quickly. We can only wait while the natural decay
processes ultimately transmute them to stable elements. Depending on what
radionuclide is involved, this can take a few days or a few thousands of
years.
Then there is the question of worn out reactors. These are projected to
have a life of about 20 years, and contain trapped in their structures large
quantities of long-lasting radioactive substances. They must be kept under
strict security for many years after they are shut down. This will be very
costly. Moreover, is there any way we can guarantee that an eartquake or some
terrorist act will not result in the release of these dangerous substances into
our air and water environments?
Finally, we wish to mention the proposal which has been made to build an
uranium enrichment plant in Quebec, mainly to supply a long-term export
contract. What would be the effects of venture? A large capital expenditure
would have to be made; most of this capital and the technology required would
be imported. The gaseous diffusion process requires a very large amount of
electric power. Thus the net effect of the operation would be to export huge
quantities of Canadian uranium and Quebec electrical energy while crea- ting a
relatively small number of jobs. Furthermore, it would contribute to the threat
of nuclear arms proliferation, as no security system can guarantee that in the
course of the many routine shipments of nuclear materials which would be
involved, some of them might not be diverted to an irresponsible or unfriendly
power.
What about the role of petroleum? Liquid fuels based on petroleum must
continue to play an important role in the Quebec energy picture for the
remainder of this century. Even if there were unlimited electrical energy
available, there is at present no efficient method for converting it into a
liquid fuel for use in motor vehicles. However, our goal should be to reduce
our dependence on oil. We can do this by reducing our dependence on the private
automobile for transportation and by improving the efficiency of oil-based
energy systems.
Meanwhile, the expected availability of oil in the short term can help
us to meet our energy needs while we develop the technology required to use
alternative, renewable energy sources and to increase our efficiency of use of
energy.
But under no circumstances should we permit the construction of a
supertanker port on the St. Lawrence River. The many tanker accidents which
have taken place recently serve to illustrate that tanker traffic poses an
increasing rather than a decreasing threat to our waterways and coastlines. A
large spill in the St. Lawrence would be catastrophic. Even if most of the oil
could be recovered, it would be impossible to prevent serious and long lasting
damage to the shoreline and to Gulf fisheries.
If we are to avoid increasing our dependence on oil and at the same time
eschew nuclear energy, we must not only make a large investment in increasing
the efficiency of our use of traditional energy sources, we must also start a
major program to encourage the use of solar and wind power by individual energy
consumers.
While these energy sources are not attractive for central generation of
electricity, they have very good potential for supplying energy at the point of
use. Specifically, wind power can supply electricity for rermote or widely
scattered rural settlements and thus elimitate the high cost of transmission
and distribution associated with central station supplies. Solar heating is
already an economically attractive method for supplying hot water and space
heating needs in residential and office buildings. Of course some form of
energy storage must be provided to go along with wind and solar energy devices,
but storage methods are available and are currently being improved.
It should be mentioned here that in order to protect the investment of
those who install solar collectors on their home or building, it will be
necessary to guarantee their "solar rights". That is to say, one must be
confident that at some time in the future, a building will not be built on a
nearby lot which will blot out his access to the sun, unless he is indemnified
for his loss. This will require new legislation.
Another alternative energy source of potential
value here is so called "biomass" energy. This is an indirect form of
solar energy in which some relatively fast growing plant is regularly harvested
and converted to a liquid fuel such as alcohol.
Before concluding, I want to mention the important matter of citizen
participation in energy planning.
According to the Environment Quality Act, and the General Regulation
Respecting the Administration of the Environment Quality Act, a certificate of
authorization must be obtained from the Environment Protection Services of
Quebec in advance of contraction and operation of the following types of
energy-related projects.
These is however no provision for citizen participation of any kind in
the decision-making process. Furthermore the citizen is denied access to the
information contained in the application for a certificate of authorization.
Hydro Quebec's Environmental Directorate has clearly stated that its
environmental impact studies are not available for public viewing. The Quebec
EPS treats all applications and their supporting documents with complete
confidentiality. Only the certificate of authorization as issued by the EPS is
a public document. The citizen is denied the right to know and the right to
participate.
STOP recommends that the Government of Quebec amend the Environment
Quality Act to provide its citizens with the right to obtain information and
the right of prior public consultation with respect to future energy generation
and transmission projects. Public participation must take place before a
project becomes a fait accompli.
In concluding this brief I wish to restate our basic position.
We are in danger of spoiling the physical environment for ourselves and
for many generations to come so that we can enjoy the luxury of incredible
waste frivolous use of energy. If we act now we will be able to achieve an
acceptable level of industrial activity and a reasonably comfortable life style
with a minimum dependence on non-renewable resources. We must immediately take
steps to reduce waste and unnecessary use of energy. At the same time we must
invest in the development of alternative energy sources. If this program is not
put into effect now, we will lose the chance to select this prudent option and
instead will doom ourselves to a futile and destructive attempt to feed our
addiction to ever increasing quantities of energy.
STOP applauds the recent announcement by the Minister of Energy that he
proposes to create a Bureau de l'Economie d'Energie to rationalize consumption
and clarify the decisions which must be made regarding energy use. This is a
vital first step towards insuring our future.
Furthermore, STOP believes that any energy policy adopted for Quebec
must include provisions for the following actions on the part of the
government: 1. Create incentives for increasing the efficiency of energy in
industry. 2. Exercise caution in using long-term, low-rate electricity
contracts to attract new industries to Quebec. 3.Use government supported
research institutes, university research grant programs and industrial
contracts to promote the development of new technologies to: a. reduce energy
consumption b. improve techniques for using renewable energy sources c. permit
storage of electrical energy. 4. Amend the labor code provisions on maximum and
minimum temperature in the work place to eliminate overheated work
environments. 5.Take immediate steps to improve existing public transit systems
while simultaneously implementing disincentives to the use of automobiles for
commuting. 6. Promote ownership of more highly efficient automobiles by
increasing fuel taxes and fuel economy standards. 7. Establish a long-term goal
of diminishing the role of the private automobile in Quebec society. 8. Amend
building codes to require a high standard of energy efficiency. 9. Provide
subsidies for insulation of existing buildings where it is difficult for the
owner to make the necessary investment. 10. Require individual metering of
electricity in multiple unit residential buildings. 11. Use electricity rate
structures and fuel taxes to encourage individual conservation. 12. Incorporate
lifeline pricing into energy rate structures to protect those least able to
pay. 13. Discourage energy intensive packaging of consumer goods and require
the use of returnable containers wherever an energy saving would result.
14.Require energy-requirement labelling of all new home appliances. 15.Begin
planning energy integration systems and promote use of municipal solid waste as
an energy source. 16. Cancel all plans for operating nuclear reactors. 17.
Prohibit the building of a nuclear fuels reprocessing plant in Quebec. 18.
Abandon plans to build a uranium enrichment plant in Quebec. 19.Prohibit the
transport of enriched uranium, plutonium and nuclear wastes through Quebec. 20.
Enact legislation to protect a property owner's solar rights. 21. Provide,
through appropriate legislation, for citizens' rights to information and
citizen participation in making decisions about energy-related projects.
Thank you.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. Vous n'avez
pas soif? M. Dealy: Oui.
Le Président (M. Laplante): Vous êtes bon en
lecture. M. le député de Rimouski.
M. Marcoux: Je dois d'abord excuser l'absence du ministre, M.
Joron, qui doit participer ce soir à la prolongation de la séance
du cabinet des ministres qui n'a pu compléter son travail hier.
Mais soyez certain d'une chose, s'il est là-bas physiquement, son
coeur et son esprit sont ici. Parce que ce sont les problèmes dont nous
discutons ce soir qui le passionnent vraiment.
Première chose que je voudrais indiquer, dans votre
présentation, M. Roab, vous avez signalé que c'était un
problème interministériel. Dans les premières
journées de cette commission parlementaire, nous avons eu l'occasion de
signaler plusieurs mémoires, par les sujets abordés, ont
spontanément suscité nos remarques à cet effet que
normalement c'est à la fois le secteur social, le secteur culturel, le
secteur économique et le secteur de l'aménagement qui sont
touchés par les problèmes liés à l'énergie.
Que ce soit par la modification de nos habitudes de consommateurs, par la
modification de nos valeurs, par la modification du style d'industrie et de
croissance économique qu'on se donne, on touche le développement
économique, etc.
Sur cette prise de conscience, c'est très heureux que vous nous
le rappeliez, c'est un sujet qui est tentaculaire et qui touche, en somme,
à tous les aspects de notre vie sociale, économique et politique.
Je pense que les membres de cette commission en sont très conscients et
vous faites bien de nous le rappeler.
Un deuxième élément que je voudrais indiquer, je
crois que tous les membres de la commission ont été
frappés par l'aspect positif de votre rapport et le sérieux des
recommandations qu'il contient. Si vous avez participé ou assisté
aux autres journées de cette commission, je crois que vous vous rendez
compte que, si on voulait proposer un mémoire à lire assez
rapidement et qui résumerait la pensée des groupes qui se sont
intéressés à un changement de société ici au
Québec ou à la protection de l'environnement, ce serait le
vôtre. Je crois que votre mémoire résume assez bien les
principales suggestions qui ont été faites, soit dans le domaine
du transport ou dans le domaine de l'habitation, dans le domaine industriel,
à propos du nucléaire également. Je crois que votre
mémoire constitue une synthèse très sérieuse et
très positive des principales recommandations que la commission a
reçues depuis six jours. Je pense que c'était important de le
noter.
Compte tenu que votre mémoire est en bonne partie un
résumé et que nous avons déjà discuté de
plusieurs de ces aspects, je pense qu'ensemble on pourrait profiter des
quelques minutes qui nous restent pour approfondir un aspect que la commission
n'a peut-être pas eu le temps d'approfondir tellement jusqu'à
maintenant. C'est votre dernière recommandation, celle qui concerne la
participation des citoyens, l'information c'est évidemment une
nécessité pour pouvoir participer et on pourrait dire
finalement la démocratie qui doit présider à la prise des
décisions dans tout le secteur qui concerne la protection de
l'environnement, les choix énergétiques que le Québec sera
appelé à faire.
La question ou le style de question que je vous poserais, c'est
très global. Bon, vous avez un souci de faire participer la population
aux décisions qui concernent l'avenir énergétique du
Québec. Votre deuxième souci est que le Québec adopte une
politique énergétique qui implique des changements fondamentaux
au niveau des valeurs des citoyens, des valeurs de comportement, d'attitudes,
des opinions, leur mentalité face à la consommation
d'énergie, etc., changer les valeurs de l'industrie, en somme, de tous
les principaux secteurs de l'activité économique et
culturelle.
Ce que j'aimerais savoir, c'est quels sont les mécanismes,
d'après vous, qui devraient être mis en place pour pouvoir
atteindre ce double objectif de changement. Il y a toujours des
résistances au changement; lorsqu'on parle de changement, on parle de
résistance au changement en même temps. Mais quel est le double
objectif de changement et de participation de la population à ces
changements?
Une question limitée, celle que j'ai posée est beaucoup
plus générale, est-ce que vous pensez qu'un organisme du style de
l'Office national de l'énergie, par rapport au Québec comme tel,
serait suffisant pour jouer ce rôle? Ou quel rôle voyez-vous
à un éventuel office québécois de
l'énergie?
M. Roab: Quant à nous, les difficultés d'effectuer
un changement avec participation des citoyens. Je crois que c'est
nécessaire, premièrement, de faire une sensibilisation de la
population avec un bon programme d'éducation dans les écoles,
avec les media. Mais sans des stimulants financiers comme des taxes
élevées, nous sommes convaincus que ce n'est pas possible de
faire réellement quelque chose dans ce secteur de la conservation de
l'énergie.
Concernant la participation et la possibilité d'avoir un
organisme comme le National Energy Board, cela dépend. Nous laissons
cette décision au gouvernement du Québec pour établir un
bon système incorporé de participation des citoyens.
Nous avons aussi entendu que le nouveau gouvernement ou quelques
secteurs, celui-ci, celui de l'énergie, le secteur de M. Léger et
peut-être d'autres... Nous sommes très heureux d'entendre que ce
sera une participation de groupes de citoyens comme le nôtre, mais nous
n'avons pas vu les faits. Nous avons compris que ce sera quelque chose pour
l'avenir.
M. Marcoux: Sur la question de l'Office national de
l'énergie appliqué au Québec, je crois que vous avez
répondu.
M. Roab: Oui.
M. Marcoux: Mais sur la question plus globale de la participation
des citoyens, si on prend des exemples précis: vous voulez construire
une usine
hydroélectrique sur la Jacques-Cartier, vous ne voulez pas
développer le nucléaire, vous voulez faire des projets au niveau
énergétique, vous voulez établir des politiques, comment
voyez-vous cette consultation de la population? Quel mécanisme devrait
être mis en place pour que cette consultation soit véritable?
M. Roab: Je peux vous faire remarquer un autre exemple dans le
texte complet, que nous avons éliminé ce soir. Cet exemple
concerne l'intervention du gouvernement du Québec avec le gouvernement
fédéral. C'est une sorte d'intervention,, une sorte de
participation qui n'existe... Ici, à Québec, il n'existe aucune
possibilité pour le gouvernement de Montréal de faire une
intervention dans une politique de l'Hydro-Québec ou dans une politique
d'énergie. Je ne crois pas. Nous laissons cette décision, nous
sommes optimistes, peut-être plus optimistes. Maintenant que nous sommes
optimistes, ce sera possible d'incorporer des possibilités pour les
participations dans ces décisions.
Je réfère aux exemples du texte, à la page 18.
M. Marcoux: Vos exemples nous indiquent ce qu'il ne faut pas
faire. J'aimerais que vous ayez des exemples qui nous indiquent ce qu'il faut
faire.
M. Roab: Excusez-moi, je n'ai pas compris.
M. Marcoux: Les exemples dans votre mémoire...
M. Roab: Oui.
M. Marcoux: ...nous indiquent la façon dont il ne faut pas
agir. J'aimerais que vous me donniez un exemple ou deux de la façon dont
il faudrait agir. Vous pouvez répondre en anglais si vous voulez.
M. Roab: Actuellement, je n'ai pas un autre exemple. C'est M.
Walker qui a préparé cette section de notre mémoire. Je
m'excuse.
M. Marcoux: Ça va.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Robert-Baldwin.
M. O'Gallagher: Je voudrais simplement faire un commentaire.
Avant-hier, dans la présentation de BP, il y a quelque chose qui m'a
frappé et qui n'a pas été signalé.
Je vais lire la partie: "Per capita, l'indépendance du
Québec sur des sources extérieures d'énergie est l'une des
plus élevées au monde, plus élevée encore que celle
du Japon, pays renommé pour son haut niveau d'indépendance sur
des sources extérieures d'énergie."
Cela a passé, personne n'a fait de remarques là-dessus,
mais je pense que c'est passablement remarquable. Nous autres au Québec,
per capita, on dépense plus d'énergie qu'au Japon. Cet
écart défavorable est dû, pour un faible pourcentage,
à notre climat, numéro 1, mais je pense que le principal
gaspillage d'énergie ce sont nos automobiles privées. Je pense
que vos recommandations, surtout 5, 6 et 7 sont bien acceptées, on doit
faire des efforts pour encourager le transport en commun.
M. Roab: Est-ce une question?
M. O'Gallagher: I just want to say it now that BP Canada
presented a report two days ago. In their report, they have figures. Per
capita, an expenditure of energy coming from outside of the province is greater
than the one in Japan per capita, dependence upon energy coming from outside
the province. I think that is a very eloquent statement on our life-style. The
big difference is that small measure would be due to our climate difference,
but principally, I think the biggest waste is in our life-style, the private
automobiles. I think we all feel that we have to put more efforts and more
money into public transportation and put penalties on the use of the private
cars.
So, I go along with your recommendations 5, 6 and 7 all heartedly.
M. Roab: Comme autre conclusion, je veux dire, à propos de
ce secteur-ci du transport, spécialement le transport en commun, que
nous ne sommes pas aussi positifs ou aussi optimistes que dans les autres
secteurs de construction sur les possibilités de changer notre
système pour la construction d'édifices.
Nous sommes actuellement frappés par l'article du Devoir, de
notre héros, M. Ford, de ce qui s'est dégagé de cette
étude, de ce projet de transport en commun proposé par son
organisme pour la région de Montréal. Nous comprenons que c'est
un programme très complexe; nous comprenons aussi que nous avons un
grand problème avec les citoyens privés qui sont
dépendants de leur automobile, mais nous ne sommes pas si optimiste et
si positif dans ce secteur.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Montmagny. Est-ce que vous avez eu votre réponse?
M. O'Gallagher: Oui.
M. Giasson: J'ai cru comprendre que, dans votre mémoire,
vous recommandez que la Loi sur la qualité de l'environnement soit
amendée, modifiée, de manière qu'on permette davantage aux
citoyens d'avoir voix au chapitre lorsqu'il y a des problèmes
posés pour les questions de l'environnement chez les différentes
communautés du Québec. Dans cet esprit, croyez-vous que
l'Hydro-Québec, lorsqu'elle doit décider de corridors pour
l'installation de ses lignes de transmission, devrait consulter les populations
des régions où les lignes de transmission vont passer? Est-ce que
cela devrait être prévu dans une loi de la qualité de
l'environnement, si c'était votre avis que l'Hydro-Québec devrait
consulter les gens, ou si
on devrait retrouver ces dispositions dans la loi qui régit
l'Hydro-Québec comme telle?
M. Roab: Comme j'ai compris votre question, M. le
député, je crois que vous discutez le problème de
Vaudreuil-Soulanges. Est-ce que c'est vrai? Vous voulez notre opinion sur la
possibilité de changer la loi pour éliminer ce problème
d'un manque de consultation de l'Hydro-Québec.
M. Giasson: On ne peut pas éliminer, dans le contexte
actuel, pour le moins, le passage de lignes de transmission pour le transport
de l'électricité par l'Hydro-Québec. Cependant, nous
savons que l'Hydro-Québec a décidé, de son autorité
seule, de choisir des corridors pour l'installation des lignes. Je vous
demandais si vous êtes d'avis que, dans l'avenir, l'Hydro-Québec
se devrait de consulter les populations là où ses lignes de
transmission devront être installées.
M. Roab: Notre réponse, c'est absolument oui. Nous sommes
absolument en accord avec les citoyens qui voulaient des informations,
premièrement concernant les possibilités d'effets biologiques ou
les effets sur les terres, et l'écologie des régions où il
n'est pas possible de faire des projets comme cela. A la page 18, nous avons
fait une référence à ce problème exactement. Nous
avons été très heureux, cela fait un an maintenant, quand
cela a été possible pour le Conseil consultatif de
l'environnement de faire pression pour forcer l'ancien ministre de
l'environnement à publier un rapport, ce qui, comme nous le comprenons,
est actuellement son obligation.
Le Président (M. Laplante): Messieurs, je vous remercie de
votre rapport, les membres de la commission aussi. J'appelle le groupe Calex.
Monsieur, je sais que vous avez un rapport assez volumineux; vous n'avez pas de
résumé qui l'accompagne. Je ne sais pas si vous allez être
capable de résumer, parce que, si vous étiez obligé de
lire cela, c'est une quarantaine de pages.
CALEX
M. Dulude {Raymond): Le rapport contient seulement 20 pages. Je
pense que les annexes, on pourrait les oublier.
M. Sénécal (Pierre): Les annexes, on peut passer
par-dessus, oui.
M. Dulude: Les annexes sont très importantes. Vous les
avez probablement consultées. On pourrait se limiter simplement au
texte.
Le Président (M. Laplante): Au texte. S'il y a
possibilité aussi de donner seulement les parties intéressantes,
sujettes à des questions surtout.
M. Sénécal: C'est tout intéressant, je
pense. C'est important.
Le Président (M. Laplante): J'en conviens. Veuillez vous
identifier, s'il vous plaît, et commencer.
M. Sénécal (Pierre): Je suis Pierre
Sénécal et mon collègue, c'est M. Raymond Dulude qui est
le vice-président de la compagnie.
Je voudrais remercier les membres de la commission de vouloir nous
donner la chance de présenter notre mémoire.
M. Dulude: Trois ans après la crise
pétrolière qui a secoué le monde industriel et
bouleversé profondément l'industrie de l'énergie au
Canada, nous accueillons avec beaucoup d'intérêt la nouvelle
politique d'ouverture du gouvernement québécois dans ce
domaine.
Il est franchement temps que toutes les parties
intéressées, surtout l'industrie pétrolière qui,
reconnaissons-le, a trop longtemps évolué à vase clos
très strict, délèguent des porte-parole officiels,
indentifient leurs intérêts et passent enfin à table pour
négocier. Car si le gouvernement est vraiment sérieux dans ses
efforts pour bâtir une politique globale dans le domaine de
l'énergie, cette négociation est appelée à devenir
permanente afin d'ajuster le tir aussi souvent que les circonstances le
commanderont. C'est pourquoi Cal-oil s'est jointe à d'autres
sociétés comme IGS, Metropolitan Petroleum, Elf et Canadian Fuel
Marketers pour former l'Association des propriétaires de terminaux
marins.
Par contre, un danger guette le gouvernement: Si l'Etat hésite
trop longtemps à adopter une politique précise et tarde à
clarifier les règles du jeu, comme se sont rendus coupables d'autres
gouvernements, cela risque d'hypothéquer l'avenir
énergétique de la province et de rompre tout le climat de
dialogue et de crédibilité qu'on veut instaurer
présentement.
L'avertissement n'est pas fait en vain, car il s'applique à la
plupart des gouvernements provinciaux du Canada, de même qu'au
gouvernement fédéral qui, malgré ses prétentions,
ne nous a offert jusqu'ici qu'une mosaïque d'intentions. Il est toujours
plus facile pour un gouvernement de créer des sociétés
d'Etat, de bâtir de nouveaux instruments de régie ou de
décréter des mesures ponctuelles comme un gel temporaire de prix.
Mais lorsque vient le temps d'orchestrer toutes les parties en cause, de
susciter un consensus et de définir des objectifs à moyen ou
à long terme, on croirait que les retombées politiques et
électorales sont beaucoup plus avantageuses.
C'est exactement le dilemme que vit le Canada depuis la création
en 1966-67 du premier groupe de hauts fonctionnaires spécialisés
dans le domaine de l'énergie autres que l'équipe de la Commission
nationale de l'énergie. Cette situation devient encore plus
évidente lorsqu'on étudie de près l'incroyable
méli-mélo dans lequel s'embourbe Washington depuis dix ans.
Résultat: La direction politique du secteur de l'énergie
est menée à deux paliers différents. Les interventions
à très court terme viennent des poli-
ticiens alors que l'influence à moyen et long terme est
exercée par divers groupes de fonctionnaires qui n'ont peu ou pas du
tout intérêt à concerter leurs efforts.
Dans le cas du Québec, la situation est un peu plus dramatique
dans la mesure où les normes d'embauche empêchent
littéralement de recruter un personnel qualifié, connaissant
à fond l'industrie et les besoins des consommateurs, et capable de
rallier l'opinion des parties. Cela s'applique aussi bien à la fonction
publique qu'aux sociétés d'Etat.
Cette entrée en matière peut paraître longue avant
d'aborder les obstacles les plus difficiles qu'aura à surmonter la
province au cours des prochaines années, mais le stade où l'on en
est et le retard que le Québec a mis jusqu'ici à définir
ses besoins et ses objectifs en matière d'énergie commandent
justement de partir sur un bon pied.
A cet égard, nous espérons que la nouvelle
stratégie de porte ouverte du gouvernement, confirmée par les
audiences publiques de cette commission, sera maintenue, car il est toujours
délicat de procéder comme on l'avait fait par mémoires
confidentiels en 1972 et 1973. Lorsque les procédures de consultation
privée monopolisent les échanges d'un gouvernement, il y a
toujours des parties en cause qui sont laissées pour compte comme le
démontrent particulièrement les sessions de la commission
parlementaire à l'égard de l'Hydro-Québec depuis quelques
années.
La situation québécoise sur le front
énergétique: Pour une province si dépendante de
l'énergie pour la transformation progressive de ses abondantes
ressources naturelles, il est difficile de comprendre pourquoi le Québec
a adopté une telle politique générale de
laisser-faire.
Le défaut d'avoir diversifié les sources
énergétiques oblige l'industrie pétrolière à
ravitailler presque les trois quarts des besoins de la province, une
responsabilité particulièrement difficile à assumer en
période de crise comme l'illustrent si bien la situation
américaine de 1977 et la position de nombreux pays importateurs lors de
l'embargo pétrolier de 1973.
L'absence complète d'une politique véritable en
matière de compétition pour répondre plus
adéquatement aux besoins des consommateurs a réduit le secteur
indépendant à sa plus simple expression depuis 1970 et
mystifié systématiquement l'activité locale du raffinage
au point de mettre plusieurs entreprises en difficultés
financières.
Le manque flagrant de rapports suivis et parfois complices avec les
provinces exportatrices après tout, il n'y a pas que l'Alberta
qui puisse ravitailler le Québec, mais aussi la Saskatchewan et
potentiellement exportatrices, surtout Terre-Neuve, cette politique du
laisser-faire s'est tout naturellement reflétée aussi bien dans
les rapports de l'Etat avec toutes les parties en cause qu'au niveau des
problèmes économiques, sociaux et écologiques que
suscitait la consommation de plus en plus frénétique de
l'énergie.
En reprenant chacun de ces points, il deviendra beaucoup plus facile
d'identifier des solutions pratiques et disponibles.
La diversification des sources d'énergie. A prime abord, il peut
paraître surprenant pour une entreprise pétrolière de se
faire l'avocat d'une diversification plus équilibrée des sources
d'énergie au Québec. Mais, à bien y penser, les plus
grands bénéficiaires d'une telle réorganisation des modes
d'approvisionnement seraient directement les consommateurs et les distributeurs
indépendants de produits pétroliers.
Comme on pourra le voir plus clairement encore au chapitre de la
compétition, les distributeurs indépendants sont actuellement
seuls devant un bloc très homogène de vendeurs qui n'ont aucun
intérêt à céder leur part de marché aux
indépendants tant et aussi longtemps que leur emprise demeurera aussi
forte sur les besoins des consommateurs. Si le gaz naturel, qui constitue
encore la denrée la moins chère pour les consommateurs au plan du
chauffage, occupait 20% du marché, soit quatre fois plus
qu'actuellement, l'industrie du raffinage aurait beaucoup plus
intérêt à rentabiliser ses activités de
transformation plutôt que son réseau de distribution, qui
coûte très cher à administrer. Cette industrie
concentrerait beaucoup plus ses efforts dans le domaine des produits
légers (essence, produits de base pour la pétrochimie,
lubrifiants, etc...) plutôt que de continuer à miser sur les
produits plus lourds (huile de chauffage et huile industrielle).
Non seulement les consommateurs québécois tireraient-ils
avantage d'une concurrence plus ferme entre trois grands vendeurs
(électricité, gaz et pétrole), mais l'ensemble de la
province profiterait des retombées d'une plus grande transformation de
produits de base sur son territoire.
Si la diversification des sources d'approvisionnement
énergétique offre des avantages évidents sur le plan de la
sécurité du ravitaillement à long terme, elle offre
également un meilleur impact économique et un climat plus sain de
collaboration qu'on minimise trop souvent.
L'impact économique de la diversification s'explique de la
façon suivante: L'industrie du gaz naturel n'a en fait qu'une
très grosse saison en hiver puisque son marché se limite
principalement au chauffage; durant les mois plus chauds, Gaz
Métropolitain doit liquéfier et emmagasiner son gaz pour
réduire au minimum les grandes fluctuations de ses besoins en
ravitaillement durant l'hiver et profiter du marché très lucratif
du gaz en été dans les Etats de la Nouvelle-Angleterre.
L'industrie pétrolière a une très grosse saison en
hiver pour le marché d'huile à chauffage et une très
grosse saison en été pour le marché de l'essence, de telle
sorte qu'il n'y a réellement jamais de répit pour ce secteur.
Quant à l'électricité, la courbe de consommation
ressemble à bien des égards à celle du gaz naturel.
En équilibrant davantage ses sources d'énergie, le
Québec pourrait étaler beaucoup plus équitablement durant
l'année toute fluctuation subite des prix et différer, par
exemple, de trois à six mois, l'impact parfois brutal des hausses de
prix du pétrole qui, comme s'il s'agissait d'une fête re-
ligieuse ou d'un anniversaire national, ont lieu systématiquement
en juillet depuis trois ans.
Bien qu'Ottawa profite de la même occasion pour majorer les prix
du gaz, l'impact de cette hausse ne se fait sentir qu'en décembre,
janvier et février sur l'indice des prix à la consommation. Pour
l'ensemble des consommateurs, ce système d'étalement faciliterait
d'autant la planification budgétaire.
Depuis au moins trois ans, le Québec avait l'occasion d'augmenter
substantiellement à moyen terme la part de sa consommation de gaz
naturel en prolongeant le réseau actuel de Gaz Métropolitain,
mais à dû littéralement céder devant les pressions
de plus en plus fortes des gros consommateurs industriels et des distributeurs
de l'Ontario qui voyaient naturellement d'un bien mauvais oeil l'arrivée
d'un nouveau convive à table.
La stratégie de porte fermée pratiquée par l'ancien
gouvernement nous empêche de comprendre toutes les manoeuvres qui se sont
déroulées en coulisses. Mais un point demeure très clair:
En attendant le parachèvement des travaux d'installation du gazoduc de
l'Arctique de l'Ouest pour augmenter sa consommation, comme le
suggéraient si habilement les industriels et distributeurs de l'Ontario,
le Québec deviendrait perdant. Car, au moment du partage du grand butin,
la croissance des marchés de l'Ontario, de l'Ouest canadien et
américain et de l'inassouvissable région des Grands Lacs sera
telle que ces clients occuperont la première place et le Québec
devra encore se satisfaire des miettes.
Pourquoi reporter à plus tard ce qu'il est devenu urgent de
réaliser dès aujourd'hui? Et la meilleure façon de
procéder ici serait de prolonger le réseau de Gaz
Métropolitain ou mieux encore d'introduire un deuxième joueur sur
le marché comme il en a été souvent question par les
années passées. Ce faisant, le Québec introduirait un
élément de concurrence dans l'expansion de son marché
gazier.
Le deuxième grand avantage à diversifier est sans doute de
réduire la responsabilité incroyable qui pèse actuellement
sur les épaules de l'industrie, une responsabilité qui a souvent
des effets contradictoires et mine le climat d'échanges et de
négociations ouvertes avec le gouvernement.
D'autre part, l'industrie doit constamment négocier des hausses
de prix à la consommation pour justifier des dépenses de plus en
plus fortes au champ de l'exploration. Ce jeu est compris facilement par les
gens du Manitoba, de la Saskatchewan, de l'Alberta et de la
Colombie-Britannique qui sont des provinces productrices. Mais il s'explique
beaucoup plus difficilement chez les consommateurs québécois qui
font la queue aux terminaux des pipe-lines Samia-Montréal ou
Portland-Montréal. Il est vrai que les grandes sociétés de
production, de raffinage et de distribution se comportent de plus en plus comme
des entreprises de service public, cherchant avant tout à maximiser
leurs revenus plutôt qu'à minimiser leurs dépenses. Mais
tant et aussi longtemps que l'industrie aura à satisfaire 70% des
besoins québécois en énergie, elle sera toujours
regardée avec méfiance, quand elle n'est pas attaquée de
plein front par l'Etat ou les consommateurs. Ses interventions sont de plus en
plus jugées avec scepticisme et sa crédibilité est en
véritable chute libre depuis 1972-73 au Canada. Or, les principales
victimes de cet affrontement sont les indépendants, distributeurs
commerciaux ou au détail, et les comptoirs de service qui n'ont jamais
retiré les mêmes avantages que la grande industrie.
Résultat: le climat de négociation s'est gâté au
point que même des gels temporaires de prix créent des mini-crises
comme une tempête dans un verre d'eau.
C'est ce climat que toutes les parties en cause devront rétablir
avant de s'engager dans un programme concret d'objectifs à court, moyen
et long termes.
La compétition sur le marché pétrolier. Là
où les consommateurs se sentent le plus lésés, c'est au
chapitre de la compétition. Les Québécois n'ont pas
complètement tort de penser que la compétition n'est pas ce
qu'elle devrait être sur le marché pétrolier. C'est
d'autant plus facile à comprendre que les politiques de l'Etat
fédéral et provincial, jusqu'ici ont été tour
à tour tellement contradictoires qu'elles n'ont fait que renforcer la
position déjà imprenable des
producteurs-raffineurs-distributeurs. Rappelons quelques faits pour illustrer
ce véritable imbroglio. De 1968 à 1974, le principal objectif du
Québec a été de susciter l'augmentation de la
capacité de raffinage qui s'était stabilisée depuis le
début des années soixante au profit de Sarnia, en Ontario. Parmi
tous les projets de raffineries et de ports pétroliers en eau profonde
qui découlaient d'une véritable euphorie de consommer et de
réexporter à tout prix, un seul résultat tangible est
sorti de toutes ces tractations, soit la raffinerie Aigle d'Or à
Saint-Romuald, qui n'a jamais été exploitée à
pleine capacité et qui, sans le support d'Ultramar à Londres,
aurait été forcée depuis belle lurette de fermer ses
portes, tout comme Shaheen a dû le faire à Come-by-Chance en
1975.
Pendant que le Québec misait à raison sur les sources
étrangères (puisque les perspectives de pénurie au Canada
même s'annoncent déjà pour 1982/83), Ottawa jouait sur la
sécurité intérieure en détournant les exportations
traditionnelles aux Etats-Unis vers le marché de Montréal.
En agissant de la sorte, Ottawa se voyait donc contraint de rendre
encore plus captif le marché pétrolier de Montréal en
protégeant la capacité de production des plus gros raffineurs et
en repoussant du coup toute autre initiative d'implantation de raffinerie.
Cette stratégie eut pour effet de lier davantage les mains des
indépendants et de fermer pratiquement le marché des importations
de produits raffinés. Entre la fin de 1973 et octobre 1976, les
importations de produits finis (essence à moteur, huiles de chauffage et
huiles industrielles) ont dégringolé de près de 80% au
Québec, comparativement à 50% dans le reste du pays, à
cause justement d'un système discriminatoire de subven-
tions généreuses pour le pétrole brut et beaucoup
plus modestes pour les produits raffinés.
Comble d'ironie, ce régime de protection a permis entre-temps
à l'industrie du raffinage de Montréal d'augmenter depuis trois
ans d'une capacité de production égale au niveau d'exploitation
d'Aigle d'Or et ce, en pleine période de surproduction. En d'autres
termes, la politique fédérale, cautionnée au moins en
partie par le Québec, mettait directement en péril l'avenir
d'Aigle d'Or qui avait pourtant été largement
subventionnée par le Québec. La situation était encore
plus critique, puisque, tout en protégeant un marché captif et en
stimulant en quelque sorte la surproduction, Ottawa limitait, d'autre part, le
potentiel d'exportations aux Etats-Unis d'Aigle d'Or sous prétexte qu'il
fallait prévenir toute urgence au Canada en maintenant
élevés les inventaires d'Aigle d'Or.
Une telle surproduction a, bien sûr, déclenché des
guerres de prix, mais ces guerres étaient, pour la plupart,
artificielles. En effet, elles découlaient beaucoup plus d'une
restructuration de la mise en marché, par l'introduction des
libres-services et d'un réflexe de protection du taux minimum de
raffinage que d'une volonté réelle d'accaparer une part
substantielle du marché. En fait, l'industrie du raffinage
contrôle déjà la majorité du marché.
Que voulez-vous retirer alors d'une guerre de prix, à part
d'éviter une baisse des ventes durant une période de
relocalisation? L'autre volet défavorable de ces guerres temporaires
était de stimuler la consommation de produits pétroliers allant
carrément à rencontre d'une diversification des sources
d'énergie. C'est encore largement le cas des huiles industrielles que
les raffineurs produisent en trop grande quantité pour éviter des
investissements massifs qui augmenteraient la valeur ajoutée des
produits.
De toute évidence, la compétition n'existe plus qu'en
principe, non seulement dans le domaine pétrolier, mais à
l'échelle de toute l'industrie énergétique au
Québec. C'est d'ailleurs ce qui explique que l'équation logique
de 5%-gaz, 20%-électricité et 70%-pétrole n'a pas
bougé de façon significative depuis dix ans.
Le marché du gaz est sous le contrôle monopolistique de Gaz
Métropolitain qui, pour différentes raisons, s'est trouvé
incapable d'augmenter substantiellement ses achats de gaz dans l'ouest pour
gonfler ses ventes au Québec.
Le marché d'électricité est sous le contrôle
monopolistique de l'Hydro-Québec qui se prépare à une
seule expansion majeure d'ici l'an 2000, soit celle de la baie James,
après quoi son rythme de croissance devrait diminuer de façon
radicale.
Le marché pétrolier est sous contrôle
oligopo-listique des grands raffineurs de Montréal dont quatre, BP,
Petrofina, Shell et Texaco, ont concentré plus de 40% de leur
capacité canadienne de transformation au Québec; le pourcentage
tombe à 20% chez Imperial Oil et Gulf.
A part cela, il n'y a qu'une poignée d'indépendants,
évoluant sur le marché pétrolier, qui assurent un tant
soit peu de compétition et qui ont déjà
démontré leur volonté de lutter forcément pour
conserver leur place en formant différentes associations, que ce soient
l'Association des marchands d'huile à chauffage, la nouvelle
coopérative Pebec ou encore l'Association des propriétaires de
terminaux marins à laquelle s'est jointe Caloil.
Tant au aussi longtemps que ces indépendants seront forcés
de se ravitailler auprès des raffineurs de Montréal, ils ne
seront pas en réalité de véritables indépendants et
ne feront que maintenir une compétition fictive. Le marché des
produits raffinés à l'étranger représente leur
seule porte de sortie, leur seul atout pour opposer une véritable
concurrence, et c'est ici que le Québec devrait intervenir en obligeant
Ottawa à modifier sa structure actuelle de subventions.
Vous retrouverez d'ailleurs, en annexe de ce mémoire, des
échanges de correspondance avec Québec et Ottawa qui n'ont
entraîné aucun changement, de même que des explications
détaillées sur le mécanisme canadien de compensation pour
l'importation de pétrole brut et de produits pétroliers.
Les rapports avec les producteurs et les futurs producteurs. Au cours
des dernières années, le Québec a commencé bien
timidement à tisser des nouveaux liens avec les provinces productrices
de l'Ouest et les futures provinces productrices des Maritimes. Mais, dans
l'ensemble, ces initiatives ont eu peu d'effet à moyen ou long terme sur
la position du Québec. Trois grands facteurs expliquent pourquoi la
province n'a pas mis plus d'accent dans ses rapports avec ses fournisseurs
actuels ou futurs:
A part la Société québécoise d'initiatives
pétrolières (SOQUIP) dont le budget d'exploitation reste bien
modeste, aucune entreprise vraiment établie au Québec, sauf
peut-être Petrofina, n'avait de programme d'exploration au pays; de toute
façon, même si les autres raffineurs s'identifiaient davantage au
Québec, les échanges entre l'industrie et le gouvernement sur les
programmes d'exploration et le développement ont été
à peu près nuls jusqu'ici;
Le gouvernement n'a à sa disposition aucune équipe
vraiment compétente dans l'exploration et le développement de
nouvelles ressources pétrolières et gazières qui puisse
à la fois justifier des échanges avec l'industrie et les
provinces productrices et indiquer à l'Etat l'évolution possible
de ces sources de ravitaillement à l'avenir pour ajuster ses tactiques
d'intervention en l'occurrence;
A l'exception de quelques brèves rencontres, il n'y a vraiment
pas eu de rapports étroits entre le Québec et des provinces comme
le Manitoba, la Saskatchewan et l'Alberta susceptibles de modifier le "pattern"
historique du ravitaillement québécois;
Du côté des provinces de l'Atlantique, le Québec
s'est surtout frotté jusqu'ici à la Nouvelle-Ecosse, qui offre
pourtant des perspectives de développement beaucoup moins prometteuses
que Terre-Neuve; en s'identifiant à la position relativement souple de
la Nouvelle-Ecosse sur toute la question du partage
fédéral-provincial des droits
sous-marins, la province s'est légèrement
aliéné Terre-Neuve.
Si l'on se fie au refus du Québec de signer récemment
l'accord fédéral-provincial, à l'instar de Terre-Neuve, la
province change peu à peu son fusil d'épaule et paraît
s'orienter dans une avenue plus prometteuse.
Toutefois, il vaudrait la peine d'étudier sérieusement une
participation d'un groupe formé de SOQUIP et d'indépendants aux
fameux travaux du groupe EASTCAN qui fore depuis trois ans au large du
Labrador. Bien que cette participation puisse devenir impossible du simple fait
qu'elle soit trop tardive, tout laisse croire, au contraire, qu'en jouant la
carte du potentiel commercial qu'offre le Québec, la province obtienne
un droit d'entrée.
Pour sa part, Terre-Neuve pourrait ainsi consolider sa position
légale vis-à-vis d'Ottawa, basée sur des droits acquis
avant son entrée dans la Confédération, et proposer au
Québec de nouveaux échanges sur l'électricité des
chutes Churchill et le financement à long terme d'un nouveau bassin au
sud. Il est déplorable que, sur ce dernier point, le Québec n'ait
pas manifesté plus de souplesse pour faciliter à long terme
l'échange d'électricité contre du gaz naturel.
Terre-Neuve pourrait également devenir un allié de choix
dans les efforts déployés par la province pour obtenir un
tracé québécois du gazoduc de Polar Gas dans l'Arctique de
l'Est. Pour des raisons qui ont plus d'apparences politiques que commerciales,
SOQUIP s'est vu refuser la participation au consortium Panarctic qui est
responsable des principales découvertes de gaz naturel dans
l'extrême nord-est canadien.
Mais le Québec devrait essayer à nouveau d'obtenir un
droit de parole dans ce groupe au nom de SOQUIP, et si l'opération
échouait encore, trouver une autre formule de participation d'un groupe
d'indépendants à Panarctic qui constituerait sans doute
l'instrument le plus précieux du Québec dans ses efforts de
diversification.
Une autre méthode dont devrait profiter le Québec à
la suite des modifications budgétaires amenées par Ottawa en mai
1976 serait de créer un consortium provincial d'exploration et de
développement avec l'aide de différentes institutions
financières et la commandite de sociétés
pétrolières indépendantes, que ce soit SOQUIP ou toute
entreprise qui n'est pas engagée dans le raffinage au Québec. Ce
procédé aurait les avantages suivants:
Un tel consortium pourrait facilement doubler ou tripler les efforts
québécois dans l'exploration et le développement de
nouvelles réserves dans l'Ouest, le Nord et l'Est canadien.
Cet effort n'entraînerait aucun déboursé
supplémentaire du Québec au-delà du programme de dotations
annuelles de $10 millions à SOQUIP et procurerait d'énormes
avantages fiscaux aux institutions financières.
Le Québec canaliserait ainsi l'épargne locale et
permettrait à un plus grand nombre de Québécois de se
faire la main au jeu de l'exploration et du développement un peu partout
au pays.
Si cette formule s'avérait profitable, d'autres consortiums
pourraient ensuite être créés avec, cette fois, la
participation d'individus.
En plus de démontrer à l'industrie et aux autres provinces
sa volonté de participer directement à la découverte de
nouvelles réserves de gaz et de pétrole, cette méthode
pourrait créer de nouveaux rapports avec les provinces productrices et
assainir le climat avec l'industrie.
De tels consortiums mixtes d'exploration constitueraient autant de
"secteurs-témoins". Pour sa part, Caloil est prête à
participer à de tels consortiums et élargir substantiellement son
rôle qui s'est confiné jusqu'ici à la distribution de
produits pétroliers.
La sécurité d'approvisionnement au prix le plus bas et non
le plus élevé.
La sécurité d'approvisionnement est le premier objectif
que toute région consommatrice devrait rechercher, à la
lumière du cauchemar qui frappe actuellement nos voisins du sud. Mais
pas à n'importe quel prix!
Avec l'ouverture du pipe-line Sarnia-Montréal, le Québec
paye un très gros prix pour assurer à peine le tiers de son
ravitaillement pétrolier, ce qui représente le cinquième
de toute notre consommation annuelle d'énergie. Et ce prix
élevé peut ne rien valoir lorsque s'épuiseront les champs
pétrolifères en exploitation de l'Ouest canadien durant la
première moitié des années quatre-vingt et qu'il n'y aura
pas assez d'usines de traitement de sable bitumineux pour combler la
différence.
Ce danger n'est pas fantaisiste et menace réellement le pays
puisque le cri d'alarme a déjà été lancé il
y a trois ans, sans avoir provoqué depuis une correction suffisante du
tir. D'autre part, l'exploration et les découvertes se concentrent de
plus en plus vers le gaz naturel et, de l'autre, aucune décision majeure
ne saurait être prise avant encore un an ou deux sur le
célèbre projet de Canadian Arctic Gas. Cela nous reporte donc en
1982-1983 sans aucun espoir de pouvoir assurer le plein ravitaillement
pétrolier du pays.
D'ici là, un autre facteur devrait hypothéquer encore plus
gravement les réserves de plus en plus ténues du Canada: la crise
énergétique des Etats-Unis. Cette crise d'approvisionnement ne
fait que commencer et risque, d'ici les années quatre-vingt, d'exercer
de plus en plus de pressions sur la politique canadienne. Déjà,
après une période systématique de restrictions, on sent,
cet hiver, un relâchement de la part d'Ottawa, non pas que le Canada
doive rester indifférent à cette crise, mais l'Etat
fédéral et les provinces devront s'entendre clairement et
rapidement sur les mesures spéciales à prendre, sinon les
Canadiens connaîtront des remous encore plus déchirants qu'au
cours de l'affrontement fiscal des années 1973-74. Présentement,
la politique de réduction graduelle des livraisons de pétrole et
de gaz canadien s'avère complètement irréaliste dans le
cadre des tensions qui s'annoncent déjà. Le Canada devra
forcément réviser sa stratégie et calculer à
nouveau les réserves qu'il pourra conserver en banque.
Résultat: La sécurité d'approvisionnement du
pipe-line Samia-Montréal deviendra illusoire et le Québec devra
encore regarder vers les marchés étrangers.
Il est donc temps de s'y mettre le plus tôt possible et de
préparer le jour pas très lointain où les prix canadiens
seront complètement dégelés et seront au pair avec les
prix du marché international.
C'est dans ce cadre que l'Etat, avec l'appui de l'industrie et
particulièrement des indépendants, est appelé à
jouer un rôle capital. A ce titre, SOQUIP pourrait aider pratiquement les
indépendants en sondant les marchés internationaux, en trouvant
des occasions d'importation de produits pétroliers à bas prix ou
en concluant les accords pour des indépendants avec des pays
exportateurs de produits pétroliers.
Certains souhaiteraient que SOQUIP prenne une participation dans la
raffinerie d'Aigle d'Or et constitue un secteur-témoin au niveau de la
distribution. Toute une série de rumeurs circulent à cet effet,
certaines prêtant même la volonté à SOQUIP de faire
un seul et même bloc des raffineries d'Aigle d'Or et de Shaheen. Mais ce
serait commettre là bévue sur bévue. Non seulement l'Etat,
par l'intermédiaire d'une de ses sociétés, n'aurait-il
aucun intérêt à prendre en main une ou deux raffineries non
rentables et trop peu sophistiquées pour répondre aux nouveaux
besoins du Québec, mais une réorganisation de l'une ou l'autre de
ces raffineries coûterait presque aussi cher que l'implantation d'une
nouvelle raffinerie qui aurait naturellement le défaut d'augmenter la
surproduction.
Pareille aventure coûterait énormément de capitaux,
s'ajouterait aux subventions déjà très larges
versées à Aigle d'Or et n'apporterait guère de
bénéfices aux consommateurs québécois.
A la lumière de ces faits, nous croyons que SOQUIP devrait
plutôt exercer un rôle d'assistance au secteur indépendant,
tant au chapitre de l'exploration qu'au niveau de l'importation. Nous disposons
déjà de structures suffisantes pour servir adéquatement
les consommateurs. Le premier souci ne devrait pas être de remplacer ou
de dédoubler ce réseau, mais d'en corriger les
déficiences.
Une consultation permanente. Le dernier point que nous voudrions aborder
est l'urgence de créer un comité consultatif permanent
représentant toutes les parties auprès du ministre
délégué à l'Energie. Ce comité serait
différent de l'organisme consultatif créé à Ottawa
en 1968/69, non seulement par sa diversité de représentation,
mais, par les instruments particuliers qu'il aurait à sa disposition. Un
tel comité disposerait en effet d'un secrétariat permanent,
financé à moitié par l'industrie, à moitié
par le gouvernement même s'il était accessible aux
représentants des consommateurs, des écologistes, des
institutions d'enseignement universitaire et des petits marchands de
détail. La principale tâche de ce secrétariat serait de
faire de la recherche sur l'évolution du marché, de financer la
recherche universitaire et d'encourager tout programme de sensibilisation de
l'opi- nion publique aux problèmes de l'énergie. En outre, ce
secrétariat constituerait un canal d'échanges permanents entre le
ministre et toutes les sphères de la population, permettrait à
l'industrie de suivre plus attentivement le travail du ministre et donnerait
enfin l'occasion aux autres groupes concernés d'être mis
constamment au fait des activités de l'industrie.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Rimouski.
M. Marcoux: Je vous remercie beaucoup pour la présentation
de votre mémoire. Je pense que vous abordez des questions importantes
par rapport à la future politique énergétique du
gouvernement du Québec. On retrouve dans votre mémoire des
idées qui ont déjà été défendues
devant cette commission, par contre, d'autres idées nouvelles. Je pense
qu'il y a quand même le ton qu'on doit remarquer et une question de
clarté et de franchise dans tout le mémoire.
Les premières remarques que je voudrais faire portent sur la
question du laisser faire, dans le passé, je pense que plusieurs
gouvernements des pays occidentaux ont laissé faire en ce qui concerne
l'énergie. Je crois que tout le monde prend conscience maintenant que la
politique du laisser faire ne peut plus durer. Sur cela, vous pouvez être
assurés que le gouvernement du Québec entend changer d'attitude
à ce sujet de façon générale autant en ce qui
concerne les produits pétroliers que le gaz, que les produits
électriques, changer notre mentalité de laisser faire.
Deuxièmement, en ce qui concerne les consultations de style
privé, je pense que le style de commission parlementaire que nous avons
tenu depuis quelques jours et que nous continuerons la semaine prochaine, ainsi
que le type de représentants d'organismes que nous avons invités,
en passant par la Protection du consommateur jusqu'aux compagnies
impliquées à tous les niveaux, indique que ce ne sont pas des
consultations privées qui, à l'avenir, se tiendront, en ce qui
concerne le secteur de l'énergie, mais ce seront des consultations
publiques et ouvertes à l'ensemble des intéressés, que ce
soient les consommateurs, les producteurs, ou les distributeurs.
Egalement, je crois que le ministre a déjà indiqué
qu'il y aurait des mécanismes de prévus, que ce soit un office de
l'énergie ou autre mécanisme, qui feraient en sorte qu'il y ait
une consultation permanente, ce que vous souhaitez dans votre rapport. Je pense
bien que cette attitude générale que vous proposez au
gouvernement, sur ces trois points, le laisser tomber et le laisser faire, que
les consultations soient ouvertes et publiques, qu'elles soient permanentes,
vous pouvez être assurés d'une attitude positive du ministre face
à ces trois recommandations.
Votre mémoire pose plusieurs questions. Je pense à une qui
est centrale tout au long de votre mémoire, qui est vitale, c'est celle
de vos rapports avec les raffineurs installés ici, au Québec, les
grandes compagnies, et votre possibilité ou votre
impossibilité d'importer des produits finis, compte tenu des
règles du fédéral, en somme, qui vous pénalisent de
$1.50 parce qu'il ne vous rembourse pas totalement sous cet aspect. Vous dites
que cela vous pose des problèmes. A ce moment, vous êtes
obligés de vous approvisionner davantage chez les raffineurs
montréalais. Vous dites que si le marché était devenu
libre, cela vous causerait moins de problème. Par contre, on sait que le
prix des produits bruts est réglementé de toute façon.
Vous ne croyez pas qu'une des conséquences de ce que vous proposez, de
libéraliser à nouveau le marché, et que vous receviez les
mêmes subventions pour l'importation de produits finis, risquerait de
mettre en difficulté l'industrie du raffinage au Québec qui est
déjà en difficulté, comme vous le reconnaissez très
clairement et très évidemment dans votre mémoire.
C'est la première question, je pense, qui est vraiment capitale
pour vous et qu'il faut éclaircir. Un autre aspect qu'on peut aborder,
c'est le rôle que vous voyez pour SOQUIP dans l'avenir. Je disais qu'il y
avait des choses qu'on retrouvait dans votre mémoire qu'on avait
déjà entendues. S'il y a un aspect qu'on n'a pas entendu, c'est
bien celui-là, sauf de SOQUIP elle-même. Vous proposez que SOQUIP
prenne de l'expansion en ce qui concerne l'exploration et l'approvisionnement
en somme, l'importation de produits pour assurer une meilleure concurrence, une
meilleure sécurité des approvisionnements. Sur quoi vous
fondez-vous pour penser que la sécurité des approvisionnements
serait plus grande si une compagnie gouvernementale, en somme, une
société gouvernementale entrait dans ce secteur, quand on sait
que finalement ce sont les producteurs si on regarde, en ce qui a trait
au pétrole, au gaz déplus en plus, ce sont les
gouvernements qui contrôlent, et les multinationales ne sont maintenant
que des intermédiaires entre les pays possesseurs de la matière
première et les gouvernements locaux?
J'aurais d'autres questions, mais je pense que ce sont deux questions
importantes qu'on pourrait...
M. Dulude: Je vais répondre à la première
question au sujet de la différence de $1.50 entre l'indemnité sur
le pétrole brut et l'indemnité sur les produits raffinés.
Je dois vous avouer que la politique d'indemnité à l'importation
a été établie le 1er janvier 1974 et que, du 1er janvier
1974 au 1er juillet 1975, il n'y avait pas de différence. Le produit
raffiné pouvait être importé sur la même base que le
pétrole brut. Nous convenons avec vous que le prix du pétrole
brut doit être réglementé pour éviter une hausse
trop immédiate du produit canadien, en comparaison avec le prix mondial.
Par contre, ce que nous soulignons, nous, c'est d'éliminer cette
injustice qui a été créée par la différence
de $1.50 le 1er juillet 1975.
Du 1er janvier 1974 au 1er juillet 1975, il n'y a pas eu, d'une
façon pratique, d'importations en produits pétroliers au
Québec durant cette période, au niveau de l'essence à
moteur et au niveau de l'huile à chauffage no 2. Ainsi, les compa- gnies
productrices, qui, incidemment, ont été celles qui ont
demandé à Ottawa de réviser la politique de
l'indemnité à l'importation, l'ont fait exclusivement pour nous
rendre la vie plus difficile, à nous, quelques indépendants. On
peut les compter sur les doigts de la main ceux qui importent et ceux qui ont
des facilités d'entreposage au Québec. Ils sont très peu
nombreux, même au Canada d'ailleurs, parce que les importateurs, au
Canada, sont situés soit sur la côte Est, sur la côte Ouest
ou au Québec, à cause du Saint-Laurent. Alors, c'était
dirigé contre quelques importateurs qui, au cours des 18 premiers mois
du programme, n'ont pas importé.
On a dialogué longuement avec les fonctionnaires de l'Office
national de l'énergie, et eux-mêmes ont développé
vous en avez quelques extraits à l'annexe un programme
d'indemnité qui pourrait varier par produit. Parce que vous savez que le
marché mondial fluctue et ne fluctue pas de la même façon
pour tous les produits. A un moment donné, vous pouvez avoir un prix
dépressif pour l'huile industrielle, alors que l'essence à moteur
coûte très cher. Si vous avez un régime de conpensation
uniforme, c'est qu'au moment où le prix de l'essence à moteur est
très élevé vous ne pouvez pas l'importer. Nous, ce qu'on
dit, c'est que, si on a la possibilité d'importation, ça permet
et ça force les raffineurs à vendre à des grossistes comme
nous à des prix plus raisonnables. Si on perd la possibilité
d'importation, ils nous vendent quand ils veulent nous vendre et au prix qu'ils
veulent. C'est là qu'est le danger.
M. Marcoux: Ce qui est en jeu dans ça, je pense bien
on l'a abordé sous un autre aspect hier à propos de
l'Alcan finalement, c'est une volonté de maintenir un certain
équilibre de l'emploi dans une région donnée qui s'appelle
Montréal.
M. Dulude: Et de maintenir une concurrence.
M. Marcoux: Est-ce que l'objectif de la politique canadienne qui
est de faire en sorte que la valeur ajoutée à un produit soit
ajoutée ici, au Canada, plutôt que d'importer des produits finis,
raffinés, vous le contestez?
M. Dulude: Non, on ne le conteste pas. Nous admettons que...
M. Marcoux: Vous contestez les effets, ce qui revient au
même.
M. Dulude: On conteste une partie des effets. Si vous laissez
entre les mains des raffineurs toutes les règles du jeu, vous acceptez,
de fait, que la concurrence se fasse à l'intérieur de ce
réseau, qui est un réseau tout de même très
restreint. Ce qu'on dit, c'est de laisser la possibilité de
l'importation en cas de besoin. Vous savez que nous...
M. Marcoux: Vous l'avez, la possibilité, comme la marge de
manoeuvre...
M. Dulude: On ne l'a pas, là...
M. Marcoux: ...des raffineurs...
M. Dulude: On l'avait.
M. Marcoux: ... est quand même assez limitée
elle-même parce que d'après les instructions du ministre
Gillespie, ils sont obligés de vous approvisionner.
M. Dulude: Ils sont obligés de nous approvisionner, mais
ils ne le font pas. Au cours du mois de février...
M. Marcoux: Pourquoi ne le font-ils pas?
M. Dulude: Parce que dans un moment de crise ou dans un moment de
baisse d'inventaire, les raffineurs se protègent. Cela fait deux ans
qu'on s'approvisionne chez Imperial Oil, entre autres, parmi certains
raffineurs locaux. Nous avons reçu, il y a quinze jours, un avis
d'Imperial Oil qu'elle n'avait pas de produits à nous vendre.
M. Marcoux: Si vous acceptiez des contrats... M. Dulude:
Qu'est-ce qu'on fait à ce moment?
M. Marcoux: ... fermes, d'une certaine durée avec ces
raffineurs, à ce moment, le problème ne serait-il pas
résolu?
M. Dulude: Ah! Des contrats fermes.
M. Sénécal: Ils ne nous donnent pas de prix. Il ne
faut pas oublier cela. On ne peut pas fonctionner avec la marge de
bénéfices qu'ils nous laissent, on ne peut pas fonctionner du
tout. N'oubliez pas que $1.50 représente presque $0.05 du gallon de
différence avec une compagnie d'huile majeure. C'est impossible de
fonctionner avec cette marge de différence. Ils nous éliminent
complètement du marché. On a autant d'argent que la compagnie
Shell à Montréal. Le petit distributeur qui va s'acheter un
camion de $28 000 qu'il doit chez IAC, qui, à tous les mois, doit aller
faire son paiement chez IAC, ce petit garçon est bien plus mal pris que
la compagnie Shell, même si elle a emprunté $200 millions sur le
marché. Nous avons plusieurs dizaines de millions d'investis au
Québec et on n'a aucune protection.
Le gouvernement est-il formé pour protéger seulement les
raffineurs? A chaque fois qu'ils vont le vouloir, ils n'ont qu'à grossir
leur capacité. Il y aura toujours un surplus de raffinage à
Montréal et il n'y aura jamais personne qui pourra entrer sur le
marché. Le marché restera captif pour eux seulement. Vous vous
trouvez à les protéger. On était en affaires à
Montréal avant que Canadian Petro-fina ne vienne s'établir.
Le Président (M. Laplante): Pourriez-vous répondre
à la deuxième question, le rôle de SOQUIP?
M. Sénécal: La question de SOQUIP? Certainement.
Personnellement, nous n'avons pas besoin de SOQUIP pour importer, mais SOQUIP
peut venir en aide à d'autres indépendants actuellement, comme
Pébec, ces gens-là. Personnellement, je connais tous les
marchés. Je vais en Europe régulièrement. Je parcours le
monde entier. Je connais tous les distributeurs et les raffineries
indépendantes dans le monde, mais par contre, par le gouvernement, ils
peuvent avoir une transaction quelconque qui pourrait être avantageuse. A
ce moment, on est toujours prêt à négocier avec le
gouvernement pour pouvoir se servir des contacts que le gouvernement pourrait
avoir dans un pays quelconque et des échanges qu'on ne pourrait pas
savoir.
M. Marcoux: II y a un aspect de votre mémoire qui m'a
étonné. C'est l'attaque directe, non voilée, que vous
faites à la compétence des fonctionnaires, à la fois du
gouvernement et des sociétés gouvernementales.
Pouvez-vous illustrer comment s'est manifestée cette
incompétence? A la page 2 du mémoire, je crois, vous parlez de
groupes. "Les interventions à court terme viennent de politiciens alors
que l'influence à moyen et à long termes est exercée par
divers groupes de fonctionnaires qui n'ont peu ou pas du tout
intérêt à concerter leurs efforts. Dans le cas du
Québec, la situation est un peu plus dramatique dans la mesure où
les normes d'embauche empêchent littéralement de recruter un
personnel qualifié, connaissant à fond l'industrie et les besoins
des consommateurs et capable de rallier l'opinion des parties. Cela s'applique
aussi bien à la fonction publique qu'aux sociétés
d'Etat."
M. Sénécal: Je ne crois pas que dans vos organismes
québécois vous ayez les connaissances profondes de
Québécois qui peuvent réellement connaître à
fond le système d'exploration et tous ses
à-côtés.
M. Marcoux: Quand vous parlez de la Fonction publique, ils ne
sont pas chargés de faire de l'exploration.
M. Sénécal: Je suis d'accord, mais elle vous
recommande, la Fonction publique, elle vous apporte des informations.
M. Marcoux: Mais qu'est-ce que c'est...
M. Sénécal: II va falloir aller discuter avec
l'industrie, d'homme à homme, être capable d'avoir la même
compétence que ces gens. Ils ne l'ont pas. J'en parlais hier avec le
président de Polytechnique, qui va présenter un mémoire la
semaine prochaine à Montréal, je crois. Il me disait que cela
manquait, dans notre milieu. A Polytechnique, nos ingénieurs quand ils
sortent, il n'y en a pas un qui se dirige vers cette industrie qui devrait
être très intéressante. C'est une bonne chose et on devrait
essayer de penser à cela pour le développer.
M. Marcoux: Comment cela s'est-il manifesté?
M. Sénécal: Bien, écoutez, c'est le besoin,
on le voit le besoin du Québec. Je parle avec des gens au Québec.
Je vois que les gens d'ici ne sont pas au courant de ce qui se passe dans le
pétrole.
M. Dulude: Cela s'est manifesté dans le passé. Pour
nous, c'est peut-être dû au fait qu'Ottawa règle toute
l'industrie du pétrole. Alors, quand nous avons des problèmes, on
se dirige toujours du côté d'Ottawa. On a, dans le passé,
essayé d'impliquer le Québec à nos problèmes et
nous avons difficilement rencontré, je dirais, une participation
spontanée à nos problèmes, non pas que les jeunes
n'étaient pas capables, mais ils n'étaient pas impliqués
et intéressés, si vous voulez, comme les fonctionnaires de
l'Office national de l'énergie le sont. Ils jouent là-dedans tous
les jours. Ils contrôlent continuellement les règles du jeu. Nous
nous disons qu'il est temps qu'au Québec on développe un peu plus
d'intérêt dans ce domaine.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Richmond.
M. Sénécal: Un instant, je vais revenir
là-dessus. Moi, je suis déjà venu dans le temps, l'autre
côté, rencontrer le premier ministre avec M. Desrochers, dans le
temps que c'était M. Bourassa. Il avait envoyé une équipe
supposément connaisseuse au Moyen-Orient. Ils sont revenus, les gens
n'étaient pas plus avancés que quand ils sont partis, ils n'en
connaissaient pas plus long. Ils ne pouvaient pas parler d'une sorte de
trouvaille ou d'une autre, de ces connaissances. Que pensez-vous qu'ils ont
fait? C'était un voyage de fête ou quoi? Je ne sais pas. Cela n'a
pas apporté grand-chose pour le Québec.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Richmond.
M. Brochu: M. le Président, j'aimerais d'abord dire que le
mémoire qui nous est présenté ce soir par Calex
m'intéresse de façon particulière. J'ap-precie beaucoup le
ton direct que vous y mettez et la franchise avec laquelle vous vous exprimez.
Je pense que vous avez l'attitude d'hommes d'affaires qui avez l'air à
savoir où vous allez et vous êtes impliqués dans le
problème à fond.
Ce n'est peut-être pas directement une question que j'ai à
vous poser, mais plutôt un commentaire sur deux choses que la commission,
à mon sens, devrait peut-être retenir parmi toutes celles que vous
proposez. Deux choses qui me paraissent importantes pour les travaux futurs de
la commission; d'abord, cet aspect qui vient d'être soulevé, la
question du fonctionnarisme et de l'influence plus continue des fonctionnaires
en place que des gouvernements, qui eux, sont changea-bles facilement, comme on
a pu le constater depuis plusieurs années. C'est-à-dire que les
fonctionnaires demeurent là. Ce sont quand même eux qui
influencent les hommes politiques en place, qu'on le veuille ou non. Je pense
que c'est l'état actuel des choses, d'une part. Il y a aussi, vous
l'avez souligné, l'espèce de lourdeur de l'appareil du
fonctionnarisme à cause du cloisonnement qui existe, soit d'un
ministère à l'autre ou d'un département à l'autre,
en ce qui concerne le même problème, celui de
l'énergie.
Je pense que ça ne devrait pas nous faire peur d'envisager cette
chose de front, parce que c'est peut-être une façon de ne pas
régler le problème que de dire: II n'y a pas de problème
avec le fonctionnarisme, ce sont tous des gars qui sont bien pratiques et il
n'y a pas de théoriciens là-dedans, ça va très
bien. Je pense que c'est une façon de se mettre la tête dans le
sable et de ne pas regarder le problème en face. J'ai eu personnellement
l'occasion de fouiller un peu la question et il faut se rendre à
l'évidence, pas parce que c'est peut-être la faute de quelqu'un en
particulier, mais l'appareil s'est construit comme ça et par la force
des choses, ce ne sont peut-être pas d'abord des praticiens qui sont tout
près de ceux qui ont des décisions à prendre en ce qui
concerne les politiques.
Ce n'est pas ma petite parole qui peut avoir de l'importance
là-dedans; par contre, on a seulement à regarder nos voisins, qui
sont un peu plus pesants que nous, qui ont peut-être un peu plus
d'expérience que nous, les Etats-Unis. Je pense qu'un des
problèmes majeurs que le président Carter affronte actuellement,
c'est justement cette espèce de bourbier du fonctionnarisme auquel il se
heurte pour mettre de l'avant des politiques nouvelles et sortir du plan
théorique pour aller vers des solutions peut-être plus
pratico-pratiques immédiates.
Disons que je profite de l'occasion c'est pour ça que je
dis que c'est peut-être plus un commentaire pour dire que cet
élément que vous soulevez, je pense qu'il faudrait
peut-être le retenir dans les débats futurs et dans l'instauration
des politiques à venir en matière énergétique.
Disons qu'en ce qui nous concerne, nous, de l'Union Nationale, on a cette
préoccupation d'aller plus du côté pratique; on a vu
l'expérience que cela a donné dans le temps passé, mais
disons que, là-dedans, la création d'une commission permanente
où vous seriez appelées, en tant qu'industries
pétrolières, à avoir une part active continuelle, pourrait
peut-être assurer un peu l'équilibre. Dans ce sens-là,
ça m'apparaît une avenue qu'il faudrait explorer de plus
près.
D'une part, c'est le premier point que j'aimerais que la commission
retienne; deuxièmement, le fait qu'on ne peut plus calculer de
façon absolue les réserves canadiennes de pétrole ou d .
gaz, je pense que c'est un élément qui n'a pas été
soulevé jusqu'à maintenant et qui mérite d'être
retenu, parce qu'on parle toujours un peu en fonction d'absolu. On dit: II n'y
a pas de problème, on a de bonnes réserves, c'est seulement la
question d'aller les chercher, tout ça, mais on n'a pas tenu compte de
l'élément que vous soulevez, c'est-à-dire que les
Etats-Unis, à plus ou moins brève échéance, et
l'expérience qu'on vient de vivre nous le démontre, vont avoir un
appétit beaucoup
plus vorace en ce qui concerne nos matières premières
d'énergie.
Je pense que, dans l'évaluation c|u'on a à faire de notre
sécurité d'approvisionnement, il faut drôlement en tenir
compte. Là-dessus, je vous remercie d'avoir soulevé ce point, je
pense qu'il faut le garder comme point de repère dans nos analyses.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Jeanne-Mance. Le député de Champlain.
M. Gagnon: Si j'ai bien compris, les difficultés que vous
mentionnez viennent du fait vous venez de répondre à une
question tout à l'heure que, dans certaines périodes de
crise, on refuse, les grosses compagnies de Montréal, les grosses
raffineries, refusent de vendre aux indépendants ou trouvent moyen de
les faire chanter jusqu'à un certain point. A un moment donné, si
j'ai bien compris, vous suggérez que SOQUIP et Aigle d'Or aient plus
d'ampleur.
M. Sénécal: Non.
M. Gagnon: Ce n'est pas cela.
M. Dulude: Que SOQUIP prenne de l'ampleur dans ce
domaine-là.
M. Gagnon: Dans ce domaine-là. M. Dulude: Je vais y
revenir.
M. Gagnon: C'est justement dans le but de faire un peu plus de
compétition ou, en fait, vous le mentionnez dans le sens de favoriser un
peu plus les indépendants. C'est cela?
M. Dulude: Oui, et amener un peu plus de compétition.
M. Gagnon: Un peu plus de compétition.
M. Dulude: Je pense que c'est nécessaire. Si vous laissez
l'industrie pétrolière agir seule, elle va faire ce qu'elle veut.
C'est ce qu'elle fait d'ailleurs, en définitive. Elle contrôle 70%
de l'énergie au Québec; c'est excessivement important.
Pour revenir à la question que vous avez posée
tantôt, au niveau de l'exploration, moi, je trouve qu'il serait
très sage que le Québec participe à l'exploration, soit
par SOQUIP ou par toutes sortes de moyens. Quand vous êtes partiellement
propriétaires de certaines ressources, que ce soit à
l'extérieur du Québec il faut que ce soit à
l'extérieur du Québec, parce que je pense qu'au Québec on
n'en a pas à ce moment-là, on a un mot à dire dans
l'utilisation de ces ressources, je pense. C'est ce que les Anglais appellent
eux-mêmes des "fully integrated companies". Les producteurs, comme
Imperial Oil et ces gros-là, c'est la façon dont ils
fonctionnent. Ils perdent énormément d'argent dans le marketing
et subventionnent le marketing avec les profits qu'ils font à
l'exploration.
Si, à un moment donné, le Québec pouvait participer
à cette exploration, que ce soit au Canada ou ailleurs, mais
principalement au Canada au départ, il me semble que ce serait une
protection additionnelle. Ce n'est pas à mettre de
côté.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Montmagny.
M. Giasson: M. le Président, c'était simplement une
remarque à la suite des propos tenus par mon collègue de
Richmond. Je pense qu'on n'a pas à se surprendre si, au Québec,
on n'a pas une équipe de spécialistes dans le pétrole, on
n'a pas encore touché à cela. On est à la période
de départ, de balbutiements, par la création de notre
société d'Etat.
Mais, si on lui donnait une vocation réelle, on pourrait aller en
chercher, des spécialistes, il y en a dans le monde, les compagnies en
ont formé et il ne faut pas se surprendre qu'on n'ait pas encore une
équipe très spécialisée dans ce secteur.
M. Dulude: On peut en développer ici.
M. Sénécal: II y en a de bons hommes. On a des
hommes pour. On a simplement à les guider et à les
développer.
M. Giasson: Je ne vois pas que ce soit un obstacle
véritable pour dire: On ne doit pas explorer ce champ de
développement par une société d'Etat,
propriété du gouvernement.
Le Président (M. Laplante): Dernière intervention,
le député de...
M. Sénécal: Excusez. Pour revenir, je voudrais
ajouter quelque chose, pour le député de Champlain. Je vais vous
raconter quelque chose qui est très simple. Nous avons des
réservoirs à Montréal, ELF a des réservoirs, CFM
(Canadian Fuel Marketer) a des réservoirs, la compagnie Murphy Oil aussi
et personne ne peut avoir du produit des compagnies majeures d'huile
l'été pour remplir nos réservoirs.
Elles ne veulent pas qu'on remplisse les réservoirs au cas
où on ferait un profit de capital sur les inventaires. Mais eux, ils
remplissent tous leurs réservoirs.
M. Gagnon: Au moment où vous en avez besoin?
M. Sénécal: On pourrait remplir nos
réservoirs l'été, mais on ne peut pas, c'est un commerce
très malsain.
M. Dulude: Ce que M. Sénécal veut souligner, c'est
que, depuis trois ans, le fédéral annonce ses augmentations de
prix d'avance.
M. Sénécal: Vous l'avez ici pour le mois de
juillet.
M. Dulude: C'est le gros pique-nique, les gars s'entendent entre
eux. Si vous êtes un homme d'affaires, si vous faites une annonce de prix
six mois d'avance vous allez...
M. Sénécal: Des années d'avance, on sait que
dans deux ans, ce sera au mois de juillet encore.
M. Gagnon: Vous dites que le problème de
l'indépendant est toujours d'acheter...
M. Sénécal: Exactement.
M. Gagnon: ...au plus haut prix et d'avoir la compétition
de ces compagnies.
M. Dulude: Etre à la merci des raffineurs de
pétrole.
M. Sénécal: Ils le savent. Le raffineur le sait,
actuellement, comme on le sait. Le prix est tant sur le marché mondial.
Il y a des revues et on l'a à tous les jours. On peut savoir le
prêt de l'huile à chauffage no 2 dans les Caraïbes, en
Europe. Ils vont dire: Votre huile à chauffage, sur le marché
mondial, vaut tant; moins le subside que vous allez avoir, c'est tant. On
pourra vous la vendre nous autres aussi au même prix, tant. On est
toujours pris à la gorge, on n'a pas d'alternative que d'acheter des
raffineurs. Comprenez-vous?
Le Président (M. Laplante): Le député du
Lac-Saint-Jean.
M. Sénécal: On n'a pas de "bargaining power" avec
eux. Autrefois, lorsqu'on n'avait pas de subside, on avait le même
subside qu'eux. On n'importait pas plus, mais on avait du produit, parce qu'on
avait du "bargaining power" et on soutenait les prix. Ce sont eux qui ont
demandé à l'Office national de l'énergie, à Ottawa,
au ministre, d'avoir une différence de $1.50. Aussitôt qu'on a
établi cela, au moins de juillet, les prix ont augmenté
immédiatement chex les majeurs.
Le Président (M. Laplante): Le député du
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Merci, M. le Président! Il y a un point
central, fondamental dans votre mémoire, c'est l'idée d'une
absence totale ou presque totale de concurrence dans le secteur
pétrolier. Vous parlez même de concurrence fictive, dans votre
mémoire. Les indépendants dont vous faites partie sont
défavorisés dans un tel système, dans un tel contexte. Or,
vous souhaitez le rétablissement de la concurrence, d'une
véritable concurrence. Ce rétablissement de la concurrence vous
le souhaitez d'abord en supprimant l'écart qui existe entre la
subvention qui est accordée pour l'importation de pétrole brut et
la subvention qui est accordée pour l'importation de produits
raffinés, premièrement.
Deuxièment, vous proposez également l'introduction des
indépendants dans le secteur de l'exploration, avec l'aide de SOQUIP,
par exemple, et vous proposez la mise sur pied d'un consortium pour faire de
l'exploration. Vous parlez de "secteurs-témoins" dans le domaine de
l'exploration, toujours dans le but de rétablir la concurrence. Je ne me
trompe pas jusque là?
M. Dulude: Et d'intéresser les Québécois
à l'industrie.
M. Brassard: D'accord, on en parlait tout à l'heure.
M. Sénécal: C'est le bout le plus
intéressant.
M. Brassard: Très bien. Cependant, ce qui m'étonne
et ce que je ne comprends pas dans votre raisonnement et dans votre
argumentation, c'est quand on arrive au raffinage, au secteur du raffinage,
là, vous ne semblez pas trouver utile de vous introduire dans ce
secteur. Vous affirmez même que SOQUIP ne devrait en aucune façon
s'introduire dans ce secteur également. Il a été question
et il est encore question de l'acquisition par SOQUIP de la raffinerie de
Saint-Romuald, vous dites qu'il ne faudrait surtout pas que cela se fasse.
C'est ce que je ne comprends pas, étant donné, comme vous venez
de l'affirmer précédemment, que ce sont précisément
les raffineurs qui vous causent du tort. C'est précisément parce
que les grands du pétrole contrôlent le raffinage au
Québec, qui fait que vous avez des difficultés dans ce secteur.
Pourtant, vous ne semblez pas trouver souhaitable que les indépendants,
peut-être aussi que SOQUIP, prennent pied dans le secteur du raffinage. A
ce moment, toujours dans le but de rétablir la concurrence... Je vous
avoue que là, je ne vous suis pas, je comprends mal votre
raisonnement.
M. Dulude: On dit dans le mémoire qu'on voit d'un mauvais
oeil que SOQUIP fasse l'acquisition de la raffinerie de Saint-Romuald ou de
Come-by-Chance, parce que ces deux raffineries ont des problèmes
techniques. C'est dans ce sens, c'est comme quand vous achetez une automobile
d'occasion.
M. Brassard: Cela ne veut pas dire que SOQUIP ne devrait pas
s'introduire dans le raffinage.
M. Dulude: Non, par contre, elle pourrait s'introduire dans le
raffinage, mais actuellement, il y a assurément une surproduction dans
l'Est du Canada. Alors, ce n'est peut-être pas le bon moment de le faire.
Cela paraît surprenant qu'on vous dise: On doit importer quand
même. On revient au jeu de la compétition, a ce moment.
Evidemment, s'il y a surproduction et qu'on laisse les raffineurs locaux
établir les prix et le jeu de la concurrence seuls, là, on
élimine la compétition totalement. Que SOQUIP ou un autre
organisme local s'installe dans le raffinage en plus des raffineurs actuels,
cela serait, d'une façon économique, préma-
turé actuellement, à cause de la surproduction, à
notre avis. Je ne dis pas que cela ne pourrait pas se faire d'ici quelques
années, mais actuellement, ce ne serait pas sage de le faire. Pour
revenir aux deux autres raffineries, ce ne sont pas des raffineries qui,
à notre avis, pour les montants impliqués, devraient être
achetées.
M. Sénécal: Vous savez qu'actuellement, la mise en
marché des compagnies d'huile majeure, est faite à l'aide des
profits... Dans l'industrie, on appelle ça le "upstream", qui s'en va
jusqu'au "crude oil". C'est là que c'est intéressant, c'est
l'huile brute, l'exploration. L'argent que les compagnies font, c'est dans
l'exploration. Elles ont des chances de déduire aussi des profits qui
sortent de là-dedans, l'équipement qu'elles y mettent, les
investissements, elles l'ont immédiatement du gouvernement. Elles le
ressortent immédiatement du fédéral. C'est là
qu'elles vont faire leur argent. Elles tiennent leurs prix assez bas pour le
raffinage, pour qu'il n'y en ait pas d'autres qui veulent regarder dans ce
département, et elles font juste se maintenir à flot. Elles
perdent même de l'argent au point de vue du raffinage et de la mise en
marché actuellement.
Le Président (M. Laplante): Bon, messieurs, je pense qu'on
a été raisonnable dans le temps.
M. Sénécal: D'accord, cela m'a fait plaisir. Je
vous remercie beaucoup.
M. Marcoux: M. le Président, s'il vous plaît, un
commentaire ou une question sur un aspect qu'on n'a pas touché,
personne, mais qui est quand même très important, dans votre
rapport; c'est l'aspect du gaz. Très rapidement. Vous dites que vous
recommandez au gouvernement d'accroître la concurrence. Vous dites, en
somme, de faciliter l'implantation du gaz davantage au Québec pour
accroître la concurrence. Or, on sait qu'il y a une surcapacité de
raffinage dans le domaine du pétrole. Alors, comment pouvez-vous
recommander ça, en somme, d'accroître la concurrence en
introduisant...
Le Président (M. Laplante): En deux mots.
M. Marcoux: ... davantage le gaz, alors qu'on sait qu'il y a une
surcapacité de raffinage, ce qui mettrait, normalement, encore plus en
péril votre position dans tout ce secteur?
M. Dulude: Oui, on dit on est réaliste et on est
franc que le gaz naturel coûte moins cher actuellement pour le
chauffage, et les 70% que le pétrole couvre, du point de vue du
marché au Québec, devraient diminuer. Vous devriez avoir un
pourcentage plus élevé que 5% au gaz, pour permettre, justement,
s'il y a une augmentation dans le pétrole...
M. Marcoux: Vous êtes conscient que ça met encore
davantage en danger votre survie.
M. Dulude: Oui, certainement.
Le Président (M. Laplante): Eh bien, messieurs...
M. Dulude: On est certain... L'avenir de la province...
Le Président (M. Laplante): ... on va clore sur ce
sujet.
M. Dulude: Vous en avez à la porte. A Terre-Neuve, il y en
a...
Le Président (M. Laplante):... les membres de cette
commission vous remercient...
M. Sénécal: Merci. M. Marcoux: ...
merci.
Le Président (M. Laplante): Cette commission ajourne ses
travaux au mercredi 23 février, 2 heures, avec les organismes suivants:
Independent Petroleum Association; Pan Alberta Gas Limited; The Alberta Gas
Trunk Line; Commission de contrôle de l'énergie atomique et
APA.
Merci!
(Fin de la séance a 22 h 28)