(Onze
heures trente-trois minutes)
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens
ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission est
réunie aujourd'hui afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi
n° 70, Loi visant à protéger les personnes contre les
thérapies de conversion dispensées pour changer leur orientation sexuelle, leur
identité de genre ou leur expression de genre.
Alors, Mme la
secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme Blais
(Abitibi-Ouest) est remplacée par M. Lemieux (Saint-Jean); Mme Dansereau (Verchères), par M. Lévesque
(Chapleau); M. Poulin (Beauce-Sud), par Mme IsaBelle
(Huntingdon); Mme Samson (Iberville), par Mme Guillemette (Roberval);
M. Barrette (La Pinière), par M. Tanguay (LaFontaine); Mme Sauvé (Fabre), par M. Ciccone
(Marquette); Mme Dorion (Taschereau), par Mme Massé
(Sainte-Marie—Saint-Jacques);
Mme Perry Mélançon (Gaspé), par Mme Hivon (Joliette).
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, Mme la secrétaire. Est-ce
qu'il y a des droits de vote par procuration?
La Secrétaire :
Oui, Mme la Présidente. Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis) dispose d'un
droit de vote par procuration au nom de M. Kelley (Jacques-Cartier).
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, je vous informe également qu'en vertu
de la motion adoptée à l'Assemblée nationale le 15 septembre 2020 les
votes pour ce mandat devront se tenir par appel nominal, et ce, jusqu'au 9 octobre 2020... jusqu'au... à la fin de
la... le 20 décembre, donc à la fin de la présente séance.
Remarques préliminaires
Nous allons donc
débuter avec les remarques préliminaires. M. le ministre de la Justice, vous
disposez de 20 minutes.
M. Simon Jolin-Barrette
M.
Jolin-Barrette : Oui, Mme la Présidente. Simplement vous dire que
c'est avec enthousiasme qu'on va débuter l'étude détaillée de cet important projet
de loi visant à protéger les personnes contre les thérapies de
conversion dispensées pour changer leur orientation sexuelle, leur identité de
genre ou leur expression de genre. On a une bonne collaboration de la part de l'ensemble des membres de la commission, je tiens à le souligner, depuis le
début. Je pense que tous ensemble, on a la volonté de faire en sorte que ce
genre de thérapie là... de faire en sorte que c'est totalement inacceptable au Québec,
c'est intolérable. Ce sont des thérapies qui sont complètement barbares.
Alors, Mme la
Présidente, j'entame avec enthousiasme l'étude détaillée du projet de loi, qui,
je sais, sera fructueuse. Et j'informe, d'entrée de jeu, les parlementaires que nous avons écouté les groupes durant les
consultations, j'ai entendu les questions de mes collègues également, et c'est
pour ça que le gouvernement a préparé une série d'amendements, que j'ai
partagée avec mes collègues déjà et que je souhaite pouvoir discuter avec eux.
Donc, nous pourrons le faire tous ensemble. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Donc, je comprends que les
amendements sont déposés sur Greffier.
M.
Jolin-Barrette : Les amendements sont distribués aux collègues dans un
premier temps. Ils ne sont pas déposés sur Greffier, c'est bien important
qu'ils ne le soient pas tout de suite.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Parfait, merci
beaucoup. Alors, maintenant, j'invite
la porte-parole de l'opposition
officielle et députée de Westmount—Saint-Louis à faire ses remarques préliminaires,
et vous disposez également d'un maximum de 20 minutes.
Mme
Jennifer Maccarone
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. À mon tour de saluer mes collègues et de dire que c'est une grande fierté pour moi de participer à une commission parlementaire où on va débattre, article par article, la Loi visant à protéger
les personnes contre les thérapies de conversion dispensées pour changer leur
orientation sexuelle, leur identité de genre ou leur expression de genre.
J'écoute et je suis contente d'entendre les
paroles du ministre, car, c'est sûr, de mon côté, et je sais que je parle également pour mes collègues, nous avons une grande ouverture de travailler en
amont avec le gouvernement
pour bonifier le projet de loi, pour l'adopter d'une façon où nous pouvons
boucher le plus possible les trous et de s'assurer qu'on protège le plus
possible toutes les personnes qui sont visées par des pratiques ou des
thérapies de conversion.
Alors, mon but, c'est sûr, c'est d'agir d'une
façon constructive, de travailler avec le gouvernement, de s'assurer que nous
allons le plus rapidement possible, mais aussi de s'assurer que nous faisons
notre travail. On n'a pas l'intention de
parler sans avoir une bonne cause, mais nous aussi, nous avons des amendements.
Nous voyons beaucoup de places où nous pouvons bonifier le projet de loi.
Le ministre est déjà au courant de ceci. Je pense qu'on a été pas mal
transparents lors des consultations particulières ainsi que dans nos remarques
que nous avons faites lors de l'adoption du principe.
Alors, d'emblée, je dois dire, Mme la Présidente,
même avant le dépôt ou le début du débat sur l'article 1 et les amendements
que je vois que le collègue nous a partagés — alors, merci pour ceci — j'ai
un amendement que je voudrais partager avec les collègues. Alors, j'aimerais
débuter avec ça.
Puis, c'est sûr, c'est une occasion... Je veux
prendre notre temps, aussi, dans cette commission. Je comprends l'urgence d'agir, mais, de l'autre côté, c'est tellement
important, ce que nous allons faire avec le projet de loi n° 70,
c'est tellement important pour les membres de la communauté, c'est tellement
important de savoir que nous... fait une avancée pour la diversité, pour
l'inclusion, pour protéger les personnes qui sont issues de la communauté
LGBTQ2, puis ça envoie un message très fort qu'ils vont prendre pleinement leur
place dans notre société.
Alors, je veux aussi s'assurer qu'on réfléchit vraiment
à l'intérieur de chaque article puis qu'on s'assure que, vraiment, on va
pouvoir protéger ce monde, parce que, c'est clair, on ne va pas ouvrir le projet
de loi n° 70 dans les 10, 15, 20 prochaines années. Alors, je
comprends l'urgence de vouloir agir, mais je veux juste m'assurer que, si on va
interagir puis si nous allons poser des questions ou si nous aurons des débats par
rapport à des amendements, c'est vraiment fait d'une bonne volonté de vouloir agir d'une
façon qui va être complète, en sachant qu'on ne va pas retourner à
débattre de ce projet de loi, on espère, pour plusieurs années.
Je le répète,
puis je le dis souvent, chaque fois que je prends la parole, de faire partie de
la communauté LGBTQ2, ce n'est pas une maladie, ce n'est pas des personnes
malades, ce n'est pas des gens qui ont besoin d'être guéris, ce n'est pas une
maladie mentale, ça ne fait pas partie d'un trouble mental. Alors, je dirais
que c'est très important de toujours avoir ça dans nos têtes quand nous allons
faire nos débats.
• (11 h 40) •
Puis on a aussi mentionné dans l'adoption du
principe, c'est quoi, une définition, une bonne définition de pratique de
conversion, thérapie de conversion. Et je soulève ceci, parce qu'on a eu...
bien, presque chaque personne qui est venue témoigner en consultations
particulières nous a dit qu'il y a quelque chose à faire à l'intérieur de la
définition, puis je sais que le ministre est déjà au courant. Nous avons déjà
dit qu'évidemment on était vraiment épanouis par ce que Florence Ashley nous a
partagé, parce que c'était vraiment complet. Je sais que ça se peut que c'est une définition qui est un peu élaborée, puis
ce n'est peut-être pas de notre habitude de travailler de cette
façon-là, mais, encore une fois, je répète, parce que nous n'aurons pas,
peut-être, la chance de rouvrir ce projet de loi, j'espère qu'on va pouvoir avoir un débat pour discuter de comment
que nous pouvons avoir une définition qui est claire, qui est vraiment ancrée dans une façon où on peut reconnaître le
plus possible les personnes qui sont visées puis ce qui n'est pas visé aussi, pour boucher tous les trous. On veut quelque chose qui est complet. Alors, c'est sûr, ça fait partie de mes orientations.
Puis je ne
pourrais pas passer sans mentionner, évidemment, que moi-même, j'ai déposé le projet de loi n° 599,
puis, comme je dis, je n'ai pas trouvé la façon de traduire ceci en français,
mais, en anglais, on dit : «Imitation is the sincerest form of flattery.»
Alors, je dirais que, vraiment, mon orientation, c'est de cette façon-là. Comme
j'ai fait dans nos remarques préliminaires, au début, début des consultations
particulières, mon but, c'est vraiment un mariage des deux projets de loi. Je
vois vraiment des belles façons que nous pouvons bonifier le 70 puis je
reconnais la volonté du ministre d'aller vers l'avant avec un projet de loi
contre... pour bannir les thérapies de conversion, les pratiques de conversion.
Mais, évidemment, je me sens un peu scoopée, parce que, c'est sûr, c'était mon
premier projet de loi, puis je l'avais choisi comme mon premier projet de loi
parce que c'était une cause qui est très chère pour moi, pour la communauté
dont je représente, et pour moi personnellement. Alors, je suis contente qu'on
va pouvoir, au moins, avoir le débat, mais je ne pouvais pas passer sans le
mentionner.
Je veux aussi souligner, puis je pense que ça
mérite d'être répété, que ça soit le 599 ou le 70, je dirais que ce qui est
très intéressant, puis c'est là où on dit que le Québec prend vraiment l'avance
sur tout le monde, c'est que les deux projets de loi, entre autres celui du ministre,
ça protège non seulement les mineurs, mais les majeurs. Ça, là, «it's huge».
Ça, ça veut dire que tout le monde à travers le Canada, vraiment, sont en train
de nous écouter. C'est de valeur, on ne peut pas tout le faire traduit pour les
gens qui ne sont pas bilingues, mais je sais qu'ils nous regardent, je sais
qu'ils nous écoutent, je sais qu'ils attendent qu'on adopte quelque chose qui
va vraiment protéger tous les Québécoises et Québécois.
Alors, je suis fière de faire partie de ceci. Parce
que, si on regarde vraiment un peu à travers le Canada, on sait qu'Ontario,
Manitoba, Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard, puis aussi on a des villes
qui ont agi, que ça soit Vancouver ou Montréal, on a des
gens qui ont vraiment pris leur place quand on en discute, les thérapies ou les
pratiques de conversion. Alors, je suis contente que, finalement, on va en
faire suivre de ceci, mais on ira même encore plus loin.
Puis c'est aussi, vraiment une suite de ce que
nous avons adopté unanimement à l'Assemblée nationale en juin 2019, la
motion condamnant les thérapies de conversion, où on a demandé à la ministre de
la Justice de faire le nécessaire pour
empêcher les thérapies de conversion au Québec. Alors, je reconnais
qu'évidemment il en prend suite puis
il a entendu le message. Alors, je suis contente qu'on va pouvoir agir puis
aller vers l'avant pour protéger ces personnes.
Je veux aussi mentionner, parce que... juste
pour faire la table un peu, encore, je veux toujours avoir dans ma tête, quand
nous allons faire le débat puis les discussions de... c'est quoi, le résultat
d'une thérapie de conversion puis pourquoi que c'est vraiment une torture,
vraiment, là, c'est une torture. Alors, je suis contente, je sais que le
ministre a déjà dit qu'il avait une ouverture de penser au-delà d'une thérapie,
mais pratique de conversion, parce qu'on sait que ça cause de la détresse, on
sait que ça cause de l'anxiété, on sait que ça cause de la dépression, une
image négative de soi, un sentiment d'échec personnel, de la difficulté à
maintenir les liens, et le dysfonctionnement sexuel.
On sait que ça devrait être banni, on sait que ça devrait être interdit. C'est
un mot que j'aimerais voir, évidemment, à l'intérieur du projet de loi.
Puis je pense aussi que ça mérite d'être répété,
mais j'ai raconté l'histoire de madame... une femme trans qui est venue à mon
bureau de comté, qui s'appelle Alizée, je ne sais pas si le ministre a eu la
chance d'entendre le discours que j'avais fait, dans la Chambre mardi,
là-dessus, mais une jeune femme trans qui est venue à mon bureau de comté parce
qu'elle, elle cherchait de l'aide pour avoir un accompagnement pour de l'aide
médicale à mourir avec la dignité. Elle a 32 ans. Elle a 32 ans puis
elle a vraiment tout essayé dans sa vie pour s'en sortir, mais sa souffrance
suite à ce qu'elle a subi... des thérapies de conversion ont été tellement
sévères qu'elle ne voulait plus vivre. Puis elle ne voulait pas le faire
elle-même parce qu'elle ne voulait pas avoir un échec. Puis elle dit que, dans
le fond, sa cause est fondée, puis c'était
tellement horrible puis grave, ses expériences, qu'elle ne voulait plus vivre.
C'est une souffrance à chaque jour
d'être sur la Terre pour elle. C'est spectaculaire, puis ça... écoute, mon coeur est tombé dans mon
estomac, c'était toute une histoire. Puis tu veux juste prendre cette
personne-là dans vos bras pour l'aider, mais, selon elle, il n'y avait vraiment
rien à faire.
C'était une personne qui était obligée, forcée
de prendre des médicaments. C'était une personne où elle était... ils l'ont
emmenée à l'église puis ils ont crié sans arrêt dans ses oreilles. Ils l'ont
forcée de dire plein de mots que, pour elle, c'étaient des menteries. Ils l'ont
attachée à un lit. «She was chained to a bed.» Puis elle était privée de l'eau,
elle était privée de nourriture jusqu'à tant qu'elle avouait que «I'm a boy».
Voyons donc, ce n'est pas ça, la société, puis ça, c'est une torture. Puis elle
ne s'en est pas sortie, elle ne s'en est pas sortie, elle veut mourir.
Alors, en son nom, puis c'est pour elle, je
pense, puis toutes les personnes comme Alizée que nous allons adopter un
projet de loi qui va être complet, un projet de loi qui va vraiment protéger le
plus possible ces personnes qui sont vulnérables. Parce que, j'avoue, Mme la
Présidente, je ne veux jamais, jamais, jamais encore avoir une personne venir à
mon bureau de comté ou ailleurs, que ça soit ici, à l'Assemblée nationale... et
pour tous les collègues, j'espère qu'on n'aura plus ces histoires de torture
qui vont venir à nos oreilles ou on sera témoin de telles histoires de torture,
parce qu'il n'a pas sa place ici, au Québec, Mme la Présidente.
Pour faire la mise en scène de ce que nous
voulons accomplir à l'intérieur de l'étude détaillée, puis, encore une fois, le
ministre est au courant parce que nous avons vraiment partagé toutes nos cartes
dans une mesure des plus transparentes possible, c'est sûr, on a une
orientation, évidemment, de modifier la définition. Ça, c'est très important
pour nous. On veut aussi que la loi s'applique à la Régie de l'assurance
maladie du Québec. Le ministre lui-même, il l'a cité dans ses remarques, il
sait qu'à l'intérieur du projet de loi n° 599 ça a figuré. Alors, c'est
sûr, nous, on s'en vient avec de tels amendements. On veut s'assurer qu'au-delà
d'une protection, puis que ça vise le Code des professions... on veut aussi
empêcher qu'il y ait une couverture de ces frais non seulement par l'assurance
maladie, mais aussi qu'il y a une interdiction au niveau corporatif,
entreprises et les organismes à but non lucratif. On veut empêcher ces
personnes à recevoir des crédits d'impôt, parce qu'on sait que ce montant, ça
s'élève à 25 millions de dollars par année.
Je sais que c'est peut-être plus complexe, mais
je pense qu'on a des idées qu'on va pouvoir amener, où nous pourrons avoir une
bonne réflexion ensemble, mais c'est clair, c'est un enjeu qui est très
important pour moi puis pour mes collègues, c'est fondamental, on veut vraiment
utiliser ce montant d'argent pour de l'aide juridique, un fonds pour les
victimes. Il y a plein d'autres choses que nous pouvons faire pour armer les
personnes qui sont victimes d'une pratique, une thérapie de conversion. On peut
aider les organismes communautaires, on peut aider les organismes qui représentent
la communauté LGBTQ2 avec cet argent, c'est un montant assez important
puis c'est annuel. Alors, je pense qu'il y a vraiment quelque chose à faire
avec ceci.
Je félicite le ministre avec les sanctions
importantes que lui, il a décidé de mettre à l'intérieur de son projet de loi.
Je pense que c'était vraiment bien fait. Alors, je suis très contente de voir
ceci, parce que je pense aussi que ça envoie un message aux gens de la
communauté qui pensent que, peut-être, je vais offrir une telle thérapie de conversion,
bien, ils vont peut-être réfléchir deux fois, trois fois, quatre fois, parce
que, c'est sûr, c'est quand même des sanctions importantes.
• (11 h 50) •
Je pense que l'autre chose qui est
superimportante pour nous aussi, c'est de s'assurer qu'on veut penser à l'idée
de prescription ou imprescriptibilité. Le ministre disait aussi que c'est
quelque chose qu'on veut au moins avoir un débat. Je comprends aussi que ça
peut être complexe, mais, de l'autre côté, c'est le moment de le penser, c'est
vraiment le moment de voir qu'est-ce que nous pouvons faire. Puis je pense
qu'on a fait des avancées, à l'intérieur du projet de loi
n° 55, qu'on peut utiliser pour nous inspirer, alors, en espérant qu'on va
avoir une telle ouverture pour ceci.
Je dirais aussi qu'il est important pour nous,
Mme la Présidente... c'est aussi de penser au niveau de qu'est-ce que nous
allons faire, à l'intérieur du projet de loi, pour s'assurer, on pense, de
formation, que ça soit en éducation, que ça soit en santé, est-ce qu'on a une
ouverture de bonifier le projet de loi pour s'assurer qu'on peut aller vers
l'avant pour ceci? J'ai mentionné un fonds d'aide aux victimes parce que, c'est
sûr, la santé mentale des victimes, c'est
très important. Puis on en parle souvent, de la santé mentale, actuellement, en
temps de pandémie, on sait que c'est un
enjeu qui est primordial, puis c'est vraiment dans le top cinq de sujets. Alors, en espérant qu'on va pouvoir faire
ceci.
Une petite pensée aussi pour protection de la
jeunesse puis les aînés. Est-ce qu'il y a des mesures, ou des articles, ou des amendements que nous pouvons
amener à l'intérieur du projet
de loi? Puis je regarde le ministre parce que, je pense, ce n'est pas seulement
nous qui va pouvoir amener ceci, j'ose espérer que le ministre a aussi des
idées peut-être créatives où on peut aborder ces idées pour s'assurer que ces
gens-là se voient à l'intérieur du projet de loi puis ils savent qu'on leur a
entendu en commission particulière, parce que c'étaient quand même des messages
qui sont très importants.
Puis, je
dirais aussi, quand on parle de publicité, plusieurs personnes
nous ont mentionné l'importance de bannir la publicité puis de l'emmener à
l'intérieur du projet de loi. Alors, on l'a dit en adoption du principe, c'est sûr, il n'y aura personne qui va avoir une
pancarte qui dit : «7 PM tonight, conversion therapy, everbody welcome.»
Ça ne serait pas ça, c'est clair. Alors, il
va falloir qu'on a des mesures, à l'intérieur du projet de loi, qui vont être
faciles à comprendre puis que les gens vont savoir non seulement que la
publicité, c'est interdit, mais on vous voit puis on va mettre des mesures
claires dans le projet de loi pour s'assurer que ça ne serait pas permis. C'est
très, très, très important.
Un petit mot aussi pour les parents qui nous
écoutent, parce que je sais qu'il y a plusieurs parents qui nous entendent,
puis ils ont quand même des craintes qu'il y aurait une taxe sur leur droit
parental. Puis, c'est sûr, ce n'est pas ce
qui est visé à l'intérieur du projet de loi ni le projet de loi n° 599. Le
but dans ce projet de loi, c'est vraiment de protéger les personnes qui
sont vulnérables. Il y a vraiment une différence entre attente vigilante et
affirmation puis une approche thérapeutique ou corrective. Alors, ça aussi,
c'est important.
Puis un mot aussi pour les personnes intersexes,
parce que je sais que ma collègue la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques,
c'est sûr, elle, elle va mener une bataille pour eux, puis je la félicite,
mais, c'est sûr, il va falloir qu'on pense
aussi à la terminologie à l'intérieur du projet de loi pour s'assurer qu'on ne
mette pas ces personnes à risque ou que leur cause soit... «gets
buried». Ça va être très important qu'ils ont toujours la visibilité, qui est
importante pour eux, puis qu'on ne leur met pas en péril, parce que leur cause,
puis leur bataille, est aussi importante que quand nous parlions des personnes
vulnérables. Puis la thérapie de conversion, c'est très, très, très important.
En conclusion, Mme la Présidente, parce que je
ne sais pas combien de temps qu'il me reste... Bon, bien, deux minutes. Ça va
tellement vite quand on est inspiré par un sujet. Je veux juste dire que, c'est
sûr, mon objectif, quand je suis venue à l'Assemblée nationale, c'était de
donner une bonne représentation des citoyens puis d'être une bonne
porte-parole, mais, comme personne, pour ma formation politique, qui représente
la communauté LGBTQ2, c'était vraiment
de s'assurer qu'on empêche d'avoir cette invisibilité collective puis de mettre
vraiment la communauté au centre de la place publique.
Alors, je vois, à l'intérieur de ce projet de
loi, une opportunité de faire ceci. Alors, je suis très fière parce qu'il y a
toujours un trop grand manque de compréhension, il y a toujours un trop grand
manque de cohésion, de cohérence, de
tolérance. Alors, j'espère que tous les gens qui nous entendent puis qui nous
écoutent... puis que tous les collègues
sont avec moi, dans le sens qu'on dit qu'on veut vraiment avancer les choses
pour cette communauté puis...
For everybody else in Canada
who's listening, thank you for tuning in. I know how important this bill is to
you, I know how important it is that we're going to be moving forward
potentially with legislation that other provinces will hopefully inspire themselves
from. So, thank you to everyone who has submitted information, ideas,
suggestions. Your feedback is crucial and very important to the process that we
have here, so...
Merci beaucoup, Mme la
Présidente, puis au plaisir d'avoir des échanges avec mes collègues.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, maintenant, au tour
de la porte-parole du deuxième groupe d'opposition et députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques
pour vos remarques préliminaires. Encore là, un temps maximal de
20 minutes.
Mme Manon Massé
Mme
Massé : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, tout le monde. Je suis très
heureuse qu'on entame aujourd'hui ce travail minutieux d'étude du projet
de loi n° 70, la Loi visant à protéger les personnes contre
les thérapies de conversion dispensées pour changer leur orientation sexuelle,
leur identité de genre ou leur expression de genre. Ce projet de loi là,
il est important, il est perfectible.
Le ministre nous l'a dit d'entrée de jeu, et je
vois depuis le début, avec les auditions, voire même les discussions qu'on a
eues lors de l'adoption de principe, qu'il y a une réelle volonté de faire
avancer rapidement ce projet de loi là, en s'assurant qu'on va offrir une pièce
législative la plus complète possible pour ces gens qui souffrent depuis
tellement d'années, et pour éviter qu'il y en ait d'autres qui aient à passer
par ces processus de torture, qui sont inacceptables dans une société comme le Québec.
Lorsqu'il y a quelques années on a intégré à la
Charte des droits et libertés de la personne... la charte québécoise des droits et libertés de la personne
l'exclusion des motifs d'identité, et d'expression de genre, et
d'orientation sexuelle
comme motifs d'exclusion, je veux dire, je pense qu'on a mis les pierres
nécessaires pour permettre l'émergence du projet de loi n° 70.
Parce que qu'est-ce que vient faire, en fait, le projet de loi n° 70?
Il vient dire aux gens : C'est dans vos droits d'être reconnus pour ce que
vous êtes et il n'y a personne qui peut vous discriminer sur la base de votre
identité de genre, de votre expression de genre ou de votre orientation
sexuelle, alors que, on le sait, par la pratique, dans le passé, il y avait ce
qu'on a appelé thérapies de conversion, hein? C'est un grand terme qui englobe différentes choses, j'en parlerai un petit peu
plus tard, mais, bref, on vient dire à ces gens qui croyaient qu'au Québec,
malgré la charte québécoise des droits et libertés, il se pouvait... ils
pouvaient se donner le droit d'intervenir sur l'identité, l'expression de genre
ou l'orientation sexuelle des personnes...
Alors, moi, je suis très heureuse, très heureuse
d'y contribuer. D'entrée de jeu, je vois que le ministre aussi souhaite rendre
ce projet-là le meilleur pour les gens. Alors, c'est clair, on va collaborer,
on va le faire avec attention, mais aussi sans qu'il y ait d'empressement. On
va le faire pour que ça roule bien, pour nous assurer que ces gens-là soient le plus rapidement possible protégés
et que ceux qui auront droit à des dédommagements, puisque le projet de loi peut laisser entendre que ces gens-là y auront droit, bien, ils puissent
y avoir droit, parce qu'il y a du monde qui attendent, là.
Je terminerais seulement en disant que, oui, je
pense que ce que le projet de loi nous aura permis, c'est de discuter notamment
de droits des personnes intersexuées, et d'apprendre, ne serait-ce que
d'apprendre à connaître ces personnes-là, et
de voir... de mieux comprendre que leurs droits se trouvent parfois
dangereusement brimés. Mais, ceci étant
dit, je comprends très bien que ce n'est pas dans le cadre du projet de loi n° 70 où on va régler tous les problèmes
concernant les droits des personnes intersexes.
Ceci étant dit, je sais qu'il y a beaucoup
d'ouverture ici et je sais qu'il en est de même pour le ministre, de
dire : Bien, il va falloir s'en occuper à un moment donné. Mais on
retrouvera, et je remercie la collaboration du ministre là-dessus, on
retrouvera, dès l'article 1, un amendement qui est important pour les
personnes intersexes. Et donc je vais le
présenter avec plaisir, et quelques autres amendements que je vois, parce que
le ministre a eu la gentillesse de collaborer dans ce
sens-là, nous a présenté déjà, sans qu'ils soient déposés, des amendements, et là-dedans,
pour moi, il y a vraiment du matériel de ce que j'ai entendu des groupes. Et
donc, là aussi, ça me fera plaisir, avec mes collègues, de les présenter le
moment venu.
Je termine en disant : Une société qui est
forte, c'est une société qui honore sa diversité. Et je pense que le Québec est
fort. Merci, Mme la Présidente.
• (12 heures) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, je reconnais la députée
de Joliette et représentante du troisième groupe pour ses remarques
préliminaires. Encore là, un 20 minutes, maximum. Mme la députée.
Mme Véronique Hivon
Mme Hivon : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je suis heureuse à mon tour de dire que
nous allons débuter ensemble cette étude détaillée du projet de loi n° 70
qui vise à protéger les personnes contre les thérapies de conversion pour
changer leur orientation sexuelle, leur identité de genre ou leur expression de
genre. Je pense qu'on franchit un grand pas, comme je l'ai dit lors de
l'adoption du principe il y a deux jours, avec le dépôt de ce projet de loi et
l'étude de ce projet de loi, un grand pas parce que le Québec a été un
précurseur pour l'égalité avec les personnes issues de la communauté LGBTQ2+.
Et je pense que c'est une autre manière de témoigner de l'importance, au Québec, de ces enjeux d'égalité, de respect de la
diversité et de reconnaître toute la souffrance aussi. Je trouve que c'est très important de reconnaître
toute la souffrance que certains membres, beaucoup de membres de cette
communauté ont vécue par le passé et vivent encore aujourd'hui. Et je pense
qu'avec ce projet de loi là on vise à diminuer cette souffrance-là, non
seulement à reconnaître pleinement la réalité des membres de la communauté,
mais aussi à diminuer la souffrance qu'ils
ont pu vivre et qu'ils peuvent vivre encore de différentes manières, et ça,
c'est une manière concrète de montrer qu'on écoute, qu'on essaie de
comprendre le plus possible et qu'on veut faire reculer cette souffrance-là.
Donc, c'est un grand pas d'avoir un projet de
loi qui vise vraiment à pouvoir dédommager les personnes qui sont victimes des
thérapies de conversion, de faire en sorte qu'elles ne puissent plus exister en
sol québécois et que les gens qui
continueraient à s'y aventurer soient pénalisés, et avec des amendes. Et je
pense que c'est un symbole
fort, de pouvoir remettre des amendes aux gens qui contreviendraient aux dispositions
de la loi.
Donc, je suis très fière de pouvoir participer à
cette étude-là. Il y a des collègues, ici, qui se penchent sur les enjeux
depuis beaucoup plus longtemps que moi, mais je suis très heureuse, au nom de
ma formation politique, de pouvoir y participer. Et évidemment mes deux collègues
des autres partis d'opposition font partie de celles-là, ces personnes qui se
penchent sur cette question depuis longtemps, et ma collègue de Westmount—Saint-Louis
a même déposé un projet de loi. Et je veux aller dans le même sens qu'elle, je pense qu'on gagne à
ramener ensemble les meilleures idées et tous nos cerveaux. C'est ça, la
beauté de la manière dont on travaille, à l'Assemblée nationale, en étude
détaillée, c'est qu'on est capable de mettre plusieurs cerveaux au service de
la même cause. Et donc on a aussi des éléments très intéressants du projet de
loi de ma collègue qui, j'espère, vont pouvoir être intégrés dans le projet de
loi aussi très bon du ministre de la Justice.
Je pense aussi qu'on a été très éclairés, là,
par des témoignages, en commission, très percutants des gens qui sont en contact direct au quotidien avec la
réalité des thérapies de conversion, dont des gens qui en ont été l'objet,
parce que, quand on entend les témoignages effroyables, effectivement, ils
semblent plus objets que sujets, et c'est quelque chose qui est très, très
pathétique aussi dans le phénomène des thérapies de conversion.
Donc, à la lumière de ce
qui nous a été dit, de l'expertise dont on a pu bénéficier, je pense qu'il va y
avoir un certain nombre de changements qui vont devoir être apportés, bien sûr,
au sujet de la définition, au sujet de la question des contrats, parce que
c'est un enjeu qui me préoccupe, le ministre le sait, on en a parlé ensemble,
pour ne pas faire en sorte qu'on puisse restreindre indûment, donc,
l'application des dispositions en étant trop restrictifs sur la notion de contrat, par exemple, toute la question de publicité qui est vraiment
quelque chose qui est très problématique. Et aussi l'accompagnement.
Peut-être que tous les enjeux reliés à l'accompagnement ne passent pas par le projet
de loi, mais je pense que ça va être important d'en discuter ici, quelle forme
d'accompagnement on peut offrir aux personnes qui ont vécu ces traumatismes-là,
comme société qui souhaite prendre soin de tout le monde et ne laisser personne
derrière. Donc, c'est aussi un autre enjeu qui nous apparaît très sensible.
Alors, je remercie déjà l'ensemble des collègues,
parce que je pense qu'on est dans un bon esprit de collaboration, le ministre
est dans un bon esprit de collaboration, et je vais lui laisser ses propos, là,
qu'il me dit et que vous ne pouvez pas entendre, mais enfin, cette fois-ci,
dans un bon esprit de collaboration, et donc qu'on va pouvoir avancer, là, pour faire vraiment le meilleur projet de loi.
Parce que, comme je le dis souvent, ça prend tellement d'énergie, et,
quand on est au gouvernement, on voit à quel point ça prend de l'énergie juste
pour arriver à déposer un projet de loi, le travail au ministère, les comités ministériels,
le Conseil des ministres, le comité de législation, tout le processus aussi à
l'Assemblée nationale. Donc, il ne faut pas rater notre coup, il faut faire le
meilleur travail qu'on peut parce qu'on ne rouvrira pas cette loi-là de si tôt.
Donc, qu'on travaille bien tous ensemble, c'est ce que je nous souhaite, Mme la
Présidente.
• (12 h 10) •
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Est-ce que d'autres membres de
la commission souhaitent faire des remarques préliminaires? M. le député de
LaFontaine.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Oui. Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, très heureux de participer à ce projet de
loi là. J'ai eu l'occasion de participer à
la plupart, pas toutes mais à la plupart des auditions, et aujourd'hui, je vous
dirais, pour moi, c'est un choix personnel de député d'être autour de la table
avec vous, avec le ministre, que je salue, les collègues de la banquette ministérielle, mon collègue de Marquette,
collègues de la deuxième et de la troisième opposition, et j'ai gardé la
collègue de Westmount—Saint-Louis
pour la fin de mes remerciements parce que je tiens à lui lever mon chapeau.
Je sais que c'est une question qui justifie des
entrées en politique, on va dire ça comme ça. C'est une question qui nous donne
l'énergie, qui nous donne le goût de se lever le matin puis dire : Moi, je
veux faire une différence. Puis, vous savez, quand on légifère, des fois on
n'est pas entièrement conscients de l'impact qu'on peut avoir dans la vie des
gens, mais, ce projet de loi là, force est de constater qu'il nous donne cette
assurance qu'on va pouvoir faire une différence dans la vie des gens. Et la
collègue de Westmount—Saint-Louis
a décidé, pour plusieurs raisons qui lui sont personnelles, de s'impliquer en
politique, a été candidate, a été élue, aujourd'hui représente sa population,
oui, de son comté, ses concitoyens, concitoyennes, mais, également, elle
traduit une réalité dont elle témoigne, entre autres, dans le contexte du débat
de projet de loi là, mais elle traduit une réalité de sa vie personnelle, de ce
qu'elle vit, de ce qu'elle entend comme témoignages également, et, à titre de
porte-parole en cette matière, elle est tout à fait, je dirais, qualifiée,
mais, qui plus est, elle apporte son bagage personnel, ses expériences de vie
et les témoignages qu'elle aura entendus.
Parce qu'on ne pourra jamais remplacer, Mme la
Présidente, ce que l'on apporte comme députés autour de la table par des
auditions. Les auditions sont fondamentales. Les auditions, on ne pourra jamais
trop en faire, des auditions, mais elles nous donnent l'occasion de rencontrer
une dizaine, une douzaine, une quinzaine, parfois, quand on est chanceux, une
vingtaine de groupes, mais on essaie de toucher à différents aspects de la
question, mais on ne pourra jamais prétendre avoir un regard entier, alors, ce
qu'on apporte autour de la table comme députés, c'est important. Et puis je tiens à saluer, à féliciter puis à exprimer toute
ma fierté à la collègue de Westmount—Saint-Louis, pour moi, d'être assis à ses côtés
et de discuter, de bonifier, d'améliorer le projet de loi.
Je tiens également à souligner qu'elle aura eu l'occasion,
un mois, jour pour jour, avant le 22 octobre dernier... 22 octobre
dernier, le ministre déposait son projet de loi n° 70, mais la collègue,
le 22 septembre, un mois, jour pour jour, déposait le projet de loi
n° 599. Et c'est important... puis je sais que la collègue du deuxième
groupe d'opposition a dit : C'est important d'agir le plus rapidement
possible pour protéger les gens. Oui, on en est, on va faire en sorte de se
hâter lentement, pour paraphraser Boileau, mais il est important d'agir plus
rapidement pour protéger, mais il est important de s'assurer de bien protéger,
de protéger de manière complète, et ça, c'est un travail qui commence maintenant. On ne pourrait pas
s'enorgueillir de dire : Bon, on a été capables de clencher ça — excusez
l'expression — en
une journée, puis la loi va être... on va appeler l'adoption finale, puis elle
va être sanctionnée, puis, bravo, en quelques jours, elle aura été sanctionnée.
On aurait passé à côté d'une occasion excessivement importante de s'assurer de
bien définir ce dont on parle, s'assurer d'exclure de ce qui n'est pas couvert
par l'interdit d'une thérapie de conversion
des soins qui, par ailleurs, sont pleinement justifiés puis qui participent de
l'avancement du Québec. Et ça, c'est un travail qui se fait article par article
et mot par mot.
Et ça, Mme la Présidente, c'est un projet de loi
qui est de droit nouveau au Québec. Une définition de thérapie de conversion au
Québec, c'est la première fois que nous allons en coucher une sur papier, dans
une loi. Et, le ministre, j'ai dit «son projet de loi n° 70», mais, du
moment où il dépose sur la table, ça devient le projet de loi de tous les
députés, des 125 députés. Et nous aurons l'occasion de proposer plusieurs
amendements, des amendements qui, Mme la Présidente,
seront tantôt acceptés, je l'espère, je le présume et je l'espère, puis
peut-être, tantôt, ne seront pas acceptés, mais qui auront eu le bénéfice de
nous faire nous questionner, comme législateurs, autour de la table. Est-ce
qu'on ajoute d'autres qualificatifs à «pratique»? Est-ce qu'on ajoute d'autres
qualificatifs à une définition ou une thérapie de conversion, c'est une
pratique? Est-ce que ça peut être autre chose qu'une pratique? Puis, en se
posant la question, Mme la Présidente, puis en statuant, la majorité
l'emportera, et, si c'est l'unanimité, bien, tant mieux. En se posant la
question, on est capables de faire écho à ce débat de société là puis de
dire : Bien là, il faut faire attention. Est-ce que, si on y va par un
interdit, exemple, tel qu'il était proposé... tel qu'il est proposé à l'heure où on se parle... Et, en toute bonne foi,
je crois que le ministre aura l'occasion de nous déposer un amendement qui va venir enlever la notion de contrat. Mais
c'est un questionnement qu'on a eu
lors des auditions, est-ce que l'on veut interdire uniquement? Est-ce
qu'on veut rendre nuls les contrats qui visent une thérapie de conversion? Bien
là, à ce moment-là, par contrat, des gens font des thérapies, à l'heure
actuelle au Québec, de conversion, et certains ne le font pas par contrat.
Et il y avait
tout l'aspect, puis j'ouvre un autre aspect qui a été discuté pendant les
auditions, des congrégations religieuses, des différents aspects... des
différentes confessions religieuses qui tantôt peuvent apporter un support, Mme
la Présidente, qui est sain, et tantôt peuvent apporter un support qui est
malsain. Alors, où, comme législateurs, allons-nous tracer la ligne? Et des
témoins, des personnes qui sont au coeur de ce que l'on veut extensionner comme
protection sont venues nous dire : Faites attention de bien séparer — puis je vais reprendre une analogie
biblique — le bon grain de l'ivraie. Faites attention
de séparer le bon grain de l'ivraie. Il y a, je vais le dire comme ça, sans que
ça soit réducteur, un support moral, intellectuel basé sur des convictions
intimes, qui peuvent être parfois religieuses, qui est sain dans la société, et
ça participe, évidemment... c'est communiqué via des femmes et des hommes à
l'intérieur de ces croyances religieuses là, de ces différentes croyances
sincères, honnêtes et sincères là, par des hommes et des femmes qui ne font pas
de thérapie de conversion et qui auront été, preuves à l'appui, témoignages à
l'appui, d'un support excessivement déterminant dans la vie des gens alors
qu'il n'y avait plus espoir, alors que la lumière, il n'y en avait plus au bout
du tunnel puis qu'ils ont été capables de réfléchir, d'identifier, de nommer,
de discuter et d'accepter. Et ce sont des éléments que je soumets dans la
réflexion que différents témoins sont venus nous porter, tant dans les
auditions, mais également hors des auditions, et que ça, il ne faut pas jeter
ça.
Et évidemment il y a des thérapies de
conversion, des gens qui ont agi de manière à ce que la personne se remette en
question, se culpabilise et faire en sorte qu'un choix... une réalité, Mme la
Présidente, soit niée. Et ça, c'est ce qu'on
veut interdire. Mais, quand vous dites, comme législateur, que vous allez...
Oui, on va agir rapidement. Mais
rapidement ne veut pas dire, Mme la Présidente, de faire l'économie d'un débat
sur une définition d'une thérapie de conversion, parce que, lorsqu'on va
tresser la ligne, tirer la ligne, puis il y a différents niveaux, puis vous
allez me voir venir, on veut définir de
façon très claire ce qu'est une thérapie de conversion, ce qui est interdit et
ce qui ne l'est pas. Ça, c'est important. Ça pourrait, Mme la
Présidente, être clair dans notre tête autour de la table, les législateurs,
mais, celles et ceux qui auront à appliquer la loi aussi, il faut que ce soit
clair.
Et souvent, entre autres pour l'avoir vécu dans
des cours de justice, souvent, ce que les législateurs avaient comme discours
autour de la table à l'article par article puis dans les discours au salon
bleu, c'est étudié par nos cours de justice en recherchant l'intention du
législateur. Et il faut prendre le temps de dire ça, il faut prendre le temps de nommer les choses, ne pas dire : On
adopte la loi vite, vite, vite, ah! on se donne bonne conscience, on a
une loi, mais de se dire qu'on va avoir,
oui, une loi, qu'on va protéger rapidement, mais allons-nous protéger bien et
complètement? Et c'est important. On aura l'occasion... puis ma collègue... on
a déjà en préparation des amendements. Le ministre nous a déposé des amendements,
puis honnêtement, Mme la Présidente, j'aime ce que je vois. Il ne les a pas
déposés, il les a distribués. Il aura l'occasion de les déposer puis de les
communiquer. J'aime ce que je vois. Je vois une belle ouverture sur différentes
notions qui ont été discutées. Et je ne dirai pas mon étonnement du fait que le
ministre a été à l'écoute parce que je ne voudrais pas porter de mauvaises
intentions, parce que je pense qu'il l'est toujours. Il est toujours à
l'écoute, mais là il a donné suite, alors heureux de voir que suite a été donnée,
et on aura l'occasion... Puis j'aime ce que je vois. Ce sont des pas dans la
bonne direction, mais on va lui proposer d'autre chose, puis, s'il n'aime pas,
à «pratique», ajouter tel autre qualificatif, bien, on va le dire pourquoi,
puis ça se peut qu'on vote pour notre amendement. Évidemment, si on ne l'a pas
retiré, on va voter pour, puis il votera contre, mais au moins les choses
auront été dites. Et ça, c'est excessivement important.
Autre chose, autre chose... puis le ministre,
avant d'être ministre, lorsqu'il était dans l'opposition, a eu l'occasion, je
pense, à plusieurs occasions de discuter d'une notion qui est
l'imprescriptibilité, l'imprescriptibilité, en vertu du Code civil du Québec,
des recours visant à dédommager des personnes qui auraient été victimes d'actes
sexuels, de violence sexuelle. Et ça, ça
aura été, Mme la Présidente, un amendement qui aura abouti, dans notre société québécoise... À l'article 2926.1 du Code
civil du Québec, il est dit...
L'imprescriptibilité, c'est quoi? L'imprescriptibilité, on va le définir
par ce qu'est la prescriptibilité. La prescriptibilité, ça veut dire,
normalement, la prescriptibilité de base : si je vous cause un tort, Mme
la Présidente, aujourd'hui, vous avez trois ans, normalement, en recours
civil. Il y a d'autres exceptions en atteinte à la réputation, il y a d'autres
délais, mais le délai minimal... le délai de base, devrais-je dire, c'est
trois ans. Si je vous cause un tort aujourd'hui, vous avez trois ans pour
me poursuivre, trois ans et un jour après le fait générateur de droit. Je vous
ai causé un tort aujourd'hui, trois ans et un jour après, vous n'avez plus de
recours. Et là, socialement, on se dit : Bien voyons donc, j'avais un
recours hier, puis aujourd'hui je n'ai pas de recours. Bien oui, c'est ça.
C'est dur, mais c'est ça pour différentes raisons, entre autres la stabilité
des rapports sociaux mais également des questions de preuve, et ainsi de suite.
On peut et on a socialement déclaré
imprescriptibles des recours qui visaient, et je le cite, «le préjudice
[résultant] d'une agression à caractère sexuel, de la violence subie pendant
l'enfance, ou de la violence d'un conjoint ou d'un ancien conjoint». On a, comme... Moi, en
tout cas, j'avais le réflexe de dire : Ah! il y a une
imprescriptibilité. Il y en a trois, déjà, imprescriptibilités qui font en
sorte que, pour ces recours basés sur ces faits reprochés là, vous pouvez
poursuivre, Mme la Présidente, vous avez toute votre vie pour poursuivre. Il
n'y a pas de question de trois ans, 10 ans, 30 ans, c'est
imprescriptible. Et l'idée que moi, j'avais reçu, puis en le relisant... c'est
qu'on a déjà fait avancer le Québec sur trois éléments. Ma collègue a fait
sienne cette proposition-là, elle nous la partage, va nous proposer un
amendement pour rendre imprescriptibles des recours, en ajouter un quatrième,
des recours qui viseraient à voir réparés des préjudices découlant d'une
thérapie de conversion.
Une fois que j'ai dit ça, Mme la Présidente, je
ne le sais pas, si le ministre... puis c'est son choix, puis il n'y a pas de
problème là-dedans, c'est la démocratie, je ne sais pas s'il va voter pour ou
s'il va voter contre, mais on va faire le débat. Et, même si on nous dit :
Bien, je ne suis pas sûr que le ministre va voter pour, on veut faire le débat,
on veut le déposer, parce qu'il n'y aura
jamais une avancée, Mme la Présidente, qui va se faire sans que vous n'ayez
pas commencé à quelque part. Vous ne pouvez
pas, dans une société démocratique, régler un dossier du jour au
lendemain, il faut bien souvent plus que des semaines, des mois, des années,
puis même plusieurs personnes qui vont se passer le témoin. Pensez au droit de vote des femmes, Mme la Présidente, on a un
monument, à côté de l'Assemblée nationale, qui nous démontre toutes ces
femmes, ces grandes femmes qui ont participé de l'histoire du Québec puis qui
ont fait en sorte que, dans les années 40, les femmes ont eu le droit de
vote, puis ça, bien, c'est un témoin qui s'est passé.
• (12 h 20) •
Alors, je ne le sais pas, si la collègue va
avoir gain de cause aujourd'hui, je ne le sais pas, si elle va avoir gain de cause aujourd'hui, je parle dans le contexte du
projet de loi n° 70, mais elle aura mis une première pierre
là-dessus. Puis, qui sait, qui sait, si ce n'est pas accepté dans
le contexte de ce projet de loi là, peut-être que nous serons, Mme la
Présidente, vous et moi, autour de la
table dans un prochain mandat, dans deux mandats, on ne sait pas dans combien
d'années, puis qu'on pourra dire : Enfin, enfin, on a voté
unanimement une avancée du Québec. Puis on pourra se rappeler de ce jour-là où
la collègue de Westmount—Saint-Louis
aura déposé son amendement. Si elle ne le dépose pas, le débat n'aura pas
commencé.
Et c'est pour ça que, pour nous, dans plusieurs
projets de loi... Puis le ministre, je le sais, quand il était dans
l'opposition, il a déposé plusieurs projets de loi, puis c'est tout à son
honneur, puis aujourd'hui, comme ministre... puis qui n'avaient pas été
nécessairement acceptés puis appelés par le gouvernement de l'époque, mais
aujourd'hui il est au pouvoir, il est ministre, il dépose ses projets de loi,
puis je peux vous donner un exemple, je crois qu'il avait déjà proposé, peut-être
par projet de loi ou pas, mais il me corrigera si j'ai tort... puis je prends
un exemple, vous allez me dire : Il est anodin, je ne compare pas les deux
choses, là, mais de permettre aux étudiants en droit d'offrir des conseils
juridiques, projet de loi n° 75. Et je pense qu'il avait déposé un projet
de loi, à l'époque, il me le confirme, et on ne l'avait pas appelé — «on»
étant la personne qui parle, j'étais leader adjoint du gouvernement à ce
moment-là — pour
différentes raisons, on n'avait pas appelé son projet de loi, puis c'était ma
collègue Stéphanie Vallée, avec laquelle il a eu une bonne relation, le
ministre, je tiens à le souligner, puis, je veux dire, à un moment donné, on
fait des choix en politique, puis on n'était pas rendus là. Mais là, dans son
projet de loi n° 75, il est ministre de la Justice, je l'ai retrouvé, là,
puis on va avoir des auditions normalement le 24, 25 novembre prochain,
puis il l'a mis dans son projet de loi. Puis, Mme la Présidente, je ne veux pas
scooper rien puis préjuger de rien, mais, pour le faire adopter, ça regarde
bien. Alors, en ce sens-là, il aura fait, avec ou sans nous, mais ça va être
avec nous... alors, il aura fait avancer la société, puis il aura permis, à
l'époque, Mme la Présidente, de faire se questionner le Barreau. Ah oui! Parce
que, là, il y a tout un aspect de l'ordre professionnel, de s'assurer que les
conseils juridiques soient valables, valides, un encadrement. Les facultés de
droit aussi, par quel bout on pourrait prendre ça? Puis il a fait avancer la
société, puis on va pouvoir concrétiser ça.
Tout ça pour dire, puis je prends l'exemple de
l'imprescriptibilité : On aura l'occasion de s'inscrire dans le débat.
Certaines fois, là... Puis je le sais, puis des collègues pourraient
dire : Bien voyons donc, c'est clair, là, on va voter contre, on va voter
pour, alors passons à... Il ne faut pas faire de la législation, Mme la
Présidente... puis ça, c'est mon point, puis ça s'applique à bien des projets
de loi, il ne faut pas faire de législation à vitesse grand V, à la
vapeur, court-circuiter des débats, s'inscrire dans le débat, proposer des
choses. Puis ce que vous proposez aujourd'hui, Mme la Présidente, puis qui est
rejeté, probablement que ça va avoir force de loi dans cinq ans. Puis, si
vous ne l'avez pas fait aujourd'hui, vous pouvez être sûr d'une chose, ça
n'aura pas force de loi dans cinq ans parce que vous n'aurez pas initié le
débat. Alors, c'est important, on va faire ce débat-là.
Le ministre, j'ai pu voir également, dans ce
qu'il pourra nous proposer, la définition... Définition, là, c'est
l'article 1 du projet de loi : On entend par «thérapie de conversion»
ça. On ne peut pas l'échapper, on ne peut pas tout proposer. Puis j'ai eu
l'occasion, là...
Puis je voulais
parler dans mes remarques préliminaires de ce qui se fait en Ontario, de ce qui
se fait en Nouvelle-Écosse, de ce qui se fait à l'Île-du-Prince-Édouard. Je les
ai, là, c'est annoté. Puis ma collègue de Westmount—Saint-Louis a levé son chapeau
également au ministre. Où le Québec va être précurseur, contrairement à ces
provinces-là, c'est pour des mineurs, des mineurs tantôt de moins de
18 ans, de moins de 16 ans, 14 ans, ainsi de suite. Nous, ce
sera pour toute personne, Québécoise, Québécois, sur le territoire du Québec
pour lequel ça sera interdit. Leur approche également, c'est de dire : Ça
ne sera pas des soins de santé couverts par l'État. Ça ne sera pas remboursé,
ça ne sera pas couvert. C'est un pas dans la bonne direction. Nous, on va aller
plus loin, la collègue de Westmount—Saint-Louis, dans son projet de loi, je vous donne
un exemple, n° 599, elle le disait, article 1 :
«Les thérapies de conversion sont interdites». Une fois que vous avez dit ça...
Ça me fait penser à Jacques Parizeau quand il disait : Écoutez, quand on
sera au pouvoir... Il disait ça en 1993, puis il a été élu en 1994, puis il a
fait son référendum, il disait : Nous, la question à la souveraineté, ça
va être «voulez-vous que le Québec devienne un pays souverain
en date de?» Évidemment, l'histoire a fait en sorte qu'on a vu que la question
était un petit peu plus compliquée que ça, puis il faisait référence à une
entente du 12 juin 1994, mais là je ne respecte pas
l'article 211 du règlement, je referme la parenthèse. Mais tout ça pour
dire que c'est important de parler clairement et de le dire clairement. Et là
on aura l'occasion, oui, de parler de la définition, mais on aura l'occasion de
parler de comment on va l'interdire, comment on va s'assurer, contrat pas
contrat, à titre onéreux ou pas à titre onéreux... on va fermer la porte de
cela. Et c'est important, donc, de s'assurer de ça.
Je lance une idée dans l'univers, Mme la
Présidente, puis je n'en ai pas parlé à ma collègue de Westmount—Saint-Louis, on aura l'occasion en fin... Puis je l'annonce au ministre, puis, s'il
veut y réfléchir, il pourra le déposer, puis il sera... il en aura la paternité, ou on pourrait avoir une
copaternité, Mme la Présidente, hein, ça pourrait être le cas, du suivi de
cette loi-là. La commission des droits de la personne et de la jeunesse est
venue nous parler. Ils ont des plaintes, ils ont des recours, des demandes d'aide à toutes les années, à toutes les semaines,
même, à tous les mois. Comment va vivre cette loi-là? Comment
pourrions-nous introduire un mécanisme, dans la loi, où il pourrait y avoir un
suivi, peut-être pas cinq ans, je
trouve ça long, peut-être trois ans après, sur l'application de cette
loi-là? Est-ce qu'elle est bien rédigée? Est-ce qu'elle est bien écrite? Puis on pourrait donner le mandat soit au
ministère de la Justice soit au ministre de la Justice, qui resterait responsable de l'application de la loi,
puis de mettre dans le coup la commission des droits de la personne et
de la jeunesse pour faire un suivi sur
comment vit cette loi-là, comment elle est appliquée puis comment on pourrait
rapidement, rapidement s'imposer un
rendez-vous, peut-être dans trois ans, sous un gouvernement libéral, Mme
la Présidente, pour mettre à jour cette loi-là.
Alors, c'est le
souhait que j'exprime. Je vous remercie beaucoup pour votre attention. Puis on
est ici pour travailler, on va faire... on veut faire avancer le Québec, mais
on veut protéger les citoyens et citoyennes de façon complète, puis c'est ce à
quoi on va s'attarder. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le député. Alors,
est-ce que j'ai d'autres remarques? Je reconnais le député de...
M. Louis Lemieux
M. Lemieux :
Saint-Jean.
La Présidente
(Mme Lecours, Les Plaines) : ...Saint-Jean. Merci.
M. Lemieux :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Normal que vous ayez oublié le nom de mon
comté, je ne siège pas généralement à cette
commission. C'est d'ailleurs un peu une surprise de m'y retrouver ce matin,
mais c'est avec grand bonheur parce
que... bien, parce que c'est un projet de loi important et, le député de
LaFontaine vient de le dire, une fois
qu'il est sur la table, il appartient à tous les députés. Et il m'appartenait de dire ce que je pensais avant de
commencer, ne serait-ce que parce que je ne reviendrai pas si vite que
ça dans votre commission parce que d'autres m'attendent.
Mais j'entends et je
comprends ce que le député de LaFontaine dit au sujet de l'importance que ça a
de bien placer les choses, puisqu'on commence quelque chose, je suis d'accord
avec lui. Et nous sommes tous législateurs, il est avocat, moi, je suis journaliste, vous me
permettrez quand même de ramener de ce qu'on a écrit sur le projet de loi
n° 70 depuis son dépôt ce qu'on en attend dans la société, ça va peut-être
nous placer un petit peu dans la perspective.
Le projet de loi
n° 70 interdit à quiconque, gratuitement ou contre rémunération, de
solliciter une personne pour qu'elle s'engage dans un processus de conversion
d'orientation sexuelle. Je comprends que tous les mots sont importants, ont
leur importance, et on va le souligner ici plus que moins parce qu'une fois que
c'est dans la loi c'est autre chose que dans un article de journal, mais je
note au passage que, l'année dernière, on avait adopté à l'unanimité, dans une
motion sans préavis, comme il se doit à l'unanimité, une volonté de l'Assemblée
nationale de faire quelque chose avec ça. Et honnêtement, quand on regarde où
on s'en va, ce qu'on s'apprête à faire, il faut tenir compte du fait qu'à
Ottawa il y a un projet de loi qui ne va pas dans le même sens, parce qu'on
parle du Code criminel, c'est complètement autre chose, mais qui travaille
là-dessus là-bas aussi, que d'autres provinces, dont l'Ontario, la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard, qui ne sont pas
toujours les provinces les plus avant-gardistes, ont déjà légiféré sur le sujet. Donc, on n'est pas
dans un vide complet, et sidéral, et total, on travaille dans un
environnement que l'on connaît et qu'on va maîtriser. Et je dirais tout
simplement que, pour paraphraser ou pour utiliser une phrase célèbre, eh bien,
pourquoi le projet de loi n° 70? Bien, parce qu'on est en 2020, et
j'espère qu'on va l'adopter avant la fin de l'année. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le député. Est-ce que j'ai d'autres remarques
préliminaires? M. le député de...
M. Ciccone :
Marquette.
• (12 h 30) •
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Marquette, merci.
M. Enrico Ciccone
M. Ciccone : Merci beaucoup, Mme la Présidente. C'était important pour moi
d'être ici aujourd'hui, puis je me suis un peu infiltré dans cette commission parce
que je suis allé voir ma collègue de Westmount—Saint-Louis, qui
va chapeauter, avec mon collègue de LaFontaine et les autres collègues également,
ce projet de loi là de l'étude. C'est important pour moi d'être ici parce que, justement,
en tant que porte-parole de l'intimidation et du sport, loisirs, saines
habitudes de vie pour l'opposition officielle, je voulais absolument mettre les
projecteurs sur le sport également, parce qu'on va avoir l'étude détaillée,
mais je veux qu'à chaque fois qu'on va déposer un amendement ou va discuter on
garde toujours en tête ce qui se passe au niveau du sport également, parce que,
malgré le fait que la société a avancé à pas de géant, là, malgré qu'on n'est
pas rendu également où on aimerait être sur les préjudices, les préjugés, sur l'homosexualité
dans le sport, c'est rétrograde, c'est antique, c'est du domaine du dinosaure, Mme
la Présidente, et on est vraiment arrêté là. Et je vais m'expliquer parce que, justement,
du domaine... du milieu où je viens, je viens d'un milieu où c'est très, très,
très macho, où il y a énormément de pression, où il y a des jeunes garçons,
même des jeunes filles, malgré que, le sport féminin, on accepte plus
l'homosexualité que, justement, le sport masculin... Et ça, moi, je trouve ça
encore vraiment, mais vraiment dommage.
Alors, on a vu dernièrement qu'il y a des...
quelques ambassadeurs ont parlé, notamment un jeune que je tiens à souligner
aujourd'hui, Yanic Duplessis, qui vient du Nouveau-Brunswick, qui a été repêché
par les Voltigeurs de Drummondville, qui fera partie de leur équipe, là,
prochainement, peut-être l'année prochaine, où a décidé d'avouer son
homosexualité, puis je trouve ça encore dommage qu'on soit obligé de l'avouer
puis qu'on utilise encore les mots «sortir du placard», alors que ça ne devrait
même plus être une situation ou une cause aujourd'hui, ça devrait être la
normalité, tout simplement, et il l'a fait avec courage, également Brock
McGillis, un ancien joueur professionnel, qui, lui, aujourd'hui, parle dans les
écoles, qui, lui aussi, a avoué son homosexualité, qui font du travail
remarquable.
Puis je tiens à les mentionner aujourd'hui parce
que, même si on veut déposer le projet de loi n° 70,
qui est une nouvelle mouture du projet de loi n° 599
déposé par ma collègue de Westmount—Saint-Louis, c'est important de dire qu'avec
cette pression-là dans le sport professionnel, et même au niveau mineur, chez
les petits garçons notamment, sans avoir de chiffres, là, c'est le genre de
situation, justement, avec les thérapies de conversion, où on pourrait voir des
jeunes l'utiliser. Parce que, justement, et je le mets entre guillemets, là, plusieurs
pensent que c'est encore une maladie, puis on veut guérir de cette maladie-là.
Alors, moi, je trouve que, un, ce projet de loi
là vient à point, c'est important de l'adopter. Puis je suis content de voir
qu'il y a des... que tous les partis sont d'accord avec ce projet de loi là. Du
milieu où je viens aussi, Mme la Présidente, à chaque année, on détermine un
club d'étoiles, un club d'étoiles, un «all-star team», je vais le dire en
anglais. Puis aujourd'hui, dans cette salle, honnêtement, là, c'est un projet
de loi qui est archihumain, et on se doit d'avoir une équipe d'étoiles. Quand
je vois la députée de Westmount—Saint-Louis
qui est là, quand je vois la cheffe du deuxième groupe d'opposition qui est là,
la députée de Joliette également, et le député de LaFontaine, qui est un
juriste accompli, et, Mme la Présidente, marquez bien mes mots, là, je vais
également inclure dans mon club d'étoiles le ministre de la Justice aussi,
alors c'est peut-être les personnes les plus appropriées pour, justement, faire
adopter ce projet de loi là.
Je ne pourrai jamais prétendre d'avoir marché
dans les souliers de ceux qu'on vient aider dans ce projet de loi là, jamais,
Mme la Présidente. Cependant, comme société, il faut avoir cette
sensibilité-là, il faut être capable de parler au nom des gens qui ne sont pas
capables de le faire. Puis je vais suivre cette commission-là. Je ne serais pas
ici sur l'étude détaillée, peut-être que je vais venir de temps en temps, mais
je vais la suivre avec assiduité, parce que c'est un projet de loi qui me
touche énormément, qui est très, très, très personnel. Je comprends, Mme la
Présidente, j'ai toujours été vu comme une grosse brute, là, mais je suis une
personne qui est archi, mais archisensible. Puis même, des fois, je cache ma
sensibilité justement parce qu'il y a encore des préjugés sur cette planète.
Alors, je vais terminer là-dessus, en disant
également, et j'ai énormément confiance au ministre de la Justice... parce
qu'il faut mettre une emphase supplémentaire, dans le projet de loi — je
l'ai lu, là — sur
la sensibilisation. Parce qu'on peut être coercitifs à certains égards, mais il
faut travailler en amont aussi. Il faut être capable de travailler en amont
pour justement ne pas être obligés d'avoir des projets de loi. Parce que, quand
la sensibilité est là, quand le travail est fait en amont, on n'est pas obligé
d'écrire des projets de loi parce qu'on n'a pas besoin de régler des problèmes,
la société va s'en charger elle-même.
Et également une meilleure formation aux intervenants
en santé auprès des jeunes, je pense qu'il faut le faire. Puis ce n'est pas
juste en santé, mais, encore une fois, pensez au sport. On est rétrograde dans
le sport. C'est encore des dinosaures qui sont là. Puis, même si... Il y a une
politique qui est très claire et très sévère dans la Ligue canadienne de
hockey, même dans la Ligue nationale de hockey, même dans la NFL, dans la NBA,
je vous invite à aller voir les politiques qui traitent des propos touchant la
race, la religion, la sexualité, les genres, c'est puni très, mais très
sévèrement. Mais, en même temps, il faut aller de l'avant avec ça puis il faut
être très... il ne faut pas aller trop vite. Quand même que tous les partis
sont d'accord, là, il ne faut pas aller trop vite, il faut prendre notre temps,
parce que c'est un projet de loi qui va vivre dans le temps. Puis, honnêtement,
là, je ne vais pas aller trop loin, mais je pense que ça pourrait être un
projet de loi, au Québec, qui pourrait passer à l'histoire, Mme la Présidente.
Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le député. J'allais dire : Vous avez utilisé
des propos non parlementaires, mais c'était pour vous-même, de «grosse brute».
Des voix : Ha, ha, ha!
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : C'est juste une blague. Alors,
merci beaucoup. Est-ce qu'il y a d'autres remarques
préliminaires? Est-ce qu'il y a des motions préliminaires?
Étude
détaillée
Alors, s'il n'y a pas de motion préliminaire,
nous allons donc prendre en considération l'article 1 du projet de loi. M.
le ministre.
Mme Maccarone : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mme la députée de Westmount.
Mme
Maccarone : Juste, conformément à l'article 245 de notre règlement, nous demandons à ce que le projet de loi
soit étudié article par article, alinéa par alinéa, paragraphe par paragraphe.
Et, comme
j'ai mentionné dans mes remarques
préliminaires, j'ai un amendement
à déposer, même avant qu'on fait la lecture du premier article du projet
de loi, le 0.1. Alors, je vous demanderais de suspendre.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Allez-y, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Juste
souligner, là, sur les propos du député de Marquette, que son équipe d'étoiles
aussi doit comprendre la députée de Roberval, la députée de Soulanges, la
députée de Bellechasse, le député de Chapleau,
le député de Saint-Jean ainsi que la députée d'Huntingdon, et l'ensemble de l'équipe du ministère qui nous accompagne, Me Grenier, qui est sous-ministre
associé, Me Claraz, qui a... la juriste qui nous accompagne, qui a rédigé nos projets
de loi, ainsi que l'ensemble de l'équipe du ministère de la Justice.
Et, Mme la Présidente, tout comme la députée de Westmount—Saint-Louis, on va suspendre, parce que je veux entretenir aussi les collègues
de deux, trois éléments hors micro, Mme la Présidente, s'il vous plaît.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le ministre. Alors, nous... Oui, M. le député de Marquette.
M. Ciccone :
Je suis conjoint avec les paroles du ministre...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Avec la nouvelle équipe d'étoiles. Parfait.
M. Ciccone : Conjointement, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Parfait. Merci beaucoup.
Alors, nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 12 h 38)
(Reprise à 12 h 46)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, la commission reprend ses travaux. Juste avant de
prendre la petite pause, nous en étions... Effectivement, nous allons procéder article
par article, alinéa par alinéa. Et, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis,
vous vouliez introduire un article 0.1.
Mme Maccarone : Oui, merci, Mme la
Présidente. Alors, je fais la lecture.
Article 0.1 : Ajouter, avant
l'article 1 du projet de loi, l'article suivant :
«0.1. Les thérapies de conversion ou les
pratiques de conversion sont interdites et nul ne peut offrir de tels services.»
Si je fais référence au projet de loi
n° 599, que j'avais déposé, je pense qu'on a dit... tout le monde a dit d'emblée que les mots sont très importants, la
terminologie est très importante. Alors, évidemment, je souhaite, d'une façon la plus complète possible, d'utiliser le mot
«interdit» — en
anglais, on dirait «prohibited» — très important, parce que je veux que
ce soit très, très, très clair pour les gens, les personnes, la communauté, il
y a des légistes, des juristes, des avocats qui vont faire lecture de ce projet
de loi lors de son adoption, de comprendre ce qui est vraiment interdit.
Je comprends
qu'il y a une certaine fluidité à l'intérieur du Code civil, et je ne prétends
pas être avocate, je vais laisser mes collègues mener cette bataille,
mais, pour moi, et ce qui, je pense, est très important, puis ce serait le moment de le faire, c'est d'utiliser des termes
qui sont clairs. «Nul ne peut», «nul ne peut», ça peut être assez fluide
comme terme, ça peut être interprété de plusieurs façons, mais le mot
«interdit», c'est clair, c'est clair.
Puis la raison qu'on le
dépose ici, c'est qu'on ne voulait pas dénaturer la logique du projet de loi
n° 70. Alors, c'était vraiment le moment de venir déposer un tel
amendement, parce que, pour l'article 1, ce qu'on souhaite, c'est d'avoir
une définition claire de c'est quoi et ce que n'est pas une thérapie ou une
pratique de conversion. Alors, on jugeait très pertinent de déposer maintenant
l'idée d'avoir une interdiction, pour que ça soit vraiment, mais vraiment
clair. Alors, c'était ça, l'esprit derrière cet article.
La Présidente
(Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, Mme la députée. Est-ce que
j'ai des interventions?
M. Jolin-Barrette : Oui, Mme la
Présidente. Je comprends bien l'intention de la députée de Westmount—Saint-Louis,
en lien avec son amendement, qui reprend, entre autres, en partie, l'article 1
de son propre projet de loi, qui est le projet de loi n° 599. Ce pour
quoi on a choisi, dans le projet de loi n° 70, d'indiquer Loi visant à protéger les
personnes contre les thérapies de conversion, il faut bien comprendre que nous,
en matière québécoise... En matière de droit québécois, notre juridiction est
en matière civile. Donc, c'est important, pour s'assurer que la loi ne soit pas
attaquable et qu'on ne se retrouve pas dans une situation où la loi pourrait
être invalidée par les tribunaux, qu'on ne fasse pas référence à
l'interdiction. Parce que, lorsqu'on parle en matière d'interdiction, on se
retrouve dans la sphère de l'interdit complet et donc dans la sphère du droit
criminel.
Et donc, au niveau du partage des compétences,
c'est le gouvernement fédéral qui est compétent en matière de droit criminel,
et le législateur québécois ne peut pas avoir adopté une loi qui serait dans la
sphère de juridiction de compétence du gouvernement fédéral, mais du
législateur fédéral, considérant le fait que, si un individu offrait une telle
thérapie de conversion, si on venait interdire formellement de cette façon-là,
ça aurait pour effet de susciter un moyen de défense pour la personne qui se
retrouverait avec une poursuite pénale à son endroit.
Donc, ça veut dire qu'une personne morale...
Puis on va le voir plus loin dans le projet de loi, là, nous, on dit : «Nul ne peut, par contrat, [ou] à titre
onéreux[...], s'engager à dispenser à une personne une thérapie de
conversion...» Ça signifie qu'on se
retrouverait dans une situation où la personne dirait : Bien, moi,
j'invoque le fait que le législateur québécois
n'a pas adopté la loi dans son champ de compétence du droit civil, de sa
compétence, et c'est ultra vires, donc c'est extra sa compétence, donc
ça pourrait mettre à risque la loi. C'est pour ça qu'on n'a pas fait le choix
d'interdire dans l'article. On est venu plutôt faire en sorte de protéger les
citoyens contre ce type de thérapie là.
Donc, on rentre dans notre juridiction, dans
notre sphère de compétence. Et on atteint un but qui est similaire pour faire
en sorte que ce type de pratique là n'ait pas cours sur le territoire québécois
en donnant des droits aux individus puis en disant : Bien, si vous offrez
ce type de service là, vous êtes passibles d'une amende importante.
• (12 h 50) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Oui, merci
beaucoup, Mme la Présidente. J'entends ce que dit le ministre. Par contre, on
n'est pas en matière de compétence fédérale
ici. Le Québec a plusieurs lois pénales qui interdisent... Je prends la loi, le
seul exemple... puis l'exemple n'est peut-être pas le plus heureux,
mais Loi concernant la lutte contre le tabagisme, c'est une loi qui a des
clauses pénales. Autrement dit, il est interdit, au Québec, de fumer dans tel,
tel, tel contexte, puis il y a des amendes si d'aventure... Là, c'est la
compétence du Québec que d'avoir une telle loi, puis le ministre fait déjà la
fin du chemin quand il impose... loi pénale, impose des amendes, qui sont très,
très substantielles, à celles et ceux qui,
d'aventure, auraient contrevenu à l'esprit de la loi, qui est celles et ceux
qui auraient fait des thérapies de conversion. Alors, je ne vois pas
l'argument ultra vires, dans la mesure où il existe des lois pénales.
Et je vous donne, loi contre le tabagisme :
«Sous réserve des articles 3 à 12, il est interdit de fumer dans tous les
lieux fermés suivants...» Je pourrai vous donner d'autres exemples de lois
pénales beaucoup plus conséquentes qu'«interdit
de fumer dans tel lieu», mais le mot «interdit» est dans plusieurs lois
québécoises, puis il y a des amendes correspondant
à cela. Et je ne vois pas le risque qu'il y ait un enjeu de constitutionnalité.
On ne le criminalise pas, on l'interdit.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, ce que le
député de LaFontaine vient de dire est quand même... est révélateur, du fait
que, dans l'exemple qu'il donne, c'est interdit dans un lieu précis. Donc, ce
n'est pas interdit de fumer sur l'ensemble du territoire québécois. Donc, on
vient, dans la loi sur le tabac ou de la lutte contre le tabagisme, venir
précisément, dans un lieu, circonscrire cet élément-là, et ça, c'est pour des
raisons de santé. Donc, c'est rattaché à la compétence québécoise, le fait de
venir circonscrire ça. Exemple, à l'Assemblée nationale, contrairement aux années 70, Mme la Présidente, et avant, et
après aussi, où il y avait des cendriers, puis vous voyez des photos
d'époque, ou les politiciens à l'époque, et, voyez-vous, la société a évolué,
tout ça.
Mon objectif est de faire en sorte de s'assurer
de la solidité de la loi et que, si jamais la loi, elle était attaquée... Le
fait qu'on propose une interdiction complète, tel que formulé dans l'amendement
qui est proposé, pourrait mettre à risque la
loi parce qu'on y va sur une interdiction mur à mur. Tandis que l'approche que
nous prenons, une façon qui est plus sécuritaire juridiquement, est le
fait de le coller sur nos compétences en matière de droit civil, de protection
du consommateur notamment, et d'atteindre un objectif qui est similaire mais
qui est à l'intérieur de notre sphère de juridiction.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Oui, merci, Mme
la Présidente. Je vais vous donner un autre exemple. Mais, avant de donner un
autre exemple, j'aimerais poser au ministre la question suivante... mais le
fait de ne pas dire «interdit», ça, c'est un débat, là, juridique, de juristes,
mais d'où relève sa compétence pour déposer son projet de loi n° 70? J'aimerais
ça savoir.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, peut-être une question de
précision, juste formulez votre question précisément. Je veux juste comprendre,
là.
M.
Tanguay : Parce que
le ministre dit : L'arbre de 91 et 92 de la Loi constitutionnelle donne des compétences, à 91, au gouvernement fédéral et des
compétences aux gouvernements provinciaux. Ça, c'est les branches de l'arbre.
Il dit : Je peux interdire le tabagisme parce que, dans une des branches
provinciales, il y a une branche qui s'appelle santé, je l'interdis. Thérapie
de conversion s'accroche à quelle branche provinciale?
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Oui. En matière de droit civil, notamment.
M. Tanguay :
O.K. En matière de droit civil, notamment, et pas exclusivement. Quelle autre
matière?
M.
Jolin-Barrette : Prenons ensemble l'article 92.
M. Tanguay :
92 de l'AANB — on
apprend ça en droit — de
l'accord...
M.
Jolin-Barrette : L'Acte de l'Amérique du Nord britannique.
M. Tanguay :
L'Acte de l'Amérique du Nord britannique.
M.
Jolin-Barrette : Mais désormais c'est la loi constitutionnelle...
M. Tanguay :
1982.
M.
Jolin-Barrette : C'est ça, parce qu'elle a été incorporée. Dans le
fond, la Loi constitutionnelle de 1982 incorpore
la loi sur la... l'Acte de l'Amérique du Nord britannique à son annexe II, je crois, M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Et qu'introduit l'acte constitutionnel de 1982, qui est fondamental dans notre
pays? La Charte canadienne des droits et libertés.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais ce qui est intéressant, Mme la Présidente, sur ce propos-là,
savez-vous c'est quoi?
M. Tanguay :
C'est que le Québec n'a jamais signé.
M.
Jolin-Barrette : Le Québec n'a jamais ratifié. Alors...
M. Tanguay :
Je le savais, qu'il allait dire ça. Là, on est hors d'ordre.
M. Jolin-Barrette : Non, non, non, Mme la Présidente. On est
spécifiquement sur le bon point, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Non, en fait, je veux juste... Pour les
besoins de la...
M.
Jolin-Barrette : ...spécifiquement sur le bon point.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Allez-y, M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Alors, je veux savoir du député de LaFontaine, Mme la
Présidente, est-ce que le député de
LaFontaine considère que, le Québec, hein, au moment du rapatriement, on a
obtenu son accord et que c'est normal qu'on n'ait pas obtenu son accord
lorsqu'on a rapatrié la constitution puis qu'on a inséré la Charte des droits
et libertés à l'intérieur de la constitution, de la Loi constitutionnelle de
1982. Est-ce que la position de son parti, c'est de dire : Écoutez, il
faut s'assurer que le Québec soit pleinement respecté?
M. Tanguay :
Mme la Présidente, je serai ravi de faire ce débat-là avec le ministre
n'importe quand, n'importe quelle tribune, je serais ravi de le faire, et de
lui poser la question également, entre autres, puis vous allez me permettre de
conclure là-dessus, si lui aurait, à l'époque, voté en faveur de la
loi 101, est-ce qu'aujourd'hui... la mouture de la loi 101, telle que
déposée par le Parti québécois aujourd'hui, est-ce qu'il voterait pour ou
contre, parce qu'il sait ce qu'il y a là-dedans?
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Je pense qu'on va revenir à l'article, à
l'amendement qui est déposé.
M. Tanguay : Le débat, on pourait le faire parce que c'est
excessivement intéressant. J'aimerais ça le faire, le débat.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Est-ce qu'on pourrait revenir à l'amendement 0.1 qui est
déposé?
M.
Tanguay : Oui. Je ne
le sais pas, je pose... le ministre, quelle autre branche à part la branche civile de
1992?
M. Jolin-Barrette : Oui, propriété
et droits civils, et... Oui, vous faisiez référence... Mme la Présidente, le député
de LaFontaine faisait référence aux aspects pénaux. Donc, 92.15 :
«L'infliction de punitions par voie d'amende, pénalité, ou emprisonnement, dans
le but de faire exécuter toute loi de la province décrétée au sujet des
matières tombant dans aucune des catégories de sujets énumérés dans le présent
article.»
Donc, le député de LaFontaine, tout à l'heure,
nous disait : Écoutez, c'est prévu qu'il y a des infractions pénales. Il y
a des lois pénales, au Québec, qui existent effectivement, mais ce n'est pas
uniquement des lois pénales, ça porte sur les objets de la compétence québécoise.
Mais, pour faire respecter la loi, Mme la Présidente, bien, c'est une loi qui a
des dents, hein, quelle est la conséquence à ça. Et, pour le Québec, cet
aspect-là, il est punitif, donc il est légitime dans la Loi sur la qualité de
l'environnement, dans le Code de la sécurité routière, dans... On va le voir
tout à l'heure, là. Dans le Code des professions aussi, il y a des sanctions
pénales qui y sont rattachées, et bien souvent ces sanctions pénales là sont
pécuniaires, comme dans le cadre du projet de loi qu'on propose aujourd'hui.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Oui, Mme la
Présidente. Et il y a plusieurs interdits, entre autres, puis je fais référence...
puis je ne veux pas ouvrir cette boîte de Pandore là, projet de loi n° 21,
là, Loi sur la laïcité de l'État, là, il était interdit de porter des signes
religieux. C'est un interdit, ça, je veux dire. Là, on pourrait me dire :
Oui, mais ça ne participe pas tellement d'une loi pénale, là, c'est une loi qui
vient encadrer l'exercice d'une profession au sein de l'État, entre autres,
puis de ses organismes connexes. Mais, bref, l'expression «interdit» existe.
Là, on n'est pas dans le domaine du tabagisme, on est dans le domaine de
l'interdit de port de signes religieux pour certaines catégories de personnes
au Québec, au premier titre...
M. Jolin-Barrette : ...
M. Tanguay : Oui, oui. Et
donc, voyez-vous, ce n'est pas en jumelant l'interdit, puis là je vous donne un
bon exemple, puis je termine là-dessus en deux secondes, avec des amendes que,
là, on est à risque devant une contestation judiciaire.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Écoutez, compte tenu de l'heure et des discussions, je dois
ajourner les travaux quelques instants, du moins, pour le début de la prochaine
séance de travail. Merci. Et nous reprenons à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 06)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la Commission des
relations avec les citoyens reprend ses travaux. Je demande à toutes les
personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
Nous
poursuivons l'étude détaillée du projet
de loi n° 70, Loi visant à protéger les personnes contre
les thérapies de conversion dispensées pour changer leur
orientation sexuelle, leur identité de genre ou leur expression de genre.
Lors de la suspension
des travaux, cet avant-midi, nous en
étions rendus à l'étude de l'amendement introduisant l'article 0.1
au projet de loi. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur cet amendement? M.
le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Oui. Merci
beaucoup, Mme la Présidente. J'aimerais savoir si, la pause du midi, le ministre
a eu l'occasion d'aller relire Henri
Brun, sortir ses cahiers, sûrement annotés, et s'il a cheminé. J'aimerais savoir
s'il a cheminé.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Bien, Mme la Présidente, je chemine toujours, mais, dans ce cas-ci, pour s'assurer que
la loi soit à l'intérieur des compétences québécoises,
pour avoir le maximum de sûreté juridique, je vais décliner l'invitation
que la députée de Westmount—Saint-Louis me fait de voter pour l'amendement, considérant le fait qu'on doit s'assurer
que les mesures mises en place par le projet de loi sont rattachées à notre
domaine de compétence, avec le véritable objet, qui est notamment les droits
civils mais aussi la compétence locale que nous avons. Et le véritable objet de
la loi que nous avons est le fait de protéger les personnes face à ce genre de
thérapie de conversion là. Alors, c'est rattaché
à nos compétences, et une interdiction formelle et complète pourrait être
assimilée ou se rapprocher du droit criminel, et je ne souhaite pas que la loi
soit déclarée ultra vires, donc je souhaite vraiment qu'on se rattache à nos
compétences.
Et donc l'objectif est similaire, et, si on y
allait avec l'amendement, tel que formulé par ma collègue, ça pourrait avoir
pour effet de faire en sorte que le but de la loi, c'est d'interdire les
thérapies de conversion. Parce qu'on dit... et je vais retrouver l'amendement,
on dit véritablement, dans la proposition de ma collègue... Je m'ennuie du
papier, Mme la Présidente.
Une voix :
...
M. Jolin-Barrette : Je l'ai. Juste
un instant, Mme la Présidente... «Les thérapies de conversion ou les pratiques de
conversion sont interdites.» Alors, on arrive avec une interdiction complète et
totale, et ça pourrait avoir une très grande proximité avec le droit criminel,
et donc je ne pourrais pas appuyer l'amendement tel que formulé.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. Est-ce que j'ai d'autres
interventions?
M. Tanguay : Oui, oui.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Puis vous allez
en avoir une couple encore, vous allez voir, inquiétez-vous pas. Je vais poser
la question, même si je connais la réponse : Est-ce que le ministre peut
nous produire ses avis juridiques?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui, j'ai des
avis juridiques et, non, je ne les rendrai pas publics.
• (15 h 10) •
M. Tanguay : O.K. Il fallait
que je passe par ce chemin-là, Mme la Présidente, et sûrement que le ministre
s'est revu il y a trois ans, dans l'opposition, avec ce genre de question là.
Puis, je pense, c'est de bonne guerre, c'étaient les mêmes réponses qu'on lui
faisait. Il est clair que les rédacteurs de 91, 92 de l'Acte de l'Amérique du
Nord britannique, partage des compétences, n'avaient pas prévu, évidemment, les
thérapies de conversion. Ça fait que ce n'est pas une compétence donnée
exclusivement au fédéral ou au provincial. Première des choses.
Deuxième des choses, il faut voir... bon, en
matière civile et en matière de santé également, qui sont des compétences
provinciales, on y voit, dans les législations provinciales et dans ce qui est
proposé, un aspect excessivement marqué de...
bien, ce n'est pas un soin de santé, on va l'exclure, c'est dans cette
compétence-là, santé. Puis, quand on
parlait de contrat à titre onéreux ou gratuit, bien là, on est dans le Code civil,
on est à 1378. On est également... quand on parle de recours
contractuels ou extracontractuels, parce qu'il va enlever le contrat, on est à
1457, 1458. Alors, pour moi, si j'avais... Mme la Présidente, ce qui n'arrivera
jamais, là, si j'étais juge à la Cour suprême du Canada, je vous dirais que très,
très, très clairement, là, bien, moi, le débat, ça ne serait pas trop long, le Québec
a compétence pour des éléments de santé puis des éléments de droit civil.
Puis je vais donner un autre exemple au
ministre, d'un exemple qu'il connaît très, très, très bien, pas parce qu'il l'a
expérimenté personnellement, mais parce qu'il a travaillé là-dessus, la Loi
encadrant le cannabis. Et là je vous dirais qu'on allait jouer dans des zones
encore plus, je vous dirais, grises qu'en l'espèce. On dit,
article 4 : «Il est interdit à une personne âgée de moins de
21 ans d'avoir en sa possession du cannabis ou d'en donner.» À
l'article 5 : «Il est interdit d'avoir en sa possession une plante de
cannabis.»
Et fédéral occupe le champ également, il a
décriminalisé... puis je ne suis pas expert, là, au fédéral... on pourrait me
corriger sur bien des choses, mais au fédéral, il y a la Loi sur le cannabis.
Il y a des éléments qui encadrent le cannabis et des décisions, puis il y avait
même... je vous dirais, c'était une compétence, là, qu'on a décidé de partager.
Alors, moi, a fortiori, je vous donne l'exemple du cannabis où le Québec
interdit, je vous en ai donné
deux exemples, articles 4 et 5, dans une zone excessivement grise où
le fédéral avait déjà criminalisé, finalement a décriminalisé... a
légalisé, pardon. A fortiori, dans le cas ici, je regarde les compétences
fédérales puis je regarde le provincial, c'est clairement santé et c'est
clairement Code civil.
Maintenant, le ministre, puis je lui soumets
l'argument qu'il pourrait me poser, le ministre pourrait dire : Bien, faites-vous-en pas, le fédéral va
l'interdire devant le Code criminel, donc on va fermer cette porte-là. Je vous
dirais : Soit, il peut le faire, il peut l'interdire dans le Code
criminel, mais ça ne fait pas que l'analogie du cannabis n'est pas particulièrement
intéressante ici, où on peut occuper ce champ de compétence.
Et, je vous dirais même, Mme la Présidente, puis
c'est un député fédéraliste qui vous le dit, moi, j'inviterais le ministre à
occuper le champ, à occuper le champ puis à l'interdire très clairement. Puis
aucune loi qui sort... qui est adoptée par l'Assemblée nationale, Mme la
Présidente, n'est à l'abri de quelque contestation que ce soit. Puis on sait
que, parfois, on va jouer dans des zones... pas des zones déraisonnables, là,
mais dans des zones peut-être un petit peu plus discutables, mais on le fait,
puis on occupe le champ. Puis je ne vois pas le fédéral contester, sur la base
de compétence, le fait que le Québec a écrit : «Les thérapies de
conversion sont interdites.»
Alors, je
fais appel au sentiment, que je sais très fort, nationaliste chez le ministre,
pour lui dire : Allez-y, nous marchons
à votre suite — puis
c'est un député fédéraliste qui dit ça, Mme la Présidente — occupons le champ de compétence.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, écoutez,
Mme la Présidente, c'est de la musique à mes oreilles d'entendre le député de LaFontaine
et sa formation politique dire au gouvernement du Québec : On va vous
appuyer dans votre démarche de nationalisme. Ça fait vraiment changement, Mme
la Présidente. Et j'aurais aimé beaucoup, à l'époque où j'étais assis à la
place de la cheffe du deuxième groupe d'opposition, dans le deuxième groupe
d'opposition, que les collègues du député de LaFontaine soient aussi
nationalistes que lui.
Alors, Mme la Présidente,
ce que je retiens, c'est que, durant ces années-là, ça a dû être dur pour le
député de LaFontaine d'être dans un parti ultrafédéraliste, qu'il ne fallait
jamais revendiquer à Ottawa, où on parlait de canadianisme même à l'époque du premier
ministre et ancien député de Roberval, M. Couillard. Mais je retiens que, maintenant,
la perspective au Parti libéral, c'est une approche beaucoup plus nationaliste,
et je pense que ça va nous aider à faire des gains concrets à l'intérieur du Canada
et qu'on va pouvoir avoir une approche extensive des compétences du Québec, et
ça, je suis heureux d'avoir l'appui du député de LaFontaine sur cet élément-là.
Et donc je le sens me pousser, m'inciter, m'inviter à étendre nos pouvoirs, et
j'en suis abasourdi, mais heureusement abasourdi, Mme la Présidente.
Cela étant, le député de LaFontaine a un bon
point au niveau de la théorie du double aspect, effectivement, à l'époque où
l'Acte de l'Amérique du Nord britannique a été adopté, on ne parlait pas de
thérapie de conversion, Mme la Présidente,
donc ce n'est pas listé à l'article 91 ou à l'article 92. Donc, il
faut aller voir quels sont les facteurs de rattachement. Et là, très certainement, on a le pouvoir de légiférer en
fonction des compétences. Le député de LaFontaine fait référence à la
santé. Moi, je le réfère à 92.13, 92.16 également, en matière de... les
matières à caractère purement local ou privé, ou le droit civil. Lui, il prend
un chemin vers la santé. Donc, le Québec peut légiférer.
À partir du moment où on peut légiférer, il faut
regarder l'objet véritable de la loi. Si l'objet véritable de la loi a pour
effet d'interdire complètement, tel que le propose l'amendement de la députée
de Westmount—Saint-Louis,
il y a des lumières jaunes qui s'allument. Là, le député de LaFontaine me
dit : Écoutez, moi, je l'essaierais. Moi, je l'essaierais, quitte à ce
qu'un juge de la Cour supérieure ou un juge de la Cour du Québec, par la suite
la Cour d'appel, Cour suprême dise : Vous n'étiez pas dans votre champ de
compétence, et donc vous avez adopté une loi, et donc, les personnes morales ou
les personnes physiques qui ont offert ce genre de thérapie là, bien, on va les
exonérer. Ils ne subiront pas l'opprobre, l'amende, et ils ne pourront pas être
condamnés à des dommages-intérêts aux personnes qui ont été victimes. Moi, je
ne souhaiterais pas qu'on arrive là.
Alors, pour davantage de sûreté juridique, pour
s'assurer que la loi trouve effet, s'applique, je préfère que nous
n'inscrivions pas l'interdiction complète et totale telle que le propose la
députée de Westmount—Saint-Louis.
Et, si je
peux faire un rebond sur ce que le député de LaFontaine nous disait par rapport
à la loi sur le cannabis, dans les
articles qu'il a cités, je crois que c'est à l'article 4, on parle d'une
interdiction partielle. Là, dans l'amendement de la députée de Westmount—Saint-Louis, c'est une interdiction totale. Donc
là, il y a une nuance à apporter puis il y a une distinction.
Cela étant, moi, je pense qu'on a beaucoup plus
intérêt à faire en sorte d'atteindre un objectif qui est similaire, à protéger
les personnes victimes de thérapie, tel qu'on le propose dans le projet de loi,
et non pas que je souhaite qu'il y ait ce genre de thérapie au Québec,
comprenez-moi bien, mon objectif, c'est de faire en sorte le plus possible de
protéger les personnes qui en sont victimes, de faire en sorte qu'elles aient des
recours, et le fait d'envoyer un message aussi, de dire : Écoutez, sachez
que, si vous offrez de genre de thérapie là, vous allez avoir des amendes...
Vous êtes susceptibles d'avoir des amendes importantes au niveau pénal, pour
l'application de la loi. Donc, c'est pour ça que je n'appuierai pas
l'amendement de la députée de Westmount—Saint-Louis.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Oui. Merci
beaucoup, Mme la Présidente. D'abord, juste pour rassurer... parce que je ne
veux pas que l'enthousiasme du ministre de la Justice lui cause... lui faire
perdre le sommeil. Il a eu l'occasion de siéger avec un grand parlementaire, Jean-Marc Fournier. Et je le réfère à un
document-phare, qui a été rédigé par
Jean-Marc Fournier, Québécois, notre façon d'être Canadiens. Et
c'est en ce sens-là où j'invitais le ministre d'être Québécois et d'exprimer sa façon d'être Canadien,
Mme la Présidente. Parce
que 91 existe, 92 existe, puis c'est dans
ce contexte-là, évidemment, il a compris, plus que dans un appétit, qui
est totalement inexistant chez moi, de faire sécession.
Alors, ceci
étant dit, Mme la Présidente, je
comprends, je comprends très, très bien ce que le ministre dit. Puis
savez-vous quoi? Je comprends mieux pourquoi au début... puis là j'y vais de mémoire,
là, on me corrigera, je pense, c'est 1378 du Code civil du Québec, par rapport
aux contrats, tu sais, les contrats entre personnes, c'est du droit civil,
c'est encadré par le Code civil. Puis je comprends pourquoi, dans la mouture
actuelle, mais j'ai compris qu'elle sera amendée, puis on va se rendre là, il
était stipulé... l'interdit était verbalisé en disant : Il est interdit de
faire un contrat — là,
pouf, on se branchait carrément sur le Code civil puis sur le droit civil — que
ce soit à titre onéreux ou gratuit. Mon point, il est là.
Puis je suis d'accord avec le ministre. Je veux
dire, si on fait patate, puis que, là, la loi est contestée, puis qu'elle est
suspendue, bien, y a-tu... Deux choses. Y a-tu moyen de trouver un mécanisme
où on pourrait, à un article, puis je pense tout haut, là, stipuler
l'amendement de la collègue de Westmount—Saint-Louis, «les thérapies de
conversion sont interdites», et par la suite, sur l'article 3, de prendre
la formulation du ministre? Croit-il qu'il serait possible de faire cela, en
précisant, en ayant un article de précision, et que, si, d'aventure, 1 est
contesté, 3 ne le serait pas, contesté, et la suspension serait applicable à 1,
et non l'entièreté de la loi, pour, justement, forcer le jeu?
Parce que c'est ça, une fédération, puis je ne
fais pas de... je ne badine pas, là, mais une fédération, c'est ça. Puis c'est
important, ce qu'on dit là... «Fédération», là, par définition, c'est de jouer
du coude. On a des intérêts communs. On ne veut pas sécession, mais c'est de
jouer du coude puis c'est occuper son champ.
Alors, je
l'inviterais peut-être à prendre l'article 1 de la collègue de Westmount—Saint-Louis et à se rattacher à son
article 3. Puis là il ne pourrait pas dire : Non, non, non, 1
emporterait 3 dans une contestation puis dans une suspension, parce que 3
serait, puis je suis d'accord avec lui, à 100 % branché sur le Code civil
du Québec puis sur la compétence du Québec à 92.13.
Mais
mon point est le suivant : Si on le fait uniquement en matière civile,
comment les cours vont interpréter ça? Dans
la première mouture, s'il n'y avait pas de contrat, vous aviez zéro recours. Ça
prenait un contrat. Puis là j'entends qu'on va l'enlever. Mais il ne
demeure pas moins que, dans ce qui serait la nouvelle proposition, il y aurait
la notion très civiliste de 1378, «à titre
onéreux ou gratuit». Comment les cours vont interpréter ça si c'est un ou une
leader d'une congrégation religieuse, ou quoi que ce soit, qui, sans
aucun contexte de rapport civiliste, essaie de m'influencer, puis finalement on
dit : Ce n'est pas marqué, comme disait la collègue de Westmount—Saint-Louis «oyez,
oyez! Thérapie de conversion à soir, à huit
heures»? Mais j'ai une crainte honnête que les tribunaux, si c'est juste la
mouture du ministre puis qu'on n'a pas 1, encadrent, limitent la protection
dans leur interprétation.
• (15 h 20) •
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : ...M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Oui, deux choses l'une. Dans un premier temps,
on se rattache à nos compétences. Je comprends le député de LaFontaine qui nous
dit, bon : Présence d'un contrat, nécessairement, on agit dans notre
sphère de compétence, on agit notamment en matière contractuelle. Le contrat
est implicite et explicite aussi. Donc, la personne qui viendrait à avoir une
thérapie de conversion — puis
on va voir, là, la définition qu'on lui donnera un petit peu plus tard — ça
doit être interprété largement, et c'est ce sur quoi on proposera d'enlever
spécifiquement «contrat». Mais il y a un facteur de rattachement au droit civil
qui doit être présent. Ça, c'est important. Puis surtout c'est important que les choix que l'on fasse, de
la façon que ça a été interprété... Puis, écoutez, on a de la
jurisprudence aussi, là, il y a Cabaret Sex-Appeal inc. contre Montréal,
notamment, que la réglementation faisait en sorte que c'était trop orienté, et
donc ça a fait en sorte que la mesure québécoise n'a pas été retenue puis qu'on
a dit : On intervient sur le droit criminel. Alors, moi, ce n'est pas mon
objectif.
Et
l'idée, c'est de faire en sorte, vraiment, de rattacher ça à la dignité de la
personne, de donner des droits, mais surtout de faire en sorte que, les
thérapies de conversion, on envoie un message clair de société, de dire que ce
n'est pas acceptable, si vous offrez ce genre de thérapie là à un individu,
sachez que vous êtes passible d'une amende. Je pense qu'on atteint le même
objectif qui est souhaité par le député de LaFontaine.
Pour ce qui est de
l'autre volet, Mme la Présidente, sur le fait de faire sécession, bien,
écoutez, je ne pourrais pas l'affirmer sans doute, Mme la Présidente, mais je
crois que le député de LaFontaine a déjà été intéressé par cette démarche dans
un passé pas si lointain, Mme la Présidente. Donc, comme on dit, c'est une
conversion récente.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le ministre.
M. Tanguay :
Mme la Présidente, je me sens un petit peu piqué au vif, puis je vais être
gentil, mais, «passé pas si lointain», je ne sais pas quel âge avait le
ministre en 1995, quand j'ai voté oui.
M.
Jolin-Barrette : Moi, j'avais...
M. Tanguay :
L'âge de raison?
M.
Jolin-Barrette : L'âge de raison, effectivement.
M. Tanguay :
D'accord. Qui est sept ans. Alors, Mme la Présidente, voilà le passé pas
si lointain.
M.
Jolin-Barrette : Bien, Mme la Présidente, moi, je considère le député
de LaFontaine tout jeune et, dans sa longue vie qu'il aura, je sais que ça ne
représente qu'un moment, un éclair, cette période-là. Je veux juste dire, Mme
la Présidente, que parfois on chemine, vous voyez le parcours du député de
LaFontaine. Et, il y a encore moins longtemps, il faisait partie d'un
gouvernement qui ne nous amenait pas à solliciter, à défendre les compétences
du Québec, puis je vois que ça a changé, ça fait que c'est une bonne chose. Le
changement, c'est maintenant.
M. Tanguay :
Bon, alors...
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Attendez, s'il vous plaît, juste une petite
seconde. J'ai la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques qui veut s'inscrire
aussi dans le débat. Mme la députée.
Mme
Massé : Merci. Étant très, très loin des affaires d'avocat, je pense
que j'ai envie de retourner sur le fond, c'est-à-dire, je pense, que ce que ma collègue de Westmount—Saint-Louis souhaite. Rappelez-vous comment, à
plusieurs reprises, on s'est dit, durant les auditions, même durant les
allocutions qui ont eu lieu en Chambre pour adopter le principe, l'importance
de la dimension pédagogique du projet. C'est sûr que, quand tu vois le mot
«interdiction», pour moi, là, c'est très pédagogique. Ça dit ce que ça a à dire
puis ça l'a cet avantage-là, je dirais.
Ceci
étant dit, je ne maîtrise pas assez le code civique et l'Acte de l'Amérique du
Nord britannique, puis je ne suis pas
toute seule, à voir mon autre collègue là-bas, mais, ceci étant dit, je suis
plutôt d'avis que, s'il y a une façon explicite de dire à tous ces gens qui utilisent les thérapies
de conversion pour avoir des impacts sur les droits fondamentaux de nos concitoyens... Puis là, bien, il a émis une piste,
là, en disant : Le 1, puis le 3, le 1, le 2, le 1 pourrait être rejeté
mais pas le 3. C'est cette
dimension-là, moi, que je me demande s'il n'y a pas possibilité... Parce que
c'est sûr que le mot «interdiction», il y a ça de fort, c'est qu'il est clair. Alors, ça, c'est la première
chose que je voulais dire, mais je n'ai pas de proposition, M. le
ministre, alors...
L'autre chose que je
voulais dire, c'est : Pour moi, la... Ce qu'on va en dire, de ce projet de
loi là, c'est une chose. Ce qui est écrit pour ne pas qu'il soit contesté, c'en
est une autre. Pour moi, de faire dire à quelqu'un, par exemple : Oui,
hein, un coup que tout ça va être adopté, oui, oui, oui, c'est interdit, les
thérapies de conversion au Québec, là, je n'aurais pas de misère à dire ça. Ou,
en fait, je vais dire : Ou tu es prêt à payer je ne sais pas combien parce
que tu vas être... tu es passible de ça. Ça fait que je me dis : Tout dans
tout, si on est capable de l'écrire, il me semble qu'on aurait l'avantage de le
faire parce que ça serait très pédagogique. Puis, si on ne peut pas, bien, moi,
à mon sens, ça ne m'empêchera pas, dans l'espace public, de dire que les
thérapies de conversion au Québec sont interdites, que ça n'a pas sa place.
Et, quand j'ai discuté avec le ministre, un des
éléments qu'il a amenés, puis malheureusement j'ai dû vous quitter un petit peu
plus tôt tantôt, bien, c'est la dimension de ce n'est pas les individus
qui vont avoir tendance à vouloir se faufiler, c'est vraiment... puis là on va
le nommer, c'est les communautés religieuses, les Églises, qui en ont, du cash,
eux autres, pour faire suivre quelque chose comme ça jusqu'à la Cour suprême en
cas de besoin.
Ça fait que moi, de rendre invalide... Bon, puis
là, c'est ça que je dis, là, je ne me démêle pas dans ces affaires-là. Un article,
deux articles, toute la loi, pas la loi, je ne le sais pas. Mais c'est sûr
que ce que je souhaite, par les choix qu'on va faire, c'est qu'on ne portera
pas flanc à ne faire que ça. Dans une semaine, il y a un jeune M. Nadeau
qui va se lever debout, qui va dire : Moi, je veux avoir réparation à
cause que telle congrégation a usé de ma vie, puis que la congrégation
fasse : Non, mon «man», parce que ce n'est pas de notoriété québécoise.
Ça, je ne voudrais pas ça, c'est clair. Mais je ne sais pas comment on arrive à
ça. Mais je trouvais que peut-être que le député de LaFontaine avait une piste,
si effectivement ça existe en droit et dans l'interprétation du droit.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
• (15 h 30) •
M. Jolin-Barrette : Oui. J'apprécie le commentaire de la députée de
Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Dans l'exemple qui est donné
par le député de LaFontaine, c'est vrai que la cour pourrait invalider...
supposons, lorsqu'il y a une contestation, pourrait invalider l'article 1
puis maintenir l'article 3, supposons. Mais ce qui peut bien arriver
aussi... Il y a un facteur de rattachement
entre les deux. Si on dit : «Les thérapies de conversion ou les pratiques
de conversion sont interdites et nul ne peut offrir de tels services»...
et là j'imagine qu'après on va passer à la définition qui serait à
l'article 1, ça fait que, là, on se rattache sur qu'est-ce qu'une thérapie
de conversion. Là, après ça, on va dire : «Nul ne peut par contrat» ou
«nul ne peut, à titre onéreux ou à titre gratuit, s'engager à dispenser à une
personne...» Ça fait que les... Ça fait qu'on ne peut pas savoir non plus de
quelle façon est-ce que les gens vont... bien, en fait, l'autorité publique qui
émettra une poursuite, sous quel article elle va le prendre. Elle va le prendre
probablement sous l'article 3, mais avec un facteur de rattachement à l'article 1
aussi.
Donc, quand on regarde la loi, aussi, quand les
juges la regardent, ils l'analysent d'une façon qui est globale aussi. Donc,
c'est sûr qu'ils regardent la portée morale de la loi, quel est son véritable objectif.
Puis, si, dans l'article introductif, le but de la loi, l'objectif de la loi,
tel que suggéré, c'est de dire : Bien, les thérapies de conversion sont
interdites, ça donne un bon signal au magistrat qui va devoir évaluer ça
c'était quoi, l'intention du législateur québécois à ce niveau-là. Donc,
premier élément qui peut mettre à risque la loi.
Donc, vous comprenez? Non pas que... Je ne suis
pas en désaccord avec la proposition, mais, moi, dans mon rôle, il faut que
j'évite le plus possible les risques d'invalidité constitutionnelle, puis c'est
un risque qui est avéré. Puis je le sais, que le député de LaFontaine le sait
aussi. Puis je comprends aussi qu'il nous invite à pousser un peu plus, mais,
moi, ce que j'essaie de faire dans le cadre du projet de loi, c'est d'avoir le
projet de loi qui va le plus loin possible à l'intérieur des balises que je
sais sécuritaires, parce que je vise à protéger les gens face aux thérapies de
conversion au Québec. Donc, l'objectif, il est atteint.
Puis je vous rappellerais aussi que le projet de
loi qu'on a déposé, avant les amendements, c'est le projet de loi qui va le
plus loin parmi les autres juridictions canadiennes, en créant notamment une
présomption d'atteinte à la dignité des droits des individus aussi. Donc, on
facilite le recours aussi en matière civile.
Donc, je pense qu'on dit pas mal la même chose.
C'est juste le chemin pour y arriver, que je ne peux pas emprunter le même que
vous, considérant le fait que ça amène des conséquences potentielles.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. Est-ce que j'ai d'autres
interventions? M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Puis, Mme la
Présidente, oui, le ministre a tout à fait raison, le Québec, avec le projet de
loi, déjà, là, qui est sur la table, là, s'il est adopté tel quel, on irait
bien plus loin que les autres provinces canadiennes, ça... puis c'est un succès
collectif, puis on doit en être conscients puis le dire. Puis je ne doute pas
du tout que le ministre, il veut les interdire dans sa compétence puis il veut
aller le plus loin possible. Puis je comprends sa préoccupation de dire :
C'est bien beau avoir une loi, mais, s'il faut l'encadrer pendant cinq ans
parce qu'elle est contestée, puis qu'elle est suspendue, on n'aura pas avancé
d'un bout. Mais il comprend aussi... Moi, je veux que, dans notre champ de
compétence, on ne ratisse pas trop large mais qu'on ratisse suffisamment large
pour...
Je vais revirer ça de bord, Mme la Présidente.
Question très précise au ministre, puis je vais y aller à la fin de la logique.
Son article 3, où on le retirerait par contrat, si un recours en dommages
et intérêts était intenté, il serait pris en
vertu de quel article, 1458 ou 1457? Responsabilité civile contractuelle ou
responsabilité civile extracontractuelle?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Bien, vous savez, on vient créer le fait de dire
qu'une thérapie de conversion... À l'article 2, là : «Toute thérapie
de conversion est présumée porter atteinte au droit à l'intégrité et à la
dignité de la personne qui la suit.» Et, dans la mécanique, ça va être possible
de porter plainte à la Commission des droits de la personne, qui pourra prendre
fait et cause.
Donc, même si on est en matière de responsabilité
extracontractuelle, même si c'était par 1457, là, on est dans un cas ou c'est
une atteinte aux droits fondamentaux que l'on crée. On crée une présomption
d'une atteinte aux droits fondamentaux. Donc, on crée un dommage à la personne
qui suit une telle thérapie. Donc, la personne, elle a un recours, comme on
dit, là, à l'encontre de la personne qui lui offre cette thérapie-là.
Donc, la Commission des droits de la personne va
devoir établir le fait qu'elle a suivi une telle thérapie, la personne morale,
la personne physique lui a offert une telle thérapie, elle en est victime et
elle a droit à des dommages parce que ça porte atteinte à sa dignité de la
personne. Elle pourrait entamer...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le député de LaFontaine...
M. Jolin-Barrette : ...elle pourrait
entamer un recours en dommages et intérêts aussi par le biais d'une action au
civil, aussi, sans passer par la Commission des droits de la personne.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Je vais préciser ma question.
Sur l'article 3, est-ce à dire... Parce que,
si vous enlevez «contrat», il y a quand même l'aspect «à titre onéreux
ou gratuit». Donc, il y a trois choses, là-dedans, qui me crient
«contrat» : «par contrat», «à titre onéreux ou gratuit», «s'engager». Le ministre
en enlève une, «par contrat». Il reste les deux autres choses qui me crient
«contrat», «à titre onéreux ou gratuit» et «s'engager». Est-ce à dire qu'on
pourrait laisser passer dans les mailles du filet et ne pas imposer d'amende à
une personne qui n'aurait pas agi dans un contexte contractuel en vertu de l'article 3?
M.
Jolin-Barrette : Nécessairement, et je l'avais dit à une intervention de gens qui sont venus en commission
parlementaire, puis je pense que la députée de Joliette aussi soulevait
beaucoup la question, c'est sûr que c'est dans... 3, c'est dans un contexte
contractuel. 2, on est dans un contexte où on vient créer une présomption d'atteinte
au droit à la dignité de la personne. Donc, c'est sûr que, pour l'infraction
pénale, bien, il y a nécessairement eu la création d'une... pour qu'il y ait commission du geste, il y a nécessairement un
contrat, mais est-ce qu'il est
explicite : je signe, je veux
une thérapie de conversion? Non, pas nécessairement. Donc, c'est dans le
sens... Pourquoi je vais vous proposer d'enlever «contrat»? Pour que ça
soit interprété le plus largement possible, mais c'est sûr que, nous, notre
facteur de rattachement, il est au droit civil et nécessairement au droit
contractuel.
Mais il faut dire... Prenons l'exemple, là...
M. Nadeau, là, quand il est venu témoigner, là, il nous a dit : J'ai,
à l'âge de 12 ans... ou 14 ans, là, je pense, c'est 12 ans. Il
dit : J'ai été voir ma mère parce que, depuis ma naissance, j'étais dans
un environnement homophobe, tout ça. J'ai éprouvé une attirance pour une
personne du même sexe que moi et donc j'ai demandé à ma mère qu'est-ce qu'on
fait, de me libérer de tout ça. Là, de ce que j'ai compris de l'histoire de
M. Nadeau, sa mère a contacté la communauté religieuse à laquelle ils
appartenaient et ils ont organisé, manifestement, une thérapie de conversion.
Donc, on constate un lien contractuel, même si
c'est à titre gratuit, entre la mère de M. Nadeau et la communauté
religieuse. Parce qu'on le sait, on n'a pas besoin d'avoir un échange de
contreparties d'argent pour pouvoir avoir la présence d'un lien contractuel. À
partir du moment où une personne s'engage à offrir une thérapie de conversion, effectivement, le député de
LaFontaine, il a raison lorsqu'il dit : Bien, il y a un aspect contractuel
là-dedans. Oui. Pourquoi est-ce qu'on viendrait enlever le terme
«contrat» explicitement? Bien, on vise à indiquer à la personne qui interprétera
la loi, si elle est contestée : c'est le plus large possible.
Donc, on ne recherche pas la présence d'un
contrat écrit formel, mais le facteur de rattachement doit être rattaché à
l'intérieur de nos compétences du droit civil. Donc, le député de LaFontaine a
raison lorsqu'il nous dit, bien : «À titre onéreux ou à titre gratuit»,
«s'engager», oui, ça va rejoindre nos compétences, mais je le répète,
l'objectif est de faire en sorte de s'assurer de la validité de la loi puis de
le raccrocher.
M. Tanguay : Mme la
Présidente...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Allez-y.
• (15 h 40) •
M. Tanguay : ...c'est
important, ce qu'on dit là. C'est important, ce qu'on se dit là puis c'est
important, ce qu'on fait là. Puis, avec le ministre,
on vient — puis le
ministre a raison — de
mettre le doigt dessus. Entre deux mots, lequel on choisit, comme
législateur? Puis ce n'est pas des avocasseries qu'on fait là : Ah! ils se
parlent entre eux autres, ils sont dans leur... On risque de laisser passer par
les mailles du filet à l'article 3, pas de pénalité si on a de la
difficulté à faire preuve d'un engagement.
Moi, qu'une personne dispense
sans qu'il y ait engagement à titre onéreux ou gratuit, qu'elle le fait
extracontractuellement, bien, je veux que, si ça s'assimile à une thérapie de
conversion, elle ait une amende. Puis je ne
voudrais pas que le Procureur général se fasse dire : Ah! 3 ne s'applique pas parce que
vous n'avez pas fait la preuve d'un engagement. Et on touche précisément
la sphère où c'est excessivement, je vais dire le mot, insidieux. Ce n'est pas marqué «thérapie de conversion», puis on ne se dira
pas... Parce qu'un contrat peut être écrit ou verbal, à titre onéreux ou
gratuit, et, dans bien des cas, ça va être insidieux, ça va tout être dans le
non-dit, ça va tout être flou. On ne dira pas : Bien, c'est trois séances.
On ne précisera pas la prestation, mais à la fin tu vas dire : Oui! ça, il
a passé entre les mailles du filet, c'était une thérapie de conversion, puis il
n'y avait pas trois séances, il n'y avait pas d'engagement, même gratuit, puis
tout ça. C'est juste ça. Entre en échapper... Puis, Mme la Présidente, ma
collègue de Westmount—Saint-Louis,
qui connaît ça mieux que moi, cette réalité, nous l'a dit : Ça ne sera jamais
marqué «thérapie de conversion», là, en 12 séances, là, tu sais, ça ne
sera jamais, jamais ça au départ.
Alors, comment
s'assurer, puis c'est ça, en toute bonne foi, ma préoccupation, qu'on ne va pas
laisser passer... puis là j'allais dire «certains dans les mailles du filet»?
Mais probablement que, sur la réalité terrain, c'est la majorité qui passerait
dans les mailles du filet. Parce qu'on veut que preuve soit faite qu'il y avait
un engagement puis qu'il y avait une sorte de rencontre des volontés :
Oui, vous êtes en détresse puis vous posez plein de questions, oui, je peux
vous offrir un éclairage, et prenons rendez-vous à tous les lundis soirs de 8 à
9 pendant les prochaines semaines. Ça, vous pourriez dire : Bien, ah! là,
on commence à définir ce qui est un engagement. Puis ça va être beaucoup plus
insidieux que ça : Vous allez venir, vous n'allez pas venir, je vais vous
prodiguer des conseils pendant cinq minutes, 15 minutes. Tout dans le
non-dit, et on va reconnaître là une thérapie de conversion, mais on risque de
la laisser passer dans les mailles du filet, c'est juste ça, versus : Oui,
oui, oui! Moi, je ne pense pas, en tout respect, comme le ministre, que... Puis,
il l'a bien dit, ce n'est pas une lumière rouge, c'est une lumière jaune. La
lumière est jaune pâle, sinon elle est verte, elle est vert pâle, là. Moi, je
pense qu'on pourrait le faire puis dire : C'est interdit, et l'appliquer
aux pénalités au Québec également.
Moi, entre deux mots,
de dire : Bien là, oui, on ne veut pas faire invalider la loi... Puis je
suis d'accord avec la collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques, on veut que ça soit
applicable le plus rapidement possible puis qu'on couvre le plus. Mais il est là. Alors, je ne sais pas si le ministre
peut penser à... puis je lui suggère
ça, là, puis on va passer à autre chose, là, j'ai dit ce que j'avais à
dire là-dessus, là. Je le sais, que je ne peux pas faire par la porte d'en
arrière, à l'article 3, s'il refuse 0.1 de ma collègue... mais on
pourrait-tu enlever «s'engager à» quand on va être rendus à 3?
La Présidente
(Mme Lecours, Les Plaines) : M. le ministre.
M. Tanguay :
S'il peut réfléchir à ça.
M. Jolin-Barrette :
Bien, Mme la Présidente, j'écoute le député de LaFontaine. Ce qu'on va faire,
le temps qu'on se rende à 3, je vais demander aux équipes de voir l'étendue, la
portée. On a des gens, au ministère de la Justice, qui peuvent regarder ça pendant ce temps-là.
Alors, en attendant, on va le regarder, puis je vais revenir, lorsqu'on
va être à l'article 3, au député de LaFontaine, avec...
Parce que,
je vous le dis, moi, mon objectif, c'est de couvrir le plus large possible. Puis
j'entends les préoccupations du député de LaFontaine, et j'en suis, je
ne veux pas qu'on n'échappe rien, le tout dans notre champ de compétence. Ça
fait que je vais lui revenir lorsqu'on sera rendus à l'article 3.
La Présidente
(Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, monsieur... Pour votre gouverne,
il reste 15 secondes.
M. Tanguay : Ah! bien, je salue. Merci pour l'ouverture du ministre.
Et j'insiste sur le fait que, dans probablement la très grande majorité
des cas, il n'y aura pas d'engagement formel, ça va être insidieux, puis il faut
les démasquer, les pogner puis les interdire. C'est ça, mon objectif. Merci.
La Présidente
(Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le député. Est-ce que j'ai
d'autres interventions sur... Oui, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Maccarone :
Excusez-moi. Juste pour clore le débat, je voulais savoir s'il y avait une
autre formulation qui serait acceptable pour le ministre. Je pense que
c'était plus l'angle que voulait aborder ma collègue la cheffe du deuxième groupe d'opposition. Ça fait que juste de
savoir s'il y avait une autre formulation qui serait plus acceptable,
même si, mettons... Je comprends, «interdiction», ce n'est peut-être pas le
mot, j'ai écouté le débat, c'était très instructif, mais, si, mettons... Je
regarde un amendement potentiel qui s'en vient, on utilise le mot «empêcher»
pour la publicité. Ça fait qu'est-ce qu'il y a, peut-être, une autre
formulation qui serait acceptable pour donner le ton qui est exigé pour
protéger, pour que les gens comprennent, pour que ça soit clair?
Mme Lecours
(Les Plaines) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, je vous dirais, dans la formule
actuelle, c'est difficile parce qu'on vise l'interdiction. Je comprends la députée de Westmount—Saint-Louis, elle nous dit : Trouvons un
autre libellé. J'aurais plus d'ouverture à travailler sur 3 que dès le départ, dans la loi, si c'est trop
restrictif au départ. Je pense qu'on est mieux de rentrer à
l'article 1 avec les définitions, expliciter comme il faut qu'est-ce qu'on
veut dire par «thérapie de conversion», puis ensuite venir essayer de bonifier
le reste du texte.
La Présidente
(Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le ministre.
Mme Maccarone :
O.K. Parce que l'autre préoccupation que j'ai, c'est dans... puis on n'a pas eu
la chance de faire le débat, mais je sais que ça s'en vient, puis je ne pense
pas que ça ferait partie vraiment d'un débat, mais, de la façon qu'on a écrit l'amendement,
c'est qu'on indique non seulement les thérapies de conversion, mais là on
commence à introduire les pratiques de conversion. Alors, je ne veux juste pas
qu'on oublie que c'est aussi le sens qu'on veut aborder, suite aux témoignages
que nous avons entendus. Puis je sais que le ministre avait déjà démontré une ouverture
à ceci, mais c'était aussi de placer la table pour tous les articles suivants
aussi. Le désir à l'intérieur de cet article, c'était non seulement de
commencer avec un message fort, mais aussi de mettre la table pour que les gens
comprennent que... c'est quoi aussi, le début de la définition.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci, Mme la députée. Est-ce que j'ai d'autres
interventions sur l'amendement? Alors, si je n'ai pas d'autre intervention...
Oui, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé :
Avant qu'on passe à l'article 1... C'est là qu'on s'en allait?
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Exact.
Mme Massé :
Est-ce que je pourrais vous demander une brève suspension, s'il vous plaît?
J'aurais besoin de parler à ma collègue de Westmount—Saint-Louis.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Je vais suspendre.
Mme Massé :
Merci.
(Suspension de la séance à
15 h 46)
(Reprise à 15 h 54)
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, la commission reprend ses travaux. Avant
la suspension, nous en étions rendus
à... je pense qu'il n'y avait plus d'intervention sur l'amendement
introduisant l'article 0.1. Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention,
nous allons placer aux voix l'amendement introduisant l'article 0.1. Mme la secrétaire.
La Secrétaire :
Pour, contre, abstention. Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis)?
Mme
Maccarone : Pour.
La Secrétaire :
M. Tanguay (LaFontaine)?
M. Tanguay :
Pour.
La Secrétaire : Vote par
procuration : Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis) pour M. Kelley
(Jacques-Cartier)?
Mme
Maccarone : Pour.
La Secrétaire :
M. Jolin-Barrette (Borduas)?
M.
Jolin-Barrette : Contre.
La Secrétaire :
Mme IsaBelle (Huntingdon)?
Mme
IsaBelle : Contre.
La Secrétaire :
Mme Picard (Soulanges)?
Mme Picard :
Contre.
La Secrétaire :
Mme Guillemette (Roberval)?
Mme
Guillemette : Contre.
La Secrétaire :
M. Lemieux (Saint-Jean)?
M. Lemieux :
Contre.
La Secrétaire : Mme Lachance
(Bellechasse)?
Mme Lachance :
Contre.
La Secrétaire : M. Lévesque
(Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) : Contre.
La Secrétaire : Mme Massé
(Sainte-Marie—Saint-Jacques)?
Mme Massé : Abstention.
La Secrétaire : Mme Hivon
(Joliette)?
Mme
Hivon :
Abstention.
La Secrétaire : Mme Lecours
(Les Plaines)?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Abstention L'amendement introduisant l'article 0.1 est
donc rejeté. Nous en sommes maintenant...
nous allons donc entamer la lecture de l'article 1 ainsi que les
explications. M. le ministre,
je vous cède la parole.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, à
l'article 1, Mme la Présidente :
«1. La présente loi vise à protéger les
personnes contre les préjudices occasionnés par les thérapies de conversion,
lesquelles sont susceptibles de porter atteinte à leur intégrité et à leur
dignité.
«On entend par "thérapie de
conversion" toute pratique ayant pour but d'amener une personne à changer
son orientation sexuelle, son identité de genre ou son expression de genre. Est
cependant exclu tout traitement médical ou intervention chirurgicale destiné à
changer le sexe d'une personne ainsi que l'accompagnement requis à cette fin.
Est également exclu l'accompagnement d'une personne dans le cadre de sa
démarche d'acceptation [ou] de son orientation sexuelle, de son identité de
genre ou de son expression de genre.»
Alors, pour les commentaires, Mme la
Présidente : Cette disposition énonce le principe du projet de loi qui est de protéger les personnes contre les thérapies
dites de conversion qui sont dispensées pour amener un changement à leur orientation sexuelle, leur identité de genre
ou leur expression de genre. Elle reconnaît que les préjudices
occasionnés par ces thérapies sont susceptibles de porter atteinte à
l'intégrité et à la dignité de la personne.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le
ministre. Est-ce que
j'ai des interventions sur l'article 1? Mme la...
Mme Maccarone : Mme la Présidente,
je veux juste valider, dans ce que le ministre a partagé, qui ne sont pas tous
déposés dans le Greffier, il y avait un amendement. Est-ce qu'il propose
d'aller vers l'avant avec son amendement ou non?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme la Présidente,
suspendons quelques instants.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 57)
(Reprise à 16 h 02)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : La commission reprend ses travaux. Nous en étions donc,
après la lecture de l'article 1 et les explications, aux commentaires. Est-ce
que j'ai des commentaires? Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Maccarone : Oui, Mme la
Présidente. Avec consentement, j'aimerais déposer un amendement au deuxième
alinéa de l'article 1.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Parfait. Donc, est-ce que l'amendement est dans Greffier? Est-ce
que vous l'avez déposé dans Greffier?
Mme Maccarone : ...en chemin. Mais, parce
que c'est très long, je propose que, pendant que c'est en chemin, je peux peut-être,
encore une fois avec le consentement des collègues, commencer au moins la
lecture, parce que c'est quand même...
La Présidente (Mme Lecours,
Les Plaines) : C'est bien. On va éviter la suspension, je vais vous
permettre de faire la lecture. Il faut quand même que, l'amendement, tout le
monde puisse l'avoir. Alors, je comprends. Allez-y avec la lecture de votre amendement.
Mme Maccarone : Bon. Bien, de
remplacer le deuxième alinéa de l'article 1 par le suivant :
«Les pratiques de conversion incluent tout
traitement, pratique ou effort soutenu qui vise à réprimer, décourager ou
changer l'orientation sexuelle, l'identité de genre, la modalité de genre ou
l'expression de genre de la personne ou ses comportements associés à un genre
autre que celui qui lui fut assigné à la naissance.
«Les pratiques de conversion incluent :
«a) Les traitements, pratiques et efforts
soutenus qui présument que certaines orientations sexuelles, identités de
genre, modalités de genre ou expressions de genre sont pathologiques ou moins
désirables que d'autres;
«b) Les traitements, pratiques et efforts
soutenus qui tentent de réduire l'identification aux genres autres que celui
assigné à la naissance ou les rapports intimes et sexuels avec des personnes
d'une certaine identité de genre ou sexe assigné à la naissance;
«c) Les traitements, pratiques et efforts
soutenus qui ont pour premier but l'identification de facteurs ayant pu causer
l'orientation sexuelle, l'identité de genre, la modalité de genre ou
l'expression de genre de la personne ou ses comportements associés à un genre
autre que celui qui [...] fut assigné à la naissance, sauf dans un contexte de
recherche approuvé par comité d'éthique à la recherche;
«d) Les traitements, pratiques et efforts
soutenus qui dirigent les parents ou tuteurs de limiter les comportements non
conformes dans le genre, d'imposer des pairs du même sexe assigné à la naissance,
ou d'intervenir autrement dans l'environnement journalier du dépendant dans le
but de réprimer, décourager ou changer l'orientation sexuelle, l'identité de
genre, la modalité de genre ou l'expression de genre de la personne ou ses
comportements associés à un genre autre que celui qui lui fut assigné à la
naissance;
«e) Les traitements, pratiques et efforts
soutenus qui présument que les transitions sociales ou médicales sont
indésirables;
«f) Les traitements, pratiques et efforts
soutenus qui délaient ou entravent la transition sociale ou médicale désirée
par la personne sans justification clinique raisonnable et libre de jugement;
«g) Les
traitements, pratiques et efforts soutenus qui utilisent délibérément les noms,
[prénoms], termes genrés, et termes d'orientation sexuelle autre que
ceux utilisés ou acceptés par la personne hormis lorsque requis par la loi.
«Les pratiques de conversion n'incluent
pas :
«a) Les
évaluations et diagnostics nécessaires ou désirés de dysphorie de genre ou
autre catégorie diagnostique comparable sous la dernière version du DSM
ou du CIM;
«b) Les traitements, pratiques et efforts
soutenus qui dispensent de l'acceptation et du support libre de jugement envers
l'orientation sexuelle, l'identité de genre, la modalité de genre ou
l'expression de genre exprimée par la personne ou ses comportements associés à
un genre autre que celui qui lui fut assigné à la naissance;
«c) Les
traitements, pratiques et efforts soutenus visant à enseigner des stratégies
d'adaptation pour aider à résoudre, endurer ou diminuer des expériences
de vies stressantes tout en prenant toutes les mesures raisonnables pour éviter
de réprimer, décourager ou changer l'orientation sexuelle, l'identité de genre,
la modalité de genre ou l'expression de genre de la personne ou ses
comportements associés à un genre autre que celui qui lui fut assigné à la
naissance;
«d) Les traitements, pratiques et efforts
soutenus qui visent à développer une identité personnelle intégrée en facilitant l'exploration et l'autoévaluation des
composantes de l'identité personnelle tout en prenant toutes les mesures
raisonnables pour éviter de réprimer, décourager ou changer l'orientation
sexuelle, l'identité de genre, la modalité de genre ou l'expression de genre de
la personne ou ses comportements associés à un genre autre que celui qui lui
fut assigné à la naissance.»
Alors, merci pour votre patience. Je sais que
c'est quand même un amendement qui est assez long, mais c'est aussi très bien
réfléchi, c'est ce que tous les collègues ont vu puis qu'on a entendu lors du
témoignage de Florence Ashley. Florence Ashley nous a quand même préparé et
présenté une loi modèle. C'est le libellé exactement comme rédigé par Florence,
et je crois que c'est très clair. Toutes les personnes qui sont venues
témoigner en commission parlementaire nous ont dit puis nous ont exprimé
l'importance de la terminologie, l'importance de la définition, de s'assurer
qu'on n'a vraiment pas de trou à l'intérieur du projet de loi, pour protéger le
mieux possible toutes les personnes qui sont potentiellement visées par une
pratique de conversion ou une thérapie de conversion.
Alors, c'est sûr, ça me tient à coeur, parce que
non seulement que Florence Ashley est quand même une experte, je sais que
c'était très bien réfléchi. Puis je pense que ne pas, en débutant, avoir le
débat ou de réfléchir et de peut-être penser à accepter ce que Florence nous
propose, ça se peut qu'on manque une opportunité en or d'avoir un projet de loi
qui est «bulletproof», qui serait une belle réflexion de la société, qui
reflète vraiment ce qui est et ce qui n'est pas une thérapie ou une pratique de
conversion.
Alors, évidemment, j'espère que ce serait
souhaité et accepté par les collègues ainsi que le ministre de penser si nous
pouvons ajouter ceci au projet de loi n° 70, car le but, vraiment, de
ceci, c'est de s'assurer vraiment que c'est un projet de loi qui est bonifié.
Parce que, comme j'ai dit dans mes remarques préliminaires, c'est clair, on ne
va pas rouvrir le projet de loi n° 70 dans 10 ans, 20 ans,
25 ans, on ose espérer, mais... Ça fait qu'est-ce qu'on peut avoir quelque
chose qui est assez complet, exact? Puis c'est une définition qui vient d'une
personne qui est experte de la communauté. Alors, voilà les remarques qui
suivent le dépôt de cet amendement.
• (16 h 10) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Je
remercie la députée de Westmount—Saint-Louis pour sa proposition d'amendement,
ainsi que Florence Ashley pour sa proposition qu'elle nous a transmise, aux
membres de la commission. C'est un effort significatif et c'est une
contribution importante aussi, cette personne étant... se spécialisant et ayant
un intérêt particulier pour le dossier.
Quelques commentaires préliminaires, là. C'est
une définition qui est très détaillée et c'est une définition qui, je vous
dirais, est davantage écrite en termes de common law, exemple, en matière de
droit criminel ou en matière de droit
fiscal, où on vient nommer chacune des exceptions associées à la définition, ce
que constitue ou ce que ne constitue pas. Le risque avec une telle
définition, c'est d'échapper quelque chose. Tandis que la définition que nous
proposons, c'est une définition davantage
civiliste puis une définition qui, avec des termes... ils sont plus généreux,
si je peux dire.
Et on verra probablement, dans les discussions
que nous aurons tout à l'heure, si on élargit la définition. Parce que, là, on
parle de «toute pratique ayant pour but d'amener une personne à changer son
orientation sexuelle, son identité de genre ou son expression de genre». Bien,
«toute pratique», là, ça vise très, très large, là, ça a une large étendue. Et
une pratique, c'est toute forme, c'est toute incitation, c'est tout traitement,
c'est tout service. Une pratique, là, c'est
ça, c'est le fait de faire la chose, de proposer la chose. Alors, la définition
de Florence Ashley, elle est large. Et moi, respectueusement, je vous
dirais : Ce que l'on retrouve dans sa définition est inclus dans
«pratique», et il faut le voir comme ça.
Peut-être qu'on pourra bonifier ultérieurement,
tout à l'heure, l'alinéa deux de l'article 1, mais, à utiliser la
définition de Florence Ashley, ce qu'on risque peut-être de faire, c'est
d'échapper quelques bouts. Parce que, si on utilise
cette définition-là et que ce n'est pas nommément indiqué, ce qui en constitue
ou ce qui est une exception d'une façon très rigoriste, on risque de ne
pas atteindre l'objectif qu'on souhaite.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. Mme la députée.
Mme
Maccarone : Ce que je dirais, ce que je ne comprends pas, d'abord,
c'est que, dans le libellé exactement dans
la loi, on parle des exclusions. Alors, c'est quoi, la différence, si on parle
déjà des exclusions puis on... Peut-être que c'est ça qui ne conjugue
pas bien pour moi dans ce que le ministre vient de partager avec la commission.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, les
exclusions sont formulées en termes larges aussi pour faire en sorte qu'on ne
crée pas une situation... Puis on veut envoyer un message clair que, le fait
qu'une personne procède à l'opération sur un changement de sexe, parce que vous
êtes en transition, on ne veut pas que le médecin soit poursuivi parce que ça
pourrait être considéré comme une thérapie de conversion. Alors, c'est pour ça
que, la façon dont c'est écrit, on ne vient pas prévoir chacune des
sous-exceptions, parce que, sinon, on pourrait se trouver dans une situation où
on échapperait quelque chose. Il faut laisser la latitude au niveau de
l'interprétation aussi, là.
Puis, dans le
fond, c'est la construction du droit aussi, de la façon de construire. En common
law, le législateur vient précisément, nommément exclure toutes les
exclusions, tandis qu'en droit civil c'est différent un petit peu.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. Mme la députée.
Mme
Maccarone : Il n'y a pas une manière d'avoir... Je comprends,
j'entends que c'est large, pas large. J'aimerais savoir c'est quoi,
qu'est-ce qui serait considéré comme large, pas large. Est-ce qu'il y a une
norme, quelque part, qu'on doit respecter? Évidemment, je ne suis pas avocate.
Quand je regarde ce qui est écrit actuellement dans l'article 1,
évidemment, pour moi, ce n'est pas assez large. Ça fait que j'ai des
préoccupations que, parce que ce n'est pas assez large puis pas assez
compréhensible, même si je reviens avec un autre amendement, puis j'en ai plein
de prêts, là, ce ne serait jamais... Présentement, dans la façon que c'est
écrit actuellement, on dirait que ce n'est pas assez large, mais, quand on
vient puis on veut vraiment boucher tous les trous possibles, on dit que c'est
trop précis. Ça fait... Est-ce qu'il y a un mi-chemin dans tout ça? Parce que
le ministre a quand même choisi de parler d'un accompagnement puis des
traitements médicaux. Bien, ça figure aussi dans la proposition de l'amendement
que je viens de faire. Puis je remercie encore... C'est moi qui l'ai fait, mais
je veux juste m'assurer que je cite Florence Ashley, parce que c'est Florence
qui l'a vraiment rédigé. Ça fait que c'est quand même inclus, sauf que Florence
propose qu'on rajoute un petit peu plus pour s'assurer que la compréhension est
bonne.
Ça fait que, si, mettons, on dit que celui-ci,
ça rejoint ce que nous voulions avoir comme une définition, est-ce qu'on peut
le retirer, le redéposer en indiquant que ce n'est pas une liste exclusive,
qu'on peut en rajouter autre chose, ou ça, c'est trop? Parce qu'il me semble
que ça, ce serait trop large, mais est-ce qu'il y a quelque chose qui est
manquant? Parce que ça, ce n'est pas assez, peut-être, ça, c'est trop, mais il
doit y avoir un mi-chemin.
Parce que... Si, mettons,
c'était écrit avec moins de mots, est-ce
que ça aurait été acceptable? Tu
sais, je sais que c'est quand même deux pages, mais ce que j'aime de ça,
c'est que, vraiment, les personnes vulnérables sont protégées. Puis les personnes
qui pensent... Parce qu'on a des... on parle souvent de la maltraitance, on
parle souvent des gens qui... Tu sais, veux veux pas, là, ça ne va pas faire le
bonheur de tout le monde, malheureusement. Je ne veux pas que ces personnes-là
regardent la définition actuelle puis disent : Ah! ça, là, ça ne
s'applique pas à moi parce que... ou, mon Dieu, je ne suis pas visé là-dedans,
ça fait que je ne fais pas partie de... En tout cas, j'ai juste une crainte
que, si on ne va pas plus large, on manque une opportunité vraiment de boucher
tous les trous puis on va avoir de l'eau dans notre bateau.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : En commentaire, Mme
la Présidente, prenons l'exemple de la députée de Westmount—Saint-Louis, ce qu'elle nous dit. Supposons, au paragraphe... Excusez-moi, j'ai la version... Est-ce que c'est la
même...
Mme Maccarone : ...
M. Jolin-Barrette : O.K. Bon.
Supposons, là... Allons au deuxième alinéa, là, les pratiques de conversion
incluent, a, b, c, d, e, f, g. La députée de Westmount—Saint-Louis nous dit : Pour
oeuvre pédagogique, supposons, pour renseigner la population... Lorsque les
gens vont prendre la loi puis ils vont la lire, ils vont regarder : Est-ce
que je rentre dans a à g? Qu'est-ce qui arrive si la personne, sa situation,
elle ne la retrouve pas de a à g? Donc là, on vient
dire... la personne va dire : Bien, moi, je ne suis pas visée par a à g.
Puis en plus le législateur, supposons, aurait pris le temps de venir spécifier, c'est soit a, c'est
soit b, c'est soit c, d, e, f ou g. Là, nous, dans la proposition qu'on fait
dans le projet de loi, on parle de pratique,
donc «pratique», c'est au sens large. Le message qu'on veut envoyer à la
population, c'est : Tout type de pratique qui touche ça vise une thérapie
de conversion, c'est une thérapie de conversion.
Alors, c'est pour ça que je vous disais
tantôt : Entre... trop détaillé dans le micro, l'effet que ça peut avoir,
c'est que, si on vient nommément le faire, bien, comme la façon que c'est
rédigé, c'est plus à la version common law, c'est sûr, sûr, sûr. Tandis que,
là, on a une définition un petit peu plus large, sous réserve qu'elle pourrait
être bonifiée s'il y a des termes qui peuvent être rajoutés ultérieurement. Tu
sais, c'est un peu le sens de pourquoi je ne souhaite pas nécessairement aller
avec cette définition-là, puis je souhaite que le message qu'on porte pour une
thérapie de conversion, c'est de dire : Bien, écoutez, c'est vraiment
toutes pratiques rattachées à un changement d'orientation sexuelle qui sont
visées, son identité de genre. Ça m'apparaît assez clair de le dire. Puis, avec
le dépôt du projet de loi, puis même, je vois, avec le dépôt du projet de loi
de la députée de Westmount—Saint-Louis,
ce que les gens retiennent beaucoup, c'est de dire : Ça existe, premièrement,
ça n'a pas de bon sens que ça existe, mais aussi ils sont heureux que le législateur
québécois mette une définition qui est quand même assez large aussi.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : J'adhère au
principe qu'a étayé le ministre, rédaction de common law, rédaction civiliste,
mais il y a un mot magnifique de la langue française qui nous permet de
retomber dans le droit civil : «Les pratiques de conversion incluent, notamment»,
et là on est dans l'univers verdoyant du monde civiliste. Qu'en pense le ministre?
Bon. M'invite-t-il à déposer un sous-amendement?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : M. le Président,
je comprends que...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : «Mme la Présidente».
M. Jolin-Barrette : Oui, excusez-moi,
Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Pas de problème.
M. Jolin-Barrette : ...je suis
désolé, désolé. Mme la Présidente, je comprends l'argument linguistique que me fait le député de LaFontaine, mais je lui
dirais : Soyons plus larges dès le départ. Et j'aurais le même
raisonnement s'il dépose un sous-amendement à l'amendement de sa collègue. Je
pense qu'il faut rester sur les bases sur lesquelles nous sommes présentement. Et, Mme la Présidente, je vous dirais même, le
Parti libéral, à l'article 1 du projet de loi n° 599,
aussi, adoptait l'approche aussi de thérapie de conversion qui est «une
pratique, un traitement ou un service qui vise soit à rendre une personne
hétérosexuelle ou cisgenre.» Donc, on voit, là aussi, qu'il y avait une
certaine... on voulait l'interpréter largement.
Donc, les travaux de Florence Ashley sont
plus... Il y a l'exercice qui a été fait de venir définir précisément tout ça,
mais moi, je pense que, pour l'application de la loi, ce n'est pas nécessaire,
et même ça pourrait avoir des conséquences, le fait d'aller aussi en détail
comme ça, qui pourraient faire en sorte que ça ne serait pas inclus.
• (16 h 20) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mme la députée.
Mme Maccarone : C'est ça qu'on
pense, qu'ils n'iront même pas si loin que ça, parce que juste moi, ma
compréhension de... rendu là, au niveau fédéral, ils vont même inclure les
définitions de qu'est-ce que c'est, parce que ça aussi, ça faisait partie de
qu'est-ce que Florence a partagé avec nous. Puis c'est sûr, je n'ai pas
incorporé ça, évidemment, parce que j'ai compris... puis je remercie ma
collègue de Joliette qui a quand même fait un peu mon éducation de pourquoi il
y a quelque chose qui est là puis pas là.
M. Jolin-Barrette : Mais, moi, ce
que je veux juste rajouter, là, le législateur fédéral, là, lui, quand il va
légiférer dans le Code criminel, là, lui, son... pour que ça constitue une
infraction criminelle, il va devoir prouver matériellement
chacun des éléments de l'infraction. Ça fait que c'est pour ça qu'ils vont précisément
dans le détail, aussi, dans le Code criminel, de cette façon-là, parce qu'il
faut qu'ils fassent... qu'ils prouvent l'intention, mais aussi le geste, aussi.
Ça fait que c'est un peu comme dans la loi de l'impôt. Ça fait que les...
Souvent, ce qui arrive, c'est que... Exemple, en droit fiscal, quand on lit la
loi fiscale, ce n'est pas évident à lire, parce qu'ils viennent combler chacun
des petits trous dans la loi au fur et à mesure que la jurisprudence évolue,
puis tout ça. Après ça, le législateur fédéral intervient puis il vient combler
le tout. Donc, c'est une méthode de rédaction différente.
Mais je peux rassurer la députée de Westmount—Saint-Louis :
avec le libellé que nous avons ou tel qu'il sera proposé ultérieurement, on
vient couvrir assez large pour couvrir les situations qui pourraient potentiellement
constituer des thérapies de conversion.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mme la députée.
Mme Maccarone : Est-ce qu'on peut
faire l'exercice de penser au pratico-pratique? Le projet de loi, tel que c'est
rédigé... je comprends qu'on aura des amendements qui vont venir, mais, de la
façon que la définition est écrite actuellement puis la différence entre ce qui
est proposé dans l'amendement dont nous sommes en train de faire le débat, juste... Puis je m'excuse de poser la question,
c'est juste parce que peut-être que je
ne comprends pas comment que ça va fonctionner sur le terrain. Est-ce
que le ministre peut donner un exemple concret de personne qui va faire la lecture, qui est une victime d'une thérapie de
conversion, avec la définition 1, en comparaison avec la
définition 2? Puis, dans le fond, il est où, les trous? C'est ça,
ma préoccupation, c'est qu'il y ait quelqu'un qui va être échappé ici. On n'a
pas plus un sens large.
Alors, ici, la définition... Bien, le pratico-pratique,
ça va avoir l'air de quoi, pour la personne sur le terrain, lors de l'adoption,
si c'est version 1 versus version B?
M. Jolin-Barrette : Bien, moi, ma
crainte, c'est qu'avec la définition de Florence Ashley, si la personne lit la
définition puis elle dit : Bien, ah! je ne rentre pas dans a à g, elle va peut-être
se dire : Ah! bien, ça ne s'applique pas à moi. Tandis qu'avec «pratique,
avec traitement ou service», ça, tout le monde sait que c'est assez large, donc
l'effet pédagogique sera encore là, sera plus grand.
Mais, moi, ce que je souhaiterais vous dire aussi,
c'est que, pour toute personne qui serait victime d'une telle thérapie ou qui
pense être victime d'une telle thérapie, la personne pourra s'adresser au corps
de police pour l'aspect pénal et pourra s'adresser à la Commission aux droits
de la personne, qui pourront la renseigner, et qui pourront l'aider, et qui
seront à même d'évaluer est-ce que ça rentre dans la définition de thérapie de
conversion.
Puis je le dis, moi, je l'entends du sens le
plus large possible, là. C'est une définition, lorsqu'on parle de pratique...
Pour moi, une pratique, c'est extrêmement large, là, ça doit être interprété largement.
Donc, l'objectif n'est pas d'être restrictif à ce niveau-là. Donc, si on vient
capsuler, si je peux dire, la définition, tel que propose Florence Ashley,
bien, on risque peut-être, malheureusement, que certaines situations ne soient
pas couvertes.
Mme
Maccarone : Même si que,
dans la première ligne, puis ce n'est pas inclus actuellement, mais je
rajouterais un mot, «les pratiques de conversion incluent tout traitement,
pratique ou service»... même si ça débute avec ça? Parce que c'est ça que le ministre
est en train d'évoquer.
M. Jolin-Barrette : Non, mais, ce
que je veux dire, moi, je suis ouvert à ça. Est-ce que c'est nécessaire de le
faire? Je ne le crois pas. Mais, pour plus de sûreté, pour que ça ait un effet,
comment dire, qui permettra à la population d'être informée, s'il y avait un
doute par rapport à «pratique» puis qu'ils se disent : Ah oui, non, moi,
c'est un service que j'ai reçu ou c'est un traitement, parce qu'on me l'a vendu
comme un traitement, supposons... Tu sais, la personne, là, le charlatan qui
fait ça dit : Ah! moi, c'est un traitement de guérison, supposons. Puis
là, parce que ce n'est pas indiqué «pratique de conversion», bien là, la personne
va se dire : Bon, O.K. Mais, pour moi, c'est clair que ça rentre dans le
terme «pratique» même s'il s'agit d'un traitement. Mais je suis ouvert à
indiquer «pratique ou service» si ça peut amener davantage de clarté.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mme la députée.
Mme Maccarone : C'est sûr, j'ai vraiment
la préoccupation de... Je suis préoccupée. Je comprends, j'entends ce que le ministre
est en train de partager avec nous. Puis je comprends qu'on pourra modifier
pour dire : «Tout traitement, pratique ou service». Mais j'aime beaucoup
l'idée qui était proposée par le député de LaFontaine, si, mettons, on
rajoutait «notamment». Bien, «notamment», il me semble, ça, ça peut être vraiment
le sens large. Ça, ça veut dire que ce n'est pas exclusif. Alors, on est en
train vraiment de boucher tous les trous pour dire qu'est-ce que c'est,
qu'est-ce que ce n'est pas, mais ce n'est pas exclusif parce qu'on rajoute le
mot «notamment». Ça fait que ça nous donne vraiment de la flexibilité dont nous
avons besoin. Je regrette que ce que j'ai lu, le mot «service», n'est pas
inclus, mais, mettons, si on rajoutait ceci puis on rajoutait aussi «notamment»,
mais est-ce que ça rejoint peut-être les préoccupations dont le ministre est en
train de partager? Puis, comme ça, on pourra vraiment s'assurer aussi que la
définition...
Je comprends qu'on veut sens large, mais, de
l'autre côté, c'est tellement sensible que j'ai peur que, si on n'a pas une
définition qui résonne avec la communauté puis qui n'est pas élaborée, on
manque une opportunité vraiment de pouvoir protéger le plus possible du monde.
Mais j'entends... c'est un très bon argument. Je ne dis pas que ce n'est pas basé, fondé dans un bon jugement. Je comprends tout
à fait, puis c'est bien expliqué. Merci. C'est juste que j'essaie de trouver un
mi-chemin, d'avoir quelque chose qui est plus large, plus global sans être
exclusif.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. L'autre
point, Mme la Présidente, il y a deux choses qu'on fait, qu'on débute aujourd'hui.
Là, on est sur l'aspect législatif, mais il y aura aussi du travail à faire, au
sein de l'État québécois, pour sensibiliser, pour diffuser, pour former les
gens aussi, puis ça, ce n'est pas des mesures législatives qui sont dans un projet
de loi... on n'a pas besoin de mesures législatives pour agir, mais c'est sûr
que les gens dans les différents réseaux, que ce soit de l'éducation ou de la
santé, dans les ordres professionnels aussi, vont être outillés, et ça va faire
partie de la sensibilisation puis des informations qui vont être transmises
désormais.
Donc, que ce soient les travailleurs sociaux ou
les gens qui travaillent dans le système de santé, ils vont être sensibilisés
aussi davantage. Parce qu'un des objectifs aussi du projet de loi, c'est de
faire en sorte que ça soit amené dans la sphère publique, puis je pense que ça
fait oeuvre utile aussi, pour dire : Bien, écoutez, là, un jeune homme
comme M. Nadeau qui a subi ça, bien, lui va dire : Bien, maintenant,
il y a des recours, ça porte atteinte à ma dignité puis... si c'est une thérapie
de conversion, la thérapie que j'ai suivie, ou même les trois que j'ai subies.
• (16 h 30) •
Mme Maccarone : Est-ce que le ministre
s'engage, d'abord, rendu à ce point-là, quand ça va être le moment de
sensibiliser la population, à faire de la promotion positive puis d'éduquer le
monde de c'est quoi puis que ce n'est pas quoi? Est-ce qu'il s'engage de
s'assurer qu'il y aura quand même une consultation qui sera faite auprès de
Florence Ashley puis les autres leaders de la communauté pour s'assurer que ce
qui est la définition fait consensus aussi puis ce qui n'est pas inclus dans la
définition de thérapie ou pratique de conversion aussi, qu'ils feront partie de
cette discussion.
Je sais, ma collègue, elle parle souvent de
Janik Bastien Charlebois, je parle souvent de Florence Ashley, que ça soit
Dr Wells, je pense qu'il y a du monde qui pourrait vraiment aider dans la
réflexion, avant que ça soit quelque chose qui sera juste diffusé «at large»,
mais qu'au moins ils vont pouvoir partager un peu une réflexion pour s'assurer
que ce qui est diffusé reflète vraiment ce que désire la communauté.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, ça, Mme
la Présidente, je suis très ouvert. Écoutez, plus on utilise des expertises qui sont à la portée du ministère de la Justice, du Bureau de lutte à l'homophobie et la
transphobie... Je pense que... le fait d'avoir
les meilleurs outils, les meilleurs éléments, de collaborer avec les gens, je
pense que c'est une bonne chose, surtout que l'objectif du gouvernement
du Québec, c'est de dire que ces pratiques-là sont barbares puis de venir
protéger la population. Ça fait que, bien
entendu, si les gens ont une expertise particulière dans ce domaine-là, on est
très heureux qu'ils la partagent puis qu'ils fassent progresser aussi la
littérature associée à cette réalité-là, aussi, qui est vécue.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Mme la députée.
Mme Maccarone : «I'm going to be picky, just a little picky.» Être ouvert,
ce n'est pas la même chose comme oui. Ça fait qu'est-ce que le ministre
s'engage, il dit : Oui, je vais consulter la communauté, telle que les
personnes que j'ai déjà nommées, qui vont pouvoir participer dans la réflexion
avant qu'on fait la désignation de... puis l'éducation de la population?
M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez,
je peux m'engager à consulter différentes personnes. Est-ce que je peux vous
dire, dans un laps de temps x, à telle date, je vais avoir consulté Florence
Ashley ou Mme Janik...
Mme Maccarone : Bastien
Charlebois.
M. Jolin-Barrette : ...Bastien
Charlebois, qu'on a déjà appelée cette semaine aussi... Donc, voyez-vous, on
consulte, on consulte, mais...
Mme Maccarone : Ce n'est pas le
temps qui me préoccupe, c'est juste de m'assurer qu'il y a quand même des
personnes concernées qui sont des experts. J'aimerais juste avoir une assurance
qu'ils feront partie de la réflexion avant d'aller vers l'avant avec la
pédagogie ici, c'est tout.
M. Jolin-Barrette : Je peux
vous assurer que, déjà, le Bureau de lutte à l'homophobie tient des
consultations. Je peux vérifier si Florence Ashley a été consultée. Je crois
que Mme Janik a été consultée. Peut-être? Bah! Nous allons les consulter.
Donc, le ministère de la Justice les consultera.
Mme Maccarone : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. Est-ce que j'ai d'autres
interventions? M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay :
Oui. Je trouve intéressant l'amendement de ma collègue de Westmount—Saint-Louis.
C'est son amendement, mais évidemment elle a repris le fruit du travail de
Florence Ashley, que nous avons entendue en audition. Puis je pense qu'on
touche un élément important... Puis on ne pourrait pas, Mme la Présidente, trop
insister, puis, je pense, je l'ai dit dans mes remarques préliminaires, sur
l'importance de définir ce que l'on veut empêcher et ce que l'on ne veut pas
empêcher. Puis c'est de droit, c'est de domaine nouveau, puis les mots qu'on
met dans la loi là, «thérapie de conversion», il n'y en avait pas, au Québec,
dans le corpus législatif au Québec.
Puis la société évolue, puis on apprend, entre
autres, Mme la Présidente... Je vais prendre l'exemple de qu'est-ce que la
pornographie, et il y a des... Historiquement, il y a toujours eu des lois qui
interdisaient la pornographie, qui ne définissaient pas la pornographie, ce qui
était interdit, tout ça. Évidemment, les sociétés ont évolué jusqu'à tant où, à
un moment donné, un juge... je ne me rappelle pas de quelle cause et dans quel
contexte, dans quel pays, mais, dans nos cours de droit, un juge à qui l'on
demandait : Bien, vous interdisez... vous appliquez la loi qui interdit la
pornographie, mais, pour vous, c'est quoi, la pornographie?, il avait
répondu : Bien, pornographie, quand j'en vois, je le sais. Alors, une
fois... Puis je ne sais pas si on se rappelle de ça, dans nos cours de droit,
c'était assez... pathétique, c'est peut-être un peu trop fort, parce qu'il
était de son temps, mais ça ne peut pas marcher, ça ne peut pas fonctionner. Madame
Bovary, qui est un immense roman de Gustave Flaubert... a subi un procès au
XIXe siècle en France, en 1857, parce qu'on voulait sanctionner «tout outrage
à la morale publique et religieuse et aux bonnes moeurs». Fin de la citation.
Il avait subi un procès, puis ça avait été historique. Puis aujourd'hui on lit
ça puis on dit : «Oh my God!»
Pourquoi c'est important? Puis, en regardant ça,
puis là je veille à tout le sérieux de la discussion que l'on a, je prends
chacun des éléments, là, puis j'invite le ministre à me suivre, les pratiques
de... Autrement dit, moi, si j'étais juge, comment je pourrais, dans mon for
intérieur, sans plus ample indication ou sans plus ample aide d'un article 1 mieux étayé, plus étayé, comment je
pourrais définir c'est quoi, amener une personne à changer son
orientation? Et là je prends juste l'élément de «incluent : c. les
traitements, pratiques et efforts soutenus qui ont pour premier but
l'identification de facteurs ayant pu causer l'orientation sexuelle...» Puis
moi, je vais être très honnête, Mme la Présidente, quand j'ai lu ça, je sais
que Florence Ashley a fait une... est sur le terrain, connaît très bien le
domaine, je me suis posé la question, comme législateur : Est-ce que ça,
c'est suffisant? Dans un contexte où une personne identifie, face à une autre,
des facteurs ayant pu causer l'orientation sexuelle, est-ce que ça, c'est une
thérapie de conversion? Puis savez-vous quoi, Mme la Présidente, je ne le sais
pas. Je vous avoue, je ne le sais pas. Est-ce que ça, ça devrait être jumelé et
cumulatif avec autre chose? Autrement dit, de quoi on parle ici? Je suis prêt à
le reconnaître, je suis prêt à le sanctionner, mais est-ce qu'on veut la faire
tomber, cette identification-là de «facteurs ayant pu causer l'orientation sexuelle»?
Est-ce que le fait de laisser entendre ça... Puis, à le lire, Mme la Présidente,
évidemment, c'est un élément qui est condamnable. Je ne suis pas en train de
dire qu'identifier ou tenter d'identifier des facteurs ayant pu causer
l'orientation sexuelle, ça fait place à discussion. Je veux dire, on est clairement
dans le domaine où ce n'est pas des propos, ce n'est pas des éléments où que
moi personnellement... et je pense que c'est condamnable, mais est-ce que ça,
dans un contexte x bien particulier, ça entre dans la catégorie «c'est une
thérapie de conversion»?
Alors, ça, cet élément-là, isolément, Mme la
Présidente, très clairement, il est condamnable, mais est-ce que c'est suffisant en soi? Et ce questionnement-là
que moi, j'ai, et très clairement que je veux qu'il soit condamné, est-ce
que ce sera pris en compte par le tribunal
si on ne précise pas davantage «thérapie de conversion, toute pratique ayant
pour but d'amener une personne à changer son orientation»?
Alors, il est
clair que, si vous essayez d'identifier des facteurs qui n'existent pas, ayant
pu causer l'orientation sexuelle, qui, par définition, en 2020,
n'existent pas, est-ce que ça, on ne mériterait pas, on ne devrait pas, comme
législateurs, de donner davantage, dans la loi, une définition... Puis je
comprends, là, je veux dire, on se rend jusqu'à l'élément g, pour ce que ça
comprend, mais est-ce qu'on ne pourrait pas justement... puis ce n'était pas
une boutade tantôt, «incluent notamment», puis le mettre, cet élément-là, puis
en mettre d'autres, «notamment»? Est-ce qu'on pourrait
avoir cette réflexion-là? Parce qu'encore une fois il ne faut pas passer à côté
de l'objectif qu'on s'est donné. Et je ne
voudrais pas, Mme la Présidente... Parce que la loi pourrait être adoptée la
semaine prochaine ou dans deux semaines, je ne voudrais pas que les
débats s'éternisent en Cour d'appel pour essayer de définir c'est quoi, une
thérapie de conversion. Alors, est-ce qu'on pourrait ajouter des «notamment»?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme la Présidente, on pourrait ouvrir sur
la question des services ou des traitements, mais je ne souhaite pas
aller aussi large que le député de LaFontaine le souhaite parce que je veux
garder un élément qui est prévisible, qui est assez large pour indiquer
clairement que c'est une pratique, donc ça doit viser largement. Donc, pour les
raisons que j'ai mentionnées précédemment, je ne souhaite pas aller vers le
«notamment» avec la liste associée qui est proposée. D'ailleurs, j'ai la
confirmation, Mme la Présidente, que le bureau de lutte à l'homophobie
consultera Florence Ashley ainsi que Mme Janik.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Est-ce que
le bureau de lutte, comme vient de le mentionner M. le ministre... puis, juste
pour ma gouverne, au niveau de la magistrature, y a-t-il des formations, des
échanges de... Qu'est-ce qui est fait? Dans un contexte où, dans tout métier... Puis, je veux dire, être juge, c'est en
soi une profession, c'est une... c'est l'aile juridique, c'est excessivement important, il y en a toujours, de la
formation continue. Est-ce qu'il y a... Est-ce que le Conseil de la
magistrature est proactif là-dedans? Est-ce que le ministre de la Justice a ces
indications?
• (16 h 40) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme
la Présidente, le député de LaFontaine vient de soulever un très bon point. Je
pense que nous aurions tout intérêt, comme société, à s'assurer que les juges,
notamment ceux de la Cour du Québec, soient invités à suivre des formations
relativement aux minorités sexuelles, surtout en lien avec ce que le
législateur québécois fait. C'est une
première. Et, si c'est une suggestion du député de LaFontaine... Parce qu'à ma
connaissance, puis on va faire des vérifications, en fait, le bureau de lutte
ne fait pas de formation pour la magistrature parce que, la Cour du Québec, il
faut comprendre qu'en raison de l'indépendance judiciaire ce sont eux qui font
les formations pour les magistrats, Cour du Québec, juges, Cour du Québec,
juges de paix magistrats, et puis je pense qu'il y a la conférence des juges
aussi, pour les cours municipales.
Cela étant, si c'est une proposition du député
de LaFontaine, éventuellement il faudrait peut-être entamer une discussion avec
la Cour du Québec relativement à des situations... Puis on ne se le cachera
pas, de plus en plus, ils vont être
confrontés à ce genre de situations là. Même chose au niveau des violences à
caractère sexuel. Je pense qu'en matière d'agression sexuelle, de
violence à caractère sexuel, de violence conjugale, ce serait une bonne idée
peut-être que d'inclure dans la formation pour la magistrature d'être sensibilisés
à ce genre de situations là. Et je crois qu'il y a déjà des formations qui sont
données, mais je pense que, comme société, le fait, clairement, que, lorsqu'on
devient juge, on soit sensibilisé, on soit informé face à ces réalités-là, tout
comme on l'est... Mme la Présidente, le présent projet de loi fait en sorte
que... Moi-même, je ne suis pas sensibilisé... je n'étais pas nécessairement
sensibilisé à la chose, tout ça, c'était important pour moi, le fait
d'intervenir dans le dossier pour les thérapies de conversion, parce que je
considère ça ignoble, mais j'ai appris des choses durant la consultation avec
les témoins.
Alors, non, actuellement, le bureau de lutte
n'offre pas ce genre de formation là, c'est sûr qu'il y a une indépendance
judiciaire au niveau des juges de la cour, mais, si ça devenait une formation,
je pense que les magistrats y gagneraient.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. Est-ce que j'ai d'autres
interventions sur l'amendement remplaçant l'alinéa deux de
l'article 1? Oui, Mme la députée.
Mme Maccarone :
C'est juste une question. Comment se
fera ceci? Ça, c'est fait par règlement, par directive? Comment qu'on peut
s'assurer que cette formation se fait?
M. Jolin-Barrette : La Cour du
Québec est souveraine dans son offre de formation. Je sais que le gouvernement
fédéral a déposé un projet de loi pour la formation des juges au niveau des
violences sexuelles. Généralement, la Cour
du Québec gère elle-même ses propres formations. Mais peut-être devrions-nous
nous questionner collectivement pour
savoir si, lorsqu'on accède à la magistrature, n'y aurait-il pas lieu d'avoir
ce genre de formation là.
Alors, je pense que la société est rendue là et
je pense que... lorsqu'on occupe un poste important comme celui de juge à la
Cour du Québec, où on est appelé à trancher des litiges, des dossiers qui sont
importants, notamment en matière criminelle, d'agression sexuelle, des cas
comme ça, en matière pénale, où on traitera de thérapies de conversion, je
pense que je pourrais retenir la proposition du député de LaFontaine et inciter
la Cour du Québec, en tout respect de son
indépendance, à travailler avec le ministère de la Justice ou avec des
ressources externes pour sensibiliser, ou pour que les formations... ou
que les magistrats aient de la formation en lien avec les personnes issues des
minorités sexuelles, leur réalité, mais aussi en matière d'agression sexuelle,
de violence sexuelle.
Mme Maccarone : Ça fait que,
dans le fond, c'est une recommandation.
M. Jolin-Barrette : Bien, dans
le cadre actuel, la magistrature, le pouvoir judiciaire, comme on dit, sont indépendants, ils bénéficient de l'indépendance
judiciaire, et c'est une indépendance qui est interprétée largement par
les tribunaux, par les cours, par la
magistrature. Et c'en est bien ici, dans notre état de droit, c'est bien
d'avoir une séparation des pouvoirs. Cela étant, il faut s'assurer que
l'ensemble des personnes qui sont appelées à rendre des décisions soient
pleinement sensibilisées à la réalité de la société actuelle.
Mme Maccarone : Juste une
question de même, Mme la Présidente, si on est avocat, on est assujetti à
40 heures, je pense, de formation professionnelle, ce n'est pas la même
chose pour les juges? On ne peut pas, mettons, l'écrire quelque part que... Il
rit, je ne sais pas si c'est... Ce n'est pas banal, là...
M. Jolin-Barrette : Non, non,
non...
Mme Maccarone : ...vraiment
parce que je ne comprends pas, parce qu'il y a quand même une formation
professionnelle qui est suivie par de tels ordres, alors ce n'est pas la même
chose pour les juges?
M. Jolin-Barrette : Je tiens à
rassurer la députée de Westmount—Saint-Louis,
aucunement ça ne m'amuse, sa question, et je
la prends extrêmement au sérieux, très, très, très au sérieux. Alors, c'est le Conseil de la
magistrature qui détermine les formations pour les
magistrats, c'est eux qui font de la formation continue, c'est eux qui sont
outillés et qui dispensent les formations. Donc, ça relève du pouvoir
judiciaire de faire ça.
Mais ce qui est soulevé par la députée de Westmount—Saint-Louis
et par le député de LaFontaine, ce sont des points extrêmement pertinents, et,
nos institutions, qu'elles soient au niveau du pouvoir politique, au niveau de
l'exécutif, au niveau du législatif, au niveau du judiciaire, c'est important
que tous soient sur la même page et qu'ils aient les formations sur les,
comment je pourrais dire... les derniers développements et la nouvelle réalité,
la réalité des gens et des victimes de ce genre de thérapie là, pour bien
comprendre cette réalité.
À l'Assemblée nationale, avant, il n'y avait pas
de formation sur le harcèlement, il y a une formation sur le harcèlement depuis
trois ans. On s'est engagés, collectivement, ensemble, à avoir une
formation, la semaine dernière ou il y a
deux semaines, avec une motion du député de... le nouveau ministre
des Affaires autochtones, sur les réalités autochtones. Alors, tout
le monde s'actualise, si je peux dire, alors la magistrature aussi, et je
retiens la suggestion du député de LaFontaine pour également inclure, dans leur
formation, ce genre de formation.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Je pense qu'on va avancer sur des
formations. Est-ce qu'on peut revenir sur l'amendement?
M. Tanguay : Bien, je
pense qu'on est pas mal dans le contexte de 211. Juste... Puis je pense que le ministre
l'a effleuré puis... Une personne-ressource,
en tout cas, nous, comme législateur, puis le ministre
a raison, le souligne, moi, j'en connais beaucoup plus maintenant qu'il
y a deux mois, là, je veux dire, on... Et c'est un nouveau domaine où... en
matière civile, recours civiliste, recours en matière civile, là, 1457, 1458, il
y a des femmes et des hommes qui vont juger de condamner ou pas une personne
parce qu'elle aurait commis la faute de faire une thérapie de conversion.
Alors, il faut absolument, puis je salue l'ouverture du ministre également,
dans le contexte où on devra respecter, évidemment, l'indépendance
judiciaire... Puis, peut-être, une personne qui nous a fait cheminer beaucoup,
nommément Florence Ashley, qui est l'auteure des lignes qui se retrouvent dans
l'amendement de la collègue de Westmount—Saint-Louis, pourra, elle... cette
personne-là pourra participer d'une formation également, puis apporter son
expertise, je dirais. Je pense que c'est important de le souligner, puis
peut-être que le bureau de lutte pourra faire appel à Florence Ashley.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, je pense qu'on fait des avancées
intéressantes. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement pour
remplacer l'alinéa deux de l'article 1? Oui, Mme la députée de
Joliette.
Mme Hivon : Oui.
Bien, peut-être avant qu'on passe au vote, simplement dire que, de mon côté, je
reconnais la grande expertise, donc, de Florence Ashley puis je vois d'un bon
oeil l'idée qu'on la consulte peut-être plus en détail de la part du gouvernement, mais je lui avais justement posé la
question parce que je trouvais que le libellé de sa définition était
très, très, très exhaustif et qu'il s'inspirait d'une approche de la common
law, mais malheureusement, dans mon gros 2 min 30 s, on n'a pas
pu avoir un gros échange en profondeur sur la question. Puis je pense qu'il
faut être prudent à ne pas dénaturer notre droit civil avec des concepts
importés de la common law, qui s'imbriquent mal dans l'ensemble de notre corpus
législatif.
Donc, autant je suis d'accord avec le
raisonnement de ma collègue de Westmount—Saint-Louis, autant, pour le
traduire dans notre loi, je pense qu'il faut respecter un concept qu'on apprend
aussi dans nos cours de droit, qui est l'économie
générale du droit en droit civil, ce qui fait en sorte que le concept de faute
en lui-même, imaginez-vous donc, il n'est pas défini avec plein de
paragraphes dans notre Code civil, et pourtant, tout notre droit de la
responsabilité civile est basé là-dessus. Donc, il faut être conscients qu'on
travaille dans le cadre du droit civil, et je pense qu'on va travailler
ensemble pour améliorer au maximum la définition qui est dans le projet de loi,
mais en respectant notre univers, qui est celui du droit civil.
• (16 h 50) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Est-ce que j'ai d'autres
interventions? Alors, si je n'ai pas d'autre intervention, nous allons placer
aux voix l'amendement remplaçant le deuxième alinéa de l'article 1. Mme la
secrétaire.
La Secrétaire : Pour, contre,
abstention. Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis)?
Mme Maccarone : Pour.
La Secrétaire :
M. Tanguay (LaFontaine)?
M. Tanguay : Pour.
La
Secrétaire : Votre
par procuration, Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis) pour M. Kelley
(Jacques-Cartier)?
Mme Maccarone : Pour.
La Secrétaire :
M. Jolin-Barrette (Borduas)?
M. Jolin-Barrette :
Contre.
La Secrétaire :
Mme Picard (Soulanges)?
Mme Picard : Contre.
La Secrétaire :
Mme Guillemette (Roberval)?
Mme Guillemette : Contre.
La Secrétaire :
M. Lemieux (Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
La Secrétaire :
Mme Lachance (Bellechasse)?
Mme Lachance : Contre.
La Secrétaire :
M. Lévesque (Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) :
Contre.
La Secrétaire :
Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques)?
Mme Massé : Contre.
La Secrétaire :
Mme Hivon (Joliette)?
Mme Hivon :
Contre.
La Secrétaire :
Mme Lecours (Les Plaines)?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Abstention. L'amendement introduisant... non, là, ça,
c'est... L'amendement remplaçant l'alinéa deux de l'article 1 est
rejeté. Nous revenons donc à l'article 1. Est-ce que j'ai d'autres
commentaires sur l'article 1? Mme la députée Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé :
Oui. Mme la Présidente, j'aimerais amener... apporter, pardon, un amendement,
qui se lirait ainsi...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Est-ce que l'amendement est déposé sur Greffier pendant
qu'on se parle? Ça va se faire pendant qu'on se parle. Allez-y, madame.
Mme Massé : Merci beaucoup. Ça
va me demander de la collaboration.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je vais juste suspendre deux secondes, deux secondes.
Je suspends.
(Suspension de la séance à 16 h 51)
(Reprise à 17 h 04)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. La commission reprend ses travaux. Nous en étions
donc... nous avons... Nous sommes revenus à l'article 1. Et, Mme la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques,
vous aviez une intervention.
Mme Massé : Oui. Merci, Mme la
Présidente. En fait, effectivement, en revenant à l'article 1, on retourne
donc à... appelons ça ce qui est la définition et ce qui en est exclu.
Je pense qu'un des éléments importants dans les
rencontres que nous avons faites, c'est de nous rendre compte que le projet de
loi... Il fallait faire attention pour faire en sorte que ce qui est dans le
projet de loi ne vienne pas, disons, avoir des impacts négatifs pour d'autres
personnes. Et, bien sûr, vous m'en avez souvent entendu parler, je parle
notamment des personnes intersexuées.
Alors, je suis contente
qu'on arrive dans le premier article, dans lequel on va pouvoir effectivement
prendre soin de ne pas embêter plus qu'elles ne le sont déjà ces personnes-là.
Et donc je ne ferai pas d'amendement à cette étape-ci, je vais laisser ma
collègue déposer l'amendement qu'elle veut déposer. Mais je tiens à dire que
l'important pour moi, entre autres, dans cet article-là,
ça va être de s'assurer que les personnes intersexes ne voient pas des impacts
négatifs de cette loi-là.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci, Mme la députée. Je comprends donc que
la parole... Je vais donc céder la parole à la députée de Sainte-Marie...
Mme
Maccarone : Westmount—Saint-Louis.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Westmount—Saint-Louis, je m'excuse. Je pense
que vous avez un amendement à déposer. Allez-y.
Mme
Maccarone : Oui. Alors, l'amendement se lit comme ci : Remplacer
le deuxième alinéa de l'article 1 par ce qui suit :
«On
entend par "pratique de conversion" ou "thérapie de
conversion" toute pratique [ou] traitement ou service visant à
amener une personne à modifier, réprimer ou décourager son orientation
sexuelle, son identité de genre ou son
expression de genre, ou à réprimer ou réduire une attraction ou un comportement
sexuel non hétérosexuel. Toutefois, tout traitement médical ou
intervention chirurgicale découlant d'une démarche autonome d'affirmation de
genre, ainsi que l'aide nécessaire à cette fin sont exclus. Il est également
exclu d'aider une personne, dans le cadre d'un processus de non-jugement, à
accepter son orientation sexuelle, son identité ou son expression de genre.»
Je m'explique, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Allez-y.
Mme
Maccarone : Alors, ceci est une modification, un amendement de
l'article qui a été écrit par le ministre dans le 70. Ça représente une
réflexion des amendements qui nous ont été proposés non seulement par la
communauté intersexe, tel que mentionné par ma collègue, mais aussi par le chef
de recherche Kristopher Wells. Et c'est une
adaptation qui, je pense, j'ose croire, serait acceptable pour le ministre.
Parce qu'à l'intérieur de cet amendement on introduit aussi l'idée de
pratique de conversion, qu'on a dit qu'on pense que ce serait une bonne chose
d'aborder à l'intérieur du projet de loi, on parle de «traitement» et
«service». On parle... on vise ce que le ministre avait déjà écrit lui-même dans le projet de loi, mais on
rajoute... on change un peu la terminologie pour s'assurer que ça reflète ce
que la communauté cherche, entre autres à s'assurer que «réprimer ou
décourager», c'est quelque chose qui est reflété.
Alors, j'espère que
ce sera adopté, évidemment, car je pense que ça rejoint les critères que nous
avons déjà débattus lors du premier amendement que j'avais abordé. Je pense que
c'est assez large et assez complet pour rejoindre les critères que le ministre
avait déjà faits, un exposé, lors du débat que nous avons fait, ça fait
peut-être 30 ou 60 minutes. Et, comme j'ai dit, je trouve qu'aussi c'est
une belle réflexion de ce que la communauté nous a demandé de faire, ainsi que
les experts, que ce soit légal ou de la communauté.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Alors, on ajoute dans l'amendement de la députée
de Westmount—Saint-Louis :
«Toute pratique — bien, en fait, "toute pratique"
est déjà là — tout
traitement ou service visant à amener une
personne à modifier, réprimer ou décourager son
orientation sexuelle — donc,
on vient rajouter "réprimer ou décourager" — son
identité de genre [...] son expression de genre, ou à réprimer ou réduire une
attraction ou un comportement sexuel non
hétérosexuel. Toutefois, tout traitement médical ou intervention chirurgicale découlant d'une démarche autonome d'affirmation de
genre, ainsi que l'aide nécessaire à cette fin sont exclus.»
En fait, on n'est pas
loin de ce que j'ai proposé, mais on vient encore une fois rajouter des
qualificatifs, contrairement à ce que nous avons à l'article 1. Donc, la
députée de Westmount—Saint-Louis
veut aller d'une façon plus large, c'est bien ce que j'entends?
• (17 h 10) •
Mme
Maccarone : C'est légèrement plus large. Dans le fond, les recommandations
que je propose, c'étaient celles qui, je crois, aussi, étaient envoyées au
bureau du ministre, de Dr Kristopher Wells, comme une modification qui
rejoint aussi les définitions qui ont été faites dans les autres provinces. Ça
élargit un peu.
Mais, les exclusions,
je pense qu'elles sont importantes, parce que, oui, on vise surtout les personnes
intersexes, mais on vise aussi les personnes...
comme on a entendu de la présentation d'Henri-June Pilote, d'AlterHéros,
de s'assurer que les personnes qui cherchent à avoir un accompagnement... Parce
qu'on ne veut pas faire le choix entre notre identité de genre ou notre orientation
sexuelle et la foi. On se comprend qu'on ne devrait pas faire ce choix-là. Mais
ça n'exclut pas qu'il y ait des personnes qui aimeraient avoir un accompagnement.
Puis je pense que les
mots de «non-jugement», c'est important, parce que, dans le fond, c'est ça qui
est visé, parce qu'on veut s'assurer qu'il y a... Encore une fois, le but,
c'est de boucher des trous, le but, c'est de s'assurer qu'on ne peut pas faire
par la porte en arrière ce qu'on ne peut pas faire par la porte en avant.
Alors, d'avoir une définition qui est légèrement plus claire, je pense qu'on
vise à protéger plus de personnes et s'assurer qu'on a moins de personnes qui
vont pouvoir essayer d'offrir une thérapie de conversion ou une pratique de
conversion. Puis aussi, la communauté, surtout quand on parle peut-être des
mineurs, des personnes... ou des majeurs, mais des personnes qui veulent avoir
un accompagnement, des personnes qui cherchent à avoir de l'aide pour mieux
comprendre leur orientation sexuelle, leur
identité de genre, leur expression de genre, je pense que c'est très important
que ça soit plus clair.
Je pense aussi que c'est
une façon, de la façon que c'est écrit, que les parents se voient aussi à
l'intérieur de ceci. On a tous reçu des lettres des parents qui ont des
craintes par rapport à la différence entre une affirmation puis une attente
vigilante, puis c'est sur la «coercion». Alors, c'est important que ça aussi...
Je pense que, parce que c'est assez large, c'est englobé dans cette définition
et je rejoins ma collègue en disant que je suis très contente de s'assurer que
la communauté intersexe, eux aussi, se voie dans un tel amendement.
Je comprends que c'est complexe aussi. Tu sais,
je sais tellement que c'est important, la définition, je suis contente de voir
que tout le monde sont en train de lire, puis de revoir, puis est-ce que ça
rejoint. Je suis prête à entendre s'il y a une façon de «perfecter»,
d'améliorer l'amendement, s'il faut, pour rejoindre une préoccupation,
peut-être que le ministre aimerait partager, ou une crainte. Mais c'est sûr, je
pense, qu'on est rendus très proche, comme lui-même a dit, ce n'est pas trop
loin de la définition, mais c'est un mi-chemin. Dans le fond, c'est un
compromis, parce qu'honnêtement ce que j'aurais voulu faire entre-temps,
c'était de déposer la définition que j'avais écrite dans le projet de loi
n° 599. Mais, pour sauver du temps, parce qu'on a déjà fait le débat sur
le premier amendement que j'ai déposé, je ne voulais pas refaire l'exercice.
Alors, j'essaie d'acheminer, le plus rapidement possible aussi, en trouvant un
mi-chemin.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : J'aurais peut-être
juste une question sur la dernière phrase, là, qui est proposée par la députée
de Westmount—Saint-Louis,
là. «Il est également exclu d'aider une personne, dans le cadre d'un processus
de non-jugement, à accepter son orientation sexuelle, son identité...»
Qu'est-ce que vous voulez dire par «dans le cadre d'un processus de
non-jugement, à accepter son orientation sexuelle»?
Mme
Maccarone : Je donnerais un
exemple. Si, mettons, un enfant, un adulte aimerait avoir un accompagnement
par un psychologue, par un sexologue, par un professionnel, par un ministre de
l'Église, «a pastor», oui, religieux, cette personne peut faire un accompagnement
sans que ça se fait dans un jugement, en disant que, «oui, je vous accompagne
mais sans jugement», en disant que «je ne m'impose pas», en disant qu'un accompagnement
où je vais vous guider pour respecter le genre dont vous êtes né avec,
biologique... ou de vous convaincre de ne pas faire un changement ou une
transition de genre, par exemple. C'est ça qu'on veut dire par «non-jugement».
Un accompagnement, c'est très important, parce
qu'il y a plein de personnes... On en a parlé, surtout, pour la communauté, on
a des difficultés. C'est de la pauvreté, c'est beaucoup de difficultés de santé
mentale, surtout des victimes qui ont subi de la thérapie ou une pratique de
conversion. Alors, c'est important qu'eux, ils voient qu'ils peuvent aller
avoir une consultation, un accompagnement, puis c'est ça qu'on veut dire par
«non-jugement». On ne veut pas, assurément, se donner la liberté, à une
professionnelle ou n'importe qui, à accompagner quelqu'un avec un jugement déjà
dans la tête : Moi, là, c'est sûr, je ne vais pas accepter qui vous êtes
puis je vais essayer de vous «coercer» à ne pas accepter la personne que vous
aimeriez être.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Donc là,
juste pour bien comprendre, vous dites : La personne qui accompagne un
individu dans son changement...
Mme
Maccarone : Pas changement, pas changement nécessairement. À accepter.
Pas nécessairement changement.
M. Jolin-Barrette : Donc, est-ce que
vous me parlez... Supposons que je suis hétérosexuel, là, et puis que je m'en
vais voir quelqu'un pour discuter, là, de mon orientation sexuelle, vous
dites : La personne que je vais voir, elle, il faut qu'elle fasse preuve
de non-jugement. C'est ça?
Mme Maccarone : On donne la liberté
aux gens de faire une consultation, oui, de cette façon-là. Comme par exemple, on sait... Comme par exemple, si on a eu
des personnes... des interventions vis-à-vis la spiritualité, de
s'assurer que cela, c'est acceptable. C'est pour essayer de rejoindre la
personne en disant que ce qui est fait dans un esprit de non-jugement serait
accepté. Mais, si c'est fait dans le jugement, évidemment, ce serait
inacceptable. Alors, c'est une façon
d'élargir un peu, de s'assurer que les gens, ils comprennent qu'ils peuvent
consulter puis avoir un accompagnement.
M. Jolin-Barrette : O.K. Mais
prenons, là, quelqu'un qui n'est pas membre d'un ordre professionnel. Parce que
les membres d'un ordre professionnel sont là pour protéger le public, puis eux,
ils doivent... ils ont un code d'éthique à respecter, tout ça, puis on va le
voir un petit peu plus loin, bien, enfin, le Code des professions, puis ils ne
peuvent pas faire de thérapie de conversion.
Là, vous, dans l'exclusion que vous incluez, que
la députée de Westmount—Saint-Louis
inclut, elle nous dit : Bien, c'est possible d'aider quelqu'un, de
l'écouter, supposons, qui se questionne sur son orientation sexuelle, son
identité de genre ou son expression de genre, mais il faut que la personne qui
l'écoute, tout ça, fasse... soit neutre, dans le fond, soit, si je pourrais
dire, impartiale et qu'elle l'accompagne en toute objectivité. Donc, exemple,
si j'étais un ministre du culte de x, y religion, là, bien là, comment je
pourrais dire, je repousserais la doctrine de ma confession religieuse pour
faire une écoute, supposons, compatissante, sans référer aux préceptes
religieux de la foi que j'enseigne ou que je diffuse. C'est ça?
Mme Maccarone :
Exactement, oui.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Mme Maccarone : Surtout pour les
personnes trans, je pense que ça va être hyperimportant pour elles. Une
transition, ce n'est pas facile. Alors, c'est important qu'elles sachent, ces
personnes, qu'elles peuvent avoir un accompagnement.
M. Jolin-Barrette : O.K. J'ai une
sous-question, là. Le non-jugement, là, c'est assez difficile à évaluer ou à
mettre en place dans un article, supposons, parce qu'en fait tout le monde a
des préjugés. Vous, moi, la députée de Westmount—Saint-Louis, le député de
LaFontaine avons un préjugé, pas au sens négatif du terme, mais tous les
individus sont construits de ça, de leur parcours, de leur récit de vie, et
tout ça. Donc, d'où on vient, qui on est, qu'est-ce qu'on est, c'est parce
qu'on a vécu des situations, puis comment on est construits, on a des préjugés,
pas nécessairement négativement, là. Donc, il faut juste être conscient
de : comment on réfléchit, bien, c'est à cause de notre vécu.
Si je fais le parallèle avec nous, ce qu'on a à
l'alinéa un, quand on dit : «Est [...] exclu l'accompagnement d'une
personne dans le cadre de sa démarche d'acceptation de son orientation
sexuelle, de son identité de genre ou de son expression de genre», en quoi ce
qui est prévu à l'alinéa deux de l'article 1 ne vous satisfait pas,
et qui amène la députée de Westmount—Saint-Louis à mettre le dernier bout de sa
proposition d'amendement? Parce que, dans le fond, l'accompagnement va être là,
là. La personne, là, qui veut discuter de son orientation sexuelle, qui est en
questionnement va pouvoir le faire, que ce soit avec un professionnel, que ça
soit avec un ami, un collègue ou un ministre du culte de son église, là.
• (17 h 20) •
Mme Maccarone : D'abord, est-ce que
ce serait plus souhaitable qu'on utilise un mot comme «neutre»? Ça, c'étaient
les mots qui ont été proposés, dans le fond, par les experts. Alors, est-ce que
c'est mieux à l'intérieur? Parce que c'est sûr, comme j'ai dit d'emblée, je ne
suis pas avocate ou légiste. Est-ce que ce serait mieux d'utiliser un autre
terme? La crainte, si ce n'est pas clair et identifié, c'est qu'on ouvre la porte
de faire ce que le ministre vient de dire comme exposé, un ministre du culte
pourrait faire l'inverse de ce que nous voulions faire avec un accompagnement. Parce
que l'accompagnement pour les personnes en transition ou les personnes qui se
questionnent, c'est très important. Alors, on ne veut pas qu'elles pensent
qu'on ne peut plus faire ceci. Comme, des personnes qui veulent consulter
l'ordre des sexologues ou un psychologue, on veut qu'elles savent que c'est
acceptable, mais d'une façon qui est faite dans un non-jugement.
Mais est-ce
que c'est mieux qu'on utilise un mot neutre? Je serais ouverte à ça. Peut-être,
c'est la terminologie, juste le mot à changer.
M. Jolin-Barrette : Mais, en fait,
tu sais, dans l'article, on prévoit que... qu'est-ce qu'une thérapie de
conversion. On part de ce que la thérapie de conversion... ce qu'elle est, puis
ensuite on vient définir trois exceptions de ce qu'elle n'est pas. Puis je
pense que, dans ce qu'on indique, «est également exclu l'accompagnement d'une
personne dans le cadre de sa démarche d'acceptation de son orientation sexuelle,
de son identité de genre», ça couvre déjà la personne qui... Dans le fond, les
gens peuvent se confier à qui ils veulent, mais ce qu'on dit, c'est qu'on ne
veut pas que le ministre du culte, si on prend cet exemple-là, fasse une
thérapie, fasse une pratique de conversion puis dise : Non, non, tu n'es
pas hétérosexuel, tu es homosexuel, ou : Non, non, tu n'es pas homosexuel,
tu es hétérosexuel. Dans le fond, le comportement, il est réprimé. Par contre,
le ministre du culte qui dirait : Bien, je t'écoute par rapport à ton
questionnement, lui-même a ses enjeux, ses croyances personnelles, tout ça,
mais c'est propre à chacune personne d'écouter les gens comme ils le sont, là.
Puis je pense qu'on avait un témoignage aussi de dire : Bien, écoutez, à l'intérieur des communautés des
congrégations religieuses, il y a des gens qui sont superouverts, là.
Ça, comment je pourrais...
Si on vient qualifier la personne, c'est parce
qu'on ne sera pas capable de dire qu'elle est neutre ou elle n'est pas neutre.
Je vous donne l'exemple, là : quelqu'un qui se confierait, là, à une
personne, puis qui n'est pas neutre, qui a des opinions, puis qu'elle
considère... n'est pas dans le même schème de pensée que le projet de loi qu'on
dépose, O.K.? Mais cette personne-là, si elle ne manifeste pas ses préjugés,
ses opinions puis qu'elle ne tente pas de convertir la personne, elle peut être
aussi d'une bonne écoute, puis avoir une écoute compatissante, puis aider la personne
qui est en questionnement sans lui imposer son jugement aussi. Donc,
voyez-vous, l'aspect de non-jugement, il est difficile à intégrer sur cet
élément-là.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mme la députée.
Mme Maccarone : Oui. Tout à fait,
j'entends le ministre. Puis, en anglais, je dirais :
«It's not a hill I'm going to die on.» Ce qui est important pour moi,
c'est d'avoir le plus de clarté possible. Déjà, je trouve qu'on fait des avancées à l'intérieur de l'article.
Alors, est-ce que le ministre a une proposition à faire qui pourrait respecter
cette idée?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Je vous reviens
dans une seconde, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Est-ce que vous voulez qu'on suspende?
M. Jolin-Barrette : Non, ça va.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Non, on y va.
M. Jolin-Barrette : C'est ça, on,
comment je... Avec le libellé, tel qu'il est proposé, on se retrouve à travers
certaines... en contradiction avec certaines libertés fondamentales propres à
chacun des individus, aussi, qui pourrait avoir des impacts avec la charte
aussi. Donc, le fait de porter le non-jugement... En fait, ce qu'on veut
attraper, ce qu'on veut viser avec la loi, c'est le comportement de la
personne, le fait de dispenser une thérapie de conversion puis le fait de
protéger la personne. Mais on ne peut pas agir sur ce qu'elle pense, la
personne elle-même, par voie législative. On peut faire de la sensibilisation
pour changer la promotion, pour changer les croyances, changer les
comportements, démontrer de l'ouverture, sensibiliser à la réalité des
personnes issues de minorités sexuelles, mais on ne peut pas, dans la loi,
venir dire : Vous allez penser ça quand quelqu'un va se confier à vous sur
cet élément-là. Mais par contre, où la loi fait en sorte d'agir, c'est que, si
la personne à qui on se confie a une pratique qui vise la conversion de la
personne vers une orientation hétérosexuelle, si elle est homosexuelle, ou vice
versa, là, à ce moment-là, on atteint l'objectif recherché.
Mme Maccarone : Alors, est-ce que le
ministre... est-ce que l'amendement serait acceptable pour le ministre si on
enlève le mot «non-jugement»? Est-ce que les autres éléments qui ont été
ajoutés sont acceptables?
M. Jolin-Barrette : Bien, dans les
autres ajouts, vous rajoutez?
Mme Maccarone : «Pratique de conversion»,
«réprimer ou réduire»...
M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez,
moi, je serais ouvert sur le «traitement ou le service». Sur la question de «modifier, réprimer ou décourager», je pense qu'on
a un libellé assez large, là, avec «changer son orientation sexuelle», là. Je pense que le fait de dire
«changer», il est déjà... il couvre déjà assez largement ces trois termes-là.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Sur précisément cet aspect-là, juste pour la
réflexion du ministre... Puis je suis d'accord avec lui, dans
sa mouture, c'est «changer». Là, on met «modifier». «Changer» ou «modifier», je
pense qu'on peut vivre avec ça, c'est du un
pour un, «changer», «modifier», c'est du un pour un. Le ministre,
dans son projet de loi, c'est «changer», nous on en ajoute trois.
Le premier, «modifier», je pense que, que ce soit «modifier» ou «changer»...
Mais, l'autre, par contre... je veux juste porter à son attention :
«réprimer» n'est pas changer ou modifier. «Réprimer», dans le langage, c'est «limiter le développement». Et
«décourager», c'est «ôter l'envie de». Puis on peut voir que ce n'est pas
modifier puis changer, là.
Alors,
j'invite le ministre à peut-être considérer, s'il veut garder «changer»... S'il ne
veut pas changer «changer», on
peut-tu ajouter «réprimer» et «décourager»? Parce qu'en français — c'est
une langue riche — ce
n'est pas la même chose. «Réprimer»,
je me répète, puis je termine là-dessus, «réprimer», c'est : limiter le développement, vouloir limiter le développement. Et «décourager», c'est «vouloir ôter l'envie
de». C'est trois mots, avec «changer», «réprimer», «décourager»,
qui se compléteraient bien, là.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le député. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : On va suspendre quelques
instants, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 29)
(Reprise à 17 h 56)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : La commission reprend ses travaux. Avant de continuer, je
vais vous demander le consentement pour poursuivre un peu au-delà de
18 heures, si tel est requis, si c'est requis. Consentement. Merci. Alors,
Mme la députée de Westmount—Saint-Louis,
oui.
Mme Maccarone : Étant donné que nous
avons beaucoup de discussions hors micro, puis on essaie de trouver un
mi-chemin pour rejoindre ce que tous les collègues aimeraient... souhaitaient
avoir, et que... c'est sûr, tout le monde veut partager leur point de vue, puis
on est tous, je pense, en consensus pour les changements que tous les collègues
de l'opposition aimeraient faire, je propose que je suspende mon amendement
pour laisser la place à ma collègue d'avoir la possibilité de... Dans le fond,
c'est un libellé qui est déjà écrit dans l'amendement que j'avais déjà déposé. Mais, pour lui donner la possibilité de déposer son amendement,
pour accélérer le processus à l'intérieur de l'article 1, je vais
suspendre mon amendement.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Nous allons donc suspendre l'amendement remplaçant le deuxième alinéa de l'article 1. Je cède
maintenant la parole à la députée de Westmount... de Sainte-Marie—Saint-Jacques, je m'excuse. Allez-y.
Mme Massé : Merci, Mme la
Présidente. Merci à tout le monde d'essayer de trouver le chemin, comme on dit.
Alors, mon amendement se lit ainsi, c'est-à-dire : Remplacer dans le
deuxième alinéa de l'article 1 du projet de loi, «destiné à changer le
sexe» par «découlant de la démarche autonome d'affirmation de genre».
Et ça se
lirait donc ainsi, pour la compréhension : «On entend par "thérapie
de conversion" — qu'on va bonifier avec le temps,
mais... — toute
pratique ayant pour but d'amener une personne à changer son orientation
sexuelle, son identité de genre [...] son expression de genre. Est cependant
exclu tout traitement médical ou intervention chirurgicale découlant de la
démarche autonome d'affirmation de genre d'une personne ainsi que
l'accompagnement requis à cette fin», et ainsi de suite jusqu'à la fin de
l'article... de l'alinéa, pardon.
Écoutez, si vous me permettez, en quelques mots,
de défendre... mais je suis consciente qu'on n'a rien à défendre, on est tous
sur la même longueur d'onde, c'est-à-dire qu'il faut absolument, dans les
exclusions que nous allons adopter dans ce projet de loi là, qu'on trouve les
mots. Et je pense que la formulation qui nous a été proposée par Janik Bastien
Charlebois, qui est la spécialiste canadienne au niveau des personnes intersexes,
en accord avec Florence Ashley, qui est
aussi une personne qui a une expertise en matière de thérapies de conversion...
les deux s'entendent pour dire que d'ajouter... de modifier, tel que je
viens de le présenter, le petit bout de phrase, bien, ça va faire en sorte de
ne pas créer de mauvaises situations pour l'avenir, pour les personnes
intersexuées. Et je sais que tous mes collègues se reconnaissent là-dedans.
D'ailleurs, certaines l'ont déjà intégré dans leurs propositions d'amendement. Et donc, voilà, je n'ai pas plus que ça à dire,
parce que je pense qu'on est tous du même côté de l'histoire par rapport
à ça.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée. Est-ce que j'ai des interventions
sur l'amendement? M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme la
Présidente, je pense que l'amendement de la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques
est un amendement qui permettra de répondre aux droits des personnes intersexes
et qui répond à leurs aspirations également. Alors, j'accueille positivement le
dépôt de l'amendement.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Est-ce que j'ai d'autres interventions?
Oui, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Maccarone : Oui...
• (18 heures) •
Mme Massé : ...bien, je suis très
heureuse que vous accueilliez... bien, je le savais, on l'accueillait tous.
Ceci étant dit, lors de nos échanges, on a
pris conscience, M. le ministre, que, concernant justement les droits
fondamentaux des personnes intersexuées, personnes intersexes, il y avait tout
là un autre chantier qu'il fallait entamer pour s'assurer que l'ensemble de
leurs droits soient respectés. Et je vous ai entendu le dire, mais je voudrais
m'assurer... et je voudrais surtout que ces personnes-là soient rassurées à
l'effet que vous avez bien compris leur message, comme quoi ce qu'on vient faire dans le projet de loi n° 70, c'est de s'assurer qu'il n'y ait pas de situation
que nous ne voulons pas puisse arriver mais que... pas parallèlement,
mais que vous envisagez sous peu prendre à bras-le-corps toute la question des
droits des personnes intersexes.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Mme la
Présidente, je pense que c'est un enjeu important, les droits des personnes
intersexes, auparavant on disait hermaphrodites, qui peuvent naître, au niveau
des parties génitales, avec une réalité qui est différente, Mme la Présidente.
Et c'est important de s'assurer que le gouvernement du Québec se penche sur ce
qu'elles vivent, ces personnes-là, et surtout s'assurer que, durant le processus...
au moment où un enfant naît, par la suite, il lui revient, à l'enfant, que sa
décision soit prise en considération dans toute cette démarche-là.
Or, c'est un chantier, effectivement, que je
crois qu'on devrait ouvrir là-dessus. Puis, comme je le disais à la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques,
c'est un dossier que j'envisage d'ouvrir pour s'assurer du droit... que le
droit des personnes intersexes soit respecté et surtout qu'on connaisse davantage
aussi leurs réalités, et l'application de la loi à leurs réalités, c'est important
qu'elle corresponde à leurs aspirations.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Sainte-Marie...
voyons, je m'excuse, là, c'est Westmount—Saint-Louis. Allez-y.
Mme Maccarone : On va amener des
pancartes pour demain.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Oui.
Mme
Maccarone : Oui. Bien, à mon tour de dire que je suis très contente de
pouvoir voter en faveur de l'amendement. Comme ma collègue a dit, ça faisait
partie aussi de ma réflexion puis la réflexion de ma formation politique, entre
autres, ça faisait partie de notre amendement. Puis, avec les interventions que
nous avons faites avec les experts, que ça soit Janik Bastien Charlebois ou
Florence Ashley, je trouve qu'on fait une belle avancée pour la communauté des
personnes intersexes.
Comme le ministre, il
dit, c'est une différence, mais ce n'est pas une maladie, il y a plein de personnes
qui vivent avec ça puis qui sont tout à fait à l'aise avec leur sexualité puis leurs différences. Alors, on devrait
le célébrer puis de s'assurer qu'évidemment on ne prend pas du recul en
ce que nous faisons ici, dans cette Chambre, en adoptant des articles ou une
loi qui va peut-être les marginaliser. Alors, je suis très contente de pouvoir
voter en faveur de ceci.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Et je
reconnais la députée de Joliette. C'est court, je le retiens, celui-là. La
parole est à vous.
Mme
Hivon : Merci, Mme la Présidente. Simplement pour dire que
nous nous réjouissons également de
cette avancée-là. Je pense que ça prouve qu'on est capables d'évoluer quand on
étudie un projet de loi puis qu'on est aussi à l'écoute des commentaires et des
présentations qui nous sont faites. Donc, c'est une belle avancée de
reconnaître, donc, en ce moment... et surtout de ne pas fermer la porte, pour
l'avenir, d'autres avancées qu'on pourrait faire pour les personnes
intersexuées.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Est-ce que
j'ai d'autres interventions? Alors, si je n'ai pas d'autre intervention, nous
allons placer aux voix l'amendement de la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques
pour remplacer l'alinéa deux de l'article 1... Non, ce n'est pas un
remplacement, c'est un ajout seulement, donc un amendement à l'alinéa deux
de l'article 1. Mme la secrétaire.
La Secrétaire :
Pour, contre, abstention. Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques)?
Mme Massé :
Pour.
La Secrétaire :
M. Jolin-Barrette (Borduas)?
M.
Jolin-Barrette : Pour.
La Secrétaire :
Mme IsaBelle (Huntingdon)?
Mme
IsaBelle : Pour.
La Secrétaire :
Mme Picard (Soulanges)?
Mme Picard :
Pour.
La Secrétaire :
Mme Guillemette (Roberval)?
Mme
Guillemette : Pour.
La Secrétaire :
M. Lemieux (Saint-Jean)?
M. Lemieux :
Pour.
La Secrétaire :
Mme Lachance (Bellechasse)?
Mme
Lachance : Pour.
La Secrétaire :
M. Lévesque (Chapleau)?
M. Lévesque
(Chapleau) : Pour.
La Secrétaire :
Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis)?
Mme
Maccarone : Pour.
La Secrétaire :
M. Tanguay (LaFontaine)?
M. Tanguay :
Pour.
La Secrétaire : Vote par procuration. Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis) pour M. Kelley
(Jacques-Cartier)?
Mme Maccarone : Pour.
La Secrétaire : Mme Hivon
(Joliette)?
Mme
Hivon : Pour.
La Secrétaire : Mme Lecours
(Les Plaines)?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Abstention. L'amendement est donc adopté.
Alors, je vous remercie tous de votre précieuse collaboration.
Alors, compte tenu de l'heure, nous allons ajourner notre séance jusqu'à
demain, vendredi le 13 novembre, à 9 h 30, où nous allons
poursuivre notre mandat. Merci, tout le monde.
(Fin de la séance à 18 h 05)