(Douze
heures quinze minutes)
La Présidente (Mme
Chassé) : Bonjour, tout le monde.
Une voix :
Bonjour, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Chassé) : Bonjour, M. le Curateur.
Une voix :
Vous allez bien?
La Présidente (Mme
Chassé) : Très bien. Vous?
Une voix :
Oui.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Fantastique! C'est ma façon de dire : À l'ordre! Je commence par :
Bonjour, tout le monde.
Une voix :
...
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci. J'accueille le soleil. J'ai réussi, quand même, hein? Je vous
propage plein de soleil.
Et je constate le
quorum et déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens
ouverte. Je vous souhaite la bienvenue. Et
je vous demande à tous de bien vouloir éteindre la sonnerie ou la fonction de
vibration de son appareil électronique ou de ses appareils
électroniques.
La
commission est réunie aujourd'hui afin de poursuivre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 18 modifiant le Code civil, le Code de procédure civile,
la Loi sur le curateur public et diverses dispositions en matière de protection
des personnes.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La Secrétaire :
Oui, Mme la Présidente. M. Lévesque (Chauveau) est remplacé par
Mme Picard (Soulanges); Mme Robitaille
(Bourassa-Sauvé), par Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce); Mme Dorion
(Taschereau), par Mme Labrie (Sherbrooke); M. LeBel (Rimouski),
par Mme Hivon (Joliette).
Auditions (suite)
La
Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Nous avons commencé à l'heure. Et,
ce matin, nous entendrons tout d'abord
le Réseau pour un Québec Famille. Je vous souhaite la bienvenue. Et je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. À
une minute de la fin, je vais vous faire un signe de la main ou un signe vocal
pour vous inviter à conclure. Débutez tout
d'abord en vous présentant, puis, ensuite, commencez tout de suite votre
exposé. Merci.
Réseau pour un Québec Famille
M. Villeneuve
(Raymond) : Oui. Alors, bonjour. Merci de l'invitation, merci de nous
entendre. Mon nom est Raymond Villeneuve, directeur général du Regroupement pour la
valorisation de la paternité, mais aujourd'hui président du Réseau pour
un Québec Famille.
Le
Réseau pour un Québec Famille, c'est un réseau de réseaux. Nos membres sont
tous des réseaux nationaux du secteur famille. Donc, dans nos membres,
il y a des gens du secteur communautaire, il y a des gens du milieu syndical, il y a des gens du milieu municipal, donc toute une
série d'acteurs qui ont tous à coeur le bien-être des familles. Donc, en
toute humilité, nous ne sommes pas des experts de la question du Curateur
public, on a un point de vue plus transversal, peut-être un petit pas de recul, alors, en toute humilité, nous allons
vous transmettre nos considérations, là, sur le projet de loi. Marie va
aller sur le détail après.
Ce
que je peux dire d'entrée de jeu, c'est que, dans les mesures proposées, on
voit quand même d'un très bon oeil toute l'idée de simplifier la loi, de rendre
ça plus simple, plus efficace, plus performant, aussi de s'adapter aux réalités
des personnes en contexte de vulnérabilité,
de tenir compte des différentes situations, qu'il n'y ait pas un modèle unique.
Tout ça au niveau de l'approche, au niveau de l'orientation, ça nous semble
bien, bien, bien intéressant.
Alors,
c'était mon petit préambule très humble. Alors, je vais passer la parole à
Marie, là, pour les considérations plus spécifiques.
Mme
Rhéaume (Marie) : Comme Raymond vous a dit, on est donc un réseau de
réseaux nationaux qui, eux, regroupent des
centaines d'organisations partout à travers le Québec.
Et, comme partie intégrante de sa mission, le Réseau pour un Québec Famille s'est donné, en
octobre 2015, l'objectif de devenir la voix des familles québécoises en
faveur du développement de politiques publiques adaptées à l'ensemble des
réalités des familles. Plus concrètement, nous intervenons auprès des décideurs publics de la société civile sur les enjeux, les dossiers, les
lois qui ont un impact direct sur la vie et le quotidien des familles. On est bien sûr préoccupés par le soutien aux
personnes fragilisées et en situation de vulnérabilité, que ces
personnes-là soient mineures ou majeures.
Je
commencerais tout de suite par le nouveau nom. Le projet de loi propose de
changer le nom du curateur pour celui
de Directeur de la protection des personnes vulnérables. Dans le contexte,
cette nouvelle dénomination-là nous semble mieux correspondre à la réalité actuelle. Pour la plupart des gens,
curateur, ça a comme un... bien, ça semble un nom de l'ancien temps,
hein? On peut le dire.
Des voix :
...
• (12 h 20) •
Mme
Rhéaume (Marie) : Bien,
c'est comme un nom... Il faut chercher pour voir que ça a rapport avec les
soins, puis comprendre ce que c'est,
mais je pense que, pour le commun des mortels, tu sais... Puis, en plus, c'est
passé de curatelle à curateur. C'est
comme... On sent, là, que ce n'est pas des réalités les plus intéressantes. Il
reste que, par rapport à toute la
question des personnes vulnérables,
c'est un concept qui n'est pas très
bien accueilli en général
par le monde associatif. Pour nous,
parler d'une personne en situation de vulnérabilité correspond mieux à la réalité
actuelle. Parler d'une personne vulnérable, c'est comme lui mettre une grosse
étiquette, puis, à partir du moment où elle a cette étiquette-là, ça devient difficile de s'en sortir. Donc, il nous
apparaîtrait, là, que parler de personnes qui ont des besoins de protection,
mais des personnes en situation de vulnérabilité, ça semblerait
actualiser encore plus la dénomination.
En mai 2018, le
réseau a fait un grand sommet qui... Ça a été un moment assez unique où on a
réuni plus de 350 intervenants de
toutes les régions du Québec qui sont venus discuter avec nous des priorités
qu'il devrait y avoir au niveau de la vie des familles. Il y a deux
éléments qui sont sortis, il y en a un qui nous concerne aujourd'hui. Moi, je
dis tout le temps : C'est un peu les deux cailloux qu'il y a dans les
souliers des familles. Le premier, c'est l'accès aux services, le deuxième, bien, c'est conciliation famille-travail.
Donc, ça, c'est vraiment les deux irritants majeurs dans la vie des
familles.
Du
côté de l'accès aux services, les familles réalisent rapidement,
quand elles rencontrent des difficultés, que les programmes puis les mesures élaborés
par les gouvernements ou les différentes instances sont très souvent
complexes. L'organisation en silos correspond mal au vécu des familles,
qui, elles, composent régulièrement avec un cumul de réalités susceptibles de transformer chaque parcours de
recherche de soutien en dédale. Cette combinaison-là contribue à un des écueils, là, vraiment qui affecte les
familles au niveau de l'accessibilité des services. Donc, tout projet de loi qui contribue à simplifier les pratiques est bienvenu.
La
réforme de la Loi sur le urateur public va en ce sens, et le réseau salue
cet objectif du projet
de loi. En passant de trois
régimes de protection à un seul, la tutelle personnalisée, il sera plus facile
d'adapter la protection offerte à une personne
en fonction de ses limitations et de ses besoins. Le réseau est
en accord aussi avec la prémisse fondamentale du projet de loi, qui veut
permettre à une personne qui vit des limitations de conserver ses droits civils
et de les exercer si possible. Dans la
réalité, tout n'est pas tout noir ou tout blanc. Il nous semble important
qu'une personne ne perde pas tous ses
droits et qu'elle puisse garder un contrôle sur sa vie en fonction de son état réel, état qui, disons-le, peut aussi varier au fil du
temps.
Le projet de loi
propose un régime de protection unique. Nous comprenons que la tutelle personnalisée
devrait permettre à chaque individu
d'obtenir le niveau de protection qui correspond le mieux à son état. Pour
nous, c'est essentiel. Cette personnalisation va être déterminée par un
tribunal, qui devra tenir compte des capacités de la personne, avec l'objectif
de lui permettre le plus possible de poser seule certains actes. Actuellement,
les délais des tribunaux pour les premières
décisions semblent être d'au moins un an. Du point de vue de la justice, un
an constitue une période plutôt courte, mais, du point de vue de la famille qui vit au quotidien les difficultés
générées par la situation d'une personne pour qui une tutelle est requise, c'est long, très long. Le
tribunal devra, comme c'est le cas actuellement, faire reposer sa décision sur des évaluations
médicales et psychosociales. Ça aussi, c'est essentiel. Toutefois,
nous voudrions rappeler que, pour plusieurs
familles, l'accès à ces évaluations
est souvent long et difficile. Le gouvernement
du Québec devrait s'engager
formellement à mettre en place une
campagne d'information auprès des intervenants du système de santé, particulièrement les médecins et les travailleurs sociaux
chargés de ces évaluations, pour les sensibiliser.
Le Réseau pour un Québec
Famille est satisfait de l'introduction dans la loi de la mesure d'assistance
et la représentation temporaire. Ça nous
apparaît d'autant plus approprié, entre autres en raison de la démographie québécoise. Pour la première fois au Québec se développe une cohorte de personnes de plus de
65 ans composée de groupes distincts qui prendront de l'ampleur
dans les prochaines années. On s'entend qu'un aîné de 65 ans, ce n'est pas
la même chose qu'un aîné de 90 ans.
Donc, il va être de plus en plus fréquent de voir un aîné de 65 ans
prendre soin d'un grand aîné de plus de 90 ans. On a vu, hein, qu'une des
classes de population qui augmente le plus rapidement actuellement au Canada, c'est les centenaires. Ça a un impact, ça, ça a un
impact qui déboule dans la vie des familles. Ça fait comme une espèce de
domino dont on souhaiterait tous pouvoir se protéger. On estime donc que la
mesure d'assistance et la représentation temporaire vont permettre aux familles
de mieux composer avec tous les défis qui sont issus de cette situation-là.
La Présidente (Mme
Chassé) : Il vous reste moins d'une minute.
Mme Rhéaume (Marie) :
Donc, soutenir les personnes
fragilisées dans leur quotidien est une responsabilité que plusieurs familles jouent naturellement. Ce
soutien est plus ou moins important en fonction des besoins, qui sont multiples
mais essentiels, donc que ce soit pour faire
toutes les phases, vous le comprenez, que les personnes fragilisées ont besoin
de traverser. Des fois, juste s'ajuster avec
la technologie, avec les fournisseurs de services, plus on vieillit, plus ça
devient compliqué. Étant donné le nombre de personnes que ça touche,
on pense que c'est important d'encadrer
légalement certains éléments du travail de soutien des personnes et de
donner les moyens aux familles d'être en mesure de le faire, que les familles
puissent compter...
La Présidente (Mme
Chassé) : En terminant.
Mme Rhéaume
(Marie) : Pardon?
La Présidente (Mme
Chassé) : En terminant.
Mme Rhéaume
(Marie) : En terminant, donc...
La Présidente (Mme
Chassé) : Cinq secondes.
Mme Rhéaume
(Marie) : Merci.
La Présidente (Mme
Chassé) : C'est terminé. Merci pour votre exposé. On va maintenant
débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous pour une
période... pour un bloc de 16 minutes.
M. Lacombe :
Est-ce qu'il vous restait plus de choses à dire? Aviez-vous encore beaucoup de
choses que vous auriez aimé nous partager?
Mme Rhéaume
(Marie) : Bien, je vais essayer de le faire à travers les échanges.
M. Lacombe :
Est-ce qu'on peut leur donner du temps?
La
Présidente (Mme Chassé) : Alors, le ministre vous offre du temps pour
bien terminer. Qu'en pensez-vous?
Mme Rhéaume
(Marie) : Bien, c'est... Je vais essayer de faire ça vite, là.
La Présidente (Mme
Chassé) : Non, allez-y, prenez votre temps. Il vous offre du temps.
Mme
Rhéaume (Marie) : Donc, on pense que les dispositions actuelles
correspondent vraiment bien à la situation qu'on retrouve, en particulier
celles qui ont de l'impact pour un nombre grandissant de familles, d'avoir la
possibilité de seconder nos grands aînés en ne se faisant pas toujours
barrer la route, en étant capable de dire : Bien non, moi, je suis mandaté, je suis capable de le faire, de ne pas
toujours se faire dire : Bien, vous n'êtes pas son époux, donc, ou vous
n'êtes pas son épouse. C'est déjà assez compliqué de se retrouver dans
l'ensemble des situations. Puis, j'imagine, vous ne le savez pas, parce qu'il y
en a plusieurs qui sont très jeunes, mais plus nos parents vieillissent... On
se retrouve souvent avec des décisions
à prendre pour l'état de santé, puis, bien, ça permet... ça va permettre aux
gens de bien... d'être en mesure de bien seconder leurs aînés, de la même façon que ça donne des moyens
d'encadrer, là, tout ce travail-là qui est fait par le proche, là, qui va être
désigné par la personne comme assistant. On trouve que c'est vraiment des
mesures qui correspondent bien à la
société actuelle. Donc, pour cette raison-là, le réseau est satisfait des
décisions qui ont été prises en ce sens-là pour le nouveau projet de
loi.
La Présidente (Mme
Chassé) : Alors, j'invite notre jeune ministre à prendre la parole.
M.
Lacombe : Mais c'est intéressant, ça, parce que, et peut-être pour
ajouter à ce que vous venez de dire, malgré, parfois, notre jeune âge, on peut
aussi avoir recours à la mesure d'assistance, par exemple pour aider un proche,
parce que ça ne s'applique pas
seulement pour les aînés qui auraient besoin d'aide. C'est la beauté, selon
moi, de ce qu'on propose. Ça
s'applique aux gens aussi qui vivent, par exemple, avec une maladie. En fait,
ça s'applique à tout le monde. Donc, c'est la beauté de la chose.
M. Villeneuve,
Mme Rhéaume, c'est toujours un plaisir de vous croiser. Merci beaucoup,
donc, d'être ici avec nous aujourd'hui.
Vous parlez pour un
large public, hein, vous représentez beaucoup de gens. Vous parlez au nom des
familles. Et, tantôt, ça me faisait sourire,
vous parliez de vos deux cailloux, il y en a un que c'est la conciliation
famille-travail, l'autre est l'accès
aux services. Peut-être pour vous donner encore plus de temps d'aller au bout
de votre pensée sur l'assistant... J'ai l'impression que l'assistant va prendre beaucoup de place ou va
répondre, disons, à beaucoup de besoins de familles. C'est l'objectif.
Est-ce que c'est votre point de vue aussi?
• (12 h 30) •
Mme Rhéaume (Marie) : Pour nous,
c'est la mesure... Comme Raymond l'a dit tantôt, toute la question qui est liée aux difficultés, là, prononcées de
personnes qui ont des problèmes
avancés, par exemple de santé
mentale ou de déficience intellectuelle, on n'est pas allés de ce côté-là
parce qu'on sait qu'il y a plein d'intervenants, là, qui sont en mesure de venir vous parler de ça. Nous, ce qui
nous intéressait, c'était de parler du point de vue de la famille, pourquoi on
a pris comme exemple... bien, les avantages,
c'est ce qui nous a sauté le plus rapidement, là... c'est la conclusion qui
nous est venue le plus rapidement, que c'était la mesure qui était le
mieux adaptée. On sait que, oui, on peut assister d'autres personnes qui ne sont pas nécessairement en
situation, là... qui ne sont pas des personnes aînées. Mais, en même temps, cet
élément-là va être tellement important dans
les années qui s'en viennent, en termes de nombre, que c'est ce qui nous est
apparu comme étant la situation peut-être la
plus brûlante pour les familles. Tu sais, ce n'est pas long, hein, la vie passe
vite, on se retrouve, là, tu sais,
les parents ont 80 ans, puis là, woups! ça se met comme à se détériorer,
tu sais, la situation, sans nécessairement que les gens aient des grands
problèmes, mais il y a une vraie fragilité qui s'installe puis de nervosité vis-à-vis de toutes sortes de décisions. Puis,
quand on n'est pas bien équipé pour soutenir la personne, bien, c'est comme...
on ne rajeunit pas, nous autres non plus,
des fois, ça fait comme... ça énerve tout le monde, ce n'est pas aidant. Mais,
si on pense que ça risque de se produire dans la majorité des familles,
éventuellement, bien, on pense que cette mesure-là, le fait de ne pas avoir à recourir au tribunal, le fait de
pouvoir être inscrit mais aussi d'être désinscrit, si jamais la situation ne va
pas bien, on pense que c'est vraiment une mesure, là, qui correspond bien à la
réalité des familles d'aujourd'hui.
M. Lacombe :
Donc, on parle... on vient surtout de parler de faciliter la vie dans des
familles, mais je vais un petit peu plus loin, parce que le premier caillou
dont vous nous avez parlé, c'est l'accès aux services. Est-ce que vous diriez
que, par définition, au-delà du fait que ça va simplifier la vie des familles,
ça va aussi améliorer l'accès aux services?
Mme
Rhéaume (Marie) : Je pense
qu'on a un peu une pente à remonter pour toute la question
de l'accès aux services. C'est quelque chose qui a été amené de façon
spontanée et très fréquente par toutes les familles qui se sont exprimées. Quand je disais, un peu plus tôt, toute la question
des évaluations... Des fois, quand on a les moyens, on peut facilement aller
au privé pour avoir les évaluations,
pour que ça aille un peu plus rapidement, mais, actuellement, il faut vraiment que les familles
soient en très mauvaise situation financière ou en très, très grande détresse pour
réussir à avoir des services. Quand on est dans une situation un peu
entre les deux, les services, ça ne se précipite pas sur nous, là.
M. Lacombe : Je vais préciser ma question...
Oui, allez-y, M. Villeneuve.
M.
Villeneuve (Raymond) : Dans
le fond, c'est ça, ce qu'on voit dans ce cas-là, mais, de façon
macro, c'est toute la question,
dans le fond, de l'interface entre la personne et le réseau de
service, souvent, qui est très, très,
très complexe. Et je connais
plein d'intervenants de bonne volonté, d'intervenants, gestionnaires, de
personnes impliquées qui ont à coeur ce
qu'ils veulent faire, mais de comprendre l'environnement dans lequel on
est, d'avoir un suivi de service, on sait que c'est vraiment des grands
enjeux pour les familles, pour les personnes âgées, pour les jeunes, et tout
ça.
Et, dans le fond, ce qu'on voit souvent, le
genre de solution structurante, c'est tout ce qui va dans le sens de
l'accompagnement, de l'intervenant pivot, d'avoir quelqu'un qui a une espèce de
vision macro de l'environnement et qui est à
même de guider, d'accompagner les personnes vers le bon endroit. Parce que la
rupture d'accompagnement, souvent, c'est
catastrophique, et c'est pour ça qu'on trouve ça intéressant, on va dans le bon
sens, mais c'est sûr que ça ne réglera pas
tout. Mais, je pense, c'est ça, quand on peut regarder vraiment la question de
l'interface entre la personne qui a le besoin et l'offre de service, je pense
qu'on se rapproche vraiment de quelque chose, et, dans plein de milieux, c'est
vrai. Et je pense qu'il y a vraiment
quelque chose d'important puis que, collectivement... sur lequel on doit
réfléchir parce que, si le service existe, mais qu'on n'y a pas accès,
c'est comme s'il n'existait pas finalement. Ça, c'est un bon exemple, la
question d'évaluation. Et puis même une fois
qu'on est évalué, après ça, il faut avoir accès aux services, et tout ça, là,
cette espèce de chaîne là, cette espèce de mécanique là, souvent... Je
pense qu'on peut mieux travailler ensemble dans ce sens-là.
M.
Lacombe : Donc, si je comprends bien, évidemment que ça améliore... Ça
n'ajoute pas de médecins, ça n'ajoute pas de travailleurs sociaux, évidemment,
dans le réseau, mais ça améliore l'accès aux services, en ce sens où
l'interface est simplifiée. La personne a accès à parler à quelqu'un
peut-être plus facilement en étant assistée.
M. Villeneuve (Raymond) : Tout à
fait. Puis c'est sûr, particulièrement dans le cas des personnes âgées qui... Écoute, il y a des gens, vous le savez, là, qui
ont cinq spécialistes différents, puis là il faut qu'ils passent des heures, à
chaque semaine, à parler au
téléphone. Tout ça peut devenir extrêmement lourd. La personne, s'il y a un
paquet de rendez-vous, et tout ça,
donc, la question de l'interface, et tout ça... Et ça, c'est un pas dans la
bonne direction, la question de l'accompagnement
des personnes, mais je pense aussi qu'il y a l'accompagnement des personnes de
l'autre côté aussi, là, qui est à améliorer, il nous semble, au réseau,
là.
M. Lacombe : Et, dernière question
pour moi, je vais laisser la parole à une collègue après, il y a une nouvelle
façon aussi de voir la mission du curateur, qui va changer de nom, on en a
parlé tantôt, c'est-à-dire qu'on introduit sa mission,
et, dans la mission, il y aura cette obligation de diffuser l'information. Donc,
il y aura un devoir d'information pour s'assurer
que tout le monde comprend bien son rôle et qu'on sensibilise aussi le public.
Est-ce que ça répond aux préoccupations, vous pensez, des gens que vous
représentez?
Mme
Rhéaume (Marie) : Bien, je pense que c'est essentiel, là. Si on veut
des gens qui sont capables d'être actifs, le mieux, c'est quand ils sont aussi informés. Puis on a parlé
d'informer les gens qui ont à s'occuper d'autres personnes, mais c'est
aussi d'informer tout le monde qui est sur le terrain des enjeux puis des
défis, là, qu'il y a pour les personnes, là.
M.
Lacombe : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme
Chassé) : Je comprends que la députée de Bellechasse désire prendre la
parole.
Mme
Lachance : Merci, Mme la Présidente. Vous m'allouez combien de temps,
Mme la Présidente?
La Présidente (Mme
Chassé) : Six minutes.
Mme
Lachance : Six minutes? Merci. Merci, M. Villeneuve, merci
Mme Rhéaume, merci de prendre le temps de nous donner le point de vue des familles. À cet effet-là, tout à
l'heure, vous avez mentionné, outre les deux cailloux, vous avez aussi mentionné qu'il y avait eu un sommet des
familles en mai 2018 dans lequel des propositions avaient été
déterminées. Plusieurs propositions?
Mme
Rhéaume (Marie) : Plus que ce qu'on était capables de traiter. Au
départ, on pensait que les gens n'auraient pas de... On est sortis de là
avec au-dessus de 400 propositions.
Mme
Lachance : Excellent. Dans cette optique-là, est-ce que le projet de
loi n° 18 répond aux énoncés qui ont été faits dans ces
propositions-là?
Mme
Rhéaume (Marie) : Je dirais, il répond en mettant des mécanismes,
comme on dit, le lien qu'on a fait avec tout le côté, là, de l'accès aux services. C'est de cette manière que le
projet répond, en facilitant les choses, en facilitant les processus. C'est tout à fait dans la bonne voie,
là, de ce qui a été formulé par les familles. Mais on n'avait pas de recommandation précise concernant le curateur ou
les gens, là... Ça, c'est des choses qu'on va plus retrouver quand il y a
des enfants avec des gros handicaps ou des choses comme ça, là.
M.
Villeneuve (Raymond) : Oui.
Puis, peut-être, ce que je pourrais ajouter, ce qui ressortait beaucoup,
évidemment, c'est toute la question des fameux silos, là. Et, à ce niveau-là, je pense qu'il y a vraiment
des défis de réflexion collective, tu sais, comment est-ce qu'on fait
pour travailler ensemble pour les familles.
Vous
le savez, les familles... Il y a un paquet de dimensions dans la vie des
familles. Oui, il y a les aînés, oui, il y a les enfants, oui, il y a l'éducation, oui, il y a un paquet, paquet de
choses, et, dans notre structure actuelle, toutes ces responsabilités-là, ces enjeux-là sont répartis
dans un ensemble de ministères, dans un ensemble d'offres de services, dans
un ensemble de programmes. Et, même
nous — c'est
notre travail au quotidien — à un moment donné, on n'arrive pas à se démêler dans tout ça. Alors, je pense que, dans
le fond, si on veut soutenir n'importe quel membre de la famille, il faut
se poser la question, là, de l'appareil gouvernemental, comment est-ce qu'il
intervient.
Et c'est sûr que
nous, on est vraiment des fans de l'importance du ministère de la Famille pour
intervenir dans ce sens-là, pour avoir une vision transversale sur les
familles. Et, oui, il y a des enjeux spécifiques, des responsabilités particulières, au ministère de la Famille, mais on
pense que le ministère de la Famille devrait être vraiment un interlocuteur
privilégié pour interpeler aussi les autres
ministères sur les enjeux, autant que Santé et Services sociaux, Justice,
Travail, et tout ça, Éducation, parce
que c'est toujours la même famille qui se promène d'un service à l'autre, qui
se promène d'un ministère à l'autre.
Et, si on oublie ça, à un moment donné, c'est que la... C'est la famille, c'est
la personne qui doit traiter avec
tout ça. Donc, je pense que cette vision-là est vraiment importante, de
dire : C'est toujours la même personne. Et, si on oublie ça, c'est
elle qui va devoir cogner aux 40, 50, 60 portes, là.
Ça
fait que, dans ce sens-là, je pense que ce projet-là est dans la bonne
direction, mais il faut le voir encore plus largement que ça, là,
l'ensemble de la démarche, là, si on veut vraiment atteindre les objectifs
qu'on souhaite atteindre.
• (12 h 40) •
Mme
Lachance : Merci pour votre réponse.
Vous l'avez dit, il y a plusieurs familles, plusieurs types de familles,
c'est vrai, hein, et puis le rôle d'aidant
naturel incombe souvent à la famille ou à la famille élargie. Dans cet ordre
d'idée là, est-ce que vous pensez que
ça va faciliter la vie des familles? Puis est-ce que le projet de loi pourrait être bonifié ou amendé pour y répondre davantage?
Mme
Rhéaume (Marie) : Déjà, en
mettant la disposition d'assistant puis l'autre disposition, là, de représentation temporaire, c'est des éléments qui vont faciliter la vie des familles
qui ne sont pas aux prises avec des difficultés peut-être plus profondes
ou plus avancées. Je pense qu'on aurait intérêt à l'expérimenter puis peut-être
à faire les ajustements nécessaires avant de
dire... Tu sais, c'est difficile d'améliorer quelque chose qui ne fonctionne
pas encore, là. Je pense que c'est de
s'assurer... Je pense qu'il y a beaucoup de dispositions qui ont été prises
pour s'assurer que ça fonctionne correctement. Sur l'expérience, j'imagine, qui a déjà été accumulée au fil des ans par
le curateur, j'espère qu'ils ont pris le temps de considérer l'ensemble des
éléments. C'est certain que, des fois, on voit les choses dans le sens
d'empêcher que les personnes en situation de vulnérabilité subissent de l'exploitation, mais aussi il faut voir la
partie qui incombe aux familles puis ne pas rendre ça tellement difficile que c'est un parcours du
combattant, puis que la première chose que tu te dis, c'est : Plus jamais
je ne vais m'embarquer dans un
parcours comme ça. Je pense que c'est ça, c'est toute cette médiation-là qu'il
faut opérer entre ceux qui prennent soin et ceux qui ont des besoins.
Mme
Lachance : Merci. Me reste-t-il une petite minute?
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste une minute.
Mme
Lachance : Excellent. Vous l'avez dit, bien, en fait, vous l'avez
mentionné sans le dire, l'esprit du projet de loi, c'est tenir compte des volontés puis des
préférences de la personne puis de valoriser son autonomie. Tout le monde
s'entend pour dire que c'est excellent
puis que c'est un principe essentiel, mais est-ce que vous pensez, dans cette
optique-là, que certains... ça pourrait alourdir le rôle des familles ou
contribuer à rendre les choses plus complexes?
Mme
Rhéaume (Marie) : Je pense que le rôle des familles est... Les
familles ont des vies passablement bien remplies avec de nombreuses responsabilités. C'est certain que tout ce qui
contribue à... Tu sais, si, quand tu as... Admettons que tu as la charge de t'occuper de quelqu'un, mais
que, finalement, tu as des outils puis tu as des dispositions qui t'aident à le
faire, bien, déjà, tu te sens comme mieux appuyé dans ce que tu fais.
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste 10 secondes.
Mme Rhéaume (Marie) : Donc, de ne
pas mettre des charges inutiles sur le dos des familles va les aider, là.
Mme Lachance : Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci pour ce bloc d'échange. Ça m'a fait
plaisir, Mme la députée de Bellechasse. J'invite maintenant la députée
de Westmount—Saint-Louis
à prendre la parole pour un bloc de 10 min 40 s.
Mme
Maccarone : Merci, Mme la Présidente. Alors, je vais faire un peu de
pouce sur qu'est-ce que ma collègue, elle
vient de vous demander. J'aimerais vous entendre, peut-être... votre opinion
sur les proches aidants familles, aidants naturels, parce qu'on parle... Est-ce qu'on devrait avoir une mention
dans ce projet de loi vis-à-vis leur rôle puis peut-être réduire la lourdeur pour ces familles-là? Parce
qu'on comprend que ces parentés... ces familles... Est-ce qu'on devrait mettre
quelque chose dans le projet de loi pour eux?
Mme
Rhéaume (Marie) : Bien, je pense qu'en tout cas c'est ce qu'on
comprend quand on lit le projet, que ça peut s'adresser à ces personnes-là. Je sais qu'il y a une politique des
proches aidants qui est peut-être en élaboration, là, il me semble que j'ai vu
que ça pourrait venir après... Bien, ça serait intéressant que les choses
soient arrimées, parce que c'est évident que... Tu sais, c'est certain
que la mesure d'assistance peut toucher des gens plus jeunes, peut toucher
d'autres personnes, mais, quand on a lu le
projet, on l'a vraiment lu avec des yeux de se dire : Bien... Tu sais, je
peux juste vous donner un exemple.
J'ai 63 ans puis ma mère a 90 ans, mon père est décédé l'année
passée, on voit bien qu'on est dans des situations où ça peut se
dérégler très rapidement, où on peut se retrouver... Bien, je veux dire, moi,
je suis encore sur le marché du travail.
Oui, on se partage ça entre nous, mais on le voit autour de nous aussi, là. Tu sais, les gens nous disent :
Moi, ma mère est rendue là, moi, mon
père est rendu là, on vient de traverser ça. Il y a tous les gens aussi qui
ont des enfants avec des besoins particuliers, des enfants qui vieillissent,
eux qui vieillissent aussi, donc c'est certain que c'est toute la question, là,
des proches aidants. Si ça peut aider de l'inscrire dans le projet de loi, de le spécifier, je ne crois pas que ce soit... C'est une
modification qui va être bien accueillie.
Mme Maccarone : Est-ce
qu'on a besoin d'un registre pour quelqu'un
qui est proche aidant? Un registre pour eux?
Mme Rhéaume (Marie) : Un registre?
Mme Maccarone : Oui.
Mme
Rhéaume (Marie) : Bien, j'ai
compris que, quand on avait la mesure d'assistance, tu t'étais inscrit en quelque part.
Puis, au moins, quand tu entrais dans le système, tu pouvais prouver
que tu étais la personne qui était déléguée. Je pense que c'est une mesure qui est intéressante en autant
que ça ne soit pas trop compliqué, puis que ça ne vienne pas alourdir
encore la démarche, là.
Mme
Maccarone : J'aimerais vous
entendre... Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais j'ai déposé un mandat
d'initiative pour faire une étude par rapport à la transition de l'âge mineur à
l'âge adulte pour les personnes autistes. C'est
sûr, c'est quelque chose qui m'interpelle personnellement. Mais vous avez parlé de l'intervenant
pivot. C'est un sujet que je trouve vraiment
intéressant puis très important.
Entre autres, j'espère que le gouvernement va accepter de discuter, par rapport à ce mandat d'initiative, parce que je
pense que le bénéfice, ce serait non seulement pour les personnes autistes,
mais vraiment pour les personnes inaptes, des personnes qui ont un besoin, peu
importe comment qu'on va le décrire, les personnes handicapées... Je pense qu'on mérite vraiment de discuter
l'idée de l'intervenant pivot. J'aimerais vous entendre un peu là-dessus, ce serait quoi, le rôle, les responsabilités,
puis comment que ça peut vraiment aider, parce qu'on comprend que ce
n'est pas nécessairement l'accompagnateur de la personne qui a besoin d'aide.
Mme
Rhéaume (Marie) : Bien, actuellement, là, je dirais que, dans...
autant pour les parents qui ont des tout petits enfants, autant pour les parents qui ont des enfants à besoins
particuliers, autant pour les grands enfants qui ont des vieux parents, tout le
monde parle de l'intervenant pivot. Est-ce que l'intervenant pivot n'est pas le
symbole comme quoi c'est tellement
difficile de s'orienter à travers les services que ça prend, comme... un
traducteur, presque, pour nous aider à dire : Ah! toi, dans ta
situation, voici l'endroit où tu serais le mieux d'aller?
En
tout cas, comme représentant des familles, là, je pense qu'on a à se
questionner là-dessus, puis ça vient tout à fait appuyer nos propos quand on dit que la mise en silo des services
fait que ça devient comme un parcours du combattant, de toujours répéter ton histoire, puis, quand les
intervenants changent, de recommencer. Donc, c'est certain qu'avoir des personnes qui facilitent la navigation dans le
milieu, c'est certainement un atout pour les familles dans la mesure où cette
personne-là aide à traduire les besoins qui
sont exprimés par la famille puis à dire : Voici ce qui serait le mieux
dans votre situation, là. Tu sais, c'est certain, c'est comme une voie
rapide, on pourrait dire.
M. Villeneuve (Raymond) : Oui. Puis,
si je peux poursuivre, c'est que c'est sûr que souvent les services sont organisés pour répondre à un problème. Problème,
solution, on est beaucoup dans cette logique-là. Sauf que la difficulté
qu'on a, c'est... s'il y a
un enfant qui a plusieurs problèmes, il se retrouve lui-même dans plusieurs
corridors de services, et, si tu as
une famille dont plusieurs membres ont plusieurs problèmes, ils
peuvent se retrouver dans plein, plein, plein de corridors de services en même
temps, et, dans chacun des corridors
de services, il peut y avoir un ensemble de péripéties. Donc, là, à
ce moment-là, on morcelle tout à
partir, justement, des problèmes, et ça, ça devient un gros, gros,
gros enjeu. Et la famille, c'est une
entité où il y a plusieurs personnes, où il y a plusieurs
agents. C'est pour ça... C'est ça, l'intention des groupes de médecine familiale, c'est de dire :
Dans le fond, c'est un groupe de personnes qui intervient. Et l'idée de l'intervenant pivot, c'est avoir quelqu'un
qui peut... Est-ce qu'il peut
considérer les enjeux dans leur globalité et non pas juste comme un ensemble de
problèmes? Et ça, je pense, c'est vraiment quelque chose qui est très ancré
dans notre façon de fonctionner et
qui est très, très lourd pour les gens qui sont aux prises avec tout ça. Donc,
d'avoir une espèce de vision globale sur les enjeux et des personnes et
des familles.
Et c'est pour
ça, quand on parlait, au début, de ne pas parler de personnes vulnérables mais
de personnes en situation de vulnérabilité, c'est d'arriver avec une
approche, dans le fond, systémique où, oui, il y a la personne, mais il y a son
environnement, il y a sa société, il y a
tout ça. Et, je pense, c'est toujours ce qu'il faut ramener, parce que, sinon,
on peut mettre un diachylon sur un
problème, mais ça demeure toujours, toujours partiel. Donc, c'est toujours ça.
Puis j'ajouterais peut-être juste...
Mon garçon est Asperger, donc il n'est pas autiste, et tout ça, mais il est
Asperger au quotidien, donc c'est des
situations qui me touchent aussi, et, effectivement, des fois, l'accès aux
services, c'est très compliqué, là. Puis, en plus, il est majeur, puis,
s'il refuse des services, et tout ça, c'est tout... il y a plein d'enjeux. Ça
fait qu'en tout cas il y a plein, plein,
plein de choses derrière ça. Mais je pense qu'effectivement, là, l'idée d'aller
dans une façon globale, on est toujours, toujours gagnant. Et le système
nous fractionne souvent les enjeux, et ça, ça ne nous aide pas dans la... comme
famille.
• (12 h 50) •
Mme Maccarone :
Avec cette définition, trouvez-vous que ce serait important, d'abord, pour
cette commission, à peut-être décider
ou de discuter l'importance de rajouter le mot «intervenant pivot» dans le
projet de loi n° 18, avec une description? Parce que ce
n'est pas nécessairement la personne qui va aider, ce n'est pas nécessairement
le tuteur, c'est vraiment quelqu'un dans le réseau qui va aider. C'est un rôle
à identifier, mais pensez-vous que peut-être ce serait intéressant de le
rajouter?
M. Villeneuve
(Raymond) : Bien, écoutez, on n'est pas des experts du projet de loi
alors on va se garder une petite réserve.
Mme Maccarone : Moi non plus.
M. Villeneuve
(Raymond) : Mais, en termes d'objectifs, de finalité, c'est sûr qu'on
est pour ça, mais, techniquement... Je pense qu'on ne voudrait pas dire
des bêtises, mais je pense que l'objectif est tout à fait louable, là, et
important.
Mme Maccarone : Comment voyez-vous
votre rôle dans l'éventualité... si jamais le projet de loi est adopté, comment voyez-vous votre rôle dans la
dissémination de comment qu'on va participer dans la gestion d'un changement du
réseau actuel à un nouveau réseau pour le Curateur public, le rôle du réseau
Québec Famille?
Mme Rhéaume
(Marie) : Bien, le réseau pourrait certainement jouer un rôle,
sensibiliser ses membres qui sont autour
de la table. On pourrait faire de la diffusion d'information. On pourrait
certainement, là, transmettre, même, aux familles ou à ceux qui sont en contact
avec les familles, là, les informations nécessaires pour bien naviguer dans ce
nouvel univers là quand il y a des besoins, là.
Mme Maccarone :
Est-ce que, dans votre expérience, vous avez des difficultés à... pour les
régions, pour disséminer l'information dans les régions ou pour
supporter les gens dans les régions qui ne sont pas urbaines?
Mme Rhéaume
(Marie) : Moi, je peux difficilement parler de ça parce que, nous, on
ne regroupe que des gens qui sont au
niveau national, au niveau de la province. Donc, on a moins de ramifications
sur le terrain, et c'est plutôt avec ces organisations-là qu'il aurait
lieu de faire, là, les vérifications.
Mme Maccarone :
Puis, ces organismes, est-ce qu'ils ont mentionné à vous que peut-être ils
aimeraient avoir plus de points de
contact pour le Curateur public dans leurs régions? Tu sais, je parle souvent
de ça, les accès, la proximité. Je regarde... On a sorti une petite
carte d'où ils sont présentement situés. Est-ce que ça serait au bénéfice de la
population, peut-être, d'en rajouter, d'autres points de contact pour la
population?
Mme Rhéaume
(Marie) : Bien, c'est certain. Là, c'est difficile, là, je ne sais pas
à quoi ça ressemble, là, en termes de répartition.
Mme Maccarone : Juste votre
opinion.
Mme Rhéaume
(Marie) : Mais c'est certain que, quand il y a des services de
proximité, c'est plus facile que quand les gens doivent parcourir, là,
des grandes distances, s'il y a lieu, là, pour faire le suivi.
Mme Maccarone : Parfait. Merci
beaucoup. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) : Ça me fait plaisir. Nous allons
maintenant passer à la députée de Sherbrooke pour un bloc de
2 min 40 s.
Mme Labrie : Merci. J'aimerais
ça revenir sur la conversation qu'on avait tout à l'heure, sur la question de s'orienter dans nos services publics. On constate
tous ici, dans nos bureaux de circonscription, que, même pour une personne
qui est tout à fait apte, c'est très
difficile, là, de se retrouver, à savoir où cogner pour avoir les services dont
on a besoin, puis je n'ose même pas
imaginer comment c'est difficile quand on doit le faire pour quelqu'un d'autre.
Donc, certainement que la notion
d'assistant vient introduire quelque chose d'intéressant. Mais êtes-vous en
mesure de me dire, dans le système actuel, est-ce que le Curateur public offre suffisamment de soutien aux
personnes qui sont tuteurs, curateurs? Est-ce qu'il a les ressources
suffisantes au niveau du Curateur public pour assister les assistants ou les
tuteurs?
Mme Rhéaume
(Marie) : Bien, on espère qu'il va y en avoir assez. Ça, je ne suis
pas en mesure de répondre à cette question-là. Comme on vous dit, on n'a pas de...
on n'a pas fait de grandes enquêtes, là, à l'intérieur, les membres du
réseau, pour le savoir, mais je pense que ça fait partie, là, des éléments qui
devraient être là, parce qu'en fin de compte soutenir
ces personnes-là, c'est empêcher que ces personnes-là se retrouvent à la charge
de l'État complètement, là. Donc, ces personnes-là mériteraient d'être
soutenues adéquatement.
Mme Labrie :
Donc, il devrait y avoir, au niveau du curateur, du soutien disponible pour les assistants, les tuteurs. Puis est-ce que c'est... mais on ne sait pas...
Vous ne savez pas si, en ce moment, ce qui existe répond aux besoins de ces
personnes-là.
Mme Rhéaume (Marie) : Non.
Mme Labrie :
Bon, bien, en tout cas, j'espère que c'est entendu. Bien, il me reste un peu de
temps, si vous voulez...
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste une minute.
Mme Labrie :
Voulez-vous le prendre, le temps? Je ne sais pas si on... Moi, si on peut
m'éclairer sur qu'est-ce... (panne de son) ...soutien déjà offert par le
curateur, est-ce que ça va être adéquat pour répondre?
La
Présidente (Mme Chassé) : Je sais qu'en général on essaie de
limiter ce genre d'échange là, parce qu'on aura l'occasion dans d'autres étapes... Ça fait que, là, je vous avise que
ces libertés-là que vous prenez sont à limiter à l'étape-ci.
Mme Labrie : On me répondra à
un autre moment, alors.
La
Présidente (Mme Chassé) : Oui. Vous allez avoir l'occasion de
d'autres discussions. Alors, ça termine votre propos? Merci. Je cède
maintenant la parole à la députée de Joliette.
Mme Hivon :
Merci beaucoup pour votre éclairage. Deux angles de question dans mon gros
2 min 30 s. Vous avez dit
tantôt que le suivi des services, c'était vraiment tout un défi puis que, quand
il y a une rupture dans l'accompagnement, c'est une catastrophe. Donc, vous accueillez favorablement, je l'ai bien
compris... Est-ce que vous pouvez nous donner des exemples vraiment concrets de ce qui n'est pas
possible en ce moment, en termes d'accompagnement, de suivi, pour éviter ces
ruptures-là puis qui deviendraient plus faciles avec le projet de loi? Je pense
que ça nous éclairerait, parce que certains hier ont dit que ça ne
changeait rien, le projet de loi. Il y en a peu, là, mais donc j'aimerais ça,
si vous avez des exemples concrets.
Puis la
deuxième chose, c'est qu'il y a un ou deux groupes qui nous ont dit,
justement : Avec les aidants naturels... Ils ont proposé d'avoir la notion d'un assistant substitut pour ne pas
être obligé de multiplier, par exemple, les demandes d'assistants si un
assistant est fragilisé ou a un moment... Est-ce que vous pensez que c'est
quelque chose qu'on devrait envisager?
Mme Rhéaume
(Marie) : Oui, je pense que... Mais il y a déjà, en tout cas, une
disposition... Je pense qu'il peut y
avoir plus que seulement un assistant, là, dans... pour une personne, là. La
personne choisit les assistants. Les difficultés, en tout cas, nous... Moi, ce dont j'ai été témoin,
là, je peux le dire, c'est quand tu es dans une visite médicale puis que tu te
fais rembarrer par l'intervenant pour
dire : Vous n'avez pas accès, vous n'êtes pas le conjoint, on ne peut pas
vous donner l'information, là, ton parent te
regarde puis, tu sais, c'est comme... il y a un malaise, là, dans la... tu
sais. Puis, comme j'ai dit, c'est encore le
cas des parents vieillissants, là, mais, plus les parents vieillissent, là, tu
te retrouves... chirurgie de la hanche, les cataractes, ce n'est pas une
joke, là, ça fait vraiment partie du processus, ça fait que tu es beaucoup dans
les services médicaux. Puis, souvent, bien,
dans les services médicaux, c'est comme... tu sais, quand ils voient que tu es
là, des fois, il y a un petit recul
avant d'accepter, là, que tu sois là, puis... Mais c'est pour aider ton parent
aussi à prendre les décisions. Des
fois, il y a des décisions financières qui doivent être prises, à savoir est-ce
que tu prends ce qui est fourni, est-ce
que tu prends la prothèse plus chère parce que tu évalues telle ou telle chose.
Bien, je pense qu'en étant signifié comme intervenant direct, bien là, comme assistant de la personne, tu peux,
comme... mieux soutenir, là, ton proche, là, dans cette situation-là.
La
Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut le bloc d'échange. Merci
pour votre contribution aux travaux, très appréciée.
Je suspends la commission jusqu'à
15 heures. Bon dîner, tout le monde!
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprise à 15 heures)
La
Présidente (Mme Chassé) : La
commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions
publiques sur le projet de loi n° 18, la Loi
modifiant le Code civil, le Code de procédure civile, la Loi sur le curateur
public et diverses dispositions en matière
de protection de personnes. N'oubliez pas de fermer les sonneries et les
vibrations de vos appareils électroniques. Et cet après-midi nous
entendrons les organismes suivants : le Réseau Avant de craquer, la Chaire de recherche Antoine-Turmel sur la
protection juridique des aînés, la Commission des droits de la personne et
des droits de la jeunesse, la Fédération québécoise de l'autisme.
Nous allons
débuter avec le Réseau Avant de craquer. Je vous rappelle que vous avez
10 minutes pour votre exposé. À
une minute de la fin, je vais vous faire un signal de la main ou un signal
vocal pour vous inviter à conclure. Vous commencez tout d'abord en vous
présentant puis ensuite vous poursuivez. Bienvenue.
Réseau Avant de craquer
Mme
Péloquin (Suzanne) : Alors,
bonjour. Mon nom est Suzanne Péloquin. Je suis mère de deux jeunes adultes
qui ont un problème de santé mentale.
Mme Levaque
(Renée) : Bonjour. Mon nom
est Renée Levaque, et je suis membre de l'entourage, moi-même, et
présidente du Réseau Avant de craquer.
M. Cloutier (René) : Bonjour. René
Cloutier, directeur général du Réseau Avant de craquer.
Mme Richard (Louise) : Bonjour.
Louise Richard, membre de l'entourage et ex-avocate.
Mme
Levaque (Renée) : Alors, Mme la Présidente, Mmes, MM. les membres de la
commission, M. le ministre de la Famille, nous vous remercions de l'invitation à venir
présenter nos commentaires sur le projet de loi n° 18.
Notre présentation résumera évidemment
le mémoire qui vous a été déposé et dont vous avez probablement déjà pris connaissance.
Quelques
mots, avant, sur le Réseau Avant de craquer. La mission du Réseau Avant de
craquer est de regrouper, représenter,
soutenir et mobiliser les organismes
oeuvrant auprès des membres de l'entourage de personnes atteintes de maladie
mentale. Fondé en 1985, le réseau regroupe 39 associations à travers le
Québec, et nos organismes membres offrent du soutien psychosocial aux membres de l'entourage, de l'information, de
la formation, des groupes d'entraide, de même que du répit.
Quelques mots
sur les personnes atteintes de maladie mentale. Une personne sur quatre sera
atteinte d'une maladie mentale au cours
de sa vie. Ça représente un tiers des dossiers actifs du Curateur public. Et,
en santé mentale, l'incapacité est habituellement partielle, temporaire
et variable dans le temps.
Dans le cadre
des lois actuelles, il y a l'installation d'un vide social lorsqu'il y a un
régime de protection public qui est
mis en place. Cela équivaut à la mort civile pour la personne qui bénéficie du
régime de protection public. Le projet de loi n° 18 est une opportunité qu'il ne faut pas manquer
d'abolir cette situation inhumaine. Il faut préserver les liens affectifs
avec la famille. Ces liens sont essentiels au rétablissement de la personne
atteinte de maladie mentale.
Quelques mots
sur les membres de l'entourage. Quatre personnes sur cinq ont un proche atteint
de maladie mentale. Ce peut être un
conjoint, un père, une mère, un enfant, un frère, une soeur, un collègue de
travail. Dans la majorité des cas, la
famille demeure la principale source de soutien et d'hébergement. La famille
joue un rôle d'accompagnateur. Toutefois, souvent, elle est non informée
et même non sollicitée par les services de santé mentale. M. Cloutier.
M.
Cloutier (René) : Oui,
alors, d'entrée de jeu, il faut vous dire que nous accueillons de façon très
favorable le projet de loi n° 18. On va vous expliquer pourquoi. Tout d'abord, par l'introduction de
la nouvelle mesure d'assistance. C'est une
mesure qui est très congruente en santé mentale, et voici pourquoi : c'est
qu'elle tient compte, comme disait ma présidente, de la nature partielle, temporaire et variable
dans le temps de la maladie mentale. Aussi, c'est une mesure qui est simple, non judiciarisée, qui ne
nécessite pas d'évaluation médicale ni psychosociale, donc très simple à
appliquer par les familles et la personne assistée. C'est une mesure qui
est très utile. Comme je disais, c'est une... la maladie mentale est variable dans le temps. Donc, quand ça va bien, la personne
peut convenir avec un membre de son entourage d'être assistée dans les situations
où il peut y avoir une crise ou une diminution de la capacité de jugement.
Donc, en prévision de ces moments-là, c'est une mesure très utile.
En plus,
cette mesure-là reconnaît le rôle essentiel de la famille qui assiste son
proche, ce qu'on ne retrouve pas toujours, puis particulièrement dans le
réseau de la santé. Souvent, très souvent, les familles ne sont pas informées,
ne sont pas impliquées, contrairement à ce qu'on vit en santé physique, hein?
On a tous accompagné des proches en santé physique.
On n'a pas de difficulté de parler avec un médecin, un intervenant, et ce n'est
pas le cas en santé mentale, malheureusement, encore. Pourtant, ce sont les mêmes lois sur la
confidentialité, et surtout c'est que, dans le projet de loi, on
prévoit que le tiers ne peut refuser que l'assistant agisse à ce titre. Vous
voyez? Ça va contribuer à aider les familles à jouer le rôle d'accompagnateur.
Pour la
mesure d'assistance, le défi, c'est l'implantation, c'est le changement des
pratiques, le changement de culture que ça devra induire afin que les
membres de l'entourage puissent jouer pleinement leur rôle. C'est pourquoi nous
recommandons quelques ajouts additionnels
pour renforcer justement la capacité d'application de cet objectif
de permettre aux membres de l'entourage de jouer le rôle d'assistant.
Alors, particulièrement, on recommande une modification au Code des professions afin d'encadrer la capacité de transmettre
de l'information et de recevoir de l'information aux membres de l'entourage, au
Code civil du Québec et à la Loi sur les services de santé et les services
sociaux.
De plus, on
recommande aussi d'ajouter, dans la Loi sur le curateur public, qui prévoit un
pouvoir réglementaire, trois
sous-éléments qui permettent de camper dans la loi qu'il doit y avoir un plan
de communication de mise en place de cette
mesure-là, et aussi de prévoir le soutien aux familles qui se voient malgré
tout refuser ce rôle-là, d'assistant. Donc, comment on va soutenir ces
familles-là tant que le changement de culture ne sera pas instauré tout
partout?
Et,
finalement, bien, on recommande la constitution d'un comité consultatif
spécifiquement en santé mentale pour être
capable de prévoir les spécificités d'application pour cette clientèle-là
compte tenu de la variabilité de la problématique dans le temps.
Au niveau de
l'intégration des régimes de protection, encore là, on en fait un accueil très
favorable parce que ça amène une simplification des régimes de
protection et ça amène l'obligation de moduler la tutelle afin que la personne conserve le plus possible l'exercice de ses droits
civils. Mais, en même temps, le projet de loi n° 18,
c'est l'occasion de mettre fin à la
mort civile des personnes sous régime de protection lorsqu'il n'y a pas un
proche impliqué pour maintenir des
liens affectifs. Donc, c'est une opportunité pour maintenir l'espoir de
rétablissement. En santé mentale, il faut toujours maintenir cet espoir-là
parce qu'il est toujours possible. Ce n'est pas comme une maladie dégénérative
ou génétique d'origine... bon, et il faut préserver aussi, donc, les liens
affectifs afin d'éviter la mort civile.
Donc, nous
recommandons quatre modifications, dont deux à la Loi sur le curateur public et
deux à la Loi sur les services de
santé et services sociaux, pour assurer l'implication d'un membre de
l'entourage, qui est désigné par le curateur, à ce moment-là, hein, et lors des décisions qui concernent soit le bien-être
ou la santé de la personne sous régime de protection public.
Puis, enfin,
le titre de Directeur de la protection des personnes vulnérables, pour nous,
c'est un titre qui n'est pas très recevable, puis je vous explique
pourquoi, c'est que ça envoie un message contradictoire entre l'intention du
projet de loi de promouvoir l'autonomie et
la considération du potentiel de la personne et l'emphase que ce titre-là met
sur la vulnérabilité de la personne.
Alors, nous, ce qu'on recommande, c'est un titre qui est simple, hein, qui
n'amène pas à créer un acronyme,
hein, si on pense à la population, et on recommande un titre tel que tuteur
public, qui dit bien ce que ça doit.
Mme Levaque (Renée) : Alors, en
conclusion...
La Présidente (Mme Chassé) : Oui. Il
vous reste une minute.
• (15 h 10) •
Mme
Levaque (Renée) : Une minute? Très bien. Le projet de loi n° 18 nous convie donc à de véritables défis de société : préserver la dignité des personnes
et l'exercice des droits des personnes ayant une incapacité, de même que
reconnaître le rôle essentiel des familles qui assistent leur proche
dans son rétablissement vers la santé mentale.
Il s'agit
d'une occasion unique de mettre fin à tout jamais à la mort civile des personnes sous un régime de protection
publique et de maintenir l'espoir d'un rétablissement aux personnes ayant une
maladie mentale.
Enfin, le
Réseau Avant de craquer offre son entière collaboration pour la mise en oeuvre de cet important projet
de loi pour les membres de l'entourage et leur proche atteint de maladie
mentale.
Mesdames, messieurs, pour la période des
questions, Mmes Richard et Péloquin, qui sont deux membres de l'entourage, pourront répondre à vos questions, d'autant
que l'adoption de cette loi sera un apport direct bienvenu dans leur
quotidien, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci pour votre exposé. Et nous allons
débuter la période d'échange avec les membres de la commission. M. le
ministre, la parole est à vous pour 16 minutes.
M.
Lacombe : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous de vous être déplacés
aujourd'hui pour nous partager vos observations,
vos recommandations sur notre projet de loi. Effectivement, on a bien lu votre
mémoire, on a pris des notes et on a quelques questions pour nous aider
dans notre travail.
Donc, allons-y tout de suite. C'est à
la page 6 de votre mémoire, donc au point 3.3, vous proposez, et
corrigez-moi si je me trompe, mais
vous proposez, selon ce que je comprends, que le directeur, lorsqu'il va agir
comme tuteur d'un majeur, puisse
désigner un proche ou un organisme communautaire pour assister ou épauler,
conseiller, là, c'est peut-être le mot sur
lequel je voudrais que vous précisiez votre pensée, dans son rétablissement,
avoir accès aux informations nécessaires pour le faire. Au sens du Code civil, ce n'est pas possible parce qu'en
fait on prévoit même que, lorsque la tutelle commence, le rôle de l'assistant prend fin, donc c'est comme
ça que ça fonctionne. Par contre, ce que je vous dirais, puis c'est là-dessus
que j'aimerais aussi vous entendre, le
curateur — qui va
changer de nom — le
curateur est déjà très engagé pour s'assurer, par exemple, qu'il y ait une bonne représentation. Selon les données
qu'on a, 87 % ont un plan de représentation, on parle de curatelle et de tutelle. Actuellement, c'est
dans les directives qui régissent le... en fait, dans les directives que le
curateur s'est lui-même donné, puis
on voit que ça donne des résultats. C'est produit dans les six mois et c'est
réévalué à chaque année.
Est-ce
que, considérant, donc, que le curateur se fait déjà un devoir d'impliquer les
proches, est-ce que ça répond à cette
préoccupation-là ou, pour vous, malgré que le Code civil ne le prévoit pas,
vous aimeriez... vous auriez quand même aimé qu'il y ait quelqu'un qui
puisse agir comme assistant, même en cas de tutelle?
M. Cloutier
(René) : Oui. En fait, puis en en discutant entre nous, on voyait
aussi cette confusion-là. Quand quelqu'un
est sous régime public, hein, et qu'on dit qu'il faudrait que le délégué, par
exemple, du curateur, qui souvent se fie
aux recommandations des intervenants dans ses décisions, soit assisté, ce n'est
pas dans le sens de la mesure d'assistance de la nouvelle mesure. Donc, c'est parce que, évidemment, puis pour
avoir travaillé dans le réseau de la santé aussi, on a un rôle d'intervenant, hein, et le délégué du
curateur a un rôle, comment je dirais, de protection, de bonne gestion, autant
des biens que de la personne, mais
ces personnes-là ne peuvent pas jouer un... ne peuvent pas établir un lien
affectif. Et c'est là-dessus qu'on
insiste, que, pour aider le délégué, par exemple, à bien jouer son rôle, il
faut maintenir ce lien affectif là avec
un proche. Ce n'est pas parce que quelqu'un est sous curatelle publique que,
nécessairement, il y a plus de membres de
l'entourage. Souvent les membres de l'entourage, elles ne sont pas en mesure de
soit gérer les biens ou d'apporter beaucoup d'aide, d'assistance à la personne. Et, pour aller au-delà de bien gérer
les biens, les services donnés à la personne, pour nous, c'est important de préserver ce lien affectif là
parce que c'est une des conditions essentielles si on veut maintenir l'espoir
d'un rétablissement. En santé mentale, il y a toujours un espoir de
rétablissement, mais s'il n'y a plus de membres de l'entourage qui se préoccupent, par exemple, du bien-être, est-ce qu'il
mange bien, est-ce qu'on tient compte de ses intérêts, et tout ça, bien, on perd un élément là, et c'est
là qu'on dit qu'il se crée un vide social. La personne est bien, elle est bien
soignée, elle est dans une bonne institution, etc., bon, on s'assure de sa
protection, mais il faut aller au-delà de ça.
Je
sais que, dans certains dossiers, il y en a, des membres de l'entourage, qui
sont impliqués. Maintenant, il y a encore certains dossiers, et ça, on pourrait
l'illustrer, si vous voulez, où on voit les conséquences du fait que les
familles ne sont pas impliquées ou mises à l'écart, dépendamment des situations.
M.
Lacombe : C'est une bonne observation, merci. Mais, si... Je le
souligne à nouveau parce que j'aimerais voir si ça vous rassure, quand même, le fait que 87 %, actuellement, là, à
l'heure où on se parle, que 87 % des cas — ou des personnes, disons — sous curatelle ou tutelle ont un plan de
représentation. Un plan de représentation vise exactement ce que vous
venez d'énoncer, c'est-à-dire engager les
proches avec la personne qui est sous curatelle ou sous tutelle, justement,
tenir compte de ces éléments-là de
préférence, assurer qu'il y ait des visites, et tout ça. Est-ce que ça vous
rassure? Et on me dit, en plus, que... On me met un peu de pression pour
que le pourcentage augmente.
Mme Richard (Louise) : Mme la Présidente, ce que j'ajouterais, c'est
qu'on est dans une société de droit. On a le droit positif, c'est-à-dire les chartes, qui nous protègent de... nos
droits fondamentaux. Mais il y a aussi ce qu'on appelle les droits
naturels, et c'est dans ce cadre-là qu'il y a un vide, là, pour le curateur, je
dirais, parce qu'au niveau des droits naturels
c'est les droits qui sont nécessaires pour la survie de la personne. C'est
aussi des droits, et, dans ces droits-là, vous avez les besoins vitaux,
physiologiques, le besoin de sécurité et de protection. Et là, c'est très, très
bien assuré par le curateur. Mais il y a
trois autres besoins qui sont importants, qui sont le besoin d'amour et
d'appartenance, le besoin d'estime de
soi et le besoin de se réaliser. Et c'est là, dans ces trois besoins-là, que le
rétablissement se situe. Et ça, la curatrice ou le curateur a beau être le plus humain possible, il
ne remplacera jamais le proche. Moi, j'ai déjà été infirmière et, lorsque je
mettais la main sur un patient, ça ne fait
pas les mêmes vibrations que si c'était son conjoint qui le touchait, ou sa
fille, ou un membre de la famille. On
ne peut pas, en tant qu'étranger à la personne, apporter ces trois besoins
fondamentaux naturels, qui sont le besoin d'appartenance, et tout ça.
Mais
les besoins de sécurité... En fait, quand la personne se trouve sur la
curatelle publique, on prend soin de ses biens et de sa personne, mais de son
état d'humain, là, c'est là qu'il y a un trou, et c'est ce qu'on aimerait bien...
profiter de l'occasion pour, justement, combler ça parce que c'est la
place qu'on met pour les proches. Et, depuis 1989, le ministère de la Santé l'a mis dans on plan d'action en santé
mentale, et, à chaque cinq ans, il y a un plan d'intégration qui est révisé.
Et on mentionne tout le temps combien, c'est important, essentiel, la place des
proches pour le rétablissement.
Alors, Mme la
Présidente, c'est maintenant ou jamais où on doit mettre dans la loi cette
expression-là, formelle. Notamment, si on
avait juste une recommandation à accepter, je dirais : Acceptez au moins
notre recommandation n° 1, qui
dit que tous les professionnels doivent respecter la confidentialité.
Cependant, à moins d'une expression expresse de la loi, là, ils peuvent... Et
c'est ça qu'on dit : Le proche qui va être identifié par le curateur pour
jouer ce rôle-là, garder le lien affectif, c'est ça qu'il faut qu'il
soit mis comme... dans les exceptions aux droits de la confidentialité. Et ça,
c'est fondamental, parce que ça fait
30 ans que ça dure, ça n'a jamais été comblé, ce point-là, parce qu'on
oublie que, dans notre société de droit, on a les droits naturels qui
sont nécessaires pour la survie de la personne.
Une voix : ...
M. Lacombe :
Vous vouliez parler? Oui, allez-y.
Mme
Péloquin (Suzanne) : Oui,
j'aurais aimé en rajouter. En fait, lorsqu'on est en train d'aborder une
modification légale, arrivent avec ça
tous les contextes de l'intervention, par exemple, dans le réseau de la santé.
Vous savez, moi, j'ai deux enfants.
J'ai plus de 18 ans d'expérience à tenter d'accompagner mes enfants,
tantôt dans une désorganisation où ça me
demande d'utiliser la P-38, donc une intervention policière qui va rentrer dans
la vie de mon enfant, qui va le prendre, le coucher à terre avec des petits gants. Pourquoi? Parce que le Code
des professions va m'interdire à moi, comme parent, de rentrer en relation avec l'intervenant puis
dire : Je trouve que mon enfant, en ce moment, vit une situation de
dangerosité.
• (15 h 20) •
Mon enfant,
par moments, va avoir une vie tout à fait merveilleuse, que j'espérais, comme
quand je les ai mis au monde, parce
que lorsqu'on porte un enfant, ce qu'on espère, c'est qu'il va avoir une
meilleure vie que la nôtre. Or, la maladie mentale va venir entacher ça dans la
vie de nos enfants. Tantôt, ils vont être en mesure d'avoir une vie sociale, à
d'autres moments, à cause des
éléments de la psychose, ils vont tellement se désorganiser, ils vont tellement
devenir inintéressants que la vie
sociale va se couper de leur vie. À un autre moment donné, ils vont réussir à
rentrer sur le marché du travail, mais, en raison de l'incapacité à se lever parce que le traitement, par
exemple, les empêche de se lever un matin, ils vont perdre leur emploi. Un autre échec. À un autre moment
donné, ils vont avoir des périodes de toxicomanie qui va s'ajouter à la maladie mentale, qui va faire en sorte qu'ils se
retrouvent sur un coin de rue à vous quêter ici, devant l'Assemblée nationale
pour pouvoir soi-disant aller prendre un café. C'est ça la réalité d'une personne
qui vit un problème de santé mentale.
Il y a donc
des épisodes où ces épisodes-là le mettent en danger pour sa sécurité. C'est
des moments aussi où la famille, on
doit travailler plus fort pour rester en relation avec eux, parce qu'ils
s'installent en rupture de lien avec nous. Lorsqu'ils arrivent dans le réseau de la santé, bien, là, on fait face,
nous comme parents, et je vous le dis, je gagne à la 6/49 chaque fois,
est-ce que je suis face à un intervenant capable d'avoir le courage de
s'éloigner un petit peu de son secret professionnel
ou de son code des professions pour m'entendre dans ma compétence de parent et
entendre mon jugement et que mon
jugement est bon, que je suis un parent bienveillant et que ce que j'amène
comme information va faire une différence dans l'intervention qu'il faut
faire auprès de mon enfant.
Et là, vous
me direz : oui, mais s'il le suivait, son traitement? Alors, c'est propre
de la maladie mentale. Toute personne et
toute personne qui vit une situation de santé mentale, à un moment donné, ne
veut plus les prendre, ses pilules, même quand tu as fait une dépression, parce qu'enfin tu voudrais retrouver
ton état de santé avant. Mes enfants, ils sont comme tous les autres. Alors, ils ont des périodes
qu'ils arrêtent de prendre leur médication. Dans ces périodes-là, moi, j'ai
besoin, j'ai besoin que les portes
s'ouvrent pour que je puisse jouer mon rôle de parent sans m'épuiser, parce que
lorsque je défonce une porte, que
j'accompagne mon enfant malade, que je le lave aussi parce qu'il ne se lavera
plus pendant un certain temps, que je
ne le reconnais plus, qu'il me parle à travers un langage psychotique, puis que
moi, j'essaie de rester en relation avec son coeur, parce que je le sais que c'est par le coeur que je vais le
ramener à la vie, et que je fais face constamment à des portes qui se ferment, parce que la TS me regarde
par son code des professions, parce que le gestionnaire me regarde en absence de mon droit, parce tout le monde me
regarde en disant : Restez dans la salle d'attente, Mme Péloquin,
puis que Mme Péloquin, parce qu'elle est courageuse, parce qu'elle
connaît le système, va utiliser... faire des plaintes, va foncer à travers la
porte, bien, en bout de ligne, quand Mme Péloquin, elle retourne dans son
stationnement, toute seule, puis dire :
Écoutez, là, en ce moment, mon fils n'a pas la capacité décisionnelle, et je
suis la première à espérer qu'il la retrouve... Sachez que je suis la première, parce que chaque fois que mon enfant va
mieux, parce qu'il se rétablit, je redeviens le parent qui avait le même
espoir quand que j'ai porté mes enfants. Le même parent.
Alors, c'est
ça. Et peut-être qu'aujourd'hui quand vous travaillez comme ça, vous vous
dîtes : Mais qu'est-ce que je
fais, moi, comme député? Qu'est-ce que je peux faire comme ministre pour
changer la vie des gens? Vous savez, ça ne fera pas de grandes annonces médiatiques de rentrer un rôle d'assistant,
mais, par contre sur vos épitaphes, vous allez pouvoir écrire que vous avez fait la différence dans ma
vie et celle de mes enfants. Et peut-être celle de mes petits-enfants, parce
qu'on sait qu'il y a un facteur héréditaire là-dedans. Ça fait que moi, je
regarde mes petites-filles en me demandant si je n'en ai pas une dans la gang. Et peut-être votre conjoint, que vous êtes
en amour depuis 15 jours, trois semaines, et que dans peut-être deux mois, il va faire sa première
crise de bipolarité, mais que vous allez l'aimer pareil, même s'il est rendu
avec un problème de santé mentale. Alors,
c'est important, ces mesures de structure là que vous êtes en train de mettre
en place, très important. Alors ce
soir, quand vous rentrerez chez vous, vous pourrez vous dire que vous avec fait
la différence dans la vie de Suzanne,
vous avez fait la différence dans la vie de René, la différence dans la vie de
Louise, et Gabriel, et Michael, du prénom de mes deux fils, mais aussi
sa soeur, qui elle aussi se ramasse dépassée par moments, qui voudrait bien jouer ce rôle d'assistant là. Parce que vous
savez, un jour, malheureusement je vais mourir, et qui va le jouer dans la
famille, ce rôle-là? C'est elle. Et, si elle
ne peut pas le faire, bien, j'espère que ça va être Angela. Et, si Angela ne
peut pas le faire, bien, j'espère que ça va être un groupe
communautaire. C'est ça la réalité que l'on vit. Alors, merci.
M.
Lacombe : En fait, je n'aurai pas d'autre question. Je pense que ça
fait le tour, mais beau témoignage, vraiment. Je vais vous confier, ça me touche beaucoup, parce que dans ma famille
aussi, je suis... vous le disiez tantôt, là, vous énumériez les statistiques, puis, bien, ça me touche
beaucoup d'entendre votre témoignage. Puis tant mieux si, comme parlementaires,
on peut, avec nos projets de loi qui
semblent parfois bien techniques, changer réellement la vie. Mais c'est M. le
curateur qui a dit : C'est plus qu'un projet de loi, c'est un
projet de société. Ça résume peut-être...
Mme
Péloquin (Suzanne) : Moi, je voudrais le dire, c'est un projet
bienveillance, sans utiliser le terme galvaudé. Plus on utilise nos projets de
loi pour favoriser qu'il y a
une bienveillance de communauté, une bienveillance de voisinage, une bienveillance
familiale, une bienveillance en termes de gens qui sont payés pour faire le
travail, alors là on ne se dispose plus
dans la protection de «mon métier, ma profession, mon secret professionnel»,
on s'installe, tout le monde, dans une bienveillance autour d'une personne qui va vivre toute sa vie avec un
diagnostic de santé mentale, toute sa vie. Il n'y a pas encore... il n'y
en a pas eu de guérison encore. On guérit des cancers, vous savez. Moi,
j'assiste avec du monde qui se promène
en rémission d'un cancer. Malheureusement, je n'ai pas encore eu ce billet-là
d'un psychiatre qui me dit que mon enfant est en rémission, au mieux, on
est en rétablissement, ensemble.
Mme Richard (Louise) : Les professionnels,
actuellement, sont liés par leur secret professionnel à cause du libellé de la loi, et c'est pour ça qu'il faut
créer cette exception. Il y en a des exceptions, si vous voulez examiner le Code des
professions, au niveau du secret professionnel, qui sont ajoutées, qui sont
présentes, libellées dans le Code des professions. Il faut absolument, à ce moment-là, qu'on fasse
aussi cette exception-là pour la personne qui va assister. Et, pour ce qui est
du curateur, le problème...
La Présidente (Mme Chassé) : ...vous
avez 20 secondes.
Mme
Richard (Louise) : ...le problème
pour le curateur, c'est que les personnes qui sont confiées sur cette loi-là,
sur cette protection-là, c'est qu'ils sont limités, souvent, ils ont des
réactions de ressentiment à leurs parents, alors...
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Merci pour votre témoignage. Alors, je cède maintenant
la parole à la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Maccarone : Aimeriez-vous
terminer votre... Oui.
Mme
Richard (Louise) : On a un
cas type sur lequel on a travaillé pour faire les propositions qu'on a faites.
Alors, ce cas, c'est une adulte qui a
été confiée par ses parents en 2002 à la curatelle publique. Alors,
imaginez-vous, vous êtes un adulte, et les parents vous confient... parce
qu'autrement le cas était trop lourd, et les parents étaient pour perdre leur propre équilibre mental. Ils l'ont confiée à
la... Ce que ça a provoqué, c'est que la personne est devenue très agressive
envers ses parents. Alors, maintenant, on
est rendus en 2019, c'était en 2002, et elle dit toujours : Ne dites rien
à mes parents, ils vont s'inquiéter. Alors, les parents, ils ont beau
dire : On veut l'aider, ils la voient dépérir, ils ne savent pas pourquoi elle a l'air d'un légume depuis quelque temps,
est-ce qu'ils ont changé la médication, est-ce qu'elle mange bien. Elle est
rendue incontinente, elle n'a plus de
dentier. Mais qu'est-ce qui se passe? Tout est fermé. Alors, ils ont essayé de
parler à la curatrice, mais c'est
toujours le mur de la confidentialité. Alors, comme je vous le disais, le
curateur est limité à certains droits naturels, mais les trois autres,
qui sont importants, ils ne peuvent pas les assumer.
Alors, c'est
donc très important, fondamental qu'on crée expressément une exception pour
qu'il y ait des informations, pas
toutes les informations mais les informations raisonnables pour que les proches
puissent se gouverner, savoir qu'est-ce qui se passe, est-ce que la médication a été changée, c'est quoi, les
effets secondaires, et tout ça. Donc, c'est là-dessus qu'on aimerait qu'on impose un libellé exprès, parce
qu'autrement les professionnels ont beau voir le parent se morfondre, mais
ils ne peuvent pas trahir leur secret
professionnel. Alors, donnons-leur au moins cette clé-là de l'exception pour la
personne qui va avoir été désignée par le curateur.
• (15 h 30) •
Mme Maccarone : Merci. Cette
semaine, c'était une semaine superbizarre pour moi parce que j'ai eu plusieurs personnes qui sont venues me voir, puis ils m'ont
dit : C'est comme si vous décrivez ma vie. Mais il faut que je vous dise,
c'est une semaine bizarre pour moi aussi parce que je viens de vivre exactement
ce que vous avez décrit. Ça me touche énormément. Je ne veux pas me retrouver
dans une situation comme ça encore. Alors, je vous entends.
C'est sûr, ça va être important de définir puis
d'aller vers l'avant pour le rôle de l'assistant. Je vous confirme : Mon
Dieu! C'est difficile d'être face avec un professionnel qui vous dit :
Non, il a 18 ans, d'où l'importance du mandat d'initiative, s'il vous plaît. J'aimerais qu'on va vers l'avant avec
ceci parce qu'il faut préparer les parents puis la communauté pour la transition de mineur à majeur. On n'est
pas pour ça quand on a des enfants ou des membres de la famille qui ne sont
peut-être pas comme les autres. Mais ça m'a
fait du bien de vous entendre, je me sens moins seule. Ça fait que merci pour
votre témoignage.
Mais ça me
fait penser, pour les gens qui n'ont pas des membres de famille qui sont là,
moi, là, je suis une maman féroce,
puis je vais être là, puis je vais me battre pour mes enfants, puis ce n'est
pas vrai que vous allez fermer la porte à ma face pour très longtemps. Puis il a 18 ans, mon enfant, ça fait que
j'ai encore une mesure de contrôle. Mais qu'est-ce que je vais faire
quand il va avoir 38 ans, puis il y a quelqu'un qui fait une
recommandation de médicaments que je sais, fondamentalement,
ce n'est pas bon pour lui, comme je vis présentement? Qu'est-ce qu'on fait pour
eux qui n'ont pas une maman féroce? Qu'est-ce qu'on va faire? Qu'est-ce
qu'on va faire?
Mme Richard (Louise) : Moi, je
pense qu'on est ici, maintenant, dans un moment stratégique pour justement répondre à votre question. C'est le moment de
placer cette ouverture-là dans le code. Le Code des professions est ouvert, la
Loi sur les services de santé est sur la table, le Code civil est sur la table.
Mon Dieu! C'est le temps, là, c'est un moment, là, puis que ça ne
passera pas encore, là, ou, en tout cas, ça peut prendre encore 30 ans.
Alors, c'est tout ouvert, c'est le moment de
dire : Ici, on modifie ça, ici, on modifie ça, et de vraiment ne plus
avoir des situations comme vous décrivez et comme on entend, pour que
l'information circule pour que le parent soutenant puisse avoir l'information
qu'il a besoin. Autrement, tout le monde s'en va, bâillonné. Alors, il faut
changer la loi.
Mme Maccarone :
Sauf que ce n'est pas toujours les parents. Des fois, c'est des personnes qui
ne sont pas des membres de la famille
naturelle. Qu'est-ce qu'on fait pour leur aider? Comme je dis, moi, je suis
prête à militer pour mon enfant, mais
des fois... ou, comme vous avez très clairement dit : Quand je ne suis
plus là... Aïe, mon Dieu! je ne veux pas pleurer encore, là. Qu'est-ce
qu'on va faire? Qu'est-ce qu'on va faire?
Mme Péloquin (Suzanne) : Bien, honnêtement pour donner un peu d'espoir,
parce qu'il y a quand même des petites ouvertures,
là, dans le réseau de la santé, où on fait plus de place aux parents, et même
pour des adultes, je pense qu'en changeant justement le paradigme de départ où
on se donne le droit de dire que, dans certaines circonstances, sans vouloir
nuire à la Charte des droits et libertés de la personne, sans vouloir
enlever le droit, mon droit à moi quand je vais bien et que j'ai tout mon potentiel à la protection de mes informations
personnelles, en ouvrant ça et en implantant cette façon-là, autre, de travailler ensemble, bien, on se ferme
moins. Mais bien sûr qu'on va toujours être confrontés, comme parents,
au fait que ce n'est pas nous, l'expert qui fait la prescription de la
médication.
Vous
savez, moi, j'ai vu mes enfants... 36 changements de traitement, là, 36,
là. 36, je ne sais pas si vous savez ce que ça veut dire, là. C'est que, chaque fois que tu vas le voir, il est
plus ou moins présent, hein? Il n'est pas là, parce qu'ils viennent
d'essayer une médication, mais ce n'est pas toi qui tiens la prescription. Par
contre, si on t'écoute, bien, tu vas être capable de dire : Écoutez, ça ne
fonctionne pas, je ne suis même pas capable d'aller dîner avec... à midi parce qu'il est comme trop sous l'effet de la
médication. Est-ce que c'est ça, contrôler les symptômes? Est-ce que c'est ça,
permettre à quelqu'un de vivre en société? C'est comme une prison
chimique rendu là, là.
Alors
là, si on crée des brèches, qu'on se repose la question : La protection
personnelle est au service de qui, à moi comme travailleuse sociale par
rapport à mon ordre professionnel ou au service d'un partage d'information
circonscrite pour le bien-être de la
personne? Là, on va moins fermer des portes. Mais il faut être capable de
changer ce paradigme-là. Et là, en ce
moment, bien, c'est une brèche ici qu'on peut utiliser. Il faut en utiliser
dans l'implantation. C'est sûr que, si c'est
adopté puis il n'y a pas de plan d'implantation, vous n'impliquez pas des
parents comme nous, bien, ça va être difficile parce que la résistance
va rester là.
Mme Maccarone :
Sauf qu'on parle de la maladie mentale, puis on a des préjugés. On parle de
consentement. Alors, qu'est-ce qu'on a besoin, comme formation dans le réseau,
pour que les professionnels, pour que tout le monde qui sont impliqués comprennent qu'il y a un effet...
Il y a quand même des préjugés, puis ils ont droit à leurs droits, à leurs
droits civils, ils ont droit à dire leur consentement aussi. Je ne veux pas
prendre ces médicaments-là. Mais ça se peut que... On a le Curateur, qui est impliqué, puis il n'y a pas
de maman qui est là qui va militer... On définit ça comment d'abord? Parce
que qu'est-ce qu'on va faire à l'intérieur
de qu'est-ce que nous sommes en train de faire? Puis, écoute, c'est de bonne
volonté partout, là, on veut aider,
puis ce n'est que de la collaboration. Mais, quand ça vient sur la santé
mentale, il y a des préjugés.
Mme Richard
(Louise) : Bien, c'est pour ça qu'on parle de partenaires. Alors,
quand on va faire les plans d'intervention,
les plans de soins, et tout ça, le proche va être assis ou la personne qui est
en lien affectif avec le patient va être
aussi à la table, et là vous allez pouvoir, en tant que parent ou lié à la
personne, dire ce que vous voyez, dire ce que vous pouvez apporter pour que ça serve à la réflexion commune. C'est ça
le partenariat. Mais il faut qu'on crée, dans la loi, formellement... Parce qu'on a beau... Les droits et libertés s'est battu... s'est
défendu bec et ongles. Alors, il faut vraiment des... On est du droit positif, là. Il faut vraiment, pour pouvoir
fonctionner librement, sans avoir peur des poursuites, mettre le libellé clair dans la loi que, pour le proche
désigné, on peut donner des informations qui font partie du secret
professionnel. Vous allez régler tous les barrages. Il n'y en aura plus.
Mme Péloquin (Suzanne) : Puis, oui, ça va prendre des programmes de
formation, puis, oui, ça va prendre que les ordres professionnels se remettent en question sur cette
protection-là, puis on défait des paradigmes, puis... Mais il y a déjà des initiatives qui se
passent dans différentes régions, entre
autres au niveau des programmes de
première psychose où ils tentent de plus en plus de travailler avec un
proche.
Et
le cheminement en santé mentale, ce n'est pas un cheminement linéaire, malheureusement, parce que c'est lié à une personne, dans la manière dont elle vit ses premiers épisodes de
santé mentale, et les proches, comment on réagit ou pas. Et, oui, si on n'est pas un parent lion, si on
n'est pas une lionne vorace, bien, si le système continue de se
comporter comme ça, bien, ça fait des
parents qui, finalement, abandonnent. Pas parce qu'ils manquent d'amour, mais ils abandonnent parce que ça devient trop difficile, accompagner le
proche souffrant, puis en en plus défoncer des portes du système. Alors, ils
vont se replier sur eux, et là, bien... Et c'est pour ça que ça prend des
modifications comme le projet de loi aujourd'hui.
Mme Maccarone :
Merci.
La Présidente
(Mme Chassé) : ...bloc d'échange, Mme la députée.
Mme Maccarone :
C'est parfait pour moi. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci pour les témoignages éloquents.
Je cède maintenant la parole à la députée de Sherbrooke. Allez-y.
Mme Labrie :
Merci. Écoutez, je vous remercie pour votre témoignage éloquent, effectivement,
et très touchant. Je pense que vous
pouvez compter sur moi, assurément, pour défendre les modifications que vous
proposez. Je pense que c'est des ajouts essentiels, puis vous m'en avez fait la
démonstration.
Personnellement,
je n'ai pas de question, ça fait que j'aimerais vous laisser mon temps s'il y a
des choses que vous aimeriez ajouter puis que vous n'avez pas eu le
temps jusqu'à maintenant.
M. Cloutier
(René) : Peut-être,
en complément aux questions... On est dans un changement de culture, notamment dans
le réseau de la santé, pour y avoir travaillé, là, dans le domaine de la santé
mentale. Donc, on sait déjà qu'au
niveau du Curateur public, il y a des
efforts qui sont mis dans l'implantation, hein, l'après, là, pour être sûrs que
ce projet de loi là fonctionne. Donc, ça, c'est pour ça qu'on insiste beaucoup
sur le défi que ça pose, des formations, des relances, un soutien aux familles qui vont rencontrer, malgré les
changements législatifs, les mêmes obstacles, mêmes difficultés. Donc, ça va
prendre un suivi serré parce qu'un
changement de culture, bien, ça se planifie, mais aussi il faut être patients,
persévérants parce que ça va prendre
des années avant qu'on puisse apporter ces changements-là. Mais on y croit, et
c'est pour ça qu'on a offert notre collaboration à l'implantation de ce
projet de loi là.
Mme Péloquin
(Suzanne) : Et, même s'il y
a juste 13 % des gens actuellement qui se retrouvent en situation, dans
le fond, plus orphelins, on va dire, d'un
réseau social, bien, il ne faut pas le négliger parce que ce 13 % là, il
faut qu'on aille apprendre d'eux
pourquoi ils se retrouvent dans une situation... orphelins d'une société. Parce
qu'ils vont vieillir. Vous savez, quand
on parle... Moi, je trouve ça toujours un petit peu triste que, dans le fond,
on enferme mes enfants dans un diagnostic de santé mentale, alors qu'ils sont des citoyens à part entière, qui ont
encore le droit de voter et qui vont vieillir. Et tantôt, quand ils vont
être rendus vieux, ce qu'on va dire qui fait une différence dans la vieillesse
et l'autonomie, c'est le fait qu'il y ait un réseau. Alors, comment peut-on se
permettre que 13 % de notre monde, et tous les autres, bien, on accepte qu'ils vont vieillir sans réseau? Comment on va
faire pour rattraper un réseau quand ils vont être rendus vieux puis que
c'est ça qui va faire une différence?
Alors, il
faut absolument se demander de quelle façon... Même si... Je comprends, tu
sais, que le Code civil, il ne vient pas dire : Bien oui, on peut désigner
une autre personne morale... Oui, mais c'est de notre responsabilité, lorsqu'on
est assis à votre table, de dire
comment on va faire ça pour que ces 13 % là... Et je ne l'espère pas, mais
peut-être qu'un de mes enfants va se retrouver
dans ce 13 % là un jour. Imaginez qu'on part tout le monde en même temps,
un beau voyage, que je ne peux pas faire, d'ailleurs, avec mes enfants
parce qu'ils ne sont pas capables de prendre l'avion...
La Présidente (Mme Chassé) : ...
• (15 h 40) •
Mme Péloquin
(Suzanne) : Oui, en
conclusion. Imaginez qu'on meurt tout le monde ensemble, bien, qu'est-ce
qui arrive, tu sais?
La Présidente (Mme Chassé) :
C'est terminé. Je suis désolée. Oui, M. le ministre.
M. Lacombe :
Est-ce que vous me permettez, Mme la Présidente, d'ajouter quelque chose, en
20 secondes, au bénéfice de tout le monde, sur le secret
professionnel?
La Présidente (Mme Chassé) : Oui.
Est-ce qu'il y a le consentement à l'unanimité? Très bien. M. le ministre.
20 secondes.
M.
Lacombe : Ça me brûlait, là,
de pouvoir sauter dans l'arène pour vous dire que c'est un excellent point. Et
ça ne se retrouve pas présentement dans ce que vous voyez, mais le ministère de la Justice... on
a saisi le ministère de la Justice de cette question-là pour
qu'éventuellement on puisse vous présenter, on puisse présenter, plus tard dans
le processus, effectivement, un élément où on pourra... où on pourrait, on va
mettre ça au conditionnel parce que c'est en travail, présentement, mais ouvrir le secret professionnel pour que l'assistant puisse
avoir accès aux informations.
La Présidente (Mme Chassé) : Merci
pour votre contribution aux travaux.
Je suspends momentanément pour laisser la place
au prochain groupe.
(Suspension de la séance à 15 h 41)
(Reprise à 15 h 43)
La
Présidente (Mme Chassé) : ...la
bienvenue aux représentants de la Chaire de recherche Antoine-Turmel sur la
protection juridique des aînés. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et ensuite
nous procéderons à une période d'échange. À une minute de la fin de votre exposé, je vais vous faire un signe
pour vous inviter à conclure. Débutez en commençant par vous présenter.
Bienvenue.
Chaire de recherche Antoine-Turmel sur
la protection juridique des aînés
Mme Morin (Christine) : Merci
beaucoup. Bonjour. Mon nom est Christine Morin, je suis professeure à la
Faculté de droit de l'Université Laval et titulaire de la Chaire de recherche
Antoine-Turmel sur la protection juridique des aînés. Je suis accompagnée par Katherine
Champagne, qui est notaire coordonnatrice à la chaire et chargée de cours
à la faculté de droit.
Alors,
pour ceux qui ne connaîtraient pas la chaire Antoine-Turmel, c'est une chaire
de recherche qui est à la Faculté de
droit de l'Université Laval, qui a
été créée à l'automne 2014 et qui regroupe des professeurs et des
étudiants qui s'intéressent à la question de la protection des droits des
personnes aînées. Donc, comme le projet de recherche... le projet de
loi, pardon, qui est discuté aujourd'hui
touche à un de nos sujets de recherche mais aussi d'enseignement, on est très
heureuses d'être parmi vous aujourd'hui et on vous remercie pour
l'invitation.
Alors,
d'emblée, on accueille favorablement le projet de loi n° 18
parce qu'on considère qu'il favorise le respect des droits, des volontés et même des préférences des personnes qui sont
en situation de vulnérabilité. Donc, clairement, dans ce sens, il va... il est en phase avec les grandes
orientations, à l'international, en matière d'accompagnement des personnes
qui sont en situation de vulnérabilité. Et je dirais que c'est particulièrement
le cas de la nouvelle mesure d'assistance qui
est proposée dans le projet de loi et qui ne requiert pas d'évaluation
médicale, d'évaluation psychosociale, en plus d'avoir l'avantage de préserver la capacité juridique de
la personne qui est assistée. Donc, clairement, cette nouvelle mesure-là,
elle est en phase avec la Convention
relative aux droits des personnes handicapées, et particulièrement de son
article 12.
J'en profite pour
vous souligner également que cette notion d'assistance est aussi en phase avec
la notion de bientraitance dont il est
abondamment question dans le Plan d'action gouvernemental pour contrer la
maltraitance envers les personnes
aînées. Alors, comme plusieurs organismes qui se sont présentés devant vous, on
pense que la nouvelle mesure va permettre de combler un besoin et on
pense que ça pourrait également être un élément qui va être utile dans la
future politique nationale en matière de proche aidance, donc on pense que ça
va pouvoir aider aussi à cet égard.
Toutefois,
pour que la nouvelle mesure d'assistance soit utilisée et pour que la population
adhère à ses objectifs, il va falloir un important travail de
sensibilisation et d'information parce que ça représente une vraie nouveauté.
La mesure d'assistance va aussi devoir être
bien encadrée par le Curateur public et par son équipe si on veut que la mesure
soit efficace et si on veut que la mesure soit sécuritaire. Ça va être
important, donc, que le Curateur public dispose des ressources humaines et matérielles nécessaires pour que le
projet de loi commence sur un bon pied, donc qu'il n'y ait pas de faux pas.
On
a, par ailleurs, certaines interrogations par rapport au rôle de l'assistant.
Donc, le projet de loi, en ce moment, prévoit qu'il y ait des mesures de
protection au moment de la mise en place de la mesure auprès du Curateur public,
mais nous, on s'interroge sur ce qui se
passe par la suite. Alors, par exemple, si, après un certain temps, l'assisté
perd sa faculté de comprendre la
mesure de protection ou si l'assisté perd sa faculté d'exprimer ses volontés et
ses préférences, qu'est-ce qui se passe? Est-ce que l'assistant va
pouvoir continuer à agir? Est-ce que l'assistant va devoir en informer le
Curateur public ou on continue comme s'il ne
s'était rien passé? Donc, on pense que ça, en ce moment, ce n'est pas assez
clair dans le projet de loi.
Pour
ce qui est de la représentation temporaire, à la base, ça nous apparaît être
une très bonne idée de prévoir une mesure
qui est justement temporaire pour un acte déterminé. Par contre, on a certaines
craintes par rapport à l'utilisation qui
pourrait être faite de la représentation temporaire. Donc, on a l'impression
que si les gens doivent aller chez le médecin pour obtenir une évaluation
médicale et qu'ils doivent ensuite se présenter devant le tribunal pour obtenir
la mesure temporaire, bien, on pense qu'il y a des gens qui vont se
dire : Allons-y directement avec la mise en place d'une tutelle modulée ou
allons-y directement avec l'homologation d'un mandat de protection pour éviter
d'avoir à retourner devant le tribunal par
la suite. Et parce que parfois les gens ont tendance à vouloir surprotéger,
donc, ils vont se dire : Bien, en ouvrant
tout de suite une tutelle, on va protéger une fois pour toutes. Donc, on craint
qu'il y ait des dérives à ce niveau-là. Donc, c'est pour ça qu'on pense
qu'on devrait réfléchir à tenter de simplifier cette mesure-là si on veut que
les gens la choisissent.
• (15 h 50) •
Pour ce qui est des
régimes de protection, de leur simplification, donc, très rapidement, on est
favorables à la simplification des règles, on est favorables à la tutelle qui
serait modulée, mais là, encore une fois, pour que la nouvelle mesure fonctionne, il va falloir une
sensibilisation très importante chez les médecins, chez les travailleurs
sociaux, chez les juristes et dans la population en général. Si on ne le fait pas suffisamment, on risque de se retrouver avec des tutelles qui ne seront toujours pas modulées en fonction des besoins de la personne,
et c'est déjà le cas qui se présente en ce moment. Donc, si on veut vraiment qu'il y ait un changement, il va
falloir une sensibilisation importante.
En
ce qui a trait au mandat de protection, alors, tout d'abord, on se réjouit du
fait que vous ayez profité de ce projet
de loi là pour venir répondre à certaines demandes des juristes de corriger
certaines lacunes. On se réjouit particulièrement
par rapport à la clarification qui est apportée à l'article 154 du Code civil.
Ça peut paraître un détail, mais, pour les juristes, c'est fondamental. Donc, maintenant,
154 du Code civil dit que la capacité d'un majeur est limitée par
l'homologation d'un mandat de
protection. Ce n'était pas clair, ce n'était écrit nulle part dans la loi, donc
il y avait des incertitudes par
rapport à ça. On vient ici vraiment
corriger une lacune. Et j'en profite pour mentionner qu'on se réjouit de tous
les petits changements qui sont
apportés dans le Code civil où on vient préciser les effets de l'homologation
d'un mandat de protection, parce qu'à plusieurs égards ce n'était pas suffisamment
clair, et là on a fait un bon bout de chemin.
On
est aussi heureuses que l'inventaire et les redditions de comptes
deviennent obligatoires, sauf... à moins que le mandant y renonce expressément
dans le cas des redditions de comptes. On est contentes, parce que ces mesures-là nous apparaissent des mesures qui sont très utiles en matière de
prévention de la... maltraitance, pardon, et de l'exploitation financière des personnes qui sont assistées ou
représentées. Qu'est-ce qui se passe, en ce moment, quand il n'y a pas de
reddition de comptes et qu'un mandataire
fait mal son travail? Bien, c'est qu'on va s'en apercevoir seulement au moment
du décès du mandataire, au moment du décès du mandant ou lorsque le patrimoine
du mandant va être épuisé. Donc, il n'y aura plus rien, il va être trop tard
pour réagir.
La Présidente (Mme Chassé) : ...
Mme
Morin (Christine) : Alors,
rapidement, peut-être, sur la procuration. Pour le reste, vous en profiterez
dans les questions, si vous avez
besoin, donc, on voulait vous parler de la procuration, même s'il n'en est pas
question dans le projet de loi, parce
que la recherche montre abondamment que les gens, encore aujourd'hui, ne
distinguent pas suffisamment une procuration d'un mandat de protection.
Alors, c'est surprenant, le nombre de personnes qui confondent encore les deux instruments ou qui signent des procurations
en prévision de leur inaptitude plutôt que de signer des mandats en prévision
de leur inaptitude. Et le problème, en ce
moment, avec les procurations, c'est que, oui, c'est un instrument qui peut
être utile, mais ça peut aussi devenir un outil qui est utile pour exploiter ou
maltraiter financièrement le mandant parce qu'une fois qu'on a donné les pouvoirs, bien, la personne
peut les utiliser comme elle veut, puis ce n'est pas toujours dans l'intérêt
de la personne.
La
Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie pour votre exposé. Nous
allons débuter le bloc d'échange en commençant avec le parti formant le
gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Lacombe : Merci, Mme la Présidente. C'est un plaisir de vous
rencontrer. Merci beaucoup d'être ici pour nous exposer vos
recommandations, vos questionnements, et puis nous permettre de vous poser des
questions.
Je vais
attraper tout de suite la balle au bond. Vous venez de parler de procuration,
et lorsqu'on a commencé à travailler sur
le projet de loi, pour certaines personnes, il y avait une confusion, on
opposait la procuration à la mesure d'assistance. Certaines personnes se demandaient quelle est la différence.
On vous a avec nous, aujourd'hui, il y en a beaucoup, mais j'aimerais vous entendre, de votre point de vue...
les grandes différences entre la mesure d'assistance et puis la procuration
Mme Morin (Christine) : Bien, avec
la mesure d'assistance, la personne conserve ses pouvoirs, conserve sa capacité, conserve ses facultés, et il y a
quelqu'un qui vient l'accompagner, lui donner de l'aide. Avec une procuration,
vous le savez, on donne nos pouvoirs
à quelqu'un d'autre. Et là, cette personne-là, si on a donné une procuration
générale, et, dans les faits, là, il
y a des gens qui signent des procurations générales plus plusieurs procurations
bancaires, une fois qu'on a fait ça, bien, la personne qui a la
procuration, elle peut faire ce qu'elle veut avec nos biens, on lui a donné le
pouvoir de faire ce qu'elle voulait avec nos
biens. Si on a bien choisi notre
mandataire, il n'y a pas de souci. Puis, heureusement, dans la plupart des cas, là,
les gens sont corrects. Mais dans la littérature, et ce n'est pas qu'au Québec, là, aux États-Unis, on en parle aussi
abondamment, on parle de la procuration comme «a licence to steal», un permis
de voler, parce qu'une fois qu'on a
signé ça, on a donné les pouvoirs à quelqu'un d'autre. Donc, il faut surveiller
cette personne-là pour s'assurer qu'elle les utilise bien, ces
pouvoirs-là. Et, si c'est moi, par exemple, qui donne une procuration à
quelqu'un, bien, je peux le surveiller. Je peux lui poser des questions par rapport à ce qu'il fait ou à ce qu'il ne fait pas par rapport à mon patrimoine. Puis, si je ne suis pas contente, je peux
révoquer la procuration.
Le problème
en ce moment, c'est qu'il y a des personnes inaptes qui ont des procurations, notamment
les procurations bancaires, et ces
personnes-là ne sont plus en mesure de surveiller leurs mandataires, ne sont
plus en mesure de leur poser des
questions, ne sont plus en mesure de mettre fin à ces procurations-là, et c'est
là qu'il y a un risque pour les abus parce que les mandataires qui sont mal intentionnés ont le
champ libre, il n'y a personne qui les surveille. Donc, on a donné le
pouvoir, il y a du danger qui vient avec ça si on a mal choisi, malheureusement,
le mandataire.
M.
Lacombe : Merci. À la
page 9 de votre mémoire, vous... je vais y arriver... Je voulais vous
parler, en fait, du rôle, disons du futur directeur d'on ne sait pas
trop quoi — on
est en train d'y penser,d'ailleurs, si vous avez des suggestions, hein... Vous mentionnez qu'on devrait prévoir que
le directeur détienne les pouvoirs nécessaires pour éventuellement prendre les mesures appropriées pour évaluer si la personne qui
est choisie pour être assistante... si ce choix-là pourrait être préjudiciable
pour la personne qui va être assistée. Notamment, vous avez beaucoup parlé
d'exploitation, maltraitance matérielle et
financière, pour tenter de prévenir ça. Donc, vous dites que le directeur
devrait avoir les pouvoirs. À quel type de pouvoirs vous faites
référence?
Mme Morin (Christine) : Bien, tout
d'abord, sur le nom du futur directeur de quelque chose, on fait quelques propositions dans le mémoire. Mais, par rapport au pouvoir du Curateur public, on pense toujours en termes de
prévention. Donc, si le Curateur public, lorsqu'il rencontre le futur assistant, a des doutes, quand il
s'entretient avec la personne, s'il soupçonne qu'il y a de l'influence indue, par exemple, que la personne a déjà des procurations en sa faveur, donc, s'il
sent que peut-être cette relation-là
n'est pas saine à tous égards, bien, on veut que le Curateur public puisse faire des vérifications. Oui, qu'il puisse vérifier notamment le plumitif, qu'il puisse parler avec des membres
de la famille. Et pourquoi on suggère ça?
Bien, c'est pour éclairer la décision de l'assisté. Donc, c'est l'assisté qui
doit choisir son assistante, puis ça, on en convient, on n'a pas de problème avec ça, mais encore
faut-il que le choix de l'assistant résulte d'une décision qui est libre et qui
est éclairée. Donc, pour que cette décision-là soit éclairée, s'il y a
des choses à connaître par rapport au futur assistant, bien, ce serait bien que le Curateur public puisse les porter à l'attention du futur assisté : Saviez-vous que
votre futur assistant a été reconnu
coupable de telle infraction, il y a tant d'années? Puis peut-être
que l'assisté va dire : Oui, je le sais. Il avait 19 ans. C'était un petit vol, je le sais, il me l'a dit,
je lui fais quand même confiance. Mais, au moins, la personne va le savoir puis, à partir de là, elle pourra prendre
sa décision, alors que si on trouve autre chose, puis des choses plus graves,
de l'exploitation financière en série, bien,
là, à ce moment-là, probablement que l'assisté va dire : Ah, bien, peut-être
que je devrais opter pour quelqu'un d'autre.
• (16 heures) •
M.
Lacombe : Est-ce que... Parce qu'on... Je ne sais
pas, je pense que vous avez vu toute la liste de filtres qu'on s'imposerait avec cette mesure-là. Je dois dire
que moi-même, je suis assez impressionné, là, de voir tout ce qui est mis
sur la table. Est-ce
que ça vous rassure, quand même? Parce qu'il y a quand même beaucoup d'éléments
que vous mentionnez qui sont prévus,
entre guillemets, là-dedans. Je comprends que le Curateur ou le directeur de
l'assistance, peut-être, et de la tutelle,
comme vous le proposez, n'ira pas vérifier dans le plumitif, par exemple, mais,
avec tout ce qui est écrit là, tout ce qui serait prévu, est-ce que ça
vous rassure quand même un peu?
Mme Morin
(Christine) : Bien, en fait,
ça me rassure, mais, s'il y a des doutes, nous, on aimerait que le curateur
puisse investiguer davantage. Donc, en cas
de doute, pas que ça devienne une obligation, mais, si on sent que, hum! on
n'est pas si certain que ça par rapport au
choix de l'assistant, bien, que le curateur prenne la peine de faire certaines
vérifications minimales pour rassurer tout le monde.
M.
Lacombe : On en prend bonne note. Au sujet de la représentation
temporaire, vous questionnez le recours au tribunal, la nécessité, donc,
de l'intervention du tribunal puis l'obtention d'une évaluation médicale pour
avoir accès à cette mesure, la
représentation temporaire. Vous suggérez qu'on puisse recourir au même type de
procédure que pour le consentement
aux soins, c'est-à-dire... Et là je ne suis pas juriste, là, mais ce que je
comprends, c'est que, s'il y a un doute que la personne ne peut
consentir aux soins, on demande un consentement substitué.
Une voix : ...
M.
Lacombe : Pas si pire, pas si pire. En fait, ce que je me demande,
c'est quelle autre instance que le tribunal pourrait accorder une représentation comme celle-là? Parce
que ce n'est pas exactement le même cadre. On n'est pas devant une
personne dans le réseau de la santé.
Mme Morin
(Christine) : Bien, en fait,
il faut chercher c'est quoi, l'objectif d'aller chercher une représentation
temporaire, c'est pour faire quel type
d'acte, puis c'est pour satisfaire quelle demande, donc, pourquoi on en a
besoin, de cette représentation
temporaire là. Est-ce que ça pourrait passer par le Curateur public? Gros point
d'interrogation. S'il faut absolument que ça passe par le tribunal,
est-ce que c'est obligé de venir avec une étiquette de personne inapte? Nous, c'est là qu'on voir un danger. Parce qu'à l'heure
actuelle, puisqu'il faut aller chez le médecin faire déclarer que la personne,
elle est inapte, bien, ça risque de créer un
doute pour tout le monde, puisqu'on a jugé qu'elle était inapte pour faire cet
acte-là.
M. Lacombe : Il ne faut pas qu'elle
soit stigmatisée.
Mme Morin
(Christine) : Exactement.
Elle veut faire un testament après. Quel notaire va accepter de recevoir ce
testament-là, sachant que la personne a été
considérée inapte pour vendre sa maison? Donc, si elle n'était pas apte pour
vendre sa maison, elle ne devrait pas être apte pour signer son testament.
Donc, si ce qu'on veut, c'est une autorisation judiciaire pour poser un acte, ça va. Est-ce que c'est obligé de
venir avec une étiquette de personne qui est inapte? C'est notre grande
interrogation, parce que c'est à partir de là que commencent les difficultés.
Une fois que la personne est étiquetée comme personne inapte, là, tout le monde pense tutelle, homologation de mandat
de protection, donc perte de la capacité juridique.
M. Lacombe : On en a pris bonne
note. C'est un point de vue intéressant et avisé. On a pris des notes. Merci.
La
Présidente (Mme Chassé) : Est-ce que je cède la parole à une députée?
La députée de Les Plaines? Allez-y, vous avez 6 min 30 s.
Mme Lecours
(Les Plaines) : 6 min 30 s. Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Merci, M. le ministre. Merci beaucoup à vous,
Mmes Champagne et Morin. Merci, c'est vraiment très clair. Dans une de mes
questions que j'avais, là, je voulais vous demander justement un peu de
commentaires sur l'obligation des mandataires à dresser un inventaire des biens et de le faire de façon périodique
également dans la reddition de comptes. Je pense que j'ai bien compris que vous
êtes en faveur de cet ajout-là. Par ailleurs, est-ce que vous êtes... vous
seriez opposés à certains... que certains changements soient apportés,
comme l'autorisation du tuteur à confondre ses biens avec ceux de son conjoint
s'il en est le tuteur?
Mme Morin (Christine) : Là, vous
parlez de la tutelle ou du mandat de protection?
Mme Lecours (Les Plaines) : Oui,
tutelle.
Mme Morin
(Christine) : De la tutelle,
O.K. Dans la mesure où les biens étaient déjà confondus avant la mesure de protection, bien, ça nous apparaît normal qu'il
demeure une certaine confusion pour la suite. Mais il ne faut pas que la
confusion des biens commence avec la mesure de
protection. Donc, il faut faire attention. C'est sûr que, dans l'idéal, dans
l'absolu, c'est mieux quand les patrimoines
sont séparés, mais déjà, en exigeant l'inventaire puis les redditions de
comptes, ça va faire un gros changement. Parce qu'il y a des gens qui
n'en sont pas conscients, il y a des gens à qui on demande : Est-ce que les comptes de banque sont séparés?,
puis qu'ils nous disent : Non, est-ce qu'ils devraient l'être?, donc, qui
sont surpris de l'apprendre. Donc, si
on clarifie, déjà, ça va aider beaucoup. Est-ce que vous le proposez dans le
projet de loi, par rapport à la tutelle, de confondre les biens?
Mme Lecours (Les Plaines) : Non,
c'est une question que je vous pose...
Mme
Morin (Christine) : O.K.,
O.K., O.K. Bien, en fait, comme je vous dis, si c'était déjà confondu avant, on
n'a pas d'opposition formelle au départ, là.
Il faudrait y réfléchir davantage. Mais c'est sûr que, dans l'absolu, c'est
plus facile de contrôler quand c'est séparé, mais, si les gens
ont toujours confondu, il va demeurer une certaine confusion,
au moins tant et aussi longtemps que les gens cohabitent.
Mme
Lecours (Les Plaines) :
C'est parce qu'on a affaire à une
clientèle, quand même, aujourd'hui, dans nos aînés, qui ont des
habitudes de vie... qui avaient des habitudes de vie qu'on n'a plus
nécessairement aujourd'hui, dans... tout dépendant
des générations, là.
Mme Morin
(Christine) : Mais ça va
beaucoup dépendre de la modulation, parce que la modulation, là, c'est une
excellente idée, et, si on veut qu'elle soit en phase avec la convention
internationale, notamment, bien, il faudrait que la modulation, ce soit plus souvent de l'assistance, auquel cas il n'y a
pas de problème avec la confusion des biens, que de la représentation et des décisions
substituées. Donc, ça va dépendre comment on va gérer les futures tutelles.
Déjà, on fait un superpas en
éliminant la curatelle complètement. Donc, ça force davantage les tribunaux à
venir expliquer c'est quoi, la
tutelle, parce que, puisque tout le monde va être sous tutelle, bien, il va
falloir prendre en considération chaque personne. Mais, si on veut se rapprocher de ce qu'exige
l'international, il faut espérer que nos tutelles, dans la mesure du possible,
vont y aller vers l'assistance et non
la représentation, puis là, si je reviens à votre question, bien, avec
l'assistance, il n'y a pas de souci.
Mme Lecours (Les Plaines) : J'ai
encore du temps?
La Présidente (Mme Chassé) : Trois
minutes.
Mme
Lecours (Les Plaines) : Je vais me permettre la question, parce qu'on
a eu un éminent chercheur hier qui est
venu nous exposer que, oui, le projet de loi était vraiment intéressant, qu'il
avançait très... qu'il était une avancée, par contre, il y avait quand même des choses qu'on devrait conserver :
Est-ce que vous êtes d'accord avec cette position-là?
Mme Morin
(Christine) : Alors,
l'éminent chercheur étant mon collègue, que j'apprécie beaucoup, avec lequel
je m'entends très, très bien et avec qui je
suis d'accord dans la plupart des situations. En fait, là où on n'est pas
d'accord, c'est notre interprétation de la convention internationale. C'est
vraiment sur cet élément-là qu'on n'est pas d'accord. Et, pour m'être rendue à l'ONU, à Genève, pour en parler
avec la rapporteuse spéciale, là, elle, elle vous dirait que le projet de loi n° 18 ne va pas assez loin. Elle,
elle vous dirait que ce qui fonctionne avec le projet de loi n° 18, c'est la mesure d'assistance parce que ce n'est pas des décisions substituées. Ce qui fonctionne avec le
projet de loi n° 18, c'est la fin de la curatelle — alors, ça, elle l'applaudirait aussi — mais, dans la mesure où on conserve la
possibilité d'avoir des décisions substituées, elle nous dirait qu'on ne va pas encore assez loin, et c'est
pour ça que le Canada a émis une réserve par rapport à l'article 12 de la
convention. Les juristes ont eu raison de le faire parce que, tant qu'on garde
les mesures de représentation, bien, on n'est pas conforme à
l'article 12 de la convention internationale.
Donc, est-ce
que c'est utopique, ce que propose l'ONU? Point d'interrogation. Je vois des
gens qui font oui de la tête, mais c'est vers ça qu'on se dirige. C'est un vrai
changement de paradigme, c'est de penser la capacité juridique comme un droit fondamental que tout le monde doit avoir,
puis le seul cas de décision substituée, ce serait quelqu'un qui est dans le
coma, donc quelqu'un qui ne peut vraiment pas prendre ses décisions. Pour
toutes les autres personnes, il faudrait ajuster l'assistance pour qu'elle soit de plus en plus importante, mais ne
jamais prendre les décisions à la place de la personne. Donc, la
convention... Est-ce que je peux continuer? Oui?
La
Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste une minute, mais je sais que
le ministre aimerait intervenir à la fin.
Mme Morin
(Christine) : O.K. Alors,
avec la convention, là, ce que prônent les Nations unies, c'est vraiment de
mettre de côté le meilleur intérêt de la personne pour remplacer par le respect
des volontés et des préférences de la personne. Donc, on change
l'équilibre, parce qu'en ce moment, bon, on fait... on va considérer ce que la
personne souhaite, mais, à la fin, on va prendre la décision dans son meilleur
intérêt. Ce qui est prôné comme changement de paradigme, c'est : Allons-y avec les volontés, et les préférences,
et, de façon subsidiaire, le meilleur intérêt de la personne selon nous, selon
nos critères. Donc, pour eux, on n'irait pas encore assez loin, même si on fait
un bon bout de chemin.
La Présidente (Mme Chassé) : Il vous
reste 15 secondes, M. le ministre.
M. Lacombe : Pour terminer avec un
clin d'oeil, pour vous dire qu'il n'y a pas de chicane, je pense, avec votre collègue, parce qu'hier il nous a quand même dit
que sa préoccupation, c'est que ce ne serait pas populaire, mais que, si
c'était populaire, on avait un excellent projet de loi.
• (16 h 10) •
La
Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien. Ça termine le bloc
d'échange avec le parti formant le gouvernement. Maintenant, je cède la
parole à la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme
Maccarone : Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup pour votre présence avec nous aujourd'hui, c'est fort intéressant, qu'est-ce que vous avez soumis à notre commission.
J'ai une question pour vous puis je vais peinturer quand même
un portrait, parce que vous avez abordé le sujet un peu avec le ministre : Est-ce que vous croyez qu'il
y a un risque d'abus avec la mesure
d'assistance, par exemple, si on parle de la maltraitance des aînés? Puis
vous avez dit que oui, ça se peut, il
faut informer, quand même, le majeur que ça se peut, la personne
à l'assistance, il y a quelque
chose qui s'est passé dans leur passé. Mais, mettons, comme
ma collègue l'a dit, mais si c'est ma nièce... oui, mais
c'est ma nièce. Qu'est-ce qu'on fait
dans un cas de même? Est-ce qu'il y a une manière de mieux encadrer qu'est-ce que nous
faisons, puis est-ce qu'il y a
vraiment un risque d'abus ou de maltraitance?
Mme Morin (Christine) : Malheureusement, je dois vous répondre qu'il y aura
toujours des risques d'abus et de maltraitance. Mais la mesure d'assistance qui est présentée me fait beaucoup
moins peur que les procurations en ce
moment, les procurations générales, les procurations
bancaires, où, là, on vient donner les pouvoirs à quelqu'un
d'autre. La mesure d'assistance, là,
la beauté de cette mesure-là, c'est que l'assistant ne peut pas faire les
choses à la place de l'assisté. Donc, c'est nécessairement l'assisté qui
va aller à la banque, c'est nécessairement l'assisté qui va prendre la
décision, c'est nécessairement l'assisté qui va vendre le bien.
Donc, l'assistant, là
où il pourrait y avoir un danger, entre guillemets, c'est au niveau de
l'influence indue qu'il pourrait exercer sur
l'assisté. Mais ça, ça existe déjà, sans avoir de mécanisme d'assistance. Donc,
ça se peut, un proche qui fait des pressions sur son père, sur sa mère
pour obtenir des faveurs, des cadeaux, pour être avantagé dans un testament. Le fait qu'on formalise la mesure d'assistance,
selon moi, ça ne va pas accroître les risques, ça ne va pas les diminuer non
plus. On vient juste officialiser une assistance qui existe déjà souvent dans
les faits, puis, en la rendant officielle, bien, l'intérêt, c'est que ça devient opposable au tiers puis que
l'assistant devient un interlocuteur valable, donc quelqu'un
à qui on va accepter de parler, alors
que, là, quand les gens téléphonent en disant : Je suis la mère, je suis
la soeur, je suis la fille, parfois,
on va dire : Je ne peux pas vous dire ces informations-là. Alors là, on
espère pouvoir répondre : Vérifiez dans le registre, je suis l'assistant de cette personne-là, donnez-moi l'information. Puis, une fois que la personne a l'information, elle
ne peut pas davantage agir seule, c'est toujours l'assisté qui a sa
capacité, qui a tous ses pouvoirs, donc, moins de risques qu'avec la procuration, encore une fois. Moi, je pense qu'il faut regarder la procuration, qu'il y a
des choses à faire avec la procuration. C'est elle qui est dangereuse
puis c'est elle qui laisse des traces dans la jurisprudence en ce moment.
Mme
Maccarone : Est-ce qu'il y a
d'autres mesures d'encadrement que nous devrions mettre en considération,
exemple, quand... On a déjà entendu des intervenants qui parlaient des
personnes qui souffrent de déficience intellectuelle,
puis le droit de vote, puis vous parlez de
l'influence, est-ce qu'il y a autres
mesures dans lesquelles... qu'on devrait penser pour bonifier le projet de loi pour éviter que ces personnes sont à
risque de la maltraitance ou d'une influence négative, disons?
Mme Morin (Christine) : Bien, en fait, malheureusement, on sait que la
maltraitance, le plus souvent, ça se passe au sein des familles. Et, encore une fois, ici, qu'il y ait une
assistance formalisée ou pas, bien, ça va continuer à se passer au sein des
familles. Donc, je pense qu'il faut lutter contre le phénomène en général.
Qu'il y ait une mesure d'assistance ou pas
de mesure d'assistance, pour moi, ça ne m'apparaît pas plus risqué, à la base,
étant donné que la personne n'a pas de pouvoir. Donc, malheureusement,
je n'ai pas d'idée magique par rapport à ça.
Peut-être vous mentionner une question qui m'avait
été posée, puis j'en fais état dans notre mémoire, une conseillère juridique
chez Desjardins, qui... J'avais été donner une formation là-bas, où je
présentais le projet de loi, puis elle m'avait demandé : Si on se rend
compte qu'un de nos clients est exploité financièrement par son mandataire,
est-ce que moi, comme conseillère, est-ce que je peux téléphoner à
l'assistant pour essayer d'obtenir une forme de collaboration, et tout ça? Si je comprends bien le projet de loi,
actuellement, ce n'est pas le cas. Est-ce qu'on veut que ça demeure comme ça?
On peut. Mais si on veut qu'il y ait
cette espèce d'élément de réciprocité là, bien, il faudrait le prévoir dans le
projet de loi, parce qu'en ce moment l'assistant peut communiquer avec
Desjardins pour poser des questions, mais Desjardins ne pourrait pas téléphoner à l'assistant pour lui dire : Surveillez
votre père, frère, il y a des problèmes qui se passent avec son compte de banque. Donc, est-ce qu'on veut entrer
là-dedans? Gros point d'interrogation. Mais sachons que, là, en ce moment,
on ne le permet pas.
Mme Maccarone :
Ça m'amène à secret professionnel. Votre opinion sur la divulgation de ces
informations pour le bien-être du majeur?
Mme Morin (Christine) : En fait, j'ai le goût de vous retourner à notre
mémoire sur le projet de loi n° 115 en matière de maltraitance matérielle et financière. Je
trouve que le compromis que vous avez adopté à cette époque-là, c'était quand
même un compromis qui était raisonnable, donc ne pas considérer les personnes
aînées et les personnes en situation de vulnérabilité comme des personnes qui ne peuvent pas prendre leurs
propres décisions, mais obliger la divulgation d'information et mettre de côté le secret professionnel pour les
personnes qui sont déclarées inaptes et pour les personnes qui sont en CHSLD.
D'ailleurs,
à ce sujet-là, dans les modifications avec le projet de loi, là, il va falloir
penser à modifier la loi contre la
maltraitance parce que la curatelle disparaît, maintenant, c'est juste la
tutelle modulée, donc il va falloir ajuster, là, en conséquence.
Donc,
je pense que c'était, à l'époque, le compromis acceptable. Le problème avec
l'exploitation et avec la maltraitance, ce n'est pas tant une histoire d'obligation de divulguer ou de dénoncer
qu'une volonté de le faire, hein, même s'il y a une obligation dans la loi, si les gens veulent se
fermer les yeux puis dire : Bien, je n'ai rien vu, on a beau dire :
Vous étiez obligé de dénoncer, si les gens disent : Ah! je n'ai
rien vu...
Mme Maccarone : Je comprends.
Je ne suis pas légiste, alors peut-être j'aurais besoin... puis j'aimerais
avoir votre recommandation. Quand vous dites, sur votre page 14 : «Il
serait important que le projet de loi définisse la notion de "temporaire" et ce qu'il entend par
"acte déterminé"», votre recommandation, ça a l'air de quoi si on met
une définition de ces deux termes-là?
Mme Morin (Christine) : Oui,
bien, en fait, il faut voir c'est quoi, l'étendue de la représentation
temporaire à laquelle on pense. Donc, est-ce que c'est vraiment juste un acte
juridique, donc, par exemple, une renonciation à une succession ou un acte de
vente ou si on peut ouvrir un peu plus pour les dossiers qui s'échelonnent dans
le temps? Par exemple, dans le cadre du
règlement de la succession, des fois, il peut y avoir plusieurs interventions
nécessaires, donc est-ce qu'on peut
aller chercher une représentation temporaire pour les fins d'un dossier en
particulier, par opposition à un acte juridique en particulier? C'est dans ce
sens-là, donc est-ce qu'il y a une latitude laissée au tribunal pour aménager
la représentation temporaire?
Mme Maccarone : Une dernière
question.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste 2 min 30 s.
Mme Maccarone :
Parfait. Par rapport à la procuration, parce que je ne connais pas... J'ai la
procuration de ma mère, par exemple.
Elle l'a signée. C'est sûr que je n'ai pas eu cause de l'utiliser, c'est au cas
où il y a quelque chose qui arrive. Dans un cas où on a quelqu'un qui,
peut-être... On parle de la maltraitance. Est-ce qu'il y a un recours pour ces personnes-là? Parce qu'on dit : Ils ont tous
le droit maintenant, ils ont la procuration, puis cette personne-là peut agir
au nom du majeur. Mais est-ce que le
majeur, il a un recours légal? Est-ce qu'il y a quelque chose qu'il peut faire
pour éviter ou pour dire : Regarde, je ne veux plus ça maintenant,
je veux reprendre mes droits civils?
• (16 h 20) •
Mme Morin
(Christine) : Absolument. On
peut toujours mettre fin à une procuration, en tout temps. Le problème
en ce moment, c'est qu'il y a plein de gens qui l'ignorent.
On a fait une étude auprès de personnes aînées
en collaboration avec Option Consommateurs où on leur posait différentes questions par rapport à leurs
finances. Puis un des énoncés, c'était : Quand vous avez signé une
procuration ou une procuration
bancaire, comme mandant, vous pouvez y mettre fin en tout temps. Je ne me
rappelle pas exactement le pourcentage,
mais il y avait beaucoup de gens qui nous ont répondu non, qui ont dit :
Il faut qu'on obtienne l'accord de notre mandataire.
Donc, ils ne savaient pas qu'unilatéralement ils
pouvaient décider, du jour au lendemain, de mettre fin à cette procuration-là, alors que c'est un élément
important. Comme mandant, on peut toujours mettre fin à une procuration quand
on n'est plus content. On n'a pas besoin
d'avoir de motif, il n'y a pas besoin d'avoir d'histoire de maltraitance.
Demain matin, on décide qu'on ne veut
plus ce mandataire-là, on peut y mettre fin. Mais, parfois, les gens pensent
qu'il faut aller chercher l'autorisation
ou l'accord du mandataire, ce qui est faux, ce qui est un problème. Puis
l'autre problème, bien, c'est si le mandant
est devenu inapte puis qu'il ne se rend plus trop compte de ce qui se passe,
bien, il ne peut pas mettre fin non plus à la procuration parce qu'il ne
se rend juste plus compte de ce qui se passe. Donc, c'est là, le danger.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
reste moins de 30 secondes.
Mme
Maccarone : J'aurais plus un message pour le ministre, et le curateur
qui nous a quitté, mais peut-être que ça devrait faire partie de la
formation qui va être disséminée aux gens de savoir qu'ils ont des droits
légaux, parce que je pense qu'en grande majorité les gens ne sont pas au
courant qu'ils ont ce droit-là. Ça fait que ce serait d'éduquer la population qu'ils peuvent aller... il y a un
recours vis-à-vis la procuration, voici comment le faire, parce qu'on est en
train de refaire le réseau. Merci.
La
Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien, merci à vous. Je cède
maintenant la parole à la députée de Sherbrooke pour un bloc de
2 min 40 s.
Mme
Labrie : Merci. Vous avez abordé une question intéressante tantôt sur
la question de... est-ce que la banque, par exemple, peut signaler à l'assistant qu'il y a un problème. On peut
se demander aussi est-ce que la banque peut signaler à la personne que... Est-ce que la banque peut
signaler au curateur qu'il y a un problème avec un tuteur, par exemple? Est-ce
que c'est un mécanisme qui existe en ce
moment? Je comprends que non. Est-ce que vous pensez que c'est souhaitable de
l'inclure dans la loi, que n'importe quelle
instance pourrait signaler au curateur : Là, on pense qu'il y a quelque
chose de croche avec cette tutelle-là ou avec cet assistant-là?
Mme Morin
(Christine) : Bien, encore
une fois, ici, votre question interpelle la question de la confidentialité
puis, pour les professionnels, le
secret professionnel. Donc, en ce moment, l'institution financière a une
obligation de confidentialité, donc
elle n'est pas supposée d'avertir le Curateur public. Donc, la première chose
que devrait faire l'institution financière, c'est demander à son client... donc l'informer, lui offrir son aide. Si
le client accepte, là, c'est parfait. Le client peut toujours lever le secret professionnel ou l'obligation de
confidentialité, puis, à ce moment-là, le client... l'institution financière va
pouvoir informer des proches, le Curateur
public, peu importe. Mais, si le client refuse de lever l'obligation de
confidentialité, bien, c'est là qu'il
y a un problème parce qu'il faut respecter ce que le client a demandé. Donc,
c'est pour ça que les institutions financières
souvent, de plus en plus, vont inscrire dans les nouveaux comptes un mécanisme
qu'ils appellent la «trusted contact person».
Alors, cette personne de confiance là que l'institution financière peut
contacter, s'ils se rendent compte qu'il se passe quelque chose dans le compte de banque qui
est étrange, ils vont voir s'il y a cette personne-là identifiée, et là vont
pouvoir communiquer avec elle pour l'inviter
à accompagner son proche qui serait maltraité ou exploité financièrement.
Alors, la question qui m'avait été posée par la
conseillère de Desjardins, c'est : Si on n'a pas le nom de cette personne-là dans le compte de banque, bien, est-ce
qu'on pourrait utiliser le nom de l'assistant? Donc, est-ce qu'on pourrait
demander à l'assistant, dans la mesure où
l'assisté aurait coché une case, là, pour dire : Oui, j'accepte que ce
soit réciproque et que les tiers
puissent s'adresser à mon assistant en cas de besoin? En ce moment, ce n'est
pas le cas, mais c'est peut-être une
des voies, sans mettre de côté le secret professionnel, de reconnaître cette
personne-là comme une personne-ressource qu'on pourrait contacter en cas
de besoin.
La
Présidente (Mme Chassé) : Cela conclut le bloc d'échange. Merci
beaucoup. Merci pour votre contribution à la commission.
Je suspends momentanément les travaux pour
laisser la place au prochain groupe à s'asseoir.
(Suspension de la séance à 16 h 24)
(Reprise à 16 h 26)
La
Présidente (Mme Chassé) :
Alors, je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, contente de vous retrouver. Et, je vous
rappelle, vous le savez, vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et
qu'à une minute de la fin, je vais vous indiquer... c'est le temps de conclure.
Commencez tout d'abord en vous présentant. Bienvenue.
Commission des droits de la personne et
des droits de la jeunesse (CDPDJ)
M. Tessier
(Philippe-André) : Bonjour.
Merci, Mme la Présidente. Je m'appelle Philippe-André Tessier, je suis
le président de la Commission des droits de
la personne et des droits de la jeunesse. Je suis accompagné de Me Claire
Bernard, directrice de la recherche, et Me Geneviève St-Laurent,
conseillère juridique à la recherche.
Donc, mesdames messieurs les députés, M. le ministre, M. le Curateur public, je suis Philippe-André Tessier, comme je le disais, et je vous remercie de l'invitation
faite à la commission de présenter nos commentaires sur le projet de loi n° 18.
Évidemment,
comme vous le savez, la commission a pour mandat de relever les dispositions des
lois et règlements du Québec qui seraient contraires à la charte et, évidemment,
ce projet de loi là interpelle directement la commission,
qui joue un rôle important en matière
d'exploitation des personnes vulnérables,
et ce, depuis près de 40 ans. En effet, la charte confie à la commission
la responsabilité spécifique de faire enquête sur les cas d'exploitation de
personnes âgées ou handicapées et de proposer des moyens pour régler ces
situations ou de saisir le Tribunal des droits de la personne pour ce faire. Ce travail se fait toujours,
d'ailleurs, en collaboration étroite avec le Curateur public, et nous sommes
donc heureux de constater que cette collaboration se voit consacrée par
le projet de loi.
La commission
joue donc un rôle actif dans la protection des personnes en situation de
vulnérabilité, qui se reflète aussi dans les avis, études et activités
d'éducation qu'elle fait sur le sujet. C'est notamment à ce titre que la
commission a fait l'analyse du projet de
loi. L'objet et les dispositions de celui-ci concernent de nombreux droits
protégés par la charte, dont
notamment le droit à l'intégrité et à la liberté de sa personne, le droit à la
personnalité juridique, le droit à la sauvegarde de sa dignité, le droit
au respect de la vie privée et le droit à la libre disposition de ses biens.
De plus, le projet de loi introduit des
modifications et des dispositifs qui concernent les mineurs, et les majeurs inaptes, et qui visent des personnes en raison de
leur âge ou de leur handicap, évidemment deux motifs qui sont de discrimination interdite en vertu de la charte. La
commission veut donc s'assurer que le projet de loi permet à ces personnes
d'exercer leurs droits et libertés en toute égalité, tel que le garantit
l'article 10 de la charte.
Notrfe
analyse, évidemment, tient compte de la Convention relative aux droits des
personnes handicapées, qui renforce, hein, les droits contenus à la charte.
Rappelons que le Québec s'est engagé en 2010 à mettre en oeuvre les droits
inscrits dans ce traité dans les domaines de sa compétence. Il convient
d'emblée de souligner que la commission souscrit aux objectifs du projet de loi, qui rejoignent plusieurs des
recommandations qu'elle a formulées par le passé. Les changements proposés paraissent ainsi favorables au respect
des droits fondamentaux des personnes vulnérables, et particulièrement du droit
à l'intégrité à la liberté de sa personne, la personnalité juridique, du droit
à la sauvegarde de sa dignité et du droit à la libre disposition de ses biens. Ces mesures s'inscrivent aussi dans
l'évolution des régimes de protection destinés aux majeurs vulnérables, que préconise aujourd'hui le droit
international et qui consacre le droit à la reconnaissance de la personnalité
juridique en toute égalité.
Au terme de
son examen du projet de loi, la commission souhaite néanmoins émettre quelques
recommandations afin de, nous
l'espérons, renforcer le filet de sécurité entourant les personnes vulnérables
et de prévenir les abus dont elles pourraient
être potentiellement victimes. Nos préoccupations concernent ainsi
essentiellement les mécanismes de surveillance et de contrôle du mandat
de la tutelle. Nous y reviendrons.
La commission
se réjouit tout particulièrement des modifications qui visent à garantir une
meilleure prise en compte des
volontés et préférences du majeur vulnérable sous régime de protection ou dont
le mandat de protection a été homologué. L'abandon de la curatelle et du conseiller au majeur pour ne conserver
qu'une tutelle aux règles souples et modulables, en fonction des facultés et circonstances propres à
chaque personne, nous semblent aussi constituer des mesures favorables à une meilleure reconnaissance de l'autonomie des personnes
vulnérables. L'obligation de tenir en compte de l'avis du majeur, dans la
mesure du possible, pour toute décision relative à la tutelle contribue
également au respect du droit à la liberté
de sa personne et de sa personnalité juridique. Il en va de même pour les
mesures de représentation temporaire ou du mandat. De l'avis de la commission, toutes ces mesures contribueront
à une meilleure reconnaissance de l'autonomie et de la volonté des
personnes vulnérables.
• (16 h 30) •
La commission
appuie également la création d'un assistant au majeur, une mesure qui respecte
le virage préconisé par la convention
voulant que la protection des personnes vulnérables passe d'abord par des
mesures de décision assistée avant
d'avoir recours à des mesures de décision substituts. Le mécanisme d'assistant
au majeur permettra à des personnes aptes
mais qui souhaitent bénéficier d'une assistance pour prendre soin
d'elles-mêmes, pour administrer leur patrimoine ou pour exercer leurs droits civils de faire reconnaître auprès des
tiers le rôle d'appui ou d'intermédiaire que joue un proche auprès d'eux. Pour bénéficier du mécanisme, il suffit
que la personne fasse une demande de reconnaissance d'assistant au directeur de la protection des personnes
vulnérables, tel qu'il est proposé, qui pourra refuser dans certains cas, y
mettre fin si l'assistant ne peut plus agir ou si des mesures de protection
sont mises en place à l'égard du majeur ou de l'assistant.
Cependant,
alors que le mécanisme se veut visiblement souple et facile d'accès, la
commission s'interroge sur les raisons pour lesquelles tout intéressé, y
compris le directeur, doit s'adresser au tribunal pour mettre fin au mécanisme dans
le cas où il exerce une crainte... il
existe, pardon, une crainte que la personne majeure ne subisse un préjudice.
Nous nous posons la question à savoir s'il aurait été plus cohérent de
laisser cette appréciation au directeur, quitte à prévoir un mécanisme
décisionnel qui garantit le respect de l'équité procédurale. Le mécanisme pose
donc cette question à la commission de la nécessité de judiciariser cette
partie du mécanisme.
D'autre part, pour être conforme à la
convention, la prise de décision assistée devrait être disponible pour toute personne qui en ressent le besoin. Or, le projet
de loi en limite actuellement l'accès aux personnes majeures qui souhaitent
être assistées en raison d'une difficulté. La commission estime que ce critère
est flou et qu'il soulève des difficultés d'interprétation
dans la mesure où cela risque de poser une barrière inutile à l'accès à un
mécanisme de décision assistée particulièrement
respectueux des droits des personnes vulnérables. La commission recommande de
retirer cette condition.
Par ailleurs, nous saluons l'introduction d'une
disposition dans la loi qui prévoit que le directeur signalera à la commission, je l'ai dit plus tôt, toute situation
susceptible d'être un cas d'exploitation au sens de l'article 48 de la
charte. Cette disposition vient
consacrer la collaboration qui existe déjà entre la commission et le Curateur
public dans leur mandat de protection
des personnes âgées ou en situation de handicap et en position de vulnérabilité
et qui se poursuivra. Je tenais en informer les parlementaires.
Si elle
adhère aux orientations de la réforme, la commission souhaite néanmoins faire
quelques recommandations pour
garantir le droit de toute personne âgée ou de toute personne handicapée d'être
protégée contre toute forme d'exploitation, mais également, je le dis,
de protéger les droits des mineurs, des enfants, compte tenu du mandat qui est
attribué à la commission pour la jeunesse.
La commission s'inquiète ainsi de la possibilité introduite par le projet de
loi qui permettrait au tuteur datif
d'être dispensé de constituer un conseil de tutelle et de rendre un compte
annuel de gestion lorsque la valeur des
biens administrés est inférieure à 25 000 $. Compte tenu du risque
que représente l'affaiblissement des mécanismes de protection du mineur
sous tutelle, la commission recommande de modifier le projet de loi pour
prévoir que le tuteur datif doit constituer
un conseil de tutelle et rendre un compte de gestion annuel, peu importe le
montant du patrimoine en jeu. Par
ailleurs, nous saluons l'introduction de mesures de reddition de comptes dans
l'exécution de mandats de protection, mais nous déplorons qu'elles
soient facultatives.
On insiste, à
la commission, depuis 2001, pour que les mesures de surveillance et de contrôle
du mandat de protection soient mises
en place pour protéger les personnes âgées et/ou handicapées contre toute forme
d'exploitation telle que le garantit
la charte. La commission est notamment favorable à la possibilité de faire
annuler certains actes faits seuls par le mandat postérieurement à
l'homologation du mandat seulement si le mandat en subit un préjudice. Une
telle mesure contribuerait à une meilleure
protection du mandant sans nier son autonomie, son droit de faire des choix et
même de faire des erreurs. La
commission regrette néanmoins que la reddition de comptes soit facultative et
qu'elle ne puisse pas être faite au directeur si personne n'a pu être
identifié dans l'entourage pour la recevoir.
Compte tenu des risques d'exploitation auxquels
font face les personnes âgées par un mandant, la commission recommande donc que
le mandataire soit tenu de faire à un tiers ou au directeur, annuellement et
sur demande, si les circonstances l'exigent,
un rapport standardisé susceptible de mettre à jour les irrégularités de son
administration. Au surplus, nous
recommandons de retirer la possibilité pour le mandant de renoncer à la mesure
de sécurité que représente la reddition de comptes faite régulièrement
en cours d'exécution du mandat. En dernier lieu, nous estimons qu'en raison des
risques d'exploitation auxquels font aussi
face les personnes sous tutelle il serait opportun de modifier le projet de loi
afin de mieux circonscrire les circonstances et les conditions dans lesquelles
le directeur pourrait utiliser le pouvoir discrétionnaire qui lui permet d'autoriser la confusion des biens du
tuteur avec ceux de son conjoint, de permettre la reddition de comptes
autrement que par un rapport annuel standardisé et de dispenser le
tuteur légal de constituer un conseil de tutelle.
Enfin,
au-delà du processus législatif en cours, la commission est d'avis qu'il faudra
porter une attention particulière, d'autres
acteurs l'ont également mentionné devant vous, à la mise en oeuvre de cette
réforme, notamment à la prise en compte de l'aptitude, de l'autonomie et de la
capacité des personnes en situation de vulnérabilité par tous les acteurs
impliqués. La commission recommande
ainsi qu'une évaluation de la mise en oeuvre des mesures à être adoptées soit
effectuée périodiquement conformément à sa mission.
Nous continuerons à veiller au respect des
droits de ces personnes et nous sommes disposés à prendre part à cette réflexion, le cas échéant. Nous demeurons à
votre disposition pour répondre à vos questions. Merci beaucoup de votre
attention.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci pour vous, pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période
d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Lacombe : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous tous d'être
ici, c'est toujours un plaisir de discuter avec vous, cette fois-ci, sur le projet de loi qu'on propose. On a, bien
sûr, lu votre mémoire avec beaucoup d'attention, on en a fait ressortir
quelques petites questions. Mais, d'abord, peut-être deux petites questions
générales pour m'assurer que le
Curateur public fait bien son travail. Vous l'avez dit tantôt, mais est-ce que
vous pouvez nous parler de la collaboration avec le Curateur public?
Est-ce que ça se passe bien au quotidien?
M.
Tessier (Philippe-André) : Oui, effectivement. Donc, compte tenu des
responsabilités qui sont dévolues à nos organismes respectifs, il est essentiel
qu'une collaboration existe entre les organisations parce qu'il faut comprendre
que les justiciables, que les citoyens du
Québec n'ont pas nécessairement toujours une connaissance intime de l'ensemble
de l'architecture des appareils de
l'État, des différents organismes et émanations de l'État. Alors, je pense que
c'est quelque chose qui est très
important, tant pour la commission que pour le curateur, de s'assurer qu'entre
nous on vise à adéquatement informer les citoyens qui communiquent chez
nous, des rôles et responsabilités de l'un et l'autre pour s'assurer que la personne est au bon endroit et soit toujours...
cogne toujours à la bonne porte, pour paraphraser une phrase un peu célèbre
dans le milieu de la justice.
M.
Lacombe : Et vous êtes donc d'accord... Est-ce que je peux même dire
que vous vous réjouissez de l'introduction de la possibilité pour le
directeur de signaler à la commission des droits de la personne et de la
jeunesse les cas présumés d'exploitation? Vous êtes d'accord avec ça?
M.
Tessier (Philippe-André) : Bien, ce qu'on pense, c'est qu'évidemment
c'est toujours... ce genre d'entente là, lorsqu'il y a un message législatif, hein, lorsqu'il y a une...
l'intention du législateur, elle est là lorsque le législateur dit :
Cette collaboration-là est non seulement
importante, hein, c'est encouragé, mais elle se retrouve inscrite dans les
principes de la loi. On pense que ça
aussi, ça vient mieux informer le public, ça vient bien faire comprendre que ce
rôle et responsabilité ne dépendent
pas des époques, ou des années, ou des titulaires des différentes charges, mais
se pérennisent dans le temps pour
chacune de nos institutions. Évidemment, c'est déjà dans la charte pour le
Curateur public. Donc, ici on vient ajouter une disposition, si on veut,
miroir dans la loi.
M. Lacombe :
Dans la mécanique des choses, là, pouvez-vous me donner un exemple d'une
situation où cette mesure-là prendrait tout son sens?
M.
Tessier (Philippe-André) : C'est sûr et certain que je vais faire
attention d'entrer dans des cas trop spécifiques, évidemment, mais ce
qu'il faut comprendre, c'est que les cas qui sont soumis à l'attention de la
commission, il arrive fréquemment que le statut de la personne qui est porté à
notre attention, dont le cas est porté à notre attention pour une situation potentielle d'exploitation, il est
possible qu'il y ait ou qu'il n'y ait pas déjà présence d'un mécanisme prévu
par la structure actuelle du Curateur public. Donc, c'est sûr et certain
que lorsqu'il y a déjà des procédures ou des processus entrepris par une entité
administrative chargée de la protection de la personne, bien, l'autre organisme
responsable doit s'assurer de ne pas faire
double emploi, si on veut, de s'assurer qu'il y a une coordination efficace par
rapport à ça, dans le respect des
compétences de chacun, parce que notre compétence et celle du curateur n'est
pas la même. Évidemment, notre mandat,
c'est de protéger la personne. Donc, c'est sûr et certain que, pour ces cas-là
spécifiques, où est-ce que, par exemple, on est à la toute veille de l'ouverture d'un régime, bien, c'est sûr que
ça, c'est important de le savoir parce que ça peut orienter les actions
de la commission en matière d'exploitation.
M. Lacombe :
D'accord. Maintenant, j'ai une question pour vous. J'ai une petite
préoccupation et je voulais peut-être vous
donner l'opportunité de nous donner plus de détails là-dessus. Vous êtes
d'accord, je comprends, avec ce qu'on
propose, d'introduire une obligation pour le mandataire de dresser un
inventaire des biens qu'il administre dans les 60 jours de l'homologation du mandat. Par contre, vous ne voudriez
pas, comme on le prévoit, qu'on puisse expressément renoncer à cette mesure-là. Je me questionne,
parce qu'il reste que c'est une mesure... que c'est un contrat entre deux
personnes, que, par exemple, dans le
cas d'un couple, bien, la personne pourrait décider de dire : Bien, moi,
ça fait 50 ans que je suis avec
cette personne-là, je veux y renoncer. Donc, dans chacun des cas, vous pensez
qu'il devrait y avoir cette mesure-là?
• (16 h 40) •
M. Tessier
(Philippe-André) : Bien, avec votre permission, je vais permettre à ma
collègue de répondre.
M. Lacombe :
La reddition de comptes, évidemment, là.
M. Tessier
(Philippe-André) : Oui, j'avais compris.
M.
Lacombe : Parce que l'inventaire étant avant bien sûr, là, je parlais...
j'ai fait un lapsus, la reddition de comptes, à la fin. Dans certains
cas, il semble que ça va de soi qu'on puisse renoncer à ça, mais ce n'est pas
votre avis?
M. Tessier (Philippe-André) :
On avait bien compris le sens de votre intervention.
M. Lacombe :
D'accord.
M. Tessier (Philippe-André) : Mais
la précision est utile pour nos téléspectateurs, là, mais on a bien compris.
Mme
St-Laurent (Geneviève)
: Oui, effectivement, la commission, depuis... de longue date, réclame une reddition de comptes pour le mandat. On le
sait, puis c'est déjà ce que l'intervenante précédente soulignait, les cas
d'abus puis d'exploitation, ça arrive
souvent entre proches. Et le mandat, c'est vrai que c'est un contrat, une
entente entre deux parties proches,
et, un peu comme un mariage, on ne prévoit jamais le divorce, on ne pense
pas que les choses vont mal se passer. Donc,
nous, ce qu'on... les recommandations constantes de la commission en cette matière-là
ont été de dire : Il faudrait une mesure
de reddition de comptes automatique, obligatoire, dans tous les mandats,
de manière standardisée, pour qu'on puisse voir facilement s'il y a des
problèmes ou pas. Après, tu sais, on comprend que, c'est ça, les gens n'ont pas
forcément... C'est ça, quand tout va bien et qu'on va faire le mandat
chez le notaire, on se dit : Bon, bien, oui, oui, on n'a pas besoin de la
reddition de comptes, tout va bien aller. Mais, après, on ne sait pas
comment les choses se passent, et puis souvent c'est dans un contexte familial. Là, on parle du
conjoint, mais ça peut être un des enfants qui est choisi comme mandataire,
puis on se retrouve dans un conflit
familial où, là, les choses, finalement, ne sont pas tout à fait les mêmes. S'il y a une reddition
de comptes, les choses sont transparentes, les choses sont claires. Donc, dans ce
souci-là, dans cet esprit de protection, d'éviter les cas
d'exploitation, c'est dans ce sens-là que la commission fait cette recommandation.
M. Tessier
(Philippe-André) : Il faut
comprendre que le vécu de la commission, c'est en matière d'application de
l'article 48 de la charte. Puis, en matière d'exploitation... Puis pour
les gens qui n'en font pas à tous les jours, des fois, ça surprend, mais
c'est les proches qui font de l'exploitation. On pense que c'est une entité
obscure, ou c'est une entité gouvernementale, ou un tiers, ou quelqu'un
de mal intentionné. C'est malheureusement beaucoup plus proche de la maison que ça. Donc, ça, c'est une réalité avec laquelle,
nous, on compose depuis 40 ans, ce qui anime ce genre de recommandation là ou, disons, cette prudence de notre côté.
M. Lacombe : D'accord. Je vais céder
la parole à un collègue.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le
ministre. Alors, la parole est au
député de Beauce-Sud pour la suite de l'échange, avec
9 min 4 s.
M.
Poulin : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci pour votre mémoire. Je veux revenir un peu
sur la question du ministre, sur un cas de figure concret de gens qui peuvent
vous rejoindre, vous téléphoner si jamais ils souhaitent, bon, que ce soit dans le processus de révision d'un
titulaire, votre avis sur une personne inapte, dans l'ensemble de ce que la CPDJ
peut faire et dans l'ensemble des droits que vous offrez, que ce soit droits de
la personne ou droits de la jeunesse. Concrètement,
pouvez-vous nous parler des délais de réponse des ressources
que vous avez à l'interne et de quelle façon vous vous y prenez
concrètement?
M. Tessier
(Philippe-André) : Votre question
interpelle quelque chose d'un
petit peu plus large, c'est toutes
les dispositions entourant la question de l'exploitation.
Mais, comme vous le savez, je pense que les intervenants précédents
en ont parlé, également, depuis 2017, il y a
une loi, donc, entourant la question de la maltraitance. Cette loi-là est venue, disons, mettre... installer, encore une fois, une collaboration entre organismes, donc le Curateur public, nous, mais également les
corps policiers, l'AMF. D'autres entités gouvernementales sont
signataires de cette entente-là, toujours dans l'idée d'assurer une collaboration avec le... sous le leadership du Secrétariat aux aînés. Donc,
c'est sûr que cette question-là, de la maltraitance, elle est
multifacettes.
Nous, une des mesures qui est aussi mise en
place par le gouvernement sur la question de la maltraitance, c'est qu'il y a
un plan d'action sur la maltraitance. Ce plan d'action là confie également
certaines responsabilités à différents organismes, et, de notre côté, c'est sûr que ce plan
d'action là vise à contrer le phénomène de l'exploitation, parce que toute question
de maltraitance n'est pas nécessairement une question
d'exploitation. Donc, c'est peut-être un sujet un peu vaste pour aujourd'hui, mais je peux vous résumer ça en vous disant que notre champ d'action à
nous n'est pas sur l'ensemble de l'oeuvre,
tout comme le Curateur public, son champ d'action, n'est pas sur l'ensemble de
l'oeuvre, d'où la nécessité de concertation entre différents organismes
sur ces questions liées à la maltraitance.
Donc, c'est
sûr et certain que, pour nous, il y a une priorité donnée à ces cas-là, parce que c'est
des cas qui sont dits, donc, urgents. Fréquemment, ce sont des personnes
qui sont, donc, âgées, assez âgées, donc en situation de vie qui nécessite une attention immédiate. Donc, nous,
c'est sûr que, sur cette question-là, on essaie d'être très vigilants à l'interne pour ce qui est de la question
des délais, et d'où aussi la nécessité de la collaboration puis des
échanges avec le curateur lorsque, souvent,
on a un mécanisme soit qui vient d'être ouvert ou qui est à la
veille d'être ouvert. Cette collaboration-là, institutionnelle, est très importante.
M. Poulin : Au niveau des délais,
vous nous dites : Le plus court possible. Vous nous donnez un horizon?
M.
Tessier (Philippe-André) :
Bien, écoutez, c'est sûr et certain que, là, pour moi, c'est
difficile de vous donner un délai
spécifique par rapport à un cas d'exploitation. Ce que je peux vous
dire, c'est qu'il y a une séquence qui est mise en place lorsqu'il y a un cas d'exploitation
qui nous est signalé. Et il faut se rappeler une chose, quand on parle de délais,
il faut toujours
être conscient que, si on parle d'un délai pour un dossier qui est judiciarisé,
c'est sûr et certain que le processus judiciaire en soi, en lui-même,
comporte un délai qui est plus grand. Mais il faut rappeler une chose, les cas d'exploitation
qui nous sont signalés donnent fréquemment
jeu, ouverture, à une action de notre part. Et il y a un juriste américain
célèbre qui disait : «Sunshine
is the best disinfectant.» Donc, la lumière du soleil, c'est le meilleur
désinfectant. Et, souvent, juste le simple fait que quelqu'un
de la commission, un enquêteur appelle, il dit : Bonjour, je
suis enquêteur à la commission,
nous avons reçu un signalement de la part
d'une personne anonyme par rapport à une problématique, qui appelle, donc, le mis
en cause, donc la personne qu'on allègue qui a fait la situation de
l'exploitation, c'est sûr que, souvent, disons que ce dialogue-là amorcé avec
la personne va venir, des fois, corriger des situations.
M. Poulin :
...certainement refroidir les ardeurs de certaines personnes.
M.
Tessier (Philippe-André) :
On l'espère, on le souhaite, et je vous dirais que, nous, c'est une action
qu'on essaie de beaucoup plus porter puis pousser parce que le processus
judiciaire comporte ses aléas et son lot de complications.
M. Poulin :
Et je vous pose la question sur les délais parce qu'on a été sensibilisés
collectivement, au Québec, à cette
notion-là, entre autres, au niveau des centres jeunesse, du
département de la protection de la jeunesse, puis Dieu sait que vous êtes, la Commission des droits de la
personne et de la jeunesse... vous avez tout un volet sur votre site Internet qui nous rappelle les droits
de la personne, les droits des aînés, les droits de la jeunesse. Avez-vous vécu
une hausse de téléphones, de
signalements depuis, disons, les dernières semaines, les derniers mois, que ce
soit au niveau des conseils, au niveau du droit de la jeunesse ou même...
vous nous parlez... depuis 2007, là, de la loi qui a été faite...
M. Tessier
(Philippe-André) : 2017, oui.
M.
Poulin : ...2017, pardon, de
la loi sur la maltraitance chez les aînés. Est-ce que, pour vous, ça a apporté
un travail supplémentaire?
M.
Tessier (Philippe-André) :
Oui. Alors, il est évident que, et on ne se fera pas de cachette, la commission,
comme beaucoup d'autres institutions publiques gouvernementales québécoises,
est aux prises avec une augmentation assez importante des plaintes qui sont déposées. Je ne veux pas
poser un outrage au Parlement avant de déposer mon prochain rapport annuel
de gestion, qui est attendu d'ici le 17 octobre, donc, si vous me le
permettez, je vous dirai que vous allez le recevoir bientôt.
M. Poulin :
...tendance à la hausse.
M.
Tessier (Philippe-André) : Mais, c'est sûr, ça peut être que... vous
pourrez voir, les députés seront... je serai ici même, à l'Assemblée, pour fait état de ça. Oui, effectivement, il y
a une tendance à la hausse des plaintes, que ce soit en jeunesse, que ce soit
en charte, mais que ce soit aussi en exploitation.
M.
Poulin : Vous êtes à la Commission des relations avec les citoyens, à
ce moment-là, la commission parlementaire?
M. Tessier (Philippe-André) :
Non, c'est un dépôt.
M. Poulin :
C'est simplement le dépôt. O.K. Il faudrait vous convoquer, à ce moment-là.
M. Tessier
(Philippe-André) : Je me rends disponible pour les parlementaires.
M.
Poulin : Merci. En terminant, avant qu'on cède la parole à ma collègue
la députée de Bellechasse, peut-être parce
qu'on est en élection fédérale, je veux parler de votre dernier paragraphe,
vous nous parlez d'Élections Canada qui «exige que toute personne extérieure à la famille qui prête assistance à
un électeur ne puisse aider qu'une seule personne par scrutin et qu'elle confirme cet engagement en
signant une déclaration sous serment». Vous dites : «Nos recherches ne
nous ont pas permis de confirmer si
Élections Québec a adopté la même pratique.» Puis votre phrase, elle est
révélatrice, parce que ce n'est pas
normal qu'on n'est pas capable de le savoir, puis qu'effectivement, dans les
bureaux de scrutin, dans les lieux de
votation, cette question-là se pose, de savoir, exemple, si on est tuteur de
deux personnes, est-ce qu'on peut les accompagner
deux fois lors de la votation? Et, si vous, vous n'avez pas été capables
d'avoir l'information, je me dis, le citoyen qui souhaite avoir l'information
doit également avoir des défis. Alors, qu'est-ce qui fait en sorte que vous
n'avez pas été capable de l'avoir? Puis, si oui, je trouve qu'il y a des
questions fort intéressantes à se poser.
Mme
St-Laurent (Geneviève)
: Très honnêtement, là, on n'a pas fait des recherches excessivement
poussées sur cette question-là, mais, contrairement au site d'Élections Canada,
où la section est très, très détaillée, l'information n'est pas rendue accessible par Élections Québec. Peut-être
que c'est le cas, mais j'avoue très humblement que je n'ai pas pris le temps de leur téléphoner pour vérifier exactement,
sur cette question-là, quelle est leur pratique. Par contre, ils n'ont
visiblement pas de politique publique sur la question, c'est tout ce que
je peux... Ma recherche s'est limitée aux documents publics d'élection sur ce
point précis.
M. Poulin : Alors, d'institution à
institution, j'invite votre commission à recommander à Élections Québec de rendre le tout accessible et de le clarifier. Je
me mets dans la peau de parents, de gens qui s'en vont voter puis qui ne sont
pas en mesure d'avoir
cette information-là, ça peut faire en sorte certaines personnes ne puissent
pas exprimer leur droit de vote. Et
ça, c'est extrêmement inquiétant à ce niveau-là, malgré les efforts qu'on a
faits, au cours des dernières années, pour permettre à des gens qui
n'avaient pas le droit de vote d'y avoir accès.
Moi, je suis
content, quand je vais visiter les organismes chez nous, de jeunes hommes, de
jeunes femmes qui ont des défis, qui
me disent : J'ai voté, je suis allé voter pour la première fois, puis de
voir des étoiles dans leurs yeux, je trouve ça fabuleux. Alors, ce
serait peut-être important de le recommander à Élections Québec.
Une voix : ...
• (16 h 50) •
M. Poulin : Oui, effectivement, il y
en a qui ont deux enfants, effectivement. Merci beaucoup. Merci.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, pour la députée de Bellechasse, il reste
1 min 27 s pour votre question.
Mme
Lachance : Merci, Mme la Présidente. Merci. J'ai une très brève
question pour vous, parce que vous en avez fait mention, tout à l'heure,
vous avez mentionné que l'exploitation et l'abus étaient quand même présents
puis que, la plupart du temps, c'était des
membres proches, des membres de la famille. Est-ce que vous auriez des
statistiques très récentes sur le nombre de cas que ça peut représenter?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il vous reste une minute.
M. Tessier
(Philippe-André) : Oui,
alors, pour ce qui est de la commission,
le nombre de cas que nous recevons par année, on parle de quelques centaines,
O.K., donc, cela dit, évidemment, on parle de situations ici où est-ce
qu'il y a enquête qui est faite.
Évidemment,
on a un volume d'appels qui est plus important, mais, comme je vous dis, là,
quand on parle de situations qui
deviennent véritablement... qui nécessitent, disons, vraiment de déployer des
moyens d'enquête, on parle de quelques centaines
de cas par année. Mais c'est quand même plus qu'avant. Et c'est une tendance où
est-ce qu'on voit augmenter, dans les dernières années, le nombre de ces
signalements-là ou de ces situations-là qui sont portés à notre connaissance.
Mme Lachance : Bien, merci. Merci,
Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, merci beaucoup. Merci à la partie ministérielle. Maintenant, nous allons passer la parole à
la députée de Westmount—Saint-Louis,
pour une période de 10 min 40 s.
Mme
Maccarone : Merci. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup pour votre mémoire puis votre présence ici
avec nous aujourd'hui. Puis ça m'allume la question, quand on parle des
plaintes, parce que vous avez dit qu'il y a
une hausse : Est-ce que le projet
de loi n° 18 répond ou va
répondre aux plaintes actuelles puis envisagez-vous une diminution grâce
à l'adoption éventuelle de ce projet de loi?
M. Tessier
(Philippe-André) : Bien,
c'est sûr et certain que la présence d'un mécanisme souple, flexible, comme
l'assistant aux majeurs, je ne pense pas que
son objectif premier, c'est nécessairement de lutter contre les cas d'exploitation
visés à 48. Mais, évidemment, lorsqu'on a des personnes qui sont là, qui sont
là pour assister, on espère y voir un effet bénéfique, et c'est pour ça,
d'ailleurs, qu'on appuie... Comme on l'a bien dit, c'est en droite ligne avec
la convention internationale que le Québec a
signée, c'est en ligne avec les principes du fait qu'il faut toujours
faire attention, dans les cas d'exploitation,
de ne pas nier non plus l'autonomie de la personne, hein? Ce n'est pas parce qu'on est âgé ou qu'on est dans une
situation de handicap, comme l'article 48 le décrit, qu'on est
nécessairement vulnérable ou qu'on est, peut être exploité.
Alors, une personne âgée peut très
bien décider de donner des cadeaux à ses petits-enfants, de payer des voyages.
Où est-ce que ça devient plus problématique,
puis, des fois, c'est là où que la zone est grise, c'est quand ces voyages-là
ne sont peut-être pas nécessairement de la propre
initiative de la personne âgée, mais disons... Alors, ces éléments de nuance
là, c'est sûr et certain qu'il y aura
encore, je pense, malheureusement, demain matin, des cas d'exploitation. Mais
c'est sûr qu'il y a des mécanismes
plus souples, plus flexibles qui respectent l'autonomie de la personne, ça, on
l'espère, de nature à venir, donc, aider à accompagner les personnes en
situation de vulnérabilité.
Mme
Maccarone : Parce que votre organisme représente toutes les personnes,
mais incluant jeunesse en particulier, le
volet jeunesse, j'aimerais savoir si, dans votre mémoire puis dans votre
présentation aujourd'hui... Avez-vous eu le réflexe de regarder le projet de loi avec un oeil pour les
personnes majeures et les personnes mineures? Si oui, quelle est la différence?
Déjà, vous dites oui, ça fait que je vais arrêter là. Quelle est la
différence?
M. Tessier
(Philippe-André) : C'est parce que c'est une bonne question. Bien,
effectivement, c'est toute la question de
la tutelle dative, puis ma collègue peut vous en parler, mais, si vous
regardez, là, dans notre mémoire, à la page 17, donc, les mesures de surveillance et de contrôle de la
tutelle dative, hein, c'est sûr et certain que pour la commission, notre rôle
étant également de veiller aux droits et aux
intérêts de l'enfant au Québec, donc les mineurs, les moins de 18 ans,
évidemment, la question ici se pose
par rapport à cette tutelle dative là, donc c'est pour ça que notre
recommandation, nous, c'est toujours, encore
une fois, l'idée du rapport annuel de gestion, là, c'est ce qui est notre
recommandation n° 4, peu importe le montant. Je vous parlais dans mon allocution d'ouverture du montant
de 25 000 $. Donc, c'est sûr et certain que nous, en raison de notre mission de veiller à l'intérêt de
l'enfant, quand on voit ça, bien, encore une fois, on fait une recommandation
au législateur et puis on vous laisse par la suite en disposer puis
prendre la meilleure décision dans l'intérêt des Québécois.
Mme
Maccarone : Puis est-ce qu'il y a autres indices que nous devons
regarder à l'intérieur, mettons, encore une fois, je reviens à mineur versus majeur, quand on parle de protection
temporaire, assistance, etc., est-ce qu'il y a une différence à
l'intérieur de ceci que nous devrions être conscients?
M. Tessier
(Philippe-André) : Nous, à part la question de la tutelle dative, on
n'a pas remarqué d'autres éléments dans le projet de loi.
Mme
Maccarone : Bon, puis d'abord quand on parle de 25 000 $,
par exemple, est-ce que ça, c'est un montant qui devrait être indexé,
par exemple?
M. Tessier (Philippe-André) : Bien,
oui...
Mme
St-Laurent (Geneviève)
: Sur le montant de 25 000 $, nous... En fait, ce qu'il faut
aussi savoir, c'est que, par exemple,
dans des cas d'exploitation, ce n'est pas toujours des gens qui ont énormément
d'argent qui se font exploiter. Des
fois, l'exploitation, c'est sur... c'est des gens qui ont un petit patrimoine.
Après, quand on est en position de vulnérabilité ou de dépendance par rapport à quelqu'un qui a le contrôle sur nos
finances, peu importe le montant... Donc, nous, on estime qu'il ne devrait pas y avoir de distinction, là,
par rapport au... On ne fait pas... Le 25 000 $, il est là depuis un
certain temps, mais on n'estime pas qu'il soit insuffisant comme
montant.
Mme
Maccarone : Alors, est-ce qu'on devrait, n'est-ce pas, l'enlever? Il y
a du monde qui ont dit : Ça devrait être zéro.
M. Tessier (Philippe-André) : C'est
une possibilité.
Mme Maccarone : Je ne l'ai pas,
l'article, devant moi, mais j'ai demandé aux autres intervenants leur avis par rapport... On a dit qu'il faut vraiment faire tous
les efforts pour rejoindre les personnes si elles veulent intervenir ou faire
des changements. Pour vous, est-ce que ça,
c'est quelque chose qui devrait être défini, c'est quoi, tous les efforts,
comme... Je ne le sais pas exactement
comme il faut, mais que tout effort est mis en place avant de procéder? Parce
que ça se peut qu'il y ait des
moments... Comme vous avez dit, souvent, on a... Exemple, sur votre
page 16, on parle beaucoup pour le... On parle des élections, mais ça peut être n'importe quoi. Qu'est-ce
qu'on fait pour les gens qui n'ont pas nécessairement des membres de la
famille qui vont être là pour leur aider? Puis, quand on dit qu'il faut que
l'assistant ou la personne à charge, que ça
soit le curateur... fasse tous les efforts possibles pour rejoindre les
personnes dans sa tribune pour aider, il
faut faire tous les efforts possibles avant d'aller vers l'avant... mais ce
n'est pas défini, «tous les efforts». Est-ce que ça, c'est quelque chose
que vous voyez problématique vis-à-vis peut-être des plaintes éventuelles que
le monde vont dire : Bien, ils n'ont
vraiment pas fait tous les efforts, parce qu'ils n'ont pas fait ça, ils n'ont
pas fait ci? Est-ce que, ça, c'est quelque chose que vous pensez...
mérite d'être clarifié?
M. Tessier
(Philippe-André) : Je vous avoue que ce n'est pas un élément sur
lequel on a vraiment porté attention. La
notion de «tous les efforts», je veux dire, on peut le dire de différentes
façons, mais, évidemment, c'est... Il faut se mettre en garde aussi de placer un fardeau insurmontable.
Donc, il y a aussi une question ici de rédaction législative. Nous, on
n'a pas...
Une voix : C'est laissé à
l'appréciation du juge.
M. Tessier
(Philippe-André) : C'est un peu laissé à l'appréciation aussi. Est-ce
que tous les efforts ont été rencontrés ou non? Je vous avoue que là-dessus, on n'a pas vraiment... je n'ai pas
vraiment d'éléments de réponse à vous fournir à part ça.
Mme
Maccarone : Et, parce que vous visez vraiment les membres de la
famille, que fait-on pour les gens qui n'ont pas de membres de la famille? Est-ce qu'il y a quelque chose à clarifier
à l'intérieur de qu'est-ce que nous sommes en train de faire? Votre
opinion.
M. Tessier
(Philippe-André) : Bien, c'est sûr. C'est pour ça... C'est parce que
la... Tu sais, l'assistant, c'est ça aussi qui est intéressant, comme
mécanisme, ce n'est pas obligé d'être un membre de la famille. Donc, c'est pour
ça que nous, on salue ce qu'on juge
être une avancée puis une meilleure conformité de la nouvelle loi future avec
ce qui est nos engagements
internationaux puis notre charte québécoise des droits et libertés. Alors, je
vous dirais que, pour ça, l'assistant, il
répond un peu à cet élément-là que vous soulignez, qui est le fait que ce n'est
pas tout le monde qui a un réseau social élargi, et tout. Ça peut être
aussi un peu plus ouvert, cette question-là.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Ça conclut pour moi. Merci.
La Présidente (Mme Chassé) : Oui.
Merci à vous. Je cède maintenant la parole à la députée de Sherbrooke.
Mme
Labrie : Merci. Dans votre mémoire, vous parlez du délai maximal de
cinq ans, qui serait adapté pour les cas
plus lourds, mais... et pour certaines personnes, vous dites : «Il est à
espérer que les tribunaux continueront à prévoir un délai de réévaluation plus court dans les autres
cas.» Mais il n'y a pas de recommandation par rapport à cette préoccupation-là
dans votre mémoire. Est-ce que vous avez des pistes de solution pour encadrer
ça?
• (17 heures) •
Mme
St-Laurent (Geneviève)
: Ça va être... En fait, ça va être fixé au cas par cas par les juges.
Donc, c'est l'idée d'une tutelle
modulable. C'est sûr que c'est difficile pour nous de faire une recommandation
là-dessus, puisque... Il faut... Comment...
Après, il y a sans doute moyen pour les parlementaires de réfléchir à
différentes formulations. Mais, nous, ce qu'on voulait surtout souligner, c'est
que, par rapport à nos recommandations passées, où il y avait eu... Dans le
dernier projet de loi, il y avait une
volonté d'étendre ces délais-là beaucoup. Il avait été proposé que ce soit
10 ans en matière de curatelle,
par exemple. Donc, pour nous, quand on regarde le cinq ans pour les cas
les plus lourds puis que ce soit au cas par cas modulable, c'était un pas dans la bonne direction, on va dire.
Après, c'est sûr qu'on ne peut qu'exprimer le souhait que les greffiers
spéciaux puis les juges qui prennent ces décisions-là continuent à avoir une
jurisprudence qui tienne compte... que ce ne
soit pas cinq ans presque automatiquement pour tout le monde, donc que ça
tienne compte de l'évolution des
gens. Après, il y a aussi d'autres mécanismes qui permettent la révision à
différents moments ou selon le besoin, donc je pense qu'on a... la commission a estimé que ça répondait un peu à cette
inquiétude-là, et puis que... Mais, certainement, il ne faudrait pas que
ça dépasse le cinq ans.
Mme
Labrie : Est-ce que vous pensez que ce serait préférable d'ajouter une
mention, par exemple, qui dit que... quand la situation d'inaptitude est
temporaire, de prévoir que le délai soit aussi court que possible?
Mme
St-Laurent (Geneviève)
: Normalement, c'est ce que le juge doit faire, donc c'est difficile pour
la commission de venir dire à la magistrature comment interpréter.
Après, c'est ça, il y a toujours...
M. Tessier
(Philippe-André) : Le problème des cas d'application, évidemment,
c'est qu'on peut, aujourd'hui, penser à
deux, trois, mais en oublier un certain nombre. Et c'est pour ça que des fois...
Puis ça respecte aussi l'autonomie, hein, individuelle. C'est ça aussi, le principe, cette appréciation-là, cet
exercice-là. Ce qu'on souhaite juste éviter, c'est l'automatisme.
Mme
Labrie : ...donc, de comment ça se passe dans la réalité. Est-ce que
c'est systématiquement cinq ans? Il faudra intervenir, si c'est le cas.
M. Tessier (Philippe-André) : Oui,
et c'est notre conclusion, en effet, puis je pense qu'on n'est pas les seuls à le dire. C'est sûr et certain que ce genre de
projet de loi là, on pense que c'est important de revoir, après un certain
temps, qu'est-ce qui en est.
La
Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie pour votre exposé et votre
contribution aux travaux de la commission.
Nous allons suspendre momentanément pour laisser
la place à la prochaine personne qui vient nous entretenir.
(Suspension de la séance à 17 h 02)
(Reprise à 17 h 04)
La
Présidente (Mme Chassé) : Je souhaite maintenant la bienvenue à la
représentante de la Fédération québécoise de l'autisme. Vous avez 10 minutes pour faire votre exposé. À une
minute de la fin, je vais vous faire un signe pour vous inviter à
conclure. Je vous invite à tout d'abord vous présenter. Bienvenue.
Fédération québécoise de l'autisme (FQA)
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : Parfait. Alors,
je suis Jo-Ann Lauzon. Bonjour, mesdames. Bonjour, messieurs. Merci de
l'invitation. Je suis la directrice générale de la Fédération québécoise de
l'autisme. Je devais être avec notre présidente, Mme Plourde, qui
s'excuse, elle a eu une grave urgence, alors elle ne peut pas être là.
Donc, vous
avez vu qu'on vous a... Notre mémoire, c'est un petit mémoire. Chez les
personnes autistes, c'est quelque chose... Il y a plus d'enfants, à l'heure
actuelle, donc on n'est pas encore dans tous ces mécanismes-là, mais ça
commence quand même de façon assez
régulière. Puis les adultes autistes ont souvent eu leur diagnostic au moment
où ils étaient déjà adultes, alors ils ne sont pas dans ce processus-là
pour beaucoup.
Donc, la
fédération, c'est un organisme qui a été fondé en 1976 par des parents
d'enfants autistes. Ce qu'il faut savoir, c'est qu'avant 2003, l'autisme au Québec, ça n'existait pas, en termes...
Au niveau des services, on envoyait les gens soit en santé mentale soit
en déficience intellectuelle. Donc, on est considérés comme une clientèle
émergente.
Notre
organisme compte 75 organismes membres, c'est-à-dire à peu
près tous les organismes
qui ont un intérêt pour l'autisme au Québec. Ce qu'on a en commun, c'est
les intérêts de la personne autiste et ceux de sa famille et de ses proches.
Notre mission, c'est de mobiliser tous les acteurs concernés afin de promouvoir
le bien-être des personnes, sensibiliser et informer la population sur
les troubles du spectre de l'autisme ainsi que sur la situation des familles,
et contribuer au développement
des connaissances et à leur diffusion. Vous devez vous rendre compte que, dans
les médias, on parle très, très
souvent d'autisme, là. C'est vraiment tout en train de se mettre en place. Ça
prend du temps. Donc, c'est des situations qui sont souvent assez
difficiles.
Notre
travail, ça se traduit par, évidemment, la promotion des intérêts et des
droits, l'information et la formation, la
promotion et une vie associative assez intense, là, pour soutenir nos membres à
travers tout ce qu'ils ont à faire, là, auprès des familles.
Le projet de
loi n° 18 nous interpelle grandement parce qu'une majorité de familles
doivent continuer à protéger leurs fils et leurs filles qui deviennent
adultes. Il faut savoir que le taux de prévalence augmente continuellement. On évalue l'augmentation au Québec à, à peu près,
20 % par année, ce qui fait qu'au bout cinq ans le taux de prévalence
double complètement. Et la commission des droits a fait une enquête, là,
l'été passé, puis elle sortait des chiffres au niveau de l'autisme. Juste pour le réseau scolaire, là,
entre 2001 et 2016, il y a eu 628,4 % d'augmentation d'élèves autistes.
Donc, ce n'est pas une histoire, le taux de prévalence, il augmente
vraiment, vraiment beaucoup.
Alors, les
personnes autistes, aussi, on appelle ça le trouble du spectre de l'autisme.
Donc, ça part à une extrémité puis ça
s'en va à l'autre. C'est un groupe qui est très hétérogène par rapport à leur
niveau de fonctionnement, les caractéristiques cognitives et comportementales, la présence ou non de troubles associés,
comme la déficience intellectuelle, les troubles d'anxiété, les troubles
graves de comportement, des stéréotypes comportementaux, les troubles liés aux
sens, bien sûr, des troubles de l'attention, des troubles de santé mentale et
tous les autres troubles, en fait, que nous, on pourrait avoir, mais ceux-là, on les retrouve fréquemment chez les
personnes autistes. Donc, la flexibilité des mesures d'assistance s'avère
essentielle dans le cas de notre clientèle.
Pour ce qui
est du projet de loi n° 18, je ne sais pas si je pourrai vous envoyer un
autre PDF de notre mémoire. J'ai parlé avec M. Marsolais, puis, à un
moment donné, on s'est mélangés, là, au niveau de la terminologie. J'ai corrigé
ça aujourd'hui, mais j'ai une copie papier seulement. En fait, on mélangeait,
là, l'assistant, le représentant, tout ça. Ce que ça nous dit, parce qu'on
avait un bon gros dossier, épais comme ça, c'est qu'il va falloir être très,
très clair pour la population en général puis pour les organismes comme
nous aussi, parce que nous, on va avoir le devoir, en fait, de donner cette
information-là à nos membres. On a travaillé fort, puis malgré tout, on s'est
mélangés dans tout ça.
Donc, ce
qu'on apprécie beaucoup, dans le projet de loi n° 18, c'est la
simplification des régimes de protection actuelle. Bien sûr que ça facilite la vie de tout le monde,
hein? On apprécie aussi le fait d'avoir des dispositifs de protection sur mesure
qui tiennent compte des forces de la personne assistée et qui lui permettent de
continuer à avoir une participation active dans
des décisions qui la concernent. Donc, ça, ça nous apparaît très, très
important. On apprécie aussi le principe d'une tutelle personnalisée. Ça, c'est
vraiment bien. Tu ne perds pas tous tes droits parce que tu as besoin d'aide à
certains niveaux, donc la personne va
pouvoir continuer à exerces ses droits le plus longtemps possible, puis garder
un contrôle sur certains aspects de sa vie.
• (17 h 10) •
On a des
inquiétudes, des questions, des commentaires. Alors, au niveau de la
représentation temporaire, puis on en
a discuté beaucoup, c'est que la personne assistée qui bénéficie d'une
représentation temporaire, on a peur qu'elle soit influencée dans le choix de son représentant. Comment on va
s'assurer que ça ne sera pas le cas? On nous a parlé de questionnaires entre
autres, là, uniformes, qu'on allait poser aux gens, et le mot «uniforme» nous a
fait très, très peur, parce qu'avec des
personnes autistes, l'uniformité, ça ne fonctionne pas du tout. Des questions
ouvertes avec un oui ou un non, ça va
être une réponse... un oui ou un non. Il faut vraiment connaître l'autisme pour
être capable de poser les questions de
la bonne façon. Alors, peut-être s'assurer, là, d'avoir des gens terrain, là,
quand il y aura formulation de ces questions-là, de ces
questionnaires-là.
Est-ce que les mécanismes seront mis en place
pour s'assurer que les droits de la personne sous tutelle seront effectivement respectés? Actuellement, parce qu'on
parle à des travailleurs sociaux, entre autres, qui ont des dossiers, puis ils nous disent : Bien non, ça ne change
rien, ça va être la même chose, on respecte encore leurs droits actuellement,
c'est juste qu'ils ne sont pas
capables. Une mentalité comme ça, ça va être long à changer. On le sait, hein,
c'est 10 ans, à peu près, là,
changer ce genre de pratique là. On pense qu'il faudrait qu'il y ait une façon
pour s'assurer que les droits de la personne sont effectivement
respectés.
Le rôle
d'assistant, comme tel, on trouve ça un peu large. Je comprends que ce n'est
pas judiciarisé, mais où commencent
et où se terminent ses responsabilités, à cette personne-là? Je sais aussi,
bon, qu'elle va être dans un registre. En
tout cas, je trouve ça très, très vague, là, ça manque de précisions. Puis,
pour des personnes vulnérables, on aurait peur qu'il y ait de l'abus au
niveau de cette mesure-là.
Le nouveau
titre du protecteur, le protecteur des personnes vulnérables, pour nous, ça
porte énormément à confusion, entre
autres, avec la loi sur la maltraitance, qui est là depuis deux ans puis qui
est très utile, là, avec notre clientèle. Cette loi-là oblige toute
personne qui est témoin de la maltraitance à faire un signalement. J'ai
l'impression que le Protecteur du citoyen ou
le protecteur des personnes vulnérables va recevoir plein de plaintes qui
n'auront aucun rapport, là, avec la protection
d'une personne. On n'est pas dans la maltraitance, c'est autre chose. Je trouve
ça... On ne parle pas non plus de personnes vulnérables dans la loi, et
là le titre, on est plus ou moins à l'aise avec ce titre-là.
Notre plus
grande inquiétude quant aux changements qui sont proposés dans le projet de
loi, c'est la capacité des ressources actuelles du Curateur public à
soutenir les personnes en besoin de protection, leurs familles et leurs
proches. Parce que l'adoption de cette
loi-là, ça va entraîner des demandes d'information, du soutien aux personnes
qui vont initier une démarche, la
gestion de la multitude des mesures d'assistance personnalisées, parce que ça
va être personnalisé, donc, en principe, ça prend plus de temps à gérer.
Ça va demander une compréhension détaillée de la situation d'une personne à protéger. Puis, enfin, la gestion du changement
de régime comme tel pour les personnes qui s'inscrivent dans les modèles
actuels. Actuellement, une personne qui est
sous la garde du Protecteur du citoyen, quand elle est très, très chanceuse,
elle rencontre
le protecteur une fois par année. Ça fait que, si on rajoute tout ça, il
faudrait s'assurer, là, d'avoir assez de personnel pour réaliser tout
ça.
Au
niveau de nos recommandations, on aimerait que le Curateur public s'assure
d'avoir des mécanismes en place pour les situations où la condition de la
personne assistée requiert immédiatement une plus grande protection, c'est-à-dire
qu'on parlait, là, au niveau de la tutelle,
s'il y a une réévaluation à faire, tu sais, mettons, qu'on juge que ça va être
dans deux ans, sauf qu'il y a des
situations où la personne, par exemple, aurait une maladie dégénérative ou ça
peut se produire rapidement, puis,
s'il faut attendre cinq ans pour une réévaluation, ça risque de la mettre dans
des situations où elle pourrait se faire abuser.
La Présidente (Mme
Chassé) : Ça termine votre exposé.
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : ...
La
Présidente (Mme Chassé) : Oui. Et on va maintenant... bientôt débuter
la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous, mais je
pense que vous avez une suggestion?
M.
Lacombe : Bien, oui, après discussion avec des collègues, on sait que
c'est un sujet qui est cher à la députée de Westmount—Saint-Louis,
puis on lui proposait, si elle le souhaite, de peut-être lui céder la moitié de
notre temps pour qu'elle puisse poser plus de questions. Je ne sais pas si on a
le droit de faire ça?
La Présidente (Mme Chassé) : Est-ce que vous voulez lui céder la moitié de
votre temps au début de votre période d'échange ou à la fin?
M. Lacombe :
Bien, ça... comme vous voulez, là. Au début. Ce serait peut-être au début?
La
Présidente (Mme Chassé) : Bien, on pourrait le... Je le suggère à la
fin, comme ça, elle pourra avoir... Est-ce qu'il y a consentement à offrir la moitié du temps du bloc du parti
formant le gouvernement? Très bien. Alors, M. le ministre, vous avez
huit minutes.
M. Lacombe : Super! Donc là, je vais me dépêcher. Mais, en
fait, je n'ai pas beaucoup de questions. Votre présentation était claire. D'abord, peut-être, une petite
précision. Vous dites que vous avez une certaine inquiétude au sujet des
ressources, est-ce que le curateur,
qui va changer de nom, aura suffisamment de ressources pour s'acquitter de sa
nouvelle tâche. Cette année, il y a 10 ressources qui sont ajoutées. La
curatrice déléguée, il y a... on envisage jusqu'à 27, il y a un horizon,
dans les prochaines années. Il y a une somme
de près de 15 millions de dollars qui est accordée pour tous les
changements qui seront nécessaires. Ça, est-ce que ça vous rassure?
C'est une bonne nouvelle?
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : Oui, oui c'est sûr.
Une voix :
...
M. Lacombe :
Il faut une réponse claire. Page 4 de votre mémoire, dans la section...
Une voix :
...
M. Lacombe :
... — on
n'est pas en demande budgétaire, là, Denis — dans la section Le respect
de la personne représentée, tantôt vous l'avez effleuré, là, j'ai tendu les
oreilles, parce que je me demandais si, justement, vous alliez donner un peu plus de détails, et vous ne l'avez pas
fait, donc là, j'aimerais peut-être avoir l'occasion de vous entendre
là-dessus, vous dites qu'il y aurait...
Bien, en fait, je vais vous citer, là, vous dites : «À notre avis, il y
aurait intérêt à préciser l'obligation de
mettre en place des mécanismes pour s'assurer que les droits de la personne
représentée seront effectivement respectés.» Vous avez expliqué ça tantôt, mais on se demande un peu... Bien,
d'abord, est-ce que vous pouvez préciser un peu plus, puis avez-vous des
idées? Qu'est-ce que vous avez en tête exactement?
Mme Lauzon (Jo-Ann) : ...pas vraiment de façon de faire, là, de recette miracle, mais si on
se fie à ce qui se passe actuellement,
quand je disais là, quand j'en parlais à des travailleuses sociales, elles me
disent : Bien, c'est exactement ce qu'on fait actuellement, là, la
personne a encore le droit de faire ses choix, na, na, na, mais, dans la
réalité, ce n'est pas ça qui se passe, là. C'est toujours des situations
qui se règlent très rapidement. Et, comme on est habitués à prendre les décisions pour les personnes qui sont sur
curatelle présentement — sous curatelle, oui — est-ce qu'on va... Ça va être quoi, le mécanisme? Tu sais, entre de dire : Vous
devez faire en sorte que la personne participe à ses décisions puis de vérifier
si la personne a participé à ses décisions, c'est là que ça se joue, là. Parce
que je peux bien vous dire, moi : Oui, oui, je lui ai demandé son opinion, c'est plus dans le sens, surtout des gens
qui font ça depuis des années, qui ont une façon de faire, qui prennent souvent les décisions à la
place des personnes vulnérables, comment on va s'assurer que ces personnes-là
vont avoir été consultées, les personnes vulnérables?
M.
Lacombe : Est-ce que c'est dans le cadre de la mesure d'assistance que
vous exprimez cette crainte-là? Parce que...
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : Pour la tutelle personnalisée.
M.
Lacombe : Exact, O.K. Donc... Parce que, dans la mesure d'assistance,
on comprend que la personne ne cède pas ses droits, là.
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Oui.
M.
Lacombe : Puis je vais terminer, je vais laisser la parole à mon
collègue après, mais, peut-être, terminer en vous... en échangeant rapidement sur la mesure d'assistance. Vous
dîtes : On trouve que c'est large, que ce n'est peut-être pas assez défini, où commence la responsabilité de
l'assistant, où est-ce qu'elle se termine. L'idée derrière le projet de loi,
c'est de donner de l'autonomie aux
personnes, donc il y aura autant de cas d'assistants qu'il y aura d'assistant,
en ce sens où la personne n'exerce pas les droits pour l'assisté. Elle
est là pour le conseiller comme c'est déjà le cas probablement, sauf que, là, on lui donne de la légitimité, parce
qu'elle peut téléphoner, et puis elle a la légitimité par exemple de téléphoner
à la banque ou dans un ministère. Est-ce que vous trouvez quand même que ça
demeure trop flou?
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : Oui, oui. Si la
personne ne perd pas du tout ses droits, c'est-à-dire que la personne qui
assiste ne pourra pas, par exemple, signer de papier à la place de... Bon, O.K.
Ça, ça me...
M. Lacombe : Ça répond à votre
inquiétude?
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Oui, oui, oui,
tout à fait, oui.
M. Lacombe : Super! Merci.
La
Présidente (Mme Chassé) : Alors, j'invite maintenant le député de
Sainte-Rose à prendre la parole. Vous avez 3 min 30 s.
M.
Skeete : Merci, Mme la Présidente, ça va être plus vite que ça. Dans
le fond... Bonjour, merci beaucoup pour votre présence aujourd'hui pour nous éclaircir. Dans votre mémoire, vous
avez exprimé que vous avez un questionnement sur l'appellation de la
direction de la protection des personnes vulnérables. Pouvez-vous m'éclairer
davantage sur la confusion, là, que ça
pourrait apporter, qui pourrait exister entre le terme «inapte» et
«vulnérable»? Comment vous voyez ça, vous,
la fédération? Est-ce que c'est une appellation qui est trop sévère, qui porte
confusion, qui peut nuire? Vous voyez ça comment?
• (17 h 20) •
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : En fait, c'est
qu'on ne voit pas le lien avec la loi comme telle, parce qu'on ne parle pas
de personnes vulnérables dans la loi. On ne
parle jamais de personnes vulnérables, puis, tout à coup, c'est le Directeur de
la protection des personnes vulnérables. Au niveau de l'autisme, il y a des
personnes qui ont certaines vulnérabilités. Je
l'ai dit tantôt, c'est un spectre. Il y a des médecins qui sont autistes, qui
ont besoin d'aide à certains niveaux, puis pas du tout à d'autres
niveaux. Ce n'est pas nécessairement des personnes vulnérables. En tout cas, elles n'aiment pas se faire identifier comme personnes
vulnérables, là. Je ne le sais pas. Moi, à cause... Chez nous, là, ce qu'on a
vu, c'est que... parce qu'on travaille beaucoup avec la nouvelle loi
sur la maltraitance, puis c'est pour les personnes vulnérables, c'est toujours, toujours ça qui revient, «personnes vulnérables». Donc, on
a peur que les gens, qu'ils aient à utiliser les signalements pour la maltraitance. Tu sais, je cherche de l'information, je m'en vais sur Internet, je vois «Directeur de la protection
des personnes vulnérables», c'est là
que je vais. Ça n'a aucun rapport avec la loi sur la maltraitance. C'était surtout
ça, là, qu'on trouvait très confondant, là.
M. Skeete : Merci. Je cède le
reste de mon temps, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Très bien. Alors, vous êtes gâtée et vous le méritez.
Alors, je cède la parole à la députée
de Westmount—Saint-Louis
pour un bloc d'échange de 19 min 40 s, c'est ça? On l'a ajusté,
hein?
Mme Maccarone : C'est comme
Noël, Mme la Présidente.
Des voix : Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Chassé) :
«It's Christmas!»
Mme Maccarone : Je n'ai jamais eu autant de temps. Alors, vraiment,
merci. Merci, collègue, je suis vraiment touchée, c'est
très gentil d'avoir accordé tout ce temps-là. Je ne sais pas si vous êtes au
courant... Oui. Bon, bien, voilà, je n'irai pas en détail.
C'est sûr,
pour moi, je veux parler un peu, parce
que je le vis présentement, personnellement, puis vous, vous avez probablement vécu un
peu la même expérience ou... terrain, les membres que vous représentez, la
transition de mineur à majeur. Très
important, parce que c'est là où on commence à ouvrir la porte aux
idées de Curateur public, ça veut dire quoi, je n'ai jamais pensé avant, tu sais, la veille de la fête de mon
fils, mon Dieu! ça se peut que j'aurais besoin de ça, une chance que j'ai ouvert un
compte de banque quand il avait 17 ans parce qu'il avait eu un petit
emploi puis je voulais lui montrer c'est quoi, avoir un peu d'indépendance.
J'aimerais avoir un
peu votre expérience terrain pour ce changement-là, parce qu'il y a un impact.
Puis est-ce qu'il y a quelque
chose... Est-ce que
vous sentez que... Toujours à
l'intérieur du projet de loi, parce que je ne veux rester quand même à l'intérieur
de qu'est-ce qu'on discute ici aujourd'hui, est-ce que le projet de loi répond
aux questions pour notre communauté,
les personnes autistes? Parce
qu'aussi il faut aller en détail, c'est totalement différent que les autres
communautés, comme vous avez bien cité
avant. Quand on parle de la transition de mineur à majeur, est-ce que ça répond
aux préoccupations que la communauté peut avoir?
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Les parents vont être très, très satisfaits de la
mesure d'assistance, c'est clair, c'est facile. Actuellement, les jeunes
adultes ne sont souvent ni sur la curatelle... Ils ne sont pas sous une
curatelle parce que les endroits où ils reçoivent des services, on va leur
dire : Bien non, vous n'avez pas besoin de ça pour le moment, là, c'est correct. Puis, tu sais, les parents, ils ont
tellement de choses à faire qu'ils font : Bon, bien, tant mieux, on va
attendre pour ça. Sauf qu'on se
ramasse dans des situations, à la dernière minute, où on en aurait besoin
maintenant, puis on ne peut pas prendre
les décisions à la place de l'adulte, puis, par exemple, des cas médicaux ou des
choses comme ça, ou des transferts de ressources, sans que le parent soit
d'accord. En tout cas, ça fait des situations assez difficiles. Mais j'ai
vérifié, et il y a beaucoup de
parents de jeunes adultes qui ne sont pas dans un régime de protection actuellement.
Ils sont très nerveux, par rapport à ça, s'il arrive quelque chose. Mais
l'accompagnement, ça va être idéal pour les familles.
Mme Maccarone :
Secret professionnel, est-ce que ça, c'est quelque chose qui vous interpelle
pour la communauté des personnes
autistes? Exemple, de rentrer dans des rendez-vous médicaux, que ça soit
financiers ou autres, est-ce que ça, c'est quelque chose qui serait
important, pour vous, pour la communauté?
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Dépendant des personnes, oui, ça peut être très
important. Mais on le sait, hein, le spectre est tellement large qu'on ne peut pas dire que c'est important pour tout
le monde. Mais, oui, certainement, pour certains jeunes adultes, oui, ça
pourrait être très important.
Mme Maccarone :
C'est peut-être quelque chose à prendre en considération dans ce projet de loi.
Je
veux parler de la maltraitance parce qu'on sait que, pour la communauté des
personnes autistes, c'est tellement vaste, hein? C'est tellement vaste
parce qu'il y a des difficultés de communication, comme il y a des difficultés
sociales, comme on peut être vraiment haut
fonctionnement comme on peut être très bas dans le fonctionnement, puis c'est
difficile d'identifier les émotions.
Puis là on parle vraiment de leur donner plus de droits, on veut respecter les
droits civils, on veut qu'ils participent à faire des choix pour eux,
mais ça va être difficile, des fois, de comprendre la maltraitance.
J'ai fait une
entrevue dernièrement puis j'ai fait exprès de ne pas préparer mes enfants parce
que je savais bien d'avance que, si je leur
dit : Là, dis ci, dis ça, eux, ils vont dire au journaliste : Ma mère
m'a dit que je devrais dire... Parce
que
c'est ça. C'est ça, souvent, le monde des personnes autistes, parce que
souvent ils ne vont pas comprendre c'est quoi, la maltraitance, et, souvent, la seule façon qu'ils peuvent nous
démontrer qu'ils souffrent ou qu'il y
a quelque chose qui ne va
pas bien, c'est à l'intérieur de leur comportement.
Ça
m'amène à discuter peut-être de l'idée de la formation. Quand on parle... que ce
soit assistant temporaire ou autres, que pensez-vous que nous devrions faire
pour protéger les personnes autistes, étant donné que le spectre est tellement
vaste vis-à-vis la formation à l'intérieur du réseau? Je veux
vous entendre par rapport à l'éducation, santé, services sociaux,
juridiques...
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : ...assez de temps
Mme
Maccarone : Pas assez...
Bien, peut-être... Bien, écoute, on a 19 minutes... ou peut-être
moins maintenant.
La Présidente (Mme
Chassé) : Vous êtes rendue à 14.
Mme
Maccarone : Ça fait que,
regarde, on est rendus à 14. Ça fait que j'aimerais vraiment
vous entendre parce que
votre expérience terrain... Qu'est-ce qu'il serait important
pour eux de comprendre? Puis peut-être ça peut être spécifique pour chaque
domaine, parce qu'on se comprend, chaque domaine est vraiment différent.
Mme Lauzon (Jo-Ann) : En fait, ça va être de la formation et information pour tous ces
domaines-là, là, pour savoir, surtout, comment bien accompagner une famille
pour qu'elle sache vers quoi s'en aller dans ça, là, quoi choisir. Et moi,
je pense, c'est là, là, c'est dans l'information puis la formation du personnel qui travaille auprès de la clientèle,
puis c'est dans tous les domaines, là.
Mme
Maccarone : Ça fait qu'est-ce qu'on devrait peut-être même aller en
milieu de l'éducation? Parce que, on sait, souvent, les personnes autistes,
comme... ça peut être déficience intellectuelle ou autres, ils sont dans le
réseau de l'éducation jusqu'à 21 ans. Est-ce qu'il y a quelque chose en particulier que nous devrons en prendre
conscience ici vis-à-vis le projet de loi, côté formation? Est-ce que ça
devrait être ciblé peut-être par réseau?
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : Oui. Effectivement, là, c'est... Je pense qu'il va y avoir des approches différentes d'un
réseau à l'autre, mais, en éducation, je ne
peux pas vous répondre actuellement parce que, comme je vous dis, les jeunes adultes, actuellement, ne sont même pas sous curatelle. Donc, on n'est pas dans ça, là... de
famille qui raconte des problèmes, qui partage avec nous au niveau de...
à ce niveau-là pour l'éducation. Il y a d'autres problèmes, là, mais...
Mme
Maccarone : Vous avez parlé
du rôle de mandataire puis vous avez dit : Au-delà le rôle de l'assistance à la personne représentée, le rôle d'un
mandataire nous semble manquer de précision, où commencent et où se terminent
ses responsabilités.
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : C'était l'erreur de notre mémoire. On parlait, en fait, de
l'assistant.
Mme
Maccarone : Parfait. On va dire de l'assistant. Aucun problème. Où
pensez-vous que ça devrait commencer et terminer, dans le cas de la
personne autiste?
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Bien, tantôt, j'ai été sécurisée quand on m'a dit que la personne
autiste ne va jamais perdre ses droits. L'autre, elle va être juste là
pour l'assister. Donc, à ce moment-là, je suis plus à l'aise avec ça.
Mme
Maccarone : Mais, quand on sait qu'une personne autiste a souvent de
la difficulté à identifier qu'il y a de la maltraitance ou identifier...
parce qu'on a des difficultés sociales, etc., puis vous avez dit que vous avez
des inquiétudes principalement sur les
personnes isolées, sans famille, qui ne peut pas leur accompagner, comment on
peut savoir que cette personne-là a
besoin plus d'aide puis comment on peut leur aider, leur éduquer pour qu'ils
comprennent mieux leurs droits, parce qu'ils ont quand même maintenant
des droits? Qu'est-ce que vous pensez que nous devrions faire pour mieux
communiquer avec cette communauté pour qu'ils puissent saisir le changement?
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : Je pense qu'il faudrait impliquer des personnes autistes
dans la préparation de cette sensibilisation-là
et de cette information-là. Il y a un groupe d'adultes... beaucoup de groupes
d'adultes autistes qui sont très conscients qu'ils ont des droits et qui
sont très actifs, entre autres, dans les réseaux sociaux, qui participent de
plus en plus, là, dans la communauté. Je
pense qu'il faudrait travailler avec ces gens-là pour trouver la meilleure...
travailler avec eux parce que c'est eux qui vont diffuser l'information
auprès des autres personnes autistes.
• (17 h 30) •
Mme
Maccarone : J'ai parlé tantôt de l'idée d'un intervenant pivot. Je ne
suis pas la seule personne à aborder ce sujet-là. J'aimerais vous entendre là-dessus. Pensez-vous que c'est une
idée intéressante? Pensez-vous que peut-être c'est quelque chose qu'on
peut même envisager d'amener dans ce projet de loi comme accompagnateur, comme
quelqu'un qui peut vraiment aider les personnes
autistes ou autres dans la compréhension non seulement du changement, parce
qu'on comprend que c'est un changement majeur, mais de leurs droits,
mais aussi quelqu'un qui peut guider les personnes à l'intérieur du processus?
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Oui. Sauf que l'intervenant pivot, on nous le promet depuis 2003. On
est en 2019, on n'a toujours pas d'intervenant pivot. Si on regarde le plan
d'action en autisme, l'intervenant pivot n'a pas un rôle clairement défini. Oui, s'il en y avait un, comme vous venez
de l'expliquer, ce serait parfait. C'est ça qui est supposé être, depuis 2003,
puis on ne l'a toujours pas. Ça fait que,
dans le meilleur des mondes, oui, l'intervenant pivot devrait être là, devrait
être en mesure d'informer et de soutenir les familles, les personnes. Dans un
monde idéal, oui, bien sûr, l'intervenant pivot.
Mme
Maccarone : Puis votre définition d'intervenant pivot, vous avez dit
que c'est manquant, ce n'est pas clair, ça serait quoi?
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : Excusez-moi, je ne comprends pas votre...
Mme
Maccarone : Vous avez dit que la définition d'intervenant pivot, dans
le plan d'action, ce n'est pas clair. Ce serait...
Mme Lauzon (Jo-Ann) : ...de ses tâches, c'est que la personne n'a pas de pouvoir. Parce que
l'intervenant pivot doit aller chercher des intervenants d'autres milieux aussi
pour soutenir les familles. Et, actuellement, l'intervenant pivot, comme il est prévu théoriquement, parce qu'en
pratique on n'en a pas, il n'a pas le pouvoir de... il peut inviter quelqu'un
à une réunion, mais il n'a pas de pouvoir de
décision, il est juste là pour discuter avec les autres membres, ce qui fait
qu'il y a souvent une perte de temps
épouvantable, là, autour de tout ça parce qu'il faut retourner auprès de
l'instance décisionnelle, revenir.
Présentement, ce n'est pas efficace, vraiment pas, puis il n'y en a pas
beaucoup, ça fait que ce n'est pas très grave.
Mme
Maccarone : Bien, il n'y en a pas beaucoup, mais je pense qu'il n'y en
a pas. Ce n'est pas identifié nulle part,
hein? Ce n'est pas comme un rôle, on n'engage pas nécessairement quelqu'un dans
le milieu de santé ou services sociaux comme intervenant pivot. Ce n'est
pas un rôle qui existe, mais... dans le même style...
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Oui, en fait, je dirais, le dernier rapport d'évaluation du premier
plan d'action, ce qui a été dévoilé par le ministère de la Santé, c'est qu'il y
a des intervenants pivots, sauf que les parents ne sont pas au courant qu'ils ont des intervenants pivots. C'est-à-dire qu'ils
donnent le rôle. L'éducateur, à un moment donné, ça devient l'intervenant
pivot. Les parents ne sont pas informés, donc ce n'est vraiment pas bien
structuré actuellement.
Mme
Maccarone : Puis je vous dirais que, dans mon expérience, c'est souvent
les parents qui sont les intervenants pivots,
et non nécessairement les personnes qui travaillent... Puis je n'enlève rien de
tout le respect pour les gens qui travaillent dans tous les réseaux, mais, souvent, c'est les parents. Il faut qu'ils
se retrouvent à dire : Je vais où pour santé, je vais où pour l'éducation, je vais où pour services
sociaux, je vais où pour les mesures judiciaires? J'ai besoin d'aide. Ça fait
que, souvent, c'est eux qui vont aller là-dedans.
Ça m'amène à...
J'aimerais vous entendre par rapport aux proches aidants. Pour la communauté
autiste, encore une fois, ça peut
être très complexe parce qu'on a un spectre qui est tellement vaste. J'aimerais
vous entendre là-dessus, comme, est-ce
qu'il y a quelque chose qu'on devrait bonifier à l'intérieur du projet de loi
pour les proches aidants, mesures de protection ou autre?
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Je pense que
la mesure d'assistance, ça va être une mesure très appréciée des proches
aidants. Je pense que ça, ça va être ce qui va être le plus utilisé, là, par
les proches aidants.
Mme
Maccarone : On sait aussi, on a entendu, pour les démographiques,
qu'on est une population vieillissante, alors ça veut dire que nous avons des personnes autistes vieillissantes.
Puis on sait que, dans plusieurs des cas, on peut être très rigide, les personnes autistes peuvent être
très, très, très rigides. Alors, est-ce qu'il y a quelque chose qu'on devrait
penser pour protéger aussi les
proches aidants à l'intérieur de tout ça? Parce qu'on a dit, aussi, la
maltraitance, mais la maltraitance, ce
qu'on a compris par autres intervenants, ça peut aller les deux bords. Ça peut
être qu'on a la personne qui est protégée, mais il faut protéger les proches aidants parce que ça aussi peut être
une maltraitance à l'inverse, on connaît un peu ça quand même. Pas besoin d'avoir des enfants différents,
de vivre, des fois, des difficultés avec nos enfants, mais, en vieillissant...
Est-ce que ça, c'est quelque chose que nous
devrions prendre en considérations, qu'est-ce qu'on va faire pour protéger les
proches aidants vis-à-vis à la maltraitance?
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Probablement,
je vous dirais qu'on n'a pas... presque pas de personnes âgées autistes actuellement. Il n'y a presque rien qui est fait au niveau des personnes autistes. Probablement qu'il y
en a, mais elles ne sont pas connues. Il n'y en a pas tant que ça,
on est en... Il y a nos organismes, entre
autres à Laval, qui ont fait des
travaux là-dessus avec des gens en Europe. On commence à
travailler, là, le troisième âge, au
niveau de l'autisme. On n'a vraiment pas beaucoup d'information là-dessus.
Mme Maccarone : Essayons de
commencer les préparatifs en avance que ça devient un problème.
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Il faut être
proactifs.
Mme
Maccarone : Oui, exactement,
exactement. Je pense aussi que c'est intéressant...
J'aimerais vous faire entendre aussi,
par rapport à... Trouvez-vous que la communauté va être... Est-ce qu'il y a...
Vous avez dit qu'il faut interpeller la communauté autiste à participer, mais on n'a personne, autiste, qui est
venue parler ici, à cette commission. Pensez-vous que ce serait possible d'avoir une personne du
réseau qui pourrait nous soumettre de l'information là-dessus, pour dire :
Voici mon expérience personnelle, voici
comment... avant que ça soit adopté pour nous aider à bonifier le projet de loi? Est-ce que ça, c'est quelque chose qui serait possible, dans
votre estime, d'avoir quelqu'un qui va nous parler de leur expérience, leur espoir aussi vis-à-vis
le futur, étant donné que ça se peut — c'est
des personnes qui peuvent être très aptes, c'est des personnes qui peuvent être indépendantes mais qui ont besoin
de mesures d'assistance temporaires — de
leur faire entendre leur expérience puis leur désir pour le futur?
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Oui, bien sûr.
Des personnes autistes, vous voulez dire, qui viendraient s'exprimer?
Mme Maccarone : Oui.
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Bien sûr.
Mme Maccarone : Puis vous êtes en
mesure peut-être de nous aider, d'être en contact avec ces personnes-là.
Vous avez dit aussi qu'on a une croissance
exponentielle de la communauté, puis je sais que vous avez eu des échanges vis-à-vis...
est-ce qu'on est prêt, est-ce qu'on va avoir des ressources, mais ce n'est pas nécessairement
tout simplement des ressources à l'intérieur du Curateur public mais aussi dans
le réseau. Parce que, là, on comprend, avec un
changement majeur, c'est la gestion de changement, le monde ne comprend pas nécessairement comment qu'il se voit à
l'intérieur de ce changement-là. Pensez-vous que ce serait important aussi de
rajouter des ressources ailleurs? Parce qu'on parle de la formation, mais formation, aussi, ça vient des ordres
professionnels, ça vient du milieu de l'éducation, mais j'ai vraiment une crainte dans le réseau de
santé. Parce que, là, il faut interpeller beaucoup les professionnels, même
encore plus, parce que, là, on comprend
qu'on peut avoir des évaluations, ça change vraiment. Êtes-vous à l'aise?
Trouvez-vous qu'on est prêt pour ce changement-là vis-à-vis les besoins
de professionnels, ou dans le réseau actuel?
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Pas vraiment,
non. Je pense que les professionnels vont avoir besoin de soutien dans tout ça. Le changement dont vous parlez, ça a fait
en sorte que les gens qui avaient développé une expertise en autisme ont
changé de chaise, ils sont partis un peu
partout. Donc, on ne peut retomber... Actuellement, on est... il y a une crise de ressources humaines, on le sait tout le monde, avec les
congés de maternité, les congés de maladie, c'est incroyable. Au niveau de la clientèle autiste, je ne sais pas avec les autres
clientèles, mais les intervenants autour d'eux changent énormément
et très, très souvent. Ça fait que ça va prendre un pivot qui va connaître toute cette information-là,
parce qu'il y a trop de changements autour
d'une personne, là. Ça fait que ça va prendre quelqu'un, effectivement. Un intervenant pivot reste
l'information la plus pertinente, je pense.
Mme
Maccarone : Si vous avez, aujourd'hui, des échanges avec vos
membres — il nous
reste juste deux minutes — est-ce qu'il y a une préoccupation actuelle — la
plus grosse préoccupation — que
la communauté autiste, ils ont maintenant vis-à-vis
le Curateur public? Si oui, c'est quoi? Et est-ce que le projet de loi... bien,
je sais qu'on a déjà parlé des mesures temporaires,
mais la plainte, mettons, numéro un, la préoccupation numéro un, la crainte
numéro un, «the biggest worry» que la communauté... qu'ils ont
aujourd'hui, c'est quoi?
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : J'ai cette information-là plus par rapport aux familles que
par rapport aux personnes comme telles. Les
familles, actuellement, c'est la complexité de tous ces mécanismes-là, tandis...
et ça, ça va répondre aux besoins... que ce soit facile puis qu'on
puisse soutenir notre adulte, là.
Mme
Maccarone : O.K., d'où la nécessité de la dissimilation de
l'information, que ça soit clair, dans un jargon que tout le monde
comprend, hein?
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : Exact.
Mme
Maccarone : Puis peut-être, tu sais, vous avez parlé de la
malcompréhension entre les définitions. Peut-être, il y a une autre
façon d'amener des définitions qui vont être plus claires pour voir vraiment la
distinction entre tous les termes. Ce serait le bienvenu.
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : Oui, tout à fait. Ça, c'est clair.
Mme Maccarone :
O.K. Bien, merci beaucoup. Je n'ai plus de questions, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Chassé) : Je peux imaginer. Merci à vous. Je cède maintenant la parole
à la députée de Sherbrooke. Allez-y.
• (17 h 40) •
Mme
Labrie : Merci. J'ai bien entendu votre inquiétude par rapport au
manque de ressources dans le réseau, je suis assez préoccupée aussi par
ça. Puis, surtout, les taux d'augmentation sont quand même assez inquiétants,
là, de prévalence de l'autisme. J'ai le goût
de vous demander est-ce qu'en ce moment, dans les recherches, ça pointe vers
une stabilisation de cette augmentation-là.
Donc, il y a des facteurs environnementaux, probablement, ou génétiques qu'on n'a pas identifiés qui...
Mme Lauzon (Jo-Ann) : En fait, c'est l'Institut
national de santé publique qui a
sorti un rapport, il y a deux ans, c'était le premier rapport sur les troubles du spectre de l'autisme, et il ne prévoyait pas que ça allait...
qu'il allait y avoir un... comment on appelle ça, comme...
Une voix :
...
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Un plateau, oui. On ne prévoyait pas du tout un plateau, on parle juste
d'augmentation. En Montérégie, à chaque année, ils sortent un document qui
s'appelle le Périscope et qui fait la Montérégie puis un peu
l'ensemble du reste du Québec, mais surtout la Montérégie, et c'est constant,
constant, ça augmente, ça augmente, et il n'y a personne, nulle part, qui parle
de plateau, pas du tout.
Mme
Labrie : On n'est pas devant un phénomène, disons, qui était seulement
sous-diagnostiqué à une époque où on connaissait moins bien...
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : Non.
Mme
Labrie : On parle de quelque chose qui connaît une croissance en ce
moment. Est-ce que vous sentez que, dans
le plan d'action du gouvernement, on met en place, en ce moment, ce qu'il faut
pour gérer cet enjeu-là à long terme? Parce que, là, c'est vrai qu'il
n'y a presque pas d'aînés autistes, en ce moment, vraisemblablement, il va y en
avoir très rapidement, et beaucoup. Est-ce qu'en ce moment on est préparés à ce
qui s'en vient, à ce tsunami-là?
Mme Lauzon (Jo-Ann) : Non, parce que... Le tsunami, ça fait longtemps qu'il est là, là. Moi,
ça fait 20 ans que je suis à la
fédération, puis je suis arrivée, puis ça a commencé à monter, puis ça n'a
jamais arrêté. Et les plans d'action sont faits pour cinq ans, il y a des montants qui accompagnent ça, mais dans
cinq ans... Je l'ai dit tantôt, on a doublé le taux de prévalence, et
ça, on n'en tient pas compte, ça fait que c'est sûr qu'on ne balance jamais,
là.
Mme Labrie : Donc, les plans
d'action ne tiennent pas compte qu'on est devant un phénomène qui continue
d'augmenter et qui ne se stabilise pas du tout.
Mme
Lauzon (Jo-Ann) : Non, non.
Pas du tout. Les plans d'action, c'est généralement à court terme. Cinq ans.
Donc, on ne va pas plus loin que ça. Puis
j'ai été de tous les comités de travail sur les plans d'action et j'ai toujours
frappé sur le clou en disant : Taux de prévalence qui augmente...
Mme
Labrie : Ça prendrait une stratégie intergouvernementale pour se
préparer à ça et éventuellement comprendre aussi les raisons pour
lesquelles...
Mme Lauzon
(Jo-Ann) : Puis, en fait, se
préparer, ce n'est même pas se préparer, on est dedans, là. Tu sais, comment
on deale ça, présentement, là. C'est incroyable, là, les listes d'attente, en
autisme, c'est, au bas mot, deux ans, là. Quand on sait qu'il faut intervenir rapidement, c'est assez paniquant pour les
familles de savoir qu'elles vont attendre deux ans.
La Présidente (Mme Chassé) : Ça
termine le bloc d'échange. Merci pour votre contribution aux travaux.
La commission
ajourne ses travaux jusqu'à mardi le 24 septembre, à 10 heures, où
nous poursuivrons notre mandat.
Et je trouve
qu'on est une commission modèle, vraiment, hein? Il y a tellement de bienveillance ici, il y a tellement de bienveillance ici. C'est bien.
(Fin de la séance à 17 h 43)