(Seize
heures vingt-deux minutes)
La
Présidente (Mme Chassé) :
Bonjour, tout le monde. Bon retour après cette petite pause. Je constate
le quorum et je déclare la séance de
la Commission des relations avec les
citoyens ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de
bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission est
réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 9,
la Loi visant à accroître la prospérité
socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du
travail par une intégration réussie des personnes immigrantes.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Birnbaum
(D'Arcy-McGee) est remplacé par M. Derraji (Nelligan); Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis) est remplacée par Mme Anglade
(Saint-Henri—Sainte-Anne);
Mme Dorion (Taschereau) est
remplacée par M. Fontecilla (Laurier-Dorion); M. LeBel (Rimouski) est
remplacé par Mme Perry Mélançon (Gaspé).
Mémoire
déposé
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci, bien reçu. Avant de débuter les remarques
préliminaires, je dépose le mémoire de la
Fédération des Québécois de souche, reçu depuis la fin des auditions et que
nous avons reçu par courriel.
Remarques
préliminaires
Nous
débutons avec les remarques préliminaires. M. le ministre de l'Immigration, de
la Diversité et de l'Inclusion, vous disposez de 20 minutes.
M. Simon
Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Chers collègues, M. le
député de Sainte-Rose, Mme la députée de
Bellechasse, Mme la députée des Plaines, M. le député de Mégantic, M. le député
de Beauce-Sud et M. le député de Chauveau. Salutations également à la
collègue et porte-parole de l'opposition officielle, la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne,
Mme la députée de Fabre, Mme la députée de Bourassa-Sauvé, M. le député de
Nelligan ainsi que mes collègues du deuxième groupe et du troisième groupe
d'opposition.
Alors,
Mme la Présidente, nous voici arrivés à une nouvelle étape du projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité
socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du
travail par une intégration réussie
des personnes immigrantes. Je tiens à vous remercier tous, membres de la
commission, pour votre contribution au sein de la consultation
particulière que nous avons tenue il y a de cela quelques semaines.
Un
consensus principal s'est clairement dégagé au sujet de la nécessité
d'améliorer le système d'immigration du Québec pour permettre l'intégration réussie des personnes qui
choisissent de s'établir au Québec et d'y réaliser leurs rêves. C'est, il faut le rappeler, l'objectif même du
projet de loi n° 9 que j'ai déposé. Je souhaite que l'étude
détaillée que nous commençons maintenant se poursuive dans le même
esprit de collaboration et que nous puissions nous donner les moyens d'atteindre
cet important objectif, soit de réformer le système d'immigration.
Cette nouvelle étape
nous permettra de discuter plus en profondeur afin de trouver des solutions
concrètes et durables pour que les personnes immigrantes puissent réaliser leurs projets de vie au Québec
tout en contribuant pleinement
à la société québécoise. Je crois sincèrement que ce sont là des attentes
partagées par la population québécoise et les personnes immigrantes ayant
choisi le Québec comme terre d'accueil.
D'autres consensus
sont ressortis des consultations particulières sur le projet de loi n° 9.
Tout d'abord, nous
convenons tous de la nécessité de renforcer la francisation et l'intégration
des personnes immigrantes. Il s'agit là d'un déterminant essentiel au
succès de l'immigration. La connaissance du français est un incontournable
pour prendre pleinement sa place dans la société québécoise. Cela se
concrétisera notamment par une bonification
de l'offre de services en matière d'intégration et de francisation. Plusieurs nouvelles mesures seront bientôt mises en
place.
Nous
comptons par ailleurs définir et mettre sur pied sous peu un parcours
personnalisé afin d'assurer un meilleur suivi des personnes qui utilisent les services d'intégration et de francisation. Ce suivi nous permettra de mieux connaître leurs besoins et d'adapter notre offre de services
en fonction de ceux-ci. Tous ont un rôle important à jouer pour
favoriser une immigration plus efficace et en réponse aux besoins du marché
du travail.
Cela dit, la
nécessité, pour le ministère de
l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, d'assurer une meilleure coordination
des services offerts par ses différents partenaires est partagée par les
différents intervenants en faveur d'une immigration plus efficace, une intégration au
marché du travail réussie et d'une meilleure réponse aux besoins actuels
de main-d'oeuvre.
Je tiens
aussi de ces échanges avec les différents représentants qu'il y a une urgence
d'agir afin de répondre aux besoins pressants de main-d'oeuvre au Québec. Nous
devons mieux arrimer le profil des personnes sélectionnées aux besoins
du marché du travail tout en accélérant leur arrivée au Québec. C'est le coeur
du projet de loi n° 9, le fait de sélectionner les gens en fonction du profil de
compétence qu'ils ont pour qu'ils puissent remplir un emploi à la hauteur
de leurs compétences.
Nous avons
entendu les éléments soulevés par des représentants du marché du travail et des
employeurs, et, je vous le confirme
encore aujourd'hui, notre objectif est de faciliter les tâches administratives
des entreprises et les processus d'embauche.
Nous travaillons à ce que les personnes qui répondent aux besoins du Québec
puissent arriver et s'intégrer plus
rapidement à la société québécoise. C'est la raison pour laquelle nous
souhaitons passer dès que possible à une gestion des demandes
d'immigration basée sur le système de déclaration d'intérêt.
Nous sommes
par ailleurs conscients que, derrière ces demandes en inventaire, il y a des
familles avec des projets et des
rêves. Les délais d'attente de l'ancien système et les déceptions trop
nombreuses suite à leur arrivée au Québec sont tristes et inacceptables, ce qui nous motive justement à mieux
sélectionner les personnes immigrantes et à leur offrir la possibilité
d'être véritablement partie prenante du Québec d'aujourd'hui.
Nous avons
entendu vos demandes visant à accorder la priorité aux personnes qui séjournent
temporairement au Québec et qui y
sont déjà en emploi. À cet effet, nous avons d'ailleurs fait savoir que les
demandes de ces personnes seront invitées
en priorité, et ce, dès l'adoption du projet de loi n° 9
tel que je l'ai présenté en motion à l'Assemblée nationale.
Le projet de
loi n° 9 est la première pierre législative de la réforme
du système d'immigration. À terme, nous nous assurerons de répondre aux besoins du marché du travail ainsi que d'une
meilleure francisation et intégration des personnes immigrantes.
En terminant,
j'aimerais réitérer mes remerciements aux membres de cette commission ainsi
qu'aux personnes avec qui nous avons
eu l'opportunité d'échanger. Vos réflexions et vos suggestions alimentent le
sain débat concernant notre système d'immigration.
Et j'invite
tous les membres de cette commission à prendre acte du fait que le projet de
loi n° 9 est nécessaire afin de moderniser le système d'immigration afin
notamment de s'assurer de pouvoir mettre en place les différentes réformes pour donner davantage de pouvoir au ministère de
l'Immigration pour mieux accompagner les personnes immigrantes, à la fois si elles sont en statut temporaire, mais
à la fois si elles sont en statut permanent. Notamment, aussi, sur le fait
que le budget du Québec consacre
146 millions de dollars d'argent neuf à l'immigration, par année, sur une
période de cinq ans, pour
730 millions de dollars. C'est une augmentation de 42 %
d'augmentation. Et donc, pour ce faire, pour réussir à pouvoir utiliser
l'argent, nous devons nécessairement réformer le système d'immigration pour
donner davantage de services aux personnes qui ont choisi le Québec.
Alors, Mme la Présidente, je vous remercie, et
nous sommes prêts à démarrer les travaux en étude détaillée.
• (16 h 30) •
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. J'invite
maintenant la porte-parole de l'opposition officielle et députée de Saint-Henri—Sainte-Anne à faire ses remarques préliminaires
pour une durée maximale de 20 minutes.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : Je vous remercie.
Je vous remercie, Mme la Présidente.
Alors,
d'abord, je vais saluer mes collègues, l'ensemble des collègues, l'ensemble des
parlementaires. Je nous souhaite des
échanges fort constructifs, lors de l'étude de ce projet de loi détaillée, qui
est, à mon sens, un projet de loi qui
est fort important. Il est fort important parce que l'immigration, c'est une
pierre angulaire, évidemment, d'un point de vue économique, mais d'un point de vue social également au Québec.
Et, dans les dernières semaines, il y a eu beaucoup d'échanges, beaucoup des... questions qui ont été posées. Et je vous dirais que ce que
je souhaite d'abord et avant tout...
d'abord et avant tout, excusez-moi, c'est de...
Une voix : ...
Mme Anglade : Non, non, je t'en prie. Non, non, il n'y a
pas de problème du tout, là. Ça m'a
fait sourire parce que je ne
m'attendais pas à ça. Je comprends très bien la situation. Ce qui est
important, c'est qu'on puisse avoir un débat qui soit serein et qui nous
amène dans la bonne direction.
Et je vais
revenir sur des éléments qui m'apparaissent essentiels. Lorsque l'on veut un
débat serein, il faut qu'on soit
capable d'avoir les réponses à nos questions, il faut qu'on soit capable de
dire : Voici les faits. Il faut savoir reconnaître qu'il y a des moments, peut-être qu'on erre, hein,
e-r-r-e, et peut-être qu'on a aussi un certain mea culpa à faire pour qu'on
puisse avancer également. Et là je souhaite qu'il y ait cette dynamique-là,
cette transparence-là. Et je peux assurer à l'ensemble des collègues de ma
volonté de le faire de manière constructive.
Dans les
dernières semaines, la présentation du projet de loi, il y a eu beaucoup de
répercussions, à la présentation du
projet de loi, beaucoup de réactions qui ont été faites. D'abord, si on prend
un peu de perspective par rapport aux seuils d'immigration, j'attache beaucoup d'importance au fait que les données
pour prendre des décisions sont importantes. On n'a toujours pas compris
jusqu'à présent pourquoi on est passé de 50 000 à 40 000 et qu'est-ce
qui justifiait ça. Je sais que le
ministre s'est exprimé à un certain nombre de reprises en disant : Il y
avait des taux de chômage deux fois plus élevés, on ne veut plus ça,
etc. Mais, au-delà de ça, simplement de passer de 50 000 à 40 000 ne
répond pas aujourd'hui aux besoins du Québec. Et d'ailleurs on le voit, puisque déjà on sent qu'il
y a une volonté de la part du ministre de rehausser les seuils à court
terme.
Donc,
finalement, on se dit : Initialement, on voulait descendre les seuils.
Quand on a vu qu'il y avait vraiment une
pénurie de main-d'oeuvre, que c'était vraiment mal avisé, on
s'est dit : On va la réduire pour une période temporaire. Là, on se rend compte que c'est pour une période
qui est peut-être simplement d'un an. Je pense que, là-dessus, il faut qu'on
se pose les bonnes questions puis qu'on prenne des décisions qui soient avisées
pour le Québec parce que des décisions de court terme peuvent avoir un impact
très moyennement sur le long terme.
Et l'image
que l'on projette, elle est importante, elle est importante d'un point de vue
économique. Je vois mon collègue de
l'Économie, qui est à l'étranger, qui va en Allemagne, qui se déplace, qui doit
promouvoir le Québec. Il est évident
que, dans les positions puis ce que fait le Québec à l'international, la
manière dont on rayonne ou dont on ne rayonne pas a des conséquences directes sur notre capacité d'attirer les
investisseurs étrangers, a des conséquences réelles sur notre capacité de mobiliser des acteurs à
l'international par rapport au Québec. Alors, il ne faut pas sous-estimer les
décisions que l'on prend. Il ne faut surtout pas sous-estimer les
répercussions qu'elles ont.
Dans ce qui
nous occupe particulièrement — on va revenir sur les
18 000 dossiers — c'est que je pense qu'on a
réellement sous-estimé l'impact que ça avait. Et le meilleur témoin de cette
sous-estimation, c'est le fait qu'on ne connaissait même pas les chiffres du nombre de personnes qui
étaient, ici, touchées par les 18 000 dossiers. Alors, dès le dépôt
du projet de loi, on a voulu tout de
suite dire : On a un enjeu, là; pourquoi est-ce qu'on ne traite pas
l'ensemble des dossiers? Dès le
départ, on a été très clairs sur cet enjeu qui nous apparaissait extrêmement
litigieux, en plus de ne pas être économique,
vraiment pas humain. On a reçu énormément de messages de la part de nos
citoyens. Puis là je parle de «on». Ce n'est pas ma formation politique qui a
reçu ces messages-là. L'ensemble des formations politiques ont reçu énormément de messages de la part de personnes qui résident
au Québec ou qui résident à l'extérieur du Québec, par rapport à ça. Et la
réaction, ça n'a pas été une réaction
d'écoute, ça a été une réaction : Ce n'est pas grave, on maintient le cap,
on veut passer rapidement à la prochaine étape.
Et c'est là, je pense, qu'on a besoin de prendre
du recul puis de se dire : Comment est-ce qu'on va aborder ce dossier-là? Le dossier de ces
18 000 cas, il est important. C'est l'image du Québec. C'est aussi
notre manière de faire les choses au
Québec, la manière dont on veut se gouverner qui va être importante. Et le fait
qu'on ait été obligé, collectivement, d'aller
devant les tribunaux, ce n'est pas souhaitable. Ce n'est souhaitable pour
personne. Puis, très sincèrement, et je le dis au ministre, moi, je ne souhaite
pas qu'on ait à revivre ce genre de situation là. Puis je pense qu'il n'a pas
envie de la revivre non plus, ce genre
de situation là. Donc, pour éviter ça, est-ce qu'on est capables d'avoir les
conversations nécessaires puis se dire : C'est la bonne chose à
faire pour le Québec? Traitons ces dossiers-là.
D'autant plus
que, lorsqu'on regarde ce qu'on a été capable et en mesure de faire dans les dernières
années, on sait très bien que... je le sais, le ministre l'a mentionné à
plusieurs reprises, c'est un legs libéral que ce nombre de dossiers là. Mais la réalité, c'est que, et le
député de Sainte-Rose va être d'accord avec moi également là-dessus, le
95 000... il y avait
95 000 dossiers, en 2011, et chaque année il y a eu une réduction des
inventaires, entre guillemets — parce qu'on parle d'humains, ici, on
ne parle pas juste d'inventaire puis de dossiers, c'est des humains qui sont en
arrière de ça — il
y a eu une réduction systématique de ce nombre de dossiers là. L'année dernière
seulement, on parle de 20 000 dossiers
qu'on a été capables de traiter. Si on a été capables d'en traiter 20 000
en un an, en plus dans une année électorale,
ce qui signifie donc qu'il y a un changement de gouvernement dans ce cas-ci,
dans ce cas qui nous occupe, il me
semble qu'on serait absolument capables de traiter l'ensemble des
18 000 dossiers, outre que... À moins qu'on décide de ne pas le faire pour des raisons idéologiques.
Aujourd'hui, ce qui se produit, c'est qu'on décide de ne pas avancer, du
côté des 18 000 dossiers, ou de le
faire simplement parce qu'on a une injonction, donc on découvre qu'on a
500 dossiers et plus.
Et, en
passant, j'aimerais que le ministre puisse répondre à certaines des questions.
Parce que, lorsqu'il nous dit qu'il n'est pas capable de répondre au nombre de
dossiers qui sont traités... En fait, il n'y a aucune raison pour laquelle
on n'est pas capables de partager cette
information-là. En plus, elle se retrouve dans les médias. Il sait très bien
qu'il n'y a personne qui va le poursuivre parce qu'il a émis... donné ces
informations-là. Chat échaudé craint l'eau froide, mais là, c'est l'eau froide, c'est vraiment l'eau froide, ce n'est
pas l'eau chaude, là, qui va arriver au chat, là. Donc, il faut quand même
prendre un peu de perspective puis se
dire : Cette information-là, elle est pertinente pour les parlementaires.
Et si, au bout du compte, les
journalistes... cette information-là, elle devient publique, pourquoi ne pas
pouvoir en discuter entre parlementaires
puis se dire : Bien, voilà ce que nous prévoyons, dans les prochaines
semaines, dans les prochains mois, pour
y arriver? D'autant plus que le ministre s'est engagé à traiter certains
dossiers de manière prioritaire. Quels sont-ils? Où sont-ils rendus?
Moi, à la
place du ministre, ce que j'aurais fait, c'est... j'aurais présenté les
18 000 dossiers, dire : Écoutez, voilà, il y en a tant, telle année, tant, telle année,
voici ceux que nous allons traiter, voici ceux qui nous restent, après, voici
ce qu'on propose de manière
proactive. Au contraire, on a l'impression que l'information n'est pas
partagée, ce n'est pas nécessaire. On veut le plus possible faire
avancer ces dossiers-là de manière constructive.
Lorsque l'on
parle des inventaires, j'aimerais également revenir sur un certain nombre de
choses. C'est qu'il n'y a personne
ici, personne ici qui peut dire : On ne savait pas qu'il y avait ces
18 000 dossiers là. Ces 18 000 dossiers là, cette information-là était publique, elle est publique,
rendue publique chaque année. D'ailleurs, ce n'est pas une nouveauté, ce n'est une nouveauté pour personne. Ils étaient
40 000, il y a deux ans, 18 000 cette année, 65 000 il y a
plusieurs années, donc, cette information, elle est publique.
Ce projet de
loi, qui vise à faire en sorte qu'idéalement, dans une forme que je
souhaiterais autre, il y ait une
meilleure intégration, un meilleur arrimage, une meilleure adéquation entre les
besoins de la main-d'oeuvre et les immigrants,
c'est une bonne chose, puisque le changement de loi... Même sous le
gouvernement libéral, en 2016, c'est ce que nous avons proposé. Le nouveau système Arrima
a été mis en place sous le gouvernement libéral. Donc, évidemment que nous
sommes en faveur. Il n'y a personne... vous n'allez trouver personne autour de
cette table et, je pense... enfin, je dis «personne», je regarde mon collègue de Laurier-Dorion, je ne suis pas
certaine, quand je dis ça, mais personne de notre formation politique, en tout cas, qui va dire
qu'on n'est pas d'accord avec un meilleur arrimage. Mais ce meilleur arrimage
là, il faut qu'il se fasse de la
bonne façon puis de la bonne manière, alors, en faveur de faire avancer un
projet qui va nous amener plus loin, qui va faire en sorte que nous
allons avoir plus de régionalisation, plus de francisation et plus
d'intégration, évidemment.
Mais j'aimerais aussi que, lorsque l'on parle de
ça, puisqu'on va parler beaucoup d'amélioration, on reconnaisse le chemin qui a été parcouru. Lorsqu'on regarde la
rétention au Québec... Moi, il y a une chose que je déteste, Mme la Présidente, là, c'est d'avoir des chiffres qui ne
tiennent pas la route. Ça, moi, j'ai horreur de ça. Ce n'est pas vrai que
25 % des gens au Québec, à
l'intérieur de 0-5 ans, décident de quitter le Québec. Ce n'est pas vrai.
Ces chiffres sont faux. Ce qui est
vrai, c'est qu'on a un taux de rétention autour de 84 % au Québec. Ce taux
de rétention là, il se compare allègrement à ce que nous voyons dans le reste
du Canada. On est mieux que certains, on est un peu moins bons que d'autres, mais
en moyenne on se situe dans la moyenne
canadienne. Et vous n'allez trouver nulle part au monde où il n'y a pas de taux
de rétention à 100 %. Ça n'existe pas. Donc, on peut se comparer aux
meilleurs puis en disant : Le 84 % devrait peut-être être à 90 %. Mais il ne faut surtout pas
dire : C'est une catastrophe, c'est un désastre, 25 %. C'est alerter
les gens. Quand on regarde les
chiffres, les chiffres tiennent la route. Est-ce qu'on peut les améliorer? J'en
suis, j'en suis. Mais encore
faut-il les regarder.
• (16 h 40) •
Quand on regarde, par
exemple, le regroupement familial, on a un des meilleurs taux de rétention au Canada.
On est deuxième sur 10 provinces, sur
le regroupement familial. Ce qui signifie donc que, ceux-là, on devrait les
encourager à... nous assurer qu'il y
ait une intégration encore plus rapide de ces gens-là parce que ça fonctionne.
Les chiffres démontrent que ça
fonctionne. Alors, quand on décline les statistiques, on se rend compte qu'on
serait capables de prendre des décisions, dire : Bien, le regroupement familial, ça, ça marche; par contre,
tel élément, peut-être qu'on devrait travailler davantage
là-dessus. Et je pense que c'est de cette manière-là qu'on va être capables de
progresser.
Même
chose pour les taux de chômage. C'est correct de prendre des taux de chômage
qui remontent à... on ne va pas dire
Mathusalem, mais qui remontent à longtemps. Mais est-ce qu'on est capables de
prendre les taux récents puis de comprendre un peu ce qui se passe dans le
système aujourd'hui, de comprendre un peu les chutes de taux de
chômage drastiques que l'on observe aujourd'hui? Et le fait qu'il y a une intégration qui se fait de plus en plus
rapidement, le fait que le taux
d'emploi des immigrants... Le taux d'emploi des immigrants a dépassé le taux
d'emploi de la population active. Je
n'ai jamais entendu le ministre le dire. Jamais qu'il n'a dit ça. Pourtant, ce
sont des faits. Alors, lorsque l'on regarde ça, il y a matière à amélioration, mais il faut absolument
comprendre tout ce qui vient en arrière, tout ce qui vient en arrière, comme données, pour nous permettre de prendre les
bonnes décisions. Et ça, je pense que c'est un élément qui est essentiel.
Ensuite, il y a évidemment toute la question de la
résidence permanente. On a besoin de comprendre, à l'intérieur de ce projet
de loi, l'intention du législateur,
comme en tout projet de loi, vous me direz. Mais la résidence permanente,
une chose à laquelle c'est sûr que je vais
m'opposer, c'est que le Québec soit un endroit où on est obligé d'avoir une épée
de Damoclès, par rapport à d'autres
régions. Je pense que le Québec peut rayonner, le Québec peut pleinement se
déployer, peut pleinement s'affirmer.
Mais je n'ai pas envie que les gens se disent : Aïe! Si je vais en Ontario,
là, ça me prend un an, et, si je vais
au Québec, ça me prend trois ans, puis j'ai une épée de
Damoclès parce qu'ils essaient d'établir des conditions à une résidence permanente. Non seulement ce n'est
pas souhaitable, mais ça va même à l'encontre des intérêts des Québécois. Ça va
même à l'encontre de ce que l'on devrait faire d'un point de vue social, d'un point de vue économique, d'un point de vue... Même d'un point de vue administratif,
ça n'a pas de sens. Et, si on regarde les propos qui ont été tenus par les différents intervenants qui sont venus nous voir,
le message est on ne peut plus clair par
rapport à leur positionnement.
Si
on regarde, par exemple, les gens de l'AQOCI... de l'AQAADI, pardon, pas
l'AQOCI, l'AQAADI. Ils sont venus
nous voir. Cette question-là est vraiment problématique. Et on sait que c'est
eux qui ont décidé de poursuivre le gouvernement et qu'il y a une
demande d'injonction, etc. On ne veut pas se retrouver dans une situation où il
y aura davantage de poursuites. Or, force
est de constater que, dans les propos qui ont été tenus par les différentes
personnes qui sont venues, il y a un risque associé à davantage de poursuites.
Donc, comment est-ce qu'on élimine aussi... Non, à la limite, on ne dit pas qu'on légifère pour
éviter des poursuites. Ce n'est pas ce que je dis. Mais on est capables
d'évaluer les risques. Et un de ces
risques, par exemple, c'est de ne pas traiter les
18 000 dossiers. Parce que ça nous coûterait environ 4 millions de dollars, passer à travers les
18 000 dossiers? Ça va nous en coûter plus de 20 millions pour
les éliminer. Quel est le choix logique par rapport à ça? Encore une
fois, ça ne tient pas la route.
Et donc, lorsqu'on
regarde les commentaires qui ont été émis, je pense qu'il faut les prendre avec
hauteur. La Protectrice du citoyen est venue
nous dire, encore une fois, qu'il y avait d'autres risques si on ne compensait
pas suffisamment les personnes. Je
sais que le ministre a moins aimé la visite de la Protectrice du citoyen, mais
au-delà de... On pourra dire moins aimé, je pense, c'est une belle manière de
qualifier l'appréciation. Non?
Une voix :
...
Mme Anglade :
Mais elle est venue, elle a donné son opinion et elle nous a dit qu'il y avait
des risques, en termes de poursuites. Et ça,
c'est un enjeu qui va revenir. Et il faut que, lorsqu'on étudie le projet de
loi, qu'on soit en mesure de dire : Bien, voici une modification qui va
faire en sorte que, d'un point de vue de la législation, on prend les
bonnes décisions.
Puisqu'on
parle d'économie, parlons-en. Plusieurs intervenants sont venus parler de
pénurie de main-d'oeuvre, de la nécessité d'avoir un meilleur arrimage. Puis là
on va tous être d'accord avec ça, hein? Il n'y a personne qui va être en désaccord avec ça.
Mais un élément très important qui a été mentionné, c'est que l'immigration
temporaire n'est pas une solution à la pénurie de main-d'oeuvre.
À plusieurs
reprises, on a entendu certains protagonistes dire : On va faire venir
plus de personnes de manière temporaire. En aucun cas l'immigration
temporaire n'est un substitut réel à une immigration permanente. Et ça, les représentants des milieux économiques ont été très
clairs là-dessus. Conséquemment, il faut qu'on soit en mesure de dire :
Ce n'est pas une solution de long terme,
c'est une solution de rechange. On peut l'améliorer, on peut accélérer
certaines choses, mais ça ne peut pas
être la source première qui va faire en sorte qu'on va bâtir... Le Québec ne
s'est pas bâti sur une immigration temporaire. Ça n'a jamais été la philosophie
au Québec. Donc, je pense qu'il faut vraiment réfléchir sur le long
terme.
Et une
entreprise, d'abord et avant tout, souhaite avoir de la prévisibilité, souhaite
avoir un degré de certitude. Tout ce qui crée de l'incertitude, de manière
générale, nuit au développement économique. Ce n'est pas compliqué, c'est
assez simple en fait. Alors, cette
incertitude-là, il faut que, lorsqu'on étudie le projet de loi article par
article, on soit en mesure de dire : On va éliminer certains
éléments d'incertitude. Ça, c'est de l'incertitude, parlons-en, éliminons ça et
éliminons ça. On va améliorer le projet de loi avec ce principe-là si on
continue d'éliminer ces éléments...
La Présidente (Mme Chassé) :
...vous reste trois minutes.
Mme Anglade : C'est parfait. C'est parfait. Je pense que je
vais les prendre. Vous m'arrêterez après. Je regarde ça.
La Présidente (Mme Chassé) :
... près d'une minute.
Mme Anglade : Il n'y
a pas de problème.
Faites-moi signe, mais je vais... j'y reviendrai de toute façon. Donc, évitons les poursuites, assurons-nous d'éliminer
des incertitudes, basons-nous sur des faits. C'est un peu les principes
qui devraient nous guider dans l'étude du projet de loi qui nous a été
présenté.
J'aimerais
rappeler aussi que, dans certains intervenants qui ont pris la parole, toute la question
de... le Québec à l'international, ce que ça signifie. Moi, ça ne me fait pas plaisir de voir des articles
sur le Québec à l'international,
ça ne me fait pas plaisir d'un point
de vue image, ça ne me fait pas plaisir d'un point de vue économique. Moi, ce
n'est pas ce genre d'articles là que
j'ai envie de lire. Je pense aussi qu'on a une responsabilité de prendre cette
hauteur-là puis de se dire que les décisions de court terme qu'on est
peut-être amenés à prendre ont des impacts à long terme. On sous-estime aujourd'hui des décisions qui sont prises, et leur
impact qu'elles vont avoir sur l'image, puis notre capacité à attirer des
personnes.
J'ai entendu
le ministre dire, à un moment donné : Ah! il y a
102 000 personnes dans Arrima, ça veut dire qu'on a de l'attrait. Je vais vous dire une chose, les
gens qu'on souhaite attirer, là, ils ont la possibilité d'aller partout sur la
planète. Ils ne vont pas attendre que
le ministre décide d'inviter les personnes qu'il veut inviter à Arrima, puis...
Ce n'est pas ça qui se passe. C'est
qu'on est en compétition avec le reste du monde. Alors, je pense qu'on a un
degré d'agilité à introduire dans notre manière de fonctionner, dans
notre manière de faire les choses.
Finalement,
peut-être d'un point de vue plus personnel, rappelons-nous que le processus
d'immigration est un processus de
long terme. Nous sommes en 2019. Il y a exactement 50 ans, mes parents
immigraient au Québec. C'est un processus
qui est long, c'est un processus qui ne se fait pas sur le coin d'une table,
c'est un processus qui est complexe, et
j'espère qu'autour de la table nous allons avoir le respect nécessaire par
rapport à des gens qui décident de faire le choix du Québec, et de comprendre que ce ne sont pas des
enjeux simples que l'on peut traiter à gauche puis à droite, puis qu'il nous
faut, encore une fois, prendre du recul et de la hauteur pour bien amener ce
projet de loi de l'avant.
Alors, Mme la
Présidente, je vous remercie. Il me fera plaisir de poursuivre les échanges
avec mes collègues. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée. J'invite
maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député de Laurier-Dorion à faire ses remarques
préliminaires pour une durée maximale encore de 20 minutes.
M. Andrés Fontecilla
M. Fontecilla :
Merci, Mme la Présidente. Comme Mme Anglade, je salue tous les membres de
la commission. C'est un réel plaisir
d'être ici avec vous et commencer l'étude détaillée d'un projet quand même...
un projet de loi très important. Je salue le ministre également.
Et évidemment,
l'immigration, c'est peut-être le sujet du XXe siècle, hein? Ce n'est pas
pour rien. Le Québec ne fait pas
partie d'un bocal de quelque chose de séparé d'à travers le monde. On fait
partie d'un monde où l'immigration est un sujet brûlant. Ça suscite d'ailleurs
des positionnements politiques et surgissements de forces politiques qui nous préoccupent. Et ce ne serait pas de... on ne peut
pas supposer que la présentation du projet de loi n° 9
échappe à la considération politique plus large que le simple arrimage économique
d'un emploi d'un immigrant à un emploi à Chibougamau.
• (16 h 50) •
Donc,
d'emblée, je dirais que c'est... je dirais rare, là, mais
c'est à vous de me dire que ce n'est pas le cas, qu'un projet de loi commence par une commotion humaine, un drame humain. En fait, c'est la
deuxième fois qu'on voit très rapidement
cette situation-là dans la présente législature. C'est le projet de loi sur les taxis, aussi, qui a suscité un drame humain... qui suscite, en ce
moment, un drame humain très important. Et celui-là, c'est concernant
l'immigration. C'est un petit peu antérieur.
Donc,
on parle de l'annulation de l'étude de 18 000 dossiers, ce qui
représente... bon, les chiffres ne sont pas fixes, peut-être que le ministre
pourrait nous renseigner, entre 45 000 et 60 000 personnes, dont
une proportion importante, substantielle
concerne des gens qui restent au Québec et qui, malgré les assurances du ministre, ne
pourront pas... enfin, n'ont pas les
critères nécessaires... ne remplissent pas les critères nécessaires pour
rentrer dans la petite case du Programme de l'expérience québécoise ou le programme Arrima. Donc, voilà, premier
constat : un drame humain et des milliers de personnes qui
dépendent de nous, d'on ne sait pas trop quoi, d'un processus politique, etc.,
et qui voient leur avenir hypothéqué.
Et,
ensuite, le projet de loi, tel qu'il nous est présenté, met de l'avant une
vision réductrice de ce qui est l'immigration et qui assigne un rôle à celle-ci cantonné strictement au domaine
économique. L'immigration n'est considérée que comme de la main-d'oeuvre qui... et non pas comme des
citoyens, citoyennes qui un jour vont s'intégrer complètement à la société
québécoise, vont fonder une famille, vont
envoyer leurs enfants, qui vont voter, qui vont participer pleinement, donc qui
vont contribuer, oui, économiquement, mais aussi socialement, culturellement à
la société québécoise.
Donc, le projet de loi n° 9 tend à considérer la personne issue de
l'immigration comme un facteur de réduction, hein? Puisqu'on parle en termes économiques, un facteur de production,
c'est une marchandise, c'est une machine qu'on déplace, qu'on achète, qu'on vend, qu'on répare, qu'on évacue, qu'on
jette aux vidanges. Et ça se passe au détriment de tous les autres facteurs qui
concernent l'intégration d'une personne issue de l'immigration. D'ailleurs, si
vous avez bien entendu les groupes
qui se sont présentés en commission parlementaire, tous les groupes dans le
domaine de l'accueil et l'intégration des personnes issues de
l'immigration nous diront que l'intégration est un phénomène complexe qui comporte des avancées, des reculs, et de la
stagnation, souvent, et des périodes de chômage, des périodes d'emplois dans
des secteurs tout à fait insatisfaisants
pour la personne, etc. Et, même, c'est une période qui peut s'étendre à travers
des années, souvent tout au long de la vie d'une personne et même
jusqu'à une deuxième génération.
D'ailleurs, on
sait, et pas seulement ici, au Québec, mais ailleurs dans le monde, la pauvreté qui
affecte les immigrants de première
génération affecte aussi les immigrants de deuxième génération, hein, la
pauvreté se perpétue. Et là on
pourrait discuter et faire des analyses de savants à savoir si la pauvreté,
c'est de la faute des pauvres ou c'est de la faute du système qui les maintient dans la pauvreté. Mais ça, c'est un
autre projet de loi, disons. C'est comme si, à travers ce projet de
loi...
Et cette
question-là de la réduction... la vision réductrice de l'immigration à l'aspect
économique, là, ce n'est pas d'une
nouveauté qui vient du gouvernement de la Coalition Québec, hein? En fait,
Arrima a été créé effectivement par le
gouvernement libéral. C'est une vision qui correspond aussi... qui a été lancée,
implantée par le gouvernement libéral, et,
oui, je reconnais, Mme Anglade, que nous avons des critiques concernant
cette vision économiste de l'immigration qui est aussi portée par le
Parti libéral. Donc, heureusement, la Coalition avenir Québec n'a pas le
monopole de cette vision-là. Donc, c'est une
vision qui, certains diraient, considère, au mieux, le ministère de
l'Immigration, le MIDI, comme une
agence d'emploi international dont la mission, c'est la mission d'une agence d'emploi, mettre en
contact un chercheur d'emploi, une chercheuse, avec un employeur. Et, au pire,
et on l'a entendu, cette mission-là même d'agence d'emploi internationale devrait être
accomplie par le privé parce qu'eux
ils connaissent vraiment, et on peut le comprendre, les réalités des dynamiques économiques sur le terrain, là.
Donc, voilà, d'emblée, on peut cantonner ce projet de loi dans cette vision-là.
Aussi, ça comporte un certain nombre de
problèmes parce que le projet de loi, tel qu'il nous est présenté, fait omission de la notion, qui était présente dans
d'autres politiques ou d'autres lois, la notion de responsabilités partagées.
Donc, selon cette notion-là, c'est autant l'immigrant que la société d'accueil
qui ont des droits et responsabilités qui doivent
être partagés et sont un peu le reflet de l'un dans l'autre. L'immigrant,
évidemment, oui, il a le devoir de s'intégrer, mais la société a le devoir de lui paver la voie, d'enlever des
obstacles, de lui donner de la francisation, lui donner des bons conseils d'emploi, un parcours individualisé,
que le projet de loi prévoit d'ailleurs, là. Mais, dans le projet de loi tel
que présenté, il n'y a pas de trace
explicite des responsabilités de la société d'accueil, et tout le poids repose
sur les épaules de la personne immigrante, ce qui est un rapport un peu
déséquilibré.
Et, oui, le
ministre prévoit, dans son projet de loi, davantage de ressources en
accompagnement personnalisé, le parcours personnalisé, ce qui est bien, que
nous saluons. Mais ce qui se dégage de l'esprit du projet de loi n° 9 est bien celui de la
capacité de l'État d'imposer des obligations, c'est ça qui se dégage
principalement, des obligations à l'immigrant. Et on lui met sur le dos la responsabilité de travailler un peu partout
à travers le territoire. Encore une fois, c'est réducteur. Et moi, je
constate... et ma formation politique, on constate un appauvrissement de la
riche vision développée par les institutions
québécoises depuis les 30, 40 dernières années à travers... concernant
l'immigration. Donc, voilà. Et je trouve cela désolant qu'on appauvrisse notre compréhension, et notre vision, et
les outils qu'on se donne concernant l'intégration de l'immigration.
On voit
souvent, dans le projet de loi n° 9, la question des valeurs québécoises. Oui, ça
existe, depuis quelque temps, cette
notion-là. Et ici on l'utilise encore une fois à profusion, mais ça porte à
confusion, hein? Évidemment, on les cantonne selon les valeurs qui se dégagent de la charte québécoise des droits et
libertés. D'ailleurs, il y a deux sortes de valeurs, semble-t-il, au Québec : il y a les valeurs
démocratiques, selon le p.l. n° 9, et les valeurs québécoises. Je pense qu'il y a
amplement matière à discussion sur ces deux
grands champs de valeurs. J'aimerais bien comprendre qu'est-ce que recouvre
l'un, qu'est-ce que recouvre l'autre, qu'est-ce que c'est, ces valeurs, et
comment les mesurer.
Et
insidieusement le p.l. n° 9 introduit la possibilité d'un test de valeurs.
Parce que, si on parle des valeurs, il faut pouvoir les mesurer à un moment donné. Comment on mesure les choses? On
passe des épreuves, des tests. Et c'était cela, d'après ce qu'on comprend. Mais, encore une fois, ce n'est pas si clair,
là. C'est considéré comme une condition à l'obtention de la résidence
permanente. Mais, sur la mécanique de tout cela, on n'en sait pas grand-chose.
Le tout sera envoyé à des éventuels
règlements. Il est très particulier et inquiétant qu'une loi ouvre cette
possibilité sans la baliser davantage.
Comment mesurer l'adhésion à des valeurs? Et surtout, et surtout, comment
peut-on pénaliser une personne de ne pas avoir suffisamment adhéré à des valeurs,
là, qu'on a préalablement mesurées? J'espère que nous allons nous y pencher
très sérieusement pendant l'étude détaillée.
• (17 heures) •
Et, en
effet, l'idée des tests des valeurs fait peut-être gagner des élections, mais
malheureusement, Mme la Présidente, selon nous, ils ne font pas gagner le Québec. Ces propositions sont
porteuses de controverses aiguës dans les décennies à venir, et elles diviseront passablement la société
québécoise, là. Et d'ailleurs est-ce
qu'il y a un état d'urgence sociale
qui justifie le fait d'inscrire dans
les lois des notions aussi controversées? C'est bien de respecter ses promesses
électorales, là. Mais, une fois au pouvoir, le gouvernement doit éviter
de jouer aux apprentis sorciers.
En prendre
moins, mais en prendre soin, on la connaît, et c'est ce que nous martèle le premier ministre depuis la campagne électorale, et nous savons que c'est un très bon
sophisme, effectivement, mais c'est un faux dilemme. Rien n'indique que
le fait de réduire le seuil et d'accepter moins d'immigrants va améliorer le
sort des personnes immigrantes. D'ailleurs,
la question de seuil, là, qui est intimement liée, quand même, à ce projet de loi là, répond à un engagement électoral, parce qu'on sait déjà... le ministre a déjà
annoncé que, dès 2019‑2020, il va y avoir augmentation. D'ailleurs, on
l'avait appris lors des consultations particulières. Donc, cependant, une année
seulement pour répondre à une promesse électorale, et en disant... en
voulant envoyer le message que le gouvernement de la Coalition avenir Québec
allait diminuer l'immigration, comme si celle-ci était quelque chose, comment dire, de problématique, là, il y en avait trop, là. Et donc on sait qu'encore une fois
la réduction de seuil d'immigration n'améliore pas le sort des personnes
issues de l'immigration, et l'institut de recherche socioéconomique l'a montré,
l'IRIS, et il a montré dans un rapport, il
n'y a pas longtemps, que les pays qui accueillent le plus d'immigrants sont
ceux où la situation est la meilleure par
rapport à la population native, là.
La question
de l'intégration. Il y a peu de choses dans le projet de loi pour une
meilleure intégration des personnes issues
de l'immigration. Pourtant, il est là, le problème, là, actuellement il n'y a
pas assez de ressources en intégration. Oui, il va y avoir plus d'argent, j'en conviens et j'applaudis, hein?
Mais il faut savoir l'utiliser, l'argent, là, hein? Parce que jeter de l'argent par la fenêtre, ça se fait aussi, vous le savez.
Mais je n'oserais jamais penser quelque
chose, hein? Lancez-vous la balle. Et
donc il n'y a pas, en ce moment, assez de ressources en intégration. Ce qu'on
trouve abondamment dans le projet de loi, là, par contre, c'est les bâtons,
c'est l'obligation. Ça, là, on ne s'en sort pas. Mais il n'y a pas
l'idée d'une bonne politique d'intégration,
là. Est-ce qu'il va y avoir supposément, bon, surtout de l'intégration, et plus
de francisation?
Oui, nous
appuyons l'idée d'un accompagnement personnalisé des personnes immigrantes,
mais on peut et on doit aller plus loin, là, pas seulement concevoir cet accompagnement-là
comme un agent d'aide pour trouver un emploi. C'est qu'on n'est pas... Le MIDI, ce n'est pas un carrefour en
emploi-jeunesse, ce n'est pas emploi-jeunesse non plus, et l'accompagnement peut aller beaucoup plus loin,
là. Par exemple, est-ce que le gouvernement investira davantage en
francisation? On aimerait le savoir. Est-ce qu'il va formuler des... va
explorer des formules novatrices? Par exemple, est-ce que le gouvernement va soutenir les entreprises pour la
francisation en milieu de travail? Est-ce que c'est appuyé par certains acteurs économiques aussi? Et surtout
soutiendra-t-il les personnes suivant des cours de français avec un revenu qui
les motive à demeurer sur les bancs d'école? Parce qu'on le sait, les personnes
qui vont surtout souvent aux cours de... à temps plein, mais particulièrement à temps partiel, ne reçoivent pas
assez d'argent, et il n'y a pas assez d'incitatifs pour rester sur les bancs d'école à apprendre le
français. D'ailleurs, ça a été souligné par... bien, le taux d'abandon a été
souligné par la Vérificatrice
générale, là. Nous avons besoin de plus de classes pour bien franciser les
personnes immigrantes. Oui, il y a
une augmentation du budget, mais on aimerait bien savoir comment cet argent-là
va être... concrètement, quelles vont être les politiques, là, qui
découlent du projet de loi n° 9.
D'autres
angles morts du p.l. n° 9, là. Aucune disposition concernant la
discrimination à l'embauche. On dirait que ça n'existe pas, alors que plusieurs intervenants en commission
parlementaire sont venus nous nommer cette réalité-là. Effectivement,
c'est une réalité difficile à reconnaître, mais un gouvernement responsable,
justement, reconnaît ces situations
difficiles et prend le taureau
par les cornes et fait quelque chose. Est-ce
que le gouvernement va proposer quelque chose dans ce sens-là pour contrer
la discrimination à l'emploi, alors qu'il n'y a rien dans le projet de loi
n° 9?
Et la
question de la reconnaissance des diplômes et des compétences, pas grand-chose
non plus dans le p.l. n° 9; un autre angle mort. Donc, ça commence à se
multiplier, et ça confirme, encore
une fois, la vision réductrice de ce projet de loi là, que, j'espère, on pourra
bonifier en cours de route. Et...
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste trois minutes.
M. Fontecilla : Trois minutes,
madame?
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui.
M. Fontecilla : Merci. Quelques articles qui posent particulièrement problème, l'article 10,
les conditions que doit déterminer un
employeur, là. On ajoute des conditions pour qu'un employeur puisse embaucher
un résident permanent, ce qui est en
soi assez problématique, parce que...
Enfin, ce que je... vous allez peut-être me corriger, un immigrant... un résident
permanent a absolument le même droit qu'un citoyen, une citoyenne canadienne,
sauf le droit de vote. Donc, je ne vois pas pourquoi un résident... on devrait
mettre des conditions à ce qu'un employeur embauche un immigrant résident, là. Et souvent des immigrants ont du mal
à se trouver du travail, et voilà que le projet de loi impose des conditions aux éventuels employeurs, des contraintes pour les
embaucher, là. Et le gouvernement, c'est prévu, va se donner le droit de retirer, on croit, là, la résidence permanente,
parce qu'elle est conditionnelle. Nous croyons fermement que la sélection doit se faire en amont. Une fois l'immigrant
sélectionné, il ne doit pas vivre plusieurs années au Québec, y trouver un
travail, y fonder une
famille, et se faire dire : Bien là, finalement, tu ne fais plus
l'affaire, tu t'en vas. Et on a utilisé tantôt l'expression l'épée de
Damoclès. C'est ce que promet ce projet de loi, et ça va faire certainement
diminuer le taux de rétention parce qu'il
n'y a aucun immigrant qui va vouloir amener sa famille au Québec alors que,
dans quelques années, il pourra se
faire dire : Bien toi, toi et ta famille, là, vous devez vous en aller. Où
ça? Ailleurs, là, dans le reste du Canada, on suppose, là. Et donc... et d'ailleurs, c'est une des craintes que...
ça a été soulevé par plusieurs personnes. Ce projet de loi est peut-être une
façon de... l'effet pervers, c'est de créer des sans-papiers, à terme. Et donc,
bien, je vais m'arrêter là, madame.
La Présidente
(Mme Chassé) : C'est très bien.
M. Fontecilla :
Merci.
La
Présidente (Mme Chassé) : Je vous rappelle qu'on s'adresse aux
membres de la commission par le nom de leur
circonscription. Et j'ai apprécié que vous vous soyez adressé tout du long à la
présidence. Alors, merci beaucoup, M. le député.
J'invite
maintenant la porte-parole du troisième groupe d'opposition et députée de Gaspé
à faire ses remarques préliminaires, pour une durée maximale de
20 minutes.
Mme Méganne Perry Mélançon
Mme Perry
Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Je ne vais pas prendre ce tour
pour faire des remarques préliminaires. Je
vais simplement rappeler que, bien, en fait, je suis en faveur du principe du
projet de loi, outre certains éléments,
à quelques éléments près. Je l'ai déjà dit en intervention au salon bleu que,
moi, quand je lis le nom du projet de loi,
ça me paraît fondamental qu'on travaille là-dessus puis qu'on le fasse de
manière conviviale, tous ensemble. Mais certainement il y a des
éléments, comme la destruction de 18 000 dossiers non traités, qui ne
va pas dans le sens de ce qu'on veut
projeter comme réputation des Québécois comme terre d'accueil pour nos nouveaux
arrivants. Et puis il y a également des éléments qui sont manquants, que
je souhaite qu'on rajoute, effectivement, dans le projet de loi. Donc, quand on
ira article par article, je me prononcerai davantage. Mais, effectivement, tout
le pan de la discrimination à l'embauche et
puis de reconnaissance des diplômes... qu'en ce moment on doit vraiment
travailler plus en profondeur. Alors, je pense que j'y reviendrai au
moment opportun. Merci.
• (17 h 10) •
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous, Mme la députée. Est-ce
qu'il y a d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires du côté du parti formant le gouvernement?
Non? Est-ce qu'il y a... Ah! j'invite le député de D'Arcy... attends, je
vais devenir bonne, Nelligan...
M. Monsef Derraji
M. Derraji :
De Nelligan.
La Présidente (Mme Chassé) : ...le député de Nelligan à prendre la parole pour
un maximum de 20 minutes.
M. Derraji : Merci,
Mme la Présidente. Nous voilà arrivés
à une étape très importante, celle qui introduira une longue série de questions afin de nous
permettre de lever le voile sur plusieurs aspects de ce projet de loi. Le moins que
l'on puisse dire... que ce projet de loi soulève bien des interrogations, des questionnements, mais aussi
des points positifs. Il est bien
évident que, parfois, à entendre parler et à entendre certaines propositions, on arrive à se demander si
ce gouvernement a une maîtrise pleine
et entière des enjeux qui touchent l'immigration. J'avais l'impression
d'assister à la même scène que nous
avons eue pendant la dernière campagne électorale, et je vais me permettre
aujourd'hui, dans mes remarques
préliminaires, de soulever trois blocs, trois points importants du point de vue
humanitaire, du point de vue migratoire et du point de vue économique. L'impact
économique mais aussi juridique — on parle aussi d'inconstitutionnalité — revient toujours lors de nos échanges avec
les intervenants que nous avons eu, tous, la chance, les membres de
cette commission, d'entendre pendant les débats entourant ce projet de loi.
Au niveau humanité,
alors, lorsqu'on parle d'humanité, on ne peut occulter la question des
18 000 dossiers. Et je pense qu'en
toute humilité il faut avouer que la décision de jeter les
18 000 dossiers a fait très mal au Québec, et à notre sérieux. Vous savez, Mme la Présidente, nous
avons eu une très bonne réputation, à l'échelle internationale, par rapport à notre système d'immigration. Il y a
beaucoup de pays qui s'est inspiré du modèle québécois au niveau de l'accueil,
mais aussi la sélection. Et, je me rappelle,
je l'ai déjà entendu dans plusieurs pays, que les gens venaient au ministère de
l'Immigration s'inspirer de nos façons de
faire. Donc, le fait de jeter à la poubelle les 18 000 dossiers et se
faire rappeler à l'ordre par la cour a été quand même quelque chose qui
nous faisait mal en tant que société québécoise.
Les
employeurs québécois aussi, pendant toute cette période, nous ont
démontré que, sur le territoire québécois,
il y avait des personnes qui travaillaient en situation régulière, qui
contribuaient à l'économie québécoise comme nous tous, qui payaient leurs taxes. Et ce qu'on a fait avec cette décision,
c'est qu'on a rajouté de l'incertitude. Nous avons vu la mobilisation de plusieurs personnes qui se disaient : Ça n'a pas de
bon sens. Moi, ma vie, elle est au Québec, ma vie n'est pas ailleurs. Comment ça se
fait que, d'un seul coup, le gouvernement va faire abstraction à tout ce que
j'ai pu construire avec ma famille et jeter
à la poubelle mon dossier? Donc, ça a été quand même un climat très
difficile, hein? Il faut le dire. Ça a été un climat où, personnellement,
je ne l'ai jamais vécu au Québec. Donc, ça, d'une part.
D'autre
part, nous pouvons répondre à
l'invitation du ministre de
l'Immigration qui nous rappelle de
collaborer dans ce dossier. Je l'ai
bien entendu, et je peux vous assurer que pas uniquement moi-même,
mais l'ensemble des membres de notre formation, ça nous tient à coeur, ce projet, parce qu'on veut bien faire les choses. Et il
faut bien faire les choses parce que
ce que nous sommes en train d'étudier
aujourd'hui va impacter l'avenir économique de notre Québec, va impacter
l'avenir de plusieurs régions, parce que,
oui, on doit arrimer entre les besoins du marché du travail, les besoins des
régions... mais il faut bien le faire, il faut bien le faire.
Et donc ce
projet de loi — et c'est
là le lapsus, hein — ce
projet de loi n° 9 repose sur une promesse politique électorale parce que, jusqu'à tout récemment,
d'après ce que j'ai compris, c'est 40 000, mais, du coup, on pense augmenter
ça à partir de l'année prochaine — nous sommes déjà presque au mois de
mai — et ça,
ça va avoir un impact négatif sur notre
économie, vu la non-disponibilité de la main-d'oeuvre. Et on ne sait pas à quel
point le processus de migration ne se fait pas en un seul jour.
Et je vais me
permettre de rajouter une petite note personnelle, et, je pense, au tour de la
table, je suis probablement l'immigrant
qui a probablement immigré récemment — hein, récemment, ça remonte quand même à
2004 — et je
vais me mettre dans la peau de ces 18 000 dossiers.
Le processus d'immigration, ça ne se fait pas facilement, c'est très difficile.
Il faut être dans la peau de cette personne
pour le vivre. Moi, personnellement, j'ai eu à faire beaucoup de voyages pour
voir le lieu de ma résidence : Est-ce que
je vais habiter à Sherbrooke, ou à Québec, ou à Montréal? Où je vais faire mon
MBA, parce que j'avais le choix, et j'ai
trouvé ce que je voulais au Québec. Donc, quand je dis une part d'humanité,
c'est très important pour nous. Et
s'il y a quelque chose à corriger après ce projet de loi, c'est redorer l'image
qu'on est toujours une terre
d'accueil et qu'on prend soin des personnes qui déposent... et qu'on a le
droit... et ils ont le droit de recevoir une réponse de notre part, peu
importe cette réponse.
Donc, comme
j'ai dit, c'est un processus qui est laborieux et se fait sur des années pour
certains. Il ne faut pas perdre de vue que le choix que font les gens
d'immigrer au Québec plutôt que vers les autres provinces du Canada repose aussi sur la volonté de vivre en français.
Les gens en sont bien conscients. Donc, le Québec est connu pour être une
province qui porte les valeurs de démocratie, d'égalité entre les femmes et les
hommes, de séparation entre le pouvoir politique
et le religieux, et de primauté du droit. Chacun prétendant à l'immigration
signe une déclaration sur les valeurs communes
de la société québécoise avant d'obtenir le CSQ. Alors, je m'irrigue en faux
lorsque l'on nous le fait croire... qu'on veut nous croire que les
personnes ne sont pas au courant.
Donc, Mme la
Présidente, contrairement à ce que le ministre de l'Immigration pense
probablement, la procédure d'immigration est davantage qu'un simple dossier
qu'on envoie au MIDI pour analyse. Il constitue, à mon sens, un contrat
moral qui lie le Québec à celles et ceux qui, de bonne foi, déposent leur
dossier lorsqu'ils savent qu'ils remplissent objectivement
les critères d'admissibilité de différents programmes d'immigration. Certains
vous diront que ce n'est pas contraignant. Mais, lorsqu'on est conscient
des dégâts sur la réputation du Québec, on mesure tout l'impact d'ordre migratoire et économique que cela peut engendrer
par ailleurs. Ce n'est pas anodin et cela doit être pris très au sérieux,
alors éliminer des dossiers sans penser aux répercussions humaines en arrière
est tout simplement inacceptable.
Au niveau
migratoire, en parlant de ce qui est inacceptable, comme on le sait, le
gouvernement du Québec aurait pu
décider de procéder à un traitement accéléré de toutes les demandes de CSQ, si
on prend le contexte actuel de pénurie de
main-d'oeuvre, en finalisant les demandes en cours. Pourtant, si on est
attentifs au discours des organismes qui ont été consultés, le besoin
est criant. Il existerait même un large consensus sur le fait qu'il faudrait
davantage penser à augmenter le taux
d'immigration. Et je pense, même le ministre s'est rendu compte très, très tôt
et il a annoncé la semaine dernière
au CORIM qu'il prévoyait une augmentation du taux en 2020. Pas tellement ça? Une
augmentation, et non à le diminuer comme le souhaitait le gouvernement.
C'est l'avis en tout cas de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain,
du Conseil du patronat du Québec, de la ville de Montréal, de l'Institut de
recherche et d'informations socioéconomiques.
En clair, les acteurs que j'entends en Chambre, de la bouche même du
gouvernement, sont tous d'accord qu'il faut augmenter le nombre d'immigrants
qu'on reçoit. Mais, fidèle à l'habitude de suivre les promesses électorales
de diminuer, le gouvernement continue à avoir en tête cette diminution et
compte l'appliquer pour cette année.
Comment
passer à côté de l'article 21.1, qui semble entaché d'inconstitutionnalité
puisque le ministre s'arroge dorénavant
le droit d'imposer des conditions pouvant affecter la résidence permanente?
Selon l'Accord Canada-Québec relatif
à l'immigration et à l'admission temporaire des aubains, 1991, c'est le
gouvernement fédéral qui est responsable de l'admission des personnes immigrantes au Québec. Le Québec ne peut que
sélectionner, mais en aucun cas restreindre ou imposer des conditions pouvant affecter la résidence permanente. Là
encore, c'est inquiétant, c'est très inquiétant, et je me demande comment on va mettre ça en application,
sachant qu'on aimerait mettre... arrimer entre les besoins du marché du travail et les futurs immigrants. Je dis
inquiétant parce que c'est trop mal connaître le système d'immigration pour en
arriver à proposer un tel article. Quel genre de relation
souhaitons-nous établir avec celles et ceux qui voient dans le Québec le tremplin vers une vie décente fondée sur
la dignité humaine et les droits et libertés individuels? Au lieu d'imposer,
il faudra veiller à ce que, collectivement,
nous soyons en mesure d'identifier les facteurs qui manquent à l'installation
et à la rétention des immigrants dans les
régions. Il ne s'agit certainement pas de contraindre ou de bousculer les
normes et règlements en matière d'immigration.
• (17 h
20) •
En ce qui
concerne la dimension économique, enfin, Mme la Présidente, laissez-moi vous
parler d'un domaine que je connais
encore mieux que les autres, celui de l'impact négatif du projet de loi n° 9 sur notre économie. Parlons de chiffres, Mme la Présidente, soyons pragmatiques. Selon les estimations d'Emploi-Québec, près de 1,5 million de postes seront à pourvoir d'ici 10 ans,
dont 118 000 dans l'immédiat. De ce nombre, près du quart, 22 %,
seront occupés par des personnes
immigrantes. Le défi que nous avons, c'est de bien sélectionner, accueillir et
intégrer nos futurs immigrants, et donc indissociables de notre
prospérité économique future, a déclaré le Conseil du patronat du Québec. Si
vous questionnez les
représentants des employeurs, ils vous le diront sans détour, ce qui constitue
une urgence pour le développement
socioéconomique de la province est la disponibilité de la main-d'oeuvre
qualifiée. Le CPQ voit même dans la
pénurie de main-d'oeuvre une véritable épée de Damoclès suspendue sur la tête
des entreprises. Les Québécois doivent
comprendre une chose fondamentale, Mme la Présidente, cela a été documenté,
analysé et confirmé dans le cadre de plusieurs tables de concertation, de
forums et de rencontres : s'il faut prendre soin de notre immigration, en
prendre moins, c'est se condamner à faire face à une crise sans
précédent au Québec en matière d'emploi et de croissance économique. Et, sérieusement, pour moi, encore, la
décision de réduire les seuils d'immigration est une décision antiéconomique.
En outre, les chiffres sont positifs quant à la capacité des immigrants à
s'insérer dans le marché du travail, puisque la Chambre de commerce du Montréal
métropolitain...
La Présidente (Mme Chassé) :
...pour le vote. On doit suspendre pour un vote, et, compte tenu de l'heure...
N'empêche que... hein?
Une voix : ...
La Présidente (Mme Chassé) : On
va revenir ici? On revient...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Chassé) : Je
vous invite, dès que le vote est pris, à revenir ici pour reprendre la séance.
On se retrouve tantôt. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 22)
(Reprise à 18 h 27)
La
Présidente (Mme Chassé) : À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous
plaît! On a repris les travaux, merci, pour
rapidement les suspendre immédiatement jusqu'à 19 h 30. Et on se retrouve à ce moment-là à la salle
La Fontaine.
Merci à tous.
(Suspension de la séance à 18 h 28)
(Reprise à 19 h 31)
La
Présidente (Mme Chassé) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission
des relations avec les citoyens
reprend ses travaux. Merci d'être là. Je demande à toutes les personnes
de fermer à nouveau son appareil électronique ou ses appareils électroniques et
de demeurer attentifs, malgré qu'on vient tous de prendre un bon souper.
Je vous
rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 9, la Loi
visant à accroître la prospérité
socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du
travail par une intégration réussie des personnes immigrantes.
Lors de la suspension
de nos travaux en fin d'après-midi tantôt, nous étions alors à l'étape des remarques préliminaires, et M.
le député de Nelligan n'avait pas
encore terminé ses remarques. M. le
député, je vous cède la parole pour une durée de
8 min 35 s.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Au fait, j'étais sur une lancée. Donc, je vais essayer de reprendre
ma lancée pour continuer mes arguments préliminaires et mes remarques
préliminaires.
J'avais la
dimension économique et, comme je disais, je citais les estimations d'Emploi-Québec, qui nous parlait de 1,5 million de postes qui seront à pourvoir d'ici 10 ans, dont 118 000 dans l'immédiat. De ce nombre, près du
quart seront occupés par des personnes immigrantes. Le défi de bien
sélectionner, accueillir et intégrer nos futurs arrivants est donc indissociable de notre prospérité économique
future. Et ça, c'était la déclaration du Conseil du patronat du Québec. Si vous questionnez les représentants des
employeurs, ils vous le diront sans détour, ce qui constitue aujourd'hui une
urgence pour le développement
socioéconomique de la province est la disponibilité de la main-d'oeuvre
qualifiée. Le Conseil du patronat, je
me rappelle, même, dans cette salle, voit même, dans la pénurie de la
main-d'oeuvre, une véritable épée de Damoclès suspendue sur la tête des
entreprises.
Donc, les
Québécois doivent comprendre une chose fondamentale, Mme la Présidente. Cela a
été documenté, analysé et confirmé dans le cadre de plusieurs tables de
concertation, de forums et de rencontres. S'il faut prendre soin de notre immigration, en prendre moins, c'est se
condamner à faire face à une crise sans précédent au Québec en matière d'emploi et de croissance économique. Et les
dernières nouvelles économiques nous le confirment, que plusieurs secteurs sont
touchés par la pénurie de main-d'oeuvre.
En outre, les chiffres sont positifs quant à la
capacité des immigrants à s'insérer dans le marché du travail puisque — l'exemple parfait — la chambre de commerce métropolitaine de Montréal
rappelle des données d'études qu'elle a menées dans la grande région
métropolitaine. Entre 2008 et 2017, l'écart du taux de chômage entre les natifs
et les immigrants a
fondu de plus de moitié. Durant cette période, le taux d'emploi des immigrants
est passé de 53 % à 61 %, se rapprochant ainsi à moins de
trois points de pourcentage de celui des personnes nées au Canada.
Certes, nous
souhaitons que soient trouvées des solutions qui permettraient d'alimenter les
régions en main-d'oeuvre. Et, sur ce point,
en termes d'arrimage entre les besoins de main-d'oeuvre et les besoins des
régions, nous sommes d'accord, mais
pas n'importe comment. Et c'est en collaboration avec les autres ministères que
cette approche doit être adoptée.
Enfin,
j'aborderais, pour terminer, le rayonnement du Québec à l'international. Nous
jouissons d'une réputation exceptionnelle qui ne s'est pas construite en
un seul jour. C'est un travail de longue haleine qui permet au Québec de
prétendre aujourd'hui jouer un rôle clé, notamment au sein de la zone
francophone. Et malheureusement ce qui a été mentionné
sur plusieurs tribunes, c'est vraiment la cacophonie avec laquelle les dossiers ont été
gérés. Et, je le répète encore une
fois, ici, il y a une urgence à rétablir cette réputation à l'international. Et le traitement qui est porté aux prétendants et prétendantes à l'immigration fera reculer
plus d'un et porterait sérieusement atteinte à nos besoins en main-d'oeuvre, qui sont criants. Les changements de cap brutaux, la suppression de
dossiers, la remise en cause de leur statut à titre de résidents temporaires ou permanents, enfin la
seconde zone à laquelle on relègue nos immigrants, décourageraient beaucoup de personnes à venir s'installer au Québec.
La notion de
confiance est fondamentale. Le défi migratoire, le défi de la main-d'oeuvre, ce n'est pas uniquement
le Québec qui le vit. Au niveau mondial, nous avons
plusieurs exemples. La France, l'Italie, l'Allemagne, le Japon, même, et
d'autres pays vivent cette problématique. Donc, la notion de confiance est
fondamentale lorsque l'on dispose des personnes, des biens et des services.
Est-ce que l'on considère l'impact sur l'attrait de l'investissement?
Feriez-vous confiance à un gouvernement qui déciderait, d'un coup de crayon, de mettre fin à des années de
procédures? Investiriez-vous dans un tel pays?
Le Québec
s'est taillé, au cours des dernières années, une place importante
en tant que chef de file et de leader dans
plusieurs secteurs d'activité. Aujourd'hui même, un rapport sur l'intelligence artificielle disait que la guerre de demain sera une guerre de talents. Et, quand on dit une
guerre de talents, c'est bien les accueillir, c'est bien les intégrer, mais
aussi leur donner un moyen et un environnement sains pour leur épanouissement.
Notre rôle est de veiller à ce que le cadre juridique dans lequel baigne le Québec
soit favorable à l'attrait de chercheurs, d'investisseurs, de sièges sociaux.
C'est pour
cela ce que je disais au début, que ce que nous sommes en train de discuter
aujourd'hui risque de laisser une
tache pour les années à venir, pas uniquement une tache antiéconomique par
rapport à la réduction des seuils d'immigration, mais par rapport à la place
que le Québec veut se donner à l'échelle internationale. C'est tout un circuit
qui s'est mis en place à travers les années et qui culmine aujourd'hui en
autant de modèles d'excellence et de leadership non seulement au Canada,
mais à travers le monde.
La Présidente (Mme Chassé) :
...trois minutes.
M. Derraji : Oui, j'ai mon
compteur. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Chassé) :
Ah! bien, parfait. Bravo, l'autonomie!
M. Derraji :
2 min 59 s. Le Québec est encore riche de nouvelles opportunités
et de potentiel pour prendre la première place
dans bien des secteurs et des domaines de pointe. Cela a l'air bénin, mais un
climat de confiance rompu peut être préjudiciable à la bonne marche de
notre croissance économique.
Et, dans une démarche de construction,
j'inviterais le ministre à être un bon joueur d'équipe, et un bon joueur
d'équipe, quand on joue en équipe, on accepte de se faire questionner, mais on
accepte de donner des réponses qui comptent.
Le déroulement des discussions article par article de ce projet de loi, ce
n'est pas pour un seul parti politique, mais plus pour notre nation. Notre Québec a besoin de nous. Notre Québec a
besoin d'une immigration. Notre Québec a
besoin d'une main-d'oeuvre qualifiée et aussi présente pour l'ensemble des
régions. Et c'est évident que le projet de loi n° 9 présente, à mon avis, beaucoup de zones d'ombre qui
méritent éclaircissement, des amendements à apporter, des intérêts à préserver. Et, entre nous, la clé est
chez le ministre. Donc, nous, nous sommes prêts à étudier les articles un à la
fois, mais ça demande aussi une très bonne collaboration de la part du
ministre.
Donc, pour
conclure, Mme la Présidente, le projet de loi n° 9, sur plusieurs... Il y
a pas mal de points positifs, comme je l'ai dit, mais il reste quand
même des points à clarifier par rapport à comment le ministre et le ministère
comptent mettre en place ces stratégies
d'arrimage, comment le ministère compte faire l'implantation au niveau de
l'ensemble des régions et comment le
ministère compte répondre aux partenaires économiques qui ont qualifié la
situation du manque de main-d'oeuvre
d'une crise. Et ça, je répète les mots du Conseil du patronat, qui ont qualifié
le manque de main-d'oeuvre par une
crise. Et, quand on dit une crise, ça veut dire que ça va affecter tôt ou tard
notre économie, mais aussi nos régions.
Donc, je vais arrêter là, Mme la Présidente. Je
vous remercie.
• (19 h 40) •
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le député de Nelligan. Merci.
Y a-t-il d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires? Mme la députée de Fabre, je vous
invite à... vos remarques. Vous avez 20 minutes.
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de
saluer l'ensemble des collègues parlementaires... et le privilège de pouvoir participer à l'étude
détaillée de ce projet de loi qui est si important pour l'avenir du Québec.
Je
vous dis tout de suite, Mme la Présidente, et au ministre que, comme mes
collègues l'ont mentionné, nous serons en
mode collaboration. Très important. Nous souhaitons vraiment contribuer, mais
nous aurons des questions. Nous aurons des amendements, mais nous serons
vraiment dans un mode de contribution continue tout au long de ces travaux.
D'ailleurs,
j'invite tout de suite, d'entrée de jeu, Mme la Présidente, le ministre, dans
cet esprit de collaboration, s'il a
des amendements à son projet de loi, de pouvoir déposer les amendements pour
qu'on puisse en prendre connaissance, donc, d'avance. Alors, j'inviterai
le ministre, dans cet esprit de collaboration, à déposer ses amendements.
Je voulais,
bien sûr, dire que je suis très attentive à la notion de pénurie de
main-d'oeuvre, à la problématique de pénurie de main-d'oeuvre. Et, quand je
regarde les derniers chiffres du bulletin sur le marché du travail du mois de
mars, le taux de chômage a encore
baissé par rapport au mois dernier, de 0,1 %. Donc, on est à... Bien, en
fait, pour le dernier trimestre, au
Québec, on est à 5,3 % de taux de chômage par rapport à 5,5 % l'an
passé. Donc, nous sommes vraiment dans une situation de plein emploi et
de pénurie de main-d'oeuvre plus criante dans plusieurs
secteurs d'activité.
Alors, oui,
bien sûr, je suis très préoccupée quand je regarde les dernières données sur
l'emploi, et, oui, il faut une
réponse aux besoins du marché du travail. J'en suis. Je suis très préoccupée
par cette notion importante d'arrimage et d'adéquation entre les besoins du
marché du travail. J'ai été près de 20 ans de ma vie dans le domaine de
l'employabilité. Alors, c'est une
préoccupation que j'ai, bien sûr, et, oui, une réponse à la pénurie de main-d'oeuvre,
j'en suis aussi. Il nous faudra un débat serein. Il faudra, de tous, une
volonté de bonifier le projet de loi et contribuer à la réflexion.
Mais, et je
tiens à ce «mais», il y a plusieurs éléments incontournables pour assurer la
zénitude de nos débats. Pour pouvoir contribuer à la réflexion, il faut bien
comprendre la lecture du ministre sur le portrait global de l'intégration
réussie des personnes immigrantes. Je
suis déjà intervenue précédemment sur le dossier, bien sûr, qui a fait couler beaucoup
d'encre, les 18 000 dossiers, et j'avais parlé à ce moment-là
d'anamorphose, qui est une image déformée lorsqu'on se penche un peu. Alors,
sous un certain angle, l'image prend toute sa réalité. Alors, je souhaite
vraiment que l'image et l'intention du ministre autour de cette grande question de prospérité socioéconomique et
d'adéquation avec les besoins du marché du travail, ce soit une véritable réalité et non pas une image
déformée parce que ce qui me préoccupe, c'est que j'entends beaucoup qu'il faut tout refaire, mais, comme l'a souligné
ma collègue précédemment, il y a des bonnes pratiques en place. Il y a eu
une amélioration continue. Et il y a des
choses à prendre en compte dans cette élaboration d'un portrait qui est juste
pour la suite des choses.
Alors, il ne
faut pas juste un projet de loi panacée universelle, mais une véritable étude
détaillée qui nous permet de
bonifier, d'améliorer entre tous les parlementaires, pas juste, donc, une
intention qui reconstruit tout sans reconnaître les éléments qui ont été
porteurs dans le passé.
Vous savez, j'ai une préoccupation aussi par
rapport à la dimension d'intégration réussie. Pour avoir été dans l'employabilité, mais dans le communautaire,
pendant près de 20 ans, pour moi, la dynamique d'un territoire, c'est fort
prometteur et c'est une condition gagnante à
chaque fois. Alors, j'aurai le grand souci d'entendre le ministre nous partager
sa vision des ententes, entre autres, avec les organismes des différents
territoires.
Je vais me
permettre un élan de chauvinisme lavallois quelques secondes pour vous dire
que, par exemple, dans la plus belle région du Québec, je pense que mon
collègue va être d'accord avec ça
entièrement, alors, déjà, on s'entend, donc, évidemment, il y a une dynamique au niveau des partenariats
locaux et régionaux entre les partenaires qui travaillent à l'intégration
des personnes immigrantes. On est dans une dynamique. Il y a un historique très
différent de celui de Montréal, par exemple.
Alors donc, il faut tenir compte de cette couleur, de cette dynamique très
particulière d'une région à l'autre, avec la richesse de l'ensemble des
organismes qui composent cette dynamique.
Alors, je
serai très, très attentive et très sensible à cet élément-là qui va contribuer
non seulement à un arrimage... Parce qu'on n'est pas juste dans une situation
où on regarde les profils des personnes et on regarde les marchés du travail.
Pour une véritable intégration réussie, il
faut faire en sorte que tous les partenaires qui sont déjà actifs et qui ont
des pratiques gagnantes soient dans
le coup et soient interpelés dans ce projet de loi. Quand je disais qu'il faut
comprendre, je pense qu'il est très important pour nous de s'entendre parce
qu'on a entendu beaucoup de distinctions entre certains chiffres. Alors, pour moi, de bien comprendre, c'est de
s'entendre dès le point de départ sur la rigueur des faits et la rigueur des
chiffres. Il faut aussi comprendre, de la
part du ministre, Mme la Présidente, les définitions qui, à mon avis, sont
absentes pour plusieurs propos et plusieurs articles du projet de loi.
Et je veux
aussi vous parler d'une condition, là. Je parlais de zénitude tantôt. Je
reviens là-dessus. J'y tiens beaucoup. Alors,
une condition qui est essentielle et tellement importante, je souhaite qu'on
n'ait pas trop, dans nos dialogues et nos débats, les mots «inventaire», «liste» et «dossier». J'espère y trouver
plus des mots comme «citoyen» et «personne» parce que ce projet de loi a
une carence d'humanité, très honnêtement. Et je ne veux pas revenir, mais je
vais revenir sur la situation des
18 000 dossiers. J'ai eu des centaines de citoyens qui m'ont adressé
leur situation, leur drame humain, des jeunes
qui étaient découragés, des personnes qui travaillaient déjà, des étudiants. Et
c'est une situation qu'on a nommée beaucoup, beaucoup, mais on avait
pour réponses évidemment les réponses que l'on connaît.
Alors, je
souhaite contribuer. Je souhaite, avec mes collègues, être là au rendez-vous
pour bonifier. Mais, pour moi, cette
humanité, elle devrait être au coeur de nos débats. Est-ce que la situation
s'est améliorée depuis des années? Oui. Est-ce qu'on peut faire mieux?
Oui. C'est l'humilité aussi qu'on a à travailler avec tout le monde.
Vous savez,
dans mon comté, j'ai plusieurs quartiers, plusieurs réalités. J'ai des
Québécois natifs. J'ai des gens de trois générations des communautés
culturelles, plus d'une dizaine de communautés culturelles qui contribuent à l'économie de mes beaux quartiers et de la région
de Laval. Alors, mes citoyens me parlent, mes citoyens me rencontrent. Et cet aspect-là, il est excessivement important
parce que les réponses que nous aurons face aux préoccupations que nous aurons,
les réponses, c'est celles que je donnerai à mes citoyens de mon comté.
Alors, voilà
la préoccupation. Donc, oui, on va être en mode collaboration, mais je souhaite
des réponses, des réponses aux questions qui me viennent de mes citoyens
de Fabre. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée de Fabre. Et ceci
met fin... Non? Il y a quelqu'un d'autre encore, là?
Une voix : ...
La
Présidente (Mme Chassé) : Alors, je n'ai pas couvert... «Eh boy!
Oh my God!» Bien là, c'est parce que c'était comme un miroir, c'est le même veston. Alors, il y a une autre membre qui désire faire ses remarques préliminaires. Je suis
vraiment désolée. Mme
la députée de Bourassa-Sauvé, je vous invite à faire vos remarques
préliminaires et j'invite...
Une voix : ...
La
Présidente (Mme Chassé) :
Du potassium? J'invite tous à continuer à être attentif. J'ai commandé
du café, du thé pour tous. Je vous invite à prendre...
Mme Paule Robitaille
Mme Robitaille : C'est parfait.
C'est un supertiming.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Oui, on va rester attentifs pour vos 20 minutes de remarques préliminaires. Merci.
• (19 h 50) •
Mme Robitaille : Merci. Alors, écoutez, ce projet de loi est très important. Et c'est fondamental, l'immigration, pour construire la société québécoise
de demain. Ça, c'est clair et net. Et le projet du ministre
est emballant. Il y a des aspects du projet de loi qui sont vraiment
emballants. On s'entend tous qu'il faut mettre les ressources pour mieux accompagner un nouvel immigrant,
qu'il faut plus de régionalisation
parce que nos régions se vident, là, on est d'accord, que les magasins ferment, puis il y a une pénurie
de main-d'oeuvre qui frappe dans nos régions, mais aussi dans nos villes.
Et on se
réjouit d'entendre le ministre qui souhaite mettre sur place un parcours personnalisé
pour chacun des nouveaux arrivants,
un accompagnement, d'une certaine façon, de luxe. Et je me réjouis aussi de
voir que le ministre a le budget pour
mettre en place quelque chose de particulièrement intéressant pour aider les
régions, pour aider nos entreprises, pour aider nos nouveaux arrivants.
Alors, avec
les différents groupes en commission parlementaire, on a réfléchi à la façon
dont les municipalités devaient
accueillir, à l'aide que le Québec devait fournir, à son rôle dans
l'intégration, à la part que l'entreprise devait jouer, au rôle des organismes communautaires dans tout le processus.
C'est très bien. C'est très, très bien. Mais il y a un aspect humain du projet de loi qu'il ne faut pas
escamoter, qu'il faut prendre en considération. On est en train de gérer
des humains, et ça, je trouve que le projet
de loi pourrait certainement bénéficier de certaines améliorations, et c'est
pour ça qu'on va avoir cette
commission parlementaire, et c'est pour ça qu'on va parler puis essayer
d'amender certains articles du projet de loi.
Bon, il y a
toute la question des 18 000 dossiers, hein, ces
50 000 personnes. Et on pense qu'il est possible, qu'il est possible et qu'il est nécessaire, d'aller de
l'avant et de traiter à la fois les 18 000 dossiers et à la fois les
déclarations d'intérêt sous le système Arrima. On peut faire les deux en même
temps. Mes collègues vous ont parlé amplement, là, de toute cette question des
18 000 dossiers, de l'importance de les traiter. Moi, j'aimerais
parler un peu des conditions à la résidence permanente.
Moi, je viens
du comté de Bourassa-Sauvé. C'est Montréal-Nord, Mme la Présidente. Il y a
beaucoup d'immigrants là-bas. Il y a
beaucoup de Québécois qui sont issus de l'immigration dans Bourassa-Sauvé. On
attend justement la visite du député
de Beauce-Sud, qui a gentiment... qui appuie certains organismes dans
Montréal-Nord et qui... et c'est très, très apprécié, parce que ces jeunes-là sont issus de l'immigration, et ils
veulent réussir, et ils veulent trouver leur place dans la société
québécoise.
Donc, un
petit... Très, très rapidement, là, je veux que personne ne dorme, mais je
vais, en quelques mots, vous dire un peu c'est quoi, la résidence permanente.
Alors, c'est une étape avancée du processus qui conduit à la citoyenneté
canadienne, hein? Alors, la résidence
permanente, c'est géré par le gouvernement fédéral, bien, parce qu'on fait
encore partie du Canada. Alors, tant
qu'on fera toujours partie du Canada, la résidence permanente, bien, devra être
gérée par le gouvernement fédéral.
Une voix : ...
Mme Robitaille :
Oui, c'est ça, mais je fais juste vous le rappeler. Alors donc, juste une
petite explication là-dessus pour
comprendre. Le Québec a le pouvoir de, hein, choisir ses immigrants. On leur
donne un certificat de sélection du Québec.
Puis ensuite le gouvernement canadien leur accorde une résidence permanente. De
là, le Québec met en place les
mesures pour les accueillir et les intégrer, pour les aider à apprendre le
français puis, bon, ainsi de suite. Et ce projet de loi là est important justement parce qu'on veut
absolument que les gens puissent s'intégrer et on veut absolument aider les
entreprises, les MRC à les accompagner là-dedans.
Là, la CAQ va imposer des conditions à cette
résidence permanente là, liées probablement à ce qui touche à l'apprentissage du français, des valeurs
québécoises et puis du lieu de résidence. Bon, les valeurs québécoises, j'ai
très, très hâte d'en parler avec M.
le ministre. J'aimerais savoir exactement quelle est sa définition de valeurs
québécoises, et tout ça. Ça va être très intéressant. On a des heures de
plaisir devant nous. Mais, bon, c'est clair... Mais, moi, ce que j'aimerais aussi voir, et
ce qu'on ne pourra peut-être pas voir, mais peut-être que M. le ministre pourra
nous donner un brouillon de ça ou, en
tout cas, une idée, c'est les règlements qui vont accompagner ces articles-là,
qui vont déterminer qu'est-ce que
l'article 9 du projet de loi veut dire exactement. Mais on n'a pas ces
règlements-là. C'est dommage. Ça nous aiderait à mieux comprendre s'il y
a peut-être un manque de transparence là. En tout cas, en campagne électorale,
le premier ministre a parlé de test possible relatif à l'apprentissage du
français, à un test de valeurs.
Une voix :
...
Mme Robitaille :
Oui? Non, non, mais ce n'est pas pour vous blesser.
La Présidente
(Mme Chassé) : On reste attentifs. Est-ce qu'il y a consentement
pour que M. le ministre se prononce pendant...
M. Jolin-Barrette :
Bien, c'est une question de règlement.
La Présidente
(Mme Chassé) : Parfait.
M. Jolin-Barrette : C'est une question de règlement.
Mme la Présidente, on semble me prêter des intentions sur un manque de transparence. Je ne
pense pas que la députée de Bourassa-Sauvé peut faire cela. Je vous soumets la
question.
Mme Robitaille :
Mais en tout cas je suis convaincue que le ministre, durant nos délibérations,
va nous expliquer ce qu'il veut comme
règlements, qu'il va nous parler un petit peu plus des règlements à venir après
l'adoption du projet de loi. Alors, je compte sur M. le ministre
là-dessus.
Mais
en tout cas, en campagne électorale, le premier ministre a parlé de test
possible relatif à l'apprentissage du français,
des tests de valeurs québécoises après trois ans de l'obtention de la résidence
permanente, d'obliger à... On a parlé
aussi de la possibilité d'obliger les gens à rester en région ou d'occuper un
travail pendant une certaine période de temps pour conserver cette résidence permanente là. Ça, c'est
justement... Et c'est des questions qu'on va poser au ministre durant
les prochaines semaines.
Pour
tous les juristes qu'on a entendus, tous les autres groupes qui ont posé des
questions durant cette période de
consultations là, cette condition à la résidence permanente, ce n'est pas une
bonne idée. D'abord, c'est une affaire de principe. C'est une question de principe parce que mettre une condition
à la résidence permanente, c'est une mesure coercitive. On devrait plutôt
accompagner au lieu d'imposer des conditions. C'est ce qu'on nous a dit, et je
trouve que c'est tout à fait juste.
Tous les groupes communautaires, même des regroupements d'affaires qui
reçoivent des immigrants, nous
expliquent que ça n'a rien de bon parce que ça crée des incertitudes et des
inquiétudes, de savoir s'ils pourront ou non garder leur résidence
permanente.
Donc,
c'est une rupture avec la tradition d'accueil du Québec. Il y a cette idée
d'éliminer bêtement... Bon, c'est... Pardon,
j'ai... Mais donc c'est une rupture avec cette tradition d'accueil du Québec,
une tradition... De tradition, pour les gens qui arrivent, une résidence
permanente, c'est une sécurité pour démarrer sa vie au Canada. On n'a surtout
pas besoin d'insécurité ou d'incertitude.
Avec le projet de loi n° 9, on lui met un stress de plus à cause de cette
condition. Il passe un test de langue, un test de valeurs, c'est une
obligation de rester en région. C'est la crainte de perdre tout, de perdre son droit de rester au Canada, au Québec
s'il perd son emploi. C'est contre-productif, Mme la Présidente, et je pense que
le ministre devrait peut-être reconsidérer... En tout cas, on va s'en parler
durant les prochaines semaines.
Moi,
dans mon comté, j'ai des Italiens qui sont arrivés au Québec dans les
années 50, 60. Ils ne parlaient pas un mot de français quand ils sont arrivés. Ça a pris souvent plus que trois
ans parce que ces gens-là, bien, ils devaient travailler. Ils devaient
travailler fort pour faire vivre leur famille. Mais aujourd'hui, je vais vous
dire, ils parlent tous français. Je les rencontre régulièrement. Leurs enfants, leurs petits-enfants parlent
aussi français. Et puis ces trois générations-là sont des Québécois à part entière qui paient leurs impôts,
qui construisent le Québec. C'est ça, l'immigration, Mme la Présidente. Les immigrants, ce ne sont pas des produits
jetables, hein, et l'immigration, ce n'est pas qu'un algorithme. Ce sont des
gens qui ont pris d'énormes risques et qui ont choisi le Québec. Il faut s'en
souvenir. Oui, il faut en prendre soin et non pas leur balancer des
conditions qui mettent tout en péril quand on leur accorde une résidence
permanente.
En
droit, cette mesure est inopérante sous plusieurs aspects. Lorsqu'un individu
devient résident permanent, il devient
résident du Canada au complet. Ça, on l'a entendu dans les consultations. Il
devient résident du Canada au complet, pas
d'une ville ou d'une province, mais du pays au complet. Et ça, l'obliger de
rester à un endroit précis, c'est une violation de l'article 6.2 de la Charte canadienne des droits, et donc c'est
un problème. On ne peut pas dire à quelqu'un qu'il va perdre son statut s'il veut déménager. Je
considère que c'est inhumain. C'est injuste de faire ça et ça va contre la
charte des droits et libertés du Canada, mais aussi du Québec.
Et
c'est la même chose au niveau du travail. On ne peut pas perdre son statut de
résident permanent si on perd son travail. Ça va contre l'idée de permanence de
cette résidence-là. Le gouvernement fédéral ne veut pas s'embarquer dans
cette idée d'accoler une condition provinciale à la résidence permanente. C'est
lui qui devrait mettre ceci en application
et il refuse. Donc, l'article est inopérant. Il refuse, donc c'est difficile
d'aller de l'avant avec ça. Même si le gouvernement
fédéral n'y voyait pas d'objection, accoler une condition à la résidence
permanente est, avec tout le respect, là, une idée malhabile, mal
ficelée en droit, qui risque de se retrouver rapidement devant les tribunaux.
• (20 heures) •
Je
vais vous expliquer pourquoi on l'a essayé, mais ça n'a pas marché.
Me Cliche-Rivard, de l'AQAADI, a expliqué qu'en 2012, sous le gouvernement conservateur de Stephen Harper, le
gouvernement fédéral a imposé une condition à la résidence
permanente, entre autres aux époux et aux épouses pour qu'ils restent dans leur
relation, mais on a tout enlevé ça en 2016 parce que ça mettait les gens dans
une situation de dépendance et de précarité. Imaginez-vous, Mme la Présidente, la femme qui doit rester en
couple avec son mari abusif pour ne pas perdre sa résidence permanente.
Ça ne fonctionnait pas, et on a tout enlevé en 2016.
On
peut faire le parallèle avec le type qui est obligé de rester dans son emploi,
bien qu'il soit peut-être harcelé par son
employeur, parce qu'il ne veut pas perdre sa résidence permanente. Enfin, on a
décidé au fédéral qu'on devient résident permanent, point à la ligne, parce que ça ne fonctionnait pas. Est-ce
qu'on veut vraiment recommencer la même erreur, Mme la Présidente? De
toute façon, le fédéral ne veut pas s'embarquer là-dedans, et, si le fédéral ne
s'embarque pas là-dedans, ça ne marche pas, de toute façon.
La
résidence permanente, c'est la première étape vers la citoyenneté. On la retire
pour quelque chose de très, très grave,
hein? Si on lit la loi de l'immigration et du statut de réfugié, on voit dans
la loi qu'on retire la résidence permanente quand quelque chose est très, très grave, pour des raisons de criminalité
ou si quelqu'un a falsifié ses documents d'immigration.
Et,
quand on retire cela, il y a toute une procédure qui s'enclenche. On peut en
appeler devant la section d'appel d'immigration
fédérale. C'est un processus complexe, ultimement géré par la Commission de
l'immigration et du statut de
réfugié. Je connais ça parce que j'ai travaillé là. Laissez-moi vous dire,
quand on retire une résidence permanente, c'est extrêmement complexe. Le
ministre doit le savoir.
On
ne retire pas la résidence permanente parce que quelqu'un ne passe pas un test
de français ou un test de valeurs québécoises
après trois ans, parce que ça veut dire que la personne qui s'est installée
ici, qui a un job et qui envoie ses enfants
à l'école, des enfants qui parlent déjà parfaitement français probablement,
devrait être déportée. Et ça ne tient pas la route. Qui va déporter cette
personne-là? Ça serait imposé en plus par des fonctionnaires fédéraux, hein?
Alors, quand on regarde tout ça, qui
va expulser ces gens-là, qui va appliquer la loi, c'est le fédéral, ce n'est
pas sérieux. Et je comprends tout à
fait Ottawa de ne pas vouloir s'embarquer là-dedans avec le Québec, parce que
c'est simplement inapplicable, et j'ai hâte que le ministre nous en
parle.
Bref,
c'est une idée inhumaine, à mon avis, antiéconomique, et ça ne tient pas la
route juridiquement. Je pense qu'il faut choisir ses batailles, et celle-là
n'est pas la bonne. Si le ministre continue de s'entêter sur cette voie, il
risque de subir le même sort qu'il a subi lorsqu'il a voulu mettre les
18 000 dossiers à la poubelle avant que son projet de loi soit adopté. Veut-il vraiment encore être dans une
situation comme celle-là? Je me demande pourquoi on s'acharnerait là-dessus. Le Québec a déjà un pouvoir de
sélection. On choisit nos immigrants, on leur attribue un certificat de
sélection du Québec. Avant qu'ils
obtiennent la résidence permanente et après qu'ils l'aient obtenu, il y a
toutes sortes de façons de travailler sur une bonne intégration et une
bonne francisation des immigrants.
Cette
condition qu'on veut accoler est, selon nous, inutile et n'apportera absolument
rien, au contraire. Nous croyons fermement
que le gouvernement doit miser plutôt sur de bonnes mesures d'intégration,
mettre le paquet dans l'intégration, une bonne coordination entre les
gouvernements, les municipalités, les entreprises, les organismes communautaires,
opter pour une approche humaine plus que sur
des clauses qui sont, de toute façon, inopérantes. Pourquoi pas la carotte, M. le ministre... ou, Mme la Présidente, pourquoi
pas la carotte au lieu du bâton? Et c'est un problème, parce que, si on va de
l'avant avec ça, on va avoir un problème de rétention. Déjà, le ministre en a
parlé, il aimerait avoir plus de gens qui
vont rester au Québec. Or, avec des mesures comme ça, on amplifie le problème.
Les gens ne vont pas nécessairement rester ici. Ils vont partir
ailleurs.
On
construirait alors deux systèmes. On aurait deux systèmes : celui du
Québec, où là il y aurait une condition à la résidence permanente, ça serait plus long pour s'établir dans le
pays, ça serait plus long pour avoir la permanence, d'une certaine façon, de rester ici; puis on
aurait un autre système dans le reste du Canada, où là ça serait beaucoup plus
rapide. Alors, qu'est-ce que vous pensez que les gens vont faire? Entre une
solution plus facile en Ontario... bien, malheureusement,
même s'ils parlent français, moi, j'ai bien peur qu'ils choisissent l'Ontario.
Il reste combien de temps?
La Présidente
(Mme Chassé) : Il vous reste 4 min 50 s.
Mme Robitaille :
O.K., bon. Ah! je vais continuer.
La Présidente
(Mme Chassé) : On continue.
Mme Robitaille :
Alors, et donc tout ça, évidemment, on l'a vu, hein, durant les derniers mois,
ça a un impact sur l'image du Québec
à l'étranger. Et, comme disaient mes collègues, il y a en ce moment... il y a
une espèce de guerre des talents sur la planète. On veut aller chercher les
meilleurs, et c'est important de donner l'image d'une société qui est capable d'accueillir, qui est ouverte à l'accueil,
qui est ouverte aux nouveaux immigrants. Et avec un projet de loi comme celui-là, je me pose de sérieuses questions. On
l'a vu, hein, dans les journaux, dans la presse internationale, on a vu les
titres. Le Monde qui
écrivait : Cafouillage au Québec sur l'accueil des étrangers; L'Orient-Le
Jour : Dossiers immigration annulés : la réputation du Québec mise à mal; le journal Les Échos, en Belgique, Le
rêve brisé d'une cabane au Canada. Ça, ça ne nous aide pas si on
veut aller chercher les meilleurs.
Et là l'impact, on ne
le voit pas encore, mais, une fois la loi adoptée, évidemment, les gens...
parce que c'est sérieux, là. Quand on décide
de déménager, qu'on décide de choisir un nouveau pays, on y pense deux fois. On
se prépare et on essaie de choisir la
meilleure variante, le mieux pour toute la famille. Et on pense sérieusement
qu'un projet de loi comme celui-là va
juste bousiller ce qui a été fait dans le passé. Pour ce qui est, justement, de
cette idée de condition à la résidence permanente, l'idée de mettre ces
18 000 dossiers à la poubelle, c'est très mauvais pour l'image du
Québec. Mais on peut tabler sur des choses positives qui sont dans le projet de
loi.
Alors donc, on s'en va où avec ce
projet de loi là? On a posé la question à Me Stéphane Handfield, et il nous a dit : Dans le mur, direct dans le mur.
On va investir combien dans les poursuites judiciaires?, il nous disait. Parce
que, s'il n'y a pas de modifications
à ce projet de loi là qui, à la base, peut être excellent, mais s'il n'y a pas
de modifications sur ces articles-là
qui vont vraiment dans le mur, comme il dit, on ne pourra pas aller bien loin,
et tous les efforts qu'on va mettre
dans l'intégration vont être contrecarrés par des articles comme ça qui sont
inapplicables. Tous les juristes qui sont venus nous voir en ont conclu
la même chose. Donc, il faut se souvenir de ça.
Je
souhaite profondément que le ministre mette toute son énergie à trouver les
meilleures façons d'accueillir ceux qui
nous aideront à bâtir le Québec. Je souhaite qu'il arrête de s'obstiner à
défendre des articles de loi qui ne tiennent juste pas la route. Je suis convaincue qu'on peut faire
mieux et j'espère que le ministre de l'Immigration et son équipe entendront
raison. Alors, Mme la Présidente, merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci pour vos remarques, Mme la
députée. Ceci, si je ne me trompe pas, met fin à la section des remarques préliminaires. Et, avant d'entamer la
prochaine section, je voulais vous dire que je trouve qu'actuellement
les propos sont assez constructifs et je voulais vous le signifier, j'apprécie.
On rentre dans une étape bientôt qui va être
importante, qui va être exigeante, et je nous invite à maintenir un haut niveau
d'écoute et d'attention. L'objectif
de l'étude détaillée, vous le savez, c'est d'améliorer le projet de loi qui est
sur la table. Et ce que j'entends, suite aux remarques préliminaires, c'est que
c'est... il y a cette intention de mener à bien ce projet-là, d'améliorer le
projet de loi. Alors, je tenais à vous mentionner que je vous félicite
pour la première étape atteinte.
Nous sommes donc
rendus à l'étape des motions préliminaires. Et, s'il n'y a pas de motion
préliminaire... Ah! il y a quelqu'un qui lève la main. Oh! M. le député de
Laurier-Dorion.
M. Fontecilla :
Merci, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Chassé) :
C'est toujours un défi de dire le nom de votre comté, hein?
M. Fontecilla :
Laurier-Dorion.
La Présidente
(Mme Chassé) : Laurier-Dorion, c'est bon.
Motion
proposant d'entendre l'Association canadienne
des conseillers professionnels en immigration
M. Fontecilla :
Voilà. Donc, je voudrais déposer une motion préliminaire pour :
«Qu'en
vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la Commission des
relations avec les citoyens tienne, avant
d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi visant à
accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché
du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes — ce n'est pas moi qui ai choisi le
titre, hein? — des
consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende l'Association
canadienne des conseillers professionnels en immigration.»
Est-ce que je peux
prendre deux minutes pour expliquer? Donc, effectivement, l'Association
canadienne des conseillers professionnels en immigration...
La
Présidente (Mme Chassé) :
...M. le député de Laurier-Dorion. Je vais suspendre les travaux. Je vais vous demander
une copie écrite de la motion que vous avez en main pour qu'on puisse la
distribuer aux membres.
Alors, je suspends
les travaux.
(Suspension de la séance à
20 h 10)
(Reprise à 20 h 16)
La Présidente
(Mme Chassé) : Alors, on reprend les discussions, les travaux.
La
motion est recevable, et je vais permettre le débat. Avant de vous inviter à la
relire, puisque tout le monde l'a en
main, je veux vous rappeler un peu les règles du débat. C'est 30 minutes
pour l'auteur. À ce moment-là, vous relirez votre motion que vous avez déposée. Et les représentants des chefs des groupes parlementaires aussi, un par groupe aura 30 minutes, ainsi que 10 minutes pour
tout autre intervenant. Ça va? C'est
une seule intervention pour chacun et aucun
droit de réplique. C'est clair? Alors, le député de Laurier-Dorion, ça va? À
l'ordre, s'il vous plaît! Le député de Laurier-Dorion, je vous invite à
débuter vos remarques.
M. Andrés
Fontecilla
M. Fontecilla :
Oui, merci, Mme la Présidente. Je voudrais rassurer les membres de la
commission, je ne prendrai sûrement
pas les 30 minutes et surtout rassurer le ministre que ça va prendre moins
longtemps. Donc, je relis, vous l'avez devant vous :
«Qu'en vertu
de l'article 244 de nos règles de procédure, la Commission des relations
avec les citoyens tienne, avant
d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi visant à
accroître la prospérité socio-économique du Québec et à
répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration
réussie des personnes immigrantes, des consultations particulières, et
qu'à cette fin, elle entende l'Association canadienne des conseillers
professionnels en immigration.»
Donc, cette motion est motivée par le fait que
ce mémoire a été présenté, il se trouve dans le site Greffier, les membres de la commission peuvent y avoir accès. Il
n'a pas été retenu dans les négociations pour faire partie du groupe qui a fait une présentation. Et on sait que
peut-être ce n'est pas tous les membres de la commission qui ont eu la chance
de parcourir l'ensemble des mémoires qui ont
été déposés, sauf que celle-ci... et, à la lecture de celle-ci, je me suis
rendu compte qu'elle avait un intérêt
tout à fait particulier, en particulier pour M. le ministre, parce que c'est un
mémoire qui rentre un peu plus dans
le détail du système Arrima et de la... comment dire, de la mécanique de
sélection des personnes immigrantes,
et pourrait donner, d'un côté... mieux montrer comment fonctionne le système
dans le détail, et d'autre part, trouver
des possibilités d'amendement ou des pistes de sortie pour, entre autres,
régler ne serait-ce que quelques dossiers dans le grand dossier des 18 000 dossiers. Et donc ils
proposent, ils avancent des suggestions qui pourraient être d'une grande
utilité et qui serviraient au ministre, au gouvernement, à éviter des drames
humains qui font les manchettes régulièrement dans les journaux.
Donc, pour
l'aspect pratique et constructif de ce mémoire-là, qui, soit dit en passant,
appuie le système Arrima, malgré que je manifeste quelques préoccupations et
quelques désaccords, mais il se prononce pour le système Arrima, ça
pourrait être d'un grand intérêt pour les membres de la commission d'entendre
ces personnes-là. Voilà.
• (20 h 20) •
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le député de Laurier-Dorion.
J'invite le ministre à faire des remarques sur la motion qui a été déposée. Alors, j'invite la leader de
l'opposition... Est-ce que quelqu'un désire faire des remarques sur la
motion qui est déposée? M. le député de Nelligan.
M. Monsef Derraji
M. Derraji : Oui, merci, Mme la
Présidente. Merci, Mme la Présidente. J'ai juste quelques points d'ajout par rapport à la motion préliminaire du collègue de
Laurier-Dorion, pour ne pas nommer son nom.
Je pense que la motion préliminaire va dans le sens même de ce qu'on
disait depuis le début de nos travaux, et c'est en parfaite adéquation par
rapport à ce qui a été dit, notamment par rapport aux partenaires
du marché du travail. Et, si je reprends la phrase «et à répondre adéquatement
aux besoins du marché du travail», je pense qu'on s'entend que le ministre doit
aimer cette phrase, parce que, si on est là
aujourd'hui en discussion par rapport à ce projet de loi n° 9, c'est
exactement pour répondre adéquatement aux besoins du marché du travail.
Et
l'autre point qui est très important, c'est l'intégration réussie des personnes
immigrantes. Donc, on le voit, les statistiques le démontrent, depuis les 10 dernières années, le
Québec a quand même constaté une très bonne évolution dans l'intégration
des personnes immigrantes. Et, par rapport à ce point, l'Association canadienne
des conseillers professionnels en immigration va amplement, je dirais, nous
donner d'autres arguments et des pistes par rapport à la réussite de
l'intégration, mais aussi à l'adéquation aux besoins du marché du travail.
L'autre point que je note,
l'Association canadienne des conseillers professionnels en immigration, de par
leur mission de jouer un rôle très important
dans l'immigration, c'est que, dans cet espace international de recherche de
talent, ces conseillers
professionnels en immigration ont, en quelque sorte, l'heure juste par rapport
au flux migratoire. Et on sait que
nos besoins... le premier besoin, à part l'aspect technique et à part l'aspect
professionnel de cette personne qu'on aimerait
ramener au Québec, c'est aussi le fait français. Et, dans un bassin
francophone, l'importance d'avoir le pouls de ce qui se passe... encore une fois, on n'est pas les seuls à être sur
le marché de l'immigration. Et donc, dans ce sens, moi, j'appuie la motion préliminaire du collègue
de Laurier-Dorion, surtout dans le contexte où nous aimerions, au-delà
d'assurer les consultations particulières, mais aussi avoir l'heure juste par
rapport à l'intégration réussie.
Donc, le projet de loi n° 9,
de par sa mission et son titre, vise à assurer cette intégration, vise à
assurer cette adéquation entre le marché de
l'emploi, les régions ainsi que les bassins d'immigration. Je pense que
l'Association canadienne des conseillers professionnels d'immigration est la
meilleure pour jouer ce rôle et nous éclairer dans la poursuite des
travaux du projet de loi n° 9. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) : Ça me fait plaisir. Je vous remercie,
M. le député de Nelligan, pour vos remarques sur la motion préliminaire qui a été déposée par
le député de Laurier-Dorion. Y a-t-il d'autres personnes qui désirent... M. le
ministre, vous désirez vous prononcer sur la motion préliminaire?
M. Simon
Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, écoutez,
Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Chassé) :
Vous avez 30 minutes.
M. Jolin-Barrette : ...je trouve ça tout de même particulier que le député
de Dorion dépose une motion préliminaire,
c'est son droit. Cela étant dit, on a tenu des auditions particulières qui avaient été négociées entre les
différents groupes parlementaires, et
généralement, lorsque les groupes parlementaires donnent leur accord à
l'Assemblée nationale pour qu'on
tienne des consultations particulières, on s'entend sur les groupes, on
s'entend sur la durée. Alors, je comprends que ce qui avait été convenu entre les groupes parlementaires, ça ne
satisfait plus le député de Laurier-Dorion. Donc, je comprends que, pour la suite des choses et pour la
conduite de nos travaux, lorsqu'on négocie avec le leader du deuxième groupe d'opposition officielle, il ne faut pas
prendre son engagement pour avéré dans le cadre des ententes que nous avons
avec le leader du deuxième groupe d'opposition.
Juste pour
des fins, là, de compréhension, les gens qui ont été entendus dans le cadre de
la présente commission, il y a eu
Accueil liaison pour arrivants, Association québécoise des avocats et avocates
en droit d'immigration, Barreau du
Québec, Chambre de commerce du Montréal métropolitain, Chambre de commerce et
d'industrie de Québec, Commission des
droits de la personne et droits de la jeunesse, Commission des partenaires du
marché du travail, Conseil du
patronat du Québec, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante,
Fédération des chambres de commerce du Québec, Fédération québécoise des
municipalités, Pierre Fortin, Stéphane Handfield, La Maisonnée, Manufacturiers exportateurs du Québec, Montréal International,
Protecteur du citoyen, Québec International, Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et
immigrantes, ville de Montréal. Ça, c'est juste les personnes qu'on a
entendues.
En plus, dans
le cadre des négociations, on a décidé de faire des auditions particulières
d'une heure pour accommoder Québec
solidaire, pour qu'elle ait davantage de temps de parole, la formation
politique. Et, comme le député de
Laurier-Dorion l'a dit, on a entendu également... en fait, l'Association canadienne des conseillers professionnels en
immigration a déposé un mémoire au bénéfice
de la commission parlementaire, comme l'Association du Barreau canadien, le Conseil interprofessionnel, la Fédération des
cégeps, HEC Montréal, Yves Laberge, Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec,
Syndicat des professeurs de l'État du Québec, Union des municipalités du Québec.
Alors, je
comprends que le député de Laurier-Dorion veut entendre encore des gens, mais je pense
qu'on avait eu une entente, on
s'était engagés. Donc, la prochaine fois, on comprend le message de Québec solidaire, lorsqu'il y a une entente, ça ne tient pas.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci, M. le ministre. Y
a-t-il d'autres intervenants sur la
motion préliminaire qui a été déposée par le député de Laurier-Dorion? Est-ce
que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne...
Des voix : ...
Mise aux voix
La
Présidente (Mme Chassé) :
Parfait. Et voilà, c'est... Parfait. Merci. Alors, de ce que je comprends, il n'y a
pas d'autres interventions. Il est l'heure de passer aux voix. Est-ce
que la motion est adoptée?
Une voix : Non.
La
Présidente (Mme Chassé) :
La motion est rejetée. Je prends en considération... Nous passons donc maintenant à l'étude...
Des voix : ...
La
Présidente (Mme Chassé) :
Est-ce que vous désirez une pause? Ça va?
On passe donc à la prochaine étape.
Mme Anglade : Mais le vote...
La
Présidente (Mme Chassé) :
Le vote vient de se passer. J'ai demandé si la motion était approuvée, elle a
été rejetée.
Mme Anglade : Alors, on peut
passer à une autre motion?
La
Présidente (Mme Chassé) :
Nous pouvons passer à une autre motion. Est-ce qu'une autre motion a à
être déposée? Alors, j'invite la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne
à déposer sa motion.
Motion proposant d'entendre
l'Association du
Barreau canadien, division Québec
Mme Anglade : Alors, j'ai une
motion, également, préliminaire.
Alors : «...conformément à l'article 244
[du règlement de l'Assemblée nationale], je fais motion afin que la Commission des
relations avec les citoyens tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du
projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la
prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du
marché du travail par une intégration
réussie des personnes immigrantes,
des consultations particulières et qu'à cette fin, [on] entende
l'Association du Barreau canadien, division du Québec.»
Alors, je ne sais pas si vous voulez que je
fasse les photocopies nécessaires.
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui, c'est ça.
Je vais suspendre les travaux, le temps
d'analyser la motion qui vient d'être déposée.
(Suspension de la séance à 20 h 28)
(Reprise à 20 h 30)
La
Présidente (Mme Chassé) :
On est prêts à reprendre les travaux. La motion préliminaire qui a été déposée
par la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne
est recevable. Alors, je ne répéterai pas les règles pour le débat, je vais permettre le débat. Je vous invite, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, à
nous relire la motion préliminaire et à faire vos remarques.
Mme Dominique
Anglade
Mme Anglade : Très bien. Merci,
Mme la Présidente. Alors, je relis la motion préliminaire :
«...conformément
à l'article 244 [du règlement de l'Assemblée
nationale], je fais motion afin que
la Commission des relations avec les
citoyens tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi
n° 9, Loi visant à accroître la
prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du
marché du travail par une intégration réussie
des personnes immigrantes, des consultations particulières et qu'à cette fin,
[...]entende l'Association du Barreau canadien, division du Québec.» C'est
bon.
La Présidente (Mme Chassé) : Est-ce
que vous poursuivez avec vos remarques?
Mme Anglade : Je poursuis avec
mes remarques.
La Présidente (Mme Chassé) : Très
bien.
Mme Anglade : Alors, nous avons reçu un certain nombre de
personnes. D'ailleurs, les groupes qui ont été reçus ont été énumérés par le ministre
tout à l'heure. Cependant, tous les groupes n'ont pas pu être entendus. Et,
dès le départ, nous avons mentionné
que nous souhaitions qu'il y ait davantage de groupes qui soient entendus, notamment ceux qui ont particulièrement exprimé le
besoin d'être présents et de faire valoir leurs perspectives. Nous pensons dans
ce cas-ci qu'étant donné que le
18 février dernier l'Association du Barreau canadien avait demandé à être
entendue en commission, c'est pertinent.
La raison
pour laquelle nous pensons que c'est pertinent, c'est, lorsque vous prenez
connaissance des éléments qui sont
présentés, on constate qu'il y a des éléments qui n'ont pas réellement été
discutés lors des échanges que nous avons
eus ici — d'ailleurs,
c'était dans cette salle. Notamment, tout l'aspect sur les étudiants
internationaux a été très peu couvert. Ils ont une perspective
intéressante à savoir de quelle manière s'ils vont être touchés
particulièrement.
Deuxièmement,
il y a une distinction importante qu'ils amènent dans leur rapport, qui a
été... dont on a peu fait état et, je
pense, qui témoigne jusqu'à un certain point du manque de profondeur qu'on a eu
dans l'analyse des dossiers, notamment
des 18 000 dossiers. Mais deux éléments : le statut
d'immigration valide sur le territoire et les demandeurs extérieurs. Ce sont deux éléments qui sont
spécifiques, et je pense que l'ensemble des gens qui participent à la
commission gagneraient à mieux comprendre ces éléments-là.
Ensuite, ils
ont des propositions concrètes pour l'accélération du processus des demandes.
Ils ont des mesures qu'ils proposent, qu'ils veulent mettre de l'avant,
qu'on n'a pas entendues avec d'autres intervenants.
Finalement,
je vous dirais qu'il y a un autre élément qu'ils amènent et qui fait en sorte
qu'on devrait les considérer, c'est
que l'absence de prévisibilité pour les travailleurs temporaires est
importante. Et ils viennent expliquer et détailler dans quelle mesure ce manque de prévisibilité là a
un réel impact sur les individus mais également sur l'ensemble du processus.
Alors, pour toutes ces raisons-là, j'estime que
nous devrions recevoir ces personnes en commission.
Je me permets
d'ajouter, Mme la Présidente, que, dans les règlements, il est clairement
stipulé, donc, article 244, qu'avant d'entreprendre l'étude détaillée la
commission peut décider de tenir des consultations particulières dans le cadre de son mandat. Donc, il relève de la commission de
décider si, oui ou non, on décide d'aller de l'avant. Mon collègue de Laurier-Dorion a fait une proposition en ce
sens. Le ministre de l'Immigration a balayé la demande du revers de la main.
Mais cette mesure-là, elle existe. Elle existe parce qu'il y a des besoins et
que, par rapport à notre système, en démocratie, on a le droit d'utiliser ce
type de règlement là justement pour avoir une discussion éclairée.
On ne demande
pas, ici... je n'ai pas 25 motions préliminaires. On pense que celui-là...
cette demande-là est plus spécifique et répond vraiment à un besoin particulier
qui éclairerait l'ensemble des membres de la commission de manière
pertinente et qui nous aiderait dans les échanges que nous allons avoir par la
suite. C'est la raison pour laquelle nous formions cette demande.
Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. Y a-t-il d'autres interventions
sur la motion préliminaire? Oui. M. le député de Nelligan.
M. Monsef
Derraji
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente. Au fait, je vais ajouter d'autres éléments. Et je
pense comme ma collègue la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne — c'est
ça? Hein?
Une voix : ...
M. Derraji :
Oui. Et sérieusement, quand je lis l'article 9 : Cette loi est
modifiée par l'insertion, après l'article 21, du suivant :
«21.1.
Lorsque le ministre sélectionne un ressortissant étranger, il peut lui imposer
des conditions qui affectent la
résidence permanente conférée en vertu de la Loi sur l'immigration et la
protection des réfugiés (Lois du Canada, 2001, chapitre 27) afin d'assurer, notamment, la protection de la santé
publique, la satisfaction des besoins régionaux ou sectoriels de main-d'oeuvre, la création régionale ou
sectorielle d'entreprises ou le financement de celles-ci, ou l'intégration
linguistique, sociale ou économique du ressortissant étranger.
«Le gouvernement détermine, par règlement, les
conditions que peut imposer le ministre ainsi que les cas où celui-ci peut les
imposer, les modifier, les lever ou les annuler.»
Sérieusement,
quand je lis cet article, je pense que nous avons tous besoin
d'éclaircissements de la part de l'Association du Barreau canadien,
division du Québec.
Et la demande,
elle est légitime, elle est louable, surtout dans un esprit de collaboration.
Encore une fois, c'est une demande de
bonne volonté. Nous demandons à entendre l'Association du Barreau canadien pour
nous éclairer. Il y a une volonté de
conditionner la résidence permanente de la part du ministre. Il y a des
règlements ou un ajout de conditionner ça,
l'arrimage en région, au niveau de l'installation des immigrants reçus. Donc,
je pense que la moindre des choses, c'est entendre l'Association du Barreau
canadien, qui, sûrement, ils vont nous donner des arguments, un, sur la
faisabilité. Et je peux assurer le ministre que ça va nous économiser
probablement énormément de temps.
Et, s'il veut aller de l'avant avec le projet,
et je sais que c'est son souhait, et mon souhait, et le souhait de nos collègues, je pense que c'est plus sage et c'est
plus bénéfique pour l'ensemble des membres de notre commission d'entendre
l'Association du Barreau canadien nous
éclairer par rapport à certains points. Parce que nous avons encore
des questions par rapport à l'applicabilité de cet article.
Et j'espère
que... j'en suis sûr, que le ministre a ses réponses, mais j'aimerais bien,
dans un esprit de neutralité aussi,
écouter et entendre un autre groupe qui, probablement, va nous donner des
pistes et va nous faire gagner, nous, à nous tous et aussi aux membres de la commission, énormément de temps. Donc,
j'espère que la demande sera considérée afin d'écouter et d'inviter
l'Association du Barreau canadien. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci, M. le député de Nelligan. Y a-t-il d'autres membres qui désirent... Oui, M.
le député de Laurier-Dorion, je vous invite à faire vos remarques.
M. Andrés
Fontecilla
M. Fontecilla : Merci, Mme
la Présidente. Donc, autant pour le
Barreau canadien que pour l'Association canadienne des conseillers professionnels en immigration, il s'agit de
personnes, des acteurs qui travaillent quotidiennement avec la Loi sur l'immigration, la loi de
l'immigration, autant canadienne que québécoise. Ils sont très au fait de la
mécanique de ces opérations-là. Ils pourraient nous éclairer grandement, là, ça
a été dit à plusieurs reprises. Ceci dit, il peut arriver qu'en cours de commission... il est très
envisageable qu'on désire, en tant que commission, en tant que membres de la
commission, étudier de nouvelles avenues, entendre des personnes qui pourraient
éclairer nos travaux.
Donc, je vous
rappelle que les négociations qui mènent à la définition des groupes qui vont présenter
verbalement leurs mémoires en commission parlementaire, c'est fait en amont du travail de la commission,
au tout début. Il y a beaucoup
d'eau qui peut couler sous le pont, là, en cours de commission. En attendant,
des choses peuvent changer. Donc, la commission
est... ça a été soulevé, les membres de la commission ont parfaitement le droit
de vouloir, de proposer... et puis,
évidemment, il y a un jeu de majorité-minorité qui s'opère, mais de vouloir
ramener des points de vue nouveaux.
Nous ne sommes
pas... Je pense que la négociation entre les bureaux des leaders
parlementaires, ce n'est pas un traité
international qui est immuable. Vous n'avez pas négocié le traité sur le
contrôle des armes nucléaires de l'Iran, là, vous avez juste négocié,
hein, une liste de groupes à entendre. Donc, il me semble qu'après avoir
entendu tout plein d'opinions il est
parfaitement légitime que les membres de la commission puissent vouloir
entendre de nouveaux points de vue
qui vont éclairer grandement notre travail et, surtout, faire une meilleure
législation pour le Québec dans l'avenir.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Y a-t-il d'autres membres qui désirent faire des
remarques? La députée de Fabre... Ah! M. le ministre.
Une voix : ...allez-y.
La
Présidente (Mme Chassé) :
La députée de Fabre s'invite à faire des remarques sur la motion
préliminaire.
Mme Monique
Sauvé
Mme Sauvé : Oui. Merci, Mme la Présidente. Vous savez,
je n'en suis pas à ma première étude détaillée, et à chaque fois je vous dirais qu'il y a un élément
qui est gagnant pour la suite des choses et pour une véritable collaboration, et c'est l'éclairage qu'on reçoit lors des
consultations, et c'est l'éclairage représentatif de l'ensemble des points de vue. Et, à chaque fois, à chaque fois, ça fait avancer le débat parce qu'on a
tous les angles, on a les
contreparties, on a les points qui s'opposent.
Et moi, pour
moi, j'ai beaucoup de difficulté à imaginer qu'on puisse mettre de côté,
exclure une telle motion qui nous
permet d'avoir un angle fondamental qui est celui du point de vue du Barreau
canadien. Alors, honnêtement, en termes de représentativité, là — parce que, pour moi, c'est un élément
majeur — quand on
n'a pas un acteur tel que celui-là au coeur
d'un débat aussi sensible, il me semble qu'on perd beaucoup dans la suite des
choses et pour la véritable collaboration qu'on doit avoir. Moi, il me
semble que cet angle-là, comme législateur, on a besoin de les entendre. Alors,
voilà.
• (20 h 40) •
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous, Mme la députée de Fabre.
M. le ministre, est-ce que vous décidez d'ajouter des remarques?
M. Simon
Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Bien oui, Mme la Présidente. Écoutez,
l'Association du Barreau canadien, division Québec, a déposé un mémoire que tous les membres de la
commission peuvent lire. Et d'ailleurs, en termes d'opinion juridique,
si on peut dire, là, on a eu en audition
particulière l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de
l'immigration. Je pense, c'est pas
mal les plus spécialisés, hein, selon les propos que les collègues avaient. On
a eu le Barreau du Québec qui est
venu en commission parlementaire aussi, vous avez pu les questionner aussi en
audition particulière aussi. Alors, la députée
de Fabre va pouvoir aussi retrouver leur mémoire sur le site Web. Qui on a eu
d'autre? Ah oui! la Commission des
droits de la personne et des droits de la jeunesse aussi, qui ont déposé un
mémoire fort volumineux, je me souviens,
une trentaine de pages aussi. Alors, ça fait trois organisations qui ont des
membres du Barreau. Aussi... ah oui! Me
Stéphane Handfield, qui est venu à titre personnel, aussi, témoigner, qui est
connu et qu'on voit souvent commenter les questions dans les médias.
Alors, ça
fait déjà quatre personnes qui sont issues du domaine juridique pour éclairer
la commission. Je pense qu'on a fait
le tour. Et, comme le dit la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, effectivement, c'est prévu dans le
règlement, à l'article 244, et
c'est utile d'avoir un règlement qu'on peut se servir. Alors, on voit que le
député de Laurier-Dorion se sert du
règlement aussi pour déposer une motion préliminaire. Puis ils sont contents, à
Québec solidaire, de pouvoir avoir un règlement sur lequel s'établir. Ça
devrait être la même chose pour le quorum. C'est prévu par règlement. Alors,
voyez-vous, le règlement est utile quand on veut, hein?
Une voix : ...
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui, monsieur...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Chassé) :
Non, je crois... Juste un moment...
Une voix : ...
La
Présidente (Mme Chassé) : Exactement. Merci. Alors, ça met fin à
vos remarques, M. le ministre. Je vous remercie
de garder vos propos sur le sujet, et c'est une seule intervention par membre.
Y a-t-il d'autres membres qui décident de nous faire part de leurs
remarques sur la motion préliminaire? Oui, la députée de Bourassa-Sauvé, je
vous écoute.
Mme Paule
Robitaille
Mme Robitaille :
J'ai lu le mémoire du Barreau canadien. J'aurais eu plusieurs questions à leur
poser. Je trouve qu'ils avancent des pistes de solution. Ça aurait été très,
très, très utile de les recevoir, et je pense que ça vaudrait la peine. C'est un débat important. C'est des
questions cruciales. On va peut-être faire une collision frontale avec Ottawa
là-dessus. Il y a des choses qui se sont
dites. On aurait pu leur poser des questions et avoir des réponses. Et je pense
que c'est nécessaire. On peut le faire. Et, considérant l'importance de ce
projet de loi, on aurait tout avantage à les entendre, à les avoir ici
avec nous. Merci.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée de
Bourassa-Sauvé. Y a-t-il d'autres membres qui décident de nous faire
part de leurs remarques?
Mise
aux voix
Alors, la
motion préliminaire déposée par la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne est mise aux voix. Il y a une demande de vote. Donc un vote par appel nominal.
Excellent. Alors, j'ai besoin de votre aide, Mme la secrétaire, le vote par appel nominal, parce que je ne pense pas que
moi, je vais me mettre dans le milieu en train de nommer les noms de
chacun, là, tu sais?
La Secrétaire :
Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne)?
Mme Anglade : Pour.
La Secrétaire :
M. Derraji (Nelligan)?
M. Derraji :
Pour.
La Secrétaire :
Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé)?
Mme Robitaille : Pour.
La Secrétaire :
Mme Sauvé (Fabre)?
Mme Sauvé : Pour.
La Secrétaire :
M. Jolin-Barrette (Borduas)?
M. Jolin-Barrette : Contre.
La Secrétaire :
M. Skeete (Sainte-Rose)?
M. Skeete : Contre.
La Secrétaire :
Mme Lachance (Bellechasse)?
Mme Lachance : Contre.
La Secrétaire :
M. Jacques (Mégantic)?
M. Jacques : Contre.
La Secrétaire :
Mme Lecours (Les Plaines)?
Mme Lecours (Les Plaines) :
Contre.
La Secrétaire :
M. Poulin (Beauce-Sud)?
M. Poulin : Contre.
La Secrétaire :
M. Lévesque (Chauveau)?
M. Lévesque (Chauveau) :
Contre.
La Secrétaire :
M. Fontecilla (Laurier-Dorion)?
M. Fontecilla : Pour.
La Secrétaire :
Mme Perry Mélançon (Gaspé)?
Mme Perry Mélançon : Pour.
La Secrétaire :
Mme Chassé (Châteauguay)?
La
Présidente (Mme Chassé) : Je m'abstiens. Alors, Mme la
secrétaire, est-ce que vous pouvez me donner le constat du vote?
La Secrétaire : La motion est
rejetée.
La
Présidente (Mme Chassé) :
La motion est rejetée. Alors, s'il n'y a pas d'autre motion préliminaire, nous
allons immédiatement débuter l'étude article par article.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Chassé) :
Ah!
Mme Anglade :
J'ai juste un commentaire à faire. Alors, à moins... Je veux juste... Ça va
être rapide, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Chassé) : Je
vous écoute, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme Anglade :
...je vous rassure. Alors, avant le début de l'étude détaillée, j'aimerais
simplement dire qu'à moins d'indication
contraire et conformément à l'article 245 on demande à ce que le projet de
loi soit étudié article par article, alinéa par alinéa et paragraphe par
paragraphe, tout simplement.
La
Présidente (Mme Chassé) : C'est noté. Donc, je suspends... C'est
une motion... Non, ce n'est pas une motion préliminaire.
Une voix : ...
La
Présidente (Mme Chassé) : O.K. Parfait. Donc, on continue. Ça
clôt donc la section des motions préliminaires. Très bien. Merci.
Étude
détaillée
Nous entrons
maintenant dans l'étude détaillée. Et je prends en considération
l'article 1 du projet de loi. M. le ministre, la parole est à vous.
Je vous laisse donc d'abord lire puis expliquer l'article 1.
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Article 1.
L'article 2 de la Loi sur le ministère de l'Immigration, de la
Diversité et de l'Inclusion (chapitre M-16.1) est modifié par l'insertion,
dans le premier alinéa et après «valeurs démocratiques»,
de «et des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés
de la personne (chapitre C-12)».
Les notes
explicatives. Cet article modifie l'article 2 de la Loi sur le ministère
de l'Immigration, de la Diversité et
de l'Inclusion afin de prévoir que la pleine participation des personnes
immigrantes est aussi faite dans le respect des valeurs québécoises
exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne.
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : On peut
voter.
La
Présidente (Mme Chassé) : O.K. M. le ministre, juste un moment,
là. Donnez-moi le temps de prendre le rythme de cette nouvelle fonction
pour moi. Je vais y arriver, soyez rassurés, je vais y arriver.
(Consultation)
La Présidente (Mme Chassé) :
O.K. Je suspends un instant. Merci.
(Suspension de la séance à 20 h 48)
(Reprise à 20 h 49)
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. On reprend les travaux. Merci à tous pour votre patience.
Donc, je comprends que vous venez de lire et de
fournir vos explications sur l'article 1, M. le ministre. Nous sommes maintenant rendus à l'étape où des
intervenants peuvent commenter cet article-là. Je rappelle les règles pour tout
le monde, puis après ce sera fait : 20 minutes par intervenant pour chaque
article ou, si un membre en fait la demande, 20 minutes par
paragraphe ou alinéa en une ou plusieurs interventions.
Est-ce qu'il
y a des intervenants qui désirent faire des commentaires sur l'article 1?
La députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. Je vous invite à faire vos
remarques.
• (20 h 50) •
Mme Anglade :
Parfait. Alors, je vais débuter. Dans le texte qui est proposé par le ministre,
on introduit la notion de... au-delà
des valeurs démocratiques, des valeurs québécoises exprimées par la Charte des
droits et libertés de la personne. Alors,
lorsque je lis «des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et
libertés de la personne», j'aimerais juste comprendre l'intention du
ministre lorsqu'il parle des valeurs québécoises. De quoi s'agit-il exactement?
La Présidente (Mme Chassé) :
Alors, M. le ministre, je vous invite à répondre.
M. Jolin-Barrette : Bien, vous savez, il y a plusieurs valeurs dans
la Charte des droits et libertés de la personne. Pour les fins de la discussion, je pense qu'on pourrait l'appeler la
charte québécoise parce que, souvent, il y a une distinction entre... enfin, les gens font une distinction
entre ce qu'on appelle la charte des droits et libertés, qui est la charte
canadienne, versus la Charte des
droits et libertés de la personne, qui est la charte québécoise. Donc, la
charte en question, dont on parle
présentement, c'est la charte québécoise, qui est quasi constitutionnelle,
versus la Charte canadienne, qui est dans la Constitution canadienne.
Alors, au fil
des années, la charte québécoise a évolué. Donc, elle a été déposée en 1975 par
l'ancien ministre de la Justice
Jérôme Choquette et elle a été bonifiée au cours des années, notamment, de
droits, d'articles qui font en sorte de représenter ce que sont les valeurs québécoises, notamment, de droits et
libertés, entre autres. Alors, dans la charte, c'est composé
notamment de droits, de libertés, mais aussi de valeurs québécoises. Et je
donne un exemple. Sous un précédent gouvernement, on a inséré, dans les
considérants, au début, dans le préambule de la charte québécoise, l'égalité
entre les hommes et les femmes. Et donc ça, je pense que, dans notre
société, ça constitue une valeur québécoise.
Alors,
lorsqu'on réfère aux valeurs québécoises, on réfère notamment à l'égalité entre
les femmes et les hommes, qui est un
des principes, je crois, avérés dans notre société comme valeur fondamentale de
la société québécoise, comme valeur québécoise inscrite dans la charte.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de
Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme Anglade :
Alors, évidemment qu'à mon sens l'égalité hommes-femmes fait partie des valeurs
qui nous régissent au Québec. Cela dit, le
ministre dit : Il y a beaucoup de valeurs qui émanent de la charte.
J'aimerais savoir : Dans la
charte, exactement, à quelles valeurs fait-il référence? Parce que moi, j'ai la
Charte des droits et libertés de la personne en avant de moi. Où parlons-nous des valeurs spécifiques à l'intérieur
de la charte? À quel moment dans la charte est-ce qu'il lui fait
référence?
La Présidente
(Mme Chassé) : M. le ministre, oui.
M. Jolin-Barrette : Bien, notamment, à l'article 9.1, on parle
de valeurs démocratiques et donc on traite notamment de la question des valeurs, questions de principe
là. Mais l'ensemble de la charte est composé de droits et de libertés, et ces droits et libertés là, notamment, ça constitue
des valeurs québécoises. Donc, on fait référence à la somme de toutes les questions qui sont dans la charte québécoise
lorsqu'on parle de valeurs québécoises. Parce que ce n'est pas vrai que
c'est uniquement des valeurs démocratiques.
Parce
que prenez l'égalité entre les femmes et les hommes. Est-ce que c'est
nécessairement une valeur démocratique? Pas nécessairement parce que vous pouvez avoir la démocratie sans
nécessairement avoir ce principe-là, cette valeur-là de la société québécoise.
Alors, pour le législateur, pour nous, c'est très clair que les valeurs
québécoises inscrites dans la charte québécoise comprennent notamment
l'égalité entre les femmes et les hommes.
Mme Anglade :
Mais en aucun cas, dans la charte... Excusez-moi.
La Présidente
(Mme Chassé) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne,
allez-y.
Mme Anglade :
Mais en aucun cas, dans la charte, est-ce qu'il est fait mention des valeurs
québécoises. Vous le définissez, vous, comme... tu sais, vous avez dit...
M. Jolin-Barrette :
...comme législateur.
Mme Anglade :
...comme législateur. Puis là je vais m'adresser à Mme la Présidente. Le
ministre les définit : valeurs québécoises, mais elles ne sont pas
définies. Il fait référence à la charte, mais elles ne sont définies nulle part
à l'intérieur de la charte. C'est pour ça
que je pense qu'il est très pertinent de définir de quoi il s'agit exactement.
La seule valeur dont j'ai vraiment entendu parler jusqu'à présent, c'est
celle de l'égalité hommes-femmes. Il y a tout un tas de choses qu'on pourrait sortir qui pourraient être des valeurs et qui
pourraient ne pas être des valeurs. Alors, je pense qu'on a besoin de
comprendre l'optique du législateur là-dedans, l'optique du ministre de
l'Immigration par rapport à ça.
Parce
qu'à part l'égalité entre les hommes et les femmes j'aimerais ça savoir de quoi
il s'agit exactement. Parce qu'avant d'inscrire «valeurs québécoises» à
l'intérieur d'une notion... Puis ce n'est pas seulement qu'on l'inscrit
au premier article. On l'inscrit à plusieurs
niveaux dans les documents. Et j'ai bien entendu le ministre quand il
dit : Les valeurs démocratiques
font notamment partie de ce qu'il considère, dans sa tête, être les valeurs
québécoises, ce à quoi, tu sais, je
peux consentir jusqu'à un certain point. Mais quelles sont les autres valeurs
auxquelles il fait référence? Et, si le mot «valeurs» est dit, notamment, à
l'article 9.1, c'est le seul endroit où on fait référence aux valeurs.
Dans toute la charte, le seul endroit
où on va trouver le mot «valeurs», c'est à l'article 9.1. Alors, à quelles
valeurs spécifiquement fait-il référence?
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, il y en a plusieurs dans
l'ensemble du texte, là. Ça fait référence au texte aussi de la charte québécoise des droits et libertés.
Mais ce qui est intéressant, Mme la Présidente, c'est que, lorsqu'elle me
dit : Ah! les valeurs québécoises... lorsque la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, pardon, dit : Ce n'est pas défini, les valeurs québécoises,
bien, ma prédécesseure, la députée de Notre-Dame-de-Grâce, a inscrit les valeurs démocratiques, hein, dans la Loi sur l'immigration. Est-ce qu'elle définit les valeurs démocratiques? Est-ce que ces valeurs démocratiques là, sont définies? Non. Parce qu'on sait tous ce que sont des valeurs démocratiques : le
droit de vote... Ce sont des valeurs qui existent, les valeurs d'une
démocratie.
Mais,
si vous voulez aller dans une énumération au niveau des valeurs québécoises,
oui, ça comprend la démocratie, ça comprendra,
je l'espère, prochainement, tout dépendant de votre volonté, l'apport du Parti
libéral, la laïcité aussi. Parce que vous n'êtes pas sans savoir que,
dans le cadre du projet de loi n° 21, on vient modifier le préambule de la
charte québécoise et qu'on vient indiquer que la laïcité, c'est une valeur
fondamentale de la société québécoise.
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, de notre côté, du côté du
gouvernement, on pense que c'est une valeur importante, c'est une valeur québécoise, la laïcité. Elle
apparaîtra prochainement, je le souhaite, si le Parlement en décide ainsi, dans
le cadre du texte. Alors, ça, c'est un
exemple concret. Et est-ce que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne serait d'accord avec moi pour
dire que la laïcité devrait être une valeur québécoise inscrite dans la charte?
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de
Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme Anglade :
Oui, nous sommes dans un État laïque, hein, et ça, on en est bien conscients.
Puis vous allez faire le débat... Nous sommes dans un État laïque, je
veux dire... À moins qu'on me dise qu'on ne fonctionne pas... ça ne fonctionne
pas de manière laïque au Québec. Je pense qu'on est dans un État laïque.
M. Jolin-Barrette :
Pas juridiquement. Pas juridiquement.
Mme Anglade :
Maintenant... Est-ce que je vais poursuivre?
La Présidente
(Mme Chassé) : On va continuer à s'adresser à moi. Merci.
Mme Anglade :
Merci, Mme la Présidente. Cela dit, je vais revenir à la question des valeurs
québécoises. Parce que le ministre a
dit : Bien, les valeurs québécoises, il y a les valeurs démocratiques; les
valeurs démocratiques sont incluses dans
les valeurs québécoises. Il y a la laïcité qu'il aimerait inclure parce qu'il
le juge nécessaire, enfin, avec le projet de loi n° 21, mais on va laisser faire le débat du projet de loi
n° 21 à la commission qui va s'en charger. Donc, on en aura assez
avec nos propres débats ici.
Mais,
sur la question des valeurs québécoises qui incluent les valeurs démocratiques,
quels sont les autres éléments qu'il aimerait ajouter? Parce que ce
n'est pas juste de dire : Des valeurs québécoises. C'est exactement quels
sont les éléments qui reflètent ces valeurs
québécoises qu'on a besoin de comprendre. Au-delà d'égalité hommes-femmes,
qu'on pourrait dire, O.K., égalité
hommes-femmes, démocratie, très bien, ça fait partie des valeurs démocratiques
de toute façon, quels sont les autres éléments qu'il aimerait ajouter,
puis qu'est-ce qu'il veut dire exactement?
La Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. M. le ministre, vous voulez
rajouter une remarque?
M. Jolin-Barrette : Certainement, Mme la Présidente. Écoutez, mais je
n'ai pas entendu la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne nous dire si elle considérait la
laïcité comme une valeur québécoise. Ça, je pense que c'est fondamental pour la poursuite du débat. Est-ce qu'elle, Mme la
Présidente, considère que la laïcité devrait faire partie des valeurs
québécoises? Pour elle, est-ce que c'est une valeur de la société
québécoise, la laïcité?
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Mme la députée
de Saint-Henri—Sainte-Anne,
c'est à vous.
Mme Anglade :
Écoutez. On ne va pas faire le débat sur la laïcité au moment où on fait le
débat sur l'immigration. Je pose des
questions à celui qui a l'intention de faire... C'est lui qui présente, le
ministre présente son projet de loi. Il a un autre projet de loi en
parallèle qui veut modifier la charte, c'est très bien. Mais, Mme la
Présidente, vous pouvez intervenir puis dire
que, par rapport au débat qui est là, ce n'est pas le sujet et l'objet, est-ce
que la laïcité est là ou pas. On a de
la difficulté à nous dire quelles sont les valeurs québécoises et on en ajoute
une autre dans un autre projet de loi qu'on va approuver plus tard.
Moi,
ce que je veux savoir, c'est... Il a écrit, dans son projet de loi, les valeurs
québécoises exprimées par la Charte des
droits et libertés. Très bien. Quelles sont les valeurs québécoises qui sont
exprimées par la charte? On ne parle pas de laïcité. À moins qu'il veuille me faire référence à la laïcité ici,
je suis très à l'aise, s'il trouve l'endroit où on veut faire référence à ça, mais quelles sont les valeurs?
Parce qu'il est impératif, pour nous, dans un projet de loi aussi important,
aussi essentiel, et sachant d'autant plus
que, vraisemblablement, on va parler éventuellement, dans des règlements, de test
de valeurs, de quelles valeurs s'agit-il exactement.
Alors,
jusqu'à présent, j'ai eu une réponse qui était l'égalité hommes-femmes, très
bien, la démocratie, très bien, qui fait partie des valeurs démocratiques.
Quels sont les autres éléments qu'on aimerait mettre de l'avant quand on parle
de valeurs québécoises?
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. M. le ministre, vous désirez
ajouter des remarques?
• (21 heures) •
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, je dénote bien, de la part de la
réponse de la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, que, pour elle, ça convient que la laïcité constitue une valeur de la
société québécoise, une valeur qui devrait être inscrite dans la Charte
des droits et libertés de la personne. C'est ce que je retiens de son propos.
Pour
ce qui est de la nomenclature des valeurs, écoutez, je peux donner une
série d'exemples. Ce que j'ai dit à la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, c'est que l'ensemble de la charte québécoise fait partie des
valeurs québécoises. Le texte même, ça constitue les valeurs québécoises :
la primauté du droit, la laïcité éventuellement, la justice, la paix.
Vous savez,
la Cour suprême a défini récemment dans un arrêt que le Québec avait des
spécificités et des valeurs sociales
distinctes. C'est quoi, le texte de base de la société québécoise? C'est la Charte des droits et libertés de la personne, qui fait partie de la constitution informelle du
Québec, et toutes les lois québécoises doivent être conformes à la Charte des
droits et libertés de la personne.
Alors, l'ensemble des valeurs se retrouvent à l'intérieur. Même chose au niveau du
droit à l'égalité, de la liberté d'association, de la liberté d'opinion, de la liberté de religion, du droit au
secours, du droit à la vie. Ça, c'est des valeurs québécoises.
Prenez... dans la charte, il y a un article qui
dit que les gens doivent prêter secours aux gens si ça ne met pas en péril leur sécurité et leur vie. Il y a
une obligation au Québec, on appelle ça l'obligation du bon samaritain. Ça, là, dans les autres textes dans d'autres États, ce n'est pas nécessairement présent, mais nous, on a fait le choix au Québec de dire : Tu dois
porter assistance. Tu dois, comme citoyen québécois, porter assistance à ton prochain. Moi, je
considère que c'est une valeur québécoise.
Je considère que, dans notre société, c'est le ciment de notre société.
Alors, ça, c'est un autre exemple,
c'en fait partie. Le bien-être général des citoyens du Québec, c'est inscrit
dans la charte. C'en fait partie, des valeurs québécoises, aussi.
Voyez-vous, il y a
une série de droits, de libertés, de principes, de concepts, qui constituent
des valeurs québécoises. Et on
l'a toujours dit, on a toujours été clairs, pour
nous, l'adhésion aux valeurs québécoises, c'est l'adhésion aux principes qui sont dans la
Charte des droits et libertés de la
personne, dans la charte québécoise.
Et je ne pense pas qu'il y
a personne qui peut être contre
le fait que la société québécoise, son vivre-ensemble, son adhésion...
l'adhésion, en fait, que la société
québécoise souhaite, ce soit l'adhésion à la Charte des droits et libertés de la personne, parce
que ça constitue, en fait, une
sorte de contrat social que nous avons. Ça fait quoi? 1975... 44? 44 ans que le
texte est là.
Alors, nous,
ce qu'on vient spécifier, c'est que, dans le cadre de l'immigration, lorsqu'on dit «le respect des valeurs démocratiques», oui, mais pas juste les questions de la démocratie, également les valeurs québécoises, qui sont
comprises dans le texte complet. Vous
voulez un autre exemple peut-être? En 2006, un précédent gouvernement, libéral de surcroît, avait inscrit le droit de vivre dans un environnement
sain, 46.1 de la charte. Ça, je pense que... On parle beaucoup de développement durable, on parle d'environnement, on se pose des questions sur comment est-ce qu'on va développer notre économie. Bien, ça, c'est une valeur québécoise
aussi de dire : Pour nos citoyens québécois d'aujourd'hui et de demain, on souhaite qu'ils vivent dans un environnement sain. C'est une
valeur québécoise. Ce n'est pas toutes les sociétés
qui ont fait ça. Est-ce que ça, c'est une valeur démocratique? Je ne le
crois pas, mais très certainement c'est une valeur québécoise, d'où le sens
d'inscrire, dans la loi sur l'immigration... bien, en fait, dans la Loi sur le ministère de l'Immigration, de la Diversité
et de l'Inclusion, la référence à «valeurs québécoises».
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. J'ai noté
deux... trois interventions. Il y a la députée de Fabre, il y a le député de Nelligan et il y a la
députée de Bourassa-Sauvé. Je vais y aller dans l'ordre qu'on me l'a signifié,
à moins que vous vouliez ajouter à l'instant...
Mme Anglade : Je vais passer et
je vais revenir à ce moment-là, alors allez-y. Je vais revenir là-dessus.
La
Présidente (Mme Chassé) : Parfait. Alors, ça vous va, dans
l'ordre? Je vais d'abord continuer avec la députée de Fabre. Je vous
invite à faire vos remarques sur l'article 1.
Mme Sauvé : Merci, Mme la Présidente. Alors, toujours dans un
souci de bien comprendre et de bien entendre ce que le ministre dit, lorsqu'il a parlé tantôt des valeurs et tout ça, je
l'ai entendu dire que bien sûr qu'il y a des valeurs de liberté, de choix, de
religion, que ça fait partie des valeurs québécoises. J'ai besoin d'une
distinction très claire entre valeurs
québécoises, valeurs démocratiques, parce que, quand je vais sur le site
d'Immigration-Québec et que je google «valeurs
démocratiques», il y a cette valeur-là qui
est très présente et qui est l'exercice des droits et libertés de la personne,
qui se fait dans le respect de ceux d'autrui
et du bien-être général. Et, dans le libellé, c'est clairement
dit : «Ces valeurs et les lois
de la société québécoise font consensus et assurent à chaque personne le droit, entre
autres, de s'exprimer et de choisir librement son style de vie, ses
opinions et sa religion.»
Est-ce que c'est ce que le ministre voulait dire
tantôt? J'ai besoin d'une clarification.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci, Mme la députée de Fabre. M. le ministre, vos remarques.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais très certainement, les valeurs québécoises
peuvent comprendre les valeurs démocratiques aussi.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci, M. le ministre. Mme la députée de Fabre, vous désirez...
M. Jolin-Barrette : Notamment.
Bien, notamment, hein, notamment.
Mme Sauvé : Notamment, O.K. Mais quand vous avez exprimé tantôt la liberté de
style de vie, et tout ça, vous faisiez appel vraiment à ce libellé, à
cette valeur commune?
La Présidente (Mme Chassé) :
...intervenir auprès de moi.
Mme Sauvé : Mme la Présidente,
oui.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci.
Mme Sauvé :
C'est bien ce que vous vouliez...
M. Jolin-Barrette : Bien, vous savez, ce qui est intéressant, Mme la Présidente, c'est que la députée de Fabre vient de dire «valeur commune», là. Donc là, ce
n'est plus une valeur démocratique, c'est des valeurs communes. Et très certainement, la façon dont ça a été libellé, ça a été libellé par la députée
de Notre-Dame-de-Grâce dans le cadre de ses consultations. Et, au départ, lorsqu'elle a commencé son processus,
elle était avec valeurs communes, et là il y a des gens qui sont venus en commission parlementaire, puis
elle a dit : Ah! on va appeler ça valeurs démocratiques pour ces
concepts-là.
Mais, par
contre, est-ce que l'égalité entre les hommes et les femmes, c'est
une valeur démocratique, pour vous, ou c'est une valeur québécoise?
Au-delà de tout ça, là, on peut s'entendre pour se dire que l'ensemble de la
charte québécoise représente les valeurs québécoises.
Moi, je ne veux pas être limitatif. Je ne veux pas faire en sorte de
dire : Ah! ça, ça rentre-tu dans
valeurs démocratiques uniquement, tout ça? Pour moi, l'ensemble des droits et
libertés qui sont présents à la charte québécoise, ça constitue des
valeurs québécoises.
Le fait de
respecter la charte, le fait qu'il y ait le droit à l'égalité, qu'il n'y ait
pas de discrimination pour les
personnes qui souffrent d'un handicap, sur la grossesse, sur l'orientation sexuelle, sur l'identité de genre, ça, je pense que c'est des valeurs québécoises.
Le fait d'être ouvert, parce que c'est ça, le droit à l'égalité prévu à l'article 10,
c'est une valeur québécoise, puis c'est pour ça qu'on vient l'inscrire. Il
faut que ce soit très clair dans notre loi que, dans la Loi sur l'immigration,
on vient couvrir les valeurs québécoises. C'est les valeurs de notre société,
c'est les valeurs du Québec. Il y a des
spécificités à la société québécoise. C'est notre texte fondamental, là, la
charte, là, au Québec, là. Il n'y a pas d'autre texte, là, qui est plus fort
juridiquement que cela, là. Donc, c'est normal que ça représente les valeurs
québécoises.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Merci. Merci à
la députée de Fabre. Vous voulez rajouter des remarques aux propos ou on
passe à...
Mme Sauvé : Non, ça va aller.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. M. le député de Nelligan.
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente. Écoutez, je vais être beaucoup plus pratico-pratique
et je vais poser la question au ministre. Nous sommes en train, avec ce projet
de loi, de planifier l'immigration pour un arrimage entre les besoins du marché
du travail, en quelque sorte, les besoins de nos régions par rapport à des
bassins d'immigration, des bassins au niveau international.
Une voix : ...
M. Derraji :
Ah! vous pouvez dire bassin ou... là où les immigrants se retrouvent, si vous
ne voulez pas le mot «bassin». Et à la lecture de ce texte proposé, le respect
des valeurs démocratiques, je pense que ça sonne très universel, et des
valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la
personne. Il ne faut pas oublier qu'on s'adresse
à des gens qui ne sont pas encore sur le territoire québécois et qu'on espère
ramener, dans un futur proche, avec la
plateforme Arrima. Je me mets à la place de cet immigrant qui va déposer son
dossier dans Arrima, et on veut qu'il respecte les valeurs québécoises.
Ma question
est très simple : Comment le ministre va s'assurer, avant l'arrivée de ces
immigrants, qu'il y a le respect de ces valeurs québécoises et valeurs
démocratiques?
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci au député de Nelligan. M. le ministre, vos remarques.
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, honnêtement, il n'y a rien dans le
projet de loi qui dit qu'on va s'assurer du respect des valeurs québécoises. Je comprends, là, que le Parti libéral
est bien, bien excité par le test des valeurs, là, mais il n'y a pas...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Non, mais
c'est ce que vous allez dire...
Des voix : ...
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, ça s'en vient. Ça s'en vient.
Ça brûle les lèvres du député de Nelligan à ce niveau-là, ça brûle les
lèvres.
Des voix : ...
M. Jolin-Barrette : C'est moi
qui ai le droit de parole, je pense.
• (21 h 10) •
La Présidente (Mme Chassé) :
Juste un moment! Je vous invite à vous adresser à moi. Merci. On poursuit.
M. Jolin-Barrette :
Je pense c'est moi qui ai le droit de parole.
La
Présidente (Mme Chassé) :
On poursuit. On poursuit dans ce sens-là.
M. Jolin-Barrette : Alors, première erreur, au niveau du député de Nelligan, il dit :
Écoutez, les gens ne sont pas encore
sur le territoire québécois au niveau des personnes immigrantes. Alors, ça,
c'est faux, parce que nous, là, il y a beaucoup
de gens qui sont des travailleurs temporaires ici. Donc, l'immigration, là, ce
n'est pas juste de l'étranger de façon permanente.
Il y a aussi des travailleurs temporaires qui sont présents ici, puis nous, on
souhaiterait que les gens qui décident de
venir de façon temporaire au Québec, bien, ils puissent demeurer à long terme
puis migrer vers l'immigration permanente. Et, lorsqu'on me dit :
Écoutez, une personne de l'étranger, elle verrait les valeurs québécoises...
Écoutez, le
texte fondamental de la société québécoise, c'est la Charte des droits et
libertés de la personne, avec la Loi
sur l'Assemblée nationale, avec la Charte de la langue française. Ça, j'espère
que vous ne le niez pas. Ce qu'il y a dans
la charte, ça représente le consensus de la société québécoise, le fait de ne
pas discriminer les gens, le fait qu'il y ait l'égalité entre les hommes et les femmes, éventuellement la laïcité. Je
sais que votre parti ne veut pas inscrire la laïcité dans la charte, ça, ça vous appartient, mais le
principe de la primauté du droit... Écoutez, pour nous, c'est très clair qu'on définit, dans la Loi sur l'immigration, quelles
sont les balises de la société québécoise, notamment, le cadre de vie, c'est ce qu'il y a présent dans la Charte des droits et libertés de la
personne. C'est clair.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. M. le député de Nelligan,
vous désirez poursuivre ?
M. Derraji : Oui,
absolument.
La Présidente
(Mme Chassé) : Allez-y.
M. Derraji :
Je pense que pour le bénéfice de l'avancement de nos travaux, il faut éviter
qu'on fait des procès d'intention.
Je n'ai pas dit le mot «test», mais, si le ministre veut qu'on parle des tests,
on va en parler des tests, s'il le souhaite, mais ce n'est pas mon
intention.
Mon
intention, elle est très simple. C'est que le ministre vient de nous parler
d'immigrants temporaires. Dans la fourchette des personnes qu'on veut recevoir, les temporaires, c'est
quand même très limité. Donc, il y a une catégorie économique qui ne
sont pas encore dans le territoire, qui sont à l'extérieur du pays.
La Présidente
(Mme Chassé) : C'est une question au ministre?
M. Derraji : Oui,
oui. Je veux juste... Oui, absolument.
La Présidente
(Mme Chassé) : Parfait. Merci. Allez-y.
M.
Derraji : Je veux juste qu'on clarifie puisqu'on parle et ce qu'on
a... on réfléchit au niveau de la même catégorie. Au niveau de l'immigration, comme vous le connaissez, Mme la
Présidente, oui, il y a les temporaires, il y a l'immigration économique, il y
a le regroupement familial, il y a la catégorie des réfugiés, il y a plusieurs
catégories. Je n'ai pas parlé des temporaires qui sont sur
le territoire, et moi, c'est dans la perspective d'adhérer tous à ces valeurs universelles, à ces valeurs démocratiques. Je ne
vais pas aller dans le jeu de mots, hein, je vais dire les valeurs
universelles, les valeurs
démocratiques et les valeurs de la société québécoise. Mais je veux juste bien
qu'on soit d'accord déjà sur la ligne de départ. Est-ce qu'on se
comprend, M. le ministre?
La
Présidente (Mme Chassé) : Parfait. Merci, M. le député de
Nelligan. M. le ministre, vous désirez rajouter?
M. Jolin-Barrette : Bien, voyez-vous, Mme la Présidente, le
député de Nelligan dit les valeurs universelles, les valeurs démocratiques puis il dit les valeurs de
la société québécoise. Je pense qu'on n'est pas loin, Mme la Présidente, parce que, pour le député de Nelligan, les
valeurs de la société québécoise, ce sont les valeurs qui sont dans la Charte
des droits et libertés de la personne. Là-dessus, je suis
d'accord avec lui, Mme la Présidente.
M. Derraji : Mme
la Présidente, je vais revenir à ma question.
La Présidente
(Mme Chassé) : Je vous écoute, M. le député de Nelligan.
M. Derraji :
Je ne vais pas faire de ce débat un débat de définitions où on va aller
chercher le Larousse pour faire des définitions de
valeurs universelles, démocratiques ou de société québécoise.
Ma question, elle est très simple.
Le projet de loi, depuis les débuts, le ministre a démontré une volonté réelle
d'accélérer le processus pour utiliser Arrima, qui vise à arrimer, qui vise
dans un... si je veux utiliser une expression utilisée
par M. le ministre, Tinder de l'immigration, donc mettre en contact des gens
qui viennent de l'extérieur avec le besoin du marché et les besoins des
régions.
Ma
question, elle est très simple. Comment on va s'assurer que les gens, avant
qu'ils viennent ici, ils respectent les valeurs
québécoises telles que mentionnées et ajoutées par le ministre, à savoir le
libellé suivant : le respect des valeurs démocratiques et des valeurs québécoises
exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne, chapitre
C-12. Ma question, elle est très claire.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. Vos remarques, M. le
ministre ?
M. Jolin-Barrette : Oui. Mme la Présidente, quand on reprend
le texte proposé, là, avec l'amendement, là, je vais le
relire, là, pour le bénéfice du collègue, là :
«Le ministre élabore et propose au gouvernement des
orientations ou des politiques sur l'immigration et la pleine
participation, en français, des personnes
immigrantes et des minorités ethnoculturelles à la société québécoise en toute égalité et dans le respect des valeurs démocratiques et des valeurs québécoises
exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne.»
Donc,
sur l'article, là, qu'est-ce que fait l'article? Il dit au ministre, en
l'occurrence pour l'instant c'est moi, que je propose au gouvernement, au reste des ministres et au premier ministre des orientations ou des politiques sur l'immigration pour la pleine participation des gens qui vont immigrer,
là, en français, et des minorités ethnoculturelles à la société
québécoise dans le respect des valeurs québécoises. Ça, c'est que l'article
dit.
Alors,
nous, ce qu'on rajoute, c'est qu'on ne vise pas juste les valeurs
démocratiques, on vise l'ensemble de la charte québécoise, parce que les
valeurs qui sont dans la charte québécoise, c'est plus large qu'uniquement les
valeurs démocratiques, puis je vous
en ai fait la démonstration tout à
l'heure, notamment
l'égalité entre les femmes et les hommes, éventuellement la laïcité.
Vous comprenez le sens du propos. L'idée, c'est d'élargir les propositions que
le ministre fait pour viser
l'ensemble de la charte, parce que ça, c'est le ciment de notre État, et les
perspectives, les programmes qui
doivent être développés visent notamment à s'assurer de couvrir
l'ensemble des valeurs québécoises qui sont dans la charte.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Ça vous convient, M. le
député de Nelligan?
M. Derraji :
Non, je vais continuer.
La Présidente
(Mme Chassé) : Vous désirez rajouter des remarques?
M. Derraji :
Oui, oui, je vais continuer. Oui.
La Présidente
(Mme Chassé) : Je vous écoute.
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente. Je commence... que je commence à comprendre le
raisonnement du ministre, et pour le
comprendre très bien, l'ajout de la phrase des valeurs québécoises exprimée par
la Charte des droits et libertés de
la personne, et depuis tout à l'heure je l'entends, c'est l'égalité entre les hommes et
les femmes. Est-ce que c'est ce que j'ai bien compris, M. le ministre?
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Entre autres.
M. Derraji :
Entre autres?
M. Jolin-Barrette :
Entre autres.
M. Derraji : Ça veut dire, Mme la Présidente, qu'il y a
d'autres valeurs qu'il vise par rapport à ça. Juste pour qu'on soit beaucoup plus explicites,
surtout que ce projet de loi va s'appliquer à des personnes qui ne vivent pas actuellement sur le territoire et qu'on
veut qu'elles adhèrent à ce processus... C'est là mon souhait et mon inquiétude
aussi.
Ce texte de loi que
nous sommes en train de proposer, ces amendements, ces ajouts ou le texte
proposé par le ministre, il vise des gens
qui ne vivent pas ici, au Québec, qu'on veut les faire adhérer à nos valeurs,
aux valeurs de la société québécoise et aux valeurs démocratiques. Et c'est là
où moi je veux qu'on soit beaucoup plus explicites et qu'on les nomme pour que
ce soit compréhensible par tous ces gens qui aimeraient venir et immigrer au
Québec. C'est là où, tout à l'heure,
l'essence même des questions de ma collègue... et c'est pour cela que je pense
qu'il faut élaborer davantage et ne pas juste parler de l'égalité entre
les hommes et les femmes.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci. M. le ministre, désirez-vous rajouter des
remarques?
M. Jolin-Barrette :
Bien, je pense que j'ai fait la nomenclature, notamment, non exhaustive des
valeurs tout à l'heure, lorsque la députée de Sainte-Anne m'a parlé ainsi
que la députée de Fabre. Alors, je vous réfère à ce que j'ai dit tout à
l'heure.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Vous désirez rajouter, M.
le député de Nelligan?
M. Derraji : Absolument. Je
comprends très bien que M. le ministre ne veut pas vraiment aller au-delà de ce
qu'il a dit tout à l'heure, mais je vais le ramener à un autre cas beaucoup
plus pratique.
La personne arrive sur le territoire,
elle est... donc une région x, chez un employeur Y, et ne respecte pas une des valeurs.
Où on veut qu'elle les respecte? Comment on va s'assurer qu'elle va respecter
les valeurs? Et dans le cas du non-respect
d'une valeur, prenons le cas que vous citez... que le ministre cite depuis tout à l'heure, le cas de l'égalité, hein? C'est des cas qui, probablement, existent. Comment on va s'assurer qu'il va les respecter
ou comment on va s'assurer qu'on va lui dire : Écoute...
M. Skeete :
Je m'excuse, Mme la Présidente, il y a un cas de règlement. Je...
La Présidente
(Mme Chassé) : Oui. Je vous écoute, M. le député de Sainte-Rose.
M. Skeete :
...de Sainte-Rose. Toujours de Sainte-Rose. Oui, en fait, je ne suis pas sûr
qu'on est sur le sujet parce qu'ici on est dans un texte qui propose une
orientation générale du projet de loi, puis M. le collègue de Nelligan,
mais lui, il est rendu à comment on va
l'appliquer plus tard. Je l'invite à peut-être poser ses questions quand on va
être rendus à des sections qui voudraient dire ça. Là, ici, on est dans la mise
en page du débat, on veut établir un principe. Je ne pense pas que c'est
le moment de faire le débat sur le principe.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci. Je suspends les travaux temporairement.
(Suspension de la séance à
21 h 20)
(Reprise à 21 h 21)
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Oui, on reprend les travaux. Donc, je vous invite à rester centrés sur
les discussions autour de l'article 1. Merci au député de Sainte-Rose. Le
député de Nelligan désire poursuivre?
M. Derraji :
Oui, oui. Absolument.
La Présidente
(Mme Chassé) : Allez-y.
M. Derraji : Merci, Mme
la Présidente. Et je pense
que, depuis le début, je suis dans l'essence même du texte proposé. Et, comme le ministre,
moi aussi j'ai mon interprétation au texte, et, si je pose des questions,
c'est pour le bénéfice de tout le
monde. Et surtout, surtout, moi, ce
texte de ce projet de loi, encore une fois, s'adresse aussi aux gens qu'on veut accueillir au Québec.
Et donc le plus qu'on soit clairs, que ce soit au niveau de nos règlements
ou nos textes, on va s'assurer qu'il y a un bon arrimage. Et je sais que
c'est la volonté du ministre d'assurer le bon arrimage.
Je
vais continuer par rapport au libellé. Il élabore notamment une politique
québécoise en ces matières. Est-ce que
le ministre peut nous parler de sa politique québécoise en la matière de ces
deux valeurs mentionnées dans le même texte?
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, deux choses.
Premièrement, le projet de loi qu'on modifie, on ne touche pas à la question de la politique. C'était déjà
présent dans le texte que votre collègue de Notre-Dame-de-Grâce a mis en vigueur.
Alors, moi, je ne touche pas à ça, là. Donc, on ne réinvente pas la roue.
L'autre
élément qui est intéressant, le député de Nelligan me dit : Comment vous
allez évaluer l'adhésion aux valeurs? Moi, j'aurais envie de lui
demander : Au niveau des valeurs démocratiques, là, que son parti avait
faites, là, comment c'était fait, ça? Comment c'était appliqué?
La Présidente
(Mme Chassé) : Oui, M. le député de Nelligan.
M. Derraji :
Mme la Présidente, je pense que le ministre, c'est à lui de répondre à nos
questions et non pas l'inverse. Je ne suis
pas ministre, et c'est M. le ministre qui doit répondre à nos questions par
rapport au projet de loi en question, à savoir le projet de loi
n° 9.
M. Poulin :
Question de règlement, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Chassé) : Oui, M. le député de Beauce-Sud, je vous écoute.
M. Poulin :
...tout le respect que j'ai pour notre collègue de Nelligan, il doit prendre la
réponse du ministre, quand même. Il doit prendre la parole du ministre.
La
Présidente (Mme Chassé) : Malheureusement, je n'ai pas compris
votre point de règlement. Pouvez-vous...
M. Poulin :
Bien, le point de règlement, ce qu'il dit, c'est qu'on doit prendre la réponse
du ministre qui est mentionnée en commission
parlementaire, et c'est ce que le ministre
fait. Alors, on ne peut pas refuser la réponse du ministre.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. J'invite M. le député de Nelligan
à poursuivre.
M. Derraji : Je
pense que nous sommes tous en train d'apprendre. Écoute, je peux aussi
élaborer l'article 35.6°, qu'on me prête des intentions, hein?
Une voix :
...
M. Derraji :
Bien, depuis le début, on me prête des intentions. Je peux aussi, moi aussi,
élaborer des articles, mais on ne va
pas s'en sortir. Je pense que j'ai le droit de poser des questions et j'exige
des réponses dans le respect de tout le monde. Tu sais, je pense que
c'est très clair.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci. Je vous invite...
Une voix :
...
La Présidente (Mme Chassé) : Un moment! Un moment! Merci. Je vous invite à
revenir à la discussion. Nous sommes à discuter de l'article 1 et à faire des
échanges et des remarques. Merci. M. le député de Nelligan, poursuivez.
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente. Je vais répéter l'essence même de ma réflexion.
L'essence même de ma réflexion, c'est
qu'on veut, et je veux personnellement, comme le ministre, assurer un bon
arrimage entre les nouveaux arrivants
et les régions. Et je comprends la volonté d'avoir l'adhésion aux valeurs
démocratiques et l'ajout des valeurs québécoises exprimées par la Charte
des droits et libertés de la personne.
Ma
question, elle est très simple : Au-delà de s'assurer, techniquement, en
termes pratico-pratiques, comment on
va mettre ça en place, comment le ministre, Mme la Présidente, comment le
ministre compte mettre ça en application? Du moment qu'il a la volonté d'ajouter le respect des valeurs
québécoises... et, depuis le début, on parle de l'égalité entre les hommes et
les femmes, je pense que c'est quelque chose qui est très important, mais
comment nous-mêmes, nous, les élus, on va s'assurer qu'il y a le respect
de cette valeur québécoise par rapport à ces personnes qu'on va ramener?
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci. M. le ministre, est-ce que vous désirez
rajouter des remarques...
M. Jolin-Barrette :
Oui, je désire...
La Présidente
(Mme Chassé) : ...répondre au député de Nelligan?
M. Jolin-Barrette : Oui. Merci,
Mme la Présidente. Écoutez,
l'article, ce qu'il dit, là, il dit : «Le ministre
élabore et propose au gouvernement des orientations ou des politiques sur l'immigration
et la pleine participation, en français, des personnes immigrantes et des minorités ethnoculturelles à la société
québécoise en toute égalité et dans le respect des valeurs démocratiques
et des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés...»
L'obligation
dans l'article, c'est de proposer au gouvernement des politiques, du ministre
vers le gouvernement, pour faire
participer les personnes immigrantes à la société en respect des valeurs
démocratiques puis des valeurs québécoises. Les valeurs québécoises, je les ai
définies, c'est les valeurs qu'il y a dans la charte, les droits et libertés de
la charte, notamment l'égalité entre
les hommes et les femmes, la laïcité éventuellement, le bien-être général, le
droit à un environnement sain. Donc,
les politiques visent notamment l'intégration, l'adhésion en français à la
société québécoise.
On dit, là, au ministre
de l'Immigration, dans le cadre de l'article, là... Je ne parle pas de moi à la
troisième personne, là. Je parle du ministre
qui est dans la loi, là, O.K., pour les fins de la discussion, là. O.K.? Ça
fait qu'on dit : Le ministre de
l'Immigration, sa job, lui, c'est ça. Avant, c'étaient juste les valeurs
démocratiques; nous, ce qu'on dit avec le
texte législatif, c'est qu'on dit, avec la proposition législative, c'est qu'on
dit... on rajoute les valeurs québécoises inscrites dans la charte,
c'est plus large.
Là,
le député de Nelligan, il me dit : Comment vous allez faire appliquer ça?
Bien, ce n'est pas une question de faire
appliquer ça sur les personnes immigrantes, c'est de proposer des programmes
puis des orientations au gouvernement pour
dire, là, supposons, au niveau de l'intégration : Comment est-ce qu'on
fait, là, pour s'assurer, là, que les personnes immigrantes participent pleinement à la société québécoise? Bien, il
faut prendre en compte nécessairement les valeurs québécoises, pas juste les valeurs démocratiques.
Puis là le député de Nelligan me disait : Bien, comment ça va se faire?
Mais j'aurais envie de lui dire :
Comment ça se faisait avec les valeurs démocratiques? Qu'est-ce qui se passait?
C'est la même chose. Le ministre de l'Immigration proposait des
orientations en lien avec ça.
Nous,
on couvre plus large sur l'ensemble de la charte. Est-ce que vous êtes en
désaccord avec le fait qu'on couvre l'ensemble de la charte québécoise au
niveau des propositions et des orientations qu'on fait au gouvernement?
Trouvez-vous ça normal, là, que, dans
les orientations, là, on mette que l'égalité entre les femmes et les hommes, ça
soit un des principes importants? Êtes-vous en désaccord avec ça, qu'on
fasse ça?
La Présidente
(Mme Chassé) : Ça clôt vos remarques, M. le ministre?
M. Jolin-Barrette :
Oui.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il nous reste peu de temps. Vous désirez clore, M.
le député de Nelligan? Je vous invite...
M. Derraji :
Oui. Pour une fois, je vais répondre directement à la question, même si je ne
suis pas là pour répondre à des
questions. Je suis là pour poser des questions pour approfondir la connaissance
et notre connaissance, parce que c'est
le ministre en question qui a déposé ce projet de loi, et, à ma compréhension,
il aimerait approfondir les échanges avec
les membres de l'opposition pour éventuellement, dans un esprit de
collaboration, comme il le souhaite, le bonifier et pour qu'on le
comprend très bien.
Oui, M. le ministre, je suis pour l'égalité
entre les hommes et les femmes. Et ma question, ce n'est pas par rapport à ça. Ma question est très claire :
Comment, du moment où vous m'avez posé la question, comment moi et vous, on va s'assurer du respect sur le terrain de ces
valeurs? Vous avez nommé, pour vous, les valeurs démocratiques, ça n'inclut
pas les valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés, pas
de problème.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste quelques instants.
M. Derraji :
Vous avez ajouté les valeurs... Vous avez ajouté, dans le texte, «et — e-t — des valeurs québécoises exprimées par
la Charte des droits et libertés de la personne», pas de problème.
Ma question
est très simple depuis le début, juste le comment, juste le comment, Mme la
Présidente. C'est juste le comment.
C'est très simple. Le ministre, probablement, peut nous économiser beaucoup de
temps et avancer très rapidement dans l'étude de ce projet de loi, c'est
juste s'il répond à ma question. C'est très simple, ma question, Mme la Présidente, au lieu de me poser des
questions si je suis pour l'égalité entre les hommes et les femmes, et je lui
dis oui.
La
Présidente (Mme Chassé) : Le ministre peut aussi poser des
questions, mais ça nous donne l'occasion de clore les débats pour
aujourd'hui. Je vous remercie...
M. Poulin : ...
La Présidente (Mme Chassé) : Je
vous écoute, M. le député de Beauce-Sud.
• (21 h 30) •
M. Poulin :
...passer au vote sur l'article 1? Déjà plus d'une demi-heure sur un esprit au
niveau la charte, alors est-ce qu'on peut passer au vote?
La Présidente (Mme Chassé) : On
suspend les travaux. Le temps est écoulé.
Des voix : ...
La
Présidente (Mme Chassé) : O.K.
Donc, le vote est demandé. Bon, est-ce
qu'il y a consentement pour la mise aux voix?
Des voix : ...
La
Présidente (Mme Chassé) : Je
suspends les travaux. O.K. Je garde votre attention juste un tout petit
moment, là, pour bien clore les travaux. Merci de votre attention et
merci pour votre collaboration.
Et compte tenu de l'heure — c'est ça, Mme la secrétaire? — la commission ajourne ses travaux sine die.
Merci.
(Fin de la séance à 21 h 31)