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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Friday, November 24, 2017 - Vol. 44 N° 93

Interpellation by the Member for Repentigny to the Minister responsible for the Status of Women on the following subject: Concrete solutions to combat sexual violence and better support victims


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Table des matières

Exposé du sujet

Mme Lise Lavallée

Réponse de la ministre

Mme Hélène David

Argumentation

Conclusions

Mme Hélène David

Mme Lise Lavallée

Autres intervenants

M. Guy Bourgeois, président suppléant

M. David Birnbaum

Mme Catherine Fournier

Mme Monique Sauvé

Journal des débats

(Dix heures trois minutes)

Le Président (M. Bourgeois) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder à l'interpellation de la députée de Repentigny à la ministre responsable de la Condition féminine sur le sujet suivant : Des solutions concrètes pour lutter contre les violences à caractère sexuel et mieux accompagner les victimes.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Guilbault (Louis-Hébert) est remplacée par Mme Lavallée (Repentigny).

Le Président (M. Bourgeois) : Je vous rappelle brièvement le déroulement de l'interpellation. Dans un premier temps, la députée de Repentigny aura un temps de parole de 10 minutes, suivie de la ministre pour également 10 minutes. Par la suite, des périodes de cinq minutes seront allouées selon la séquence suivante : d'abord, un député de l'opposition, ensuite, la ministre, puis un député du groupe formant le gouvernement, et ainsi de suite. Je comprends qu'il y a une entente à l'effet que l'opposition officielle interviendra lors de la troisième et de la sixième intervention. 20 minutes avant la fin de la séance, j'accorderai 10 minutes de conclusion à la ministre et un temps de réplique égal à la députée de Repentigny.

Enfin, je vous rappelle que le débat ne peut, à moins d'un consentement, dépasser midi. Donc, compte tenu que nous commençons nos travaux plus tard, je demande s'il y a consentement pour poursuivre nos travaux jusqu'à 12 h 2. Consentement? Consentement.

Maintenant, je demande à la députée de Repentigny de prendre la parole. Vous avez 10 minutes.

Exposé du sujet

Mme Lise Lavallée

Mme Lavallée : Merci, M. le Président. Je tiens à saluer Mme la ministre de la Condition féminine, la députée de Marie-Victorin. Et vient d'arriver, dans nos tribunes, Mme Rose Dufour, fondatrice de La Maison de Marthe de Québec, conférencière et auteure, je vous salue. Merci beaucoup, madame. Je nous convie ce matin à un échange positif, constructif. Si on veut intéresser plus de femmes en politique, il faut démontrer que l'on peut conjuguer la politique au féminin.

Cela étant dit, ça ne m'empêchera pas de questionner certaines décisions prises par la ministre ou certaines absences de décision. Je m'engage à le faire dans le plus grand respect et avec toute ouverture et l'écoute qu'un sujet comme celui dont nous allons discuter nécessite. Je reconnais la qualité des femmes avec qui j'ai la chance d'échanger ce matin, et j'ai très hâte d'entendre les propositions de l'opposition officielle ou encore d'entendre la ministre nous faire état de l'éventail des mesures gouvernementales déjà en place.

Notre objectif est de démontrer ce matin que des choses se font au gouvernement, dans les partis d'opposition, et dans les organismes, et ailleurs. Voilà pourquoi j'ai demandé à ce que le sujet de la présente intervention s'intitule «Des solutions concrètes pour lutter contre les violences à caractère sexuel et mieux accompagner les victimes». Bref, nous avons une belle occasion ce matin d'être entre femmes pour discuter du problème des violences à caractère sexuel, un problème qui nous interpelle toutes et tous... je le sais, il y a des hommes ici, mais on parle des parlementaires ici, on est quand même les trois représentantes de la condition féminine — désolée pour les hommes que j'ai omis — car soyons honnêtes, malheureusement encore aujourd'hui, ces violences touchent principalement les femmes.

Nous avons, de façon particulière, assisté à des vagues de dénonciations depuis trois automnes successifs : il y a eu, en 2014, dans les dénonciations qui ont affecté l'UQAM; en 2016, il y a eu l'affaire Ghomeshi et la série de dénonciations à l'Université Laval impliquant un député de l'Assemblée nationale; et nous avons la série de dénonciations de personnalités publiques cet automne. Au Québec, les agressions sexuelles ont fait un bond de 23 % entre 1998 et 2015 pour atteindre 3 981 agressions. Précisons que ces données ne concernent que les crimes déclarés à la police et validés. Les crimes à caractère sexuel sont ceux qui connaissent le taux de dénonciation le plus faible. Du côté du SPVM, les plaintes pour agression sexuelle ont augmenté de 17 % entre 2014 et 2015. Le problème est donc bel et bien réel, actuel et demande une réaction musclée de la part du gouvernement. On vit un ouragan social, pour reprendre les mots de la ministre. Nous sommes au coeur d'un basculement, d'un changement de culture à l'échelle de la société québécoise. Nous avons une responsabilité à cet égard, comme parlementaires, d'embrasser ce changement de culture au Québec et de faire en sorte que les choses changent durablement au bénéfice des survivantes d'abord et de toutes les femmes.

À chacune de ces vagues de dénonciations, les organismes se retrouvent avec une augmentation de demandes, doivent conjuguer avec un manque de ressources, d'effectifs et financières, doivent jongler avec les listes d'attente existantes et répondre à l'afflux de nouvelles demandes. À chaque fois que des dénonciations apparaissent dans la sphère publique, nous regardons ce que nous devons faire dans l'immédiat et on essaie de mettre un diachylon sur la fracture ouverte. On organise un forum, des consultations, par exemple, ou on donne 1 million de dollars et on passe à l'autre appel, mais la fracture ne guérit pas. Les dénonciations publiques permettent de mettre en évidence des situations inacceptables, mais, une fois le buzz médiatique disparu, plus rien, comme si le problème n'existait plus, qu'il était disparu, que tout était réglé jusqu'à la prochaine crise.

Même chose pour la prostitution juvénile. On s'indigne une fois par année la semaine du Grand Prix, et après on dort sur nos deux oreilles pendant que nos jeunes filles, elles, continuent de se faire exploiter le reste de l'année. Chaque fois que ces vagues de dénonciation surviennent, à chaque nouveau scandale, les organismes présents sur le terrain nous rappellent que les agressions sexuelles sont un problème présent toute l'année, qu'ils doivent faire face aux femmes qui se présentent chez eux, qu'ils doivent les soutenir, les écouter, les accompagner et peut-être les amener à dénoncer, si elles sont prêtes à le faire.

Au fil de ces années, les organismes ont démontré le manque de rehaussement de leur financement. On leur demande de répondre à des appels de projets qui n'ont qu'un effet ponctuel et dont leur durée est provisoire. Or, pour répondre aux demandes et alléger les listes d'attente, elles ont besoin d'effectifs supplémentaires, des intervenantes permanentes et non une aide ponctuelle et temporaire.

• (10 h 10) •

Dans le cadre des récentes dénonciations auxquelles nous avons assisté, les organismes se sont retrouvés à nouveau sollicités par un excédent auquel la ministre de la Condition féminine et la ministre de la Santé publique ont répondu rapidement en proposant l'injection d'un montant de 1 million de dollars et la tenue d'un forum en décembre prochain. Je ne doute aucunement des intentions des ministres, mais j'ai quelques interrogations au sujet de ces annonces précipitées qui n'ont rien de structurant. Ces annonces ne répondent pas aux besoins des organismes pour un financement stable, récurrent et à la mission.

Au cours de cette interpellation, je veux amener la ministre à réfléchir sur la pertinence du forum qu'elle prévoit tenir dans quelques semaines et sur les besoins exprimés depuis plusieurs années par les organismes qu'elle a l'intention de consulter encore. Ces mêmes organismes ont dénoncé d'ailleurs la tenue d'un autre forum plutôt que des mesures concrètes, structurantes pour accompagner les victimes. Les besoins sont connus, les solutions pour contrer les violences sont sur la table, il faut les mettre en application.

J'aimerais rappeler à la ministre les forums et autres consultations qui se sont tenus au cours du présent mandat, pas sur les 10 dernières années, mais depuis quatre années seulement. En matière de harcèlement et de violence sexuelle, je rappelle qu'il y a eu 12 rencontres régionales et suprarégionales ainsi que des consultations particulières en 2013‑2014. Au cours de l'année 2014, plus de 35 organismes concernés par la problématique des agressions sexuelles ont été rencontrés par des représentants gouvernementaux. 18 organismes ont été entendus en mars 2015 par les membres de la Commission des relations avec les citoyens. En juin et septembre de la même année, le Forum itinérant en matière d'agression sexuelle s'est aussi tenu à Montréal, Rivière-du-Loup et Gatineau. Des consultations particulières auprès d'organisations autochtones ont été menées en 2013 et 2014. Des consultations et des forums, il y en a eu suffisamment. L'heure n'est plus à la recherche de solutions, mais à leur mise en oeuvre.

Je soumets quatre propositions à la ministre qui feront l'objet de mes prochaines interventions : implanter le cours d'éducation à la sexualité dans toutes les écoles du Québec et de façon obligatoire dès la rentrée scolaire 2018, adresser de façon durable et structurante la lutte aux violences sexuelles de concert avec les organismes de première ligne par un financement stable et à la mission, mettre fin aux délais de prescription pour les crimes à caractère sexuel, engager l'Assemblée nationale dans une démarche de lutte contre la prostitution juvénile et l'exploitation sexuelle de nos jeunes. Cela doit s'ajouter aux mesures actuellement en place. Je pense que les propositions que je formule aujourd'hui ont l'avantage de colmater les brèches dans le continuum de services et de prévention en matière de violences à caractère sexuel.

Je remercie Mme la ministre pour sa participation à la présente interpellation. Je suis contente de voir à quel point elle était satisfaite de sa nomination au sein du ministère de la Condition féminine. Et je sais que c'est une grande féministe, et je suis assurée qu'au bout de notre deux heures de travail nous arriverons à des constats et peut-être des consensus qui nous amèneront à avancer dans des sujets qui nous préoccupent et qui préoccupent les femmes et, je répète, les jeunes filles qui sont aux prises avec la prostitution juvénile. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la députée. Nous allons maintenant procéder en cédant la parole à Mme la ministre également pour une période de 10 minutes.

Réponse de la ministre

Mme Hélène David

Mme David : Merci beaucoup, M. le Président. On est en très bonne compagnie aujourd'hui : Mme la députée de Repentigny, Mme la députée de Marie-Victorin, M. le député de D'Arcy-McGee, qui a été d'une grande aide pendant la commission parlementaire, les consultations, Mme la députée de Fabre, qui est une grande convaincue et convaincante, j'en suis sûre, de toute la question des organismes communautaires — non seulement elle les connaît, elle y a travaillé, elle a dédié une grande partie de sa vie, donc on a l'incarnation même de cette question des organismes communautaires — le député de D'Arcy-McGee, qui a consacré beaucoup de temps à l'éducation dans sa vie, aussi commissions scolaires, donc je me sens bien entourée, en plus de tous les spécialistes, la sous-ministre associée, évidemment, au Secrétariat à la condition féminine, mon chef de cabinet, attachée de presse, attachée politique et vous tous et toutes. On va dire un petit «tous», hein, quand même, pour les messieurs aussi qui nous accompagnent et qui nous éclairent. Et c'est une des questions qu'il faut se poser et qu'il faut encourager, le rôle des hommes dans ce combat-là.

Maintenant, je suis aussi contente... Je ne veux pas trop vous mettre dans la même génération que moi, Mme la députée de Repentigny, mais on a une jeune députée qui est exactement la cible des jeunes que nous voulons aider. Et nous avons vraiment besoin de vous, Mme la députée, pour nous dire que peut-être nous, on a passé certaines étapes de notre vie et qu'on a peut-être oublié des choses ou que les choses ont peut-être changé. Puis moi, je me fie beaucoup sur vous pour nous dire : Écoutez, là, mesdames, les choses peuvent encore aller mieux pour telle et telle raison et, de telle et telle façon, on va pouvoir faire plus.

Alors, je pense qu'à nous toutes et tous on peut vraiment faire une conversation intéressante ce matin. Il y a toujours un peu de partisanerie, la structure même du gouvernement, de l'Assemblée nationale est faite pour ça, un en face de l'autre dans différents partis, mais je pense que, s'il y a une cause où il doit y avoir de la solidarité, c'est bien la cause des femmes. Je sais qu'à Québec solidaire ils portent particulièrement cette cause, j'en ai été témoin dans tous les pores de ma peau et de mon ADN. Mais il y a quand même des gens qui portent le dossier, je ne sais même pas pourquoi... ou s'il y aurait pu avoir un représentant de Québec solidaire ou une représentante, mais on verra à discuter avec eux et elles en temps et lieu.

J'ai bien écouté votre introduction et je l'apprécie beaucoup. Je l'apprécie parce que vous avez vraiment dit que cette cause-là devait être une cause... le plus possible, on s'entend, on n'est pas naïves non plus, on n'est pas Calinours, comme disent certaines des fois, on sait bien qu'on est en politique puis qu'on va essayer d'aller chercher le meilleur puis en retirer le meilleur pour notre formation politique, je n'ai rien contre ça, mais, s'il y a une cause où il doit y avoir de la solidarité féminine et de la créativité aussi par rapport à ces enjeux-là, c'est bien cette cause-ci, qui est très large, qui touche quand même la moitié de la population, devrait-on le répéter, et je pense que vous avez bien placé les choses en ligne de départ.

Et il y a des choses que j'ai noté que vous avez dites, par exemple qu'il faut faire vivre les dénonciations. Et je répète souvent que... entre autres, la scénariste d'Unité 9, qui a dit : Je n'écrirai plus jamais de la même façon. Ce n'est pas rien pour quelqu'un qui a une série aussi importante pour parler de l'univers carcéral féminin, que j'ai eu, dans mon parcours personnel, professionnel, je dirais, le privilège de connaître parce que j'ai évalué des mères, plusieurs, plusieurs mères qui avaient tué leurs enfants, donc j'ai fait beaucoup d'expertises psycholégales. Et, quand j'écoute ça, je me dis : Merci, merci à cette série de nous sensibiliser à cet univers-là. Et puis elle a dit : Je serais la première à pleurer que nous ne parlions plus de cet ouragan social, que ça s'éteigne comme peut-être d'autres événements avant ou d'autres vagues avant. Et je pense que même une avant-midi comme celle qu'on a, à laquelle j'avais hâte de participer, je le dis en toute sincérité, parce que j'ai dit : Là, on va avoir du vrai temps de qualité, et pas seulement dans les 1 min 15 s, 45 secondes, on a vraiment le temps de vraiment échanger... Alors, faire vivre les dénonciations, ça veut dire, effectivement, s'arranger tous et toutes pour qu'il y ait des mesures qui vivent, que ça reste avec toutes sortes d'initiatives qu'on va prendre.

Évidemment, vous parlez... et je sais, Mme la députée de Repentigny, que c'est un sujet qui vous tient à coeur, la prostitution; moi aussi. C'est un hasard de mon parcours, mais peut-être qu'il n'y a pas de hasard dans la vie, j'étais si contente d'être à la Condition féminine parce que ça fait des années et des années que je travaille dans ce domaine-là, que j'ai toujours fait mes recherches universitaires en termes de compétences parentales, de recherches sur les femmes. Je ne prendrai pas les cinq minutes qui me restent pour dire tout ça, mais la première recherche que j'ai faite, à part la dépression postnatale, c'était sur la prostitution juvénile, les mineurs. J'ai été passer des soirées, des nuits au parc La Fontaine avec un collègue masculin. On arrivait, on était jeunes professeurs puis on s'est dit : On va aller regarder la prostitution chez les mineurs. Et vous n'aurez vraiment pas besoin de me convaincre — et je sais qu'il y a des gens qui travaillent avec cette clientèle-là — de l'importance de les aider, du lourd passé qu'ils ont, autant jeunes garçons mineurs, hein... il y a une existence de prostitution masculine quand on était au parc La Fontaine, ça s'est peut-être déplacé depuis ce temps-là, mais le niveau de vulnérabilité et de passé très, très lourd de ces jeunes m'avait complètement bouleversée, on avait même publié là-dessus. Et évidemment que, dans tous les cas, il y avait eu abus sexuel avant. On n'arrive pas du jour au lendemain avec nos enfants qui deviennent prostitués juvéniles.

• (10 h 20) •

Alors, je suis tout à fait d'accord qu'il faut regarder ça très attentivement. Vous me permettrez de dire que ça fait un mois que je suis là, mais toutes les causes que vous chérissez et que vous embrassez, je les ai embrassées depuis longtemps et je voudrais — je sais que ce n'est pas votre cas — qu'il me reste encore quatre ans pour pouvoir regarder toutes ces questions-là.

Là, vous dites qu'il y a eu, bon, une aide d'urgence. Je le répète, j'ai appelé ça, nommé ça une aide d'urgence. Si un jour vous êtes du côté du gouvernement, vous allez voir qu'aller chercher 1 million en deux heures, c'est un exploit, je vous le dis. Je ne suis pas une politicienne de très longue expérience, mais, quand je suis convaincue de quelque chose... J'ai dit : Là, les plaintes vont augmenter, les dénonciations vont augmenter, il faut dire présent. Et je n'ai jamais dit que c'était une aide pour leur permettre de survivre pour 10 ans, ce n'est pas le cas. C'était vraiment une aide d'urgence qui permet d'avoir des heures supplémentaires, d'avoir du personnel qui peut répondre un peu plus vite et puis qui est un équivalent temps plein sur deux mois, disons ça comme ça, pour un 20 000 $. Ça ne veut pas dire que je m'arrête là.

Et effectivement le forum dont vous parlez... Oui, il y en a eu, des forums. J'ai passé ma vie aussi dans des forums à toutes sortes de questions. Il ne faut pas non plus trop banaliser l'importance d'un forum — d'ailleurs, mon ministère est un peu découragé — organisé à six semaines d'avis, où on met ensemble tous les acteurs gouvernementaux, aussi ministériels pour dire : Qu'est-ce qu'on fait? Et juste de tenir un forum, ça sert à mobiliser les troupes parce qu'ils vont être là pour le forum et puis pour dire : O.K., qu'est-ce qu'on fait de bien? Qu'est-ce qu'on peut faire de mieux? Puis comment on peut regarder l'avenir? Alors, pour moi, c'est important, ce forum-là. Pas parce que je veux y passer un mois, puis il n'y a pas de consultations pendant six mois, pour pelleter par en avant, puis qu'on se revoie au mois d'avril, puis il n'y aura rien de fait. Il est très bientôt, ce forum, avant Noël. On va arriver la langue à terre, tout le monde, je le sais, mais au moins on se sera dit qu'on aura mis plusieurs acteurs gouvernementaux, acteurs du milieu, puis qu'on aura dit : Vu cet ouragan, mais en plus des besoins qui étaient déjà là, je le sais, qu'est-ce qu'on peut faire de plus, qu'est-ce qu'on peut faire de mieux? Pour moi, j'ose croire, en toute honnêteté et transparence, que ce forum aura vraiment, vraiment des retombées intéressantes.

Évidemment, les quatre points que vous touchez... bien, la ministre de la Condition féminine, évidemment, elle touche un peu à tout, mais elle n'est pas la ministre titulaire de tout, alors je suis la ministre qui essaie de convaincre tout le monde. Alors, éducation sexuelle, plus d'argent, les délais de prescription, la prostitution... Évidemment, nous avons passé des heures ensemble — c'est le fun, on se connaît de plus en plus — sur le projet de loi n° 151, qui est, je dirais, dans le secteur que j'occupe et que j'occupais. Alors, tout ça mis ensemble, ça permet de faire un grand tour d'horizon. Je ne vous promets pas de gagner toutes mes batailles avec tous mes collègues ministres, mais je vous promets, par exemple, que toutes ensemble, on va pouvoir garder ce sujet à l'agenda, garder ce sujet avec les besoins dans la discussion sociale, publique, gouvernementale et, j'oserais dire, parlementaire.

Alors, je vous remercie beaucoup de vos propos introductifs, et puis on aura l'occasion d'échanger sur plein de sujets.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la ministre. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. Mme la députée de Repentigny, vous avez la parole pour un maximum de cinq minutes.

Argumentation

Mme Lavallée : Merci beaucoup, M. le Président. Le premier bloc sera sur le cours d'éducation à la sexualité. Il y a un consensus au Québec, il faut remettre en place les cours d'éducation à la sexualité dans toutes les écoles primaires et secondaires du Québec. Or, malgré qu'à peu près tout le monde le demande, le ministre de l'Éducation souffle le chaud et le froid à savoir s'il va rendre le cours d'éducation à la sexualité obligatoire l'an prochain. Il a dit que c'est un souhait, mais il n'est pas catégorique dans son intention ou non de le rendre obligatoire. En ce moment, les écoles donnent le cours sur une base volontaire dans le cadre d'un projet pilote. Seulement 165 écoles participent au projet pilote sur les quelque 2400 écoles primaires et secondaires publiques du Québec. La ministre a déposé un plan et un projet de loi pour contrer les violences sexuelles dans les cégeps et les universités, et je la félicite pour son projet de loi, mais c'est un non-sens que l'on n'enseigne ni la sexualité, ni le consentement, ni aucune prévention en matière de violences à caractère sexuel dans les écoles secondaires, et je pense qu'elle est d'accord avec moi. Alors, je demande à la ministre de la Condition féminine de convaincre — c'est de ça, et je ne doute pas de sa capacité de persuasion — le ministre de l'Éducation de mettre en place les cours d'éducation à la sexualité dans toutes les écoles du Québec dès septembre 2018. Il faut le faire et, pour que ça marche, il faut bien le faire.

Le projet pilote du gouvernement a été mis en place depuis deux ans déjà, mais avec très peu de soutien pour les enseignants. C'est un sujet excessivement complexe à aborder pour nos enseignants, qui sont inquiets de se lancer dans cette matière avec si peu de ressources et d'appui du ministère. On comprend, je pense, le malaise des enseignants de se retrouver avec ces contenus à enseigner. Il y a moyen de bien faire les choses et de mieux encadrer les enseignants. Il doit y avoir des professionnels en soutien aux enseignants. Non seulement le cours d'éducation à la sexualité doit-il être mis en place dès l'automne prochain mur à mur, dans toutes les écoles du Québec, mais des ressources supplémentaires doivent être déployées, en commençant par faire une place aux sexologues dans nos écoles.

Dans l'éventualité où aucun sexologue n'est disponible, nous proposons qu'un intervenant compétent soit en charge de soutenir les enseignants dans le cadre du cours d'enseignement de la sexualité, comme par exemple une infirmière ou un intervenant oeuvrant au sein d'un organisme communautaire existant. Beaucoup de groupes communautaires ont développé des programmes pouvant être utilisés dans nos écoles, en autant, cependant, que les ressources, tant au niveau des effectifs et financières, le leur permettent. Selon l'étude PIXEL de l'Institut national de santé publique du Québec, deux jeunes adultes sur cinq n'utilisent pas le condom, même pour une aventure d'un soir. 20 % des jeunes affirmaient qu'il y a eu pénétration avant de mettre le condom. Les jeunes adultes ignorent des informations de base, et plusieurs ont des pratiques sexuelles risquées. Entre 2011 et 2015, les cas de gonorrhée ont plus que doublé et les cas de chlamydia ont augmenté de 23 %. Un jeune homme sur 10 et une femme sur trois ont déjà vécu un abus sexuel. Est-ce que la ministre va convaincre le ministre de l'Éducation d'instaurer dans toutes les écoles du Québec le cours d'éducation à la sexualité pour septembre prochain avec des ressources supplémentaires, des professionnels en soutien aux enseignants? Ne laissons pas Internet se charger de l'éducation sexuelle de nos jeunes.

Pour revenir au forum que la ministre veut instituer, la commission parlementaire qui a eu lieu en mars 2015, j'ai les verbatims ici, j'ai imprimé certains mémoires et je n'ai pas eu accès aux interventions qui ont lieu en juin 2015 sur, toujours, le phénomène des agressions sexuelles. Dans ces documents-là, ce que j'ai pu voir concernant les cours d'éducation sexuelle, on avait l'appui de Pour les droits des femmes, le Conseil du statut de la femme, la Fédération des femmes du Québec, la Fédération des maisons d'hébergement, qui parlait d'un manque de places dans leurs maisons aussi, les RQCALACS, qui parlaient des cours d'éducation à la sexualité, le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale, l'Intersyndicale des femmes, la Concertation des luttes contre l'exploitation sexuelle. Donc, tous ces groupes-là, déjà en 2015, et probablement plusieurs autres groupes qui sont venus dans les forums qui se sont promenés dans les régions du Québec, sont venus pour appuyer cette demande-là au niveau des cours d'éducation sexuelle.

Nous avons aussi, dans les groupes...

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la députée. Nous allons maintenant céder la parole à Mme la ministre.

• (10 h 30) •

Mme David : Merci beaucoup. C'est court, cinq minutes, c'est frustrant. On aura l'occasion d'en parler hors d'ondes, si vous voulez, parce que je trouve ça extrêmement important, moi, qui a failli être professeure de sexologie, figurez-vous, dans mon jeune temps. J'avais postulé pour être professeure au Département de sexologie, donc c'est quelque chose, ça aussi, qui m'intéresse. C'est plate dire ça parce que plus on dit : Ah! ça, j'ai fait ça, ça veut dire qu'on est moins jeune qu'on était, mais on a quand même une certaine expérience, hein, messieurs mesdames?

Et donc, là aussi, je vous dis ça, pas parce que je veux vous raconter toute ma vie, mais c'est pour vous dire comme je considère important, évidemment, de se pencher sur cette question de rapport à la sexualité, parce que, là, je voudrais qu'on élargisse un peu le champ desdits cours de sexualité, ou d'initiation, ou d'apprentissage. Oui, oui, les cours, oui, d'en parler plus, on s'est dit hier, et je le disais avec la présidente du Conseil du statut de la femme : Est-ce qu'on a un peu pris pour acquis que tout ça était réglé parce que, depuis la libération de la femme... on a dit ça longtemps, on l'entend moins, cette expression-là, mais la sexualité maintenant, c'est complètement un sujet ouvert, il n'y a plus de problème. On élève nos enfants en leur en parlant à tous les jours, comme si c'était si évident. Et je pense qu'on a peut-être une réflexion collective à se faire, de dire : Est-ce qu'on en a parlé tant que ça? Comme parents aussi, je parle, pas seulement comme éducateurs. On a tendance à mettre beaucoup, beaucoup sur l'école, mais je pense qu'il faut en mettre aussi partout, c'est-à-dire dans nos maisons, dans l'éducation de nos enfants, dans l'ensemble de la société aussi. C'est formidable, l'école, mais la vie est une école aussi, et partout ça devrait transparaître, cette notion d'importance, de respect, de consentement, et Dieu sait qu'on a besoin d'en parler de ce temps-ci.

Alors, effectivement, les cours, c'est un des outils en plus de l'éducation, mais encore faut-il que les adultes, pas seulement les professeurs dans les écoles mais l'ensemble de la société, partagent cet objectif de culture, de respect, de notions, notions... vous parlez de sexologues ou d'infirmières, bien, j'oserais dire, pour les plus petits, des notions anatomiques, des notions relationnelles, des notions psychologiques. C'est l'éducation des garçons par rapport aux filles. On a parlé de l'éducation genrée. Bien, alors, le petit garçon qui doit jouer dur dans la cour d'école, puis la petite fille qui est dans l'empathie... Et puis Dieu sait les femmes, qu'on est dans cette approche plus humaniste, peut-être des fois, des rapports hommes-femmes.

Alors, ce n'est pas seulement une question de cours d'initiation à la sexualité. Quand on parle des rapports de force dans la question de consentement sexuel, c'est... On a beaucoup, beaucoup parlé des rapports avec les études féministes, qui disent : Oui, mais c'est parce que chacun reste dans son approche genrée. Donc, des cours d'éducation à la sexualité, là, c'est large, c'est des cours des rapports hommes-femmes aussi, et donc ça a trait à la culture. Combien de fois on dit : Oui, mais dans telle ou telle culture, ça ne se passe pas de la même façon? Et Dieu sait que ça fait des débats sociaux autour de toutes sortes d'enjeux liés à ça.

Alors, oui, les cours, je pense, de sexualité reviennent dans le discours. Il y avait des projets pilotes. Il y en a beaucoup plus cette année, je pense que c'est passé de 15 à 165 écoles. Le ministre de l'Éducation, ne vous inquiétez pas, je lui en parle très souvent, et je pense qu'il est très, très sensible, ayant lui-même de jeunes enfants, très sensible à cette question-là, je pense qu'il y travaille sérieusement. Il y a une progression quand même importante.

Mais je voudrais quand même terminer sur un sujet qui est un peu encourageant et qu'on voudrait probablement, éventuellement, encourager plus, c'est le programme Empreinte des CALACS. Le programme Empreinte des CALACS, secondaire III, secondaire IV, ils sont très en demande depuis quelques semaines. J'ai été visiter moi-même... j'ai passé pas mal de temps à Trêve pour elles avec le RQCALACS et j'ai parlé beaucoup de ces programmes-là, j'ai regardé toutes les commissions scolaires qui ont ce programme Empreinte. Et voilà un des sujets dont on va discuter à ce forum-là. Est-ce qu'on peut aller plus loin dans ce domaine-là? Est-ce qu'on peut aider plus les CALACS avec ce programme-là? Je pense que la demande est là, le momentum, comme on dit, est là. Alors, j'espère pouvoir avoir l'occasion, à travers le forum — et j'oriente un peu vers ça — de discuter, entre autres, de cette question, de ce genre de programmes à intégrer dans nos écoles secondaires, et on en a discuté hier dans...

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de D'Arcy-McGee.

M. Birnbaum : Merci, M. le Président. Mme la ministre, collègues de Repentigny, de Marie-Victorin et de Fabre, en tant qu'homme, parlementaire, père, je me sens interpelé ce matin. Il me semble que c'est d'une évidence que les hommes du Québec, les décideurs du Québec ont une responsabilité accrue de faire partie de la solution, des délibérations, c'est normal. En ayant partagé notre forum, comme à la commission parlementaire de la culture et de l'éducation, je comprends que nous tous, on est préoccupés par ce débat et je comprends l'expertise et le dévouement de nos collègues des deux formations de l'opposition ainsi que ma collègue pour le sujet qui est devant nous aujourd'hui.

Je me permets d'être un petit peu surpris par la suggestion de Mme la députée de Repentigny que nous, on est en train de poser des diachylons sur le problème. Je crois qu'on peut et on va continuer de parler des solutions, des gestes assez concrets, pragmatiques et réalistes. Et j'aimerais aborder, dans un premier temps, les gestes qu'on a faits, qu'on propose de faire en tout ce qui a trait à la sensibilisation de la population pour aborder les questions de prévention et de l'accompagnement des victimes ensuite.

En ce qui a trait à la sensibilisation, ça commence avec des actions concertées depuis 2001, dont trois plans d'action, dont le dernier de 2016 qui va nous amener jusqu'en 2021. Et cette dernière stratégie définit l'agression sexuelle ainsi que l'exploitation sexuelle, et voilà les deux pôles de nos préoccupations les plus profondes. Mais des réalisations qui commencent à porter fruit déjà, on parle des investissements tôt, tôt en matière de lutte aux violences sexuelles pour la durée de la période de notre plan stratégique de quelque 200 millions de dollars, ce n'est pas rien : 44 millions pour les actions incluses dans la stratégie violences sexuelles, dont 26 millions de nouveaux crédits, 156 millions pour l'ensemble des mesures existantes qui se poursuivent. À titre d'exemple : financement de Centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, les CALACS; un autre 23 millions, à titre d'exemple, pour intervenir à l'égard des violences à caractère sexuel dans les milieux d'enseignement supérieur, dont le sujet du projet de loi n° 151 dont on parle; et, comme la ministre a dit, le million pour les organismes venant en aide aux victimes, un geste ponctuel, une autre fois, comme la ministre a dit, mais une somme que nous avons dégagée en urgence et in extremis de façon très vite.

Plein d'autres exemples qui relèvent du Secrétariat à la condition féminine : une vaste campagne gouvernementale abordant les violences sexuelles et la violence conjugale qui a été lancée; un appel aux projets, des projets très intéressants et prometteurs pour être réalisés, quelques exemples, et quelques-uns de ces groupes ont témoigné devant nous en commission parlementaire lors des audiences qui viennent de se compléter sur le projet de loi n° 151. Le projet, la campagne Sans oui, c'est non!, voilà un exemple concret qui cible l'éducation, la prévention pour faire comprendre aux jeunes, surtout aux jeunes gars, que c'est clair, c'est des zones qui ont l'air grises peuvent être décrites pour que la plupart des jeunes hommes, qui n'ont pas le goût de dépasser les limites, vont comprendre les limites. Ce n'est pas toujours évident pour un jeune gars, disons, de 18 ans. Il y a d'autres projets : GRIS-Montréal, GRIS-Québec, qui visent spécifiquement les violences sexuelles à l'endroit des communautés LGBT, voilà une préoccupation, plusieurs exemples au Y des femmes de Montréal. Et je crois qu'il faut sensibiliser, comme je dis, cibler la population, qui doit appuyer les dépenses accrues dans un tel domaine qui est très crucial, des jeunes femmes qui ont besoin de comprendre qu'il y a un appui pour elles et, comme je dis, les jeunes gars qui ont le goût, dans la plupart des cas, de comprendre les limites davantage.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Repentigny.

• (10 h 40) •

Mme Lavallée : Merci beaucoup, M. le Président. Devant la plus récente vague de dénonciations, la ministre a annoncé, avec sa collègue ministre déléguée à la Santé publique, 1 million de dollars et la tenue d'un forum en décembre prochain. On peut considérer l'injection du montant de 1 million de dollars comme une aide d'urgence. Les organismes ont maintenant besoin d'une aide à plus long terme. Il y a eu, dans les années récentes, un nombre important de consultations sur le sujet des violences sexuelles. Concernant la seule commission parlementaire du mois de mars 2015, de nombreux groupes ont été entendus, dont la Fédération des femmes du Québec, le RQCALACS, les Femmes autochtones du Québec, le Conseil québécois LGBT, l'Intersyndicale des femmes, et ainsi de suite. En juin et septembre de la même année, le Forum itinérant en matière d'agression sexuelle a aussi rencontré plusieurs groupes à Montréal, Rivière-du-Loup et Gatineau. Beaucoup de ce qui a été dit dans cette commission parlementaire va se redire en décembre 2017. Le gouvernement détient déjà le portrait de la situation et connaît les enjeux.

En septembre 2015, on a parlé du manque de financement récurrent pour les organismes ainsi que du manque d'effectifs pour répondre aux besoins excédentaires des listes d'attente. Actuellement, plusieurs groupes et organismes sont membres du Comité-conseil en matière d'agression sexuelle. Selon les informations dont je dispose, ce comité n'a pas été consulté depuis 2014. Ce comité a pourtant pour rôle de conseiller la ministre sur les stratégies et moyens d'action devant être priorisés afin de contrer la violence sexuelle. Je suggère à la ministre de réunir ce comité-conseil.

Les organismes ont, bien sûr, salué l'injection récente d'une somme de 1 million de dollars en aide d'urgence, mais force est de constater que ça ne répondra pas très longtemps aux besoins sur le terrain. Les organismes demandent une vision à long terme, du financement à la mission stable et récurrent.

Pourquoi un nouveau forum de discussion? Quels seront vos attentes et vos objectifs pour ce forum en décembre? Est-ce que ça n'aurait pas été plus simple, moins coûteux et plus efficace de réunir et de mobiliser le comité-conseil qui existe déjà? Plus de 50 organismes sont membres de ce comité-conseil. Qu'est-ce qui justifie d'organiser un forum, alors que la ministre a toutes les informations et ressources à portée de main? Finalement, peut-elle s'engager à aller chercher auprès de son collègue des Finances, pour le prochain budget, un financement stable, suffisant à la mission et récurrent pour les organismes communautaires dédiés au soutien et à l'accompagnement des victimes de violences à caractère sexuel?

Je veux rappeler que, dans le cadre de la commission parlementaire qui s'est tenue en mars 2015 et des forums qui ont eu lieu en 2015, au niveau du financement accru des organismes, ça a été demandé par le Conseil du statut de la femme, les RQCALACS, qui évaluaient, pour 2013‑2014, un manque d'environ 5 millions, selon ce qu'elles ont dit en commission parlementaire à ce moment-là. Il serait étonnant que le montant soit moindre en 2017. Il y a eu le Regroupement des intervenants en matière d'agression sexuelle, Pour les droits des femmes qui espéraient, en 2015, qu'il n'y ait pas de coupures budgétaires, la Concertation des luttes contre l'exploitation sexuelle qui parlait d'un manque de ressources et de manque de financement accru, la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes qui parlait de l'importance de dégager des budgets. Donc, en 2015, tous ces sujets-là étaient déjà traités, toutes ces demandes-là étaient déjà traitées.

Et, lorsqu'on parle d'un diachylon, c'est que la commission parlementaire 2015 fait suite à des dénonciations qui avaient eu lieu à l'automne 2014. Donc, on a consulté des gens et on va reconsulter des gens, et la crainte des organismes, c'est dire : Après le forum, il va arriver quoi? On l'a fait, cet exercice-là. Est-ce qu'on va changer la page 1 de notre mémoire qu'on a présenté en 2015 juste pour changer la date puis refaire les mêmes demandes? Ça ne sera pas différent. Donc, c'est mes attentes auprès de la ministre. J'aimerais qu'elle réponde à mes inquiétudes et les inquiétudes de plusieurs organismes terrain. Merci.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.

Mme David : Oui, écoutez, c'est toujours important, c'est le nerf de la guerre, l'argent, effectivement. Et l'argent... probablement qu'il y a 30 ans aussi on demandait plus d'argent, il y a 20 ans, il y a un an. Moi, je suis arrivée en fonction le mercredi, genre, 22 octobre ou... je ne sais plus les dates, là, parce que je vous avoue que, depuis ce temps-là, je suis moi-même dans cet ouragan social, si je peux dire, et donc l'affaire Weinstein ou, en tout cas, des... Cet ouragan commençait le vendredi matin, et le jeudi matin j'étais en conférence de presse pour annoncer 1 million, jeudi d'après. Ça, là, ça veut dire quatre jours ouvrables. Bien, à ce rythme-là, quatre jours ouvrables pour 1 million, si on multiplie, ça fait pas mal de millions.

Je ne vous dis pas... et je ne vous promets pas tout ça. Mais ce que je peux dire, par contre, c'est que, quand il y a eu l'autre ouragan qui a précédé, qui était plus dans les collèges et universités, qui ont mené aux journées de consultations, oui, il y a eu des consultations, encore des consultations, il n'y en avait jamais eu sur cette thématique-là pour les collèges et les universités, jamais, jamais. Alors, on a fait cinq journées extrêmement importantes pour l'avenir de nos collèges, de nos universités. C'est quelque chose qui n'avait jamais été fait. Vous dites que des forums, il y en a, il y en a, il y en a, puis on va arrêter de parler, puis on va agir, mais, dans les collèges et les universités, ça n'avait jamais été fait, premièrement.

Deuxièmement, quatre mois plus tard, ça donnait 23 millions de dollars. Puis on continue à réfléchir, puis on est en projet de loi, puis on va changer, tous ensemble, la société, puis on va la changer pour vrai parce que, des lois, qu'on le veuille ou pas, il y a quelque chose de structurant, quelque chose d'encadrant, puis là on va se pencher sur tous les aspects. Puis c'est important, chaque mot qu'on va décider dans ce projet de loi là puis avec quoi on va arriver. Je veux que vous soyez aussi fiers que moi, parce que, là, ce n'est pas une question de partis, c'est une question d'avenir de nos jeunes, de nos jeunes filles en particulier, mais de nos garçons aussi, autant victimes qu'agresseurs, si malheureusement ça se produit, autant pour les étudiants de l'immigration, des étudiants en besoins particuliers, handicapés, des étudiants internationaux, toutes les clientèles.

Alors, je pense que, quand je me mobilise et je mobilise les gens autour, si l'exemple des consultations pour les collèges et universités est un exemple sur lequel on peut se fier... puis mes cinq premiers jours en Condition féminine, je pense que je suis arrivée, de façon assez pragmatique, à donner des résultats très, très, très concrets. Alors, moi, les forums, pour ce que soit de la perte de temps, ça ne m'intéresse pas. Mais, quand vous dites vous-même, et là je vais vous prendre à vos propres mots : Allez voir votre collègue des Finances, vous allez voir, un jour, quand vous irez voir, peut-être un jour, un collègue des Finances, vous êtes mieux d'être équipée, puis vous êtes mieux d'avoir des données, puis êtes mieux d'avoir consulté votre monde, puis vous êtes mieux de savoir pourquoi, parce que vous allez avoir, évidemment, à vous justifier par rapport à d'innombrables demandes dans la société.

Celle-là, elle est superimportante, mais ça prend de la conviction. Puis, pour avoir de la conviction, quand j'arrive et je dis : Je suis allée rencontrer les CALACS, je suis allée à une maison, j'ai passé 2 h 30 min avec la fédération des maisons d'hébergement pour victimes de violence conjugale, je vous dis qu'on les voit, les besoins, mais il faut être convaincant, il faut être équipé des meilleures idées de tout le monde pour dire : Bien, ça, là, la facture, c'est tant. Mais, si j'arrive demain : Je veux plus d'argent, j'ai zéro crédibilité, même s'il y a eu beaucoup de forums. Quand c'est porté par quelqu'un, je vous dis que ça fait une bonne différence. Et j'ai l'intention de porter ces sujets-là comme j'ai toujours porté tous les autres sujets dans ma vie.

Alors, je suis d'accord avec vous, il faut qu'on soit très attentives et attentifs à la question du financement. Ce million était un début, et l'argent est déjà rendu. Ça aussi, vous verrez un jour que ce n'est pas évident de faire sortir l'argent rapidement du gouvernement. Il est sorti, ils ont chacun 20 000 $, 30 000 $, 40 000 $, 50 000 $, dépendant de la taille, etc., et ils peuvent au moins avoir ça pour engager, mettre des heures et puis répondre mieux à la demande pour ces semaines-ci.

Maintenant, allons et rendons-nous au forum. Ce forum, comme je vous dis, touche mes collègues de plusieurs ministères. Les questions que vous avez à me poser touchent, à chaque fois presque, un collègue différent. Bien, c'est une bonne idée qu'ils soient sensibilisés, eux autres aussi. Alors, un forum, ça sert aussi à ça, aux gens qui sont là, mais aux gens qui écoutent et aux gens qui participent, et que tous ensemble, on ait cette réflexion importante. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de D'Arcy-McGee.

• (10 h 50) •

M. Birnbaum : Merci, M. le Président. J'aimerais parler d'un deuxième axe qui suit de façon logique nos discussions et c'est-à-dire la prévention des violences sexuelles en milieu universitaire et collégial. Je tiens aussi à noter que, bon, les forums, des fois, je comprends, les gouvernements utilisent ça comme prétexte pour faire du surplace. Pour avoir assisté à un de ces cinq jours-là, je vous avoue, moi, je n'aurais pas voulu être responsable de dire à ces victimes : On a déjà assez parlé, ça va, on connaît votre histoire. Ça a été une journée que, j'admets, je trouvais pénible, difficile mais très nécessaire. Il faut comprendre de façon fondamentale et profonde les séquelles des incidents de violence sexuelle pour en agir.

Aussi, je me permets juste de mentionner un autre petit mot sur le 1 million de dollars. Pour avoir oeuvré la moitié de ma vie professionnelle dans le secteur communautaire, je sais que ces regroupements-là passent d'une petite subvention à une autre et optimisent cet argent pour être présents sur le terrain. Souvent, l'argent arrive après que notre projet proposé aurait dû être fini. Le fait que ça a été fait de façon ponctuelle, et on voit déjà des retombées sur le terrain, ce n'est pas rien, il faut prendre ça très au sérieux. Et je me permets de féliciter la ministre là-dessus. Il fallait de l'action très, très vite, et nous étions au rendez-vous.

Quand on parle de la prévention, c'est au centre de notre projet de loi n° 151, qui exige aux établissements d'enseignement supérieur d'adapter une politique ayant pour objet de prévenir et de contrer les violences à caractère sexuel. Ces audiences nous démontrent l'importance de la prévention, et on note que... et je vais en parler un petit peu, mais qu'on est sur la bonne voie. J'ai trouvé ça très encourageant. On est devant une situation où il y a plein de progrès à faire, mais il me semble que la vitesse de nos réponses commence à accélérer. De voir le consensus... Bon, chaque groupe avait sa propre approche dans nos audiences qui viennent de se terminer, mais de voir — et je me suis permis de faire l'observation — les organismes syndicaux, l'organisme qui représentait tous les cadres dans les universités et cégeps, qui se sont prononcés de façon sincère, et dévouée, et détaillée sur l'importance d'être à l'oeuvre, ce n'est pas rien. Ces organismes ont, en premier lieu, à défendre leurs membres. Là, ils acceptent... et, comme j'ai dit, c'est normal et légitime, mais en même temps ils acceptent que voilà un fardeau additionnel qu'on accepte d'imposer sur nos membres. Par définition, on est là pour gagner les meilleures conditions de travail, et tout ça, on est là pour faire leurs avocats, pour les appuyer. Là, ils acceptaient, ils comprenaient et ils comprenaient que, dans ces terrains-là, notre projet de loi était sur la bonne voie et surtout en ce qui a trait à la prévention.

Bon, il y a des éléments sérieux et imputables dans le projet de loi : que les rôles et les responsabilités de toutes les parties concernées soient énumérés et clarifiés, que les mesures de prévention et de sensibilisation visant à contrer la violence à caractère sexuel, elles incluent notamment des activités de formation pour les étudiantes et les étudiants. Et on s'est fait dire, et j'imagine qu'on va l'étudier de près, que ça soit étendu aux intervenants, même occasionnels, même les fournisseurs, peut-être, des établissements, parce que c'est l'affaire de tout le monde, que les mesures de sécurité — bon, voilà la prévention de premier ordre — qui visent à contrer la violence soient mises en place dans les infrastructures. Juste de s'assurer l'éclairage normal... Des fois, les gars ne le constatent pas que de marcher au stationnement, à l'arrêt d'autobus, c'est une aventure pour une jeune femme. Quelle réalité ridicule à constater que c'est une aventure de se rendre à son auto, à son autobus. Bon, le projet de loi va insister que les établissements s'adressent à cette responsabilité, que les services d'accueil, de soutien, de l'accompagnement des personnes ainsi que les délais applicables soient mis en vigueur. Voilà les mesures concrètes qui sont de mise. Le travail est déjà commencé. Chaque université a déjà fait des gestes, mais il y a de plus à faire, et on va être au rendez-vous.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Fournier : Merci, M. le Président. Donc, je salue mes deux collègues qui sont là aujourd'hui pour l'interpellation, la ministre de la Condition féminine, la porte-parole de la Coalition avenir Québec en matière de condition féminine aussi, et tous les autres députés et le personnel présents. C'est un sujet qui est tellement important, puis donc c'est intéressant qu'on puisse creuser davantage, plus que lors de la traditionnelle période des questions et même, pour poursuivre un peu sur la thématique qui nous a occupés cette semaine, là, avec l'étude, les consultations particulières sur le projet de loi n° 151.

Pour ma part aussi, depuis quelques mois, j'ai l'occasion de parcourir le Québec avec deux de mes collègues du Parti québécois. On est en train de faire une tournée qui s'appelle Solidarité en action, et donc on rencontre des groupes communautaires un peu partout sur notre territoire. Puis, quand la députée, justement, de Repentigny parlait du manque de financement des organismes, on le constate pour les organismes qui aident les victimes d'agression sexuelle, mais aussi pour l'ensemble des organismes communautaires. C'est quelque chose qui revient à chaque rencontre que j'ai avec eux. Il y a vraiment une dérive du financement des organismes communautaires vers le financement par projets. Puis ça, c'est problématique, parce qu'on ne fait pas... Les organismes, ils ont une mission, ils savent ce qu'il est mieux d'accomplir avec l'argent qu'on leur offre, et donc c'est important que le gouvernement puisse avoir cette vision-là de reconnaître, au fond, qu'il faut davantage axer le financement des organismes communautaires à leur mission. Donc, ça, c'est d'une part. Et donc c'est bien certain qu'avec les événements des dernières semaines, mais je dirais même des dernières années, le réseau, par exemple, des CALACS souffre d'un sous-financement, là, qui est particulièrement accru.

Donc, il y a eu le mouvement #agressionnondénoncée il y a quelque temps, maintenant on se retrouve, là, dans le fameux ouragan social avec le mouvement #moiaussi. Et là les statistiques sont vraiment effarantes, hein? Si on regarde dans certaines régions du Québec, si on regarde les Îles-de-la-Madeleine, la hausse des demandes se chiffre à 533 %. Il y a plusieurs chiffres comme ça qui sont astronomiques, là, vraiment. En termes d'augmentation des demandes, grosso modo, on parle de 251 % d'augmentation.

Et les organismes, oui, ça les a aidés, le 1 million, puis je salue la ministre pour son action rapide là-dessus. Mais, si je prends, par exemple, un organisme de chez nous, à Longueuil, qui est tout près de ma circonscription, mais qui aide, à long terme, les gens qui souffrent et les victimes d'agression sexuelle, qui leur procure un soutien psychosocial important, ils ont un manque à gagner de 400 000 $ par année — donc, je parle de l'organisme La Traversée à Saint-Lambert — et, avec le fonds d'urgence, ils ont pu avoir environ 27 000 $. Donc, oui, c'est un pas, c'est une avancée, mais il faut reconnaître, là, que le problème est beaucoup plus grand que ça. Il va falloir qu'il y ait des moyens appropriés, parce qu'avec ce contexte social on incite les victimes à dénoncer, on invite les victimes à aller chercher de l'aide, mais je nous invite à nous mettre dans la peau d'une victime qui prend son courage à deux mains, qui décroche le téléphone, qui va frapper à la porte d'un organisme communautaire et qui se fait répondre qu'il y a une liste d'attente de deux mois, de six mois, d'un an. Comment, comme société, on peut accepter que le délai de prise en charge des gens qui en ont besoin ne soit pas immédiat? Moi, ça me préoccupe vraiment énormément.

Puis on en fait, de la sensibilisation, puis tant mieux, il va y en avoir de plus en plus, des victimes qui vont aller chercher de l'aide, qui vont porter plainte. Alors, il faut reconnaître que ce phénomène-là, il est appelé à augmenter dans les années à venir parce que les récents mouvements de dénonciation nous ont bien montré que l'effet, il est, bien sûr, immédiat, mais que l'effet est encore plus grand quelques semaines, quelques mois après les mouvements. Donc, c'est vraiment important qu'on puisse augmenter, là, de façon importante, de façon significative le financement à la mission de ces organismes communautaires pour faire en sorte, là, qu'on n'ait plus de listes d'attente dans les organismes et qu'on aide les victimes automatiquement.

Mme la ministre, vous avez dit qu'il faut être convaincant auprès des gens des Finances lorsqu'on demande du financement, mais je pense que le contexte social est assez convaincant, je crois que les statistiques qui sont relevées par les organismes communautaires sont assez convaincantes aussi. Alors, il faut vraiment pouvoir prendre les moyens appropriés.

Puis là, lorsqu'on parle du forum, les groupes le disent, on va arriver aux mêmes conclusions. Je vous annonce tout de suite que les groupes vont dire, la première recommandation : Il faut augmenter de façon importante le financement à la mission des organismes communautaires. Alors, ça, c'est clair. Tu sais, est-ce que ça sert à gagner du temps? Le forum en lui-même, combien est-ce qu'il va coûter? Est-ce qu'il ne faudrait pas plutôt mettre l'argent directement chez les organismes qui en ont besoin? Alors, moi, c'est les questions que j'aimerais exprimer aujourd'hui à la ministre.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.

Mme David : Oui, alors, je vais reprendre tout de suite par la fin parce que ça m'interpelle, cette question-là, pas de forum, ce n'est pas nécessaire. Je vais vous donner deux, trois exemples de choses, là. Oui, l'argent, mais qu'est-ce que vous faites avec la prochaine question, madame, sur les délais, les délais de poursuite? Qu'est-ce que vous faites avec les questions autour du modèle de Philadelphie? C'est important de discuter de ça. Qu'est-ce que vous faites avec l'accompagnement en justice des gens? Ce n'est pas juste une question d'argent, c'est une question de contenu.

Qu'est-ce que vous faites des gens en milieu de travail, de Diane Lemieux, Commission de la construction, qui dit : Moi, là, il faut changer la culture, la mentalité? Il ne faut pas juste lui envoyer de l'argent. Il faut en discuter en société, de cette question-là. Qu'est-ce que vous faites du milieu culturel qui dit : Là, il faut s'organiser? Je veux bien qu'on s'organise, mais il faut les aider à s'organiser. Ils ne veulent pas juste de l'argent, ils veulent de l'expertise, ils veulent entendre des experts. Et les experts, ils vont être là, puis les différents ministères vont être là. Qu'est-ce que vous faites des normes du travail? Il faut en discuter. Les normes du travail sont-elles adéquates en rapport avec le harcèlement sexuel? Ce n'est pas de l'argent, ça, c'est des décisions politiques.

Alors, on veut bien qu'il y ait de l'argent, mais on veut bien que les policiers aient une écoute plus attentive, on veut que le système de justice soit beaucoup plus fluide, que les gens s'y retrouvent dans ce système de justice. Donc, il faut que le ministère de la Justice soit très interpelé. Pas besoin d'argent pour ça, besoin de discuter, besoin de sensibiliser. Il faut que la question des conditions de travail soit discutée.

• (11 heures) •

Alors, toutes ces questions-là, ce n'est pas de l'argent, c'est de la sensibilisation sociale. Ça n'exclut pas le besoin d'argent, mais ce n'est pas vrai qu'on peut se taire, puis pitcher de l'argent, puis c'est tout. Ce n'est pas vrai. Les organismes seraient les premiers... et j'ai parlé longuement avec eux, puis on ne parle pas seulement d'argent quand on se rencontre, on parle de contenu. On parle, par exemple... Je vais vous donner un exemple, fédération des maisons d'hébergement pour violence conjugale. Savez-vous de quoi on a beaucoup parlé, avec raison? C'est la réalité de Montréal, c'est que les femmes qui demandent de l'hébergement de secours pour violence conjugale, ce sont des immigrantes, et très souvent elles ne parlent pas ni français ni anglais. Oui, il faut de l'argent pour des traducteurs, mais encore faut-il que moi, comme ministre, je sois convaincue et convaincante dans le besoin de traduction. Pourquoi? Parce que je dis : On est en 2017, la réalité urbaine montréalaise et d'autres régions... J'étais au gala du Y des femmes à Québec pour les femmes itinérantes. J'étais la seule, d'ailleurs, de toute l'Assemblée nationale à être là. Bien, je vous dis que vous auriez vraiment trouvé que c'était important d'être là. C'était tellement touchant, tellement émouvant de voir... il y avait 450 personnes et il y avait des femmes qui étaient sorties de l'itinérance. Mais, quand on parle de ça, on parle vraiment de comment aider les femmes autochtones, les femmes de l'immigration qui souvent viennent d'autres cultures puis qui disent : Bien là, je pense que je vis de la violence conjugale et je dois partir de là. Alors, oui, ils font une oeuvre extraordinaire, les maisons d'hébergement. Elles ont des listes d'attente, elles aussi. Le Y... la Y, qu'il faut dire, WCA, W pour «women», refuse 900 personnes par année, 900 personnes par année.

Les bureaux comme La Traversée, qui est un bureau de consultation avec des psychologues, et tout ça... J'ai eu un bureau pendant 25 ans. Est-ce que j'ai eu des listes d'attente? Tout le temps, tout le temps, tout le temps. On se sent des fois un peu impuissants face aux listes d'attente. Mais, bon, ils trouvaient des fois, heureusement, des services ailleurs, on essayait de donner le maximum. Mais il faut aider tous ces regroupements-là. Les regroupements des CALACS, c'est la même chose.

Enlever les listes d'attente, en tout respect... C'est parce que c'est compliqué, la question des listes d'attente. Vous pouvez avoir une liste d'attente à un endroit, mais la personne peut avoir peut-être, de façon sage, fait sa demande à différents puis être pris à un endroit x ou un endroit y. Un peu comme les maisons d'hébergement disent : On n'a plus de place chez nous, mais il y a une centrale, qui est la ligne... il y a un central pour les violences conjugales, et là ils peuvent envoyer dans d'autres maisons d'hébergement. Alors, il faut un système d'accueil, d'accompagnement. Et, oui, il faut accompagner en termes financiers plus, c'est clair, on essaie de les aider le plus possible. On a mis quand même 200 millions dans la dernière stratégie, mon collègue en a parlé. Mais je pense que je suis obligée d'apporter des nuances à ce que vous dites parce que je ne voudrais pas qu'on sorte d'ici en disant : Ça ne vaut rien, un forum, tout ce qu'on veut, c'est un chèque et puis on ne parlera pas. Moi, quand on va entendre parler les policiers, parler d'une plus grande sensibilité, le modèle de Philadelphie, que ça soit la justice, je vais dire : Bravo! Là, on a fait une avancée de société importante.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de D'Arcy-McGee.

M. Birnbaum : Merci, M. le Président. Je me permets une allusion à notre performance économique et j'insiste que ce n'est pas gratuit. Avec tout respect, quand la députée de Marie-Victorin parle de ressources, qu'il en manque, qu'on puisse se comprendre que d'avoir créé un déficit de 7 milliards de dollars du gouvernement précédent et d'avoir remis le Québec sur les rails avec des surplus successifs maintenant pour une troisième année, est-ce qu'on peut se comprendre qu'on ne parle pas aux banquiers quand on parle de tout ça? Qu'on parle d'un phénomène qui est intimement, intimement attaché à ce qu'on discute aujourd'hui, s'il vous plaît. C'est une des raisons pour quoi je suis embarqué dans la vie politique, c'est pour avoir les ressources pour faire les choses pour être en mesure de rendre la justice sociale, l'accès aux services, l'équité à notre population en entier. Alors, ce n'est pas un exercice économique, puis après, bon, là on fait les bonnes choses comme bons citoyens, les deux sont liés. Alors, si on est pour parler de dégager des sommes, il faut en être conséquent. Et voilà la raison pour quoi les gestes économiques qui sont la signature de notre gouvernement prennent toute leur ampleur.

Je me permets d'offrir un deuxième défi aux formations de l'opposition. Quand on parle de deux vigies suite aux agressions qu'ils ont eues à l'Université de Laval, on parle de ces cinq journées, ces cinq forums aux universités, à part d'avoir vu mon collègue le député de Chambly à une de ces occasions, il me semble que je suis le seul député homme de notre Assemblée nationale à assister à de tels événements, qui sont assez importants, hein? Il me semble qu'à la prochaine fois je devrais me trouver avec d'autres collègues masculins.

Bon, je me permets de prendre le temps qu'il me reste pour parler de quelque chose qui est au centre de nos discussions. On parle de la prévention, de la formation, mais est-ce qu'on va faire le tout pour être au rendez-vous quand il s'agit de soutenir, d'accompagner des victimes lors de leur participation au processus judiciaire? Je me permets de parler surtout aux hommes, mais des femmes aussi, pour nous sensibiliser. De quoi on parle quand on parle de ça? De nous interpeler à imaginer — vous avez fait référence, Mme la députée de Marie-Victorin — le fardeau sur une jeune femme victime d'un acte de violence sexuelle, la peur, la douleur, la honte. Quel outrage d'avoir honte suite à un geste horrible commis par quelqu'un d'autre, la colère d'avoir été victimisée et le fardeau de vivre avec la suite, les étapes médicales, légales à franchir. Et qu'on se rappelle qu'on parle de 66 % de ces victimes, peut-être plus, qui ont moins que 18 ans, 84 % de ces jeunes qui connaissent leur agresseur, ce qui rend la suite de l'événement tellement douloureux, on parle de quelqu'un qu'on connaît. Alors, d'où vient notre grande responsabilité d'accompagnement, de notre devoir de rendre les étapes à franchir plus claires, sans obstacle et... pour assurer un suivi le moins invasif, le plus réconfortant que possible.

Bon, dans cette optique, notre plan stratégique vise plusieurs, plusieurs volets : l'importance d'adopter un programme de rencontre entre la procureure ou le procureur aux poursuites criminelles et pénales avec la victime — y a-t-il quelque chose de plus important? — de favoriser l'accès au télétémoignage pour protéger des jeunes peut-être en région ou dont ils connaissent l'agresseur, de témoigner par visioconférence, de produire des outils d'information qui vont contribuer à sensibiliser les intervenantes et les intervenants du système judiciaire aux mesures visant, justement, à faciliter ce témoignage tellement difficile. Le plan stratégique parle aussi de produire et diffuser des capsules d'information sur le processus judiciaire ainsi que sur le rôle et la procédure où le procureur aux poursuites criminelles et pénales, dans le cas de traitement d'un dossier, a à agir pour sensibiliser les jeunes aux grandes difficultés dans ces domaines-là. Bon, voilà les gestes concrets — il y en a plein d'autres — qui vont, j'espère, continuer à rendre ce processus pénible au moins un petit peu plus facile.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Repentigny.

• (11 h 10) •

Mme Lavallée : Merci, M. le Président. En mars 2016, le député de Borduas a déposé le projet de loi n° 596, qui vise à combler un trou dans la loi actuelle. Le projet de loi a pour objet de prévoir qu'une action en réparation d'un préjudice résultant d'une agression à caractère sexuel ne puisse se prescrire ou s'éteindre par le seul écoulement du temps. Malgré tous les appels lancés par ma formation depuis 18 mois, le gouvernement a toujours refusé de modifier le Code civil du Québec. Pour de nombreuses victimes, les délais de prescription actuels les empêchent carrément de tourner la page et de repartir à zéro. Une victime agressée en 2009 et qui a connaissance des faits n'a plus de recours civil contre son agresseur pour obtenir réparation. Le gouvernement doit régler cette inéquité dans la loi pour les victimes agressées sexuellement avant 2010. Les délais de prescription ont été abolis dans plusieurs autres provinces, et le Québec est, une fois de plus, à la traîne. Il est urgent d'envoyer un signal de soutien aux victimes en abolissant définitivement tout délai dans le système judiciaire québécois, comme c'est le cas en matière criminelle. Il n'est pas normal que toutes les victimes ne puissent se tourner vers les tribunaux. En éliminant une fois pour toutes cette barrière juridique qu'est le délai de prescription, bon nombre de victimes pourraient être incitées à dénoncer et obtenir justice. Une agression sexuelle est un traumatisme qui marquera à jamais la vie des victimes. Il est primordial de les encourager à dénoncer, et je suis certaine que la ministre est d'accord avec ça.

Je demande au gouvernement d'envoyer un message d'appui aux victimes d'agression sexuelle. Ces victimes d'agression sexuelle ont besoin d'accompagnement, de soutien psychologique et financier et du support de l'État. Les délais actuels sont injustes et représentent un frein à la dénonciation pour les victimes du passé. Il faut leur donner un coup de main, abolir les délais de prescription pour qu'elles puissent choisir librement de poursuivre ou non leurs agresseurs. Posons ce geste pour toutes les victimes du passé qui ont le courage de briser le silence.

Est-ce que la ministre reconnaît que le droit des femmes d'être indemnisées en cas d'agression sexuelle est bafoué actuellement? Est-ce que la ministre considère injuste que certaines femmes perdent leur droit à leur indemnisation à cause de la prescription? Est-ce que la ministre reconnaît qu'il peut être long et difficile pour une femme d'entreprendre des démarches pour faire reconnaître une agression sexuelle et obtenir réparation et que la question des délais de prescription n'a pas sa raison d'être? Le projet de loi de mon collègue de Borduas ne concerne que la modification d'un article dans le Code civil. Est-ce que la ministre pourrait envisager d'intégrer les articles du projet de loi n° 596 en amendant son projet de loi n° 151? Si la ministre ne peut le faire, pourrait-elle prendre l'engagement que le projet de loi sera appelé au plus tard au début de la prochaine session afin de le faire adopter et qu'enfin on règle une situation qui, jusqu'à maintenant, créait une inéquité envers certaines femmes? C'est un détail pour nous dans le cadre de l'étude détaillée d'un projet de loi, mais ça changerait la vie de combien de femmes si on intègre la modification au projet de loi n° 151? Faisons de la cause des femmes une priorité et adoptons ce projet de loi tout simple mais important pour la cause des femmes victimes d'agression sexuelle.

Comme il me reste du temps, je vais vous lire — c'est un projet de loi d'une page — l'article 1, c'est l'article qui vient modifier l'article 2926.1 du Code civil du Québec, et le premier paragraphe, c'est celui qui vient en aide aux victimes : «L'action en réparation d'un préjudice résultant d'une agression à caractère sexuel est imprescriptible.» Tout simple, rapide, mais qui pourrait définitivement régler le problème qui revient auprès de certains organismes qui interviennent auprès des femmes victimes d'agression sexuelle. Et le Conseil du statut de la femme en a d'ailleurs parlé hier et en a parlé dans le cadre de la commission parlementaire en mars 2015. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.

Mme David : Oui. La première réaction que j'ai, c'est : Si la vie était si simple que ça, on serait tellement bien, on se coucherait toujours tranquilles, on dormirait bien. Un mot veut dire beaucoup de choses, et c'est pour ça que je le dis pour notre projet de loi qui nous concerne en ce moment, où on parle de délais d'ailleurs, ce n'est pas un mot neutre, «imprescriptible». Et moi, je ne suis pas juriste. Vous, vous êtes notaire de formation et de pratique, alors, là-dessus, je vous envie un peu parce que vous avez quand même un bagage dans ce domaine-là. C'est un très, très bel exemple d'un voeu que l'on peut appeler et souhaiter, mais qui n'est certainement pas du ressort d'une ministre de la Condition féminine qui, là, peut aller plaider et discuter avec les gens du ministère de la Justice, ça, c'est clair. D'ailleurs, c'est votre collègue le député de Borduas qui a proposé ça et c'est, comme par hasard, le critique à la justice.

Alors, je sais bien que vous prenez des notes et vous écrirez que M. Jolin-Barrette — je ne sais pas si j'ai le droit de le nommer dans cas-ci, disons le député de Borduas — aille voir les gens qui sont au ministère de la Justice et ma collègue à la Justice, qui peut-être verra de quelque chose avec beaucoup plus de conséquences qu'un simple mot. Parce que, s'il y a des choses qu'on apprend en droit, je crois... je n'ai pas fait mon droit moi-même, bien que j'aie failli le faire, mais j'ai assez fréquenté d'avocats pour savoir que ça peut durer des heures, des heures, des heures, on le voit en commission parlementaire quand on fait des projets de loi, ça peut être des heures pour une virgule, un mot, un point, alors que dire d'un paragraphe et que dire d'une loi au complet? Donc, chaque mot compte, et je pense que c'est une des premières choses que les juristes apprennent dans leurs cours de droit. Donc, ce mot-là, «imprescriptible», il veut sûrement dire quelque chose. Tout ce que je peux vous dire, c'est que — et je n'irai pas très loin, je vous avertis, là-dessus parce que je ne parlerai pas de quelque chose qui n'est pas de ma compétence professionnelle — depuis 2013, le délai de prescription pour les poursuites civiles où l'on demande réparation pour une agression à caractère sexuel, pour de la violence subie pendant l'enfance ou de la violence conjugale est passé de trois ans à 30 ans. C'est quand même 10 fois plus comme délai.

Alors, il y a eu quand même des avancées. Ce que ça veut dire, c'est que la justice et le Code civil — puis là je vous dis, là, je fais attention aux mots, là — il y a des juristes qui réfléchissent à ces questions-là. Ce qu'on peut dire, c'est, étant donné... tout ce qui est dans le discours public et social en ce moment amène peut-être à une réflexion comme ça et qu'on peut demander aux juristes de se pencher sur ces questions-là. Dans le forum que j'organise, il y aura un volet juridique aussi. Alors, voilà ce genre de lieu où ça ne coûte pas un sou. Ce n'est pas de l'argent, là, que vous dites qu'il manque, c'est une mesure du Code civil qui, vous dites, un mot, un mot, vous l'avez beaucoup dit, changerait énormément.

Alors, j'imagine que ce genre de discussion a des lieux précis de gens très compétents où ce n'est pas parce que tout le monde est avocat que tout le monde s'entend sur la même façon de voir le Code civil, mais je pense que c'est un sujet que vous pourriez regarder. Et je ferai le message à ma collègue de la Justice que nous en avons parlé ce matin et que c'est un sujet qui revient ou est dans une certaine actualité par rapport à tout ce que nous vivons. Ça, je m'engage à lui dire.

Par ailleurs, et parce que, là, on touche à quelque chose de très, très, très actuel dans le projet de loi n° 151, on en a parlé, de délais. On en a parlé pour des délais de... et que je trouve aussi important, là, parce que, là, on ne parle pas du «après les faits». Puis là, si je voulais brûler du temps — puis là, en fait, il ne m'en reste pas beaucoup — j'aurais pu vous parler de toutes les patientes que j'ai eues et qui, oui, ont eu des traumatismes il y a bien, bien, bien des années, et donc vous n'avez pas à me convaincre que le traumatisme, il dort, là, puis tout à coup il ressort. Mais, quand on parle de délais, au moment où il y a un traumatisme de quelqu'un, une étudiante, par exemple, qui est prête et qui veut rencontrer quelqu'un, là, on est dans des délais extrêmement importants. Et c'est pour ça qu'on a parlé — il y a eu des suggestions de part et d'autre, là — des chiffres 5-5-45, par exemple, étant donné... cinq jours pour les mesures immédiates, cinq jours pour, après ça, regarder le suivi de la plainte puis, après ça, 45 jours pour la traiter. C'est un exemple que je donne parce que c'est facile à retenir. Mais pourquoi il a été question de délais? Dans le fond, c'est l'envers du miroir de ce que vous dites. Des fois, on garde ça très enfoui pendant très longtemps puis on veut que la société reconnaisse que ce n'est pas parce que c'est enfoui... puis je l'ai enseignée toute ma vie, la question de l'inconscient ou la question du refoulé...

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Fabre.

• (11 h 20) •

Mme Sauvé : Merci, M. le Président. Alors, d'entrée de jeu, je me sens très privilégiée d'être ici ce matin pour, bien sûr, une problématique qui me tient bien à coeur. Je veux saluer les collègues et je veux nommer mon grand respect pour la ministre qui est ici ce matin et aussi mon collègue de D'Arcy-McGee.

Vous savez, je vais parler d'un aspect très précis en termes de solutions concrètes, puisque c'est le sujet ce matin, pour les victimes de violence sexuelle. C'est un thème qu'on n'a pas abordé du tout, et c'est pourtant un engagement du gouvernement du Québec, c'est toute la nuance qu'on doit donner, l'aide et l'intervention qu'on doit adapter selon différents groupes de victimes sexuelles. Pourquoi? Pourquoi j'aborde ça? Parce que les victimes ne constituent pas un groupe homogène, et il faut adapter les solutions concrètes. La ministre vient de nommer, entre autres, en termes de démarches de dénonciation, à quel point il y a une nuance, une attention qui doit être donnée dans l'accompagnement, dans les délais. Il y a certains groupes qui nécessitent aussi une attention particulière.

Alors, tantôt, je reviendrai sur la notion du chèque et puis toujours l'aspect du financement, mais je n'entends pas beaucoup parler, de la part des oppositions ce matin, à toute cette nuance qui est nécessaire dans les solutions que l'on donne et que l'on met concrètement, des solutions musclées, comme vous le dites si bien, mais des solutions nuancées aussi dans le respect des personnes et dans le respect des groupes auxquels elles appartiennent. Alors, les solutions, elles sont présentes, elles sont dans la stratégie. Je vais juste être capable, en cinq minutes, de faire un bref survol parce qu'il y en a tellement. Alors, je vous invite à lire tout ça, mais je vais vous donner des exemples concrets. Parlons des personnes handicapées victimes de violence sexuelle, les autochtones, les personnes réfugiées, les personnes immigrantes, issues de minorités ethnoculturelles, les aînés, les personnes prostituées, les LGBT. Il faut ajuster les solutions aux différents groupes.

Alors donc, comment est-ce qu'on y arrive? Bien, tout d'abord, c'est important, première étape dans les solutions, il faut mieux connaître la réalité de ces groupes-là. Il y a des portraits qui sont nécessaires, hein? Ce n'est pas pour rien que, dans la stratégie, on retrouve, entre autres, le portrait par rapport à ce que vit la communauté des LGBT qui sont victimes de violence sexuelle. Donc, les portraits, fort important. Reconnaître l'expertise d'accompagnement en place. Je pense, entre autres, à l'action concrète de soutien au centre d'expertise Marie-Vincent, qui travaille avec les jeunes autochtones et avec leurs familles. Ça aussi, une action concrète modulée.

Et là je vais revenir un peu à ce qu'on a entendu par rapport aux organismes communautaires, puisqu'on parle d'accompagnement. Je suis toujours un peu... pour bien connaître le communautaire... Et je vais nous ramener, là, à l'histoire communautaire, à la politique gouvernementale de 2001. Oui, le financement, mais, oui, aussi la capacité des organismes communautaires qui, dans leur ADN, doivent travailler à la problématique qui est devant eux, s'adapter, développer des bonnes pratiques et être dans un enracinement dans la communauté. Ça, ça veut dire qu'on trouve des nouvelles solutions. Quand il y a des réalités qui émergent, quand il y a des nouveaux besoins qui prennent une ampleur, il faut être capables de se concerter et de travailler ensemble. Et ça, c'est l'identité communautaire que je connais, que j'apprécie et que je souhaiterais qui soit davantage nommée.

Moi, là, quand j'ai vécu, dans mon organisme, des délais par rapport aux démarches d'orientation, l'émergence de santé mentale chez les jeunes et la venue des jeunes immigrants, je me suis retournée de côté, j'ai regardé mes partenaires du milieu, puis j'ai été créative, et je n'ai pas attendu de demander un chèque. Et on a réussi à chaque fois parce qu'on était dans l'innovation et l'enracinement dans la communauté. C'est ce que j'aimerais davantage entendre.

Dans les solutions concrètes d'adaptation aux différents groupes, il y a l'aspect de la formation aussi qui est très important, les intervenants, entre autres, de première ligne de l'Office des personnes handicapées du Québec, au CAVAC également. Et il faut soutenir les nouvelles initiatives et, oui, des projets, regarder des nouvelles pratiques. Moi, je pense, entre autres, en termes d'information, à une belle initiative lavalloise qui s'appelle As-tu ton numéro? C'est une initiative de la Table jeunesse du Marigot. Ça donne accès, entre autres, aux organismes qui travaillent auprès des personnes qui vivent la violence sexuelle.

Alors, les expertises communautaires institutionnelles sont fortes. Il faut adapter les solutions. Elles sont présentes. Le gouvernement du Québec, avec sa stratégie, est très sensible, une stratégie très porteuse de solutions qui vont s'adapter pour chacun des groupes dans leur caractère unique, dans leurs réalités qui sont propres, et on a une ministre qui est très sensible à cela. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Merci, M. le Président. Porte-parole de la condition féminine depuis janvier dernier, certains dossiers revenant dans l'actualité ont attiré mon attention, et plus particulièrement le dossier de la prostitution juvénile, puis je suis contente d'apprendre que la ministre est interpelée par le sujet. Depuis le printemps dernier, j'ai rencontré beaucoup d'organismes et personnes, lu beaucoup de textes, livres, écouté beaucoup de documentaires sur le sujet, et j'ai été profondément troublée par ce que j'ai lu et entendu.

Quand on parle de violence à caractère sexuel, on parle aussi de prostitution juvénile. Le sujet revient plus particulièrement autour de l'organisation du Grand Prix. Malheureusement, le problème n'existe pas uniquement à cette période. Le sujet revient aussi lors de séries de fugues, lorsque des séries de fugues arrivent en centre jeunesse. Malheureusement, aussi, le problème de prostitution juvénile ne concerne pas seulement les filles provenant des centres jeunesse. Ce dossier devrait être une des priorités du gouvernement. S'il doit y avoir un forum et des consultations, c'est sur ce sujet-là. De jeunes filles sont recrutées dès l'âge de 14 ans à peine. Elles sont exploitées par un proxénète et peuvent lui rapporter une somme d'environ 200 000 $ par année. Le proxénète en a plus qu'une à sa charge.

À l'ONU, l'exploitation sexuelle est passée au deuxième rang dans le palmarès de la criminalité, après le trafic des stupéfiants. Ces jeunes femmes qui sortent sont souvent en état de choc post-traumatique. Alors que les peines que subissent les proxénètes ne sont pas assez lourdes, selon moi, ces jeunes filles, elles, sont sentencées à vie. Nous devons, comme parlementaires, nous sentir interpelés par cette problématique qui prend de l'ampleur. On ne peut penser que ce dossier-là se réglera tout seul, sans un intérêt marqué par le gouvernement.

Dans toutes mes rencontres, ce qui est ressorti presque tout le temps, c'est l'absence d'un portrait global à la grandeur du Québec sur le problème de la prostitution juvénile et de la traite. Dans vos priorités en matière d'exploitation sexuelle dans la stratégie, il est mentionné, à l'item 4 : «Puisque les connaissances [sont à parfaire à cet égard], des actions sont prévues visant à mieux connaître, notamment, l'ampleur de l'exploitation sexuelle, les facteurs de risque, le profil et le parcours des personnes exploitées, ainsi que les conséquences de la prostitution sur les filles et les femmes», et effectivement c'est important. Si le Québec est fou de ses enfants, ça ne devrait pas se limiter à la petite enfance, mais bien au-delà.

Comme vous êtes à la deuxième année du plan stratégique et qu'à la lumière de ce que j'ai entendu depuis plusieurs mois il est primordial et urgent d'avoir ce portrait qui nous permettrait de connaître l'ampleur du phénomène, est-ce que la ministre peut nous dire si un tel portrait est en cours d'exécution? Si oui, quand aurons-nous accès à ce portrait? Si non, est-ce que la ministre exigera que ce portrait soit effectué afin qu'au début de la prochaine session parlementaire nous ayons toute l'information requise et de pouvoir circonscrire ainsi nos priorités?

Ensuite, est-ce que la ministre est d'accord avec l'idée de convoquer une commission parlementaire non partisane sur ce sujet? Est-ce que la ministre serait ouverte à l'idée de proposer une stratégie pour contrer et lutter... la prostitution juvénile et l'exploitation sexuelle, que ce dossier soit traité de façon indépendante et que nous fassions de ce dossier une priorité?

D'ailleurs, dans la commission parlementaire 2015, dans le dossier de l'exploitation sexuelle, le Conseil du statut de la femme s'est positionné en faveur de ce dossier. Le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale, elles ont mentionné qu'elles avaient été consultées pour l'élaboration d'un plan d'action en matière d'exploitation sexuelle. La Concertation des luttes contre l'exploitation sexuelle attend le plan d'action de lutte contre l'exploitation sexuelle. Eux autres mentionnent qu'il est très difficile d'avoir des chiffres sur l'ampleur du phénomène. La prostitution est une industrie en expansion. Selon eux, il y aurait une inaction ou un manque de volonté du gouvernement.

Donc, déjà, dans les forums 2015, c'est aussi des sujets sur lesquels nous nous sommes penchés. Et, pour moi, c'est une de mes priorités. J'ai accordé énormément de temps depuis le printemps dernier sur ce sujet-là et je n'ai pas l'intention de baisser les bras concernant le dossier qui m'interpelle. Je vous remercie, madame.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.

Mme David : Oui, merci beaucoup. Alors, quel sujet de grande importance. Comme je vous ai dit, ça fait 40 ans que j'y suis sensibilisée, alors je vais juste essayer d'être capable de me limiter à cinq minutes. Parce que votre intérêt est réel, on le sent, on le sait, et je pense que je n'aurai pas à vous convaincre longtemps que le mien l'est aussi parce que j'en ai rencontré, des prostituées juvéniles, parce que je peux vous dire que tu ne deviens pas prostituée du jour au lendemain, parce que je peux vous dire qu'il y a des garçons prostitués, puis j'aimerais ça être sûre que vous êtes autant intéressée aux jeunes garçons mineurs qu'aux jeunes filles parce que du proxénétisme, ce n'est pas seulement chez des jeunes filles, c'est aussi chez des jeunes garçons, que, oui, il y a des histoires d'une lourdeur incroyable. Je vous amènerai en centre d'accueil, je vous amènerai en prison pour femmes, je vous amènerai dans ces lieux-là. Vous avez rencontré déjà beaucoup de monde, et on le sait que chaque cas... puis j'ai dû faire, je ne sais pas, moi, des dizaines, et des dizaines, et des dizaines d'évaluations de cas de parents qui avaient des enfants dans la prostitution ou des enfants eux-mêmes, et chaque cas est extraordinairement troublant et lourd. Et il y en a qui s'en sortent, oui, il y en a qui s'en sortent, puis il y en a qui s'en sortent moins, puis ça prend de l'aide, et puis ça prend des lieux sécuritaires pour eux parce que ce n'est pas évident d'avoir un proxénète au bout.

Puis vous dites : On n'a pas beaucoup de données là-dessus. C'est sûr qu'on n'en a pas beaucoup. Pensez-vous que les proxénètes vont s'afficher puis vont participer à des projets de recherche? Pas sûre. Alors, il faut utiliser des moyens vraiment astucieux et passer par les victimes, et les victimes n'osent pas trop parler. Ce n'est pas un milieu à l'eau de rose, là, c'est vraiment un milieu d'une grande dangerosité avec des immenses effets et conséquences sur ces jeunes qui deviennent adultes, très souvent enceintes très jeunes, avec des enfants de parents différents, de pères différents, et qui sont eux-mêmes dans ce cycle de la violence et du placement par la DPJ, et qui ont des enfants, et qui après, bon, pourront avoir des passés très, très lourds.

Je répète, j'étais à cette soirée pour aider la YWCA pour les... Vous savez qu'ils ont 60 femmes en hébergement à tous les soirs, et la plupart ont des passés qui ressemblent à ce que je viens de décrire, et ça peut aller jusqu'à l'itinérance, etc. Alors, oui, il faut faire de la recherche, oui, le Secrétariat à la condition féminine a lancé un appel d'offres, oui, il y a eu une recherche qui a été entamée...

• (11 h 30) •

Une voix : ...Université de Sherbrooke.

Mme David : ...et on me dit, là, que c'est à l'Université de Sherbrooke, je suis très contente, il y a différentes universités qui s'intéressent à cette question-là, et puis, oui, effectivement, il faut documenter. Il faut toujours documenter, la recherche sert à ça, et on appuie la recherche, il faut appuyer la recherche. Là, on ne partira pas dans la recherche, mais je vous dirai quand même qu'on a mis 180 millions de plus pour les fonds de recherche dans les cinq prochaines années, c'est très, très bien accueilli par les différents universités et collèges, puis il faut en faire de plus en plus, de la recherche. Alors, oui, je vous remercie de vous intéresser à ce sujet qui est un des, on pourrait dire, sous-sujets de toute cette question des agressions et des violences à caractère sexuel.

Quand vous me parlez d'Un Québec fou de ses enfants, c'était un collègue à moi, Camil Bouchard, il était professeur de psychologie lui aussi, il a écrit ce livre avant d'entrer en politique, et ce livre qui a fait vraiment époque et auquel on s'est référés longtemps parce qu'il disait des choses importantes sur les conséquences de bonnes ou de moins bonnes actions qu'on porte vis-à-vis nos enfants, et la question de la prostitution en est une.

Est-ce qu'il y a différents lieux où il faut en parler? Plus on en parle, plus c'est important, je vais être d'accord avec vous là-dessus. Moi, je ne me prononcerai pas sur un véhicule plutôt qu'un autre. Commission parlementaire, il y a plein d'initiatives qui se font avec le ministère de la Sécurité publique, il y a des initiatives avec le ministère de la Justice. Encore une fois, c'est un peu comme les délais de prescription, puis la ministre de la Justice... Oui, je peux sensibiliser les gens, mais, vous le savez, une commission parlementaire est relativement souveraine dans les sujets qu'elle veut traiter.

C'est un sujet fort important, je vous remercie de le porter. Parce que chacun, on peut décider... parce qu'il y en a tellement, de causes. Bon, pour une raison qui est la vôtre, et que je respecte, et que je salue, vous portez cette cause-là, j'en suis. Vous avez vu qu'on a beaucoup de causes qu'on pourrait porter toutes les deux sur plein d'enjeux. Alors, si la commission parlementaire veut s'y pencher, elle peut s'y pencher. On pourra voir avec les gens de la commission parlementaire, mais ils sont souverains dans, quand même, leurs décisions.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à la députée de Fabre.

Mme Sauvé : Merci, M. le Président. Alors, je veux remercier également la collègue de Repentigny pour sa préoccupation, sa sensibilité par rapport à ça, parce qu'effectivement, je dirais, on a parlé d'ouragan social, c'est un fléau social, et il faut continuer toujours, toujours d'y travailler, même s'il y a des initiatives gouvernementales excessivement importantes et beaucoup d'actions, aussi, multidisciplinaires, je dirais, qui sont sur le terrain. Je veux donc vous parler de tout ce qui se fait en matière... et ce qui se fera aussi, autant pour la prévention... D'ailleurs, la ministre dit ceci : Pour contrer les violences sexuelles mais aussi le problème de l'exploitation sexuelle, ça prend de la prévention. La prévention, prévention, il faut y être beaucoup. Mais il y a l'action, aussi, déterminante qui est celle où les acteurs principaux travaillent ensemble et sortent de leurs secteurs pour être dans une solution concertée.

Je veux parler aussi de l'aide à la sortie. Et ça, c'est très important aussi, parce qu'il y a l'aspect de la prévention, mais il y a la sortie de la prostitution. C'est très fragile, hein, toute cette démarche-là, que ce soit une jeune fille ou un jeune garçon qui souhaite sortir de cette réalité-là, il y a des rechutes, il y a une fragilité, ça prend un accompagnement. Et tantôt quand je parlerai des solutions concrètes qui font partie de la stratégie, on verra qu'il y a l'éventualité d'ajout de personnes-ressources. Alors, c'est important, ça, ces solutions concrètes là, dans l'accompagnement et l'intervention, entre autres aussi pour la sortie de la prostitution et, évidemment, la lutte au proxénétisme.

Ça a été mentionné plus tôt, au Canada — c'est épouvantable quand on regarde ça, hein, la statistique — la moyenne d'âge d'entrée dans la prostitution se situe entre 14 et 15 ans. C'est vraiment épouvantable. Et c'est présent partout au Québec, c'est présent dans toutes les régions, divers contextes, des contextes insoupçonnés. Et je vous en parlerai d'un, contexte, tantôt, mais il ne faut pas sous-estimer l'ampleur de ce phénomène-là et les lieux et places où il y a une émergence. Comment on arrive à contrer ça, prévenir, soutenir? Bien, évidemment, par les solutions concrètes, puis elles sont nombreuses. Mais c'est important de les nommer, ces solutions concrètes là qui sont au coeur de la stratégie gouvernementale parce qu'on y voit, là, l'aspect multiacteur.

Alors, il y a un programme de prévention, entre autres, et d'intervention qui va être mis en place et qui va soutenir les partenariats locaux, fort important, des outils, des activités, des offres de formation, l'intervention policière intensifiée, une concertation nouvelle de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants sur Internet, du DPCP, qui va voir le jour, un projet pilote pour avoir des personnes-ressources pour la sortie de la prostitution, comme je l'ai nommé, une nouvelle coordination de la lutte contre la traite des personnes et des réseaux, une équipe policière intégrée de lutte contre l'exploitation sexuelle, un guide d'enquête, une formation aux procureurs, la production et diffusion d'un répertoire de ressources communautaires, mieux connaître ce qui se fait et qui n'est pas suffisamment connu, alors, il y a aussi un projet pilote avec les intervenants du CAVAC au sein du Service des enquêtes spécialisées du Service de police de la ville de Montréal, bref, une multitude de solutions très terrain, très concrètes, des pratiques gagnantes. Il faut continuer l'effort, mais il y a des idées excessivement importantes, et il faudra toujours, toujours y travailler.

Alors, je veux vous parler, et j'ai peu de temps... Moi, je peux vous dire que, dans mon expérience de vie précédente, j'ai eu à gérer une situation de crise où, dans les propres murs de mon organisme, j'ai eu un jeune homme qui est arrivé, qui était en activité et qui se préparait à faire du recrutement de jeunes filles. J'ai eu à vivre ça et, je peux vous dire, j'en parle encore aujourd'hui avec beaucoup d'émotion parce que ça a été une gestion de crise. Et on ne s'est pas demandé qui fait quoi, et tout ça, on a travaillé ensemble avec le centre jeunesse, avec la police de Laval, avec les organismes communautaires qui avaient l'expertise. On a travaillé à la prise en charge du jeune homme, et on a travaillé à l'accompagnement des jeunes filles, et on a réussi à résorber la situation, mais ça a été un travail instantané de concertation.

Alors, oui, il y a des solutions, mais, encore une fois, ne minimisons pas le travail réel qui se fait déjà sur le terrain dans la prévention et l'accompagnement. Le gouvernement du Québec est là dans cette sensibilité-là à reconnaître, et sa stratégie inclut un volet unique pour lutter contre l'exploitation sexuelle. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à la députée de Marie-Victorin.

Mme Fournier : Merci, M. le Président. Tantôt, dans sa réponse, la ministre de la Condition féminine a abordé la question de la violence conjugale, qui était justement un sujet que je souhaitais aborder plus en profondeur aujourd'hui. On a parlé des maisons d'hébergement pour femmes, et j'ai eu l'occasion, il y a quelques semaines, de pouvoir rencontrer plusieurs de leurs représentantes ici même, à l'Assemblée nationale, dans le cadre d'un point de presse que j'ai donné avec mon collègue Alexandre Cloutier, qui est d'ailleurs le porte-parole des hommes alliés, donc le manifeste des hommes contre la violence faite aux femmes, que j'invite d'ailleurs tous les hommes présents dans la salle à signer. Donc, les maisons d'hébergement pour femmes s'inquiétaient alors du renouvellement du plan d'action en matière de violence conjugale, plan d'action qui avait été amené par ma collègue députée de Taschereau en 2012 lorsque nous étions au gouvernement, donc le plan d'action 2012‑2017, qui vient à échéance le 6 décembre prochain, et donc les groupes se demandaient ce qui arrivait avec ça. Par la suite, à la période de questions, la ministre m'avait répondu qu'ils allaient s'en occuper, que les groupes allaient être rencontrés, d'ailleurs, ce que je souligne, parce que je sais que les maisons d'hébergement pour femmes ont effectivement été consultées récemment, donc, ça, c'est un bon pas, c'est une bonne chose. Mais où en est-on? Est-ce qu'on va pouvoir avoir le plan d'action rapidement?

Parce qu'il faut se rappeler que le plan d'action 2012‑2017 comportait trois axes : un axe de prévention, un axe de dépistage et un axe d'intervention. Il y avait aussi une campagne, donc, de sensibilisation qui était prévue dans le plan d'action, mais qui n'a pas été réalisée par le présent gouvernement lorsqu'il est arrivé au pouvoir. Donc, je me demande est-ce que cet aspect-là va être inclus dans le nouveau plan d'action. Et j'espère de tout coeur, donc, qu'une campagne de sensibilisation importante soit déployée, parce que c'est encore un fléau qui touche énormément de femmes. On dit qu'il y a une femme sur quatre qui va être victime de violence conjugale dans sa vie, alors ça rappelle l'importance de cet enjeu-là.

Alors, qu'en est-il maintenant? J'aimerais entendre la ministre sur la question. Et quels moyens aussi seront accordés à cette politique — parce que, on l'a dit, l'argent, c'est bien sûr le nerf de la guerre — puis sur le plan d'action, aussi, en matière de violence conjugale? Je sais qu'aux dernières études des crédits — la ministre de la Condition féminine ne portait pas encore ce chapeau, et moi non plus, je n'étais pas encore porte-parole en condition féminine — la députée d'Anjou—Louis-Riel, qui est maintenant la ministre de l'Habitation, s'était engagée à ce qu'à chaque fois qu'il y ait un plan d'action qui est coordonné par le Secrétariat à la condition féminine, bien, que le ministère puisse rendre publiques les fiches de suivi des ministères, là, afin que tous puissent obtenir l'information. Mais on se rend compte qu'en date aujourd'hui les fiches, donc, de suivi ne sont toujours pas disponibles, donc qu'est-ce que la ministre entend faire là-dessus? Merci.

Conclusions

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la députée. Maintenant, nous en sommes rendus aux dernières interventions. Mme la ministre, vous avez la parole pour 10 minutes.

• (11 h 40) •

Mme David : 10 minutes?

Le Président (M. Bourgeois) : Oui.

Mme Hélène David

Mme David : Mais c'est les remarques finales, là, je ne réponds pas à madame, c'est ça? Ah! excusez. Mais je vais lui répondre, c'est un sujet trop important que je vais donc inclure dans ma clôture. Parce que, excusez, j'étais dans l'idée qu'on continuait nos échanges. Le temps passe vite, mais je trouve que c'est un sujet extrêmement important.

Ce matin même, d'ailleurs, a eu lieu le déjeuner pour les hommes. On a émis un beau tweet là-dessus. J'étais avec Mme Monastesse lundi après-midi dans une maison d'hébergement. C'est là que j'ai passé 2 h 30 min avec elle, et la directrice de la maison, et d'autres personnes, pour vraiment, vraiment discuter de tous les enjeux de violence conjugale, et il y en a beaucoup, et j'ai eu l'occasion de le dire un peu précédemment, les nouveaux enjeux de violence conjugale, les nouveaux enjeux.

Et, puisque vous parlez de stratégie, effectivement elle se termine bientôt. Et j'étais allée les rencontrer quand ils sont venus ici, et c'est sûr qu'on est déjà au travail pour la prochaine stratégie et que, me connaissant moi-même, là, je me parle à moi, et je n'ai pas l'intention de rester inactive sur... mettre les deux mains à la pâte moi-même dans cette nouvelle stratégie, parce qu'il n'y a rien de plus important pour moi que d'entendre moi-même les gens et d'aller sur place, d'aller sur le terrain. Et donc on va très rapidement se mettre au travail pour la nouvelle stratégie pour contrer les violences conjugales.

Ces violences-là peuvent avoir changé de nature, peuvent avoir changé de culture, j'oserais dire, peuvent avoir changé dans les formes, mais, sur le fond, il reste qu'il y a un problème sérieux encore de violence conjugale. Et, comme j'ai dit, cette violence ne vient pas seule, il y a beaucoup de victimes collatérales, dont les enfants, évidemment, et qui sont dans les refuges avec leurs mères. Et j'ai visité des chambres, là, il y avait une chambre avec une dame et cinq enfants. Alors, imaginez le lit est là, il y a trois autres lits là, puis il y a deux autres lits dans une autre petite pièce, un tout petit évier, et c'est son nouveau lieu de vie. Mais probablement que, pour cette personne-là, évidemment, on veut que ça ne soit qu'une transition, que ça ne dure pas trop longtemps, mais il y a un accompagnement extraordinaire qui se fait. Moi, je salue les femmes qui travaillent dans ces centres-là jour après jour, parce qu'il n'y a pas de petite situation, il n'y a pas de situation banale, parce que ce n'est vraiment pas un caprice d'aller dans un centre d'hébergement et ce n'est pas un caprice d'aller dans un YWCA, ce n'est pas un caprice d'être prostituée. Tous les sujets qu'on touche sont des sujets très importants pour notre société.

On parle beaucoup de la fierté de nos actions dans toutes sortes de matières au Québec, l'innovation, la recherche, l'éducation, on a parlé beaucoup d'enseignement supérieur, on parle de l'éducation des jeunes, mais ici on est ici, tous et toutes, en politique pour dire qu'est-ce qu'on peut faire de plus, qu'est-ce qu'on peut faire de mieux. On ne peut pas seulement dire : On est bons, il faut qu'on dise qu'on est ici pour rendre des services au public. Je pense qu'on est tous et toutes ici pour ça. Les façons peuvent différer, mais on a tous la même motivation.

Et certainement qu'ici ce qui nous réunit ce matin, ce sont les violences à caractère sexuel sous toutes leurs formes. On a terminé avec les violences conjugales, on est allés par le proxénétisme, les jeunes filles et jeunes garçons dans la prostitution, on a parlé, évidemment, des violences dans les collèges, dans les universités, mais des dénonciations en milieu de travail, des campagnes actuelles, donc, des mesures en sécurité publique, des mesures en justice, des mesures dans le milieu de travail — parce que ça, on n'en parle peut-être pas assez, quoique là, il y a des dénonciations qui en parlent beaucoup, mais il faut penser au milieu de travail — et on a parlé d'éducation sexuelle. Et je pense que c'est un ensemble qui est très, très important, ce n'est pas seulement une mesure. Alors, oui, il faut supporter ces mesures-là, puis on les supporte par... je ne veux pas revenir sur des chiffres, là, mais tout ce qu'on a mis sur les stratégies d'intervention en matière d'agression sexuelle, sur les projets de recherche, sur le PSOC, pour soutenir les maisons d'hébergement, le soutien à la mission, le soutien aux projets aussi. Mais le fait que nous parlions de l'ensemble de ces sujets-là, ça veut dire que, peut-être, peut-être, tous ensemble, on va faire vivre un peu cet énorme dossier de la condition féminine.

Vous n'étiez pas là, moi non plus, ça ne fait donc pas très longtemps... ni l'une ni l'autre, mais je pourrais dire, dans ce qui me concerne, que ça fait plus longtemps que vous, de toute évidence, ne serait que les générations différentes... C'est un sujet qui m'habite au plus haut point, et je m'aperçois de l'immense privilège mais responsabilité aussi qui est la mienne d'essayer de faire avancer tous les dossiers avec tous les collègues. Quelque part, c'est très stimulant, mais il faut qu'on en parle tous ensemble pour que tous les collègues, vos collègues, mes collègues, priorisent ces dossiers-là. Parce qu'il y a beaucoup de dossiers à prioriser dans la vie, mais ceux-là, ce sont des dossiers, comme l'éducation, des dossiers de base qui font en sorte qu'on veut que nos jeunes ne passent pas par une enfance et une adolescence qui vont faire en sorte que leur vie va être hypothéquée pour le restant de leurs jours.

• (11 h 50) •

Il y a eu des années où on parlait beaucoup plus d'inceste. On n'a pas prononcé le mot une seule fois aujourd'hui. Est-ce un signe des temps? Est-ce parce qu'il y a eu énormément de travail de fait du côté de l'inceste, dont on ne parlait pas avant, mais pas du tout? Les questions de violences à caractère sexuel, ça, en milieu de travail, c'est tellement plus nouveau qu'avant qu'on en parle officiellement les normes du travail ne prévoient pas une ligne spéciale pour les violences, le harcèlement sexuel. C'est le harcèlement psychologique qui couvre tout ça. Je le sais parce que, quand j'étais dans le milieu universitaire, les gens me disaient, dans les bureaux de prévention : Il faudrait qu'il y ait une séparation du harcèlement psychologique, du harcèlement sexuel, ça ne se traite pas de la même façon. Vous avez vu le reportage hier à Radio-Canada, ils sont traités sous le couvert du harcèlement psychologique. Est-ce que c'est la bonne façon? Est-ce qu'il faut réfléchir à ça? Alors, voilà une bonne question pour une ministre du Travail, et je sais qu'elle se la pose et qu'elle est très sensible. Donc, voilà des sujets qui n'étaient pas très, très populaires avant et qui, là... avec cet ouragan social, on le répète, les femmes se mettent à parler. Et, comme j'ai dit hier, la peur a peut-être changé de côté un petit peu et que ceux qui, tout comme l'inceste, je pense, où il y avait une sorte d'invulnérabilité, d'impunité... il ne se passera jamais rien, je ne serai jamais découvert, bien, je pense que, là, il va y avoir un changement de culture profond par rapport à des gens au pouvoir, peut-être plus masculins à date, c'est pas mal des exemples plus masculins, que ça soit envers des hommes ou des femmes, d'ailleurs, où ils vont se sentir un peu moins invulnérables dans l'exercice de leur pouvoir, parce qu'il y a souvent un lien entre pouvoir et violences à caractère sexuel, malheureusement.

Alors moi, je tiens à vous remercier de vous intéresser à ça. J'oserais dire : Laissez-moi pas tomber dans les prochains mois. Je pense qu'il faut que tous ensemble, on continue, mes collègues qui sont là aussi et qui s'intéressent à ça. Ça prend un village pour élever un enfant. Ça prend une société pour changer des pratiques et pour accepter, tel que mon collègue le disait, qu'il y a des réalités difficiles, il y a des réalités qu'on ne veut pas voir et que c'est tellement plus facile de ne pas penser à la prostitution juvénile, à la violence conjugale, à l'inceste, à toutes ces violences, petites, moyennes et grandes, qui n'ont d'adjectif petit, moyen ou grand que dans notre tête à nous, pragmatique. Mais, dans la tête d'une femme, d'un enfant qui vit ça, ça peut être un immense traumatisme pour ce qui, nous, pourrait bêtement être catégorisé de petite violence, donc il n'y a pas de petite violence.

Et je pense qu'on doit absolument avoir en tête que ce qu'on fait aujourd'hui, ce qu'on fait depuis quelques semaines, ce que vous faites même depuis plusieurs mois... moi, j'étais dans d'autres dossiers, mais je n'en pensais pas moins sur l'importance de ces sujets-là, mais il faut qu'on continue à travailler tous et toutes ensemble. Alors, je vous remercie de cette interpellation, parce que ça permet de mettre ça dans l'agenda, je dirais, politique — c'est plate à dire, mais c'est ça — l'agenda politique des priorités de toute l'Assemblée nationale. On a voté une motion ensemble, je me suis engagée à donner suite à cette motion. Le forum est dans la suite de cette motion. Ce forum est même dans la suite de la stratégie pour contrer les violences à caractère sexuel, c'est même la motion, ou l'article, ou l'action n° 55. Et donc je pense qu'on va... avec ça, tous ensemble, j'ose croire qu'on va arriver à quelque chose de très, très intéressant.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la ministre. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée de Repentigny, également pour une période de 10 minutes.

Mme Lise Lavallée

Mme Lavallée : Merci, M. le Président. Je reviendrai avec les quatre propositions que j'ai annoncées dès le début de l'interpellation. Donc, l'importance pour moi d'implanter des cours d'éducation à la sexualité dans toutes les écoles dès le début de la rentrée scolaire 2018, pourquoi? Parce que l'éducation sexuelle, c'est la base de tout. C'est notre travail en amont qui va faire peut-être qu'un jour on va parler moins de violence conjugale, moins d'agression sexuelle et moins de prostitution juvénile. Quand on parle de cours d'éducation sexuelle, ce qui devrait être inclus dans le cursus de ces cours-là, c'est de traiter des sujets comme les relations saines, la pornographie versus la sexualité dite normale, l'importance de comprendre ce que veut dire un non, le respect, la prostitution et les formes de recrutement, la pédophilie, l'inceste et tout autre sujet important. Et je rappellerai que 80 % des femmes prostituées ont été abusées durant leur enfance. C'est un point qui est commun. Elles ont été victimes d'inceste, de viol, d'agression sexuelle par un proche, un ami, un membre de la famille. Donc, cette agression-là dans leur parcours, au tout jeune âge, a changé leur façon de voir leur rapport à leur corps. Et c'est pour ça que c'est important d'intervenir très jeune sur des sujets aussi percutants.

Je reviens sur le dossier de la lutte aux violences sexuelles, et au fameux forum, et à l'investissement de 1 million. Oui, on ne critique pas et on salue cet investissement-là, puis je pense que les organismes étaient contents, mais, oui, depuis plusieurs années, il y a un problème de financement récurrent, et ça a été dit dans les commissions parlementaires en 2015. Votre équipe ministérielle le sait, ça, elles étaient là dans les forums. Et ma crainte à moi, c'est qu'on leur fasse répéter la même chose et qui serait une perte de temps, parce qu'elles sont déjà débordées. Parce que le 1 million que vous leur avez donné, ils éteignent des feux, et ce que ça a fait aussi, il faut se le rappeler, c'est que les femmes qui sont dans les listes d'attente ont eu peur que cet investissement-là que vous leur avez donné fasse en sorte que les nouveaux cas qui appellent dans ces centres-là soient prioritaires à celles qui étaient sur les listes d'attente. C'est ça que ça a créé, cette peur-là. Et naturellement qu'à chaque fois qu'on médiatise les agressions sexuelles, mais les femmes qui sont sur les listes d'attente, bien, ça ramène tout, ça rebrasse tout ce qu'elles ont vécu, et donc, pour eux autres, elles sont prioritaires. Donc, c'est toujours de faire attention à l'impact. On le fait de bonne foi, on veut que ça ait un succès, mais des fois ça crée, des fois, plus de problèmes qu'autre chose. Donc, moi, c'est ma peur, c'est qu'on refasse cet exercice-là, mais qu'on arrive encore au même résultat puis qu'on ne réponde pas aux organisations.

Concernant mettre fin au délai de prescription, oui, je suis consciente que la ministre de la Condition féminine ne peut pas régler les cours d'éducation sexuelle dans les écoles, ne peut pas régler le problème des délais de prescription, mais vous êtes à la défense des femmes, et je compte sur vous. Et je suis certaine que vous êtes capable de beaucoup de persuasion pour convaincre vos collègues de régler ça. Ce n'est quand même pas gros, mais ça peut faire toute la différence dans la vie des femmes. Donc, c'est un petit paragraphe qui change tout.

Et je veux finir avec le dossier de la prostitution juvénile, parce que, pour moi, j'ai mis énormément de temps tout au long de l'été, j'ai passé mon été sur ce sujet-là et je veux vraiment que le gouvernement prenne ce dossier-là à bras-le-corps. L'Organisation internationale du travail disait que la traite à des fins d'exploitation sexuelle rapportait, au Canada seulement, environ 400 millions de dollars US, donc c'est énormément d'argent. Dans le rapport qui a été fait par Mmes Sandrine Ricci, Lyne Kurtzman et Marie-Andrée Roy, La traite des femmes à des fins d'exploitation sexuelle, il y a énormément d'information. Ça a été fait en 2012, mais c'est un bijou. Et là-dedans on parle de ce que les filles, nos filles, subissent. Donc — je vais y arriver — on parle qu'on séquestre les jeunes filles, qu'on les roue de coups, on les agresse sexuellement, elles subissent des représailles. Les proxénètes les tatouent pour indiquer à qui elles appartiennent. C'est grave, ça. Et on les transforme physiquement : on leur fournit des prothèses mammaires, on exige qu'elles perdent du poids, la décoloration des cheveux, l'épilation, bronzage. C'est effrayant. On traite ces femmes-là de marchandise et de denrées périssables, parce que, quand elles sont trop vieilles, on passe à un autre appel ou, si elles sortent de la prostitution, ce n'est pas grave, les proxénètes ne courront pas après, ils vont en prendre une nouvelle. C'est des jeunes filles qui sont prises dans ces réseaux-là. Et, on parle de la traite des femmes, Patrice Carrier, de la section du SPVM, disait qu'on est la seule province à exporter nos filles vers le reste du Canada, parce qu'on ne les garde pas ici, elles sont mineures, elles ne veulent pas se faire prendre, donc le proxénète les amène ailleurs. Elles ne parlent pas l'anglais, on leur enlève leur argent, on les enferme dans des chambres, et là c'est un après l'autre, après l'autre, après l'autre. C'est grave.

Moi, pour moi, je veux vraiment que le gouvernement prenne ce dossier-là à bras-le-corps. Mme Dufour, qui est là, le souhaite ardemment. Je suis en train de lire sa bible. Je n'ai pas fini la lecture, c'est énorme. Mais je pense qu'il y a des femmes qui s'impliquent dans ce dossier-là. Mme Dufour n'est pas payée lorsqu'elle s'implique dans son organisation, et c'est parce qu'elle aime les femmes et parce que des organismes comme la CLES, comme le RQCALACS s'impliquent sur ces dossiers-là... Le Conseil du statut de la femme a fait un rapport extraordinaire sur la prostitution juvénile, et, pour moi, c'est un dossier que j'ai l'intention de défendre et de ne pas laisser tomber. J'ai présenté un mandat d'initiative, malheureusement on m'a dit non. J'ai présenté deux motions pour redemander une commission parlementaire, on m'a dit non. J'ai questionné le ministre à l'autre session, on m'a dit non. Mais je vais continuer malgré les non qu'on me dit parce que, pour moi, on doit sauver ces jeunes filles là qui sont prises dans ces réseaux-là, et c'est le défi que je me donne le temps que je vais avoir le dossier de la condition féminine.

Et je compte sur vous parce que je suis assurée, vous m'avez convaincue, que vous étiez touchée par ce dossier-là. Et je compte sur vous, et j'espère que ce forum-là ou cette commission parlementaire là aura lieu d'ici la fin de la présente législature. Je compte sur vous, et vous m'avez inspiré vraiment confiance durant l'interpellation. Je suis très contente d'avoir demandé cette interpellation-là parce que je pense que je considère que vous démontrez beaucoup de bonne foi. On va voir la suite des choses. Mais je vous remercie, je remercie les gens qui ont participé à ce travail-là. Et je compte aussi sur l'équipe ministérielle qui est derrière, qui font un travail, qui ont assisté à toutes ces commissions-là, ces forums, ces consultations dans les années passées. Mais je pense que, par moments, il faut passer à l'action. Il y a des choses dont on est sûrs que les gens veulent.

Et, lorsque vous avez parlé tout à l'heure des personnes handicapées, justement, en commission parlementaire, en 2015, il y a eu, bon, des gens qui ont représenté des femmes autochtones du Québec, il y a eu le Conseil québécois LGBT, il y a eu le Réseau d'action des femmes handicapées du Canada, le Centre de ressources et d'intervention pour hommes abusés sexuellement, il y a eu la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes. Moi, j'ai peur, par le nouvel exercice, qu'on redemande aux gens de redire les mêmes choses et qu'à ce moment-là elles craignent qu'on arrive au même résultat. C'est ma peur. Mais je fais confiance à la ministre, j'ose espérer qu'on va vraiment arriver avec des vraies actions après le forum que vous allez faire. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Bourgeois) : Merci, Mme la députée, et merci à l'ensemble des parlementaires pour la qualité des échanges, qui se sont faits dans un respect, j'oserais dire, exceptionnel.

Et, compte tenu de l'heure, je lève la séance de la commission ayant accompli son mandat, qui ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 heures)

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