(Onze heures quarante minutes)
Le Président (M. Picard) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je vous souhaite la
bienvenue et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission est réunie afin de procéder aux consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 134, Loi visant principalement à moderniser des règles
relatives au crédit à la consommation et à encadrer les contrats de
service de règlement de dettes, les contrats de crédit à coût élevé et les
programmes de fidélisation.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président : Mme Guilbault
(Louis-Hébert) est remplacée par M. Lamontagne (Johnson).
Le
Président (M. Picard) : Merci. Ce matin, nous débuterons par
les remarques préliminaires et nous entendrons ensuite l'Union des
consommateurs.
J'invite maintenant la... Oh! un instant. C'est
vrai, nous avons commencé en retard, donc j'aurais besoin d'un consentement
pour qu'on puisse terminer à 12 h 40. Consentement?
Des voix : Consentement.
Remarques préliminaires
Le Président (M. Picard) :
J'invite maintenant la ministre responsable de la Protection des consommateurs
et de l'Habitation à faire ses remarques préliminaires. Mme la ministre, vous
disposez de six minutes.
Mme Lise Thériault
Mme Thériault : Merci, M. le
Président. Donc, chers collègues membres de la commission, mesdames et messieurs représentant les organismes, tout
d'abord, permettez-moi de vous partager à quel point je suis fière de
reprendre les rênes de ce ministère, qui fut autrefois sous la gouverne de M.
Tardif et M. Rochefort, qui, à l'époque, étaient ministres de l'Habitation et
de la Protection du consommateur dans les années 1981 à 1985, sous le
gouvernement de M. René Lévesque.
Donc, en tant
que ministre responsable de la Protection des consommateurs et de
l'Habitation — et
première femme à occuper ce poste en
titre — je tiens
à vous mentionner que notre travail, M. le Président, est déjà amorcé. En
effet, j'ai rencontré, dès le
lendemain de ma nouvelle affectation, plusieurs organismes et collaborateurs,
dont l'Office de la protection du
consommateur, afin de prendre rapidement connaissance des enjeux et défis liés
à mes nouvelles fonctions. Avant de commencer,
j'aimerais aussi souligner le travail de ma collègue, la ministre de la
Justice, pour le travail colossal qu'elle a effectué au cours des dernières années en matière de protection du
consommateur, puisqu'elle était responsable de ce dossier.
Je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui, M.
le Président, pour lancer les consultations particulières sur le projet de loi n° 134, qui vise principalement
à moderniser les règles relatives au crédit à la consommation et à
encadrer les contrats de service de règlement de dettes, les contrats de crédit
à coût élevé et les programmes de fidélisation. Nous entendrons les
commentaires et les recommandations de différentes parties prenantes, qui
viendront enrichir notre réflexion pour la suite de la démarche législative. Je
suis convaincue que ces échanges que nous aurons ici seront constructifs et
porteurs de changement.
Avant
d'entrer dans le vif du sujet, je tiens à remercier à l'avance tous les
représentants des groupes qui feront valoir
leurs points de vue. Je salue également l'ensemble de mes collègues
parlementaires qui participeront aux discussions ainsi que les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui,
dont ma directrice de cabinet, Mme Marie-France Daoust, qui sera
également responsable des dossiers de la Protection du consommateur; les
membres de l'Office de la protection du consommateur,
la présidente, Mme Ginette Galarneau, la vice-présidente, Mme Marjorie
Théberge, et le directeur des affaires
juridiques, Me André Allard; ainsi que M. Marc Croteau, qui est le
sous-ministre en titre au MAMOT, ministère sous lequel,
administrativement, nous allons répondre de nos actions.
Nous le
savons tous, le marché de la consommation a connu de nombreuses transformations
au cours des dernières années. Plus
que jamais, avec les nouveaux produits financiers disponibles sur le marché,
les nouvelles technologies et les médias
sociaux, l'accès au crédit est facile, et les commerçants multiplient leurs
façons d'attirer l'attention des consommateurs.
Même s'il simplifie notre vie à plusieurs égards, ce contexte apporte aussi son
lot de défis et de nouvelles problématiques.
Certains consommateurs, et, en particulier, ceux qui sont plus vulnérables,
peuvent parfois se tourner vers des entreprises qui offrent des services de règlement de dettes ou
encore vers des commerçants qui proposent de petits prêts d'argent
assortis de taux d'intérêt élevés. Pensant éviter le surendettement, ils
s'engagent dans une voie qui, loin de la solution miracle qu'ils espéraient,
peut entraîner des grandes conséquences sur leur situation financière.
Bien que ces
véritables cas justifient à eux seuls la nécessité d'agir pour contrer les
pratiques d'entreprises qui exploitent
la vulnérabilité des plus démunis, ils font la démonstration qu'une mise à jour
de règles s'impose en matière de crédit.
Pour notre gouvernement, il est important d'agir dans le plus grand intérêt du
consommateur, et c'est ce qui motive notre
décision d'aller de l'avant avec ce projet de loi. Il s'agit de la première
étape de notre démarche de modernisation des règles de crédit à la consommation, par laquelle nous voulons établir
les meilleurs mécanismes de protection, prévenir le surendettement et
donner aux consommateurs tous les outils pour qu'ils soient mieux informés
quand vient le temps de contracter du crédit.
Ce projet de
loi cible une cinquantaine de mesures à adopter afin que cessent les pratiques
les plus préjudiciables pour les
consommateurs. D'abord, il propose de revoir les exigences imposées aux
entreprises de règlement de dettes et à celles qui offrent du crédit à
coût élevé. Il vise également à prévenir le surendettement, par exemple en
introduisant l'obligation pour un commerçant
d'évaluer la capacité du consommateur de rembourser le crédit demandé avant de
conclure un tel contrat. La question
d'augmenter le paiement minimum du solde des cartes de crédit fait aussi partie
des avenues proposées.
En
complément, nous visons l'objectif d'actualiser les règles relatives non
seulement au crédit variable, comme c'est
le cas, par exemple, pour un contrat de carte de crédit ou marge de crédit,
mais aussi à la publicité et aux promotions de type sans frais ni intérêt. Ainsi, le consommateur disposerait d'une
information plus claire lui permettant de prendre des décisions plus
éclairées quand vient le temps de contracter du crédit.
M. le Président, notre gouvernement est
conscient que les imprévus de la vie peuvent avoir des impacts sur la situation financière des consommateurs. C'est
pourquoi il propose d'en prendre davantage compte en ouvrant la
possibilité de mettre fin plus facilement à
une entente de paiement préautorisé ou de faire cesser, pour le futur, la
solidarité entre un autre
consommateur, par exemple le codétenteur d'une carte de crédit émise au nom du
conjoint, lors d'une séparation, par exemple.
En ce qui
concerne les programmes de fidélisation, le sujet qui a retenu notre attention
à pareille date l'an dernier, nous proposons des ajustements afin qu'il
soit interdit d'imposer une date d'expiration ou un délai pour utiliser des unités d'échange, tels des points accumulés.
Enfin, parmi ces mesures les plus marquantes et les plus concrètes, le
projet de loi prévoit d'améliorer les dispositions en matière de contrat conclu
à distance, par exemple l'annulation d'un achat effectué par Internet ou par
téléphone, et les règles en matière de recouvrement de certaines créances.
M. le
Président, voilà ce qui constitue les principales mesures du projet de loi
n° 134. Permettez-moi de préciser qu'elles résultent de
consultations qui ont été menées par l'Office de la protection du consommateur
auprès d'une vingtaine d'organisations, et
qui ont permis de définir nos
priorités d'action, et, par le fait même, de proposer des solutions pour diminuer l'endettement des consommateurs. D'ailleurs,
je suis convaincue que ces consultations qui s'amorcent nous fourniront un
éclairage précieux pour la suite de notre démarche. Merci, M. le Président, de
votre...
Le
Président (M. Picard) :
Merci, Mme la ministre. J'invite maintenant la porte-parole de l'opposition
officielle et députée de Marie-Victorin, pour vos remarques préliminaires,
3 min 30 s.
Mme Catherine Fournier
Mme
Fournier : Merci, M. le Président. Je tiens d'abord à saluer la ministre
de la Protection des consommateurs, la
nouvelle ministre. Bienvenue dans vos nouvelles fonctions. Ça fait
plaisir de voir, justement, la fierté qui est accordée à la protection
des consommateurs. Je pense que c'est une bonne nouvelle. Moi-même, depuis mon
arrivée comme députée de Marie-Victorin, depuis que j'ai hérité aussi des
fonctions, à l'opposition officielle, de la protection des consommateurs, on se fait vraiment
mettre l'accent là-dessus, parce que ce sont des problèmes qui touchent les
gens dans leur vie quotidienne. Et le projet de loi qu'on va commencer aujourd'hui
en est un de ceux-là.
Donc, je salue également tous mes collègues qui
sont ici présents aujourd'hui : de l'opposition, de la partie gouvernementale. Donc, il s'agit de mon premier
projet de loi sur lequel je vais avoir l'occasion également de
travailler, donc je vous offre ma
collaboration pour ça, parce que c'est un projet de loi qui est attendu. Dès
mon arrivée, j'ai rencontré aussi les différents groupes de protection
des consommateurs, qui m'ont fait part de leur volonté d'aller de l'avant rapidement avec ce projet de loi, parce qu'il y
avait quand même un travail colossal qui avait été fait dans les
dernières années avec le projet de loi
n° 24, qui était malheureusement tombé au feuilleton en 2012. Et donc
j'espère qu'on va pouvoir se saisir du travail qui avait été fait à ce
moment-là pour enrichir nos discussions puis vraiment mettre la table et
collaborer afin d'avoir un projet de loi qui soit vraiment le plus complet
possible.
Parce qu'on
sait que l'endettement, c'est un phénomène extrêmement préoccupant, dans une
société comme la nôtre, et, vraiment,
de plus en plus, le niveau d'endettement des ménages québécois continue
d'exploser, même il augmente, et le
nombre de faillites aussi qui a grimpé de plus de 50 % dans les 10
dernières années. Alors, ça, c'est quelque chose qui est préoccupant. Ça touche également beaucoup les jeunes
consommateurs, les jeunes qui arrivent sur, par exemple... dans les institutions d'enseignement, qui se font
proposer du crédit. On a vu, la semaine dernière, dans Le Journal de
Montréal, un jeune de 22 ans qui
avait déjà 10 000 $ de dettes. Alors, je pense qu'il ne faut pas non
plus occulter le fait que les jeunes sont
aussi des consommateurs vulnérables. Et, en ce sens-là, ça m'apparaît manquant
de prime abord, là, dans le projet de loi
n° 134. Alors, je pense qu'il va falloir analyser ces différentes mesures
là. Mais, comme je l'ai dit, j'offre toute ma collaboration à la
ministre pour qu'on puisse arriver à un projet de loi qui soit le plus complet
possible. Merci.
Le
Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. J'invite le
porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député de Johnson pour
ses remarques préliminaires.
M. André Lamontagne
M.
Lamontagne : M. le Président, je vais saluer Mme la ministre, Mme la
déléguée du groupe de l'opposition officielle.
Mes chers collègues, c'est un plaisir d'être avec vous pour l'étude du projet
de loi n° 134, puis c'est avec
un grand plaisir que je vais m'affairer, au
meilleur de mes habiletés, à vous offrir ma meilleure collaboration. Ça va être un plaisir de vous écouter aujourd'hui. Je vais garder le reste de mon temps pour plus
tard au cours de la session, s'il
vous plaît. Merci.
Auditions
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Union des
consommateurs. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé et que nous procéderons, par la suite,
à une période d'échange avec les membres de la commission.
Dans un premier temps, je vous demanderais de vous identifier et de
faire votre présentation. Allez-y.
Union des consommateurs
M. Boucher
(Marcel) : Bonjour. Mon nom
est Marcel Boucher. Je suis responsable
des affaires juridiques et de la recherche pour Union des consommateurs.
• (11 h 50) •
Mme Roehl
(Gabriele) : Gabriele Roehl,
conseillère budgétaire à l'ACEF du Sud-Ouest de Montréal et membre de
l'Union des consommateurs.
Mme Chicoine
(Isabelle) : Bonjour.
Isabelle Chicoine, conseillère budgétaire également, ACEF Montérégie-Est
et membre de l'Union des consommateurs.
Mme Roehl (Gabriele) : Mme la
ministre, M. le Président, Mmes et MM. les députés, bonjour. Nous vous
remercions pour l'invitation à venir vous présenter nos commentaires sur le projet
de loi n° 134. Les associations de consommateurs
qui travaillent sur le terrain observent et luttent depuis longtemps
contre les problèmes liés à l'endettement que vivent les nombreux consommateurs québécois.
Nous sommes donc bien au fait du besoin réel d'une modernisation de certaines règles relatives au crédit. Nous ne
pouvons que nous réjouir des développements sur cette question survenus au cours de la dernière année.
Union des
consommateurs est un organisme à but
non lucratif dont la mission est de représenter et défendre les consommateurs en prenant en compte de façon
particulière les intérêts des ménages à revenus modestes. L'union regroupe
12 organismes de défense des droits des
consommateurs, dont 10 associations coopératives d'économie familiale, les
ACEF, qui font de l'intervention budgétaire
et de l'éducation financière depuis de plus de 50 ans auprès des ménages
québécois.
Nous avons participé, depuis 2010, aux
différentes consultations menées par l'Office de la protection du consommateur
dans le cadre des travaux visant la modernisation, notamment, des règles
relatives au crédit à la consommation et à
la lutte au surendettement. Nous sommes heureux, après cette longue attente,
qu'un nouveau projet de loi soit
enfin à l'étude. D'entrée de jeu, nous tenons à exprimer notre satisfaction à
l'égard de la création du ministère de la
Protection du consommateur et de l'Habitation. Nous espérons que la ministre
saura rappeler à tous les autres ministères que la protection du consommateur est essentielle, que de nombreuses
lois, projets de loi ou autres réglementations peuvent avoir un impact important sur les consommateurs et
que leurs intérêts doivent constamment être pris en compte. Nous vous
présenterons, en huit minutes, quelques éléments que nous trouvons essentiels.
Nos observations détaillées se retrouvent dans notre mémoire.
Le projet de loi n° 134 n'a pas une portée
aussi large que le projet de loi précédent en la matière, le projet de loi n° 24, mort au feuilleton en 2012.
Toutefois, le projet de loi n° 134 contient des dispositions qui n'étaient
pas présentes dans le projet de loi
précédent, notamment concernant les contrats de service de règlement de dettes
et de redressement financier. Nous y revenons plus tard.
L'Union des
consommateurs se réjouit particulièrement de l'introduction du principe du prêt
responsable dans la LPC. Trop souvent, des personnes se voient octroyer
du crédit au-delà de leur capacité de remboursement. Dans les ACEF, il n'est pas rare que nous rencontrions des
personnes avec cinq, voire 10 cartes de crédit, et parfois une marge
de crédit par-dessus tout ça. Un des cas qui
m'ont particulièrement marquée pendant ma carrière de conseillère
budgétaire, c'était l'exemple d'une dame
âgée que j'ai rencontrée et qui avait un revenu de 950 $ d'une pension par
mois. Ça veut dire 11 400 $
par année. Et elle s'est vu octroyer une carte de crédit avec une limite de
35 000 $. Ça veut dire... une analyse qui n'a pas été faite de sa capacité de remboursement. Nous accueillons
donc très positivement l'introduction du principe de la
responsabilisation des prêteurs à cet égard.
Toutefois, la
lecture des dispositions qui encadrent cette obligation d'évaluer la capacité
de rembourser nous fait craindre que
cette protection, au-delà de l'affirmation d'un principe, aussi importante
soit-elle, n'ait pas autant de mordant que
ce qu'auraient désiré les acteurs du milieu. Par exemple, l'article 103.3
prévoit que le commerçant qui ne procéderait pas à l'évaluation obligatoire perdrait le droit aux frais de crédit.
C'est, selon nous, une pénalité minimale. De plus, la loi ne prévoit
aucune pénalité pour le commerçant qui, après évaluation, accorderait tout de
même le crédit demandé.
De
l'autre côté, nous appuyons l'obligation des commerçants, dans les cas des contrats
qui seront définis comme étant à taux élevé, de remettre au consommateur
un exemplaire par écrit des documents faisant état de l'évaluation qu'il a faite. Nous sommes d'avis que cette
obligation de communiquer ces renseignements devrait être même applicable
dans tous les cas et non seulement aux
contrats de crédit à taux élevé. Il s'agit d'une occasion en or d'informer et
d'éduquer le consommateur sur les risques de l'endettement et sur l'effet du
crédit sur sa situation financière. Le poids pour les commerçants nous semble, par opposition, infime, puisqu'ils auront, de
toute façon, l'obligation de constituer ces documents.
L'absence de
contrainte sur la nature et la finalité de l'évaluation qu'imposerait la LPC
continue à nous préoccuper, et nous sommes
d'avis que les dispositions proposées se devraient d'être précisées, et les
obligations des commerçants, plus strictes.
Nous rapportons, dans notre mémoire, quelques exemples de mesures législatives
en matière de prêt responsable qui ont été adoptées à l'étranger,
notamment la possibilité de diminution, voire de la perte du montant du capital
à rembourser ou encore la possibilité de
modification des modalités de remboursement s'il y a défaut, par le
commerçant, de procéder à l'évaluation
prescrite. Nous invitons les législateurs québécois à s'en inspirer et
d'apporter aux dispositions proposées les modifications nécessaires
avant l'adoption.
L'industrie
des redresseurs financiers et de règlement de dettes fait des ravages depuis
trop longtemps. Déjà, dans les années 80 et 90, ces entreprises
faisaient l'objet de plaintes mais poursuivaient leurs activités. Aucune
disposition législative ne semble pouvoir
les arrêter. Il était donc grand temps, selon nous, que les législateurs
québécois s'attaquent à cette
industrie, et nous nous réjouissons des mesures envisagées dans le projet de
loi n° 134. Cela dit, nous venons de compléter une recherche sur
les entreprises de règlement de dettes et de redressement financier qui nous a
permis d'identifier certaines pratiques
commerciales et représentations qui désavantagent outrageusement les
consommateurs qui ont recours à ce type
d'entreprise dans l'espoir de sortir de leur situation financière difficile.
Notre recherche nous a amenés à
soulever un doute sérieux sur la nécessité même de ce type d'entreprise, de
tout avantage réel pour le consommateur que peuvent constituer ces types
de services, que nous estimons intrinsèquement viciés. Nos constats nous
amènent à recommander une interdiction complète de ce type d'entreprise, comme
ce fut longtemps le cas aux États-Unis.
Toutefois,
l'interdiction de ce type d'entreprise semble loin d'être l'avenue préconisée
par les législateurs jusqu'à présent.
Malgré les failles importantes et les résultats mitigés des lois adoptées dans
les cinq provinces canadiennes qui réglementent
les entreprises de règlement de dettes — et la seule mesure, ontarienne, qui encadre,
dans une moindre mesure, les
redresseurs financiers — il est essentiel que tout cadre réglementaire qui vise ces deux
types d'entreprise comporte certains éléments clés, s'il entend avoir le
moindre effet positif.
Notre recherche nous a amenés à conclure que
toute réglementation qui offrira une protection, aussi minime soit-elle, au consommateur québécois devrait contenir
certains éléments qui paraissent essentiels. Notre rapport en dresse une liste. Nous constatons avec soulagement que
plusieurs de ces éléments se retrouvent parmi les dispositions à
l'étude. Les obligations liées aux permis
devraient permettre à l'OPC de recueillir, avec le temps, les outils
nécessaires pour justifier éventuellement un resserrement ou une
interdiction de ces entreprises.
Parmi les autres mesures concernant le crédit à
la consommation, nous souhaitons — et nous terminerons notre présentation
avec ce dernier élément — vous
faire part de nos commentaires sur le versement minimal requis pour le paiement
des cartes de crédit.
Les taux
d'intérêt sur les cartes de crédit sont tellement élevés que le
consommateur qui ne paie que le versement minimal requis, fixé présentement autour de 2 % et parfois même 1 %, étire très longtemps la période
nécessaire pour rembourser le capital. Un règlement qui fixera un
paiement minimal plus élevé aura un effet prometteur sur la santé financière des consommateurs en réduisant la
période de remboursement et, du même coup, le montant total des
intérêts. Nous ne pouvons que nous en réjouir. Nous vous remercions de votre
attention.
• (12 heures) •
Le
Président (M. Picard) : Merci, Mme Roehl. Donc, je cède
maintenant la parole à Mme la ministre pour une période de
16 minutes.
Mme
Thériault : Merci, M. le Président. Tout d'abord, merci, M.
Boucher, Mme Roehl et Mme Chicoine, d'être avec nous aujourd'hui. Vous êtes des partenaires privilégiés, l'Office
de la protection du consommateur, je vais dire ça comme ça. Je pense que ma présidente, Mme
Galarneau, me mentionnait que, justement, dans l'étude que vous avez eu l'occasion de mentionner, Mme Roehl, il y aura une
analyse, qui sera faite en profondeur, des différents points qui auront été soulevés à l'intérieur de votre étude, pour
voir de quelle manière nous pourrions profiter de l'occasion qu'on a
devant nous, alors qu'on étudie toutes les
questions qui sont relatives au crédit, pour pouvoir peut-être profiter du fait
qu'on a un projet de loi, pour pouvoir venir bonifier ce qu'on a.
Vous savez
qu'une consultation a pour but vraiment d'entendre ce que les gens ont à dire,
les pour et les contre, qu'on doit
quand même trouver un juste équilibre quelque part aussi. J'ai pris moi-même
connaissance de différents cas, au fil
des années, comme la plupart de mes collègues, j'en suis convaincue. Le cas
dont la députée de Marie-Victorin faisait état, qu'on a vu dans Le Journal de Montréal... il y a des cas de
crédit qui sont totalement pathétiques. Donc, je pense que le choix qui a été fait par notre prédécesseur, au
départ... Et la députée de Marie-Victorin indiquait à juste titre qu'il y a
déjà eu un projet de loi qui a été déposé. Il y a eu un changement de
gouvernement, le projet de loi est tombé; bon, on a ramené un autre projet de loi. Mais évidemment je pense que le fait
d'avoir une ministre qui s'occupe à temps plein de la protection du consommateur et de l'habitation va
faire en sorte qu'on va pouvoir certainement procéder plus rapidement.
Donc,
évidemment, je pense que le fait que nous soyons en commission parlementaire,
près d'une semaine après mon
assermentation, je pense que ça doit démontrer et envoyer un signal clair qu'on
va aller de l'avant avec l'adoption d'un projet de loi. Évidemment, je ne peux pas présumer de ce que feront mes
collègues non plus, mais, je pense, c'est important d'entendre également qu'il y a un esprit de
collaboration qui règne au sein de ces questions de protection du
consommateur.
D'ailleurs,
on a proposé, mes deux collègues porte-parole des dossiers, d'avoir une
rencontre avec l'Office de la protection du consommateur hier, pour
justement se saisir des grandes lignes du projet de loi. Et je peux vous dire qu'il y aura certainement des bonifications suite
aux propos que vous nous avez tenus dans le projet de loi comme tel.
J'aimerais
vous entendre, par contre, sur l'analyse du crédit obligatoire. Lorsque vous
dites que tout le monde devrait déposer systématiquement, j'aimerais que
vous nous disiez... Parce que je pense que, pour les personnes qui écoutent aussi, ça peut être important de
comprendre pourquoi, ça, c'est un point qui vous apparaît tout à fait
essentiel, comme quoi on doit obliger. Vous
avez certainement dû entendre des histoires d'horreur sur des gens qui pensent
qu'ils ont une capacité de crédit et finalement ils ne l'ont pas parce que
cette analyse-là n'est pas faite. Donc, je vais vous demander si vous pourriez
nous en parler un peu plus.
Mme Roehl
(Gabriele) : Je pense que,
pour nous, en fin de compte, évaluer la capacité de remboursement, c'est
un point qu'on défend, une revendication
qu'on porte depuis longtemps. Dans les ACEF, justement, on rencontre des
gens qui ont des problèmes d'endettement ou
qui veulent simplement apprendre comment faire un budget. Et un des éléments
qu'on constate, en fin de compte, avec les
gens qui ont des dettes ou des gens qui n'ont pas de dette... que la
méconnaissance entourant le fonctionnement du crédit est très grande. Les gens
ne comprennent pas cet outil, qui est très puissant, qui s'est beaucoup démocratisé — tout le monde a, aujourd'hui, accès à une
forme de crédit ou une autre — par contre, qui a aussi beaucoup de
dangers. Il y a des pièges dans lesquels on peut tomber, et, un des pièges,
c'est le surendettement.
Les gens nous
disent toujours : J'ai trois, quatre, cinq, 10... je pense
que le record qu'on a vu, c'est 15 cartes de crédit avec des
limites qui peuvent aller du 5 000 $, au 10 000 $, à
50 000 $. Et les gens qu'on rencontre ont toujours l'impression : Si l'émetteur du crédit m'a
accordé une telle carte de crédit avec une telle limite, ils ont certainement
fait une étude exhaustive de ma situation
financière, et, s'ils pensent que je mérite une carte avec une limite de
10 000 $ ou 20 000 $, que je suis capable de
rembourser.
Malheureusement,
ce n'est pas du tout le cas pour les cartes de crédit, ou de moins en moins, et
on voit, en fin de compte, au
contraire, que les gens qui s'approchent de leur limite de crédit, au lieu de
peut-être faire un signal d'alarme et parler
aux consommateurs pour un peu réfléchir sur leur situation, l'institution
financière va, au contraire, augmenter leur limite de crédit. Ça veut
dire...
On voit,
comme l'exemple que j'ai mentionné, des situations où la limite accordée ne
correspond pas du tout à la capacité de remboursement. Et, bien sûr, la
personne pourrait faire cette analyse, mais on trouve que les prêteurs, justement, aussi, ont une responsabilité de voir
avec les consommateurs est-ce qu'ils sont capables de rembourser un
crédit qui a été accordé.
Le Président (M. Picard) :
Mme la ministre.
Mme
Thériault : Oui. Je vais... Parce que vous avez parlé, dans
votre mémoire, sur le fait qu'il y a des gens qui vont demander un dépassement de la limite de
crédit. Là, je vous ai entendue sur les détenteurs de cartes de crédit
qui en ont plusieurs, avec beaucoup de capacité de crédit à portée de la main.
Nous parlons des personnes... Là, j'aimerais vous entendre parler sur les gens qui ont une capacité de crédit, exemple,
une personne qui a une carte de crédit avec une plus petite marge, parce que c'est sa première carte ou
parce que c'est voulu, c'est comme ça... Il y a des personnes aussi qui
ont une relation saine avec le crédit.
Mais, à partir du moment où tu n'as, exemple,
que 1 000 $ sur la carte de crédit, et woups! il y a un imprévu, que
ce soit en voyage, que ce soit un bris majeur de véhicule ou autre, qu'est-ce
que vous pensez, vous, du fait qu'à l'intérieur
du projet de loi qui est déposé, tel quel, qu'on puisse permettre un
dépassement, d'une certaine manière? Parce qu'il y a aussi des gens qui demandent, plutôt que d'aller chercher une
deuxième carte de crédit, d'avoir une autorisation pour pouvoir dépasser
la marge de crédit qui leur est allouée.
Le Président (M. Picard) :
Mme Roehl.
• (12 h 10) •
Mme Roehl
(Gabriele) : Il y a deux
aspects à cette question. Je pense qu'on se réjouit beaucoup que, dans le
projet de loi, en fin de compte, le fait que
ce n'est pas permis d'augmenter une limite sans le consentement express du
consommateur soit affirmé et clarifié. Parce que, malgré cette
interdiction qui existe déjà, dans la pratique, on le voit couramment, que la
limite des consommateurs est augmentée sans que les gens soient au courant de
ce fait et sans qu'ils ont donné leur consentement.
La question
de : Est-ce qu'on devrait permettre un dépassement?, on trouve ça un peu
difficile, parce que c'est clair que
ça, c'est dans l'intention de dépanner quelqu'un. De l'autre côté, il n'est
déjà pas recommandé, si on a une limite sur sa carte, de se rendre proche de la limite. On devrait toujours se
garder une marge de manoeuvre. Et il y a beaucoup de gens qui se fient sur le fait que, quand la limite
est atteinte, ils vont être arrêtés. On voit ça souvent dans les cas des
joueurs compulsifs, par exemple, des gens
aussi qui sont des acheteurs compulsifs. Ils ont une certaine limite sur leur
carte de crédit et ils se fient sur
le fait qu'à un moment donné ils vont être arrêtés. C'est ça, la limite, O.K.,
ils ont consenti, et c'est ça, la limite de leur capacité de rembourser.
Au lieu de
dire... Parce que, pour nous, une limite, ça devrait être une limite. Pour
nous, ça ne fait pas vraiment de sens
de dire qu'on vous accorde une limite de 5 000 $, 10 000 $,
mais, dans les faits, vous pouvez dépasser. De combien? 10 %, 15 %, 20 %? Pourquoi fixer
une limite plus basse dans un premier temps? Et, peut-être au lieu de cibler
certains cas d'accidents, des imprévus,
d'une chambre d'hôtel qui a... suite
à un accident de voiture, un bris de voiture, on pourrait peut-être dire
aux gens... Parce que ça ne prend pas grand-chose, là, ça prend un appel à
notre émetteur de crédit pour demander une augmentation de notre limite de crédit. Ça veut dire : au lieu de cibler ces certains cas d'exception, on trouve
qu'on devrait peut-être plutôt appuyer sur le principe que la limite, c'est la
limite, pour que l'ensemble des consommateurs puissent se fier sur ce fait.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Mme la ministre.
Mme Thériault : Non. Il y avait
la députée de Fabre, monsieur...
Le Président (M. Picard) : Mme
la députée de Fabre.
Mme
Sauvé : Bonjour. Merci, M. le Président. Alors, très heureuse d'être ici; c'est ma
première présence à cette commission,
alors j'en suis très heureuse. J'aurais une question par rapport à la préoccupation que j'ai. Et là je fais appel évidemment à
votre rôle, à l'Union des consommateurs, mais aussi à votre expertise terrain
comme ACEF aussi... la préoccupation spécifique envers les jeunes, qui sont, bien sûr,
très tentés par la première expérience du crédit. Est-ce que vous avez une préoccupation
particulière, spécifique, afin de protéger les jeunes face à une première
expérience de crédit? J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Boucher
(Marcel) : Oui. On a des préoccupations particulières pour différentes clientèles qui peuvent être plus
vulnérables. Notre approche en général, pour la Loi sur la protection du consommateur, c'est de viser la
protection de l'ensemble des
consommateurs. S'il y a des consommateurs jeunes qui ont ce problème-là,
le même problème peut se refléter dans
l'ensemble de la population. On n'a jamais trouvé que c'était une excellente idée de partir
avec le principe : on va faire des règles particulières pour les
jeunes.
Cela dit,
l'endettement des jeunes, oui, c'est problématique et ça peut l'être. Et il y a
des hameçons qui sont lancés aux jeunes, par exemple — c'est
pour ça qu'on en parle dans notre mémoire, on en a déjà parlé, on en a parlé
lors du projet de loi n° 24 — la sollicitation, la sollicitation au crédit
qui se fait dans les institutions d'enseignement. On trouve ça
épouvantable. Vous allez voir, dans notre mémoire, on le détaille un peu plus.
Donc, cette préoccupation-là pour l'endettement des jeunes, oui, on la retrouve
dans ça, quelque chose qui n'a pas été reporté au projet de loi qui est
présentement à l'étude, qui devrait peut-être l'être.
Mme Sauvé : Merci pour votre
réponse. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Picard) :
C'est tout? Mme la ministre.
Mme Thériault : Oui. Dans
votre mémoire, vous proposez que l'état de compte, lorsqu'on reçoit son état de
compte sur ses cartes de crédit, exemple, que l'état de compte indique, en plus
de l'information sur la période de remboursement,
le montant total en dollars des intérêts que devra payer le consommateur si seul
le paiement minimum est effectué à chaque période.
Est-ce que
vous pourriez, mettons, nous imager quelqu'un qui a une carte de crédit,
mettons, à 1 000 $ puis qui ne fait que le paiement minimum, combien de temps ça peut lui prendre pour
rembourser sa carte de crédit s'il ne fait que le paiement minimum, au
taux actuel de 5 %?
Le Président (M. Picard) :
Madame...
M. Boucher (Marcel) : Vous m'avez
demandé si je peux le calculer présentement? Non, je ne peux pas le calculer. On peut le calculer assez rapidement. Si
on se dit qu'on a une carte de crédit à 20 %, qu'on paie 2 % par
mois, c'est-à-dire qu'on va payer 24 %,
donc il y a 4 % du capital qui est payé. C'est grossier, comme calcul, là,
mais ça donne à peu près ça. Ça fait
que calculez : chaque année, on paie 4 %. Combien de temps ça va
prendre pour payer le solde? C'est
énorme. Il y a des calculs qui sont faits... Je pourrai, si vous voulez, vous
trouver des références là-dessus. Il y a des calculs qui ont été faits
sur les temps de remboursement.
La question
qu'on soulève dans notre mémoire, c'est : Qu'est-ce qui parle le plus au
consommateur? Si on veut vraiment
faire peur au consommateur, là, quand on lui envoie l'état de compte, qu'est-ce
qui va le réveiller, qu'est-ce qui va le
choquer le plus, qu'est-ce qui va faire en sorte que le consommateur va
regarder ça puis va dire : Il faut que je fasse quelque chose, ça n'a pas de sens, le montant que
ça va me coûter. Puis je pense que c'est le montant que ça va lui coûter
qui risque le plus de choquer le
consommateur. Parce que le temps... Le temps, oui, mais, présentement, je peux
faire ces paiements-là, alors je les
fais, ça va bien, puis je les ferai plus longtemps, puis, un jour, je ferai des
plus gros versements, et tout ça.
Mais, si on
voit le montant : tu dois 4 000 $, tu vas payer, en bout de
compte... si tu ne fais que le paiement minimum, tu vas payer, en bout de compte, deux fois, trois fois ce montant-là, je
pense que c'est susceptible de réveiller les gens.
Le Président (M. Picard) :
Mme la ministre, il reste deux minutes.
Mme
Thériault : Merci. J'aimerais peut-être vous entendre sur le
fait qu'on puisse dorénavant mettre fin à une responsabilité
conjointement, solidairement, sur une carte de crédit ou sur un prêt, sur le
fait qu'on doit, au moins, prouver qu'on a
avisé la personne conjointe ou l'ex-conjoint. Je pense qu'on va donner ça comme
exemple, parce que vous aviez passé des commentaires là-dessus dans votre mémoire. Et moi, je
pense qu'il est sain, lorsqu'il y a une séparation, qu'on puisse dire : Non, je ne serai plus
conjointement et solidairement responsable de la carte de crédit du prêt.
C'est réclamé depuis longtemps. Je pense que ça va faciliter aussi, souvent,
les séparations ou des divorces. Parce qu'il m'apparaissait logique de faire
quelque chose comme ça aussi, je l'entends bien. Mais, par rapport au fait
qu'on doit informer ou, au moins, prouver à
son institution financière qu'on a informé l'autre partie qu'on veut y mettre
fin, vous aviez inscrit des choses dans votre mémoire par rapport à ça.
M. Boucher
(Marcel) : Oui.
Effectivement, il faut que quelqu'un puisse mettre fin à la solidarité pour les
dettes à venir. C'est clair qu'on ne parle
pas des dettes passées qui ont été... c'est comme ça que ça a été contracté.
Pour les dettes à venir, il faut que
le consommateur puisse mettre fin à la solidarité. La solidarité, c'est un
engagement, c'est une garantie que l'institution financière, le prêteur,
quoi que ce soit, a avec le consommateur, avec les deux consommateurs, je veux
bien, mais avec le consommateur qui veut y mettre fin.
Il nous est
difficile de justifier qu'on ajoute des conditions supplémentaires au simple
fait qu'on dit, qu'on ait à dire au
prêteur, au créancier : Je ne serai plus responsable avec cette
personne-là; révise le dossier s'il le faut, regarde si le montant qui est alloué, par exemple, sur la carte
de crédit si tu veux continuer à avoir juste un responsable pour ça.
Refais les calculs, fais ce que tu dois, mais moi, je ne veux plus être
responsable de ça.
Dans nos
discussions avec l'Office de la protection du consommateur, on disait
qu'évidemment, dans un monde idéal,
on veut que tout le monde ait des bonnes relations, puis, si je veux mettre fin
à la solidarité que j'ai avec quelqu'un, je vais lui en parler et je pourrai en aviser l'institution financière. Mais
on ne se retrouve pas toujours, dans la réalité, dans un monde idéal. Il y a des situations où les
relations vont être difficiles, où je ne pourrai pas nécessairement... on
pense par exemple aux ruptures de couples... où je ne voudrai pas ou ne pourrai
pas nécessairement être en contact avec l'autre personne. Et cette obligation supplémentaire là va être un obstacle qui
va faire que peut-être que je vais rester solidaire, et peu importe ce
qu'il se passera par la suite pour la dette, là.
Ce que nous
suggérons dans le mémoire, c'est que le débiteur ait à informer le créancier.
Est-ce que l'autre partie a été
informée ou pas de cette fin de solidarité... c'est tout, de faire cesser là
cette obligation-là. S'il y a des gens qui ont une preuve qu'ils ont envoyé un courrier, ou un
courriel, ou quoi que ce soit, qu'ils la fournissent, évidemment. Les gens
qui ne l'ont pas, qui ont un problème pour la fournir, on ne devrait pas leur
imposer cette obligation-là.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Mme la ministre, un court commentaire, bref.
Mme Thériault :
Un court commentaire, c'est... Moi, je pense qu'on peut s'envoyer des
courriels. On n'est pas obligés
d'avoir la réponse de l'autre. Mais je pense qu'à partir du moment où on est
capables de donner à l'institution financière
copie du courriel qu'on a envoyé à l'ex-conjoint disant que nous voulons mettre
fin conjointement, solidairement aux
engagements futurs... Si c'est fait par un avocat ou si c'est fait par la
personne elle-même, et qu'à la seule preuve du courriel en c. c., exemple, en copie conforme, est-ce que ça serait
quand même acceptable? Parce qu'un courriel, tout le monde communique
ensemble. C'est facile.
M. Boucher
(Marcel) : Absolument. Notre
position là-dessus, c'est ce que j'essayais de vous communiquer
tantôt : Si quelqu'un peut le faire,
s'il n'y a pas de problème, si c'est simple et efficace, pourquoi pas, bien
sûr. C'est pour ça qu'on propose, dans notre mémoire, dans les cas où
c'est possible, bien sûr, faisons-le. Mais il y a un paquet de cas où c'est impossible. Il faudrait que la loi prévoie, à tout
le moins, une échappatoire pour les gens qui ont un problème, par simple
déclaration que, non, je ne peux pas aviser l'autre personne, ou il y a un
problème, ou je préfère ne pas, ou...
Le Président (M. Picard) :
Merci.
Mme Roehl
(Gabriele) : On pense
particulièrement aux cas de violence conjugale où, vraiment, le contact
peut être extrêmement difficile après une rupture.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Marie-Victorin pour
10 minutes.
Mme Fournier : Merci, M. le
Président. Merci à vous d'être présents aujourd'hui avec nous en commission parlementaire. Ça me fait plaisir de vous recevoir
pour présenter le point de vue justement de la protection des consommateurs.
Dans votre présentation, dans votre mémoire,
moi, il y a un point qui m'a particulièrement intriguée, c'est le fameux devoir
de conseil que vous évoquez auprès donc des prêteurs. Vous nous avez donné,
dans votre mémoire, l'exemple de la France. J'aimerais voir un peu comment vous
considéreriez l'application de ce devoir de conseil là dans le cas québécois,
pour éviter aussi les conflits d'intérêts entre les prêteurs et ceux qui
contractent le crédit.
• (12 h 20) •
Le Président (M. Picard) :
Allez-y, M. Boucher.
M. Boucher
(Marcel) : Cette mention-là du devoir de conseil en France, ce
n'est pas quelque chose qui, d'après nous, présentement, pourrait être application au Québec.
Justement à cause des problèmes de conflits
d'intérêts, les gens avec qui le
consommateur va faire affaire pour obtenir un prêt ne sont pas nécessairement compétents pour donner des conseils. C'est un exemple qu'on
donnait pour montrer que cette obligation-là de vérifier la capacité de payer,
cette responsabilité des prêteurs peut aller très loin. On le voit
dans certaines juridictions étrangères, ça peut aller très, très loin. On le donnait comme exemple afin de dire au législateur québécois : Il ne faut pas
avoir peur d'aller loin. Il y en a d'autres qui sont allés loin, le
monde ne s'est pas écroulé, et la situation semble être plus sous contrôle sur
ces questions-là.
Ce sur quoi
nous insistions dans notre mémoire, pour ce qui est du devoir de conseil, c'est
que le prêteur remette les documents
sur lesquels il se base. Bref, son évaluation, les documents ou la conclusion
de son évaluation, pour que le consommateur
ait en main... pour qu'il soit informé de qu'est-ce qu'on regarde quand on doit
évaluer est-ce que j'ai la capacité
de rembourser un crédit. Et qu'il l'ait sous les yeux. Qu'est-ce qui a été pris
en compte? Qu'est-ce qui a été évalué?
Puis le
devoir de conseil et ces renseignements-là, un autre exemple qu'on donne...
(Interruption) excusez-moi, je ne sais plus de quel pays, que les
renseignements que donne le consommateur doivent être vérifiés, validés par des
documents officiels ou quoi que ce soit. On trouve que, ça aussi, c'est aller
très, très loin.
Dans le cadre
de nos discussions avec l'Office de la protection du consommateur, on
réfléchissait à voix haute et on
suggérait, à un moment donné, d'inclure, dans la loi, un principe que le
prêteur va se fier évidemment aux renseignements qui sont donnés par le consommateur, mais sur des renseignements
crédibles. C'est-à-dire que, aussitôt qu'il y a quelque chose qui semble un peu louche, le prêteur devra
avoir l'obligation de le vérifier, soit en demandant des documents soit
en demandant une confirmation. Et on donnait l'exemple : Quelqu'un, parce
qu'il veut avoir de l'argent... c'est un des problèmes
qu'on retrouve avec ça, l'évaluation de la capacité de payer, hein? Les gens
qui ont une capacité de payer réduite, ils
en veulent, de l'argent. Ils vont voir un prêteur parce qu'ils veulent de l'argent,
pas pour se faire dire : Tu n'as pas les moyens de rembourser.
Parce qu'ils veulent de l'argent, il y a une
possibilité qu'ils disent au prêteur ce qu'il veut entendre pour avoir l'argent
qu'ils veulent. La responsabilité du prêteur reste là quand même. Il doit
évaluer : Est-ce que la personne a la capacité
de payer? C'est pour ça que, dans la juridiction étrangère qu'on mentionne, il
y a cette obligation de vérification aussi.
Alors, peut-être que, dans la loi, on devrait indiquer que... dans le règlement,
parce que ça reste à venir... Donc, parmi les choses à vérifier, les choses devront être vérifiées pour qu'à
partir du moment où les renseignements sont crédibles, ils peuvent être
pris en compte; autrement, non.
Le Président (M. Picard) : Mme
la députée.
Mme
Fournier : Merci beaucoup. Vous parliez aussi des sanctions, selon vous, qui ne seraient pas
assez sévères, dans votre mémoire. Puis
j'aurais aimé savoir : À votre avis, quelles sanctions donc devrait-on
appliquer pour que vraiment il y ait un effet dissuasif sur les gens qui
proposent du crédit?
Le Président (M. Picard) : M.
Boucher.
M. Boucher
(Marcel) : Je vous disais
tantôt que le législateur québécois ne doit pas avoir peur d'aller trop loin.
On peut aller très, très loin. On donne l'exemple... c'est la Suisse, je crois,
où la loi prévoit que le prêteur va perdre le capital.
Et on se dit : Jusqu'à un certain point, c'est parfaitement normal et
logique. On est un groupe de défense des droits des consommateurs. On se
dit : C'est parfaitement normal et logique. Le prêteur va recevoir un
consommateur, va évaluer est-ce que la
personne a la capacité de rembourser l'argent que je lui prête. Réponse :
non. Et il lui prête l'argent.
On se
dit : Bon, le prêteur prend un risque. Il prend un gros risque, comme
quelqu'un qui parierait sur les chevaux. Il prend un gros risque. Si ça
ne paie pas, ça ne paie pas. Il perd tout. Et on se dit que ça serait logique,
que ça serait plus équitable pour le consommateur
qui emprunte et qui va faire confiance, jusqu'à un certain point, au prêteur.
Si le prêteur évalue — mais
ça, c'est dans les cas extrêmes, là — que l'emprunteur n'aura pas la capacité de
rembourser, c'est un «gamble» : s'il le perd, il perd tout.
Le Président (M. Picard) :
Mme la députée.
M. Boucher
(Marcel) : J'imagine que,
dans la loi, ce qu'il faudrait prévoir pour aller jusque-là, ce sont des
étapes, des étapes de gravité du manquement. Mais le manquement le plus grave
devrait entraîner les conséquences les plus graves.
Il faut que... La loi ne prévoit pas que, si l'évaluation est négative,
c'est-à-dire que le prêteur fait l'évaluation de la capacité de payer et
conclut que la personne n'a pas la capacité de payer... Il peut quand même lui
prêter, la loi ne l'interdit pas. Dans certaines circonstances, ça peut être
justifiable, peut-être, que la pénalité maximale ne devrait pas s'appliquer.
Dans d'autres cas, il y a sûrement des motifs qui permettraient de l'appliquer.
Le Président (M. Picard) :
Mme la députée.
Mme
Fournier : Merci beaucoup. Oui,
donc, je comprends les sanctions. Mais est-ce qu'en ce moment, selon
vous, l'OPC est présentement en train de faire respecter ces obligations-là?
Est-ce qu'il y a des ressources qui sont allouées à ça?
M. Boucher (Marcel) : De quelles
obligations parlez-vous?
Mme Fournier : Les sanctions qui
sont prévues.
M. Boucher (Marcel) : Ah! les
différentes sanctions. Est-ce que l'office a suffisamment...
Mme Fournier :
De ressources, oui.
M. Boucher
(Marcel) : ...de ressources
pour faire ça? D'après nous, comme groupe de défense des droits des consommateurs, l'Office de la protection du consommateur n'a pas suffisamment de ressources et n'en aura jamais assez.
La protection du consommateur est essentielle.
On
mentionnait, tantôt, la place de la protection du consommateur et la joie que
nous éprouvions de savoir que quelqu'un
va siéger au Conseil des ministres et va avoir comme préoccupation constamment la
protection du consommateur. Qu'on
parle de finances, qu'on parle de transports, qu'on parle de quoi que ce soit, il y a toujours
une préoccupation pour la
protection du consommateur qui devrait être présente. Là, il va y avoir
quelqu'un au Conseil des ministres qui est nommé pour faire ça, c'est sa job — c'est
à ça qu'elle doit penser — et
qui doit intervenir dans tous les dossiers. On se réjouit de ça.
Est-ce que,
si un ministre de la Protection du consommateur fait ça,
l'office a présentement assez de ressources? Jamais de la vie. Il
va y avoir d'autant plus de dossiers, il va y avoir d'autant plus de choses à
faire, d'autant plus de surveillance, d'autant plus de sanctions. Voilà :
ressources, s'il vous plaît.
Mme
Fournier : Sur un autre
sujet, les fameux programmes de fidélisation. Vous dites, dans votre mémoire,
vous nous l'avez un peu expliqué, qu'on ne retrouve pas l'interdiction, donc,
de la perte de valeur des points. Même, on le circonscrit,
là, ouvertement dans le projet de loi que c'est possible que ça arrive. Puis on
comprend, effectivement, c'est un peu comme de la vraie argent.
Avec l'inflation, c'est possible qu'on dise qu'il y a un bien qui peut valoir
plus de points au fil du temps que dans les années, par exemple, précédentes.
Mais il y a
plusieurs cas, là, depuis quelques mois, qui commencent à apparaître. Moi-même,
à mon bureau de circonscription, j'ai eu des citoyens qui sont venus me voir, que
leurs points avaient perdu, par
exemple, une valeur de 20 %
depuis le mois de janvier, puis ils trouvaient que cette situation-là était
totalement injuste. Et je les comprends, parce que ça représentait des
valeurs, par exemple, autour, quand même, de 1 000 $. Puis je me
demandais si vous, vous recommanderiez
d'interdire totalement la perte de valeur des points ou vous fixeriez le
pourcentage à un certain niveau.
M. Boucher
(Marcel) : Nous n'avons pas pensé à la solution idéale. Ce
que nous soulignons dans le mémoire, c'est
que cette porte-là reste toujours ouverte pour le commerçant. Et la dévaluation
peut être... S'il n'y a rien qui... Si ce n'est pas couvert du tout, s'il
n'y a aucun plafond, s'il n'y a
aucun encadrement, ça peut être n'importe quoi. Le commerçant
peut prévoir, dans son contrat : Je
peux dévaluer à la valeur que je veux, et, le lendemain, il dévalue de 90 %. C'est dangereux.
Ce sont effectivement des problèmes dont on a
entendu parler récemment, ces problèmes de dévaluation là. D'après nous, la loi ou le règlement devrait
prévoir quelque chose. Prévoir quoi? Je ne sais pas. Mais ne rien dire
nous semble dangereux.
Le Président (M. Picard) :
Mme la députée, moins d'une minute.
Mme
Fournier : Oui. Bien, peut-être très rapidement, là, dans une optique
de bonification du projet de loi, on sait
que c'est en deux phases, mais que cette phase-ci vise davantage les
consommateurs vulnérables. On a parlé de la sollicitation sur les
campus, dans le fond, dans les établissements d'enseignement. Mais est-ce que
vous voyez aussi des mesures qui sont manquantes dans le projet de loi et qui
auraient leur place dans un projet de loi qui vise les consommateurs plus
vulnérables?
M. Boucher (Marcel) : Le projet de
loi qui est sur la table présentement va déjà demander un certain travail d'étude et d'ajustement. Vous me demandez si...
est-ce que des choses devraient être ajoutées avant qu'il soit passé au vote?
Mme Fournier : Si vous avez des
mesures spécifiques que vous voyez qui sont manquantes, effectivement, dans le
projet de loi.
M. Boucher
(Marcel) : Il y en a plein,
des mesures spécifiques qui sont manquantes. Le projet de loi n° 24 a
été coupé, parce que l'idée était de
déposer, sur les mesures les plus urgentes, un projet de loi qui était
susceptible de faire son cheminement
et d'être adopté. Si vous me demandez s'il y a des mesures manquantes, je
pourrais vous en donner pour le reste de la journée, des manquantes, à
la protection du consommateur...
Mme
Fournier : Des mesures urgentes, justement, qui visent les
consommateurs les plus vulnérables. C'était ça, le sens de ma question.
Merci.
Le Président (M. Picard) : Merci,
Mme la députée. M. Boucher, rapidement.
• (12 h 30) •
M. Boucher
(Marcel) : Nous faisons
confiance, maintenant qu'il y
a un ministre de la Protection du
consommateur, qu'il va y avoir un nouveau projet de loi aux six mois,
pour faire les phases suivantes et les choses urgentes.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Mais je...
Une voix : ...votre position.
Le Président (M. Picard) : Je cède maintenant la parole à M. le député de Johnson pour une période de sept minutes.
M.
Lamontagne : Merci, M. le Président. Dans votre mémoire, vous
mentionnez, quand vous parlez pour évaluer le crédit d'une personne, d'utiliser le revenu disponible au lieu
d'utiliser une forme de ratio d'endettement. Je comprends très bien le bien-fondé. Dans le fond, on veut
savoir ultimement, à la fin de chaque mois, il reste combien de sous à
la personne dans son portefeuille pour être
capable de contracter un emprunt. Mais, dans la réalité, chaque personne est
un cas, tu sais, au niveau du revenu disponible puis qu'est-ce qui intervient
dans le revenu disponible.
Alors,
comment... qu'est-ce que vous suggérez, ou comment vous voyez que ce serait
applicable qu'on essaie de s'orienter
vers le revenu disponible plutôt que vers quelque chose d'un peu plus général,
qui est le ratio d'endettement?
M. Boucher
(Marcel) : Le règlement va
prévoir les éléments dont devra tenir en compte le prêteur. Ça va être
la façon de faire. Il faut faire une
grille... d'après nous, il faut faire une grille qui va ressembler à une grille
de budget, qui va détailler... qui va
essayer de trouver le revenu disponible. Combien, à la fin du mois, une fois
toutes les dettes payées, une fois
l'impôt payé, une fois les obligations de base, le loyer, la nourriture... Il
te reste-tu suffisamment d'argent pour payer une dette supplémentaire? Donc, c'est ce que nous présumons jusqu'à
maintenant... On va voir quand le règlement va être déposé... c'est ce
que nous présumons que le règlement va proposer : une grille d'analyse qui
va ressembler à une grille de budget, qui prend les grandes lignes pour voir le
revenu disponible applicable à un nouvel emprunt.
M.
Lamontagne : O.K. Alors, vous pensez vraiment que l'idée d'utiliser le
revenu disponible, c'est quelque chose qui est tout à fait faisable,
là...
M. Boucher (Marcel) : Oui...
M.
Lamontagne : Non, c'est parce qu'il y a une vague de dépenses qui
entrent dans un budget d'une personne, puis
chaque personne est différente. D'arriver avec un formulaire gouvernemental qui
va être soumis aux différents prêteurs, qui va venir couvrir l'ensemble des dépenses qu'un individu peut avoir,
je veux dire, on peut en avoir pour pas mal de pages.
M. Boucher (Marcel) : Vous me
dites : Chacun est individualisé. Oui, et ces nouvelles dispositions de la
loi visent justement à ce qu'une évaluation
personnalisée soit faite, donc, oui, il va falloir que la situation personnelle
de cette personne-là... C'est ça
qu'il faut regarder : Est-ce qu'elle qui est devant moi a la capacité de
rembourser? C'est ça. Ça va être ça,
la nouvelle responsabilité du prêteur. Est-ce qu'elle a la capacité de
rembourser, et idéalement l'informer de : Est-ce qu'elle l'a, cette
capacité-là, est-ce qu'elle ne l'a pas, et sur quelles bases.
Finalement,
ce que vous me demandez, c'est : Est-ce que ça va être compliqué? Oui, je
pense que oui. Je pense que ça va
être compliqué. Il va falloir que la grille soit bien faite. La grille va être
dans le règlement, heureusement, parce que ça va permettre des
modifications rapides, parce que la première grille qui va être soumise par
règlement, ce n'est pas certain qu'elle va
marcher 100 %, puis que, six mois plus tard, on va s'apercevoir que, oups!
il y a quelque chose qui n'est pas pris en compte, puis ça ne règle pas
tel problème, puis il va falloir modifier le règlement. C'est bien possible.
L'idéal, pour
faire ça, ça aurait été que les gens, avant de faire quelque emprunt... ou,
rendus à tel point, avant de faire un
emprunt, les gens soient référés vers quelqu'un qui va faire, avec eux, un
budget de fond en comble pour que la personne soit vraiment au fait de
ça. Mais ça, c'est totalement irréaliste. Ça fait qu'il faut trouver quelque
chose entre les deux. Puis ça va être le prêteur qui va devoir faire une partie
de ce travail-là.
M.
Lamontagne : À l'article 103.1, là, on vient permettre un recours
quand on pense qu'il y a une connivence entre le commerçant, mais aussi le commerçant prêteur, pour une réparation,
là, pour le consommateur. Est-ce que, selon vous, ce qui est proposé,
est-ce que ça va être applicable? Est-ce que ça va être un bénéfice pour le
consommateur?
M. Boucher (Marcel) : Vous parlez de
connivence, je ne sais pas de quoi vous me parlez.
M. Lamontagne : C'est le recours du
consommateur contre un commerçant de crédit qui collabore avec un commerçant
vendeur.
M. Boucher (Marcel) : O.K.
Excellent. Oui, bon, d'abord, voyez-vous, vous me dites connivence, et ça m'a trompé. Il s'agit de collaboration régulière. Il
ne s'agit pas d'entente pour faire un mauvais coup, là. C'est juste...
Quand ils collaborent régulièrement, la
loi — et c'est
déjà le cas — dit
qu'il y a certains moyens, qui sont opposables au commerçant, qui peuvent être opposables au prêteur lors d'un
recours qui est fait par eux en défense, donc. Ce que la loi prévoit, ce
que la modification de la loi prévoit, c'est
que certains moyens vont pouvoir être utilisés aussi en demande. Lorsque le
commerçant, lorsque le prêteur ne
poursuit pas, qu'il laisse traîner les choses, le consommateur va pouvoir
entreprendre lui-même les recours et
entreprendre des recours contre le prêteur. Parce qu'évidemment le commerçant,
une fois qu'il est payé par le prêteur,
il n'a plus beaucoup d'intérêt à poursuivre. Et, bien souvent, il va
disparaître du décor. Et, si le consommateur veut essayer d'opposer des moyens de défense, par
exemple, le contrat n'était pas valide ou le bien a brisé, ou... Bref, j'ai des moyens de défense
contre le commerçant, mais le commerçant n'est plus là. Je fais quoi? Je
continue à payer? Non.
Ce que la loi
prévoit maintenant, c'est : Si le commerçant n'est plus là, et
qu'il y a un problème que tu aurais pu opposer
au commerçant, tu peux dorénavant l'opposer au prêteur si le prêteur et le
commerçant collaboraient régulièrement. Ça nous semble parfaitement
raisonnable. Ça nous semble même ne pas aller tout à fait assez loin, parce
qu'il y a des cas où
le commerçant est peut-être encore là, il n'est peut-être
pas insolvable, il n'est peut-être pas en faillite, mais il est sur le bord
de... Donc, le consommateur, avant de pouvoir inscrire, comme défendeur, dans
les procédures, le prêteur d'argent va
devoir attendre ou va entreprendre des procédures et, en cours de procédure, va
s'apercevoir que le commerçant n'est plus saisissable ou qu'il ne pourra
pas payer la... Il va falloir recommencer les procédures.
Ça ne nous semble pas être une bonne idée. Il
faudrait prévoir une façon d'intégrer au recours, ce qui est entrepris par le consommateur, intégrer le prêteur
immédiatement pour qu'il suive le dossier. Si, en bout de ligne, il
n'est pas... on laisse la responsabilité au
commerçant, bien, ça sera le commerçant qui aura la responsabilité. Mais, si
jamais elle doit être transférée, bien, il sera déjà au dossier.
M. Lamontagne : Ça fait que ça, ça
serait votre façon d'aller plus loin?
M. Boucher (Marcel) : Oui.
M. Lamontagne : C'est que, dès le
départ, là...
M. Boucher
(Marcel) : Qu'on puisse inscrire,
qu'on puisse au moins mettre le nom, que la loi permette de mettre le nom du prêteur comme défendeur, déjà sur la
première procédure, peu importe ce qui se passe pendant la procédure.
M.
Lamontagne : Puis ça, que les partis collaborent d'une façon
régulière, ensemble, ça, c'est connu? On prend pour acquis que c'est
toujours connu, c'est toujours...
M. Boucher
(Marcel) : C'est une
disposition qui est déjà là, hein, dans la Loi sur la protection du
consommateur pour les... Les moyens de défense
sont opposables au prêteur qui collabore régulièrement avec le commerçant. Et,
jusqu'à présent, ça a été utilisé. Ça ne crée pas de problème particulier. Je
ne sais pas, en pratique, comment on... si c'est très utilisé, si c'est
problématique. Mais je sais que c'est utilisé, cette disposition-là.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Merci, M. le député. Le temps est écoulé déjà.
M. Lamontagne : Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Picard) :
Donc, je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.
Et la commission suspend ses travaux jusqu'à
15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 37)
(Reprise à 15 h 11)
Le Président (M. Matte) : ...et de
leurs téléphones.
Nous allons
poursuivre les consultations
particulières sur le projet de loi n° 134 cet après-midi. Avant de débuter
l'audition, j'aimerais savoir s'il y a consentement pour que M. Jolin-Barrette,
député de Borduas, puisse remplacer M. Lamontagne, député de Johnson. Est-ce
qu'il y a consentement?
Mme Thériault : Certainement,
consentement, M. le Président.
Une voix : ...
Le Président (M. Matte) : C'est
bien, M. le député de Borduas, la pression est terminée, vous êtes accepté.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le
Président, m'en voilà soulagé.
Le
Président (M. Matte) :
Alors, cet après-midi, nous allons entendre les organismes : la Chambre des notaires du Québec, le Barreau
du Québec et le Centre d'études en droit économique.
Une voix : ...
Le
Président (M. Matte) :
Pardon? Oui. Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on puisse, compte tenu qu'on
débute un peu plus tard, prolonger un peu plus tard?
Des voix : Consentement.
Le
Président (M. Matte) : Consentement. C'est bien. Donc, je vous dis que je souhaite la bienvenue à la
Chambre des notaires. Je vous invite, là, à
faire les présentations. Je vous informe que vous avez 10 minutes de
présentation, et, par la suite, nous allons procéder à des échanges de part et
d'autre. Le gouvernement, vous disposez de 16 min 30 s,
l'opposition
officielle, de
9 min 54 s, et le deuxième
groupe de l'opposition officielle,
6 min 36 s. Sans plus tarder, je vous laisse la parole,
si vous voulez bien présenter les gens qui vous accompagnent pour fins
d'enregistrement.
Chambre
des notaires du Québec (CNQ)
Mme Chamberland (Nancy) : Alors, bien, merci beaucoup. Permettez-moi de vous présenter Me Marc Boudreault,
notaire, qui a été, jusqu'à tout récemment et pendant 33 ans, professeur
de droit à l'Université d'Ottawa — son domaine
d'enseignement et de prédilection, les sûretés; Me Nicolas Handfield, également
notaire, chef de service à la Direction
des services juridiques à la chambre; et Me Antoine Fafard, à la Direction des
services juridiques également et également
notaire. Et je me présente : Nancy Chamberland, notaire. Je suis
administratrice au conseil d'administration de la Chambre des notaires et, cet après-midi, je
remplace le président de l'ordre, Me François Bibeau, qui est à Victoria à
la conférence annuelle de la Fédération des
ordres professionnels de juristes du Canada, en Colombie-Britannique, bien
sûr.
Alors,
M. le Président de la commission, Mme la ministre, mesdames messieurs, membres
de commission, il me fait plaisir d'être avec vous aujourd'hui à titre
de représentante de la Chambre des notaires. Nous tenons à remercier la Commission des relations avec les citoyens de
nous avoir invités à faire des représentations dans le cadre de l'étude
du projet de loi n° 134.
Les
notaires, juristes possédant une expertise en matière de financement
hypothécaire, principalement dans le
cadre de transactions immobilières, sont directement interpelés par les
objectifs du projet de loi n° 134. La chambre est donc heureuse de
participer à la consultation et d'alimenter votre réflexion entourant la protection
du consommateur.
D'entrée
de jeu, je tiens à préciser que nous épousons l'objectif de vouloir assainir
certaines pratiques qui se sont développées
au cours des dernières années dans le domaine du crédit à la consommation et
qui malheureusement visent souvent les consommateurs les plus vulnérables. La
chambre ne peut donc qu'applaudir l'initiative du législateur de vouloir
protéger les consommateurs québécois
en modernisant la loi de protection du consommateur afin qu'elle tienne
compte des réalités actuelles.
Nous
considérons toutefois que, pour véritablement être en mesure
de moderniser le crédit à la consommation et assurer une protection
accrue des consommateurs québécois, le projet de loi n° 134 doit obligatoirement
prévoir de nouvelles mesures applicables au crédit immobilier.
Comme nous l'avons
soutenu lors de consultations antérieures et comme nous le faisons encore
aujourd'hui, l'évolution et surtout la sophistication du crédit immobilier
au cours des 30 dernières années nécessitent une modernisation des règles applicables afin de protéger le
consommateur. Le crédit immobilier, on le sait tous, est souvent la dette la
plus importante qu'un consommateur
contractera dans sa vie. Et l'avènement de différents produits financiers en
matière de financement hypothécaire nous permet aujourd'hui d'affirmer
qu'il existe une connexion très étroite entre le crédit immobilier et le crédit
à la consommation.
Ainsi,
s'il n'y avait qu'un seul message à retenir cet après-midi de la Chambre des
notaires, nous aimerions que la commission retienne ce message. S'il ne
contient pas de mesure afin de moderniser le crédit immobilier, le projet de loi n° 134 ne pourra malheureusement espérer
atteindre l'objectif de moderniser le crédit à la consommation dans le
but de protéger les consommateurs québécois.
Il
faut savoir que, depuis 1994, le Code civil du Québec permet que les
hypothèques puissent garantir l'ensemble des obligations présentes et futures contractées par un consommateur. Il
s'agit d'une clause que l'on retrouve maintenant dans presque tous les
contrats d'hypothèque et dont les conséquences sont souvent très mal comprises
par les consommateurs. Or, ces derniers doivent avoir toutes les informations
pertinentes, nécessaires et utiles quand vient le moment de signer un
engagement aussi important pouvant avoir d'énormes répercussions sur leur santé
financière et sur celle de leurs proches.
Parallèlement à cette
problématique, il faut rappeler la portée des articles 21 et 22 du règlement
d'application de la loi de protection du
consommateur. De façon générale, ceux-ci prévoient que le contrat de crédit qui
est ou qui doit être garanti par une
hypothèque immobilière de premier rang est exempté de l'application de la loi
presque en totalité. Or, comme on vient de le mentionner, l'hypothèque
immobilière de premier rang sert dorénavant à garantir n'importe quelle
obligation présente ou future du consommateur. Ce type d'hypothèque est
maintenant la norme en matière de crédit immobilier.
On
comprend donc que l'exemption prévue à cette disposition réglementaire s'étend
également à tout contrat de crédit
présent ou futur auquel le consommateur a ou aura consenti, et ce, considérant
qu'il est ultimement garanti par une hypothèque
immobilière. Le consommateur subit alors une diminution substantielle de sa
protection, considérant que la plupart de ses obligations seront exclues
et que la Loi sur la protection du consommateur ne pourra être appliquée par
l'effet de cette disposition réglementaire.
En
bref, il est impératif de revoir les dispositions de la Loi sur la protection
du consommateur en les adaptant à la réalité
actuelle des contrats de crédit garantis par hypothèque immobilière, souvent,
on le répète, la dette la plus importante qu'un consommateur contractera au cours de sa vie. Il en va, bien sûr,
de la protection du consommateur et de la lutte contre le
surendettement.
Alors,
en espérant avoir su illustrer très brièvement mais clairement la position de
la Chambre des notaires sur le projet n° 134, je vous invite,
mesdames et messieurs, à échanger avec nous sur ce sujet, et mes collègues se
feront un plaisir de répondre à vos questions. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Matte) : Je vous remercie pour votre exposé.
J'inviterais la ministre pour débuter la période d'échange.
• (15 h 20) •
Mme Thériault : Merci, M. le Président. Tout d'abord, j'aimerais saluer
nos invités, évidemment, Me Chamberland, qui nous a exposé le point
de vue de la Chambre des notaires, les personnes qui l'accompagnent, le
Pr Boudreault, Me Handfield et Me Fafard. Merci d'être en
commission parlementaire.
Évidemment,
je vous dirais que c'est ma première commission parlementaire à titre de
ministre responsable de la Protection
des consommateurs mais pas ma première commission parlementaire puisque j'en ai
fait quand même passablement
beaucoup. Ça fait déjà 15 ans que je suis dans ce Parlement-ci, et j'ai eu le
plaisir de siéger à la Commission des
institutions et de présider les travaux, donc le travail que fait M. le
Président, donc ce qui me permettait d'être en contact régulier avec la
Chambre des notaires ainsi que le Barreau du Québec, qui va suivre tout de
suite après vous.
Évidemment, toutes
vos remarques sont prises en considération. Je sais que vous avez des
discussions avec l'Office de la protection
du consommateur. Votre mémoire est quand même très bien accueilli. Je trouve
que... Vous avez parlé d'assainir
certaines pratiques. Donc, oui, effectivement, le projet de loi qu'on a devant
nous... Dois-je le rappeler, en 2012,
il y a un projet de loi qui avait été déposé dans une autre législation. Il y a
eu des élections, changement de gouvernement,
on n'a pas rappelé le projet de loi,
gouvernement minoritaire aussi, donc il
n'a pas eu beaucoup de temps pour pouvoir faire de la législation. Je
pense que c'est correct, les gens comprennent le contexte. Le fait d'avoir une
ministre maintenant qui revient, dédiée entièrement à la protection du
consommateur, je crois que ça fait aussi la différence pour pouvoir procéder
des dossiers parallèlement au ministère de la Justice.
Je
vais me permettre un commentaire par rapport au message que vous nous demandez
de retenir sur revoir les règles
entourant les hypothèques. Présentement, l'exclusion est dans le règlement. Si
nous retirions l'exclusion dans le règlement
qui suivra l'adoption de cette loi-ci, il n'y a rien qui nous garantit que ça
fonctionnerait quand même, parce que je retire un gros morceau si je
fais ça. J'aimerais avoir votre avis là-dessus, parce que, comme on a dit
depuis qu'on a commencé, là, vous avez une portion de ce qui a été déposé en
2012, c'est la phase un.
Il y a une ministre à
temps plein. Ce matin, le groupe qu'on a entendu demandait à ce qu'on puisse
faire de la législation deux fois par année. Je pense qu'il y a
beaucoup de choses au niveau du consommateur qu'on peut
trouver, qu'on peut toucher. On a toujours
le choix de déposer un gros projet de
loi qui va toucher une panoplie de
groupes où on pourrait entendre 50,
70 groupes, 100 groupes en commission
parlementaire, avoir des avis très
partagés, ou le limiter pour toucher à des choses bien particulières,
comme ce qu'on fait présentement, où on s'attaque au surendettement, aux points
de fidélisation, pour répondre aux nouvelles réalités qu'on vit.
Donc,
il est évident qu'il y a des choix qui ont été faits auparavant.
Ça fait une semaine seulement que je porte le chapeau de ministre responsable de la Protection des consommateurs,
et il m'apparaissait fort important de ne pas reporter les consultations qui avaient été mises à l'agenda aujourd'hui, demain et la semaine
prochaine pour pouvoir aller de
l'avant. Vous savez que j'aurais pu
dire : Non, j'aimerais ça qu'on reporte un peu. Mais, étant donné que le
temps de commission est fort
important, qu'il y a 10 commissions, que les 10 ne peuvent pas siéger en même temps, le temps était déjà réservé, je pense que c'était important de pouvoir appeler ce projet de loi là, être capable d'entendre les groupes, et je suis convaincue
qu'avec la collaboration de mes collègues de l'opposition, pour leur avoir
parlé, que notre but commun, c'est de faire avancer les droits des
consommateurs et d'être capables de les protéger.
Donc,
j'aimerais vous entendre : Qu'est-ce
qui arriverait si nous décidions, dans le règlement qui va suivre ce
projet de loi là, de retirer cette
exception-là? Et, par la suite, M. le Président, je pense que mes collègues
vont vouloir certainement s'entretenir avec nos invités, donc je vais
laisser la place aux députés.
Le Président (M.
Matte) : C'est bien. Je vous remercie, Mme la ministre. Je vous
invite... M. Sauvageau.
M. Boudreault (Marc) : Alors, si
j'ai bien compris votre question,
c'est de savoir qu'est-ce qui
arriverait si on enlevait l'exemption qui est prévue dans le règlement
plus tard. Ça, il faut bien voir que le but, c'est de protéger le consommateur, hein? Le but de la loi, c'est
d'abord de protéger le consommateur. Il reste que, quand on est en
matière hypothécaire, il est clair qu'on ne
veut pas, à cause de la nature de l'hypothèque qui est faite par acte notarié,
on ne veut pas que tous les articles
s'appliquent, il faut qu'on fasse un tri parmi les articles applicables pour décider quelles mesures vont s'appliquer à l'hypothèque. Puis il faudrait aussi... on doit regarder aussi l'autre
mécanisme qui est prévu dans le règlement,
c'est-à-dire qu'on a un avis qui vient donner de l'information au débiteur, et cet
avis-là pourrait également être bonifié
pour donner plus d'information, être amélioré, etc., comme on le dit dans les
recommandations. Alors, je pense qu'il faut plutôt se dire qu'il doit y
avoir certaines dispositions qui vont être exclues. Mais ce qui est peut-être
le plus important, c'est de s'assurer que,
quand des obligations sont garanties par des hypothèques, que les obligations
garanties par les hypothèques vont quand même offrir une protection au
consommateur.
À l'heure actuelle,
si je peux me permettre rapidement, là, vous savez qu'avec l'hypothèque
parapluie, depuis 1994, l'hypothèque peut
garantir n'importe quel genre d'obligation. Alors, ça peut être n'importe
quelle obligation présente ou future
du débiteur, ça peut être n'importe quelle obligation présente ou future des
personnes qui sont assimilées au débiteur
par l'acte d'hypothèque, comme le conjoint, la caution, le futur acquéreur,
etc., puis ça peut être aussi
n'importe quelle obligation
qui est due envers le créancier ou envers des personnes assimilées au
créancier. Et ça, on vise le cessionnaire, une personne qui acquerrait
une partie de la créance, un subrogé. Ça peut être aussi parfois des filiales,
des compagnies filiales du prêteur.
Alors,
on voit qu'avec l'hypothèque parapluie, maintenant, il y a énormément
d'obligations qui sont visées par l'hypothèque. Puis, à
l'heure actuelle, avec le règlement tel qu'il est fait, parce qu'il date de
1981, puis, en 1981, les hypothèques ne
couvraient qu'une seule obligation, c'était une obligation déterminée seulement,
alors, depuis 1994, les hypothèques
couvrent une multitude d'obligations. Puis la conséquence de ça, c'est que toutes les
obligations qui sont garanties par une hypothèque
sont exclues de toute protection en vertu de la Loi sur la protection du
consommateur. À toutes fins pratiques, là,
il n'y a aucun article qui s'applique dès qu'une obligation est garantie par
une hypothèque.
Alors,
évidemment, entre ça puis dire : On rend tous les articles applicables,
là, il y a un monde, il y a un monde. Il faut plutôt cibler quelles sont
les dispositions qui doivent s'appliquer aux hypothèques immobilières. Puis ça,
la Chambre des notaires tient à ce que ça
soit fait, tient à ce qu'il y ait certaines dispositions qui s'appliquent. Puis
il faut aussi conserver les bons
mécanismes qui ont été mis en place, comme l'avis de 48 heures. Alors, l'avis
de 48 heures sert. Ce qu'on voudrait, c'est que l'avis de 48 heures
puisse être utilisé dans plus de cas que présentement. Alors, avec l'hypothèque
de premier rang, il n'y en a pas, d'avis de 48 heures, il n'y a aucune
protection.
Le Président (M. Matte) : C'est bien. Maintenant, est-ce qu'il y a... Oui,
j'inviterais le député de Beauce-Sud... Oh!
Mme Thériault : Bien, je vais
juste répondre.
Le Président (M. Matte) : Ah!
Mme
Thériault : Tout simplement que l'Office de la protection du
consommateur va travailler avec vous pour voir de quelle manière, s'il y a une possibilité qu'on puisse... Parce
qu'effectivement c'est sûr que, si on le retirait du règlement, il faut
prévoir des modifications tout de suite dans le projet de loi. Donc, c'est pour
ça que je parlais : une phase un, phase
deux. Parce que j'entends ce que vous dites. Je suis parfaitement consciente
que, lorsqu'on a une hypothèque, c'est probablement
l'investissement le plus important d'une vie la plupart du temps. On comprend,
et le fait qu'on puisse mettre plein
de choses dans l'hypothèque, là, ce n'est pas nécessairement une bonne chose au
niveau de l'endettement. Je vous donne
raison dans ce que vous dites. Sauf que mon principal souci, c'est de ne pas
retarder l'adoption du projet de loi, et, s'il faut que je reparte des consultations, que je refasse un processus
législatif, ma crainte, c'est de ne pas être capable de l'adopter à
l'automne.
Mme Chamberland (Nancy) : Me
Handfield voulait compléter. Ça va?
Le Président (M. Matte) : Oui.
M. Handfield (Nicolas) : On comprend
totalement ça, puis on travaille avec l'Office de la protection du consommateur
depuis plusieurs années justement pour améliorer la protection, puis on
apprécie la relation qu'on a avec l'office. Ce qu'on veut s'assurer, c'est que
les bonnes dispositions qu'il y a dans ce projet de loi là n° 134 soient applicables sans que certains créanciers... on ne
nommera pas de nom, mais pourraient dire : Bien, on va passer, on
va demander qu'il y ait une hypothèque de premier rang, donc toutes les dispositions
sur le crédit à coût élevé mais non applicables
parce que c'est une hypothèque de premier rang, parce qu'il y a un règlement.
Donc, on va travailler main dans la
main avec l'office pour proposer des éléments, ça va nous faire plaisir, mais
il faut s'assurer que qu'est-ce qui est contenu, qu'on trouve excellent dans le projet de loi, mais ça, c'est applicable,
qu'on ne le — excusez-moi
l'anglicisme — by-passe pas parce qu'on passe par une
hypothèque de premier rang dès que la loi est sanctionnée.
Mme Chamberland (Nancy) : M. Fafard.
Le Président (M. Matte) : Oui.
M. Fafard
(Antoine) : Oui, donc c'est juste pour clore là-dessus. L'hypothèque
parapluie, comme Me Boudreault disait,
vraiment, c'est souvent sur les hypothèques de premier rang. Donc, à ce
moment-là, l'article 21 fait en sorte que la LPC ne peut s'appliquer. Ce qui fait en sorte aussi que les hypothèques
de second rang ou d'autre rang qui sont couvertes par l'article 22, qui
là offre certaines protections, comme justement l'avis de 48 heures, ne sont
presque plus utilisées aujourd'hui. Donc, on
a souvent recours... on n'a presque plus recours aux hypothèques de deuxième
rang. Donc, c'est pour ça qu'il y a aussi — et on en parle dans le
mémoire — une
nouvelle réalité dans le monde du crédit immobilier, puis on souhaite que
justement le projet de loi en tienne compte. Donc, c'était vraiment pour
rajouter ce point.
Le Président (M. Matte) : Très bien.
Mme la ministre.
Mme
Thériault : Ce qui veut dire que, si on commençait quelque
chose dans le règlement et qu'on complétait dans la phase deux, ça
pourrait vous rendre heureux.
M. Handfield (Nicolas) : C'est...
Mme Thériault : Ça dépend
quoi.
• (15 h 30) •
M. Handfield (Nicolas) : Si la loi
prévoit que certains éléments s'appliquent aux hypothèques nonobstant l'article
du règlement, si vous voulez être sûr et certain puis de travailler sur une
phase deux... Mais qu'est-ce qui est important,
c'est qu'il ne faut pas que les dispositions actuelles de la loi, qui sont dans
le projet de loi, soient tassées à cause d'un règlement. Juridiquement parlant, la loi est plus forte, il faut
que la loi parle. Puis aussi c'est en réaffirmant qu'avec l'arrêt
Marcotte de la Cour suprême du Canada... qui est venu réaffirmer que la loi de
protection du consommateur s'applique à
toute institution financière, à tout créancier. Et on sait, avec le
projet de loi C-29 du gouvernement
fédéral, qu'ils vont
revenir puis qu'ils vont essayer de faire
en sorte que la loi de protection du consommateur ne s'applique
pas à toute institution financière. C'est le moment que le législateur fasse en
sorte que la loi soit vraiment respectée dans des mesures très importantes,
comme le projet de loi n° 134 contient.
Mme Thériault : Merci.
Le Président (M. Matte) : Je vous
remercie. Maintenant, j'inviterais le député de Beauce-Sud.
M.
Busque : Merci, M. le Président. Alors, j'en profite pour saluer mes collègues, Mme la ministre, collègues de l'opposition officielle ainsi que la deuxième opposition, ainsi, bien entendu, que nos invités spéciaux, les
représentants de la Chambre des notaires.
Alors, Mme Chamberland, M. Boudreault, M. Handfield et M. Fafard, merci d'être
là. Merci de nous partager vos opinions cet après-midi.
Je
reviendrais sur... tantôt, Mme Chamberland, au début, dans votre présentation,
vous avez mentionné l'impact de l'hypothèque
sur la consommation en tant que telle. Alors, vous vouliez sûrement parler de
l'hypothèque parapluie, là, et l'incidence que ça avait sur le crédit à
la consommation.
Une voix : Sur la marge de
crédit...
M. Busque : Sur les marges de
crédit. Alors, on revient un peu à l'explication que M. Boudreault parlait, là,
lorsqu'il parlait du fameux... de l'hypothèque parapluie, en partie.
M. Boudreault (Marc) : Bien,
c'est-à-dire qu'il y a deux éléments. Il y a l'hypothèque parapluie qui va
faire en sorte qu'il y a une multitude
d'obligations qui vont devenir exclues de l'application de la loi si tu as une
hypothèque de premier rang. Ça, c'est un
premier élément. Mais il y a un autre élément qui s'ajoute, c'est qu'alors
qu'auparavant, avant 1994, les
hypothèques servaient toujours à garantir un emprunt, un prêt, alors,
maintenant, il faut constater que, de plus en plus, les hypothèques
garantissent une marge de crédit. Alors, c'est ce que les consommateurs
préfèrent. Puis, à ce moment-là, quand c'est
une marge de crédit, il reste que le montant maximal de la marge de crédit est
toujours fixé au maximum de ce que le
débiteur peut rembourser. Même s'il ne la prend pas toute au complet, il se
fait fixer 250 000 $, même s'il a besoin de juste
150 000 $.
Qu'est-ce que
ça cause, vous pensez? Le consommateur est porté à consommer, à aller chercher
des biens et des services, à mettre
ça sur la marge de crédit. Puis, à ce moment-là, l'hypothèque monte et il se
retrouve dans une position où il
n'est plus capable de payer. C'est ça, le surendettement. C'est comme un
incitatif à consommer, puis ça, ça se produit à cause de la marge de
crédit. Ça n'enlève pas l'autre élément, l'autre élément en plus de la marge de
crédit qui est l'obligation principale...
vous avez, en plus, toutes les autres obligations qui peuvent être garanties
par l'hypothèque puis qui viennent s'ajouter aussi au montant total de
l'hypothèque.
M. Busque : C'est toujours
préautorisé, c'est toujours disponible, n'est-ce pas?
M. Boudreault (Marc) : La marge de
crédit?
M. Busque : Oui.
M.
Boudreault (Marc) : Bien, c'est-à-dire qu'on le fixe normalement au début, à moins qu'il y ait...
Oui, on le fixe au début, on fixe le montant au début. Si jamais on
voulait remonter la marge, ça prendrait une nouvelle hypothèque.
M. Busque : Dans ce contexte-là,
est-ce qu'on devait envisager de défendre les marges de crédit au niveau des hypothèques?
M.
Boudreault (Marc) : Non, il
ne faut pas les défendre, il faut juste être conscient qu'on devrait peut-être
limiter, parfois, le montant de l'hypothèque
ou, encore mieux, informer le consommateur. En tout cas, c'est un danger, c'est
un danger, par rapport aux marges de crédit,
qui se produit. Peut-être que, dans certains cas, le débiteur, étant mieux
informé, pourrait justement comme limiter cette
marge de crédit là. Mais il faut faire attention; il faut faire attention,
parce que c'est quand même un incitatif. Les moyens de limiter la marge
de crédit, ça, c'est peut-être un peu plus délicat, mais il y a peut-être des
façons de le faire.
Effectivement, on pourrait peut-être trouver un
moyen par lequel on protégerait le débiteur contre sa propre audace, si vous voulez, contre le fait qu'il soit
lui-même porté à se surendetter. Mais, comme c'est là, de la façon dont
les hypothèques sont faites, il n'y a personne qui empêche que ce soit le
montant maximal pour la marge de crédit. Puis surtout il n'y a rien qui empêche
que le montant de l'hypothèque, lui, soit fixé à n'importe quel montant, parce
que le montant de l'hypothèque peut être très élevé, peut être bien au-dessus
de la valeur marchande de l'immeuble.
C'est
ce qui se fait en pratique. La maison vaut 250 000 $, il n'y a rien
qui nous empêche de créer une hypothèque pour 500 000 $ immédiatement. Qu'est-ce qu'on se dit? Si
jamais la valeur de l'immeuble augmente, bien, à ce moment-là, ce surplus-là permettra de garantir à nouveau des
obligations plus grandes. Et, s'il y a des obligations qui sont dues par
d'autres personnes que le débiteur, parce que souvent c'est aussi garanti par
l'hypothèque, bien, ce surplus-là servira à garantir les obligations de toutes
les autres personnes. Mais l'impact est toujours le même. Du moment qu'on a une
hypothèque comme ça, du moment que c'est des obligations
garanties par hypothèque, à l'heure actuelle, c'est une hypothèque de premier rang, puis ce sont toutes des hypothèques de premier rang, la Loi sur la
protection du consommateur ne protège
pas le consommateur, elle ne s'applique pas. Tout ce qu'il reste, ce sont les dispositions d'une loi fédérale, la Loi sur les banques, ou des lois
semblables à la Loi sur les banques. C'est tout ce qu'il reste.
Autrement dit, quand on parle de crédit immobilier, c'est comme si le législateur
québécois permettait que sa Loi sur la protection du consommateur ne s'applique
pas, tout simplement. Alors, les gens se retrouvent sans aucune
protection. C'est ça, l'impact à l'heure actuelle...
Le Président (M.
Matte) : Je vous invite à conclure.
M. Boudreault
(Marc) : ...des dispositions telles qu'elles sont connues.
Le Président (M.
Matte) : Je vous remercie. Le temps étant écoulé, j'invite la députée
de Marie-Victorin à poursuivre les échanges.
Mme
Fournier : Merci, M. le Président. Merci d'être là cet après-midi avec nous pour
exposer quelque chose qui est effectivement très important, parce que c'est vrai qu'une
hypothèque, c'est souvent la plus grosse dette que va contracter un
particulier. Alors, sachez qu'on vous entend aujourd'hui. Je crois qu'il y a de
la volonté, du côté de la ministre aussi, de prendre en considération vos
recommandations, de se pencher sur l'enjeu que soulevez aujourd'hui.
Et
moi, j'aimerais peut-être que vous nous parliez davantage... justement, tantôt, vous avez évoqué l'urgence en ce qui a trait avec la situation du côté du gouvernement fédéral. Si vous pouviez un peu développer ce que vous vouliez dire par
là, ça pourrait être intéressant.
M.
Handfield (Nicolas) : En
fait, comme en fait part dans notre mémoire, l'automne dernier, la chambre a
interpelé le public par rapport à la situation de la modification amenée par le projet de loi C-29 au gouvernement fédéral, qui allait faire en sorte
que la loi de protection du consommateur ou toutes les lois de niveau
provincial de protection du consommateur ne s'appliqueraient pas, au détriment
de la loi fédérale, quand que c'est une institution financière soumise à la Loi
sur les banques.
Donc,
l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité une motion disant
que c'était important de réaffirmer que la loi de protection du consommateur devrait s'appliquer. Puis même la Cour suprême du Canada, dans l'arrêt Marcotte, en 2014, est venue
dire que ça s'appliquait, étant donné qu'il n'y avait pas de problématique
constitutionnelle qu'il y ait une loi provinciale de protection du consommateur
qui puisse s'appliquer aux activités d'offre de services financiers.
Donc,
c'est pour ça qu'on dit que c'est important que le législateur
québécois fasse en sorte que sa loi provinciale de protection du consommateur s'applique à tout
produit financier qui est offert. Parce
que les consommateurs, oui,
ils reçoivent des conseils quand que c'est
une hypothèque. Le notaire intervient en toute fin de processus
pour lui expliquer les conséquences
juridiques de son acte, de mettre une sûreté, mais, par rapport à un prêt, tout le prêt, son conseiller financier à l'institution qui peut lui expliquer, plus souvent
qu'autrement, là, le contrat de prêt ne sera même pas signé à l'institution
financière, ça va être le notaire qui va signer le prêt pour le bénéfice de l'institution,
et aussi la sûreté, l'hypothèque.
Donc,
on intervient tout... Puis on s'entend que tu vas chez le notaire, dans
48 heures, tu déménages, tu penses plus à ton camion de déménagement — ou,
quand tu fais un refinancement hypothécaire, au bateau que tu vas t'acheter
avec ta marge de crédit — que
tu vas penser aux conséquences juridiques de l'acte que tu es en train de
poser. Donc, c'est pour ça qu'on
indique le besoin d'information supplémentaire que le consommateur doit obtenir puis aussi qu'on
dit au législateur québécois de mettre des mesures concrètes pour
s'assurer de réaffirmer la position de cette loi-là, de son champ de
compétence.
Mme
Fournier : Oui, c'est ça.
Donc, on s'entend que ça va être plus difficile par la suite pour le gouvernement
fédéral de revenir sur la loi du Québec, si nous, on a déjà légiféré en ce sens-là.
Est-ce que c'est ça que vous entendez? Est-ce que vous pouvez expliquer
un peu...
• (15 h 40) •
M.
Handfield (Nicolas) : Bien, en tant que tel, si on fait en sorte que la loi de protection du consommateur ne
s'applique pas à la quasi-totalité des
produits offerts à une banque à cause qu'ils sont couverts par une hypothèque
parapluie de premier rang, comment qu'on
peut venir dire que notre loi de protection du consommateur, au Québec,
contient des dispositions plus fortes pour protéger le consommateur, parce
que c'est les choix de la société québécoise qui ont été choisis, si on ne peut
pas l'appliquer?
Donc,
qu'est-ce qu'on dit, c'est qu'il faut s'assurer que la loi s'applique, quand
elle doit s'appliquer, sur des produits comme, par exemple, des cartes de crédit. On sait que nos dispositions par rapport aux cartes de crédit, avec les contrats faits en langage clair, différentes dispositions qui sont prises... Mais, si la carte de crédit est prise à la même
institution financière qu'une hypothèque
parapluie de premier rang, bien, ça pourrait faire en... dire : Mais finalement...
mais on ne veut plus appliquer la disposition de la loi. Ça pourrait
arriver présentement, avec les dispositions du règlement, avec 21 puis 22 du règlement.
Donc, il faut s'assurer que, quand il y a une disposition sur un autre produit
que le prêt immobilier, il faut s'assurer que la LPC s'applique pour réaffirmer
c'est quoi, le... pourquoi qu'on a donné le caractère d'ordre public de cette
loi-là.
Mme
Fournier : Parfait. Puis ça,
selon vous, est-ce que ça se règle en abolissant le 6c dans la loi de la
protection du consommateur ou ça prend un projet de loi totalement différent?
M. Handfield (Nicolas) : Comme Me Boudreault disait tantôt, ce n'est pas
toutes les dispositions de la LPC qui devraient s'appliquer à une hypothèque. C'est pour ça qu'on est pour que
6c soit aboli, parce que le fait de complètement faire en sorte qu'une
hypothèque immobilière ne soit pas applicable, on ne peut pas être pour ça.
Donc, on est contents que 6c soit
aboli. Mais on veut s'assurer que la loi soit claire sur quand qu'elle s'applique
puis quand qu'elle ne s'applique pas, pour que le consommateur... pour
pas qu'il ait à faire : O.K., on va vérifier la loi, puis, après ça, on
vérifie le règlement, puis que là on vérifie dans deux gros textes pour
s'assurer : Est-ce que qu'est-ce que je suis en train de faire, je
suis protégé ou non? Il faudrait que ça soit clair dans un seul texte :
dans la loi.
Le Président (M.
Matte) : Oui.
M. Boudreault (Marc) : Dans le
fond, ce qu'il faudrait faire, là,
c'est reprendre les articles 21 et 22 du règlement, les modifier selon
les recommandations qu'on a été faites, hein, pour mieux en baliser
l'application puis les exemptions, à quoi ça s'applique,
bonifier l'avis de 48 heures comme on le recommande, prendre ces dispositions-là,
21 et 22, et les mettre dans la loi. Et là, à ce moment-là, on aurait quelque
chose qui se tient. Alors, c'est de reprendre le texte de 21 et 22, bonifier
les mesures puis l'application puis le mettre dans la loi. Et là ça serait
parfait.
Mme
Fournier : Très bien.
Finalement, j'aimerais peut-être que vous nous
éclairiez sur la définition que vous donnez au mot «consommateur». Dans
votre recommandation... Donc, la recommandation n° 7... pardon, la 8,
bon :
«Que
la définition de ce qu'est un "consommateur" soit modifiée dans la
Loi [de] la protection du consommateur, afin d'indiquer qu'il s'agit d'une "personne physique, à
l'exception de celle qui se procure un bien ou un service aux fins de
l'exploitation d'une entreprise".»
Donc, selon vous,
quelle application cette recommandation-là donnerait par rapport à la loi
existante?
Mme Chamberland
(Nancy) : C'est Me Fafard qui va vous répondre.
Mme
Fournier : Parfait.
M.
Fafard (Antoine) : Donc, présentement, par rapport à la définition du consommateur, c'est sûr que
là, si on regarde la LPC et le Code civil
du Québec, il y a un besoin d'harmonisation. Déjà, en
partant, c'est ça, on voit que la notion de commerçant, qui n'est déjà plus utilisée dans le Code civil du Québec, est encore utilisée dans la Loi sur la
protection du consommateur. Donc, c'est certain que nous, on propose qu'il
serait souhaitable que la définition de ce qu'est un consommateur soit modifiée pour indiquer qu'il s'agit d'une personne
physique à l'exception de celle qui procure un bien ou un service aux fins de l'exploitation d'une
entreprise. On ne veut pas venir pénaliser nécessairement les gens
justement qui offrent des services, les
entrepreneurs, les artisans, à ce
moment-là, qui offrent des services,
tout ça, pour venir les assimiler à des consommateurs. Mais on pense qu'il
y a vraiment un besoin d'harmonisation.
C'est sûr qu'un peu
comme le même principe que Me Handfield disait, c'est important que nos lois
puissent être bien comprises, donc que le
citoyen peut vraiment bien se référer dans les différents textes législatifs
qui sont à portée de main. Donc, je
pense que c'est vraiment l'élément principal. Vraiment, ce qu'il faut retenir
de cette recommandation-là, c'est
vraiment une harmonisation par rapport aux... les deux lois, donc la LPC et le
Code civil du Québec, à ce moment-là, quelque chose qui a été quand même
mentionné lors de la dernière consultation, donc lors du projet de loi
n° 24, en 2011. Donc, quelque chose qui est quand même toujours véhiculé
par la Chambre des notaires, mais vraiment dans un souci d'harmonisation.
Mme
Fournier : Merci beaucoup. Je pense que votre rapport est extrêmement intéressant
aujourd'hui. Puis sachez qu'on en prend vraiment bonne note pour la suite des
choses.
Une voix :
Merci.
Le Président (M.
Matte) : Je vous remercie. J'invite le député de Borduas à poursuivre
les échanges.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Me Chamberland, Me Boudreault, Me Handfield, Me
Fafard, merci de votre présence. Effectivement, le mémoire de la chambre est fort intéressant, mais, si vous voulez, on va juste faire un petit «wrap-up» de ce que vous avez dit parce que
hypothèque de premier rang, deuxième rang, c'est plus ou moins clair
pour les gens qui nous écoutent. Donc, avant 1994, je veux m'acheter une
maison, je m'en vais chez mon notaire, je contracte un emprunt hypothécaire
avec la banque ou avec la caisse. Qu'est-ce qui arrive? Le notaire va faire un
acte hypothécaire, donc il va inscrire un acte,
au registre foncier, sur ma maison, sur mon condo puis il va dire : Bon,
bien, pour assurer la garantie de mon prêt, bien, mon immeuble, là, ma maison
va être grevée d'un acte hypothécaire.
Arrive 1994.
Maintenant, on permet les marges de crédit hypothécaire. Donc, à l'intérieur
d'un même contrat de crédit... Dans le fond,
j'achète ma maison; maintenant, au lieu que ça soit un acte hypothécaire qui
est fait par le notaire, c'est une
marge de crédit. Donc, je contracte une marge de crédit hypothécaire qui est
inscrite avec un contrat rotatif, pour être
plus précis. Alors, c'est possible de garantir à la fois ma maison... Puis là,
au fur et à mesure que je rembourse mon hypothèque, si on veut, bien là ça dégage une marge de manoeuvre, ça
devient une marge de crédit hypothécaire qui est disponible pour le
crédit à la consommation. Donc, avec ça, au fur et à mesure, je peux m'acheter
mon char, je peux m'acheter un vélo, je peux
m'acheter un voyage dans le sud, je
peux m'acheter... je peux me faire une chirurgie plastique, je peux me
mettre du Botox dans la face. Tout ça, c'est garanti. On se comprend là-dessus?
O.K.
Vous,
ce que vous dites, c'est qu'on devrait modifier... on devrait, dans le fond, abroger 20 et 21 du règlement, les mettre dans la loi pour faire
en sorte que les consommateurs, lorsqu'ils ont des contrats de crédit
accessoires à la maison — supposons,
j'ai pris du Botox dans mon visage, je l'ai financé — on
fasse en sorte que, désormais, bien, le consommateur puisse avoir accès à la
Loi sur la protection du consommateur. Si c'est uniquement le contrat de crédit
rattaché au bien immobilier, à la maison, là, à ce moment-là, on maintient
l'exception. C'est ça que je comprends?
Une voix : Vas-y, vas-y.
M. Boudreault (Marc) : Ce n'est pas
tout à fait ça, c'est-à-dire que...
M. Jolin-Barrette : Expliquez-moi.
M. Boudreault (Marc) : ...quand vous
avez votre marge de crédit... Aujourd'hui, on va souvent y aller. L'obligation principale, c'est la marge de crédit.
La marge de crédit, si c'est une hypothèque de premier rang, la Loi sur
la protection du consommateur ne s'applique
pas, l'article 21 du règlement. Alors, ça veut dire qu'il n'y a aucune
mesure, il n'y a même pas d'avis de 48 heures, il n'y a aucune information
qui est donnée au débiteur, le débiteur n'a pas à recevoir quoi que ce soit de la part du créancier. Pourquoi? Parce que
la loi ne s'applique pas, dès que c'est un contrat de crédit — et la
marge de crédit est un contrat de crédit — garanti par une hypothèque
immobilière de premier rang.
Ça,
nous, on trouve que, quand il s'agit, comme ça, de marges de crédit, il faudrait qu'il y ait
plus d'information donnée au
débiteur, que le débiteur puisse recevoir, comme c'est prévu à l'article
22 pour les hypothèques de deuxième rang.
Mais on voudrait que ça devienne la
même chose pour les hypothèques de
premier rang; peu importe le rang, du moment
que ce n'est pas une obligation déterminée, on voudrait que le débiteur reçoive
plus d'information, qu'il sache c'est quoi, son taux de crédit, qu'il sache c'est quoi, les conditions,
etc. Mais, à l'heure actuelle, marge de crédit ou prêt, la Loi sur la
protection du consommateur ne s'applique pas.
Alors là,
vous, vous faites référence à l'obligation principale. Mais l'autre élément sur lequel il
faut toujours insister, c'est que, en plus de garantir la marge de crédit, l'hypothèque va garantir toutes
les obligations présentes et futures du débiteur, parfois de son conjoint, de la caution, de toutes sortes de
personnes non seulement envers le créancier, mais envers d'autres créanciers assimilés au créancier. Et là
ça signifie... Puis parfois ça peut être une personne vivant sous le
même toit qui est assimilée au débiteur. Ça veut dire que l'enfant de 18 ans,
qui vit sous le toit avec son père puis sa mère, qui fait une demande de carte de crédit, s'il y a une hypothèque qui
existe qui garantit les obligations présentes et futures tant du débiteur que des personnes qui vivent sous
le même toit, ça veut dire que la demande de carte de crédit n'est pas soumise à la Loi sur la protection du
consommateur. Ça veut dire : n'importe quelle obligation
future ne sera pas soumise à la Loi sur la protection du consommateur.
Autrement dit, à chaque fois qu'on va avoir une obligation
qui va être contractée, il faut se demander : Oui, mais y a-tu une
hypothèque sur la maison? Puis, s'il y a une hypothèque sur la maison, est-ce
que ça garantit ce type d'obligation? Si la réponse est oui, l'obligation n'est plus sujette à la Loi sur la protection du consommateur. Autrement
dit, par le crédit immobilier, on se rend
compte qu'il y a un tas d'obligations qui ne sont pas soumises à la Loi sur la
protection du consommateur. Le simple fait qu'il y ait un crédit immobilier, ça
entraîne cet effet-là.
On voudrait qu'il y ait
plus d'information. Premièrement, que
le débiteur sache c'est quoi, les obligations garanties. Moi, je l'ai fait, l'exercice. Vous prendrez un
acte d'hypothèque de 52 pages puis vous essaierez de savoir c'est quoi, les
obligations garanties, vous allez voir que c'est un méchant exercice, ce n'est vraiment
pas facile. Il faudrait que le créancier dise au débiteur, dans un avis : Voici quelles sont les obligations
garanties, puis, si j'en ai oublié une, elle n'est pas couverte par l'hypothèque.
Ça, c'est une de nos recommandations. Alors, que ça soit clair, qu'il sache
dans quoi il s'embarque. Alors, c'est
des mesures comme ça qu'on veut mettre en place. Je ne sais pas si je réponds à
votre question, mais c'est ça.
• (15 h 50) •
M.
Jolin-Barrette : Mais d'où
l'importance de le mettre dans le cadre du projet de loi n° 134, parce
que, lorsque les gens vont à la banque ou à la caisse pour contracter un
prêt hypothécaire, ils se retrouvent démunis face à cette situation-là, ils
contractent pour quelque chose qu'ils ne sont même pas au courant généralement.
M. Boudreault (Marc) : Exact.
M. Jolin-Barrette : On pourrait dire
que leur consentement n'est pas éclairé tant que ça.
M.
Boudreault (Marc) : Exact.
Il va l'être par le notaire, mais trop tardivement dans le processus, parce
que, quand le notaire va arriver, c'est en
bout de ligne, puis il est trop tard, le déménagement est déjà fait, tout est
fait, c'est trop tard. On veut que
l'avis de 48 heures soit donné beaucoup plus tôt, dans les 48 heures
suivant l'offre de financement — ce n'est
pas du tout à la même place, là — et là le débiteur va savoir c'est quoi,
l'hypothèque. Parce que, quand vous faites affaire avec un courtier hypothécaire, là, pensez-vous que le courtier
hypothécaire va vous parler des obligations garanties par l'hypothèque?
Il va vous parler du taux d'intérêt, c'est tout ce qu'il va vous parler. Il va
dire : On va choisir le meilleur taux d'intérêt. Il n'y a personne qui va
vous dire qu'est-ce que l'hypothèque couvre.
Or, moi,
comme consommateur, j'aimerais bien savoir que cette hypothèque-là qu'on est en
train de me mettre, là, couvre les
obligations de ma femme, de mes enfants, de la caution, hein, d'une personne
qui s'est portée caution. Mon père s'est
porté caution pour moi, puis je me retrouve à être responsable de toutes les
obligations présentes et futures que mon père va contracter dans le futur. C'est ça, l'impact des hypothèques
parapluies, c'est ça que les gens ne se rendent pas compte, comment c'est tentaculaire, si vous
voulez. Ça s'en va, puis ça couvre un tas d'obligations, puis, en plus,
comme c'est garanti par hypothèque, aucune protection. Alors, c'est là-dessus
que...
Le Président (M. Matte) : O.K. Je
vous remercie. Je vous remercie de votre participation aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants afin
de permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 52)
(Reprise à 15 h 55)
Le Président (M. Matte) : Il me fait
plaisir de vous accueillir, les représentants du Barreau du Québec. Je vous
rappelle que vous avez 10 minutes pour faire un exposé, et, par la suite,
nous allons procéder à un échange. Mais je vais vous informer lorsque votre
temps est à la veille de se terminer. Sans plus de préambule, je vous invite à
prendre la parole et à vous présenter afin de permettre l'enregistrement.
Barreau du Québec
Mme Hawi (Réa) : Bonjour. Alors, je
me présente, mon nom est Réa Hawi. Je suis avocate au Secrétariat de l'Ordre et
Affaires juridiques au Barreau du Québec. Je suis également secrétaire du
Comité sur la protection du consommateur au
Barreau. Et je suis accompagnée de Me
Luc Thibaudeau, qui est président du comité du Barreau sur la protection
du consommateur.
Alors, nous
sommes très heureux d'être ici aujourd'hui pour présenter la position du
Barreau du Québec sur le projet de
loi n° 134. Le dernier projet de loi en cette matière remonte à 2011. C'était le projet de loi n° 24, qui est mort au feuilleton l'année
suivante. Ce projet de loi était donc très attendu et le Barreau du Québec
salue son dépôt.
Le Barreau accueille favorablement le projet de
loi n° 134, qui vise à protéger les consommateurs les plus vulnérables et
à prévenir l'endettement. Les enjeux sont importants et les modifications
proposées viennent encadrer certaines
pratiques de commerce qui devaient être modernisées ou encadrées davantage pour
protéger les consommateurs les plus
démunis. Pensons à l'évaluation de la capacité de rembourser du consommateur,
aux nouvelles mesures qui se rapportent aux contrats de crédit à taux
élevé, à l'interdiction d'augmenter la limite de crédit du consommateur, à la révocation de l'entente de paiement préautorisé, à
la libération d'un consommateur solidaire, moyennant un avis, et aux modifications concernant la publicité relative aux
effets positifs du crédit sur la situation financière du consommateur.
Ce projet de loi constitue sans contredit un pas dans la bonne direction.
Par contre, il ne propose pas de véritable
modernisation des principes de base en matière de protection du consommateur ni d'harmonisation entre les notions
de la LPC et celles des autres lois, notamment le Code civil du Québec. Le Barreau du Québec est d'avis que la LPC doit
être révisée et modernisée de manière plus globale. Me Thibaudeau vous exposera certains de nos commentaires plus
détaillés sur le projet de loi n° 134, mais, de manière préliminaire,
j'aimerais dire quelques mots sur la
nécessité de la réforme globale de la loi et, de manière sous-jacente, la
nécessité de revoir la manière de présenter le contenu obligatoire des
contrats.
Plusieurs dispositions de la LPC soulèvent des
difficultés d'interprétation et des controverses inutiles. Il faut clarifier la terminologie et certaines notions de
la loi. Par exemple, la notion même de commerçant pose des difficultés
d'interprétation pour plusieurs articles de la LPC, et il faut la définir ou
l'harmoniser, à tout le moins, avec la notion d'entreprise
que l'on retrouve au Code civil. La notion de consommateur aussi a besoin
d'être clarifiée. Ce projet de loi constitue
une opportunité de pallier à cette situation afin de favoriser une meilleure
application de la loi. Cette facilité d'application bénéficierait à
tous, incluant les consommateurs les plus démunis.
Ensuite, les
exigences relatives aux règles de formation des contrats pour lesquels un écrit
est exigé ont été rédigées à la fin
des années 70, alors que la conclusion d'un contrat de consommation entre un
commerçant et un consommateur s'effectuait
nécessairement en personne et toujours sur support papier. Ces dispositions ne
sont plus adaptées à la réalité d'aujourd'hui
et devraient être révisées. La première Loi sur la protection du consommateur
est entrée en vigueur en 1971. Le secteur des biens et services destinés
à la consommation a bien changé depuis. Les avancées technologiques ont
transformé radicalement la nature des biens et services offerts aux
consommateurs et la manière de les offrir.
Les habitudes des consommateurs ont également
changé. Avec les modèles économiques modernes, on a vu l'apparition
d'environnements commerciaux qui n'existaient pas au moment de l'adoption de la
première loi ou qui n'existaient pas, en
2006, lors de l'adoption du projet de loi n° 48 concernant les contrats
conclus à distance. À notre avis, ces nombreux changements justifient de
revoir complètement les dispositions de la LPC de manière à les adapter à la
réalité du XXIe siècle.
• (16 heures) •
Maintenant,
le contenu obligatoire des contrats. À ce sujet, le projet de loi n° 134
propose d'abroger les annexes de la
LPC. On comprend que le contenu informatif obligatoire qui s'y trouve sera
énoncé dans le règlement à venir. Si tel est le cas, cette façon de
faire offre plus de flexibilité puisqu'il sera plus facile de faire des
modifications en fonction des nouveaux types
de contrats qui feront leur apparition et des changements liés aux pratiques de
l'industrie. Par contre, on remarque
que, dans plusieurs cas, certains éléments d'information ont été incorporés à
même la LPC au lieu d'être prévus dans le règlement à venir. Cette façon
de faire s'éloigne de l'objectif de simplifier la loi.
Prenons
l'exemple de l'article 125. Actuellement, cet article prévoit que le contrat de crédit
variable doit reproduire, en plus des
mentions prescrites par règlement, les mentions prévues à l'annexe IV de la loi. Le
projet de loi n° 134 propose une version modifiée de l'article 125. Le nouvel article énumère les renseignements que doit contenir le contrat de crédit variable, en plus de prévoir qu'il doit contenir aussi les renseignements que peut exiger un règlement. On se retrouve ainsi à avoir les éléments
encore à deux endroits différents.
Il faut éviter de reproduire la même façon de
faire et de se retrouver avec un formulaire en plus des éléments prévus dans la loi. Nous sommes d'avis qu'une
nouvelle approche devrait être préconisée, et que le contenu informatif
obligatoire devrait être inclus à un seul endroit, en l'occurrence dans le règlement
d'application. Nous avons donné l'exemple de l'article
125, mais les éléments essentiels varient d'un type de contrat à l'autre, et
nous savons que malheureusement les consommateurs ne prennent généralement
pas le temps de lire leur contrat en entier.
Pour pallier
cette situation, le Barreau propose de s'inspirer du Règlement
sur le coût d'emprunt fédéral qui exige que certains renseignements soient communiqués dans un encadré informatif
sous forme de tableau afin de simplifier la façon de transmettre l'information au consommateur. Ainsi, les éléments essentiels
pour chaque type de contrat de crédit à la consommation, comme ceux
prévus à l'article 125, seraient prévus dans des encadrés faciles à comprendre,
ce qui permettrait au consommateur de
retrouver l'essentiel du contrat sans avoir à le lire en entier. De plus, la
présentation visuelle des encadrés affiche l'information dont le
consommateur a besoin pour comparer entre elles les offres qui lui sont
présentées lorsqu'il magasine son crédit.
Le règlement d'application de la LPC devrait
inclure, à la fois, les listes d'éléments essentiels et les encadrés
informatifs. Idéalement, ceci remplacerait les annexes actuelles de la loi et
les mentions obligatoires dans la loi.
Voici maintenant
certains éléments qui méritent d'être adressés plus particulièrement, et je vais laisser la parole à mon collègue.
M.
Thibaudeau (Luc Hervé) : Merci beaucoup, Me Hawi. Bonjour, M. le
Président, Mmes, MM. les
députés, Mme la présidente, M. le vice-président.
Premièrement,
félicitations, le projet de loi est... vraiment démontre le travail et
l'importance que le gouvernement attache
à la protection des consommateurs. C'est un travail monumental, il est vaste.
Je n'aurai pas le temps de commenter et j'ai choisi quatre mesures plus
particulières.
Bien entendu,
c'est un projet de loi qui s'adresse au surendettement et aux contrats de
crédit. Malheureusement, et pour me faire l'écho de ma consoeur, il y a
encore certaines particularités et certaines imprécisions dans la loi qui demeurent, comme, par exemple, la détermination des
frais de crédit et la possibilité de pouvoir demander des frais fixes dans un contrat de crédit. Vous allez me
répondre : Oui, mais, outre le contrat de crédit variable, les frais fixes
sont interdits. Mais, même s'il est possible d'en venir à cette conclusion-là,
c'est uniquement par le biais d'une lecture conjointe de plusieurs articles.
Pourquoi je choisis cet élément-là à commenter? Parce que c'est un autre
élément, qui milite en faveur d'une refonte globale de la loi, qui mériterait à
être plus claire à cet effet.
Le contrat de
crédit à coût élevé, le Barreau du Québec salue cette avancée, il s'agit d'une
innovation dans la loi. En plus de
l'article 8, qui prévoit deux types de lésions, l'article 103.4 pourrait
traiter du contrat de crédit à taux élevé et l'article 103.5 prévoirait une présomption de lésion subjective lorsque
le contrat est conclu alors que ratio d'endettement est trop élevé. Bravo! Mais la définition du contrat
de crédit à coût élevé n'a pas été ajoutée dans la loi et elle le sera
dans le règlement. Il est difficile de
commenter à ce stade. Bien entendu, le Barreau offre sa pleine collaboration
dans la détermination de ce qui constituera un tel contrat.
L'identification d'un contrat de crédit à coût
élevé devra tenir compte de plusieurs facteurs, non seulement la réalité
économique contemporaine, mais aussi la jurisprudence déjà rendue en la
matière. Pour votre information, Mmes, MM.
les députés, il y a une décision de la Cour d'appel toute fraîche, qui date de
moins d'un mois, qui reconnaît que
47 % — 47 % — ce n'est pas lésionnaire. Je crois qu'il va
être difficile de déterminer dans quelles circonstances la présomption
de l'article 103.5 va pouvoir s'appliquer parce que c'est une notion qui évolue
et qui va être mouvante dans le temps.
Le
Président (M. Matte) : Votre temps étant écoulé, je dois céder la
parole à Mme la ministre. Mme la ministre, c'est à vous de débuter les
échanges.
Mme
Thériault : Merci, M. le Président. Vous me permettrez
évidemment de saluer les gens du Barreau qui sont avec nous aujourd'hui.
Me Thibaudeau et Me Hawi, merci pour votre présentation.
Vous me voyez
enchantée d'être assise à la table aujourd'hui en tant que ministre responsable
de la Protection des consommateurs et
de l'Habitation. Et je vais mentionner ce que j'ai mentionné à la Chambre des
notaires auparavant : Ça fait
une semaine que j'ai été nommée, je pense que je suis une ministre très dédiée
aux dossiers qui me sont consacrés, à tout
le moins, ça fait quand même déjà 15 ans que je siège en ce Parlement, dont
plus de 10 à titre de ministre, et, dans chacun des ministères que j'ai eu le privilège de diriger, j'ai toujours
fait adopter des lois qui, de manière globale, avaient un assez grand
assentiment. Et tout le monde, dans tous les domaines, vont dire que je suis
une ministre qui est très dédiée à ses dossiers et que mes dossiers avancent
régulièrement beaucoup.
Je dois dire
que j'avais le choix entre est-ce qu'on va en commission parlementaire ou
on repousse les consultations. Et,
d'emblée, lorsqu'on m'a posé la question, bien, j'ai dit : Bien non, on ne
repousse pas les consultations, sachant à quel point... puisqu'il y a 10 commissions qui siègent dans ce parlement,
qu'il y en a maximum quatre qui peuvent siéger en même temps, tout le monde se bouscule pour venir
avoir du temps, pour avoir du temps de commission, pour être capable de
faire avancer leur projet de loi.
Ceci étant dit, vous avez
parlé du projet de loi n° 24, et je dis bien le projet de loi n° 24,
puisqu'il est mort au feuilleton lorsqu'il y
a eu un déclenchement d'élections, projet de loi qui avait été déposé par
l'actuel député de Saint-Laurent lorsqu'il était le ministre de la Justice. Il
y a eu un gouvernement minoritaire qui a certainement manqué de temps,
je vais le dire comme ça, et, par la suite, ma collègue la ministre de la
Justice, qui assumait les responsabilités de la protection du consommateur, je pense que depuis que le Parlement siège
qu'elle est en commission de manière permanente, bien... et je ne me trompe pas beaucoup. Il y a beaucoup de législations
qui sont sous sa responsabilité. Je pense que le fait d'avoir une ministre dédiée à la protection du
consommateur va permettre de faire avancer de manière rapide certains
dossiers.
Évidemment,
moi, j'arrive, le projet de loi est déposé, les commissions sont appelées. Vous
comprendrez que ma position
est : nous allons faire adopter ce projet de loi là le plus rapidement
possible. J'ai des discussions avec mes collègues des deux oppositions, on a fait des rencontres
pour pouvoir leur exposer, par l'Office de la protection du
consommateur, le contenu du projet de loi avec ses objectifs pour faire en
sorte qu'on puisse l'adopter le plus rapidement possible. J'entends, cependant, que vous auriez aimé une
réforme globale, mais je ne peux faire autrement que de vous dire qu'à
ce stade-ci ma priorité numéro un, c'est de faire avancer le projet de loi
n° 134 et le faire le plus rapidement possible. Appelons ça la phase I d'une législation qui touche la protection du
consommateur. Et, quand la phase I sera, elle, réglée et adoptée, on
pourra concentrer nos efforts sur les autres éléments de la protection du
consommateur.
Je vais me permettre de vous dire aussi que,
puisque je suis la ministre qui est responsable également de l'Habitation, il y a de larges pans de mes
responsabilités qui sont enchâssés dans le Code civil du Québec. Le fait
d'avoir une ministre dédiée à l'Habitation
et à la Protection du consommateur permet de rapatrier des compétences et me
permet aussi de faire des législations. Et,
comme ministre de l'Habitaiton, bien, il est évident qu'il va y avoir d'autres
modifications législatives qui vont tomber sous ma responsabilité, et j'entends
bien respecter en tous points l'engagement que j'ai pris, soit protéger les
droits des consommateurs.
Donc, vous
comprendrez que le projet de loi n° 134, j'entends bien travailler de
concert avec mes collègues, pour faire
en sorte que nous puissions le faire adopter le plus rapidement possible. Il ne
sera peut-être pas parfait, mais il aura au moins la vertu de faire avancer certaines choses pour protéger les
consommateurs des personnes qui sont mal intentionnées.
Donc, je vous
entends, mais j'ai lu aussi dans votre mémoire, soi-disant, qu'il y avait quand
même des choses qui avaient évolué.
Je vais me permettre de faire un exemple. Les gens de ma génération vont se
souvenir de ça — peut-être
pas le député de Borduas — moi, moi, je me souviens des timbres Gold
Star, hein? Il ne se souvient pas de ça, O.K., mais il y a des timbres Gold Star qui existaient à une
certaine époque où, lorsqu'on faisait notre épicerie, l'épicier
remettait des timbres à nos parents, qu'ils
collaient dans des petits catalogues, et nos parents pouvaient aller acheter
des choses. C'est ce qui a...
l'ancêtre des points de fidélisation, je dirais, que les gens de ma génération
connaissent. Et je n'ai que 51 ans, mais je m'en souviens. Sauf
qu'aujourd'hui il n'y a plus de timbres Gold Star, il y a certaines chaînes
d'alimentation qui ont des timbres aussi pour la fidélisation des
clients, ça arrive quelquefois. Les cartes, les Air Miles, Aéroplan,
nommez-les. Mais il y a beaucoup de choses...
• (16 h 10) •
Une voix : La vaisselle.
Mme
Thériault : Oui, puis
la vaisselle. C'est parce que je ne veux pas faire de promotion pour les
chaînes, mais effectivement je pense qu'au niveau de la fidélisation
des clients, les bannières d'affaires ont beaucoup évolué, et on
va retrouver des choses dans ce projet de loi là qui répondent à une réalité d'aujourd'hui,
chose qu'on n'avait pas voilà à peine 15
ans, 20 ans. Donc, évidemment, comme ministre qui est
responsable de la Protection
des consommateurs, vous comprendrez
que je ne peux pas faire autrement, moi, que de me réjouir d'être assise en commission
ici pour être capable de faire avancer les dossiers, mais que ça me fera
plaisir de travailler avec le Barreau pour faire en sorte qu'on puisse
continuer à faire avancer la législation et mieux protéger le consommateur.
Mais je suis
très heureuse de vous entendre. Parce que là je ne veux pas prendre tout le
temps, je veux vraiment que mes collègues puissent s'exprimer elles
aussi, puisque ce sont deux collègues féminines.
Lorsque vous
parlez de la révision de la loi, vous avez bien compris que ce qui avait été
déposé, c'était comme... Là, on a à peu près
une cinquantaine d'articles du premier projet de loi qui avait été
déposé, le projet de loi n° 24, qu'on a repris ici, puis ce que j'appellerais la phase I. Bon, on comprend qu'on
est en temps limité, je veux bien essayer d'en faire le plus possible, mais il y aura une phase II. Est-ce
qu'il y a d'autre chose qui n'était pas dans l'ancien projet de loi n° 24,
puisque j'imagine que vous l'avez regardé, que vous voudriez regarder assez rapidement,
autre que ce qu'il y a dans votre mémoire?
Mme Hawi
(Réa) : Donc, pour la
révision complète de la loi, on a déjà fait un travail préliminaire, on a une
liste de points qui pourraient être abordés,
là, et revus dans le cadre d'une révision plus globale de la loi. On pourrait vous
en faire part lorsque vous le voudrez. On en a peut-être trois pages de points,
quatre pages.
M. Thibaudeau (Luc Hervé) :
Peut-être, si vous permettez, Me Hawi...
Mme Hawi (Réa) : Ou on peut en citer
quelques-uns.
M.
Thibaudeau (Luc Hervé) : On
pourrait en citer quelques-uns, mais, de façon générale, on pense... Des
fois, le mieux... comment on dit? Le mieux est l'ennemi du bien. Et il y a beaucoup
d'endroits dans la loi... La Loi sur la protection
du consommateur a pour objectif la
divulgation la plus complète des informations nécessaires au
consommateur pour prendre sa décision. Et, à de nombreux
endroits dans la loi, on retrouve une liste ou des listes d'informations
obligatoires qui doivent être portées à la connaissance du consommateur dans le
cadre de la conclusion d'un contrat. Et,
comme dit Me Hawi, c'est une des observations que nous avons faites. Nous
trouvons que la loi a un caractère répétitif à cet effet. Et le résultat de ces dispositions est que, souvent, nous
nous retrouvons avec cette kyrielle d'informations là, qui est disposée souvent de façon plus ou moins
ordonnée dans les contrats en fonction du type de contrat, en fonction
du secteur d'affaires dans lequel on évolue, alors qu'il pourrait y avoir
clairement une liste d'informations, si vous permettez l'expression, standard,
qui pourraient s'appliquer. Bon, je ne parle pas... Par contre, la divulgation
du taux de crédit s'applique aux contrats de
crédit, mais il y a d'autres contrats. Les contrats d'enseignement, par
exemple, les contrats de carte
prépayée, c'en est un autre. Bien entendu, ce n'est pas un contrat autant
bilatéral que le contrat d'enseignement, mais pourquoi il ne pourrait
pas y avoir une annexe qui mentionnerait : voici l'information de base et
les réponses aux questions de base que tout
consommateur peut se poser sur ce contrat et que le consommateur devrait
savoir, et présentées d'une manière
strictement obligatoire au consommateur, et ce, pour tous les contrats? C'est
un des nombreux exemples que le
Barreau du Québec pourrait proposer et qui ont déjà été discutés avec l'Office
de la protection du consommateur, et qui aurait pour but d'alléger la
loi, de simplifier la loi et de faciliter la compréhension du consommateur.
Une voix : Je vous entends.
Merci.
Le Président (M. Matte) : C'est
bien. Merci. Maintenant, j'inviterais la députée de Richmond à poursuivre nos
échanges.
Mme
Vallières : Merci
beaucoup, M. le Président. Salutations aux membres de la commission, également.
Madame monsieur, merci beaucoup de votre présence.
Je m'occupe des dossiers jeunesse au sein du gouvernement
du Québec et j'ai eu l'opportunité de travailler beaucoup avec Le Jeune Barreau
aussi à d'autres sujets. J'aimerais savoir s'il y a eu une analyse particulière
de faite. Ce que vous nous présentez,
c'est à un niveau macro, quand même, pour tout
le monde. Est-ce qu'il y a une
analyse particulière qui a été faite
au Barreau sur l'impact pour les jeunes précisément ou si c'est inclus
à même le mémoire que vous déposez?
Mme Hawi
(Réa) : Non. C'est inclus
dans le mémoire. On n'a pas ciblé les jeunes particulièrement,
mais, cela dit, il y a plusieurs
des dispositions dans la LPC qui s'appliquent aux jeunes, que ce
soit la publicité, le crédit, tout ce qui est prévu comme mesure de protection,
surendettement, etc. Ça s'applique également pour les jeunes, mais normalement c'est inclus dans notre
mémoire. On n'a pas vraiment ciblé les jeunes en particulier.
Mme
Vallières : On
parle de lutter contre l'endettement, ça a assurément un impact sur les jeunes parce
que justement la consommation est de plus en plus grande et les jeunes le font de
plus en plus tôt. Cet accès également au crédit est tellement facile de nos
jours. Quelle est votre opinion par rapport à la présence et la sollicitation
du crédit dans nos établissements d'enseignement? On ne le retrouve pas dans
votre mémoire.
M. Thibaudeau (Luc Hervé) : On ne le
retrouve pas dans le mémoire parce qu'on ne le retrouve pas dans le projet de loi. On le retrouvait dans le projet de
loi n° 24, on le retrouvait dans plusieurs documents d'orientation qui
ont été émis par l'Office de la protection
du consommateur au cours des dernières années. C'est sûr que la loi de
protection du consommateur ayant pour
but de protéger ceux qui sont dans une situation de désavantage par rapport au
consommateur, cette situation-là est définitivement présente, Mme la députée,
quand on est en présence d'un commerçant et, par exemple, d'un étudiant ou
d'une étudiante, parfois d'un mineur. À l'époque, le Barreau du Québec avait
supporté les orientations et les projets de
disposition qui, effectivement, encadraient et imposaient plusieurs
restrictions à la sollicitation des contrats de crédit, par exemple,
dans des établissements d'enseignement ou auprès des jeunes en général.
Mme
Vallières :
Merci. Si vous permettez également, ça recoupe aussi, là, mais, quand on parle
de publicité par rapport au crédit,
vous en parlez dans votre document et vous parlez de l'article 245 qui, selon
vous, et je vous cite, «a besoin de
plus de mordant». Est-ce que c'est possible d'indiquer quel genre de mordant
auquel vous faites référence, quand vous parlez de la consommation
responsable, entre autres, ce que vous avez en tête exactement?
M.
Thibaudeau (Luc Hervé) : La
principale raison, Mme la députée, pourquoi on a fait cette
recommandation-là, c'est que, contrairement
à plusieurs autres dispositions de la LPC, il y a très, très peu de
jurisprudence rendue en vertu de l'article 245 de la loi. On a
l'impression que c'est parce qu'effectivement les dents de cette disposition-là
ne sont pas assez aiguisées. Qu'est-ce que
ça veut dire, vraiment, «inciter le consommateur à se procurer un bien ou un
service au moyen du crédit»? Bon, «ou illustrer un bien ou un service»,
il y a une décision qui a été rendue relativement à cette situation factuelle là, et c'est en 1988. On pense
qu'il y a quand même plusieurs pratiques qui... Bon, nous, on n'est pas
ici pour juger des pratiques des
commerçants, on n'est pas ici pour leur dire quoi faire, mais on la voit, la
publicité, on est soumis à la
publicité, tout le monde, tous les jours et on s'aperçoit qu'il y a certaines
pratiques effectivement qui frôlent une infraction possible à cette
disposition-là.
Est-ce qu'effectivement il n'y a rien qui est
fait à cet effet-là parce que c'est le poursuivant? Est-ce que c'est le Procureur général qui trouve que cette
disposition-là n'a pas assez de mordant? Nous, on n'a fait que constater que
c'est une des dispositions qui est quand
même, quand on veut prévenir le surendettement, hein, le surendettement passe
par l'incitation au crédit. Il n'y a
personne... en fait, il n'y a personne... oui, il y a plusieurs gens qui
décident de souscrire à des contrats de crédit de
manière volontaire, mais il y a toujours une incitation, et c'est comme ça que
la société de consommation fonctionne. La
publicité, ce sont des incitations à se procurer des biens. Et la publicité sur
le crédit, bien, foncièrement, ce
n'est pas une mauvaise chose parce que ça fait fonctionner l'industrie, ça fait
fonctionner les secteurs d'affaires,
mais, encore une fois, ça peut nuire au consommateur qui, effectivement, a cédé
à la tentation de se procurer du crédit en fonction de manoeuvres
d'incitation un peu trop pressantes auprès du consommateur.
Mme
Vallières : Merci.
Le Président (M. Matte) : Merci.
J'invite la députée de Fabre, il vous reste deux minutes.
• (16 h 20) •
Mme Sauvé : Alors, je serai, M. le
Président, très rapide avec un ton très enflammé. Alors, chers collègues, membres de la commission, distingués
représentants du Barreau du Québec. Ma question, elle est fort simple, et ça
touche les programmes de fidélisation.
Dans votre mémoire, vous avez fait un survol, l'état de situation,
la multiplication des programmes existants, les enjeux, entre autres, en lien avec les éléments d'expiration, mais, moi, il y a
un élément sur lequel je veux vous
entendre rapidement, c'est tout l'enjeu important
et la nécessité, donc, d'encadrer ces programmes-là. Mais la surcollecte de données sur les consommateurs qui est liée aux programmes
de fidélisation, vous l'avez nommée, et, en termes de volonté d'encadrement des programmes de fidélisation, est-ce qu'il y a un véritable enjeu lié à ça, la
collecte des données liée aux consommateurs?
M.
Thibaudeau (Luc Hervé) : Je
pense que, de façon générale, Mme la députée, il y a plusieurs enjeux qui
sont reliés en 2017 sur la question de la collecte des données auprès des personnes
physiques, même auprès des personnes morales.
Si mon associé Raymond Doray était ici pour vous en parler, je pense que vos
deux minutes seraient rapidement épuisées.
Ce n'est pas une question que le projet de loi adresse. Bien entendu, le
consommateur peut devenir victime de ça. On parle des fois que plusieurs
de ces contrats-là sont des contrats, entre guillemets, à titre gratuit. Ce
n'est pas vrai. Le consommateur, même s'il
souscrit à un contrat, entre guillemets, à titre gratuit, il paie. Il paie
parce qu'il procure de l'information
aux commerçants et il leur donne de l'information, aux commerçants, et les
commerçants se servent de cette information-là pour faire fructifier
leur entreprise et pour générer des revenus auprès de leur entreprise. Alors,
c'est sûr qu'il y a des mesures de
protection... Et, encore la semaine dernière, je pense que... On en voit à
toutes les semaines, des bris de
systèmes informatiques ou des brèches causées par des tierces parties qui ont
comme résultat qu'il y a de l'information
concernant des consommateurs qui est perdue ou qui est diffusée à des personnes
qui ne devaient pas en avoir accès.
Alors, c'est sûr qu'il y a des mesures importantes qui doivent être prises à
cet effet-là. Peut-être qu'on peut penser que les avancées
technologiques vont pouvoir aider la prévention de ces situations-là, mais je
ne pense pas qu'on est encore dans un environnement 100 % sécuritaire sur
ce plan-là.
Le Président (M. Matte) : Je vous
remercie. Notre temps étant écoulé, je ne crois pas que la députée de
Marie-Victorin a déjà passé des soirées à coller des timbres, là.
Mme
Fournier : Non, effectivement, mais je connais la pièce Les
belles-soeurs, donc ça m'a permis d'être en contact avec cette
activité.
Le Président (M. Matte) : C'est
bien, mais je vous invite à prendre la parole et à poursuivre les échanges.
Mme Fournier : Merci, M. le
Président. Merci d'être présents parmi nous aujourd'hui en commission parlementaire. On a pris bonne note de votre
mémoire, puis, notamment, dans vos remarques préliminaires, j'aimerais
peut-être que vous puissiez nous parler de
la partie sur l'harmonisation avec les exigences fédérales. Ce serait
intéressant pour la commission que
vous puissiez illustrer la difficulté justement d'harmonisation entre les deux
régimes, le régime québécois et le régime fédéral, et l'impact que ça a
sur la vie de tous les jours de nos concitoyens en matière de protection des
consommateurs.
M.
Thibaudeau (Luc Hervé) : En
fait, c'est une question... Nous, on n'est pas ici, bien entendu, pour parler
de droit constitutionnel, et je pense qu'il
est bien clair ici que la législature provinciale a, comme dirait ma fille,
foule compétences pour intervenir dans cette matière-là, incluant en ce
qui concerne les contrats de crédit conclus par les banques. O.K.?
Ceci étant
dit, certains sont encore échaudés de l'affaire Marcotte, on se demande même si
on ne va pas en revoir une autre. Je
pense que ça serait un peu prématuré de dire que le débat est clos pour
toujours. Ce que le Barreau recherche dans
ses recommandations et ce que ce comité ici que je préside recherche aussi
auprès de ses membres, c'est d'essayer de trouver un consensus. J'ouvre une petite parenthèse pour vous dire que
tout ce qui est dit aujourd'hui a fait l'objet d'un consensus unanime des neuf membres du comité
consultatif de la protection des droits des consommateurs du Barreau du Québec. Nous, ce qu'on veut éviter, comme ordre
professionnel très impliqué dans les affaires judiciaires et dans tout
ce qui concerne l'administration de la justice, ce qu'on veut éviter, c'est la
multiplication des litiges. O.K.?
Le seul
message ou, je pense, le premier message qui est important de passer ici, là,
c'est : Est-ce qu'il y aurait un moyen
effectivement d'éviter que des dossiers comme l'affaire Marcotte se
reproduisent et qu'on aille encore se retrouver en Cour suprême pour se demander s'il y a une disposition de la Loi sur
la protection du consommateur qui s'applique aux banques ou si le fait qu'il y a une certaine divergence entre la Loi sur
les banques et la Loi sur la protection du consommateur fait en sorte qu'il y ait un genre de
«federal paramountcy» qui joue en faveur des banques, ou qu'on se demande quel soit l'effet du modèle
d'harmonisation qui a été conclu entre les provinces et le fédéral il y a
plusieurs années et qui... Nous, on
aimerait que tout ça soit mis de côté et qu'on puisse en arriver à un consensus
qui fasse en sorte qu'on puisse
permettre à toutes ces entreprises prêteuses qui concluent des contrats de
crédit, et il y a plusieurs d'entre
elles qui concluent des contrats de
crédit, pas seulement des banques, mais plusieurs autres institutions aussi,
sur l'ensemble du territoire canadien... puissent effectivement pouvoir adopter un
modèle d'affaires qui leur permettrait de sauver des coûts, qui leur
permettrait de procéder de façon plus efficace. Parce que ça, qui en gagnerait
au bout de la ligne? C'est le consommateur, il paierait moins cher.
Mme Fournier : Très bien. Merci.
M. Thibaudeau (Luc Hervé) : Nous
prônons l'harmonie.
Mme
Fournier : Puis je vous
ramène justement à la page 19 de votre mémoire, là, concernant l'article 103.2, vous dites, donc, que les «consultations [seraient] nécessaires afin de déterminer quelles autres institutions
devraient être incluses à l'exemption». Vous, est-ce que vous
souhaiteriez l'application à tous?
M.
Thibaudeau (Luc Hervé) :
Nous sommes très satisfaits des exceptions qui ont été énoncées au projet de loi parce que ces exceptions-là
concernent des organismes, des institutions qui savent ce qu'ils font en matière d'enquêtes de crédit, hein? Je pense qu'on a à la fois un
système bancaire national et des caisses populaires, et des institutions
prêteuses au Québec qui connaissent leur
travail et qui sont responsables à cet effet-là. L'article 103.2 et surtout
l'article 103.4... Et je crois me rappeler, de mes rencontres avec
l'Office de la protection du consommateur, qu'on vise des industries particulières ici. Ce qu'on veut dire, dans ce
commentaire que vous venez de relever, c'est que ça pourrait être plus
précis pour qu'effectivement tous les
intervenants dans le domaine du prêt à la consommation puissent savoir en quoi
s'en tenir relativement à ces
nouvelles obligations là d'évaluer la capacité de rembourser du consommateur,
de façon à ce qu'effectivement la loi soit claire et qu'ils sachent à
quoi s'en tenir.
Mme
Fournier : Parfait. Merci beaucoup. Je vous amènerais sur le sujet des
prêteurs sur gages. À la page 20 de votre
mémoire, vous dites que vous auriez «souhaité voir les activités des prêteurs
sur gages régies dans leur ensemble» et,
par exemple, ajouter des dispositions portant sur «la reprise des biens et
l'exercice particulier des droits du prêteur». Je me demandais
lesquelles, dispositions, vous auriez vues et comment vous voyez ça dans
l'application.
M. Thibaudeau (Luc Hervé) :
Excusez-moi juste deux secondes.
Mme Fournier : Pas de problème.
M.
Thibaudeau (Luc Hervé) :
Bien, bien entendu, la meilleure façon... le premier souci que le législateur
doit avoir pour protéger le consommateur
là-dedans, là, c'est qu'il doit faire en sorte que le consommateur ne perde pas
son bien sans vraiment en avoir été averti.
On pense que les obligations de divulgation de la part du commerçant au
consommateur dans le cas de reprise devraient être plus rigidement encadrées. Et, bien
entendu, le processus lui-même qui mène... C'est un peu péjoratif de
dire «la reprise», parce qu'on sait que le prêteur sur gages est déjà en
possession du bien. Est-ce qu'effectivement
il y a une hypothèque qui a été consentie? Est-ce qu'il y a un recours
hypothécaire qui doit être exercé par le prêteur sur gages? C'est
peut-être un peu lourd pour le prêteur, on pense qu'il pourrait y avoir des
processus plus efficaces. Mais ce qu'il ne
faut pas perdre de vue, même si on peut trouver un processus plus efficace pour
le prêteur, il ne faut pas perdre de
vue que le consommateur doit être pleinement informé. La plupart du temps, ces
contrats-là sont aussi des contrats de crédit à coût élevé. On sait que
ça représente un gros investissement pour le consommateur d'avoir à racheter son bien ou de pouvoir le récupérer.
Mais, encore une fois, il devrait être bien informé et il devrait y avoir
des mesures pour s'assurer que la
dépossession, O.K., du droit de propriété de ce bien-là, ou, si c'est une vente
avec faculté de rachat,
l'impossibilité de pouvoir racheter soit vraiment dénoncée au consommateur
suivant des exigences très strictes, un peu comme les avis de déchéance
du bénéfice du terme, sinon plus strictes.
Mme
Fournier : Merci. Finalement, j'aimerais ça, vous entendre sur les
programmes de fidélisation. Vous dites que
vous êtes d'avis, là, que les programmes de fidélisation... en fait, les
gestionnaires devraient avoir le droit de modifier la valeur des unités
d'échange. Je vous avoue que ça me surprend. Bien entendu, je peux le
comprendre dans le cas, par exemple, de l'inflation. C'est normal qu'après quelques
années ça coûte plus cher en termes
de points d'acheter un bien ou
un autre. Mais, au-delà de ça, pourquoi vous êtes en faveur de ça?
• (16 h 30) •
M. Thibaudeau (Luc Hervé) : On a
essayé de comprendre le plus possible, je dis bien le plus possible cette industrie-là. Il y a plusieurs types de programmes
de fidélisation. Il y a certains programmes de fidélisation qui ne
visent qu'une chaîne, qu'une association de
détaillants; il y a d'autres programmes de fidélisation qui visent les
utilisateurs de carte, qui fait en
sorte que ces points-là, il y a un commerce de ces points-là qui a lieu entre
les opérateurs des programmes de fidélisation,
entre les détaillants, entre les émetteurs de cartes de crédit. Et ce n'est pas
pour rien que ces points-là, que la valeur
de ces points-là change de temps en temps ou que la façon de les calculer... Et
on ne parle pas, ici, de l'inflation, Mme
la députée, on parle de laisser une certaine liberté à l'opérateur d'un
programme de fidélisation, de pouvoir gérer son programme de la façon la plus favorable au
consommateur. Parce qu'il n'y a rien qui dit qu'un changement dans la valeur des points est toujours défavorable au
consommateur, en autant, bien entendu — et ça, c'est dans notre mémoire et on
l'appuie, cette mesure-là — que
le but de la loi est respecté, c'est-à-dire que le consommateur est informé.
Moi, j'adhère
à un programme de fidélisation, à un programme de loyauté, et j'ai conscience,
et je sais que la valeur de mes
points peut être modifiée dans le temps. Si ce but-là est atteint, le but de la
Loi sur la protection du consommateur est
atteint, c'est-à-dire le consentement éclairé de la part du consommateur. On
est d'accord qu'une modification unilatérale des points au détriment du consommateur et sans que le consommateur
sache que telle chose était possible, ce n'est pas une bonne chose dans notre société. Mais, dans un
contexte où le consentement du consommateur est libre, éclairé, il le
sait, il veut adhérer au programme quand
même, on ne voit pas pourquoi cette industrie-là ne serait pas permise dans
notre société.
Le
Président (M. Matte) : Je vous remercie. Maintenant, j'invite le
député de Borduas à poursuivre les échanges.
M. Jolin-Barrette : Merci, M.
le Président. Bonjour. Merci d'être présents et de contribuer aux travaux de la
commission.
Pour
poursuivre sur les programmes de fidélisation, ce que vous nous dites,
c'est : à la base, quand la personne contracte pour avoir la carte de fidélité, il faut qu'elle soit informée
qu'il y a une possibilité que la valeur de ses points fluctue avec le
temps.
M. Thibaudeau (Luc Hervé) :
Pourrait.
M. Jolin-Barrette : Pourrait fluctuer. On va entendre, dans la
commission parlementaire, certaines entreprises qui ont ce genre de programme là. Par contre, pour le
consommateur, est-ce que vous pensez qu'il devrait uniquement y avoir un
avis à la conclusion du contrat ou c'est un avis qui est à répétition, qui est
fait dans le temps?
Supposons que la compagnie a l'intention de
modifier. Bien là, un mois avant ou deux mois avant, elle doit envoyer un avis aux consommateurs pour dire :
Attention, vos points seront modifiés, ou seront dilués, ou, à partir de
telle date, les points vaudront telle quantité de points.
M. Thibaudeau
(Luc Hervé) : Vous avez
entièrement raison. Il devrait y avoir deux obligations de divulgation. Premièrement, l'avertissement préalable,
c'est-à-dire : Attention, la valeur des points pourrait fluctuer dans le
temps si vous adhérez à ce
programme-là. Et, après un an, j'accumule x centaines ou milliers de points,
j'ai ma petite banque de points, la valeur des points s'apprête à
changer, j'aimerais ça en être informé avant, M. le député.
L'article 187.9 du projet de loi... le
projet d'article 187.9, pardon, semble être un peu une reprise de l'article 11.2, prévoit effectivement une
dénonciation préalable au consommateur qu'il y a certains éléments du
contrat qui peuvent faire l'objet d'une modification unilatérale.
Maintenant,
bien entendu, je pense que tout le monde peut s'entendre ici que, la valeur des
points, c'est un élément essentiel du contrat, hein? Est-ce que, parce
que c'est un élément essentiel contrat, 11.2 pourrait avoir un effet? On pense que 187.9 vient un peu annihiler les effets
de 11.2 et dire que, bien, si c'est un élément essentiel dans le cas
d'un programme de loyauté, effectivement, il
doit y avoir deux étapes à la divulgation, c'est-à-dire : vous changez un
élément essentiel?, le consommateur doit le savoir avant de conclure le
contrat; et, lorsqu'un élément essentiel est changé, le consommateur doit le savoir à l'avance, de sorte à ce que je puisse
profiter des points que j'ai accumulés. Si moi, je dis : Moi, ça ne
me tente pas que mes points aient cette valeur-là, je vais les dépenser tout de
suite.
M. Jolin-Barrette : Un des
enjeux qu'il y a eus lorsque l'épisode Air Miles est arrivé, en décembre,
l'année dernière, c'était que, bon, on a
décrété unilatéralement un changement de la valeur des points. Parfois, les
gens qui ont des programmes de
fidélisation, qui participent à ce genre de programmes là accumulent durant des
années et des années leurs points. Et
parfois ils attentent d'atteindre un certain niveau pour pouvoir obtenir,
supposons, assez de points pour s'acheter le... bien, pas s'acheter mais
obtenir le bien désiré.
Est-ce que
vous pensez qu'on devrait, par le biais du projet de loi n° 134, si le
gouvernement décide d'aller dans la démarche
où on informe le consommateur une première fois, à la base, lors de la
signature du contrat et au moment où il va y avoir une modification, est-ce
qu'on devrait réglementer, en termes, je ne sais pas, de pourcentage, la valeur
de la modification des points?
Parce qu'actuellement ce qu'on aurait, là,
c'était : Bien, à la base, je contracte, je le sais que mes points vont
pouvoir être modifiés; puis, deuxièmement,
un mois avant ou deux mois avant, je reçois un avis puis je sais que mes points
vont être modifiés. Mais cette
modification-là, elle demeure en quelque sorte unilatérale en termes du quantum
de la valeur des points à être modifiés. Est-ce que nous, comme
législateurs, on devrait venir réglementer ça pour dire : Bien, si vous offrez un programme de fidélisation, vous ne
pouvez pas diminuer la valeur des points de plus de, je ne sais pas,
50 % ou 75 %? Est-ce que vous pensez que le législateur devrait faire
ça?
M. Thibaudeau
(Luc Hervé) : En tout cas,
on n'est pas ici pour tracer la ligne. Si c'est ça que vous me demandez de faire, je suis désolé, je ne peux pas répondre
à votre question. Mais je peux vous dire que, dans l'énoncé factuel que
vous m'avez soumis, vous avez dit :
Parfois, on accumule des points; parfois, on espère effectivement pouvoir se
payer le voyage de rêve, mais, tout
le temps, on pensait que les points ne seraient pas changés. Et, nous, dans ce
que nous vous disons, c'est : Ce
dernier élément-là, là... Parce que je pense que la saga Air Miles de l'automne
dernier, c'était là que c'était : c'était
que tout le monde pensait que les points ne seraient pas changés. Et, dans un
contexte où, effectivement, on réussit à gérer cet élément-là et à faire en sorte que cette
croyance-là, O.K., est adaptée suivant le contrat que le consommateur
conclut, bien, les deux autres éléments, je pense que vous les avez réglés.
Si le
consommateur décide de prendre le risque de souscrire à un contrat dont les
termes et conditions sont sujets à changement
et qu'il le fait — et c'est
là que c'est très important, et c'est ça, le but de la LPC — en toute connaissance de cause, je ne
vois pas pourquoi on devrait aller encore plus loin puis dire : Oui, mais
vous pouvez le changer, mais, à partir de
50 %, vous ne pouvez plus. Moi, je vous répondrais, M. le député :
Article 8. Est-ce qu'à ce moment-là le contrat deviendrait lésionnaire? «Did I get my part of the bargain?», et ça,
c'est John F. Kennedy, en 1963, qui le disait, quand il a prononcé son
fameux discours sur les droits des consommateurs.
La Loi sur la
protection du consommateur est là pour assurer un équilibre. Mme la ministre,
Mme la présidente... Mme la présidente, on en a parlé assez souvent, et
elle connaît ma position là-dessus. Oui, il faut protéger le consommateur le plus qu'on peut. On est tous des
consommateurs ici, on a tous ces bidules-là, on a tous signé des
contrats de 25 pages sans les avoir lus et
on est tous contents que la LPC nous protège à cet effet-là. Mais moi, je ne
veux pas voir cette industrie-là s'effondrer, parce que cette
industrie-là, elle participe à l'économie de la province, à l'économie de la
nation, elle donne des jobs à mes concitoyens, à mes enfants, à ma famille. Il
faut que ça fonctionne. Alors, il faut essayer de trouver un équilibre.
Je pense que
restreindre ça de la manière dont vous le proposez, M. le député, moi, j'ai
l'impression qu'il y a déjà des
dispositions dans la loi qui sont là pour prévenir les abus des commerçants, et
l'article 8 pourrait servir à ce moment-là.
Le
Président (M. Matte) : Et je
vous remercie de votre participation aux travaux de la commission. Le temps
est...
M. Thibaudeau (Luc Hervé) : Si je
peux me permettre, M. le Président...
Le Président (M. Matte) : Oui?
M.
Thibaudeau (Luc Hervé) :
Juste, Mme la ministre, nous désirons... le Barreau du Québec désire
vraiment vous féliciter. Ce qui est perçu
comme un vent de renouveau depuis 10 jours dans mon comité consultatif, c'est
de voir qu'il y a un ministère qui va, dans son titre, porter les mots
«protection du consommateur». Bravo! Et bonne chance.
Mme Thériault : Merci.
Le Président (M. Matte) : Je
reprends : Je vous remercie...
M. Thibaudeau (Luc Hervé) : Je m'excuse,
M. le Président.
Le Président (M. Matte) : De rien.
Je vous remercie de votre participation aux travaux.
Et je suspends les travaux quelques instants
afin de permettre au prochain groupe de prendre position.
(Suspension de la séance à 16 h 39)
(Reprise à 16 h 42)
Le
Président (M. Matte) : Il me fait plaisir de vous souhaiter la
bienvenue, Me Lacoursière. Je vous exprime que vous avez
10 minutes pour nous faire un exposé, et, par la suite, nous allons
échanger ensemble pour une meilleure compréhension. Donc, sans plus de
préambule, je vous cède la parole.
Centre d'études en droit
économique (CEDE)
M. Lacoursière (Marc) : Merci
beaucoup. M. le Président, Mme la ministre et Mmes, MM. les membres du comité, je vous remercie beaucoup pour l'invitation.
Alors, je vous ai déjà transmis un court document et je transmettrai,
dans les prochaines semaines, deux, trois semaines environ, un document plus
complet, pour les raisons que j'ai expliquées
dans mon document. J'en suis vraisemblable désolé. J'aurai quelque chose de
plus complet qui répondra à certains détails dont je ne parle pas
aujourd'hui dans mon document.
Idéalement,
en fait, une réforme de la LPC serait plus une vision globale. C'est certain
que, si on regarde sur une vision à
long terme ou à moyen terme... plutôt à moyen terme... on pourrait regarder,
revoir beaucoup de choses de la LPC pour
que ça soit plus clair, pour éviter certains problèmes de coordination, et tout
ça. Ça, c'est dans un monde idéal, peut-être un monde universitaire, mais je comprends très bien les impératifs
du gouvernement et les impératifs lorsqu'on présente le projet de loi.
Et les différents projets de loi qui ont été présentés depuis 2006, 2009... et
celui-ci, et j'ai compris que d'autres, évidemment, viendront par la suite sur
le crédit, le prochain également... sont, tout de même, des très bons projets
de loi qui ont permis de faire avancer les droits des consommateurs. Ça, c'est
le moins que l'on puisse dire.
Le projet
actuel, qui traite du crédit à la consommation, est une première phase, une
première étape sur deux, et c'est, encore une fois, dans un premier
temps, je dirais, c'est un très bon projet de loi. Il fait avancer les droits
des consommateurs et il protège les consommateurs. Et, lorsque je parle des
consommateurs, on pense au consommateur moyen,
le commun des mortels, entre guillemets, si je peux dire, qui est vulnérable,
évidemment, un consommateur qui est faible, et
tout ça. Mais également le projet s'attaque au problème, même s'il ne le mentionne
pas, mais c'est entre les lignes, il
s'attaque au problème du surendettement. Et là on vise le consommateur que
j'appelle financièrement défavorisé. Alors,
et ça, c'est vraiment important. Il y a plusieurs mesures, je vais y revenir
dans quelques instants ou sinon dans la période de questions, il y a plusieurs mesures qui sont vraiment très...
je dirais même avant-gardistes, au Québec, là-dessus.
Il y a un premier commentaire que j'aimerais
faire, c'est : Je suis très heureux de voir que le Québec veut harmoniser les protections du consommateur avec
soit le fédéral ou d'autres provinces anglophones, par exemple
l'Ontario, peu importe. C'est une très bonne chose.
Mais, si on remonte dans le temps, vous avez
connu les timbres Gold Star, peut-être que vous vous rappelez l'époque où l'OPC... les premiers temps de l'OPC,
les premières versions de la loi. Et
ce que l'on voyait dans le temps, c'est que la LPC était comme un leader au Canada pour faire avancer les
droits des consommateurs, elle poussait beaucoup plus loin. Et je trouve que le gouvernement, si je peux dire, ou le projet
de loi en général est trop timide de
ce côté-là. Ce qui est dedans, ce
sont des bonnes protections, ça va protéger le consommateur, mais je crois qu'on
pourrait aller un peu plus loin.
Je ne crois
pas qu'il faut être trop timide; que ce soit une question
d'harmonisation avec le fédéral ou peu importe la raison, je crois qu'il faut, tout en ayant en
tête qu'il faut garder cet équilibre tant recherché en
droit de la consommation entre les intérêts du consommateur et ceux d'un
commerçant, ou d'une entreprise, ou d'un prêteur... C'est vraiment important
de trouver un équilibre, mais c'est important de savoir que le
consommateur, et je l'ai dit tout à
l'heure, il est vulnérable, il
est faible. Donc, comment trouver le juste équilibre? Évidemment, comme j'ai
l'habitude de dire à mes étudiants, l'équilibre, de mon point de vue ou du point
de vue de chacun, ça peut changer. Évidemment,
si on n'a pas tous la même perception, c'est tout à fait naturel.
Ceci étant
dit, j'aurais aimé voir ou j'aimerais voir... que ce soit maintenant
ou dans une prochaine phase, et je comprends
que le projet de loi doit être adopté rapidement
et je suis très content également... mais voir un peu ou revoir ce rôle de leader du gouvernement pour amener des projets de loi, pour amener une meilleure protection
des consommateurs et ne pas être trop
gêné. De dire : Oui, on va s'harmoniser, mais, si les autres vont plus
loin, on va suivre... J'aimerais que ce soit l'inverse, en fait, je
crois que ce serait préférable. Ça, c'est un premier commentaire que je veux
vous faire.
Si j'embarque plus spécifiquement dans la loi,
donc, évidemment, j'ai mentionné, c'est très bon pour les consommateurs, c'est un gain appréciable pour les
consommateurs, ça va de soi. Ce qui est là est bien. Il y a des petites choses évidemment, des commentaires. Comme j'ai
dit, j'ai mentionné dans mon court document et je le mentionnerai plus
en détail dans le rapport que je vous remettrai dans les prochaines... dans
deux, trois semaines, le point évidemment important
là-dedans, dans le projet de loi, évidemment, si je vais aux aspects
spécifiques, c'est la question de l'évaluation de la solvabilité,
évaluation de la capacité de payer ou de rembourser du consommateur.
Je crois que
c'est une mesure-phare du projet de loi. C'est une mesure qui est très
importante. C'est une mesure qui s'adresse
à la fois aux institutions financières, entre guillemets, traditionnelles, les
banques ou les caisses populaires, et également
les autres types de prêteurs, qui sont des prêteurs qu'on pourrait appeler les
prêteurs à risque — ou à
coût élevé, comme le projet l'appelle. Ça, c'est une très bonne chose.
C'est certain
que, si une institution financière se présente ici puis elle dit : Nous,
on n'a peut-être pas besoin de ça parce
que nous, on a des politiques internes, on suit ça, moi, je suis très d'accord.
Et, comme l'a dit mon confrère Me
Thibaudeau tout à l'heure, c'est certain que, généralement, les institutions
financières, elles sont très responsables, elles font attention, elles
suivent des règles très spécifiques, et il n'y a aucun doute là-dessus.
Mon problème, par exemple, est le suivant :
je veux croire que, bon, on respecte les règles, on ne prête pas à n'importe qui, tout ça, surtout pour des
institutions financières plus traditionnelles, mais le problème, donc, que
j'ai, c'est : Pourquoi il y a un
surendettement si élevé? Pourquoi il y a un taux d'endettement si élevé dans la
population? Le taux d'endettement
crée des problèmes. Il crée tellement des problèmes que, pas plus tard qu'hier,
le Bureau du Surintendant des institutions financières a adopté des
nouvelles règles... bien, une modification aux règles, la règle B-20, concernant
les prêts hypothécaires — souscription de prêts hypothécaires — pour resserrer encore plus les conditions
d'accès au crédit hypothécaire. Donc, ça, c'est quelque chose qui est
quand même assez important. Donc, s'attaquer à l'endettement, c'est bon, je suis
content qu'on le mette et qu'il y ait des sanctions, bien entendu, rattachées à
ça.
Un autre
point... le temps file vite, rapidement... Un autre point important, c'est que
le projet de loi veut s'attaquer au
surendettement, à l'endettement, tenter de baliser au moins l'endettement des
particuliers, de l'encadrer, tout ça. On ne vise principalement que le
crédit à la consommation, le crédit personnel. Dans la vie, dans la réalité,
c'est un peu différent, ça fonctionne un peu
différemment. Il y a deux types d'endettement, vous le savez, l'endettement
personnel et l'endettement immobilier. Les gens qui ont de l'immeuble,
évidemment, si on est très endettés au niveau d'une dette hypothécaire, on peut avoir des difficultés à
rembourser, disons, une carte de crédit, ou, l'inverse, si on a trop
d'emprunts sur une voiture ou peu importe,
ça peut causer des problèmes au niveau immobilier. Les deux sont interreliés,
les deux sont des vases communicants. Alors, si on veut résoudre un, il
faut résoudre l'autre, ça, c'est important.
• (16 h 50) •
Je comprends
que l'AMF s'attaque également, de son côté, au niveau des problèmes
immobiliers, ça, c'est quelque chose
qui est très bien. Et je comprends également que l'AFM travaille avec l'OPC sur
ces questions-là. Mais j'aimerais voir peut-être une meilleure
coordination de ce côté... ce qu'elle fait très bien. Le travail est très bien
fait, mais j'aimerais qu'on puisse aller un
peu plus loin au niveau de mieux se coordonner sur cette question-là, parce
que, pour le moment, le projet ne vise que l'aspect des dettes
personnelles et non pas des dettes immobilières.
Dans
un meilleur des mondes, on aurait, dans ce projet de loi là, à la fois
l'encadrement des dettes personnelles à la consommation et également des dettes immobilières, donc le crédit
immobilier. Je pense que ce serait quelque chose qui serait souhaitable. Je donne juste un exemple
là-dessus : les marges de crédit hypothécaires. C'est ce que certains
appellent, en bon québécois, passez-moi
l'expression, un bar ouvert. On peut piger là-dedans. L'idée de la marge de
crédit hypothécaire,
c'est pour aller chercher de l'argent pour les rénovations domiciliaires ou ces
choses-là qui touchent la maison ou
notre copropriété. Mais, lorsque les gens utilisent cette marge-là pour payer
la carte de crédit, payer des voyages, etc., ce n'est pas ça, le but du
truc, là. Mais l'argent, elle est là, c'est facile à obtenir. Donc, ça, c'est
quelque chose qui pourrait être plus
encadré. Donc, si on allait vers le chemin de crédit personnel et crédit
immobilier, c'est quelque chose qui pourrait être pris en compte, bien
entendu.
Le
Président (M. Matte) : C'est bien. Bien, je vous remercie de votre
exposé. J'invite la ministre à poursuivre les échanges.
Mme
Thériault : Oui, merci, M. le Président. Me Lacoursière ou
Pr Lacoursière, très heureuse de vous rencontrer cet après-midi. Mes premiers mots seront pour vous
féliciter. Vous allez sortir un ouvrage bientôt sur le droit bancaire,
par ce que j'ai cru voir dans un échange de
correspondance. Donc, je comprends très bien que vous avez quand même
tenu à venir nous rencontrer, parce que ce qu'on est en train de faire, c'est
quand même assez important pour la protection du consommateur.
Vous
avez parfaitement saisi la notion ou ce que nous avons retenu du défunt projet
de loi n° 24... c'est vraiment protéger
les consommateurs les plus vulnérables, entre guillemets, et le surendettement.
Et j'aimerais peut-être citer ici, pour
le bénéfice de mes collègues les députés, mais aussi pour les gens qui nous
écoutent, un extrait du jugement de la Cour
suprême du Canada dans la cause Jean-Marc Richard contre Time inc., qui parle
évidemment du consommateur moyen.
Peut-être,
vous êtes... vous devez être au courant de ça, mais, je pense, ça serait...
c'est intéressant que les gens l'entendent aussi parce que c'est quand
même un jugement qui a été rendu, où on disait : «Ainsi, le concept du "consommateur moyen" n'évoque pas, en
droit québécois de la consommation, la notion de personne raisonnablement
prudente et diligente. Il renvoie encore moins à la notion de personne avertie.
Afin de réaliser les objectifs de la Loi [de] protection du consommateur, les
tribunaux considèrent que le consommateur moyen n'est pas particulièrement
aguerri pour déceler les faussetés ou les subtilités dans une représentation
commerciale.»
Au paragraphe
suivant, on indiquait que «les qualificatifs "crédule et
inexpérimenté" — c'est
fort, comme termes, là — expriment donc la conception du consommateur
moyen qu'adopte la Loi [de] la protection du consommateur. Cette description du consommateur moyen respecte
la volonté législative de protéger les personnes vulnérables contre les dangers de certaines méthodes publicitaires. Le
terme "crédule" reconnaît que le consommateur moyen est disposé à
faire confiance à un commerçant sur la base
de l'impression générale que la publicité qu'il reçoit lui donne. Cependant, il
ne suggère pas que le consommateur moyen est incapable de comprendre le sens
littéral des termes employés dans une publicité, pourvu que la facture générale
de celle-ci ne vienne pas brouiller l'intelligibilité des termes employés.»
Donc, évidemment,
vous aurez compris que, dans ce que je viens d'exposer ici, je voulais
certainement faire référence directement aux
publicités qui sont envoyées, qu'on aborde dans ce projet de loi là pour
justement protéger le consommateur, qui est le but de la loi de
protection du consommateur, qui est aussi le but, la mission, la vision de la ministre titulaire de ce tout nouveau
portefeuille. Et je dois vous dire bien humblement que, lorsque cette loi-là a
été créée, en 1971, j'avais à peine
cinq ans, donc je ne me souviens pas des tenants et des aboutissants puisque
j'étais trop jeune. Par contre, je
dois vous dire que je connais bien un de mes prédécesseurs, Me Jacques
Rochefort, qui a été ministre responsable de l'Habitation et de la
Protection des consommateurs.
Donc,
évidemment, j'aurai certainement le loisir, dans les semaines qui viennent,
d'aller rencontrer Me Rochefort, parce que justement je pense que c'est
important de se rappeler d'où est-ce qu'on est partis, où nous sommes rendus, l'évolution entre le fait que, oui, la loi de
protection du consommateur a quand même connu certaines étapes, mais ça
va tellement vite qu'il y a plein de choses à faire. Je pense que vous avez
bien saisi aussi le fait qu'on avait ciblé, dans un premier temps, pour s'assurer qu'on puisse procéder éventuellement
à l'adoption de ces modifications législatives... et que c'est évident qu'il y
aura une phase II, et certainement une phase III, et une phase IV.
Sauf
que j'aimerais ça vous entendre, suite à ce que je viens de vous parler, de
l'attitude du consommateur moyen, comment
on peut mieux le protéger. Oui, il y
a la loi. Les gens ne connaissent pas
nécessairement la loi. Il
y a plein de choses qui parlent des publicités, qui parlent des
nouvelles manières de faire, le terme de surendettement. Il y a tellement de choses qu'on peut faire. Je pense que ce qu'on a ciblé dans notre projet de loi est vraiment quelque
chose qui vient chercher le
coeur, mais c'est sans pour autant s'arrêter là.
M. Lacoursière
(Marc) : Évidemment, depuis plusieurs années, en fait, l'approche québécoise
et fédérale également, là, des deux côtés, tant pour le crédit que pour
d'autres aspects — mais
principalement au niveau du crédit, je vais m'en tenir à
ça, bien entendu — c'est
d'informer le consommateur. Alors, on veut l'informer de toutes sortes de manières, et là on a un problème, dans un premier
temps, là, on a un problème un peu, si je peux dire, nouveau, auquel on ne faisait pas face avant. Alors, l'information du
consommateur, c'est que le consommateur, souvent, de quelle manière il s'informe? Il s'informe par le biais de son iPhone, d'un appareil
électronique, et tout ça, et ça, c'est un aspect de la loi où on parle
un peu de certaines communications électroniques, mais c'est très épars, à
gauche, à droite.
Je
pense, c'est un point sur lequel...
hein, je parlais de la vision globale tout à l'heure, là... c'est un point sur
lequel la loi pourrait se pencher, tout l'aspect des nouvelles technologies. Je
n'embarque pas dans les nouveaux modèles d'affaires,
ça, c'est autre chose, là, mais je m'en tiens au niveau des communications. Si
je prends, par exemple, un appareil comme
vous connaissez tous, bien entendu, lire des documents là-dessus, lire des
trucs, je n'ai que quelques années de plus que vous, et ce n'est pas facile, là. Alors, peut-être mon fils... ou
peu importe, ça, c'est une autre histoire... les jeunes, mes étudiants
sont habitués, je comprends, mais, pour le consommateur moyen, justement, c'est
un peu difficile.
Et
justement ce rapport-là aux technologies peut poser
certains problèmes pour une catégorie de la population qui sont des
consommateurs vraiment moyens, mais qui connaissent quand même bien leurs
trucs. Mais pensons, disons, aux personnes âgées. Les
personnes âgées ont un rapport aux technologies que nous, on n'a pas,
évidemment, et encore moins que nos enfants
ou mes étudiants, par exemple. Donc, des fois, la loi peut être moins adaptée
de ce côté-là. Donc, ça, c'est un point où on pourrait faire un effort.
Évidemment,
l'autre point... comme je disais, je l'ai marqué, je n'ai pas insisté dans ma
présentation, mais il y a une question,
là, qui est assez importante, c'est toute la question... et ça, c'est un monde
en soi, là... c'est l'accès à la justice. Et je comprends que la loi en tant que telle, on va la critiquer à gauche, à
droite, il y a des petits trucs. Mais, fondamentalement, c'est quand
même très bien, c'est quand même une très bonne loi, mais c'est le problème de
la mettre en oeuvre.
Dans
certains cas, au niveau fédéral, il existe un organisme de réglementation des
conflits... pardon, de médiation, si je
peux dire, ou de régulation extrajudiciaire des... de règlement, pardon,
extrajudiciaire des conflits, des litiges. Il y a quelque chose qui
existe, un peu semblable à l'AMF. On pourrait retravailler un peu là-dessus.
C'est quelque chose qui pourrait être réfléchi, au moins ne serait-ce que bien
informer le consommateur que cette possibilité-là existe.
Le côté fédéral
fonctionne relativement bien. C'est certain qu'on pourrait... Ça dépend du
point de vue : une institution
financière va peut-être être moins d'accord; un consommateur, peut-être, et,
encore là, ça dépend qui a eu gain de cause.
Souvent, ça, ça influe un peu. Mais, généralement, c'est une bonne façon
d'accéder à la justice. Il y en a d'autres. Mais, pour ce qui est concrètement de la loi, le fait de permettre cette
possibilité-là d'aller vers une forme de médiation... Là, je parle au niveau du crédit; est-ce qu'il y
aurait quelque chose de plus général...
la loi, c'est autre chose. Mais
ça, c'est quelque chose qui peut être un plus, évidemment.
Et
il y a : Autres éléments. Donc, j'ai mis, dans mon document, ne serait-ce
que l'éducation financière, et je suis le premier à reconnaître les limites de l'éducation financière. Il y a
quand même... C'est bon, l'éducation financière, c'est bon, la littératie financière et c'est bon d'expliquer
aux gens comment ça fonctionne, les aspects financiers. Parce que
c'est un peu, disons-le, rébarbatif pour plusieurs, pour une certaine tranche
de la population et sinon pour la majorité de la population. Donc, au moins
l'abc de la finance, comment ça fonctionne, comment fonctionne une carte de
crédit, tout ça, il y a
des gens qui ont de la difficulté avec ça. Donc, ça va dans l'esprit de
divulguer l'information, éduquer les gens. C'est plus quelque
chose, je crois, qui est vraiment comme fondamental.
• (17 heures) •
Pour
le reste, ce sont des mesures que l'on retrouve dans la loi. Alors, il y a plusieurs
mesures que vous avez mises. Évidemment,
mieux évaluer le crédit, je l'ai
mentionné tout à l'heure, je n'y reviens pas. Les modalités de remboursement, je l'ai mentionné dans mon document,
c'est quelque chose qui existait dans le projet n° 24 qui n'a pas été
repris.
Donc,
en deux mots, c'est l'idée que le consommateur, lorsqu'il est en défaut, par l'article 107,
il peut faire une requête pour modifier ses termes de paiement et les
conditions imposées par la loi et par la jurisprudence. Et je pense notamment à
Mercedes contre Champagne, décision de la Cour d'appel, 1993, de mémoire. Dans
ce cas-là, c'est des cas où on exige quand même... la barre est haute, là, ce n'est pas n'importe qui qui demande,
c'est... par exemple, on a un motif
sérieux, une perte d'emploi, tout ça.
Donc, ça, dans le projet de loi, on permettait que le consommateur prenne
les devants pour demander, en cas de perte
d'emploi, ne pas attendre de recevoir cet avis de défaut, mais qu'il puisse prendre les devants, donc, pour demander une modification des termes de paiement. C'est quelque
chose qui peut être également
souligné.
J'ai parlé des frais hypothécaires,
je n'y reviens pas, c'est quelque chose qui pourrait beaucoup aider les
consommateurs. Comme je l'ai mentionné dans mon document, c'est un peu un
tremplin vers le surendettement pour certaines personnes, là. Je pense que
c'est assez clair en ce qui me concerne.
Évidemment,
il y a d'autres aspects. Un autre aspect qui est très important, je ne l'ai pas
mentionné, mais j'y viens maintenant,
le dépassement de la limite de crédit. Le dépassement, l'article 128, on
va... ça, c'est un exemple où on va peut-être
un peu plus loin que le fédéral, mais on pourrait quand même faire un bout de
chemin, on a l'article 128 qui permet d'augmenter la limite de
crédit à condition que le consommateur ait consenti de manière expresse. Donc,
ça, c'est très bien, c'était déjà une vieille disposition, mais là on vient la
préciser, premièrement, et on vient expliquer qu'il ne doit pas y avoir de frais de dépassement de la limite de crédit. C'est
très bien, mais là on amène une exception à 128.1, on dit : Dans
certains cas, si on augmente la... Oui?
Le
Président (M. Matte) : Je m'excuse, je dois suspendre les travaux
parce qu'il y a un vote. Le vote est appelé, donc on doit suspendre les
travaux, on va aller voter, puis on va revenir, puis on va poursuivre avec
vous.
M. Lacoursière
(Marc) : Oui. O.K. désolé.
Le Président (M.
Matte) : Vous nous attendez ici.
(Suspension de la séance à
17 h 2)
(Reprise à 17 h 27)
Le
Président (M. Matte) : ...il
vous reste environ six minutes à poursuivre les échanges avec Mme la ministre à ce moment-là. Oui, six
minutes. Bien, 5 min 45 s. Puisque vous me surveillez, je vais
être précis.
Mme Thériault :
...la députée de Fabre avait certainement une question.
Le
Président (M. Matte) : C'est
beau. Maintenant, j'invite la députée de Fabre à
poursuivre les échanges qui sont déjà amorcés. Mme la députée, à vous la
parole.
Mme
Sauvé : Merci, M. le Président. Bienvenue. Très contente de vous entendre. Écoutez,
ma question, c'est une sensibilité
par rapport au consommateur solidaire, alors je voulais voir un petit peu
qu'est-ce que vous pensez de la mesure qui
vise à le libérer et... bien, par exemple, si on prend le codétenteur d'une
carte de crédit. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus.
M.
Lacoursière (Marc) : Je suis
entièrement d'accord qu'on puisse libérer le codétenteur de la carte
de crédit lorsqu'il décide de...
Bien, souvent, c'est des cas de séparation ou de divorce. Essentiellement, c'est ça. Donc, c'est une mesure
qui est excellente à deux points de
vue. D'abord, si les personnes sont
séparées, il n'y a plus de raison qu'elles continuent d'être solidaires. Et je crois que
c'est encore malheureusement le cas aujourd'hui, encore, ce sont des conjointes qui sont solidaires, donc ça permet un peu mieux
de protéger les débitrices dans ce cas-ci. Donc, c'est quelque chose qui est très bien vu.
De quelle
manière, quelles sont les modalités maintenant pour... on parle d'envoyer un avis, dans la
disposition législative. Moi, je vous
dirais : Pourquoi ne pas pouvoir envoyer un avis par courriel tout
simplement? On envoie un avis par
courriel et... parce que, si on envoie un avis par courrier recommandé,
peut-être que ça peut être... c'est compliqué pour certaines personnes, et tout ça. Un courriel, nous avons tous des
ordis, nous avons tous des téléphones cellulaires, peu importe, on envoie le courriel avec un accusé
de réception qui confirme que ça a été bien envoyé, comme ça, tout est
clair, c'est clair pour tout le monde, et, à ce moment-là, la solidarité
termine.
Donc,
évidemment, pour les dettes, jusqu'au moment de l'avis, les dettes passées,
c'est certain que la personne qui est
la titulaire secondaire, si je peux dire, va demeurer responsable, c'est tout à
fait normal, mais, pour ce qui s'en vient... Donc, ça va faciliter, en
deux mots... surtout un avis par courriel, là, pourrait faciliter la vie des
titulaires secondaires.
Mme Sauvé : Et, pour vous, c'est la
principale mesure, là, qui va pouvoir libérer, c'est vraiment un peu votre
solution un peu.
M. Lacoursière (Marc) : Oui, je
crois que c'est une solution qui est très intéressante.
Mme Sauvé : Et qui est concrète.
M. Lacoursière (Marc) : Absolument,
oui.
Mme Sauvé : Merci.
M.
Lacoursière (Marc) : Et qui
est simple également, surtout qui est simple, qui est conviviale.
L'idée, c'est de faciliter la tâche
souvent au consommateur et, dans certains cas, aux institutions financières également, là, mais, dans ce cas-ci, on parle du
consommateur, le débiteur... le codébiteur. Donc, oui, ça lui facilite la
tâche, c'est simple, on envoie un courriel, un accusé de réception comme quoi
ça a été reçu, et tout, tout est sous contrôle dans ce cas-là.
• (17 h 30) •
Mme Sauvé : Merci beaucoup pour
votre réponse. Merci.
Le
Président (M. Matte) : Je vous remercie. Maintenant, j'invite la députée de Richmond
pour poursuivre nos échanges. Il vous reste trois minutes.
Mme
Vallières : Merci,
M. le Président, bien aimable à vous.
Bonjour,
merci de votre participation avec nous vraiment très appréciée. J'ai
le bonheur de porter des dossiers jeunesse
au sein du gouvernement, alors c'est un aspect qui m'intéresse particulièrement et dans ce projet de loi que l'on dépose aussi. Vous avez parlé évidemment
beaucoup du surendettement. Vous parlez de la littératie, de l'éducation
financière. Au-delà de l'éducation financière, parce que vous l'avez mentionné tout
à l'heure, que ça peut démontrer certaines
limites, il y a quand
même un cours supplémentaire qui a été ajouté dans le cursus en ce moment. Puisque vous dites que cette éducation financière a
certaines limites, comment vous le voyez dans l'avenir, non seulement pour les jeunes, mais vous
parlez aussi des consommateurs plus défavorisés? Pour atteindre ces gens-là,
pour être capable, justement, de faire cette éducation de façon la plus
adéquate possible, la solution que vous préconisez?
M.
Lacoursière (Marc) : Bien,
en fait, si on parle de l'éducation financière en tant que telle, évidemment,
il y a les organismes
consuméristes qui font la part des choses. Il y a même certaines institutions
financières qui en font, et parfois c'est très bien
fait également. Certains qui peuvent avoir un parti pris, du
moins en apparence, évidemment, mais ils
sont quand même compétents dans ce qu'ils expliquent. Donc, ce
n'est pas rien non plus. L'Office de
la protection du consommateur, au niveau fédéral également, il y a des
mesures qui sont prises.
Mais, lorsque
je disais qu'il y a des limites à l'éducation financière, on a
fait un peu un bon bout de chemin avec ça, les cours à l'école également, c'est autre chose, est-ce qu'on peut penser à
des mesures plus concrètes dans le projet
de loi? Donc, les mesures dont on a vu... L'histoire de la personne qui est
débitrice solidaire, par exemple, qui veut se désolidariser, ça, c'est quelque
chose, c'est une mesure, l'évaluation du crédit, alors, toutes ces mesures-là.
Les jeunes, le problème des jeunes sur
les campus, la sollicitation du crédit sur les campus, ça me fait
réfléchir sérieusement. Il y a une nuance entre la publicité et la sollicitation
très active. Je comprends que faire de la publicité dans les journaux, peu importe, sur Internet, c'est une
chose, mais aller vraiment solliciter des étudiants dans les salles de
classe... Moi, les étudiants parfois me disent, dans les cours, ils viennent me
voir, ils savent que j'enseigne le crédit, alors évidemment, ils viennent me
voir, ils me disent : Oui, ils nous offrent beaucoup d'argent, là, les institutions financières. Puis, tu sais, plusieurs sortent de là, de l'université, ils sont tombés un peu dans la spirale, ils sont peut-être
trop... Est-ce qu'il faut enlever ça totalement?
Est-ce qu'il faut mettre une limite? Ce sont des questions à réfléchir. Mais,
lorsqu'on promouvoit le crédit, on promouvoit un peu l'endettement en même
temps. Donc, ça, c'est quelque chose qui serait au moins à considérer.
Mme
Vallières : Et
est-ce que, par rapport à cette sollicitation sur les campus, vous dites,
dans le document que vous avez présenté, que vous excluriez les institutions
financières déjà sur place, est-ce que c'est déjà une incitation aux institutions
financières, à ce moment-là, d'entrer sur les campus et peut-être offrir cette
sollicitation-là?
Mais
une deuxième interrogation aussi, parce
que la sollicitation ne se fait pas
que par les institutions
financières sur les campus... J'ai rencontré un étudiant qui a été sollicité
par une compagnie...
Le Président (M.
Matte) : Je m'excuse, Mme la députée de Richmond...
Mme
Vallières :
On n'a plus de temps.
Le
Président (M. Matte) : ...votre temps est écoulé et, par respect... à moins que l'opposition veut vous
laisser du temps pour finir, là.
Mme
Fournier : Bien, la question
était pertinente. Donc, effectivement, je laisserais la députée de Richmond
terminer.
Le Président (M.
Matte) : C'est bien.
Mme
Vallières :
Merci beaucoup. Sollicitation par une compagnie de véhicules qui va voir les
étudiants universitaires pour leur dire : Qu'est-ce que vous avez
comme véhicule? Je vous offre la même chose, neuf, pour le même paiement que vous avez. Ça fait que la personne se
ramasse avec un nouveau véhicule, mais elle ne réfléchit pas au fait
que, là, elle vient de se rajouter un trois,
quatre, cinq, 10 ans de paiements, même si c'est le même montant mensuel.
Donc, la sollicitation ne se fait pas que par les institutions financières, ça
fait que j'aimerais ça vous entendre là-dessus aussi.
M. Lacoursière (Marc) : En fait, c'est tout ça, la question. Donc, j'ai
commencé à parler de la sollicitation active. Le fait qu'il y a une institution
financière, prenons l'Université Laval — évidemment, celle que je connais mieux — il
y a une caisse populaire Desjardins sur le campus, nous sommes très contents,
moi le premier, qu'il y ait une caisse populaire sur le campus, c'est très bien.
Ça, c'est une chose.
Mais
là je parle d'autre chose. Ce n'est pas le fait d'interdire d'avoir une institution sur le campus; la question,
elle va plus loin... le problème, pardon, va
plus loin. C'est, lorsqu'on va dans la salle de classe, on va rencontrer les
étudiants, on leur offre des primes, on leur
paie un lunch, entre guillemets, on leur donne, peu importe, des cadeaux ou
quoi que ce soit pour qu'ils s'engagent à prendre des cartes de crédit,
c'est plutôt là, le problème, en fait, tant qu'à moi.
Mme
Vallières :
Merci.
Le Président (M.
Matte) : Je vous remercie. Maintenant, j'invite la députée de
Marie-Victorin à poursuivre.
Mme
Fournier : Oui, bonsoir. Merci d'être parmi nous, M. Lacoursière.
C'est très intéressant d'avoir le point de vue aussi d'un professeur qui vit la situation, notamment sur les campus
post secondaires, parce que, moi aussi, c'est une question qui
m'interpelle beaucoup.
Ça
ne fait pas si longtemps que ça que j'ai passé à travers ce parcours-là, et je
me souviens bien que, par exemple, à la rentrée, il y avait souvent des
institutions financières qui installaient des kiosques directement dans les
aires communes des étudiants pour les
inciter à obtenir des cartes de crédit, puis je pense qu'on s'entend sur le
fait que les jeunes qui arrivent justement
au cégep ou à l'université n'ont pas nécessairement encore beaucoup
d'expérience en matière de crédit et
peuvent malheureusement se laisser tenter par certains crédits par manque
d'information et par manque d'éducation financière. Et, dans votre mémoire, donc, vous traitez de la question,
qui est un élément, en fait, manquant dans le projet de loi n° 134, mais qui avait pourtant été
débattu dans le projet de loi n° 24 assez abondamment, mais vous dites
qu'on devrait l'interdire ou la baliser afin d'empêcher les abus. Puis je me
demandais ce que vous entendiez par le terme «baliser». De quelle façon vous le
verriez?
M. Lacoursière
(Marc) : Parfait. Soit l'empêcher, on comprend qu'on ne veut pas avoir
de sollicitation, ou la baliser, on peut
dire : Bien, dans certains cas, certains types de sollicitation, ça
pourrait être par une mesure réglementaire. Évidemment, là, ce n'est pas une mesure qu'on pourrait mettre dans le
projet de loi en tant que telle, mais moi, je la verrais plus dans un règlement, mais ça, c'est une
question de modalités. Mais, pour revenir à baliser, donc, on pourrait
permettre, dans certaines circonstances,
interdire qu'il y ait une prime qui soit donnée, par exemple. Si c'est vraiment
de l'éducation financière...
Des fois, on va dire : C'est de l'éducation financière, mais c'est
peut-être vraiment de la sollicitation. Qu'est-ce qu'il en est derrière tout ça? Alors, au moins,
empêcher les primes, ça serait déjà un bon début de fait. Comme je
disais tout à l'heure, on va payer le lunch,
pour avoir moi-même été témoin, là, de la situation sur le campus. Donc, ça,
c'est quelque chose, est-ce que, oui
ou non, c'est souhaitable? Il y aurait moyen de voir. On pourrait dire :
Oui, dans certains cas, ça pourrait être permis, mais jusqu'où? Est-ce
qu'on devrait dire : On met une limite au montant qu'on accorde aux étudiants? C'est beaucoup. Les étudiants ont droit
à beaucoup d'argent. C'est beaucoup, là, des fois ça frôle le
100 000 $ pour des étudiants en
droit. Pour faire un bac, je comprends qu'il y a des frais, les frais de
scolarité, les frais d'hébergement, tout ça. Mais c'est beaucoup
d'argent, là.
Mme Fournier :
Exactement le point que j'allais amener parce qu'on sait justement, dans
certaines disciplines, par exemple,
que ce soient des étudiants en droit, des étudiants en médecine ou même dans
d'autres domaines... peuvent avoir accès
à des sommes très faramineuses, comparativement à des étudiants dans d'autres
domaines aussi, alors qu'on sait pourtant
que ce n'est pas parce qu'on devient avocat qu'on fait nécessairement
100 000 $, 200 000 $, 300 000 $ par année.
Donc, ça laisse miroiter que la situation financière va pouvoir s'améliorer,
mais ce n'est pas nécessairement le cas. Puis
il y a beaucoup d'étudiants qui se ramassent avec des fardeaux financiers
extrêmement importants alors même qu'ils ne sont même pas entrés sur le
marché du travail. Donc, vous, j'en comprends que vous seriez favorable à des
mesures qui limiteraient la marge de crédit disponible, donc, accordée pour les
étudiants.
M. Lacoursière
(Marc) : Bien, je serais en mesure d'encadrer, de manière générale,
cette question-là de la sollicitation dans
un premier temps. Est-ce qu'on doit l'interdire ou non? Encore une fois, je
pose la question. Ça, c'est dans un premier temps.
Dans un deuxième
temps, le montant, est-ce que c'est beaucoup ou ce n'est pas beaucoup?
Évidemment, une institution financière
dirait : Bien, la plupart des gens ne vont pas prendre, disons que c'est
100 000 $, je mets un chiffre rond, là, ne vont peut-être pas prendre le 100 000 $, mais ne
vont prendre que 30 000 $ ou 25 000 $. Je mets
vraiment un chiffre au hasard, là. Ce n'est
pas les vrais chiffres, c'est un chiffre au hasard. Mais je peux comprendre que
la plupart ne vont pas jusqu'au bout
de la marge, j'en sais quelque chose, mais l'idée, c'est que ça peut être assez
tentant et dans certains cas.
Et,
lorsque j'ai débuté, j'ai parlé de la marge de crédit hypothécaire, qui permet
d'aller chercher de l'argent pour autre
chose que l'objet lui-même, c'est-à-dire les rénovations domiciliaires, donc
aller chercher de l'argent pour payer des voyages ou autres choses. Mais chose dans ce cas-ci, peut-être qu'un
étudiant serait tenté de dire : Oui, je pourrais prendre l'argent dans cette marge-là pour me payer quelque
chose à moi qui n'est pas nécessairement directement lié, par exemple, un voyage ou peu importe. C'est quelque chose qui
amène un peu, là, une forme d'endettement qui est peut-être un peu
néfaste pour les étudiants.
Mme Fournier :
Parfait. Puis, quand vous parlez justement des activités d'une institution
financière, là, qui serait située à l'intérieur de l'établissement, vous dites
de ne pas interdire la sollicitation à l'intérieur même des lieux de l'institution financière ou vous leur
permettriez même de faire de la sollicitation à l'extérieur, puisque... Par
exemple, la caisse Desjardins à l'Université Laval, est-ce que, dans ce cas-là
que vous mentionnez, ils pourraient aller faire la sollicitation, par exemple,
à l'extérieur de la porte de leur institution?
• (17 h 40) •
M. Lacoursière (Marc) : Non, non. En fait, pour revenir à l'exemple de
Desjardins, c'est un bon exemple, c'est, encore une fois, la nuance
entre la publicité et la sollicitation. Je suis très à l'aise et même, je
dirais, j'encouragerais même Desjardins, s'ils veulent faire de la publicité,
c'est bon, c'est une bonne chose s'ils veulent faire de l'éducation financière.
Mon problème n'est pas là. Mon problème, c'est lorsqu'on fait vraiment la
sollicitation active où on va donner des primes aux étudiants, mais vraiment on
insiste beaucoup pour qu'ils prennent du crédit. C'est plutôt là, le problème. Si ça se limite à l'éducation financière
ou de la publicité, c'est une chose, mais, si on va beaucoup plus loin
dans la sollicitation qui est très active et
qui devient très néfaste, c'est plutôt là. Je comprends que la zone est un peu
grise, là, je suis le premier à le comprendre, mais c'est plutôt là que
ça me fait réfléchir un peu, disons.
Mme
Fournier : O.K. Merci. J'aurais une dernière question concernant les
hypothèques parapluies. Ça, vous en parlez
un peu dans votre mémoire. Je me demandais comment vous l'envisagiez dans le
cadre de la présente loi. Est-ce que vous auriez pensé que ça aurait pu
s'intégrer au projet de loi n° 134?
M. Lacoursière (Marc) : Bien, en fait, c'est la question de savoir est-ce
qu'on intègre le crédit immobilier ou non. Si vous décidez d'intégrer
cette chose-là, il y a plusieurs solutions. On pourrait réfléchir à plusieurs
solutions. Peut-être que le montant pourrait
être moindre que ce qui est accordé actuellement. Parce qu'on accorde... Et je
sais que les institutions financières sont quand même prudentes, parce
que, s'ils accordent une marge de crédit hypothécaire, ce n'est pas 100 % de la valeur. Tout est
calculé, mais, en plus de ça, on devra maintenant évaluer la capacité de
rembourser. Il y a un peu tout ça qui vient
jouer en ligne de compte. Peut-être que le montant disponible pourrait
peut-être être moindre. L'idée, ce
n'est pas de vérifier, c'est de faire la police, entre guillemets, de vérifier
qu'est-ce que les gens font avec leur marge, là. Je ne veux pas, tu
sais, on ne va pas jusque-là, ce n'est pas ça l'idée. L'idée, c'est de
dire : Il y a beaucoup d'argent disponible, et les gens, s'ils savaient un
peu mieux, s'ils étaient un petit peu plus sensibilisés à la question dans quoi
ils s'embarquent, mais ça va un peu avec l'éducation financière, là, tout se
tient, en fait.
Donc, ça, c'est
quelque chose qui pourrait être pris en compte. Peut-être qu'il pourrait y
avoir un petit peu moins d'argent
disponible, c'est quelque chose qui peut être envisagé. Je n'ai pas une
solution unique à vous soumettre maintenant,
mais ce que je vous dis, c'est : On pourrait réfléchir à ce genre d'avenue
là. Est-ce que, donc, il y aurait moins d'argent
disponible? Ça peut être une chose, mais le fait que les gens, les emprunteurs
soient plus sensibilisés aux conséquences
d'aller piger dans la marge, ça... Tu sais, il y a un peu tout ça, mais le fait
qu'on va peut-être mieux évaluer à qui on donne la marge, c'est
peut-être ça aussi. Il y a plusieurs éléments qui tournent autour pour la
réponse.
Mme
Fournier : Ça va. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Matte) : C'est bien. Je vous remercie. Maintenant,
j'invite le député de Borduas à poursuivre nos échanges avec Me
Lacoursière.
M.
Jolin-Barrette : Bonjour.
M. Lacoursière
(Marc) : Bonjour.
M. Jolin-Barrette : Merci de participer aux travaux de la commission. Je voudrais continuer
sur le propos, là, de la députée de
Marie-Victorin relativement aux hypothèques parapluies. Vous dites : On
devrait peut-être les régir davantage, notamment au niveau du montant,
d'un plafonnement. Avez-vous une opinion là-dessus, sur le pourcentage de plafonnement qu'on devrait inscrire, parce que
vous le dites, puis la Chambre des notaires, tout à l'heure, l'a
mentionné aussi, dans le fond, par une
garantie hypothécaire, on vient rendre... bien, en fait, il y a des biens
immobiliers qui ont une garantie
hypothécaire maintenant. Donc, est-ce qu'il y a un montant en termes de
pourcentage de la valeur de la propriété qu'on devrait limiter?
M. Lacoursière
(Marc) : Je n'ai pas de montant à vous soumettre nécessairement. Peut-être
que la Chambre des notaires a un montant
plus spécifique que moi. Ce que je vous dirais, c'est que les institutions
financières n'accordent une marge de crédit qu'à un certain pourcentage
de l'actif qui est disponible, de l'actif net, là. Peut-être...
M.
Jolin-Barrette : ...ratio, là. Ils regardent le ratio puis...
M. Lacoursière (Marc) : Oui, le ratio, mais peut-être qu'on pourrait un
peu diminuer dans certains pourcentages. C'est une question de voir. Je pense que le mieux, là-dedans, ce
serait : si on le fait par une mesure réglementaire, on aurait le temps de peut-être consulter un peu ce qui en
est, de voir quelques opinions diverses sur la question, mais moi, je
vous dirais qu'il faudrait au moins réfléchir à peut-être qu'il y en aurait un
peu moins, d'argent, de disponible. Mais ça, c'est juste un élément de la
réponse.
Mais
l'autre élément, je vous le disais tout à l'heure, c'est toute l'idée de
dire : Est-ce qu'on pourrait sensibiliser mieux les clients? Et ça m'amène peut-être, si vous me permettez, à un
point que je mentionne dans le rapport, que je n'ai pas encore
mentionné : peut-être que le banquier, au sens général, incluant les
caisses populaires, peut-être que le banquier
pourrait avoir une obligation de mieux conseiller son client, de bien
conseiller son client. En droit, le banquier n'a pas cette obligation-là en droit canadien. Le banquier a l'obligation
s'il peut volontairement donner des conseils, mais n'a pas à conseiller. Donc, si, au moins, il pouvait
donner des conseils à plusieurs égards, surtout au niveau d'un
engagement hypothécaire, vraiment, il peut
les donner. Mais, s'il avait cette obligation de conseiller et de dire :
Moi, je crois que, dans votre
situation, vous ne devriez pas aller jusque-là, au moins l'interdire, c'est
quelque chose qui pourrait être complémentaire à cette question-là de la
marge de crédit hypothécaire.
M.
Jolin-Barrette : Puis, si on reste dans le cadre des emprunts
hypothécaires, là, qu'est-ce que vous pensez de — bon, enfin, on peut l'élargir à toute la
notion, là, de la conclusion de contrats de crédit — la notion de consentement? Tu sais, selon votre expérience en consommation,
en crédit, tout ça, le consommateur québécois, là, quand il contracte
une hypothèque, quand il contracte un
contrat de crédit, est-ce qu'il y a des données là-dessus, à savoir est-ce
qu'il comprend véritablement ce à quoi il s'engage au niveau du
consentement libre et éclairé?
M. Lacoursière (Marc) : Je ne suis pas certain jusqu'à quel point la majorité...
le consommateur moyen comprend tout
parfaitement. Évidemment, le banquier, normalement, surtout dans un cas
hypothécaire, va bien lui expliquer dans quoi il s'engage, le
consommateur va poser des questions. Mais c'est compliqué, surtout le domaine hypothécaire,
c'est assez compliqué, donc ça pose évidemment des problèmes
importants. Quelle est la valeur du consentement? C'est certain qu'en général il a pris connaissance... Le consommateur moyen a peut-être consulté un peu, le banquier lui a
expliqué les choses. Il n'a pas d'obligation de consigne, mais il a l'obligation d'information et de renseignement. Donc, normalement, le banquier lui a
expliqué un peu ce qu'il en est, donc je pense qu'il y a quand même un
consentement qui est là.
Mon
problème est plus au niveau de la marge de crédit. Est-ce qu'il a vraiment compris la marge sur le coup et puis est-ce
qu'il en a vraiment besoin? Parce que, des fois, on offre des marges qu'on n'a peut-être
même pas besoin et, également, des fois, on offre des limites de crédit pour
l'achat d'une maison, et c'est peut-être plus haut que ce qu'on a vraiment
besoin. Donc, ça, c'est autre chose, là. Alors, est-ce qu'on a expliqué? On a
consenti, oui, mais, de la part du prêteur, est-ce qu'on a bien expliqué
dans quoi on s'embarque puis est-ce que le consommateur l'a vraiment saisi? Peut-être
que, dans certains cas, ce n'est pas le cas.
M.
Jolin-Barrette : Dans le cadre de prêts hypothécaires, là, pensez-vous
qu'on devrait légiférer à l'effet de forcer
les institutions financières à offrir un choix au consommateur, à
savoir : Est-ce qu'il désire avoir un acte hypothécaire ou une
marge de crédit hypothécaire? Parce que, je vous donne un exemple, actuellement,
dans les institutions financières, c'est ce qui se passe, c'est que, lorsque
vous y allez pour une hypothèque, bien, le choix n'est pas véritablement
offert. Dans le fond, l'institution financière dirige le client vers une marge de crédit
hypothécaire sans offrir la possibilité. C'est pris pour acquis. Donc, est-ce
que vous pensez que nous, on devrait légiférer pour dire : Bien, vous
devez offrir véritablement les deux au consommateur puis d'expliquer quelles
sont les conséquences à prendre un acte hypothécaire versus une marge de
crédit hypothécaire?
M.
Lacoursière (Marc) : Oui,
ça... Bien, évidemment, si on lui dit : Là, vous prenez une
hypothèque, et on vous donne le choix de prendre la... Oui, c'est ce qui
est souhaitable, évidemment, parce que...
M. Jolin-Barrette : Pensez-vous
qu'on doit légiférer là-dessus?
M.
Lacoursière (Marc) : Bien,
légiférer de quelle manière? C'est-à-dire, pour dire : Vous devez lui
expliquer, lui offrir la possibilité... C'est ce que j'entends?
M. Jolin-Barrette : Exactement.
M.
Lacoursière (Marc) : Oui,
dans ce cas-là, oui, parce que les banquiers ou les prêteurs vont dire :
Nous, on le fait dans la pratique.
Mais je comprends que, dans la pratique, les institutions financières le
font. Le problème, c'est, ils disent :
On va suivre nos pratiques commerciales. Oui, je veux bien, mais, comme je
disais tout à l'heure, il n'y
a pas de sanction s'ils ne suivent pas les pratiques
commerciales. Et, si on regarde en bout de ligne, là, le taux d'endettement
qui est très élevé, bien, il y a quelqu'un
quelque part qui est très généreux en accordant du crédit.
Donc, ça, ça pose un certain problème.
Donc, oui, pour revenir à votre question, le fait de dire : On devrait
bien expliquer et que ce soit clair, on offre l'hypothèque en tant que telle. Et ce serait autre chose, une autre...
on offre concrètement, il y a un deuxième consentement évidemment qui se
fait. Et que ce soit vraiment un peu plus encadré, oui, oui, je suis d'accord
avec ça.
M.
Jolin-Barrette : À l'article
103... bien, enfin, à 19 du projet de
loi, on vient insérer l'article
103.2 du projet de loi, donc l'évaluation
de la capacité de rembourser le crédit demandé. Donc, on dit : «Avant de
conclure un contrat de crédit avec un consommateur ou, si le contrat de crédit
est un contrat de crédit variable, de consentir à l'augmentation de la limite de crédit, le commerçant doit évaluer la
capacité du consommateur de rembourser le crédit demandé», et, lorsqu'on
va au troisième alinéa, on dit que les institutions financières, comme les banques et les caisses, sont réputées
satisfaire à cette obligation-là d'information, en fonction des saines
pratiques de gestion commerciales en matière de crédit à la consommation.
Le Président (M. Matte) : Merci pour
la question...
M.
Jolin-Barrette : Peut-être
juste, la question comme telle : Est-ce que vous trouvez que
c'est approprié de faire une exception comme ça pour les banques et les
caisses ou on devrait les assimiler à tous les autres prêteurs?
M.
Lacoursière (Marc) : Je suis
à l'aise avec ça parce que les banques sont très, très encadrées. Cette
question-là, je pense que...
Le
Président (M. Matte) : On va
poursuivre après. Je veux dire, on dépasse largement le temps qui était
alloué. Mais je voudrais tout simplement vous remercier de votre participation
aux travaux de la commission.
M. Lacoursière (Marc) : Merci.
Le
Président (M. Matte) : Je
voudrais également, au nom de la commission, vous remercier
pour les notes que vous nous avez fournies.
M. Lacoursière (Marc) : Très bien.
Merci.
Le Président (M. Matte) : Et, tel
qu'entendu avec la secrétaire de la commission, vous allez nous faire parvenir
votre mémoire d'ici quelques jours, et qu'il sera déposé lors de l'étude
détaillée du projet de loi.
M. Lacoursière (Marc) : Parfait.
Le
Président (M. Matte) : Et je
vous souhaite aussi, je sais que vous êtes très occupé et que vous allez
déposer votre premier volume, là,
prochainement, ça, sur l'éditeur. Donc, je vous souhaite bonne chance puis je vous remercie encore.
M. Lacoursière (Marc) : Merci
beaucoup. C'est très gentil.
Le Président (M. Matte) : Je
suspends les travaux sine die, là, à demain matin. Ça va?
(Fin de la séance à 17 h 50)