(Dix heures)
Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bon matin. Je déclare la séance
de la Commission des institutions ouverte.
La commission est réunie afin de procéder à
l'interpellation de la députée de Joliette à la ministre responsable des
Relations canadiennes et de la Francophonie canadienne sur le sujet
suivant : L'échec de l'approche provincialiste du gouvernement fédéraliste
de la Coalition avenir Québec pour faire avancer ses revendications
constitutionnelles face au gouvernement canadien.
Avant de débuter, Mme la secrétaire, y a-t-il
des remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme Jeannotte (Labelle) est remplacée par M. Caron (Portneuf)
et M. Barrette (La Pinière) est remplacé par M. Birnbaum
(D'Arcy-McGee).
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Je comprends qu'il y a une entente à
l'effet que l'opposition officielle intervienne lors de la deuxième, quatrième
et sixième série d'interventions et que le deuxième groupe d'opposition
intervienne lors de la cinquième série d'interventions.
Nous en sommes aux déclarations d'ouverture. Mme
la députée de Joliette, vous avez la parole pour 10 minutes. Merci.
Exposé du sujet
Mme Véronique Hivon
Mme Hivon : Merci beaucoup, M.
le Président. Alors, je salue la ministre, toute son équipe du SQRC, et les
collègues de la partie ministérielle, et mes collègues de l'opposition.
Pour cette dernière interpellation de la session
et de la législature, on s'est dit que ce serait une bonne idée de faire le
bilan des promesses versus des résultats du gouvernement de la CAQ dans son
approche, comme le dit le titre de
l'interpellation, son approche provincialiste, comme gouvernement fédéraliste,
pour faire avancer ses revendications face
au gouvernement canadien. Évidemment, on a intitulé l'interpellation «Échec» et
aujourd'hui on va établir pourquoi c'est un échec mais surtout
comprendre comment le gouvernement a pu se contenter de si peu, alors qu'il
avait voulu promettre tant.
Alors, ça nous amène d'abord à rappeler ce
document, qui est un document dont la ministre et moi parlons souvent, qui
était le document-phare de la Coalition avenir Québec, déposé en
novembre 2015, Un Québec ambitieux : un nouveau projet pour les
nationalistes du Québec, qui faisait partie de cette thèse autonomiste — dite autonomiste — de la
Coalition avenir Québec. Donc, ça, c'était la promesse, 21 revendications,
21 champs de travail avec le gouvernement fédéral. Et le résultat, ça a
été quoi? Ça a été zéro. Donc, il n'y a aucune de ces 21 demandes qui a
été couronnée de succès. Pire, on se ramasse avec le document Québécois,
notre façon d'être Canadiens, qui est toujours la marche à suivre du gouvernement
caquiste, qui était pourtant la politique du gouvernement libéral sous
Jean-Marc Fournier et Philippe Couillard.
Alors, je pense qu'aujourd'hui il ne faut pas
réajuster l'appareil, mais il y a effectivement une énorme différence, une
marge incommensurable entre ce qui avait été annoncé, ce qui a été obtenu et,
pire, ce qui apparaît comme la politique actuelle du gouvernement caquiste,
donc une politique totalement fédéraliste et provincialiste qui ne se distingue
aucunement de celle du gouvernement de Philippe Couillard.
Comment a-t-on pu en arriver là? C'est une
excellente question. En fait, on peut se dire que c'était un mirage, c'était un
mirage, le projet autonomiste — dit autonomiste — de la
CAQ. Et, quand on y regarde de plus près, il
faut quand même voir ce qui s'est passé. Dans les 21 demandes, il y a eu
zéro résultat, mais, pire, il n'y a presque rien qui a été formellement
demandé.
Alors, je vous rappelle le contexte. Il y a eu,
essentiellement, trois demandes, les trois refusées, et c'est comme si ça avait
paralysé l'action du gouvernement en matière de relations Québec-Canada, ce qui
fait qu'ils n'ont à peu près plus rien demandé, de peur de devoir affronter
d'autres échecs.
Petit rappel.
Première demande : rapport d'impôt unique. Rapport d'impôt unique, c'était
dans leur document. C'était dans le décor depuis longtemps. Qu'est-ce
qui s'est passé? La demande est faite. Moins de 24 heures plus tard, la
réponse arrive, sans aucune ambiguïté, de Justin Trudeau. Il ne s'est même pas
arrêté pour parler aux journalistes, pour en faire un point de presse formel
dans le corridor, à la Chambre des communes, en passant. Non. On est
complètement fermé à la revendication du rapport d'impôt unique.
Deuxième élément : pouvoirs en
matière d'immigration. Donc, le mois dernier à l'étude des crédits, le
premier ministre, dans une journée où il s'était fait questionner abondamment
par notre chef parlementaire sur la question de l'immigration, il dit :
Ah! nous, on les veut tous, les pouvoirs en immigration. Qu'est-ce qui s'est
passé? Je vous le donne en mille, exactement la même attitude, Justin Trudeau
dit non. Il ne réfléchit pas pendant une semaine, pendant un mois, non. Moins
de 24 heures plus tard, même fin de non-recevoir : Jamais de la vie,
on ne consentira pas les pouvoirs en immigration au Québec.
Et, bien sûr, c'est
sans compter la revendication traditionnelle d'assujettir les entreprises à
charte fédérale à la Charte de la langue française. Encore une fois, fin de
non-recevoir.
Alors, face à ça, ces
petites demandes qui étaient bien peu de choses, quand on regarde l'ensemble
des 21 demandes, dont des modifications constitutionnelles, dont plusieurs
ententes qui étaient revendiquées dans le document
de la CAQ, dans leur positionnement prégouvernemental, eh bien, on s'est
ramassés avec un gouvernement qui n'a plus rien demandé et là qui nous
amène l'immigration, mais on va y revenir, qui nous amène l'immigration, comme
pour faire sa prochaine campagne électorale sur cet enjeu-là, alors que ça fait
neuf ans que c'était dans ses revendications et qu'il a obtenu absolument zéro.
Je pourrais aussi
vous rappeler que, pire de ne plus être à l'offensive, le gouvernement ne
réussit même pas à arrêter les tirs et donc à bien jouer en défensive. Juste
une petite énumération de toutes les intrusions qu'on vit dans nos champs de
compétence, puis je vais juste prendre le domaine de la santé, parce que c'est
assez hallucinant quand on regarde ça. Donc, le gouvernement fédéral est allé
créer un institut national de recherche sur la santé des femmes, a élaboré une
stratégie nationale pour le trouble du spectre de l'autisme, une recherche pour
lutter contre le cancer pédiatrique — 30 millions — 35 millions
pour un cadre national sur le diabète, 30 millions pour une stratégie
nationale en matière de soins palliatifs.
Je pourrais
continuer. Je pourrais parler de toutes les autres intrusions dans d'autres
domaines, mais je pense que ça démontre que non seulement le gouvernement n'est
pas à l'offensive et n'obtient absolument rien, mais il ne réussit même pas à
freiner les intrusions dans des choses qui sont fondamentales, liées à ce qu'on
est, à nos champs de compétence, notamment
en matière de santé. Ça vous donne une idée de l'écart entre ce qui avait été
annoncé et ce qui est le résultat.
Et je veux aussi
revenir, bien entendu, sur la dernière campagne électorale fédérale, où, là,
notre premier ministre a envoyé une lettre, donc, comme des choses arrivent
parfois, où il a fait une autre énumération de ce qu'il souhaitait, notamment
les transferts en santé, la souveraineté environnementale — d'ailleurs,
je rappelle que notre collègue le député de Jonquière a déposé le projet de loi
n° 391 pour qu'on ait pleinement notre souveraineté environnementale — fin
de non-recevoir. Transferts en santé, on sait où on en est. Le gouvernement a
même eu moins de succès que le gouvernement précédent, libéral, au chapitre des
transferts en santé. Il faut quand même le faire. Ça dit qu'il y a tout un
rapport de force avec le fédéral. Il y a un petit peu d'ironie ici, juste pour
être sûre de ne pas être prise au texte.
Ensuite, ils
demandaient... Transferts en bloc pour la lutte aux changements climatiques, il
n'y a eu aucun suivi. La conclusion d'une
entente reconnaissant au Québec un droit de retrait inconditionnel, bien
entendu, avec pleine compensation pour toute dépense fédérale, fin de
non-recevoir. Ils rappelaient le rapport d'impôt unique, fin de non-recevoir.
Alors, c'est là, c'est là qu'on en est.
Mais, pire, non
seulement il n'y a plus d'offensive, non seulement on ne réussit pas à arrêter
les tirs de manière défensive et à voir les intrusions se multiplier, mais on
apprend cette semaine que le gouvernement fédéral va même contester des lois
qui, pourtant, appartiennent pleinement à la souveraineté parlementaire et
démocratique du Québec. Alors, on est passés
d'un gouvernement qui faisait miroiter qu'il allait faire 21 gains de
nature constitutionnelle, de négociations bilatérales avec le gouvernement,
qui n'en a obtenu aucune, à un gouvernement qui, en plus, voit des intrusions se multiplier et même des contestations
de lois adoptées souverainement par l'Assemblée nationale du Québec.
C'est vous dire à quel point ce gouvernement échoue complètement du point de
vue des relations avec le Canada.
Je veux, en terminant
sur cette introduction, parler des fameuses ententes. À chaque fois qu'on pose
les questions sur l'échec complet du plan caquiste et de revendications
caquistes pour faire ressortir leur approche totalement provincialiste et qui
ne donne aucun résultat, on nous répond toujours la même chose. Encore hier, le
premier ministre a fait une énumération d'ententes. Bien, savez-vous quoi, M.
le Président? On est allés fouiller. Qu'en était-il de ces ententes-là sous le
Parti libéral, par exemple, le gouvernement du Parti libéral? Parce que ce
qu'on dit toujours à la ministre, c'est que ça, ces ententes-là, ça va de soi
dans un contexte fédératif. Évidemment, tu es toujours en train de négocier des
ententes. Ça n'a rien à voir avec un succès d'un gouvernement. Eh bien,
imaginez-vous donc qu'il y avait plus de ces ententes-là sous le dernier
gouvernement du Parti libéral, 316 ententes. Sous le gouvernement de la
CAQ, 222.
Alors, quand on nous
dit comment c'est formidable, parce qu'on n'est pas capables de répondre,
évidemment, à aucune des 21 revendications, parce qu'il y a eu un gros
zéro comme résultat, et qu'on nous invoque comment c'est formidable parce qu'on
conclut des ententes qui sont juste la base du travail dans une fédération,
bien, je pense que le gouvernement va devoir réajuster le tir. Et ce qu'on
espère aujourd'hui, c'est que la ministre va admettre l'échec complet et
l'impuissance de son gouvernement à faire des gains pour la nation québécoise,
alors que ça devrait être au coeur de ses priorités.
Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup, Mme la députée. Mme la ministre, pour 10 minutes,
s'il vous plaît.
Réponse de la ministre
Mme Sonia LeBel
Mme LeBel : Merci.
Merci, M. le Président. Chers collègues, si vous me permettez, je vais
commencer... je vais le faire au début pour ne pas l'oublier à la fin puis je
vais profiter de cette opportunité pour souligner le départ de ma collègue en
soulignant son engagement. Puis je veux vraiment le faire au début pour ne pas
oublier. Elle l'a souligné tantôt, c'est la dernière interpellation de la
session, mais c'est aussi peut-être la dernière occasion où on aura l'occasion,
moi et elle, de discuter.
J'ai eu l'occasion de
le faire avec le collègue de Jonquière, le collègue de Mont-Royal—Outremont, parce que j'étais en commission parlementaire avec
eux, et je veux lui faire part de ma... j'allais dire de mon... j'allais dire
de ma satisfaction, mais je trouve que ce n'est pas le bon terme, là... voilà,
de mon... je cherche le bon terme, vous voyez ce que je veux dire...
• (10 h 10) •
Une voix :
...
Mme LeBel : ...appréciation,
merci, exactement, de mon appréciation. J'avais «satisfaction», mais je
trouvais que ce n'était tellement pas
approprié à la situation. Et ce n'est pas quelque chose que j'ai écrit, c'est
quelque chose que je veux exprimer.
On a travaillé ensemble sur des choses quand j'étais à la Justice, entre autres
le comité transpartisan pour l'accompagnement
des victimes. Je sais que je ne suis pas dans le sujet, mais je veux quand même
faire cette parenthèse-là.
Donc, il y a beaucoup
de choses qu'on a en commun, et je pense qu'on a aussi... On a ces choses en
commun là et on s'est toutes les deux investies en politique, là, par désir de
faire une différence puis par désir de servir les Québécois et de faire avancer
le Québec. Et ça, je ne remets pas en doute le désir de ma collègue de le
faire. Ce qui nous différencie, c'est la vision à travers laquelle on passe
pour pouvoir servir l'autonomie du Québec, pour pouvoir affirmer notre
nationalisme. Et je pense que c'est cette façon de voir, d'obtenir des
résultats... C'est plutôt dans notre vision que ça nous sépare. Mais je pense
qu'on est là toutes les deux pour l'intérêt des Québécois, et c'est pourquoi je
vais profiter de l'occasion de cette interpellation-là pour exposer la vision
de notre gouvernement, de notre façon d'être nationalistes, notre façon de voir
les avantages et l'approche du gouvernement de la CAQ.
Je vais saluer les
députés qui m'accompagnent, député de Saint-Jean, députés de Bellechasse, de
Portneuf, qui vont m'aider à mettre de l'avant et à présenter aujourd'hui, là,
au cours de cette interpellation-là, comment nous, on pense qu'on peut, dans...
en écartant ce fameux paradoxe ou ce fameux axe qui a séparé les Québécois
depuis les 50 dernières années et auquel les Québécois ont dit non en
2018... Il faut se rappeler, en 2018, les Québécois ont dit : C'est
terminé, la vision fédéralisme et souverainisme, c'est terminé, ce schisme
entre les deux, ce qu'on veut, c'est un gouvernement qui va être pragmatique,
qui va faire avancer le Québec, qui va être résolument nationaliste, résolument
pour l'autonomie du Québec et qui va travailler pour l'intérêt des Québécois,
pour l'intérêt du Québec.
Pour nous, ça, ça se
décline comment? Ça se décline, nécessairement, en défendant nos compétences
chaque fois qu'on le peut, chaque fois qu'on doit le faire, chaque fois qu'on
pense qu'elles sont... qu'il y a un empiètement. C'est de les défendre, c'est
de faire... d'avoir plus d'autonomie, donc d'aller chercher plus de pouvoirs,
et d'obtenir notre juste part des fonds fédéraux qui nous appartiennent,
également, et d'affirmer notre leadership à travers la francophonie canadienne
pour le fait français, pour la défense du français.
Donc, peut-être qu'on
peut passer, là, en revue quelques gains. On nous parle d'ententes qui sont...
Elle nous parlait de 316 versus 222. Je vais en profiter pour dire que
peut-être qu'on... Peut-être que le chiffre est exact, je ne l'ai pas vérifié,
je ne le mets pas du tout en doute, mais ce que je peux vous dire, c'est que,
nous, depuis qu'on est au pouvoir, il n'y a pas une entente que l'on signe où
on ne fait pas respecter les compétences du Québec. Et je pourrais citer
quelques ententes précédentes où il y a eu des intrusions dans nos champs de
compétence, où on a laissé aller des petits bouts de jardin qu'on a travaillé
très fort pour récupérer dans les quatre dernières années, entre autres dans
l'entente sur le logement, qu'on a signée dernièrement, au bout de plusieurs
années d'efforts, pour défendre nos compétences. Donc, peut-être que, dans le
316, il y a des petits bouts de terrain de notre jardin qui s'en sont allés,
mais nous, on tente et on pense être capables de les récupérer pas à pas.
Donc, les quatre
ententes majeures relatives au marché du travail, entre autres, pour
5,5 milliards sur six ans. On pourra y revenir. L'accord asymétrique sur
les garderies, 6 milliards en transferts sans condition. Je pense que
c'est important de le mentionner. Ce n'est pas anodin. L'entente pour le
logement provisoire pour les coûts engagés par le Québec pour les demandeurs
d'asile, extrêmement important également pour le quotidien de tout le monde, pour notre vie, pour notre autonomie au Québec.
L'Entente Canada-Québec sur le logement, je viens de le mentionner au passage, c'est 3,7 milliards sur 10 ans.
Entente entre le Québec et Ottawa pour faciliter la venue, l'embauche des
travailleurs étrangers temporaires au Québec, extrêmement important, on est en
pénurie de main-d'oeuvre, impact important pour nos entreprises. C'est du
concret, ça, M. le Président.
Et je vous ai
mentionné la francophonie, affirmer notre leadership par... Cette francophonie-là
est un dossier qui m'est extrêmement cher,
un dossier sur lequel on a mis beaucoup d'énergie, effectivement, depuis notre
arrivée au pouvoir en 2018, depuis que j'ai eu le privilège d'occuper le
poste de ministre responsable des Relations canadiennes et de la Francophonie
canadienne. Et, pour moi, c'est une façon importante d'affirmer, justement,
cette spécificité-là du Québec, ce leadership-là qu'on doit avoir à travers le
Canada mais à travers la francophonie canadienne pour la pérennité, la survie
et aider notre langue française à continuer de fleurir.
Et cette...
Et, entre autres, de façon plus concrète, notre positionnement sur la
modernisation de la loi fédérale sur les langues officielles est un
positionnement extrêmement important dans cet objectif-là. Cette approche-là
qui est portée par le Québec vise à assurer une meilleure
prise en compte, M. le Président, de la situation particulière de la langue française
au Québec mais au Canada. Et elle a été très bien reçue, que ce soit au Québec
ou dans l'ensemble du Canada. Et cette
francophonie forte, unie et engagée qu'on veut mettre de l'avant, ce
leadership-là qu'on veut mettre de
l'avant nous aide et est un point d'ancrage important de cette autonomie-là, de
ce nationalisme-là qu'on exprime, au gouvernement, que l'on représente
présentement.
Plusieurs... Je pourrai y revenir plus avant,
mais il y a également la réforme de la charte française, qu'on est en train de... qui a été adoptée, je pense...
qu'on vient d'adopter cette semaine, d'ailleurs, mardi — les
journées passent tellement vite — et
ça aussi, c'est une autre preuve de notre engagement envers la langue
française. Mais, dans cette loi-là, le
gouvernement est venu modifier la Constitution canadienne, il ne faut pas le
négliger, M. le Président, pour inclure, à l'article 90 de la Loi
constitutionnelle de 1867, le texte suivant :
«Caractéristiques fondamentales du Québec.
«90Q.1. Les Québécoises et les Québécois forment
une nation.
«90Q.2. Le français est la seule langue
officielle du Québec. Il est aussi la langue commune de la nation québécoise.»
Ça peut sembler être anodin, ça peut sembler
être ésotérique, mais c'est un fondement extrêmement important, une pierre
angulaire importante de l'expression de ce nationalisme québécois que l'on
incarne.
Je vais aller rapidement, parce que c'est
l'introduction, puis j'aurai l'occasion de revenir, parmi mes autres
interventions, plus à fond sur plusieurs de ces aspects-là, mais la
représentation du Québec est fort importante. On n'est pas dans le jeu de la
chaise vide. Et, pour nous, c'est une priorité pour laquelle on s'est
mobilisés. Entre autres, à la Cour suprême du Canada, le Québec a toujours recherché
des modifications au processus de nomination des juges à la Cour suprême, et j'en suis très fière. J'ai été à la fois
ministre la Justice, ministre des Relations canadiennes quand on a
réussi à obtenir ce gain-là. Et le fait de pouvoir intervenir dans la
nomination... de façon significative dans le processus de nomination des juges,
d'un des trois sièges qui nous sont réservés à la Cour suprême, je pense que
c'est un engagement fort important.
Le fait aussi qu'à la Chambre des communes le
Québec doit pouvoir compter, là, sur une représentation, une députation qui a
un poids suffisant... suffisamment important pour y faire valoir et défendre
efficacement les valeurs et préoccupations
québécoises, c'est important. Mais il faut rappeler qu'en octobre dernier on
apprenait que le nombre de sièges, à la Chambre des communes, attribués
aux provinces et aux territoires, à la suite du prochain redécoupage décennal,
allait passer de 338 à 342. Et, selon cette nouvelle répartition-là, à l'aide
de la formule, là, de 2011, on était potentiellement en voie de perdre un
siège, en danger de perdre le siège. Pour nous, c'était inacceptable. On n'a
pas hésité, on a fortement... on s'est fortement opposés à cette décision. Je
suis intervenue auprès de mon homologue fédéral,
et, le 24 mars dernier, il y a un projet de loi qui a été déposé pour
fixer un seuil minimal de députés par lequel une province est habilitée
à être représentée, en se basant sur la composition de la chambre en vigueur au
cours de la 43e législature.
On peut dire que ce n'est pas assez, on peut
dire qu'il faut en obtenir plus, mais, pour moi, M. le Président, je vais
conclure, quand... dans la recherche et l'atteinte de nos objectifs, chaque pas
est important, chaque pas compte. Il n'y a pas de petite entente, il n'y a pas
de petit gain. Chaque pas est un gain dans la bonne direction. Et on va
continuer à travailler, à négocier, à discuter et à se tenir debout pour le
Québec, M. le Président.
• (10 h 20) •
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, Mme la
ministre. Pour la première série d'interventions, je cède maintenant la parole
à la députée de Joliette, pour cinq minutes, s'il vous plaît.
Argumentation
Mme Hivon : Merci, M. le Président.
Peut-être juste reprendre, là, certains des éléments. Vous savez, en
démocratie, c'est qu'il y a de l'imputabilité, du moins on l'espère. Il devrait
y avoir un sens des responsabilités d'un gouvernement et une imputabilité par
rapport à ce qui est présenté comme ce qui est l'objectif, la promesse, l'engagement
et ce qui est obtenu. Et là, ça tombe bien, on est en toute fin de parcours de
cette législature-là, donc c'est le temps de regarder, justement, la différence
entre la promesse et la réalité.
Et le fait est qu'on pourrait les prendre un par
un : les points d'impôt, transferts aux provinces d'une partie de
l'assiette fiscale du gouvernement fédéral, l'application de la loi 101,
j'en parlais tantôt, aux entreprises fédérales, le rapport d'impôt unique, les
transferts fédéraux tenant compte du vieillissement, le rapatriement de tous
les budgets fédéraux en culture, les pouvoirs en matière de langue,
d'immigration, de culture, et, venons-y, les juges québécois. Là, la ministre
dit : C'est un gros gain. Bien, la demande, ce n'était pas ça, c'était que
les juges québécois à la Cour suprême, ils
soient faits sur proposition de l'Assemblée nationale, pas pour qu'on puisse
chuchoter à l'oreille et donner un avis au gouvernement fédéral.
L'encadrement du pouvoir de dépenser... Bref, il y a un sens des responsabilités
et de l'imputabilité qui doit aller de pair avec un gouvernement qui se
présente à nouveau devant les Québécois.
Et ce qui est assez incroyable, c'est que la
ministre nous dit : Ah! nous autres, vous savez, on n'est plus là-dedans,
là, fédéralisme, souverainisme, nous, c'est nouveau, là, c'est complètement
différent, c'est autre chose, parce qu'on
veut notre pragmatisme, puis ça, là, ça va nous amener à faire des gains. Bien,
il faut regarder le bilan. Est-ce que cette approche-là a permis de faire
des gains? La réponse, c'est non. C'est la même chose, la même affaire
d'ententes conclues, comme tout gouvernement du Québec doit en conclure avec le
gouvernement fédéral, mais absolument aucun
gain par rapport à ces 21 demandes, 21 revendications qui étaient
dans le plan, et même pas pour les trois petites qui ont survécu, et qui ont réussi à être demandées par le gouvernement,
là, et qui ont reçu un refus catégorique. Donc, il faut aussi voir où on en est, et le fait est que,
si cette approche-là était si formidable, bien, il devrait y avoir des
résultats. Or, force est d'admettre qu'il n'y en a pas.
Ça m'amène spécifiquement au dossier de
l'immigration, parce que c'est assez incroyable de voir qu'alors que c'était
une des 21 demandes... Bien entendu, là, le gouvernement nous ressort ça
en toute fin de parcours : Aïe! on veut tous nos pouvoirs en immigration,
on va aller faire campagne là-dessus, on va se battre pour ça. Ils ont redit ça
cette semaine : On a adopté le projet de loi n° 96,
là, on part sur les revendications en immigration. C'est juste que le premier
ministre du Canada a dit, en avril — ça, ça fait quelques semaines — non,
en moins de 24 heures. Donc, c'est bien beau de faire miroiter des choses
puis d'essayer de se donner un programme pour essayer de montrer que, mon Dieu!
on est donc formidables puis on veut donc obtenir des choses, c'est juste que
la réponse est venue presque avant même la demande.
C'est dans
cette situation-là qu'on est. Moi, je pense que ça commande de la transparence,
et de la responsabilité, et de la vérité par rapport aux Québécois et
aux électeurs quand on se présente devant eux, et malheureusement, d'aller faire miroiter ça quand la réponse est
négative et elle est déjà venue, je ne pense pas que c'est la chose à faire pour créer, je dirais, de l'adhésion
et lutter contre le cynisme des gens par rapport aux promesses
politiques.
Et, oui, je veux revenir sur le dossier de
l'immigration, parce que le résultat, il est pire que neutre, il est même
négatif, parce que le gouvernement fédéral nous a annoncé, il y a quelques
mois, qu'il allait rehausser significativement les seuils d'immigration au
Canada. On peut débattre sur le fond des choses, mais la réalité est qu'il est obligé, en vertu de l'accord
Canada-Québec sur l'immigration, de consulter le Québec, parce qu'évidemment
qu'il ne peut pas décider ça tout seul, parce qu'évidemment, pour la seule
nation francophone en Amérique du Nord, ça a un lien intrinsèque avec notre
avenir. Or, on a demandé, lors de l'étude des crédits, on a demandé, et il n'y
a pas de démarche formelle fondamentale, de prise de position qui fait en sorte
que ça va être respecté. Mais, pire, quand je vous parlais d'être sur la
défensive, les étudiants francophones qu'on souhaite admettre, notamment
d'Afrique, bien, il y a une discrimination complète qui se joue, à l'heure
actuelle, par rapport aux étudiants anglophones qui sont admis au Canada par le
gouvernement fédéral.
Donc, le résultat en immigration, encore une
fois, c'est zéro. Ce n'est même pas de processus formel, comme c'est prévu. Et,
sur la défensive, on ne réussit pas non plus à obtenir ce qu'on devrait.
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre, pour cinq
minutes, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le
Président. Je vais commencer à relever un premier commentaire. Oui, on a une
vision différente de la façon d'obtenir... de la façon d'affirmer la place du
Québec, l'autonomie du Québec, le nationalisme du Québec, et on a une façon et
une vision très différentes de voir comment on peut défendre l'intérêt du
Québec. Est-ce qu'on pense que notre façon de faire, notre vision, elle est
facile? Est-ce qu'on pense qu'on va obtenir des gains facilement? La réponse,
c'est non.
Mais, si on jetait la serviette chaque fois qu'on
se fait dire non, que serait-il advenu du Parti québécois et cette vision souverainiste après 1980, après 1995,
après les dernières élections de 2018? Je pense que le Parti québécois a
l'intention de continuer à pousser sa vision, parce qu'il y croit, et, pour la
même raison, le gouvernement de la CAQ va continuer à pousser sa vision, parce
qu'on y croit. Et on y croit, qu'on peut travailler de la façon dont on
travaille. Mais est-ce que les gains vont
être faciles à obtenir? La réponse est non. Mais on pense... Et c'est pour ça
que je vous disais qu'il n'y a pas de petit gain puis il n'y a pas de
petite entente. Chaque entente est un pas dans la bonne direction.
Donc, je vais peut-être en faire une
énumération, parce que, oui, tout ce qu'on a mis sur la table, on y croit, mais, à un moment donné, à force de courir
plusieurs lièvres à la fois, on peut tous les échapper. Alors, qu'est-ce
qu'on fait? On travaille, on focusse, on met l'accent, on met l'énergie sur nos
ententes, sur des priorités à court, à moyen et à long terme, et on obtient des
gains, on avance.
Quatre ententes en matière de formation de la
main-d'oeuvre conclues en juin 2019, ce n'est pas rien, Accord sur la relance
sécuritaire, Accord Canada-Québec concernant le Fonds pour une rentrée scolaire
sécuritaire, Accord asymétrique 2021-2026 concernant le volet pancanadien
pour l'apprentissage et la garde des jeunes enfants entre le gouvernement du Québec et le gouvernement du
Canada, entente par échange de lettres concernant une aide financière
aux organismes de transport collectif — les millions, les milliards
s'accumulent au fil de mon énumération, des milliards et des millions qui est
notre juste part des fonds qu'on doit obtenir du fédéral — entente
visant à compenser le Québec pour les sommes
encourues relativement à l'hébergement temporaire des demandeurs d'asile,
entente concernant le programme pour les travailleurs étrangers
temporaires et le Programme de mobilité internationale, Accord Canada-Québec
pour les refuges pour les femmes et les organismes d'aide aux victimes de
violences sexuelles et de violence conjugale au Québec, pour répondre
particulièrement à la pandémie de la COVID-19 — parce qu'il y a eu beaucoup de choses à faire, pendant la pandémie,
il y a beaucoup de dossiers, de sujets, d'enjeux qui étaient immédiats
pour les Québécois, qu'il fallait régler avec le fédéral et qu'on a réglés avec
le fédéral — l'Entente
Canada-Québec sur le logement, qui a été conclue en octobre 2020,
3,7 milliards sur 10 ans, Entente de contribution entre le Canada et
le Québec pour le Fonds pour la large bande universelle — ça va
contribuer à faire en sorte... parce que les Québécois étaient prêts à payer, mais ça va contribuer à faire en sorte que tous
les Québécois, en octobre 2022, comme on l'avait promis, au gouvernement
de la CAQ, auront maintenant Internet haute vitesse, c'est très structurant
pour le Québec, c'est très important pour le
Québec — protocole
d'entente concernant le processus de nomination des juges de la Cour suprême. Ça faisait des années que c'était
demandé, on a réussi à l'obtenir. En juin 2019, après deux ans de
négociations avec le gouvernement fédéral, il y a quatre ententes majeures
relatives au marché du travail qui ont été signées. Ce n'est pas rien. On
accumule, encore là, les milliards.
La conclusion de ces ententes a permis
d'augmenter le transfert des fonds fédéraux vers le Québec, d'améliorer
la cohérence de ses actions, la cohésion de sa structure. Il faut prendre
chacun des gains. Il faut continuer à mettre de l'avant notre vision. On va
toujours continuer à défendre...
Et je vais prendre la
minute qu'il me reste pour parler de la contestation judiciaire de la Loi sur
la laïcité. Il faut condamner la volonté exprimée par le gouvernement fédéral
de participer à cette contestation judiciaire là formée pour la loi n° 21. En tant que société distincte, là, ayant des
caractéristiques et des valeurs sociales qui lui sont propres, le Québec est
libre, il faut le comprendre, le Québec est libre de se doter d'un modèle
d'organisation des rapports entre les religions et l'État qui reflète cette
réalité. Dans le cas du Québec, la clause de sa souveraineté parlementaire lui
permet plus particulièrement de protéger son modèle de société, il faut que le
gouvernement fédéral le comprenne, ses valeurs et son identité à l'intérieur du
cadre canadien.
Et, contrairement à
ce que laisse entendre présentement le gouvernement fédéral, le recours à la
disposition de souveraineté parlementaire n'empêche pas le débat judiciaire et
le débat démocratique, lequel a cours depuis de nombreuses années au Canada et
au Québec, sur les questions ayant trait aux rapports entre l'État et les
religions, qui se poursuivra dans les années à venir, et l'intention du
gouvernement fédéral d'aller baliser cette clause... Il faut condamner cette
intention, et on va se tenir debout, et on va y répondre avec fermeté. Merci, M.
le Président.
• (10 h 30) •
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la
députée de Bellechasse, pour cinq minutes, s'il vous plaît.
Mme
Lachance : Merci, M. le Président. Permettez-moi d'abord de saluer
tous les collègues qui sont ici aujourd'hui. Salutations à la ministre,
salutations aux collègues de notre côté. Je suis quand même heureuse d'en
débattre aujourd'hui, évidemment, pour la dernière fois, avec notre collègue,
que j'apprécie beaucoup et, je tiens à le souligner aussi, avec qui j'ai
travaillé dans un dossier en intimidation, entre autres choses, et ce fut un
grand plaisir. Maintenant, je comprends aussi, la connaissant un peu, la
motivation de parler des revendications constitutionnelles de la collègue.
Puis, on peut le
dire, il y a quelques mois... il y a un mois, en fait, ça a été le
40e anniversaire du rapatriement de la Constitution. On ne peut pas nier,
M. le Président, l'importance qu'a eue cet événement sur la définition de notre
dynamique, la dynamique Canada-Québec, pour les années et même les décennies
qui ont suivi. On doit aussi reconnaître, par contre, que cette dynamique s'est
transformée avec le temps.
Le premier réflexe
qu'on a eu, c'est d'avoir été laissés de côté par cette entente. Ça a été un
refus, un refus de la réalité canadienne
comme elle était, un désir d'émancipation de la province pour accomplir nos
ambitions nous-mêmes. Maintenant, je pense qu'on peut, en plus, le
souligner, une majorité de Québécois n'en sont plus là. On entendait, en 2018, peu avant notre élection, que
l'arrivée de la CAQ au pouvoir signifiait la fin du clivage
souverainistes-fédéralistes dans le débat comme définissant les campagnes
électorales de la province, puis je pense qu'on peut dire, maintenant : C'est chose faite. Ça ne veut pas
dire qu'on ne doit pas continuer à avoir des revendications, mais ça
veut dire que nos revendications peuvent
être faites, maintenant, différemment. Dans certains cas, comme en santé, c'est
par association avec les
gouvernements des provinces qu'on se porte à la défense de notre compétence
provinciale. Dans d'autres cas, c'est en rappelant notre singularité
qu'on protège nos champs de compétence, qu'on revendique leur élargissement.
Puis c'est aussi au nom de notre singularité qu'on protège notre langue, notre
culture, nos institutions.
Un des gains qui a
été fait, un gain important en août dernier, c'est par succès de nos démarches
lorsqu'on a eu l'Accord asymétrique 2021‑2026 concernant le volet
pancanadien pour l'apprentissage et la garde des jeunes enfants. C'est
6 milliards pour cinq ans sans condition qui ont été obtenus. Et
évidemment ces sommes-là, au-delà de l'entente,
c'est important de le mentionner, et de le mentionner pour tout le monde, ça va
être utilisé pour compléter notre réseau
des services de garde, un autre dossier qui tient très à coeur de notre
collègue. On l'a obtenu grâce à l'excellence de notre travail en la
matière. Justin Trudeau l'a dit lui-même, on a déjà atteint, même surpassé tous
les objectifs de son programme et celui qu'il voulait imposer aux provinces. Ce
n'est pas des places à 10 $ qu'on offre ici, ce sont des places à
8,50 $ que nos familles bénéficient. Non seulement on a pu mettre la main
sur ce montant-là du fédéral, mais, en plus,
on l'a obtenu sans contrainte. On a su mettre en valeur, démontrer nos atouts
et nos acquis dans un champ de compétence qui nous était propre.
Ma collègue députée
de Joliette le sait comme moi, ce n'est pas la première fois que le Québec se
démarque des autres provinces dans son travail, et même du gouvernement
fédéral, en donnant le ton sur des enjeux même avant tout le monde. C'est une
de nos grandes armes. C'est notre désir de se dépasser, notre désir de mieux
faire, de mieux faire pour servir notre monde. Au Québec, M. le Président, on
est capables d'aller de l'avant et de tracer notre chemin. On est capables
d'excellence et d'innovation. Et ça, c'est une arme importante pour revendiquer
le respect qui nous revient et le financement, évidemment, qui vient avec.
Dans le cas des
services de garde, ça a été un succès, évidemment, une entente asymétrique pour
nous, parce qu'on s'est démarqués dans ce modèle de services de garde. On peut
aussi dire que cette entente, bien, c'est un exemple patent de la défense de
nos compétences. Nous sommes la seule province à l'avoir obtenue sans
contrainte. Ce que ça veut dire et ce que ça va donner, bien, c'est,
évidemment, plus de places, mais aussi ça nous a permis de bonifier
significativement le salaire des éducatrices. Donc, pour une première fois depuis
2014, le nombre d'inscriptions a augmenté. C'est un exemple d'une réussite, M.
le Président.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
M. le député de D'Arcy-McGee, s'il vous plaît.
M. Birnbaum : ...M. le
Président, Mme la ministre, son équipe du cabinet ministériel, mes collègues
les députés du côté ministériel ainsi que des oppositions.
Bon, nous sommes ici pour discuter le
sujet : L'échec de l'approche provincialiste du gouvernement
fédéraliste de la Coalition avenir Québec
pour faire avancer ses revendications constitutionnelles face au gouvernement
canadien. Il semble que c'est normal d'établir nos visions ou manques de vision
sur des questions fondamentales qui entourent ce genre de question. Bon, le Parti québécois a le mérite, en quelque part,
malgré quelques tergiversations durant son histoire, d'être cohérent
dans sa vision des choses. Don Quichotte, qui se battait contre le vent, était
cohérent. Bon, Québec solidaire, si on se fie à leur comportement sur le projet
de loi n° 96 : Oui, non, non, oui, indépendance
du Québec, bon, à quelques jours de la
semaine, oui, des autres jours, bon, peut-être, on va parler d'autre chose, ça
évite les questions.
Bon, le premier
ministre, qu'on se le dise, la réponse à la question, c'est : Je ne sais
pas, je ne sais pas. Mes enfants, les siens aussi, j'imagine, rendus à quatre
ans, ont été en mesure de trancher sur des questions importantes : C'est
quoi, ta couleur favorite? Est-ce que tu aimes les épinards? Ce premier
ministre, qui se donne la fierté d'être franc et clair, répond à notre question
nationale la plus existentielle, qui est une question réelle, de toute fins
pratiques : Je ne le sais pas... ou, plutôt, je ne vais pas vous le dire.
Autonomiste... Je suis devant plusieurs avocates et avocats. Je vous invite à
me trouver ce terme dans quelque document que ce soit qui encadre notre façon
de vivre ensemble. Bon, évidemment, la
réponse de notre formation est assez claire là-dessus, c'est que, et je
souligne l'affaire, parce que, là, on va se rejoindre, les intérêts
supérieurs du Québec se réalisent le mieux au sein d'un Canada uni.
Bon, la ministre des
Affaires intergouvernementales a-t-elle une couleur favorite? Est-ce qu'elle
aime les épinards? Est-ce qu'elle est fédéraliste ou souverainiste?
Autonomiste, est-ce qu'elle peut l'expliquer davantage, si oui, et que ce soit clair? Pourquoi je me permets
de poser la question? On ne peut pas faire l'abstraction d'une question
qui n'est pas tranchée à 100 % et ne serait jamais tranchée, parce que
nous sommes au Québec. Nous sommes au Québec,
et la défense de nos intérêts supérieurs va toujours prendre le devant, mais
comment? Et c'est de cette optique-là que
je pose ces questions sur les légumes favoris, les couleurs favorites, parce
que c'est fondamental. Ça a des implications stratégiques, concrètes et
réelles.
Est-ce que le
gouvernement de la CAQ, sur la question de nos intérêts supérieurs, agit de
façon efficace, avec de l'ambition et de la transparence, avec diligence et
bonne foi, pour faire avancer nos intérêts? Et c'est là-dessus, la question qui
nous rejoint aujourd'hui, que nous avons des questions, et grandes questions.
Et l'échec est peut-être le bon mot. Où sont les résultats pour accroître la
richesse du Québec au sein du Canada, pour assurer que l'exercice de nos
pouvoirs pour réaliser nos rêves en tant que nation au sein du Canada soit au
rendez-vous?
Et là, comme je dis,
bon, les questions se posent, et il y en a plusieurs de déjà amorcées, sans
réponse assez concrète, sur le manque de mouvement sur une déclaration d'impôt
unique au Québec, ce qui a été une proposition de notre... de l'ancien
gouvernement, de transferts en santé, de transferts en santé, où il y avait des
objectifs très clairs de quelque 35 milliards de dollars, avec une
augmentation annuelle et pérenne de ces 6 %. Où sommes-nous? Où
sommes-nous sur ces questions? Il y en a plusieurs autres. Et, malgré nos
visions, c'est des questions qui se posent, parce qu'on se réunit à chercher à
défendre les intérêts supérieurs du Québec, et où sont les résultats sur des
questions très concrètes là-dessus?
Le
Président (M. Bachand) : Merci. Mme la
ministre, s'il vous plaît.
• (10 h 40) •
Mme LeBel : Alors,
à la question : Qu'est-ce que j'aime?, je vais répondre très
catégoriquement, M. le Président : J'aime le français. Et, pour moi, notre
affirmation comme nation francophone, la défense du français au Québec, l'affirmation de la position du Québec
comme nation francophone et à... dans cette francophonie canadienne, et
assumer un rôle de leadership, pour moi, le fait français, le fait d'être
francophone, c'est la pierre angulaire de notre identité. C'est pour ça que je
vais prendre le temps pour vous parler, justement, de cette politique dont je
suis très fière, la politique... l'approche en matière de francophonie
canadienne. Et, pour moi, défendre le français, que ce soit sur notre
territoire par le biais du p.l. n° 96 qui vient
d'être adopté ou que ce soit par cette position-là à travers le Canada, pour
moi, c'est fort important.
Vous savez, comme
seul État francophone en Amérique du Nord, le Québec est conscient du rôle
primordial qu'il doit jouer en matière de protection de la langue française,
puis, depuis 2018, on a multiplié les actions en ce sens-là. D'ailleurs, le
20 mars dernier, M. le Président, j'ai dévoilé la nouvelle politique du
Québec en matière de francophonie canadienne, et son titre, son slogan, ce
qu'il apporte, le... c'est Pour une francophonie forte, unie et engagée.
Ça démontre clairement la volonté du Québec de faire rayonner notre langue.
Et je suis intimement
convaincue que la protection de notre langue, l'affirmation de notre
spécificité, l'affirmation de notre
identité, de notre nationalisme passe également par une forte francophonie
canadienne. On est une province francophone dans une mer anglophone en
Amérique et en Amérique du Nord, et, pour nous, de protéger, d'aider la
francophonie canadienne à se valoriser, à grandir, à la promouvoir, pour nous,
c'est gagnant-gagnant. Ça ne peut qu'aider à
renforcir également la francophonie du Québec. Et soutenir des actions
concrètes, des projets rassembleurs
qui ont des répercussions sur la vitalité du français, c'est fort important. Je
peux vous donner quelques-unes des mesures-phares de la nouvelle
politique sur laquelle on a travaillé très fort, M. le Président.
La désignation du
22 mars comme la Journée québécoise de la francophonie canadienne, c'est
fort important. Cette date correspond à l'anniversaire de l'écrivaine Gabrielle
Roy, dont la vie et l'oeuvre illustrent la permanence des liens qui unissent les
Québécois. Qui ne connaît pas Bonheur d'occasion? Qui ne connaît pas ce
livre de Gabrielle Roy, qui vient du Manitoba? Donc, quel beau symbole
d'unification de la francophonie.
La création d'une
marque distincte de fierté francophone, le label «francoresponsable», ça non
plus, ce n'est pas anodin.
Un investissement supplémentaire de
8 millions de dollars sur trois ans pour mieux soutenir les efforts
de mobilisation des Québécois et des francophones au Canada, ça va permettre
d'offrir davantage de stages étudiants et professionnels, notamment dans les bureaux du
Québec. Les Fonds de recherche du Québec permettront à des étudiants des autres provinces et des territoires de
poursuivre des études de recherche dans une université francophone du
Québec au moyen des bourses pour la
francophonie canadienne. Ces actions vont mobiliser et vont favoriser les
connaissances réciproques entre francophones. C'est mutuellement bénéfique, M.
le Président.
Finalement, notre politique prévoit également
l'organisation de rencontres annuelles pour qu'on continue à faire... à
mousser, à alimenter cet objectif-là très clair. Et on y travaille à plusieurs
aspects, à cette francophonie-là, je vous le dis. Il y a la défense du français
sur notre territoire, mais il y a aussi la défense du français sur un plus
large spectre. Et, que l'on croie qu'on devienne souverainiste un jour ou non,
on va toujours demeurer une province, ou un État, ou un territoire francophone
entouré d'anglophones, et il faut travailler pour garder cette francophonie
forte. C'est au coeur de notre spécificité, M. le Président, c'est au coeur de
notre identité.
Et on le fait également avec le projet de loi n° 96. Et, quand on parle de la défense du français, je
suis fort étonnée, d'ailleurs, que le Parti québécois ait voté contre. Je
comprends qu'il considère qu'on ne va pas assez loin, mais, encore une fois,
pour moi, quand on défend une position, quand on veut faire des avancées, quand
on veut faire... quand on veut protéger,
chaque pas est important, et on s'est privé... On ne s'est pas privé, parce
qu'il a été adopté, mais, par ce geste-là, on pourrait se priver des
avancées fort importantes que le projet de loi n° 96
nous fait faire.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de
Portneuf, s'il vous plaît.
M. Caron : M. le Président,
écoutez, je ne sais pas si la présidente du Conseil du trésor aime les
épinards, mais je peux vous assurer qu'elle défend ses dossiers avec la force
de Popeye.
Plus
sérieusement, je voulais, bien entendu, saluer chaleureusement les collègues en
cette dernière interpellation de la
42e législature, bien entendu, saluer la présidente du Conseil du trésor,
ministre responsable des Affaires canadiennes, ma collègue la députée de
Bellechasse, mon collègue député de Saint-Jean juste en face de moi, bien
entendu, les collègues de l'opposition, la
députée de Joliette. Moi aussi, je veux vous dire à quel point j'exprime toute
mon admiration à votre égard. J'ai
souvent entendu, lors des moments où vous vous êtes levée dans la Chambre, ce
trémolo dans votre voix, qui
démontrait à quel point vous défendiez vos dossiers avec rigueur mais aussi
avec détermination et avec passion. Vraiment,
vous êtes inspirante pour moi. Vraiment, félicitations! Salutations à nos
collègues députés de D'Arcy-McGee
et Jean-Lesage.
Dernier de ces 45 vendredis qu'on a passés
ensemble, depuis quatre ans, à faire vivre la démocratie. C'est un moment important. Hier, mon collègue député de
Trois-Rivières rappelait qu'ici, au salon bleu, parfois, c'est
l'occasion de faire un petit peu de pédagogie. Eh bien, ces interpellations du
vendredi sont aussi parfois l'occasion d'apporter quelques précisions,
d'apporter quelques éclaircissements sur des projets qu'on défend ou sur des
situations qui nous sont chères.
Le thème de l'interpellation aujourd'hui,
l'échec de l'approche provincialiste du gouvernement fédéraliste de la
Coalition avenir Québec pour faire avancer ses revendications
constitutionnelles face au gouvernement canadien, je vous avoue que ça m'a
passablement surpris, Mme la députée. Même, j'ai trouvé ça un petit peu
surréaliste. Et j'entendais tout à l'heure le bilan que présentait notre
présidente du Conseil du trésor. J'irais presque jusqu'à dire qu'il y a erreur sur la cible. Il me semble que
vous tirez sur le messager et que nous devrions, au contraire, nous unir
pour obtenir plus de gains. On parle d'échec. Moi, je parlerais, bien entendu,
plus de gains du gouvernement du Québec, au bénéfice de l'ensemble des
Québécoises et des Québécois.
Pas d'écoute... Je voudrais revenir... Et je
sais bien que la pandémie ne doit pas être un prétexte à tout, mais je
rappellerai à quel point notre gouvernement, et le premier ministre au plus
haut chef, a su prendre sa place durant la gestion de cette pandémie. Je ne
trahirai, bien entendu, pas le secret du caucus, mais, quotidiennement ou
hebdomadairement, nous avions des comptes rendus sur les demandes empressées
qu'effectuait notre premier ministre auprès du gouvernement fédéral pour qu'on
puisse poser des gestes plus cohérents et obtenir, bien entendu, des résultats
plus convaincants dans la lutte à cette pandémie.
Est-ce qu'on a obtenu tous les gains espérés?
Pas toujours, pas toujours aussi rapidement qu'on ne l'aurait souhaité, mais
les demandes, soyez-en assurés, ne sont jamais timides. Les réponses le sont
parfois, mais j'ai la certitude que notre volonté est de toujours vouloir
défendre nos compétences et d'en obtenir plus. La caractéristique de notre
gouvernement, bien au contraire, ce n'est pas d'être considéré comme un
suiveur, mais bien d'être considéré comme un leader au Canada, et je crois
qu'incontestablement notre crédibilité est forte. Les gains sont nombreux. Ma
collègue députée de Bellechasse le disait, il y a quelques instants aussi, avec
la question des garderies.
Vous savez, et je sais que c'est important pour
vous, quelle est l'importance du rôle du député. Il n'y a pas de petit dossier.
Je vais prendre, pour illustration, un dossier qui m'est cher dans Portneuf,
c'est la cession d'un quai qui appartient... et qui est de compétence fédérale.
Depuis des années, nous sommes en négociation pour obtenir ce quai et permettre
à la circonscription de Portneuf de rayonner encore plus. On n'y parvient pas
jusqu'à maintenant. Le travail est long. Il ne faut pas baisser les bras. La
cause est ardue. C'est parfois compliqué, je vous l'avoue, mais, encore une
fois, ce qui est important, c'est de considérer que ce travail est un travail à
long terme. Et la présidente du Conseil du trésor l'a bien illustré tout à
l'heure, il n'y a pas de petit gain, il n'y a pas de petite entente. Il faut
continuer de mettre toute l'énergie nécessaire pour obtenir notre juste part.
Et je reviendrai, M. le Président, tout à
l'heure sur des dossiers à caractère plus... de nature plus provinciale. Merci
beaucoup.
• (10 h 50) •
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la députée
de Joliette, s'il vous plaît.
Mme Hivon : Oui.
Merci, M. le Président. Juste en réplique, on nous parle... On fait un bloc sur
l'entente sur les garderies. C'est bien beau de nous parler de l'entente sur
les garderies, là, mais je veux juste rappeler qu'il n'y a absolument rien de spécifique au Québec là-dedans.
Le gouvernement fédéral a décidé, justement, de faire un programme pancanadien, qui, d'ailleurs, est une intrusion
dans les champs de compétence des provinces, et il a conclu ces
ententes-là avec toutes les provinces. Donc, quand on nous montre ça comme un
supergain du gouvernement de la CAQ, je veux juste dire et rappeler à tout le
monde que ça n'a rien à voir avec le gouvernement de la CAQ. Ces ententes-là
ont été conclues... j'allais dire, «coast to coast», en bon latin, mais d'un
océan à l'autre.
Je veux vraiment avoir des réponses à mes
questions. Je remercie vraiment les collègues de leurs bons mots, ça me fait
chaud au coeur, mais, si vous voulez vraiment me faire plaisir aujourd'hui, ce
serait de répondre à mes questions. Ça, ça me ferait vraiment plaisir. Et ce
qu'on constate, il faut quand même le faire, c'est que ça, c'était la
proposition, puis le résultat, c'est zéro. Pire que de n'avoir eu aucun gain
des 21 demandes, on est en défensif. Donc, on nous envoie des intrusions,
on nous envoie des rejets, on conteste. On veut contester les lois adoptées de
manière souveraine. On nous annonce un programme pancanadien d'assurance
médicaments, un programme pancanadien d'assurance dentaire, des normes
pancanadiennes en CHSLD.
Mais comment ce gouvernement-là, qui faisait
miroiter aux Québécois... À un moment donné, il faut rendre des comptes, là. Si
tu fais miroiter aux Québécois que ton approche, elle va être tellement
formidable, elle va donner tellement de gains, puis que le résultat, c'est un
gros zéro sur ce que tu leur proposais, mais, pire, c'est une multiplication
d'intrusions, une multiplication de contestations, une multiplication de fins
de non-recevoir, bien, à un moment donné, il faut que tu te rendes à l'évidence
que ça ne marche pas, ton affaire. Puis c'est comme si le gouvernement a tellement peur de l'échec, parce
qu'évidemment il a fait miroiter aux Québécois que, lui, ça marcherait,
que, lui, ça fonctionnerait parce que lui, il avait une autre approche... puis
que, dans les faits, il n'y a rien qui marche, bien, tu ne demanderas plus
rien. Tu ne demanderas plus rien ou tu vas juste faire des sparages puis des
effets de toge, puis tu vas ressortir l'idée de l'immigration à quelques mois
d'une élection, alors que tu t'es déjà fait dire non par le gouvernement
fédéral.
Donc, moi, aujourd'hui, j'ai des questions puis
j'aimerais vraiment ça avoir des réponses. Comment le gouvernement peut-il
sérieusement continuer à dire aux Québécois qu'il va continuer sur cette
voie-là, alors que les résultats sont nuls?
Puis les ententes, là, je lui rappelle, c'est sa seule réponse à toutes mes
questions. Le gouvernement libéral en a plus conclu, et nous,
gouvernement péquiste, on en a conclu 122 dans une seule année. Donc,
j'aimerais ça avoir d'autres réponses. Et ça nous amène, donc, à dire :
Est-ce que ce document-là, est-ce que ces 21 demandes là qui avaient été
présentées aux Québécois comme l'approche nouvelle de la CAQ... est-ce qu'elle
le met de côté, ce document-là? Est-ce qu'elle le renie, ce document-là? Est-ce
qu'elle se dit : Bien, on a obtenu zéro sur 21, donc on passe à d'autre
chose puis on va admettre que notre approche ne fonctionne pas?
Elle me parle
de petits gains. Bien, moi, je regarde d'où elle part. Les petits gains dont
elle nous parle, il n'y a rien de
différent de ce qui se faisait sous le gouvernement libéral, sous les
gouvernements fédéralistes. Donc, cette fameuse approche qui était
supposée être une nouvelle voie mais qui se résume, oui — et,
le titre, je pense qu'il porte bien son nom — à une approche provincialiste
assumée, fédéraliste dans le contexte canadien, est-ce que c'est toujours ça? Comment peut-on dire... Est-ce qu'on va se
représenter à la prochaine campagne électorale avec ce programme-là ou
bien on va avoir au moins la décence de dire aux Québécois : Ça n'a pas
marché, notre affaire, désolé, mais notre troisième voie, avec tout ce qu'on
vous a fait miroiter, ça n'a pas marché? Nous, on aurait pu leur dire d'avance
que ça n'allait pas marcher, s'ils nous avaient demandé notre avis, parce que
ça a été essayé quelques fois dans l'histoire du Québec et du Canada, avec
toujours aucun résultat. Mais là c'est pire.
Est-ce qu'elle peut admettre que cette
approche-là non seulement est au neutre et n'amène aucun résultat de ce qu'ils
avaient fait miroiter, mais, en plus, amène des intrusions? Parce qu'on est
devant un gouvernement qui est impuissant et on est face à un gouvernement qui
a l'air d'être spectateur face à sa propre impuissance. Puis de dire :
Aïe! c'est vraiment plate, on va se faire contester notre loi, s'il vous plaît,
ne faites pas ça, aïe! c'est vraiment plate, il y a des intrusions, on est
indignés, nous autres aussi, qu'il y ait des intrusions... Oui, mais c'est
quoi, les résultats? C'est ça, la question. C'est quoi, les résultats?
Le Président (M.
Bachand) : Mme la ministre, s'il vous
plaît.
Mme LeBel : Oui. Merci, M. le
Président. Effectivement, ma collègue revient constamment sur le document de
2015. J'ai mentionné tantôt que toutes ces priorités-là sont importantes et
qu'on continue d'y travailler, mais que les
gains ne se feront pas de façon instantanée, de la même façon que, si elle
avait abandonné... son parti avait abandonné cette option depuis 1980,
je pense qu'on pourrait dire qu'ils ont abandonné trop tôt. Il faut continuer à
travailler sur ce qu'on croit, et on y croit, à notre façon de faire. Mais,
ceci étant dit, quand on me dit «zéro gain», je dis non.
Dans le fameux document, il y avait la
reconnaissance constitutionnelle pleine et entière du Québec en tant que
nation. On l'a fait par le projet de loi n° 96. Non seulement on l'a fait
par le projet de loi n° 96, ça a été accepté par le fédéral et reconnu
dans une motion à Ottawa.
Il y avait aussi la nomination des juges de la
Cour suprême, et je lis : «Dans cette perspective, il est inacceptable que des juges unilingues soient
nommés à la Cour suprême. Il s'agit, rappelons-le, du tribunal de
dernière instance pour les questions québécoises. S'il faut se réjouir que la
Cour suprême ait constitutionnalisé récemment le principe que trois de ces
juges soient issus du Québec —
et je l'ai mentionné tantôt —
il n'en demeure pas moins, dans un réel
esprit fédératif, que le Québec doit être formellement impliqué dans leur
sélection.» Ce n'est pas zéro gain. Ce sont des gains très tangibles,
des gains qu'il a fallu négocier fortement.
D'ailleurs, je vais
rectifier... Juste une petite parenthèse sur le premier commentaire de ma
collègue sur l'entente en matière de garderies. Bien, je m'excuse, là, mais
nous sommes les seuls, au Canada, à avoir bénéficié d'un transfert sans
condition, ce qui veut dire que nous sommes libres d'utiliser en toute
autonomie cet argent qui nous est dû, notre
juste part. Et ça fait justement partie des principes que nous mettons de
l'avant dans notre nationalisme pragmatique.
Et tout ça va me permettre de vous parler de...
justement, le bilinguisme de la Cour suprême et également le fait que nous avons obtenu un protocole pour
participer pleinement à la nomination des trois juges... d'un des trois
juges quand leurs postes se libèrent à la Cour suprême. Et, encore là, ce n'est
pas anodin. Nous avons droit à trois juges à la Cour suprême. Il faut le
reconnaître. Et c'est... C'était important qu'on soit impliqués dans le
processus de leur nomination. Aucune loi n'oblige les juges de la Cour suprême
à maîtriser le français. L'article 16 de la Loi sur les langues
officielles demande aux juges des tribunaux fédéraux de comprendre le français
sans l'aide d'un interprète, mais il ne s'applique pas à la Cour suprême, et
ça, c'est une revendication dans le document de 2015, là.
Le 21 mai 2008, l'Assemblée nationale du
Québec a adopté une résolution unanime qui affirmait que la maîtrise de la
langue française est une condition préalable et essentielle à la nomination
d'un juge à la Cour suprême. Entre 2008 et 2016, le gouvernement du Québec a
écrit à... plusieurs fois au gouvernement fédéral pour leur faire part de cette
exigence. Bien, nous, on a continué à pousser ça parce que c'est important. Ça
faisait partie de notre engagement. Suivant
la mise en place du nouveau processus consultatif pour la nomination des juges
à la Cour suprême en 2016, le précédent gouvernement a salué la décision
de faire du bilinguisme un caractère obligatoire de sélection.
Le 15 juin 2021, le gouvernement fédéral
avait prévu le faire dans sa réforme de la Loi sur les langues officielles. On
a poursuivi nos actions. Et le retrait de l'exception qui concerne la Cour
suprême, à l'article 16 de la Loi sur les langues officielles, est
conforme aux intérêts du Québec, est conforme à l'engagement qu'on avait pris.
Et le projet de loi qui est présentement sur la table vise notamment à assujettir
la Cour suprême à l'article 16 de la Loi sur les langues officielles.
C'est un gain. D'accord, c'est vrai que le projet de loi doit être adopté, on
le comprend, mais il est là. Ce gain,
il est tangible, il est là. Il est là pourquoi? Parce qu'on n'a pas baissé les
bras. On n'a pas arrêté au premier refus. On a continué à se tenir
debout, demandé encore, et encore, et encore, et c'est ce qu'on va faire avec
chacune des demandes que vous avez mentionnées, tout en continuant, en
focussant nos priorités. J'en ai parlé tantôt, à courir trop de lièvres à la
fois, on n'en attrape aucun.
Alors, nous, ce qu'on fait, c'est qu'on est
pragmatiques et on regarde qu'est-ce qui est important aujourd'hui, en 2022, en
2021, en 2020, en 2018 pour les Québécois, sur quoi devons-nous mettre
principalement nos efforts sans abandonner nos priorités. On travaille sur tout
en parallèle. On continue d'avancer. On continue de revendiquer. On continue de
demander et de négocier. Mais on travaille sur les priorités actuelles, parce
que l'intérêt des Québécois, c'est ça que ça... qu'ils demandent.
Je vais terminer rapidement sur le processus de
nomination. On l'a obtenu. Je l'ai dit, j'en suis très fière. J'étais à la fois ministre de la Justice... Donc,
comme juriste, pour moi, c'est hautement important, hautement
symbolique. Et c'est historique, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) : M. le député de Saint-Jean,
s'il vous plaît.
• (11 heures) •
M. Lemieux : Merci, M. le
Président. Salutations aux collègues. J'aurai le privilège d'avoir une autre
intervention, alors je réserverai mes meilleurs mots pour mes collègues pour
plus tard.
Pour l'instant, puisque les mots, justement, ont
toujours leur sens et leur importance, j'aimerais, à l'instar du collègue de Portneuf,
reprendre le titre utilisé par la députée de Joliette pour convoquer la
ministre responsable des Relations canadiennes à cette interpellation en le
rephrasant à ma manière, avec votre permission, et en respectant ma vision et mon opinion, un peu comme on le fait
en étude détaillée d'un projet de loi, à la manière d'un amendement qui
n'en est pas un formel, M. le Président, dans les circonstances, parce que ce
ne serait pas conforme au règlement de la procédure parlementaire en
interpellation. Mais permettez tout de même, pour les fins de notre discussion,
à la manière de l'amendement, que je
remplace «l'échec» par «le succès», «provincialiste» par «nationaliste», et
«fédéraliste» par «pragmatique», et «pour faire avancer ses revendications» par
«pour faire respecter ses compétences et réaliser ses ambitions», ce qui
donnerait : Le succès de l'approche nationaliste du gouvernement
pragmatique de la Coalition avenir Québec pour faire respecter ses compétences
et réaliser ses ambitions.
Et, pour tout
vous dire, je l'ai réécrit comme ça parce que c'est spontanément et logiquement
ce que je constate après quatre années de pouvoir de notre gouvernement,
presque quatre, dans ses relations avec les autres partenaires de la
fédération, à commencer par le gouvernement fédéral. Et j'en veux pour preuve
deux projets de loi qui ont été adoptés en cette Chambre, dont je suis
particulièrement fier, la Loi sur la laïcité et la Loi sur la langue officielle
et commune du Québec, le français, fier parce que... Ce n'est pas mes lois,
mais j'étais tellement content que notre gouvernement les fasse adopter.
Commençons par dire que, dans les deux cas,
notre gouvernement a trouvé l'équilibre, je pense, qu'il fallait pour livrer la
marchandise dans un contexte où il fallait passer à l'action parce que les
choses avaient trop tardé. Et ce n'était pas par manque de temps pour les
gouvernements qui nous ont précédés, puisque la Charte de la langue française datait
de 45 ans, et le débat sur la laïcité a été fait, analysé, étudié,
commissionnisé pendant de longues années sans aucune... en tout cas, aucune
suite digne de ce nom, à commencer par une loi.
C'est vrai que la Charte de la langue française
restait un monument, même après 45 ans, mais les assauts des tribunaux, et
les ajustements pas toujours couronnés de succès au fil des ans, et, justement,
le passage du temps faisaient en sorte qu'une mise à niveau était nécessaire,
d'autant plus que le constat de son effet sur le français était de moins en moins convaincant et qu'il fallait non seulement
freiner le déclin du français, puisque, par définition, je le répète à chaque
fois, même si on freine un déclin, ça reste un déclin, il fallait resserrer les
dispositions de la charte pour assurer la pérennité du français chez nous, et
lui donner ce qu'il fallait pour être vraiment et rester la langue officielle,
et devenir de bon droit la langue commune du Québec.
Il ne faut pas oublier qu'au moment de l'adoption
de la charte de Camille Laurin, en 1977, l'Internet était encore une idée presque... qui frôlait presque la
science-fiction. Pas besoin de vous faire la démonstration de l'effet
qu'a eu l'Internet en décuplant l'hégémonie
de l'anglais et en emportant les jeunes générations dans une vague
d'anglicisation qui fait peur, encore aujourd'hui, sans tomber dans la peur de
l'anglais, puisqu'il va de soi, M. le Président, que, tout citoyen du monde que
nous soyons, nous ne pouvons qu'épouser le bilinguisme et le multilinguisme
dans un monde globalisé, mais pas au prix de perdre notre langue, qui, dans les
circonstances, aura toujours besoin d'être protégée dans le contexte
géographique qui est le nôtre.
Et le lien avec l'interpellation d'aujourd'hui,
parce que j'y réponds, à cette question, c'est quoi? Dans le contexte de nos
relations avec les partenaires de la fédération, c'est la capacité que nous
avions et que nous avons utilisée pour aller jusqu'où il fallait aller pour
respecter nos droits et nos compétences, pour nous respecter. En ce qui me
concerne, il n'y a pas à être gêné ni même à se formaliser d'utiliser la clause
de dérogation, qu'on appelle de plus en plus, dans le langage, la souveraineté
parlementaire, si j'ai bien compris. Donc, il n'y avait pas de raison de se
gêner. Ça fait partie des outils à notre disposition. Et ne pas s'en servir,
justement, aurait été d'abdiquer une partie de nos pouvoirs et de nos
responsabilités.
Le même raisonnement, en ce qui me concerne,
s'applique à la Loi sur la laïcité, pour la clause de dérogation comme pour
tout le reste, avec ce que ça implique pour l'ensemble de la démarche
d'affirmation nationale que ça suppose. On
verra pour la suite et les contestations qui s'en viennent et qui ont été
déclarées cette semaine, mais il ne fait aucun doute dans mon esprit que le gouvernement va défendre sa loi et va
tout faire juridiquement, constitutionnellement, politiquement et socialement pour faire respecter nos droits, nos
compétences, nos juridictions, nos ambitions et notre volonté du vivre-ensemble avec nos voisins, et
partenaires, et nos communautés, des Premières
Nations aux nouveaux arrivants, en passant par l'autre nation de langue
anglaise, avec qui nous avons construit ce chez-nous, de la nation que
nous sommes, pour vivre ensemble dans un monde global et une société moderne,
légalement laïque et en français.
Tout ça pour vous dire, M. le Président, que je
répète de plus en plus que je suis un nationaliste décomplexé et très fier de
l'attitude de ma ministre à l'égard d'Ottawa.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de
D'Arcy-McGee, s'il vous plaît.
M. Birnbaum : Merci, M. le
Président. Dans un premier temps, ne vous en faites pas, que je tousse, je me
suis testé à maintes reprises, négatif. Peut-être, je ne mange pas assez mes
épinards.
Bon, la ministre, en refusant d'identifier si
les épinards sont sur sa liste de choses, de légumes favoris, faisait référence
au rayonnement du français. Pas une réponse sur la façon d'aborder les
questions intergouvernementales canadiennes
ni de parler de comment... de la meilleure façon de faire rayonner notre
Québec. Si on veut... Il y a plusieurs mentions. Si on veut prendre la
déviation de parler du projet de loi n° 96, bon, il y avait une façon
inclusive, pragmatique et sérieuse d'aborder cette question fondamentale de
comment faire avancer notre langue commune, le français, et cette vision n'a
été aucunement présente dans le traitement de ce projet de loi, à ma grande
tristesse, mais il n'y a pas assez de temps pour parler de ça.
Bon, si je ne vais pas établir si la ministre
aime les épinards, j'aimerais parler de la façon de faire rayonner le français à travers le Canada, où on laisse... on
est laissés beaucoup sur notre appétit, partagés, partagés d'être
conjoints, solidaires avec les quelques
millions d'âmes canadiennes francophones. Est-ce que la ministre, en parlant
des réalisations de son gouvernement en tout ce qui a trait à la
francophonie canadienne, au rayonnement de notre langue française, peut expliquer les nettes diminutions dans les budgets
accordés à ce sujet-là? Comment ça s'explique? Et c'est le Québécois de
langue anglaise très fier de notre responsabilité, au Québec, de faire rayonner
notre langue commune qui pose la question.
Est-ce que la ministre peut expliquer le radio silence presque total de son
gouvernement devant les menaces très réelles aux universités et
programmes universitaires francophones en Alberta comme en Ontario? Ce n'est
pas des minces affaires.
Je me permets une dernière, je vous promets,
petite parenthèse sur mon obsession sur les légumes verts, là. Ça a des ramifications pour les Canadiens de
langue française, parce qu'ils ont... oui, justement, la ministre n'a pas
l'air de comprendre mon analogie, mais, oui,
mais, oui, ils ont besoin, dans un premier temps, chaque matin, de
s'entendre, de travailler avec leur
population majoritaire et ainsi que le gouvernement majoritaire, qui les posent
souvent, les questions, en ce qui a trait à leurs liens avec le Québec.
Mais ma question est toujours, surtout, sur la base résultat.
Comme je dis,
on se rend compte, dans notre intérêt, de mettre de l'avant les intérêts
supérieurs du Québec sur ces questions, et, comme je dis, sur la
francophonie canadienne, il y a des questions qui se posent. Et une question
qui en dit long, parce que je serai le
premier à admettre que nos intérêts là-dessus peuvent être, en quelque part,
ambivalents, et je parle de l'immigration, de l'immigration.
Évidemment, M. le Président, le Québec a
privilégié et a encouragé une immigration francophone au Québec. Mais, si on
est pour avoir des engagements, il faut qu'ils soient réels et cohérents. Le
Canada français a besoin de se renflouer aussi, aussi, et ça se discute de plus
en plus, l'importance qu'ils aient accès... un accès qui se... ferait rayonner
davantage le français à travers le Canada, leur accès à l'immigration en
français. Il faut être cohérents sur ces questions, comme sur la langue
française, où il faut, ce que ce gouvernement a lamentablement échoué à faire,
prendre place pour la communauté d'expression anglaise en même temps.
Sur
l'immigration, est-ce que la ministre peut être claire sur comment on va à la
fois mettre de l'avant nos objectifs en immigration de langue française mais
épauler les communautés canadiennes-françaises à avoir leur juste part de
l'immigration française aussi?
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
Mme la ministre, s'il vous plaît.
• (11 h 10) •
Mme LeBel : Merci,
M. le Président. Quand on parle de priorités, j'en mentionnais encore... le
fait qu'on ne peut pas tous courir les lièvres à la fois, une priorité majeure
pour le gouvernement du Québec mais non seulement pour le gouvernement du Québec, mais pour l'ensemble des provinces, et
ce sont les transferts en santé. Et on travaille activement pour faire
comprendre au gouvernement fédéral qu'il est important d'augmenter les
transferts en santé.
D'ailleurs,
je souligne que le gouvernement Trudeau avait mentionné que, dès qu'on serait
sortis de la pandémie, on pourrait s'asseoir avec lui et en discuter
convenablement. Bien, on est sortis de la pandémie. Je pense, c'est le temps
qu'il rencontre sa promesse. Mais on a obtenu des gains dans ce sens-là, et je
m'explique.
D'ailleurs, je veux
saluer le travail de notre premier ministre à tous. Quand il était président du
Conseil de la fédération, il a réussi un tour de force, de rallier l'ensemble
des provinces et territoires autour de ce sujet. Et je pense que le fait d'avoir obtenu un consensus pour qu'on
pousse tous dans la même direction auprès du gouvernement fédéral, c'est
un gain. Et ce consensus-là perdure, M. le Président.
Ça fait que ça va me
permettre de vous parler un peu de notre approche dans nos représentations avec
le gouvernement fédéral dans un dossier qui est important et qui est sur la
pile, sur le dessus de la pile des priorités en matière de relations
canadiennes, ce sont les transferts canadiens en santé. Le contexte de la
pandémie semble avoir renforcé la volonté du gouvernement fédéral de se doter
d'outils afin de jouer un rôle accru en santé au détriment de l'autonomie et de
la responsabilité première des provinces dans ce domaine. Je vais le répéter à
plusieurs reprises, on ne veut pas de fonds ciblés, on ne veut pas de normes
nationales, on ne veut pas de nouveaux programmes. La santé est une compétence
provinciale. Le Québec n'est pas le seul à l'affirmer. On veut l'augmentation
de la base des transferts en santé.
Dans les
50 dernières années, le gouvernement fédéral a multiplié les interventions
en matière de santé et de services sociaux, ce qui a affecté la capacité du
Québec à faire ses propres choix. Il a agi de manière unilatérale en excluant
les provinces et les territoires. En parallèle, les transferts fédéraux en
santé, c'est important de le comprendre, ont progressivement diminué pour
atteindre un plancher historique d'environ 22 %, à l'heure où on se parle. À ce titre, M. le Président, je le répète,
notre demande auprès du gouvernement fédéral est sans équivoque, et,
non, on n'abandonnera pas, parce que présentement on fait face à un
refus : Nous souhaitons une augmentation récurrente et sans condition des transferts canadiens en santé,
M. le Président. Il s'agit d'une priorité pour notre gouvernement. On
n'en démordra pas. Et non seulement on n'en démordra pas, mais on n'est pas
seuls à le réclamer. On a réussi à rallier un consensus. Et, en matière de
négociation, d'avoir ce rapport de force, c'est fort important, et on est
confiants que le gouvernement fédéral va finir par voir la lumière.
Le Québec est un
leader dans les représentations, ce n'est pas anodin, en matière d'autonomie,
en matière d'affirmation de notre nationalisme. On a plusieurs dossiers à faire
avancer, mais, comme l'a rappelé le premier ministre, M. le Président, lors de
la dernière campagne fédérale, la priorité absolue, celle sur laquelle on
travaille ou sur laquelle on met nos
énergies, c'est la hausse des transferts en santé, je le répète, c'est unanime
des premiers ministres, pour qu'Ottawa fasse sa juste part et augmente
de façon récurrente et permanente ses transferts en santé à 35 %. Ce ratio devra par la suite être maintenu au fil du
temps à l'aide d'un facteur de progression annuel qui est approprié, M. le
Président. On a une population qui est vieillissante. On a besoin d'avoir notre
juste part des fonds fédéraux, mais c'est à
nous, à chacune des provinces, au Québec, de décider à quel endroit on va
mettre cet argent-là. On connaît nos priorités
sur le terrain. On le sait. Est-ce que c'est en soins à domicile? La réponse,
c'est oui. Est-ce que c'est de prendre soin de nos aînés? La réponse, c'est oui. Est-ce que c'est d'avoir plus
d'infirmières? La réponse, c'est oui. Est-ce que c'est d'avoir les soins
de première ligne? La réponse, c'est oui. Est-ce que c'est en matière de santé
mentale? La réponse, c'est oui. Mais c'est à nous de le faire et c'est à nous
de le décider.
L'accessibilité, la
qualité des soins de santé sur l'ensemble du territoire québécois constituent
une grande priorité, et c'est notre
compétence, c'est notre autonomie. Et on va continuer, M. le Président, à
l'aide des autres provinces, et seuls s'il le faut, à réclamer notre
juste part et l'augmentation des transferts dans la base, M. le Président.
Le
Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.
M. le député de Portneuf, s'il vous plaît.
M. Caron : Merci, M. le Président. Tout à l'heure, je disais
que j'allais revenir sur des enjeux d'ordre à toucher l'ensemble de nos concitoyens et je voulais, bien
entendu, revenir sur la question d'Internet haute vitesse. Notre
collègue députée de Joliette, tout à l'heure, parlait des familles et disait
que, finalement, c'était un gain «coast to coast», pour reprendre son
expression. En revanche, là, c'est bien un gain pour les concitoyens du Québec.
J'ai insisté aussi
sur le rôle du député. Et quel est celui ou celle d'entre nous qui n'a pas reçu
une multitude d'appels au bureau, des appels parfois désespérés, notamment dans
cette période où on a vécu la pandémie, parce que
les gens n'avaient pas la possibilité d'avoir accès à Internet haute vitesse?
C'est essentiel en 2022. C'est un besoin essentiel, un souhait
fondamental de la part... qui est manifesté de la part de notre population, je
le disais, avec le télétravail, mais c'est vrai aussi pour le confort de nos
enfants, pour le confort de nos familles, pour le confort de nos aînés aussi.
C'est important pour le développement économique de nos régions.
Je
prends encore un exemple très local. La vallée Bras-du-Nord, grâce à Internet
haute vitesse qui va pouvoir se déployer chez elle, eh bien, va pouvoir
rayonner plus encore, mais aussi on va faire toutes sortes de gains en matière
écologique, puisqu'il ne sera plus question d'imprimer des billets.
Bref, accès Internet
haute vitesse changera véritablement la vie de centaines de milliers de
Québécoises et Québécois pour le mieux, et ça, je considère que c'est une
grande victoire, que c'est un grand gain. Et comment on a pu réaliser ça, M. le Président? C'est grâce à la
collaboration du gouvernement de la CAQ avec ses homologues fédéraux.
Lorsque nous sommes
arrivés au pouvoir, à l'automne 2018, c'était plus de
250 000 foyers qui n'étaient pas connectés à Internet haute vitesse.
C'est, vous l'admettrez, assez inacceptable au XXIe siècle, plus que...
tant pour tous les Québécoises et Québécois... d'avoir accès à un outil
technologique moderne, et ce, partout sur le territoire.
La télécommunication,
vous le savez, c'est de juridiction fédérale. Une collaboration de tous les
instants entre les deux paliers de
gouvernement a été nécessaire. Je voulais aussi profiter de l'occasion pour
féliciter mon collègue député d'Orford qui a travaillé de manière
brillante sur ce dossier. Il a fallu asseoir les différents joueurs autour de
la table et s'assurer que le plan irait de
l'avant. Le gouvernement fédéral a vu que c'était du solide, que c'était du
sérieux, que nous avions un projet ambitieux, et le gouvernement fédéral nous a
fait confiance en contribuant financièrement au programme Régions branchées et
aux volets Éclair I et Éclair II de l'Opération haute vitesse. De
concert, notre gouvernement injecte plus de 1,3 milliard, M. le Président.
Tous les foyers québécois seraient branchés en 2022. Nous tiendrons notre parole. Nous en sommes fiers. Ce sont des
investissements colossaux, il faut le reconnaître, mais des
investissements nécessaires et qui vont changer la qualité de vie de l'ensemble
de nos concitoyens.
J'ai une pensée,
lorsque je relis l'interpellation de ce matin, j'ai une pensée pour les
citoyennes et citoyens de Joliette, de Matane-Matapédia, de Gaspé, des
Îles-de-la-Madeleine, de Jonquière, de René-Lévesque et de Duplessis qui, en
2018, n'avaient pas accès à Internet haute vitesse mais qui, en 2022, grâce à
notre travail, pourront enfin entrer dans une nouvelle ère de connectivité.
Alors, je me pose la question s'ils partagent aujourd'hui les propos de notre
collègue députée de Joliette. Je pense que de poser la question, c'est d'y répondre.
Il y a, en effet,
beaucoup de dossiers sur lesquels on a travaillé, et j'entendais l'ensemble de
mes collègues intervenir sur tout ça depuis tout à l'heure. Et c'est bien
évident qu'on ne réussit pas, à coup sûr, à obtenir ce qu'on négocie, mais vous pouvez avoir la certitude, M.
le Président, qu'on va poursuivre toutes les démarches pour obtenir le maximum de gains pour notre province au bénéfice
des Québécoises et des Québécois. Le chantier est vaste, il faut
l'avouer, il faut l'admettre, mais la chose la plus importante, et c'est ce
qui... qualifie, pardon, l'esprit de notre gouvernement et du premier ministre,
qui l'anime, c'est cette volonté de toujours vouloir plus, toujours vouloir
aller plus loin. Alors, l'important, c'est d'être déterminés, de monter les
dossiers de manière professionnelle, de monter les dossiers de manière
exemplaire pour pouvoir convaincre. Et je suis bien convaincu que les années à
venir sont prometteuses de bonnes nouvelles. Merci, M. le Président.
• (11 h 20) •
Le
Président (M. Bachand) : Merci. M. le
député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci,
M. le Président. Quand j'ai vu, dans les journaux, que la CAQ allait tenir un
congrès en fin de semaine en évacuant les sujets de l'heure, le logement,
l'environnement, l'économie, la mondialisation, tout ce qui se passe, puis en
centrant ça sur la fierté, je me suis dit : Bien, très bien, mais c'est
quoi, la fierté caquiste? Moi, je suis très fier de mon peuple. Je suis très
fier d'être Québécois parce qu'on est un peuple de résistants. On est un peuple
qui a traversé l'histoire en se maintenant, en se réinventant, en continuant de
parler français, entre autres, un peuple qui a résisté, qui a fait la rébellion
des Patriotes, qui n'a pas abandonné, qui a fait la Révolution tranquille, qui
a fait deux référendums. Je suis fier aussi des peuples autochtones, au Québec,
qui ont fait Oka et Idle No More. Je suis fier de cette résistance, de cette
insoumission, de cette chose-là qui fait qu'on est restés différents. Mais c'est
quoi, la fierté caquiste?
Le cadre dans lequel
vous décidez de rester, c'est un cadre qui nous soumet. C'est un cadre dans
lequel... une espèce de cage, là, dans laquelle il y a plein de décisions qui
nous échappent. On n'a pas le contrôle sur nos ports. On n'a pas le contrôle
sur le fleuve Saint-Laurent. On n'a pas le contrôle sur nos voies ferrées.
S'ils veulent nous passer un pipeline, ils nous passent un pipeline. Les
décisions extrêmement importantes qui vont modeler notre avenir seront prises ailleurs,
par d'autres qui ne sont pas nous. Et vous savez qu'est-ce que c'est, ça? C'est
de l'aliénation. L'aliénation, c'est devenir étranger à soi-même. Devenir
étranger pourquoi? Parce qu'on ne prend pas les décisions qui modèlent notre
avenir. Elles sont prises par d'autres, et c'est les autres qui modèlent notre
avenir. Et ça, c'est le nivellement de la
différence québécoise, tranquille, à petits pas, comme des petits gains, là,
d'ententes, d'une province canadienne
comme les autres. J'entendais la ministre dire, et ses collègues : C'est
fini, le souverainisme et le fédéralisme, maintenant, c'est le
nationalisme. Le nationalisme caquiste, là, c'est le fédéralisme libéral qui a
fait faillite puis qui repart sur un autre nom. C'est exactement la même affaire
mais version cheap, version pas d'ambition. Au moins, les libéraux, là, à un
moment donné, plus maintenant mais à un moment donné, ils avaient des
ambitions.
Dans les
années 70, dans les années 80, pensez aux accords du lac Meech, les
revendications qu'on avait, les ambitions,
même à l'intérieur du cadre. Au moins, on voulait avoir plus, on voulait avoir
quelque chose pour le Québec, pour avoir une plus grande prise sur notre
avenir. Aujourd'hui, c'est quoi? Soumission totale. La CAQ a abandonné ses rêves
de jeunesse et même ses rêves de demi-vie. Parce que les rêves de demi-vie, là,
l'espèce de compromis qui est arrivé, là, un petit peu avant l'élection :
On va avoir un rapport d'impôt unique, regardez ça, on va peut-être abolir le
lieutenant-gouverneur et ses fonctions monarchiques, on va faire ci, ça va être
incroyable, on va récupérer des pouvoirs, tout ça, ça a été tout simplement
évacué.
Je me demande c'est quoi, l'objet de la fierté
caquiste aujourd'hui. Ce n'est clairement pas se tenir debout puis aller en chercher plus pour le Québec. C'est
la fierté de bomber le torse à genoux. C'est grave. Dans l'histoire de notre peuple, là, ça va
être jugé très sévèrement. Là, ce n'est pas la mode, parce que vous
dites : C'est super, on est là, on en profite. Mais ça va être jugé
sévèrement, surtout dans l'histoire du nationalisme québécois. On n'est
clairement pas dans un sommet. On est plus quelque chose comme dans un creux.
Et tout ça me fait penser à la question
suivante : Si vous êtes fiers, là, est-ce que vous aimez votre peuple?
C'est quoi, l'amour? Moi, quand j'aime mes proches, mes amis, ma famille, je
les veux libres. Quand j'aime mon peuple, je le veux libre. Je ne veux pas,
pour mes proches, qu'ils soient pris dans une situation où, toute sa vie, les
décisions importantes pour leur avenir soient prises par d'autres en fonction
d'intérêts d'autres. Non. Je veux qu'ils puissent décider par eux-mêmes, qu'ils
se déterminent par eux-mêmes, qu'ils fassent leurs choix en assumant les conséquences, la liberté de prendre des décisions
bonnes et mauvaises, mais les leurs, dans lesquelles ils se définissent.
Aujourd'hui, ce n'est pas ça qui se passe.
Alors, j'inviterais la ministre et l'ensemble
des députés de la CAQ à réfléchir à la question : Est-ce que vous aimez
votre peuple? Et, si vous l'aimez, pourquoi ne le voulez-vous pas libre?
Pourquoi voulez-vous le maintenir dans une situation où sa différence et son
identité s'érodent?
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la
ministre, s'il vous plaît.
Mme LeBel : Merci, M. le Président.
Je pense qu'en tout... Je pense qu'on peut affirmer, là, que l'on prouve chaque
jour, dans cette enceinte, que les Québécois sont maîtres de leur avenir,
maîtres d'oeuvre de leurs décisions, par chaque projet de loi qu'on adopte, par
chaque décision qu'on prend, par chaque débat qu'on fait.
C'est quoi, la fierté d'être Québécois? C'est
quoi, le nationalisme de la CAQ? Il y a plusieurs choses que je pourrais dire,
mais je vais me concentrer sur quelques sujets. Pour moi, l'autonomie du Québec
passe, oui, par la défense de nos compétences auprès du fédéral, mais c'est
également par le renforcement de notre structure, le renforcement de notre
économie, de faire prospérer le Québec. Et ça, c'est un enjeu qui est très cher
à notre premier ministre, de diminuer l'écart de richesse des Québécois pour se
détacher une fois pour toutes de cette dépendance que l'on a envers la
péréquation. Et c'est un des premiers jalons à accomplir pour être capables
d'avoir cette pleine autonomie. Et vous savez quoi? On fait bouger l'aiguille
depuis qu'on est au pouvoir. On fait bouger l'aiguille de façon significative
dans la bonne direction.
C'est aussi défendre le français. J'en ai parlé,
M. le Président. Défendre le français, c'est défendre le français commun par le
projet de loi n° 96. On défend le français par le projet de loi
n° 96. Certains disent qu'on ne va pas assez
loin et votent contre. Moi, je dis : Tous les pas, tous les gains sont
importants. Certains disent qu'on va trop loin, puis c'est peut-être
plus cohérent de voter contre, à ce moment-là. Mais chaque pas que l'on fait,
chaque intervention, chaque force... renforcement de la protection de la langue
française dans notre territoire, c'est un geste d'autonomie, c'est un geste
nationaliste, c'est un geste de fierté québécoise.
Défendre le français, je l'ai mentionné, c'est
aussi à la grandeur du territoire. Que l'on soit souverainiste ou non, jamais
on ne va changer la situation géographique du Québec. On va toujours être un
État francophone entouré d'une mer d'anglophones en Amérique du Nord et en
Amérique. Donc, il faut se rapprocher de nos pairs, il faut tendre la main à cette francophonie canadienne,
cette francophonie-là qui nous unit, cette langue qui nous unit. Et la
vision d'une francophonie forte, unie et engagée, c'est aussi la défense du
français, c'est aussi un geste de fierté affirmé. Parce que le français, c'est
la pierre angulaire de notre identité, c'est le fondement de notre nation, et
de la défendre et de tendre la main aux autres francophones qui nous entourent
pour défendre cette langue, c'est un geste de fierté.
Se tenir debout, également, devant la tendance
marquée du fédéral d'envahir nos compétences, c'est également un geste de fierté. Est-ce qu'on a les résultats instantanés?
Est-ce qu'on a les gains que l'on veut immédiatement? La réponse, c'est
non. Mais, je le répète, si, chaque fois dans ma vie où je m'étais fait dire
non, j'avais jeté la serviette, je ne serais pas rendue où je suis rendue
aujourd'hui. Alors, je vais continuer à travailler, je vais continuer à
défendre. Pourquoi? Parce qu'on obtient des gains. On obtient... On fait des
pas.
Et je vais me permettre, même si ce n'est pas à
la satisfaction de mes collègues, de continuer à énumérer ce que l'on a fait
comme gains. Et, outre ce que j'ai nommé tantôt à la Cour suprême, ce que j'ai
nommé par rapport à l'affirmation, dans la Constitution, que le Québec est une
nation québécoise, le fait d'avoir le bilinguisme des juges, d'être
participants au protocole, d'avoir l'application de la Charte de la langue
française aux entreprises de juridiction fédérale par le biais du projet de loi
n° 96, qui faisaient partie du document de 2015 — donc,
on n'est pas à zéro — bien,
on en a eu d'autres.
Et je vais vous nommer l'accord Canada-Québec.
Vous allez dire : C'est très ciblé, mais c'est très important pour les
refuges pour femmes et les organismes d'aide aux victimes de violence sexuelle
et de violence conjugale au Québec pour répondre à la pandémie. Vous allez me
dire : Mon Dieu! Mme la ministre, ce n'est pas quelque chose
d'extraordinaire. Bien non, c'est extraordinaire, ça répondait à un besoin
immédiat dans un contexte particulier de l'intérêt des Québécois. Et savez-vous
quoi? C'est un accord exemplaire et unique au Canada qui a permis au Québec de
se retirer d'une initiative fédérale avec pleine compensation pour obtenir
notre juste part. On a réussi à faire valoir, dans cette tendance à envahir nos
compétences, notre voix, notre position, et c'est un gain clair.
• (11 h 30) •
Le Président (M.
Bachand) : Merci. M. le député de
Saint-Jean.
M. Lemieux : Merci, M. le Président.
J'avais envie de dire au député, au collègue de Jean-Lesage, qu'on a l'air plus
bas que d'habitude au salon bleu quand on parle. Je ne suis pas à genoux, M. le
député. Je suis assis parce qu'on est en interpellation. Sinon, je serais
fièrement debout, comme je le suis toujours au salon bleu.
Réponse
au député de D'Arcy-McGee : ma couleur favorite, bleu, bleu CAQ, tu
sais, le pâle, ciel, là, bleu CAQ. Les
épinards? Oh! que oui, j'adore, mais plus en salade qu'en accompagnement. C'est
trop mou. Ce n'est pas mon genre.
Est-ce que je suis fédéraliste ou souverainiste?
Bien, c'est clair qu'on pourrait dire ni l'un ni l'autre, sinon qu'autonomiste. Je n'ai jamais aimé la troisième
voie... pas la troisième voie, mais l'idée, le concept un peu passéiste,
je trouve, de la troisième voie, mais
nécessaire à l'époque de sa création, ça, j'en conviens. Je suis plus, d'abord,
et avant tout, et par-dessus tout, pour les Québécois, leur langue et
leur culture, nonobstant... puis ce n'est pas constitutionnel comme question,
mais nonobstant l'état de la fédération, dirais-je.
D'ailleurs, l'axe fédéralisme-souverainisme, on
en a parlé avant, mais j'y reviens, parce que c'est beaucoup pour ça que je
suis ici, moi, justement, parce que, depuis 50 ans, c'était l'un ou
l'autre, avec ce que j'appelle un gaspillage de ressources humaines éhonté d'un
côté comme de l'autre, alors que, là, et j'ai le bonheur de répondre à l'appel, je me retrouve dans un gouvernement
pragmatique, nationaliste, du gros bon sens, efficace, un gouvernement
qui pense d'abord et avant tout, comme tout bon gouvernement devrait le faire,
aux intérêts supérieurs du Québec. Mais, parce que nous sommes ce que nous
sommes, on peut toujours penser aux intérêts supérieurs du Québec de façon
ponctuelle puis pour l'avenir aussi.
Au sujet de
la francophonie, j'étais très content d'entendre la ministre prendre autant de
temps pour en parler, de la francophonie canadienne, puisque j'ai passé
10 ans dans l'Ouest canadien et cinq ans en Atlantique. Vous savez que la
différence en Atlantique, c'est... Si vous dites «Maritimes», c'est Nouveau-Brunswick,
Île-du-Prince-Édouard et Nouvelle-Écosse. Si vous dites «Atlantique»,
c'est Terre-Neuve, Labrador, Nouvelle-Écosse, Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard.
J'étais en Atlantique.
On dit de nos... des Acadiens qu'ils sont nos
cousins. Il ne faut pas se tromper, là. C'est plus que nos cousins, c'est nos
frères et soeurs francophones. Ils ont besoin de nous. Et cette politique de
francophonie canadienne de la ministre, une politique forte, unie et engagée...
J'aurais tellement aimé, dans les années 70 et 80, quand j'étais dans
l'Ouest, qu'on puisse avoir une de ces politiques. Et, trompez-vous pas, là, je
sais très bien qu'en 1970 et 1980 il y a eu
un gouvernement du Parti québécois. Mais, un jour, je vous raconterai ce qu'on nous
disait, dans l'Ouest canadien, quand il était question du Québec et de
ses aspirations, en disant : Si vous n'êtes pas contents, vous n'avez rien
qu'à revenir au Québec. Je m'excuse, mais
les gens qui sont là-bas, surtout... Gabrielle Roy et les autres Franco-Manitobains
avec qui j'ai passé plusieurs années de ma
vie, ils sont chez eux, là-bas. Ce n'est pas le Québec, chez eux, c'est le
Manitoba.
Je voulais dire un mot sur C-11. Je n'aurai pas
le temps, mais je veux juste vous souligner au passage que ce qu'on a adopté
comme motion sans préavis cette semaine au sujet de C-11, à Ottawa, ce n'est
pas banal, puis c'est la façon de faire, puis c'est comme ça qu'on fait
toujours... Et ce n'est pas parce qu'on a toujours fait ça qu'il faut continuer
à le faire, mais c'est ce qu'on fait comme députés, c'est ce qu'on fait comme
Assemblée nationale. Pendant que la ministre de la Culture travaille
d'arrache-pied... Et cette motion-là qu'elle a réussi à faire adopter ici par tous les partis — forcément, c'était une motion sans préavis, elle
était, donc, unanime — bien,
pour elle, c'est des outils, des... même, des munitions de plus pour
aller défendre ce qu'elle est en train de faire et de gagner, à Ottawa, par
rapport à C-11, dont on a énormément besoin.
Je vous ai dit que je gardais mes bons mots pour
la fin, mais ils sont... en ce qui me concerne, en tout cas, ils sont
importants. Effectivement, dernière interpellation. On va enchaîner les
dernières pour les deux prochaines semaines, et puis, pour certains de nos
collègues, c'est des vraies dernières à l'Assemblée nationale. Alors, je ne
voudrais surtout pas les oublier et les passer sous silence : le député de
D'Arcy-McGee, bien sûr, qui ne reviendra pas parmi nous, quoi qu'il arrive sur
la scène électorale le 3 octobre prochain; le député de Jean-Lesage, je
vous souhaite bonne chance aux prochaines élections; et la députée de Joliette.
Eh Seigneur! Il faut que je vous salue, que je vous remercie, parce que, si je
suis ici, c'est aussi un peu à cause de vous, parce que... Vous avez eu le
temps de le dire beaucoup, Mme la députée de Joliette, en vous en allant, en
disant que la politique autrement, c'est possible. C'est la première chose que
j'ai dite en me levant ici, en arrivant en 2018, et, grâce à vous, je pense que
c'est encore possible. Merci. Je voulais dire que j'avais pour vous un immense
respect, que, cette politique autrement, vous n'en êtes pas seulement un bel
exemple, mais vous en êtes un modèle, et je vais essayer de le suivre.
Je vous souhaite à tous une très bonne fin de
législature. Je vous donne rendez-vous, j'espère, au mois d'octobre l'année
prochaine.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de
D'Arcy-McGee, s'il vous plaît.
M. Birnbaum : Merci, M. le
Président. Et je remercie le député de Saint-Jean pour ces mots gracieux et que
je partage totalement en ce qui a trait à mes collègues ici, du côté de
l'opposition. Mais il ne me reste qu'à peine quatre minutes, je crois, alors je
vais passer à l'action et, avec tout respect, dire que la vision
constitutionnelle, en quelque part, du député Saint-Jean, ça ne va pas
s'insérer facilement sur une pancarte électorale. Moi, j'ai eu de la difficulté
à suivre. Et j'insiste que les Québécois et Québécoises qui nous écoutent vont
de plus en plus demander une clarté là-dessus.
«Autonomie», c'était un mot de Mario Dumont,
emprunté par le premier ministre actuel. Où est-ce que ça se situe sur le
«spectrum» d'approche, de vision? Écoutez, on travaille sur des assises qui
nous permettent de veiller aux intérêts supérieurs de notre Québec, et la
réponse «I don't know» ne passe pas... pour quelques années, peut-être, avec
beaucoup de succès électoral. À un moment donné, il y aurait des questions
là-dessus.
Mais, une autre fois, si j'avais abordé cet
aspect de notre discussion, c'est d'avoir en tête les intérêts supérieurs du
Québec. Et, là-dessus, où sont les résultats des actions ou non-actions du
gouvernement actuel, son dossier, dont on n'a même pas touché, la transition
énergétique, quand on sait qu'Ottawa a dépensé des milliards pour
sauver Terre-Neuve de la faillite, qu'il a acheté un pipeline dans l'Ouest et
qu'Ottawa refuse de répondre à la demande des provinces de rehausser les transferts
en ce qui a trait à l'énergie?
Et, la santé, la ministre en a parlé, mais
elle-même a noté qu'on est devant, actuellement, un échec, un pourcentage qui
est tellement trop faible. Et là c'est devant un mandat, qui vient de se
compléter, de notre premier ministre en tant que président du Conseil de la
fédération. Alors, de dire que, oui, on ne va pas céder, c'est une chose, mais
on est en politique chaque jour, chaque jour. Et surtout le gouvernement joue
devant l'obligation du résultat, et là on parle de la santé, qui nous touche
chaque jour, et les transferts ne sont pas au rendez-vous.
Bon, en quelque part, les efforts pour en faire
mieux résident sur les ressources que le Québec confie aux relations intergouvernementales canadiennes. Ils
sont au programme 3, pour commencer. Les dépenses, M. le Président,
sont en réduction. À l'aube de cette
pandémie, la collaboration, la compréhension, l'échange économique nous
imposent davantage, et là on voit des réductions de dépenses.
Je parlais un petit peu de l'électricité. Où
sont les pourparlers sur notre ressource précieuse, hydroélectricité, vers
l'Ontario et l'Atlantique? Est-ce que le ministre peut parler le moindrement du
progrès à cet égard?
• (11 h 40) •
Et je me permets, dans les dernières
30 secondes qu'il me reste, de poser une question qui est toujours,
toujours sans réponse. J'ose croire qu'une des fiertés du Québec, c'est de
participer au rayonnement tout court de notre
pays, le Canada, où, chaque fois que je voyage au nom du Québec, j'ai la fierté
de voir comment on est d'avant-garde, on est efficaces, on est fiers,
comme on a des choses à partager avec le reste du Canada, comme bien... comme
bonnes choses en soi-même... en soi. Est-ce qu'on peut en parler de temps en
temps, avec la fierté qui est due?
Conclusions
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup. Mme la
ministre, pour 10 minutes, s'il vous plaît.
Mme Sonia LeBel
Mme LeBel : Je comprends que c'est
ma conclusion, M. le Président. Donc, compte tenu que c'est la dernière fois
que je vais m'adresser pendant cette interpellation-là, bien, j'ai gardé pour
la fin le fait de remercier le député de D'Arcy-McGee pour son travail, de dire
combien j'ai apprécié travailler avec lui, sa collaboration. J'ai appris... à
moins... j'espère que je ne me trompe pas, que vous ne vous représentiez pas.
Donc, je prends l'occasion pour vous saluer, parce que ce n'est pas la dernière
fois qu'on va se croiser mais la dernière fois où on va potentiellement
s'interpeler. En tout cas, je ne prendrai pas de chance et le risque que ça
n'arrivera plus, que je ne rate pas mon occasion de vous souhaiter bonne chance
pour la suite et de faire ce que j'ai fait avec vos autres collègues, parce que c'est sincère, de vous
remercier pour votre service dans l'intérêt des Québécois. Je le dis
souvent, on peut être dans des formations politiques différentes, on peut avoir
des visions différentes, des projets pour le Québec qui sont différents, mais
je pense que personne, ici, ne peut affirmer que les 125 députés ne sont
pas là parce qu'ils croient pouvoir servir l'intérêt des Québécois. Et je pense
que, ça, il faut aller au-delà des partis politiques et le féliciter. Et je
vous ai gardé pour la fin. Je l'ai fait amplement avec ma collègue tantôt, mais
je voulais... Je ne vous avais pas oublié. Donc, un petit peu dans
l'introduction, un petit peu dans la conclusion. Donc, merci beaucoup. C'était
un plaisir de travailler avec vous.
Je vais prendre un moment, comme c'est la
conclusion, pour souligner qu'on peut être nationaliste, autonomiste, défendre les intérêts du Québec face
à Ottawa et dénoncer les empiètements sur nos champs de compétence sans
nécessairement militer pour la séparation ou un référendum. Je l'expliquais
tantôt, M. le Président, ce n'est pas...
c'est une... je pense que c'est une divergence de vision sur la façon
d'atteindre des objectifs qui peuvent être... qui sont communs, quand je
parle de l'intérêt du Québec et l'intérêt des Québécois. Et, sur ça, nous
croyons que notre façon de faire, au moment
où on se parle, elle est la meilleure pour faire avancer le Québec. Pour
preuve, je pense qu'il faut que je mette l'accent sur deux volets
importants : les gains qu'on a faits face au gouvernement fédéral et la
francophonie.
Nos gains face à Ottawa sont nombreux. On peut
vouloir les ramener à de simples ententes administratives, mais moi, je refuse
qu'on fasse ça, parce que chaque gain qu'on fait, chaque somme d'argent qu'on
va chercher, quand on le fait, surtout, sans condition, comme on l'a fait en
matière de garderies, à titre d'exemple, puis je pourrais vous donner d'autres
exemples... Chaque fois qu'on se tient debout devant le gouvernement fédéral,
qui ne manque pas d'imagination, je dirais, et de créativité pour inventer des
nouveaux programmes qui empiètent dans nos champs de compétence, pour
travailler sur des fonds ciblés... Puis, je le dis souvent, si le gouvernement
fédéral veut faire de la politique provinciale, bien, il y a une élection en
octobre 2022. Ils peuvent se présenter comme candidats. Mais ce sont nos
champs de compétence, et ils ont leurs propres champs de compétence. Et on l'a
dénoncé cette semaine. Je pense qu'ils devraient s'occuper de leurs champs de
compétence.
C'est quoi, leurs champs de compétences? Entre
autres, on parle, hein, des événements malheureux que l'on voit. On a vu au
Texas aussi. Bon, ce n'est pas au Québec, mais il se passe des choses
troublantes également au Québec quand on parle du contrôle des armes à feu. Puis
je pense que c'est le temps que le gouvernement fédéral arrête de se mêler de
nos affaires et s'occupe des siennes. Et c'est fort criant qu'il s'occupe du
contrôle des armes à feu à la frontière et qu'il bannisse les armes de poing au
Québec... pas au Québec, sur tout le territoire canadien.
Ceci étant dit, on fait des gains puis on va
continuer à se tenir debout. On va continuer d'avoir une voix forte face à Ottawa. On va continuer à ne pas prendre
«non» pour une fin... pour la dernière réponse possible. On va continuer
à répéter nos demandes. Il y a des ententes qu'on a obtenues, à titre
d'exemple, après un an et demi, deux ans de négociations,
trois ans, même, des fois, de négociations. Et, si on avait pris «non» comme
première réponse, on aurait accepté des
transferts avec des conditions, des redditions de comptes, des intrusions dans
nos champs de compétence, et on aurait donné, ce que je mentionnais au
début, des petits bouts de notre jardin. Et il ne faut pas donner des petits
bouts de notre jardin. Il faut se battre pour un transfert, pour obtenir notre
juste part des fonds, dans le respect de nos compétences, avec la pleine
capacité, pleine autonomie d'intervention, comme nous pensons devoir le faire,
comme nous savons, comme peuple québécois, comme État, savoir le faire. Et
c'est ça qu'on va continuer de revendiquer.
Entre autres, je regarde à plus haut niveau, le
fait qu'on s'est opposés de façon très forte... Et ça, c'est un gain qu'on a eu
plus rapidement. Il faut se réjouir quand c'est plus rapide puis il faut être
patients quand c'est plus long, mais il faut continuer à revendiquer. Quand je
parle du projet de loi C-14, celui qui a été déposé pour fixer le seuil
minimal de députés par lequel une province habilitée à être représentée... en
se basant sur la composition actuelle de la Chambre, la 43e législature,
bien, ce gain-là, là, ne vous leurrez pas, il n'a pas été obtenu juste parce
qu'on s'est contentés de ne rien faire, non, parce qu'on l'a dénoncé. On s'est
tenus debout. J'ai interpelé mon collègue à Ottawa. J'ai fait valoir notre
point encore, encore et encore, et ce projet de loi là a été déposé. Je pense
que c'est un gain. Des fois, c'est plus rapide, des fois, c'est moins rapide,
mais il faut le noter.
Notre approche a permis de conclure plusieurs
ententes d'importance pour les Québécois. Je les ai nommées tantôt puis je n'en
ferai pas la nomenclature, je pense que je les ai dites, mais elles sont
importantes. Et je refuse de les réduire à la simple entente administrative,
parce qu'à l'intérieur de ces ententes-là, le diable étant dans les détails...
Ce n'est pas le fait de conclure une entente... oui, mais c'est le fait de la
conclure en s'assurant que la compétence, l'autonomie... les compétences, la
pleine autonomie du Québec, à l'intérieur de ses champs de compétence, soient
respectées. Puis c'est pour ça que, des fois, ça prend du temps.
Les gens nous interpellent, nous disent :
Bien, voyons, pourquoi vous ne prenez pas l'argent du fédéral? On a besoin de
construire des logements, on a besoin de construire des hôpitaux, on a besoin
d'améliorer nos CHSLD. À ça je réponds : Oui, mais ça vient avec tellement
de conditions qu'à chaque fois qu'on dit oui à une telle entente on laisse
aller un bout du Québec. Et jamais, jamais on ne va accepter ça, M. le
Président. Et, si ça prend un an, si ça prend deux ans, si ça prend trois ans
avant de recevoir notre juste part, on va se tenir debout. Mais, au final,
quand on va la recevoir, et pas «si», mais, «quand» on va recevoir notre juste
part, on va s'être assurés que l'autonomie du Québec et ses compétences ont été
respectées.
Maintenant, je vais parler de francophonie parce
que c'est, encore une fois, une pierre angulaire de la fierté du Québec, et il
faut le mentionner. C'est une responsabilité historique du Québec. C'est un
devoir de solidarité. C'est un leadership rassembleur d'avoir mis sur la table
cette politique, mais non seulement d'avoir fait une politique pour une
francophonie forte, unie et engagée, mais de l'avoir fait avec l'ensemble des
communautés francophones du Canada, qui se sont ralliées avec nous autour de
cette politique-là. Le Québec n'a pas fait une politique seul, dans sa tour
d'ivoire, en disant : Moi, je parle français, je vis en français, je me
lève le matin en français, je vais travailler en français, ça fait que je sais
c'est quoi, moi, la défense du français. Ce n'est pas ce qu'on a fait. On a
tendu la main aux francophonies qui nous
entourent, à nos compatriotes francophones, et on a travaillé avec eux. Et
cette politique-là n'est pas seulement la politique du Québec, c'est la
politique d'une francophonie forte, unie et engagée, pour laquelle on a investi
plus de 8 millions de dollars sur trois ans. Et c'est important.
Il y a l'influence qu'on a eue sur la révision
de la loi sur la langue française... les langues officielles. On n'a peut-être
pas eu tout ce qu'on voulait, mais on a eu une influence certaine, M. le
Président, parce qu'on s'est tenus debout. Et ça, c'est extrêmement important.
Et mon collègue parlait de... qu'on est à genoux
devant le fédéral, qu'on ne s'affirme pas. Bien, d'inscrire dans la Constitution du Canada que le Québec est
une nation, ce n'est pas se tenir à genoux, ce n'est pas quémander, ce
n'est pas attendre après le fédéral, c'est s'affirmer. Et qu'est-ce qui est
arrivé par la suite? Bien, le fédéral a emboîté le pas et a acquiescé. Mais, au
départ, on l'a fait en s'affirmant. Donc, il y a des fois où on doit discuter
et il y a des fois où on doit s'affirmer, et, cette fois-là, on s'est affirmés.
Et c'est un gain qui est réel, qui est tangible, et c'est un gain qui va
influencer, qui va colorer, qui va... j'allais dire «shaper», ce n'est pas le
bon, je parle de francophonie, là, de former, de venir structurer toutes les
relations que nous aurons prochainement et qu'on continuera d'avoir dans les
prochaines années avec le fédéral.
Et, je le répète, on ne s'arrêtera pas au
premier non. On va continuer. On a fait des gains, on est en train d'en
négocier d'autres, et on va en faire d'autres, et on va continuer d'en faire.
Peu importe le temps que ça prendra, M. le Président, on va être là pour le
Québec.
• (11 h 50) •
Le Président (M.
Bachand) : ...Mme la députée de Joliette,
s'il vous plaît.
Mme Véronique Hivon
Mme Hivon : Oui. Merci, M. le
Président. Alors, écoutez, j'ai entendu peu de réponses à mes questions,
malheureusement. J'ai entendu beaucoup d'éléments qui réjouissent... qui
réjouissent ce gouvernement. Grand bien leur fasse de se réjouir de si peu. De
mon côté, je trouve ça assez triste et consternant si eux sont dans cette
voie-là, de se réjouir.
Et
j'ai fait une petite liste des éléments qui ont ponctué leurs interventions,
donc, la question de la reconnaissance de la nation québécoise dans la
Constitution. Je veux juste partir de ce qui était dans le fameux document, là.
C'est la même chose que comme pour les juges de la Cour suprême. Il y avait un
modèle, c'est arrivé là. Ce n'est pas du tout la même chose. C'était : «Modification
constitutionnelle multilatérale nécessitant un accord constitutionnel avec le gouvernement du Canada», un minimum de sept provinces sur
10, 50 %, vous savez, la règle du sept, 50 %. Là, on est passés
à : On va le mettre de manière unilatérale dans la constitution interne du
Québec.
Et là on a une
ministre qui nous dit : Eh! ça va être formidable, ça va complètement
restructurer nos rapports avec le Canada. Ça les restructure tellement, M. le
Président, qu'on n'est pas capables d'avoir aucun gain, que les transferts en
santé se font toujours attendre. Mais, pire, ça les restructure tellement,
cette modification unilatérale à la constitution interne, que, pour nous
montrer tout leur respect à l'égard de la nation québécoise, qu'est-ce qu'on a
su cette semaine? Que le gouvernement fédéral va contester la loi n° 21 sur la laïcité et qu'il va contester la loi n° 96 sur la langue française. C'est formidable, comment ça
a restructuré nos rapports et le respect que le Canada témoigne à l'égard de la
nation québécoise. Nos lois, adoptées souverainement dans nos champs de
compétence, le fédéral va les contester. Et là on a un gouvernement qui nous
dit : Eh! mais c'est formidable, la nation québécoise a fait son entrée
dans la Constitution canadienne. Nuance : dans la constitution interne du
Québec. Et on a un exemple flagrant que le gouvernement fédéral s'en
contrebalance.
De quoi nous ont
parlé nos collègues pour montrer comment c'est formidable, le fédéralisme? De
garderies. Quand je parlais d'être défensifs des garderies... On a notre propre
programme, on est les leaders mondiaux avec nos CPE, et là, quoi, on se réjouit
parce qu'alors qu'on est les précurseurs, alors qu'on a influencé le monde...
mais là, le Canada, on se réjouit parce qu'on nous donne de l'argent, parce
qu'on a déjà notre programme, sans condition? Bien, j'espère bien. J'espère
bien.
On nous parle
d'Internet haute vitesse. Je ne sais pas si c'est ça qui restructure notre
relation Québec-Canada, mais j'espère qu'on a un petit peu plus d'ambition pour
l'avenir des Québécois.
On nous parle de
transferts en santé. La ministre nous dit : C'est ma grande priorité, les
transferts en santé. Elle nous énumère comment ça n'a pas de bon sens en se
plaçant, encore une fois, en spectatrice, comme les Québécois qui trouvent que
ça n'a pas de bon sens qu'on n'ait pas notre juste part en santé. Oui, mais
c'est eux qui sont au gouvernement. C'est
eux qui devraient assumer cette responsabilité, ce leadership-là, et mener à
des résultats. Elle nous dit : C'est ma priorité. Aïe! Toute une
priorité. Après quatre ans, il n'y a pas un iota de transfert qui s'est
concrétisé. Elle dit : Ce n'est pas instantané, il ne faut pas demander
que ce soit instantané. Je pense que c'est l'euphémisme du jour, M. le
Président. Ça fait quatre ans que c'est leur priorité. C'est dans les lettres,
c'est dans les revendications, c'était dans le document. Le résultat, c'est
zéro.
Donc, c'est de ça
qu'on nous parle aujourd'hui quand on veut nous faire croire que ce
gouvernement-là, pragmatique, qui amène une nouvelle voie, change, change
complètement l'avenir de la relation Québec-Canada. Moi, je vous soumettrai, M. le Président, qu'ils font une démonstration
éclatante que la troisième voie, que l'autonomisme, que le nationalisme
fédéraliste, il ne mène nulle part.
Mais ce qui est
grave... Qu'eux croient là-dedans, qu'ils croient que d'être juste sur la
défensive, de réussir à sauver un siège à la Chambre des communes, de freiner
un recul, c'est ça, les avancées pour le Québec, c'est ça, être ambitieux pour
le Québec, grand bien leur fasse. Mais qu'ils veuillent bercer les Québécois de
cette illusion-là, de leur faire croire qu'ils vont, pour eux, obtenir des
gains, ça, c'est grave, parce qu'on doit la transparence. On doit la vérité. On
doit avoir un sens des responsabilités face aux Québécois. On doit lutter
contre le cynisme. Et de ne pas donner l'heure juste aux Québécois et de faire
miroiter que tout pourrait être transformé, alors que les résultats, après
quatre ans, c'est un gros zéro, ce n'est qu'un gouvernement qui essaie de
survivre, de freiner les empiètements, de freiner les reculs. C'est le
contraire de l'ambition. C'est le contraire de ce que les Québécois méritent.
Et tantôt, vous
savez, on nous dit : Nous, on n'est pas fédéralistes, on n'est pas
souverainistes. Bien, je veux juste dire qu'aux dernières nouvelles tu
appartiens à un pays ou tu souhaites ne plus appartenir à ce pays-là. Le
gouvernement de la CAQ, lui, souhaite appartenir au Canada. C'est ce qu'on
appelle être fédéraliste, être Canadien. C'est tout à fait leur choix. Mais on
ne peut pas laisser entendre, avec, en plus, zéro résultat, que ça, c'est des
notions qui sont dépassées.
Et,
vous savez, tantôt, on disait : Nous, l'approche qu'on veut — la
ministre me parlait de son approche — c'est
une approche dans le fédéralisme. Mais ce qui est très triste de cette
approche-là, c'est qu'elle ne dépend pas des Québécois,
elle se met à la merci d'un autre peuple, d'une autre nation. Elle se met à la
merci de demander, de quémander et d'espérer, de supplier, comme le
premier ministre l'a fait cette semaine : S'il vous plaît, ne contestez
pas. C'est ça qu'offre la CAQ aux Québécois.
Bien, nous, M. le
Président, on a une approche qui est différente, et, oui, on l'assume
pleinement. Puis vous savez quoi? Même si ça
fait 19 ans qu'il y a eu uniquement 18 mois de gouvernement
souverainiste au Québec, bon an mal
an, quand il y a un sondage, il y a toujours entre 33 % et 35 % des
Québécois qui se disent toujours indépendantistes. C'est une idée forte.
C'est une approche forte. Pourquoi? Parce qu'elle ne dépend que des Québécois.
Ce n'est pas une approche pour la survivance. Ce n'est pas une approche de
résignation. Ce n'est pas une approche d'abandon de ce que nous sommes et de
tout ce qu'on pourrait être comme Québécois. C'est une approche courageuse.
C'est une approche qui dit : Nous, on a assez confiance dans les Québécois
pour penser que, oui, ils méritent de pouvoir aller au bout d'eux-mêmes, oui,
ils méritent, à leur tour, d'avoir confiance en eux, assez confiance en eux
pour se dire oui, pour arrêter le recul, pour arrêter le déclin, pour arrêter
cette idée qu'on va juste se battre pour préserver ce qu'on a. Non. On devrait
se déployer pleinement.
Et vous savez quoi?
D'envoyer le message au monde entier et de faire entendre la voix singulière du
Québec francophone, avec son accent bien à lui, dans le monde entier, ce serait
une richesse incroyable, pas juste pour les Québécois mais pour le monde
entier. On parle de biodiversité. On parle de diversité culturelle. Bien, moi,
je crois assez dans le Québec pour penser que la voix du Québec, elle mérite de
résonner partout, et que la culture du Québec, elle doit aussi avoir sa pleine
place, pas en chuchotant sur un strapontin à l'UNESCO, où on espérerait pouvoir
être entendus, non, de sa propre voix.
Et ce que j'espère, c'est
qu'avec ce projet-là, qui, oui, est toujours porté et auquel les Québécois sont
très attachés... On voyait même, il y a quelques jours, un autre sondage,
40 % des Québécois qui se disaient toujours indépendantistes. C'est quand
même un exploit quand on veut nous faire croire que c'est une idée qui est
morte puis qui est dépassée. Malgré qu'il
n'y a pas de gouvernement souverainiste au Québec, on est encore à ce niveau de
force là. Et on serait capables de dire aux
Québécois : Non, c'est dépassé. Voyons donc! Depuis quand qu'être
soi-même, pour une personne ou une nation, c'est dépassé, d'offrir aux
Québécois de pouvoir vivre pleinement selon leurs priorités, selon leurs particularités, et de faire résonner
cette différence-là partout dans le monde, ce serait dépassé, de pouvoir
dire à tous ceux qui veulent venir vivre ici
que, oui, on va les accueillir avec cette langue française qui est notre socle
commun?
Mais surtout est-ce qu'il y a plus beau projet
que de dire à tous ceux et celles qui sont ici, nouveaux arrivants comme
anciens arrivés, plus jeunes, plus vieux, gens des villes, gens des campagnes,
gens des régions, gens de la métropole, qu'on va travailler ensemble? Ça va
être notre nouveau point de rencontre, ce projet, ce nouveau pays du Québec
qu'on va tous forger ensemble, qu'on va tous bâtir ensemble. Moi, c'est ça,
l'ambition que je nous souhaite. Moi, c'est ça, l'ambition que je souhaite
voir... les gouvernements québécois avoir pour leur peuple, parce que, non, je
ne me résignerai jamais à me réjouir de pouvoir freiner le déclin. Je ne me
résignai jamais à pouvoir abandonner des choses qui sont fondamentales pour notre
avenir collectif, et c'est ce que j'aurais aimé voir aujourd'hui. Merci, M. le
Président.
Le Président (M.
Bachand) : Merci beaucoup, Mme la députée.
Compte tenu de l'heure, je lève la séance, et la
commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux au
mardi 31 mai, à 10 heures, où elle va poursuivre un autre
mandat. Merci.
(Fin de la séance à 12 heures)