(Quinze heures quinze minutes)
Le Président (M. Benjamin) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte.
La commission est réunie afin de poursuivre
l'étude détaillée du projet de loi n° 92, Loi visant la création d'un
tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et de violence conjugale et
portant sur la formation des juges en ces matières.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire :
M. Martel (Nicolet-Bécancour) est remplacé par Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac); M. Rousselle (Vimont) est remplacé par Mme Melançon
(Verdun); et M. Zanetti (Jean-Lesage) est remplacé par Mme Labrie
(Sherbrooke).
Étude détaillée (suite)
Le Président (M. Benjamin) :
Merci. Lors de l'ajournement de nos travaux jeudi dernier, la députée de Verdun
a fait part à la commission de sa volonté de présenter un sous-amendement à l'amendement
du ministre à l'article 3. Mme la députée, je vous cède la parole.
Mme Melançon : Merci, M. le
Président. Alors, oui, tel qu'annoncé jeudi dernier, je voudrais déposer un sous-amendement
pour le paragraphe 6°. Est-ce que vous souhaitez que je lise l'amendement,
M. le Président?
Le Président (M. Benjamin) :
Alors, comme on ne l'a pas encore reçu, donc nous allons devoir suspendre afin
de nous le faire parvenir.
Nous suspendons les travaux.
(Suspension de la séance à 15 h 16)
(Reprise à 15 h 19)
Le Président (M. Benjamin) :
Alors, nous reprenons nos travaux. L'amendement est maintenant sur Greffier. Est-ce que, membres de la commission...
est-ce que vous souhaitez avoir du temps pour pouvoir lire l'amendement
ou, du moins...
M. Jolin-Barrette : ...à la
députée à lire son amendement.
Le Président (M. Benjamin) :
Allez-y, Mme la députée de Verdun.
• (15 h 20) •
Mme Melançon : Merci, M. le
Président. Alors, le ministre... donc, le remplacement du sixième paragraphe du
deuxième aliéna par celui-ci :
«6° le ministre est responsable de s'assurer que
les ministères et organismes concernés offrent de la formation continue, de
base et spécialisée, sur les réalités relatives à la violence sexuelle et à la
violence conjugale aux personnes susceptibles d'intervenir au tribunal
spécialisé, notamment les avocats de la défense, les procureurs, les greffiers,
les enquêteurs, les policiers, le personnel de la cour, les interprètes et les
intervenants psychosociaux.»
M. le Président, je dépose ce sous-amendement à
la suite d'une discussion que nous avons eue à l'article 3, justement. Puisque
le ministre, tout au long de ce projet de loi, nomme les juges... Et là on a pu
voir, dans les articles précédents, que nous
étions, bien sûr, avec «toute personne qui se porte candidate à la
fonction de juge doit s'engager à suivre, si elle est nommée, le programme
de perfectionnement...» Donc, on a nommé les juges. On a nommé, bien entendu...
Et on n'a pas terminé, là, parce que ça va se poursuivre aux articles suivants
où on peut parler de juges... Pardonnez-moi,
je ne suis pas dans mon bon cahier, juste revenir derrière, si vous me le
permettez. Mais on a différents juges, donc, de différentes cours, et on
les nomme ici, dans le projet de loi.
Dans l'article 3, ce que nous sommes en
train d'identifier, c'est que le ministre va être responsable, donc, d'offrir des formations en continu. Là, on est
très, très large, hein : «...aux personnes susceptibles d'intervenir au
tribunal spécialisé.» Nous, ce que nous
demandons, et nous avions identifié à l'intérieur du rapport Rebâtir la
confiance, justement, les groupes qui devront, bien sûr, recevoir
une formation adéquate pour pouvoir assurer le suivi avec les victimes. Vous savez, M. le Président, on sort de la période de
questions puis on vient de parler, justement, d'une pénurie de main-d'oeuvre. On parle d'identifier actuellement
les gens qui vont pouvoir accompagner du mieux possible les victimes,
parce que c'est de victimes dont il est question ici, donc, de pouvoir
accompagner les victimes dans le processus qui sera entamé, mais sans jamais
les nommer. C'est ce qu'on nous propose actuellement dans le projet de loi.
Pas plus tard qu'hier, M. le Président, j'étais
avec le Centre des femmes de Verdun, et ça m'a conforté, la rencontre que j'ai
eue hier avec elles, parce qu'elles m'ont demandé, justement, de continuer le
travail que nous faisons actuellement sur le projet de loi n° 92 en me
mentionnant qu'on doit identifier qui sont les personnes qui seront dûment
formées pour accompagner les victimes. C'est important qu'on puisse le faire
parce qu'actuellement est-ce qu'on parle des avocats? Le ministre nous a
répondu la semaine dernière : Bien sûr, le Barreau est en train de
regarder, d'analyser. Bien, qu'on les nomme, qu'on nomme les choses, qu'on
nomme les personnes. Et, dans le projet de loi, actuellement, on est très
flous. On est très pointus quant aux juges, mais très flous quant aux autres
personnes qui peuvent, bien sûr, suivre de la formation, suivre de la formation
continue, suivre de la spécialisation aussi, parce qu'on a fait la part des
choses entre une formation plus générale et une spécialisation.
Alors, voilà pourquoi j'amène ce sous-amendement
à ce moment-ci. De les nommer, c'est aussi de rendre responsables ceux et
celles qui vont accompagner, donc, les victimes à la cour. Et, pour moi, c'est
important que ces personnes-là puissent savoir qu'elles sont dûment identifiées
pour suivre une formation. Difficile d'offrir une formation quand on ne sait
pas à qui l'offrir, et c'est le ministre de la Justice qui sera responsable de
cette partie-là, d'assurer justement qu'on puisse offrir une formation continue
de base et spécialisée.
Donc, je crois qu'à ce moment-ci on peut nommer
ces groupes-là, nommer les personnes qui seront, donc, là pour accompagner les
victimes, mais, plus encore, rendre ces gens-là directement, je vais le dire
comme ça, là... mais responsables, à savoir qu'ils vont devoir suivre une
formation. Si, par exemple, je suis greffier à la cour et qu'on ne me dit pas, en tout cas, ce n'est pas nommé nulle
part, là, que moi, je vais devoir suivre une formation, difficile de
savoir : Ah oui! Je vais avoir une formation, il en a été question. Tel
que c'est nommé, actuellement, dans le projet de loi, je trouve qu'on est loin, malheureusement, d'identifier clairement... Je pense que, pour le bien, bien sûr, des
victimes, on doit identifier qui sont ceux et celles qui sont
susceptibles d'intervenir au tribunal spécialisé, donc, avec les victimes.
Et, voilà,
pour moi, en tout cas, il me semble que c'est clair, puis avec le «notamment»...
parce que le ministre nous a servi, la semaine passée, la réponse, à
nous dire : Bien, on ne va pas commencer ici à identifier... parce que,
dans 10 ans, peut-être que ça ne sera plus le cas, peut-être qu'il va y
avoir de nouveaux intervenants. Bien, c'est pour ça qu'on utilise le «notamment.»
Le choix des mots — vous
êtes mieux placé que quiconque, vous qui connaissez très bien la belle langue française — d'utiliser un mot comme «notamment»,
à ce moment-ci, nous permet d'ouvrir une porte, nous permet d'additionner, bien sûr, des groupes qui pourraient
être susceptibles, donc, d'intervenir au tribunal spécialisé. Donc,
voilà le but de ce sous-amendement. Je pense que c'est important. Je le répète
ici, on avait nommé, à l'intérieur du rapport Rebâtir la confiance, des
groupes. Je crois que, dans le projet de loi, qui faisait fi de tous les autres
groupes...
Puis, je tiens à vous dire, M. le Président, la
semaine dernière, le ministre nous a prêté des intentions très, très fortes à
moi, la collègue de Sherbrooke ainsi qu'à la députée de Joliette en nous disant
même que nous avions menti. Moi, je veux juste vous dire qu'on a travaillé. On
a travaillé pour rebâtir la confiance. On a travaillé sur ce rapport important,
et ce qui était dit avec les membres experts, ce qui était dit avec, bien sûr,
nos deux coprésidentes, c'était qu'on était rendus à l'étape où il faut nommer
les choses, et, moi, ce que je souhaite, c'est qu'on puisse ici nommer les
choses comme il se doit, parce que ce projet de loi là, je veux juste vous
rappeler, M. le Président, que ça fait 14 heures, un peu plus de
14 heures, là, qu'on l'étudie. On a fait avancer, grâce, notamment, à la
banquette des oppositions, avec un préambule, avec un nouvel article, avec des
objectifs à l'intérieur, parce qu'au départ...
Et je crois que c'est le député de Saint-Jean
qui nous a rappelé au tout départ — bonjour, M. le député de
Saint-Jean — que
le ministre avait déposé en liasse ses amendements. Je veux juste vous dire
que, s'il y a eu des amendements, c'est qu'il y avait du travail qui n'avait,
au départ, pas été fait. Le ministre a écouté, tant mieux. Il s'est... On a été
capable de bonifier grâce au préambule, grâce aux objectifs qu'on avait été en
mesure d'introduire.
Mais là ce projet de loi là ne répond plus
uniquement, tel que le ministre de la Justice le voulait, à la formation des
juges. À cause des objectifs que nous nous sommes fixés à l'article 0.1,
je pense qu'on doit parler de la formation des groupes, et j'ai vraiment
l'impression qu'en ne les nommant pas... On nommait justement de
responsabiliser certains groupes, puis on a même posé des questions, à un
moment donné, au ministre, puis ce n'était pas clair, là. D'accord, est-ce que
les avocats de la défense, eux... Bien oui, mais... Moi, je... On a besoin de
savoir qui sont ceux qui seront visés, et, dans le projet de loi, actuellement,
bien, ce n'est pas identifié. Alors, je demande simplement qu'on puisse
identifier ces groupes. Voilà, M. le Président.
Le Président (M. Benjamin) :
Merci, Mme la députée de Verdun. Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon : ...si
le ministre a quelque chose à dire après cette plaidoirie éloquente de ma
collègue.
Le Président (M. Benjamin) :
M. le ministre, est-ce que vous souhaitez intervenir à ce stade-ci?
• (15 h 30) •
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, M. le Président, on a eu la discussion la semaine passée
déjà, puis j'ai déjà énoncé pourquoi je n'étais pas favorable à mettre le
«notamment» puis à nommer tous les acteurs, parce que, l'article, il est déjà
large et il couvre les différents intervenants présents et à venir aussi, parce
que, dans le cadre des tribunaux, il risquera probablement d'y avoir d'autre
personnel. Et ce que je trouve particulier, M. le Président, c'est qu'on vient redire :
Dans le projet de loi, ah! à la base, vous visiez les juges, puis là il y avait
un manque relativement aux
autres membres du personnel. Et ça, j'ai eu l'occasion de le dire, M. le
Président, les juges, il y a des considérations particulières en raison du statut des juges, M. le Président, qui ne relève pas nécessairement de l'État. Alors... Bien, en fait, ils relèvent de l'État, mais il y a des
considérations particulières relativement à leur type de formation, qui est
fait par le Conseil de la
magistrature, en fonction de la séparation des pouvoirs. Donc, c'est pour ça
qu'on est venus les viser directement.
Mais, pour le reste
du personnel, le gouvernement, l'État peut très bien le faire. Et là j'ai une responsabilité
sur moi, notamment à l'article 6, on l'a modifié suite à la suggestion de la
députée de Joliette, le paragraphe 6°, pardon : «le ministre est
responsable de s'assurer...» Alors, on est venus modifier le tout.
Alors, je conçois le
souhait de la députée de Verdun. Cependant, je n'y donnerai pas suite pour tous
les éléments que j'ai énoncés à la précédente séance, que je vais verser dans
le cadre de cette séance-ci également, M. le Président. Mais, je peux la
rassurer, l'ensemble des intervenants qui sont susceptibles d'intervenir au
tribunal se verront... on va s'assurer qu'ils aient une formation.
Le Président
(M. Benjamin) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon :
Merci, M. le Président. Je pense que la collègue de Verdun a été très claire,
elle a bien exposé les raisons pour lesquelles, de ce côté-ci, ça nous apparaît
incontournable. Puis on ne fait pas une bataille sur ce point-là juste pour
faire une bataille sur ce point-là, là. C'est parce que, quand on vient
inscrire dans la loi que les intervenants vont devoir avoir une formation,
c'est quelque chose qui est au coeur de la réalité du tribunal spécialisé, tellement
au coeur de la réalité du tribunal spécialisé d'avoir des gens formés, des
acteurs formés, que le ministre a plusieurs articles dans son projet de loi sur
la formation des juges, qui ne constituent évidemment qu'un des blocs des
acteurs qui vont être interpelés par le tribunal spécialisé. Alors, c'est très,
très difficile à comprendre pourquoi on ne nommerait pas, au moins à un endroit
dans le projet de loi, qui sont ces autres acteurs essentiels qui sont au coeur
de l'institution qu'on est en train de mettre en place, soit le tribunal
spécialisé.
C'est
d'autant plus incompréhensible que le rapport Rebâtir la confiance, il parle en
long et en large de chacun de ces acteurs-là. Le rôle des procureurs,
des avocats de la défense, des policiers, on dit à quel point c'est au coeur
des éléments qui doivent être améliorés pour
rebâtir la confiance. Donc, c'est comme si c'est le coeur de la réalité
d'avoir une division spécialisée, d'avoir un tribunal spécialisé, d'avoir des
acteurs qui soient spécialisés, formés, puis là le ministre nous dit : Non, mais, moi, ça, je ne peux pas écrire ça
dans le projet de loi. Je peux l'écrire pour les juges, mais les autres,
là, on va juste mettre une catégorie générale d'intervenants susceptibles
d'intervenir au tribunal spécialisé.
Moi, je pense que,
quand on fait une loi, surtout quand elle découle d'un rapport, de gros travaux
avec des experts, où ces éléments-là étaient
au centre même de l'idée du tribunal spécialisé, il faut les nommer dans la
loi. Puis je comprends que le ministre dit : Oui, mais je ne
voudrais pas en échapper. Mais on fait ça tout le temps, dans des lois, mettre
des «notamment». Pourquoi? Parce que ça permet à la fois de faire une
énumération qui est éclairante pour le lecteur,
puis pour ceux et celles qui vont devoir interpréter la loi, puis pour ceux et
celles qui vont devoir mettre en place le tribunal spécialisé, puis pour ceux et celles qui vont faire le suivi du
rapport Rebâtir la confiance. Puis, en même temps, on se protège parce que, oui, les choses peuvent
ne pas être figées dans le temps, puis on met un «notamment». On voit ça
constamment. On voit ça dans plein de lois au Québec, que le ministre,
lui-même, a adopté quand il était dans l'opposition. Je veux dire, c'est
quelque chose qui n'est pas du tout inacceptable. Au contraire, ça vient
simplifier la rédaction.
Ça fait que c'est sûr
que moi, je trouve que c'est une faille énorme de dire : On travaille sur
le tribunal spécialisé, mais on ne vous nomme même pas c'est qui, les acteurs
qui sont au coeur du tribunal spécialisé. Ils ne sont pas nommés là. Ils ne
sont pas nommés ailleurs, là. Pour la question, donc, de la formation, ils ne
le sont pas, ils ne le sont pas ailleurs. Ce n'est pas comme si le ministre
pouvait dire : Ah! bien, on va référer à tel endroit, je vais faire un
renvoi à tel endroit. C'est évident, ça découle de ça. Non, on ne les nomme
pas. Puis là il se donne une responsabilité, puis on ne nomme toujours pas qui
va être responsable de recevoir une formation.
Alors, je trouve que
c'est vraiment une faille. Je trouve que c'est quelque chose qui va nuire à la compréhension. C'est quelque chose qui ne va pas dans le sens de ce qui est recommandé dans le rapport.
C'est quelque chose qui va complexifier les choses sur le terrain parce
que... J'ai hâte de voir comment ça va se débattre ensuite partout pour
dire : Ah! mais ça, ça comprend-tu telle catégorie, telle catégorie
d'avocats, telle catégorie de policiers, quelle... telle catégorie
d'intervenants judiciaires, quelle catégorie d'intervenants psychosociaux?
Donc, il me semble
que la moindre des choses, c'est de le mettre, puis de le mettre général, puis
de dire : Oui, c'est les avocats de la
défense, c'est les procureurs, c'est les enquêteurs. Donc, on le spécifie. Ça
donne une... ça donne vraiment vie à ce que c'est, le tribunal
spécialisé.
Donc, je demanderais
vraiment au ministre de reconsidérer, parce que l'argument qu'il nous fait,
c'est large puis... Si je mets «notamment», je ne veux pas... Si je
l'énumère, je ne veux pas le restreindre. Bien, nous, on dit : On ne le
retreint pas en mettant un «notamment», on vient juste le préciser,
l'expliciter puis montrer c'est quoi, l'essence même du tribunal.
Le Président
(M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Joliette. M. le
ministre.
M. Jolin-Barrette :
Oui. Je vais vous demander une courte suspension, M. le Président.
Le Président
(M. Benjamin) : Nous suspendons les travaux.
(Suspension de la séance à 15 h 36)
(Reprise à 16 h 07)
Le Président (M. Benjamin) :
Alors, nous allons reprendre nos travaux. À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, je
comprends qu'il y a une intervention au sujet du sous-amendement, donc, de la
députée de Verdun.
M. Jolin-Barrette : Alors, on
est prêts à l'adopter, M. le Président.
Le Président (M. Benjamin) :
Alors, est-ce que le sous-amendement à l'amendement amendé de l'article 3
est adopté? Adopté. M. le ministre, allez-y.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, suite à une discussion avec les collègues hors micro, nous allons
convenir de suspendre l'article 3, l'amendement de l'article 3, pour
aller faire l'article sur les projets pilotes à l'article 11, le tout
étant convenu entre les collègues qu'il n'y aura pas d'autre sous-amendement
sur l'article 3, à l'exception du paragraphe 2° de l'alinéa deux
de l'amendement de l'article 3, qui se lit ainsi :
«Le ministre de la Justice peut toutefois, par
arrêté, déterminer les districts judiciaires dans lesquels le tribunal est
graduellement établi et conséquemment où la Division spécialisée en matière de
violence sexuelle et de violence [...] peut siéger;». Donc, les collègues des
oppositions se réservent le droit de sous-amender cet article-là, mais c'est le
seul paragraphe que les collègues entendent amender, et on a leur engagement
là-dessus. C'est bien ça?
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Donc, pour
le procès-verbal, on a entendu «tout à fait», M. le Président.
Mme Hivon : Hors
micro, il y a eu une seule petite nuance, à moins que le ministre nous sorte un
lapin de son chapeau, dans les prochaines heures, qui touche cet amendement.
Le Président (M. Benjamin) :
Alors, pour le procès-verbal aussi, je dois vous demander : Est-ce qu'il y
a consentement pour suspendre l'étude de l'amendement amendé présenté par le
ministre à l'article 3 ainsi que l'article 3?
Consentement. Est-ce qu'il y a... Je comprends aussi... Le ministre nous a
annoncé l'intention d'entreprendre l'étude
de l'article 11. Est-ce qu'il y a consentement pour entreprendre l'étude
de l'article 11? Consentement. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Juste pour
être clair, M. le Président, je ne sais pas comment faire apparaître un lapin
de mon chapeau. Alors...
Une voix : ...
Le Président (M. Benjamin) :
Allez-y, la parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Ah!
j'apprends des choses, M. le Président, j'apprends des choses. Alors, avec
votre permission, M. le Président, je déposerais un amendement, pour remplacer
l'article 11, qui résume les discussions que nous avons eues en lien avec
les consultations et en lien avec les commentaires des collègues par rapport
aux discussions que nous avons eues depuis le début de la commission. Alors,
il... et je crois envoyer, par le biais des airs... et se retrouve-t-il sur
Greffier?
Le Président (M. Benjamin) :
Ah! c'est une nouvelle version.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Le Président (M. Benjamin) :
Alors donc, nous allons devoir, M. le ministre, suspendre quelques instants, le
temps de vous confirmer la réception de la nouvelle version.
(Suspension de la séance à 16 h 10)
(Reprise à 16 h 14)
Le Président (M. Benjamin) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. L'article 11
a bel et bien été déposé sur Greffier. M. le ministre, donc, on vous donne la
parole.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, donc, le nouvel amendement. Alors, remplacer l'article 11 du
projet de loi par le suivant :
«11. Le ministre de la Justice [doit], par
règlement, mettre en oeuvre un projet pilote visant à établir un tribunal
spécialisé afin de réserver un cheminement particulier aux poursuites qui
impliquent un contexte de violence sexuelle ou de violence conjugale, et ce,
dès le contact d'une personne victime avec un service de police.
«Dans le cadre de ce
projet pilote :
1° le ministre peut, par règlement, établir, au
sein de la chambre criminelle et pénale de la Cour du Québec, une division
appelée "Division spécialisée en matière de violence sexuelle et de
violence conjugale" qui entend toute poursuite qui implique un contexte de
violence sexuelle ou de violence conjugale;
«2° le règlement prévu au paragraphe 1° peut
cependant déterminer quels types de poursuites sont entendues par cette
division spécialisée lesquels peuvent varier en fonction de toute distinction
jugée utile, notamment en fonction des districts judiciaires;
«3° le
ministre peut, par arrêté, déterminer les districts judiciaires dans lesquels
la division spécialisée peut siéger;
«4° le
Directeur des poursuites criminelles et pénales doit identifier, à la lumière
des faits et des circonstances d'un dossier,
si l'infraction criminelle alléguée implique un contexte de violence sexuelle
ou de violence conjugale et, le cas échéant et sous réserve du règlement
prévu aux paragraphes 1° et 2°, soumettre le dossier à la division spécialisée;
«5° le ministre offre aux personnes victimes des
services intégrés et adaptés à leurs besoins lesquels doivent inclure des mesures d'accompagnement, l'aménagement des lieux physiques afin qu'ils soient sécuritaires et
sécurisants et la coordination des dossiers;
«6° le ministre privilégie le traitement par un
même procureur de toutes les étapes d'une poursuite;
«7° le ministre est responsable de s'assurer que
les ministères et organismes concernés offrent de la formation continue, de base et spécialisée, sur les réalités relatives à
la violence sexuelle et à la violence conjugale aux personnes
susceptibles d'intervenir au tribunal spécialisé, notamment les avocats de la
défense, les procureurs, les greffiers, les enquêteurs, les policiers, le
personnel de la cour, les interprètes et les intervenants [sociaux];
«8° le ministre doit préparer l'établissement du
tribunal spécialisé permanent visé à l'article 83.0.1 de la Loi sur les
tribunaux judiciaires (chapitre T-16).»
Donc, essentiellement, M. le Président, la
distinction entre le projet d'amendement que j'avais soumis à mes collègues au
début de la commission... ce sont les modifications qu'on est venus insérer
suite à l'étude... aux travaux de l'étude
détaillée. Donc, vous aurez noté, le paragraphe 8° répond à une demande de la députée de
Sherbrooke, que, durant les projets pilotes, je dois
préparer l'établissement du tribunal spécialisé permanent visé à l'article 83.0.1.
Donc, pendant les projets pilotes, je travaille sur le permanent.
Ensuite, on est venu ajouter également les
discussions qu'on a eues dans le premier alinéa, et ce, dès le contact d'une
personne victime avec un service de police, suite aux discussions que nous
avons eues, pour établir le cheminement à partir de quand est-ce que le
tribunal spécialisé débute. Ça fait que, dans le projet pilote, c'est le miroir
du tribunal permanent, donc, dès le contact d'une personne victime avec un
service de police.
Ensuite, on
est venu ajouter au paragraphe 5° également ce qu'on a rajouté dans l'article 3,
donc, «l'aménagement des lieux physiques afin qu'ils soient sécuritaires
et sécurisants et la coordination des dossiers».
Ensuite, à 7°, on est venu modifier, en lien
avec les discussions qu'on a eues sur la formation... donc : «Le ministre
est responsable de s'assurer que les ministères et organismes concernés offrent
de la formation continue, de base et
spécialisée, sur les réalités relatives à la violence sexuelle et à la violence
conjugale aux personnes susceptibles d'intervenir au tribunal
spécialisé, notamment les avocats de la défense, les procureurs, les greffiers,
les enquêteurs, les policiers, le personnel de la cour, les interprètes et les
intervenants psychosociaux.»
Puis, 8°, comme je l'ai dit, alors, on est venu
répliquer les dispositions miroir du tribunal permanent aux projets pilotes.
Le Président (M. Benjamin) :
Merci. Est-ce que j'ai... Est-ce qu'il y a des interventions sur l'article 11?
Mme la députée de Verdun.
Mme Melançon : Là, M. le
Président, juste pour m'assurer de la bonne démarche encore une fois, parce
qu'on est allé de différentes façons, là, depuis le début de l'étude... Alors, à
ce moment-ci, pour l'article 11, comment souhaitez-vous que nous puissions
procéder? Est-ce qu'on y va par paragraphe? Est-ce qu'on y va par alinéa? Juste
pour que ce soit clair.
M. Jolin-Barrette : C'est un amendement,
donc 20 minutes sur l'ensemble.
Mme Melançon : Total? Parfait.
Alors, on peut... J'imagine qu'on peut débuter, M. le Président, par là où on
veut, parce que, dans le fond, ici, on est dans le coeur aussi des discussions
que nous avons eues avec les différents groupes lorsqu'on était... donc,
lorsque les groupes sont venus se faire entendre. Et, lorsqu'on parlait du projet
pilote, à ce moment-là, moi, je le rappelle... d'où l'importance du deuxième paragraphe
du deuxième alinéa de l'article 3. Quand on a parlé du projet pilote avec
les groupes, je pense que, dans la tête de certains, certains y voyaient une
année de projets pilotes, d'autres disaient : Bien, peut-être que ça
prendra un peu plus. On a entendu le ministre, lors de l'étude du présent projet
de loi, dire : Trois ans de projets pilotes. Moi, ce que j'ai envie...
Puis, à ce moment-ci, on n'a pas de... Ce n'est pas arrêté dans le temps. Ma
vraie première question, c'est de savoir... Un projet pilote, d'abord, moi, je
veux savoir, dans la tête du ministre, c'est combien de temps.
• (16 h 20) •
M. Jolin-Barrette : Un projet
pilote... dans le fond, l'horizon dans lequel on compte les faire, c'est dans
un délai de deux ans, maximum trois ans, donc, à partir de l'adoption de la
loi. L'idée est de faire en sorte de permettre d'avoir... Dans le fond, on va
intégrer les poursuites actuelles qu'il y a à l'intérieur du tribunal
spécialisé, mais on veut aussi avoir l'expérience d'une personne victime qui
débute son cheminement avec le tribunal spécialisé, hein, puis
qui mène à terme son expérience. Alors, généralement, ça peut être un processus
qui s'étend plus longtemps, mais c'est un minimum de deux ans, donc, pour avoir
une bonne expérience. Puis le regroupement des CAVACS également nous suggérait
d'avoir un deux ans, également, mais, pour moi, c'est un maximum de trois ans.
Mme Melançon : Et là on entend
le ministre... y aller ainsi, mais il n'y a rien actuellement, ici, qui stipule
deux ans, maximum trois ans. Je pense qu'on
va devoir, à un moment donné, nommer la volonté du ministre, sans
quoi... parce que je comprends, là, que c'est par règlement que le ministre
veut mettre en oeuvre ce projet pilote. C'est de l'habilitation réglementaire
dont il est question ici, et, par règlement, c'est qu'on risque peut-être
d'avoir d'autres surprises, et ce ne pas ce
que nous souhaitons, bien entendu. Puis, je le répète, lorsque les groupes sont
venus ici, M. le Président,
pour se faire entendre, dans la tête de plusieurs...
Puis, je vous le dis, là, hier, j'étais avec le
Centre des femmes de Verdun, où tout le monde avait compris la même chose. Il y
avait un projet pilote, puis, le lendemain du projet pilote, là, qui était
d'une durée... je vais y aller, là, d'une durée de deux ans, parce que
c'est ce qu'on avait entendu en grande fréquence auprès des groupes, bien,
après deux ans, à deux ans et un jour, ce qu'on voyait, c'est que c'était
pour être déployé sur l'ensemble du territoire et dans tous les districts
judiciaires, alors que ce n'est pas tout à fait ce qui est écrit. Je le ramène
au troisième article, au deuxième paragraphe, deuxième alinéa, où c'est dit
que, par arrêté, ça peut être différent.
Donc, bon, le fait que ce soit par règlement, ça
me cause un... bien, pas un souci, mais, en même temps, je me pose certaines
questions. Ce règlement-là, le ministre prévoit le sortir à quel moment après le
projet de loi?
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, il faut que le projet de loi soit adopté pour que je puisse faire le
règlement rapidement. Dans le fond, lorsque les projets pilotes vont être...
vont pouvoir démarrer avec tout le monde, à ce moment-là, on va pouvoir établir
le règlement, puis établir le règlement pour faire en sorte que, dans tel
district, tel district, tel district, on démarre le projet pilote. Dans le
fond, ça prend la concertation des organismes, des acteurs du milieu judiciaire
également.
Ça fait que ce que ça va nous permettre de faire
aussi, c'est de dire : Bon, bien, supposons que le projet de loi était
adopté la semaine prochaine, puis que, dans trois semaines, on est prêts à
démarrer, on va pouvoir démarrer à un endroit x dans ce district-là. Si, après
ça, en début janvier, dans l'autre district, ils sont prêts, bien, on va
pouvoir prendre le règlement pour l'autre
district. Donc, les projets pilotes, on va les faire comme ça. C'est pour ça
qu'on y va par règlement.
L'autre point à votre question, à savoir, bien, ce
n'est pas indiqué, le délai, moi, je vous dis : Tu sais, c'est un délai
minimum de deux ans, parce que, pour tester les différentes étapes, il
faut pouvoir avoir la rétroaction en lien avec les différentes étapes, avec un
certain nombre de victimes aussi, qui auront vécu chacune des étapes dans les
différents districts, maximum trois ans.
Mme Melançon :
J'ai plein de questions qui me viennent en tête. Puis le ministre pardonnera la
méconnaissance du système de justice, mais, en deux ans, combien de victimes
pense-t-il qu'il pourrait justement... on pourrait voir, dans un district
judiciaire, par exemple?
M. Jolin-Barrette : Bien, ça
dépend des districts judiciaires qui sont choisis, mais, tu sais, le délai en
matière de violence sexuelle, c'est 444 jours. Alors, 444 jours,
c'est au moins un an et demi. Ça fait que ça, c'est le délai médian. Ça fait
que tu as la moitié des dossiers qui sont en haut de ça, la moitié qui sont en
bas aussi, mais, tu sais, ceux qui se rendent à procès, bien, c'est plus long
aussi.
Mais l'objectif également des projets pilotes,
du fait que les dossiers vont être sortis du rôle régulier, ça va faire en
sorte également... puis c'est un des objectifs des projets pilotes, de faire en
sorte d'aller plus rapidement puis que... ce qui est demandé également en violence
conjugale, violence sexuelle, puisque ce sont ces dossiers-là qui vont être
traités, l'idée, c'est de raccourcir beaucoup les délais.
Donc, le délai de deux ans, c'est raisonnable
pour évaluer tout comme il faut. Puis, comme je vous disais tantôt, on va
vouloir également insérer les dossiers qui sont actuellement en cour aussi.
Donc, tu sais, supposons que la personne a déjà été arrêtée, là, puis, je ne
sais pas, là, ils sont rendus au troisième pro forma, bien, on va vouloir le
migrer vers le tribunal spécialisé.
Mme Melançon : M. le Président,
j'aimerais savoir... Le ministre entend avoir combien de projets pilotes, du
moins, dans combien de districts judiciaires?
M. Jolin-Barrette : Bien, on
aura des discussions notamment avec la cour, la direction de la cour, mais
nous, on envisage d'avoir environ, je vous dirais, tout dépendant, là... mais
entre cinq et 10. Donc, je vous rappelle qu'il y a 36 districts
judiciaires. Donc, ça signifie qu'il y a environ le tiers des districts, ce qui
signifie que, pendant que ça fonctionne, ça veut dire qu'on va être en moyens
de travailler sur l'ensemble du Québec en même temps. Déjà, dans les
10 districts, supposons, il y a déjà du travail qui va avoir été fait,
puis là il va rester les 20 quelques autres à mettre en place, durant ces deux
années-là, en fonction de l'expérience des différents districts.
Mme Melançon : Et, dans les
districts qui seront retenus, la volonté du ministre, est-ce que c'est de
pouvoir, dans chacun des districts, parler et de violence conjugale et de violence
sexuelle ou pourrait-il choisir un district juste pour de la violence sexuelle
puis un autre district juste pour de la violence conjugale?
M. Jolin-Barrette :
Mon objectif, c'est que les deux soient dans chacun des districts, donc, à la
fois violence sexuelle et à la fois violence conjugale.
Mme Melançon :
Je peux peut-être laisser...
Le Président
(M. Benjamin) : Mme la députée de Sherbrooke.
Mme Labrie :
...va guider le choix du ministre pour les cinq à 10 districts visés par
les projets pilotes?
M. Jolin-Barrette :
Bien, plusieurs choses, des discussions, notamment, avec la Cour du Québec pour
qu'on travaille en collaboration là-dessus. Deuxièmement, dans l'inoubliable
rapport Grenier qui a été déposé, ce qu'on nous recommandait, c'est d'avoir
différentes tailles de palais de justice, d'avoir différents volumes de
dossiers, également d'avoir des caractéristiques régionales particulières,
dont, notamment, des milieux urbains, des milieux ruraux, milieux autochtones
aussi.
Le Président
(M. Benjamin) : Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon :
Bien, si ma collègue veut continuer, elle peut continuer. Je veux dire, si ma collègue
de Sherbrooke veut continuer, je voulais juste signifier que je voulais prendre
la parole après.
Le Président
(M. Benjamin) : D'accord. Mme la députée de Sherbrooke.
Mme Labrie :
Est-ce que c'est possible d'inscrire dans l'article le nombre de districts où
il y aura des projets pilotes et la durée maximale prévue pour les projets
pilotes?
M. Jolin-Barrette :
Sur le nombre de districts, la réponse, c'est non, parce que ça dépend...
Mme Labrie :
Un nombre minimal, disons? Est-ce qu'on peut inscrire un nombre minimal de
districts où il y aurait des projets pilotes et une durée maximale de roulement
des projets pilotes?
M. Jolin-Barrette :
Sur la durée, on peut le faire. Ça, on peut le faire. Sur le nombre de projets
pilotes, ça, par contre, non, parce qu'il faut réussir à discuter avec les intervenants
du milieu, notamment. Ça fait que, dans le fond, ça prend de la concertation.
Ça fait que je ne peux pas... Tu sais, notre objectif, c'est entre cinq et 10,
mais je ne peux pas vous couler ça dans le béton. Tu sais, toute notre
intention, c'est d'y aller, mais...
Mme Labrie :
...par exemple, dans un minimum de cinq districts judiciaires.
M. Jolin-Barrette :
Notre objectif, c'est entre cinq et 10.
• (16 h 30) •
Mme Labrie :
Moi, j'accueille cinq et 10 positivement. Je ne ferai pas une bataille pour
qu'il y ait un minimum plus élevé que cinq. J'entends que l'objectif, c'était
jusqu'à 10. C'est une bonne nouvelle. J'espère que ça va être réalisable d'en
faire 10, parce que ça viendrait presque être entre le quart et le tiers des
districts. Mais je pense que, si, de toute façon, c'est ça, l'objectif du
ministre, dans ses discussions avec les autres partenaires, avec la Cour du
Québec, ce serait vraiment une bonne idée d'inscrire que le projet pilote va
être implanté dans un minimum de cinq districts judiciaires. Ça laisse
quand même énormément de marge de manoeuvre. Ça peut être cinq, six, sept,
huit, neuf, 10, 15, mais il y aura toujours ce minimum-là. C'est, de toute
façon, l'intention du ministre. Ça rassurerait énormément de gens. Puis, au
niveau du délai, donc le maximum de trois ans dont le ministre parlait, il est
prêt à l'inscrire dans l'article? C'est ça?
M. Jolin-Barrette :
Pour un délai de trois ans, je suis prêt à le mettre, un délai maximal de trois
ans.
Mme Labrie :
O.K. Bien, en tout cas, j'imagine qu'on va faire comme on a fait pour d'autres articles,
qu'on va dire toutes les choses qu'on veut voir pour amender l'article. Moi,
c'est deux choses que je veux voir là : je veux voir le minimum de cinq
districts puis je veux voir la durée maximale. Je voudrais voir aussi les
modalités d'évaluation du déroulement des projets pilotes. J'aimerais qu'on puisse
voir, dans l'article du projet de loi, comment on va faire pour assurer le
suivi des projets pilotes : par exemple, que soit formé un comité
réunissant les partenaires pour évaluer le déroulement des projets pilotes tout
au long du processus.
M. Jolin-Barrette :
Oui. Sur la question du suivi des projets pilotes, nous, au MJQ, on va les
suivre, comment ça fonctionne, mais aussi on va avoir recours à des gens qui
vont pouvoir nous dresser un portrait de savoir... qui vont être chargés de
l'évaluer, dans le fond, comment ça fonctionne, qu'est-ce qu'il y a à
améliorer, c'est quoi, le suivi rattaché à ça, là, qu'est-ce qu'il faut ajuster
dans le cadre des expériences qui sont vécues dans le cadre des projets
pilotes.
Mme Labrie :
Ce comité-là, est-ce qu'il va y avoir des victimes? Est-ce qu'il va y avoir des
groupes qui représentent les victimes, qui offrent des services aux victimes?
M. Jolin-Barrette : Bien, ce
n'est pas... L'évaluation, ce n'est pas le... Ce n'est pas un comité qui fait l'évaluation, c'est des personnes qu'on va
désigner pour recueillir, pour faire ce travail-là. Mais il y aura déjà une
table de discussion, une table de suivi avec
les partenaires pour le suivi des... dans
le fond, pour le suivi du tribunal
spécialisé. Donc...
Mme Labrie : On peut
officiellement créer cette table de suivi dans le projet de loi en l'inscrivant
dans cet article-là, sur les projets pilotes, d'ajouter une ligne qui dit que
le ministre crée une table de suivi réunissant les partenaires pour évaluer les
projets pilotes?
M. Jolin-Barrette : Bien, la
table, elle existe déjà. On l'a déjà créée avec les différents partenaires.
Donc, vous avez le groupe de travail qui poursuit ses travaux avec les
différents intervenants qui sont plus, je vous dirais, étatiques, et on a créé également une table de suivi avec les différents
intervenants, les différents groupes, notamment les fédérations
d'hébergement, les CAVAC, les CALACS, donc avec tous les partenaires. Donc, la
table, elle est là, puis ils vont pouvoir nous donner leurs commentaires en
lien avec l'implantation.
Mme Labrie : Donc, puisqu'elle
existe, le ministre me le confirme, est-ce qu'on peut inscrire dans la loi que
le ministre confie l'évaluation ou le suivi du déroulement des projets pilotes
à cette table-là?
M. Jolin-Barrette : Non, parce
que ce n'est pas eux qui vont évaluer. Dans le fond, c'est une table qui est
consultative, qui va permettre de donner leurs commentaires, mais ce n'est pas
une table d'évaluation. Dans le fond, on va pouvoir évaluer...
Mme Labrie : Est-ce qu'on peut
inscrire que le ministre confie à cette table de faire le suivi de
l'implantation des projets pilotes? Parce qu'il n'y a rien, en ce moment, qui
le dit. Moi, j'entends l'intention du ministre, que des gens se penchent sur
l'implantation du projet pilote, mais je pense qu'on peut... qu'on devrait le
formaliser, dans l'article ici, qui va s'en occuper, surtout que la table, elle
existe déjà.
M. Jolin-Barrette : Je vais le
prendre en délibéré.
Mme Labrie : J'aime ça quand le
ministre dit ça, parce qu'il a tellement démontré d'ouverture jusqu'à maintenant.
Quand il a pris des choses en délibéré, il les a incluses dans le projet de loi.
M. Jolin-Barrette : Bon.
Mme Labrie : Ça va pour
l'instant. Je vais laisser...
Le Président (M. Benjamin) :
Merci. Mme la députée de Joliette.
M. Jolin-Barrette : ...à
l'écoute, M. le Président, et que je réponds aux demandes des oppositions.
Mme Labrie : ...à de nombreuses
reprises, y compris en point de presse jeudi.
Une voix : Exact!
Mme Labrie : Le ministre
démontre beaucoup d'ouverture, et on l'apprécie pleinement.
M. Jolin-Barrette : Vous
devriez faire juste des points de presse qui disent ça.
Mme Labrie : Ça me fait plaisir
de le réitérer encore là.
M. Jolin-Barrette : Juste des
points de presse juste qui disent ça, là-dessus, je serais prêt à suspendre la
commission juste pour ça.
Le Président (M. Benjamin) :
Alors, nous poursuivons avec la ministre... la députée de Joliette, pardon.
Mme Hivon :
Oui. Quand le ministre parle d'une période maximale de trois ans, justement,
est-ce que ça comprend la période
d'évaluation, c'est-à-dire que ce n'est pas juste qu'on déploie l'affaire, mais
on a évalué les projets pilotes?
Le Président (M. Benjamin) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors,
l'évaluation se fait en continu des différents projets pilotes. Donc, c'est sûr
que, tu sais, si le projet pilote se termine à trois ans, bien, l'évaluation,
on va l'avoir, tu sais, en... Bien, l'évaluation est intégrée,
ça fait que... Tu sais, nous, notre objectif, là, c'est même de ne pas
nécessairement attendre le trois ans avant de démarrer les projets pilotes à la
grandeur. Ça fait que, tu sais...
Mme Hivon : ...à
la grandeur.
M. Jolin-Barrette : Pardon?
Mme Hivon : Le
projet à la grandeur. C'est ça.
M. Jolin-Barrette : Pardon, le
projet permanent à la grandeur du Québec. Ça fait que l'idée, tu sais, c'est
d'avoir l'évaluation en continu.
Mme Hivon : O.K.
Donc, ce n'est pas un trois ans. Plus, vous comprenez qu'on ne se met pas à
déployer tout de suite après les projets pilotes parce qu'il faut évaluer, voir
ce qui a marché et qui n'a pas marché. Au bout de trois ans, on va avoir nos
données, notre évaluation. L'expertise qui va avoir évalué va être déjà entrée,
donc on va être prêts à déployer.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien,
tu sais, l'objectif, là, ce n'est pas : les projets pilotes, puis là on
s'assoit pendant deux ans, puis là on regarde aller. Dans le fond, c'est :
au fur et à mesure, il y a quelque chose qui ne marche pas, on l'ajuste, on
l'ajuste partout, pour ne pas arriver, tu sais, dire : Il y a eu le projet
pilote pendant deux ans, puis là, bien oui, c'est vrai, ça, ça n'a pas marché,
ou telle autre chose, ça a marché, ou... Ce n'est pas comme... Puis c'est un
processus continu puis c'est un processus avec une rétroaction, là. Tu sais,
dans le fond, on documente ce qui fonctionne mais aussi on va ajuster des
choses. Supposons qu'il y a des éléments dans les projets pilotes qui sont mis
en oeuvre qui ne fonctionnent pas, on n'attendra pas au bout de deux ans pour
l'ajuster. C'est ça, le but, là.
Mme Hivon :
...contente d'entendre ça. Donc, je pense que c'est vraiment la bonne manière
de faire, puis je suis vraiment contente de voir ça. Ça fait que vous allez
être toujours en évolution pour que ce soit optimal comme implantation puis
qu'on s'ajuste aux écueils qu'on rencontre puis aux besoins auxquels on veut
répondre.
M. Jolin-Barrette : Et, d'ailleurs,
ça va avec la proposition qu'on vous fait au paragraphe 8° : «le
ministre doit préparer l'établissement du tribunal spécialisé permanent visé à l'article 83.0.1
de la Loi sur les tribunaux judiciaires». Donc, tout est dans tout.
Mme Hivon : C'est vraiment un bon ajout. Quelle bonification
qui nous permet de voir que tout est dans tout!
M. Jolin-Barrette : Bien,
écoutez, c'était déjà dans mon intention, mais mon objectif, c'est de
satisfaire mes collègues des oppositions. Alors, pour y arriver, M. le
Président, je suis prêt à tout.
Mme Hivon : Et
surtout d'avoir le meilleur projet de loi, parce que...
M. Jolin-Barrette : Bien, moi,
je le trouve très, très bon, le projet de loi. Je comprends que, parfois, on
veut différentes choses.
Mme Hivon : C'est
bon. Ça fait que, ça, est-ce que... si le ministre est prêt à... Moi,
j'aimerais ça, que ce soit spécifié, là, je fais juste le dire, parce qu'il y a
comme deux types de projets pilotes, là, dans la vie : il y a ceux où on
part, on regarde l'affaire aller puis après on évalue, moi, j'aimerais ça, si
le ministre a, donc, l'intention d'inscrire la durée maximale des projets pilotes,
que ça inscrive spécifiquement «y compris l'évaluation en continu» ou comme il
voudra l'écrire.
Ensuite de ça, le ministre parle vraiment, dans
l'article, là, d'un projet pilote. J'imagine qu'évidemment, un projet pilote,
c'est le vocable général, mais qu'il va se déployer en plusieurs projets
pilotes. Donc, ce n'est pas nécessaire d'aller inscrire qu'il va se décliner en
plusieurs projets pilotes. Mais la collègue a fait la suggestion. Moi, je pense
que ce serait vraiment intéressant de le dire aussi, qu'il va y avoir...
C'est parce qu'en fait, comment c'est écrit,
c'est «dans le cadre de ce projet pilote». Le ministre ne dit pas «dans le
cadre des projets pilotes». Donc, à la lecture même, ce n'est pas clair.
M. Jolin-Barrette : L'habilitation
permet d'y aller de deux façons, puis on l'a volontairement écrit de cette
façon-là pour faire en sorte que... dans le fond, je pourrais adopter un règlement
général sur un projet pilote qui couvre les 10 districts, supposons. Supposons
que, sur les projets pilotes, on est tous prêts en même temps, bien, on le met
dans un puis on cadre ça.
L'autre élément, supposons que j'ai des
districts qui ne sont pas prêts en projets pilotes, ça me permet d'adopter,
supposons, 10 règlements différents pour faire en sorte de les partir un à la
suite de l'autre. Tu sais, dans le fond, ça donne cette flexibilité-là. La
façon que c'est libellé, ça me permet d'avoir les deux options.
Mme Hivon : En
écrivant «ce projet pilote». Parce que, c'est ça, je pensais l'inverse.
M. Jolin-Barrette :
Exactement.
Mme Hivon :
Je pensais que c'était écrit «les projets pilotes», qu'il y aurait plus de flexibilité.
• (16 h 40) •
M. Jolin-Barrette :
Non, bien, parce que, dans le fond, ça me permet d'avoir des règlements
distincts. L'habilitation législative me permet, dans le fond... supposons que
j'avais un projet pilote x, dans le fond, puis lui, il est prêt au mois de
décembre, bien, lui, je le pars, puis ça me permet, au mois de janvier,
supposons, d'adopter un autre règlement pour l'autre projet pilote.
Mme Hivon :
J'ai une autre question, mais, si c'est là-dessus, je peux laisser aller ma collègue.
Le Président (M. Benjamin) : J'avais la
députée de Verdun, dans un premier temps. Ensuite, Mme la députée de Sherbrooke.
Mme Melançon :
Merci, M. le Président. C'est indiqué, dans le fond, que le ministre... bien,
qu'il va y avoir des choix, là, qui seront
faits, à savoir... C'est au deuxième paragraphe, troisième alinéa : «le ministre
peut, par arrêté, déterminer les
districts judiciaires dans lesquels la division spécialisée peut siéger». Donc,
ça, ce sera, donc, par règlement. Moi,
j'aimerais savoir comment est-ce
qu'on va faire pour choisir les
districts judiciaires? Comment le ministre va-t-il déterminer dans quels districts
judiciaires il y aura ces projets pilotes?
M. Jolin-Barrette :
Bien, plusieurs éléments. On va s'asseoir, dans un premier temps, avec la
direction de la Cour du Québec pour les différents districts. Ce qu'on souhaite,
notamment, c'est différentes tailles de palais de
justice, différents volumes de dossiers, des caractéristiques régionales, donc
urbain, rural, également un avec présence de communautés autochtones.
Mme Melançon :
Alors, à ce moment-ci, M. le Président, je ne sais pas si je peux faire une
proposition au ministre, mais je crois qu'on devrait peut-être retrouver
certains des éléments qui, bien sûr, seront dans le règlement, mais, quand même,
de mentionner ici, à l'intérieur du projet de loi directement, qu'il y aura, justement,
une volonté de la part du ministre.
Parce que, là, pour
le reste, à partir du moment où on aura adopté l'article 11... on y va un
peu à l'aveugle, parce que les règlements... M. le Président, vous savez, hein,
lorsqu'on parle d'habilitation réglementaire, c'est que nous, on ne revoit pas nécessairement,
comme ça, en commission, chacun des règlements. Moi, je pense que, si on était
capable d'aller un peu plus loin pour définir quelle est la volonté, justement,
du ministre, qu'on puisse avoir tant du rural que de l'urbain, et de savoir qu'on
veut avoir le nombre de dossiers, puis comme ça, bien, ça va...
Parce que, là, on est
en train de parler, je vais y aller avec le fond de ma pensée, là, on est en
train de parler du judiciaire, puis je ne voudrais pas qu'on puisse politiser
le judiciaire. Mais non, mais c'est très vrai. À ce moment-ci, on va déterminer par règlement, puis ça, c'est le ministre qui le
fera, dans quel district judiciaire il va y avoir des tribunaux
spécialisés. Moi, je pense que ça nous prend quand même l'indication du côté du
ministre de nous dire : Bien, oui, on
veut avoir et de l'urbain et du semi-urbain puis on veut avoir des endroits où
il va y avoir plus de dossiers.
Moi, je veux savoir
qu'est-ce qu'a le ministre derrière la tête quant au choix des districts
judiciaires. Parce que c'est immense, quand même, qu'on puisse introduire
ici... Puis on en parle depuis le début, là, de la division des pouvoirs entre
l'exécutif, le législatif puis le juridique. Mais là on s'en va quand même sur
une voie où c'est : «le ministre peut, par arrêté — c'est
ce qu'il est indiqué, là — déterminer
les districts judiciaires dans lesquels la division spécialisée peut siéger».
Moi, j'ai besoin de connaître, dans le fond, qu'est-ce qui va déterminer le
choix de ces districts-là. Et tel que mentionné, là, au deuxième paragraphe,
troisième alinéa, on ne sait pas qu'est-ce qui va, dans le fond, diriger le
choix du ministre.
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, je vous l'ai déjà dit, c'est les critères qui sont prévus au
groupe de travail, qui ont été énoncés par le groupe de travail. Donc,
l'important, dans le cadre des projets pilotes, c'est notamment les différents
districts, la taille, la grosseur, présence de communautés autochtones,
disponibilité du personnel, que les gens
soient formés... tu sais, il faut déjà développer tout ça puis il faut
travailler aussi avec les organismes locaux aussi. Ça fait qu'il y a
certains endroits qui vont être prêts à partir beaucoup plus rapidement, ça
fait qu'on va identifier ces différents districts-là.
Mais je comprends
votre suggestion, mais, dans le cadre de la Loi sur les tribunaux judiciaires,
ce n'est pas l'endroit pour indiquer tous les types de critères qui doivent
être rencontrés, parce que ça prend une certaine flexibilité aussi pour faire
en sorte que ça se fasse aussi. Donc, comme je vous le dis, on va concerter
tout le monde pour les démarrer puis pour les mettre en place.
Mme Melançon :
Donc, M. le Président, je comprends que des critères comme ceux-là... Est-ce
qu'on a d'autres exemples de choix de districts judiciaires comme ça, quand on
veut faire des projets pilotes, ou ça reste tout simplement à... Dans le fond,
là, ce sera le choix du ministre, là.
M. Jolin-Barrette :
Mais, exemple, généralement, quand on fait les PAJSM, les programmes de justice
en santé mentale, généralement, c'est le milieu qui est prêt à les faire. Donc
là, à ce moment-là, le MJQ donne suite à la demande, fournit les ressources,
tout ça.
Là, on se retrouve dans
une situation où il faut avoir une discussion notamment avec la cour pour que
ça fonctionne et faire en sorte aussi que, dans certains districts, on puisse
l'implanter, puis que les organismes soient disponibles, puis qu'il y ait une
concertation aussi.
Mme Melançon : Ça m'amène à une
autre question, puis je vais y revenir parce que j'ai quelques petites
vérifications à faire. Concernant les projets pilotes, là, le ministre vient de
me dire, dans le fond, qu'il y a des endroits où les projets pilotes vont être
prêts avant d'autres, puis on le sait, puis on a entendu des groupes, là, qui
nous disaient : Bien, nous autres, on est déjà concertés, puis on est
prêts à partir dans notre région. Puis je pense que le ministre les connaît,
ces régions-là qui veulent lever la main pour recevoir rapidement un projet
pilote. Prenons l'exemple où on a
cinq projets pilotes. Si mon cinquième projet pilote démarre à la fin de
l'année 2022, mon trois ans m'amène à la fin de 2025?
M. Jolin-Barrette : Non, c'est
de la sanction de la loi. Donc, exemple, la loi est sanctionnée vendredi cette
semaine, supposons. C'est une situation hypothétique et fictive. Supposons que
c'est vendredi cette semaine — il n'en appartient qu'à vous — vendredi
cette semaine. Donc, vendredi, c'est quoi, c'est le 12 novembre? Ça fait
que 12 novembre 2024. Donc, vous voyez, moi, la pression que j'ai de
pouvoir organiser tout rapidement. Donc, le délai, c'est trois ans à
partir de la sanction.
Mme Melançon : Trois ans à
partir de la sanction. Donc, il y a des projets pilotes qui pourraient être
d'une durée beaucoup plus courte. Parce que, si j'ai un projet pilote qui démarre...
Parce que vous l'avez dit vous-même, là, il y a des projets pilotes qui vont
pouvoir... qui pourraient démarrer aux fêtes, puis il y en a d'autres qui ne
seront pas nécessairement prêts, mais qui
vont démarrer peut-être en juin ou peut-être en septembre 2022.
C'est possible, ça?
M. Jolin-Barrette : Donc, ça
donne un minimum de deux ans.
Mme Melançon : Donc, ça leur
donne environ deux ans, en effet.
M. Jolin-Barrette : Donc, comme
je vous ai dit tantôt, l'objectif, c'est que ça soit minimum deux ans pour bien
l'évaluer, pour bien, tu sais, voir toutes les différentes étapes. Ça fait que
c'est ça, l'objectif. Mais, tu sais, du fait que ça rentre en vigueur à la
sanction de la loi, tu sais, supposons un délai de trois ans, puis là je
comprends que vous souhaitez avoir un délai écrit dans la loi...
Mme Melançon : Oui.
M. Jolin-Barrette : ...donc, ça
aussi, on le prend en délibéré. Donc, ça va permettre, un, de, nous, nous
mettre une pression, ce que vous souhaitez aussi, j'imagine, et que ça procède
rapidement, qu'on aille de l'avant.
Mme Melançon : Donc... je continue juste... parce que
je veux juste être sûre de bien, bien, bien comprendre, là, ça veut dire
que, si on a un minimum de deux ans, c'est ce qu'on dit, là, pour voir...
M. Jolin-Barrette : ...c'est un
minimum de deux ans pour voir les différentes étapes.
Mme Melançon : ...donc ça veut
dire qu'un projet pilote ne pourrait pas démarrer... Parce que, si tu as le
cinquième, là, projet pilote... là on cherche, on cherche un district
judiciaire, là, puis qu'on arrive l'année prochaine à pareille date puis que je
ne l'ai pas, mon cinquième, il ne pourra démarrer après l'année de sanction, si
on veut atteindre le maximum de trois ans. C'est ce que je comprends?
M. Jolin-Barrette : Votre
enjeu, c'est si, supposons, il n'était pas démarré vendredi le 12 novembre
2022.
Mme Melançon : Ou le 20 ou le
26...
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Mme Melançon : ...pour l'année
suivante. Oui, tout à fait.
M. Jolin-Barrette : Oui. Mais, dans le fond, il y aurait un
plus petit délai. Mais, ce que je veux dire, vu... il y aurait un plus
petit délai associé à l'expérience pilote, mais, si ça fonctionne, il n'y a
rien qui va nous empêcher de le permanentiser, là, tu sais, parce que l'objectif,
c'est de permanentiser le tout. Tout est fait pour aller rapidement, pour les
mettre en place rapidement avec des pilotes rapidement, mais qu'au bout de
trois ans on s'en va vers les projets permanents.
Donc, vous avez déjà votre garantie que le projet
pilote, c'est trois ans max. Mais il n'y a rien qui empêche que, dans la
dernière année, en 2024, si tout est prêt, puis on dit : O.K., on est
prêts à partir, c'est permanent.
• (16 h 50) •
Mme Melançon : Je vais
laisser...
Le Président
(M. Benjamin) : J'ai la députée de Sherbrooke, ensuite... suivie
de la députée de Joliette.
Mme Labrie : Oui. Quand ma
collègue de Joliette a posé une question au ministre, ça m'a... la réponse du ministre
m'a amené une autre question. Dans le fond, le ministre veut se donner la possibilité
de démarrer les 10 projets pilotes séparément. Est-ce qu'il a l'intention
de tester différents modèles dans chacun des projets pilotes ou il veut tester
le même type de modèle dans l'ensemble des districts dans lesquels il va y
avoir des projets pilotes?
M. Jolin-Barrette : Bien, dans
le fond... Et, oui, c'est le même modèle. Tu sais, nous, on veut avoir VC...
Sur le fond, c'est le même modèle, VC, VS, violence sexuelle, violence
conjugale. Dans certains districts, il y a certaines particularités de...
notamment relativement aux infractions criminelles qui y sont traitées, plus de
types de dossier. Je donnais l'exemple, dans un certain district, où il y a
plus de cas d'inceste. Ça fait que, nécessairement, les organismes qui vont
collaborer, ils vont avoir une particularité régionale associée à ça. Ça fait
qu'on va... bien sûr qu'on va prendre la réalité terrain pour ajuster. Puis, à
la lumière de l'expérience qu'il va y avoir, supposons, de développer dans ce
district-là, supposons, sur cette infraction-là de cas d'inceste, on va pouvoir
incorporer dans le tribunal permanent, ou même en cours de route, de
dire : Aïe! Ça, cette façon-là de fonctionner pour les personnes victimes,
ça fonctionne bien, on devrait l'étendre à la grandeur des projets pilotes, à
la grandeur du Québec aussi.
Ça fait que est-ce que c'est un cadre
imperméable? La réponse, c'est non. Tu sais, dans le fond, c'est, justement,
l'objectif du projet pilote de dire quelles sont des pratiques qu'on peut
incorporer qui vont bénéficier à la grandeur, puis qu'est-ce qui ne fonctionne
pas, puis qu'est-ce qu'on peut ajuster aussi. Ça fait que c'est ça.
Mme Labrie : ...si le ministre
choisit un des deux scénarios qui était de les démarrer plusieurs en même
temps, il va y avoir une... ça ne sera pas nécessairement uniforme dans les
projets pilotes. Il va y avoir une certaine forme de souplesse, puis ils vont
pouvoir aussi prendre des cheminements différents selon l'évolution du projet
pilote qui est appliqué dans chacun des districts. Ils vont pouvoir tester des
choses différentes, chacune de leur côté.
M. Jolin-Barrette : Vous avez
tout à fait raison. Parce que, dans chacun des districts, ce n'est pas le même
type de clientèle, ce n'est pas le même type fonctionnement, supposons, ce
n'est pas le même volume aussi. Ça fait que,
tu sais... Puis c'est pour ça... les grands districts, plus petits, composantes
autochtones, ce n'est pas du mur-à-mur. Donc, c'est la flexibilité que
ça amène pour avoir les meilleures pratiques.
Mme Labrie : Merci.
Le Président (M. Benjamin) :
Merci. Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon : Moi,
je pense que le ministre nous les nomme clairement, là, les critères. Vu qu'on
ne verra pas le règlement puis que c'est comme central au démarrage du projet,
puis tout ça, il me semble que ce serait intéressant de voir les catégories,
c'est-à-dire les éléments : la taille, le volume, tu sais, la taille du
district, le volume... ce qui va le guider dans le choix des districts. Je
pense que ça le protège et ça protège tout le monde, parce que ça se peut qu'il
ait du monde, puis pas mal de monde qui soit déçu de ne pas faire partie des projets
pilotes. Et donc d'expliquer c'est quoi, le processus qui va mener au choix des
projets pilotes, premier élément, je pense que ce serait un plus de le voir
dans la loi.
L'autre élément, c'est que le ministre lui-même
l'a dit, qu'évidemment il ne fera pas ça tout seul, il va faire ça en
concertation avec la Cour du Québec. On se rappelle que Mme Corte et
Mmes Desrosiers ont soulevé ça de manière générale, dans le cadre de ce
qu'on a discuté à l'article 3, l'enjeu qu'elles voyaient comme
potentiellement une atteinte à l'indépendance institutionnelle du fait que le ministre
choisissait les districts, parce que, selon leur argument, ça pouvait amener à
forcer la cour, dans le fond, dans l'assignation des juges. Puis là le ministre
nous explique : Bien, je ne suis pas en train de dire que c'est
l'assignation des juges parce que c'est juste des districts. Je ne veux pas
qu'on fasse tout le débat constitutionnel ici, je veux juste qu'on prenne acte
que c'est un argument qui nous a été soumis.
Puis, pour essayer toujours de diminuer les
irritants, est-ce qu'on ne pourrait pas écrire noir sur blanc que «le ministre
va faire ça en concertation avec la Cour du Québec» ou minimalement «après
avoir consulté la Cour du Québec»? Donc, tout le monde saurait que ce choix-là,
des projets pilotes, des districts, ça va vraiment se faire de manière
concertée. Ça fait que je pense qu'on s'enlève un double irritant, à la fois
sur l'indépendance institutionnelle et sur le fait que chacun pourrait
travailler en silo. On me dit que ça s'est déjà vu, que ça soit écrit.
M. Jolin-Barrette : Bien, je vais faire un commentaire puis ensuite je vais répondre à la question. Je veux être très, très
clair : les parlementaires... le législateur à l'Assemblée nationale a toute la légitimité d'organiser les
tribunaux de la façon dont le législateur le
souhaite. C'est une compétence constitutionnelle de l'administration de la justice qui est confiée
au gouvernement du Québec, à l'Assemblée
nationale. O.K.? Il y a
eu beaucoup de choses qui ont été dites, beaucoup de choses à tort et à travers, beaucoup
de choses, beaucoup de choses. J'ai peu fait de commentaires, O.K., relativement
à tout ça, parce que moi, je souhaite que, profondément, le tribunal spécialisé
voie le jour puis que ça fonctionne. Ça fait que ça, c'est mon souhait puis
c'est mon désir. Ça amène à trouver des voies de passage, des voies de
solution.
Alors, votre suggestion,
je vais y penser, donc je vais la prendre en délibéré, mais je tiens à réitérer
fondamentalement que, dans notre démocratie, ça prend un équilibre. Tous les
gens ici, autour de la table, là, ils ont un mandat
électif des citoyens du Québec. Puis de la façon que ça fonctionne dans notre démocratie,
c'est qu'il y a du monde élu qui font des lois. Il y en a certains qui se
retrouvent au pouvoir exécutif et qui tirent leur légitimité démocratique de
leur élection. On voulait juste ramener ça pour... toute chose étant égale, par
ailleurs, puis bien cerner le débat sur l'important travail que nous faisons
actuellement.
Mais, sur votre
suggestion, donc je comprends que c'est après consultation, je vais y penser,
puis je vais le prendre en délibéré, puis je vais vous revenir.
Mme Hivon :
J'ai bien entendu les propos du ministre de manière générale. Ceci dit, le
ministre lui-même a dit, évidemment, qu'il s'assoirait avec la Cour du Québec,
là. Je pense qu'on en est tous conscients, que, pour que le démarrage des projets pilotes puisse se faire
correctement, ça va prendre une concertation, puis dans le choix des
districts aussi. Puis le ministre le disait
tantôt, par exemple, avec le PAJ-SM, tout ça, souvent, c'est des initiatives
qui viennent de districts qui sont
prêts, et donc de la cour soutenue par le ministère. Donc là, on a un processus
qui peut être différent.
M. Jolin-Barrette :
...une spécification sur mes propos ici. La consultation, ça peut être une
bonne chose, mais, quand vous consultez, ça doit être bilatéral, hein, les
différentes initiatives. Alors, vous avez bien beau mettre une obligation, dans la loi, de consultation, il
faut que tous les partenaires soient conscients de l'importance de
travailler ensemble. Et, lorsqu'il y a des travaux à faire dans le système de
justice, il faut que l'ensemble des partenaires se consultent réciproquement,
d'une façon synallagmatique, comme on apprenait.
• (17 heures) •
Mme Hivon :
Mais j'entends bien tout ce que le ministre dit. Je pense que tout le monde
veut que ça marche. Puis, je veux dire, dans
le passé, j'amenais l'exemple des PAJ-SM, qui est un programme, donc, en santé
mentale. C'est venu d'initiatives de la cour. Donc, je veux dire, il y
en a eu, des initiatives pour des... une justice adaptée. Comme je le dis
souvent, on l'adapte selon les caractéristiques de la personne qui est accusée.
Parce que souvent, on est à la limite de la
réalité judiciaire et la réalité, je dirais, psychosociale. Donc, on le voit en
itinérance, on le voit en toxicomanie puis on le voit en santé mentale.
Alors, moi, j'ai bon
espoir qu'on peut voir ce même genre de synergies là émaner évidemment pour le
tribunal spécialisé. Ça fait que je pense que ce serait un plus de parler de
concertation ou de consultation. Je pense, concertation, c'est encore mieux.
Mais je vous laisse voir ce qu'il en est.
Et je pense même
qu'on pourrait envisager quelque chose qui dirait comme «le ministre peut, par
arrêté et de manière concertée», je le dis juste pour dire ce que j'ai en tête,
«déterminer, de manière concertée, avec la Cour du Québec ou avec les autorités
de la Cour du Québec, déterminer les districts judiciaires dans lesquels la
division spécialisée peut siéger. Dans le choix des districts, il sera guidé
par», tac, tac, tac, donc la taille, le volume, la diversité des territoires.
Ça fait que je dis ça comme ça. Je pense qu'on pourrait inclure ça dans le 3°.
L'autre chose que je
voulais savoir, c'est... Je vais juste attendre. C'est parce que j'ai une
question technique. Donc, l'autre chose que je voulais savoir, c'est :
Quand le ministre dit, mettons, cinq à 10 projets pilotes dans cinq à
10 districts, est-ce que... Mettons qu'il dit : Le district... est-ce
que c'est palais de justice qu'il veut dire ou c'est district judiciaire? Tu
sais, palais de justice, c'est les centres et points de service. Parce que, des
fois, dans un district, ça peut être différent. Ou c'est, dans son esprit, le
district au complet, un palais de justice?
M. Jolin-Barrette :
...judiciaire.
Mme Hivon :
C'est le district. Donc, est-ce que ça peut être... mettons qu'il y a plus
qu'un point de service dans le district.
M. Jolin-Barrette :
Bien, dans le fond, ça pourrait s'appliquer dans plus qu'un palais dans le
district mais ça va être le même projet pilote.
Mme Hivon :
Ça serait un seul?
M. Jolin-Barrette :
Oui.
Mme Hivon :
C'est ça. Puis est-ce qu'automatiquement, s'il y a plus qu'un point de service
dans le district, tous embarqueraient dans le projet pilote? Ou ça peut être
une entité dans le district?
M. Jolin-Barrette : Non, pas nécessairement, parce que ça dépend, tu
sais, des palais dans le district judiciaire, est-ce que... Parce que ça demande, dans le fond, différentes ressources
associées. Ça fait que, tu sais, ce qu'on veut faire, c'est entre cinq
et 10 districts judiciaires comme projet pilote. Mais ça ne veut pas dire
que dans le district, tous les palais vont
avoir cet outil-là. Puis dans les faits, dans les faits, ça arrive bien souvent
que, s'il y a plusieurs palais, il y a certains
types de poursuites qui sont dirigés vers un palais précis. Tu sais, c'est ce
que je veux dire, ce n'est pas... Il y a des palais qui roulent une journée par semaine, là, dans certains
districts, puis il y a des palais qui n'entendent rien pantoute... bien,
qui entendent peu de choses. Tu sais, le palais, il est là, mais ils entendent
très, très peu de choses, notamment pas de dossier en matière criminelle et
pénale. Ça fait que, tu sais, ça ne veut pas dire, parce que vous avez deux,
trois palais dans un district...
Mme Hivon :
Que ça va être partout, puis que c'est le même volume, puis que c'est les mêmes
dossiers, on se comprend.
L'autre question, c'est la Division ACCES. Donc,
on a une division ACCES, à la Cour du Québec qui est déjà en train d'être mise
sur pied avec...
Le ministre fera ses commentaires, j'expose mon
point de vue. Donc, moi, je me fie à ce qui est écrit dans le mémoire de la
Cour du Québec. On nous parle d'une division ACCES, on met les trois éléments
qui la constituent, donc une concertation, une spécialisation, bon, tout ça. Et
cette Division ACCES là, elle se déploie progressivement sur l'ensemble du
territoire. C'est ce qui est écrit dans le...
C'est parce que, là... pour les gens qui ne
voient pas, là, c'est parce que le ministre fait toutes sortes de signes. Donc,
il pourra exposer, là, les commentaires qu'il a à dire par rapport à ça. Mais
moi, je me fie... évidemment, on se fie à ce qu'on a dans le mémoire, donc, qui
est explicite, qui dit qu'une division ACCES est mise sur pied avec tels, tels,
tels éléments et qu'elle va se déployer progressivement sur l'ensemble du
territoire.
Donc, je veux juste savoir comment le ministre
voit la cohabitation des projets pilotes. J'imagine que les projets pilotes, de toute façon, ils vont partir
de ce qui est déjà embryonnaire dans la Division ACCES, là, parce qu'il
y a beaucoup de choses qui se rejoignent dans tout ça. Mais je voudrais juste
qu'il nous explique comment tout ça va cohabiter, projets pilotes, dans
certains districts, avec un suivi, puis la Division ACCES qui va se déployer.
M. Jolin-Barrette : Bien, dans
le fond, partout au Québec, à la grandeur du Québec, au bout des projets
pilotes, ça va être la Division spécialisée en matière de violence sexuelle et
de violence conjugale. Ça, c'est clair, c'est ce que la loi va prévoir. Bon,
actuellement, la Division ACCES, elle n'est pas déployée. Je vous réitère qu'on
a annoncé notre intention d'aller de l'avant avec un tribunal spécialisé il y a
fort, fort, fort longtemps, et la cour le sait il y a fort, fort, fort
longtemps aussi. Donc...
Mme Hivon : Fort, fort, fort longtemps, il faut quand même...
On a déposé le rapport en décembre dernier, donc...
M. Jolin-Barrette : Je
comprends, mais moi, je peux vous dire que j'avais l'impression que le rapport
du groupe de travail, parce que j'étais à l'écoute depuis quelques années, que
cette idée de tribunal spécialisé allait voir le jour probablement. Alors,
comme ministre, je n'ai pas attendu que le rapport soit déposé, déjà pour
sensibiliser les différents acteurs à dire : Peut-être devrions-nous
regarder ce modèle-là qui est notamment proposé, et qui a été véhiculé, vous
l'avez bien dit vous-même, par la députée de Joliette, il y a plus de deux,
trois ans de ça. C'est une idée intéressante, et j'ai toujours dit que c'était
une idée intéressante. Partant de là, comme ministre de la Justice, déjà il y a
plus d'un an, j'ai sensibilisé les différents acteurs à peut-être devrions-nous
regarder la possibilité de mettre en place un tribunal spécialisé. Il y a plus
d'un an de cela.
Le rapport est arrivé en décembre, et, dès que
le rapport a été déposé, j'ai constitué un groupe de travail pour la mise en
oeuvre d'un tribunal spécialisé. Alors, comme on dit, on ne dormait pas au gaz,
là. La volonté gouvernementale a toujours été que ça se fasse, puis que ça
aille bien.
Alors, pour revenir à votre question, le
19 août, j'annonce mon intention de déposer un projet de loi. Le 10, 11,
12 septembre, dans ces zones-là, je dépose un projet de loi. On apprend
par communiqué, le 28 septembre, 29 septembre,
qu'il y a création d'une division ACCES à la Cour du Québec.
Globalement, là, c'est ça l'historique, là.
Alors, moi, ce que je vous dis, c'est qu'en
réponse précisément à votre question, qu'est-ce qui arrive, là, supposons que
la cour continue de développer sa division, bien, la division, là, en quoi elle
consiste principalement, c'est d'avoir un rôle qui va être sorti, hein, des autres
causes, puis que les dossiers soient traités plus rapidement. Ce qui est une
bonne chose, et je le souligne. Ce qui est une bonne chose. Alors, ça va très
bien cohabiter. Le tribunal spécialisé, ce qu'il vient faire, c'est de
permettre de venir encadrer, enrober, donner les ressources partout, puis
d'ajuster. Mais sur le processus judiciaire comme tel, le fait que la cour
isole les rôles, le fait que les dossiers cheminent plus rapidement, je ne peux
qu'applaudir cette intention-là, et ça aurait dû être fait, comme on dit, il y
a fort, fort, fort longtemps, très longtemps, très, très longtemps, très, très,
très longtemps. Donc, je pense que tout le monde comprend ce que je veux dire.
Mme Hivon : Et ça
ne répond pas... avec égard, ça ne répond pas à ma question sur la
cohabitation.
M. Jolin-Barrette : Bien oui,
ça répond... dans le fond, là...
Mme Hivon : Parce
qu'il y a trois... s'il va voir à la page 10, il y a trois éléments, là.
M. Jolin-Barrette : Dans un
district, là, où le projet pilote va être là, ça va être la division
spécialisée. Si, dans un autre district, il n'y a pas de projet pilote, bien,
la cour pourra organiser ça comme elle veut. Le fait d'avoir un rôle qui est
dédié aux victimes d'agression sexuelle et conjugale, c'est une bonne chose
puis c'est important. Mais ça n'a pas nécessairement besoin d'avoir une
division, là, vous comprenez? Puis, si ça s'appelle Division ACCES, O.K., mais
ça va s'appeler division spécialisée en matière de violence sexuelle et
conjugale après le projet pilote.
Mais je veux juste dire que l'organisation comme
telle, là, dans le fond, des tribunaux, c'est le législateur qui le fait. Mais,
dans le pratico-pratique, là, le fait, là, que ça soit isolé, là, je donne un
exemple, là, à Valleyfield, là, actuellement de la façon qu'ils fonctionnent en
violence conjugale, là, c'est que je pense que, les accusés, c'est le mercredi
ou, les victimes, c'est le mercredi, les accusés, c'est le jeudi. Donc, il y a
déjà des initiatives qui sont faites, là, pour les rôles puis la façon de fonctionner.
Alors, ça, c'est une bonne chose, puis ça doit continuer, puis même
j'encourage à ce que ça se fasse partout au Québec. Déjà, là, et ça, ça relève
du judiciaire, là, le fait que le rôle soit isolé puis que les dossiers
procèdent plus rapidement.
Puis juste revenir sur les commentaires qui ont
été faits. Rien dans le projet de loi n'affecte l'indépendance judiciaire. Ce n'est pas le législateur, ce n'est
pas l'exécutif qui vient assigner l'horaire du juge, ce n'est pas le
législatif, l'exécutif qui vient dire : Tel juge s'assit à telle salle à
tel endroit.
• (17 h 10) •
Mme Hivon :
Est-ce qu'il y a des précédents qu'il y a des projets pilotes en matière
judiciaire ont émané du ministère et non pas de la cour, mettons?
M. Jolin-Barrette : Bien,
premièrement, il faudrait vérifier. Mais je vous dirais que, si ça ne s'est
jamais fait, c'est un problème. Puis je suis bien heureux qu'on le fasse puis
que ça émane du ministère, puis du législateur, puis des collègues des
oppositions. Puis je pense que peut-être que trop longtemps il n'y a pas eu
assez, comment je pourrais dire, d'importance à accorder à l'administration de
la justice pour s'assurer que les citoyens soient satisfaits du système de
justice puis pour que ça fonctionne bien. Je pense que, vous savez, le système
de justice, là, tout le monde l'a dit, puis la collègue de Joliette aussi l'a
dit au fil des années que je l'ai côtoyée, on ne peut pas dire que le système
de justice, c'est l'endroit au monde où on est le plus techno, puis c'est le
plus modernisé, puis qui est arrivé au XXIe siècle, là. On dit souvent,
dans le réseau de la santé, il y avait des fax, je pense qu'il y avait encore
des télex dans le système de justice, là, des fois.
Mme Hivon :
...pas de donnée. C'est ce qui est assez fascinant.
M. Jolin-Barrette : Bien,
exactement. Alors...
Mme Hivon : Mais
on ne fera pas ce débat-là ici, aujourd'hui, parce que...
M. Jolin-Barrette : Alors,
là-dessus, on s'entend.
Mme Hivon : Je
veux avancer.
M. Jolin-Barrette : Il y a beaucoup
d'améliorations à faire dans le système de justice. Je peux vous dire qu'on y
travaille fort. Puis ça, aujourd'hui, ce qu'on fait, ça, c'est une amélioration
puis un changement de culture dans le système de justice, puis je suis heureux
de le faire avec vous.
Mme Hivon : ...plus d'accord avec ça. On est sur la même longueur d'onde sur
la nécessité de cet avancement, que j'ai même qualifié... que nous avons
qualifié de minirévolution. Donc, voilà.
M. Jolin-Barrette : ...isoler
l'extrait et le partager sur mes réseaux sociaux.
Mme Hivon :
Tantôt, la collègue a parlé de la place des victimes dans l'évaluation, dans le
suivi. Donc, je veux juste bien comprendre. Le ministre nous a parlé de son
comité de suivi. Dans le comité de suivi, quelle est la place des victimes?
M. Jolin-Barrette : ...le
comité de suivi, on a invité les différents groupes de victimes à participer au
comité de suivi.
Mme Hivon :
...des CALACS, les CAVAC?
M. Jolin-Barrette : Les CALACS,
les CAVAC, les maisons d'hébergement.
Mme Hivon : O.K.
M. Jolin-Barrette : Le Barreau,
les associations d'avocats de défense aussi.
Mme Hivon :
Association de?
M. Jolin-Barrette : De défense.
Mme Hivon : Oui, O.K.
O.K., moi, ça fait un bon premier tour, M. le Président.
Le Président (M. Benjamin) : Merci,
Mme la députée de Joliette. Mme la députée de Verdun.
Mme Melançon : Merci, M. le
Président. Bien, je vais le répéter, ici, puis depuis le début, j'ai un profond
malaise avec l'idée des projets pilotes, profond malaise, puis je trouve qu'on
n'en a pas beaucoup parlé depuis qu'on a repris. Le
malaise vient du fait que des victimes, qu'elles se situent à Verdun, par
exemple, ou à Sherbrooke, ou à Joliette, et selon le choix du ministre quant
aux districts judiciaires, bien, il est possible que les victimes n'aient pas
le même accompagnement. Et ça, j'ai vraiment un profond malaise avec le projet
pilote, avec l'idée de projet pilote, depuis le départ, à cause de ça. D'ailleurs,
on avait eu cette discussion-là avec les coprésidentes, avec les membres
experts aussi, et c'est pourquoi j'ai des questions, vraiment. Puis je suis
contente que la députée de Joliette l'ait soulevé tout à l'heure, là, parce que
j'étais là, moi aussi, à regarder le document que nous avait envoyé, donc, le
Conseil de la magistrature en lien avec le projet de loi n° 92,
et dans la Division ACCES, je me posais la question : Est-ce que c'est une
façon, justement, de venir... Je ne veux pas dire pallier parce que ce n'est
pas tout à fait exact, mais est-ce que c'est une façon où on peut tout de même
assurer une forme d'accompagnement? Parce qu'entre ne pas avoir
l'accompagnement de base, je dirais ça comme ça, qui est proposé ou d'y aller
avec le projet pilote, moi, je pense qu'il faut vraiment s'assurer qu'il y ait
une collaboration, un travail conjoint. Aussi, bien sûr, pour déterminer si,
par exemple, on fait le choix de cinq projets pilotes dans cinq districts
judiciaires, bien, est-ce qu'on peut s'assurer que... Pendant les trois ans,
est-ce qu'on peut avoir Division ACCES qui vient du moins pallier au manque
qu'il y a actuellement dans le système judiciaire? Ça, c'est une première
question.
Et je pense que ça prend quelque chose parce
que... Puis je le dis, puis ça vient vraiment du fond de mon coeur, là, je ne
peux pas penser qu'il y ait quelqu'un, une victime qui, elle, va dire :
Honnêtement, là — puis
je vais le dire de façon très crue, là, M. le Président, là — tu
sais, j'ai eu la «bad luck» dans le mauvais district judiciaire. Ça ne peut pas
être ça. Ça ne peut pas être ça. Puis on en a entendu des histoires d'horreur.
On a rencontré des victimes aussi. Et le
témoignage qu'elles nous font, avec la difficulté qu'elles vivent actuellement,
je ne peux pas penser que... selon le choix qui aura été fait par le ministre
d'un district ou d'un autre, bien, tu te dis : Bien, honnêtement, là, j'ai
été doublement malchanceuse. De, un, j'ai vécu de la violence conjugale ou de
la violence sexuelle puis en plus je n'étais pas dans le bon district
judiciaire quand ça s'est passé. Ça, ça va très, très loin de ce que j'ai
entendu, puis c'est pourquoi, moi, personnellement j'avais un immense malaise
avec les projets pilotes. Ça, c'est dans un premier temps.
J'entendais le ministre tout à l'heure parler
avec la députée de Joliette puis nous dire : Bien, ça fait longtemps, puis
je savais qu'on était pour avoir le tribunal spécialisé à l'intérieur de Rebâtir
la confiance, à l'intérieur du rapport. Je veux juste dire au ministre que
nous autres, là, on travaillait sur le rapport puis on était même surprises de
voir le tribunal spécialisé retenu par les experts. Donc, le ministre, je le
trouve chanceux de savoir que lui, il savait que ça faisait longtemps qu'on
était pour y travailler, là. On avait fait des propositions, mais on était loin
d'être sûrs que c'était pour être retenu à l'intérieur du rapport Rebâtir la
confiance puis je peux en témoigner, j'ai deux bonnes corroboratrices, là,
à mes côtés. Parce que la journée où ils nous ont dit : Oui, le tribunal
spécialisé sera là, d'abord, je me rappelle du commentaire de la députée de
Joliette et de sa grande joie, cette journée-là, de dire : O.K. Bien, je
ne pensais pas que c'était pour être là, puis ils sont allés loin, puis je suis
heureuse du travail qui a été fait. Ça, c'est dans un premier temps.
Quand le ministre parle de collaboration, puis
je l'entends, là, puis je le sais, là, qu'il y a une problématique avec le...
Je vais terminer, si vous me permettez, M. le ministre. Il y a une
problématique avec le Conseil de la magistrature puis avec la juge en chef.
C'est pour ça que je voulais entendre la juge en chef. Parce qu'il nous
dit : Bien, voici comment ça s'est passé pour la Division ACCES, moi, je
suis bien prête à entendre ce que le ministre nous dit, mais ce n'est pas tout
à fait ce qui est écrit à l'intérieur des écrits du Conseil de la magistrature,
ce n'est pas tout à fait les mêmes dates, ce n'est pas tout à fait comme ça que
ça semble s'être passé. Et, quand on veut parler de collaboration, honnêtement,
tu sais, on voit les flèches, là, qui sont dirigées depuis quand même le début
de l'étude du projet de loi, moi, je pense qu'il faut aplanir, actuellement...
• (17 h 20) •
Le Président (M. Benjamin) : Il
vous reste trois minutes, Mme la députée.
Mme Melançon : Merci. Je pense
qu'il faut aplanir, justement, les irritants, je pense qu'on est là vraiment
pour ça. Parce que non seulement j'ai un malaise avec les projets pilotes, je
le répète ici, qui vont être d'une durée de trois ans, puis après le
trois ans, ça se peut que le déploiement ne se fasse pas partout sur
l'entièreté du territoire, je le répète ici, puis là c'est aux victimes, là, à
qui je parle actuellement, là, mais en plus il y a cette possibilité-là de
contestation judiciaire, puis, quand on parle des districts judiciaires, bien,
clairement, la lecture du ministre puis celle de la juge en chef, ce n'est pas
la même lecture.
Ça fait que moi, je pense que la proposition de
la députée de Joliette de pouvoir inscrire ou... Parce qu'on marche sur la
ligne actuellement, là, puis je ne voudrais pas qu'on parte avec une
contestation, parce que, là, ce ne sera pas trois ans de projets pilotes plus
après ça le déploiement, on ne sait pas sur combien de temps après où il sera
exigé sur tout le territoire, puis, je veux juste vous dire, si on s'en va dans
une contestation, on va faire plus trois ans ou plus cinq ans, on va être rendu
à une décennie pour pouvoir mettre en place un tribunal spécialisé. J'ai vraiment
un malaise. Mais, moi, c'est sur la question de l'iniquité où j'ai un sérieux
problème avec le projet pilote, puis j'aimerais
ça, entendre le ministre pouvoir me dire comment est-ce qu'on peut régler ça, parce que ce n'est pas normal qu'une victime, selon
là où elle aura été agressée, bien, aura ou non un accompagnement.
Le Président (M. Benjamin) : M.
le ministre, allez-y.
M. Jolin-Barrette : Là-dessus, M.
le Président, je tiens juste à rassurer la députée de Verdun, et surtout à lui
dire pourquoi est-ce qu'on fait notamment les projets pilotes puis pourquoi on
s'en va vers le tribunal spécialisé. Actuellement, ce n'est pas vrai que les
victimes ont le même traitement partout, hein? Il y a des choses qui
fonctionnent bien à certains endroits, il y a des bonnes pratiques qui doivent
être implantées partout. Notamment, l'objectif du projet pilote, c'est ça, et
le projet pilote va nous permettre, justement, d'avoir un meilleur
accompagnement, de regarder ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas puis de
pouvoir le standardiser à la grandeur du Québec. Ça, c'est ce qu'il est
important de dire. Et, d'ailleurs, dans tous les districts maintenant, hein,
c'est moi qui ai annoncé au mois de mai la poursuite verticale en matière de
violence conjugale, ce n'était pas le cas. Ça fait qu'il y a plusieurs mesures
qui vont s'appliquer — violence
sexuelle également — partout,
on est venus consolider ça. Ça ne se faisait pas partout, donc on est venus
ajouter les ressources pour le faire. Donc, déjà le même procureur du début à
la fin.
Alors, dans chacun des districts, actuellement,
il y a de l'offre d'accompagnement, de soutien par les différents intervenants.
Les projets pilotes vont venir permettre de circonscrire qu'est-ce que sont les
meilleures pratiques, comment est-ce qu'on
le fait, puis on va l'ouvrir partout. Mais il y a déjà des services aux
personnes victimes dans les différents palais de justice avec les
différents organismes. Ça, il faut le dire. Mais, déjà, actuellement, il y a
des distinctions en fonction du panier de services qui est offert à travers le
Québec, c'est déjà le cas, puis on vient aplanir ça notamment avec des mesures
paramétriques, notamment sur la poursuite verticale.
L'autre point qui est fort important, c'est au
niveau de l'IVAC. Avec l'IVAC, avec le projet de loi n° 84,
maintenant, les victimes sont vraiment mieux accompagnées en termes de services
sur l'ensemble du panier de services qui est offert.
Alors, je comprends la préoccupation de la
députée de Verdun. Elle souhaiterait, jour un, que ça soit déjà créé, le
tribunal spécialisé, puis que tous les services soient offerts en même temps.
Mais, déjà même à l'intérieur des tribunaux... des projets pilotes, en fonction
des différents districts, on va venir ajuster. Donc, on les démarre avec une
certaine forme, mais il va y arriver, dans les projets pilotes, qu'il va y
avoir de l'amélioration à faire aussi, donc cette amélioration-là va se faire
en continu.
Puis ce qu'on va pouvoir faire dans les
districts autres, comme par exemple la poursuite verticale, on va le faire dès
le départ aussi. Mais il faut ajuster. Mais déjà, les victimes ont des
services, il faut le dire, ça.
Donc, je comprends la préoccupation. Puis, tu
sais, je l'ai expliqué abondamment dans l'article 3. Comme, je voudrais
bien partir demain matin tout, mais les victimes nous ont dit, les
regroupements de victimes aussi : Passez par projets pilotes, mais aussi,
comme, assurez-vous que ça fonctionne bien, cette formule, que ça soit la bonne
formule qui soit applicable.
Alors, je respecte ce que la députée de Verdun
nous énonce. Puis on a le même objectif. Mais il faut le dire aux victimes,
puis ça, c'est important, de le dire et de le réitérer : N'importe quelle
victime au Québec qui a besoin de soutien, qui a besoin d'aide, il y a des
intervenants dans le système de justice qui sont là pour vous
accompagner : le même procureur du début à la fin, les CAVAC dans toutes
les régions du Québec, qui sont présents, n'hésitez pas à les contacter, à les
consulter.
Et il faut le dire : Vous n'êtes pas obligé
de déposer une plainte, une plainte à la police pour avoir des services à
l'IVAC, ça ne prend pas de plainte à la police. Il y a un programme d'aide
financière d'urgence. Ensuite, vous pouvez avoir du soutien financier, du
soutien psychologique à l'IVAC sans avoir besoin d'avoir déposé votre plainte à
la police. Vous pourrez le faire au moment où vous serez prêts à le faire. Ça,
c'est important de le réitérer, comme message. Il y a des lignes, SOS Violence
conjugale, SOS violence sexuelle aussi qui sont là aussi.
Alors, je tiens à le dire, à le réitérer, il y a
des centaines de personnes qui travaillent dans le milieu de la justice, qui
sont là pour soutenir les victimes. Ça fait qu'il faut aussi, dans le message
qu'on véhicule, ramener un message de confiance et de dire qu'il y a des gens
qui sont là pour les accompagner. Je pense que c'est fondamental.
Le Président (M. Benjamin) : Il
vous reste 53 secondes.
Mme Melançon : Bien sûr. Merci,
M. le Président. Bien, je suis d'accord avec le ministre sur une chose,
c'est qu'il faut que les victimes puissent aller chercher les ressources là où
elles sont.
Cependant,
quand on a parlé de ça avec les groupes... quand j'entends le ministre
dire : Bien, il y a plusieurs groupes qui étaient tout à fait
d'accord avec les projets pilotes, ils étaient... elles étaient d'accord, parce
que, majoritairement, c'étaient des femmes, elles étaient d'accord mais en
pensant que le lendemain des projets pilotes, c'était déployé partout au
Québec. Je tiens aussi à le rappeler au ministre. Parce que ça, on n'en avait
jamais entendu parler, de la possibilité que ce ne soit pas déployé partout le
lendemain des projets pilotes. Et ça, je pense qu'il faut quand même le
rappeler. C'est pour ça qu'on est là, pour travailler à améliorer ce projet de
loi. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Benjamin) :
Merci, Mme la députée. Mme la députée de Sherbrooke.
Mme Labrie : ...combien de temps
il me reste, M. le Président?
Le Président (M. Benjamin) : Il
vous reste environ... plus de 10 minutes.
Mme Labrie :
Parfait. Je vous remercie. Je vais profiter de l'intervention que le ministre
vient de faire pour lui poser une
question à l'aide financière d'urgence, est-ce que c'est déployé partout au
Québec en ce moment? Parce qu'au moment
de discuter du projet de loi, le ministre voulait commencer par l'implanter à
certains endroits, ça devait être progressif.
M. Jolin-Barrette : ...ce ne sera pas bien long, je vais demander la
réponse. Actuellement, c'est Laval, Montérégie.
Mme Labrie :
Donc, il y a deux régions dans lesquelles il y a ça, bon. Ça m'amène à une
nouvelle demande, là, j'en ai formulé quelques-unes tout à l'heure pour
bonifier cet article-là. Pour moi, il va falloir rajouter un élément dans
l'article, qui va être un délai après la fin des projets pilotes. J'ai déjà
demandé qu'on inscrive le délai maximum pour les projets pilotes, mais je veux
aussi qu'on inscrive le délai maximum après la fin des projets pilotes à
l'intérieur duquel les tribunaux spécialisés doivent être implantés. Le
ministre nous dira quel délai lui semble raisonnable. Moi, je ne vais pas
improviser une estimation de quel délai serait le meilleur, mais je veux qu'il
soit inscrit parce que, comme on le voit avec l'IVAC, ça peut être très
progressif. Ça fait quand même plusieurs mois qu'on a adopté le projet de loi.
À ce jour, il y a juste deux régions encore où il y a l'aide financière
d'urgence qui est accessible, alors que tout le monde avait un sentiment — je
pense que c'est le bon mot pour parler d'aide financière d'urgence — que
ça soit implanté. Le ministre a l'air de vouloir me répondre tout de suite.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien,
c'est parce que l'enjeu avec l'IVAC, c'est enjeu aussi par rapport avec les
organismes qui sont sur le terrain. Donc, dans le fond, pour démarrer, parce
que vous savez comment fonctionne le Programme d'aide financière d'urgence,
dans le fond, c'est géré par SOS Violence conjugale avec les organismes, donc l'hôtel, les transporteurs, le soutien aussi.
Ça fait que le MJQ est prêt, là. Dans le fond, c'est parce que c'est la
concertation avec tout le monde quand on part ça, ça fait que
ce n'est pas un délai qui est imputable à l'administration publique, là,
c'est juste ça que... Puis, tu sais, je ne dis pas que c'est la faute de
personne, mais ce qu'on... tu sais, comme, on peut...
• (17 h 30) •
Mme Labrie : Moi, je ne
sous-entends pas que ce délai-là, il est imputable au ministre, là, ce n'est
pas le but de mon intervention. Le but de
mon intervention, c'est de dire au ministre : Je veux que, dans cet
article-là, on prévoit combien de temps après la fin du délai maximum,
pour les projets pilotes... combien de temps maximum, on va avoir pour déployer
les vrais tribunaux spécialisés partout. Je veux voir ça dans l'article et
c'est ça qui va nous sécuriser pour que le ministre puisse boucler son
article 3 de tout à l'heure. Bien, moi, en tout cas, personnellement, ça
va me sécuriser de voir ça. Je trouve ça important parce que je ne voudrais pas
parce que je ne voudrais pas qu'au terme des projets pilotes ça soit très long,
voire trop long, et très inégal surtout, l'implantation à l'échelle du Québec
de tous les tribunaux spécialisés. Ça fait que je comprends qu'il a déjà
inscrit à quelques endroits que ça allait être développé partout, c'est une
certaine forme de confirmation de son intention qu'il n'y aura aucun district
judiciaire dans lesquels il n'y en aura pas. Mais, après ça, sur l'enjeu des
délais, il faut le voir aussi dans le projet de loi.
Ça fait que j'aimerais ça que le ministre nous
dise, lui, combien de temps il pense que ça peut prendre. Puis je le sais qu'il
va avoir des choses à attacher un petit peu partout, là, le ministre vient de
me dire qu'il y a des choses, ce n'est pas juste le ministère de la Justice,
c'est les partenaires aussi. Bien, ça va être la même chose pour les tribunaux
spécialisés, c'est sûr que ça ne sera pas juste le ministre de la Justice qui
va être responsable de délais qu'il pourrait y avoir. Tous les partenaires vont
devoir participer à ça, ça va prendre de la coordination, de la concertation.
Moi, je veux savoir combien de temps le ministre pense qu'on va avoir besoin,
après la fin des projets pilotes, pour pouvoir boucler ça partout. Puis ce
délai-là, j'aimerais ça qu'on l'inscrive dans le projet de loi.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, on a déjà eu cette discussion-là tout à l'heure, là, puis, comme je l'ai
dit, je ne peux pas mettre un délai pour la grandeur du Québec. Dans le fond,
le paragraphe 8°, là, que je suis venu insérer, là, puis c'est la
discussion que j'ai eue avec la députée de Joliette tantôt, là, le
paragraphe 8° fait en sorte que, durant les projets pilotes, je travaille
à la mise en place de l'application. Moi, idéalement, dès la fin des projets
pilotes, on va être prêts à démarrer partout, mais je ne peux pas vous garantir
que c'est partout. Donc, il est là, l'article... à l'article 3, le
paragraphe 2°.
Mme Labrie :
Mais est-ce qu'on pourrait ajouter, par exemple, là... Le paragraphe 8°,
duquel le ministre parle, ça dit : «le ministre doit préparer
l'établissement du tribunal spécialisé permanent visé à l'article[...] — blabla — de la
Loi sur les tribunaux judiciaires». Est-ce qu'on pourrait ajouter un bout de
phrase qui dit : Et ce, au plus tard — je donne un chiffre, là, mais
ça sera le chiffre du ministre, là — ...au plus tard, par exemple,
deux ans après la fin des projets pilotes? Est-ce que c'est possible d'ajouter
un petit bout de phrase comme ça qui vient dire c'est quoi, le délai dont le
ministre dispose pour préparer l'établissement du tribunal spécialisé
permanent? Ma proposition, ce n'est pas sur le chiffre, là, c'est sur inscrire
ce délai dans l'article.
M. Jolin-Barrette : Non, mais
l'enjeu, là, c'est qu'on veut le déployer à l'ensemble du Québec. Mais comme
j'ai exposé, je pense, mercredi dernier, ça peut arriver que, dans certains
districts, on ne soit pas en mesure de faire violence sexuelle et violence
conjugale, pour x, y raisons.
Mme Labrie : Bien sûr, je l'ai
entendu, là, le ministre, il l'a répété souvent.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Mme Labrie : Mais c'est pour ça
que je veux qu'on prévoie un délai. Ça peut arriver, je comprends ça, mais il
va falloir les attacher, ces fils-là, pour le faire à un moment donné. Combien
de temps ça va prendre?
M. Jolin-Barrette : Je veux
juste vous donner un exemple. Ça peut arriver que, pour des organisations...
pour l'organisation judiciaire, ça peut arriver parfois que le tribunal ne
siège pas dans un district donné puis que c'est transféré
parce qu'il arrive un événement x, y, z. Je donne un exemple : c'est déjà
arrivé que la cour refuse de siéger dans certains endroits.
Mme Labrie : ...
M. Jolin-Barrette : Ils
n'étaient pas satisfaits des locaux.
Mme Labrie : O.K. Bien, à ce
moment-là, on va veiller à aménager les locaux de manière adéquate. C'est déjà
inscrit à plusieurs endroits dans le projet de loi, c'est même inscrit dans cet
article-là. Qu'est-ce qui pourrait ne pas être réglé à l'intérieur d'un délai
que le ministre aura lui-même choisi pour qu'à la fin de ce délai-là que le
ministre aura choisi qu'on ne puisse pas le faire partout?
M. Jolin-Barrette : Je
comprends. Je ne peux pas prédire l'avenir, mais ce que je vous dis, c'est que,
dans des circonstances comme ça... Parce que la chambre criminelle et pénale
siège, O.K., mais il peut arriver, parce que, supposons que, je ne le sais pas,
les gens du milieu, il y a des enjeux x, y, z que je ne peux pas prévoir, que
ce n'est pas possible en VC mais que c'est possible en VS. Bien, l'article, il
est là pour ça.
Mme Labrie : Bien, ça veut dire
que le ministre... les endroits où c'est plus difficile ou qualifié
d'impossible par certaines personnes, le ministre va le laisser comme ça et
donc ne va pas le mener à terme?
M. Jolin-Barrette : Non. Notre
objectif, c'est de le mettre partout.
Mme Labrie : Dans combien de
temps après les projets pilotes?
M. Jolin-Barrette : Le plus
rapidement possible. Mais il faut que tout soit prêt pour le mettre en place.
Parce que ce que les groupes nous ont réitéré, là, c'est de dire : Il faut
que ça marche, hein? Puis c'est pour ça qu'ils disent de passer par projets
pilotes. Après ça, après ça, il faut réussir à le mettre en place puis il faut
que les acteurs soient là aussi pour le mettre en place, aussi, la
concertation.
Mme Labrie : Mais, si le
ministre nous dit : Le plus rapidement possible, on peut penser, puis
surtout qu'il va... là, il s'engage à préparer cet établissement-là, permanent,
pendant les projets pilotes, on peut penser que, dans la majorité des districts
judiciaires, à la fin du projet pilote, ça va être relativement prêt ou, en
tout cas, dans les mois qui vont suivre, ça va être relativement prêt. Après,
il y aura des exceptions, le ministre nous a dit que ça allait sûrement
arriver, où les gens ne seront pas prêts tout de suite. Ça va prendre plus de
temps dans ces milieux-là. Moi, je veux quand même qu'on prévoie un délai
maximal pour ces milieux-là, pour que ça soit implanté aussi. Moi, quand le
ministre refuse de prévoir un délai maximal, ce que ça me dit, c'est : Ah!
peut-être que, dans les lieux où c'est trop difficile ou compliqué, il va
laisser faire. S'il n'a pas l'intention de laisser faire, qu'on prévoie un
délai maximal qu'il aura établi lui-même.
M. Jolin-Barrette : Non. Mais
je vous donne un exemple, là. Sur la cour itinérante, là, c'est une cour qui
est particulière en soi, puis il faut s'entendre avec les nations autochtones
aussi, donc il y a différentes modalités d'application. Donc, il faut, un,
qu'ils embarquent, hein, dans le projet, puis il faut être aussi à leur
disposition pour le faire, donc il y a différentes modalités. Ça fait
qu'exemple, supposons que ça marche en violence conjugale, mais qu'il y a des enjeux en violence sexuelle puis
qu'il faut adapter certaines choses, bien, ça va nous permettre de le faire
aussi.
Mme Labrie : Bien sûr, là, moi,
je ne suis pas du tout en train de demander au ministre de les implanter
partout, toutes en même temps. Je reconnais qu'il va y avoir ces enjeux-là. Je
veux juste savoir combien de temps le ministre se donne pour avoir réglé tous
ces enjeux-là. S'il trouve que deux ans, c'est déraisonnable, tu sais,
qu'il dise combien de temps ça prend. Ça se peut que ça soit plus long que ça,
dans certaines communautés, je peux tout à fait comprendre ça, moi. Mais, si
l'objectif, de toute façon, c'est de régler chacun de ces enjeux-là qui vont
ralentir le déploiement permanent, j'imagine que lui-même il en a un, horizon
en tête, quand même. Est-ce qu'il va laisser faire que ça pourrait prendre
10 ans à certains endroits puis qu'on change deux, trois fois de gouvernement
entretemps?
Tu sais, bien, moi, c'est ça qui me questionne.
Tu sais, on le sait qu'il va y en avoir, des endroits où ça va être plus
compliqué, puis que ça va prendre plus de concertation, puis ces
négociations-là peuvent être plus longues, notamment avec les communautés
autochtones, puis il faut prendre le temps de le faire correctement. Mais, si l'objectif c'est de le faire partout, il faut
prévoir combien de temps on se laisse, justement, pour peaufiner ce travail-là
dans les endroits où ça va être un peu plus compliqué.
M. Jolin-Barrette : Je
comprends votre demande.
Mme Labrie : Est-ce que le
ministre le prend en délibéré?
M. Jolin-Barrette : Moi, ce que
je vous dis, c'est que, dès la fin des projets pilotes, je souhaite que ça soit
en vigueur puis je vais travailler en ce sens-là. C'est notamment pourquoi j'ai
mis l'article... le paragraphe 8°.
Mme Labrie : Bon, bien, je vais être superclaire, là, sur ce
que je veux voir comme ajout dans le paragraphe 8°.
Je voudrais qu'à la fin on précise le délai maximal que le ministre se donne
pour l'établissement
permanent, là, des tribunaux spécialisés.
Moi, je vais le laisser juger de quel délai ça prend. Ça se peut que ça soit un
certain nombre d'années. Moi, je vais
être à l'aise avec ça, mais je veux que ça soit écrit dans le projet de loi, le temps qu'il se donne.
M. Jolin-Barrette :
M. le Président, j'ai très bien compris la demande de la députée de Sherbrooke.
Mme Labrie :
Bien, je suis contente de savoir que je suis claire.
M. Jolin-Barrette :
Comme on dit, c'est clair comme de l'eau de roche.
Mme Labrie :
C'est parfait. J'ai hâte de lire le libellé.
M. Jolin-Barrette : Cependant, cependant... c'est clair, mais, comme
je vous ai dit à de multiples reprises, il y a certains éléments que je
vais inscrire dans le projet de loi, suite à vos suggestions, mais il y en a
d'autres que je ne retiendrai pas.
Mme Labrie :
O.K., mais là, pour l'instant, moi, j'en ai donné quatre : le nombre
minimum de districts pour les projets pilotes,
le délai maximal pour les projets pilotes, d'écrire que le suivi va être confié
à la table de partenaires puis le délai maximal après la fin des projets
pilotes. Ça, c'est mes demandes pour améliorer cet article-là.
M. Jolin-Barrette :
Je comprends.
Mme Labrie :
Merci.
Le Président
(M. Benjamin) : Merci. Merci, Mme la députée de Sherbrooke. Mme
la députée de Joliette.
Mme Hivon :
J'ai juste une question d'information pour éclairer tout le monde avant qu'on
continue. Les cours itinérantes siègent dans quels districts?
M. Jolin-Barrette :
C'est le district d'Abitibi.
• (17 h 40) •
Mme Hivon :
O.K. Le ministre, tantôt, nous a dit : Ça ne veut pas dire que ça va
nécessairement être tous les palais en même temps de tous les districts. Donc,
je veux juste lui dire que, si jamais ça prenait plus de temps pour se concerter, ce n'est pas une raison pour éliminer
complètement un district, comme il peut se donner le pouvoir de le
faire.
Je veux juste qu'on se
situe bien là-dessus, là, parce que je ne voudrais pas que... Je ne dis pas que
c'est... je ne prête pas d'intentions au ministre, là, mais je ne voudrais pas
qu'il utilise l'argument d'une situation spécifique comme la cour itinérante, qui est extrêmement particulière.
Puis, d'ailleurs, dans le rapport, il y a des chapitres puis
il y a des enjeux particuliers, dont l'idée d'un tribunal holistique puis... je
veux dire, qui s'inspire du tribunal spécialisé mais qui est plus aussi, là,
pour qu'on enlève l'idée sur laquelle je me bats depuis mercredi dernier et
que, là, ma collègue amène aussi, d'avoir une assurance, dans le projet de loi,
qu'il va se déployer partout au Québec, le tribunal spécialisé. C'est ça qu'on
recherche.
Donc, je pense aussi
qu'on peut l'inscrire dans la foulée du projet pilote, en disant que, dans un
délai x après les projets pilotes, il va devoir se déployer partout. Que ce
soit là, que ce soit en faisant la bataille à l'article 3, ce n'est pas ça
qui est l'essentiel. L'essentiel, c'est qu'il y ait une garantie qu'il va se
déployer partout, qu'on ne pourra pas enlever des morceaux pour en faire un
gruyère, donc.
Puis je veux juste...
Puis, ceci dit, tu sais, quand le ministre... C'est pour ça qu'on reste sur
notre appétit puis on en reparle encore, mais c'est comme si le ministre nous
disait : Bien, il va y avoir des choses qui vont faire que ça ne pourrait
pas, mais, dans le fond, il se donne, dans le projet de loi, partout, le
pouvoir d'être responsable de tout. Donc, c'est comme de dire : Il est
responsable de tout, l'allocation des ressources, d'aller chercher l'argent, de
se concerter avec le monde, de s'assurer que les formations sont faites, donc qu'est-ce
qui pourrait lui échapper? Et puis les services judiciaires relèvent de lui, ça
fait que, s'il y a des gens qui disent que ce n'est pas sécuritaire de siéger
ici, bien, ça relève de lui de trouver un endroit sécuritaire pour siéger. Je
veux dire, tout le monde va comprendre que, si le plafond s'effondre, c'est une
force majeure, là, on ne parle pas d'une situation comme ça. Donc, c'est ça un
peu qui fait en sorte qu'on se dit : Le ministre, il est responsable de
tout, donc pourquoi ne pas être capable de prendre l'engagement dans le projet
de loi?
Ça fait que le
ministre va comprendre que moi aussi, je trouve que ce serait une autre manière
d'arriver à l'objectif de s'assurer qu'il n'y a pas d'échappatoire. Puis on
pourrait l'inscrire dans la foulée des projets pilotes, en disant : X
temps, exemple, deux ans après la fin, le tribunal... le ministre y travaille
et, dans un délai maximal de deux ans suivant la fin des projets pilotes, le
tribunal est déployé dans l'ensemble des districts judiciaires.
Je veux revenir.
Tantôt, le ministre a dit quelque chose, puis ça me chicote comme ça m'a
chicotée la semaine dernière, il dit : En ce moment, il y a des
différences dans l'offre de service, puis ce n'est pas tout le monde qui a les
mêmes services. Et je veux comprendre ce qu'il veut dire par là.
M. Jolin-Barrette :
Exemple, à Montréal, il y a Côté Cour, c'est un programme particulier. Ce n'est
pas présent dans tous les districts.
Mme Hivon :
Mais à part ça, là?
M. Jolin-Barrette :
Bien, il y a des initiatives locales qui sont offertes, qui sont des bonnes
initiatives qui doivent être étendues à la grandeur du Québec.
Mme Hivon :
Puis, donc, je veux dire, il est d'avis qu'il faut aller vers, justement, cette
uniformisation-là avec le tribunal spécialisé puis qu'il soit déployé partout,
donc il me semble que, d'autant plus, il devrait vraiment être rendu très,
très, très convaincu de ce qu'on lui plaide sur l'importance d'avoir une
garantie que ça va être déployé partout. Puis, s'il veut un délai, on met un
délai, mais, au moins, on se donne les moyens d'y arriver. Donc, ça, c'était la
précision que je voulais, là.
Tu sais, c'est sûr,
c'est comme le programme en santé mentale, il n'est pas partout, c'est des
initiatives, effectivement. Mais je ne pense pas que c'est un argument pour
venir nous dire, quand ma collègue de Verdun plaide ce qui l'embête avec l'idée d'y aller par projet pilote... pour
dire : Oui, mais, en ce moment, tout n'est pas parfaitement uniforme, donc on pourrait continuer à ne pas être
parfaitement uniforme. Au contraire, je pense qu'il faut saisir
l'occasion du tribunal spécialisé pour se dire : Dans ces matières-là,
toutes les victimes, toutes les plaignantes vont avoir droit aux mêmes services, à la même qualité de services.
Donc, j'invite le ministre à réfléchir à la possibilité, effectivement,
de le mettre à la fin du 8°.
M. Jolin-Barrette :
M. le Président, je n'arrête pas de réfléchir, je n'arrête pas de réfléchir.
Le Président
(M. Benjamin) : Est-ce que j'ai d'autres interventions?
Mme Hivon :
Là, ce qui est difficile, c'est comme l'autre fois, là, c'est parce qu'on ne
sait pas ce que le ministre va déposer.
M. Jolin-Barrette :
Bien, moi, je vous dirais, comme : Finissez votre tournée, comme, sur tout
ce que vous voulez. Parce qu'honnêtement, pour les fins d'efficacité des
travaux de la commission, moi, je trouve que, comme, comment on a fonctionné la
dernière fois, vous m'avez fait part de vos demandes, la députée de Sherbrooke
a quatre demandes, la députée
de Verdun a fait des demandes, vous en avez fait aussi,
alors moi, j'aime mieux que vous me disiez : Simon, je veux tel
point, tel point, tel point, ce que vous avez commencé à faire, ça fait que,
là, la merveilleuse équipe de légistes qui est avec nous, ici, prennent des
notes, puis on regarde ce qu'il est possible de faire, ce qu'il n'est pas
possible de faire. Parce que ça arrive, des fois, que ce n'est pas possible de
faire certaines choses, hein?
Alors, moi, je vous
dirais : Bien, est-ce que vous avez d'autres demandes, questions,
suggestions sur l'article des projets pilotes? J'ai bien noté le délai de mise
en vigueur, le délai maximal pour les projets pilotes, les autres éléments que
vous avez soulignés également.
Le Président
(M. Benjamin) : Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon :
Oui. Je vais les redire. Je voulais qu'on inclue dans les projets pilotes de
dire qu'il y a une période maximale et que ça comprend la période d'évaluation.
Je veux qu'on parle de concertation avec la Cour du Québec dans la
détermination des choix des districts des projets pilotes et du nombre, les
critères qui vont mener à ces choix-là, le délai maximal d'implantation à la
grandeur du Québec, à la suite des projets pilotes, puis la... Bien, ça, je
pense que ça va, le dernier, ça va. Puis j'appuie toutes les demandes de mes
collègues.
M. Jolin-Barrette :
Donc, on s'entend, il n'y a pas d'autre demande, donc on peut déposer
l'amendement, puis adopter le prochain amendement, puis terminer 11, terminer
l'article 11.
Mme Hivon :
Est-ce que le ministre suggère...
Mme Labrie :
...l'amendement tout de suite?
M. Jolin-Barrette :
Bien, il y a encore du travail à faire un petit peu, mais ce qu'on peut faire
en attendant, c'est suspendre 11 puis retourner à 4, bien, en attendant, le
temps que les équipes terminent de travailler.
Mme Hivon :
Moi, ça va.
Le Président
(M. Benjamin) : ...consentement là-dessus? J'ai un consentement?
Oui? Alors, nous suspendons, à ce moment-là, donc, l'amendement à
l'article 11 et l'article 11, voilà, et nous revenons à
l'article 4.
M. Jolin-Barrette :
On retourne à l'article 4, M. le Président...
Le Président (M. Benjamin) :
C'est bien ça.
M. Jolin-Barrette :
...avec votre permission?
Le Président (M. Benjamin) :
Bien sûr, allez-y.
M. Jolin-Barrette : Donc, l'article 4, M. le Président :
Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 87, du
suivant :
«87.1. Toute
personne qui se porte candidate à la fonction de juge doit s'engager à suivre,
si elle est nommée, le programme de perfectionnement sur les réalités
relatives à la violence sexuelle et à la violence conjugale établi par le
Conseil de la magistrature.»
Commentaires : avec la modification
proposée par le présent article, les candidats à la fonction de juge de la Cour
du Québec devraient s'engager à suivre, s'ils sont nommés, le programme de
perfectionnement sur les réalités relatives à la violence sexuelle et à la
violence conjugale qui serait établi par le Conseil de la magistrature.
Le Président (M. Benjamin) :
Est-ce qu'il y a des interventions sur l'article 4? Mme la députée de
Joliette.
Mme Hivon : Sur
le type de formation, évidemment, c'est le Conseil de la magistrature qui a
toute la marge de manoeuvre. Est-ce que le ministre a eu des échanges avec le Conseil
de la magistrature pour savoir si on s'enlignait vers une formation générale
puis une formation spécialisée?, on se comprend, là, une formation générale
pour tous les juges et une formation plus spécialisée pour ceux qui vont siéger
à la division spécialisée.
M. Jolin-Barrette : En fait, ça
relève de l'indépendance de la magistrature, la formation, hein, c'est le
Conseil de la magistrature qui est responsable de la formation de ses propres
juges. Ce que la Cour du Québec nous a manifesté à plusieurs reprises, c'était
à l'effet que les juges recevaient déjà de la formation et qu'ils étaient des
juges spécialisés. La Cour du Québec, la direction de la Cour du Québec
dit : Les juges sont spécialisés, donc ça, c'est le message et l'opinion
qui est véhiculée par la cour, alors je prends acte de ce message.
Cela étant, dans la proposition législative
qu'on a, on a inséré également... et on le verra à l'article 8, donc à
l'article 257, donc : L'article 257 de cette loi — c'est
la Loi sur les tribunaux judiciaires — ...par l'ajout, à la fin, de
l'alinéa suivant :
«Le conseil établit notamment un programme de
perfectionnement sur les réalités relatives à la violence sexuelle et à la
violence conjugale. À cette fin, il consulte les personnes et les organismes
qu'il estime appropriés en raison de leur expérience, de leur expertise, [et]
de leur sensibilité ou de leur intérêt en ces matières.»
Donc, l'obligation qu'on vient créer dans la
loi, là, pour le... Quand on était à l'article 4, c'est le juge qui soumet
sa candidature, il va devoir s'engager à suivre cette formation-là. Ladite
formation, elle va être développée par le
Conseil de la magistrature, mais on indique... le législateur indique au
Conseil de la magistrature : Pour développer cette formation-là,
vous devez consulter les groupes de personnes qui ont une expertise en cette
matière, donc, pour la développer. Donc, on ne dit pas au Conseil de la
magistrature quoi mettre dans la formation puis de la façon dont elle est
dispensée, ça relève de l'indépendance judiciaire. Cependant, on envoie un
message clair sur qui doit être consulté pour la création de la formation.
Mme Hivon : ...on
envoie ce message clair là?
M. Jolin-Barrette : À
l'article 8 du projet de loi.
Mme Hivon : O.K.
C'est ça.
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Non. Bien,
parce qu'à 4, c'est l'obligation sur le juge qui, lui... en fait, le candidat à
la fonction de juge qui, lui, s'engage à suivre cette formation-là. Mais la
formation, elle est détaillée à l'article 8.
Le Président (M. Benjamin) :
C'est bon, Mme la députée?
Mme Hivon : ...on
en discutera à 8. C'est bon.
Le Président (M. Benjamin) :
Parfait. Mme la députée de Verdun.
Mme Melançon : Bien, un peu
dans le même esprit que la collègue de Joliette, quand on regarde... Puis là,
on peut parler de l'article 4, de l'article 5, de l'article 6 et
de l'article 7, dans le fond, puis on pourra y aller en étapes, mais là on
est ici, là, on est... «Toute personne qui se porte candidate à la fonction de
juge doit s'engager à suivre...» Là, on parle des juges. On va parler des juges
à la retraite, on va parler des juges de paix magistrats et des juges de paix
magistrats à la retraite. Là, on est superspécifique.
M. Jolin-Barrette : ...des
fonctions judiciaires, des fonctions spécifiques.
• (17 h 50) •
Mme Melançon : Oui, je vais juste terminer mon idée, si vous me
permettez, M. le ministre. À ce moment-ci, de la façon... Puis je
me rappelle que le ministre m'a dit qu'au début de l'étude article par article,
dans le fond, que les juges s'engagent sur
leur honneur, c'étaient les mots du ministre, à... donc ils s'engageaient à suivre... dans le fond, c'était sur leur honneur,
pour ceux qui veulent devenir juge.
M. Jolin-Barrette :
Dans le fond, c'est ça, ils ne sont pas juges encore.
Mme Melançon :
C'est ça. Alors là, on entre dans ceux qui sont juges, à cette partie-ci,
n'est-ce pas?
M. Jolin-Barrette :
Article 4, c'est la personne qui se porte candidat. Donc, il n'est pas
encore nommé juge.
Mme Melançon :
Vous avez raison, M. le ministre, tout à fait. À l'article 5...
M. Jolin-Barrette :
Ça m'arrive de temps en temps, ça m'arrive.
Mme Melançon :
On le souligne quand ça vous arrive.
M. Jolin-Barrette :
Je suis heureux que la députée de Verdun le reconnaisse. Ça aussi, je vais
mettre ça sur mes réseaux sociaux.
Mme Melançon :
Vous devriez tellement écouter les points de presse, on le dit aussi, en point
de presse, que parfois vous démontrez de l'ouverture puis que parfois ça va tellement
bien. Puis parfois, bien, c'est plus compliqué, mais on doit aussi le dire
quand ça arrive. Donc là, à l'article 4, monsieur...
M. Jolin-Barrette :
Voyez-vous, M. le Président, là aussi, je vais reprendre l'extrait, mais pas le
dernier bout avec le dernier «parfois».
Mme Melançon :
Voilà. Je vais taire mon commentaire, ici, parce qu'on est en train d'étudier quelque
chose qui est tellement sérieux. Mais à l'article, donc, 5, où on va être dans
les juges qui sont à la retraite, puis ensuite de ça les candidats juges paix
magistrats, puis ensuite de ça les juges paix magistrats à la retraite, ce que
je veux dire, c'est que c'est
hyperpointilleux. Ici, là, dans ces quatre articles, on parle qu'ils doivent
s'engager à suivre le programme de perfectionnement.
Moi, quand je lis ce
qui nous a été déposé, puis tout à l'heure je voulais y faire référence, puis le
ministre me disait : C'est plus ou moins ça... moi, quand je vais lire ce
que nous a déposé, bien sûr, le Conseil de magistrature, qui... je le rappelle,
là, il n'est pas signé uniquement par la juge en chef, là, il y a plusieurs
honorables qui font partie du Conseil de la magistrature, ils nous disent
qu'ils ont déjà de la formation. Moi, j'aimerais ça entendre le ministre, à
savoir est-ce que cette formation-là est adéquate, actuellement. Parce que, là,
si on veut qu'ils s'engagent à suivre une formation, on envoie un message
clair, comme dit le ministre, puis on le verra à l'article 8, là, mais est-ce
que... la formation que les juges reçoivent, actuellement, est-ce qu'elle est
adéquate, selon le ministre?
M. Jolin-Barrette :
Bien, moi, M. le Président, j'aimerais bien le savoir. Savez-vous pourquoi
j'aimerais bien le savoir? Parce qu'il n'y a pas de reddition rattachée à ça.
Et là, dans le projet de loi, ce qu'on vient faire, c'est on vient mettre une
reddition. Alors, le législateur, les législateurs, ce qu'ils font aujourd'hui,
c'est qu'ils viennent dire à la magistrature : Ce sujet-là, il est très
important, il est très, très, très important. Et c'est un signal qu'on envoie,
on dit : Écoutez, les juges suivent la formation, et c'est eux qui gèrent
leur propre formation.
Cela
étant, en tout respect de l'indépendance judiciaire, le législateur, quand
même, exprime une préoccupation sociétale à l'effet qu'on souhaite que
les juges reçoivent une formation en matière de violence sexuelle et de violence
conjugale. Et, pour ce faire, ils devront consulter, pour bâtir la formation,
les différents groupes qui ont une connaissance de ces enjeux-là et, suite à
ça, devront indiquer à l'Assemblée nationale le nombre de juges qui suivent
cette formation et le contenu de la formation. Alors, nous, dans la limite des
pouvoirs qui me sont imposés par la Loi constitutionnelle de 1867, j'agis à
l'intérieur des pouvoirs qui me sont conférés.
Mme Melançon :
Ma question est quand même la suivante : Actuellement, il n'y a rien qui
nous laisse croire que la formation des juges est efficace ou inefficace?
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, je vous dirais et je vous référerais au rapport Rebâtir la
confiance, qui était une des recommandations importantes, qui disait que...
l'importance que la magistrature soit formée. Le législateur fédéral a fait le
même constat que le législateur québécois en imposant un projet de loi,
également. Et la magistrature nous indique que les juges reçoivent de la
formation, ce qui est vrai. Le gouvernement du Québec consacre des sommes
importantes, 1,5 million de dollars, à la formation des juges. Et ce que
nous savons de la direction de la Cour du Québec, c'est que les juges sont
spécialisés. Nous, ce que nous faisons aujourd'hui, c'est que nous venons
spécifier qu'il s'agit d'un enjeu important, la violence sexuelle et la
violence conjugale, et que nous souhaitons, collectivement, que les magistrats
également suivent des formations en lien avec ces deux réalités.
Mme Melançon :
Et je ne peux pas être plus d'accord avec le ministre, à ce moment-ci. Moi, la
question que j'ai... Parce que, je le répète, le projet de loi que nous
étudions actuellement, qui a été transformé de façon plutôt magistrale par les
interventions des différentes oppositions, avec, bien sûr, la volonté du ministre
à collaborer à l'intérieur de cette transformation-là... mais je dois rappeler
que le projet de loi n° 92, au départ, ne visait que les juges. Et ma question est, donc, la suivante, puis
je pose la question parce que je ne suis pas juriste comme le ministre,
mais quand même. À partir du moment où on demande une certaine collaboration
avec la Cour du Québec, avec le Conseil de
la magistrature, moi, ce que j'ai envie de poser comme question c'est : À
partir du moment où on a voulu mettre ceci dans le projet de loi, est-ce
qu'il y a eu des échanges avec le Conseil de la magistrature ou avec
l'honorable Lucie Rondeau, qui est la juge du Québec, à savoir qu'est-ce qu'il
y a, actuellement, dans la formation, qu'est-ce qu'on peut améliorer? Est-ce
qu'il y avait déjà eu des échanges préalables à ce qu'on a actuellement sous
les yeux, dans laquelle on demande aux juges
qui se portent candidats d'y aller, justement, avec un engagement à suivre la
formation, et qu'est-ce qu'il y a dans la formation? Est-ce qu'il y avait eu
des échanges entre le ministre et la Cour du Québec?
• (18 heures) •
M. Jolin-Barrette : Je veux
juste être clair, M. le Président. On n'est pas en train de dire que les juges
de la Cour du Québec, les juges de paix magistrat ou les juges suppléants ne
sont pas compétents. Ils sont compétents, et ils suivent des formations, ça,
c'est très clair, et ils entendent des centaines de dossiers par année,
notamment en matière de violence conjugale et de violence conjugale. On ne
remet aucunement en question la compétence de ces hommes et ces femmes qui ont
des responsabilités extrêmement importantes. Ce que nous disons par le biais du
projet de loi, c'est que nous souhaitons que les membres de la magistrature
soient sensibilités, notamment, sur le savoir-faire, sur le savoir-être en
matière de violence conjugale et de violence sexuelle.
Alors, il y a
beaucoup de victimes que j'ai rencontrées, qu'on a rencontrées ici, qui nous
ont dit : Écoutez, il y a beaucoup de mythes et de préjugés, de
stéréotypes qui existent encore. D'où l'objectif de l'article 8 du projet
de loi, que, lorsque la formation va être développée, ça en tienne compte en
fonction des gens qui ont une expertise dans ce domaine-là. Mais pour vous dire
le contenu des formations qui sont données aux juges, bien, ça relève du
Conseil de la magistrature, ça relève de l'indépendance judiciaire. Nous, ici,
on vient de parler de perfectionnement, de la formation, donc formation
continue, on vient proposer ça à la magistrature. Donc, la magistrature se
gouvernera en conséquence, en fonction de ce que le législateur souhaite voir.
Ce qui est important de souligner, c'est que les juges sont souverains dans les
formations qu'ils reçoivent, mais je vous réitère... à l'effet que le message
de la direction de la cour, c'est que les juges reçoivent déjà de la formation
et qu'ils sont spécialisés.
Mme Melançon : La question, en
tout respect, était de savoir s'il y avait eu des échanges entre le ministre de
la Justice et la Cour du Québec pour savoir
de quel programme actuellement... Quels sont les programmes actuellement
qu'ont les juges? Est-ce que le ministre connaît le contenu des programmes qui
sont offerts actuellement aux juges?
M. Jolin-Barrette : La cour
indique notamment que, puisqu'ils ont la responsabilité de presque la totalité
des dossiers en matière d'infractions à caractère sexuel ou de violence
conjugale, les juges de la Cour du Québec reçoivent la formation nécessaire
pour traiter les cas d'infractions à caractère sexuel ou de violence conjugale
dont ils sont quotidiennement saisis.
Mme Melançon : M. le Président,
je vais reposer ma question. Est-ce que le ministre a eu des échanges avec la
cour, avec la juge en chef, quant au contenu de ces formations qu'ils reçoivent
actuellement?
M. Jolin-Barrette : Je
comprends très bien la question de la députée de Verdun, et le contenu des
discussions, échanges et conversations que j'ai de nature privément, je ne les
partage pas.
Mme Melançon : Moi, je ne veux
pas connaître le contenu. Je veux savoir s'il y a eu des échanges, oui ou non,
sur le sujet, tout simplement.
M. Jolin-Barrette : Ce qui est
fort important, c'est qu'on vient inscrire dans le projet de loi une obligation
pour le Conseil de la magistrature de développer un perfectionnement pour les
membres de la magistrature. Donc, je comprends que mes collègues sont en accord
avec la proposition que je fais, qui fait suite à la recommandation 162 du
rapport Rebâtir la confiance.
Mme Melançon : Bien, on a
toujours dit... Puis, pour avoir travaillé et avec l'ancienne juge en chef, Me
Corte, et avec Julie Desrosiers sur la formation, bien sûr, des juges, mais pas
uniquement des juges, aussi des policiers, des procureurs, des avocats, on a
toujours été d'accord à ce qu'il puisse y avoir une formation qui soit offerte.
Moi, ma question, c'était juste de savoir s'il y avait eu des échanges
là-dessus directement avec la juge en chef, et aux réponses que j'ai obtenues,
je pense qu'on peut en déduire qu'il n'y a pas eu nécessairement d'échanges
directement avec l'honorable Lucie Rondeau. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Benjamin) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, il ne faudrait pas tirer des inférences et prêter des intentions. Il
faut juste faire très attention dans cette commission.
Le Président (M. Benjamin) :
Merci. Donc, nous allons poursuivre avec la députée de Joliette.
Mme Hivon : C'est
quoi, le lien hiérarchique ou l'absence de lien hiérarchique entre le ministre,
le ministère et le Conseil de la magistrature?
M. Jolin-Barrette : Le Conseil
de la magistrature est un organisme qui est notamment chargé de la formation
des juges. Alors, il n'y a pas de lien hiérarchique entre le Conseil de la
magistrature et le ministère de la Justice. Le Conseil de la magistrature est
présidé par la juge en chef de la Cour du Québec, avec laquelle le juge en chef
associé et les juges en chef adjoints siègent, ainsi que la présidente du
Tribunal des droits de la personne, le président... le juge président d'une
cour municipale ainsi que deux avocats et, il me semble, deux citoyens désignés
par l'Office des professions, et également il y a certains juges, également, de
la Cour du Québec qui y siègent. Alors, il n'y a pas de lien hiérarchique entre
le ministère de la Justice, le ministre et le Conseil de la magistrature. C'est
pour ça que nous procédons par voie législative pour que le législateur et les
parlementaires indiquent que doit contenir le contenu d'une formation pour les
membres de la magistrature.
Mme Hivon : On va
en rediscuter quand on va être rendus aux articles 8 et 9, mais je pense
que le ministre va comprendre facilement que, parmi les irritants, on vient,
là, attacher ça vraiment, vraiment serré pour les juges, on dit sur quoi le
conseil va devoir établir ses programmes de perfectionnement, on dit qu'il va
devoir rendre compte, mais, pour tous les autres organismes responsables de la
formation pour tous les autres, il n'y en a pas, il n'y a pas de disposition
miroir qui dit que le programme va devoir consulter pour être établi puis sur
quoi il va porter ni de reddition de comptes. Donc, moi, j'invite juste le
ministre, qui réfléchit constamment, à peut-être tout de suite réfléchir à
l'importance de penser, aux autres organismes, que ce soit son ministère, que
ce soit le ministère de la Sécurité publique, que ce soit le DPCP, tous ceux
qui vont être mis à profit pour ça, qu'ils doivent avoir les mêmes obligations
que celles que le ministre donne au Conseil de la magistrature, sans lien
hiérarchique.
M. Jolin-Barrette : Bien, M. le
Président, j'espère que la députée de Joliette est consciente qu'il y a une
distinction fondamentale entre les membres de la magistrature puis les gens qui
sont des employés de l'État, le lien hiérarchique associé à cela, parce que, de
la façon dont est construit le projet de loi, là, on est dans une sphère où on
doit respecter la séparation des pouvoirs, hein? Puis, pour ce faire, et vous
l'aurez noté, ce qu'on dit, c'est que le candidat à la magistrature doit
s'engager à suivre cette formation-là.
Alors, c'est un engagement sur l'honneur. Le
juge en exercice, lui, on dit que le Conseil de la magistrature doit rendre
disponible une formation de perfectionnement sur ces réalités-là. Il en revient
au juge de suivre ou non cette formation-là. Le juge suppléant, là, c'est un
peu différent. S'il souhaite continuer à siéger, il devra avoir suivi la
formation, parce qu'il y a un décret d'autorisation. Dans le rapport qui est
soumis à l'Assemblée nationale, nombre de juges et la formation. On ne vient pas
dire quels juges l'ont suivie, quel autre juge ne l'a pas suivie. C'est fort
différent en raison de la séparation des pouvoirs.
Ce n'est pas la même chose que les employés de
l'État, qui, lorsque l'État dit : Vous suivez tel type de formation, vous
la suivez. Il y a un lien hiérarchique, alors qu'avec la magistrature il n'y a
pas de lien hiérarchique, et c'est pour ça que c'est écrit de cette façon-là.
C'est pour ça que le fédéral l'a écrit de cette façon-là aussi. Donc, le
Conseil de la magistrature ont l'autonomie de déterminer de quelle façon est
dispensée la formation à leurs propres juges, puis il n'y a pas d'immixtion de
la part de l'exécutif ou du législatif là-dedans parce qu'il y a une séparation
des pouvoirs, parce que je respecte la séparation des pouvoirs. Voyez-vous la
distinction?
Donc, moi, je ne peux pas dire : Tel juge
va aller s'asseoir dans telle salle et va suivre tel contenu de telle formation
à telle heure. Ça, je ne peux pas dire ça. Ça relève du Conseil de la
magistrature. Donc, c'est pour ça que c'est libellé de cette façon-là. Mais là
je comprends qu'on me parle des autres personnes qui vont intervenir au
tribunal et je veux juste vous illustrer un point sur la magistrature. On met
ça en place, mais il n'y a personne qui va forcer qui que ce soit à suivre
cette formation-là. Je ne peux pas légalement le faire. Vous êtes consciente de
ça. O.K., ça fait que, là, on est sur la formation des juges, les candidats.
Mme Hivon : Je
comprends tout ça, mais il y a quand même cinq articles du projet de loi
là-dessus : ceintures, bretelles, reddition de comptes, rapports,
formations, qui va être consulté. On se comprend qu'on va loin pour un
organisme avec lequel le ministre n'a pas de lien hiérarchique, O.K.? On parle
des irritants parce qu'on essaie de trouver des moyens aussi d'aplanir les
irritants. À partir du moment où le ministre dit : Il y a ça, le Conseil
de la magistrature est responsable, par exemple, puis je veux savoir ce qu'il
advient de ça... Je ne dis pas qu'il faut tout enlever ça. Je dis juste que...
Pourquoi... Je comprends son affaire, qu'il dit : On a nos... les
employés, ils ont un lien hiérarchique. Je veux bien, là, mais c'est tout aussi
important, je crois, de savoir, les ministères et organismes, ils en ont organisé
combien, il y en a combien qui en ont suivi. C'est une chose de dire : Ça
va être obligatoire. C'est quoi, après, la réalité, puis comment ça va se
traduire, puis ça va être quoi, le rythme pour savoir... avec lequel les
formations vont être données? Ça fait que tout ce que je dis au ministre :
On n'est pas là, là.
M. Jolin-Barrette : Bien,
alors, traitons l'article 4.
Mme Hivon : Mais
je l'encourage fortement à réfléchir.
• (18 h 10) •
M. Jolin-Barrette :
D'accord, mais traitons l'article 4.
Le Président (M. Benjamin) :
Merci. Mme la députée de Verdun.
Mme Melançon : Merci, M. le
Président. Bien, je vais prendre le ministre au mot, parce que, lorsqu'il m'a
répondu tantôt, il m'a ramenée à la recommandation 162 du rapport Rebâtir
la confiance, alors : «Offrir aux juges siégeant au tribunal
spécialisé une formation spécifique et continue sur les problématiques
d'agression sexuelle et de violence conjugale, portant autant sur le droit et
le savoir-faire que sur le savoir-être.»
Moi, je pense, en tout respect, qu'à ce
moment-ci, peut-être, on pourrait ajouter à l'article 4, donc, le
programme de perfectionnement. Moi, je pense qu'on doit dire «de formation
spécifique et continue», parce que, si on
veut rester dans l'esprit, parce que le ministre m'a ramenée à l'esprit du rapport, peut-être
pourrions-nous simplement reprendre un libellé qui ressemble à la recommandation 162
du rapport, dans laquelle on peut parler d'un programme de perfectionnement ou un programme de formation spécifique et continue,
parce que c'est le mot «continue», je crois, qui est
aussi important à ce moment-ci et qui était dans l'esprit du rapport Rebâtir
la confiance.
M. Jolin-Barrette : Je veux
juste être très clair, O.K.? La députée de Verdun m'a dit : Je veux éviter
toute possibilité de contestation, O.K.? Ce à quoi elle m'invite en lien avec
ça amène des risques supplémentaires sur la séparation des pouvoirs. Alors, je
comprends ce qu'elle veut dire, mais, puisque la formation des juges relève de
l'indépendance judiciaire, je ne peux pas aller dans cette direction-là.
Mme Melançon : Est-ce qu'on
peut proposer? Est-ce qu'on peut proposer, dans le fond, à la magistrature...
parce que c'est ça qu'on est en train de faire, là. À ce moment-ci, on est en
train de proposer. Donc, dans le fond, ce que les législateurs veulent, c'est
de proposer, dans le fond, à la législature... à la magistrature, dis-je, en
tout cas, au conseil, d'offrir une formation, bien sûr, spécifique et continue.
C'est ça, l'esprit, puis c'est vous qui m'avez ramenée à la recommandation 162,
M. le ministre.
Donc, moi, je me dis : Est-ce qu'on peut quand
même faire la proposition, sans l'exiger, mais dire : Nous, là, ce qu'on
veut, comme législateurs, c'est de s'assurer qu'un juge qui est en poste va
continuer à suivre une formation, et nous le souhaitons, qu'elle soit continue.
Dans le fond, ce n'est pas sans l'exiger, parce que c'est le ministre qui nous
dit : Moi, je peux envoyer des messages auprès de la magistrature, mais je
ne peux pas les obliger. Mais est-ce qu'on peut quand même, parce que c'est ce
qu'on est en train de faire de toute façon, faire une proposition que, le programme,
il soit spécifique et continu?
M. Jolin-Barrette : Le terme
que nous utilisons, c'est «perfectionnement». C'est large. Ça relève du Conseil
de magistrature, en tout respect de leur indépendance judiciaire. Alors, il
revient à la cour de donner les formations qui lui semblent appropriées pour la
formation des juges. Alors, ça relève de l'indépendance judiciaire, la
formation. Alors, toute immixtion en lien avec la formation des juges pourrait
avoir des conséquences. Alors, on s'est assurés de faire en sorte que le
libellé que nous avons permet de respecter l'indépendance judiciaire, la
séparation des pouvoirs. Donc, c'est un programme de perfectionnement. Les
juges suivent déjà de la formation. On leur dit : Il faut qu'un programme
de perfectionnement soit là, notamment sur les réalités de violence sexuelle et
conjugale.
Donc, je comprends l'intention de la députée de
Verdun. Je lui dis : Soyons prudents sur le type de libellé que nous
avons. Puis du perfectionnement, un argument de texte, ça veut pas mal dire formation
continue ici. Vous perfectionnez... Honnêtement, est-ce que la perfection
existe? Je ne le sais pas, mais on peut tendre à la perfection. Donc, du perfectionnement, c'est travailler à
aller vers la perfection. Alors, j'imagine qu'on ne réussit pas ça d'un
coup.
Le Président (M. Benjamin) :
Est-ce que j'ai...
M. Jolin-Barrette : Je n'ai pas
entendu le commentaire de la députée de Sherbrooke parce qu'elle n'avait pas la
parole, M. le Président.
Le Président (M. Benjamin) : Je
ne l'ai pas entendu non plus, M. le ministre, non. Alors, est-ce que j'ai
d'autres interventions? Mme la députée de Sherbrooke.
Mme Labrie : Ce que j'avais
dit, c'était qu'avec le projet de loi non plus on n'avait pas atteint la
perfection du premier coup, mais on y travaille bien, travaille très
sérieusement.
Le Président (M. Benjamin) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, je
reçois le commentaire de la députée de Sherbrooke avec ouverture et
bienveillance, M. le Président.
Le Président (M. Benjamin) : Est-ce
que j'ai d'autres interventions? Si je n'ai pas... S'il n'y a pas d'autre
intervention, nous allons donc procéder à la mise aux voix. Est-ce que l'article 4
est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président
(M. Benjamin) : Merci. Donc, après le 4, on poursuit en ce moment,
maintenant, avec l'article 5. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui, l'article 5,
M. le Président, c'est :
L'article 93 de cette loi est modifié par
l'ajout, à la fin, de l'alinéa suivant :
«Pour être autorisé à exercer de telles
fonctions, un juge à la retraite doit avoir suivi le programme de
perfectionnement sur les réalités relatives à la violence sexuelle et à la
violence conjugale établi par le Conseil de la magistrature.»
Commentaire. Avec la modification proposée par
le présent article, les juges de la Cour du Québec à la retraite ne pourraient être autorisés à exercer des fonctions
judiciaires que s'ils ont suivi le programme de perfectionnement sur les réalités relatives à la violence sexuelle
et à la violence conjugale qui serait établi par le Conseil de la magistrature.
Le Président (M. Benjamin) : Mme
la députée de Joliette.
Mme Hivon : ...à
la retraite, qu'importe la chambre où ils vont siéger. Et j'aimerais que le ministre
nous explique le raisonnement qui a précédé sa volonté d'inscrire l'obligation
de suivre, donc, avant qu'un juge à la retraite puisse sièger, dans le fond...
M. Jolin-Barrette : Dans le
fond...
Mme Hivon : Donc
là, ce n'est plus un engagement sur l'honneur. Là, on se comprend, on est une
étape de plus. Il doit y avoir... Le juge à la retraite qui veut siéger doit
fournir la preuve qu'il a suivi le programme. Et je veux qu'on me précise est-ce
que c'est pour l'ensemble des chambres et pour quelle raison le ministre a fait
ce choix-là d'assujettir tous les juges à la retraite.
M. Jolin-Barrette : Bon,
première question, oui, ça concerne les juges de toutes les chambres. Il faut
savoir que la juridiction d'un juge de la Cour du Québec, elle est nommée à
l'ensemble... Il est nommé comme juge de Cour du Québec. Généralement, ils
soumettent leur candidature pour une chambre ou deux chambres, ou même parfois
ça arrive que certains concours, c'est pour trois chambres, dans les plus
petits districts qui siègent dans les trois chambres. Mais la juridiction d'un
juge à la Cour du Québec, elle est sur les trois chambres. Donc, ça couvre les
trois chambres. Voyez-vous, tous les candidats à la magistrature devront
s'engager sur l'honneur à suivre cette formation-là dès le départ, peu importe
la chambre sur laquelle ils soumettent leur candidature. Au bout du processus, tous les juges qui voudront continuer à
siéger devront avoir suivi cette formation-là s'ils souhaitent continuer
à exercer leurs fonctions, peu importe la chambre.
Mme Hivon :
Le moment... Quand on dit «continuer», là... Quand... Je veux dire, on parle
des juges qui sont, en ce moment, à la retraite. Je veux juste voir, là,
en termes de transition, qui ça implique.
M. Jolin-Barrette : Dans le
fond, il y a une transition, là, je
crois, de six mois dans les dispositions transitoires, là. Dans
le fond, un juge qui est... Il faut
savoir que, dans le fond, lorsque vous êtes un juge suppléant... Donc, à
la Cour supérieure, à la Cour
d'appel, on parle de juge surnuméraire. Ici, au Québec, à la Cour du Québec,
c'est juge suppléant.
Donc, vous prenez votre retraite, vous pouvez
être désigné comme juge suppléant. À ce moment-là, ça veut dire que vous êtes à
la retraite, mais que vous revenez à la journée, O.K.? Mais, pour être autorisé
à siéger comme juge suppléant, ça prend un décret qui est présenté par le ministre
de la Justice pour pouvoir exercer vos fonctions. Généralement, on prend un
décret d'une année pour que le juge puisse continuer d'exercer ses fonctions,
et il est renouvelé annuellement.
Donc, exemple, un juge qui est en fonction
aujourd'hui, O.K., puis qui prendrait sa retraite en 2023, bien, si, en 2023,
il veut être désigné à titre de juge suppléant, avant d'autoriser le décret, il
va devoir avoir suivi la formation, même chose pour le juge qui est
actuellement juge suppléant, O.K.? Celui qui est juge suppléant, là, ça se
termine... supposons, il a été nommé, puis ça se termine un an après son
mandat, le décret, ça m'arrive de reprendre des décrets pour des juges qui sont
à la retraite pour l'année suivante, à ce moment-là, ils devront avoir suivi la
formation.
Mme Hivon : Donc,
c'est toujours un an quand le décret est pris?
M. Jolin-Barrette :
Généralement, c'est un an, effectivement.
• (18 h 20) •
Mme Hivon :
O.K. Ma seule préoccupation, c'est... Ces juges-là à la retraite, évidemment,
sont très importants dans le système. Le système est ainsi fait qu'il y
a beaucoup de juges à la retraite qui viennent donner du temps pour entendre des causes. Est-ce qu'on risque d'avoir
un impact sur la fluidité, et donc la célérité, si, par exemple, les
juges, avant de pouvoir transiter de
régime... Je tombe à la retraite, je dois prendre ma formation. Ça va se faire
de manière, j'imagine, pas parallèle,
parce qu'il faut que ça soit fait avant de pouvoir continuer à siéger. Donc,
est-ce qu'il y a des évaluations qui ont
été faites de ça? Parce que, souvent, les juges à la retraite, ils continuent
plusieurs années, mais là, une fois que ça va être passé, avant d'avoir
le renouvellement du décret, il va falloir qu'ils montrent qu'ils ont suivi la
formation. C'est ça? O.K. Est-ce que ça a été... Il y a combien de juges à la
retraite qui siègent comme juges suppléants?
M. Jolin-Barrette :
Généralement, en moyenne, 70.
Mme Hivon : 70
sur combien de juges en tout?
M. Jolin-Barrette : Il y a...
Bien, en fait, est-ce que c'est 308? 308 postes de juge, est-ce que c'est en
plus des juges à la retraite? On va vérifier.
Mme Hivon : O.K. Ça
fait que c'est quand même un... Moi, je ne suis vraiment pas contre, au contraire,
là, mais je veux juste voir l'impact sur... dans le temps, là.
M. Jolin-Barrette : Mais le
Conseil de la magistrature va être en mesure de former.
Mme Hivon : Bien, on espère que tout ça est fluide, dans la
concertation, et tout ça, pour maximiser ces chances-là.
M. Jolin-Barrette : Il y a un
avantage indéniable à être juge suppléant aussi.
Mme Hivon : Non,
c'est sûr, mais on imagine... S'il y a des délais dans les signatures des
décrets par le ministre pour autoriser des juges à continuer à siéger, ça ne
sera pas gagnant pour le système de justice.
M. Jolin-Barrette : Je
comprends.
Le Président (M. Benjamin) :
Donc, Mme la députée de Verdun.
Mme Melançon : Merci, M. le
Président. Là, ici, on est plus direct, là, parce que, tout à l'heure, comme on
le mentionnait, c'était un engagement sur l'honneur pour ceux qui sont
candidats à devenir juges, alors que, là, ce sont les juges à la retraite dont
il est question, et pour être autorisés à exercer une telle fonction. Est-ce
que le ministre a d'autres exemples qui exigent, donc, une autorisation comme
celle-là pour les ministres ou est-ce que c'est un nouveau concept qui est
intégré?
Le Président (M. Benjamin) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui,
excusez-moi, est-ce que vous pourriez répéter seulement la fin, s'il vous plaît?
Mme Melançon : Bien sûr. Ce que
je m'interrogeais, c'est que, tout à l'heure, on disait que, pour les juges qui
sont candidats, donc, candidats à devenir juge, donc, c'était un engagement sur
l'honneur. Ici, on parle des juges à la
retraite, mais ici on marque : «Pour être autorisé à exercer de telles
fonctions...» Est-ce qu'il y a
d'autres exigences comme ça qui sont inscrites pour pouvoir autoriser à
qu'ils puissent exercer des fonctions, les juges?
M. Jolin-Barrette : Bien, c'est
une décision discrétionnaire de la part du ministre.
Mme Melançon :
O.K., mais est-ce qu'il y a d'autres exemples qui existent, de discrétionnaire
comme celui-là?
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, la décision d'autoriser une personne qui a pris sa retraite à titre de
juge suppléant, c'est une décision qui est discrétionnaire, qui relève du
gouvernement. Est-ce que... Dans la Loi sur les tribunaux judiciaires, ce n'est
pas prévu qu'il y ait des conditions particulières de prévues associées à ça.
Donc, on en fait une condition. C'est une nouvelle condition.
Mme Melançon : C'est une
nouvelle condition et c'est un aspect qui est complètement nouveau aussi, que
de mettre une condition à l'exercice d'une fonction de juge à la retraite
actuellement. Il n'y a pas d'autres exigences pour les juges à la retraite?
M. Jolin-Barrette : Bien oui,
il y a des exigences. Il y a des disponibilités budgétaires associées à ça. Le
fait que le gouvernement du Québec autorise, supposons, 70 juges,
annuellement, par année, c'est parce qu'il y a un choix également de l'État québécois
de consacrer les sommes nécessaires et requises à la rémunération puis au
traitement des juges supplémentaires. Le gouvernement du Québec pourrait
dire : Bien non, il n'y a pas de juges suppléants. Donc, en complément à
la question de la députée de Joliette, il y a 308 juges à la Cour du
Québec plus les 69 juges suppléants.
Mme Melançon : Et plus les
39 juges de paix magistrats.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais,
eux, dans le fond, l'étendue de leur pouvoir n'est pas le même que ceux des
juges de la Cour du Québec. Ils n'ont pas la même juridiction que les juges de
la Cour du Québec.
Mme Melançon : Sauf qu'à
l'article 6 on va quand même en traiter.
M. Jolin-Barrette :
Bien, c'est parce que, dans le fond, c'est une catégorie de juges distincts.
Dans le fond, un juge de la Cour du Québec a tous les pouvoirs d'un juge de
paix magistrat, mais un juge de paix magistrat n'a pas tous les pouvoirs d'une
juge de la Cour du Québec.
Mme Melançon : Tout à fait.
D'ailleurs, c'est pour ça... Je me rappelle bien que... Je pense que c'est ma collègue de Joliette, là, qui avait posé la
question dès le départ, à savoir pourquoi est-ce qu'on mettait les juges
magistrats au tout départ dans le projet de loi, là, qu'on avait commencé à
étudier. Quand on dit : «Pour être autorisé à exercer [une telle fonction], un juge à la retraite doit avoir
suivi le programme de perfectionnement», donc, le programme doit être
fini, doit... La formation doit être faite. La durée d'un perfectionnement
comme celui-là, c'est combien de temps?
M. Jolin-Barrette : En fait,
ça, c'est déterminé par le Conseil de la magistrature. Dans le fond, nous, on
dit : Ils doivent développer un programme de perfectionnement. Alors,
c'est la cour qui détermine la formation des juges, incluant la durée, la
fréquence et le perfectionnement des juges.
Mme Melançon : Je vous entends,
mais est-ce qu'on a des exemples? Est-ce qu'on sait, grosso modo, c'est combien
de temps, la durée d'un programme de perfectionnement?
M. Jolin-Barrette : Ça relève
de la discrétion de la cour. La discrétion...
Mme Melançon : Ça fait que, là, on
n'a pas idée... parce qu'un programme de perfectionnement, selon certains
programmes, ça peut être d'une journée ou d'un an. Moi, je veux juste savoir...
On n'a pas idée du tout, du tout à ce moment-ci...
M. Jolin-Barrette : Le Conseil
de la magistrature est souverain dans l'offre de formation qui est offerte aux
juges. Ça leur arrive d'avoir des ateliers, des colloques, demi-journée, une
journée, deux jours, quatre jours, mais, comme je vous le dis, ça relève du
Conseil de la magistrature. Alors, peut-être qu'il serait approprié que le
Conseil de la magistrature organise un colloque, une fois par année, d'une ou
plusieurs journées, sur la nature de ces sujets, mais ce n'est pas à moi à le
dire. Ça relève de l'indépendance judiciaire.
Mme Melançon : M. le Président,
je veux juste rassurer le ministre, là, ce n'était pas... C'est loin d'être un piège. Moi, je voulais juste savoir, tu sais...
parce que je ne connais pas ça. Donc, je voulais juste savoir... Dans le fond, un programme de perfectionnement... parce que, pour avoir fait des
programmes de fonctionnement pas nécessairement en violence sexuelle ou
en violence conjugale, bien, parfois ça peut être... s'étendre sur une durée de
quelques jours, quelques semaines, quelques mois.
Donc, je voulais juste avoir une idée, parce
qu'à partir du moment où ce sont des juges à la retraite, puis avec ce que le ministre nous disait tout à l'heure, avec le six
mois puis avec toutes les contraintes, je voulais juste savoir, dans le temps, est-ce
qu'on va pouvoir, justement,
permettre qu'on puisse atterrir, puis qu'on ne soit pas en déficit de
juges pour, justement, entendre les
causes... qui pourrait nous permettre, si on a un déficit de juges, de ne pas
pouvoir déployer le tribunal spécialisé sur l'ensemble du territoire,
parce qu'on aura aussi exigé... pour autoriser un juge à la retraite à venir
siéger. Donc, c'était juste pour pouvoir m'assurer qu'on n'était pas en train
de créer un vide dans lequel on était pour contredire notre volonté que l'on
veut atteindre à l'article 3, deuxième paragraphe, deuxième alinéa, voilà.
Le Président (M. Benjamin) :
Est-ce que j'ai d'autres interventions sur l'article 5? S'il n'y a pas
d'autre intervention, nous allons donc procéder à la mise aux voix. Est-ce que l'article 5
est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Benjamin) :
...
M. Jolin-Barrette : ...M. le
Président. Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 162, du
suivant :
«162.1. Toute personne qui se porte candidate à
la fonction de juge de paix magistrat doit s'engager à suivre, si elle est
nommée, le programme de perfectionnement sur les réalités relatives à la
violence sexuelle et à la violence conjugale établi par le Conseil de la
magistrature.»
Avec la modification proposée par le présent
article, les candidats à la fonction de juge de paix magistrat devraient
s'engager à suivre, s'ils sont nommés, le programme de perfectionnement sur les
réalités relatives à la violence sexuelle et à la violence conjugale qui sera
établi par le Conseil de la magistrature. Donc là, c'est le même article, sauf
pour les candidats à la fonction de juge de paix magistrat.
• (18 h 30) •
Le Président (M. Benjamin) :
Mme la députée de Verdun.
Mme Melançon : Je vais revenir
avec une question, puis là c'est vraiment pour qu'on puisse m'éclairer. Je sais
qu'on avait répondu, au début du présent... de l'étude du projet de loi, là. Le
juge de paix magistrat... parce que, tout à l'heure, on en parlait, là, justement,
un juge de paix magistrat va recevoir des causes en violence conjugale et en violence
sexuelle.
M. Jolin-Barrette :
En fait, au tout début de la loi, on parlait des juges de cour municipale.
Donc, les juges de cour municipale, il y en a 80 quelques, il y a trois cours
avec des juges permanents, municipales. Donc, les autres, c'est des juges à la
séance. Et je pense qu'il y a une quinzaine de cours municipales qui traitent
du droit criminel.
Les juges de paix magistrats, ils ont des
compétences concurrentes avec les juges de la Cour du Québec, donc, notamment,
ils vont entendre les infractions de nature statutaire. En fait, ils
instruisent les poursuites introduites en vertu de la partie 27 du Code
criminel, relativement aux infractions de lois fédérales autres que le Code
criminel ou réglementant certaines drogues et autres substances. Ils ont le
pouvoir d'autoriser des mandats. Donc, notamment, si vous allez faire un mandat
d'arrestation puis que c'est une infraction de nature sexuelle ou de violence conjugale, bien, nécessairement, c'est connexe, c'est un petit peu plus... La victime n'est pas nécessairement dans la salle, mais
le dossier... peut traiter un dossier de violence sexuelle ou conjugale aussi.
Donc, c'est important d'avoir une sensibilité relativement à ces dossiers-là.
Le Président (M. Benjamin) : Ça
va, Mme la députée de Verdun?
M. Jolin-Barrette : ...mandat
d'arrestation ou mandat de perquisition.
Le Président (M. Benjamin) : Mme
la députée de Joliette.
Mme Hivon : Bien,
précisément, pour l'éclairage collectif, est-ce qu'un juge de paix magistrat
peut entendre devant lui des victimes de violence sexuelle et conjugale?
M. Jolin-Barrette : Exemple, un
procès en matière de violence sexuelle ou conjugale...
Mme Hivon : Ça,
non.
M. Jolin-Barrette : En
matière... supposons, par poursuite sommaire? Je vais faire la vérification.
Mme Hivon : Oui.
Parce que les échos qu'on a des praticiens, là, c'est que les juges de paix
magistrats, disons qu'on est vraiment
dans un autre univers. Beaucoup trouvent que d'exiger la formation
pour tous les juges de paix magistrats, y compris ceux à la retraite,
c'est quand même une coche de plus par rapport au reste où ça se justifie assez
bien, parce que ce que je reçois comme argument, c'est qu'ils n'entendent pas
de victimes, de plaignants ou de parties comme telles qui peuvent avoir été
confrontées à ces réalités-là. Par exemple, le ministre nous a bien expliqué
que ce n'était pas juste les juges en chambre criminelle parce que ça se peut
qu'en jeunesse, ça se peut aussi qu'en civil dans les causes du droit de la
famille, il y ait vraiment des répercussions puis que ce soit vraiment important
pour le juge d'être bien sensibilisé, formé à cet égard-là. Pour les juges de
paix magistrats, je pense que ça serait vraiment éclairant que le ministre nous
plaide pourquoi il y a ce lien de rattachement là possible, parce qu'on semble
nous rapporter que c'est beaucoup, tu sais, c'est beaucoup plus technique, là.
M. Jolin-Barrette : Bien, moi,
je vous dirais, là, que je suis très, très à l'aise que tous les membres de la
magistrature au Québec soient assujettis à un programme de perfectionnement sur
les violences sexuelles et conjugales. Les gens... Les juges entendent toutes
sortes de dossiers, mais ça ne veut pas dire que lorsque quelqu'un vient
témoigner, même si ce n'est pas une cause de violence conjugale ou de violence
sexuelle, c'est une infraction statutaire, c'est une infraction pénale, tout
ça, ça ne veut pas dire que la personne qui va venir témoigner un jour, on ne
devrait pas avoir une sensibilité par rapport à la réalité si c'est porté à
l'attention du juge.
L'autre
point, ils autorisent des mandats de perquisition, ils autorisent des mandats
d'arrestation, notamment dans des cas d'agression sexuelle et de violence
conjugale, ça, le juge de paix magistrat, en son bureau ou en salle de cour,
a le pouvoir de faire ça aussi. Alors, le
fait que le juge sache lorsqu'il y a une dénonciation qui est faite puis qui va
venir délivrer un mandat d'arrestation, que c'est un dossier de violence
sexuelle supposons, violence sexuelle sur des mineurs, exploitation sexuelle, agression sexuelle pour arrêter quelqu'un,
peut-être que le juge, lorsqu'il a le mandat, il posera
des questions pour autoriser le mandat en lien avec le fait qu'il a été
sensibilisé à certaines réalités ou préoccupations.
Puis ça, je pense, lorsqu'on parlait, là, du processus
judiciaire, tout à l'heure, que ça doit être sous le couvert, le fait que les
gens soient davantage informés, davantage sensibilisés, c'est le milieu
judiciaire. Puis un juge de paix magistrat, ça siège en chambre criminelle et
pénale aussi, il va fréquenter des collègues aussi de la Cour du Québec. Alors,
le fait que tout le monde ait cette formation, il y en a qui vont être
davantage spécialisés, mais le fait qu'ils soient sensibilisés à cette
réalité-là, aux mythes et préjugés, le fait de recevoir davantage de formation,
ça m'apparaît quelque chose d'important dans notre société, où on est rendu
comme société.
Vous savez, le fait de pouvoir siéger, de
pouvoir prendre des décisions qui ont un impact sur la vie des gens. On parle d'un très petit nombre de personnes, là,
qui ont ce privilège et également cette responsabilité fort importante.
Comme juge de paix magistrat, comme juge de la Cour du Québec, comme juge d'une
cour municipale, vous êtes investi d'un pouvoir qui est régalien, qui est
délégué par l'État pour rendre justice.
Et, dans cette considération-là, moi, il m'apparaît
fondamental que les gens qui ont cette responsabilité-là soient, dans le cadre
de notre société d'aujourd'hui, après tout ce qu'on a vécu, après les avancées
significatives, que l'État dise : Oui, c'est vraiment important, et nous
considérons que vous devez être sensibilisés à ces réalités-là. Alors, c'est
pour ça qu'on vise tous les juges.
Mme Hivon :
Merci, M. le Président.
Le Président
(M. Benjamin) : Merci, Mme la députée. Est-ce que j'ai
d'autres interventions sur l'article 6? S'il n'y a pas d'autre
intervention, donc nous allons procéder à la mise aux voix. Est-ce que
l'article 6 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le Président
(M. Benjamin) : Merci. Nous passons maintenant à
l'article 7.
M. Jolin-Barrette : Oui. L'article 7. L'article 165.1 de
cette loi est modifié par l'ajout, à la fin, de l'alinéa suivant :
«Pour être autorisé à
exercer de telles fonctions, un juge de paix magistrat à la retraite doit avoir
suivi le programme de perfectionnement sur les réalités relatives à la violence
sexuelle et à la violence conjugale établi par le Conseil de la magistrature.»
Donc, avec la
modification proposée par le présent article, les juges de paix magistrat à la
retraite ne pourraient être autorisés à exercer des fonctions judiciaires que
s'ils ont suivi le programme de perfectionnement sur les réalités relatives à la violence sexuelle et à la violence conjugale
qui serait établi par le Conseil de la magistrature.
Donc, c'est le
pendant des juges de la Cour du Québec qui sont à la retraite, les juges de
paix magistrat à la retraite devraient également suivre cette formation.
Le Président
(M. Benjamin) : Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon :
Donc, juste pour qu'on se comprenne bien, tantôt, on l'a passé vite, là, quand
c'était les juges de la Cour du Québec à la
retraite, mais ce que ça veut dire, c'est que, concrètement, ceux qui vont
avoir l'obligation, c'est les
nouveaux juges, donc, qui vont devoir, avant d'être nommés, s'engager sur
l'honneur à suivre la formation, puis les
juges qui sont retraités qui vont avoir l'obligation de la suivre pour revenir
siéger. Évidemment, tous les juges... Oui.
M. Jolin-Barrette :
Juste une spécification. Généralement, là, les juges retraités, là, ils ne
prennent pas leur retraite puis ils reviennent, là, généralement, ils prennent
leur retraite, mais ils continuent, là...
Mme Hivon :
Oui, c'est en continu, exact.
M. Jolin-Barrette :
...ils annoncent leur retraite comme un an d'avance quasiment puis ils
disent : Je vais prendre ma retraite.
Puis, avant qu'ils prennent leur retraite, on dit : Bien, on va adopter un
décret pour qu'ils prolongent.
Mme Hivon :
C'est ça. Puis on peut, donc, s'imaginer que, pendant cette période-là, où ils
prévoient leur retraite et qu'ils
prévoient continuer à siéger après comme juges suppléants, ils vont faire le
programme de perfectionnement, mais tous les autres juges...
M. Jolin-Barrette :
Il ne faudrait pas, et j'exprime un souhait, il ne faudrait pas attendre d'être
rendu à la veille de la retraite pour se dire : Bon, bien, je veux
continuer à travailler, ça fait que je vais suivre le programme, mais ça, ça
relève de l'indépendance judiciaire.
Mme Hivon :
Exact. Donc, je veux juste qu'ici on soit bien conscient que, pour tous ces
juges-là qui ne sont pas sur le point de prendre leur retraite puis qui veulent
revenir siéger ou qui ne sont pas un nouveau juge qui veut être nommé, il n'y a
pas d'obligation.
• (18 h 40) •
M. Jolin-Barrette :
Pour les juges en exercice, ils sont invités à suivre la formation.
Mme Hivon :
Mais il n'y a rien, je veux dire, il n'y a rien dans la loi qui...
M. Jolin-Barrette :
Je ne peux pas obliger un juge en exercice à suivre une formation.
Mme Hivon :
C'est ça. Donc, si on se parle clairement, le ministre prend les possibilités
qu'il a, soit parce qu'il faut qu'il signe un décret pour autoriser un juge à
la retraite à revenir siéger ou soit parce qu'il a le pouvoir, évidemment, de
nommer un juge, de le faire. Mais juste pour que ce soit clair pour tout le
monde, les autres juges, il n'y a pas d'obligation parce que le ministre n'a
pas la capacité de l'obliger.
M. Jolin-Barrette :
En vertu de l'indépendance judiciaire...
Mme Hivon :
Tout à fait.
M. Jolin-Barrette :
...puis en vertu de la séparation des pouvoirs, la formation des juges relève
du Conseil de la magistrature.
Mme Hivon :
Puis pour la question, là, juste revenir brièvement sur la question que c'est
une nouvelle condition de nomination, ça veut dire que maintenant, dans les
avis de nomination de juge, ça va être inscrit que le candidat va devoir
s'engager à suivre... ça va être inscrit clairement, hein?
M. Jolin-Barrette : C'est dans le cadre du formulaire prescrit par
règlement dont vous avez copié à la fin du projet de loi qui va permettre... Dans le fond, à la
fin : je m'engage, si je suis nommé, à suivre le programme de
perfectionnement sur les réalités relatives à la violence sexuelle ou à la
violence conjugale établi par le Conseil de la magistrature.
Mme Hivon : Les pages 31
et suivantes de notre cahier, là, donc ça va être inscrit là. O.K., c'est beau,
M. le Président.
Le Président (M. Benjamin) :
Merci, Mme la députée. Est-ce que j'ai d'autres interventions sur
l'article 7? S'il n'y a pas d'autres interventions, nous allons, donc,
procéder à la mise aux voix. Est-ce que l'article 7 est adopté?
Des voix : Adopté.
Le Président (M. Benjamin) :
Merci. Nous poursuivons. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
L'article 8. L'article 257 de cette loi est modifié par l'ajout, à la
fin, de l'alinéa suivant :
«Le conseil établit notamment un programme de
perfectionnement sur les réalités relatives à la violence sexuelle et à la
violence conjugale. À cette fin, il consulte les personnes et les organismes
qu'il estime appropriés en raison de leur expérience, de leur expertise, de
leur sensibilité ou de leur intérêt en ces matières.»
Cet article prévoit que le Conseil de la
magistrature devrait établir un programme de perfectionnement sur les réalités
relatives à la violence sexuelle et à la violence conjugale.
Avant
d'établir ce programme, le conseil consulterait les personnes et les organismes qu'il estimerait appropriés.
Tous les juges, même ceux déjà nommés, pourraient suivre ce programme de
perfectionnement.
Le Président (M. Benjamin) :
Est-ce que j'ai des interventions? Mme la députée de Verdun.
Mme Melançon : Merci,
M. le Président. Dans le fond, ici, de la façon dont on le lit, c'est que
le conseil établit, notamment, un programme de perfectionnement sur les
réalités. Bien, peut-être qu'on l'écrit, mais ça revient un peu aux questions
que je posais tout à l'heure au ministre, peut-être est-ce que ce
programme de perfectionnement sur les réalités existe déjà. C'est possible.
M. Jolin-Barrette : Bien,
écoutez, c'est possible qu'il y ait de la formation en lien avec les violences
sexuelles et les violences conjugales de la part de la Cour du Québec, de la
part du Conseil de la magistrature.
Mme Melançon : C'est pour ça
que je posais la question tout à l'heure, M. le Président, dans le fond, à
savoir est-ce que ça se peut que ça existe
déjà. C'est pour ça que je posais la question aussi à savoir est-ce qu'il y
avait eu un échange entre le Conseil de la magistrature et le ministre de la
Justice pour savoir est-ce que ça, ça existe déjà.
M. Jolin-Barrette : Nous, on vient très clairement l'établir, qu'il
doit y avoir un programme de perfectionnement. Et que, et que, pour
construire ce programme de perfectionnement là, le Conseil de la magistrature
consulte les personnes ou les organismes qu'il
estime appropriés en raison de leur expérience, de leur expertise, de leur
sensibilité et de leur intérêt en ces matières.
Mme Melançon :
Donc, ma question, M. le Président : Est-ce que c'est possible qu'il
y ait déjà un programme de perfectionnement comme ça avec consultation
des personnes? Est-ce que ça se peut que ça existe? C'est une question dont je
n'ai pas la réponse.
M. Jolin-Barrette : C'est
possible, c'est possible.
Mme Melançon : Mais... ou,
justement, la collaboration... Puis là je vais, bien sûr, aller fouiller dans
le document qui nous a été déposé par le Conseil de la magistrature sur le
sujet. Pas que je sois contre l'idée, au contraire, parce que ça va exactement
dans l'esprit de ce que nous discutions à l'époque. Ma question, c'est juste de
savoir, si on introduit ici un article comme celui-là, est-ce que c'est pour
nous... est-ce que c'est pour qu'on se fasse plaisir entre nous ou si c'est
vraiment parce que là, le ministre, tout à l'heure, disait : Tu sais, je ne
peux pas, je ne peux pas aller plus loin, puis il nous invitait à la prudence.
Puis, depuis le début, moi, je dis : On
doit être prudent, il faut aplanir les irritants, je ne veux pas que ce projet
de loi là soit contesté par la Cour du Québec notamment, mais, à partir du
moment où on se dit tout ça puis qu'on introduit cet article-là sur lequel on
ne peut pas dire qu'il va y avoir un programme de perfectionnement, mais qu'en
même temps on demande, en plus, qu'il y ait une consultation des personnes et des
organismes, mais ça se peut que ça existe, mais ça se peut que ça n'existe pas,
mais ça se peut aussi qu'on ne puisse pas l'exiger... Donc, je trouve qu'on est
dans... il y a beaucoup, beaucoup de non-dits ici, puis je sais, là, qu'on est
dans un terrain miné, dangereux, glissant, bref, on est dans l'ordre de ce qui
nous appartient peut-être ou peut-être pas.
Donc,
c'est pour ça que je pose la question au ministre : Est-ce qu'à sa
connaissance à lui, comme ministre de la Justice, aujourd'hui, il y a un
programme de perfectionnement sur les réalités relatives aux violences
sexuelles et à la violence conjugale? Et est-ce que c'est possible que, de ces
programmes-là qui sont offerts actuellement ce soit en lien... en tout cas, qu'il y ait un lien déjà préalable avec les
organismes, est-ce que c'est une chose qui est possible?
M. Jolin-Barrette :
C'est quelque chose qui est possible et il y a une obligation déontologique des
membres de la magistrature de maintenir et
d'acquérir les connaissances, les aptitudes nécessaires à l'exercice de
leurs fonctions judiciaires. Donc, c'est une responsabilité que le Code
de déontologie de la magistrature impose aux magistrats québécois et qui est exercée
par le Conseil de la magistrature. Alors, bien entendu, il y a beaucoup
de juges qui siègent en matière d'infraction sexuelle et conjugale et il
y a déjà de la formation qui est donnée. Ce que nous faisons aujourd'hui, c'est que nous envoyons un signal très clair à l'effet que les
réalités des violences sexuelles et conjugales doivent être considérées
par le Conseil de la magistrature dans le cadre du perfectionnement qui est
offert aux juges.
Même s'ils sont
spécialisés, la société indique clairement qu'en tout respect de l'indépendance
judiciaire, il nous apparaît important, dans le cadre de notre société d'aujourd'hui,
comme le sont les juges fédéraux, hein, d'ailleurs, ça, c'est important de le
souligner, les juges de la Cour supérieure, hein, qui n'entendent pratiquement
pas de causes en matière criminelle, parce que plus de 99 point quelques
pour cent des dossiers, en matière d'infraction de nature sexuelle et
conjugale, se retrouvent à la Cour du Québec. Tous les juges de la Cour
supérieure sont assujettis à cette formation. Tous les juges de la Cour d'appel
sont assujettis à cette formation. Tous les juges de la cour fédérale sont
assujettis à cette formation. Tous les juges de la Cour d'appel fédérale sont
assujettis à cette formation. Pourquoi?
Parce qu'autant le législateur fédéral que le législateur... du Québec
considèrent... Désolé, M. le Président, la langue m'a pratiquement
fourchu. Alors, c'est pour ça que le législateur québécois s'est assuré, dans
le cadre du projet de loi, d'envoyer un signal très clair sur quelles sont les
attentes en termes de formation. Et je le réitère, l'État québécois consacre
1,5 million de dollars à la formation des juges.
Le Président
(M. Benjamin) : Merci. Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon :
S'il n'y avait pas de séparation des pouvoirs, on ne serait pas en démocratie,
donc ce serait problématique. Mais comme discussion au point de vue l'esprit,
un petit détail comme ça. La raison pour laquelle on fait la discussion, ce
n'est pas parce qu'on est contre l'idée qu'il y ait de la formation, puis qu'on
puisse être précis, puis tout ça. Je pense que tout le monde souhaite ça. C'est
juste qu'on ne veut pas créer des irritants ou des risques. Puis, d'ailleurs,
le ministre, tantôt j'ai noté, il a dit quelque chose comme : Ça
n'amène pas de risque supplémentaire, ce qui voulait comme laisser entendre
qu'il y a quand même des risques, mais que ça n'amenait pas des risques
supplémentaires. Donc, il faut faire attention, je pense, parce qu'on veut que
ça marche, le tribunal.
Donc, je me demande
juste si, pour aplanir un peu... Moi, honnêtement, je ne vois pas
l'article 8, ce qu'il vient apporter par rapport à l'obligation qui est
déjà faite aux autres articles, là, dont on dit, dès l'article 5, un
programme établi par le Conseil de la magistrature. Donc, c'est...
M. Jolin-Barrette :
C'est parce que ça fait référence à ce programme. On dit : Ce
programme-là, qu'est-ce qu'il contient? C'est l'article 8 qui contient.
Mme Hivon :
Oui, mais ça ne le dit pas ce que ça contient. Tout ce que ça dit, c'est qu'il
doit consulter du monde, dans le fond.
• (18 h 50) •
M. Jolin-Barrette :
Mais ce que ça dit, c'est que c'est un programme de perfectionnement sur les
réalités relatives à la violence sexuelle et à la violence conjugale. Ça fait
que ça, c'est le premier point.
Ce à quoi ils doivent
s'engager, ceux qui ne sont pas encore nommés à la fonction de juge, ils
doivent suivre ce programme de perfectionnement là. Et l'assise de ça, il est à
l'article 257 de la Loi sur les tribunaux judiciaires. Après ça, on
dit : Pour construire ce programme-là, le conseil est invité à consulter
telle, telle personne.
Mme Hivon :
Mais le ministre nous dit, lui, que de l'inscrire à l'article 93, puis de
dire... parce que c'est bien écrit,
là : «...un juge à la retraite — à l'article 5, par exemple — doit avoir suivi le programme de perfectionnement
sur les réalités relatives à la violence sexuelle et à la violence conjugale
établi par le Conseil de la magistrature.» Donc, ça dit ce que ça a à dire.
M. Jolin-Barrette :
...c'est parce que l'enjeu, là, c'est qu'on est dans une disposition spécifique,
à 93, puis votre disposition spécifique se rattache à la disposition générale
qui est à 257, pour dire... Parce que, si vous dites, là... Dans le fond, à 93,
c'est : l'obligation est sur la tête du juge de paix magistrat, supposons,
de suivre la formation, puis on dit : Vous devez suivre la formation...
Vous devez suivre le programme de perfectionnement qui est nommé... programme
de perfectionnement de la... établi par le Conseil de la magistrature, mais ça
ne dit pas qu'il existe, ce programme-là. C'est comme un énoncé de fait. Dans
le fond, vous dites : Bien, vous allez devoir suivre ce programme-là. Mais
le programme en soi, il est où? Il est créé par l'article 257. Ça fait que
votre disposition spécifique, elle est là puis elle se raccroche à la disposition
générale.
Mme Hivon : Ça
fait que ce que le ministre nous dit, c'est que, parce qu'on l'a énoncé là, ce
n'est pas suffisant. Il faut vraiment donner...
M. Jolin-Barrette :
Le mandat.
Mme Hivon :
Inscrire clairement le mandat, donc la responsabilité.
M. Jolin-Barrette :
C'est ça.
Mme Hivon :
O.K. Pour répondre... bien, pour faire suite à la question de ma collègue de Verdun,
qui disait : Mais peut-être qu'il est déjà établi... Puis, effectivement, en
tout cas, si on lit le mémoire, il y a toute une page qui explique, là, tout ce
qu'il se fait en matière d'agressions sexuelles, de violence sexuelle et
conjugale, et tout ça. Donc, pour ne pas donner l'impression qu'il va devoir y
avoir l'établissement d'un programme, ça pourrait être hybride, on se comprend,
il peut y avoir déjà des choses qui se font, ça va peut-être... peut-être que
le programme de perfectionnement va être perfectionné, donc mis à jour, et tout
ça, peut-être qu'il va être créé en partie... «Le conseil établit», ça donne un
peu l'impression que c'est comme une nouvelle responsabilité. Si on disait, par
exemple, «le conseil offre», je veux dire... O.K. Pourquoi, non?
M. Jolin-Barrette :
Je vous réfère au texte de l'article 257, original, là :
«Le conseil établit
des programmes d'information, de formation et de perfectionnement des juges des
cours et des juges de paix magistrats relevant de l'autorité législative du
Québec et nommés par le gouvernement.»
Ensuite, on vient
ajouter : «Le conseil établit notamment un programme de perfectionnement
sur les réalités relatives à la violence sexuelle et à la violence conjugale.»
Alors, ce qui est
important, c'est que ça soit pérein. Vous me l'avez dit à plusieurs reprises, notamment
par rapport au tribunal, mais nous, on veut s'assurer que ça demeure une
question d'actualité. Alors, ce programme de formation là devra être là à
travers le temps, pas au gré des saisons. Alors, on dit clairement, c'est un
message qui est envoyé : Vous devez établir un programme en matière de
violence sexuelle et conjugale.
Mme Hivon :
Ça, je suis d'accord. Je pense juste que d'offrir... Si tu es obligé d'offrir
ou d'établir, ton obligation est aussi ferme, là. Ça fait que c'était juste...
mais je comprends que l'alinéa d'avant parle d'établir. Ça fait que ça me va
pour garder le mot «établir». Puis la dernière question, c'est pourquoi aller
jusqu'à les prendre par la main? Parce qu'on sait la sensibilité qu'il y a par
rapport à ça, là, on a vu quelques pages à quelques endroits sur le sujet.
Pourquoi prendre la main du Conseil de la magistrature pour dire qu'il faut
qu'il consulte des personnes et des organismes comme si le Conseil de la
magistrature ne pensait pas faire ça? J'imagine que le ministre comprend un peu
le message que ça envoie et l'irritant que ça peut créer.
M. Jolin-Barrette : Oui, et je crois que dans notre société, il est
nécessaire qu'un programme de perfectionnement soit construit en
consultant des gens qui travaillent auprès des personnes victimes qui ont une
expérience, qui ont une expertise, qui ont un intérêt ou qui on une sensibilité
particulière. Je crois que ça ne dit pas qui doit être consulté, tel
professeur, telle organisation, tel regroupement de victimes, que ça soit les
CAVAC, que ça soit quelqu'un qui a une sensibilité, mais je pense que pour le
législateur, c'est important de venir dire, lorsque vous construisez cette
formation-là, relativement au savoir-être, au savoir-faire, par rapport aux
mythes et préjugés, par rapport au contenu des
réalités qui sont vécues par les victimes de violences sexuelles et
conjugales... c'est important d'envoyer un signal clair que pour construire cette formation-là, il
doit y avoir une formation qui... un programme de perfectionnement qui
va amener une démarche vers une ouverture, une consultation en lien avec des
gens qui connaissent particulièrement les différentes réalités.
Et,
par mes propos, je ne veux pas dire que les membres de la magistrature ne
comprennent pas ou ne connaissent pas
cette réalité-là, mais, en termes de formation, pourquoi ne pas offrir un
programme de perfectionnement qui invite le Conseil de la
magistrature... Et c'est développé par le Conseil de la magistrature, il faut
le dire, la formation, elle est faite par le Conseil de la magistrature, mais
qui va prendre des informations, des renseignements de certaines personnes qui
oeuvrent dans ce domaine-là. Ça m'apparaît tout à fait pertinent de l'indiquer.
Le Président
(M. Benjamin) : Merci, Mme la députée. Donc, Mme la députée de
Sherbrooke.
Mme Labrie :
Le ministre me donne quasiment le goût de demander qu'on ajoute aux articles
précédents ces spécifications-là quand on parle de la formation.
M. Jolin-Barrette :
...distinction qui existe, et j'ai eu l'occasion de le donner, puisqu'il s'agit
de fonctions particulières et que la formation relève uniquement du Conseil de
la magistrature, c'est un message, un signal qui est envoyé en tout respect de
l'indépendance judiciaire.
Mme Labrie :
Nous, on pourrait vouloir envoyer le même signal puis demander que le ministre
fasse la même chose, là, qu'«il consulte les personnes et les organismes qu'il
estime appropriés en raison de leur expérience, [...] leur expertise, [...]
leur sensibilité ou leur intérêt en ces matières». On pourrait ajouter ça quand
il est question, au sixième paragraphe, bon, de l'article 3, de la responsabilité
du ministre d'assurer une formation continue de base et spécialisée. On
pourrait rajouter la même chose.
M. Jolin-Barrette :
Bien, écoutez, je vais le prendre en délibéré, mais c'est déjà le cas puis
c'est déjà ça qu'on fait au ministère.
Mme Labrie :
Nous, c'est parfait. On veut juste inscrire dans la loi les choses. Si vous le
faites déjà, tant mieux, ce sera plus facile
pour le gouvernement de s'y conformer, là. Il n'y a rien de plus
réjouissant que de savoir que vous allez vous conformer facilement à ce
qu'on demande.
M. Jolin-Barrette :
Je le prends en délibéré.
Le Président
(M. Benjamin) : Merci, Mme la députée. Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon : Justement, c'était le prochain point que je voulais amener.
Après que ma collègue de Sherbrooke prenne la parole, je voulais
revenir sur la demande que je faisais tout à l'heure, la préoccupation que
j'émettais qu'en fait, on ne parle... le ministre nous a bien expliqué pourquoi
il prévoit ça, puis les distinctions, puis... mais pour la pérennité, pour la
clarté, pour s'en assurer... Parce que, là, on a la ceinture, les bretelles, on
a tout, là, hein, pour le Conseil de la magistrature, on va dans le détail. On
dit qu'ils vont devoir consulter puis quel... sur quel type d'expérience, puis
tout ça. Pour le reste, pour tous nos autres intervenants, on ne sait pas qui
est responsable, on ne parle pas de programme de perfectionnement, on ne dit
pas qui va consulter.
M. Jolin-Barrette :
Si je peux me permettre, là, on est là, sur les juges, à 8. Tout ce débat-là,
on peut le refaire à 3 puis à 11.
Mme Hivon :
Oui, c'est juste que le ministre, tantôt... Moi, je veux bien qu'on le refasse
à 3 et à 11, mais il nous a dit, à 3 : Vous savez, on va juste... Sauf que
ça pourrait être à 3. Moi, je veux juste que le ministre sache que...
M. Jolin-Barrette :
Je le sais. J'ai très bien saisi.
Le Président
(M. Benjamin) : Un instant...
Mme Hivon : Merci. Il y a un enjeu de pérennité puis il y a
un enjeu aussi de diminution d'irritants pour monter qu'on ne met pas la
ceinture et les bretelles et tout ce qu'on peut trouver d'autres pour les
juges, puis que, pour le reste, il n'y a
rien qui vient spécifier le programme de perfectionnement puis les obligations
de consultation puis tout ça.
Le Président
(M. Benjamin) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Très bien noté.
Le Président
(M. Benjamin) : Est-ce que j'ai d'autres interventions sur
l'article 8?
• (19 heures) •
Mme Hivon :
Moi, je voudrais savoir... c'est parce que, là, on va adopter ça, qui va loin
pour le Conseil de la magistrature, mais on ne sait pas si on va avoir une
disposition miroir pour les autres. Moi, pour adopter ça, je voudrais qu'on me
dise qu'on va dire la même chose pour les autres.
M. Jolin-Barrette :
Je vais le prendre en délibéré.
Mme Hivon :
Donc, on va suspendre 8.
M. Jolin-Barrette :
Non, on va adopter 8...
Mme Hivon :
Bien, on ne peut pas marcher comme ça, là, à moins que le ministre dise que
c'est son intention.
M. Jolin-Barrette :
Je vais l'inscrire dans les projets pilotes.
Mme Hivon :
Oui? O.K. Parfait.
Le Président
(M. Benjamin) : Merci. Est-ce que j'ai d'autres interventions sur
l'article 8?
Mme Hivon :
Je salue l'ouverture du ministre sur ce point.
Le Président
(M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Joliette. Donc, s'il n'y
a pas d'autre intervention sur l'article 8, nous allons procéder à la mise
aux voix. Est-ce que l'article 8 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le Président (M. Benjamin) :
Adopté. Merci. M. le ministre, poursuivons.
M. Jolin-Barrette :
Article 9, M. le Président...
Une voix :
...
M. Jolin-Barrette :
Oui, article 9 : Cette loi est modifiée par l'insertion, après
l'article 259, du suivant :
«259.1. Au plus tard
le 31 mars de chaque année, le conseil remet au ministre de la Justice un
rapport sur la mise en oeuvre, au cours de l'année précédente, du programme de
perfectionnement sur les réalités relatives à la violence sexuelle et à la
violence conjugale.
«Ce rapport indique
notamment, pour chaque activité de perfectionnement :
«1° son titre, une
description de son contenu, sa durée et les dates où elle a été offerte;
«2° le nombre de
juges et de juges de paix magistrats qui y ont assisté.
«Le ministre dépose
ce rapport devant l'Assemblée nationale dans les 15 jours de sa réception
ou, si elle ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise de ses travaux.»
Cet article prévoit
que le Conseil de la magistrature devrait préparer un rapport annuel sur la
mise en oeuvre du programme de perfectionnement sur les réalités relatives à la
violence sexuelle et à la violence conjugale.
Ce rapport serait
déposé à l'Assemblée nationale.
Le Président
(M. Benjamin) : Mme la députée de Verdun.
Mme Melançon :
Merci, merci beaucoup, M. le Président. Bien, à ce moment-ci, l'article 9,
moi, je me rappelle du mémoire du Barreau qui nous disait... qui nous appelait
à la prudence, là. Puis, si je peux juste trouver... Pardonnez-moi, je vais
mettre...
M. Jolin-Barrette :
...il disait : C'est préférable que vous ne mettiez pas de transmission au
ministre puis directement à l'Assemblée nationale.
Mme Melançon :
Exactement. Parce que, selon le Barreau, cela pouvait compromettre
l'indépendance judiciaire. Depuis le début, donc, de l'étude de l'actuel
projet de loi, on le sait, là, on marche parfois sur la ligne. Puis, à ce
moment-ci, je voudrais juste que le ministre puisse soit nous rassurer ou nous
dire que dans aucun cas on peut compromettre
l'indépendance judiciaire en faisant l'exigence de déposer un rapport au
ministre, qui déposera 15 jours, en tout cas, je pense que c'est ça, là, 15 jours, dans les
15 jours suivant sa réception, là, déposer le tout devant
l'Assemblée nationale.
M. Jolin-Barrette :
Je tiens à rassurer la députée de Verdun, ça ne contrevient pas du tout à
l'indépendance judiciaire, le fait de transmettre le rapport au ministre, qui,
lui, le dépose.
Mme Melançon :
Alors, j'aimerais juste savoir, M. le Président, comment est-ce que le ministre
interprète la réticence du Barreau à ce moment-là?
M. Jolin-Barrette :
Bien, le Barreau a droit à son opinion. Le Barreau n'a pas indiqué que ça ne
respectait pas la séparation des pouvoirs. Le Barreau a indiqué que ça pouvait
constituer... qu'il serait peut-être préférable de l'envoyer directement à l'Assemblée
nationale.
Moi, ce que je dis,
c'est que c'est préférable de l'envoyer au ministre de la Justice, qui le
dépose, comme les différents organismes qui relèvent du ministre de la Justice.
Mme Melançon :
Parce que, dans le fond, ce que proposaient les gens du Barreau, c'était plutôt
un rapport annuel sur la formation dispensée aux juges sur ces enjeux puis que
ce soit disponible directement sur le site Internet, là, et non pas déposé.
Moi, je fais juste
soulever le questionnement à ce moment-ci, parce que, comme je le dis, puis
depuis le début, il y a des irritants, puis
je ne voudrais pas qu'on échappe parce qu'on n'a pas entendu ou écouté. Puis là
c'est le Barreau, quand même, là, qui nous faisait le commentaire pour
l'article 9 spécifiquement. Je demeure quand même inquiète. J'imagine que
le ministre a, donc, entre les mains, des avis juridiques qui peuvent nous
conforter dans la décision d'introduire ici, à l'article 9, la
modification dans l'insertion après l'article 259.
M. Jolin-Barrette :
Il n'y a pas d'enjeu sur l'exercice de l'indépendance judiciaire du fait que le
ministre reçoit le rapport et le soumet à l'Assemblée nationale. Je crois qu'il
est important que le Conseil de la magistrature puisse informer la population
adéquatement et qu'au 31 décembre, annuellement, transmette au ministre de
la Justice et qu'au plus tard 15 jours après le ministre de la Justice puisse
le déposer en Chambre, à l'Assemblée nationale.
Mme Melançon :
Je veux juste savoir : Il n'y a pas d'enjeu aux yeux du ministre ou il n'y
a pas d'enjeu, c'est l'information qu'on a du ministère de la Justice? C'est
votre lecture comme ministre, là, de me dire qu'il n'y a pas d'enjeu actuellement, ou si c'est la lecture
du ministère de la Justice et peut-être des avis que vous avez entre les
mains?
M. Jolin-Barrette :
Alors, j'ai des avis juridiques, je ne les dévoile pas, mais la position que
j'exprime en cette Chambre... en cette commission est la position du gouvernement
du Québec. Donc, vous comprendrez que je suis en accord
avec le texte de loi que j'ai présenté. Et je le fais non pas en tant que
Simon, mais en tant que ministre de la Justice.
Mme Melançon :
J'ai une autre question, M. le Président. Dans le rapport, donc, on va indiquer
que, pour chaque activité de perfectionnement... Puis je voulais juste vous
dire, là, tout à l'heure, je suis allée chercher, puis j'ai répondu à ma
propre... parce que je savais que j'avais lu à quelque part, là, la durée, dans
le fond, des formations pour les juges, puis c'était 10 jours, là, qui
étaient consentis pour des formations. Donc, je m'étais un peu... j'avais vu ça
gros, les perfectionnements, dans le fond, en pensant que ça pouvait être sur
des semaines ou...
M. Jolin-Barrette :
Juste une précision également. Je tiens à vous dire également que, dans la loi
fédérale, le ministre de la Justice reçoit le rapport également.
Mme Melançon :
Grand bien au ministre de la Justice fédéral. Moi, je voulais surtout entendre
le ministre de la Justice provincial, là, ici, sur le sujet, parce que, pour
moi...
M. Jolin-Barrette :
O.K., ministre de la Justice du Québec.
Mme Melançon :
Tout à fait. Pour moi, ce qui est un enjeu à ce moment-ci... puis, je vous le
dis, M. le Président, tu sais, à partir du moment où le Barreau émet des
inquiétudes, je pense qu'on doit les entendre. Puis, à partir du moment où je
constate que le ministre a des avis entre les mains qui lui disent l'inverse...
C'est parce que ça fait plusieurs fois, quand même, M. le Président, où on est
sur la ligne. Puis il y en a, des irritants. Puis, des fois, le ministre
dit : Bien non, moi, je vous dis qu'on peut aller là. Moi, je veux croire
le ministre, là, je veux toujours croire le ministre, ça fait vraiment plaisir
de lui faire plaisir au quotidien, mais moi, je veux m'assurer qu'il n'y aura
pas de contestations sur une possible, une possible lecture autre que celle du ministre
de la Justice du Québec. Et c'est pourquoi je voulais soulever avec ce que le
Barreau nous avait mentionné.
Cela étant dit, à
l'intérieur du rapport, là, on va nous indiquer, pour chaque activité de
perfectionnement, le titre, la description du contenu. Donc, moi, tantôt,
j'entendais que, tout ça, on ne les a pas actuellement, là. On n'a pas actuellement
quelles sont les activités, quelle est la description du contenu. Ça, ça va
être tout à fait nouveau. C'est ce que je comprends de ce qui est indiqué ici.
Parce que, tantôt, je posais la question au ministre : Est-ce que ça
existe actuellement? C'est quoi, la formation? Puis il me disait : Bien
non, ça, c'est le Conseil de la magistrature. Ça, on ne le sait pas. Est-ce que
ça existe actuellement? Ça, on ne le sait pas. Mais là, ce que je comprends,
c'est qu'on va intégrer ici, dans le rapport, quelles seront les activités de
perfectionnement, la description de cette activité de perfectionnement, la
durée... bon, la date offerte, ce n'est pas si mal, là, puis le nombre de juges
et de juges de paix magistrats qui y ont assisté. Mais ces informations-là, à
l'heure où on se parle, ça n'existe pas.
M. Jolin-Barrette :
À l'heure actuelle, ces informations-là ne sont pas rendues publiques.
Mme Melançon :
Et donc, si je poursuis, M. le Président, tantôt, je posais la question au ministre,
à savoir : Mais est-ce que cette activité de perfectionnement-là, actuellement,
est-ce que ça existe?, puis le ministre me disait : Peut-être. Donc,
possible.
À ce moment-ci, ce que je veux savoir, c'est... Son titre, une description du contenu,
ça, là, ça va être quelque chose qui est totalement nouveau qu'on exige maintenant.
• (19 h 10) •
M. Jolin-Barrette :
Exactement.
Mme Melançon :
C'est par transparence. Et est-ce que... Pourquoi ce n'était pas demandé avant?
Pourquoi on ne l'avait pas?
M. Jolin-Barrette :
Vous voulez dire dans la loi?
Mme Melançon : Non, mais, pas dans la loi, mais c'est parce que,
tantôt, je vous posais la question, M. le
ministre.
M. Jolin-Barrette :
Bien, parce qu'il n'y a pas d'obligation d'en rendre compte de la part du
Conseil de la magistrature.
Mme Melançon :
Et là on arrive avec une obligation.
M. Jolin-Barrette :
Là, on met une obligation de rendre compte.
Mme Melançon :
D'accord.
M. Jolin-Barrette : Puis vous noterez que la responsabilité de rendre
compte, elle est sur le titre de la formation, le contenu, les dates
puis le nombre de juges, c'est tout.
Mme Melançon : Ce n'est pas
nominal?
M. Jolin-Barrette :
Ce n'est pas nominal. Alors, ça respecte le principe de l'indépendance
judiciaire. Mais les Québécois et les Québécoises consacrent 1,5 million
de dollars à la formation des juges aux Québec, alors je crois que, sur un
sujet aussi important, c'est important que les parlementaires, la population du
Québec sachent combien de juges ont suivi le programme de perfectionnement.
Le Président (M. Benjamin) :
Mme la députée de Sherbrooke.
Mme Labrie : Oui. Je trouve ça
aussi important qu'on sache ce qui en est des formations puis qu'il y ait un
rapport. J'aimerais savoir si le ministre a de l'ouverture, il semble en avoir
beaucoup, j'espère qu'il en aura là-dessus aussi,
à ce que lui-même dépose un rapport sur les formations qui vont être
développées pour tous les autres intervenants dont on a fait mention
jusqu'à maintenant.
M. Jolin-Barrette : Je vais le
prendre en délibéré.
Mme Labrie : Parfait. Parce que
j'ai déjà fait savoir au ministre qu'à mon sens c'est une lacune que, dans le
projet de loi, il n'y a pas de... il n'y a aucun article qui prévoit les
modalités de suivi, là, des tribunaux spécialisés. À mon sens, il faut qu'il y
ait aussi un engagement du ministre sur plusieurs choses, mais notamment que
lui-même dépose un rapport sur les formations offertes.
M. Jolin-Barrette : C'est bien
noté.
Mme Labrie : Merci.
Le Président (M. Benjamin) :
Merci. Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon :
Oui. Donc, à ce jour, là, je veux juste être bien claire... être sûre que j'ai
bien compris, le Conseil de la magistrature, il ne fait aucun rapport
annuel, rien?
M. Jolin-Barrette : Le Conseil
de la magistrature fait un rapport annuel aux... trois ans?
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Pardon?
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Oui. Le Conseil de la magistrature, en théorie,
fait un rapport annuel aux deux ans, en théorie.
Mme Hivon : Puis
c'est quoi, la source de cette obligation-là, qui est appliquée, en théorie?
M. Jolin-Barrette : Non, c'est
ça, il n'y a pas d'assise légale.
Mme Hivon :
Non. O.K. Mais là la complexité de la chose, c'est que le ministre nous
dit : Il n'y a pas de lien hiérarchique, mais il demande que le
rapport lui soit transmis à lui. J'essaie de suivre la logique du raisonnement.
M. Jolin-Barrette : Bien, notamment...
Mme Hivon : Il
n'y a aucun lien de rattachement. Là, je comprends que...
M. Jolin-Barrette : Bien, le
ministre de la Justice est responsable de l'administration de la justice.
Mme Hivon : Oui.
M. Jolin-Barrette : Donc, il y
a un lien de rattachement là.
Mme Hivon : Mais,
à ce jour, on n'a jamais cru bon inscrire nulle part que le Conseil de la
magistrature devait faire un rapport de ses activités. C'est quelque chose qui
n'existe pas du tout?
M. Jolin-Barrette : C'est
peut-être une bonne suggestion.
Mme Hivon : Je
pose... Je ne veux pas d'argumentation pour l'instant, je veux de
l'information.
M. Jolin-Barrette : Ah! bien,
ce n'était pas de l'argumentation, c'était une affirmation en lien avec votre
proposition.
Mme Hivon :
C'était une question. Donc...
M. Jolin-Barrette : Ah! je l'ai
perçue comme une proposition.
Mme Hivon : Oui.
Mais je pense que c'est bien que tous les organismes rendent des comptes. La
question, c'est de savoir : Là, l'assise qui est créée, c'est pour
l'ensemble des activités de perfectionnement ou si c'est pour le
perfectionnement sur les réalités des violences sexuelles et conjugales?
M. Jolin-Barrette : C'est le perfectionnement sur les réalités des
violences sexuelles et conjugales, uniquement là-dessus.
Mme Hivon : O.K.
Le ministre nous dit que c'est superimportant que le Conseil de la
magistrature, à qui il donne 1,5 million, rende des comptes. Mais là on ne
crée pas une obligation qu'il rende des comptes de manière générale, on le crée
juste sur ça. Je me demande pourquoi.
Et j'arrive à mon autre question de :
Pourquoi on ne retient pas... Je trouve que c'est une bonne suggestion du
Barreau de dire que le rapport est transmis directement à l'Assemblée
nationale. Il y a un élément d'indépendance...
Le Président (M. Benjamin) :
Écoutez...
M. Jolin-Barrette : C'est... Le
Barreau a dit : Sur le site Web du Conseil de la magistrature.
Le Président (M. Benjamin) : Je
vous remercie pour votre collaboration.
Mme Hivon : Oui,
mais...
Le Président (M. Benjamin) : Compte
tenu de l'heure, la commission reporte ses travaux sine die. Merci.
(Fin de la séance à 19 h 15)