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(Vingt heures deux minutes)
Le Président (M. Forget): Je déclare ouverte la
séance de la commission des institutions. Le mandat de la commission
pour cette séance est de procéder à une consultation
générale et de tenir des auditions publiques sur la protection de
la vie privée eu égard aux renseignements personnels
détenus dans le secteur privé. Mme la secrétaire, est-ce
qu'il y a des remplacements ce soir?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Forget
(Prévost) remplace M. Fradet (Vimont) et M. Bourdon
(Pointe-aux-Trembles) remplace Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve).
Le Président (M. Forget): L'ordre du jour pour la
séance de ce soir se lit comme suit: à 20 heures nous attendons
les représentants de Télébec Itée. À 21
heures la commission ajournera ses travaux. Cet ordre du jour est-il
adopté?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Forget): Alors, je demanderais au
porte-parole du groupe de bien identifier les gens qui l'accompagnent.
Télébec Itée
M. Marquis (Denis): Alors, mon nom est Denis Marquis, je suis
directeur général responsable des affaires corporatives chez
Télébec Itée, entre autres responsable des affaires
réglementaires de l'entreprise, et j'aimerais vous présenter
à mes côtés d'abord Mme Sandra St-Amour, qui est
responsable des affaires réglementaires comme telles, qui est en fait le
point de contact de l'entreprise avec notre Régie des
télécommunications du Québec, et également M.
Pierre Grimard, et ici je pense que c'est un changement sur l'ordre du jour
préliminaire qui vous avait été distribué plus
tôt aujourd'hui, qui est dans notre groupe de systèmes
informatiques, qui a dû remplacer à pied levé M. Neault qui
a été appelé sur une urgence. M. Grimard est directement
responsable dans l'organisation des systèmes informatiques de
l'administration des banques de données.
Le Président (M. Forget): Alors, je rappelle le temps
alloué pour les exposés et les échanges: la durée
de l'exposé, 20 minutes; la durée des échanges, 40
minutes. Alors, M. le ministre, la parole est à vous. Excusez-moi, vous
avez raison, c'est à vous d'exposer.
M. Marquis: Merci, M. le Président. Merci, M. le ministre.
Alors, j'aimerais tout d'abord ici faire un bref sommaire du mémoire qui
a été soumis à la commission, en débutant tout
d'abord par un profil assez bref également de Télébec,
simplement pour dire que Télébec est la deuxième plus
importante entreprise de télécommunications, sous juridiction
québécoise évidemment. Télébec compte
environ 1200 employés au moment où on se parle. Son territoire
d'exploitation s'étend sur un territoire très vaste qui va de la
baie James jusqu'aux Îles-de-la-Madeleine. Il compte 126 circonscriptions
téléphoniques, qui couvrent différents secteurs de la
province, entre autres l'Abitibi-Témiscamingue, les régions de La
Tuque, Mont-Laurier, Bécancour, ainsi que plusieurs autres secteurs du
centre du Québec. Sur ce territoire nous desservons environ 160 000
clients de résidence et d'affaire, et encore une fois nous sommes sous
la juridiction de la Régie des télécommunications du
Québec.
Juste un petit historique de notre comparution ici ce soir. Le 4 octobre
1990, la ministre des Communications d'alors demandait à la Régie
des télécommunications un avis sur la protection de la vie
privée en matière de télécommunications. Le 20
novembre qui suivait, la Régie demandait à Télébec,
de même qu'à divers autres intervenants, de s'associer à la
démarche qu'elle entreprenait à ce moment-là pour
répondre à la demande du ministre. Le 8 janvier 1991,
Télébec comparaissait pour répondre à sa demande en
produisant un mémoire lors d'une audience publique qui se tenait
à Montréal.
Au mois de mai 1991, la Régie a produit son avis au ministre des
Communications qui incluait diverses recommandations liées au domaine
des télécommunications. Finalement, le 20 août, cette
année, Télébec répondait à l'avis des
consultations générales de la commission des institutions en
produisant un mémoire, mémoire dont vous avez probablement copie
entre les mains.
Alors, je me permettrai ici, ce soir, de faire un bref
résumé de ce mémoire en traitant de quatre principaux
thèmes qui y étaient abordés, à savoir:
premièrement, la confidentialité des communications
transportées par le réseau de Télébec et la
protection des renseignements personnels dont nous disposons sur notre
clientèle; deuxièment, la sécurité de nos banques
de données; troisièmement, la commercialisation des banques de
données et enfin, et non le moindre, le service de gestion des
appels.
Parlons tout d'abord de la confidentialité
des communications et de la protection des renseignements personnels. La
confidentialité des communications est assurée de plus en plus
par le biais des progrès technologiques qui sont survenus au cours des
dernières années. Tout d'abord, il y a un déploiement de
plus en plus grand de la technologie dite octonumérique dans le
territoire de Télébec. Par octonumérique, on sous-entend,
au point de vue commutation des équipements de type numérique et,
dans le réseau, le déploiement de fibres optiques qui
amènent une facilité de plus en plus grande d'assurer la
confidentialité des communications qui y sont transportées.
Également, les lignes à postes groupés, ou les
lignes rurales, comme on les a appelées, sont de moins en moins
nombreuses. À la fin de cette année, par exemple, 93,2 % de nos
clients auront accès à une ligne à un ou deux
abonnés et ça devrait tendre vers 100 % autour de 1996. Nous
envisageons également, à moyen terme, la possibilité
d'abolir les lignes à deux abonnés, ce qui fait que la grande
majorité de nos abonnés, de nos clients, devrais-je dire, auront
une ligne individuelle avec, évidemment, le maximum de
confidentialité que ça comporte.
Télébec a toujours assuré la protection des
renseignements personnels qu'elle détient sur ses clients. Par le biais
de la formation que nous donnons à nos employés, les
différentes procédures internes qui ont été
développées, surtout avec notre code d'éthique, tout ceci
constitue des outils qui permettent à Télébec de maintenir
une excellente réputation dans ce domaine. Tel qu'il est indiqué
dans notre mémoire, beaucoup d'emphase est mise sur l'application de
notre code d'éthique qui est revu régulièrement avec
chaque employé et des sanctions sont même prévues lorsqu'un
employé s'écarte des règles de conduite établies
par l'entreprise.
Je me permettrais ici de citer peut-être une couple de passages de
ce code d'éthique dont copie est incluse au mémoire. Par exemple,
on y dit qu'il est du devoir de tout employé de respecter la vie
privée de l'abonné et de tenir pour strictement confidentielle
toute information de nature personnelle ou professionnelle concernant
l'abonné qui a pu être portée à sa connaissance. On
y lit un peu plus loin: "L'objet ou le contenu des communications
téléphoniques ou informatiques - ou même l'existence d'une
telle communication - ne doit jamais être révélé
à un tiers par un employé de Télébec."
Si on poursuit, on y dit également que la ligne de conduite
tracée dans la présente brochure ne fait que s'ajouter à
notre propre sens de la droiture. Mais il arrive parfois dans tout groupe
d'importance comme le nôtre que certains s'écartent des normes de
conduite établies. Il faut alors s'attendre à ce que des mesures
disciplinaires, pouvant aller de la simple réprimande jusqu'au
congédiement ou à des poursuites judiciaires, soient prises.
Passons maintenant à la sécurité de nos banques de
données. Pour son exploitation, Télébec dispose d'une
quantité de renseignements et de données sur ses clients. Par
exemple, l'adresse et la localisation physique de chacun, le numéro de
téléphone qui y correspond, les habitudes de crédit et de
paiement de ses clients, les types d'équipements terminaux lorsqu'ils
sont fournis par l'entreprise et, enfin, les coordonnées des appels
interurbains que nos clients effectuent.
Afin de protéger la vie privée de ses clients, en plus du
code d'éthique et des diverses procédures internes,
Télébec a adopté une politique de sécurité
informatique qui est rigoureusement appliquée au sein de l'entreprise.
Chaque employé est tenu de respecter les règles en matière
de sécurité informatique. Le non-respect constitue une grave
infraction et peut donc donner lieu à des mesures disciplinaires.
Pour chaque système informatique, un cadre responsable de la
gestion de la sécurité doit être désigné pour
veiller à différentes activités, notamment gérer
routinièrement la sécurité du système;
accréditer les utilisateurs; s'assurer que les personnes qui ont
accès au système ou qui l'utilisent connaissent et respectent les
mesures de sécurité; gérer, contrôler et
évaluer jusqu'à quel point les normes de sécurité
sont respectées et mises en oeuvre; prendre connaissance des rapports de
sécurité et faire enquête sur les manquements possibles
à ces mesures de sécurité; et, finalement, signaler au
directeur de sécurité tous les manquements constatés ou
présumés.
Toutes ces mesures permettent d'assurer la protection de la vie
privée de nos clients, protection d'ailleurs bien reconnue par la
Régie des télécommunications dans son avis au ministre des
Communications, qui affirmait n'avoir été saisi d'aucune plainte
en cette matière. Télébec reconnaît toutefois que
l'évolution des technologies en matière de banque de
données pourrait nécessiter un accroissement des mesures de
protection requises. Alors, on assiste évidemment en ces années
à des grandes capacités de stockage sur les nouvelles
technologies avec la prolifération des réseaux locaux ou des
réseaux à grande étendue qui permettent un accès
relativement aisé s'il n'y a pas des mesures de protection
adéquates à différentes informations.
Télébec souscrit donc aux recommandations de la
Régie dans son avis à l'effet qu'un groupe d'étude
conjoint devrait recevoir mandat de considérer l'application des
recommandations du comité interministériel à l'industrie
des télécommunications, par l'adoption de normes
générales et de règles dont le respect pourrait être
suivi par la Régie selon le processus réglementaire habituel.
Parlons maintenant de la commercialisation des données.
Jusqu'à présent, Télébec n'a jamais
commercialisé aucune donnée qui est à sa disposition.
Alors que Bell Canada, par exemple,
est autorisée à fournir des informations non
confidentielles sur les inscriptions d'affaire dans les pages jaunes moyennant
un tarif, Télébec n'a pas eu de demandes de cette nature. S'il y
avait une telle éventualité, Télébec croit que les
principes qui seraient applicables pourraient être intégrés
dans l'élaboration d'un règlement et tarif prévoyant la
commercialisation de ces dites données, le tout devant être soumis
à l'approbation de la Régie des
télécommunications.
Finalement, abordons la question du service de gestion des appels. Le
service de gestion des appels constitue, selon nous, un bon exemple d'un
service novateur qui découle d'une évolution technologique.
Compte tenu des bénéfices qui résultent de ce service,
soit un meilleur contrôle des appels reçus par le client
appelé, Télébec a décidé d'emboîter le
pas à l'instar de Bell Canada et de
Québec-Téléphone. Ce service est maintenant offert dans
les circonscriptions de Rouyn-Noranda, Beaudry et Bellecombe, en
Abitibi-Témiscamingue depuis le 24 octobre dernier, ce qui est quand
même encore assez récent. Télébec est consciente des
nombreuses interrogations soulevées par ce nouveau service en
matière d'atteinte à la vie privée,
particulièrement en ce qui a trait à la fonction d'affichage du
numéro de téléphone du client appelant. Cependant,
jusqu'à présent, à notre connaissance, peu de plaintes ont
été enregistrées par Bell et
Québec-Téléphone quant au désavantage de ce service
alors que les plaintes concernant les appels de nature harassante ont
chuté de façon radicale. À titre d'exemple, les
interventions policières reliées à des appels importants
ont diminué de l'ordre de 78 % à Ottawa et 70 % à
Québec pendant le seul premier semestre de 1991.
Afin de protéger l'anonymat d'un appelant qui le désire,
Télébec offre la possibilité que l'appel soit
acheminé par le téléphoniste pour un montant de 0,75 $.
Les refuges pour victimes de violence conjugale sont exemptés de ces
frais.
À ce stade-ci, Télébec n'a pas envisagé
d'autres alternatives pour la protection de la vie privée de ses
clients. Cependant, son intention est de suivre le développement dans
l'industrie à ce sujet, tout comme en a l'intention son
régulateur, la Régie des télécommunications.
D'ailleurs, l'autorisation que nous avons reçue pour l'offre à
Rouyn-Noranda était de nature provisoire et se doit de suivre les
expériences qui sont en cours sur le territoire québécois
avant de donner un aval définitif. (20 h 15)
Comme le reconnaît la Régie dans son avis au ministre des
Communications, Télébec est d'avis que les essais du SGA en cours
doivent se poursuivre dans le but de mieux évaluer ses impacts,
notamment au niveau de la protection de la vie privée des clients. Selon
l'évolution du SGA, d'autres mesures pourraient devoir être
implantées. Celles-ci seront discutées avec la Régie et
mises en oeuvre, le cas échéant, selon les dispositions
réglementaires jugées appropriées.
En guise de conclusion, Télébec reconnaît que
certaines recommandations qui résulteront du présent processus de
consultation pourraient exiger différentes actions de sa part, par
exemple un renforcement de la formation de son personnel, la création de
nouvelles procédures ou la modification de certaines procédures
existantes. Comme l'indique le rapport du comité
interministériel, l'intégration de nouvelles exigences dans les
activités d'une entreprise devrait être planifiée et
respecter un certain échéancier. En assumant que ce principe soit
reconnu, Télébec croit qu'elle pourrait apporter les
modifications qui s'imposent sans trop de difficulté. Elle souscrit
toutefois aux recommandations de la Régie des
télécommunications dans son avis au ministre, à l'effet
qu'un groupe d'étude conjoint devrait être formé pour
considérer l'application des recommandations du comité
interministériel selon les particularités propres au monde des
télécommunications. Télébec soutient
qu'étant déjà réglementée par la
Régie des télécommunications les décisions et
règlements que cette dernière adopte constitueraient une
réglementation suffisante pour assurer la protection de (a vie
privée de ses clients.
Alors, ce serait tout, M. le Président, comme
résumé de notre mémoire. Je serais évidemment
disponible avec mes collègues pour répondre aux questions.
Le Président (M. Forget): Alors, j'inviterais M. le
ministre.
M. Cannon: Oui, merci, M. le Président. Je veux d'abord
souhaiter la bienvenue aux gens de Télébec, les remercier d'avoir
bien voulu partager avec nous quelques commentaires et de nous avoir transmis
un mémoire.
J'ai parcouru votre mémoire et, pour l'essentiel, je
m'aperçois que vous avez fait vôtres les conclusions de la
Régie des télécommunications dans l'avis du mois de mai
1991, notamment le groupe d'étude conjoint de travail,
l'élaboration des règlements de tarifs, la mise sur pied d'un
suivi de la Régie quant à la divulgation des renseignements
confidentiels. Mais, à un moment donné, dans votre
mémoire, vous indiquez que l'évolution technologique aura comme
conséquence un accroissement des mesures de protection de la vie
privée. Comme première question: Est-ce que vous avez des
exemples à nous donner, là-dessus?
M. Marquis: Je pense qu'évidemment la question du service
de gestion des appels en est un où on a apporté une solution qui,
on le croit, amène certains avantages vis-à-vis une
clientèle. On a mentionné la question des appels importants
où on croit sincèrement que le service de gestion des appels peut
apporter un bénéfice. On a également parlé des
banques de
données où on a maintenant la possibilité
d'accéder à des banques de données de grosseur gigantesque
à partir d'un réseau qui peut avoir des tentacules au-delà
d'une ville et même d'une province. Alors, c'est ce qui nous amenait
à dire que révolution technologique en soi amène des
possibilités très intéressantes mais peut parfois avoir
des retombées, notamment en matière de protection de la vie
privée, pour lesquelles il faut se montrer prudents.
M. Cannon: Votre entreprise - et vous l'indiquez, je pense, dans
votre document - est contrôlée par BNR. C'est ça?
M. Marquis: Non, BNR...
M. Cannon: Excusez, pas BNR mais par BCE, pardon.
M. Marquis: Par BCE. En fait, nous sommes une filiale à
part entière de BCE.
M. Cannon: Donc... Et le code d'éthique qui est contenu
dans votre rapport ressemble étrangement à celui que l'on
retrouve chez Bell.
M. Marquis: Évidemment, on a un contrat de services avec
Bell Canada, pour certaines données qu'on n'a pas à
réinventer... On le fait lorsque possible.
M. Cannon: La semaine dernière, lorsque M. Beauregard, de
Bell Canada, est venu nous rencontrer, pour l'essentiel, il nous a dit:
Écoutez, voici, je pense que l'autoréglementation peut être
la voie. Nous n'avons peut-être pas besoin d'intervenir d'une
façon législative. Nous avons un code d'éthique que nous
suivons quasiment à la lettre qui est reconnu et qui a fait ses preuves.
Mais, après avoir discuté un peu avec M. Beauregard, on s'est
aperçu qu'il y a eu un cas d'une publication semble-t-il erronnée
d'une maison d'hébergement pour femmes victimes d'actes de violence, qui
malheureusement avait été publié, et que bon, une
indemnisation devait s'opérer.
Dans votre cas à vous, je vous pose la même question que
j'avais posée à ce moment-là à M. Beauregard.
Est-ce que, un, il y a eu des manquements à votre code d'éthique,
c'est-à-dire des cas où chez vous, par erreur ou pour autres
raisons, il y a eu un manquement? Si oui, quels sont ces exemples? Et, comme
troisième question: Comment avez-vous procédé pour
indemniser la personne qui a été la victime de cette erreur ou de
cette circonstance?
M. Marquis: Je vais d'abord indiquer que mon historique à
Télébec ne date pas des 20 dernières années. Alors,
à ma connaissance, nous n'avons pas eu de cas comme ceux dont
effectivement nous avons été mis au courant égale- ment
qui ont pu survenir à Bell Canada.
Maintenant, Mme St-Amour, elle, a quelques années de plus que moi
à Télébec. J'aimerais peut-être lui passer la
parole...
M. Cannon: Malgré son jeune âge. Des voix:
Ha, ha, ha!
M. Marquis: Malgré son jeune âge. Alors,
peut-être qu'elle pourrait confirmer ce que je viens de dire.
Mme St-Amour (Sandra): Effectivement, je suis au service de la
réglementation à Télébec depuis bientôt 14
ans et, entre autres, je m'occupe des plaintes d'abonnés. Parmi ces
quantités de plaintes qu'on gère quotidiennement, à ma
connaissance on n'a jamais eu de cas grave où il y aurait eu de
l'information confidentielle qui aurait été
relâchée.
Évidemment, il ne faut pas dire que c'est une
impossibilité. Il peut arriver, là, une erreur administrative,
mais, vraiment, on n'a pas eu de cas qui a été signalé
où on a dû indemniser.
M. Cannon: Dans le cas où cela se produirait... Si on y
allait, là, d'une façon hypothétique, il se produirait
quoi? Est-ce qu'il y a, par exemple, à l'intérieur de votre code
d'éthique, une façon qui est standard pour procéder
à l'indemnisation de la personne qui a été victime d'une
erreur de votre entreprise?
Mme St-Amour: Dans notre code d'éthique, non. Le code
d'éthique est plus en relation de l'employeur vis-à-vis ses
employés pour assurer la protection des clients.
Maintenant, il y a quand même des procédures internes. On a
aussi des règlements approuvés par la Régie quant aux
limitations de nos responsabilités face au client qui disent qu'on est
protégé, disons, étant une entreprise; le transport de nos
informations, les erreurs qui peuvent se produire aux annuaires, on a comme une
protection au niveau de la responsabilité. Mais, évidemment,
chaque cas qui est signalé à l'entreprise est regardé au
mérite. S'il y avait un cas, à titre d'exemple, celui de Bell,
j'ai l'impression qu'on aurait peut-être pris une approche semblable.
Ça dépend aussi du degré d'inconvénient qui peut
résulter de l'erreur que l'entreprise aurait pu commettre.
M. Cannon: Je sais que vous faites beaucoup de choses au niveau
de votre code d'éthique. Mais est-ce que vous croyez que, pour l'usager,
le consommateur, il serait souhaitable qu'il y ait une législation qui
lui donne la possibilité à la fois de recourir devant les
tribunaux et aussi, que les tribunaux aient cette possibilité de
sanctionner lorsqu'on démontre qu'il y a un besoin d'indemnité
à la suite d'une lésion qui a
été commise à l'endroit d'un client?
M. Marquis: Ce qu'on dit finalement, c'est que le code
d'éthique - comme Mme St-Amour a mentionné - était
plutôt vis-à-vis de nos employés pour s'assurer que chacun
reconnaît le degré d'intégrité qu'on attend d'eux
vis-à-vis notre clientèle.
Maintenant, s'il y avait un quelconque problème, nous croyons
qu'il y a déjà des mécanismes qui sont prévus
directement avec l'entreprise, escaladés à l'intérieur des
échelons administratifs de l'entreprise et, finalement, à la
Régie des télécommunications qui permettent à un
client qui se sent lésé de faire ses revendications et de faire
en sorte que l'entreprise puisse réagir correctement. Évidemment,
il existe toujours le recours aux tribunaux civils si tout ça
échouait. Mais ce qu'on a vu jusqu'à présent - je confirme
un peu ce que Mme St-Amour disait: On n'a pas eu à aller si loin que
ça. Il y a évidemment des plaintes qui arrivent une fois de temps
à autre par le biais de la Régie des
télécommunications mais on a, je crois, toujours
démontré dans le passé, un souci de les régler
à la satisfaction de tous.
M. Cannon: II y a aussi quelques associations de consommateurs,
dont l'ACEF, l'ACEF du centre de Montréal et la FNACQ, qui sont venues
témoigner et qui ont, pour la majorité, exprimé le
désir que l'usager des systèmes de
télécommunications, notamment le SGA, le système de
gestion des appels, puisse en tout temps bloquer ou puisse avoir bloqué
gratuitement l'affichage des renseignements nominatifs ou personnels les
concernant. Est-ce que vous avez une opinion là-dessus?
M. Marquis: Évidemment, de prime abord, lorsqu'on a
introduit le service, la situation idéale... Je parle simplement en
termes d'une entreprise qui veut un service qui fonctionne le plus souvent
possible. Parce qu'il faut reconnaître que contrairement à
d'autres services, par exemple les services, ce qu'on appelle "Liberté",
chez nous, les services téléphoniques spécifiques... Le
service de gestion des appels ne fonctionne pas toujours à 100 %. Pour
vous donner un exemple, lorsqu'un client appelle à partir d'un type
d'équipement d'ancienne technologie, le numéro de
téléphone ne peut pas être transmis dans ces
cas-là.
Alors, ça veut dire que le client qui paie pour un service
d'affichage, dans certaines situations, il peut lui arriver...
Évidemment, lorsqu'on introduit le service, on essaie que ce soit le
minimum de fois, mais dépendant qui l'appelle, si ça adonne, par
exemple, que c'est toujours dans un même secteur qui est desservi par un
équipement d'ancienne technologie, il peut lui arriver que le service ne
fonctionne pas.
Alors, ce qu'on essaie de faire, par contre, c'est que pour tous les cas
où ça devrait fonctionner, dans un environnement
d'équipement numérique, on voudrait bien que le numéro de
téléphone soit transmis pour que celui qui s'est abonné au
service puisse dire qu'il en a pour son argent. Alors, partant de ce
principe-là, nous aurions aimé introduire le service sans qu'il
n'y ait aucune forme de blocage. Maintenant, il avait été reconnu
- on n'était pas des précurseurs dans le domaine, il y a eu quand
même beaucoup de compagnies qui se sont lancées dans les SGA avant
Télébec... Il avait été reconnu qu'il fallait
mettre quand même une certaine porte de sortie pour les cas exceptionnels
où - j'imagine qu'on n'a pas à en parler nécessairement en
long et en large - une certaine forme de blocage devenait absolument
nécessaire, et c'est pourquoi on avait prévu, dans notre
dépôt tarifaire, le recours aux téléphonistes pour
acheminer ces appels-là.
Si on veut aller plus loin, technologiquement, il existe des
possibilités d'aller plus loin. Mais ce qu'on fait, c'est qu'on
crée à un moment donné une situation où un client
va payer pour un service et où il y aura un certain nombre de fois
encore plus grand où ça ne fonctionnera pas. Alors, je pense que
là il y a un impératif où on dit: Le service a des
avantages, mais si on crée un cercle vicieux où on enlève
toutes les situations où l'avantage, on peut en
bénéficier, à ce moment-là, on empêche le
service d'être fonctionnel.
M. Cannon: Donc, vous croyez qu'un blocage qui serait gratuit
pourrait nuire au déploiement du service de gestion des appels?
M. Marquis: Définitivement. M. Cannon: C'est bien
compris.
M. Marquis: En plus de... Quand on parle de "gratuit", si on le
faisait sur une base manuelle comme on le fait aujourd'hui avec le service des
téléphonistes, ce serait probablement un volume très
important, les gens, sachant que c'est gratuit, profiteraient du service
certainement plus qu'ils en profitent dans le moment. Alors, ça
créerait probablement un volume de travail très important
à notre service des téléphonistes.
M. Cannon: Ce qui veut donc dire que, pour 0, 75 $, je peux
harceler quelqu'un.
M. Marquis: II y a...
M. Cannon: Parce que pour 0, 75 $, je peux aviser
l'opératrice que j'ai envie d'appeler Mme X ou je ne sais pas qui et de
faire désengager mon numéro de son système d'affichage et,
donc, de harceler la personne ou enfin... Tout l'objectif, ou enfin les
avantages qui avaient été annoncés à
l'époque de l'introduction de ce
système-là, il y a bel et bien une bonne façon de
pouvoir contourner le système, moyennant 0,75 $.
M. Marquis: Je ne suis pas tout à fait d'accord avec
ça parce que, pour facturer à l'abonné son 0,75 $, il faut
qu'on garde une trace de celui qui a appelé. Alors ce qui veut dire que,
s'il y avait harassement qui était rapporté aux forces
policières, il y aurait moyen de retracer cet appel-là. Alors, je
pense que ce n'est pas tout à fait exact de dire qu'il pourrait y avoir
du harcèlement à 0,75 $.
M. Cannon: Donc, il y a une façon, pour vous, de pouvoir
retracer...
M. Marquis: Définitivement.
M. Cannon: ...la personne qui a demandé l'exclusion
à 0,75 $...
M. Marquis: C'est ça.
M. Cannon: ...et de savoir, après, qu'il avait
appelé tel numéro.
M. Marquis: C'est ça. M. Cannon: O.K. Ça
va.
Le Président (M. Forget): Alors, j'invite le
représentant de l'Opposition officielle, le député de
Pointe-aux-Trembles. (20 h 30)
M. Bourdon: Bonjour. D'abord, je voudrais vous demander, parce
que je ne l'ai pas vu dans votre mémoire, où est le siège
social de Télébec.
M. Marquis: Vous savez, Télébec est une entreprise
très étendue. Le siège social est officiellement à
Québec, sur le chemin Saint-Louis. Maintenant, il y a simplement notre
service de facturation qui est localisé sur le chemin Saint-Louis. Le
personnel administratif, corporatif si je puis dire, est localisé
à Anjou.
M. Bourdon: D'accord. Maintenant, je remarque sur la carte des
services que vous dispensez que vous êtes très
disséminés dans l'ensemble du territoire. Est-ce qu'on peut
penser que c'est parce que vous avez fait des acquisitions successives
d'entreprises plus petites?
M. Marquis: Je pense que vous pensez très bien.
Téléphone Bécancour était à l'origine ce qui
est devenu aujourd'hui Télébec, le joint des deux mots, et
effectivement Télébec a grandi, au fil des 20 et quelques
dernières années, principalement par le biais d'acquisition de
compagnies indépendantes qui, à un moment donné,
décidaient de laisser leurs opérations et de se vendre.
M. Bourdon: Maintenant, le service de gestion des appels
soulève, je pense, des questions à l'endroit de la vie
privée. Dans le fond je veux vous poser sensiblement les mêmes
questions que j'ai posées à Bell, dans le sens que, de temps
immémoriaux, une personne qui le voulait pouvait obtenir de votre
entreprise ou d'autres de ne pas faire publier son numéro et que son
numéro ne soit pas accessible au service des renseignements. Et ce que
je comprends c'est qu'elle a beau payer pour ça maintenant, on ne
l'imprime pas dans l'annuaire téléphonique, on ne le donne pas
aux renseignements, mais le changement technologique fait que son numéro
est connu de la personne qu'elle appelle.
M. Marquis: Exact, ce qui veut dire que, pour à peu
près 3 % de notre clientèle qui paie un tarif de non-publication,
non publié, ça pourrait être effectivement le cas.
M. Bourdon: Est-ce qu'il serait envisageable que ces
personnes-là soient gratuitement bloquées, et exclues de la
communication à partir de l'idée qu'elles vous ont
déjà payé pour que leur numéro ne soit pas
connu?
M. Marquis: Techniquement c'est faisable, maintenant ce n'est pas
nécessairement ce qu'on souhaite, compte tenu de ce que j'ai
mentionné tout à l'heure, que c'est quand même une certaine
quantité de clients pour lesquels le numéro de
téléphone ne parviendrait plus aux abonnés, qui eux ont
payé pour avoir un affichage. Alors...
M. Bourdon: Mais vous ne trouvez pas que c'est une situation
très paradoxale? Il y a de vos clients qui paient pour que leur
numéro ne soit pas connu, mais le plus grand nombre paie pour
connaître les numéros des autres. Mais ceux qui ne veulent pas
qu'il soit connu, qui ont déjà payé pour qu'il ne soit pas
publié, il faut qu'ils rajoutent 0,75 $ par appel pour continuer de
protéger la condidentialité de leur numéro.
M. Marquis: Évidemment, il y aurait toute une étude
sociologique à faire pour déterminer la corrélation entre
les abonnés qui paient pour ne pas que leur numéro soit
publié dans l'annuaire ou à l'assistance-annuaire, et ceux qui ne
veulent également pas que leur numéro soit transmis. Je pense
qu'il en existe, comme il existe également des abonnés qui n'ont
aucun inconvénient à ce que leur numéro soit dans
l'annuaire, et qui ne voudraient pas, pour une raison ou pour une autre, que
leur numéro soit affiché sur un autre
téléphone.
Maintenant, l'autre facteur que j'aimerais amener également,
c'est que pour l'abonné qui est à l'origine d'un appel,
généralement il a quand même le contrôle sur la
personne qu'il appelle, à savoir s'il veut effectivement que son
numéro puisse être reçu. Il n'y a jamais quand
même de garantie. Il faut quand même que l'abonné ait le
service d'affichage. Il peut quand même déterminer s'il veut que
son numéro parte, sinon il peut utiliser le service à 0,75 $, ou
sinon il y a quand même, évidemment c'est toujours des moyens
extrêmes, là, mais il peut toujours faire originer son appel d'un
autre téléphone que le sien, s'il veut absolument protéger
son numéro de téléphone personnel. Alors, le point que je
veux faire c'est que simplement, cet abonné-là, même si son
numéro n'apparaît pas dans, si c'est à Montréal, les
400 000 inscriptions qu'il y a dans l'annuaire, il peut quand même
exercer un contrôle, à savoir que son numéro apparaisse sur
le téléphone de qui il veut.
M. Bourdon: Maintenant, vous ne trouvez pas aussi que d'une
certaine manière on impose à la personne qui veut protéger
la confidentialité de son numéro de téléphone des
obligations? Puis, en termes de marketing, je comprends dans quelle logique
vous êtes. Si c'est trop simple de ne pas être affiché, vous
ne serez plus payé pour avoir l'affichage. Et je me demande, dans votre
cas comme dans celui de Bell, je sais bien qu'il y a un aspect secondaire, moi,
je pense, de la question qui protège les femmes des appels harceleurs,
par exemple, mais que l'aspect principal, c'est que c'est un service dont vous
faites la mise en marché et que, si c'est facile relativement de se
désengager... C'est la règle dans de nombreux pays d'Europe de
l'Ouest. Il y a un tribunal du Connecticut qui a décidé que
c'était une intrusion dans la vie privée d'avoir l'afficheur du
numéro de l'appelant. Vous ne trouvez pas, en tout cas, qu'il y a
là-dedans une assez grave intrusion dans la vie privée d'une
personne? Par exemple, une femme victime de violence conjugale qui ne serait
pas dans une maison d'hébergement - parce que vous avez exclus les
maisons d'hébergement, mettons que, bon, on n'en parle plus - mais elle
est chez une amie et elle oublie, elle appelle son ancien conjoint. Il peut la
retracer par son numéro. Par hypothèse, on peut penser que
l'ancien conjoint fait un lien entre ce numéro-là et une adresse
si c'est une amie. Il part et il la tue. Là, à ce
moment-là, quelle protection lui a été offerte?
Peut-être que, toute sa vie, elle a été
protégée contre les appels obscènes, mais là c'est
son assassin contre lequel elle ne serait pas protégée. Et ce
n'est pas un cas hypothétique. Ce que les organisations qui s'occupent
de consommateurs nous ont soulevé, c'est des cas d'une personne, par
exemple, qui va à une clinique pour une MTS ou un avortement. La
clinique appelle à la maison et un autre membre de la famille qui
reçoit l'appel rappelle au numéro pour apprendre que la personne
consulte un psychiatre, un psychologue, une clinique spécialisée
dans les MTS. Autrement dit, est-ce qu'il n'y a pas opposition entre le
désir légitime de votre entreprise et d'autres de mettre sur le
marché des afficheurs et le droit de chaque citoyen à la vie
privée?
M. Marquis: Évidemment, les scénarios que vous avez
décrits sont tous possibles. Je pense que ce n'est pas farfelu, ce que
vous mentionnez. Maintenant, tout est une question relative. Si on parle
d'intrusion à la vie privée, on peut également regarder
ça de l'autre côté et se dire que l'abonné qui est
appelé, pour lui aussi, à chaque fois que le
téléphone sonne, c'est une intrusion dans sa vie privée.
Jusqu'à présent, durant les 100 et quelques dernières
années, il n'y avait aucune possibilité d'apporter une
contrebalance à cette intrusion-là. Aujourd'hui, la technologie a
évolué et on dit, de la même façon que lorsque que
quelqu'un cogne à notre porte, on peut décider, en sachant qui
cogne, si on ouvre ou on n'ouvre pas; on a maintenant cette
possibilité-là avec le service téléphonique. Je
pense que, si on n'avait pas 100 ans d'histoire en arrière de nous,
probablement que la polémique ne serait pas aussi grande qu'elle l'est
dans le moment.
Maintenant, je pense qu'il faut que Télébec avoue que
notre expérience est quand même relativement limitée. On a
dit jusqu'à présent que, depuis le 24 octobre seulement, nous
avons lancé le service dans une partie quand même petite de notre
territoire. Ça représente un peu plus de 14 000 clients, en
Abitibi. Et on pense qu'à ce point-ci ça répond à
un besoin. Ce n'est pas simplement une volonté d'une entreprise comme la
nôtre de lancer un produit et de créer des besoins. Après
seulement deux semaines, sur 14 000 et quelques centaines de clients, on a
au-delà de 800 services qui ont été abonnés. Alors,
pour nous, ça répond à un besoin et, comme j'ai
mentionné tout a l'heure à M. le ministre, on devra être
très prudent et suivre de près la situation autant des clients
qui auront des récriminations à faire dans la région pour
voir s'il y a des ajustements à faire. Nous n'écartons pas
définitement la possibilité que certaines situations se
présentent et nous forcent à apporter certains ajustements. Je
pense qu'il faut le vivre. On surveille également très
étroitement ce qui se passe sur les territoires avoisinants.
Évidemment, pour nous, quand on disait l'évolution de
l'industrie, pour nous, l'industrie, c'est pas mal Bell Canada. C'est le gros
au Québec et je pense qu'on ne sera pas nécessairement les
précurseurs, mais, si jamais il y a des ajustements à faire, on
est prêt à les considérer très
sérieusement.
M. Bourdon: Moi, si vous me permettez une opinion, je pense que
les personnes qui paient pour que leur numéro ne soit pas publié
devraient, il me semble, avoir le privilège de bloquer gratuitement les
appels qu'elles font parce qu'on peut penser qu'elles vous ont
déjà
payé pour que le numéro ne soit pas connu et, si vous
dites que c'est 3 %, ce serait quand même un progrès. Encore que
c'est juste une hypothèse que j'émets parce que, moi, je pense
qu'il y a une intrusion dans la vie privée.
Cela dit, le problème que vous décrivez de l'intrusion
dans la vie privée est réel. C'est sûr que le
téléphone, c'est un corps étranger dans la maison et que,
si on est appelé par erreur à 3 heures du matin, on est
harcelé peut-être par quelqu'un qui s'est trompé de
numéro et n'a pas de mauvaise foi, mais c'est évident que
ça existe. Mais vous ne trouvez pas que le changement technologique qui
a donné naissance au répondeur permet, lui, de filtrer les
appels? Il ne permet pas de connaître le numéro de l'appelant,
mais il permet de mettre l'appelant devant un enregistrement, ce qui permet
déjà - on le sait parce qu'on en a à peu près tous
maintenant des répondeurs - d'avoir deux fins: de filtrer l'appel, de
savoir qui appelle et de décider, en toute liberté, si on veut
lui répondre ou pas et maintenant ou plus tard, quand l'appelé
décide que ça fait son affaire, disons. Et, à
l'égard des appels importuns, j'ai l'impression - et importuns, je ne
pense pas juste aux harceleurs, je pense au télémarketing, par
exemple - le répondeur est un dissuasif parce que l'abonné, il a
sa liberté entière là. Il a quatre messages et il y en a
un qui ne l'intéresse pas. Il a juste à ne pas appeler et son cas
est réglé. Mais j'ai le sentiment, moi, qu'il y a quelque chose
qui constitue une intrusion dans la vie privée des gens, et les
organisations de consommateurs - et je voudrais vous questionner
là-dessus - nous disent aussi que la personne qui appelle dans une
entreprise qui fait de la vente d'une forme ou de l'autre, on va pouvoir relier
l'afficheur à une banque de données et, en conséquence, on
peut faire des listes de personnes à solliciter pour tel ou tel ou tel
besoin. Et, en fait, je vous pose la question: Vous ne pensez pas qu'à
ce moment-là l'abonné qui ne veut qu'appeler, qui ne veut
qu'avoir un renseignement - ça, c'est son droit, c'est son désir
- d'une certaine manière, il va s'abonner? Parce que, s'il a
appelé dans un magasin de réparation de rasoirs
électriques, ça se peut qu'il reçoive une sollicitation
pour acheter tel ou tel ou tel rasoir électrique.
M. Marquis: D'abord, il faut se rappeler que le service de
gestion des appels n'est offert qu'au service monoligne. Alors, ça veut
dire que pour l'entreprise qui serait appelée par quelqu'un,
normalement, ce serait une toute petite entreprise qui n'aurait qu'une ligne
téléphonique. Autrement, dans le moment, le numéro de
téléphone n'est pas transmis. La fonction affichage existe dans
les services téléphoniques de grandes entreprises mais à
l'interne. L'autre point, c'est qu'une entreprise sérieuse qui se
respecte, normalement, ne prendrait pas des moyens comme ceux-là pour
rejoindre sa clientèle, autrement elle risque de ne pas être en
affaire tellement longtemps. Et il existe tellement d'autres moyens que le
service d'affichage pour obtenir des numéros de téléphone,
je vais simplement vous en mentionner un. Lorsque vous avez, par exemple, des
foires ou des expositions où les gens se présentent pour visiter
des kiosques et où on a une boîte dans laquelle on peut
déposer des coupons et gagner un voyage en Floride ou quelque part, il
faut toujours se demander... Évidemment, il faut indiquer le
numéro de téléphone parce qu'on veut vous appeler pour
vous dire que vous avez gagné le voyage. Alors, on peut toujours se
demander ce qui arrive de tous les autres coupons qui restent dans la
boîte. Souvent, on reçoit de la documentation, on reçoit
des appels à la maison et on se demande d'où ça vient et,
plus souvent qu'autrement, on a beaucoup de difficulté à retracer
mais, souvent, c'est des occasions comme celle-là et je pense que le
service de l'afficheur sera peut-être une possibilité de plus pour
que des gens entreprenants puissent obtenir des listes mais simplement une
parmi tant d'autres. (20 h 45)
M. Bourdon: Vous avez raison, mais j'ai l'impression que la
citoyenne ou le citoyen commence à être saturé d'une
certaine façon. Par exemple, moi, quand je me suis abonné
à Time magazine et que j'ai pris la carte American Express, ça a
transformé l'existence de ma boîte aux lettres; là, je
reçois des sollicitations multiples. Et moi, je voulais juste lire le
Time, puis avoir une carte de crédit qui ne fait pas crédit,
parce que j'aime ça me restreindre. Il y a ma collègue de
Terrebonne qui rapportait avoir rappelé un restaurant où elle
avait fait venir une pizza. Puis, sur réception de son numéro de
téléphone par informatique évidemment, elle s'est fait
répondre: Oui, on entre par la porte d'en arrière de la maison et
ça l'a comme inquiétée, dans le sens que qu'est-ce que
cette banque de données donne à un cambrioleur, par exemple? Il
finit par connaître les habitudes de plusieurs centaines de citoyens dans
la région de livraison du restaurant, puis des détails qui
peuvent aider un cambrioleur. Mais je me demande si le goût de mettre sur
le marché des moyens, il n'est pas d'une certaine façon
incontrôlée, et avec des aspects nocifs, en tout cas moi, je vous
donne mon opinion: II me semble qu'à l'égard des appels
importants le répondeur comporte des avantages qu'on filtre ses appels,
sauf que le répondeur, on ne s'y abonne pas; d'habitude, on
l'achète. Et puis, bon, ça fait un marché qui est vite
saturé, là, alors que le système de gestion des appels,
çafait quelque chose qui se renouvelle. À cetégard-là, j'ai le sentiment qu'évidemment lés
gens ont des réactions égoïstes, on est
intéressé à savoir qui nous appelle; on est
peut-être moins intéressé toujours qu'on sache que les
autres sachent que nous avons appelé. Ils connaissent notre
numéro; il y a là comme un problème. Mais
je vous dirai - je termine là-dessus - qu'il y a comme un
problème d'éthique de demander de l'argent à quelqu'un
pour que son numéro de téléphone ne soit pas connu, puis
après ça de le communiquer par l'afficheur. Il me semble que la
personne a payé pour qu'on ne le sache pas, puis que là vous
dites: Bien, si ça nous paie, on va le faire savoir, son
numéro.
M. Marquis: J'aimerais peut-être juste revenir sur la
question des répondeurs que vous avez abordée. Évidemment,
les répondeurs existent depuis déjà de nombreuses
années et ont connu un déploiement assez extensif. Maintenant,
selon les données qu'on connaît, je ne pense pas que
l'avènement du répondeur ait eu un effet marqué ou du
moins même notable sur les appels harassants. Par contre, avec ce qu'on a
vu depuis que le service de gestion des appels a été
lancé, je pense qu'on peut définitivement faire le jour et la
nuit comme étant un aspect positif qu'il faut certainement
reconnaître... Évidemment un appel importun ne laisse pas de
message sur un répondeur. Généralement, on ne rappelle pas
ces gens-là. Alors, ce qui veut dire que c'est juste ceux qui veulent
bien laisser un message qui le laissent et à partir de là,
évidemment, il peut y avoir un certain filtrage de fait. Mais ça
n'a définitivement pas eu d'impact sur le nombre d'appels importuns qui
- je pense qu'il faut le reconnaître en tant qu'entreprise de
télécommunications - représente un coût social
très élevé, lorsqu'il y a un appel qui est rapporté
à notre service à la clientèle, qui doit passer par le
service de police, si on avait - je ne sais pas si Mme St-Amour aurait des
chiffres - mais, si on avait le coût de ce que ça
représente pour la société, de réagir à un
tel appel, ce serait un coût - j'en suis persuadé -
faramineux.
Le Président (M. Forget): Alors, merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. Alors, j'invite le
député d'Orford.
M. Benoit: M. le Président, merci. Messieurs, madame.
D'abord, j'ai eu le plaisir de lire votre code d'éthique il y a quelques
instants et j'en suis particulièrement impressionné. Est-ce que
c'est unique dans votre industrie, un code d'éthique comme
celui-là, ou si chaque compagnie de téléphone en
Amérique a un code d'éthique pour ses employés?
M. Marquis: Je pense que c'est assez
généralisé. Celui que vous voyez, évidemment, a
quand même une certaine connotation avec Bell, parce qu'on fait quand
même partie de la même famille, mais je pense qu'il y a une
représentante de l'Association des compagnies de téléphone
du Québec, qui est venue ici il y a quelque temps, qui faisait part
qu'au Québec, du moins, les compagnies indépendantes en
général, respectent un code d'éthique. Alors, j'ose croire
que ça fait partie de la mentalité de Ma Bell, si on retourne 25
ou 30 ans en arrière, où l'éthique était une
donnée absolument importante, spécialement à
l'égard des employés où il y avait, je dirais, une
espèce de garantie morale qui venait avec chaque employé, que
lorsqu'un employé de Bell, que ce soit de Bell aux États-Unis ou
de Bell ici, entrait dans un domicile, la clientèle pouvait être
confiante que, s'il y avait quoi que ce soit, l'employé avait quand
même des règles très strictes à suivre et que, si
elles n'étaient pas suivies, la compagnie prendrait ses
responsabilités.
M. Benoit: C'était ma deuxième question et vous y
arrivez sans que je vous la pose. Est-ce qu'il y a des cas, et peut-être
que vous ne voudrez pas me répondre, mais est-ce qu'il y a des cas chez
vous, ou chez vos compétiteurs, où les compagnies ont dû
prendre leurs responsabilités effectivement?
M. Marquis: Définitivement. Il y a eu des cas de
congédiement d'employés lorsqu'il y a eu manquement grave au code
d'éthique.
M. Benoit: Je vais aller un peu plus loin. Un peu plus loin, dans
votre code d'éthique, à la page 5, vous parlez à un moment
donné, vous dites: "Beaucoup d'employés ont également
accès à de l'information que le gouvernement a
déclarée confidentielle. " Quelle est cette information qu'on
aurait déclarée confidentielle, et à laquelle vos
employés ont accès?
M. Marquis: On fait affaire par exemple avec des entreprises
comme, je vais prendre le cas le plus typique, la Gendarmerie royale du Canada.
On a signé par exemple l'an dernier, fin de l'an dernier ou début
de cette année, un contrat pour l'approvisionnement de services pour la
Gendarmerie royale du Canada. Alors, pour fournir des services, il faut savoir
où sont localisés les équipements, il faut savoir
qu'est-ce qu'ils font, et évidemment ça pourrait
représenter une valeur quasi nationale si on va à ce
point-là. Alors, ce genre d'informations là, normalement, n'est
accessible qu'aux personnes qui ont été
décrétées comme solvables, si je peux dire, en termes de
pouvoir conserver cette information. Alors, ça va
généralement avec le type de clientèles auxquelles nous
devons fournir des services.
M. Benoit: Très bien. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Forget): Alors, merci, M. le
député d'Orford. Est-ce que le député de
Pointe-aux-Trembles...
M. Bourdon: En fait, je n'ai pas d'autres questions. Avant de
passer la parole au ministre, je voudrais vous remercier de la clarté de
votre
exposé et vous dire que, même si sur les afficheurs je
pense qu'on ne se mettra pas d'accord, j'apprécie la franchise et la
clarté de vos réponses.
Le Président (M. Forget): M. le député.
M. Cannon: À mon tour, je voudrais vous remercier d'avoir
bien voulu participer aux délibérations. Même si vous
êtes notre seul groupe ce soir, je pense que le peu de personnes qui
étaient présentes ce soir nous a permis justement de poser des
bonnes questions. Et la qualité y était. Merci, de votre
présence.
Le Président (M. Forget): Merci beaucoup, M. le ministre.
Je remercie les représentants de Télébec de nous avoir
présenté leur mémoire.
Ceci met fin aux travaux de la commission qui sont ajournés
à demain matin, mercredi le 13 novembre à 9 h 30.
(Fin de la séance à 20 h 53)