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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Thursday, June 4, 1987 - Vol. 29 N° 66

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du Conseil exécutif et du ministère des Relations internationales


Journal des débats

 

(Quinze heures quinze minutes)

Le Président (M. Filion): La séance de la commission des institutions est ouverte. Je vous rappellerai notre mandat, qui est de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère du Conseil exécutif, les programmes 1 et 2, les éléments 1, 2, 4 et 5, l'élément 3 ayant déjà été étudié et ceux du Secrétariat à la jeunesse pour l'année financière 1987-1988.

Je demanderais à notre secrétaire d'annoncer les remplacements.

La Secrétaire: Les remplacements sont les suivants: M. Boulerice (Saint-Jacques) par Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Godin (Mercier) par M. Brassard (Lac-Saint-Jean) et M. Paré (Shefford) par M. Rochefort (Gouin).

Conseil exécutif Organisation des travaux

Le Président (M. Filion): Un bloc de trois heures trente minutes a été prévu, soit deux heures trente pour le Conseil exécutif proprement dit et une heure pour le Secrétariat à la jeunesse.

Je rappellerais à nos invités qu'il y a deux façons de procéder: ou bien nous discutons en bloc de l'ensemble des crédits, ce que je serais porté à vous suggérer, et on procède à l'adoption des programmes à la fin, ou bien on étudie chacun des programmes au fur et à mesure.

M. Johnson (Anjou): Si le premier ministre le voulait, on pourrait peut-être faire un premier tour de piste qénéral...

M. Bourassa: D'accord.

M. Johnson (Anjou); ...et lui permettre de prendre la parole, s'il le veut, pendant un certain temps. Ensuite, on passera aux éléments de programme. Je pourrai lui dire, une fois qu'il aura fait son tour de piste, les choses sur lesquelles j'ai l'intention de l'interroger, ce qui permettra à ses collaborateurs de sortir un certain nombre des dossiers.

M. Bourassa: Oui. Le chef de l'Opposition est au courant des grands dossiers qui peuvent intéresser le chef de l'exécutif. Je pense que, depuis deux ou trois semaines, j'ai répondu à des questions. Les trois quarts des périodes de questions étaient affectés à l'examen de ces dossiers.

Je veux féliciter le chef de l'Opposition pour avoir constamment exprimé la viailance que le chef de l'Opposition doit exprimer sur des dossiers qui impliquent l'avenir collectif. D'ailleurs, ce n'est pas un travail qui a été inutile parce qu'on a obtenu deux clauses de sauvegarde par rapport au lac Meech. J'ai été obligé de faire valoir mon désaccord à grand regret quand il a dit qu'il y avait un recul dans l'accord du lac Meech, hier. Je comprends les circonstances où il doit être obligé de s'opposer, mais je ne crois pas qu'il y ait eu de recul, au contraire. Et ia meilleure preuve qu'il n'y a pas eu de recul, c'est qu'on a obtenu une clause de sauvegarde sur la société distincte et une clause de sauvegarde sur le pouvoir de dépenser qui étaient les deux secteurs qui faisaient le plus l'objet de discussions.

Donc, sur cette question constitutionnelle, le chef de l'Opposition a assumé son rôle avec des résultats qu'il a pu constater lui-même.

Pour la question du libre-échange, je serai prêt à répondre à toutes les questions. Même si ça fait quelques jours que je ne me suis pas mis à jour dans ce dossier, j'essaierai de répondre aux questions là-dessus. J'ai une rencontre le 22 juin au lac Meech. Je sais que c'est un lac que n'aime pas beaucoup le chef de l'Opposition, mais ils ont décidé de faire la rencontre à cet endroit-là. Il y a les autres dossiers...

M. Johnson (Anjou): C'est parce que vous aimez les histoires d'horreur.

M. Bourassa: Pas ces jours-ci. Au contraire, ce sont plutôt des histoires très positives pour l'avenir du Québec. Donc, je suis prêt à répondre à ces questions plutôt que de faire un grand discours préliminaire.

M. Johnson (Anjou): Oui? Bon, d'accord. Je voudrais simplement dire au premier ministre, au départ, que j'ai l'intention de lui poser un certain nombre de questions touchant évidemment un peu le dossier constitutionnel. Je dis "un peu" parce qu'il y a d'autres sujets et je sais très bien que, si on s'embarque là-dedans, on peut y passer trois heures. C'est d'ailleurs pour ça que j'ai

suggéré qu'on tienne une commission parlementaire...

M. Bourassa: Une autre?

M. Johnson (Anjou): Oui, sur les textes juridiques, en lui disant, d'ailleurs, qu'il me semble qu'au Québec on aurait l'air un peu "tarlais" d'être les seuls au Canada à avoir étudié un communiqué de presse alors que, dans l'ensemble du Canada, ils vont étudier les textes juridiques. Compte tenu du fait qu'il y a eu des ajouts, des retranchements ou des changements dans les expressions, dans les mots ou dans les questions constitutionnelles, il m'apparaîtrait normal que, dans les circonstances, on procède cette fois-ci sans être limités avec un appel public: une publication des textes dans la Gazette officielle et à une commission parlementaire ouverte comme on en a tenu sur le régime forestier et sur bien d'autres choses qui n'avaient peut-être pas tout à fait les conséquences de l'entente constitutionnelle.

Je veux interroger le premier ministre également, comme il le sait, sur les questions relatives au libre-échange. Je donne avis à ses collaborateurs: sur le comité Warren, son fonctionnement, les rencontres, la question des documents, etc., et, évidemment, les enjeux de fond. J'aimerais qu'on puisse discuter un peu sur la question des enjeux de fond dans le libre-échange.

J'ai également l'intention d'interroqer le premier ministre sur les nominations et les "dénominations" qui peuvent avoir eu lieu au gouvernement depuis qu'il est en place. Je présume que des gens du Conseil exécutif ont les listes à la portée de la main. J'en ai quelques-unes et je présume que vos listes de nominations sont plus complètes. Je parle des nominations... Je n'entre même pas dans la question des socio-économiques, dans les réseaux, etc. Je pense que ce sont les ministres sectoriels qui doivent répondre de cela. Je pense vraiment à des nominations chez les sous-ministres, les contrats, etc.

C'est à peu près ce que j'ai l'intention de couvrir. Mon collègue le député de Lac-Saint-Jean, aura pour sa part, quelques questions à poser au premier ministre touchant la question des règles de conflits d'intérêts et de son application. J'aurai, quant à moi, une question très précise quant aux conditions de travail du Secrétaire général qui a précédé l'actuel Secrétaire général.

L'entente constitutionnelle M. Pierre Marc Johnson

Si le premier ministre le veut, on peut commencer, mais en acceptant l'un et l'autre de se limiter avec la question de l'entente constitutionnelle. J'ai pris connaissance du texte. J'ai cependant eu le plaisir d'en avoir une copie avant les journalistes qui étaient à Ottawa. J'ai pris connaissance du texte vers à peu près treize heures, pour ma part, c'est-à-dire à peu près au moment où les premiers ministres étaient dans leur tour de table à la télévision, quelques moments après votre intervention. C'est votre bureau qui, à notre demande, a très gentiment acquiescé à nous envoyer une copie sur laquelle était d'ailleurs inscrit 11 h 29 le matin et on l'a obtenue à 13 heures. On a été heureux de cela. Je pense que mes... Oui, c'est bien. Cela a pris juste une couple d'heures à l'avoir, pas tout à fait. Cependant, il semble que les journalistes à Ottawa n'aient pas eu le privilège d'avoir copie de ce texte avant que les premiers ministres aient fait leur tour de piste, soient déjà debout et prêts à partir. Donc, les journalistes étaient peut-être un peu limités dans les instruments qu'ils avaient pour poser des questions précises aux différents premiers ministres qui étaient là, y compris à celui du Québec.

Une chose qui m'a frappé, c'est l'introduction de l'article 4. Je rappellerai au premier ministre qu'il était parti pour Ottawa avec trois objectifs, disait-il, à la suite de la commission parlementaire partielle que nous avions tenue sur les communiqués de presse du lac Meech sur les éléments de l'entente de principe.

Je me souviens que vous nous aviez dit, après nous avoir honoré de votre présence pendant deux heures à la fin de nos travaux, que vous repartiez avec un certain nombre d'intentions et d'objectifs. D'abord, vous nous avez confirmé que la deuxième ronde de négociation porterait notamment sur la question des autochtones. Votre ministre des Affaires canadiennes, pour sa part, avait eu l'occasion de dire aux qens de l'UPA que cela porterait aussi sur l'aqriculture. Il avait dit à la CEQ que cela porterait également sur l'article 93 de la constitution. Il nous a parlé du domaine des communications. Malheureusement, je pense que j'en oublie deux ou trois. Je ne les ai pas à portée de la main en ce moment.

Mais j'avais cru comprendre que la deuxième ronde porterait sur beaucoup de sujets, incluant des questions qui touchent le partage des pouvoirs. Forcés de constater que, dans le projet d'entente que vous avez signé hier, on est encore dans le Sénat et dans les pêches de Brian Peckford.

Deuxièmement, vous nous aviez dit que, parmi vos objectifs il y avait vraiment la limitation du pouvoir de dépenser et la recherche - je vous cite à peu près au texte - de garanties selon lesquelles on n'irait pas asseoir là un pouvoir et donner une sécurité d'intervention à l'État fédéral dans un domaine de juridiction provinciale. Je suis forcé de constater aussi qu'à l'article 106a),

de toute évidence, s'il est vrai que les provinces obtiennent un droit de retrait avec compensation ou un droit de non-participation à un programme cofinancé de l'Etat fédéral, cela ne peut se faire que conditionnellement à l'existence d'un programme d'initiative compatible avec les objectifs nationaux du gouvernement fédéral. Je suis aussi forcé de constater qu'il y a donc là une assise très claire du pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral dans un domaine de juridiction provinciale et que le paragraphe 2 de ce même article 106a), pour sa part, introduit une clause de sauvegarde, non pas sur le pouvoir de dépenser, mais sur les capacités législatives de l'État canadien et de l'État québécois, ce qui n'est pas tout à fait la même chose, certains spécialistes m'ayant dit, parmi ceux que le ministre a peut-être déjà consultés dans le passé ou devrait, qu'à toutes fins utiles, cette clause de sauvegarde, dans la mesure où elle touche la loi, mais pas le pouvoir de dépenser, est bien plus une réaction au fait qu'on vient de reconnaître le pouvoir de dépenser. Il faut s'assurer que les tribunaux ne tiennent pas pour acquis que cela veut dire aussi qu'il y a un pouvoir législatif du fédéral dans les domaines de juridiction provinciale.

Force est de constater que, sur ces deux objectifs, a priori il ne semble pas y avoir eu quelque chose qu'on pourrait appeler des gains.

Troisièmement, l'autre objectif du premier ministre était de s'assurer que la clause sur la société distincte allait qarantir et donner des éléments de sécurité juridique au Québec à l'égard de deux choses - je reprends ici ce que lui-même ou ce que son ministre a répété à satiété, pour ne pas dire ad... Il y a une expression latine qui fait beaucoup plus image là-dessus - d'une part, que vous ne vouliez pas définir la société distincte autour de la langue par peur d'être trop restrictif. Là, on a eu droit à ejusdem generis et en voulez-vous, en voilà. Il y en avait du latin! Bref, si on dit que la société distincte égale la lanque, donc, dans les autres domaines, on ne pourra pas avoir recours à cette clause. Là le ministre donnait toujours l'exemple de la Caisse de dépôt. Là, si on a une loi au sujet de la Caisse de dépôt qui fait tellement partie de ce qu'on est au Québec et fait presque partie de notre fibre et de notre être collectif, là, on pourrait plaider la société distincte pour dire qu'on a peut-être empiété un peu dans le "banking" ou des affaires comme ça qui relèveraient du fédéral.

Quant à moi, je crois comprendre que l'article 4, qui a été ajouté à la demande même du premier ministre sur cet aspect non linguistique, vient dire assez clairement, il me semble, qu'en aucune façon, l'article au complet qui comprend la dualité des Canadiens français et des Canadiens anglais, le rôle des Législatures et le rôle de protection et de promotion du Québec sur la société distincte; en aucune façon, à toutes fins utiles, ne saurait affecter les pouvoirs, les privilèges et les droits du Parlement du Canada ou du gouvernement du Canada. Je vois mal comment on pourrait plaider la société distincte pour expliquer que la Caisse de dépôt et placement est peut-être à la limite de l'empiétement des pouvoirs fédéraux de 91 en matière de "banking", par exemple, à moins que le premier ministre n'ait une interprétation tout à fait autre de cela.

Deuxièmement, sur la question de la langue française, il est évident que le premier ministre s'est rendu compte, à la suite de la commission parlementaire et par suite de ce qui lui a été dit par de nombreux spécialistes, même ceux qui n'avaient pas l'insigne honneur d'être membres du Barreau, qu'à toutes fins utiles, la dualité canadienne et la société distincte pouvaient mettre le Québec dans une situation où il y aurait des chances -évaluez-le comme vous voulez: 50 %, l %, comme on voudra - que la dualité canadienne pourrait l'emporter sur le caractère spécifique ou distinct du Québec.

Dans cela, il faut bien se comprendre que ce n'est pas un problème créé par la constitution canadienne. C'est un problème créé par l'accord du lac Meech. Là, je pense que le premier ministre était dans une situation où il fallait absolument qu'il s'assure que, comme c'est lui qui avait décidé d'aller au lac Meech, il s'assurait que la dualité canadienne ne viendrait pas nous faire reculer en plus sur les questions linquistiques. Ce qui serait le bout du bout. Je suis prêt à convenir avec lui que le sens de l'article 4, c'est, en tout cas, au mieux pour la dualité canadienne, d'être envoyé dos à dos avec la société distincte et au pire, pour la dualité canadienne de ne pas pouvoir avoir préséance sur la société distincte en matière linquistique.

Cela est dans la mesure où on regarde juste l'article 2. Si on regarde le reste de la constitution maintenant, le premier ministre ne disconviendra pas que l'article 1 de la charte canadienne touchant ce qu'on appelle le test de la légitimité démocratique, l'article 2 concernant la liberté d'expression, l'article 6 concernant le droit à la mobilité, le droit d'établissement des personnes y compris le fait de qaqner sa vie, l'article 15 sur le droit de l'égalité, l'article 27 sur le multiculturalisme, l'article 93 sur le système scolaire et l'article 133, qui a été plaidé abondamment dans le domaine des législations et de la justice, sont encore des contraintes existantes et qui sont telles que l'Assemblée nationale est limitée, non pas seulement par les articles 133 et 23, mais elle est limitée par l'ensemble de la

constitution canadienne indépendamment de ce fameux paragraphe 4 qu'il a fait ajouter et qui, lui, visait à régler en partie un arbitrage entre le premier paragraphe, section A, et le premier paragraphe, section B, qui était, d'une part, à la dualité canadienne et, d'autre part, la spécificité du Québec. (15 h 30)

Finalement, je rappelle au premier ministre, puisqu'il le sait, même s'il n'avait pas le goût de le savoir il a été obligé de l'apprendre pendant ces 20 heures qui ont dû être exigeantes pour lui, je n'en disconviens pas, le premier ministre sait bien, en fin de compte, que ce à quoi on a affaire encore "une fois, c'est à une clause d'interprétation. Je veux bien qu'on fasse un plat extraordinaire et qu'on brasse cela avec un malaxeur tant qu'on voudra entre: Est-ce que la dualité canadienne l'emporte sur la spécificité ou est-ce un match nul ou est-ce une prédominance et un plancher pour le Québec? Cela n'empêche pas que tout cela est à l'intérieur d'un univers qui s'appelle "une clause d'interprétation" à l'égard de laquelle les juges se permettront d'avoir recours, dans la mesure où il n'y a pas de choses claires dans le reste. À un moment donné, on peut se retrouver avec des dispositions sur la liberté d'expression, sur le droit d'établissement, sur le multiculturalisme ou sur l'article 133, la langue de la législation et la langue de la justice qui sont assez claires dans notre jurisprudence et qui vont à l'encontre du français au Québec, qu'on se comprenne bien!

Je vais vous mettre tout cela dans une capsule: vous êtes allé chercher une relative sécurité entre deux paragraphes que vous aviez vous-mêmes introduits au lac Meech, mais vous n'avez pas changé la question des pouvoirs. Je fais exception, ici, de l'article 23 et de l'article 133. J'essaie de me mettre même dans votre cohérence et dans votre logique interne puisque vous avez toujours dit: Nous, ce qu'on accepte c'est l'article 23 sur la clause Canada et l'article 133 sur le fait qu'on veut permettre à des députés de parler anglais à l'Assemblée nationale. C'est cela que vous vouliez? Très bien! Alors, à ce moment, ce qu'il fallait exiger dans votre propre cohérence, c'est-à-dire l'article 23 s'applique, l'article 133 s'applique dans la mesure où il s'agit du droit de parole d'un député et non pas du droit d'écrire des jugements en anglais en Cour d'appel. Pour le reste, la société distincte en matière linguistique, cela veut dire les pouvoirs à l'Assemblée nationale du Québec. Cela aurait été clair, cela aurait permis de mettre les vrais enjeux sur la table alors qu'on se retrouve essentiellement avec une clause d'interprétation avec les failles que je pense que je viens de décrire au premier ministre. Je sais que celui-ci aura sûrement des réponses. Je ne tiens pas pour acquis cependant qu'elles sont satisfaisantes, mais je suis prêt à l'écouter cependant.

Une voix: Ça, c'est nouveau.

M. Johnson (Anjou): Encore faut-il avoir quelque chose à entendre.

M. Robert Bourassa

M. Bourassa: Alors, je vais essayer, M. le Président, de prendre point par point. Les journalistes, tantôt, m'on posé un peu certaines de ces questions sur la clause 4 que nous avons fait ajouter parce que, comme a dit le chef de l'Opposition, les propositions du lac Meech étaient en bonne partie proposées en termes juridiques, mais ce n'était pas final, c'étaient plutôt des principes. Aussitôt qu'on a eu - et je remercie le chef de l'Opposition de l'apprécier - les textes juridiques on les lui a fait parvenir. Donc, il ne peut pas dire... Mais quand même, on les a eus à 11 h 30 et il les a eus à 13 heures. On les a eus à Ottawa et à 13 heures il les avait ici. Il ne peut pas dire qu'on s'est traîné les pieds pour lui faire parvenir les textes juridiques.

M. Johnson (Anjou): Juste un mois et une heure.

M. Bourassa: J'ai dit lorsque nous avons obtenu les textes juridiques. Avant cela, évidemment, je lui disais qu'il y avait différentes hypothèses qui circulaient. La clause 4, j'ai discuté avec mes collaborateurs, le ministre M. Rémillard, à mes côtés. Il y avait eu des représentations en commission parlementaire, il y avait eu toutes sortes de points de vue. J'ai pensé que la commission parlementaire pouvait être utile avant la rédaction finale des textes juridiques. C'est pourquoi j'ai fait trois semaines. Nous aurons un débat à l'Assemblée nationale pour la résolution, quand nous déciderons de la présenter. On va en discuter entre nous dans les prochains jours. Sans être présent physiquement, je dois dire au chef de l'Opposition que j'ai suivi de très près les débats en commission parlementaire qui étaient, d'ailleurs, repris régulièrement à Radio-Québec. J'en ai discuté avec mes colloques et, finalement, on a dit: II peut y avoir un petit risque, non pas un gros risque, parce que - le chef de l'Opposition a oublié de le mentionner tantôt - dans l'article en question, je le répète, on parle de protection dans le cas de la dualité et, dans le cas du caractère distinct, on parle de protection et de promotion. D'ailleurs - je lui ai dit ce matin - je lisais le texte qui lui a servi de référence quand il a rencontré M. Mitterrand - un bon texte -et, dans ce texte, il disait à la fin: Ce n'est

pas suffisant de protéger, il faut promouvoir. J'ai dit, franchement, il a été bien inspiré de lire nos propositions du lac Meech, puisque c'est exactement dans cet esprit que nous avons obtenu cet accord.

M. Johnson (Anjou): En ce moment, vous dérogez un peu.

M. Bourassa: Non, c'est simplement pour dire au chef de l'Opposition que, déjà, il y avait une sécurité juridique à peu près satisfaisante, mais, comme j'ai une responsabilité et qu'un texte constitutionnel, comme il l'a souvent dit, cela s'applique pour plusieurs décennies, j'ai dit à mes collaborateurs: Je veux une garantie de 300 % - ils sont là, ils peuvent confirmer ce que j'ai dit - sur le fait que les pouvoirs du Québec et les compétences linguistiques du Québec ne pourront pas être sujets à érosion.

La crainte que j'avais, c'était les programmes de francisation. Vous savez comment c'est important en Amérique du Nord d'avoir au Québec des programmes de francisation pour que le français soit la langue de travail, parce que c'est cela qui est la source. Si le français estlta langue de travail, on va être incités davantage à aller aux écoles francophones. Si le français est la langue de travail, on va pouvoir jouer un rôle plus important dans l'économie. L'économie est, en bonne partie, la source du pouvoir réel sur les plans social, culturel et politique.

Donc, nous avons travaillé sur cette clause de sauvegarde, sur différentes formules. Le problème du Québec et du Canada, le chef de l'Opposition le sait, c'est que nous avons, au Québec, deux minorités. Logiquement, les minorités doivent avoir des protections constitutionnelles par rapport aux majorités. C'est que, nous, nous avons au pays, au Québec en particulier, une majorité francophone qui est la plus menacée des majorités en Occident ou la plus vulnérable pour toutes les raisons qu'on connaît: démographique en Amérique du Nord, le développement des communications, chute de la natalité. Nous avons donc, au Québec, l'une des majorités les plus vulnérables sur le plan culturel de l'Occident et, en même temps, on a une minorité par rapport à cette majorité francophone.

C'est un défi intellectuel et politique très exigeant de devoir à la fois, comme cela se fait dans toutes les fédérations civilisées, protéger les droits des minorités, mais, en même temps, devoir protéger la majorité francophone qui est elle-même une minorité dans l'ensemble de l'Amérique du Nord. C'était cela le défi intellectuel et politique de la négociation constitutionnelle.

Je suis très fier d'avoir réussi à faire accepter un texte - et le ministre a été largement responsable là-dessus et tous mes collèques - qui se trouve à introduire l'équilibre entre la nécessaire protection de la majorité et les protections normales pour toutes les minorités. Donc, il a fallu ajouter ce paragraphe 4. On en a discuté, je l'ai dit tantôt aux journalistes...

M. Johnson (Anjou): Est-ce vous qui avez demandé l'ajout du paragraphe...

M. Bourassa: Oui.

M. Johnson (Anjou): ...ou juste des modifications dans le paragraphe 4?

M. Bourassa: C'est moi qui ai demandé l'ajout du paragraphe quand je me suis rendu compte, après discussion, qu'il y avait risque.

Là, on a discuté. Il y a eu des contrepropositions d'autres gouvernements, qui ont dit: On comprend votre problème. On comprend que vous ne pouvez pas risquer avec les proqrammes de francisation, que cela puisse être mis en cause. Ils ont fait des propositions pour lesquelles on disait: Rien ne change - évidemment on tombe dans le jarqon juridique et comme mes experts étaient unanimes, j'ai accepté leur point de vue - ou rien ne déroge. Pendant une heure de temps on parlait si on devait utiliser le mot "changer" (alters) - vous vous souvenez -ou "déroger".

M. Johnson (Anjou): Derogates.

M. Bourassa: Derogates. "Alters", cela pouvait vouloir dire que cela qelait la possibilité d'interpréter pour ohtenir des pouvoirs additionnels. Cela protégeait, mais cela protégeait pour le bas et cela gelait pour le haut, alors que "derogates", cela nous protégeait contre l'érosion des pouvoirs linguistiques, mais cela nous permettait une interprétation et d'avoir, le cas échéant, des pouvoirs additionnels. Cela, je dois dire au chef de l'Opposition que cela n'a pas été la chose la plus facile, durant ces fameuses vinqt heures, de faire accepter cette chose. Finalement, cela a été accepté.

Donc, le défi de concilier à la fois la protection de la majorité francophone avec la minorité, on a réussi à l'obtenir en protégeant contre l'érosion des compétences linguistiques et en permettant, au surplus, cette possibilité, le cas échéant - il y a une évolution sociologique, économique, sociale qui peut se développer - à la société distincte du Québec maintenant reconnue dans le premier article de la constitution, comme je le lui ai dit ce matin. Au meilleur endroit qu'on pouvait lui trouver dans la constitution canadienne, le Québec est reconnu comme société distincte solennellement et formellement. Donc, cela permet à cette société distincte de pouvoir, le cas échéant, obtenir une interprétation favorable

pour l'addition de nouveaux pouvoirs.

En mentionnant également, dans cette clause 4, d'une façon spécifique la question linguistique, cela rendait... J'ai entendu les propos de M. Claude Morin, que j'ai bien connu et avec qui j'ai travaillé étroitement, mais je crois qu'il a parlé trop vite. Toujours cette soif de publicité pour ceux qui ont fait de la politique - on la partage tous un peu -de donner des commentaires parfois trop rapidement.

M. Johnson (Anjou): ...et qui veulent y revenir, n'est-ce pas?

M. Bourassa: Dans ce cas, je dis que M. Claude Morin a fait un commentaire prématuré, je Je regrette pour lui.

En ajoutant, dans la clause comme telle, la référence linguistique, dans la clause 4, à ce moment-là, cela devient étanche. Les tribunaux, avec cette référence à la langue, ne pourront pas - le chef de l'Opposition l'a admis tantôt, à toutes fins utiles - permettre l'érosion des compétences linguistiques du gouvernement du Québec.

M. Johnson (Anjou): Je n'ai pas dit cela.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition pourrait répliquer s'il veut, mais c'est ce que j'ai compris, il a dit qu'à toutes fins utiles, il y avait une protection.

M. Johnson (Anjou): Je n'ai pas parlé de...

M. Bourassa: Donc, dans la clause 1, il y avait une référence sur la langue, où les Canadiens français sont protégés. Au paragraphe 4, il y avait une autre référence sur la langue et j'ai eu une autre décision à prendre avec mon collèque: Est-ce qu'on ajoute une troisième référence sur le fait que le Québec est une société à majorité francophone? Je l'ai dit à la télévision hier, à l'émission Le Point, et peut-être M. Bédard aussi, auparavant, à court terme, les gens auraient dit: Bon, encore! Trois fois on parle du français. Cela aurait pu, à court terme, sur le plan de la présentation, sur le plan des apparences, en satisfaire quelques-uns, mai3 j'avais affaire à des textes juridiques, donc...

M. Johnson (Anjou): Vous êtes chanceux, vous!

M. Bourassa: ...il fallait que j'aie des avis juridiques. On m'a signalé cette clause qu'à tournée en ridicule le chef de l'Opposition tantôt: ejusdem generis. C'est une clause de droit! Pour un ancien ministre de la Justice, cela m'étonne parfois.

M. Johnson (Anjou): Oui, oui, je la connais.

M. Bourassa: Cette clause de ejusdem generis disait que si on introduisait un élément de définition, à ce moment-là, on limitait la portée juridique. En examinant cette situation au cours de ces vinqt heures, pour empêcher que la clause de la société distincte n'ait moins de portée, éventuellement, dans les secteurs économiques et sociaux, étant donné qu'il y avait une référence juridique au premier paragraphe et au quatrième, j'ai pris la décision d'opter pour un plus grand pouvoir potentiel pour cette clause. Je pense qu'on s'entend là-dessus; du moins, j'en ai l'impression. (15 h 45)

En ce qui a trait au pouvoir de dépenser, là aussi ce n'était pas facile parce qu'il n'y avait pas de tribunaux. Malheureusement, le chef de l'Opposition, quand il était ministre des Affaires sociales, avait oublié d'aller devant les tribunaux pour C-3. Je ne l'en blâme pas, peut-être qu'il voulait y aller et que ses conseillers n'ont pas voulu, mais il reste quand même qu'on n'avait pas de clause juridique qui pouvait nous guider pour limiter ce pouvoir de dépenser. Vous savez quels remous ceta crée dans certains milieux du Canada anqlais actuellement et encore aujourd'hui. Nous avons donc demandé une clause dérogatoire qui a été acceptée et le texte du lac Meech a été, à toutes fins utiles, conservé intact. Ce que nous visons avec cette clause, c'est de mettre un terme dans toute la mesure du possible au pouvoir illimité du gouvernement fédéral de dépenser, de mettre un terme à ce que je pourrais appeler le fédéralisme unilatéral qui...

M. Johnson (Anjou): Une autre!

M. Bourassa: Ne trouvez-vous pas l'expression pertinente?

M. Johnson (Anjou): Je ne l'avais jamais entendue celle-là. Je les ai toutes entendues, mais celle-là, je ne l'avais pas entendue.

M. Bourassa: D'accord. Alors, M. le Président, je pense qu'il est opportun, alors qu'on disserte abondamment dans tous les milieux intellectuels du Canada et du Québec sur le pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral, d'exprimer avec des formules qui puissent refléter la réalité ce qu'on a voulu restreindre, le fédéralisme unilatéral. Le chef de l'Opposition en a été lui-même victime avec la loi C-3...

M. Johnson (Anjou): Ha! Ha! Ha!

M. Bourassa: Le gouvernement fédéral arrive avec des normes, avec des critères, il

les impose, c'est vrai, puis il coupe les fonds. Vous le savez, vous êtes allé siéger à Ottawa; c'est l'une des seules fois où vous avez accepté de participer à un débat, ce fut contre la loi C-3; le chef de l'Opposition s'en souvient. Le gouvernement fédéral établit des normes, des critères, il participe au financement et, à un moment donné, il se retire du financement et il nous force à respecter les normes. C'est cela le fédéralisme unilatéral qu'on veut combattre, qu'on veut limiter.

M. Johnson (Anjou): Et que vous remplacez par le fédéralisme aquatique du lac Meech...

M. Bourassa: Non, non.

M. Johnson (Anjou): ...qui dit quoi sur le pouvoir de dépenser, d'après vous?

M. Bourassa: Justement, j'y arrive, parce qu'il fallait régler d'abord la question de la société distincte. Maintenant, c'est le pouvoir de dépenser qui va forcer le gouvernement fédéral, étant donné ce droit de retrait que possèdent les provinces, à tenir compte des priorités des provinces. Quand il voudra établir un programme national, au lieu de faire comme avant, de dire ce qu'il veut et de dire: C'est cela, il devra le dire, s'il ne veut pas que chaque province exerce son droit de retrait, il devra tenir compte des priorités des provinces. Si nous avons déjà dans un programme national le plan en question, c'est évident qu'on va encaisser la compensation et on n'est pas pour en faire un a côté. Donc, à ce moment-là, on utilise les fonds. On n'est pas pour avoir deux programmes similaires. Si on n'en a pas, il devra discuter avec nous et là, étant donné qu'on parle de compatibilité avec les objectifs nationaux, on a une marge de manoeuvre pour pouvoir s'y inscrire et cela, en fonction des objectifs nationaux.

Je terminerai sur ce point en disant au chef de l'Opposition que nous sommes quand même dans un marché commun avec pleine mobilité des personnes, des marchandises, des capitaux et que, forcément, dans un marché commun, il doit y avoir des politiques qui sont un peu comparables. Si vous avez dans une province des politiques sociales radicalement différentes d'une autre province... D'ailleurs, c'est ce qui fait qu'en Scandinavie il y a une comparabilité des politiques sociales, c'est ce qui fait que, dans le Marché commun aussi, dans le domaine linguistique, vous avez un Italien - je peux donner des causes au chef de l'Opposition de la cour du Luxembourg - qui peut obtenir à certaines conditions un procès en italien en Belgique. Ainsi, même dans des fédérations ou des regroupements de nations indépendantes, dans la mesure où vous avez cette mobilité des personnes, des marchandises et des capitaux, vous avez, même dans des exemples comme le Marché commun, des règlements ou des dispositions du traité de Rome qui permettent à des gens d'autres pays d'avoir des services, notamment sur le plan juridique, dans leur langue. Si cela l'intéresse, je pourrais lui référer des causes, à lui ou à ses recherchistes, notamment en ce qui a trait à des citoyens italiens installés en Belgique qui ont pu exiger d'avoir un procès en italien. Donc, c'est ce qui explique qu'on accepte l'article 133. Si cela existe, peut-être pas au même niveau, mais si cela existe entre la Belgique, l'Italie, la France, la Hollande et l'Angleterre, pourquoi, au Canada, alors qu'on constitue une fédération, on ne pourrait pas avoir cette possibilité? Je comprends que ces exemples-là ne plaisent pas au chef de l'Opposition. Cela affaiblit sa thèse, mais je veux simplement...

M. Johnson (Anjou): Vous étirez beaucoup une clause exceptionnelle concernant le droit d'être entendu devant un jury en italien en Belgique. On est rendu que, dans toute l'Europe, tout le monde...

M. Bourassa: Non, non. On en parlera. Ce que j'ai dit...

M. Johnson (Anjou): Pensez-vous vraiment qu'on peut avoir un procès en néerlandais en France?

M. Bourassa: Non. Ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que je vais lui envoyer les causes. D'accord?

M. Johnson (Anjou): Oui, sûrement.

M. Bourassa: II pourra en prendre connaissance. Je ne dis pas que c'est comparable absolument.

M. Johnson (Anjou): Ah bon! D'accord.

M. Bourassa: Mais je dis que la mobilité des personnes...

M. Brassard: Vous n'enverrez les dispositions constitutionnelles.

M. Bourassa: ...le fait qu'il y a la mobilité des personnes...

M. Brassard: ...qui se réfèrent à cela!

M. Bourassa: Oui, mais il y a le traité de Rome. C'est pour un temps indéfini.

Donc, c'est une quasi-constitution. L'article 140 du traité de Rome.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Une voix: Et bang!

M. Brassard: Certainement, par coeur.

M. Bourassa: Ce que je veux dire au chef de l'Opposition... 240 ou 140, je dois dire. Cela fait longtemps que je ne l'ai pas consulté.

M. Brassard: Je me disais aussi que vous vous trompiez.

M. Bourassa: Je dois dire au chef de l'Opposition que, si vous avez une mobilité des personnes, il vous faut accepter au niveau des politiques économiques - on le voit avec le "free trade" - au niveau des politiques sociales, certaines normes générales. Cela revient au débat référendaire qu'on a eu il y a sept ou huit ans. Dans ce contexte, je crois que ce que nous avons obtenu sur le pouvoir de dépenser est quand même un gain. C'est reconnu comme tel. Je ne pense pas qu'on peut dire que c'est un recul. C'est un gain, puisque cela vous aurait donné, vous, quand vous étiez ministre des Affaires sociales, plus de pouvoir pour appliquer des priorités du Québec. Donc, je crois que cela change l'équilibre du fonctionnement du fédéralisme au Québec. Cela permet d'avoir un Canada mieux équilibré et, finalement, ce sont ces arguments-là que j'ai soumis au lac Meech. Je ne dis pas que tous les premiers ministres ont accepté cela d'emblée, dès le départ. Il y en a qui, évidemment, insistaient sur la possibilité pour le fédéralisme de pouvoir s'exercer sans avoir des restrictions excessives. Il y avait différents points de vue, mais, finalement, on s'est entendus. Même ceux qui étaient hésitants vis-à-vis de cette limitation du pouvoir de dépenser pour raison d'un gouvernement central fort - et je respecte leur point de vue - finalement, ont compris que c'était dans la nature d'un nouveau fédéralisme d'accepter cette clause sur le pouvoir de dépenser.

Sur l'immigration, juste un mot.

M. Johnson (Anjou): Ah oui!

M. Bourassa: Juste un mot là-dessus. C'est la première fois, m'a-t-on dit, sous réserve de la qualité de mon information, depuis 120 ans, au sujet de l'immigration, qu'il y a un partage des pouvoirs à l'avantage du Québec à la suite d'une entente entre les partenaires de la fédération. C'est la première fois. C'est la première fois qu'on va chercher un nouveau partage des pouvoirs dans un secteur clé, dans un secteur fondamental pour la sécurité culturelle du Québec, pour les raisons qu'on connaît bien. Je pense qu'il faut admettre cela. C'est la première fois en 120 ans qu'il y a un nouveau partage à l'avantage du

Québec dans un secteur absolument vital pour sa sécurité. J'en ai assez dit pour l'instant.

M. Johnson (Anjou): Merci. Deux ou trois choses très brièvement. Je ne veux pas relancer le débat. Je soumets simplement la réflexion suivante au premier ministre et à son ministre. Je ne demande pas de réponse aujourd'hui, mais j'en apprécierais une éventuellement. Cela peut être à l'automne même, parce que, de toute façon, cela a l'air que cela ne se réglera pas à l'automne ou avant l'automne. On va revenir sur le processus...

M. Bourassa: Toujours ce pessimisme. Discussion générale

M. Johnson (Anjou): Non, non. Ce n'est pas pour moi. C'est pour vous. Je sais l'importance que le premier ministre et ses conseillers accordaient à l'expression "le gouvernement peut promouvoir". Notamment, il y a là-dedans des questions qui relèvent des privilèges de la couronne. Je lui soumets simplement la réflexion suivante: N'est-il pas inquiétant de voir que l'article 4 dit que rien dans ce qui précède, donc, dans les mots "gouvernement pouvant faire la promotion", ne déroge aux privilèges du gouvernement canadien?

M. Bourassa: Mais, j'ai répondu à cela. C'est la clause dont on parle depuis 20 minutes ensemble. Cela nous protège contre l'érosion des compétences...

M. Johnson (Anjou): On se comprend ià.

M. Bourassa: ...mais pour l'avenir. Mais là, le premier ministre... Le chef de l'Opposition, pardon.

M. Johnson (Anjou): Cela viendra.

M. Bourassa: Je dois être un peu fatigué. Le chef de l'Opposition me pose une question portant sur l'avenir. Je lui ai dit tantôt que, d'abord, il y avait une distinction entre "protéger" et "promouvoir" et je crois que, dans ce cas-là, en acceptant le mot "derogates" au lieu de "alters", nous avons cette possibilité-là. On pourra, à un autre moment durant le débat, s'il le veut, expliciter davantage, mais je dois lui dire que nous avons fait un débat très long, très important. J'ai moi-même demandé qu'on fasse venir les experts constitutionnels d'autres provinces pour leur poser des questions. Pourquoi s'opposaient-elles?

M. Johnson (Anjou): Non. Je ne suis pas en train de vous demander de recommencer. Je veux simplement vous dire que je sais

l'importance que vous accordiez, et vos conseillers aussi, et vous savez aussi l'importance que je pouvais accorder au sens du mot "gouvernement" dans la notion de promotion, notamment pour le Québec, pour les fins - disons - de l'application de certaines jurisprudences sur les privilèges de la couronne en matière extérieure.

Je soumets simplement au premier ministre que je souhaite qu'il demande à ses conseillers juridiques qui étaient en train de discuter du sexe des anges autour du mot "derogates" faute d'avoir fait des revendications en termes de pouvoirs qui auraient été claires, qu'il demande à ses conseillers de bien évaluer ce que signifie maintenant "le gouvernement peut promouvoir le caractère distinct du Québec", quand on sait maintenant que ça ne peut pas aller à l'encontre des privilèges du gouvernement fédéral. Je pense notamment à un privilège bien particulier de la couronne dans notre système. Mais je lui soumets simplement cela pour sa réflexion sur le processus pour les mois à venir.

Je ne veux pas rentrer trop non plus...

M. Bourassa: Oui, mais si vous me posez la question...

M. Johnson (Anjou): Oui? Ah! pardon. Si vous voulez, sûrement.

M. Bourassa: ...j'ai des conseillers juridiques...

M. Johnson (Anjou): Avec plaisir. Me Tremblay. Oui.

M. Bourassa: Me Tremblay, M. Samson et tous les autres qui, quand même, ont beaucoup d'expérience. On ne peut que progresser. On est protégé contre l'érosion. Qu'on pense au sommet, par exemple. Quand le chef de l'Opposition était premier ministre, il a signé cette entente et, d'ailleurs, je lui ai rendu hommage pour cela devant le président de la République mercredi dernier. Je pensais que les médias...

M. Johnson (Anjou): Vous n'aviez plus le choix, parce qu'il le savait.

M. Bourassa: Mais il reste quand même que, publiquement...

M. Johnson (Anjou): Vous aviez bien essayé de le faire ignorer par tout le monde, mais lui le savait.

M. Bourassa: M. le Président, je pense que le chef de l'Opposition devrait quand même admettre que c'était un beau geste. Devant 200..

M. Johnson (Anjou): C'est correct. C'est correct.

M. Bourassa: ...journalistes étrangers et canadiens, j'ai rendu hommage au chef de l'Opposition pour son rôle dans le sommet francophone en présence du président de la République, au cas où. Parce que, si lui le savait, il y avait peut-être parmi les journalistes des personnes qui ne le savaient pas. J'aurais souhaité qu'ils en fassent état pour le chef de l'Opposition, mais ce n'est pas...

Ce que je veux lui dire, c'est que cette clause-là - qui est une clause un peu typique et que nous avons travaillée ensemble, pas moi, mais qui m'a été suggérée par mes conseillers juridiques et examinée de très près par le ministre - n'a pour but que de protéger les compétences existantes. Mais, encore une fois, en enlevant le mot, je pense qu'on pourra parler sur ça plus longuement. Si te chef de l'Opposition le veut, je peux demander à mes conseillers juridiques d'expliciter davantaqe sur le plan technique. Moi, j'ai été rassuré, mais, si le chef de l'Opposition ne l'est pas, ils peuvent le faire ou le ministre peut compléter sur ce plan-là, s'il le veut, pour le rassurer au maximum.

Est-ce que le ministre pourrait...

M. Johnson (Anjou): Je veux simplement dire au premier ministre qu'à cause du nombre de dossiers qu'on a à couvrir, ce n'est pas que je ne voudrais pas qu'on en parle, au contraire, je vais vous suqqérer qu'on puisse en parler comme il faut, en bonne connaissance de cause et avec tout ce qu'on peut d'experts au Québec sur ces questions, en même temps que ça va se faire ailleurs au Canada. Je ne pense pas que ce soit en 30 secondes ou même en 42 minutes qu'on va réqler ça ici. On a entendu des gens en commission pendant je ne sais plus combien d'heures - une cinquantaine d'heures, qui n'étaient pas suffisantes quant à nous -et en dépit de tout ça, il est resté comme des zones pour le moins qrises...

M. Bourassa: Mais oui, mais...

M. Johnson (Anjou): Comme c'était un communiqué de presse, mais là, on a des textes et je pense que ce sera moins gris.

M. Bourassa: Oui.

M. Johnson (Anjou): Mais ça va quand même prendre du temps.

M. Bourassa: Oui, mais je...

M. Johnson (Anjou): Ce n'est pas en 40 secondes qu'on va régler ça.

M. Bourassa: ...doute que je puisse satisfaire le chef de l'Opposition quoi que je

fasse. J'en doute et je le comprends, il remplit son rôle. Je lui disais que Disraeli disait: Le rôle de l'Opposition, c'est de s'opposer.

M. Johnson (Anjou): Vous pourriez être surpris. (16 heures)

M. Bourassa: Un des pères de la démocratie dans le régime britannique. C'est vrai que cela lui est arrivé quelquefois d'être d'accord, mais la moyenne n'est pas forte.

Ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que, sur cet aspect, s'il a besoin d'assurance additionnelle, nous avons la conviction d'avoir obtenu une clause qui nous protège contre l'érosion des compétences, mais on ne peut que progresser à cause du terme promotion. Tous les conseillers juridiques s'accordent là-dessus, du moins tous ceux que nous avons consultés. Le ministre peut peut-être ajouter quelques mots avant de passer à un autre sujet.

M. Rémillard: Oui. Merci, M. le Président. Cette clause, comme le premier ministre vient de la présenter, est une clause qui conserve des acquis et qui permet au Québec ensuite de pouvoir évoluer en fonction d'une caractéristique qui est maintenant dans la constitution, celle de société distincte, mais qui n'est pas définie précisément, justement, pour donner cette possibilité au tribunal d'interpréter ce qu'est la société distincte. C'est donc là un outil extrêmement important pour le Québec, entre autres, en matière linguistique.

Ce n'est pas pour rien que, justement, on a ajouté, en tout dernier: "y compris à leurs pouvoirs, droits ou privilèges en matière de langue.", pour que ce soit bien précis, bien exprimé, qu'il s'agissait d'une clause qui était surtout en fonction de cette protection concernant la langue. Ce que cela signifie, M. le Président, c'est qu'en ce qui regarde, par exemple, la Charte canadienne des droits et libertés, je sais que c'est un sujet qui passionne le chef de l'Opposition. Les droits fondamentaux, cela le passionne. Alors, en ce qui regarde la Charte canadienne des droits et libertés, cela permettra de recourir à l'article 1 de la Charte canadienne des droits et libertés et ceci nous permettra à ce moment-là de justifier une loi québécoise, par exempte, en matière linguistique, qui pourrait aller à l'encontre de l'article 2 sur la liberté d'information ou de communication, de justifier qu'il s'agit là d'une mesure raisonnable et qui se justifie dans le contexte d'une société libre et démocratique, ce qu'on appelle le fameux test de la légitimité, et de plaider qu'il s'agit là d'une mesure qui protège et, en plus, la promotion. Vous savez, je vous en ai parlé en commission parlementaire et je pense que vous l'avez compris. Ce qui veut dire que, si, à la suite d'une telle plaidoirie, le tribunal en arrivait quand même à la conclusion qu'on ne peut pas faire une telle mesure linquistique, une telle loi en fonction de la langue, il y aurait à ce moment-là la clause "nonobstant", dont l'utilisation est garantie par C144.

Une voix: Mais elle est là. Elle est là.

M. Rémillard: Mais je trouve cela curieux. Tout à l'heure, j'entendais le chef de l'Opposition à la période de questions dire: C'est odieux la clause "nonobstant".

M. Bourassa: Je ne comprends pas.

M. Johnson (Anjou): Non. Je me contentais de citer le ministre.

M. Rémillard: Ah oui!

M. Bourassa: Ah non! Ah non!

M. Johnson (Anjou): Le ministre, pendant un an, nous a entretenus de la sacro-sainte égalité de tous les Canadiens sous la charte canadienne et du fait que, dans le fond, l'idéal serait qu'il n'y ait pas d'article 33 et qu'on ne puisse pas se soustraire à la charte canadienne. J'accepte mal qu'il vienne nous faire la leçon pour nous expliquer qu'en termes linguistiques au Québec on va évoluer qrâce à l'utilisation, dit-il, de la clause "nonobstant". Voyons donc!

M. Rémillard: M. le Président, ce que je fais, c'est qu'actuellement...

M. Johnson (Anjou): II y a quand même des limites à prendre les gens pour des cruches.

M. Rémillard: J'essaie d'expliquer strictement l'application de l'article 4 et simplement ce que je veux lui dire, c'est qu'on peut prendre la clause "nonobstant" -c'est une garantie que nous avons par l'article 4 - dans la mesure où le gouvernement le décide. Lorsque le chef de l'Opposition nous dit que ce sont les tribunaux qui vont décider, ce ne sont pas les tribunaux qui vont décider. S'il y a une loi qui est déclarée inconstitutionnelle par la Cour suprême et que le gouvernement veut que cette loi s'applique, malgré des droits individuels, au nom des droits de la collectivité, il prend ses responsabilités et il prend la clause "nonobstant". On ne le fera pas systématiquement comme vous l'avez fait, mais on l'applique. Alors, ce que veut faire l'article 4, c'est strictement de faire en sorte que le gouvernement puisse avoir en main tous les pouvoirs en matière de langue

et cela, c'est un pouvoir important.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pense qu'on va être prêt à passer à d'autres sujets. Je dirai simplement l'autre sujet que je veux aborder avec le premier ministre. Rapidement, sur la commission parlementaire. Je dois dire que je ne suis pas satisfait ni des explications du premier ministre, ni de celles de son ministre. Dans le cas de son ministre, c'est comme un vidéo clip qu'on a déjà entendu. Dans le cas du premier ministre, je ne disconviens pas que c'est la première fois qu'on l'entend disserter de façon un peu précise sur les questions techniques. Je ne veux pas le mettre dans une situation où on prétendrait tout recommencer à ce stade-ci, mais je lui dis simplement ceci: Nous avons, en commission parlementaire, pendant 45 heures à peu près, 55 heures, entendu un certain nombre de personnes, de groupes, des experts, des individus, qui sont venus nous entretenir de ce qu'ils avaient entre les mains, c'est-à-dire le communiqué du lac Meech.

Deuxièmement, le qouvernement canadien semble avoir décidé de procéder à une consultation relativement large par la Chambre des communes ou par le Sénat, ou les deux, ou un groupe conjoint et, possiblement, qu'il s'agirait d'auditions d'une commission itinérante. Je dis bien "possiblement", les choses ne semblent pas être arrêtées.

Troisièmement, M. Peterson de l'Ontario a déclaré que, dans le fond, il mettait cela en première vitesse. Je pense qu'il y a des élections qui s'en viennent. Je l'ai entendu et je l'ai vu de mes yeux à la télévision dire: Vous savez, on a trois ans pour adopter cela. Techniquement... Bon! Il n'a pas l'air trop pressé. Je crois comprendre que, chez M. Buchanan en Nouvelle-Écosse, la session doit se terminer incessamment. Elle ne reprend, je pense, qu'au mois de février, à moins qu'il ne fasse une session spéciale là-dessus. Donc, on est dans un échéancier, à moins que le premier ministre ne me dise le contraire, qui nous mène quelque part à l'automne pour l'adoption par les autres provinces canadiennes.

Quatrièmement, il semble évident que, dans le cas d'au moins trois provinces, trois gouvernements, devrais-je dire, le Manitoba, l'Ontario et le gouvernement canadien, sur les textes concernant l'adhésion du Québec à la constitution du Canada, le texte juridique de l'adhésion du Québec à la constitution canadienne, des gens de Colombie britannique et d'ailleurs seront consultés. Le premier ministre ne juge-t-il pas normal, voire essentiel, ne serait-ce que pour au moins un morceau de la dignité, dans la dignité et l'enthousiasme au-delà des fiertés satisfaites qu'il va de soi que, maintenant que nous avons le texte sur la base duquel le gouvernement actuel veut voir adhérer le Québec à la constitution du Canada, qu'il y ait une consultation, mais cette fois-ci, sans le qenre de contrainte qu'on a connue jusqu'à maintenant, avec publication des textes, publication des avis dans la Gazette officielle, invitation aux groupes et aux experts de présenter des projets de mémoire et auditions qui pourraient durer un certain temps, disons, je ne sais pas moi, à compter du début de l'automne ou de la fin de l'été?

M. Bourassa: II reste à en voir l'utilité. Le chef de l'Opposition doit bien être conscient qu'on a beau lui dire, par exemple, que dans certaines dispositions - je pense à l'article 106 - on ne reconnaît pas le pouvoir fédéral de dépenser, parce qu'il existe - tout le monde le sait qu'il existe -et qu'on a une clause de sauvegarde, je pourrais lui répéter beaucoup d'autres aspects du débat constitutionnel, mais le chef de l'Opposition revient constamment avec les mêmes questions et les mêmes dénédations.

Dans le cas de l'immigration, je l'ai dit, c'est la première fois dans l'histoire constitutionnelle en 120 ans qu'on obtient de nouveaux pouvoirs. Donc, ce sont des choses qui sont connues. Le texte a été maintenant adopté par les différents premiers ministres. Nous sommes la seule province à avoir tenu trois semaines d'audiences parlementaires. Lui-même parlait de 50 heures, il y en a eu 55. C'est plus que les auditions en 1981. Je dois lui dire éqalement qu'il y aura un débat à l'Assemblée nationale quand la résolution va être déposée.

Je n'ai pas l'intention, pour l'instant -je n'en vois pas l'utilité non plus, étant donné qu'on a eu ces audiences parlementaires - d'accepter de recommencer les audiences parlementaires sur ce que nous avons déjà discuté et qui a donné à certains éqards quelques résultats avec les modifications qui ont été apportées.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, sur cette question avant de passer au sujet du libre-échange et des nominations, à celui des travaux sessionnels et à la question des conflits d'intérêts, je me permettrai simplement de dire au premier ministre que c'est quand même la fin des haricots là, qu'il y a des gens à Kamloops et à Moose Jaw qui vont aller discuter des conditions d'adhésion du Québec à la constitution canadienne à partir de textes qui vont s'appliquer et être interprétés par des juqes, pendant que nous, ici, nous disons: Non, non, nous, on ne fait pas cela. Je trouve que c'est vraiment la fin des haricots. Je pense que le premier ministre voulait passer bien des choses sous le boisseau à l'époque; dans son esprit, il bâclait tout cela avant le 20 juin et tout le monde allait se promener avec son drapeau du Canada - comprends-tu?

- le 1er juillet. Là, cela ne marche plus, parce qu'il y a du monde qui ont mis ceta à "slow" un peu, en Ontario et puis au fédéral et puis en Nouvelle-Écosse et puis au Manitoba. Disons que c'est un peu moins vite que c'était prévu. L'entonnoir est comme un peu plus ouvert. Il y en a même qui ont dit que cela pourrait être amendable. Là, ils vont aller discuter des conditions d'adhésion du Québec, non pas de la création d'une province dans les Territoires du Nord-Ouest, mais des conditions d'adhésion de nous au "Canada Bill", et le premier ministre me dit: Non, cela va se consulter ailleurs au Canada, mais savez-vous pour l'instant, nous, nous trouvons que ce ne sera pas utile. Franchement! Franchement!

M. Bourassa: Alors, M. le Président, pour essayer de calmer le chef de l'Opposition...

M. Johnson (Anjou): Je n'ai pas le mérite de boire du lait comme vous en ce moment, alors!

M. Bourassa: Alors, apportez un verre de lait au chef de l'Opposition.

M. Johnson (Anjou): Si on m'apporte un verre de lait comme vous.

M. Bourassa: M. le Président, si c'est le seul défaut qu'on me reproche!

M. Rochefort: On n'a pas le courage de vous reprocher les autres.

M. Bourassa: Ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est qu'il y a déjà eu des audiences parlementaires. Il n'y en a pas eu à Kamloops ou à Moose Jaw ou aux autres endroits qu'il voudra bien nommer, mais il y en a déjà eu ici. Donc, comparons des situations comparables. Ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est qu'on a eu trois semaines de débat parlementaire. On ne voit pas aujourd'hui l'utilité d'arriver encore avec des audiences parlementaires et de faire venir les mêmes groupes qui peuvent faire valoir de toutes façons leur point de vue à d'autres tribunes. Je ne vois pas l'utilité de recommencer tout le processus d'audition parlementaire, d'autant plus qu'il y aura un débat à l'Assemblée nationale. Je pense que le chef de l'Opposition ne peut pas me reprocher de ne pas faire le maximum pour essayer - il remplit son rôle, donc, c'est à ce titre que je le fais - de répondre à ses requêtes. Il a dit d'abord, trois jours. J'ai dit: Trois. Après, il a dit: Six. D'accord, pour six. Après, huit. D'accord pour huit.

M. Johnson (Anjou): Moi, j'ai toujours dit illimité, c'est vous qui avez dit: Trois.

M. Bourassa: Télédiffusion des débats? J'ai accepté. J'ai accepté que ce soit en commission des institutions présidée par le député de Taillon. Il y en a qui ont dit...

M. Johnson (Anjou): C'est un remarquable président.

M. Bourassa: Oui, c'est un remarquable président, mais est-ce que l'objectivité va être absolue dans tous les cas? J'ai accepté que ce soit le député de Taillon qui préside la commission des institutions. J'ai tout accepté.

M. Johnson (Anjou): La prochaine, allez-vous l'accepter?

M. Bourassa: Les textes juridiques, on les a eus à 11 h 30. J'ai demandé à mes gens: Tout de suite au chef de l'Opposition. Une heure après. Là, il n'est pas satisfait encore. Il veut encore avoir des audiences parlementaires. Je dis au chef de l'Opposition que, pour l'instant, je n'en vois pas l'utilité. Aujourd'hui, je n'en vois pas l'utilité.

M. Johnson (Anjou): D'accord, je comprends. Pour l'instant, vous n'êtes pas trop sûr de vous sur cela, mais il se pourrait que cela change.

M. Bourassa: Est-ce que le chef de l'Opposition veut que je lui donne une réponse plus définitive?

M. Johnson (Anjou): Ah! mot, s'il y a une possibilité qu'il y en ait une!

M. Bourassa: On n'en voit pas l'utilité... M. Johnson (Anjou): Pour le moment.

M. Bourassa: ...étant donné qu'on en a déjà eu des audiences parlementaires. Je pourrais ajouter que cela m'étonneratt qu'on en voie dans l'avenir, mais on ne peut pas préjuger de ce qui peut arriver. (16 h 15)

Conseillers politiques et sous-ministres

M. Johnson (Anjou): Quelques remarques. Le deuxième sujet, les nominations. J'ai été frappé par vos propos, quand vous êtes arrivé au gouvernement en décembre, vous annonciez à grand renfort de publicité, vous avez même fait les premières pages de journaux avec cela, que, là, on diminuait les masses salariales des cabinets, deuxièmement, qu'il y avait trop de sous-ministres au gouvernement et, troisièmement, qu'il n'y aurait plus de jetons de présence dans les organismes où des gens siègent à

titre de citoyens, comme membres d'un conseil d'administration de différents organismes. Cela, c'était bien connu, c'était les bacchanales ou les orgies péquistes ou quelque chose comme cela. Vous aviez utilisé une expression particulièrement virulente au sujet de ces excès et de ces abus de fonds publics, disiez-vous à l'époque.

M. Bourassa: Je parlais des attachés politiques pour la campagne de leadership du chef de l'Opposition.

Des voix: Hal Ha! Ha!

M. Johnson (Anjou): Ah oui, je suis sûr de cela. Que voulez-vous, comme disait quelqu'un, on ne peut pas empêcher le monde d'aimer. S'ils étaient nombreux, ils étaient nombreux.

M. Bourassa: Oui, sauf qu'ils travaillaient sur le temps du gouvernement à même les fonds publics.

M. Johnson (Anjou): Cela dit, le premier ministre se vantait beaucoup d'avoir réduit, de façon considérable, la masse salariale des cabinets politiques. Pourrait-il nous dire maintenant comment elle se compare, à ce jour, à ce qu'elle était? Comment a-t-elle évolué depuis un an?

M. Bourassa: La masse salariale, M. le Président...

M. Johnson (Anjou): D'abord, est-ce qu'on pourrait les avoir?

M. Bourassa: Oui. La masse salariale -j'ai vérifié cela, j'aurai des chiffres plus précis - a baissé de plus de 20 % malgré une hausse du coût de la vie de 4,9 % à Montréal et de 4,2 % sur le plan nationat. Donc, c'est une baisse de près de 25 %. Est-ce que cela satisfait le chef de l'Opposition?

M. Johnson (Anjou): Non, parce que j'aimerais que le premier... Cela, c'est par rapport à l'an dernier. Je voudrais juste que le premier ministre nous dise: Et cela prendrait les chiffres. Le problème, je dois vous le dire, c'est qu'on ne les a pas obtenus cette année. On les a obtenus exeptionnellement dans le cas de deux ou trois ministères au moment de l'étude des crédits. Depuis de nombreuses années, quand on demandait quel était le personnel politique des différents ministres, nous, nous avions accepté, à l'époque où nous étions au gouvernement, de fournir les noms et les salaires des personnes. Cette année, cela a été impossible d'obtenir cela, sauf dans quelques très rares cas.

Je pense que la ministre de la Santé et des Service sociaux et le ministre des

Communications ont accepté de les fournir, mais les autres, non. Il me semble que si le premier ministre pouvait prendre l'engagement aujourd'hui de nous fournir ces listes avec les salaires, on pourrait passer à autre chose comme sujet.

M. Bourassa: Je dois dire pour... Peut-être que cela a pris...

M. Johnson (Anjou): Pardon?

M. Bourassa: Bien je ne sais pas ce qu'on vous dit.

M. Johnson (Anjou): Ce qu'on me disait, c'est que même dans le cas du cabinet du premier ministre, on n'a pas eu les données. Je commence à comprendre que l'exemple venait de haut.

M. Bourassa: Ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que cela a pu le prendre par surprise, mais la masse salariale a baissé de plus de 20 %.

M. Johnson (Anjou): Par rapport à quand?

M. Bourassa: Par rapport à 1985-1986, votre dernière année d'administration; 20 % de moins. Si je tiens compte du 4 % d'inflation, cela fait, en termes réels, 25 %: 20 % nominal et 25 % en termes réels. 25 % de moins avec tous les problèmes que vous nous avez laissés à réqler, on a réussi à...

M. Johnson (Anjou): Tout en étant conscient qu'il y a au moins quatre titulaires de ministères de moins, ce qui représente environ le pourcentage de 20 % dont vous parlez.

M. Bourassa: M. le Président, il y a 28 ministres au lieu de 29. Il ne faut pas...

M. Johnson (Anjou): En ce moment, en avez-vous 28?

M. Bourassa: Oui. Est-ce que vous pensez qu'on devrait...

M. Johnson (Anjou): Comment allez-vous faire votre remaniement? Vous allez être mal pris.

M. Bourassa: On s'en parlera tous les deux.

M. Johnson (Anjou): Vous allez être mal pris dans votre remaniement.

Si le premier ministre pouvait prendre l'engagement...

M. Bourassa: Fn qros, 20 000 000 $ en

octobre 1985...

M. Johnson (Anjou): Oui.

M. Bourassa: ...et 16 000 000 % quatorze mois plus tard. Sur une même base, c'est de 20 à 16 millions.

M. Johnson (Anjou): Excusez-moi, pourquoi sur une même base?

M. Bourassa: On prend une année.

M. Johnson (Anjou): C'est parce qu'il y a une partie de l'année financière 1985-1986 qui a été sous votre administration et une partie sous la nôtre. Il ne faut pas...

M. Bourassa: On termine à la fin de 1986. 1986, 16 000 000 $; 1985, 20 000 000 $. Alors, cela fait une baisse de 20 %. Je pense que j'ai tenu parole et je demanderais au chef de l'Opposition de le reconnaître.

M. Johnson (Anjou): Cela me fera plaisir de le reconnaître une fois que j'aurai l'ensemble des chiffres.

Les documents que je demande au premier ministre, s'il est prêt à nous les fournir, c'est, premièrement, la liste des attachés politiques; deuxièmement, les salaires, comme cela se faisait avant; troisièmement, j'aimerais qu'on obtienne la progression à l'intérieur même de votre propre masse depuis que vous êtes là, année pour année?

M. Bourassa: II n'y a pas eu de progression, M. le Président.

M. Johnson (Anjou): Aucune progression de la masse salariale des cabinets.

M. Bourassa: Mon budget original était de 2 23...

M. Johnson (Anjou): Je ne parle pas de votre bureau, je parle du gouvernement, de l'ensemble des cabinets. Depuis que vous êtes au gouvernement, comment la masse salariale a-t-elle évolué?

M. Bourassa: Elle a baissé de 20 %.

M. Johnson (Anjou): Je ne vous demande pas juste... Là, vous me parlez par rapport à 1985. Je vous demande: A-t-elle augmenté cette année par rapport à l'an dernier?

M. Bourassa: 3 %.

M. Johnson (Anjou): Bon, d'accord, là on a un chiffre.

M. Bourassa: Mais c'est encore 20 % de moins que vous.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Johnson (Anjou): On comparera cela à la fin du mandat.

M. Bourassa: J'ajoute que, pour mon propre cabinet, j'ai refusé les 3 %.

M. Johnson (Anjou): Vous savez très bien que vous n'en avez pas besoin, voyons donc!

M. Bourassa: M. le Président!

M. Johnson (Anjou); Les "dénominations" maintenant. Je dis bien tes "dénominations", étant donné qu'un certain nombre de personnes, que je ne nommerai pas nécessairement, mais j'en ai une longue liste...

M. Bourassa: On a nos listes pour ce qui est de votre côté.

M. Johnson (Anjou): ...particulièrement beaucoup d'anciens sous-ministres et sous-ministres adjoints - on parle bel et bien de la fonction publique, on ne parle pas du péripublic et des sociétés d'État, on parle de la fonction publique - par une technique quelque peu étonnante, qui s'appelle la technique du décret en vertu de... Il faudrait que je me souvienne de quelle loi. Mais sans vous dire le nom, je vous donne: Concernant M. ou Mme X, il est ordonné sur proposition du premier ministre que soit attribué à M. ou Mme X, sous-ministre adjoint au ministère Y, administrateur d'État II, le classement de cadre supérieur classe I à ce ministère, au même salaire annuel, à compter des présentes.

À toutes fins utiles, il faut bien se comprendre, je pense que si ce décret était rédiqé comme il devrait l'être, il se lirait: Concernant M. ou Mme X, sous-ministre adjoint, qui ne le sera plus à la fin de la lecture du prochain paragraphe... Voilà! C'est ce que fait ce type de décret.

Or, il y a une bonne quinzaine de personnes qui, comme sous-ministres ou sous-ministres adjoints, se sont retrouvées dans cette situation. Je voudrais demander au premier ministre, d'abord, si ces personnes ont été remplacées. En d'autres termes, est-ce qu'il y a au gouvernement, en ce moment, sensiblement le même nombre de sous-ministres et de sous-ministres adjoints qu'il y en avait il y a un an et demi?

M. Bourassa: D'après les chiffres que j'ai devant moi, M. le Président, c'est: sous-ministres adjoints, 116 par rapport à 124; dirigeants d'organismes, 95 par rapport à

103; membres à temps partiel d'organismes du gouvernement, 989 par rapport à 1052. C'est au 31 mars 1987. C'est ce qu'on appelle rationalisation et productivité de la haute fonction publique.

M. Johnson (Anjou): Dans le cas des sous-ministres adjoints, voulez-vous me redonner les chiffres? Sous-ministres adjoints et sous-ministres combinés ou...

M. Bourassa: Sous-ministres et sous-ministres adjoints...

M. Johnson (Anjou): Oui.

M. Bourassa: 116 par rapport à 124.

M. Johnson (Anjou): 116, 124.

M. Bourassa: II y en a huit de moins. Et dirigeants d'organismes, 95 à 103; huit de moins.

M. Johnson (Anjou): Est-ce que cela comprend les secrétaires généraux associés, quand vous dites sous-ministres et sous-ministres adjoints, au total?

M. Bourassa: Oui.

Une voix: Au total.

M. Johnson (Anjou): Merci.

M. Bourassa: On accepte vos félicitations.

M. Johnson (Anjou): Qu'est-ce que vous faites avec celles et ceux qui, dans bien des cas, ont une longue carrière dans la fonction publique, ou même qui, dans certains cas, en dépit de leur jeune âge, ont une carrière remarquable et remarquée, et qui n'ont pas tous été des attachés politiques du précédent gouvernement, soit dit en passant? De ce côté-là, vous ne semblez pas vous priver. Si je comprends bien, il y a un nouveau secrétaire général associé qui est un attaché politique du ministre Gobeil maintenant.

M. Bourassa: Bien, cela...

M. Johnson (Anjou): Non, non, c'est juste que...

M. Bourassa: Ce serait perdre du temps...

M. Johnson (Anjou): Mais ce sont des choses qui semblaient scandaleuses il y a quelques années.

M. Bourassa: M. le Président...

M. Johnson (Anjou): Je voudrais savoir combien de ces personnes, qui étaient sous-ministres et sous-ministres adjoints, sont en disponibilité.

M. Bourassa: Vous voulez dire ceux... M. le Président, je pense qu'on a fait la preuve que, sur le plan de la partisanerie, on était prêts... On accepte le travail, même ceux qui... Le chef de l'Opposition a l'air de rigoler.

M. Johnson (Anjou): Non, c'est parce que vous alliez faire un beau lapsus. Vous étiez prêts, sur le plan de la partisanerie, en arrivant.

M. Bourassa: Ce que je dis c'est qu'on ne peut pas dire, par rapport à ce qui a pu être fait, qu'il y a eu les fameuses purqes dont parlait le chef de l'Opposition au début de notre mandat.

La question du chef de l'Opposition, c'est: Combien de personnes ou de sous-ministres...

M. Johnson (Anjou): Je pourrais vous donner la liste, les noms...

M. Bourassa: 25.

M. Johnson (Anjou): Bon. Il y a 25...

M. Bourassa: Environ 25.

M. Johnson (Anjou): ...environ 25 personnes, sous-ministres adjoints, sous-ministres au présidents d'organismes qui, en ce moment, sont sans affectation. C'est bien ce que vous me dites?

M. Bourassa: Ils peuvent avoir été prêtés - le chef de l'Opposition est au courant - à des organismes, à l'ENAP ou à d'autres...

M. Johnson (Anjou): Oui. Mais il y a -on se comprend bien - 25 personnes ayant le ranq d'administrateurs d'État, sous-ministres adjoints, sous-ministres en titre...

M. Bourassa: Qui ont été mutés à d'autres postes.

M. Johnson (Anjou): ...ou présidents... Non, non. Je demande au premier ministre quels sont ceux qui sont sans affectation. Une affectation, c'est de la productivité avec l'argent des contribuables. Bon. Je comprends qu'à l'occasion, un sous-ministre adjoint ou un sous-ministre puisse aller à l'École nationale d'administration publique faire une année, l'équivalent de ce qu'on appelle dans d'autres milieux une année sabbatique, qu'il reçoive son salaire mais non son compte de dépenses, etc., et qu'il peut faire une recherche qui est une contribution

intéressante pour l'État. Mais disons que quelqu'un qui partirait pour dix ans comme cela, c'est une autre paire de manches,

M. Bourassa: M. le Président, ce qu'on me dit, c'est que si le chef de l'Opposition parle de ceux qui réellement n'ont pas été affectés à d'autres fonctions...

M. Johnson (Anjou): Oui.

M. Bourassa: ...c'est beaucoup moins que 25.

M. Johnson (Anjou): II y en a combien?

M. Bourassa: Je pourrais lui donner, d'ici la fin...

M. Johnson (Anjou): J'apprécierais beaucoup....

M. Bourassa: M. Benoît Morin va essayer de trouver cela.

M. Johnson (Anjou): ...si M. Morin pouvait nous trouver cela.

M. Bourassa: Oui.

M. Johnson (Anjou): J'attendrai peut-être d'avoir les chiffres. Est-ce que M. Morin va pouvoir nous les fournir d'ici la fin de nos crédits?

M. Bourassa: On va essayer, oui. M. Johnson (Anjou): J'apprécierais. M. Bourassa: D'accord.

M. Johnson (Anjou): Mais le premier ministre ne disconviendra pas que le chiffre idéal, c'est zéro.

M. Bourassa: Oui.

M. Johnson (Anjou): Oui, c'est correct, parce qu'on parle...

M. Bourassa: C'est comme pour des élections, le chiffre idéal, c'est 122 comtés.

M. Johnson (Anjou): Oui, cela, c'est bien sympathique, mais en attendant, je parle de gens qui ont fait carrière dans la fonction publique, qui ont un salaire de sous-ministre ou de sous-ministre ajdoint, qui est en général plus élevé que celui de la plupart des gens autour de cette table...

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Johnson (Anjou): ...et qui peuvent se retrouver sans affectation, ce qui en soi peut arriver exceptionnellement dans l'État mais qui ne doit sûrement pas toucher trop de personnes.

M. Bourassa: Non, je suis d'accord avec vous. Je ne sais pas combien il y en avait quand vous étiez là, mais je vous dis que c'est beaucoup moins que 25 - j'avais mal compris la question du chef de l'Opposition -parce qu'il y en a qui ont été prêtés à des organismes.

M. Johnson (Anjou): En attendant d'avoir les chiffres éventuellement, on va passer au libre-échange. Quelques remarques sans entrer dans le fond du dossier, ce que je ferais avec plaisir, si le premier ministre est prêt à ce qu'on fasse cela jusqu'à 17 h 30 ou 17 h 45; moi, je suis disponible pour qu'on parle du libre-échanqe. Je trouve qu'on n'en parle pas assez au Québec en ce moment et Dieu sait que cela fait un an qu'on essaie d'en parler, nous autres. On obtient des espèces de "one-liner" de la part de votre ministre du Commerce extérieur.

D'abord, quelques questions au sujet du comité Warren. Combien de personnes en font partie? Au total, combien de personnes ont été impliquées dans...

M. Bourassa: M. le Président, on vient de me donner les chiffres pour les nominations des postes dont le chef de l'Opposition parlait. En 1985-1986, il y a eu 198 nominations à temps complet par le gouvernement dont a fait partie le chef de l'Opposition; en 1986-1987, 121. C'est quand même une réduction.

M. Johnson (Anjou): Vous me donnez le nombre de nominations.

M. Bourassa: Et 417...

M. Johnson (Anjou): Je comprends, mais s'il y a des gens qui avaient des mandats de quatre ans ou de cinq ans...

M. Bourassa: Cela donne une idée quand même qu'il n'y a pas eu...

M. Johnson (Anjou): Non, cela donne une idée sur cinq ans. Il faut tenir compte de la durée des mandats.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition n'est pas dans un état aujourd'hui pour admettre quoi que ce soit.

M. Johnson (Anjou): Moi, je pense que le chef du gouvernement, qui a passé une nuit difficile qui l'a été encore plus pour le Québec, en ce moment, compare des pommes avec des oranges. Pourtant, cela m'étonne de la soi-disant riqueur d'un économiste. On ne compare pas deux périodes comme celles que vous venez de comparer en dépit du fait

qu'un de vos adjoints vienne de vous passer un papier à cet effet.

M. Bourassa: M. le Président, je pense que j'ai donné...

M. Johnson (Anjou): S'il y avait des mandats qui n'étaient pas expirés, c'est évident que vous ne pouviez pas les nommer.

M. Bourassa: Oui, mais j'ai comparé des nominations à temps complet d'une année par rapport à des nominations à temps complet d'une autre année. Je pense que...

M. Johnson (Anjou): Cela ne vaut que dans la mesure où vous le faites sur deux périodes comparables dans la durée des mandats. Bon, voilai

M. Bourassa: Oui, mais il reste quand même que c'étaient deux années d'administration. Je ne vois pas pourquoi le chef de l'Opposition essaie de faire des diversions sur la comparaison de ces chiffres.

Le libre-échange

M. Johnson (Anjou); Bon. Alors, je demande au premier ministre, sur le libre-échange, d'abord, combien y avait-il de groupes, de personnes? Quel a été le budget total engagé jusqu'à maintenant dans le travail sur le libre-échange? (16 h 30)

M. Bourassa: 250 000 $ pour le comité.

M. Johnson (Anjou): 250 000 $ d'engagements financiers. Du côté des dépenses, vous ne pouvez peut-être pas être à même de le dire. C'est à peu près la même chose?

M. Bourassa: Oui.

M. Johnson (Anjou): D'accord. Essentiellement, ces dépenses ont été affectées, je présume, au traitement de M. Warren et de quelques-uns de ses adjoints. Ce sont des gens qui commandent des traitements assez élevés, mats aussi des gens des comités consultatifs. C'est cela? C'est quoi à peu près la ventilation des 250 000 $?

Une voix: Le traitement de M. Warren...

Le Président (M. Filion): Excusez-moi. Pour le Journal des débats, est-ce que vous pourriez vous identifier...

M. Johnson (Anjou): M. Morin.

Le Président (M. Filion): ...avant de prendre la parole?

M. Morin (Benoît): Benoît Morin, secrétaire général du gouvernement. En fait, il y a le traitement de M. Warren et il y a aussi le traitement de M. Dorais qui agit comme secrétaire du comité.

M. Johnson (Anjou): Le traitement de M. Warren est de combien?

M. Morin (Benoît): Le traitement de M. Warren était d'environ 100 000 $.

M. Johnson (Anjou): D'accord. Est-ce que M. Warren est à temps plein là-dessus ou non? M. Warren, est-ce qu'il est considéré comme à temps plein ou...

M. Morin (Benoît): Non.

M. Johnson (Anjou): Non, je ne le crois pas.

M. Morin (Benoît): Non, non.

M. Johnson (Anjou): II est à honoraires, à toutes fins utiles.

M. Morin (Benoît): C'est cela. Il est à honoraires, effectivement.

M. Johnson (Anjou): À peu près 100 000 $. M. Dorais, comme secrétaire?

M. Morin (Benoît): II a eu des honoraires d'environ 70 000 $.

M. Johnson (Anjou): 70 000 $. Est-ce qu'il est à temps plein?

M. Morin (Benoît): Non, il est à temps partiel lui aussi.

M. Johnson (Anjou): II est à temps partiel aussi. Est-ce que, dans le cas de M. Dorais, il a d'autres émoluments qui viennent du gouvernement, dans d'autres ministères, ou d'autres fonctions?

M. Bourassa: On peut vérifier et je pourrai...

M. Johnson (Anjou): Je comprends que c'est une question assez détaillée, mais je présume que... D'accord.

Maintenant, le fonctionnement des comités. On comprend: Voici un président, voici son secrétaire. Je présume qu'il y a une armée de fonctionnaires qui a dû travailler sur le libre-échange; je l'espère, en tout cas.

M. Bourassa: Oui, d'excellents aussi.

M. Johnson (Anjou): Au Conseil exécutif... Il y a des gens remarquables au Conseil exécutif, au Trésor, aux Finances, au Commerce extérieur, à l'Industrie et au

Commerce. Il y a des professionnels de grande qualité dans ces ministères.

M. Bourassa: Oui.

M. Johnson (Anjou): Est-ce qu'on pourrait nous entretenir, à savoir comment cela a fonctionné? Il commence à se faire tard un peu, cela s'en vient.

M. Bourassa: Je crois que le chef de l'Opposition... J'essaie, aux périodes de questions, de lui répondre. Là, on a été...

M. Johnson (Anjou): Non, quand je dis "il se fait tard", je ne parle pas de cet après-midi.

M. Bourassa: Ah! excusez-moi.

M. Johnson (Anjou): Je trouve que ce serait une bonne idée que les gens sachent ce qui se passe avec le libre-échange. C'est à la veille d'être signé. C'est comme l'affaire des textes.

M. Bourassa: J'étais prêt à répondre aux questions du chef de l'Opposition depuis trois ou quatre semaines, mais, malheureusement, et je comprends, la priorité a été accordée aux questions constitutionnelles.

Il y a un comité ministériel permanent au développement économique qui est présidé par le ministre des Finances et il y a des ministres dans les secteurs économiques. Il y a un sous-comité ministériel sur la question du libre-échange avec M. MacDonald, Daniel Johnson, Gil Rémillard et André Vailerand. Le secrétaire est Michel Audet et le conseiller principal, comme on vient de le mentionner, est Jake Warren.

Il y a un comité de coordination des relations intergouvernementales présidé par Mme Diane Wilhelmy qui s'occupe également du dossier constitutionnel et qui a fait un travail de géant dans le dossier constitutionnel - je pense qu'on peut te signaler au chef de l'Opposition - avec M. Roland Arpin comme secrétaire au Conseil du trésor et Michel Audet, qui est secrétaire général associé au développement économique.

Il y a un comité technique interministériel présidé par M. Michel Audet et un comité consultatif présidé par M. Jake Warren avec M. Lawrence Cannon, adjoint parlementaire, Yvon Dolbec, Marie-Josée Drouin, Guy Dufresne, Marcel Dutil, Paul Martin, Jean-Louis Roux. Est-ce que cela répond à la curiosité du chef de l'Opposition?

M. Johnson (Anjou): En partie, oui. En partie seulement dans la mesure où je comprends, premièrement, qu'il y a un comité technique, deuxièmement, qu'il y a tout ce qui se fait, je présume, par les services dans chacun des ministères qui risquent d'être impliqués, troisièmement, qu'il y a un comité consultatif. Le comité technique relève d'un comité ministériel présidé par le ministre des Finances. Est-ce que c'est bien cela? J'ai bien compris?

M. Bourassa: Bien je parle du comité ministériel permanent.

M. Johnson (Anjou): Ah bon, d'accord. M. Bourassa: Le CMPDE.

M. Johnson (Anjou): Ce n'est pas un comité ad hoc du Conseil des ministres.

M. Bourassa: Non. C'est le comité ad hoc...

M. Johnson (Anjou): II y a une espèce de sous-comité du comité permanent...

M. Bourassa: ...présidé par M. le ministre du Commerce extérieur. Le comité permanent, c'est Gérard D. Levesque, ministre des Finances et le comité ad hoc, c'est M. MacDonald.

M. Johnson (Anjou): Parfait. Mais le comité ad hoc relève-t-il du comité permanent ou s'il est séparé?

M. Bourassa: Oui, il relève... C'est un sous-comité.

M. Johnson (Anjou): Donc, le secrétaire des deux comités c'est le même secrétaire général associé.

M. Bourassa: Michel Audet.

M. Johnson (Anjou): Michel Audet. D'accord.

Du côté du comité consultatif, d'abord il faut voir en gros c'est quoi le produit final de ça. Le produit final de ça, c'est M. Warren qui, de temps en temps, doit parler à l'ambassadeur Reisman ou quelque chose de cet ordre-là.

M. Bourassa: Oui. Ils se connaissent très bien d'ailleurs, ils ont travaillé ensemble pendant plusieurs années.

M. Johnson (Anjou): Voilà! Oui, c'est ça, au-delà des relations...

M. Bourassa: Mais c'est commode.

M. Johnson (Anjou): Non, non, mais au-delà des parties de golf, je comprends tout ça, mais on parle du libre-échange...

M. Bourassa: On ne parle pas de parties

de golf...

M. Johnson (Anjou): ...et des intérêts du Québec aussi, pas juste des intérêts de gens qui sont copains-copains et qui se sont connus à l'université.

M. Bourassa: M. le Président, je pense que je suis obligé de rectifier les faits parce que le chef de l'Opposition manifeste un certain mépris vis-à-vis des hauts fonctionnaires ou des conseillers qui apportent au Québec une expertise extraordinaire. M. Jake Warren a été responsable, principal négociateur pour les négociations du GATT. Donc, il a été ambassadeur en Angleterre et à Washington, je crois, et il a eu à travailler très souvent avec M. Simon Reisman qui était sous-ministre des Finances.

M. Johnson (Anjou): Je ne doute pas des qualités de M. Warren. La question n'est pas là. Ce que j'essaie de...

M. Bourassa: Donc, il ne s'agit pas de parties de golf.

M. Johnson (Anjou): ...dire au premier ministre, c'est que la qualité essentielle de l'efficacité pour servir les intérêts du Québec dans le dossier du libre-échange, ça ne peut pas être seulement le fait que des gens se soient connus ailleurs. Cela présuppose premièrement que ça fonctionne ici. Et c'est là-dessus que je l'interroge, si le premier ministre me le permet, parce que je trouve que ça vaut la peine, l'enjeu est de taille, n'est-ce pas? Je vais vous dire que, d'après moi, il va avoir un effet un peu plus important que la société distincte que vous êtes allé vous faire peinturer dans un coin l'autre jour.

M. Bourassa: M. le Président...

M. Johnson (Anjou): Ce que je demande au premier ministre, c'est ta chose suivante: Le comité consultatif du Québec, est-ce que je me trompe si je dis qu'il avait deux fonctions? D'une part, M. Warren parle à M. Reisman à partir...

M. Bourassa: II y a un comité fédéral-provincial, juste pour que le...

M. Johnson (Anjou): Bon, c'est ça. D'accord.

M. Bourassa: ...présidé par M. Reisman et dont M. Warren est délégué pour le Québec.

M. Johnson (Anjou): Voilà! Ça, c'est dans la structure formelle. Il y a un comité fédéral-provincial. M. Reisman parle avec...

M. Bourassa: Le délégué du Québec qui est M. Jake Warren...

M. Johnson (Anjou): Oui, oui, c'est ça.

M. Bourassa: Et lui parle avec Peter Murphy.

M. Johnson (Anjou): II parle avec Peter Murphy en face. Bon!

M. Bourassa: II y a eu de nombreuses réunions à venir jusqu'à maintenant, avec plusieurs sous-comités de ce comité au niveau fédéral.

M. Johnson (Anjou): II y a plusieurs sous-comités.

M. Bourassa: ...de ce comité fédéral-provincial.

M. Johnson (Anjou): Bon! Ce comité fédéral-provincial, si je comprends bien, est formé d'une part de l'ambassadeur Reisman qui représente le Canada et, deuxièmement, de représentants - au pluriel - de chacune des provinces. Est-ce que je me trompe? C'est bien ça?

M. Bourassa: Oui, c'est ça.

M. Johnson (Anjou): Chacune des provinces est présente.

M. Bourassa: En tout cas, le Québec y est représenté. J'imagine que c'est le cas pour toutes les provinces.

M. Johnson (Anjou): Toutes les provinces. Bon!

Quand M. Warren va là, il doit avoir des mandats. Je présume que son mandat d'ordre général est de défendre les intérêts et le point de vue du Québec. Je présume aussi que M. Warren est favorable au libre-échange sur le plan du choix politique que cela implique. Le premier ministre me corrigera là-dessus...

M. Bourassa: Non, vos présomptions sont justes cette fois-ci.

M. Johnson (Anjou): Oui? Je vous remercie. Vous êtes bien gentil. Trop aimable.

Donc, je présume que M. Warren a des mandats. De qui lui viennent ces mandats au Québec? Est-ce qu'ils lui viennent du comité ministériel ou du comité consultatif?

M. Bourassa: Forcément, ils viennent du gouvernement qui s'exprime par le sous-comité ministériel, lequel fait rapport au comité ministériel qui, lui, fait rapport au Conseil des ministres.

M. Johnson (Anjou): Parfait! Que vient faire le comité consultatif dans tout ça?

M. Bourassa: Le comité consultatif, comme le comité de coordination des relations intergouvernementales - je peux envoyer un organigramme au chef de l'Opposition - se trouve à fournir des informations au sous-comité ministériel. Le groupe de M. Warren a déjà entendu des représentants de plusieurs secteurs manufacturiers.

M. Johnson (Anjou): D'accord. Et les membres du comité dont on a donné les noms: Yvon Dolbec, Raymond Biais, plus maintenant évidemment, Marie-Josée Drouin, Marcel Dutil, Mona-Josée Gagnon, Roger Pruneau, Michel Vennat, Jean-Louis Roux, M. Dorais qui est secrétaire, Tous ces membres se sont-ils réunis souvent?

M. Bourassa: Oui. Au minimum, une fois par mois. Le comité consultatif?

M. Johnson (Anjou): Oui.

M. Bourassa: Une fois par mois.

M. Johnson (Anjou): Est-ce que le comité consultatif a eu accès aux études d'impact des différents ministères?

M. Bourassa: Oui, je crois. Sans avoir les études... Une bonne partie des études. Le chef de l'Opposition m'avait posé une question à un moment donné il y a deux ou trois mois là-dessus.

M. Johnson (Anjou): Oui, oui.

M. Bourassa: J'attendais qu'il me la repose.

M. Johnson (Anjou): Ce serait certainement plus simple si vous y répondiez la première fois.

M. Bourassa: Oui mais, M. le Président, le chef de l'Opposition me fait des reproches. II arrive sans préavis un beau matin ou un après-midi puis il demande: Quelles sont les modalités de distribution des comités d'étude aux membres du comité consultatif sur le libre-échange? Et il voudrait que le premier ministre. sans préavis, puisse connaître les modalités de distribution de tout ce qui se fait pour plusieurs dizaines de comités. Et il me fait le reproche de ne pas... Je comprends qu'on me dit que je suis assez bien informé mais les modalités de distribution...

M. Johnson (Anjou): II y a des limites, n'est-ce pas?

M. Bourassa: Vous avez raison, il y a des limites.

M. Johnson (Anjou): Voilà.

M. Bourassa: Alors, il ne peut pas me faire le reproche de ne pas...

M. Johnson (Anjou): Je peux comprendre cela. Il y a des limites, comme dans la société distincte.

Comment le premier ministre explique-t-il cependant, dans le cas de ces études d'impact, qui évidemment peuvent commencer à donner un portrait de ce que va vouloir dire le... Comment le premier ministre explique-t-il que ces études d'impact qui vont commencer à donner aux Québécois un portrait de ce que cela pourrait vouloir dire, non pas ce que cela va vouloir dire, n'est-ce pas? il ne faut pas se faire d'illusion. Ces études d'impact sont des modèles habituellement économétriques dans lesquels le pifomètre joue un rôle important. Mais c'est le pifomètre exercé par des spécialistes des méthodes quantitatives en général. Je pense que c'est le meilleur qu'on puisse posséder.

Comment le premier ministre explique-t-il que son ministre du Commerce extérieur, M. MacDonald déclarait le 13 mai - ce n'est pas il y a six mois - à une question de mon collègue de Bertrand: Nous avons mentionné qu'il y avait des études - et je cite -sectorielles qui étaient mises à jour avec les chiffres de 1986 et qui allaient être rendues publiques dans une dizaine de jours par le ministre de l'Industrie et du Commerce entre autres chez qui se sont préparées la majorité de ces études. Ces études recevront la même distribution que leur rapport, c'est-à-dire que qui que ce soit dans la province de Québec qui désire avoir des copies les aura.

C'est M. MacDonald qui déclare cela à l'Assemblée nationale le 13 mai. Le ministre de l'Industrie et du Commerce déclare lui, le 87-07-01, donc le 7... Non, le 1er... J'essaie de voir sur la transcription du Journal des débats en commission.

Une voix: C'est le 2 juin.

M. Johnson (Anjou): C'est le 2 juin? Bon. Bien oui, c'était avant-hier, à l'étude de ses crédits il y a quelques jours. Voilà. Alors le 2 juin donc, au moment où vous étiez à Ottawa, votre collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce, député de Vaudreuil-Soulanges, déclare: "II est essentiellement exclu que nous mettions sur la place publique, en pleine négociation, l'inventaire des points forts et des points faibles du Québec compte tenu des enjeux évidemment de libéralisation des échanges. Il est inutile de mettre sur la place publique ce qui peut faire l'avantage concurrentiel

d'une entreprise ou alors étaler au grand jour les faiblesses particulières de certaines entreprises pour que leurs concurrents évidemment en prennent avantage. Nous ne sommes pas aujourd'hui disposés à laisser aller comme cela, sans balises aucune, ce qu'on peut avoir découvert grâce à notre expertise au ministère de l'Industrie et du Commerce et dans d'autres ministères, soit l'Agriculture, à l'Énergie et aux Ressources, etc."

Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire si on va avoir les études d'impact parce qu'il me semble que ses ministres ne s'entendent pas?

M. Bourassa: Non. Le ministre de l'Industrie et du Commerce a répondu à cette question mardi. Je ne sais pas si quelqu'un, un de vos recherchistes pourrait trouver le texte de sa réponse.

M. Johnson (Anjou): C'est cela. C'est cela que je vous lis.

M. Bourassa: Ah d'accord!

M. Johnson (Anjou): C'est cela que je viens de vous citer.

M. Bourassa: Oui, mais justement il a donné les raisons.

M. Johnson (Anjou): Oui.

M. Bourassa: À cause de la concurrence, ta publication de ces études pourrait affecter certaines entreprises.

M. Johnson (Anjou): Alors, si je comprends bien, lui, le ministre du... (16 h 45)

M. Bourassa: Oui. Le ministre du Commerce extérieur a publié ce document qui fait la synthèse des études sur le libre-échange avec les États-Unis. Je ne sais pas si le chef de l'Opposition...

M. Johnson (Anjou): Non.

M. Bourassa: Vous ne l'avez pas vu.

M. Johnson (Anjou): Oui, je l'ai vu. J'en ai même pris connaissance. On s'est même permis de le critiquer, mais le premier ministre était occupé à autre chose. Il était sur le bord d'un lac. Je pense qu'il ne s'en est pas rendu compte.

M. Bourassa: M. le Président, toujours...

M. Johnson (Anjou): Pour revenir à son style...

M. Bourassa: ...ses attaques insidieuses sur le chef du gouvernement fédéral.

M. Johnson (Anjou): Mais, est-ce que....

M. Bourassa: C'est malheureux. Non, mais c'est toujours ces attaques vis-à-vis de M. Mulroney. Je ne sais pas ce qu'en pense le député de Joliette. Toujours...

M. Johnson (Anjou): Je n'attaque pas M. Mulroney.

M. Bourassa: Oui. Vous avez dit que, pour 25 $, il vendrait le Yukon.

M. Johnson (Anjou): Non.

M. Bourassa: Pour avoir quelques votes.

M. Johnson (Anjou): Pour 25 votes, il aurait vendu le Yukon. Pas 25 $. J'ai dit 25 votes. Ce n'est pas la même chose.

M. Bourassa: Mais le reproche...

M. Johnson (Anjou): En plus de tout cela, j'ai dit qu'il le vendrait aux Russes pour cela. C'est ce que j'ai dit. Bon.

M. Bourassa: Le reproche est aussi injuste pour le premier ministre du Canada qui a fait quand même, à l'occasion du lac Meech, parce que c'est lui qui a abordé la question...

M. Johnson (Anjou): On est dans le libre-échange.

M. Bourassa: ...une contribution exceptionnelle à l'unité du pays.

M. Johnson (Anjou): Je comprends que le premier ministre passera une bonne fin de semaine. Je lui souhaite. Avant, il y a encore du travail à faire. Cela porte sur le libre-échange, en ce moment. Bon. Je voudrais simplement lui dire qu'il y a comme un problème avec son ministre du Commerce extérieur. En tout cas, s'il n'en a pas, je pense qu'il vient de trancher. Je pense qu'il trouve que le ministre de l'Industrie et du Commerce a raison et que le ministre du Commerce extérieur a tort. Parce que son ministre du Commerce extérieur nous a promis... On l'a demandé - c'est comme le reste, c'est comme les textes juridiques - on a demandé au ministre du Commerce extérieur: Peut-on avoir les études d'impact? II a dit: Oui, le 13 mai, dans dix jours, dit-il, le 13 mai...

M. Bourassa: Une dizaine de jours.

M. Johnson (Anjou): Une dizaine de jours, d'accord, on se comprend. Cela fait une vingtaine de jours. Entre-temps, le député de Vaudreuil-Soulanges se fait poser la question, par mon collègue de Bertrand,

M. Parent, et lui répond: Savez-vous, non, on ne les rendra pas publiques. Dans le fond, la question que je pose est: Arrive-t-il que le ministre de l'Industrie et du Commerce et le ministre du Commerce extérieur se parlent du dossier du libre-échange?

M. Bourassa: Ils siègent tous les deux au comité.

M. Johnson (Anjou): Je vais vous dire, cela ne paraît pas.

M. Bourassa: Ils s'entendent très bien. Je pense, M. le Président....

M. Johnson (Anjou): Alors, pourriez-vous expliquer à un des deux qu'il est mélangé...

M. Brassard: ...qu'ils se comprennent.

M. Johnson (Anjou): Parce qu'il y en a un qui dit qu'il va rendre publiques les études et l'autre explique que c'est absolument impossible, que c'est une affaire d'intérêt public que ce ne soit pas rendu public. Le premier ministre nous ferait-il la grâce d'expliquer à un de ses deux ministres, qu'il y en a un qui est ou confus ou mélangé?

M. Bourassa: M. le Président, je me souviens très bien de cette déclaration -dont j'avais pris connaissance même si j'étais absent, parce que je n'étais pas à Québec. Le ministre avait dit: Dans une dizaine de jours, mais je devrai en discuter avec le ministre de l'Industrie et du Commerce. Il l'a dit à ce moment-là.

M. Johnson (Anjou): Enfin, je ne veux pas revenir sur ce qu'il a dit, mais tout le monde peut le lire. Je veux seulement donner la page, c'est la page 7538 du Journal des débats. Le premier ministre va se rendre compte que son ministre de l'Industrie et du Commerce s'est mis le doigt dans l'oeil jusqu'au coude. Cela étant dit, j'aimerais savoir, du premier ministre, s'il entend, oui ou non, rendre les études publiques?

M. Bourassa: Vous dites que le ministre de l'Industrie et du Commerce s'est mis le doigt dans l'oeil jusqu'au coude?

M. Johnson (Anjou): Non, j'ai l'impression que c'est celui du Commerce extérieur, d'après ce que vous me dites.

M. Bourassa: Ah! je pensais.

M. Johnson (Anjou): Si c'est celui de l'Industrie et du Commerce, je voudrais le savoir.

M. Bourassa: Non, mais c'est cela. Je me demandais si vous attaquiez...

M. Johnson (Anjou): Cela m'étonnerait. Cela va dépendre de votre réponse, celui qui s'est mis le doigt dans l'oeil.

M. Bourassa: M. le Président...

M. Johnson (Anjou): Lequel des deux s'est mis le doigt dans l'oeil?

M. Bourassa: Le ministre du Commerce extérieur a fait une déclaration. Il a dit: Dans une dizaine de jours, le ministre de l'Industrie et du Commerce pourra vous expliquer s'il peut rendre publiques ces études.

M. Johnson (Anjou): Non! Il a dit dans une dizaine de jours, ce sera rendu public par le ministre de l'Industrie et du Commerce. Ce n'est pas la même chose.

M. Bourassa: Non. Parce que le ministre du Commerce extérieur, à plusieurs reprises, a mentionné les risques pour la concurrence, cela a été mentionné par le ministre du Commerce extérieur. Nous avons discuté de cette question-là tous les trois. Donc, il peut y avoir des citations hors contexte. Mais nous avons discuté de cette question-là. Le ministre du Commerce extérieur a dit: II y a des risques pour la concurrence. Voilà le document qui a été rendu public. M. le Président, on dirait que c'est le chef de l'Opposition qui a siégé 20 heures.

M. Johnson (Anjou): Non, absolument pas. On a eu une îonque commission parlementaire pensez-vous, vous n'avez rien vu encore. Alors, finalement j'aimerais que le premier ministre nous confirme, blaque à part...

M. Bourassa: M. le Président, ce qu'a dit le ministre du Commerce extérieur, indépendamment d'une déclaration qui a pu être citée, c'est qu'il demanderait à ses collègues - cela revient un peu à la déclaration, mais c'est un peu plus nuancé -de publier les études ou quelles sont les études qui pourraient être publiées en tenant compte des conséquences sur la concurrence. Donc, le ministre de l'Industrie et du Commerce, qui a sa propre responsabilité, a dit que dans les cas qui l'intéressaient cela comportait des risques. C'est tout.

M. Johnson (Anjou): Donc, les études ne seront pas rendues publiques.

M. Bourassa: Je me réfère à la réponse du ministre de l'Industrie et du Commerce. Il a répondu mardi.

M. Johnson (Anjou): Et non pas à celle du ministre...

M. Bourassa: Non, je veux dire la dernière que vous avez.

M. Johnson (Anjou): Donc c'est le ministre de l'Industrie et du Commerce qui a raison non pas celui du Commerce...

M. Bourassa: Mais non.

M. Johnson (Anjou): Je veux savoir, ils disent des choses contradictoires. Y a-t-il moyen de savoir c'est quoi que le gouvernement fait?

M. Bourassa: Oui, je vais le dire au chef de l'Opposition s'il me donne la chance, s'il me donne quelques secondes et s'il m'écoute. Il ne m'écoute pas quand je réponds, il parle toujours à droite ou à gauche.

M. Johnson (Anjou): Ah, je l'écoute attentivement.

M. Bourassa: Oui.

M. Johnson (Anjou): Vous savez, je suis capable des fois de faire deux choses en même temps.

M. Bourassa: Tant mieux! Ce que je dis au chef de l'Opposition c'est que d'abord, te ministre du Commerce extérieur a fait une déclaration...

M. Johnson (Anjou): Oui.

M. Bourassa: ...en disant: Les ministres responsables devront s'occuper de publier ou non les études. Chaque ministre - c'est ce que j'ai dit tantôt au chef de l'Opposition -aura la responsabilité de prendre la décision pour son secteur. Le ministre de l'Industrie et du Commerce a pris la décision pour son secteur. C'est cela la réalité.

M. Johnson (Anjou): Bon, d'accord. M. Bourassa: Alors c'est clair?

M. Johnson (Anjou): Non, mais je comprends que le premier ministre est un peu embarrassé par cela.

M. Bourassa: Non, pas du tout.

M. Johnson (Anjou): Je n'insisterai pas, je vais juste me contenter de lui envoyer une photocopie des déclarations de ses deux ministres. Il va se rendre compte que je ne compte pas de blague sur cela. C'était bien clair que le ministre de l'Industrie et du Commerce - il était mentionné - devait rendre publiques dans une dizaine de jours les études et, 20 jours après, le ministre de l'Indusrie et du Commerce dit: Vous ne les aurez pas les études parce que la concurrence, la vertu et la tarte aux pommes. Je comprends que le premier ministre nous dit, puisqu'il refuse de répondre clairement, que c'est le ministre de l'Industrie et du Commerce qui a raison, que la politique du gouvernement c'est que les études d'impact du ministère de l'Industrie et du Commerce ne seront pas rendues publiques. Ai-je bien compris?

M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition est injuste vis-à-vis du ministre de l'Industrie et du Commerce. Il n'a pas parlé de tarte aux pommes et de choses comme cela. Il a dit: Dans les secteurs qui m'intéressent...

M. Johnson (Anjou): II a parlé d'agriculture. C'est faux, il en parle d'agriculture, ici.

M. Bourassa: ...ou sous sa responsabilité il y a des impacts négatifs sur la concurrence. C'est cela qu'a dit le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Johnson (Anjou): Bon, alors c'est vous le premier ministre. Si je comprends bien, il n'y aura pas d'études rendues publiques.

M. Bourassa: Je veux dire que si des études, selon l'avis des ministres, pouvaient, dans certains cas - parce qu'on a déjà publié plusieurs documents - affecter la concurrence, je pense que le chef de l'Opposition va comprendre.

M. Johnson (Anjou): D'accord, donc, c'est non. Merci.

M. Bourassa: Pour des raisons que tout le monde va admettre.

M. Johnson (Anjou): Un autre sujet, si vous permettez, M. le Président, je demanderais à mon collègue, le député de Lac-Saint-Jean, qui a une ou deux questions à poser au premier ministre. Cela va se faire rapidement.

M. Bourassa: M. le Président, l'essentiel des conclusions de toutes les études se retrouve dans ce document.

M. Johnson (Anjou): Je ne suis pas d'accord avec cela. Mais enfin!

M. Bourassa: Je respecte l'opinion du chef de l'Opposition, je ne la partage pas.

M. Johnson (Anjou): J'apprécie.

Une voix: Mais vous ne la partagez pas!

L'ex-secrétaire général du gouvernement

M. Brassard: M. le Président...

Le Président (M. Filion): Oui, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: ...j'aurais un certain nombre de questions à poser au premier ministre. D'abord, une question concernant l'ancien secrétaire général du gouvernement, M. Roch Bolduc, qui a quitté le gouvernement depuis un certain temps, pour savoir quel était le statut de M. Bolduc pendant qu'il était à l'emploi du gouvernement à titre de secrétaire général. Est-ce qu'il avait gardé des liens financiers ou administratifs avec son ancien employeur le groupe CGI.

M. Bourassa: Comme vous le savez, M. Bolduc avait été engagé pour onze mois, donc, il a été engagé à contrat. Je peux essayer de retrouver le contrat.

M. Brassard: II est contractuel.

M. Bourassa: Oui. Je vais le lire: "Le gouvernement engage à contrat M. Roch Bolduc pour agir comme secrétaire général et greffier du Conseil exécutif ci-après, etc. M. Bolduc assiste le conseil - ce sont les fonctions. Durée: 23 décembre 1985 pour se terminer le 22 juin 1986." Il avait été engagé pour six mois, à contrat, pour la période de transition et, après, cela a été prolongé de cinq mois, par décret.

M. Brassard: Pendant cette période, où il était à contrat avec le gouvernement, quels étaient - je reviens à la question que j'ai posée - les liens, soit financiers, soit administratifs qu'il avait conservés avec son ancien employeur, le groupe CGI?

M. Bourassa: II était à contrat. Je crois qu'il n'occupait absolument aucune fonction dans son ancienne entreprise puisqu'il était à plein temps secrétaire général. Il a été engagé pour six mois, je lui ai demandé de prolonger de cinq mois donc, il travaillait totalement à plein temps. Toute son activité...

M. Brassard: II travaillait à plein temps, mais est-ce... Je parlais de liens financiers. Est-ce qu'il est demeuré, par exemple, actionnaire du groupe CGI dont il provenait?

M. Bourassa: II est possible qu'il ait eu des actions...

M. Brassard: II demeurait actionnaire.

M. Bourassa: ...mais il n'avait aucun lien administratif ou aucun lien de travail de quelque nature que ce soit.

M. Brassard: Vous dites qu'il est possible qu'il soit demeuré actionnaire. Est-ce que c'est...

M. Bourassa: Étant donné qu'il était engagé pour six mois, j'aurais trouvé exagéré de lui demander de vendre ses actions. Il était engagé pour une période de six mois.

M. Brassard: Serait-il possible d'avoir une réponse précise...

M. Bourassa: Sur le nombre d'actions qu'il avait?

M. Brassard: Non, sur...

M. Bourassa: S'il en avait et le nombre d'actions?

M. Brassard: S'il était demeuré actionnaire du groupe CGI ou en congé sans traitement. Quel était le genre de lien ou de statut de M. Bolduc par rapport au groupe CGI d'où il provenait?

M. Bourassa: M. le Président, j'ai le contrat ici, je ne sais pas si le député de Lac-Saint-Jean voudrait obtenir une copie du contrat d'engagement de M. Roch Bolduc...

M. Brassard: Pour le contrat, cela va, M. le Président.

M. Bourassa: Le contrat, c'est le contrat. Vous n'êtes pas satisfait du contrat.

M. Brassard: Je ne parle pas du contrat, je vous parle des liens conservés par M. Bolduc avec le qroupe conseil d'où il provenait, soit le qroupe CGI. Quels étaient les liens qu'il a conservés?

M. Bourassa: Les seuls liens qu'on peut peut-être envisager, c'est qu'il ait eu des actions de l'entreprise. Il ne pouvait pas avoir d'autres liens puisqu'il était à plein temps pour le gouvernement.

M. Brassard: II peut avoir eu un autre lien, il peut avoir été en congé sans traitement. C'est un lien cela.

M. Bourassa: Sur la question des actions et des autres liens, je peux avoir les détails et donner la réponse au...

M. Brassard: II peut être demeuré administrateur de l'entreprise, au conseil d'administration. Serait-il possible - vous me donnez des hypothèses - dans les plus brefs délais, que les membres de la commission

puissent obtenir une réponse plus précise concernant toute nature du statut de M. Bolduc, au moment où il était à contrat avec le gouvernement au poste de secrétaire général associé, par rapport au groupe où il travaillait auparavant?

M. Bourassa: D'accord. Je vais vérifier le statut en question pour être sûr de donner une réponse exacte. J'ai demandé au secrétaire général d'aller vérifier.

M. Brassard: Si je comprends bien -vous me direz si je me trompe - à la fin de son contrat, M. Bolduc est redevenu vice-président du groupe CGI.

M. Bourassa: Adjoint au président.

M. Brassard: Adjoint au président. A-t-il encore un lien quelconque avec le gouvernement?

M. Bourassa: Non.

M. Brassard: Soit comme conseiller...

M. Bourassa: Après avoir démissionné, je lui ai demandé d'être conseiller pour quelques mois, de mars à mai, soit pour deux mais. Par la suite, il a démissionné, à la fin de mai.

M. Brassard: Donc, présentement, il n'a plus aucun lien contractuel avec le gouvernement.

M. Bourassa: Durant deux mois, je lui ai demandé de conseiller le gouvernement sur certains points. Je voudrais quand même rendre hommage au travail de M. Bolduc. Je sais que le député ne veut pas...

M. Brassard: Absolument pas.

M. Bourassa: ...insinuer quoi que ce soit. S'il y a un serviteur de l'État...

M. Brassard: Je voudrais bien qu'on se comprenne. Je n'ai pas...

M. Bourassa: ...à qui on peut rendre hommage, c'est bien M. Roch Bolduc. (17 heures)

M. Brassard: M. le Président, je voudrais bien qu'on se comprenne. Je connais la feuille de route de M. Bolduc, ce sont simplement des informations, qui m'apparais-sent pertinentes, que je voudrais connaître.

M. Bourassa: D'accord. Je ne voudrais pas que ce soit interprété d'une façon négative. C'est important d'avoir des gens comme M. Roch Bolduc pour pouvoir aider l'administration du gouvernement. Des gens qui ont 30 ans d'expérience... Il ne faudrait pas que les questions puissent être interprétées d'une façon négative et qu'on ne soit plus capable d'avoir des conseillers, à l'occasion, qui peuvent être utiles.

M. Brassard: Oui, mais c'est important que les choses soient transparentes, le premier ministre en conviendra.

M. Bourassa: D'accord, c'était simplement une mise en garde non pas pour le gouvernement, mais pour l'ensemble de ceux qui pourraient travailler pour l'administration publique et pourraient être craintifs de le faire s'ils étaient susceptibles d'être traités injustement.

M. Chevrette: Mais quand tout se fait clairement, il n'y a plus de problème.

M. Brassard: Donc, M. le Président, je peux compter sur des réponses dans des délais assez brefs.

M. Bourassa: Oui.

Directive sur les conflits d'intérêts

M. Brassard: Merci. Je reviens au dossier de la directive concernant les conflits d'intérêts des membres du Conseil exécutif. La dernière question que j'ai posée au premier ministre, à ce sujet, concerne les annexes, les fameuses annexes. C'est regrettable que le ministre délégué aux Affaires canadiennes ne soit pas aussi bon détective que l'agent 007. On pourrait lui demander de trouver ces fameuses annexes. II semble qu'on avait beaucoup de difficulté à les localiser.

Est-ce que le premier ministre a réussi, entre-temps, à retrouver les annexes des déclarations d'intérêts de ces ministres?

M. Bourassa: M. le Président, j'ai déjà répondu au député à ce sujet. Quand, l'an dernier, le député m'a fait des suggestions sur les fonctions de mandataire, en ce sens que tes mandataires ne devaient pas être des individus qui, à l'occasion, pourraient être des amis personnels, j'ai accepté la suggestion du député. Je pense que c'était une suqgestion valable.

Dans le cas de la publication des actions, par exemple, j'ai déjà répondu au député qu'il s'agit d'actions cotées à la Bourse, donc d'actions qui font l'objet d'un mandat sans droit de regard. À ce moment-là, si elles font l'objet d'un mandat sans droit de regard, ce que demande le député, c'est de rendre publiques les annexes, mais sans supposer qu'un ministre aurait tel et tel type d'action, par exemple, d'une compagnie X, qui pourraient être vendues, à un moment donné, par le mandataire, sans droit de

regard de la part du ministre. À ce moment-là, on serait sous l'impression que le ministre a encore des actions qu'il n'a plus, parce que cela a déjà été vendu, et que ses décisions, au lieu d'être uniquement prises en fonction de l'intérêt collectif, pourraient être prises en disant: Si je donne un contrat à cette compagnie X, je ne sais pas si j'ai encore des actions dedans, mais si je lui donne le contrat, même si c'est la meilleure, ils vont m'accuser de le faire parce que j'ai dix actions.

Je ne vois pas l'utilité, la justification de rendre publiques des annexes alors qu'il y a des transactions constantes qui se font par les mandataires, ce, sans droit de regard. La justification... Si le député me fait des suggestions qui sont justifiées, je les accepte, comme pour le chef de l'Opposition. À ce moment-là, je me dis: Dans quelle situation se trouvera-t-on? Les ministres vont dire: Est-ce que j'ai encore ces actions? Est-ce que mon ministère peut octroyer le contrat? Non, si je ne les ai pas, parce que si mon ministère octroie le contrat et qu'on pense que je les ai, on va faire des liens. Il faut quand même...

M. Brassard: M. le Président...

M. Bourassa: Est-ce que le député me suit?

M. Brassard: Oui, je vous suis très bien. Je vous ai demandé: Avez-vous les annexes? En avez-vous pris connaissance? Vous avez dit non, ce sont seulement les mandataires qui en ont pris connaissance. Ma question n'est même pas: Voulez-vous rendre publiques les annexes? C'est: Vous êtes, comme premier ministre, le responsable de l'interprétation et de l'application de ta directive sur les conflits d'intérêts. Or, vous me dites: Je ne connais pas les annexes, je n'en ai pas pris connaissance, je ne veux pas en prendre connaissance et je ne sais pas où elles sont; je sais que les mandataires les ont, mais personne au Conseil exécutif ne les détient, et moi, je ne les ai pas regardées comme interprète de l'application et responsable de l'application des directives. Je trouve cela, pour le moins, étonnant.

M. Bourassa: Le député change de sujet complètement.

M. Brassard: Non, c'est la question que je vous posais.

M. Bourassa: II parle...

M. Brassard: Je vous posais la question tantôt; Avez-vous les annexes? Les avez-vous retrouvées? En avez-vous pris connaissance? C'est cela, la question.

M. Bourassa: M. le Président, les annexes ont été remises aux mandataires sans droit de regard. Quelle utilité...

M. Brassard: Mais, vous, les avez-vous regardées?

M. Bourassa: ...pourraient avoir ces annexes quand des transactions peuvent les modifier constamment? Quelle utilité cela pourrait-il avoir pour moi, alors que, constamment, on peut faire des transactions qui modifient le contenu des annexes? C'est ce que je dis au député, je vais répéter mon explication.

M. Brassard: Comment faites-vous pour interpréter la directive à l'égard de vos ministres si vous n'avez pas pris connaissance des annexes?

M. Bourassa: On parte des actions publiques, des actions cotées à la Bourse sans droit de regard.

M. Brassard: Cela ne vous intéresse pas?

M. Bourassa: Si les ministres n'ont pas de droit de regard, si je regarde les actifs le 1er janvier 1987 et que, le 2 janvier 1987, ils sont complètement transformées par d'autres transactions, quelle est l'utilité de connaître les actifs le 1er janvier quand, le 2, ils peuvent être tout à fait différents? Voyons donc!

M. Brassard: Je vais vous donner un... Selon votre directive, en septembre, les ministres devront faire un nouveau rapport. D'accord?

Le Président (M. Filion): À l'ordre, s'il vous plaît!

Est-ce qu'on peut demander le silence autour de la table pour nous permettre de bien saisir le contenu des échanges?

M. Brassard: Le ministre des Affaires canadiennes pourrait-il se retirer?

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Le Président (M. Filion): Merci.

M. Brassard: Donc, en septembre, les ministres vont devoir vous soumettre de nouveau une déclaration d'intérêts. À l'article 4, concernant les compagnies publiques, il est dit qu'"il conserve la liberté de retirer des fonds ou d'en ajouter..,". Donc, il pourrait fort bien arriver qu'en septembre de l'année suivante, le volume, le montant par conséquent, aussi, des intérêts d'un ministre ait considérablement auqmenté. Pour savoir cela, il va falloir que vous

consultiez les annexes. Je ne comprends pas que, comme interprète et responsable de l'application...

M. Bourassa: M. le Président.

M. Brassard: ...de la directive sur les déclarations d'intérêts, vous n'ayez pas juqé bon d'examiner les annexes de ces déclarations d'intérêts. En septembre, comment allez-vous faire pour savoir que certains de vos ministres, parce qu'ils ont la liberté de retirer des fonds ou d'en ajouter, ont augmenté leur mise de fonds dans des compagnies publiques de façon substantielle ou l'ont retirée, ou ont réduit considérablement leur portefeuille confié à un mandataire? Comment allez-vous en prendre connaissance si vous ne consultez pas les annexes aux déclarations d'intérêts?

M. Bourassa: Le député arrive avec une autre question.

M. Brassard: Je pose plusieurs questions pour essayer de vous faire prendre conscience qu'il est important pour vous de prendre connaissance des annexes.

M. Bourassa: Oui. Je dis que le député arrive avec une autre question, parce qu'il parle de deux périodes différentes. D'accord? Il parle du 1er septembre au 1er septembre. Dans le premier cas, évidemment, les ministres soumettant leurs actions de compagnies cotées à la Bourse à des mandataires, sans droit de regard, il n'y a aucune utilité, pour le chef du gouvernement, par curiosité ou autrement, de voir ces actions qui, le lendemain, peuvent être transférées à d'autres. D'accord? Est-ce que le député est d'accord avec moi? Bon. Le député soulève la question qu'après un an, il pourrait être utile pour le chef du gouvernement, au cas où il y aurait une augmentation spectaculaire de la fortune, cotée à la Bourse, des ministres - on sait que la Bourse a augmenté beaucoup, je comprends... Le député dit que, s'il y a une augmentation spectaculaire de l'actif, le premier ministre peut être justifié de s'enquérir des sources de cette augmentation, c'est-à-dire le 1er septembre qui vient. Je comprends la question du député et j'en prends note, mais ce que je veux dire au député, c'est que, de savoir, au début d'une période, les actions qui sont détenues, alors que cela peut être modifié en tout temps, en n'importe quelle circonstance, je crois que ma curiosité n'est pas justifiée.

Quant à l'autre question du député, savoir s'il ne pourrait pas être utile, au bout d'un an, s'il y avait des changements spectaculaires dans l'actif, que le premier ministre puisse poser quelques questions: je dis que j'en prends note. Mais elle n'est pas d'actualité. C'est le 1er septembre prochain.

M. Brassard: Seulement poser des questions. Vous n'auriez pas la curiosité d'examiner les annexes.

M. Bourassa: Selon les réponses que j'ai, quand même. Je pense que le député est assez intelligent pour comprendre ce que je dis. Si les réponses sont satisfaisantes, je les accepte. Si elles ne le sont pas, j'en pose d'autres.

M. Brassard: Si je comprends bien, M. le Président, en septembre, à la suite du dépôt des déclarations d'intérêts de ses ministres, ces dépôts, qui doivent être rendus publics en vertu de sa propre directive, ne comporteront pas, encore une fois, les annexes.

M. Bourassa: Pour les raisons que je viens de mentionner, le secrétaire qénéral s'occupe de cela. Parce que je comprends que j'ai une responsabilité de l'intégrité du gouvernement et c'est pour moi de toute première importance, les premières remarques que j'ai faites comme premier ministre, le 12 décembre 1985, ont été de demander à mes ministres, comme première exiqence, l'intégrité de l'administration. À l'occasion du premier anniversaire, j'ai également rappelé l'exigence de l'intéqrité de l'administration. Cela suppose des sacrifices. Il y a plusieurs ministres qui viennent du monde des affaires, ils ont accepté des sacrifices financiers considérables, mais il est important, pour l'administration publique, d'être de la plus qrande transparence. Mais en ce qui concerne la question que m'a posée le député sur les annexes, je pense que je lui ai répondu pourquoi ma curiosité n'était pas justifiée. C'est parce que le contenu de ces annexes est constamment en chanqement. Mais pour ce qui est de l'autre question, sur la comparaison entre les deux dates, on va examiner la justification de cette curiosité. Ce n'est pas facilement qu'on assume cette curiosité, mais je pense que si c'est nécessaire de le faire pour l'intégrité, on va examiner la question.

M. Brassard: M. le Président, j'ai examiné les déclarations d'intérêts de deux de ses ministres, celle de M. Lincoln, ministre de l'Environnement, et celle de M. Ciaccia, ministre de l'Énergie et des Ressources. J'ai constaté que les deux sont associés en affaires, par l'entremise d'un "joint venture", comme on dit, pour un terrain de 161 000 pieds carrés sur le chemin Bord du lac - ce n'est pas le lac Meech - à Dorval, pour fins de développement résidentiel. On retrouve une déclaration similaire, dans la déclaration de M. Ciaccia, ministre de l'Énergie et des Ressources, pour

[a même association, avec M. Lincoln, lui, c'est par l'entremise de Green Clore Holdings Inc., pour le même terrain de 161 000 pieds carrés, sur le chemin Bord du lac, à Dorval, Québec.

Voilà deux ministres dont on constate qu'ils sont associés en affaires.

M. Bourassa; Pour la propriété d'un terrain.

M. Brassard: Pour la propriété d'un terrain, d'un vaste terrain, à vendre. Its sont associés en affaires. Or, il arrive...

M. Bourassa: Est-ce que c'est le même nombre de pieds carrés? Il faudrait que je vérifie.

M. Brassard: Oui, 161 000 pieds carrés, exactement.

M. Bourassa: Dans les deux cas?

M. Brassard: Dans les deux cas, 161 000 pieds carrés, sur le chemin Bord du lac, à Dorval.

M. Bourassa: D'accord.

M. Brassard: C'est un "joint venture", par le biais de deux sociétés.

M. Bourassa: Et cela a été déclaré dans les...

M. Brassard: C'est dans leur déclaration d'intérêts.

M. Bourassa: Bon. Il n'y a pas de cachette.

M. Brassard: C'est pour des fins d'affaires. Les deux sont associés en affaires. Cependant, il arrive que ce sont deux ministres qui sont titulaires de deux ministères qui, très fréquemment, se retrouvent très souvent en opposition pour un certain nombre de dossiers. L'un est voué à l'exploitation et à l'utilisation des ressources, l'autre est voué à la protection et à la conservation de l'environnement. On pourrait citer de nombreux cas, de nombreux dossiers, dont le transport de la ligne de transmission d'Hydro-Québec, où les deux ministères sont en conflit. Je pourrais vous citer l'exemple des berges du lac Saint-Jean - je connais bien ce dossier-là - où les deux ministères également étaient en conflit. C'est malheureusement le ministère de l'Énergie et des Ressources qui l'a emporté, même si c'est le ministre de l'Environnement qui a signé une entente avec l'AIcan. Est-ce que vous trouvez normal que deux ministres, titulaires de deux ministères susceptibles très souvent... Ce serait différent, évidemment, si l'un était ministre des Communications et l'autre, je ne sais pas, ministre de l'Environnement; il y a moins de lien. Mais dans le cas de deux ministères qui sont vraiment, constamment et très souvent, en divergence de vues sur un bon nombre de dossiers, est-ce que vous trouvez cela normal que ces deux ministres soient, sur le plan privé, associés et fassent des affaires ensemble? (17 h 15)

M. Bourassa: Dans la propriété d'intérêts. Dans mon prochain remaniement, s'ils gardent le terrain il faudra les chanqer de ministère.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Brassard: Ah non! Vous trouvez ça drôle?

M. Bourassa: M. le Président, le ministre...

M. Brassard: Je ne vous parle pas de l'éqalité, là, je vous parle... Est-ce que vous trouvez normal que deux ministres soient associés en affaires sur le plan privé - des affaires de nature spéculative, on sait ce que c'est de vendre des terrains - et qu'en même temps ils soient titulaires de deux ministères dont les dossiers sont constamment en opposition et en conflit? Vous trouvez ça normal?

M. Bourassa: Le député présume quand même que parce que les deux ministres...

M. Brassard: La question se pose. La question ne se pose pas?

M. Bourassa: Quand est-ce que cela a été déclaré? Si vous me posez la question...

M. Brassard: C'est la déclaration d'intérêts... La dernière, il n'y en a eu qu'une. Pour le moment il n'y a pas eu deux déclarations d'intérêts.

M. Bourassa: Septembre...

M. Brassard: Vous l'avez dit tantôt, ca va arriver l'automne prochain, la deuxième.

M- Bourassa: Depuis septembre 1986 que cette déclaration est publique, que vous avez ça sous les yeux et tout à coup vous arrivez...

M. Brassard: On étudie vos crédits, M. le premier ministre, une fois par année.

M. Bourassa: Non, non, laissez-moi... Puisque vous...

M. Brassard: C'est une fois par année

qu'on aborde ces sujets-là.

M. Bourassa: Puisque vous... Vous avez le choix de l'aborder lors de la période de questions. Qu'est-ce que vous attendez? Vous ne parlez plus de l'édifice Chinic, là. On en a parlé de l'édifice Chinic. Vous avez fait un scandale avec ça jusqu'à ce qu'on vous apprenne que vous aviez reçu davantage; 8500 $ que vous avez reçus en 1985 des dirigeants du groupe Roche et vous...

M. Brassard: Ce n'est pas ça ma question. Je vous demande si c'est normal.

M. Bourassa: Je comprends, vous n'en parlez plus de ça.

M. Brassard: Si vous me dites que c'est normal, vous pensez que c'est normal, vous me dites: C'est normal, il n'y a pas de problèmes là, c'est tout. Je vous pose la question, je vous interroge pour savoir votre point de vue sur une situation semblable. Je ne dis pas que c'est illégal, je ne parle pas d'illégalité. Est-ce que vous trouvez ça normal?

M. Bourassa: Est-ce que je peux répondre?

M. Brassard: Oui, bien sûr.

M. Bourassa: Je réponds sur la question de Chinic, je sais que cela a scandalisé le chef de l'Opposition. S'il peut venir s'asseoir il pourra commenter. Vous avez fait tout un plat avec la question de l'édifice Chinic. 5900 $ qui avaient été donnés à la caisse du Parti libéral en 1985 par les dirigeants du groupe Roche; 14 000 000 $ de contrats sans soumissions. Quand j'ai vu ça, j'ai dit à mes gens: Vérifiez donc comment le PQ a reçu du même groupe pour la même année. Ils m'ont dit: 8500 $; 5900 $ pour nous, 8500 $, un gros scandale pour le Parti libéral et quand vous étiez au pouvoir, non. Je veux simplement mettre en relief que ce genre d'attaques parfois doivent être faites avec un minimum de vigilance et de prudence et de respect des personnes.

M. Brassard: ...c'est une question que je vous pose.

M. Bourassa: Je vais répondre à la question du député. Ces déclarations ont été rendues publiques le 1er septembre 1986. Le 3 juin, il vient à mes crédits et soudainement il sort ces documents qui sont publics depuis un an et dit: Les ministres sont en chicane. Donc, pourquoi posséderaient-ils le même terrain?

M. Brassard: Non, non, ce n'est pas ça.

M. Bourassa: C'est un peu...

M. Brassard: Vous avez l'esprit tordu, ce n'est pas possible.

M. Bourassa: Les ministres sont en conflit. Mais pourquoi, au 3 juin, posez-vous cette question-là...

M. Brassard: Les deux ministres, en tant que personnes, sont au contraire intimement liés, étroitement associés en affaires sur le plan privé.

M. Bourassa: Oui, mais ils l'étaient...

M. Brassard: Et leurs ministères ont des dossiers qui souvent s'opposent. En tout cas, dans le cas que je connais très bien, le dossier des berqes du lac Saint-Jean, comme par hasard, c'est le point de vue et la vision de l'Énergie et des Ressources qui l'ont emporté, même si c'est le ministre de l'Environnement qui a négocié et qui a signé l'entente. Il arrive donc que le point de vue de l'Environnement ne soit pas accepté dans des dossiers et dans d'autres cas...

M. Bourassa: C'est l'inverse.

M. Brassard: C'est peut-être l'inverse mais je vous dis qu'il y a là deux ministères qui sont perpétuellement en opposition parce qu'ils ont des vocations qui s'opposent. L'un est exploiteur de ressources, utilisateur de ressources et l'autre a une vocation de conservation et les deux titulaires sont deux amis en affaires, deux associés en affaires. Je vous demande simplement si une situation comme ça vous apparaît normale. Cela ne vous crée pas de problèmes, ça ne vous suscite pas d'interrogation?

M. Bourassa: L'interrogation que cela me suscite d'abord, c'est pourquoi le député me pose-t-il cette question le 3 juin 1987 quand on avait la même situation le 2 septembre 1986?

M. Brassard: Depuis ce temps-là, il y a toute une série de dossiers qui sont...

M. Bourassa: Non. Mais là il dit toute une série de dossiers. Pourquoi aujourd'hui y a-t-il conflit entre ces deux ministères, d'après le député, et qu'il n'y en avait pas il y a dix mois, que c'était chose normale, qu'on acceptait cela?

M. Brassard: II y a toujours eu conflit entre ces deux ministères. Le premier ministre me comprend. C'était comme cela de notre temps aussi, ce sont deux ministères qui, quel que soit le gouvernement, ont toujours des dossiers très conflictuels. C'est toujours le cas. Mais, est-ce que c'est

normal, justement à cause de cette situation de fait qui perdure, quel que soit le gouvernement, compte tenu des vocations mêmes des ministères, qu'à leur tête se trouvent deux personnes qui sont associées en affaires?

M. Bourassa: M. le Président, ce sont deux collègues que j'ai nommés.

M» Brassard: Oui, c'est sûr. Ce n'est certainement pas nous qui les avons nommés.

M. Bourassa: Je n'ai absolument rien, jusqu'à maintenant, aucune espèce d'élément, et ni le député n'en a. Si j'ai soulevé tantôt l'affaire Chinic qui a fait lever le chef de l'Opposition, et j'attends encore sa réponse pourquoi 5900 $ c'est une faute et 8500 $ cela ne l'est pas... Oui, j'ai hâte de l'entendre.

Ce que je dis au député c'est que je n'ai aucune espèce d'élément d'aucune nature, ni directement ni indirectement, que les deux ministres n'assument pas leurs responsabilités de la façon la plus intègre et la plus efficace. Il soulève cette question d'un terrain commun. Je peux vérifier si de fait cela a pu avoir une influence comme telle. Nous sommes prêts à demander aux hommes politiques des exigences très fortes avec lesquelles je suis d'accord. Mais, est-ce que dans mes remaniements ou dans la formation de mon cabinet, il va falloir vérifier jusqu'à ces aspects-là? Peut-être que oui. Peut-être qu'il faut aller jusque là. Vous êtes bien en peine de faire des reproches au gouvernement. Mais le député, quand même, fait son rôle. Il cherche.

M. Brassard: Je vous demande si cette situation vous dérange. Vous dites cela ne me dérange pas ou cela me dérange ou cela m'inquiète un peu. Vous me répondez, c'est tout. J'attends votre réponse.

M. Baurassa: M. le Président, ce que je dis au député... Je sais que le député semble un peu mal à l'aise de soulever des questions comme celle-là parce que c'est un peu ridicule.

M. Brassard: Je ne suis pas mal à l'aise du tout.

M. Bourassa: Mais ce que je lui dis...

M. Brassard: Ah! C'est ridicule cela? Une situation ridicule?

M. Bourassa: Ce qui est ridicule c'est que vous le soulevez aujourd'hui et que vous ne l'avez pas fait, il y a dix mois, alors que les deux ministères étaient aussi en conflit, comme il le dit, alors que ce n'est pas le cas. Chaque ministre a ses responsabilités.

M. Brassard: Donc, le premier ministre me reproche le moment où j'ai soulevé la question. C'est cela?

M. Bourassa: Non, ce que je dis...

M. Brassard: II me reproche le moment où j'ai soulevé la question.

M. Bourassa: Ce que je dis c'est pourquoi, si c'est aujourd'hui digne de... Pourquoi est-ce que cela n'a pas été fait il y a dix mois? Je demande au chef de l'Opposition.

M. Johnson (Anjou): Oui. Est-ce que le premier ministre me permet d'y répondre?

M. Bourassa: Ce que je vais dire pour compléter la réponse c'est que jusqu'à maintenant je n'ai absolument rien eu d'indication que la possession commune d'un terrain pouvait affecter, ni directement ni indirectement, les fonctions de chacun des deux ministres. Je vais vérifier pour voir si, parce que...

M. Brassard: J'espère que je ne vous apprends pas la nouvelle. Vous le saviez déjà? J'espère que vous le saviez déjà.

M. Bourassa: Est-ce que je peux terminer? Est-ce que vous pouvez être un peu calme, s'il vous plaît?

Le Président (M. Marcil): S'il vous plaît, M. le député de Lac-Saint-Jean, pourriez-vous écouter la réponse et ensuite les gens pourront...

M. Bourassa: Je dis que je vais vérifier parce que l'élément qu'apporte le député, qui est nouveau par rapport au fait que la chose existe depuis dix mois, c'est qu'il aurait pu y avoir, dans l'exercice de leurs fonction, influence due à la possession commune d'un terrain. Je vais vérifier. À ma connaissance, il n'y a eu aucune espèce d'influence. J'ai dit que j'ai pris toutes les mesures les plus exigeantes pour assurer l'intégrité de l'administration. Si je dois prendre d'autres mesures, je suis prêt à les prendre, mais je vais vérifier si cette possession commune et les fonctions respectives des ministères, étant donné qu'on me soulève cela aujourd'hui, pas la question de la possession qui était publique mais la possibilité de conflits, je n'ai aucune indication que cela a pu jouer. Je vais vérifier et on avisera.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le premier ministre.

M. Johnson (Anjou): Simplement pour revenir un peu sur...

Le Président (M. Marcil): M. te député d'Anjou.

Sous-ministres (suite)

M. Bourassa: Juste avant de répondre au chef parce quMI m'a demandé des informations sur les 25.

M. Johnson (Anjou): Oui.

M. Bourassa: Alors, ce n'est pas 25. Quinze ont eu une affectation, trois ou quatre sont en congé de maladie - on a essayé de vérifier - et six sont en attente. Alors, ce n'est pas 25 c'est 6.

M. Johnson (Anjou): Six qui sont en attente?

M. Bourassa: Oui.

M. Johnson (Anjou): Au total, il y a 16 sous-ministres de moins que dans l'administration différente mais il y en a 25 qui ont plus ou moins d'affectations...

M. Bourassa: Non, non. Non. S'il vous plaît! Quand même, je n'ai pas dit plus ou moins d'affectations.

M. Johnson (Anjou): Bien, c'est-à-dire...

M. Bourassa: Est-ce que le chef de l'Opposition pourrait être sérieux?

M. Johnson (Anjou): Pardon, il y en a plus ou moins 25, pardon, dont l'affectation... Je m'excuse.

M. Bourassa: C'est 124 à 16. Ce n'est pas 16, c'est a.

M. Johnson (Anjou): Le premier ministre, qui a passé la journée à faire des lapsus, peut m'en permettre un.

M. Bourassa: Dans la moyenne, vous faites une bonne lutte. Sur 124 à 116. Ce n'est pas 16, c'est 8. Donc, je suis obligé de rectifier le chef de l'Opposition comme je te fais très souvent sur les chiffres.

M. Johnson (Anjou): Vous dites qu'il y a 8 sous-ministres de moins qu'avant. C'est ça? Mais il y en a 25 qui ont été déplacés dont certains se retrouvent chez eux en congé de maladie, d'autres à l'ENAP, 6 sans affectation. Je vous dis: Au total, votre personnel supérieur: sous-ministres adjoints et sous-ministres inclus à 50 000 $, à 78 000 $ ou 82 000 $ par année, là ce n'est pas tout à fait vrai. Vous avez déplacé 25 personnes dont 6 sont sans affectation et, si on oublie les 25 premiers, à toutes fins utiles, ce n'est pas vrai qu'au total il y en a 8 de moins qu'avant. Vous avez comme un problème à compenser avec le 25 et ce que vous avez fait avec les 25.

M. Bourassa: Non.

M. Johnson (Anjou): C'est juste cela que je vous dis. Je sais que M. Bolduc, à l'occasion, a plaidé à l'égard d'un certain nombre de hauts fonctionnaires à qui il expliquait ce qui était en train de leur arriver dans la vie; le problème c'est qu'il y avait trop de sous-ministres au gouvernement. Voilà!

M. Bourassa: Je ne sais pas ce que M. Bolduc a dit à certains hauts fonctionnaires. Le chef de l'Opposition semble au courant de conversations privées du secrétaire général.

M. Johnson (Anjou): J'avais entretenu te premier ministre de ces conversations, d'ailleurs, mais il ne s'en souvient pas.

M. Bourassa: Ça doit être le ouï-dire, certainement. Ce qui m'a choqué un peu, c'est quand le chef de l'Opposition a dit: II y en a quinze qui ont plus ou moins d'affectation. Je pense que, là-dessus, ce n'est pas... Il y en a quinze qui ont une affectation. Trois ou quatre en congé de maladie. Et ils sont en attente. Pour M. Bolduc...

M. Johnson (Anjou): Un net de deux. Si le premier ministre me permet, je reviens...

Le Président (M. Marcil): M. le député d'Anjou, je pense qu'il y avait une autre question en rapport avec M. Bolduc.

M. Bourassa: M. Bolduc a démissionné. Nous avons essayé de le rejoindre, mais il avait quitté son bureau. Il a démissionné du conseil de CGI International et du conseil de CGI Incorporée lorsqu'il a été nommé secrétaire général.

M. Johnson (Anjou): D'accord, merci.

Le Président (M. Marcil): M. le premier ministre.

Directive sur les conflits d'intérêts (suite)

M. Johnson (Anjou): Sur l'autre affaire qui a l'air de préoccuper le premier ministre à la suite des questions que lui a posées mon collègue. Je ne sais pas pourquoi le premier ministre a la peau sensible comme cela, là-dessus. Ce que soumet mon collègue, c'est simplement ceci: Voici deux ministres qui occupent des fonctions au gouvernement qui sont souvent opposées. Écoutez, l'Agriculture passe son temps à se chicaner avec l'Environnement. L'Énergie et les Ressources

passe son temps à se chicaner avec l'Environnement. C'est dans la nature des choses. Ce que mon collègue soulève, c'est qu'il se rend compte que les deux titulaires des ministères sont en même temps des associés en affaires sur le plan privé. Il ne dit pas que c'est illégal, immoral ou autrement. La question qu'il pose au premier ministre est: Le premier ministre voit-il là une difficulté?

Là, le premier ministre s'empresse d'essayer de se justifier d'un contrat sans soumissions de Chinic. Cela n'a rien à voir avec cela. Ce qu'on aimerait entendre du premier ministre, c'est simplement cela et je ne veux pas qu'il le prenne dur comme ça. Je comprends, il a passé une grosse semaine, mais ce qu'on attend du premier ministre, c'est simplement qu'il accepte de soulever un certain questionnement. Je vous dis: L'exemple concret qui vient autour de ça, c'est quoi? C'est que si vous avez deux collègues qui passent leur temps à s'envoyer de l'expertise de hauts fonctionnaires contradictoires sur le même sujet, c'est déjà un sujet de tension difficile entre des hommes et des femmes qui travaillent dans un Conseil des ministres. Si, en plus de ça, ce sont des associés en affaires, n'y a-t-il pas une dynamique, à un moment donné, qui peut être ennuyeuse sur le plan du processus de décision? Je ne parle pas de donner des contrats sans soumissions et faire passer les fils électriques sur les terrains du ministre de l'Environnement. Ce n'est pas de ça qu'on parle. C'est la question qui avait été posée au premier ministre.

Maintenant, je vais dire au premier ministre... Je vais tenir pour acquis que ce qu'il dit, c'est que des gens de la compagnie qui a obtenu un contrat sans soumissions du gouvernement, le bureau d'ingénieurs-conseils... Je vais tenir pour acquis que des associés, des employés ont contribué au total pour 8000 $ au Parti québécois et qu'ils ont contribué pour 5000 $ au Parti libéral. Je veux tenir ça pour acquis, mais je n'ai pas les chiffres. Je vais tenir pour acquis ce qu'il me dit. Je vais lui dire une chose: Quand même, des gens qui sont dans le même bureau d'ingénieurs fourniraient pour 8000 $ à coups de 100 $ ou même de 500 $ chacun au Parti québécois, ils n'auraient pas des contrats de 10 000 000 $ sans soumissions. C'est cela qui est en cause. Ce qui est en cause dans l'affaire de Chinic - je le rappellerai au premier ministre - ce n'était pas le fait de savoir s'il avait contribué 2800 $ ou 4126 $ ou 3824 $ au Parti libéral, c'était de savoir si c'était normal qu'un contrat de 10 000 000 $ soit donné sans soumissions, c'est aussi simple que cela. (17 h 30)

M. Bourassa: M. le Président, je vais répondre...

M. Johnson (Anjou): En donnant ces chiffres, il nous donne raison, bon, voilà!

M. Bourassa: M. le Président, on n'est pas pour comparer les contrats de Roche avec votre gouvernement avec les nôtres. Si j'ai soulevé cette question, c'est que c'est vous ou votre adjoint qui a fait tout un plat avec les 5900 $ en disant: Voyez, 5900 $ en faisant le lien avec les contrats. Tout cela a été justifié en commission. D'ailleurs, vous avez laissé tomber l'affaire. C'est le chef de l'Opposition ou ses adjoints qui en ont fait un scandale des 5900 $ jusqu'à ce qu'ils réalisent peut-être que, dans leur cas, c'était 8500 $. C'est pourquoi, à la suite des questions qui ont été posées par le député de Lac-Saint-Jean, j'ai dit: J'espère que vous ne voulez pas aborder cette question avec le même esprit que vous aviez utilisé dans le cas de Chinic, où c'était un scandale de contribuer 5900 $ au Parti libéral en 1985. C'est cela que j'ai voulu dire au chef de l'Opposition.

Pour ce qui a trait à l'autre question, j'ai dit au député, d'abord, ma surprise qu'il soulève cette question aujourd'hui. Dans le Conseil des ministres que j'ai l'honneur de diriger, il y a un climat de solidarité particulièrement solide. Il n'y a pas de tensions ou d'affrontement ou de rivalité ou d'ambitions concurrentes...

M. Johnson (Anjou): Cela viendra.

M. Bourassa: Cela viendra. On parle en connaissance de cause, je suppose.

M. Johnson (Anjou): Vous en savez quelque chose. C'est parce que vous avez déjà connu cela. Vous l'avez déjà connu.

M. Bourassa: Alors, c'est pourquoi j'ai trouvé que la question soudaine comme cela était curieuse. Ceci étant dit, j'ai dit que absolument rien de ce qui avait été soulevé avait pu jouer un rôle,, mais que j'étais prêt à examiner si cela a pu jouer un rôle.

M. Johnson (Anjou): Voilà! C'est tout ce qu'on attendait du premier ministre.

M. Bourassa: Oui, mais je veux dire quand même.

M. Johnson (Anjou): Bien voilà!

M. Bourassa: On présente cela avec mélodrame.

M. Johnson (Anjou): Mais non, c'est vous qui avez l'air de prendre cela comme cela. C'est une question simple du député de Lac-Saint-Jean.

M. Bourassa: Pour ce qui a trait à M.

Bolduc.

M. Johnson (Anjou): Vous auriez aimé mieux qu'on fasse cela en Chambre plutôt que dans l'étude des crédits, où on peut discuter comme cela?

M. Bourassa: À votre choix, en Chambre ou ici, vous savez... Ce n'est pas la partie la plus exigeante de mes fonctions que de répondre à vos questions.

M. Johnson (Anjou): Cela paraît dans votre façon de répondre, d'ailleurs. Cela paraît dans la façon de répondre du premier ministre qu'il traite avec beaucoup de désinvolture le Parlement...

M. Bourassa: Non, M. le Président, j'ai beaucoup de...

M. Johnson (Anjou): ...et une arrogance d'ailleurs que sa fatigue, aujourd'hui, pourrait justifier. Il vient d'en donner un bel exemple.

M. Bourassa: L'arrogance?

M. Johnson (Anjou): Bien, je comprends!

M. Bourassa: On me reproche plusieurs choses, mais pas...

M. Johnson (Anjou): Ce n'est pas la partie la plus exigeante, n'est-ce pas le Parlement pour vous, cela paraît!

M. Bourassa: C'est parce qu'il y a d'autres fonctions exigeantes dans le travail du premier ministre.

M. Johnson (Anjou): Oui, oui, on n'en doute pas!

M. Bourassa: En ce qui a trait à M. Bolduc, il n'y a aucun lien selon lequel il aurait été maintenu avec CGI quand il est devenu secrétaire général. Je voudrais que ce soit rectifié vis-à-vis des médias.

M. Johnson (Anjou): Bon, alors c'est clair, vous l'avez dît tout à l'heure.

M. Bourassa: Je voulais que ce le soit bien parce que ce n'est pas tellement pour M. Bolduc, c'est pour l'impact que ce genre de questions qui se comprennent...

M. Johnson (Anjou): D'accord! Et je pense que mon collègue... Écoutez, on ne se privera quand même pas de questions. Si le monde se fait des constructions mentales déviées ou soupçonneuses ou un peu paranoïdes avec nos questions, je vais vous dire que vous allez comme avoir un problème au bout d'un an ici.

M. Bourassa: J'ai dit que c'étaient des questions qui se comprenaient.

M. Johnson (Anjou): D'accord.

M. Bourassa: Mais je demande, parce qu'il y a plusieurs exemples de pétards mouillés que vous avez soulevés depuis un an, d'être plus prudents étant donné votre moyenne de pétards mouillés depuis que nous sommes au pouvoir.

M. Johnson (Anjou): Ma dernière question au premier ministre sur ce sujet, avant qu'on aborde le dossier jeunesse sur l'ensemble des sujets, c'est justement pour vous parler de cette partie peu exigeante de votre tâche qui s'appelle le Parlement.

M. Bourassa: Je n'ai pas dit que c'était peu exigeant...

M. Johnson (Anjou): Oui, la moins exigeante.

M. Bourassa: Non, j'ai dit que ce n'était pas la plus exiqeante. Il faut être nuancé et subtil en politique, apprenez cela.

La session en cours

M. Johnson (Anjou): Encore faut-il que... Maudit que vous êtes barbeux! Le premier ministre peut-il me confirmer que son qouvernement a l'intention de proroger la session? II y a des rumeurs qui circulent dans le parlement depuis quelques jours selon lesquelles on terminerait nos travaux quelque part autour du 19, 20, 21 - je ne me souviens pas, enfin au plus tard le 22 - dans les jours qui précèdent le 22 juin, et qu'on reprendrait au mois d'octobre, pas avec une nouvelle session, mais avec la continuation d'une session qui a commencé avec un discours d'ouverture que le premier ministre n'a même pas lui-même prononcé, qui a été prononcé par la députée de Chornedey. Le premier ministre pourrait-il nous confirmer ces rumeurs ou, j'espère, nous les infirmer, parce que nous serions particulièrement surpris qu'un gouvernement qui prétend tant faire et qui a tant à réaliser soit encore sur son erre d'aller d'un discours du trône d'il y a deux ans au moment où on reprend nos travaux à l'automne?

Le premier ministre ne trouve-t-il pas que c'est un peu normal... On comprend, il y a des sessions parfois qui peuvent s'allonqer. Les sessions peuvent durer plus qu'une année de calendrier, dix-huit mois, exceptionnellement, à la fin d'un mandat des gouvernements ici. Cela a été votre cas, cela a été le cas de mon prédécesseur et le fait que je sois arrivé à la dernière minute, un peu avant les élections. Là, vous êtes en début de mandat et, à l'automne, cela fera deux

ans que vous êtes au pouvoir et vous n'aurez prononcé qu'un seul discours d'ouverture. Le premier ministre trouve-t-il cela normal ou si cela fait partie - probablement - du peu de considérations, s'il trouve cela normal -je me permets de spéculer - qu'il a à l'égard du Parlement? Parce que sa façon de répondre et sa façon d'agir, son caractère parfois moqueur, mais caractérisé par une ironie souvent déplacée, sans compter l'absence totale de réponse à nos questions, quant à moi, viendrait confirmer que, à ta limite, non seulement il n'accorde pas beaucoup d'importance au Parlement, mais il est probablement à la limite de le mépriser.

M. Bourassa: C'est évident que le chef de l'Opposition et moi-même n'avons pas le même style. Nous ne sommes pas ici pour discuter de notre style dans les débats parlementaires. Je ne pense pas que mon style ait contribué à augmenter la tension des débats parlementaires. Je crois que, au contraire, si on...

M. Johnson (Anjou): II contribue à ce qu'on en n'ait pas.

M. Bourassa: ...compare nos débats parlementaires à ceux qui se tiennent dans d'autres parlements, il faut admettre que tout se fait, même dans des questions d'une grande acuité, avec une relative sérénité.

En ce qui a trait au discours d'ouverture, je dois lui dire qu'au niveau fédérai on a été trois ans et demi, je crois, sans avoir de... Il n'y a rien qui oblige à faire des discours d'ouverture régulièrement. Cela peut donner - le mot "spectacle" n'est pas exact - au gouvernement l'occasion d'énoncer des orientations générales.

J'ai dit, à plusieurs reprises depuis quelques semaines que, pour nous, ce qui est important - je l'ai justement dit à d'anciens collègues du chef de l'Opposition - c'est le discours sur le budget. Dans le discours sur le budget, il y a des orientations générales, il y a des politiques concrètes avec des calendriers et il y a des engagements précis. Je prends le dernier discours sur le budget: une politique sur la recherche et le développement, une politique sur les bas revenus, une politique d'incitation au travail. Je crois que le gouvernement - il y a eu trois discours sur le budget - a, dans les discours sur le budget, l'occasion d'annoncer d'une façon ferme, précise, concrète ses politiques.

Nous nous sommes engagés, le 12 décembre 1985 - et Mme Bacon parlait au nom du gouvernement, je ne pense pas que la lecture d'un texte par un membre du gouvernement... Tout le monde savait que c'était la politique du gouvernement - à redresser les finances publiques - redressement spectaculaire des finances publiques - et à relancer l'économie. Le Québec est actuellement l'endroit le plus dynamique au Canada. La moitié des nouveaux emplois de tout le Canada est créée au Québec. Le règlement du problème constitutionnel. On s'aperçoit que, depuis hier, le règlement du problème constitutionnel est acquis. L'amélioration des relations du travail. Mais il reste encore des choses à faire. La réforme de l'aide sociale n'a pas été complétée.

Je dis au chef de l'Opposition, comme je l'ai dit à plusieurs reprises, que, dans notre perception des travaux parlementaires, le discours sur le budget a au moins une importance aussi grande et permet d'annoncer des politiques. Ce n'est pas un précédent. Dans d'autres Parlements, il y a eu un ou deux discours d'ouverture dans tout un mandat. Ce que les Québécois attendent de mon gouvemement, ce n'est pas quatre ou cinq discours d'ouverture, c'est la réalisation des engaqements qu'on a pris le 2 décembre 1985. C'est ce qu'on fait. La session ne sera pas prorogée, elle sera ajournée à la mi-octobre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, un commentaire là-dessus. Je regrette, évidemment, ce que nous confirme le premier ministre. Sans qu'il y ait là recherche du spectacle, je pense qu'un discours d'ouverture, surtout après deux ans, c'est l'occasion de présenter une certaine vision, de mettre un peu de souffle, de donner un sens de la direction ou de répondre aux préoccupations des citoyens alors que j'écoute le premier ministre décrire ce qu'il entend faire comme étant l'art de ne pas gouverner, dans le fond, avec un certain niveau de cynisme.

Je pense que le discours inaugural, à mi-mandat, serait une bonne idée. Maintenant, vous n'êtes pas obliqé de partager notre opinion, mais j'aimerais vous entendre donner une direction, une vision, une orientation à ce qui s'en vient au Québec pour les prochaines années. Peut-être aurez-vous de la difficulté à trouver une vision, une orientation ou une direction et que vous préférez le train-train quotidien des annonces genre "à compter de minuit ce soir", qui a son côté un peu théâtral et dramatique sur le plan des discours sur le budget.

Il me semble que les Québécois auraient mérité d'entendre de vous, à mi-mandat, où vous voulez amener le Québec à la fin de votre mandat. Vous avez choisi autre chose. On ne fait pas de vague, on fait le train-train, et, de temps à autre, on a un petit morceau qui surprend les gens dans le discours sur le budget. C'est un style, c'est le vôtre, vous y avez droit...

M. Bourassa: C'est efficace!

M. Johnson (Anjou): ...mais il me semble que vous êtes capable de faire mieux. Cela fait quand même quelques années que je vous vois aller, cela fait quelques mois que je pense vous connaître un peu, il me semble que les Québécois aimeraient entendre le premier ministre du Québec dire: Écoutez, les deux prochaines années, je les vois à peu près comme cela, et on va mettre l'accent sur telle chose. Non, vous laissez cela à des ministres qui se contredisent, à des trucs annoncés à minuit, le soir. C'est comme s'il y avait quelqu'un qui avait peur d'aller au fond des choses et de saisir l'opinion publique du fond des choses. Je trouve cela dommage.

Évidemment, c'est une façon de faire de la politique, mais je pense que les Québécois vont s'en tanner, à un moment donné.

M. Bourassa: Pensez-vous que cela va venir vite?

M. Johnson (Anjou): Cela viendra suffisamment vite pour que vous vous en aperceviez.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition sait fort bien - je lui ai dit qu'on n'avait pas le même style, cela ne veut pas dire que le chef de l'Opposition n'a pas beaucoup de qualités - que, si on faisait un discours inaugural, quoi qu'on dise... Je crois qu'on a réussi, hier, l'une des victoires politiques les plus importantes du peuple québécois, comme je t'ai dit. Quelle a été la réaction du chef de l'Opposition? "Un recul." Quoi qu'on fasse et quoi qu'on dise, je suis convaincu que le chef de l'Opposition sera le premier à dénoncer: Ce sont des orientations générales, ce sont des mots, c'est du verbiage. À la télévision, pendant deux heures, on va voir son agréable performance refléter ainsi son opposition au gouvernement. Nous, on a été élus pour agir.

M. le Président, je me souviens d'une remarque du British Financial Times, quand je suis allé à Davos, qui décrivait celui qui vous parle un peu de la façon du chef de l'Opposition, mais d'une autre manière. Si je peux le citer, c'est en anglais: "Robert Bourassa... (17 h 45)

M. Johnson (Anjou): Pas vrai!

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Bourassa: ...is not talking much but doing a lot."

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Bourassa: Alors, c'est la perception du gouvernement qu'ont les citoyens du Québec. C'est un gouvernement qui ne recherche pas le spectacle. L'État-spectacle, ils l'ont connu durant dix ans et à quel prix! C'est un gouvernement qui agit, qui règle les problèmes et qui fait avancer le Québec. C'est pourquoi on a été élus. II y a eu un discours inaugural qui reprenait le programme du mandat, le 12 décembre 1985 et, après un an et demi, on ne peut pas dire que la population dans l'ensemble ne soit pas satisfaite de l'action du gouvernement.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le premier ministre de même que M. le chef de l'Opposition. Le temps est écoulé, à moins que vous ne décidiez de continuer le débat sur cet engagement.

M. Johnson (Anjou): ...

Le Président (M. Marcil): Oui.

M. Johnson (Anjou): Mais je pense qu'il faut adopter les crédits. Ce serait peut-être une bonne idée, hein? Enfin, cela ne me fait rien, on peut très bien ne pas les adopter et on recommencera la semaine prochaine. De toute évidence, vous ne me donnerez pas une heure pour parler de l'avenir du Québec, parce que vous ne ferez pas de discours inauqural. Je trouve que vous forcez beaucoup pour m'empêcher de parler.

M. Bourassa: Prenez toutes les occasions que vous pouvez.

M. Johnson (Anjou): Alors, est-ce qu'il faut...

Le Président (M. Marcil): Oui.

M. Johnson (Anjou): ...d'abord adopter les programmes?

Le Président (M. Marcil): Nous allons d'abord adopter le proqramme 1 et on adoptera le programme 2 lorsque nous aurons terminé l'étude des crédits en ce qui concerne le Secrétariat à la jeunesse. Est-ce que le programme 1 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Marcil): Adopté. J'appelle le programme 2 relatif au Secrétariat à la jeunesse.

Secrétariat à la jeunesse

M. Johnson (Anjou): À l'occasion de l'étude du programme 2, le premier ministre sait que la députée de Chicoutimi travaille avec nous, notamment sur le dossier jeunesse en plus de celui de l'enseignement collégial et universitaire. Je dirai au premier ministre qu'à l'égard des jeunes, on a déjà entendu ce qu'il avait à nous dire. Nous, on a deux ou

trois choses à lui dire. Évidemment, il sait bien que dans l'Opposition, on ne peut pas faire des choses que lui prétend faire citant le British Financial Post...

M. Bourassa: Times.

M. Johnson (Anjou): Times. Pardon! Alors, celui-là, c'est le Times, rien de moins! Mais dans l'Opposition, notre rôle est de le questionner et aussi de constater un certain nombre de choses. Je dois vous dire qu'en dépit d'une légère diminution du chômage chez les moins de 30 ans, globalement, à nos yeux, la situation faite aux jeunes dans notre système économique continue d'être difficile.

Est-ce que j'ai besoin de rappeler au premier ministre un certain nombre de statistiques qu'il connaît sûrement ou qu'il fouillera? Quand on regarde ce qui s'est passé depuis une dizaine d'années, on se rend compte qu'il y a eu à peu près quelque 400 000 nouveaux emplois et à travers cela, il y a eu la crise économique, il faut en être bien conscient. Mais on se rend compte que, chez les gens de plus de 35 ans, les 35-50, il y en a 500 000 de plus. Cela veut dire quoi, en pratique? Cela veut dire que les gens de 35 à 50 ans sont allés faire un déplacement au niveau des emplois. Quand on regarde les moins de 30 ans, on se rend compte que ceux qui ont été les plus pénalisés depuis une dizaine d'années - et c'est encore vrai dans les statistiques économiques courantes - ce sont les 25 ans et moins qui, eux, dans le lot, en ont perdu à peu près 50 000 en faveur des 35-50 ans. Je pense que c'est quelque chose de fondamental, quelque chose d'important dans la société. II me semble que les jeunes sont à même de s'attendre à un peu plus qu'un conseil consultatif dont la loi n'est pas encore adoptée, d'ailleurs, qui traîne devant le Parlement depuis un an. Le Conseil consultatif de la jeunesse, cela fait un an que c'est déposé et ce n'est pas encore adopté. Évidemment, le premier ministre va dire: De quoi vous plaignez-vous? On a fait une commission parlementaire. Je comprends, mais un an... Là, on va livrer cela à la fin du mois de juin ou peut-être l'automne prochain comme étant l'une des qrandes réalisations du gouvernement, le Conseil consultatif de la jeunesse. Je vais vous dire que c'est amuser le monde avec pas grand-chose, je trouve.

M. Bourassa: Un conseil permanent et non consultatif.

M. Johnson (Anjou): Un conseil permanent, oui, qui est un conseil consultatif.

M. Bourassa: II s'appelle le conseil permanent.

M. Johnson (Anjou): Oui, il s'appelle le conseil permanent, mais, on se comprend bien, son rôle, c'est un conseil consultatif. C'est cela que vous avez offert aux jeunes du Québec depuis un an que vous êtes là et, même, vous faites traîner le projet d'un conseil consultatif. Pas fort! Pas fort le café, comme disait l'autre. Préoccupant. Préoccupant aussi de voir qu'en ce qui concerne la réforme de l'aide sociale, on est encore dans les excuses, les remises à demain, les "ça dépend de ce que le fédéral va faire", les "écoutez, on va publier un livre blanc". Le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu fait une conférence de presse en plein milieu de l'agitation constitutionnelle pour annoncer, imaginez-vous, qu'au mois de juillet il va publier quelque chose là-dessus. Cela fait un an qu'il a le dossier entre les mains. Un an! Pas seulement le dossier, il a le mandat. Ca tourne en rond pas mal! Ça tourne en rond autour de la question des jeunes.

Je suis prêt à reconnaître, cependant objectivement, mais cela n'a rien à voir avec vous autres, ce n'est pas votre faute... Je ne suis pas de ceux qui pensent que les gouvernements peuvent prétendre accaparer des succès de création d'emplois tout le temps, pas plus que des drames. Les gouvernements ont un rôle. Les gouvernements provinciaux, il faut bien le reconnaître, avec les moyens qu'ils ont, ont un rôle plus accessoire. Je suis bien prêt à reconnaître qu'il y a eu une diminution, une certaine diminution du chômage chez les jeunes, mais ils sont déjà affligés d'un taux qui, finalement, marque un écart du double de ce qu'il était il y a 20 ans par rapport à ceux qui ont plus de 10 ans et qu'une réduction d'une demie de un pour cent ou de un pour cent, de toute évidence, ne répond pas à la problématique. Il y a un problème structurel dans notre économie à l'égard des jeunes.

Je pense que la diminution léqère du chômage chez les jeunes depuis quelques mois est reliée essentiellement à des phénomènes du secteur privé, à un taux d'investissement relativement raisonnable, etc., mais dont on n'a aucune garantie quant à la stabilité. En tout cas, ce n'est sûrement pas là le résultat d'une politique macroéconomique du gouvernement et d'une série de mesures très précises. Le gouvernement, pour l'essentiel, s'en remet, là-dedans comme dans tout le reste, à la loi du marché. Marché: le nouveau culte de l'entreprise. C'est sympathique. Le premier ministre sait très bien que je ne méprise pas les gens d'entreprises.

M. Bourassa: Le club des millionnaires qu'il parlait.

M. Johnson (Anjou): Oui, mais il arrive

parfois que le club des millionnaires, ce n'est pas lui qui va définir l'avenir du Québec. C'est aussi simple que cela.

M. Bourassa: Oui, mais il y avait une pointe de mépris là-dedans.

M. Johnson (Anjou): Non, il n'y a pas de pointe de mépris. Il y a une constatation qu'il y a des limites à remplacer, comprenez-vous, ceux qui nous faisaient des sermons, à une certaine époque, ou qui étaient préfets de discipline par des gens qui ont des gros comptes de banque. C'est aussi simple que cela. Je ne crois pas à cela, moi, que, dans notre société, il y a une classe qui a la vérité absolue. Alors, ce n'est pas plus le milieu des affaires que cela a été te clergé ou que cela a été même les partis politiques pendant un certain nombre d'années. Je trouve que c'est pas mal plus compliqué que cela l'évolution des sociétés, mais je trouve un peu simpliste de s'en remettre à l'espèce de religion du marché qui va tout faire. Je trouve que c'est un peu dur pour les jeunes et ça continue d'être dur pour les jeunes.

M. Bourassa: Je veux dire au chef de l'Opposition - je ne veux pas l'interrompre -que, quand il a formé le comité pour la Société d'investissement jeunesse, il n'a recouru qu'au milieu des affaires, et pas une femme à part cela, mais ça, c'est un autre aspect. Quand il dit que le milieu des affaires n'a pas la vérité absolue, lui-même, quand il a posé un geste pour les jeunes avec lequel nous étions d'accord, il n'a recouru qu'au milieu des affaires. Alors, il y a une espèce de contradiction entre la réalité et te discours.

M. Johnson (Anjou): Non, c'est parce que le premier ministre ne connaît pas les dossiers de l'époque. Je reconnais qu'il a un peu de difficulté à se situer à un autre niveau que celui auquel il veut se situer en ce moment, mais le premier ministre devrait se rappeler que le comité de développement social que j'ai présidé au milieu de la crise économique a abouti à la réforme de l'aide sociale et de la création des programmes de réinsertion, sur le marché du travail, des jeunes assistés sociaux, de retour à l'école et de travaux communautaires. Je pense que l'État avait un bout à faire aussi et ce n'était pas juste le milieu des affaires qui pouvait le faire. Le milieu des affaires aussi a une contribution à apporter; c'est évident. C'est pour cela que j'ai apporté cette idée de la création de la Société d'investissement jeunesse que j'appelais, moi, Corporation d'investissement jeunesse et que le premier ministre a changé pour Société d'investissement jeunesse. Ce n'est pas impartant. C'est vous qui avez adopté la loi. Vous n'aviez plus le choix, d'ailleurs, rendu où j'avais amené le projet. Vous ne pouviez pas faire autrement et j'étais bien heureux que ça fonctionne. J'espère qu'on va nous dire, aujourd'hui, aux questions de ma collègue, que ça fonctionne, par exemple. J'espère! II y a autre chose qui pourrait être fait pour les jeunes au Québec et je vais peut-être en entretenir le premier ministre dans les mois qui viennent. Je lui dirai simplement, aujourd'hui, au départ, qu'il ne vienne pas me parler du conseil permanent comme une réponse. Ce n'est pas ça qu'on veut entendre aujourd'hui, ce sont des affaires pas mal plus substantielles que ça. Et, s'il me permet, je vais passer la parole à ma collèque, la députée de Chicoutimi.

M. Bourassa: Juste un mot pour être très bref. Quand le chef de l'Opposition dit qu'il n'y a pas beaucoup qui a été fait sur la situation économique, on n'est pas pour reprendre tous les chiffres, mais il faut constater qu'alors que la population active du Canada est restée stable depuis un an, qu'elle a augmenté de 1 % de 62 % à 63 % au Québec, donc, ça veut dire qu'il y a beaucoup plus de personnes maintenant qui ont confiance dans l'économie du Québec et qui acceptent de faire partie du marché du travail et que le chômage, malgré une augmentation de la population active, a baissé et que le Québec a créé plus de la moitié de tous les emplois du Canada, même s'il représente 25 % de la population. Ce n'est pas arrivé depuis très, très, très longtemps, la meilleure année économique depuis 1974.

M. Johnson (Anjou): Que se sont créés au Québec plus de la moitié des emplois et non pas que le Québec a créé...

M. Bourassa: Le gouvernement ne se confond pas avec le Québec.

M. Johnson (Anjou): J'espère!

M. Bourassa: Le Québec, ses agents économiques, ses hommes d'affaires, ses travailleurs...

M. Johnson (Anjou): Très bien! Très bien!

M. Bourassa: Ce n'est pas de l'habileté, c'est le respect des faits. Pour nous, c'est une forme d'affirmation nationale. On n'entend plus parler de l'affirmation nationale et ça va être gênant d'en parler depuis hier. Je vais laisser la parole à...

M. Johnson (Anjou): Vous parliez des jeunes. On aimerait ça savoir que vous êtes capable de le faire.

Le Président (M. Marcil): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. On al'impression que le premier ministre n'a pas tellement le goût de parler de la condition des jeunes et, pourtant, il a été fort éloquent en campagne électorale, probablement emporté par l'enthousiasme, Je me rappelle qu'il disait que la jeunesse serait la toute nouvelle question nationale. Je ne l'ai pas souvent entendu parler de la question nationale.

Tout à l'heure, j'ai trouvé amusante votre référence à Davos. Si je me rappelle l'article qu'on avait eu l'occasion de lire au moment de cette visite du premier ministre en Europe, il disait à son auditoire que la reprise économique était en cours depuis 1985. J'ai trouvé ça amusant. Je me suis dit: II faudrait peut-être, un jour, lui rappeler qu'il n'était pas entièrement responsable de la reprise économique et que, déjà l'économie avait commencé à se porter mieux quand le gouvernement a pris les rennes du pouvoir.

Tout à l'heure, le premier ministre a dit que plutôt que de faire des discours, il préférait réaliser ses engagements. J'aurais le goût de lui parler d'un certain nombre d'engagements qui tardent à se réaliser et qui seraient peut-être à l'inverse des réalisations ou des engagements pris. Je vais le faire brièvement parce qu'il nous reste peu de temps parce qu'il y a un certain nombre de questions. J'espère qu'on va avoir, contrairement... Le premier ministre a dit en visite dans mon comté, voulant justifier qu'il devait quitter pour venir en Chambre, qu'il trouvait ça un peu ordinaire de s'en aller en Chambre parce que l'Opposition ne posait pas de questions intelligentes...

M. Bourassa: Je n'ai pas dit ça, j'ai dit le contraire, mais sourire en coin.

Mme Blackburn: Ah! non, non. Vous avez dit: Si, encore, l'Opposition posait des questions intelligentes. On pourrait relever les... Je dis, de temps en temps, que j'aimerais que le premier ministre prenne la peine de nous donner des réponses aussi intelligentes, parce que ça pourrait être intéressant pour tout le monde. Je vais essayer d'en avoir quelques-unes.

Par rapport aux engagements, on avait promis d'améliorer l'aide financière aux étudiants. Si ce gouvernement reste au pouvoir pendant quatre ans, ça va signifier à peu près un endettement additionnel des jeunes de l'ordre de 100 000 000 $. Quant au gel des frais de scolarité, je voudrais juste lui rappeler si, de temps en temps, il cause un peu avec son ministre des Finances... Parce que la menace pèse toujours, elle est dans le rapport du ministre des Finances et on sait qu'elle est encore dans la tête du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science de même que dans celle du président du Conseil du trésor. La menace pèse sur les jeunes et ils en sont conscients.

En matière de services, il y a eu des coupures importantes. Les répondants dans les bureaux de Communication-Québec: 38 postes fermés. Ce sont des postes qui étaient occupés essentiellement par des jeunes. Fini, on n'en a plus entendu parler. Je pense que les contrats se sont terminés en mars, (18 heures)

Au Secrétariat à la jeunesse, c'est près de la moitié des services qui ont été coupés. Le gouvernement s'était engagé à créer ce qu'on appelait les centres de services ou les guichets uniques. On s'était donné deux guichets uniques, un dans la région de Québec, un dans la région de Montréal. Celui de Montréal est fermé et les services de celui de Québec sont réduits de moitié.

La parité de l'aide sociale, on ne continuera pas. Les jeunes, à quoi ont-ils eu droit? À une opération de harcèlement. Les maisons de jeunes, c'est important. Elles sont essentiellement tournées vers l'aide aux jeunes un peu plus en difficulté, pour éviter la délinquance, certains problèmes d'intégration dans la société. Sur 161 demandes, l'an passé, on apprenait de la ministre que 43 s'étaient vu refuser toute forme de financement. Cela veut dire le quart des demandes.

Mais, plus grave encore, pour les maisons d'hébergement - on est dans l'année des sans-abri - 25 demandes, 12 refus, soit 50 %. Actuellement à l'aide sociale, chez les moins de 30 ans, vous avez à peu près un tiers de million de personnes qui vivent des prestations de l'aide sociale. On sait que majoritairement les chefs de famille sont des femmes, 68 559 femmes chefs de famille. Je pourrais continuer, 2000 jeunes de moins de 30 ans sans-abri et, les sans-statut, environ 50 000 dans la région de Montréal. Et on pourrait continuer. Il avait pourtant pris un certain nombre d'engagements et on se rappelle les salles combles, évidemment autobus payés et le reste aussi, mais salles combles devant lesquelles on annonçait la parité de l'aide sociale.

M. Bourassa: Des raisins verts.

Mme Blackburn: On annonçait également que la toute nouvelle question nationale serait la jeunesse. Ce qu'on constate, c'est qu'ils ont été dramatiquement frappés et de toutes sortes de façons. L'accès à la fonction publique, on a commencé par couper 1600 postes d'occasionnels. 1600 postes d'occasionnels et équivalents temps complet, cela touche particulièrement les jeunes.

J'aimerais avoir un certain nombre de réponses. J'espère que les réponses vont être

aussi brèves. J'ai essayé de faire des questions brèves. Par rapport au Secrétariat à la jeunesse, je lisais, dans le rapport annuel de 1985-1986 du ministère du Conseil exécutif, à ta page 43, qu'on avait modifié le rôle du Secrétariat à la jeunesse pour en faire "un rôle d'aviseur auprès des différents ministères sur les questions spécifiquement jeunesse. Plus encore - je la trouve bien celle-là - le Secrétariat à la jeunesse cherchera à introduire davantage les partenaires socio-économiques dans la définition des réponses aux problèmes vécus par les jeunes." On a l'impression que c'est là la potion magique qui devrait résoudre tous les problèmes des jeunes. Est-ce qu'il est juste que le Secrétariat à la jeunesse ne donne plus de services aux jeunes de façon directe et que l'essentiel de son rôle sera tourné vers les ministères ou, encore, à essayer d'établir des liens avec différents partenaires socio-économiques?

M. Bourassa: M. le Président, il y a plusieurs inexactitudes dans ce qui a été soulevé. Il y a eu, d'abord, comme on l'a signalé à plusieurs reprises, la rationalisation des dépenses. On est conscient de l'ampleur du déficit. On n'y reviendra pas. Il y a eu réajustement de l'action du secrétariat après l'Année internationale de la jeunesse. Cela aussi se comprend. Le secrétariat devait redéfinir son mandat en prévision de jouer davantage un rôle de secrétariat.

Le Secrétariat à la jeunesse doit desservir deux grandes clientèles: la clientèle interne, les ministères, et les jeunes, les groupes, les partenaires socio-économiques. Je pourrai donner plus de détails là-dessus. J'ai toute une série de chiffres devant moi qui montrent les efforts qui ont été faits par le gouvernement vis-à-vis les jeunes. Je peux mentionner, notamment, pour répondre à certaines critiques, pour la parité de l'aide sociale, que ce n'est pas du harcèlement qui a été fait. On n'est pas pour reprendre tout le débat sur des gestes qui ont été approuvés par l'ensemble de l'opinion publique et plusieurs membres de l'ex-gouvernement. On n'est pas pour reprendre tout le débat pour expliquer le retard du ministère à appliquer la politique de la parité de l'aide sociale. Les raisons en ont été données en Chambre à plusieurs reprises. Pour ce qui a trait à la Société d'investissement jeunesse, ça a commencé à fonctionner. Il y 30 demandes qui sont à l'étude et 1800 dossiers.

Une voix: 1000?

M. Bourassa: Ce sont 1800 dossiers. Ce que nous avions enclenché en janvier 1985 et qu'a poursuivi le chef de l'Opposition comme premier ministre quelques jours avant le lancement de l'élection, ça donne des résultats concrets. C'est déjà en marche. On ne peut pas dire qu'on ne respecte pas nos engagements.

Mme Blackburn: Pour l'aide sociale, je suis loin d'être certaine que les jeunes qui étaient réunis à Montréal au centre Paul-Sauvé aient bien compris la mesure qu'on voulait introduire qui était davantage d'amener les adultes au même niveau que les jeunes, et non pas l'inverse. Je pense que c'est important de rappeler cela au premier ministre. Pour ce qui est du Secrétariat à la jeunesse, on ne nous a pas fourni de budget. Ce sera combien cette année? Combien reste-t-il de personnes? Peut-être une autre question aussi, dans quelle proportion les services sont-ils offerts aux jeunes plutôt qu'au ministère? Les jeunes ont-ils encore des services du Secrétariat à la jeunesse?

M. Bourassa: Votre question, c'est: Quelle est la proportion des services...

Mme Blackburn: Qui vont directement aux jeunes plutôt que de répondre à des demandes du ministère, parce que j'ai eu l'occasion de voir un certain nombre de demandes qui viennent des ministères. On a l'impression que l'essentiel des activités serait pour répondre à des demandes de ministères. Y a-t-il encore au Secrétariat à la jeunesse des services à la clientèle?

M. Bourassa: Oui.

Mme Blackburn: Dans quelle proportion?

M. Bourassa: La proportion a baissé étant donné le flot de demandes reliées à l'Année internationale de la jeunesse. Il y a des services continus à la clientèle et d'autres via le centre de documentation à Québec et les agents de liaison.

Mme Blackburn: Écoutez, je voudrais savoir. J'espère que, lorsqu'on veut faire l'évaluation d'un service - je vois la directrice ici - on doit certainement avoir compilé des données statistiques sur le pourcentage des services qui sont offerts à la clientèle par rapport à ceux qui sont offerts aux différents ministères. Ma question, c'est: Est-ce que ça existe encore des services à la clientèle au secrétariat? Mais la seconde question pourrait peut-être y répondre en même temps. Concernant le budget, on n'a pas eu de données...

M. Bourassa: On me dit que c'est la moitié des effectifs et la moitié du budget pour le service à la clientèle.

Mme Blackburn: Quel est le budget actuellement au Secrétariat à la jeunesse? Celui de 1986-1987 et celui de 1987-1988? Combien reste-t-il de personnes?

M. Bourassa: On me donne ici 40 personnes et 1 771 000 $.

Mme Blackburn: Quelle augmentation par rapport à... C'est 1987-1988?

M. Bourassa: Même budget. Identique.

Mme Blackburn: Donc, il n'y a pas d'indexation. On peut penser que ça équivaut à une diminution de 4,5 %.

M- Bourassa: Ça veut dire combien? C'est 40 000 $ de diminution, si on fait les calculs.

Mme Blackburn: Quand c'est sur le salaire de quelqu'un qui gagne 15 000 $, c'est important.

M. Bourassa: D'accord. C'est un peu plus, oui, je m'excuse. Attendez que je sorte ma règle à calcul. Je sais que te chef de l'Opposition me traite souvent de règle à calcul.

M. Johnson (Anjou): Ah non! Jamais. Plutôt de numéro de loterie. Ce n'est pas la même chose.

M. Bourassa: Si le résultat est bon.

M. Johnson (Anjou): Je trouve que vous l'êtes, mais c'est à la loterie pareil.

M. Bourassa: Vous aimeriez partager mon numéro de loterie.

Mme Blackburn: Pour moi, les jeunes auraient plus de chance à la loterie de ce temps-là.

M. Bourassa: Alors, une légère augmentation. Environ 1 %.

Mme Blackburn: L'an passé, il n'y avait pas eu d'indexation.

M. Bourassa: Voulez-vous dire par rapport à l'année précédente? C'était une année de transition là.

Mme Blackburn: Si vous comprenez, c'est qu'on est en train d'examiner le budget. On est à l'étude des crédits et on n'a aucune information.

M. Bourassa: On vous donne des chiffres là, 1 771 000 $.

Mme Blackburn: On ne les a pas reçus avant, comme c'est la coutume dans tous les autres ministères. Le secrétariat, c'est la même chose. C'est fort étonnant qu'on n'ait pas eu ces données avant.

M. Bourassa: Non, mais on vous donne le budget là. L'avez-vous demandé?

Mme Blackburn: Oui, oui, oui.

M. Bourassa: Là, on vous le donne: 1 771 000 $ et 40 personnes. Qu'est-ce que vous voulez de plus?

Mme Blackburn: Donc, il y a 1100 $ de plus que Pan passé.

M. Bourassa: Le budget est incorporé à celui du secrétariat général, ce n'est pas un budget comme tel.

Mme Blackburn: C'est un programme, c'est le programme 1.

M. Johnson (Anjou): Sauf que...

M. Bourassa: On vous le dit, 1 771 000 $.

Mme Blackburn: C'est plus que l'an passé.

M. Johnson (Anjou): Je comprends, M. le premier ministre, mais vous reconnaîtrez que vous ne nous facilitez pas le travail. Je comprends que vous n'êtes pas entiché particulièrement du Parlement, d'aucune de ses instances et d'aucune des périodes, mais je vous dirai que, nous comme Opposition, pour faire notre travail, nous avons besoin d'un peu de documents.

M. Bourassa: M. le Président...

M. Johnson (Anjou): Cette année, si vous permettez, M. le premier ministre, cela a été particulièrement difficile d'avoir de vous, de vos services ainsi que de beaucoup de vos ministres, des documents qui nous permettent de faire notre travail comme nous pensons que nous devons le faire pour les citoyens du Québec et, en ce sens, vous pouvez bien traiter de haut, avec une attitude hautaine, la députée de Chicoutimi, comme c'est le sport favori d'ailleurs de votre collègue de l'Éducation, mais je vous dis que, nous, nous essayons de faire notre travail et que nous apprenons quel est votre budget au moment où il nous reste dix minutes pour vous expliquer que vos crédits sont adoptés. Si cela ne vous fait rien, nous, nous essayons de travailler.

M. Bourassa: M. le Président, quand même, je demanderais au chef de l'Opposition de faire preuve de patience. D'abord, je n'ai aucune intention de traiter de haut la députée de Chicoutimi, bien au contraire. Je ne vois pas en quoi il peut faire cette affirmation. Deuxièmement, je ne traite pas de haut le Parlement, j'essaie d'y être

présent tous les jours. Malheureusement, je préviens le chef de l'Opposition que demain, je devrai être à Montréal, puisque je dois recevoir la reine mère au cours de l'après-midi.

M. Johnson (Anjou): C'est le "fun" cela.

M. Bourassa: Quoi! La reine mère est un membre de la famille royale dont la personnalité est très estimée au Québec, au Canada et partout. Donc, je ne pourrai pas être à l'Assemblée nationale demain matin. Mais chaque fois que je peux être présent, le chef de l'Opposition le sait. S'il regarde les présences de d'autres chefs de gouvernement dans d'autres parlements ou avant, il doit voir que je fais un effort d'assiduité maximum. Là, pour ce qui a trait au budget, on lui donne le montant du budget et le nombre de personnes.

M. Johnson (Anjou): Je vous le dis encore une fois, on le reçoit à 18 h 12, alors que nos crédits se terminent à 18 h 30. C'est essentiellement parce que, chez vous, comme dans le reste des ministères cette année, je vous jure qu'on n'a pas eu le diable de collaboration pour obtenir des documents. Je ne sais pas si vous avez des choses à cacher. Vous savez qu'on n'est pas si dangereux que cela, on n'est que 23, M. le premier ministre, mais on considère qu'on représente encore 40 % de la population et on est ici pour travailler. Maintenant, vous avez peut-être quelques experts autour de vous qui vous font dire des choses aussi grosses et aussi énormes: Vous devriez être content, je vous donne le budget, c'est 1 230 000 $ quelque. Voyons donc! On est à 18 h 12. C'est ce que la députée de Chicoutimi vous dit. Si on a un peu de difficulté à obtenir des renseignements pour pouvoir faire notre boulot, on comprend que vous avez rarement des réponses à nos questions, mais on aimerait au moins avoir des instruments pour en poser. Voilà!

M. Bourassa: Bon, 40 %...

M. Johnson (Anjou): C'est ce que j'ai à dire, M. le premier ministre, de votre gouvernement sur le plan de la collaboration qu'il accorde à l'Opposition pour pouvoir travailler. Cela a été des chinoiseries sans nom pendant la période des crédits pour obtenir des extraits de choses qui étaient considérées comme étant disponibles couramment à l'époque où, nous, nous étions au gouvernement. Je comprends que vous voulez mener comme des "businessmen", je comprends que vous voulez faire comme cela vous tente, mais je vous dis que vous ne respectez pas un comportement élémentaire sur le plan de la capacité de l'Opposition à faire son travail démocratiquement.

M. Bourassa: Bon!

M. Johnson (Anjou): Malgré cela, je pense qu'on a réussi à enquiquiner une couple de vos ministres.

M. Bourassa: Cela n'a pas paru, mais en tout cas...

M. Johnson (Anjou): Attendez...

M. Bourassa: Ce que je voudrais dire...

M. Johnson (Anjou): Vous verrez, vous pouvez continuer de dire cela, et la prochaine étape, ce sera quoi? On n'aura pas accès à rien?

M. Bourassa: Non, M. le Président...

M. Johnson (Anjou): Est-ce qu'on va avoir droit aux livres des crédits? Je comprends que vous faites couler le budqet une semaine avant, parce que vous êtes trop sans dessein pour être capables de respecter les règles de sécurité dans le gouvernement.

Le Président (M. Marcil): M. le député d'Anjou, s'il vous plaît, pourriez-vous retirer cette parole?

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je dis que le qouvernement est sans dessein, c'est-à-dire qu'il n'a pas d'objectifs. Il me semble que c'est clair. Je ne me suis pas adressé au premier ministre, vous avez remarqué. Vous savez, j'oserais jamais dire cela au premier ministre.

Le Président (M. Marcil): Cela va. Vous avez terminé, M. le député d'Anjou? (18 h 15)

M. Bourassa: Je veux dire à mon honorable ami, le chef de l'Opposition que, d'abord, 40 %, il arrondit un peu sur la représentation. Ce que je veux lui dire, c'est que je vais vérifier si c'est vrai qu'il y a eu manque de collaboration. Moi, j'essaie de les lui donner, mais parfois je n'ai pas de préavis. Ici, on m'est arrivé avec le cas de Roch Bolduc. J'ai vérifié, on l'a rejoint. Finalement, on a répondu. Vous, de votre côté aussi, votre collaboration n'est pas illimitée. Quand vous voulez avoir des réponses et que vous arrivez avec toutes sortes de cas particuliers sans qu'on ait de préavis, on ne peut pas tout savoir dans tout.

Je pense qu'on essaie de répondre au maximum. Si c'est vrai qu'on vous a refusé cette collaboration, je vais voir à ce que la prochaine année ce soit corrigé. Si ce n'est pas vrai, si par exception le chef de l'Opposition exagère, à ce moment-là, je

devrai en tirer mes propres conclusions.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le premier ministre. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: L'an passé, on avait eu droit à la présentation d'un budget sur une page de huit pouces et demi par quatorze. Ce n'était pas quelque chose qui utilisait le temps de deux personnes pendant une semaine. On s'était contenté de peu. Probablement qu'on aurait dû parler l'an passé, parce que cette année cela s'est réduit à zéro. Rien!

Je voudrais demander au premier ministre si on peut nous déposer un document qui fasse état du budget et de la ventilation des dépenses.

M. Bourassa: On m'assure...

Mme Blackburn: Est-ce qu'on peut demander que cela nous soit acheminé, que cela nous soit adressé ou, si ce n'est pas disponible au moment où on se parle, qu'on puisse en avoir des copies?

M. Bourassa: On m'assure, M. le Président, que toutes les questions qui ont été posées - je ne sais pas si Mme Diodati pourrait répondre - ont reçu réponse. Pouvez-vous...

M. Johnson (Anjou): Je parle des documents de base.

M. Bourassa: Tous les documents ont été... Ma collaboratrice, Mme Diodati, dit que les affirmations du chef de l'Opposition sont incorrectes, que tous les documents...

M. Johnson (Anjou): Si le premier ministre veut prendre la parole de Mme Diodati plutôt que la mienne, je le respecte.

Mme Blackburn: C'est cela...

M. Bourassa: J'ai dit qu'elles sont incorrectes. Il est soupe au lait aujourd'hui.

Mme Blackburn: M. le Président, je pense que Mme Diodati ne connaissait peut-être pas bien les règles, puisqu'à une question de Mme Audet elle lui a répondu: Je ne suis pas certaine qu'on puisse vous communiquer ces documents. Donc, cela a été demandé. Je pense qu'on perd un temps important, alors que j'aimerais mieux... Cela fait peut-être l'affaire du premier ministre, parce qu'il n'a pas l'occasion de se faire poser de questions et, donc, il n'est pas obligé de répondre. Ce que je demande, c'est qu'on dépose cela et on pourrait passer à d'autres questions, si vous le permettez.

M. Bourassa: Je veux quand même dire, étant donné qu'il y a toutes sortes d'affirmations qui ont été faites, que beaucoup de renseignements vous ont été fournis. C'est faux de dire qu'il y a moins de transparence qu'avant, parce que Mme Diodati, qui a travaillé avec vos collaboratrices, a dit qu'elle a fourni tous les renseignements sommaires demandés: ventilation détaillée des dépenses du Secrétariat à la jeunesse, ventilation détaillée des dépenses de transfert, nombre de jeunes ayant requis les services du Secrétariat à la jeunesse - toutes des choses qui ont été fournies - liste des études, bilans, monographies produits par le Secrétariat à la jeunesse, page 6 et 7, liste des personnes ressources du Secrétariat à la jeunesse, page 8 et 9, liste des demandes des différents ministères reçues au Secrétariat de la jeunesse, page 10 à 12.

Comment prétendre, M. le Président, maintenant...

Mme Blackburn: ...l'adoption du budqet, alors qu'on est en train d'examiner les crédits.

M. Bourassa: Je viens de vous les donner.

M. Johnson (Anjou): Voulez-vous qu'on étudie les crédits sans budget?

M. Bourassa: Vous l'avez la ventilation ici. Ventilation détaillée.

Mme Blackburn: 1986-1987.

Mme Diodati (Carole): C'est ce que vous aviez demandé.

M. Bourassa: C'est ce que vous avez demandé qu'on vous donne.

Mme Blackburn: M. le Président...

Le Président (M. Marcil): Oui, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: ...vous savez très bien que ces commissions parlementaires servent à examiner les crédits. Comment le faire sans avoir en main ces renseignements?

M. Bourassa: Je ne vois pas l'intérêt...

Mme Blackburn: Je pense que, là, on essaie d'utiliser le temps inutilement pour des...

M. Bourassa: C'est parce que vous n'avez plus de réponse que vous nous accusez de cela. Il reste qu'on m'assure qu'on a répondu à toutes les questions qui avaient été posées. Peut-être qu'il y a eu des

erreurs de l'autre côté.

Le Président (M. Marcil): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Les règles et, là, cela va être la dernière chose là-dessus. On a des demandes particulières et à celles-ci, effectivement, on nous a répondu. Cela va bien. Il va de soi que, lorsqu'on s'en va examiner des crédits, on ait le budget et qu'il y ait une certaine ventilation. C'est élémentaire.

M. Bourassa: Bien non, j'ai dit que c'était intégré au budget - je l'ai dit tantôt - d'ensemble. C'est cela.

Mme Blackburn: Non.

M. Bourassa: J'ai donné le chiffre dans l'intégration.

Mme Blackburn: Pour le Secrétariat à la condition féminine, j'ai assisté à la présentation et on avait en main le budget détaillé, les dépenses ventilées. C'est comme élémentaire, tout le monde pense que cela doit se faire, à l'exception, probablement, du Secrétariat à la jeunesse.

M. Bourassa: C'est un élément du budget. C'est la raison, il me semble... Je ne vois pas pourquoi on craindrait de faire connaître le budget.

Le Président (M. Marcil): Donc, concernant la demande...

Mme Blackburn: Pourra-t-on déposer le document.

Le Président (M. Marcil): ...qui a été faite concernant un possible dépôt...

Mme Blackburn: Du budget et de la ventilation des dépenses. Est-ce que c'est possible?

Le Président (M. Marcil): ...est-ce que vous prenez note de cette demande? Merci.

M. Bourassa: S'il y a d'autres demandes, nous allons faire le nécessaire.

Le Président (M. Marcil): Merci de votre collaboration. Mme la députée.

Mme Blackburn: Alors, j'ai une autre demande.

M. Bourassa: On n'a rien à cacher, on n'a jamais rien eu à cacher. On veut offrir le maximum de transparence.

M. Johnson (Anjou): Le maximum?

M. Bourassa: Absolue!

Mme Blackburn: On a fermé 38 postes de répondants dans les régions pour Communication-Québec. C'étaient des répondants jeunesse, dans le cadre de Déclic jeunesse. Par quoi est-ce qu'on a remplacé cela? Est-ce qu'on a fait l'évaluation du programme avant de le fermer? Sur la base de quoi a-t-on pris cette décision?

M. Bourassa: Est-ce qu'on peut permettre à madame de répondre?

Le Président (M. Marcil): Si vous voulez bien vous identifier avant.

Mme Lapotnte (Danièle): Danièle Lapointe, je suis directrice générale du Secrétariat à la jeunesse. Ce n'est pas tout à fait mon dossier, c'est celui du ministère des Communications et il y a toujours la défense des crédits du ministère des Communications. M. French, pourrait sans doute vous apporter une meilleure réponse que la mienne. Communication-Québec jeunesse a été créé, ces qens ont été embauchés, si je me souviens bien, dans le cadre des options Déclic à l'époque. C'était un mandat d'une durée de deux ans et cela a été prolongé. Comme le rôle de Communication-Québec est de donner de l'information de base sur les activités du Québec, ces gens embauchés dans le cadre des options Déclic ne répondaient pas parfaitement à la définition que M. French a donnée à son équipe de Communication-Québec. Voilà. Je pense que M. French est un meilleur interlocuteur que moi.

Mme Blackburn: Comme le premier ministre est responsable de tout le dossier jeunesse, je suppose qu'il doit avoir certaines préoccupations. Il y avait là des services, des services utilisés et des services qui répondaient à un besoin des jeunes, en particulier dans les régions. On les a fermés sans aucune forme d'évaluation, sauf de dire que cela ne correspond peut-être pas vraiment à ce qu'on reconnaît généralement comme étant la responsabilité de Communication-Québec.

M. Bourassa: Je voudrais dire à la députée que, comme je l'ai répété - il faut toujours répéter les réponses, parce qu'on revient avec les mêmes questions - il y avait l'Année internationale de la jeunesse, l'année dernière. Ce n'est pas tous les ans, l'Année internationale de la jeunesse. Il y a eu une baisse des demandes, parce que l'Année internationale de la jeunesse est terminée. Donc, il faut tenir compte des évolutions, des événements qui changent. Je pense que la députée va comprendre cela. À cause du fait qu'il n'y a pas... 1985, c'est 1985.

Mme Blackburn: L'année dernière, c'était l'Année de la paix.

M. Bourassa: J'ai dit 1985, cela fait deux ans, ou un an et demi, et c'était l'Année internationale de la jeunesse.

Mme Blackburn: Je comprends que le premier ministre a de la difficulté à expliquer comment on ferme un tel service alors qu'il est utilisé. Comment se fait-il qu'il accepte qu'on aille encore couper dans des services pour les jeunes, services qui ne sont pas si nombreux. Ce n'est pas parce que l'Année internationale de la jeunesse était finie que les jeunes, tout à coup, n'avaient plus besoin d'informations. C'est assez surprenant d'entendre un tel raisonnement.

M. Bourassa: M. le Président, quand même, je n'admets pas... Il reste quelques minutes. Avec la Société d'investissement jeunesse, on a dit tantôt qu'il y avait combien de dossiers à l'étude? 30 à l'étude. Et combien de demandes? 1800. Il reste quand même qu'il y a de nouveaux services qui fonctionnent. Cette approche de maintenir indéfiniment, quels que soient les événements, les services qui peuvent perdre de leur utilité à cause de l'évolution des institutions ou des conjonctures, c'est une approche qui nous a conduits à 30 000 000 000 $ de déficit.

Mme Blackburn: Que le premier ministre m'explique, à ce moment-là, comment cette Société d'investissement • jeunesse répond aux besoins des maisons de jeunes et aux besoins des maisons d'hébergement. On est dans l'année des sans-abri et, l'année dernière... Je vais juste rappeler au premier ministre, cela ne m'étonnerait pas... Je comprends qu'il ne puisse pas avoir toutes ces données en tête, il y a des ministres pour cela, mais quand cela concerne la jeunesse, c'est le premier ministre qui s'en occupe. L'an passé, sur 161 demandes de maisons de jeunes, le quart se sont vu refuser des subventions. Il y en a un certain nombre qui ont dû fermer leurs portes.

Les maisons de jeunes, on peut s'en passer dans un quartier, on les laisse aller aux arcades et les choses s'arrangent. Mais pour les maisons d'hébergement, sur 25 demandes, 50 % n'ont reçu aucune subvention, et il y a 2500 jeunes itinérants, 2000 à Montréal, 500 à Québec. On est dans l'année...

M. Bourassa: Des programmes ont été annoncés par M. Bourbeau, le ministre des Affaires municipales. Si on me permet de répondre cas après cas, il y a des programmes qui ont été annoncés par le ministre des Affaires municipales en ce qui a trait aux sans-abri, au cours d'une conférence de presse avec le ministre fédéral. Je crois, si ma mémoire est bonne, que 15 000 000 î ont été affectés pour les sans-abri, notamment les jeunes.

Dans le cas des maisons de jeunes, la ministre responsable, Mme Thérèse Lavoie-Roux - ce sont des secteurs qui relèvent de différents ministères - a annoncé qu'il y aurait des augmentations de fonds, une injection additionnelle. Alors, je crois que l'information de la députée n'est pas complète. Le gouvernement essaie d'augmenter - il l'a fait lors du dernier budget - les sommes disponibles pour pouvoir faire face à cette situation. Je pense bien que, s'il y a un gouvernement qui est conscient des problèmes des jeunes - c'est pour cela qu'on met tellement l'accent sur l'économie - c'est bien celui qui dirige le Québec actuellement.

Mme Blackburn: M. le premier ministre, vous allez me donner le goût de vous rappeler que, en quatre ans, on aura endetté les jeunes étudiants québécois de quelque 100 000 000 $, alors qu'on a décidé, avec une seule modification du budget, de retourner à peu près 80 000 000 $ dans les poches des plus nantis, des hauts salariés.

M. Bourassa: On a donné 200 000 000 $ au dernier budget du 10 avril aux moins fortunés. Alors, s'il vous plaît!

Mme Blackburn: Les étudiants ne sont pas parmi...

M. Bourassa: Indépendamment des étudiants.

Mme Blackburn: ...les plus fortunés.

M. Bourassa: Dans le cas des étudiants, si vous voulez prendre ce niveau de discussion, je peux vous répondre au même niveau en vous disant qu'on a maintenu notre engagement de geler les frais de scolarité qui sont déjà parmi les moins élevés en Amérique du Nord, alors qu'on avait une situation financière très difficile. On a maintenu cet engagement depuis le 2 décembre.

Mme Blackburn: On avait aussi pris l'engagement d'améliorer la situation des étudiants, mais je ne reviendrai pas là-dessus. On va revenir sur les maisons...

M. Bourassa: On accorde des bourses dans votre région, aux étudiants de votre comté. Il y a une somme additionnelle de 400 $ qui est accordée aux étudiants des régions périphériques dont ceux de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Mais on a...

M. Bourassa: Non seulement on a gelé les frais de scolarité, mais on a augmenté pour 4 000 000 $ à 5 000 000 $ les bourses des étudiants des régions périphériques.

Mme Blackburn: Oui, en même temps qu'on a augmenté leur endettement de 270 $ par année et les frais afférents dans les universités jusqu'à 150 $ par année. Donc, on a donné d'une main et on a repris de l'autre. Je ne voudrais pas qu'on s'en aille dans cette guerre de chiffres,

M. Bourassa: Guerre de chiffres, si vous voulez l'aborder la guerre de chiffres, cela se fait à deux, cela. Vous ne pouvez pas lancer toutes sortes de chiffres et m'empêcher de répliquer.

Mme Blackburn: Ce n'est pas toutes sortes de chiffres. 270 $, n'importe qui va pouvoir vous confirmer que c'est ça, c'est un endettement annuel.

M. Bourassa: Non, non.

Mme Blackburn: Ensuite, les frais afférents dans les universités...

M. Bourassa: Pour le cas de l'endettement, cela a été bien dît, la moyenne nationale est de 30 % sous forme de bourses et 70 % sous forme de prêts. Tout ce qu'on a fait, dans le cas du Québec, c'est 45-55 et pas un étudiant n'a été privé du montant disponible pour faire ses études et on a ajouté 5 000 000 $ pour les étudiants des régions périphériques.

Mme Blackburn: C'est 40-60, juste pour votre information, prêts-bourses.

M. Bourassa: On va vérifier.

Mme Blackburn: Oui, oui, on l'a dit en commission parlementaire la semaine dernière.

M. Bourassa: Alors, cela a évolué.

Mme Blackburn: ...dernier budget. Cela va vite.

Ce que j'aurais aimé, les maisons de jeunes, c'est aussi le même problème. Les maisons de jeunes se retrouvent avec à peu près le niveau de financement de 1985. Cela veut dire une incapacité, ne serait-ce que d'indexer le salaire des jeunes travailleurs. Ils sont parmi les plus démunis, ils travaillent souvent au salaire minimum et ils ne sont pas en mesure, avec ce qu'on leur donne, d'indexer leurs salaires.

M. Bourassa: On vient d'augmenter pour une deuxième fois, le salaire minimum. Je m'excuse d'interrompre la députée...

Mme Blackburn: Oui, oui.

M. Bourassa: ...parce qu'elle fait toutes sortes d'affirmations. On a augmenté pour une deuxième fois le salaire minimum, parce que cela profite surtout aux jeunes. C'est une autre mesure. Cela n'avait pas été augmenté durant cinq ans.

Mme Blackburn: Oui, mais on gèle les budgets des maisons de jeunes où travaillent les jeunes.

M. Bourassa: Écoutez...

Mme Blackburn: Je ne vois pas comment vous allez...

M. Bourassa: ...le combat pour la jeunesse ne se fait pas uniquement dans un seul secteur d'une façon absolue et cimentée indéfiniment. Il y a des possiblités de modifier les structures et de continuer à aider les jeunes. C'est ce que je n'approuve pas dans l'attitude de la députée. Il faudrait qu'on garde les mêmes structures, tous les mêmes groupes avec les mêmes budgets sans tenir compte de l'évolution des situations, ou des priorités, ou de l'amélioration de l'efficacité des politiques. Nous, nous ne voulons pas avoir des structures où les trois quarts des budgets vont à l'administration.

Mme Blackburn: Si le premier ministre suivait un peu le dossier des jeunes en difficulté. Ce sont probablement ceux qui sont pour nous les plus préoccupants: que ce soit les jeunes sans statut, c'est-à-dire qu'on ne retrouve ni au bien-être, ni à l'assurance-chômage, ni dans les écoles - on estime qu'ils sont environ 50 000 - que ce soit les jeunes qui sont sans abri. Actuellement, on estime que, dans la région de Montréal, il y en a 2000.

M. Bourassa: Oui, il y a eu 15 000 000 $ d'affectés; j'ai répondu il y a cinq minutes à cela.

Mme Blackburn: Ce que j'essaie de faire valoir, c'est que ces jeunes, qui éprouvent les plus grandes difficultés, sont actuellement ceux qui sont les plus affectés par les décisions de ce gouvernement. Le premier ministre nous dit: On a ajouté des budgets pour les maisons de jeunes. Selon le Coordonnateur des regroupements de maisons de jeunes, M. Papin cela ne permet même pas d'atteindre le budget de 1985. C'est comme si les besoins n'avaient pas évolué. C'est essentiellement là-dessus que je voulais amener le premier ministre pour essayer de le sensibiliser à la situation qui est celle des plus démunis au Québec. Autant un certain nombre de personnes estiment que le contrôle exercé par les agents du service

social pouvait, dans une certaine mesure, se justifier, autant il ne faut pas penser que ce contrôle a eu comme effet de créer des emplois! Ceux qui se retrouvent sans soutien, sans bien-être et à l'extérieur, je pense qu'on n'a pas beaucoup de préoccupation pour cette clientèle actuellement, les plus démunis.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, Mme la députée de Chicoutimi, compte tenu que le temps est terminé. M. le premier ministre.

M. Johnson (Anjou): C'est terminé.

M. Bourassa: Je remercie le chef de l'Opposition...

Programme adopté

Le Président (M. Marcil): C'est terminé, mais juste avant, M. le premier ministre, nous allons adopter l'élément 1 du programme 2. Adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Marcil): Les éléments 1, 2, 4 et 5. Adopté?

M. Johnson (Anjou): Adopté.

Le Président (M. Marcil): Le programme 2 est donc adopté.

M. Bourassa: Je remercie le chef de l'Opposition de sa collaboration. Ce sont des journées quand même assez remplies pour tout le monde. On a essayé durant trois heures et demie de faire avancer la connaisance des dossiers qui nous intéressent mutuellement.

M. Johnson (Anjou): Je remercie le premier ministre de s'être prêté à ces quelques heures de discussion en souhaitant que nous en ayons d'autres sur des dossiers fondamentaux et je lui souhaite bon repos en fin de semaine.

M. Bourassa: C'est réciproque pour le chef de l'Opposition. Qu'il continue à prendre du lait, je pense que cela va être une bonne habitude.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le premier ministre, M. le chef de l'Opposition. Nous suspendons les travaux jusqu'à 20 heures et nous nous retrouvons au salon rouge.

(Suspension de la séance à 18 h 35)

(Reprise à 20 h 19)

Ministère des Relations internationales

Le Président (M. Trudel): À l'ordre, s'il vous plaît! Je rappelle le mandat de cette commission qui est de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère du Conseil exécutif, au programme A, Affaires intergouvernementales canadiennes et du ministère des Relations internationales pour l'année financière 1987-1988.

L'enveloppe convenue et demandée par l'Opposition est de quatre heures, dont deux heures accordées aux relations internationales dès maintenant et pour deux heures, et deux heures aux affaires intergouvernementales canadiennes.

M. le ministre, je vois que vous avez une déclaration préliminaire à nous faire. Je vous invite à nous la faire de la façon qui vous semble la meilleure, ou une lecture rapide ou un résumé substantiel, enfin, vous êtes absolument libre de faire comme bon vous semble. En vous souhaitant la bienvenue et en souhaitant la bienvenue à vos collaborateurs, je vous reconnais immédiatement le droit de parole.

M. Rémillard: Merci, M. le Président. Je voudrais tout d'abord présenter les gens qui m'accompagnent ici à la table, devant vous, à ma droite, M. Marcel Bergeron qui est le sous-ministre en titre au ministère des Relations internationales, a ma gauche, M. Jean-Paul Carrier qui est mon chef de cabinet, et M. Denis Ricard qui est sous-ministre adjoint au ministère des Relations internationales.

M. le Président, de fait, j'ai une déclaration ou un énoncé qui, je crois, fait très bien le point sur les activités de mon ministère depuis un an. Je comprends qu'à un moment donné il peut être un peu long pour l'Opposition de m'entendre lire cet énoncé, cependant je crois que c'est un énoncé qui fait vraiment le point sur ce que nous avons fait pendant la dernière année. Si je peux me permettre de le lire et tout simplement qu'on m'interrompe et qu'on me pose des questions au fur et à mesure, je crois qu'on aura fait tout le tour de la question. Qu'on m'interrompe donc simplement, je m'interromps immédiatement à ce moment-là et j'essaie de répondre aux questions, le mieux possible. Ensuite, bien sûr, dès que j'aurai terminé mon énoncé je répondrai à toutes les questions concernant d'autres aspects qui n'auraient pas été traités.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je veux bien collaborer et, en fait, c'est au ministre de choisir comment il veut procéder. J'ai une déclaration beaucoup plus modeste. J'ai quatre pages, ce n'est pas très long. C'est essentiellement des notes. J'en ai

peut-être pour dix minutes. Mais comme cela touche un certain nombre de choses, si je comprends bien, le ministre nous dit qu'il est prêt à passer à travers ses 60 pages...

M. Rémillard: Non. Excusez-moi, vous avez la grande version.

M. Johnson (Anjou): Ah bon! D'accord.

M. Rémillard: J'ai une version abrégée ici. J'ai un résumé.

M. Johnson (Anjou): On commençait à être inquiet un peu de ce côté-ci. En tout cas...

M. Rémillard: Non. Excusez-moi.

M. Johnson (Anjou): Cela fait 61 pages ce que j'ai entre les mains et je trouvais cela un peu long.

M. Rémillard: On m'a préparé quelque chose de très complet.

M. Johnson (Anjou): Ah bon! Très bien.

M. Rémillard: Mais au risque d'être un peu incomplet, quitte à répondre à vos questions, je vais quand même faire un résumé de cela.

M. Johnson (Anjou): D'accord. Remarques préliminaires M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Alors, M. le Président, j'ai l'intention, dans un premier temps, de traiter de manière relativement détaillée des activités du ministère des Relations internationales au cours de l'année écoulée, en m'attardant plus particulièrement sur les problèmes que nous avons eu à résoudre dans le domaine de la gestion de notre réseau de représentations à l'extérieur et des autres programmes du ministère. Je compte ensuite aborder l'examen de notre implication dans la préparation du Sommet de Québec en mettant l'accent, à la fois, sur ce que nous avons accompli jusqu'ici et sur ce qu'il nous reste à faire, d'ici à septembre. Je tâcherai aussi de présenter de manière succinte notre perception des suivis à donner à cet événement majeur. D'autres dossiers de premier plan, dont s'occupe le ministère des Relations internationales, seront aussi traités dans cette présentation. Enfin, je souhaiterai évoquer quelques-unes des perspectives qui se présentent à moyen terme. Bien entendu, je suis ensuite à votre disposition, après l'intervention du chef de l'Opposition, pour répondre à toutes les questions que vous voudrez bien me poser.

Avant de traiter en détail de chacune des questions qui doivent, à mon sens, nnns préoccuper aujourd'hui, il me paraît indiqué de rappeler brièvement quels sont les fondements de notre action internationale et quelles sont les orientations principales qui déterminent notre conduite dans la qestion courante de nos affaires.

En ce qui regarde tout d'abord les fondements de l'action internationale du Québec. Lors de l'étude des crédits, l'an dernier, j'avais souligné que le gouvernement avait l'intention de fonder sa politique internationale sur la continuité et l'évolution. Il existe en effet un certain nombre de données fondamentales liées à notre histoire, à notre situation géographique et aux caractéristiques de notre société qui lui confèrent à la fois toute sa spécificité et en même temps lui posent aussi des défis redoutables. Le Québec constitue sans aucun doute une société hautement développée. En tant que francophones et nord-américains, nous pouvons puiser à des sources multiples pour assurer notre développement. Nous sommes cependant une société de dimension modeste, évoluant au centre d'un ensemble continental dont la puissance et la cohésion ne peuvent manquer d'affecter, à la longue, ce que nous sommes et ce que nous entendons être dans un monde qui, par ailleurs, se caractérise de plus en plus par la constitution de blocs continentaux puissants, dotés de marchés considérables et de dynamismes intégrateurs de plus en plus évidents. Il devient impératif, pour une société comme le Québec, d'agir pour obtenir des conditions qui préserveront sa sécurité économique, culturelle et sociale. De plus, l'interdépendance et la concurrence de plus en plus forte entre les sociétés obligent le Québec à utiliser toutes les cartes dont il dispose pour assurer le maintien de sa spécificité et, surtout, dans le contexte actuel, le développement de son économie.

L'adhésion de la société québécoise au fédéralisme canadien lui confère des atouts importants dans le contexte que je viens de décrire. En unissant nos forces, notre savoir-faire et notre poids politique aux autres canadiens, nous disposons d'une voix, sur le plan international, beaucoup plus forte que si nous étions seuls à affronter les complexités de ta scène internationale. La société québécoise a cependant des intérêts qui lui sont propres sur la scène internationale. Dans certains domaines, nos principaux concurrents à l'étranger sont d'autres régions de la fédération. Notre spécificité culturelle nous commande d'avoir accès à la coopération avec d'autres sociétés francophones.

En matière d'immigration, notre situation démographique crée au Québec un contexte différent de celui du reste du Canada. En tant que principale expression politique de la société québécoise, le

gouvernement du Québec ne peut ignorer les responsabilités particulières qui lui incombent sur le plan international. Le développement de l'action internationale du Québec, depuis 25 ans, traduit la reconnaissance par les gouvernements qui se sont succédé au pouvoir depuis le début de la révolution tranquille de la nécessité absolue pour le Québec d'agir dans le cadre des compétences qui lui sont reconnues par la constitution canadienne pour promouvoir ses intérêts aussi bien au Canada qu'à l'étranger.

C'est dans le contexte plus strict des fondements du fédéralisme canadien que les gouvernements successifs du Québec ont assumé leurs responsabilités sur le plan international. Le bilan de l'action entreprise est largement positif. Avec des moyens modestes, à l'échelle internationale, le Québec a su se tailler une place très originale dans le concert des sociétés dont il a largement tiré profit pour son propre développement. Le gouvernement s'est doté de ministères, d'un réseau de représentations à l'étranger, d'un ensemble d'ententes diverses et de programmes de promotion économique et d'immigration qui font que nous sommes, sans aucun doute, l'État non souverain le plus actif sur la scène internationale.

Maintenant, en ce qui regarde les priorités du gouvernement actuel, chaque gouvernement - et cela est tout à fait normal - a abordé la formulation de sa politique internationale dans l'optique globale qui était la sienne. Le gouvernement actuel définit ses priorités ou ses orientations en fonction des principes d'un libéralisme aux couleurs du Québec, adapté aux réalités contemporaines et aux aspirations de notre population. Nous nous sommes donné comme objectif prioritaire le développement d'une économie concurrentielle au plan international et capable d'accroître la création d'emplois stables et qualifiés pour notre population active. Par ailleurs, le maintien et le développement de notre spécificité culturelle et le rétablissement à moyen et à long terme de notre équilibre démographique constituent des orientations qui ont une pertinence certaine pour notre politique internationale. Le récent accord constitutionnel nous en donne d'ailleurs des moyens efficaces.

L'intention du gouvernement d'accorder une attention soutenue au maintien des équilibres financiers de l'État a aussi des implications importantes pour la formulation de notre politique. J'aurai l'occasion de revenir plus tard sur la formulation de nos politiques et sur notre intention d'engager une concertation avec les principaux intervenants gouvernementaux et non gouvernementaux à ces sujets.

L'évocation de la priorité que le gouvernement s'est donnée d'assainir les finances publiques me fournit l'occasion de revenir aux propos que j'avais tenus l'an dernier devant cette commission et de faire état de ce qui a été entrepris au cours de l'année financière 1986-1987 en vue de rationaliser la gestion du ministère en général et du réseau de représentations à l'étranger en particulier.

En ce qui regarde la qestion du réseau de représentations, nous avons entrepris une action de rationalisation. Dans le cadre de l'important effort entrepris au début de l'année dernière par le gouvernement pour assainir les finances publiques, le ministère des Relations internationales a été appelé à contribuer aux objectifs financiers établis pour l'ensemble du gouvernement. Comme je l'ai indiqué l'an dernier devant cette commission, nous avons choisi de faire porter dans ce contexte notre examen sur deux éléments majeurs du budget du ministère des Relations internationales. Tout d'abord le réseau de représentations à l'étranger et aussi divers programmes de subventions. (20 h 30)

II était en effet normal qu'après 20 ans d'expansion le réseau de représentations du Québec à l'étranger soit soumis à une analyse de pertinence visant à mesurer l'adéquation entre les objectifs que nous fixons pour notre politique extérieure et les résultats que l'on peut obtenir en implantant une représentation permanente dans un endroit donné, à l'extérieur. L'exercice n'était pas simple à conduire. Nous avons aqi avec beaucoup de prudence l'an dernier. Les modifications que nous avons apportées à la configuration du réseau ont été relativement limitées. L'ensemble de l'opération du printemps et du début de l'été dernier a permis de stabiliser les coûts d'opération du réseau de représentation en général et de réduire sensiblement le budget de plusieurs postes.

J'avais indiqué, l'an dernier, que l'exercice auquel nous avions procédé était appelé à se poursuivre de manière continue à l'avenir. Cet ajustement doit cependant s'effectuer avec pondération et, comme je le mentionnais plus haut, nous entendons procéder avec prudence. Aussi, les services du ministère travaillent-ils depuis l'automne dernier à raffiner les méthodes d'évaluation dont nous disposons, à mettre au point avec tes autres ministères des modes de planification et de qestion et à resserrer au maximum les critères de qestion en vigueur.

Nous avons voulu aussi améliorer la gestion du réseau. À cet éqard, le ministère peut faire état d'une série d'innovations introduites récemment avec le concours du Conseil du trésor qui devraient nous permettre de planifier de manière saine nos engagements à l'extérieur. Comme vous le savez, une partie importante des dépenses que nous effectuons pour maintenir le réseau

de représentation s'est effectuée en monnaie étrangère. Le niveau de ces dépenses exprimé en dollars canadiens varie, évidemment, selon les taux en vigueur.

Depuis la création de notre première représentation jusqu'à cette année, aucun mécanisme d'ajustement n'existait pour tenir compte, de manière ordonnée, des fluctuations de taux de change que nous devons subir. Depuis 25 ans, les fluctuations du taux de change du dollar canadien ont eu tendance à augmenter, surtout ces dernières années. Après un examen approfondi de tous les facteurs en présence, examen conduit par le Conseil du trésor et les services du ministère, il a été convenu que, dorénavant, serait instauré un mécanisme d'ajustement périodique de la partie du budget du ministère dépensée en devises qui permettrait d'ajuster de manière régulière ce budget aux besoins réels. Si le dollar canadien était appelé à remonter vis-à-vis de la plupart des monnaies majeures, le ministère aurait des budgets à remettre au ministère des Finances et, dans le cas contraire, nous recevons les montants requis, au cours de l'année, pour faire face à nos engagements.

La création de ce mécanisme a été rendue possible par l'informatisation croissante de nos opérations et la mise en place de nouveaux cadres budgétaires qui permettent de suivre de manière constante l'évolution des dépenses de chaque délégation, ce qui n'existait pas auparavant.

Ce qui apparaît une réforme purement technique a des implications importantes pour l'avenir du réseau, des délégations, de la représentation du Québec à l'étranqer. Connaissant et contrôlant désormais nos coûts, étant en mesure de faire face aux variations imposées par la conjoncture internationale, nous serons beaucoup mieux équipés pour planifier de manière ordonnée nos engagements et réagir, lorsqu'il y a lieu, devant des évolutions qui appellent une intervention de notre part.

Je peux donc dire que le ministère des Relations internationales a rempli avec succès la première partie de la mission qui lui a été confiée par le gouvernement, celle d'assainir sa base financière et de gérer efficacement ses coûts.

Quant à la planification du réseau, les nouveaux mécanismes de gestion du réseau étant en place, il nous reste, au cours des prochains mois, à développer les processus qui présideront à la planification de son évolution au sein du ministère des Relations internationales et avec les autres ministères ou utilisateurs du réseau. Le travail d'évaluation des délégations ne manquera pas, en cours d'année, d'amener des changements dans la configuration de certaines de celles-ci, le recours à des moyens de représentation plus souples ou le redéploiement de ressources d'une région à l'autre. Nous poursuivons nos discussions avec le ministère des Affaires extérieures en vue de convenir des modalités, de l'établisssement de bureaux économiques québécois au sein de certaines ambassades canadiennes. Nous avons échangé des propositions avec la partie fédérale et nous poursuivons activement la recherche de solutions aux difficultés qu'une insertion de ce type peut poser pour les deux gouvernements.

Cela n'exclut nullement le développement de certaines activités au sein du réseau. La nécessité de plus en plus marquée de trouver des débouchés sur les marchés internationaux pour nos produits aqro-alimentaires a conduit le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation à nous proposer l'implantation au sein du réseau de sept attachés aqro-alimentaires. On se rappellera que deux postes de ce type avaient été créés, il y a quelques années, à Tokyo et New York. Cette initiative du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation que nous avons appuyée a récemment reçu l'aval du Conseil des ministres.

Dans le domaine culturel, les besoins deviennent de plus en plus pressants. Le ministère des Affaires culturelles s'est donné un certain nombre d'objectifs qui impliquent une présence plus active à l'étranqer. J'aurai donc sans doute l'occasion, sous peu, de procéder à l'affectation à Paris et à New York de conseillers culturels qui auront été choisis en accord avec ma collègue, la ministre des Affaires culturelles du Québec.

En ce qui reqarde les subventions maintenant, j'ai mentionné au début de ma présentation que nous avons aussi mis l'accent l'an dernier sur la rationalisation du programme de subventions du ministère. En effet, après le réseau, cet élément budgétaire représente le deuxième poste permanent en importance de notre budget. Le principal élément à inscrire sous ce chapitre est la subvention versée annuellement par te ministère des Relations internationales aux collèges Marte-de-France et Stanislas, de Montréal. On se rappellera que le ministère verse à ces deux collèges une subvention, équivalente à celle qu'ils recevraient en vertu de la Loi sur l'enseignement privé s'il s'agissait de collèges québécois, au titre de la coopération franco-québécoise. Cette responsabilité a été confiée au ministère des Relations internationales en 1976.

Nous avons indiqué l'an dernier que nous souhaitions réexaminer cette situation car, j'étais d'avis qu'une subvention de ce type ne relevait pas prima facie de la responsabilité du ministère des Relations internationales. Il me paraissait justifié par ailleurs, après dix ans d'existence de cet arrangement, d'entamer avec la France des discussions à propos de l'avenir des collèqes,

non seulement sur le plan budgétaire mais aussi à propos du type de formation offert par les collèges et leur adaptation au contexte québécois.

Je peux vous dire aujourd'hui que les négociations sont avancées et que nous devrions en arriver, au cours des prochains mois, à une solution satisfaisante pour toutes les parties.

En ce qui concerne nos programmes de subventions, nous avons été amenés à concentrer les ressources disponibles autour des activités qui nous paraissaient les plus directement reliées au mandat et à la vocation du ministère des Relations internationales. Ainsi, la plupart des subventions régulières, que nous versions à des événements culturels au Québec, deviennent désormais la responsabilité du ministère des Affaires culturelles.

L'échéance qui retiendra le plus l'attention des services de mon ministère au cours des prochains mois est sans conteste le sommet des chefs d'État et de gouvernement des pays ayant en commun l'utilisation du français, dont la tenue est prévue à Québec du 3 au 5 septembre 1987. De fait, comme vous l'aurez constaté à la lecture du cahier des crédits, nous avons prévu un montant global de 8 500 000 $ pour couvrir l'ensemble des coûts reliés aux préparatifs et au déroulement du sommet.

Je serai à votre disposition, plus tard, pour répondre aux questions détaillées que vous jugerez utile de m'adresser à propos de la ventilation de ces montants. J'ai l'intention, au cours de cette présentation, de traiter plutôt des gestes que nous avons posés depuis un an pour préparer l'accueil du sommet, de notre action pour donner suite aux décisions du Sommet de Paris et du déroulement prévisible des événements, d'ici à la tenue du sommet.

J'aurai aussi l'occasion d'aborder notre perception des suites que pourrait avoir cet événement.

En ce qui regarde tout d'abord les suivis du Sommet de Paris, je ne reprendrai pas ici la relation en détail du déroulement du premier sommet francophone. Le Québec y a joué un rôle de premier plan comme en témoignent les fonctions assumées par son premier ministre en tant que rapporteur général de la conférence. Les propositions que nous avions élaborées avant le sommet en vue de déterminer quel thème devait être retenu pour l'avenir de la coopération multilatérale et les modalités qui devraient être retenues pour traiter de ces thèmes ont été largement adoptées par les participants au sommet. Il ne paraît pas excessif d'affirmer que notre participation au Sommet de Paris a représenté un des moments les plus éclatants, sinon le plus éclatant, de notre action internationale depuis 25 ans.

Je m'en voudrais ici de ne pas souligner que le chef de l'Opposition, en négociant l'entente de novembre 1985 avec le gouvernement fédéral, a contribué à créer les conditions de ce succès.

L'acceptation par les chefs d'État et de gouvernement de notre invitation à venir à Québec pour la deuxième conférence au sommet nous conférait bien évidemment des responsabilités particulières dans la gestion des suivis du premier sommet. Notre qualité d'hôte du sommet suivant nous imposait de plus un ensemble d'obligations en termes de logistique, de préparation des contenus et d'animation générale de la communauté francophone en prévision de cet événement.

Le premier geste que nous avons posé, une fois accepté le principe de la tenue de la deuxième conférence à Québec, a été de conclure un accord avec le qouvernement fédéral pour son déroulement. Le contexte d'un sommet qui se tient à Québec est évidemment très différent de celui qu'on avait connu à Paris. Aussi, l'accord définît-il de manière précise le rôle que chaque gouvernement doit assumer dans la préparation et le déroulement du sommet.

Comme vous le savez, le Canada est la puissance invitante pour la conférence et le Québec, gouvernement hôte. L'accord prévoit aussi la création d'un comité d'organisation du sommet présidé par l'ambassadeur du Canada à Paris et dont la vice-présidence est assumée par notre délégué général en France.

Enfin, une clé de répartition des frais engaqés pour l'organisation du sommet est aussi prévue dans l'accord. Cette clé tient compte de la participation du Nouveau-Brunswick à la préparation de l'événement.

L'organisation du sommet a été confiée au ministère des Relations internationales. Il est évident, cependant, que les structures permanentes du ministère ne sont pas conçues en fonction des impératifs de l'organisation d'un événement de ce type. Le ministère dispose d'un noyau de base qui était manifestement appelé à jouer un rôle centra! dans l'organisation du sommet, en l'occurrence, la direction des Affaires francophones. Cette direction devait cependant continuer de s'occuper de la vie des institutions et associations francophones qui ne s'arrête pas parce qu'il y a un sommet.

Aussi, ai-je décidé, à l'automne dernier, de mettre en place une structure légère qui est devenue le Secrétariat québécois du sommet de Québec. Ce secrétariat, placé sous l'autorité du sous-ministre adjoint, M. Ricard, travaille sur les trois dimensions de l'action proprement québécoise en vue du sommet, soit les contenus, les communications et les événements associés.

L'entente entre Ottawa et Québec présidant à la préparation du sommet précise que chacun des deux gouvernements est

responsable des contenus qu'il entend présenter au sommet. L'organisation de l'événement est cependant, en vertu de l'entente, une entreprise conjointe. Il est très vite devenu évident qu'il fallait créer une structure commune Ottawa-Québec-

Fredericton pour réaliser l'ensemble des tâches de nature logistique que les gouvernements hôtes se devaient d'assumer.

Au cours de l'été et de l'automne 1986» des discussions serrées entre les gouvernements du Canada et du Québec eurent lieu à propos de la configuration à donner à cette structure commune et des modalités à prévoir pour assumer son bon fonctionnement. Le secrétaire, M. Guy Simard, dirige cette structure composée de cinq services correspondant chacun à un volet logistique et particulier des préparatifs. Il s'agit des services du protocole, de l'accueil, du logement, du transport et des communications. Une unité administrative complète les effectifs du secrétariat.

En vertu de l'entente conclue à Paris, la responsabilité des préparatifs en matière de sécurité relève des autorités fédérales. Une concertation étroite est cependant maintenue entre la Gendarmerie royale du Canada et la Sûreté du Québec à ce propos. Le gouvernement fédéral a accepté par ailleurs d'assumer la totalité des coûts reliés à cet aspect du sommet.

Le Sommet de Paris avait été préparé par un comité de représentants personnels des chefs d'État et de gouvernement invités au premier sommet. On a vite donné à cette instance la dénomination de comité des sherpas. Le Sommet de Paris a décidé de confier le suivi des décisions qui y avaient été prises à ce même comité qui est devenu le comité des suivis. Ce comité des suivis où le Québec est représenté par notre délégué général en France a travaillé de manière très active depuis février 1986. Il est intéressé de très près aux modalités de la réforme de l'Agence de coopération culturelle et technique souhaitée par le Sommet de Paris. Les décisions prises en décembre 1986, lors de la dernière réunion du conseil d'administration de l'agence que j'ai d'ailleurs eu le plaisir de présider, visent à intégrer pleinement l'agence dans les activités francophones multilatérales découlant du sommet.

Le comité des suivis a fait rapport, il y a quelques semaines, en dressant un bilan globalement satisfaisant des suivis donnés au premier sommet. Le comité peut notamment s'enorgueillir d'avoir présidé à la mise en place des cinq réseaux de coopération multilatérale et aux premiers pas de ceux-ci. Le comité a nommé à des postes de responsabilité élevés au sein des réseaux deux de nos compatriotes. M. Christian Latortue, haut fonctionnaire du ministère de l'Énergie et des Ressources a été nommé responsable du réseau énergie par le comité. M. Jean-Marc Léger a été nommé, l'automne dernier, responsable du volet industries culturelles dans le réseau culture et communications.

Le comité des suivis fait très largement place, depuis quelques semaines, au comité des sherpas constitué en vue d'assurer au niveau international la préparation du Sommet de Québec. Ce comité est présidé par l'ambassadeur du Canada à Paris, M. Lucien Bouchard. Notre délégué général à Paris, M. Jean-Louis Roy, en est le vice-président. Il se réunit alternativement à l'ambassade du Canada ou à la délégation générale. Ces réunions ont jusqu'ici regroupé régulièrement de 30 à 35 représentants des pays conviés au prochain sommet. La tâche primordiale du comité des sherpas est de préparer l'ordre du jour du Sommet de Québec, de retenir au sein de chacun des réseaux la nature des propositions d'origine multilatérale ou bilatérale qui seront abordées à Québec. Le comité, enfin, est le lieu privilégié où se réglera, au cours des prochains mois, l'ensemble des problèmes qui pourraient surgir au niveau international lors de la préparation de la conférence. (20 h 45)

Nous sommes particulièrement soucieux, en ce qui reqarde le contrôle financier, du respect du cadre financier qui a été établi pour notre participation au sommet. Qu'il s'agisse de notre contribution au fonctionnement du secrétariat conjoint, de notre participation au suivi du sommet de Paris ou de notre contribution aux événements qui seront associés au sommet, nous entendons veiller au maintien des coûts de façon riqoureuse. Le secrétariat québécois du sommet est donc doté d'un contrôleur financier d'abord responsable du suivi des engagements au secrétariat conjoint. Responsable des aspects logistiques de la préparation du sommet, le secrétariat conjoint s'est concentré dans un premier temps sur l'établissement d'échéanciers pour chacun des secteurs dont il est responsable et sur la mise en place d'une planification des activités.

Au secrétariat québécois du sommet, les groupes de travail charqés d'alimenter nos contributions aux réseaux de coopération multilatérale ont élaboré un ensemble de propositions dans chacun des cinq secteurs qui ont conféré au Québec un rôle de tout premier plan dans la préparation des contenus du sommet, notamment, au sein du comité des sherpas. Il serait trop long ici d'entrer dans le détail de chacune des propositions que nous avons transmises au chef de réseau et au comité des sherpas. À Paris, maintenant, le comité des sherpas a été saisi de propositions de coopération multilatérale et s'est penché activement sur l'ordre du jour du sommet. Notre délégué

général a fait preuve de leadership au sein de cette instance. Les participants auront aussi à prendre des décisions en ce qui a trait au rôle central que l'Agence de coopération culturelle et technique doit assumer dans la coopération multilatérale francophone. Pour notre part, nous sommes favorables à une évolution progressive qui conduirait les réseaux à s'intégrer à des structures réformées de l'agence où ils seraient appelés à remplacer les directions générales existantes.

Puisque la francophonie dispose déjà d'un organe international apte à gérer la coopération multilatérale, il nous paraîtrait contre-indiqué de créer à ses côtés des structures qui entreraient inévitablement en conflit sur plusieurs plans avec l'agence. Il noua semble que ce point de vue est de plus en plus largement partagé par les pays participants à la condition que l'on puisse procéder progressivement. L'agence elle-même doit être réformée. Tout le monde s'entend là-dessus. Un premier pas a été accompli au mois de décembre dernier par la conférence générale. Mais il reste beaucoup à faire. Nous souhaitons que l'agence devienne un instrument plus performant, moins lié par un ensemble de contraintes administratives et financières et doté d'une souplesse plus grande. L'allégement des structures de l'agence, l'élimination d'un grand nombre de contraintes de nature administrative et l'articulation de ces travaux autour des réseaux devraient, à nos yeux, fournir- à cette institution irremplaçable les moyens de progresser et de jouer le rôle qui doit être le sien au sein de la francophonie.

En ce qui regarde les perspectives, il est bien sûr que notre intérêt est que la deuxième partie du sommet consacrée aux questions de coopération soit la plus substantielle possible, car le premier ministre du Québec est appelé à la présider. Mais au-delà de cet intérêt, il y a notre conviction que seule la création d'un véritable espace francophone au sein duquel circuleront idées, personnes et produits peut permettre au concept francophone de prendre tout son sens.

Nous sommes encore à préciser la teneur exacte des messages qui serviront de substrat à toutes les interventions québécoises au sommet. Notre réflexion s'articule actuellement autour des trois idées forces suivantes.

Premièrement, le Sommet de Québec doit être l'occasion de faire prendre conscience à tous les membres de la francophonie que des enjeux d'avenir leur sont communs et que chacun ne peut affronter seul les défis qui en découlent.

Deuxièmement, il est essentiel également que les réseaux soient construits sur la notion de partenariat, chacun y apportant une contribution différente mais spécifique et nécessaire. Il importe au premier chef au Québec que le Sud soit associé activement à la mise au point des programmes majeurs qui canaliseront la coopération internationale francophone et, au lendemain du sommet, qu'il soit coresponsable de la mise en oeuvre des décisions qui auront été prises à cette occasion.

Troisièmement, ainsi conçus, les réseaux seront donc décentralisés dans l'aire géographique de la francophonie pour être sur place au - service de toutes les composantes. Le grand défi du Sommet de Québec est de structurer l'ensemble francophone existant, de lui donner une cohésion qui permette d'additionner et de conjuguer ces ressources innombrables pour faire face, comme on dit, avec une personnalité spécifique à des problèmes dont l'ampleur dépasse chaque partie du tout.

Le ministère des Relations internationales et les intervenants gouvernementaux et non gouvernementaux québécois sur la scène internationale. Le sommet constitue la priorité de l'heure pour le ministère des Relations internationales. Cela n'exclut nullement une action résolue dans un certain nombre de directions dont le cahier des crédits qui a été remis founit un aperçu sur le plan économique. En effet, on y détaille les priorités d'action pour chacune de nos directions géographiques et les orientations que nous avons retenues pour l'année à venir pour nos activités avec les organisations multilatérales et un certain nombre d'autres intervenants.

Je ne reviendrai donc pas sur cet aspect de notre action cette année. Je suis bien évidemment à votre disposition pour répondre aux questions que vous voudrez bien me poser tout à l'heure. Je crois plutôt utile de faire état de certaines initiatives que nous avons prises récemment et d'actions que nous comptons entreprendre au cours des prochains mois pour intensifier nos relations avec un certain nombre d'intervenants gouvernementaux et non gouvernementaux.

À la conférence socio-économique sur le Québec dans le monde de 1984, un large consensus s'est dégagé parmi les participants non gouvernementaux. Il était primordial pour eux que le gouvernement fasse connaître de manière aussi précise et articulée que possible les objectifs retenus pour son action internationale et les moyens auxquels ils entendaient avoir recours pour les réaliser.

Ce consensus s'est élaboré dans un contexte où tous reconnaissent que l'action des intervenants non gouvernementaux québécois sur la scène internationale a pris une ampleur considérable depuis quelques années. Qu'il s'aqisse de nos entreprises, de nos institutions universitaires, de nos villes et communautés urbaines, de nos associations, tous ont désormais le regard

largement tourné vers l'extérieur.

Le développement de l'activité internationale de l'ensemble des secteurs de la vie collective québécoise se manifeste aussi au sein du gouvernement. Il n'y a pratiquement plus un ministère aujourd'hui qui n'intègre une dimension internationale à sa planification et à son action. Le rôle du ministère des Relations internationales est de s'assurer que cette action multiforme se situe dans un cadre cohérent et que les intervenants gouvernementaux à l'étranger, dans la poursuite de leurs intérêts, contribuent de manière optimale aux objectifs d'ensemble que le gouvernement a arrêtés pour son action.

Le gouvenement précédent a répondu aux voeux formulés par la conférence par la publication d'un énoncé de politique en juin 1985. Depuis lors, un nouveau gouvernement a pris le pouvoir doté d'orientations nouvelles et soucieux de faire jouer à l'État le rôle qui doit être le sien dans une société contemporaine.

L'environnement canadien et international a aussi évolué rapidement. Je mentionnerai simplement à cet égard l'accord constitutionnel, l'évolution rapide du dossier de la libéralisation des échanges avec les États-Unis, la tenue du premier sommet francophone et la préparation du deuxième, le lancement des négociations commerciales multilatérales, le caractère de plus en plus aigu de certains problèmes comme les pluies acides ou de nouvelles initiatives en matière de politique étrangère prises à la fois par le gouvernement canadien et nos principaux interlocuteurs étrangers.

Aussi ai-je demandé aux services du ministère des Relations internationales, depuis quelques mois, de préparer un texte d'orientation politique qui intègre toutes les données nouvelles dont je viens de faire état. Nous avons l'intention de rendre publics les éléments de cette politique dès que cela sera possible. Nous voulons provoquer un débat aussi large que possible sur cette question fondamentale.

L'appui à l'action internationale des villes et communautés urbaines. De longue date, le gouvernement du Québec a privilégié l'appui aux initiatives des collectivités locales comme moyen d'atteindre les objectifs qu'il s'est donnés en matière de politique internationale. Cet appui a pris les formes les plus diverses: financement de missions à l'étranger, prêt de personnel, mise à la disposition des collectivités de notre réseau de représentation à l'étranger, action diplomatique vigoureuse auprès des autorités - étrangères en vue de favoriser l'atteinte des objectifs que nos villes, communautés urbaines et MRC peuvent se donner.

Depuis plusieurs années, le gouvernement du Québec tient de plus en plus compte de la nécessité pour les villes et les communautés urbaines d'intégrer une dimension internationale à leur développement. Des villes ont largement pu compter sur l'appui de nos services extérieurs pour attirer chez eux des investissements industriels. La plupart des commissaires industriels québécois savent qu'ils peuvent compter sur notre réseau de représentation extérieure pour organiser leur action de promotion industrielle. Dans deux cas cependant, l'importance pour l'ensemble de la société québécoise des collectivités en cause justifie une action gouvernementale plus accentuée. II s'agit des réqions de Montréal et de Québec.

Je me suis attaché, depuis un an et demi, à faire valoir au maximum les atouts de Québec, de la ville de Québec sur le plan international. La tenue du sommet à Québec et la qualité de l'accueil que nous nous préparons à offrir aux participants auront un impact considérable sur l'image de Québec dans l'ensemble de la francophonie et bien au-delà. La création d'une instance d'arbitrage commercial internationale, l'ouverture prochaine de la représentation nord-américaine de l'Unesco, l'appui à Rendez-vous 1987 et celui que nous apportons aux initiatives de l'Université Laval sur le plan international constituent des manifestations de l'intention du gouvernement de permettre à la région de Québec d'assumer pleinement sa vocation internationale.

La recherche méthodique d'une valorisation de la région de la capitale sur le plan international ne doit pas faire perdre de vue que c'est dans la région montréalaise que se joue en premier lieu l'avenir de notre société sur le plan international. Montréal représente pratiquement la moitié du Québec sur le plan humain. La concentration qu'on y retrouve d'entreprises, d'institutions et d'associations oeuvrant sur le plan international fait que c'est d'abord dans la région métropolitaine que nous devons concentrer nos efforts en vue d'appuyer les initiatives des collectivités locales sur le plan international.

L'action du ministère des Relations internationales pour favoriser le développement de la réqion métropolitaine sur le plan international est peut-être mal connue. Aussi, m'en voudrais-je aujourd'hui de ne pas en faire état. Cette action se déploie dans plusieurs directions. Souliqnons d'abord que nous agissons de concert avec la ville de Montréal depuis longtemps. Peu de visiteurs importants sont reçus par le gouvernement du Québec sans qu'ils aient l'occasion de rencontrer les autorités municipales de Montréal. Nous nous concertons régulièrement avec les autorités montréalaises en vue de planifier nos activités et de faire jouer au maximum les complémentarités qui peuvent exister entre le palier gouvernemental

québécois et celui de la ville. Encore tout récemment, le sous-ministre du ministère des Relations internationales, M. Marcel Bergeron, a tenu une rencontre de travail avec le secrétaire général de la ville de Montréal en vue de cerner les principaux défis auxquels chacun faisait face et de dégager les voies d'une action commune dont l'intérêt paraît manifeste.

Cette volonté de soutenir les acteurs de la région de Montréal dans leur démarche se traduit très concrètement au niveau du déploiement des ressources du ministère des Relations internationales. La très grande majorité des subventions que nous versons au Québec à des associations, institutions et organismes culturels sont versées dans la région de Montréal comme l'AQOCI et les collèges français. Le maire de Montréal, le président de la Communauté urbaine et l'ensemble des autorités municipales bénéficient largement des services de notre réseau de représentation à l'étranger lorsqu'ils se déplacent. Afin de concrétiser notre action, de nous impliquer de manière approfondie dans la dimension internationale de la ville de Montréal, nous avons pris la décision depuis un an d'étoffer le bureau du ministère à Montréal. J'ai tenu à souligner aujourd'hui l'importance de notre implication dans le développement de la région de Montréal car certains commentateurs, dont le chef de l'Opposition, ont cherché à souligner l'action que je conduis en faveur de la région de Québec pour la mettre en opposition avec les impératifs de développement de la région de Montréal. Je crois que l'ensemble des éléments dont je viens de faire état témoigne de notre intention d'agir avec une énergie aussi bien en faveur de la région de la capitale qu'en faveur de la région métropolitaine dans le respect des vocations propres et du potentiel de chacune de ces deux régions.

Je suis maintenant à votre disposition, M. le Président, et à celle des membres de cette commission pour répondre à des questions,

Le Président (M. Filion): Je vous remercie, M. le ministre.

M. le chef de l'Opposition

M. Pierre Marc Johnson

M. Johnson (Anjou): Je remercie le ministre d'avoir accompagné sa présentation orale d'un texte considérable à partir duquel, je pense, il s'est inspiré et que j'ai suivi tant bien que mal, mais je peux l'assurer que nos services vont prendre connaissance avec attention, et moi aussi, de certains chapitres.

Quelques remarques préliminaires à partir de son exposé. Le ministre, qui porte le chapeau des affaires canadiennes avec le premier ministre et aussi celui des affaires internationales, à l'occasion, nous parle des deux sujets au point, d'ailleurs, où cela l'amène à faire quelques lapsus. Quand ils deviennent écrits, cependant, cela me préoccupe un peu plus que verbalement. Le ministre nous a parlé du concert des sociétés. J'ai toujours compris, moi, que, dans les questions internationales, on parlait du concert des nations. En tout cas, c'est comme cela que je l'ai appris en sciences politiques et en droit. Je comprends qu'il est très préoccupé par la notion de société, ces jours-ci, mais il ne faudrait quand même pas exagérer. Vous savez, au début du siècle, ce n'est pas la Société des sociétés qui a été fondée, c'est la Société des Nations. (21 heures)

Deuxièmement, le ministre a fait allusion à l'accord constitutionnel et, juste avant qu'il nous annonce qu'il va demander à son ministère de produire pour la deuxième fois en trois ans un document d'orientation, il nous a parlé des événements et du contexte actuel et il a fait allusion à deux reprises à l'intérêt que représente l'accord constitutionnel sur le plan international pour le Québec. Je vais lui poser une question. Je comprends que le ministre était convaincu, à tort ou à raison - je dirais qu'à ce stade-ci, ça n'a pas tellement d'importance - que la notion du gouvernement qui peut faire la promotion du caractère distinctif du Québec emportait donc le privilège de la couronne des relations extérieures dans le système de type britannique. J'ai posé la question au premier ministre tout à l'heure mais en lui demandant de décanter ça un peu. Je peux peut-être demander au ministre de faire la même chose.

Est-ce qu'il ne considère pas que le paragraphe 4 de l'article 2 de l'accord constitutionnel, dans la mesure où il explique maintenant que rien dans le présent article ne peut venir déroger aux pouvoirs, aux droits et aux privilèges du Parlement du Canada, vient quelque peu tempérer les espoirs qu'il fondait sur... Le gouvernement du Québec peut promouvoir le caractère distinct, comprendre par "gouvernement" le droit exécutif, comprendre la "couronne" au sens de l'arrêt Maritime Bank et de la notion de prolongement des compétences internationales, la théorie des onze couronnes. C'est ce que j'avais à dire sur la question constitutionnelle. Je n'entends pas y revenir beaucoup.

Je remarque aussi qu'à la page 47 de ses remarques, le ministre nous parle d'un environnement dont il faut tenir compte au moment où il décide de donner mandat à son ministère d'écrire une politique. On nous parle du lancement des négociations multilatérales. Je me permets de lui soumettre la chose suivante. Le Québec a toujours dû être extrêmement modeste quand il était question du GATT, compte tenu du

fait qu'on a passé les quinze dernières années à se tirer dans les airs avec le fédéral pour pouvoir y participer et que notre rôle a toujours été un rôle malheureusement accessoire! que je souhaiterais beaucoup plus important. Est-ce que je dois comprendre que le ministre nous annonce que le Québec aura maintenant un rôle plus important au niveau de la négociation multilatérale?

C'est ce que j'aurais comme remarques tout à fait préliminaires. Ensuite, j'aurai quelques commentaires sur les crédits. Je vais simplement, pour permettre au ministre et à ses collaborateurs de voir un peu comment l'organisation de nos travaux se fera et leur permettre de sortir les documents d'avance, leur donner une espèce de table des matières de ce qui va se passer de notre côté.

Je vais faire des remarques générales sur le budget du ministère qui ne seront pas toutes absolument agréables, je vous le dis tout de suite, M. le ministre. Deuxièmement, je vais m'arrêter un petit peu au fonctionnement de la délégation à Paris. Je vais vous parler de l'Office franco-québécois pour la jeunesse. Je vais vous parler des délégations. Il peut y avoir une série de questions notamment sur les délégations. J'aurai une question sur une entente internationale concernant la Belgique en matière de sécurité sociale. J'aurai évidemment un certain nombre de questions concernant le sommet francophone, étant donné que c'est un gros morceau, merci!

Voilà, cela vous donne un peu le portrait. J'ai remarqué quelques crayons se lever derrière vous, M. le ministre. Je pense que vous avez la du personnel extrêmement compétent et je suis sûr aussi, chargé de valises pleines comme à chaque fois qu'on fait les crédits.

Mes remarques préliminaires: M. le ministre, vous occupez un ministère qui, quand je regarde son évolution budgétaire, vous obligera peut-être bientôt à changer de titre. Les crédits 1987-1988 démontrent que vous êtes à la tête d'un ministère qui est de relations de moins en moins internationales. Et si, par malheur, vous deviez y rester trop longtemps ou si le président du Conseil du trésor ne vous fait pas plus de faveurs, vous serez peut-être un jour à la tête du ministère des défuntes relations internationales, ce qui m'inquiète.

Je m'explique. Les représentations du Québec à l'étranger sont réduites comme une peau de chagrin. Je comprends, comme vous l'avez dit dans votre exposé, que l'ère de la grande rationalisation est arrivée, mais j'ai quelques chiffres qui me préoccupent quand même beaucoup.

D'abord, les crédits pour les représentations à l'étranger - l'élément 1 du programme 1 - sont gelés, ce qui signifie en pratique une baisse, compte tenu de l'inflation. On sait pourtant que, globalement, les dépenses du gouvernement ont augmenté de 5,9 % cette année. Ce n'est pas moi qui dis cela, c'est le président du Conseil du trésor. Les délégations du Québec, de toute évidence, n'ont pas eu le plaisir et le privilège de cette manne du Trésor, comme le ministère lui-même d'ailleurs, car quand on exclut les 8 000 000 $, on me corrigera, c'est environ 8 000 000 $ pour le sommet francophone, à moins vraiment que le sommet ne dure un an mais je ne le pense pas... Quand on exclut le projet spécial du ministère des Relations internationales avec l'ACDI dans le cas du Zaïre et du Rwanda, je pense que c'est 1 500 000 $ ou près de 2 000 000 $ qui vont là-dessus. Disons que j'enlève le budget du sommet et j'enlève le projet Zaïre-Rwanda - on se comprend bien je regarde ce qui reste, c'est une augmentation de 2 % dans votre ministère pour faire fonctionner tout cela. Je vous dis que cela me préoccupe beaucoup. J'ai l'impression que cela doit préoccuper d'autres personnes aussi.

Deuxièmement, il m'apparaît dans un contexte comme cela que le ministère est comme un peu assoupi saqement au pied du "bunker". Je m'explique. Il y a de moins en moins de personnel en fonction à l'étranqer. Cela me préoccupe et je ne pense pas... Je reconnais ici un certain nombre de visages, de gens qui ont été en poste à l'étranqer et, dans la mesure où nous, comme vous l'avez si bien dit, on n'est pas un État souverain, ce n'est pas parce qu'on les envoie en Albanie, vous savez, et, qu'ils ont hâte de revenir. En général, nos gens sont en poste dans des pays où la vie peut être exigeante, le travail est cependant stimulant et intéressant. Je ne pense pas qu'ils soient en train de courir pour revenir absolument au Québec. En tout cas, d'après l'expérience que j'ai eue, les gens dans nos délégations, les délégués, professionnels et autres, c'étaient des gens qui étaient extrêmement stimulés par leurs postes à l'étranger.

Mais je me rends compte qu'au 1er avril 1987, dans votre ministère, M. le ministre, il y avait seulement 58,7 % de l'effectif de votre ministère qui étaient en poste hors Québec, contre 70 % un an auparavant. Cela parle. Cela s'appelle une diminution substantielle de la présence du Québec à l'étranger. Quand on réduit ainsi de 12 % l'effectif à l'étranger, c'est quelque chose en termes relatifs.

L'autre dimension, évidemment, c'est qu'il y a des délégations qui se vident. En un an, deux postes nouveaux créés à Dakar et à Bogota mais suppression de 55 postes qui représentent une perte nette de 15 %, 15,1 % si je ne me trompe pas. Le Québec a notamment supprimé douze postes à Düsseldorf - il ne doit certainement pas

rester grand-chose là - neuf à Paris - ce qui est une ponction sévère - six à Dallas -cela, c'est la fermeture, on se comprend -six à Caracas - si ce n'est pas la fermeture, je ne sais pas ce que cela laisse - quatre à New York, quatre à Atlanta, quatre à Milan, Milan et Rome, pour bien se comprendre.

Quand je vois tout cela, j'ai l'impression qu'au nom de la rationalisation budgétaire, la présence du Québec à l'étranger commence à être un peu lilliputienne, ma foil Pourquoi ne pas le dire? Si ce qu'on veut dire c'est que comme société, pour reprendre un terme à la mode, on pense qu'on n'a pas vraiment les moyens d'être à l'étranger, qu'on se le dise et qu'on l'explique aux Québécois à part cela. Je vais vous dire, M. le ministre, que ma conviction est que les Québécois sont prêts à consentir un effort pour s'assurer que nous rayonnons sur le plan international. Cet effort implique, par définition, que le Québec qui dépense à peu près 21 500 000 000 $ par année pour conserver sa différence ne devrait pas voir, quand le grand couperet du Trésor passe, sa présence internationale, élément fondamental de sa différence, être ainsi si brutalement affectée.

Les budgets de fonctionnement, en plus de celui des délégations, sont restreints. Si on exclut le poste budgétaire des loyers qui, lui, est en hausse prévisible de 9 %, les crédits sont, à toutes fins utiles, là aussi gelés. Il y a une baisse de 17 400 $, si je ne me trompe pas dans l'analyse qu'on a pu en faire, et ils n'ont pas augmenté de 1,9 % comme l'ensemble. Je ne trouve pas que c'est très fort, fort à l'étranger. Par ailleurs, le budget des communications a été à nouveau touché cette année comme l'an dernier. La baisse prévue de 8,1 % porte à 26 % la ponction subie depuis le 1er avril 1986 dans les budgets des communications des délégations à l'étranger. Pourtant, je pense que ça tombe un peu sous le sens commun que le budqet de communications, c'est extrêmement important pour une délégation, précisément parce qu'on n'est pas des ambassades, à l'exception de celle de Paris qui peut ressembler un peu à ça. II ne faut pas en avoir fait beaucoup de délégations du Québec pour se rendre compte que ce sont des organisations extrêmement modestes comparativement aux installations du gouvernement souverain du Canada et que, ma foi!, il faut être créateur, il faut être ingénieux et il faut être habile. Il faut cibler ses objectifs. Moi, j'ai vu des gens faire des miracles d'imagination à l'étranger parce que, en général, nos gens à l'étranger ne se prennent pas pour des ambassadeurs. Heureusement, d'ailleurs, parce qu'on n'a pas les moyens. Cela viendra peut-être un jour. Mais ils sentent le besoin de cibler et un des moyens qu'ils ont pour compenser le peu de ressources que nous avons et même, dans un contexte idéal, que nous aurions, ils ont besoin d'un budget de communications et je trouve que ce n'est pas très fort, ce qui leur est laissé.

Quant à la délégation de Paris, je comprends que le délégué général est pas mal occupé de ce temps-ci. Le délégué général est vice-président du comité des sherpas, il est vice-président du secrétariat et il s'occupe du multilatéral qu'il est allé récupérer en plus du poste de délégué du Québec et il faut que, de temps en temps, il vienne voir le ministre à Québec. Au point d'ailleurs où, malheureusement, il n'était pas présent ni représenté à l'Association internationale des parlementaires de lanque française le 4 mai à Paris. Il était probablement en préparation de sa présence au Québec au moment de la réunion des délégués qui se tient annuellement. C'est vrai que nos délégués manquent des choses, mais l'Association internationale des parlementaires de langue française, le 4 mai à Paris, c'était le groupe ad hoc de suivi du Sommet de Paris. Il n'y avait personne du Québec qui était là. Peut-être qu'on aurait pu... Je ne sais pas si c'était pour des raisons financières, j'espère que non, mais si c'était pour des raisons financières, j'aurais une suggestion à faire au ministre. Il pourrait peut-être fermer la Lettre du Québec dont le professionnalisme est pour le moins douteux et passer cela à du personnel temporaire qui s'occuperait de représenter les gens dans les événements importants. (21 h 15)

L'Office franco-québécois pour la jeunesse, je trouve que ça commence à ressembler à une mort lente ou, en tout cas, il va y avoir quelqu'un qui va être en cyanose par asphyxie, tout à l'heure. 200 000 $ de coupures deux années de suite sur un budget d'à peu près 1 500 000 $, cela commence à faire pas mal de coupures, alors que, pourtant, les quatre années précédentes, il n'y avait eu qu'une baisse moyenne de 1 % par année, alors qu'ici, on voit une chute de 11 % par année, depuis deux ans. J'aimerais que, dans sa réaction, le ministre nous dise, notamment dans le cas de l'Office franco-québécois pour la jeunesse, s'il reste un avenir là. Je comprends qu'il se sente obligé d'être inventif, son collègue du Trésor avait dit que le sommet coûterait 6 500 000 $ et on voit 8 500 000 $, évidemment, il ne fera pas de cadeau à d'autres domaines. On sait comment cela marche entre le Trésor et les ministères. Probablement que le ministre doit tenter de se rabattre sur les organismes non gouvernementaux, comme l'Association France-Québec, qui, en soi, n'est pas une piste à négliger pour ce genre de choses, mais, à ma connaissance, l'Association France-Québec demandera alors, à son gouvernement respectif, d'obtenir peut-être une espèce

d'engagement, de soutien moral, matériel et peut-être même financier, puisque, de plus en plus, on va lui envoyer ce qui ne sera pas fait par l'Office, dans lequel on coupe. Il reste à peine 750 000 $ à l'Office pour organiser tout, mais tout. Je me souviens d'une époque où, à l'Office, il y avait des avions remplis qui partaient de Mirabel, enfin, non pas de Mirabel, à l'époque c'était de Dorval - cela vous donne une idée de mon âge - et en général ces gens partaient de bonne humeur, ils allaient découvrir des choses et ils revenaient. Il y avait des Français qui faisaient la même chose. Disons que là, j'ai l'impression qu'il ne restera pas grand monde avec ce qui va rester du budget, au rythme où cela va. Si on veut mettre fin à l'Office franco-québécois pour la jeunesse, qu'on le dise aussi, qu'on dise quelles sont les orientations. Qu'on dise: Oui, bon, on va réduire cela de moitié; mais qu'on le dise. Cela doit être invivable pour les gens dans ces boîtes. Voilà pour l'Office franco-québécois. J'avais dit au ministre que ce ne serait pas nécessairement agréable tout ce que j'avais à lui dire. Il ne s'attendait pas à cela, je te sais.

Je ne sais pas si le ministre veut réagir à un certain nombre de choses. Ensuite, j'aurais une série de questions très précises, dans lesquelles je vais essayer de m'abstenir de mes commentaires éditoriaux.

M. Gil Rémillard (réplique)

M. Rémillard: Merci, M. le Président. Il y a plusieurs choses dans les remarques du chef de l'Opposition. J'essaierai d'y répondre et, s'il considère que je ne réponds pas à toutes ses questions, il n'a qu'à me poser d'autres questions complémentaires.

J'aimerais tout d'abord aborder la question du budget du ministère qui, cette année, est un budget global de 66 466 200 $. C'est un budget qui est en augmentation de 19,6 % par rapport à l'an dernier. Il y a bien sûr, dans ce budget, une somme de 6 800 000 $ qui nous est donnée pour l'organisation du deuxième Sommet de la francophonie qui aura lieu à Québec. C'est là une activité majeure du ministère. Cela s'inscrit dans la volonté du gouvernement d'accentuer ses relations internationales pour promouvoir le caractère distinct du Québec, tant sur le plan culturel que sur le plan économique. C'est dans ce contexte que je suis particulièrement heureux, comme ministre, de pouvoir présenter pour la prochaine année un budget en augmentation de 19 600 000 $ et qui nous permet de voir des possibilités d'évolution beaucoup plus intéressantes, parce que nous avons procédé à une rationalisation de notre administration, tant en ce qui concerne le ministère lui-même que nos représentations à l'étranger.

Il y a aussi, dans ce budget, une somme de près de 2 000 000 % qui est comparée à l'administration de programmes que nous faisons avec l'ACDI, pour certains pays, tel que l'a souligné le chef de l'Opposition. Maintenant, je voudrais souligner cette collaboration de plus en plus étroite que nous avons avec l'ACDI, cet orqanisme de coopération de développement international du gouvernement fédéral. C'est un organisme qui, comme vous le savez, dispose d'un budqet extrêmement important, 2 300 000 000 $. Le gouvernement fédéral consacre, chaque année, 2 300 000 000 $ pour ses efforts de coopération et de développement sur la scène internationale. De cette somme, il doit revenir une part proportionnelle au Québec, aux Québécoises et Québécois qui veulent oeuvrer sur la scène internationale, qui veulent participer à des activités internationales. C'est dans ce contexte que nous avons développé nos relations avec l'administration de l'ACDI par une étroite collaboration avec la ministre des Relations extérieures, Mme Landry, ce qui nous permet d'avoir une participation plus étroite et d'aboutir à des résultats, comme ceux que nous avons cette année, qui totalisent 2 000 000 $ - et c'est un début -et qui nous permettent de travailler à l'administration de certains programmes de l'ACDI et du gouvernement du Québec pour le mieux-être de ces pays et, aussi, pour la bonne participation des Québécois sur la scène internationale.

Il y a une somme supplémentaire de 1 700 000 $ pour le réseau de représentation à l'étranger. Donc, cette année, le ministère des Relations internationales a 1 700 000 % de plus, strictement pour son réseau à l'étranqer. Voilà un apport tout à fait neuf. D'où vient cette somme de 1 700 000 $? Elle provient des 8 500 000 $ que nous avons pour le Sommet de la francophonie et dont nous prenons, pour le sommet seulement 6 800 000 $. Ce qui veut dire qu'il nous reste 1 700 000 $ que nous allons affecter au réseau de représentations à l'étranger. C'est donc dire que c'est une amélioration très importante.

Après avoir effectué une rationalisation, l'an dernier, dans nos délégations, dans nos représentations à l'étranger, nous sommes maintenant en mesure, avec cette somme de 1 700 000 $, de passer à une phase de développement, un développement en fonction des besoins, des objectifs que nous avons. Quand je parle de rationalisation de notre réseau de délégations et de représentations à l'étranger, je veux dire que, dans la précédente année, nous avons procédé, notamment, à la fermeture de la délégation de Dallas. Nous avons transformé la délégation de Lafayette en bureau pour l'encadrement du programme de coopération et d'éducation avec la Louisiane. Nous avons

transformé les délégations de Caracas et de Düsseldorf en bureaux économiques, parce qu'il s'agissait de délégations qui n'avaient plus la vocation qu'on leur avait attribuée lors de leur création. Dans le cas, par exemple, de Caracas, on avait créé cette délégation, il y a quelques années, parce que l'Amérique latine, à ce moment-là, en particulier, le Venezuela et le Mexique, connaissait un essor économique extrêmement intéressant, à la suite de la crise du pétrole. Comme producteurs de pétrole, ces pays avaient un rôle important à jouer. On sait à quel point le Québec considérait comme importante cette relation avec le Venezuela, qui était un de ses fournisseurs en pétrole. Mais le contexte économique évoluant, nous nous sommes adaptés à la situation économique mondiale et nous avons fait de ces délégations, de Caracas et de Düsseldorf, des bureaux économiques et non pas des délégations.

Nous avons aussi transformé la délégation de Port-au-Prince en bureau d'immigration. Nous avons aboli le poste de délégué aux affaires multilatérales et francophones à la délégation générale de Paris. Ce sont des fonctions maintenant assumées par le délégué général à Paris. Peu de personnes savent qu'il y avait deux délégués à Paris, le délégué général et un délégué multilatéral. Cela venait de quelques difficultés administratives. On avait nommé quelqu'un à une autre délégation. Finalement, on avait décidé de nommer une autre personne à cette délégation. On ne voulait pas déplaire à cette première personne qu'on avait nommée et qu'on devait destituer. Finalement, on lui avait créé un poste à Paris, lequel était occupé par un diplomate de grande compétence, M. Roquet, qui faisait un très bon travail à Paris, mais qui fait maintenant un excellent travail comme délégué général à Bruxelles.

Le délégué général à Paris occupe les deux fonctions. Il le fait d'ailleurs très bien, avec un personnel très compétent, puisque les adjoints de M. Roquet peuvent maintenant travailler en étroite collaboration avec le délégué général à Paris, et les résultats sont là pour nous le démontrer. Nous avons maintenant, à Paris, une équipe qui travaille fort bien et qui est concentrée en fonction d'une relation bilatérale avec la France, mais aussi d'une relation multilatérale. La preuve de cette relation multilatérale est certainement le Sommet de la francophonie qui aura lieu ici, à Québec, les 2, 3 et 4 septembre prochain.

Nous avons ainsi rationalisé des effectifs dans plusieurs délégations, de même que nous avons aussi développé nos relations avec les autres ministères qui ont une présence internationale. Je pense, en tout premier lieu, au ministère du Commerce extérieur. Nous avons un comité de coordination formé de représentants des deux ministères qui nous permet de nous rencontrer régulièrement et d'élaborer des politiques communes et qui permet au ministère des Relations internationales de jouer son rôle d'animateur des politiques du Québec en matière internationale.

Nous avons aussi des relations très suivies avec le ministère de l'Immigration qui joue un rôle important sur la scène internationale et qui jouera un rôle d'autant plus important que nous avons maintenant cette entente constitutionnelle qui donne au Québec encore d'autres possibilités, des possibilités très importantes en matière internationale, dans le cadre de la fédération canadienne, en respectant le principe que le Canada est responsable des critères d'admission au pays, mais qu'à l'intérieur de ces critères d'admission, le Québec peut avoir sa compétence en matière de sélection.

C'est donc dans ce cadre que nous devons maintenant situer les relations internationales du Québec, un cadre qui nous permet d'envisager l'avenir de nos relations avec beaucoup de possibilités parce que, au ministère, nous avons assaini nos finances, nous avons rationalisé nos effectifs et nous avons concentré nos efforts en fonction d'objectifs bien déterminés, en concertation avec les autres ministères qui ont une présence internationale. Notre responsabilité, au ministère des Relations internationales, est une responsabilité de coordination, de planification et d'animation. Nous sommes de plus en plus à même de faire cette concertation, cette animation et de faire en sorte que la politique du Québec, sur la scène internationale, soit concertée et soit la plus efficace possible. (21 h 30)

En ce qui regarde aussi l'Office franco-québécois, je dois dire tout d'abord que, l'an dernier, son budget n'a pas été diminué. L'an dernier, il a même eu un surplus de 370 000 $. D'autre part, lorsque j'ai assisté pour la première fois à une réunion du conseil d'administration de l'Office franco-québécois, j'ai demandé - et la partie française gouvernementale l'a demandé aussi - que l'office puisse faire un effort pour rationaliser son administration. II y avait plus de 40 % de frais d'administration dans son budqet, ce que nous considérions comme beaucoup. Il y avait, par exemple, en moyenne, deux accompagnateurs par mission. Maintenant, c'est un accompagnateur. Pour certaines missions, on n'a pas besoin d'accompagnateur. Il y a aussi les frais qu'on impose aux stagiaires. Ces frais étaient de... Un petit instant, je vais vous donner ces chiffres.

Une voix: En moyenne, les contributions financières sont passées à 321 $ cette année, alors qu'elles étaient en moyenne...

Le Président (M. Filion): Est-ce que vous pourriez vous identifier pour le Journal des débats?

M. Moretti (Pierre): Je suis Pierre Moretti, directeur administratif à l'office.

Le Président (M. Filion): Merci.

M. Moretti: Donc, la contribution moyenne des stagiaires de l'Office franco-québécois est passée de 435 $, en 1986, à 312 $, en 1987. Je dois préciser cependant qu'il y a eu une réduction parallèle des prestations qui étaient offertes à ces stagiaires à peu près du même ordre. Donc, c'est plus pour des raisons de marketing et de compétitivité avec d'autres organismes que nous avons adapté les contributions financières.

Période de questions

L'Office franco-québécois pour la jeunesse

M. Johnson (Anjou): Le budget... J'essaie juste de comprendre, M. le ministre ou M. Moretti. Ce que je lis dans le livre que vous nous avez envoyé, c'est une réduction de 200 000 $ cette année. Est-ce qu'il y a une réduction de 200 000 $ ou s'il n'y en a pas? C'est peut-être parce qu'on lit mal, mais moi je lis, à l'élément 2, aux crédits à voter du programme concernant l'OFQJ, pour 1987-1988, 1 510 000 $ alors qu'en 1986-1987, c'était 1 710 000 $. Ensuite, c'est indiqué 200 entre parenthèses, cela veut dire déficit et c'est indiqué 11,7 % entre parenthèses, cela veut dire réduction. Alors, moi, je regrette, mais je ne vois pas d'augmentation là.

M. Rémillard: Voici, c'est que l'an dernier, comme je le mentionnais tout à l'heure, il y a eu un surplus de 329 000 $. Nous considérons...

M. Johnson (Anjou): Je vous vois venir, c'est correct.

M. Rémillard: ...que, pour cette année, nous voulons qu'il y ait d'autres mesures de rationalisation des dépenses et je crois qu'il y a un travail très sérieux qui est fait, je dois le saluer, c'est un travail bien fait, pour rationaliser l'administration et c'est fait tant du côté français que du côté québécois, ce qui fait qu'une diminution de 200 000 $ ne devrait pas affecter le rendement ni le nombre de stagiaires qui, normalement, utilisent les services de l'agence. Nous considérons qu'avec 200 000 $ de moins, il n'y aurait pas vraiment de diminution dans les services offerts.

M. Johnson (Anjou): Le nombre de stagiaires, par exemple, est-il resté sensiblement le même? II y a eu une évolution du nombre de stagiaires, disons, depuis deux ou trois ans.

M. Rémillard: On m'informe qu'ils ont abaissé leurs frais d'administration de 40 % à 20 %. C'est pour cela que je salue leur travail. Lorsque nous sommes arrivés, cela a été ma première demande: Écoutez, 40 % de frais d'administration, cela n'a pas de bon sens. Alors, ils sont arrivés à 20 %...

M. Johnson (Anjou): Au chapitre du nombre de stagiaires, maintenant?

M. Rémillard: Le nombre de stagiaires est à déterminer en fonction du qenre de missions qu'ils vont établir. Là encore, cela dépend des genres de mission que l'office devrait avoir et ce n'est pas encore fixé, ce n'est pas encore déterminé.

M. Johnson (Anjou): Combien y en a-t-il eu l'an dernier, par rapport à l'année précédente?

M. Rémillard: On va vous donner ces chiffres. En 1985, il y a eu 224 projets réalisés. En 1986, il y en a eu 323. Cela ne les a pas trop affectés.

M. Johnson (Anjou): Mais le nombre de stagiaires?

M. Rémillard: En 1985, il y avait 1403 stagiaires et, en 1986, 1137.

M. Johnson (Anjou): Donc, il y a eu plus de projets, mais moins de stagiaires.

M. Rémillard: Plus de projets et moins de stagiaires.

M. Johnson (Anjou): Voilà. Comme vous voyez, je ne veux pas y aller de façon simpliste.

M. Rémillard: Et il n'y a pas eu de coupures, en 1986. Je vais laisser le sous-ministre, si vous voulez, vous expliquer.

M. Johnson (Anjou): Oui, M. Bergeron.

Le Président (M. Filion): Pour le Journal des débats, monsieur, votre prénom.

M. Bergeron (Marcel): Marcel Bergeron.

Le Président (M. Filion): Marcel Bergeron.

M. Bergeron: En 1986, les budgets de l'office étaient de 1 710 000 $, c'est-à-dire la contribution du gouvernement. C'est en

1987 que la contribution du ministère a été réduite à 1 510 000 $. Ces chiffres dont on parle, 323 et 1137, ce dernier indiquant une diminution du nombre de stagiaires, n'ont pas été influencés par le fait que le ministère a versé moins, puisqu'il a versé la même contribution.

M. Johnson (Anjou): Oui, je comprends. J'avais compris cela. Merci, M. Bergeron. Pourtant, est-ce que cela n'était pas passé, de 1985 à 1986, de 1 910 000 $ à 1 710 000 $?

M. Bergeron: Oui.

M. Johnson (Anjou): J'ai le cahier de l'an dernier. Oui?

M. Bergeron: Très bien. De 1985 à 1986, il y a eu, de fait, une diminution, soit 1 910 000 $, en 1985, à 1 710 000 $, en 1986.

M. Johnson (Anjou): D'accord.

M. Bergeron: Je croyais que vous mentionniez qu'il y avait eu 200 000 $ de moins, c'est-à-dire un autre 1 510 000 $ l'an passé et non 1 000 000 $.

M. Johnson (Anjou): Non. M. Bergeron: C'est bien.

M. Johnson (Anjou): Je parlais pour l'année dont on étudie les crédits.

M. Bergeron: Cela va.

M. Johnson (Anjou): Alors que les années précédentes, il n'y avait pas eu de réduction, enfin des réductions de l'ordre de 1 % plutôt que de l'ordre de 10 % ou 11 %.

M. Bergeron: Environ.

M. Rémillard: II y a aussi les frais d'administration qui sont passés de 40 % à 20 %, à la suite de notre demande.

M. Johnson (Anjou): Oui, j'ai compris cela, M. le ministre.

M. Rémillard: Si vous mettez tout cela ensemble, vous vous apercevez que ces gens font un effort considérable, il faut le remarquer et souligner leur travail, pour rationaliser.

M. Johnson (Anjou): M. le ministre, je veux seulement vous rassurer à ce sujet. Je ne suis pas ici pour décerner des médailles; vous non plus, probablement. Vous le saviez, d'ailleurs, que je n'aurais pas tendance à vous en décerner beaucoup, compte tenu des positions relatives qu'on occupe ici, autour de la table. Ne vous en faites pas, un jour, cela vous arrivera aussi. Mais j'essaie de cerner la réalité. C'est cela qui m'intéresse, les contenus.

Les délégations

Je voudrais continuer, cette fois-ci, sur les budqets des délégations. Vous nous avez expliqué tout à l'heure, parce qu'on a fait l'addition des différents postes, qu'on arrive à 8 500 000 $ pour le sommet. J'avais entendu M. Gobeil, le président du Conseil du trésor, expliquer que ce serait 6 500 000 $ ou à peu près. J'en ai donc conclu que 2 000 000 $ de plus étaient affectés au sommet. Vous nous avez expliqué tout à l'heure qu'à l'intérieur du budqet du sommet francophone, à l'intérieur de ce qu'on vous alloue comme enveloppe dans les crédits, au poste des traitements, au poste du fonctionnement et au poste des transferts, ce sera bel et bien 6 800 000 % et non pas 8 500 000 $. Comme on va vous budgétiser 8 500 000 $, vous allez prendre 1 700 000 $ et vous allez l'affecter aux délégations. Félicitations pour votre beau programme. Je suis sûr que les qens des délégations sont heureux de cela. Maintenant, ce ne sont pas les crédits qu'on va adopter.

Deuxièmement, M. le ministre, je me permets de vous dire qu'on est heureux de l'apprendre. C'est une grosse nouvelle, ce soir, que vous nous annoncez, qu'il n'y a pas 8 500 000 $ pour le sommet. Il y a 6 800 000 $ pour le sommet et 1 700 000 $ pour tes délégations. J'espère que les délégations vont applaudir. Les directeurs de section, derrière vous, doivent être heureux de l'apprendre, à moins qu'ils ne le sachent déjà. M. le ministre, deux remarques. Premièrement, ce n'est pas cela qui est budgétisé ici et cela me préoccupe un peu. Deuxièmement, vous faites comme de la péremption de crédits par anticipation, n'est-ce pas? Évidemment, je n'ai jamais connu un événement comme celui du sommet, mais je peux vous dire que seulement pour l'Expo '67, c'était il y a 20 ans, on avait reçu quelques chefs de gouvernement ici. Je travaillais un peu dans ces affaires-là, à l'époque, avec des gens que vous connaissez. Je vais vous dire qu'on n'a pas périmé bien des crédits. Quand les gens vont arriver, vous allez vous rendre compte que vous aviez essayé de tout prévoir mais que c'est impossible, M. Ricard. Vous aurez prévu le maximum, mais vous verrez qu'il y a comme des facteurs impondérables. Vous allez être obligé de louer un avion pour quelqu'un, il va vous arriver des tuiles incroyables. J'espère que vous vous y attendez. Quarante chefs d'État ou de gouvernement dans la ville de Québec, c'est un gros contrat. Je suis sûr que les gens du

ministère peuvent le relever et je leur fais confiance, mais je vous dis que, d'après moi, le coussin de 1 700 000 $, il se pourrait qu'il passe dans le sommet. Si j'étais des délégations, je ne compterais pas sur lui cette semaine. Néanmoins, je vous le souhaite.

Voilà pour les délégations. Je présume que le montant de 1 700 000 $, M. le ministre, sera utilisé pour l'ouverture des délégations è Dakar, Abidjan et à Tunis, comme votre collègue l'avait déclaré lors d'un voyage, évidemment, en disant dans un communiqué, quelques jours après, que cela relevait de vous, comme d'ailleurs la nomination des attachés culturels. Alors, c'est cela. Est-ce que ce montant sera surtout utilisé pour l'Afrique?

M. Rémillard: Je peux vous dire cela, si vous voulez.

M. Johnson (Anjou): Oui. Ah! bien, avec plaisir.

M. Rémillard: Oui. Alors, écoutez, vous avez raison de dire que c'est une grande nouvelle. Je suis content que vous le souligniez. De fait, il y a eu une enveloppe, qui nous a été donnée par le Conseil du trésor, de 8 500 000 $. Nous avons un budget pour le sommet, comprenant notre participation comme gouvernement du Québec, seul, notre participation conjointe avec le gouvernement fédéral et aussi les événements associés ou périphériques que nous avons organisés de 6 800 000 $. C'est donc dire qu'il reste 1 700 000 $. Nous allons utiliser ces 1 700 000 $ pour l'amélioration de notre réseau à l'étranger. Est-ce que cela veut dire de nouvelles délégations, de nouveaux bureaux, de nouveaux représentants? II est certain que nous étudions de plus en plus la possibilité d'avoir des représentants en Afrique, un ou des représentants. Est-ce que ce sera des délégations? Est-ce que ce sera des bureaux? C'est encore à l'étude. Est-ce que ce sera situé dans un pays d'Afrique du Nord, dans un pays subsaharien? Où cela sera-t-il situé? C'est encore à l'étude. Mais nous aurons une présence en Afrique. Nous avons déjà une présence en Afrique, a Abidjan, comme vous le savez, mais notre représentant a strictement pour fonction de s'occuper des aspects culturel et de l'éducation. Pour ce qui est de l'aspect économique, il peut s'en occuper quelque peu, mais il n'en a quand même pas le mandat d'une façon très explicite.

Alors, ce que je peux vous dire c'est que nous étudions très attentivement la possibilité d'avoir une ou des présences québécoises en Afrique. Notre prise de décision à ce sujet devrait pouvoir se concrétiser dans un avenir quand même relativement prochain. Mais une chose est certaine, c'est que, l'an prochain, le ministère des Relations internationales pourra affecter 1 700 000 $ à l'amélioration de son réseau à l'étranger. À la suite de la rationalisation que nous avons faite, cela peut vouloir dire beaucoup pour l'amélioration de nos services à l'étranqer.

M. Johnson (Anjou): Merci, M. le ministre. Je dois vous dire que c'est là une bonne nouvelle, à condition que vous ayez les 1 700 000 $.

En ce qui concerne la suppression de la Direction générale des affaires multilatérales au ministère. J'essaie de voir la cohérence d'une telle décision. Evidemment, je vais vous dire que cela s'inscrit carrément dans la foulée de l'abolition du délégué aux affaires multilatérales à Paris. Ron, la cohérence, ce devrait être d'abolir la direction générale après. Mais, là, il y a un sommet qui va se tenir et qui est du multilatéral, merci. Le suivi du sommet, d'après moi, il devra être comme un peu "multibilatéralisé" sur les bords. J'essaie de voir comment cela va se faire au ministère après. Allez-vous recréer la direction du multilatéral? (21 h 45)

M. Rémillard: C'est à étudier. II s'agissait de fractionner cette direction générale pour pouvoir concentrer nos efforts en fonction du Sommet de la francophonie, comme vous venez de le mentionner, sous la direction du sous-ministre adjoint, M. Ricard, M. Barrette s'occupe du multilatéral dans une direction. Quant à savoir si on pourrait revenir ensuite à une direction générale qui pourrait reprendre les deux activités, c'est une possibilité. Mais nous sommes à réorganiser, à voir le fonctionnement du ministère et il est probable que, dans la prochaine année, nous puissions retoucher certains aspects de l'organisation du ministère pour le rendre encore plus effectif en fonction de nos objectifs et de nos priorités.

Le Sommet de la francophonie

M. Johnson (Anjou): Bon. Je pense qu'on va entrer un peu dans le sommet, maintenant. Restera la question belge à soulever. Le sommet, évidemment, c'est beaucoup de choses. Je pense que le ministre est conscient que l'objet de l'exercice, aujourd'hui, est de nature un peu technique, qu'il a de nombreuses plates-formes ou occasions qu'il ne saurait manquer, je n'en doute pas, pour nous parler de sa philosophie de la continuité dans l'évolution. Mes questions vont être effectivement de nature un peu technique et j'espère que les réponses du ministre le seront aussi.

À propos de la place accordée aux

francophones hors Québec lors du sommet, avez-vous pris officiellement position et quelle est cette position, si c'est le cas? On sait que les Acadiens réclament une place au sommet au lieu et à la place du premier ministre du Nouveau-Brunswick. Au moins, eux, ils parlent français. On sait, par ailleurs, que le président de la République française, il va de soi, a dit récemment des choses très importantes à ce sujet. Il a laissé entendre, selon ce que j'ai vu en tout cas au bulletin de nouvelles, qu'il ferait une espèce d'intervention pour permettre une place aux francophones hors Québec, lors du sommet, Pourrait-on avoir les précisions du ministre là-dessus? Avez-vous une position? Est-elle celle du président de la République française?

M. Rémillard: Oui. M. le Président, je dois tout d'abord dire qu'il s'agit d'une question qui ne relève pas seulement de la juridiction du Québec, mais aussi de la juridiction de tous les pays et de tous les gouvernements présents au Sommet de Québec, c'est-à-dire qu'il faut que tous les pays, tous les gouvernements membres de ce sommet donnent leur consentement à ce qu'il y ait de nouveaux membres ou peut-être aussi de nouveaux groupes qui auraient un statut particulier, que ce soit observateur, associé, enfin, on peut penser à différentes formules.

C'est donc sous cette réserve que je ferai les commentaires suivants. Nous sommes très sensibles à la demande des Franco-Canadiens, ou des francophones hors Québec, comme aussi nous sommes très sensibles à la demande des Franco-Américains parce que plusieurs Américains de souche francophone, une très grande partie québécoise, nous ont aussi demandé à participer d'une façon ou d'une autre, sous différentes modalités, au Sommet de Québec. Vous avez raison de souligner l'intervention du président de la République française, M. François Mitterrand, qui, lors de sa dernière visite, qui a été un succès d'ailleurs, a dit aux francophones hors Québec, de ta Saskatchewan, je crois, qu'il souhaitait qu'ils puissent être présents d'une certaine façon au Sommet de Québec.

C'est une question que nous voulons étudier avec les autres pays et les gouvernements membres du sommet. Donc, elle sera discutée au niveau des sherpas, comme nous les appelons. Pour notre part, nous aimerions que ces francophones hors Québec puissent être, au moins présents à l'ouverture et à la clôture. Quant aux séances de travail elles-mêmes, ce sont des séances à huis clos, ce qui rend plus difficile la présence de ces francophones hors Québec ou de ces francophones nord-américains. Je veux dire au chef de l'Opposition que nous sommes très sensibles à cette demande et que nous espérons que les autres chefs d'État et de gouvernement accepteront qu'ils soient au moins présents et à l'ouverture et à la clôture. Il reste à déterminer les modalités de cette présence.

M. Johnson (Anjou): Cette présence, si on se comprend bien, étant à vos yeux une présence à titre d'observateur accrédité; par exemple comme les qens de l'AUPELF ou comme d'autres, les associations comme l'Alliance française, etc.

M. Rémillard: II s'agit, comme je viens de vous le mentionner, de déterminer une présence. Je n'ai pas la capacité, comme ministre des Relations internationales du Québec, de déterminer ce soir que ces francophones hors Québec auront telle place avec tel statut au sommet, mais nous voulons que cette question soit étudiée dès les prochaines réunions des sherpas. Maintenant, il faut comprendre aussi qu'il y a ces événements périphériques qui sont très liés au sommet. Il y en a d'ordre économique, il y en a aussi d'ordre même social, des réunions de syndiqués, mais il y en a beaucoup d'ordre culturel et, en particulier, le Regroupement des peuples francophones et le Conseil de vie française organisent des événements particuliers dans le cadre de ce deuxième Sommet de Québec qui va réunir, ici à Québec, des représentants des associations des francophones non seulement hors Québec, mais aussi nord-américains. II y a une présence nord-américaine de francophones aux États-Unis qui peut se chiffrer par quelque 25 000 000 ou 30 000 000 d'Américains qui ont une oriqine francophone, québécoise pour la majorité. Donc, il est intéressant de voir le regain de vie de ces francophones. Nous sommes très intéressés à ce qu'ils puissent participer à des événements qui se situeront dans le cadre du sommet de la francophonie.

M. Johnson (Anjou): Là, je veux me permettre d'être peut-être un peu technique. Peut-être que le ministre n'aime pas bien cela qu'on soit technique, c'est cela l'idée de l'étude des crédits. Quand j'interroge le ministre aux engagements financiers, comme il me renvoie aux crédits, j'espère qu'il va me donner la chance et le privilège d'une couple de réponses précises. Le ministre vient de nous parler, à toutes fins utiles, de quelque chose qui ressemble au Festival des francophones d'Amérique quand il dit que, dans ces événements périphériques au sommet, on pourra y voir une manifestation de la présence francophone nord-américaine. Je suis un peu au courant de cela ou, enfin, sûrement pas autant que le ministre, mais j'en ai entendu parler un peu et je trouve que c'est une bien bonne idée. Je présume

que le Secrétariat des peuples francophones aura quelque chose à y faire, etc. La question que je pose au ministre ce n'est pas cela. Alors que je lui pose une question sur la représentation au sommet des francophones hors Québec du Canada, là, il me parle des francophones de l'Amérique du Nord, qui, eux, vont avoir des événements culturels, des occasions de liens, etc. On est tous pour cela. Moi aussi, je vais y aller quand ils vont faire le festival ici, au pigeonnier, vous pouvez être sûr que je vais aller faire mon tour comme tout le monde. Ma question, ce n'est pas cela. En Amérique du Nord il y a, si l'on veut, trois sortes de francophones, si vous me passez l'expression. Il y a les Franco-Américains, il y a les Canadiens français, pour reprendre l'expression "meechienne" et aquatique récente, qui sont hors Québec, et il y a les Québécois francophones. Les Québécois francophones ont un État, enfin peut-être encore pour un certain temps. Les Canadiens français hors Québec, eux, ont quelques articles dans la constitution canadienne et, surtout, une histoire particulièrement lourde. Puis, les francophones des États-Unis, du Mississippi, du Maine, ou les gens de Saint-Pierre-et-Miquelon se retrouvent dans une situation, sur le plan de leur statut politique, qui n'a rien à voir ni avec le Québec ni avec le Canada.

L'objet de ma demande, à ma connaissance, qui est dans le décor porte sur les francophones hors Québec du Canada qui demandent d'être présents au sommet. Je demande au ministre si le gouvernement du Québec a une position quant à la présence des francophones hors Québec du Canada. Je sais qu'ils ont une demande, je vous demande si vous avez une position. Je crois comprendre que vous me dites trouver cela intéressant, mais est-ce qu'il y a une position du gouvernement sur cette question? Je vais vous dire que vous risquez de l'avoir dans le visage, ce ne sera pas long. Je ne vois pas vraiment pourquoi ce serait seulement les sherpas à Paris qui régleraient cela parce que cela prendra quelqu'un pour amorcer le dossier quelque part. Je verrais mal que ce soit le Sénégal qui amorce ce dossier, je verrais possiblement le poids du gouvernement français jouer, sûrement, pour des raisons évidentes: Peut-on penser à la francophonie sans la présence de la France et son poids absolument déterminant? Peut-on penser vraiment à la francophonie canadienne sans qu'il y ait le Québec?

Qui reste-t-il? Il reste le gouvernement canadien et il reste le gouvernement du Québec qui, soit dit en passant, sont président et vice-président du comité technique et des sherpas. Est-ce que le gouvernement du Québec a donné un mandat à M. Roy sur cette question? C'est cela, ma question. C'est un peu technique, mais...

M. Rémillard: Je vais répéter qu'il s'agit d'un sommet de chefs d'État et de chefs de gouvernement ayant en commun l'usage de la langue française. Ce sont des chefs d'État ou des chefs de gouvernement, dans un premier temps. Cependant, nous sommes très sensibles à ce désir des francophones hors Québec d'être présents d'une façon ou d'une autre à ce deuxième Sommet de Québec. Nous disons au chef de l'Opposition que nous allons proposer, dans les prochaines réunions des sherpas, une demande pour qu'il y ait possibilité d'une présence de ces francophones hors Québec. Elle pourrait être à l'ouverture, à la clôture. En ce qui regarde les réunions des chefs d'État et de gouvernement, ce sont des réunions à huis clos, et ce sera certainement plus difficile.

J'insiste pour dire au chef de l'Opposition que c'est un forum privilégié pour des chefs d'État et de gouvernement. Ce ne sont pas des États généraux de la francophonie. Peut-être qu'il faudrait penser organiser des États généraux de la francophonie, je ne sais pas, mais, pour le moment, il s'agit du deuxième sommet de chefs d'État et de gouvernement. Dans ce contexte, le chef de l'Opposition conviendra aisément, même si c'est technique, qu'il faut prévoir, pour les francophones hors Québec, une situation qui soit compatible avec cette réalité, puisqu'il s'agit d'un forum, d'une conférence, d'un sommet de chefs d'État et de gouvernement. (22 heures)

M. Johnson (Anjou): Je comprends bien le ministre qui dit que, si les francophones hors Québec veulent être dans la salle avec l'AUPELF et l'Alliance française, on est prêt à envisager cela, mais il n'est pas question pour eux de participer, ils ne peuvent qu'être des observateurs accrédités.

M. Rémillard: Non, ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que nous, nous favorisons la présence des francophones hors Québec.

M. Johnson (Anjou): À titre de participants à un niveau au à un autre ou à titre d'observateurs accrédités?

M. Rémillard: Écoutez, ce n'est pas à nous de le décider. On verra ce qu'il est possible de faire dans le contexte...

M. Johnson (Anjou): Mais qu'est-ce que vous souhaitez comme... Ce que je demande, c'est: Est-ce que le gouvernement du Québec a une position sur la place des francophones hors Québec?

M. Rémillard: Non, écoutez, énervez-vous pas...

M. Johnson (Anjou): II me semble que c'est relativement clair. Je ne pense pas que ce soit... Je comprends que vous ayez une contrainte dans le sens que ce sont les sherpas et les représentants des différents gouvernements qui vont décider. Mais avez-vous une position de départ?

M. Rémillard: Oui, mais écoutez, énervez-vous pas pour rien.

M. Johnson (Anjou): Quelle est cette position de départ, M. le ministre? C'est cela que je vous demande.

M. Rémillard: D'accord, d'accord.

M. Johnson (Anjou): Je ne vous demande pas de me faire un sermon sur la montagne ou ailleurs quant au fait qu'il y a une différence entre des chefs d'État et des États généraux; j'ai une vague idée de ça, M. le ministre, même si je n'ai pas eu l'honneur de fréquenter vos cours à l'université. Je vous pose simplement une question claire. Si vous me dites que vous n'avez pas de réponse, je suis prêt à accepter, mais s'il vous plaît, est-ce que vous pourriez me dire que vous n'avez pas de réponse?

M. Rémillard: Oui, mais écoutez..

M. Johnson (Anjou): Est-ce que vous avez une position quant à la participation à titre d'observateurs accrédités ou ayant un autre statut pour les francophones hors Québec du Canada? Je pense qu'ils ont le goût de le savoir.

M. Rémillard: Je me demande pourquoi vous vous énervez comme ça. Ça va bien, je vous donne vos réponses, il n'y a pas de problème.

M. Johnson (Anjou): C'est parce que vous ne répondez pas. J'avoue que...

M. Rémillard: Restez calme, restez calme, vous allez voir, on va s'entendre, je vais vous donner cette réponse.

M. Johnson (Anjou): Non, c'est mot qui prescris les Valium ici, M. le ministre, juste au cas où vous n'en seriez pas sûr.

M. Rémillard: Bon, d'accord. Moi, je ne me suis jamais promené avec un sarrau blanc dans un hôpital, j'en conviens.

Je voudrais vous dire qu'il n'est pas possible d'accorder aux francophones hors Québec un statut de participant, parce que seuls les chefs d'État et de gouvernement peuvent y participer au départ. Serait-il possible de leur donner un statut d'observateurs à un titre ou à un autre, ce qui serait intéressant, mais qui doit être discuté devant les sherpas parce que nous avons ici des francophones hors Québec qui veulent être observateurs? II y a aussi des organismes multilatéraux qui veulent aussi être observateurs, il y a d'autres groupes qui sont en relation directe avec la francophonie qui veulent aussi être observateurs ou bénéficier d'une autre modalité de présence, il y a des associations comme l'Association France-Québec, par exemple, qui aimerait bien être présente. Il s'agit d'avoir une politique concertée et c'est une politique qui doit être établie par le comité international des sherpas. C'est dans ce contexte que je vous dis que la position du gouvernement du Québec est de favoriser une présence des francophones hors Québec au Sommet de Québec. Sous quelle forme? C'est à préciser.

M. Johnson (Anjou): Bon, alors je remercie le ministre. C'est déjà un peu plus précis que cela ne l'était il y a dix minutes, mais vous aurez remarqué que cela aura pris des intonations et des insistances particulières pour y arriver. Soit dit en passant, si le ministre se demande quelle est notre position, même si on n'a pas à en avoir parce qu'on n'est pas au qouvernernent, je vais vous dire que je trouve que les francophones hors Québec peuvent au mieux être des observateurs.

M. Rémillard: Bon, écoutez, je prends bonne note de ce commentaire du chef de l'Opposition que j'apprécie beaucoup. Je sais que lorsqu'il était au gouvernement, cela causait des problèmes, cette relation avec les francophones hors Québec. Je me souviens de certains discours qu'il a faits sur le tard, peut-être un peu, il en conviendra avec moi, mais qu'il a faits quand même avec un désir de bonne volonté. Dans le cadre de la nouvelle perspective de sa formation politique, perspective d'affirmation nationale, je suis heureux de constater qu'il y aura quand même de la place pour les francophones hors Québec. Je crois que c'est intéressant et j'en prends bonne note.

M. Johnson (Anjou): Le ministre ne pourra pas s'en tirer aussi simplement. L'université hors les murs...

M. Rémillard: Mais oui.

L'université internationale

M. Johnson (Anjou): D'abord, j'ai cherché les crédits, on a fait une petite recherche aussi au ministère de l'Éducation et il semble qu'il n'y ait pas d'argent au ministère de l'Éducation pour l'université hors les murs dont le ministre s'est fait le champion. Je voudrais savoir si...

M. Brassard: À la belle étoile.

M. Johnson (Anjou): Le député de Lac-Saint-Jean dit qu'elle risque non seulement d'être hors les murs, mais d'être à la belle étoile. On ne trouve pas beaucoup d'argent. Je pense que le ministre a déjà évoqué la notion de 10 000 bourses qui, semble-t-il, pourraient avoir un coût moyen de 75 000 $ à 100 000 $ chacune. Cela fait pas mal de délégations, ça. Est-ce que le ministre pourrait nous dire si cette proposition va émaner d'un des réseaux? Par exemple, le réseau d'information scientifique et technique qui, je pense, est présidé par M. Hasquin, de Belgique, si je me souviens bien. Où cela en est-il rendu? Est-ce que c'est à l'ordre du jour?

M. Rémillard: L'université internationale de la francophonie, université hors les murs, est à l'étape de projet. J'ai eu l'occasion de rencontrer M. Guillou, de l'AUPELF. J'ai eu l'occasion aussi de parler avec le vice-président de l'AUPELF, M. Jean-Guy Paquet, ex-recteur de l'Université Laval. Lorsque j'ai rencontré M. Guillou, à Paris, je lui ai dit que c'était un projet qui intéressait grandement le gouvernement québécois. Cependant, j'ai mentionné trois conditions. Tout d'abord, que l'AUPELF soit le maître d'oeuvre, si vous voulez, de cette université de la francophonie, c'est-à-dire que cette université soit une émanation, soit sous l'égide de l'AUPELF, qui a son siège social à Montréal; que le siège social demeure donc à Montréal, en fonction de l'AUPELF; qu'il y ait une participation importante dans l'élaboration du projet par les Québécois impliqués déjà dans l'AUPELF et qu'on soit impliqués directement au sein du conseil d'administration à un poste à déterminer. C'est donc dire que, pour nous, cette université doit se situer dans le cadre d'action de l'AUPELF, un organisme multilatéral de la francophonie des plus importants qui a son siège social à Montréal.

M. Johnson (Anjou): L'Association des universités partiellement ou entièrement de langue française, si je me souviens bien...

M. Rémillard: C'est cela.

M. Johnson (Anjou): ...dont le premier président et fondateur, je pense, a été M. André Bachand, si je me souviens bien, de l'Université de Montréal...

M. Rémillard: C'est cela, exactement. M. Johnson (Anjou): ...en 1967.

M. Rémillard: Qui travaille maintenant à Québécor, qui est toujours un monsieur très actif dans le domaine de la francophonie et qui a une grande expérience dans ce domaine. Il s'agit d'un projet qui pourrait être étudié dans la mesure où on peut s'entendre sur ses principes directeurs, au Sommet de Québec.

M. Johnson (Anjou): Ah oui?

M. Rémillard: Oui. C'est une possibilité très sérieuse. Nous en discutons actuellement avec le gouvernement canadien et avec le gouvernement français. Il reste maintenant à faire accepter le projet par l'ensemble des pays de la francophonie. Le but est de pouvoir créer un endroit, des possibilités pour les chercheurs de la francophonie de pouvoir se rassembler, d'organiser des séminaires, de faire des publications en utilisant la langue française. Le chef de l'Opposition sait très bien qu'il n'est pas facile pour un chercheur de publier en français. Il y a cette tentation de plus en plus forte de publier en lanque anglaise pour être lu. Et quand on a fait des recherches pendant des années et des années et qu'on veut publier les résultats de ces recherches, on est fortement tenté de publier en anglais et c'est bien dommage. Il faut donc revaloriser les publications scientifiques en langue française. Il faut revaloriser ces réunions, ces conférences, ces séminaires de chercheurs de langue française, il faut qu'on fasse en sorte qu'on puisse créer cet espace d'information scientifique, de recherche qui va permettre à des chercheurs d'échanger entre eux et de publier dans la langue française en sachant qu'ils seront lus. C'est un des buts de cette université.

M. Johnson (Anjou): M. le ministre, ma question avait juste pour but de savoir si vous aviez des crédits, mais, si je comprends bien, vous n'en avez pas. Ce que vous nous dites - et ce que je trouve intéressant, pour reprendre une de vos expressions favorites -c'est qu'il y a, à ce stade-ci, des possibilités que la question fasse l'objet de discussion au moment du Sommet de Québec.

M. Rémillard: Ce sera même discuté à la rencontre au Burundi que nous aurons au mois de juillet.

M. Johnson (Anjou): Au Burundi.

M. Rémillard: Oui pour la préparation du Sommet de Québec.

M. Johnson (Anjou): Voilà.

Puisque vous évoquez cette question des publications en langue française, parce qu'il y a bien des choses, l'université hors les murs, lieux de communication, d'échanges entre francophones, et là on peut décider, puisqu'on parle du premier, du deuxième et du troisième cycles, des chercheurs, est-ce que c'est une université ou si c'est un lieu

de convergence, de scientifiques ayant déjà des diplômes? On peut faire un projet absolument cosmique. Le problème, c'est que cela prend des crédits qui vont avec, plus des notions de réconciliation comme le concept de liberté académique, qui n'est pas nécessairement identique partout, etc. Il faut faire des choix, cibler dans les disciplines, etc., mais c'est absolument gigantesque comme projet, on se comprend bien. Le ministre, qui a été longtemps lui-même un universitaire, le sait sans doute mieux que moi.

Je me permets, tout en ne niant pas l'intérêt que représente pour un horizon sur quinze ou vingt ans un tel projet, de faire une suggestion au ministre sur le problème des publications. C'est clair, quand on regarde les statistiques du Québec - c'est sûrement vrai aussi pour une bonne partie des pays francophones - l'université d'où vient le ministre, l'Université de Sherbrooke, l'Université de Montréal, l'immense majorité des publications, surtout scientifiques, se fait en langue anglaise. Pourquoi? Parce que, dans le fond, plus il y en a plus il y en a. C'est une espèce de boule de neige. Deuxièmement, parce que les chercheurs sont à la recherche d'auditoires ou de lecteurs les plus nombreux possible, l'anglais s'étant affirmé comme la langue, entre guillemets, de communication scientifique sur le plan international depuis de nombreuses années.

On ne peut pas y faire grand-chose en soi à cela. On se comprend bien. Mais il y a un obstacle qui est de nature technique, et je ne prétends pas qu'il serait facile de le renverser, mais je me suis permis d'en entretenir le président de la République française, lors de son passage, il me semble qu'à court terme il y a là comme des moyens peut-être intéressants. (22 h 15)

On sait que beaucoup de revues scientifiques américaines ont la règle de ce qu'on appelle la première publication "Original contribution". Cela veut dire que le MIT Energy Review, le Harvard Biology Review ou le American Journal of Medicine ou le New England Journal of Medicine, dans certains secteurs - nommez-les, il y en a des centaines - ont une espèce de règle de base qui est la suivante: On ne peut être publié dans ces revues de réputation internationale, et à vaste lecture, que dans la mesure où l'article est publié pour la première fois. C'est ce qui fait que les gens de l'IREQ à Hydro-Québec, notamment, en pratique, publient surtout en anglais aux États-Unis. Ils ne peuvent même pas publier au Québec dans des revues qui, pourtant, les accueilleraient avec intérêt. Ce serait vrai aussi pour d'autres revues francophones.

Je me permets de suggérer au ministre de conserver en mémoire une certaine vision d'une université dont il faudra, faute d'avoir des murs, d'au moins en connaître un jour les délimitations. Est-ce qu'un projet intéressant sur le plan multilatéral pour le monde francophone ne serait pas le suivant, dans la mesure où le second sommet de la francophonie - qui, souhaitons-le, sera un succès - donnera lieu à un suivi et à un autre sommet par la suite... Il faudra une action multilatérale enqagée au niveau des chefs de gouvernement et des chefs d'État, par des personnes présentes tantôt à l'UNESCO, ou dans la plupart des organismes des Nations unies. Ne serait-il pas intéressant de voir comme projet collectif du monde francophone de faire graduellement des pressions, dans les années qui viennent, avec des pays non anglophones? Je pense à certains pays européens avec lesquels on pourrait faire une espèce d'alliance objective où chacun y trouverait son intérêt pour que, graduellement, on amène certaines revues américaines, par des pressions de toutes sortes dans la communauté scientifique, à accepter une exception à la notion d"'original contribution" qui pourrait être la suivante: Dans le MIT Energy Research Review, on pourrait accepter des articles sur les questions énergétiques qui viennent des pays francophones même si ces articles ont été publiés dans un certain nombre de revues antérieurement identifiées.

Je pense que les Hollandais, les Danois, les Suédois, les Finlandais et certains autres ont les mêmes problèmes. Dans certains cas, je dois vous dire, le problème est encore pire. Les articles sur les effets ioniques du transport d'énergie à haute tension en néerlandais, je dois vous dire qu'il ne doit pas y avoir des milliers de débauchés pour cela dans les revues scientifiques néerlandaises. Je me permets d'en faire la suggestion au ministre. Je trouve que ce serait un projet concret et intéressant. Les pays francophones et des pays non anglophones pourraient trouver là une occasion de concertation, de coopération et de travail de longue haleine dans une série d'organismes des Nations unies en faisant pression sur un certain nombre de pays, je pense particulièrement à la Grande-Bretagne et aux États-Unis qui, on le sait, accaparent une bonne partie du marché de ces revues scientifiques.

Peut-être que, pour les trois premières années, cela devrait cibler... je me permets de le dire puisque je connais l'intérêt du premier ministre pour les questions énergétiques. Puisqu'il présidera la deuxième partie du sommet, il pourra, peut-être, en faire son bébé ou enfin un de ses projets. Le premier créneau pourrait viser cet effort concerté du monde francophone pour obtenir une exception à la notion d"'original contribution". Ce pourrait être, par exemple, dans le secteur énergétique, c'est-à-dire pour les trois, quatre prochaines années vraiment

sur le plan multilatéral on travaille un peu partout pour obtenir une exception à la règle d'"original contribution" aux États-Unis dans le secteur de l'énergie.

Je pense que des projets concrets comme ceux-là qui ne font peut-être pas appel évidemment à des choses aussi vastes qu'une université hors les murs seraient sûrement, en tout cas à court terme, auraient peut-être plus de chance de donner des résultats concrets pour le monde de la recherche et surtout je pense que cela pourrait créer un intérêt commun entre le multilatéral francophone et d'autres pays, notamment des pays occidentaux dont la langue est peu utilisée en dehors de leur propre territoire. Je me permets de faire la suggestion au ministre comme ma contribution très modeste à sa réflexion sur le sommet francophone.

Ma dernière question portera sur l'Agence de coopération technique. On sait que le gouvernement canadien, particulièrement, l'ambassadeur du Canada à Paris, a manifesté son intérêt de voir la société devenir le Secrétariat permanent du sommet après le Sommet de Québec. Je voudrais simplement connaître la position du gouvernement du Québec, à ce sujet, si position, il y a?

M. Rémillard: M. le Président, je voudrais tout d'abord dire que je prends bonne note de la suggestion du chef de l'Opposition. Je veux lui dire que depuis déjà trois ans, le gouvernement contribue pour une somme de 30 000 $ par année, avec la France, à la revue Médecine-Science qui a été mise en place par le ministère des Relations internationales du Québec. C'est un succès. De plus en plus, cette revue s'impose dans le domaine scientifique et c'est particulièrement intéressant.

En ce qui regarde l'Agence de coopération culturelle et technique, la position du gouvernement du Québec est celle que j'ai énoncée, au tout début, dans mon énoncé. C'est-à-dire que nous voulons que l'agence devienne le maître-d'oeuvre administratif du sommet de la francophonie et des décisions prises par les chefs d'État et de gouvernement.

Il est clair qu'il faut conserver le comité de suivi formé des sherpas, mais il serait intéressant que, graduellement, en fonction de l'évolution de sa réorganisation administrative, l'Agence de coopération culturelle et technique puisse intégrer progressivement les cinq réseaux du sommet dans son organisation qui comprend aussi cinq directions générales, de sorte que l'on n'ait pas un dédoublement de l'action multilatérale de la francophonie.

Il est normal, maintenant que nous avons ces sommets de la francophonie, que nous aurons même un deuxième sommet ici à

Québec, que l'agence devienne un organisme administratif puisque, auparavant, l'agence était un organisme politique. Mais maintenant ce sont des chefs d'État et de gouvernement qui prennent les décisions politiques. L'agence doit donc devenir un véritable secrétariat administratif capable d'administrer pour faire en sorte que les décisions prises par les chefs d'État et de gouvernement puissent être appliquées avec un maximum d'efficacité. En tant que président du conseil d'administration de l'Agence de coopération culturelle et technique, je suis particulièrement intéressé à ce processus de redéfinition administrative de l'Agence de coopération culturelle et technique. Il ne s'agit pas de créer de nouvelles structures. Il s'agit d'utiliser la structure multilatérale que nous avons, qu'est l'agence dans la francophonie, et de faire en sorte qu'elle soit apte à devenir l'administrateur des décisions prises par les chefs d'État et de gouvernement, lors des sommets.

M. Johnson (Anjou): Si le ministre me permet, même si je sais qu'on a écoulé notre temps. Dans ce contexte, si le gouvernement canadien, par exemple, décidait de doubler sa contribution à l'ACCT, le ministre croit-il que le Québec devrait faire de même pour y conserver le poids relatif qu'il y a?

M. Rémillard: C'est le Québec qui a suggéré qu'on double les contributions à l'Agence de coopération culturelle et technique.

M. Johnson (Anjou): "On", s'appliquerait au Canada et au Québec ou, cela pourrait-il s'appliquer aussi à d'autres pays?

M. Rémillard: Cela pourrait s'appliquer à d'autres pays qui sont contributeurs. Nous avons été très heureux de voir que le gouvernement canadien semblait adopter finalement la même position. Je dois dire qu'il y a eu quelques hésitations, pendant un bout de temps, mais je suis content de voir qu'on a réussi à les persuader. Ce n'étaient pas tes visions du gouvernement fédéral pendant un certain temps. Maintenant, on réalise qu'ils sont convaincus qu'il ne faut pas créer un nouvel organisme multilatéral pour la francophonie mais bien faire en sorte que l'agence puisse être cet orqanisme multilatéral efficace. Dans ce cadre, la suggestion du Québec de doubler le budget de l'agence par sa contribution est une politique qui pourrait être acceptée aussi par d'autres intervenants.

Nous espérons que ça pourra se faire dans un avenir prochain. Comme président du conseil d'administration de l'agence, évidemment que c'est une question qui m'intéresse au plus haut point.

M. Johnson (Anjou): M. le ministre, je vous remercie de ces deux heures et quart que vous nous avez consacrées pour l'étude de vos crédits. Je vous prie d'être convaincu de notre souhait profond de voir le succès marquer le Sommet de Québec, un beau succès pour la francophonie et pour le Québec aussi.

M. Rémillard: Je vous remercie, M. le chef de l'Opposition. Vous me permettrez, avant de terminer, de remercier les gens qui m'accompagnaient, les sous-ministres et les gens de mon ministère qui sont ici, qui se sont dérangés ce soir, qui sont présents et qui font un travail tout à fait remarquable. Je crois que le Québec peut être fier de ces personnes, tant tes administrateurs que ceux qui représentent le Québec à l'étranger. Je tiens à les remercier pour leur excellent travail.

Le Président (M. Filion): Messieurs, est-ce que le programme 1, Affaires internationales, programme 2, Office franco-québécois pour la jeunesse, programme 3, Gestion interne et soutien du ministère des Relations internationales sont adoptés?

M. Johnson (Anjou): Adopté, adopté et adopté, M. le Président.

Le Président (M. Filion): Est-ce que l'ensemble des crédits du ministère des Relations internationales est adopté?

M. Johnson (Anjou): Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Filion): Nous avons également à l'ordre du jour, pour ce soir, le programme 4 du ministère du Conseil exécutif, à savoir le programme des affaires intergouvernementales canadiennes. Avec la permission des membres, nous allons, bien sûr, accorder un répit à nos invités. Donc, suspension de cinq minutes.

(Suspension de la séance à 22 h 25)

(Reprise à 22 h 38) Affaires intergouvemementales canadiennes

Le Président (M. Filion): Est-ce que vous avez des remarques préliminaires, M. le ministre, au sujet de ce programme qui concerne, on le sait, les Affaires intergouvernementales canadiennes ou si vous êtes prêt à entrer dans le vif du sujet avec M. le député de Lac-Saint-Jean?

Remarques préliminaires

M. Gil Rémillard M. Rémillard: J'ai un énoncé que j'aimerais lire, une présentation.

Vous me permettrez, dans un premier temps, de présenter les gens qui m'accompagnent. J'ai, à ma droite, Mme Diane Wilhelmy, sous-ministre, secrétaire générale associée pour les affaires canadiennes. M. Morin, qui est responsable du secrétariat aux affaires économiques. Â ma gauche, Mme Florence levers, de mon cabinet, directrice adjointe du cabinet, a la responsabilité des affaires canadiennes, et Mme Levasseur est en charge de l'administration du ministère.

M. le Président, il s'agit ce soir de défendre les crédits du Secrétariat aux Affaires intergouvernementales canadiennes. C'est pour moi, donc, un plaisir et un honneur de venir discuter avec vous de ce qui a été une année de travail intensif qui a porté des fruits très intéressants. Évidemment, nous pouvons penser au dossier constitutionnel et à cette entente que nous avons concrétisée après l'entente du lac Meech et concrétisée encore hier avec les autres premiers ministres du Canada. Je pense aussi à un ensemble d'autres questions qui constituent le quotidien d'un secrétariat dont le mandat est de promouvoir les intérêts du Québec au plan intergouvememental canadien et de coordonner l'action du gouvernement dans ce domaine.

Cette année, nous avons surtout dirigé notre action en fonction d'une nouvelle diplomatie québécoise; une diplomatie que nous qualifions de tranquille mais efficace. C'est dans le dossier constitutionnel que cette diplomatie s'est révélée particulièrement intéressante, avec les résultats que nous connaissons.

Nous avons aussi, pendant cette dernière année, enregistré des proqrès significatifs importants dans d'autres domaines importants comme nos négociations commerciales avec les États-Unis, dans le domaine des arrangements fiscaux, dans le domaine de la main-d'oeuvre, de la recherche scientifique, de l'immigration, des relations interprovinciales, dans le domaine de ta francophonie et bien sûr dans le domaine du dossier concernant les autochtones, le dossier constitutionnel des autochtones.

C'est sous le signe de l'affermissement de nos relations avec les gouvernements fédéral et provinciaux que nous avons placé nos priorités pendant cette dernière année. Il s'agissait de donner une nouvelle orientation à la diplomatie du Québec au Canada en fonction des priorités du gouvernement. Largement amorcée depuis un an et demi, cette attitude nouvelle a déjà rapporté d'abondants dividendes. Elle mérite d'être soutenue et développée dans tous les domaines de l'activité économique, sociale et culturelle.

Cette année, les activités

intergouvemementales du Québec ont été particulièrement intenses. Certes, le nombre de dossiers à incidence intergouvernementale s'est accru considérablement. Mais nous avons voulu également améliorer la qualité de nos relations. L'attitude manifestée par le présent gouvernement, l'esprit résolument positif et constructif dans lequel nous abordons nos rapports avec le gouvernement fédéral et ceux des autres provinces, nous a permis, en effet, de marquer des progrès sensibles dans plusieurs dossiers majeurs. Le dossier constitutionnel à cet égard a donné l'élan à la nouvelle diplomatie québécoise. Il a été l'occasion de refaire la toile de fond de nos relations intergouvernementales, de la revoir, de la redéfinir et d'en préciser les contours.

Nous avons établi clairement et dès le départ que, pour nous, l'avenir du Québec se situe à l'intérieur du Canada, à l'intérieur de la Fédération canadienne. C'est là la conviction profonde de la très grande majorité de la population du Québec comme c'est l'engagement fondamental de son gouvernement. Nous croyons au fédéralisme canadien parce qu'à l'intérieur du régime fédéral le Québec peut être fidèle à son histoire et à son identité particulière, tout en s'épanouissant pleinement au plan économique, social et culturel et en bénéficiant d'un marché commun. C'est pourquoi nous avons voulu reprendre les discussions constitutionnelles. Il n'était pas question cependant de quémander mais de reprendre notre place comme partenaire majeur de la fédération. Nous avons donc engagé des pourparlers dans ce cadre général.

Il est apparu, au fil des rencontres, que nos efforts assidus en vue de faire progresser les négociations constitutionnelles ont eu des répercussions positives dans l'ensemble des dossiers, non seulement dans celui du dossier constitutionnel en lui-même, avec l'aboutissement que nous avons connu hier dans ce dossier, mais aussi dans l'ensemble des dossiers que nous avons emmenés dans ces relations avec les autres provinces et le gouvernement fédéral. Les rapports avec les autres gouvernements se sont resserrés, des affinités se sont dessinées, des solidarités sont apparues. Nous avons pu explorer de nouveaux modes de collaboration, renouer des liens qui avaient été relâchés et renforcer ceux qui étaient déjà établis. Sans éclat, sans fracas, s'est instaurée une diplomatie québécoise tranquille et efficace. (22 h 45)

En tant que partenaire de la Fédération canadienne, le gouvernement du Québec doit, en effet, se préoccuper des priorités, des difficultés et des aspirations des autres régions du Canada. Il ne saurait autrement comprendre et évaluer avec pertinence les attitudes et les réactions des autres provinces à l'égard des grands enjeux de la société québécoise, en particulier à l'égard des revendications du Québec. Le Québec doit, par ailleurs, rappeler constamment à ses partenaires les caractères spécifiques de la société québécoise qui justifient le gouvernement du Québec d'adopter, à l'occasion, des positions différentes de celles du reste du Canada.

Ces objectifs, M. le Président, ne peuvent être atteints que par le maintien de relations constantes tant au niveau ministériel qu'à celui des fonctionnaires. Par la mise en place d'une banque d'informations de base sur chacune des régions du pays ainsi que par le suivi quotidien de l'actualité dans chacune des provinces, il devient ainsi plus facile d'amener nos interlocuteurs des autres provinces à s'ouvrir à nos points de vue et à nos prises de position lorsque ceux-ci sont à même de constater que nous nous soucions de tenir compte de leurs propres préoccupations. Sans rechercher pour autant les fronts communs, de telles relations permettent de discuter franchement, d'éliminer les malentendus et parfois d'ajuster des positions et d'en arriver à des consensus.

L'analyse des dimensions géopolitiques des problèmes canadiens nous a permis, d'une part, de mieux pressentir les réactions de nos partenaires à nos propositions et, d'autre part, d'être en mesure, à l'occasion, de proposer des compromis acceptables à toutes les parties. La diversité des intérêts sociaux, économiques, culturels et politiques au Canada rend, en effet, très difficile d'atteindre des consensus qui tiennent compte des priorités de chacun et de trouver des solutions simples et acceptables pour tous. Les discussions s'en trouvent cependant grandement facilitées lorsque le Québec se montre sensible aux préoccupations des autres.

Au-delà des améliorations qu'elle apporte au climat des échanges en général, notre vision des relations interqouverne-mentales a permis de réaliser des proqrès considérables dans certains dossiers multilatéraux. Dans le dossier des négociations commerciales avec les États-Unis, par exemple, un consensus a pu s'établir entre toutes les provinces. Sur les mécanismes de consultation et de coordination que le gouvernement fédéral devait mettre en place, cette solidarité entre les provinces ne peut intervenir qu'au terme de relations harmonieuses soigneusement mûries.

Pour l'entente du lac Meech, nous avons pu rallier l'accord des onze premiers ministres, ce qui, en soi, est un exploit sans précédent qui s'est confirmé hier de façon manifeste lorsque les onze premiers ministres ont ratifié cette entente. Je reviendrai plus loin sur cet événement historique qui

modifiera considérablement les rapports entre les partenaires de la Fédération canadienne pour le mieux, dans la mesure où nous pourrons miser sur la reconnaissance du rôle des provinces en fonction d'un fédéralisme fort et d'un gouvernement central capable de prendre les responsabilités qui s'imposent pour le bien-être de la fédération.

Évidemment, certains différends importants subsistent. Nous vivons dans une fédération et le nombre de partenaires entraîne forcément des tiraillements qui traduisent des intérêts ou des aspirations parfois contradictoires. Ces difficultés ne mettent cependant pas en cause les indéniables bénéfices du fédéralisme canadien et notre adhésion à ta Fédération canadienne.

Dans nos relations avec les gouvernements fédéral et provinciaux, il convient de souligner l'importance d'inscrire l'action de tous les ministères québécois à l'intérieur d'un cadre cohérent et bien intégré. Le rôle du Secrétariat aux Affaires intergouvernementales canadiennes à cet égard s'avère indispensable pour coordonner toutes les activités gouvernementales québécoises au Canada. Il est en effet le seul organisme à avoir une vision globale de nos relations avec les différents gouvernements. Le secrétariat est tout à la fois un acteur et un spectateur privilégié de la scène canadienne. Par ailleurs, tous les intervenants gouvernementaux peuvent ainsi contribuer aux objectifs d'ensemble du gouvernement du Québec en matière de relations intergouvernementales.

Le secrétariat est, au gouvernement du Québec, le spécialiste des affaires canadiennes, au même titre que le ministère des Relations internationales pour les affaires internationales. En se dotant d'un organisme spécifique, rattaché au ministère du Conseil exécutif, le gouvernement du Québec a voulu marquer l'importance qu'il accordait à ses relations avec le gouvernement fédéral et les gouvernements des provinces. Il a aussi voulu mieux servir ainsi les intérêts des divers organismes gouvernementaux québécois et, par conséquent, ceux du Québec.

Le réseau de quatre bureaux dont dispose le secrétariat à l'extérieur du Québec constitue l'instrument privilégié de cette nouvelle diplomatie québécoise qui est la nôtre. Edmonton pour les provinces de l'Ouest, Toronto pour l'Ontario, Moncton pour les provinces de l'Atlantique et Ottawa pour la liaison avec le gouvernement fédéral. Ces bureaux, dont le plus ancien, celui de Toronto, a été ouvert en 1971, veillent aux intérêts du Québec dans leur territoire respectif et permettent au gouvernement du Québec d'avoir une liaison avec les autres gouvernements des provinces et avec le gouvernement fédéral dans te but d'une meilleure information réciproque.

Les trois bureaux responsables des relations avec les autres provinces voient plus particulièrement aux intérêts économiques du Québec en matière de promotion commerciale, industrielle et touristique, en concertation avec les ministères québécois. De plus, ils maintiennent et développent les relations avec les communautés francophones. Ils fournissent aux médias de l'information sur les dossiers québécois. Ils répondent enfin aux demandes d'information générale et spécialisée des organismes et citoyens de ces provinces.

Pour sa part, le bureau d'Ottawa est davantage un poste de liaison avec les ministères et organismes fédéraux. Il veille à recueillir toute la documentation pertinente sur la législation, les politiques et les programmes fédéraux.

Dans le cadre des négociations constitutionnelles, les bureaux ont été appelés à intensifier leurs relations avec les autres gouvernements, fédéral et provinciaux, ainsi qu'avec les leaders d'opinion, les milieux d'affaires, les journalistes. Ainsi, grâce à leur connaissance de plus en plus approfondie des réqions et des provinces, nos bureaux peuvent mieux représenter les intérêts du Québec et contribuer au développement des relations intergouvernementales. Les bureaux apportent en particulier une analyse et un éclairage qéo-politiques qui se sont révélés très précieux tout au long des pourparlers constitutionnels. Le secrétariat a l'intention de continuer à développer cette expertise à plus long terme.

Il est très difficile d'évaluer les retombées des efforts de nos bureaux dans les domaines de la promotion économique et commerciale, de la promotion industrielle et de la promotion touristique. Il appert cependant que nos bureaux constituent des instruments très efficaces pour fournir un appui logistique aux Québécois et surtout pour établir et maintenir des liens avec les milieux financiers, industriels et touristiques sur leur territoire.

Les bureaux contribuent, par ailleurs, activement à la diffusion de la culture québécoise en aidant à l'organisation d'expositions, de concerts, de festivals, de spectacles, de lancements de livres à l'intention des artistes québécois. Ils font éqalement un effort particulier pour promouvoir les produits culturels québécois.

Dans le secteur de la francophonie, les bureaux sont maintenant responsables de la liaison avec la communauté et les organismes francophones sur leur territoire. À ce titre, ils reçoivent les demandes d'aide et effectuent la sélection des projets.

Quelques statistiques permettent d'illustrer la vigueur de nos activités intergouvernementales. Depuis décembre 1985, il s'est tenu neuf conférences de premiers ministres, 102 conférences de

ministres, sans compter de nombreuses réunions de sous-ministres, et il faut ajouter un nombre considérable de réunions bilatérales dont quatre entre le premier ministre du Québec et celui de l'Ontario.

Au cours de cette période d'un an et demi, un grand nombre de sujets ont été abordés dans ces forums intergouvernementaux, À titre d'illustration, soulignons que les premiers ministres ont surtout discuté d'économie et de commerce en mettant l'accent particulièrement sur la libéralisation des échanges avec les États-Unis, sur le développement économique régional ainsi que sur la situation économique des femmes. Une conférence spéciale s'est tenue sur la question constitutionnelle autochtone, conférence à laquelle le premier ministre s'est fait remplacer par le ministre responsable. Soulignons enfin que les premiers ministres ont abondamment discuté de constitution surtout au cours des dernières semaines.

En ce qui a trait aux ministres, parmi les grands sujets qui ont retenu leur attention lors des conférences, il faut souligner les arrangements fiscaux, le dossier constitutionnel autochtone, les services de garde, le bois d'oeuvre, la formation professionnelle des adultes, les revendicateurs du statut de réfugié, la stratégie agricole nationale et bien d'autres. Pour assumer ces responsabilités, le SAIC, le Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes dispose cette année d'un budget de 8 078 400 $. Ce budget est supérieur de 559 000 $ à celui de l'an dernier. Cette augmentation s'explique en majeure partie par une augmentation des sommes consacrées à la coopération avec l'Ontario à la suite de la décision prise par les premiers ministres de l'Ontario et du Québec d'élargir la portée de l'entente de coopération et d'augmenter le volume des activités qui en découlent.

En ce qui regarde certains dossiers que l'on peut considérer comme majeurs, disons qu'au-delà des grands dossiers qui retiennent souvent l'attention comme le dossier constitutionnel, il y a d'autres relations intergouvernementales qui comprennent un nombre considérable de sujets dans la plupart des domaines de l'activité publique. Le bilan des relations intergouvernementales se mesure parfois en termes de gains dans les négociations avec les gouvernements fédéral et provinciaux, mais la qualité des relations avec nos partenaires dans la confédération s'évalue cependant de plus en plus en termes d'ouverture d'esprit, de collaboration et d'harmonisation des interventions.

Le dossier de la libéralisation des échanges avec les États-Unis est un dossier qui occupe une large place dans les activités intergouvernementales, un dossier de très grande importance pour l'avenir économique du Québec et pour l'ensemble de la fédération canadienne. Indépendamment de l'évolution mouvementée des négociations proprement dites avec les États-Unis, le dossier du Québec a proqressé de façon satisfaisante au plan canadien. Notre gouvernement a affirmé clairement sa position à ce sujet. Il ne s'oppose pas à la tenue de ces négociations. Il y porte un intérêt marqué dans la mesure où elles visent à améliorer l'accès de nos exportations au marché américain.

Jusqu'à présent, les mécanismes de consultation et de coordination mis en place ont permis au Québec de participer de façon satisfaisante à l'établissement des positions canadiennes dans le respect des intérêts du Québec. Les discussions ont été franches et constructives et continuent de l'être, tout en adoptant une attitude de collaboration. Cependant, le gouvernement du Québec tient à s'assurer une marge de manoeuvre suffisante pour atteindre ses objectifs de développement socio-économique. Ainsi, tout accord commercial entre le Canada et les États-Unis devra comporter une période de transition suffisamment longue pour tenir compte des différences de productivité, des clauses de sauvegarde de la production intérieure contre une trop forte croissance des importations, et prévoir la possibilité de programmes d'adaptation pour les travailleurs, les entreprises et les régions qui seraient éventuellement touchés par cette entente de libre marché avec les États-Unis d'Amérique. C'est pourquoi, avant de donner son approbation à la conclusion de toute entente concernant un libre-échange avec les États-Unis, le Québec se réserve le droit d'en faire une évaluation ultime, minutieuse en fonction de ses intérêts fondamentaux.

Sans mettre en cause la compétence fédérale de négocier et de signer un accord international, le gouvernement du Québec doit insister pour que le gouvernement fédéral amorce dans les meilleurs délais l'étude d'une formule d'adhésion ou de ratification à un éventuel accord. La mise au point de cette formule est indispensable, d'une part, pour que les provinces puissent exprimer leur adhésion politique aux conclusions et, d'autre part, pour qu'elles puissent faire connaître leur appui aux dispositions qui relèvent de leur autorité. Les États-Unis ont, d'ailleurs, fait valoir à maintes reprises qu'ils tenaient à ce que les provinces prennent des engagements fermes en ce sens. Les négociations bilatérales avec les États-Unis devraient connaître d'ici la fin de l'année leur dénouement. Les principes défendus par le gouvernement du Québec seront réaffirmés. Nous nous attacherons tout particulièrement à trouver une formule qui sera en mesure, d'une part, d'assurer un degré substantiel de consentement provincial à toutes les dispositions de l'accord et d'autre part, de permettre aux provinces de

s'engager à mettre en oeuvre les dispositions relevant de leur autorité et à adopter des mesures législatives pour rendre leurs lois conformes aux dispositions de l'accord. (23 heures)

En ce qui regarde le développement économique régional, c'est un dossier qui a connu des développements importants. C'est là une autre manifestation significative de notre diplomatie tranquille, mais efficace. Rappelons ici que l'Entente de développement économique et régional, l'EDER, signée en 1984 entre le gouvernement du Canada et celui du Québec, prévoit des déboursés conjoints de 1 270 000 000 $ sur une période de cinq ans. Depuis sa signature, neuf ententes auxiliaires ont été conclues. En février dernier, le Québec a signé une nouvelle entente de 35 000 000 $ dans le domaine agro-alimentaire. Le 11 juin, les deux gouvernements concluront une entente pour le développement des pêches, ce qui permettra d'utiliser au complet le solde annuel de l'entente qui est, lui aussi, de 35 000 000 $.

Notons également qu'une entente de concertation et d'harmonisation en matière de communication a été signée et qu'une autre doit être conclue prochainement dans le secteur des mines. Par ailleurs, les négociations se poursuivent en vue de la conclusion d'une entente sur le développement économique des autochtones.

J'ai déjà soumis au ministère fédéral responsable de l'EDER un nouveau plan d'action pour l'année qui vient. Je compte avoir avec lui, dans un proche avenir, une réunion pour en discuter.

Les efforts du Québec dans le secteur économique ont donné des résultats souvent intéressants. À titre d'exemple, mentionnons l'attribution par le gouvernement fédéral d'un contrat d'entretien des F-18. Il s'agit d'un investissement de plus de 1 000 000 000 $ au cours des vingt prochaines années. Ce contrat créera de 300 à 400 emplois par année et permettra des transferts technologiques importants.

En ce qui regarde maintenant les arrangements fiscaux, il demeure nettement évident, sur le plan financier, qu'il faut maintenant réactiver nos discussions avec le gouvernement fédéral et discuter d'un traitement plus équitable en matière d'arrangements fiscaux et de péréquation pour le Québec. Il faudra maintenant concentrer nos efforts sur la réforme de la fiscalité dont le principe est généralement accepté, mais qui fait l'objet de discussion entre les deux ordres de gouvernement. Le ministre fédéral des Finances doit publier un livre blanc sur cette question le 18 juin prochain. Nous surveillerons de très près le projet de réforme fiscale actuellement à l'étude au gouvernement fédéral, car cette réforme aura certainement un impact sur les transferts financiers aux provinces et nécessitera des mesures d'harmonisation fiscale entre les deux ordres de gouvernement. Nous devrons réévaluer la structure de notre propre fiscalité et décider dans quelle mesure nous adhérerons à l'approche prise par le gouvernement fédéral. Cela signifie que nous devrons agir en étroite collaboration avec ce gouvernement fédéral afin de nous assurer que ta mise en application de la réforme se fera dans les meilleurs intérêts de tous.

Dans le domaine de la main-d'oeuvre, les deux gouvernements se sont entendus en février sur la question de la formation professionnelle des adultes. Par cet accord de trois ans, Ottawa s'engage à qarantir une somme de 139 000 000 $ pour chacune des trois prochaines années pour la formation en établissement scolaire et la formation sur mesure. De plus, le gouvernement fédéral s'engage à fournir un certain appui pour la formation dans de nouvelles entreprises.

Après de longues négociations, cet accord représente des qains substantiels pour le Québec. Il sera dorénavant possible de mieux répondre aux besoins des entreprises et de leurs travailleurs. Non seulement l'entente reconnaît-elle la formation sur mesure, mais le gouvernement du Québec s'est réservé la responsabilité de la formation en industrie dans les entreprises de 200 employés et moins.

Les relations interprovinciales. Les relations de coopération du Québec avec les autres provinces du Canada ont été particulièrement fécondes au cours de l'année qui s'est écoulée. En effet, le gouvernement du Québec, à partir d'un budget de 600 000 $, a réalisé des activités bilatérales de coopération avec la majorité des provinces canadiennes. Ces activités, qui s'exercent dans le cadre d'accords plus ou moins formels selon les cas, touchent principalement les secteurs de l'éducation et des affaires culturelles.

C'est avec l'Ontario que la coopération a connu le plus d'expansion. Les premiers ministres du Québec et de l'Ontario ont en effet convenu de revitaliser l'accord-cadre qui existe entre les deux provinces depuis 1969 et d'accroître sensiblement, pour 1987-1988, le budget qui lui est alloué. Une entente a pu être ainsi signée entre les ministres de l'Enseignement supérieur des deux provinces dans le domaine de l'enseignement postsecondaire. Cette entente permettra, notamment, à des francophones ontariens l'accès à des études en sciences de la santé dans les universités québécoises.

En ce qui regarde le dossier constitutionnel, comme je le mentionnais au tout début, il constitue la démonstration la plus éloquente de l'efficacité, de la pertinence de la nouvelle façon de faire qui a été instaurée au Secrétariat des affaires

intergouvemementales canadiennes. À cet égard, il a été tenu compte des leçons de l'histoire passée et récente. Les gouvernements libéraux des années soixante et soixante-dix ont su aborder, avec pragmatisme et discernement, (a pratique quotidienne des relations intergouvernementales que le Québec entretient avec ses partenaires canadiens. Cette période marque celle du leadership québécois au plan intergouvernemental en général et constitutionnel en particulier.

Le Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes est donc revenu à cette tradition d'une préparation des dossiers qui ne laisse rien au hasard, doublée d'une diplomatie qui se veut la plus efficace possible. Mais, en plus de préparer et d'apprécier les dossiers au mérite, le Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes s'est attaché à en évaluer l'impact prévisible auprès de ses partenaires gouvernementaux canadiens, tant fédéral que provinciaux, ainsi qu'à tenir compte de la conjoncture politique qui prévaut chez ceux-ci. À cet effet, l'évolution géopolitique sur la scène fédérale ainsi que dans chaque province a été prise en considération, de même que les conclusions auxquelles ont permis d'aboutir la couverture de presse à l'échelle du pays, ainsi que la mise à jour de notre tableau politique canadien.

Enfin, le Secrétariat aux affaires intergouvemementales canadiennes s'est appliqué non seulement à faire comprendre le contenu du dossier constitutionnel québécois, mais également à définir la façon dont ses interlocuteurs pouvaient être rejoints et convaincus du bien-fondé des positions québécoises.

En conclusion, M. le Président - je crois que je vais abréger - je suis particulièrement heureux, comme ministre responsable du Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes, de présenter le bilan de cette année d'administration, une année riche en réalisations et, bien sûr, en fonction d'une réalisation particulièrement importante, celle que nous avons confirmée encore hier et qui fait que le Québec pourrait être reconnu dans la constitution comme un partenaire à part entière tout en redonnant au fédéralisme canadien une vigueur nouvelle. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Filion): Je voudrais vous remercier, M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes. Puis-je, peut-être, vous suggérer, étant donné que vous avez abrégé votre texte, si vous le jugez à propos, de le déposer à cette commission? Il pourrait être ainsi distribué aux membres de cette commission, mais je laisse le tout à votre discrétion.

M. Rémillard: M. le Président, je crois que je vais avoir, probablement par les questions qu'on va me poser, l'occasion de compléter les passaqes sur lesquels je n'ai pas insisté. Je ne voulais pas prendre trop de temps pour en laisser plus pour la période des questions. Si je vois que je ne réponds pas à tous les aspects que je devais traiter dans mon énoncé, à ce moment-là, il me fera plaisir de le déposer pour information.

Le Président (M. Filion): Je vais reconnaître, maintenant, M. le député du Lac-Saint-Jean.

Période de questions Spécialistes en matière constitutionnelle

M. Brassard: Merci, M. le Président. Je n'aurai pas de remarques préliminaires, sinon il ne nous restera plus de temps. Je vais passer à des questions sur un certain nombre de sujets. Le premier concerne l'engagement par le ministre d'experts constitutionnalistes, tel qu'on peut le retrouver dans les documents qu'il nous a fait parvenir et qui avaient été demandés par l'Opposition avec les montants payés. Alors, c'est ainsi qu'on voit que Me François Chevrette a participé à une réunion dans le cadre du dossier constitutionnel, 553 $; Jean Garneau a aidé à l'élaboration du tableau politique canadien pour 4979 $; Edward McWhinney, une étude sur le Sénat, 4995 $; Réjean Pelletier, une étude sur le Sénat, 3000 $; Carole Tremblay, recherches en droit aux fins du dossier constitutionnel pour 1080 $; Michel Bastarache, étude sur l'enchâssement de la Cour suprême dans la constitution, 5000 $; Me Gérald Beaudoin, étude sur la formule d'amendement, 5000 $; André Bernard, étude sur le préambule, 4200 $; Pierre Blache, une étude sur le pouvoir général de dépenser, 5000 $; Armand de Mestral, une étude sur le préambule, 4000 $; Mme Nicole Duplé, une étude sur l'entente Cullen-Couture, 5000 $; Pierre Foucher, une étude sur les droits linguistiques, 5000 $; Julius H. Gray, une étude sur l'entente Cullen-Couture sur l'immigration, 5000 $; Joseph Maqnet, une étude sur la formule d'amendement, 5000 $; l'étude Noël, Décary, Aubry et Associés, j'imagine qu'il s'agit de Me Robert Décary, une étude sur l'implication constitutionnelle de l'accord sur le libre-échange, 13 558 $; Daniel Proulx, une étude sur la charte des droits et libertés; Stephen Scott, une étude sur les droits linguistiques, toujours 5000 $ et Guy Tremblay, une étude sur la Cour suprême, 5000 $.

Or, il est arrivé que le ministre, à la commission parlementaire des institutions portant sur le dossier constitutionnel et sur le communiqué de presse du lac Meech, a invité au nom du gouvernement un certain

nombre de ces experts. Il les a choisis et les a invités à comparaître devant les membres de la commission pour exposer leur point de vue. Cela a été le cas de Me Chevrette, Me Beaudoin, Me Blache, Me Duplé, Me Décary. Me Guy Tremblay a comparu également, mais invité par l'Opposition.

J'aimerais, d'abord, savoir comment la sélection a été faite, étant donné que, sur un nombre assez important d'experts à qui on a demandé des études dont plusieurs concernent des éléments de l'entente constitutionnelle signée hier, plusieurs de ces experts n'ont pas été invités à comparaître. On a invité Me Beaudoin, Me Blache, Me Duplé, Me Décary, Me Chevrette, mais on n'a pas invité, par exemple, Pierre Toucher qui a fait une étude sur les droits linguistiques. Pourtant, tout le monde sait que la question linguistique est au coeur du débat constitutionnel, cela a accaparé une bonne partie de l'attention des membres et des groupes qui ont témoigné devant cette commission pendant plus d'une cinquantaine d'heures. Leurs propos, leurs remarques et leurs mémoires portaient dans une très large mesure sur la question linguistique. Vous avez commandé des études sur les droits linguistiques à certains experts constitutionnels, curieusement ils n'ont pas été invités à venir témoigner.

Donc, une première question sur cela. Comment avez-vous fait la sélection? Sur quelle base avez-vous fait la sélection pour inviter les experts constitutionnels qui avaient déjà auparavant fourni des études commandées par votre ministère?

M. Rémillard: Oui, M. le Président, je veux remercier le député de Lac-Saint-Jean pour cette question qui me permet de souligner que nous n'avons rien laissé au hasard. Comme je le disais dans mon énoncé tout à l'heure, c'était un dossier délicat, difficile, et nous avons voulu le mener avec un maximum de chances de réussite. Nous avons donc voulu faire en sorte qu'il n'y ait pas d'ambiguïtés ou qu'il n'y ait pas de fautes de négociation qui puissent être commises. Tout a été analysé auparavant, pensé en fonction de ces négociations que nous devions entamer avec le gouvernement fédéral et les neuf autres provinces. C'est dans ce contexte que nous avons demandé une série d'études à des spécialistes. Notre critère de sélection a été: des gens compétents dans leur domaine. (23 h 15)

Le député de Lac-Saint-Jean a lui-même souligné tout à l'heure que certains de ces experts que nous avons engagés ont différentes tendances générales. Pour nous, un seul critère importait, celui de leur compétence dans leur domaine. Nous avons donc demandé à des gens... il y a même certaines personnes qui ont été des conseillers du précédent gouvernement, comme je vois M. Painchaud, ici, qui a conseillé le gouvernement péquiste en matière de relations internationales. Il y en a d'autres aussi que je pourrais mentionner qui étaient là, ce sont des gens compétents qui pouvaient nous donner une bonne expertise. C'est dnns ce contexte-là que nous avons demandé à ces gens de nous fournir des études que nous avons analysées en fonction de ces cinq demandes que nous avions: la reconnaissance du Québec comme société distincte, la Cour suprême - vous les connaissez - le pouvoir de dépenser, la formule d'amendement et l'immigration. C'est donc en fonction de ces cinq points que nous avons demandé ces études.

Quand la commission parlementaire est arrivée, il nous a été possible de faire référence à certains spécialistes dont certains avaient déjà fait des études pour nous, d'autres n'en avaient pas fait, et qui pouvaient - pour nous, c'est le seul critère qui nous a guidés - apporter un éclairage aux parlementaires quant au projet précis que nous avions à la suite de cette entente du lac Meech. Lorsque le député de Lac-Saint-Jean me demande quel a été le critère de sélection de ces experts, je vais lui dire strictement: la compétence, la compétence. Certains qu'on a invités à témoigner ne se retrouvent pas dans cette liste. Je pense, par exemple, au professeur Léon Dion, que nous avons invité et que vous ne retrouvez pas ici mentionné. Nous lui avons demandé de témoigner et il est venu discuter avec nous du projet. Il y en a eu d'autres aussi.

M. Brassard: M. le Président, je voudrais préciser mes questions pour essayer d'avoir des réponses brèves et précises aussi. Je vois bien que le ministre a commandé des études à des experts, j'en ai la liste. C'est bien évident que cela tourne autour du dossier constitutionnel, j'ai cru remarquer cela aussi. Ma question, c'est qu'il en a invité un certain nombre à venir témoigner devant la commission, qui avaient déjà, au prélable, fourni sur commande des études sur certains sujets, mais il en a laissé de côté aussi. L'une des questions que je me pose, par exemple, c'est: Comment se fait-il que, à l'exception de M. Chevrette qui, lui, a eu la franchise de dire: Écoutez - je me souviens de son témoignage - j'ai travaillé au dossier pour le compte du gouvernement - il l'a admis, mais aucun des autres invités ne l'a admis - on apprenne par la suite, par après, que ces experts qui sont venus témoigner devant ta commission ont, au préalable, auparavant, été embauchés, engagés par le ministère pour travailler au dossier constitutionnel?

Le ministre n'aurait-il pas pu indiquer à la commission, au moment où ces personnes comparaissaient, ou révéler que Me Beaudoin,

au moment où il comparaissait, avait fourni une étude sur la formule d'amendement pour un montant de 5000 $ et que Me Blache en avait fourni une, lui aussi, sur le pouvoir fédéral de dépenser comme Me Duplé sur l'entente Cullen-Couture pour 5000 $?

Le ministre ne croit-il pas qu'il aurait dû, à ce moment-là, comme Me Chevrette l'a fait de lui-même, indiquer et fournir cette information aux membres de la commission et à ceux qui s'intéressaient aux témoignages faits devant la commission?

Ce n'est pas une information pertinente qui aurait pu être fournie, ça? Les experts invités par le gouvernement, tout en reconnaissant que c'était des experts, c'était aussi des experts qui avaient, auparavant, travaillé pour le compte du gouvernement, fourni des études et qui avaient été payés, évidemment, comme c'est normal. Quand on fait des études sur commande, on se les fait payer. Ne juge-t-il pas qu'il aurait peut-être fallu fournir cette information au moment où ces personnes éminentes comparaissaient?

Le Président (M. Filion): M. le ministre.

M. Brassard: Cela va être intéressant comme information.

M. Rémillard: Oui. Voici, M. le Président. Quand on regarde la liste des personnes que nous avons consultées, par ces demandes, on s'aperçoit qu'il y a la plupart des spécialistes en matière constitutionnelle ou politique au Québec et même certains parmi les plus éminents au Canada.

Je ne sais pas où veut en venir le député de Lac-Saint-Jean, mais lorsqu'on donne, comme dans le cas ici de M. François Chevrette, 553,50 $...

M. Brassard: ...qui avait travaillé au dossier.

M. Rémillard: ...qu'il a mentionné.

M. Brassard: C'est le seul qu'il a mentionné.

M. Rérnîllard: J'ai été universitaire aussi et ce n'est pas un contrat de 2000 $, 3000 $ ou 4000 $ qui permet de dire qu'on achète des gens. Vous savez, il faut quand même comprendre que ces gens-là...

M. Brassard: M. le Président, il faudrait bien se cpmprendre.

M. Rémillard: ...viennent ici pour témoigner de par leur compétence.

M. Brassard: M. le Président, il faudrait bien se comprendre. J'ai en aucune façon prétendu ou affirmé que ces personnes avaient été achetées par le gouvernement parce qu'elles avaient fourni des études commandées par le qouvernement sur le dossier constitutionnel.

Ce n'est pas ça que je dis du tout. Je reconnais leur compétence en cette matière. Je dis simplement que le ministre aurait dû, au moment où ces personnes comparaissaient devant nous comme experts, indiquer - une information importante - que, tout en comparaissant comme experts, ces personnes avaient également travaillé pour le compte du gouvernement et fourni des études au gouvernement sur certains éléments ou certains aspects du dossier constitutionnel.

C'est ça que je dis. Cela m'apparaît pertinent. C'est une information qu'il aurait été pertinent de fournir, sans mettre en doute ou remettre en question la compétence ou l'honnêteté de ces personnes. Il me semble que ça aurait été une information pertinente de savoir, lorsque M. Beaudoin est venu témoigner, que, auparavant, il avait fourni une étude sur la formule d'amendement au dossier constitutionnel commandée par le gouvernement. Cela m'apparaît une chose, en tout cas, qui aurait été intéressante de connaître à ce moment-là.

Deuxièmement, c'est aussi intéressant de voir qu'il y a des experts qu'il a écartés, en quelque sorte, ou que le gouvernement n'a pas voulu inviter. Je pense, par exemple, aux droits linguistiques. Il a commandé deux études à deux personnes différentes sur les droits linguistiques. Je le répète, la question linguistique est au coeur du débat constitutionnel. C'est cette question qui intéresse d'abord et avant tout les Québécois, je pense. Cela m'apparaît évident. Curieusement, de ces experts à qui on a commandé des études sur les droits linguistiques alors que la question linguistique est majeure, est au centre du débat constitutionnel, le gouvernement ne juge même pas utile d'en inviter un seul pour venir témoigner comme expert.

Est-ce que, finalement, le gouvernement n'a pas tout simplement sélectionné, parmi les experts à qui il a demandé des études sur le dossier constitutionnel, ceux qui avaient fourni des études qui correspondaient au point de vue du gouvernement et à la vision du qouvernement sur le dossier constitutionnel - au fond, j'en arrive quasiment à cette conclusion - et que les autres, peut-être, qui n'ont pas eu le privilège de comparaître sur invitation du gouvernement, avaient fourni des études qui ne correspondaient pas nécessairement au point de vue du gouvernement sur le dossier constitutionnel et à sa vision des choses et, qu'à ce moment-là, on n'a pas cru bon de les inviter?

Partant de là, M. le Président, comme ces études ont été financées à même les fonds publics, je trouverais intéressant que ces études soient rendues publiques et que,

entre autres, les membres de la commission parlementaire des institutions qui ont suivi le cheminement de ce dossier puissent en prendre connaissance.

Je vous avoue sincèrement que je souhaite beaucoup prendre connaissance de l'étude sur les droits linguistiques, parce que c'est une question qui m'intéresse au premier chef. Étant donné que ces études ont été financées à même les fonds publics, ne serait-il pas possible que le ministre dépose ces diverses études sur le dossier constitutionnel et que l'on puisse y avoir accès et, en particulier, que les parlementaires intéressés à cette question puissent avoir accès à ces études?

M. Rémillard: M. le Président, dans un premier temps, le député de Lac-Saint-Jean semble nous dire que l'on aurait choisi des experts susceptibles de véhiculer les mêmes points de vue que le gouvernement, et en matière linguistique en particulier. Le député de Lac-Saint-Jean mentionne des études que nous avons commandées en matière linguistique. Vous dites... Non? N'est-ce pas ce que vous dites?

M. Brassard: Non. J'ai dit qu'étant donné que le gouvernement connaissait ces études... On a les dates des mandats, donc ce sont des études qui ont été pour la plupart fournies en 1986. Alors, étant donné que le gouvernement connaissait le contenu de ces études, il était facile pour lui, quand vint le moment de demander à des experts de venir témoigner devant la commission des institutions, de sélectionner les experts qui, dans leurs études, avaient exprimé un point de vue qui correspondait à celui du gouvernement et à la vision du gouvernement. C'était facile pour lui de dire: Me Beaudoin, sur la formule d'amendement entre autres, son étude est très bonne. Il n'y a aucun problème; cela correspond exactement à notre vision des choses. Il viendra confirmer le point de vue du gouvernement.

Vous connaissiez les études, donc la sélection était facile. Comme vous n'avez pas jugé bon d'inviter ceux qui ont fait des études sur les droits linguistiques, je suis porté à conclure que, probablement, le contenu de ces études sur les droits linguistiques ne correspondait pas nécessairement à votre vision des choses en cette matière, puisque vous n'avez pas jugé bon de les inviter et puisque ceux que vous avez invités - je me souviens des témoignages -dans l'ensemble, ont en quelque sorte cautionné la position gouvernementale sur le dossier constitutionnel. C'est ce que je dis.

M. Rémillard: M. le Président, je vois que le député de Lac-Saint-Jean a la mémoire courte. Tout d'abord, je veux lui rappeler qu'il y a deux études qui ont été commandées à des spécialistes sur les questions linguistiques mais qu'il y en a une autre qui n'apparaît pas ici mais qu'il sait très bien que nous avions aussi, parce que c'est un spécialiste des questions linguistiques qui a été mon conseiller pendant un certain temps et qui s'appelle Léon Dion.

M. Léon Dion, spécialiste des questions linguistiques, a été invité par le gouvernement à témoigner à cette commission et je sais, maintenant que je lui renouvelle un peu la mémoire, que le député de Lac-Saint-Jean doit se souvenir de ce témoiqnage de Léon Dion. Donc, lorsque le député de Lac-Saint-Jean insinue qu'on a pu simplement choisir des experts qui pouvaient confirmer le point de vue du gouvernement, en particulier dans le domaine linguistique, il oublie que justement, pour parler de cette question, nous avons invité le professeur Léon Dion. Alors, cela montrait justement à quel point nous voulions respecter la vocation d'une commission parlementaire qui est d'informer les parlementaires, d'entendre, d'écouter et de prendre... bonne note de ce qu'on vient y dire. C'est dans ce contexte que nous avons invité le professeur Léon Dion. (23 h 30)

On ne pouvait pas avoir une commission parlementaire d'un ou deux mois. Il fallait quand même qu'on trouve des spécialistes qui puissent nous donner la meilleure expertise possible, dans une perspective de travail la plus fructueuse possible pour la commission. Or, c'est dans ce cas-là que nous avons pensé inviter le professeur Léon Dion comme expert en matière linguistique et politicoloque qui est venu témoigner ici. Je trouve les insinuations ou les affirmations -que ce soit l'un ou l'autre - du député de Lac-Saint-Jean bien mal fondées, mais il me fait plaisir de lui renouveler la mémoire pour lui dire que le professeur Léon Dion est venu témoigner ici. Il l'avait sans doute oublié.

M. Brassard: M. le Président, d'abord, l'exemple de M. Dion ne tient pas. Je pose une question sur les experts qui ont fourni des études sur le dossier constitutionnel commandées et payées par le gouvernement. Je n'ai pas vu Léon Dion dans cette liste. Ma question porte sur ces experts-là et non pas sur les autres experts qui ont comparu également et qui ne font pas partie de cette liste. Elle porte sur cette liste-là.

Je reviens à ma question: Est-ce que le ministre est consentant à rendre publique cette série d'études sur le dossier constitutionnel? Cela intéresserait sans aucun doute tous ceux qui se préoccupent et qui suivent cette question.

M. Rémillard: Je veux simplement, pour revenir au cas du professeur Léon Dion, dire qu'il y a ici une liste de spécialistes et le professeur Léon Dion - je crois que le

député de Lac-Saint-Jean le savait très bien - qui a été conseiller auprès du ministère, nous a, par conséquent, donné des opinions...

M. Brassard: ...déjà? M. Rémillard: Pardon?

M. Brassard: Pendant combien de temps?

M. Rémillard: II faudrait que je vérifie cela, L'an dernier, à la défense des crédits, c'était public avec toutes les conditions. Cela ne pose pas de difficulté. Si vous voulez avoir des précisions à ce chapitre, on pourra vous en fournir avec grand plaisir.

M. Brassard: Sur la...

M. Rémillard: Sur la publication des études maintenant.

M. Brassard: Oui.

M. Rémillard: Vous savez qu'en fonction de la loi sur l'accès à l'information, habituellement, les opinions juridiques sont considérées comme confidentielles et les opinions sur des sujets de discussion de relations fédérales-provinciales sont aussi considérées comme confidentielles. Je pense que vous pouvez comprendre, M. le député de Lac-Saint-Jean, qu'il est impossible pour le gouvernement de rendre publiques ces études au moment où nous sommes dans une période intense de discussions constitutionnelles.

Nous venons de signer cette entente avec les autres premiers ministres canadiens, une entente historique pour le Québec, mais c'est strictement un premier pas, un pas déterminant et extrêmement important qui permet au Québec de redevenir un partenaire majeur dans la fédération. Mais il y aura une deuxième étape, c'est ce que j'essaie de dire. Nous procédons d'une façon logique et pragmatique. Dans un premier temps, cinq conditions ont été remplies à l'unanimité par les onze premiers ministres et, ensuite, dans une deuxième étape, nous allons négocier et discuter d'autres sujets. Et il se peut fort bien que les sujets qui apparaissent ici comme ayant été étudiés par les spécialistes se retrouvent comme des sujets de négociation lors de cette deuxième étape de discussions constitutionnelles.

Comment voulez-vous à ce moment-là qu'on rende publiques ces études qui sont pour nous de première utilité pour préparer nos positions constitutionnelles?

Savez-vous que votre question a été posée par l'Opposition libérale du temps, presque la même question, au ministre...

M. Brassard: Est-ce que...

M. Rémillard: Si vous me permettez juste de terminer... au ministre de l'époque responsable du secrétariat qui est maintenant le chef de l'Opposition...

M. Brassard: Qui a répondu non.

M. Rémillard: ...et qui a fait la même réponse, une réponse sage. Lui, il disait simplement: Écoutez, je ne peux pas rendre publiques ces études, parce que ce sont les études qui guident nos négociations. Je ne suis quand même pas pour les rendre publiques devant tout le monde. Cela se comprend. Je pense que c'est asse2 facile à comprendre.

M. Brassard: Si je suis bien le raisonnement du ministre, M. le Président, il dit: On ne peut pas les rendre publiques et une des principales raisons, c'est qu'il va y avoir une deuxième ronde de négociations et plusieurs de ces études portent sur cette deuxième ronde. Celle-là, je la comprends, mais incluez-vous l'étude sur les droits linguistiques là-dedans? Il me semblait que vous aviez réglé ce problème. Est-ce que la question linguistique fait partie de la deuxième ronde?

M. Rémillard: Le premier ministre a dit, encore aujourd'hui, si ma mémoire est bonne, à la période de questions, qu'en matière linguistique, nous, nous acceptons l'article 133 qui permet à un député de langue anglaise d'utiliser sa lanque maternelle à l'Assemblée nationale ou à un parlementaire francophone d'utiliser sa langue au Parlement du Canada ou de pouvoir s'adresser aux cours de justice dans sa langue au Québec; nous l'acceptons.

Nous acceptons aussi, d'une façon générale, l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés qui est ce que nous appelons la clause Canada, c'est-à-dire la possibilité pour des parents qui ont suivi leurs études primaires dans une école anglaise d'une province canadienne d'inscrire leurs enfants à une école anglaise au Québec. Cela c'est ce qu'on appelle la clause Canada et on l'accepte.

Cependant, on a dit qu'il y avait un petit aspect concernant la clause Canada qui est un prolongement, qui n'est pas très lourd de conséquences mais qui nous préoccupe quand même jusqu'à un certain point et que nous aimerions éventuellement pouvoir discuter. C'est donc cela, une possibilité de discuter des questions linguistiques. Parce qu'en matière de sécurité culturelle linguistique, nous avons obtenu, avec l'entente du lac Meech confirmée hier, une sécurité culturelle en matière de tangue qui nous réjouit et qui fait en sorte que, véritablement, cette entente du 3 juin est une entente historique pour le Québec.

C'est une clause que nous avons, qui nous permet de considérer nos acquis en matière de langue et, en plus, d'avoir un outil extrêmement intéressant pour défendre à l'avenir toute mesure législative ou gouvernementale linguistique au Québec. Cela, c'est important. Cela a été l'objet, je vais vous l'avouer ce soir, d'une très difficile négociation entre les premiers ministres du Canada et le premier ministre du Québec parce que nous tenions à avoir cette garantie à 100 %.

M. Brassard: M. le Président...

Le Président (M. Filion): Oui, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: ...je n'ai pas posé une question sur les 20 heures de négociations constitutionnelles d'Ottawa. Je n'ai pas demandé au ministre de me faire un survol du dossier constitutionnel et du contenu de l'entente. Je lui demande s'il veut rendre publiques des études, entre autres, sur les droits linguistiques. Il me dit non, on ne peut pas parce qu'il va y avoir une deuxième phase et que ces études portent sur la deuxième phase.

S'il ne veut pas rendre publique une étude sur les questions linguistiques parce qu'il y a une deuxième phase, cela veut donc dire que la question linguistique est dans une deuxième phase. Il me dit qui et c'est tout. Il n'a pas besoin de me faire un cours de trois heures.

M. Rémillard: M. le Président...

Le Président (M. Filion): M. le ministre.

M. Rémillard: ...la question m'a été posée...

M. Brassard: On a assez peu de temps. Il a pris un grand moment pour faire une longue intervention et on a très peu de temps pour ces questions.

M. Rémillard: M. le Président...

M. Brassard: Si en plus il fait des harangues à ne plus finir, on ne s'en sortira pas.

M. Rémillard: ...je ne voudrais pas indisposer le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: ...une question précise et une réponse précise.

M. Rémillard: C'est simplement que je veux essayer de répondre le plus complètement possible à sa question. Il me pose une question, il me dit...

M. Brassard: Vous ne voulez pas les rendre publiques, très bien, je prends acte de votre réponse.

M. Rémillard: M. le Président.

M. Brassard: Je prends acte des raisons également pour lesquelles vous ne voulez pas les rendre publiques.

M. Rémillard: Pourquoi le député ne me permet-il pas tout simplement de répondre? Je ne voudrais pas qu'il s'énerve. Qu'il reste calme, qu'il se détende.

M. Brassard: Répondez à la question.

M. Rémillard: Oui, mais attendez, je vais vous répondre. Restez calme, il n'y a pas de problème, détentez-vous.

Ce que je vous dis, c'est que concernant la question linguistique, on est allé chercher des éléments extrêmement importants avec l'entente du lac Meech. Ce que nous disons, c'est que dans une deuxième étape, nous pouvons éventuellement aborder certains aspects d'une politique linguistique, par exemple en ce qui reqarde ce volet de la clause Canada qui n'est pas lourd de conséquences mais qui existe. C'est dans ce contexte...

M. Brassard: Est-ce que c'est le seul élément...

M. Rémillard: Pardon?

M. Brassard: ...linguistique de la deuxième phase?

M. Rémillard: Pour le moment, c'est un de ceux qui soulèvent quelques points d'interrogation chez nous.

M. Brassard: Et l'article 93?

M. Rémillard: L'article 93 n'est pas une question... C'est cela, votre problème. Je voudrais vous informer et je voudrais que vous compreniez- cela.

M. Brassard: C'est l'article 93 qui empêche le gouvernement du Québec de créer des commissions scolaires sur une base linguistique.

M. Rémillard: Bon. M. le Président, est-ce que je peux me permettre de répondre à cette question? C'est une question importante et je voudrais que le député de Lac-Saint-Jean la comprenne très bien.

M. Brassard: Je la comprends bien. Vous avez seulement à me répondre si oui cela va être dans une deuxième phase. Ne me faites pas de cours. Vous répondez si oui

d'autres éléments... Là, vous me dites: L'article 23, il y a un élément qui va être dans la deuxième phase. Très bien, parfait. J'en prends note. Je vous demande: Est-ce qu'il y a d'autres éléments linguistiques qui vont être dans la deuxième phase. Voilà! Je vous donne comme exempte l'article 93. C'est cela qui empêche actuellement le gouvernement du Québec d'appliquer la loi 3 qui crée des commissions scolaires sur une base linguistique. La CEQ et l'Alliance des professeurs sont venues pour vous dire: Pourquoi ne vous êtes-vous pas intéressés à cela? Vous nous avez dit: C'est dans une deuxième phase. Alors, me souvenant de ce que vous avez dit, je vous demande: Est-ce que cela aussi va faire partie de la deuxième phase sur la question linguistique?

M. Rémillard: Est-ce que je peux répondre, là?

M. Brassard: Oui, oui.

M. Rémillard: Oui? C'est possible, là? Bon. Je veux simplement dire au député de Lac-Saint-Jean que l'article 93 de la constitution de 1867 n'a pas pour objet la langue mais bien la religion, n'est-ce pas? II a été mis dans la constitution - c'est une erreur que beaucoup font et je voudrais simplement vous le dire...

M. Brassard: Non, je le sais que c'est sur la religion.

M. Rémillard: ...très modestement, je veux vous renseigner. Vous me posez une question, je vous réponds. Mais laissez-moi vous répondre. Je vous dis que l'article 93 a été mis dans la constitution par les Pères de la confédération en 1867 parce qu'il pouvait y avoir un problème entre, à ce moment-là, les protestants et les catholiques. Donc, l'article 93 est basé strictement sur ces commissions scolaires protestantes et catholiques. Cela cause des problèmes au point de vue de la réorganisation du système scolaire québécois, qui, on le voudrait, pourrait être basé sur des questions linguistiques: francophones et anglophones. Là, on peut difficilement faire complètement cette réforme du système scolaire québécois parce qu'on a l'article 93 qui nous empêche à certains niveaux de le faire. Cela a soulevé une jurisprudence très difficile et très importante dans le droit constitutionnel canadien. Il faut voir à ce problème d'une façon très sérieuse. Le chef de l'Opposition en commission parlementaire m'est arrivé avec cela à plusieurs reprises et ce soir, le député de Lac-Saint-Jean m'arrive avec cela. C'est drôle quand même que lorsqu'ils ont publié leur proposition constitutionnelle en mai 1985, tout d'abord, ils ont refusé une commission parlementaire. D'autre part, ils n'ont nullement mentionné, mais nulle part dans ce document de mai 1985, les propositions constitutionnelles du Québec du Parti québécois, du qouvernement québécois de l'époque, de revendications sur l'article 93. Maintenant, on nous dit: Qu'est-ce que vous allez faire de l'article 93, la lanque? C'est une question qui doit être étudiée mais qui doit être étudiée sérieusement. Vous avez été neuf ans au gouvernement. Vous avez voulu justement établir un système scolaire basé sur la langue. Vous n'avez même pas mis dans votre document constitutionnel ce problème concernant l'article 93 de la loi constitutionnelle de 1867. Et là, vous venez me faire la leçon! Bien, un instant, monsieur!

M. Brassard: M. le Président, on a déjà répondu à cette question. Vous irez voir dans le Journal des débats. Je n'ai pas l'intention de continuer sur cela.

M. le Président, vous aviez une question à poser pour que je passe à un autre sujet parce que...

Le Président (M. Filion): Oui. Juste avant de laisser ce sujet...

M. Brassard: ...on s'éternise.

Le Président (M. Filion): M. le ministre, vous me permettrez... Ma préoccupation est un peu la suivante: D'une part, vous savez, bien sûr, qu'une résolution sera déposée un jour à l'Assemblée nationale et que les élus du peuple devront disposer de cette résolution donnant suite à l'accord constitutionnel. Donc, un débat d'intérêt éminemment public s'amorcera, s'est déjà amorcé et se poursuivra tant et aussi longtemps que l'ensemble du processus d'amendement à la constitution ne sera pas terminé, d'une part. (23 h 45)

Deuxièmement, ce débat sera de nature, en bonne partie, juridique, bien sûr politique mais également juridique. Troisièmement, les études que le député de Lac-Saint-Jean vous demande de bien vouloir rendre publiques ont été payées, comme il l'a mentionné, avec l'argent de cette même population, de ces mêmes contribuables qui nous élisent et qui vont demander aux députés de se prononcer pour ou contre cette résolution qui sera l'objet de nos débats à l'Assemblée nationale.

D'autre part, parmi les deux ordres d'arguments que j'ai entendus tantôt, il y a, premièrement, la loi sur l'accès à l'information. Je dois vous dire que je diffère d'opinion et d'interprétation quant à la portée de la loi sur l'accès à l'information. Mais encore là, c'est simplement une loi qui fixe des balises qui permettent, dans certains cas, de divulguer des documents si la volonté de l'organisme

qui les détient est à l'effet contraire.

De plus, vous avez évoqué le fait des négociations futures sur le plan constitutionnel et que vous ne voudriez pas que ces négociations futures soient mises en péril par la divulgation de ces études qui ont été payées par la population du Québec.

À cause de l'ensemble de cette argumentation, je dois vous dire que, dans mon cas, je suis préoccupé par le fait que vous ayez semblé disposer immédiatement de la question soulevée par le député de Lac-Saint-Jean et que vous considériez ne pas vouloir ou devoir rendre ces documents publics.

Moi, je vous dis que c'est une denrée importante. Le débat est essentiellement juridique. Il est d'intérêt public de le faire pour que la population soit le mieux informée possible. Or, à cause de l'ensemble de ces motifs pris, comme on le dit parfois en droit, isolément et dans leur ensemble, je me demande si vous ne pouvez pas prendre cette question en délibéré et y réfléchir pour que nous puissions au moins garder l'espoir, non seulement les membres de cette commission mais la population, que l'éclairage nécessaire à la formulation d'un jugement sur cet accord constitutionnel puisse être adéquatement et décemment fourni à la population.

Donc, ma question, c'est: Est-ce que vous ne pourriez pas y apporter une réflexion additionnelle?

M. Rémillard: M. le Président, je suis certain que vous pouvez comprendre ma position comme ministre responsable des discussions et des négociations avec le gouvernement fédéral et les autres provinces canadiennes. Je suis certain que vous pouvez comprendre que je ne peux rendre publiques des études qui me permettent d'établir ma position de négociation, d'établir nos stratégies de négociation, de discussion avec les autres provinces et le gouvernement fédéral. Je crois que c'est élémentaire, M. le Président et, vous, certainement, vous le comprenez.

Le chef de l'Opposition, lorsqu'il était ministre responsable aussi de ce même ministère dont j'ai le plaisir et l'honneur aujourd'hui d'être responsable, donnait la même réponse et avec beaucoup de sagesse; et je vous fais la même réponse. Cela ne se peut pas. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?

Toutefois, peut-être plus tard, dans l'avenir, quand tout ça sera terminé, que ce sera public, à ce moment-là, on pourra les consulter. Mais comment voulez-vous que je rende publiques ces études qui nous servent, à nous, de fondement pour nos prises de position stratégiques? On ne le peut pas. Je ne peux pas faire ça. Je pense que vous le comprenez.

Le Président (M. Filion): Je redonne la parole à M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Je vais passer à un autre sujet, M. le Président, tout en regrettant et trouvant déplorable que le ministre refuse de rendre publiques ces études, ce qui permettrait, comme vous l'avez mentionné à juste titre, à la population de se faire une meilleure idée, une meilleure opinion sur la question constitutionnelle, d'autant plus que ces études ont été financées à même les fonds publics.

Ententes fédérales-provinciales

J'aborderais rapidement une question sur les ententes fédérales-provinciales. J'avais demandé le bilan. J'en ai un très sommaire dans les documents fournis par le ministre. Les différentes ententes auxiliaires avec les montants appliqués, les engagements, le solde, je signale au ministre que sauf pour une, toute ces ententes ont été conclues, néqociées et signées par l'ancien gouvernement du Parti québécois. Seule la dernière a été conclue et elle n'implique pas des sommes considérables: 35 000 000 $ seulement ont été conclus sous le gouvernement du Parti libéral.

Il y a d'abord des questions que je me pose sur les chiffres fournis, parce que je prends juste un exemple: l'entente sur le développement des transports. Le montant impliqué de 170 000 000 $, l'engagement est de 162 300 000 $. Il resterait 7 700 000 $.

M. Rémillard: Puis-je vous demander à quelle page vous êtes? Excusez-moi.

M. Brassard: Dans l'annexe J. Cela va? M. Rémillard: Oui, merci.

M. Brassard: Donc, je me pose une question premièrement sur les chiffres, parce que sur le développement des transports entre autres, je sais pertinemment, je me souviens fort bien qu'on avait réservé dans cette entente de 170 000 000 $ un montant de 25 000 000 $ pour l'autoroute Alma-La Baie. Je sais aussi, le ministre des Transports l'a confirmé, quoiqu'il a annoncé certains projets récemment, que les 25 000 000 $ actuellement ne sont pas encore dépensés. Il n'y a pas un sou qui a été dépensé pour l'autoroute Alma-La Baie. Il a annoncé un projet d'à peu près 7 000 000 $; ce qui fait que juste sur ce projet de l'autoroute Alma-La Baie où on avait prévu 25 000 000 $, normalement de non engagés encore, il devrait rester autour de 18 000 000 $ juste sur ce projet-là. Or, je retrouve en solde 7 700 000 $. C'est pour l'entente sur le développement des transports.

Premièrement, j'aimerais comprendre la façon dont vous faites le bilan. Qu'entendez-vous par engagement? S'agit-il d'argent véritablement engagé et dont les dépenses sont autorisées par le Conseil du trésor sur des projets précis? Si c'est cela, je ne comprends pas entre autres l'entente sur le développement des transports ou si c'est simplement des montants réservés à des projets sans que le cheminement du projet en soit rendu à l'appel d'offres ou à l'autorisation de dépenses de la part du Conseil du trésor? Quel est le sens des termes utilisés, celui d'engagement en particulier?

M. Rémillard: Je comprends très bien l'intérêt du député de Lac Saint-Jean pour cette route Alma-La Baie. De fait, il y a 25 000 000 $ d'engagés et pour vous donner plus de précisions, si vous me le permettez, je demanderais à M. Marc Morin de vous donner l'information la plus pertinente possible.

Le Président (M. Filion): Pour les fins du Journal des débats, M. Marc Morin?

M. Morin (Marc): C'est cela. Alors, le sens du terme "engagement", dans les tableaux qui vous ont été fournis, indique simplement que les projets ont été approuvés par le comité de gestion de l'entente et deuxièmement qu'ils ont été approuvés par les ministres responsables de l'entente. Cela ne signifie pas que la dépense est nécessairement engagée du point de vue du gouvernement. Cela signifie que les ministres se sont entendus et que le ministre proposera, dans un cas comme celui-là, la dépense au Conseil du trésor lorsqu'il sera prêt à commencer.

M. Brassard: Cela veut dire que cela a simplement franchi l'étape du comité directeur de chacune des ententes auxiliaires.

M. Morin (Marc): C'est cela.

M. Brassard: Les deux gouvernements se sont mis d'accord sur tels projets. D'accord.

On voit qu'une bonne partie des sommes est maintenant engagée et, au fond, la question que je pose, c'est une question un peu d'ordre général. Hier, aux crédits de l'OPDQ, le ministre responsable du Développement régional, M. Marc-Yvan Côté, a révélé qu'il était en train de préparer, de concevoir et de mettre au point un projet d'entente fédérale-provinciale sur le développement des régions, ce qui me fait dire, par conséquent, qu'on se prépare à la pré-entente, qu'on prépare de nouvelles ententes, qu'on négocie de nouvelles ententes pour remplacer celles qui vont venir à échéance et qui voient une bonne partie des sommes impliquées déjà engagées. C'est le cas au développement régional. J'aimerais savoir quelle est la vision des choses du ministre à ce sujet-là, son approche, sa stratégie, où il en est rendu à ce chapitre en termes de préparation de nouvelles ententes. A-t-il identifié les créneaux, les secteurs prioritaires où l'on négocierait de nouvelles ententes? Ce travail d'élaboration et de conception est-il en voie d'achèvement? A-t-il des échéanciers en vue, en termes d'entreprendre des pourparlers ou des négociations avec le gouvernement fédéral concernant de nouvelles ententes?

M. Rémillard: Oui, concernant ces ententes, en ce qui regarde par exemple l'EDER, on a conclu donc l'entente sur l'agro-alimentaire. Celle sur les pêcheries -c'est conclu - sera officiellement signée te 11 juin prochain. Mais on manque d'argent pour des ententes auxiliaires qui pourraient être plus complètes à certains niveaux. Il y a déjà eu des ententes auxiliaires en matière de communication, par exemple. Il pourrait y en avoir d'autres dans bien d'autres domaines, en matière de transport en particulier. J'ai demandé au ministre fédéral responsable de ces projets, M. Michel Côté, qu'on se rencontre pour en discuter. De fait, on doit se rencontrer dans les prochaines semaines et discuter de la possibilité de mettre plus d'argent sur d'autres projets particuliers.

Quant à ces projets, d'une façon plus particulière, je pourrais me référer encore à M. Morin qui pourra nous parler de certains projets actuellement à l'étude qui, j'en suis certain, peuvent vous intéresser.

M. Brassard: M. le Président, le ministre parle de certains secteurs.

M. Rémillard: C'est cela, de certains secteurs d'activité avec quelques projets probablement.

M. Brassard: Identifiés.

M. Rémillard: Bien sûr, on a aussi des possibilités d'ajouts dans les ententes déjà existantes, où on voudrait mettre plus d'argent et on voudrait développer certaines ententes.

M. Brassard: Ce sont deux volets, en fait. Parmi les ententes actuellement conclues et en application, en vigueur, y en a-t-il pour lesquelles les intentions du gouvernement sont fermes de demander au gouvernement fédéral des ajouts d'argent et une extension en termes de temps, premièrement, et, deuxièmement, je reviens à la question que je posais - c'est peut-être M. Morin qui peut y répondre - est-ce que vous avez déjà identifié d'autres créneaux,

d'autres secteurs, dans lesquels il serait souhaitable et utile que le Québec négocie des ententes fédérales-provinciales de développement? (Minuit)

M. Rémillard: J'ai déjà écrit au ministre Côté, le ministre de l'Expansion industrielle pour le gouvernement fédéral, je lui ai déjà écrit comme je le mentionnais tout à l'heure, et je lui ai mentionné des domaines d'activité où nous pourrions poursuivre notre action conjointe et d'autres domaines où nous pourrions commencer. En particulier, on aimerait ajouter de l'argent dans des secteurs comme celui du développement industriel. Alors dans le développement industriel, il y a des possibilités très intéressantes et on voudrait ajouter une somme importante pour le développement industriel qui pourrait être développé dans un programme conjoint avec le gouvernement fédéral.

Dans le domaine des équipements culturels aussi, nous voulons ajouter des sommes d'argent parce que maintenant notre entente est épuisée et nous avons encore beaucoup à faire dans ce domaine et nous voulons développer les équipements culturels. C'est un secteur dont j'aimerais aussi discuter avec M. Côté.

M. Brassard: Cela pourrait permettre à la ministre des Affaires culturelles de lever son moratoire sur les équipements culturels.

M. Rémillard: Et ensuite, en ce qui regarde le développement des transports, sujet très important au Québec, on sait à quel point avec un territoire aussi vaste et aussi difficile et aussi par la géographie et le climat, à quel point il est important d'avoir un bon réseau de transport et là aussi, notre enveloppe est épuisée. 11 faudrait renégocier d'autres ententes avec le gouvernement fédéral pour développer nos transports.

Dans les matières d'agriculture et de pêche, maintenant c'est fait. Mais, il n'est pas dit qu'il ne faudrait pas réexaminer le tout pour pouvoir faire quelques petits réajustements aussi. Mais si vous me permettez, si vous voulez avoir encore plus de précisions, M. Morin, qui est avec moi, qui travaille d'une façon plus précise sur des projets, pourra vous donner cette information.

M. Morin (Marc); Je pourrai simplement ajouter qu'il y a également certains types d'entente qui sont prévus dans l'EDER, qu'on appelle des ententes de concertation et d'harmonisation, et actuellement, une est signée dans le domaine des communications, il y en a une autre qui est en négociation dans le domaine minier. Il faut dire aussi qu'une négociation est en cours actuellement pour la signature de la conclusion d'une entente d'aide aux autochtones, de développement des autochtones.

M. Brassard faisait allusion tantôt à l'entente que M. Côté souhaiterait voir réaliser avec le fédéral. Il s'agit d'un complément aux ententes actuelles et non pas d'une entente qui remplacerait les ententes actuelles. Il s'agirait surtout d'une entente de concertation, des interventions des deux ordres de gouvernement et il espérerait peut-être avoir également un fonds commun que les deux gouvernements pourraient dépenser pour venir en aide à certaines régions en difficulté.

M. Brassard: Je reviens. En dehors des ententes auxiliaires actuellement en vigueur, est-ce que vous en êtes rendus à avoir identifié certains secteurs qui ne sont pas couverts présentement et qui devraient l'être, que vous jugez quant à vous prioritaires, je ne sais pas, dans le domaine municipal par exemple? Est-ce que vous avez identifié actuellement, au moment où l'on se parle, un certain nombre de secteurs prioritaires?

M. Morin (Marc): Pour les prochaines négociations, pour les cinq années qui suivront les ententes actuellement en vigueur, on a un problème important qui est celui des réorientations de la politique du développement régional du gouvernement fédéral. Il y a eu, la semaine dernière, une réunion des ministres du développement régional à Whitehorse. Ils espéraient connaître la nouvelle politique fédérale qui devait être annoncée et le ministre Côté a indiqué qu'il n'était pas prêt à annoncer sa politique. Alors on ne sait même pas s'il continuera à y avoir des ententes avec le gouvernement fédéral.

Dossiers importants pour le Québec

M. Brassard: Merci, M. le Président, moi cela va pour les ententes fédérales-provinciales. Je passerais peut-être à un autre sujet. En Chambre, j'avais posé la question au ministre, à partir d'un article du Devoir, dans lequel on laissait entendre qu'il y a une espèce de concertation entre les deux gouvernements, le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral, compte tenu du contexte constitutionnel, une espèce de concertation afin de mettre en veilleuse ou de mettre une sourdine à certains dossiers majeurs pour le Québec dont l'impact économique est reconnu comme considérable. On en citait un certain nombre - c'est ce que j'avais fait à l'époque en Chambre - je pense à la création de l'agence spatiale qui a suscité bien des démarches de la part des intervenants, montréalais surtout, pour qu'elle soit localisée à Montréal compte tenu de la

concentration de l'Industrie aéronautique et spatiale canadienne à Montréal et des emplois qu'on y retrouve. Tous les intervenants jugeaient qu'il allait de soi que cette agence spatiale devait se retrouver à Montréal. Actuellement, cela semble au point mort. On n'en entend plus parler. On est étonnamment silencieux sur cette question et ce dossier.

Le deuxième dossier, c'est le Centre bancaire international. À l'origine, un centre financier international était réclamé pour Montréal. Cela s'est réduit à un simple centre bancaire. La portée de ce projet a été considérablement réduite, si bien que le ministre des Finances du Québec a même déclaré au début de l'année que cela n'avait plus finalement qu'une valeur symbolique. Ce dossier aussi ne semble plus faire l'objet de démarches ou de discussions et il semble également en veilleuse.

C'est la même chose pour le dossier de la papeterie de Matane. On sait que le gouvernement du Québec souhaite la mise en place d'une papeterie à Matane. Il est disposé à y apporter son soutien financier à condition, bien sûr, que le gouvernement fédéral en fasse autant. Donc, une demande formelle a été faite auprès du gouvernement fédéral pour subventionner une papeterie à Matane. On n'en entend plus parler non plus, même si le ministre de l'Énergie dit que le dossier chemine; il chemine doucement.

Même phénomène aussi avec les approvisionnements en gaz naturel de Pétromont. On sait ce qui se passe. Le ministre de l'Énergie fédéral refuse de se prononcer sur ce dossier majeur qui a des implications considérables en termes d'investissements et de création d'emplois pour la région de Montréal. C'est aussi au point mort. On pourrait également parler du rapport Picard sur le développement économique de Montréal. On peut dire qu'il a aussi été mis sur la glace.

Tout cela est d'une certaine façon relié au dossier constitutionnel. Il semble que les deux gouvernements se soient entendus pour ne pas faire de vagues dans le lac Meech, pour que le lac Meech soit une nappe d'huile calme, sans vagues. C'est peut-être cela la nouvelle diplomatie du ministre responsable des Affaires canadienne qu'il qualifie de tranquille et efficace. Dans ces cas-là, je la trouve tranquille en effet, mais je ne suis pas porté à la trouver efficace, parce qu'il s'agit de dossiers majeurs pour le Québec, de dossiers à caractère économique, de dossiers qui ont des impacts considérables au plan économique en termes d'investissements, de retombées et de création d'emplois. Je pense que c'est important pour le Québec, compte tenu du taux de chômage qu'on retrouve au Québec et du niveau d'investissements qui est insuffisant.

Par conséquent, il y a de quoi s'inquiéter. Il n'y a pas de fumée sans feu, M. le Président. Si ces rumeurs qui circulent et ces articles qu'on retrouve dans les journaux qui font état d'une entente plus ou moins tacite entre les deux gouvernements pour mettre sur la glace, si vous voulez, un certain nombre de projets majeurs de façon, sans aucun doute - c'est sûrement l'intention stratégique - à ne pas mécontenter le Canada anglais, de façon à éviter que, dans le Canada anglais, dans les autres provinces, on en arrive à considérer que le Québec est favorisé indûment et que, par conséquent, cela aurait des effets négatifs sur l'évolution du dossier constitutionnel.

Voilà ce qui circule et on est, évidemment, inquiets, parce qu'on se dit qu'il arrive, précisément, que ces gros dossiers majeurs sont mis en veilleuse. Leur cheminement est pratiquement arrêté, ils ne connaissent pas une évolution rapide, les décisions sont reportées, sont retardées parce qu'elles risqueraient, si elles étaient prises en faveur du Québec, de nuire à l'évolution du cheminement du dossier constitutionnel.

Alors, j'aimerais bien que le ministre responsable de la nouvelle diplomatie du Québec - tranquille, sans aucun doute, efficace, j'ai quelques doutes - nous rassure en nous indiquant que ces dossiers majeurs: agence spatiale, centre bancaire, papeterie de Matane, approvisionnement en gaz naturel de Pétromont, vont reprendre leur évolution rapidement et vont connaître des décisions rapides, également. Parce que je pense que c'est important, sur le plan économique, pour le Québec.

Est-ce que le ministre est en mesure d'affirmer solennellement, devant les membres de cette commission, qu'il n'y a aucune concertation entre les gouvernements du Canada et du Québec pour retarder, reporter à plus tard des décisions sur des dossiers majeurs intéressant le Québec et étant susceptibles de favoriser son développement économique.

M. Rémillard: M. le Président, je déclare, solennellement, devant les membres de cette commission, qu'il n'y a aucune entente, secrète ou non secrète, qui ferait que des dossiers, concernant le Québec, à néqocier avec le gouvernement fédéral, soient mis en veilleuse pour quelque objet ou but possible. Au contraire, M. le Président, tous ces dossiers, qui ont été énumérés par le député de Lac-Saint-Jean, sont actuellement dans une phase très active. Je dis, par exemple, et j'en informe le député de Lac-Saint-Jean, qu'il y a un comité qui a été formé pour tous les projets concernant la région de Montréal. Un comité, dis-je, qui est sous la présidence conjointe du ministre Robert de Cotret, du côté fédéral, et du ministre Daniel Johnson, du côté provincial, avec un secrétariat permanent. Ces

ministres et ce comité se réunissent une fois par mois et le secrétariat est là, pour ce comité, et agît d'une façon permanente pour faire avancer tous les dossiers concernant la région de Montréal.

Quant à des sujets comme Matane, le député de Lac-Saint-Jean me disait, tout à l'heure, au début de sa question: J'ai posé cette question au ministre en Chambre. Oui, je m'en souviens très bien, il m'a même dit, à ce moment-là, si ma mémoire est bonne, que j'étais le numéro 4 du dossier constitutionnel. (0 h 15)

M. Brassard: Je lui ai dit cela?

M. Rémillard: Eh oui, il m'a dit cela. Il a peut-être changé d'idée, ce soir, mais je vais voir si je suis encore classé à ce niveau. Il est un petit peu tard, mais quand même. Je lui avais dit qu'il n'y avait pas d'entente secrète et mon collègue, te ministre responsable de l'Énergie, s'était levé en Chambre et avait complété la réponse en disant qu'il avait rencontré, dans les derniers jours, les responsables fédéraux, dont le ministre Michel Côté, en ce qui regarde le projet de papeterie à Matane. Ces dossiers sont très actifs, et, pour faire le point, si vous voulez, sur nos négociations fédérales-provinciales concernant chacun de ces dossiers, sans rentrer dans le contenu - parce que vous comprendrez, M. le député que cela regarde les ministres sectoriels - si vous me permettez, je vais encore demander à M. Marc Morin de nous faire le point sur la situation, à ce jour, de nos relations avec le gouvernement fédéral sur ces dossiers.

M. Morin (Marc): Pour la papeterie de Matane, il y a un projet de Saugbrugs qui avait été abandonné et on a annoncé, depuis, que M. Péladeau, après avoir acquis Donohue, songeait à relancer le projet de la papeterie de Matane. Le gouvernement fédéral a pris des engagements de réserver des fonds pour cette papeterie. Cependant, depuis que M. Péladeau a fait des démarches pour obtenir la contribution fédérale, aucune réponse ne nous a encore été donnée. Cela ne signifie pas qu'il y a eu une réponse négative ou positive. Le gouvernement fédéral étudie, actuellement, quelle suite il donnera à cette nouvelle demande pour un nouveau projet de papeterie à Matane.

Dans le dossier du transport des liquides du gaz pour la pétrochimie - c'est un dossier qui nous occupe au plus haut point et qui préoccupe grandement, en particulier, M. Ciaccia - le problème qui se pose, actuellement, c'est que l'Interprovincial Pipe Line, la société qui devait transporter les liquides de gaz de Sarnia à Montréal, a retiré la demande qu'elle avait faite auprès de l'Office national de l'énergie et ne semble plus intéressée à transporter les liquides du gaz, alors, ici, ce n'est pas un problème intergouvernemental. Il s'agit du retrait de la demande du transporteur auprès de l'Office national de l'énergie. Des démarches sont actuellement entreprises, auprès du gouvernement fédéral, d'une part, pour que l'Interprovincial Pipe Line révise sa décision et, d'autre part, pour que l'Office national de l'énergie statue pour l'attribution d'un permis de transport des liquides du gaz de Sarnia jusqu'à Montréal.

Dans les autres dossiers, il y avait...

Le Président (M. Filion): De l'aérospatiale et du centre bancaire international.

M. Morin (Marc): Pour l'agence spatiale, évidemment, tout le monde attend la décision fédérale. Je pense que c'est tout ce qu'on peut dire. It y a des groupes... M. Johnson fait des pressions énormes auprès de M. de Cotret, à Montréal, dans le cadre du comité dont le ministre a parlé tantôt. Mais il y a également des groupes de pression qui se sont organisés, dans la région de Montréal, à l'instigation de plusieurs hommes politiques de la réqion. Je pense que la décision est fédérale et strictement politique, pour l'instant.

M. Brassard: M. le Président, je connaissais à peu près l'évolution de ces dossiers. La question que je pose... D'abord, je prends acte de l'engagement solennel du ministre, d'une part. D'autre part, je lui dis cependant ceci: si, dans des délais raisonnables, pour certains de ces dossiers, je pense à la papeterie de Matane... Des délais raisonnables, cela signifie d'ici à quelques semaines. Pour l'agence spatiale, c'est d'ici à quelques semaines. Cela fait assez longtemps que ces dossiers traînent dans le paysage. Pour la question de l'approvisionnement du gaz naturel également. Je lui dis ceci: s'il n'y a pas de décisions qui se prennent sur ces dossiers majeurs, dans des délais raisonnables et, pour moi, raisonnable signifie quelques semaines, j'en arriverai à la conclusion qu'on s'est entendu, jusqu'à ce que le dossier constitutionnel soit parvenu à un stade te! qu'il n'y ait plus de risques de "floper" - vous me permettez l'expression -de connaître un échec, pour retarder les décisions sur ces dossiers-là. Autrement dit, je prends la parole du ministre avec la réserve que si, concrètement, il n'y pas de décisions prises sur ces dossiers dans les semaines qui viennent, je vais non pas prétendre que le ministre a menti, Dieu m'en garde, mais qu'il n'était pas au courant de l'entente tacite qui s'est conclue entre les deux gouvernements. Alors, on va attendre les résultats, on va attendre quelques semaines, on verra ce qui se passera sur ces dossiers majeurs, on verra si des décisions

seront prises, favorables au Québec, et après cela, on pourra s'en reparler.

Champ de tir de L'Ascension

J'aurais un dernier sujet, M. le président, à traiter. Cela concerne mon comté. C'est un sujet que le ministre connaît bien, qui relève de son champ de responsabilité, c'est le champ de tir de L'Ascension. On ne retracera pas toute l'évolution du dossier, on va seulement aller à la fin. Je sais qu'à la suite d'une consultation qu'il avait effectuée en région, après avoir rencontré des intervenants, le caucus des députés de la région, le ministre avait écrit au ministre Benoît Bouchard, lui proposant - si ma mémoire est bonne, vous me corrigerez si j'ai tort - la mise en place d'une sorte de comité conjoint fédéral-provincial qui serait mandaté pour faire le tour de la question, pour examiner les tenants et les aboutissants de ce dossier et en arriver, ensuite, à faire une recommandation. Ma question, au fond, est très simple: le ministre a-t-il eu une réponse à cette missive envoyée au ministre Bouchard, a-t-il eu une réaction, une réponse écrite et quelle est la nature de la réponse?

M. Rémillard: C'est un sujet qui retient beaucoup notre attention. Comme vous le savez, M. le député de Lac-Saint-Jean, nous avons rencontré votre caucus lors de la visite que nous avons faite au mois de février dernier, le 20 février. On a consulté beaucoup d'intervenants de la région du Lac-Saint-Jean pour avoir leur point de vue et il est évident que les réactions sont partagées quant à l'établissement de ce champ de tir pour avions F-18. Quant à nous, du gouvernement, il y a un premier principe qui nous guide, c'est celui de la sécurité de la population. Nous voulons aussi assurer la protection de l'environnement et nous voulons assurer aussi les meilleures retombées économiques pour la région visée. C'est dans ce contexte que j'ai suggéré à M. Bouchard, ministre de l'Emploi et de l'Immigration, ministre responsable de la région du Lac-Saint-Jean, un groupe de travail conjoint fédéral-provincial pour faire le point sur cette situation, parce que nous avons des questions importantes qui sont encore sans réponse et que, de notre côté, plus de sept ministères nous ont donné un avis fort mitigé quant à l'opportunité d'avoir ce champ de tir, en fonction du respect des critères que j'ai mentionnés tout à l'heure.

C'est donc dans ce contexte que j'avais proposé au ministre Bouchard un groupe de travail conjoint, mais le ministre Bouchard m'a écrit pour me dire qu'il n'acceptait pas une telle solution. Je l'ai aussi rencontré, il m'a dit: Je n'accepte pas une telle solution, on est prêt, maintenant, à procéder, décidez- vous. Je lui ai dit: On veut avoir des réponses à des questions plus précises, il faut étudier la situation et on a besoin que vous participiez à ce groupe de travail parce qu'il s'agit d'un domaine de la Défense nationale et on a des questions qu'on est légitimement en droit de se poser, pour la population concernée du Lac-Saint-Jean et vous devez nous permettre d'avoir ces réponses, d'étudier la situation. Entre-temps, j'ai reçu aussi une lettre du ministre Beatty, ministre de la Défense nationale. C'est le ministre responsable du dossier, M. Bouchard étant le ministre responsable de la région où a lieu le projet. Le ministre Beatty est le ministre responsable de ce dossier parce que ministre responsable de la Défense.

J'ai répondu à sa lettre en lui disant que nous aimerions...

M. Brassard: La lettre du ministre de la Défense nationale allait dans quel sens? Demandait-elle au gouvernement de prendre une décision dans les plus brefs délais?

M. Rémillard: C'est cela. Le ministre nous disait: Bien, écoutez, prenez une décision. Qu'est-ce que vous en pensez? Qu'est-ce que vous voulez faire? Alors, j'ai écrit, au nom du gouvernement, pour lui dire que j'avais déjà discuté de ce sujet avec M. Bouchard. Il ne semblait pas très au courant, je ne sais pas s'il y avait eu des échanges entre ces deux ministres. Je lui ai mentionné cette intention, pour nous, d'avoir un groupe de travail. Je lui ai dit: Il s'agirait d'avoir un groupe de travail et je suis persuadé que, dans quelques mois, cela pourrait prendre trois ou quatre mois, on sera en mesure de donner une réponse, en étant assurés que la sécurité des personnes et l'environnement seraient protégés. Il y a des gens qui ont droit à l'environnement. C'est un droit fondamental, le droit à la qualité de l'environnement, tout comme le droit à l'évolution économique de la région. On nous parle, présentement, d'un champ de tir pour les F-18, on veut bien, mais de quoi va-t-on nous parler demain? Qu'est-ce qu'on va ajouter? Qu'est-ce qu'on veut faire? La base de Bagotville est très importante pour l'avenir économique de cette réqion dont le gouvernement a à coeur le développement économique. Il l'a montré à plusieurs reprises, ces derniers temps. Alors, il faut que l'on puisse avoir le point de vue du gouvernement fédéral, par le ministre directement concerné, et qu'on puisse faire le point, recevoir des réponses à nos questions pour pouvoir procéder dans ce dossier le plus tôt possible.

Alors, M. Beatty terminait sa lettre en disant: "Si vous désirez de plus amples renseignements à ce sujet, n'hésitez pas de communiquer avec moi." Alors, c'est ce que nous avons fait et, maintenant, j'attends une

réponse à ma lettre, de M. Beatty. Je n'ai pas encore reçu de réponse. J'espère qu'on va répondre à cette lettre le plus tôt possible, parce que c'est un dossier pour lequel on doit prendre une décision, pour le mieux-être possible de la population, le plus tôt possible,

M. Brassard: Si je comprends bien, dans la lettre que vous avez écrite au ministre de la Défense, vous lui recommandez la même chose que vous avez suggérée à M. Bouchard, c'est-à-dire un comité conjoint fédéral-provincial. Ce comité conjoint serait-il habilité à tenir des audiences publiques, comme vous l'avez évoqué lors de votre visite dans la région?

M. Rémillard: Alors, c'est une possibilité, mais ce n'est pas une nécessité, en ce sens que nous voulons un groupe de travail léger, le plus efficace possible, capable de faire le point, d'aller chercher l'expertise et de répondre aux questions que nous nous posons. S'il faut faire quelques audiences, peut-être bien, mais on n'en voit pas nécessairement l'obligation. Ce groupe de travail pourrait fort bien procéder le plus rapidement possible et nous fournir les informations nécessaires pour que nous puissions prendre une décision en bonne connaissance de cause.

M. Brassard: Dernière question, M. le Président. Je comprends, et c'est tout à fait normal, que vous souhaitiez obtenir toutes les informations pertinentes pour permettre au gouvernement du Québec de prendre une décision, mais il ne faut pas oublier, non plus, que la population et les intervenants du milieu souhaitent aussi avoir accès à ces informations.

L'un des problèmes qui se posent, justement, c'est que le gouvernement du Québec est peut-être insuffisamment informé pour prendre une décision, mais, dans la population aussi - vous connaissez un peu le débat qui a entouré toute cette question -beaucoup se jugent insuffisamment informés et il faudrait que l'information circule.

M. Rémillard: Je crois que vous soulevez un point très important et vous avez raison de dire que la population doit être informée, puisqu'il s'agit de sa sécurité. Donc, dans la mesure du possible, je crois qu'il faut informer la population de tous les éléments qui vont nous permettre de prendre une décision.

Base de plein air de Longueuil

Le Président (M. Filion): M. le ministre, je dois vous avouer que, plus l'heure avançait, plus j'avais le goût de vous poser des questions sur l'entente intervenue à 5 heures du matin ou aux petites heures du matin, è Ottawa. Comme cela, on aurait pu participer peut-être à ce même état d'esprit qui a fait que vous considérez l'article 2.4 comme étant une clause de sauvegarde et de protection absolue de la langue française. Mais je résisterai à cette tentation, ne serait-ce que pour vous éviter trop de nuits blanches dans une même semaine.

Ma question porte donc uniquement sur un cas de comté, également, soit la base de plein air de Longueuil qui changera d'ici peu d'appellation et deviendra parc régional. Elle a reçu l'aval du gouvernement du Québec pour poursuivre son plan d'aménagement, son plan directeur, et le gouvernement du Québec y injectera certaines sommes d'argent dans les semaines qui viennent. Selon les informations que j'ai obtenues, sous toutes réserves, donc - je n'en ai pas eu connaissance personnellement - il semblerait qu'une entente fédérale-provinciale soit tout à fait imminente, relativement au financement des parcs régionaux et que, peut-être, encore une fois - je vous dis cela sous toutes réserves, M. le ministre - cette entente permettrait un financement ou une participation quelconque du gouvernement fédéral au développement de cette base de plein air de Longueuil qui deviendra, encore une fois, parc régional. Mes informations sont-elles exactes? Si oui, cette entente existe-t-elle effectivement? Est-elle intervenue ou doit-elle intervenir d'ici peu? C'est une question très technique, je l'admets. Peut-être que les gens autour de vous ont l'information ou peut-être, suis-je...

M. Rémillard: M. le Président, je n'ai peut-être pas les informations nécessaires pour répondre vraiment à votre question, mais, de fait, des projets d'entente sont actuellement négociés par le ministre des Finances, M. Levesque, le ministre responsable du Développement réqional, M. Côté, et le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, M. Picotte, pour des parcs régionaux, dans le domaine récréatif. C'est en marge des ententes de l'EDER. Je ne crois pas que ces négociations soient actuellement dans un état très avancé, en tout cas pas en ce qui regarde des projets très précis comme celui que vous mentionnez. Si vous me le permettez, je prendrai note de votre question et je pourrai vous donner une réponse.

Adoption des crédits

Le Président (M. Filion): Alors, je vous remercie, M. le ministre. Est-ce que le programme du secteur Affaires intergouvemementales, des Relations internationales et du Conseil exécutif est adopté?

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Filion): Est-ce que l'ensemble des programmes du Conseil exécutif - parce qu'il s'agissait là de la dernière étape du Conseil exécutif - est adopté?

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Filion): Donc, nous ajournons. Je remercie...

M. Rémillard: M. le Président, si vous me le permettez.

Le Président (M. Filion): Oui.

M. Rémillard: Je voudrais simplement vous remercier et remercier l'Opposition ainsi que les fonctionnaires qui m'ont accompagné et qui ont fait un travail tout à fait remarquable. Vous savez, préparer ces crédits, c'est un gros travail, énorme et immense. Je voudrais les remercier. Je suis très fier du travail qu'ils accomplissent. Ce sont des gens très compétents et je les remercie d'avoir fait ce travail pour nous.

Le Président (M. Filion): On vous remercie. Nos travaux sont donc ajournés sine die.

(Fin de la séance à 0 h 36)

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