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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Tuesday, March 17, 1987 - Vol. 29 N° 43

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur le projet de loi 104 - Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse


Journal des débats

 

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Filion): Bienvenue aux membres de la commission. Je déclare la séance de la commission des institutions ouverte. Pour les personnes qui sont présentes avec nous ce matin, ainsi que pour les membres de la commission, je rappellerais le mandat que nous poursuivons. Nous en sommes à la cinquième journée d'exécution de ce mandat qui est de procéder à une consultation générale et de tenir des audiences publiques sur le projet de loi 104, Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse.

Je demanderais à notre secrétaire d'annoncer les remplacements.

La Secrétaire: M. Johnson (Anjou) est remplacé par Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Kehoe (Chapleau) par M. Hamel (Sherbrooke), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce) par Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Vallières (Richmond) par M. Thérien (Rousseau).

Le Président (M. Filion): C'est bien. S'il y a des corrections à apporter à ces remplacements, on pourra les faire durant nos travaux.

Je rappellerais notre ordre du jour d'aujourd'hui: À 10 heures - c'était prévu pour 10 heures - on voit le représentant du regroupement de cinq organismes jeunesse de l'Outaouais, M. Guylain Hotte, qui est déjà installé à la table des invités. Â la suite de ce regroupement, nous entendrons un représentant du Collectif de communication de Montréal, Vox Populi. La personne est également dans la salle, M. Ravatel. Par la suite, nos travaux seront ajournés pour reprendre à 15 heures avec les Travaux communautaires du Haut-Richelieu Inc. À 16 heures, des représentants de la Maison Tangente et, à 17 heures, les représentants de L'Antre-temps.

Ce soir, nous ne siégerons pas. Demain et jeudi, nous allons siéger et, avec la secrétaire, ainsi que le comité directeur, nous sommes en train d'examiner les possibilités de terminer nos travaux jeudi, mais rien n'est moins sûr. À l'oeil, on peut calculer comme également possible que nous devions continuer une journée la semaine prochaine. Est-ce qu'il y a des questions sur nos travaux?

Mme Blackburn: Terminer les travaux cette semaine, est-ce que cela voudrait dire simplement les audiences?

Le Président (M. Filion): Oui.

Mme Blackburn: Parce que je ne vois pas qu'on soit à même de pouvoir faire la clôture cette semaine.

Le Président (M. Filion): Vous vous souvenez de l'entente qui est intervenue au début de nos travaux, une période avait été prévue pour les représentants de chacun des deux partis, leur permettant d'adresser des remarques de clôture.

Mme Blackburn: Oui.

Le Président (M. Filion): De mémoire -je peux vérifier si vous le désirez, on ne l'a pas ici - il y a une période de 45 minutes qui avait été allouée à chaque côté. Encore une fois, nous allons tenter de terminer nos travaux cette semaine, mais plus probablement je pense qu'il faudra continuer une journée la semaine prochaine. Est-ce qu'il y a d'autres questions sur le déroulement de nos travaux? Cela va.

Regroupement de cinq organismes jeunesse de l'Outaouais

Je voudrais donc souhaiter la bienvenue à M. Guylain Hotte, représentant du regroupement de cinq organismes jeunesse de l'Outaouais. Il est lui-même du Relais des jeunes Gatinois et il est le porte-parole de ce regroupement de cinq organismes jeunesse. Il serait peut-être bon, M. Hotte, que vous nous fassiez part, avant de nous résumer votre mémoire, de la liste des cinq organismes que vous représentez. Ensuite, je vous inviterais à présenter votre mémoire, tout en vous rappelant et en rappelant aux autres invités de ce matin qu'une période d'une heure est allouée à chacun des groupes. La période est divisée comme suit: 20 minutes pour la présentation du mémoire, 20 minutes d'échanges avec les représentants du groupe ministériel et 20 minutes d'échanges avec les représentants de l'Opposition. Évidemment, si vous prenez moins que 20 minutes pour la présentation de votre mémoire, ce temps est versé à la période d'échanges.

M. Hotte, bienvenue.

M. Hotte (Guylain): Merci. M. le Président, membres de la commission, en tant que représentant du regroupement des organismes jeunesse suivants, c'est-à-dire Centre Adojeune, Relais des jeunes Gatinois, Centre jeunesse de l'Outaouais Inc., Centre de consultation l'unité Inc., et La Relance, il nous fait plaisir de vous adresser la parole sur le projet de loi 104 portant sur le Conseil permanent de la jeunesse.

Parce que nous oeuvrons auprès des jeunes directement, soit dans le domaine du loisir, dans le domaine social ou dans celui du travail, c'est-à-dire des jeunes entre 12 et 30 ans; parce que nous croyons que, dans l'Outaouais, la problématique jeunesse est d'une acuité équivalente, sinon pire que chez ses consoeurs les autres régions du Québec; parce que nous croyons au processus de consultation des commissions parlementaires, il nous a semblé approprié et légitime de vous présenter ce mémoire et de venir vous vous en parler.

Lors de son allocution du 24 février, M. le premier ministre nous parlait de la nouveauté du processus de sélection des conseillers et de partenariat entre les jeunes et l'État. Je le cite: "II s'agit là d'une formule qui tient compte, comme il se doit, de l'évolution de notre culture démocratique et qui mise essentiellement sur un véritable partenariat des jeunes et de l'État dans la recherche de solutions, ainsi que dans la définition des orientations fondamentales de l'administration".

Voilà pour nous une approche que nous accueillons favorablement dans la mesure où elle est suivie de gestes concrets. En effet, le projet de loi 104, pour nous, est un geste concret. De plus, sous réserve des principes devant guider son application, le projet de loi 104 est accueilli favorablement par notre groupe. Je dois dire que dans l'Outaouais il existe en ce moment un comité consultatif au niveau municipal. C'est un premier exercice qui se fait. Je dois dire que c'est profitable relativement à cet exercice. Je crois que le conseil permanent proposé ici est un peu supérieur, pour autant qu'il respecte les principes d'autonomie, de légitimité et d'efficacité. Ce sont des principes de base que nous tenons à faire respecter.

Enfin, nous recommandons que le Conseil permanent de la jeunesse et le Secrétariat à la jeunesse offrent des services complémentaires.

Nous avons quelques recommandations sur le projet de loi et des remarques par rapport à la composition du conseil permanent. Évidemment, nous proposons qu'au conseil soient représentées les régions du Québec et même nous proposons d'avoir treize membres, c'est-à-dire deux membres flottants qui pourraient représenter les régions avec une grande densité urbaine comme Québec et Montréal. Nous recommandons aussi d'avoir une politique de concertation régionale qui permettrait aux membres du conseil de consulter les organismes jeunesse de son milieu; c'est-à-dire que nous voulons un passaqe entre la base et les élus. Nous voulons un mécanisme de concertation que le conseil pourrait élaborer. Pour nous, le passage est très important, surtout pour les jeunes qui ont une vue du pouvoir un peu marginalisée. Il est important non seulement de laisser voir, mais que dans la pratique il y ait un passage.

Quant à la nomination du président et des vice-présidents, nous recommandons que les membres du conseil nomment trois personnes parmi eux pour combler les fonctions de président et de vice-présidents et que le ministre nomme le président parmi les trois membres.

Quant à la durée du mandat, nous recommandons un mandat de trois ans pour le président afin d'assurer une continuité au sein du conseil, un mandat de deux ans pour les vice-présidents et une rotation au tiers quant aux gens non rémunérés ou n'étant pas de l'exécutif.

Quant à la vacance des membres du conseil, nous recommandons que le collège électoral ne soit pas dissous et qu'une vacance au sein du conseil soit remplacée par un membre du collège.

Quant à la fréquence des réunions du Conseil permanent de la jeunesse, nous suggérons une fréquence de réunion d'une fois par mois à la place de deux fois, comme c'est indiqué, afin de maintenir la participation des membres non actifs.

Organisme jeunesse, secteur d'activités. Il y a une problématique au niveau de l'identification à ce sujet. Plusieurs organismes vont travailler dans le secteur social, du loisir, ou culturel. Ce n'est qu'un biais qu'ils utilisent pour arriver à leurs fins. Il y a une difficulté d'identification. Nous recommandons, en conséquence, que des critères précis soient établis afin d'éviter la confusion et de favoriser l'uniformité dans la détermination des secteurs d'activités des organismes jeunesse. D'autant plus que la détermination des secteurs d'activités de l'organisme jeunesse est à la base de l'élection des membres du collège.

Critères de présentation des candidatures pour devenir membres du collège. Nou3 recommandons que la nomination des membres du Conseil permanent de la jeunesse soit basée sur des critères précis et plus élaborés concernant les qualités requises, autres que seulement l'âge.

En gros, on peut dire que l'on reçoit bien ce projet de loi, pour autant qu'on respecte les concepts de légitimité, d'efficacité pour avoir une crédibilité auprès

de la population jeunesse ou de la clientèle jeunesse. De plus, nous demandons une complémentarité par rapport au Secrétariat à la jeunesse. C'est, en gros, le résumé du mémoire des cinq organismes. Merci.

Le Président (M. Filion): Je vous remercie, M. Hotte. J'inviterais maintenant un représentant du groupe ministériel à amorcer l'échange avec vous, M. le ministre.

M. Gratton: Merci, M. le Président. Je désire remercier M. Hotte d'avoir consenti à venir nous faire connaître le point de vue des organismes jeunesse de la région d'Outaouais qu'il représente ce matin. Je suis particulièrement heureux que, pour une fois, des gens de l'Outaouais viennent ici à la commission parlementaire. Trop souvent, on a l'impression que les gens de l'Outaouais se sentent très loin de Québec. Ce n'est pas seulement la distance, mais peut-être beaucoup plus la proximité plus grande du gouvernement fédéral qui amène un tas de gens chez nous à considérer le gouvernement fédéral d'abord et, à l'occasion, à oublier le gouvernement provincial,

C'est malheureusement vrai en sens contraire également, dans la mesure où, à défaut de représentation adéquate des gens de l'Outaouais au sein de l'appareil gouvernemental, on risque toujours, évidemment, que la région de l'Outaouais ne soit en quelque sorte oubliée, à l'occasion, par le gouvernement du Québec.

Je souligne votre passage. Vous êtes le seul organisme qui a accepté l'invitation de la commission à venir faire connaître son point de vue. Je suis extrêmement heureux que vous soyez là ce matin.

Vous avez identifié dans votre mémoire les cinq organismes que vous représentez. J'apprécierais que vous nous précisiez un peu plus quels sont ces organismes, quels sont leurs objectifs, quelles sont leurs clientèles, quelles sont leurs approches à l'égard de leurs clientèles et, bref, que vous nous fassiez un tableau. Est-ce que ces cinq organismes sont très représentatifs de l'ensemble des organismes jeunesse dans le territoire de l'Outaouais?

M. Hotte: Je peux faire une typologie. On peut mettre quatre centres ensemble: Centre Adojeune, Relais des jeunes Gatinois, Centre jeunesse de l'Outaouais et Centre de consultation l'unité qui formeraient un tout par rapport à la jeunesse et, donc, qui ont à peu près les mêmes objectifs de prévention de la délinquance, de développer les milieux de vie pour les jeunes avec une approche et une méthode qui diffèrent d'un centre à l'autre. Mais c'est toute l'éducation par le biais du loisir et c'est un peu la formation et le développement des jeunes. Alors, ces quatre centres-là seraient ensemble. En gros, ils offrent des activités variées et on ne touche pas au domaine du travail. Le seul centre ou te seul organisme qui touche au domaine du travail, c'est la Relance. Elle touche directement l'employabilité comme moyen de développer la jeunesse. Il faut voir tout cela comme des moyens. Elle ne diffère pas nécessairement; c'est seulement le moyen qui est différent. La Relance s'adresse aux plus vieux également, c'est-à-dire aux 16-30 ans. Quant à nous, les quatre organismes, on s'adresse plus aux 6 ans et cela va jusqu'à 18 ans, 19 ans.

M. Gratton: Est-ce qu'on retrouve des professionnels dans vos organismes?

M. Hotte: Les conseils d'administration sont composés de professionnels et de représentants de la communauté. Quant au personnel comme tel, évidemment, comme les salaires ne sont pas excessifs, cela n'attire pas nécessairement la crème. Mais nonobstant ce fait, il y en a qui ont la vocation et qui veulent vraiment, fermement aider la jeunesse et ils s'en font une mission. Il y a des diplômés, si on peut dire, dans le domaine ou dans d'autres domaines connexes, c'est-à-dire en psycho-éducation, en sociologie, etc.

M. Gratton: Quelle est l'implication des organismes que vous représentez, s'il y en a une, dans la maison des jeunes sans emploi de Gatineau?

M. Hotte: Oui. Justement, ce n'est pas pour défendre mon clocher, mais le Relais des jeunes Gatinois, en ce moment...

M. Gratton: Allez-yl

M. Hotte: D'accord. Le Relais des jeunes Gatinois, en ce moment, prépare un projet par rapport à une coopérative d'emploi. Pour nous au relais, il est évident que c'est le processus qui est important; que la coopérative se réalise ou pas, en tant qu'intervenant, ce n'est pas ce qui est important, c'est plutôt le processus. Le relais collabore avec le Centre des jeunes sans emploi, qui a un volet "jeunes entrepreneurs". C'est une ressource vraiment appréciée. C'est une expertise que le relais ne pourrait pas avoir et on apprécie beaucoup cette complémentarité.

M. Gratton: Si je comprends bien, les organismes que vous représentez oeuvrent surtout sur le territoire de la ville de Gatineau?

M. Hotte: La plupart, à l'exception du Centre jeunesse de l'Outaouais et de la Relance qui sont à Hull, sont à Gatineau.

M. Gratton: Est-ce que vous avez des communications ou des contacts avec d'autres organismes jeunesse du même type ou du même genre dans la partie périphérique de ta région, par exemple, en Haute-Gatineau, dans le comté de Pontiac?

M. Motte: Toujours pour le Relais des jeunes Gatinois, on a une vocation de patro. C'est un son de cloche commun aux gens du Québec, j'en suis sûr. On a des échanges avec le Patro de Québec, le Patro de Montréal et le Patro d'Ottawa. Il y a aussi des échanges qui se font avec des centres qui sont situés plus près de nous, c'est-à-dire des centres à Buckingham ou dans la région périphérique. On propose beaucoup d'échanges en ce sens avec les gens de Québec, de Montréal et de la région immédiate. Donc, au plan de l'animation et de la programmation politique, si on peut dire, il y a une concertation qu'on essaie de faire. C'est évident que les jeunes sont tout le temps désarmés et désorganisés, mats on essaie quand même de composer et d'intervenir au plan politique, à un moment donné, quand on peut.

M. Gratton Est-ce que, selon vous, il y a d'autres particularités à la problématique jeunesse de l'Outaouais par rapport au reste du territoire québécois que celles que vous avez mentionnées?

M. Hotte: Comme prémisse, je me dis tout le temps que les jeunes du Québec, c'est-à-dire du Lac-Saint-Jean, de l'Outaouais ou de Montréal, se ressemblent beaucoup. Il y a des caractéristiques et des problématiques spécifiques à l'Outaouais. Le taux de criminalité est très élevé dans l'Outaouais et ces modèles de maisons de jeunes ou de centres de jeunes sont justement, pour intervenir quant à cette problématique au niveau de la criminalité en Outaouais, Hull et Gatineau ont les records par rapport à cela. Alors, la criminalité, je dirais, ressort.

M. Gratton: Selon vous, est-ce que les contacts que vous entretenez, par exemple, avec les organismes ontariens sont de nature à vous fournir un éclairage différent de ce que peuvent recevoir, par exemple, des organismes du reste de la province? La façon de fonctionner des gens en Ontario est-elle différente de la nôtre`?

M. Hotte: Évidemment, par la nature des politiques des gouvernements, c'est différent. Au niveau des subventions, par exemple, le Patro d'Ottawa est très différent de ce côté-là. I! y a une minorité au niveau des Franco-Ontariens. Alors, au niveau de l'acuité, au niveau de haut-parleurs afin de se faire entendre, ils sont mieux équipés.

Alors, il y a une différence, c'est évident. (10 h 30)

M. Gratton: Est-ce que chez les jeunes anglophones de l'Outaouais québécois il y a participation à vos activités ou est-ce qu'il y a des organismes qui s'adressent spécifiquement aux jeunes anglophones?

M. Hotte: Les anglophones, je n'en connais pas beaucoup. Nous, on reçoit les anglophones par ta force des choses. Quand tu es en minorité dans un groupe, soit que tu as une personnalité forte ou que tu es vraiment né dans le quartier et que tu as appris à fonctionner avec les francophones. Mais des anglophones, il n'y en a pas plus que cela dans notre centre et dans les autres centres, non plus. Alors, au niveau des anglophones, il n'y a pas beaucoup de choses qui se font pour la jeunesse.

M. Gratton: Par rapport à vos recommandations sur le contenu du projet de loi 104, vous mentionnez qu'un mécanisme de consultation devrait exister entre le Conseil permanent de la jeunesse et les organismes dans les régions et dans les divers secteurs d'activité. Est-ce que vous avez réfléchi à ia forme précise que ce mécanisme de consultation pourrait prendre?

M. Hotte: C'est vraiment un aspect qu'on n'a pas plus poussé, c'est une suggestion. Ce qu'on veut comme principe, c'est un meilleur passage et que la base sente qu'il y a un passage démocratique dans ce sens. Quant aux mécanismes de concertation, on n'a pas donné plus de détails lè-dessus.

M. Gratton: Vous suggérez, par contre, que le conseil se charge de promouvoir cette concertation dans les régions.

M. Hotte: Oui, c'est cela.

M. Gratton: Nous retenons la notion de la complémentarité du travail que fait le Secrétariat è la jeunesse par rapport au Conseil permanent de la jeunesse. Pour nous, ce sont deux organismes fort distincts, bien que certains organismes sont venus nous recommander ici de fusionner les deux de façon qu'il y ait plus de ressources concentrées sur le Conseil permanent de la jeunesse. Quant à nous, il y a une différence fondamentale entre le travail et la mission du Secrétariat à la jeunesse, qui est un organisme gouvernemental qui doit informer les organismes jeunesse des programmes gouvernementaux et peut-être voir à la diffusion de tous les autres renseignements par rapport au Conseil permanent de la jeunesse qui est un comité "aviseur", un comité qui aura pour rôle principal de conseiller le gouvernement sur les diverses

politiques à adopter. Dans ce sens, je pense que vous pouvez être rassurés: il n'est pas question pour nous de confondre le rôle des deux organismes que sont le secrétariat et le conseil permanent.

M. Hotte: Ce processus annonce bien. C'est un geste concret pour nous, c'est important.

M. Gratton: Vous mentionnez également dans votre mémoire qu'on devrait peut-être augmenter le nombre minimal de réunions que devrait tenir le conseil permanent. Quant à nous, ce qu'on a inscrit dans la loi nous apparaît un minimum essentiel. Ce que nous craindrions en ajoutant au nombre, ce serait que le conseil lui-même pourrait constater que ce n'est pas nécessaire et pourrait tout simplement, soit ne pas le respecter ou soit tenir des réunions dans le simple but de respecter la loi.

La question que je me pose: Est-ce que vous tenez vraiment à ce qu'on fasse une obligation plus rigoureuse que celle qui est faite à l'article 12 de se réunir au moins une fois par deux mois? Cela fait quand même six réunions annuellement.

M. Hotte: Non, je pense que c'était dans l'optique de maintenir une participation active des non-membres. Mais s'il y a une bonne délégation des responsabilités, je pense que cela peut être acceptable que ce soit une fois à tous les deux mois. C'était dans l'optique de faire participer les non-membres, d'augmenter le minimum. Mais, s'il y a une bonne délégation des responsabilités et une efficacité qui se fait, je pense qu'on peut agréer à cela, il n'y a pas de problème.

M. Gratton: D'ailleurs, vous n'êtes pas le premier organisme qui vient nous dire qu'on devra trouver les moyens de mettre à contribution les membres du collège électoral qui n'auront pas été choisis comme membres du Conseil permanent de la jeunesse. Il nous semble, en effet, que c'est au Conseil permanent de la jeunesse d'en juger. Nous ne croyons pas à la nécessité d'inscrire dans la loi que le conseil se prévale des ressources qui seront au collège électoral, mais il nous semble que cela va de soi.

M. Hotte: A l'interne, probablement.

M. Gratton: Le Conseil permanent de la jeunesse voudra sûrement faire appel à toutes les ressources qui sont là et qui sont déjà familières avec l'objectif et la mission du Conseil permanent de la jeunesse et qui pourront, par exemple, faire partie de façon privilégiée des comités ou des commissions que décidera de créer le Conseil permanent de la jeunesse.

Vous suggérez également d'établir des critères plus précis pour la nomination des membres du conseil. Quant à nous, on n'est pas réfractaires à préciser le plus possible. Je vous pose la question: Ne croyez-vous pas que le gouvernement, lui, pourrait s'astreindre à des critères beaucoup plus précis que ceux qu'on retrouve dans la loi quant à la nomination des membres du collège électoral, tout en s'assurant que la composition du collège électoral est la plus représentative possible? Je dis bien la plus représentative possible, parce qu'on s'imagine bien que cela ne pourrait être parfait à moins d'avoir un nombre tellement grand que cela deviendrait tout à fait inefficace.

Si le gouvernement, en nommant les membres du collège électoral - et vous ne faites pas objection à cet aspect du projet de loi - s'assurait qu'il y a une représentation valable au sein du collège électoral, on pourrait ensuite laisser au collège électoral le soin de procéder selon des critères un peu moins précis quant au choix des membres du Conseil permanent de la jeunesse.

M. Hotte: C'est une avenue qui est acceptable. C'est un point qui a été débattu. Il n'y a pas eu consensus nécessairement.

M. Gratton: Donc, il n'y a pas d'objection à ce qu'on procède de cette façon.

M. Hotte: Non, je veux dire que, si on le fait sur l'avenue du collège électoral, c'est-à-dire en ayant des critères plus précis, plus rigoureux en ce sens, on récupère sur la composition du conseil.

M. Gratton: Nous sommes particulièrement sensibles à l'idée que vous formulez d'un mandat plus long ou d'une façon d'assurer une certaine continuité. Sauf qu'on se rend compte que, par exemple, dans les organismes jeunesse, en moyenne les mêmes personnes oeuvrent pendant un peu plus d'un an à peine; d'où le critère qu'on a retenu de deux ans. Je ne sais si vous avez des remarques à cet effet.

M. Hotte: Sûrement. Vous me parlez d'expérience et de pratique. Justement, ils ne restent pas plus qu'une année. Nous convenons que, probablement, en ayant cette structure qui risque d'être assez bien établie et en ayant un budget, tout cela, cela pourrait être possible que des jeunes restent peut-être plus qu'un an. Cela permettrait une, continuité du conseil, c'est-à-dire qu'il n'y ait pas changement chaque année et de faire la roue chaque fois. Par la pratique, peut-être que les organismes ou les conseils ne tiennent pas plus qu'une année, mais en établissant bien les objectifs et en choisissant bien les personnes avec ce

processus de sélection, je pense qu'il serait possible qu'un président reste trois ans et les vice-présidents deux ans et qu'il y ait une rotation au tiers pour le restant.

M. Gratton: Justement, quand on parle d'une rotation au tiers, un des problèmes que pose la suggestion que vous faites, c'est de devoir réunir le collège électoral aussi souvent. La question qu'on se pose, c'est: D'abord, est-ce que dans les faits, on finirait par obtenir la collaboration de tous ces gens-là aussi souvent? Deuxièmement, est-ce que, finalement, il n'y aurait pas une autre façon d'en arriver à cette rotation qu'on recherche?

M. Hotte: Évidemment, on voyait tout le temps: le collège électoral va être composé, va être dissous. Les organismes présents voyaient cela plus comme un retour de ne pas dissoudre le Collège électoral et puis de faire un retour à la base. C'était dans ce sens, la rotation au tiers. Tu reviens au collège, le collège n'est pas dissout. Tu reviens, sans avoir à rendre compte au collège. On pensait qu'un exercice comme celui-là, c'était bien pour maintenir un intérêt.

M. Gratton: Oui. Il est à noter, évidemment, que, quant à ce désir que nous partageons d'assurer une certaine continuité, il y a toujours la possibilité de la reconduction d'un mandat pour une deuxième année.

M. le Président, je vais céder la parole à l'Opposition, quitte à revenir après si le temps le permet.

Le Président (M. Després): Avec plaisir, M. le ministre. Je passerai maintenant la parole à Mme la députée de Chicoutimi, de l'Opposition.

Mme Blackburn: M, le Président, M. Hotte, cela me fait plaisir, au nom de ma formation politique, de vous souhaiter la plus cordiale bienvenue. C'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai pris connaissance du mémoire. Je ne connais pas beaucoup, certainement moins bien que le ministre, les associations jeunesse de cette région, mais j'ai eu l'occasion d'y aller et d'échanger davantage sur ce que j'ai estimé une initiative extrêmement intéressante, le Centre des jeunes sans emploi. C'est proprement impressionnant. Je pense que cette façon de réunir dans un même lieu les différents services et les différents programmes touchant l'intégration sociale et professionnelle des jeunes est tout à fait emballante. Je souhaiterais avoir un tel centre dans mon comté. Cependant, cela prend un dynamisme peu commun et une détermination de tous les intervenants de la région, ce qu'ils ont réussi à obtenir. J'ai été vraiment impressionnée. Je pense que les parlementaires auraient intérêt à connaître l'expérience qui a cours actuellement dans cette région.

Si vous me le permettez, j'aimerais aborder votre mémoire au fil des pages parce que j'ai pris des notes. Je lis toujours avec beaucoup d'intérêt et beaucoup d'attention les mémoires qui sont présentés. Avant de commencer, je voudrais vous dire que j'apprécie votre participation parce que, chaque fois que les jeunes se privent de venir faire entendre leur voix, il y en a d'autres qui parlent à leur place. C'est dans cette optique que j'ai invité moi-même les jeunes à venir se faire entendre à cette commission. Cela m'apparaît extrêmement important.

Je reviens à votre mémoire. Je voudrais vous dire qu'il y a plusieurs points que vous ne touchez pas qui ont été largement débattus ici à cette commission, qui touchaient à la fois à l'autonomie du conseil, au rôle que pourrait jouer ce conseil relativement aux autres organismes - est-ce que cela deviendra l'unique et le seul porte-parole des jeunes? - à la représentation régionale - oui, vous en faites état - et à un certain nombre de questions de cette nature. Vous me permettrez peut-être de revenir avec quelques questions.

Je prends donc votre mémoire, en page 4. En faisant référence au document de réflexion présenté par le module de recherche du Secrétariat à la jeunesse, datant de mai 1986, vous rappelez qu'il énonce trois postulats de base que vous endossez: l'autonomie, la légitimité et l'efficacité. J'aimerais que vous nous expliquiez comment cette autonomie peut être préservée en même temps que la loi donne de grands pouvoirs au ministre responsable. Je me permets de vous rappeler les articles qui, font problème pour un certain nombre d'organismes. Sur le mandat confié au conseil consultatif, il y a deux articles extrêmement importants. Il y a l'article 27: "Le conseil doit donner son avis au ministre sur toute question que celui-ci lui soumet relativement aux besoins et aux intérêts de la jeunesse". Il y a aussi l'article 29: "Le conseil peut, avec l'autorisation du ministre, former des comités spéciaux pour l'étude de questions particulières relatives à la jeunesse et déterminer leurs attributions."

Est-ce que vous ne pensez pas que de tels articles, à l'instar de certains autres organismes jeunesse, auraient comme effet, si utilisés largement par le ministre, de limiter les travaux du conseil aux dossiers que voudrait bien lui donner le ministre? Dans l'hypothèse où le ministre lui confie plusieurs travaux, on pourrait penser que le conseil n'aurait plus la latitude pour en entreprendre à sa guise ou selon les besoins

qu'il a identifiés. Cela ne vient-il pas mettre en doute fondamentalement la marge d'autonomie qui est laissée à ce conseil consultatif en vertu du présent texte? (10 h 45)

M. Hotte: Je ne suis pas tellement familier avec les rapports entre les conseils et le gouvernement. On ne s'est pas tellement prononcé sur cet aspect, ne sachant pas la pratique des autres conseils.

Mme Blackburn: Au moment où on se parle, avez-vous une copie de la loi en main? Non, il est plus difficile de la commenter si vous ne l'avez pas. L'avez-vpus? Oui. C'est à l'article 27.

Le Président (M. Després): Excusez, M. Hotte, avez-vous une copie du projet de loi?

M. Hotte: Non, je n'en ai pas.

Le Président (M. Després): On va vous en fournir une; ce ne sera pas long.

M. Hotte: Oui, je l'ai, d'accord.

Mme Blackburn: Bien. C'est à l'article 27. Le précédent article dit: Dans l'exercice de cette fonction, le conseil peut saisir, sous forme d'avis le ministre de- toute question relative à la jeunesse, effectuer ou faire effectuer des études et des recherches, solliciter des opinions, fournir de l'information au public. L'article 27 vient atténuer la portée du précédent parce qu'il dit: "Le conseil doit donner son avis au ministre sur toute question que celui-ci lui soumet relativement aux besoins et aux intérêts de la jeunesse. Il doit, de plus, effectuer ou faire effectuer les études et recherches qui lui sont demandées par le ministre."

Si cet article est largement utilisé par le ministre, il vient limiter, pour ne pas dire complètement annihiler, tout le précédent qui donne des pouvoirs au conseil. Il pourrait, pour utiliser un terme bien québécois, "loader" le conseil qui n'aurait plus ni le temps ni les ressources humaines pour faire effectuer d'autres travaux à son initiative. Cela ne vient-il pas en contradiction avec cette autonomie qui viendrait légitimer en quelque sorte les travaux du conseil?

M. Hotte: Entre les articles 25 et 27, je ne vois pas de contradiction, c'est seulement qu'on met des paramètres. Je ne vois pas de contradiction à ce sujet.

M. Gratton: Mme la députée me permettrait-elle? Je pense que, d'ailleurs, c'est revenu à plusieurs occasions. Pour nous, il est très clair que le Conseil permanent de la jeunesse devra pouvoir fixer et déterminer ses priorités. J'ai l'intention de recommander qu'on inscrive cela dans la loi de façon que cela ne porte pas à confusion, à savoir que le Conseil permanent de la jeunesse pourrait être inondé à ce point qu'il ne serait plus possible pour lui de déterminer ses priorités. On va clarifier cela par un texte qui sera très clair là-dessus.

Mme Blackburn: D'accord. Très bien. En poursuivant, je trouve intéressante l'idée que vous avancez, en page 5 de votre mémoire, concernant la composition du Conseil permanent de la jeunesse où vous parlez de deux membres flottants qui permettraient de prendre en considération les bassins de population des grands centres urbains comme Montréal et Québec. Cela permet, à l'occasion, dans d'autres organismes, ce qu'on appelle les membres "cooptés", d'aller chercher des compétences qui ne se retrouvent pas au sein des membres qui sont déjà nommés au conseil. L'idée est particulièrement intéressante; elle mériterait d'être exploitée.

Par ailleurs, dans cette même page, au dernier paragraphe, vous dites: "Afin d'assurer une représentativité régionale adéquate, nous recommandons que le Conseil permanent de la jeunesse élabore une politique de concertation régionale qui permettrait à ses membres de consulter les organismes jeunesse de son milieu." Vous continuez: "Le Conseil permanent de la jeunesse, pour mener à bonne fin son mandat, se devra d'établir un système de communication efficace qui traduira un portrait réaliste de la situation des jeunes de toutes les régions du Québec." Je constatais d'abord, à la lecture de la liste des organismes dont vous êtes aussi le porte-parole, que la problématique doit être extrêmement variée. Si, en plus, j'ajoute la problématique que touche le Centre des jeunes sans emploi, alors vous partez encore plus jeune, de 7 ans à 30-35 ans. Alors, vous comprendrez qu'à la fois la problématique est extrêmement variée et présenter un portrait relativement réaliste de la situation des jeunes de toutes les régions et, en même temps, de toutes les couches d'âge, c'est relativement, pour ne pas dire extrêmement complexe.

Mais, par ailleurs, je me demandais: Si vous attendez cela du conseil consultatif, est-ce que, pour vous, le conseil consultatif devient "le" porte-parole des jeunes au Québec?

M. Hotte: Je ne sais pas s'il devrait en être exclusivement le porte-parole. Pour parler de la couche de représentativité et de tout cela, elle a été identifiée à une population de 15 à 30 ans ayant de3 caractéristiques semblables. On a identifié l'âge pas juste arbitrairement comme cela. On l'a évalué selon des critères. Alors, pour

moi, il est possible d'avoir un portrait juste.

Quand on parle des jeunes, on ne parle pas nécessairement des 6 ans à 12 ans. Malgré qu'on travaille avec cet âge-là, cela ne veut pas dire qu'on défend spécifiquement cet âge.

Mme Blackburn: Oui, mais, selon vous, est-ce que ce conseil devrait être le porte-parole unique de la jeunesse?

M. Hotte: Si on ne respecte pas les concepts d'autonomie, de légitimité et tout cela, le conseil deviendra à la remorque du Secrétariat à la jeunesse ou du gouvernement. C'est évident que, dans un équilibre politique, ce serait bon d'avoir une autre voie. Par rapport au gouvernement, je vois le conseil consultatif comme étant le seul.

Mme Blackburn: Cela veut dire que la voix des jeunes qui veulent se faire entendre - les regroupements de maisons de jeunes, les associations étudiantes, les jeunes sans emploi, les jeunes bénéficiaires de l'aide sociale - devrait passer par le canal du conseil permanent.

M. Hotte: Pas nécessairement. S'ils veulent avoir un répondant au niveau du gouvernement, Je conseil permanent permet cela. Je ne dis pas qu'il n'y a pas du lobbying de la part de ces autres organismes, associations ou assemblée. Alors, c'est possible pour les maisons de jeunes de se faire entendre, mais en ayant un répondant au niveau du gouvernement, je pense que c'est le conseil consultatif.

Mme Blackburn: En page 7 de votre mémoire, au premier paragraphe, article 6, on lit: "Nous recommandons que le collège électoral ne soit pas dissous suite à la nomination du Conseil permanent de la jeunesse et qu'une vacance au sein du conseil soit remplacée par un membre du collège électoral nommé par Ies autres membres du même collège, ce qui, à notre avis, encouragerait l'autonomie et augmenterait la crédibilité du Conseil permanent de la jeunesse".

Quand vous dites de ne pas dissoudre le conseil, ce serait exclusivement pour éventuellement le réunir pour nommer un remplaçant. Est-ce que c'est ce que je dois comprendre?

M. Hotte: Aussi pour la rotation au tiers. C'est-à-dire, s'il y a une rotation au tiers, il y a des nouveaux membres qui seraient élus. Alors, le collège serait pour cela. Le conseil n'aurait pas à répondre au niveau du collège. Il n'aurait pas à faire de rapport ou à rendre compte au niveau du collège. Je le vois seulement pour un processus de nomination.

Mme Blackburn: Mais ce conseil qui, par exemple, si ta loi est adoptée dans des délais relativement courts, pourrait être constitué en juin, vous voyez qu'il serait renouvelé à quelle fréquence?

M. Hotte: Pour des mandats de trois ans, une rotation au tiers pour les gens non-rémunérés ou un genre de CA. Et, pour l'exécutif, c'est mentionné: pour le président, c'est trois ans et les vice-présidents, deux ans.

Mme Blackburn: Dans l'article 12, je reviendrais sur le nombre minimal de réunions. Vous avez expliqué un peu les raisons. Ce serait pour favoriser la participation des non-membres. J'utilise un peu votre déclaration de tout à l'heure. J'ai probablement mal suivi votre explication. Comment faites-vous un rapport entre l'augmentation obligatoire du nombre . de réunions annuelles et un accroissement de la participation des non-membres?

D'abord, vous pouvez peut-être m'expliquer comment les non-membres peuvent participer au conseil.

M. Hotte: C'est cela. Ce n'est pas nécessairement un lien causal. En ayant plus de réunions, ils ne vont pas nécessairement y participer plus. C'est plutôt le partage des responsabilités, la répartition du travail et la division des tâches qui vont permettre cela. On pourrait se réunir une fois par année et il y aurait autant d'efficacité, autant d'implication, c'est certain. On pourrait le faire aux deux mois. On peut aussi le faire une fois par mois. Il n'y a pas nécessairement un lien causal entre la fréquence et...

Mme Blackburn: Ce n'était pas vraiment le sens de ma question, J'ai cru comprendre tantôt que vous disiez que l'une de3 justifications du fait qu'on augmenterait le nombre ou la fréquence des réunions, c'était pour favoriser la participation des non-membres. Je voudrais savoir comment faites-vous un rapport entre la participation des non-membres au Conseil permanent de la jeunesse? Également, comment voyez-vous qu'ils y participent effectivement? Je n'ai pas vraiment bien compris.

M. Hotte: C'est un peu des questions de régie interne, j'ai l'impression. Le conseil aura à déterminer comment ses non-membres vont participer. Là, on parle du mandat comme tel. Ce sur quoi on s'est prononcé, c'est par rapport au mandat. Quant à la participation et comment ils vont y participer, ce sera de la régie interne, j'ai l'impression. Ils verront comment ils répartiront les tâches, etc.

Mme Blackburn: À l'article 29, de la

page 7 du projet de loi, on dit: "Le conseil peut, avec l'autorisation du ministre, former des comités spéciaux pour l'étude de questions particulières relatives à la jeunesse et déterminer leurs attributions." Quant à faire participer des non-membres, en admettant que l'on invite quelqu'un de votre région à venir assister à une réunion ici ou à siéger à un comité, pour qu'il soit rémunéré, pour que l'on défraie ses déplacements - il n'est pas rémunéré à l'acte - il faut qu'il soit reconnu comme faisant partie ou comme étant membre d'un comité ou encore qu'il vienne travailler au conseil.

Vous avez deux cas où les conseils peuvent payer des déplacements. Le premier, c'est quand vous êtes employé et le deuxième, quand vous êtes membre d'un comité ou d'une commission. Dans le cas qui nous concerne ici, on dit que "le conseil peut, avec l'autorisation du ministre, former des comités," alors que, dans les autres conseils, on peut, à volonté, former des comités, ce qui, une fois qu'on a une résolution du conseil, permet de convoquer des personnes et de payer pour leurs frais de déplacement, par exemple. Dans le cas qui nous concerne, si vous voulez une participation des non-membres, il me semble que l'article 29 constitue un empêchement important.

M. Hotte: C'est vrai qu'il peut y avoir une ingérence à ce niveau.

Mme Blackburn: De plus, est-ce que cet article ne vient pas un peu en contradiction avec le discours autonomiste?

M. Hotte: Je crois que, pour avoir de l'efficacité à un moment donné, il faut quand même, sans se prostituer par rapport au pouvoir, avoir un bras qui vient du gouvernement. Par rapport aux comités, je ne vois pas de problème. Le conseil peut se débrouiller là-dessus et faire des comités. Justement, si on veut parler des questions de transport ou des frais de représentation, etc., le conseil peut aussi former des comités.

Mme Blackburn: Non, ce n'est pas aussi simple que cela le paraît. Le conseil peut, mais avec l'autorisation du ministre. C'est clair. Non, ce n'est pas dans toutes les lois.

M. Gratton: C'est comme cela au Conseil du statut de la femme et c'est comme cela au Conseil des collèges.

Mme Blackburn: Ah non! En tout cas, au Conseil des collèges et au Conseil supérieur de l'éducation également, je pense, le conseil peut constituer des comités. Il peut également constituer des...

M. Gratton: Mais avec l'autorisation du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science. C'est à l'article 22.

Mme Blackburn: Pour le conseil supérieur?

M. Gratton: Pour le Conseil des collèges.

Mme Blackburn: Pour le Conseil des collèges, ce sont des commissions.

M. Gratton: "Dans l'exercice de ses fonctions, le conseil peut, avec l'autorisation du ministre de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie, constituer d'autres commissions...

Mme Blackburn: D'autres commissions, voilà.

M. Gratton: ...chargées de mandats particuliers".

Mme Blackburn: Oui, d'autres commissions.

M. Gratton: Dans le cas du Conseil du statut de la femme, à l'article 6, on voit que "le Conseil peut, avec l'approbation préalable du ministre, former des comités spéciaux."

Mme Blackburn: Oui. C'est cela.

M. Gratton: On dit même: "Ces comités peuvent, avec l'approbation préalable du ministre, être totalement ou partiellement formés de personnes qui ne sont pas membres du conseil". (11 heures)

Mme Blackburn: Oui, je connais assez bien les deux lois. La loi qui laisse le plus d'autonomie par rapport à la création de comités, c'est celle du Conseil des collèqes qui, effectivement, faisait une distinction entre les comités et les commissions. Une commission ayant un caractère, une responsabilité beaucoup plus grande, cela demandait une autorisation du ministre. Les comités ne demandaient aucune autorisation du ministre.

M. Gratton: Ce que je dis, Mme la députée, c'est que l'esprit du projet de loi 104 est le même. Dans la mesure où cela prend une décision gouvernementale pour pourvoir aux dépenses, aux frais de déplacement, c'est à cela qu'on réfère quand on parle de l'approbation du ministre.

Mme Blackburn: Oui.

M. Gratton: II n'est pas question de s'ingérer dans l'autonomie du conseil permanent.

Mme Blackburn: Je pense que - et vous me permettrez de diverger d'opinion - cela aurait favorisé plus l'autonomie du conseil si on avait prévu deux formules: une qui prévoit la constitution de commissions permanentes - et là, c'est quelque chose, cela veut dire qu'année après année cela poursuit son travail - et ce que, par exemple, je suggérais sur l'emploi, la constitution de comités ad hoc ou de comités provisoires qui viennent traiter d'une question en particulier. Cela peut relever de la responsabilité du conseil qui n'a pas besoin d'autorisation du ministre ou du gouvernement pour ce faire.

Cela aurait permis en même temps aux comités d'assurer une meilleure ou une plus grande participation des non-membres, comme vous les appelez. Généralement, quand on prévoit une autorisation ministérielle pour former une commission et un comité, c'est parce qu'au moment où le gouvernement accepte la formation de la commission ou du comité, c'est qu'il prévoit également les budgets additionnels; tandis que vous pouvez très bien, au sein de l'organisme, estimer utile de former un comité, ne serait-ce que provisoirement pour dire: On voudrait dégager un peu une problématique touchant l'itinérance. C'est un comité qui peut fonctionner six mois et un an, mais à même les budgets du conseil, qui ne demande pas de budgets additionnels. Il n'y a aucune clause qui prévoit cela là-dedans.

M. Gratton: Ce que je répète à la députée de Chicoutimi, c'est que c'est là l'esprit, quant à nous, du projet de loi 104. Si cela a besoin d'être précisé, on pourra le faire.

Mme Blackburn: D'accord, parce qu'à mon avis c'est important si on veut leur assurer l'autonomie dont on parle tant.

Vous avez, en page 8 de votre mémoire: "Nous recommandons, en conséquence, que des critères précis soient établis afin d'éviter la confusion et de favoriser l'uniformité dans la détermination des secteurs d'activités des organismes jeunesse". Tout à l'heure, le ministre vous a demandé un peu d'éclairage sur cette question. J'avais une question. D'abord, j'avais de la difficulté à voir de quelle façon on pourrait déterminer des critères précis. Juste à la lumière des organismes que vous représentez ce matin, vous n'en avez que deux pour lesquels il serait vraiment facile de savoir dans quel secteur ils se trouvent: il y en a un qui est en loisirs et l'autre est en travail. Les trois autres sont à la fois loisir, social; loisirs, travail et éducation; social, loisirs et éducation.

S'ils avaient à appuyer une candidature, ils pourraient indépendamment appuyer une candidature pour le social, pour le loisir et pour l'éducation si je pense, par exemple, au Centre jeunesse de l'Outaauais, de même que pour le travail. Comment pouvons-nous mieux définir les secteurs d'activités, et en même temps, reconnaître que des associations font des recommandations au nom d'un secteur d'activités alors qu'elles couvrent quatre champs d'activités?

M. Hotte: C'était, justement, un de nos problèmes à notre table: on ne savait pas trop dans quel secteur d'activités on était. Le ministère de la Santé et des Services sociaux définit dans le social le Relais des jeunes Gatinois, par exemple, et on peut autant avoir le palier loisirs ainsi de suite. II y a une difficulté pour nous de nous identifier à tel secteur. On peut être appuyé par un même orqanisme autant au travail, autant aux loisirs et autant au social. Il y a une difficulté de ce côté.

Mme Blackburn: En page 9, vous revenez un peu sur cette question en disant: "Nous appuyons la formation du collège électoral pour procéder au choix des membres du conseil. Par contre, tout en étant d'accord avec la limite d'âge mentionnée à l'article 18 du projet de loi 104, nous recommandons que la nomination des membres du Conseil permanent de la jeunesse soit basée sur des critères précis et plus élaborés concernant les qualités requises pour siéger au conseil."

Sur cette question, à la fois des critères ou des secteurs représentés au sein du conseil ou que représentent les organismes, plusieurs organismes nous ont fait valoir qu'il y aurait des difficultés pour ainsi dire insurmontables pour les jeunes de 15 - 18 ans qui voudraient faire valoir leur candidature. Si, par exemple, on prend la région de l'Outaouais où quatre délégués sont supposés siéger au collège électoral et que vous avez facilement, disons, une trentaine de délégués issus de différents organismes, comment un jeune de 15, 16 ou 17 ans pourrait-il, à l'intérieur de ces 30 délégués, faire valoir sa candidature? On faisait valoir que c'était difficile, d'abord, de trouver trois organismes qui appuieraient sa demande, des organismes incorporés en vertu de la troisième partie de la Loi sur les compagnies. Ensuite, une fois rendu au sein de ces quelque 30 personnes dans la région, comment pouvoir défendre son dossier, sa compétence à siéger à un conseil? On a dit qu'il y avait un certain nombre de difficultés. Je vous pose la question parce que la plupart des organismes que vous représentez travaillent, justement, auprès des jeunes de moins de 18 ans. Ce serait assez intéressant de voir comment. Vous connaissez vos jeunes, vous avez des images en tête...

M. Hotte: C'est sûr que...

Le Président (M. Després): Je m'excuse, M. Hotte, mais j'aimerais faire remarquer à Mme la députée de Chicoutimi qu'il lui reste moins de deux minutes.

M. Hotte: C'est sûr qu'en pratique, si on regarde les 15-18 ans, j'ai l'impression que, dans le processus électoral de nomination, il risque de ne pas y avoir de 15-18 ans. Je ne vois pas comment on pourrait favoriser plus ou si cela favorise moins la participation des 15-18 ans. Ce sera fait sous forme d'élection.

Mme Blackburn: En fait, je trouvais importante votre intervention là-dessus parce que vous travaillez précisément auprès de ce groupe d'âge. Vous êtes probablement la personne qu'on a reçue ici la plus qualifiée pour nous dire dans quelle mesure les jeunes que vous connaissez, autour de vous, seraient capables de se défendre et de se faire une place à l'intérieur du processus déjà indiqué dans la loi. Vous nous dites que c'est difficile, selon vous.

M. Hotte: C'est sûr que c'est très difficile. Combien y en a-t-il à l'Assemblée nationale qui ont l'âge de 18 ans et plus?

Mme Blackburn: La procédure est quasiment aussi complexe: il faut se trouver des appuis et ensuite défendre son dossier.

Certains mémoires nous ont recommandé qu'on réserve des sièges, qu'on s'assure que, par exemple, il y en ait la moitié pour les moins de 23, 24 ans. Je pense qu'ils y allaient de 18 à 22 et de 23 à 30; c'était la proposition qu'on a eue sur la table. À quelques reprises, c'est revenu en disant: II faut s'assurer qu'il y ait une représentation équitable entre les groupes d'âge parce que la problématique est trop différente dépendamment que vous avez 17, 18 ans ou 27 ans.

M. Hotte: À efficacité égale, je suis favorable à une représentativité. Cela ne veut pas dire que les plus jeunes sont moins débrouillards, mais, à un moment donné, à efficacité égale... Cela veut dire qu'il faut une efficacité au conseil. Je ne suis pas nécessairement pour la représentativité. C'est peut-être surprenant, c'est peut-être intolérant comme commentaire. Je travaille avec les 15-18 ans et il n'est pas dit qu'il n'y aura pas un passage même si c'est moi ou quelqu'un d'autre plus âgé qui y sera. Il n'y a pas d'inconséquence là.

Mme Blackburn: II ne faudrait surtout pas que vos propos soient entendus par vos jeunes.

M. Hotte: Cela fait dix ans que je travaille avec les jeunes et je n'ai pas de problème.

Mme Blackburn: Non, mais dire qu'ils ne sont peut-être pas... qu'il faudrait choisir l'expérience plutôt que l'âge.

M. Hotte: Non, l'efficacité.

Mme Blackburn: C'était simplement là-dessus. Vous n'avez peut-être par tort, remarquez, ce n'était pas un jugement.

Je voudrais, parce que mon temps est écoulé, vous remercier à nouveau d'avoir participé à cette commission parce que, je le rappelle, quand vous ne le faites pas, il y a quelqu'un d'autre qui le fait en votre nom ou on ne le fait pas du tout. Je trouve important que vous soyez là. Parmi les regroupements qu'on a reçus, c'est le plus important, je pense, qui touche les jeunes de moins de 18 ans. Les autres, c'est davantage, je dirais, de 18 à 30 ans, que ce soit des maisons de jeunes, des maisons d'hébergement, des groupes de soutien aux initiatives-jeunesse. Je trouve donc votre participation fort intéressante et très pertinente. Je vous remercie.

Le Président (M. Després): M. le ministre, je vous inviterais à conclure.

M. Gratton: Oui, M. le Président, très brièvement, je voudrais d'abord faire mienne l'invitation que lançait Mme la députée de Chicoutimi aux membres de la commission de se rendre dans l'Outaouais constater les choses qui se font dans le domaine de la jeunesse. Effectivement, le Centre des jeunes sans emploi est une des résultantes très directes du Sommet socio-économique de la région de l'Outaouais qui avait lieu le 9 mai dernier, au mont Sainte-Marie. On se rappellera qu'à cette occasion c'est la jeunesse de l'Outaouais elle-même qui a su tirer son épingle du jeu et obtenir des résultats très concrets et très probants quant à l'implantation de cet équipement au service des jeunes.

Je voudrais dire à M. Hotte que nous le remercions de sa présence ce matin, de la contribution très positive qu'il a faite à nos travaux et lui demander de continuer les efforts que lui et les organismes qu'il représente font pour assurer qu'il y ait des candidatures valables au collège électoral en provenance de l'Outaouais. Cela étant assuré par les jeunes de la région de l'Outaouais, il appartiendra, ensuite, au gouvernement d'assurer que la région soit représentée également au Conseil permanent de la jeunesse, ce que, à titre personnel, je souhaite de tout coeur. Merci infiniment, M. Hotte.

M. Hotte: Merci.

Le Président (M. Després): M. Hotte, au nom des membres de la commission des institutions, j'aimerais vous remercier de votre participation au projet de loi 104 et de votre implication dans le milieu jeunesse. Nous allons, maintenant, suspendre pour moins de deux minutes pour permettre au Collectif de communication de Montréal, Vox Populi de prendre place à la table des témoins.

(Suspension de la séance à 11 h 12)

(Reprise à 11 h 13)

Le Président (M. Després): J'atnerais vérifier votre nom. Est-ce bien M. Jean-Marc Ravatel? M. Ravatel, au nom des membres de la commission, il me fait plaisir de vous accueillir ici ce matin pour que votre organisme vienne exposer son point de vue sur le projet de loi 104 sur la formation du Conseil permanent de la jeunesse.

J'aimerais vous rappeler que vous avez 20 minutes pour faire votre présentation et qu'il nous restera 40 minutes pour débattre le sujet, à parts égales, entre le groupe ministériel et l'Opposition officielle. La parole est maintenant à vous, M. Ravatel.

Collectif de communication de Montréal, Vox Populi

M. Ravatel (Jean-Marc): J'aimerais d'aborder signaler que je représente Vox Populi; cependant, on a écrit le mémoire avec Hélène Monette et au nom de Vox Populi. Je ne sais pas si vous l'avez vu, mais on l'a fait signer par beaucoup de gens à la fin. Je représente donc tout ce qui peut être à la fois groupes culturels et sociaux de Montréal.

Pour aller droit au but, on trouve que, dès le départ, vous visez mal la cible, c'est-à-dire que dans votre conseil vous définissez quatre secteurs: le social, l'éducation, le travail et le loisir. Nous ne voyons pas le mot culture là-dedans. Je pense que vous êtes au courant, mais, parmi la jeunesse, la culture est un phénomène très fort. Vous avez pu le voir déjà avec l'Année internationale de la jeunesse. La plupart des projets qui ont été présentés sont des projets culturels; dans les travaux communautaires, il y a eu toutes sortes de subventions. Si vous les lisez, vous verrez qu'il y a, au moins à 60 %, des tendances culturelles. Si vous voulez parler des jeunes, vous êtes obligés de parler de la culture, parce que c'est quelque chose qui est en très grand essor au Québec, et les jeunes sont très sensibilisés à ce problème.

On peut dire qu'on retrouve la culture dans le loisir et dans le travail, mais nous considérons que c'est un bloc en soi. Dès le départ, vous en nommez quatre, mais, nous, on en voudrait cinq. C'est l'une de nos grandes revendications. Évidemment, la culture touche le social, l'éducation et le travail. On aimerait aussi faire comprendre que, souvent, on a tendance è considérer la culture comme un loisir. Nous considérons que c'est faux, la culture n'est pas un loisir, c'est un travail comme un autre. C'est surtout à ce niveau qu'on a écrit le mémoire, pour essayer de vous faire prendre conscience d'un peu de ce bloc. Vous n'avez peut-être pas l'impression d'en prendre conscience réellement, surtout que c'est très Hé à la jeunesse: culture, jeunesse. On ne peut pas parler de jeunesse sans parler de culture. Je vis è Montréal et je pense que c'est pareil dans les régions, beaucoup de gens sont impliqués dans des activités culturelles et sociales, socio-culturelles. Dans ce projet de loi, on n'en parle pas trop, c'est un peu oublié; c'est surtout pour cela que je suis là. Je représente aussi beaucoup d'autres groupes, par exemple, l'ATTACQ, qui est une association de travailleurs et travailleuses artistiques culturelles du Québec. La revue Ciel Variable et une autre qui s'appelle L'Oeil rechargeable, qui sont toutes des revues à tendance culturelle et sociale.

Je pense que vous avez lu le mémoire et je ne veux pas m'éterniser là-dessus, je préfère que vous me posiez des questions, ce sera plus vivant.

Le Président (M. Després): J'inviterais maintenant le ministre ou le député de Rousseau à prendre la parole.

M. Thérien: Merci, M. le Président. Merci, M. le ministre de me laisser parler. On a beaucoup de facilité avec le ministre là-dessus.

M. Ravatel, je veux d'abord, au nom de la formation politique du gouvernement du Québec, vous remercier de vous être présenté devant nous pour nous parler de la jeunesse. Bien entendu, à la lecture de votre mémoire, j'ai bien senti que vous aviez profité de cette tribune pour nous sensibiliser à tout le problème de la relève artistique. La relève, c'est la jeunesse aussi. Je pense que vous avez bien fait de prendre cette tribune. Nous pouvons quand même vous signaler que nous communiquerons votre mémoire aux Affaires culturelles.

M. Ravatel: On l'a déjà fait, de toute façon.

M. Thérien: Vous l'avez déjà fait. Nous en enverrons un deuxième au cas où. Nous voulons vous faire remarquer, M. Ravatel, que vous n'êtes pas le seul groupe qui ait

parlé de la culture. Nous sommes très sensibilisés de ce côté-ci, et je crois que tous les intervenants de la commission parlementaire le sont aussi, à la notion de culture qui fait partie intégrante du vécu des jeunes au Québec. Bien entendu, tout au long de votre plaidoyer, vous parlez de la difficulté qu'ont les jeunes en ce qui concerne la culture artistique: les difficultés financières et les difficultés de reconnaissance aussi. C'est pour cela que vous avez introduit cela en disant qu'on ne touche peut-être pas la bonne cible. La cible que nous voulons toucher, et je crois que le ministre Ta bien étalé déjà, c'est un véhicule, le Conseil permanent de la jeunesse. Ce n'est pas le seul, cela en est un.

Tout cela pour m'amener à vous poser quelques questions sur votre mémoire qui m'a fait porter réflexion sur la question de l'âge. Bien entendu, c'est difficile de circonscrire d'où part la jeunesse et où s'arrête la jeunesse. On peut parler de la jeunesse du coeur. On sait très bien que le ministre s'est dit très jeune l'autre fois à ce sujet. Vous dites que la relève culturelle se vit jusqu'à l'âge de 35 ans....

M. Ravatel: Oui.

M. Thérien: Vous changez le plafond et les limites d'âges. J'aimerais cela vous entendre là-dessus.

M. Ravatel: Le plafond, on ne le change pas vraiment... Si vous prenez l'association EGG, les Échanges franco-québécois définissent les jeunes comme ayant de 18 à 35 ans. Nous avons mis 35 ans parce que, justement, et surtout dans le domaine culturel, il est très dur d'être reconnu avant 35 ans, c'est-à-dire que dans le domaine de la culture, à 34 ans, on peut être considéré encore comme un jeune. C'est pour cela que nous avons élargi un peu pour le mémoire en tant que tel. Surtout dans le domaine culturel, nous considérons qu'il y a des tas de gens qui ont 32 ou 33 ans et qui sont encore considérés comme de jeunes artistes.

M. Thérien: Vous ne croyez pas qu'on va avoir le même problème en disant que ceux qui ont 36 ou 37 ans et qui ne sont pas reconnus sont encore des jeunes?

M. Ravatel: Non. C'est certain que c'est un critère très subjectif, c'est évident. Dans le cas où il y aurait quelque chose de créé sur la culture, nous aimerions agrandir cet âge. Il y a beaucoup de personnes entre 30 et 35 ans qui sont justement dans des domaines culturels, comme nous l'expliquons, qui travaillent dans ces domaines depuis dix ans, donc, qu'on peut considérer comme professionnels mais qui ne sont pas reconnus en tant que tels. C'est pour cela que nous faisons exprès de l'élargir pour faire prendre conscience aux gens que c'est une situation délicate qu'on peut vivre même à 31 ou 32 ans dans le domaine culturel. C'est pour cela que nous l'avons élargi, surtout pour le domaine culturel. J'ai vu vos chiffres, c'est 18-30 ans.

M. Thérien: C'est 15...

M. Ravatel: C'est 15-30 ans, oui.

M. Thérien: Les balises que nous avons mises, c'est pour la nomination des membres...

M. Ravatel: C'est cela.

M. Thérien: ...du conseil permanent. Je ne pense pas qu'à l'intérieur les dossiers soient strictement limités aux 15-30 ans.

Vous parlez aussi de l'introduction, et, je pense, à juste titre, du mot culture à l'intérieur des quatre divisions. Si on mettait loisir et culture, comment réagiriez-vous à cette nomenclature?

M. Ravatel: Plus ou moins bien. Ce n'est pas pareil du tout. Un loisir, bon... La culture, c'est quelque chose que nous vivons tous les jours. Pour moi, le loisir, c'est quand, après son travail, on fait quelque chose. On travaille dans la culture. Ce n'est pas un loisir. Pour beaucoup de gens, faire de la peinture ou faire de la musique et tout, ce n'est pas: après le travail, on va s'amuser à faire de la musique. Ce sont des gens qui travaillent parce qu'ils ne peuvent pas faire autrement. Ils ne peuvent pas gagner leur vie avec leurs activités artistiques. Mais, pour beaucoup de gens, c'est un travail à 100 % et on va même préférer consacrer plus de temps à son travail culturel qu'à la limite on en consacrera à son travail qu'on a dans le social.

M. Thérien: Mais ne pensez-vous pas que c'est difficile et qu'on ne tombera pas dans le loisir culturel, et ainsi de suite? Est-ce qu'on est capable de départager complètement ce qui est culture et loisir? Vous pensez qu'on est capable de bien déterminer cela et de mettre des balises pour qu'on ait des représentants de la culture et des représentants du loisir? II y a même des partis politiques qui ont de la difficulté avec la sémantique et toutes sortes de choses.

M. Ravatel: Vous me direz que je suis paranoïaque. On nous parle souvent de loisir. Par exemple, je vais vous expliquer qu'en ce qui concerne les demandes de subventions on est sans cesse en train de nous renvoyer la

balle d'un ministère à un autre. Le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, c'est lui qui nous donne des subventions au niveau de la culture. Quand je lis cela, je trouve cela aberrant; le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui va nous donner des subventions pour des choses culturelles. C'est pour cela qu'on a insisté là-dessus. On veut bien faire la différence entre la culture et le loisir. La culture en tant que telle, cela peut être un loisir, mais je considérerais que la culture englobe le loisir et non pas le loisir englobe la culture. C'est plutôt dans ce sens-là que je veux le dire. On peut considérer dans le domaine de la culture un phénomène loisir, si vous voulez. Mais il ne faut pas faire l'inverse et dire que la culture, c'est du loisir.

M. Thérien: Oui, je pense que c'est très justifié et que vos explications sont véridiques. C'est très difficile de... Mais je pense que le Conseil permanent de la jeunesse va se faire un souci de ne pas oublier le côté culturel. Je ne sais même pas comment on va introduire le mot culture, mais on prend bonne note que la culture et le loisir présentent des difficultés d'interprétation et qu'au moins on puisse se mettre à jour du côté culturel.

J'ai une question très simpliste. Êtes-vous favorable au Conseil permanent de la jeunesse, étant donné que vous n'en parlez pas tellement dans votre mémoire?

M. Ravatel: Non, on n'en a pas parlé tellement parce qu'on a eu du mal à obtenir l'information, primo. Par exemple, ce petit projet de loi que j'ai là, j'ai eu du mal à le trouver. Même sur le fait d'écrire des mémoires, on l'a appris un peu par hasard. Ce sont des gens qui nous ont dit: Ah! vous avez des choses intéressantes, vous devriez en écrire un. On était en période de "rush" sur notre revue. Donc, on l'a fait un peu en "sideline". Cela a été fait assez vite. On a essayé de le faire signer par pas mal de monde, parce qu'on pensait aussi que les signatures étaient importantes. Vous avez vu, il y a quand même des signatures comme celle de M. Paul Toutant, de Radio-Canada, et beaucoup de gens dans tous les domaines, culturel, artistique, de la production, même aussi des groupes qui oeuvrent dans le domaine social comme le Collectif des jeunes sans emplois et qui travaille plus dans le social. D'ailleurs, j'aimerais vous poser des questions à ce sujet-là, pour éclaircir un peu. Il y a un Secrétariat à la...

M. Thérien: Vous avez droit à vingt minutes.

M. Ravatel: ...jeunesse qui a été créé pour l'Année internationale de la jeunesse.

Là, il y a eu le grand "boom", parce que c'était l'Année internationale de la jeunesse et, donc, les subventions pleuvaient. Tout était beau, tout était rose. Là, évidemment, le gouvernement libéral rentre au Québec. Le Secrétariat à la jeunesse était, entre guillemets, évidemment beaucoup plus péquiste, j'imagine.

M. Thérien: C'est vous qui le dites.

M. Ravatel: Oui, c'est mot qui le dis et je le pense. Donc, là, on craint qu'au Conseil permanent de la jeunesse... J'aimerais savoir s'il n'y a pas un eourt-circuitage là-dedans. Il y a déjà une institution qui est là." -Pourquoi n'est-ce pas cette institution qui, elle-même, aurait pu créer ce... puisqu'il y a déjà une institution, qu'elle a déjà une expérience et qu'elle a pas mal d'archives. Étant donné qu'elle a écrit plein de projets et qu'elle a vu plein de projets, elle a déjà toute une expertise et, par les projets qui ont été présentés dans le cadre de l'Année internationale de la jeunesse, elle a un peu le moyen de tâter le pouls de la jeunesse. Ces gens savent ce qu'ils veulent. D'ailleurs, ce sont eux-mêmes qui m'ont dit que 70 % des demandes de projets étaient des projets culturels, ce qui prouve que la culture est quelque chose de très important pour la jeunesse québécoise.

Donc, j'aimerais qu'on me donne des éclaircissements sur le mandat des deux. Qu'est-ce que va faire l'un et qu'est-ce que va faire l'autre? Pourquoi dédoubler quelque chose qui aurait pu finalement être fait par l'un ou par l'autre? Mais pourquoi ce dédoublement, en fait? C'est seulement là-dessus...

Le Président (M. Després): Oui, M. le ministre.

M. Gratton: M. le Président, si on me permet. Effectivement, parce que nous considérons qu'il y a deux objectifs, qu'il y a deux fonctions qui sont complètement différentes. Dans un premier temps, le Secrétariat à la jeunesse, lui, est un organisme de coordination. C'est un organe de la fonction publique qui a pour mandat de coordonner les efforts des divers ministères parce que le dossier jeunesse étant un dossier horizontal, qui touche à l'ensemble des ministères, c'est le rôle du Secrétariat à la jeunesse, dans un premier temps, de coordonner les efforts des divers ministères en ce qui a trait à la jeunesse et d'informer la jeunesse des programmes gouvernementaux dans le domaine.

Un des changements qu'on a apportés en arrivant le 2 décembre 1985, c'est justement de nous assurer de la présence de la secrétaire générale associée à la jeunesse à cette table de concertation de l'ensemble

des secrétaires généraux associés, pour s'assurer que l'élément jeunesse est présent partout, dans toutes les discussions qui ont trait à des politiques qui, même si elles ne s'adressent pas spécifiquement à la jeunesse, ont besoin de tenir compte des intérêts de la jeunesse à ce niveau.

Le conseil permanent, lui, est un organisme-conseil. C'est un conseil consultatif que le gouvernement désire se donner pour être mieux renseigné, pour s'assurer que les politiques qu'on peut instaurer collent à quelque chose de vécu. Dans un certain sens, le Secrétariat à la jeunesse va du gouvernement vers les organismes de jeunesse dans les régions. Le conseil permanent, lui, agirait à l'inverse, c'est-à-dire qu'il sensibiliserait le gouvernement à la réalité vécue par les organismes de jeunesse. D'ailleurs, on nous a suggéré à certaines occasions de fusionner les deux. Pour nous, il s'agit de deux rôles très distincts qui doivent demeurer distincts et qui ne remettent pas en cause l'efficacité de l'un ou de l'autre.

M. Ravatel: Quels vont être en fait les rapporta entre ces deux organismes? Est-ce qu'ils vont travailler de façon complètement séparée? Je pense que le Secrétariat à la jeunesse, dans une certaine mesure, peut, lui aussi, vous informer sur ce qui se passe chez les jeunes. Je ne vois pas pourquoi vous voulez forcément séparer du milieu vers le haut et du milieu vers le bas. Cela peut très bien être... Je comprends bien ce que vous voulez dire. C'est qu'il y en a un qui fait plutôt toute la démarche vers le haut. Mais est-ce qu'il va être complètement détaché du Secrétariat à la jeunesse ou est-ce qu'il va utiliser les connaissances du Secrétariat à la jeunesse?

M. Gratton: II est évident que le Conseil permanent de la jeunesse pourra faire appel aux ressources qui sont disponibles. En fait, le modèle est celui du Conseil du statut de la femme par rapport au secrétariat générai et, comme on l'appelle, la ministre déléguée à la Condition féminine. On sait que les deux ont un rôle tout à fait différent. Souvent, la ministre déléguée à la Condition féminine peut vouloir se faire conseiller, obtenir des avis du Conseil du statut de la femme. C'est un peu le même mécanisme que l'on prévoit en ce qui a trait à la jeunesse parce que le dossier est le même. C'est un dossier horizontal qui ne relève pas d'un seul ministère.

Il reste à voir si, à la suite de l'adoption du projet de loi 104, qui prévoit la création du Conseil permanent de la jeunesse, le Conseil exécutif décidera d'en confier la responsabilité soit à un ministre délégué à la Jeunesse, comme c'est le cas pour la condition féminine, ou à le laisser au premier ministre, comme c'est le cas présentement. Quoi qu'il en soit, les deux relèveront toujours du Conseil exécutif, à moins qu'on ne crée un ministère de la jeunesse, mais je ne pense pas que nous soyons rendus là.

M. Ravatel: D'accord.

Le Président (M. Després): J'inviterais M. le député de Rousseau à continuer cet échange. (11 h 30)

M. Thérien: Je voudrais continuer étant donné que cela va peut-être apporter certains éclaircissements. Avez-vous eu la chance de constater dans le projet de loi la façon dont on choisit les membres"? Je voudrais entendre votre réflexion là-dessus. Êtes-vous d'accord avec cette forme de nomination?

M. Ravatel: Ce que je trouve un peu délicat dans les articles, c'est quand vous dites que quelqu'un, pour se présenter, doit être commandité, si vous voulez, par trois organismes qui oeuvrent dans... Parmi ces trois organismes, il doit y avoir au moins deux paliers différents, par exemple, un palier sur le travail et un palier social. C'est un peu le même problème qu'on avait avec la personne qui était ici avant, c'est assez délicat. Par exemple, vous prendriez Vox Populi, on travaille aussi bien dans le domaine culturel que social.

Je pense qu'il y a plusieurs petits organismes jeunesse... Les organismes jeunesse touchent à beaucoup de choses à la fois. Je prends l'exemple de ce que je vis. On est des tout petits groupes; on va faire des événements à la fois sur la multi-ethnicité, des événements à la fois sociaux, politiques et culturels parce qu'on va présenter des expositions photos, des oeuvres artistiques. Donc, à ce niveau-là, c'est un petit détail technique, mais c'est assez délicat. Vous dites deux domaines différents. En fait, je pourrais me faire présenter par trois groupes qui pourraient dire aussi bien: Je suis un groupe culturel que je suis un groupe social, etc. À ce niveau-là, il ne faut pas trop figer. Ce sont des petits problèmes techniques que vous allez peut-être rencontrer. Le choix en tant que tel ne me dérange pas trop. C'est certain que la représentativité des 15-18 ans risque d'être assez dure à obtenir. Je le vois même dans les groupes de jeunes dans lesquels on travaille. La plupart des gens qui s'impliquent sont des gens entre 20 et 30 ans. Avant 18 ans, c'est beaucoup plus délicat. Alors, peut-être qu'à ce moment-là... Moi, je vous suggérerais de faire une campagne de promotion. J'ai deux reproches à vous faire. D'abord, j'ai été prévenu trop tard de venir ici, parce que j'aurais pu venir

avec plus de monde. Je l'ai appris un peu à la dernière minute. Cela m'a bousculé. J'aurais pu arriver avec d'autres groupes qui travaillent dans le même domaine que nous et qui auraient aimé venir ici. Je l'ai appris trop tard.

Je pense qu'il faudrait faire une promotion ou une publicité à la télévision, ou je ne sais trop, pour informer les jeunes qu'ils peuvent se faire élire è ce collège-là. J'ai un peu peur. Dans ces choses-là, ce sont souvent des gens qui sont intéressés politiquement ou ce sont toujours les mêmes qu'on retrouve à ces conseils. C'est un peu pour cela que je suis venu parce que c'est la première fois que je fais une démarche politique aussi lointaine pour me rendre aussi haut. J'ai toujours été très méfiant face à ces choses parce que c'est souvent, finalement, la même "gang" qu'on retrouve. J'aimerais, si on fait cela, qu'il y ait pour une fois des gens plus représentatifs ou moins conscientisés politiquement; donc, moins attirés par ces démarches-là, mais peut-être plus représentatifs parce que, si vous voulez avoir un bon son de cloche, il faut... Alors, à ce niveau-là, je vous suggérerais de faire une campagne de promotion, parce que, moi, j'ai eu peu d'information là-dessus. Il a fallu que j'aille chercher l'information, et je vous le reproche un peu. J'aurais aimé que cela soit diffusé plus largement pour qu'on soit plus au courant.

M. Gratton: Est-ce qu'on me permet, M. le Préaident? Vous avez tout à fait raison. On est très conscient des difficultés que comporte la démarche de sensibiliser des organismes qui sont non seulement éloignés géographiquement, mais qui sont également éloignés par la non-politisation de leurs membres. Je vous donne ceci à titre d'exemple. C'est la cinquième ou la sixième journée que la commission des institutions consacre à l'étude des mémoires sur le projet de loi 104 et, sauf erreur, outre les remarques d'ouverture du chef du gouvernement, du chef de i'Qpposition, de Mme la députée de Chicoutimi, je ne pense pas que j'aie vu un seul article de journal ou un seul reportage qui touche aux travaux que nous faisons quand même depuis six jours. C'est dire que le seul fait de tenir une commission parlementaire n'est sûrement pas la façon d'informer les organismes intéressés à poser ou à appuyer des candidatures.

Nous devons trouver une façon de sensibiliser le plus large éventail d'organismes possible tout en reconnaissant que cela ne sera pas par une déclaration de l'Assemblée nationale ou une motion adoptée à la commission parlementaire que cela va s'effectuer, parce que, de ce côté-là, cela manque énormément de diffusion.

M. Ravatel: Une question technique: Vous avez reçu combien de mémoires?

M. Gratton: Une quarantaine au total dont environ un peu plus de la moitié ont fait l'objet d'auditions jusqu'à maintenant. Ces 40 organismes regroupaient - il y a énormément de regroupements - quelque 250 ou 275 organismes oeuvrant dans le domaine de la jeunesse. Je ne pense pas qu'il y ait une seule région du Québec qui n'a pas eu au moins un représentant. D'ailleurs, le groupe qui vous a précédés ce matin était le seul organisme provenant de la région de l'Outaouais qui soit venu présenter des mémoires, mais il y a eu au moins un organisme pour chacune des régions, Je retiens, parce que c'est factuel, la nécessité pour le gouvernement... Cela sera fait par le Secrétariat à la jeunesse.

Pour en revenir à la distinction que l'on fait, je me permets de compléter ma réponse de tantôt. Quand on parle du Secrétariat à la jeunesse, on parle d'un organisme de coordination interministérielle, un organisme de la fonction publique, donc, qui répond au gouvernement, alors que le Conseil permanent de la jeunesse est un organisme autonome - on va tâcher de faire en sorte que le projet de loi l'indique très clairement et plus clairement que certains semblent croire - qui ne répond pas du gouvernement et qui fournit des avis au gouvernement sur demande du gouvernement ou de sa propre initiative. C'est là la distinction fondamentale.

M. Ravatel: Son pouvoir, en fait, il a le droit de faire des recommandations et ça s'arrête là. Il peut faire ses recommandations, lesquelles peuvent être appliquées ou non. Ce n'est pas le Conseil permanent de la jeunesse qui a la décision finale de les appliquer.

M. Gratton: Évidemment pas. La décision finale demeure toujours au gouvernement puisque les politiques gouvernementales doivent être adoptées par le gouvernement. La pression que peut exercer un conseil permanent de la jeunesse face à des avis ou à des conseils que le gouvernement ne retiendrait pas, ce serait justement par le biais de la diffusion, un peu comme d'autres conseils consultatifs le font présentement. Tout au moins, cela nous donne un organisme le plus représentatif possible des divers éléments des différents organismes de jeunesse de l'ensemble des régions du Québec, si possible, de divers secteurs d'activité. Ces personnes ne sont pas à la solde du gouvernement et ne sont pas des fonctionnaires, mais ce sont des personnes indépendantes, prêtes à conseiller le gouvernement en matière de politiques qui visent la jeunesse.

Le Président (M. Després): Est-ce que le député veut ajouter autre chose?

M. Thérien: Seulement pour compléter avant de passer la parole à...

M. Gratton: Je m'excuse auprès du député de Rousseau.

M. Thérien: Pas du tout, cela me fait plaisir. D'ailleurs, c'est très justifié.

Je voulais aussi vous féliciter pour les nombreux intervenants - vous l'avez souligné - qui ont signé votre mémoire, ce qui prouve que cela porte intérêt et que cela rayonne sur d'autres. Je veux vous féliciter d'avoir vaincu cette peur ou cette crainte d'une démarche dite politique, mais qui est plutôt une démarche sociale très importante, comme le soulignait la députée de Chicoutimi tantôt. C'est très important que les gens qui ont quelque chose à dire le disent. Je pense que c'est la place pour le faire au Parlement. Je vous remercie.

Le Président (M. Després): J'inviterais donc maintenant la députée de Chicoutimi à continuer le débat.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Ravatel. Au nom de ma formation politique, cela me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue et de vous dire que je suis heureuse de vous voir là parce que c'est le seul mémoire qui nous parle effectivement des jeunes travailleurs. C'est assez étonnant, et j'ai eu l'occasion de le souligner à quelques reprises. Même la CEQ qui est venue nous parler ici est venue nous parler des jeunes de façon générale et n'a pour ainsi dire pas du tout touché à toute la question des jeunes travailleurs. Ce que je veux voir dans votre mémoire, vous venez nous parler des jeunes travailleurs dans les industries culturelles. Quand on parle de culture, on a l'impression, non pas l'impression parce que cela a été énoncé ici à quelques reprises de façon claire, on fait une équivalence entre le loisir et la culture. Je dirais - c'est une de mes difficultés - que la culture, c'est à la fois le travail, c'est à la fois le social, c'est à la fois l'éducation et c'est à la fois le loisir. C'est pourquoi je me demande comment et à quel titre vous pourrez éventuellement faire des recommandations pour, par exemple, des candidats. Vous, normalement, on devrait vous classer dans le travail; c'est logique et normal puisqu'on parle de jeunes travailleurs de l'industrie culturelle. Cela pose une difficulté majeure. Je pense que la plupart des pays qui sont un peu à l'avant-garde estiment que la culture représente le secteur le plus dynamique et le plus prometteur de création d'emplois, qui passe devant la plupart des autres secteurs parce que c'est le seul secteur qui ne connaît pas d'effets négatifs dus au développement des nouvelles technologies. Il ne fait que s'enrichir des nouvelles technologies et cela ne fait pas pour autant freiner le développement de ces besoins. Par exemple, si on pense aux vidéoclips, cela n'a pas eu comme effet de ralentir, cela n'a fait qu'améliorer le produit, le rendre plus rapidement efficace; c'est un autre mode de communication. Dans ce sens-là, c'est beaucoup plus prometteur que, par exemple, les industries du meuble parce que, dans l'industrie du meuble, la nouvelle technologie a comme effet de rendre la production plus efficace. Comme vous ne pouvez pas consommer beaucoup plus de meubles que ce qu'on consomme dans une vie, ce n'est pas dans ces secteurs qu'il faut investir, mais davantage dans le secteur des industries culturelles.

J'aimerais faire appel à vos connaissances par rapport à tout ce qui touche le domaine du travail culturel. Savez-vous combien il y a de travailleurs dans les différentes industries culturelles, que ce soit la littérature, le cinéma et la photographie, le théâtre, la danse, etc.?

M. Ravatel: Non, je ne pourrais pas donner un nombre.

Mme Blackburn: Non?

M. Ravatel: C'est assez délicat à définir parce que, dans ces milieux, malheureusement, beaucoup de gens ne sont pas rémunérés régulièrement, il y a beaucoup de pigistes. Donc, il y a ceux qui travaillent dans ce domaine à temps plein et il y a une infinité de pigistes qui vont travailler trois ou quatre mois sur un projet et même moins; je parle surtout du domaine du cinéma et de ces choses-là. C'est assez difficile. Mais, par mon vécu et mon expérience, je considère qu'au moins un jeune sur deux a une préoccupation culturelle. Cela est important. Vous parlerez avec beaucoup de jeunes et ils vont vous dire qu'ils font un travail parce qu'ils ont besoin d'argent pour s'acheter de la peinture ou des choses comme cela. Je suis citoyen canadien, il y a seulement quatre ans que je suis là, je viens de l'autre bord de l'Atlantique, et je peux dire qu'il y a présentement au Québec un phénomène culturel très riche, une effervescence culturelle énorme que je considère comme très intéressante, même plus intéressante que ce qui se passe en France, par exemple. J'ai l'impression qu'on est en train de la gaspiller. C'est un peu pour cela que je suis là, parce qu'on va parler des coupures et de ces trucs. Il y a eu beaucoup de coupures dans le secteur culturel, cela bouge un peu. C'est aussi pour cela que nous avons préparé ce mémoire, pour appuyer ce que d'autres personnes font avec la ministre des Affaires

culturelles, Mme Lise Bacon. On voulait aussi que la jeunesse entende parler de la culture. J'ai l'impression qu'on est en train de faire un gros gaspillage présentement au Québec; c'est un peu pour cela que je suis là, pour essayer de tirer la sonnette d'alarme et dire aux gens qu'il est vrai que l'industrie de la culture rapporte - on a vu encore récemment les chiffres dans un article sur l'actualité -pas mal plus que d'autres industries, sauf qu'on a du mal à calculer; c'est flou. En plus de cela, un jeune qui va créer, cela va l'empêcher de faire des tas d'autres affaires. Je connais plein de jeunes qui sont sortis plus ou moins de la délinquance grâce à une activité culturelle ou quand ils sont entrés dans une organisation de spectacles ou des choses comme cela. Ce sont des choses très concrètes; je pense qu'on fait un travail sur le terrain qui est très intéressant, mais, malheureusement, il est plus ou moins reconnu. La culture est encore considérée comme: "Bof!" L'armement et l'économie d'abord, la culture ensuite. Au Québec, il y a un phénomène culturel qui, je le répète, est très fort, très riche et il faudrait que le gens s'en rendent compte et en prennent conscience. Surtout le Québec, de par sa position en Amérique du Nord, a une culture bien particulière et il se doit de l'encourager et de la faire connaître. Je dirais qu'actuellement je ne le ressens pas tellement, je ressens même plutôt carrément un repli. C'est à peu près tout ce que j'ai à dire sur le sujet.

Mme Blackburn: II y a des chiffres qui circulent touchant à la rentabilité ou à la productivité en matière d'investissement culturel. Si je ne m'abuse, on dit que chaque dollar investi en rapporte sept. Est-ce exact? J'essaie de me rappeler. (11 h 45)

M. Ravatel: C'est cela, c'est un rapport de 6 $ ou 7 $. Justement, à ce sujet, je voudrais ajouter des choses aussi. Si jamais le conseil permanent - ce sont des conseils que je vous donne - ou si vous avez l'intention de faire un travail sur la culture, là, souvent, on nous dit, autant le gouvernement fédéral que provincial - il y a aussi des articles qui essaient de nous le faire croire - que l'État est fatigué de soutenir les industries culturelles, de les financer et tout, en disant qu'il faut se tourner vers le privé. C'est le grand discours qu'on entend de partout: Le privé va ouvrir ses bras aux jeunes artistes et va leur donner de l'argent. C'est peut-être vrai sur certains plans, mais, nous, la jeunesse en tant que telle on n'en ressent aucun effet. Juste pour donner un exemple concret, on a une belle revue qui s'appelle Ciel Variable et on considère que c'est une très jolie revue comprenant photos, diffusion de photographies et tout. On a fait énormément de démarches auprès des grandes compagnies pour obtenir, on ne leur demandait pas grand-chose, 500 $, pour nous acheter une demi-page pour nous payer l'impression parce qu'on en avait besoin. On leur faisait de la publicité, par exemple, Hydro-Québec ou Alcan, toutes ces grosses compagnies. On lit dans les articles de l'actualité que ces grandes compagnies sont prêtes maintenant à ouvrir les bras aux jeunes artistes et à leur donner de l'argent.

Je considérais que c'était un leurre. On nous fait croire cela, mais ce n'est pas vrai. Ces gens investissent sur ce qu'on appellerait des chevaux sûrs, c'est-à-dire qu'ils vont investir sur des gens qui sont très connus, ils investiront sur des valeurs sûres. Ils n'ont encore absolument pas dans leur tête l'idée d'investir sur des choses plus petites - peut-être qu'ils font moins parler d'eux - mais qui, finalement, sont tout aussi efficaces. Je pense que, si vous aviez un travail à faire sur ce plan, j'aimerais que la commission permanente se préoccupe de ce problème. Par exemple, dans les recommandations, à un moment donné, on dits Par exemple, pourquoi les compagnies qui investissent dans des activités culturelles n'auraient-elles pas des déductions d'impôt? Ce sont des petites solutions concrètes. Je pense qu'il y aurait un effort du gouvernement à faire. C'est notre rôle; nous, on le fait, mais c'est aussi le rôle du gouvernement de faire comprendre aux entreprises privées qu'il serait peut-être temps qu'elles se décident à financer la culture. C'est, à mon avis, un phénomène, un gros morceau de cette problématique. Elles ne sont pas encore prêtes pour l'instant.

Donc, vous, votre rôle, ce serait un peu cela aussi parce que vous allez avoir un certain pouvoir. Les espoirs qu'on a, c'est un peu par rapport à cela, sensibiliser les compagnies privées à investir dans la culture et pas forcément dans de la culture qui est voyante ou qui est "sage". Investir dans une culture peut-être moins voyante, mais finalement tout aussi efficace, qui fait travailler beaucoup de monde et qui motive beaucoup de monde. Il y a une chose qui est fantastique chez le peuple québécois, c'est son volontariat. Dans la culture, les jeunes sont volontaires. Ils ont le goût de le faire même si cela va leur coûter de l'argent. Je connais des tas de musiciens qui, pour aller faire un show, ne sont même pas rémunérés. Cela va leur coûter 100 $ de transport pour amener leur matériel, mais ils ont envie de le faire, ce qu'on ne retrouve pas forcément dans beaucoup d'autres pays. Comme je vous l'ai dit, j'ai l'expérience de la France et je peux vous dire que dans ce domaine il y a quelque chose de très riche ici qui se passe. Je pense qu'il faudrait en être conscient et ne pas le gaspiller. C'est un peu cela qui me tient à coeur en ce moment.

Mme Blackburn: Vous nous présentez, je

le rappelle, un mémoire qui situe davantage la culture dans le monde du travail, dans les entreprises culturelles. On a créé au Québec des groupes de soutien aux initiatives jeunesse qui ont comme mandat, à la fois de recevoir, d'examiner et d'analyser les projets de création d'entreprises pour accorder l'aide technique en particulier pour la création d'entreprises. Est-ce que vous avez déjà été informé de l'existence de tels groupes? II y en a 85 au Québec. Est-ce que dans le genre d'entreprises auxquelles vous faites référence, il est possible de s'adresser au groupe de soutien des initiatives jeunesse? L'avez-vous déjà fait? Est-ce que les réponses sont positives? Est-ce qu'on vous considère comme le monde du loisir?

M. Ravatel: Je suis au courant que cela existe. On a fait quelques démarches, mais à ce chapitre le domaine culturel n'est pas très reconnu. Cela est plutôt, de ce que j'en connaisse, dans les petites entreprises. En tant qu'entreprise culturelle, j'ai été à un colloque au cégep, à Laval sur ce qu'on appelle, un mot qui est très à la mode de nos jours, I'entrepreneurship; cela marche très fort, c'est une grande idée. Ce dont vous parlez est un peu dans le même domaine, mais c'est de l'entrepreneurship très... Comme je le ressens, c'est plutôt du genre entrepreneurship très petite chose privée. Dès qu'on parle de culturel, c'est certain qu'une revue n'est pas rentable. Si voua regardez le domaine de l'édition au Québec, les chiffres en face, qui est-ce qui va vous financer? C'est certain que ce qu'on espérait ultimement, c'était de sortir quatre numéros et de faire travailler des gens là-dessus qui soient rémunérés, mais nous ne voulons pas aller gros parce que nous savons très bien qu'il y a des domaines comme cela qui sont... Ces gens pensent en hommes d'affaires. Ils ne penseront pas: Bon, avant de nous financer, il va falloir leur apporter des chiffres de rentabilité. C'est certain, par exemple, que pour l'édition on ne peut pas inventer que c'est rentable si ce n'est pas rentable. Ce n'est pas rentable justement parce qu'il n'y a pas tellement d'effort3 faits sur cela. C'est comme un peu un cercle vicieux. Ce n'est pas rentable parce qu'on ne nous aide pas et, quand on veut nous aider, il faut qu'on soit rentable. Si on n'est pas aidé, on se sort difficilement de ce cercle.

J'ai entendu parler de ces choses. Nous n'avons pas vraiment fait la démarche parce qu'il y a aussi une question de temps. Nous visions plutôt du rapide et du pratique avec la publicité. J'ai l'impression que c'est plutôt dans un domaine très privé. Ce que je reproche un peu actuellement, que ce soit au niveau fédéral ou provincial, c'est vraiment le mot entrepreneurship. On essaie de nous faire voir plein d'affaires et tout. J'ai l'impression que mieux resituer les choses...

Ce n'est pas évident pour un jeune de comprendre tout de suite ce que c'est que l'entrepreneurship. Il le comprendra peut-être plus à travers justement un travail comme cela. Je pense que ce sont de bonnes intentions, mais, en ce qui a trait à l'efficacité, je ne sais pas. Je ne peux pas porter de jugement. Nous, en tout cas, nous n'avons pas vraiment été attirés par ces organismes pour l'instant. Par contre, l'initiative est très intéressante. Cela reste difficilement accessible, je trouve.

Mme Blackburn: Tout à l'heure, à une question du député de Rousseau, vous disiez ne pas devoir compter, et surtout les jeunes, sur le secteur privé pour développer les industries culturelles ou encourager la culture en disant que les grandes entreprises, si elles investissent dans des produits culturels, elles s'en vont du côté des valeurs sûres, de ce qu'on appelle les "blue chips", et cela a peu à voir finalement avec l'encouragement à la relève. Vous dites que l'encouragement à la relève serait davantage une responsabilité de l'État.

M. Ravatel: Je suis tout à fait pour que les compagnies privées se mettent à investir dans cela, sauf qu'elles ont comme dix ans de retard avant qu'elles comprennent cela. Je pense que le gouvernement a un rôle à ce niveau pour les sensibiliser, notamment en créant des projets de loi ou des exonérations d'impôt. Il y a un travail à faire aussi de la part du qouvernement à ce sujet. Je considère aussi que le gouvernement se doit de financer la culture parce que c'est quand même quelque chose qui lui revient. C'est quelque chose qui lui rapporte beaucoup en retombées sociales et économiques. Je pense qu'en retombées sociales cela lui rapporte beaucoup. II y a beaucoup de gens, comme je l'ai dit, qui évitent la délinquance ou des problèmes à travers des activités culturelles. Il faudrait que le gouvernement se rende compte qu'à long terme c'est un poids social. Cela peut paraître coûter cher de financer cela, mais à long terme c'est très bénéfique. Évidemment, on vit tout le temps avec des gouvernements qui pensent à très court terme. C'est un peu cela aussi le problème de base. À ce sujet, je pense qu'ils doivent faire un effort en ce qui a trait au privé pour qu'ils comprennent plus cela, mais le gouvernement aussi doit continuer à remplir son rôle et non pas tout... Alors, s'il veut se décharqer de cela sur le privé, qu'il fasse la démarche pour que le privé le comprenne et le fasse aussi bien que lui, sauf qu'à l'heure actuelle ce n'est pas vraiment cela qui se passe. Il a une démarche à faire, mais je pense aussi qu'il doit continuer à subventionner et à aider la culture des jeunes de son pays. Si ce n'est pas lui qui le

fait, ce sera qui d'autre? Ce seront les privés, mais, comme on dit, les privés ne sont pas très chauds sur cela. Il faut bien que quelqu'un le fasse.

Mme Blackburn: Vous dites que, quand la culture est un gagne-pain, on ne peut pas laisser exclusivement le soin à l'entreprise privée de la développer.

M. Ravatel: Non. Il faut que les deux intervenants soient là. Non, l'idée du privé est intéressante, mais il faut quand même que le gouvernement reste un intervenant dans ce domaine, c'est certain.

Mme Blackburn: Tout à l'heure, vous vous interrogiez sur les pouvoirs effectivement dévolus au Conseil permanent de la jeunesse en rappellant qu'ils étaient exclusivement consultatifs. Dans cette perspective, qu'est-ce que peut faire un conseil permanent de la jeunesse pour tout le dossier que vous venez de nous présenter, et particulièrement tout ce qui a trait aux travailleurs des industries culturelles?

M. Ravatel: II y aurait aussi un effort de promotion à faire. C'est délicat de parler de ce problème parce que, comme on dit, la culture touche un peu à tous les paliers. Donc, pour moi, dans ma manière de vivre, c'est quelque chose d'important. Je pense que la culture d'un peuple, c'est intéressant. Quand on maintient les gens dans la sous-culture, on en fait ce qu'on veut et ils sont manipulables. Donc, c'est certain que d'un autre côté... Je pense que c'est un acquis très important. À ce sujet, le Conseil permanent de la jeunesse pourrait faire des efforts de promotion pour faire comprendre l'importance de la culture dans la vie de tous les jours, de tout un chacun. Souvent, les personnes ordinaires considèrent encore la culture comme un phénomène de marginalité. Ah! oui. Lui, c'est le peintre, le "flyé" qui fait de la peinture. Il aura du mal à comprendre que cette personne peut travailler autant que quelqu'un à l'usine dans ce domaine, qu'elle y met autant d'énergie, autant d'espoir. Il devrait y avoir des recommandations faites au niveau de la promotion de la culture chez les jeunes. La relève, c'est nous autres. Si on ne nous aide pas ou si on continue à laisser les situations telles quelles, il y en aura de moins en moins et les gens vont se fatiguer. Je connais personnellement beaucoup de personnes qui ont laissé la culture parce qu'elles en avaient marre d'être sur le bien-être social et d'être dans des conditions de travail très dures. Elles ont préféré retourner, parce que ce sont des gens qui peuvent être compétents. Beaucoup peuvent travailler comme recherchistes. Beaucoup de gens quittent ce domaine parce que, au bout d'un moment, ils en ont marre, ils craquent. Ce sont des gens qui, à mon avis, ont beaucoup de talent.

Donc, arriver à faire un effort de promotion et aussi faire une politique de diffusion, de lieux de diffusion. On a de gros problèmes. Il y a beaucoup de créateurs et de matériel créatif, mais très peu de lieux de diffusion ou ils sont toujours réservés aux mêmes, quasiment. Il y a donc un effort è faire dans la diffusion et dans la promotion pour faire comprendre plus aux gens, faire entrer dans la tête des gens, l'idée de la culture parce que les gens ont encore, à mon avis, une idée bien fausse de ce qu'est cette problématique. C'est une idée encore très archaïque. Il serait temps de moderniser un peu et d'actualiser la masse en général à cette problématique. Je pense que, là-dessus, il y aurait un effort de promotion et, dans le travail de commission, cela devrait être tout le temps en toile de fond.

Mme Blackburn: L'une de vos principales recommandations est de faire une place è la culture au même titre que le travail, le loisir et l'éducation. Je dois vous dire que, pour ma part - je voudrais le faire ici, à cette occasion - je voudrais m'engager à défendre cette place que vous voulez faire à la culture au sein des secteurs officiellement reconnus.

M. Ravatel: Notre principale recommandation, avant de parler du reste, on commence par cela: vous avez mis l'éducation, le travail, le social et le loisir, et nous aimerions qu'il y ait une cinquième section qui soit la section culture. C'est notre première revendication; de là découlent toutes les autres, en fait.

Mme Blackburn: Je pense que c'est particulièrement important et pertinent parce que les pays qui ont le plus de succès actuellement sur le plan économique, ce sont ceux qui ont d'abord investi dans la culture parce qu'ils voient un rapport entre la capacité d'être productifs, imaginatifs et efficaces, et la qualité du développement culturel et de l'imagination qui passe par la fréquentation des arts. Dans ce sens-là, on pense à certains pays d'Europe, au Japon en particulier et à la Corée, qui ont investi beaucoup dans la culture parce qu'ils estiment que c'est l'une des meilleures façons de donner à une population cette imagination, cette créativité qui la rend tantôt productive et imaginative en matière de développement économique. L'autre raison qui a incité ces pays à investir massivement dans le développement de la culture, c'est qu'ils estiment que le développement de l'économie se fera beaucoup par le biais du développement de ce que j'appellerais les productions ou les biens culturels, la

production de biens de consommation, si vous me passez l'expression, d'ordre culturel, de nature culturelle. Je trouve que c'est très important et particulièrement au Québec parce qu'il est prouvé que toute population de moins de 15 000 000 d'habitants ne peut absolument pas développer sa culture sans une aide réelle et concrète de l'État, donc sans l'intervention de l'État.

Je voudrais dire également que Je partage la lecture que vous faites par rapport à la richesse, à la production culturelle au Québec. On l'a dit à plusieurs occasions, la culture au Québec est faite de deux grands courants culturels: le courant européen et le courant américain. Je dirais aussi qu'on s'est enrichi de nos racines amérindiennes, ce qu'on oublie trop souvent lorsqu'on parle de la qualité de la culture ici et des valeurs qu'on défend.

Je suis d'accord avec vous que, dans cette perspective de contribution de l'État au développement de la culture au Québec, encourager la participation du privé nous paraissait essentiel. Les dernières décisions du gouvernement ont précisément comme effet de ralentir les investissements dans le domaine culturel, et je pense en particulier aux actions accréditives qui étaient déductibles à 166 %. On sait que ce sont des secteurs à risque élevé, l'industrie culturelle, et, au dernier budget, le gouvernement décidait de réduire la déduction, de la faire passer de 166 % à 133 %, si ce n'est à 100 %. Il faudrait que je revérifie mes données. Ce qui fait que cela a comme effet de ralentir la volonté des entreprises privées de venir investir dans des industries culturelles. Je me rappelle le propos, d'ailleurs, de la ministre qui disait en Chambre que ce n'était pas très important parce que de toute façon cette aide venait aider à la production de films québécois pornographiques et que c'était la raison pour laquelle ce n'était pas très important même si l'entreprise privée se retirait de ce secteur d'activité.

Je voudrais juste vous rappeler en terminant, d'abord, vous remercier à nouveau de votre contribution et rappeler que votre mémoire est un des rares qui viennent nous parler précisément et exclusivement de travailleurs dans un secteur d'activité. Vous dire également que, pour l'essentiel, votre principale recommandation qui veut faire une place spécifique à la culture au sein des secteurs reconnus, je m'en ferai la porte-parole. J'espère que la partie ministérielle prendra sérieusement en compte votre recommandation parce que je pense qu'elle a tout à fait sa place. Je vous remercie.

Le Président (M. Després): M. le ministre.

M. Gratton: M. le Président, je voudrais, moi aussi, remercier M. Ravatel de sa contribution à nos travaux. Lorsque nous avons décidé de tenir cette consultation générale sur le projet de loi 104, nous visions à connaître le point de vue des intéressés quant au contenu du projet de loi 104. Nous voulions également échanger, en toute franchise, avec les organismes qui s'intéressent à la problématique jeunesse et faire en sorte que nous puissions ensemble cheminer vers des solutions à l'élaboration desquelles le Conseil permanent de la jeunesse pourra contribuer. Dans ce sens, je pense que la présentation de votre mémoire ce matin, qui contient des choses que personne d'autre n'est venu nous dire jusqu'à maintenant, a été très éclairante pour le gouvernement. Je vous prie de croire que nous ferons en sorte que vos recommandations obtiennent une considération sérieuse.

D'autre part, je pense que vous pourrez repartir avec une conception plus complète que celle que vous n'aviez avant de venir. Je vous prie de croire que tout ce que vous pourrez faire pour faire connaître les intentions du gouvernement ou l'intention de la législation pour que des candidatures provenant du milieu qui vous intéresse soient posées au collège électoral sera bienvenu.

Je souligne au passage que ces liens avec les gens du milieu que nous souhaitions pouvoir établir ici en commission parlementaire s'accompagnent également... Ce matin, en particulier, au cours de la présentation de votre mémoire, un membre du cabinet de Mme la ministre des Affaires culturelles, Mme Bacon, est présent. M. Mario Genest, qui est à votre extrême droite, j'en suis sûr, saura assurer le suivi qui s'impose.

Quant à nous, de la commission, et les membres du gouvernement, nous vous remercions à nouveau de votre collaboration. Nous vous assurons que nous considérons très sérieusement les remarques que vous nous avez faites.

Le Président (M. Després): M. Ravatel, je vous remercie beaucoup de votre participation à la commission des institutions dans le cadre du projet de loi 104. Je vais maintenant suspendre les travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 5)

(Reprise à 15 h 19)

Le Président (M. Filion): Alors, nous allons donc poursuivre nos travaux de consultation eu égard au projet de loi 104, Loi sur le Conseil permanent de la Jeunesse. L'ordre du jour de cet après-midi: Nous allons commencer nos travaux avec les

Travaux communautaires du Haut-Richelieu Inc. et je voi9 déjà son représentant, M. Jean Thouin, qui a pris place à la table des invités; suivront à 16 heures les représentants de la Maison Tangente qui sont également présents parmi nous et à 17 heures les représentants de la maison L'Antre-Temps.

Donc, bienvenue, M. Thouin. Et, sans plus tarder, je vous inviterai à bien vouloir présenter le mémoire préparé au nom des Travaux communautaires du Haut-Richelieu Inc.

Travaux communautaires du Haut-Richelieu Inc.

M. Thouin (Jean): Merci. M. le Président, mesdames et messieurs les députés, M. le ministre. Les Travaux communautaires du Haut-Richelieu, c'est un organisme qui s'occupe de jeunes contrevenants, des jeunes qui ont été arrêtés pour des délits mineurs, des gens entre 13 et 18 ans. Notre approche avec ces jeunes, c'est de les faire travailler dans des travaux bénévoles pour compenser un peu les torts qu'ils ont causés, mais c'est surtout de les intégrer dans la communauté. On regarde surtout le côté positif, le potentiel de ces jeunes et non pas le ou les délits qu'ils ont commis. Nous nous sommes penchés sur le projet de loi au conseil d'administration. On s'est dit d'accord avec ce projet d'avoir un Conseil permanent de la jeunesse pour apporter une meilleure compréhension de la situation des jeunes au gouvernement et, aussi, je pense que cela peut apporter une meilleure connaissance de la situation pour la population.

Il y a des points qui nous ont surpris un peu, des articles du projet. D'abord, la définition d'un organisme jeunesse, telle qu'elle est libellée, comme étant un organisme incorporé, etc. selon la troisième partie. Il y a un autre point qui nous a surpris, c'est lorsqu'on parle seulement de quatre secteurs concernant les jeunes et qu'on parle surtout de la problématique jeunesse au lieu de parler de la question jeunesse. Ce n'est pas juste un problème, les jeunes; il y a beaucoup de potentiel là-dedans et cela nous a surpris aussi, finalement, les moyens accordés à la commission, en comparant avec des documents qu'on a reçus du secrétariat, par rapport aux moyens accordés à d'autres conseils. Donc, on se demande si ce n'est pas un conseil à rabais.

Alors, pourquoi parler de problématique jeunesse et non pas de question jeunesse? C'est un peu parce qu'évidemment il y a des problèmes qui surviennent avec les jeunes, mais il faut regarder bien plus le côté de leur potentiel, je pense. J'imagine qu'il y en a d'autres qui l'ont dit avant. Ensuite, on a intitulé notre mémoire: Les Jeunes: notre avenir et aussi notre présent. Les jeunes sont actifs dans différents domaines. On n'est peut-être pas toujours porté à regarder ce qui se fait de positif, mais c'est bien sûr que les manchettes des journaux, c'est souvent concernant ce qui se fait de négatif et des malheurs.

Donc, les jeunes, notre avenir et notre présent c'est là-dessus que le conseil devrait miser et on recommande d'élargir un peu la composition du collège électoral pour avoir 50 personnes qui représentent huit secteurs différents dans lesquels le gouvernement intervient.

Avant d'expliquer cela, je voudrais revenir sur la question des problèmes. C'est sûr qu'il existe des problèmes chez les jeunes, la première partie de notre mémoire en fait état. On dit que c'est une question de justice d'avoir un conseil permanent pour tes jeunes parce qu'ils n'ont pas souvent voix au chapitre. Les gens de 35 et 45 ans ou les deux autres générations, les pères de la Révolution tranquille, tes enfants de la Révolution tranquille et les grands-parents sont souvent plus présents dans l'actualité; ils sont souvent plus actifs politiquement, donc, ont voix au chapitre plus souvent. Par contre, les jeunes représentent peut-être un peu moins d'un tiers de la population; Ies 15-30 ans sont moins actifs et sont peut-être plus désabusés aussi. J'en connais plusieurs dans la vingtaine qui sont pas mal désabusés des institutions. Je pense que ce serait rendre justice aussi à l'ensemble du Québec que de former un comité qui s'intéresse plus à la jeunesse parce qu'en négligeant d'intégrer nos jeunes ce n'est pas une perte seulement pour les jeunes, c'est une perte pour l'ensemble du Québec. Tout le potentiel que les jeunes ont, surtout les nouvelles technologies, les nouvelles approches... Souvent, on se casse la tête, nous, tes plus vieux - je me considère vieux, là - avec les nouvelles technologies, l'informatique, la productivité. En réalité, les jeunes vivent cela plus facilement que nous et, puis, tout ce dynamisme-là, si on s'en prive, on en prive l'ensemble du Québec.

J'irais jusqu'à dire que c'est une tragédie nationale; à l'exemple du sénateur Jacques Hébert, je pense que c'est une situation qui est grave. Ce n'est pas terminé, il y a eu la crise, bien sûr, en 1982. Il y a eu bien des jeunes qui ont été laissés pour compte et ce ne sont pas juste les plus démunis. Je pense que les gouvernements, autant au niveau fédérai, provincial que municipal, n'ont pas montré qu'ils avaient une très grande connaissance de la situation des jeunes. S'ils en avaient une connaissance, ils n'en avaient sûrement pas une grande compréhension. Vous me permettrez d'être bien sincère avec vous. Je pense qu'ils n'avaient pas non plus toujours la volonté de changer les choses. Il y a eu d'autres pays,

notamment la France où je suis allé voir ce qui se faisait, qui avaient une volonté bien précise, des plans d'action et des moyens plus importants qu'au Québec. C'est bien sûr, si on tient compte de la population. Mais, quand il y a une volonté politique - leur façon de travailler consistait en des équipes de concertation locale - tout le monde embarque là-dedans et cela avance plus. C'est bien sûr qu'il faut ménager bien des susceptibilités.

On dit qu'un des gros problèmes des jeunes pour leur intégration est le manque de travail. Quand un jeune ne travaille pas, il ne peut pas s'intégrer à la communauté. Il ne peut pas s'identifier à un métier, à une fonction, à une personnalité. La question du travail est importante et on a souvent répondu aux jeunes: Vous allez voir, dans quelques années, en 1990 ou en 2000, cela ira bien. Mais les enfants de ces jeunes seront déjà grands quand eux seront encore au chômage. Ça va vite, les enfants. La jeunesse va jusqu'à 30 ans, cela veut dire qu'il en a plusieurs qui ont des enfants de 10 ans.

Non, je pense qu'on n'a pas pris Ie3 moyens, dans les années passées... Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour m'exprimer sur ce sujet en tant que personne travaillant avec des jeunes qui sont souvent tristes et déçus et dont les parents sont souvent mal à l'aise et mal pris. Ces jeunes sont dans des sous-sol et attendent.

Le travail partagé ou la réduction du temps partiel aurait pu aider beaucoup de jeunes. Il est bien sûr qu'une personne avec une certaine expérience est plus valable qu'un jeune, au point de vue de la compétence, mais tes jeunes ont du dynamisme et, comme je le disais tantôt, ils réussissent mieux que nous à se débrouiller avec les changements rapides actuels. Ça, c'est important, sans compter l'aspect économique. Si on compte tout ce qu'un jeune dépense, on pourrait estimer tout ce qu'on a perdu de consommation à cause du fait que les jeunes n'ont pas beaucoup travaillé ces dernières années. Cela se chiffrerait, j'en suis certain, dans les milliards de dollars, les salaires que les jeunes n'ont pas gagnés et donc qui n'ont pas été dépensés, mais qui ont été gagnés par des personnes plus vieilles et qui sont dans des bas de laine. Cela ne fait pas marcher l'économie. C'est une question mathématique.

Donc, la première partie de notre mémoire traite un peu de justice pour les jeunes et pour l'ensemble du Québec. Ensuite, on parle, à la page 3, d'un peu d'espoir. C'est sûr que je dépeins un tableau triste, mais c'est la réalité. Les jeunes sont déçus. Ils n'ont pas souvent voix au chapitre. Si le Conseil permanent de la jeunesse peut être assez crédible pour eux, je pense qu'ils embarqueront, parce qu'ils feront partie de l'appareil gouvernemental. Ils seront intéqrés là-dedans comme ils devraient l'être à tous les échelons.

Pour cela, il faut des moyens adéquats. Il ne faut pas que ce soit un conseil à rabais. À la page 4, je parle de l'importance des moyens. Nous recommandons que le nombre de membres soit d'un minimum de quinze, que la durée de leur mandat soit d'un minimum de trois ans. Même s'il peut y avoir un roulement dans les organismes de jeunes, pour assurer un conseil, un certain suivi des décisions, cela prend plus que deux ans. Je suis certain qu'il y a des jeunes de 27 ou 30 ans qui pourraient être dans un conseil pendant trois ans. Ensuite, nous recommandons que des allocations de présence soient versées aux membres des comités spéciaux et aux membres du collège électoral. Je l'ai mentionné. Je ne savais pas si c'était inclus ou non. Je ne l'ai pas vu dans le projet. Je l'ai mis. Je trouvais important que les jeunes qui viennent de régions éloignées aient au moins - surtout s'ils travaillent à temps partiel, comme la plupart, ou s'ils ne travaillent pas du tout -leurs dépenses payées pour venir participer au conseil. Nous recommandons qu'un budget suffisant soit octroyé pour mener à bien le mandat du conseil. J'ai vu, depuis quelques années, des employés du gouvernement, des jeunes, être employés seulement à temps partiel ou comme contractuels parce qu'on ne veut plus embaucher beaucoup d'employés. Donc, ce sont les derniers engaqés et les premiers mis à la porte. Je pense que ce n'est pas juste pour eux: parce qu'ils sont les plus jeunes, ils ont les emplois les plus précaires, ce qui fait que j'ai l'impression que, lorsqu'on s'occupe de jeunes, on a toujours des moyens à rabais. Alors, je souhaite que cela ne soit pas le cas pour le conseil, de façon que les jeunes partout considèrent le conseil à sa juste valeur et considèrent que c'est vraiment aussi juste pour eux que pour tous les autres conseils. (15 h 30)

Ensuite, l'autre partie où l'on parle d'une richesse et non pas d'un problème, c'est ce que je disais au début. La jeunesse n'a pas seulement des problèmes de travail, d'instruction, de loisir ou de mésadaptation sociale, elle consomme et façonne la culture, culture au sens large. Elle cultive, elle se nourrit, elle participe aux développements industriel, technologique, etc.

Elle vit les changements technologiques et elle les vit mieux, même, que les plus vieux. Elle apporte de nouvelles valeurs - qui sont peut-être parfois anciennes - qui font quand même partie de l'évolution. Quand on pense juste à la question du vécu familial, la question de relations entre parents, les jeunes ont vécu des choses qu'ils voudraient peut-être changer dans l'avenir. Donc, ils sont dans les changements et apportent des

choses qui sont nouvelles, qui sont importantes au niveau, je dis culturel au sens large, de la vie en société; le social est un peu dans le culturel, là.

En conséquence, pour avoir un éclairage de l'ensemble des champs d'intérêt des jeunes, nous recommandons que le collège électoral soit composé de 60 membres -j'avais dit 50 tout à l'heure, je m'excuse, c'est parce que je ne lisais pas mon texte -afin de bien représenter l'ensemble des secteurs d'intervention de l'État et de l'action des jeunes.

J'ai fait huit catégories. J'ai pris ie tableau des ministères du gouvernement du Québec et, comme cela faisait trop de secteurs, j'ai essayé de combiner cela et j'ai pondéré un peu pour arriver à huit secteurs. Mais, avant, je dois aussi vous parler de l'autre recommandation: Que soient reconnus comme un organisme jeunesse toute association, tout groupe ou organisme, incorporé bu non, contrairement à ce qui est libellé qui dit qu'il faut que ce soit un organisme incorporé, selon la troisième partie de la Loi sur les compagnies. Je trouve cela un peu restrictif parce qu'il y a des coopératives, des syndicats, des associations, des fédérations. Je pense que c'est valable, tous ces gens-là. On ne demande pas dans les autres conseils, que ce soit le Conseil du statut de la femme ou ailleurs, que les associations qui vont être consultées pour avoir une personne nommée par le ministre soient nécessairement incorporées selon la troisième partie de la Loi sur les compagnies. Il serait peut-être bon d'élargir un peu. Ou moment qu'une association est représentative, qu'elle existe depuis douze mois et qu'elle s'adresse à des jeunes de 15 à 30 ans ou regroupe des jeunes de 15 à 30 ans, à mon sens, c'est une association ou un groupe qui est valable et qui peut représenter les jeunes. Il y a une technicité là, mais je pense que ce serait beaucoup restreindre autrement, en conservant cela tel quel.

Les huit secteurs que nous proposons: Premièrement, l'éducation qui est seule, vu son importance, le travail aussi, la concertation locale à cause de l'importance du travail qui se fait dans les régions localement. Bien sauvent, c'est localement que se font les changements un peu, comme on peut dire, en régions c'est souvent la PME qui développe l'emploi. Je pense qu'il y a aussi une PME, des organismes sociaux qui sont petits, mais moyens, et qui, actuellement, développent des façons d'intervenir avec les jeunes, donc, comme c'est au niveau local que cela se fait, il est important qu'il y ait des gens et, comme il faut que cela se fasse en concertation, des gens de la concertation locale. Cela peut être des conseillers municipaux ou des conseillères municipales aussi parce que c'est quand même un rôle de concertation, être conseiller municipal.

Le quatrième point, l'économie, la finance ou la consommation, donc, une personne qui viendrait d'un de ces trois secteurs que j'ai regroupés. Le cinquième secteur, une personne qui viendrait de la santé, du domaine social ou de l'environnement qui sont des secteurs assez proches. Ensuite, troisième secteur, une personne qui viendrait du domaine des communications ou des relations avec d'autres peuples ou d'autres ethnies. C'est bien sûr qu'on pense surtout aux régions où il y a plusieurs ethnies, comme Montréal, et aussi aux associations qui ont des liens dans d'autres pays. Il y a des associations jeunesse qui ont des liens dans d'autres pays et qui considèrent les relations internationales d'une façon différente de celle des personnes plus vieilles.

Le septième secteur: l'industrie, le commerce ou la technologie. Finalement, le huitième secteur que je trouve important, c'est le secteur du loisir, de la culture ou de ta vie en société. Quand je dis culture, je parle au sens large, pas seulement sur le plan de l'expression culturelle et artistique, mais plus au sens de la vie en société. S'il y avait un représentant par secteur, ce qui fait huit, il en resterait sept pour arriver à quinze membres. À ce moment-là, on pourrait se permettre d'équilibrer cela pour avoir peut-être plus de représentants de certaines régions plus populeuses. Au moins, on serait certain que toutes les régions puissent avoir un représentant.

L'autre recommandation, c'est que soit aboli le paragraphe 2 de l'article 19 du projet de loi et qu'il soit remplacé par le suivant. C'est la question d'être accrédité par des organismes. Nous proposons que cette déclaration doive être accompagnée d'une ou de plusieurs résolutions à l'appui de cette candidature. Je pense que, si une association est valable en tant que telle, la candidature qu'elle présente peut être valable. Si elle veut être appuyée par plusieurs, c'est encore plus valable, mais je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'aller chercher trois associations dans deux domaines différents. Je me fie à ceux qui feraient les nominations dans ce sens. J'imagine qu'ils choisiraient des gens représentatifs.

Ensuite, que le conseil soit composé d'un minimum de quinze jeunes - comme je le disais - élus par le collège électoral, en tenant compte de la représentativité des régions, mais tout en incluant obligatoirement un représentant dans chacun des huit secteurs mentionnés.

En résumé, ce sont un peu nos propositions. Nous pensons que le conseil peut aider à intégrer les jeunes et qu'il peut aider à apporter à la population une meilleure connaissance de la situation. La seule inquiétude que je pourrais avoir - elle n'est

pas écrite dans le mémoire - c'est que je me demande, en supposant que le conseil est formé, s'il va rester des organismes jeunesse dans la province pour, présenter des candidatures. Présentement, il y a plusieurs organismes qui se posent des questions sur leur survie et qui demandent de l'aide financière, finalement. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Després): M. Thouin, je vous remercie de votre présentation. Je donnerais peut-être maintenant la parole à un membre de la députation ministérielle pour vous interroger. Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata, la parole est à vous.

Mme Dionne: D'accord. Merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord, M. Thouin, j'aimerais vous remercier et remercier les Travaux communautaires du Haut-Richelieu Inc. pour votre étude du projet de loi, la préparation de votre mémoire et sa présentation. Je l'apprécie beaucoup. On en a vu plusieurs depuis le commencement et je trouve qu'il est rafraîchissant, malgré le fait que vous travailliez auprès de jeunes qui ont probablement les plus gros problèmes au Québec. J'aimerais vous demander comment votre organisme travaille auprès des jeunes contrevenants. Est-ce que vous avez des façons particulières, des programmes spécifiques?

M. Thouin: Surtout pour le programme de travaux communautaires, comme on l'appelle, on demande à des gens, dans des associations de loisir ou toute association qui rend un service à la population, d'accueillir un jeune pour le faire travailler un certain nombre d'heures. Cette année, la moitié des jeunes étaient sous décision judiciaire du Tribunal de la jeunesse et, pour l'autre moitié, c'était une mesure de rechange. On demande leur collaboration. Je choisis les organismes les plus près de la résidence du jeune et leur réponse est toujours positive. C'est-à-dire qu'ils considèrent qu'ils vont rendre un service au jeune, tout en recevant un service en nature. C'est notre façon de travailler: demander la collaboration des gens. La plupart du temps, les gens voient cela comme une action éducative et non pas répressive. Il s'agit vraiment d'intégrer un jeune et - comment dire? - de lui permettre de compenser pour les torts qu'il a commis. Parfois, cela peut faire six mois, un an et, parfois même, deux ans que le petit vol a été fait. Il est temps qu'on passe l'éponge et qu'on arrête de le regarder comme un délinquant, mais plutôt comme un jeune qui a du potentiel, qui vient rendre un service. C'est un peu notre façon de faire. Notre organisme fait le lien entre le réseau public et les gens qui sont volontaires pour aider ces jeunes.

Mme Dionne: On a parlé de sensibilisation, par exemple, dans le milieu carcéral. Est-ce que vous travaillez de cette façon ou vous êtes plus préoccupé par la réadaptation dans la vie de tous les jours du jeune?

M. Thouin: C'est plus une réadaptation par le travail, l'intégration du jeune. On n'a pas d'activité pour faire une réflexion à partir d'un exemple. On a quand même des groupes de rencontre pour des jeunes qui ont commis des vols à l'étalage où, là, c'est plus une prise de conscience à l'intérieur d'une discussion de groupe. C'est moins important comme vol que les autres...

Mme Dionne: Donc, votre financement est à partir des budgets accordés aux Travaux communautaires.

M. Thouin: Le financement vient du ministère des Affaires sociales.

Mme Dionne: ...organismes.

M. Thouin: C'est cela, les services de soutien aux organismes communautaires qu'on demande chaque année, dont une partie vient de transferts du gouvernement fédéral. C'est le Code criminel, donc, c'est une loi fédérale. C'est ce que j'ai entendu dire, je ne le sais pas exactement.

Mme Dionne: D'une année à l'autre vous avez un budget qui vous permet de faire votre travail.

M. Thouin: Chaque année on fait une demande et on a un budget qui nous permet d'engager une personne et trois quarts, et d'organiser cela. Les gens sont bien prêts à collaborer, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, même s'ils ont certains préjugés, certaines craintes naturelles quand ils ne connaissent pas les jeunes. Il reste que chaque fois qu'on l'a demandé, les personnes qui ont refusé un jeune sont très rares. Donc, elles étaient disponibles, elles étaient prêtes, mais ce qui manquait, c'était l'organisation, les moyens pour organiser cela.

Mme Dionne: Je lisais dans votre mémoire et, à la page 3, il y a un bout que je me permets de citer parce que je l'ai apprécié et je pense que mes collègues vont également l'apprécier. Vous dites: "Nous les 35 ans et plus, qui nous débattons avec la haute technologie comme facteur de développement économique, nous ne nous rendons pas compte que pour les jeunes cela fait partie de leur vie. L'informatique est un jeu pour eux. Nous qui sommes troublés par

les relations avec les communautés ethniques, culturelles et biculturelles, ne voyons pas que les jeunes vivent déjà en harmonie. Nous qui nous penchons sur les problématiques sociales et familiales, ne savons-nous pas les nouveaux modèles sociaux et les nouvelles valeurs que les jeunes vivent? Ce sont les jeunes qui nous aideront à trouver des solutions pour l'avenir: ils ont déjè un pied dans les années 2000."

Je lisais votre paragraphe et, quand on regarde avec quel esprit on a voulu préparer un projet de loi sur le Conseil permanent de la jeunesse, cela se ressemble beaucoup puisque vous parlez de richesse au lieu de parler de problèmes et nous disons que le conseil permanent donne une latitude aux jeunes tout en leur faisant confiance. Donc, on fait confiance non seulement quand on parle de problèmes, mais quand on parle également de richesse. J'étais confiante qu'on l'avait bien présenté, mais vous me rassurez d'autant plus puisque vous travaillez avec les jeunes contrevenants, qui ont de gros problèmes et je pense que c'est bien de rester positif et de rester optimiste pour la jeunesse. Les jeunes sont dans les années 2000 et ils y sont bien ancrés depuis longtemps.

Je regarde à l'article 16 votre commentaire sur le nombre de jeunes. Vous parlez de huit secteurs, au lieu de cinq en tant que tels; j'ai remarqué que vous avez mentionné que vous avez travaillé à partir des ministères du gouvernement pour faire un lien. On parle de nombre, mais est-ce que vous pensez qu'on peut être aussi efficace à quinze qu'à onze? Je me posais la question. Il ne faut pas alourdir cela nécessairement, mais...

M. Thouin: II y a d'autres conseils dans lesquels il y a quinze membres, je pense. J'ai lu le document que j'ai reçu du Secrétariat à la jeunesse, je me suis dit: Pourquoi en mettre seulement onze pour les jeunes? Il faudrait mettre le maximum, autant que pour les autres. (15 h 45)

Mme Dionne: Si on regarde cela, on utilisait quatre secteurs, soit les affaires sociales, l'éducation, les loisirs, le travail et vous en mettez huit, en tant que tels. Comment pourrait-on faire un lien entre vos huit et les quatre? Est-ce que les nôtres, ceux du projet de loi, sont trop précis, d'après vous?

M. Thouin: On parle du social parce qu'on parle des problèmes sociaux des jeunes, du travail, à cause des problèmes de travail, de loisir parce qu'on pense que les jeunes manquent de loisirs, qu'ils n'ont rien à faire. L'autre secteur est l'éducation. C'est sûr que c'est important. Mais il reste que le gouvernement agit et fait des lois dans plusieurs secteurs, pas seulement dans ces secteurs. Les jeunes participent à la vie économique dans plusieurs secteurs, ce qui fait qu'ils ont sûrement des choses à dire aussi dans les autres secteurs de l'économie et de la consommation. Il ne faut pas penser que les jeunes n'ont rien à dire et qu'en bas de 35 ans ils ne peuvent pas parler. Je n'ai pas attendu 35 ans pour parler. Je pense que vous non plus.

C'est cela. Je trouvais que c'était un peu restrictif de mettre seulement quatre secteurs. Si c'est pour conseiller le gouvernement sur l'ensemble de la situation des jeunes, comme c'est dit dans le projet, je pense, je me suis limité aux secteurs du gouvernement du Québec. J'aurais pu prendre cela encore plus largement, mais je me suis dit; Si le gouvernement du Québec légifère dans ces secteurs, il pourrait poser des questions aux jeunes. Il pourrait avoir des conseils du Conseil permanent de la jeunesse sur ce secteur. C'est peut-être un peu vaste, mais cela va avec l'esprit qu'il ne faut pas regarder juste les problèmes, mais aussi le potentiel dans d'autres secteurs.

Mme Dionne: D'ailleurs, c'est la première fois que, dans un mémoire, on a le secteur de la consommation qui est indiqué. Je trouve que c'est bien. Effectivement, on n'en a pas parlé jusqu'à maintenant, mais c'est un secteur qui affecte les jeunes parce que, si les jeunes ont de l'argent, comment le dépensent-ils? Et le niveau économique... Alors, j'ai trouvé cela très intéressant de voir que vous en avez parlé. Comment voyez-vous les relations entre le Conseil permanent de la jeunesse et les organismes de jeunes? Quel lien leur voyez-vous? Est-ce que c'est direct? Si vous voulez me donner votre réflexion là-dessus, peut-être.

M. Thouin: C'est un lien assez direct du fait que, d'abord, ce serait difficile d'avoir des communications entre le conseil permanent et l'ensemble des organismes jeunesse parce qu'il existe des centaines d'organismes jeunesse, mais ceux-ci ne sont pas tous regroupés. Il n'y a pas de liens entre eux partout. Je pense aux organismes orienteurs, dont nous sommes, les Travaux communautaires. II y a 35 organismes orienteurs dans la province qui orientent des jeunes vers des associations. On n'a pas vraiment de liens entre nous encore. J'apprenais tantôt qu'il commence à y avoir un regroupement des maisons d'hébergement. Donc, il manque de communication entre les orqanismes. Comment faire, alors, pour que tous ces organismes soient vraiment en lien avec le conseil permanent? C'est un problème. Je pense qu'il y en a qui ont suggéré qu'il y ait des instances régionales. Je n'avais pas pensé à cela, mais cela pourrait être important de penser à cela.

Chose certaine, la communication est difficile entre les organismes parce qu'il n'y a pas beaucoup de moyens de communications, iî n'y a pas de tables de concertation.

À Saint-Jean, on avait commencé à en faire une, il y a quatre ans. Cela continue de peine et de misère. On n'a pas tellement de moyens ce qui fait qu'on se consacre seulement à nos activités. Alors, la communication n'est pas très grande. C'est la difficulté d'avoir un lien avec le conseil. Celui-ci va avoir des liens avec les associations par les personnes, mais cela va être un peu échevelé, si vous me permettez l'expression. Les contacts vont se faire à partir des gens du conseil qui sont de telle ou de telle région. Mais rendue dans la région, la personne du conseil n'a pas nécessairement de moyens de communiquer avec tout ce monde.

Mme Dionne: II y a peut-être aussi l'aide du collège électoral qui pourrait arriver à ce moment-là.

M. Thouin: Oui. Par le biais du collège électoral, cela pourrait être une bonne manière d'établir ce lien.

Mme Dionne: Je me souviens que quelque part - je ne me souviens pas de la page - vous dites qu'il est important de reconnaître les organismes et les jeunes, aussi, en tant qu'individus. C'est également important que... On parlait de regroupement à partir d'organismes, c'est-à-dire de recommandation de trois organismes de deux secteurs; il y a effectivement beaucoup de jeunes qui ne sont pas reliés spécifiquement à un organisme ou à un autre.

M. Thouin: II ne faut pas nécessairement toujours être accrédité par deux ou trois organismes. Un jeune peut être actif dans une association et ce qu'il a à dire est valable.

Mme Dionne: Comment voyez-vous également les relations entre le conseil et le gouvernement?

M. Thouin: D'après ce que je connais du projet de loi, le conseil est là pour conseiller le gouvernement, c'est bien certain.

Mme Dionne: C'est un conseil "aviseur"...

M. Thouin: Comme le Conseil supérieur de l'éducation qui fait des études, comme le conseil de la santé, le conseil de la famille -comment s'appelle-t-il? - le Conseil du statut de la femme, en fait, tout cela.

Mme Dionne: Oui, d'accord.

M. Thouin: Je vois que ce sont des conseils autonomes, dans le sens que ce n'est pas le gouvernement qui va leur dire quoi faire ou quoi dire, finalement. J'espère qu'ils auront une certaine autonomie dans les choix de sujets pour étude et dans les communications avec la population aussi.

Mme Dionne: D'accord. M. le Président, cela va pour moi.

Le Préaident (M. Després): Merci, Mme la députée de Kamouraska. Je passerais peut-être maintenant la parole à Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Thouin. Cela me fait plaisir au nom de ma formation politique de vous souhaiter la bienvenue è cette commission et de vous remercier d'avoir accepté de participer à ses travaux. En dépit du fait que le temps qui vous était alloué pour rédiger un mémoire pour réagir au projet de loi était relativement bref, vous avez trouvé le temps nécessaire pour le faire. Je voudrais vous en remercier. J'ai eu l'occasion de le dire et je pense que c'est important de le rappeler, j'ai beaucoup d'estime pour les organismes qui se sont donné la peine de participer, parce qu'en l'absence de participants il y a quelqu'un qui parle en leur nom. C'est pourquoi je trouve important que vous y soyez.

Comme le soulignait la députée de Kamouraska-Témiscouata tout à l'heure, je pense que votre mémoire a quelque chose de rafraîchissant. En effet, il y a peu de mémoires qui nous ont présenté la jeunesse autrement que sous une problématique, comme faisant plutôt partie de la solution. Je faisais remarquer à cette commission que malheureusement on finissait par définir la jeunesse en termes de problèmes. Finalement, cette façon de définir la jeunesse nous en présentait une dépendante, c'est-à-dire non autonome économiquement, ce qui expliquait qu'il y a peu de mémoires qui viennent nous parler des jeunes au travail. Alors, on a exclu complètement du discours toute une catégorie de jeunes qui, semble-t-il, ne posent pas de problème - mais, quand même, ils sont au travail - comme s'ils ne faisaient plus partie de la jeunesse du moment qu'ils n'ont pas de problème. Je trouvais cela malheureux. Je trouve que votre approche, en effet, nous situe les jeunes davantage comme étant partie de la solution et toute notre appréhension, vous le soulignez bien en page 3 de votre mémoire, touchant le virage technologique, touchant l'intégration des autres communautés, les nouvelles valeurs, les rapports avec les autres pays, la paix, l'environnement, etc. Ce sont des questions

sur lesquelles les jeunes ont déjà des idées bien arrêtées et avec lesquelles ils sont relativement à l'aise, beaucoup plus à l'aise, finalement, que ne le sont généralement les adultes. Dans ce sens, votre mémoire est particulièrement intéressant.

Vous avez également souligné l'importance qu'il faudrait attacher au travail. La dignité et la reconnaissance sociale des jeunes passent par quelque chose de stable, je dirais; ou ils sont aux études, ou ils sont au travail. Quand ils ne sont ni à l'un ni à l'autre, ils finissent pas perdre de la dignité, je dirais. Dans ce sens, vous soulignez l'importance qu'il faudrait accorder, j'ai cru comprendre, à tout ce qui s'appelle la politique d'emploi ou de plein emploi, particulièrement pour les jeunes.

Vous avez également attiré notre attention sur la précarité de la situation de certains organismes de jeunes. C'est une situation précaire parce qu'ils n'ont pas de financement statutaire et que tous les ans on doit recommencer la démarche d'aller chercher un financement ou encore de faire des levées de fonds pour financer ces activités.

J'aimerais peut-être revenir sur certains aspects plus particuliers de votre mémoire. Vous nous dites en page 2, au dernier paragraphe, rappelant les divers programmes qui ont été mis à la disposition des jeunes. "Seulement à ce niveau, la situation est encore grave cinq ans plus tard. Si les gouvernements ont pris les moyens pour résoudre ce problème, il est bien évident qu'ils n'étaient pas aussi importants que l'exigeait l'ampleur de la situation. Plusieurs des mesures prises sont conjoncturelles alors que les causes sont structurelles." Je pense que cela résume bien les difficultés qu'on éprouve actuellement parce que l'on travaille à la conjoncture alors qu'il faudrait travailler à la structure. Il est prouvé que, par exemple, en matière d'emploi, la reprise économique, dans les pays où il y a eu une reprise économique réelle, a négligé, pour ainsi dire, le chômage des jeunes. En dépit d'une reprise économique, cela n'a pas eu pour autant d'effet sur le chômage des jeunes parce que le problème du chômage des jeunes est davantage structurel que conjoncturel. Il y a des mesures importantes qui ont été prises dans certains pays, et j'en cite une qui pourrait avoir des effets rapides si on acceptait de s'en aller dans ce sens et si ce gouvernement se penchait sérieusement sur ce qu'il a appelé sa politique d'emploi. C'est une législation du travail qui diminuerait ou réglementerait le temps supplémentaire. On sait, par exemple, qu'un pays comme la Belgique a réduit à zéro le temps supplémentaire qui est autorisé. Ceci a comme effet de créer de 10 % à 20 % plus d'emplois dans certaines entreprises. C'est une mesure qui demande du courage, du courage politique, je pense bien, mais qui aurait certainement des avantages réels, concrets et immédiats sur le chômage des jeunes.

Vous rappelez que les jeunes n'ont pas voix au chapitre et vous estimez que c'est une façon de donner aux jeunes voix au chapitre. Ne trouvez-vous pas qu'il y a un danger de voir dans ce conseil le porte-parole de la jeunesse alors qu'au Québec on a quelque 850 organismes jeunesse? Tout à l'heure, vous illustriez, par votre propos, les difficultés que ce conseil aurait è se tenir en rapport avec ces organismes, en raison de leur diversité et du fait aussi qu'ils travaillent à des problématiques très locales et sont limités à quelques centaines d'individus.

M. Thouin: Je pense que le conseil ne pourrait pas être le porte-parole des jeunes. D'ailleurs, le Regroupement des organismes communautaires du Montréal métropolitain a déjà pris position de ne pas venir ici parce qu'il considère justement que cela peut être une structure qui est trop lourde, peu efficace. Donc, je ne pense pas que cela soit le seul moyen pour les jeunes d'être entendus au gouvernement et je ne pense pas que ce soit le moyen, pour les jeunes, d'être leur porte-parole. On sait qu'un conseil comme celui-là peut prendre plusieurs mois et plusieurs années, peut-être, pour arriver à faire des recommandations précises sur des sujets précis. À ce moment-là, moi, qui suis avec des jeunes en difficulté depuis quelques années, je suis toujours impatient, d'un mois à l'autre, de voir des choses se dérouler. Comme les jeunes sont encore plus impatients que moi, à ce moment-là, ce n'est peut-être pas la solution idéale, comme structure à mettre en place. Je considère quand même que cela peut être valable, du fait que cela intègre les jeunes dans le système gouvernemental, que cela leur donne une place. Je ne pense pas que ce soit un moyen très efficace, certains peuvent même craindre que ce ne soit qu'un moyen de ne faire que des études et de retarder toute action. Peut-être. Je ne le prends pas, a priori, de cette façon. Je le considère positif, comme moyen, même si je ne pense pas que ce soit le moyen le plus efficace. Peut-être qu'il y aurait d'autres moyens. Au niveau de la concertation, comme je le disais tantôt, il y a déjà eu des volontés, il y a quelques années, d'aider la concertation locale. Cela s'est un peu évanoui. Je pense que ce serait peut-être un autre moyen à envisager qui serait parallèle et qui serait plus à la portée des organismes. Il y a quelques années, on nous offrait de nous aider à faire de la concertation, mais le qros problème était qu'on offrait cela à des organismes dont la plupart des intervenants étaient bénévoles. Eux, ils auraient préféré

avoir plus de moyens pour travailler dans l'action et, ayant suffisamment de moyens, auraient pu dégager un peu de temps pour faire de la concertation. (16 heures)

Présentement, beaucoup d'organismes communautaires - je ne parle pas pour le mien, parce qu'on a une subvention régulière - sont très insécures et leurs employés ont vraiment de petits salaires. Je pense à Relais Jeunesse qui est un organisme qui héberge des jeunes. Présentement, un centre d'accueil utilise cette ressource pour des jeunes filles qui normalement devraient être à Saint-Hyacinthe au lieu de les laisser dans des motels, comme cela se faisait il y a quelques années. Il faut dire que, dans la région de la Montérégie, on manque de centres d'accueil. On manque de places. Nos jeunes sont éparpillés partout, même jusqu'à Québec.

Alors, on utilise le Relais Jeunesse, qui est une ressource communautaire, avec des employés qui sont payés environ à 5 $ l'heure et la maison a été prêtée par le Club Richelieu. C'est sûr qu'il y a des aides locales. On sent que la communauté veut aider, mais il n'en demeure pas moins qu'il n'y a pas beaucoup de moyens. On sait que cela peut être assez compliqué de s'occuper de jeunes filles ou de jeunes garçons perturbés. Ce sont des enfants souvent perturbés. Si on ne donne pas un bon service à ces enfants et à ces familles parce que les ressources communautaires ont peu de moyens, je ne suis pas sûr que ce soit la meilleure chose à faire concernant le service que les gens s'attendent à recevoir d'un gouvernement. Si on veut se servir des petits organismes communautaires pour que cela coûte moins cher, pour rendre les services que les centres d'accueil ne peuvent pas rendre, je ne suis pas certain que ce soit la bonne façon.

Pour revenir à la question de la concertation, le financement des organismes est important pour qu'ils puissent fonctionner et ensuite se concerter. Simplement donner des budgets de concertation à des organismes qui sont complètement bénévoles, qui ne fonctionnent que quelques heures les soirs de semaine et qu'on compte sur eux pour aider beaucoup... Je pense, dans notre région, au mouvement SEM, Sensibilisation à l'enfance maltraitée, qui a des projets et des programmes. Ces personnes sont toutes bénévoles. Il est bien sûr que ce n'est pas ce service de bénévoles qui compensera pour les listes d'attente d'enfants battus et maltraités qu'on a dans notre région. C'est impossible, d'autant plus si on leur demande en plus de faire de la concertation. Ils en font. Ils sont consultés par les infirmières du CLSC, par les écoles, par le ministère des Affaires sociales. Tout le monde les consulte. Ils ont une approche nouvelle avec les enfants et les parents, mais ils n'ont pas d'argent pour fonctionner. Ils deviennent des experts à peu de frais. Ils deviennent des gens qui ne peuvent pas réellement se concerter pour arriver aux résultats auxquels on veut arriver.

C'est un peu ce qui est tragique au niveau des organismes. Depuis 1982, il y a un slogan qui dit qu'il faut que les gens se prennent en charge. Le communautaire s'occupera maintenant des jeunes. Je vois des représentants de l'Association des centres d'accueil, parfois, dans les comités où je vais représenter le communautaire et ils disent: On s'occupe des jeunes délinquants ou des jeunes mésadaptés socio-affectifs en centre d'accueil, mais on ne peut pas vraiment résoudre leurs problèmes. Il faut que la communauté les prenne en charge et on les suivra dans la communauté qui les aura pris en charge. C'est un peu une illusion. C'est dire: On se décharge de nos responsabilités vers la communauté. Mais cette communauté n'a pas toujours les moyens. Si la prise en charge communautaire demeure un sloqan, ce n'est pas suffisant pour donner les moyens qu'il faut aux gens.

Depuis 1982, je pense qu'il y a eu quand même certains efforts qui ont été faits au niveau des organismes jeunesse, mais il y a deux fois plus d'organismes qui font des demandes aux services de soutien aux organismes communautaires qu'il n'y en a qui reçoivent des subventions. Les moyens sont très limités. Comme je vous le dis, il y a une marge entre le sloqan et le moyen concret. Lorsque la ministre, Mme Lavoie-Roux, a donné 2 000 000 $ il y a quelques mois aux conseils régionaux de la santé et aux CSS pour résorber la liste d'attente des enfants maltraités, ce n'était pas seulement un slogan, c'étaient des millions de dollars. Mais on ne donne pas ça aux organismes communautaires. On leur dit: Vous devez être missionnaires. Justement, il y avait un missionnaire ici, tantôt. Il se disait missionnaire, parce qu'il faut absolument faire quelque chose pour ces pauvres jeunes. On va y aller. On ne gagnera presque rien et on s'en ira après. C'est ce que d'autres députés étaient venus me dire à Saint-Jean il y a quelques années: Soyez missionnaire et allez travailler ailleurs ensuite. Je ne pense pas que c'est comme cela qu'on rendra de bons services aux gens dont on s'occupe. Moi, cela fait presque quatre ans que je suis là. Si j'avais été là seulement un an et que le responsable avait changé à chaque année, cela manquerait de continuité. Les bénévoles qui nous aident ont aussi besoin d'une certaine continuité. C'est bien beau de dire: Ce seront des jeunes qui travailleront dans les organismes communautaires. On ne leur donnera pas de gros salaires. Cela ne coûtera pas cher, mais ça prend une certaine continuité. Les jeunes ont aussi le droit

d'avoir des salaires. Ce n'est pas parce qu'ils sont jeunes qu'ils vont manger des spaghetti en boîte tout le temps.

Mme Blackburn: Si je comprends bien vos propos, vous dites que, s'il y avait une priorité réelle, il y en a une aujourd'hui, ce serait la reconnaissance et le financement des groupes de jeunes, des ressources alternatives qui, selon vous, ne seraient financés qu'à quelque 50 % de la demande.

M. Thouin: Actuellement, oui.

Mme Blackburn: Je me demandais - et c'est une question que j'ai eu l'occasion de poser aux autres - si le conseil n'aurait pas eu des chances de se donner un peu plus d'efficacité si on s'était au préalable donné les grands éléments de ce que serait une politique de la jeunesse pour ensuite - c'est une façon d'établir ses priorités comme gouvernement également - créer ce Conseil permanent de la jeunesse.

M. Thouin: Oui, peut-être; je suis bien conscient que, comme je le disais tantôt, ce n'est pas le seul moyen. Peut-être que cela aurait été important qu'il y ait un ministère de la jeunesse et une politique de la jeunesse. Mais chose certaine, ce n'est pas suffisant, un conseil permanent. Comme je vous le dis, je trouve cela important, mais ce n'est pas suffisant.

Mme Blackburn: En page 4 de votre mémoire, vous proposez "que des allocations de présence soient versées aux membres, aux membres des comités spéciaux et aux membres du collège électoral." Vous savez que le projet de loi prévoit défrayer les frais de séjour et les frais de déplacement, les frais raisonnables encourus, et que le gouvernement, depuis son accession au pouvoir, songe à abolir toutes les allocations de présence.

Cependant, le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur en a décidé autrement. Alors, pour le Conseil supérieur de l'éducation, il y aura encore des allocations de présence pour tous les membres du conseil qui ne sont pas membres de la fonction publique ou qui ne travaillent pas dans un établissement public, parapublic ou dans une université.

Par ailleurs, vous le disiez un peu tout à l'heure, on a tendance, lorsqu'il s'agit des jeunes, à leur demander de faire du bénévolat. Je voudrais voir votre réaction parce que je sais que dans les conseils que je connais... Je ne connais pas, cependant -probablement que le ministre serait plus informé que moi là-dessus - les décisions qui ont été prises au Conseil du statut de la femme, qui ont été prises aux autres conseils consultatifs; je connais celles touchant l'Éducation et l'Enseignement supérieur, mais je ne connais pas celles dans les autres conseils consultatifs.

Est-ce qu'à la limite on ne se retrouvera pas avec un seul conseil permanent dans lequel les membres ne seront pas rémunérés? Je me demande, finalement, si la pratique ne finira pas par consacrer la situation actuelle ou presque et ne finira pas par marginaliser le Conseil permanent de la jeunesse en lui refusant des allocations de présence.

M. Gratton: II va falloir que je vérifie parce qu'au moment où l'on se parle je ne suis pas en mesure de fournir les informations à la députée. J'irai aux informations et demain je pourrai vous les fournir.

Mme Blackburn: Je dois dire que, pour le décret que je connais, celui qui touche les organismes reliés au ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, pour ce qui est du Conseil des collèges et du Conseil des universités, ils établissent que l'allocation de présence par journée sera de 200 $ ou de 100 $ par demi-journée à toute personne qui aura participé au moins à douze réunions à compter de la treizième journée. Généralement, ces organismes se réunissent deux jours par mois sur dix mois, ce qui donne à peu près 20 jours. Autrement dit, ce que je vois ici, c'est que les membres de ces conseils continueront à être rémunérés et à recevoir une allocation de présence. Cela, c'est pour tous ceux qui ne sont pas membres d'un organisme public ou parapublic et même ceux qui, étant membres d'un organisme public et parapublic verraient leur salaire coupé parce qu'ils participent à une séance de ces conseils-là se verraient rembourser pour la perte de salaire subie.

Alors, je voudrais attirer l'attention des ministres et des députés ministériels là-dessus car cela m'apparaît important; il ne faudrait pas amener les jeunes à faire du bénévolat alors que dans les autres conseils consultatifs on remet en question cette volonté gouvernementale d'abolir les allocations de présence.

Sur une autre question, toujours en page 4, vous dites "qu'un budget suffisant soit octroyé pour mener à bien le mandat du conseil." Que serait, selon vous, un budget suffisant?

M. Thouin: Je n'ai pas d'idée, actuellement, de ce qu'est un budget suffisant.

Mme Blackburn: Oui.

M. Thouin: C'est une précaution que j'ai prise, comme je le disais tantôt, sachant que, lorsqu'on s'adresse aux jeunes, on a tendance à couper les budgets et à vouloir

faire les choses à rabais. Alors, c'est une précaution que j'ai prise en faisant cette recommandation d'avoir un budget suffisant. Cela peut se comparer aux frais nécessaires pour les autres conseils. Je n'ai pas d'idée exacte de ce que cela coûte. Je ne suis pas habitué dans ces domaines.

Mme Blackburn: En page 6, vous recommandez qu'il y ait 60 membres au sein du collège électoral et qu'il n'y ait pas obligation pour les organismes d'être incorporés pour faire des recommandations. De même, vous suggérez d'élargir à huit le nombre de secteurs représentés. Je trouve intéressante la division que vous faites, mais j'aimerais voir comment vous situez la culture. Par rapport à l'intervenant qui vous a précédé un peu avant le lunch, qui ne voulait pas voir associée la culture au loisir, pourriez-vous nous dire quelle définition vous accordez à la culture?

M. Thouin: J'ai aussi hésité avant d'associer loisir et culture parce que je vois qu'il y a une différence. Dans le loisir, il peut y avoir du loisir sportif, occupationnel ou artistique. Il y a différents domaines. D'ailleurs, il aurait peut-être fallu mettre les loisirs sportifs avec "santé, social ou environnement". C'était difficile un peu de partager cela. Mais pour ce qui est du culturel, il y a des gens qui sont dans le domaine artistique, bien sûr, mais aussi il y a toute la question de vie en société. Ainsi, lorsqu'on parle de la culture nord-américaine, c'est une façon de vivre, tout cela; aussi quand on parle de la culture française, quand on parle de consommation même. Donc, j'entends culture au sens large de façon de vivre, mais incluant, bien sûr, toute la question de la création artistique aussi.

Mme Blackburn: Une dernière question parce que le temps passe. Plusieurs intervenants nous ont fait valoir qu'il serait difficile pour un jeune de moins de 18 ans de passer à travers les différentes étapes de sélection. D'abord, il lui faut un appui. Mais là, vous diminuez les difficultés du moment où vous dites de un à plusieurs, que, si votre jeune qui a 15, 16 ou 17 ans se retrouve avec une trentaine de jeunes proposés par différents organismes, il va éprouver un certain nombre de difficultés à faire sa place ou à faire valoir sa candidature. Des organismes nous proposaient d'introduire une mesure qui ferait une place réelle aux jeunes de moins de 18 ans. Il y en a qui proposaient plus la formule où la moitié du conseil serait composée de 15-22 ans et l'autre moitié de 23-30 ans.

M. Thouin: Je pense que, dans la pratique, cela risque d'être des gens de 25 à 30 ans qui soient au conseil. Alors, mettre une disposition comme cela pour des jeunes en bas de 18 ans, cela serait peut-être une façon intéressante de se prémunir contre cela, pour avoir vraiment leur opinion parce que c'est important qu'ils soient là.

Mme Blackburn: Je voudrais à nouveau vous remercier de votre participation, M. Thouin. Votre présentation était assez éloquente par rapport à l'approche qu'on devrait avoir non pas de la problématique jeunesse, mais de ce groupe d'âge qui devrait être l'avenir du Québec, comme vous le dites, et non pas son problème; qui devrait être partie aux solutions et pas seulement exclusivement examinée sous l'angle des difficultés qu'elle pose à la société actuelle. Alors, c'est avec beaucoup d'intérêt aussi que j'ai noté votre préoccupation touchant l'avenir des organismes jeunesse et le soutien que recevaient les ressources alternatives.

Je pense que votre préoccupation est légitime quand on connaît la réponse que nous faisait Mme Lavoie-Roux, ministre de la Santé et des Services sociaux, à une question au feuilleton touchant le financement des organismes jeunessse. Elle nous apprenait qu'en 1986-1987 il y avait eu 25 demandes de subventions pour créer des maisons d'hébergement et que 12 avaient été refusées pour les jeunes. Et pour ce qui était des maisons de jeunes, les refus étaient dans une proportion du tiers, si je ne m'abuse. Il faudrait que je revoie la réponse là. Alors, cela illustre, je pense, de façon assez éloquente, que les priorités du gouvernement sont ailleurs. Un mémoire comme le vôtre qui situe l'importance des ressources alternatives comme l'importance des soutiens qu'on doit accorder aux organismes jeunesse, je pense, devrait permettre à la partie ministérielle de réfléchir ou d'accorder un peu plus d'intérêt et d'attention à tout ce qui touche le soutien aux ressources alternatives, qu'elles soient jeunes ou adultes.

Alors, pour cela et pour le contenu de votre mémoire, je vous remercie.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup Mme la députée de Chicoutimi. M. le ministre, en conclusion.

M. Gratton: Oui, M. le Président, je voudrais remercier, à mon tour, M. Thouin d'être venu nous formuler un certain nombre de suggestions qui, pour ma part, sont notées avec beaucoup d'intérêt. S'il en allait de l'intérêt du gouvernement de savoir dans quelle direction aller et de son intérêt pour la question jeunesse, nul doute que le seul fait que nous nous retrouvons ici, à notre initiative, pour, justement, échanger avec vous et combien d'autres groupes qui sont venus nous rencontrer en témoigne selon moi. Ce que nous visons à faire avec le Conseil permanent de la jeunesse, ce n'est pas

révolutionner le monde. Loin de nous la pensée que cela aurait pour effet de régler le financement, par exemple, des organismes jeunesse et de nous donner automatiquement une politique jeunesse. Mais il nous semblait opportun d'agir maintenant dans la création du conseil permanent justement pour qu'on puisse en arriver à élaborer une politique qui réponde mieux aux besoins réels et ce, par le biais d'un comité "aviseur" comme le Conseil permanent de la jeunesse.

Vous nous rappeliez, à juste titre, qu'on doit cesser de parler de problématique jeunesse, mais plutôt de la question jeunesse. Je fais amende honorable parce que j'ai moi-même utilisé l'expression aussi tôt que ce matin et je serais tenté de vous dire: Je vous promets que je ne le ferai plus parce qu'effectivement vous avez tout à fait raison. Ce dont nous parlons ici, ce n'est pas strictement de se donner des outils pour régler des problèmes, mais plutôt de se donner un outil pour mettre a contribution ce dynamisme que représente la jeunesse québécoise. Je vous remercie d'être venus nous le rappeler à partir de votre expérience vécue.

Si la commission ne nous avait permis que d'identifier et d'échanger avec des personnes comme vous et combien d'autres qui sont venues nous rencontrer, je pense que la démarche en aurait valu la peine. Mais, en plus, cette démarche aura l'avantage de nous permettre de bonifier le projet de loi 104 que nous avons présenté et cela aussi ira dans le sens de doter la jeunesse québécoise d'un outil qui sera un peu plus approprié, un peu plus efficace, nous le souhaitons, et qui répondra aux objectifs que nous nous fixons.

Merci infiniment, M. Thouin.

M. Thouin: Merci beaucoup, M. le ministre.

Le Président (M. Marcil): Nous allons suspendre 60 secondes pour permettre au groupe Maison Tangente de prendre place a l'avant.

(Suspension de la séance à 16 h 19)

(Reprise à 16 h 23)

Le Président (M. Després): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je demanderais le consentement de cette commission pour que Mme Harel (Maisonneuve) remplace M. Godin (Mercier). Est-ce qu'il y a consentement?

M. Gratton: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Després): Merci, M. le ministre.

J'inviterais M. Lamoureux, du groupe de la Maison Tangente, à présenter son équipe, s'il vous plaît.

Maison Tangente

M. Lamoureux (Daniel): Bonjour, M. le Président, mesdames et messieurs.

En fait, nous sommes quatre des six travailleurs, éducateurs et éducatrices de la Maison Tangente, soit Louise Fortin, Marie-Josée Lamy et Robert Rousse.

Nous avons soumis en novembre un mémoire à la commission des institutions, mémoire qui traite des itinérants au Québec et plus particulièrement à Montréal et ce, parce que nous considérons que le futur Conseil permanent de la jeunesse devra se pencher sur ces problèmes et être en mesure d'aider à les résoudre. C'est pourquoi nous abordons rapidement aujourd'hui la question en termes de problématique des sans-abri, en termes d'alternatives, de ressources pour terminer avec des recommandations spécifiques sur la composition, le rôle et les outils du conseil permanent à cet égard. C'est à noter que notre témoignage d'aujourd'hui reflète plutôt l'esprit que la lettre du mémoire présenté en novembre.

Mme Fortin (Louise): Un jeune itinérant, c'est un garçon ou une fille âgé de moins de 30 ans qui n'a pas d'adresse fixe. C'est une personne sans emploi, sans économie, sans meuble, ni garde-robe, sans revenu décent, effectivement instable et souvent désespérée. C'est un gars qui arrive de la Gaspésie pour se trouver une "job" à Montréal avec 200 $ dans les poches et beaucoup d'enthousiasme. Il se retrouve, après deux semaines ou trois mois, obligé de coucher sur le banc d'un parc. C'est la fille que son "chum" met à la porte sans un sou. C'est le psychiatrisé qu'un institut éjecte sur le trottoir et qui y reste. On en distingue deux catégories, soit structurelle ou conjoncturelle. Le structurel est issu des foyers d'accueil, des écoles de réforme, des hôpitaux psychiatriques, des institutions. Le conjoncturel est issu de l'éclatement de la famille, d'une perte prématuré d'emploi. Ils sont environ 10 000 jeunes sans abri à Montréal en cette Année internationale du logement des sans-abri. Ils dorment dehors dans les parcs, sur les bouches d'aération, sur le mont Royal, à la gare centrale, dans des immeubles désaffectés ou en construction, dans un portique, en groupe dans un taudis ou dans une chambre pouilleuse au début du mois quand le chèque du BS vient d'arriver.

L'hiver, ils passent la nuit dans un café ouvert jusqu'au matin ou ils marchent sans s'arrêter ou ils se font amener à Bordeaux. Ils mangent ce qu'on leur donne, ce qu'ils peuvent acheter avec leur chèque de 171 $ par mois. Selon le Dr Yves Lamontagne du

Centre de recherche psychiatrique de l'hôpital Louis-Hippolyte-Lafontaine, 47 % avouent avoir déjà tenté de se suicider, mais H ne précise pas dans son étude combien au Québec réussissent chaque mois. Si la situation persiste, ils se retournent tôt ou tard vers le crime, la prostitution, vente de drogue, vol par effraction. Conséquences: toxicomanie, arrestation, incarcération. Bordeaux représente d'ailleurs pour eux la fin de l'itinérance d'abord parce qu'ils y sont nourris et logés, ensuite parce qu'ils y apprennent les rudiments de leur futur carrière de criminels et qu'ils s'y font des amis et des complices. Si le pénitencier est l'université du crime, Bordeaux en est la polyvalente et la rue, la maternelle.

Mme Lamy (Marie-Josée): Louise vous a résumé en quelques mots ce qu'était la problématique des jeunes sans-abri. Pour ma part, je vais vous parler d'une des alternatives possibles à cette problématique.

Elle parlait aussi de Bordeaux. À titre d'exemple, en 1984-1985, selon un rapport du ministère de la Justice du Québec, il en coûtait 86,48 $ par jour par détenu à Bordeaux. C'est sans compter les frais d'avocats, de magistrats, de police que suppose toute inculpation au criminel; sans compter aussi les dommages à la propriété, les pertes de vie, les compensations versées aux victimes. Laisser la situation se détériorer comme on le fait aujourd'hui n'est pas une solution rentable ni efficace.

Si vous avez regardé le tableau qui est joint au mémoire, vous avez constaté que les causes du problème des sans-abri au Québec sont le chômage, l'éclatement de la famille, la désinstitutionnalisation un peu sauvage, la pénurie du logement à prix modique à Montréal. On pense qu'il faut agir maintenant sur ces causes. Simultanément, il faut aussi agir à court terme sur les effets déjà générés par ces causes: l'hébergement des jeunes sans-abri, motivation, formation, apprentissage et travail.

Dans cette perspective, nous croyons que la Maison Tangente constitue un exemple. À Tangente on accueille présentement huit jeunes à la fois pour une période d'une durée maximale de 21 jours. On leur offre gratuitement trois repas par jour, les articles de toilette, les billets d'autobus et surtout un accompagnement professionnel dans leur démarche.

De son côté, on demande au jeune qui habite à Tangente de travailler à améliorer sa situation. Cela peut se traduire par se chercher et se trouver un emploi ou parfaire sa formation. Après trois semaines, 80 % des jeunes sont en mesure, avec leurs économies, de louer une chambre ou un appartement et de recommencer leur vie. À Tangente on reçoit environ 300 jeunes par année. On croit que c'est une preuve de l'efficience de

Tangente comme celle de la plupart des maisons d'hébergement du Québec.

Toutefois on se rend compte que l'importance de l'action du secteur communautaire est peu reconnue par l'État si on en juge par la proportion du budget qui lui est allouée. Par exemple, pour l'exercice 1986-1987, le ministère de la Santé et des Services sociaux, sur un budget global de 6 280 000 000 $, a consacré 718 200 $ aux maisons d'hébergement, c'est-à-dire 0,01 % du budget global du ministère. Cette somme, quinze maisons d'hébergement se la sont partagée pour en arriver à un per diem approximatif de 19,68 $. On est loin des 86,48 $ de Bordeaux qui, au lieu de contribuer à intégrer l'individu â la société, le marginalise davantage. On est loin aussi, avec les 100 lits au Québec, dont 57 à Montréal, des 1000 lits de Toronto.

C'est pourtant évident, l'hébergement représente la première et nécessaire étape vers l'intégration sociale. C'est la clé du dépassement du mur quotidien du manger-dormir au-delà duquel l'individu est enfin en mesure de songer à l'hygiène, à la santé, au travail, à la formation, à l'épargne, au logement, au loisir, à la famille, à une vie normale en fait.

M. Rousse (Robert): Maintenant nous allons aborder la conclusion de notre présentation par les recommandations que la Maison Tangente peut faire à la commission. Comme les recommandations que je vais exprimer dépassent, tout en les englobant celles qui ont été présentées dans le mémoire, car on a continué nôtre travail, on se permet d'ajouter une feuille d'information à la documentation que vous avez déjà reçue.

Considérant la problématique des jeunes sans-abri au Québec; considérant les différentes alternatives offertes pour la résoudre; considérant le nombre d'intervenants gouvernementaux dans la solution aux problèmes afferrents; la Maison Tangente recommande: la création d'un Conseil permanent de la jeunesse qui soit un incubateur d'idées et d'initiative à l'égard des jeunes du Québec; l'attribution à ce conseil d'un rôle de lobby auprès des différents ministères, du Conseil des ministres et des grandes institutions ainsi que des médias; la création statutaire au sein du Conseil permanent de la jeunesse d'un comité consultatif communautaire sur l'hébergement et aussi la création d'un comité consultatif communautaire sur l'emploi.

Quatrième recommandation: l'attribution par le Conseil du trésor d'un budget annuel de 3 000 000 $ au Conseil permanent de la jeunesse consacré au financement d'initiatives locales en matière d'hébergement et d'emploi.

Cinquième recommandation: la création

d'un fonds d'investissement jeunesse de 10 000 000 $ géré par le Conseil permanent de la jeunesse et consacré au développement d'alternatives communautaires en matière d'emploi et d'hébergement jeunesse.

Ce sont là un peu l'ensemble de nos recommandations. Je voua remercie d'avoir bien voulu nous entendre et d'avoir été patients. Nous serons disposés à répondre aux questions.

Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup de votre intervention. Je vais reconnaître le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: D'abord, je vous remercie d'être venu nous rencontrer en commission parlementaire pour nous exposer le problème des sans-abri. Je dois vous dire que votre texte est très clair, très limpide, très bien structuré, même très cartésien. On se comprend très bien dans le texte. C'est une excellente approche.

On entend beaucoup de choses sur les sans-abri présentement parce que peut-être que c'est à la mode à cause de l'année internationale. On glane des informations ici et là à la télévision, à la radio, dans les médias, mais je dois vous dire que c'est le premier texte que je vois qui, de façon aussi synoptique, place bien les choses et les établit clairement. Je veux souligner cela au départ.

Ce qui m'a frappé un peu... Je vais parler de vos activités parce que je pense que c'est important. Vous avez une approche assez spéciale. Vous recevez garçons et filles entre 18 et 25 ans. Est-ce que vous pourriez nous dire comment cela fonctionne à l'intérieur du groupe de huit que vous avez? Vous ne faîtes pas de distinction, c'est-à-dire que la personne qui se présente et qui a un besoin, vous la recevez. Comment procédez-vous?

M. Lamoureux: On a huit lits, plus un divan qui est une place de dépannage. Mettons que quelqu'un arrive à trois heures du matin, le divan est disponible et on lui donne cela jusqu'au matin. Sur les huit lits,

Il y en a deux qui sont réservés aux filles parce que la demande est beaucoup moindre en ce qui concerne les filles qu'en ce qui concerne les gars. Toutefois, il peut arriver que durant un mais on ait plus de filles que de garçons. Il peut arriver qu'on ouvre deux chambres au lieu d'une pour les filles. On ne réserve pas. On dit souvent aux gens qui veulent réserver pour dans quatre jours que ce n'est pas un motel, ce n'est pas une auberge. Le premier qui téléphone le matin, s'il y a un lit de libre, si la personne répond aux critères minimums, on fait une entrevue.

On voit si on peut l'aider à résoudre ses problèmes, ses besoins. Si oui, on l'accepte. Il n'y a rien d'acquis, le séjour maximal de 21 jours n'est jamais acquis. Tout dépend si le séjour va bien ou pas. Tout dépend si le plan de séjour est respecté. Si oui, la personne peut rester jusqu'à un maximum de 21 jours.

M. Bélisle: Vous avez cinq éducatrices et éducateurs. Est-ce que je dois comprendre que ce sont des gens qui sont à temps plein là-bas? Est-ce cela?

M. Lamoureux: Six à temps plein. M. Bélisle: C'est six à temps plein,

M. Lamoureux: On ne peut pas se permettre un de plus. Déjà là...

M. Bélisle: Quel est le profil normal d'un cheminement avec un jeune sans-abri qui rentre chez vous: Comment le prenez-vous en main? Comment le mettez-vous sur une voie de meilleure réalisation personnelle ou une lueur d'espoir au bout des 21 jours? Qu'est-ce que vous faites, les cinq ou six éducateurs, avec le jeune quand il rentre à partir de ce moment-là, jusqu'à la fin?

M. Fortin: D'accord. Les jeunes qui viennent chez nous, premièrement ce sont des gens qui sont aptes travail. Pour ceux qui auraient des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie ou autres, à ce moment on sert de personnes-ressources de référence, on les réfère à des organismes plus adéquats. En ce qui concerne ceux qui sont en démarches d'emploi, c'est sûr qu'on fait un suivi avec eux; c'est-à-dire qu'on a commencé à monter une banque d'employeurs, donc, pour les jeunes ça aide pour les "emplois, c'est sûr. Si le jeune a des difficultés à se présenter chez un employeur, il ne sait pas trop comment s'y prendre, on fait affaire avec un organisme de travail et avec un conseiller qui aide ce jeune, donc on a à faire là aussi. Maintenant si, à la fin du séjour, la personne travaille... Normalement cela va quand même assez vite. À la suite de cela on l'aide face à sa recherche de logement. Quand on peut on l'aide et on fait un suivi en appartement aussi.

M. Bélisle: Oui, M. Rousse, allez-y.

M. Rousse: Pour compléter, en fait ce qui fait la particularité d'une maison comme Tangente c'est qu'on ne prend pas le jeune pour l'intégrer dans un moule mais on procède plutôt à partir de ses besoins et de sa réalité. L'approche que nous avons est plutôt une thérapie basée sur des choses concrètes et quotidiennes, des victoires quotidiennes qui peuvent permettre à l'individu de se dépasser et d'aller de l'avant. L'individu est le centre de nos préoccupations. Par les ententes que nous

avons avec d'autres groupes communautaires, à ce moment nous pouvons mettre autour de lui un certain nombre de services. Donc, c'est beaucoup plus personnalisé et nous ne cherchons pas à intégrer la personne dans un moule mais plutôt à adapter les ressources à ses besoins.

M. Bélisle: Vous mentionniez tantôt qu'il y a 300 jeunes par année qui passent chez vous. Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire, sur ces 300 jeunes qui ont eu besoin de vos services, de votre aide et du "counselling" que vous faites... Il y a beaucoup de communication dans ce que vous faites. Vous jasez avec les jeunes, vous regardez leur identité propre et vous essayez de les aider à se trouver eux-mêmes et à trouver leur place dans la société. Combien y en a-t-il - avez-vous des statistiques pour nous le dire? - que vous pensez avoir récupérés - je n'aime pas ce terme, je pense que ce n'est pas adéquat - mais remis sur une bonne piste? La moitié, les trois quarts?

M. Lamoureux: II y a une nuance à faire. Nous en recevons 300. Il y en a qui complètent leur séjour de 21 jours et d'autres non. De ceux qui complètent - je crois qu'ils représentent autour de 60 % à 65 % - je dirais qu'il y a autour de 80 % qui vraiment ne reviennent pas et sortent du circuit des maisons d'hébergement et des sans-abri. Soit qu'ils ont trouvé un travail ou soit qu'ils sont en formation. Ils ont un appartement ou une chambre et ils volent de leurs propres ailes. C'est sûr qu'il y en a qui reviennent après un an, après deux ans. Des fois, ils retombent. Par exemple, un gars un peu alcoolique, bon. Je pense que la moyenne de succès en ces termes est excellente.

M. Bélisle: Est-ce que quelqu'un peut tenter de m'expliquer une statistique importante à la page 5?: "Masculins dans une proportion de dix pour une". Pourquoi?

M. Rousse: En termes d'itinérance? M. Bélisle: Oui.

M. Rousse: Le pourquoi est difficile à trouver. C'est probablement souvent parce que les jeunes garçons, quand ils sont arrivés à 18 ou 19 ans, les choses ne débloquent pas rapidement pour eux. Des fois, on va entendre l'expression: Écoute tu es assez grand, vas-y. Il y a cela. Il y a aussi, comme nous disions, les gens qui viennent de l'extérieur de Montréal, beaucoup plus souvent des gars vont partir en se disant: Bien, coudon, il n'y pas d'ouvrage dans mon coin de pays, je vais aller essayer. Ce sont certaines raisons. Il y en a d'autres sûrement mais ce sont les plus fréquemment rencontrées.

M. Bélisle: D'accord. Vous avez mentionné, à la page 10 de votre document un tas de solutions. Il y a une douzaine de points. Je vais m'attarder à deux ou trois de ces solutions. Je trouve cela très enrichissant ce que vous avez mis là. Vous parlez de la multiplication des programmes d'appartements supervisés; vous voulez m'expliquer votre conception de ce qu'est un programme d'appartements supervisés?

M. Lamoureux: C'est un programme de subventions d'appartements supervisés, c'est-à-dire il y en a plusieurs sortes. Par exemple, cela peut être, par exemple, un ensemble de trois appartements dans un bloc qui contiennent chacun deux personnes et où on peut mettre ce que l'on appelle un poteau, non pas un éducateur ni un surveillant, non plus, mais une personne-ressource qui va voir à l'intégration progressive des jeunes qui sont là, qui ne les surveillera pas mais qui va plutôt les aider, effectivement. Il y en a très peu. Les maisons d'hébergement comme la nôtre sont obligées d'avoir des séjours à court terme de 21 jours au maximum. Il y a d'autres maisons qui ont des séjours un peu plus longs mais je pense que c'est un grand manque. En 21 jours, on peut parvenir à amasser un peu d'argent, à se trouver une "job" pour aller en appartement, mais pas vraiment pour démarrer. Cela prendrait vraiment des séjours de six mois, de façon de plus en plus autonome. Chez nous, il faut qu'il lave la vaisselle mais quand tu es seul dans un appartement, peut-être que tu n'as pas le goût ou peut-être... Nous, on oblige les qens à l'épargne, par exemple. Quand quelqu'un travaille, on prend sa paye, on la met dans une enveloppe, on la met dans le tiroir et, quand il s'en va, on lui redonne. Quand il est tout seul en appartement, peut-être qu'il ne pense pas à acheter de la bouffe pour dans trois semaines. C'est cela l'apprentissaqe progressif de l'autonomie, c'est à cela que serviraient les appartements supervisés ou partagés.

M. Bélisle: Combien de cas connaissez-vous, en ce moment, d'appartements supervisés, de projets d'appartements supervisés qui existent au Québec?

M. Rousse: Nous en connaissons trois ou quatre dans la région de Montréal. Il y a le BCJ Longueuil qui a des appartements supervisés, le BCJ Viray et le Service d'intégration à la collectivité qui en a deux. Le Service d'intégration à la collectivité a un mode un peu différent, dans le sens où c'est un logement... Mais tous ces programmes, c'est un logement dans lequel il y a un certain nombre de jeunes; les coûts sont modiques, sont souvent en accord avec leur budget, 25 % du budget. Il y a aussi

d'autres, de nouvelles formules à développer. Une voix: Comme quoi?

M. Rousse: Un peu comme ce que Daniel disait, les foyers appartements. Plutôt que d'être dans un logement où ils sont quatre ou cinq qui partagent le logement, il y a un respect mutuel, c'est plutôt dans un édifice où il y a dix, douze, quinze logements pour ne pas faire un ghetto; en fait, qu'il y ait un certain nombre de logements qui puissent être laissés aux jeunes sur les mêmes bases, en termes de pourcentage de budget, de revenus. Un éducateur supervise et sert de personne-ressource. À ce moment-là, il s'agit de payer l'appartement de cet éducateur, dans lequel un certain nombre d'éducateurs peuvent passer, mais il y en a toujours un sur place.

M. Bélisle: Ce ne serait pas tellement cher, en fin de compte, de payer un appartement pendant une année.

M. Rousse: Non. Dans le fond, ce sont des mesures légères mais superefficaces et basées sur une réalité quotidienne. Ce qui arrive, même dans la clientèle que l'on reçoit... Tantôt on a parlé des gens qui avaient un passé structurel. Ces gens-là ont vu des éducateurs depuis bien des années. À partir du moment où la relation est éducateur-jeunes hommes ou jeunes délinquants - parce que c'est un peu le pattern suivi - il y a une fermeture, il y a une coupure qui est là. Souvent ils ont beaucoup plus de métier pour manipuler un intervenant qu'un intervenant peut avoir de métier avec des jeunes. C'est souvent ce qui fait qu'il y a des programmes avec des mesures lourdes et des mesures super-professionnalisées qui manquent leur objectif parce que le contact de base ne se fait pas à cause qu'il y en a un qui est un intervenant du milieu social, c'est un employé de l'État, un éducateur diplômé, et tout. Il y a un recul, une fermeture qui se fait.

M. Bélisle: Malheureusement, je n'aurai pas le temps de continuer avec toutes les questions que j'avais mais je veux terminer sur une question fondamentale. Vous parlez de la nécessité d'interventions communautaires. Je veux savoir, à la Maison Tangente... Les institutions locales de la ville, les services municipaux, les organismes sans but lucratif qui pivotent un peu autour de l'arrondissement où vous êtes situés se sentent-ils impliqués, vous aident-ils? Se sentent-ils embarqués dam ce problème?

M. Rousse: Toutes les fois, dans notre comté, où on a eu à faire appel, pour un coup de main ou pour une ouverture, aux autres groupes communautaires, on a pas eu de problème. À titre d'exemple, à un moment donné, dans les perdiem, on avait 40 $ par année pour les services de loisir, ce qui n'est pas beaucoup pour huit personnes. On a pu créer une entente avec le Centre culturel et sportif de l'est; comme on avait un budget de 40 $, il nous laissait pour un an six cartes de membre, pour 40 $. Dans notre milieu, il y a une certaine écoute, oui, surtout de la part des milieux communautaires.

M. Bélisle: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Je vous remercie, M. le député de Mille-Îles. Je vais reconnaître Mme la députée de Chicoutimi. (16 h 45)

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Mesdames et messieurs, cela me fait plaisir au nom de ma formation politique de vous souhaiter la bienvenue et je dois vous dire que c'est avec également beaucoup d'intérêt que j'ai lu votre mémoire. Je dois dire qu'avec la lettre circulaire que vous avez fait tenir aux députés, vous tracez un portrait que je qualifierais de saisissant de la situation qui est vécue quotidiennement par quelque 10 000 jeunes au Québec. Je pense que cela ne devrait laisser personne indifférent.

Vous tenez également ce que j'appellerais un discours économique en nous rappelant au gouvernement et à tous que si on n'intervient pas pour des raisons humanitaires il faudrait tenir compte des coûts économiques d'une situation qui se détériore et qui, parce que non soignée aujourd'hui, va coûter beaucoup plus cher demain. Je rappelle un paragraphe de votre lettre: "Si on ne les aide pas en parlant des jeunes - immédiatement, maintenant, ces jeunes sont voués au crime, à l'alcoolisme, à la toxicomanie, à la maladie. Ne rien faire maintenant équivaut à négliger de réparer le toit qui fuit, cela coûtera plus cher demain, car la prison, l'hôpital, le tribunal, l'aide sociale sont de loin plus onéreux que des ressources communautaires adéquates."

Vous faites également une comparaison - je ne me rappelle pas vous l'avoir entendu dire - au sujet de la situation de l'hébergement pour les sans-abri, une comparaison entre le Québec et l'Ontario. Je dois dire que cette comparaison nous est souvent servie lorsque, par exemple, on veut nous dire que les frais de scolarité ici dans les universités sont beaucoup plus bas qu'en Ontario, que les prêts-bourses sont beaucoup plus élevés. Autrement dit, c'est toujours pour dire qu'on est moins bon ici que là-bas. Je dois dire que là c'est effectivement vrai. Si je reprends une partie de votre lettre, vous rappelez qu'au cours de l'Année

internationale du logement des sans-abri 10 000 jeunes errent dans les rues de Montréal et ils se partagent 50 lits quand Toronto en offre 1000 à ses défavorisés. Je pense que cela parle plus que ce qu'on pourrait faire comme long exposé sur cela.

Vous soulignez - et j'ai trouvé particulièrement frappant - le fait que l'aide ne vous venait jamais pour les jeunes sans-abri: on ne pouvait pas coucher au poste de police, ni dans les presbytères, ni dans les écoles dont les locaux ne servent pas, pas plus que dans les églises. J'aurais une question et je me doute un peu de la réponse: Comment se fait-il que tous ces lieux soient fermés?

M. Lamoureux: Ils sont fermés et ils nous sont fermés. Les commissions scolaires, souvent, ont des... Pardon?

Mme Blackburn: Ils sont fermés aux jeunes et aux organismes également.

M. Lamoureux: Souvent il y a des... Non, parfois il y a des écoles qui sont fermées par manque d'étudiants, elles sont abandonnées. Il y a souvent les presbytères qui sont abandonnés aussi parce que c'est trop vieux, c'est trop froid, peut-être qu'il y a un manque d'occupants. C'est très difficile. On cherche à acquérir, pour une somme nominale sans doute, c'est la seule chose qu'on pourrait se permettre, un immeuble depuis des années. C'est impossible. Les communautés religieuses, les commissions scolaires, la ville... Non, on n'y parvient vraiment pas, ce qui fait qu'on est obligé de payer un loyer, qui n'est pas énorme, qui n'est pas considérable, on est dans un quartier populaire. Il reste que si on pouvait, non seulement nous mais tous les autres hébergements ou secteurs commautaires, exploiter cet espace qui est perdu - je pense au sous-sols d'église, à certaines salles des écoles - on pourrait loger une bien plus grande partie de ces 10 000 sans-abri. C'est une solution. Quant aux postes de police, il fut peut-être une époque où les gens qui voyageaient pouvaient y être abrités. Cela se fait peut-être encore en campagne, mais à Montréal c'est impossible. Après le couvre-feu, après une certaine heure, c'est interdit d'être dans un parc public à Montréal. Si la police ramasse un jeune sur un banc, elle ne le garde pas dans ses cellules à moins qu'il ait commis une infraction. Elle téléphone chez nous, elle téléphone dans une autre maison d'hébergement ou à l'urgence sociale, elle l'envoie quelque part. Je ne sais pas si cela répond à votre question?

Mme Blackburn: Je m'explique mal l'espèce d'insensibilité à ces situations du côté des institutions religieuses ou civiles, que ce soit la commission scolaire ou la municipalité.

M. Lamoureux: II n'y a pas de sensibilisation là. En tout cas, j'ai l'impression que les gens considèrent que leur mission n'est vraiment pas de faire de l'hébergement, mais plutôt de faire autre chose. Ils ne sont pas vraiment touchés par cela.

Mme Blackburn: Dans votre mémoire en page 10 vous proposez des solutions alternatives pour couper un peu le robinet qui nous amène ces mésadaptés et vous citez ce que vous appelez des solutions à court terme. Évidemment, au premier titre, la création d'emplois pour les jeunes, la multiplication et l'enrichissement des programmes de rattrapage, la multiplication et l'enrichissement des programmes de recyclaqe, accessibilité accrue aux prêts-bourses, création de programmes de retour aux études, création de coopératives de travail, multiplication des centres d'hébergement-dépannage, développement des services des centres d'hébergement-dépannage, multiplication des programmes d'appartements supervisés, multiplication des programmes d'appartements partagés, multiplication des programmes de logements communautaires et majoration de l'aide sociale.

Le premier point, la création d'emplois, vous amène à proposer une commission que vous dites communautaire sur l'emploi. Pouvez-vous m'expliquer le sens du mot "communautaire"? Est-ce sur les emplois communautaires? On dit: un comité communautaire consultatif. Je voulais voir ce que le mot "communautaire" venait faire ici. Sur l'hébergement je le comprends mieux, mais sur l'emploi?

M. Lamoureux: Ce serait un comité consultatif composé de gens issus du milieu communautaire et non pas de l'État.

Mme Blackburn: Quand vous parlez de l'accessibilité accrue aux prêts-bourses, à quoi pensez-vous?

M. Lamoureux: Souvent, la réglementation des prêts-bourses s'applique mal aux jeunes itinérants qui veulent retourner aux études. Souvent, ces gens-là sont obligés de travailler le soir pour étudier le jour ou inversement de travailler le jour. Souvent, pour quelqu'un sur l'aide sociale qui veut retourner aux études c'est très compliqué. C'est sûr que ces gens-là ne vont pas au niveau universitaire; souvent c'est au niveau secondaire, mais ils rencontrent une foule de problèmes à ce niveau-là. Mais il n'y a pas un canal, pas un pont par où ils peuvent passer pour atteindre l'autonomie à ce niveau-là. Donc, cela les pénalise face à la formation.

Mme Blackburn: Je voudrais seulement vous rappeler - cela peut être intéressant -qu'un des engagements du Parti libéral touchant les jeunes, c'était d'accorder des prêts-bourses pour les jeunes étudiants au secteur professionnel de niveau secondaire. Cela viendrait répondre à ce que vous soulignez ici.

Une dernière question, parce qu'avec la permission du président, je veux laisser la place à Mme la députée de Maisonneuve, parce que je sais que la maison est dans son comté et qu'elle a toujours manifesté beaucoup d'intérêt pour vos activités. Je voudrais juste vous parler de votre recommandation - celle qui nous a été présentée par M. Lamoureux? Est-ce cela?

M. Rousse: Mon nom est Rousse.

Mme Blackburn: M. Rousse. Alors, la proposition que vous nous faites et tout le mémoire font état de l'urgence d'intervenir. Vous semblez attribuer au conseil permanent des responsabilités importantes, à la fois à titre de lobby, d'informateur et je dirais également de distributeur de budgets, d'attribution de subventions è la fois pour l'hébergement, mais également pour le développement d'alternatives communautaires en matière d'emplois et d'hébergement.

Si on vous dit que le conseil permanent sera à peu près, en étant très optimiste, en mesure, parce qu'il faut le créer, de vous proposer ou de fonctionner à l'intérieur de cela... Cela prendrait un minimum - je sais un peu de quoi je parle, parce que j'ai créé un conseil - d'à peu près 18 mois - c'est en étant très optimiste - pour être en mesure de vous apporter quelque support, tel que vous le suggérez. Pensez-vous que la situation actuelle peut encore attendre 18 mois?

M. Rousse: Effectivement, la situation actuelle est pressante, d'autant plus qu'elle avait été décriée, ou les solutions que l'on envisage à long terme ont déjà été mises de l'avant. J'ai des extraits ici du rapport Batshaw qui date de 1975 et dans lequel on reconnaît des solutions de rechange dans une recommandation qui dit: Que le ministre des Affaires sociales finance en priorité des projets de services en réadaptation communautaire, tels les auberges, les foyers et des choses du genre. Cela fait donc longtemps que cela traîne. Aussi, à l'intérieur du mémoire, vous retrouvez des solutions à court terme.

Effectivement, si on veut un conseil qui puisse apporter des solutions à long terme, des solutions probantes, des choses qui ont de l'allure, qui se tiennent et qui vont être un peu plus solides, il est certain que cela prend du temps. Par contre, on se dit: Continuons à court terme, en attendant que ce conseil donne des résultats. On sugqère aussi à court terme de remplir certaines recommandations. Ce sont les solutions è court terme qu'on a énoncées. C'est vraiment en attendant que le travail se fasse.

Pourquoi lui donne-t-on une telle importance? Quand on parie de l'attribution d'un rôle de lobby, etc., je pense que cela reprend un peu le caractère dynamique de la jeunesse. Quand ils sont placés dans de bonnes conditions, je crois que les jeunes sont extrêmement dynamiques et que le conseil a plutôt un rôle de locomotive. Comme on le dit sauvent dans le langage populaire, il faudrait qu'ils donnent la "drive" un peu. C'est essentiel. Mais à court terme, effectivement, il y a des solutions. C'est l'amélioration. En tout cas, il y a des choses qui fonctionnent déjà. Il ne s'agit pas de les rejeter du revers de la main. Il faut plutôt les améliorer en attendant que des solutions plus efficaces soient mises de l'avant. De là, dans un premier temps, la création d'un conseil qui a plutôt un rôle d'incubateur, qui est à la recherche de solutions novatrices et efficaces.

Le Président CM. Marcil): Merci beaucoup, Mme la députée de Chicoutimi. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président, II me fait d'autant plus plaisir de vous voir ici cet après-midi que - mes collègues ne le savent peut-être pas - j'ai parlé très fort à l'époque où c'était un autre gouvernement. Il est évident que les maisons d'héberqement pour jeunes itinérants ont un passé qui est assez récent, finalement.

La semaine dernière j'ai lu, parce que je les avais dans mon courrier, les deux pages que vous avez fait parvenir à tous les députés de l'Assemblée nationale, je pense. Je n'avais pas vu l'en-tête de votre papier. Je ne savais pas que cela venait de vous, mais ma collèque a raison, ce sont deux pages qui résument extrêmement bien la situation, l'état du problème et les solutions possibles. Ce sont des remèdes modestes mais efficaces.

Je veux simplement vous rappeler que vous parlez de la Maison du père, dans votre mémoire, qui reçoit des personnes de 25 ans et plus, et que chez vous vous recevez les personnes de 18 à 25 ans. Dans un quartier du bas de la ville de Montréal, le poste de police no 52, qui couvre une partie de l'est de Montréal, définit que, annuellement, près de 80 % de la criminalité est juvénile dans le quartier, contrairement à la criminalité dans le centre-ville, qui est une criminalité adulte. Dans le secteur, c'est une criminalité qui est beaucoup plus juvénile qui se manifeste par des pourcentages d'infractions qualifiées qui sont assez considérables.

Hier, j'ai rencontré un groupe de personnes qui veulent mettre sur pied une nouvelle maison dans le quartier; la Maison de l'être. Vous en avez sûrement entendu parler. Ils me disent que le problème à Montréal, c'est qu'il n'y a pas de possibilité d'accueil pour les moins de 25 ans qui ont des gros problèmes de toxicomanie et d'alcool. Tantôt vous disiez - et je remercie le député de Mille-Îles parce qu'il avait raison de vous replacer dans le contexte communautaire, alors que vous faisiez état de vos rapports avec le carrefour... C'est assez essentiel qu'il y ait ce genre... Je regardais la liste des organismes dont vous disiez être partie prenante. Il y a la table de concertation jeunesse et je pense à Resto Pop, où il est possible que des jeunes qui sont hébergés chez vous aillent prendre un repas. J'imagine que le SEMO emploi-jeunesse est aussi à la disposition de ceux qui vont chez vous et qu'ils peuvent, par le Service externe de main-d'oeuvre emploi-jeunesse, qui est situé tout près finalement, avoir un soutien en ce qui a trait à l'emploi. (17 heures)

J'imaginais aussi La Dauphinelle, qui est la maison d'hébergement qui reçoit aussi des jeunes femmes itinérantes. Expressément ce que je me suis demandé en lisant votre mémoire c'est d'abord s'il y a beaucoup d'analphabètes. Vous, vous recevez les 18-25 ans qui dans le fond ne sont pas trop "poqués", n'est-ce pas? Ceux qui ont des problèmes lourds de toxicomanie - ce n'est pas un reproche que je vous fais - ou d'alcool vous n'êtes pas en mesure de les recevoir? Bon. D'autre part, vous recevez des gens, vous-mêmes l'avez dit, qui sont aptes au travail. Vous disiez dans ces deux pages du résumé qu'en général les résidents ont un emploi après cinq jours. Donc, je me dis: Est-ce que les itinérants... On a toujours l'image de l'itinérant qui vient d'ailleurs. L'itinérant c'est le voyageur qui vient d'ailleurs. Tantôt, en parlant du gars de la Gaspésie, vous confirmiez un peu cette impression qu'on a. Vient-il vraiment d'ailleurs, l'itinérant? Parmi les 300 personnes que vous recevez annuellement il y en a vraiment combien qui viennent d'ailleurs et combien sont de l'intérieur, finalement?

D'autre part, est-ce que, parmi ceux qui ont des problèmes, la majorité est formée de ceux qui ont "droppé" au secondaire, ou ont-ils complété un secondaire? Est-ce que vous avez des relations avec l'école Marie-Anne, l'école où les 18 ans et, plus peuvent aller compléter un secondaire tout ayant l'aide sociale? Est-ce que je me trompe? Mais tantôt vous avez dit: Nous favorisons un apprentissage progressif de l'autonomie. C'est beaucoup, ce mandat et cette vocation. Quand j'ai écouté cela, je me disais: Dans le fond, c'est la famille. Quelle est l'institution dans notre société qui a à faire l'apprentissage progressif de l'autonomie? Disons que la réponse, cela devrait être la famille. Dans le fond, vous êtes le substitut de la famille. Est-ce que vous avez réfléchi sur cette question? Est-ce que l'absence de politiques familiales ou le développement de politiques familiales de quelque part peut avoir des effets? Vous distinguiez dans la clientèle la structurelle et la conjoncturelle. Vous dites: La structurelle c'est celle qui est lourde, lourde et lourde qui sort, j'imagine, de Rivière-des-Prairies ou qui sort d'un milieu complètement psychotique d'une certaine façon ou qui a de graves problèmes. Vous c'est plus ce que vous appelez ceux qui momentanément n'ont pas de chance. Alors ceux-là ne trouvent plus le support qu'ils trouvaient avant dans leur famille. C'est cela qu'il faut comprendre.

M. Rousse: Sur cela, quand on parle de la provenance, tantôt vous avez mentionné ceux qui viennent de l'extérieur de Montréal, etc. Nous pourrions estimer à environ un tiers la clientèle que nous recevons qui vient de l'extérieur de Montréal. On peut dire Montréal métropolitain, les gens qui viennent carrément d'un peu plus loin.

Quant aux problèmes lourds, effectivement nous ne sommes pas équipés pour y répondre. Nous avons demandé pendant quatre ans... Nous nous sommes aperçus qu'à court terme notre formule fonctionne pour des gens qui ont certains problèmes pas trop graves. Il y en a d'autres que nous avons reçus des fois et que nous gardions trois semaines. Nous nous disions: Dans le fond, si nous pouvions continuer le travail pendant trois mois, quatre mois, cinq mois et six mois, cela pourrait donner des résultats à moyen terme. À toutes les fois que nous avons fait des demandes dans ce sens, et la seule place où nous pouvions en faire c'était au soutien et aux organismes communautaires, on nous répondait que ce n'était pas nécessairement le genre de formule applicable à moyen terme parce qu'à moyen terme il faudrait avoir plus une approche, entre guillemets, "professionnelle" avec des psychologues, etc. La réalité-thérapie semblait difficilement envisageable au soutien et aux organismes communautaires, ce qui est un peu contraire à nos prétentions. Aussi, quand on regarde la provenance des gens en termes structurels, effectivement nous en recevons beaucoup qui ont suivi des programmes à Rivière-des-Prairies, Cité des Prairies et toutes sortes de centres comme ceux-là. Nous pouvons estimer à entre 40 % et 60 % la clientèle qui a passé par le milieu institutionnel. Par contre, quand ils sortent de là, ils sont censés avoir un certain bagage minimum mais malheureusement tout le temps qu'ils ont été en institution ils n'ont pas eu à se

préoccuper de ce qu'ils allaient manger le soir, ils n'ont pas eu à se préoccuper s'il y avait des loisirs ou des trous à combler dans leur journée pour s'occuper. Tout était prévu.

À 18 ans, on leur donne une bonne tape dans le dos et on leur dit: Vas-y mon gars, tu es capable. Ils font six mois, un an. Désorganisation! C'est là qu'on les reçoit chez nous. Par contre, comme ils ont déjà un bon bagage, un cheminement de fait, c'est strictement une réadaptation en fonction de ce qu'ils ont appris et de l'appliquer dans la réalité. Souvent, ça va bien aller. On va pouvoir faire le lien.

Effectivement, comme Mme Harel disait, quand on a ouvert cette maison, on s'est dit: Qu'est-ce qu'on fait comme maison? Parce qu'on aurait très bien pu être strictement un abri dans lequel on dit: Écoutes, on a huit lits. Tu viens, tu t'organises. On ne pose pas de question. On offre des lits de dépannage. On est une ressource de dépannage. On s'est dit: On veut être plus qu'un toit sur la tête. On veut être plus que de la bouffe dans l'assiette. On veut être une aide.

On a toujours eu comme préoccupation dans nos interventions d'être assez prêt de la personne parce qu'effectivement les jeunes qu'on rencontre n'ont presque plus de liens familiaux ou les liens familiaux sont très détériorés. On est un peu la deuxième famille. Je pense que si on avait pensé présenter des statistiques ce serait éloquent. C'est surprenant le nombre de jeunes qui reviennent faire un tour après, à toutes les fois qu'ils ont des bonnes nouvelles. Vous savez, parfois on n'en n'entend pas parler parce que cela va mal un peu au travail et, tant que cela va bien, à un moment donné il sait qu'on est un petit peu sa famille et des fois il va venir parler du problème particulier. On va aborder une amorce de solution. On le perd dans la brume pendant un mois, deux mois et, tout â coup, on reçoit un coup de téléphone disant: Puis-je aller en visite ce soir? Effectivement, là ils viennent nous compter des bonnes nouvelles. On est souvent, pour eux, une deuxième famille.

Souvent, il y a des cas, personnellement, que j'ai toujours trouvé pathétiques. L'éclatement de la cellule familiale, comme on le vit au Québec présentement... Ce que je trouve terrible c'est quand un jeune est chez eux, soit avec son père ou avec sa mère, et que le "chum" ou la blonde arrive dans le décor et qu'il n'y a plus assez de place pour trois dans la maison. Ce sont souvent des cas qu'on rencontre. C'est ceux qu'on appelle des cas conjoncturels qui représentent 45 % à 50 % de notre clientèle.

Le Président (M. Filion): II vous reste trois minutes, environ.

Mme Harel: En fait, tantôt vous disiez qu'une institution, par exemple, comme Rivière-des-Prairîes, qui est un centre d'accueil pour jeunes, finit par fabriquer des jeunes qui ont des difficultés d'autonomie.

M. Rousse: ...

Mme Harel: Est-ce qu'il ne faudrait pas envisager des mesures de transition, par exemple? Vous êtes presque une maison de transition entre la vie indépendante totale et la vie d'institution. C'est comme une sorte de maison de transition. Il y a comme une sorte de passage à faire. Ne faudrait-il pas envisager qu'il y ait une sorte de reconnaissance qu'il y a un besoin de maisons de transition pour des jeunes en centres d'accueil?

Je termine. Vous êtes impliqués aussi dans divers... Vous avez parlé du regroupement des maisons d'hébergement. Vous avez discuté de toute la question relative au Conseil permanent de la jeunesse. Vous en avez discuté à divers stades. Comment cela est-il perçu dans les milieux où vous êtes? Oisons que les jeunes que vous servez, j'imagine, ne sont pas très au courant. Ce sont les intervenants, j'imagine, qui sont plus intéressés. Quelles sont les attentes dans ce milieu à l'égard du conseil?

M. Lamoureux: Dans le fond, les gens qui travaillent dans le secteur communautaire ont l'impression souvent de rouler dans le vide parce que les jeunes sans-abri n'ont pas d'association ni de syndicat. Ils n'ont pas de voix. Un des mandats du Conseil permanent de la jeunesse serait sans doute d'être à la fois une oreille pour entendre ce qui se passe en ce qui a trait aux sans-abri et une voix aussi qui dirait ce qui se passe là aux ministères, aux instances gouvernementales, aux grandes institutions. Ce serait l'attente idéale, d'être à la fois une oreille et une voix qui pourraient les aider à résoudre leurs problèmes.

M. Rousse: Une des difficultés rencontrées dans cette volonté, c'est comment assurer la représentativité de ces intérêts? On comprend le souci démocratique du gouvernement dans la mise en place d'un collège électoral, etc. Mais il y a cette représentativité des problèmes, non pas généraux, mais plutôt de la rue, d'en bas. Comment accorder cette voix, comme disait Daniel, à l'oreille?

En ce qui a trait aux maisons de transition que vous avez abordées, Mme Harel, effectivement, la Maison Tangente joue un peu ce rôle mais elle n'est pas comme telle une maison de transition. Comme je le disais tantôt, tout ce qui est assez directement relié à l'institution amène une relation de confiance difficile avec

l'individu. Effectivement, ce qui serait à souhaiter, ce serait encore plus de maisons d'hébergement du style de la Maison Tangente ainsi que des maisons d'hébergement qui peuvent offrir le même type de services mais, à moyen terme, sur des durées plus prolongées. Ce qui n'existe pas actuellement.

Le Président (M. Filion): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: En conclusion, M. le Président...

Le Président (M. Filion): D'accord. Oui. Je vous en prie.

Mme Blackburn: Je voudrais simplement vous dire, mesdames et messieurs, que j'ai été particulièrement impressionnée par le tableau que vous nous avez fait de la situation des jeunes. Je dois dire que c'est récemment que j'ai constaté l'espèce, j'allais dire, d'injustice dont sont victimes les jeunes qui vivent en institution du fait que du moment où ils ont 18 ans on les éjecte. Il ne viendrait pas à l'esprit d'une famille normale, dans le sens d'une famille un peu responsable, de faire la même chose avec son jeune sous prétexte qu'il vient d'avoir 18 ans. Il peut arriver qu'il soit autonome à 16, 17 ou 18 ans, comme il peut l'être à 22 ans. C'est là, comme d'autres probablement, que j'ai réalisé qu'il y avait quelque chose d'un peu anormal, d'un peu artificiel quand on décide que vous êtes autonome à 18 ans.

Vous faites deux recommandations touchant la création de comités consultatifs communautaires, c'est-à-dire l'un sur l'hébergement et l'autre sur l'emploi. Je voudrais vous dire que, sur l'emploi, cela a été une des premières demandes que j'ai faites au moment où on l'on commençait les travaux de cette commission. Effectivement, je pense qu'il y a là une priorité et que la seule façon de marquer qu'il y a là une priorité pour le gouvernement, c'est de créer dès maintenant, et en même temps que l'on crée le conseil, une commission. Je préférerais une commission à un comité parce qu'une commission a des pouvoirs plus étendus. Par exemple, ce pourrait être une commission de l'emploi.

Pour ce qui est de l'hébergement, l'autre commission que je suggérais en était une sur l'adolescence. J'estimais comme tous - et je pense bien que la lecture des documents nous amène à réaliser que les problèmes de mésadaptation, etc., que vit la jeunesse, enfin tous ceux dont vous avez fait état trouvent leur origine beaucoup dans l'enfance et dans l'adolescence. Une des façons que j'appelle de fermer le robinet à la venue de nouveaux mésadaptés est d'intervenir en matière de prévention.

Je voudrais vous rassurer et vous dire que cette recommandation que vous faites, je vais m'en faire le défenseur. Au moment où on examinera le projet de loi en commission parlementaire et en Chambre, je saurai en temps utile rappeler cette recommandation. Je vous remercie infiniment de votre participation.

Le Président (M. Filion): Oui, M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Au paragraphe 2 de vos recommandations, quand vous parlez du rôle de lobby auprès des différents ministères, du Conseil des ministres, des grandes institutions, des médias, est-ce que je dois comprendre qu'il y a plus que l'expression "une oreille et une voix", ou est-ce que c'est vraiment cela?

M. Lamoureux: À notre avis, le conseil permanent ne devrait pas être un organisme que les ministères consultent pour voir si telle politique ou tel projet de loi qui est sur le point d'être adopté correspond aux attentes du conseil. Il devrait plutôt avoir un objectif plus actif. Le conseil peut aller directement aux ministères. N'appelons pas cela des pressions, mais qu'il fasse un peu de lobby pour défendre les intérêts de la jeunesse qu'il avait entendus.

M. Bélisle: Autrement dit, de présenter les faits qui préoccupent la jeunesse.

M. Lamoureux: Oui.

M. Bélisle: C'est dans le projet de loi et je suis convaincu que c'est très important. C'est dans ce sens-là que vous ajoutez au volet de l'oreille et de la voix la prise en main de leurs objectifs et de mettre sur la table leurs priorités et les dire clairement. C'est ce que vous voulez dire?

M. Lamoureux: Sur la table politique et sur la table publique aussi. (17 h 15)

M. Bélisle: Et sur la table publique. Entièrement d'accord.

Une dernière question. Dans la quatrième recommandation qui s'adresse au gouvernement, au Conseil du trésor, vous parlez d'un budget annuel de 3 000 000 $ au Conseil permanent de la jeunesse, attribué au financement d'initiatives locales en matière d'hébergement et d'emploi chez les jeunes. Juste une réaction rapide. Si on prenait ce montant annuellement - 3 000 000 $ - et qu'on ne l'affectait pas à l'emploi mais seulement aux problèmes d'hébergement, de transition, de dépannage, de réorientation, combien pensez-vous qu'on pourrait aider de jeunes entre 18 et 25 ans en une année?

M. Lamoureux: En ce moment, c'est 718 200 $. Il y a 100 lits au Québec, combien peut-an avoir de lits avec 3 000 000 $?

M. Bélisle: C'est une équation simple, c'est tout.

M. Lamoureux: Oui, à peu près cela.

M. Bélisle: Sauf que, si on utilise d'autres volets dont vous avez parlé tantôt, comme des appartements supervisés et tout le reste, là ce n'est pas la même équation qu'on fait.

M. Lamoureux: Non, on ajoute des services.

M. Bélisle: On est d'accord là-dessus?

M. Lamoureux: Oui. Il y a une question de quantité, mais aussi de qualité.

M. Bélisle: D'accord, je comprends.

M. Lamoureux, Mme Fortin, Mme Lamy et M. Rousse, je vous remercie profondément. Cela m'a éclairé beaucoup; je m'intéresse beaucoup aux problèmes des jeunes parce que j'en al plusieurs à la maison. Plusieurs amis de mes jeunes viennent à la maison et on cause beaucoup. Plusieurs sont désorientés et, pour d'autres, cela va bien; il s'agit de les aider du mieux qu'on peut. Je trouve cela fantastique l'initiative que vous avez eue et le travail que vous faites. Je vais tout faire pour essayer de sensibiliser d'autres personnes à la problématique parce que c'est réellement un problème aigu au Québec. Je vous félicite et je vous remercie de l'excellence de vos recommandations.

M. Lamoureux: Merci.

Le Président (M. Filion): M. le ministre.

M. Gratton: Oui. J'aimerais moi aussi remercier nos invités de la Maison Tangente d'être venus compléter en quelque sorte le tableau qu'ils nous avaient dressé dans la lettre qu'ils ont sûrement adressée à l'ensemble de la députation, quant au phénomène des sans-abri.

Dans la recommandation que vous nous avez déposée ici aujourd'hui, vous faites allusion à l'attribution d'un budget de 3 000 000 $ qui serait consacré au financement d'initiatives locales en matière d'hébergement et d'emploi chez Ies jeunes et à la création d'un fonds d'investissement jeunesse de 10 000 000 $ qui serait consacré au développement d'alternatives communautaires en matière d'emploi et d'hébergement des jeunes. Vous suggérez que ces deux programmes soient confiés au

Conseil permanent de la jeunesse. J'ai déjà eu l'occasion d'indiquer que, pour nous, le Conseil permanent de la jeunesse est un comité "aviseur" et, donc, il ne saurait se substituer au Secrétariat à la jeunesse. C'est ainsi que, si cette recommandation devait connaître une suite concrète par une décision gouvernementale, ce serait au secrétariat ou à un ministère éventuel ou au ministre délégué à la jeunesse qu'appartiendrait le fardeau ou la tâche de donner une suite concrète à votre proposition.

C'est ainsi que vous avez pris probablement connaissance de la déclaration du ministre des Affaires municipales et responsable de l'Habitation, la semaine dernière, à savoir qu'il avait pris l'initiative de former un comité interministériel dans le cadre de l'année des sans-abri, lequel comité est en train, justement, de préparer des propositions, des actions qui pourront marquer l'année des sans-abri par - on l'espère et on le souhaite - des gestes concrets.

Je me permets donc de faire parvenir cette recommandation que vous faites aujourd'hui à ce comité interministériel, tout en vous disant qu'il ne saurait être question de patienter encore très longtemps pour que des suites soient données par ce comité puisqu'un mémoire au Conseil des ministres devrait être acheminé pour décision dans les deux semaines, sinon dans les jours qui suivent. C'est donc dire que votre présence ici, en commission parlementaire, nous aura permis d'activer les choses quant à votre recommandation. Je souhaite que très bientôt vous verrez des décisions concrètes qui seront annoncées. Encore une fois, merci de votre participation. C'est une occasion unique pour moi et peut-être pour d'autres membres de la commission d'être exposés à cette situation qui, malheureusement, nous échappe quand on est ministre du Revenu, ministre délégué à la Réforme électorale et leader du gouvernement.

J'apprécie énormément cette occasion que m'a fournie la commission de me sensibiliser et de m'informer un peu mieux de la situation des jeunes et, notamment, des jeunes moins favorisés, comme ceux à qui vous rendez service. Merci.

Le Président (M. Filion): À mon tour, au nom de tous les autres membres de la commission, de vous remercier de la qualité de votre mémoire. J'ai pu juger comme étant excellent l'échange qu'il y a eu avec les membres de la commission. Encore une fois, merci.

L'Antre-temps

Donc, la commission des institutions reprend ses travaux. Nous avons devant nous

les représentants de la maison L'Antre-temps, de Longueuil. M. Claude Caron, assis au centre, ainsi que Mme Mona Gagnon -c'e9t bien cela? - assise à la gauche de M. Caron. Bienvenue à cette séance de la commission des institutions qui, comme vous le savez, est mandatée pour entreprendre des auditions publiques sur le projet de loi 104, Loi sur le Conseil permanent .de la jeunesse. Les travaux d'aujourd'hui ainsi que votre présence à cette commission parlementaire se situent dans ce cadre de consultation de l'Assemblée nationale sur ce projet de loi. Donc, sans plus tarder, je vous inviterais à bien vouloir présenter votre mémoire que nous avons déjà reçu et dont les parlementaires ont déjà pris connaissance.

M. Caron (Claude): D'accord, merci. Avant de parler du mémoire directement, j'aimerais certainement commencer par attirer votre attention sur, je dirais, le fonctionnement de la commission et les difficultés que cela nous a causées à L'Antre-temps. D'abord, nous avons su seulement vers la fin du mois d'octobre que nous pouvions présenter le mémoire et que nous n'avions que quelques jours pour le présenter. Avant même de savoir si le mémoire serait accepté et avant même de savoir s'il y aurait eu une prolongation, ou quoi que ce soit, nous n'avons pas pu commencer comme tel ou nous devions commencer sans trop savoir ce qui arriverait. Après coup, nous avons su qu'il y aurait une prolongation de quinze jours et que nous pourrions présenter le mémoire. En ce qui me concerne, je déplore considérablement ce fait. Je n'aime pas commencer à parler en critiquant, mais cela me semble important de dire que les circonstances entourant la présentation de ce mémoire ont fait que certainement un grand nombre d'organismes jeunesse ou d'organismes communautaires n'ont pas osé présenter quoi que ce soit, compte tenu du fait qu'ils ne savaient pas s'ils pourraient se présenter ou s'ils seraient acceptés parce que les délais étaient écoulés. En même temps, je trouve que le peu de temps qui a été mis à notre disposition a certainement influencé le travail qui a pu être fait. C'est pourquoi, lorsqu'il est question de traiter ou de nommer cela un mémoire, en ce qui me concerne, je trouve que c'est un mot un peu pompeux. Je parlerais plutôt d'un document de réflexion ou d'une amorce de réflexion à cause du temps que nous avons eu. Je ne voudrais pas parler plus longtemps sur cela, mais c'était important que je le dise.

J'aimerais présenter l'organisme L'Antre-temps. Je sais que je l'ai fait sur papier. L'Antre-temps est une maison d'hébergement et de dépannage pour les jeunes adultes de 16 à 25 ans. Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie qu'un jeune qui est dans la rue, sans abri, et qui ne sait pas où dormir, ou un jeune qui, à la suite, je dirais, d'un problème familial quelconque va se retrouver dans la rue peut s'adresser à L'Antre-temps. L'avantage d'une ressource comme L'Antre-temps, c'est qu'à n'importe quel moment du jour ou de la nuit on peut s'adresser à L'Antre-temps. On téléphone et, s'il y a de la place, les gens sont acceptés. C'est un organisme qui tente d'aider les jeunes à se replacer ou à reprendre pied. Nous pouvons être une référence, nous intervenons en situation de crise. .Donc, nous allons aider en ce qui concerne l'emploi et nous allons essayer de regarder aussi les problèmes. Souvent, les gens qui nous arrivent ont des difficultés, et ce n'est pas seulement le fait d'être sans abri - je traiterai de cela un peu plus tard. Nous allons tenter de les orienter vers différentes places telles les maisons pour toxicomanes, des choses du genre. Donc, nous allons faire un travail d'orientation. Nous allons les aider relativement à l'emploi et nous allons les aider au niveau personnel parce que, lorsqu'ils vivent des situations comme celles-là, ils aiment bien pouvoir en parler et que nous les aidions.

Maintenant, je passerais tout de suite à la question de la situation financière de ce genre d'organisme. Sans faire de bilan ou quoi que ce soit, je pense qu'à peu près n'importe quel organisme du type de L'Antre-temps qui travaille dans la région de Montréal et un peu partout éprouve le même genre de difficulté, c'est-à-dire des problèmes de financement. Même si ce sont des organismes qui coûtent très peu cher, c'est très difficile de trouver des fonds et d'intéresser le gouvernement à cette situation d'obtenir que quelqu'un, quelque part, prenne des responsabilités et donne des subventions. Je rappelle que je mentionnais tantôt qu'il s'agissait de sans-abri. Je pense que tout le monde ici connaît le climat québécois et, quand on se retrouve au mois de janvier dehors dans la rue et qu'on n'a aucune place où se loger, aller dans des entrées de maisons d'appartements, attendre, comme on le fait, dans des endroits où il y a des bouches de chaleur, n'importe quoi, ce n'est vraiment pas adéquat. Je considère que c'est inconcevable. C'est la raison pour laquelle il faudrait certainement qu'il y ait quelque chose dans ce domaine. (17 h 30)

Ces mêmes difficultés financières ont eu une implication quant à notre présence ici. Quand on parle du peu de moyens dont on dispose, c'est clair que se déplacer, partir une, deux ou trois personnes d'un organisme pour venir ici, à Québec, cela occasionne des frais qui sont, sans être très élevés, je le reconnais, quand même suffisamment importants pour qu'on en tienne compte. On ne se déplace pas comme on veut. Quand on a beaucoup de problèmes financiers au

départ, chaque cent est important. Je pense qu'il y a d'autres moyens qui auraient pu être mis de l'avant pour nous éviter ces frais. Cela nous coûte cher et, quand on s'occupe de chercher du financement, on se rend compte que ce n'est pas facile. Je trouve que c'est peu valable pour nous de nous déplacer dans des conditions comme celles-là.

Maintenant, j'aimerais regarder un peu la problématique des jeunes. Nous, on pense, quand on parle de sans-abri, de difficultés et de vouloir faire quelque chose pour les jeunes, qu'il est important de parler de l'implication que cela a sur ces jeunes. J'ai fait référence dans le mémoire à la façon dont les jeunes qui vivent les situations d'aujourd'hui peuvent penser ou arriver à faire quelque chose de bien ou de valable plus tard. Je pense que ce qu'ils vivent actuellement les prépare très mal. Dans ce sens, je pense qu'on ne peut pas se permettre d'attendre encore pour aider ces jeunes. Il faut intervenir et c'est très urgent.

C'est vrai qu'on parle du Conseil permanent à la jeunesse, et je vais en parler un peu plus loin aussi, mais il reste qu'il faudrait faire attention aux besoins actuels de ces jeunes et les mettre de l'avant. Nous, on voudrait que, en attendant que le conseil permanent ait fait la consultation et les choses qu'il a à faire, il y ait des mesures pour l'emploi, qu'il y ait des politiques d'emploi qui soient mises de l'avant. Qu'il y ait des programmes, par exemple, comme ceux qui existaient à l'aide sociale pour le retour aux études, les stages en entreprise, des choses du genre. Je pense qu'il faut absolument qu'il y ait quelque chose qui soit fait de ce côté, sinon les jeunes vont encore aggraver une situation qui est déjà extrêmement pénible.

Maintenant, on arrive au collège électoral pour se rapprocher davantage du projet de loi. La formule du collège électoral, si j'ai bien compris, selon les notes que j'ai eues, c'est qu'une personne qui est âgée de 15 à 30 ans peut s'adresser à trois organismes communautaires jeunesse pour être parrainée afin d'être membre du collège électoral. Nous, cette façon de fonctionner nous inquiète beaucoup parce qu'une personne peut venir nous visiter, noua rencontrer, elle a bien de l'allure, elle est bien gentille, mais est-ce que vraiment ce serait une personne qu'on pourrait déléguer pour nous représenter au collège électoral, compte tenu des responsabilités du collège? On est inquiet de cette formule parce qu'à peu près n'importe qui peut se retrouver là, venir au collège électoral. On est inquiet quant à la représentation sectorielle et régionale. On voudrait que les différents secteurs mentionnés dans le projet de loi et les différentes régions soient aussi représentés.

Il y a des questions qu'on se posait:

Pourquoi est-ce le ministre qui décide de la formation du collège électoral? Les gens sont nommés, ils sont allés chercher trois répandants de différents organismes et, à ce moment-là, ils n'ont qu'à se présenter ici et le ministre responsable va décider. À ce niveau-là, on aurait une proposition. On aimerait que ce soient des tables de concertation locales qui fassent une certaine sélection des candidats de façon que l'on puisse un peu mieux les connaître parce qu'on se dit que rencontrer des gens, les évaluer et parler avec eux, ce serait mieux, et on se dit aussi qu'en se consultant entre orqanismes, on serait davantage à même de constater qui serait valable pour nous représenter, parce que, finalement, dans le collège électoral, il y aura aussi des membres du conseil permanent. Donc, on ne peut pas se permettre d'envoyer Pierre, Jean, Jacques, si on peut dire... J'ai perdu le fil. Cela va me revenir, excusez-moi.

Le Président (M. Filion): D'accord. M. Caron, il n'y a pas de problème.

M. Caron: Finalement, on craint que la représentativité soit un peu absente. Une question que l'on se pose, c'est: Qu'arrive-t-il au collège électoral après coup? Avec les documents que j'ai étudiés, il ne m'a pas été possible de savoir ce qu'il en arrivait. J'aimerais obtenir des informations là-dessus.

Une autre question, parce qu'on n'a pas eu nécessairement suffisamment de temps pour avoir toutes les réponses à nos questions, mais on espère bien les avoir quand la loi sera là: Pourquoi est-ce le ministre qui nommerait les remplaçants en cas de vacances? On se demande, on se dit: Le ministre a beaucoup de pouvoir à ce niveau-là et cela présente une certaine inquiétude pour nous. On sait que normalement le ministre a beaucoup de pouvoir, mais quand même...

Une autre question. On se dit: Pourquoi le président est-il nommé par le ministre? Donc, le président, les remplaçants en cas de vancaces sont nommés par le ministre et aussi les gens qui vont former le collège électoral. Donc, quand on parle des gens qui sont allés chercher des lettres de trois organismes, cela fait quand même beaucoup de sélection faîte par le ministre. Finalement, ce que l'on proposerait, c'est que le collège électoral demeure en place et qu'il nomme les remplaçants et le président du conseil permanent. On voudrait aussi qu'il y ait un membre du conseil permanent par région administrative. Évidemment, la représentativité, on trouve que c'est très important.

Maintenant, je reviens plus directement au projet de loi, notamment en ce qui concerne les fonctions et pouvoirs du conseil permanent. La section III, article 26,

j'aimerais que Mona nous en fasse lecture.

Mme Gagnon (Mona): "Dans l'exercice de cette fonction, le conseil peut: "1° saisir, sous forme d'avis, le ministre de toute question relative à la jeunesse qui appelle l'attention ou l'action du gouvernement et lui soumettre ses recommandations; "2° effectuer ou faire effectuer les études et recherches qu'il juge utiles ou nécessaires à l'exercice de sa fonction; "3° solliciter des opinions, recevoir et entendre les requêtes et les suggestions de personnes, de groupes et d'organismes sur les questions relatives à la jeunesse; "4° fournir de l'information au public sur toute question relative aux besoins et aux intérêts de la jeunesse."

M. Caron: Dans l'ensemble, ce qui est dit à cet article 26, en ce qui nous concerne, cela va très bien. Il y a juste un petit mot qui a accroché mon attention, et c'est important d'y revenir - vous allez comprendre plus tard - c'est le mot "peut". Le conseil permanent "peut". Ce mot veut dire la possibilité. Cela peut vouloir dire: il y a donc une possibilité de faire cela si des choses peuvent se faire et, pour vous expliciter davantage ma pensée, j'aimerais que Mona lise l'article 27, tout de suite ce qui suit.

Mme Gagnon: "Le conseil doit donner son avis au ministre sur toute question que celui-ci lui soumet relativement aux besoins et aux intérêts de la jeunesse. Il doit de plus effectuer ou faire effectuer les études ou recherches qui lui sont demandées par le ministre."

M. Caron: Encore là, c'est très bien, sauf que, là, on ne parle plus de "peut", mais on parle de "doit". En ce qui me concerne, je trouve que c'est inquiétant parce que, s'il doit le faire, c'est comme dire: Tu vas pouvoir aller jouer dehors, mais, avant, tu dois faire tes devoirs. Donc, si tu fais ce que tu dois faire, il n'est pas assuré que tu vas pouvoir faire ce que tu peux faire. Évidemment, on s'entend que les gens qui font le projet de loi ont de la bonne volonté et visent à améliorer la condition des jeunes. On veut aussi que le conseil permanent remplisse vraiment ses fonctions. Mais il reste que, d'un côté, on dit: Le conseil permanent "peut" et, de l'autre côté, on dit: Le conseil permanent "doit". "Doit" quand cela vient du ministre et "peut" quand cela vient d'eux autres. En tout cas, cela nous inquiète un peu. Je reviens encore avec cette fameuse question des pouvoirs.

Est-ce que tu veux lire l'article 28, Mona?

Mme Gagnon: "Le conseil s'assure, s'il y a lieu, qu'on donne suite à ses avis."

M. Caron: D'accord. Il s'assure qu'on donne suite à ses avis. Je veux bien m'assurer, mais comment? J'aimerais que cela apparaisse comment on peut s'assurer que les avis vont être faits. II y a les avis qui peuvent venir du conseil permanent et il y a aussi les avis qui peuvent venir du ministre. Mais, quelque part, j'aimerais bien qu'on ait une assurance quelconque sur ces questions d'avis, à savoir comment on va y donner suite et ce qui va se passer après cela. Cn ne le sait pas.

L'article 29.

Mme Gagnon: "Le conseil peut, avec l'autorisation du ministre, former des comités spéciaux pour l'étude de questions particulières relatives à la jeunesse et déterminer leurs attributions."

M. Caron: J'ai seulement retenu l'article 29 parce que cela réapparaissait encore un peu plus évident parce qu'il est écrit: "peut, avec l'autorisation du ministre", etc. C'est encore une fois beaucoup beaucoup d'autorité. Cela ne répond pas nécessairement à mes attentes vis-à-vis de la formation d'un conseil permanent que de façon aussi évidente il y ait autant, je dirais, de pouvoirs qui soient donnés au ministre. Je pense que je ne suis pas le seul à le penser. C'est pourquoi on a regardé un document du Secrétariat à la jeunesse. Qu'est-ce que c'était? C'était...

Mme Gagnon: C'est un document...

M. Caron: C'est le rôle d'un conseil permanent. C'est cela?

Mme Gagnon: C'est cela.

M. Caron: D'accord. J'aimerais que Mona nous lise comment on définit le rôle d'un conseil.

Mme Gagnon: Un conseil est un organisme qui se définit d'abord par sa fonction dominante, la consultation. Tel qu'indiqué dans la classification et la désignation des organismes par fonction et contrôle du Secrétariat à la réforme administrative et aux emplois supérieurs du ministère du Conseil exécutif, l'organisme constitué par une loi dont la fonction est de donner des avis à un ministre sur la politique gouvernementale dans l'ensemble d'un secteur et dont la majorité des membres sont extérieurs à la fonction publique devrait être classé conseil.

M. Caron: J'ai retenu l'aspect de la consultation. Donc, si on consulte les gens, si on veut qu'une consultation serve à quelque

chose, il faut qu'on soit en mesure de les écouter. Dans le projet de loi que j'ai lu, ce n'est pas sûr que le conseil permanent pourra le faire parce que, si le ministre a des priorités qu'il juge plus valables à mettre de l'avant, le conseil permanent doit le faire. Le risque est que toutes les études, toutes les choses qui seront faites par le conseil permanent partent du gouvernement. Je ne dis pas que ce que le gouvernement va demander est mauvais, non, mais, quelque part, si on veut faire une consultation, il faut que cela puisse se faire pas seulement dans un sens, mais dans les deux sens. Il faut absolument qu'on puisse s'assurer de cette chose. (17 h 45)

J'ai retenu aussi que c'était extérieur à la fonction publique: "doit, avec l'autorisation du ministre". Alors, je me demande beaucoup ce qu'est la différence entre avoir l'autorisation de faire des choses... Je ne vous dis pas qu'il n'y a pas une grosse différence, mais vous pourrez certainement me l'expliquer. Ils doivent avec l'autorisation ou ils font partie de la fonction publique, donc ils dépendent de leur employeur. À ce moment-là, je pense que cela limite beaucoup encore ces gens. J'ai lu, toujours dans le même document, quelque chose qui concernait les causes de la création d'un conseil permanent. Mona, voudrais-tu nous le lire, s'il vous plaît?

Mme Gagnon: L'inhabilité des structures existantes à satisfaire certaines exigences démocratiques. On aurait recours à des organismes autonomes parce que, selon le cas, l'assemblée, l'administration et le gouvernement n'assuraient pas une représentation satisfaisante des intérêts spécifiques que l'on rencontre dans toute société moderne et, plus généralement, une participation continue entre les périodes électorales de la population au processus démocratique.

M. Caron: D'accord. Je vous reviens toujours avec... C'est un mot qu'on utilise beaucoup, remarquez bien, dans nos organismes communautaires et on y tient mordicus. Je le ramène aujourd'hui aussi, c'est cette fameuse autonomie. L'autonomie, en tout cas, moi, clairement, selon un peu le document du Secrétariat à la jeunesse, m'apparaît bien loin. Ce n'est pas si sûr que cela qu'il y ait de l'autonomie. Je pense qu'il va falloir en tenir compte dans le projet de loi ou dans la loi, s'assurer que vraiment l'autonomie soit respectée. Actuellement, je ne considère pas qu'elle l'est vraiment. On dit aussi: besoins non satisfaits... Est-ce cela?

Mme Gagnon: Représentation satisfaisante.

M. Caron: Représentation satisfaisante. Je pense que, si on veut représenter vraiment la population de façon adéquate, il faut qu'on puisse jouir d'une certaine autonomie et ce n'est pas sûr que cela va pouvoir se faire, tel que le projet est présenté actuellement.

On disait aussi que c'était une participation au processus démocratique. Si on retient notre proposition que les membres du conseil permanent soient nommés par le collège électoral, c'est-à-dire le président et les vacances, enfin tout, que le collège électoral soit nommé par des personnes des organismes de chaque région, qu'il y ait des tables de concertation, je pense qu'on aurait vraiment des gens qui pourraient nous représenter aussi et qui seraient certainement capables de nommer les personnes qu'ils veulent. Je pense aussi que cela respecterait davantaqe ce qui était mentionné dans ce document, le processus démocratique. Je ne veux pas dire non plus que ce document est le seul document valable, qu'il a la vérité et la vie concernant la formation d'un conseil permanent de la jeunesse, mais je peux dire que, nous, à L'Antre-Temps, on adhère davantage à un conseil permanent qui pourrait respecter, justement, les attentes qui ont été mentionnées dans ce document. Voilà!

Le Président (M. Filion): Bien, je vous remercie, M. Caron, autant pour la qualité du mémoire écrit que vous avez déjà déposé à la commission que pour la qualité de vos interventions orales cet après-midi. Je crois comprendre également, après avoir lu votre mémoire, après avoir lu le sommaire et après vous avoir écouté cet après-midi, que vous avez utilisé le temps subséquent au dépôt de votre mémoire pour étudier plus à fond le projet de loi et pour compléter votre critique - ce mot est utilisé dans le sens positif ici - votre critique du projet de loi.

En ce qui concerne les remarques que vous avez faites au début relativement au délai de présentation des mémoires, je dois vous dire que vous n'êtes pas le seul organisme à l'avoir mentionné. Le problème, je dois vous le dire, M. Caron, ce ne sont pas les organismes que nous avons entendus et que nous entendrons, mais ce sont les organismes que nous n'entendrons pas parce qu'ils n'ont pas les moyens de se faire entendre. Je dois véritablement, à ce stade-ci, vous remercier de l'énergie, du temps et des sous investis par la maison L'Antre-Temps, d'avoir pris la peine, j'allais dire, de bâtir ces recommandations, ce mémoire, et d'avoir pris le temps de venir le présenter à Québec. Ce qui me frappe dans l'ensemble de la consultation qu'on a eue depuis le début, c'est qu'on peut entendre les gens qui sont ici, mais combien d'organismes n'ont pas été entendus, qui auraient aimé être

entendus relativement au projet de loi 104 et qui n'ont pas les moyens ni les ressources pour le faire? Moi-même, je dois dire que dans la région de Longueuil plusieurs organismes ont communiqué avec moi, mais c'est bien simple, ils n'ont pas les moyens, ils n'ont pas le temps et ils n'ont pas l'énergie pour le faire parce qu'ils se sont déjà entièrement consacrés à faire fonctionner leur organisme, leur service à une clientèle bien définie. Je pense que vos commentaires du début étaient fort à propos à ce sujet-là. Je voudrais maintenant prendre quelques minutes pour le bénéfice des membres de la commission et pour le mien également. Vous mentionnez au début de votre mémoire que la maison L'Antre-temps, on le sait, est un centre d'hébergement temporaire pour mineurs et majeurs, donc entre 16 et 25 ans, et vous mentionnez que les références vous viennent beaucoup du Centre de services sociaux Richelieu. Pourriez-vous nous dire par qui sont référés les jeunes que vous accueillez chez vous à la maison L'Antre-temps, à part le Centre de services sociaux Richelieu?

M. Caron: En ce qui concerne les mineurs, c'est obligatoire, compte tenu de la loi 24, que cela soit le Centre de services sociaux Richelieu ou encore un centre local de services communautaires, un CLSC. Pour ce qui concerne les majeurs, c'est à peu près n'importe qui. On a des références qui nous viennent de la police, du Carrefour Le Moutier, à Longueuil, d'autres maisons d'hébergement, des CLSC aussi, des centres de dépannage, des comptoirs de vêtements qu'il y a à Longueuil. On a des références qui viennent d'à peu près n'importe qui, des gens qui ont connu L'Antre-temps et qui disent à des jeunes qui sont mal pris: Allez là. Et aussi parce qu'on fait beaucoup de publicité de part et d'autre, ce qui nous fait connaître. À ce moment-là, il y a de plus en plus de gens, ce qui fait varier grandement qui peut nous référer du monde. C'est à peu près tout le monde.

Le Président (M. Filion): En somme, il y a une grosse, pour ne pas dire la totalité, mais une grosse majorité des références qui sont faites par des institutions, le CSS, le CLSC ou encore des corps policiers, ou, comme vous l'avez mentionné, des centres de dépannage, etc., des institutions qui existent et qui font appel à vos services pour recevoir ces jeunes. Combien de jeunes la maison L'Antre-temps peut-elle accueillir?

M. Caron: On a neuf places, dont trois places pour les mineurs maintenant et six places pour les adultes.

Le Président (M. Filion): Oui, Mme Gagnon, je vous en prie.

M. Gagnon: Les mineurs doivent nécessairement être référés par le Centre de services sociaux Richelieu. C'est seulement comme cela qu'on les accepte.

Le Président (M. Filion): On a parlé un peu tantôt de la question des ressources financières eu égard à tous les organismes qui ont pu avoir de la difficulté à participer à nos consultations et vous mentionnez dans votre mémoire que ce qui est important pour vous, c'est la reconnaissance de l'efficacité et de l'utilité des organismes communautaires jeunesse par la mise en place d'une politique de financement de ces organismes, par la définition de critères d'évaluation objectifs et par l'accroissement du budget du programme de soutien aux organismes communautaires.

Est-ce que je dois comprendre que cette reconnaissance, qui prendrait entre autres formes celle d'un appui financier concret, que, si cette reconnaissance et ce respect existaient pour vous, le Conseil permanent de la jeunesse aurait plus ou moins raison d'exister?

M. Caron: Non. Je ne pense pas qu'on puisse limiter cela au simple fait qu'il y ait une reconnaissance des organismes communautaires pour empêcher la création d'un conseil permanent de la jeunesse. Il reste quand même que les sociétés évoluent, changent. Les problèmes peuvent changer aussi. Comme le mandat d'un conseil permanent de la jeunesse, c'est la consultation, dans ce sens, je ne vois pas du tout, je ne suis pas opposé du tout à ce qu'il y ait un conseil permanent. C'est assez important de se tenir vraiment à la fine pointe de l'information, que les gens qui ont des choses à dire, qui ont des problèmes, qui ont des difficultés puissent avoir un mécanisme pour les exprimer ouvertement.

La reconnaissance des organismes communautaires, pour nous autres, c'est important et c'est pourquoi j'en parlais. On considère qu'on fait un travail valable, sauf que chaque année, chaque fois qu'il est question de faire des demandes de soutien financier, il faut toujours reprendre le processus du début à la fin. Autrement dit, un organisme comme L'Antre-Temps, qui n'a toujours pas été subventionné par le ministère de la Santé et des Services sociaux, fait une demande, explique de long en large tout ce qu'il fait, le nombre de personnes, les statistiques et aussi son budget de fonctionnement. Mais un organisme qui existe depuis cinq ans a la même chose. Donc, il n'y a pas vraiment de politique de financement en regard de ces organismes.

Il faut bien préciser que des organismes communautaires, on ne peut pas... Moi, je travaille dans le domaine de l'hébergement. C'est entendu qu'on ne peut pas intervenir

dans tous les secteurs. Il y a des secteurs comme le loisir et le travail qui sont très importants et il faut que quelque part il y ait un organisme qui puisse un peu consulter la population, prendre le pouls de la population pour savoir ce qui arrive avec cela et en ce sens, le conseil permanent pourrait très bien le faire.

Le Président (M. Filion): Pour vous, le Conseil permanent de la jeunesse aurait un peu le rôle de faire des études, d'aller chercher de l'information, etc., et de devenir en quelque sorte pour vous un haut-parleur pour la jeunesse. C'est cela?

M. Caron: C'est ce qu'il était censé être aussi, me semblait-il.

Le Président (M. Filion): D'accord. Je veux revenir au projet de loi 104. Vous avez mentionné une sorte de mainmise gouvernementale dans le processus du choix des membres du conseil. Vous avez mentionné, à très juste titre, la formulation des articles 26 et 27 du projet de loi 104 et cette différence qui, je dois le dire, a été soulevée par beaucoup d'intervenants entre les pouvoirs du conseil et ses devoirs. Vous avez également mentionné, cela a frappé beaucoup d'intervenants, et je suis content que vous l'ayez relevé, à l'article 29, la formation de comités qui doit se faire avec l'autorisation du ministre. Je pense que c'est complètement... En tout cas, c'est faire fi de la capacité d'autonomie et de fonctionnement autonome de la part d'un conseil que de demander au gouvernement d'autoriser la formation de comités...

M. Caron: En tout cas, on peut dire à tout le moins...

Le Président (M. Filion): Oui.

M. Caron: Excusez, M. le Président.

Le Président (M. Filion): Je vous en prie, allez-y!

M. Caron: On peut dire à tout le moins qu'à l'article 29 c'est encore plus explicite qu'à l'article 26. À l'article 26, on dit: "peut". Si on regarde cela et qu'on n'arrête pas... D'ailleurs, ce que je n'ai pas nécessairement fait la première fois que je l'ai lu. C'est en lisant que c'est totalement frappant. À l'article 26, cela commence bien. A l'article 27, on s'aperçoit qu'il y a des choses qui peuvent changer, mais, quand on arrive aux mots "doit, avec l'autorisation", on ne se pose plus de question, c'est clair. Très certainement, l'autonomie est atteinte.

M. Gratton: M. le Président.

Le Président (M. Filion): Sur ce sujet-là, M. le ministre?

M. Gratton: Oui, M. le Président. J'ai déjà eu l'occasion de mentionner ce matin -je pense que vous étiez absent et peut-être que M. Caron n'était pas là non plus - que, pour nous, l'esprit de la loi vise à donner la plus complète autonomie possible au Conseil permanent de la jeunesse. J'ai indiqué que, si l'article 29, dans sa formulation actuelle, qui dit "doit", créait problème, on allait apporter les amendements qui s'imposent. Pour nous, il n'est pas question que le Conseil permanent de la jeunesse devienne complètement assujetti aux demandes gouvernementales qui pourraient l'inonder et l'empêcher d'exercer son autonomie.

J'ai déjà clairement indiqué que voilà un des amendements qui sera apporté au projet de loi. Je ne saurais le rédiger sur le coin de la table au moment où on se parle, mais on fera en sorte que le projet de loi qui sera déposé pour adoption à l'Assemblée nationale rejoigne vos préoccupations de ce côté-là, M. Caron. (18 heures)

Le Président (M. Filion): Je vous remercie également, M. le ministre. Effectivement, je suis heureux de vous entendre confirmer cet amendement futur, ce qui ne fait que corroborer la justesse de vos propos sur ces articles, M. Caron.

Finalement, pour que le Conseil permanent de la jeunesse soit véritablement un haut-parleur quelconque, il faut lui donner les moyens de son mandat et l'autonomie nécessaire pour qu'il puisse le mener à bien. C'est un peu le sens de vos propos à la fois sur le processus de nomination et sur les devoirs et pouvoirs du Conseil permanent de la jeunesse.

M. Caron: Oui, je pense que dans l'esprit de ce que M. le ministre disait, c'est clair et net - je l'ai précisé - que, dans le projet de loi tel qu'il est là, je ne suis pas d'accord sur les devoirs et pouvoirs. Quand M. le ministre précise qu'il va y avoir un amendement, je suis très heureux de l'entendre. J'avoue très honnêtement que je n'en attendais pas moins.

Le Président (M. Filion): D'accord. Une dernière chose avant de laisser la parole à ma collègue, la députée de Maisonneuve. Je sais qu'elle â quelques questions à vous poser.

Vous avez suggéré dans votre mémoire, sauf erreur, une recommandation que je n'ai retrouvée nulle part ailleurs. Je voudrais juste en saisir le sens et la portée exacte. On a vu dans votre mémoire votre préoccupation pour l'existence et la pérennité - si je puis m'exprimer ainsi - du Secrétariat à la jeunesse. Vous dites que le secrétariat

pourrait être placé sous la juridiction du Conseil permanent de la jeunesse, accroissant de ce fait l'autonomie du conseil, probablement. J'aimerais peut-être vous entendre, M. Caron, sur la réflexion qui vous a poussé à faire cette recommandation.

M. Caron: J'ai quand même eu des contacts avec différentes personnes. Dans les conversations qu'on a eues et même sans parler de contact, seulement à regarder, il y a eu beaucoup de coupures qui ont été effectuées au Secrétariat à la jeunesse. Il y a eu des bureaux de fermés, il y a eu différentes choses de ce genre, ce qui m'a amené à penser - pas seulement moi -qu'éventuellement il pourrait y avoir une fermeture, je dirais, du Secrétariat à la jeunesse et que cela vienne à ne plus exister comme structure. Cela m'a inquiété parce que je me suis dit: Cette structure qui était là avec ses forces et ses faiblesses a quand même développé une certaine expertise. On sait évidemment, lorsqu'on crée un conseil permanent, après que le Secrétariat à la jeunesse a été créé, que cela peut poser des difficultés assez importantes. Il a de l'expertise et cela peut occasionner des problèmes entre les individus qui seraient aux deux places. Il n'en demeure pas moins, je crois, que le secrétariat a eu l'occasion de développer une expertise. Il a été en contact avec beaucoup de régions. Dans ce sens-là, je pense que l'expertise qui a été développée par le secrétariat pourrait être utilisée à bon escient par le conseil permanent.

Le Président (M. Filion): Je...

M. Caron: Quand...

Le Président (M. Filion): Je vous en prie.

M. Caron: Quand je parlais de les mettre un peu sous la juridiction, si je peux dire, du conseil permanent, cela va de soi que celui-ci a besoin quand même d'outils pour travailler, a besoin d'expertise, d'expériences pour être efficace le plus rapidement possible. C'est dans ce sens que je croyais opportun qu'il y ait une collaboration. Quelle sorte de collaboration pourrait être établie? J'ai parlé de le placer sous le couvert du conseil permanent. En ce qui me concerne, ce n'est pas nécessairement absolu. C'était une réflexion à ce moment-là. Mais à tout le moins, je considère qu'il faut qu'il y ait une forme de collaboration entre les deux qui s'établisse, sinon cela serait comme laisser tomber une quantité valable d'expériences et d'expertise.

Le Président (M. Filion): Je vous remercie, M. Caron. Quitte à revenir un peu plus tard, je laisse maintenant la parole à ma collègue, la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. M. Caron, vous avait fait une description très fouillée, très exhaustive, très descriptive du projet de loi. Alors, je vais avoir une seule question. Elle concerne et elle reprend d'une certaine façon la question concernant le Secrétariat à la jeunesse et ses rapports avec le conseil et, également, une recommandation que vous faites de rémunérer les personnes qui devraient siéger au conseil.

Comme vous le voyez, d'une certaine façon, va être complétée la représentation au niveau de conseils de différents groupes dans la société. On a assisté à la création du Conseil du statut de la femme, il y a plusieurs années maintenant - cela fait huit ans - avec un secrétariat à la condition féminine qui existe également, mais qui relève de la ministre. Une autre formule totalement différente, c'est le Conseil des communautés culturelles et de l'immigration qui a son secrétariat, un peu comme la formule que vous recommandez, qui relève du conseil directement avec un secrétariat. Mais, évidemment, on est par définition et par nature, femme toute sa vie, puis on est membre d'une communauté culturelle toute sa vie, mais la jeunesse reste une étape transitoire. Ce que je veux savoir, c'est quel est le mode de représentation le plus adéquat. On s'entend bien que la jeunesse reste momentanée et on est tous voués à un état de passage autre. Alors, comment faire pour que les personnes soient représentatives, tout en étant de passage?

Vous suggérez une sorte de rémunération pour tout le monde, n'est-ce pas? Ne serait-il pas mieux d'envisager un secrétariat, comme il existe, qui continuerait de remplir les divers postes, et d'avoir vraiment un conseil consultatif formé de personnes qui, bénévolement, pour un certain temps, occupent des fonctions de représentation de leur milieu, parce que la jeunesse est aussi diversifiée selon les couches sociales, selon les catégories économiques, selon l'appartenance ethnique? Alors, comment voyez-vous cela?

M. Caron: D'abord, pour la représentativité, quand on proposait que ce soient des tables régionales de concertation qui puissent nommer des personnes, en ce sens-là, je considérais ou on considérait, quand on en a parlé, que cela pourrait être valable puisque, en se consultant, il y a certainement moyen d'envoyer des personnes qui pourraient être représentatives.

En ce qui concerne la rémunération des différentes personnes, j'aurais pu manifester une inquiétude. Je suis conscient que cela peut occasionner des problèmes et que ce sont quand même des gens qui sont de

passage. Mon souci à ce moment-là, je me disais: S'ils font toutes les consultations qu'ils doivent faire, ils vont certainement, à un moment donné, avoir beaucoup de choses è faire. Peut-être que je pourrais le reformuler en le manifestant comme une inquiétude vis-à-vis du temps disponible de ces gens-là pour la consultation en regard de leur mandat de consultation et de donner des avis. C'est peut-être plus une inquiétude. À ce moment-là, quand je l'ai fait, j'ai pensé à la solution la plus simple: On va les rémunérer. Ils vont le faire à temps plein et ce sera très bien, sauf que, lorsque vous m'amenez les éléments dont vous me parlez aujourd'hui, je suis d'accord avec cela aussi. Cela pose des problèmes, mais, par contre, il y a des gens qui vont le faire de façon bénévole. Cela me pose une inquiétude de l'autre côté aussi. Je n'ai malheureusement pas de réponse, ni dans un sens ni dans l'autre, parce que, pour moi, les bénévoles, cela pose un problème et les rémunérer aussi. Donc, je m'excuse. Le peu de temps qu'on a eu pour y réfléchir fait que je n'aurais pas de réponse plus que cela,

Mme Harel: Je vous remercie beaucoup, M. Caron, de nous faire part de vos réflexions.

Le Président (M. Filion); J'invite maintenant les représentants du groupe ministériel. M. le député de Limoilou.

M. Després: Je veux d'abord vous féliciter pour le travail que vous faites auprès d'une clientèle jeunesse en difficulté et de nous rappeler justement cette dure réalité qui est sûrement trop élevée et parfois oubliée. Étant donné le court laps de temps qu'il nous reste, j'en arriverai directement à une ou deux courtes questions en ce qui concerne vos recommandations. Tout d'abord, concernant la création d'un conseil permanent, à la recommandation 3.2, vous dites: S'assurer d'une représentativité de toutes les régions en proportion du nombre d'organismes par région. Vous dites, à la page suivante: II pourrait y avoir un membre du conseil par région administrative. Alors, comme il y a dix régions administratives, cela voudrait dire un représentant par région administrative. Mais vous dites avant cela: d'une représentativité en fonction de la proportion du nombre d'organismes. Si on prend, par exemple, la région de Montréal, je suppose que l'on retrouve peut-être 50 % des organismes jeunesse de la province dans cette région-là. Donc, on retrouverait beaucoup plus de représentants au conseil de la région de Montréal. Donc, comment fait-on à ce moment-là? Est-ce qu'on agrandit le nombre de directeurs au Conseil permanent de la jeunesse ou se limite-t-on à un par région? Je trouve cela un peu contradictoire.

J'aimerais que vous m'expliquiez brièvement votre objectif.

M. Caron: J'ai constaté moi aussi cette contradiction et je m'en excuse, sauf que mon souci à ce moment-là... J'ai mêlé deux choses: d'abord, pour les personnes nommées au sein du collège électoral, qu'il puisse y avoir une représentativité qui soit assurée en fonction des régions. Cela va de soi, quand on arrive au conseil permanent, comme il y a une personne par région, c'est clair que cela ne peut pas être plus que cela. Il y a effectivement une contradiction de ce côté-là, mais j'avais envoyé le mémoire quand je l'ai constaté. Mais je faisais plus référence dans le premier point à la formation du collège électoral.

M. Després: Je vous remercie beaucoup. Encore en ce qui concerne vos recommandations, et peut-être brièvement, lorsque vous dites: "Reconnaissance de l'efficacité et de l'utilité des organismes communautaires jeunesse par la mise en place d'une politique de financement de ceux-ci, par la définition de critères d'évaluation objectifs..". Pour vous, quels sont ces critères d'évaluation objectifs? Encore brièvement, s'il vous plaît!

M. Caron: Je ne pourrais pas tous les définir brièvement ici.

M. Després: Peut-être un ou deux. Quels sont, pour vous, les critères?

M. Caron: Des critères objectifs? M. Després: Oui.

M. Caron: Que l'on n'ait pas chaque année à tout redéfinir ou à tout montrer ce que l'on a fait, à préparer un document complet sur toutes nos activités d'une année à l'autre, comme c'est le cas actuellement, et que ce soit toujours comme une première demande chaque fois qu'on en fait une.

Le Président (M. Filion): M. le député de Limoilou.

M. Després: M. le ministre, je n'ai pas d'objection à vous laisser la parole.

M. Gratton: M. le Président, je remercie le député de Limoilou. Compte tenu de l'heure et de l'occupation des locaux qui doit suivre, j'aimerais simplement vous donner une assurance, M. Caron. Vous dites dans votre mémoire que les coupures dans les effectifs du Secrétariat à la jeunesse vous amènent à craindre sa disparition à plus ou moins brève échéance.

M. Caron: Je vous entends mal.

M. Gratton: Je dis que dans votre mémoire vous dites que les coupures dans les effectifs du Secrétariat à la jeunesse vous amènent à croire qu'il pourrait disparaître è plus ou moins brève échéance. Je désire vous rassurer là-dessus: il n'est pas de notre intention de faire disparaître le secrétariat, bien au contraire. Nous pensons que le conseil permanent et que le secrétariat pourront tous deux remplir des rôles différents, mais devront coexister.

Dans un dernier temps, M. le Président, je voudrais, à l'intention de l'ensemble de la commission et pour faire suite à des remarques qu'a faites M. Caron, qui ont d'ailleurs été reprises par vous, M. le Président...

Le Président (M. Filion): Une seconde, M. le ministre, on vous entend à peine. Est-ce que l'on pourrait garder la porte fermée uniquement pour permettre à la commission de continuer ses travaux? S'il vous plaît!

M. Gratton: M. le Président.

Le Président (M. Filion): Peut-on fermer la porte pour que l'on puisse continuer à échanger en commission parlementaire avec nos invités?

M. Gratton: Premièrement, M. le Président, à l'intention de M. Caron et à l'intention de l'ensemble des membres, quant à la représentativité des organismes qui sont venus en commission parlementaire, je ne voudrais surtout pas que les remarques qui ont été faites prêtent à confusion quant à la façon dont la secrétaire de la commission a exécuté son travail, M. le Président. On sait qu'il y a eu 82 organismes qui avaient manifesté un intérêt pour le projet de loi 104 et pour participer à la consultation. De façon systématique, chacun de ces 82 organismes a été contacté par Mme Giguère, la secrétaire de la commission, à toutes les étapes, notamment au moment où le délai a été prolongé. Chaque fois, et encore aujourd'hui, on a été forcé de constater qu'il y avait un groupe qui s'était désisté à la dernière minute. C'est donc dire que, si des organismes ont pu se plaindre de ne pas avoir l'occasion de venir nous rencontrer, ce ne sont sûrement pas eux qui, strictement par un appel téléphonique, ont manifesté un intérêt au départ. Il y en avait 82. Ce ne sont sûrement pas ceux-là qui peuvent s'en plaindre puisque, de ce côté, le secrétariat de la commission s'est acquitté fort valablement de sa tâche.

Je dis donc, M. le Président, que nous regrettons évidemment de ne pas avoir pu rejoindre plus de personnes, mais la qualité des représentations que nous avons reçues des organismes qui se sont présentés, en l'occurrence, l'Antre-temps, représenté par

M. Caron et Mme Gagnon, nous amène à conclure que la démarche en valait le coup, que les représentations que nous reçues nous permettront de bonifier le projet de loi. Pour cela, nous vous remercions de votre contribution, M. Caron.

Le Président (M. Filion): À mon tour de vous remercier pour la justesse de vos propos, la franchise avec laquelle vous avez abordé cette période d'échanges avec les parlementaires et pour la qualité autant de votre mémoire que de vos représentations. Merci.

J'ajourne donc nos travaux à demain, 10 heures. Je tiens à souligner, pour le bénéfice des membres de la commission, que nous avons utilisé à peu près la période de 60 minutes qui nous était allouée. Donc, ce n'est pas à cause du chahut que vous avez entendu que nos travaux sont ajournés. Merci.

(Fin de la séance à 18 h 18)

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