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(Dix heures huit minutes)
Le Président (M. Filion): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La séance est maintenant ouverte. Je rappellerais, pour ceux qui
l'auraient oublié, notre mandat qui est de procéder à une
consultation générale et de tenir des audiences publiques sur le
projet de loi 104, Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse. Ces auditions
ont commencé hier et se poursuivent aujourd'hui, toute la
journée.
Je vous fais part de l'horaire d'aujourd'hui. À 10 heures ce
matin, avec 7 ou 8 minutes de retard, je demanderais à la
Fédération des associations étudiantes collégiales
du Québec, dont j'ai déjà eu le plaisir de rencontrer les
représentants, de bien vouloir s'avancer et prendre place à la
table des invités.
À 11 heures, nous recevrons la Centrale de l'enseignement du
Québec. À midi, la Délégation Jeunesse,
région 04 Inc. Nos travaux seront suspendus à 13 heures pour
reprendre à 15 heures avec le Centre d'aide aux
défavorisés l'AMY. À 16 heures, cet après-midi, les
Groupes de soutien aux initiatives-jeunesse de la région 04; et,
à 17 heures, la Table de concertation des services d'aide à la
jeunesse de Drummond Inc.
Je vous rappelle, pour le bénéfice des personnes qui sont
dans la salle, l'horaire de travail de cette commission lors des audiences. Les
représentants des organismes disposent d'une période maximum de
20 minutes pour présenter le mémoire, après quoi les 40
minutes restantes sont divisées en parts égales entre les deux
formations parlementaires pour leur permettre d'échanger des propos avec
nos invités, les représentants des organismes. Si les organismes
prennent moins de temps pour présenter leur mémoire, ce temps
additionnel est laissé à la période de discussion avec les
parlementaires qui, on le sait, est parfois plus fructueuse, étant
donné que le mémoire des organismes a déjà
été déposé, lu et étudié par les
membres de cette commission.
Je demanderais à la secrétaire de bien vouloir annoncer
les remplacements pour la séance de ce matin.
La Secrétaire: M. Boulerice (Saint-Jacques) est
remplacé par M. Jolivet (Laviolette), M. Godin (Mercier) par Mme
Blackburn (Chicoutimi), M. Kehoe (Chapleau) par M. Gardner (Arthabaska), M.
Laporte
(Sainte-Marie) par M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce) par Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M.
Vallières (Richmond) par M. Thérien (Rousseau).
Le Président (M. Filion): Est-ce qu'il y aurait des
questions des membres de la commission en ce qui concerne l'horaire de nos
travaux? Non. Je tiens pour acquis que tout se déroule à leur
satisfaction.
Bienvenue aux représentants de la Fédération des
associations étudiantes collégiales du Québec. Sans plus
tarder, je demanderais aux représentants de cet organisme de bien
vouloir s'identifier.
Fédération des associations
étudiantes collégiales du Québec
Mme Brisson (Natalie): Bonjour. Je suis Natalie Brisson,
secrétaire à l'information de la FAECQ et je viens du
cégep Lévis-Lauzon.
M. Ouellet (Jean-Nicolas): Bonjour. Je suis Jean-Nicolas Ouellet,
de la FAECQ et du cégep de Rivière-du-Loup.
Le Président (M. Filion): Je vous inviterais sans plus
tarder à présenter votre mémoire.
Mme Brisson: M. le président de la commission, Mmes et MM.
les députés, la Fédération des associations
étudiantes collégiales du Québec est heureuse d'apporter
sa contribution aux travaux de la commission des institutions. Loin de nous la
prétention de vous apporter l'éclairaqe de la jeunesse du
Québec dans toute son intégrité. Nous avons adopté
une approche sectorielle, axée sur la clientèle étudiante,
et plus particulièrement celle des collèges du Québec.
Nous tenterons de traduire avec le plus de justesse la réflexion de nos
membres qui, bien qu'ayant principalement le statut d'étudiants, sont
aussi des travailleurs et des participants à plusieurs activités
couvertes par d'autres organismes de jeunes.
Vous nous permettrez, M. le Président, de vous présenter
notre fédération qui regroupe plus de 30 000 membres dans dix
collèges dans tout le Québec. La FAECQ fut fondée en 1982
et ses principaux objectifs sont de regrouper les associations
étudiantes de niveau collégial, de promouvoir et
défendre les intérêts pédagogiques, sociaux
et économiques de ses membres et de faire reconnaître les
étudiants comme des partenaires à part entière de
l'éducation.
Nos priorités pour la présente année seront
axées sur la qualité de l'enseignement et des services
dispensés aux étudiants, le renouvellement des méthodes
pédagogiques et l'amélioration du régime d'aide
financière aux étudiants.
Nos principaux partenaires sont le Regroupement des associations
étudiantes universitaires et ses associations membres. Nous entretenons
des rapports constants et réguliers avec le Conseil des collèges,
le cabinet du ministre de l'Enseignement supérieur, la
Fédération des cégeps, la Fédération des
enseignants du Québec et plusieurs organismes du monde de
l'éducaiton ou de la jeunesse dans son ensemble.
Notre intérêt dans un dossier comme celui du Conseil
permanent de la jeunesse s'explique par l'occasion privilégiée
dont nous nous prévalons de faire valoir les préoccupations de
nos membres directement devant les élus du peuple
québécois. Particulièrement, dans le cas auquel nous
accordons temps et énerqie, nous sommes à même de constater
que les jeunes, étudiants ou autres, sont difficilement
catégorisables sans que l'on oublie ou néglige une facette de
leur entité globale.
Nous nous présentons devant cette commission, M. le
Président, avec une argumentation qui respectera, autant que faire se
peut, le caractère polyvalent de la présence de la jeunesse
étudiante dans notre province.
M. Ouellet: Le conseil face aux problèmes de la jeunesse.
Le principe d'un conseil consultatif à caractère permanent avec
pour mission de fouiller, d'analyser et de diagnostiquer les problèmes
de la jeunesse québécoise nous apparaît, dans un premier
temps, positif et chargé de promesses.
La jeunesse n'est pas homogène comme telle ou alors si peu
qu'aucun organisme n'a pu regrouper et canaliser ses énergies afin
d'amener des solutions à ses nombreux problèmes. De cette
situation originent les centaines de groupes de jeunes qui se donnent pour
objectif de regrouper d'abord des jeunes vivant ou subissant la même
réalité sociale.
La pluralité des problèmes et même des
remèdes a débouché sur un nombre impressionnant
d'organismes et de regroupements faisant flèche de tout bois et
défendant les mêmes intérêts. Cette
impétuosité ne relève pas tant d'un manque d'organisation
que d'un manque de ressources et de concertation dans les moyens d'action. La
venue d'un conseil pourrait stabiliser et donner de l'assurance à
plusieurs organismes qui n'auraient pas les capacités de se faire
entendre. Mais, dans un second temps, quand on regarde vers ceux qui ne
bénéficient pas de l'incorporation, de l'organisation et qui sont
isolés, il est difficile de croire qu'è court terme le Conseil
permanent de la jeunesse pourra les rassurer et répondre à leurs
besoins. En effet, le chômage, l'assistance sociale, une
société qui leur est hermétique, rien de tout cela ne
chanqera du jour au lendemain avec l'apparition du Conseil permanent de la
jeunesse. La nécessaire intervention de l'État ne peut se limiter
è la création d'organismes consultatifs sujets à des
remises en question. Trop de temps s'écoulera entre sa mise sur pied et
les effets visibles de son existence. Pour nous, il est clair que le Conseil
permanent de la jeunesse ne sera pas une solution en soi aux problèmes
que nous vivons. Nous voyons en un tel organisme une vocation de
réflexion sociale sur le fond des problèmes.
L'heure est pourtant aux solutions, aux politiques claires en
matière de reconnaissance et de financement des groupes de jeunes. Il ne
faudrait pas que le CPJ mobilise toutes les énergies du gouvernement et
que celui-ci croie que tous seront rassasiés, bien au contraire. Nous
attendons du gouvernement des interventions concrètes, une politique
claire en matière de reconnaissance et de financement. Pour nous, le
Conseil permanent de la jeunesse est donc un porte-voix utilisable à
long terme.
Les priorités maintes fois identifiées, cernées et
disséquées pourront souffrir si le gouvernement attend que ce
conseil refasse l'exercice que d'autres ont fait auparavant. Demain, le Conseil
permanent de la jeunesse nous sera utile; aujourd'hui, il faut aqir. Les jeunes
n'accepteront pas que le CPJ crée une diversion.
Le conseil face aux groupes de jeunes. Quand un organisme consultatif
multisectoriel prend sa place dans le paysage socio-politique de la province,
ses partenaires ou ceux qu'il consulte l'observent et l'analysent. Imposer
à des organismes habitués à faire cavalier seul ou
à des alliances très ponctuelles entre eux un organisme qui les
chapeauterait ne se fait pas sans un temps d'adaptation et d'apprivoisement. La
FAECQ a vécu cette situation avec le Conseil des collèges.
Aujourd'hui, une étudiante recommandée par la FAECQ siège
au sein du conseil et nous collaborons le plus souvent possible aux
consultations de l'organisme.
Le Conseil des collèges ne remplacera pas la FAECQ lorsqu'il faut
acheminer ce que pensent les étudiants de la fédération.
Le Conseil permanent de la jeunesse ne remplacera jamais la FAECQ ou tout autre
organisme. Le CPJ ne doit pas être l'unique porte d'entrée au
gouvernement. Les diverses provenances des membres du conseil feront en sorte
que l'expertise de celui-ci sera très générale et qu'il ne
pourra décemment
approfondir certains problèmes particuliers.
Ainsi, dans le cadre d'un conseil où un seul, ou aucun, membre
provient du secteur de l'éducation, nous voyons mal comment les onze
personnes produiraient un avis valable sur ce qui se vit dans les
collèges et les correctifs à y apporter. Étant
donné qu'il faut composer avec les lois 21 et 25 sur les
collèges, que quatre organismes gouvernementaux ou paragouvernementaux
amènent leur contribution dans plusieurs domaines de l'éducation
collégiale, que cette même éducation doit respecter les
préalables universitaires et les exigences du marché du travail,
seule une expertise approfondie et une solide connaissance du milieu assureront
la crédibilité des propos du CPJ.
Le Conseil permanent de la jeunesse devra établir au plus
tôt sa crédibilité et sa légitimité
auprès des groupes de jeunes qui n'ont pas demandé sa
création. La légitimité du conseil ne sera fondée
que sur les grands principes et les études de fond
générales qu'il produira. Les questions particulières ne
seront soulevées de manière significative que par les organismes
au coeur de ces sujets. Il faudra aussi qu'il établisse devant qui il
est redevable et de qui il prend ses mandats. Son attitude face au gouvernement
sera alors un indicatif crucial pour les jeunes. Nous n'avons que faire d'un
organisme qui a les pieds et les poings liés par un budget et des
mandats limitatifs qui l'empêcheront de déboucher sur du
concret.
La crédibilité du CPJ ne soulèverait aucune
montagne actuellement. Chaque jour, dans chacun des actes qu'il posera, il
devra construire sa crédibilité face aux groupes de jeunes et il
devra nous prouver son utilité. Pour ce faire, le gouvernement devra lui
assurer les crédits nécessaires pour qu'il aille dans les
régions. Ceci demandera de la part du conseil un déploiement de
son action et de ses points d'attache.
Le conseil face à l'analyse de la FAECQ. Une analyse sommaire du
projet de loi 104, sur l'article 3: "Après avoir sollicité l'avis
du conseil, le ministre nomme un président parmi les membres du
conseil." Il nous apparaît inopportun que le ministre nomme le
président du conseil, même après avis de celui-ci. Afin de
respecter intégralement le conseil sur la question de sa régie
interne et de celui ou celle qui devra la mettre en application, il nous semble
tout indiqué que les membres du conseil procèdent à une
élection pour combler ce poste.
Nous proposons que l'article 3 du projet de loi 104 soit changé
par: "Les membres du conseil nomment un président ou une
présidente parmi eux".
À l'article 5: "La durée du mandat des membres du conseil
est de deux ans. "Un membre ne peut être renommé
consécutivement qu'une fois. "À l'expiration de son mandat, il
demeure en fonction jusqu'à ce qu'il soit remplacé ou
nommé de nouveau".
Nous appuyant sur la loi 24 instituant le Conseil des collèges ou
encore sur les premières années du Conseil supérieur de
l'éducation, nous affirmons que l'on doit procéder de
façon similaire pour la durée du mandat des premiers conseillers.
Selon cette procédure, un nombre quelconque de conseillers ou de
conseillères siégerait deux ans et un autre siégerait
trois ans pour qu'il y ait une certaine continuité dans la façon
de fonctionner du conseil permanent. Nous proposons donc que la moitié
des conseillers ou conseillères nommés au moment de
l'instauration du conseil ait un mandat de trois ans et l'autre moitié
un mandat de deux ans.
À l'article 8: "En cas d'empêchement temporaire du
président, le ministre désigne un des vice-présidents pour
le remplacer tant que dure cet empêchement."
Nous vous proposons donc que l'article 8 du projet de loi 104 soit
amendé en changeant les mots "le ministre désigne" par les mots
"le conseil nomme". Nous invoquons la même argumentation que dans le cas
de l'article 3, mais avec la nuance qui veut que les conseillers et les
conseillères soient plus au fait des agissements et des tâches des
vice-présidents. Par cela, nous entendons que les conseillers et
conseillères sont plus aptes à juger qui pourra assumer le mieux
l'intérim.
À l'article 16: "Est un organisme de jeunesse, aux fins de la
présente section, tout organisme qui oeuvre auprès des personnes
âgées principalement entre 15 et 30 ans dans les secteurs des
affaires sociales, de l'éducation, des loisirs ou du travail et qui est
incorporé en vertu de la Partie III de la Loi sur les compagnies
(L.R.Q., chapitre C-28) depuis au moins 12 mois."
Deux lacunes nous apparaissent ici comme étant à corriger
rapidement. Tout d'abord, aucun des quatre secteurs d'activité n'est
clairement défini. Ainsi, certaines de nos associations membres, de par
leur charte d'incorporation, oeuvrent dans des domaines aussi variés que
l'éducation, les loisirs, l'information et les services et embauchent
des employés pour mener à bien leur but. Cette lacune permettrait
à la rigueur à un candidat de remplir les conditions
stipulées à l'article 19 en n'ayant que des appuis d'associations
étudiantes mais incorporées dans des buts différents. La
seconde lacune, selon nous, concerne la nécessité pour un
organisme d'être incorporé pour se voir reconnu comme tel par le
projet de loi. Cette condition élimine de facto plusieurs groupes qui
seraient tout à fait légitimes dans la démarche du Conseil
permanent de la jeunesse. Pensons aux groupes religieux, entre autres, et aussi
aux jeunes qui ne bénéficient
pas du même niveau de structuration que d'autres. Ces derniers ont
beaucoup à dire au gouvernement sur ses politiques et sur les moyens
à prendre afin de corriger la situation des jeunes comme eux. Nous
proposons donc que le gouvernement définisse dans les cadres du projet
de loi 104 chacun des secteurs d'activité.
Sur l'article 2 et l'article 17: "Le conseil se compose de onze membres
nommés par le ministre responsable de l'application de la
présente loi parmi les personnes qui forment le conseil électoral
prévu à la section II, conformément aux dispositions de
cette section." "Un collège électoral composé de 40
membres, nommés par le gouvernement conformément à la
présente section, doit être formé avant le 1er avril 1987
et par la suite à tous les deux ans à compter de cette date pour
procéder au choix des membres du conseil."
Nous proposons que soit amendé l'article 17 du projet de loi 104
en y ajoutant la notion suivante: Le collège électoral sera
composé d'un premier groupe de 25 membres de moins de 25 ans et d'un
second groupe de membres âgés de 25 ans et plus. Chacun des deux
groupes nomme huit personnes au conseil.
Nous croyons que le mode électoral choisi, bien qu'original, pose
plusieurs problèmes. Discriminons les deux plus importants: la
représentation des groupes d'âges et le poids des régions.
Ce que nous vous proposons se veut un moyen de contourner le mieux possible la
mise à l'écart des plus jeunes par les plus vieux sur la base des
curriculum vitae de ceux-ci. Il est facile de prévoir que lorsque les 40
membres du collègue électoral seront réunis, il y aura une
opération de charme incroyable entreprise pour accéder au
conseil. De plus, les groupes qui auront parrainé un candidat ou une
candidate feront beaucoup pour le ou la voir siéger au conseil. Cette
situation ne nous enchante guère et pourrait faire en sorte que, par les
excès de quelques-uns, la jeunesse entière soit
discréditée. En allant un peu plus loin, il est facile de
prévoir qu'aucun jeune de quinze ans ne sera élu au CPJ. Et
même de voir que les plus expérimentés, habituellement les
plus vieux, auront un curriculum vitae impressionnant et qu'ils s'empareront de
la majorité des places disponibles. Dans une démarche qui vise
essentiellement à préserver une représentation
équilibrée, nous croyons que le collège électoral
doit être formé de deux groupes d'âges distincts, et que
chacun de ces deux groupes nommera ses représentants au conseil.
Nous nous inquiétons aussi de la nette possibilité que la
représentation des régions soit nettement insuffisante, et ce,
pour les mêmes raisons que celles qui menacent les plus jeunes. Ceux qui
proviennent des grands centres vivent dans une pépinière de
projets et de groupements. Il leur est aisé de se farcir une feuille de
route enviable, chose difficile en régions, du moins sur une
période de temps relativement courte.
Nous estimons essentiel que l'on prévoie, non seulement lors de
la composition du collège électoral, mais aussi au conseil, une
représentation équilibrée des régions. Pour ce
faire, une telle mesure commande une étude du nombre d'organismes se
retrouvant dans chacune des régions administratives afin de ne pas
défavoriser les grands centres ou une région en particulier. Nous
laissons à ceux qui disposent de ces données le soin
d'établir les proportions en toute connaissance de cause.
Les fonctions du conseil sont clairement établies. Par contre,
ses pouvoirs s'exercent toujours avec l'ombre ou l'endossement du ministre
responsable de chacun de ses actes. Nous voyons mal pourquoi le conseil devrait
demander au ministre l'autorisation afin d'en référer à un
comité spécial en vue d'approfondir une question. Et nous
concevons encore moins pourquoi le conseil ne pourrait faire appel à qui
il estime fondée la confiance qu'il lui porte. Ce serait une bien
piètre opinion des jeunes que de les croire incapables d'agir dans les
contraintes budgétaires qui leur seront imposées ou de
s'adjoindre des collaborateurs valables. Nous nous interrogeons aussi sur le
pourquoi du droit de regard du gouvernement sur la régie interne du
conseil. Là encore, il y a un fossé entre la confiance que l'on a
évoquée et celle couchée sur papier.
Nous proposons donc que soit biffé de l'article 29 du projet de
loi 104 "avec l'autorisation du ministre", et ce, aux deux endroits où
cette mention apparaît, et qu'à l'article 30 on biffe "un tel
règlement est soumis à l'approbation du gouvernement".
Le CPJ face au gouvernement. La relation entre le conseil permanent et
le gouvernement nous éclairera sur bien des sujets. Nous verrons, dans
un premier temps, quelles seront les ressources financières face aux
mandats que le conseil recevra du ministre et l'ampleur de ses tâches. Ce
sera un moment privilégié car il y aura un exercice de
"priorisation" des mandats. En effet, on devra choisir entre le mandat qui a
poussé chacun à se présenter au conseil, entre ceux qui
auront été confiés par ceux qui ont appuyé les
conseillers et, bien sûr, ceux que le gouvernement confiera
d'autorité au conseil. La nature des mandats gouvernementaux trahira la
volonté qu'il a de régler les problèmes d'assistance
sociale, de frais de scolarité et d'autres urqences qui traînent
encore. Nous verrons alors si le Conseil permanent de la jeunesse sera une
soupape pour évacuer, le temps de la préparation d'un avis, un
débat chaud.
Mme Brisson: En conclusion, nous aimerions renouveler notre
conviction que la priorité actuelle pour les jeunes n'est pas d'avoir un
Conseil permanent de la jeunesse. Plusieurs groupes vivent dans
l'insécurité face à leur financement, à leur statut
et à bien d'autres égards. Nous ne sommes pas contre
l'instauration du Conseil permanent de la jeunesse, mais nous ne voulons pas
que la mise sur pied de cette structure se fasse sur le dos des jeunes qui ne
peuvent attendre encore et encore que l'on se penche sur leur situation.
En conséquence, nous aimerions que îe gouvernement nous
dise si sa priorité est la jeunesse ou le Conseil permanent de la
jeunesse. M. le Président, nous vous remercions.
Le Président (M. Filion): Je vous remercie, Mme Brisson,
M. Ouellet. J'inviterais maintenant les membres de la commission à
commencer les discussions avec les représentants de la
fédération. Mme la députée de
Kamouraska-Témiscouata.
Mme Dionne: Merci, M. le Président. J'aimerais tout
d'abord, au nom de ma formation politique, remercier les représentants
de la Fédération des associations étudiantes
collégiales du Québec, M. Ouellet et Mme Brisson, pour la
présentation de leur mémoire.
J'aimerais tout de suite aborder certaines questions qui me sont venues
à l'idée en lisant votre mémoire. La première,
c'est que vous parlez de crédibilité de l'organisme. Vous
soulevez le problème en pages 4 et 5 du mémoire. Il est certain
que je trouve très lucide de votre part de mentionner que le conseil
permanent doit être crédible auprès du gouvernement, mais,
ce qui est le plus important, auprès des jeunes et de tous les
organismes jeunes du Québec. Je pense que, dans ce sens, c'est tout un
défi pour le conseil en tant que tel et pour le conseil d'administration
du conseil permanent de relever ce défi et de s'assurer que les
organismes sont bien représentés et crédibles. (10 h
30)
Vous parlez aussi des groupements et des jeunes qui ne sont pas
organisés, qui viennent de régions ou de grands centres. Je me
dis qu'encore là cela relève du conseil permanent de la jeunesse
ou des membres qui en font partie de s'assurer que, non seulement les jeunes
regroupés sont écoutés par le conseil, mais les autres
aussi, ceux qui, pour différentes raisons, ne peuvent pas faire partie
d'organismes.
Pour ce qui est des secteurs représentés au conseil
permanent, on a, bien sûr, l'éducation, les loisirs et tout cela.
Vous vous inquiétiez du fait que l'éducation en tant que telle ne
pourrait être représentée adéquatement. Vous parliez
d'aucun membre ou un membre du conseil. Si je fais un calcul
mathématique, on dit qu'on a quatre ou cinq secteurs et qu'on a onze
membres, donc je me dis que le secteur de l'éducation devrait avoir au
moins un minimum d'un membre ou même deux ou peut-être même
trois. À ce sujet, je pense que ce serait une assurance à donner
aux associations étudiantes que le conseil permanent pourrait bien
représenter les intérêts des étudiants.
L'autre point est à la page 11. Vous parlez de la nomination du
président. Vous me ferez part de vos commentaires là-dessus.
Quand vous mentionnez que le président devrait être nommé
par le conseil d'administration, par les membres du conseil, de ce que je me
souvienne, c'est qu'autant au Conseil des collèges qu'au Conseil
supérieur de l'éducation le président est nommé par
le gouvernement. Je pense que ce qui est important, pour ne pas créer de
processus électoral ou des débats ou des divisions entre les
jeunes... La façon qui est présentée dans le projet de loi
apporte un certain consensus puisque le président nommé par les
membres doit être aussi nommé par le gouvernement, qui est un
intervenant privilégié. Alors, je pense que tous et chacun font
partie du consensus. Je ne sais pas si vous avez une opinion
là-dessus.
M. Ouellet: Notre opinion là-dessus, c'est qu'il est
clair, si on reqarde les autres organismes consultatifs qui ont
été instaurés dans les années
précédentes, qu'il y a, en effet, une tradition qui s'est
imposée selon laquelle le premier ministre ou le ministre responsable
nommait le président ou la présidente de l'organisme qui devait
le consulter et lui produire ses avis. Par contre, nous privilégions un
angle qui est à peu près le même que celui que le
gouvernement offre face au Conseil permanent de la jeunesse,
c'est-à-dire un peu révolutionner ou amener de la fraîcheur
avec l'idée d'une structure consultative, amener un principe de
nomination et d'élection qui soit différent, qui soit
transparent, finalement. Dans cette optique, nous privilégions une
transparence qui va jusqu'au bout, qui va du repérage et de
l'élection des membres du Conseil permanent de la jeunesse
jusqu'à l'élection à la présidence d'une fille ou
d'un gars. Selon nous, quand le consensus va s'être fait autour d'une
personne pour atteindre la présidence, c'est que cette personne se sera
imposée par ses qualités personnelles et par son vécu, son
"background", si je peux dire. On n'a pas vraiment besoin, à ce moment,
de l'approbation du ministre responsable. Selon nous, on doit aller jusqu'au
bout dans cette transparence et dans cette relative liberté qu'ont les
jeunes de modeler la composition du conseil.
Mme Dionne: Cela pourrait aller, à la limite,
jusqu'à entériner. Ce que vous voulez dire, M. Ouellet, c'est que
le gouvernement pourrait entériner et que, de toute façon, vous
voyez la démarche faite par le conseil lui-même, son autonomie et
sa transparence.
Mme Brisson: On croit que les jeunes sont assez responsables pour
aller jusqu'à cette démarche.
Mme Dionne: C'est bien, cela. Ma dernière question touche
la réglementation qui soutient le projet de loi. On parle de
réglementation, aux articles 29 et 30, qui doit être
approuvée par le gouvernement. Il est certain que dans un projet de loi
qui est approuvé par l'Assemblée nationale, qui est
analysé et adopté, la réglementation qui soutient ce
projet de loi est approuvée par le Conseil des ministres. C'est dans ce
sens que la réglementation doit être soumise à
l'approbation du gouvernement. C'est un processus démocratique qui est
établi en tant que tel. À votre avis, c'est aller trop loin et
cela enlève la liberté du conseil?
M. Ouellet: Dans la démarche que le gouvernement offre
à ce conseil, on est prêt à aller jusqu'au bout. En retour,
on demande, on exige presque la même chose du gouvernement. On va jouer
le jeu et on va aller jusqu'au bout là-dedans. C'est pourquoi on disait
que les jeunes sont un groupe difficile - on le dit dans l'introduction -
à mettre dans une boîte ou à catégoriser. Je suis
étudiant mais je n'étudie pas tout le temps, je travaille aussi
et j'ai d'autres activités. Il faut essayer de respecter cette
liberté, ce visage à plusieurs facettes de la jeunesse et donner
un mandat de confiance qui va jusqu'au bout, comme je le disais
précédemment. Ce serait intéressant de laisser les jeunes
se trouver un mode de fonctionnement dans lequel ils se retrouvent. C'est
important, quand on se donne une voie, quand on se donne une façon de
fonctionner, de se retrouver, d'être à l'aise dans cette
boîte, dans ce fonctionnement. C'est dans cette optique qu'on
présentait cette proposition d'amendement.
Il faut absolument, quand on parle de crédibilité et de
bon fonctionnement, que les jeunes se retrouvent là-dedans. Je m'excuse
de le dire aussi directement, mais c'est difficile pour des gens de
l'Assemblée nationale ou d'ailleurs de pondre quelque chose dans lequel
les jeunes vont automatiquement se retrouver. C'est un peu naïf de le
croire. Je ne sens pas cette naïveté dans le projet de loi comme
tel, mais c'est un peu naïf de le croire. Il faut laisser aux gens qui
vont l'animer, qui vont faire que le conseil permanent sera quelque chose de
valable, quelque chose d'essentiel dans la société plus tard, la
liberté de le modeler selon les années, selon l'évolution
de la jeunesse et le laisser évoluer avec les jeunes parce que les
jeunes évoluent rapidement. On n'a qu'à penser simplement
à la mode qui change aussi très rapidement-Donc, il faut, dans un
certaine mesure qui va s'établir avec le bon sens qu'auront les gens
élus au Conseil permament de la jeunesse, lui laisser une certaine
marge, le laisser évoluer, changer un peu de direction, lui laisser une
souplesse qui sera nécessaire pour que les jeunes s'y retrouvent.
Mme Dionne: J'ai un dernier commentaire. Vous semblez parler de
déresponsabilisation de l'État face au conseil,
c'est-à-dire que, s'il y a un Conseil permanent de la jeunesse bien
établi, le gouvernement recule et se dit: Enfin, ils ont leurs
créneaux, et tout cela. Personnellement, je peux vous dire que ce n'est
pas ce que je crois du Conseil permanent de la jeunesse. En fin de compte,
l'établissement d'un conseil permet précisément de faire
la différence. En regroupant des jeunes de différents secteurs,
de différentes régions, je pense que c'est le contraire qui peut
arriver. Le gouvernement se situera beaucoup plus près de la jeunesse et
de ses problèmes vécus un peu partout dans chacun des secteurs.
Je suis un peu de l'avis contraire que vous émettez dans ce
sens-là parce que je me dis que, s'il est bien représentatif, si
les avis qu'il donne sont sérieux et léqitimes quant aux
problèmes des jeunes, alors cela ne fait que porter un plus grand poids
de la jeunesse vers le qouvernernent. D'après mol, cela rapproche au
lieu d'éloigner. C'est un avis personnel.
M. Ouellet: Même si c'est un avis personnel d'une
députée du parti au pouvoir, vous tendez à nous rassurer,
finalement. J'espère que cet avis personnel sera partagé par un
grand nombre pour ne pas dire la totalité et qu'il y aura une certaine
pérennité dans cet avis, dans cette façon de voir les
choses. Vous tendez è rétablir notre confiance face à
l'organisme qui est en train de naître.
Le Président (M. Filion): Je vous remercie.
M. le député de Mille-Îles et, ensuite, M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Bélisle: Dans là même veine que ma
collègue de Kamouraska-Témiscouata, je tiens à vous
féliciter pour la présentation très pertinente de tout ce
qui touche au futur Conseil permanent de la jeunesse. Entre autres, j'ai
relevé deux passages de votre mémoire et je vous les cite: "Pour
nous, il est clair que le Conseil permanent de la jeunesse ne sera pas une
solution en soi aux problèmes que nous vivons. Nous voyons en
un tel organisme une vocation de réflexion sociale sur le fond
des problèmes." Vous allez même jusqu'à dire, deux pages
plus loin, que "la crédibilité du Conseil permanent de la
jeunesse ne soulèverait aucune montagne actuellement. À chaque
jour, dans chacun de ses actes qu'il posera, il devra construire sa
crédibilité face aux groupes de jeunes; il devra nous prouver son
utilité." Cela fait un peu le lien avec ce que ma collègue vient
de dire relativement à l'état de le confiance. Quand vous vous
sentez rassurés, je pense que vous avez raison de l'être.
Je viens immédiatement à votre proposition 4. Dans votre
mémoire, vous nous dites: "Que le gouvernement définisse dans les
cadres de la loi 104 chacun des secteurs d'activité". Je fais
référence à l'article 16, où l'on a quatre secteurs
d'activité: affaires sociales, éducation, loisir et travail. Vous
avez deux objections fondamentales très légitimes dont l'une
où vous souhaitez que ce soit plus clairement établi parce que,
parfois, certains organismes de jeunes chapeautent deux ou trois domaines
à la fois. Ma première question, c'est: Ne croyez-vous pas qu'en
les précisant avec plus de circonspection dans le texte de loi on
enlève beaucoup de souplesse et on ne rend pas la réalité
de la jeunesse? Vous-même avez dit tantôt que la jeunesse, ce n'est
pas définissable dans un bloc monolithique. Cela ne pourrait pas
être une grande case, mais un tas de petites cases. Comment
réagissez-vous face à cela?
M. Ouellet: Face à cela, j'aimerais mentionner le fait que
les jeunes restent perplexes face à cet article parce qu'il laisse
beaucoup dans le vague. Vous nous avez cités et je vous cite en me
citant. D'accord on n'est pas un bloc monolithique et on n'est pas quelque
chose facilement visible avec un simple regard, mais on n'est pas si vague que
cela non plus. On n'est pas monolithique, mais on n'est quand même pas si
diffus que cela non plus.
C'est dans cette optique, afin que les choses soient claires pour tout
le monde, qu'il faut - sans trop en mettre car cela deviendrait vraiment un
cadre fermé et très rigide - il faut en mettre un peu plus pour
que les gens disent: Bien, moi, c'est là que je suis et c'est
là-dedans que je suis perçu et c'est finalement là que je
me situe, pour que les gens puissent se situer plus facilement.
On a quatre secteurs définis dans la tête de chacun,
maïs pas de manière très ferme ni éclatante et
probante pour tout le monde. C'est cela qui est un peu difficile à voir
parce que, dans le secteur du loisir, il y a beaucoup de choses qui peuvent
intervenir et, à la rigueur, même dans le secteur de
l'éducation. En amenant une certaine défini- tion, une certaine
catégorisation d'où se situent les groupes de jeunes, on
éviterait le fait que je pourrais me présenter avec les
associations étudiantes de la FAECQ, qui ont été
incorporées à des moments différents et avec des chartes
différentes. C'est un peu cela qu'on veut éviter parce que,
sinon, on enlève à cet article toute sa valeur et tout son sens.
Une personne qui oeuvre dans une fédération, une association
nationale, dans n'importe quel groupe que ce soit, a tout ce qu'il lui faut
pour se présenter sans avoir la vision aussi large que l'article veut
s'assurer qu'elle a.
M. Bélisle: Mais ne pensez-vous pas que ce qu'on veut dire
à travers des grandes cases générales souples en mettant
"loisir, travail, affaires sociales et éducation", c'est la notion
d'activité principale? Au lieu de définir avec beaucoup de
précisions. Le loisir, c'est le fait qu'un individu accomplisse un acte
sportif à telle heure, bon. À chaque fois qu'on s'encarcane dans
des définitions très précises dans un projet de loi, ma
pauvre expérience me démontre que très souvent on se met
les pieds dans les plats.
Alors, ce qu'on a voulu faire, c'est de laisser le cadre le plus large
possible pour couvrir presque toutes les situations possibles. Je pense que
c'est un signe de souplesse. Je ne sais pas comment vous réagissez face
à cela, mais il me semble que c'est peut-être un signe
d'espoir.
M. Ouellet: C'est un signe de souplesse et c'est un signe
d'espoir, mais cela peut facilement devenir un échec patent. C'est cela
qui nous fait peur. J'assaie de bien me faire comprendre. On peut, d'une
façon ou d'une autre, essayer... Le gouvernement a mis une garantie avec
cela, une preuve de souplesse. Il essaie de donner la garantie que les jeunes
auront une expérience valable, donc feront quelque chose de valable. Par
contre, on vient de passer par-dessus finalement le principe qui demande trois
appuis dans deux secteurs différents parce que, dans ce temps-là,
on peut jouer sur les mots et avoir, dans un seul endroit, des appuis de bien
des secteurs, mais qui, finalement, sont la même chose et c'est cela.
M. Bélisle: Combien d'associations étudiantes
collégiales représentez-vous, en vertu de la partie III de la Loi
sur les compagnies?
M. Ouellet: Je pourrais dire, sans avoir un chiffre
extrêmement précis, que sept sont incorporées avec des
chartes très différentes. À Rivière-du-Loup, cela a
été fait sur la base des loisirs, à certains autres
endroits, c'est la base de la représentation premièrement,
représentation politique, et, à d'autres endroits, c'est de
tendre à favoriser
l'information sur le travail. Donc, c'est facile de jouer
là-dedans. Et c'est sur notre pauvre expérience que l'on se fie
pour vous dire cela. (10 h 45)
M. Bélisle: Alors, de nos deux pauvres expériences
on va pouvoir échanger. Proposition 6. Vous me dites à la
proposition 6, dans le résumé: "Le collège
électoral sera composé d'un premier groupe de 25 membres de moins
de 25 ans et d'un second groupe de membres âgés de 25 ans et plus.
Chacun des deux groupes nomme huit personnes au conseil". Moi, ma question est
toute simple. Vous n'avez pas peur, encore une fois - j'ai une crainte
là-dessus - de faire une discrimination à l'intérieur de
deux groupes et déjà de commencer à séparer des
problèmes de la jeunesse? Ceux qui sont au-dessus de 25 ans et ceux qui
sont en bas de 25 ans.
Je prends votre position de départ quand vous nous dites: C'est
un tas de petits blocs, ce n'est pas un bloc monolithique. Puis, vous en
arrivez et vous dites: Nous autres, notre vision de la composition, c'est en
bas de 25 ans, dans le collège électoral, et en haut de 25. C'est
comme si on accordait plus d'importance à ceux qui sont rendus sur le
marché du travail. Tous ceux qui partent de l'adolescence, qui vont aux
études et qui sont sur le marché du travail avant 25 ans, on leur
donne une équivalence d'importance comparativement aux groupes au-dessus
de 25 ans. Ce n'est pas une sorte de discrimination cela?
M. Ouellet: Au contraire, c'est une façon, selon nous,
d'éviter la discrimination lorsque ces gens seront tous face à
face dans la même salle et que ce seront les personnes les plus
expérimentées, qui habituellement sont les plus
âgées, qui auront tous les atouts dans leur main et tout le charme
nécessaire pour prendre la place. Cela fait en sorte que tout un tas de
petites facettes ne seront pas représentées finalement parce que
les gens qui ont une façon beaucoup plus articulée de se
présenter, de se vendre aussi, finalement, parce que ce sera un peu cela
le collège électoral, eux, ils vont pouvoir s'approprier plus de
place. C'est ça qu'on veut éviter surtout.
Je ne pense pas que cela puisse discriminer beaucoup de choses parce
qu'il y aura toujours des jeunes de 26 ans, des gens de 24 ans qui auront un
pied dans les deux groupes finalement. Ces gens, à 20 ans, vivront avec
les mêmes lois, les mêmes règlements, les mêmes
problèmes, les mêmes carences dans le secteur privé ou
public que les gens qui en ont 29. Mais ils auront aussi des choses très
particulières, très concrètes et très
différentes des autres qu'ils pourront amener. Il y a peu de gens de 28
ans dans les cégeps, mais il y en a beaucoup de 18 ans. C'est cela que
l'on veut amener. Moi, je ne pourrais pas aujourd'hui arriver et vous faire un
exposé sur la problématique des universités.
Je le pourrais un peu parce que, de par mon rôle à la
FAECQ, j'ai été obligé de me plonger là-dedans.
Mais, ne pas être là, je ne pourrais vraiment pas le faire. Par
contre, quelqu'un qui y est et qui est assuré d'avoir une meilleure
chance d'être représenté là, lui, il pourra le faire
à bon escient et en plus il pourra le faire de manière efficace
parce qu'il sera au bon endroit et il sera assuré de pouvoir le faire au
Conseil permanent de la jeunesse. Nous, c'est cela que l'on veut. On ne veut
pas discriminer. On veut empêcher la discrimination et faire en sorte que
l'objectif premier du Conseil permanent de la jeunesse d'être le
porte-voix de l'ensemble de la jeunesse, cela puisse se faire
équitablement pour tous.
M. Bélisle: Merci.
Le Président (M. Filion): Merci, M. le
député de Mille-Îles. M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): M. le Président, deux
commentaires et une petite question. D'ailleurs, par la performance que vous
livrez ce matin, je pense que vous montrez énormément de
dynamisme pour débattre le dossier dont vous avez étudié
les retombées possibles. Le deuxième commentaire, c'est à
la suite des propos de ma collègue de Témiscouata. Vous semblez
réjouis des propos de Mme Dionne face au rôle qu'on veut donner au
CPJ. J'aimerais que vous soyez aussi réjouis de la performance du Parti
libéral de s'être doté de quinze députés
jeunes en bas de 35 ans et la même chose du caucus des
députés qui s'est formé un comité ad hoc sur la
jeunesse, dont France fait partie, et il y a Michel Després, il y a
Rémy Poulin, il y a Georges Farrah et moi-même. Il y en a d'autres
qui ne sont malheureusement pas ici. Ils sont à d'autres commissions
parlementaires. Une des possibilités, c'est d'étudier au maximum
les propositions qui sont faites et de regarder les meilleures avenues
possible.
Lorsque vous faites mention, dans ce que vous avez livré ce
matin, de l'incorporation des organismes, est-ce que vous avez des propositions
à faire? Vous n'êtes pas les premiers à dire que les
organismes qui ne sont pas incorporés devraient aussi faire partie du
conseil ou du collège électoral. De quelle façon
pourrait-on valider les organismes qui ne sont pas incorporés pour faire
partie du conseil?
M. Ouellet: Je répondrai deux choses. Premièrement,
je me réjouis parfois quand je vois certaines institutions, mais je
me réjouis surtout des résultats qu'elles nous apportent.
Dans un deuxième temps, quant à votre question demandant si on a
des propositions face aux gens qui ne sont pas regroupés, je pense que
c'est tout simplement de ne pas s'en tenir qu'aux organismes incorporés,
mais de s'en tenir aux organismes qui existent et que le Secrétariat
à la jeunesse tend de plus en plus dans son action quotidienne à
rejoindre et, eux, è le rejoindre finalement. Donc, vous avez
déjà là une bonne banque de données parce qu'il y a
dans les proportions relativement peu d'organismes qui sont incorporés
et qui ont besoin de l'être comme tels finalement. Il y a beaucoup
d'organismes très efficaces qui ne sont pas incorporés, qui ont
beaucoup de choses à dire et qui sont très bons. C'est aux
députés de les trouver dans le milieu, qu'ils soient jeunes ou
peu importe leur âge, qu'ils soient dans leur comté... Qu'ils les
trouvent. Ils ont à faire face è ces gens-là, à les
aider, à les épauler par le Secrétariat à la
jeunesse qui est là et qui remplit son rôle. II faut lui donner ce
mandat en plus. C'est de les trouver, de les chercher. Ce n'est pas difficile
parce qu'habituellement ces gens sont des gens qui se plaignent. Ils sont
faciles à trouver parce qu'ils ont souvent de bonnes raisons de se
plaindre et ils amènent leurs doléances là où il !e
faut.
Donc la proposition comme telle d'un article, je ne crois pas, mais peut
être enlever ce besoin d'être incorporé pour qu'il y ait un
mandat plus large de reconnaissance, finalement d'organismes qui existent. Si
un organisme existe durant cinq ans et qu'il peut proposer des gens et s'il
n'existe plus au bout de cinq ans qu'il est remplacé par quelque chose
d'autre, bien tant mieux. On l'oublie et on s'occupe de ce qui le remplace,
finalement.
M. Messier (Saînt-Hyacinthe): Face aux réalisations,
que vous sembliez susciter tout à l'heure, j'aimerais dire que la
Société d'investissement jeunesse, c'est du passé parce
que c'est déjà en vigueur et c'est le Conseil permanent de la
jeunesse... On a enlevé les barrières discriminatoires face au
salaire minimum, la loi 119. Je peux en passer une vingtaine comme cela. Vous
pouvez vous réjouir de notre performance. Merci.
Le Président (M. Filion): Merci, M. le
député de Saint-Hyacinthe.
Étant donné le temps déjà entamé par.
la formation parlementaire occupée par le gouvernement, je reconnais Mme
la députée de Chicoutimi, porte-parole de l'Opposition.
Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président. M.
Ouellet, Mme Brisson, il me fait plaisir au nom de ma formation politique de
vous accueillir à cette commission. J'ai lu votre mémoire avec
beaucoup d'intérêt comme j'ai eu l'occasion d'en voir plusieurs
autres qui venaient de votre organisme. Ils sont toujours très
pertinents et de belle qualité.
Je dirais que ce qui me frappe dans presque toutes les paqes, c'est que
vous émettez plusieurs réserves, des réserves Importantes,
je dirais, sur la difficulté que pose la définition de la
jeunesse. Vous dites: Ce n'est pas homogène. C'est difficilement
catégorisable. Vous émettez aussi des réserves en disant,
dans votre conclusion: La priorité, ce n'est pas la création d'un
Conseil permanent de la jeunesse. Vous dites également en page 4 de
votre mémoire que l'heure est aux solutions et non pas encore à
la recherche. Vous faites aussi des réserves importantes, mais
intéressantes également, disant d'éviter de penser qu'un
Conseil permanent de la jeunesse devrait être le porte-parole unique des
jeunes. Finalement, est-ce que je vous lis mal si je dis qu'à la limite,
s'il n'y avait pas de modifications majeures importantes apportées au
projet de loi, vous ne croyez pas que sa création soit très
pertinente?
M. Ouellet: Pour nous, il est clair qu'on n'accepte pas
d'organisme qui pellette des nuages. Je l'ai dit tantôt, on ne croit pas
aux institutions comme telles, on croit à leurs résultats. Pour
nous, c'est ce que cela prend. La crainte que nos étudiants ont, c'est
que dans la forme actuelle les résultats ne soient que mitigés.
Nous, on veut que non seulement la lettre, mais l'esprit du projet de loi soit
respecté et fasse en sorte que, si on veut des progrès, ils
arrivent.
Pour nous, les modifications que nous apportons ne sont peut-être
pas toutes essentielles, mais il y en a. Quand on parle de la confiance
réelle et exprimée par la lettre et par l'esprit que le
gouvernement a face au conseil, cela nous prend des choses comme cela pour
être convaincus que, oui, la confiance est donnée aux jeunes, que,
oui, on leur donnera les moyens de s'exprimer et que, oui, on veut donner aux
jeunes les moyens de s'affirmer. Pour nous, c'est ce que cela nous prend. C'est
pour cela qu'on se présente ici en vous donnant notre avis. Pour
être rassurés, cela nous prend cela et, après, cela va nous
prendre les résultats pour qu'on soit tout à fait confiants.
Mme Blackburn: En page 6 de votre mémoire, vous dites: Les
diverses provenances des membres du conseil feront en sorte que l'expertise de
celui-ci sera très générale et qu'il ne pourra
décemment approfondir certains problèmes particuliers. De
même, en page 14, cela rejoint un peu cet exposé: Nous voyons mal
pourquoi le conseil devrait demander au ministre l'autorisation d'en
référer à un comité
spécial en vue d'approfondir une question parce qu'on dit qu'il y
a nécessité de créer des lieux de réflexion plus
spécialisés.
Je suis étonnée, je dois vous le dire -j'ai eu l'occasion
de le dire à quelques reprises - qu'on impose à un organisme
consultatif l'obligation de se présenter devant le ministre responsable
pour créer des comités spéciaux. Cela se voit dans le cas
de commissions permanentes, mais dans le cas de comités, à ma
connaissance - il faudrait que je revoie les autres conseils consultatifs, mais
il y en a peu. Le Conseil supérieur de l'éducation a deux
comités: les comités de l'enseignement catholique et protestant,
mais ils sont déjà prévus dans la loi. Dans les autres
conseils, des commissions sont généralement prévues dans
la loi ou encore, si on veut en créer, il faut avoir une autorisation
parce qu'une commission a un caractère plus permanent et aussi des
pouvoirs que n'a pas le comité.
Je me demandais si, pour traiter de ces questions particulières,
il ne serait pas pertinent de prévoir dans la loi du conseil la
création de commissions. Mot, à titre d'hypothèse, je
suggérerais qu'on puisse avoir une commission sur l'emploi, qui est le
problème majeur actuellement, et une autre commission qui pourrait
être sur l'adolescence, parce que beaucoup de problèmes que
connaît la jeunesse, que ce soit le décrochage ou la
déliquance, trouvent leur origine à l'adolescence. Comme certains
organismes définissent la jeunesse de façon très large, de
12 ans à 55 ans - ce que je trouve un peu exagéré - ce
serait peut-être intéressant comme façon de mieux cerner la
problématique, je dirais, de l'adolescence. À vous voir
réagir, on peut penser aussi que ces commissions pourraient être
dirigées par les vice-présidents ou vice-présidentes; on
en prévoit deux. Est-ce qu'on pourrait avoir vos commentaires sur une
hypothèse comme celle-là?
M. Ouellet: L'hypothèse est intéressante - nous on
n'a pas pu l'approfondir autant qu'on a pu réfléchir sur le
projet - parce qu'elle découle d'une constatation qu'on avait
nous-mêmes faite, c'est-à-dire que c'est inhabituel que - parce
qu'on connaît bien le Conseil des collèges - pour consulter de
manière approfondie un groupe on doive faire entériner notre
façon de fonctionner, surtout quand c'est un comité qui peut
siéger seulement quelques semaines et donner ses résultats. De ce
côté, nous aussi on ne voyait pas une confiance tout à fait
entière là-dedans parce que ce n'est pas cela qui se passe avec
les autres. On a deux poids deux mesures avec les jeunes et les plus
âgés.
Quant aux commissions permanentes, surtout sur l'emploi - sur l'aide
sociale ou sur l'adolescence, l'aide sociale se retrouve dans les deux cas -
cela pourrait être très intéressant et très
fonctionnel parce que pour nous, plus on va tendre vers une structure qui sera
fonctionnelle, plus on sera heureux. Ce n'est pas tant la structure et les noms
que cela porte qui sont importants, mais les résultats. Tendre vers des
choses qui vont amener de vrais résultats, cela nous intéresse.
C'est finalement cela qu'on veut et on le disait: L'heure est aux solutions. Il
faut donner les moyens d'approfondir les réflexions sociales. Par un
moyen tel que celui-là, cela pourrait être très
intéressant. Il s'agirait de voir comment on pourrait articuler cela et
fonctionner avec cela. Cela pourrait être intéressant,
Mme Blackburn: En page 7 de votre mémoire, parlant de la
crédibilité de cet organisme, vous dites: Pour ce faire, le
gouvernement devra lui assurer les crédits nécessaires pour qu'il
aille dans les régions. Ceci demandera de la part du conseil un
déploiement de son action et des points d'attache.
Certains organismes suggèrent que le collège
électoral soit une structure permanente, d'autres vont plus loin, ils
parlent de tables locales permanentes de concertation qui pourraient constituer
ce que vous appelez les points d'attache. Est-ce que vous avez un peu
réfléchi dans ce sens ou si... (11 heures)
M. Ouellet: Là-dessus, la forme des points d'attache pour
nous, c'est clair et net que cela prend une décentralisation, cela prend
une présence régionale, c'est évident. Le
Secrétariat à la jeunesse a prouvé que cela prend une
présence régionale. Concernant la forme du point d'attache, on
n'a pas essayé de s'enfarger là-dedans. Comme je le disais
tantôt, ce n'est pas la forme de la structure ou sa couleur qui est
importante, mais c'est sa "fonctionnalité"; qu'elle soit fonctionnelle
et productive. Des tables régionales, ce serait intéressant, car
c'est une façon de fonctionner qu'ont d'autres groupes de jeunes et
c'est facile pour eux de se retrouver là-dedans et de se "positionner"
et que cela fonctionne le plus vite possible. Cela pourrait être
intéressant. Pour le conseil permanent de la jeunesse, c'est une
assurance qu'il va être vraiment branché là où il le
faut, partout,
Les jeunes qui ont des problèmes, on les trouve à deux
endroits: Dans les régions et, quand ils ne sont pas dans les
régions ils sont dans la rue. Ce ne sont pas eux qui ont un
secrétariat national et qui sont privilégiés, comme c'est
le cas de certaines associations étudiantes. Les associations
étudiantes, en vertu de la loi 32, on leur donne un bureau, un point
d'attache, un endroit stable et sûr, de même qu'un certain
financement. Nous, on est privilégiés parce qu'il y a des
problèmes qu'on n'a pas, Les
gens qui sont dans la rue, seuls, dans les régions, qui doivent
faire des interurbains, eux ne sont pas privilégiés. En plus
d'avoir les mêmes problèmes que tout le monde, ils ont des
problèmes techniques majeurs. C'est pour cela qu'il faut des points
d'attache, des endroits où le Conseil permanent de la jeunesse sera
facilement repérable, facilement utilisable, à moindres frais et
avec une efficacité quasi totale; c'est nécessaire. Sinon, le
conseil ne serait pas ce qu'il prétend être et ce qu'il doit
être, finalement.
Mme Blackburn: Vous avez abordé la question de la
nomination du président. Vous n'avez pas fait de commentaire sur les
modes de nomination des membres du collège électoral et du
conseil lui-même. Certains organismes estiment que les nominations des
membres du collège électoral comme du conseil devraient se faire
suivant le mode électif par leurs pairs. La loi prévoit que les
postes de président et vice-président soient
désignés par les membres du conseil. Vous réclamez la
nomination du président au nom d'une autonomie, et d'autres organismes
vont beaucoup plus loin en disant: Si on veut véritablement
"départisaner" - si vous me permettez le terme - cet organisme, il
faudrait éviter que les nominations soient politiques. Iriez-vous aussi
loin que cela?
Dans un autre volet - j'ai deux questions, en fait - vous avez fait
allusion à la démarche que les candidats devaient faire pour
solliciter trois appuis. On sait que, actuellement, c'est déjà
commencé et que cela ne se fait pas nécessairement sur une
connaissance intime des candidats qui sollicitent des appuis. Cela se fait, on
dit: Moi, je t'appuies, toi, tu m'appuies. C'est de bonne guerre, étant
donné que la loi le permet. Est-ce qu'il ne serait pas plus simple de
faire comme cela se fait dans le réseau des affaires sociales,
c'est-à-dire que le gouvernement invite tous les organismes connus
à proposer une candidature et que ce soient ces candidats en
assemblée générale qui élisent les membres du
collège électoral, par exemple? Est-ce que cela
n'éviterait pas, finalement, cette espèce de course à
laquelle vous avez fait allusion tout à l'heure, qui ne nous donnera pas
la garantie d'avoir nécessairement les meilleurs candidats et les
meilleures candidates?
M. Ouellet: C'est évident. Dans les deux questions, il y a
un dénominateur commun, c'est la valeur des candidats. Quand on parle de
partisanerie, dans n'importe quel parti politique, que ce soit à
l'Assemblée nationale ou ailleurs, il y a des intervenants très
crédibles et très valables, peu importe la couleur politique.
Malheureusement, quand on arrive à la vision partisane - on le voit
beaucoup au niveau fédéral depuis quelque temps - ce ne sont pas
nécessairement des gens qui ont une valeur indiscutable. Cela, on n'en
veut pas. L'élément de partisanerie, cela pourrait être
dangereux à court, moyen ou long terme, peu importe le gouvernement qui
est là; à un moment donné, cela peut devenir dangereux. On
a vu depuis vingt ans - mes souvenirs ne remontent pas plus loin parce que je
n'étais pas là pour les vivre -que le gouvernement n'était
peut-être pas toujours la meilleure voie pour recruter les gens. Pour
nous, l'élément de partisanerie, c'est quelque chose qu'il faut
absolument éliminer.
C'est pourquoi on devrait, pour éliminer la partisanerie et pour
éviter l'absence d'une ou de plusieurs régions,
"dérégionaliser" les nominations et tout cela. Je suis
allé à une réunion où il y avait plusieurs groupes
de jeunes et on se faisait donner un petit briefing sur le Conseil permanent de
la jeunesse pour bien voir ce que c'était. À la fin, pendant
qu'on prenait un café, il y a des gens qui se sont
échangés des cartes d'affaire, ceux qui en avaient, ou des bouts
de papier. Bien moi, tu m'envoies ta lettre d'appui à cette adresse et
je t'envoie la mienne pour toi. Ces gens venaient de se rencontrer, finalement.
C'est dommage parce que cela élimine tout à fait... Cela a eu
l'effet tout à fait contraire de ce qu'on voulait. On voulait des gens
qui aient une vision large, et, finalement, on va se retrouver avec des gens
qui ont assisté à bien des réunions, qui ont connu bien du
monde à bien des endroits. C'est dommage parce que le but premier
était noble, mais finalement on se ramasse avec une affaire tout
à fait farfelue. De la manière que cela se vit, cela n'a plus du
tout le sens que cela avait. C'est ridicule.
Nous, nous fonctionnons par assemblée générale
où tous les membres sont là. On trouve en discutant les gens les
plus valables et on les met aux postes où on croit qu'ils vont vraiment
remplir leur rôle. Des assemblées générales
élimineraient l'élément de partisanerie. Cela
n'élimine pas la couleur politique, mais cela éliminerait le
patronage qu'on pourrait voir. Cela amène une transparence là.
Donc, la crédibilité que le gouvernement voulait donner au
conseil est là. S'il y avait des assemblées
générales en régions, groupe par qroupe, coin par coin,
cela permettrait aux gens des régions de s'exprimer, d'avoir quelqu'un
qui soit là, qui a fait ses preuves dans sa région et qui a su,
de par son curriculum vitae, de par les faits qui sont là,
démontrer sa valeur. Cela tend à faire en sorte que ces gens
soient représentatifs de leurs régions.
Mme Blackburn: Je reviens un peu sur toute la question de
l'autonomie, dans la suite de ce qu'on est en train d'examiner. Il y a la
question de la réglementation et de
l'obligation qui est faite de l'autorisation du ministre pour adopter le
règlement. Tout à l'heure, la députée de
Kamouraska-Témiscouata disait que c'était dans l'ordre des choses
et normal. Pourtant, je me rappelle et je pense que tous et toutes ont en
mémoire des déclarations de ce gouvernement qui disait: On va
réglementer moins et mieux, Je dirais qu'il réglemente beaucoup
et pas toujours de façon très sage. Dans ce genre de
règlement, beaucoup d'organismes n'ont que la responsabilité de
déposer leur règlement effectivement. Ils n'ont pas à le
faire approuver. Le dépôt est souvent exclusivement pour s'assurer
que le règlement ne va pas a l'encontre des droits de la personne. Mais
c'est tout simplement un dépôt. Je pense que ce serait beaucoup
plus dans l'ordre des choses si c'était la situation. Là-dessus,
je vous rejoins.
Pour ce qui est des organismes, le fait qu'ils doivent être
incorporés - c'est revenu souvent, comme le rappelait tantôt le
député de Saint-Hyacinthe - je trouve cela
particulièrement préoccupant parce que beaucoup d'organismes
jeunes, très efficaces, ne sont pas nécessairement
incorporés. Là, vous le soulignez pour les organismes à
caractère religieux. Je pense à certaines associations
étudiantes qui fonctionnent depuis des décennies et qui ne sont
pas incorporées. Elles seraient automatiquement exclues. Alors, cela ne
me paraît pas être le meilleur critère pour choisir, pour
autant qu'on maintienne cette obligation d'avoir l'appui d'organismes
incorporés. Cela ne me semble pas être la meilleure des
solutions.
Vous avez attiré notre attention sur la nécessité
d'établir des règles qui nous assureraient qu'on a une
représentation relativement équitable des différents
groupes d'âges. Contrairement au député de
Mille-Îles, je pense qu'il y a une certaine sagesse là-dedans
parce qu'automatiquement celui qui a plus d'expérience, plus de bagou,
plus de facilité de s'exprimer devant un groupe a plus de chances de se
retrouver assis à la table du conseil. Ce ne seront pas
nécessairement les jeunes de 18 ou 19 ans, malgré toutes leurs
connaissances, qu'on risque de retrouver là, tantôt. Je trouvais
cette idée intéressante. Je me demandais, en parlant de
représentation des groupes - je poserais la question à Mme
Brisson - si on a songé ou si on a discuté la possibilité
d'introduire aussi une règle contre la discrimination à l'endroit
des femmes, pour permettre une représentation éqale ou
équitable des femmes au sein du conseil.
Mme Brisson: Je peux vous dire que, non, on n'en a pas
discuté en tant que tel parce qu'on ne se penche pas sur un dossier des
femmes. On pense que les femmes sont assez responsables et assez
articulées pour se défendre elles-mêmes. On est rendu en
1987.
À ce moment-là, on n'a pas tellement à se poser la
question sur le nombre de femmes et le nombre d'hommes. On a confiance en nous,
que les femmes seront à cette table, à ce conseil permanent.
M. Ouellet: Dans ce sens, je rejoins ma compagne parce qu'elle
est la preuve vivante qu'à l'exécutif de la
fédération, il y a autant de femmes que d'hommes. Elles ont su se
tailler une place malgré le préjugé social qui subsiste
encore, mais moins à l'échelle des jeunes, je crois.
Peut-être que certaines générations sont malheureusement
encar-canées dans ce préjugé, mais, chez les jeunes, cela
tend à s'éliminer. De plus en plus de femmes ont pris les moyens
de se donner les éléments qui font que leur valeur est solide et
elles se sont retrouvées à des exécutifs nationaux comme
à la FAECQ. Maintenant, c'est la parité et personne ne s'en
plaint, bien au contraire.
Une voix: La qénération du poêle à
bois!
Mme Blackburn; Vous avez treize collèges
affiliés?
Mme Brisson: Dix.
Mme Blackburn: Combien y a-t-il de femmes à la
présidence ou au secrétariat général, ce qu'on
appelle le secrétariat?
Mme Brisson: Nous regroupons dix collèges et, dans les
exécutifs locaux, il y a un représentant à l'externe qui
vient dans nos commissions nationales. Sur les dix collèges, il y a neuf
femmes et un homme.
Mme Blackburn: Pour les présidences d'associations
locales?
Mme Brisson: Des présidentes, il y en a deux, à ma
connaissance; on a fait un pas dans ce sens.
Mme Blackburn: C'était ce que je voulais souligner. Ce
n'est pas pour dire que vous ne faites pas bien et que les efforts n'y sont
pas, qu'il n'y a pas une plus grande reconnaissance que cela a
déjà été le cas, mais je pense qu'il reste du
chemin à faire. Je le dis tant aux garçons qu'aux filles. Le
temps passe, j'aurais eu d'autres questions, mais, malheureusement, on doit
entendre encore plusieurs organismes. Je voudrais vous remercier de votre
présence ici, vous dire que votre contribution aux travaux de cette
commission devrait permettre - j'espère que le gouvernement en tiendra
compte d'apporter des modifications intéressantes et pertinentes
à ce conseil consultatif. Bien que vous n'en fassiez pas une
priorité, j'ai compris de votre propos que si on devait le
créer - vraisemblablement, le gouvernement le créera - il
faudrait à tout le moins le créer de manière qu'il soit le
plus utile possible, le plus pertinent possible, le plus efficace possible. La
façon de le faire, c'est de lui assurer la plus grande autonomie
possible de même qu'une représentation équitable à
la fois des régions et des groupes d'âges. Je ne peux pas
m'engager au nom du gouvernement, mais je peux vous dire que j'aimerais bien
qu'on tienne compte de vos recommandations au moment où il s'agira de
voir à la modification et à l'adoption du projet de loi. Je vous
remercie.
Le Président (M. Filton): Je vous remercie, Mme la
députée de Chicoutimi. M. le ministre.
M. Gratton: M, le Président, je sais qu'il reste
très peu de temps, c'est malheureux, mais je me permettrai quand
même de répondre à la question que vous posez dans la
dernière phrase de la conclusion de votre mémoire, à
savoir si le gouvernement fait de sa priorité la jeunesse ou le Conseil
permanent de la jeunesse. Il n'y a aucun doute dans mon esprit, la
priorité du gouvernement, c'est la jeunesse. Le Conseil permanent de la
jeunesse n'est, en somme, qu'un outil bien simple par lequel on veut associer
la jeunesse aux décisions gouvernementales pour donner ce que justement
vous recherchez, des résultats concrets. C'est pour cela que tout
l'esprit de la loi assure cette latitude.
On se demande pourquoi ne pas préciser. Dans un premier temps, on
s'interroge sur le fait que le ministre devra approuver des études ou
des consultations particulières que le conseil pourra vouloir faire. On
se demande si c'est pertinent. Dans un autre temps, on suggère
d'inscrire dans la loi qu'il devra y avoir comité ou commission sur tel
sujet. Je pense qu'il y a contradiction.
Ce que nous voulons, c'est que ce soit le plus ouvert, le plus large
possible et qu'on puisse, au bout de la ligne, avoir un conseil permanent
formé de gens qui vont travailler avec le gouvernement. Il faut qu'il y
ait une complicité entre le Conseil permanent de la jeunesse et le
gouvernement parce que le Conseil permanent de la jeunesse, malgré toute
sa bonne volonté, ne pourra pas prendre des décisions et poser
des gestes concrets, si ce n'est de sensibiliser le gouvernement, d'amener le
gouvernement, lui qui dispose des ressources, à prendre des
décisions et à agir. C'est dans ce sens et uniquement dans ce
sens qu'on dit dans le projet de loi...
Par exemple, si on fait le sommaire de la représentativité
du conseil, on remarque que des organismes nous parlent - qu'on va entendre au
cours de nos auditions - de représentation par région, par
secteur d'activité, par critère d'âge, par caractère
multi-ethnique ou multiculturel et d'équilibrer les hommes et les
femmes. S'il fallait en arriver à inscrire dans la loi tous ces
critères, on aurait soit un Conseil permanent de la jeunesse de 70
personnes qui, finalement, n'aboutirait à rien ou, en fait, quelque
chose qui ne serait pas efficace. On dit: Faisons confiance à la
jeunesse. On innove en disant: Plutôt que le gouvernement nomme
simplement à partir de suggestions qui seraient faites, il y a, par
exemple, la notion de laisser dans chaque région les gens élire
eux-mêmes. Mais il faut que cela s'organise. Ce qu'on dit, c'est que ce
n'est pas au gouvernement d'aller l'organiser. Dans la mesure où les
régions feront l'effort de concertation et arriveront avec des
propositions qui seront de nature à convaincre le gouvernement de
retenir telle candidature plutôt que telle autre, c'est ce qu'on vise
à faire. Si on inscrit toutes ces limites dans le projet de loi, je
crains fort qu'on n'en arrive justement à encarcaner le conseil de telle
façon que tout ce que cela sera, ce sera un bel instrument, une belle
institution mais il ne donnera pas des résultats concrets. On va
sûrement y revenir en cours de route. Je peux très facilement
m'expliquer la méfiance que les qroupes de jeunes ont à l'endroit
de cela. J'ai moi-même, en quelque sorte, les mêmes
méfiances parce que je sais comment cela fonctionne un gouvernement. Il
y aura toujours quelqu'un quelque part qui va tâcher de faciliter les
choses pas seulement pour le gouvernement, mais pour l'appareil gouvernemental,
en disant: Essayons donc d'aqencer cela pour que ce soit le moins
dérangeant possible. Je dis que ce sera aux groupes de jeunes qui
formeront le Conseil permanent de la jeunesse d'en arriver à ce que cela
ne se produise pas. Si on allait, par contre, tout préciser dans la loi,
à ce moment-là, il me semble qu'on risquerait d'avoir exactement
l'effet contraire.
Vos recommandations vont sûrement être
considérées avec tout le sérieux qu'elles méritent
et je vous assure que la priorité, c'est, oui, la jeunesse et non pas le
Conseil permanent de la jeunesse. Le Conseil permanent de la jeunesse, c'est
une bien infime partie des gestes qu'entend poser le gouvernement
vis-à-vis de la jeunesse.
Le Président (M. Filion): Je voudrais remercier Mme
Brisson ainsi que M. Ouellet de leurs interventions. Nous avons
dépassé légèrement le temps qui nous était
alloué, mais, compte tenu de la qualité à la fois de votre
mémoire et des échanges de ce matin, je crois que c'était
tout à fait justifié. Je vous remercie.
Je vais suspendre les travaux pendant 60 secondes pour permettre aux
représentants de la Centrale de l'enseignement du Québec
de s'approcher de la table des invités. (Suspension de la
séance à 11 h 18)
(Reprise à 11 h 20)
Le Président (M. Filion): A l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!
Avant de poursuivre nos travaux, je demanderais â la
secrétaire de procéder à certaines rectifications en ce
qui concerne nos remplacements.
La Secrétaire: M. Johnson (Anjou) sera remplacé par
M. Jolivet (Laviolette) et M. Kehoe (Chapleau) sera remplacé par M.
Poultn (Chauveau) et non par M. Gardner (Arthabaska). M. Bourassa est
remplacé par M. Gratton pour la durée des travaux.
Centrale de l'enseignement du Québec
Le Président (M. Filion): D'accord. Je vous remercie.
Bienvenue à la Centrale de l'enseignement du Québec et surtout
à ses représentants. Sans plus tarder, je demanderais donc aux
représentants de la CEQ de bien vouloir s'identifier et de nous exposer
le sommaire de leur mémoire.
Mme Pronovost (Solange): Bonjour. Je suis Solange Pronovost,
vice-présidente à la Centrale de l'enseignement du
Québec.
M. Laberge (Henri): Bonjour. Je suis Henri Laberge, conseiller
à la CEQ.
Le Président (M. Filion): Bienvenue! Je vous invite donc
à faire votre exposé.
Mme Pronovost: M. le Président, Mmes et MM. les
députés, au nom de la Centrale de l'enseignement du
Québec, je tiens à remercier les membres de cette commission de
nous permettre d'intervenir sur le projet de loi 104.
Vous savez que la Centrale de l'enseignement du Québec est une
centrale syndicale qui regroupe environ 110 000 membres. Ces membres sont en
contact direct et quotidien avec l'ensemble des jeunes au Québec.
La Centrale de l'enseignement du Québec entretient de grandes
relations avec plusieurs organisations de jeunes au Québec et se
préoccupe depuis fort longtemps des problèmes vécus par
les jeunes, particulièrement les problèmes d'accès aux
études postsecondaires, les problèmes d'emploi et de
chômage, les problèmes de pauvreté, les problèmes
entourant la constitution d'organisations autonomes de jeunes et leur
représentativité.
Nous pensons que, pour répondre aux besoins actuels des jeunes,
les efforts doivent être mis à ce moment-ci, sur des politiques
d'accessibilité aux études supérieures, sur une politique
de plein emploi - qui nous semble être le problème majeur - et sur
une politique qui favorise l'exercice du droit d'association et l'autonomie de
ces organisations de jeunes.
Pour une problématique préalable, nous considérons
que, dans tous les grands problèmes vécus dans notre
société actuelle, certains ont des aspects spécifiques
à la jeunesse. Par exemple, si on parle de violence, de
harcèlement sexuel, d'aqressîon sexuelle, de discrimination
systémique, de la maladie, de l'intoxication, de la
détérioration de l'environnement, de la prolifération des
armes nucléaires, de la peur de la guerre, de droit è
l'information, de libre expression, dans tous ces grands problèmes
sociaux, nous estimons qu'il faut absolument tenir compte des besoins des
jeunes et de leurs points de vue. Il nous semble qu'on ne peut résoudre
les problèmes des jeunes de façon séparée du
contexte global de la société québécoise.
Par exemple, on ne saurait résoudre le problème du
chômage chez les jeunes, qui est un aspect global, en discriminant
d'autres catégories de personnes qui, elles aussi, vivent le
problème du chômage. Il nous semble, à ce niveau, que la
solution s'inscrit dans une politique de plein emploi tenant compte de
l'arrivée des jeunes sur le marché du travail, mais qui
intègre également la préoccupation d'assurer une meilleure
formation générale et professionnelle, la préoccupation de
la réduction du temps de travail et l'abaissement de l'âge de la
retraite. Il nous semble qu'il en va de même lorsqu'on traite des
problèmes de violence ou de harcèlement sexuel. C'est un
problème majeur pour toutes les femmes au Québec. Ce n'est pas un
problème uniquement pour les jeunes.
C'est pourquoi nous pensons que, avant de discuter de la pertinence de
mettre sur pied un conseil permanent de la jeunesse, nous aurions vraiment
aimé savoir comment le gouvernement se situe face à toutes ces
considérations et à quelle problématique le gouvernement
veut répondre par le truchement du Conseil permanent de la jeunesse.
Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi de créer un tel organisme
plutôt que d'assurer une meilleure représentation des jeunes au
sein d'organismes consultatifs qui existent actuellement et qui traitent des
problématiques entourant les jeunes? Est-ce que l'intention du
gouvernement serait de spécialiser le Conseil permanent de la jeunesse
sur un certain nombre de questions spécifiques comme, par exemple, le
Secrétariat à la jeunesse? Comment penser que le Conseil
permanent de la jeunesse pourrait être la meilleure façon de
prendre en considération le point de vue des jeunes dans toutes les
politiques gouvernementales
alors que le gouvernement n'a pas encore fait connaître sa vision
qu'il entend donner comme place aux jeunes au sein de la société
québécoise?
II nous semble à ce niveau que le gouvernement aurait dû
pousser plus loin sa réflexion et soumettre à la population les
conclusions de cette réflexion par le biais d'un livre vert et donner
à la population, y compris, bien sûr, les jeunes, l'occasion de
critiquer, d'infirmer ou d'enrichir sa problématique complète.
Peut-être qu'après cette consultation, on assisterait tout de
même à la mise sur pied d'un conseil permanent de la jeunesse,
mais on se dit qu'au moins la population saurait l'analyse que le gouvernement
fait de la place des jeunes au Québec et que les jeunes auraient pu se
faire entendre sur la mise sur pied de tels mécanismes plutôt que
tel autre. Malheureusement, nous pensons que la proposition du gouvernement,
à ce moment-cî, ne peut reposer sur aucune analyse sérieuse
d'une problématique d'ensemble. II nous semble que c'est une
façon de remettre en cause la représentation des jeunes et des
organisations autonomes qu'ils ont eux-mêmes mises sur pied. D'ailleurs,
après consultation de plusieurs de ces organisations de jeunes, ils nous
ont dit craindre que les instances décisionnelles du gouvernement ne se
refusent dorénavant à les entendre directement vu que le
gouvernement veut donner une voix forte et crédible au Conseil permanent
de la jeunesse.
Nous nous questionnons vraiment. Est-ce que la voix forte et
crédible des jeunes n'existe pas à ce moment-ci dans les
organisations que les jeunes eux-mêmes se sont données? Est-ce que
la voix des jeunes doit être univoque? Est-ce qu'il n'y a pas un peu de
place pour des expressions contradictoires? Nous sommes inquiets sur le fait
que le Conseil permanent de la jeunesse se retrouverait peut-être dans la
situation d'assurer la conciliation des points de vue de l'ensemble des groupes
de jeunes pour présenter une vision synthétique,
c'est-à-dire celle de toute la jeunesse du Québec. Bien sûr
qu'on pense qu'il y a intérêt è réaliser des
consensus larges parmi les jeunes. Ces consensus, il nous semble que cela
demande des compromis de part et d'autre. Ces compromis doivent être
réalisés librement dans un processus vraiment
démocratique. Nous pensons que c'est ce que vivent actuellement les
organisations que les jeunes se sont données. Est-ce que la voix forte,
la voix crédible dont parle le gouvernement, ne pourrait pas se
retrouver effectivement dans un regroupement autonome? Bien sûr, nous
pensons qu'un regroupement autonome serait quelque chose de souhaitable au
Québec. Nous ne pensons pas, par ailleurs, que le Conseil permanent de
la jeunesse pourrait y suppléer.
Sur la procédure de nomination des membres du conseil et du
collège électoral, pour le moins, nous devons vous dire que
l'analyse que nous faisons nous amène à considérer cette
procédure quelque peu inusitée. Nous nous demandons si cet
organisme du Conseil permanent de la jeunesse sera un organisme consultatif
comme celui que nous retrouvons actuellement dans les différentes
structures comme, par exemple, le Conseil supérieur de
l'éducation, le Conseil de !a langue française, le Conseil du
statut de la femme. La pratique actuelle veut que les membres de ces
différents conseils, soient des experts dont on reconnaît la
compétence, soient des personnes représentatives qui seront
reconnues par le gouvernement justement pour leur représentation. (11 h
30)
En bout de course, le gouvernement est responsable de ces nominations.
Le conseil tel qu'il est proposé par le projet de loi 104 ne nous
paraît pas être un conseil consultatif. Il nous semble être
voulu et pensé comme un organisme représentatif. Nous pensons que
le mode de nomination risque qu'effectivement ce conseil soit faussement
représentatif.
D'abord, tous ses membres, au conseil, seront nommés par le
ministre, de même que tous les membres du collège
électoral. Pour faire partie du collège électoral,
où il y a 40 membres, ces personnes doivent solliciter et obtenir des
résolutions d'appui en provenance de conseils d'administration d'au
moins trois organismes de jeunesse en provenance de deux secteurs
d'activités. Ce n'est donc pas le ministre ni le gouvernement qui
invitera officiellement les différentes organisations à soumettre
des recommandations. Ce sont les candidats eux-mêmes qui solliciteront
leur propre mise en candidature par voie de résolutions d'appui. Dans ce
contexte, nous pensons que certaines organisations ne pourraient jamais
être sollicitées.
Une organisation peut bien appuyer autant de candidatures qu'elle le
désire. Il ne nous semble pas y avoir de restrictions dans le projet de
loi à ce sujet. La seule balise qui nous semble établie est celle
d'assurer la représentation équilibrée des régions
et des secteurs d'activités que nous avons nommés
précédemment dans l'intervention avant nous, c'est-à-dire
les affaires sociales, l'éducation, le loisir et le travail.
Il nous apparaît qu'il y a une question qui se pose à ce
sujet, parce que plusieurs des organismes de jeunesse oeuvrent effectivement
dans plusieurs de ces secteurs. Ce que nous avons constaté, et nous
l'avons vraiment analysé, c'est qu'il n'y a aucune disposition dans le
projet de loi qui assure la représentation équitable des deux
sexes. Est-ce que, pour le gouvernement, la
représentation des régions et des secteurs
d'activités serait plus importante que l'égalité
homme-femme? L'égalité homme-femme, il nous semble que c'est un
des premiers problèmes que nous avons à résoudre au
Québec.
Vous comprendrez que nous ne pouvons être d'accord sur cette
procédure de nomination qui est basée sur des démarches
individuelles. Il nous semble que ce genre de démarche est une
procédure qui convient fort bien aux organisations politiques partisanes
ou aux jeunes habitués à l'action électorale. Mais, pour
beaucoup d'organismes de jeunes, cela n'est vraiment pas une pratique
habituelle et ce n'est vraiment pas une démarche avec laquelle ils sont
familiers. Bien sûr que les jeunes qui appartiennent à des
familles politiques ou idéologiques, qui sont différentes de
celles du parti au pouvoir, pourront s'organiser. Mais étant
donné qu'en définitive, c'est le gouvernement qui nomme les
membres du conseil et les membres du collège, il nous semble que les
différentes organisations auront tendance à appuyer des
candidatures pour lesquelles elles seront presque assurées que ces gens
risquent, effectivement, d'être choisis.
On pourrait aussi se demander si les organisations ne seront pas
restreintes dans l'appui des différentes candidatures, voulant s'assurer
que leurs candidatures soient effectivement choisies. Nous pensons que cette
procédure de nomination est vraiment de nature à inciter les
partis politiques à infiltrer les organisations de jeunes. Nous pensons
que la branche jeune du parti au pouvoir est sans doute celle qui peut retirer
le plus d'avantages de cette démarche. Et sans trop s'en rendre compte,
ces jeunes risquent de devenir, plus ou moins consciemment, il va sans dire, un
instrument de contrôle social au service du gouvernement. Nous pensons,
malheureusement, que c'est un fort mauvais apprentissage de la
démocratie.
Le collège électoral est formé de 40 personnes que
le gouvernement va nommer. Certaines de ces personnes, effectivement,
pourraient être tentées d'utiliser des organismes influents pour
avoir les plus grandes chances d'être choisies. Pour ces jeunes, il nous
semble que les meilleurs canaux, actuellement, sont le parti au pouvoir et sa
commission jeunesse.
Il nous semble qu'au sujet des modalités de la procédure
de nomination, il y a également quelques problèmes. Les onze
membres du Conseil permanent de la jeunesse sont nommés par le ministre
responsable; c'est ce que nous dit l'article 2. Le ministre responsable choisit
les membres du collège électoral... Pardon, cette affaire est
tellement compliquée, je me reprends. Les onze membres du conseil sont
nommés par le ministre. Celui-ci doit les choisir parmi les 40 membres
du conseil électoral sur recommandation du collège
électoral, c'est ce que nous dit l'article 21.
Cependant, les termes utilisés à l'article 21 et à
l'article 22 amènent quelque peu d'ambiguïté. D'abord, il
n'est pas certain que le ministre soit tenu de se conformer à toutes les
recommandations du collège. Il n'est pas dit clairement non plus que
chaque recommandation faite par le collège électoral doit
l'être à la majorité de ce dernier. Il est dit: Ce sont les
membres du collège électoral qui font des recommandations. Est-ce
que ce sont deux, trois, quatre ou dix membres du collège
électoral qui feront des recommandations ou si le collège
électoral fera une recommandation? Cela n'est pas dit non plus, par le
biais de l'article 22. Cela laisse entendre que le ministre n'est nullement
tenu de se conformer à des recommandations qui ne seraient pas celles du
collège électoral lui-même. Parce qu'aux articles 21 et 22,
d'une part, nous utilisons les termes "les membres du collège
électoral, et, d'autre part, nous utilisons les mots "le collège
électoral". Il nous semble qu'à ce niveau cela nécessite
précision. D'autant plus que, au troisième alinéa de
l'article 24, on spécifie que le gouvernement, par règlement,
détermine la procédure à suivre par le collège pour
recommander les membres du conseil. Dans ce sens, nous pensons que le ministre
dispose d'une bonne marge de discrétion si, effectivement, il n'y a pas
consensus au collège électoral et que, dans cette
éventualité, certaines personnes du collège
électoral, qui pourraient être convaincues d'avoir une attention
particulière de la part du ministre, pourraient être
tentées de ne pas vouloir de consensus pour que leurs propos passent en
ligne directe. Comme je le disais précédemment, pour le moins, il
nous semble qu'il doit y avoir là des précisions
d'apportées d'autant plus que notre gouvernement actuel dit vouloir
être transparent.
Sur les fonctions et pouvoirs du conseil, on dit à l'article' 25
que "le conseil a pour fonction de conseiller le ministre sur toute question
relative à la jeunesse." Cet énoncé nous paraît
passablement vague et général. Comme nous l'avons dit au
début, presque tous les problèmes sociaux ont des aspects qui
touchent la jeunesse et qui sont discutés dans à peu près
toutes les politiques gouvernementales et qui sont susceptibles de toucher aux
intérêts des jeunes.
Il existe d'autres organismes consultatifs actuellement qui doivent
donner leur avis sur des questions relatives à la jeunesse. Nous
reprenons notre question: Pourquoi créer un Conseil permanent de la
jeunesse plutôt que d'assurer une meilleure représentation des
jeunes dans les organismes consultatifs plus spécialisés? II nous
semble que la deuxième formule éviterait un certain
danger d'éparpillement parce que le mandat du Conseil permanent
de la jeunesse n'est vraiment pas circonscrit dans le projet de loi
actuellement.
Je vous mentionne ici une erreur, malheureusement, dans notre texte; ce
n'est pas la vague, mais bien le vague. Le vague qui concerne les prescriptions
législatives favorisent les interventions discrétionnaires du
pouvoir exécutif. Le conseil permanent pourrait bien définir ses
priorités, ses champs d'intervention.
Cependant, l'article 27 accorde au ministre le pouvoir de commander des
études et des recherches et le conseil a l'obligation de les effectuer.
Peut-être que le ministre ne commandera pas d'études ni de
recherches, mais il se peut que le conseil soit inondé de demandes de la
part du ministre. Il nous semble qu'il resterait peu de latitude au conseil
pour travailler sur les priorités qu'il se serait données.
Nous pensons également que les moyens d'action du conseil sont
fort limités. D'abord, il faut mentionner que la majorité des
membres du conseil ne sont pas rémunérés, qu'ils ont
besoin de l'autorisation du ministre pour mettre sur pied des comités
spéciaux et que le budget de fonctionnement du conseil est laissé
à la discrétion du gouvernement. Nous pensons également
que les moyens d'action du conseil sont limités parce que les pouvoirs
attribués par l'article 26 sont conditionnés par les articles 27,
29 et 34. Cela veut dire que le conseil pourra remplir son mandat de l'article
26 pour autant que le ministre ne demandera pas lui-même trop
d'études et de recherches, pour autant que le ministre autorisera la
mise sur pied de comités spéciaux dont pourrait avoir besoin le
conseil et pour autant également que le gouvernement lui octroiera un
budget suffisant pour lui permettre de remplir son mandat.
Quant au pouvoir qui est donné au conseil par l'article 28, et je
me permets de le lire: "Le conseil s'assure, s'il y a lieu, qu'on donne suite
à ses avis", il nous semble que ce pouvoir est à toutes fins
utiles nul. Lorsque nous avons lu cet article, nous avons communiqué
avec les bureaux du gouvernement pour savoir quels étaient les moyens de
contraindre le gouvernement à donner suite aux avis du conseil et,
malheureusement, la réponse que nous avons obtenue est la suivante: 11
n'y a aucun moyen prévu et cet article est inscrit comme une pression
morale. On se demande vraiment pourquoi, si c'est là l'intention du
gouvernement, on l'inscrit dans un projet de loi.
Sur les fonctions et pouvoirs, comme sur d'autres éléments
que nous avons soulignés tout à l'heure, il nous semble qu'il y a
beaucoup trop d'imprécision non seulement dans la formulation mais aussi
pour la volonté globale. Il nous semble que le conseil permanent serait
créé un peu à la hâte, sans savoir vraiment à
quels problèmes il veut répondre et sans trop tenir compte des
besoins et des aspirations des jeunes.
En conclusion, nous pensons que le projet de loi 104 est pour le moins
prématuré. Nous recommandons, de façon globale, que le
gouvernement, à ce moment-ci, sursoie à son adoption et qu'il
complète sa propre réflexion qui pourrait déboucher sur un
livre vert et faire l'objet d'une vaste consultation de la population. Dans
cette démarche, les organismes de jeunesse doivent avoir l'occasion de
s'exprimer librement sur les mécanismes qu'ils privilégient pour
assurer une meilleure écoute dans les instances décisionnelles.
Il nous semble que ce processus serait beaucoup plus démocratique et
répondrait, par la même occasion, au désir du gouvernement
d'être véritablement transparent.
Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Filion): Je vous remercie, Mme Pronovost.
J'invite maintenant les membres de la formation ministérielle à
nous faire part de leurs questions ou de leurs commentaires.
M. le ministre.
M. Gratton: Merci, M. le Président. Je voudrais tout
simplement faire un commentaire pour le moment et mon collèque de
Beauharnois enchaînera avec une série de questions. (11 h 45)
Je ne vous cacherai pas qu'en lisant votre mémoire - j'ai pris la
peine de le relire à plus d'une reprise pour bien en cerner le sens -
j'ai eu la nette impression que la CEO faisait un procès d'intention au
gouvernement. Je vous dirai tout de suite que votre recommandation de surseoir
à l'adoption du projet de loi 104 aurait pu être retenue si la
majorité ou une vaste proportion des organismes de jeunesse qui
viendront témoigner devant cette commission partageaient cette opinion,
ce qui, à mon avis, n'est pas le cas. La vaste majorité des
organismes qu'on a entendus et qu'on entendra puisqu'on a étudié
leurs mémoires, dans plusieurs cas, émettent des réserves
quant aux modalités du projet de loi, mais sur le principe de la
création du Conseil permanent de la jeunesse, je pense que c'est quelque
chose comme une quarantaine d'organismes sur la cinquantaine que nous
recontrerons qui se disent d'accord avec le principe. Je vous mentirais si je
vous disais que le gouvernement se penchera sur l'opportunité de
surseoir. Sûrement que le gouvernement prendra en considération
très sérieuse les représentations faites par l'ensemble
des organismes à cette commission, mais je pense pouvoir m'autoriser
à vous dire que le gouvernement
procédera, dans les meilleurs délais, à la
création du Conseil permanent de la jeunesse.
Vous nous dites, en somme, qu'il y a d'autres priorités. Il y a
la politique d'accessibilité aux études supérieures pour
toutes les catégories de la population, politique de plein emploi,
conjuguer une politique de revenu minimum garanti applicable aux
étudiants et étudiantes et tout cela. J'en suis, mais l'un
n'exclut pas l'autre. Si on devait retenir votre recommandation de
procéder par l'énoncé d'une politique, d'un livre vert
avec consultation générale, on se retrouverait dans un an, deux
ans, trois ans, devant une situation où, ce qui manquerait le plus, ce
seraient des résultats concrets. Ce qu'on se fait dire depuis hier et ce
qu'on se fera dire au cours des sept ou huit jours qu'on aura à entendre
les représentations des groupes de jeunes, c'est qu'il y a un
problème criant chez la jeunesse québécoise et que cela
prend des gestes immédiats, urgents, concrets. Tout en étant
d'accord pour avoir les politiques les plus cohérentes possible, il me
semble qu'on ne doit pas... Ce serait là pour le gouvernement, il me
semble, la façon facile de dire: Remettons à plus tard les gestes
qui impliquent des déboursés, qui impliquent des décisions
difficiles à prendre pour le gouvernement et pondons une politique. On a
eu des gouvernements qui ont fait carrière à pondre des
politiques qui ne donnaient pas de résultats concrets.
Vous nous suggérez, plutôt que de créer le Conseil
permanent de la jeunesse, qu'on améliore la représentation des
groupes de jeunes au sein des conseils consultatifs ou comités
existants. Je vous rassure tout de suite: ce travail est déjà
commencé. On fait un effort de façon systématique pour
tâcher d'avoir des représentants, non seulement des jeunes, mais
de toutes les sphères de la société à nos conseils
consultatifs. Mais on ne se cachera pas entre nous qu'un ou deux ou trois
représentants jeunes dans un comité consultatif ne risque pas de
donner des résultats très probants, surtout quand il s'agit de
conseils consultatifs.
Quant à la méfiance que d'autres organismes partagent avec
vous à l'égard du gouvernement, il me semble que l'exemple de la
commission politique du Parti libéral du Québec est un exemple
concret de notre capacité en tant que groupe politique de donner toute
la place nécessaire aux jeunes. On s'accommode depuis longtemps, au sein
du Parti libéral, d'une représentation qui est fixée dans
la constitution du parti à un tiers des membres en congrès
général, en conseils généraux. Je ne vous cacherai
pas que cela crée des nécessités de dialogue, de consensus
et de discussions. Mais je suis extrêmement fier d'appartenir à un
parti qui a un programme à l'égard de la jeunesse qui, il me
semble, colle à la réalité, en tout cas, dans la mesure
où il a été préparé et élaboré
par des jeunes et non par des vieux croulants comme moi. Je vous dis
très sincèrement que ce que nous visons à faire avec le
Conseil permanent de la jeunesse, ce n'est pas de récupérer le
discours jeunesse. J'ai dit tantôt au qroupe qui vous a
précédés qu'effectivement la tendance au sein du
gouvernement, quel que soit le parti qui le forme, est toujours la même.
C'est d'uniformiser et de simplifier la tâche, pas des jeunes, en
l'occurrence, mais du gouvernement. J'irai même plus loin et je vous
rejoindrai en quelque sorte en disant qu'il y a un risque que les jeunes qui
vont se retrouver au Conseil permanent de la jeunesse, une fois rendus, jouent
le jeu eux aussi et voient des avantages et des intérêts
personnels à jouer ce jeu, à faire les compromis qui s'imposent.
Il s'agira pour ces gens, pour les membres du conseil de se prémunir
contre cela.
Vous nous posez un certain nombre de questions dans le mémoire,
à savoir: Est-ce que le Conseil permanent de la jeunesse va priver les
groupes, les organismes autonomes de la possibilité de continuer de
faire affaires directement avec le gouvernement? Pas du tout. Ce que nous
constatons, par contre, c'est que les difficultés de communication qui
mènent à des décisions concrètes
présentement sont reliées au fait qu'il y a une dizaine de
ministères qui oeuvrent dans le domaine et que nulle part au sein du
gouvernement, sauf au Secrétariat à la jeunesse, il n'y a
d'endroit où on peut concerter les efforts et faire en sorte qu'il y ait
des politiques plus générales qui favorisent la solution des
problèmes de la jeunesse.
Les modalités d'élection du collège
électoral et du conseil lui-même ne sont pas idéales; on va
sûrement regarder de très près les améliorations
qu'on pourra y apporter. Je reviens I ce que je disais
précédemment, ne nous demandez pas d'inscrire dans la loi chacun
des critères qui nous amènera finalement à paralyser le
Conseil permanent de la jeunesse parce que, à ce moment, on n'aura pas
atteint le but visé. La voix forte et crédible des jeunes peut se
retrouver dans les regroupements autonomes et je souhaite qu'elle continue de
se retrouver dans les regroupements autonomes, ce qui n'implique pas qu'on
remette en cause l'opportunité d'avoir un Conseil permanent de la
jeunesse. Vous faîtes des remarques pertinentes, qui nous amènent
à nous poser la question nous-mêmes, à savoir: Quelles sont
les intentions du gouvernement? Comment pouvons-nous mieux les traduire? Si
vous vous posez la question, c'est sûrement parce que le texte de loi
porte à interprétation. Donc, on va s'y pencher très
sérieusement, on va tâcher d'assouvir vos craintes, de vous
rassurer et
de rassurer ceux qui partagent votre point de vue.
Je dis, en terminant, que cela n'ira pas jusqu'à surseoir
à l'adoption du projet de loi 104. Nous pensons qu'il s'agit là
d'une mesure concrète qui, je le répète, n'est pas une
panacée, qui ne viendra pas régler le problème de la
jeunesse et, surtout, qui ne permettra pas au gouvernement de se laver les
mains de la situation des jeunes. Si ce devait être ce qui
résultera de la création du Conseil permanent de la jeunesse, on
aura à blâmer, bien sûr, le gouvernement, mais surtout les
jeunes qui en seront membres. Dans la mesure où vous avez des
suggestions à nous faire sur la meilleure façon que les membres
du Conseil permanent de la jeunesse ne deviennent pas des bureaucrates
immédiatement après leur arrivée au conseil, j'en suis, je
vous prie de nous éclairer, c'est ce que nous recherchons.
Je vous remercie de votre présentation. Je pense que mon
collègue aurait quelques questions à vous poser.
Le Président (M. Filion): Merci, M. le ministre. M. le
député de Beauharnois.
M. Marcil: Merci, M. le Président. Après avoir lu
votre mémoire, surtout que vous avez fait référence
à certains articles du projet de loi, je partirais de votre conclusion:
"Nous recommandons au Parlement québécois de surseoir à
son adoption jusqu'à ce que le gouvernement ait complété
une réflexion plus élaborée sur la situation de la
jeunesse et ses principaux problèmes. "Cette réflexion devrait
déboucher sur un livre vert..."
Depuis le début des auditions, quand même, près de
200 organismes de jeunes sont cosignataires d'environ 48 mémoires qui
ont été déposés ici et la très grande
majorité favorise la création de cette structure, d'un conseil
permanent, mais avec des réserves, comme le disait tantôt mon
collègue, et beaucoup de recommandations quant aux modalités
d'application, choix, nomination, élection et ainsi de suite.
Je suis surpris dans tout cela, que vous recommandiez au gouvernement de
surseoir à son adoption. Je fais le parallèle avec les messages
qui nous ont été transmis dans les mémoires par les
organismes de jeunes; on en a eu encore la preuve, hier, où ils nous
l'ont dit assez clairement. Au sujet de l'identification des besoins des jeunes
et de la problématique jeunesse, il y a eu des études de faites.
Des mémoires ont été déposés è ce
sujet. Cela garnit maintenant les tablettes des différents
ministères. Les jeunes nous demandent de les laisser identifier leurs
besoins. Ils veulent un outil, un moyen leur permettant d'identifier leurs
besoins, de suggérer, de recommander des moyens d'action concrète
et également de leur donner les moyens de les appliquer.
Vous vous référez, dans votre mémoire, aux articles
25 et 27, parce que vous avez sauté l'article 26, du moins dans la
lecture de votre mémoire. À l'article 25, vous dites: "Le conseil
a pour fonction de conseiller le ministre sur toute question relative à
la jeunesse." Vous passez à l'article 27 et vous dites: "Le conseil doit
donner son avis au ministre sur toute question que celui-ci lui soumet
relativement aux besoins et aux intérêts de la jeunesse." Entre
ces deux articles, il y a l'article 26 que je trouve fondamental, du moins pour
le Conseil permanent de la jeunesse: "Dans l'exercice de cette fonction, le
conseil peut - j'y tiens bien parce que c'est quand même un verbe
d'action, à mon avis - 1° saisir, sous forme d'avis, le ministre de
toute question relative à la jeunesse qui appelle l'attention ou
l'action du gouvernement et lui soumettre ses recommandations; 2° effectuer
ou faire effectuer les études et recherches qu'il juge utiles ou
nécessaires à l'exercice de sa fonction; 3° solliciter des
opinions, recevoir et entendre les requêtes et les suggestions de
personnes, de groupes et d'organismes sur les questions relatives à la
jeunesse; 4° fournir de l'information au public sur toute question relative
aux besoins et aux intérêts de la jeunesse."
Ne trouvez-vous pas que ce pourrait être le premier ou un des
mandats du Conseil permanent de la jeunesse, le jour où ils vont
décider, eux, qu'il faudrait faire une enquête publique,
d'écrire un livre vert, d'aller en consultations auprès de la
population, auprès des organismes de jeunes, pour réellement
établir la problématique jeunesse? Ne trouvez-vous pas que le
fait de créer ce Conseil permanent de la jeunesse, pas avec la
réglementation, mais du moins avec les articles de loi qui le composent,
qui l'identifient, qui déterminent ses fonctions, pourrait être un
des mandats, mais commandé par les jeunes et non pas encore par nous
autres, les adultes? Je vous pose la question.
Le Président (M. Filion): M. Laberge.
M. Laberge: Je vais commencer par répondre le plus
directement possible à la question posée, et après cela,
si vous me le permettez, j'aimerais faire des commentaires sur les discours qui
ont précédé la question. Vous me dites que nous n'avons
pas parlé de l'article 26. Je vous réfère à la paqe
7 de notre mémoire, au haut de la page 7, où on dit que les
pouvoirs attribués par l'article 26 sont conditionnés par les
limitations prévues aux articles 27, 29 et 34. C'est le commentaire qu'a
fait la vice-présidente tout à l'heure. Maintenant, si on compare
la rédaction de l'article 26 à l'article 27, il y a une chose qui
saute aux yeux. À l'article 26,
il y a le mot "peut"; à l'article 27, il y a le mot "doit". Cela
fait une différence énorme et la différence est la
suivante: le conseil peut faire tout cela dans la mesure où il va lui
rester du temps pour le faire. Or, à l'article 27, il doit
répondre aux commandes du gouvernement et c'est ce qu'on disait au bas
de l'article 6 de notre mémoire. Dans la mesure où le conseil
serait inondé de demandes par le gouvernement, à ce
moment-là, le conseil n'a plus les moyens de faire ce qui est
prévu à l'article 26. C'est dans ce sens-là que, je pense,
on a très bien parlé de l'article 26. On l'a très bien lu,
on l'a vu comme il faut. C'est un élément central de notre
réflexion sur le mémoire. (12 heures)
Maintenant, je veux revenir sur des remarques antérieures. Vous
avez dit que la majorité des mémoires appuient le projet de
création d'un Conseil permanent de la jeunesse.
J'espère que vous ne vous faites pas l'illusion que cela veut
nécessairement dire que tous ceux qui ne sont pas venus parler sont
favorables. Nous avons rencontré des organismes de jeunesse, nous les
avons réunis chez nous, nous avons discuté avec eux. Parmi les
organismes de jeunesse que nous avons rencontrés, la majorité ne
voit pas la pertinence de la création du conseil permanent de la
jeunesse à ce moment-ci.
Vous nous dites que le gouvernement veut poser des gestes concrets
dès maintenant. Fort bien! Mais qu'est-ce qui l'empêche de poser
des gestes concrets? Tantôt, M. Gratton semblait dire qu'il avait
posé des gestes concrets pour répondre aux trois priorités
qu'on mentionnait en page 1 de notre mémoire. Il disait que ce sont des
priorités effectivement importantes, mais rien ne nous empêche de
répondre à ces priorités même si on crée un
conseil permanent de la jeunesse.
Ensuite, dans la suite de son exposé, il semblait dire que, si on
sursoyait à l'adoption du projet de loi 104, on ne pourrait plus poser
les gestes concrets pour répondre aux trois priorités qu'on
mentionne. Je ne vois pas pourquoi. Rien n'empêche de poser des gestes
pour assurer une meilleure accessibilité des jeunes à
l'éducation supérieure, pour assurer un meilleur accès
à l'emploi, etc., même si on sursoit à l'adoption du projet
de loi 104.
On a dit également que le Parti libéral avait une
politique qui colle à la réalité des jeunes. Fort
bienï Je ne connais pas en détail la politique du Parti
libéral. C'est possible. Mais ce que, nous, on dit, c'est que le
gouvernement, lui, ne nous a pas annoncé sa politique. On nous a dit
qu'il existe des mémoires et des études en très grande
quantité. Bon. Alors, si le gouvernement a tellement d'études et
de mémoires, pourquoi ne se donne-t-il pas la peine d'écrire?
Peut- être que cela va se faire plus vite à ce moment. S'il a tout
le matériel qu'il lui faut pour nous exposer sa vision de la politique
jeunesse, il pourrait nous la donner. C'est tout simplement ce qu'on demande,
que cela prenne un an ou quelques semaines. Si le gouvernement est capable de
faire cela en quelques semaines, qu'il le fasse, mais il nous semble que, avant
de mettre sur pied un organisme comme celui-là, on devrait au moins
expliquer dans quelle conception globale le gouvernement le situe. C'est cela
notre point de vue. Ce n'est pas de dire: Ne faites rien, mettez tout de
côté. C'est tout simplement qu'on veut comprendre à quelle
problématique le gouvernement veut répondre. Je dis bien le
gouvernement, pas le Parti libéral. Que le Parti libéral ait sa
politique, c'est une chose. Mais que le gouvernement en ait une, c'est
celle-là que nous voulons connaître.
Maintenant, sur la question de la réflexion que le gouvernement
pourrait faire, qui risquerait de remettre en veilleuse la participation des
jeunes, je ne ferai pas l'injure au gouvernement de faire une réflexion
qui ne tiendra pas compte de la masse de mémoires et d'études
qu'il dit avoir déjà en main. J'imagine qu'à ce
moment-là, il va tenir compte de cela.
Nous, notre inquiétude, on n'a pas fait de procès
d'intention au gouvernement, on n'a pas dit que le gouvernement voulait faire
des choses comme cela, mais nous attirons l'attention du gouvernement sur un
danqer que présente la hâte à vouloir créer des
structures pour organiser les jeunes à leur place. Le gouvernement a
sans doute de très nobles intentions quand il le fait, mais nous disons:
Attention! c'est dangereux. Réfléchissez un peu plus avant de le
faire parce que le conseil permanent qui est là ne sera pas un simple
orqanisme consultatif comme le sont les autres organismes consultatifs
créés jusqu'ici.
Au Conseil du statut de la femme, par exemple, personne n'a la
prétention de dire que cela représente les femmes. Cela
représente un groupe de femmes qui ont été choisies pour
donner des conseils au gouvernement sur la situation des femmes, des femmes
très respectables qui ont un point de vue respectable. Mais on ne
prétend pas que c'est pour organiser les femmes, pour les faire parler
à la place des organisations que les femmes se donneront
elles-mêmes.
Dans le cas des jeunes, par le processus même de la formation,
cela donne .cette impression qu'on est en train d'organiser les jeunes. Ils
n'ont pas de regroupement autonome national, alors, on va créer un
conseil permanent qui va parler au nom des jeunes et qui va être la voix
forte et crédible. C'est l'expression qu'on emploie dans la
publicité qu'on fait autour de ce conseil. C'est le danger qu'an y volt.
C'est
un glissement vers une forme de corporatisme où l'État se
mêle d'organiser les groupes au lieu de leur donner des moyens de
s'organiser eux-mêmes. C'est cela.
Le Président (M. Filion): Je vous remercie, M.
Laberge.
M, Marcil: M. le Président, pour revenir justement
à l'article 26...
Le Président (M. Filion): M. le député de
Beauharnois, bien que le temps de la formation ministérielle soit
épuisé, je comprends. Allez-y!
M. Marcil: C'est juste pour faire une nuance entre les articles
27 et 26. Les membres disent: II doit de plus effectuer ou faire effectuer. Il
y a un "ou" à côté et il y a un autre verbe
également. Donc, je pense qu'il y a une question de confiance à
accorder à l'organisation de jeunes qui formera ce conseil. Si on a
encore la même attitude face à l'organisation d'un organisme comme
celui-là, que nous avons déjà ou que certains peuvent
avoir face aux organismes déjà en opération, à ce
moment, quand allons-nous avoir confiance aux jeunes? Quand on parle des
jeunes, on ne parle pas seulement des jeunes de moins de 15 ans. On englobe les
jeunes de 15 à 30 ans. Il y a une maturité, une expérience
de vie, un vécu également, et il y a des gens qui vivent des
problèmes que nous ne vivons pas. Ils sont bien plus en mesure de les
identifier que, nous, nous pouvons le faire.
M. Laberge: Je pense que vous avez mal compris. Quand je dis que
le conseil ne pourra pas nécessairement réaliser ce qui est
prévu à l'article 26, si l'article 27 donne au gouvernement les
moyens de l'inonder, ce n'est pas dans le sens que les membres du conseil
n'auraient pas les compétences et les capacités. Ce n'est pas
cela qu'on a voulu dire. C'est que les moyens...
M. Marcil: Dans le sens que le ministre peut toujours les
inonder.
M. Laberge: C'est ça. M. Marcil: C'est
évident.
M. Laberge: Parce qu'il peut faire faire, bien sûr, mais,
pour faire faire, il faut qu'il ait l'autorisation du ministre
également.
M. Marcil: Là, c'est une question de
crédibilité du ministre aussi. Vous pouvez créer un
organisme uniquement pour l'organiser ou pour donner une image, mais je ne
pense pas que ce soit notre but.
M. Laberge: Je ne le crois pas non plus, mais cela peut
être un effet.
Le Président (M. Filion): Je vous remercie. Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci. Mme Pronovost, M. Laberge. Au nom de ma
formation politique, cela me fait plaisir de vous accueillir ici. Je dois dire
que les propos que vous tenez rejoignent beaucoup les préoccupations que
j'ai eu l'occasion d'énoncer hier. Avant de commenter à la fois
votre mémoire et les quelques remarques qui nous viennent du parti
ministériel, je voudrais profiter de l'occasion pour souligner la
participation assez exceptionnelle de Mme Pronovost à toute la question
des jeunes. Je sais qu'elle participe entre autres au Festival Création
Jeunesse. Cela pour dire que, finalement, son intérêt pour la
jeunesse dépasse largement le cadre de son travail. C'est
peut-être pourquoi elle défend avec autant d'intérêt
et autant d'efficacité, je dirais, ce dossier.
Le discours du parti ministériel est inquiétant. Je pense
qu'il est important de faire quelques mises au point ou mises en garde. La
commission parlementaire en est à sa deuxième journée et
j'ai entendu à plusieurs reprises, à propos du rapport entre le
Conseil permanent de la jeunesse - ce futur conseil - et le gouvernement, que
l'on parlait de complicité. C'était le ministre du Revenu. On
parlait de partenariat. Cela, hier, c'était le premier ministre. On
parlait d'aller main dans la main et c'était le député de
Mille-Îles, hier. Et cela continue.
Est-ce qu'il s'agit - en fait, je rejoins quasiment votre
inquiétude - d'une succursale de la commission jeunesse du Parti
libéral qu'on veut créer là? Je dois dire, un peu comme le
disait tout à l'heure le ministre, que l'inquiétude n'est pas
seulement à l'endroit d'un qouvernement que d'utiliser la structure.
Elle est inquiétante à l'endroit du gouvernement, quel qu'il
soit, qui aura la grande tentation d'utiliser la structure pour qu'elle soit le
moins dérangeante possible. Ce n'est pas le privilège d'un parti
d'éviter à l'occasion d'avoir trop de contestation. Ce n'est pas
le propre d'un parti. Sauf que, quand on crée une structure qui favorise
cela, on risque d'atteindre effectivement cet objectif.
Je l'ai dit hier également, il est difficilement concevable qu'on
crée un conseil permanent de la jeunesse sans inscrire ce conseil et son
mandat à l'intérieur d'une politique gouvernementale. Le
gouvernement n'a pas de politique jeunesse, comme le gouvernement n'a pas de
politique sur la langue, comme le qouvernement n'a pas de politique de
développement régional et qu'il n'a pas non plus de politique, je
dirais, touchant la privatisation. Il privatise Quebecair et, six mois
après, il
va voir ce que cela voulait dire pour les régions. Il faut le
faire! Le gouvernement n'a pas de politique de la langue non plus. Le
gouvernement, de façon générale, gère par
à-coups, pour tranquilliser. Le danger, avec cette structure, me semble
le même qu'on a connu en 1973 avec la création du Conseil du
statut de la femme. Il y en a peut-être ici qui... Les jeunes ont moins
de chances de se le rappeler, mais moi je me rappelle. On a créé,
en 1973, le Conseil du statut de la femme et, pendant deux ans, on a
reporté toutes les décisions touchant a la condition
féminine parce qu'on disait: On commande des études au Conseil du
statut de la femme. Je me le rappelle pertinemment. On n'a rien fait pendant
deux ans.
Quand le Conseil du statut de la femme, qui est pourtant très
efficace, a réussi à produire ce qu'on a fini par adopter comme
une politique, Pour les Québécoises: égalité et
indépendance, c'est à la fin de l'année 1979, ou au
début de l'année 1980, si ma mémoire est fidèle. Je
ne suis pas allée aux informations, mais on pourrait le vérifier.
II se pourrait que je me trompe d'une année, mais au maximum, Pour
les Québécoises: égalité et indépendance,
cela a été déposé aux alentours de ces
dates-là. C'est un conseil particulièrement performant. Cela nous
indique à peu près les échéances devant lesquelles
sera confronté le Conseil permanent de la jeunesse si on attend de lui
qu'il propose au gouvernement une politique de la jeunesse.
Le premier ministre nous a dit, hier, avec une telle assurance que je
crains que tout le monde ne le croie, que tous les mémoires, dans la
très grande majorité, sont favorables. On a fait le calcul. Le
tiers seulement est favorable, avec des modifications mineures. Et on sait avec
l'aide de qui ils ont été préparés. Mais cela,
c'est autre chose, c'était leur droit. Le tiers est favorable, mais avec
tellement de réserves que, si vous leur demandez: À la limite,
s'il était adopté tel quel, seriez-vous favorables, ils vous
diraient non. Et l'autre tiers est défavorable.
Penser qu'on va régler le sort des jeunes avec un Conseil
permanent de la jeunesse, alors que le gouvernement ne s'est pas donné
une politique de la jeunesse... Je ne dis pas que la problématique n'est
pas connue. Elle est connue. Mais entre une problématique qui est connue
et un gouvernement qui dit: Sur la base de cette problématique,
voilà mes priorités, c'est autre chose et c'est cela qui
s'appelle une politique de la jeunesse.
Il n'y a pas non plus de politique d'emploi et de plein emploi.
C'était pourtant une priorité. On gère à la
pièce. De temps en temps, pour que cela ne crie pas trop, on crée
quelque chose. Évidemment, le Conseil permanent de la jeunesse, c'est un
engage- ment du Parti libéral. Une fois au gouvernement, c'était
probablement l'engagement le plus facile à tenir ou, en tout cas, celui
qu'il était le moins dérangeant de tenir parce que celui qu'on
aurait attendu, c'était une politique de plein emploi pour les jeunes.
Le Conseil permanent de la jeunesse ne viendra pas régler le
chômage des jeunes. Je trouve que c'était le temps de faire une
certaine mise au point, d'abord, sur ce que ce gouvernement attend du conseil
permanent, que cela soit un complice ou un partenaire, main dans la main. Je
trouve que cela ne commence pas beaucoup à ressembler à un
conseil relativement autonome qui pourrait donner des avis relativement
crédibles à un gouvernement. Je n'invente pas les mots. On pourra
relever la transcription des débats. Je le rappelle textuellement.
À présent, je dois dire que j'ai peu de questions parce
que j'estime comme d'autres mémoires aussi que vous avez raison. Un des
mémoires, présenté ce matin ou hier soir, nous disait:
Effectivement, il faudrait qu'on ait une consultation qui dépasse
largement les cadres de la commission parlementaire parce qu'on ne peut pas
créer un organisme comme cela sans qu'il s'inscrive dans une politique
et dans une démarche beaucoup plus globales.
Je n'ai pas beaucoup de questions, mais j'en aurais quand même
une. Je partage votre préoccupation - vous me permettrez le terme -
lorsqu'on "ghettoïse" des groupes, que ce soient les femmes, les jeunes,
les handicapés et autres ethnies, je veux dire, comme autre handicap. Ce
qui me préoccupe dans cette situation, c'est lorsqu'on fait ce genre de
catégories pour les personnes âgées, pour les groupes en
difficulté; on fait du problème des femmes un problème de
femmes et non pas un problème de société. On risque de
faire du problème des jeunes un problème de jeunes et non pas un
problème de société. C'est cela le danger avec ce genre de
structure. C'est une façon de déresponsabiliser la
société par rapport aux grands problèmes auxquels sont
confrontées des couches particulières de la
société.
À présent, en même temps qu'on dit cela et en
même temps que vous nous dites: C'est le danger - et je partage ces
préoccupations - diriez-vous la même chose du Conseil du statut de
la femme? Moi, je vais vous dire que j'avais certaines réserves à
l'époque pour les raisons que je vous exprime. Me diriez-vous que, si
c'était à refaire aujourd'hui, il faudrait songer à une
création comme le Conseil du statut de la femme parce que là on
est en train de créer l'équivalent pour les jeunes? (12 h 15)
M. Laberge: On n'a pas de réflexions spécifiques
sur la question, de la façon qu'elle est posée. On a
essayé de comparer
dans notre étude du projet de loi J04 quel était le statut
du Conseil du statut de la femme par rapport au statut du Conseil permanent de
la jeunesse et on a vu des différences. Il nous apparaît que le
Conseil du statut de la femme, malgré certains problèmes qu'on a
soulevés... D'ailleurs, depuis sa fondation, on a toujours
soulevé des problèmes au sujet du fonctionnement du Conseil du
statut de la femme, des nominations et des relations entre le conseil et le
gouvernement, relations entre le conseil et les organisations de femmes.
Il reste que, fondamentalement, on peut dire que le Conseil du statut de
la femme n'a pas de maquillage. C'est un groupe de femmes qui sont
nommées par le gouvernement pour donner des conseils au gouvernement. Il
n'y a pas de prétention à l'hégémonie
représentative des femmes. On n'a jamais prétendu que la
présidente du Conseil du statut de la femme, quand elle parle, parle au
nom de toutes les femmes du Québec; elle parle au nom du groupe de
conseillères du gouvernement qui sont nommées pour faire cette
tâche. C'est cela la différence fondamentale. Le danger qu'on voit
dans le Conseil permanent de la jeunesse, c'est qu'il soit perçu,
à cause de tout le mécanisme de nomination, comme une
espèce de grosse organisation de jeunes chapeautée d'en haut.
C'est cela le danger qu'on voit.
Mme Blackburn: Des jeunes nous ont demandé ici que le
conseil soit le plus autonome possible, que, par exemple, les membres du
collège électoral soient élus, que les membres du conseil
lui-même soient élus à même les membres du
collège électoral. D'autres sont allés plus loin: il
faudrait des structures permanentes, locales et régionales.
Diriez-vous que devant une proposition comme cela il faudrait que ce
soit tout un ou tout l'autre? Autrement dit, il faudrait vraiment que ce soit
un conseil comme le Conseil du statut de la femme - personne ne se fait
d'illusion, c'est-à-dire personne ne prétend que ce conseil est
le porte-parole de toutes les femmes - qu'il soit è cette image ou
encore qu'il appartienne entièrement aux jeunes.
M. Laberge: II nous paraît que oui. Si c'était un
organisme qui appartenait vraiment aux jeunes, il faudrait que toute la
structure démocratique implique l'ensemble de toutes les organisations
de jeunesse et sur un pied d'égalité. Avec des résolutions
d'appui de trois organismes oeuvrant dans deux secteurs, comme on l'a
signalé, il peut arriver qu'une quantité d'organismes ne soient
jamais sollicités pour donner leur appui à quelque candidat que
ce soit. C'est une démarche individuelle. Celui qui a le plus de bagou
et qui pense qu'il devrait être au collège électoral fait
sa tournée. Celui qui est habitué à faire du pointage
électoral, cela va mieux, mais celui qui a toujours travaillé
dans les scouts ou dans la JEC, peut-être que pour lui cela va un peu
moins bien que d'aller faire le tour des associations pour aller vendre sa
candidature.
Ce n'est pas une procédure démocratique, mais elle a un
aspect suffisamment pseudo-démocratique pour donner le change. Il
faudrait vraiment que ce soit tout un ou tout l'autre. Ou bien c'est vraiment
totalement démocratique et cela appartient aux jeunes, c'est eux qui
choisissent leur procédure, c'est eux qui font tout le processus
d'élection jusqu'en haut et qui choisissent le président du
conseil, ou bien c'est autre chose, c'est un conseil consultatif nommé
par le qouvernement et, là, le gouvernement a le droit de nommer des
conseils consultatifs. Le gouvernement n'a pas la science infuse. Il faudrait
que ce soit clair que c'est un groupe de personnes respectables choisies par le
gouvernement en fonction de la compétence qu'elles ont. Quand le
gouvernement va écouter ces gens, il ne dira pas: Voici, les jeunes
m'ont dit telle chose. Il va dire: Mes conseillers m'ont dit telle chose et on
a pris leurs recommandations.
Mme Blackburn: Je voudrais laisser la chance à mon
collègue.
Le Président (M. Filion): Merci, Mme la
députée. M. le député de Laviolette.
M. Jolivet: J'ai juste une question. On comprendra bien que le
gouvernement a l'intention d'adopter cette loi, mais, dans l'hypothèse
où il accepte votre recommandation de surseoir et considère les
recommandations des groupes qui sont venus depuis hier qui disent qu'il est
temps d'arrêter de palabrer et de réaliser des choses, ne
croyez-vous pas que votre proposition aurait pour effet de retarder la mise sur
pied d'un conseil? Et là je ne parle pas de sa composition, de sa
façon de fonctionner. Est-ce que cela n'aurait pas pour effet de
retarder, ce qui donnerait aux jeunes l'impression que les adultes, comme on
nous a appelés hier, les gens du poêle à bois, continuent
de parler des sujets qu'eux, de l'ère du four à micro-ondes, sont
plus à même de comprendre à leur façon plutôt
qu'à la nôtre? C'est ce qu'on nous disait hier. Je vous pose la
question: Est-ce que votre proposition n'aura pas pour effet de retarder
d'autant cette prise de conscience, cette position des jeunes?
Mme Pronovost: Si on devait connaître une démarche
d'un an, deux ans ou trois ans, effectivement, vous auriez raison. Cependant,
les gens nous ont dit tout à l'heure qu'il y a
moult mémoires ou documents qui existent actuellement sur les
tablettes, les officines du gouvernement. Nous pensons que ces documents, ces
écrits peuvent très bien servir à une consultation
immédiate et faire en sorte que, dans les mois qui viennent, nous
connaissions à tout le moins un énoncé de politique de la
part du gouvernement et ses priorités pour mettre sur pied des
mécanismes, des mesures pour contrer l'ensemble des problèmes que
les jeunes connaissent au Québec actuellement. Je pense que c'est une
démarche qui peut se faire dans un délai suffisamment court, et
j'ai la nette conviction que l'ensemble des groupes qui pourraient être
consultés, sur la base d'un livre vert ou sur la base d'une formulation
de l'ensemble des mémoires et des écrits qui ont
déjà été produits, s'empresseraient de venir dire
au gouvernement ce qu'ils en pensent, comment ils voient les choses et quelles
sont les solutions qu'ils ont envisagées. Je pense que les choses
pourraient effectivement se faire dans un temps relativement court.
Le Président (M. Marcil): Merci, M. le
député. Mme la députée.
Mme Blackburn: Madame, monsieur, j'aimerais vous remercier et
souhaiter, avec d'autres intervenants, que le discours que vous portez, les
inquiétudes que vous avez selon lesquelles la création un peu
hâtive d'un conseil permanent ne donnera pas nécessairement la
politique qu'on attend, soient entendus de la partie ministérielle et
qu'au moment où viendra le temps d'examiner de façon plus
attentive le projet de loi, on puisse prendre en compte et considérer
vos propos et commentaires. Je vous remercie infiniment de votre
participation.
Le Président (M. Marcil): Merci, Mme la
députée. M. le ministre.
M. Gratton: M. le Président, j'aimerais également
remercier Mme Pronovost et M. Laberge de nous avoir fourni cette occasion de
discuter et les assurer de notre meilleure volonté de tâcher de
les rassurer quant aux questions qu'ils posent.
Le Président (M. Marcil): Mme
Pronovost, M. Laberge, je vous remercie beaucoup de votre participation.
Nous allons suspendre les travaux 60 secondes pour permettre au prochain groupe
de s'avancer.
(Suspension de la séance à 12 h 24)
(Reprise à 12 h 25)
Le Président (M. Dauphin): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Délégation Jeunesse, région 04
Inc.
Nous reprenons nos travaux. Je demanderais au groupe représentant
la Délégation Jeunesse, région 04 Inc., de s'identifier
et, par la suite, de voir à la présentation de son
mémoire. On vous rappelle que vous avez droit à une
période de 20 minutes.
M. Gélinas (Daniel): Daniel Gélinas,
président.
Mme Leblanc (Dorothée): Dorothée Leblanc,
vice-présidente.
M. Messier (Guy): Guy Messier, directeur.
M. Gélinas: D'abord, on voudrait remercier cette
commission d'avoir bien voulu nous recevoir aujourd'hui pour entendre notre
mémoire sur le Conseil permanent de la jeunesse.
Notre façon de procéder, ce sera de prendre notre
mémoire, la table des matières et chacune des étapes du
mémoire pour vous le présenter de façon plus claire et
coordonnée.
Avant de commencer, M. le Président, je voudrais vous demander
s'il serait possible vers la fin de notre présentation d'ajouter une
pièce au mémoire, c'est-à-dire l'organigramme de la fin,
si on peut vous le passer. J'ai des copies ici.
Le Président (M. Dauphin): Pas de problème.
M. Gélinas: D'accord, merci.
La présentation de notre organisme. Notre organisme a pris
naissance, il y a environ deux ans, dans le cadre du sommet économique
de la région 04. C'est-à-dire que notre délégation
avait été formée dans le but d'alimenter le sommet
économique avec des propositions jeunesse par l'intermédiaire du
siège jeunesse. Ce même sommet économique n'a pas eu lieu.
La délégation avait préparé des propositions qui
avaient été déposées déjà au sommet.
Elle n'a pas voulu les laisser tomber. À la suite de cela, l'organisme a
décidé de s'incorporer et de se donner un statut
légal.
Les objets de cette corporation sont les suivants de façon
globale: favoriser et promouvoir la réflexion et la concertation sur la
condition socio-économique des jeunes de 16 è 30 ans de la
région administrative 04; défendre et promouvoir les
intérêts socio-économiques des jeunes de la région;
collaborer activement à la promotion et au développement
socio-économique de la région tout en s'assurant la participation
des jeunes.
D'une façon générale, la délégation
se voulait surtout porteuse de dossiers jeunesse auprès d'instances,
qu'elles soient gouvernementales ou institutionnelles. C'est ce qu'elle fait
d'ailleurs. Depuis le début, l'organisme a voulu être
géographiquement représentatif de la région. Pour cela,
dans la délégation, tous les membres viennent des quatre coins de
la région 04. On considère qu'il y a une part de
représentativité. Jusqu'à ce jour, la
délégation a eu plusieurs interventions auprès de la
Société d'investissement jeunesse, du programme Jeunes
Promoteurs, du Conseil permanent de la jeunesse aujourd'hui et est aussi membre
du CA du Conseil régional de concertation et d'action de la
région 04. D'une façon générale, c'est notre
organisme. Je passerai maintenant la parole à Dorothée Leblanc
pour la suite.
Mme Leblanc: Merci, Daniel.
La Délégation Jeunesse, région 04, est d'accord
avec l'essence même du projet de loi 104, c'est-à-dire que nous
croyons que c'est justifié de créer le Conseil permanent de la
jeunesse pour de multiples raisons que je vais brièvement vous
énumérer. Nous croyons nécessaire et pertinent que le
gouvernement puisse compter sur les avis d'un organisme conseil, étant
donné qu'il n'en reçoit pas de l'ensemble des jeunes du
Québec qui, il va sans dire, forment la faction la plus dynamique et la
plus novatrice de la société québécoise, à
notre avis, sans vouloir froisser les autres générations. (12 h
30)
Nous sommes d'accord avec le Conseil permanent de la jeunesse pour
donner aux jeunes du Québec un porte-parole indépendant de
l'appareil gouvernemental afin de pouvoir lui faire part plus
concrètement des besoins des jeunes et, ainsi, ne plus se limiter
essentiellement ou seulement à l'expertise de la fonction publique.
D'accord aussi, car nous croyons à l'efficacité d'une
structure conseil pour faire avancer la cause des jeunes du Québec. Il
suffit de se référer à l'exemple concret qu'a
été le Conseil du statut de la femme depuis de nombreuses
années pour la cause des femmes. Au même titre, nous
espérons que le Conseil permanent de la jeunesse favorisera une
visibilité de la situation des jeunes et ce, à tous les
niveaux.
D'accord, car pour nous, de la Délégation Jeunesse,
région 04, la mise sur pied du Conseil permanent de la jeunesse est
comme une suite logique à l'Année internationale des jeunes
puisqu'il a été fréquemment demandé durant cette
année de donner aux jeunes un ou des moyens de se faire entendre du
gouvernement, ce qui n'existait pas.
D'accord, car le Conseil permanent de la jeunesse constitue en soi une
première démarche de rapprochement de la part du gouvernement
actuel vers les jeunes du Québec, démarche qui, nous
l'espérons, ne sera pas la dernière non plus.
Il y a toujours des "mais". On est d'accord qu'il y ait un Conseil
permanent de la jeunesse, mais pas que cela se fasse de n'importe quelle
façon; il y a toujours l'envers de la médaille. Nous avons,
à la lecture du mémoire, vu des lacunes et nous aurions des
modifications à proposer. Pour ce faire, je vais laisser la parole
à M. Messier.
M. Messier (Guy): Disons que le premier élément
qu'on aurait à soumettre à la commission serait la nomination
d'un ministre délégué. Considérant que le projet de
loi 104 a été présenté par le premier ministre et
qu'à l'intérieur du projet de loi lui-même on voit souvent
le nom du premier ministre énoncé, on trouverait pertinent qu'il
y ait la nomination d'un ministre délégué qui aurait la
disponibilité, premièrement. Comme on est en commission
parlementaire et que le premier ministre n'est pas ici, on considère
qu'il n'a peut-être pas la disponibilité voulue pour chapeauter
l'actuel projet de loi sur le conseil permanent.
On considère aussi que le ministre délégué,
par sa disponibilité, pourrait accorder plus de temps à
l'écoute et au pilotage des différents dossiers, donc, être
considéré comme un interlocuteur disponible. Ce serait
peut-être la première chose que nous aurions à
suggérer comme telle. Maintenant, à l'intérieur de
l'organigramme que vous retrouvez dans le mémoire, nous avions fait
figurer le premier ministre. Une légère modification à y
apporter, ce serait de remplacer le premier ministre par le ministre
délégué.
Le deuxième point qui nous tient très à coeur au
sujet du futur conseil permanent, c'est la base du conseil lui-même. Vous
n'êtes pas sans savoir que les nombreux organismes jeunesse au
Québec éprouvent de nombreuses difficultés sur le terrain.
Ce que nous vivons sur le terrain et ce qui est vécu ici, à
l'Assemblée nationale, sont peut-être deux réalités
complètement différentes. On considère que la base est
quand même fragile; il faudrait éventuellement penser à
consolider et à développer cette base. Comme on en a fait part
dans notre mémoire, on considère que, dans un avenir prochain,
s'il n'y a pas de politique gouvernementale qui garantisse le
développement des organismes jeunesse, on pourrait supposer, dans une
perspective qu'on ne voudrait pas rendre trop dramatique mais qu'on peut
envisager, que d'ici quelques années, on risque de se ramasser avec
quelques organismes jeunesse qui auront traversé les périodes
difficiles ou les années difficiles.
Une des premières choses qu'on
voudrait porter è votre attention, c'est le fait que les
organismes jeunesse sont souvent confrontés è la
réalité du financement. Actuellement, on ne retrouve pas dans les
énoncés du gouvernement actuel une politique qui garantisse
à l'ensemble des organismes représentatifs de la jeunesse au
Québec ce qui va leur permettre de se développer. Donc, on se
rend compte que, si le conseil permanent s'appuie sur ces organismes et
qu'actuellement le gouvernement n'a pas une politique parallèle ou
complémentaire pour leur assurer une survie ou un développement,
cela se peut fort bien que d'ici quelques années on se revoie pour
discuter de la base même du Conseil permanent de la jeunesse.
Il y a aussi une autre réalité qu'il faudrait regarder.
Les jeunes, qui sont souvent dynamiques dans leur milieu, sont souvent
perçus comme des quémandeurs de l'État. Si une politique
pouvait leur garantir un développement et un fonctionnement
décents, on pourrait éviter que, à tout bout de champ, les
organismes viennent vous voir ou aillent voir le député ou
l'organisme du coin pour lui demander 100 $ ou 1000 $ pour assurer leur
fonctionnement l'année suivante.
Deuxièmement, on considère aussi que l'aspect financier
est important, mais on considère que la présence du
Secrétariat à la jeunesse, au cours des dernières
années, a été très importante en régions. La
suggestion ou la proposition qu'on fait dans le mémoire, c'est d'en
arriver è aller chercher l'actuelle structure régionale du
Secrétariat à la jeunesse pour l'insérer à
l'intérieur du Conseil permanent de la jeunesse de façon à
permettre aux organismes de compter sur une ressource qui va les conseiller et
les aider dans leur développement. Ces deux points, selon nous, se
complètent parce que, si on a l'argent sans la ressource, il se pourrait
fort bien que les organismes éprouvent des difficultés. Pour nous
autres, on le présente dans un bloc.
Vous trouverez à la page 6 quelques énoncés
budgétaires. Un des éléments qu'on considère
intéressant - peut-être à la fois inquiétant - c'est
que, depuis le mois de mai 1986, on se rend compte que les budgets
consacrés au Secrétariat à la jeunesse et à
Communication-Québec jeunesse semblent diminuer avec les années.
On peut se rendre compte où iront les ressources demain. Si on coupe le
Secrétariat è la jeunesse, si on enlève
Communication-Québec jeunesse, qui, en régions, va aider les
organismes à se développer?
La directrice du module administratif du Secrétariat à la
jeunesse nous a dit que le budget prévisible, à partir d'avril
1987, serait d'environ 1 700 000 $, C'est une donnée additionnelle qu'on
va ajouter è notre mémoire et on aimerait faire avec vous un
petit exercice budgétaire. Je me demande,
Daniel, si ce ne serait pas pertinent de présenter
l'organigramme. L'organigramme qu'on vient de vous remettre remplace celui que
vous retrouvez dans notre mémoire. Sans vous l'expliquer, parce que je
vais laisser à mon confrère le soin de le faire tantôt,
dans les moindres détails, j'essaierais plutôt de m'en tenir
à un exercice budgétaire pour vous démontrer l'importance
de répartir les montants d'argent inscrits à la page 6, a
l'intérieur des budgets du Secrétariat à la jeunesse et du
futur Conseil permanent de la jeunesse.
Concernant les bureaux régionaux, nous avons envisagé
qu'un montant d'argent de 500 000 $ soit consacré aux onze bureaux
régionaux dans les onze régions du Québec. Leur
fonctionnement pourrait équivaloir à environ 500 000 $.
Concernant la Direction générale du Conseil permanent de la
jeunesse, avec tout le personnel, la documentation, la recherche, les
communications avec les personnes de la direction générale, nous
avons évalué le budget à environ 500 000 $; cela
s'applique aux salaires uniquement. Le fonctionnement des bureaux
régionaux et de la direction générale, on
l'évaluerait à 300 000 $. On serait déjà rendu
à 1 300 000 $. Pour assurer le fonctionnement du collège
électoral et des conseils régionaux, on suggérerait un
montant d'argent de 300 000 $ pour le fonctionnement. Le dernier montant qui
apparaîtrait a notre nouvel organigramme concerne le Secrétariat
à la jeunesse où on suggérerait un montant de 400 000 $,
qui comprendrait le fonctionnement et les salaires.
Globalement, on remanierait le budget qu'on vous a
présenté dans notre mémoire et il pourrait totaliser 2 000
000 $ plutôt que 1 350 000 $ environ.
Je pense bien que c'étaient les principaux points que j'avais a
présenter.
M. Gélinas: Pour faire suite un peu à ce que M.
Messier a dit ici, j'aimerais reparler de l'aspect de la régionalisation
du conseil permanent.
En tant qu'organisme fonctionnant en réqions déjà,
et je pense de façon assez représentative, on s'aperçoit
à quel point il est important que les régions soient reconnues de
façon distincte parce qu'il y a des différences, il y a des
distinctions entre différentes régions. Je pense que le conseil
permanent doit être branché sur les régions. I! ne doit pas
devenir un conseil complètement indépendant qui est à
Québec, qui est débranché ou qui prend des mandats ou qui
s'alimente on ne sait trop où. Le conseil permanent a besoin de
s'alimenter en régions. Pour cela, nous proposons certains points par
rapport à cette régionalisation. Je pense que cela répond
aussi à un processus démocratique et représentatif de
l'ensemble
de la province de Québec. Par rapport à cela, nous, on
demande que chaque région du Québec nomme en assemblée
générale des organismes communautaires jeunesse ses quatre
délégués au collège électoral. À ce
niveau, je pense que vous pouvez voir sur votre organigramme les onze conseils
régionaux formés de quatre membres qui, eux, seront élus
de la façon dont on l'a dit.
Que le collège électoral ainsi formé propose au
premier ministre une liste de onze personnes devant combler les postes
prévus - on dit premier ministre, cela peut aussi être le ministre
délégué; selon nous, cela serait préférable
que ce soit un ministre délégué - au conseil permanent
à l'intérieur duquel on retrouvera un
délégué de chacune des régions du
Québec.
Que le collège électoral ne soit pas dissous et qu'on lui
confie un triple mandat -vous le voyez aussi dans l'organigramme - de lien
entre le conseil permanent et les régions, de conseiller auprès
du conseil permanent et de soutien au développement des organismes
communautaires jeunesse.
S'assurer également que le conseil permanent régionalise
ses services en ayant un bureau dans chacune des régions du
Québec. Cette équipe de permanents en régions, 2,5
employés, verront à supporter les délégués
régionaux au conseil permanent et à soutenir les organismes
communautaires jeunesse.
Nous, on voit la régionalisation de cette manière,
c'est-à-dire qu'on croit que c'est probablement la manière la
plus représentative. Le conseil permanent, comme on l'a
déjà spécifié, ce n'est pas... Le Conseil permanent
de la jeunesse est un conseil spécifique et on doit le considérer
comme tel. Il touche les jeunes, ce qui n'est pas n'importe quelle
catégorie de population. C'est cela.
Mme Leblanc: Le dernier point qui se retrouve à la page 8
du mémoire porte sur la complémentarité des mandats du
Secrétariat à la jeunesse et du Conseil permanent de la
jeunesse.
À la lecture d'un document qui nous est parvenu le 18 juillet
1986 de la direction du Secrétariat à la jeunesse, on a
réalisé qu'entre les rôles et fonctions du
Secrétariat à la jeunesse et les rôles et fonctions qu'on
retrouve dans le projet de loi, c'est-à-dire à la section III,
articles 25 à 30, il y a des similitudes, il y a du
dédoublement.
Nous avons une proposition à faire pour qu'il y ait une meilleure
complémentarité et qu'il n'y ait pas de dédoublement. La
proposition serait que le Conseil permanent de la jeunesse ait un mandat
conseil, comme on le lui donne dans le projet de loi, mais aussi un mandat de
soutien aux organismes communautaires jeunesse qui se ferait par le transfert
des bureaux régionaux du
Secrétariat à la jeunesse vers le Conseil permanent de la
jeunesse.
Le Secrétariat à la jeunesse, nous lui verrions un mandat
de concertation interministérielle. C'est un mandat que le
Secrétariat à la jeunesse avait déjà, mais qu'il
n'a pas pu remplir à cause de ses nombreux mandats. Ce serait pour
réunir finalement les principaux ministères afin d'éviter
le dédoublement au niveau de la recherche sur le terrain, au niveau de
politiques souvent... Les jeunes sont un peu confondus parce qu'il y a des
politiques dans différents ministères qui se rejoignent ou se
ressemblent. On verrait aussi le Secrétariat à la jeunesse comme
support au ministre délégué à la jeunesse, bien
entendu. Ce serait en gros.
M. Gélinas: En fait, l'organigramme tout simplement qu'il
reste à regarder, c'est un survol, si on veut, de tout ce qui vient
d'être dit, c'est-à-dire que, nous, comme on le dit, on aimerait
qu'il y ait un ministre délégué. Celui-ci chapeauterait
les dossiers jeunesse qui sont actifs présentement: ceux du
Secrétariat à la jeunesse, du conseil permanent et de la
société d'investissement. Comme on l'a dit, le Secrétariat
à la jeunesse, on lui verrait un mandat d'intervention et de
coordination inter-ministérielles. Dans le cas du conseil permanent, ce
qui nous intéresse particulièrement, comme on l'a dit, on
voudrait qu'il y ait onze conseils régionaux formés de quatre
membres représentant des secteurs différents qui, eux,
enverraient leurs quatre membres au collège électoral et qui
auraient les mandats qu'on a déjà spécifiés
précédemment. (12 h 45)
Au niveau de la direction générale, c'est-à-dire le
mandat administratif, qui aurait aussi les mandats de communication, de
recherche et de documentation, il y aurait ce qu'on appelle, nous, le mandat
liaison très important qui fait le lien entre la base et le conseil
permanent. Cette base des employés qui seront dans les bureaux
régionaux seront en contact direct avec les membres des conseils
régionaux avec qui ils travailleront toujours, c'est-à-dire que
les employés seront là pour les soutenir dans la recherche, etc.
En gros, c'est ça. Je pense qu'on est prêt à avoir des
questions. Il y a peut-être des choses qui sont ambiguës.
Le Président (M. Dauphin): Je vous remercie pour votre
présentation. Nous allons passer maintenant à la période
de discussion. M. le ministre.
M. Gratton: Oui, M. le Président. J'aimerais
évidemment remercier la Délégation Jeunesse, Région
04, pour la qualité et la diversité de ses
recommandations. En ce qui e trait à l'opportunité de
nommer un ministre délégué â la jeunesse, je n'ai pu
m'empêcher de sourire parce que je suis, moi-même, ministre
délégué à la Réforme électorale, je
suis ici à titre de leader parlementaire pour remplacer le premier
ministre, qui est parrain du projet de loi. Je me dois de m'excuser
auprès de vous parce que je devrai quitter incessament. J'ai encore la
mauvaise habitude, même après quatorze ans à
l'Assemblée nationale, de penser que, quand on prévoit les
travaux de 10 heures à 13 heures, ça se termine à 13
heures. Et j'ai contracté un engagement cette fois à titre de
ministre du Revenu.
Tout cela pour dire qu'un ministre délégué pourrait
consacrer beaucoup plus d'énergie que le premier ministre à
condition qu'il soit placé dans la situation de pouvoir le faire. Je ne
rejette pas, loin de là il ne m'appartient pas d'ailleurs ni d'accepter,
ni de rejeter la suggestion que vous faites quant à la nomination du
ministre délégué. Je suis sûr que le premier
ministre, qui, dès le début du mandat du gouvernement actuel a
voulu, à titre de premier ministre, que le Secrétariat à
la jeunesse soit représenté à la table des
secrétaires généraux adjoints et qu'on donne un nouveau
rôle à jouer au Secrétariat à la jeunesse, avisera
de l'opportunité ou pas de conserver le dossier lui-même.
Ce que je puis vous dire, c'est que, règle
générale, les dossiers que pilote le premier ministre ont
l'habitude de se régler assez rapidement, merci.
Cela dit, je laisserais à mon collègue, le
député de Saint-Hyacinthe, le soin de vous poser des questions.
Je m'excuse de devoir quitter. Je voudrais vous dire avant que les
recommandations que vous faites recevront une considération tout
à fait sérieuse de la part du gouvernement en ce qui concerne les
amendements à apporter au projet de loi 104.
Le Président (M. Dauphin): Merci, M. le ministre. M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Merci. Je voudrais renchérir
sur ce que le ministre du Revenu vient de dire. La diversité de vos
recommandations est bien appropriée. J'aimerais aussi vous remercier.
Vous faites, à la page 4, une synthèse concernant le Conseil
permanent de la jeunesse en disant que les besoins exprimés par les
jeunes... Ce sont -les jeunes qui sont les mieux placés pour intervenir
auprès de ceux-ci. C'est vraiment ce qu'on veut faire en ce qui a trait
au Conseil permanent de la jeunesse. Comme le ministre en a fait mention tout
à l'heure, lorsqu'on parlait du premier ministre ou du ministre
délégué, je pense, à l'article 33, îl est
bien défini que le premier ministre ou un ministre
délégué peut être choisi pour intervenir concernant
le Conseil permanent de la jeunesse.
D'autre part, avant de poser une question, sur votre
préoccupation en ce qui a trait à la disparition
éventuelle du collège électoral. Je crois que du
côté ministériel on va se pencher sérieusement pour
voir si, effectivement, il y aura disparition du collège
électoral. Plusieurs intervenants ont fait mention, hier et aujourd'hui,
qu'il peut y avoir disparition du collège électoral. On va
regarder cela ici, à savoir si oui ou non et dans quelle mesure tout
cela va se faire.
Une dernière considération, étant donné que
je vais avoir, dans la région de Saint-Hyacinthe, le Sommet de la
Montérégie. Je trouve pertinent que vous soyez là depuis
deux ans et que vous existiez encore. J'espère que les gens de la
Montérégie ou que le conseil, en tout cas, le comité de
direction du Sommet de la Montérégie va garder les mêmes
structures. Que le conseil et les jeunes qui développent certains
thèmes pour le Sommet de la Montérégie vont garder la
même efficacité ou la même vigueur d'esprit, et qu'au bout
de deux ans ils seront encore là. Je pense que votre rôle, vous le
jouez très bien.
Ma première question est la suivante: Tout à l'heure, vous
avez soumis en ce qui a trait au financement des organismes.., Vous parliez de
consolider les organismes déjà en place. On sait qu'on
subventionne une multitude d'organismes. De quelle façon devrait-on
consolider ces organismes? D'après vous, est-ce qu'on pourrait les
consolider ou les subventionner selon leur rayonnement, selon leur impact dans
le milieu? Ce sera ma première question.
M. Messier (Guy): Peut-être qu'il faudrait étudier
certaines modalités au niveau gouvernemental. Mais, chose certaine, pour
pouvoir reconnaître la réalité des organismes jeunesse sur
le terrain, on se rend compte qu'il faut aller frapper à plusieurs
portes à l'intérieur du gouvernement pour avoir une subvention ou
une aide gouvernementale. On se demande s'il n'y aurait pas moyen d'avoir une
politique uniforme en tenant compte de certains critères qui pourraient
aider l'ensemble des organismes sans être obligé de leur faire
faire des démarches à l'intérieur de tout l'appareil
gouvernemental ou d'aller voir la caisse populaire de leur municipalité.
Ce que je veux quand même bien faire comprendre, c'est l'importance
d'avoir une politique si on veut, premièrement, consolider les
organismes actuels et, demain, permettre à d'autres organismes
d'être mis sur pied. Maintenant, les modalités pourraient
être selon la bonne volonté du gouvernement. Mais il faut dire
aussi que c'est une réalité et que de plus en plus d'organismes
consacrent un temps
énorme à chercher des sources de financement pour
survivre, et la réalité revient tous les ans.
Le Président (M. Dauphin): Oui, madame.
Mme Leblanc: J'aurais un complément de réponse.
Dans le mémoire, à la page 5, on précise après
consultation que les organismes communautaires jeunesse au Québec
consacrent environ 40 % - c'est plus ou moins, ce peut être 30 % dans un
groupe et 50 % dans un autre - de leur énergie, de leur temps et de
leurs priorités à faire de la recherche de subventions ou
d'argent pour pouvoir survivre. C'est ce que, nous, on trouve grave quant au
financement, entre autres.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): D'après vous, ce pourrait
être une priorité laissée au Conseil permanent de la
jeunesse que de déterminer une politique de subvention aux organismes ou
aux implications comme...
M. Messier (Guy): Ce pourrait être un premier mandat...
M. Messier (Saint-Hyacinthe): C'est une des priorités que
vous voyez, oui.
M. Messier (Guy): ...du conseil permanent de se pencher sur une
politique de financement global concernant les organismes.
M. Gélinas: J'aimerais ajouter qu'il est très
important que le conseil permanent se donne comme mandat premier de faire cela
parce que ce sont les organismes communautaires jeunesse, comme on l'a dit pour
nous, qui vont alimenter le conseil permanent. S'ils ne sont pas
consolidés, s'ils n'ont pas une force dans leur milieu, le conseil
permanent n'aura pas d'alimentation du tout, de là l'importance de cette
consolidation.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Parfaitl J'ai une autre question
concernant le conseil et la composition du collège électoral. Je
comprends fort bien que, dans la région de la Mauricie-Bois-Francs, il
peut être facile de se concerter et de déléguer certains
membres issus des milieux jeunesse pour former un collège
électoral ou désigner certaines personnes.
Maintenant, dans les régions métropolitaines, par exemple
Montréal et Québec où il y a plusieurs organismes, cela
peut être 100 ou 200 organismes. De quelle façon pourrait-on
choisir ces organismes relevant du conseil ou du collège
électoral?
M. Gélinas: Selon nous, certains critères de base
pourraient être établis. Tout à l'heure, on a dit qu'il y
avait beaucoup d'organismes qui n'avaient jamais été
incorporés et qui étaient très importants. Il y a des
critères qui pourraient être établis et il y aurait une
annonce d'assemblée générale, comme cela se fait pour
plusieurs organismes. Chacun des organismes se présenterait, il y aurait
élection et il y aurait des gens qui seraient élus. C'est la
façon la plus démocratique, cela se fait dans un paquet de
secteurs. Laisser seulement une personne ou deux faire le choix, je pense que
ce n'est pas très démocratique.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): D'accord. Peut-être une autre
question, avant de passer la parole à l'Opposition, sur la composition
du conseil. Il y a plusieurs intervenants qui ont fait mention qu'il pourrait y
avoir une recherche, une bataille à l'intérieur du collège
électoral pour accéder au conseil. Est-ce que, d'après
vous, une sorte de campagne ou un programme électoral, entre guillemets,
pourrait faciliter les choses pour accéder au conseil"?
M. Gélinas: De la part de qui? De la part des intervenants
qui voudraient accéder là? Ils feraient une espèce de
cabale?
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Effectivement, ceux qui font partie
du collège électoral pour accéder au conseil... Il y a
plusieurs intervenants parce que le ministre peut nommer les gens et plusieurs
personnes ont dit: Non, nommer les gens, ne devrait pas être la
meilleure, il devrait y avoir un autre système. Et j'en soumets une: un
programme électoral ou un plan d'action, d'après vous, est-ce que
ça pourrait être un mécanisme de remplacement? Une campagne
de leadership pour le Parti québécois?
M. Gélinas: Sûrement, peut-être, je n'y ai pas
pensé.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Excusez-moi, oui.
Mme Leblanc: Étant donné le peu de temps que
Déléqation Jeunesse a eu pour écrire ce mémoire et
étant donné le fait qu'on est des travailleurs
bénévoles - on a nos emplois à temps plein - cette
question n'a pas été soulevée. On ne s'est pas
penché là-dessus et on n'a pas approfondi tous les points du
projet de loi; c'était impossible pour nous, étant donné
les délais.
M. Gélinas: Évidemment, on pense que le
collège électoral lui-même pourrait avoir le choix de se
donner sa propre méthode d'élection du conseil. Je pense que ces
gens auraient la capacité de le faire aussi, sans le leur imposer.
Peut-être que, si on impose
une façon d'élire, ce sera trop rigide.
Mme Leblanc: Faisons confiance aux jeunes du Québec.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Je vais revenir...
Le Président (M. Dauphin): Vous pouvez garder votre temps
de parole plus tard. Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Madame, messieurs, cela me fait plaisir de vous
accueillir ici. Vous couvrez effectivement, comme l'a dit le ministre tout
à l'heure, plusieurs aspects du projet qui vous est soumis, et c'est
fort intéressant. J'aimerais quand même, si vous le permettez, y
aller de quelques questions, sans plus de préambule.
Dans votre mémoire, à propos du Conseil consultatif de la
jeunesse, vous dites que c'est une attitude non gouvernementale. Vous savez que
les personnes, selon le projet, seront nommées par le gouvernement, que
le personnel sera de la fonction publique. Qu'est-ce qui vous amène
à penser que ce n'est pas un organisme gouvernemental?
Mme Leblanc: La base, pour nous, ce sont les jeunes
intéressés à devenir délégués et qui
vont se faire élire par les organismes communautaires jeunesse. C'est
là notre intervention. À la base, ces jeunes ne proviennent pas
d'un parti politique quelconque, ils proviennent de la base. C'est certain que,
si 60 proposent leur candidature, le premier ministre en choisira 40 qui
formeront le collège électoral là, et, du collège
électoral, on choisira les onze personnes.
Mme Blackburn: Dans le projet proposé, il est très
clair que les nominations seront politiques.
M. Gélinas: On en est tout è fait conscient. C'est
ce qu'on a voulu éviter par notre proposition.
Mme Blackburn: D'accord. Je veux bien comprendre ce paragraphe.
En admettant que les propositions que vous suggérez soient
acceptées, on en ferait un organisme non gouvernemental, un peu plus
autonome.
Mme Leblanc: Pas à 100 %, bien entendu, parce que le
président sera nommé et choisi par le premier ministre parmi les
onze candidats proposés.
M. Messier (Guy): On suppose aussi, avec le nouvel organigramme
qu'on vous a remis, que le conseil permanent, tel qu'il est, formé d'un
conseil d'administration de onze membres, pourrait être
représentatif pour autant qu'on va dans le sens de nos recommandations.
Chose certaine, c'est qu'il peut y avoir un jeu autant politique qu'autre
à l'intérieur du conseil d'administration. On n'échappe
pas à cette réalité. Il y a aussi le fait que, si à
la base on consolide les organismes et qu'on a toujours une présence
dans les régions, on pourrait éventuellement avoir un conseil
permanent, un conseil d'administration composé de onze membres beaucoup
plus représentatif et qui devra nécessairement tenir compte de la
réalité des recommandations des régions. C'est pour cela
qu'on disait de laisser le collège électoral en place pour
créer ce lien.
Mme Blackburn: Dans votre mémoire, vous insistez beaucoup
et vous faites de cet organisme le porte-parole de la jeunesse. Je vais essayer
de l'illustrer par le contenu de votre mémoire. Vous voulez que le
collège électoral ne soit pas dissous et qu'on lui confie un
triple mandat: un mandat de lien entre le Conseil permanent de la jeunesse et
les régions, de conseiller auprès du Conseil permanent de la
jeunesse et de soutien au développement des organismes communautaires
jeunesse. Cela veut dire que, pour vous, toutes les voix, toutes les
expressions de la jeunesse devraient passer par ce canal. Est-ce que cela ne
vous paraît pas dangereux? Est-ce que le danger ne serait pas
d'uniformiser le discours jeunesse, de récupérer le discours
jeunesse? (13 heures)
Je repense aux propos qu'ont tenus les personnes qui vous ont
précédés en disant: Il faudrait distinguer deux types
d'organismes. Il y a celui qui est consultatif au sens connu du terme.
Là, vous avez le Conseil du statut de la femme, le Conseil des
collèges, le Conseil supérieur de l'éducation, le Conseil
des universités, une gamme de conseils dont on ne prétend pas
qu'ils sont le porte-parole des universités, le porte-parole des femmes
ou des environnementalistes. C'est un organisme consultatif pour un
ministre-Là, la structure que vous nous donnez, il me semble, menace de
museler, si je peux m'exprimer ainsi, l'expression des divergences des autres
organismes, parce que "le" canal deviendrait "ce" canal, alors que l'on
connaît la multitude des besoins et des intervenants. Est-ce à
dire que les intervenants de la jeunesse ne sont pas crédibles et que
pour les rendre crédibles, il faudrait ce porte-parole crédible
et fort dont parle le gouvernement? Cela me préoccupe un peu, et
j'aimerais avoir vos commentaires et vos réactions là-dessus. Je
comprends que l'on ne peut pas envisager l'ensemble des difficultés que
peut poser un organisme comme celui-là, mais à la lumière
des propos qui ont été tenus précédemment, est-ce
que...
Mme Leblanc: On n'a pas la prétention
de dire que ce serait le seul porte-parole. En ce moment, la
réalité des jeunes, c'est qu'il n'y en a pas de porte-parole des
jeunes au Québec. Si je fais abstraction du Regroupement des maisons de
jeunes, qui est assez fort et qui est le seul organisme qui a des subventions
annuelles depuis quelques années, les jeunes n'en ont pas de
porte-parole, mais on n'a pas la prétention de dire que ce serait le
seul porte-parole. Cependant, cela pourrait devenir un porte-parole
crédible, étant donné la régionalisation que l'on
voudrait qui y soit apportée.
Mme Blackburn: Également, il ne faudrait pas oublier les
associations étudiantes qui sont relativement bien structurées et
qui défendent assez bien leurs dossiers. Selon vous, s'il y avait une
priorité, vous parlez beaucoup d'une première priorité qui
serait la reconnaissance et le financement des organismes communautaires,
diriez-vous que cette priorité viendrait avant la création d'un
Conseil permanent de la jeunesse?
M. Gélinas: Cela a toujours été une
priorité, mais elle serait peut-être plus facile è faire
passer ou à se concrétiser avec l'existence d'un conseil
permanent.
Mme Blackburn: Si l'expérience peut nous enseigner quelque
chose, l'expérience du Conseil du statut de la femme en particulier,
l'expérience du Conseil des collèges, que j'ai eu l'honneur de
présider et de créer, je vous préviens que l'on risque de
voir décéder plusieurs organismes communautaires si l'on attend
pour se donner une politique que le conseil soit è même de le
faire.
Le danger, c'est un peu ce qui était exprimé aussi tout
à l'heure, c'est que, des commandes de cette nature, ajoutez-en trois ou
quatre et vous venez, vous me passez le terme, de "loader" le conseil pour
l'année suivante. Il n'y a plus d'espace, de moyens de procéder
à des recherches ou à des travaux qui soient de leur propre
initiative. C'est un peu le danger quand on essaie de trop en mettre et de trop
attendre d'un seul organisme.
M. Messier (Guy): J'ai un commentaire à faire. C'est
sûr qu'on est quand même conscients que, depuis de nombreuses
années, il y a bien des organismes communautaires qui
représentent les jeunes au Québec et qui ont fait de nombreuses
revendications, à l'intérieur d'un gouvernement ou l'autre, pour
obtenir une aide financière et même aller jusqu'à demander
une politique au gouvernement en place. Cela fait plusieurs années qu'on
l'attend.
Maintenant, on se dit qu'il va y avoir un organisme officiel. Mais il y
aurait peut-être lieu aussi que les organismes continuent à
pouvoir faire leurs revendications ou acheminer leurs revendications. Ce serait
peut-être une voie additionnelle à toutes celles qui actuellement
n'ont pas été entendues ou qui ont été entendues.
Et, avec la réalité que l'on connaît actuellement, il n'y
en a pas de politique de financement au moment où on se parle qui
pourrait être cohérente et qui pourrait éviter qu'à
l'avenir les organismes ne se convertissent en quémandeurs
d'État.
Mme Blackburn: Je dois dire que c'est une des
préoccupations qui m'a été souvent soumise par les jeunes.
J'ai rencontré plusieurs organismes de la jeunesse, et cela revient
régulièrement. Une des façons intéressantes qu'a
eue un organisme hier de le souligner, a été de dire:
L'insécurité est telle, elle n'est pas seulement par rapport
à la viabilité de l'organisme, elle est par rapport à la
permanence de celui qui est animateur au sein de l'organisme. Ils vivent
à la petite semaine et ils ne peuvent jamais investir leurs revenus dans
quelque chose d'un peu stable et à long terme.
Vous proposez une structure décentralisée. Je dois dire
que je trouverais cela intéressant si, comme on le disait tout à
l'heure, elle était véritablement une structure de jeunes,
appartenant aux jeunes, ou encore carrément une structure
gouvernementale, qui est un conseil au sens où on l'entend
généralement. Autrement, il risque d'y avoir confusion quant aux
attentes qu'on a è l'endroit de ce type d'organisme et quant à
l'utilisation qu'on pourrait éventuellement en faire. Les deux premiers
intervenants nous disaient tout à l'heure que la pertinence de
créer un conseil consultatif pour la jeunesse aurait été
plus évidente si cela s'était inscrit dans le cadre d'une
politique gouvernementale. Est-ce que vous partagez cet avis?
M. Messier (Guy): Ce qu'on pourrait mentionner, c'est qu'à
l'heure actuelle on peut se rendre compte qu'une politique qui touche la
jeunesse est inexistante. Il serait peut-être souhaitable qu'on puisse
voir certains énoncés de politique à plus ou moins long
terme, parce que dans les régions et sur le terrain on se questionne sur
ce qui va rester à la fin du présent exercice financier.
Tantôt, on soulevait toute la question de l'inquiétude devant les
perspectives qui ne traduisent pas la volonté du gouvernement. Donc,
qu'est-ce qui va arriver è partir du 1er avril? C'est une chose. On
pourrait souhaiter qu'il y ait une politique qui touche la jeunesse et que le
conseil permanent s'inscrive à l'intérieur de cette politique
comme étant un moyen pour les jeunes d'énoncer des avis ou des
recommandations au gouvernement.
Mme Blackburn: Seriez-vous davantage enclin à
suggérer qu'on reporte la création du conseil le temps de se
donner une politique de financement des organismes et une politique de la
jeunesse?
M. Gélinas: Évidemment, an ne peut pas être
en désaccord avec cela, avec le fait d'émettre une politique de
financement. Je pense qu'on a peut-être oublié un peu l'aspect du
ministre délégué. Qui va prendre en charge, qui va mettre
de l'avant cette politique de financement? On ne sait pas vraiment qui va le
centraliser. C'est peut-être une inquiétude qu'on a. S'il n'y a
pas de ministère, c'est peut-être difficile d'émettre une
politique. Il y a des énergies à mettre là-dessus. Le
ministre délégué est important à ce niveau. Lui va
probablement avoir suffisamment de force pour être capable d'influencer
ou d'avoir un impact sur les autres ministères, surtout que, quand on
parle de politique de financement, on va avoir affaires aux autres
ministères. C'est important et on n'y revient pas suffisamment.
Mme Blackburn: Vous souligniez à juste titre tantôt
qu'il y a des dangers qu'on voie diminuer considérablement les
ressources financières mises à la disposition des jeunes. Tout
à l'heure, le ministre nous disait, en réponse à la FAECQ
qui s'inquiétait de la question de savoir si c'est le Conseil permanent
de la jeunesse qui est la priorité ou si c'est la jeunesse qui est la
priorité, il les rassurait en leur disant que c'était vraiment la
jeunesse qui est la priorité. Mais, si on regarde les décisions,
on est enclin à croire que cela n'a pas été leur
première préoccupation; on dirait plutôt que c'est de
l'ordre des dernières préoccupations. Il y a eu des coupures au
secrétariat. Les postes de répondants au bureau de
Communication-Québec sont menacés. Ils doivent être abolis
le 1er avril, si mon information est juste. Il y a le gel des budgets des
maisons de jeunes. Pourtant, il y a des besoins criants. On a des
itinérants, ce qu'on appelle des sans-statut. Ils ont augmenté
l'endettement des étudiants de 24 000 000 $. Ils disent bien: On a
reconnu l'éloignement dans l'aide financière aux étudiants
pour environ 400 $, sauf qu'ils ont commencé par aller chercher 24 000
000 $ et ils retournent 3 400 000 $. C'est un cadeau de Grec, parce qu'ils
endettent tous, les jeunes du Québec de 270 $ de plus par année.
Il y a de façon générale une diminution des ressources
financières mises à la disposition des organismes jeunesse. Je
trouve que cette situation a de quoi préoccuper. Je crains que le
débat qu'on est en train d'avoir n'ait comme fin de détourner
l'attention des difficultés réelles qu'éprouvent les gens.
Pendant qu'on est ici, ce que j'apprécie beaucoup, on ne nous a pas
annoncé que cela donnerait naissance, dans les prochains mois, à
une politique de la jeunesse, à une politique de plein emploi, à
une politique de financement et de reconnaissance.
M. Gélinas: II est évident qu'on s'est posé
la question. On a eu cette inquiétude. On crée un conseil et on
élimine peut-être tout ce qu'il y a à côté.
L'exercice qu'on a fait quant aux chiffres, on l'a fait de façon un peu
plus globale. On est allé chercher des informations et on s'est
aperçu qu'il y avait des ressources qui tombaient d'un côté
et qu'il y en avait un peu qui allaient du côté du conseil
permanent. En tout cas, on a fait une proposition, nous autres, au niveau des
chiffres. On pense que cela pourrait être viable.
Mme Blackburn: Je trouve la proposition intéressante. Je
dois dire que je n'ai pas vraiment - je ne dirai pas d'opinion - mais de
réserves majeures quant à l'idée de créer des
services, parce que ce dont les jeunes ont le plus besoin, ce sont des services
en régions. C'est ce qui a été le plus affecté. Je
dis en régions, mais c'est aussi de façon générale,
car on a également coupé dans les grandes régions de
Montréal et de Ouébec. Je me dis que, si, véritablement,
la jeunesse était une priorité pour ce gouvernement, il me semble
que ce ne sont pas tout à fait les gestes qu'on aurait posés.
M. Messier (Guy): Est-ce que je pourrais me permettre...
Mme Blackburn: Oui, je vous en prie.
M. Messier (Guy): ...un ou deux commentaires? Concernant le
budget que nous avons proposé, j'aimerais apporter une précision.
Le gouvernement a suggéré un budget de 2 500 000 $ avec le
Secrétariat à la jeunesse, qui est de 1 700 000 $. S'il est
reconduit à partir du 1er avril, selon des sources, avec un budget qui
touche le Conseil permanent de ta jeunesse d'environ 850 000 $, avec la
proposition que nous mettons sur la table, nous faisons gagner 600 000 $ au
gouvernement, si on s'en tient à notre proposition.
Deuxièmement, concernant la présence des ressources
régionales, on parle peut-être de grands centres, mais il ne
faudrait quand même pas oublier, dans la réalité, que le
Québec est immensément qrand. On retrouve de nombreuses zones
rurales qui sont grandement défavorisées. Les personnes qui sont
actuellement rattachées au Secrétariat à la jeunesse ont
fait leurs preuves dans le passé. On trouverait dommaqe que le
gouvernement coupe et retire cette présence régionale.
Le Président (M. Dauphin): Merci beaucoup, Mme la
députée de Chicoutimi. Il reste cinq minutes. M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Si on veut faire une
petite blague, depuis hier, depuis que j'assiste à l'audition des
mémoires, on a vu des représentants des jeunes des régions
et je me suis aperçu que le seul représentant du
côté libéral n'a même pas posé de questions
à des jeunes qui représentent une très vaste région
au Québec.
Je dois dire aussi que j'ai été un 'peu surpris par le
député de Saint-Hyacinthe quand il a porté à
l'attention de la commission, par ses questions, le fait qu'il n'était
pas au courant qu'il y avait des organismes de jeunesse qui existaient au
Québec et qui avaient des difficultés provenant du changement de
gouvernement de 1985.
Je m'explique. Pour les maisons de jeunes en particulier, on avait une
politique qui était claire, nette et précise. Les gens qui
entraient à l'intérieur de ce budget savaient où ils
allaient pour les années a venir. On a d'abord gelé le budget,
Deuxièmement, quand on a commencé à créer de
nouvelles maisons de jeunes, dans certains cas, on est allé
au-delà de la politique qui avait été établie avec
les maisons de jeunes, de sorte qu'on s'est retrouvé avec une nouvelle
maison de jeunes, cette année, avec des budgets plus gros que pour
celles qui fonctionnent depuis trois ou quatre ans.
Je ne veux pas uniquement jeter la pierre de l'autre côté.
Je dirai que même notre gouvernement - je veux être honnête
avec cela, M. Messier me connaît à ce niveau, j'ai mon
franc-parler - avait de la difficulté à obtenir, pour des
organismes comme le vôtre, l'argent nécessaire à leur
fonctionnement. Souvent, la réticence venait de l'organisme
administratif, que ce soit le Conseil du trésor, que ce soient les gens
à l'intérieur de l'appareil gouvernemental que sont les
fonctionnaires, qui ne s'apercevaient pas que, avec le même argent, des
organismes comme le vôtre faisaient plus de travail, quelquefois deux,
trois et même quatre fois plus de travail que l'appareil gouvernemental
qui, lui, avait besoin pour fonctionner de l'argent qui n'était pas
donné aux jeunes.
Je fais référence à ce que je disais hier soir -
j'en profite parce que M. Messier a participé aux discussions à
l'époque - sur ce qu'on a appelé - de façon plutôt
positive que négative - le groupe d'Action-Travail ou
Alternative-Travail Normandie au lieu de "Action-Chômage". On pourrait
dire que le problème des jeunes à l'époque - on
était au pouvoir à cette époque, et j'ai l'impression que
c'est encore la même chose aujourd'hui -c'est que des gens
empêchaient, pour toutes sortes de raisons, que l'argent leur soit
versé pour leurs besoins et les façons de l'exprimer et les
façons, surtout, de réaliser des actions. (13 h 15)
Tout à l'heure, la CEQ est venue devant nous et je lui ai
posé la question, elle disait: Retardons encore, on va plutôt
présenter un livre vert, on va faire une plus vaste consultation. Je
m'inquiétais, parce que, justement, ce que les jeunes demandent, c'est:
Arrêtons de palabrer et agissons plutôt à partir d'actions
bien concrètes. Ce que vous proposez, en partie d'abord, c'est de dire:
Si vous voulez que l'on ait un conseil permanent qui ait une forme de
représentativité et de crédibilité
nécessaire, il faut que l'on consolide davantage et qu'on enlève
à ceux qui représentent les jeunes, dans les organismes
communautaires jeunesse, au Québec, le quémandage qu'ils ont
à faire actuellement - je sais que cela leur prend 40 %, 50 %, 60 % de
leur temps dans certains cas - et qu'on leur demande ensuite de s'assurer que
l'argent est bien dépensé aux fins pour lesquelles il a
été donné. On se retrouve, finalement, dans tout un
charivari qui fait que les jeunes ne se retrouvent pas comme ils voudraient se
retrouver.
Ma question est la suivante: Qu'est-ce que vous proposeriez,
aujourd'hui, si vous étiez membres du Conseil permanent de la jeunesse,
pour consolider, développer et donner à ces organismes jeunesse
un financement qui ne soit pas à la petite semaine, mais un financement
à long terme? Qu'est-ce que vous avez dans la tête comme
proposition? Cette question, je vous l'ai déjà posée
ailleurs.
M. Gélinas: C'est une grosse question! Mme Blackburn:
C'est beaucoup...
M. Gélinas: Sans vouloir s'avancer sur la question, il est
évident que, comme dans toute décision à prendre ou dans
toute politique, il y a tout un processus d'analyse et de travail à
faire. On n'en est pas là parce que ce n'est pas cela que l'on a fait.
En tout cas, c'est évident que, s'il y a une politique de financement
d'organismes communautaires jeunesse, des critères vont s'établir
dans les secteurs, dans le champ d'intervention, etc. C'est là-dessus
que devrait se pencher... Je ne sais pas s'il y a des esquisses de faites sur
cela au gouvernement. On le propose. Si l'on nous demande de le faire, on va le
faire. Si on nous donne le mandat de le faire, on va le faire chez nous. Pour
le conseil permanent, ce serait une tâche intéressante que de
faire le défrichage sur ce plan, s'il n'y en a pas de
fait. S'il y avait un ministre délégué, il pourrait
donner le mandat à son personnel de recherche de voir à faire le
défrichage pour une politique de financement. En ce moment, je pense que
c'est assez disparate. Il y a des organismes qui sont financés par un
ministère et d'autres par un autre. Finalement, il n'y a rien de
consolidé. Donner une image complète, tout de suite, sur la
façon dont cela devrait se faire, je pense qu'elle serait erronée
parce qu'on n'a pas toutes les informations en main.
M. Jolivet: Est-ce que je pourrais vous poser une dernière
question? Oui? Je m'excuse.
Mme Leblanc: Je voulais dire que les jeunes, au Québec, ne
sont pas tellement présents dans l'appareil gouvernemental, que ce soit
dans l'Opposition ou dans le parti au pouvoir, II serait grandement temps que
l'appareil gouvernemental comprenne que les jeunes, comme je l'ai dit un peu
plus tôt, sont une fraction dynamique et innovatrice de la
société québécoise. Les jeunes, c'est beaucoup de
monde au Québec. Il serait grandement temps qu'on les reconnaisse et
qu'on leur donne un droit de parole. Parmi les façons de faire, il y en
a une qui nous est proposée et on a présenté un
mémoire là-dessus. Ce n'est peut-être pas la meilleure,
mais ce n'est pas la seule non plus.
M. Messier (Guy): Pour répondre a votre question, je
dirais qu'il y a peut-être deux critères qu'il s'agirait de
retrouver en termes de politique de financement: premièrement, assurer
une permanence à l'intérieur de laquelle il y aurait un
mécanisme d'évaluation pour ne pas que, du jour au lendemain, on
coupe de façon draconienne, sans en évaluer l'impact;
deuxièmement, avoir une certaine latitude dans le financement. Le gros
problème que l'on éprouve dans les organismes jeunesse, c'est que
tout ce qui vient du gouvernement est normalisé à un point tel
que l'on n'a plus de latitude. Donc, que l'on fasse confiance aux organismes
actuels qui pourront se développer et qu'on leur laisse une latitude
d'action, avec un certain montant d'argent qui pourra leur permettre
d'être plus créatifs.
M. Jolivet: Juste une dernière question. Quand vous
regardez la formation du Conseil permanent de la jeunesse, n'avez-vous pas un
peu la crainte que ce soit la panacée a toutes les difficultés
que connaît la jeunesse, aujourd'hui, dans le sens où l'on dit
à ces gens: Vous allez avoir tellement de choses à faire que les
organismes qui, actuellement, bouillonnent dans le milieu, des organismes qui
veulent que la jeunesse s'exprime, vont dire: On a quelqu'un qui va nous
représenter - c'était un peu la question de ma collègue
tout à l'heure - de telle sorte que, finalement, nous ne bougerons plus
en bas, il n'y a qu'eux qui seront les porte-parole? N'y a-t-il pas un danger
que, finalement, on s'assoie là-dessus et que l'on dise: On va les
laisser travailler et que l'on recule plutôt que d'avancer? Par le
bouillonnement des idées dans le milieu, des actions vont être
posées qui vont amener le conseil à agir. Alors que, si on les
laisse aller seuls, ils riquent d'être récupérés par
d'autres, par des mandats qu'on peut leur donner.
M. Messier (Guy): Je tiens juste à dire que vous avons
élu des représentants du peuple et, malgré tout cela, il y
a quand même bien d'autres mécanismes et bien d'autres moyens que
les gens, à la base, utilisent pour aller chercher ce dont ils ont
besoin.
M. Jolivet: Des manifestations?
Mme Blackburn: Y compris les élections tous les quatre
ans.
Mme Leblanc: M. le Président, si vous me permettez un
commentaire. Sans vouloir être méchante ou mordante, je pense que,
si le gouvernement connaissait la jeunesse au Québec, il n'aurait pas
proposé une commission parlementaire aux jeunes du Québec, mais
peut-être, une commission parlementaire itinérante parce que les
jeunes du Québec - je viens de la Gaspésie, je suis
expatriée, mais je sais bien que, si j'étais en Gaspésie,
je ne me serais pas présentée ici aujourd'hui - n'ont ni le temps
ni l'argent; c'est aussi une réalité.
Le Président (M. Dauphin): Alors, Mme la
députée de Chicoutimi, très brièvement.
Mme Blackburn: Pour conclure brièvement, je dois rappeler
que c'était la demande qu'on avait faite au gouvernement d'une
commission itinérante. Le gouvernement se vante d'une bonne
participation. Je voudrais lui rappeler qu'il y a quelque 750 organismes et
qu'il n'y en a pas tellement ici qui auront l'occasion de se prévaloir
du droit de parole.
Pour votre réflexion, j'aurais le goût... J'aurais voulu
poser une autre question, mais on pourra en parler à un autre moment.
Plutôt que de confiner les jeunes au sein d'un organisme qui s'appelle le
Conseil permanent de la jeunesse, ne serait-il pas préférable de
leur permettre d'investir tous les autres lieux du pouvoir en s'assurant qu'ils
soient présents un peu partout?
Je vais vous laisser là-dessus. Je vous remercie infiniment de
votre présence ici. Les propos que vous avez tenus et de même
que l'éclairage que vous apportez sur le projet de loi, sur la
condition des jeunes vont nous être particulièrement
précieux. Je vous remercie.
Mme Leblanc: Face à ce que Mme la députée
vient de nous... Personnellement, j'ai investi des organismes autres et c'est
tellement folklorique parce que minoritaire que, finalement, depuis trois ans
je suis commissaire d'école et je me pose la question: Qu'est-ce que je
fais là? Parce qu'il n'y en a pas de jeunes.
Le Président (M. Dauphin): Excusez-moi, mais le
député de Saint-Hyacinthe avait d'autres questions.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Peut-être un commentaire. Je
ne voudrais pas politiser le débat, la cause des jeunes est beaucoup
trop noble. Vous conviendrez avec moi qu'après dix ans d'inaction,
lorsqu'on est arrivé au pouvoir, la feuille de route était vierge
et vous conviendrez avec mot qu'après un an et demi de pouvoir...
Une voix: Non, non.
Le Président (M. Dauphin): À l'ordre! À
l'ordre!
M. Messier (Saint-Hyacinthe): ...je fais référence
à ce que madame a dit: Dans la Société d'investissement
jeunesse, le gouvernement n'est pas présent, c'est laissé aux
jeunes. D'ailleurs, il y a un très jeune directeur général
qui est à recueillir avec un conseil d'administration du privé
des fonds pour garantir des prêts de risque pour les jeunes qui veulent
lancer une entreprise. C'est déjà une réalisation
concrète qui devrait démarrer sous peu.
Une voix: La plus belle réalisation, c'est celle qu'on
vous a laissée.
Mme Leblanc: On aurait des commentaires de la
Délégation Jeunesse à ce sujet.
Une voix: Le déficit.
Mme Leblanc: Pendant près d'un an, la
Délégation Jeunesse a essayé de se faire entendre au sujet
du projet de loi 103, Loi sur la Société d'investissement
jeunesse, mais elle n'a pas été écoutée.
Une voix: À ce niveau-là...
Mme Leblanc: C'est la réalité qu'on a vécue
sur un autre projet de loi et je tiens à le préciser. La
Société d'investissement jeunesse, la réalité
actuelle, c'est à la Bourse de Montréal, au 20e étage - je
m'excuse, je parle encore des régions périphériques. Je
vois difficilement comment un jeune va partir de l'Abitibi, peu importe, ou de
Chicoutimi, pour venir à la Bourse de Montréal proposer son
dossier.
M. Gélinas: Je pense que certains le savent ici, cela fait
longtemps qu'on travaille au projet de loi de la Société
d'investissement jeunesse. On a envoyé des avis à M. Bourassa
l'an dernier, cela fait déjà plus d'un an de cela; on a
même rencontré les gens qui s'occupent de la Société
d'investissement jeunesse. On a discuté avec eux de possibilités
de régionalisation. En tout cas, on a essayé d'amener toute
l'expertise qu'on avait parce qu'on avait une expertise sur la question et,
c'est dommage, mais peu importe le parti, ce n'est pas ce qui nous
intéresse, c'est la réalité, et la réalité,
c'est qu'on n'a jamais été entendu à notre juste valeur
dans ce dossier.
Quand on parle d'interventions de jeunes, je pense que c'est le meilleur
exemple pour dire que c'est très difficile pour un groupe de jeunes en
régions de s'immiscer ou de pouvoir être consultés sur des
dossiers jeunesse. Cela a été soulevé aujourd'hui et je
suis content que ce soit soulevé parce que...
Le Président (M. Dauphin): M. le député.
M. Messier (Sainte-Hyacinthe): Vous allez convenir avec moi
qu'à la Société d'investissement jeunesse, je pense, votre
porte-parole, c'est quand même le directeur général, il y a
un conseil d'administration, les pararamètres de la
régionalisation ne sont pas encore arrêtés et je pense que,
lorsque vous dites qu'il n'y aura pas de régionalisation, c'est
peut-être aller un peu loin. Il y aurait lieu d'aller voir...
Pour revenir au mémoire que vous avez présenté ce
matin, selon votre organigramme, au niveau de la direction
générale, vous avez donné quatre mandats: documentation,
recherche, liaison et communication. Je regarde le rôle dévolu
présentement au Secrétariat à la jeunesse. Est-ce que je
comprends que vous voulez transférer cela au Conseil permanent de la
jeunesse ou si ce sont deux choses différentes? Qu'est-ce que c'est? Au
Secrétariat à la jeunesse, il est bien identifié
qu'effectivement il y a un module recherche, développement, liaison,
communication et documentation. Le Conseil permanent de la jeunesse est une
unité revendicatrice concernant... Et, si je regarde le
Secrétariat à la jeunesse, c'est une unité administrative.
Quelle est la liaison que vous faites entre les deux? Est-ce que ce sont des
choses différentes?
Mme Leblanc: Comme je le disais un
peu plus tôt, le mandat que nous voyons au Secrétariat
à la jeunesse, c'est un mandat de concertation
interministérielle, et on ne pense pas que cela demande une direction
générale avec toutes les... C'est vraiment un transfert qu'on
faisait au Conseil permanent de la jeunesse.
Le Président (M. Dauphin): Je remercie les
représentants de la Délégation Jeunesse, région 04,
pour leur participation. Nous suspendons nos travaux jusqu'à 15 heures
pour entendre le Centre d'aide aux défavorisés l'AMY.
(Suspension de la séance à 13 h 26)
(Reprise à 15 h 5)
Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous
plait!
Nous devons avoir le quorum pour débuter et nous l'avons. Je
souhaite la bienvenue au Centre d'aide aux défavorisés l'AMY.
Bienvenue à M. Denis Roy, à M. Proulx, de même qu'à
M. Jean-Pierre Tessier. On vous souhaite la bienvenue à notre commission
parlementaire et, sans perdre de temps, nous commençons. M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Une explication pour le
bénéfice du Journal des débats. Ce midi, j'ai mangé
avec des gens qui se demandaient qui était président de
séance en dernier; c'était M. Claude Dauphin. J'aimerais saluer
les gens de la transcription; ils nous entendent, ils transcrivent
immédiatement et il y avait des points d'interrogation à savoir
qui était président de séance en fin de matinée.
Merci.
Le Président (M. Marcil): Cela va. On vous souhaite la
bienvenue et, sans plus tarder, on vous incite à faire votre
exposé afin de pouvoir engager une discussion immédiatement
après. Vous avez vingt minutes.
Centre d'aide aux défavorisés
l'AMY
M. Proulx (Jean): Merci. Avant de commencer, pour que ce soit
clair, on aimerait rectifier deux petites erreurs qui se sont glissées
dans notre mémoire, dans l'historique du Centre d'aide aux
défavorisés. On dit qu'on a mis sur pied le Carrefour
d'initiatives-jeunesse en décembre dernier. Ce n'est pas en
décembre 1986, mais bien en décembre 1985, cela a
été écrit à l'automne. À la page 4, on dit!
"Il faudrait prévoir dans la loi un mécanisme de convocation des
organismes jeunesse pour qu'ils élisent leur collège
électoral. C'est écrit "dans les deux ans", mais c'est "tous les
deux ans".
Là-dessus, je vais vous dire comment on a l'idée de
procéder. Étant donné que vous avez tous le mémoire
en main et que vous l'avez lu, on n'a pas l'intention de le
répéter ici, mais plutôt d'essayer de vous expliquer ce
qu'on fait au Centre d'aide aux défavorisés l'AMY dans un premier
temps et surtout dans quel cadre général se situe pour nous, le
Conseil permanent de la jeunesse. On va parler aussi sûrement des
améliorations à apporter au projet de loi tel que
présenté.
La corporation l'AMY de Nicolet a définitivement pris une option
pour les personnes défavorisées. Je pense que cela va ressortir
dans tout ce qu'on va dire cet après-midi: on travaille avec les
personnes défavorisées. Ce qu'on veut faire avec les personnes
défavorisées, c'est leur dire qu'elles sont quelqu'un, ces
personnes, parce qu'elles ne le savent pas, on leur dit qu'elles sont des bons
à rien. Nous sommes convaincus que tout le monde est quelqu'un et que
tout le monde peut faire quelque chose. C'est notre leitmotiv de départ:
Tu es quelqu'un dans la vie, il faut que tu fasses de quoi avec toi, tu ne
resteras pas là. Ce qu'on veut, c'est leur donner une espérance,
l'estime d'elles-mêmes; on veut que ces personnes se sentent utiles
à quelque chose, car elles ne se sentent utiles à rien
présentement.
On veut aussi les aider à se trouver un projet de vie, Ces
personnes n'ont aucun objectif à court ou à long terme, tout ce
qu'elles veulent, c'est manger ce soir, avoir un logement. Elles n'ont aucune
vision plus large de cela, elles n'ont aucun projet, elles ne savent pas
où elles s'en vont. Nous, c'est ce qu'on veut qu'elles trouvent en
dedans d'elles-mêmes. On veut qu'elles se prennent vraiment en main, ces
personnes, qu'elles se prennent en charge, mais c'est extrêmement
difficile de travailler avec elles parce que la société est
bâtie pour les riches et elles le savent.
Nous, on leur dit: Embarque, fais quelque chose, mais la
société est bâtie pour les riches et elles le savent. Qu'on
pense à la politique du gouvernement qui s'en vient, qu'on pense
à la privatisation, qu'on pense aux subventions aux entreprises, qu'on
pense aux abris fiscaux pour les compagnies. Il y a 75 000 compagnies au Canada
qui ne paient pas d'impôt; moi, j'en paie et je n'ai pas un gros salaire.
Ceux qui gagnent 4,35 $ l'heure, ils en paient aussi et ils n'ont pas un gros
salaire. C'est assez difficile de travailler avec elles quand c'est le
schème global que tu as.
Le désengagement de l'État dont on parle
présentement dans le rapport Gobeil, c'est la même chose. Encore
moins de ressources vont aller aux plus démunis, aux plus pauvres;
encore plus de ressources vont aller aux compagnies et aux gens qui sont
plus aisés. Donc, c'est vraiment un État au service des
riches et ce n'est pas seulement ici, au Québec, il ne faut pas s'en
faire, c'est pas mal partout. Nous, on dit que l'État doit être au
service de tous, l'État doit être au service de tout le monde et
plus particulièrement au service des personnes les plus démunies.
On pense qu'il doit y avoir une plus juste répartition de la richesse
collective. Le Québec est assez riche pour faire vivre tout le monde.
Cela ne se peut pas qu'il y ait des pauvres au Québec, mais c'est ce qui
se passe présentement.
L'État devrait permettre à chacun de se responsabiliser
dans la société, d'être utile à quelque chose. On
peut penser, par exemple, aux industries japonaises. De plus en plus, les gens
qui travaillent dans les usines sont responsables de quelque chose dans
l'usine, ils se sentent responsables et ont une productivité meilleure.
Ils se sentent utiles à quelque chose, ils ont quelque chose à
faire, ils ne sont pas des robots. Il y a des robots au Japon, mais ceux qui
travaillent ne sont pas des robots, ils se sentent utiles à quelque
chose et c'est cela qui est important.
Actuellement, les personnes les plus démunies, on les laisse
carrément de côté, on ne leur donne pas la chance de
participer, on ne leur donne pas la chance de développer leurs
capacités et leurs talents. Et après cela, on dit que ces
personnes-là sont paresseuses. C'est le discours qu'on lit dans les
journaux et partout. On dit que ces personnes-là sont paresseuses.
Je parle des personnes démunies en général, sauf
que les jeunes font pas mal partie de cette "gang". C'est cela que les jeunes
vivent. Ils sont laissés de côté. Ils n'ont pas le
goût de s'impliquer. Pourquoi? Ils sont peu scolarisés. Ils
laissent l'école à 16 ans. Pourquoi? II y a 42 % des jeunes qui
n'ont pas terminé leur secondaire V sur notre territoire. Ils ont des
problèmes de drogue, des problèmes de vandalisme, de suicide. Il
y a quatre ou cinq tentatives de suicide par mois sur le territoire du
diocèse de Nicolet. On peut se demander pourquoi, encore. Ils ne sont
pas politisés, ils n'ont le goût de rien. Pourquoi? Parce qu'ils
n'ont pas leur place. Ils n'ont pas la chance de développer leurs
talents, ils n'ont pas la chance de se faire valoir en tant qu'êtres
humains.
Je vais laisser la parole à Jean-Pierre qui va continuer.
M. Tessier (Jean-Pierre): C'est sûr que je suis bien
conscient que j'ai ma part à faire dans la société. Depuis
trois mois que je me suis sorti de la drogue, je me dis que, face à ce
qui se passe dans la société aujourd'hui, j'ai bien de la
misère à repartir en neuf parce que je vois que je suis toujours
mis à part. Je me dis que, probablement de ma part, mais je crois aussi
de la part des gouvernements et de la société, ce n'est pas le
passé qui doit nous préoccuper, mais c'est surtout l'avenir. Nos
besoins? Je pense qu'on a beaucoup besoin de formation, d'information aussi,
pour mieux nous développer et prendre notre place dans le système
politique, vu qu'on n'est pas tellement informés du système
politique, moi en tout cas.
J'aime bien aussi les subventions pour aider les jeunes - il y a Jeunes
volontaires et plusieurs programmes - sauf que, encore là, je me dis
qu'on est toujours sur le bien-être social et c'est toujours des petits
salaires de 1,87 $ l'heure qu'on gagne à faire des 20 heures par
semaine. Je me demande pourquoi il n'y aurait pas une politique de l'emploi. On
pourrait les payer, nous aussi, nos médicaments et tout ce qui suit au
lieu d'avoir un chèque du bien-être social à 170 $ par
mois. Comme on le fait présentement au carrefour, on dit aux jeunes: Les
jeunes comme toi qui ont le goût de se prendre en main et qui cherchent
une occasion de s'impliquer dans un milieu de vie qui leur ressemble, on est
quasiment obligé de leur faire des repas à prix modique. Avant,
c'était des soupers; maintenant ce sont des dîners et des soupers
à 1 $ parce qu'ils ont seulement 170 $ par mois.
En plus, des occasions de travail temporaire avec les Jeunes
volontaires, on est bien conscient que cela nous supporte beaucoup, mais on ne
sait jamais quand cela finit, on ne sait jamais quand cela commence et on ne
sait jamais où aller avec cela. On leur donne des activités de
loisir et de formation, mais ils ne peuvent pas être prêts pour la
formation s'ils voient qu'en haut cela ne se dégage pas. Tu as beau
suivre un cours à l'université, un cours de quoi que ce soit,
s'il n'y a pas de débouchés, s'il n'y a rien, qu'est-ce que cela
donne de suivre des cours? Qu'est-ce que cela donne de se former si on n'est
pas motivés à s'en sortir et à faire face à la
société? La société pense que les démunis
sont des bons à rien, mais je ne pense pas qu'on les utilise à
leur valeur.
Je me sentirais bien plus présent dans la société,
je me prendrais bien plus en charge vis-à-vis de la
société, je serais peut-être bien moins voleur, je serais
peut-être bien moins drogué et je serais peut-être bien
moins porté à faire des mauvais coups si je me sentais utile dans
la société. J'ai le goût de m'embarquer dans le
système politique, mais je ne sais pas comment cela marche. J'ai besoin
d'appuis aussi pour continuer de la part du gouvernement, de la
société et de tout le monde qui m'entoure. J'ai besoin de tout
cela. On a aussi besoin d'une maison pour se sentir utile, pour se sentir
important dans notre projet de vie de société, d'une maison
d'appartenance où on peut se
retrouver parmi d'autres gens, où on peut se sentir
apprécié, pas juste démuni. Cela ne m'intéressera
pas toujours de vivre sur le bien-être social à 170 $ par mois
parce que ce n'est pas ma propre vie. Ce n'est pas moi qui ta gagne. J'aimerais
bien mieux avoir mon salaire. Je pourrais payer tous mes repas et toutes mes
choses. Je n'aurais pas besoin de faire des repas à prix modique pour
les jeunes. Ils pourraient payer leurs repas. Là, on est obligé
de leur faire des repas à prix modique. Je trouve cela assez
révoltant, surtout dans le système dans lequel on vit
aujourd'hui. Il y a assez de drogués, assez de suicides et on se demande
toujours pourquoi. (15 h 15)
Nous autres, comme êtres humains sur la terre, est-ce qu'on est
ici pour bâtir ensemble pour les êtres humains ou si on est ici
pour se détruire entre nous? Est-ce qu'on est ici pour se garder
rancune, pour bâtir des armes, pour faire la guerre ou pour
résoudre des problèmes? Pourquoi ne pas s'en parler?
Après, on peut envisager des réponses. Je ne pense pas que ce
soit le fusil qui va répondre à des choses. Je ne pense pas que
ce soit la guerre. Je ne pense pas que ce soit aussi la révolte. Je ne
pense pas que ce soit des coupures budgétaires. Je ne pense pas que ce
soit le bien-être qui va résoudre ces problèmes-là.
Je pense plutôt à l'être humain. Comment cet être
humain sera-t-il heureux? II se sent toujours démuni. Il se sent
toujours mis à part. Au prix où sont les logements et la bouffe
aujourd'hui, on ne peut pas vivre; on est quasiment obligé de voler; on
n'a pas le choix. On en cherche de l'ouvrage, mais il n'y en a pas. On en veut,
mais il n'y en a pas.
Ce que je me dis en tant que jeune, c'est: Ne craignez pas d'investir en
nous. La jeunesse, c'est l'avenir et l'avenir, c'est demain. Ayez confiance,
nous vous le rendrons bien.
À présent, je donne la parole à Denis Roy.
M. Roy (Denis): C'est bien certain que, si on pense que l'avenir
est dans les jeunes... Je suis impliqué moi-même dans le Centre
d'aide aux défavorisés l'AMY. Je crois qu'on répond
vraiment à environ 20 % de la population qui vit des situations
très alarmantes.
C'est pour cela que nous sommes heureux à la corporation de voir
une politique et on dit: D'accord, on est pour la création d'un Conseil
permanent de la jeunesse, mais pas n'importe comment. L'idée
première d'avoir un conseil, d'avoir une communication pour être
capable d'aller chercher toujours ce que pense la base, c'est vraiment
important pour redonner aux jeunes cette conscientisation, pour qu'ils puissent
s'informer et prendre une décision. Aussi longtemps que les jeunes ne
sentiront pas que ce sont eux qui prennent les décisions, que ce sont
toujours d'autres personnes politisées qui prennent les
décisions, je ne pense pas que les jeunes vont prendre leur place,
qu'ils vont aller de l'avant.
On est heureux qu'il y ait un conseil, mais on ne voudrait pas le voir
fait de n'importe quelle façon. La première chose qu'on devrait
respecter, c'est qu'actuellement il y a des efforts faits au Secrétariat
à la jeunesse. Pour nous, le travail a été fait par eux.
On le trouve important. On dit aussi que cet organisme a une bonne connaissance
du milieu jusqu'à maintenant. C'est pour cela qu'on dit dans notre
mémoire qu'il faudrait être capable d'incorporer dans une seule
structure, à même ce nouveau Conseil permanent de la jeunesse,
l'expérience et la structure déjà mises en place par le
Secrétariat à la jeunesse.
Si on divise pour s'affaiblir, on ne fonctionnera pas. Toute
institution, surtout sur la jeunesse, si on peut l'incorporer dans une seule
structure de communication, je pense que c'est important. À notre point
de vue, il ne faudrait pas toujours recommencer. On commence avec un
système, on l'arrête, on en prend d'autres. On dit qu'une seule
structure de communication, ce serait vraiment intéressant.
On pense que ce serait le Secrétariat à la jeunesse qui
aurait à mettre en place les structures de base. Quant aux articles 16
à 24 de votre projet de loi, on dit: Whoops! ce n'est pas le ministre
qui doit nommer. Partout où c'est le ministre qui décide, on n'y
croit pas parce que, si on veut que les jeunes se prennent en charge, il faut
que ce soient les jeunes qui décident.
On prétend que les associations, les groupes qui sont
constitués actuellement dans les régions, le Secrétariat
à la jeunesse les connaît et on se connaît entre nous. Un
individu qui a un peu de leadership, qui veut aller plus loin, qu'il se fasse
reconnaître par trois associations au moins et que cet ensemble de
candidats qui sera formé à partir des associations se regroupe
pour former le collège électoral. Au sujet du collège
électoral, nous autres, on dit: II faudrait absolument que toutes les
régions soient représentées. C'est pour cela qu'on dit
dans notre mémoire que, dans les huit régions dans les centres
autres que Montréal et Québec, il y ait au moins trois
représentants nommés par les gens qui ont été
reconnus par les associations. Je pense que les jeunes ensemble dans les
régions, ils se connaissent et, en plus, ils vont se sentir, eux,
proches des gens qui ont été nommés par eux. Ils vont se
sentir vraiment partie prenante. Ils vont être intéressés
à revenir en bas pour dire ce qui se passe plus haut.
À Montréal et à Québec, parce que ce sont
deux centres plus grands, au lieu d'en
avoir trois, sept pour Montréal et cinq pour Québec, pour
former un total pour !e collège électoral de 36 personnes
nommées par la base ensemble. Ces 36 personnes, elles, pourront
élire ensemble le conseil permanent. Je pense que chaque région
doit avoir au moins un représentant pour qu'on sache ce qui se passe. Si
on veut que la communication se fasse bien du haut en bas, il faut absolument
qu'il y ait au moins un représentant pour chacune des régions et
trois autres qui pourraient être nommés n'importe où dans
la province, des gens qui ont une connaissance plus grande et un dynamisme plus
grand qui font partie du conseil permanent qui est composé de treize
personnes.
Au-dessus de tout cela, il est bien certain qu'on a besoin d'un parti
politique, d'un gouvernement qui dit: Moi, j'ai une volonté politique,
mais une volonté politique pour redonner à la base les
décisions qui permettent une communication qui peut se faire de la base
vers le haut et non pas toujours dire: Moi, comme ministre, il faut bien que je
décide telle chose ou bien je vais aller consulter. On fait semblant de
nous consulter pour décider ce qu'on veut.
Je pense que les jeunes en ont assez d'avoir des semblants. Pour qu'ils
se prennent en main, il faut absolument leur redonner leurs
responsabilités. II faut que les jeunes deviennent vraiment
responsables. Cela veut dire que, pour nous autres aussi, c'est sûr que
le collège électoral doit rester, si on veut que la communication
se fasse de haut en bas. La volonté politique du gouvernement, c'est
qu'il y ait le Conseil permanent de la jeunesse, mais le collège
électoral doit rester parce que ses représentants vont aller de
haut en bas pour venir rejoindre les associations.
Comme dernier point que je trouve bien important, si vraiment on dit que
les jeunes sont importants, qu'ils sont l'avenir, que c'est une
priorité, on espère, nous autres, avoir un ministère de la
Jeunesse et que le ministre aussi fasse partie du Comité des
priorités. On sait qu'au gouvernement les grandes orientations, les
grandes décisions sont prises par un Comité des priorités
qui décide de pas mal tout. C'est lui qui a l'argent et c'est lui qui
décide tout cela. Si on dit que les jeunes, c'est l'avenir, il faudrait
que ce ministre fasse partie du Comité des priorités et je pense
que de cette façon, on pourrait bâtir un peu pour demain.
C'est un peu l'ensemble de l'exposé. C'est bien certain que, pour
nous, quand on regarde les défavorisés, on les sent
écrasés, on les sent petits; on sent qu'ils n'ont pas de projet
de vie. Mais, avant de leur donner un projet de vie dans une
société qui est bâtie vraiment sur l'argent et le profit,
on dit, premièrement, que notre volonté politique devrait
être basée sur l'être humain avant le profit. Il serait bien
nécessaire, en tout cas, que le courant aille un peu à
l'envers.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. Roy, M.
Proulx et M. Tessier. On va maintenant passer à la période des
questions.
M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Merci. J'aimerais, au nom de notre
formation politique, vous remercier pour votre exposé et vous remercier
aussi - malheureusement, je n'ai pas pris votre nom en note - pour le vibrant
témoignage que vous nous avez donné tout à l'heure. Je
pense que vous faites réaliser aux membres des deux formations
politiques que vous êtes peut-être tannés d'attendre et que
vous attendez des actions précises. Je pense que le conseil permanent
peut être une action gouvernementale précise pour entendre les
gens comme cela et trouver des moyens efficaces ou, à tout le moins,
possibles pour résorber la crise de la jeunesse.
J'aimerais vous féliciter aussi pour votre prise de position
conernant les plus mal pris dans notre société. À
Saint-Hyacinthe, on a certains réseaux alternatifs, en particulier le
Centre de bénévolat, la Maison l'Alcôve Inc., et La
Clé sur la porte Inc., qui semblent répondre, pour la
région de Saint-Hyacinthe, sensiblement aux mêmes
préoccupations que vous avez mentionnées dans votre texte. Je
trouve cela relativement important que cela soit étendu plus qu'à
la région de Saint-Hyacinthe, et à la région de Nicolet,
mais aussi au niveau provincial. Je trouve cela relativement important que
l'implication du milieu se fasse.
Dans d'autres discussions, d'autres intervenants nous ont
mentionné le problème d'itinérance. On sait que, dans la
région montréalaise et peut-être la région de
Québec, on a certains problèmes. Est-ce que vous, en
régions, vous vivez la même chose et de quelle façon
résorbez-vous cela ou pouvez-vous les aider?
M. Proulx: Nicolet, c'est certain, est une petite ville. Il n'y a
pas autant d'itinérants qu'il n'y en a à Montréal, par
exemple, sauf qu'il y en a qui viennent chez nous aussi. Cela n'a
peut-être pas été dit clairement, mais on a mis sur pied
une maison qui s'appelle le Carrefour d'initiatives jeunesse où on fait
de l'accueil et où on fait de la formation avec les jeunes. On leur sert
des repas et on fait du dépannage de coucher aussi. Il est arrivé
des itinérants. Il en est arrivé un de Thetford-Mines avant les
fêtes et un de Québec il n'y a pas longtemps. On les accueille,
ces jeunes.
De quelle façon les aide-t-on? C'est exactement de la
façon dont on a parlé. Ce
qu'on veut, c'est leur faire prendre conscience que, tant qu'ils vont
rester dans leurs problèmes de drogue, de vandalisme, tout ça,
ils n'ont aucune chance de s'en sortir. On veut qu'ils se trouvent un projet de
vie: Qu'est-ce que tu as envie de faire dans la vie et, à partir de
là, quels sont les moyens que tu peux te donner? Si tu restes dans la
"dope", non, tu ne t'en sortiras pas, Il faut que tu fasses plus que cela. En
même temps, il faut les conscientiser au fait que la
société n'est pas facile pour eux et que ça va demander
des efforts.
Jean-Pierre en est un exemple. L'été dernier, il
consommait de la cocaïne. Aujourd'hui, il s'implique, il fait quelque
chose, il a le goût de changer parce qu'il a compris que, s'il restait
comme il était, il n'avait aucune chance de s'en sortir. En même
temps qu'il travaille à améliorer son sort, il travaille pour
essayer de changer des choses. C'est pour cela qu'il est ici aujourd'hui et
c'est pour cela qu'on trouve que le conseil permanent est un bon outil pour
faire entendre la voix des jeunes. C'est pour cela qu'on est là.
M. Roy: Je voudrais ajouter un point pour vous montrer
jusqu'à quel point c'est important. Aujourd'hui, au niveau du
gouvernement, on a plus d'une structure, les travailleurs sociaux, etc., pour
prendre en main tous ces jeunes, ces défavorisés. Les jeunes
itinérants qu'on reçoit, ce sont justement les travailleurs
sociaux qui nous les amènent parce qu'eux travaillent de 9 heures
à 17 heures, et, les soirs et fins de semaine, ces jeunes n'ont pas
d'endroit. Cela veut dire que les maisons d'appartenance, c'est important; il
faut qu'on ait une structure pour les recevoir. Mais nous, il faut le faire
bénévolement, il faut le faire avec des miettes. On n'est
à peu près rien dans la structure.
Il faudra quand même reconnaître un jour que tout ne se fait
pas par le bénévolat. Il faut créer des structures,
trouver des moyens pour venir en aide aux fonctionnaires qui ne sont plus
là après 17 heures et les fins de semaine. Les itinérants,
on les accueille les fins de semaine. Entre la grosse machine gouvernementale
et les petits moyens qu'on a, il y a toute une marge. C'est pour cela que le
conseil permanent aura des choses à faire, il devra prendre les moyens
pour faire en sorte qu'il y ait des gens 24 heures par jour, sept jours par
semaine et non pas de 9 à 17.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): À la page 2 de votre
mémoire, en parlant des structures, vous dites: "Nous craignons
cependant que la création du CPJ entraîne la disparition du
Secrétariat à la jeunesse". J'aimerais vous rassurer. Le Conseil
permanent de la jeunesse est un organisme conseil auprès du gouvernement
comparativement au Secrétariat à la jeunesse qui est un organisme
administratif pour diffuser de l'information aux jeunes sur les politiques
gouvernementales. Je ne pense pas qu'il y ait de scission, de séparation
ou de fusion. Je pense que les deux unités sont vraiment distinctes.
Chaque unité a son rôle à jouer. L'une va aller chercher de
l'information et l'autre va diffuser l'information. Je pense que les deux
doivent exister; les deux sont viables et devraient être valables dans le
milieu des jeunes.
Vous avez parlé aussi, à la page 5 de votre
mémoire, de l'alternance des membres. Il y a plusieurs groupes qui ont
fait état de cette possibilité d'alternance. C'est évident
qu'on va regarder de près la possibilité d'alterner au conseil.
Il faut prendre en considération que le Conseil permanent de la jeunesse
est un outil pour les jeunes, autant au niveau de la possibilité de
faire partie du conseil, que pour le collège électoral d'avoir la
possibilité de se donner des priorités propres, de se donner des
modes de fonctionnement. Je pense que vous le faites ressortir, mais je
voudrais mettre plus d'emphase sur cela. Le conseil permanent est là
pour les jeunes, mais il s'agit que les jeunes s'en servent. Je pense que le
ministre en a fait mention ce matin. Le conseil permanent va être de
toute beauté si les jeunes s'en occupent, mais, s'ils le laissent de
côté, c'est évident qu'il va courir à sa mort. Je
pense qu'il y a une volonté et vous êtes là pour cela,
d'ailleurs. Il y a d'autres groupes de jeunes qui sont ici cet
après-midi et ils ont une volonté de concertation et une
volonté d'agir. D'autre part, je pense que l'Opposition et le
côté ministériel veulent des actions positives face aux
jeunes. Je pense que le conseil permanent peut être une de ces
solutions.
Vous faîtes mention dans votre exposé que chaque
région devrait élire des représentants au collège
électoral. Comme j'en ai fait mention ce matin, il peut y avoir des
disparités. Vous dites qu'il devrait y avoir sept sièges à
Montréal, cinq sièges à Québec et le reste, trois
sièges, dans les régions. De quelle façon les
régions comme Montréal et Québec devraient-elles choisir?
On sait qu'à Montréal il peut y avoir 200 groupes. Je n'ai
peut-être pas le nombre exact, mais il peut peut-être y avoir 200
groupes. Vous demandez d'en choisir sept, mais cela peut amener une certaine
bataille de savoir qui vont être les représentants officiels au
conseil ou au collège électoral. De quelle façon
voyez-vous ce mode d'élection ou ce mode de choix des organismes de
jeunes pour faire partie du collège ou du conseil? (15 h 30)
M. Proulx: Je le vois de la même façon pour
Québec ou Montréal que pour nous
autres. Pour nous, à Nicolet-Bécancour, on est à
une table de concertation. Il y a quinze organismes. Mais, si on
s'élargit, il y a toute la région 04 avec La Tuque,
Trois-Rivières, Victoriaville et Drummondville, on va arriver à
un nombre assez élevé aussi. Je pense que les jeunes sont assez
responsables pour se dire entre eux qui est le mieux placé pour aller
là, qui a le goût d'y aller. Je fais entièrement confiance
aux organismes jeunesse en régions, avec l'appui du Secrétariat
à la jeunesse, pour déterminer qui devrait aller au
collège électoral. De la même façon, je fais
entièrement confiance au collège électoral pour
élire treize membres - nous parlons de treize - parmi les trente-six
pour aller au conseil permanent.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): II y a un autre groupe qui a
soulevé hier la question des tables de concertation. Je connais le
mécanisme des tables de concertation, j'étais
vice-président d'une table de concertation à Saint-Hyacinthe
où on regroupait la quasi-totalité des organismes qui touchaient
de près ou de loin la problématique jeune. Lorsque vous parlez de
quinze, est-ce que cela touche les quinze organismes comme les CSS, le CLSC,
d'autres organismes aussi?
M. Proulx: Le centre d'emploi du Canada.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): D'accord. Ils sont tous
représentés, tous membres de la table de concertation?
M. Proulx: Ils ne sont pas tous membres. Ce n'est pas tout le
monde qui a voulu être membre, mais on est une quinzaine de membres.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Quant è leurs dissensions
par rapport à une table de concertation jeunesse, avez-vous des
idées là-dessus?
M. Proulx: En ce qui concerne le CLSC, chez nous c'est un manque
de disponibilité, un manque de temps. C'est toujours cela que l'on se
fait dire par les organismes que je dis institutionnels. On est même
très surpris d'avoir le centre Travail-Québec, et le centre
d'emploi du Canada à la table de concertation.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Peut-être une dernière
question avant de passer aux gens de l'Opposition. Entre guillemets, on peut
écrire le mot "balise" concernant le choix, tant au niveau du
collège électoral qu'au niveau du conseil. Vous demandez que
chaque région soit représentée au niveau du conseil ou du
collège électoral. Est-ce que vous pensez que cette balise
d'obliger le gouvernement ou le Conseil permanent de la jeunesse à avoir
des représentants de chaque région, ce n'est pas enlever un peu
de responsabilité aux jeunes de choisir qui devrait être
là, soit au conseil ou au collège électoral?
M. Proulx: C'est précisément pour cela que l'on dit
qu'il faudrait qu'il y ait au conseil d'administration trois autres personnes
qui pourraient venir de n'importe quelle région, qui seraient là
pas parce qu'elles appartiennent à telle région et que cela en
prend une de cette région, mais parce qu'elles ont une bonne expertise
des jeunes. Cela fait longtemps que ces gens travaillent avec les jeunes. Ils
ont un potentiel et une expérience qu'ils peuvent mettre au service de
tout le monde. On est d'accord avec la régionalisation et c'est
important, mais il ne faut pas, non plus, qu'au conseil ce soit dix
régions qui sont représentées; il faut que ce soit dix
personnes compétentes. C'est pour cela qu'on en ajoute trois pour
être sûr qu'il y ait au moins des personnes compétentes.
Cela ne veut pas dire qu'il va y en avoir dix autres, c'est bien certain, mais
c'est de cette façon que l'on pense qu'il y aurait le plus de chances
d'avoir des personnes compétentes au conseil permanent. Que ce ne soit
pas des régions qui soient représentées. Qu'il n'y ait pas
des représentants bidon comme en voit à certains conseils
d'administration. Des fois, cela prend quelqu'un et on dit: Vas-y.
M. Roy: Comme balise, si on oublie une région qui n'est
pas représentée, comment va-t-on prendre des décisions
à la base? Il faut absolument qu'il y ait au moins des
représentants dans chacune des régions pour qu'il y ait une
circulation de communication, de décision ou de tout ce qu'on a dit
tantôt. Si une région est isolée, toute seule, qui va la
représenter? Si on veut que les jeunes prennent les décisions
à la base, il faut absolument leur permettre d'avoir au moins un
représentant.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Cela a été
soulevé à maintes reprises. Il y a des catégories
d'activités. Il y a l'autre perspective régionale, l'autre
perspective hommes-femmes. Il y a plusieurs paramètres, il s'agit de
regarder cela.
M. Proulx: II y en aura trois à choisir là.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): D'accord. Pour moi cela va.
Le Président (M. Marcil): Avant de passer à Mme la
députée de Chicoutimi, j'aimerais savoir ce que veut dire
l'AMY.
M. Proulx: André, Mariette, Yves.
Le Président (M. Marcil): Merci. Mme
la députée de Chicoutimi.
Une voix: Ce sont les fondateurs de la corporation, ils sont
plusieurs personnes.
Mme Blackburn: M. le Président, messieurs, il me fait
plaisir de vous souhaiter la bienvenue au nom de ma formation politique. Je
devrais, d'abord, vous féliciter pour le travail que vous
réalisez. Vous faites dans votre milieu, et vous nous en avez fait la
démonstration, un travail utile, pour ne pas dire indispensable. Vous
avez - je pense à M. Roy, en particulier -parlé assez longuement
des difficultés qu'éprouvait votre organisme en raison d'un
financement qui était plutôt modeste et vous dites ne recevoir que
les miettes alors que vous avez de grands besoins et de petits moyens.
Également, M. Tessier nous a tracé un portrait assez
éloquent des difficultés qu'éprouvent les jeunes et, plus
particulièrement, vous nous avez longuement parlé - je dois dire
que cela m'a assez impressionnée -du mépris qu'on semble avoir
à l'endroit des jeunes en difficulté et des assistés
sociaux en particulier.
Avant de passer à des questions plus particulières sur le
mémoire, j'aurais aimé que vous me disiez un peu à quelle
occasion, plus particulièrement, vous sentez ce mépris à
l'endroit des jeunes assistés sociaux en général.
M. Tessier: Pour moi, présentement, je pourrais dire que
je suis chanceux parce que je suis sur un PDE, un programme de
développement d'emploi, pour 22 semaines. Mais avant, pendant au moins
trois ans alors que j'étais un assisté social, je vivais surtout
comme un drogué, ce que j'étais avant. Pourquoi je prenais des
drogues? Je voulais m'intégrer dans le système politique, je
voulais travailler. J'ai fait des études en ébénisterie,
mais il n'y a pas de sortie. Je me suis dit: Cela me donne quoi
d'étudier dans ce cas-là, cela me donne quoi de me forcer
à travailler s'il n'y a rien au bout de la ligne? Je me suis dit que, de
toute façon, je n'avais rien à perdre. J'aime autant me geler la
face et oublier tout cela. Parce que, pour moi, c'était bien trop gros
de voir tout cela en même temps, tout le gros système,
c'était trop gros à absorber pour moi. Mon système
n'était pas capable d'absorber cela.
Le jour où je me suis mis face à face avec moi-même,
je me suis dit: Moi aussi, j'ai un intérêt dans la
société. Si je veux changer, la société changera
peut-être aussi à un moment donné. C'est sûr, comme
je l'ai mentionné tantôt, je suis bien conscient que j'ai ma part
à faire dans la société. J'ai bien des changements
à faire face à tout cela. Dans ce temps-là, je me disais:
Je gagne 170 $ par mois, je suis dans un programme Jeunes volontaires à
150 $ par mois, j'ai vingt heures par semaine à faire, ce qui est
pratiquement impossible parce que, dans l'ouvrage qu'on faisait, on faisait 40
heures et cela nous donne 1,87 $ l'heure. D'accord, on va dire que nos
médicaments sont payés, nos lunettes sont payées, tout le
"kit" est payé, mais rien n'empêche qu'on travaille 40 heures par
semaine et qu'on a des petits salaires. On a de la misère à se
payer une liqueur, on a de la misère à se payer un
vêtement. Dans ce cas-là, je me suis dit: Cela ne donne rien de
travailler.
Tantôt, j'ai dit que je trouve les programmes de subvention super
parce qu'au moins c'est mieux que d'être sur le bien-être social.
Mais je me dis qu'il y a sûrement place pour l'amélioration
quelque part parce qu'on est toujours sur le bien-être social quand
même. On dit toujours que les jeunes sont des drogués, des
voleurs, en tout cas tout ce qui est négatif. Mais on est toujours sur
le bien-être social quand même. Ce sont toujours des programmes sur
le bien-être social. Je me dis, comme je l'ai dit tantôt: Pourquoi
pas une politique de l'emploi, pourquoi ne pas avoir un salaire? C'est nous qui
allons payer notre bouffe, c'est nous qui allons payer la réparation de
nos dents, nos lunettes et tout ce qui suit. Je me sens bien plus responsable
de moi si je travaille et si je gagne mon argent, mais si j'ai un salaire au
bout. Tandis que là je gagne 170 $, tout est payé.
Carrément, je m'en fous et je n'ai pas le goût de travailler parce
que je ne gagne pas assez cher et on rit de moi à 100 %. Avec ce qu'on
gagne là - 150 $ par mois, comme je l'ai dit tantôt, cela donne
1,87 $ l'heure - cela ne m'intéresse pas de travailler. Je suis bien
prêt à faire ma place dans la société, mais qu'on me
laisse une marge de crédit, qu'on me laisse fonctionner. Qu'on ne me
renferme pas en moi-même en me disant: Je vais te donner 1,87 $ l'heure.
C'est comme cela que je le voyais. Aujourd'hui, je ne le vois plus comme cela.
Mais... Je le vois encore comme cela. Je suis chanceux, je suis sur un
programme PDE. Mais je ne suis pas complètement content, parce que je ne
sais pas encore si je vais être engagé au bout des 22 semaines. Je
vais retourner sur le chômage. Qu'est-ce que je vais avoir après
cela? Je ne sais même pas ce qui va m'arriver. Je ne peux même pas
me garantir ce dont j'ai besoin: mes études, j'ai besoin de
vêtements, j'ai besoin de nourriture pour survivre. Je suis quand
même un être humain.
Dans le passé, je vivais, mais on ne voit pas ça, on
dirait. On va te payer tes médicaments, on va te payer tes lunettes,
etc., mais ta vie-santé, ta vie à toi, c'est quoi? C'est
d'être sur le bien-être social toute ta vie? C'est cela qui me
déboussolait et qui faisait que je me révoltais
complètement contre la société. Pourquoi il y a tant de
personnes dans les prisons qui se révoltent
après? II n'y a pas de sortie après. Ce sont des gars de
prison et on est toujours en train de les juger. Tu es un gars de prison? Non,
je ne t'engage pas ici. C'est quoi, les jugements qu'on porte envers eux
autres? Je suis bien d'accord qu'ils ont peut-être fait bien des erreurs
comme tant d'autres, mais pourquoi ne pas essayer de résoudre ces
problèmes et de leur faire comprendre? Si on donnait de l'ouvrage
à ces personnes-là, elles ne commettraient peut-être plus
de vols et elles ne consommeraient peut-être plus de drogues non plus.
C'est dans ce sens-là.
M. Roy: Je vais vous donner un ou deux exemples bien simples. Les
gens disent: Seulement le fait d'enlever l'indexation de l'aide sociale aux
trois mois, ce n'est pas quelque chose qui améliore quand, partout
ailleurs, on parle d'indexer les salaires. Mais eux autres ne sont pas en peine
pour toi. On a eu longtemps, des années soixante-dix à ce jour,
l'État-providence. Aujourd'hui, ce n'est pas vrai. Vous ne l'aurez plus
la providence; on va parler de l'État maximum. Mais les jeunes, à
170 $ par mois sur le bien-être social, ils n'avaient pas
l'État-providence; ce n'était pas cela qu'ils vivaient. Ce sont
tous des mots comme cela. L'État est bâti pour les riches, mais
les gens à faible revenu ressentent tout cela.
Quand les jeunes entendent-ils parler d'une politique de l'emploi ou
bien d'une éducation qui permette de découvrir l'être
humain, toute la capacité, tout le potentiel de l'être humain,
toute la grandeur de l'être humain? Non, on donne des connaissances pour
devenir rentable. Mais les jeunes qui ne connaissent pas leur être humain
disent: Bye Bye, les plus vieux. Ils ne veulent plus embarquer dans le sens de
dire: Moi, je veux faire de l'argent, point. Ils veulent vivre une vie dans une
politique de l'emploi, dans une politique d'être heureux, vivre une vie
plus heureuse. S'ils débarquent, c'est parce que nous autres on veut
qu'ils débarquent. Quand je dis "nous autres", j'ai 50 ans, moi aussi;
alors, je suis un peu responsable des jeunes, mais j'écoute ce qu'ils me
disent.
Quand on parle de l'État-providence et de l'État maximum
pour les jeunes sur le bien-être social ou les familles sur le
bien-être social, ce n'est pas vrai. On leur raconte des menteries et on
pense qu'ils acceptent tout cela. Ce sont des exemples comme ça à
partir desquels les jeunes nous disent: On est écrasés. Je
pourrais donner plusieurs exemples. Je voulais vous donner les exemples les
plus simples.
Mme Blackburn: Vous êtes favorables à la
création d'un Conseil permanent de la jeunesse. À présent,
ce qui me frappe - ce n'est pas seulement le cas de votre ' organisme, mais de
quelques autres qui se sont présentés - c'est que vous dites oui
au
Conseil permanent de la jeunesse, mais vos propositions de modifications
sont telles que ce n'est plus un conseil consultatif. Par ailleurs, vos propos
nous démontrent - il me semble, si je comprends bien - que, s'il y avait
une priorité, ce ne serait peut-être pas nécessairement la
création d'un Conseil permanent de la jeunesse. Ce qui revient dans
votre propos depuis tout à l'heure et de façon quasiment
continue, c'est premièrement, une politique de l'emploi et,
deuxièmement, un sous-financement pour les maisons de jeunes, pour les
regroupements et les organismes de jeunes. Je voudrais savoir si j'ai bien
compris. Premièrement, s'il y avait une priorité, selon vous,
est-ce que ce serait le Conseil permanent de la jeunesse ou une politique de
l'emploi?
M. Roy: Je pense que c'est les deux que ça prend,
c'est-à-dire que le gouvernement aura besoin de quelqu'un pour le
conseiller pour savoir ce qui est le mieux à faire pour les jeunes. Le
Conseil permanent de la jeunesse doit être là; il doit jouer ce
rôle: conseiller le gouvernement concernant les besoins des jeunes; ce
qu'il faut faire avec les jeunes. C'est un problème les jeunes; c'est un
méchant problème. Que faut-il faire avec eux autres? Le Conseil
permanent de la jeunesse est important pour aviser le gouvernement à ce
sujet. À la suite de cela, le gouvernement doit débloquer des
fonds pour financer des maisons comme la nôtre, par exemple. Je ne veux
pas prier pour mon clocher, mais je pense que c'est important, ce qu'on fait.
II faut développer une politique de l'emploi. Toutes les conclusions
auxquelles le Conseil permanent de la jeunesse arrivera seront transmises au
gouvernement qui, ensuite, mettra en branle les programmes et ce qu'il faut
pour répondre aux besoins des jeunes. (15 h 45)
Mme Blackburn: Ayant présidé un organisme
consultatif où les gens sont issus de différents milieux et
viennent de toutes les régions de la province, j'ai été
à même de constater qu'il est extrêmement long de faire des
consensus. Si vous me dites qu'il y a urgence de se donner une politique de
l'emploi et qu'en même temps vous pensez qu'on doive confier cela
à un conseil consultatif, on risque d'avoir une politique d'emploi au
mieux d'ici deux ans. Le conseil n'est pas encore constitué. La
démarche de constitution du conseil est relativement longue. Selon vous,
est-ce que cela peut attendre aussi longtemps?
M. Roy: Je pense que, même si cela prenait deux ans, cela
ferait moins longtemps à attendre que les jeunes qui attendent depuis au
moins 20 ans. Je me dis qu'il faut absolument donner un organisme aux jeunes
pour que ce soient les jeunes qui décident.
C'est sûr, les jeunes disent ensemble: On veut absolument une
politique d'emploi; c'est très urgent. Mais il faut une structure pour
que les jeunes s'expriment et se sentent responsables, sentent que c'est leur
projet, que l'avenir, que demain, c'est eux. Il faut leur donner une
façon de communiquer, une structure nécessaire pour qu'ils
puissent dire des choses.
C'est sûr que cela semble uniquement et complètement
consultatif actuellement, mais cela va être mieux encore que rien. Quand
on consultera, peut-être qu'on viendra à être capables de
prendre des décisions plus tard. Comme on dit, on embarque dans un
cheminement d'avenir; maintenant, on n'a rien. Les jeunes n'ont rien ou
presque, actuellement.
Mme Blackburn: Quand même, on répertorie à
travers la province quelque 750 organismes de jeunes. Vous avez quand
même des regroupements d'organismes de jeunes et je dirais que vous avez
des associations étudiantes qui sont fort actives et très
efficaces. Ils en ont fait la démonstration au moment où le
gouvernement songeait à augmenter les frais de scolarité dans les
universités.
Une question: Vous proposez des modifications telles que ce conseil n'a
plus rien à voir et n'est en rien comparable au conseil consultatif
qu'on connaît. Ce qu'on appelle la fonction consultative en
administration publique, c'est quand vous allez chercher un certain nombre de
personnes qui ont la responsabilité d'aviser un ministre sur une
question particulière. C'est là le projet qui nous est
soumis.
Cependant, ce qui a créé de la confusion, c'est le mode de
désignation des membres par la voie d'un collège électoral
qui laisse l'impression, pour ne pas dire l'illusion, que l'organisme
appartient aux jeunes. Mais toutes les nominations, si on pense au projet de
loi, seront faites par le gouvernement. Vous savez, la loi est très
claire là-dessus. Un conseil consultatif, cela donne des avis à
un ministre et un ministre peut lui demander des avis, non, pas en demander, en
exiger, ce qui est beaucoup plus contraignant que ce qu'on a dit.
Les modes de désignation, vous les connaissez. Vous les avez
commentés. Il est prévu que le collège électoral
soit dissout dès qu'il a fait des recommandations pour les membres du
conseil. Dans l'hypothèse où il y aurait peu ou pas de
modifications à ce conseil consultatif, est-ce que vous estimez que cela
pourrait toujours être utile et être aujourd'hui, au moment
où on se parle, la priorité?
M. Proulx: Oui. Je pense qu'il faut viser... Vous-même
disiez cet avant-midi que, actuellement, le gouvernement n'avait pas de
politique d'ensemble, qu'il agissait à la pièce. Si on
crée une politique d'emploi a la pièce et si plus tard on
crée une autre affaire à la pièce et si après cela
on crée une autre chose à la pièce, je pense que cela vaut
peut-être la peine de prendre le temps d'installer cela comme il faut, de
regarder plus loin que dans un an. Les problèmes sont urgents, mais je
pense qu'il faut regarder une politique globale, il faut regarder à long
terme parce que les problèmes des jeunes, ce ne sont pas des
problèmes qui sont là juste pour deux ou trois ans. C'est
là pour quinze ans au moins.
Mme Blackburn: C'est que... Je passerai la parole à mon
collègue ensuite. Vous savez, une politique gouvernementale, cela
appartient à un parti, c'est décidé par un gouvernement
qui est au pouvoir et qui a déjà une certaine philosophie et il a
généralement un programme. Le gouvernement avait un programme.
C'était une politique de plein emploi. C'était la parité
de l'aide sociale, c'était le gel des frais de scolarité,
c'était l'amélioration des prêts et bourses. On
connaît les décisions.
Ce que je veux dire, c'est qu'il est difficile de concevoir que ce soit
possible qu'on laisse à un organisme consultatif le soin de
décider pour un gouvernement, quel qu'il soit, d'une politique de
financement, par exemple, des organismes jeunesse ou d'une politique de plein
emploi. Cela relève de la conception qu'un gouvernement se fait de son
mandat et du rôle qu'il veut faire jouer à différents
organismes à caractère économique, par exemple.
C'est un peu comme si on était en train de prendre les choses
à l'envers. Normalement, l'État, le gouvernement se donne une
politique et, à l'intérieur, il dit: Je crée un conseil
pour juger de la qualité de la politique que j'ai proposée, parce
que, déjà, il l'a balisée. C'est normal parce que certains
gouvernements à caractère plus social-démocrate pensent
qu'on devrait davantage répartir les richesses. D'autres, à
caractère plus économique ou administratif, comme c'est davantage
la tendance de ce gouvernement, pensent qu'il faut laisser davantage
l'État se développer par le biais de la libre entreprise. La loi
du plus fort, quoi. Il est bien évident que concevoir une politique de
plein emploi, concevoir une politique de développement de maisons de
jeunes, ce n'est pas tout à fait dans la même perspective que cela
se fait, selon le gouvernement qui est au pouvoir.
C'est pourquoi je m'inquiète, quand on attend autant d'un tel
organisme et quand, de plus, je vois un danger que ce soit une façon de
museler les organismes jeunesse, s'il n'y a qu'une voix pour exprimer les
besoins des millions de jeunes au Québec entre 12 et 35 ans, parce que
c'est ça qu'on se donne
comme définition. Quand on sait la problématique que vous
venez de nous présenter, celle qu'on a entendue de la part des groupes
de soutien aux initiatives-jeunesse qui est radicalement différente,
celte des organismes des associations étudiantes - vous savez, c'est
très très varié... Je pense à ceux qui viendront et
qui sont dans le milieu culturel, par exemple.
Vous avez une variété infinie et si vous n'avez pas un
minimum de données sur ce que veut faire un gouvernement par rapport
è ces questions, il me semble que ce n'est pas le conseil qui va
réussir à donner la politique du gouvernement. À mon avis,
on leurre les jeunes quand on les laisse penser que c'est comme cela que cela
va se passer. Ma question, c'est: S'il n'y avait pas de modification, le projet
tel qu'il est présenté, est-ce que pour vous cela demeurerait une
priorité? Je pense que vous m'avez dit oui.
M. Roy: C'est sûr que oui. On aimerait bien mieux avoir une
régie et qu'on prenne toute l'affaire en main, mais on dit: Si on
demande l'impossible, on n'aura rien. On est mieux de se contenter d'un pas.
C'est sûr qu'on dit que c'est un pas en avant vers une bonne direction un
jour. On sait que... En tout cas, si vous saviez comme les gens
défavorisés sont écrasés, ils n'ont pas le
goût d'en demander trop parce qu'ils n'en auront pas. Ils auront les
miettes. On disait tantôt que, dans notre maison, on va chercher des
subventions, des dons à gauche et à droite. On n'a même pas
de subvention. On vient d'avoir une petite subvention - bien petite. Ce sont
des miettes. C'est sûr qu'on veut marcher les deux pieds sur terre. Si on
demande trop, les jeunes vont passer encore des jours... Tout le monde veut
faire une foule de choses pour les jeunes, mais ils font quoi en
particulier?
C'est là qu'on dit: C'est peut-être un petit pas, mais
c'est sûr qu'on voudrait avoir bien plus que cela. C'est certain.
Le Président (M. Marcil): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi. M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: Merci. Je ne sais pas, j'ai eu de la misère
à suivre la discussion du député de Saint-Hyacinthe tout
à l'heure, mais il parlait d'organismes revendicatifs. Je n'ai pas pu
comprendre le consultatif et le revendicatif. Je ne sais pas où il va
chercher ses mots. Ou bien c'est un organisme revendicatif et on lui donne les
moyens d'être autonome, ou bien il devient consultatif et à ce
moment il est sujet à l'obligation de répondre aux questions du
ministre. C'est comme cela que je le vois. Deux exemples surgissent à
mon esprit qui sont récents. L'automne passé, nous étions,
ma collègue et moi, en commission parle- mentaire sur le financement des
universités et beaucoup de jeunes sont venus nous dire: On ne doit pas
changer les frais de scolarité. On doit plutôt regarder comment
les universités fonctionnent et voir là où il y a des
pertes actuellement et utiliser ces sommes. Si jamais par hasard vous
décidez d'augmenter les frais de scolarité, il faudrait penser
à remanier tout l'ensemble du système de prêts et bourses.
Les jeunes disaient cela.
Les gens de l'université disaient, de leur côté: Un
instant, il faut que les frais de scolarité augmentent. On n'a pas
d'autre source de financement que celle-là et donnez-nous de l'argent.
Entre-temps, des gens, des professeurs qui viennent du milieu, disent:
Écoutez, il y a toutes sortes de choses. Finalement, on se retrouve avec
le ministre qui n'est pas capable de prendre une décision autre que
celle que le premier ministre prend à un moment donné à la
suite de pressions. On se retrouve avec un comité formé par le
ministre, qui nous avait d'ailleurs dit pendant la commission parlementaire
qu'il le formerait, sur le travail fait par les profs, sur les
difficultés dans la recherche et le développement, ainsi que sur
l'enseignement pour arriver finalement avec un comité qui travaille,
mais seulement avec les universités, pour savoir comment régler
le problème des universités, en difficulté.
Qu'est-ce qui va résulter de tout cela? On ne le sait pas. Mais
les jeunes dedans ne sont plus dedans. Ils étaient en commission
parlementaire. Ils ne sont plus là. Un autre ministre, dans un autre
secteur s'en va dire aux femmes victimes de violence: Vous avez des
problèmes avec les maisons des femmes, vous avez des problèmes
avec les maisons des femmes en difficulté. Il dit aux gens:
Écoutez, produisez ou disparaissez. Quand on a ces langages, on se pose
de sérieuses questions sur la véritable intention. Moi, je ne
veux pas prêter d'intention, mais je me pose des questions. C'est un peu
en réponse à M. le ministre, ce matin, qui disait: II y a des
gens, comme à la CEQ... Vous portez des jugements sur les intentions que
nous avons. Moi, je dis: On n'a pas l'assurance que, effectivement, vous voulez
donner à ce conseil une autonomie. Si vous leur dites: Produisez, sinon,
disparaissez... On a l'impression, justement, que les maisons de jeunes,
actuellement, pour certaines raisons et dans certains cas, disparaissent l'une
après l'autre. Elles ont des difficultés et le
député de Saint-Hyacinthe ne semblait pas connaître cela,
j'ai l'impression, tout à l'heure. J'ai parlé de cela ce
matin.
Il y a des maisons de jeunes, actuellement, qui disparaissent. Le
système de financement était déjà enclenché
et, s'il avait perduré, on n'aurait pas les problèmes actuels. Il
y a des organismes de jeunes qui essaient de fonctionner dans tout cela et
qui
se trouvent finalement à n'avoir aucun financement et, comme ont
dit des gens ce matin, à quêter leur financement. Dans ce
contexte, j'ai cru comprendre que vous aimez mieux avoir un petit pas
plutôt que de ne rien avoir, parce que, si vous risquez d'en demander
trop, vous risquez de ne rien avoir. Même si j'avais la même
impression que celle que vous m'avez exprimée tout à l'heure, n'y
a-t-il pas un danger à mettre en place quelque chose qui, finalement, ne
rendra service à personne parce qu'on aura donné l'illusion de
vouloir régler des problèmes et que, finalement, on n'aura rien
réglé parce qu'on aura pris les moyens d'empêcher les
décisions et de faire les revendications qui s'imposent?
J'aime mieux, d'un autre côté, vous le dire. J'aime mieux
avoir des groupes revendicatifs, autonomes plutôt que de voir des gens
qui deviennent non autonomes et non revendicatifs pour simplement servir la
cause d'une promesse électorale. Il s'agit de savoir où l'on se
situe dans cela.
Je voulais faire cette réflexion. Je veux avoir vos
commentaires.
M. Proulx: C'est cela. Je pense que cela est impartant. On le dit
aussi: Cela dépend beaucoup de la volonté du gouvernement. De
quelle façon le gouvernement a l'intention de... Dans quelle intention
le gouvernement a présenté ce projet de loi? Moi, je tiens pour
acquis que, s'il a présenté ce projet de loi, c'est qu'il a le
goût que les jeunes fassent quelque chose et il a le goût de
régler le problème. Maintenant, c'est pour cela que nous sommes
réticents dans la façon de faire ce conseil permanent. On ne veut
pas laisser... On dit qu'il ne faut pas que le gouvernement ait toute la
latitude de mettre qui il veut là parce que, si c'est de la partisanerie
qui se passe et qu'on envoie du monde la en disant: D'accord, vous ne
faîtes rien, on a réglé notre promesse électorale,
tout est beau, cela montre dans les journaux qu'on prend soin des jeunes, si
c'est cela l'intention, c'est bien certain qu'on n'aboutira à rien.
Moi, je pense qu'il faut faire confiance au gouvernement
là-dessus et donner la chance de mettre sur pied ce conseil permanent et
de travailler justement... On parlait de complicité, ce matin, entre le
conseil permanent et le gouvernement, cela sera superimportant qu'il y ait de
la complicité. C'est bien certain. Si le conseil donne des avis et que
le gouvernement dit toujours non parce que cela ne fait pas son affaire, cela
ne marchera pas.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. Proulx.
M. Jolivet: J'aurais juste un dernier petit mot.
Le Président (M. Marcil): Je vous demanderais de
conclure.
M. Jolivet: Oui. C'est simplement pour dire qu'effectivement je
suis prêt à donner la chance aux coureurs, contrairement à
ce que le député de Mille-Îles semblait dire de l'autre
côté de la table, tout à l'heure. À partir de cela,
cependant, je demande aux gens... Nous, membres de l'Opposition, notre devoir
et notre travail c'est de rester vigilants pour que, effectivement, ce qu'ils
nous disent aujourd'hui, la réalité du projet de loi, et la
réalité de l'action soient bien ce qui a été dit et
non pas ce que peuvent cacher les intentions. Je n'ai pas l'intention de leur
prêter des intentions. Je ne suis pas de ce genre, mais je suis là
pour surveiller et j'espère que vous aussi vous êtes là
pour surveiller.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le
député de Laviolette. Mme la députée de Chicoutimi,
est-ce que vous voulez conclure, compte tenu qu'il reste neuf minutes à
l'autre formation?
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais vous
remercier pour votre participation aux travaux de cette commission et de
nouveau vous féliciter pour l'excellence du travail que vous
réalisez et souhaiter que, même si ce gouvernement se donne, nous
donne et vous donne un Conseil permanent de la jeunesse, il y ait toujours
moyen de se donner aussi une politique de plein emploi sans renvoyer cela aux
calendes grecques et de la même manière qu'il se donne rapidement
une politique de reconnaissance et de financement des organismes jeunesse.
Une des façons les plus importantes de s'assurer que le conseil
permanent demeure crédible longtemps, c'est qu'il y ait des associations
de jeunes très fortes. Qu'est-ce qui fait la crédibilité
du Conseil du statut de la femme, du Conseil supérieur de
l'éducation? Je vous dirais qu'ils ne peuvent pas dire n'importe quoi
parce qu'il y a des organismes très vigilants en arrière qui
s'appellent la Fédération des commissions scolaires ou
différentes associations féminines, qui sont très
structurés et très forts. La crédibilité d'un
Conseil permanent de la jeunesse va se faire à la condition qu'elle
puisse reposer sur des associations très fortes. C'est primordial.
J'espère en même temps qu'on est en train de se donner un conseil
permanent, qu'on trouvera aussi le moyen de se donner des politiques qui,
è mon avis, sont d'une extrême urgence. Je souhaite d'ailleurs que
votre maison puisse en bénéficier si jamais on développe
une politique de reconnaissance de financement d'organismes de jeunes.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, Mme la
députée de Chicoutimi. Il vous reste neuf minutes pour poser des
questions et conclure.
M. Gratton: M. le Président, je conclurai avec un bref
commentaire. Je vous dirai franchement que j'aurais le goût de continuer
le débat partisan que voudraient susciter les députés de
Chicoutimi et de Laviolette, mais il me semble que nous ne sommes pas là
pour ça. Si nous constatons avec nos invités qu'il y a des
carences énormes par rapport au financement des organismes de jeunesse
et par rapport à la politique d'emploi, nous le constatons à la
suite de gestes posés par les gouvernements: le nôtre et le
précédent. On pourrait discuter longuement des
améliorations qui ont pu découler d'une attitude
différente du gouvernement actuel; là n'est pas le but de mon
propos.
Nous recherchons, en tant que gouvernement, une façon de
développer des politiques d'emploi, des politiques de financement et des
politiques d'aide à la jeunesse qui ne seront pas ourdies uniquement par
le gouvernement, à Québec, dans les officines gouvernementales,
sans tenir compte des besoins réels et des aspirations de la jeunesse.
Ce que l'on dit -je pense que c'est M. Proulx qui le disait tantôt -
c'est que le Conseil permanent de la jeunesse est un outil, ce n'est pas le
seul. C'est un outil qui peut être extrêmement utile pour amener le
gouvernement à prendre vraiment conscience de la situation et à
être conseillé sur les moyens réels susceptibles de donner
des résultats concrets.
On est loin de penser que cela va tout régler, on est loin
d'avoir l'intention tout simplement, en créant un Conseil permanent de
la jeunesse, de se laver les mains de la situation de la jeunesse
québécoise. S'il fallait que nous en soyons là, nous
serions les premiers à en subir les conséquences.
Je dis donc à nos invités que je constate avec
satisfaction qu'ils voient la création du Conseil permanent de la
jeunesse dans cette optique. Je prends également bonne note des
réserves très directes, très franches que vous
émettez quant à la façon de le constituer et quant
à sa façon de fonctionner. À cela, on va tenter d'apporter
des réponses au moment de la présentation du projet de loi
à l'Assemblée nationale.
Je vous prie de croire que ce que le gouvernement tente de faire par la
création du Conseil permanent de la jeunesse, ce n'est pas de
créer des illusions. On est très pratique dans notre approche.
Depuis dix ans maintenant, le gouvernement du Québec a tenté de
répondre aux besoins et aux attentes de la jeunesse
québécoise et on n'a manifestement pas réussi, pas plus
nous que le gouvernement précédent. On dit qu'un des outils qui
nous amènera peut-être à mieux réussir, c'est la
création du conseil permanent, c'est tout ce qu'on dit. Je pense que,
à un moment donné, l'Opposition devra nous dire si elle est
d'accord ou pas avec la création du Conseil permanent de la jeunesse. On
peut se poser la question parce que cela n'a pas été clair au
cours des travaux. Mais ce débat, on le fera entre nous à
l'Assemblée nationale.
Pour le moment, je me limite à vous féliciter de votre
engagement et du travail extrêmement valable que vous faites dans votre
région et à vous remercier très spécifiquement pour
l'éclairage que vous êtes venus nous donner ici, à la
commission.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le ministre.
M. Roy, M. Proulx et M. Tessier, on vous remercie de votre collaboration. Nous
allons suspendre 60 secondes, pour permettre aux Groupes de soutien aux
initiatives-jeunesse de la région 04 de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 4)
(Reprise à 16 h 7)
Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous
plaîtl
Nous souhaitons la bienvenue aux Groupes de soutien aux
initiatives-jeunesse de la région 04. M. Daniel Trahan, Mme Martine
Cloutier et Mme Manon Filion, nous vous souhaitons la plus cordiale bienvenue.
Vous savez un peu comment nous procédons. Nous vous laissons 20 minutes
pour exposer votre opinion. Ensuite, il y aura un échange avec les deux
partis. Allez-y.
Groupes de soutien aux initiatives-jeunesse de la
région 04
Mme Filion (Manon): M. le Président, membres de la
commission parlementaire, bonjour. Je tiens à vous remercier d'avoir
bien voulu nous donner l'occasion de présenter notre mémoire
à cette commission parlementaire.
Le Conseil permanent de la jeunesse est attendu fortement par les
organismes jeunesse et se veut le porte-parole de nos moyens d'action. Pour
plusieurs jeunes, l'"entrepreneuriat" représente une planche de salut et
l'opportunité de prendre une place prépondérente dans le
développement de leur collectivité. Résultant à la
fois d'un sous-emploi chronique au cours des dernières années et
d'une volonté de cette génération de prendre sa place, ces
circonstances ont favorisé l'apparition de multiples outils
destinés à appuyer l'effort des jeunes entrepreneurs. C'est dans
ce contexte qu'ont été mis sur pied, il y a plus d'un an et
demi, les groupes de soutien aux initiatives-jeunesse afin d'appuyer les
jeunes impliqués dans des projets de création d'entreprises.
Par ce mémoire, les Groupes de soutien aux initiatives-jeunesse
de la région 04 désirent démontrer leur appui face au
conseil et exprimer leur volonté de participer à sa
création en y apportant quelques modifications.
Avant de vous faire prendre connaissance de notre principale
recommandation, nous allons enchaîner avec une brève
présentation des Groupes de soutien aux initiatives-jeunesse. Au nombre
de 87 au Québec dont 8 dans la région 04, les qroupes appuient
les jeunes âgés entre 18 et 30 ans dans leurs démarches de
création et d'exploitation d'entreprises. Selon des données
recueillies après notre première année d'existence, les
groupes de la région 04 ont collaboré au lancement de 145
nouvelles entreprises, créant ainsi au-delà de 330 emplois et
engendrant un investissement total de plus de 5 000 000 $. L'importance de ces
résultats laisse entrevoir une nouvelle réalité
économique dont une des manifestations les plus probantes est
l'intérêt marqué des jeunes pour les affaires.
Je cède maintenant la parole à Mme Cloutier.
Mme Cloutier (Martine): Donc, après avoir expliqué
le rôle de nos corporations à l'intérieur de notre
région, nous jugeons important de préciser que nous sommes en
accord sur le principe de la création d'un nouvel organisme autonome,
soit le Conseil permanent de la jeunesse.
Concernant notre principale recommandation, nous sommes d'avis qu'il
serait opportun de réviser la structure organi-sationnelle
proposée dans le projet de loi 104. Afin de faciliter la
présentation de cette nouvelle structure, la page 10 de notre
mémoire vous présente l'organigramme du conseil permanent que
nous proposons.
Donc, nous suggérons premièrement une
régionalisation des représentants à la base. La base du
conseil serait composée de représentants provenant des dix
régions administratives. Chacune des régions serait
représentée par cinq personnes de cinq secteurs distincts, soit:
l'éducation, le travail, le loisir, le social et un nouveau secteur,
l'"entrepreneuriat". Ce secteur vous sera expliqué un peu plus loin dans
notre présentation. Donc, le collège électoral serait
formé de 50 personnes à la base.
Deuxièmement, au plan de la composition du conseil permanent, ce
conseil regrouperait deux personnes provenant de chacun des secteurs. Au total,
dix personnes composeraient le conseil. Les nominations se feraient
équitablement afin d'assurer une représentativité
régionale.
Troisièmement, l'exécutif du conseil serait composé
de cinq personnes provenant du conseil permanent; conséquemment,
l'exécutif est composé d'un représentant par secteur
d'intérêt, toujours en ayant en tête une
représentativité régionale.
Le personnel affecté au conseil permanent serait composé
de cinq personnes qui assureraient la conduite des affaires quotidiennes du
conseil et le personnel rémunéré serait
sélectionné par l'exécutif du conseil.
Cinquièmement, la structure de soutien au conseil correspondrait
à celle existant présentement au Secrétariat à la
jeunesse, c'est-è-dire le personnel affecté au module de
l'administration, au module de la recherche, au module de la communication et
au module de liaison dans les dix bureaux régionaux.
M. Trahan (Daniel): Plusieurs raisons nous ont amenés
à apporter certaines modifications à la structure initiale
proposée dans le projet de loi 104. Compte tenu de notre vocation de
catalyseur des actions "entrepreneuriales" des jeunes, nous avons jugé
opportun d'ajouter un nouveau secteur d'intervention, celui de
l'"entrepreneunat". Ce secteur nous paraît, en particulier, une
entité distincte des secteurs retenus a l'article 16 du projet de loi.
D'ailleurs, ce secteur d'intérêt occupe une place de plus en plus
importante dans l'environnement immédiat des jeunes du
Québec.
Parmi l'ensemble de nos motivations inhérentes à ce
changement de structure de fonctionnement, cette nouvelle composition veut
répondre principalement à un besoin de régionalisation.
Les besoins, les attentes et les intérêts des jeunes étant
différents d'une région à l'autre, il convient donc
d'assurer une représentativité régionale à la base
du conseil. En conséquence, nous suggérons que le collège
électoral soit toujours présent dans le but d'assurer des liens
constants entre le conseil et les organismes qui en forment les assises.
De plus, nous préconisons que les dix membres du conseil
permanent soient nommés par le collège électoral, et ce,
pour assurer une démarche autonome. Si les organisations de jeunes
n'interviennent pas directement dans le choix des membres du conseil, les
jeunes seront les premiers à remettre en question la pertinence des avis
du conseil et du conseil lui-même. Cette démarche aura pour but de
privilégier un caractère d'autonomie et de non-partîsanerie
quant à la formation du conseil. La procédure sera
utilisée pour la composition de l'exécutif, et ce, pour des
raisons similaires.
D'ailleurs, le conseil permanent ainsi que l'exécutif seront
formés de membres bénévoles afin d'éviter qu'un
processus de rémunération ouvre la porte aux
opportunistes et risque de discréditer ceux qui s'y engagent pour
la cause. La structure de soutien proposée verra à utiliser
certaines ressources déjà en place au sein du gouvernement du
Québec. Or, le Secrétariat à la jeunesse, un organisme
concerné depuis plusieurs années dans l'ensemble des dossiers
jeunesse, possède déjà une expertise et des liens solides
auprès des organismes jeunesse.
Étant donné l'urgence de la situation, la conjoncture
actuelle nous oblige à arrêter notre choix sur une structure
déjà opérationnelle, soit celle que représente le
Secrétariat à la jeunesse. Nous considérons qu'il serait
inopportun de réinventer la roue en créant une nouvelle structure
pour assurer une présence au sein de chacune des régions.
Quant au budget nécessaire pour assurer l'ensemble des
activités du conseil, nous estimons qu'une enveloppe budgétaire
de 1 500 000 $ permettrait d'opérationaliser ce nouvel organisme
autonome. De ce budget, une somme de 300 000 $ pourrait être
allouée directement au conseil tandis qu'un montant de 1 200 000 $
serait affecté à la structure de soutien, soit à la
structure que représente le Secrétariat à la jeunesse. (16
h 15)
Nul ne doute que cette structure-conseil répond à des
besoins essentiels exprimés par la jeunesse. Or, la nature originale de
ce projet suscite quand même une certaine crainte de notre part. Ainsi,
la création du conseil ne devra pas mettre en péril la
responsabilité de l'ensemble du gouvernement. On ne saurait accepter que
la formation du conseil serve de voie d'évitement ou de soupape de
sécurité dans la mesure où le gouvernement soit
tenté d'évacuer certains problèmes en les
référant au conseil. Il nous apparaît, dans ce contexte,
que ce n'est pas la nature même du conseil qui est en cause, mais
plutôt la manière dont ce dernier sera utilisé dans sa
fonction consultative.
Finalement, il convient de souligner que la portée de cette
nouvelle structure passe par le présent et le devenir des organismes
jeunesse qui en constituent la source. Comme ces intervenants seront
appelés à contribuer à sa mise en fonction, il est
essentiel d'assurer leur subsistance afin de tirer le maximum de leurs
ressources et de leur expertise. Considérant que les organismes jeunesse
ont de sérieux problèmes de survie et que la création du
conseil repose sur la représentativité de ces derniers, il
conviendrait d'envisager certaines actions afin d'épauler
financièrement ces partenaires à part entière.
Mme Filion: Pour conclure, c'est dans cet esprit que nous
réitérons le souhait de voir le gouvernement s'assurer de mettre
à contribution le dynamisme, la volonté ainsi que la
solidarité des jeunes car ils seront garants de la pertinence et du
succès des actions du Conseil permanent de la jeunesse.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup. Maintenant, M.
le député de Saint-Hyacinthe.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Merci beaucoup. J'aimerais vous
remercier au nom de notre formation politique, gouvernementale,
ministérielle, pour cet excellent mémoire. Ce n'est pas le
premier mémoire qu'on reçoit des groupes de soutien. Je crois que
vous êtes très bien structurés. On a reçu ceux
d'Abitibi, de Québec, du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie.
Chaque fois que les groupes de soutien sont venus déposer un document,
il était très bien structuré. Ils savent où ils
vont. J'aimerais vous rassurer: comme président du comité ad hoc
du caucus des jeunes députés libéraux, on a
rencontré le groupement provincial, Mme Blais et les autres, et on a eu
un très bon échange, très cordial et très franc et
je pense que cela va bien en ce qui concerne les groupes de soutien. Le
ministre l'a d'ailleurs mentionné hier, je pense qu'il y a un apport de
part et d'autre. Il y a lieu d'échanger énormément
ensemble. On a besoin de vous et je pense que vous avez besoin de nous.
J'aimerais vous rassurer aussi concernant la déresponsabilisation dont
vous faites mention à la page 11 de votre document. Je vais vous lire le
petit paragraphe 4.1: "Une déresponsabilisation gouvernementale à
éviter." L'apport du Conseil permanent de la jeunesse est un apport
d'efficacité et d'efficience. Je crois qu'il y a lieu, au lieu de
rechercher la confrontation, de rechercher plus cette efficience-là. Le
conseil permanent est là pour agir sur le terrain et tout cela et le
gouvernement - pour ma part, je pense que le côté
ministériel n'a pas d'arrière-pensées - est là pour
agir avec la plus grande célérité possible. On ne devrait
pas dire que le gouvernement va se déresponsabiliser.
J'aimerais aussi souligner l'ampleur de vos réalisations. En page
2, vous faites mention des résultats concrets lorsque vous parlez de 293
emplois, concernant un investissement total de 4 600 000 $. Il est dommage que,
lorsque le regroupement provincial a fait sa conférence de presse il y a
quelques mois concernant toute la réalisation des groupes de soutien,
cela n'ait pas fait toute la presse, cela n'ait pas fait toutes les manchettes
voulues. Je pense que les journalistes sont un peu défaitistes. Ils
écartent habituellement les bonnes nouvelles et ils prennent les
mauvaises. À l'exception, on l'a vu dernièrement...
Mme Blackburn: Mais ils écoutent...
M. Messier (Saint-Hyacinthe): ...de la
démission de M. Garon. C'est une bonne nouvelle et cela a fait
les manchettes,
M. Jolivet: J'aimerais savoir comment cela va avec Roma Hains.
Comment vont les choses avec M. Hains?
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Cela va très bien.
Le Président (M Marcil): S'il vous plaît! Si vous
voulez revenir...
M. Messier (Saint-Hyacinthe): C'est une bonne nouvelle et cela a
fait les manchettes. Mais je pense qu'il y aurait lieu de revenir plus souvent
avec vos réalisations pour que les entrepreneurs sachent que les jeunes,
vous existez. D'emblée, la Société d'investissement
jeunesse est là pour vous aider aussi. Je pense que vous allez avoir un
lien assez... Je pense que cela va être dur de parler. M. le
Président, qu'est-ce qu'il y a?
Le Président (M. Marcil): II faudrait éviter, M. le
député de Saint-Hyacinthe, de faire des allusions qui n'ont aucun
rapport avec le but de notre séance.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): On parle de bonnes nouvelles.
Mme Blackburn: M. le Président, ce que je voulais dire au
député...
Le Président (M. Marcil): Non, laissez faire, Mme la
députée, s'il vous plaît!
Mme Blackburn: Les journalistes écoutaient au perroquet.
Il fallait peut-être qu'il fasse attention.
Le Président (M. Marcil): C'est bien. Il faudrait quand
même démontrer un peu de sérieux. Allez, madame.
Mme Cloutier: Si je peux me permettre un commentaire. À la
suite de nos réalisations, vous avez dit que c'est très bien, que
nous avons été très performants, on espère que cela
sera très bien regardé lors de notre renouvellement qui s'en
vient pour le mois de juin.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Une voix: C'est parfait.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Concernant les propositions
relatives à la structure de l'organisation que vous avez soumises dans
votre document de réflexion, je pense que le gouvernement s'est
déjà engagé, à un certain niveau, à regarder
cela de près concernant l'organisation interne. Quand on parle de
conseil et aussi de collège électoral, je pense qu'il y aurait
lieu de regarder, pour notre part, un peu plus de quelle façon cela va
se faire. Énormément de représentations ont
été faites. Vous avez sensibilisé la partie
ministérielle concernant le conseil, l'organisation interne telle
quelle. C'est peut-être de la redondance, mais je pense que des
partenaires comme vous, des groupes de soutien... J'ai eu la chance, dans mon
comté, avant d'être député, de créer un
groupe de soutien aux initiatives-jeunesse. Je connais très bien votre
apport et j'ai une oreille très attentive. On a besoin de partenaires
comme vous au Conseil permanent de la jeunesse. À la lecture de votre
mémoire, se reflète bien cette intention de vouloir participer
avec le gouvernement comme partenaire. C'est ce que le gouvernement recherche
et le premier ministre l'a très bien dît hier. Chez les jeunes, on
a besoin de partenaires. Vous êtes des partenaires efficaces; vous
connaissez la problématique des jeunes. On est là pour vous
aider; on a besoin de connaître la problématique et c'est au
Conseil permanent de la jeunesse de trouver des solutions et au
secrétariat de diffuser cette information.
Vous suggérez - à la page... il faudrait que je le
retrouve; j'ai pris des notes -d'inclure un nouveau secteur et c'est M. Trahan
qui a fait la nomination concernant le secteur de l'"entrepreneuriat". Est-ce
que c'est le secteur que vous privilégiez? Est-ce qu'il faut faire
abstraction des autres secteurs qui ont été mentionnés ou
si vous voyez une combinaison travail-économie, entrepreneur-travail,
quelque chose du genre? Il y a des secteurs qui ont été
très bien identifiés dans le projet de loi et c'est un nouveau
secteur que vous identifiez. De quelle façon? Faudrait-il l'imbriquer
à un nouveau secteur?
M. Trahan: Compte tenu de notre vocation de catalyseur des
actions "entrepreneuriales", on a inclus le secteur de l'"entrepreneuriat"
parce qu'on voyait que ce secteur pouvait du moins véhiculer de
nouvelles valeurs. On sait très bien les changements qui se produisent
présentement concernant le marché du travail, les
opportunités ou, du moins, le peu d'opportunités qui peuvent
s'adresser aux nouveaux diplômés ou même à ceux qui
sortent des polyvalentes. Il reste que, d'une certaine manière, on peut
voir que cela recoupe une partie du secteur du travail et même du secteur
de l'éducation. Nous voulions en particulier véhiculer que le
secteur de l'"entrepreneuriat", c'est un secteur qui prend de plus en plus
d'importance présentement et pour les prochaines années et on
considère que c'est un secteur qui va peut-être attirer de plus en
plus de gens, de plus en plus de jeunes. Dans ce sens-là, on a cru que
le secteur de l'"entrepreneuriat", en tout cas, pouvait être une
entité distincte des quatre autres
secteurs qui étaient prédéterminés dans le
projet de loi.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Merci. À la page 5 de votre
mémoire, vous faites mention du collège électoral.
Beaucoup de gens sont venus nous voir pour nous suggérer certaines
choses concernant le collège électoral, concernant le conseil tel
quel. Est-ce que vous pouvez nous dire quelles sont les balises que vous
voulez? Faut-il enlever les balises qui sont implicites dans le projet de loi?
C'est quoi, la formation? Quelle est votre perception de la formation du
conseil du collège électoral? Certaines balises sont
indiquées dans le projet de loi. Voulez-vous qu'on enlève ces
balises ou si vous allez vivre avec ou quoi?
M. Trahan: On s'est servi un peu des paramètres inclus
dans le projet de loi, parce que la nouvelle structure qu'on a proposée
répond essentiellement à un besoin de régionalisation. On
voulait que l'ensemble des régions du Québec soient entendues
auprès du Conseil permanent de la jeunesse et, à la formation du
collège électoral, on permettait de rattacher ou, du moins,
d'entendre l'ensemble des régions et aussi l'ensemble des secteurs
d'intervention. C'est un peu dans cet ordre d'idées qu'on a voulu
proposer cette forme de collège permanent.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): Merci. Cela va pour tout de
suite.
Le Président (M. Marcil): Merci, M. le
député de Saint-Hyacinthe. Je vais donner la parole à Mme
la députée de Kamouraska-Témiscouata.
Mme Dionne: Merci, M. le Président. J'ai quelques
commentaires à faire. Tout d'abord, j'apprécie beaucoup votre
rapport parce que, à mon avis, il est pragmatique. Étant
donné que j'ai travaillé à l'élaboration du projet
de loi, il est sûr que, quand on commence à écrire un
projet de loi article par article, on oublie parfois des choses. Quand vous
mentionniez I'"entrepreneuriat" tout à l'heure - le député
de Saint-Hyacinthe en a parlé - c'est effeptivement un secteur... Sans
vouloir l'oublier, je pense que, quand on a mis la partie du travail, on n'a
peut-être pas été assez loin. En tout cas, je trouve que
c'est une très bonne idée et c'est important de le souligner
parce que de plus en plus on a des jeunes entrepreneurs qui vont loin.
Quand on a pensé le conseil permanent, quand on l'a
préparé, il y avait trois objectifs qu'on regardait. Le premier,
c'était qu'il soit représentatif; le deuxième, qu'il soit
crédible quant aux jeunes et quant au gouvernement. Quand on parle de la
déresponsabilisation du gouvernement, si, effectivement, le conseil
permanent est crédible auprès des jeunes, à mon avis, il
va avoir une force très importante. Alors, le gouvernement ne peut pas
passer à côté. À ce niveau, je pense que c'est
important.
Mais la balle est, bien sûr, dans le camp des jeunes et des
groupements de jeunes qui enverront des représentants, etc. Alors, que
ce soit une formule d'élections régionales ou une autre formule,
cela va être bien important de s'assurer que, dans chaque région
ou pour chaque secteur d'activité, les gens choisis apportent vraiment
une crédibilité au Conseil permanent de la jeunesse. Dans ce
sens, la balle est vraiment dans le camp des jeunes.
La troisième chose concerne l'efficacité. Le projet de loi
précise quand même certaines choses et est ouvert sur bien
d'autres. Pour permettre d'avoir une efficacité administrative ou
politique - on peut la nommer de quelque façon que ce soit - il faut un
conseil efficace. Il faut que les jeunes en régions ou les membres du
conseil d'administration se sentent à l'aise et qu'on y travaille bien
et que, justement... Dans d'autres mémoires, on disait que
c'était le temps d'agir; alors, c'est effectivement pour vous donner les
balises pour agir sans refermer... Je pense que c'est intéressant
d'avoir en consultation les opinions des différents groupes parce que
cela nous permet vraiment de bonifier le projet de loi.
Qu'on passe quatre ou dix jours à écouter les jeunes pour
effectivement le bonifier, je trouve que c'est très important. Je tiens
à vous remercier de votre mémoire.
Le Président (M. Marcil): Cela va. Merci, Mme la
députée. Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président, mesdames,
messieurs. Il me fait plaisir de vous accueillir au nom de ma formation
politique. Je dois dire que c'est toujours avec beaucoup de plaisir que je
reçois tous les groupes de jeunes, mais, si je puis m'exprimer ainsi, on
a un attachement particulier aux groupes de soutien aux initiatives-jeunesse.
Je pense qu'il n'est pas inutile de rappeler que c'est une création du
précédent gouvernement et c'est une des bonnes
réalisations. Je pense que le gouvernement actuel le reconnaît
également. Il reste à espérer, cependant, que...
M. Gratton: Effectivement.
Mme Blackburn: C'est vrai, je pense. Il reste à
espérer, cependant, qu'il le reconnaîtra suffisamment pour ne pas
donner suite au mémoire du ministre de l'Industrie et du Commerce dans
le sens de réduire le budget de la moitié. Cela a
été l'occasion de représentations en Chambre en
particulier. Je
sais que c'est toujours en négociation.
Je sais, pour avoir examiné votre performance, que c'est parmi
les emplois à créer ceux qui coûtent le moins cher au
Québec. C'est pourquoi je souhaite sincèrement que le
gouvernement ne donne pas suite au projet de fusion de vos groupes au
commissariat industriel, par exemple.
J'ai lu avec beaucoup d'intérêt votre mémoire. Il
est bien fait. Cela se déroule bien. J'ai quelques questions beaucoup
plus en ce qui regarde la compréhension. Vous nous présentez, en
page 9, ce que serait un budget pour le Conseil permanent de la jeunesse. Vous
l'estimez à 1 500 000 $. On affecterait 1 200 000 $ è la
structure de soutien du CPJ et 300 000 $ seraient alloués au
fonctionnement du CPJ. Est-ce que cela regroupe à la fois l'actuel
Secrétariat à la jeunesse et le conseil permanent ou si le
Secrétariat à la jeunesse, ce serait un autre budget?
M. Trahan: C'est que le Secrétariat à la jeunesse
représenterait la structure de soutien.
Mme Blackburn: C'est cela, la structure de soutien. (16 h 30)
M. Trahan: Oui. Peut-être pas avec toute l'ampleur qu'on
lui connaît présentement, mais en tout cas, du moins, ce budget
nous apparaît, en fin de compte, peut-être suffisant pour soutenir
cette infrastructure. Tandis que les 300 000 $, c'est pour les frais de
déplacement ou des choses comme cela pour les membres qui font partie de
l'exécutif, du conseil permanent ainsi que du collège
électoral.
Mme Blackburn: D'accord. Vous savez qu'actuellement le
Secrétariat à la jeunesse, au moins au moment où on a
quitté, avait un budget de 1 700 000 $ et que le budget prévu
pour le conseil permanent, aurait été de 800 000 $, si on l'avait
créé un peu plus tôt. J'imagine qu'il est à 1 200
000 $. On a avancé des chiffres. Cela veut dire que ce que vous proposez
est en deçà ou coupe de moitié les ressources qui,
actuellement, normalement, étaient consenties à ces organismes.
Cela vous paraît-il suffisant?
M. Trahan: En fin de compte, on ne s'est pas attardé sur
tout le mécanisme ni sur l!enveloppe budgétaire qui serait
allouée à cela. On a principalement fait référence
aux autres conseils qui existent présentement au sein du gouvernement du
Québec. On a fait un certain rapprochement, en tout cas, à ce
niveau.
Mme Blackburn: Par rapport au budget global.
M. Trahan: C'est ça.
Mme Blackburn: La différence, c'est que les autres
conseils consultatifs, à l'exception du Conseil du statut de la femme,
n'ont pas de structures décentralisées. Le budget du Conseil du
statut de la femme est de 3 400 000 $. Je vous dis cela juste en passant.
Peut-être une autre petite remarque qu'il faudrait faire, parce que je
sais que vous avez l'habitude de faire ce genre d'analyse: 300 000 $ pour la
structure principale, si elle a à donner des avis et à payer
trois permanents qui vont être des cadres supérieurs,
président ou présidente et deux vice-présidents, cela
gruge une bonne partie déjà de vos 300 000 $ plus vos cinq... Je
pense qu'il faudrait peut-être que vous fassiez faire un cahier de
charges là-dessus qui vous amènerait a des chiffres un peu plus
élevés, très probablement.
Vous avez insisté beaucoup sur la nécessité d'un
financement pour les organismes jeunesse. Finalement, je pense bien ne pas
trahir votre pensée en disant qu'un financement adéquat des
organismes jeunesse, c'était la seule façon d'assurer la
crédibilité du Conseil permanent de la jeunesse. Voudriez-vous
élaborer un peu là-dessus?
M. Trahan: Bien entendu, le financement des organismes jeunesse,
présentement, c'est le nerf de la guerre. On sait très bien que
pour plusieurs organismes - on en a parlé un peu ce matin - c'est
toujours la quête continuelle, la recherche de financement. Nous, pour
notre politique de financement - c'est une suggestion, tout simplement on
aimerait que le conseil permanent s'arrête et regarde quelle forme
pourrait prendre une politique de financement. Ce serait soigner le mal
à sa racine, parce qu'on sait très bien que le conseil permanent
repose sur les organismes jeunesse. Ce sont les organismes jeunesse qui vont en
constituer la base, et si la base est toujours en train de s'effriter, il reste
que c'est tout le reste de la structure qui va en souffrir.
Mme Cloutier: De toute façon, on avait mentionné,
à la page 12, qu'en tenant pour acquis que le mandat juridique du
conseil serait très large sa première mission pourrait porter sur
l'établissement d'une politique de financement des organismes jeunesse.
C'est ce que nous mentionnons. Cela pourrait être un premier mandat pour
le conseil.
Mme Blackburn: Vous proposez des modifications que je
qualifierais de majeures au Conseil permanent de la jeunesse qui, finalement,
je le rappelle un peu, ont pour effet de faire de cet organisme non plus un
conseil consultatif au sens où on l'entend, mais vraiment un organisme,
je dirais, que
les jeunes pourraient davantage s'approprier. J'aurais deux questions.
La première: Ne craignez-vous pas qu'un organisme qu'on veut être
la voix des jeunes ne crée une certaine distorsion quand on arrive
à traduire le message qui est extrêmement varié et qui
répond à une problématique fort complexe des jeunes?
Peut-être que vous pourriez répondre à cette question et je
reviendrai avec la seconde.
M. Trahan: Nous, on voit principalement le conseil permanent
comme peut-être une voie, en tout cas, un canal privilégié
de communications entre les organismes jeunesse et le gouvernement. À ce
niveau, on s'attend aussi que le conseil établisse une communication qui
soit bidirectionnelle, qu'on ait aussi des feed-back du gouvernement et vice
versa.
Il reste qu'en ce qui a trait à la distorsion on ne s'est pas
arrêtés à ce niveau. On a vu que le conseil permanent
représentait un outil privilégié, en tout cas, pour
maintenir des contacts avec le gouvernement, c'était un nouvel outil
pour investir les lieux du pouvoir, comme on peut dire. C'était un outil
privilégié, en tout cas.
Mme Blackburn: Peut-être pour nous permettre de mieux
comprendre, dans le cas qui vous concerne, par exemple, on se replace a
l'automne dernier au moment où on vous apprend qu'il y a un
problème et on s'interroge sur la structure des groupes de soutien aux
initiatives-jeunesse? Est-ce que, dans un cas comme cela, vous estimez devoir
passer par un conseil permanent dans l'hypothèse où il serait
créé? Parce que c'est de cela qu'on parle, vous savez.
Mme Cloutier: Vous voulez...
Mme Blackburn: Non, c'était une question parce que vous
voulez en faire un porte-parole. Est-ce à dire que vous allez porter une
revendication au conseil permanent qui, lui, va la porter au gouvernement ou si
vous voulez garder des liens directs avec le gouvernement ou la
possibilité de vous exprimer directement sans passer par un
intermédiaire? Je voudrais comprendre comment vous en faites le
porte-parole de tout le monde parce qu'il y a aussi des associations
étudiantes. Est-ce qu'ils devront aussi faire les revendications
à la place d'associations étudiantes, des maisons de jeunes, des
jeunes volontaires? Vous savez, j'essayais juste de voir comment dans la
réalité cela pouvait s'articuler.
Mme Cloutier: Comme le mentionnait tout à l'heure Daniel,
c'est une voie de plus qu'on a l'occasion de mettre sur pied, mais cela
n'empêche pas de tout laisser au conseil permanent... Pour les groupes de
soutien on a une représentativité provinciale. Alors, les
pressions peuvent se faire du côté de nos représentants
provinciaux puis, en même temps, en plus, le conseil s'attarde aussi
à ces dossiers. C'est pour nous une voie de plus et présentement
on a l'occasion de dire oui au conseil; alors, pourquoi ne pas le faire? On n'a
pas eu l'occasion de dire oui à d'autres choses; alors, maintenant, je
pense qu'on profite de la chance qui nous est offerte.
Mme Blackburn: Cela me rassure. C'est une voie de plus et non pas
l'unique voie.
Mme Cloutier: Non.
Mme Blackburn: C'est plus rassurant, je dois vous dire.
Dans l'hypothèse où le gouvernement refuserait d'apporter
les modifications majeures que vous proposez - parce que ce sont des
modifications fondamentales, ce ne sont pas juste des virgules et prolonger le
mandat d'une année, c'est vraiment sur le fond, les modes de nomination,
de représentation, la structure régionale, le mandat, tout est
là-dedans - est-ce que vous estimeriez qu'un conseil tel que
prévu par la loi, il y aurait aussi urgence de le mettre en place?
M. Trahan: Pour ma part, je trouve qu'il y a vraiment urgence,
compte tenu de toute la problématique jeunesse véhiculée
présentement en ce qui a trait au chômage ou peu importe. Il reste
que le conseil permanent représente peut-être l'étincelle
ou, du moins, le déclencheur vers d'autres actions qui pourraient
être entreprises plus tard. Cela peut être un catalyseur pour
d'autres actions qui pourront avoir lieu, je veux dire, dans les mois à
venir. Disons que c'est une opportunité qui nous est offerte. Il reste
qu'on préférerait qu'il y ait quelques modifications, en fin de
compte, pour tenir compte des besoins des régions. Mais il reste que, si
cela peut provoquer d'autres choses, nous, on va être derrière le
projet à part entière.
Mme Filion: Urgence, je trouve que c'est un bien grand mot. Si on
était assuré qu'il y aurait une politique jeunesse
établie, une politique pour les jeunes, dans des délais de X
mois, si quelqu'un nous disait: Dans six mois, on établit une politique
pour les jeunes, à ce moment-là, peut-être qu'il y aurait
lieu de modifier, mais on n'a rien de concret sur papier. On n'a rien de
sûr. Donc, c'est l'occasion rêvée de se consacrer au Conseil
permanent de la jeunesse, de prendre ce qui nous est offert, comme Martine l'a
si bien dit tantôt. Quand on peut dire oui à quelque chose, on le
dit et quand arrivera un peu plus tard la politique, on pourra encore
être là et manifester nos intentions face à cette
pratique, si on peut le faire, évidemment.
Mme Blackburn: Vous seriez d'accord pour dire que, même
s'il n'est pas modifié et faute de mieux, on accepterait cela. C'est ce
que je voulais vous entendre dire.
Mme Cloutier: On a apporté certaines modifications et on y
croit fortement. On espère qu'il y aura une
représentativité principalement par secteur - la
régionalisation - et on aimerait que l'"entre-preneuriat" soit
considéré. Cela nous tient à coeur. Je crois que vous avez
apprécié et vous aussi avez peut-être dit "oui", entre
guillemets, à ce secteur. On serait bien satisfait.
Mme Blackburn: II y a deux discours qui nous semblent un peu
contradictoires du côté du parti ministériel. Il y en a un
qui dit: II faut que le conseil soit contestataire. L'autre dit: II faut qu'il
soit complice. Je me dis qu'il ne peut être à la fois complice et
contestataire. En tout cas, cela me semble assez contradictoire. Quand vous
êtes complice, êtes-vous en contestation? À quel genre de
conseil croyez-vous? Un conseil qui s'en va main dans la main, un conseil
complice et partenaire du gouvernement ou un conseil qui veut davantage
traduire une réalité plus concrète et qui ne rentre pas
toujours dans le "mood" du gouvernement, quel qu'il soit.
Mme Cloutier: Qu'il soit contestataire ou complice, ce qu'on
demande, c'est la crédibilité et l'efficacité des membres.
On veut que ce soit très constructif. C'est mon souhait,
Mme Filion: En espérant que la complicité ne sera
pas une utopie, c'est sûr que ce serait l'idéal. On veut que le
Conseil permanent de la jeunesse fonctionne bien, efficacement, que les deux
parties fonctionnent du mieux possible, jusqu'à la limite,
évidemment. C'est ce qu'on souhaite. Ce souhait n'est peut-être
pas réalisable jusqu'au bout, mais il faut le prononcer quand
même.
Mme Blackburn: On se rappelle le sort qui a failli être
réservé à un organisme qui a été
contestataire, il y a quelques mois. Cela a passé tellement proche, plus
proche que ça...
M. Jolivet: C'était la mort.
Mme Blackburn: On l'avait? De facto, je pense que ce que le
gouvernement édicté, c'est qu'il faudra que le conseil soit
plutôt du genre docile et complice. Je sais que mon collègue
brûle d'envie de vous poser quelques questions.
Le Président (M. Marcil): Merci, Mme la
députée. On va passer au député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. À la page 11 de
votre document, vous parlez d'éviter une déresponsabilisation
gouvernementale. Je vous pose à peu près la même question
que j'ai posée à d'autres groupes: Est-ce que la mise sur pied
d'un Conseil permanent de la jeunesse, qui ne serait pas balisé et qui
aurait une certaine autonomie, n'aurait pas pour effet de
déresponsabîliser les groupes sur le terrain, surtout si on n'a
pas les moyens de fonctionner dans des structures financières
convenables? Est-ce qu'il n'y a pas de danger?
Je vous donne deux exemples pour éviter d'être
accusé de partisanerie alors que je veux me faire l'avocat du diable. Je
prendrai des exemples du passé, me basant sur la façon dont
ça se produit aujourd'hui et dont ça s'est produit dans le
passé. À un moment donné, des organismes volontaires
d'éducation populaire financés par le ministère de
l'Éducation, voyant leurs besoins, se sont regroupés. On les a
retrouvés à l'intérieur du Regroupement des organismes
volontaires d'éducation populaire et, en même temps, on a eu des
discussions à savoir quelle était leur responsabilité.
L'un était spécialisé en alphabétisation, l'autre
en éducation populaire, l'autre dans un autre domaine. Finalement, quand
est arrivé le temps de négocier des budgets, on a dit:
Écoutez, on a le même budget qu'avant, mais on a plus d'organismes
entre lesquels on doit partager. Finalement, tout le monde a eu moins et les
uns étaient en maudit contre les autres. On a utilisé le vieux
principe selon lequel on divise pour mieux régner.
Dans un autre groupe, on a fondé les zones d'exploitation
contrôlée et on leur a dit: Écoutez, on ne veut pas que
vous formiez une association nationale. Malgré tout, les gens l'ont
fait, la Fédération des ZEC a été mise sur pied. Le
ministre, quel qu'il soit, a tendance à dire: Écoutez, je ne veux
pas avoir 50 intervenants, je n'en veux qu'un. Finalement, c'est l'organisme
central, qui s'appelle le Regroupement des organismes volontaires
d'éducation populaire, qui commence à négocier pour
l'ensemble, cela ne fait pas l'affaire de tous et les gens se chicanent. Avec
les ZEC, c'est la même chose, il n'y en a qu'un qui vient parler.
Est-ce qu'il n'y a pas un danger si le conseil n'est pas balisé
dès le départ dans le projet de loi, si on dit: Je ne veux
entendre qu'une personne, c'est le Conseil permanent de la jeunesse, tous les
autres, vous ferez le bruit que vous voudrez, je ne veux rien savoir de vous?
Est-ce qu'il y a un danger
qu'on déresponsabilise ces organismes et qu'on dise: II n'y a
rien à faire, "just too bad", on va passer par l'intermédiaire du
conseil permanent? Si, entre-temps, il y a eu des mandats gouvernementaux, ils
se trouvent tellement bloqués que, finalement, rien ne se fait et, par
le fait même, on déresponsabilise le gouvernement. On en vient
à avoir un chien qui court après sa queue. Comment voyez-vous
cette interprétation? (16 h 45)
Mme Filion: Ce qu'on demande, entre autres... Je vais essayer de
répondre à votre question. Ce qu'on pense, c'est que, si c'est le
cas, si le gouvernement veut entendre seulement la voix du Conseil permanent de
la jeunesse avec la régionalisation, on espère que le Conseil
permanent de la jeunesse va tenter de refléter l'esprit des cinq
secteurs qu'on mentionne dans le mémoire, en tout cas, l'esprit
général. C'est sûr qu'il va toujours y avoir des
insatisfaits. Au sein d'une famille, il y en a, imaginez ce que c'est au sein
de tous les organismes jeunesse. Ce qu'on espère, c'est que, si c'est
bien structuré et si c'est bien compris de la part de l'exécutif
et de toute la structure, si le porte-parole reflète bien la base, je
pense qu'il peut être la seule voix pour autant qu'il reflète bien
la base, pour autant qu'il soit vraiment représentatif.
Mme Cloutier: Les groupes ont appris avec le temps à
devenir très responsables. Alors, je ne verrais pas qu'ils soumettent
tout cela à quelqu'un d'autre. Comme Manon Filion le disait tout
à l'heure, s'il y a un jeu de pouvoirs, à un moment donné,
peut-être doit-on faire intervenir le conseil. Je pense qu'au fil du
temps les corporations ont appris à être responsables et à
être plus autonomes. Je ne croirais pas qu'elles demanderaient que le
conseil fasse tout à leur place.
M. Jolivet: Est-ce que vous croyez que, dans la formule d'envoi
de gens qui participeront au conseil par le collège électoral et
autre, c'est justement là qu'il faut aqir immédiatement et ne pas
attendre que le conseil soit formé selon la loi actuelle pour en arriver
finalement à avoir une représentation nommée par quelqu'un
à la suite de recommandations qui viendraient de quelque part? Donc,
c'est immédiatement qu'il faut faire les propositions. C'est dans ce
sens que vous réagissez, si j'ai bien compris. Les groupes qu'on a eus
disent: La représentation doit être imposée par la base et
non pas d'en haut. C'est cela que j'ai compris.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le
député. Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Je vous remercie infiniment de votre
participation. Il me reste à souhaiter que le gouvernement, le parti
ministériel tienne compte des différentes recommandations que
vous avez faites. Je le rappelle, je voyais tout à l'heure le ministre
faire signe que oui quand je disais que vous proposiez des modifications
majeures. Il faudrait voir jusqu'à quel point le gouvernement est
prêt à modifier le projet de loi qu'il a mis sur la table.
Tout à l'heure, le ministre me disait: II va falloir que vous
vous branchiez pour nous dire si vous êtes d'accord avec ce projet de
loi. Je pourrais lui répondre qu'on pourrait être d'accord dans la
mesure où il est prêt à y apporter certaines modifications.
Il serait prématuré pour le moment, en raison du projet de loi
qu'on a présentement en main et des nombreuses réserves qu'ont
les jeunes par rapport à ce projet de loi, que je lui dise aujourd'hui
que je suis d'accord avec ce projet de loi.
Je vous remercie infiniment de votre présentation. On vous
souhaite aussi longue vie. J'espère comme vous, madame, que votre budget
va être reconduit après le 1er juillet.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, Mme la
députée de Chicoutimi. M. le ministre.
M. Jolivet: Avec l'indexation. M. Gratton: M. le
Président...
Une voix: II ne faut pas trop en demander, M. Jolivet.
Mme Blackburn: La même indexation que les
députés: 3,5 %.
M. Gratton: Je voulais dire, M. le Président,
qu'effectivement, si nous avons tenu à entendre une cinquantaine
d'organismes de jeunes sur le projet de loi 104, c'est qu'il nous apparaissait
important de connaître le point de vue des premiers
intéressés par le projet de loi et que ce n'était
sûrement pas pour en conclure au bout de la démarche que nous
avions le monopole de la vérité et que rien ne devait être
changé. Effectivement, il y aura sûrement des amendements qui
découleront des travaux qui seront apportés au projet de loi.
Mais faut-il souligner qu'ils ne font que débuter puisque nous avons
encore plus de trois quarts des groupes à entendre après
aujourd'hui.
Ce que j'aurais souhaité, c'est que Mme la députée
de Chicoutimi se mouille tout de suite sur le principe de la création
d'un Conseil permanent de la jeunesse, quelles que soient les modalités
qui peuvent l'accompagner. Je constate qu'elle n'est pas prête à
faire plongeon aujourd'hui, peut-être
que cela viendra un peu plus tard. Quant à nous, je vous dis
très candidement que oui, il y aura des changements. Évidemment,
les amendements qu'on apportera ne sauraient rejoindre toutes les
représentations qui nous sont faites par les 50 organismes. Du seul fait
que certains s'opposent et sont contradictoires, on ne pourrait satisfaire tout
le monde- Ce que nous souhaitons, c'est non pas nécessairement
satisfaire le plus grand nombre possible, mais d'en arriver avec une loi qui
sera suffisamment ouverte, qui donnera suffisamment de latitude pour que les
jeunes, eux, puissent s'assumer au sein de ce Conseil permanent de la jeunesse.
C'est l'objectif que nous visons et je pense que votre contribution, à
titre de représentants des qroupes de soutien aux initiatives-jeunesse
de votre région, est fort valable.
J'ai constaté avec plaisir les réalisations très
concrètes que les groupes que vous représentez ont réussi
à obtenir dans le domaine de la création d'emplois et je souscris
volontiers au fait que le gouvernement précédent a pris là
une bonne décision. Dieu sait qu'il fallait qu'ils en prennent
quelques-unes et c'en est une, celle-là! Je vous avoue d'emblée
que, si nous pouvons améliorer les choses qui ont été bien
faites dans le passé, personne, même pas l'Opposition, ne pourra
nous en vouloir.
Mme Blackburn: Plus la Société
d'investissement-jeunesse; il faut que le ministre nous la donne aussi.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le
ministre.
M, Gratton: Malheureusement... Madame, je pense, aurait quelque
chose à dire.
Le Président (M. Marcil): Oui, c'est cela, je vais lui
laisser la parole.
Mme Cloutier: J'aurais un petit commentaire, avant de terminer.
Si vous voulez que les jeunes s'assument au niveau du conseil permanent, il
devra répondre à leurs besoins et on espère que nos
modifications seront regardées attentivement. Merci beaucoup.
M. Gratton: De cela, je vous l'assure et je vous remercie de vos
représentations.
Le Président (M. Marcil): M. Trahan, Mme Cloutier, Mme
Filion, merci beaucoup de votre précieuse collaboration. Nous suspendons
pour 60 secondes pour permettre au prochain groupe, Table de concertation des
services d'aide à la jeunesse de Drummond Inc., de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 52)
(Reprise à 16 h 54)
Table de concertation des services d'aide à la
jeunesse de Drummond Inc.
Le Président (M. Marcil): Veuillez reprendre vos places,
s'il vous plaît! On va commencer. Merci beaucoup, vous êtes bien
aimable, madame.
Nous allons entendre la Table de concertation des services d'aide
à la jeunesse de Drummond Inc.
M. Michel Houde, Mme Manon Côté, M. Daniel Manseau et M.
Yves Bolduc, vous êtes les bienvenus à notre commission
parlementaire. Sans perdre trop de temps et tenant compte que vous avez 20
minutes pour exposer votre mémoire, nous allons procéder. Par la
suite, il y aura un échange comme celui auquel vous avez assisté
tantôt. La parole est à vous.
M. Houde (Michel): M. le Président, nous tenons à
vous remercier de nous recevoir aujourd'hui. Je tiens aussi à souligner
la présence du député de notre comté, le
député de Drummond, Jean-Guy Saint-Roch, qui a bien voulu
assister à cette présentation.
Je trouverais intéressant, comme entrée en matière,
de qualifier le CPJ, à cette heure-ci de la journée, non pas de
conseil permanent de la jeunesse, mais de conseil provisoire de la jeunesse.
Car, à voir circuler les groupes, aujourd'hui, et les nombreux conseils
qu'ils lancent à la commission, le président devra être
prêt à prendre des décisions très vite, autant sur
le conseil permanent que sur le contenu des différentes propositions qui
ont été présentées ici, aujourd'hui.
Je pense qu'il est important, dans ce qui va suivre, de présenter
la table de concertation des services d'aide à la jeunesse du Drummond
métropolitain.
L'organisme existe depuis 1979. Présentement, la table de
concertation est un regroupement de partenaires constitué de trois
secteurs, de douze organismes communautaires jeunesse, de 17 institutions, de
même que de 21 individus. L'ensemble de ces secteurs s'est donné
un conseil d'administration formé de trois représentants des
organismes communautaires, trois des établissements et un à titre
individuel. Certains organismes communautaires sont issus de la table de
concertation, d'autres organismes communautaires sont nés
d'eux-mêmes ou d'autres organismes. Actuellement, la table de
concertation compte deux permanents. Globalement, nous offrons les services de
regroupement, d'analyse de besoins, de coordination d'actions, de support
à des projets, de support aux organismes communautaires et de
sensibilisation de la population à la problématique jeunesse.
Nous avons, depuis le début des opérations, en 1979, subi
moult transformations pour mieux répondre, il va sans dire, aux besoins
en constante évolution. Les réalisations sont nombreuses. Que ce
soient des organismes comme tels, que ce soient des colloques annuels, que ce
soient des organisations quelconques au plan de la
représentativité. Les sources de financement sont: le
gouvernement du Québec, le gouvernement fédérai et les
institutions du milieu. L'avenir est encore prometteur et plein
d'espérances et il vise à une meilleure
complémentarité des institutions communautaires, à une
équité accrue entre les institutions et les ressources
communautaires. Si on veut parler d'égal à égal, je pense
que, à ce niveau, les organismes communautaires devront être
aidés de façon substantielle.
Plus précisément, le Conseil permanent de la jeunesse -
j'ai une petite note là-dessus - je ne sais pas si, avec le temps, il y
a danger de le confondre avec le CPJ, le Comité de la protection de la
jeunesse. II y a juste cela. Quand on va véhiculer les sigles, on sera
porté à confondre le Comité de la protection de la
jeunesse et le Conseil permanent de la jeunesse. Ce n'est peut-être pas
problématique, mais, quand on a à véhiculer des sigles par
présentation, je pense qu'il y a un petit problème.
Concernant le CPJ, bien sûr que l'on souscrit à cette
démarche nous aussi, mais non sans nous interroger, sans quand
même dire: Oui, mais. Avec l'ensemble de cette transformation - je pense
que c'est une transformation - nous souhaitons voir s'actualiser d'abord la
consolidation des ressources communautaires. Pour ce faire, à la
recommandation 1.3 de notre document, à la page 13, nous n'avons pas
spécifié - je pense qu'on l'a identifié - on ne peut pas
encarcaner non plus à l'intérieur d'une loi une
spécificité quant au nombre exact de représentants. Ce qui
est important, ce que l'on défend, c'est qu'il y ait au moins un
représentant par région qui fasse partie du fameux conseil
consultatif. À notre avis, c'est essentiel.
Ces individus qui auront à siéger doivent - en tout cas,
à notre avis - avoir une préoccupation constante de l'ensemble
des jeunes. Les gens qui seront le devront avoir une préoccupation, je
dirais même majeure pour les jeunes en difficulté. Assez souvent,
on est porté à oublier cet élément. On s'associe
aussi aux autres groupes quand on parle d'équité homme-femme pour
constituer le fameux conseil. Bien sûr, on est d'accord avec des
représentants des différents secteurs.
Il ne devrait exister une instance provinciale que s'il existe, bien
sûr, une instance régionale. On veut bien envoyer en haut des gens
qui sont vraiment issus de la base, que ce soit à partir des principes
de démocratisation ou de participation des gens de la base. Cette
structure régionale a besoin d'être alimentée. Les budgets
actuellement consacrés au Secrétariat à la jeunesse
pourraient être une structure intéressante et on en fait mention
à la page 14 de notre document, à la proposition 2.4. On en fait
quasiment un prérequis à cette implantation du CPJ. On est
d'accord là-dessus, mais est-ce qu'il y a possibilité
malgré tout d'asseoir ce qui existe déjà et de
façon récurrente? On fait allusion, bien sûr, à
toute cette reconnaissance et au financement des organismes communautaires.
Je passerai maintenant la parole à Yves pour aller plus loin
concernant ce fameux prérequis qu'on demande au CPJ.
M. Bolduc (Yves): Bonjour. J'aimerais d'abord, au nom des
organismes communautaires jeunesse - on peut s'entendre sur une
abréviation parce que c'est quand même assez long à dire
chaque fois: OCJ, cela représente les organismes communautaires jeunesse
- de la MRC de Drummond remercier d'abord les membres de l'Assemblée
nationale de nous avoir permis, par le biais de cette commission parlementaire,
d'émettre notre opinion.
Si vous le permettez, avant d'entreprendre la lecture des
recommandations de la TCSAJ, qui est la table de concertation, concernant le
rôle des OCJ au sein du Conseil permanent de la jeunesse, j'aimerais vous
entretenir brièvement de la réalité spécifique des
jeunes de la MRC de Drummond et des organismes communautaires qui desservent
ces jeunes.
Pour ce faire, je m'appuierai sur un document produit par la table de
concertation en collaboration avec les OCJ. Traçons un portrait des
jeunes et du secteur communautaire jeunesse de la MRC de Drummond. Ce document
va vous être distribué à l'instant, je crois. C'est un
exercice que les organismes communautaires ont fait pour essayer de voir quel
était l'impact réel et quelle était aussi la nature des
besoins des jeunes au sein de notre communauté. On va faire une boutade.
On n'est peut-être pas des groupes de soutien, mais nous aussi on est
capable d'être structurés.
La MRC de Drummond compte sur son territoire 76 000 habitants environ
dont près du quart sont des jeunes de 15 à 29 ans. Une personne
sur quatre à Drummondville est jeune. Les 18 à 25 ans à
eux seuls représentent près de la moitié de tous les
chômeurs de la MRC, 72 % des jeunes n'ont pas de DEC, c'est
évident, et 1300 bénéficient de l'aide sociale.
Ceux-là représentent près du tiers de tous les
bénéficiaires de l'aide sociale de la région. Vous
pourrez avoir ces données en page 4 de notre document.
Cela, pour dire que ces chiffres témoignent des
difficultés vécues par les jeunes dans leur tentative de
s'intégrer au modèle social qu'on leur propose. Ces
difficultés d'adaptation et d'intégration ont des
conséquences importantes, notamment en ce qui regarde la
judiciarisation, et je pourrais citer Mme Marie Laforce-Shooner, qui est
protonotaire au palais de justice de Drummondville, dans son rapport annuel qui
disait: Après avoir connu des records dans le domaine des divorces, des
séparations et des faillites, le district judiciaire de Drummond est en
train de se tailler le titre peu enviable de champion de la délinquance
juvénile dans la région 04 et même dans la province. Il
faut dire qu'on avait rediscuté avec Mme Shooner et on avait
réajusté pour dire judiciarisation au lieu de délinquance.
À la suite de cela, on peut dire que plus que jamais les jeunes ont des
besoins criants, notamment pour l'hébergement, le travail, les
ressources matérielles et financières, les problèmes de
drogue et d'alcool, de judiciarisation, d'isolement, de violence et de suicide,
sans oublier l'éducation et le loisir.
Les organismes communautaires jeunesse sont des réponses
concrètes; ils sont issus du milieu, adaptés et
intégrés face aux besoins des jeunes. Drummondville en compte
douze sur son territoire, mais ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que, en
1984-1985, il y a seulement quatre de ces organismes communautaires qui sont
décédés. On avait envie de dire: Nous allons respecter une
minute de silence pour chaque groupe communautaire mort cette année,
mais je pense qu'on n'aurait pas le temps de parler. Et ce, majoritairement
pour des raisons de financement.
Alors, pour nous, à Drummondville, concrètement, perdre
quatre organismes sur notre territoire veut dire des centaines de jeunes qui se
ramassent tout seuls, sans aide, sans appui, avec des difficultés,
notamment, quant à l'intégration sociale.
On peut dire que la moitié des OCJ ont une existence de deux ans
et moins. Cela aussi, c'est significatif. Cela veut dire que les organismes
communautaires jeunesse n'ont pas une vie très longue. En majeure
partie, c'est à cause de leur structure de financement, qui est
super-difficile à "manager". Les douze organismes communautaires de
Drummondville ont rejoint en 19.86 plus de 1811 jeunes, soit près d'un
jeune sur trois dans la région. Je pense que cela est significatif.
Quand tu rejoins un jeune sur trois quelque part, je pense que tu es
"connecté" sur la réalité; tu ne flottes pas quelque part.
C'est à cause de l'enracinement réel dans la communauté.
Les organismes communautaires ont une structure basée sur le
bénévolat. Cela fait participer les gens. C'est sûr que,
quand tu n'es pas payé pour aller quelque part, tu y vas par
intérêt. Tu n'y vas pas pour te montrer; tu y vas parce que tu es
intéressé a faire bouger des choses. Cela témoigne encore
de l'enracinement dans le milieu.
En page 10 du document sur le portrait, vous pouvez voir que les douze
organismes communautaires ont fait participer 378 bénévoles pour
plus de 16 000 heures de travail données gratuitement par la
communauté. J'imagine que ce sont des choses qui doivent être
dites quelque part. Ce sont des gens qui ont travaillé, qui n'ont pas
été payés, mais qui se sont drôlement
impliqués. C'est encore le contact avec le concret. En page 11, vous
pouvez voir que treize emplois à temps plein ont été
créés par les organismes communautaires jeunesse, plus 34 emplois
temporaires. C'est cela de moins au chômage.
Maintenant, les enjeux. Quels sont les enjeux des organismes
communautaires jeunesse au moment où on se parle? Partout, on
siège au sein de comités, de tables de concertation, de
différentes structures. On est interpellé. De plus en plus, on
nous confère une certaine compétence. On nous approche pour nous
dire que, oui, c'est important que vous nous fassiez bénéficier
de votre expertise. Pourtant, nulle part cette expertise et cette
compétence ne sont reconnues officiellement. Nous sommes des partenaires
et nous voulons être reconnus comme tels. Nous possédons
l'expertise et l'expérience. Pourtant, le financement ne vient pas avec
la compétence. Il y a 40 % de notre temps et plus qui passe à la
recherche de financement. Ce sont des chiffres. Cela a toujours l'air facile
à dire, mais, dans la réalité, c'est drôlement
emmerdant, quand tu sais que ta mission est d'être sur le terrain
à aider des jeunes, de passer 40 % de ton temps è aller chercher
de l'argent; c'est drôlement démotivant. Tu finis par dire: Mon
action sert à quoi, finalement? Je suis un agent de bureau. Je cherche
de l'argent. Mais, moi, mon action, c'est sur le terrain que je veux la vivre.
C'est d'aider les jeunes et non pas d'être toujours en train de
rédiger des projets pour aller chercher du financement et de modifier
aussi ma mission pour la cadrer avec des programmes de subventions
déjà élaborés qui ne tiennent pas compte des
réalités sur le terrain.
Le problème du financement, c'est un problème important.
Qu'est-ce qui existe pour le financement des organismes communautaires
jeunesse? Il existe des projets ponctuels, des programmes de création
d'emplois, PDE, etc. On les connaît tous. Je ne voudrais pas en faire la
litanie, cela deviendrait presque endormant. On est poigné avec cela. Il
y a l'aide privée. Dans l'aide privée, qu'est-ce qu'il y a?
Les
communautés religieuses, Centraide, les clubs sociaux, les
compagnies. Les compagnies préfèrent maintenant donner à
Centraide, On se fait souvent dire cela. Ce qui arrive avec les programmes de
financement privés, c'est que souvent ces subventions visent
l'implantation de nouvelles ressources. Après un an ou deux, les
subventions ont tendance à régresser de façon
significative. Les organismes ferment leurs portes. L'expertise
accumulée se perd pendant qu'on réinvestit dans de nouveaux
organismes. Il y a là, à mon sens, quelque chose d'aberrant. On
investit pendant deux ans dans des organismes, on les laisse acquérir de
l'expertise, on les laisse développer des mécanismes pour rendre
des services adaptés aux besoins des jeunes et, au bout de deux ans, on
ne leur donne plus un sou. On leur dit: Partez et, une fois que vous serez
partis, crevez deux ans après!
Quand vous regardez l'âge des organismes de la région, vous
voyez fort bien que la moitié ont deux ans et moins d'existence. Cela
veut dire que le plus difficile reste à venir pour eux. Et, quand on
réinvestit dans d'autres groupes, je me demande sur quelle base on le
fait. Je ne connais pas d'économiste, lorsqu'on investit et qu'on
détruit après ce qu'on a investi, qui pourrait me dire que c'est
rentable quelque part. Si on investit, il faut attendre que les fruits
poussent. Si on sème un arbre, il faut attendre qu'on ait une
récolte avant de couper l'arbre, sinon on investit pour rien. C'est du
gaspillage.
Ce qui nous reste: l'autofinancement. C'est drôle à dire,
mais l'autofinancement se traduit par la vente de services. Quand on offre des
services à des gens défavorisés, qui va payer? Ils n'ont
pas les moyens de payer nos services. On n'est pas capable de leur demander de
l'argent pour les services qu'on leur rend. Ce sont des jeunes qui sont
bénéficiaires de l'aide sociale, qui sont chômeurs, qui ont
des problèmes de judiciarisation, qui sortent de prison ou qui n'ont pas
de ressource d'hébergement. Comment peut-on faire pour leur faire payer
ces services? On ne peut pas. Il reste quoi? L'État. Plusieurs
programmes de financement dans plusieurs ministères: le "melting pot".
On recommence. Il faudrait presque, comme aux États-Unis, avoir recours
à des courtiers en subvention pour s'en sortir. On n'arrive même
pas à avoir l'information suffisante pour connaître tous les
programmes qui existent dans tous les ministères. Quand on
réussit à avoir l'information suffisante, il faudrait passer plus
de 52 semaines par année pour y répondre parce qu'ils sont tous
échelonnés sur des périodes différentes. Tu
n'arrives jamais à t'en sortir. Tu es en recherche de financement de
façon permanente, d'un bout à l'autre de l'année. Tu n'as
jamais une période de "break". Il faudrait qu'on s'engage du monde pour
le faire et on n'a pas d'argent. C'est un cul-de-sac.
C'est pourquoi, considérant que la structure même du CPJ
repose sur les organismes communautaires, et cela vous le trouverez en page 16
de notre mémoire, nous avons la recommandation 3.2: La Table de
concertation des services d'aide à la jeunesse, au nom des
organismes-membres et partenaires couvrant le territoire de la MRC de Drummond
recommande - là il y a eu une erreur de libellé -
considérant que les OCJ visent la prise en charge par le milieu des
besoins et des problèmes des jeunes; considérant que les
organismes communautaires sont plus que quiconque présents dans le
milieu et issus de celui-ci; considérant que les organismes
communautaires jeunesse offrent des services de première ligne
essentiels à la population jeune; considérant enfin que les
organismes communautaires jeunesse n'ont aucune base récurrente de
financement, et j'oserais même ajouter "de structure permanente de
financement", que le gouvernement du Québec élabore une politique
de reconnaissance et de financement sur une base récurrente pour les
organismes communautaires jeunesse. Je vous remercie.
Le Président (M. Marcil): C'est nous qui vous remercions
de votre exposé. Maintenant, nous allons passer à la
période d'échange.
M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Messier (Saint-Hyacinthe): J'aurais juste un petit commentaire
avant que M. le député de Limoilou prenne la parole et vous
remercie. Pour répondre à la boutade que vous avez
mentionnée tout à l'heure, je ne sais pas si vous étiez
là mais, avant d'être député, j'étais
vice-président de la Table de concertation des services jeunesse et la
table de concertation a créé le Groupe de soutien aux
initiatives-jeunesse. Les deux sont très bien structurés à
Saint-Hyacinthe. On s'est servi amplement de votre procédure de
régie interne à Drummondville lorsqu'on a créé cela
à Saint-Hyacinthe avec M. Boivin, du DSC. C'est pour cela que ça
fonctionne très bien à Saint-Hyacinthe. Je vous remercie.
Le Président (M. Marcil): Merci, M. le
député de Saint-Hyacinthe de vos précisions. Maintenant,
la parole est au député de Limoilou.
M. Després: D'abord, j'aimerais au nom de la
députation ministérielle vous remercier de votre participation
à cette commission parlementaire. Je suis satisfait de voir que vous
êtes tout d'abord d'accord avec le principe qu'il y ait un Conseil
permanent de la jeunesse parce qu'effectivement cela va répondre
à bien des besoins. Cela ne réglera
pas tous les problèmes, sûrement pas, mais cela donnera une
tribune aux jeunes pour qu'ils soient capables de faire savoir au gouvernement
qu'il y a des priorités, quelles sont ces priorités et de quelle
façon on devrait les régler. (17 h 15)
J'aimerais aussi vous faire remarquer que, dans votre mémoire,
dans la première partie, lorsque vous dites: Nous croyons que la
situation vécue par les jeunes est non seulement la
responsabilité du ministère des Affaires sociales, mais aussi
celle des intervenants oeuvrant dans les secteurs suivants: scolaire,
municipal, de la santé, économiquet Le ministre avait fait
remarquer hier que, dans le cadre de l'Année des sans-abri, il y a eu
formation d'un nouveau comité interministériel qui regroupe le
ministère des Affaires municipales, ceux de la Santé et des
Services sociaux, des Relations internationales et Affaires
intergouvernementales, de la Main-d'Oeuvre, le Secrétariat à la
jeunesse, le ministère de l'Éducation et la Condition
féminine. Je suggérerais qu'on puisse, en ce qui concerne cette
partie de votre intérêt face au dossier de la jeunesse, qui
démontre qu'effectivement le dossier de la jeunesse relève de
plusieurs ministères, leur faire parvenir votre mémoire pour les
sensibiliser à une certaine réalité, quand vous parlez des
jeunes défavorisés et de certains problèmes qui
existent.
Autre commentaire en ce qui concerne la formation de la Table de
concertation des services d'aide à la jeunesse. Vous dites que vous
regroupez effectivement trois secteurs: celui des organismes communautaires,
des institutions et des individus. J'aimerais que vous m'expliquiez un peu de
quelle façon cela fonctionne. Il y a une table par secteur pour former
un conseil d'administration. Est-ce que je pourrais avoir certaines
explications là-dessus?
M. Houde (Michel): Vous avez ce qu'on appelle la table de
concertation qui regroupe l'ensemble des établissements communautaires
et des individus. Quand on arrive pour déléguer ces gens au
conseil d'administration, chaque secteur identifie trois personnes pour
siéger directement au conseil d'administration. Le conseil
d'administration a à planifier des activités tantôt en
sous-comités, tantôt à l'intérieur d'un colloque.
Les organismes communautaires eux-mêmes ont aussi à identifier des
problématiques, et tantôt c'est le milieu institutionnel qui doit
identifier des problématiques. Quand la table de concertation veut
connaître davantage le pouls de l'ensemble des problématiques,
elle réunit les trois secteurs.
Historiquement, comme je le mentionnais tantôt, il va sans dire
qu'on a été appelé à modifier sensiblement la
structure de notre organisation parce qu'on voulait y répondre
davantage. Au début, c'était à peine cinq ou six
institutions, surtout d'éducation et sociales. À un moment
donné, on a essayé d'aller un peu plus loin pour aller chercher
toutes celles qui avaient une connotation jeunesse.
M. Després: Cela va. Dans un autre ordre d'idées,
en ce qui concerne la structure de soutien régional, vous savez qu'au
fond, un des buts du projet de loi est justement de faire en sorte qu'il y ait
une concertation au niveau des réqions parce que le collège
électoral verra à ce qu'il y ait cette
représentativité régionale, une concertation des
organismes existants dans une région pour donner du poids à leur
candidature parce que si les différents organismes d'une région
décident de tous poser leur candidature au collège
électoral, on se retrouvera peut-être dans une réqion avec
des gens qui feront partie du collège électoral, mais qui ne
feront peut-être pas nécessairement consensus. Ce qu'on veut par
le projet de loi, c'est qu'il y ait cette concertation entre les
différents organismes pour donner du poids.
Un individu dont la candidature est appuyée de façon
générale ou par plusieurs groupes, même si on demande trois
endossements, si on veut, appuyée par ]5, 20, 25 organismes, parce que
les gens d'une région donnée auront décidé que le
ou les individus qu'ils veulent envoyer au collège électoral sont
Mme ou M. X, je verrais mal qu'il soit refusé au collège
électoral et qu'on donne le poids de cette région au
collège.
M. Manseau (Daniel): Le modèle que nous vous proposons
offre des garanties qu'il y aura un consensus des réqions sur les
individus qui vont siéqer au conseil régional et, ensuite, au
conseil provincial des conseils régionaux. L'esprit du modèle
proposé - il peut y en avoir d'autres - est de dire: Quelles sont les
garanties que les gens seront effectivement choisis pour leur
représentation des organismes communautaires jeunesse? Rien dans la
lettre de la loi n'indique qu'il y aura consensus des réqions sur les
personnes choisies. Si vous me dites que dans les modifications que vous
apporterez à la loi, vous proposerez des garanties pour que ces gens
soient vraiment représentatifs des organismes communautaires jeunesse,
nous sommes tout à fait d'accord avec votre proposition.
M. Després: Ce que je veux dire, c'est que, indirectement,
le projet de loi se trouve à forcer... Je prends votre région,
par exemple. Je pense qu'effectivement une concertation existe, mais dans la
région où il n'y a pas cette concertation... Prenons
plutôt, par exemple, les réqions métropolitaines. Est-ce
que, dans les régions
métropolitaines comme Québec ou Montréal, on
pourrait fonctionner là où on retrouve 100 ou 150 organismes? De
la même façon, est-ce que vous proposez le même processus
dans toutes les régions?
M. Manseau: Effectivement, nous proposons un regroupement; que
les gens qui sont choisis... Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, ce
que nous proposons est un modèle. Il a ses limites comme tous les
modèles. Mais l'objectif que nous vous proposons, c'est que la structure
soit vraiment représentative des intérêts des jeunes. Nous
trouvons intéressant, dans ce que vous proposez dans votre projet de
loi, que vous disiez que, pour mieux représenter les
intérêts des jeunes, vous faites confiance aux organismes
jeunesse. Vous précisez: des organismes sans but lucratif. Donc, nous
disons: des organismes communautaires jeunesse. On trouve cela très
intéressant dans le projet de loi que vous proposez. Donc, vous
reconnaissez que les organismes communautaires jeunesse défendent les
intérêts des jeunes. Là-dessus, on est tout à fait
d'accord avec vous. Effectivement, c'est le meilleur modèle pour que les
intérêts des jeunes soient les mieux représentés.
Cependant, si vous reconnaissez les organismes communautaires jeunesse comme
étant les plus aptes à représenter les
intérêts des jeunes, il faudrait lier à cette
reconnaissance le financement nécessaire à la survie, à la
récurrence des organismes communautaires. C'est juste la logique.
M. Bolduc: Comme complément de réponse
là-dessus, contrairement à ce que d'autres ont
présenté dans leur mémoire précédemment au
sujet de !a politique de financement des organismes communautaires, nous
croyons que cela devrait émerger du gouvernement et non du CPJ. C'est
une responsabilité sociale et non pas la responsabilité des
jeunes.
M. Després: Dans votre mémoire, vous dites que la
procédure de représentation "suppose la formation d'une
assemblée régionale dans chacune des régions où
toute personne accréditée par trois organismes de deux secteurs
différents - on retrouve ce bout-là dans le projet de loi - peut
être en nomination au poste de représentant de sa région".
Est-ce que vous avez prévu un moyen de contrôle pour envoyer
à cette assemblée générale 20 individus
différents avec l'endossement des mêmes organismes? Quel
contrôle y faites-vous?
M. Manseau: La mécanique qu'on utilise est celle que vous
avez proposée dans votre projet de loi quand une personne doit
être proposée par trois organismes provenant de deux secteurs
différents. Elle nous semblait valable. La seule chose qu'on dit, c'est:
Qui nomme les personnes au collège électoral? On a dit: À
partir de la proposition que l'on fait, si on veut que l'organisme soit
vraiment représentatif des intérêts des jeunes, il faudrait
créer une structure réqionale que seraient les conseils
régionaux des organismes communautaires jeunesse. Justement, il existe,
dans certaines réqions, des tables de concertation des organismes
jeunesse. À ce moment-là, on pourrait se servir de cette
mécanique.
M. Després: J'aimerais savoir si des organismes de deux
secteurs différents... Est-ce que, tous les quatre, vous pouvez vous
faire endosser par les mêmes secteurs d'activité et par les
mêmes organismes? Est-ce que cela va être accepté à
votre assemblée générale, à ce
moment-là?
M. Manseau: Je pense que...
M. Després: Étant donné que c'est dans une
même région.
M. Manseau: Je pense que l'esprit de la loi, c'était qu'il
y ait une diversité des gens qui représentent les
intérêts des jeunes. Sur cela, nous sommes tout à fait
d'accord. II reste à établir la mécanique. Il nous semble
difficile ce soir d'échanger sur cette mécanique. Nous sommes
tout à fait d'accord avec vous qu'il faudrait s'assurer que la
diversité des intérêts soit représentée au
collège électoral. Nous sommes tout à fait d'accord avec
cela. Malheureusement pour nous, il est trop tard. On est déjà
tous âgés de plus de 30 ans. On ne pourra pas participer au
Conseil permanent de la jeunesse.
M. Houde (Michel): J'ai un complément d'information
là-dessus. Dans la réqion, il y a un an et demi environ, on
était regroupés dans ce qu'on appelait le CRJ 04, l'ensemble des
tables de concertation de quatre villes. On a abandonné
momentanément, étant donné qu'on avait d'autres
priorités. On a dit: On va travailler à l'intérieur de
chacune de nos municipalités. Même si on en arrivait à ce
CRJ 04, pour ce qui est de la réqion 04, il va quand même falloir
aller chercher d'autres organismes jeunesse qui ne faisaient pas partie du CRJ
04. Une fois regroupés, il y aura quand même lieu d'identifier les
critères de sélection pour envoyer au niveau provincial les
éléments qu'on pense les meilleurs pour représenter la
région.
M. Després: À ce moment-là, j'irai dans
votre région et je pourrai poser ma candidature.
Une voix: Vous ne serez peut-être pas accepté.
M. Després: Non, à moins de
déménager, mon cher ami.
Maintenant, en ce qui concerne votre dernière recommandation: "La
Table de concertation des services d'aide à la jeunesse recommande que
les intérêts des jeunes défavorisés soient
représentés et défendus de façon prioritaire."
J'aimerais savoir, pour vous, les priorités des jeunes
défavorisés -lorsqu'on parle de gens défavorisés,
on peut parler des assistés sociaux, on peut parler de financement,
d'études, d'alcoolisme, d'un paquet de choses - quelle est votre
définition des priorités face aux jeunes
défavorisés? Quelles sont vos priorités?
M. Manseau: Si on parle des priorités des organismes
communautaires jeunesse, je pense que c'est évident, c'est du
financement sur une base récurrente. Si on parle des
intérêts des jeunes défavorisés, quels sont leurs
besoins actuellement, on se rend compte que la société
québécoise, depuis le début des années
quatre-vingt, a énormément évolué. La crise
économique, la tendance néo-libéraliste,
l'entrepreneurship, tout cela a amené une nouvelle forme de leadership
dans notre société.
Ce qu'on constate, c'est qu'il y a des jeunes qui sont laissés
pour compte et leur besoin, c'est de briser leur isolement. Ils se trouvent de
plus en plus isolés; quand on se retrouve isolé, on se
marginalise de plus en plus. Quelqu'un qui a 180 $ d'aide sociale par mois pour
survivre, s'il n'a pas de ressources communautaires pour l'aider, risque de
s'engager dans des voies difficilement acceptables pour notre
société actuellement, des voies telles que la consommation de
drogues et d'alcool, la délinquance et jusqu'au désespoir,
à l'inertie, à la passivité et même au suicide.
Donc, je pense que les deux principaux problèmes des jeunes
actuellement, des laissés-pour-compte, sont l'isolement et la
non-reconnaissance sociale.
Je ne veux pas juger cette société, mais je dis que dans
une société qui a un discours très axé sur
l'entrepreneurship, quand on n'a qu'un secondaire II ou un secondaire III,
quand on n'a pas de soutien familial, quand on n'a aucun revenu et quand on
reçoit 180 $ par mois, il est difficile de s'identifier à ce
discours lié à l'entrepreneurship, et ce, sans vouloir aucunement
juger de la validité de l'entrepreneurship.
M. Bolduc: En complément de réponse, il faudrait
savoir aussi que les organismes communautaires jeunesse qui existent et ceux
qui sont à venir - parce qu'il y en a d'autres à venir, il y a
des ressources è implanter, il y a des ressources à venir pour en
arriver à rendre les services les plus essentiels à cette
jeunesse - ces organismes sont déjà à même de rendre
des services, sont déjà à même d'identifier des
besoins; ils travaillent avec ces jeunes, ils s'arrangent pour que ces jeunes
puissent avoir un accès, quelque part dans cette société,
à une certaine emprise, qu'ils puissent coller à la
réalité, qu'ils puissent s'engager dans une voie qui leur
permette d'avoir accès au discours basé sur l'entrepreneurship.
Avant de s'engager dans n'importe quelle voie du type entrepreneurship, les
jeunes ont besoin, avant tout, de ressources matérielles et
financières, de soutien moral et de ressources physiques aussi. Je crois
que c'est relié à un problème social et on doit y penser
d'une façon fondamentale.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, M. le
député de Limoilou. Nous allons maintenant passer la parole
à Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonsoir, madame,
bonsoir, messieurs. Tout à l'heure, en boutade, M. Bolduc disait: Nous
aussi, même si on n'est pas dans le groupe de soutien aux initiatives
jeunesse, on est capable de se structurer. Je dois dire que j'ai
été très agréablement impressionnée à
la fois par la qualité de votre mémoire et par votre
efficacité, puisque vous avez trouvé moyen de faire une
consultation pour rédiger ce mémoire quand on connaît les
délais qui vous ont été impartis. Ce que j'ai
apprécié également, c'est l'excellente structure de
concertation que vous vous êtes donnée. Je ne le dis pas
simplement pour vous flatter, je suis sincèrement impressionnée.
(17 h 30)
Ce qui confère une qualité particulière à
votre mémoire, c'est la connaissance intime que vous avez des besoins
des jeunes de votre région. Vous me dites en rejoindre un sur trois.
C'est assez exceptionnel pour ne pas dire unique, probablement, dans la
province. Dans ce sens, c'est ce qui, à mon avis - j'espère que
c'est partagé par le gouvernement - donne un poids réel et
très important, je dirais, au mémoire et aux recommandations que
vous nous faites.
Vous avez assez longuement élaboré sur les
problèmes des jeunes, sur les organismes communautaires jeunesse, le
fait que plusieurs aient dû fermer leurs portes faute de moyens
financiers, le temps que vous devez consacrer pour chercher du financement. Je
voudrais rappeler ici qu'on n'est pas suffisamment conscient des
économies que ces organismes font réaliser. Je vais tenir un
discours économique parce que je me dis que, de plus en plus, c'est
quasiment le seul discours qui passe.
Un jeune en institution, un jeune délinquant, coûte entre
60 000 $ et 70 000 $ par année. Le moindrement qu'un organisme
communautaire jeunesse réussit à
éviter que le jeune glisse du côté de la
délinquance, cela veut dire que s'il en réchappe un par
année il a déjà payé plus que ce qu'on donne
à des maisons de jeunes, soit environ 40 000 $. Je pense que c'est cela
qu'il va falloir qu'on réalise et, un peu comme dans le cas, pour un
autre modèle, des groupes de soutien aux initiatives-jeunesse, ils
créent à peu de frais des emplois. Vous, dans ce qu'on appelle
les ressources alternatives, ce sont nos moins coûteuses, elles sont
généralement très efficaces, elles sont
généralement quasiment disponibles presque 7 jours par semaine,
quand ce n'est pas 24 heures par jour, et je ne suis pas sûr qu'on ait
réalisé...
M. Manseau: Madame, je voudrais appuyer ce que vous venez de dire
en disant que je suis responsable d'une maison d'hébergement à
Drummondville et mon collègue, à mon extrême gauche,
Michel, est directeur d'un centre d'accueil. Sans vouloir du tout juger de la
qualité de leur intervention, parce qu'on travaille la main dans la
main, il reste que depuis deux ans que nous sommes ouverts on n'a pas encore
reçu d'argent du gouvernement et on a une possibilité...
Actuellement, il y a neuf jeunes chez nous. Le centre d'accueil ne peut pas,
à cause de sa structure de fonctionnement, mais, si on pouvait avoir
accès à deux lits du centre d'accueil, on pourrait faire
fonctionner facilement la maison d'hébergement, chez nous, pendant un an
complet, payer cinq éducateurs, cinq intervenants en ressources
communautaires. C'est donc extrêmement important pour nous.
Tout à l'heure le député nous a parlé de
l'année des sans-abri. Présentement, le gouvernement, pour le
soutien aux services communautaires, a un budget de 600 000 $ pour
l'hébergement des jeunes sans-abri. Ce n'est donc pas beaucoup. C'est
sûr qu'on revendique des montants supérieurs. La même chose
en ce qui concerne les éducateurs de rue, qui font un travail de
prévention dans le milieu naturel; donc, ce sont des sommes d'argent qui
ne sont pas prises en charge par le gouvernement. Eux aussi ont beaucoup de
difficulté à recevoir de l'argent du service de soutien aux
organismes communautaires.
M. Bolduc: On est rendu au coeur d'un problème social. On
n'a pas encore réussi à chiffrer le coût de la
prévention et l'économie réalisée par cette
prévention. Si on continue dans la voie de la récupération
du plus ma! pris, on s'en va dans la récolte de beaucoup de plus mal
pris. Si on ne fait pas un travail de terrain, à un moment donné
il va falloir qu'on ferme les portes ou qu'on ouvre d'autres
établissements. À ce moment-là, je pense que la prise en
charge coûte très cher. Il faudra réagir un jour.
M. Houde (Michel): Je pense que Daniel a ouvert une belle porte.
Non pas que je veuille me défaire de mes deux lits mais, effectivement,
au niveau d'un discours économique, en 1980, nous du centre d'accueil
Les Pavillons Laforest, on a dégagé les montants pour un
coordonateur et on s'est aperçu qu'avec les années ces 30 000 %
ont fait générer au-delà de 250 000 $ par année
dans la communauté. Déjà là, c'est une façon
de voir qu'il y a une possibilité de gérer la décroissance
d'une autre façon et par une prise en charge par la communauté.
Je pense que, pour revenir aux organismes communautaires jeunesse, c'est beau
de s'impliquer, mais on en a assez de passer 46 % de son temps à courir
l'argent. On parle d'équité, d'égal à égal,
mais on ne peut pas être d'égal à égal quand,
à un moment donné, on passe la moitié de son temps
à trouver du financement. Il est important de vous présenter ces
éléments aujourd'hui.
Mme Blackburn: Je partage tout à fait ce discours. Il
faudra qu'à un moment donné on le comprenne, et rapidement, parce
qu'on ne pourra pas en même temps voir une population vieillissante, de
plus en plus dépendante, et des jeunes qui ont de la difficulté
à apprendre à s'assumer. On les a des deux bouts. Cela ne pourra
pas fonctionner; cela va craquer. On connaît les coûts de la
récupération et de la réparation quand on n'a pas fait de
prévention. Il est vrai que, si on ne connaît pas les coûts
de la prévention, on connaît drôlement les coûts du
manque de prévention parce qu'on en voit les effets quotidiennement, que
ce soit dans les écoles, par décrochage ou par
délinquance.
M. Houde (Michel): J'aimerais ouvrir une parenthèse
là-dessus. On en parlait justement en venant ici. L'argent n'est pas non
plus dans les institutions pour donner à du communautaire.
Déjà - M. le député est là aussi pour
l'attester - on a ce qu'il faut actuellement pour vivre au niveau de l'interne
et cela déborde. À un moment donné, on manque de place. Il
faudra faire des efforts pour trouver un moyen quelconque. C'est de l'arqent
neuf et cet argent neuf, il faudra le donner à qui de droit.
M. Bolduc: Je pense que la structure qu'on propose concernant le
CPJ, en disant qu'on veut rapatrier les budqets du Secrétariat à
la jeunesse, laisse une porte ouverte dans le sens où on est d'accord
avec le Conseil permanent de la jeunesse, sauf qu'on voudrait qu'il ne
coûte pas un cent. On voudrait qu'il ne coûte rien pour laisser des
sommes disponibles à la base, là où c'est important,
là où cela prend de l'argent. Ne
nous mettez pas une structure qui va coûter de l'argent pour
priver ceux qui en ont le plus besoin en bas. C'est évident, c'est un
discours qui se tient très bien. Il y a, sur la table de plusieurs
organismes et de plusieurs regroupements au Québec, une volonté
ferme d'aller au ministère de la Santé et des Services sociaux et
dire: Maintenant, ce qu'on veut, ce n'est plus quelque chose comme 0,4 % du
budget de la Santé et des Services sociaux; c'est 1 % et au-delà.
Ce qu'on exige, ce sont des sommes supplémentaires injectées pour
ces jeunes. Si on ne fait que déplacer les fonds, cela ne sert a rien.
Il faudra qu'à la base il y ait plus d'argent et non pas dans la
structure. C'est, en gros, ce qu'on recommande.
Mme Blackburn: Je dirais que vous faites quasiment des blocs de
recommandations, le premier sur la nécessité et l'urgence de
reconnaître et de financer les organismes communautaires jeunesse. Je ne
ferais pas tout à fait la même lecture que le député
- de Saint-Hyacinthe ou de Limoilou - qui a dit: Je suis heureux de voir que
vous êtes d'accord avec le Conseil permanent de la jeunesse. Je n'avais
pas fait tout à fait la même lecture. Ce que je lis et ce que vous
proposez comme structure, c'est radicalement différent de ce qu'est le
projet actuellement sur la table. Je dois vous dire que, pour ma part, si le
gouvernement nous avait suggéré une telle structure, je serais
extrêmement heureuse et tout à fait confiante par rapport à
l'avenir d'un tel organisme. Je vais revenir sur ce que j'ai déjà
dit. Le mode de nomination du conseil, tel que proposé et quel que soit
le gouvernement, risque de devenir une structure partisane et complice, comme
on a dit tantôt, tandis que, ce que vous proposez, c'est d'aider les
jeunes à s'organiser, à se donner des lieux de concertation tant
au niveau régional qu'au niveau national. Je crois beaucoup à un
genre de structure comme ça pour une raison très simple. Je sais
que ce n'est pas facile pour un gouvernement de l'accepter et je suis
consciente de ce que cela peut vouloir dire parce que, éventuellement,
on crée une structure comme ça, on prend le pouvoir et on l'a. Je
suis consciente de ce que cela peut vouloir dire. Je pense qu'au Québec
-comme dans les autres pays, mais plus particulièrement au Québec
- on a besoin de ce genre d'opposition que constituent les jeunes. Beaucoup de
dossiers ont connu un cheminement" différent parce que les jeunes l'ont
exprimé et de façon très ferme: par exemple, dans les
écoles, dans les universités, où ils ont la chance
d'être mieux structurés et d'être là un bout de
temps. Je crois beaucoup à cela et j'ai beaucoup de difficulté
à croire qu'on tirera autant d'avantages d'un organisme qui sera plus ou
moins muselé d'avance ou un peu "partisane". Une fois que vous
êtes à l'intérieur... Certains conseils consultatifs que je
ne nommerai pas étaient relativement agressifs, et heureusement
aqressifs, et on ne les entend plus. Même, je pense à deux avis
que j'ai vu passer qui sont tout à fait différents des avis qui
avaient été émis juste deux ans avant sur la même
question. Vous faites un "virage en u" là-dessus, parce que le ministre
estimait qu'il avait besoin d'un appui. C'est son droit mais cette structure,
moi j'y crois davantage. Allez-y donc, oui.
M. Manseau: Permettez-nous de préciser notre pensée
là-dessus. Effectivement, nous sommes d'accord avec les objectifs du
projet de loi 104, soit ce qu'on retrouve aux articles 25 et 26,
c'est-à-dire de conseiller le ministre sur toute question relative
à la jeunesse. Évidemment, nous avons également de fortes
réserves sur l'articulation actuelle de la loi qui n'en fait qu'un
organisme de consultation. Nous croyons présentement que le
Secrétariat à la jeunesse joue le rôle de conseiller sur
les questions relatives à la jeunesse auprès des
différents ministères.
Nous croyons également qu'il n'est pas prioritaire de mettre sur
pied une autre structure de consultation pour le gouvernement étant
donné qu'il y a déjà le Secrétariat à la
jeunesse qui joue ce rôle. C'est pour cela que nous proposons que le
Conseil permanent de la jeunesse ait plutôt une structure
représentative des intérêts des jeunes afin de mieux
conseiller le gouvernement sur les questions relatives à la jeunesse. Il
y a pour nous une nuance quand même importante là-dedans.
Par contre, quand nous avons reçu le document pour l'étude
du projet de loi, il y avait un document de Danièle Lapointe qui est
directrice générale du Secrétariat à la jeunesse et
qui disait que la formation du Conseil permanent de la jeunesse
privilégierait les caractères d'autonomie et de non-partisanerie
afin d'accroître le pouvoir d'action auprès du premier ministre.
C'était dans le document qui accompagnait le texte de loi. À ce
moment, elle disait que les rôles étaient de coordonner l'action
gouvernementale et de conseiller les différents ministères. Nous
croyons que c'est là l'esprit que doit avoir le Conseil permanent de la
jeunesse.
Nous devons faire confiance au gouvernement pour qu'il adapte des
mécanismes prévoyant exactement cette autonomie et cette
non-partisanerie. Nous avons proposé un modèle qui peut
être valable. Il y a d'autres modèles qui peuvent être
également valables.
M. Bolduc: Pour poursuivre la citation que mon collègue a
donnée, elle est très juste. C'était l'esprit. Je dois
dire par contre qu'on n'a pas retrouvé cela dans la lettre. II
s'agirait peut-être de l'insérer quelque part, de voir de
façon concrète à ce que ce soit
préservé.
Dans un autre ordre d'idées, on disait du projet de loi 104 que
ce serait le lieu d'apprentissage du pouvoir pour les jeunes, le premier
contact avec une structure de pouvoir. Je trouve que c'est très sain,
c'est très logique d'arriver à une structure comme
celle-là, mais je dirais aussi que si on veut créer une structure
d'apprentissage du pouvoir pour les jeunes il faut garder la
réalité de ce qu'est le pouvoir et dire que c'est un
élément de transformation sociale. À ce moment-là,
il ne faut pas le museler. Si on veut que les jeunes apprennent le pouvoir,
apprennent l'utilisation du pouvoir, il faut qu'ils soient capables de
l'assumer. L'assumer, cela veut dire être capable de le transformer.
M. Manseau: Je comprends également que le gouvernement,
à un moment donné, peut craindre les structures de
représentation. Si on s'en souvient, il y a quelques années, les
états généraux de la jeunesse avaient causé
beaucoup de brouhaha - j'y ai participé un peu - ils n'étaient
peut-être pas très satisfaisants pour la cause des jeunes. On peut
craindre, à un moment donné, d'embarquer dans une structure de
représentation, mais pour nous elle est vraiment essentielle. Que le
gouvernement privilégie que ce soient les organismes communautaires
jeunesse, donc, les gens les plus près des intérêts des
jeunes, qui en sont le fondement et la base même, nous sommes tout
à fait d'accord. Ce que nous proposons en plus, c'est que le
gouvernement puisse lier cette reconnaisance à un financement stable et
récurrent.
Mme Blackburn: M. le Président, M. Manseau fait
état d'un document du Secrétariat à la jeunesse qui a
été, j'imagine, distribué à tous les organismes.
Est-ce qu'il est possible d'avoir une copie de ce document?
Le Président (M, Marcil): Je ne sais pas si j'aurai le
privilège de vous donner copie. Faudrait peut-être...
Mme Blackburn: Demander au secrétariat.
Le Président (M. Marcil): ...s'adresser au
Secrétariat à la jeunesse.
Mme Blackburn: Un document... (17 h 45)
Le Président (M. Marcil): Un document dont M. Manseau nous
fait part.
M. Jolivet: Dans ce cas-là, si on ne peut pas l'avoir, il
y a une façon bien simple, c'est que les gens... Oui.
M. Gratton: On m'indique que le chef de l'Opposition a
déjà le document en main. Je n'ai pas d'objection à en
faire des copies et vous les adresser directement. D'ailleurs la demande avait
été faite par le bureau du chef de l'Opposition. Ce dernier a
reçu la documentation.
Mme Blackburn: Dans votre mémoire, il y a des termes qui
reviennent, qui viennent appuyer vos demandes de modification, et qui sont
à la page 2 de l'introduction. Vous dites: II est essentiel que ce soit
représentatif, il est primordial... Cela m'amène à la
question suivante. Si le projet de loi n'était pas modifié,
est-ce que vous estimez que ce serait une priorité de le créer et
est-ce qu'il faudrait quand même le constituer? La deuxième
question - est-ce que j'ai bien compris? - si vous aviez à
établir une priorité, cela devrait être et rapidement une
politique de reconnaissance et de financement des orqanismes communautaires
jeunesse, parce que vous semblez lier la crédibilité du conseil
permanent, tel que vous le proposez, et la solidité, sî je peux
m'exprimer ainsi, la permanence des organismes jeunesse.
M. Manseau: Le gouvernement, je pense, s'est doté d'une
structure de consultation qui est le Secrétariat à la jeunesse.
C'est pour cela que nous croyons que si le gouvernement n'a pas l'intention
d'en faire une structure représentative, il a déjà un
instrument qui est fort valable puisqu'il se l'est donné, puisqu'il l'a
dirigé et l'a géré. À ce moment, pourquoi
créer une autre structure? Est-ce que c'est prioritaire? Nous ne croyons
pas. Est-ce qu'il est prioritaire d'avoir une structure représentative?
Oui, nous le croyons pour défendre les intérêts des jeunes.
À ce moment, avec une structure dont la base est les organismes
communautaires jeunesse, la question est: Est-ce qu'il est prioritaire d'en
financer l'existence, la récurrence, compte tenu des services qu'elle
offre à la clientèle? II est certain que nous ne pouvons que
répondre oui à cette question. Pour nous, c'est le fondement
même. Le gouvernement le reconnaît en la constituant dans une loi.
Donc, pour nous il est important d'assurer le financement récurrent de
ces organismes.
M. Bolduc: Je pense aussi que c'est évident, comme Daniel
le disait, qu'on se doit de dire non à un dédoublement de
structures parce que d'abord on pense qu'il n'y aura pas d'argent à
mettre là. On n'a pas d'affaire à mettre deux fois l'argent dans
la même structure, dans des choses qui vont avoir le même
résultat. D'autre part, on se demande: Est-ce qu'on a le choix? Est-
ce que de toute façon ce projet de loi ne sera pas adopté?
Vous avez fait la consultation et on est ici pour vous dire ce qu'on pense.
Après, ça vous appartient. Ce sera vous qui allez en
disposer.
M. Houde (Michel): Je pense que le gouvernement a besoin d'un
instrument pour le conseiller et je dirais même un peu plus que cela,
pour évaluer aussi. Je pense qu'il revient au gouvernement de faire ce
choix. Avec les recommandations qui ont été faites, aujourd'hui,
je demeure persuadé que le gouvernement, que ceux qui auront à
prendre des décisions ne peuvent pas être insensibles aux
recommandations qui ont été faites, ici, aujourd'hui.
Mme Blackburn: Plusieurs organismes qui se sont
présentés ici trouvaient que la création d'un tel
organisme consultatif aurait mieux trouvé sa place si, au
préalable, le gouvernement s'était doté d'une politique
jeunesse et l'avait fait connaître par le biais d'un livre blanc, d'un
livre vert comme on l'a fait à l'occasion de la création, je
dirais, de tous les organismes. À ma connaissance, le Conseil
supérieur, c'était le rapport Parent; le Conseil des
cégeps du Québec, c'était Vers une nouvelle étape;
le Conseil du statut de la femme, je ne me rappelle pas bien le titre;
l'Environnement, c'était la même chose. Il y avait une
ébauche de politiques gouvernementales touchant la question dans
laquelle on prévoyait la création d'un conseil consultatif. Ici,
à l'inverse, on crée le conseil consultatif et on dit: II va nous
donner une politique.
Plusieurs organismes sont venus nous dire que la démarche aurait
été beaucoup plus logique et se serait inscrite d'une
façon beaucoup plus rationnelle si, au préalable, elle
s'était appuyée sur l'essentiel des grandes orientations que le
gouvernement entendait prendre sur la question de la jeunesse. Comment
réagissez-vous à cela?
M. Manseau: Nous ne connaissons pas tous les rouages de
l'organisation d'un gouvernement. Il est peut-être difficile de
répondre à cette question de façon très
spécifique. Par contre, ce que nous voulons dire c'est que le
gouvernement demeure quand même l'ultime responsable des politiques
jeunesse et sociales qu'il doit mettre sur pied. En ce sens-là, une de
nos craintes, c'est que le gouvernement pourrait se déresponsabiliser
face au Conseil permanent de la jeunesse et dire que le lobbying de tous les
autres intervenants, de tous les autres groupes jeunesse pourrait se faire
d'une façon canalisée par le Conseil permanent de la
jeunesse.
Nous savons très bien que le gouvernement est très ouvert
à toutes les formes de lobbying des intérêts commerciaux et
industriels, et nous croyons qu'il doit rester ouvert à toutes les
formes de lobbying des groupes de pression jeunesse tout autant
diversifiés qu'ils le sont. C'est bien évident.
Donc, nous demandons quand même au gouvernement de ne pas attendre
que le conseil permanent donne toutes sortes d'avis mais de regarder vraiment
la situation des jeunes, actuellement, et de voir de quelle façon il
peut intervenir pour le mieux-être de ces jeunes.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, Mme la ministre,
Mme la députée, si vous voulez conclure.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Marcil): II y a une dame hier, ou
aujourd'hui, qui...
M. Jolivet: C'est un très bon lapsus.
Mme Blackburn: II m'a appelée Mme la ministre. Cela
viendra.
Le Président (M. Marcil): Espérez toujours.
Allez.
Mme Blackburn: Madame, messieurs, je voudrais, au nom de ma
formation politique, vous remercier d'avoir accepté de participer aux
travaux de cette commission. La qualité de votre mémoire, de
votre réflexion, la qualité de votre prestation également,
va nous permettre d'apporter un éclairage important, je dirais, par
rapport aux débats qui sont actuellement en cours sur cette
question.
Avec M. Houde, j'espère beaucoup que le gouvernement ne restera
pas insensible aux remarques et aux propositions qui viennent de votre
organisme et d'autres organismes qui vont essentiellement dans le même
sens.
J'ai été impressionnée par votre expertise.
D'évidence, vous parlez avec une connaissance intime de la situation des
jeunes dans cette région, et avec une connaissance assez large, parce
que vous couvrez plusieurs secteurs d'activité. Cela ne veut pas dire
que pour autant l'expertise des autres n'est pas importante, sauf qu'en raison
de l'étendue de votre expertise, elle est particulièrement
pertinente. Il me semble qu'on ne peut pas négliger la valeur d'une
telle réflexion lorsqu'il s'agit de vouloir doter les jeunes d'un
organisme qui réponde au mieux aux besoins de la jeunesse du
Québec.
Avec vous, j'espère que la partie ministérielle
reconnaîtra la valeur des recommandations que vous nous avez
présentées. Je vous remercie de votre présence ici.
Également, si vous me le permettez, je voudrais vous remercier aussi
pour tout ce que vous faites pour les jeunes de votre région.
Le Président (M. Marcil): Merci beaucoup, Mme la
députée. M. le ministre.
M. Gratton: M. le Président, compte tenu de l'heure,
j'aurai une seule question. Étant donné que ce que le
gouvernement vise à faire en créant le Conseil permanent de la
jeunesse, c'est de se donner un conseiller privilégié, est-ce que
vous trouveriez normal que de quelque façon que ce soit, d'une
façon quelconque, le gouvernement soit associé à la
nomination des membres de ce conseil consultatif?
M. Manseau: II reste que dans les recommandations que nous
faisions on avait de la difficulté à saisir où toutes les
nominations se faisaient exactement. C'est certain que nous proposions que les
nominations dans les régions, jusqu'au collège électoral,
soient faites par les organismes eux-mêmes et que les gens recommandent
au premier ministre de nommer onze personnes. On n'était pas contre
cette façon de faire qui semblait être d'usage commun au
gouvernement. Dans ce sens, on a dit: Les gens vont recommander et le premier
ministre, de toute façon, est très ouvert aux recommandations, et
c'est d'un usage commun au gouvernement de nommer après recommandation.
On n'avait pas vraiment mis en doute la bonne foi du gouvernement dans ce
sens.
M. Gratton: Je suis content que vous apportiez cette
précision parce que je vous avoue que ma compréhension
était différente. Effectivement, ce que vous proposez, c'est de
laisser toute la latitude voulue, toute l'autonomie voulue quant à la
nomination des membres du collège électoral par le biais de vos
collèges électoraux régionaux. Mais vous reconnaissez au
gouvernement la possibilité de nommer les membres du conseil sur
recommandation du collège électoral.
M. Houde (Michel): Ce que je souhaiterais, à ce sujet,
c'est sûrement une possibilité de voir quels devraient être
les critères pour accéder à un tel poste. Je pense que
c'est ensemble qu'il y a possibilité que la lumière jaillisse. Je
pense qu'il y a possibilité d'avoir les meilleurs individus aux
meilleurs postes par la collaboration de la partie ministérielle avec ce
collège électoral.
Le Président (M. Marcil): Une conclusion, M. le
ministre?
M. Gratton: Ce que nous avons recherché... Normalement, on
le sait, on nomme les membres de tous les conseils consultatifs à peu
près de la même façon, c'est le gouvernement qui les nomme
sur proposition d'organismes socio-économiques ou sur proposition, tout
simplement, du ministre responsable. Je suis loin de partaqer le point de vue
de Mme la députée de Chicoutimi que le fait de ne pas accorder
plus d'autonomie aux groupes intéressés dans la nomination des
membres de ces conseils consultatifs débouche nécessairement sur
un élément de partisanerie. Effectivement, il y a des conseils
consultatifs. Mme la députée de Chicoutimi a fait état,
sans l'identifier, d'un cas. On pourrait faire état de plusieurs cas de
conseils consultatifs: le Conseil supérieur de l'éducation, le
Conseil du statut de la femme ont fait des recommandations qui ne faisaient pas
tout à fait l'affaire du gouvernement, et c'était pourtant des
groupes dont les membres avaient été nommés par le
gouvernement.
Ce que j'aimerais savoir, c'est si vous seriez capable de vivre avec la
formule qui est présentée dans le projet de loi actuellement,
c'est-à-dire le mode de nomination selon lequel des organismes comme
ceux que vous représentez appuient des candidatures. On pourrait
ensemble, comme vous le dites, M. Houde, essayer de cerner quels pourraient
être les critères. Par exemple, on pourrait -comme la
possibilité en a été évoquée -demander aux
candidats de présenter leur programme ou de présenter un document
appuyant leur candidature qui soit appuyé par des organismes reconnus.
Est-ce que la formule actuelle du projet de loi pourrait vous satisfaire?
Une voix: En trente secondes.
M. Houde (Michel): C'est le type de réponse que je vais
donner, parce que Manon vient de me souffler quelque chose d'important à
l'oreille. Ce qui a fait notre force à nous, ce qui a fait nos
succès, c'est la concertation. Je pense que ce qu'on a mis sur pied,
c'est en consultant les gens, c'est en demandant l'opinion des gens et en
prenant des décisions ensemble, assez souvent. Je ne sais pas si la
réponse peut vous satisfaire, c'est une dimension de concertation.
M. Bolduc: Nous ne croyons pas que l'exercice de retourner
à la base, de régionaliser, d'aller chercher dans les milieux
où vivent les jeunes soit un exercice infaisable. Nous croyons, au
contraire, que c'est un exercice qui peut apporter beaucoup plus de richesse et
beaucoup plus de consistance au Conseil permanent de la jeunesse. C'est dans
cet esprit que nous formulons la recommandation de démocratiser toute la
structure. Nous pensons qu'il s'agirait là d'un apport positif pour le
conseil permanent.
Le Président (M. Marcil): C'est bien.
M. Gratton: M. le Président, je m'associerai volontiers,
en terminant, aux propos de Mme la députée de Chicoutimi quant
à la qualité du mémoire que vous nous avez
présenté, quant à l'élément
représentatif, très sûrement, d'une très vaste
portion de la population des jeunes de votre région. Je vous en
remercie, le message est bien reçu.
Le Président (M. Marcil): En conclusion, j'aimerais
profiter de l'occasion pour remercier les membres de cette commission pour leur
magnifique travail durant ces deux jours et remercier tous les groupes qui ont
bien voulu se présenter et collaborer à cette séance de
consultation, en particulier, M, Manseau, M. Bolduc, Mme Côté et
M. Houde. Merci beaucoup de votre précieuse collaboration et bon
retour.
J'ajourne les travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 heures)