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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Wednesday, September 24, 1986 - Vol. 29 N° 19

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition du président de la Commission des droits de la personne sur les problèmes vécus par cet organisme


Journal des débats

 

(Dix heures vingt-trois minutes)

Le Président (M. Filion): II me fait plaisir de constater quorum et de déclarer cette séance de la commission des institutions ouverte.

Pour le bénéfice des membres, de nos invités et de ceux qui nous écoutent, je rappellerai le mandat de la commission qui est de procéder à l'audition du président de la Commission des droits de la personne, afin de connaître les principaux problèmes vécus par l'organisme. Ce mandat est le fruit de la décision de la commission prise lors de la séance du 17 juin 1986. Je voudrais peut-être en profiter pour replacer notre mandat dans le contexte.

Je vous rappelle que la commission a choisi d'exercer son pouvoir de surveillance, pour l'année 1986, sur l'Office de la protection du consommateur, mandat qui a été accompli durant la journée d'hier et qui se poursuivra évidemment par les travaux à huis clos des membres de la commission. Du même souffle, la commission a décidé d'examiner, en 1987, les orientations, les activités et la gestion de la Commission des droits de la personne, conformément à l'article 294 du règlement de l'Assemblée nationale. Je donne lecture de l'article 294 de notre règlement: "Chaque commission examine annuellement les orientations, les activités et la gestion d'au moins un organisme public soumis à son pouvoir de surveillance. Le choix des organismes se fait conformément à l'article 149. À défaut d'accord, la commission de l'Assemblée désigne les organismes qui seront entendus."

Encore une fois, il y eut accord au sein de la commission même, et, pour l'année 1987, le choix de la commission se porte sur la Commission des droits de la personne. Cependant, évidemment, les membres de la commission étaient sensibilisés au fait que la Commission des droits de la personne exerce des activités qui sont étendues, non seulement sur le plan qualitatif, mais aussi sur le plan quantitatif, de sorte que la séance de ce matin a pour but de nous aider à préciser notre mandat pour l'an prochain, afin d'éviter que, en somme, à vouloir couvrir trop large, nous ne puissions cerner absolument rien de bien précis. Donc, avant de déterminer les questions sur lesquelles portera l'examen de la commission l'an prochain, la commission a décidé d'entendre le président de la Commission des droits de la personne afin de connaître les problèmes vécus par l'organisme en ce qui concerne ses activités, ses orientations et sa gestion.

Je souhaite donc la bienvenue à Me Jacques Lachapelle, président de la Commission des droits de la personne, qui est accompagné, à sa gauche, de la vice-présidente de la Commission des droits de la personne, Me Nicole Trudeau-Bérard. À ce stade-ci, je demanderais à la secrétaire d'annoncer les remplacements.

La Secrétaire: M. Farrah (Îles-de-Ia-Madeleine) est remplacé par M. Doyon (Louis-Hébert).

Le Président (M. Filion): Voici la procédure que nous allons suivre ce matin. D'abord, je vais inviter les membres de la commission à faire, s'ils le désirent, les remarques d'ouverture qu'ils jugeront appropriées. Dans un deuxième temps, nous entendrons l'exposé du président de la Commission des droits de la personne. Suivra une période d'échange de propos entre les membres de la commission et les représentants de la Commission des droits de la personne et, s'il y a lieu, encore une fois, avant de terminer nos travaux, les membres de la commission pourront adresser certaines remarques finales.

Je rappellerai que nos travaux ne doivent pas dépasser 13 heures aujourd'hui. Donc, j'inviterais les membres de la commission qui le désirent à faire quelques remarques préliminaires tout en signalant à mes collègues que j'aurai, moi aussi, certaines remarques préliminaires à faire étant également - je pense que vous le savez - critique en matière de justice.

M. le député de Louis-Hébert.

Remarques préliminaires M. Réjean Doyon

M. Doyon: Pour faire suite aux mots de bienvenue que vous venez de prononcer, j'ajoute les miens et ceux des représentants des députés ministériels qui sont ici. Je suis très heureux de me retrouver à cette table et d'avoir l'occasion d'écouter et de discuter avec le président et la vice-présidente de la Commission des droits de la personne. Au Québec, nous sommes tous fiers de la charte

qui nous régît dans le domaine des libertés et des droits de la personne. C'est là un avantage que nous avons eu longtemps sur d'autres provinces et nous voulons garder cette longueur d'avance.

Je le fais avec d'autant plus de plaisir, M. le Président, que je suis peut-être un des seuls députés à avoir eu recours à la Commission des droits de la personne lors d'un incident qui m'a opposé à la Communauté urbaine de Québec il y a maintenant quelques années. La Commission des droits de la personne a été saisie de mon cas et a fait enquête pour vérifier des prétentions que j'avais dans ma requête, à savoir que j'étais destitué de mon poste pour avoir utilisé ce que je prétendais appartenir à tout le monde: le droit d'association. J'avais effectivement fondé une association de cadres supérieurs à la Communauté urbaine de Québec, j'en étais le président fondateur et j'avais été mis en demeure par les dirigeants de la communauté urbaine de me retirer de cette association sous peine de destitution, ce que j'avais refusé de faire. Il s'était ensuivi une longue guerre de tranchées, une longue guérilla qui m'avait opposé à la communauté urbaine. La Commission des droits de la personne avait fait une enquête à ce moment-là, avait interrogé les personnes intéressées, avait évalué toute la situation et avait regardé si le secrétaire général de la Communauté urbaine de Québec - ce que j'étais à l'époque - profitait d'une liberté qui était identifiée et qui apparaissait dans la Charte des droits et libertés de la personne et était venue à la conclusion que la destitution qui m'avait été imposée par la Communauté urbaine de Québec était une destitution qui s'était faite par discrimination, c'est-à-dire parce que j'avais utilisé un droit qui était le mien.

Tout cela aurait dû normalement clore le dossier parce que la Commission des droits de la personne était allée très loin, avait déclaré qu'il y avait discrimination et avait à ce moment imposé des dommages exemplaires à la Communauté urbaine de Québec et des dommages punitifs etc.. Sauf que le hic - et la Commission des droits de la personne est bien au courant de cela -c'est qu'il s'agissait là de recommandations qui ont été totalement ignorées par la Communauté urbaine de Québec qui ne s'est pas sentie liée, même si elle avait participé à l'enquête, avait répondu aux questions et avait donné sa version des faits. Malheureusement, quand la décision est sortie, qui était défavorable on ne peut plus, à la Communauté urbaine de Québec, on a dit que c'était une décision qui n'avait aucune valeur juridique et on s'en désintéressait. À partir de là, on entrait par voie d'injonction devant les tribunaux communs et avec tout ce qui s'ensuit.

Je voudrais signaler ici en passant - on aura peut-être l'occasion d'en parler - que lorsqu'on fait face - et c'est souvent le cas - à un organisme de l'importance de la Communauté urbaine de Québec et qu'on se retrouve - tant qu'on est devant la Commission des droits de ta personne cela va assez bien, on peut se débrouiller avec les moyens du bord, je ne parle pas tellement pour moi puisque l'épisode est fini, la page est tournée et c'est de l'histoire ancienne -avec des demandes d'injonction et que la personne qui a été lésée et pour laquelle la Commission des droits de la personne a déterminé qu'il y avait eu discrimination se retrouve devant la Cour supérieure avec tout ce que cela comporte de droits d'appel, de poursuites et de délais, il est absolument impossible - dans un cas comme le mien -de tenir le coup, c'est impossible. Déjà le conflit avait duré pendant sept ou huit mois, sans salaire et sans moyen de subsistance. On embarque à ce moment-là dans des procédures judiciaires où on se retrouve devant la Cour supérieure avec comme perspective, en fin de compte, la Cour d'appel et la Cour suprême. Il est très difficile pour quelqu'un de continuer la bataille. C'est regrettable.

Vous allez me dire que ce n'est pas un problème qui est nouveau, que la solution n'est pas facile et que les tribunaux supérieurs sont là pour ce genre de choses. Sauf que les moyens coercitifs dont dispose la Commission des droits de la personne ne sont peut-être pas suffisants. La situation est spéciale quand il s'agit d'étudier le comportement d'hommes publics - je le suis devenu maintenant - mais j'ai déjà été de l'autre côté de la clôture. Je me rappelle encore un certain nombre de choses. Je sais très bien qu'il est difficile pour un homme public de reconnaître qu'il a fait erreur, qu'il s'est trompé et que des personnes neutres, des arbitres, des gens dont c'est le métier ou la vocation à qui l'on confie ce genre de mandat, ont établi ce genre de choses.

Il faudra voir ensemble et je suis extrêmement heureux de voir la Commission des droits de la personne ici à cette commission parlementaire. Il y a toujours moyen de rendre perfectible ce qui l'est essentiellement, c'est-à-dire des lois. Il est toujours utile pour le législateur d'entendre ceux qui doivent faire fonctionner ces lois, les appliquer et qui s'aperçoivent très souvent qu'il y a des lacunes et qu'il y -a des manques. Nous sommes reconnaissants à la Commission des droits de la personne pour le travail qu'elle accomplit. Elle le fait souvent dans des conditions difficiles. Comme je l'ai dit, j'ai été en mesure de m'en rendre compte moi-même et je profite de l'occasion pour remercier personnellement et publiquement la Commission des droits de la

personne pour ce qu'elle fait pour d'autres personnes qui sont dans des situations difficiles comme moi je l'ai déjà été. Je souhaite qu'elle continue son travail dans les meilleures conditions possible avec les fonds qui sont nécessaires pour qu'elle fasse son travail convenablement et toujours en tenant compte que vous êtes souvent le dernier recours de gens qui ne savent plus où se jeter.

Quand on arrive à la Commission des droits de la personne, on a tout essayé et on se dit, ça c'est la planche de salut, c'est la bouée de sauvetage. Très souvent, les choses se règlent sans que cela aille trop loin. Très souvent, par voie de médiation ou autre, quand les gens réussissent à faire valoir leur point de vue, les choses s'éclaircissent. Je vous souhaite de continuer de faire votre bon travail. Je veux vous assurer que, en tant que députés - je parle ici au nom de mes collègues - nous sommes sympathiques à votre cause, nous avons l'intention de regarder d'une façon positive vos recommandations, vos représentations. Je vous remercie d'être venus devant nous. Nous allons avoir l'occasion peut-être de dialoguer plus longuement plus tard. Merci beaucoup.

Le Président (M. Filion): Merci, M. le député de Louis-Hébert. Y a-t-il d'autres membres de la commission qui désirent intervenir à ce stade-ci?

M. André Boulerice

M. Boulerice: J'aimerais, M. le Président...

Le Président (M. Filion): Oui.

M. Boulerice: ...si vous me le permettez, moi aussi, au nom de notre formation politique, souhaiter la bienvenue aux représentants de la Commission des droits de la personne. L'occasion est fort belle, je ne la raterai pas, de saluer des gens qui ont pignon sur rue dans le comté de Saint-Jacques. Cela fait la fierté du député du comté que je viens de vous citer. Sur ces mots, tout en ajoutant que l'importance que vous jouez à l'intérieur de notre système démocratique n'est pas à démontrer, elle est reconnue de tous, il vaudrait mieux peut-être pour nous, à l'instant même, aller au fond du sujet et vous donner le temps nécessaire de nous expliquer où vous en êtes, où vous vous dirigez, pour qu'ensuite, nous puissions vous adresser les commentaires appropriés.

Le Président

Le Président (M. Filion): Merci, M. le député de Saint-Jacques. Quant à moi, à la suite de l'exposé du président de la

Commission des droits de la personne et à la suite également de la période d'échanges de vues, de questions, de réflexion que nous tiendrons par la suite, nous devrons, comme commission, déterminer quelles seront les activités, les orientations et les questions de gestion concernant la Commission des droits de la personne qui feront l'objet de l'examen en commission. Nous savons d'ores et déjà, et cela en conformité avec l'article 66 de la charte, que la commission doit promouvoir, par toutes mesures appropriées, les principes contenus dans la charte, exercer les pouvoirs et exécuter les devoirs prescrits par la charte dans le but de garantir et appuyer les droits et libertés des Québécois et Québécoises.

Ce sont là les principes fondamentaux essentiels qui sous-tendent, bien sûr, toute société démocratique. Le respect de ces principes guident déjà notre société depuis des décennies, mais ce n'est que depuis 1976 que la charte a été promulguée au Québec et que la Commission des droits de la personne a vu le jour.

La Commission des droits de la personne, depuis cette date, veille afin que ces droits soient réellement reconnus, sauvegardés, appliqués. Le principe du respect des autres et des différences devient prépondérant sur tout autre principe.

Voilà donc une mission qui n'est pas toujours facile, elle est vaste, ne serait-ce qu'au niveau de la promotion des droits et libertés qui rencontre, bien sûr, plusieurs embûches. Car n'y a-t-il pas lieu souvent de changer les mentalités et les comportements?Nous croyons que le rôle de la commission est déterminant et essentiel pour l'évolution de la société québécoise. Nous constatons régulièrement son impact et l'impact des recommandations de la Commission des droits de la personne sur la société.

Tout récemment encore - c'est frais dans notre mémoire - le cas de la petite Julie Legault est un exemple concret de l'application non pas d'une recommandation mais d'une médiation de la Commission des droits de la personne.

C'est donc avec un intérêt non dissimulé face à votre exposé que nous entrevoyons cette rencontre, conscient que nous sommes de l'importance de l'organisme au sein de notre société et de son impact sur nos mentalités et sur nos comportements.

M. le député de Beauhamois.

M. Serge Marcil

M. Marcil: Merci, M. le Président. Un petit mot pour remercier le président et la vice-présidente de la Commission des droits de la personne de bien vouloir nous rencontrer ce matin et nous exposer des recommandations possibles ou de nous faire un court exposé du travail déjà réalisé par cette commission.

Tout d'abord, on a procédé hier à l'audition d'un autre organisme, l'Office de la protection du consommateur, un organisme d'une importance capitale pour les consommateurs au Québec et qui a pris naissance justement sous le règne du gouvernement Bourassa en 1975, organisme qu'on a louangé, qu'on appuie et qu'on continuera à appuyer dans ses efforts pour défendre les droits des gens, du moins des consommateurs.

Aujourd'hui, on entend aussi un autre organisme mis sur pied également par le gouvernement Bourassa en 1975, le 27 juin plus précisément. Donc, deux organismes de taille d'une importance capitale pour les individus, pour les Québécois. Nous savons que le rôle que cet organisme a joué chez nous est quand même difficile, compte tenu des résultats. Comme mon collègue de Louis-Hébert tantôt l'a bien mis en évidence, les problèmes que les gens peuvent vivre à la suite de toutes les formes de discrimination... On a vécu la même chose chez nous et tout ce qu'on peut conclure, malgré les efforts, malgré le magnifique travail réalisé par la Commission des droits de la personne, c'est que l'individu, à la fin de tout ce processus, est souvent encore -comment pourrais-je dire? - sans appui, sans recours.

L'examen que nous allons faire de cet organisme aujourd'hui et dans les jours qui vont suivre, j'espère qu'il va nous servir justement à cerner certains problèmes ou certaines problématiques qu'on pourrait corriger, qui pourraient donner encore plus de pouvoirs si possible à la commission ou même d'aller plus loin et permettre au moins è ceux qui ont recours à cette commission de faire en sorte que ses recommandations soient réellement, devraient normalement être prises en considération et être appliquées telles quelles. Donc, comment trouverons-nous la formule? Je ne le sais pas. Du moins, cet exercice va sûrement nous aider à aller plus loin. J'ai hâte de vous entendre, de cheminer avec vous et de réfléchir au cours de cette matinée sur le travail que vous avez déjà réalisé, tout en nous mettant en évidence également les recommandations que vous aimeriez que l'on travaille aussi pour nous permettre au cours des années futures, 1987, 1988 et peut-être 1989 d'aller encore plus loin dans le travail ou dans le mandat que cette commission devrait avoir. Merci beaucoup.

Le Président (M. Filion): Merci, M. le député de Beauharnois. M. le président, nous sommes toute ouïe.

Exposé du président de la Commission

des droits de la personne

M. Lachapelle (Jacques): M. le Prési- dent, messieurs, je l'avais déjà écrit sur mon document, vous le lirez, c'est avec plaisir, je le réitère après vous avoir entendus, c'est avec beaucoup de plaisir que je sens qu'on est accueilli ici par cette assemblée. Je dois ajouter que c'est également avec beaucoup de respect qu'on se présente devant vous. Je crois que nous devons répondre de nos activités. Il me fait plaisir de venir devant la commission des institutions de l'Assemblée nationale vous exposer selon votre désir, les orientations, les activités et la gestion de la Commission des droits de la personne pour peut-être continuer à fournir des détails au printemps sur toutes ces questions.

Comme vous m'avez laissé beaucoup de lattitude pour traiter de ces questions, je me permets de vous soumettre l'ordre suivant: Dans un premier temps, j'aimerais rappeler à votre commission quelques éléments de la Charte des droits et libertés. Ensuite, je vous présenterai la commission elle-même, sa juridiction, son fonctionnement, au niveau des instances décisionnelles comme des mécanismes organisationnels. Enfin, je voudrais vous exposer la situation des droits tels qu'ils sont traités du point de vue administratif, parce que je pense que c'est surtout cet élément qui va retenir notre attention.

Finalement, je ferai un retour avec vous sur les objectifs et les réalisations de l'année 1985, et je voudrais passer en revue avec vous les orientations que nous nous sommes fixées pour la présente année.

La Charte des droits et libertés de la personne, on l'a rappelé tantôt, fut présentée comme projet de loi 50 à la troisième session de la 30e Législature. Elle a été adoptée le 27 juin 1975. Elle a été cependant promulguée le 28 juin 1976, date à laquelle la commission a ouvert ses bureaux à Montréal et à Québec. Depuis lors, elle a subi des modifications importantes. Signalons celles qui ont le plus d'impact sur l'organisation et la juridiction de la commission. En 1982, plusieurs modifications ont été apportées à la charte par la loi 86, sanctionnée à l'Assemblée nationale le 18 décembre 1982 et mise en vigueur le 1er octobre 1983. On a, entre autres, ajouté deux motifs illicites de discrimination: l'âge et la grossesse. Un article visant les formulaires de demande d'emploi et les entrevues de sélection est entré en vigueur le 1er juin 1984. On a aussi ajouté l'interdiction de la discrimination fondée sur les antécédents judiciaires. (10 h 45)

À cause de son caractère de loi fondamentale du Québec, la charte prévalait déjà sur toute loi postérieure à son entrée en vigueur, du moins dans ses articles 9 à 38. Désormais, les articles 1 à 8 priment aussi toute disposition d'une loi postérieure au 30 septembre 1983, sauf indication

contraire stipulée en vertu de l'article 52.

D'autre part, depuis le 1er janvier 1986, toute loi du Québec, qu'elle soit postérieure ou antérieure à la charte, devra, à moins d'exception, se conformer aux articles 1 à 38 de la charte.

Enfin, la possibilité de mettre en application des programmes d'accès à l'égalité, inscrite dans le texte de loi 1982, est entrée en vigueur le 26 juin 1986, donc tout dernièrement. Un paragraphe a aussi été ajouté à l'article 67 à cette époque prévoyant l'obligation pour la commission de procéder à l'analyse de toute la législation québécoise tant postérieure qu'antérieure à la charte.

Enfin, le 1er septembre dernier est entré en vigueur le règlement sur les programmes d'accès à l'égalité. Ce texte législatif qu'est la charte s'est donc vu considérablement modifié depuis son adoption et a ajouté à la Commission des droits de la personne une quantité importante d'activités, ce qui a donc nécessité de constantes modifications et ajustements à son organisation.

Retenons aussi de ce bref exposé sur la charte qu'elle est un document unique, tant par sa facture, par son style, que par le nombre de droits qu'elle garantit et que, sans être un texte constitutionnel, elle a, selon les mots de la Cour suprême, un caractère quasi constitutionnel.

C'est le ministre de la Justice qui est chargé de l'application de cette loi et c'est à la Commission des droits de la personne que revient de promouvoir, par toutes mesures appropriées, les principes contenus dans la charte, d'exercer les pouvoirs et d'exécuter les devoirs qui y sont prescrits.

La commission doit notamment et je me réfère à l'article 67: a) recevoir les plaintes et faire enquête dans les matières qui relèvent de sa compétence en vertu de l'article 69; b) établir un programme d'information et d'éducation, destiné à faire comprendre et accepter l'objet et les dispositions de la présente charte; c) diriger et encourager les recherches et publications sur les libertés et droits fondamentaux; d) procéder à l'analyse des lois du Québec qui pourraient être contraires à la charte et faire au gouvernement les recommandations appropriées; e) recevoir les suggestions, recommandations et demandes qui lui sont faites touchant les droits et libertés de la personne, les étudier et faire au gouvernement les recommandations appropriées; f) coopérer avec tout organisme du Québec ou de l'extérieur, voué è la promotion des droits et libertés de la personne.

Également, la partie III de la charte donne à la commission certains autres mandats: celui de prêter assistance lorsqu'elle en est requise à l'élaboration d'un programme d'accès à l'égalité.

La commission peut également, après enquête, si elie constate une situation de discrimination prévue à l'article 86.1, recommander l'implantation, dans un délai qu'elle fixe, d'un programme d'accès à l'égalité.

Lorsque sa recommandation n'a pas été suivie, elle peut aussi s'adresser au tribunal et sur preuve d'une situation de discrimination, obtenir dans le délai fixé par le tribunal, l'élaboration et l'implantation d'un programme d'accès à l'égalité.

Ces pouvoirs et devoirs sont exercés par les commissaires au nombre de sept, et par le personnel embauché à ces fins.

Comme on le sait, les commissaires sont nommés par l'Assemblée nationale par un vote d'au moins les deux tiers de ses membres.

La commission compte actuellement onze membres, dont deux permanents, le président et la vice-présidente, et neuf autres qui siègent à temps partiel. Actuellement, le mandat de cinq commissaires est échu depuis le mois de décembre 1985. Trois autres mandats se termineront au mois de décembre prochain et trois mandats se termineront en décembre 1987.

II est important de rappeler que les membres de la commission restent en fonction jusqu'à leur remplacement. Mais il faudrait aussi songer qu'au mois de décembre prochain, il y aura huit commissaires à remplacer ou dont le mandat devrait être renouvelé.

J'en profite ici pour vous signaler qu'il serait important d'assurer une relève et peut-être de ne pas remplacer d'un coup ces huit commissaires qui devront être remplacés ou renouveler et de voir à ce qu'il y ait une continuité. Je pense que cela ferait beaucoup de départs en même temps.

Le rôle de ces commissaires est de deux ordres: d'une part, c'est â l'assemblée des commissaires de donner les grandes orientations qui doivent guider les activités des diverses directions. D'autre part, l'assemblée des commissaires décide des enquêtes de discrimination qui sont présentées à la commission.

Pour ce qui est de son premier râle, plus particulièrement depuis 1985, nous avons élaboré un mode de gestion par objectifs qui sont proposés par le personnel de la commission, soumis à un comité de gestion formé des cadres de la commission et ensuite soumis pour décision à l'assemblée des commissaires.

Le second rôle de la commission est de décider des enquêtes et de faire des recommandations et des commentaires touchant les droits et libertés de la personne sur les projets de loi et les sujets et demandes qui sont portés à l'attention de la commission.

Au cours de l'année 1985, l'assemblée

des commissaires a tenu 27 séances et son comité des enquêtes 17, au cours desquelles 522 rapports d'enquêtes ont été étudiés. Le comité des enquêtes est composé d'au moins trois commissaires. Ce comité étudie et discute les dossiers d'enquête, transmet son rapport et soumet ses recommandations à l'assemblée des commissaires qui statue sur chacun des dossiers en séance plénière.

Pour assumer ces différents mandats, la commission dispose de 117 postes de travail dont actuellement 116 sont comblés et également de huit postes occasionnels.

La répartition des emplois à temps plein et à temps partiel au 31 mars 1986, selon l'appartenance à un groupe cible, s'établit de la façon suivante: on compte 62,5 % de femmes, 37,5 % de cadres et 49 % de personnel professionnel féminin. Trois personnes répondent à la notion de handicapée, 17 % sont membres de diverses communautés culturelles et une personne est de descendance autochtone. Les employés sont regroupés dans neuf directions incluant les bureaux régionaux.

La structure de la commission est calquée sur les mandats qui lui sont confiés. Pour une meilleure compréhension des activités de la commission, j'aimerais vous les décrire brièvement.

La Direction des enquêtes. Son rôle est de voir à l'ensemble des activités reliées à la réception des plaintes de discrimination ou d'exploitation, de procéder à des enquêtes selon tes règles d'équité et de justice naturelle et, bien sûr, à la médiation.

La Direction du contentieux. Le mandat de la Direction du contentieux est de fournir des avis juridiques sur des sujets concernant la commission et ses activités. Elle rédige des documents de nature juridique, est responsable des poursuites judiciaires et assure le suivi de ces dossiers devant les tribunaux.

Le contentieux reçoit le mandat d'intenter une poursuite judiciaire lorsque la commission conclut au bien-fondé d'une plainte de discrimination et que les recommandations émises à la suite d'une telle conclusion ne sont pas suivies. Dans une telle situation, la commission peut, en vertu de l'article 83 de la charte, demander une injonction contre la personne en défaut. Elle peut également réclamer en faveur de la victime l'indemnité dont elle avait réclamé le paiement.

Outre les poursuites civiles, la commission peut également envisager, après enquête, une poursuite au niveau pénal. Dans de tels cas, elle fait rapport au Procureur général l'informant des faits qu'elle estime susceptibles de constituer une infraction à la charte.

La Direction de la recherche. La principale fonction de cette direction est d'effectuer des travaux portant sur l'interprétation de la charte, dans le but d'en déterminer la portée et les limites; de procéder à l'analyse des lois du Québec afin d'en déceler les éléments qui pourraient être incompatibles avec les dispositions de la charte.

La Direction des programmes d'accès à l'égalité vient tout juste d'être mise en vigueur. La direction doit, en substance, assurer la conception, l'élaboration et l'implantation de programmes d'accès à l'égalité, produire l'instrumentation et les données statistiques nécessaires à la mise en oeuvre de tels programmes, fournir aux employeurs et aux institutions l'assistance requise pour développer un programme d'accès à l'égalité et procéder, le cas échéant, au contrôle et à l'évaluation des programmes visés par une recommandation de la commission.

La Direction de l'éducation. Son rôle est de concevoir et de développer des programmes et des instruments d'éducation visant à faire connaître et respecter les droits, à prévenir ou à modifier les préjugés et attitudes qui les compromettent. C'est par l'information et la formation, la concertation et la conciliation communautaire qu'elle rejoint les groupes visés, aussi bien en milieu scolaire qu'en milieu de travail ou autres.

Enfin, la Direction de l'éducation développe des réseaux de coopération, offrant un soutien aux groupes communautaires et organismes pour la défense et la promotion des droits de la personne. On en retrouvera des exemples dans le chapitre consacré aux dossiers de la commission.

La Direction des communications assure un triple mandat relié aux renseignements, è l'information et à la coopération. Elle établit le contact avec les individus, les groupes, le grand public et, enfin, les médias. En outre, elle assure un rôle-conseil auprès des autres directions en matière de production des publications et s'occupe de la diffusion de documents produits par la commission.

La Direction des services administratifs. Cette direction fournit un service administratif en matière de gestion des ressources humaines, financières et matérielles. Elle élabore les politiques et développe les outils nécessaires à la gestion des ressources. Elle est responsable de l'application de la convention collective.

Le Centre de documentation relève de la Direction des services administratifs. II répond aux besoins internes d'information documentaire et met à la disposition du public la documentation produite, soit par la commission ou par d'autres instances relatives aux droits et libertés de la personne.

La Direction régionale de Québec. La responsabilité de la Direction régionale de Québec est de veiller à la promotion et à l'application de la charte pour les régions

administratives de l'Est du Québec, Bas-Saint-Laurent, Saguenay-Lac-Saint-Jean, Québec, Trois-Rivières, Côte-Nord et Nouveau Québec- Elle veille à accomplir le mandat de la commission dans les régions qu'elle dessert, en matière d'accueil, de renseignement, d'information, de coopération et d'enquête.

Les bureaux régionaux: Le principe de la régionalisation des services de la commission a été accepté, à titre exploratoire, par le Conseil du trésor. Les statistiques des années précédentes témoignent de l'importance pour la commission de se rapprocher des populations des régions éloignées et de donner un accès plus équitable à ses services.

Les régions desservies pour l'instant sont: l'Estrie, l'Outaouais, l'Abitibi-Témiscamingue et la Côte-Nord. Les bureaux régionaux participent aux orientations de la commission tout en tenant compte des particularités régionales et des problématiques spécifiques dans le choix des modes d'intervention. Leur mandat recouvre l'ensemble des activités reliées à l'information, la coopération et l'éducation, la recevabilité des plaintes et la tenue d'enquêtes.

Je vous ai présenté la partie organisationnelle de la commission. J'aimerais examiner avec vous maintenant la situation de la commission par rapport à ses activités et à l'exécution de ses mandats.

Le premier élément ressort: l'augmentation du nombre de dossiers. Selon les paramètres organisationnels, il est aisé de constater que la vitesse de croisière de la Commission des droits de la personne n'est pas encore atteinte mais qu'elle se trouve au contraire en plein essor. Ainsi, en 1985, 552 dossiers d'enquête ont été ouverts par rapport à 412 en 1984. Le nombre de requêtes, c'est-à-dire le nombre de demandes d'information ou d'enquêtes adressées à la commission a été de 31 735 en 1985 par rapport à 21 830 en 1984. Cette année, jusqu'au 30 juin seulement, nous avons enregistré 21 702 requêtes et 500 dossiers d'enquête ont été ouverts. Une projection réaliste pour l'année en cours serait de 43 000 requêtes et de 1000 dossiers d'enquête. En termes de pourcentage ce fait signifie une augmentation se situant aux environs de 30 % pour les requêtes et de plus de 80 % pour les enquêtes.

L'augmentation du volume de travail: Si la commission connaît une augmentation de la qualité des dossiers, c'est aussi au niveau de la complexité des enquêtes qu'elle voit s'accroître son travail. Ainsi, elle a dû, afin de répondre à un souci d'équité procédurale, mettre en application des règles de procédures qui engendrent un surplus de travail tant de la part des enquêteurs que du personnel de bureau.

De plus, la commission constate que les problèmes de discrimination doivent être traités de façon plus globale afin d'en détecter toute l'ampleur et d'apporter des solutions non pas seulement au cas qui nous est soumis mais à l'ensemble du système. Il en est ainsi, par exemple, dans le cas de plaintes soumises par des infirmières noires et ce sera le cas sûrement pour les enquêtes de la commission en matière d'enquêtes systémiques. De la même manière, nous constatons qu'une enquête, cas par cas, en matière de discrimination raciale dans le logement ne donne pas les résultats escomptés et qu'il faudra élargir l'intervention de la commission.

Les bureaux régionaux: Quatre bureaux régionaux sont ouverts depuis l'automne 1985. La commission ne réussit pourtant pas, à cause du manque de ressources, à couvrir tout le territoire de la province. De fait, la CDP ne possède pas les effectifs nécessaires pour répondre aux besoins de la population en régions.

Les communications. Le manque de ressources matérielles et humaines se fait sentir au niveau de la Direction des communications qui devrait se voir accorder un budget de fonctionnement de 237 000 $ par année, selon l'étude de la firme Optimum réalisée en 1985. La commission, selon cette étude, doit faire un effort pour joindre des clientèles spécifiques, ce qu'elle ne peut réaliser avec un budget réduit de 64 000 $ pour les communications. (11 heures)

Impact des PAE (programmes d'accès à l'égalité). La mise en vigueur de la partie III de la charte a signifié une augmentation importante de la charge de travail des diverses directions, notamment celles de la recherche, des communications et de l'éducation.

Volume de travail et budget. Bien qu'il y ait eu augmentation des effectifs de la commission depuis 1983, cette augmentation n'a pas suivi celle des paramètres organisationnels qui a été bien plus forte. D'autre part, le budget de fonctionnement est loin d'avoir suivi l'augmentation des effectifs de la commission. On peut voir d'ailleurs à la fin un tableau indiquant la projection des effectifs, celle des budgets de fonctionnement de même que des activités de la commission.

Pour l'année en cours, 1986-87, la commission a connu une coupure de 100 000 $ à son budget de fonctionnement. Elle a également subi - je ne l'ai pas indiqué ici - une coupure budgétaire de 250 000 $ au niveau des traitements.

Si, les années antérieures, la commission bénéficiait d'une certaine marge de manoeuvre grâce aux postes occasionnels autorisés, cette marge de manoeuvre est actuellement considérablement rétrécie. En

1983, les postes occasionnels représentaient 27 % des postes permanents; en 1986, ils représentent 3,4 % seulement.

Mesures de rationalisation que la commission a mises en place. La commission a entrepris et poursuit ses efforts de rationalisation qui se sont concrétisés par la transformation de certains postes de professionnels en postes d'employés de bureau, ce qui a eu comme résultat une diminution, bien sûr, des salaires moyens. L'efficience et la productivité ont donc été améliorées dans diverses unités administratives. Malgré l'augmentation du nombre d'enquêtes, nous avons réussi à en diminuer légèrement les délais.

Des mesures ont également été prises pour améliorer les méthodes de travail afin d'augmenter la productivité: formation des employés de bureau en traitement de texte, réaffectation du personnel, partage avec le Comité de la protection de la jeunesse, dans les bureaux régionaux, des services de secrétariat.

Telle est la situation que nous connaissons à la Commission des droits de la personne. Vous avez également manifesté le désir de connaître les orientations et les objectifs de la commission de même que ses réalisations. Je me permettrai donc de passer en revue ces grandes orientations et les dossiers de la commission qui, au cours de l'année dernière, ont été privilégiés. Nous nous étions fixé sept orientations sur lesquelles j'aimerais faire le point.

La première était d'assumer le rôle de leadership de la commission en matière de droits de la personne auprès des principaux intervenants, intéressés et partenaires.

On connaît un nombre important d'interventions. Je me permets de vous signaler les plus importantes:

Le rapport Tanguay, c'est-à-dire le rapport sur la prison Tanguay, la prison des femmes à Montréal, qui devrait se continuer au cours des prochains mois. On devrait aussi assurer le suivi des recommandations de la commission. - La participation assidue et éclairée de la commission à l'enquête sur l'hôpital de Rivière-des-Prairies a amené la commission à faire des recommandations précises au président de la commission Shadley et à la ministre de la Santé et des Services sociaux. - Les réflexions de la commission sur la liberté d'expression ont refait surface durant la dernière campagne électorale et nous ont permis de relancer les recommandations de la commission sur les dépenses électorales.

Dans le dossier des programmes d'accès à l'égalité, la commission a favorablement influencé ie comité de l'Assemblée nationale chargé d'étudier les règlements concernant les programmes. - Les suites du dossier "taxi". En collaboration avec de nombreux partenaires, la commission a procédé à la mise en oeuvre systématique des recommandations du rapport final d'enquête. - Avec les jeunes, nous avons préparé la déclaration de la commission face à la situation des jeunes. Également, la conférence sur l'éducation aux droits que nous avons menée en février dernier fut un événement encourageant et stimulant pour la commission face à son action dans ce domaine. - Nous avons vu aussi la publication de la charte annotée de même que des recueils juridiques des droits de la personne qui sont présentés avec la collaboration de SOQUIJ.

La deuxième orientation précisait: faire connaître à la population les principes et les objectifs inscrits dans la charte ainsi que le rôle de la commission.

L'un des objectifs était de régionaliser l'action de la commission. Le Conseil du trésor a approuvé notre démarche au cours d'une conférence de presse marquant le 10e anniversaire. Nous avons annoncé cette nouvelle à la population.

Jusqu'à maintenant, nous devons dire que les résultats de notre action en régions sont plus que probants.

Troisième orientation: définir une stratégie d'ensemble afin d'assurer le rayonnement et la présence de la commission dans tout le Québec dans un plan et des politiques de communications. La firme Optimum et la Direction des communications ont élaboré cette politique qui devrait être mise en application, du moins en partie, dans un avenir prochain.

Quatrième objectif: Améliorer et rendre plus efficace et plus efficiente l'administration de la commission, tant au niveau des diverses directions que de l'assemblée des commissaires. Le rôle du comité de gestion par rapport à celui de l'assemblée des commissaires a été défini et précisé. L'adoption de règles de régie interne s'est concrétisée. L'adoption et la mise en vigueur des directives en matière de procédure d'enquête, préparées avec la collaboration de la direction des enquêtes. L'adoption par les commissaires, à la suite d'études du Service de la recherche, de critères d'intervention de la Commission des droits de la personne dans divers secteurs d'activité. La tenue de 20 réunions du comité de gestion, qui ont permis de coordonner nos activités et de les réaliser en concertation. Dans le domaine administratif, il fallait entreprendre des réformes importantes, mettre en place les premiers éléments d'une politique en matière de gestion de personnel, les premiers jalons de manuels administratifs, recruter le personnel nécessaire. Qu'il suffise, à ce sujet, de mentionner que nous avons dû traiter quelque 1500 candidatures en l'espace de quelques

mois.

Les études sur le système d'information de gestion progressent. La conception administrative d'un système d'informatique a subi un peu de retard, mais devrait voir le jour sous peu.

Cinquième élément. Cultiver le sentiment d'appartenance des employés et des commissaires dans tout le processus des activités de la commission, notamment en améliorant la qualité de vie au travail. Bien sûr, il n'est pas facile de mesurer l'amélioration de la qualité de vie au travail, pas plus que du sentiment d'appartenance. Permettez-moi de vous signaler cependant quelques événements. La participation des employés dans la préparation des objectifs. La mise en place du plan de formation et des procédures d'accueil. La participation des commissaires à divers comités. La tenue d'une réunion des commissaires à Québec et surtout la mise en place d'un comité des enquêtes qui siège à Québec. Au plan de la mobilité des employés, dix-sept personnes ont changé de poste de travail au cours de l'année 1985.

Le sixième élément était de finaliser la mise en place de la nouvelle structure administrative de la commission et plus particulièrement de la Direction des programmes d'accès à l'égalité et du plan de régionalisation.

La Direction des programmes d'accès à l'égalité est maintenant opérationnelle. De nombreuses sociétés et entreprises, dont la commission, bénéficient actuellement des précieux conseils des conseillers et conseillères en programme d'accès à l'égalité.

Septième élément. Humaniser les relations de la commission avec sa clientèle et améliorer les services rendus à cette dernière. Dans un premier temps, il nous fallait connaître la qualité des services offerts aux clients de la commission. Notons que, selon les résultats de l'étude Optimum, il apparaît que la Commission des droits de la personne jouit d'une très bonne notoriété et crédibilité, tant auprès de la population en général qu'auprès de sa clientèle. La charte est moins connue et l'efficacité de la commission devrait être améliorée notamment dans les délais de traitement des dossiers.

Nous avons procédé également è une compilation des délais d'enquête. Les résultats sont encourageants, puisque la comparaison avec la commission canadienne nous laisse voir des délais de 150 jours à Québec, de 200 jours à Montréal par rapport à neuf mois à la commission canadienne.

L'adoption de règles de procédure aux enquêtes, qui mettent l'accent sur les principes d'équité, répondra sûrement aux nombreuses demandes de notre clientèle.

Ce sont là quelques grands dossiers que nous avons menés en 1985. Ils ont nécessité beaucoup d'énergies et de coordination. Mais pendant ce temps-là, les activités des diverses directions n'ont pas cessé. La recherche a aussi produit d'importantes études qui ont permis la préparation des critères d'intervention de la commission sur plusieurs motifs de discrimination et l'établissement des politiques en matière d'accès à l'égalité. L'éducation a entrepris une période de réflexion sur sa mission, mais n'a pas cessé pour autant ses interventions auprès des jeunes, des autochtones, des femmes, dans le dossier "taxi" et dans le monde du travail.

Un contentieux réduit a suivi de près les nombreux dossiers de la commission devant les tribunaux. Les communications ont répondu à plus de 31 735 demandes de renseignements et distribué le message de la commission à 277 000 exemplaires.

Dans les régions de l'Outaouais, de l'Estrie, du Nord-Ouest et de l'Abitibi-Témiscamingue, on a multiplié les interventions de la commission, si bien qu'on pourrait y voir réunis pour la prochaine année autant de dossiers qu'à Montréal.

À la Direction des programmes d'accès à l'égalité et à la recherche, on travaille à circonscrire les éléments de ce dossier complexe des programmes d'accès à l'égalité et des obligations contractuelles pendant que les conseillers travaillent en collaboration avec une dizaine d'entreprises à la préparation de programmes d'accès à l'égalité.

Les orientations pour l'année 1986-1987. Nous nous étions donc tracé pour l'année 1985-1986, des orientations et des objectifs que nous avons réalisés en tout ou en partie ou dont la réalisation a été amorcée récemment. C'est à partir des résultats obtenus dans la continuité des orientations de l'année dernière et d'une nouvelle lecture de notre environnement que nous nous sommes fixé, au début de l'année de nouvelles orientations.

Si le mandat de la commission demeure le même, le contexte est quelque peu modifié. Il nous faut tenir compte d'impératifs économiques qui modifient les attentes de nos clientèles vis-à-vis de la commission. Il est également nécessaire de prendre en compte les contraintes budgétaires qui nous forcent à faire des choix et à rationaliser davantage l'utilisation de nos ressources.

On assiste en même temps à de fortes demandes dans le domaine du travail. Autant au niveau de l'accès au travail, de l'égalité salariale, qu'en termes d'amélioration des conditions et de la qualité de vie au travail. On connaît également à la commission des demandes de plus en plus pressantes d'action pour combattre le racisme, et pour l'amélioration des relations interraciales.

D'autre part, nous savons, à la suite de la conférence d'éducation, qu'il est nécessaire d'axer notre action éducative dans les écoles autant au niveau secondaire qu'au niveau primaire.

Ce contexte nécessite que nous soyons de plus en plus conscients de la valeur de nos ressources humaines qui doivent être mieux équipées pour accomplir le travail et qui doivent, par conséquent, bénéficier d'une formation adéquate, d'une meilleure concertation des ressources et des différentes directions à la réalisation des mandats de la commission.

D'autre part, il est essentiel de ne pas perdre de vue les mandats de la commission et de concentrer nos efforts sur la qualité des services à la clientèle en renforçant entre autres les règles de procédure, la qualité des enquêtes et nos interventions devant les tribunaux.

Devant les demandes de plus en plus importantes qui nous parviennent, les vastes champs d'activité qui s'ouvrent à la commission, il faut faire des choix, se donner l'instrumentation nécessaire pour ce faire et, finalement, se munir d'un plan stratégique pour les réaliser.

Pour l'année 1986, neuf orientations guident nos actions. Le premier, sur le racisme indique que la commission évalue les actions qu'elle a entreprises, précise ses objectifs, adopte un plan d'intervention et concerte ses efforts dans la réalisation des objectifs choisis.

Dans le domaine du travail: que !a commission centre ses efforts sur les implications de la charte dans le milieu de travail, notamment, dans l'application de l'article 19 de la charte, une recherche et une mise en application de nouveaux modes d'intervention dans les cas de harcèlement sexuel et racial, la mise en application de programmes d'accès à l'égalité, l'information aux employeurs.

Dans le dossier de la condition féminine: que la commission intensifie et concerte son travail dans les nombreux dossiers qui touchent les conditions féminines, les programmes d'accès à l'égalité, le harcèlement, l'aide aux femmes immigrantes, l'égalité salariale, la poursuite de l'enquête à la prison Tanguay.

Dans le dossier autochtone: que la commission prenne connaissance du document mis à jour, "Bilan et perspectives" et statue sur ses recommandations. Que les interventions de la commission dans ce dossier soient axées sur des problèmes spécifiques comme la discrimination dans le logement et l'accès au travail.

Que la commission continue son action dans le domaine de l'éducation aux droits dans le milieu scolaire tant au niveau primaire que secondaire.

Que les actions de la commission soient orientées vers l'amélioration des services à la clientèle dans tous les secteurs d'activité.

Qu'on procède à la nomination d'un responsable des services à la clientèle qui aura pour mandat d'examiner les plaintes des clients, de faire rapport au président sur chacun des cas soumis et de faire à la commission toute recommandation visant à améliorer la qualité des services à la clientèle.

Qualité de vie au travail: que l'on poursuive les efforts dans le but d'améliorer l'efficience et l'efficacité de la commission. Que les réformes administratives entreprises soient orientées dans le sens d'une meilleure utilisation des ressources humaines: préparation d'outils de travail plus adéquats, système d'information de gestion, plan de formation, développement de l'informatique.

Qu'à l'occasion du "Bilan prospectif" qui aura lieu dans le cadre du dixième anniversaire, la CDP évalue avec les employés les mécanismes de participation à la préparation des objectifs et au processus de planification stratégique de la commission.

En termes de planification stratégique: que la commission procède à l'établissement d'une planification stratégique de ses objectifs et de ses actions et établisse un mécanisme de priorisation des dossiers de la commission, notamment à l'éducation, aux communications et dans le choix des enquêtes de sa propre initiative en matière de discrimination systémique ou directe.

Promotion de la CDP: que la commission procède à l'étude et à la mise en application du plan de communication suggéré par la firme de consultants.

Que la commission procède, en collaboration avec SOQUIJ ou autres organismes, à la diffusion de la charte annotée, des recueils de jurisprudence et des avis de la recherche.

Que la commission intensifie ses efforts de concertation et de collaboration auprès des groupes ou organismes voués à la promotion des droits et libertés de la personne.

Que la commission précise, dans les meilleurs délais, sa politique de publication. (11 h 15)

Ce sont là des orientations et des objectifs à court et à moyen terme.

Dans un avenir plus immédiat, sur le plan administratif, certains dossiers feront l'objet de notre attention. Ainsi, le projet de loi 110 qui traite de l'intégration des employés de la commission à la fonction publique et de la fusion du Comité de la protection de la jeunesse, nous donnera l'occasion de nous pencher sur ces deux importantes questions. Quant à la fusion du Comité de la protection de la jeunesse, la commission a déjà fait part de son opinion sur ce sujet.

L'intégration des employés à la fonction

publique est d'un autre ordre, mais a tout autant d'importance. Dans une organisation qui a déjà dix ans d'existence et où les postes de travail sont limités, la mobilité de nos employés, autant pour leur épanouissement et leur mieux-être que pour la régénérescence de l'organisation est préoccupante. Il nous faudra, à l'intérieur ou en dehors du cadre législatif, trouver une solution à cette impasse.

Nous sommes aussi préoccupés par l'augmentation importante des dossiers d'enquête et l'ajout de nouvelles responsabilités. La commission est en pleine effervescence. Il nous faut constamment réajuster l'organisation afin d'améliorer son efficacité et son efficience et suivre le rythme de la demande. Nous avons, sous ce chapitre, de nombreux projets visant à améliorer la performance de la commission. Les compressions budgétaires que nous connaissons nous laissent peu de marge de manoeuvre pour réaliser ces mandats. Même en rationalisant l'organisation, nous ne pourrons pas toujours agrandir par l'intérieur.

Je vous ai livré ici, j'espère, sans trop de détails non plus pour vous perdre, les questions administratives qui touchent la Commission des droits de la personne. Je suis bien conscient que c'est là un préambule et je demeure à votre disposition pour répondre à vos questions. Je vous remercie.

Le Président (M. Filion): M. le président, je vous remercie pour cet exposé remarquablement bien fait. Compte tenu de nos préoccupations, compte tenu de la raison pour laquelle nous sommes réunis ici aujourd'hui, je dois vous dire que votre exposé fait un tour d'horizon très instructif, d'abord, évidemment, de la nature de la commission et de sa composition, des problèmes vécus actuellement par la commission ainsi que de ses orientations. En ce sens, je vous félicite déjà. Je pense que vous avez dit tantôt que vous accordiez beaucoup d'importance au fait de venir rencontrer la commission des institutions. Je pense que la qualité du texte que vous avez déposé ce matin témoigne bien du sérieux avec lequel vous avez entrepris cet exercice démocratique parlementaire, parfois fastidieux, mais qui, encore une fois, est une conséquence de notre organisation démocratique.

Je ne sais pas si mes collègues de la commission... Je les vois en train de réfléchir. Peut-être que je pourrais... Oui, M. le député de Beauharnois.

Discussion générale Les commissaires

M, Marcil: Vous avez parlé tantôt du renouvellement du mandat des commissaires.

Pourriez-vous nous parler un peu du commissaire? Comment est-il recruté? Je sais que c'est une nomination de l'Assemblée nationale, mais quelle classe de la société touche-t-il? Est-ce qu'on retrouve uniquement des avocats comme commissaires ou bien si on retrouve un éventail assez large d'individus?

M. Lachapelle: Je vais faire l'exercice avec vous, si vous voulez et, peut-être aussi, la vice-présidente pourrait nous aider. Je compte, à l'oeil, cinq, six, sept avocats effectivement. Ce sont des avocats qui sont en pratique privée et professeurs d'université. Voilà un peu les deux types d'avocats qui sont chez nous. Il y a un représentant, M. Luc André... On ne peut pas dire qu'il est représentant, il est d'origine autochtone et il est, je pense, animateur d'une station de radio à Sept-Îles. M. Morrisseau...

Une voix: II y a deux syndicalistes.

M. Lachapelle: II y a deux syndicalistes, oui, M. Morrisseau et Mme Simard. M. Lévy est un agent d'assurances, je pense; il est à sa retraite aujourd'hui. M. Dowie est un travailleur social qui était, à l'époque, au CSSMM ou une organisation semblable, dans le réseau des affaires sociales. Je pense que cela donne un peu, si vous voulez... Si on recule dans le temps, on voit qu'il y avait également une représentation d'avocats qui a toujours été importante. Il faut dire qu'il y a des questions juridiques éminemment pointues, si je peux m'exprimer ainsi.

M. Marcil: Ces gens-là représentent-ils l'ensemble des régions du Québec ou originent-ils tous d'un même milieu ou de grands centres comme Montréal et Québec?

M. Lachapelle: Montréal, Québec, Sept-fles, Sherbrooke. Y a-t-il d'autres régions?

Mme Trudeau-Bérard (Nicole): II y a une préoccupation pour que cela ne soit pas tout concentré à Montréal, et d'autre part une préoccupation pour qu'il y ait une représentation... Évidemment, c'est impossible qu'il y ait une représentation totale de tous les groupes cibles visés par l'article 10 de la charte, mais la préoccupation était quand même qu'il y ait une représentation adéquate des femmes, des communautés culturelles, des autochtones, sur une base peut-être rotative, mais cette préoccupation était là.

M. Lachapelle: Effectivement, on peut compter quatre femmes sur les onze commissaires.

M. Marcil: Leur mandat est de quelle durée?

M. Lachapelle: Originellement, les mandats sont de trois ans et il y a habituellement un renouvellement. Jusqu'à maintenant - évidemment l'histoire de la commission est très courte - il y a eu des mandats de trois ans et des renouvellements de deux ans pour faire un total de cinq ans.

Ce que je vous mentionnais tantôt, c'est qu'il serait un peu catastrophique, même s'il y en a qui ont complété cinq ans, de prendre huit nouveaux commissaires qui ne connaissent pas le système d'organisation et qui seraient comme cela propulsés.

M. Marcil: Sont-ils rémunérés?

M. Lachapelle: Oui. La rémunération est de 4000 $ par année - c'est une rémunération fixe - et de 200 $ par réunion.

M. Marcil: Par réunion.

M. Lachapelle: La charte indique que cette rémunération ne peut pas être diminuée ni le mandat réduit.

Le Président (M. Filion): Est-ce que la charte l'indique?

M. Lachapelle: Oui, à l'article 60, si ma mémoire est bonne.

Le Président (M. Filion): On coupe pour les députés.

M. Lachapelle: C'est qu'il y a déjà eu dans le passé des tentatives...

Mme Trudeau-Bérard: L'article 59.

M. Lachapelle: Excusez-moi, l'article 59. Le gouvernement fixe le traitement et les conditions de travail.

Le Président (M. Filion): D'accord.

M. Lachapelle: Le traitement et la durée du mandat, une fois fixés, ne peuvent être réduits. Originellement je crois que le montant était de 11 000 $, ou plus élevé que 4000 $. Il a été ramené à 4000 $ et on a fixé des per diem par rencontre, ce qui favorise peut-être un peu le quorum.

Le Président (M. Filion): M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: M. le Président, j'aimerais renchérir sur... Ma question va sans doute vous paraître naïve, mais je me dis que, si l'on perd de sa naïveté, on devient complètement vicieux. Alors c'est pour cela que je n'ai aucune réticence à continuer dans cet élan naïf. Je voudrais un peu reprendre la question que mon collègue de Beauharnois a posée quant au conseil d'administration. La Commission des droits de la personne, qui a quand même une autonomie relativement large, n'a pas été tentée un jour de tracer une espèce de portrait-robot du parfait conseil d'administration, c'est-à-dire la formation des candidats, leur expérience de vue, leur vécu, de façon que lorsque le gouvernement les nomme... S'il y a une commission où tout gouvernement, quelle que soit son orientation, devrait bien se garder de faire de la partisanerie politique ou de la pure récompense politique, c'est bien à la Commission des droits de la personne. Donc, si une espèce de portrait-robot comme cela, toujours en fonction de la naïveté dont je vous faisais part tantôt, était fixé, peut-être que cela pourrait servir de guide è l'Assemblée nationale et au gouvernement quant aux nominations à la Commission des droits de la personne.

M. Lachapelle: II faut dire que jusqu'à maintenant la commission n'a jamais suggéré de portrait. On compte et on doit continuer à compter sur la sagesse de l'Assemblée nationale, qui doit nommer aux deux tiers... Ce serait difficile pour la commission. On peut bien faire état de la représentation actuelle, faire connaître sa composition, vous indiquer quels groupes sont représentés, mais au-delà de cela, ce serait aller dire à l'Assemblée nationale ou aller prendre des responsabilités qui appartiennent tout à fait à l'Assemblée nationale. On est bien conscient que jusqu'à maintenant cela s'est bien réalisé.

M. Marcil: Dans ce sens-là, M. le Président, ce n'est pas de nommer des yens, mais de faire en sorte qu'il y ait un certain équilibre des différentes classes sociales qui composent quand même la société québécoise et puis les types également de professions. Je veux dire, la Commission des droits de la personne, le monde culturel, le monde des affaires, le monde industriel ou la partie patronale, je ne sais pas. Parce qu'on retrouve toujours dans la plupart de ces conseils d'administration des professeurs d'université, mais on ne retrouve pas d'enseignants du secondaire ou du collégial, vous savez.

Il y a quand même toute une dimension que vous traitez concernant justement l'éducation des jeunes, la formation par le biais des écoles secondaires ou collégiales, ainsi de suite. Seulement une idée, si on pouvait arriver et dire: Le conseil des commissaires devrait être représenté... Trois ou quatre postes devraient être occupés par le monde juridique du Québec, deux postes par le monde culturel, ou ainsi de suite. L es nominations, il y en a toujours à faire d'une façon ou d'une autre. Sans que cela soit trop partisan, il y a toujours quand même des

noms qui nous arrivent..,

Le Président (M. Filion): Si vous me permettez, M. le président, juste une remarque. C'est que les commissaires sont nommés par l'Assemblée nationale.

Une voix: Oui, oui, c'est cela.

Le Président (M. Filion): Évidemment, il ne faut pas se leurrer, l'Assemblée nationale ne se prononce pas sur une liste de 6 000 000 de noms. Quand même, il demeure que cette préoccupation, je pense, manifestée par mes collègues peut trouver sa suite dans le vote qu'aura à tenir l'Assemblée nationale sur le choix de ces membres.

Sans diminuer la portée de ce que vous dites, ce n'est pas facile de bâtir un conseil de commissaires parfaitement représentatifs, compte tenu, encore une fois, du caractère un peu juridique de certains problèmes qui sont soumis à la commission.

Je ne sais pas si vous voulez ajouter quelque chose.

M. Lachapelle: Je pense que c'est difficile de construire le portrait-robot d'un commissaire. Je pense qu'on le connaît. C'est une personne qui devrait incarner une certaine sagesse, bien sûr, une compétence dans un domaine particulier, venir d'un milieu particulier, mais, dans cette population où on mentionnait tantôt les groupes cibles de la commission, on imagine que l'Assemblée nationale est capable de faire ses choix.

D'autre part, on peut bien, quant à nous, indiquer certaines, peut-être pas des préférences, mais certaines orientations comme, par exemple, que bien oui, évidemment, on a besoin d'avocats ou qu'il y en a peut-être trop actuellement. On peut peut-être indiquer que ce n'est pas nécessaire d'en avoir autant que cela. Il y en a peut-être un certain nombre qui sont nécessaires et qui sont très éclairants.

C'est sûr que des grandes orientations sur la composition d'un comité peuvent être données. J'ai plus de difficulté à rentrer dans la suggestion du député de Saint-Jacques d'avoir un portrait-robot d'un commissaire. Pour l'ensemble d'une commission, c'est peut-être possible.

Le Président (M. Filion): M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: C'est tout simplement pour dire que j'ai vécu une expérience récente d'une nomination pour un organisme du centre-ville, très enraciné dans le centre-ville, mais provenant d'une lointaine banlieue, et comble de l'étonnement, recommandation soumise par un club équestre. Je ne voudrais surtout pas que cette chose-là arrive à la Commission des droits de la personne. C'est pour cela que je vous parlais d'un portrait-robot de la composition d'un conseil d'administration. Peut-être pas nécessairement aller de façon très explicite en disant: Il faut effectivement que ce soit un homme... Enfin, vous connaissez la vieille blague du prototype minoritaire type qui, quelquefois, va plutôt vers la caricature que l'efficacité réelle au niveau de la commission.

J'aurais, avant de vous poser une question, qui à mon point de vue est d'importance, à vous faire une remarque quant à votre mémoire. Ce n'est pas un reproche virulent. Je pense que vous avez raté une chance de faire l'éloge de l'État québécois et forcément l'éloge de la Commission des droits de la personne en omettant une addition à notre charte, celle de 1977, quant à l'orientation sexuelle qui a fait du Québec, avec le Royaume des Pays-Bas et l'État du Wisconsin, l'un des trois États les plus progressites à ce sujet. Je crois que ce sont des choses qui méritent d'être écrites. Si elles sont écrites elles sont connues, elles sont sues par l'ensemble de la population du Québec et cela projette une image extrêmement positive de l'esprit progressiste des Québécois. (11 h 30)

Les visites aux assistés sociaux

Dans un autre ordre d'idées, quant à la question qui me préoccupe le plus, M. le Président, dans la Presse du 18 septembre 1986, l'on titrait: "Appel aux tribunaux d'un front commun contre les visites des assistés sociaux". On disait: "Les visites surprises des inspecteurs du gouvernement aux domiciles des assistés sociaux ont poussé la Commission des droits de la personne du Québec, la Ligue des droits et libertés et le Front commun des assistés sociaux et des assistées sociales, lequel regroupe 20 000 bénéficiaires, à former un front de solidarité pour mettre fin aux rondes - je ne' sais pas si on parle de peinture flamande, de rondes de nuit ou de jours - des fonctionnaires. Les trois organismes, qui veulent faire déclarer illégales ces visites ont en effet déposé hier devant la Cour supérieure trois requêtes distinctes en intervention afin d'appuyer la pétition d'une assistée sociale de la métropole qui avait demandé à ce même tribunal de faire annuler les tournées des fonctionnaires du ministère du Travail". On poursuit plus loin: "Dans leurs requêtes les trois organismes - c'est-à-dire les deux qu'on a cités et le vôtre - expliquent qu'ils ont le devoir de participer au litige qui "met en question les droits fondamentaux garantis autant par la Charte québécoise des droits et libertés de la personne que par la Charte

canadienne des droits et libertés. Cette cause - déclarent les intervenants - mérite leur estime et leur soutien". J'aimerais vous entendre commenter plus à fond et peut-être nous donner un état du dossier actuellement chez vous.

M. Lachapelle: Vous savez que certaines plaintes ont été déposées à la Commission des droits de la personne par des assistés sociaux qui sont venus nous exposer effectivement qu'ils avaient des difficultés avec les enquêteurs qui intervenaient dans leur domicile. Bien sûr, à cette époque nous n'avions pas eu de plaintes formelles mais beaucoup de demandes d'information: Quels sont nos droits? Quelles sont nos prérogatives? Est-ce qu'on peut refuser la présence de ces personnes dans nos maisons qui viennent enquêter?

Pour la Commission des droits de la personne c'était extrêmement embêtant de donner des lignes de conduite, si vous voulez, à ces personnes parce qu'on ne savait pas quelles pouvaient être les répercussions immédiates pour les gens: Est-ce qu'il pouvait y avoir coupure de l'aide sociale? Et est-ce qu'il pouvait y avoir d'autres répercussions? La Commission des droits de la personne a donc choisi à ce moment de faire une intervention beaucoup plus globale auprès du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et de lui indiquer quelle était son opinion sur les visites à domicile, indiquant entre autres, suivant notre analyse de la loi que, la Loi sur l'aide sociale ne permettait pas ces visites à domicile qui nous semblaient des intrusions dans la vie privée. Il n'y avait pas spécifiquement de pouvoirs dans cette loi. Également nous avons indiqué au ministre de la Santé et des Services sociaux - je n'ai pas le texte devant moi - que c'était soulever encore des préjugés sur les assistés sociaux que de faire ce genre d'enquêtes et ce type d'enquêtes qui ne s'adressaient pas à certains individus en particulier qu'on soupçonnait de fraude mais bien à une espèce d'échantillonage un peu partout dans la société. C'est ce que nous avons indiqué au ministre de la Santé et des Services sociaux à l'époque. À ce moment nous indiquions que cela venait encore scléroser les stéréotypes de la population envers les assistés sociaux dont on dit qu'ils profitent de l'assistance sociale indûment, etc. Nous avons donc envoyé ce document au ministre et par la suite, lorsqu'il y a eu des plaintes de déposées à la Commission des droits de la personne... Actuellement il y a une plainte qui est à l'étude à la Commission des droits de la personne. Bien sûr nous aurons à statuer sur cette plainte. C'est difficile d'en parler davantage, elle est au stade de l'enquête. Également nous avions indiqué, comme c'est notre devoir de le faire, que nous pourrions nous présenter devant les tribunaux et ayant donné notre opinion au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, nous nous devions je pense d'aller devant les tribunaux lorsqu'une personne s'est portée requérante devant la cour. Ce que nous avons fait, c'est que nous n'avons pas poursuivi nous-mêmes mais en termes de procédure judiciaire, de procédure civile nous nous sommes joints, par le mode d'une intervention, à la demande de cette personne.

M. Boulerice: Est-ce que vous avez eu une réponse officielle du ministre aux commentaires que vous lui avez adressés.

M. Lachapelle: Le ministre nous a indiqué qu'il était très sensible à nos commentaires. Il faudrait peut-être qu'on reprenne tout l'ensemble des commentaires, mais enfin... Il indiquait, entre autres, qu'il avait une opinion juridique contraire à la nôtre qui venait indiquer que leurs procédures étaient tout à fait dans l'ordre et ne contrevenaient pas à la charte. D'autre part, il nous a indiqué qu'il invitait la commission à travailler avec ses fonctionnaires à bonifier ses directives, ce à quoi nous avons répondu que, quant à nous, il nous était difficile, même impossible, de travailler à bonifier un texte qui, selon nous, n'avait pas de fondement juridique.

M. Boulerice: D'accord. Je vous remercie, M. Lachapelle.

Le Président (M. Filion): M. le député de Shefford.

M. Paré: Premièrement, une question d'ordre très général. Quant à la section sur les orientations, vous parlez de l'entrée en vigueur de la section de l'accès à l'égalité, selon l'expérience de la régionalisation, vous êtes tout à fait en faveur, donc cela veut dire étendre les services aux différentes régions du Québec, aller de l'avant dans l'éducation et l'information de la population; l'augmentation des demandes est considérable, on parle même dans certains secteurs de 80 % dans l'ensemble, donc cela veut dire que la commission, si elle n'est pas débordée, a connu une augmentation considérable. Est-ce possible d'atteindre les objectifs que vous vous fixez dans l'état actuel des choses avec les ressources que vous possédez, ou si vous êtes en train de nous dire que, si vous voulez les réaliser, il va falloir que le législateur en tienne compte lors du prochain budget?

M. Lachapelle: Si je tente des comparaisons, on traite environ 500 à 600 dossiers avec le personnel qu'on a, c'est-à-dire onze enquêteurs à Montréal, cinq à

Québec, donc 16 en tout, si la tendance se maintient, c'est-à-dire que cette année on prévoit une augmentation de 80 %, on doublerait le nombre de dossiers. II va falloir vraiment trouver des moyens différents pour traiter nos enquêtes ou bien augmenter le nombre d'enquêteurs. Je dis: Trouver des moyens différents pour traiter nos enquêtes ou bien augmenter le nombre d'enquêteurs. Dans les moyens différents de traiter nos enquêtes, îl y a, par exemple, la médiation dès le départ. Au lieu de procéder directement à des enquêtes, je ne suis pas convaincu qu'on va faire beaucoup plus de travail parce que la médiation demande également énormément de travail. C'est peut-être une nouvelle façon, une nouvelle approche, par exemple. D'autre part, j'imagine que si l'on fait des comparaisons avec l'Ontario, voici les chiffres qu'on a sur ce sujet: en Ontario, pour un "case load" -je ne sais pas comment traduire, allons pour "case load" - de 1749 dossiers à la fin de juillet, il y avait 57 enquêteurs. Nous, pour un nombre de dossiers de 1507, on a actuellement 16 enquêteurs. On imagine qu'ils font à peu près le même style d'enquête que chez nous, d'une envergure à peu près semblable.

J'ai l'impression que, si cette tendance se maintient, cela sera difficile de maintenir des délais acceptables. Dans le domaine des droits, il est extrêmement important d'avoir des réponses rapides. Des délais de sept ou huit mois sont peut-être acceptables, plus longs que cela, ça commence à être périlleux, d'autant plus qu'on sait, comme le mentionnait tantôt le député de Louis-Hébert, qu'après cela, ce n'est pas fini. Si on veut avoir gain de cause jusqu'au bout, il faut aller devant les tribunaux.

On peut dire quand même que jusqu'à maintenant on a réussi à maintenir un rythme de 70 % de règlement de nos dossiers, donc de médiation, donc de fermer des dossiers avant que tout un long processus, même à la commission, ne s'engage. Cela m'apparaît une voie importante.

Mais il m'apparaît difficile, d'autre part, d'aller beaucoup plus qu'à 70 % de règlement de dossiers. C'est un chiffre qui est même extrêmement optimiste.

M. Paré: Voulez-vous répéter seulement la comparaison avec l'Ontario. Vous avez dit: Pour 1749 en Ontario, il y avait 57 enquêteurs...

M. Lachapelle: Oui.

M. Paré: ...comparativement au Québec, avec quels chiffres?

M. Lachapelle: Cette année... Je m'excuse, je pense que je ne vous ai pas donné les bons chiffres. Ah! Bien oui: Au mois de décembre 1985, 1547 pour 16 enquêteurs.

Discrimination dans le logement

M. Paré: Merci. Dans un autre domaine maintenant, vous avez parlé dans votre présentation du début, entre autres, des problèmes de discrimination dans le logement. Quand on regarde, par exemple, dans le bulletin "Droits et libertés", on trouve "discrimination dans le logement" avec plusieurs bulletins qui ont été émis.

Quels sont les principaux problèmes que vous rencontrez sur le plan du logement?

M. Lachapelle: Je dois dire d'abord que - je dirais quasiment par intuition et aussi parce qu'on a des gens sur le terrain - on sait qu'il y a de la discrimination dans le logement. On a entendu une émission à CBC, je pense, récemment où il y a même un président d'une association qui est venu dire: Bien oui, on fait de la discrimination et c'est normal. Et il a décliné toute la série de stéréotypes sur les gens qui proviennent de l'étranger ou sur les minorités ethniques, etc.

Donc, on sait qu'il y a de la discrimination dans le logement. Ce qu'on n'est pas capable de cerner, c'est l'ampleur de cette discrimination. Ce qu'on n'est pas capable de connaître également, lorsqu'on fait enquête chez nous, c'est d'aller recueillir la preuve, parce qu'on sait pertinemment que lorsqu'une personne se présente pour obtenir un logement et qu'on lui dit: Écoutez, non, j'en avais il y a une demi-heure, mais je l'ai loué...

Les gens qui cherchent un logement se rendent bien compte qu'ils ne sont pas bienvenus à cet endroit. Ce qui est important, c'est de loger la famille et ils vont cogner à une porte voisine, ce qui donne comme résultat que la preuve est extrêmement difficile à ramasser. Dans les cas qu'on a eus à la commission, il y en a quelques-uns où on est arrivé à faire la preuve. Mais c'est très subtil comme discrimination.

Les gens ne se prémunissent pas. Malgré toute la publicité qu'on a faite, malgré toute la documentation qu'on a acheminée vers ces groupes pour leur indiquer comment faire lorsqu'ils sont victimes de discrimination, on sent qu'il n'y a pas d'intérêt à pousser plus loin. Donc, on se dit: Ce n'est pas la façon, cas par cas, d'aller traiter ce genre de dossier. D'autre part, il faut bien connaître et mesurer l'ampleur de ce phénomène, bien sûr dans la ville de Montréal, et aussi peut-être à Sept-Îles pour les autochtones qui vont dans ce milieu. On nous dit que les jeunes qui vont y étudier sont refusés à certains endroits.

D'autre part, ce qu'on ne connaît pas, non plus, c'est comment certains propriétaires de ces maisons d'appartements -finalement, il se forme des ghettos; si les gens sont refusés à des endroits, ils sont acceptés, par ailleurs, à d'autres places - en font une espèce de commerce, si vous voulez.

Quel est l'état de ces logements? Quels sont les services qu'on leur donne par rapport à des services qu'on donnerait à des membres de "la majorité"? Quel est le loyer également comparativement à un loyer semblable, même si la Régie du logement veille sur le coût des loyers? C'est le genre d'intervention qu'on voudrait faire éventuellement. Enfin, on espère avoir quelques dollars dans nos budgets pour faire un peu d'enquêtes dans ce domaine très prochainement.

M. Paré: Mais, si je comprends bien, présentement, il n'y a pas eu d'enquête poussée ou de clientèle-cible ou d'étude avancée de ce côté? Si vous avez des cas qui vous étaient rapportés spécifiquement de la Régie du logement, par exemple, vous interviendriez, mais vous n'en avez même pas à l'heure actuelle.

On en entend parler. Vous parliez de l'émission - j'étais pour vous en parler aussi, mais c'est déjà fait - où on a entendu des plaintes, mais on ne peut jamais aller au-delà de ça. Pour le moment, on sait que le problème existe. Vous avez parlé des groupes minoritaires, mais il y aussi les foyers monoparentaux qui sont dans des situations semblables et des bénéficiaires de l'aide sociale.

On les connaît, mais on n'est pas en mesure, autrement que par l'information ou la prévention très générale, sans être capable de s'adresser aux gens, puisque cela ne se rend pas chez vous... On sait qu'il y a un problème dans le logement mais on n'a pas pu intervenir, si je comprends bien, jusqu'à maintenant,

M. Lachapelle: C'est cela; actuellement, il n'y a pas d'intervention globale. À la commission, au service de la recherche, on travaille sur un projet d'intervention dans ce secteur d'activité. Encore une fois, ce qu'on a institué qui nous paraissait le plus adéquat - on a peu ou pas de demandes - c'est ce qu'on appelle une intervention rapide.

Dès qu'une personne nous appelle et qu'elle nous indique qu'elle a été victime de discrimination, on ne met pas de machine en branle qui est un enquêteur qui va arriver là dans deux mois. On appelle immédiatement le propriétaire et on dit: Quelqu'un s'est présenté chez vous et il semble bien que vous l'avez refusé à cause de telle ou telle raison. Ce n'est pas acceptable selon la charte. Qu'est-ce que vous avez l'intention de faire'' Ou bien on nous raccroche la ligne au nez et là nous faisons enquête, ou bien le propriétaire dit: D'accord, je vais recevoir la personne; je vais voir ce qui en est. On a réussi à régler passablement de dossiers de cette façon.

Encore une fois, peu de personnes font appel à nous, parce qu'elles sont préoccupées par d'autres questions. Les gens veulent se loger et ils sont rejetés. Donc, il faut aller à la base pour régler cette question de discrimination de la part des propriétaires. (11 h 45)

M. Paré: Une dernière question, toujours sur le logement. Vous savez qu'il y a des propriétaires qui font remplir des questionnaires. Rattaché au bail, il y a un questionnaire où l'on demande, par exemple, a) l'identification, b) le propriétaire actuel -cela va, c) immigrant - là, on va dans les détails; ensuite, on demande l'adresse de l'ex-employeur et on va même jusqu'à demander la marque de la voiture, le numéro d'immatriculation, des références s'ils disparaissent, qui contacter, leur compte à la banque, avec quelle banque ils font affaires et les références de crédit. Est-ce que vous avez reçu une copie de ces documents? Est-ce que vous en avez fait une analyse pour savoir si cela outrepasse les droits des propriétaires à l'égard des locataires.

M. Lachapelle: Je dois vous dire que c'est vraiment la première fois que je prends connaissance de ce document par votre intermédiaire. Bien sûr, on pourra sûrement l'analyser et voir d'où il provient. Il me semble à tout le moins, à première vue, suspect sur certaines des questions que vous avez mentionnées.

M. Paré: Je vous remercie. Je vous en remettrai une copie avant votre départ.

M. Lachapelle: Merci.

Le Président M. Filion): Merci, M. le député de Shefford. M. le député de Chapleau.

Bureaux régionaux

M. Kehoe: Merci, M. le Président. Dans votre exposé, à la page 13, vous parlez des bureaux régionaux. Vous mentionnez, dans votre rapport, que le principe est à titre exploratoire. Est-ce que cela veut dire que vous avez pris une décision quelconque? Est-ce que ce sera permanent? Est-ce que c'est là pour y rester? Quelle est l'expérience vécue à ce jour? Je fais référence surtout à votre bureau de Hull. Je pense que, initialement, la commission a pris la décision de le fermer. À la suite de certaines pressions, je pense qu'il est ouvert ou que l'ouverture est prolongée jusqu'au mois de mars, sî je ne me

trompe. Dans l'ensemble, quelle est la politique, l'attitude ou l'expérience vécue à ce jour, pour les bureaux régionaux?

M. Lachapelle: La commission a pris la décision d'ouvrir des bureaux régionaux. Bien sûr, au moment où on a ouvert les bureaux régionaux, à l'époque, on n'avait pas de budget, on n'avait pas non plus d'autorisation du Conseil du trésor. Je comprends que la commission aurait pu ouvrir des bureaux régionaux sans avoir l'approbation du Conseil du trésor, sauf que j'ai compris qu'antérieurement à mon arrivée à la commission en tout cas, dans un plan de structures de la commission, le Conseil du trésor avait refusé cette demande d'ouvrir des bureaux régionaux,

Nous sommes retournés devant le Conseil du trésor pour obtenir une approbation de principe. Cette approbation de principe, entre autres, nous disait: Vous pouvez ouvrir des bureaux régionaux jusqu'au mois de décembre de la présente année -donc 1986 - après cela, on fera une évaluation de la situation et on verra si on doit prolonger ces bureaux régionaux. On nous a indiqué, à ce moment-là, que la commission devait financer elle-même ses bureaux régionaux. Pour une première partie de l'année 1986 c'est-à-dire dans le budget antérieur, c'était relativement facile, on avait des budgets en conséquence. Pour cette année, le ministère de la Justice, après des discussions, nous a alloué un certain montant d'argent qui nous permettrait de vivre - si vous voulez - jusqu'au mois de décembre.

Bien sûr, comme vous le mentionnez, il y a eu énormément de pressions quand on a indiqué que les bureaux régionaux allaient être fermés, tel que prévu, au mois de décembre, si on n'avait pas les budgets. Le ministère de la Justice nous a donc accordé des budgets pour compléter, si vous voulez, l'expérience jusqu'au mois de mars. Actuellement, dans nos budgets, pour ce qui est du mois de mars, quoique le ministre de la Justice m'ait bien dit qu'il était très préoccupé par cette question des bureaux régionaux et qu'il souhaitait que l'on puisse perpétuer ces bureaux, je dois vous avouer qu'on n'a pas de sommes d'argent prévues pour qu'on puisse continuer l'expérience.

M. Kehoe: Si je comprends bien, si ces bureaux sont fermés, à ce moment-là, les citoyens et les citoyennes de ces régions, s'ils veulent formuler une plainte, sont obligés de se rendre à Québec ou à Montréal. Si les quatre bureaux sont fermés, effectivement, il y aura des bureaux seulement à Montréal et à Québec.

M. Lachapelle: Comme c'était antérieurement.

M. Kehoe: Justement.

M. Lachapelle: À ce moment-là, il y a des lignes téléphoniques inwatt et, bien sûr, la plainte traditionnelle par voie écrite.

M. Kehoe: Mais effectivement, il n'y aura pas d'enquêteur sur les lieux, il n'y aura pas de bureau, il n'y aura pas les services qu'ils ont actuellement.

M. Lachapelle: À ce jour, on s'est rendu en région pour enquêter, mais il n'y aurait plus cette personne attachée à la région, qui va dans les écoles ou qui va auprès des personnes qui demandent de l'information.

M. Kehoe: Si je comprends bien, c'est le ministre de la Justice qui va déterminer sî ces bureaux vont continuer de fonctionner. Le budget de fonctionnement vient du ministre la Justice, actuellement. Vous ne savez pas du tout, vous n'avez pas d'indication, à l'heure actuelle?

M. Lachapelle: C'est-à-dire que le budget est, bien sûr, voté par l'Assemblée nationale mais présenté par le ministère de la Justice.

M. Kehoe: Mais vous n'avez rien, vous-même... Dans le budget de la commission elle-même, il n'y a rien pour couvrir les dépenses de ses différents bureaux régionaux actuellemen?

M. Lachapelle: On avait prévu six personnes occasionnelles qui étaient dans notre budget pour la présente année, six personnes occasionnelles qui couvrent actuellement les bureaux régionaux.

Dans le budget de l'année prochaine, 1987-1988, ces six personnes occasionnelles ne sont plus là parce que c'était, à ce moment-là, la décision du Conseil du trésor de faire cette expérience jusqu'au mois de décembre. C'est pourquoi on nous avait octroyé ces budgets.

Le Président (M. Filion): Merci, M. le président. Cela va, M. le député de

Chapleau? D'accord. M. le député de Beauharnois.

Fonctionnement

M. Marcil: Dans votre structure de fonctionnement, on retrouve sept directions. Est-ce pensable, est-ce passible de penser à un moment donné de jumeler certaines directions, disons celle de la recherche avec celle de l'éducation ou...? Y a-t-il certaines directions qui peuvent avoir un rôle compatible?

Le Président (M. Filion): II y a neuf directions.

M. Lachapelle: Bien écoutez... Si on compte, on peut les énumérer si vous voulez. Le contentieux...

M. Marcil: Oui.

M. Lachapelle: II est difficile de jumeler un contentieux. On sait que dans toute entreprise de contentieux, les avocats sont branchés auprès du président. Je pense qu'il ne serait pas acceptable qu'on les place aux enquêtes, qu'on les place ailleurs. Il y a une espèce de petit conflit, si on veut.

Ensuite, les régions. C'est une petite unité où il y a quatre personnes et un directeur qui s'occupe de leur donner l'information. Peut-être qu'éventuellement... Comme il s'agissait d'un projet-pilote, on a placé une personne responsable pour suivre le projet et voir son évolution. Donc, peut-être que ce secteur des régions pourrait être jumelé avec les communications ou avec l'éducation. Ce n'est pas impensable.

M. Marcil: Prenez...

M. Lachapelle: Québec, c'est difficile. Ils forment une unité en soi.

M. Marcil: Prenez la recherche... C'est seulement à titre d'exemple, remarquez bien...

M. Lachapelle: Oui, oui.

M. Marcil: Vous y avez sûrement pensé depuis longtemps, la recherche avec la direction du contentieux... On sait que votre direction de la recherche met surtout l'emphase sur l'incompatibilité de certaines lois ou l'impact de certaines lois par rapport à la Charte des droits et libertés, et ainsi de suite.

La Direction du contentieux peut-elle avoir le même rôle? Est-ce qu'elle joue un peu ce rôle également lorsqu'elle monte des dossiers? Non?

M. Lachapelle: Non. Le contentieux a vraiment une activité très particulière. Ce sont les poursuites devant les tribunaux et l'évaluation des dossiers d'enquête quant à la preuve tandis que le côté recherche est beaucoup plus recherche - je ne dirai pas recherche fondamentale parce qu'on ne se rend pas jusque là, on laisse cela aux universités - axée sur la charte comme telle, sur les motifs de la charte. Par exemple, actuellement, les programmes d'accès à l'égalité, c'est une matière extrêmement complexe où il y a peu de jurisprudence, peu de doctrine, où il faut aller chercher ce qu'il y a aux États-Unis. C'est à peu près cela.

Donc, c'est une recherche très particulière, très axée sur la charte. Il m'apparaîtrait difficile aussi d'aller jumeler ces deux secteurs.

Ce que je tentais de voir, c'était la raison que vous aviez en arrière de votre suggestion de regrouper des directions. Vous trouviez que cela fait beaucoup de cadres?

M. Marcil: Non, je pose la question naïvement comme mon collègue de Saint-Jacques a l'habitude de le faire. C'est une bonne façon de traiter les choses. Quand on parle de l'assemblée des commissaires, le rôle de cette assemblée et le nombre de réunions par année, c'est quoi? C'est quoi le rôle des commissaires?

M. Lachapelle: Le rôle de l'assemblée des commissaires, c'est de statuer, bien sûr, sur tous les dossiers d'enquête. Tous les dossiers d'enquête sur lesquels il n'y a pas eu de règlement en cours de route se rendent d'abord devant un comité d'enquête qui filtre, si vous voulez, le dossier, s'assure que la preuve est complète et fait une recommandation à l'assemblée des commissaires, aux onze commissaires qui prennent une décision suivant un quorum établi à six. Tous les dossiers font tout ce cheminement. Donc, les commissaires entendent et statuent sur chacun des dossiers qui leur sont présentés.

M. Marcil: Ce sont des réunions statutaires?

M. Lachapelle: Ce sont des réunions statutaires et quelques réunions spéciales sur des cas particuliers, des dossiers particuliers extrêmement lourds qui nécessitent peut-être plusieurs heures de discussion.

M. Marcil: Quand on parle de réunions statutaires, est-ce une réunion par mois, deux réunions par mois?

M. Lachapelle: Leur fréquence est aux trois semaines.

M. Marcil: Ah, une à toutes les trois semaines à peu près.

M. Lachapelle: Oui. Il y a également les avis de la commission. Les commentaires de la commission sur les textes de loi qui sont présentés devant tous les commissaires.

M. Marcil: Si je comprends aussi, c'est que tantôt on parlait de représentation des commissaires. Je suppose que parmi votre personnel, autant au niveau du personnel de cadre ou de soutien, vous avez également des gens qui ont une formation juridique.

M. Lachapelle: Oui.

M. Marcil: Pour monter les dossiers et travailler dans chacune des directions.

M. Lachapelle: Le contentieux.

M. Marcil: Le contentieux. D'accord.

M. Lachapelle: II y a également plusieurs avocats qui sont aux enquêtes.

M. Marcil: Merci.

Le Président (M. Filion): Sur le même sujet, je crois, M. le député de Louis-Hébert, vous aviez manifesté votre intention de poser une question.

M. Doyon: Concernant les réunions qui ont lieu à peu près à toutes les trois semaines, est-ce que tout est étudié, est-ce qu'on attend que l'assemblée des commissaires ait en main le rapport complet des enquêteurs? Comment cela fonctionne-t-il? Est-ce que l'enquêteur est appelé à venir présenter son rapport lui-même et à l'expliquer, au besoin?

M. Lachapelle: Le processus est le suivant. On prend cela à partir du début. Une plainte, on regarde où elle doit être acheminée, parce qu'il y a des cas qui ne sont pas des plaintes qui relèvent de la commission. Elles peuvent aller, par exemple, à l'Office de la protection du consommateur, parce que quelqu'un veut nous parler de son grille-pain; on l'achemine donc ailleurs. Sur les quelque 35 000, il y a un fil qui se fait jusqu'à 400, 500 dossiers par année. On étudie la recevabilité. La recevabilité est quand même très large parce qu'on dit: Toute personne qui a raison de croire... Il ne s'agit pas que des gens arrivent chez nous avec des tas de preuves. Une personne qui dit: Moi, j'ai raison de croire... je suis un Noir, je me suis présenté dans un logement et on m'a refusé. S'il nous donne des indications assez précises, savoir è quelle heure, telle journée, on fait enquête.

À partir de ce moment, un enquêteur va sur les lieux, interroge des personnes, soit de façon inquisitoire ou contradictoire, monte là un dossier qu'il estime, lui, complet et se présente devant un comité des commissaires, trois commissaires qui évaluent l'ensemble du dossier, la question de droit. À ce moment, à ce comité des enquêtes qui représente le contentieux qui a fait une évaluation du poids de la preuve, il y a également l'enquêteur qui vient présenter son dossier. Très souvent il n'est pas là parce que le dossier est relativement clair surtout quand il s'agit de règlement. Quand il s'agit de dossier plus contesté, l'enquêteur vient, fait état du résultat de son enquête et apporte d'autres éléments de discussion et d'autres commentaires dans ce dossier.

Là, les trois commissaires présents font une recommandation à leur collègue et un projet de résolution est préparé, rejetant ou maintenant la recommandation de l'enquêteur et proposant ensuite la médiation. Dans l'autre étape, les commissaires reçoivent ce document. Généralement, il est entériné, mais il y a quelquefois des discussions autour d'une résolution proposée.

M. Doyon: Est-ce qu'il serait concevable que les commissaires, pour une raison ou pour une autre, décident eux-mêmes d'entendre des témoins, de les convoquer?

M. Lachapelle: Ce serait concevable; ce serait extrêmement lourd. Bien sûr, il faudrait ajouter un certain nombre de commissaires, parce que là ils deviendraient véritablement des commissaires-enquêteurs. Ce serait une tout autre...

M, Doyon: Cela ne s'est jamais fait. M. Lachapelle: Je pense...

Mme Trudeau-Bérard: Cela s'est fait dans un cas particulier, le cas d'un universitaire. Par ailleurs, il y a eu cette enquête dans l'industrie du taxi où là la commission a nommé trois personnes, trois commissaires pour entendre toute la preuve, le mouvement de l'enquête. Dans un autre cas, moi aussi j'ai siégé pour entendre... en fin de compte, j'ai fait l'enquête. Mais ce sont des cas exceptionnels, parce que c'est une question de disponibilité de nos commissaires. La majorité, enfin, neuf sur onze sont nommés à temps partiel. Étant donné le nombre de dossiers que l'on a, la structure n'est pas du tout pensée en fonction d'un tel fonctionnement actuellement.

M. Lachapelle: Ce que vous suggérez est extrêmement intéressant. C'est bien sûr qu'on a la preuve un peu comme une Cour d'appel, si vous voulez, où un enquêteur vient nous présenter une preuve qu'il a lui-même recueillie. C'est bien sûr qu'on n'est pas en contact direct. On peut difficilement évaluer dans certains cas la crédibilité des témoins, peser véritablement les témoignages, si bien qu'un peu, comme la Cour d'appel, on s'en remet à l'enquêteur quand il vient nous dire: Tel témoin qui a témoigné devant moi, je ne le crois pas pour telle ou telle raison. On agit un peu de cette façon avec les dossiers qui nous sont présentés. (12 heures)

M. Doyon: Je ne me souviens pas trop. Est-ce que, lors de son enquête, l'enquêteur assermenté les personnes?

M. Lachapelle: Oui.

M. Doyon: Dans tous les cas? M. Lachapelle: Oui.

M. Doyon: C'est essentiel, c'est une procédure obligatoire?

M. Lachapelle: On suit la procédure prévue devant les tribunaux. Ceia nous semble un minimum, en tout cas.

M. Doyon: Oui, oui, je n'ai rien contre cela. En tout cas, selon l'expérience que j'ai vécue, je trouve que c'est une procédure expéditive, qui permet d'aller trouver les personnes sur place, de les rencontrer dans un milieu qui est le leur, de faciliter les choses. D'un autre côté, sans que j'aie à me plaindre des décisions qui ont été rendues, pour celles que je cannais, j'ai l'impression que cela a été fait sans que les personnes qui étaient interrogées - moi le premier -aient été vraiment conscientes que les questions qui nous étaient posées appelaient des réponses sous serment. Ce n'était pas très clair dans mon esprit, en tout cas.

M. Lachapelle: Remarquez que depuis l'époque... Oui.

M. Doyon: C'était plutôt une conversation à bâtons rompus. On expliquait, on faisait valoir son point de vue et on plaidait un petit peu à travers cela. Il y avait des arguments: un bout c'étaient des faits, d'autres, de l'argumentation, de la plaidoierie. Je me suis dit: Il y aurait peut-être lieu - je ne sais pas - de bien séparer ces choses-là, que l'enquêteur arrive et dise: Qu'est-ce qui s'est produit tel jour? C'est quoi? Des faits, des faits, des faits. Une fois qu'on a fini les faits, les parties - parce qu'il y a quand même jusqu'à un certain point des parties là-dessus - pourraient être invitées à défendre leur point de vue, à invoquer des points qui sont à l'appui de leurs prétentions.

Mais, la façon dont cela s'est passé, en tout cas - comme je vous l'ai dit, j'ai été impliqué de très près là-dedans et cela a duré assez longtemps pour que j'en aie connaissance - c'est que cela se faisait à bâtons rompus. Si j'avais, pas un conseil, mais une suggestion à faire, ce serait de demander à vos enquêteurs de bien structurer leurs entrevues, les interviews - c'est bien plus cela - et de leur dire: Là, vous allez aux faits. Vous faites la cueillette des faits. Après, vous invitez les personnes à plaider comme on plaide un petit peu devant un tribunal, parce que c'est cela l'idée. Cela peut être aussi intéressant pour lui de recueillir un certain nombre d'arguments qui vont étayer sa décision éventuellement. Lui, il pourrait aller au-delà de cela et même poser des objections et dire: Oui, mais il y a cela, mais en dehors de l'exposé des faits proprement dits, qui est le premier rôle des témoins quand on est rencontré.

M. Lachapelle: Là-dessus, si vous me le permettez, probablement qu'à l'époque de l'enquête dont vous parlez ces règles de procédure n'existaient pas. Depuis lors, on a quand même justement constaté, à la suite peut-être de commentaires comme le vôtre et de l'expérience de la commission, qu'effectivement l'enquête n'était pas très encadrée. Souvent aussi des groupes qui s'intéressent au droit et qui présentaient des dossiers devant la commission nous ont fait état de certaines remarques de ce genre.

Depuis le 18 avril 1986 - c'est quand même assez récent - on a des directives concernant la procédure applicable aux enquêtes de la commission. C'est une procédure beaucoup plus rigoureuse qui se divise, de fait, en deux: une première partie qui est un peu inquisitoire, comme celle que vous avez connue, où l'enquêteur fait une recherche de la preuve de manière à monter son dossier; dans une autre partie - cela, ce sont les parties qui choisissent - ils disent: Nous, nous voulons que vous continuiez de façon inquisitoire à ramasser la preuve et vous présenterez votre document à la commission; ou encore de façon contradictoire, c'est-à-dire que vous allez nous amener devant ce que vous allez constituer comme une espèce de petit tribunal où vraiment il y aura des règles très précises et où j'entendrai la preuve de l'un et la preuve de l'autre. Cette procédure est actuellement en vigueur à la commission. C'est effectivement beaucoup plus clair, de sorte que chacun a nettement l'impression d'entendre le témoignage de l'autre, de pouvoir répondre et d'argumenter ensuite, et non pas d'argumenter et de témoigner.

M. Doyon: C'est sûrement une amélioration.

Présence régionale

Le Président (M. Filion): Avec la permission de mes collègues, je me suis inscrit à ce stade-ci car j'ai certaines préoccupations. D'abord, en ce qui concerne la présence régionale de la commission -cela a été évoqué tantôt, je pense qu'on a entamé le sujet et, si j'ai mal compris, vous me corrigerez - je crois comprendre un peu de l'ensemble de vos propos ainsi que du texte qui nous a été présenté que, d'une part, la présence de la commission dans les quatre régions où elle est présente maintenant, à savoir l'Outaouais, l'Estrie, l'Abitibi et la Côte-Nord, est menacée, si l'on veut, pour l'année prochaine et que, d'autre part, bien sûr, en ce qui concerne ta présence éventuelle de la commission dans

d'autres régions, il n'y a aucun plan immédiat de réalisation d'une telle présence régionale de la Commission des droits de la personne.

Je dois vous dire que cela m'inquiète beaucoup. D'une part, on voit que le nombre de demandes augmente considérablement. Cela veut dire que la commission est de plus en plus connue. La charte, comme vous l'avez dit, l'est peut-être un peu moins, mais la commission l'est. D'autre part, on se rend compte que la Commission des droits de la personne, qui est la grande exécutrice de cette loi fondamentale, va être dans l'incapacité d'être présente régionalement avec toutes les conséquences que cela amène. Je sais qu'au niveau des communications téléphoniques cela peut être facile, mais quand même'. Ne serait-ce des fois que de savoir qu'il y a un bureau de la Commission des droits de la personne à certains endroits, cela peut inciter des gens à faire appel à tort ou à raison, à la commission, mais au moins à aller s'informer de leurs droits. Mais s'il n'y a pas de présence régionale à Trois-Rivières, je ne vois pas pourquoi les gens de cette région seraient enclins à se présenter et à s'informer de leurs droits et de leurs obligations également. Ce ne sont pas juste des victimes qui vont vous voir; il y a les gens qui veulent faire les choses en conformité avec la Charte des droits et libertés de la personne. Est-ce que je comprends bien, en concluant que le manque de ressources pose un problème plus que sérieux pour la régionalisation de la Commission des droits de la personne?

M. Lachapelle: Effectivement, le projet au départ était de voir si la population répondait à la présence de la commission sur le territoire, si nos gens là-bas étaient au moins occupés. On a dit: Donnez-nous un minimum de ressources, on va le savoir. Je crois que la réponse est qu'il y a un nombre incroyable de demandes qui sont adressées à nos bureaux et qui se traduisent par l'augmentation dont je vous parlais tantôt. Donc, il y a une présence régionale différente de la ligne téléphonique. Les gens se présentent à nos bureaux et ils viennent nous voir pour présenter leurs problèmes. Cela me semble beaucoup plus important, quant à moi, une présence humaine qu'un téléphone. Je crois bien que, pour les commissaires, on n'a pas à plaider longtemps sur l'importance de la présence régionale. Ce que l'on constate actuellement, c'est même une inégalité par rapport à Trois-Rivières ou à d'autres régions du Québec qui n'ont pas cette présence régionale. La preuve est faite d'autant plus que je reçois continuellement à mes bureaux des demandes de nombreux organismes et de personnes de maintenir ces bureaux en régions. Je crois que tout le monde actuellement est sensibilisé à cette dimension de la présence régionale de la commission. Il ne resterait qu'à actualiser cela. Ce ne sont pas des budgets extraordinaires.

L'autre hypothèse, c'est que la commission finance cela elle-même. Je dois vous avouer que, dans les circonstances actuelles, cela m'apparaît extrêmement difficile de prendre cinq ou six personnes à Montréal ou à Québec et de lesenvoyer en régions. Finalement, on va enlever des services ailleurs, on va déshabiller un pour habiller l'autre. Je ne crois pas qu'on rende service à quiconque.

D'autre part, on a fait énormément d'efforts pour essayer de réduire les coûts. On a cohabité - à défaut de fusion - avec le Comité de la protection de la jeunesse. On a partagé - parce que deux professionnels avec une secrétaire, cela nous semblait suffisant -des équipements et des bureaux et la clientèle est à peu près la même, finalement. Là, on a réduit les coûts au minimum. Quant à nous, bien sûr, la ligne téléphonique pourrait être une réponse. L'envoi de personnes pour aller faire des enquêtes pour répondre ensuite aux demandes qu'on aura quasi suscitées, ce serait peut-être une solution, mais peut-être aussi dispendieuse aussi car on ferait voyager des enquêteurs entre Montréal et Sherbrooke et l'Abitibi.

Si on a choisi Sept-Îles et Rouyn, c'est parce qu'il y a là aussi une présence autochtone importante. Et c'est l'une des missions de la commission de s'occuper également de cette minorité qui a des choses à nous communiquer et qui ne viendra pas à Montréal nous dire qu'elle a des problèmes de logement et avec diverses administrations. Ses membres ont déjà énormément de difficulté à entrer en contact avec nous autres, ils ne viendront pas nous dire cela à Montréal, ni par ligne téléphonique. De fait, on a eu des plaintes comme cela, qui sont mal articulées, mais il faut comprendre la mentalité, il faut s'asseoir avec eux, il faut en discuter et, à distance, cela ne se fait pas.

Le Président (M. Filion): Je vous remercie. En ce sens, la conclusion qui est en page 15 de votre texte, quand vous dites: "De fait, la CDP ne possède pas les effectifs nécessaires pour répondre aux besoins de la population en régions" fait appel d'abord à l'expérience que vous avez vécue sur une base exploratoire et à l'ensemble des considérants que vous venez d'exposer. Je pense que c'est une matière importante.

Je voudrais également entamer avec vous... La firme Optimum est un firme de consultants qui fait des sondages, c'est cela?

Mme Trudeau-Bérard: C'est une filiale

de Cossette.

Rôle d'éducation et d'information

Le Président (M. Filion): Quand ils sont arrivés à la conclusion que la Commission des droits de la personne jouissait d'une bonne crédibilité et était assez bien connue dans la population, mais, par contre, que la charte l'était moins, cela confirme ma modeste perception des choses. Cela m'amène à traiter du rôle d'éducation de la commission, d'éducation et d'information. Je connais la différence entre les deux, mais seulement pour les fins de nos propos je suis porté à les grouper. Je le sais, j'ai bien lu vos textes et je suis au courant de la distinction, mais quand même éducation, information et communication, cela peut, dans un certain sens, aller ensemble. Ce n'est pas facile, non plus, nécessairement de faire de l'information et de l'éducation. Je lisais au bas de la page 15, d'abord, les contraintes budgétaires qu'éprouve la Direction des communications, lorsque vous dites que la "Direction des communications devrait se voir accorder un budget de fonctionnement de 237 000 $, selon l'étude de la firme Optimum." Or, vous fonctionnez actuellement avec un budget réduit de 64 000 $ en ce qui concerne les communications. En ce qui concerne l'éducation, combien y a-t-il de personnes au sein de la Direction de l'éducation, grosso modo?

M. Lachapelle: Je crois qu'il y a sept professionnels...

Le Président (M. Filion): Sept professionnels, un personnel de soutien.

M. Lachapelle: ...qui font un travail quand même, malgré les distinctions que vous apportez, un peu différent de l'information comme telle qui est dans les écoles, qui est auprès des syndicats, des employeurs et qui va porter un message beaucoup plus précis. Comme, de fait, on veut susciter un changement, donc, le message est beaucoup plus profond tandis que - bien sûr, vous avez fait la distinction tantôt - l'information est beaucoup plus large.

Au niveau de l'information, il y a cinq professionnels à l'éducation dont l'un est prêté à un autre organisme; donc, actuellement, il y a quatre personnes.

Le Président (M. Filion): Je mettais cela en parallèle avec la deuxième orientation pour l'année dernière qui était de: "faire connaître à toute la population les principes et les objectifs inscrits dans la charte, ainsi que le rôle de la commission." Compte tenu que la commission existe depuis dix ans, à votre avis, M. le président, a-t- elle réussi à atteindre cet objectif? La réponse ne sera ni blanche ni noire, mais quand même... Également, dans un deuxième temps, croyez-vous avoir ce qu'il faut entre les mains pour mener à bien véritablement ce mandat que vous confie la charte, un mandat d'une extrême importance?

M. Lachapelle: Je fais référence à Optimum et je reprends ce que cette firme nous a dit. La commission est connue parmi les grands organismes au Québec; en termes de notoriété, elle serait la deuxième, la première étant, justement, l'Office de la protection du consommateur qui, évidemment, touche notre vie quotidienne, La deuxième est la Commission des droits de la personne. Donc, on sait qu'elle existe. (12 h 15)

Ce qui est difficile dans l'esprit des gens, ce sont toutes ces distictions dans les chartes, si bien que les gens qui lisent dans les journaux la "commission canadienne", la "charte canadienne", "Amnistie internationale", pour M. ou Mme Tout-le-Monde, c'est du pareil au même. Ce sont des droits. On rattache tout ça à une commission quelconque, canadienne ou autre.

Donc, il nous apparaît important que, dans l'esprit des Québécois, cette distinction soit claire. On trouve un peu malheureux qu'on ait une charte québécoise qui a beaucoup d'élan et d'allant, qu'elle ne soit pas connue dans la tête des gens et qu'ils ne comprennent pas qu'il y a véritablement une charte québécoise issue de nos réflexions et de notre gouvernement. Pour nous, c'était l'élément important.

Optimum vient nous confirmer en cela que la commission, comme telle, avait livré son message, mais ne livrait pas le message de la charte québécoise. De fait, on a demandé à Optimum, identifiant certains problèmes de communication: Voulez-vous nous dire, avec les budgets que nous connaissons et que nous avons à la commission, si on travaille bien, si on est bien organisé, si on donne les bons messages et quelle est la perception des gens qui reçoivent nos messages? Optimum nous a répondu que oui, l'image de la commission était bonne. Mais ils nous ont dit: Ce n'est pas ça qu'il faudrait faire, parce qu'il y a d'autre chose à faire. C'est là qu'ils nous sont arrivés en nous disant: Si vous voulez vraiment remplir la mission que vous devez faire, ce sont des budgets de l'ordre de 300 000 $ et j'en passe, parce qu'évidemment ces gens des communications ont des limites...

Le Président (M. Filion): Elle sont très élevées. "Sky is the limit".

M. Lachapelle: "Sky is the limit". Alors, on a enlevé 300 000 $ dans les suggestions

qu'ils nous avaient faites. On a dit: Ceux-là, vous pouvez les laisser tomber. Mais ils nous disaient que, pour bien percevoir ce message qu'on voudrait, qui était cet objectif que vous mentionniez tantôt, c'étaient des budgets de cet ordre qu'on devait investir.

Effectivement, avec 64 000 $ par année, on publie "Droits et libertés" qu'on mentionnait tantôt et quelques petites brochures. On fait quelques conférences avec des journalistes, comme récemment, pour expliquer des programmes d'accès à l'égalité, parce qu'on essaie d'aller beaucoup plus dans des "briefings" de presse que dans des conférences de presse où on veut expliquer, de façon plus profonde, le message de la commission, ce que sont des programmes d'accès à l'égalité et des programmes d'éducation.

On réussit à faire ce minimum. Mais on ne couvre peut-être que le dixième des demandes adressées à la commission d'aller un peu partout avec des kiosques pour donner de la documentation. Actuellement, on veut produire un document sur les programmes d'accès à l'égalité et je vous avoue qu'on n'a pas l'argent pour le faire. On va, bien sûr, se tourner vers le ministère de la Justice ou ailleurs pour obtenir ces budgets. Mais ça nous semble important de faire connaître ce que sont exactement les programmes d'accès à l'égalité, alors que cette notion est galvaudée à certains égards et n'est peut-être pas très bien connue juridiquement d'une très grande partie de la population.

Le Président (M. Filion): Je note que, finalement, la commission n'est pas en mesure, comme vous le dites, de répondre à un dixième de toutes les demandes qui lui parviennent. Cela veut dire que la demande est présente, le besoin existe, parce que la commission est connue. Comme vous le dites, en plus de ça, il y a le problème du cumul des chartes et des commissions. Le besoin d'information existe. C'est de satisfaire ce besoin avec, comme vous le dites, l'instrumentation appropriée et un plan stratégique qui est difficile.

Programmes d'accès à l'égalité

Justement, sur les programmes d'accès à l'égalité, c'était ma prochaine question. C'est un règlement d'extrême importance qui est maintenant en vigueur au Québec depuis quelques mois, sauf erreur. Est-ce que je dois comprendre de votre réponse également que la commission dispose de peu de moyens de faire connaître ce règlement qui vise à redresser des situations de discrimination dans des organisations ou des entreprises?

Je me pose la question. D'abord, est-ce que les entreprises de Trois-Rivières, de la Mauricie, connaissent l'existence du règlement sur les programmes d'accès à l'égalité?

Est-ce qu'elles connaissent l'existence des possibilités et de la direction qui existent maintenant, à la Commission des droits de la personne, pour aider et pour fournir les ressources nécessaires à établir tel plan, etc? Est-ce que les victimes elles-mêmes de discrimination les connaissent? Je pense que la réponse est manifeste, du moins selon ma modeste perception: c'est non.

Or, ce régiment est en vigueur au moment où l'on se parle. Je n'ai vu nulle part de campagne d'information, d'une façon ou d'une autre, visant à faire connaître ce règlement d'extrême importance. C'est le ministre lui-même qui le dit, ce n'est pas moi: d'extrême importance.

M. Lachapelle: Actuellement, nous sommes en train de préparer un colloque qui doit avoir lieu dans moins d'un mois, où on va réunir des employeurs, des groupes et des syndicats et où on va faire connaître... Il faut quand même dire qu'il y a tout un travail de préparation où on doit bien définir ce qu'est un programme d'accès à l'égalité. Je dois vous avouer que c'est extrêmement complexe. Si c'est complexe pour la commission, il faut essayer de le vulgariser, de le "décomplexifier" pour les employeurs et pour tout autre groupe qui veut utiliser les services de la commission et connaître ce système qu'est un programme d'accès à l'égalité.

Donc, très prochainement, on devrait rendre publique une information pertinente sur ce sujet, en collaboration avec le ministère de la Justice avec qui on prépare une brochure. Si ce n'était de la collaboration d'un ministère, on n'y arriverait pas. Cette brochure va expliquer les règlements, exposer ce qu'est un programme d'accès à l'égalité et comment on fait pour y arriver. C'est bien sûr qu'actuellement, parce qu'on est dans un travail préparatoire, il y a eu peu d'information de donnée vu que nous sommes en train de mettre sur pied toute l'instrumentation de base nécessaire. Si demain matin un employeur nous demandait carrément, comme cela, de mettre en place immédiatement un programme d'accès à l'égalité, il nous manquerait peut-être certaines données statistiques: Où sont les groupes cibles? Quels sont-ils? Quelles sont leurs spécialités et leurs professions? Toutes ces questions ne sont pas encore résolues. Cela devrait être fait dans un sondage et une enquête sociologique qu'on est en train d'administrer actuellement. On possédera des données là-dessus d'ici le début de l'année.

Pour ce qui est de la promotion, il y a un programme léger qui devrait être mis sur pied très prochainement à la suite du colloque qu'on va tenir sur les programmes d'accès à l'égalité. Pour aller porter le message dans chacune des entreprises, il faut véritablement s'asseoir avec...

Le Président (M. Filion): À titre d'exemple, si mon entreprise était décidée à appliquer un programme volontaire, est-ce que la commission serait en mesure de faire les analyses de disponibilité de main-d'oeuvre pour la région de la Mauricie, dans le secteur du papier?

M. Lachapelle: Actuellement, on est à colltger...

Le Président (M. Filion): C'est énorme comme responsabilité, finalement.

M. Lachapelle: ...ces données. C'est, évidemment, la réponse des employeurs: Je veux bien faire un programme, mais vous allez me dire où est la main-d'oeuvre. C'était donc la première étape à franchir. Actuellement, on est en train de ramasser ces données. Bien sûr, un employeur ne peut pas aller les chercher sur le terrain parce qu'il n'en a pas les moyens et je dirais, même le courage parce que c'est quand même une entreprise extrêmement difficile. On travaille actuellement à ce projet.

Le Président (M. Filion): C'est un travail extrêmement complexe...

M. Lachapelle: Extrêmement complexe.

Le Président (M. Filion): ...dépendant de la nature de l'entreprise et de la nature du groupe cible qui est choisi. Ouf! Je me demande...

M. Lachapelle: Pour ce faire, on a la collaboration de nombreux organismes au Québec, entre autres, le Secrétariat d'État qui nous a fourni des subventions généreuses.

Le Président (M. Filion): En somme, ce que vous me dites, c'est que c'est un programme léger, avec les moyens du bord. Je suis convaincu que vous faites ce que vous pouvez avec ce que vous avez en main pour voir à l'application et à la diffusion de l'existence de ces programmes d'accès à l'égalité.

Augmentation du volume de travail

De façon générale, l'augmentation des demandes, c'est assez faramineux: 80 % pour les enquêtes et 30 % sur le plan des requêtes. 80 %, c'est presque du simple au double. Il y a les programmes d'accès à l'égalité et aussi, ce que j'ai trouvé extrêmement intéressant - vous en parlez en bas de la page 14 et haut de la page 15 - la discrimination raciale dans le secteur du logement. "La commission constate que les problèmes de discrimination doivent être traités de façon plus globale afin d'en détecter toute l'ampleur et d'apporter des solutions". C'est une orientation importante.

On, compte tenu des besoins qui existent en information en particulier, du volume de travail, j'ai été fasciné par la statistique que vous nous avez donnée, à savoir que, malgré toutes ces augmentations d'activités et de responsabilités, la commission a connu une coupure de 100 000 $ dans son budget de fonctionnement et de 250 000 $ pour les traitements. Ne peut-on pas dire, M. le président, que la commission se trouve actuellement à une étape drôlement cruciale de son existence et, pour véritablement pouvoir assumer le minimum minimorum des responsabilités qui lui sont propres, n'est-il pas de toute urgence que la commission puisse disposer des ressources dont elle a besoin afin de remplir son rôle? Sinon, on va se retrouver dans une drôle de situation au Québec où tout le monde va connaître la commission, mais la commission elle-même sera un peu incapable de livrer la marchandise? Et quand on connaît l'importance de cette marchandise!

On a étudié hier, je le dis en passant, l'Office de la protection du consommateur qui a des bureaux régionaux partout. C'est important... Pardon?

Une voix: II ne s'est pas plaint de son budget.

Le Président (M. Filion): II a des bureaux partout. Alors, si c'est important au Québec de protéger le consommateur, je me dis qu'il n'est sûrement pas moins important, à mon avis, de protéger les droits de la personne parce que c'est fondamental. Je sais que c'est difficile pour vous, M. le président, mais quand même nous sommes ici en commission parlementaire pour dialoguer de façon franche et ouverte. Ne considérez-vous pas que la commission en est à une étape cruciale de son développement et qu'il est impérieux qu'elle puisse recevoir des autorités parlementaires et exécutives l'attention que son dossier mérite?

M. Lachapelle: Ce que je peux vous dire à ce sujet, c'est que, d'abord, il n'y a pas de panique à bord.

Le Président (M. Filion): Non.

M. Lachapelle: II y a une augmentation importante qui se manifeste cette année. Il faudra voir un peu comment cela se répercute dans nos activités et j'entends bien aller voir ce qu'est toute cette demande qui nous arrive et qui double. Deuxièmement, c'est bien sûr que l'on va livrer autant et même à 110 % ce que l'on nous a donné en termes d'efficacité et d'efficience de la commission.

Je partage aussi votre inquiétude quand

on voit monter cela et que l'on voit que seulement quatre régions sont ouvertes. Donc, il y avait dans les régions un besoin et, à mon sens, une première évaluation nous fait comprendre que cette augmentation de la demande vient des régions d'une façon importante. Donc, il faudra aller régler le problème régional et c'est probablement là le point le plus important et le point majeur: est-ce que l'on continue à donner ce service aux régions et est-ce que l'on va ailleurs aussi en régions? Donc, si on va ailleurs en régions, il va falloir s'équiper à l'interne pour répondre à la demande. Quand on va en régions, cela suscite des plaintes et, quand cela suscite des plaintes, il faut également envoyer des enquêteurs et il faut que l'on puisse réaliser des enquêtes en régions.

D'autre part, je ne voudrais pas, non plus, exagérer l'importance de la demande, mais il y a un tas de secteurs que l'on n'a pas couverts. On parlait tantôt de discrimination systémique, on pourrait enquêter. On a enquêté dans le domaine du taxi pendant des mois pour quand même trouver là un problème de discrimination extrêmement important. On parlait du logement, cela demande aussi des développements importants. On sait que, dans des entreprises aussi, il y a des problèmes de discrimination. On a eu l'occasion de discuter également avec les gens de la STCUM à Montréal où il y a, là aussi, des problèmes et on est en train d'articuler avec cette entreprise une façon d'aborder ce problème et d'arrêter immédiatement les problèmes que l'on peut connaître. Il y a certains problèmes de discrimination qui peuvent se poser. (12 h 30)

Ce que je suggère au moment où on se parle, c'est de regarder la situation de très près sans peser sur le bouton de panique. 11 n'y a pas de chiffres inventés là; ils sont là, ils nous arrivent. C'est un premier constat. Il faut vraiment regarder la situation avec beaucoup de vigilance. Sinon, c'est un peu un leurre que d'avoir une commission qui s'affiche et qui dit aux gens: Venez nous voir, quand on ne peut pas traiter ensuite les plaintes dans des délais acceptables et dans des formes qui répondent véritablement aux services que cette charte veut promouvoir dans la population.

La situation n'en est pas à un point de panique. Je pense qu'effectivement il y a des lumières rouges qui viennent de s'allumer et ce n'est peut-être pas le temps de peser sur le bouton. Mais en régions, en tout cas, il va falloir trouver une réponse immédiate, d'ici quelques mois, d'ici au mois de mars. On est rendu au point où il va falloir trouver une solution à cela.

Le Président (M. Filion): Je vous remercie. Juste deux petits points avant de terminer. Premièrement, j'ai noté à la page 26 de votre texte la conscientisation qui existe au niveau de la commission sur le degré de formation du personnel. Je suis très sensible à cela. Dois-je comprendre que c'est une de vos priorités pour l'année qui vient ou est-ce qu'il y a déjà un programme qui existe pour voir à ce que le personnel soit adéquatement formé compte tenu qu'il n'y a rien de facile dans ce secteur?

Le député de Louis-Hébert relatait tantôt son cas personnel. L'enquêteur qui passe d'un problème de discrimination pour un logement, qui doit aller ensuite à un problème de travail ou d'égalité salariale au travail, etc., c'est un domaine qui n'est pas facile. Ce n'est pas comme d'enquêter sur un vol de télévision, avec tout le respect que j'ai pour ceux qui le font. Alors, est-ce que ce programme-là existe actuellement? Pouvez-vous m'en dire quelques mots?

M. Lachapelle: Peut-être que Mme Trudeau-Bérard peut vous en dire quelques mots, c'est elle qui pilote ce dossier depuis deux années.

Mme Trudeau-Bérard: Ce que nous faisons, c'est que nous avons un programme triennal. Il est élaboré avec les gestionnaires et aussi avec le personnel. Donc, d'une part, on tient compte des besoins organisationnels, des besoins qu'on identifie et par ailleurs, aussi, des besoins qui sont signifiés par le personnel. C'est sur une base continue. On fait des blocs de formation de façon continue sur un programme qui est revu annuellement.

Le Président (M. Filion): Juste une dernière question qui est un détail. Je termine avec un détail. J'ai vu récemment le texte de la charte québécoise des droits. J'ai une copie à mon bureau de comté. Sur le mur d'un de mes collègues, j'ai vu effectivement la même charte, mais cette fois-là il n'y avait pas le fleurdelisé ni la signature du premier ministre de l'époque, M. René Lévesque. Est-ce que la disparition du fleurdelisé sur le texte officiel de la charte relève d'une erreur d'inattention, en somme? Vous n'êtes pas au courant de cela?

Mme Trudeau-Bérard: C'est quelque chose qui est affiché?

Le Président (M. Filion): Oui, c'est ça. Quand on demande la copie laminée, en tout cas, on peut la faire laminer, mais...

Une voix: C'est une copie parchemin.

Le Président (M. Filion): Copie parchemin.

Mme Trudeau-Bérard: Ce n'est pas nous qui l'avons distribuée celle-là.

M. Lachapelle: Je pense que c'était l'Éditeur officiel. C'était une édition un peu spéciale. C'était la copie calligraphiée probablement.

Mme Trudeau-Bérard: C'est ça. Le Président (M. Filion): Oui.

M. Lachapelle: Qui avait été faite par...

Le Président (M. Filion): J'ai remarqué, est-ce que je me trompe? que toutes les copies qui circulent, formule parchemin, comportaient le fleurdelisé et celle que j'ai vue ne l'avait pas.

Mme Trudeau-Bérard: Je n'ai pas vu cette dernière dont vous parlez.

M. Doyon: Cela va être pas mal moins bon.

M. Lachapelle: Pardon?

M. Doyon: Il va falloir faire attention parce que la charte va peut-être être beaucoup moins bonne.

M. Boulerice: C'est la raison pour laquelle, à Ottawa, on conserve l'unifolié et la signature de M. Trudeau.

M. Doyon: Non, mais je me souviens, M. le Président, que...

Le Président (M. Filion): Deuxièmement, je ne sais pas si c'est parce que vous avez été absent pendant une partie des débats, mais il existe dans la population une confusion entre les deux chartes en plus de cela et on aurait avantage, un petit peu, à promouvoir celle qui nous est spécifique au Québec.

Mais, en tout cas, je prends note que c'est chez l'Éditeur officiel qu'il faudrait voir.

Je vous remercie. J'ai M. le député de Mille-Îles, M. le député de Saint-Jacques, M. le député de Beauharnois. M. le député de Mille-Î les.

Mesures d'évaluation des interventions

M. Bélisle: Merci, M. le Président. J'ai regardé attentivement la page 14, bien entendu, de votre intervention relativement au nombre important de requêtes qui passent 31 735 en 1985 à une estimation de 43 000. Par conséquent, au lieu d'environ 500 dossiers formels, on a 1000 dossiers. C'est une augmentation de 12 000 requêtes environ pour l'année courante et, en fin de compte, la conséquence c'est la création de 500 dossiers actifs. Je vous écoutais tantôt et vous parliez du pourquoi. C'est là qu'il faut diriger notre esprit, les raisons fondamentales de cette augmentation. Il y a plusieurs raisons qu'on peut donner; entre autres, l'accumulation de dossiers dans des secteurs qui n'étaient pas couverts adéquatement par le passé par votre organisme. Je voudrais savoir s'il y a d'autres raisons qu'on pourrait donner à cela. Est-ce que vous avez pu imaginer quelques-uns des motifs ou des raisons supplémentaires qui pourraient entraîner 12 000 requêtes de plus et 500 dossiers de plus?

M. Lachapelle: D'abord, il faut faire attention au terme "requête". Ce sont des demandes d'information adressées à la Commission des droits de la personne...

M. Bélisle: Je suis d'accord avec vous.

M. Lachapelle: ...qui ne touchent pas nécessairement la Charte des droits et libertés de la personne. Comme je le disais tantôt, cela peut être quelqu'un qui dit: Moi, j'ai été victime de viol. Je voudrais faire une réclamation. Je m'adresse chez vous. Non, il faudrait aller à l'IVAC, c'est là où les victimes d'actes criminels vont pour indemnisation.

M. Bélisle: Je suis entièrement d'accord.

M. Lachapelle: Je dois vous avouer que les intuitions que vous avez me semblent justes.

M. Bélisle: M. le Président, quand je regarde 31 735 requêtes ou demandes d'information adressées à votre organisme en 1985 et qu'elles génèrent en fin de compte 500 dossiers actifs, je me dis: II y a soit une accumulation ou une absence d'information dans un secteur donné plutôt qu'une panique. Quand vous disiez tantôt: II ne faut pas prendre panique, je suis entièrement d'accord avec vous, il n'y a pas lieu de prendre panique, mais il y a certainement une bonne analyse en profondeur qui doit être faite.

Moi, il y a une autre chose qui me tracasse beaucoup, ce sont les mesures de performance de votre organisme. C'est sûr que vous avez beaucoup plus de crédibilité qu'avant, vous êtes beaucoup plus présents. Les gens qui ont des problèmes vont vous voir. Je vois l'augmentation de 1983-1984, 1984-1985 et 1985-1986; 402, 412 et 500 dossiers. C'est une augmentation sensiblement raisonnable pour la même loi. Je me demande si vous avez des données, è la Commission des droits de la personne, qui vous permettent de dire que vos interventions, les dossiers traités, les cas analysés, les cas réglés, les cas publicisés et les poursuites de cour ont entraîné une

amélioration, un maintien - je suis très sérieux dans ma question - ou une dégradation de l'attitude des Québécois face à la discrimination. Vous comprenez notre problème. On a une enveloppe générale et on affecte des fonds à différents programmes et vous êtes un de ces programmes. Je me vois très mal, quand je suis confronté à la page 14 de votre intervention, en venir à la conclusion qu'une des raisons, c'est que les Québécois, pendant l'année courante, à cause de l'existence de votre organisme, sont devenus plus discriminants qu'avant. Selon mon intuition, ce n'est pas vrai, de la façon que je connais les Québécois. Mais j'aimerais savoir si vous avez des mesures concrètes qui vous ont été données quant a la perception que les Québécois ont, parce que tout cela se passe dans le système de valeurs et dans la tête des individus. Je suis discriminant face au handicap d'une personne, face à la couleur d'une personne par rapport à mon schème de valeurs. Vous travaillez sur le schème de valeurs des gens. Je veux savoir si vous avez des mesures d'évaluation sur cela.

M. Lachapelle: D'abord, je voudrais revenir à une première question, car ce n'était pas une affirmation, c'était plutôt dans le style d'une question: Est-ce qu'effectivement, au Québec, il y a plus ou moins de discrimination? Je n'ai jamais prétendu cela et je ne dis pas cela non plus. Ce n'est pas parce qu'on adresse plus de demandes qu'effectivement il y en a plus. Je n'ai pas le compteur de Geiger qui viendrait me dire si cela monte ou descend; je ne suis pas capable de le dire. Il y a des manifestations de temps en temps et on en a vu à un moment donné. Par exemple, on a mis sur la place publique récemment le fait qu'il y avait, dans le logement, des problèmes de discrimination. Bon! Ils existaient probablement avant qu'on les signale aujourd'hui. Peut-être quelqu'un a-t-il allumé une étincelle quelque part et probablement qu'on aura plus de demandes à la commission; seulement cet événement a suscité cela.

Nous n'avons pas non plus de ces instruments. Il serait intéressant d'en développer pour savoir...

M. Bélisle: Ce serait utile au possible.

M. Lachapelle: ...oui, est-ce que l'intervention dans une entreprise, par exemple, qui nous a permis - je prends un exemple: chez Catelli, on a eu récemment une plainte d'inégalité salariale. Après des poursuites judiciaires, après médiation et après de longues discussions, on a effectivement réglé le dossier, je pense, à la satisfaction des femmes qui s'étaient présentées à la commission. Est-ce que cela va arrêter là dans l'entreprise?

M. Bélisle: On ne sait pas.

M. Lachapelle: Est-ce que, dans l'avenir, l'entreprise ne fera pas tout en son possible pour continuer à serrer la vis autrement? Chez son voisin à côté, est-ce qu'on ne dira pas: Prenez vos précautions parce que, sur l'égalité salariale, vous allez avoir des problèmes, soyez plus subtils, peut-être? Je ne sais pas. L'effet peut être cela aussi, mais je ne pourrais pas vous donner ce...

M. Bélisle: M. le Président - c'est une suggestion que je fais - j'essaie d'analyser et de regarder le problème avec vous: il serait peut-être fort utile pour votre organisme, dans le but d'orienter toutes les interventions que vous faites, de les corriger, de les améliorer, de changer vos cibles, de modifier, d'être plus performants, de penser très bientôt à développer des outils de mesure semblables. C'est mon premier point, c'est excessivement important.

Hier, on a eu devant nous l'Office de la protection du consommateur et, avec le temps, avec les années, il a développé... Il peut vous dire: Dans telle industrie où il y avait telle sorte de problème, au bout de cinq ou six ans d'interventions, la on en a...

M. Lachapelle: Vous êtes d'accord avec moi qu'on ne parle pas de la même chose?

M. Bélisle: Non, non, d'accord, mais quand même; toutes choses étant regardées dans des proportions et avec des lorgnettes différentes, je pense qu'il y aurait quelque chose à faire là-dessus.

M. Lachapelle: Je partage tout à fait votre point de vue.

Équité dans le règlement des différends

M. Bélisle: Parfaitl Maintenant, deuxième question, quand je regarde le rapport de 1985 - vous excuserez ma façon de voir les choses, je les vois peut-être avec l'oeil de quelqu'un qui a les deux pieds coulés dans le béton, j'espère que non - à la page 52, on parle d'un congédiement fondé sur l'orientation sexuelle. Je partage, et je pense que la presque-totalité des Québécois partage l'opinion qu'il ne doit pas y avoir de discrimination basée sur l'orientation sexuelle d'une personne. Je lis le résumé technique qui est là: Un homme qui travaillait depuis quelques semaines comme cuisinier dans un restaurant fut très surpris de se faire congédier. Il n'avait reçu aucun reproche sur la qualité de son travail. Le propriétaire lui remet son chèque de salaire et dit: Mon vieux, des gens comme toi, on n'en veut pas ici.

Vous recevez, par conséquent, un appel téléphonique, une requête, une demande

d'information. Il vous donne le nom du restaurant, le nom du propriétaire, il vous donne l'événement, il vous dit exactement les faits, c'est noté dans votre dossier. Vous partez de là et vous faites enquête. Cela passe à un deuxième niveau, on continue: "Les deux parties furent convoquées à une audition au bureau de la commission." Et là les deux parties s'amènent à la commission et le résultat, c'est: Elles se dirent consentantes à régler le litige à l'amiable et, après médiation, le plaignant - celui qui a subi la discrimination - a accepté un montant en argent de 100 $.

Que pensez-vous de cela, vous? Trouvez-vous que... Je ne sais pas, mentalement, même s'il y a un compromis, que c'est légal entre deux parties, quelqu'un qui utilise la Commission des droits de la personne pour obtenir un dédommagement pécuniaire d'une somme totalement ridicule, qui est de 100 $, qui a monopolisé les ressources de l'État, moi, je trouve que c'est une sorte d'aberration. C'est comme si on utilisait la commission pour des fins autres que celles pour lesquelles elle a été prévue. C'est mon côté droit civil ou civiliste qui me fait sursauter quand je vois cela.

Je vais vous donner un autre exemple un peu plus loin, c'est un cas exactement dans te même style, à la page 55: refus de logement à un bénéficiaire de l'aide sociale. Cela se règle, il y a une plainte, des démarches etc. On arrive devant la commission et on s'entend: Je vais te donner une compensation de 400 $. Cela finit toujours par une petite compensation ridicule. On dirait que... L'honneur est sauf et tout le monde est satisfait, tout le monde est content; on a fait notre job. (12 h 45)

M. Marcil: Exactement, dans la même ligne de pensée, j'ai vu un cas comme ça qui m'avait été référé, un cas de logement. La recommandation, en fin de compte, c'était de recevoir des excuses, premièrement, et de lui donner une bouteille de champagne. Cela vous dit quelque chose, ce cas?

M. Lachapelle: Oui.

M. Bélisle: Mieux que ça, dans votre document qui est là...

Mme Trudeau-Bérard: C'était à la demande du plaignant.

M. Lachapelle: Mais c'était à la demande du plaignant.

M. Marcil: C'était à la demande du plaignant. Oui, c'est ça, le plaignant voulait avoir des excuses et une bouteille de Champagne.

M. Bélisle: Si vous le permettez, M. le Président, dans la même ligne, il y a un autre exemple d'un cas qui est relaté au sujet d'un handicapé qui entre dans un restaurant avec son chien. Le type ne veut pas le recevoir. Quinze minutes plus tard, il lui donne une table au fond. Il vient chez vous. Cela cause des frais à tous les citoyens. Il y a un dossier d'enquête, une enquête qui est menée auprès des deux parties. Cela se règle comment"? Le restaurant donne 100 $ et un bon pour souper pour quatre personnes à son restaurant. Ce n'est pas sérieux, M. le Président. Ce n'est pas ça que je veux qu'on obtienne comme résultat de la Commission des droits de la personne.

Peut-être que je suis naïf ou que je pense que les objectifs ou les moyens ne sont pas utilisés. Mais je reviens à ce que je vous disais tantôt. J'aimerais entendre votre réflexion là-dessus. Il me semble que je serais mal à l'aise d'être à la commission et de voir se passer de choses comme ça. Je ne trouverais pas mon travail utile ou drôlement futile.

Le Président (M. Filion): Je suis sûr que vous pourriez... Vous gardez les deux parties de votre qualificatif pour le Journal des débats?

M. Bélisle: M. le Président, je m'excuse de mon commentaire, mais ça me...

Le Président (M. Filion): Non, c'est pour vous. Ce n'est pas grave, c'est juste pour vous que je le mentionnais. Est-ce que vous gardez les deux parties pour le Journal des débats?

M. Bélisle: De mon qualificatif? Le Président (M. Filion): Oui! Bon.

M. Bélisle: M. le Président, je conserve les deux qualificatifs. Je suis ici pour exercer mon droit de parole. M. le Président, je ne le dis pas dans le but de discréditer la commission. On est ici pour essayer d'avoir un échange de leur côté et qu'eux aussi sachent ce qu'on pense. Ce que je dis aujourd'hui, c'est au président de la commission de savoir s'il y en a d'autres qui pensent comme moi dans la société au Québec et si on est en train d'allumer une lumière rouge.

À un certain moment, si on affecte 5 000 000 $ à la Commission des droits de la personne et pour la protection des droits civils au Québec, ce n'est pas dans ce but et dans ce sens que je veux que ce soit utilisé.

Le Président (M. Filion): D'accord, il n'y a pas de problème. M. le président.

M. Lachapelle: J'ai pris vos

commentaires dans l'intérêt des justiciables qui se présentent à la commission et qui veulent obtenir un règlement équitable de leurs différends. Je peux ajouter d'autres exemples à celui qui est mentionné par le député. Récemment, on a réglé le dossier d'une femme immigrante au Québec, victime de harcèlement sexuel, obligée d'avoir des relations avec son employeur. Si elle n'avait pas eu ces relations, elle aurait été dénoncée à je ne sais pas quel organisme et peut-être obligée de retourner dans son pays, alors qu'elle n'était pas encore immigrante reçue . On comprend dans quelle horreur cette femme a dû vivre pendant des années. Le jour où elle a été immigrante reçue, elle est venue à la commission. Elle a obtenu 10 000 $ de dédommagement. Qu'est-ce c'est? C'est sûrement infime pour avoir vécu un enfer pendant ces années.

Si on veut donner suite aux recommandations que vous faites, il faudrait peut-être modifier l'article 81: "La commission doit tenter d'amener les parties à régler leur différend." La commission est là en tant que médiateur. C'est ça, le travail qu'elle fait. Si on veut nous amener à faire de l'arbitrage et à faire plus que ça, nous n'avons pas d'objection. Dans bien des cas, les commissaires regardent les montants et ils disent: Ils ont accepté ça; vous leur avez dit oui. Mais les gens nous arrivent au bureau, en nous disant - ce sont des personnes, victimes de harcèlement racial ou sexuel - tout ce que je veux de la part du mis en cause, c'est des excuses. Je n'en demande pas plus. Je ne veux pas d'autre chose que ça. Je ne veux surtout pas d'argent. Faites que cette personne nous donne des excuses. Des fois, on n'arrive même pas à obtenir des excuses. Dans beaucoup de cas, on a une lettre disant: Oui, effectivement, j'ai eu des propos racistes. J'ai fait telle chose. Je regrette et je m'en excuse. Et c'est fini.

De fait, je pense qu'il y a une philosophie derrière cet article. Ce n'est pas un endroit pour aller récupérer des montants d'argent. Il y a des tribunaux pour ça et on peut y aller. Ce que la charte préconise par cet article, c'est d'essayer de faire en sorte - il y a un aspect pédagogique dans ça - que ce restaurateur accepte dorénavant une personne aveugle avec son chien et dise: Je vais lui donner non pas la place qui est dans le fond parce qu'il peut déranger les gens, mais la table de son choix ou à la table qui est libre. Je pense qu'il y a un élément d'éducation extrêmement important là-dedans.

Moi aussi, en tant qu'ancien avocat civiliste, quand je regarde les montants qui sont là, surtout aujourd'hui avec cette espèce d'inflation des montants devant les tribunaux... S'il fallait qu'on regarde la jurisprudence américaine, ce serait incroyable les montants que des gens pourraient obtenir, par exemple, dans l'avant-dernier cas que je viens de vous mentionner.

La philosophie de la charte est tout autre: amener les parties à régler leurs différends et non pas accorder une compensation équivalente aux dommages subis; c'est autre chose que cela. Si on peut s'inquiéter de voir les si faibles montants d'argent qui sont indiqués dans la jurisprudence, dans ces décisions ou dans les résultats de nos enquêtes, c'est un peu le résultat de tout cela.

Le Président (M. Filion): Si vous me le permettez, dans le même sens que mon collègue, je pense qu'il y a une partie de ces préoccupations, surtout avec l'exemple que vous venez d'ajouter, où cela sonne faux à mes oreilles aussi, le cas de cette dame en particulier et aussi les exemples de mon collègue. Il y a tout le chapitre que j'essaie de retracer des possibilités en ce qui concerne les plaintes pénales. Est-ce que je me trompe?

M. Lachapelle: Oui.

Le Président (M. Filion): Alors, je comprends, d'un côté, qu'on ne peut pas empêcher une personne d'accepter une bouteille de champagne et des excuses. J'ai déjà vu des procédures judiciaires où l'une des principales conclusions de la demande, c'était des excuses. C'est bien qu'on essaie de ne pas tout monnayer, mais, d'un autre côté, surtout avec l'exemple que vous donnez... Le chapitre sur les plaintes pénales, est-ce qu'on pourrait peut-être vous entendre là-dessus? Quelle politique la commission entretient-elle à l'égard des plaintes pénales, dans des cas comme ceux qui sont soulevés par le député de Mille-Îles et aussi dans les cas que vous soulevez?

Mme Trudeau-Bérard: En ce qui concerne les plaintes pénales, cela n'a pas tellement été utilisé, effectivement, d'abord parce qu'il y a un problème. Vous savez que le degré de preuve n'est pas le même. C'est au-delà du doute raisonnable. Je n'ai pas de leçon à vous donner à ce point de vue. Donc, la difficulté en matière de discrimination, c'est d'arriver à un niveau de preuve aussi fort.

D'autre part, il y a eu à la commission, au départ, une philosophie qui était de n'utiliser le Code pénal que dans des cas extrêmes, la commission ayant basé sa philosophie sur les principes de la charte qui mettaient l'accent sur la médiation.

Par contre, lorsqu'on a fait l'enquête sur les taxis, on s'est penché à nouveau sur cette question. Pour nous, il y avait là des violations tellement flagrantes et tellement publiques qu'il nous apparaissait important de poser des gestes du côté pénal. C'est ce que

nous avons fait. Nous avons porté des plaintes envers des compagnies de taxi et nous avons eu gain de cause dans trois cas.

Le Président (M. Filion): Je vais redonner la parole, s'il le désire, à mon collègue. Est-ce qu'il n'y a pas des cas de discrimination?

Mme Trudeau-Bérard: Je dois dire que c'est en appel que l'on a gagné.

Le Président (M. Filion): D'accord.

Mme Trudeau-Bérard: Parce qu'on a été...

Le Président (M. Filion): Oui, j'ai su. Mme Trudeau-Bérard: ...tenaces.

Le Président (M. Filion): Vous faites bien. Il arrive toutes sortes de choses en appel, d'ailleurs.

Écoutez, en deux mots, je comprends la politique, je comprends également l'article 81 et tout cela. En tout cas, on va probablement y réfléchir puisque le temps achève. Je pense qu'il y a des cas de discrimination tellement répugnants. Je comprends également, comme beaucoup de mes collègues, que le fardeau de la preuve n'est pas le même en droit pénal. Par contre, je dois vous dire que le droit pénal, comme tout le reste, a évolué et que ce n'est pas parce qu'il y a une personne seule qui témoigne contre cinq autres personnes que la preuve hors de tout doute raisonnable ne peut pas être atteinte, au contraire. Je comprends que ce n'est pas la même chose qu'un règlement en argent, etc., mais je dois vous dire qu'avec les exemples qu'on a eus... Le vôtre, M. le président, celui que vous avez donné, m'a particulièrement frappé. Une femme a été tenue dans un état que je ne qualifierai pas. On faisait la même chose dans les camps de concentration. Elle a obtenu 10 000 $, c'est son affaire, c'est parfait'. Elle aurait obtenu 50 $! Elle les a acceptés.

C'est le rôle de médiation de la commission et je suis d'accord. Par contre, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de développer une politique de dépôt de plaintes pénales un peu plus... D'ailleurs, c'est une infraction au Code criminel, l'exemple que vous donnez, d'obtenir des relations sexuelles par menaces, intimidation.

M. Lachapelle: C'est aller plus loin que le harcèlement.

Le Président (M. Filion): C'est un genre de viol, finalement. Même si on ne porte pas cette plainte qui est peut-être radicale, il demeure qu'en vertu de la charte il y a des plaintes pénales qui peuvent être déposées - sauf erreur, vous me corrigerez - par la commission. Notre temps achève. Je vais redonner la parole au député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Je ne veux pas consommer beaucoup de...

Le Président (M. Filion): Quant à moi, ces exemples me frappent beaucoup.

M. Bélisle: J'ai souligné cela. C'est une vision personnelle que vous partagez, que d'autres membres de la commission partagent, j'en suis sûr, que le président, la vice-présidente et que beaucoup de membres de cet organisme doivent partager.

Je vais juste vous donner un exemple d'une chose qui est arrivée aux États-Unis. À Las Vegas, une personne était propriétaire d'un casino. Cette personne avait un passé assez chargé. C'était connu qu'elle était une dame qui offrait ses services à toute personne qui en faisait la demande. Au bout de douze ans - c'est un peu perdu - un journaliste a fouillé cela et c'est sorti en première page d'un grand quotidien de Las Vegas: "ex-tenancière de, etc., et propriétaire de tel casino." Ce n'est pas du harcèlement sexuel. Ce n'est pas contraindre une personne contre son gré à faire quelque chose. C'est simplement relever quelque chose qui s'est passé dans le passé de quelqu'un. Savez-vous combien la cour américaine lui a accordé? 1 000 000 $ US en dommages seulement pour cela.

Quand je vois cela - je sais qu'il y a des critères différents, je comprends tout cela - je me dis: Peut-être que la médiation est excellente. Mais la commission devrait regarder attentivement si cela ne vaudrait pas mieux - peut-être pas des poursuites pénales parce que c'est surtout nominal, les montants sont tellement limités - que, dans certains cas, on aille jusqu'au bout du processus judiciaire et qu'on y aille pour la valeur de ce que cela représente réellement parce qu'ultimement on compense toujours en dollars, mais pas pour 100 $ ou pour des principes semblables. Pas prendre 5 000 000 $ de budget, mettons qu'il y a 2 500 000 $ pour la promotion et la publicité et tu divises par 500, cela te fait peut-être 5000 $ par cas d'étude. Je pense qu'il y a un calcul et une révision fondamentale des objectifs qui doivent être faits dans ce sens. En tout cas, c'est mon opinion.

Mme Trudeau-Bérard: Si vous le permettez, pour clarifier au sujet des exemples que vous apportez, je pense que, dans tous ces exemples, ce sont des règlements qui interviennent au tout début de l'enquête ou pendant l'enquête. Ce ne sont pas, à proprement dit, des règlements qui interviennent une fois que l'enquête est

terminée et qu'il y a un rapport de l'enquêteur et que la commission s'est prononcée à savoir si le dossier est fondé ou pas. À ce moment, il y a une médiation qui intervient. Nous donnons un mandat de médiation à ce moment. Mais, très souvent, dans les cas que vous avez cités, ce sont des règlements qui interviennent au tout début, dans les premiers temps que la plainte est déposée. Du fait qu'il y a une plainte à la commission, les parties se rencontrent et souvent le mis en cause, voyant, réalisant ce qu'il a fait, fait une proposition. On a le même malaise que vous. On en a souvent discuté, je dois dire, parce qu'à ce moment on ne fait que constater.

On n'a pas, nous, à prendre de décision. C'est différent lorsqu'on parle de médiation proprement dite de la commission une fois que la plainte a été déclarée fondée. À ce moment, nous avons des critères qui sont basés sur la jurisprudence, Nous conseillons les plaignants quand ils nous demandent: Écoutez, quelle est ma position maintenant que la plainte est fondée? Qu'est-ce que je peux réclamer, etc? II reste toujours, dans une période de négociation ou une médiation, que c'est à la partie plaignante de décider ce qu'elle va accepter en fin de compte.

Le Président (M. Filion): Oui.

M. Bélisle: Une minute.

M. Doyon: Cela relève de l'article 81.

Le Président (M. Filion): On retient vos exemples. M. le député de Shefford, très brièvement parce qu'on a déjà dépassé notre temps.

M. Paré: Oui. Très rapidement.

Le Président (M. Filion): Est-ce qu'on peut prendre quelques minutes additionnelles, MM. les membres de la commission?

M. Doyon: Peut-être deux minutes. Le Président (M. Filion): Oui.

M. Doyon: J'airnerais peut-être donner un cas un peu spécial. On va comprendre le dilemme dans lequel on peut se trouver dans certains cas. Peut-être que mon collègue veut y arriver aussi.

M. Paré: Je vais aller exactement dans le sens contraire. Il ne faut surtout pas toucher à l'article 80. Si on est ici pour passer notre perception, je pense que vous n'avez pas accroché sur la bonne affaire. C'est un droit qu'on va réclamer à la Commission des droits de la personne, n'oublions pas cela, qu'on va demander à la commission de faire exercer. C'est un droit; ce n'est pas un montant, ce n'est pas une compensation. Vous accrochez sur l'à-côté. Le bonhomme qui est allé au restaurant et qui voulait entrer avec son chien, il ne voulait pas avoir quatre billets et quatre repas payés. C'est du surplus, c'est un cadeau, c'est un ajout, c'est la cerise sur le gâteau. Ce qu'il voulait, c'est pouvoir aller au restaurant avec son chien; maintenant, il peut. Le reste ne devrait peut-être même pas être inclus dans le rapport. En fait, cela a été rajouté pour montrer que, finalement, le restaurateur non seulement a compris - et à l'avenir, il va l'accepter, il va accepter tous les autres avec leur chien - mais il l'a tellement accepté qu'il donne une compensation. On devrait être content des 100 $ au lieu de les ridiculiser. C'est tellement vrai que c'est peut-être même - je passe entre guillemets ce que je dis - une façon d'acheter le silence du gars qui vient de gagner pour que la publicité qui sorte sur le restaurant ne soit pas qu'il a refusé qu'une personne avec un handicap entre. En lui donnant un repas, finalement, ce qui va sortir, c'est que le gars a gagné quatre repas. C'est extraordinaire. C'est ce qu'il faut dire et arrêtons de regarder la bouteille de champagne et les "giddy giddy" à côté. La commission est là pour faire respecter des droits. La personne peut maintenant aller au restaurant et elle n'est pas cachée dans le fond à côté des toilettes. Elle peut manger avec tout le monde. Le droit. Félicitations, bravo à la commission. Par l'article 81 et la médiation, la personne peut maintenant aller manger dans un restaurant avec son chien. Elle est égale à tout le monde. C'est cela, le rôle de la commission, que tous aient des droits égaux. Donc, on a réussi dans ce cas-là.

Dans l'autre cas du restaurant, c'est la même chose. On peut bien rester sur le 100 $ et essayer de ridiculiser ce montant qui n'est pas important, sauf que ce n'est pas cela qui est important. C'est que la commission vient de faire accepter par un restaurateur l'embauche égale, en vertu de la charte qu'on s'est donnée et dont on est tous fiers. Ce n'est pas l'à-côté et le surplus qu'on donne à la personne. La personne a enfin acquis son droit.

Je ne sais pas si vous étiez là au moment où on a dit qu'une des difficultés de la commission est de faire changer les mentalités et de faire accepter notre charte, de la faire connaître et de la faire accepter. Si on veut faire changer les mentalités, il faut qu'il y ait des gens comme cela qui aillent se plaindre et il faut qu'il y ait des gens qui reconnaissent tellement qu'ils ont eu tort et qu'ils n'ont pas fait respecter notre charte qu'ils donnent même une compensation à la victime, à cause de leurs gestes, à eux autres.

Je dis qu'il ne faut surtout pas changer

Particle 81 et les gestes qui sont là, les petits montants qu'on appelle excuses, bouteilles de champagne, 100 $ ou 400 $, ce n'est pas ce qui est important. Cela, c'est la preuve de la reconnaissance de la culpabilité de la personne qui n'a pas appliqué la charte.

Le Président (M. Filion): Avec votre permission, que faites-vous dans le cas de l'immigrante?

M. Paré: Dans le cas de l'immigrante, je pense que ce n'est pas la même personne qui va recommencer. Je pense que la commission a mis l'éclairage sur un facteur. Maintenant, la victime a des droits au civil, au pénal. C'est à elle...

Une voix: M. te Président, peut-on...

Le Président (M. Filion): Juste une seconde. C'est qu'on a dépassé... Vouliez-vous prendre !a parole? Écoutez, de toute façon, je pense que nos invités peuvent constater dès maintenant la chaleur qui va caractériser nos débats à huis clos. Je vaudrais...

M. Bélisle: M. le Président, je viens juste d'apprendre, de la part du député de Shefford, que c'est la position, ce qu'il nous a donné ce matin, officielle du Parti québécois?

Le Président (M. Filion): M. le député de Mille-Îles, s'il vous plaît!

M. Paré: Je voudrais ajouter ceci. À la question que vous m'avez posée hors micro: Est-ce la position officielle du Parti québécois? je n'ai pas dit oui, parce que je ne peux pas répondre pour mes collègues. J'ai dit: J'espère, parce que nous, quand on se bat pour un droit, comment pourrions-nous mettre...?

M. Bélisle: M. le Président, je vais demander un droit de réplique là-dessus parce que je vais lui donner l'autre côté de la médaille.

Le Président (M. Filion): Écoutez, chers collègues, M. le député de Mille-Îles, M. le député de Shefford, je vais vous ramener à l'ordre, d'autant plus que nous avons des invités. Alors, donc...

M. Bélisle: Mais c'est très amical, M. le Président.

Le Président (M. Filion): C'est très bien, mais alors cela vous a permis...

M. Bélisle: Je respecte les droits de la personne du député de Shefford.

Le Président (M. Filion): Je pense que vous êtes à même de constater que nous aurons donc matière à exercer notre mandat l'an prochain. Nous allons avoir matière immédiatement, d'ailleurs, à le circonscrire, car le but - je le rappelle à mes collègues et je vous le rappelle - de l'exercice de ce matin était de nous aider à déterminer quels seront les volets de notre mandat pour l'an prochain. La matière ne manquera pas. Les documents que vous avez déposés et les propos que vous avez tenus sauront très bien alimenter cette réflexion, cette recherche.

Permettez-moi, en terminant, au nom de tous les membres de la commission, de vous remercier et, encore une fois, de vous féliciter pour le sérieux et la franchise de vos propos de ce matin, devant la commission. Merci.

Je rappellerais aux membres de la commission que nous nous revoyons à 15 heures, cet après-midi, à la même salle, pour une séance de travail entre nous. Je vous remercie.

M. Lachapelle: Merci. (Fin de la séance à 13 h 6)

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