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(Quinze heures quarante-cinq minutes)
Le Président (M. Filion): À l'ordre, s'il vous
plaît! Bienvenue à la commission des institutions. D'abord je
voudrais souhaiter la bienvenue à M. le premier ministre, ainsi qu'au
chef de l'Opposition. Je rappellerais le mandat de la commission qui est de
procéder à l'étude des programmes 1 et 2 des
crédits budgétaires du ministère du Conseil
exécutif pour l'année financière 1986-1987, à
l'exception de l'élément 3 du programme 2 qui sera
étudié demain, cet élément 3 étant les
Affaires amérindiennes et inuit.
D'autre part, il est actuellement 15 h 45 et je crois comprendre
qu'à la suite d'une entente entre les deux partis cette commission
siégera jusqu'à 18 h 30, d'une part, et que l'étude des
crédits se fera en bloc et non pas élément par
élément.
Cela étant dit, je comprends également que le premier
ministre n'a pas de remarques préliminaires à adresser aux
membres de la commission. Cependant, je l'inviterais, s'il le juge à
propos, à nous présenter les gens qui l'accompagnent dans la
défense de ses crédits, cet après-midi.
M. Bourassa: Oui. J'ai mon personnel politique: M. Rémi
Bujold, chef de cabinet, M. Denis Ricard, chef de cabinet adjoint, M. Ronald
Poupart, directeur des communications, M. Fernand Lalonde, un de mes
conseillers et tous ceux qui seront impliqués dans les dossiers
particuliers.
Le Président (M. Filion): D'accord. J'inviterais
maintenant le chef de l'Opposition, s'il désire le faire, à
adresser quelques remarques préliminaires.
Remarques préliminaires M. Pierre Marc
Johnson
M. Johnson (Anjou): M. le Président, la tradition veut que
le ministre, en l'occurrence le premier ministre, fasse un exposé
général. Je crois comprendre qu'il y a renoncé, qu'il
tentera probablement de répliquer à mon exposé à
l'occasion d'une série de questions. Je voudrais lui dire simplement
qu'il serait normal qu'il fasse d'abord un exposé et que j'intervienne
par la suite. Je comprends donc, dans la mesure où il m'a dit qu'il
entendait répondre de façon très précise et
brève à mes questions, que c'est ce qu'il fera.
M. le Président, l'étude des crédits du
ministère du Conseil exécutif a toujours revêtu un
caractère assez particulier d'autant plus que les crédits de ce
ministère sont étudiés en détail devant cette
commission, mais en fonction, par exemple, de la question de la promotion des
droits des femmes, des Affaires intergouvernementales canadiennes ou encore,
à l'égard des affaires amérindiennes, le SAGMAI.
Cependant, mes questions aujourd'hui porteront essentiellement au cours de la
présente séance de notre commission sur des sujets qui sont
reliés aux fonctions du premier ministre en tant que chef de
l'exécutif.
Même si le programme sera discuté plus tard par cette
commission, vous me permettrez, cependant, de commencer par quelques mots qui
touchent nos frères amérindiens et inuit. En effet, je crois
qu'il est important, ne serait-ce que par respect à l'égard des
nations autochtones, que le premier ministre demeure le principal interlocuteur
des nations autochtones du Québec, même si, comme le premier
ministre l'a fait, il a nommé un ministre responsable de ce dossier. En
effet, les relations entre le gouvernement du Québec et les nations
autochtones ont comme base la reconnaissance des nations autochtones par les
autres communautés formant le peuple québécois. C'est
pourquoi les chefs de ces nations doivent d'abord et avant tout pouvoir
s'adresser au premier ministre du Québec. D'autre part, je voudrais
rappeler que la motion qui a été adoptée par
l'Assemblée nationale le 20 mars 1985 demeure toujours, quant à
nous, une base valable pour aborder la question des droits des autochtones et
leur développement. J'espère que dans ce dossier le premier
ministre et son gouvernement feront preuve de rigueur.
M. le Président, dans ces commentaires généraux, le
premier ministre ne sera pas surpris de m'entendre lui faire un certain nombre
de reproches, étant donné que la période de questions
n'est pas exactement le meilleur des forums pour ce faire, me voyant
constamment fermer le clapet au moment des questions additionnelles, le premier
ministre pouvant cependant profiter de la latitude qui est la sienne pour
répondre comme bon lui semble à toutes les questions que je
pourrais lui poser.
Nous avons devant nous environ deux heures et demie. Le premier ministre
me
trouvera peut-être dur sur un certain nombre de sujets, mais je
veux simplement le rassurer en lut disant qu'à la fin de mon
exposé j'ai une série d'une bonne quarantaine de questions qui
touchent à un certain nombre de sujets que j'ai
énumérés avant de commencer cet exposé. Elles sont
relatives au processus du libre-échange - je ne parle pas des contenus,
je pense que nous aurons d'autres occasions d'en parler dans les semaines qui
viennent à la question des comités de bénévoles,
aux relations entre le bureau du premier ministre, l'exécutif et la
haute fonction publique, aux directives du premier ministre en matière
de conflits d'intérêts, à l'Ordre national du Québec
et au dossier jeunesse. Si le premier ministre y agrée, j'aimerais qu'on
puisse consacrer la dernière heure ou, au moins, les dernières 45
minutes de notre séance à discuter du dossier jeunesse, en
particulier.
M. le Président, après quatre mois au gouvernement, nous
constatons que ce gouvernement a fait preuve à certains égards
d'un relâchement que je qualifierais dans certains secteurs de dangereux,
tant au niveau de la forme que du fond des dossiers. La forme étant
à la politique et aux institutions démocratiques ce que le
langage non verbal est à la conversation, il m'apparaît que la
forme que prend l'intervention gouvernementale véhicule un message.
On a trop souvent utilisé des faux-fuyants ou des
idéologies pour éviter les vrais débats sur des
décisions ou des indécisions, particulièrement devant
l'Assemblée nationale. Il y a deux dossiers, évidemment, qui
illustrent particulièrement ce relâchement du gouvernement sur la
forme et le fond; c'est, évidemment, la loi 101 et la clause
"nonobstant". À l'égard de cette dernière, permettez-moi
de rappeler que c'est par la voie d'une entrevue avec un journaliste par un
ministre que les Québécois ont appris que le gouvernement du
Québec acceptait une partie importante de la Loi constitutionnelle de
1982. Il faut dire également, car c'est absolument invraisemblable, que
cette décision du gouvernement avait été
précédée d'une initiative individuelle du ministre du
Revenu qui retirait du projet de loi 2 la clause "nonobstant" qui y figurait,
étant donné que ce projet de loi avait été
élaboré par le précédent gouvernement et
modifié quant à certains de ses paramètres sur le plan de
la fiscalité lors de la mini-session du mois de décembre.
Tout cela, donc, avant même que nous ayons une décision
gouvernementale sur un sujet aussi important. On était en mesure de
s'étonner quelque peu, ce que fit, d'ailleurs, le principal conseiller
constitutionnel du gouvernement, le professeur Léon Dion, en marquant sa
désapprobation, notamment sur la forme, par son départ.
Dans le cas de la non-application de la loi 101, le gouvernement prend
prétexte d'une cause pendante devant la Cour d'appel pour ne pas
énoncer une politique linguistique ce qui a pour effet,
évidemment, de créer et d'entretenir, dans certains cas, une
confusion autour de ce sujet délicat et néanmoins fondamental
à l'égard des acquis de la population francophone du
Québec. Dans ce dossier, également, le gouvernement évite
les débats en jouant, d'une part, sur des perceptions, sans compter le
recours constant par le Procureur général et la
vice-première ministre à des demi-vérités,
notamment quand ils affirment que celui qui vous parle alors qu'il était
Procureur général ne prenait pas de poursuites, ce qui est faux.
Celui qui était Procureur général à l'époque
prenait des poursuites. Il accordait, c'est vrai, des délais, mais
après inscription des causes devant les tribunaux.
Relâchement aussi autour de la façon dont on traite
certains dossiers. Par exemple, on a vu le ministre du Revenu signer un
décret, faire annoncer une décision par un fonctionnaire et
blâmer l'ancien gouvernement pour prélever 250 000 000 $ de
nouveaux impôts sur le tabac, la bière et l'essence.
Il y a aussi, par une annonce le jeudi saint, à la veille du
congé pascal, l'abandon partiel du principe de l'universalité
d'accès aux services de soins dentaires, ce qu'on appelle maintenant
l'Impôt sur les enfants. Sans compter ces définitions
innovatrices, venant de la ministre responsable, du concept
d'universalité dans notre système et qui ne correspondent
absolument pas à ce que nous avons pu recenser dans la documentation
moderne et occidentale sur ces questions-Relâchement aussi dans la
façon dont le gouvernement traite un peu avec la fonction publique. Je
veux parier, bien évidemment, de la façon quelque peu
cavalière avec laquelle la vice-première ministre se livre
à des foires d'empoigne qui, pour le moins, manquent
d'élégance avec des hauts fonctionnaires sur la place publique.
Mais, je veux aussi parler d'une espèce d'attitude de table rase que ce
gouvernement utilise un peu partout à l'égard de la haute
fonction publique et à l'égard des conseils d'administration des
sociétés d'État. Des personnes compétentes sont
écartées et l'attitude partisane qui a été
adoptée par le gouvernement et certains de ses ministres pourrait briser
très injustement un certain nombre de carrières de hauts
fonctionnaires qui ont toujours été loyaux envers l'État
québécois.
Relâchement aussi quant aux directives. J'ai eu l'occasion de le
mentionner et mon collègue, le député de Lac-Saint-Jean,
également: on n'assiste pas simplement à un ajustement des
anciennes directives du gouvernement, mais, vraiment, à un retour
en arrière par une formule innovatrice, mais qui nous
ramène quelques années en arrière, en particulier autour
du concept de la divulgation des avoirs des ministres, ce qui nous
apparaît un accroc assez sérieux à la transparence dont
doit faire preuve le gouvernement.
L'implication des citoyens, par ailleurs, dans les débats
importants de notre société, la concertation sectorielle, la
concertation régionale subissent aussi des reculs importants. Ce sont
maintenant des comités de non-élus, qui ne sont pas
représentatifs de la population, qui sont en train de remplacer les
débats qui normalement devraient être faits à
l'Assemblée nationale ou au sein de la société
québécoise. Qu'on me comprenne bien, j'ai beaucoup de respect
pour la plupart de ces gens dont je connais les noms et j'en connais un certain
nombre aussi personnellement depuis plusieurs années. Mais je crois que
le caractère homogène de ces comités, leur
caractère non représentatif de l'ensemble des couches de la
société, la largeur des mandats dont ils disposent et le
rôle d'influence considérable qu'ils auront à jouer peuvent
nous amener à nous questionner sur une attitude à l'égard
du respect des élus qu'on retrouve à l'Assemblée
nationale. Cela peut nous amener aussi à nous questionner sur ce que
seront dans notre société, pour les années à venir,
les grands forums d'échanges autour des enjeux majeurs qui nous
guettent, notamment celui du libre-échange pour ne prendre que
celui-là. Tout cela au profit d'une attitude qui semble malheureusement
dominée par l'idéologie et une certaine vision de la
concentration du pouvoir entre les mains d'un groupe très
spécifique de la population.
Avec toutes les coupures qui leur tombent sur la tête, par
ailleurs, le développement des régions est de toute
évidence en péril. On n'a qu'à penser aux effets qu'auront
les coupures à Radio-Québec, dans les universités, les
constituantes de l'Université du Québec, en particulier, sans
compter l'Université de Sherbrooke, le Fonds de développement
régional qui n'est pas coupé de 6 000 000 $ - cela,
c'était la proposition du ministre -mais qui est coupé de 23 000
000 $, PECEC, le reboisement des forêts, l'agriculture, le transport,
sans compter qu'il arrive même que des considérations de nature
purement partisane viennent teinter des dossiers économiques. Je pense
ici au transfert sur la Côte-Nord d'un projet de pépinière
qui devait normalement s'établir au Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Ce relâchement semble aussi affecter une certaine vision
intégrée de la défense des intérêts du
Québec. Évidemment, je pense à la reconnaissance sans
débat, sans garantie aucune, d'une partie importante du "Canada Bill",
mais je pense également à cette volonté de cesser les
activités de placement dans le secteur de la main-d'oeuvre alors que ce
champ d'activité a fait l'objet de revendications constantes depuis 25
ans au Québec. Car le Québec a toujours recherché
l'exclusivité en matière de main-d'oeuvre, la politique de
placement étant un des éléments essentiels d'une politique
de main-d'oeuvre. (16 heures)
Le fait, par ailleurs, que le premier ministre, tout au moins en
apparence, exige moins que l'Ontario et l'Ouest canadien quant au rôle du
Québec dans les négociations sur la libéralisation des
échanges du Canada avec les États-Unis témoigne à
nos yeux également de ce type de relâchement.
Quant aux promesses, je ne veux pas revenir trop longuement sur
l'élection, le verdict a été clair et nous travaillerons
à changer ce verdict d'ici trois ou quatre ans. Mais je voudrais
simplement dire que nous avons eu l'occasion de qualifier les promesses du
gouvernement d'irresponsables lors de l'élection. Il tente aujourd'hui
de faire porter, de façon systématique, sur l'ancien gouvernement
la responsabilité de sa propre irresponsabilité. Je ne veux pas
revenir sur le débat, entre autres celui "qui n'a pas eu lieu. Ce
débat, d'ailleurs, qui est devenu pour le premier ministre une impasse
non seulement budgétaire, mais politique, c'est celui de l'inexistence
d'une marge de manoeuvre de 600 000 000 $, qu'il s'affaire» sans doute en
ce moment à construire à coups d'impôts anticipés ou
de taxes anticipées dont nous entendrons parler dans les jours qui
viennent, et espérons-le, pas jeudi soir.
Il est temps, cependant, que le gouvernement prenne ses
responsabilités, particulièrement envers les jeunes à qui
il a promis la lune. Le premier ministre, je crois, est responsable du dossier
des jeunes. Il doit se souvenir de certaines de ses promesses. Je me permets de
lui rappeler quelques faits. Au lieu d'améliorer le régime des
prêts et bourses, comme on le disait dans la propagande du Parti
libéral, le premier ministre nous a annoncé, par son
président du Conseil du trésor, des coupures dans le
système des prêts et bourses. Les jeunes assistés sociaux
de moins de 30 ans attendent toujours la parité inconditionnelle, mais
il semble que la parité promise va devenir de plus en plus
conditionnelle.
Les coupures de postes permanents et occasionnels dans la fonction
publique frappent particulièrement les jeunes et on attend toujours les
recettes magiques qui vont donner du travail à nos jeunes
chômeurs. J'espère, au moins, que ces préoccupations font
l'objet des études d'un des comités du premier ministre. Quant
aux jeunes qui veulent se trouver un emploi dans les régions, il est
évident qu'avec les
coupures que celles-ci viennent de subir il est inutile de penser que
l'avenir s'ouvre pour eux et pour elles dans les régions.
Jusqu'à ce jour, donc, le gouvernement a fait preuve, dans bien
des dossiers, de partisanerie, y compris dans des dossiers de portée
économique. Dans les mois qui viennent, deux dossiers primordiaux
attendent le Québec: la libéralisation des échanges et la
négociation constitutionnelle. J'ose espérer que, dans ces deux
dossiers, les intérêts du Québec prévaudront sur la
partisanerie et l'idéologie, mais surtout et aussi que les vrais
débats pourront se faire là où ils doivent se faire dans
la société et que les comités de non-éius ne
remplaceront pas l'Assemblée nationale.
Au cours de notre séance, M. le Président, j'aborderai
donc, si le premier ministre en convient, le plus rapidement possible et avec
beaucoup de questions, les dossiers touchant la négociation sur la
libéralisation des échanges Canada-États-Unis, sur le
processus encore une fois plutôt que sur le contenu, les relations entre
le gouvernement et la haute fonction publique, les directives aux membres de
l'exécutif qui concernent les conflits d'intérêts et les
intentions du gouvernement en ce qui concerne les jeunes pour lesquels
j'aimerais, comme je le disais, que nous conservions au moins quarante-cinq
minutes, sans compter les comités de bénévoles qui ont
été formés par le gouvernement. Je voudrais que nous
puissions consacrer sur ces dossiers le temps que le premier ministre pourra
nous accorder. J'ai plusieurs questions à lui poser et, étant
donné le peu de temps que nous avons, j'apprécierais au plus haut
point que ses réponses soient concises, précises et
brèves, comme il sait pouvoir le faire, bien qu'il ne pratique pas ce
sport de temps-ci à l'Assemblée nationale. Merci.
M. Robert Bourassa
M. Bourassa: M. le Président, je voudrais féliciter
chaleureusement le chef de l'Opposition pour le ton très posé et
très serein avec lequel il aborde cette discussion. J'ai pensé
laisser parler d'abord le chef de l'Opposition. D'abord, nous sommes
déjà serrés par le temps et nous voulons en consacrer une
partie importante à la question des jeunes. J'ai pensé le laisser
parler d'abord de manière que je puisse rectifier certains faits - je
m'attendais à devoir le faire - et aborder immédiatement les
questions et les réponses que j'essaierai de donner, comme il le
souhaite, de la façon la plus concise possible.
Il n'y a pas le moindre doute dans notre esprit, pour me
référer à ses premiers propos, que le cas de SAGMAI
restera sous la responabilité du premier ministre. J'ai demandé
au ministre responsable des mines de s'occuper du dossier en collaboration avec
moi, étant donné qu'il connaît très bien ce dossier.
Sûrement que mon bureau sera toujours prêt à recevoir toutes
les représentations qui pourront être faites par les nations
autochtones. Je dois dire que, depuis que nous sommes élus, les
relations, à ce jour, semblent se dérouler de façon
très cordiale et très efficace. D'ailleurs, demain, le ministre
responsable et moi-même, si je peux le faire, serons ici pour parler de
cette question.
Le chef de l'Opposition a parlé de plusieurs autres questions. Je
n'y reviendrai pas longuement parce que je crois y avoir déjà
répondu. Sur la loi 101, je crois que j ai donné mon point de
vue. Le programme du parti est connu. Je suis obligé, encore une fois,
simplement, de dire au chef de l'Opposition que, à une modalité
ou à une nuance près, lui-même, à 129 reprises, a
admis qu'il fallait attendre le jugement de la Cour d'appel. La poursuite a
été prise avec des frais impliquant le gouvernement et les
contribuables, mais ce qu'il faut retenir, l'essence même de l'attitude
du chef de l'Opposition quand il était ministre de la Justice,
c'était d'attendre le jugement de la Cour d'appel. Je pense bien que
c'était l'objectif: quand il accordait des délais par l'entremise
de son procureur, il voulait attendre le jugement de la Cour d'appel. Je le
comprends et je suis d'accord avec lui parce que nous considérons
qu'arriver à l'Assemblée nationale et soulever encore tout le
débat linguistique avant le jugement de la Cour d'appel, cela pourrait
inutilement susciter des affrontements, dans un sens ou dans l'autre - j'essaie
d'être très prudent dans mes commentaires sur les jugements,
étant donné la distinction entre le pouvoir judiciaire, le
pouvoir exécutif et le pouvoir législatif - étant
donné que le jugement pourrait avoir une influence sur ces
débats.
Alors, nous sommes d'accord, les deux partis, du moins dans la mesure
où le chef de l'Opposition est impliqué. Je crois bien que c'est
partagé par une majorité de son caucus, mais nous sommes
d'accord, les deux partis, sur cette question, pour attendre le jugement de la
Cour d'appel. Dans un cas, on prend des poursuites, on accorde le délai;
dans l'autre cas, étant donné que le jugement doit être
rendu d'ici quelques semaines, quelques mois au maximum, on attend le jugement.
Quant au reste, les politiques sont semblables pour ce qui a trait à la
question des poursuites dans le cas de l'affichage.
Pour ce qui a trait à l'aspect fiscal qu'a abordé le chef
de l'Opposition, j'ai dit à plusieurs reprises et je le
répète - il reste 48 heures - que, si l'Opposition était
capable de nous démontrer qu'elle n'avait pas prévu dans son
budget... Je comprends que le chef de l'Opposition, et je ne lui en tiens
pas
rigueur, n'est pas plus familier qu'il le faut avec toutes ces questions
de finances publiques; cela, je le comprends. Je me souviens du débat
à CKAC où, malheureusement, il avait eu un blanc de
mémoire sur l'augmentation des revenus pour 1986-1987. Je ne veux pas
rappeler de mauvais souvenirs au chef de l'Opposition, mais c'est un fait que,
dans ces questions, il est peut-être moins familier que dans d'autres
questions. Mais je suis obligé de lui dire que, dans les
prévisions de 1986-1987, son gouvernement avait prévu les
augmentations qui ont eu lieu au mois de janvier. Si l'Opposition avait
été capable de démontrer que ce n'était pas le cas,
que ce n'était pas inclus dans les revenus - si elle avait
été capable de le faire, elle l'aurait fait - nous nous
étions engagés à retirer ces augmentations. Donc,
c'était prévu, cela faisait partie de l'héritage fiscal et
financier qui nous a été laissé par l'ancien
gouvernement.
Sur un autre point, M. le Président, je trouve que le chef de
l'Opposition va très vite quand il parle d'un impôt sur les
enfants. Je crois qu'il pourrait avoir la face un peu longue, le soir du
budget, si, intérieurement, il souhaite cet impôt pour des fins
électorales. Je crois que c'était prématuré pour le
chef de l'Opposition...
M. Johnson (Anjou): Vous allez retraiter.
M. Bourassa: M. le Président, je crois que le chef de
l'Opposition devrait prendre connaissance des documents de Mme
Thérèse Lavoie-Roux. La ministre de la Santé et des
Services sociaux a dit qu'il n'y avait que des hypothèses qui
étaient soumises et qu'aucune décision n'avait été
prise sur le moyen fiscal qui serait utilisé pour compléter le
montant des coupures avec l'objectif visé. On visait un objectif de 22
000 000 $. Le montant des coupures, on le verra dans le budget; il a
été à toutes fins utiles rendu public. Donc, il y avait un
écart et il y avait là pour combler cet écart plusieurs
hypothèses fiscales qui étaient considérées.
Conclure, comme le fait le chef de l'Opposition, que ce sera un
impôt sur les enfants, je crois que c'est au moins
prématuré. Il n'y avait aucun engagement de la ministre
responsable sur la modalité définitive qui serait choisie. Il y a
eu simplement différentes hypothèses qui ont été
soumises, comme le ministre des Finan- ces, dans son document du 5 mars,
abordait toute une série d'hypothèses sur différentes
modifications fiscales. Ce n'est pas parce qu'on émet certaines
possibilités qu'automatiquement cela devient une politique
définitive. Je crois que le chef de l'Opposition peut faire une
distinction entre l'hypothèse... D'ailleurs, lui-même l'a fait
à plusieurs reprises et plusieurs de ses anciens collègues;
lui-même quand il partait d'un ticket modérateur, je crois qu'il
parlait de cela comme d'une hypothèse sujette à discussion. II a
reculé, d'ailleurs, avant les élections sur cette question. On
l'a accusé d'avoir reculé, mais il aurait pu dire que
c'était une hypothèse qu'il émettait.
Alors, pourquoi lui aurait-il le droit d'émettre des
hypothèses et la ministre de la Santé et des Services sociaux
n'aurait pas le droit d'émettre des hypothèses? J'espère
que le chef de l'Opposition me suit dans ce débat sur
l'universalité qui n'est pas limité à ceux qui participent
actuellement à la vie politique active. Il y a quand même
d'anciens ministres qui en parlent. M. Parizeau en parlait justement ces jours
récents. Ce n'est pas un fait nouveau. Encore une fois, je demande au
chef de l'Opposition de ne pas sauter trop vite aux conclusions et de conclure,
comme il l'a fait tantôt; qu'il y aura cet impôt, alors qu'on le
soumettait simplement comme une possibilité.
Pour ce qui a trait aux relations du gouvernement avec la haute fonction
publique - je savais que le chef de l'Opposition aborderait cette question -
mes recherchistes m'ont soumis toute une série de documents sur les
nominations de l'ancien gouvernement. On manque de temps, je ferai grâce
à l'Opposition d'énumérer toutes ces nominations. J'en ai
quelques-unes qu'il a faites lui-même, mais gardons le débat
à un niveau serein.
Je lui dirai quand même que j'ai lu avec intérêt
certains commentaires qui ont été faits par des journalistes sur
la transition tranquille dont j'avais parlé. Je réfère
notamment à un article dans le journal Le Devoir, de M. Gilles Lesage,
qui examinait à fond toute cette question des changements qui ont eu
lieu depuis quatre mois et qui en concluait finalement que c'était une
transition relativement tranquille. Le chef de l'Opposition m'accuse d'avoir
une méthode jacobine, de faire table rase. Je comprends qu'il aime
parfois avoir le sens de l'humour, mais il pourrait considérer les
postes actuels et constater qu'il y a eu des changements comme c'est
inévitable qu'il y en ait quand il y a un nouveau gouvernement. Chaque
nouveau gouvernement apporte des changements, comme je lui ai dit. Certains
mandats sont renouvelés, d'autres ne le sont pas. Il y a certaines
mutations. Alors, il ne faut pas là-dessus conclure, comme l'a fait le
chef de l'Opposition, que nous avons adopté une approche partisane dans
les mutations qui ont eu lieu. Nous avons simplement effectué certains
changements comme c'est normal pour un nouveau gouvernement.
Pour ce qui a trait aux coupures, je suis heureux de voir que le chef de
l'Opposition est prêt à aborder toutes les questions. Il sait fort
bien que ces coupures ne sont pas faites par plaisir. Ce sont des coupures
qui nous sont imposées par l'héritage financier et fiscal
de l'ancien gouvernement, c'est-à-dire que l'annexe B-10 du budget de
son ancien collègue, M. Duhaime - on s'en souvient - annonçait un
déficit de 2 970 000 000 $ et que ce déficit est finalement,
comme on le sait, de 4 500 000 000 $. (16 h 15)
Nous avons respecté certains engagements. Nous avions pris
plusieurs engagements sur le plan fiscal. Nous les avons respectés au
mois de décembre., Nous avions pris un engagement dans le cas des salles
d'urgence. Dieu sait qu'on en avait parlé durant la campagne
électorale! On l'a fait parce que c'était notre devoir essentiel
de le faire. Est-ce qu'il y a un service plus essentiel que la protection de la
santé dans les salles d'urgence? Comme le chef de l'Opposition avait
été ministre des Affaires sociales, on a soulevé la
question. Comme il s'était vanté d'avoir coupé 142 000 000
$ dans le secteur hospitalier, on a insisté sur la question pour lui
dire que, pour le Parti libéral, c'était une priorité de
régler le problème des salles d'urgence. Même avec la pire
crise financière depuis 50 ans au Québec, nous avons
décidé d'affecter 150 000 000 $ additionnels pour régler
le problème des salles d'urgence, de manière à tenter au
moins de le régler, étant donné que c'est un
problème très complexe. J'espère que cela a
contribué au moins à atténuer l'impact très
négatif de cette situation sur la population,,
Je pourrais discourir longtemps sur d'autres coupures. Il y a eu
plusieurs questions qui ont été posées en Chambre
là-dessus. On y a répondu et on y répond dans les
crédits. Nous voulons mettre fin à cette époque qui
voulait que nous pelletions sur les épaules de nos descendants des
centaines et des centaines de millions par année, en empruntant à
long terme. On en reparlera tantôt quand on discutera des jeunes. Nous
voulions également faire en sorte de redresser l'économie,
d'assainir les finances publiques. Il y a eu un taux de croissance des
dépenses très élevé depuis 20 ou 25 ans au
Québec. Nous vivons dans une nouvelle époque. On en est
conscient. Quand j'ai été élu premier ministre, il y a 16
ans aujourd'hui...
M. Johnson (Anjou): J'allais vous souhaiter un bon anniversaire,
d'ailleurs.
M. Bourassa: Merci. Le chef de l'Opposition, je ne sais pas s'il
était au cégep à ce moment-là.
M. Johnson (Anjou): J'étais devant le Parlement avec une
pancarte. D'habitude, je suis à la porte, ici, avec des pancartes. Vous
avez vu ça en fin de semaine.
M. Bourassa: Le chef de l'Opposition devrait savoir que,
dès ce moment-là, nous mettions l'accent sur le progrès
social et sur le redressement économique.
Je crois avoir couvert la plupart des questions qui ont
été soulevées. IL y a les comités de
bénévoles. Je ne sais pas si le député de
Lac-Saint-Jean va me poser des questions.
M. Brassard: J'ai des questions spécifiques
là-dessus.
M. Bourassa: On pourra répondre aux questions
spécifiques; de même pour les conflits d'intérêts,
s'il y a des questions spécifiques. Au lieu de répondre d'avance,
j'aime mieux avoir des questions. Cela va.
Le Président (M. Filion): Merci.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, on pourrait
peut-être commencer avec les questions. On ne relèvera pas tout ce
que le premier ministre dit. On va avoir des occasions, après le
discours sur le budget, la semaine prochaine, de discuter en long et en large
de la question des finances publiques. Je remercie quand même le premier
ministre de son attitude bien condescendante à mon égard en ce
qui concerne les finances publiques.
Je veux simplement lui citer un alexandrin qui vient de quelqu'un qu'il
connaît très bien, au sujet de l'imprécision et de
l'utilisation du silence quand on a de bonnes idées. Quelqu'un qu'il
connaît bien et qui a été sénateur à une
certaine époque et qui est maintenant à sa retraite, disait
récemment: "Si ton esprit veut cacher les belles choses qu'il pense,
dis-moi qui t'empêche de te servir du silence." Je pense qu'il y a
là un mérite assez remarquable à cette phrase d'un ancien
homme politique libéral et qui s'applique à beaucoup de choses
que vient de nous dire le premier ministre.
Le libre-échange
Je vais commencer avec le libre-échange. On sait que la semaine
dernière, par un vote très serré, la commission Packwood,
aux États-Unis, au Sénat américain, a adopté cette
procédure qui permet maintenant, qui donne l'accord du Sénat au
président des États-Unis, au pouvoir exécutif, d'entamer
les négociations d'un accord de libéralisation des
échanges avec le Canada. On se rappellera aussi que ces échanges
au Sénat américain ont été
précédés de tractations très complexes et
très insistantes de la part de la Maison Blanche au point, d'ailleurs,
où ce matin, en me levant et en lisant un journal que cite souvent le
premier ministre de ce temps-ci,
je voyais que M. Reagan nous annonçait que les provinces seraient
d'accord et qu'elles seraient liées. Les réticences du
Sénat américain à donner feu vert au président, on
le sait, pour amorcer un processus qu'on appelle "fast track",
c'est-à-dire un processus rapide, sont évidemment
extrêmement reliées au rôle que jouent les sénateurs
américains. On sait que, vers 1912, cela a été une
période prolifique aux États-Unis sur le plan des institutions
politiques. On a accordé, si je me souviens bien, cette
année-là ou dans les années qui ont immédiatement
précédé ou suivi, le droit de vote aux femmes. On a
décidé d'instaurer la prohibition, ce qui n'est pas
nécessairement la chose la plus solide qui ait été faite.
On a également permis, à cette époque-là, que les
sénateurs deviennent des élus et qu'ils aient une fonction de
défense des intérêts régionaux aux
États-Unis. On ne s'étonne donc pas de voir les sénateurs
appréhender ce dossier avec des préoccupations au sujet des
intérêts régionaux américains. Toutes choses
étant égales par ailleurs, le rôle que les sénateurs
jouent dans l'exécutif américain a son pendant ici, je crois,
dans le rôle que jouent les premiers ministres des provinces dans notre
système.
En 1984, le Québec a exporté, en valeur, 13 000 000 000 $
vers les États-Unis, soit 75 % de ses exportations internationales. Nous
avons importé pour 10 000 000 000 $, donc une balance positive,
même si de façon générale, elle est négative
pour le Canada.
L'importance des échanges, donc, entre le Québec et les
États-Unis, est ici un indice de ce que représente cette question
et le vote du Sénat américain nous indique aussi, je crois, que
ces négociations seront extrêmement serrées. Par ailleurs,
M. Mulroney a insisté, en conférence de presse encore, sur le
fait qu'il n'y aurait qu'un seul négociateur canadien.
Ma question au premier ministre est la suivante: Au-delà du
consensus qui est intervenu à la conférence de Halifax, quelques
jours avant l'élection, où M. Mulroney nous avait
déclaré qu'il était très important qu'il y ait "a
full provincial participation", "a full provincial involvement", qu'en est-il
maintenant des garanties qu'aurait obtenues le premier ministre du
Québec du premier ministre canadien quant à notre participation
au processus? J'entends par participation l'élaboration des mandats qui
présupposent antérieurement une analyse des données, que
ce soit les rapports que l'on retrouve dans l'actualité ou ailleurs, ou
certains des comités.
Deuxièmement, il y a le processus de négociation
lui-même, la présence ou non dans les salles ou dans les salles
attenantes. Ce n'est pas un problème théorique, c'est un
problème réel. On sait qu'en négociation, quand des enjeux
pareils sont en cause, la nuance de ce qui se dit à une table,
l'échange du "give and take" ou du "bartering", pour reprendre les
expressions de négociation anglaises, est une chose qui devient
très très sensible et qu'il est toujours très difficile de
revenir, a posteriori, sur ce qui se passe dans une salle de
négociations. Nous l'avions dit à l'époque, il nous
apparaissait inconcevable qu'il y ait dix négociateurs pour chaque
province, en plus de celui du fédéral, sans compter les
Territoires du Nord-Ouest et le Yukon. Il nous apparaissait important, et nous
étions parvenus à un consensus à cet effet à
Halifax, que les provinces puissent être présentes dans le
processus même des négociations et physiquement très
près des négociateurs canadiens.
Et finalement, la troisième question, c'est: Une fois un accord
de principe intervenu entre les deux ambassadeurs et leurs équipes
respectives, quelles sont les garanties, là aussi, qu'il aurait obtenues
du premier ministre du Canada quant au consentement du Québec à
l'égard du contenu? Voit-il là un consentement de la nature de
celui qui sera celui du Sénat américain, c'est-à-dire
"make or brake", on approuve ou on rejette? Ou voit-il un consentement qui
pourrait être conditionnel? Voit-il ce dossier dans la perspective non
pas du passé, mais de l'avenir, dans la perspective de l'exercice d'un
droit de veto que, par ailleurs, son ministre semble vouloir revendiquer?
Voilà.
M. Bourrassa: Quant à la première question au sujet
des pourparlers, j'ai discuté très brièvement avec le
premier ministre du Canada, la semaine dernière, et avec le premier
ministre de l'Ontario, hier, sur cette question-là. Nous devons en
rediscuter. Je ne me souviens pas s'il y a eu une question en Chambre la
semaine dernière. Non, il n'y a pas eu de question en Chambre la semaine
dernière là-dessus. Mais j'avais déjà
répondu...
M. Johnson (Anjou): On n'a jamais de réponse en Chambre,
de toute façon. Alors, on ne se force pas pour les questions.
M. Bourassa: Au moins, faites un meilleur choix de questions.
D'ailleurs, M. le Président, le chef de l'Opposition se plaignait
tantôt de la formule qui fait que lui, il pose des questions et que nous,
on donne les réponses. C'était à lui de la modifier quand
il était au pouvoir s'il trouve que la formule désavantage
l'Opposition.
Alors, pour revenir à la question du libre-échange...
M. Johnson (Anjou): Oui, c'est cela.
M. Bourassa: ...vous savez que le président du
Comité des provinces est actuellement M. Getty. Il y a une
élection en Alberta la semaine prochaine. Donc, jusqu'à
l'élection, nous ne pouvons pas poursuivre nos discussions avec le
président, mais la position du Québec a toujours
été la suivante; sans insister pour être à la table
des négociations, on est d'accord encore là-dessus... J'entendais
tantôt le chef de l'Opposition qui disait: On n'insiste pas pour
être à la table, mais il faut être physiquement très
près de la table de négociations. Ce n'est pas
particulièrement limpide pour moi, ce que veut dire être
physiquement très près sans être à la table. Ce que
nous nous demandons, c'est de participer à l'élaboration des
mandats pleinement.
M. Johnson (Anjou): Si le premier ministre me le permet...
M. Bourassa: Oui, certainement.
M. Johnson (Anjou); ...la distinction que je fais, c'est
"l'opérationnalisation" des mandats dans la négociation. Le
premier ministre qui, en plus d'être un économiste de
renommée, est un homme qui est reconnu comme un grand
négociateur, il sait très bien que l'exécution d'un mandat
c'est d'ouvrir un couloir entre des balises qu'on s'est données pour
essayer de trouver une entente. Savoir si vous allez être à gauche
ou à droite ou au centre dans le couloir et savoir jusqu'où vous
êtes prêts à délester un morceau de votre mandat,
cela se fait dans . la salle de négociations. Cela ne se fait pas en
théorie et a posteriori, cela se fait au moment où les gens
discutent et échangent. La notion de la proximité physique des
représentants des provinces, surtout quand il s'agit de sujets qui sont
les leurs et de leur juridiction, cela nous apparaît, en ce
sens-là, fondamental.
M. Bourassa: Oui, sauf que, comme le disait le chef de
l'Opposition, le 27 novembre à Halifax - c'est le 27 ou le 28, en tout
cas, c'est la dernière semaine de novembre - il y a eu une entente sur
les principes. Le premier ministre du Canada a dit, je crois, il y a quelques
jours: Pour l'application des principes, nous aurons l'occasion dans les
prochains mois d'en discuter. J'ai reçu le ministre, M. Joe Clark,
responsable des Affaires extérieures. Je lui ai fait part des points que
j'ai déjà exprimés publiquement au chef de l'Opposition
à l'Assemblée nationale: participation au mandat, le fait que le
Québec ne se fasse pas imposer un traité ou des décisions
qui vont contre ses intérêts sans évidemment qu'il donne
son accord, cela peut être globalement, cela peut être en partie.
C'est de cela qu'on va discuter dans les prochaines semaines et dans les
prochains mois.
Parce que le premier ministre du Canada n'est pas prêt à en
discuter tout de suite, parce que le président du comité des
premiers ministres des provinces, M. Getty, est en période
électorale, je ne peux pas être plus précis dans mes
réponses au chef de l'Opposition. Je ne pourrai pas l'être avant
que le premier ministre revienne de son voyage en Asie et que l'élection
soit passée en Alberta, on verra le résultat. À ce
moment-là, nous pourrons discuter entre les premiers ministres sur
l'application des principes auxquels il a participé au mois de novembre.
Il y a une conférence des premiers ministres qui est prévue pour
le mois d'août.
Et je crois que le chef de l'Opposition doit constater - ce que j'avais
déjà dit au mois de mars et que je peux lui rappeler -que ce
n'est pas acquis, qu'il n'y a pas une fébrilité du
côté des États-Unis pour signer un traité de
libre-échange. Un vote de dix à dix, un vote aussi serré
exprime d'une certaine façon quelques réticences vis-à-vis
d'un traité de libre-échange. Donc, je crois qu'on va avoir le
temps, parmi les provinces et le gouvernement fédéral, de se
préparer et de trouver une formule qui protège nos
intérêts et qui ne paralyse pas le processus de
négociation. Il est fort plausible que le négociateur
américain veuille consulter les principaux secteurs industriels des
États-Unis avant d'aborder directement et à fond la
négociation. Alors, ce sont des délais qu'an peut
présumer.
C'est déjà une grande victoire pour le Canada et pour le
Québec qu'on soit d'accord pour discuter d'échanges commerciaux
plus libres. Là-dessus, il y a consensus. Évidemment, il y a
toutes sortes d'impacts qui peuvent exister pour différentes industries,
mais on est d'accord pour qu'il y ait des échanges plus libres. Cela ne
peut que favoriser le Canada et le Québec. Or, déjà le
vote du Sénat est une grande victoire en ne bloquant pas ces
discussions. Mais on n'est pas rendus au point où le Québec doit
donner un accord à un traité qui lui est soumis. (16 h 30)
M. Johnson (Anjou): Une dernière question
là-dessus; j'en aurais plusieurs, mais... Le sénateur Packwood a
déclaré aux journalistes récemment que la seule assurance
écrite qu'il avait reçue de M. Reagan concernant les conditions
à l'éventuelle négociation d'un traité de
libre-échange était la question du règlement rapide du
contentieux en matière d'importation de bois canadien. On sait que
l'Oregon est situé essentiellement sur le marché de la Colombie
britannique mais que, si on touche le contentieux canadien-américain sur
la question du bois d'oeuvre, entre autres, entre la Colombie britannique et
l'Oregon, on va
donc toucher ce qui se passe dans le cas du Québec et de
l'Ontario à l'égard des États de la Nouvelle-Angleterre et
à l'égard aussi d'États jusqu'au Deep South, dans certains
cas.
Est-ce que le premier ministre est informé de l'existence de
conditions écrites autres ou d'autres types de conditions qui
existeraient du côté américain?
M. Bourassa: Non, je ne suis pas informé et sous toutes
réserves - et le chef de l'Opposition pourra me rectifier, si
nécessaire - je crois que le premier ministre du Canada adéclaré au lendemain du vote qu'il n'y avait pas eu de
conditions qui avaient été imposées au Canada. Vous vous
souvenez...
M. Johnson (Anjou): M. Packwood a dit lui qu'il y avait... C'est
cela. Enfin, il va falloir sortir cela.
M. Bourassa: Moi, je prends la parole, étant
résident canadien...
M. Johnson (Anjou); Et je me permets de souligner cette
question...
M, Bourassa: D'accord.
M. Johnson (Anjou): ...pour le premier ministre, parce qu'on sait
que le contentieux du bois de sciage et du bois d'oeuvre a été
probablement le contentieux qui a rendu le plus visible le problème des
arbitrages nécessaires à faire dans les litiges commerciaux entre
le Québec et les États-Unis et qui a coûté
d'ailleurs 3 500 000 $ seulement en frais juridiques à l'industrie du
bois de sciage au Québec qui s'est promenée d'un "ruling
authority" à un autre aux États-Unis et qu'on a gagné par
la peau des dents à cause d'une technicité. Si jamais,
effectivement, du côté américain, l'engagement qu'aurait
pris la Maison Blanche à l'égard du sénateur Packwood pour
obtenir son vote qui a fini, comme on le sait, extrêmement serré
était qu'on réglerait le problème du contentieux, on peut
dire que cela risque de ne pas être tellement favorable pour le
Québec.
M. Bourassa: C'est à surveiller de très
près.
M. Johnson (Anjou): Oui.
M. Bourassa: Je suis d'accord, comme la question de l'agriculture
ou du textile et d'autres questions.
M. Johnson (Anjou): Du côté des entraves
interprovinciales au commerce, le premier ministre nous a dit récemment
- je parle du premier ministre du Québec - nous a déclaré
publiquement qu'il était prêt à agir très rapidement
pour abolir les entraves au commerce entre les provinces. Une de ces entraves
touche évidemment ce qu'on appelle les marchés publics; je pense
ici aux politiques d'achat des réseaux public, parapublic,
péripublic, aux sociétés d'État et
particulièrement à Hydro-Québec. Est-ce que le premier
ministre est prêt à considérer qu'il devra mettre fin
rapidement aux politiques d'achat préférentielles du gouvernement
et des sociétés d'État dans ce domaine?
M. Bourassa: Non, j'ai simplement repris, M. le Président,
ce que j'avais soumis, en réponse à une question d'un
journaliste, à la commission Macdonald. Je parlais de la
possibilité d'un code d'éthique entre les provinces, de commencer
par cela. Je disais que, si on voulait négocier un libre-échange
avec les États-Unis, il fallait que notre union économique comme
telle ne soit pas marquée par toutes sortes de barrières
tarifaires ou non tarifaires. C'est évidemment une chose qu'on va
discuter entre provinces.
M. Johnson (Anjou): On sait que la politique d'achat
préférentielle d'Hydro-Québec, entre autres, dans des
domaines extrêmement importants sur le plan des technologies nouvelles,
sur le plan de l'ingénierie, sur le plan d'une partie de l'industrie
lourde aussi, a des conséquences particulièrement
bénéfiques pour le Québec sur le plan économique et
que cela reste probablement, des barrières dites interprovinciales, ta
barrière la plus importante et sûrement, en tout cas, la plus
visible aux yeux des voisins canadiens. Est-ce que le premier ministre, quand
il parle d'appliquer l'idée sugqérée par M. Macdonald dans
son rapport d'un code d'éthique, pense mettre la question des politiques
préférentielles des sociétés d'État dans le
paquet, à court terme?
M. Bourassa: Non, pas à court terme. M. Johnson
(Anjou): Non.
M. Bourassa: Tout ce que je peux dire au chef de l'Opposition,
c'est lui citer le paragraphe qui est dans le rapport présenté
par le Parti libéral du Québec en février 1984 à la
commission Macdonald où je parle peut-être pour... Si je peux
juste citer ce que je disais: Peut-être pourrions-nous, par exemple,
explorer la possibilité d'un code d'éthique interprovincial. Un
tel code pourrait baliser d'une manière souple et flexible certaines
pratiques potentiellement discriminatoires, etc. Si un tel code
d'éthique qui n'imposerait rien d'autre qu'une contrainte morale aux
provinces,
s'avérait inefficace !ors de l'expérience, il serait
toujours possible de considérer dans le même esprit une approche
plus musclée sous forme d'entente commune interprovinciale. Ce n'est pas
contraignant au niveau actuel.
M. Johnson (Anjou): Donc, ce n'est pas contraignant. On y va
rapidement, mais pas de façon contraignante» Est-ce que le premier
ministre a l'intention de rendre public l'ensemble des études que va
faire le comité présidé par M. Warren et auquel
participent les autres personnes qu'il a nommées récemment?
Est-ce qu'il y aura une commission parlementaire sur l'ensemble de ces
questions? Est-ce que le projet éventuel de libre-échange - si
jamais il y avait accord à l'intérieur du mandat du premier
ministre, donc d'ici deux ou trois ans - sera soumis à l'approbation de
l'Assemblée nationale ou considère-t-il que c'est du ressort
exclusif de l'exécutif?
M. Bourassa: Pour les deux questions, en principe, on n'a aucune
objection à rendre les études publiques, si cela ne va pas contre
l'efficacité des négociations ou l'intérêt public.
Je réponds par une phrase ' assez générale au chef de
l'Opposition parce que je n'ai pas les études en main. Je ne peux pas
dire assurément si elles seront rendues publiques. Mais, en principe, on
n'a pas d'objections, sauf si on venait à la conclusion que cela peut
nuire à nos négociations. Quant à l'accord, on verra
à ce moment-là. Je crois que la procédure habituelle au
Québec est qu'au moins, au minimum, on en discute en commission
parlementaire.
M. Johnson (Anjou): Au minimum.
M. Bourassa: C'est ce que j'avais fait en 1971, dans le cas des
propositions, à Victoria; et on avait discuté de ces
propositions. Est-ce qu'on doit en faire un grand débat à
l'Assemblée nationale? On pourra aviser en temps opportun. Mais cela
m'étonnerait qu'on ne discute pas du traité comme tel en
commission parlementaire.
Les comités de bénévoles
M. Johnson (Anjou): Les comités de
bénévoles. La composition de ces comités, comme je le
disais tout à l'heure, frappe particulièrement par son
caractère assez homogène. Ce sont des gens d'affaires, je dirais
même des hommes d'affaires. Il y a très peu de femmes. Je pense
qu'il y en a seulement une ou deux qui font partie des comités, en tout
cas quant aux trois grands qui ont été rendus publics par
communiqué le 22 janvier. Comment le premier ministre peut-il nous
expliquer l'absence, dans ces comités d'élus - à
l'exception du député de Notre-Dame-de-Grâce, qui est son
adjoint parlementaire également - particulièrement compte tenu de
la déclaration de la vice-première ministre lors du discours
inaugural de la mini-session, qui s'avérera probablement le seul
discours inaugural qu'on aura pendant un an ou un an et demi... Celle-ci disait
alors que le gouvernement voulait que l'Assemblée nationale accroisse
son autorité et sa productivité, qu'elle légifère
moins et mieux et qu'elle participe davantage aux décisions de
l'État. Quand on voit l'étendue des mandats accordés
à ces comités rendus publics le 22 janvier et quand on en voit la
composition, je pense qu'il n'y a pas grand-chose pour l'Assemblée
nationale là-dedans. Comment explique-t-il l'absence des régions,
des municipalités, des femmes, des groupes socio-économiques, des
syndicats et des fonctionnaires dans de tels comités?
M. Bourassa: M. le Président, je pourrais citer Jean
Paré qui faisait une analyse de ce type d'argumentation dans
L'Actualité selon laquelle, à chaque comité, on doit avoir
des représentants des régions et des différents groupes
sociaux. C'était des comités dont l'échéance
était pour quelques mois seulement. Il y a quand même certaines
femmes dans les comités. Là-dessus, je suis obligé, sans
vouloir déplaire au chef de l'Opposition, de lui rappeler qu'il n'y
avait aucune femme qui avait été nommée, sur sept
personnes, dans l'un des seuls comités qu'il a formés, la
Corporation d'investissement jeunesse.
M. Johnson (Anjou): C'est inexact. Il y avait la
présidente de Forano.
M. Bourassa: Si c'est le cas, toutes mes excuses au chef de
l'Opposition.
M. Johnson (Anjou): Oui, voilà.
M. Bourassa: Mais la liste qui nous a été remise ne
contenait aucune femme.
M. Johnson (Anjou): On verra tout à l'heure.
M. Bourassa: Encore là, s'il y a une erreur, je suis
très heureux que...
M. Johnson (Anjou): Je suis sûr que vous êtes
contrit.
M. Bourassa: Je suis contrit et surtout heureux de voir que le
chef de l'Opposition a tenu compte de cette situation que nous voulons
corriger, de toute façon. Mais le but de ces comités n'est pas de
faire de la consultation dans différentes régions ou dans
différents milieux, le but de ces comités est d'arriver à
faire des recommandations qui seront assujetties aux discussions du Conseil des
ministres. Si elles supposent des lois,
celles-ci seront assujetties aux débats parlementaires. Il faut
que !e chef de l'Opposition tienne compte de l'objectif des comités
avant d'exprimer des griefs sur le caractère représentatif de ces
comités.
M. Johnson (Anjou): Encore une fois je ne veux pas...
M. Bourassa: II faudrait une vingtaine de personnes dans chaque
comité pour... Il faut régler d'ici trois mois.
M. Johnson (Anjou): Je regarde l'ensemble des comités.
Révision des fonctions et organisations gouvernementales, mandat de
trois mois: M. Gobeil, évidemment, président du Conseil du
trésor; M. Bélanger, de la Banque Nationale; M. Lortie, de chez
Provigo; M. Marcoux, de la Banque d'Épargne; M. Jean-Claude Rivest.
Comité sur la déréglementations M. Scowen; M. René
Dussault, qui est connu dans l'État québécois; Mme Brien;
Me Reynold Langlots; M. Jean-Luc Migué; M. Sébastien Allard; M.
Pierre Clément, de la Fédération canadienne des
entreprises indépendantes; M. Lavigne, qui est conseiller au Conseil
exécutif. Comité sur la privatisation: M. Marcel
Côté, de SECOR, si je me souviens bien; M. Roger Beaulieu, avocat;
M. Marcel Bélanger, comptable connu; M. Castonguay, des institutions
financières de La Laurentienne; M. Raymond Cyr, président de la
multinationale Bell Canada; M. Siblin, dont je ne connais pas la prononciation.
Ce qui frappe: c'est monolithique, ce sont des gens strictement, ou à
peu près, du milieu des affaires. Je ne mets pas en cause la
qualité de ces gens, et encore une fois j'en connais un certain
nombre.
Le caractère monolithique, la provenance de ces personnes autour
d'enjeux aussi importants que la révision de l'organisation
gouvernementale, la déréglementation et la privatisation... Le
mandat est tellement large! On sait que cela va définir le carré
de sable autour duquel le Conseil des ministres va décider, et
finalement finir peut-être par nous arriver avec des projets de loi,
à un moment donné; ce serait une bonne idée, le Parlement
est là pour cela, quitte même à ce que ce soit des projets
de loi qui en abolissent d'autres ou qui mettent fin à d'autres. Mais
c'est cela qui frappe, et je trouve que le premier ministre est peut-être
trop insensible à ce que je soulève là. Je comprends qu'il
peut faire un club de gens qu'il connaît bien, qui le conseillent. Quand
j'ai formé la Corporation d'investissement jeunesse, c'étaient
tous des gens du milieu des affaires. Je ne leur demandais pas de venir me dire
comment l'État devrait être; je leur demandais de me dire comment
eux pouvaient régler en partie le problème des jeunes.
C'était normal que ce soit eux, je ne demandais pas à la CSN
d'être là. Ce caractère monolithique, le premier ministre
ne semble pas le reconnaître. J'aimerais l'entendre peut-être
quelques secondes.
M. Bourassa: Je crois quand même que le chef de
l'Opposition simplifie un peu; peut-être qu'il est obligé de
simplifier pour avoir un début d'argument. Il reste que ces
comités-là, comme je l'ai dit, avaient pour but de nous
conseiller dans certains cas sur la gestion. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a
pas des gens... René Dussault a été sous-ministre de la
Justice, il a travaillé longuement avec M. Castonguay aux Affaires
sociales, on ne peut pas dire qu'il n'a pas fait preuve d'ouverture sur la
qualité du développement du Québec. Si mon adjoint
parlementaire n'était pas présent, je pourrais dire la même
chose à son endroit. Il y a Jean-Claude Rivest qui, à ma
connaissance, n'a jamais occupé des postes importants dans le monde des
affaires; il a travaillé dans la fonction publique, il a
été député à l'Assemblée nationale.
Donc ce n'est pas si monolithique que le prétend le chef de
l'Opposition.
Il reste quand même que, les comités ayant pour but de nous
aviser sur le poids du secteur public dans la machine gouvernementale, dans
l'État... Je me souviens des propos du chef de l'Opposition en juin, en
juillet, en août: faire faire. Je ne sais pas si le chef de l'Opposition
se souvient quand il répétait cela dans ses tournées -
fructueuses, il faut bien l'admettre, on a vu cela à la fin de septembre
- où productivité... À chaque fois que j'écoutais
le chef de l'Opposition je l'entendais parler de productivité, il
fallait mettre l'accent sur la productivité. Or le chef de l'Opposition
sait que, dans le secteur privé, à cause de l'application parfois
impitoyable des lois du marché, on est obligé de mettre l'accent
sur la productivité. Cela ne veut pas dire qu'on va accepter toutes
leurs recommandations, il n'en est pas question. Mais, dans les études
qui vont nous être soumises, dans les recommandations qui vont être
faites au gouvernement, on veut faire en sorte de voir comment on peut, en
respectant nos objectifs, dans notre programme Maîtriser l'avenir, de
progrès social et de garder l'aspect humain dans toutes nos politiques,
éliminer certaines dépenses. On a trouvé toutes sortes de
comités qu'on élimine parce que, finalement, on s'aperçoit
que ces comités étaient inutiles. Encore là, je
pourrais... (16 h 45)
M. Johnson (Anjou): Comme les jurys de sélection pour les
gens qui sont admissibles à la magistrature?
M. Bourassa: Ne faisons pas dévier le débat.
M. Johnson (Anjou): C'est inutile?
M. Bourassa: À l'étude des crédits du
ministère de la Justice, l'ancien ministre pourra poser ses questions.
Il y a toute une série de comités. Je vais laisser la parole
à mon adjoint parlementaire pour la déréglementation parce
que c'est lui qui préside ce comité. Donc, nous visons d'abord
à mettre de l'ordre dans la réglementation, il va lire des
milliers et des milliers de pages de règlement. On est
étouffés par la réglementation. Ce qu'on a voulu faire,
c'est introduire un peu de bon sens dans toute cette réglementation.
Pour la privatisation, c'est la même chose. Je pense que le chef de
l'Opposition est d'accord qu'il est peut-être temps, en 1986, de changer
d'approche économique au Québec, étant donné les
contraintes que nous devons vivre et étant donné l'exigence, pour
nous, d'être de plus en plus concurrentiels et d'être de plus en
plus productifs, pour reprendre son expression.
M. Johnson (Anjou): Si le premier ministre me permet juste une
remarque là-dessus. Il est évident que la productivité, la
capacité concurrentielle de nos entreprises et de l'État
lui-même sont au coeur de ce qui nous attend pour les quelques
années à venir si on ne veut pas devenir une grosse
Île-du-Prince-Édouard, avec tout le respect que j'ai pour ceux qui
viennent de là, mais disons que ce n'est pas exactement Silicon Valley.
Cela dit, j'ai été frappé par le fait que le premier
ministre nous dise: Les impitoyables lois du marché. Je n'en disconviens
pas, c'est impitoyable et cela va être encore plus impitoyable si on
libéralise les échanges avec les Américains. Mais, ce que
je connais des gens qui viennent du milieu des affaires et, notamment, parmi
ces personnes que je connais, y compris un certain nombre de ses ministres, ce
sont des gens qui croient d'abord et avant tout en l'efficacité des lois
du marché et qui, en général, ne sont pas très
préoccupés par la confiance qu'on peut avoir dans la gestion des
ressources humaines et par la conviction profonde qu'on a que le progrès
est fait par des humains. Il n'est pas seulement fait par la loi du
marché. Le caractère monolithique de ces comités risque de
refléter cette vision néo-conservatrice, "friedmandienne",
maintenant populaire depuis quelques années. Mais cela va passer
aussi.
Fondamentalement, Macdonald a constaté - je ne parle pas de votre
ministre, je parle de l'ancien ministre des Finances fédéral -
dans son rapport, que l'économie canadienne était un échec
parce que les gouvernements, comme les entreprises, n'avaient pas réussi
à motiver les gens, en termes de productivité; c'est un des
grands constats. Sa conclusion, c'est; Ouvrons les marchés aux
Américains et, ma foi, les plus forts survivront. Si on ne croit
qu'à cela et si on vient d'un milieu qui est obsédé par
cette préoccupation, on ne reflète pas d'autres dimensions qui
sont une préoccupation à l'égard de la gestion des
ressources humaines, à l'égard de l'Implication des gens dans
l'entreprise, à l'égard des fonctionnaires et des employés
des secteurs public et parapublic dans les priorités de modes
d'intervention de services de l'État aux citoyens et dans la
capacité qu'ont les êtres humains d'améliorer la
productivité. Ce n'est pas juste la loi du marché qui va
améliorer la productivité et, en cela, je crois que le premier
ministre et moi, on diffère passablement. Plutôt que de me lancer
dans un long débat autour de cela...
M. Bourassa: Et si je voulais répondre, si le chef de
l'Opposition me permettait, parce que je crois qu'on ne diffère pas
tellement.
M. Johnson (Anjou): J'ai toujours dit que vous me ressembliez un
petit peu.
M. Bourassa: C'est prometteur pour l'avenir, pour vous. Je dis au
chef de l'Opposition que je suis conscient du caractère impitoyable des
lois du marché. D'ailleurs, immédiatement après avoir dit
cela, j'ai dit que c'était notre rôle de voir à ce que ces
lois du marché s'appliquent d'une façon humaine. Mais on est
obligé de constater, comme l'a fait le président Mitterrand qui,
il y a quelques années, disait: Je constate... Après avoir, en
1981, orienté l'économie française vers une voie
différente de la plupart de ses voisins, il a constaté,
après, que les lois du marché, comme il disait lui-même,
sont plus exigeantes, plus pesantes que les décisions politiques. Alors,
nous, on prend le pouvoir en 1986, on voit l'état des finances, le
chômage, le chômage des jeunes dont on parlera tantôt et on
se dit: II faut amorcer un virage dans la gestion de l'État. Alors, ce
n'est pas une question d'idéologie ou d'être
néo-conservateur. D'ailleurs, ceux qu'on a nommés ont tous eu une
expérience dans le service public. Michel Bélanger a
été secrétaire au Conseil du trésor, sous-ministre
de votre prédécesseur comme chef du Parti
québécois. Claude Castonguay a présidé la
commission Castonguay qui a apporté les réformes sociales les
plus avant-gardistes en Amérique du Nord. C'est lui qui a fait cela.
Pierre Lortie a également été dans l'appareil public. Yvon
Marcoux aussi, au Conseil du trésor. Tous ces gens, sauf exception, ont
travaillé au service de la communauté ou au service de
l'État. Donc, ils ont cette expérience à la fois du
secteur privé avec toutes ses exigences dont nous convenons tous les
deux et cette expérience du secteur public. C'est pourquoi j'ai
jugé bon de leur demander, à
cette période critique, à ce nouveau tournant de
l'histoire économique du Québec, de nous aviser sur certaines
recommandations, et c'est nous qui jugerons, à la lumière du
débat public qui suivra, si ces recommandations sont valables ou
non.
Est-ce que je pourrais permettre à mon adjoint parlementaire de
dire quelques mots sur la déréglementation?
M. Johnson (Anjou): J'allais dire que je suis sûr qu'on va
avoir l'occasion d'entendre le député de
Notre-Dame-de-Grâce à plusieurs reprises au cours des mois qui
viennent, compte tenu du mandat qu'il a, à l'Assemblée nationale
ou autrement- Je ne vois pas d'autre solution à la
déréglementation que celle de venir devant le Parlement pour
abolir des lois. Je voudrais qu'on puisse procéder peut-être
autour d'un certain nombre d'éléments mécaniques autour de
ces comités. Cela m'apparaît très important, si le
député de Notre-Dame-de-Grâce me le pardonne.
Est-ce que ces comités vont remettre des rapports qui seront
rendus publics?
M. Bourassa: En principe, oui.
M. Johnson (Anjou): En principe, oui.
M. Bourassa: II y a eu des recommandations; je pense qu'il y aura
des...
M. Johnson (Anjou): Deuxièmement, est-ce que...
M. Bourassa: II y a des études, peut-être, qui vont
rester confidentielles, mais le rapport comme tel devrait être rendu
public.
M. Johnson (Anjou): Les rapports devraient être rendus
publics. Est-ce que, à ces comités - je vais parler un peu de la
rémunération - qui sont formés de gens qui peuvent
être appelés à fournir des avis professionnels, comme le
disaient votre lettre et votre communiqué, beaucoup de gens seront
rémunérés? Qui en décidera? Quels seront les
critères? Est-ce qu'il y a des mandats qui vont pouvoir être
accordés à des firmes? Est-ce qu'ils seront soumis aux
règles habituelles du Conseil du trésor pour donner des mandats
aux firmes? Est-ce qu'il y a déjà des demandes d'honoraires qui
sont parvenues à l'autorité qui autorisera les
dépenses?
M. Bourassa: Je dois vous dire, tout d'abord, que nous essayons
une nouvelle formule, c'est-à-dire le bénévolat. On nous a
dit - je n'ai pas les chiffres devant moi, mais ce sont des estimations - qu'en
éliminant les jetons de présence nous pourrions faire
économiser à l'État plusieurs millions de dollars. Donc,
je crois que c'est une formule qui se doit d'être mise en pratique. Ces
gens sont disposés à servir d'une façon
bénévole pour ce qui a trait au travail, à leur
présence aux comités.
Mais j'ai mentionné ceci dans le communiqué et, comme le
chef de l'Opposition vient d'y référer, je lis la phrase en
question: "Ces personnes ont accepté de remplir leur mandat
bénévolement, sauf le remboursement de leurs dépenses en
vertu des règlements en vigueur et une juste rétribution s'ils
étaient amenés à fournir au gouvernement des avis dans le
cadre de leur profession." S'il faut qu'ils travaillent durant plusieurs jours
ou plusieurs semaines, je crois qu'il est normal qu'ils puissent être
rémunérés pour leur travail. Ils ne peuvent pas, quand
même... En dehors du travail et de leur présence au comité
comme tel, je ne crois pas que ceci, conformément à mon
communiqué, implique toutes les études qu'eux peuvent devoir
faire.
Il n'y a eu aucun paiement qui a été fait à ce
jour, il y a eu des autorisations qui ont été demandées;
dans deux cas, on a retourné la demande qui avait été
faite en invoquant les raisons qui sont bien connues et qui ont
été rendues publiques par le président du Conseil du
trésor. Donc, je crois qu'on a attaqué injustement le
gouvernement là-dessus. Encore là, je pourrais, mais...
M. Johnson (Anjou): Est-ce que je dois comprendre que le ministre
de la Justice a acheminé au Conseil du trésor une demande de
rémunération de certains des membres du comité de la
déréglementation?
M. Bourassa: Oui. Ce qui est arrivé, c'est que, dans un
cas, on a fait une demande d'autorisation, c'est-à-dire pas de demande
précise. On a dit qu'on demandait une autorisation au cas où il y
aurait des études. Or, il n'y a pas d'étude, donc, il n'y a pas
de dépense de ce côté. Dans l'autre cas, on a fait une
demande d'honoraires; elle a été refusée, à ce
jour, par le Conseil du trésor. Dans un cas, c'était simplement
une demande d'autorisation sans études et il est fort possible qu'il n'y
ait aucun montant qui soit déboursé. Dans l'autre cas, c'est une
demande d'honoraires qui a été refusée, pour l'instant, et
qui exige d'être étudiée plus à fond. Je crois que
c'est assez injuste pour les personnes en cause. Il y a deux personnes, il y en
a au moins une que le chef de l'Opposition connaît très bien et
qui a été sous-ministre de la Justice. C'est assez injuste de
voir son nom associé à ce genre d'accusation. Encore là,
j'ai plusieurs cas de l'ancien gouvernement. C'est pas 400 $ par jour, c'est
1000 $ par jour qui ont été donnés. Mais comme le
débat...
M. Johnson (Anjou): Mais on ne disait pas qu'ils étaient
bénévoles.
M. Bourassa: Non. Je dis au chef de l'Opposition que s'il lit les
communiqués et qu'il fait un effort d'objectivité -
peut-être pas pour nous, mais pour les personnes en cause - il
s'aperçoit que, si ces gens font des études et qu'ils mettent
beaucoup de temps à faire ces études, ça ne fait pas
partie du mandat bénévole. Cela se comprend très bien. On
a pris la peine de le spécifier. Je veux clarifier cela parfaitement,
parce que ce n'est pas juste pour les personnes qui ont été
mentionnées. On peut faire de l'opposition sur le dos du gouvernement
mais, quand on implique des individus qui ne peuvent pas se défendre, je
suis obligé d'insister davantage pour clarifier la situation.
Le Président (M. Filion): M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Sur cette question et en rapport avec les questions
que je posais au premier ministre, la semaine dernière, si on
résume - il me contredira si je me trompe -il y a un ministre qui est
responsable d'un des comités, celui sur la
déréglementation, en l'occurrence le ministre de la Justice, qui
a acheminé une demande formelle au Conseil du trésor pour
rémunérer, en raison d'avis professionnels, trois des membres du
comité, c'est-à-dire Me Dussault, Me Langlois et M.
Mîgué. Ce que vous me dites et je vous signale la réponse
de M. Gobeil au Soleil, il a dit: Pour Me Langlois, c'est réglé.
À 400 $ par jour, ce sont des honoraires raisonnables, acceptables et
justifiables. Mais pour MM. Dussault et Migué, j'ai demandé au
ministre responsable de la justice de voir à justifier cette demande de
400 $ par jour parce que, justement, ces deux derniers membres étant
professeurs à l'ÉNAP, ils ont droit, normalement, à un
tarif, par jour, de 275 $. C'est indiqué d'ailleurs dans la demande du
Conseil du trésor. Mais quand vous me dites qu'il n'y a personne qui a
été rémunéré... Ce que je peux lire dans ta
demande, c'est qu'on indique, au 31 mars 1986, donc pour l'exercice financier
1985-1986, qu'il y a un montant de 10 200 $ qui a été
engagé sur une base de 400 $ par jour pour des avis professionnels
donnés par MM. Dussault et Migué. Ce que le ministre de la
Justice semble affirmer dans sa demande, c'est que, pour ce qui est de
l'exercice financier 1985-1986, il y a des avis professionnels qui auraient
été donnés par MM. Dussault et Migué et qu'un
montant de 10 200 $ aurait été engagé sur une base de 400
$ par jour pour payer le coût de ces avis professionnels.
M. Bourassa: II a été refusé. Le tarif de
400 $ a été refusé.
M. Brassard: Ce que vous me dites, c'est que la décision
du Conseil du trésor est de dire: 400 $, il faut justifier ça,
c'est trop. Est-ce que cela signifie que le Conseil du trésor est
disposé cependant à verser les honoraires réguliers pour
un professeur de l'ÉNAP, c'est-à-dire 275 $ par jour?
M. Bourassa: Je dois vous dire que, actuellement, la situation...
Comme je l'ai dit tantôt, dans le cas de M. Langlois, il n'y a pas de
demande. C'est simplement une autorisations Donc, s'il n'y a pas
d'études, il n'y aura aucune dépense, sauf qu'il dit! je
participe au comité, je donne mes avis dans les réunions, je ne
charge rien. Si j'ai des études à faire, au-delà du
travail normal du comité des bénévoles...
M. Brassard: Ce sera au tarif de 400 $ par jour.
M. Bourassa: 400 $ qui est le tarif du ministère de la
Justice, c'est cela?
M. Johnson (Anjou): Pour une certaine catégorie, en
fonction du nombre d'années d'expérience au Barreau, etc.
M. Bourassa: Je remercie le chef de l'Opposition de son
information. Donc, c'est les tarifs du ministère de la Justice. Ce n'est
pas moi qui le dit, c'est l'ancien ministre de la Justice. (17 heures)
M. Brassard: Pour les deux autres?
M. Bourassa: Pour les deux autres, la demande était de 400
$. Cela a été refusé. On en est là actuellement,
donc il va y avoir négociations qui vont...
M. Brassard: Est-ce que MM. Dussault et Migué ont
donné, en dehors de leur participation au comité, des avis
professionnels?
M. Bourassa: Je sais que, monsieur... Ils travaillent, ils ont
travaillé à des études, oui. Ils ont travaillé.
M. Brassard: En plus de leur participation comme membres du
comité?
M. Bourassa: En plus de leur participation comme membres du
comité qui, elle, est bénévole, ils ont
travaillé... Peut-être que M....
M. Brassard: Et les honoraires rattachés à ces
études ou à ces avis professionnels, si je comprends bien le
refus du Conseil du trésor d'aller jusqu'à 400 $, ce serait, en
tout cas, au moins 275 $ par jour, tel que le prévoit l'ÉNAP?
M. Bourassa: Attendons de voir ce que
sera la décision du Conseil du trésor.
M. Brassard: À moins que le ministre de la Justice
réussisse à justifier ce qui lui a été
demandé, réussisse à justifier que les tarifs peuvent
être dans ces deux cas-là -puis donne des raisons à cet
effet - de 400 $ par jour.
M. Bourassa: On verra la conclusion des négociations. Mais
ce que je veux dire, c'est qu'il faut faire une distinction très nette.
On peut toujours faire de la démagogie facilement, mais je me permets de
demander à l'Opposition, quand cela implique des individus qui ne
peuvent pas se défendre, d'être un petit peu plus vigilant. Alors,
ce que je dis, c'est que, dans le cas en question, leur travail de
bénévole continue; c'est une nouvelle formule que l'on entreprend
et qui va épargner des sommes énormes à l'État.
Mais quand ils doivent faire des études pendant des jours et même
des semaines, à ce moment-là ils ne peuvent pas, pour des raisons
que tout le monde va comprendre, travailler bénévolement. Alors,
c'est pour cela que je dis que l'accusation du député...
M. Brassard: Je ne fais pas d'accusation, je fais des constats,
c'est sûr...
M. Bourassa: D'accord.
M. Brassard: C'est sûr que c'est une nouvelle formule, mais
elle est un peu étrange dans le sens que c'est en tant que membres du
comité accomplissant bénévolement leur mandat qu'ils se
demandent, comme professionnels, des avis qui, là, peuvent être
rémunérés.
M. Bourassa: Vous avez un comité d'une demi-douzaine de
membres, puis à un moment donné ils peuvent dire dans un cas...
On connaît l'expérience de M. Dussault dans l'administration
publique, il a publié plusieurs volumes, tout le monde le
reconnaît, il a été sous-ministre de la Justice et il a
occupé plusieurs postes. S'ils ont besoin...
M. Brassard: Je ne mets pas en doute leur compétence.
M. Bourassa: D'accord. Je remercie le député de
Lac-Saint-Jean de reconnaître cet aspect-là. Donc, s'ils sont
compétents et s'ils travaillent en dehors du comité des
bénévoles, ils ont droit de demander des honoraires. Le reste,
c'est à discuter avec le Conseil du trésor, pour qu'il n'y ait
pas d'abus.
M. Brassard: Maintenant, juste une dernière question
là-dessus, le chef de l'Opposition l'a posée tantôt, je la
repose parce que je l'avais posée aussi la semaine dernière en
Chambre: Y a-t-il également d'autres membres d'autres comités -
là c'est celui sur la déréglementation, mais il y a
également celui sur la privatisation et un autre également sur
les fonctions de l'État -y a-t-il d'autres membres de ces comités
qui ont été appelés à fournir leurs avis
professionnels?
M. Bourassa: Non. Bien, M. Rivest fait partie d'un comité,
il dit non pour son comité. Pour la privatisation, je pourrais
vérifier et donner la réponse demain. Mais, en tout cas, pour le
comité...
M. Brassard: Juste...
M. Bourassa: Un instant. Dans le cas du comité sur la
privatisation, il y a Marcel Côté, qui est conseiller ou
secrétaire de ce comité-là. Dans son cas,
évidemment, il consacre énormément de temps...
M. Johnson (Anjou): II est rémunéré?
M. Bourassa: Oui, je crois qu'il devrait avoir une
rémunération.
M. Johnson (Anjou): Mais je voudrais simplement m'assurer, pour
ne pas que le premier ministre nous accuse d'être démagogues et de
nous en prendre à des gens qui ne sont pas présents... On se
comprend bient moi je m'en prends au premier ministre ici, je ne m'en prends
pas à M. Dussault, je m'en prends au fait que le premier ministre a
traîné dans la nature le fait qu'il y avait plein de
comités de gens qui bénévolement faisaient des choses,
puis on constate qu'il y a bien des gens compétents là-dedans,
puis qu'ils vont être payés pour ce qu'ils font.
M. Bourassa: Non...
M. Johnson (Anjou): Voilà, c'est cela qui est en
cause.
M. Bourassa: ...non, là je suis obligé
d'interrompre le chef de l'Opposition, je suis obligé d'interrompre le
chef de l'Opposition. Nous avons dit...
Une voix: Polisson.
M. Bourassa: ...quand même, je ne veux pas hausser le ton,
mais...
M. Johnson (Anjou): Vous pouvez essayer.
M. Bourassa: ...que le chef de l'Opposition lise le
communiqué qui a été rendu public: "Ces personnes - je
vais le relire, parce que cela a l'air qu'il ne l'a pas lu -
ont accepté de remplir leur mandat
bénévolement,...
M. Johnson (Anjou): C'est cela. Ce n'est pas nous autres qui
avons dit cela.
M. Bourassa: ...sauf le remboursement de leurs dépenses en
vertu des règlements en vigueur et une juste rétribution si elles
étaient amenées à fournir au gouvernement des avis dans le
cadre de leur profession." Il me semble que cela devrait clore le débat,
avec des excuses, si possible, de la part de l'Opposition.
M. Johnson (Anjou): Non. Cela nous dit juste, M. le
Président, que le premier ministre nous oblige toujours à aller
au-delà des virgules, on sait cela.
Le Président (M. Filion): Alors, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce, vous vouliez intervenir sur
cette question.
M. Scowen: Oui.
Le Président (M. Filion):Est-ce toujours votre
intention?
M. Scowen: Oui, très brièvement...
M. Johnson (Anjou): J'ai quatre autres sujets.
M. Scowen: Cela ne sera pas long. Je pense que j'ai le devoir
d'intervenir ici pour expliquer ce qui s'est passé dans le cas de ces
honoraires. Je dois vous dire que M, Migué et M. Dussault sont
très blessés par les questions et par les allusions qui ont
été faites à leur égard depuis maintenant quelques
jours. Le premier ministre a bien cité les règles du jeu et c'est
moi, après consultation, qui ait proposé à ces trois
personnes un tarif de 400 $ par jour. M. Langlois, qui est dans le secteur
privé, a un tarif normal de plus du double. Je dois vous dire que tous
les membres, dont M. Migué et M. Dussault, consacrent ce que
j'évalue à environ douze heures par semaine à la
préparation et à l'assistance à ces réunions. On se
rencontre une fois par semaine pendant huit heures, et il y a la lecture des
dossiers avant. Toutes ces heures qui vont monter à cinq ou six semaines
au total sont bénévoles. M. Migué et M. Dussault compris,
ils ne reçoivent pas un cent des fonds publics pour ces heures qu'ils
vont, je le répète, monter probablement à
l'équivalent de cinq ou six semaines de travail. L'État va
recevoir gratuitement le bénéfice de leur compétence pour
ces heures pour rien. Mais dans le cas de M. Dussault et de M. Migué,
j'ai vite constaté qu'on avait là deux personnes avec des
compétences énormes et le leur ai demandé de
préparer les dossiers, les documents, les textes qui pouvaient faire
l'objet de discussions pendant les réunions. Donc, M. Migué et M.
Dussault ont accepté de travailler la nuit et les week-ends - parce
qu'ils ont un travail régulier à l'ÉNAP - pour
préparer ces dossiers. J'ai proposé les 400 % parce que c'est
à peu près la moitié de ce qu'on peut recevoir normalement
pour les personnes de cette compétence dans le secteur privé.
J'ai proposé la moitié parce que, dans le cas de M. Migué
et de M. Dussault, j'ai constaté qu'ils reçoivent les services
des bureaux du secteur public, ce que, normalement, dans le secteur
privé, on est obligé de payer soi-même. Cela a
été refusé par le Conseil du trésor qui a
demandé des explications. Je cite exactement la réponse. Ils ont
dit de demander au ministère de fournir des justifications
supplémentaires à l'égard des honoraires de Me Dussault et
de M. Miqué puisqu'ils sont tous deux professeurs à
l'ÉNAP. Ils ont demandé ces justifications et j'ai l'intention de
défendre les 400 $ que j'ai proposés moi-même et
j'espère que je serai en mesure de persuader le Conseil du trésor
que, dans ces deux cas, en tenant compte de l'importance de ce comité,
c'est totalement justifié. J'espère que je peux avoir
l'approbation de l'Opposition à cet égard. J'espère que je
peux l'avoir aujourd'hui.
M. Brassard: ...influence sur le Conseil du trésor.
M. Johnson (Anjou): Non, pas tellement. Si on en avait,
d'ailleurs, cela ne serait pas mené comme cela.
M. Bourassa: Si mon adjoint parlementaire pose cette question,
c'est que vous donniez 1000 $ par jour dans certains cas.
M. Johnson (Anjou): Oui, mais on ne les appelait pas
bénévoles.
M. Bourassa: Non, non mais quand même.
M. Johnson (Anjou): Je veux dire: Tout est là.
M. Bourassa: Mais le chef de l'Opposition joue sur les mots.
M. Johnson (Anjou): Je disais oui... M. Scowen:
J'espère que le...
M. Johnson (Anjou): Mais ce que je comprends, c'est que le
premier ministre, peut-être, veut clore là-dessus. Je pense que
cela serait une bonne idée...
M. Bourassa: Oui et je vous comprends...
M. Johnson (Anjou): ...pour lui...
M. Bourassa: Oui, je vous comprends...
M. Johnson (Anjou): ...parce qu'on pourrait continuer longtemps
là-dessus. Ce que je comprends pour l'essentiel, c'est que Me Dussault,
M. Migué, Me Reynold Langlois qui, d'ailleurs, va peut-être
être appelé bientôt à plaider contre vous dans
quelque chose...
M. Bourassa: Ah! Vous êtes au courant, vous êtes au
courant.
M. Johnson (Anjou): ...à titre d'avocat, ou contre un des
ministres, dans ses fonctions... Qu'on se comprenne bien. Je comprends que ces
gens vont nous fournir des avis extrêmement intéressants et
"knowledgeable", pour bien me faire comprendre. Je comprends que cela ne
coûtera pas cher d'après ce que nous dit le député
de Notre-Darne-de-Grâce. 400 $ par jour venant de gens qui ont
l'expérience qui normalement pourrait les amener dans le privé
à avoir un tarif de 1000 $ par jour, ce n'est pas cher. Je vous dis:
Peut-être que vous ne trouvez pas cela cher par rapport au privé,
mais ce n'est pas du bénévolat. Voilà, c'est tout.
M. Bourassa: M. le Président...
M. Johnson (Anjou): C'est parce qu'il y a un problème de
perception très sérieux...
M. Scowen: Est-ce que vous êtes capable de comprendre
qu'ils jouent deux rôles différents?
M. Johnson (Anjou): ...autour de cela, en ce moment.
M. Scowen: Est-ce que vous êtes capable de le comprendre?
Deux rôles différents.
M. Bourassa: Non, ils ne veulent pas comprendre pour des raisons
de politiques partisanes.
Une voix: Le deuxième rôle, ils se le donnent
eux-mêmes.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pourrais
peut-être passer à une autre sujet, si le premier ministre me le
permet, au sujet des...
M. Bourassa: Je voudrais juste clore, M. le Président,
parce que, là, le chef de l'Opposition ne veut pas comprendre, ne veut
pas lire ou ne veut pas écouter ce que j'ai mentionné
tantôt, que c'était prévu dans le communiqué qui
était annoncé que, s'il y avait des études, ils pouvaient
être rétribués. C'était écrit, c'était
annoncé.
M. Johnson (Anjou): C'est ça.
M. Bourassa: On ne peut pas dire qu'on a essayé de
camoufler quoi que ce soit ou qu'on a trahi le mandat qu'on avait
annoncé. On n'a pas exclu dans leur travail...
M. Johnson (Anjou): Mais vous avez fait tout un plat du
bénévolat, par contre, publiquement. Alors, voilà!
M. Bourassa: Bien, quand même, un plat... Vous faites des
plats sur tout et sur rien. Vous en avez fait sur la taxe sur les enfants, des
plats.
M. Johnson (Anjou): Bon! Je retiens bien ce que me dit le premier
ministre. Il considère que son plat sur le bénévolat est
l'équivalent de ce qu'il me reproche au sujet de la taxe sur les
enfants.
Le Président (M. Filion): M. le chef de l'Opposition,
est-ce que vous avez d'autres questions?
M. Johnson (Anjou): Oui, j'ai d'autres questions.
M. Bourassa: II est rappelé à l'ordre par son
collègue et ami.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, vous vous acquittez
bien de votre tâche. Pas bénévolement, à cette
commission, mais, enfin, vous vous en acquittez.
M. le Président, au sujet des jetons de présence,
rapidement. Est-ce que la politique, c'est en vertu d'un décret, la
décision qui a été annoncée, le
bénévolat pour les sociétés d'État?
M. Bourassa: Cela s'applique comme cela a été
annoncé.
M. Johnson (Anjou): À tout le monde, toutes les
sociétés d'Etat?
M. Bourassa: Sauf, je n'ai pas le communiqué, mais cela
s'applique... C'est la position de principe sauf que, dans certains cas, on a
admis que certaines personnes pouvaient être rétribuées
à raison de...
M. Johnson (Anjou): En vertu d'une règle
élaborée centralement ou dans chaque société
d'État?
M. Bourassa: Dans certains ministères, il peut y avoir des
conseils...
M. Johnson (Anjou): Par les ministères?
M. Bourassa: ...ou des comités consultatifs où,
à cause de l'importance ou des exigences du travail et des personnes qui
en font partie, cela pouvait être plus difficile dans ces cas-là
d'appliquer le bénévolat. C'est une position de principe qui va
épargner plusieurs millions de dollars, d'après ce qu'on m'a dit.
Je ne peux pas vérifier, mais cela va au moins épargner des
sommes très importantes au gouvernement. On peut...
M. Johnson (Anjou): C'est ça. Et quand c'est...
M. Bourassa: ...en faire de la partisanerie mais, avant de passer
à un autre sujet que je voudrais également discuter, les conflits
d'intérêts, j'aimerais bien dire au chef de l'Opposition que tout
cela était prévu, tout cela avait été
annoncé et qu'il n'y a donc absolument rien d'incorrect par rapport
à ce que nous avions dit. Personne n'a prétendu, jamais,
même quand je parlais des comités de bénévoles...
Quand le chef de l'Opposition me dit que j'en ai fait tout un plat, je n'ai
jamais prétendu quoi que ce soit contraire au communiqué qui a
été rendu public.
Alors, on passe à un autre sujet, M. le Président?
M. Johnson (Anjou): Bon, rapidement, toujours au sujet de
l'abolition des jetons de présence qui, apparemment, va nous faire
économiser des millions. Premièrement, si c'est prévu dans
la loi qu'il y a une rémunération, je présume que vous
allez déposer des projets de loi pour modifier les lois?
M. Bourassa: On posera les gestes nécessaires à cet
effet-là.
M. Johnson (Anjou): Oui. Je tiens cela pour acquis. Donc, cela
devrait venir avant le 15 mai?
M. Bourassa: Comme je le disais tantôt au chef de
l'Opposition, c'est une nouvelle formule probablement non seulement au
Québec ou ailleurs. On est très heureux que des dizaines de
personnes, des centaines acceptent de travailler bénévolement au
service de la communauté. Je pense qu'il devrait nous féliciter
plutôt que de couper les cheveux en quatre.
M. Johnson (Anjou): D'accord. II ne s'agit pas de cela, M. le
Président. C'est que, sans être cynique, je considère que,
oui, des gens peuvent avoir un sens de la responsabilité à
l'égard des questions collectives, y compris des sociétés
d'État, mais le danger, à mes yeux, d'abolir la
rémunération qui n'est souvent pas énorme, surtout compte
tenu de ce que les gens peuvent faire parfois dans le secteur privé et
ailleurs, pose la problématique d'établir une sorte de
créance de relations d'affaires entre des milieux et des
sociétés d'État et que cela devienne un club
extrêmement sélect auquel n'ont pas accès peut-être
un certain nombre de personnes qui n'ont pas les moyens d'y aller passer des
journées sans se faire payer. Quant à moi, cela rejoint toute la
problématique des comités.
M. Bourassa: Mais, c'est pour cela qu'il y a plusieurs
exceptions. C'est ce que j'ai dit tantôt au chef de l'Opposition quand il
m'a demandé si cela s'appliquait en tout temps, à tout le monde,
dans tous les ministères. Il y aura plusieurs exceptions pour les
raisons que vient de mentionner le chef de l'Opposition.
M. Johnson (Anjou): Je souhaite bonne chance au premier ministre
là-dessus.
Sur le plan des règles - comment dirais-je? - d'éthique,
non pas quant aux questions personnelles, etc., mais sur le plan presque, des
loyautés que quelqu'un doit à celui au ceux pour qui il
travaille, est-ce que le premier ministre ne voit pas des difficultés
dans le fait, par exemple, qu'un homme remarquable, qui a fait sa marque, M.
Pierre Lortie, soit à la fois président d'un comité
très impartant au niveau du libre-échange sur le plan canadien,
soit également membre du comité bénévole sur les
fonctions et l'organisation de l'État, du gouvernement du Québec
et, en plus de cela, qu'il soit appelé à donner des cours
à des attachés politiques du gouvernement pour leur faire
profiter de l'expérience que lui a eue à l'époque
où il était attaché politique? (17 h 15)
Est-ce qu'il ne voit pas là des situations qui pourraient
être embarrassantes pour le gouvernement au moment où, par
exemple, le gouvernement du Québec et te gouvernement
fédéral ne s'entendent pas autour de quelque chose d'assez
fondamental dans les questions du libre-échange? Cette
multiplicité des chapeaux qu'on porte, je comprends que c'est innovateur
et qu'on est dans le chaos créateur et dans les exceptions, mais est-ce
qu'il y a un certain nombre de balises et de règles que le premier
ministre se donne pour éviter des situations qui pourraient être
extrêmement embarrassantes pour le gouvernement comme pour les
individus?
M. Bourassa: II s'agit, M. le Président, d'établir
là où il y a un conflit d'intérêts.
Évidemment, on peut toujours présumer la culpabilité.
M. Johnson (Anjou): Mais non, il ne s'agit pas de faire cela.
M. Bourassa: Mais je réfère le chef de l'Opposition
à d'autres pays, dont notre voisin, les États-Unis, où on
doit observer ce genre de services plus ou moins bénévoles qui
sont accordés. On sait que les hommes ou les femmes qui ont
occupé des postes très importants, comme membres du cabinet des
présidents américains, le faisaient très souvent à
des salaires assez inférieurs et bien inférieurs à ce
qu'ils pourraient obtenir. J'ai rencontré, au mois de février,
par exemple, le président de la Federal Reserve Board, M. Paul Walker.
Je ne veux pas faire du "name dropping" au chef de l'Opposition, mais on
connaît le salaire de M. Walker...
M. Johnson (Anjou): C'est moins qu'un sénateur!
M. Bourassa: C'est 65 000 $ environ, moins même que le
salaire du chef de l'Opposition, alors qu'il se trouve à être
responsable de l'ensemble de la politique monétaire américaine,
avec des effets très importants sur l'économie mondiale. On
n'innove pas à ce point quand on arrive avec ce système au
Québec. Mais je suis d'accord avec le chef de l'Opposition qu'il faut
l'appliquer avec prudence et avec lucidité. Mais je pense que cela vaut
la peine d'essayer et j'espère que le chef de l'Opposition va être
d'accord avec moi.
Relations entre le bureau du
premier ministre, l'exécutif
et la haute fonction publique
M. Johnson (Anjou); M. le Président, rapidement, un autre
sujet avant de passer aux directives et au dossier jeunesse: c'est les
relations entre le bureau du premier ministre, son gouvernement et la fonction
publique, dont je m'inquiète. Le premier ministre nous citait un
article, dans le journal, établissant la douceur, la quiétude et
la normalité de la transition.
M. Bourassa: C'était un article très
fouillé.
M. Johnson (Anjou): Qui était un article très
fouillé, mais ce qui est en même temps, j'ai l'impression, une
claque en plein visage à l'égard d'un certain nombre d'autres
personnes. Je lis, ici, le Soleil du 25 février: "Des centaines de
cadres seraient dégommés". Je lis la Presse...
M. Bourassa: Seraient!
M. Johnson (Anjou): Oui, très bien, mais cela s'en vientl
Je lis la Presse, Montréal, le mercredi 5 mars: "La faucheuse frappe
à l'agriculture." Je lis le Soleil du 16 janvier: "Jack Warren,
conseiller sur le libre-échange avec les USA; les nominations
provinciales, elles vont commencer à tomber comme de la manne." Je lis
le Soleil du jeudi 20 février: "Le sous-ministre Yves Martel victime de
la purge libérale". Je lis le Soleil du 21 février:
"L'agriculture: Pagé fait sa purge". Je lis la Presse du 22
février: "Des lendemains qui déchantent". Je lis la Presse du 22
mars: "Bourassa écarte des sous-ministres et les remplace par des
partisans". Je lis: "Le sous-ministre du Revenu victime de la purge
libérale", toujours dans le Soleil du 28 mars. Je lis: "Nouvelles
nominations à Québec: Bourassa choisit des libéraux"; dans
le Devoir, cette fois-ci, du premier avril. Montréal, le mercredi 9
avril: "être compétent et libéral"; ce qui n'est pas
incompatible, je n'en disconviens pas, mais ce qui n'est pas obligatoire. La
Presse du samedi 23 novembre 1985: "La fonction publique: pas question de
purge", nous disait le premier ministre, à l'époque.
M. le Président, je suis inquiet! Je suis inquiet de
l'atmosphère qui règne dans cette ville. Il s'agit d'y passer
quelques heures par semaine pour s'en rendre compte. On doit, dans certains
cas, rencontrer les gens dans un contexte incroyablement discret, des gens
hésitant même à s'afficher près des
députés de l'Opposition au Café du Parlement. Je
considère qu'à l'égard de la haute fonction publique,
notamment, la foire d'empoigne entre la ministre des Affaires culturelles et
vice-première ministre et un certain nombre de dirigeants d'organismes,
non seulement manque d'élégance, mais également est
préoccupante quant au type de respect auquel on doit s'attendre, dont
doivent bénéficier, je crois, des serviteurs loyaux de
l'État. Il ne faudrait quand même pas que la nouvelle règle
au Conseil exécutif soit d'établir de facto que le traitement
à l'égard d'un haut fonctionnaire sera relié directement
à sa perspective de carrière et que sa perspective de
carrière soit reliée directement à un changement de
gouvernement. Ce n'est pas comme cela que cela se passe, au Québec,
depuis vingt ans. On a mis de l'ordre là-dedans au début des
années soixante, et il faudrait s'assurer, M. le Président...
J'entends quelques rires gras d'un député qui n'est pas au
Conseil des ministres et qui n'y sera sûrement pas avec ce genre
d'attitude.
M. le Président, il y a effectivement un respect de l'appareil de
l'État qui a animé les gouvernements depuis une quinzaine
d'années. En ce moment, on assiste à un climat qui est
préoccupant. Il est préoccupant parce que, à notre avis,
le premier ministre, toujours en nommant ses comités
bénévoles, semble les écarter carrément du
processus décisionnel; quand il laisse circuler le type de rumeurs que
nous entendons depuis un certain temps, ce n'est pas rassurant pour la haute
fonction publique. La haute fonction publique a non seulement
droit au respect des élus. Je sais que la seule mention d'un
certain nombre d'organismes relevant de l'État fait des gorges chaudes
dans les milieux du caucus libéral parce qu'on accuse des endroits
d'être des nids de péquistes, dans une mentalité, quant
à moi, de kolkhoze qui est dépassée, au Québec Je
me préoccupe de voir le rôle qu'entend faire jouer à la
haute fonction publique le premier ministre, notamment dans
l'établissement des nouvelles priorités qui amèneront, de
toute évidence, selon ce que nous annonce le premier ministre, des
réorientations profondes de l'État.
À mon avis, si l'on veut que ces réformes soient un
succès pour le gouvernement et pour le Québec, si elles doivent
l'être, il faut que nos fonctionnaires, et particulièrement notre
haute fonction publique, soient partie prenante à ce type de
décisions, car c'est cette fonction publique qui, dans le quotidien,
administrera, verra à l'application de ces réformes. Je
considère que depuis un certain temps, malgré le fait que le
premier ministre peut bien se réfugier derrière l'article qui
fait son affaire, de toute évidence il a déjà le syndrome
du bunker et de l'isolement s'il ne s'est pas rendu compte que sur la
Grande-Allée et ailleurs à Québec cela préoccupe du
monde, en ce moment.
M. Bourassa: Je vais répondre, M. le Président, au
chef de l'Opposition. Il a choisi toute une série d'articles, de
nouvelles...
M. Johnson (Anjou): ...que les autres, peut-être.
M. Bourassa: Non, on n'est pas pour mettre les journalistes sur
la sellette, mais il faut quand même faire une distinction entre des
analyses et des articles. Quand, par exemple, on annonce: Bourassa choisit des
libéraux - ce n'est pas un crime - mais quand on lit l'article et qu'on
voit que c'est Jean-Marc Léger qui est nommé Commissaire
général à la francophonie, très compétent et
très qualifié... À ma connaissance, M. Léger n'a
jamais eu une carte du Parti libéral.
Je voudrais ajouter au chef de l'Opposition que ce n'est pas parce que
quelqu'un est libéral ou péquiste qu'il est nécessairement
inefficace. Je donnerais un exemple qu'a bien connu le chef de l'Opposition: un
membre actif du Parti québécois, mais qui, en même temps, a
été l'un des serviteurs de l'État les plus efficaces qu'on
ait eus. Je n'ai qu'à mentionner son nom, Louis Bernard, qu'a bien connu
le chef de l'Opposition. Je ne pense pas que le gouvernement du Parti
québécois ait eu à se plaindre du travail de M. Bernard,
mais tout le monde savait qu'il était péquiste. Et je n'ai jamais
hésité à reconnaître sa compétence. Donc, il
ne faut pas automatiquement lier incompétence avec membre d'un parti.
Pour convaincre le chef de l'Opposition, je lui donne un exemple qu'il
connaît bien.
Ceci dit, je crois que, depuis quatre ou cinq mois - depuis quatre mois
et demi -nous avons essayé de procéder à des
décisions qui permettaient à la fois un renouvellement de la
fonction publique... Après tout, on a été élus sur
le changement. Le chef de l'Opposition lui-même, le soir des
élections, a dit: On a été battus parce que les gens
voulaient du changement. Le changement, cela ne se limite pas uniquement au
personnel politique. Il peut y en avoir également des changements dans
le personnel de la fonction publique. Je crois que nous avons agi avec prudence
et modération. Et c'est pour cela que j'ai cité une analyse, non
pas une nouvelle avec des conditionnels et des termes dramatiques, mais une
analyse qui a examiné tous les cas. Ceci c'est fait sous la direction de
M. Roch Bolduc qu'a bien connu, probablement, le chef de l'Opposition, qui est
dans la fonction publique québécoise depuis au moins 25 ans, qui
est respecté et reconnu dans toute la fonction publique
québécoise. Il peut arriver qu'il y ait eu des cas... On ne dit
pas qu'on a été à 100 % dans tous les cas...
Immanquablement, il a pu se glisser des erreurs. C'est normal. Il n'y a rien
d'étonnant.
Mais, dans l'ensemble des décisions qui ont été
prises, je suis convaincu que nous avons agi avec modération et avec
sagesse. Est-ce que cela répond à l'inquiétude du chef de
l'Opposition?
M. Johnson (Anjou): Non. Dans le fond, le premier ministre me
renvoie simplement au fait que, ma foi, il y a peut-être eu quelques
erreurs.
M. Bourassa: Mais je ne dis même pas qu'il y en a
peut-être, je ne suis pas sûr, j'attends encore qu'on me donne un
cas.
M. Johnson (Anjou): II n'est même pas sûr.
Une voix: M. Lefrançois, Mme Leduc.
M. Bourassa: Mais vous n'êtes pas au courant de tout ce qui
s'est passé.
M. Johnson (Anjou): Oui, il y en a quelques-uns. Ah! il y en a
plus?
M. Bourassa: Non, non, mais il mentionne des noms. Je veux dire
qu'il y a deux cotés à la médaille.
M. Boulerice: Dans le cas de Mme Leduc, pour moi cela ressemblait
à une convention dans un comté voisin du mien,
mais c'est une autre histoire.
M. Johnson (Anjou): Évidemment, il y a quand même un
certain nombre de nominations partisanes, le premier ministre le
reconnaît.
M. Bourassa: Comme il y avait treize sous-ministres adjoints qui
provenaient directement du personnel politique du Parti
québécois.
M. Johnson (Anjou): Et il y a eu l'inverse aussi.
Des voix: Ah!
M. Bourassa: Mais je ne veux pas insister là-dessus, M. le
Président, parce qu'on manque detemps.
M. Johnson (Anjou): Mais est-ce que vous êtes en train de
me dire... Mais, avec plaisir, avec plaisir, si le premier ministre veut
revenir là-dessus, on va en discuter. On prendra le temps qu'il faut. Je
serais même prêt à étendre l'étude des
crédits durant toute la soirée, s'il le désire.
M. Bourassa: Non, on a un caucus ce soir et c'est important, un
caucus. Mais je donne cela, c'est juste pour dire...
M. Johnson (Anjou): Est-ce que le premier ministre est en train
de me dire que tous ceux qui, à un moment donné, dans leur
engagement dans les affaires publiques ont transité par le Parti
québécois, se sont joints aux rangs des serviteurs de
l'État à titre de sous-ministre adjoint ou d'administrateur
d'État, que, par définition, ils ont la tête sur le billot
en ce moment?
M. Bourassa: Non. J'ai dit tantôt au chef de
l'Opposition... Je lui ai donné un exemple qu'on pouvait être
membre du Parti québécois et bien servir l'État. Mais,
quand le chef de l'Opposition me dit qu'il y a des nominations de
libéraux, je lui dis qu'il y a treize sous-ministres adjoints qui
proviennent du personnel politique du Parti québécois et cela,
c'est inévitable. Aux États-Unis, quand il y a un
président républicain, à l'occasion il pourra avoir
recours à des démocrates, mais principalement ce seront des
républicains. Et vice versa.
M. Johnson (Anjou): Cela fait deux fois, M. le Président,
que le premier ministre nous cite les Américains, soit à ses
comités de bénévoles, maintenant c'est Je régime
présidentiel américain. Je n'aurais pas ha? un régime
présidentiel durant les dernières élections. M. le
Président, je vais passer aux directives.
M. Bourassa: Le chef de l'Opposition est un peu
prétentieux en fin de séance.
M. Johnson (Anjou): Ah! Vous savez, c'est parce que j'ai un bon
exemple devant moi. C'est par osmose, peut-être.
Le Président (M. Filion): Nous ne sommes qu'en milieu de
séance, M. le premier ministre.
Directives du premier ministre en matière de
conflits d'intérêts
M. Johnson (Anjou): On n'est qu'en milieu de séance, M. le
premier ministre. Les directives. Je sais que le premier ministre a un certain
nombre de choses à nous dire. Moi, j'ai surtout des questions à
lui poser.
L'objet d'une directive c'est de régir les intérêts
financiers ou les relations professionnelles ou d'affaires que les gens peuvent
avoir de façon à éviter toute crainte raisonnable de
partialité. C'est donc un objectif préventif, on le
reconnaîtra, et la confiance irréprochable qu'on doit avoir en nos
institutions, en nos élus et en ceux qui assument la direction de
l'exécutif dans notre système doit nous amener, je crois,
à être extrêmement rigoureux autour de ces questions.
Le fait est que les directives rendues publiques par le premier ministre
sont très différentes des directives précédentes.
Il le reconnaîtra. Je ne veux pas ici entrer dans le débat si, oui
ou non, des ministres doivent être propriétaires ou peuvent
détenir des actions de compagnies publiques. Nous avions fait le choix
que non, sauf exception, les exceptions étant divulguées, ies
exceptions étant connues publiquement. Mais je prends juste la logique
interne des nouvelles directives du premier ministre et je m'interroge sur un
certain nombre de choses.
La première, c'est la notion de fiducie. Je comprends qu'à
partir du moment où le premier ministre fait le choix que des membres du
Conseil exécutif peuvent posséder des actions publiques il faut
qu'il trouve un mécanisme de distance. C'est ce qu'on appelle le "blind
trust" ou la fiducie, ou le mandat sans droit de regard. (17 h 30)
Cependant, il n'est pas anonyme et je m'interroge sur cette dimension
des règles qui fait qu'un ministre peut désigner une personne
physique qu'il connaît, avec qui il peut entretenir une longue
amitié - histoire d'une carrière, d'une vie et d'une chose qui va
durer entre deux personnes - plutôt que de l'obliger à remettre
ses actifs entre les mains d'une entreprise, d'une institution
financière pour augmenter les garanties d'un certain anonymat et d'une
distance plus évidente entre le ministre et celles et ceux
qui ont à transiger de façon quotidienne ou occasionnelle
sur les valeurs qui sont, entre autres, cotées en Bourse.
Deuxièmement, je m'étonne du fait que le premier ministre,
dans ses directives, ait permis qu'un ministre puisse ajouter à la
fiducie. Je m'explique. Je comprends qu'un ministre peut avoir des actifs au
moment où il devient ministre. Le principe de la nouvelle directive, il
est là| on l'a remis en cause, mais il est là. Pourquoi
pourrait-il retirer de l'argent de la fiducie? Il peut en avoir besoin. Il
change de maison, il décide de se payer un voyage, d'acheter d'autres
équipements, etc. Parfaitement normal. Il peut retirer de l'argent de la
fiducie. Pourquoi lui permettre d'en ajouter? Car à partir du moment
où une personne devient ministre...
M. Bourassa: Mais s'il en retire et qu'il ne lui en reste plus,
il faut qu'il en remette. Oui, mais...
M. Johnson (Anjou): Ah, je regrette! À partir du moment...
La question que je pose au premier ministre, je la dis très simplement
et je voudrais qu'on discute sur le principe fondamental qu'il y a
derrière cela, à mes yeux. À partir du moment où on
devient membre du Conseil exécutif du gouvernement du Québec, on
devient ministre, c'est une "job" à temps plein. Il vous reste
peut-être quelques moments pour votre vie familiale et puis un peu pour
les loisirs, à l'occasion, pour les gens qui prennent cela au
sérieux, en tout cas. On n'est plus dans les affaires. On n'est plus
dans la "business". On n'est plus avocat. On peut rester membre du Barreau,
mais on ne pratique plus le droit autrement que dans ses fonctions de ministre.
On n'est plus un gestionnaire d'entreprise.
Qu'est-ce qui arrive à un autre citoyen soumis à nos
anciennes directives? Il était ministre et, s'il vendait sa maison et
qu'il faisait un profit de capital, un gain de capital important, à ce
moment-là, il prenait son argent et il achetait des obligations
d'épargne du Québec ou il mettait ça dans un compte en
banque ou il achetait des valeurs courantes. Pourquoi permettre à un
ministre qui, maintenant, est dans une "job" à temps plein, comme membre
du Conseil exécutif, de faire croître les biens qu'il a
placés au moment où il est entré dans le Conseil des
ministres? Je ne comprends pas la logique qu'il y a derrière cela, car,
à partir du moment où on est ministre, on ne doit faire que
ça. Si le ministre réalisait effectivement un gain de capital sur
une vente de propriété, de sa maison personnelle, par exemple,
qui, elle-même, n'est pas soumise à la fiducie, je vous le dis, il
achètera des obligations d'épargne du Québec comme tout le
monde. Pourquoi aller accroître cette fiducie, d'autant plus, je le dis,
que cette fiducie, parce qu'elle permet qu'une personne physique et non pas une
institution anonyme l'administre, pose tout le problème de la distance
qui doit exister? Je comprends que le règlement dit que les ministres
s'engagent à ne pas influencer, etc. Je comprends tout ça. On n'a
pas à faire de présomption de culpabilité.
M. Bourassa: C'est ce que fait le chef de l'Opposition depuis
cinq minutes.
M. Johnson (Anjou): Non, mais à partir du moment où
on sait qu'il y a une directive... Si vous prenez l'argument du premier
ministre qu'on n'a pas à faire de présomption de
culpabilité, il ne devrait pas y avoir de directive du tout. II faut
qu'il y en ait une. À partir du moment où il y en a une, il faut
qu'elle ait une substance. À partir du moment où elle a une
substance, il faut qu'elle obéisse à un certain nombre de
principes. Le principe de permettre qu'un individu soit le fiduciaire
plutôt qu'une corporation qui a un caractère plus anonyme et le
principe qui permet au ministre de réinjecter des sommes additionnelles
dans la fiducie m'apparaissent être des failles importantes dans la
logique interne même de la directive du premier ministre.
M. Bourassa: D'accord. Pour répondre au chef de
l'Opposition, je dois noter quand même que, et le député de
Lac-Saint-Jean et le chef de l'Opposition ont, à ce jour, traité
de cette question avec assez de sérénité et
d'objectivité. Cela étant dit, je suis obligé d'être
en désaccord avec plusieurs affirmations du chef de l'Opposition. Ce
n'est pas facile de légiférer l'honnêteté, comme je
l'ai dît à l'Assemblée nationale. J'ai essayé, avec
mes conseillers, d'arriver avec des directives qui soient réalistes.
Elles ne sont peut-être pas parfaites - tout est perfectible - mais j'ai
essayé d'arriver avec des directives qui soient réalistes et qui
n'incitent pas à toutes sortes d'accommodements pour respecter ces
directives ou qui ne forcent pas le chef du gouvernement à multiplier
les exemptions. Les 5 %, par exemple; le chef de l'Opposition sait fort bien
qu'il n'y aura pas beaucoup d'acheteurs qui vont être
intéressés à acheter 5 % d'une compagnie privée
d'un ministre qui doit s'en départir. Pour le faire, le ministre
pourrait être forcé de faire des ententes avec des proches et de
dire: Bien, je ne peux pas trouver d'acheteurs, qui va acheter 5 % d'une
compagnie privée? Je ne peux pas les vendre, qui va acheter cela?
Pourrais-tu les acheter en attendant, etc.? Cela créerait un état
de dépendance vis-à-vis de cette personne-là qui pourrait
le rescaper pour respecter les directives.
Je ne sais pas si le chef de l'Opposition me suit. Le raisonnement
derrière cela,
c'est que les directives ne soient pas telles qu'elles encouragent
à toutes sortes de stratagèmes détournés. Alors, je
crois que là-dessus, je n'ai pas vu beaucoup de commentateurs qui ont
critiqué cette disposition. Finalement, cela respecte l'esprit de la Loi
sur la Législature qui a été adoptée par un
consensus des deux principaux partis et qui disait que, si la transaction est
de bonne foi et s'il n'y a pas d'influence démesurée ou
d'influence identifiable, c'est acceptable. Je peux donner l'article de la loi,
le chef de l'Opposition est au courant, c'est dans l'article 65 de la Loi sur
l'Assemblée nationale sur les conflits d'intérêts. Alors,
j'ai voulu interpréter cet article-là. D'ailleurs, j'avais
déjà mentionné cette restriction en 1974.
Mandat sans droit de regard. Je pense que les gens sont d'accord,
maintenant que le RÉA est largement populaire dans l'ensemble de la
population du Québec, et surtout à la suite des exceptions qui
avaient été accordées par M. Lévesque, que
c'était justifiable.
Il y a deux autres questions que je voudrais aborder. Il y a la question
que l'on vient d'aborder sur l'identité du fiduciaire. Je crois qu'il
peut y avoir autant d'intimité entre une fiducie et un individu qu'il
peut y en avoir entre un comptable ou un ministre. Il n'y a pas de garantie
absolue que, dans le cas d'une fiducie, il n'y aura pas de relations cordiales.
L'expérience va démontrer la valeur des directives. Mais j'ai
fait confiance et je fais confiance à mes collègues; ils vont
respecter non seulement la lettre, mais l'esprit des directives. Et l'esprit
des directives, c'est de ne pas se placer en position de conflits
d'intérêts de quelque façon que ce soit. Et c'est pour cela
que j'ai décidé de ne pas limiter cela. Dans certains cas, les
biens pouvaient ne pas être suffisamment importants pour justifier les
frais d'un recours au trust. S'il y a quelques biens ou quelques actions que
veut garder un ministre à cause du RÉA, doit-il automatiquement
confier cela à une organisation comme un trust? Alors, c'est cela. On
verra si le règlement comme tel est suffisamment étanche.
C'est la même chose pour les biens à l'extérieur du
Québec. Là-dessus, j'ai tu plusieurs commentaires dans des
éditoriaux. Je le rappelle simplement parce que
l'intégrité, c'est peut-être le bien le plus
précieux de l'homme ou la femme politique. C'est pourquoi je peux
difficilement passer cela sous silence lorsqu'on se pose des questions sur ce
problème-là et d'une façon qui ne correspond pas aux
faits. Je dois dire que, dans le cas des biens à l'extérieur du
Québec, l'interdiction existe à l'article 2, sauf si ce sont des
résidences ou des biens qui leur appartiennent personnellement et non
susceptibles d'être transigés d'une façon
spéculative; et la divulgation existe à l'article 6. Donc, c'est
faux de dire que je permets aux ministres de faire commerce des biens à
l'extérieur du Québec. Ceux qui l'ont mentionné - il y en
a plusieurs - je me permets de leur signaler qu'étant donné qu'il
s'agit de l'intégrité des hommes publics et des femmes publiques
il y aurait peut-être lieu, à la première occasion, de
faire cette nuance-là.
Le Président (M. Filion): M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: M. le Président, je voudrais indiquer au
premier ministre, qui a l'habitude de citer souvent des articles de la
Presse...
M. Bourrassa: J'en ai cité un tout récent.
M. Brassard: ...que souventefois les observateurs et ceux qui ont
commenté cette question ont, la plupart, exprimé l'avis qu'ils
étaient, en général, d'accord avec les assouplissements
que vous avez apportés pour ce qui est des intérêts, des
avoirs et des actifs des ministres. Mais, ce que vous oubliez de mentionner, et
je pense qu'il est important de le dire, c'est que tous ces observateurs
également ont clairement énoncé et indiqué qu'au
chapitre de la divulgation il y avait ce qu'on pourrait appeler une carence en
matière de transparence. Il y avait une carence.
M. Bourassa: Pas tous, mais plusieurs.
M. Brassard: La plupart. Tous ceux que j'ai lus, en tout cas. Il
y avait une carence au niveau...
M. Bourassa: II y en a que vous n'avez pas lus.
M. Brassard: ...de la tranparence et au chapitre de la
divulgation, ce qui fait qu'il y a une face cachée de la lune dans cette
question-là, alors que cela n'existait pas dans la directive de l'ancien
gouvernement. Je donne juste quelques exemples: dans la directive de l'ancien
qouvernement, les conjoints et les enfants mineurs des membres du Conseil
exécutif déclaraient ce qu'ils détenaient dans des
compagnies publiques. J'ai revérifié cela et j'ai l'exemple de
Mme Marois, ministre de la Main-d'Oeuvre: son conjoint détenait beaucoup
d'actions dans un bon nombre de compagnies publiques, c'est indiqué,
c'est connu. Ce n'est pas gênant, cela. Il n'y a pas de honte à
cela, mais c'était clair, limpide, on le savait. C'était dans la
déclaration. Là, ce n'est pas le cas. On ne sait pas ce que
détiennent les conjoints et la famille immédiate des
membres du Conseil exécutif en matière d'actions de
compagnies publiques.
M. Bourassa: Pas privées.
M. Brassard: Mais oui, c'est cela, de compagnies publiques. Mais
dans l'ancienne directive, pour la famille immédiate, c'était
dans la déclaration du ministre. Donc, il y a là un manque de
transparence qui...
M. Bourassa: II n'y avait pas interdiction?
M. Brassard: Pardon?
M. Bourassa: Dans l'ancienne directive, il n'y avait pas
interdiction de faire des transactions?
M. Brassard: Le conjoint, la famille immédiate...
M. Bourassa: C'est cela. II n'y avait pas...
M. Brassard: ...ou les enfants mineurs pouvaient continuer de
détenir des actions des compagnies publiques, mais elles étaient
divulguées. C'était connu.
M. Bourassa: Oui, mais s'il n'y a pas interdiction, pourquoi y
a-t-il divulgation?
M. Brassard: Mais la divulgation... M. Bourassa: Oui, mais
quand même. M. Brassard: On le savait.
M. Bourassa: II faut être logique. Si c'est permis...
M. Brassard: C'était permis dans l'ancienne aussi; cela
n'était pas interdit pour un conjoint d'un ministre de détenir
des actions dans des compagnies publiques, cela n'était pas interdit.
Mais la directive disait; Dans la déclaration du ministre du membre du
Conseil exécutif, c'était déclaré, c'était
divulgué, c'était connu. Ce n'est pas le cas dans la vôtre.
C'est une des carences importantes.
M. Bourassa: Je reviendrai sur la question de la divulgation,
parce que j'avais déjà répondu au député
là-dessus en Chambre que, si la divulgation n'est qu'annuelle, comme
c'est ce que réclame le député, il peut y avoir toutes
sortes de transactions. Cela devient un trompe-l'oeil. La divulgation, à
ce moment-là, devient un trompe-I'oeil, parce qu'il peut y avoir toutes
sortes de transactions entre les deux années.
M. Brassard: C'est sûr qu'il peut y avoir des transactions,
mais dans la déclaration...
M. Bourassa: Oui.
M. Brassard: ...de l'année suivante, comme on
connaît la déclaration de l'année précédente,
on peut voir les différences qu'il y a dans le portefeuille.
L'autre point qui m'apparaît important, c'est que dans votre
propre directive vous indiquez, à l'alinéa 6 de l'article 6 sur
la divulgation, que dans sa déclaration le membre du Conseil
exécutif doit donner les détails du mandat sans droit de regard
conclu en conformité avec les dispositions de l'article 4. J'ai
regardé toutes les déclarations des membres du Conseil
exécutif et le seul détail qu'on a, c'est le nom du fiduciaire ou
le nom de l'institution financière qui est habilitée à
gérer les actifs. Cela m'apparaît un peu court comme
détail, un peu réduit comme détail. Dans l'article 6, vous
dites: "Les détails du mandat sans droit de regard". Je m'attendais
à retrouver les conditions du mandat dans lesquelles l'entreprise ou
l'institution financière ou la personne...
Et j'ai les mêmes réserves quand il s'agit d'une personne,
parce que les liens sont assez étroits. Je vous signale juste que, pour
ce qui est de M. MacDonald, ministre du Commerce extérieur, c'est un
individu, un avocat, Me Michel Vennat, et qu'on le retrouve également
nommé au comité sur le libre-échange. Alors, il y a des
relations très étroites entre les deux. Je ne vous dis pas que
votre directive qui dit: aucune influence sur les décisions relatives au
placement et sur la façon d'administrer les fonds va être
violée. Je vous dis qu'il peut y avoir des doutes qui surgissent dans
l'esprit de la population... (17 h 45)
M. Bourassa: II y en aura toujours, des doutes...
M. Brassard: ...à ce sujet-là. Mais, si vous aviez
exigé...
M. Bourassa: ...pour ceux qui veulent en avoir.
M. Brassard: ...que ce soit une institution financière
seulement qui soit fiduciaire ou mandataire, je pense que ce danger aurait
été écarté. Bref, M. le Président, je
continue de maintenir qu'en apportant des assouplissements - il y a en certains
qui, sans doute, et je le dis comme je le pense, sont acceptables - il m'aurait
paru, quant à moi, important et même essentiel qu'au chapitre de
la divulgation vous fassiez preuve de plus d'exigence, de plus de rigueur. Ce
n'est malheureusement pas le cas.
M. Bourassa: Le député de Lac-Saint-Jean s'en tient
à la question des actions de compagnies publiques. Je crois qu'il
admettra, parce que c'est là qu'il peut y avoir de l'influence, que,
pour les compagnies privées, il y a divulgation et il y a interdiction.
Le député sait fort bien qu'en pratique l'influence qu'on peut
avoir dans des compagnies publiques est très, très marginale.
M. Johnson (Anjou): Permettez-moi là-dessus, et le premier
ministre va comprendre: quand le gouvernement prend une décision sur le
plan du rééquipement des pâtes et papiers, je vais vous
dire, cela peut faire varier les cours de Domtar, merci!
M. Bourassa: Oui, oui.
M. Johnson (Anjou): Donc, on se comprend bien. C'est de cela
qu'on parle. Je pense que le premier ministre ne peut pas minimiser
l'importance des décisions d'un membre du Conseil exécutif en se
référant au concept de compagnies publiques. Le gouvernement,
toutes les semaines, prend des décisions d'une extrême importance
pour beaucoup d'entreprises qui sont publiques.
M. Bourassa: Justement, ces actions sont confiées à
des mandataires...
M. Brassard: Vous permettez?
M. Bourassa: Juste pour répondre au chef de l'Opposition,
ces actions sont confiées à des mandataires sans droit de regard.
Il n'y a pas possibilité pour un ministre, à ce moment-là,
d'intervenir ou d'influencer ces entreprises, c'est le mandataire sans droit de
regard. Il faut quand même présumer de l'honnêteté et
de la non-culpabilité de ceux qui agissent à l'intérieur
de ces directives. Il n'y a certainement aucune possibilité pour un
ministre qui confie ses actions publiques à un mandataire sans droit de
regard de pouvoir influencer, parce que le mandataire ne sait pas, lui, s'il va
se débarrasser de ses actions. S'il se débarrasse de ses actions,
comment pourrait-il influencer par des décisions l'avenir de cette
compagnie? Est-ce que le chef de l'Opposition me suit?
M. Johnson (Anjou): Oui, j'ai très bien suivi le premier
ministre, mais je pense que c'est le premier ministre qui ne me suit pas dans
mon raisonnement.
M. Bourassa: Non, mais...
M. Johnson (Anjou): II est dans sa logique à lui, mais ma
logique à moi est différente.
M. Bourassa: Oui, oui.
M. Johnson (Anjou): Elle dit que la notion d'"at arm's lenght"
que l'on retrouve dans la jurisprudence, pour moi, est moins assurée par
le fait que ce sont des individus... Voici un exemple et encore une fois il n'y
a pas d'accusation là-dedans, que l'on se comprenne bien! La notion
d'"at arm's length" entre un ministre et un avocat, qui par ailleurs travaille
à des dossiers qui relèvent de ce même ministre, n'est pas
aussi évidente que la notion d"'at arm's length", à distance,
entre un ministre et une compagnie qui s'appelle la fiducie X. Elle est moins
évidente, elle est moins manifeste et les occasions d'échanges
entre les personnes sont par définition beaucoup plus nombreuses. Vous
me direz que, si quelqu'un veut être malhonnête, il trouvera bien
les moyens et qu'on ne doit pas présumer, je suis entièrement
d'accord avec vous, de la culpabilité des gens. Je dis que le rôle
d'une directive comme celle-là, c'est d'établir la plus grande
distance possible, de poser le moins de situations de confusion. Je ne dirai
même pas de tentations, parce que, si j'utilise le mot tentations, les
gens vont dire que j'ai une présomption qu'il y a du monde qui va
être coupable. Mais le moins d'occasions de confusion. Je trouve, comme
le dit si bien mon collègue, que, dans le cas d'une fiducie, qui est une
institution financière, cela aurait été plus simple, plus
clair. Alors que, là, en permettant de confier cela à des
individus, cela fait des individus très, très près de la
personne et qui, même de par leurs activités professionnelles,
peuvent être en relation avec le ministre dans un secteur
déterminé. C'est un problème.
M. Bourassa: J'ai déjà mentionné au chef de
l'Opposition que j'avais décidé d'accepter cette formule pour les
raisons que je lui ai mentionnées. C'est évident que, si on veut
éliminer tous les risques de confusion, on va revenir à des
directives qui devront impliquer toutes sortes d'exceptions. Où se
trouve le dosage? J'ai essayé de procéder d'une façon
réaliste. J'en ai conclu qu'il pouvait y avoir des individus aussi
qualifiés que des fiducies pour agir: des professionnels, des avocats,
des comptables. J'en ai conclu également que, dans certains cas, il
pourrait arriver que les avoirs des ministres ne justifient pas le recours
à une institution fiduciaire, et c'est pourquoi j'ai
présenté cette formule qui me paraît une formule de
compromis. C'est l'expérience qui va déterminer si mon approche
est plus sage que celle du chef de l'Opposition.
M. Johnson (Anjou): J'espère que vous aurez raison.
Le Président (M. Filion): M. le député
de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: M. le Président, avant de poser ma
dernière question, juste un mot sur les exceptions, parce que le premier
ministre a l'air de prétendre qu'il y en avait un tas. Il n'y en avait
pas tant que cela, des exceptions. À ma connaissance il y en avait deux.
Pour M. Biron, c'était une exception pour ce qui est des délais.
M. Biron avait demandé des délais supplémentaires, plus de
soixante jours pour se départir de ses intérêts. L'autre
exception, c'est M. Martel, plus récent et on sait pourquoi. Il y a une
annexe à sa déclaration et on sait pourquoi il demande une
exception, c'est très clair, on connaît les intérêts
qu'il a, on connaît le nombre d'actions qu'il détient dans les
compagnies. C'est limpide. C'est une exception, mais il n'y en avait pas tant
que cela. À part M. Biron et M. Martel, je n'en connais pas
d'autres.
M. Bourassa: J'ai un autre cas, mais on n'est pas pour amener
cela sur la place publique.
M. Brassard: Vous avez l'air de prétendre qu'il y en avait
beaucoup. Il n'y en avait pas tant que cela.
M. Bourassa: II y en a plusieurs et il y en aurait eu plus
peut-être si... Bon.
M. Brassard: M. Biron finalement s'est conformé. On lui a
accordé un délai supplémentaire et il s'est
conformé,
M. Bourassa: Si vous parlez de M.
Biron, il y a d'autres cas où les conflits
d'intérêts étaient en cause, mais on ne parlera pas de
cela.
M. Brassard: Ma dernière question, M. le Président,
c'est la suivante: Est-ce que le premier ministre consentirait à
déposer, conformément à sa propre directive, les
détails des mandats sans droit de regard?
M. Bourassa: Moi, j'ai mon mandat ici. Si vous voulez, je vais
déposer le mien. Je vais en discuter au Conseil des ministres, puis je
pourrai aviser.
M. Johnson (Anjou): Conformément à la directive,
normalement il devrait figurer dans les déclarations des ministres. La
directive prévoit à 6.6...
M. Bourassa: J'ai le mien ici.
M. Johnson (Anjou): ...que le détail des mandats doit
figurer dans la déclaration et on ne le retrouve pas.
M. Bourassa: Le détail des mandats.
C'est le détail des mandats que vous voulez?
M. Johnson (Anjou): C'est cela. Je présume que cela peut
varier d'un fiduciaire à l'autre. C'est fort possible.
M. Bourassa: Moi, j'ai un mandat du Trust général
du Canada. Je n'ai pas d'objection quant au mien.
M. Johnson (Anjou): Vous n'avez pas pris un individu, vous avez
pris une institution. Je reconnais la prudence du premier ministrec
Une voix: C'est parce qu'il en avait trop.
Le Président (M. Filion): Voulez-vous le déposer
maintenant?
M. Brassard: On aurait dû suivre votre exemple.
M. Bourassa: Merci.
Le Président (M. Filion): Le déposez-vous
maintenant, M. le premier ministre?
M. Bourassa: Non, je vais...
M. Johnson (Anjou): M. le Président, comme il reste...
M. Bourassa: Juste trente secondes. Donc, si je comprends bien,
pour la question des 5 %, pour la question du mandat sans droit de regard, pour
la question des biens à l'extérieur du Québec,
l'Opposition...
M. Brassard: J'ai une question sur les 5 %.
M. Bourassa: Oui.
M. Brassard: Est-ce que c'est cumulatif? Parce qu'il y a de
l'ordre de 5 %...
M. Bourassa: Dans man esprit, non.
M. Brassard: ...pour les membres du Conseil des ministres et il y
a 5% pour la famille immédiate. Est-ce que cela peut s'additionner?
M. Bourassa: Non. Dans mon interprétation, et c'est moi
qui les interprète, c'est non. Là-dessus et sur les biens
à l'extérieur du Québec - j'y reviens parce qu'on a
interprété cela d'une façon inexacte - je crois que
l'Opposition est d'accord avec les directives. Elle n'est pas d'accord sur le
type de mandataire et sur tes modalités de la divulgation pour les
actions publiques. On verra, à l'expérience, s'il y a lieu de
modifier la situation.
Johnson (Anjou): M. le Président, est-ce qu'on peut passer
au dernier sujet?
M. Brassard: Et s'ily avait possibilité, bien
sûr, de déposer les mandats. Vous allez en discuter?
M. Bourassa: Au Conseil des ministres, oui.
Le Président (M. Filion): M. le chef de l'Opposition.
Le dossier jeunesse
M. Johnson (Anjou): Oui, M. le Président. J'aimerais qu'on
s'entretienne un peu du dossier jeunesse. C'est toujours la même chose.
On voulait garder presque une heure, mais on garde, quand même,
trente-cinq minutes. Je pense que le premier ministre a, quand même,
jusqu'à six heures trente.
M. Bourassa: Oui.
M. Johnson (Anjou): D'accord, parce qu'initialement on devait
avoir trois heures; on règle pour deux heures et trois quarts.
M. Bourassa: Je suis prêt à collaborer avec le chef
de l'Opposition, comme depuis le début de la séance.
M. Johnson (Anjou): Oui, je sais cela. Je sais que cela a ses
limites, cependant. M. le Président, je voudrais parler un peu du
dossier jeunesse au premier ministre. À ma connaissance, il est toujours
responsable de ce dossier jusqu'à ce qu'il crée un
ministère, je crois, d'ici quelques semaines. Il doit créer un
ministère de la Jeunesse.
M. Bourassa: J'ai déposé un projet de loi sur le
Conseil permanent de la jeunesse; je n'ai pas parlé de création
d'un ministère.
M. Johnson (Anjou): Vous n'en avez pas parlé, mais cela
s'en vient quand même.
M. Bourassa: J'ai parlé d'un Conseil permanent de la
jeunesse.
M. Johnson (Anjou): Bon, d'accord. M. le Président, je
serais bien tenté de revenir sur ce qui s'est passé pendant la
campagne électorale, mais on l'a dit, redit et je présume que
cela a été compris, en tout cas tout au moins entendu.
Je constate, M. le Président, juste à travers le prisme
d'une analyse très rapide -on l'a faite en profondeur, mais je vais la
donner très rapidement pour les besoins de notre discussion - qu'un peu
de la même façon que les coupures annoncées par le
gouvernement vont avoir des effets, je crois, dans les régions à
cause de l'effet cumulatif dans chacun des secteurs des instruments qu'on
touche, malheureusement, je crois que le gouvernement, jusqu'à
maintenant, en espérant que les choses changeront, à cause du
caractère indistinct de ces coupures fragilise encore plus ces
clientèles à qui il a tant promis parce qu'il est sensible
à la réalité de cette génération, comme je
le suis. Mais il leur a promis beaucoup de choses. Je constate qu'il y a 1600
postes d'occasionnels, dans la fonction publique, qui étaient en
majorité occupés par des jeunes, qui ne seront plus là. Je
constate qu'on a aboli les centres de placement Travail-Québec en milieu
scalaire. C'était le relais pour bien du monde entre le cégep ou
l'université et le marché du travail. En plus de cela, ceux et
celles qui occupaient les postes, souvent comme occasionnels, pour le
ministère du Travail, étaient également des jeunes.
C'était un lieu qui permettait, devant un marché qui s'est
refermé de plus en plus, qu'il y ait là quelques avenues, un
certain nombre de solutions à des problèmes très concrets
pour le monde qui était au cégep, à l'école
secondaire ou à l'université. Je constate également qu'on
n'a pas encore vu l'ombre de la queue de la grande politique de recyclage qui a
été annoncée tambour battant. Je présume que cela
viendra avec le temps, peut-être dans le discours sur le budget.
Peut-être plus tard!
Je constate également qu'en matière de prêts et
bourses le ministre de l'Éducation peut nous faire son festival
humoristique comme il nous le fait depuis quelque temps... Et c'est vrai qu'il
est très drôle, il faut dire qu'il est très
drôle.
M. Bourassa: Oui, c'est surprenantl
Une voix: Excellent!
Une voix: II est très drôle!
M. Johnson (Anjou): Oui, c'est cela. Il a un côté
jovialiste, un peu, dans son approche, mais il reste quand même
qu'objectivement il...
M. Bourassa: Vous l'accusiez d'être calviniste!
M. Johnson (Anjou): Ah non! Je ne l'ai jamais accusé de...
Jamais je n'oserais! Le ministre de l'Éducation peut bien nous faire son
festival de l'humour à toutes les périodes de questions, mais
fondamentalement il a coupé dans les prêts et bourses. Je
comprends que le chiffre absolu va augmenter, il y a plus d'étudiants et
c'est un programme normé, mais il reste qu'objectivement le niveau
d'endettement des étudiants devra
augmenter.
L'aide sociale, la parité, ensuite la parité
inconditionnelle, ensuite, la parité peut-être conditionnelle,
ensuite, le silence et maintenant l'inaction! L'inaction. On attend la grande
réforme de l'aide sociale du député de Brome-Missisquoi,
le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, de
l'Habitation, non, de l'inspection du bâtiment, de la concertation du
travail et de la sécurité du revenu» Je ne sais pas s'il va
avoir le temps de s'occuper de la réforme de l'aide sociale. Pendant ce
temps-là, les jeunes attendent. Les frais de scolarité en milieu
cégépien - on le voit, en ce moment - pour les cours
d'été sont augmentés et on a toute la problématique
autour des frais de scolarité dans les universités. On sait qu'il
y a un problème de financement des universités et on n'aimerait
pas que cela soit pris à la pièce. La solution, c'est qu'on va
doubler les frais de scolarité demain matin. C'est évident que
cela a l'air d'une belle solution pour le ministre des Finances, mais il y a un
objectif qui s'appelle "jeunesse", là. Comment cela va-t-il être
intégré?
Les maisons de jeunes qui voient leur budget réduit, des
entreprises communautaires de jeunes qui ont décidé de faire
autre chose que tirer un joint quand ils sont mal pris, qui se sont
organisés, qui ont trouvé une bâtisse, qui travaillent avec
les marchands du coin. J'en ai visité quand j'étais ministre des
Affaires sociales. Et un marchand du coin qui avait fourni l'espèce de
buffet relativement simple, mais sympathique, de fromages et de liqueurs douces
avait dit: Moi, je viens ici et je fais cela pour rien. Savez-vous pourquoi?
Parce que, à la maison de jeunes, ici, ce sont des jeunes qui se
retrouvent, qui font des spectacles ensemble, qui règlent quelques
problèmes, qui se parlent entre eux. Pendant ce temps-là, ils ne
sont pas tentés de venir faire mon dépanneur le soir! C'est une
réalité vraie dans certains coins. Les maisons de jeunes, cela
aide à sortir du monde de la délinquance! Les maisons de jeunes
sont coupées.
Et le Comité de l.a protection de la jeunesse, on n'en parle pas.
On va nous parler, évidemment, des comités et dire qu'il y en
avait trop, etc., mais on envoie M. Tellier à la Commission des affaires
sociales et on abolit le Comité de la protection de la jeunesse. On
donne des mandats encore plus gros à la Commission des droits de la
personne qui va être aux prises avec l'application des règlements
sur la discrimination positive et on s'imagine qu'elle va s'occuper de la
protection de la jeunesse en même temps. (18 heures)
Je suis un peu déçu de voir le peu de vision
intégrée qu'on a, compte tenu des espoirs considérables
que le premier ministre et son équipe, l'ancien député de
Viau, qui maintenant pourra y travailler à temps plein au Conseil
exécutif, avaient soulevée.
Quant à la Corporation investissement jeunesse, j'aurai quelques
questions pour le premier ministre. Le premier ministre sait fort bien que la
Corporation d'investissement jeunesse, au moment où j'ai quitté
le gouvernement ou au moment où il a pris la direction du gouvernement,
était très avancée. Il se rappellera qu'à la
mi-décembre je lui avais transmis copie d'un dossier dans lequel on
énumérait l'ensemble des étapes qui étaient
impliquées dans cet effort qui, pour moi, était une
réponse que je croyais voir le milieu des affaires apporter
concrètement. Au lieu du discours, au-delà du "placotage" qu'on
entend souvent autour de ces questions, qu'est-ce que vous pouvez faire, vous?
M. Desmarais, à Power Corporation, on le sait, a des quantités de
liquidité considérables de ce temps-ci, surtout depuis le
jugement du CRTC Je pense qu'il peut être utile. Il en a la
capacité. Je crois qu'il en a la volonté, comme beaucoup
d'autres. Il s'agissait de confier une responsabilité du milieu des
affaires à l'égard des jeunes entrepreneurs et des jeunes qui
veulent entreprendre. Il y a, là aussi, un véhicule au niveau
d'un certain nombre de valeurs, qui était un véhicule juste et
d'un bon registre.
La Corporation d'investissement jeunesse avait déjà fini,
au stade où je l'ai laissée au premier ministre, la
définition de son rôle, de ses principes, de ses objectifs. Elle
avait déjà élaboré un certain nombre de choses
autour du lieu d'accueil des jeunes, des projets, des critères
d'admissibilité et de sélection des projets, du type d'aide que
la corporation pourrait apporter aux jeunes promoteurs, la participation des
groupes-conseils, des organismes régionaux dans les mécanismes de
support technique et le tamisage des projets, enfin, tout ce qui concernait le
fonctionnement interne de la corporation, notamment, son aspect légal de
financement et de régionalisation. Depuis ce temps, pas de nouvelles.
Est-ce que le premier ministre a rencontré les gens du milieu des
affaires que j'avais réunis? Est-ce que ça va finir par aboutir?
Je dois dire au premier ministre même qu'il arrive qu'à mon bureau
j'ai des appels de jeunes qui me disent: Où est-ce qu'on s'adresse pour
la Corporation d'investissement jeunesse? Si elle était
créée, je dirais: Vous vous adressez à la corporation,
mais là, en ce moment, je ne sais même pas où les envoyer.
Ce n'est sûrement pas moi qui vais la faire, je ne suis plus au
gouvernement. J'aimerais ça, par exemple. On va y voir plus tard. On va
travailler fort pour arriver là et on va compter sur vous pour vous
occuper du reste. De fait, il y en a qui attendent. Il va falloir que le
gouvernement réponde. D'autant plus que je crois que le premier ministre
avait
reconnu, au mois de décembre, qu'il accepterait de continuer ce
projet que j'avais mis sur pied dès que j'ai été
élu premier ministre, en dépit d'un certain nombre d'exercices
auxquels s'étaient livrées quelques personnes qu'il
connaît, pour que cela n'aboutisse pas trop vite avant l'élection.
Je sais que le premier ministre a pris cet engagement qu'il y verrait.
Maintenant, je suis préoccupé, je veux savoir où c'est
rendu, c'est pour quand et c'est combien? Est-ce que c'est un projet de loi?
Est-ce qu'il y a des modifications fiscales? Est-ce que ça va finir par
décoller?
M. Bourassa: Je remercie le chef de l'Opposition de ses propos.
Je veux juste, d'abord, clarifier un point, parce qu'il a dit que la
présidente de Forano faisait partie de son comité. J'ai la liste
des membres du comité ici. MM. Desmarais, Pierre Laurin, Pierre
Péladeau, André Bisson, Laurent Beaudoin, Serge Saucier, Marcel
Savard, Bernard Lamarre, le sénateur Colbert, Pierre Ducros et Yvon
Martineau. Il n'y a pas de femmes dans ce comité.
M. Johnson (Anjou): Cela, c'est un exécutif qu'ils se sont
donné. Au comité que j'ai réuni, ils étaient 18.
C'est un groupe de travail qu'ils se sont donné par la suite.
M. Bourassa: Le premier ministre du temps n'a pas vu à ce
qu'il y ait une représentation féminine au comité?
M. Johnson (Anjou): Cela s'est fait au moment de la transition,
la formation du comité. Voilà, "tough luck".
J'aimerais ça que vous en veniez à la question, par
exemple. Non, mais c'est parce qu'on peut s'amuser comme ça pendant un
quart d'heure, mais qu'est-ce qui se passe avec la Corporation d'investissement
jeunesse?
M. Bourassa: Encore une fois, je vais faire plaisir au chef de
l'Opposition. Je n'en parle plus. Je ne parlerai pas de cette question, parce
que je m'aperçois qu'il est un peu mal à l'aise. Disons que c'est
simplement pour rectifier.
Une voix: Un peu beaucoup.
M. Bourassa: J'ai accepté, quand j'ai vu le premier
ministre, le 12 décembre, son idée. Et je dois dire que
c'était d'autant plus facile que cela faisait partie de notre programme
depuis janvier 1985. Une résolution avait été
adoptée par le Parti libéral au conseil général de
janvier 1985.
Quand même, le premier ministre a repris cette idée et je
ne le blâme pas. J'ai même accepté de la faire inscrire au
discours inaugural et de la mentionner et j'ai eu plusieurs rencontres avec M.
Desmarais pour discuter de cette question.
Mon chef de cabinet a écrit au ministre des Finances pour avoir
les dégrèvements fiscaux en cause. Ce qui n'était pas
prévu, parce que c'était quand même assez vague... Le
premier ministre du temps se souvient que c'est deux jours avant
l'élection qu'il a fait cette rencontre, te lundi midi - il s'en
souvient - on s'était parlé au téléphone le matin
et il a annoncé l'élection le mercredi soir. Donc, c'était
pas mal vague, à ce qu'on a constaté.
Nous avons travaillé le dossier. Nous voulons avoir les
dégrèvements fiscaux, mais nous voulons essayer de trouver une
formule pour favoriser la participation des jeunes en régions.
D'ailleurs, j'espère vivement qu'on pourra déposer le projet de
loi avant l'ajournement. Avant le 15 mai, cela va être difficile, mais
avant l'ajournement. De même que le Conseil permanent de la jeunesse.
M. Johnson (Anjou): Avant le 15 mai ou avant la fin de la
session?
M. Bourassa: Avant la fin de la session. Donc, ce sera
débattu à l'automne, mais le premier pas aura été
fait. Alors, nous avons posé des gestes et nous avons eu des rencontres.
Le chef de l'Opposition est au courant que ceux qui font partie de ce
comité ne sont pas toujours disponibles, même s'ils manifestent
beaucoup de collaboration. Souvent, ils sont à l'extérieur du
pays ou à l'extérieur du Québec, mais c'est pour nous une
priorité et j'espère que ce sera dépolitisé.
D'ailleurs, c'est dans cet objectif que j'ai repris exactement les termes du
chef de l'Opposition dans le discours inaugural et cela lui permet de revenir
avec cette idée. J'espère que le projet sera
dépolitisé, mais nous trouvons que cette idée commune, si
on peut dire, puisqu'elle a originé du Parti libéral et qu'elle a
été endossée par le Parti québécois, pourra
faire avancer la situation pour régler les problèmes des
jeunes.
Pour ce qui a trait aux problèmes plus généraux,
dans le cas de l'aide sociale, le ministre responsable a annoncé un
projet de loi cet automne. On est au courant. C'est l'une des questions les
plus difficiles, mais on va tenir notre engagement d'éliminer la
parité. On en a parlé durant la campagne électorale. Le
chef de l'Opposition a vu une évolution dans notre pensée.
M. Johnson (Anjou): Le premier ministre a fait un lapsus, parce
qu'il a dit qu'il éliminerait la parité. Je pense qu'il voulait
dire éliminer la disparité.
M. Bourassa: Oui, la discrimination, éliminer la
discrimination. On en a parlé à plusieurs reprises dans des
débats électoraux,
mais nous arriverons avec le projet de loi à l'automne.
Pour ce qui a trait aux bourses, je crois que le ministre de
l'Éducation, à plusieurs reprises, et il doit
répéter constamment les mêmes réponses, a
montré les augmentations: 457 000 000 $ par rapport à 400 000 000
$. Quant aux frais de scolarité, il a annoncé une commission
parlementaire où toutes les parties pourront faire valoir leur point de
vue»
Je voudrais terminer en disant au chef de l'Opposition qu'il ne faut
quand même pas oublier que l'un des efforts les plus importants pour
nous, les plus prioritaires et, en même temps, les plus exigeants, c'est
de mettre fin à cette époque qui voulait qu'on reporte sur nos
descendants des emprunts à long terme pour financer des dépenses
courantes. Cela fait dix ans que cela dure.
M. Johnson (Anjou): On va entendre cela à partir de jeudi
pas mal.
M. Bourassa: Après...
M. Johnson (Anjou): Après et pendant.
M. Bourassa: Oui, mais c'est quand même important. Le chef
de. l'Opposition doit se rendre compte que c'est un tournant dans l'histoire
financière du Québec de mettre fin à presque dix ans
d'emprunts à long terme. Ce ne sont pas des choses dont on se rend
compte aujourd'hui.
M. Johnson (Anjou): Les jeunes?
M. Bourassa: Mais, ce sont les jeunes qui seront favorisés
avec cela, M. le Président. Ce sont les jeunes qui vont cesser de voir
alourdir sur leurs épaules des endettements qui ne leur seront d'aucun
avantage. Alors, c'est cela. Je pense que c'est un élément
important de la politique. Il fallait commencer par le commencement. Le
commencement, c'est de mettre de l'ordre dans les finances publiques et c'est
d'avoir des programmes réalistes pour répondre aux besoins des
jeunes. Cela demeure notre priorité.
On a posé des gestes. II y en a d'autres qui vont être
posés avant la fin de la session, à l'automne, une commission
parlementaire sur les modalités de financement des bourses. On n'a pas
perdu notre objectif parce qu'on a pris le pouvoir. Au contraire, on est plus
déterminé que jamais à vouloir le réaliser afin de
redonner espoir aux jeunes du Québec dans leur avenir. II faut commencer
au début et le début, c'est de mettre de l'ordre dans les
finances qui les affligeaient chaque année de plusieurs centaines de
millions d'endettement dont ils devaient être responsables dans l'avenir.
Il y a déjà près de 5 000 000 000 $ qu'ils devront assumer
d'ici à la fin du siècle, alors qu'ils n'en auront retiré
aucun avantage.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, avant de vous
demander de reconnaître ma collègue de Chicoutimi qui a quelques
questions pour le premier ministre, j'aimerais simplement demander à
celui-ci; Qui, à son cabinet, s'occupe du dossier de la Corporation
investissement jeunesse, ou au Secrétariat, au Conseil exécutif
ou...
M. Bourassa: Bien, il y a...
M. Johnson (Anjou): Est-ce que c'est un attaché politique?
Est-ce que c'est un...
M. Bourassa: Oui, il y a Carole Diodati qui s'en occupe...
M. Johnson (Anjou): Que je connais, d'ailleurs.
M. Bourassa: ...avec Jean-François Viau. oui.
M. Johnson (Anjou): Vous êtes d'Anjou, n'est-ce pas?
M. Bourassa: C'est cela, d'Anjou. Mais cela ne faisait pas partie
de vos 348 voix de majorité.
M. Johnson (Anjou): Je sais cela, mais j'ai bien connu son
père qui était conseiller municipal d'Anjou et, en dépit
de nos opinions politiques très divergentes, on a toujours eu beaucoup
de plaisir à converser.
Une voix: Ce n'était pas son père.
M. Johnson (Anjou): Je n'ai jamais compté, je dois dire,
ni sur M. Diodati, ni sur son aimable fille pour voter pour moi.
M. Bourassa: Très dynamique.
M. Johnson (Anjou): II faut bien qu'il y en ait quelques-uns.
Une voix: II y en a eu plusieurs.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, donc, c'est un
attaché politique qui a le dossier.
M. Bourassa: Oui. Mon chef de cabinet s'en occupe
également et Jean-François Viau aussi. C'est elle qui...
M. Johnson (Anjou): Au Conseil exécutif?
M. Bourassa: ...d'une façon très
journalière, si je puis dire...
M. Johnson (Anjou): C'est Mme Diodati qui va faire te suivi.
M. Bourassa: ...suit le dossier d'une façon
quotidienne.
M. Johnson (Anjou): D'accord.
M. Bourassa: Elle peut attester que je lui en ai parlé
à plusieurs reprises.
M. Johnson (Anjou): Oui, je me permets de...
M. Bourassa: C'est aussi important pour 'moi que cela peut
l'être pour le chef de l'Opposition.
M. Johnson (Anjou): Oui, et je crois le premier ministre sur
cette question sans aucune difficulté, sans aucune réserve. Il me
permettra sûrement d'évoquer l'expérience que j'ai eue dans
ce dossier-là pour lui dire que c'est bien facile de réunir 18
personnes autour d'une table pour qu'elles vous expliquent pourquoi cela ne
marchera pas. D'ailleurs, c'est le drame en général de n'importe
quelle forme de changement quelque peu audacieux dans les appareils, que ce
soit celui de l'État ou ailleurs. Je me permets de dire au premier
ministre que, pour que débloque ce projet, au-delà de tous les
écrits qui auraient pu exister ailleurs - je n'avais pas lu celui du
Parti libéral, je veux juste l'assurer que je n'avais pas l'intention de
le plagier - la volonté politique dans ce dossier est essentielle. Ce
n'est pas vrai que vous allez embarquer le système bancaire pour qu'il
forme ses gérants locaux et régionaux. Ce n'est pas vrai que vous
allez embarquer de grandes entreprises québécoises pour qu'elles
mettent 100 000 $, 200 000 $ ou 300 000 $ de capital de risque. Ce n'est pas
vrai que vous allez embarquer les instances régionales et que vous allez
harmoniser les chambres de commerce avec le Mouvement Desjardins dans les
régions s'il n'y a pas une volonté politique du maudit de dire:
On le fait.
Je me permets de dire au premier ministre que cela fait six mois que
cela dure. Et, là, il nous annonce qu'il va y avoir un projet de loi qui
va être déposé avant la fin de la session, mais qui ne sera
pas adopté avant l'automne. Cela aura duré presque un an et demi.
Tout en comprenant et en étant convaincu que le premier ministre trouve
que c'est important, je me permets de lui dire que je pense qu'il faut qu'il y
passe lui-même un certain temps. J'ai passé le meilleur de sept
journées au téléphone à réunir des gens et
à leur expliquer. Il y a plein de gens qui m'expliquaient pourquoi cela
ne marcherait pas et je leur disais: Cela va marcher pareil. Cela a fini par
marcher. C'est cela qu'il faut faire maintenant dans ce dossier. M.
Bourassa: Bien, c'est...
M. Johnson (Anjou): Le ministère des Finances va pouvoir
lui expliquer pourquoi c'est compliqué, je suis sûr de cela, sur
le plan fiscal, mais c'est au premier ministre de trancher. Il est capable de
trancher, des fois, dans quelques affaires. On a vu cela. Il est même
capable de couper. On aimerait cela qu'il puisse trancher en faveur de la
Corporation d'investissement jeunesse rapidement.
M. Bourassa: Je suis d'accord avec le chef de l'Opposition que
cela prend une volonté politique. Elle existe, mais je dois quand
même donner le temps au ministère des Finances d'examiner les
implications. J'aurais aimé déposer le projet de loi avant le 15
mai. Cela fait quatre mois et demi, pas six mois. Cela fait quatre mois et
demi. J'ai été pris avec un héritage. Cela a établi
certaines contraintes.
M. Johnson (Anjou): C'est un beau projet en héritage,
cela. (18 h 15)
M. Bourassa: Non, cela, c'était une bonne partie de
l'héritage, mais assez embryonnaire dans sa présentation. Alors,
ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que nous allons y mettre toute la
volonté politique. Il n'a pas eu le temps de soumettre la question des
dégrèvements fiscaux au ministère des Finances. Le
ministère des Finances est peut-être dirigé par un homme
extraordinaire, comme on le constatera.
M. Johnson (Anjou): II s'est bien occupé de ce
temps-ci.
M. Bourassa: Oui. On constatera la sagesse et la valeur de son
travail jeudi soir prochain. Le ministre des Finances doit prendre quand
même un certain temps à examiner les conséquences des
dégrèvements fiscaux que je lui ai soumis.
M. Johnson (Anjou): Brièvement, est-ce que, dans ces
circonstances, le premier ministre peut me dire le mandat du groupe de travail
formé dans son caucus, par rapport à la Corporation
d'investissement jeunesse. Est-ce qu'il y a un lien ou si c'est une
opération strictement au bureau du premier ministre? Je sais que vous
avez un groupe de travail formé dans votre caucus.
M. Bourassa: D'accord, oui. Je suis au courant.
M. Johnson (Anjou): Je voudrais savoir si ce groupe va travailler
avec les gens de
la Corporation d'investissement jeunesse?
M. Bourassa: Oui. Il y a une collaboration très
étroite entre les jeunes députés du caucus - on a une
équipe très dynamique de jeunes, comme le constate le chef de
l'Opposition - et il y a une collaboration étroite avec le personnel de
mon bureau qui s'occupe des questions jeunesse.
M. Johnson (Anjou): Qui va parrainer le projet de loi?
M. Bourassa: Le même qui l'aurait parrainé sous
l'ancien gouvernement.
M. Johnson (Anjou): Donc, le premier ministre.
M. Bourassa: Oui, vraisemblablement.
M. Johnson (Anjou): D'accord, ça me rassure.
Le Président (M. Filion): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. J'aurais surtout
l'intention de poser des questions autour du Secrétariat à la
jeunesse. Dans le cahier des crédits qui nous a été
soumis, je ne vois rien qui concerne le Secrétariat à la
jeunesse. J'ai à ta fois regardé dans les budgets, de même
que dans le cahier des crédits qui nous a été soumis.
Habituellement, les crédits du Secrétariat à la jeunesse
apparaissent dans le programme 2, élément 6 ou 7. J'ai eu beau
faire le tour et à plusieurs reprises, je n'ai toujours pas
retrouvé le budget du Secrétariat à la jeunesse.
M. Bourassa: Passez à d'autres questions et nous allons
essayer de retrouver cela dans le livre des crédits.
Mme Blackburn: Évidemment, n'ayant pas trouvé les
budgets du Secrétariat à la jeunesse, j'étais incapable de
trouver l'information touchant la demande qui a trait aux comités du
suivi des sommets régionaux. Ils avaient fait une demande pour 1986-1987
de l'ordre de 527 000 $ pour leur permettre de poursuivre des travaux.
M. Bourassa: On tombe un peu dans la plomberie, mais je comprends
les questions de la députée. Programme 2, 2030. Vous allez voir
que c'est regroupé là. 1 760 000 $.
Mme Blackburn: À quel élément? M.
Bourassa: À l'élément 2. Mme Blackburn:
Programme 2.
M. Bourassa: Programme 2, élément 1. Mme
Blackburn: À votre cabinet?
M. Bourassa: Vous n'avez que le total, 8 011 000 $, qui couvre le
Comité de législation, le Secrétariat à la
jeunesse, l'Ordre national, etc., le Secrétariat aux affaires
culturelles.
Mme Blackburn: Nous n'avons rien ici. Il serait de quel ordre,
me dites-vous?
Une voix: Nous ne l'avons pas reçu. M. Bourassa: 1
760 000 $.
Mme Blackburn: Tout à l'heure, le chef de l'Opposition a
fait état de l'absence ou d'un manque de vision d'ensemble de la
problématique "jeunes". Le fait qu'il n'y ait pas d'adjoint
parlementaire au dossier jeunesse accentue, si je puis dire, cette
espèce de vision d'ensemble qui fait qu'aujourd'hui on est incapable de
mesurer les effets réels des diverses compressions dans les
différents ministères par rapport à la
problématique du dossier jeunesse, tant sur l'emploi que sur la
formation. On a fait état tantôt d'un certain nombre de
compressions et de coupures. Elles se retrouvent effectivement dans les postes
d'occasionnels à la fonction publique. On retrouve la même
situation dans plusieurs ministères, en particulier, à la voirie.
Il me semble qu'il aurait été intéressant, si la jeunesse
avait été une priorité, qu'on puisse retrouver là
aussi un adjoint parlementaire, comme on a cru nécessaire d'en nommer un
à la déréglementation.
M. Bourassa: On a beaucoup plus qu'un adjoint parlementaire. On
a, au sein du caucus, une quinzaine de jeunes qui se réunissent et
discutent, par exemple, de la question des prêts et bourses.
M. Johnson (Anjou): Est-ce qu'ils décident quelque
chose?
M. Bourassa: Oui, ils décident beaucoup de choses,
beaucoup plus que dans votre parti.
M. Johnson (Anjou): D'accord, On voudrait être sûr de
cela.
M. Bourassa: Et ils rencontrent les ministres responsables;
notamment, dans le cas des bourses et des prêts, ils ont rencontré
M. Ryan. Ils ont posé beaucoup de questions. Ils ont rencontré le
ministre de l'Éducation. Alors, on a une présence très
dynamique et responsable en même temps dans le caucus des
éléments de la jeunesse.
Mme Blackburn: Je ne serais pas pour le reprocher au premier
ministre. Si vous les occupez un peu, ils vont peut-être être plus
sages en Chambre. Comme je suis souvent l'objet...
M. Bourassa: Qui vous a soufflé cette remarque
désobligeante?
Une voix: Personne.
Mme Blackburn: Je suis capable de penser par moi-même, cela
m'arrive.
M. Johnson (Anjou): En dépit de ce que pense le premier
ministre, la députée de Chicoutimi est apte à raisonner
comme elie le fait en ce moment.
M. Bourassa: C'est pour les remarques désobligeantes que
je trouve qu'elle est moins apte que le chef de l'Opposition.
Mme Blackburn: Si le premier ministre veut reconnaître
toute l'importance de la question jeunesse, est-ce qu'il ne serait pas
pertinent de nommer un ministre? Je parlais d'un adjoint parlementaire, mais
également cela pourrait être un ministre. Par exemple, vous faites
état des discussions, qu'il y a eu entre ce groupe de travail et le
ministre de l'Éducation sur l'aide financière aux
étudiants. Je rappellerais que le premier ministre, en campagne,
promettait l'indexation de l'aide financière aux étudiants, ce
qui existait d'ailleurs déjà, sauf que, là, il a
réduit l'indexation; elle est de 2 % et non de 3,1 %, tel que
c'était la pratique, au cours des années, touchant
l'indexation.
J'aurais quelques questions, parce que le temps coule et je vaudrais
avoir le minimum de réponses.
M. Bourassa: Juste pour répondre à votre question;
je crois que vous m'avez posé une question. Nous avons l'intention de
créer un Conseil permanent de la jeunesse qui va aller beaucoup plus
loin que simplement avoir un ministre responsable nominalement du secteur de la
jeunesse. C'est ce qu'on a dit aux jeunes quand on les a rencontrés
depuis deux ou trois ans. On discutait de cette question de
l'opportunité d'avoir un ministère. Ils préféraient
- et cela a été une proposition de la Commission Jeunesse du
Parti libéral, un Conseil permanent de la jeunesse qui permettait de
voir l'ensemble des politiques qui peuvent affecter les jeunes.
Mme Blackburn: Même avec un Conseil permanent de la
jeunesse, on peut penser que cela ne fait pas, pour autant, un porte-parole au
Conseil des ministres, par exemple. Cela ne remplace pas la présence
d'un ministre délégué à la Jeunesse au Conseil des
ministres.
M. Bourassa: Non. Le Conseil permanent de la jeunesse
relève du premier ministre et le premier ministre siège au
Conseil des ministres.
Mme Blackburn: Est-ce que le premier ministre a l'intention de
donner suite à la demande des comités du suivi du symposium? Vous
vous rappellerez - probablement que vos gens connaissent mieux la
problématique -qu'à la suite des symposiums on a
créé onze comités régionaux du suivi qui sont
composés de différents partenaires, de représentants des
jeunes, du patronat, des municipalités, des syndicats, des commissions
scolaires. Ces comités, pour se financer, sont allés chercher de
l'aide à la fois des municipalités et des commissions scolaires.
Cela s'est avéré une formule extrêmement
intéressante. Ils ont demandé cette année, pour poursuivre
leurs travaux, 527 000 $ et je voulais savoir si la demande avait
été agréée.
M. Bourassa: Je veux dire, la formule est intéressante,
mais le coût de 527 000 $t c'est présentement sous
examen.
Mme Blackburn: Donc, on ne peut pas répondre aux jeunes
aujourd'hui qu'ils peuvent continuer à compter sur cet outil.
M. Bourassa: Pas aujourd'hui même.
Mme Blackburn: Il y avait également ceci: À la
suite de la recommandation du secrétariat d'État, on avait une
politique qui touchait te financement des organismes des jeunes. J'aimerais
savoir si elle est toujours sur ta planche. Est-ce qu'on entend l'appliquer
prochainement?
M. Bourassa: Et votre question, c'est quoi, madame?
Mme Blackburn: C'est une politique concernant le financement des
organismes de jeunes.
M. Bourassa: On me dit que Mme la ministre de la Santé et
des Services sociaux examine présentement cette question.
Mme Blackburn: Une autre question.
M. Bourassa: On me dit que c'est l'ancien ministre qui avait fait
cette promesse-là, le député de Joliette, et que
c'était tombé à l'eau; alors, c'est
réexaminé par la ministre.
Mme Blackburn: C'était une bonne idée.
M. Bourassa: L'ancien ministre, leader de l'Opposition ne
partageait peut-être pas
votre point de vue parce qu'il l'a laissé tomber à
l'eau.
Mme Blackburn: II y a une expérience intéressante
aussi qui a été mise en route, les centres multi-services qui
sont à Québec et à Montréal. C'est ce que l'on
appelle généralement les guichets uniques. Les premiers centres
ont été créés en mai 1984. En fait, c'est
intéressant parce que cela permet aux jeunes de s'adresser à un
lieu précis et à un endroit précis pour avoir de multiples
informations à la fois sur la formation, l'emploi, les maisons de
jeunes, les services finalement.
Une voix: Oui, je me souviens, d'accord.
Mme Blackburn: Alors, le budget prévoit-il maintenir ces
centres-là ou augmenter leur budget? Pense-t-on rendre la structure
permanente et étendre évidemment ces centres multi-services aux
différentes régions?
M. Bourassa: Pour l'instant, il n'y a aucun changement avec la
situation qui existait. On m'assure, M. Viau et M. Rousset, qu'il s'agit
de...
Mme Blackburn: Alors, ce sont les mêmes budgets, parce que
je n'ai toujours pas la ventilation de vos crédits.
M. Bourassa: C'est malheureux. On me dit que l'an dernier le
budget était peut-être supérieur, étant donné
l'Année internationale de la jeunesse. Mais cela fonctionne, on m'assure
que cela fonctionne comme avant. H n'y a pas eu de pertes d'efficacité.
S'il y a eu un élément budgétaire, si le budget a
été réduit, c'est à cause du fait que l'an dernier
c'était l'Année internationale de la jeunesse.
Mme Blackburn: Est-ce que vous avez l'intention de rendre
permanente cette structure-là?
M. Bourassa: À la lumière de ce que le Conseil
permanent de la jeunesse va nous recommander.
Mme Blackburn: C'est donc dire que l'avenir est incertain
pour...
M. Bourassa: S'il y a changement dans l'avenir, ce sera pour le
mieux.
Mme Blackburn: Je veux bien le croire et l'espérer.
M. Bourassa: Oui. Faites-nous confiance. Mme Blackburn: Pour ce
que j'ai vu dans le dossier jeunesse, je vous dis que...
Une voix: II s'agit de faire confiance aux gens.
Mme Blackburn: Pourrait-on me dire aujourd'hui, comme je n'ai pas
encore les données en main, quel est le budget du Secrétariat
à la jeunesse?
Une voix: Mme la députée avait raison.
M. Bourassa: On me dit qu'il n'y a eu aucune coupure,
malgré que ce que vous auriez pu souhaiter secrètement. II n'y a
eu aucune coupure... Combien de personnel?
Une voix: 33 postes-années. M. Bourassa: 33
postes-années.
Mme Blackburn: Est-ce que les postes actuellement... En tout cas,
à ce que l'on sait, le Secrétariat à la jeunesse serait
plutôt squelettique actuellement. S'il n'y a pas eu de coupures, il va y
avoir des économieso
M. Bourassa: On me dit que compte tenu que l'Année
internationale est terminée il y a certains postes qui vont tomber, mais
dans l'efficacité cela demeure la même chose.
Mme Blackburn: Alors, peut-être une dernière
question qui touche la création de ces trois comités: la
Corporation d'investissement jeunesse, le Conseil permanent de la jeunesse et
le troisième comité, c'est...
M. Bourassa: II y en a deux. Bien, il y a le caucus, le
comité du caucus.
Mme Blackburn: C'est l'analyse du programme gouvernemental
à l'emploi. Et l'on sait que le Secrétariat à la jeunesse
a donné des avis sur ces différentes questions. Vous parlez de la
compétence du Secrétariat à la jeunesse. Est-ce que ces
comités vont recommencer le travail qui a été fait,
à la demande de votre cabinet, sur ces questions?
M. Bourassa: C'est une base de travail pour les
députés du caucus.
Mme Blackburn: II y en a qui...
M. Johnson (Anjou): Est-ce que le premier ministre nous donne
encore trois minutes?
Une voix: Oui, je suis sûr de cela.
Le Président (M. Filion): M. le député de
Saint-Jacques, rapidement, parce que je
rappelle que le temps prévu par les partis est à peu
près écoulé.
M. Brouillette: Vous m'en enlevez, M. le Président,
actuellement.
M. le premier ministre, vous avez parlé de dépolitiser la
Corporation d'investissement jeunesse. Alors, est-ce que je peux vous
interpréter et dire que quant au secrétariat et au Conseil
permanent de la jeunesse, pour le choix des dirigeants et des membres, il y
aura une très grande vigilance quant à la politisation de ce
comité et de ce secrétariat?
M. Bourassa: Je prends notre de votre inquiétude.
M. Johnson (Anjou): Je ne trouve pas cela très rassurant.
Est-ce que le premier ministre peut s'engager... Comme il a dit que la
Corporation d'investissement jeunesse il ferait que cela soit au-dessus des
partis politiques - je l'espère... À l'égard du conseil
qui sera créé, qu'il nous donne un certain nombre d'assurances
que ce sera à l'abri de tractations partisanes et de la présence
de personnes, dont on reconnaît les mérites par ailleurs, mais qui
ont aussi et surtout le mérite d'être libérales.
M. Bourassa: Disons que nous allons essayer de ne pas suivre la
tradition établie par l'ancien gouvernement.
M. Johnson (Anjou): À ce moment-là, si vous ne
suivez pas notre tradition, il risque d'y avoir des rouges là.
M. Bourassa: Cela, c'est votre interprétation.
Le Président (M. Filion): Je vous invite donc à
conclure.
Conclusion
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je comprends que
l'horaire d'un premier ministre - et je ne lui en tiens pas rigueur -c'est
quelque chose d'assez exigeant. Je le remercie néanmoins de s'être
prêté à cet exercice. Je me permets de lui dire que je
souhaiterais qu'on puisse faire cela une fois par semaine. Mais,
malheureusement, cela va être impossible.
M. le Président, permettez-moi en conclusion de dire que je
considère que le premier ministre n'a malheureusement pas levé un
certain nombre d'ambiguïtés autour de quelques dossiers qui
m'apparaissent très importants. Il nous a souvent
référés à des comités, il nous a
référés à des choses qui sont faites ailleurs, au
fait que les choses sont en processus.
Il manque, je crois, une certaine fermeté dans les propos du
premier ministre autour de quelques enjeux qui nous apparaissent importants,
notamment quant au rôle que le gouvernement du Québec jouera
à l'égard des négociations sur le libre-échange. Je
crois qu'on nous a référés dans des limbes d'incertitude
administrative. Notamment, il y a un certain nombre d'ambiguïtés
dans ses réponses et on lui a dit que nous les trouvions
insatisfaisantes dans le cas des comités de bénévoles et
de ce que cela présuppose finalement comme vision du fonctionnement de
l'État et à l'égard des difficultés qu'il y a avec
l'interprétation des directives et leur carence. Nous avons bien dit ce
que nous pensions de cela. Nous ne sommes pas en accord avec le premier
ministre.
À l'égard du dossier jeunesse, le premier ministre nous
dit qu'il parrainera le projet de Corporation d'investissement jeunesse; je le
souhaite. Et je souhaite qu'au moment où il aura à le faire il
nous démontrera une connaissance non seulement des enjeux mais
également de l'activité gouvernementale, notamment celle de son
secrétariat à l'égard des jeunes. Ça ne peut pas
être une priorité prioritaire si on n'a pas l'impression, de ce
qui découle de notre questionnement, que c'est très clair pour
celui qui a la responsabilité en ce moment du dossier jeunesse. On nous
renvoie constamment d'un changement de personnel à une
législation éventuelle, à des considérations pour
le Parlement à l'automne. Nous aimerions être convaincus que le
premier ministre lui-même...
Le Président (M. Filion): S'il vous plaît, est-ce
qu'on pourrait avoir le silence? Je comprends qu'il y a un caucus qui va
commencer quand cette commission aura terminé ses travaux. Merci.
M. Johnson (Anjou): Nous souhaiterions, M. le Président,
qu'à l'égard du dossier jeunesse, en particulier, le premier
ministre fasse montre d'un contrôle certain de ce dossier qui reste
important et fondamental, non seulement pour ce gouvernement, mais pour
l'avenir du Québec.
M. Bourassa: Je remercie le chef de l'Opposition. Je crois qu'on
a eu un échange de vues intéressant et probablement utile. Je
suis en désaccord avec le chef de l'Opposition sur quelques points.
C'est normal. Il faut quand même tenir compte que nous ne sommes au
pouvoir que depuis un peu plus de cent jours et que, malgré cela, nous
avons réussi à donner un nouveau ton à la gestion du
gouvernement, ton qui semble recueillir un appui important de la
population.
M. le Président, avant de terminer, je dirai que j'ai
été étonné quand même que le chef de
l'Opposition - et cela correspond à
son attitude à l'Assemblée nationale - ne me pose pas de
questions sur les dossiers dans les relations
fédérales-provinciales sur la péréquation, sur
différents dossiers. J'aurais pensé, parce que cela fait toujours
partie de la tradition des crédits du premier ministre que le chef de
l'Opposition s'interrogeait sur ces dossiers. Et, là, curieusement... Je
n'ose pas croire que c'est lié à la campagne de financement du
Parti québécois. Je ne le crois pas. Mais, aux crédits du
chef du gouvernement, dans l'un des dossiers les plus importants, alors qu'on a
plusieurs dossiers actuellement, que ce soit dans les Affaires culturelles,
dans le domaine du développement économique, dans le domaine des
paiements de la péréquation, qui ne fonctionnent pas à
l'avantage du Québec, je m'étonne qu'il n'y ait pas eu de
questions là-dessus. Je le dis simplement. Peut-être que cela fait
partie de la stratégie du chef de l'Opposition de soulever ces questions
à d'autres moments. Mais je crois que cela aurait été un
endroit privilégié pour le faire.
J'espère qu'on aura l'occasion, d'une façon aussi ouverte,
sans contrainte trop forte de la procédure, d'une façon aussi
utile pour la qualité du débat public, de discuter de cette
question.
Je veux remercier en terminant le chef de l'Opposition, malgré
ses quelques reproches, du sérieux et du ton avec lesquels il a
participé à cette discussion, de même que ses
collègues.
Le Président (M. Filion): Est-ce que les programmes 1 et 2
des crédits budgétaires du ministère du Conseil
exécutif pour l'année financière 1986-1987, à
l'exception de l'élément 3 du programme 2 qui sera
étudié demain, sont adoptés?
M. Johnson (Anjou): Adopté.
Le Président (M. Filion): Adopté. J'ajourne donc
nos travaux.
(Fin de la séance à 18 h 36)