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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Thursday, April 24, 1986 - Vol. 29 N° 5

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du Solliciteur général


Journal des débats

 

(Dix heures quatorze minutes)

Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous plaît!

Comme nous avons quorum, nous allons commencer les travaux de la commission. Est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la secrétaire? Non. Je déclare la séance ouverte.

Je veux tout d'abord vous présenter les membres de la commission parlementaire. Du côté de l'Opposition, il y a M. Claude Filion, le député de Taillon, le président de cette commission, mais aujourd'hui, il agira comme porte-parole de l'Opposition; il y a également le député de Shefford. Du côté ministériel, il y a le député de Mille-Îles, le député de Richmond, M. Vallières, de même que votre humble serviteur, le député de Beauharnois.

M. le ministre et M. le porte-parole de l'Opposition, selon les ententes établies, nous vous laisserons le temps de vous préparer et nous adopterons les crédits programme par programme. C'est ce qui a été convenu? Cela va.

Pour vous rappeler le mandat de la commission, il s'agit de procéder à l'étude des crédits du Solliciteur général. La répartition du temps a déjà fait l'objet d'une entente entre les deux leaders. Il est 10 h 15, et cinq heures nous sont allouées pour l'étude de ces crédits. Nous allons, ce matin, siéger jusqu'à 12 h 30 et nous continuerons cet après-midi; à moins que vous ne vouliez qu'on poursuive jusqu'à 12 h 45? Ce matin, c'est de 10 heures à 12 h 30. On récupérera cet après-midi. Cela va?

M. le minsitre, à vous la parole.

Remarques préliminaires M. Gérard Latulippe

M. Latulippe: Merci, M. le Président. Nous sommes aujourd'hui réunis pour faire l'étude détaillée des crédits alloués à ce qui sera le futur ministère du Solliciteur général. En tant que Solliciteur général, je suis responsable en particulier de deux secteurs névralgiques: le secteur des services correctionnels et le secteur de la sécurité publique. Le premier comporte deux volets inséparables l'un de l'autre: la détention et la probation. Quant à la mission que j'exerce en matière de sécurité publique, elle couvre à la fois l'administration de ta Loi de police et la responsabilité d'assurer la sécurité de la collectivité pour l'ensemble de la province; elle comporte aussi une juridiction directe sur la Sûreté du Québec.

Par ailleurs, l'ensemble de mes attributions fait relever de moi plusieurs organismes: la Commission de police, la Commission québécoise des libérations conditionnelles, la Régie des permis d'alcool, le Bureau des coroners. Les crédits qui feront aujourd'hui l'objet d'une étude détaillée se regroupent sous trois secteurs. Dans le secteur des institutions judiciaires, nous étudierons les éléments portant sur les enquêtes, les décès et les incendies. Dans le secteur de la gestion juridique du cadre socio-économique, nous étudierons le contrôle des permis d'alcool. Dans le secteur des institutions pénales, nous étudierons la garde des détenus, leur réinsertion sociale, les services correctionnels et la Commission québécoise des libérations conditionnelles. Dans le secteur de la sécurité publique, nous étudierons certains éléments identifiés comme recherche et programmation, formation et perfectionnement des policiers, sécurité et protection, expertise médico-légale et police scientifique. Toujours dans le même secteur de la sécurité publique, nous étudierons le programme de normalisation et de surveillance de l'exercice des fonctions de police. Enfin, nous étudierons le programme de la Sûreté du Québec tant au niveau de la protection de la société, des citoyens et de leurs biens qu'en regard de la gestion interne et du soutien qu'il requiert. L'ensemble des crédits à voter est de l'ordre de 477 566 700 $. Nous les débattrons au fur et à mesure de l'étude des différents programmes et éléments de programmes ci-dessus mentionnés.

Cette séance d'étude détaillée des crédits est importante. Elle nous permet de faire le bilan des activités et des opérations des différentes organisations qui sont sous ma responsabilité. Elle m'offre également l'occasion d'élaborer les priorités et les orientations qui me guident et me guideront au cours de l'exercice du mandat qui m'est confié. Mon entrée en fonction comme Solliciteur général, le 12 décembre dernier, a été marquée par le dépôt le jour même du rapport du Protecteur du citoyen sur le respect des droits des personnes incarcérées dans les centres de détention du Québec, J'ai immédiatement entrepris l'étude du rapport et fait en sorte que des correctifs soient

apportés dans les cas qui le requièrent. Cette démarche nous fournit l'occasion de renforcer la qualité des échanges entre nos organisations pour améliorer la situation des personnes incarcérées.

D'ailleurs, l'étude du rapport du Protecteur du citoyen, de même que ma visite de certains centres de détention et de certains centres de transition, ont suscité chez moi une réflexion profonde sur notre système correctionnel au Québec. On doit, entre autres, prendre conscience que le dispositif mis en place pour assurer le traitement de la délinquance adulte ne répond pas adéquatement aux besoins reliés à la clientèle visée. C'est la raison pour laquelle j'ai mis sur pied un comité d'étude sur les alternatives à l'incarcération dans la perspective de rechercher les outils correctionnels appropriés pour nos délinquants, en ayant à l'esprit qu'il faut préserver le caractère punitif, l'aspect d'exemplarité et les objectifs de dissuasion et de réhabilitation sociale nécessaires. Toutes nos institutions carcérales n'offrent pas les ressources propices pour traiter adéquatement nos délinquants, sans compter qu'un certain nombre de ces établissements sont désuets quant à leur structure même. C'est la raison pour laquelle j'ai, entre autres, annoncé la fermeture de la prison de Trois-Rivières. D'autres centres de détention fermeront leurs portes le 15 juillet prochain, à savoir: le centre de détention de Mont-Laurier, de Matane, de Percé, de Saint-Joseph-de-Beauce, de Cowansville et de Rouyn. Quant au centre de détention de Joliette, ses opérations seront réduites à partir de cette date même. Cette décision prend appui sur différentes orientations bien définies.

D'abord, il y a lieu d'utiliser au maximum les alternatives actuelles à l'incarcération. Cette décision a été prise en tenant compte de notre système actuel, notre réseau actuel d'alternatives à l'incarcération. Cette décision tient compte aussi que nous sommes en train de repenser l'utilisation du dispositif correctionnel et, en particulier, les mesures sentencielles appliquées par nos tribunaux, à savoir l'emprisonnement, la probation, les travaux communautaires, etc. Le besoin d'appliquer aux services correctionnels du Québec un cadre général de planification des établissements de détention prévoyant un développement intégré de l'ensemble de son réseau en fonction de l'évolution et des besoins de chacune des régions constitue une autre raison pour laquelle j'ai pris cette décision. Enfin, le respect des contraintes budgétaires auxquelles nous avons à faire face en raison de la crise économique que vit le Québec constitue une autre des raisons.

J'ai également amorcé une démarche qui nous conduira vers la rénovation de l'organisation policière au Québec. À cet égard, le processus que j'entends poursuivre devra nous donner des résultats dès 1987. À ce chapitre, la réorganisation que nous entendons faire devra répondre aux principales attentes de la collectivité québécoise: d'abord, l'efficacité et l'amélioration des services policiers, ensuite, le rapprochement à effectuer entre la police et la communauté qu'elle dessert et, enfin, l'accroissement de l'efficience et une juste répartition du fardeau fiscal qu'entraînent les coûta inhérents aux opérations policières.

Il existe de plus, dans un autre ordre d'idées, un consensus autour de la nécessité de créer un ministère du Solliciteur général de façon à mieux cerner la réalité complexe de la sécurité publique et des services correctionnels, et aussi d'accorder à ces questions toute l'attention politique que notre société est en droit de réclamer.

Pour l'instant, les crédits relatifs à ce futur ministère sont les suivants: en l'occurrence, les communications, le personnel, l'administration, la vérification et l'évaluation, ainsi que la direction du ministère, qui sont provisoirement inscrits au programme d'administration du ministère de la Justice. Ils seront répartis à la suite de l'entrée en vigueur de la loi créant le ministère du Solliciteur général.

Les activités et les opérations des organismes sous ma juridiction, et leurs objectifs sont les suivants: la Direction générale de la probation et des établissements de détention, qui fournit aux contrevenants adultes des services de probation, tente de faciliter la réinsertion sociale des contrevenants et prouvent la participation de la communauté à la prévention de la délinquance de même qu'à la réinsertion sociale des contrevenants en plus d'assurer la garde des personnes incarcérées.

Si on fait un bref tour d'horizon sur la clientèle carcérale, la clientèle des centres de détention, on s'aperçoit qu'au Québec nous avons peu de criminels lourds. Contrairement à la perception répandue dans le public, la clientèle carcérale du Québec n'est pas dangereuse. Les détenus ont en moyenne 24 ans; 75 % de la population carcérale subit une peine d'emprisonnement de moins de trois mois; 86 % doivent purger une peine de moins de six mois; 38 % ont été incarcérés à la suite d'infractions relatives à la circulation.

Dès lors, on peut certes se permettre de douter du fait que l'emprisonnement constitue le traitement adéquat pour ce genre de délinquants, d'autant plus que dans nombre de cas ceux-ci sont incarcérés à défaut de paiement de l'amende.

Quelques mots maintenant sur la Commission québécoise des libérations conditionnelles. La Commission québécoise des

libérations conditionnelles agit comme organisme décisionnel responsable de l'application des modalités de la libération conditionnelle. Par ailleurs, l'orientation générale donnée par la commission à ses politiques et pratiques est à l'effet de donner aux agents de surveillance responsables des cas soumis les moyens nécessaires pour assumer leur rôle en tenant compte des particularités individuelles de chaque cas.

Il est important de constater que, de 1980 à 1985, sur 75 % des demandes de libération conditionnelle qui ont été accordées, aucune récidive n'a été enregistrée. Par ailleurs, 65 % des personnes qui se sont vu refuser leur demande de libération conditionnelle ont récidivé. Ces chiffres nous démontrent la qualité des décisions rendues par la commission.

Un autre élément important à considérer, c'est l'utilisation des ressources communautaires qui relèvent de mon ministère. Le nombre de clients référés dans les ressources d'hébergement communautaire a augmenté de 5,6 % dans les ateliers de réinsertion sociale par le travail, de 36,7 % dans les ressources spécialisées, telles que l'Institut Pinel, tandis que le nombre d'évaluations psychiatriques et psychologiques faites par des ressources professionnelles a augmenté de 37 %. Tout le réseau de ressources communautaires doit être mis à contribution de plus en plus dans notre système carcéral québécois.

Concernant la sécurité publique, il faut dire qu'il y a eu une augmentation de 3,19 % du nombre des infractions au Code criminel en 1985, En fait, ce qui est important de savoir, c'est que le taux de criminalité au Québec se situe bien en deçà de celui que l'on retrouve dans la presque totalité des provinces canadiennes.

Quelques mots sur mes priorités comme Solliciteur général pour l'année 1986-1987. D'abord, la loi sur le ministère du Solliciteur général; deuxièmement, la rénovation des services policiers au Québec. Hier, nous avons donné le coup d'envoi à une vaste et importante opération, la rénovation de l'organisation policière au Québec. J'entends réaliser cet exercice avec la participation active des principaux intervenants concernés par cette question et les membres du milieu policier.

La désuétude de nos organisations policières est particulièrement mise en relief par la multiplicité inusitée de petits corps de police et la répartition inéquitable des coûts inhérents à la protection de l'ensemble des citoyens. Il est prévu que ce vaste processus débouche dès 1987 sur les modifications qui s'imposent pour la mise en place de nouvelles structures policières au Québec.

Un autre de mes objectifs, c'est l'amélioration des services correctionnels au

Québec. Dans le but de concrétiser l'orientation favorisant le recours aux sentences en milieu ouvert par rapport à celles en milieu fermé, comme l'incarcération, j'ai formé un groupe de travail constitué de personnes reconnues pour leur compétence dans le domaine judiciaire et correctionnel. Il s'agit de recommander un plan d'action pour la mise en oeuvre progressive de mesures alternatives à l'incarcération touchant les domaines de la prévention, de la déjudiciari-sation, des alternatives à l'incarcération et de la réinsertion sociale des contrevenants. Il s'agit d'aller beaucoup plus loin que les démarches qui ont été faites dans les dernières années à ce sujet. (10 h 30)

Finalement, il est important dans le cadre actuel de faire la promotion des programmes alternatifs existants. Un recours plus fréquent aux programmes existants en milieu ouvert sera encouragé. Parmi ces programmes, il y a entre autres la mesure probatoire, la mesure de travail communautaire, la mesure de libération conditionnelle et de l'hébergement communautaire. Ces programmes, en plus d'être des alternatives éprouvées à l'incarcération, s'inscrivent conformément aux orientations que j'ai mises de l'avant dans l'exercice de mes fonctions de Solliciteur général et dont je viens de faire mention. Le programme des travaux communautaires, de même que les maisons d'hébergement et les centres de transition feront l'objet d'une attention particulière.

Un projet de relance du programme de travaux communautaires est en préparation. Le coût d'envoi de cette relance s'amorcera en mai prochain. Les principaux intervenants, à savoir la magistrature, le substitut du Procureur général, les avocats de la défense, les agents de probation, les responsables d'organismes communautaires qui ont fait de cette mesure substitutive à l'incarcération un succès, seront de nouveau mobilisés pour concrétiser encore davantage. Il y a lieu aussi de continuer d'améliorer les conditions de détention.

Tous ces objectifs doivent s'insérer à l'intérieur des crédits actuels du Solliciteur général. Ils s'établissent actuellement à 479 000 000 $, soit une augmentation de 2 887 700 $ par rapport à ceux de l'année précédente. Cette augmentation s'inscrit dans le cadre des préoccupations gouvernementales de redresser les finances publiques du Québec et de rationaliser les dépenses tout en optimisant les services offerts. La contribution du Solliciteur général aux efforts de rationalisation des dépenses gouvernementales est de 6 643 500 $ et elle se répartit dans les programmes suivants: D'abord, le contrôle des permis d'alcool, pour 253 300 $; le programme relatif à la garde des détenus et de réinsertion sociale des délinquants, pour 2 714 300 $; le programme

relatif à la sécurité pubique, pour 550 000 $; le programme relatif à la normalisation et surveillance à l'exercice des fonctions de police, 225 900 $ et la Sûreté du Québec, 2 900 000 $.

Cette compression de 6 643 500 $ représente une réduction de 1,4 % des dépenses prévues. Parmi les mesures retenues pour réaliser l'objectif de rationalisation, il faut souligner celle concernant le regroupement d'établissements de détention représentant une réduction de dépenses de 1 400 000 $, soit 21 % du montant total des réductions. Aussi, les services auparavant dispensés à Mont-Laurier, Rouyn, Matane, Percé, Cowansville et Saint-Joseph-de-Beauce le seront désormais à Saint-Jérôme, Amos, Rimouski, New-Carlisle, Waterloo ou Bordeaux et Québec. De plus, la réduction des activités de détention à Joliette est un autre des éléments compris dans cette mesure.

Il est important de souligner ici que le personnel des établissements qui fermeront le 15 juillet prochain sera relocalisé dans d'autres centres de détention. Il n'y a donc aucune perte d'emplois permanents directement reliée à cette opération. Outre la mesure visant la fermeture de certains établissements, il est important de souligner les principales mesures qui généreront des économies substantielles en 1986-1987. Ces économies résident notamment dans la réduction et le report d'achat d'automobiles, d'équipements de télécommunication et de diverses autres fournitures à la Sûreté du Québec.

On peut, de plus, expliquer ces économies par la réduction du taux d'encadrement des surveillants dans les établissements de détention. À ces économies, il faut ajouter la réduction des dépenses résultant d'une rationalisation de gestion. À cette fin, le budget des directions générales et organismes a été réduit de l'ordre de 5 % dans la plupart des cas, afin de participer à l'effort de rationalisation des dépenses publiques, tel que préconisé par le président du Conseil du trésor.

J'ai voulu présenter aux membres de la commission un portrait, d'une part, des réalisations, et, d'autre part, des grandes orientations que je me propose de faire dans l'année qui vient et, enfin, de vous donner le portrait véritable de ce qui constitue pour moi l'ensemble des crédits de ce qui sera te futur ministère du Solliciteur général.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre. M. le porte-parole de l'Opposition.

M. Claude Filion

M. Filion: M. le Président, le ministère en devenir du Solliciteur général est une jeune entité qui a été longtemps une partie dynamique, progressiste et vitale au sein du ministère de la Justice. Regroupées sous un seul ministre responsable, à la suite de la décision du gouvernement précédent de nommer le premier Solliciteur général depuis une dizaine d'années, les directions générales évolueront maintenant de leur propres ailes, unies, et nous sommes évidemment de ceux qui voient d'un bon oeil la restructuration qui permet ainsi l'autonomie du ministère du Solliciteur général.

En effet, les importantes responsabilités qui y sont dévolues méritent des ressources humaines à temps plein et exclusives, y compris en ce qui concerne le titulaire du ministère lui-même. Bien sûr, les contacts doivent être fréquents entre les deux ministères - celui du Solliciteur général et celui de la Justice - mais l'aspect multidimensionnel d'un nombre grandissant de dossiers fait de cette nécessité le lot d'à peu près tous les ministères.

Dès le début de l'examen des crédits du ministère, nous avons été confrontés à la même embûche d'imprécisions, à savoir que le document général déposé par le président du Conseil du trésor ne correspondait pas au cahier explicatif des crédits du ministère et, également, que les coupures budgétaires n'étaient pas clairement exprimées. Rappelons que le document du Conseil du trésor mentionne ce qui suit en ce qui concerne le ministère du Solliciteur général. Au chapitre des coupures, Rationalisation et autres mesures - c'est un terme qu'on a retrouvé dans l'ensembles des ministères... Rationalisation et autres mesures en ce qui concerne la Sûreté du Québec, 2 900 000 $; Rationalisation interne et autres mesures, 3 500 000 $.

En ce qui concerne les activités prioritaires, il était fait mention d'une somme de 2 100 000 $ allouées pour la mise en application de la nouvelle Loi sur les coroners. Or, en comparant ces chiffres avec ceux fournis par le ministère, nous constatons, d'une part, que la mise en application de la nouvelle Loi sur les coroners, programme 1, ne justifie une augmentation que d'environ 1 000 000 $, tandis que les coupures à l'élément 1 du programme 6 de la Sûreté du Québec seraient de l'ordre de 12 500 000 $. Il conviendra donc, surtout à la lumière des chiffres que nous donnait tantôt le ministre, qu'on fasse le point là-dessus, car nous devons rappeler qu'à la commission du budget et de l'administration, l'Opposition a été incapable d'obtenir des données claires et précises sur la ventilation des compressions et des coupures effectuées par le gouvernement libéral. On sait qu'un comité de bénévoles a été formé par le gouvernement libéral pour procéder à l'évaluation de l'ensemble de l'activité gouvernementale. Nous espérons que le

ministère du Solliciteur général, compte tenu de son mandat, a su se mettre à l'abri, peut-être pas du Trésor, mais tout au moins de celui du gouvernement parallèle que constituent les comités de bénévoles décideurs.

Nous aurons l'occasion de passer en revue tes effets de la nouvelle Loi sur les coroners conçue par le gouvernement précédent, adoptée par l'ancienne Législature et dont l'entrée en vigueur a été fixée, en novembre dernier, au 3 mars 1986. En ce qui concerne le contrôle des permis d'alcool, certaines questions seront examinées, notamment sur le dernier rapport de la régie portant sur le vin libre en restaurant. Il en va de même pour tout le secteur de la sécurité publique qui occupe à lui seul une large part, 370 000 000 $, soit plus des trois quarts de l'ensemble du budget du ministère. Le ministre ayant annoncé son intention de procéder à la réorganisation des forces policières, comme nous l'apprenions encore une fois ce matin, à la suite de la conférence de presse qu'il a donnée hier, nous apprécierons, au cours de l'exercice parlementaire qui commence, connaître les grands axes de cette réorganisation. Dans cette réalisation, j'ose espérer que la Sûreté du Québec jouera un rôle central car ce corps policier constitue maintenant une force professionnelle efficace et fiable au service de toute la population aux quatre coins du Québec. La question de la formation des policiers retiendra également notre attention.

D'un autre côté, les coupures à la Sûreté du Québec sont peu ou pas connues. Encore ce matin, nous entendions de la bouche du Solliciteur général certaines précisions quant à ces coupures. Nous apprécierions donc faire le point là-dessus. Y aura-t-il fermetures de postes totales ou de nuit, transfert de fonctions des postes de policiers à des postes de civils, spécialisation de la Sûreté du Québec en matière d'enquêtes criminelles, disparition de certains corps de police municipaux avant la réorganisation des forces policières, etc.? Quelle est la véritable nature des décisions prises ou à prendre à la Sûreté du Québec et quel est leur impact sur les services effectivement rendus? Nous devrons, avec le Solliciteur général, faire toute la lumière là-dessus. Sur un autre plan, force est de constater que le ministre n'a pris, depuis son assermentation, que très peu de décisions, à part évidemment la formation de comités ou l'énoncé de politiques; et curieusement, à peu près toutes ces annonces ou décisions se retrouvent au chapitre de la détention.

En effet, depuis le 12 décembre, nous avons eu droit de la part du ministre à l'expression de son intention de développer les ressources alternatives à l'incarcération. Ce discours - nous tenons à le souligner immédiatement au ministre - rejoint parfaitement les préoccupations de l'Opposition. En ce sens, il peut être assuré de notre entière collaboration. Est-il utile de rappeler que c'est sous le gouvernement du Parti québécois que la recherche d'alternatives à l'emprisonnement a donné des fruits dont le système des travaux communautaires et celui des travaux compensatoires comme solution au non-paiement d'amendes ne sont que quelques exemples? Il faut y ajouter la création, encore une fois par le gouvernement du Parti québécois, de la Commission québécoise des libérations conditionnelles ainsi que l'utilisation de plus en plus accrue de ressources d'hébergement communautaire pour détenus non violents. Ce sont là des réalisations d'alternatives concrètes. Or, depuis les discours du ministre, rien de palpable n'a été produit concrètement par le ministre, ce qui ne l'a pourtant pas empêché paradoxalement d'annoncer précipitamment une série de mesures touchant les institutions pénales et qui sont parfaitement incohérentes avec l'absence claire de développement des ressources alternatives, je dirais de "nouvelles" - entre guillemets - ressources alternatives.

Quelles sont ces décisions? Fermeture de six établissements de détention: Saint-Joseph-de-Beauce, Cowansville, Percé, Matane, Rouyn et Mont-Laurier. Réduction des activités de la prison de Joliette, qui sera fermée les fins de semaine. (10 h 45)

L'incohérence ne s'arrête pas là. Le Solliciteur général est-il conscient du problème de surpopulation des prisons provinciales? À Bordeaux, le surplus de prisonniers dépasserait plusieurs centaines tandis qu'à Orsainville, le bordereau indiquerait un surplus supérieur à une centaine. II s'agit là d'individus qui ont été sentenciés par les tribunaux dans le respect de nos règles de droit qui tiennent compte, rappelons-le, de la réhabilitation des détenus mais aussi de la protection de la société. Le Solliciteur général n'ignore sûrement pas que les sentences qu'on appelle de fin de semaine ne sont à peu près pas exécutées parce qu'elles ne peuvent plus l'être faute de place. Également, en ce qui concerne les courtes sentences de trois mois, par exemple, qui sont ordonnées par le tribunal, j'apprécierais savoir du Solliciteur général s'il est exact que ces sentences ne peuvent plus, au moment où on se parle, être exécutées. Pourquoi le Solliciteur général n'a-t-il pas attendu la mise en place de ces nouvelles ressources alternatives à l'emprisonnement avant de décider, sans consultation avec les intervenants, de la fermeture de prisons, alors que les principales prisons sont déjà surpeuplées? Assurément, le ministre a mis la charrue devant les boeufs et ce, malheureusement, au mépris de l'institution

judiciaire, au mépris des régions et, dans certains cas, contrairement aux engagements électoraux de son propre parti.

Quel est donc le prix récolté pour la fermeture de ces établissements? Un butin de 1 200 000 $, soit environ 200 000 $ par établissement fermé. Cependant, ce n'est pas là l'économie réelle, car il faut y soustraire tous les frais de transport des détenus et des prévenus, notamment à l'occasion des présences nécessaires devant les cours de justice qui, elles, demeureront dans la municipalité où est située la prison dorénavant fermée, à moins que l'on apprenne la semaine prochaine, de la bouche du ministère de la Justice, que les palais de justice seront fermés dans ces endroits. Au surplus, ce sont les municipalités qui devront assumer les coûts et les désavantages inhérents aux décisions du ministre au chapitre de la perte d'activités économiques et au chapitre de certaines dépenses. Or, on le sait, les budgets des municipalités sont déjà extrêmement hypothéqués et les alourdir davantage ne peut qu'affecter les contribuables des municipalités concernées. Mais il y a plus, car voici quelques-unes des conséquences prévisibles à la suite de la décision du ministre: dépenses et inconvénients reliés à la relocalisation des agents de la paix en institution pénale, déracinement des détenus de leur milieu, avec les inconvénients pour les familles et les 'visiteurs, mais surtout avec tes effets que cela peut avoir sur leur réhabilitation; également, difficulté pour les prévenus de communiquer avec leur avocat, droit reconnu par la charte des droits.

Nous ne reconnaissons pas, M. le Président, dans la décision du ministre, le discours qu'il avait tenu dès sa nomination sur l'importance d'une plus grande humanisation dans le traitement des prisonniers. Nous n'avons pas reconnu non plus le souci d'humanisation que nous partageons dans les deux autres décisions qu'a prises le ministre, à savoir le maintien du centre de Parthenais. Â ce sujet, je tiens à signaler que, contrairement à tous les ministres de la Justice et à tous les solliciteurs généraux qui l'ont précédé, le Solliciteur général actuel est le premier à ne pas vouloir s'engager dans la voie peut-être difficile mais pourtant recommandée par le Protecteur du citoyen de la fermeture du centre de détention de Parthenais. Il est remarquable que l'actuel Solliciteur général crée un précédent en annonçant qu'il ne fermera pas Parthenais et qu'il maintiendra également la prison de Sherbrooke. Le Solliciteur général, en ce qui concerne la prison de Sherbrooke, sonne ainsi le glas de la nouvelle prison là-bas, dont le dossier était pourtant rendu, me dit-on, à une étape presque de réalisation.

Enfin, M. le Président, on peut s'interroger sur la nature et la qualité des rapports entre le Solliciteur général et les agents de la paix en institution pénale au niveau des relations du travail. Le dossier de la fermeture des prisons augure donc mal à l'aube des négociations sur les ententes collectives. J'aurai donc certaines questions au sujet de la motivation des travailleurs et travailleuses directement en contact avec les détenus.

Pour terminer ce dossier des institutions carcérales, nous aimerions souligner au Solliciteur général qu'il n'est pas trop tard pour reconsidérer les décisions qu'il a prises prématurément et de façon incohérente. Cette commission des institutions, que j'ai l'honneur de présider, pourrait étudier sérieusement, avant le 15 juillet, les impacts réels des hypothèses contenues dans son dossier. Notre collaboration lui sera acquise s'il décide d'obtenir un nouvel éclairage dans la réalisation d'un devoir dont la première partie est mal bâclée. Nous sommes donc hautement préoccupés par l'absence de logique des décisions du Solliciteur générai. Les grands discours qu'il a tenus ne concordent pas avec les décisions qu'il prend et les décisions sont prises sans consultation avec les milieux intéressés.

Encore ce matin, en prenant connaissance des résultats de la nième conférence de presse du Solliciteur général, nous avons constaté la création d'un autre comité. Ce comité disposera d'un mandat extrêmement important, celui d'étudier tout le problème de la réorganisation des forces policières au Québec. Qu'est-ce qu'on y constate? J'ai été estomaqué, M. le Président, de constater qu'il n'y a aucun représentant des municipalités à ce comité, qu'il n'y a aucun représentant des effectifs policiers eux-mêmes, c'est-à-dire ceux qui sont principalement préoccupés par les impacts des décisions qui viendront, les policiers et les municipalités. On y retrouve, et ce sont sûrement des personnes de fort bonne foi - je ne sais pas si c'est un comité de bénévoles, on verra plus tard - deux personnes qui viennent du milieu des affaires, deux personnes qui viennent du milieu de l'éducation, l'ancien directeur de la Sûreté du Québec, M. Saint-Pierre - on ne peut pas douter de son expérience - et un avocat. Où sont les représentants des municipalités à ce comité dont, encore une fois, les travaux seront extrêmement importants pour l'avenir des forces policières au Québec? Où sont les représentants des policiers eux-mêmes? Syndicat ou pas, dans ce comité, il est renversant que le Solliciteur général ait fait ft de cette consultation tout à fait normale avec deux groupes qui, de façon vitale, sont intéressés par les travaux.

Encore une fois, cela a été la même chose dans le cas de la décision de fermer des prisons prise par le Solliciteur général.

Voilà un autre exemple du peu de cas que fait le gouvernement du Parti libéral de la consultation et de la participation des régions aux prises de décisions. On le sait, ce gouvernement a aboli le ministère de la concertation. Dans plusieurs ministères, on retrouve la mise de côté des règles que les gouvernements précédents avaient créées pour consulter les intervenants et les faire participer aux prises de décisions.

Je cite d'ailleurs à ce sujet les propos rapportés dans le Devoir de ce matin du président de l'Union des municipalités régionales de comté, M. Nicolet, qui dit ceci, et ce n'est pas moi qui le dis: "Mais le temps où le gouvernement québécois annonçait une réforme affectant le milieu municipal en l'excluant du processus paraissait, depuis un bon moment, révolu, aux yeux de M. Roger Nicolet. "C'est ce que nous avions compris, a-t-il déclaré au Devoir..." "Depuis la réforme de la fiscalité municipale, le gouvernement québécois, par l'entremise du ministère des Affaires municipales, et le monde municipal..." avait mis sur pied des tables et des mécanismes de consultation.

On continue: "...M. Nicolet ne croit pas se méprendre sur les intentions véritables du gouvernement en enclenchant un processus de réforme de la police. "Tout le monde sait qu'il s'agit de nous faire payer." On sait que derrière tout le dossier de la réorganisation des forces policières se cachent des enjeux financiers extrêmement importants pour les municipalités et pour les gouvernements. Le Solliciteur général détient la responsabilité d'importants dossiers, ceux de la sécurité publique et de la réorganisation annoncée des forces policières, on l'a vu, n'étant pas les moindres. Nous espérons que nous retrouverons dans l'avenir moins de discours, mais plus de cohérence, moins de discours et une meilleure conscience tant des réalités régionales que nationales, et ce, pour le plus grand bien des effectifs policiers, des administrateurs du ministère et des réseaux et, enfin, pour le bénéfice de la population en général.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le porte-parole de l'Opposition. Compte tenu que nous avons terminé les remarques préliminaires, j'appellerais le programme 1, c'est-à-dire Enquêtes sur les décès et les incendies. J'inviterais les membres de cette commission à procéder à la période des questions.

Enquêtes sur les décès et les incendies

M. Filion: Sur le programme 1, M. le Président, je pense que le Solliciteur général a capté le message dans mon discours. Le document déposé par le président du Conseil du trésor faisait mention d'une somme de 2 100. 000 $ annoncée à titre d'activités prioritaires précisément pour la mise en application de la nouvelle Loi sur les coroners. D'autre part, en examinant le Cahier explicatif des crédits 1986-1987, j'ai retrouvé une somme - vous pourrez me corriger, M. le Solliciteur général - d'un peu plus de 1 000 000 $. Est-ce que le ministre pourrait faire le point là-dessus pour éclairer ma lanterne?

M, Latulippe: Le budget initial de 1985-1986 sous l'ancienne loi était de 1 945 000 $. Il y a eu un budget supplémentaire en 1985-1986 pour la nouvelle loi, parce que la Loi sur les coroners, la loi concernant la recherche sur les décès, est survenue l'an dernier. Un budget supplémentaire de 1 090 000 $ a été accordé, pour un total de 3 035 000 $. Le budget de 1986-1987 est de 4 111 000 $. Il y a donc un écart de 2 166 000 $. Cet écart provient des deux facteurs suivants: tout d'abord, des crédits supplémentaires de 1985-1986 de 1 090 000 $ et des nouveaux crédits en 1986-1987 de 1 076 000 $, ce qui constitue effectivement l'écart dont vous parlez de 2 166 000 $ qui a pour objectif de permettre au bureau du coroner d'administrer la nouvelle loi sur la recherche des circonstances des décès.

Je vous souligne, M. le Président, que cette nouvelle loi est entrée en vigueur le 3 mars et qu'elle est survenue, c'est vrai, sous un régime du gouvernement du Parti québécois, mais je vous souligne qu'elle est survenue à la suite de débats et à la suite d'une lutte de tous les moments menée par l'ancien porte-parole libéral en matière de justice, à l'époque, M. Herbert Marx, qui est devenu ministre de la Justice et qui a constamment talonné le gouvernement de l'époque dans le but d'en arriver à des modifications substantielles et fondamentales à l'ancienne Loi sur les coroners, qui datait pratiquement du moyen âge. C'est à cause du porte-parole en matière de justice, M. Marx, que nous n'avons plus le concept du témoin principal. C'est à cause de la lutte continuelle du porte-parole en matière de justice, M. Marx, qu'on en est arrivé à changer le concept de verdict. Je pense que l'Opposition libérale de l'époque a été "instrumentante" dans le développement de cette nouvelle loi. D'ailleurs, je souligne au parte-parole de l'Opposition que nous avons, à l'époque comme Opposition, une fois les amendements apportés, voté pour cette loi. (11 heures)

M. Filion: Nous sommes au début de l'examen des crédits. Il nous reste quatre heures de travaux. Je ne sais pas si on veut être sérieux, essayer de comprendre, d'avancer, surtout répondre aux interroga-

tions, certaines que vous avez soulevées; mot, je les ai soulevées. Si nous faisons référence à tout ce qu'a dit l'ancien critique de l'Opposition et maintenant ministre de la Justice, notamment dans les termes de prison cela peut être dangereux. Je n'ai pas l'intention de relever tout ce qu'il a dit parce qu'une bonne partie est contradictoire avec ce que vous faites.

Je prends bonne note que vou3 approuvez cette loi qui a été adoptée, je vous le rappelle, par un Parlement dans lequel vous et moi n'étions pas, sauf erreur. Non? En tout cas, je n'y étais pas, ce n'est pas une erreur. En ce sens, comme je vous l'ai dit, l'actuel ministre de la Justice a dit énormément de choses. En ce qui concerne le ministère du Solliciteur général, j'ai décidé d'écarter toutes les déclarations de l'ancien critique, parce que je n'en finirais pas de relever des contradictions avec ce qui peut se passer, ce qui s'est passé, ce qui va se passer dans l'avenir, sûrement, et tout ce qu'il a dit.

Maintenant, je prends bonne note. Je suis satisfait de l'explication que vous me donnez sur les crédits. Si je comprends bien, ce sont des crédits supplémentaires qui font la différence quant aux 2 000 000 $ d'activités prioritaires sur les enquêtes du coroner.

En ce qui concerne cette nouvelle loi et l'application de cette nouvelle loi - il est peut-être un peu tôt mais quand même -est-ce que le ministre, pour mon information, peut déjà me donner des réponses quant à l'administration et à l'organisation de ce programme, compte tenu de la nouvelle loi qui... cela ne fait même pas deux mois maintenant? Je ne sais pas si le Dr Grenier est ici?

M. Latulippe: II est ici, oui.

M. Filion: Oui? Ah! Bon. Alors, je le salue en passant et je le félicite.

Est-ce que le Solliciteur général peut m'informer un peu - c'est le début - du nombre de décès, étudié, qui peut passer on le sait de quelque chose comme 5000 à 15 ' 000 par année. J'ai remarqué les changements d'effectifs également de 31 permanents à 52 permanents. Pourrait-on d'abord me dire si tous les effectifs ont été comblés?

M. Latutippe: Comme vous voyez au livre des crédits, nous avons prévu quinze coroners permanents. La distinction majeure au plan des effectifs se situe à deux niveaux: Au niveau des coroners permanents où nous passons de six jusqu'à quinze et au niveau des employés de bureau, des employés de soutien, où nous passons de neuf à quatorze.

Le poste des coroners permanents n'a pas été entièrement comblé. Il y en a eu douze de comblés jusqu'à maintenant et un des coroners, Maurice Laniel, est actuellement malade. Nous allons graduellement combler les postes qui sont encore ouverts, non comblés au livre des crédits. Nous sommes allés graduellement dans le but de voir - parce que c'est tout récent comme vous l'avez mentionné - comment évoluerait l'application de cette loi.

M. Filion: Le ministre compte bien combler les effectifs de quinze coroners permanents?

M. Latulippe: Oui. Les effectifs mentionnés au livre des crédits, nous comptons les combler.

M. Filion: M. le ministre, est-ce que le budget est suffisant, compte tenu, encore une fois, de l'augmentation des décès étudiés, qui va passer de 5000 à 15 000, étant donné la nouvelle orientation prévue par la loi? Il me semble avoir lu dans la revue de presse, dans le Soleil, sauf erreur, qu'il semblait plus réaliste à l'époque, aux yeux du coroner en chef, d'avoir un budget d'environ 6 000 000 $. Là, nous avons un budget de 4 000 000 $. Est-ce que le ministre est satisfait que le Bureau du coroner va avoir les ressources financières suffisantes pour mener à bien les objectifs contenus dans la nouvelle loi?

M. Latulippe: Oui. Effectivement, nous sommes persuadés que le budget actuellement de 4 100 000 $ est suffisant. Lorsque vous faites référence à un budget qui était, à l'origine, supérieur, il faut préciser qu'il y a eu des modifications à la loi, entre autres, toute la question des avis qui devaient être donnés à l'origine - et cela a été aboli -dans des cas d'incinération. Déjà là, je pense que nous sommes en mesure, sur ce qui était prévu à l'origine, d'épargner environ 1 000 000 $. Par ailleurs, il y a évidemment, par exemple, les cas d'autopsie. Maintenant, il est fort probable qu'il y ait moins de cas d'autopsie du fait que les coroners investigateurs peuvent faire une analyse extérieure du cadavre et cela ne nécessiterait pas, dans tous les cas, d'autopsie.

Nos évaluations sont qu'effectivement... Et, compte tenu de l'évaluation actuelle, nous serons très facilement en mesure de respecter les obligations prévues par la loi avec le budget qui nous est actuellement alloué. Un autre point qu'il faut souligner, c'est qu'il y a ou qu'il y aura ce que l'on appelle les coroners auxiliaires qui sont des infirmières et qui vont nous permettre de réduire le coût de certaines investigations comme, par exemple, les cas de décès en centre d'accueil. Ce sont là des mesures qui

nous permettent d'être plus efficaces avec un budget qui est quand même substantiel pour l'application de la nouvelle loi.

M. Filion: Les coroners auxiliaires, en bonne partie - ce n'est pas en totalité, j'ai l'impression - seront des infirmières.

M. Latulippe: Ce seront des infirmières ou des infirmiers, les coroners auxiliaires.

M. Filion: En totalité ou en bonne partie? Il doit y avoir quand même d'autres...

M. Latulippe: Le concept de coroner auxiliaire a justement été fait dans le but que ce soient des infirmières ou des infirmiers. En totalité, ces personnes seront des infirmières ou des infirmiers.

M. Filion: Est-ce que le recrutement est commencé?

M. Latulippe: Le recrutement des coroners auxiliaires est commencé. Les concours sont lancés. Nous procéderons normalement comme nous l'avons fait, d'ailleurs, pour tous les coroners permanents investigateurs ou enquêteurs, nous suivrons le processus normal et nous engagerons ces personnes au fur et à mesure que les besoins se feront sentir. Évidemment, comme vous le savez, concernant l'application de la nouvelle loi, avant que la population y soit habituée, avant que tous les processus soient mis en place, avant que le rouage soit fait, il y a quand même un certain nombre de mois, avant qu'on ait atteint ce rythme de croisière. Donc, l'embauche se fait graduellement, comme nous avons procédé jusqu'à maintenant pour le cas des coroners investigateurs et celui des coroners enquêteurs.

M. Filion: Est-ce qu'il y a un chiffre, quand même, que vous voulez atteindre en ce qui concerne le nombre de coroners auxiliaires? J'ai compris que vous étiez pour suivre l'engagement au fur et à mesure des besoins mais, quand même, avez-vous des prévisions?

M. Latulippe: Actuellement, comme je vous l'ai dit, notre intention est de procéder graduellement parce que nous allons voir jusqu'à quel point ils seront nécessaires, jusqu'à quel point, finalement, leur charge de travail sera lourde. Nous croyons que nous devrons, au début, en engager environ quatre pour la région de Montréal et deux pour la région de Québec. Comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, ce rôle de coroner auxiliaire est un peu un rôle périphérique par rapport au rôle des coroners investigateurs et par rapport au rôle des coroners enquêteurs.

Périphérique dans Je sens que, finalement, un de leurs rôles principaux est en fonction des avis de décès qui ont lieu et qui auront lieu dans les centres d'accueil parce qu'il s'agit là, comme vous le savez, d'un des éléments additionnels de cette nouvelle loi, de pouvoir se pencher sur les cas de décès en centre d'accueil dans le but d'être capables non seulement de retracer les causes et les circonstances, mais de voir si, finalement, on ne pourrait pas, par ces analyses, améliorer la santé publique au Québec.

M. Filion: Vous mentionniez tantôt, M. le Solliciteur général, M. le Président, la question de l'incinération. La nouvelle loi ne prévoit aucun mécanisme de contrôle quant à l'incinération des cadavres. Étant donné que l'incinération détruit toute preuve relativement aux circonstances d'un décès - j'ai bien l'impression que cela détruit toute preuve, il ne doit pas en rester beaucoup, une fois que les cendres sont dans l'urne - cela doit être pas mal difficile de faire une enquête. Étant donné, d'un autre côté, qu'il y a un certain degré de contrôle qui est nécessaire, qu'entend faire le ministre au sujet de cette question d'incinération des cadavres?

M. Latulippe: Comme vous le savez probablement - finalement, je vais vous renseigner là-dessus - avant toute incinération, on doit avoir une autorisation du coroner. Vous pouvez facilement comprendre que l'autorisation du coroner est un des éléments qui nous garantit qu'il n'y aura pas de problème avec les cas d'incinération. Deuxièmement, comme vous le savez - sinon, je vais vous l'apprendre - il y a la Loi sur la protection de la santé publique qui effectivement couvre encore ces cas d'incinération.

Je pense qu'il faut bien comprendre aussi que dans notre société la façon dont on dispose de ces personnes décédées... l'incinération est évidemment un des phénomènes qui fait partie de l'évolution sociale actuellement au Québec. Je ne pense pas que l'on doive, par des mesures quelconques, restreindre ce recours lorsque des familles, par choix, décident qu'elles doivent plutôt procéder à l'incinération des personnes décédées. Je pense qu'on doit respecter cette volonté des familles dans des circonstances semblables.

M. Filion: Je partage votre point de vue là-dessus. Je dois comprendre qu'actuellement, depuis deux mois, chaque incinération est précédée d'une permission donnée par le coroner, selon ce que vous me dites?

M. Latulippe: On peut dire qu'effectivement oui. Comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, la loi entre en

vigueur et il y a quand même une adaptation. Comme vous pouvez certainement le comprendre, lors de l'application d'une loi, il y a les rouages qui sont à être mis en place. Mais on peut dire que cette disposition, jusqu'à maintenant, est en bonne voie d'application et de réalisation.

M. Filion: En ce qui me concerne, M. le Président, je suis prêt à passer à l'adoption des crédits du programme 1. Je veux juste revenir au budget global du coroner. Encore une fois, il m'est apparu que la somme de travail occasionnée par la nouvelle Loi sur les coroners était tout à fait considérable, non seulement parce que dans certains cas, on doit appliquer des nouveaux mécanismes dans des nouveaux secteurs, mais aussi parce que le volume prend des proportions beaucoup plus considérables.

Je ne doute pas une seule seconde de l'efficacité des ressources humaines qui sont en place. Cependant, je suis un peu préoccupé - il y a juste 24 heures dans une journée et apparemment il faut en dormir quelques-unes, et juste sept jours dans une semaine, à moins qu'on rechange le calendrier - par les ressources du coroner. (11 h 15)

Je me dis que les attentes sont énormes sur le plan de la population en général. On connaît l'impact qu'a eu l'adoption de la nouvelle Loi sur les coroners. Les responsabilités, elles, par exemple, sont en place, parce que la loi ne fait pas de distinction entre une situation nouvelle et une situation ancienne. La loi fixe des responsabilités et il appartient aux autorités de relever ces responsabilités.

Dans ce sens, j'ai l'impression que le ministre sera appelé à faire un pèlerinage au Conseil du trésor au cours de l'année, je ne sais pas, mais je voudrais lui dire que, de notre côté, il aura notre soutien dans cette recherche de fonds supplémentaires, s'il en a besoin; s'il n'en a pas besoin, tant mieux. Sans avoir été au fond des choses - je voyais votre sous-ministre qui opinait - il m'est quand même apparu, en lisant la loi, en regardant les budgets, qu'il y avait une légère disproportion, mais je suis quand même rassuré par vos propos de ce matin et je suis prêt à adopter, à l'unanimité, le programme 1.

Le Président (M. Marcil): M. le ministre.

M. Latulippe: Permettez-moi, M. le Président, d'être moi-même également inquiet, au début de cette étude des crédits, de la philosophie de gestion de mon collègue de Taillon. Ce qu'il nous dit, c'est qu'avant que l'on connaisse l'impact d'une loi, avant qu'on puisse réaliser la charge de travail, il faut donner un budget monstre à un organisme au cas où l'application de la loi prendrait une proportion démesurée ou une proportion gigantesque. Je pense que c'est mettre la charrue devant les boeufs. Je pense que, comme gestionnaire raisonnable, il faut être en mesure d'évaluer de façon raisonnable l'impact d'une loi, de donner un budget raisonnable et non pas de tenter, avant la mise en oeuvre d'une loi, de donner un budget qui soit hors de proportion et qui prévoie absolument toutes les possibilités, et c'est malheureusement de cette façon, dans les années passées, qu'on a vécu dans le secteur public. On a gonflé les budgets, on a gonflé la taille de nos organismes et c'est malheureusement à cause de cela aussi qu'on en est arrivé au Québec à la situation qu'on vit actuellement, une situation difficile au niveau économique.

Je préfère, comme philosophie de gestion, qu'on puisse être objectif, qu'on puisse être en mesure de donner des budgets réalistes, en évaluant de façon précise et de façon. réaliste les besoins, les impacts d'une loi, parce que, vous savez, on ne connaît pas encore l'ampleur que prendra cette loi. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il faut que cela évolue au fil des mois et je pense que le budget que nous avons consacré à l'application de cette loi est non seulement réaliste, mais il est suffisant pour permettre qu'elle soit appliquée telle qu'elle a actuellement été adoptée.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre.

M. Filion: M. le Président, le Solliciteur général a peut-être oublié que, dans ses grandes lignes, le budget du coroner est un budget qui a été fixé par le gouvernement précédent; il n'y a pas eu de modification. Je lui posais la question, à savoir s'il était satisfait, compte tenu du fait que le nombre de décès - on commence à avoir des chiffres - passe de 5000 à 15 000. Si le Solliciteur général voulait que j'aille plus loin - je ne pense que ce soit dans son intérêt que je le fasse - je pourrais noter certains des arguments qui ont été avancés pour un budget supérieur.

Ma question, comme je l'ai dit, était de savoir si le budget était réaliste. Gouverner, c'est aussi prévoir, bien prévoir les choses. Il ne s'agit pas de donner un budget hors de proportion; ce n'est aucunement ce que j'ai souligné. Ce que j'ai souligné au ministre, c'est qu'on est face à l'application d'une nouvelle loi et, donc, qu'il faut faire preuve de souplesse durant l'exercice budgétaire pour être capable d'affronter les imprévus, tout en sachant que gouverner, c'est tenter de prévoir le maximum de choses possible.

Le Président (M. Marcii): Merci, M. le porte-parole de l'Opposition.

M. Latulippe: Je voudrais aussi ajouter que le budget qui est actuellement devant vous a été établi par notre gouvernement parce que, auparavant, le budget était supérieur à 4 100 000 $. Nous avons procédé à choisir à budget, nous avons procédé aussi, dans ce secteur, à l'établir, et c'est nous qui l'avons établi. Le gouvernement précédent avait prévu un budget supérieur à 4 100 000 $.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre. Nous pouvons conclure que le programme 1, Enquêtes sur les décès et les incendies, est adopté.

M. Bélisle: M. le Président. Le Président (M. Marcii): Oui.

M. Bélisle: Si vous me permettez. Si vous voulez procéder à l'adoption élément de programme par élément de programme, j'aurais une question avant de compléter la section et de passer au vote par la suite, si vous voulez bien?

Le Président (M. Marcil): Oui, rapidement, puisque si nous voulons absolument compléter l'étude des six programmes que nous avons à étudier dans une période de cinq heures, c'est...

M. Bélisle: M. le Président, si vous me le permettez... Le Président (M. Marcii): Allez-y.

M. Bélisle: ...ce sera le plus court possible mais pas nécessairement rapide. Je lisais également, comme l'a fait le député de Taillon, porte-parole de l'Opposition dans ce domaine, à la page 3 du cahier des crédits budgétaires préparé par le Solliciteur général et son équipe, les montants relatifs à cette première section, éléments du programme 1. Quelqu'un tout à l'heure m'a apporté le projet de loi 36 sur la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès. Je vais avouer très candidement et très naïvement mon ignorance de toutes les dispositions de la loi. Je pense que c'est de mise de le faire, au départ. Mais je voudrais demander ceci au Solliciteur général. Toutes les dispositions de cette loi qui sont relatives aux centres d'accueil... Je lis à la page 3 du document qui nous a été présenté et je cite: "L'écart à cet article s'explique, d'une part, par l'augmentation de la juridiction du coroner eu égard aux nouveaux avis obligatoires à lui être donnés. Exemple: centres d'accueil, 4000 décès sur une base annuelle. D'autre part, la nouvelle loi oblige le coroner à faire une étude beaucoup plus poussée et détaillée de chacun des cas. Il doit en effet chaque fois établir la cause médicale du décès." On retrouve cela aux articles 34 et suivants de la nouvelle loi. Je voudrais connaître l'opinion du Solliciteur général sur ces nouvelles dispositions de la loi. Est-ce que, personnellement, il est en accord avec ces dispositions ou s'il envisage des amendements ou non? Est-ce qu'il est satisfait de ces mesures de protection additionnelle? Et s'il y a des mesures de protection additionnelle pour des gens en centre d'accueil... Ma réaction toute simple, c'est que j'ai de la difficulté à comprendre le but visé par le fait qu'on demande des avis, expertises médicales, causes médicales de décès pour des gens qui sont en centre d'accueil, dans des institutions privées et paragouvernementales. Je ne sais pas si, personnellement, j'étais dans un centre d'accueil, j'accepterais un tel fait, j'accepterais qu'on procède d'une telle façon alors que je ne décède pas à la maison. Je comprends mal la distinction. Il me semble qu'il y a deux classes de citoyens dans la société: ceux qui peuvent se permettre de décéder à la maison et ceux qui décèdent en centre d'accueil. Ceux qui décèdent en centre d'accueil, ils ont droit à plus d'attention de la part de l'État. Ceux qui décèdent à la maison, c'est différent. J'ai beaucoup de difficulté sur le plan intellectuel à comprendre la mécanique. Etant donné que la mécanique représente un coût important en période de restrictions budgétaires, j'apprécierais grandement, M. le Solliciteur général, que vous éclairiez ma modeste lanterne.

M, Latulippe: Je voudrais dire au député de Mille-Îles que, moi aussi, actuellement, je m'interroge sérieusement sur ces dispositions de la loi. Pourquoi, actuellement, à la suite du décès d'une personne en centre d'accueil, doit-on donner un avis obligatoire au coroner? Et, un coroner investigateur va faire une investigation médicale du cas de décès en centre d'accueil. Il y a des milliers de personnes qui décèdent en centre d'accueil. Quels problèmes spécifiques peut-il y avoir par rapport à une personne qui décède en centre d'accueil et une personne qui décède chez elle?

M. Bélisle: Peut-être parce qu'il y a un doute.

M. Latulippe: Les personnes qui décèdent en centre d'accueil n'ont-elles pas déjà, même plus que les personnes qui décèdent chez elle, tout un réseau de soins médicaux permettant de s'assurer que les soins médicaux qui ont été donnés aux personnes en centre d'accueil avant qu'elles décèdent soient des soins adéquats? Je pense

qu'au contraire, il y a une présomption beaucoup plus forte sur tout notre réseau en centre d'accueil, sur le faitque tes soins donnés à ce9 personnes en centre d'accueil ont été bons, ont été adéquats. Je m'interroge actuellement là-dessus. C'est un des sujets sur lequel je désire pousser plus loin ma recherche et mes renseignements parce que c'est une question que je me pose.

Le Président (M. Macil): Merci, M. le ministre, est-ce qu'on peut conclure que le programme 1 est adopté?

M. Filion: Juste avant, dans la foulée...

Le Président (M. Marcil): II est seulement 11 h 30.

M. Filion: ...du questionnement...

Le Président (M. Marcil): II nous reste seulement cinq programmes...

M. Filion: ...du Solliciteur général... Le Président (M. Marcil): ...à voir.

M. Filion: ...que préconiserait-il en dehors de la formule actuelle? Parce que tantôt, je l'entendais dire: C'est une bonne chose que le coroner auxiliaire, cela nous donne un coup de main, cela coûte moins cher, etc. Or, dans la foulée de son questionnement, que préconiserait-il?

M. Latulippe: Tout à l'heure, je vous ai mentionné qu'il y avait actuellement dans la loi le concept de coroner auxiliaire, sauf que mon questionnement est plus fondamental sur la nécessité des avis et surtout sur la nécessité des investigations. Je ne suis pas en mesure actuellement de vous annoncer une modification à la loi, mais je suis en mesure de vous dire que je me pose des questions sérieuses sur l'opportunité de cette disposition. En temps et lieu, je serai en mesure de faire les annonces pertinentes.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre. Maintenant...

M. Bélisle: Si la réponse du Solliciteur général est... À mon tour de prendre bonne note que, dans quelque temps, on aura peut-être d'autres avis de sa part concernant ce point spécifique qui, à mon humble avis, jette un doute sur nos institutions publiques.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le député de Mille-Îles.

Je répète: Est-ce que je peux conclure que le programme 1 est adopté?

M. Filion: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Programme 2, Gestion juridique du cadre socio-économique, Contrôle des permis d'alcool.

Gestion juridique du cadre socio-économique

M. Filion: Deux questions techniques sur le programme 2. Les baisses notées à la supercatégorie "Fonctionnement de personnel" sont-elles dues uniquement à la réduction des effectifs? également, je sais que les collaborateurs du ministre peuvent prendre des notes, j'aimerais avoir des explications sur la diminution à la catégorie "Autres rémunérations" considérant que le nombre d'employés occasionnels demeure le même, c'est-à-dire quatre.

M. Latutippe; Pouvez-vous répéter votre première question, je ne l'ai pas saisie?

M. Filion: Les baisses à la supercatégone Fonctionnement de personnel sont-elles dues uniquement à la réduction des effectifs? Je ne crois pas. En 1985-1986, je ne sais pas si vous avez les chiffres? Cela part de 2,9 à 2,7.

M. Latulippe: Je suis en mesure de vous dire que c'est dû à deux facteurs. C'est l'effet, d'une réduction des effectifs de 109 à 107. Comme vous allez le constater, en ce qui concerne la régie, nous sommes à implanter des systèmes informatisés de gestion. Ce qui peut avoir un effet sur le niveau des effectifs, ce sont ces deux conséquences, ces deux facteurs qui effectivement se reflètent dans la variation de 115,7 que vous retrouvez à la super-catégorie "Fonctionnement de personnel". Je voudrais ajouter qu'il y a aussi le facteur de la réduction des employés à tpmps partiel dans ce chiffre. Il y avait 31 400 employés à temps partiel qui étaient requis à l'époque pour faire fonctionner le système d'information au niveau des permis, le système manuel que nous avions à l'époque. (11 h 30)

M. Filion: D'accord. Egalement, dans le cahier des crédits, on a remarqué une réduction annoncée, prévue, ou souhaitée, de 40 % du personnel de la régie, sur une période de trois ans. Je vois le ministre qui fronce les sourcils. Je l'envoie au programme 2, élément 1, page 4 du cahier explicatif des crédits et je lis: "Cette nouvelle conception administrative a été rendue nécessaire à la suite de la réduction de 40 % des effectifs de la régie, sur une période de trois ans et elle permettra de prendre avantage..."

Cette réduction de 40 % sur trois ans est sur quelle période de trois années exactement? Est-ce la première, la deuxième; ou l'année 1986-1987 constitue-t-elle la troisième? Où se situe-t-on dans le

calendrier?

Deuxièmement, j'aimerais avoir l'opinion du Solliciteur général sur cette politique de réduction. Pendant que le ministre consulte, je voudrais saluer M. le président de la Régie des permis d'alcool, M. Laflamme.

M. Latulippe: II y adeux facteurs qui ont provoqué cette réduction de personnel au fil des dernières années. C'est la troisième année, les deux autres années se sont passées sous le gouvernement précédent. Je vous rappelle que, autant moi que vous, nous n'étions pas là. Cependant, à l'époque, il y a eu cette décision de faire en sorte que les inspecteurs soient remplacés par des agents de la Sûreté du Québec. Vous savez que maintenant, le contrôle des permis d'alcool est fait par les agents de la Sûreté du Québec. C'est un des facteurs - le remplacement de ces inspecteurs, au fil des ans, par les agents de la Sûreté du Québec - qui se réflète dans cette réduction de personnel.

Le deuxième facteur - celui que je vous mentionnais tout à l'heure - c'est l'informatisation de la gestion des permis d'alcool, qui apermis d'avoir beaucoup moins de travail manuel, de travail de soutien, pour les fins de la gestion des permis d'alcool. Le système informatisé a été implanté au cours des dernières années. Ce sont les deux facteurs, les deux volets, qui justifient cette réduction de personnel. Nous sommes à la fin de la démarche qui a débuté il y a trois ans.

M. Filion: L'année 1986-1987 étant la dernière année?

M. Latulippe: Effectivement, c'est la dernière année.

M. Filion: D'accord. Un autre sujet, toujours à l'intérieur du même programme, M. le Président...

M. Latulippe: Nous sommes à la fin du processus de l'implantation du système informatique.

M. Filion: C'est cela.

M. Latulippe: Cela se poursuit, mais c'est presque la fin. Évidemment, s'il est possible pour nous, d'améliorer encore la qualité de la gestion, s'il est possible dans l'avenir, de rationnaliser encore le fonctionnement, je pense que ce sera notre devoir de le faire et nous allons tenter de faire notre devoir.

M. Filion: Est-ce que le ministre entrevoit - après avoir réussi cette réduction quand même assez sensationnelle - pour les années qui viennent, d'autres compressions ou d'autres réductions de personnel à la régie?

M. Latulippe: Je pense que vous le voyez, pour l'analyse des crédits de cette année, c'est assez clair. Notre effectif, de 113 qu'il était en 1985-1986, est rendu à 111. C'est le niveau d'effectif que nous aurons pour les crédits pour lesquels nous sommes ici aujourd'hui.

Contrôle des permis d'alcool

M. Filion: M. le Président, je voudrais maintenant aborder avec le Solliciteur général, la question du vin libre. On sait que tout récemment, il y a à peine un mois, la régie rendait public son rapport sur le phénomène du vin libre. Je ne voudrais pas tenter de résumer le rapport qui est relativement volumineux. La solution proposée était l'émission d'un permis de restaurant pour vendre, d'un permis de restaurant pour servir, les deux permis étant exclusifs. Grosso modo, du côté des restaurateurs qui détiennent évidemment un permis pour vendre, on a plutôt montré une insatisfaction quant au rapport. Cependant, du côté des restaurateurs ou pratiquants de vin libre, on s'est montré relativement satisfait des conclusions du rapport. J'ai cru noter qu'un autre comité avait été formé par le ministre, sauf erreur, un comité interministériel, pour étudier les conclusions du rapport et, sauf erreur, selon le communiqué qu'avait émis le Solliciteur général, je crois que son rapport était attendu pour le mois de juin.

J'aimerais quand même, au-delà de ces comités, qu'on puisse échanger des propos un peu ensemble là-dessus, M. le Solliciteur général. Est-ce que vous êtes, grosso modo, favorable aux conclusions du rapport?

Concept du vin libre

M. Latulippe: Je suis heureux de la question de mon collègue de Taillon parce que cela me permet de pouvoir discuter avec lui non seulement du concept du vin libre, mais plutôt de la source. Pourquoi a-t-on vécu, pourquoi vivons-nous aujourd'hui avec ce réseau, qui est quand même assez limité jusqu'à maintenant - il est plutôt concentré dans l'espace - le réseau de restaurants qui acceptent le vin libre? Cela veut dire que les gens peuvent apporter leur bouteille de boisson et consommer sur place. Je pense que la source du problème vient du prix des vins. Je pense qu'on peut facilement dire qu'au Québec le prix des vins dans nos restaurants est très élevé. Le rapport en a fait clairement état. Pour déterminer le prix des vins, selon la façon dont on fonctionne dans notre réseau de restauration, on prend le prix de base payé à la régie et on le multiplie par deux et souvent même par trois. Cette situation est différente, dans d'autres provinces, entre autres, en Colombie

britannique. Le fait que nous payons des prix assez élevés pour les vins a donné ouverture - il y a eu, à un moment, une coquille dans la loi - au phénomène du vin libre, une ouverture à un type de restauration qui est différent, pour permettre aux gens, à certaines personnes de notre société de pouvoir aller au restaurant, de pouvoir aller dans des quartiers spécifiques de Montréal et d'y consommer du vin à meilleur coût, de pouvoir faire un choix quant au mode de consommation du vin.

Mais cela remet en question beaucoup de choses. Cela remet en question le prix des vins. Cela touche plusieurs secteurs d'activité. Cela ne touche pas uniquement le ministère du Solliciteur général. Je suis principalement préoccupé par la tranquillité publique. Il est évident que je suis personnellement... J'ai reçu le rapport de la commission et j'ai un préjugé favorable pour ce rapport parce que, d'une part, si on en venait à accepter le concept du vin libre, il est évident que, pour la tranquillité publique, il est important que l'on contrôle strictement ce type d'activité. Cependant, je pense que cela implique aussi d'autres personnes. Cela implique aussi nos pratiques en matière de petites et moyennes entreprises. Cela touche directement des petites et moyennes entreprises du Québec.

M. Filion: La formation de votre comité...

M. Latulippe: Si vous me le permettez...

M. Filion: D'accord, mais vu que vous êtes dans ce propos.

M. Latulippe: ...M. Filion, je vais terminer. Je pense que je dispose, M. le député de Taillon, encore...

M. Filion: D'accord, mais vu que vous êtes sur ce sujet.

M. Latulippe: Je voudrais continuer parce que je pense qu'il est important que je puisse, devant la commission, exprimer véritablement l'ensemble du problème. Donc, cela touche les petites et moyennes entreprises. Cela touche la liberté de concurrence. Cela touche aussi tout le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, et celui du Tourisme en particulier parce que ces restaurants sont concentrés dans des régions, surtout à Montréal, où il y a une présence importante de touristes. Cela touche aussi le ministère du Revenu, les pratiques en matière de taxation, le coût de la taxation. C'est pour cela que j'ai voulu m'associer à d'autres ministres, aux ministres qui sont spécifiquement concernés, que ce soit M. Picotte, M. Daniel Johnson, au ministère de l'Industrie et du Commerce, M. André Valterand, ministre délégué aux PME ou M. Gratton, du Revenu, pour que l'on puisse avoir une solution qui ne vise pas uniquement l'aspect du Solliciteur général, qui ne vise pas seulement l'aspect de la protection de la tranquillité publique, mais qui vise aussi la problématique plus globale entourant l'activité économique de la production, de la vente et de la consommation de boissons alcooliques au Québec.

Donc, je pense que, aujourd'hui, il faut avoir - et je me devais de l'avoir - une vision plus globale que celle de mes responsabilités strictes comme Solliciteur général. C'est la raison pour laquelle je ne suis associé à mes collègues. Nous allons agir rapidement pour véritablement solutionner le coeur du problème, celui dont je vous ai fait état tout à l'heure.

M. Filion: M. le Président, je pense que le dossier est intéressant et il est symptomatique d'une série d'attitudes. Évidemment, la Régie des permis d'alcool, avec à la tête - je regardais la signature du rapport - le président-directeur général, le vice-président-directeur général adjoint et le régisseur, dans ce qui m'est apparu, en tout cas, une étude exhaustive mais, encore une fois, je ne l'ai pas lu en détail...

MM. Laflamme, Laurence et Boulet nous remettent un rapport. Qu'est-ce que le Solliciteur général fait? II vient de nous le dire. On crée un comité.

Pour créer un comité on va aller chercher du monde du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, de l'Industrie et du Commerce - toujours à l'intérieur du gouvernement - un ministre délégué aux PME, des gens du ministère du Revenu - on pense aux sous - et, évidemment, c'est le Solliciteur général qui forme le comité. Mais, est-ce que le ministre a songé une seule seconde, peut-être, à inclure dans ce comité au plus sacrant - il n'est pas trop tard pour le faire - des gens de la Protection du consommateur? Est-ce que les consommateurs ne sont pas une partie drôlement intéressée au problème du vin libre? Où sont les représentants des groupes de consommateurs? D'ailleurs, encore une fois, on reste à l'intérieur du gouvernement. Alors, est-ce qu'on a peur de sortir à l'extérieur du gouvernement? Même si on restait à l'intérieur du gouvernement, pourquoi ne pas inclure des gens délégués par le ministre responsable de la Protection du consommateur?

Si on prend la peine d'aller chercher des gens, imaginez-vous, du cabinet du ministre délégué aux PME qui n'a pas de ministère, lui, à part cela, mais à qui on demande quand même des ressources pour assister à des réunions une fois par trois semaines sur le rapport sur le vin libre, pourquoi pas des gens délégués par le

ministre responsable de la Protection du consommateur?

M. Latulippe: Je voudrais...

M. Filion: Deuxièmement, toujours sur ce comité. J'ai retrouvé le communiqué de presse: Le comité interministériel aura pour mandat d'étudier la problématique globale entourant l'activité économique de la production, de la vente et de la consommation de boissons alcooliques au Québec. C'est à peu près le mandat qu'avait le comité. Je pense que le comité interministériel est un comité gouvernemental. Au lieu d'étudier les problématiques, il devrait étudier les conséquences pratiques - et politiques, s'il le veut - des recommandations contenues dans un rapport préparé par des gens qui possèdent l'expertise appropriée dans un secteur.

On retrouve un peu partout au gouvernement des comités; ici, ce ne sont pas des comités de bénévoles, mais c'est ce qu'on retrouve un peu partout. Là, c'est un autre comité. Une étude pour faire l'étude de l'étude. C'est la même chose sur le rapport Beaudry de votre collègue. C'est la même chose dans les autres commissions parlementaires où on a eu la chance d'étudier. On fait des rapports sur les rapports des rapports. Mais, il faut faire attention parce que les comités, à un moment donné, vont finir par remettre leurs rapports. À ce moment-là, en dehors des grands discours, il va falloir prendre des décisions et des bonnes, en concertation avec ceux qui vivent les réalités.

Et, dans ce cas-ci, pour revenir à la question du vin libre, M. le Président, je dis ceci: Le consommateur est sûrement une partie intéressée. Il est remarquable qu'on ait réussi à inclure des gens du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche dans ce dossier alors qu'il n'y a personne de l'Office de la protection du consommateur ou du ministre délégué à la Protection du consommateur.

Quant à faire des comités, vous pourriez peut-être en faire de bons. (11 h 45)

M. Latulippe: Je comprends les préoccupations de mon collègue de Taiilon. Je vois qu'il brandit le rapport sur le vin libre. J'espère que mon collègue l'a lu. J'espère aussi qu'il a pu lire la table des matières parce qu'il pourra constater que les consommateurs ont participé. Non seulement ils ont participé, mais ils ont été entendus devant la commission. Non seulement ils ont été entendus devant la commission, mais la commission a eu une oreille très attentive face aux représentations des consommateurs. Je vous le souligne. C'est même à la page 249 du rapport, M. le député de Taillon. Je pense que nous avons été fort conscients de la présence des consommateurs. D'ailleurs, si vous regardez, il n'y a pas seulement les consommateurs qui sont impliqués, il n'y pas de restaurateur dans mon comité, il n'y a pas d'hôtelier. Ces personnes ont été entendues là où elles devaient être entendues.

Quant au deuxième aspect de votre question, M. le député de Taillon, oui, le gouvernement libéral n'agit pas à la hâte, dans la précipitation. Le gouvernement libéral n'est pas un gouvernement qui improvise, comme on l'a malheureusement vécu dans les années passées. Oui, quand nous gouvernons, il est important que nous puissions avoir toutes les facettes d'un problème. Il est important que nous puissions, entre ministres, coopérer. Il est important que nous agissions de façon réaliste, posée, en ayant des solutions qui collent véritablement aux problèmes. Il est impartant de ne pas improviser. C'est vrai, M. le député de Taiilon, c'est la façon dont je procède, c'est la façon dont les ministres procèdent actuellement. Vous n'avez pas à craindre. Nous n'arriverons pas avec des solutions improvisées, comme nous l'avons malheureusement vécu dans les années passées. C'est ce que les citoyens du Québec cherchent aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle nous avons été élus. C'est la raison pour laquelle nous continuerons de former le gouvernement.

M. Filion: Pas de décision précipitée, sauf quand vient le temps d'appliquer les coupures décrétées par les groupes de bénévoles qui ont décidé de comprimer les dépenses de l'État. À ce moment, on ne se gêne pas. On ferme des prisons, rien de moins, pour sauver 200 000 $ par prison. Là, on en prend des décisions précipitées. Je l'ai dit tantôt dans mon discours d'ouverture, il est remarquable qu'à peu près les seules décisions du ministre aient été prises dans le secteur de la détention. Dans le reste, je vous le concède, il n'y a pas eu de décision précipitée. Au contraire, on assiste à une joyeuse éclosion presque printanière de comités. À peu près un par semaine. J'en ai fait un petit "listing" de ces comités. Uniquement en ce qui concerne le Solliciteur général, ça s'en vient pas pire. Ce que je disais au Solliciteur général, non pas que ce ne soit pas correct de former des comités, c'est correct, mais il faudrait s'organiser pour qu'ils soient bien formés, d'une part. Deuxièmement, il faut s'attendre que les rapports viennent, à un moment donné.

Maintenant, pour revenir à la question du vin libre, je pense que le Solliciteur général n'a pas compris ma question. C'est bien sûr, je l'ai dit tantôt, que ce rapport était exhaustif, avait fait le tour, avait consulté des gens, mais le mandat que vous avez donné à votre comité interministériel,

c'est le mandat de refaire tout le tour de la problématique. Si vous refaites tout le tour de la problématique, incluez le verset des consommateurs. Dans ce dossier, comme dans beaucoup d'autres, il semble que le gouvernement du Parti libéral, qui a aboli le ministère de la concertation, oublie des acteurs importants.

M. Latulippe: Je pense, malheureusement, que mon collègue de Taillon n'a pas saisi, compris, finalement, l'importance et compris surtout que, comme gouvernement, le problème du vin libre était pas mai plus vaste et il a pas mal plus de conséquences que de tout simplement penser aux gens ou aux personnes qui se présentent avec leur bouteille de boisson dans un restaurant rue Dulude. C'est un problème, M. le député de Taillon, qui est plus vaste que ça, qui est plus global que ça, qui implique notre politique sur la façon dont on établit le prix des vins, qui est plus général, qui implique aussi toute la question de l'application de la loi, la LIMBA, parce qu'il est important que nous soyons sévères dans cette application de la loi.

C'est un problème qui est plus global, qui est plus complexe que ce que vous mentionnez. Je vous convie à passer à travers le rapport, parce qu'il est certain que ce rapport nous amène des éléments intéressants sur la situation. Mais justement, la solution implique d'autres personnes, d'autres ministères. C'est une solution qui viendra de façon raisonnable, dans les mois qui viennent, solutionner le problème auquel on a fait référence.

M. Filion: M. le Président, en ce qui concerne le prix des vins, il faut dire que les taxes additionnelles décrétées par le Conseil des ministres n'aident pas à régler cet aspect de la disproportion qui existe dans le prix des alcools au Québec et ailleurs.

Je suis content que le Solliciteur général soit sensible à cette question. Peut-être que son collègue du Revenu, le ministre des Finances, va vouloir nous lever d'autres impôts sur les biens dits luxueux. On dit: C'est luxueux, l'alcool et le tabac. Mais on a même taxé l'essence; c'est plus malheureux. L'alcool et le tabac sont des biens luxueux, on y va'.

Je pense qu'on est rendu les champions. Votre gouvernement a donné une joyeuse escalade aux prix de l'alcool et du vin. En ce sens, M. le Président, je suis heureux de voir que le Solliciteur général est sensible à cette dimension. Le ministre des Finances nous annonce le budget pour le 1er mai ou une autre date; Je ne sais pas si cette affaire est réglée, mais peu importe, autour du 1er mai; cela va être réglé cet après-midi. On va avoir le discours sur le budget du ministre des Finances.

Cela va se discuter un petit peu, j'espère, au Conseil des ministres et non pas juste dans les comités de sages bénévoles, pour qu'on puisse commencer à songer à ces questions. N'importe lequel d'entre nous qui aime un peu le vin constate, en allant aux États-Unis, une disproportion incroyable de prix pour les bouteilles de vin. Quand on va dans les autres provinces, c'est la même chose.

Je lisais un article de la Gazette - je ne sais pas si le Solliciteur général est au courant - du 22 mars, en ce qui concerne la contrebande de l'alcool. Cet article fait état d'un problème de contrebande de boissons alcooliques entre le Québec et le New Hampshire. Pourquoi? Ce n'est pas compliqué. C'est parce que cela coûte mauditement moins cher là-bas.

Si on est capable de remplir de gros camions et d'amener cela au Québec, cela devient un commerce bien sûr illégal, mais fort lucratif. Ce seraient des Québécois qui, selon l'article, importeraient de l'alcool obtenu à prix prohibitif aux États-Unis pour faire un profit considérable en le revendant au Québec.

En ce sens, je veux demander au Solliciteur général s'il est au courant de cet aspect du problème, c'est-à-dire de la contrebande de l'alcool. Qu'est-ce qu'il entend faire, étant donné qu'il assume également les deux responsabilités, celle de la sécurité et celle de la régie des permis d'alcool. II doit avoir réfléchi à ce problème. Est-ce qu'il y a un comité en marche? Qu'est-ce que le ministre a fait ou qu'est-ce que le ministre entend faire concernant le problème de la contrebande de l'alcool qui, M. le Président - je pense que c'est important de le souligner - a des effets non pas théoriques, mais des effets concrets sur le marché québécois et qui affectent les gens?

Encore une fois, quand on regarde ce qui se passe en Europe, notamment... Parce que la qualité de cet alcool est un point d'interrogation. On sait ce qui s'est passé avec le vin italien. Je suis sûr que les gens à la régie, notamment, doivent connaître ce dossier 100 fois plus que moi. En Europe, cela a causé beaucoup de problèmes.

En ce sens, quelles sont les actions qu'a posées le ministre concernant la contrebande de l'alcool et quelles sont ses intentions à propos de ce dossier?

M. Latulippe: Je voudrais revenir un peu en arrière sur le discours fleuve de mon collègue de Taillon. Lorsqu'il a dit: On est devenu au Québec des champions en matière de taxes. Oui, c'est vrai pour le gouvernement précédent. Vous êtes devenus des champions en matière de taxes. Oui, ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on paie notre vin... Je suppose que le député de Taillon, même

lorsqu'il n'était pas à l'Assemblée nationale, buvait aussi du vin. Je suppose que le député de Taillon, il y a quelques mois, allait aussi au restaurant et constatait aussi, à l'époque, que le prix des vins au Québec était très élevé. Je suppose aussi que le député de Taillon, à l'occasion - je vois qu'il a voyagé au New Hampshire ou ailleurs - a pu constater...

M. Filion: Je ne sais pas pourquoi le Solliciteur général fait une réflexion sur un voyage au New Hampshire. Quiconque a été le moindrement attentif à mes propos...

M. Latulippe: Je voudrais répondre au discours fleuve.

M. Filion: Je n'ai jamais dit que j'avais été au New Hampshire.

Le Président (M. Marcil): Le ministre a la parole. Est-ce qu'on peut lui permettre de continuer?

M. Latulippe: Effectivement, vous étiez les champions de la taxation au Québec. Vous parliez, dans votre discours fleuve, de la création de quelques comités qui vont, à très court terme, régler des problèmes importants. Mais que dire du nombre effarant Je pourrais vous en faire la liste éventuellement - de commissions d'enquête de toute nature que le gouvernement précédent a faites, refaites et "rerefaites" sans résultat concret. Je pense que nous avons entrepris une démarche tout à fait différente.

Enfin, pour répondre à votre troisième préoccupation, je peux vous dire que je suis également préoccupé par la situation dont vous faites état, en rapport avec le commerce peut-être illégal de boissons alcooliques. Je pense que le problème existait probablement et même certainement auparavant. Je vous le dis, c'est un des facteurs qui me préoccupent. Nous sommes à regarder comment la LIMBA, la loi pourrait être amendée dans le but, finalement, d'en arriver à des restrictions beaucoup plus fortes, dans le but de donner des dents à cette loi pour contrôler toute situation illégale qui pourrait survenir en rapport avec le commerce des boissons alcooliques.

M. Filion: Est-ce que le ministre a posé des gestes? C'est cela, ma question.

M. Latulippe: Les gestes que nous sommes en train de poser, c'est effectivement de revoir les dispositions de la loi, les dispositions de la LIMBA, et, en temps et lieu, nous serons en mesure de faire les annonces pertinentes pour faire en sorte que cette loi ait beaucoup plus de dents, ait beaucoup plus de mordant pour être en mesure de contrôler les situations dont nous avons hérité du passé.

Le Président (M. Marcil): Est-ce qu'on peut permettre au député de Mille-Îles d'intervenir?

M. Filion: Oui, avec grand plaisir.

M. Bélisle: Dans la même veine que ce que le député de Taillon vient de nous souligner relativement à la contrebande, ce qui m'intéresse, M. le Solliciteur général, c'est surtout l'aspect général des infractions à la Loi sur les permis d'alcool. J'ai été estomaqué d'apprendre, la semaine dernière, à la commission du budget et de l'administration, que d'autres infractions, à la loi sur les loteries... le président de Loto-Québec a fait savoir en commission parlementaire qu'il y avait au-delà de 600 000 000 $ par année de manque à gagner à cause des jeux illégaux dans notre société.

Ma question est la suivante. Je voudrais savoir si vous possédez des estimations de pertes de revenus gouvernementaux quant aux infractions qui peuvent se produire présentement dans notre société relativement à la Loi sur les permis d'alcool. Autrement dit, est-ce qu'il y a un manque à gagner important de la part du gouvernement du Québec à cause d'infractions dont vous avez connaissance ou dont vous présumez l'existence qui nous empêchent de toucher des sommes importantes?

M. Latulippe: C'est même la Société des alcools qui a procédé à certaines évaluations. Le fisc perd au-delà de 50 000 000 $ par année, selon les évaluations de la Société des alcools, en rapport avec les infractions à la LIMBA. C'est la raison pour laquelle nous devons procéder à des amendements à cette loi pour qu'elle ait véritablement des dents, et dans le but d'avoir tous les moyens à notre disposition de l'appliquer, pour éviter que se continue cette situation héritée du passé. (12 heures)

M. Bélisle: Une dernière question, M. le Solliciteur général. Je vois que le budget à l'élément Contrôle des permis d'alcool est de 4 776 000 $ pour l'année 1986-1987. Serait-il possible de nous dire - on parle toujours, bien entendu de bénéfices économiques -quels sont les revenus perçus par le contrôle des permis d'alcool au Québec, en contrepartie? II y a le coût du programme, il y a aussi le bénéfice. Moi, j'aimerais faire mon petit rapport coûts-bénéfices pour mon information personnelle.

M. Latulippe: II y a deux facteurs dont on doit tenir compte: les permis, d'une part, et ce que la Société des alcools perçoit en

conséquence de l'application de la loi. Les permis: nous pouvons chiffrer à 7 900 000 $; ce que la Société des alcools perçoit, c'est aux alentours de 40 000 000 $. On se rend bien compte que quand vous faites cette analyse coût-bénéfices, avec le budget que nous allouons à la commission, c'est très positif.

M. Bélisle: Merci, M. le Solliciteur général.

Le Président (M. Marcil): Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. Filion: J'ai cru comprendre que vous avez soulevé la question des revenus des jeux illégaux en mon absence. C'est cela?

M. Bélisle: Alors que vous étiez absent de la Chambre, M. le député de Taillon, oui, j'ai soulevé la même question que nous avons eue la semaine dernière à la commission du budget et de l'administration.

M. Filion: D'accord. Je voudrais...

M. Bélisle: Nous avons appris qu'il y a avait au-delà de 600 000 000 $ dans les jeux illégaux, qui étaient perdus par le Québec à chaque année. Lorsqu'on parle de restrictions budgétaires, comme vous devez bien le comprendre, c'est très important de voir où nous pouvons ramasser les sous supplémentaires pour des services de base.

M. Filion: J'ai des questions sur cet aspect. Je vais les poser, si tout le mande est d'accord, quand nous serons rendus au bon programme.

M. Bélisle: C'est votre interprétation, M. le député de Taillon.

M. Filion: Si nous étions à la commission de... Comme je vous le dis, j'ai des questions prévues là-dessus. Alors, je vais attendre un peu plus tard cet après-midi.

Le Président (M. Marcil): II a seulement fait un rapprochement avec les contraventions aux permis d'alcool, les pertes d'argent.

M. Filion: En ce qui nous concerne, M. le Président, nous sommes prêts à adopter le programme 2.

Le Président (M. Marcil): Vous êtes prêts à adopter le programme 2?

M. Filion: Je ne sais pas si... Oui, d'accord.

Le Président (M. Marcil): Adopté. Nous passons au programme no 3.

M. Filion: Au programme 3...

Le Président (M. Marcil): Garde des détenus et réinsertion sociale des délinquants.

Garde des détenus et réinsertion sociale des délinquants

M. Filion: D'abord, je voudrais savoir du Solliciteur général quel est l'état de la surpopulation à la prison de Bordeaux. J'aimerais qu'il me donne les chiffres sur la situation réelle à la prison de Bordeaux. Ensuite, peut-être du même souffle, pour éviter deux séries de recherche, à Orsainville.

Je suis tout surpris de voir le temps que cela prend pour faire le point sur une question aussi importante, fondamentale.

M. Latulippe: C'est bien certain que c'est une question importante et fondamentale, mais c'est aussi une question qu'il faut voir sous différents angles. D'abord, si on nous parle de surpopulation, il est important que mon collègue de Taillon connaisse l'état de la situation dans l'ensemble du Québec. Il est important de savoir que, dans l'ensemble du Québec, nous avons dans notre système carcéral 3105 places, pour l'information du député de Taillon. Il est impartant aussi qu'il connaisse qu'en moyenne nous utilisons 2600 places sur ces 3105. Il est important aussi de savoir que la région de Québec, puisqu'il m'a posé la question sur Québec, se conçoit comme une région, c'est la région administrative 03, que cette région comprend 500...

M. Filion: M. le Président...

M. Latulippe: ...centres de détention...

M. Filion: ...ma question porte sur Bordeaux et Orsainville.

M. Latulippe: Non, la question porte sur le centre de détention de Québec...

M. Filion: Non, non, ma question...

M. Latulippe: ...et sur Bordeaux. Il est important...

M. Filion: Ma question porte sur Bordeaux et Orsainville.

M. Latulippe: ...que mon collègue puisse avoir une vision réelle de la situation et puisse comprendre comment on fonctionne dans notre système carcéral. Effectivement, par exemple dans la région de Québec, les besoins en matière d'incarcération doivent se compter en fonction de la région elle-même et non pas uniquement centre par centre. Dans la région de Québec... Il y a beaucoup

d'impacts dans cette question, M. le député de Taillon. Maintenant...

M. Filion: Ma question est simple, M. le Président, quand même.

Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Filion: On a uniquement cinq heures à accorder à nos travaux. Je pose une question très précise au Solliciteur général et il est en train de me...

M. Bélisle: Question de règlement, M. le Président.

M. Filion: ...donner un cours sur l'organisation des prisons et l'organisation...

Le Président (M. Marcil): S'il vous plaît. À l'ordre!

M. Filion: ...des régions au Québec.

M. Bélisle: Question de règlement, M. le Président.

M. Filion: Je connais les régions au Québec, M. le Solliciteur général.

M. Bélisle: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Marcil): Oui, M. le député de Mille-Îles, sur votre question de règlement.

M. Bélisle: M. le Président, je me vois contraint de rappeler au député de Taillon trois articles du code, les articles 287, 284 et 209. Si une question est posée, le ministre a tout son temps de réponse et jusqu'à 20 minutes pour y répondre. En plus, l'article 287 nous dit très bien qu'il peut intervenir aussi souvent qu'il le désire quand une question lui est posée lorsqu'il est en étude des crédits. Alors, la question mérite une réponse. Malheureusement, si c'est une question aussi large qu'une autoroute que le député de Taillon pose, il faut qu'il s'attende à recevoir une réponse aussi large qu'une autoroute. Alors, qu'il patiente en permettant au Solliciteur général de répondre.

M. Latulippe: Si on revient aux centres de détention...

M. Filion: M. le Président, je veux juste relever dans les propos du député de Mille-Îles...

Le Président (M. Marcil): Est-ce que c'est une question de...

M. Filion: Ma question n'est pas large comme une autoroute, au contraire. Elle est très précise. Si vous voulez, on peut faire une petite maïeutique ensemble, on va commencer avec le nombre de cellules à Bordeaux, cela va aller plus vite. Je vais vous poser des questions précises, si vous aimez mieux cela...

M. Latulippe: M. le Président, j'aimerais...

M. Filion: ...pour arriver à avoir la lumière.

M. Latulippe: ...être en mesure de terminer ma réponse à mon collègue de Taillon.

Le Président (M. Marcil): À l'ordre, s'il vous plaît! On va laisser ta chance au ministre de terminer sa réponse.

M. Latulippe: Donc, on va y arriver. Quand on regarde la région de Québec qui comprend plusieurs centres, nous avons 612 places. Quand on regarde le centre de détention de Québec, en particulier, il y a 505 cellules. Quand on regarde les besoins de la région de Québec, de la région 03, on se rend compte que 489 cellules sont requises sur une base annuelle pour répondre à la demande. Nous n'avons pas de surpopulation dans la région de Québec. Nous n'avons pas de surpopulation à Québec. Il ne faut pas générer des craintes inutiles, bien au contraire. Nos équipements carcéraux sont amplement suffisants dans la région 03, même en l'absence de la prison de Saint-Joseph-de-Beauce. En ce qui concerne la situation à Bordeaux en particulier, actuellement je peux vous dire qu'il y a, au moment où on se parle, une population interne de 797 personnes. Je peux vous dire que la capacité de Bordeaux est de 850 places. I! ne faudrait certainement pas tenter de faire croire à la population que nous vivons au Québec constamment des problèmes de surpopulation dans notre système carcéral.

M. Fillion: M. le Président, d'abord le Solliciteur parlait d'offre quand il parlait de places en prison. Pardon, il parlait de demande. Ce n'est ni une offre ni une demande, c'est une nécessité. Les gens qui vont là, ce n'est pas parce que la demande est forte, c'est vraiment parce que c'est une nécessité. Quand on parle de détention, nous sommes en train d'appliquer, d'exécuter des ordonnances du pouvoir judiciaire.

Deuxièmement, est-ce qu'il est exact, le Solliciteur général devrait le savoir-Plusieurs personnes sont condamnées à des termes de prison dans la région de Montréal, ils vont tous à Bordeaux. Je l'ai dit tantôt, il y a des condamnations à des fins de semaine, il y a aussi des condamnations à de

courtes sentences de prison. Est-ce qu'il est exact que les sentences de fins de semaine ne sont pas ou presque pas exécutées à Bordeaux parce qu'il n'y a pas de place? Est-ce qu'il n'est pas exact - on sait qu'un individu qui est condamné à une peine de prison n'est pas admissible à une libération conditionnelle avant le tiers de sa peine -que, dans l'état actuel de la surpopulation à Bordeaux, un individu sans antécédents judiciaires - prenons un cas simple condamné à trois mois de prison ne purgera même pas le tiers de sa peine, faute de place? Si on veut raccourcir encore plus, prenons une sentence de 45 jours de prison continue ordonnée par l'autorité judiciaire -cet individu devrait normalement purger 15 jours de prison n'étant pas admissible à une libération conditionnelle - est-il exact qu'à cause de l'état de surpopulation que le Solliciteur général nie, si je compends bien sa réponse... Vous avez nié tantôt qu'il y a un état de surpopulation à Bordeaux et à Orsainville, si j'ai bien compris votre réponse.

M. Latulippe: Les sentences intermittentes, dans un premier temps, c'est votre première question, à Bordeaux ou ailleurs, sont actuellement exécutées toujours dans les limites de la capacité de Bordeaux.

Votre deuxième question sur les libérations conditionnelles, je peux vous dire -j'espère que mon collègue de Taillon est au courant - que nous avons effectivement, dans nos centres de détention, des programmes d'absence temporaire et que ces programmes permettent aux détenus qui n'ont pas nécessairement purgé effectivement le tiers de leur sentence mais qui peuvent, dans un but de réinsertion sociale, être en situation d'absence temporaire... ce sont là des programmes qui s'appliquent équitablement pour toutes les sentences, quelle que soit leur durée. Ce sont là des programmes qui sont nécessaires pour la réinsertion sociale des détenus. Vous savez, M. le député de Taillon - je l'ai dit au début - les détenus dans nos centres de détention au Québec ne sont pas des personnes qui, généralement, sont dangereuses. Ce sont des personnes qui ont beaucoup plus besoin de l'aide de la société et de l'appui de la communauté. La philosophie carcérale de la séquestration la philosophie carcérale de garder le monde en dedans, surtout dans les cas où il s'agit de détenus ou de personnes qui sont condamnées à des peines légères, c'est fini au Québec. Je pense que, pour la meilleure protection du public, pour éviter la récidive des gens, il faut les réinsérer socialement. Quant à moi, les programmes d'absence temporaire, les programmes d'alternative à l'incarcération, ce sont des moyens non seulement d'aider les détenus à se réinsérer socialement, mais ce sont aussi des moyens de protéger la société, parce qu'une personne que l'on réinsère dans la société, c'est une personne qui ne sera plus, qui ne sera jamais un récidiviste. (12h 15)

M. Filion: M. le Président, les beaux discours, nous en sommes, je l'ai dit tantôt. Les ressources alternatives à l'emprisonnement, c'est clair. D'ailleurs, vous vous inscrivez parfaitement bien dans la foulée de tout ce qui a été fait au Québec par vos collaborateurs dans les années passées. C'est clair, par exemple, que le travail de la Commission québécoise des libérations conditionnelles est excellent. C'est clair en ce qui concerne le programme d'absence temporaire ou le programme de congé humanitaire - je pense que c'est ainsi qu'on l'appelle au ministère - que ce sont des programmes qu'il faut mettre de l'avant. Ce que j'essaie d'expliquer au Solliciteur général, pour essayer de voir s'il en est conscient, c'est d'abord - c'est cela qui est inquiétant... D'après vous, M. le Solliciteur général, est-ce qu'il existe un problème de surpopulation à Bordeaux, oui ou non? Et un problème de surpopulation doit se comprendre comme suit. Tantôt, vous m'avez dit, concernant les sentences de fin de semaine, qu'elles sont purgées, mais dans la limite de la capacité de Bordeaux; ensuite, en ce qui concerne les courtes sentences, dans la limite de la capacité de Bordeaux. Mais ma question porte précisément sur la limite des grandes prisons québécoises que sont Bordeaux et Orsainville. Dans ce sens-là, pour mettre un peu le Solliciteur général sur la piste - on évalue, grosso modo, à 830 ou 850 le nombre de cellules à Bordeaux - est-ce qu'il n'est pas exact que, dans une situation normale - je ne dis pas des programmes de congé humanitaire et des programmes d'absence temporaire - le nombre de détenus - je ne parle pas en l'absence d'application de ces programmes - serait d'environ 1300? Est-ce que c'est possible si les sentences de fin de semaine étaient appliquées et si les courtes sentences étaient exécutées, dans la proportion d'un tiers, c'est-à-dire dans la proportion, grosso modo, prévue par la loi?

M. Latulippe: Je voudrais soulever un point en réponse à la question du député de Taillon. Quand le député de Taillon nous dit que les alternatives à l'incarcération, dans le passé, ont été développées, je peux lui dire que ce n'étaient pas véritables alternatives à l'incarcération. Dans plusieurs cas, ces mesures ont été utilisées comme des additions à l'incarcération. On incarcère au Québec autant qu'on incarcérait il y a dix ou quinze ans.

Ce qu'il faut faire, les orientations qu'on doit prendre, c'est que ces mesures deviennent de véritables alternatives à l'incarcération. Deuxièmement, en ce qui concerne la surpopulation des prisons et, en

particulier dans la région de Montréal, il est évident qu'à certains moments durant l'année, il peut survenir et il survient, à Montréal ou ailleurs, une surpopulation. Il arrive certaines périodes durant l'année où il y a un surplus de détenus. Mais, vous savez, on ne construit pas un pont parce qu'il y a du trafic à 17 heures. Je ne construirai pas une prison juste parce que pendant un mois ou trois semaines, il y a quelques détenus de plus. Je préfère prendre ces sommes d'argent, M. le député de Taillon, pour la réinsertion sociale des détenus tout au long de l'année.

M. Filion: Alors, est-ce que c'est nécessaire de fermer des prisons, par exemple? C'est cela la question, M. le Président. On a besoin - et le Solliciteur général en a besoin, étant donné l'importance de ses fonctions - d'un peu de cohérence. II nous dit et nous le répétons: il faut développer des ressources alternatives à l'incarcération.

D'ailleurs, soit dit en passant, je n'ai rien vu dans ses budgets qui soutienne une intensification des ressources alternatives à l'incarcération. On y viendra un peu plus tard. Mais rien dans les budgets soutient de façon substantielle l'intensification des efforts du ministère dans les ressources alternatives à l'emprisonnement.

Deuxièmement, je l'ai dit tantôt, il n'y a rien de concret pour aller plus loin que ce qui a été fait par le gouvernement précédent en matière de ressources concrètes alternatives à l'emprisonnement. Quand le ministre nous dit, et c'est incroyable, que le programme de travaux communautaires n'est pas une alternative à l'emprisonnement, franchement; et quand on pense également à la création de la Commission québécoise des libérations conditionnelles, ce sont là des actions concrètes visant à permettre une solution autre que l'emprisonnement pour les détenus.

Or, d'une part, M. le Président, il y a une incohérence à ce niveau, comme je l'ai dit dans mon discours d'ouverture; le ministre met ses bas après ses souliers. Parce que dans ce cas-ci, ce qu'il aurait fallu faire aurait été fort simple: développons ces ressources alternatives à l'emprisonnement et ensuite on pourra regarder ce qui se passe du côté des prisons. Encore une fois, le rôle du ministre, je l'ai dit tantôt... Mais un juge du tribunal de la Cour des sessions de la paix, n'importe où au Québec, ou d'une Cour supérieure, qui condamne un individu à la prison, tient compte de différents facteurs. Il tient compte des possibilités de réinsertion dans la société. Il tient compte de ce qu'on appelle tous les facteurs subjectifs, y inclus la réhabilitation de l'accusé et du détenu. II tient compte de ce facteur mais il tient aussi compte des facteurs dissuasifs, comme on les appelle, facteurs importants pour la protection de la société.

Quand un juge, quel qu'il soit, au Québec - et encore une fois, ce sont là nos règles de droit, à moins que le Solliciteur général veuille les changer, auquel cas il devrait en parler à son collègue, le ministre de la Justice - ordonne l'incarcération d'un individu pour une certaine période de temps, à ce moment, le pouvoir judiciaire s'attend que le pouvoir exécutif représenté par le Solliciteur général, remplisse sa partie des obligations. Je veux bien qu'on tienne compte des moyens et je suis tout à fait d'accord avec les programmes qui peuvent exister à l'intérieur du système carcéral pour favoriser la réinsertion des détenus, au lieu de l'emprisonnement strict. On le sait, c'est évident que les prisons ne sont pas le meilleur endroit pour réhabiliter les gens.

Idéalement, ce devrait être au chaud, mais en attendant, des prisons, que voulez-vous, il en faut quelques-unes. Il en faut. Le Solliciteur général a la responsabilité uniquement des prisons, non pas la responsabilité des pénitenciers. C'est évident que dans les prisons, on trouve des individus qui sont condamnés moins lourdement que dans le cas des pénitenciers. Mais, un peu de cohérence de la part du Solliciteur général! Qu'il développe d'abord ses ressources alternatives. Qu'il règle son problème de surpopulation, auquel il ne m'a toujours pas répondu, à moins qu'il fasse l'autruche sur les problèmes à Bordeaux, qui sont pourtant de notoriété publique dans les milieux judiciaires. Et ces problèmes de surpopulation à Orsainville aussi. Avant de fermer des prisons ailleurs, ce qui va venir par la force des choses aggraver le problème de la surpopulation, je pense que le ministre aurait dû vérifier l'état, les données factuelles de la situation. I! aurait dû regarder la réalité en face au lieu de se lancer dans de grands discours pour l'humanisation des prisons et après cela, il est incapable de tenir... Parthenais? incroyable! Il faut y avoir été. Je ne sais pas si le Solliciteur général y est allé. Ça doit.

Tous les ministres de la Justice avant lui, toutes les autorités politiques responsables ont décidé de fermer Parthe-nais. Ce n'est pas facile. Je l'avoue que ce n'est pas facile. J'offre ma collaboration au Solliciteur général pour trouver une solution. Parce qu'il faut en construire ailleurs. Curieusement, le Solliciteur général a dû l'apprendre, les prisons, quand on les ferme les gens n'aiment pas ça, mais quand vient le temps d'en construire une nouvelle quelque part, là c'est moins drôle. Il y a l'opinion publique. Il faut tenir compte de l'intérêt des gens, j'en suis. Quant à son discours d'humanisation, dans le cas de la fermeture des prisons, j'irai un peu

plus loin.

Qu'il fasse le tour des six endroits où il vient de fermer des prisons et qu'il vienne me reparler d'humanisation quand on pense aux inconvénients pour les gardiens de prison, quand on pense, dans certains cas, aux rénovations qu'avaient faites pas plus tard que l'an dernier certains directeurs de prison, quand on pense aux programmes de réinsertion sociale qui pouvaient exister dans ces six endroits et sur lesquels le ministre vient de mettre la hache de façon inconsidérée!

J'aimerais bien parler, avant qu'on pousse plus loin la discussion, de la question de la surpopulation pour qu'on se comprenne. Est-ce que le Solliciteur général admet, oui ou non, le problème de la surpopulation à Bordeaux et à Orsainville?

Le Président (M. Marcil): J'aurais une question technique, avant de débuter, M. le ministre. Il nous reste environ quatre minutes. Je vais permettre au ministre d'intervenir et le député de Mille-Îles avait levé la main pour une question. Cela va aller, M. le ministre?

M. Latulippe: Oui. En ce qui concerne Parthenais, puisque mon collègue y a fait référence, il aurait dû être le conseiller de l'ex-ministre de la Justice et de l'ancien ex-ministre de la Justice, autant le chef de l'Opposition actuelle, autant M. Bédard, qui avaient annoncé à plusieurs reprises la fermeture de Parthenais. Il aurait dû être auprès d'eux à ce moment pour leur faire savoir comment solutionner le problème de Parthenais.

M. Filion: Ils ne l'ont pas abandonné, eux, par exemple.

M. Latulippe: Mais, monsieur...

M. Filion: II n'ont pas abandonné; ils n'ont pas jeté la serviette.

M. Latulippe: ...j'aimerais être en mesure de terminer.

M. Filion: Ce que le Solliciteur général actuel fait.

M. Latulippe: Quand mon collègue de Taillon parle de surpopulation et essaie de monter cela en épingle, il faudrait rétablir les faits. Il faudrait peut-être aussi que mon collègue prenne son crayon et son papier pour compter, parce qu'effectivement il y a 3105 places au Québec. Il y a 29 centres de détention. Les fermetures que l'on s'apprête à faire ne touchent, compte tenu des réaménagements, que 47 places sur 3105.

Il ne faudrait pas commencer à exagérer la situation quand on regarde pourquoi on ferme ces centres, quand on regarde les besoins régionaux. J'ai fait état, tout à l'heure, de la situation dans la région de Québec.

M. Filion: C'est incroyable, M. le Président! Il n'est pas en train de me dire -juste pour qu'on se comprenne - qu'il y a juste 47 places dans les six centres de détention.

M. Latulippe: M. le Président, j'aimerais bien que mon collègue...

Le Président (M. Marcil): M. le député de Taillon et M, le ministre, à l'ordre! On va permettre au ministre de terminer sa réponse.

M. Latulippe: Quand on regarde la situation, comme on l'a vu dans la région de Québec, où effectivement, on est en mesure de satisfaire les besoins de détention, quand on regarde en plus les institutions qu'on ferme quand on regarde le type de centres de détention que défend mon collègue... À Saint-Joseph-de-Beauce, par exemple, le centre a été construit en 1860; à Trois-Rivières, en 1815; à Joliette, en 1860. Mon collègue aurait dû faire partie d'un gouvernement du XIXe siècle. Je pense qu'il fait un débat qui aurait valu au XIXe siècle. Mais pas aujourd'hui, au moment où on se parle. Je suppose que mon collègue a dû visiter certains de ces centres. Est-il en mesure de nous dire que la façon dont ces centres sont construits, sont constitués, que les équipements qu'on y retrouve sont encore valables, compte tenu de la philosophie carcérale qu'on doit avoir au XXe siècle, en 1986? Quand il n'y a pas de toilettes, quand il n'y a pas de lavabos, quand il n'y a pas de salles communautaires, pensez-vous qu'on peut, dans ce type de prison du XIXe siècle, être en mesure d'avoir véritablement une philosophie moderne de réinsertion sociale?

Parlons-en de la réinsertion sociale. Justement, en ce qui concerne particulièrement Saint-Joseph-de-Beauce, c'est vrai qu'il y a un réseau de programmes de réhabilitation sociale qui sont bons et qui sont effectivement réalisés dans cette région. Nous allons les continuer et nous allons les développer. Si cela s'est développé dans la Beauce, c'est que nous avions là une communauté qui était favorable à la réinsertion sociale, une communauté qui ne se basait pas uniquement sur des équipements du XIXe siècle, mais une communauté qui était apte à contribuer au développement de ses détenus.

Je terminerais sur certains points. Mon collègue se porte à la défense d'une prison comme Percé. Savez-vous combien cela coûte à Percé? Cela coûte 150 000 $ la place et il y a deux cellules qui sont utilisées.

M. Filion: C'était un engagement du Parti libéral.

M. Latulippe: Cela coûte 150 000 $ la place et mon collègue de Taillon se porte à la défense de coûts semblables. À Mont-Laurier, savez-vous combien cela nous coûte par jour pour maintenir un détenu? Plus de 200 $ par jour pour garder un détenu dans la prison de Mont-Laurier.

Le Président (M. Marcil): M. le ministre, ai vous voulez conclure, compte tenu que le temps s'écoule.

M. Latulippe: En conclusion, je pense que nous avons fait des choix qui étaient raisonnables, des choix qui tenaient compte de la population carcérale et, surtout, des choix qui mettaient de l'avant notre désir de réinsertion sociale des détenus au Québec.

Le Président (M. Marcil): Merci, M. le ministre. Nous allons continuer les travaux cet après-midi avec la question du député de Mille-Îles. Cela va?

M. Filion: À quelle heure?

Le Président (M. Marcil): Immédiatement après la période des questions.

(Suspension de la séance à 12 h 32)

(Reprise à 15 h 41)

Le Président (M. Marcil): Nous reprenons les travaux de la commission. Lorsque nous avons ajourné, nous nous étions entendus pour laisser la parole au député de Mille-Îles.

Services correctionnels

M. Bélisle: M. le Président, ma question s'adresse au Solliciteur général relativement au programme 3, élément 1, Services correctionnels, où je vois qu'il y a une diminution du montant des crédits demandés de 101 086 000 $ en 1985-1986 à 97 300 000 $ en 1986-1987, soit une diminution de 3 700 000 $ approximativement.

M. Filion: Est-ce qu'on a quorum?

Le Président (M. Marcil): Nous sommes cinq.

M. Filion: Nous sommes quatre.

Le Président (M. Marcil): Non, le député de Richmond...

M. Filion: Ah! c'est vrai! D'accord.

Le Président (M. Marcil): ...le député de la... Nous sommes cinq.

M. Filion: Oui, j'avais oublié le député de Sainte-Marie. Je m'excuse, M. le député de Mille-Îles.

M. Bélisle: Non, cela va, M. le député de Taillon. Est-ce que cela va, M. le Solliciteur général? Je prends tout simplement le Cahier explicatif des crédits, 1986-1987, à la première page, secteur institutions pénales, 03, troisième case, 01, Services correctionnels. C'est le document que vous nous avez remis que j'ai en ma possession. Est-ce que cela va?

M. Latulippe: Oui.

M. Bélisle: Alors, compte tenu de ce préambule, M. le Solliciteur général, et compte tenu des remarques faites ce matin, j'écoutais le député de Taillon parler de -j'ai noté - "rénovations inconsidérées des directeurs de prison". J'ai bien écouté, j'ai bien noté au fur et à mesure que vous donniez cette expression "des rénovations inconsidérées des directeurs de prison". M. le Solliciteur général, j'ai entendu dire - c'est peut-être une rumeur non fondée - qu'à la prison de Trois-Rivières il y a eu des travaux qui ont été faits l'année dernière non pas à un coût modique, mais à un coût d'environ 400 000 $ pour le sablage au jet de sable des murs de l'institution. Je crois comprendre que, cette année, l'institution sera démolie et qu'une nouvelle institution sera construite à cet endroit. Je me pose la question suivante: Est-ce que la diminution dans les crédits demandés de 101 086 000 $ à 97 300 000 $, ce sont des économies de cet ordre-là, des dépenses inconsidérées que vous avez coupées à ce chapitre?

M. Filion: Je ne veux pas empêcher la réponse du Solliciteur général; cependant, pour votre information, je n'ai jamais parlé de rénovations inconsidérées. J'ai parlé des rénovations, je n'ai jamais dit "inconsidérées". Alors, quand même, je ne vous empêche pas de débattre avec le Solliciteur général de la question de la prison de Trois-Rivières, mais je n'ai jamais employé cette expression-là. (15 h 45)

M. Latulippe: Je ne débattrai pas à savoir si mon collègue de Taillon a prononcé ou non ces paroles. Il a certainement mentionné qu'il y avait eu des rénovations. Je dirais qu'il y a eu des rénovations considérables et inconsidérées; en particulier, je vous souligne ce que le gouvernement péquiste, votre gouvernement, a fait dans les années passées. Vous savez que j'ai eu à

fermer la prison de Trois-Rivières. Je ne sais pas si le député de Taillon connaissait Ea situation à la prison de Trois-Rivières, une prison qui a été construite au début du XIXe siècle, une prison où les conditions de vie des détenus à l'intérieur étaient déplorables, tout à fait déplorables; des conditions de vie tout à fait inhumaines. Pendant que ces personnes, non seulement les détenus, mais les travailleurs, les agents de la paix, travaillaient à l'intérieur de cette prison, le gouvernement passé trouvait préférable, plus cohérent, de dépenser 400 000 $ durant l'année 1984-1985 pour "sandblaster" les murs de cette prison du début du XIXe siècle, plutôt que d'investir ces sommes à améliorer les conditions de vie des détenus à la prison de Trois-Rivières ou ailleurs.

M. Filion: M. le Président, tout en restant à l'intérieur du même programme, j'ai peut-être certaines réflexions parce que je voudrais qu'on étudie un peu plus certains aspects du programme. Je voudrais souligner ceci: En ce qui concerne d'abord la prison de Trois-Rivières, sauf erreur, c'est une nouvelle construction d'environ 11 000 000 $, grosso modo. Or, je ne sache pas, qu'il va y avoir démolition de l'ancien édifice. Au contraire, j'ai cru comprendre des découpures de presse que l'ancien édifice va rester. Je ne sais pas, je n'étais pas là, mais peut-être que c'est une réponse à la question du député de Mille-Îles.

Cependant, il y a certaines choses qui valent la peine d'être mentionnées. À plusieurs reprises depuis le début de nos travaux, le Solliciteur général a fait mention qu'il s'agit de vieilles prisons, etc. Je vous ferai remarquer qu'on est ici dans un édifice qui a lui-même au-delà de 100 ans et que certaines constructions qui datent, qui ont un petit peu de barbe, dans certains cas peuvent, à peu de frais, si elles sont bien entretenues, si elles sont bien rénovées, continuer à jouer le rôle de leur vacation, en quelque sorte. En deux mots, ce n'est pas parce qu'un édifice a été construit en 1940 ou en 1840 que pour moi, a priori, c'est un critère. II faut regarder l'état de l'édifice et, dans ce cas-ci, l'état de la prison, etc.

J'ai mentionné également - on reviendra à la prison de Percé - que dans certains cas les fermetures sont faites contrairement aux engagements précis du Parti libéral durant la campagne électorale. Cette attitude de mettre de côté les engagements qu'il a pris pendant la campagne électorale est généralisée pour le Parti libéral, maintenant qu'il a pris le pouvoir. Si le Solliciteur général le veut, dans le cas des prisons,, j'ai encore une fois monté un petit dossier mais je me dis: Le Solliciteur général n'était pas là et moi non plus. Donc, prenons le dossier un petit peu à neuf. Cependant, quant aux engagements de son parti, il faudra que le gouvernement explique à la population qui, lorsqu'elle se fait raconter des promesses par un parti politique qui est en quête de votes, écoute... Quand une population écoute, elle se construit à juste titre des expectatives, des attentes et, quand celles-ci ne sont pas remplies, on crée de la frustration. C'est précisément ce que le Solliciteur général a fait dans son dossier, peut-être malgré lui, parce que je suis convaincu qu'il n'était pas à Percé comme les candidats libéraux l'ont été. II se trouvait impliqué dans cette opération qui se généralise au gouvernement, pas juste au ministère du Solliciteur général mais dans l'ensemble des ' ministères, où on a promis des choses à la population et où on est incapable maintenant de respecter nos engagements et nos promesses.

Pour ces frustrations, M. le Solliciteur général, étant donné que vous êtes responsable en plus des corps de police, je dois vous dire qu'on a un prix à payer en ce qui regarde le climat social. Le tollé de protestations qui a accompagné vos décisions de fermeture des prisons n'est pas étranger aux attentes et à l'expectative que votre parti a créées dans la population.

Avant de passer à un autre sujet, je voudrais souligner, en ce qui concerne la surpopulation des prisons - je n'ai pas réussi ce matin à obtenir des précisions de la part du Solliciteur général - qu'il y a une distinction à faire entre les cellules qui sont effectivement occupées à Bordeaux - le Solliciteur général nous parlait, je pense, d'environ 790, 800 ou quelque chose comme cela, sur 830 ou 850 - et le bordereau de dépôt - je ne sais pas si on l'appelle comme ça - en tout cas, le bordereau de réception ou de dépôt, où on doit recevoir un certain nombre d'individus qui, comme je l'ai dit ce matin, nous viennent du pouvoir judiciaire. Encore une fois, je ne sais pas si le Solliciteur général veut m'apporter des précisions là-dessus. Ce qui m'intéresse comme chiffres c'est, en ce qui concerne Bordeaux ou Orsainville, quel est le bordereau en ce qui concerne ces deux prisons? Est-ce que le ministre est en mesure de répondre à cette question?

M. Latulippe: Mon collègue de Taillon parle longtemps et pose plusieurs questions dans son discours. Je voudrais brièvement lui dire que je suis d'accord avec lui que, lorsqu'un gouvernement gouverne mal, cela cause des frustrations. C'est pour cela, M. le député de Taillon, qu'on est au pouvoir depuis le 2 décembre.

Deuxièmement, vous avez parlé de cette enceinte qu'est l'Assemblée nationale. C'est vrai. Je vous rappelle aussi certaines modifications: des tuiles à l'entrée de l'Assemblée nationale, 250 000 $. Vous n'étiez pas là, probablement, M. le député de

Taillon, et si vous aviez été là vous auriez convaincu votre gouvernement de ne pas faire de telles dépenses.

Vous parlez aussi du maintien et vous dites: Finalement, des prisons du début du XIXe siècle, si c'est bien aménagé, on peut toujours les garder pour quelques siècles à venir. Mais je voudrais vous souligner que de la construction d'une prison dépend aussi une philosophie carcérale. À l'époque, M. le député de Taillon, la philosophie carcérale, au début du XIXe siècle, était basée sur la séquestration. Vous avez probablement visité certaines de ces vieilles prisons. Vous pouvez facilement constater qu'à l'intérieur de ces prisons, ce n'était pas aménagé dans le but de favoriser la réinsertion sociale des détenus. Les nouvelles prisons, celles qui resteront, seront beaucoup plus ouvertes, seront aménagées avec des aires beaucoup plus ouvertes, avec des aires où on va pouvoir pratiquer, avoir des programmes occupationnels, des programmes qui vont nous servir à réhabiliter les détenus. Lorsque les conditions de vie à l'intérieur de ces centres de détention sont exécrables, écoutez, une prison peut devenir une école du crime.

Je pense que ce qui est préférable - et c'est cela qui est bon socialement - c'est de faire en sorte, autant lorsqu'une personne est à l'intérieur du centre de détention que lorsqu'elle est en milieu ouvert, de s'assurer qu'elle va être réinsérée dans la société. Quand on parle des centres de détention qui datent d'une centaine d'années, ils n'étaient pas conçus en fonction des objectifs que l'on a aujourd'hui, de nos objectifs de réinsérer socialement nos détenus.

M. Filion: C'est ma dernière question'' Ma question sur le bordereau à Bordeaux, Montréal et à Orsainville, Québec.

M. Latulippe: Je répète à mon collègue de Taillon qu'il arrive à l'occasion qu'il y ait de la surpopulation dans nos prisons. Je le répète parce qu'il me repose exactement la même question. Je vais être obligé d'y répondre encore de la même façon. On ne construit pas un pont parce qu'il y a du trafic à 17 heures. Je vais encore être obligé de lui dire qu'effectivement on a 3105 places au Québec dans les centres de détention et qu'effectivement on en utilise en moyenne 2600. Je vais aussi être obligé de lui dire que la protection de la société ne se fait pas uniquement dans les centres de détention, c'est aussi dans les maisons de transition. On a un réseau de maisons de transition où les détenus, où les personnes peuvent séjourner pendant une certaine période de temps. C'est un milieu plus ouvert, mais on a quand même là un contrôle strict sur nos détenus. Lorsqu'on pense à notre système correctionnel, il ne faut pas penser uniquement en termes de prison, il faut penser en termes d'ensemble du réseau. Je pense que mon collègue aurait avantage à actualiser ses nations en matière de philosophie carcérale pour comprendre que le système est plus complexe, est plus élaboré que simplement une prison avec des barreaux.

M. Filion: Selon les informations qu'il m'a été possible de recueillir, je répète ce que j'ai dit ce matin, les sentences de fins de semaine, les courtes sentences ne sont à peu près pas exécutées, dû à la surpopulation des deux prisons que j'ai mentionnées. Vous me dites: II reste de la place. Cela dépend où il y a de la place. On ne prend pas quelqu'un qui a été arrêté à Chicoutimi pour l'emmener purger une peine à Sherbrooke, s'il y a de la place à Sherbrooke. Cela n'aurait aucun sens. Encore une fois, selon les informations dont je vous ai livré certaines bribes... Vous me dites: Occasionnellement, il peut y avoir des problèmes de surpopulation dans les prisons. J'en suis. Cela peut arriver occasionnellement. Tant mieux, dans le fond, pour les détenus. Mais il faut penser aux institutions judiciaires aussi.

Pour ce qui est des sentences de fins de semaine, des courtes sentences, de façon à peu près systématique on a des problèmes de surpopulation. On ne construit pas un pont parce qu'il y a du trafic à 8 h 30 et à 17 heures mais, quand la voie principale est bloquée 24 heures par jour, sept jours par semaine, en bon administrateur, on cherche à diriger le flot en créant de nouvelles ressources.

Si le Solliciteur général me dit: Écoutez, on a de petits problèmes occasionnels, d'accord. Je vais prendre sa parole. Mais si, comme il semblerait, dans certains milieux - le Solliciteur général a pratiqué le droit, d'ailleurs, dans la région de Montréal - systématiquement ou à peu près, le problème a pris une proportion telle que la surpopulation est rendue chronique dans ces deux établissements, je pense qu'il serait malaisé pour lui de me répondre que c'est juste un petit problème occasionnel. C'est ça que je veux savoir de vous.

M. Latulippe: Pour ce qui est des sentences intermittentes, actuellement à Bordeaux, les gens qui ont à les purger les purgent au rythme d'environ 150 par fin de semaine. Les gens, au fil des semaines, alternent évidemment. Donc, on doit dire qu'effectivement les sentences intermittentes sont purgées et chacun vient à son tour, à toutes fins utiles, au rythme de 150 par fin de semaine. Au niveau des courtes sentences, je peux vous assurer aussi que les courtes sentences sont purgées. Mais je dois aussi vous dire que les personnes qui sont condamnées à de courtes sentences ont aussi

droit aux mêmes avantages, aux mêmes chances, je dirais, que les personnes qui sont condamnées à de longues sentences.

D'une personne condamnée à une sentence d'un mois, dira-t-on qu'elle est dangereuse pour une semaine et qu'elle ne l'est plus pour trois semaines? Est-ce logique de dire lorsqu'on va la prendre et la mettre en retrait de la société pendant trois semaines ou un mois; Elle a été dangereuse pendant cette période et elle ne l'est plus par la suite? C'est notre concept de punition qui doit changer. (16 heures)

Ces gens sont admissibles aux programmes d'absences temporaires, de la même façon. Ces programmes sont utilisés et ils doivent être utilisés au maximum. Pour moi, quelqu'un qui a commis un crime en rapport avec la drogue, qui a pris ou qui a fait du trafic de drogue, j'aime beaucoup mieux, beaucoup plus, qu'il soit amené à faire des travaux communautaires, des travaux auprès de personnes qui ont souffert du problème de la drogue, plutôt que de lui faire purger une peine d'un mois, de deux mois, de dix mois, d'un an de prison, car il sortira de là avec les mêmes habitudes de vie qu'il avait au moment où il est entré.

C'est ce concept de punition - la personne est punie quand même, mais elle est punie en voyant que le geste qu'elle a posé, que cet acte criminel posé, a causé des torts dans la société? a causé des torts aux victimes - ce type de sentence différente, qui va contribuer à aider ces personnes à changer leurs habitudes de vie.

C'est le message qu'il faut passer dans la société et c'est cela que l'on doit de plus en plus implanter dans notre société. ïl ne faut pas être attaché à une philosophie du siècle dernier.

M. Filion: M. le Président, concernant tous ces discours, encore une fois - je l'ai dit ce matin - il y a un problème sérieux. Les institutions judiciaires sont là pour exercer, pour appliquer les règles de droit que se donnent les individus en société. La sentence, à moins que... Le Solliciteur général, je l'écoute parler; il me dit: Quelqu'un condamné à dix mois, j'aime bien mieux qu'il aille faire des travaux communautaires plutôt que de purger une sentence. Cela m'inquiète.

Ce n'est pas au Solliciteur général à décider d'une sentence, quand les juges s'appliquent et font des rapports pré-sentenciels et ont entendu, dans certains cas, le procès ou entendu les parties. Ce sont les juges qui sont habilités, au Québec comme ailleurs, à rendre une sentence. Si un juge condamne un individu à dix ans, je ferais remarquer au Solliciteur général qu'il n'aura jamais juridiction dans sa prison sur cette personne; elle va aller dans un pénitencier fédéral, en vertu de notre système. Je suis inquiet parce que je participe à la philosophie qui veut que... Je l'ai dit ce matin, la prison n'est pas, il faut l'admettre franchement, le meilleur endroit pour réhabiliter les gens, c'est le moins qu'on puisse dire. Mais, une fois qu'on sait cela, par exemple, le Solliciteur général a l'obligation, la responsabilité d'appliquer, comme membre de l'exécutif, les sentences prévues par les instances judiciaires. S'il y a des programmes - je les ai mentionnés ce matin - de congés humanitaires ou de congés temporaires, peu imparte, la Commission des libérations conditionnelles est là pour jouer son rôle également, j'en suis, c'est excellent. Mais, encore une fois, sans avoir réussi à développer d'autres ressources à l'emprisonnement, le discours du Solliciteur général m'inquiète à ce stade-ci parce que, encore une fois, il a une responsabilité. S'il se ferme les yeux sur...

Par exemple, on dit qu'on va mettre à la disposition non pas la demande parce que l'offre et la demande dans ce milieu... On ne demande pas fort d'aller en prison. Enfin, on subit le châtiment ou la sentence qu'a exercée un juge. L'exécutif doit mettre à la disposition des prévenus et des détenus un équipement suffisant pour pouvoir recevoir décemment le nombre approprié de personnes qui sont sentencées. Le Solliciteur général n'est pas là pour décider si la sentence est bonne ou non. Dans ce cas, ce que je soulève comme question, cela concerne nos équipements. D'ailleurs, le gouvernement du Parti libéral, entre 1970 et 1976, a lamentablement failli dans leur renouvellement. Entre 1976 et 1985, un effort sérieux a été fait par le gouvernement pour renouveler son voeu; un parc d'équipement, il en faudra toujours un, peu importent les discours du Solliciteur général à cet effet. Ma question est: Le pouvoir exécutif ici devant nous offre-t-il les équipements suffisants pour permettre de donner suite aux décisions rendues par les instances appropriées? Je dois vous dire que je n'ai pas eu de réponse, je ne voudrais pas revenir longtemps là-dessus cet après-midi, mais votre discours m'inquiète.

M. Latulippe: Je pense que mon collègue de Taillon aime beaucoup les monologues et n'écoute pas les réponses qu'on lui donne, qu'on lui sert, mais je peux le rassurer qu'actuellement, dans notre système carcéral, nous administrons les sentences telles qu'elles sont données par les tribunaux du Québec. Nous avons les équipements nécessaires pour administrer ces sentences telles qu'elles sont données, telles qu'elles sont rendues par les juges du Québec.

Nous avons, par ailleurs, différents programmes pour faciliter la réinsertion

sociale des détenus. Là-dessus, j'imagine que vous y reviendrez, notre Commission des libérations conditionnelles est distincte de ce qui se passe dans les autres provinces puisque, au Québec, comme vous le savez, la question des absences temporaires est administrée par le directeur, par les centres de détention eux-mêmes, chez les détenus de moins de six mois- La Commission des libérations conditionnelles s'occupe des détenus de plus de six mois tandis que, dans d'autres provinces, la Commission des libérations conditionnelles a juridiction autant sur la question dite des absences temporaires que sur celle des libérations à plus long terme. Je pense que, là-dessus, la particularité de notre régime fait l'honneur de notre système. Dans nos prisons, nous administrons des régimes d'absences temporaires, et cela n'a pas pour effet, ni pour objectif, de modifier les sentences des tribunaux qui sont effectivement administrées de façon correcte par nos établissements, et nous avons les équipements pour ce faire. Mais, comme le disait mon collègue, on a aussi un effort à faire pour renouveler certains équipements. C'est la raison pour laquelle j'ai poussé, entre autres, sur le dossier de la construction d'une prison à Trois-Rivières, puisque cela faisait presque sept ans que vous l'annonciez que rien n'avait été fait durant cette période.

Ressources alternatives à l'emprisonnement

M. Filion: On me signale, méchamment ou gentiment, que cela faisait sept ans que l'actuel ministre de la Justice était contre. Parlons maintenant des ressources alternatives à l'emprisonnement. Je pense bien qu'en dehors de questions que j'ai soulevées sur la surpopulation, sur lesquelles te Solliciteur générai ne me rassure que partiellement, le développement des alternatives à l'emprisonnement va toujours demeurer pour n'importe quelle société, à mon avis, le meilleur investissement qui soit. Encore là, je suis inquiet en vérifiant votre budget de n'y rien retrouver en ce qui concerne le développement et la préparation de nouvelles ressources alternatives. Dans ce sens, le ministre peut-il m'indiquer de façon précise quels sont les montants supplémentaires engagés en vue de concevoir et de mettre en oeuvre les ressources alternatives à l'emprisonnement, plus particulièrement à l'intérieur du programme substitutif à l'incarcération? J'aimerais aussi retrouver des montants supplémentaires consacrés à la probation, aux services communautaires, aux maisons de transition. Ces budgets ne subissent-ils pas une diminution?

M. Latulippe: Je suis d'abord heureux de voir que le député de Taillon est tout à fait d'accord avec les objectifs du gouvernement libéral en matière carcérale, correctionnelle. J'en suis heureux et je l'en félicite. Pour ce qui est de toutes les mesures relatives à la réinsertion sociale des détenus, autant les travaux communautaires, les travaux compensatoires, les maisons de transition, j'ai pris la peine... Dans les crédits que nous étudions aujourd'hui, malgré les compressions budgétaires que vous connaissez au gouvernement, il n'y a rien -et je n'ai pratiqué aucune compression - qui affecte l'ensemble de la réinsertion sociale. J'ai même l'intention de procéder à une relance, dès le mois de mai, du programme de travaux communautaires en sensibilisant, comme vous l'avez dit tout à l'heure, entre autres, la magistrature, les procureurs de la couronne, les intervenants aux bienfaits des travaux communautaires. C'est une démarche que j'entreprends immédiatement.

C'est aussi une des raisons pour lesquelles, lorsque j'ai eu à faire face à des choix budgétaires, qui, comme pour tous les membres du Conseil des ministres, étaient difficiles, puisque nous avons hérité cette situation du passé, j'ai d'abord choisi de procéder en ce qui concerne les équipements carcéraux qui avaient une faible capacité d'hébergement, dont le coût de fonctionnement était élevé, plutôt que de toucher à tout notre système de réinsertion sociale. C'est un choix que j'ai fait à la base et c'est la raison pour laquelle tout le réseau n'est pas touché en ce qui concerne la réinsertion sociale des détenus.

M. Filion: Soyons quand même, je ne sais pas, un peu logiques. Les ressources alternatives à l'emprisonnement, c'est un pan de mur dans l'ensemble du dossier. Ce n'est pas toute la pièce au complet et, dans ce sens-là, le Solliciteur général a annoncé la création d'un comité qui va étudier encore une fois les nouvelles ressources alternatives. Maintenant, ce comité, qui, je pense, doit remettre son rapport en août 1986, ne l'a pas encore fait, évidemment.

Deuxièmement, je prends acte de l'admission du ministre selon laquelle aucun budget sur les alternatives n'a reçu d'argent supplémentaire dans les crédits de 1986-1987. Or, à partir de ce moment-là, j'aimerais savoir du Solliciteur général pourquoi il n'a pas attendu le rapport du comité qu'il a mis sur pied et pourquoi il n'a pas attendu l'obtention de montants d'argent supplémentaires avant de prendre ces décisions.

M. Latulippe: Je comprends que mon collègue de Taillon voudrait mettre la charrue avant les boeufs et déjà engager des ressources additionnelles sur des alternatives nouvelles à l'incarcération avant...

M. Filion: C'est votre discours.

M. Latulippe: Non, ce n'est pas mon discours.

M. Filion: C'est votre discours.

M. Latulippe: M. le député de Taillon, si vous me permettez. Donc, il vaudrait qu'on fasse cela avant d'avoir le résultat et les recommandations concrètes de ce comité sur les alternatives à l'incarcération. Cependant, ce que je vous dis, c'est que nous allons, dans un premier temps, immédiatement, utiliser au maximum ces alternatives. Nous allons les offrir au maximum aux principaux intervenants, dont la magistrature. C'est pour cela que je vous redis que nous allons relancer le programme de travaux communautaires dès le mois de mai. Je pense, et je vous pose la question, dans le fond: Vaut-il mieux dépenser d'abord avant de faire des économies ou faire des économies pour pouvoir les dépenser de la meilleure façon? Mon collègue, à toutes fins utiles, malheureusement, veut mettre la charrue avant les boeufs.

M. Filion: Le Solliciteur général n'a pas aimé mon expression, ce matin. Je m'aperçois que cela l'a fatigué. Maintenant, on va quand même se comprendre. Pour vous, est-ce qu'une absence de coupure est un développement?

M. Latulippe: Je pense que...

M. Filion: Parce que c'est ce dont on parle. (16 h 15)

M. Latulippe: ...mon collègue de Taillon n'a pas encore compris - pourtant, c'est facile - la façon dont on a exercé nos choix budgétaires en matière de services correctionnels. Nous avons choisi de protéger l'ensemble des programmes de réinsertion sociale, les réseaux de maisons de transition, les programmes de travaux communautaires, les programmes occupationnels à l'intérieur des centres de détention. Et nous avons décidé plutôt d'effectuer ces compressions, en partie, sur des équipements carcéraux qui, pour certains, étaient désuets, pour d'autres avaient une faible capacité d'hébergement, pour d'autres n'étaient à peu près pas utilisés ou très peu utilisés.

En plus de procéder ainsi, nous avons protégé l'emploi de tout le personnel permanent de ces centres de détention. Nous n'avons coupé aucun poste permanent. Nous avons exécuté ces compressions en protégeant l'emploi du personnel. Je pense que nous avons réussi à atteindre des objectifs qui étaient conséquents avec notre démarche, respectueux du personnel, et nous avons aussi touché à des équipements qui, pour plusieurs, étaient désuets et insuffisants.

M. Filion: Comment le Solliciteur général peut-il espérer faire des développements dans les ressources alternatives, réinsertion, travaux communautaires, maisons de transition, sans argent neuf?

M. Latulippe: Je m'aperçois que mon collègue de Taillon garde cette philosophie -pourtant, il est nouveau à l'Assemblée nationale - que le Parti québécois a véhiculée pendant tant d'années et qui nous a amenés dans ce gouffre financier. Pour lui, développement veut dire dépenses gouvernementales. Je comprends qu'il ne peut pas s'en sortir, c'est un carcan que le gouvernement nous a légué, une situation qu'on vit parce que vous nous l'avez léguée avec cette philosophie depuis neuf ans. Je comprends, M. le député de Taillon, mais, vous savez, nous ne sommes plus à l'époque du gouvernement passé. Pour nous, développement ne veut pas nécessairement dire dépenses gouvernementales.

M. Filion: Dans ce secteur-là, le Solliciteur générai pense être en mesure de faire un développement relativement substantiel sans argent neuf?

M. Latulippe: Je pourrais donner des exemples à M. le député de Taillon. Je vais probablement vous l'apprendre, nous avons dans notre système... Ce que nous tentons de faire, c'est que la communauté Side les détenus à s'en sortir. Vous savez, par exemple, qu'il existe des situations où les détenus iront travailler dans des entreprises privées. D'ailleurs, vous avez vu, dans la région de la Beauce et dans d'autres comme Sherbrooke, c'est ce qui se passe. Ils sont aidés par des entreprises qui les emploient. En d'autres endroits, ils sont aidés par des ressources communautaires. Ils reçoivent un support de l'ensemble de la communauté. Cela ne coûte pas des millions ni des milliards de dollars. Il s'agit de faire en sorte que la communauté joue son rôle auprès de ces personnes qui sont les plus démunies de la société, comme dans d'autres secteurs elle est appelée aussi à jouer son rôle.

Je le répète: Dépenses, pour nous, n'égalent pas nécessairement développement. Le développement vient aussi de la meilleure utilisation ou d'une utilisation maximale et optimale de nos ressources et, en particulier, de nos ressources humaines.

M. Filion: Je pense que le Solliciteur général m'avait compris. C'est bien sûr que dans n'importe quel programme on peut utiliser les ressources qu'on a, multiplier, demander des efforts, etc., pour obtenir une meilleure productivité des ressources humaines; on en est conscient.

Il est bien évident - je pense que te

Solliciteur général aura à la découvrir, parce que semble-t-il qu'il ne le sait pas encore -que, dans plusieurs cas, le développement et ce qu'on a demandé aux ressources humaines qui sont à l'intérieur de ces services, c'est déjà pas mal maximal. D'un autre côté, j'écoute finalement le Solliciteur générai nous parler des ressources alternatives. II reconnaît en quelque sorte le bien-fondé des ressources qui ont été mises en place par le gouvernement précédent. Il fait une grosse soupe de cela, il tient un grand discours et il développe un comité dont il n'attend même pas le rapport pour prendre ses décisions, par ailleurs.

M. Latulippe: Si vous me le permettez, M. le Président, je vais donner deux exemples à mon collègue de Taillon pour mieux le renseigner sur ce que j'entends par une meilleure utilisation des ressources, y compris les ressources humaines. Premièrement, le rôle de l'agent de la paix. Auparavant, l'agent de la paix était un gardien qui ouvrait et fermait les portes des prisons. Il était gardien de prison.

Une voix: Un geôlier.

M. Latulippe: Un geôlier. Effectivement, on a développé aussi des ressources, des criminologues, des ressources professionnelles, qui se sont additionnées, mais si les agents de la paix - c'est ce à quoi nous nous engageons actuellement puisque nous leur donnons les cours de formation; c'est ce qui se passe, c'est notre objectif et c'est ce que nous faisons -deviennent des agents directs, avec une relation d'aide directe auprès du détenu pour les aider à se réinsérer socialement, on aura besoin beaucoup moins de services professionnels. Ces gens-là devront avoir un rôle de soutien auprès des agents de la paix et on n'arrivera pas à une situation de dédoublement des ressources.

Je vais vous donner un deuxième exemple, les travaux communautaires; et on s'entend, le député de Taillon est d'accord avec moi pour dire que vaut mieux prendre un jeune qui a fait le trafic de la drogue ou qui a consommé de la drogue et le faire travailler auprès des personnes qui souffrent à cause des problèmes de drogue plutôt que de le laisser en prison. Il est d'accord là-dessus. Je voudrais lui dire qu'il s'agit là d'un bon geste social, mais qu'en plus, cela coûte 2,25 $ par jour pour une sentence de travaux communautaires par rapport à une moyenne de 85 $ par jour pour le même jeune qu'on va garder dans une cellule. Vous comprendrez qu'à ce moment-là on a besoin de beaucoup moins de ressources et on peut utiliser, de façon beaucoup plus maximale, les mêmes ressources en procédant ainsi, en même temps qu'on est capable d'atteindre des objectifs de protection de la société et de réinsertion sociale de nos détenus. Je veux simplement vous souligner que nos détenus ont en moyenne, au Québec, 24 ans.

Réaménagements à Parthenais

M. Filion: En ce qui concerne les travaux communautaires, je ferai remarquer deux choses au Solliciteur général. Premièrement, ce sont les juges qui décident d'une sentence de travaux communautaires. Deuxièmement, ce sont des réformes qui ont été faites par le gouvernement précédent. Cela dit, en ce qui concerne les sentences de travaux communautaires, c'est sûr que cela coûte moins cher. Ce n'est pas le Solliciteur général qui va contrôler le nombre de sentences de travaux communautaires, à moins qu'il ne nous dise qu'il a une autorité quelconque sur les juges, et je ne pense pas que cela avance jusque-là.

Cela dit, M. le Président, avec la collaboration du Solliciteur général, je voudrais aborder certains cas précis d'équipement. D'abord, en ce qui concerne la prison Parthenais, vous avez entendu ma déclaration d'ouverture. Est-ce que je pourrais connaître votre position là-dessus? Plus particulièrement, combien vont coûter les réaménagements dont vous avez parlé et quel est l'échéancier des travaux de réaménagement de Parthenais? Également, s'il était assez aimable de répondre à l'affirmation que j'avais faite dans mon allocution d'ouverture, à savoir qu'il est le premier Solliciteur général, ou ministre de la Justice, depuis belle lurette qui non seulement ne s'engage pas à faire les efforts nécessaires et pas faciles pour fermer Parthenais, mais qui, au contraire, s'engage à garder Parthenais ouvert comme centre de détention.

M. Latulippe: Oui, c'est vrai. Je suis le premier Solliciteur général, quand je regarde les précédents ministres de la Justice de votre gouvernement, à ne pas avoir annoncé la fermeture de Parthenais pour éviter de faire face aux problèmes de Parthenais.

M. Filion: Vous avez dit que, pour éviter de faire face aux problèmes de Parthenais, vous annoncez que vous ne fermerez pas Parthenais. Est-ce que c'est cela?

M. Latulippe: Je voudrais simplement vous rappeler, M. le député, que les ministres de la Justice qui m'ont précédé, à différentes occasions ont annoncé publiquement, à grand renfort de publicité, la fermeture de Parthenais. Or, ils n'ont jamais fermé Parthenais. Par ailleurs, ce à quoi je procède actuellement... Il est évident que je ne le peux pas et je dois réaliser que demain matin Parthenais ne peut pas être fermé. Je

n'ai pas de baguette magique pour construire en une nuit une prison, un équipement carcéral. Ce n'est pas possible.

M. Filion: Sauf à Trois-Rivières.

M. Latulippe: M. le député de Taillon, si vous permettez que je termine ma réponse. Cependant, ce que j'ai entrepris de faire, c'est de tenter deux choses. D'abord, de réduire la population carcérale à Parthenais en utilisant différentes méthodes, en tentant et en y réalisant une réduction des séjours de courte durée parce que, comme vous le savez, un des problèmes de Parthenais est le fait qu'effectivement il y a un nombre considérable d'entrées et de sorties de courte durée.

Déjà, entre autres, il y a un agent de liaison de la Sûreté de Montréal qui y a été mandaté parce que nous voulons, comme vous le mentionniez, en concertation avec les services policiers et Ies procureurs de la couronne, procéder rapidement aux enquêtes sous caution parce qu'on s'est rendu compte qu'une proportion importante des personnes qui sont admises à Parthenais et qui y restent une journée ou deux sont par la suite libérées sous caution. Si on procède immédiatement aux enquêtes sous caution il est évident que l'on va éviter un nombre considérable de séjours de courte durée à Parthenais.

Deuxièmement, nous allons réduire les séjours de longue durée à Parthenais. Nous le faisons non seulement en concertation avec les services correctionnels, mais avec les procureurs de la couronne en particulier et les autres intervenants, pour tenter de réduire les séjours de longue durée à Parthenais.

Finalement, nous allons procéder à certains réaménagements à l'intérieur. Nous sommes actuellement à faire les démarches en ce sens. Si vous avez... Oui, j'ai visité Parthenais. Probablement que vous l'avez fait, vous aussi. Je l'imagine. Je l'espère. Vous vous rendez compte, quand vous visitez Parthenais, qu'il y a des problèmes au niveau des conditions de vie des détenus. En d'autres termes, entre autres, les chemins de ronde. Si vous avez vu Parthenais, vous constatez qu'il y a trop de barreaux, que c'est aliénant.

Il y a différents problèmes avec la cour extérieure. Il y a des problèmes internes et des réaménagements qui doivent être entrepris, qui seront entrepris pour améliorer à court terme les conditions de vie à l'intérieur de Parthenais même et ceci, joint à la réduction des séjours de courte durée, de longue durée et aussi aux cas psychiatriques, va nous amener à trouver une solution à court terme, une solution immédiate, sans avoir a annoncer à tous les six mois la fermeture de Parthenais en ne faisant rien, comme vous l'avez fait pendant neuf années de pouvoir.

M. Filion: Je ne sais pas si le Solliciteur général a lu le rapport du Protecteur du citoyen. Peut-être qu'il peut ne pas se fier, s'il le désire, aux engagements, aux déclarations de bonne foi, indépendamment de la politique, faites par l'ensemble de ses prédécesseurs. Également, s'il ne veut pas se fier à la prise de position de l'actuel ministre de la Justice en ce qui concerne Parthenais, s'il veut mettre cela de côté et faire fi de cela - parce que c'est à cela qu'on assiste actuellement - j'aimerais quand même que le Solliciteur général nous explique certaines choses: Premièrement, est-ce que vous avez bien lu le rapport du Protecteur du citoyen sur Parthenais? Deuxièmement, comment pouvez-vous l'écarter comme cela? Et aussi, comme questions subsidiaires, je lui rappelle les questions que j'avais posées: Combien vont coûter les réaménagements à la prison de Parthenais et quel est l'échéancier de réalisation de ces réaménagements à Parthenais? (16 h 30)

Je voudrais quand même souligner ceci. Peut-être que le Solliciteur ne m'a pas compris ce matin. Les ministres de la Justice qui l'ont précédé... Je l'ai dit, d'ailleurs, fermer une prison, cela a l'air que c'est impopulaire et en construire une nouvelle dans une communauté, cela a l'air que c'est impopulaire aussi. Ce n'est pas facile. Je sais que les prédécesseurs du Solliciteur général ont fait des efforts. Entre autres, on a parlé de La5alte pendant un certain temps, etc. Je ne dis pas que c'est une chose facile que de réussir, dans la région de Montréal, la construction d'une nouvelle prison. Mais, par exemple, ce que le Solliciteur général devrait faire, quand c'est recommandé par le Protecteur du citoyen et à peu près tout le monde de sensé qui a passé plus que cinq minutes ailleurs qu'au rez-de-chaussée de Parthenais, c'est de fermer la boîte. On apprend plutôt qu'il ne veut pas fermer le centre de détention. J'aimerais cela qu'il m'explique, eu égard au rapport du Protecteur du citoyen et, deuxièmement, en termes de sous, parce que cela est concret, des murs ça coûte des sous... Il ne pourra pas me dire: On va développer les murs actuels, on va faire un comité. Quel est son échéancier de réalisation des réaménagements?

M. Latulippe: Je suis heureux de voir que mon collègue me parle du rapport du Protecteur du citoyen qui, la journée même de mon entrée en fonction, m'arrivait en dépeignant cette situation qui existait pendant les dernières années, pendant plusieurs années, pendant les années où vous

étiez au gouvernement dans nos prisons québécoises. Je peux vous dire aujourd'hui -et je pense que le Protecteur du citoyen l'a déclaré publiquement - que mes services correctionnels, les services correctionnels de notre ministère et notre attitude dans le dossier, les démarches que nous avons entreprises, et cette coopération que nous avons donnée au Protecteur du citoyen, étaient tout à fait exceptionnelles dans le but de satisfaire et de résoudre les différents problèmes que soulevait le rapport du Protecteur du citoyen.

Nous n'avons pas fait de comité. Nous avons agi immédiatement, de concert avec le Protecteur du citoyen, par différentes mesures. La fermeture de la prison de Trois-Rivières en était une. La discipline. Les problèmes relativement aux soins de santé dans les prisons. La formation du personnel. La confidentialité du dossier médical. Les problèmes que les détenus avaient en rapport avec leur courrier. Les problèmes que les détenus avaient en rapport avec leurs heures d'exercices. Les problèmes que les détenus avaient en rapport avec les requêtes qu'ils passaient, qu'ils donnaient à l'administration. Tous ces cas ont été en bonne partie résolus avec la coopération du Protecteur du citoyen et de nos services correctionnels.

Là-dessus, nous avons agi rapidement et nous avons été en mesure d'apporter les correctifs requis. C'est le Protecteur du citoyen lui-même qui l'a mentionné. Pour ce qui est de Parthenais, le Protecteur du citoyen ne visait pas directement, ne parlait pas directement de la qualité de vie. Il faisait référence à des études antérieures. Nous sommes les premiers à nous attaquer directement aux problèmes de la qualité de la vie, aux problèmes des détenus, aux problèmes de la surpopulation, si on veut, au niveau des prévenus, parce que ce sont des prévenus à l'intérieur de Parthenais. Nous sommes les premiers à avoir posé des gestes concrets en rapport avec Parthenais. Je peux vous dire que je suis fier de ce que les services de notre ministère ont fait à la suite des rencontres, à la suite des instructions que je leur ai données au sujet du rapport du Protecteur du citoyen.

Je peux vous lire une lettre du Protecteur du citoyen et je vous en donne lecture, lettre qui a été adressée à mon sous-ministre en date du 24 février 1986. "Je vous remercie de votre lettre du 12 février ainsi que du dossier qui l'accompagnait - je peux déposer cette lettre. Je n'ai pas eu le temps d'étudier en détail le document que vous m'avez soumis, mais déjà je peux me réjouir de la diligence et du sérieux avec lesquels vous donnez suite au rapport sur les droits des personnes incarcérées. Mon prochain rapport annuel en fera état. "Je suis également heureux de constater que nous sommes tout à fait sur la même longueur d'onde. Les récentes déclarations du Solliciteur général viendraient le confirmer, s'il m'était encore permis d'en douter. "Mes représentants au comité que nous avons formé me disent que les travaux avancent rapidement et permettent d'espérer des résultats concrets, dont certains, d'ailleurs, sont déjà atteints." Cela, c'était le 24 février 1986. Je voudrais déposer devant cette commission cette lettre du Protecteur du citoyen.

M. Filion: Si je comprends bien, le Solliciteur général est fier de réaménager Parthenais au lieu de le fermer, alors qu'en rupture avec... Est-ce que le Solliciteur général est allé à Parthenais? Me permettez-vous cette question? Vous n'êtes pas obligé de me répondre.

M. Latulippe: Oui. Est-ce que le député de Tallion est allé à Parthenais?

M. Filion: Oui, j'y suis allé.

M. Latulippe: Alors, on se comprend.

M. Filion: On se comprend. Dans ce sens, encore une fois, M. le Solliciteur général, j'apprécierais, avant de conclure sur Parthenais en ce qui me concerne, que vous puissiez répondre à ma question sur le réaménagement physique de Parthenais. Est-ce qu'il est en marche? Quels sont les plans? Quel est le budget et où est le budget?

M. Latulippe: Les démarches sont entreprises actuellement avec l'aide de consultants pour identifier les aménagements que l'on va faire - il faut commencer par le début. C'est ce qu'effectivement nous sommes en train de faire, des démarches pour procéder à des modifications aux équipements à l'intérieur de Parthenais. Ces démarches, avec l'aide des gens de la détention et d'un consultant, sont actuellement en marche, avec les architectes du ministère.

M. Filion: Et les gens du Conseil du trésor?

M. Latutippe: II est évident que cela va coûter certainement moins cher que votre projet. Vous n'étiez pas au gouvernement, M. le député de Taillon. Moi non plus, mais vous étiez conseiller à l'époque, je pense, du premier ministre.

M. Filion: Pas à la Justice.

M. Latulippe: Mais cela coûtera certainement moins que les 40 000 000 $ pour construire la prison à LaSalle. Comme vous le dites et comme vous l'avez si bien dit, il faut en construire. Vous avez tenté

d'en construire à LaSalle, on voit ce que cela a donné quant au sort des détenus de Parthenais.

Vous savez, la première étape, ce sont les aménagements. Comme je le répète, il est impossible en une nuit, il était tout à fait impossible de concevoir de fermer Parthenais en l'espace d'une nuit - c'est un peu l'espoir que nous donnaient constamment les anciens ministres de la Justice - sans changer la situation de Parthenais.

M. Filion: Le Solliciteur général est-il au courant que le Conseil du trésor a toujours souhaité garder Parthenais ouvert?

M. Latulippe: Êtes-vous en train de me dire que le ministre responsable du Conseil du trésor, du temps de votre ancien gouvernement, souhaitait garder Parthenais ouvert?

M. Filion: Je suis en train de vous demander si, vous, vous étiez au courant que les officiers du Conseil du trésor ont toujours souhaité ou combattu - si on veut mettre cela dans ce sens - la fermeture de Parthenais?

M. Latulippe: Êtes-vous en train de me dire que, sous l'ancien gouvernement, c'étaient les fonctionnaires du Conseil du trésor qui prenaient les décisions, et non le ministre responsable du Conseil du trésor?

M. Filion: Avez-vous discuté avec votre collègue responsable du Conseil du trésor de la fermeture de Parthenais?

M. Latulippe: Comme vous le savez, lorsqu'il est venu, entre autres, à la prison de Trois-Rivières, lorsque nous avons eu un projet précis, lorsque nous avons eu des échéanciers à suivre, dans chacun des cas, nous les avons soumis au Conseil du trésor. Nous défendons notre dossier et je peux vous dire que nous avons l'oreille du Conseil du trésor. J'imagine, d'après vos propos, qu'auparavant ce n'était pas le cas, sous l'ancien gouvernement.

M. Filion: Le Solliciteur général a-t-il défendu auprès de son collègue responsable du Conseil du trésor l'hypothèse de la fermeture de Parthenais?

M. Latulippe: Je trouve curieux que mon collègue veuille toujours mettre la charrue devant les boeufs. Dans une première étape, comme vous le savez, il s'agit, d'une part, d'évaluer spécifiquement quels sont les aménagements que l'on va faire; dans un deuxième temps, d'en évaluer les coûts et, dans un troisième temps, de faire les propositions requises au Conseil du trésor en lui donnant effectivement les avantages, les inconvénients, en faisant, par exemple, la comparaison avec la construction d'autres équipements. Je peux assurer mon collègue de Taillon que nous avons aujourd'hui un ministre responsable du Conseil du trésor qui est une personne en charge du Conseil du trésor, c'est lui qui prend les décisions au Conseil du trésor et il est capable d'évaluer, avec le Solliciteur général, l'impact, les coûts et les avantages des aménagements qui auront à être faits à Parthenais.

M. Filion: M. le Président, en terminant sur Parthenais en ce qui me concerne, je prends note du fait que le Solliciteur général a rendu les armes en ce qui concerne la fermeture de Parthenais et que l'hypothèse de la fermeture de Parthenais n'a pas été discutée avec son collègue du Conseil du trésor, selon son absence de réponse à ma dernière question. De notre côté, réaménagements mineurs ou pas, Parthenais restera toujours la boîte que tous les ministres de la Justice, l'actuel ministre de la Justice et le Protecteur du citoyen ont décrite, avant lui, c'est-à-dire une boîte que n'importe quel administrateur responsable verrait à fermer.

M. Latulippe: Je voudrais conclure moi aussi sur Parthenais en disant que les ministres de la Justice qui m'ont précédé, ceux du précédent gouvernement, ont constamment annoncé la fermeture de Parthenais dans le but d'en faire des annonces publiques, dans le but d'en faire une promotion publique sans, effectivement, réaliser quoi que ce soit de concret, aucun geste positif, aucun geste concret, en rapport avec la situation de Parthenais, les aménagements de Parthenais et, surtout, en rapport avec les conditions de vie non seulement des détenus, souvent des prévenus qui y restent l'espace d'une nuit, mais aussi en rapport avec tout le personnel qui y travaille, rien de concret pendant neuf ans de gouvernement du Parti québécois.

Dossier de la prison de Sherbrooke

M. Filion: Et avant cela. Je pense que c'est Kennedy qui disait que ceux qui ne réussissent pas à garder un idéal vivant ne devraient pas faire de politique.

En ce qui concerne la prison de

Sherbrooke, puis-je connaître la position du Solliciteur général?

M. Latulippe: Vous avez mentionné qu'il faut garder les espoirs vivants, mais à force de faire des conférences de presse, a force de susciter des espoirs, on finit par créer le désespoir. Quand vous me parlez de la situation à Sherbrooke, je suis fort conscient qu'effectivement nous avons et nous devrons - c'est l'un des équipements qui doit être renouvelé, comme Trois-Rivières - procéder

effectivement à avancer dans ce dossier de Sherbrooke puisque, comme dans le cas de Trois-Rivières, la situation de la prison de Sherbrooke - j'ignore si mon collègue s'y est rendu - demande effectivement des modifications, demande à être considérablement réévaluée puisque, comme vous le savez, il s'agit d'un équipement qui est fort désuet. Vous savez aussi, comme moi, que dans la région de Sherbrooke, il y a un besoin dans cette région du Québec d'un équipement carcéral qui est plus conforme à la philosophie carcérale des années que nous vivons actuellement.

M. Filion: Leministre écarte-t-il la possibilité de la fermeture de la prison de Sherbrooke?

M. Latulippe: Je peux vous dire qu'il aurait été préférable pour l'ancien gouvernement de donner une priorité aux centres de détention plutôt que d'en donner aux palais de justice. (16 h 45)

M. Filion: Oui, mais maintenant, c'est vous, et je vous pose une question bien simple.

M. Latulippe: Pour mon gouvernement et pour mot, la situation à Sherbrooke me préoccupe et c'est une priorité. Je n'ai aucunement l'intention de procéder à la fermeture de la prison de Sherbrooke. J'ai beaucoup plus l'intention de procéder à renouveler cet équipement.

M. Filion: Vous voulez dire réaménager?

M. Latulippe: J'ai dit "renouveler cet équipement".

M. Filion: Bon, alors...

M. Latulippe: Je ne parle pas de réaménagement. Je pense qu'il va falloir - je l'ai dit lorsque je suis ailé à Sherbrooke -que nous ayons un nouvel équipement dans la région de Sherbrooke.

M. Filion: Je n'ai pas fini, M. !e Président. J'ai manqué le dernier mot de la réponse sur Sherbrooke. Je m'excuse, moi aussi, je suis avec un collaborateur.

M. Latulippe: Je n'ai pas saisi.

M. Filion: J'ai manqué vos derniers mots sur la prison de Sherbrooke.

M. Latulippe: J'ai dit qu'effectivement il va falloir qu'on renouvelle cet équipement. J'ai dit que la situation à Sherbrooke me préoccupait. C'était, au niveau de la planification des équipements au Québec, une de mes priorités. J'ai réglé, je pense, la question de Trois-Rivières. Je m'attaquerai bientôt à la question de Sherbrooke.

M. Filion: Mais dans ce cas-ci, en écartant la possibilité de la construction d'une nouvelle prison?

M. Latulippe: Absolument pas!

M. Filion: Absolument pas? Vous ne l'écartez pas?

M. Latulippe: Nous n'écartons pas la construction d'une nouvelle prison à Sherbrooke. Ce que je vous dis, c'est qu'en ce qui concerne la région de Sherbrooke, c'est un dossier dont je m'occupe actuellement. Lorsque je serai en mesure de faire des annonces publiques en rapport avec cette région, il me fera plaisir de le faire et de vous en faire part de même qu'à !a population de Sherbrooke et du Québec.

Fermeture de la prison de Saint-Joseph-de-Beauce

M. Filion: En ce qui concerne la prison de Saint-Joseph-de-Beauce dont le Solliciteur général a annoncé la fermeture pour le 15 juillet - le ministre a sûrement écouté une partie de mon allocution d'ouverture avant d'entrer dans le fond du dossier - est-ce que la décision du ministre est finale et irrévocable ou s'il envisage, à la suite, peut-être, de ce que j'ai dit, et surtout de ce qui a été dit par les différents intervenants, la possibilité de reconsidérer sa décision?

M. Latulippe: Lorsque, comme ministre, je prends une décision... Comme mes collègues au gouvernement... Nous sommes un gouvernement responsable, un gouvernement qui prend ses décisions... J'ai pris une décision, ce n'est pas pour changer d'idée à toutes les 24 heures.

M. Filion: Ce n'est pas mal d'admettre ses erreurs de temps en temps, vous savez.

Le Président (M. Marcil): ...vous permettez?

M. Filion: Je vais juste terminer sur la prison de Saint-Joseph-de-Beauce.

Le Président (M. Marcil): D'accord, cela va. Allez.

M. Filion: D'accord. Est-ce que le Solliciteur général a pris connaissance du volumineux dossier, préparé par les gens qui vivent la situation, concernant la prison de Saint-Joseph? Est-ce qu'il a pris connaissance des coûts réels de sa décision, surtout que l'économie envisagée par le Solliciteur

général et le Conseil du trésor n'est peut-être pas une économie réelle en fin de compte, compte tenu, notamment, du problème de transport - je l'ai souligné - du déplacement des détenus, etc.? Est-ce qu'il a pris note des représentations du Barreau, de la municipalité, du personnel, des agents et -pourquoi pas? - des détenus, à savoir que la fermeture de la prison de Saint-Joseph-de-Beauce est un geste antisocial, inhumain, qui va occasionner pour la population, des inconvénients, des ennuis et des frais, qui sont bien supérieurs à l'économie projetée par le Solliciteur général? Encore une fois, les décisions prises par le Solliciteur général ont été prises sans consultation. Dans certains cas, on parle de régions qui sont éloignées, où le tissu social s'est créé indépendamment de ce qui peut se passer à Montréal ou à Québec et, sans consulter les intervenants dans ces dossiers, le ministre a décidé unilatéralement de procéder à la fermeture de prisons. Maintenant, on voit les conséquences sur le plan humain, sur le plan économique, sur le plan de la justice, également.

J'ai souligné le problème de la communication - j'ouvre une parenthèse là-dessus - entre les détenus et leurs avocats. J'ai souligné également le fait - ce n'est pas un problème, c'est une situation réelle - que le palais de justice est situé à l'endroit où était située la prison. C'est une réalité à côté de laquelle on ne peut passer. Vous imaginez le cas des prévenus qui vont devoir revenir pour leur comparution, pour leur enquête sous cautionnement, peut-être dans certains cas pour une décision sur leur enquête sous cautionnement, pour leur enquête préliminaire pro forma, pour leur enquête préliminaire, pour une communication de preuves peut-être ultérieures, pour une préparation de procès, pour un procès qui, dans certains cas, peut être continué, pour des représentations sur sentence, pour la sentence elle-même, etc.

Est-ce que le Solliciteur général a vraiment tenu compte de l'ensemble des frais, des inconvénients, des ennuis pour tes visiteurs, entre autres, et pour les détenus eux-mêmes? À Saint-Joseph-de-Beauce, on le sait, dans le dossier qu'a entre les mains le Solliciteur général, il était dit au sujet de la réinsertion sociale... Le ministre en faisait cas tantôt. Or, Saint-Joseph-de-Beauce, c'était justement un endroit où ce programme fonctionnait merveilleusement bien parce qu'il y avait une bonne intégration de la politique, si on veut, d'alternative et de la politique de réinsertion sociale qui s'était créée dans le milieu. C'est la même chose, finalement, dans à peu près tous les endroits où le ministre a fermé des prisons. Et, là, on va demander à ces prisonniers d'aller purger leur peine ailleurs, les déraciner de leur milieu, de leur potentiel de réhabilitation qui est archi-important dans le contexte. Or, est-ce que le ministre a tenu compte des frais occasionnés pour les municipalités qui devront, dans plusieurs cas, notamment à Saint-Joseph-de-Beauce, commencer à promener le monde?

Quand j'ai vu la décision en ce qui concerne Joliette... Cela ne se ferme pas, une prison, à un moment donné, pour les prévenus. Alors, à Joliette, on veut fermer la prison le vendredi soir. Les gars vont aller ailleurs. Je lierai remarquer au Solliciteur général, qui a déjà pratiqué le métier d'avocat, que, souvent, en ce qui concerne les prévenus, les avocats communiquent avec leur client la fin de semaine. Or, précisément, dans le cas de Joliette, cela va être un cas où les détenus vont être ailleurs que dans le district de Joliette. C'est facile pour les détenus à ce moment de communiquer avec leur avocat.

Est-ce que le Solliciteur général, devant le tollé de protestations unanimes, de tout le monde, de tout ce qui bouge comme vie régionale dans ces coins-là, n'est pas prêt, M. le Président, à considérer que peut-être il a fait une erreur? Peut-être a-t-il fait une erreur dans ces cas-là? Je l'ai dit dans mon discours. Le Solliciteur général est ici, c'est la commission des institutions et on peut examiner ces cas-là un à un, si vous voulez, et essayer d'apporter d'autres solutions qu'une fermeture unilatérale sans consultation qui, dans certains cas, non seulement sur le plan économique mais sur le plan humain... Je laisse le Solliciteur général deviner les conséquences sur le plan humain pour les familles des prévenus et des détenus qui devront se promener d'un endroit à l'autre alors que te palais de justice lui-même, c'est-à-dire l'endroit où la justice va être rendue, va demeurer à l'endroit où était la prison. Mais la prison va s'en aller, elle. Le palais de justice va demeurer là.

Je regarde le député de Marquette qui est avocat comme nous. Tout cela, M. le député de Marquette, puisque le Solliciteur général ne m'écoutait pas au début de ma phrase, c'est pour réaliser une économie, un butin de 200 000 $ par établissement fermé. Je ne sais pas si le Solliciteur général a fait les mathématiques appropriées. Il s'apercevra que ce sont des économies de bout de chandelle réalisées sur le dos des régions et sans consultation. Saint-Joseph-de-Beauce est un exemple parfait. Ces gens-là se sont pris en main pour sensibiliser le ministre, pour sensibiliser les intervenants, pour essayer de faire réaliser au gouvernement qu'il faisait une grave erreur. Dans d'autres cas aussi, dans d'autres régions, cela s'organise dans ce sens-là pour sensibiliser le ministre.

Ce que je lui demanderais aujourd'hui, c'est de prendre en considération les facteurs qu'il ne connaissait pas au moment où il a pris sa décision prématurée et d'ouvrir une

porte au moins à une reconsidération de décision. Le Conseil du trésor, vous le savez, je l'ai dit, abat son couperet, mais plusieurs de vos collègues ont réussi à expliquer aux gens du Conseil du trésor que certaines coupures étaient carrément disproportionnées par rapport à l'objectif recherché. À Saint-Joseph-de-Beauce, à Rouyn, à Matane, à Mont-Laurier, à Percé, à Joliette, c'est le cas.

M. Latulippe: Je comprends que M. le député de Taillon mêle un peu tout parce qu'il ne connaît pas toutes les données du dossier. Il entend les rumeurs par-ci, les rumeurs par-là, il discute avec un tel par-ci, un tel par-là. Je comprends qu'il puisse avoir mêlé les pommes, les choux et les carottes. Mais je pense qu'il est temps que je lui explique la situation. Tout d'abord, c'est un point qu'il doit connaître, je pense, puisqu'il a lui-même pratiqué le droit à peu près à la même époque que moi: il n'y a pas au Québec de prison à chaque endroit où il y a un palais de justice.

M. Filion: ...vous en enlevez dans le coin où il y a un palais de justice.

M. Latulippe: M. le député de Taillon, je pense qu'on vous a laissé parler. Quand on regarde la situation à Saint-Joseph-de-Beauce... J'ai rencontré, à l'initiative du député du comté, les différents intervenants et j'ai eu un échange direct et franc avec les principaux intervenants de la région. J'ai mentionné à ces intervenants, ayant pris connaissance de leur rapport, que sur plusieurs points je n'étais pas d'accord avec les chiffres qu'ils me soumettaient.

Parlons de la situation à Saint-Joseph-de-Beauce telle qu'elle a été présentée dans le rapport auquel vous faites référence. Le coût d'abord. Vous savez qu'à Saint-Joseph-de-Beauce, c'est un équipement qui a quand même une capacité réduite, 35 cellules. Vous savez et vous devriez savoir qu'à Saint-Joseph-de-Beauce le coût par jour d'un détenu est de 99 $, lorsque l'on regarde la présence et le coût par place dans l'équipement même, dans l'équipement carcéral. Vous savez qu'en 1985, l'an dernier, le coût par place à Saint-Joseph-de-8eauce était de 37 986,14 $.

Les comparaisons qu'ont faites les gens de bonne foi de Saint-Joseph-de-Beauce étaient basées sur des facteurs différents. Ils ont fait la comparaison, entre autres, entre l'établissement de Saint-Joseph-de-Beauce et le centre de détention de Québec. Or, le centre de détention de Québec offre des services beaucoup plus complets aux détenus ou aux prévenus que le centre de détention de Saint-Joseph-de-Beauce. J'entends par là les services d'infirmerie, les ateliers internes, externes comme la buanderie, menuiserie, ateliers. Je vous souligne que le centre de détention de Québec est capable d'héberger des cas plus dangereux, les cas psychiatriques, entre autres. (17 heures)

Donc, si on avait à faire une comparaison entre les deux établissements, il faudrait enlever, strictement parlant, le coût de ces services qui sont plus importants parce que le centre est plus nouveau, parce que ce centre est plus développé par rapport à celui de Saint-Joseph-de-Beauce. Donc, une base de calcul différente.

Deuxièmement, un des points essentiels qu'il faut souligner, c'est la différence de calcul entre le per diem à Saint-Joseph-de-Beauce, que nous disons être de 99 $, et celui qu'a soulevé le comité de Saint-Joseph-de-Beauce comme étant autour de 55 $. Là-dessus, il faudrait bien que le député de Taillon comprenne que le calcul des gens du comité de Saint-Joseph-de-Beauce, en toute bonne foi d'ailleurs, est basé sur la façon de procéder du ministère sous l'ancien gouvernement en partie, en 1984, c'est-à-dire en calculant le coût d'une place à l'intérieur du centre de détention et, en même temps, le coût des personnes qui sont en absence temporaire; donc, en faisant l'addition de ces deux types de personnes, celles qui sont dans le centre de détention et celles qui sont en absence temporaire. Or, les personnes qui sont en absence temporaire sont aussi utilisées. Elles sont aussi des personnes qui sont dans des maisons de transition. Je vous donne un exemple précis pour que vous puissez comprendre.

Le 23 avril 1986, il y avait douze personnes appartenant à l'établissement de Saint-Joseph-de-Beauce qui étaient en absence temporaire dans des maisons de transition. Les services correctionnels paient actuellement 40 $ et quelques cents par jour pour les services rendus à trois de ces personnes et 28,78 $ pour les neuf autres. Il serait tout à fait illogique que la direction de détention comptabilise ces gens, d'une part, dans le per diem de l'établissement, alors qu'on comptabilise ce per diem au niveau du centre de détention. En ce qui a trait au per diem d'une personne en absence temporaire, il est de 2,25 $ par jour. Donc, les bases de calcul sont tout à fait différentes. Il faut regarder le coût à l'intérieur de cet établissement.

Concernant le transport, entre autres, pour ce qui est des comparutions, je voudrais dire qu'actuellement, tant que le centre était ouvert... Compte tenu du petit nombre de cellules pour la garde des prévenus, il y en a six pour la garde des prévenus, la majorité d'entre eux étaient déjà acheminés au centre de détention de Québec. La responsabilité de faire comparaître ces personnes incombe à Saint-Joseph-de-Beauce. Actuellement, la situation est la suivante: on part de Saint-

Joseph-de-Beauce et on se rend à Québec pour aller chercher un prévenu qui doit, dans certains cas, comparaître à Thetford-Mines. De là, il retourne à Québec pour revenir à Saint-Joseph-de-Beauee. Vous comprendrez que, si on part de Québec, on va faire moins de miltage que si on part de Saint-Joseph-de-Beauce pour aller à Québec, revenir à Saint-Joseph-de-Beauce ou à Thetford-Mines et retourner à Québec. Les coûts du transport reliés aux comparutions seront diminués plutôt qu'augmentés au moment de la fermeture de ces établissements.

Quand mon collègue parle du personnel, jusqu'à quel point c'est inhumain pour ce personnel, je peux vous dire que le personnel de Saint-Joseph-de-Beauce sera relocalisé. La majorité d'entre eux, si je ne m'abuse, au-delà de 80 %, ont déjà accepté, soit 32 sur 34, l'endroit où ils seront relocalisés. C'est loin d'être dramatique. Ils ont déjà fait eux-mêmes ce choix. Je voudrais dire à mon collègue de Taiilon qu'il est exact que la région de Saint-Joseph-de-Beauce a développé, au fil des ans, un système, un réseau de réhabilitation sociale qui, effectivement, est enviable, mais il faut que je dise à mon collègue de Taillon qu'il y a une différence entre une personne qui est à l'intérieur d'un centre de détention pour purger sa peine et une personne qui se trouve à l'extérieur d'un centre de détention, soit dans un centre de transition - d'ailleurs, il y en a un à Vallée-Jonction - ou qui se trouve en absence temporaire, ou en absence temporaire en train de travailler dans une industrie locale. Ce n'est pas la même chose, M. le député de Taiilon, d'être en arrière des barreaux ou d'être à l'extérieur en train de suivre des programmes de réhabilitation sociale.

Quant à nous, je peux vous dire que je travaille là-dessus conjointement avec le député local qui fait un travail extraordinaire, auprès de sa population. Je peux vous dire que nous allons protéger cette infrastructure de réhabilitation sociale pour la région. C'est important de le faire. C'est non seulement important de le faire, mais c'est important d'accroître cela parce que je pense que les Beaucerons peuvent être à l'avant-garde du développement des alternatives à l'incarcération au Québec parce que, déjà, ils ont une expérience dans ce domaine.

C'est pour cela d'ailleurs que, lorsqu'on calcule le coût par jour à l'intérieur du centre de détention, cela coûte si cher; et quand on le calcule en tenant compte de l'infrastructure de réhabilitation sociale, cela coûte moins cher. C'est parce qu'effectivement...

M. Filion: M. le Président.

M. Latulippe: ...cette région est performante au niveau de la réhabilitation sociale. Il n'est pas de notre intention de changer cette situation. Au contraire, notre intention est d'aller de l'avant au niveau de la réhabilitation sociale en Beauce puisque, déjà plusieurs personnes qui sont détenues, en absence temporaire ou dans des programmes occupationnels, travaillent dans les régions ou effectivement sont soutenues par la communauté et, en particulier, par le centre de transition à Vallée-Jonction.

Je pense que mon collègue doit faire cette distinction. Il doit la faire et il doit vraiment faire un travail beaucoup plus approfondi que celui d'écouter des rumeurs par-ci, par-là, d'en lancer et d'en recevoir. J'invite mon collègue à faire un exercice rigoureux. Il comprendra qu'effectivement, c'est une bonne décision et il se joindra à moi dans mes objectifs, comme il l'a dit au début, pour améliorer le réseau de réhabilitation sociale dans la région de Beauce.

Le Président (M. Marcil): À titre d'information, je tiens à signaler aux gens de cette assemblée qu'il est 17 heures tout près de 10 minutes. Nous n'avons pas terminé le programme 3. Il nous resterait trois autres programmes à étudier. Maintenant, je vais reconnaître le député de Marquette.

M. Filion: Si le député de Marquette n'a pas d'objection, je voudrais juste, pendant que c'est assez clair, l'opinion du ministre qui prêche dans le désert en nous disant qu'un détenu coûte moins cher quand il n'est pas détenu. C'est bien évident. Maintenant, ce que le Solliciteur général aurait probablement intérêt à faire...

M. Latulippe: Cela me surprend que mon collègue ne le sache pas.

M. Filion: ...M. le Président, c'est d'arrêter de servir dans sa soupe les analyses parfois déconnectées du Conseil du trésor qui ne connaît pas les réalités régionales. C'est parfaitement le rôle du ministre d'être capable de faire la distinction entre des analyses théoriques dans certains cas, pas toutes, du Conseil du trésor et les réalités régionales telles que vécues.

J'ai retrouvé, M. le Président, dans les propos du ministre, une mathématique infernale, incroyable, qui fait fi des réalités géographiques et des réalités telles que vécues non seulement à Saint-Joseph-de-Beauce, mais dans toutes les autres régions. C'est incroyable que le Solliciteur général, dans un dossier comme celui-là, se soit fait remplir par des analyses et des mathématiques déconnectées des réalités.

Lorsque, dans une municipalité, une ville ou un village, il existe un palais de justice et une prison et qu'on déménage la prison en venant nous servir le genre d'analyse hautement contestée que nous sert

le Solliciteur général, sans écouter, sans prendre la peine d'écouter les intervenants, je me pose de sérieuses questions pour l'avenir, de sérieuses questions pour les régions en particulier car elles, évidemment, ne sont pas dans votre bureau à tous les jours. Les régions ne vous entourent pas. Quand elles viennent vous voir, elles n'ont pas les armes sophistiquées des différentes tables de calcul qu'on peut utiliser quand arrive le temps d'examiner le coût pour l'État d'un détenu à tel ou tel endroit. Il y a des frais indirects. Il y a des frais de transport. Il y a une perte d'activités économiques. Il y a des pertes de salaires pour des régions, en plus, comme je l'ai dit tantôt, de tout l'aspect humain à côté duquel le Solliciteur général choisît cette fois-ci de passer.

Je vais laisser la parole au député de Marquette. J'ai d'autres questions sur d'autres prisons et je voudrais également aborder, entre autres, les programmes 4 et 6, qui sont particulièrement importants.

Le Président (M. Marcil): M. le ministre.

M. Latulippe: Je vaudrais répondre à mon collègue de Taillon. Je ne sais pas si... Mon collègue de Taillon semble obnubilé par les fonctionnaires du Conseil du trésor. Cela fait deux ou trois fois qu'il m'en parle, en regard à la situation existant au temps de son ancien gouvernement, ou du temps où, je pense, il a été conseiller politique. Je ne sais pas s'il a eu des problèmes à l'époque avec les fonctionnaires du Conseil du trésor. Je peux vous dire que la situation, que les décisions que nous avons prises à propos des centres de détention étaient basées sur des facteurs hautement humains. D'ailleurs, la meilleure preuve, c'est la façon dont nous avons traité le personnel de ces centres de détention. J'inviterais mon collègue à un peu plus de rigueur au niveau de l'analyse et au niveau aussi de l'objectivité.

Le Président (M. Marcil): Je reconnais le député de Marquette.

M. Dauphin: Merci beaucoup. Est-ce qu'on peut parler de côté ou s'il faut parler par en avant? Cela va.

Le Président (M. Marcil): La télévision n'est pas ici présentement.

M. Dauphin: Une très brève question, M. le Président - on en a parlé quelque peu tantôt - relativement aux annonces trimestrielles que l'ancien gouvernement faisait en rapport avec l'institution de Parthenais. En corollaire avec Parthenais, on parlait souvent de la ville de LaSalle, l'ouverture d'une nouvelle prison à la ville de

LaSalle. Pendant au moins sept ans, on a annoncé du côté de l'ancien gouvernement, qu'on construirait une prison à la ville de LaSalle. Comme par pur hasard, le 24 novembre 1985, soit une semaine et demie avant le scrutin provincial, M. Bédard, qui avait été nommé Solliciteur général à la toute fin, nous avait envoyé une lettre à savoir qu'il n'était plus question de construire une prison à LaSalle. Alors, j'aimerais savoir de vous, M. le ministre -malgré que j'aie lu et me sois tenu au courant des orientations générales de votre ministère, ou futur ministère à être créé prochainement - quelles sont les intentions du ministère, avec ce qu'on nous a annoncé depuis sept ans et qu'on a annulé une semaine avant le vote.

M. Latulippe: Je pense que c'était un des sports de l'ancien ministre de la Justice que d'annoncer la fermeture de Parthenais, d'annoncer la construction d'une prison à LaSalle, jusqu'au point où les citoyens étaient contre, d'annoncer à nouveau la fermeture de Parthenais jusqu'à la veille des élections, où on se rendait compte de l'opposition des citoyens, où on annonçait «à nouveau qu'on ne construirait cette fois plus de prison à LaSalle, avec comme conséquence, à ce moment-là aussi, qu'on ne fermait pas Parthenais. Quant à nous, c'est clair, nous l'avons dit et je le répète, ce n'est certainement pas mon intention de construire une prison à la ville de LaSalle.

M. Dauphin: Merci beaucoup. Personnel des institutions carcérales

M. Filion: J'ai quelques questions qui vont être brèves, pour terminer le programme 3. Je ne veux limiter votre temps de parole aucunement, mais vous savez que j'aimerais beaucoup traiter avec vous de la réorganisation des forces policières. D'abord, en ce qui concerne la maison Tanguay, il doit y avoir eu des développements en ce qui concerne le processus de médiation, entre autres, avec la Commission des droits de la personne, et quant aux recommandations de la Commission des droits de la personne, pour la compensation, pour le fonds des détenus, et l'amélioration des services médicaux. (17 h 15)

M. Latulippe: Pour ce qui est du fonds des détenus - j'avais eu l'occasion de vous le mentionner informellement - c'est notre intention de présenter un projet de loi relativement à la question du fonds des personnes incarcérées, du fonds des détenus, autant sur le plan de la personnalité juridique de ce fonds que sur le plan des questions qui relèvent de la gestion des fonds locaux des détenus, de l'utilisation de ces

fonds," dans le but d'être en mesure d'atteindre des objectifs de responsabilisation de la personne détenue en rapport avec ce fonds et en rapport avec les programmes occupationnels, également, qui découlent de l'utilisation de ces fonds.

M. Filion: Est-ce un projet de loi, sauf erreur, qu'on peut envisager pouvoir étudier ici, à l'Assemblée nationale, avant... C'est-à-dire, est-ce qu'il pourrait être déposé avant le 15 mai?

M. Latulippe: Je peux vous dire qu'il est dans la machine.

M. Filion: II est dans la machine à saucisses.

M. Latulippe: II devrait probablement, j'espère, être là pour cette présente session.

M. Filion: D'accord. En ce qui concerne l'amélioration des services médicaux?

M. Latulippe: II y a plusieurs ententes, comme vous le savez, non seulement à Tanguay, parce qu'il y a déjà eu une entente à Tanguay avec les CLSC. Une amélioration s'est effectuée sur le plan des services médicaux. Sur le plan des soins de santé, il y a eu une diminution du délai d'attente, entre autres, qui s'est faite à la suite du rapport. Je peux vous dire qu'il y a des ententes dans d'autres centres de détention en rapport avec les CLSC sur le plan des soins de santé.

M. Filion: D'accord, je vous remercie. En ce qui concerne le fonds des détenus, je suis un petit peu surpris, comme je l'avais fait remarquer au Solliciteur général, qu'on doive procéder par législation. Mais je tiens pour acquis... Evidemment, cette analyse a dû être faite, refaite et surfaite. Advenant le cas où, comme cela semble être le cas, le Solliciteur général doive procéder par législation pour reconnaître juridiquement cette entité, à ce moment, il pourra sûrement compter sur notre collaboration.

M. Latulippe: C'est un peu plus, c'est plus que seulement reconnaître juridiquement l'existence du fonds. Le fonds existe déjà dans la loi. C'est un des facteurs, à ma connaissance, la personnalité juridique du fonds. Deuxièmement, il y a d'autres éléments, comme la participation des détenus à la gestion ou le type de participation qu'ils auront à la gestion du fonds local, les modalités de gestion, les modalités d'analyse, les modalités de vérification de ce fonds.

Ce sont des amendements que nous apporterons à la Loi sur la probation et sur les établissements de détention.

M. Filion: Je comprends que les pouvoirs réglementaires actuels ne le permettent pas, c'est cela?

M. Latulippe: C'est cela.

M. Filion: D'accord. Rapidement, encore une fois, vous avez relevé qu'en ce qui concernait le Conseil du trésor j'avais l'épiderme sensible. IL semble qu'un projet pilote concernant les revendications de la Direction générale de la détention auprès du Conseil du trésor soit en cours et que ce projet conférerait plus d'autonomie à la direction quant à ses revendications, en ce sens qu'un contrôle moins strict serait exercé par le Conseil du trésor.

Or, qu'en est-il, selon le ministre? L'expérience, si elle a eu lieu, s'est-elle avérée concluante? ...les interventions, M. le Solliciteur général, pourvu que vous donniez plus de marge, plus d'autonomie à votre ministère, en bonne partie...

M. Latulippe: J'espère que vous êtes d'accord...

M. Filion: ...parce que, encore une fois, les analyses mathématiques, vous savez, il faut... Un illustre inconnu, comme disait l'autre, disait: Les statistiques sont aux hommes politiques ce que les lampadaires sont aux ivrognes. Ils soutiennent plus qu'ils n'éclairenti Alors, des fois il faut faire attention aux analyses très bien chiffrées du Conseil du trésorl

M. Latulippe: Je comprends bien, M. le député de Taillon, que vous utilisez à vos fins de façon régulière ce dicton?

M. Filion: Non, vous avez remarqué que j'essaie de ne pas employer beaucoup de chiffres et de statistiques dans le genre de débats que nous avons, parce que, précisément, des chiffres, on peut en trouver à toutes les sauces quand on est bien entouré. Mais, ceci étant dit...

M. Latulippe: Merci, M. le député de Taillon, de dire que je suis bien entouré.

M. Filion: Malheureusement, cet après-midi, j'ai eu beaucoup de chiffres.

M. Latulippe: Nous avons un excellent cabinet, un excellent personnel politique. Nous avons des députés qui m'entourent qui sont excellents, un excellent Conseil des ministres et je vous remercie de nous louanger.

M. Filion: En ce qui concerne le projet pilote? Il a oublié de dire qu'il avait d'excellents fonctionnaires. Moi, c'est ce que j'ai remarqué.

M. Latulippe: Ce à quoi vous faites référence, M. le député de Taillon, c'est ce qu'on appelle le contrat de productivité. L'objectif des discussions que nous avons, au niveau de nos sous-ministres et du Conseil du trésor, est d'arriver à planifier un niveau optimal de ressources, avec ce que cela comporte comme gestion à l'intérieur de ce niveau optimal de ressources. Je peux vous dire que nous n'avons pas, pour l'année en cours, terminé les discussions avec le Conseil du trésor pour être en mesure d'arriver à une entente au niveau de ce contrat de productivité, mais c'est l'un de nos objectifs de le faire dans l'année qui vient.

M. Filion: Je pense que c'est une formule intéressante, en tout cas à l'oeil, qu'il ne faudrait sûrement pas abandonner pour permettre - probablement que cela se fait à d'autres endroits aussi - aux administrateurs de votre ministère d'appliquer des politiques intégrées.

M. Latulippe: Cela permettrait, entre autres, de lever ou d'éviter certaines contraintes au niveau administratif. Je pense que c'est l'un de nos objectifs, que d'améliorer la qualité de la gestion. Je pense que c'est un objectif qui doit être poursuivi constamment, lorsque vous occupez un poste de ministre, que d'améliorer la qualité de la gestion à l'intérieur de votre ministère. C'est un objectif qui est constamment à renouveler et c'est ce à quoi nous nous attardons au sein de notre ministère.

M. Filion: En ce qui concerne la problématique générale de ceux qu'on appelle les gardiens de prison, ou l'Union des agents de la paix en institutions pénales - je pense que c'est te nom le plus français... D'ailleurs, je souligne que le ministre a une expérience en relations du travail qui n'est sûrement pas négligeable. Je lisais dans l'une des interviews qu'il a données au journal du ministère: Nous sommes à une époque où l'on entre dans de profonds changements au niveau de la gestion du personnel, au niveau des relations du travail au Québec. De plus en plus, les travailleurs doivent être amenés à participer, à se sentir partie prenante de l'entreprise et des décisions de l'environnement dans lequel ils évoluent. C'est une entrevue que donnait le Solliciteur général, je pense que c'était au journal du ministère à l'époque.

Je dois dire au Solliciteur général que je suis d'accord. Je pense qu'il faut de plus en plus investir dans une meilleure gestion des ressources humaines, une meilleure participation également des employés aux prises de décisions, des travailleurs et des travailleuses, de ceux qui vivent la situation. Vous savez qu'au ministère du Travail le service de médiation préventive, au bout de quatre ans de travail, a, quant à lui, mis le doigt sur ce qu'était le principal fléau en relations du travail. Ce sont ceux qui sont directement en contact avec le public ou, en tout cas, avec le travail, ceux qui sont sur la ligne de production et leur contact avec leur premier supérieur, ceux qu'on peut appeler, dans une grosse usine, les contremaîtres. C'était là la clé pour le service de médiation préventive, une étude extrêmement intéressante.

Je sais que le Solliciteur général participe à cette philosophie, tout au moins au niveau du discours. Là où je suis inquiet, c'est quand je vois, à l'occasion de la fermeture des prisons, premièrement, la non-consultation des travailleurs. En plus de cela, dans un entrefilet que je n'ai pas voulu conserver, il semblerait que des représentants de votre syndicat sont sortis vite de votre bureau ou, en tout cas, il est arrivé un frottement. Cela m'inquiète un peu, M. le Solliciteur général, de voir qu'au niveau du discours la tendance tout à fait moderne et contemporaine de faire participer les gens aux prises de décisions... Il faut les consulter, les mettre dans le coup. Là où j'ai été inquiet, c'est quand j'ai vu dans les faits, véritablement, sans parler évidemment des régions - mettons cela de côté, je ne veux pas susciter de polémique - les gardiens de prisons, comme on les appelle, les agents de la paix en institutions pénales ou en milieu carcéral, représentés par une association accréditée, être écartés de la prise de décision du ministre. Encore une fois, il faut mettre les gens dans le coup, aujourd'hui, si on veut que cela marche. C'est cela la règle. Je pourrais en parler longtemps. Le Solliciteur général connaît l'intérêt que je porte et je devine l'intérêt qu'il porte également aux questions de relations du travail. Mais je dois vous dire que je n'ai pas trouvé dans les gestes qu'il a posés et les décisions qu'il a prises, depuis son arrivée au ministère, d'application concrète de cette philosophie de participation.

Encore une fois, pour terminer là-dessus, lorsqu'on examine la décision annoncée hier de la création d'un comité d'étude sur l'important dossier de la réorganisation des forces policières, on constate qu'il n'y a aucun représentant des municipalités et aucun représentant des travailleurs eux-mêmes. Dans ce cas-ci, ce sont les policiers. Je ne veux pas, là-dessus, encore une fois, en ce qui concerne l'ancien directeur de la Sûreté du Québec, qui a une expérience sûrement inestimable... Je suis préoccupé, M. le Solliciteur général, par la distance qui sépare vos discours de vos gestes non seulement dans ce dossier mais, en particulier, au niveau des relations du travail. Vous pourriez peut-être me rassurer.

M. Latulippe: Oui, je sais que mon

collègue de Taillon, comme on me l'a dit, a aussi une expérience inestimable en matière de relations du travail. Je dois lui relancer la balle là-dessus. Mon collègue de Taillon, vu son expérience, comme la mienne en matière de relations du travail, connaît certainement la différence qu'il faut faire entre la cogestion et la qualité de vie au travail. La cogestion veut dire, évidemment, que les employés participent à la gestion et aux décisions du gestionnaire, lorsqu'on a à faire des choix budgétaires. Lorsqu'on a à diriger un ministère, je pense que cela ne se fait pas sous forme d'une cogestion. La responsabilité publique que nous avons envers la population du Québec, du fait que nous sommes des élus mandatés par la population pour décider, pour faire des choix budgétaires, fait en sorte que cela exclue des notions de cogestion.

Par ailleurs, mon collègue sait fort bien que la qualité de vie au travail passe par différents facteurs. Elle passe d'abord par une attitude positive et ouverte vis-à-vis de nos partenaires que sont les syndicats. Elle passe aussi par une préoccupation constante en dehors des périodes de négociation de conventions collectives, un respect des gestes d'administrateurs que l'on pose vis-à-vis de notre personnel. Je peux vous dire que j'ai procédé en fonction de cette philosophie que nous partageons tous les deux. Je vais vous donner deux exemples. Le premier exemple, c'est la façon dont nous avons traité le personnel qui est relocalisé dans nos centres de détention. Non seulement n'y a-t-il pas de coupure de postes, non seulement avons-nous protégé l'emploi de ces personnes, mais nous les avons rencontrées. Nous assumons les frais de relocalisation. Nous ne leur avons pas imposé de réaffectations, nous avons tenté avec elles de leur donner des choix pour qu'elles puissent être en mesure de choisir les lieux où elles seront relocalisées. Nous avons préparé une politique d'accueil, pour ces personnes, dans les nouveaux centres de détention où elles seront relocalisées. (17 h 30)

Nous avons donc agi vis-à-vis du personnel de la façon la plus ouverte, la plus humaine possible. C'est la même démarche que nous avons entreprise vis-à-vis des agents de la paix, quant à leur formation. Vous savez comme moi que l'amélioration de la qualité de la vie au travail passe par ia revalorisation des rôles du travailleur, de la personne qui travaille. Il faut se préoccuper de la nature de son travail, il faut se préoccuper d'enrichir la tâche de nos travailleurs, parce que la motivation de ces personnes en dépend. Souvent, comme vous le savez probablement, M. le député de Taillon, puisque vous avez pratiqué en relations du travail, le niveau d'absentéisme des personnes va dépendre de la motivation qu'elles ont au travail.

En particulier, en ce qui concerne les agents de la paix, nous nous sommes préoccupés à les former à assumer un nouveau rôle, un rôle différent, celui d'intervenant direct auprès de la population des détenus. Nous allons leur donner deux cours spécifiques cette année, un sur les relations interpersonnelles, l'autre sur la psychologie du délinquant. Si vous avez visité Parthenais, j'imagine que vous êtes allé au 13e étage et que vous avez discuté avec les agents, les surveillants. Ils ont certainement dû vous dire comment ils ont participé à développer cette nouvelle philosophie, cette nouvelle relation d'aide vis-à-vis les détenus. Non seulement se sont-ils basés ou ont-ils accepté la formation qu'on leur donnait, mais ils ont pris les devants pour développer eux-même des relations d'aide différente, nouvelle vis-à-vis de ces détenus. Je pense que, comme Solliciteur général et comme personne préoccupée des relations du travail, préoccupé du bien-être de mon personnel, j'ai agi en conséquence de la philosophie que nous partageons.

Puisque vous avez soulevé le dossier de la réorganisation des farces policières et que vous avez parlé de mon comité, j'aurais aimé que vous assistiez hier à la conférence de presse pour comprendre le mécanisme parce que, tout au long des semaines et des mois qui ont précédé, j'ai eu des relations constantes, directes. D'ailleurs, j'aurais aimé que vous soyez au congrès de la PPQ pour voir la réception que j'ai reçue de la part du syndicat des policiers. Parce qu'effectivement, les policiers, leurs représentants syndicaux, seront impliqués tout au long de la démarche pour en arriver à une réorganisation des forces policières. Le comité que j'ai formé est composé de personnes qui ont un recul, qui n'ont pas d'intérêt spécifique à défendre, en ce qui concerne la réorganisation des forces policières. Que ce soient des personnes provenant des municipalités, il n'y a personne qui actuellement provient ou travaille dans le milieu policier, il n'y a personne qui provient des forces policières, des directeurs, des chefs d'association, des chefs de police.

Personne, finalement, n'a un intérêt spécifique à défendre sauf que, si vous aviez été en conférence de presse, vous auriez constaté que la démarche est double. Il y a une équipe de travail qui aura à bâtir les scénarios d'organisation, les orientations. Sur cette équipe de travail, aux différentes étapes de cette équipe de travail, les intervenants, y compris les syndicats policiers, vont pouvoir et devoir... Nous allons demander leurs interventions tout au long du processus. Ils seront non seulement consultés, mais ils seront partie prenante tout au long du processus. Je pense que la démarche que j'ai entreprise comme

Solliciteur général et l'attitude que j'ai eue vis-à-vis des syndicats est positive. Évidemment, la question des négociations collectives, toute question qui relèvera des négociations sera négociée en temps et lieu. Mais en dehors des négociations, puisque nous sommes à l'extérieur, en partie, pour les dossiers dont je vous ai parlé, mon attitude est conforme à la philosophie que nous partageons.

M. Filion: M. le Président, j'ai une dernière question. Peut-être qu'on peut la régler. Je reviendrai sur la question de la réorganisation des forces policières pour qu'on puisse finir le programme 3. Ma dernière question: On a parlé beaucoup des travaux compensatoires pour paiement d'amendes. Je pense que c'est important, c'est une voie intéressante de ressources. Or, cette loi, à moins d'entente avec les municipalités, ne concerne pas les sentences qui peuvent être rendues en cour municipale. Alors, j'aimerais savoir du ministre s'il existe de telles ententes avec les municipalités, et s'il peut déposer la liste, s'il l'a, des ententes avec les municipalités.

M. Latulippe: Je peux vous dire que, malheureusement, entre le moment où nous avons pris le pouvoir et maintenant, il y a très peu de municipalités - je pense qu'il n'y en a que quatre - qui ont voté le décret relatif aux travaux compensatoires. Je peux vous dire que je crois personnellement que l'emprisonnement pour défaut de paiement de l'amende - c'était d'ailleurs dans le programme du Parti libéral lors de la dernière élection - devrait être aboli complètement. Une des recommandations que me fera le Comité sur les alternatives à l'incarcération sera de m'identifier, entre autres, quelles sont les alternatives, parce qu'il y a évidemment les travaux compensatoires et il peut y avoir d'autres alternatives. Quand on pense aux personnes qui sont emprisonnées pour défaut d'avoir payé leur billet de vitesse, est-ce qu'on n'aurait pas d'autres moyens pour les forcer à payer leur billet, leur contravention, alors qu'ils ont commis des impairs à la sécurité routière?

M. Filion: Je sais tout cela. On n'a pas besoin de recommencer à zéro. Si je vous pose la question bien précise, à savoir, combien...

M. Latulippe: Vous me posez la question, M. le député, il faudrait...

Le Président (M. Marcil): S'il vous plaîtl S'il vous plaît!

M. Filion: Ma question était simple: Est-ce qu'il existe des ententes? Est-ce qu'il peut déposer la liste? Depuis le début le Solliciteur général...

Le Président (M. Marcil): M. le porte-parole, s'il vous plaît! M. le député de Taillon, on va permettre au ministre de terminer sa réponse étant donné qu'il a 20 minutes.

M. Filion: Le temps est précieux ici comme ailleurs.

Le Président (M. Marcil): Vous avez raison, je l'ai mentionné aux deux partis depuis le début.

M. Latulippe: Je déposerai la liste des municipalités qui ont voté ces décrets. Je n'ai pas d'objection à le faire.

M. Filion: II y en a quatre. C'est cela?

M. Latulippe: À ma connaissance. M. le député de Taillon, je m'engage à déposer la liste dès que je pourrai le faire devant cette commission.

M. Filion: D'accord, cela va.

Le Président (M, Marcil): Est-ce qu'on peut conclure que le programme 3 est adopté?

M. Filion: Sur division.

Le Président (M. Marcil): Sur division. On passe maintenant au programme 4, "Sécurité publique".

Sécurité publique

M. Filion: On va regarder un peu mon commentaire du début en ce qui concerne la réorganisation.

Le Président (M. Marcil): Juste une question technique, M. le député de Taillon. Nous prévoyons terminer à 18 h 24. Cela va?

M. le député de Taillon.

Réorganisation des forces policières

M. Filion: M. le Président, en ce qui concerne la réorganisation policière au Québec, je prends le texte de sa conférence de presse d'hier comme, d'ailleurs, il en fait assez régulièrement: "Le Solliciteur général s'attaque à un dossier majeur." C'est le titre. C'est important, on s'y met, je m'y mets, je me dis: II vient de se passer quelque chose, cela y est, cela bouge. Cela bouge, M. le Président, et quand on regarde toute la paperasse, au-delà du brassage de nuages, ce qu'on trouve, c'est un comité formé de deux banquiers, deux pédagogues,

un ancien directeur de la Sûreté du Québec et un avocat. Aucun effectif policier, aucun représentant policier en exercice, aucun représentant de la Commission de police et surtout, encore devrais-je dire, aucun représentant des municipalités. Incroyable! Alors qu'on sait tous qu'un des enjeux importants, la réorganisation des forces policières au Québec, sera la question des sous des contribuables dans certaines municipalités où, actuellement, il existe des corps de police, dans d'autres municipalités où- il n'en existe pas et pour l'ensemble des contribuables qui paient pour la Sûreté du Québec.

Le Solliciteur général s'attaque à undossier majeur. Il crée un comité. Imaginez-vous! Il aurait pu faire cela sans déranger personne, avec deux banquiers, comme je l'ai dit, et personne de la Commission de police, pas un policier en exercice, pas un représentant des municipalités. C'est inacceptable, M. le Président! La décision du ministre quant à son comité d'étude sur la réorganisation des forces policières est non seulement inacceptable, mais incroyable! Incroyable! Dans ce sens-là, on peut se demander... Le ministre a donné plusieurs interviews, depuis quatre mois, à peu près à tout le monde, en disant: Écoutez, cela s'en vient, la réorganisation des forces policières, c'est une de mes priorités, etc. Du brassage de nuages et des discours. Le Solliciteur général passe à l'action. Imaginez-vous deux secondes la réaction aujourd'hui des maires des régions, des effectifs policiers eux-mêmes, que ce soit chez les agents de la paix ou au niveau de la hiérarchie, la réaction de dépit qui doit exister et la frustration qui doit exister à tous les niveaux. Le Solliciteur général aura beau créer les organigrammes qu'il voudra, on ne passe pas à l'action, on ne s'attaque pas à un dossier comme celui-là en faisant fi des représentations véritables et des intérêts qui sont en jeu dans ce cas-ci.

M. le Président, j'ai une courte expérience parlementaire, qui se limite à quatre mois à peine. Je dois vous avouer que celle-là, c'a a été le plat. J'ai suivi, j'avais hâte, j'ai vu le Telbec hier, mais c'est ce matin, finalement, que j'ai reçu le dossier de presse du Solliciteur général. J'ai demandé à le voir parce que je ne croyais pas ce que je lisais dans les journaux. Évidemment, la réaction n'a pas été longue à se faire sentir. On n'a qu'à lire les propos du président de l'Union des municipalités régionales de comté, M, Cholette, pour comprendre...

M. Latulippe: Nicolet.

M. Filion: Pardon.

M. Latulippe: Cholette, c'est l'autre.

Des voix: Nicolet.

Une voix: Celui qui envoie des lettres.

M. Latulippe: Vous ne parlez pas du même programme.

M. Filion: Je cherche son prénom. M. Roger Nicolet. Je l'ai lu tantôt. Je pense qu'on vient de sonner le glas parce qu'entreprendre, passer à l'action dans un dossier comme celui-là d'une façon comme celle-là, je vais vous dire que c'est bien mal commencer ses devoirs.

M. le Président, j'aimerais que le Solliciteur général m'explique comment il a pu en arriver à passer à l'action et à approuver un communiqué de presse où on essaie de dire sérieusement aux gens que le Solliciteur général s'attaque à un dossier majeur de cette façon-là.

M. Latulippe: Mon collègue de Taillon aurait eu avantage à faire un peu plus que lire les journaux et à suivre ce qui s'est vraiment passé. Mon collègue de Taillon aurait eu avantage à voir comment et quelle a été la réaction des intervenants. Hier - je peux l'en informer - il aurait pu être présent, c'était public. Il y avait des gens de la Sûreté du Québec, des corps policiers provinciaux, des corps policiers municipaux, de l'Union des municipalités, de l'Union des municipalités régionales de comté. Les présidents des syndicats policiers, M. Nadon, M. Marcil, M. Turcotte, étaient présents hier à une rencontre, parce qu'effectivement j'ai rencontré les intervenants. Non seulement j'ai rencontré les intervenants hier, mais cela fait plusieurs mois que je les rencontre, un à un, pour discuter avec eux de la façon dont ils pourraient coopérer, de la façon dont ils pourraient travailler avec moi, avec une équipe de travail à la rénovation de l'ensemble des forces policières au Québec.

M. le député de Taillon, je pense qu'il y a un consensus sur la nécessité de procéder à une rénovation importante de nos forces policières au Québec. Les intervenants sont d'accord. Hier, lors de la rencontre avec les intervenants - je ne parle pas de la conférence de presse, je parle d'une rencontre que j'ai eue avec l'ensemble des intervenants, pour expliquer la façon dont ils participeraient, parce que je les ai consultés, avant cette démarche, sur le processus que j'allais entreprendre - je peux vous dire qu'ils ont eu une réaction tout à fait positive, quant à leur participation à la démarche que j'ai entreprise hier.

Je leur ai dit qu'effectivement, ils seront impliqués dans l'équipe de travail qui, au sein de mon ministère, préparera les scénarios d'organisation. Je leur ai demandé d'ailleurs, d'ici au 1er juin, de me faire parvenir tous les documents qu'ils jugeront à

propos, dans le but que l'on puisse s'en inspirer pour procéder à cette rénovation. Je peux vous dire que j'ai consulté non seulement le Conseil des ministres, mais aussi, en particulier, certains des ministres qui sont spécifiquement concernés, dont le ministre des Affaires municipales et le ministre des Transports. (17 h 45)

D'ailleurs, dans l'équipe de travail, il y aura un des sous-ministres du ministère des Affaires municipales, M. Jacques O'Bready qui, comme vous le savez, a déjà été maire de la ville de Sherbrooke. C'est une équipe qui mettra à contribution les intervenants. Par ailleurs, finalement, on aura des décisions à prendre. C'est une démarche qui, comme vous le dites, est complexe, qui implique plusieurs intervenants. Vous avez, comme gouvernement, un choix à faire. Il est important que, dans le comité qui me conseillera spécifiquement sur l'ensemble de la démarche, sur le choix des scénarios, les personnes qui en font partie soient des personnes qui aient un recul, qu'elles soient en mesure d'avoir un recul face aux différents intérêts qui sont concernés dans cette démarche.

Comme vous l'avez dit tout à l'heure, il y a différents intervenants qui ont des intérêts divergents, souvent même opposés. Les personnes que j'ai choisies l'ont été en rapport avec les éléments les plus importants dans cette réforme, c'est-à-dire la question fiscale et la question sociale. Ce sont des éléments importants qui ont amené notre réforme. Les personnes qui ont été choisies sont respectées dans toute la société québécoise pour leur objectivité et leur réalisme. Il suffit de mentionner M. Pierre Goyette, qui est président de la Banque d'épargne de Montréal et Mme Dorothy Wills, sociologue. Ces personnes ont un recul par rapport aux différents intérêts. Mais les intervenants, y compris les municipalités, non seulement sont concernés, mais sont partie prenante de la démarche. Il est important que vous le sachiez, parce qu'on l'a dit et on le redit; et au moins, que vous compreniez cette démarche, si vous faites un petit effort.

M. Filion: M. le Solliciteur général, vous aurez beau ajouter tous les mots que vous voulez, mais un comité consultatif, cela conseille et cela avise les personnes qui prennent les décisions. En ce sens, je ne sais pas pourquoi vous avez écarté des gens, qui vivent à tous les jours des situations, pour former ce comité. Je vous rappellerais qu'au Québec historiquement - vous le savez d'ailleurs - il y a toujours eu un partage des responsabilités en matière de sécurité publique, entre le provincial et le municipal, partage que je dirais historique. On peut se demander si le Solliciteur général croit toujours à cette complémentarité des rôles du gouvernement du Québec et des municipalités en matière de protection policière sur le territoire québécois.

J'en aurais long à dire. J'aimerais étudier la Sûreté du Québec avec vous. Je vais limiter mes commentaires parce que j'ai l'impression que nous pourrions filer longtemps.

M. Latulippe: Je vaudrais que M. le Président me permette de répondre à cette dernière intervention du député de Taillon. Il est exact - je le redis au député de Taillon et, d'ailleurs, le ministère des Affaires municipales et son ministre sont concernés -les municipalités sont et seront partie prenante de la démarche. Il est exact cependant, que je suis comme Solliciteur, directement responsable de l'administration de la Loi de police. C'est une loi qui relève de ma juridiction. Mais il est évident que, même si cette loi relève de ma juridiction, les municipalités et les ministères concernés sont importants dans la démarche et sont impliqués dans la démarche que nous avons entreprise.

Le Président (M. Marcil): Cela va pour le programme 4?

M. Filion: Non. J'ai quelques questions au programme 4. Ce sont des questions rapides.

M. Latulippe: Programme 4, qui est le programme sur...

M. Filion: "Sécurité publique". Moi, je le connais. Je suis sûr que vous le connaissez un peu, vous aussi.

M. Latulippe: Excusez, est-ce que je peux poser une question d'information? Le programme 3, sur la Commission québécoise des libérations conditionnelles...

M. Filion: Oui, c'est adopté sur division.

M. Latulippe: Commission québécoise des libérations conditionnelles.

Le Président (M. Marcil): Le programme 3 est adopté sur division.

M. Latulippe: D'accord.

Le Président (M. Marcil): C'est ça?Programme 4.

M. Filion: D'accord. En ce qui concerne le Laboratoire de police scientifique et le laboratoire de médecine légale, d'un côté il y a ce laboratoire et, de l'autre côté, les nouvelles fonctions, les nouveaux rôles, qui devront être assumés, qui découlent de la

nouvelle Loi sur les coroners. Est-ce que le ministre peut nous dire s'il y a coordination - je vois le sous-ministre opiner - s'il y a un dédoublement, même, dans certains cas? J'ai l'impression que les ressources de l'une peuvent être fort utiles à l'autre. Une bonne partie du travail au niveau des coroners pourrait être allégée par les instruments importants que constituent le Laboratoire de police scientifique et le laboratoire de médecine légale. Si le ministre pouvait m1 assurer qu'il n'y a pas de dédoublement et qu'il y a une bonne coordination, nous passions à la question suivante. C'est ça?

M. Latulippe: Oui. Effectivement, les coroners ont été formés par les pathologistes du Laboratoire de médecine légale. Oui, il y a une bonne collaboration, j'allais même dire une excellente collaboration.

M. Filion: J'ai l'impression qu'elle va devenir active au point où il faudrait - je ne sais pas si vous songez à un moment donné... organiquement rapprocher ces deux.,,. D'abord, est-ce qu'ils sont situés au même endroit?

M. Latulippe: Non. D'ailleurs, je peux vous dire une chose, c'est que je pense même que - déjà, c'est commencé probablement on réussira à avoir moins d'autopsies qu'on n'en avait, parce que, comme vous le savez, les coroners vont avoir à faire un examen externe et cela va amener une réduction du niveau des autopsies.

M. Filion: D'accord. Le Laboratoire de police scientifique et le Laboratoire de médecine légale sont situés où?

M. Latulippe: À Parthenais. Les avez-vous visités?

M. Filion: Mais les coroners, est-ce qu'ils ne sont pas à Parthenais, eux aussi?

M. Latulippe: L'avez-vous visité?

M. Filion: Est-ce qu'ils ne sont pas à Parthenais, également, les coroners?

M. Latulippe: Les coroners sont à la Place Desjardins.

M. Filion: À la Place Desjardins.

M. Latulippe: Ce n'est pas loin. Je ne sais pas si vous avez visité le Laboratoire de médecine légale?

M. Filion: M'invitez-vous?

M. Latulippe: Ah oui! vous êtes bienvenu en tout temps, M. le député de

Taillon.

M. Filion: Cela dépend du cadavre que Ie3 coupures vont avoir mis sur la table.

M. Latulippe: Pas sur une table. À moins que vous ne vouliez une autopsie prématurée.

M. Filion: M. le Président, en ce qui concerne l'Institut de police, ce n'est pas un problème facile et j'ai vu - je ne me trompe pas - que la formation des policiers était pour faire partie du cadre de réflexion de votre comité conseiller. Est-ce que je me trompe là-dessus?

M. Latulippe: Oui, effectivement, c'est un des éléments.

M. Filion: Indépendamment des travaux du comité, est-ce qu'on peut savoir vos orientations eu égard à l'hypothèse de la prise en main par la Sûreté du Québec du contrôle sur la formation des policiers?

M. Latulippe: M. le député de Taillon, je ne pense pas que je vais répondre sur des hypothèses. Je pense que vous me parlez de questions hypothétiques. J'ai mal compris votre question, alors. Si vous voulez la répéter?

M. Filion: Oui, c'est une alternative.

M. Latulippe: Vous parlez de l'alternative que la Sûreté prenne en main la formation des policiers?

M. Filion: Oui, je vous énonce cela et comment réagissez-vous à cette possibilité?

M. Latulippe: M. le député de Taillon, je pense que nous avons devant nous beaucoup de crédits à analyser, des choses concrètes et des choses vraiment réelles. On a passé énormément de temps sur différents sujets. Je ne pense pas...

M. Filion: Qui va donner...

M. Latulippe: ...qu'il soit d'intérêt de discuter hypothétiquement, dans les nuages, d'hypothèses "possiblement hypothétiques". Je pense que vous êtes plus concret que cela, M. le député de Taillon. Nous avons des programmes concrets à analyser. Nous avons des crédits concrets. Il nous reste toute la Sûreté du Québec à analyser, la Commission de police.

M. Filion: M. le Solliciteur général, la formation des nouveaux policiers, c'est quelque chose de très concret. Je vous demande: Écartez-vous la possibilité que cette formation puisse un jour être donnée

par la Sûreté du Québec?

M. Latulippe: La formation est actuellement donnée parl'Institut de police.

M. Filion: Je le sais.

M. Latulippe: C'est très important, et je vais vous donner un exemple pour montrer jusqu'à quel point c'est important.

M. Filion: Écartez-vous cette hypothèse-là, oui ou non?

M. Latulippe: M. le député de Taillon, ce sont des hypothèses "hypothétiques". Vous naviguez dans des hypothèses; vous êtes un homme plus concret que cela, M. le député de Taillon, quand vous...

M. Filion: Écartez-vous cette hypothèse-!à? Cela est bien concret, je ne vous demande pas de me donner des exemples.

M. Latulippe: Comme avocat en relations du travail, vous étiez un homme beaucoup plus concret. Avez-vous changé comme député?

M. Filion: M. le Solliciteur général, ma question est simple: Écartez-vous, oui ou non, la possibilité que la formation des policiers soit donnée par la Sûreté du

Québec? Vous me dites oui, non ou peut-être?

M. Latulippe: Non, M. le député de Taillon, je n'ai pas l'intention de répondre à des questions qui sont hypothétiques; ce sont des hypothèses que vous montez...

M. Filion: ...

M. Latulippe: ...vous-même. Ce n'est pas mon intention de répondre à des questions hypothétiques puisque nous avons des crédits fort concrets à analyser, et je vous convie à les analyser avec nous.

M. Filion: M. le Solliciteur général, vous êtes maître de vos réponses, je vais être maître de mes questions. Je vous questionne sur une orientation. J'apprécierais beaucoup que vous me répandiez parce que je suis ici pour vous interroger justement sur vos politiques, sur vos orientations, pour savoir où on s'en va. Je vous pose la question et je la rends la plus simple possible. Écartez-vous, oui ou non, la possibilité que la formation des policiers puisse être donnée par la Sûreté du Québec?

M. Latulippe: C'est une question très hypothétique que je n'ai même pas considérée, M. le député de Taillon.

Actuellement, ce n'est certainement pas dans mes intentions. Si vous regardez le programme qui est devant nous sur l'Institut de police, vous allez pouvoir constater de façon très concrète que, pour 1986-1987, c'est l'Institut de police. Et vos questions hypothétiques demeurent, je pense, très hypothétiques.

M. Filion: Entre une hypothèse et une orientation, faites-vous une différence?

M. Latulippe: Vous savez que déjà, à l'Institut de police, il y a des professeurs qui proviennent de la Sûreté du Québec. Si c'est lateneur de votre question, certain...

M. Filion: C'est clair, bien oui.

M. Latulippe: ...les gens de la Sûreté du Québec maîtrisent leurs techniques policières et, effectivement, viennent enseigner... D'ailleurs, le directeur général de l'Institut de police provient de la Sûreté du Québec, mais, dans l'année qui vient, les orientations sont précises. Je crois à l'institution qu'est l'Institut de police. Pour moi, elle dépend de ma Direction générale de la sécurité publique et je n'ai pas l'intention de changer la situation qui existe actuellement.

M. Filion: M. le Président, le ministre de la Justice déclarait récemment qu'il entrevoyait la possibilité d'une loi limitant le pouvoir de négociation de la couronne avec les délateurs. Quelles sont les intentions du Solliciteur général à ce sujet?

M. Latulippe: Je pense que vous pourrez poser la question... Je pense que les projets de loi du ministre de la Justice concernent le ministre de la Justice. Je pense que vous êtes, M. le député de Taillon, le député de l'Opposition qui êtes critique en matière de justice. Je n'ai pas à répandre sur les projets de loi de mon collègue, le ministre de la Justice.

M. Filion: ...cela concernerait les policiers. Si cela concerne les policiers, cela vous concernerait. Quelles sont vos intentions là-dessus compte tenu que votre collègue, le ministre de la Justice, a laissé entrevoir, dans un article paru dans la Gazette, la possibilité d'une loi limitant le pouvoir de négociation avec les délateurs?

M. Latulippe: Si, éventuellement, il y a un projet, si jamais, hypothétiquement, il y avait un projet de loi dans le sens que vous mentionnez, qui affecterait d'une façon ou d'une autre les forces policières, il est évident qu'à ce moment-là je serai consulté et que je serai en mesure de me faire une opinion. Je serai en mesure surtout de

pouvoir discuter ouvertement et franchement avec vous en ayant quelque chose de concret, parce que, comme vous le savez, on procède d'abord à des consultations interministérielles. Â ce moment-là, je serai en mesure d'en discuter ouvertement avec vous et, éventuellement, avec l'assemblée. (18 heures)

M. Filion: Votre absence de réponse, M. le Solliciteur général, pourrait me pousser à vous poser certaines questions concernant notamment les conditions de détention des délateurs et, également, sur le budget des délateurs, comment on peut le retrouver dans vos budgets, mais je vais m'en abstenir. Cependant, pour une question aussi générale que celle-là, je pense que vous avez pris connaissance de l'opinion de votre collègue, le ministre de la Justice. Je ne vous demande pas, encore une fois, de me donner des réponses précises - ce ne sont pas des hypothèses - je vous demande des orientations là-dessus. Je suis extrêmement déçu de ne pouvoir obtenir de votre part une collaboration - sur cette question, peut-être pourriez-vous invoquer certaines raisons - sur l'ensemble des questions que j'ai soulevées.

M. Latulippe: M. le Président, M. le député de Taillon, encore là, je trouve tout à fait hors propos et inapproprié, surtout de discuter hypothétiquement d'un projet de loi hypothétique, que peut-être le ministre de la Justice serait en train de concevoir ou d'étudier. Je pense que lorsqu'on discute d'un projet de loi, M. le député de Taillon...

M. Filion: Mais voyons donc, c'est bien la philosophie du Parti libéral...

M. Latulippe: ...on en discute avec...

M. Filion: ...si on ne discute pas des projets de loi, voyons donc!

M. Latulippe: M. le député de Taillon, je pense qu'on en discute lorsqu'on a quelque chose de concret entre les mains.

M. Filion: Voyons donc!

M. Latulippe: Que le ministre de la Justice soit en train d'évaluer ou de songer finalement à la situation des négociations avec les délateurs, parfait, j'en suis. Maintenant, que l'on discute d'un projet de loi, bien on en discutera. Mais je pense que vous aurez la chance de le faire lorsque ce projet de loi sera discuté et déposé à l'Assemblée nationale.

M. Filion: M. le Président, ce que j'entends me renverse. Voyons donc! On ne parle pas d'un projet de loi. Je regarde le député de Marquette qui a la plus grande expérience parmi nous. Voyons donc! On ne parle pas des projets. Cela se parle, ce n'est pas quelque chose de sacré. On peut discuter d'un projet de loi, on peut échanger là-dessus. D'ailleurs, on demande à la société de réfléchir aux droits, ce n'est pas juste dans les comités de bénévoles. Et on l'a appris cet après-midi, ce sont des bénévoles qui étaient fort bien payés, un peu mieux payés d'ailleurs que ce qu'on retrouve dans leur salaire habituel. Ce n'est pas juste dans les comités de bénévoles, décideurs du gouvernement parallèle du Parti libéral, où on va discuter de ce qu'est un projet de loi qui s'en vient. On peut bien en discuter ici. Ce ne sont pas des hypothèses. Des orientations et de la discussion, dans certains cas, peuvent jaillir de bonnes idées.

J'ai passé une heure avec le Solliciteur général pour tenter d'avoir une orientation claire quant aux alternatives sur les mesures d'emprisonnement. Je n'ai rien obtenu. Je lui demande quelle est son orientation vis-à-vis d'un projet de loi semblable. Il ne me répond pas. Il se réfugie derrière quoi? Est-ce que c'est au Canadian Club, au Mount Steven Club, que vont se décider les projets de loi qui vont affecter le Québec, partout? Juste parce que cela est une hypothèse qu'on dépose un projet de loi, on ne voudrait pas en discuter. Vous prenez le mauvais exemple sur votre premier ministre qui essaie de jouer le même jeu. Voyons donc, an est élu par le peuple ici. On est 122, on peut se parler. Vous déciderez ce que vous voudrez dans le projet de loi que vous allez déposer devant le Parlement, mais il faut en discuter, échanger. Je ne pense pas que cela soit uniquement avec vos comités consultatifs - fussent-ils aussi mal foutus que celui que vous avez composé hier - que cela va se décider. Je pense qu'il ne faut pas avoir peur de la discussion. Je ne pense pas que le Solliciteur général, lorsqu'il pratiquait le droit, en avait peur. Je ne vois pas pourquoi il aurait peur maintenant d'échanger sur ce qui s'en vient pour le Québec. C'est pour cela que la population nous a élus. C'est pour cela que la population vous a élu, du bon bord. La preuve: vous êtes ministre et vous avez des responsabilités ministérielles. Quant au reste, cessez de vous réfugier derrière je ne sais quoi. Les décisions se prennent-elles ailleurs? Dites-nous-lel

M. Latulippe: Je suis déçu de voir que mon collègue de Taillon préfère discuter de projets de loi hypothétiques, de questions hypothétiques, plutôt que de discuter de crédits, de sujets aussi importants, par exemple, que l'embauche à la Sûreté du Québec. Je suis très étonné que mon collègue préfère discuter de questions hypothétiques, plutôt que de discuter du fait que depuis cinq ans - alors qu'il n'était pas au gouvernement - les ministres de la Justice qui nous ont précédés ont gelé

l'embauche à la Sûreté du Québec, ont procédé à des attritions de postes systématiques, 350 policiers de moins depuis cinq ans.

Je suis surpris que mon collègue de Taillon préfère discuter, dans les nuages, de projets hypothétiques plutôt que d'attendre le moment où ces projets de loi seront concrets, plutôt que de discuter de choses aussi importantes, aussi concrètes que celles de la sécurité publique au Québec, de l'embauche à la Sûreté du Québec, de la question des policiers au Québec et de la réorganisation policière.

C'est beaucoup plus concret, ce que l'on retrouve dans ces crédits, M. le député de Taillon, que des questions hypothétiques. Est-ce que l'Opposition craindrait que se soulève en commission parlementaire la façon dont l'ancien gouvernement a traité ta sécurité publique au Québec? M. le député de Taillon, c'est l'actuel chef de l'Opposition qui disait que "la police c'était un mal nécessaire" au Québec. M. le député de Taillon, pour le gouvernement libéral, la sécurité publique est une nécessité au Québec. Ce n'est pas un mal nécessaire, comme le disait votre chef. J'aimerais qu'on discute de la situation actuelle par rapport à celle que l'on a vécue durant les années qui ont précédé, par rapport, je vous le rappelle, aux conflits en 1984...

M. Filion: ...citation, on va en discuter n'importe quand, M. le Solliciteur général, n'importe quand.

M. Latulippe: ...aux conflits en 1985, aux conséquences de ce conflit sur la sécurité publique, aux conséquences de ce conflit sur la sécurité routière. Je vous convie à en parler maintenant, alors qu'il nous reste une quinzaine de minutes, M. le député de Taillon.

M. Filion: M. le Président, quand une hypothèse est rendue à une étape où l'on songe à présenter un projet de loi, ce n'est plus une hypothèse. Cela veut dire que c'est devenu une matière sérieuse.

Deuxièmement, en ce qui concerne la dernière envolée du Solliciteur général: n'importe quand! Et j'imagine déjà... à entendre un peu les propos "c'est un mal nécessaire", déjà il y a le mot "nécessaire"; c'est une nécessité. C'est un mal, probablement dans le sens - et le Solliciteur général l'aura compris - où, dans le fond, dans une république - j'allais dire de Platon - idéale... on dit que cette république n'existe pas...

Puisque le Solliciteur général, et nous d'ailleurs, sommes préoccupés par la situation à la Sûreté du Québec... Je ne sais pas s'il a saisi mes interventions chiffrées, dans mon allocution d'ouverture, mais est-ce qu'il peut faire le point là-dessus? Je n'ai pas réussi à saisir exactement où la somme de 12 500 000 $ qui est comprise que vous retrouvez à l'élément l du programme 6...

M. Bélisle: Est-ce que je dois comprendre que le programme 4 est adopté?

M. Filion: Voulez-vous qu'on étudie les trois ensemble?

M. Bélisle: C'est qu'on a adopté une...

Le Président (M. Marcil): Est-ce qu'il y a consentement à ce qu'on les étudie globalement?

M. Filion: Est-ce qu'il y a consentement à ce que nous étudiions les trois ensemble?

M. Bélisle: J'aimerais qu'on continue de la façon que vous vous êtes entendus ce matin.

M. Filion: Si vous voulez, il n'y a pas de problème.

M,.Bélisle: Allons-y donc sur 4, 5; puis, procédons à 6. Parce que je vous attends, M. le député de Taillon, sur 6, J'ai une toute petite question à poser là-dessus. Je voudrais avoir l'occasion d'y arriver.

Le Président (M. Marcil): Est-ce qu'on peut conclure que le programme 4 est adopté?

M. Filion: Est-ce que le Solliciteur général peut nous dire quelle est la position qu'il a adoptée après la réclamation historique du gouvernement provincial au gouvernement fédéral sur le remboursement des dépenses de frais de maintien des services policiers au Québec? Quelle est sa position là-dessus? Ma question est brève. Je voudrais connaître sa position actuelle.

Le Président (M. Marcil): M. le

Solliciteur général.

M. Latulippe: II n'est pas actuellement dans mes objectifs... Au moment où on entreprend à l'intérieur de ma juridiction une rénovation des organisations policières, je ne pense pas qu'il soit approprié à court terme de relancer immédiatement tout un débat avec les autorités fédérales avant de connaître - et c'est ce à quoi nous nous attardons - quelle est la situation actuelle, parce qu'elle a évolué au fil des années en rapport avec la participation, par exemple, dans les autres provinces, des autres provinces aux services qui sont rendus par la GRC - à l'intérieur des autres provinces. Les provinces participantes sont actuellement au nombre de huit. Il y aurait une participation

actuelle accrue de ces provinces au coût des services qui sont donnés par la GRC. Je pense qu'avant de relancer un débat que le gouvernement précédent n'a d'ailleurs jamais mené à terme, il est important de pouvoir évaluer la situation actuelle. Et ce qui est le plus important actuellement, M. le député de Taillon, je pense que c'est de pouvoir procéder chez nous? on a du travail à faire ici au niveau de la rénovation de nos forces policières. Quand on regarde la Loi de police, quand on regarde la situation dans laquelle j'ai hérité de cette Loi de police, à la suite des amendements auxquels vous avez procédé en 1979, oui, il y a énormément de travail à faire, ici au Québec, au niveau de la rénovation de nos forces policières.

M. Filion: M. le Président, d'abord, je rappellerais au Solliciteur général, que ce fut le ministre Jérôme Choquette, sauf erreur, qui a été le premier à faire la réclamation au gouvernement fédéral, réclamation qui a toujours été maintenue par les prédécesseurs du Solliciteur général actuel. Et je ne sais pas si, dans ce cas-ci comme dans d'autres, le Solliciteur général, devant des défis parfais un peu plus durs, va abandonner la cause du Québec. Je dois vous dire qu'hier c'étaient Ies crédits de son collègue, le ministre des Relations internationales et ministre délégué au Affaires gouvernementales canadiennes. Dans ce sens-là, en terminant, je ne voudrais pas qu'on abandonne cette réclamation du gouvernement provincial à l'égard du gouvernement fédéral parce que dans le dossier, peu importe ce qui se passe, quand on regarde le fond du dossier, c'est-à-dire les policiers au Québec, en Ontario et ailleurs, on se rend compte que le Québec n'a sûrement pas tout à fait tort dans sa réclamation.

M. Latulippe: M. le député de Taillon...

M. Filion: Encore une fois, tous les prédécesseurs du Solliciteur général, contrairement à l'attitude que semble adopter le Solliciteur général, ont toujours maintenu cette réclamation.

M. Latulippe: M. le député de Taillon, je pense qu'il n'était jamais question, il n'est jamais question d'abandonner quelque réclamation traditionnelle que ce soit face au gouvernement fédéral en matière de financement de nos services policiers. Évidemment, il faut connaître la facture, dans un premier temps.

Je vous souligne que c'est le ministre des Finances, M. Parizeau, à l'époque, qui avait de nouveau soulevé le débat et, que je sache, pendant la période où il a été ministre des Finances, il n'y a pas beaucoup d'argent du fédéral qui est venu financer nos services policiers, malgré l'intervention, au début de son règne, du Parti québécois en rapport avec le financement de nos services policiers. Mais soyez assuré, M. le député de Taillon, que, comme Solliciteur général, personnellement, je n'ai certainement pas l'intention, dans aucun des dossiers où j'aurai à négocier avec le gouvernement fédéral, de négocier en position de faiblesse. Je n'ai certainement pas l'intention de laisser tomber quelque réclamation juste et raisonnable que ce soit dans les dossiers où je serai appelé à négocier avec mon collègue, le Solliciteur général du Canada.

M. Filion: Adopté.

Le Président (M. Marcil): Adopté. Le programme 4?

M. Filion: Le programme 4, adopté.

Normalisation et surveillance de l'exercice des fonctions de police

Le Président (M. Marcil): Programme 5, "Normalisation...

M. Filion: Adopté.

Le Président (M. Marcil): ...et surveillance de l'exercice des fonctions de police", adopté?

M. Filion: Adopté.

Le Président (M. Marcil): Adopté pour les deux partis. Programme 6, "5ûreté du Québec".

Sûreté du Québec

M. Filion: En ce qui concerne le programme 6, M. le Président, j'ai eu l'occasion de signaler dans mon discours d'ouverture comment, à mes yeux tout au moins, la Sûreté du Québec était devenue, au fil des années, un corps professionnel extrêmement compétent, fiable, dynamique, présent un peu partout. J'ai eu l'occasion de souligner également qu'à mon avis la Sûreté du Québec devait jouer un rôle central en ce qui concerne la réorganisation des forces policières sur le territoire du Québec. Cependant, en voyant les crédits, je suis un peu déçu de constater que la Sûreté du Québec ne recevait pas les budgets suffisants pour continuer les efforts qui ont été entrepris au cours des dernières années. Notamment, dans ces efforts qui ont été couronnés de succès, je pense qu'il vaut la peine de souligner, au niveau de la police autochtone, le plan de formation et d'implantation au Nord, sans parler du travail qu'effectuent les escouades spécialisées de la Sûreté du Québec. Qu'on pense à l'escouade d'intervention tactique, le groupe GTI dans le

jargon du métier, à l'escouade canine, à l'escouade de plongée sous-marine. Également, ce qui m'est apparu particulièrement important, c'est l'escouade de !a sécurité routière, où il y avait un besoin de 175 nouveaux postes. Ma question au Solliciteur général: Est-ce qu'il a discuté avec son collègue du Conseil du trésor afin d'obtenir les sommes d'argent nécessaires pour assurer le plein développement de cette force policière unique que constitue la Sûreté du Québec?

M. Latulippe: Je suis heureux de voir que mon collègue de Taillon est d'accord avec moi sur le fait que la Sûreté du Québec est un corps policier efficace. Je dois dire que c'est un corps policier qui est plus qu'efficace, quand on regarde leur présence et le taux de solution du crime à la Sûreté du Québec en rapport avec ce qui existe dans d'autres provinces et dans d'autres sociétés. Quand on regarde aussi la comparaison des taux de criminalité au Québec par rapport à ailleurs, on doit être fier de la 5ûreté du Québec parce qu'elle se compare avantageusement. On peut dire que c'est un des corps policiers les plus performants au Canada.

Regardons les budgets de la Sûreté du Québec. On va en parler, M. le député de Taillon, des budgets. On a un accroissement budgétaire, cette année, à la Sûreté du Québec, d'environ 4%. On a des compressions de l'ordre de 2 900 000 $. Quand on regarde l'évolution des budgets à la Sûreté du Québec, la façon dont l'ancien gouvernement a traité la Sûreté du Québec...

M. Filion: Ce n'est pas 4 %. Je crois que vous avez fait une erreur. C'est plutôt 4 000 000 $ que vous vouliez dire, avec une variation de 2 %. C'est 4 000 000 $, c'est cela. C'est juste pour corriger, parce que peut-être...

M. Latulippe: Quand on regarde l'évolution des budgets au fil des ans et quand on regarde, au cours des dernières années, par exemple, les péremptions de crédits que le gouvernement passé a effectuées à la Sûreté du Québec, ces péremptions de crédits dépassent, dans plusieurs cas, les compressions de 2 900 000 $ que nous effectuons cette année.

Je pourrais vous citer des chiffres. Je pense que, il y a deux ans, on a fait des péremptions qui dépassaient 4 000 000 $; à d'autres moments, des péremptions qui dépassaient 3 000 000 $ ont été faites par l'ancien gouvernement, au sein de la Sûreté du Québec. En partant du principe que c'était un mal nécessaire, c'est pour cela qu'on a réduit les effectifs. En partant du principe que c'était un mal nécessaire, c'est pour cela qu'on en est arrivé à une situation, dès 1984, où des postes ont été fermés la nuit. Cette situation a été générée par votre philosophie que la sécurité publique au Québec était un mal nécessaire.

M. Filion: Une question, M. le Solliciteur général, parce que le temps va nous filer entre les doigts. Est-ce qu'il va y avoir des fermetures de postes, totales ou de nuit, à la Sûreté du Québec à la suite de l'application des compressions contenues dans le budget?

M. Latulippe: La réponse est claire. Il n'y aura pas de fermeture de postes à la Sûreté du Québec. Ce qui se passe actuellement, ce qui s'est passé il y a quelque temps - et cela, je vais vous le rappeler -depuis cinq ans, vous avez procédé à une attrition systématique des postes d'emploi des policiers à la Sûreté du Québec, jusqu'au point où vous vous retrouviez, dès 1984, dans une situation où il devait y avoir des fermetures de postes la nuit.

J'ai décidé, il y a quinze jours, de mettre fin à cette attrition systématique de postes à la Sûreté du Québec. Nous avons déclaré que nous procédons actuellement à la réouverture de l'embauche à la Sûreté du Québec. Il est important, M. le député de Taillon, de remplacer le plus rapidement passible les policiers qui, au fil des mois, au fil des ans, prendront aussi leur retraite, afin d'éviter que se produise un "gap" de générations que vous étiez en train de créer dans notre sécurité publique au Québec avec l'attitude négative que vous avez eue vis-à-vis des forces policières durant toute la période où vous avez été au pouvoir.

J'ignore en vertu de quelle philosophie on a pu déclarer et on a pu agir de la sorte face à la sécurité publique au Québec.

M. Filion: Le Solliciteur général n'est pas en campagne électorale...

Le Président (M. Marcil): M. le député de...

M. Filion: ...juste pour me permettre de terminer, il n'y a pas de télévision ici. Je pense qu'il faut l'admettre et être juste, les gouvernements précédents ont permis, dans la mesure de leurs moyens, à la Sûreté du Québec de se développer et, comme je l'ai dit tantôt, de se développer des créneaux d'excellence qui sont remarquables; j'en ai souligné quelques-uns tantôt et il y en d'autres. Maintenant, malgré tous vos discours, je constate quand même qu'au niveau des effectifs policiers, à la Sûreté du Québec, dans vos crédits, il y a 96 effectifs de moins pour l'an prochain.

Le Président (M. Marcil): Je

reconnaîtrais le député de Mille-Îles, s'il vous plait!

M. Bélisle: Merci, M. le Président. Au programme 6, M. le Solliciteur général, je vois une augmentation, à l'élément 2, Gestion interne et soutien, de 64 365 000 $ en 1985-1986 à 80 975 100 $ en 1986-1987, soit 25 % d'augmentation...

Une voix: Quelle page?

M. Bélisle: Pardon? Je pose une question. C'est la page sur les comparaisons par programme et élément, la première page qui suit votre crédit, dans le Livre des crédits 1986-1987. C'est le second poste d'augmentation le plus important après le programme 1, qui était une augmentation de 35 %. J'aimerais avoir une explication quant à cette masse plus importante au poste de Gestion interne et soutien. C'est quand même une augmentation de 16 000 000 $; il y a beaucoup d'argent d'affecté à ce poste.

M. Filion: M. le député de Mille-Îles, vous savez, il y a trois ou quatre séries de chiffres qui circulent, selon l'endroit d'où on les reçoit. Le Conseil du trésor nous dit une chose, le cahier explicatif des crédits du ministère nous dit autre chose et les crédits, la portion des crédits nous dit autre chose.

M. Bélisle: Alors, M. le député de Taillon, n'était-ce pas alors une bonne question que vous auriez dû poser?

M. Filion: Oui, je l'ai posée dans ma déclaration d'ouverture et je n'ai pas eu de réponse.

M. Latulippe: C'est une question de réaffectation des crédits, ce sont les loyers effectivement qui étaient affectés à l'élément 1 et qui ont été transférés à l'élément 2.

M. Bélisle: Contrairement à ce que pensait M. le député de Taillon, ce ne sont pas des employés civils, mais ce sont des loyers.

M. Latulippe: Effectivement.

M. Bélisle: Merci.

M. Filion: J'ai dit que l'élément 2...

Le Président (M. Marcil): Je regrette, votre temps est écoulé.

M. Filion: Si je peux me permettre de rectifier, j'ai dit que l'élément 2 touchait, selon le cahier explicatif des crédits qui nous a été remis par le ministère du Solliciteur général, les effectifs civils, alors que l'élé- ment 1 traitait des effectifs policiers.

Le Président (M. Marcil): Programme 6, Sûreté du Québec.

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Marcil): M. le député de Taillon, le programme 6, cela va? Adopté.

Les crédits budgétaires du Solliciteur général pour l'année financière 1986-1987 sont-ils adoptés?

M. Filion: Sur division.

Le Président (M. Marcil): La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 22)

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