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Version préliminaire

43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Tuesday, March 19, 2024 - Vol. 47 N° 45

Special consultations and public hearings on Bill 51, An Act to modernize the construction industry


Aller directement au contenu du Journal des débats


 

Journal des débats

9 h 30 (version non révisée)

(Neuf heures quarante-six minutes)

La Présidente (Mme D'Amours) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je vous demande, à toutes les personnes dans la salle, de bien vouloir éteindre la sonnerie de votre appareil électronique. La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi no 51, Loi modernisant l'industrie de la construction.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Tremblay (Dubuc) est remplacé par Mme Bogemans (d'Iberville) et Mme Tremblay (Hull) est remplacée par Mme Malette (Huntingdon).

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Nous entendrons ce matin les témoins suivants, soit : la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec, le Conseil du patronat du Québec et l'Association des employeurs en mécanique industrielle du Québec.

Je souhaite maintenant la bienvenue à la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes, 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange. Je vous invite donc à vous présenter et à nous donner votre exposé.

M. Côté (Eric) : Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes, MM. les députés, bonjour. Mon nom est Éric Côté, je suis président-directeur général de la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec, communément appelée la CEGQ. Aujourd'hui, je suis accompagné de Lucien... Julien Lessard, excusez, oui, président du conseil d'administration de la CEGQ, qui est aussi vice-président exécutif de l'entreprise Beaudoin Canada, de Mme Mélissa Robitaille, présidente sortante du conseil d'administration et P.D.G. de... une entreprise de construction. Je suis accompagné, finalement, de M. David Dinelle, directeur des affaires publiques et des relations gouvernementales de la CEGQ.

Nous tenons à vous remercier pour l'invitation...

M. Côté (Eric) : ...à participer à cette consultation particulière et, d'entrée de jeu, j'aimerais préciser avec vous que la CEGQ accueille favorablement la volonté exprimée dans la modernisation de l'industrie de la construction derrière le projet de loi no 51.

La CEGQ est fondée en 1996. Elle a pour mission de défendre les intérêts des entrepreneurs généraux et de l'industrie de la construction par sa contribution au développement du Québec, notamment au niveau économique et durable. Elle est la seule association vouée exclusivement à la promotion des intérêts collectifs des entrepreneurs généraux. Ses membres, ensemble, réalisent 85 % des projets dans les secteurs institutionnel, commercial et industriel. Avant d'aller plus loin, vous me permettrez, Mme la Présidente, de permettre à notre président du conseil, M. Lessard, un entrepreneur général, de vous expliquer les rôles et responsabilités d'un entrepreneur général dans le secteur de la construction.

M. T.-Lessard (Julien) : Merci, Eric. Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, comme entrepreneurs généraux, nous sommes les chefs d'orchestre sur les chantiers. Nous sommes responsables de la gestion des projets de construction, nous planifions l'ensemble des travaux, nous engageons et nous gérons les entrepreneurs spécialisés, nous veillons au respect de l'échéancier et du budget. Nous assurons que les projets respectent les normes et réglementations et nous assurons la maîtrise d'oeuvre en santé et sécurité au travail sur les chantiers. Nous veillons à la satisfaction de toutes les parties prenantes en ayant une vision globale du projet.

Malgré ce qui précède, les entrepreneurs généraux ne sont pas exclusivement représentés dans les discussions officielles, alors que la loi R-20 leur accorde un statut différent en leur exigeant notamment l'obligation solidaire en matière salariale en vertu de l'article 54 de la loi R-20. Puisque les entrepreneurs généraux portent la responsabilité de la planification et de la productivité des chantiers et qu'elle apporte une vision globale qui viendra bonifier la concertation des acteurs de l'industrie, la CEGQ souhaite une reconnaissance officielle comme association d'entrepreneurs, en vertu de l'alinéa 1-c de l'article 1 de la loi R-20. Je repasse maintenant la parole à M. Côté.

• (9 h 50) •

M. Côté (Eric) : En matière de polyvalence, le Québec se distingue en comptant le plus grand nombre de métiers dans l'industrie de la construction, avec pas moins de 26 métiers reconnus. En comparaison, le régime d'apprentissage exige six métiers, en Ontario, neuf, en Alberta, et cinq au Nouveau-Brunswick. La CEGQ est d'avis que la polyvalence de la main-d'œuvre constitue un élément essentiel pour une productivité accrue, et c'est pourquoi nous saluons l'ouverture du projet de loi à cet effet. La présente modernisation doit effectivement favoriser une plus grande flexibilité de la main-d'œuvre tout en assurant la qualité, et j'y tiens, et je le mentionne, permettant à chaque travailleur d'accomplir un éventail élargi de tâches, surtout dans un contexte de gestion de déficience à la fin des chantiers où il y a plusieurs métiers qui se succèdent.

Plusieurs d'entre vous avez entendu parler des fameux cadres de porte. Alors, on se dévoile, on vous le dit, c'est un entrepreneur de la CEGQ qui a évoqué cette problématique-là. Il aurait aimé être avec nous, mais, pour des raisons de confidentialité, de difficultés pour son entreprise, il a choisi de laisser son association lui expliquer la situation. Vous avez entendu, il y a un entrepreneur qui avait, sur une... dans un chantier d'une commission scolaire, a dû changer des cadres de porte parce que les plans prévoyaient 24 pouces, alors qu'il fallait finalement mettre 30. Il a fallu sept métiers pour changer le cadre de porte. Dans notre mémoire, on vous fait la liste, la nomenclature. Alors, tout ça, finalement, nous croyons qu'avec le projet de loi, ça ne serait malheureusement qu'une petite économie qui serait possible. En appliquant la nouvelle définition de la polyvalence proposée dans le projet loi no 51, rien ne précise que l'entrepreneur aurait eu besoin de moins de métiers. Les tâches semblent reliées, mais il est difficile de le confirmer, même si elles tendent à s'inscrire dans une même séquence de travail. Leur réalisation, toutefois, s'effectuerait sur plus d'une journée.

Afin d'encadrer la polyvalence, elle propose... la CEGQ propose un partage des compétences à travers les familles de métiers. Qu'est-ce que c'est, les familles de métiers? C'est un rapport qui existe depuis 2013, produit par la CCQ, qui vient introduire une approche selon laquelle les 26 métiers seraient répartis selon cinq grandes familles à l'intérieur desquelles les travailleurs pourraient évoluer et partager certaines tâches. Donc, ce n'est pas quelque chose de laissé au hasard, qu'on a inventé, c'est un document qui date depuis 2013, à cet effet-là. Donc, favoriser un apprentissage et un partage de compétences à l'intérieur de familles cohérentes et... pour favoriser l'apprentissage de ces compétences.

Afin d'évaluer les différentes relatives... délais ou coûts, dans l'exécution des travaux concernant les changements des cadres de porte, nous avons procédé à une évaluation. Alors, tout simplement, on a essayé de voir si l'entrepreneur, avec les familles de métiers, aurait réalisé une économie. Selon nos termes, et on peut vous dire, les travaux pour changer les 13 cadres de porte dans l'école ont pris 45 jours parce qu'il y a des métiers qui se succédaient, il y avait des délais, pour un coût d'environ 25 000 $. On parle d'un vrai chantier, ici, ce n'est pas une analyse qui était faite sur la base, donc...

M. Côté (Eric) : ...en appliquant le concept lié aux familles, seuls deux métiers auraient été nécessaires, un charpentier... et un peintre. Pour les mêmes modifications, l'entrepreneur estime que les tâches auraient... seraient tombées à 26 jours, ce qui représente une amélioration dans le temps de 42 %.

Toutefois, ce qu'on se rend compte, c'est que la gestion des juridictions de métier est quelque chose de complexe. Et, avec l'arrivée d'une nouvelle loi, peu importe comment le gouvernement ou l'Assemblée en décidera, il est nécessaire de mettre en place un mécanisme de préapprobation pour que les entrepreneurs qui sont de bonne foi, qui veulent faire les choses comme il faut dans la polyvalence, ne se trompent pas, ne soient pas pénalisés. Et on aimerait que la CCQ puisse offrir un service de validation avant le début des travaux. Donc, un entrepreneur pourrait faire vérifier si la méthode ou quelque chose comme ça pourrait être préautorisé, au lieu de prendre une chance d'avoir une contravention et de se retrouver en situation, comment dire, un peu dommageable et qui aurait un impact au niveau juridique. Alors, afin d'éviter justement des combats d'interprétation juridique, il semble important de mettre en place ce mécanisme d'approbation. Et nous savons que, dans le passé, la Commission de la construction du Québec le faisait dans certains cas, et on pense que ça serait quelque chose de louable pour l'industrie, au lieu d'avoir une police, un accompagnement, un peu comme on le fait de plus en plus du côté de la CNESST, avec l'introduction du projet de loi n° 59 qui a été faite il y a quelques années.

Sur la question de la mobilité, la CEGQ est d'avis qu'il faut... qu'il n'y a plus de raison valable d'entraver la mobilité des travailleurs et des travailleuses devant... et demande l'abolition de toutes les restrictions à cet égard. Mais toutefois, et il y a un frein à la mobilité, c'est le budget, d'amener des gens de notre équipe sur un autre chantier, ça implique qu'on va devoir couvrir les frais de déplacement et de séjour. Alors, ça ne se fait pas à n'importe quel prix. Et je rassure le ministre là-dessus, ça ne peut pas être un bar ouvert. Il y a des limites parce que, dans un contexte de plus bas soumissionnaire, si on met toute notre équipe avec tous les pleins prix, on risque de ne pas être compétitif.

Je laisserais... je vais continuer. Je voulais changer tout de suite, hein? Je voulais vous parler enfin de la rétroactivité. Avant même de parler de la création d'un fonds de rétroactivité, il faudrait faire un débat de fond sur la rétroactivité et d'expliquer pourquoi elle est impraticable dans le secteur de la construction. Premier point, à moins d'une disposition contractuelle... ne le prévoit, il est impossible pour un entrepreneur de rétroactivement solliciter son client pour une somme qu'il a oublié de prévoir dans son projet. Ce projet, c'est... est vaste, et cette clause est étendue dans les contrats publics, les contrats privés. Elle est même inscrite au Code civil du Québec à l'article 2109.

Autre élément qui laisse, dans le fond, aux parties de regarder la situation, en 2014 et en 2017, à cause d'un conflit de travail, le gouvernement a dû statuer sur les conditions salariales des travailleurs, et, à ce moment-là, n'a pas appliqué le principe de la rétroactivité. Par contre, le gouvernement dans sa sagesse et... a appliqué une correction dans l'augmentation pour justement tenir compte de la période qu'il y a eu entre l'échéance et la fin du conflit. Donc, de ce côté-là, l'histoire nous montre qu'il y a une possibilité de faire les choses à cet effet-là, et nous souhaitons, donc, à cet effet-là, de retirer tous les éléments sur la question de la rétroactivité. Mélissa.

La Présidente (Mme D'Amours) : Il vous reste une minute.

Mme Robitaille (Mélissa) : Merci, Éric. Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, les femmes dans l'industrie de la construction ne représentent que 3,7 % de la main d'œuvre. Après cinq... cinq ans, 54 % d'entre elles quittent le milieu, comparativement à 35 % chez les hommes. Le climat de travail, associé malheureusement à des comportements inappropriés à certains moments, est certainement responsable de cette situation. Afin de soutenir la rétention des femmes dans l'industrie de la construction, il est crucial de renforcer la sensibilisation. C'est pourquoi la CEGQ soutient, comme le suggère le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail, le CIAFT, la mise en place d'une formation obligatoire contre le harcèlement à intégrer au régime d'apprentissage. Cette formation serait une étape essentielle pour créer un environnement de travail plus respectueux et inclusif.

J'aimerais aussi ajouter aux propos de mon collègue Julien que la liste des associations reconnues par la loi n'a pas guère changé depuis 50 ans. Malgré tout, depuis la CEGQ s'est établie par son professionnalisme et sa pertinence au sein de l'industrie. Comme mes collègues viennent d'aborder la question de la polyvalence et de la mobilité, celles-ci se planifient en amont des projets de construction par l'entrepreneur général, d'où... d'où l'importance d'être reconnu par la loi R-20 et d'être autour de la table. En conclusion, d'autres recommandations se trouvent dans notre mémoire et nous demeurons disponibles pour vos questions.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci beaucoup. Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons débuter maintenant la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Boulet : Oui, merci, Mme la Présidente. D'abord, un grand merci pour la qualité de votre mémoire, pour la recherche que vous avez faite afin de nous présenter des recommandations qui sont bien articulées, qui sont clairement exprimées. M. Côté...

M. Boulet : ...M. Côté et toute votre équipe. Donc, bravo! Ceci dit, comme je l'ai fait à d'autres groupes, si je résumais très, très sommairement votre mémoire, c'est plus de polyvalence, plus de mobilité que ce qui est dans le projet de loi, pas de rétroactivité puis, quant à l'accès, d'un accès particulièrement pour augmenter la représentativité des femmes.

Puis peut-être revenir à la polyvalence. Puis effectivement c'est un exemple qui a fait du bruit sur la place publique, que le changement d'une porte dans une école, où ça requiert l'intervention de sept personnes, et, effectivement, les 13 cadres de porte qui prennent 45 jours à des coûts particulièrement élevés... Et c'est le but visé par la polyvalence. Ceci dit, vous l'avez mentionné, M. Côté, il ne faut pas que la polyvalence devienne non plus un bar ouvert. Il ne faut pas que ça ait un impact négatif sur la qualité des travaux et que ce soit aussi incompatible avec les compétences des travailleurs. C'est pour ça que la polyvalence, elle est relativement prudente. Mais, je vous entends bien, il faut que ça ait un impact. Et, si la polyvalence est bien encadrée par l'entrepreneur, elle devient, cette polyvalence-là, un incitatif à la planification. Puis plus tu planifies, plus tu peux bénéficier de la polyvalence quant à la diminution des délais et, conséquemment, la réduction des coûts. Puis, effectivement, quand on se compare, on réalise qu'il y a beaucoup plus de rigidité entre les métiers, qui sont par ailleurs beaucoup plus nombreux au Québec que dans le reste du Canada.

• (10 heures) •

S'il y avait, quant à la polyvalence, un élément spécifique de l'article 72... je comprends que vous faites référence à la notion de famille et activités pour des raisons de cohésion... Puis on a fait une réflexion là-dessus. Puis vous vous étiez informé, l'année passée, quand même des consultations qui ont été faites avec les sous-comités professionnels, qui relèvent de la CCQ, sur le concept d'activités, le partage des activités, puis, au bout de plusieurs mois, même avec ces sous-comités professionnels là, qui sont complètement paritaires, il n'y a pas eu une activité qui a fait l'objet d'un consensus. C'est là qu'on voit par ailleurs les limites du paritarisme. Mais vous vous souvenez qu'il y a un certain nombre d'années il y avait eu un projet de réforme du régime d'apprentissage et de gestion de la main-d'oeuvre, vous appeliez ça à l'époque, je sais que vous le connaissez parce que vous avez des références historiques en construction, M. Côté, le PRAGM. Et ça avait été analysé, mais il n'y avait pas eu de consensus. C'est pour ça qu'on est revenu à la notion de polyvalence, mais avec des conditions, avec des balises. Et ma question sur la polyvalence : S'il y avait un élément prépondérant dans la définition de polyvalence qui nous permettrait de l'élargir et que vous pourriez nous conseiller de faire lors de l'étude détaillée, ce serait quoi spécifiquement?

M. Côté (Eric) : Mais merci. Ce qu'on proposait, c'est d'avoir un modèle, pas de... de ne pas, justement, laisser ça librement puis que tout le monde puisse faire n'importe quoi. On ne veut pas que les électriciens se mettent à faire de la plomberie et vice versa. Il y a des choses importantes. Les familles de métiers donnaient des balises justement de ce côté-là. On comprend que ces démarches-là ont eu lieu à une époque où, dans le contexte de paix industrielle, c'était différent puis... Il faut le reconnaître, là, que la juridiction des métiers a aussi un impact sur l'organisation des entreprises dans le secteur de la construction, je pense que vous allez entendre la Régie du bâtiment, qui est dans un projet de réforme avec l'annexe trois, ça l'a un impact sur l'organisation des entreprises si on a des métiers plus polyvalents. Et je pense que... Puis vous parlez de références historiques, mais je pense qu'à cette époque-là la résistance au changement est venue du secteur des entreprises, n'est pas venu du secteur syndical le plus fort à cet égard-là. Alors, je pense que... Ce qu'on recherche aussi, ultimement, c'est des entreprises qui sont plus polyvalentes, qui peuvent faire plus de choses. Pourquoi on est obligés d'avoir une entreprise en peinture, une entreprise en plâtrage, une entreprise... alors qu'il pourrait y avoir, des entreprises... Il en existe, en ce moment, et ces entreprises-là tirent leur épingle du jeu. Donc, la polyvalence fait, aide à la croissance des entreprises.

Alors, à cet effet-là, je pense que la proposition de faire dans des familles de métiers, ultimement, va faire en sorte qu'on pourrait être peut-être plus proche du modèle ontarien, où on en voit des avantages.

M. Boulet : O.K., mais...


 
 

10 h (version non révisée)

M. Boulet : ...je reviens à ma question, puis je vous comprends bien, en deux mots, s'il y avait un élément de la définition balisé, actuel qu'on retrouve à l'article 72 du projet de loi n° 51, est-ce qu'il y a un élément qui retiendrait votre attention plus particulièrement, ou il ne peut ne pas y en avoir, là?

M. Côté (Eric) : Je vous dirais que l'élément qui est sur une seule journée, peut-être, plus... est plus limitatif. Je pense que, dans certains cas, on pourrait l'élargir sur une plus longue période, pas sur l'ensemble du chantier, mais... Si on avait... une journée, on pourrait peut-être faire des gains sur nos...

M. Boulet : C'est une bonne réponse. Mais, maintenant, la mobilité... Non, mais c'est une réponse claire.

M. Côté (Eric) : ...on s'est préparé. 

M. Boulet : La mobilité, donc aucune entrave à la mobilité. On voit, parce que vous êtes présents dans l'institutionnel, commercial, industriel, que dans ces deux secteurs-là, parce que l'industriel est un secteur, puis l'institutionnel, commercial, mais 13 des 26 métiers... ou des 25 métiers parfois, je pense, c'est plus 25, parce qu'il y en a un 26e, là, qui a été comme réglé, mais ils bénéficient de la totale mobilité. Il ne semble pas y avoir eu d'effet négatif. La mobilité, je pense que, dans un contexte d'effervescence de l'industrie de la construction, ça va être bénéfique. Cependant, on entend des groupes venir nous faire des représentations sur l'impact négatif de la mobilité, sur l'employabilité des travailleurs, puis la possibilité de faire une réelle conciliation travail-famille. Je vous demanderais de me dire en deux mots qu'est-ce que vous répondez à ceux qui plaident de cette manière-là.

M. Côté (Eric) : Je vous dirais que la première chose qui s'implique dans la modernisation, c'est un tout. La question de la polyvalence puis de l'amélioration des compétences des travailleurs aussi va améliorer et, je pense, va amoindrir l'effet de la mobilité. Si on a des gens en région qui ont plus de polyvalence, on va avoir plus d'emplois en région. Alors, ça, c'est un élément que je considérerais.

Puis sur la question du, comme on dit, du bar ouvert, là, il faut payer ces gens-là quand on les amène dans une autre région, et c'est des coûts. Et ultimement, là, quand on est en plus bas soumissionnaire, on ne peut pas prévoir qu'on va amener tout notre monde parce qu'on ne gagnera pas... Alors, il faut trouver un équilibre et ce côté-là. Et, je pense, c'est une question d'applicabilité, justement, qu'on dit la pleine mobilité, parce que d'appliquer que ça, c'est tant d'heures, et tout ça, ça peut devenir complexe. Alors, si on le fait sur une base uniforme mais qu'on le fait sur des bases, balises et qu'il y a des balises avec la compétence qui s'ajoutent à ça, il y a quelque chose d'intéressant et il y a une applicabilité plus facile si on la met, la pleine mobilité.

M. Boulet : Et il y a un autre élément qui doit être partagé aussi, c'est que la mobilité, c'est une faculté, ce n'est pas une obligation qui peut, si tu veux être mobile, tu sais, je le dis dans le contexte de la conciliation travail-famille, et tu peux ne pas vouloir être mobile, et ça, ça s'applique, tant du côté des entrepreneurs qu'à des salariés pris individuellement. Vous avez vu que l'avenue qu'on a empruntée, c'est de diminuer de 50 % le seuil pour être un travailleur préférentiel, donc qui peut être mobile auprès du même employeur et, pour les femmes, ça a baissé de 500 à 400. Puis on rend accessible ce traitement-là de travailleurs, travailleuses préférentiels aux groupes issus de la diversité, les minorités visibles, les personnes immigrantes, les personnes en situation de handicap, puis les personnes issues des communautés autochtones. Puis pour la pleine mobilité, bien, il y a quand même un seuil à 15 000 heures travaillées, ce qui permet de se déplacer d'un employeur à l'autre, encore une fois, en tenant compte de ta volonté et du besoin de l'employeur de bénéficier des services de cette personne-là qui est généralement un peu plus expérimentée.

Mais l'article 35 de la Loi sur le règlement sur la formation professionnelle demeure encore en vigueur et, s'il y a une nécessité d'embauche, il y a une priorité d'embauche pour les travailleurs locaux et régionaux. Par ailleurs, c'est des heures additionnelles, vous l'avez bien mentionné, c'est les projets à Hydro-Québec, c'est les projets industriels, c'est toutes les filières stratégiques au Québec. Les 10 prochaines années, on va avoir besoin de travailleurs puis on va avoir besoin de diminuer les coûts et les délais pour construire plus, et c'est le but fondamental du projet de loi. Sans négliger la possibilité aussi des entrepreneurs...

M. Boulet : ...des travailleurs, travailleuses de régions d'aller travailler de Saint-Hyacinthe à Québec ou de La Tuque à Trois-Rivières, puis, peu importe, là, dépendamment du découpage des régions.

Autre élément, M. Côté, la rétroactivité. Il y avait un article, comme vous savez, qui interdit aux parties, dans la loi actuelle, de négocier une forme de rétroactivité salariale. Vous êtes contre puis vous avez parlé d'un... qu'il y aurait peut-être un débat de fond à faire. Je pense qu'on fait ce débat-là depuis des années, puis des années, puis des années. Il y en a qui disent oui puis il y en a qui disent non. Nous, on a pensé que l'instauration d'un fonds de rétroactivité salariale allait permettre, en raison des changements de chantier, des changements d'entrepreneurs puis de la mobilité interne des travailleurs, que ça puisse assurer à tous les travailleurs, travailleuses visés par un règlement de convention collective après la date d'expiration, de... une forme de rétroactivité salariale. Mais vous parlez... vous ouvrez la porte à ce qui avait été fait par le législateur, une correction. Qu'est-ce que vous pensez si c'était une compensation ou un montant forfaitaire? Est-ce qu'il y a d'autres options créatives que vous nous soumettriez pour fins d'analyse lors de l'étude détaillée?

M. Côté (Eric) : Je pense que l'élément du fonds, c'est que les gens contribueraient au fonds, les entreprises, dans le fond, cotiseraient le fonds et devraient, à ce moment-là, majorer leurs soumissions en fonction de ces coûts-là qui s'ajoutent. Il y a un élément que ça... qui nous préoccupait. Quand un entrepreneur doit faire un projet qui s'échelonne sur deux périodes de convention collective, il anticipe l'augmentation salariale à venir, et la majore, et il prévoit son budget pour sa masse salariale. Donc, on sait que... si, après le 1er mai, le projet continue, on sait que les salaires vont augmenter, ça fait qu'on prévoit une contingence de ce côté-là, et, quand on fait la soumission, on prévoit ce coût-là.

• (10 h 10) •

Dans ce cas-ci, si on cotise au fonds, on cotise dès le début des projets, et tous nos clients sont soumis à une majoration de 3 %, même si leurs projets n'arrivent pas à... après l'échéance. Donc, les gens vont... On va avoir des prix de soumissions qui vont inclure les 3 %, par exemple, qu'on dit exemplaires, et ils vont devoir, après ça, payer plus cher, alors que leur projet n'ira pas au-delà de la date de convention collective. Alors, on chercherait un moyen équitable, puis nos clients vont sûrement... puis vous les entendrez, vous leur poserez la question, ils vont être là tout l'après-midi, aujourd'hui, le Conseil du patronat et la Fédération des chambres de commerce, pour ne pas les nommer. Mais ces gens-là, est-ce qu'ils sont intéressés à cotiser un 3 % de plus sur la valeur des projets, alors qu'en ce moment on nous met beaucoup de pression pour réduire le coût des projets puis le temps des projets? Alors, cette mesure-là, à notre avis...

La mesure de correction, elle fonctionne et elle peut être appliquée. Ce qui nous préoccupe aussi, j'en ai peu parlé, mais, par expérience, c'est le rapport de force aussi, que, si on étale la période de négociation parce qu'on sait qu'il y a un fonds qui est disponible, est-ce que les parties vont être aussi motivées à travailler de ce côté-là? C'est un élément qui nous préoccupe, pour l'avoir vécu.

Mme Robitaille (Mélissa) : Si je peux me permettre aussi, une suggestion qu'on a partagée, en tout cas, que j'ai partagée, c'est bien de prévoir ce qui vient après, mais, si on peut avoir des mécanismes dans la loi qui obligent les parties à s'entendre en amont, avec des obligations de résultat, sur une entente à date fixe, ça réglerait... ça passerait tout le monde à faire son travail avant d'arriver à une date butoir. Donc, après ça, on continue le fil quotidien de nos chantiers.

M. Boulet : On s'entend totalement. D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle on a devancé d'un an la période de maraudage, le dépôt obligatoire d'offres et de propositions, la médiation obligatoire. Plus on commence en amont, meilleures sont nos chances de régler. Puis ça, évidemment, c'est l'objectif que partagent tant les syndicats que les associations d'employeurs, qu'il n'y ait pas... on n'ait pas à attendre le 30 avril, à la date d'expiration des conventions collectives. On est vraiment sur la même longueur d'onde. Surtout que le Québec, les Québécois, les Québécoises ont besoin de notre industrie, dans toutes les missions essentielles de l'État, là, je le répète souvent.

Et donc ce que vous dites, la rétroactivité, est-ce que vous seriez... Vous dites : Il pourrait y avoir un impact sur le rapport de force, donc donnant un peu plus de pouvoir de négociation aux syndicats. S'il n'y a pas d'entente le 30 avril, de toute manière, on va avoir une rétroactivité. C'est un peu votre point, hein?

M. Côté (Eric) : Le chèque va rentrer le 3 avril, la paie va être majorée puis... Mais il y a un élément, c'est... puis je vais vous dire, moi, je fais beaucoup confiance à la modernisation du régime de...

M. Côté (Eric) : ...de négociation pour y avoir été, pour avoir vécu, pour avoir été assis à une table de négociation pendant 100 jours, à attendre que les syndicats viennent, la question de la bonne foi est là puis la question du rapport de force. On n'était pas pressés. On savait qu'on arrivait à l'échéance puis qu'on s'en allait en médiation. C'est important cet élément-là de ne pas être à la table et d'attendre l'autre partie qu'elle se décide parce qu'elle sait qu'elle va avoir un meilleur rapport de force au mois d'avril qu'au mois de novembre.

Donc ça, c'est vraiment important. Puis vous venez corriger dans votre projet de loi, justement, M. le ministre, cette question-là, et ça nous amène, je... moi, je... Puis peut-être... c'est peut être plus théorique pour des gens, mais quand on... dans ces tables-là, dans ces salles-là, on voit l'effet de ces modifications-là, et moi, je fais confiance en tout cas, que ces éléments-là vont faire une différence et inciter les parties à s'entendre avant. C'est ça l'objectif. Dans le cas de certains secteurs, le secteur du... s'entendait toujours avant le secteur... puis ce n'était pas une question de rétroactivité. C'était une question de discuter. Après ça il y a eu des prises en otage d'un secteur ou l'autre, ça, c'est quelque chose qui devrait justement ne pas se faire, et s'il y a des parties qui peuvent s'entendre, on puisse y aller, selon moi, en tout cas. Et j'ai espoir, là, que le régime de négociations... puis je n'ai pas neuf négociations comme mon collègue à l'ACRGTQ, j'en ai seulement deux et demi, alors j'ai...

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. C'est tout le temps que nous avions.

M. Boulet : Merci beaucoup, beaucoup.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je vais maintenant céder la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Cadet : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci d'être avec nous cet avant-midi. Au-delà des différents éléments du projet de loi, productivité, mobilité dont on a abondamment parlé, mon attention, donc, s'est portée, donc, sur une autre demande que vous avez, donc, dans votre mémoire, donc, soit la demande de reconnaissance officielle, puis vous l'avez mentionné dans votre présentation initiale de 10 minutes. Donc, vous souhaitez être reconnue officiellement comme une association d'entrepreneurs sans exiger une présence directement aux tables de négociation. Ma première question pour vous, donc : Ça serait quoi le plus gros impact anticipé de cette demande de reconnaissance officielle...

M. T.-Lessard (Julien) : Je peux y aller. C'est au niveau là... Justement, on mentionne que la planification des travaux peut être améliorée puis on croit bien le faire. Mais il y a toujours place à l'amélioration, puis c'est quelque chose qui se discute aussi en amont avec les travailleuses et les travailleurs. ...c'est vraiment au niveau de l'organisation des travaux qu'on croit qu'il y a des gains puis qu'on peut apporter aussi, parce que, comme je l'expliquais un peu, en entrée de jeu, on a une vision globale du chantier puis on veut assurer la satisfaction de tout le monde dans un projet aussi, là.

Mme Cadet : Donc, M. Lessard, vous répondez un peu à ma sous-question, parce que c'était la prochaine. Je me disais : est-ce que je vous ai entendu en introduction parler de planification des travaux, puis on en a beaucoup parlé dans cette commission dans les derniers jours. Donc, tout le monde nous dit... Beaucoup d'intervenants, en fait, sont venus nous dire que la planification était vectrice, donc, de productivité. Donc, comment, donc, l'améliorer? Vous, vous dites que cette préoccupation-là, qui a été entendue, pourrait être partiellement répondue par votre présence autour des différentes tables de gouvernance. C'est bien ça?

M. T.-Lessard (Julien) : Absolument. Quand qu'on parle de polyvalence, de mobilité, c'est quelque chose qui se planifie dans les projets. Ce n'est pas quelque chose qu'on peut faire sur le spot, disons, pendant un chantier. C'est quelque chose qu'on doit discuter avant, qu'on doit organiser aussi. Donc, c'est un peu pour ça, on parle de planification aussi.

Mme Cadet : Merci. Je vais revenir sur la question de polyvalence. Donc, dans votre mémoire, donc, essentiellement, ce que vous nous dites, c'est que la notion de polyvalence est insuffisamment définie. Avec le ministre, donc, vous avez parlé, donc, de certains éléments qui pourraient, donc, nous outiller, à nous, comme législateurs. Mais vous dites aussi que cette lacune-là, selon vous, donc... donc... risque de litige. Vous souhaitez rendre accessible un mécanisme de préapprobation centralisé par la CCQ pour éviter des différends sur les tâches que pourraient réaliser les salariés de la construction en vertu de la nouvelle définition de polyvalence. Dans... Bien, en fait, dans... Je me questionne. Donc, comment ça... comment fonctionnerait un tel mécanisme, selon vous, à ce que la CCQ, donc, créerait les ressources pour mettre en œuvre?

M. Côté (Eric) : Sur cet effet-là, c'est... c'est... Au lieu que l'entrepreneur... En fait, l'entreprise a la possibilité de contacter son association sectorielle qui peut lui donner une interprétation mais qui n'a pas force de loi, alors... et qui a quand même ses limites. Mais la Commission de la construction du Québec, quand elle... elle peut le faire sous forme d'une lettre, de dire que tels travaux, si l'entrepreneur propose une modification... et la CCQ pourrait à ce moment-là approuver ou pas la méthode, ou dire qu'elle n'est pas conforme. Mais s'il y a conflit par la suite sur le chantier, bien, la lettre aura force, au moins, puis donnera un appui à l'entrepreneur de faire les choses comme il faut, au lieu de prendre une chance puis de se retrouver avec un ticket, au moins de faire un mécanisme. Mais ces choses-là... il y a plein de choses qui se discutent. Les conventions collectives prévoient des... des conférences d'assignations. Il y a des choses comme ça. Il y a plein de choses dans les conventions collectives qu'on n'utilise pas. Mais encore une fois, comme entrepreneur général, je pense qu'on peut contribuer justement à cette partie-là. Chaque jour, on parle à des donneurs d'ouvrage sur leur planification des travaux qu'ils... à faire avec la Société québécoise d'infrastructure, avec le ministère de l'Éducation, avec les villes...

M. Côté (Eric) : ...donc on est tous les jours dans ces questions-là, de planification, de séquencement de travaux, alors je pense qu'on peut contribuer. On est déjà là-dedans, de toute façon, ça fait qu'on pourrait justement participer à un forum à cet égard-là.

Mme Cadet : Sur la question des familles des métiers, vous répondez quoi, donc, aux groupes qui nous disent que cette formule là, donc, n'octroie pas la flexibilité nécessaire sur les chantiers puis brime l'innovation?

M. Côté (Eric) : Bien, je pense qu'on est déjà dans un carcan. Juste de le sortir, de déjà annoncer qu'il va y avoir des limites, je ne pense pas... je pense qu'il faut faire graduel. La sagesse du ministre, dans son projet, c'est justement d'y aller... pas d'ouvrir complètement, mais d'ouvrir graduellement. Nous, ce qu'on dit, c'est : Ouvrons juste un peu plus grand pour, justement, permettre quelque chose de plus facilement applicable que d'une journée.

On l'a vécu, pendant la pandémie, il fallait mettre le masque après 15 minutes. On s'est rendu compte, comme entrepreneurs généraux, que ce n'était pas... impossible de compter 15 minutes sur un chantier, un travailleur, on a dit : Mettez le masque tout de suite, puis ne vous contaminez pas. Ça a été un peu contre-courant de toutes les associations, quand on l'a fait, mais savez-vous quoi? Ça a fait une différence puis ça a été appliqué par la Santé publique deux semaines après, puis ça a même été salué par le ministre à cette époque-là.

Mme Cadet : Dans votre mémoire, vous parlez aussi du cumul de compétences par la formation. Donc, je comprends que, pour vous aussi, comme bien des groupes, la formation... donc de rétention. En parlant, donc, du cumul de compétences, je m'interrogeais, donc, sur les propositions qui ont été... bien, en fait, de votre position sur les propositions qui ont été entendues à l'effet que des détenteurs de cartes de compétence occupation puissent être éligibles à la détention des cartes de compétence apprenti sans devoir renoncer à leur carte. Est-ce que vous avez eu une prise de position là-dessus?

• (10 h 20) •

M. Côté (Eric) : Sur la question des occupations, pas spécifiquement, mais, de manière générale, un travailleur qui veut occuper ou avoir d'autres compétences est limité et va retomber comme apprenti. Il faut trouver un mécanisme pour favoriser les gens d'avoir plusieurs compétences. Et c'est beaucoup plus pratique d'avoir des gens avec plusieurs compétences que d'avoir quelqu'un qui a seulement une carte à qui on demande de faire plusieurs choses, selon moi.

Mme Cadet : Vous souhaitez qu'une formation sur le harcèlement soit obligatoire pour les titulaires de cartes de compétences, vous l'avez mentionné. Pour vous, donc, ça devrait être quoi... de vos membres en la matière?

Mme Robitaille (Mélissa) : En fait, nos membres, comme entrepreneurs généraux, ont déjà des obligations de formation. On a les formations qui sont accréditées par la RDQ sur le harcèlement qui est donné par la CEGQ. Donc, on est en mesure de pouvoir former les entrepreneurs généraux. Là où on veut aller plus loin, c'est de former chacun des travailleurs sur le chantier. J'ai la chance de le répéter depuis quatre ans à M. Boulet, la formation en soi, que ce soit en santé et sécurité, que ce soit en savoir être, savoir vivre, sur les chantiers, c'est essentiel. Ça passe par... Plus que les gens vont avoir des connaissances, ça va aider. C'est sûr que ça ne réglera pas tout, mais ça va amener un vent de changement. Puie des formations aussi sur le courage, parce que, souvent, l'intégration des gens sur le chantier, ça prend une ou deux personnes qui se lèvent puis qui disent : Ça suffit, on arrête. Ça devrait être une condition essentielle dans les formations, qui est récurrente d'année en année, pour qu'un vent de changement s'inscrive puis qu'on voie des personnes avec des compétences sur les chantiers, et non plus des hommes, des femmes, des minorités ou autres.

Mme Cadet : Merci. Vous l'avez mentionné, vous avez mentionné l'exemple, donc, des sept corps de métiers pour changer un cadre de porte. Il y a des groupes qui sont en désaccord avec cette affirmation-là, qui nous disent : Non, ce n'est pas tout à fait le cas. Vous leur répondez quoi?

M. Côté (Eric) : C'est un vrai chantier dans une vraie école, ce n'est pas un exemple. Il y avait des sous-traitants aussi. La réalité, c'est qu'il y avait plusieurs sous-traitants. Ça fait qu'un employé d'un sous-traitant ne peut pas aller faire l'autre travail, il y a des contrats qui sont donnés. Ça montre la rigidité de la chose. Ce qui est déplorable, c'est qu'on a été obligé de changer des portes qu'ils avaient déjà installées, qui n'étaient pas de la bonne grandeur. La qualité des plans est là, mais ça, il faut aller à l'origine de ça, mais c'est un vrai cas, c'est vraiment vécu. Et je réitère, j'aimerais beaucoup que l'entrepreneur qui l'a vécu puisse vous l'expliquer, parce qu'il voulait être polyvalent puis il s'est rendu compte que ça n'avait pas de bon sens. Et, en tout cas, si les gens pensent que ce n'est pas vrai, on est... on a donné beaucoup d'information à cet égard-là puis on a détaillé les choses, là, qui sont, en ce moment, confidentielles, mais on peut s'engager auprès de la commission pour vous fournir de l'information qui ne nuira pas à l'entrepreneur, là.

Mme Cadet : Sur la question de la rétroactivité, donc, vous avez évoqué, donc, votre position. Il y a deux éléments. Donc, évidemment, donc, il y a la rétroactivité, en tant que telle, et il y a la question, donc, du fonds. Beaucoup de groupes sont venus nous dire que le fonds de rétroactivité, donc, était d'une grande complexité. Donc, le ministre vous a demandé un peu, donc, quels seraient, donc, les autres mécanismes, mais, à la base, est-ce que vous pensez que de mettre de l'avant, donc, des clauses permettant la négociation de la rétroactivité dans les conventions collectives peut se faire sans la mise sur pied d'un tel fonds? Est-ce que ce sont des dispositions qui sont indissociables l'une de l'autre?

M. Côté (Eric) : Bien, tous les gens qui signent des contrats en... puis qui signent, puis qui veulent respecter le Code civil, l'article...

M. Côté (Eric) : ...2109 qui a dit que, quand vous avez un forfait, c'est ça puis vous ne l'avez pas prévu, on ne peut pas rajouter puis revenir voir le client pour dire : Ah! bien, j'ai oublié de mettre la rétroactivité, je te rajoute une facture. Dans une chaîne de sous-traitance, ça veut dire que tous les sous-traitants rajouteraient la rétroactivité et la donneraient à l'employeur général qui la donnerait à son client. Je ne veux même pas assister à une séance de négociation sur cet élément-là, ça va être assez difficile.

Mme Cadet : Enfin, sur le... on... on sait, donc, l'un des objectifs du projet de loi, donc, c'est d'améliorer la productivité dans le secteur de la construction. De la manière dont le projet de loi est libellé aujourd'hui, est-ce que vous pensez que cet objectif est atteint?

M. Côté (Eric) : Je vous dirais qu'il ouvre des portes sur des éléments qu'on n'avait pas avant. La question de la polyvalence n'était pas abordée. La glace est brisée, on peut... Je pense qu'il y a un lieu de discussion. La question de parler de la rétroactivité même, ça donne une opportunité de chercher des solutions de ce côté-là. La réforme dans l'industrie de la construction date quand même de plusieurs années, elle a pris du temps, puis on a... on finit d'absorber ce qu'on a vécu. Je pense que... Je pense que le... C'est un pas dans la bonne direction. On a des suggestions pour l'améliorer. On va suivre, du côté détaillé... l'analyse détaillée, pour voir si justement nos suggestions peuvent être retenues.

La Présidente (Mme D'Amours) : 20 secondes, Mme la députée.

Mme Cadet : Merci. Puis peut-être ma dernière question, donc, sur l'impact sur les travailleurs. Donc, pour vous, donc, les... vos propositions, donc, quel impact elles auraient sur les travailleurs?

M. Côté (Eric) : Une meilleure planification. J'ai entendu toutes les associations syndicales représentatives le demander, une meilleure planification. Ce que les entrepreneurs généraux se targuent à tous les jours, c'est de faire de la planification. Si on peut travailler en collaboration justement avec les syndicats dans les instances, on va le faire.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. C'est tout le temps que nous avions avec la députée. Maintenant, je cède la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve. La parole est à vous.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous quatre. Content de vous voir ici. D'abord, bravo pour votre appui à la recommandation du... sur la formation obligatoire contre le harcèlement. Je pense que c'est quelque chose d'important, puis votre appui à ce niveau-là pourrait influencer peut-être le ministre à aller dans ce sens-là.

J'aimerais parler un peu de mobilité parce que vous n'êtes pas la première association patronale à réclamer l'abolition totale de la mobilité. Puis j'avoue qu'il y a quelque chose qui me choque un peu là-dedans, dans le sens où je regarde la loi, puis, dans la loi... puis vous me dites si je me suis trompé, on fait référence à la possibilité d'avoir de la mobilité dans les conventions collectives, mais il n'y a pas... il n'y a aucun barème. Il n'y a pas de clause dans la loi sur la mobilité. Les clauses, si je ne me trompe pas, sont dans vos conventions collectives, pas dans toutes d'ailleurs, dans certaines. Parce que vous nous demandez de faire, dans le fond, c'est de venir jouer dans vos conventions collectives que vous avez négociées, que vous avez signées, donc vous étiez d'accord avec le contenu des conventions collectives. Pourquoi nous demander, nous, comme législateur, de venir changer le contenu d'un contrat librement signé entre vous et vos employés?

M. Côté (Eric) : Bien, d'une part, on n'a pas négocié ces conventions collectives là. Nous ne sommes pas pris à partie dans le processus. Ça, c'est la première chose. Donc, nous, on rencontre nos clients, on leur explique des clauses et, comme association, on n'est pas en mesure de dire : Bien, c'est nous qui avons négocié ces éléments-là. Il y a des associations qui existent, et on n'est pas formellement consultés dans ce processus-là. Alors, ça, c'est la première chose qu'on doit établir.

Sur la question de la mobilité, il y a un frein économique d'amener tous ces travailleurs dans une autre région. Je sais que c'est dans les... prévu dans les conventions collectives, mais, à notre avis, pour une praticabilité. Et on pense toujours, là, les chantiers de Montréal à la Côte-Nord. Mais quand on parle d'un chantier de Sherbrooke à Granby ou de Mont-Tremblant à Boucherville, c'est là que... où il y a des bâts qui blessent, où la conciliation travail-famille est peut-être facilement, plus facilement organisée, des choses comme ça. Il y a des déplacements qui sont juste assez importants, qui traversent des régions, et ça, bien, en ce moment, la mobilité l'empêche.

M. Leduc : Vous dites dans votre mémoire... vous donnez l'exemple, là, d'un... d'une compensation pour les travailleurs qui se déplacent, là. Il dit : Par exemple, en 2023, pour tout travailleur qui résidait à plus de 120 kilomètres du chantier, le salarié recevait un montant de 137,50 $ par jour en frais de chambre et de pension. Est-ce que ça, si dans le projet de loi, on avait décidé, nous, comme législateur, de venir modifier ce montant-là à la hausse ou... par exemple, ça vous aurait... fait votre affaire qu'on commence à jouer sur des conditions de travail dans le contenu des conventions collectives?

M. Côté (Eric) : Historiquement, les gouvernements ont tellement légiféré sur les conditions des travailleurs. On est dans un régime où on commence à faire confiance aux parties de négocier des ententes.... Mais sur l'élément de la mobilité, ce n'est pas la même chose d'un secteur à l'autre, et c'est pour ça qu'on souhaitait une mobilité plus facilement applicable. En ce moment, ça veut dire qu'il faudrait qu'on redessine les régions... L'idée d'une pleine mobilité est plus facile que de... les cartes de régions du Québec, là.

M. Leduc : On imagine qu'à la table de négo, si une partie syndicale souhaite appliquer des nouvelles clauses de mobilité ou les renforcer, il va mettre un effort là-dessus puis il va renoncer peut-être à d'autres éléments de négociation qui est sur la table en échange de convaincre sa partie patronale d'accepter des clauses de mobilité. Mais là, si, comme législateur, on vient abolir les clauses de mobilité, je suis pas mal certain que la...

M. Leduc : ...qui avait été mise sur la table, qui avait été retirée, elle ne sera pas mise dans la convention collective, dans le projet de loi. Il y a quelque chose d'injuste là- dedans.

La Présidente (Mme D'Amours) : 15 secondes. 

M. Côté (Eric) : Je vous dirais que c'est la proposition qu'on fait, justement, d'abolir. On tient cette position-là.

M. Leduc : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Je cède maintenant la parole au député de Jean-Talon pour deux minutes, 38 secondes.

M. Paradis : Merci beaucoup pour votre présence et pour votre mémoire. J'aurais deux lignes de questions avec les deux minutes qui vous restera pour répondre. La première chose, ça a attiré mon attention, le modèle allemand, dont vous nous parlez, pour la création d'un front commun de formation puis ensuite la formation obligatoire. Vous dites : Il faudrait travailler là-dessus, mais c'est la partie peut-être un peu la plus courte de votre mémoire. J'aimerais ça que vous nous disiez un petit peu, là, comment vous pensez que ces propositions-là vont faire en sorte que, pour des nouvelles tâches, là, des nouvelles compétences, on aurait un programme de formation initiale ou continue qui permettrait d'en assurer la qualité.

Deuxièmement, comme mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, j'étais un petit peu surpris de lire la phrase : Il n'y a plus de raison valable d'entraver la mobilité provinciale. Et je comprends, là, qu'il y a beaucoup d'arguments en cette faveur-là, mais est-ce que vraiment tous vos entrepreneurs, y compris les plus petits entrepreneurs en région, c'est ça qu'ils vous disent, là, qu'il n'y a vraiment aucune raison de... d'avoir encore une protection régionale sur les travaux? J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Côté (Eric) : Bien, je vais revenir sur la question de la mobilité. Un entrepreneur qui est dans une région, qui veut sortir de sa région, parce que son entreprise grandit puis qu'il veut faire plus de contrats, ne pourra pas amener son équipe à l'extérieur de la région en ce moment. Alors, la région devient, excusez l'expression, mais un endroit où il est confiné, s'il veut sortir, la marge pour sortir de la région est plus difficile. Alors, un entrepreneur qui est dans le sud des Laurentides, bien, s'il veut aller dans une autre région, il est coincé puis il ne pourra pas sortir. Ça, c'est un élément.

• (10 h 30) •

Sur la question de la formation en Allemagne, je vous remercie de la question. Enfin, il y a une formation qui existe en Allemagne où on vient chercher plusieurs compétences, elle est plus langue. Ça va un peu à l'encontre de la tendance des formations rapides, mais je pense que d'avoir des gens qui viennent chercher plusieurs compétences, une espèce de tronc commun, qui vont chercher... ça m'apparaît un choix intéressant. Par contre, pour les travailleurs qui sont déjà en industrie, d'avoir des formations qui sont déjà... qu'on peut financer avec le fonds de formation pour, justement, venir parfaire des compétences ou en ajouter, à mon avis... Moi j'ai toujours l'exemple du carreleur qui a passé 20 ans à genoux, il a peut-être le goût de se lever puis de travailler autrement, puis de faire d'autres choses. Puis ça, bien, il faut lui offrir une opportunité. Puis cette personne-là, elle va vivre un enfer, parce qu'elle va recommencer comme apprentie dans son métier. C'est injuste, ça n'a pas de bon sens. Il faut favoriser l'acquision de plusieurs compétences.

La Présidente (Mme D'Amours) : 20 secondes.

M. Paradis : Est-ce que vous avez plus d'informations sur ce modèle-là, vous-même, vous avez des analyses puis ce que ça a comme impact sur la qualité des travaux? Parce que, si c'est le cas, en tout cas, vous pouvez... n'hésitez pas à le demander.

M. Côté (Eric) : Plus les gens sont formés, plus les... Bien, écoutez, je vais déposer le cas de l'Allemagne, là, c'est une étude de cas qu'on nous a partagée. Puis, sur la question de la formation, je pense que, plus il y a de formation, plus les gens sont compétents, et la qualité, à ce moment-là, est au rendez-vous.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Je vous invite à le déposer au secrétariat. On pourra en faire transférer l'information aux membres de la commission.

Donc, je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.

Je suspends les travaux quelques instants afin de préparer la visioconférence pour nos prochains invités. Merci.

(Suspension de la séance à 10 h 31)


 
 

10 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 10 h 34)

La Présidente (Mme D'Amours) : Nous reprenons nos travaux, et je souhaite maintenant la bienvenue au Conseil du patronat du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre exposé, s'il vous plaît.

M. Blackburn (Karl) : Merci, Mme la Présidente. M. le ministre et Mmes et MM. les députés. D'abord, je suis Karl Blackburn, président et chef de la direction du Conseil du patronat du Québec et je suis accompagné aujourd'hui de Line Laperrière, directrice Relations de travail et santé, sécurité, travail, santé, sécurité et affaires juridiques au Conseil du patronat.

Comme vous le savez, le CPQ regroupe des entreprises et des associations sectorielles oeuvrant dans tous les secteurs d'activité et toutes les régions du Québec et représente directement et indirectement les intérêts de plus de 70 000 employeurs de toutes tailles, tant du secteur privé que parapublic. Le CPQ représente les plus importantes associations du secteur de la construction et plusieurs parties prenantes entourant ce secteur. Nous vous présentons aujourd'hui un consensus patronal qui vise à répondre aux besoins des employeurs confrontés aux défis de productivité sans disposer des outils nécessaires pour les relever.

D'entrée de jeu, je tiens à souligner, avec le manque de 13 000 à 15 000 travailleurs et travailleuses dans le secteur de la construction, par année d'ici 2025, les employeurs font beaucoup d'espoir dans la réforme du secteur de la construction. On doit se donner tous les moyens pour être plus productifs, plus flexibles et plus innovants. C'est très fort, mais la clé pour faire sortir plus de logements de terre en moins de temps, construire rapidement les infrastructures énergétiques dont nous avons grandement besoin, rénover nos écoles dans des temps raisonnables, et j'en passe. Québec n'a pas le droit à l'erreur. On doit réussir à tout prix cette réforme. Le projet de loi, dans sa forme actuelle, manque la cible pour nous permettre de vraiment y arriver.

Dans notre mémoire, nous proposons plusieurs recommandations que je vais vous présenter aujourd'hui même. Tout d'abord, le principe de polyvalence instauré au projet de loi est salué. Toutefois, le CPQ soutient qu'il doit être étendu afin de faire en sorte que les définitions réglementaires n'entravent pas la capacité des employeurs à organiser et à diriger le travail de manière efficace. Selon le CPQ, il est essentiel que les travailleurs puissent accomplir les tâches variées pour assurer la continuité du travail, peu importe leur statut ou leur certificat de compétence. La polyvalence est précieuse pour corriger les déficiences, résoudre les problèmes rapidement et garantir le bon déroulement des projets.

Recommandation 1 : Le CPQ recommande de favoriser un principe de polyvalence des métiers et des titres occupationnels afin de permettre la gestion des affectations dans la façon la plus flexible et souple possible. Le CPQ estime que pour offrir une meilleure application du concept de travaux de structures qu'une définition soit intégrée au projet de loi. Ces travaux, selon le CPQ, doivent avoir un niveau de dangerosité élevé pour les infrastructures, les travailleurs et la population.

La mobilité accrue des travailleurs maintenant. Par la suite, le CPQ salue l'ouverture à la mobilité interrégionale introduite par le projet de loi, ce qui pourrait atténuer la pénurie de main-d'œuvre dans certaines régions du Québec de façon plus durable. Cependant, cette mobilité est réservée aux métiers sans que les occupations puissent en bénéficier. Le CPQ estime que cela aura peu ou pas d'impact sur la productivité des entreprises et l'utilisation optimale de la main-d'œuvre. Les allègrements... les allègements, pardon, prévus au projet de loi permettraient d'atteindre un taux de mobilité de 73 % actuellement. Le CPQ estime qu'une mobilité totale à 100 % est nécessaire afin d'accroître véritablement la productivité des entreprises et l'utilisation optimale de la main-d'œuvre. Par ailleurs, le CPQ estime important de souligner que, tel qu'illustré dans l'étude réalisée par Lab Eco mandaté par l'ACQ, en août 2023 : Il est faux de prétendre que les travailleurs des grands centres urbains vont venir voler les emplois en région. Le lieu de résidence...

M. Blackburn (Karl) : ...résidence ne doit donc plus être un critère de sélection à l'embauche ni une limite aux opportunités d'emploi des travailleurs. Une telle limitation entrave la capacité de gains financiers des travailleurs ainsi que les gains possibles en productivité et en compétence des entreprises, puisqu'elles les confirment à un carcan freinant leur efficience. Par ailleurs, la liberté de travailler est un droit constitutionnel fondamental, et des décisions judiciaires ont confirmé la présence ou la préséance de ce droit sur des clauses limitant le lieu de résidence pour les travailleurs. Un travailleur qualifié et spécialisé doit pouvoir bénéficier personnellement de ses qualités et avoir la possibilité de les mettre au profit de tout le Québec. Le CPQ soutient qu'il faut étendre la mobilité des salariés non seulement aux métiers, mais aux... mais aux occupations aussi.

Au niveau de la rétroactivité salariale, le principe de rétroactivité salariale constitue une entrave substantielle au processus de négociation. Le CPQ est très préoccupé par l'intégration d'un tel principe dans le projet de loi. Il est crucial que les conditions de travail restent négociées équitablement sans qu'un principe de rétroactivité salariale et un fonds dédié ne viennent déséquilibrer le rapport de force déjà fragile dans l'industrie. Introduire une telle taxe sur la masse salariale augmenterait les charges des entrepreneurs et impacterait considérablement les coûts des travaux, en plus d'affecter les cotisations à la CNESST. Le CPQ propose d'abroger le principe de la rétroactivité salariale et l'instauration d'un fonds.

• (10 h 40) •

Au niveau de l'attractivité et le maintien en emploi au niveau de la main-d'oeuvre, nous saluons d'abord les mesures visant à intégrer les personnes issues des groupes sous-représentés dans le secteur de la construction, puisqu'elles permettront, nous l'espérons, d'intégrer des gens déjà qualifiés dans l'industrie, mais encore faut-il les attirer, les former et les garder. Le CPQ aurait souhaité voir davantage de mesures incluses dans le projet de loi à ce sujet. En voici quelques-unes. Le CPQ recommande que, pour rendre l'industrie davantage représentative de la population québécoise, il serait important de mettre en œuvre davantage d'actions portant sur les trois facettes : attraction, intégration et maintien, et qui impliquent, bien évidemment, autant que possible une pluralité d'acteurs : les employeurs, les travailleurs, leurs représentants, bien évidemment, la CCQ et organismes communautaires. Le CPQ est d'avis qu'en investissant dans la formation sur les conditions d'un environnement de travail exempt de discrimination, le bien-être au travail et les conditions de travail en général, les entreprises pourront assurer leur pérennité et leur succès à long terme.

Maintenant, au niveau de la formation de la main-d'œuvre, la formation de la main-d'œuvre joue un rôle crucial dans l'augmentation de la productivité, et son rôle est d'autant plus crucial dans un contexte de polyvalence. Or, le CPQ aurait souhaité que ce sujet soit adressé par le projet de loi. Entre autres, nous sommes d'avis que de nouvelles avenues doivent être considérées, comme le développement de programmes en alternance travail-études permettrait de répondre rapidement aux besoins de l'industrie en termes de disponibilité de la main-d'œuvre qualifiée, favorisant la productivité et la polyvalence. Ainsi, le CPQ recommande qu'une mise à jour des programmes de formation soit faite, que des stages en entreprise soient permis et que des journées d'apprentissage de type laboratoire soient organisées.

Au niveau des infractions de la loi R-20 maintenant, mieux accompagner les entrepreneurs dans l'application de la loi R-20 en offrant un service d'accompagnement bonifié. Par ailleurs, le CPQ recommande de ne pas aller de l'avant avec l'augmentation du montant des amendes, tel que prévu dans le projet de loi.

Au niveau de la formation et de la recherche, du développement et de l'innovation, instaurer une culture de l'innovation au sein de l'industrie de la construction en encourageant la collaboration entre les entreprises, les organismes de recherche et les universités, comme par la mise en place de programmes de soutien financier en recherche et en développement.

En conclusion, Mme la Présidente, j'espère que ces recommandations vous permettront, en tant que législateurs, de prendre les bonnes décisions dans l'intérêt de notre société. Selon le CPQ, il ne faut pas manquer l'occasion d'être ambitieux dans cette réforme de l'industrie de la construction. Après tout, nos grands défis à venir auront grandement besoin d'une industrie de la construction productive, flexible et innovante. En vous remerciant pour votre attention, nous sommes à votre disposition, Mme la Présidente, pour échanger avec les membres de la commission. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci beaucoup pour votre exposé. Maintenant, nous allons...

La Présidente (Mme D'Amours) : ...commencer la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Boulet : Oui. Merci, Mme la Présidente. M. Blackburn, Mme Laperrière, merci pour la qualité de votre mémoire, pour la clarté, M. Blackburn, de votre présentation. Et je résume souvent un mémoire en disant, en ce qui vous concerne, c'est plus de polyvalence, plus de mobilité, pas de rétroactivité, plus d'accès et de la formation. Évidemment, je vais y aller un après l'autre. La polyvalence, c'est sûr qu'il faut être à la quête d'un équilibre, hein, M. Blackburn. Il faut respecter la qualité de la construction, la santé, sécurité des travailleurs et la compatibilité avec les compétences des travailleurs. Puis c'est sûr que la polyvalence, je le répète, c'est un incitatif à une meilleure planification pour les... les entrepreneurs. Plus tu planifies, plus tu vas bénéficier de la polyvalence, mais ce n'est pas un bar ouvert. Ça, je le répète constamment. Ça ne peut pas être un bar ouvert. Il y a cependant beaucoup plus de métiers au Québec que dans les autres provinces du Canada. Il faut s'assurer que la polyvalence soit respectueuse des capacités de l'un et de l'autre.

Puis revenir sur le grand chantier de modernisation, le projet de loi no 51 n'est pas une finalité. Vous le savez, hein, on travaille sur plusieurs chantiers, l'intégration des technologies, la numérisation des entreprises, la formation. Et donc il ne faut pas voir ce projet de loi comme étant le seul élément qui va nous permettre d'avoir plus de main-d'oeuvre et d'améliorer notre productivité. Mais je vous ai bien entendu sur la polyvalence. Vous souhaitez notamment qu'elle bénéficie, notamment, aux détenteurs de certificats compétences occupation. Et est-ce que vous souhaitiez aussi que ça, ça bénéficie aux détenteurs de certificat compétences apprentis? Juste me répondre oui ou non. Vous dites oui, Mme Laperrière. O.K. Donc, la polyvalence à tous les détenteurs de certificats compétences, que ce soit apprentis, compagnons ou occupations.

M. Blackburn (Karl) : Si je peux me permettre, M. le ministre, d'abord, avant de céder la parole à Lyne, parce Lyne détient une expertise qui est extrêmement importante. Mais j'apprécie grandement les propos que vous avez tenus par rapport à la clarté de notre mémoire. Sachez que je dis souvent, ou les gens me disent souvent que je suis subtil comme un deux-par-quatre. Alors, comme vous le voyez bien...

M. Boulet : ...

M. Blackburn (Karl) : ...on souhaite vraiment avoir l'occasion, étant donné qu'on est de la construction, on est aussi bien de s'en servir, mais on veut surtout saisir l'occasion qui nous est offerte aujourd'hui, mais qui est offerte également au gouvernement, de moderniser cet outil qui est extrêmement important pour permettre de relancer l'industrie de la construction. J'en conviens, ce n'est pas le seul élément. Il y a plusieurs autres facteurs qui peuvent être déterminants dans la bonification ou l'amélioration de notre système de construction au Québec, mais il n'en demeure pas moins que, derrière la présentation qu'on vient de vous faire aujourd'hui, les recommandations qui ont été longuement réfléchies et longuement mûries avec l'ensemble des acteurs du secteur de la construction, nous croyons bien humblement que ce qui vous est proposé, ça permet d'atteindre les objectifs que vous poursuiviez, M. le ministre, lorsque vous avez lancé cette volonté de revoir la loi R-20 pour la rendre plus productive, plus attractive et également pour s'assurer qu'on puisse répondre aux besoins de demain. Et dans ce contexte, bien humblement, c'est ce qu'on vous présente aujourd'hui.

M. Boulet : C'est très clair, M. Blackburn. J'irais à la mobilité, parce qu'on a un temps quand même assez limité.

M. Blackburn (Karl) : Oui.

M. Boulet : Mobilité, et je répète aussi qu'il ne faut pas que ce soit un bar ouvert, il y a quand même des entraves, des limites qui varient d'un secteur à l'autre, qui varient d'une convention collective de travail à l'autre. Et je comprends votre élément sur l'importance constitutionnelle du lieu de résidence. Et la mobilité, c'est une faculté, ce n'est pas une obligation, c'est une possibilité qui vise à répondre à des besoins. Puis on me rappelait récemment qu'il y a des entreprises qui sont spécialisées dans certains secteurs de la construction, qui sont dans des régions et qui pourraient, grâce à la mobilité, faire des contrats de construction dans d'autres régions et même dans des milieux urbains. Ça, on ne le dit pas assez souvent, mais je trouvais que votre propos me permettait de le rappeler. Il y a quand même des opposants qui mentionnent que ça pourrait engendrer des répercussions sur l'employabilité et la conciliation travail-famille. En deux mots, qu'est ce que vous répondez à ça?

M. Blackburn (Karl) : Bien, d'abord, vous le savez, M. le ministre, je suis un fervent régionaliste. Et pour moi, le succès du Québec va être dans la vigueur de cette...

M. Blackburn (Karl) : ...régions du Québec. On va se baser sur des faits, sur des données, et je pense que ces données vont rassurer ceux qui peuvent avoir une certaine crainte relativement, justement, à cette mobilité. À titre d'exemple, dans la région de Montréal, 96 % des salariés locaux y travaillent. Ils ont donc peu d'intérêt à aller ailleurs au Québec. Ils ont de la difficulté même à répondre aux besoins des banlieues, imaginez-vous dans la région de Montréal.

On va prendre la région du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie, 77 % des salariés locaux y travaillent et répondent à 90 % des heures travaillées dans leur région. Donc, dans le Bas-Saint-Laurent et Gaspésie, il manque de travailleurs.

Je vais vous donner un autre exemple d'une autre région qu'on entend parler souvent, celle de la Côte-Nord. Sur la Côte-Nord, 90 % des salariés locaux y travaillent et répondent à 44 % des besoins ou des heures travaillées dans la région. Il en manque encore plus dans la région de la Côte-Nord.

Alors cette mobilité, d'abord, permet aux travailleurs de pouvoir gagner sa vie partout où ils le souhaitent. Donc, cette mobilité va permettre justement à chaque travailleur d'aller chercher le travail là où il se trouve. Mais les données qu'on vient de partager démontrent que c'est faux de prétendre que les travailleurs de Montréal vont aller voler les emplois dans les régions du Québec. Basons-nous sur des données sur des faits, et on dit souvent que les faits donc sont têtus, bien, c'est ce qu'on vous présente ce matin.

M. Boulet : Merci, M. Blackburn. L'accès, ça aussi, c'est important. Évidemment, on a besoin d'une main-d'œuvre accrue. Il y a la représentativité des femmes, des groupes issus de la diversité. Il y a un nombre considérablement moindre de personnes immigrantes, de personnes issues des minorités visibles ou des personnes issues des communautés autochtones dans nos chantiers de construction. Vous avez vu les statistiques de l'Institut du Québec récemment. Il faut donc avoir des normes claires de reconnaissance des expériences et des heures de formation à l'extérieur de l'industrie de la construction et à l'extérieur du Québec. Je pense qu'on se rejoint.

• (10 h 50) •

M. Blackburn (Karl) : Oui.

M. Boulet : N'oublions pas, quand vous parlez d'intégration, attraction, maintien ou rétention, qu'il y a la Loi sur les normes du travail, parce que vous avez fait référence à la discrimination.

M. Blackburn (Karl) : Oui.

M. Boulet : Et le projet de loi n° 42 qui va nous permettre de faire des pas en avant. Sachez que, selon Léger, il y avait 79 %, dans le secteur de la construction, qui voyaient, subissaient ou étaient témoins de discrimination, harcèlement qui ne signalaient pas. Là, on vient protéger ces personnes-là.

M. Blackburn (Karl) : Exact.

M. Boulet : Et intégrer une culture de signalement, puis... une culture de protection des liens d'emploi et à l'encontre des formations de représailles.

Formation, M. Blackburn, vous le savez, hein, ça aussi, il y a des chantiers avec le ministère de l'Éducation et la Commission de la construction du Québec pour accroître l'offre de formation en alternance travail-études.

M. Blackburn (Karl) : Oui.

M. Boulet : Moi, j'y crois. Mais je vais juste vous rappeler que, depuis deux ans, on a fait un allègement réglementaire, et allez rencontrer des étudiants, étudiantes dans des centres de formation professionnelle au Québec, et ils peuvent dorénavant aller travailler pendant les périodes de congé, de relâche et pendant les vacances estivales dans les chantiers, et ça, ça donne des résultats phénoménaux. Ça répond à des besoins et ça permet aux jeunes, pendant leurs études, de bénéficier d'une expérience de travail. Et les heures de travail sont transformées en équivalent d'une 1,5 heure. En fait, les heures de formation...

M. Blackburn (Karl) : De formation.

M. Boulet : ...équivalent à 1,5 heure dans le régime d'apprentissage. Donc ça, ça donne des résultats. Mais je vous comprends très bien que la formation, c'est un élément clé, mais ce n'est pas un des leviers qui appartient nécessairement à un projet... à une loi qui concerne les relations de travail.

La machinerie de production, ça serait ma dernière question. Après ça, je laisserais ma collègue d'Iberville intervenir. La machinerie de production, on nous en parle — en fait, c'est une discussion un peu plus récente — que ce soit à ce sujet. Qu'est-ce que vous auriez à me faire comme commentaire, M. Blackburn, sur ce sujet-là?

M. Blackburn (Karl) : D'abord, brièvement, je vais revenir sur la formation, M. le ministre, si nous sommes en mesure de déployer l'outil de formation, comme vous l'avez mentionné, à travers toutes les régions du Québec, et de le déployer de façon large, bien sûr, on va faire une rétention plus grande et on va s'assurer que les jeunes qui sont dans cette formation puissent, dès... dès... dès le départ, savoir s'ils aiment ou non leur métier, et ça, je pense que c'est important de se fier là-dessus.

Par rapport à l'assujettissement des... de la machinerie de production, ce n'est pas dans le projet de loi. Bien évidemment, on y a pensé, on en a parlé, mais comme ce n'était pas...

M. Blackburn (Karl) : ...ce n'était pas dans le projet de loi, on ne l'a pas adressé dans notre mémoire. Mais je voudrais qu'on profite de l'expérience de ma collègue Lyne Laperrière pour vous en parler brièvement, parce qu'elle a l'occasion de travailler avec les membres du CPQ sur cet aspect-là. Et Lyne, si ça te plaît, je te céderais la parole sur ce point-là.

Mme Laperrière (Lyne) : Merci, M. Karl Blackburn. Bien sûr, M. le ministre, pour répondre à votre question, en fait, la machinerie de production, jadis, le CPQ s'était positionné de façon à ne pas rendre assujettis les travaux de machinerie de production autour des années 2011. Or, il semblerait que, dans les dernières années, le temps a fait son œuvre et le marché aurait évolué, faisant en sorte que les conditions ont vraiment fait augmenter de façon considérable les coûts de main-d'oeuvre. Et les conditions, notamment au niveau du placement de main-d'oeuvre, ne sont pas les mêmes que celles qui sont régies de l'industrie de la construction. Or, les associations d'entrepreneurs spécialisés en mécanique industrielle que nous avons eu la chance de côtoyer dans les derniers jours, voire les dernières heures, au même titre que les donneurs d'ouvrage, s'entendent pour dire qu'il y a une problématique.

Cependant, ce n'est pas le projet de loi n° 51 qui est l'opportunité de régler tous les problèmes dans l'industrie de la construction pour la bonne et simple raison que ce n'est pas tout le monde qui est invité à la table des consultations. Or, nous, ce qu'on vous propose, c'est de se donner rendez-vous avec les parties prenantes, incluant les donneurs d'ordre, pour s'entendre et discuter spécifiquement sur ce projet de réglementation là et qui nous permettra, nous l'espérons, pouvoir porter des recommandations qui vont faire l'unanimité de tous les joueurs confondus.

M. Boulet : C'est une très bonne réponse, Lyne Laperrière. Merci. Avec votre assentiment, Mme la Présidente, je laisserais ma collègue d'Iberville intervenir avec le Conseil du patronat du Québec.

La Présidente (Mme D'Amours) : Parfait. Je cède maintenant la parole à la députée d'Iberville.

Mme Bogemans : Merci. J'ai combien de temps?

La Présidente (Mme D'Amours) : Quatre minutes, 40 secondes.

Mme Bogemans : Parfait. On vient juste d'aborder, entre autres, l'alternance travail-études comme étant un moyen de tester l'intérêt, là, des jeunes qui commencent. Puis le groupe, justement avant, on parlait de la polyvalence de la main-d'oeuvre. Comment vous voulez justement l'appliquer aux gens qui sont déjà dans la construction, dans les occupations, entre autres, ou dans même les métiers, qui voudraient avoir plus qu'une corde à leur arc?

M. Blackburn (Karl) : Bien, moi je pense qu'on ne peut pas se priver de l'expertise et de l'expérience de ma collègue Lyne. Alors, Lyne, s'il te plaît. 

Mme Laperrière (Lyne) : Évidemment qu'au niveau de la polyvalence ce que le projet de loi actuellement proposait, c'est une polyvalence étendue par rapport uniquement qu'aux compagnons. Or, les apprentis de métier sont capables de faire des tâches qui ne sont pas uniquement réservées à un titre que compagnon. Nous, on croit que les compétences sont transférables et utilisables au même titre que les occupations. Et là ce qui est important de retenir, ce n'est pas une fusion des métiers qu'on veut, ce n'est pas un bar ouvert, comme le dit si bien le ministre, c'est important de faire confiance aux droits de gestion des employeurs. Ils sont capables d'organiser, diriger les travaux avec le jugement, en considérant, bien sûr, les risques reliés à l'exécution des travaux. On ne va pas confier des risques élevés à des gens qui n'ont pas les compétences au même titre que dans tous les autres secteurs de l'économie.    C'est la seule industrie qui est tellement légiférée, qui nous empêche d'avoir cette flexibilité-là de répondre aux exigences de façon impromptue sur les imprévus, mais surtout en raison de la pénurie de main-d'œuvre, c'est de pouvoir offrir un vaste réservoir de talents, plus vaste que celui qu'il est actuellement. Si on prend juste les apprentis, les occupations, c'est plus de 95 000 travailleurs supplémentaires qui s'ajoutent à ceux des compagnons qui sont autour de 100 000.

Mme Bogemans : Super! Puis dans les mesures un petit peu plus particulières, dans, vraiment, le même ordre d'idées, là, au niveau de la reconnaissance des acquis des nouveaux arrivants, avez-vous des suggestions pour pouvoir les inclure dans votre domaine?

Mme Laperrière (Lyne) : Évidemment... Bien, je m'excuse, Karl...

M. Blackburn (Karl) : Allez-y.

Mme Laperrière (Lyne) : ...je suis allée directement. Au niveau des gens issus de la diversité comme des immigrants, ils ont une expertise vraiment spécifique, ils sont capables d'exécuter, exemple, des travaux de peinture ou de couverture ailleurs dans leur pays. Il s'agit évidemment de faire un règlement qui nous permet justement de les reconnaître et de les intégrer directement dans l'industrie. Évidemment qu'on ne peut pas le faire sans nécessairement valider leurs compétences. Donc, il sera peut-être nécessaire d'ajouter des procédures pour pouvoir les reconnaître, exemple, un examen de qualification, ne serait-ce que pour les intégrer. J'ai vu passer un décret, justement, là-dessus dans les dernières heures.

Mais au niveau des écoles de métiers, ce serait intéressant d'ajouter des nouvelles initiatives pour permettre à ces gens-là d'intégrer des formations spécifiques, mais de pouvoir les mettre tout de suite sur les chantiers pour venir corroborer puis s'infuser, comme on dit, de la réalité des chantiers au Québec, ce qui n'est pas la même que dans leur pays nécessairement. Les mœurs et coutumes, les règles sont complètement différentes.

M. Blackburn (Karl) : Si je peux me permettre d'ajouter, quelle meilleure façon d'intégrer des nouveaux arrivants dans notre société que par...

M. Blackburn (Karl) : ...le travail? Et un bon nombre de ceux-ci veulent contribuer, peuvent contribuer, ont des compétences qui restent simplement à valider dans certains cas et pourraient rapidement contribuer à la prospérité puis à la croissance économique de notre société. Tout le monde serait gagnant. Alors, je pense que ce que Lyne vient de mentionner comme étant certains éléments à considérer par rapport à la façon dont on peut accueillir ces gens sur notre territoire, bien, la meilleure façon de les intégrer, c'est bien sûr via le travail.

Mme Bogemans : Exactement. Puis, en fait, dans le même ordre d'idées — je pense qu'il me reste une seule minute — tantôt, vous disiez la vigueur régionale. Encore... Est-ce que vous voyez, au niveau de la formation ou de l'inclusion des gens de la diversité ou des femmes, au niveau régional, des initiatives qui pourraient faire une différence majeure?

M. Blackburn (Karl) : Bien, bien évidemment. Si on est capable d'avoir cette polyvalence, entre autres au niveau de la mobilité — c'est une chose importante — de trouver par des exemples concrets des mesures qui vont permettre une plus grande intégration des femmes sur le milieu du travail déjà en situation de handicap dans certains cas, des gens des Premières Nations... Les gens des Premières Nations veulent contribuer également à la prospérité du Québec. Alors, on a tous les outils entre les mains pour être capables d'y arriver. Il s'agit de se décloisonner, je dirais, légèrement pour tenir compte de la réalité dans laquelle nous sommes en 2024, le marché du travail et la pression qui est exercée sur le marché du travail, et je pense qu'on se doit d'être ambitieux, et on rejoint la volonté du ministre lorsqu'il mentionnait qu'il voulait être ambitieux pour la réforme dans laquelle on s'inscrit. Bien, je vous invite à demeurer vigilants, à aller jusqu'au bout et de faire de cette réforme de la loi R-20 vraiment un projet ambitieux qui va nous permettre de lever plus d'écoles plus rapidement, qui va nous permettre de rencontrer davantage de construction au niveau énergétique et de relancer l'industrie de la construction.

• (11 heures) •

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. C'est tout le temps que nous avions avec la députée. Maintenant, je cède la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Cadet : Merci. Merci, M. Blackburn, Mme Laperrière, merci d'être avec nous et votre mémoire, effectivement, donc, très clair. Ma première question, donc, concerne votre première proposition, sur la polyvalence des métiers. Deux choses ici, donc, dans... Votre proposition, donc, à la fois, donc, traite donc du droit de gestion de l'employeur... Donc, vous demandez donc... permettre par ailleurs à tous les employeurs d'exercer leur droit de gestion dans l'assignation du travail à accomplir. Mme Laperrière, vous... avez fait référence un peu, donc, en répondant aux questions précédentes. J'aimerais vous entendre plus longuement là-dessus et sur des propositions peut-être concrètes pour nous, comme législateurs, de répondre à cette demande et de voir donc quels seraient les risques aussi de ne pas y répondre. Et la deuxième partie, pour ce qui est donc de la définition, donc, de la polyvalence, dont vous vous intéressez à la question des travaux de structures, vous nous proposez donc une certaine définition. Donc, je veux... je suis curieuse de vous entendre sur ces éléments-là.

M. Blackburn (Karl) : Alors, Lyne.

Mme Laperrière (Lyne) : Merci. Donc, pour répondre à votre question, je vais essayer d'être brève, parce qu'elle est quand même longue et a plusieurs aspects.

Au niveau du droit de gestion des employeurs, les employeurs connaissent quand même leur main-d'œuvre et leur capacité de réaliser des travaux. Si on utilise les talents à bon escient, dans la mesure où ils sont capables de faire les travaux, l'employeur est capable d'assigner des tâches de façon supervisée, de façon contrôlée pour qu'ils soient capables de faire face aux imprévus, surtout, et aux déficiences. Considérant que les temps perdus à répondre à ces enjeux-là, à être obligé de... exemple, d'embaucher un travailleur supplémentaire pour venir compléter un travail qui est d'une durée quand même assez rapide et courte sans compromettre les niveaux de dangerosité, ça permettrait de réduire les coûts et, évidemment, d'être plus efficace et plus efficient dans le travail.

Je prends l'exemple des travaux de structures. Au sens large de ce qui est proposé au projet de loi n° 51, «travaux de structures» serait limité, ne permettrait pas d'appliquer la polyvalence. Or, si je prends l'exemple d'un cimentier applicateur qui se voit confier la tâche de lisser le béton sur un morceau de coffrage de bâtiment, le coffrage étant... pouvant être interprété comme étant des travaux de structures. Or, lisser le béton n'a aucunement de lien de dangerosité, c'est plutôt un travail de finition. C'est pour cette raison-là que nous suggérons de ne pas se limiter à ce qui est prévu dans le projet de loi, de bien définir la portée pour considérer les éléments de risques élevés de travaux au même titre, exemple, que la Régie du bâtiment le fait pour la qualification des entrepreneurs ou encore le Code des travaux de construction, qui stipule les travaux qui ont un niveau de dangerosité plus élevé.

Mme Cadet : Merci, Mme Laferrière. Donc, c'est très clair au niveau des travaux de structures. Pour ce qui est du droit de gestion, là, on a beaucoup entendu des intervenants nous parler de la notion d'équilibre dans le projet de loi. Est-ce que ce que vous mettez de l'avant, donc, nous permet de préserver cette notion d'équilibre, tout de même?

Mme Laperrière (Lyne) : Pour poursuivre en fait dans la même lignée, si je prends l'exemple d'un apprenti maçon, bien, il est certainement capable de faire des tâches, même s'il n'a pas encore les compétences de niveau compagnon. Donc, c'est dans cette optique...


 
 

11 h (version non révisée)

Mme Laperrière (Lyne) : ...là que l'employeur est capable d'assigner des tâches à un niveau d'apprentissage sans nécessairement porter préjudice dans l'exécution ni dans la qualité des travaux.

Mme Cadet : Mais d'ailleurs, donc... donc vous parlez ici, donc, des apprentis. Donc, je reviens sur la question du ministre un peu plus tôt. Donc, vous avez... vous nous avez dit, donc, la polyvalence, donc, c'est confirmé, donc vous voudriez donc l'étendre, donc, aux occupations, aux apprentis. La mobilité aussi? On ne vous a pas entendu là-dessus, la mobilité puis aussi sur le cumul occupation-métier.

Mme Laperrière (Lyne) : ..que je poursuive, Karl?

Mme Cadet : Oui, vous pouvez poursuivre, Mme Laperrière.

M. Blackburn (Karl) : ...oui, vas-y, Lyne.

Mme Laperrière (Lyne) : En fait, c'est qu'au niveau de la mobilité, ce qui est important de connaître, c'est qu'on veut offrir un vaste réservoir de talents, qui est plus élevé que ceux qui seraient disponibles localement. Si on étend la polyvalence à l'ensemble de l'industrie, ça va nous permettre nécessairement de répondre aux besoins ponctuels, de s'adapter aux marchés qui évoluent actuellement, de... d'améliorer évidemment la compétitivité des entreprises, tant au niveau local qu'au niveau national.

Mme Cadet : Merci. Dans votre mémoire, vous...

M. Blackburn (Karl) : Si je peux me...

Mme Cadet : Oui, allez-y, M. Blackburn.

M. Blackburn (Karl) : ...si je peux me permettre, Mme la députée, quand on regarde les objectifs qui sont poursuivis dans le projet de loi, avec que ce qui est mis en place, on augmente à 73 % la... cette mobilité qui est importante. Nous, ce qu'on se dit, dans le contexte actuel, avec les défis énormes qui sont devant nous, faisons le petit pas supplémentaire pour nous rendre à 100 %. Et c'est dans ce contexte qu'on vous a fait ces présentations qui nous permettraient à tout le moins d'atteindre cette mobilité qui est extrêmement importante pour l'économie, pour les employeurs, mais les travailleurs également.

Mme Cadet : Dans votre mémoire, vous indiquez : «Le CPQ regrette l'absence de solutions concrètes d'attractivité, d'intégration et de maintien en emploi.» Je vous ai entendus, donc, sur l'attractivité. Sur le maintien en emploi, quelles mesures vous auriez voulu voir dans le projet de loi, à cet égard, concrètes?

M. Blackburn (Karl) : Lyne.

Mme Laperrière (Lyne) : En fait, on ne s'est jamais vraiment attardés actuellement, dans l'industrie de la construction, pour connaître les raisons qui fait en sorte que les gens quittent l'industrie. Donc, ce qu'on recommande, c'est qu'il y ait une enquête qui soit effectuée pour nous permettre de déceler les lacunes mais surtout de proposer des solutions qui viendraient contrer ces phénomènes-là. On a parlé de la formation, évidemment, on a parlé de la polyvalence. La polyvalence est également un élément important, un attrait pour la nouvelle relève, qui, elle, cherche un travail diversifié. Ils ne veulent pas passer leurs journées à faire une tâche récurrente pour le reste de leur... de leur carrière. Ils veulent qu'ils aient une carrière dans l'industrie, et le développement des compétences fait nécessairement un lien pour développer les talents et surtout la prochaine génération de travailleurs de l'industrie.

M. Blackburn (Karl) : Et, si je peux me permettre d'ajouter un élément qui est essentiel, selon moi, vous, comme législateurs, comme députés de comté par exemple, vous avez eu des cas qui vous ont été présentés. Je suis certain qu'il y a des citoyens qui sont allés vous présenter leur cas, leur situation, des fois catastrophiques, ou tristes, ou malheureuses. Et nous, ce qu'on... ce qu'on pense, c'est que cette étude va permettre justement d'aller chercher exactement le bobo là où il est et de quelle façon on peut remédier à ce bobo. Et, quand Aline fait référence à ce que les jeunes aspirent pouvoir faire dans un contexte d'industrie de la construction, par exemple, où la technologie prend de plus en plus de place, bien, on doit être capables de leur démontrer que ce métier, qui est extrêmement important, va leur permettre de grandir d'abord comme individus, comme travailleurs, mais de grandir dans le secteur de la construction dans lequel ils vont avoir choisi de s'investir. Alors, c'est pour ça que cette étude nous apparaît essentielle pour être capables de voir où on est, doit par pour nous aider à mieux cibler où on veut aller.

Mme Cadet : Merci, M. Blackburn. Puis, effectivement, donc, vous parlez de la formation, donc, j'ai moi-même, donc, déploré qu'on... qu'on ne s'y attardait pas assez dans... dans le projet de loi. Parce qu'il y a un consensus qu'on a entendu, que c'est effectivement, donc, un vecteur de rétention.

M. Blackburn (Karl) : Tout à fait.

Mme Cadet : Au niveau de la planification de la main-d'oeuvre, donc, il y a beaucoup d'intervenants qui sont venus nous dire qu'il fallait aussi, donc, agir en ce sens. Évidemment, c'est un peu complexe, hein? Donc, est-ce que vous avez des recommandations pour nous, comme législateurs, pour nous pencher sur la question cruciale de la planification pour augmenter la productivité dans le secteur?

M. Blackburn (Karl) : Alors, Lyne.

Mme Laperrière (Lyne) : La planification des travaux sous-tend nécessairement la meilleure coordination, de travailler de façon coercitive à l'aide de... des joueurs, des joueurs clés, ne serait-ce que ce soient les ingénieurs, les architectes, que les entrepreneurs puissent travailler en amont avec eux pour être capables de mieux planifier et coordonner les besoins spécifiques, notamment au niveau de la main-d'œuvre, mais également au niveau de tout ce qui comprend la logistique de la main-d'œuvre, le matériel, les équipements, la machinerie, il faudrait nécessairement faire des cohésions par rapport à ça. Si on améliore évidemment la meilleure planification des travaux, on va être en mesure également de mieux planifier les besoins de main-d'œuvre, de reconnaître leurs talents nécessaires pour exécuter les...

Mme Laperrière (Lyne) : ...Bravo! Puis pour ajouter dans les... dans les éléments pour attirer la main-d'oeuvre, bien, c'est là qu'on va être capables de faire la meilleure promotion pour attirer exactement ce dont on a besoin en fonction des grands projets notamment. Puis à cet... à cet égard, la promotion de l'industrie de la construction mérite qu'on s'y attarde, qu'il y ait une cohésion simultanée de tous les acteurs concernés de l'industrie pour finalement rejoindre les gens qu'on veut rejoindre, c'est-à-dire les personnes immigrantes, les personnes issues des communautés autochtones ou des Premières Nations. Donc tous les nouveaux publics cibles que l'industrie veut accueillir, bien, il faut être capables de les rejoindre dans leur culture, dans leur langue également. Donc, il ne faut pas l'oublier.

M. Blackburn (Karl) : Et on sait que dans ces... dans ces groupes spécifiques de gens qui sont un peu plus éloignés du marché du travail, bien, que si on arrivait avec... à mettre en place les bonnes mesures, les bons programmes, les bons outils, bien, on va augmenter le taux de participation de ces gens-là et ainsi probablement être dans la tête de peloton des pays de l'OCDE, ce qui n'est pas le cas actuellement. Alors, c'est pour ça que le secteur de la construction peut générer des... de réelles opportunités pour le Québec, pour nos entreprises, pour les travailleurs. Et la modernisation dans laquelle on se réunit aujourd'hui, bien, ça vise à atteindre ces objectifs. Et je nous invite, moi, à ne pas oser. Je vous invite, vous les législateurs, à ne pas avoir peur d'aller au-delà, des fois, de ce que... qui peut être proposé. Pourquoi? Bien, parce que le marché l'exige. La réalité, aujourd'hui, l'exige. Et le défi auquel nous sommes confrontés exige qu'on prenne des fois des décisions qui peuvent paraître, des fois, courageuses, mais qui m'apparaissent essentielles.

• (11 h 10) •

Mme Cadet : Merci. Dernière question, ici, pour la suggestion que la rétroactivité en raison du temps imparti. Donc, vous nous avez donc bien exposé votre position. Pour vous, est-ce que c'est possible de mettre de l'avant la rétroactivité sans fonds?

M. Blackburn (Karl) : Non.

La Présidente (Mme D'Amours) : En 20 secondes.

M. Blackburn (Karl) : Bien, en fait... Bien, le principe de rétroactivité, comme je l'ai mentionné, c'est comme si c'était une nouvelle taxe sur la masse salariale. Et pour nous, ce n'est pas possible d'aller de l'avant dans une modernisation avec un tel principe, sachant pertinemment que les outils de négociation sont déjà sur la table pour permettre d'avoir une certaine équité dans le pouvoir de négociation, tant des travailleurs que des employeurs.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci infiniment. Je cède maintenant la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve pour 3 min 28 s

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous deux. D'abord, M. Blackburn...

M. Blackburn (Karl) : Bonjour.

M. Leduc : Est-ce que c'est une épinglette de la Franco-Ontarie que je vois à votre boutonnière?

M. Blackburn (Karl) : Tout à fait. Vous avez le sens de l'observation important. Je suis à Toronto ce matin, M. le député, pour parler de francophonie économique...

M. Leduc : Très bien.

M. Blackburn (Karl) : ...dans une province anglophone, et on va faire une allocution tout à l'heure devant 350 gens d'affaires francophones qui veulent faire de notre... de notre unicité, c'est-à-dire de ce qui nous unit, notre langue, un vecteur de croissance économique et de prospérité. Alors, c'est ce que je vais m'assurer de partager comme information. Et je suis accompagné de notre ambassadrice de la Francophonie économique du CPQ, Mme Danièle Henkel.

M. Leduc : Vous les saluerez de notre part. On les aime beaucoup...

M. Blackburn (Karl) : Tout à fait.

M. Leduc : ...les Franco-Ontariens et Franco-Ontariennes. Sur la question de la mobilité, là, vous avez peut-être entendu mon échange avec le groupe précédent, sinon je vous le résume. Moi, je suis un peu surpris de l'approche de plusieurs groupes patronaux et donc du vôtre aussi aujourd'hui, de venir nous demander, à nous les législateurs, de venir modifier le contenu de conventions collectives. D'habitude, au contraire, c'est l'inverse qu'on entend dans les différents projets de loi, où est-ce qu'on se fait reprocher, les législateurs, de vouloir trop modifier les normes du travail, le Code du travail? On nous dit : Non, non, non. Laissez-nous négocier, laissez-nous négocier. C'est souvent la posture même du ministre sur d'autres sujets : Laissez-les négocier, laissez-les négocier. Mais là vous nous dites : Non, non, non. Ces clauses-là que nous avons librement signées, réitérées d'une convention à l'autre, qui ne sont pas d'ailleurs dans toutes les conventions, qui sont dans certaines conventions, vous venez nous demander de les abolir. Vous venez demander, même plus, de venir négocier à votre place. C'est particulier, non?

M. Blackburn (Karl) : Bien, en fait, on doit négocier dans le cadre qui a été instauré il y a déjà plusieurs années, dans un autre contexte, totalement différent de ce qu'il est aujourd'hui. Nous, ce qu'on vous demande aujourd'hui, c'est d'enlever des barrières, d'enlever des mécanismes qui vont freiner la croissance de l'industrie de la construction et ainsi le développement de cette industrie dans l'ensemble des régions du Québec. Si vous enlevez ce principe-là et que vous permettez la libre circulation ou la mobilité telle qu'on la décrit dans le projet de loi, je suis convaincu que l'ensemble de nos entreprises, l'ensemble de nos travailleurs vont sortir gagnants. Et on doit vous demander cela parce que c'est une loi qui nous empêche de le faire. Ce n'est pas trois choses. Alors, on ne vous demande pas de négocier à notre place, mais on vous demande de nous permettre de faire en sorte que cette mobilité soit exclue ou cet empêchement de mobilité soit exclu par la suite pour permettre justement à l'industrie de se doter des meilleures pratiques dignes du XXIᵉ siècle dans lequel on se trouve actuellement.

M. Leduc : ...la loi, elle dit qu'on peut négocier des clauses en mobilité. Elle ne vous impose pas de le faire. C'est vous, après ça...

M. Blackburn (Karl) : Oui.

M. Leduc : ...qui, dans une table de négo, dans un jeu de «give and take», comme on dit, vous acceptez de faire ça. Parce moi, je m'en viens à me poser la question : Coudon, il y a-tu d'autres affaires dans la convention collective qu'on pourrait retirer, qui feraient votre affaire aussi, tu sais, qui tant qu'à être en train de discuter, il y a-tu d'autres éléments comme ça qui pourraient faire votre plaisir, là?

M. Blackburn (Karl) : Je vois Lyne qui sourit et trépigne d'envie de vous répondre. Alors, Lyne.

Mme Laperrière (Lyne) : Oui, effectivement. Pour corriger un peu les informations, quand...

Mme Laperrière (Lyne) : ...a mis à votre connaissance, c'est qu'effectivement il y a des clauses prévues aux conventions collectives en regard de la mobilité pour les occupations, parce qu'elles n'ont pas été incluses dans le règlement sur la mobilité qui concerne les métiers. D'ailleurs, c'est la même chose pour la définition de tâches des occupations. Elle n'est pas incluse à la loi R-20, au niveau de l'annexe A, donc ça a été un oubli. Ça fait que finalement ils l'ont mis dans les conventions collectives, tout simplement, pour ne pas créer de vide. Mais ce qu'on veut, en fait...

M. Leduc : ...

Mme Laperrière (Lyne) : Pardon?

M. Leduc : Ils l'ont mis avec votre accord dans les conventions collectives.

Mme Lapointe (Linda) :  Bien, c'est les parties impliquées aux négos, là...

M. Leduc : Oui, c'est ça.

Mme Laperrière (Lyne) : ...on se comprend, les associations patronales, syndicales. Mais je vous dirais que ce qu'on veut retenir, c'est d'offrir une flexibilité de choix, le choix pour les travailleurs de travailler dans des régions différentes, de ne pas être restreints de travailler de façon unique en fonction de leur lieu de travail... de leur lieu de domicile, pardon. Ils ne peuvent pas non plus aller travailler dans les zones limitrophes, qui étaient peut-être à 20 kilomètres de leur lieu de travail, exemple à Trois-Rivières ou en Mauricie...

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.

Mme Laperrière (Lyne) : ...ce qui leur empêche d'avoir des revenus. La même chose pour les entrepreneurs.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci, Mme Laperrière.

Mme Laperrière (Lyne) : Ils ne peuvent pas continuer de travailler ailleurs.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. C'est tout le temps que nous avions. Maintenant, je cède la parole au député de Jean-Talon pour deux minutes, 38 secondes.

M. Paradis : Merci beaucoup, Mme Laperrière et M. Blackburn pour votre mémoire et votre témoignage. Alors, d'un côté, il y a ce désir de modernisation, d'amélioration du secteur de la construction et, de l'autre, il y a aussi une telle chose que la paix industrielle qui existe dans le secteur de la construction actuellement. Et nous, comme parlementaires, notre devoir, c'est de faire la bonne chose. Vous nous proposez le décloisonnement complet des métiers occupation pour tous les salariés, la mobilité sans restriction dans tout le Québec, pas de limite au pouvoir de gestion des employeurs, pas de rétroactivité salariale, pas d'amende augmentée en cas d'infraction, plus d'investissements destinés aux entreprises. Ma question est vraiment ouverte, parce que j'aimerais ça vous entendre là-dessus. Alors, si on faisait tout ça dans le projet de loi, est-ce que vous pourriez me décrire l'ambiance dans les chantiers de construction du Québec au lendemain de l'adoption de la loi?

M. Blackburn (Karl) : Bien, je vous retournerais peut-être la question, M. le député. Si on fait ça, est-ce que vous êtes certain que ça va être la catastrophe dans l'industrie de la construction et que le climat de travail va être tellement mauvais qu'on va reculer comme société? Moi, je suis convaincu que non. Nous avons atteint cette maturité qui est extrêmement importante au Québec. Et, lorsqu'on regarde le défi devant lequel nous sommes confrontés, pensez-y, là, au dernier trimestre de 2023, 175 000 postes étaient disponibles. Nos écoles, dans certains cas, tombent en ruine. Nos hôpitaux ont besoin d'avoir des investissements importants. L'industrie de la construction, compte tenu de la conjoncture économique actuelle, hausse des taux d'intérêt, spirale inflationniste sur les coûts d'approvisionnement, est à l'arrêt.

Alors, le choix que nous avons, le choix que vous avez comme législateurs, c'est de dire : On ne prend pas de décision parce qu'on pense que ça peut créer des problèmes ou de dire : Faisons-nous confiance. Allons de l'avant avec une modernisation importante parce que le marché du travail l'exige. Et dans 10 ans ou dans 15 ans, si la situation évolue ou change, on verra ce qu'on fera... ce moment-là. Mais il est clair qu'il est impératif aujourd'hui de modifier cette loi pour nous donner tous les outils nécessaires pour y arriver puis gagner, tant pour les employeurs comme pour les travailleurs. Parce que la mobilité de la main-d'œuvre, M. le député, n'oublions pas que ça permet à un travailleur qui a des compétences extraordinaires de pouvoir les partager partout, là où il veut, et monnayer cette compétence.

M. Paradis : Mais vous pensez, M. Blackburn, que la proposition aussi tient compte de beaucoup de considérations sur la sécurité des chantiers, sur la qualité de travaux, sur l'intérêt des régions, sur la formation des travailleurs. Vous pensez que ça en tient compte.

M. Blackburn (Karl) : Tout à fait. Penser le contraire, ce serait nous inculquer de faux motifs. Et ce qu'on vous propose, ce n'est pas par pur... pur... Ce n'est pas de la religion qu'on est en train de prôner. C'est vraiment des démarches importantes qui ont été menées avec l'ensemble des acteurs de la construction. Et nous, on pense que nous sommes mûrs pour faire ces changements-là, qui sont importants et nécessaires pour notre industrie. Lorsqu'on se compare aux autres, je suis en Ontario ce matin, votre collègue l'a... l'a souligné, on le voit bien qu'il y a une différence de productivité importante. Les propositions, qu'on pense, ne viendront pas annuler la paix industrielle, mais elles vont surtout permettre à notre industrie de pouvoir prospérer et grandir.

La Présidente (Mme D'Amours) : Mme Laperrière, M. Blackburn, merci infiniment pour votre contribution à la commission. J'ajourne... je suspends, pardon, les travaux quelques instants afin de recevoir nos prochains invités.

(Suspension de la séance à 11 h 18)

(Reprise à 11 h 22)

La Présidente (Mme D'Amours) : Nous reprenons nos travaux. Et je souhaite maintenant la bienvenue à l'Association des employeurs en mécanique industrielle du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour nous donner votre exposé. Je vous demande de vous présenter et de commencer votre exposé, s'il vous plaît.

M. Thibaudeau (Éric) : Mme la Présidente, M. le ministre, Mme les députés, messieurs les députés, merci de nous recevoir, merci de nous accorder votre précieux temps dans le cadre de cette commission. Tout d'abord, j'aimerais vous présenter les gens qui m'accompagnent, M. Sébastien Larivée, qui est le trésorier de notre association et également président de Ganotec, un fier fleuron québécois qui appartient maintenant à une multinationale américaine, Kiewit. Je suis également, à ma gauche, accompagné de M. Daniel Sirois, président de Mécanique CNC, une autre importante entreprise de construction en mécanique industrielle basée à Boucherville, avec des activités un peu partout à travers le Québec, qui est membre de notre association. Et je suis accompagné de M. Michel Fournier...

M. Thibaudeau (Éric) : ...qui est directeur des relations de travail chez Kiewit et Ganotec, mais on l'a forcé à venir avec nous parce qu'il a aussi un passé de président de la CSD Construction pendant de nombreuses années. On pensait vous offrir l'opportunité d'entendre quelqu'un qui a vu tous les côtés de la médaille, si jamais vous avez des questions. Moi, Éric Thibaudeau, je suis avocat chez BCF, mais je suis aussi le secrétaire corporatif de l'association et j'ai le bonheur de vous entretenir aujourd'hui de la demande que nous présentons à cette commission et au ministre.

L'AEMIQ, c'est quoi? Bien, c'est un regroupement d'employeurs qui font de la mécanique industrielle. Je vois sur vos visages confondus : mécanique industrielle, quid, qu'est-ce? Alors, de la mécanique industrielle, si je lisais la définition dans le règlement, c'est tout ce qui n'est pas de la mécanique de bâtiment. Je ne pense pas que ça vous aide beaucoup, alors je vais vous le définir comme suit : de la mécanique industrielle de production, de la machinerie de production, pensez à n'importe quelle ligne de production, machinerie industrielle qui produit quelque chose. Des exemples : les turbines dans les barrages d'Hydro-Québec produisent de l'électricité. Pensez à... dans le secteur batterie que nous sommes en train de développer avec fierté au Québec, bien, ce qu'il y a entre les quatre murs et le plafond, là, la ligne de production, c'est de la machinerie de production. Pensez à la transformation du minerai dans les usines qui accompagnent les mines dans le Grand Nord du Québec, par exemple, c'est de la machinerie de production. Donc, c'est un secteur, là... si on regarde les chiffres des différents organismes gouvernementaux, CCQ, et tout, là, de 2020 à 2030, on parle d'environ 55 milliards de dollars en travaux dans l'industriel, dans le secteur industriel de la construction.

Le problème pour nous, pour notre association est le suivant, c'est qu'au courant des années 2000, donc de 2000 à 2007, est survenue une succession de décisions rendues par le commissaire de l'industrie de la construction... qui a changé de nom à de multiples reprises depuis, mais un tribunal administratif spécialisé dans la loi R-20 et qui est venu désassujettir de la loi R-20 les travaux de machinerie de production sur... et je lance une opinion gentille que je pourrai expliquer en long, mais sur des... de la terminologie de deux mots, essentiellement, qui ont été interprétés et qui sont venus vider de son sens le règlement d'application de la loi R-20, qui est le règlement pour les élus qui porte sur la machinerie de production et la machinerie de bâtiment.

C'est donc... Vous êtes en train de travailler depuis de nombreux mois, depuis de nombreuses semaines, depuis un an, probablement, et plus, M. le ministre, sur un projet de loi que l'AEMIQ endosse. Nous sommes d'accord avec les recommandations et les avancées de ce projet de loi là sur à peu près tous les sujets. La problématique, pour nous, c'est que, si ce merveilleux train part de la gare, nous, on va rester sur le quai parce qu'on n'est pas assujettis à la loi. Notre association et nos employeurs souhaitent bénéficier des avancées qui sont proposées dans le projet de loi, et, pour ce faire, il doit y avoir une correction, un ajout réglementaire pour faire en sorte que nos membres puissent exécuter ces travaux-là sous l'égide de la loi R-20 à nouveau.

Pourquoi est-ce que l'AEMIQ est pour les mesures mises de l'avant dans le p.l. 51? La polyvalence des métiers, extrêmement important pour nous. Pourquoi? Pénurie de main-d'œuvre, et le secteur industriel est un secteur dans lequel il est difficile... c'est difficile, c'est un secteur qui n'est pas toujours facile à travailler. Ce n'est pas des cloisons sèches dans une maison résidentielle. Donc, d'avoir de la main-d'œuvre qui est en mesure d'exécuter plus de tâches, c'est important pour nous, dans le respect, évidemment, des règles de santé et sécurité et de la qualification requise. L'efficience et la productivité est important et aussi l'accès à la main-d'œuvre, l'accès à une main-d'œuvre variée, plus de femmes, plus de minorités visibles, plus de gens issus des communautés autochtones. Ça, c'est quelque chose qui est important pour notre association.

Donc, on endosse le projet de loi, mais, comme je vous l'ai présenté, Mme la Présidente, M. le ministre, sans votre aide, on n'est pas assujettis à tous ces beaux projets là. Et ça fait surtout quoi? ...bon, bien, vous, c'est bien, l'AEMIQ, mais encore? Bien, ça fait qu'on a pour 30 à 50 milliards de projets industriels de machinerie de production, prévus dans les 10, 15 prochaines années, qui ne seront pas assujettis à toutes les belles avancées que vous êtes en train de mettre sur papier et faire des avancées. Et je m'adresse vraiment à tous les partis politiques, aux législateurs, quand je vous dis cela.

Notre solution est la suivante... Et je le dis d'emblée, M. le ministre, je n'utiliserai pas le mot «réassujettissement», ça fait peur, ça fait peur à des gens, notamment les donneurs d'ouvrage, qui pensent qu'on veut repartir de vieux débats qu'on a entendus dans les années 1990-2000. Nous, ce n'est pas ce qu'on souhaite. Ce qu'on souhaite, c'est de rétablir...

M. Thibaudeau (Éric) : ...la portée initiale, l'intention initiale du législateur en 1970 est de... Puis j'aimerais ça rappeler l'intention du législateur de 1970. Ce n'était pas de faire plaisir au patronat, c'était de protéger les travailleurs de la construction lorsqu'ils exécutaient les travaux de machinerie de production pour leur permettre de demeurer assujettis au régime de la loi R-20, bénéficier des avantages sociaux, du régime de retraite, des vacances qui sont payées par l'OCQ, dans le temps, devenu la CCQ, la commission de la construction depuis. C'est une solution. Vous pourrez le regarder dans le texte réglementaire, dans notre mémoire, qui est simple, on ne fait pas un nouveau règlement, on modifie deux, trois mots. Il y a une définition de salarié de la construction, on ne l'a pas inventée, on l'a copié collée de la loi. C'est aussi simple que ça.

Et c'est une solution qui est rassembleuse, respectueuse des droits de tous. Les donneurs d'ouvrage vont pouvoir continuer à opter pour faire du... construction avec nous, des travailleurs de la CCQ, nous qui utilisons une main-d'œuvre exclusivement détentrice de certificats de compétence ou faire affaire avec des entreprises, comme mentionnait Mme Laperrière du Conseil du patronat, qui utilisent une main-d'œuvre hors construction, qui n'est pas détentrice de certificat, puis qui a d'autres types de qualité, je présume. Ce n'est pas eux que je représente, mais c'est un projet qui est respectueux de ces entreprises, de celles que nous représentons, des travailleurs également. Il ne faut pas oublier... j'ai écouté avec grande attention une question du député de Québec solidaire, un petit peu plus tôt, et nous sommes la seule industrie de la construction en Amérique du Nord où la syndicalisation est obligatoire. Alors, il n'est pas question pour moi d'enlever des droits à des travailleurs syndiqués dans les entreprises que nous représentons, notre association, pour les lancer dans le vide. Non, ils sont déjà syndiqués avec les syndicats de la construction, et ça, c'est important de le mentionner.

• (11 h 30) •

Je ne pensais jamais que je dirais ça un jour à une commission parlementaire, mais j'y vais. Je vais traduire en français ce qui suit : Si ça ressemble à un canard, si ça nage comme un canard et si ça cacane comme un canard, c'est un canard. Nous sommes des entreprises de construction. Nous exécutons également des travaux régis par la loi R-20, donc pas exclusivement de la machinerie de production. On fait aussi des heures qui sont assujetties à l'industrie. Nous utilisons une main-d'œuvre des salariés détenteurs de certificats de compétence, et ce, exclusivement. On n'en a pas d'autres que ceux-là. On contribue au régime d'avantages sociaux, on contribue aux régimes de retraite, on verse les vacances à la CCQ qui les redonne aux travailleurs. Et c'est souvent le fait qu'on applique les conditions R-20, une exigence des donneurs d'ouvrage. Mais tout ça, on le fait sur une base volontaire et il y a des problématiques qui viennent avec ça, notamment celles découlant de l'application de la loi sur les normes et du Code du travail qui, je le rappelle, aux députés, on a décidé, pas ici, ici, mais ici, en 1937, que ces deux lois-là n'étaient pas appropriées à l'industrie de la construction. Puis on a envoyé le régime de relation de travail vers la Loi sur les décrets de conventions collectives et, dans les années 60, décidé de faire notre propre loi sur les relations de travail de la construction, la loi R-20. Donc, nous sommes des entrepreneurs en construction, nous utilisons une main-d'œuvre construction. Nous demandons qu'un amendement soit fait au projet de loi afin que nous puissions bénéficier des belles avancées qui sont mises de l'avant dans le projet de loi n° 51. C'est tout.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci beaucoup. Nous allons procéder à la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Boulet : Oui. Merci. Me Thibaudeau, merci à votre équipe. C'est un très bon mémoire. La présentation, elle est aussi limpide. Puis je pense que ça va bénéficier à l'ensemble des parlementaires. Il y a des éléments de pédagogie, là, vous nous ramenez à des étapes charnières, 1937, 1968, vous dites 1970, là, mais à cette période-là, et les interprétations des tribunaux, là. Tu sais, vous référez à des décisions au début des années 2000, notamment... et autres. Je pense qu'on connait la dynamique. J'ai des questions précises, mais avant je veux que ce soit clair, là, quand vous dites : La machinerie de production, vous utilisez l'exemple d'une turbine. Et vous référez plus spécifiquement à l'installation...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

M. Boulet : ...à l'installation, l'entretien et la réparation. Je reviens au projet de loi. Dans les métiers qui concernent la mécanique industrielle, pouvez-vous nous donner, peut-être qu'il est dans le mémoire, mais un exemple spécifique de la valeur ajoutée de la polyvalence que nous avons dans le p. l. 51?

M. Thibaudeau (Éric) : Oui. Je réfléchis à un exemple concret et précis. Dans le domaine industriel environ, là, ça varie d'employeur à employeur, mais ce qu'on appelle les métiers mécaniques représentent, à peu près, là, 85 % des heures sur un chantier. Ces métiers mécaniques là, c'est quoi? Des tuyauteurs, des chaudronniers, des mécaniciens de chantier et des chaudronniers. Alors, ce sont les quatre... Il y a d'autres métiers, mais c'est eux qui sont là en prédominance. Ce sont des métiers qui ont leurs spécialités et qui ont vraiment des travaux différents l'un de l'autre, mais qui ont aussi des intersections quand même importantes. Par exemple, au niveau de certains travaux de soudure, de certains travaux de tuyauterie, puis là je ne veux pas... on pourrait remplir la salle, M. le ministre, cette jurisprudence qui vient couper au couteau, qui appartient à quel métier. Mais cette polyvalence-là, dans le projet de loi qui permettrait clairement un... permettez-moi l'anglicisme, un «overlap», une intersection commune sur certaines tâches de ces métiers-là, pourrait certainement être bénéfique aux entreprises qui oeuvrent dans notre secteur.

M. Boulet : Sans affecter la qualité, sans être incompatible avec les compétences des travailleurs, travailleuses et évidemment avec une incidence qui est favorable sur les délais et les coûts. Je pense que c'est ce qui est fondamentalement visé. Est-ce que... Si je vous demandais un exemple de mobilité, la mobilité, évidemment, ça non plus, ce n'est pas un bar ouvert. Est-ce que la mobilité c'est un atout, en tenant compte de ce qui est dans le projet de loi n° 51, pour votre secteur, en fait plus spécifique de mécanique industrielle?

M. Thibaudeau (Éric) : En fait, je pense que ça pourrait répondre à des appréhensions que plusieurs acteurs de l'industrie sont venus vous expliquer, puisque, dans notre convention collective, il n'y a pas de concept de mobilité de main-d'œuvre. C'est certain, c'est l'employeur qui s'adresse aux syndicats qui lui réfèrent la main-d'œuvre. Je ne connais pas les critères internes qui sont utilisés. Mais dans la convention comme telle, il n'y a pas de critère de mobilité. On ne dit pas : Bien, il faut travailler par région, etc.

Je peux également affirmer que ça fait l'objet de discussions collaboratives, je tiens à le souligner, régulières entre les employeurs et le syndicat, de trouver des travailleurs qui ne résident pas trop loin. Vous avez entendu un intervenant, je pense que c'était la Corporation des entrepreneurs généraux ce matin qui disait : Écoutez, les frais de chambres et pensions sont un frein eux-mêmes à avoir un certain nombre X et Y de travailleurs en région, parce qu'évidemment il y a un coût important, là, qui vient avec. Selon les secteurs, on parle entre 137 $ et 159 $ de frais de chambre et pension, par jour, pour un travailleur qui est à plus de 120 kilomètres de chez lui. Donc, je pense que le réglementaire sur la mobilité de main-d'oeuvre était important à une certaine époque où les travailleurs c'était 600, 700 heures par année. On a vu ça il n'y a pas si longtemps que ça. Maintenant, on est au plein emploi puis on... on peine à trouver des travailleurs. En tout cas, nous dans notre convention-cadre, là, type, chez chacun des employeurs, on n'a pas cette règle-là de mobilité, puis ça n'a pas, à ma connaissance, à tout le moins, et on me corrigera, les gens qui sont avec moi,  si je me trompe, ça n'a pas créé aucun chaos.

M. Boulet : Bien, vous le dites bien, on est dans un contexte de pénurie de main-d'œuvre qu'on anticipe d'ailleurs pendant des années, tenant compte des projets. Puis vous allez être impliqués, bien sûr, dans des projets industriels un peu partout au Québec, dans les filières stratégiques de développement social et économique, et pour répondre à des besoins dans tous les secteurs d'activité humaine. Rappelez-moi, dans le nombre d'heures de travail que ça peut représenter, sur une année, fait par les membres de votre association.

M. Thibaudeau (Éric) : Alors, ça varie beaucoup d'une année à l'autre.

M. Boulet : Oui.

M. Thibaudeau (Éric) : Les projets étant importants, on comprend qu'un bon contrat avec de nombreux travailleurs fait exploser le nombre d'heures exécutées d'une année à l'autre. Là, mais bon an mal an, sur les trois dernières années, nos membres employeurs ont exécuté environ entre 3 et 4 millions d'heures travaillées déclarées sur une base volontaire, à la CCQ, et ça...

M. Thibaudeau (Éric) : ...CCQ, et ça représente, si on se fie... et là on fait du croisement de données, si on se fie aux données de la CCQ et aux données de l'Association de la construction du Québec, qui est l'association qui est chargée de négocier les... et appliquer avec la partie syndicale les conditions de travail du secteur industriel, là, ça représenterait nos membres environ entre 30 % et 40 % des heures travaillées dans le secteur. Mais c'est pour ça, comme je vous dis, je suis prudent sur les chiffres parce que ça varie beaucoup, là, d'année en année, mais on... entre 30 % et 40 %.

M. Boulet : Quand vous référez au secteur de la construction, où il y a effectivement une adhésion syndicale obligatoire, comme vous n'êtes pas assujettis, ce que vous devez expliquer, pour le bénéfice des parlementaires : Pourquoi? Est-ce que ce n'est qu'en raison des exigences des donneurs d'ouvrage que vous contribuez, que vous... les heures, que vous vous assurez que les travailleurs bénéficient des avantages sociaux du régime de retraite? Comment ça marche au plan pratique? Parce que le fait de ne pas être assujetti peut ouvrir la porte à ce que des travailleurs ne soient pas nécessairement membres de syndicats. Mais ce que vous expliquez, c'est qu'ils sont tous membres de syndicats. J'aimerais ça que vous nous expliquiez le pourquoi du comment.

• (11 h 40) •

M. Thibaudeau (Éric) : Je vais tenter de faire ça simplement, étant donné le temps qui nous est alloué. Suite aux décisions qui ont été rendues dans les années 2000, ça l'a créé, sur les chantiers, pas trop de changement immédiat, mais ça l'a créé un vide juridique, c'est-à-dire qu'on avait des associations représentatives syndicales de la construction qui avaient une main-d'œuvre compétente en nombre important, notamment au conseil provincial des métiers de la construction, qui sont très représentatifs dans les milieux de la mécanique industrielle... Et donc il y avait une main-d'œuvre qualifiée. Nos membres ont continué à faire affaire avec ces syndicats-là, mais leur existence était sous l'existence de la loi R-20, n'est-ce pas, donc ça a amené à la création d'un... notamment, pour ce qui est de nos membres, d'un syndicat Code du travail, un syndicat boutique, si je peux l'appeler ainsi, dans les termes juridiques de droit du travail, qui est appelé l'Association des métiers mécaniques du Québec. Et cette association-là, en 2019-2020, a entrepris une tournée de syndicalisation chez l'ensemble des employeurs qui constituent notre association. C'est avec eux qu'on s'assoit, qu'on négocie les conditions de travail. Donc, ça, c'est l'historique d'où vient notre convention collective et avec quel syndicat on fait affaire. Il n'y en a qu'un seul et c'est l'AMMQ.

M. Boulet : O.K., je comprends. Et donc, quand on a discuté ici, au parlement, de l'établissement d'un service de référence pour remplacer l'époque où il y avait ce qu'on appelait le placement syndical, est-ce que... Qui fait le référencement de la main-d'oeuvre qui est requise ou pour répondre aux besoins de vos entrepreneurs?

M. Thibaudeau (Éric) : Comme c'est un document public, je vais vous... je vais vous donner la réponse brève, mais je vous invite à consulter la... une des conventions collectives, c'est public sur Corail, du ministère du Travail. Mais essentiellement c'est un mécanisme par lequel l'employeur, lorsqu'il a des besoins de main-d'œuvre, va communiquer avec le syndicat en lui disant : Bien, voici, j'ai besoin de tant de travailleurs, de tant de métiers, de telle expérience ou telle spécialité. Et c'est le syndicat qui va se charger de trouver les travailleurs, les salariés et de les envoyer à l'employeur.

M. Boulet : D'accord. Vous soumettez un mémoire qui met l'accent sur les avantages de ce que vous recommandez, c'est-à-dire, même si vous n'aimez pas ce mot-là, assujettir. Est-ce que vous êtes capable de vous exprimer sur les inconvénients de faire ce que vous nous proposez de faire?

M. Thibaudeau (Éric) : C'est peut-être un petit peu prétentieux de vous dire ça, M. le ministre, mais je n'en vois pas vraiment. Et je m'explique. Les donneurs d'ouvrage, les grandes entreprises que l'on sollicite au niveau provincial, national et international ont besoin d'une certaine certitude dans l'exécution de leur projet. Qu'il y ait un...

M. Thibaudeau (Éric) : ...de relations de travail qui s'applique puis qui est prévisible, notamment au niveau des dates de grève, par exemple, c'est important pour eux. Quand un donneur d'ouvrage, j'en ai dans mes clients qui ne sont pas membres de l'association, planifie un projet, bien, de savoir qu'il y a une expiration de date de convention collective en mai 2025 dans la construction, il y a un calcul de risque qui est fait dans l'exécution du projet. Mais là la situation, avec deux régimes parallèles, est la suivante, c'est que vous avez un risque de grève en mais 2025, vous avez un risque de grève à l'expiration de nos conventions collectives, en décembre 2025, vous avez... et là c'est pour ceux qu'on a comme signataires de conventions collectives, d'autres entreprises pourraient avoir d'autres échéances. Donc, ça crée une incertitude. Ça, c'est pour les donneurs d'ouvrage, un régime plus attrayant, on sait à quoi s'en tenir.

Pour les entrepreneurs que nous sommes, ça permet également d'exécuter les travaux en étant synchronisés. Mes clients ne sont pas les seuls, sur un chantier de construction, il y a les entrepreneurs qui font la bâtisse, qui font les murs, qui font les travaux assujettis. Puia, si on n'a pas les mêmes conditions de travail aux mêmes dates, qui finissent au même moment, et les mêmes augmentations, ça crée des problèmes.

Pour ce qui est des travailleurs, je n'y vois pas d'inconvénient. Je m'explique. Les travailleurs membres de l'AMMQ avec qui nous faisons affaire sont tous détenteurs d'une carte de compétence CCQ, exclusivement, c'est tout ce qu'on utilise comme main-d'œuvre. Donc, si les travaux que nous vous demandons d'assujettir à la loi R-20 le sont, ces salariés-là vont continuer à être représentés par les syndicats, notamment le conseil provincial, comme je vous le mentionnais.

M. Boulet : Donc, selon vos prétentions, c'est bonnet blanc, blanc bonnet, ou c'est du pareil au même, assujetti, non assujetti?

M. Thibaudeau (Éric) : En fait, là où il y a... ça crée une problématique, le non-assujetti, c'est l'incertitude pour les donneurs d'ouvrage.

M. Boulet : Je comprends.

M. Thibaudeau (Éric) : C'est l'incertitude... en fait, l'incertitude des donneurs d'ouvrage est la même pour les travailleurs. Donc, vous vous imaginez un salarié qui doit faire, potentiellement, des négociations ou la grève en mai 2025, pour quand il fait des travaux assujettis, puis, six mois plus tard, quand il va négocier avec un des employeurs ici, pourrait se retrouver en grève une deuxième fois dans la même année. Donc, il y a ça.

Et, également, dans les désavantages pour nous, comme employeurs, et je fais attention aux termes que j'utilise, mais... parce qu'on comprend comment la mécanique du Code du travail fonctionne, et c'est pour ça que je parlais de 1937 et de se rappeler d'où on vient, notre histoire, il y a un déséquilibre au niveau de la négociation de la convention collective, en ce que c'est important d'avoir des conditions de travail qui sont relativement uniformes, mais, nous, on représente juste 30 % de l'industrie, là.

M. Boulet : Vous avez utilisé le mot «syndicat de boutique», mais ce n'est pas véritablement des syndicats de boutique, dans la mesure où ils sont détenteurs d'une accréditation syndicale en vertu du Code du travail. Donc, il y a les périodes ouvertes puis il y a les périodes où on peut exercer un droit de grève ou de lock-out, le cas échéant. O.K., je comprends bien.

Et donc, si je vous demande de vous mettre dans les bottines d'un donneur d'ouvrage, vous référez à la stabilité, la possibilité de ne pas être exposé deux fois à des risques de conflits de travail, comme étant des avantages que les grands donneurs d'ouvrage pourraient mettre de l'avant pour appuyer votre recommandation. Donc, est-ce que ce serait faux de prétendre que ce que vous nous recommandez fait... à peu près, parce qu'il n'y a jamais d'unanimité, dans le monde des relations de travail, en tout cas, je ne l'ai jamais vu ou aperçu, mais il y aurait un fort consensus des acteurs patronaux et syndicaux derrière la recommandation que vous nous soumettez?

M. Thibaudeau (Éric) : Effectivement, je me permets de dire ce qui suit : Dans l'industrie de la construction, du côté syndical, vous avez entendu, lu les mémoires de la FTQ-Construction, qui demande un assujettissement plus large, plus contraignant que le nôtre, peut-être moins bienvenu de la part des donneurs d'ouvrage, mais qui recommande de réassujettir certains travaux. Le Syndicat québécois de la construction fait de même dans son mémoire. Si vous consultez ou posez des questions à la CSD et à la CSN, ils vont vous dire qu'ils sont d'accord avec notre proposition, et j'ai compris, en écoutant attentivement la commission parlementaire mardi dernier, que vous avez posé la question vous-même au Conseil provincial des métiers de la...

M. Thibaudeau (Éric) : ...construction, qui vous a répondu positivement en faveur d'un assujettissement, donc du côté syndical construction. Du côté patronal construction, l'ACRGTQ l'a écrit dans son mémoire, l'ACQ appuie notre position. La CEGQ, que vous avez entendue ce matin, également, est du côté des donneurs d'ouvrage. Nous, ceux qu'on consulte... On a discuté avec le Conseil du patronat. Vous avez entendu leur réponse, contrairement à historiquement, où ils s'objectaient, là, ils vous disent : consultons, il y a du bon là-dedans, nous sommes rendus ailleurs.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Merci, c'est tout le temps que nous avions.

M. Thibaudeau (Éric) : Merci, Mme la Présidente.

M. Boulet : Merci à toute votre équipe, maître.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je cède maintenant la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Cadet : Merci, Mme la Présidente. Merci, Me Thibaudeau, et à vous tous, donc, d'être présents aujourd'hui.

Donc, Me Thibaudeau, je vous entendais, donc, vous disiez... vous nous avez expliqué que vos membres, donc, contribuent aux régimes d'avantages sociaux, emploient exclusivement des salariés de la construction qui sont détenteurs de certificats de compétence émis par la CCQ, ils déclarent des heures travaillées à la CCQ mais les travaux qu'ils réalisent ne sont pas assujettis à la R-20. Vous nous avez dit, donc, que les heures qui sont exécutées par vos membres pour les travaux d'installation, réparation, entretien, de machinerie de production représentent... je pense que vous avez... vous avez dit un peu plus tôt de 30 % à 40 % des heures de l'industrie. Donc, ça voudrait dire que vous n'êtes pas... donc, vos membres, donc, ne sont pas les seuls dans le secteur industriel dans la situation, là, que je viens de décrire, que vous avez décrite, précédemment. Est-ce que vous pouvez confirmer que votre proposition de modification réglementaire, quand... quand on la lit dans le mémoire, elle ne... elle ne toucherait pas que vos membres, mais l'ensemble des employeurs dans cette situation-là?

• (11 h 50) •

M. Thibaudeau (Éric) : Il y a effectivement un... une balance, si je peux l'appeler ainsi, importante d'employeurs de 60 % à 70 % des heures qui sont presque dans la même situation que nous, c'est-à-dire qu'ils continuent à utiliser une main-d'œuvre exclusivement détentrice de certificats de compétence et occupation de la CCQ, qui continuent à contribuer aux régimes sur une base volontaire, qui trouvent leur main-d'œuvre auprès des syndicats de l'industrie de la construction. La différence, c'est qu'eux, au moment où on se parle, à tout le moins, à ma connaissance, à part les membres de notre association, eux n'ont pas fait l'objet d'une campagne de syndicalisation de la part d'un syndicat.

Mme Cadet : Donc, dans...

M. Thibaudeau (Éric) : Donc, ils sont dans une zone... Si vous me permettez, je m'excuse de vous interrompre. Ils sont dans une zone de flottement. On fait comme si on était la CCQ, on ne l'est pas, comme si on était assujettis. On continue à faire comme tel, mais juridiquement parlant, ils sont dans... elles sont, ces entreprises-là, dans un vide.

Mme Cadet : Mais puisque votre proposition les toucherait tout de même, donc ces employeurs-là, donc, ils pensent quoi de la demande? On a parlé du fort consensus donneurs d'ouvrage-syndicats, donc associations patronales, mais les autres employeurs qui sont touchés, là... qui seraient touchés par votre proposition de modification réglementaire, ils en pensent quoi?

M. Thibaudeau (Éric) : Comme ces entreprises-là sont membres de l'Association de la construction du Québec et que l'ACQ appuie notre demande, je prends pour acquis qu'ils seraient pour notre demande. La problématique, c'est que ces entreprises-là ne sont membres d'aucune association de travaux non assujettis, comme celle que nous, on s'est créée. Donc, je ne fais que présumer.

Mme Cadet : Vous avez dit plus tôt que l'intention du législateur, en... bon, en 1979-1978, était de protéger le travailleur avec l'assujettissement initial, là. Vous avez parlé, donc, de la... dans la réglementation, de l'alinéa quatre, là, vous en faites référence dans votre mémoire, donc, concrètement, aujourd'hui, votre demande, elle va changer quoi pour le travailleur?

M. Thibaudeau (Éric) : Au lieu d'être... La seule différence, en ce qui nous concerne, c'est qu'au lieu d'être membres de l'AMMQ, qui est un syndicat qui a été... dont les dirigeants sont également des dirigeants de locaux syndicaux, la... de l'international, excusez-moi, le Conseil provincial des métiers de la construction, au lieu d'être membres de l'AMMQ, ils vont être membres soit du Conseil provincial dans la construction ou un des quatre autres syndicats de la construction auxquels ils ont droit de choisir à chaque période de maraudage, aux quatre ans.

Mme Cadet : Vous l'avez mentionné, donc, la R-20 ne s'applique pas, vous avez votre propre convention collective. Puis vous l'avez évoqué un peu, donc, dans votre échange avec le ministre, justement, donc, du libellé, donc, de conventions collectives, donc, qui est public. Je vous amène donc à la page... à la page 12, à la section 6.1, sur la référence de salarié. On dit : «Lorsque des salariés sont requis, l'employeur procédera comme suit : l'employeur communiquera avec le syndicat chaque fois que des salariés seront requis et motivera clairement sa demande de main-d'oeuvre.» Et à l'alinéa e, «en aucun cas l'employeur ne peut passer outre au bureau de placement du syndicat.» Je veux m'assurer d'avoir bien compris. Ici, donc... n'ont pas la liberté dans le choix de la main-d'oeuvre?

M. Thibaudeau (Éric) : Vous m'excuserez, je ne m'attendais pas à ces questions-là. Je suis en train de récupérer une copie de la convention collective et de me rendre à l'article...

M. Thibaudeau (Éric) : ...écoutez, ce sont... ce sont vos mots, madame la députée, mais effectivement le processus est très clair à 6.1. Je me permets d'en lire un petit bout: «Un employeur communiquera avec le syndicat chaque fois que des salariés seront requis et motivera clairement sa demande de main-d'œuvre en indiquant», et là,  «nature des travaux, expertise recherchée», donc qu'est-ce qu'on peut mettre comme information. Et c'est écrit, à b: «En fonction des critères formulés par un employeur, le responsable du syndicat s'efforcera, au meilleur de ses connaissances, de fournir des salariés correspondant au profil recherché. L'employeur peut soumettre au syndicat le nom de personnes non membres pour fins de référencement éventuel ou d'embauche immédiate en cas de pénurie, sous réserve d'une évaluation positive, tant par l'employeur que le syndicat, des compétences et qualifications.» Et, à e, bien, on indique qu'«en aucun cas l'employeur ne peut passer outre au bureau de placement du syndicat».

Donc, l'employeur formule la demande, le syndicat trouve la main-d'œuvre. Et comme le dit e, je ne peux pas décider d'aller vous embaucher, Mme la ministre, je ne suis pas sûre que ça vous intéresserait, mais je ne peux pas aller décider de vous embaucher sans avoir l'aval du syndicat, effectivement.

Mme Cadet : Donc, vous devez exclusivement passer par le syndicat pour le référencement de la main-d'œuvre.

M. Thibaudeau (Éric) : Oui.

Mme Cadet : Donc, vous confirmez que le mécanisme qui est prévu au chapitre 9.1 de la loi R-20, il n'est pas répliqué dans vos conventions.

M. Thibaudeau (Éric) : 9.1 étant le placement... Bien, effectivement, on n'est pas assujetti à la loi R-20, donc le placement syndical n'est pas interdit.

Mme Cadet : Merci. Dans votre mémoire, vous indiquez aussi qu'«opérer à l'extérieur du cadre R-20, ça ne permet pas aux entreprises de demeurer concurrentielles, productives et efficaces». Vous énumérez des exemples de notions qui sont issues du cadre normatif du Code du travail, de la Loi sur les normes du travail de la LATMP, qui n'ont pas cours dans l'industrie, mais qui s'appliquent à vos membres, bien évidemment. Est-ce que vous avez des exemples tirés, cette fois-ci, du cadre de négociation des conventions qui viendraient affecter vos coûts de production?

M. Thibaudeau (Éric) : Oui. Si vous me permettez, je veux juste reculer sur les exigences, parce que, moi, je pense, c'est important. Le fondement même de ce qu'on vous demande, c'est de réaliser que le Code du travail, la Loi sur les normes ne sont pas adaptés aux réalités de notre industrie, pour toutes sortes de raisons, on en énumère dans notre mémoire. Et on apprécierait vraiment si les gens qui participent à la commission prenaient le temps de lire ces inconvénients-là, parce que vous allez voir que ce sont des exigences de la loi qui sont difficilement compatibles avec des travaux de construction. Et je vous donne un exemple bien simple. Dans la construction, on peut sous-traiter, il n'y a aucune... aucun empêchement de sous-traiter. Pourquoi? Bien, parce que tout le monde a les mêmes conditions de travail, c'est la même convention collective qui s'applique, provincialement parlant.

Donc, que ce soit A ou B qui fasse les travaux, c'est les mêmes conditions de travail. Donc, on y va vraiment par spécialité d'entreprise puis on s'adresse à la meilleure entreprise pour faire les meilleurs travaux possible avec l'efficience et productivité. Alors que, dans le Code du travail, il est interdit, vous le savez, quand une main-d'œuvre est visée par un certificat d'accréditation, de sous-traiter, à moins que la convention collective le permette. Vous avez copie la convention collective, de toute évidence, vous irez voir à la fin, il y a une annexe. C'est compliqué de prévoir les noms d'entreprises, il y en a tellement. Ça limite la flexibilité, à ce niveau-là, de l'exécution des travaux. Je m'excuse. C'est important pour moi de donner ces exemples-là parce que le syndicat n'a rien exigé de ça, là. Nous, on n'a rien exigé de ça. Ce sont des exigences de la Loi sur les normes et du Code du travail, mais qui, pardonnez-moi l'anglicisme... mal avec les réalités de notre industrie.

Pour ce qui est de ce qui découle de la convention collective comme telle, bien, les travailleurs, les salariés s'attendent nécessairement à ce qu'on maintienne minimalement les conditions de travail qu'ils ont déjà dans l'industrie de la construction. Donc, la base de négociation, c'est la convention collective, l'industrie de la construction et donc nécessairement tout ce qui va en résulter ou découler, suivant les demandes syndicales qui vont être faites, même si on est les plus chiches et féroces négociateurs possible, sera nécessairement des écarts à la hausse entre notre convention collective et ce qui existe dans l'industrie de la construction.

Mme Cadet : Donc, par exemple, dans la convention renouvellement, en ce moment, donc, qu'est-ce que ça signifie en termes d'écart?

M. Thibaudeau (Éric) : Ce n'est pas que je n'ai pas la réponse, je fais attention, mais je tiens à le dire: Nous avons conclu une entente de principe à la fin janvier, et le syndicat est en tournée de ratification présentement, donc la semaine dernière. Il reste une assemblée ce soir, je crois. Donc, je vais faire attention à comment je m'avance dans les propos. Je peux dire qu'il y a une augmentation de salaire, dans les deux prochaines années, qui est substantiellement plus élevée que celle de la construction. Ça, c'est un exemple que je peux donner. Je peux donner un exemple... j'en ai...

M. Thibaudeau (Éric) : ...énuméré quelques-uns dans notre mémoire, là, mais essentiellement, on pourrait aussi parler... Oui, bien, en fait, je regarde la plus pertinente dans la liste qu'on vous a... je vous invite à la lire, mais c'est sûr que l'interdiction totale de recruter de la main-d'œuvre dont on vient de parler un petit peu plus tôt, bien, peut-être qu'on pourrait aider le syndicat à recruter ailleurs, autrement, de diverses manières, ça manque un peu de flexibilité. Vous verrez dans le même article que vous m'avez souligné, en , l'article suivant, le 6.2, que le droit de transférer de la main-d'œuvre à un... d'un chantier à un autre est possible, mais limité à un certain nombre de travailleurs. Donc, ça fait en sorte que, dans les nouveaux travailleurs qui arrivent à un autre chantier, il faut refaire les périodes de formation en santé-sécurité, par exemple. Donc, ça, ça représente des coûts dans les millions de dollars de la formation initiale en chantier pour les entreprises que nous représentons. Ce sont des... ce sont des exemples.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. C'est tout le temps que nous avions. Maintenant, je cède la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous quatre.

M. Thibaudeau (Éric) : Bonjour.

M. Leduc : Plusieurs associations patronales viennent ici nous parler pour nous demander de venir modifier le contenu des conventions collectives. Vous, vous prenez un chemin un peu différent. Vous dites : Nous avons un contenu de convention collective qui nous déplaît. En tout cas, à la page sept, vous en nommez, là, cinq, puis on en a... on vient d'évoquer l'interdiction de recruter la main-d'œuvre, mais j'avoue que je suis un peu surpris de votre démarche, parce qu'en plus, ce n'est pas un secteur qui est syndiqué depuis des décennies, là, où on pourrait essayer de plaider : Bien, nous, on arrive, puis là il y a comme un truc qui est là depuis tout le temps. Vous, c'est nouveau ces conventions collectives là, ou du moins relativement nouveau. Mais tout ça, ça... ce n'est pas le Saint-Esprit qui vous a imposé ça, là. Vous avez vous-mêmes négocié ça, vous avez signé, vous avez négocié. Pourquoi nous, on viendrait, comme législateurs, commencer à jouer dans le contenu des conventions collectives que vous avez négociées?

• (12 heures) •

M. Thibaudeau (Éric) : Premièrement, si vous permettez de rectifier le tir sur une chose, notre position, c'est qu'on appuie le projet de loi tel quel. Je n'ai pas dit que j'appuyais le Conseil du patronat puis que je voulais que ce soit encore plus large, plus loin. Donc, nous, c'est le projet de loi «as is» que nous appuyons avec la demande que nous, on vous fait. Donc, cet équilibre précaire là, que vous manifestez, là, dans vos questions aux divers intervenants, on est sensibles à ça, puis on le comprend et on ne demande pas au ministre, dans ces sujets-là, d'aller plus loin que ce qu'il propose dans le projet de loi.

M. Leduc : Est-ce que, dans les conventions que vous avez signées, librement, toujours, il y a des clauses de réactivité... rétroactivité salariale?

M. Thibaudeau (Éric) : Non.

M. Leduc : Aucune?

M. Thibaudeau (Éric) : Non.

M. Leduc : Donc, le fait d'avoir la possibilité de le faire dans le Code du travail n'est pas un automatisme, que ça s'applique dans toutes les conventions du Québec, ça se négocie. Donc, ça veut dire que ça soit pas été abordé à votre table de négo ou soit que ça a été abordé, mais retiré en échange de quelque chose d'autre.

M. Thibaudeau (Éric) : Dans l'ancienne, la première convention collective, celle qui est publiée, ça n'a pas été question. Dans celle qui a été en négociation, là, ça a été question de, mais ce n'est pas prévu, effectivement, dans l'entente de principe.

M. Leduc : Si on...

M. Thibaudeau (Éric) : Cependant, je tiens à vous dire...

M. Leduc : Allez-y.

M. Thibaudeau (Éric) : ...quelque chose, peut-être pour éclaircir tout le monde, si vous permettez, je prends la balle au bond.

M. Leduc : Rapidement, parce que j'ai une autre question.

M. Thibaudeau (Éric) : Oui. Si vous prenez la convention collective, que vous avez... qui est publiée, là, publique, celle qui vient d'échoir, là, en décembre, puis que vous prenez la convention collective du secteur industriel de la construction, là, à part le référencement dont on vient de parler à 6.1, là, ça ressemble beaucoup à l'industrie de la construction.

M. Leduc : Je regarde les salaires, les pensions, les repas, les vacances. Ce qui a été négocié dans vos conventions collectives, c'est toujours un peu meilleur que ce qu'il y a dans la CCQ. Donc, je ne peux pas m'empêcher de voir qu'il y a là une espèce d'intérêt pécunier, bien sûr, en étant assujetti à la construction, d'avoir moins de dépenses dans un futur assez proche. Je ne peux pas m'empêcher aussi de constater que, si vous faites ce move-là, ils n'auront plus accès à la loi anti-scab, ils n'auront plus le droit de faire des griefs sur les salaires. Donc, je vois... je vois mal comment c'était un avantage pour les travailleurs et travailleuses. Puis vous faites souvent une comparaison avec le reste des secteurs industriels... de la construction, pardon, mais vous n'êtes pas en compétition directe non plus avec... c'est comme des industries assez différentes, non?

M. Thibaudeau (Éric) : Non, on est en compétition directe avec eux, en compétition directe avec le groupe de l'Aespiq, qui est non syndiqué puis qui coûte environ 9$, 10 $ de l'heure moins cher que nos membres ici, première chose. Deuxième chose, je suis en désaccord avec l'affirmation que vous faites que, quand je regarde les frais de chambre, les pensions versus la construction, c'est moins cher. C'est vrai pour le secteur industriel qui applique l'ACQ, c'est faux pour le secteur génie civil dans lequel il y a aussi la machinerie de production, qui sont rendus bientôt à 159 $. Donc, c'est faux.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci, c'est tout le temps que nous avions. Je cède maintenant la parole au député de Jean-Talon.

M. Paradis : Merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. Merci pour votre mémoire. L'article 1 b) du règlement, j'ai consulté la jurisprudence que vous citez à la note de bas de page deux de votre mémoire, et il est à l'effet que, quand...


 
 

12 h (version non révisée)

M. Paradis : ...quand on analyse la preuve, dans certains cas, cet article-là ne trouve pas application. Dans d'autres, il trouve application. Est-ce que, dans le fond, ce que vous nous demandez, ce n'est pas de modifier ou d'intervenir pour corriger un courant jurisprudentiel avec lequel vous n'êtes pas d'accord? Premièrement. Et deuxièmement, je sais qu'on a peu de temps, mais en conclusion, vous dites... Dans votre mémoire, vous dites que ce que vous suggérez, ça ne fait perdre aucun droit aux salariés. Je comprends que vous avez répondu à ma collègue de Bourassa-Sauvé que, bon, c'est une question d'appartenance syndicale, mais en réalité, vous, vous dites : Les conditions de travail, ça va avoir un impact sur les conditions de travail. Donc, est-ce que vous êtes capables de nous dire quelles conséquences vous voyez que ça peut avoir sur les conditions de travail? Parce que, vous, vous y voyez un avantage, est-ce que, donc, il y a un désavantage pour les employés concernés?

M. Thibaudeau (Éric) : Bien, je vais commencer par votre deuxième question. C'est la plus simple à répondre. Qu'il soit membre dans l'AEMIQ ou membre de... dans la construction de l'Inter, de la FTQ, ou peu importe, il y a une table de négociation. Ils peuvent demander à obtenir ce qu'ils veulent. O.K.? Ça fait que... Que ça soit avec nous, le Code du travail ou que ça soit R-20, ils peuvent négocier et obtenir les conventions qu'ils veulent. Ça, c'est 1. 2, sur votre question sur le règlement, il y a deux mots qui sont problématiques, la notion d'employeur professionnel. Et ce que les jugements sont venus dire au début de l'année 2000, c'est de dire : Bien, la machinerie de production, ça ne comptera jamais dans le mot «professionnel».

Ça fait que, là, c'est comme un, vous me permettrez l'expression, un chien qui court après sa queue. Je fais des... Je fais des travaux CCQ avec des travailleurs CCQ, mais parce que les heures que je fais en machinerie de production ne comptent jamais dans mon statut d'employeur professionnel, je ne suis jamais employeur professionnel. Donc ça fait en sorte que le règlement ne s'applique jamais. Et les salariés principalement issus de la construction, bien, vous lirez la jurisprudence, il y a un décideur qui a décidé que je ferais un «snapshot» de l'industrie complète du Québec, il y a, je ne me souviens plus les chiffres, là, mais il y a 700 chaudronniers dans la construction et il y en a 3 500 selon le ministère du Travail. Ce n'est pas une expertise issue principalement de l'industrie de la construction, alors que l'objectif du législateur, à l'époque, c'était de dire : Quand j'utilise une main-d'œuvre CCQ, là, issue de la CCQ, elle va être traitée CCQ, c'est aussi simple que ça. Alors, la proposition qu'on fait, elle est simple, dans un texte simple qui rétablit cet équilibre-là, qui a toujours été voulu par tout le monde, donneurs d'ouvrage, travailleurs, syndicats de la construction. Vous n'avez pas entendu un syndicat de la construction venir vous dire qu'il était en désaccord avec ce qu'on demande là.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. C'est tout le temps que nous avions. Donc, je vous remercie pour votre contribution à nos travaux de la commission. La commission suspend ses travaux jusqu'à... jusqu'après les avis touchant les travaux de la Commission vers 15 h 15. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 06)


 
 

15 h (version non révisée)

(Reprise à 15 h 15)

La Présidente (Mme D'Amours) : Nous reprenons nos travaux. À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux, et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi no 51, Loi modernisant l'industrie de la construction. Cet après-midi, nous entendrons les témoins suivants, soit : la Commission de la construction du Québec, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, la Fédération des chambres de commerce du Québec et le... et la Régie, pardon, du bâtiment du Québec.

Je souhaite maintenant la bienvenue à la Commission de la construction du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et, par la suite, nous procéderons à la période d'échange. Alors, je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé, s'il vous plaît.

Mme Murray (Audrey) :Merci, Mme la Présidente. Merci à vous et aux membres, là, de la commission d'avoir invité la Commission de la construction du Québec. Je suis Audrey Murray, la présidente-directrice générale de la commission de la construction. Je suis accompagnée d'Isabelle Blais, secrétaire général de la commission, Pierre-Luc Désilets, vice-président par intérim, service à la clientèle et aux partenaires, et Mélanie Malenfant, vice-présidente par intérim communications, stratégies et innovation.

Donc, Mme la Présidente, mon intervention de cet après-midi sera portée par le grand respect que la CCQ porte aux représentants qui... aux représentations qui ont été faites au cours des derniers jours par les participantes et participants à vos travaux, car, parmi ceux-ci, se trouvent plusieurs administrateurs et membres des comités paritaires de la commission qui, à titre d'associations et de leaders du secteur de la construction, sont venus vous voir afin de mettre au jeu une lecture et des propositions parfois divergentes concernant le projet de loi no 51. Comme vous le savez peut-être déjà, au terme de vos travaux, suivant la sagesse des parlementaires, l'organisation que je dirige sera responsable de mettre en œuvre le projet de loi no 51, qui sera devenu loi. Et, afin de bien faire notre travail, la CCQ devra miser sur la confiance et la mobilisation de tous et de toutes. C'est pourquoi, aujourd'hui, je souhaite mettre au jeu avec mon équipe des informations stratégiques pour alimenter vos réflexions et qui permettront d'éclairer vos travaux, sans pour autant nous prononcer sur le projet de loi no 51. Je souhaite d'abord... Je vais vous présenter deux grands moteurs de transformation qui, à mon avis, doivent être tenus compte dans vos réflexions, mais, avant tout, je vais vous présenter la Commission de la construction du Québec.

D'abord, vous dire que c'est une grande organisation qui est au service de la prospérité, bien sûr, de l'industrie de la construction, mais aussi du Québec. Se rappeler que cette industrie représente 6,6 % du PIB de notre économie et un emploi sur 15 au Québec. Elle est financée de manière privée, par un prélèvement à même la masse salariale et un soutien ponctuel du gouvernement pour la lutte au travail au noir. Qui est la Commission? C'est près de 1 million de contacts clients par année au service des 200 000 travailleurs, travailleuses et 27 000 entreprises qui oeuvrent sur les chantiers du Québec. En matière de qualifications et de formation, c'est un ordre professionnel, en quelque sorte, donc, chaque année, on émet plus de 35 000 certificats de compétences, permis de travail. On accompagne dans leur apprentissage les travailleurs et travailleuses et on offre également du perfectionnement. Donc, l'année...

Mme Murray (Audrey) :...année record, 25 000 personnes ont pu bénéficier de formations continues dans l'industrie de la construction. On est aussi une compagnie d'assurances, donc, à l'échelle du Canada, je crois qu'on est la deuxième en importance. On dessert plus de 150 000 assurés. On offre également un service à nos 100 000 retraités, donc ça représente près d'un milliard de déboursés par année. La Commission est également responsable d'assurer la conformité sur les chantiers. À cet égard, on visite plus de 50 000 chantiers par année, on rencontre près de 100 000 travailleurs, travailleuses et plusieurs dizaines de milliers d'entreprises. Et évidemment on exerce les recours appropriés. Et finalement elle est fiduciaire de neuf fonds pour une valeur de 33 milliards. Et à cet égard, elle est quatrième déposante à la Caisse de dépôt pour le régime de retraite des travailleurs, travailleuses. Elle peut compter sur une équipe de 1 300 personnes à travers le Québec. Elle travaille, bien sûr, cette mission en concertation avec les grandes associations qui composent le secteur de la construction et, évidemment, les joueurs clés gouvernementaux et privés.

Donc, maintenant les deux constats, deux grands moteurs dont je voulais vous faire part pour alimenter votre réflexion. Le premier, c'est... quand on regarde la situation économique actuelle, malgré le fait qu'elle est incertaine et difficile pour certains secteurs, ce qu'on observe, c'est que l'industrie est dans un cycle de croissance qui devrait se maintenir à court et moyen terme. Donc, en 2024, on a annoncé une baisse de 3 %, mais globalement, quand on regarde d'ici 2028, notre équipe d'économistes prévoit qu'on va dépasser le sommet de 2021, donc atteindre jusqu'à 210 millions d'heures travaillées. C'est un sommet historique au Québec depuis qu'on cumule les données. Bien sûr, il faut faire des nuances. Le secteur du génie civil, actuellement, est déjà dans un sommet. Le secteur industriel est porté par la nouvelle impulsion de la filière batterie, donc accuse aussi une augmentation importante des heures. Toutefois, le secteur institutionnel, commercial et résidentiel vivent un soubresaut dû à la situation économique. Du côté des régions, on observe aussi une croissance qui va permettre à toutes les régions de bénéficier de cette situation-là bien que cette année, dû aux soubresauts du côté résidentiel, commercial et institutionnel, les deux grandes régions métropolitaines, Montréal et Québec, subissent une diminution significative, notamment à Montréal.

• (15 h 20) •

Donc, tout en tenant compte de ces nuances, on trouvait important aujourd'hui de vous faire part du fait que, tu sais, les besoins sont importants dans les prochaines années. Et donc ce cycle de croissance économique là va poser des défis importants pour notre secteur, notamment au regard de la mission de la commission et en regard des besoins de main-d'œuvre.

Et bien sûr on parle de main-d'œuvre compétente, et c'est le deuxième élément que je voulais mettre au jeu aujourd'hui. Donc, la commission prévoit qu'au cours des cinq prochaines années, elle estime que les besoins de main-d'œuvre donc seront... pour répondre à la demande de main-d'œuvre compétente en nombre suffisant, on aura besoin de 17 000 personnes par année d'ici 2028. Quand vous faites le compte, c'est près de 70 000 personnes nouvelles qui vont devoir nous choisir pour répondre au roulement de la main-d'oeuvre, mais aussi à la croissance économique à laquelle on fait face. Or, on sait très bien que le Québec est traversé par une grande transition démographique et que la chasse aux talents est ouverte dans tous les secteurs d'activités, que la capacité d'attrait de nos formations professionnelles a diminué, a fluctué dans les dernières années, que, comme industrie, on a des grands défis. On vous en a parlé. On a un enjeu d'abandon quand même important de nos travailleurs, travailleuses. Et dans les dernières années, on a assisté aussi à des entrées de nouvelles mains-d'oeuvre non diplômées. Et évidemment, comme tous les secteurs économiques, il faut s'assurer qu'on offre des conditions intéressantes pour séduire les jeunes, pour qu'ils nous choisissent.

Donc, c'est certain que la commission a la responsabilité, avec ses partenaires, de regarder cette situation-là, de poursuivre le travail qu'on a à faire d'attraction, de rétention, de développement de la main-d'oeuvre, travailler bien sûr sur l'amélioration du climat de travail et être plus inclusif. Et donc ce grand défi, on doit maintenant l'envisager au niveau de la main-d'oeuvre, non seulement d'un point de vue qualitatif, mais d'un point de vue... non seulement d'un point de vue quantitatif, mais aussi d'un point de vue qualitatif, car, quand on parle de productivité, de notre côté, on doit miser sur la compétence pour être capable d'y arriver.

Donc, comment faire pour relever ce grand défi? La commission comprend que le projet de loi met au jeu plusieurs propositions et que, depuis le début de vos travaux, bien sûr, il y a eu d'autres propositions qui vous ont été suggérées. Donc, à notre niveau et en regard de nos responsabilités, à l'écoute de ce que les gens vous ont dit, bien sûr, on a l'intention de poursuivre certaines initiatives qui sont déjà en marche, que je voulais vous partager parce qu'elles sont apparues comme étant convergentes, à mon avis, de la part des gens qui sont venus vous voir.

D'abord, un engagement ferme de la commission en faveur de l'accueil de davantage de femmes. Également, ouvrir la porte aux Premières Nations, aux groupes sous représentés pour être une industrie plus inclusive...

Mme Murray (Audrey) :...un engagement aussi sans compromis pour la compétence au cœur de nos priorités, une lutte constante contre le travail non déclaré et assurer la conformité sur nos chantiers et, bien sûr, un engagement sans faille de notre part en faveur de la concertation et de la collaboration comme un moyen de trouver des solutions rassembleuses.

Donc, en conclusion, Mme la Présidente, la commission souhaite bien sûr être une alliée des leaders syndicaux, patronaux, des entreprises, de la main-d'œuvre, de l'industrie de la construction et des joueurs clés qui œuvrent avec notre secteur d'activité. Notre objectif, c'est bien sûr générer la confiance, créer de la valeur, et, bien sûr, notre engagement à mettre en œuvre ce que l'Assemblée nationale décidera sur ce projet de loi est total. À notre avis, c'est un moment historique pour notre industrie de livrer... de livrer des choses importantes. La société s'y attend. On manque de logements, on a besoin d'entretien, de développer nos infrastructures, également les hôpitaux, les écoles, les garderies, et bien sûr contribuer à la transition énergétique du Québec. Donc, la commission sera au rendez-vous avec ses partenaires, puis il nous fera plaisir de répondre à vos questions aujourd'hui à cet égard.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons débuter maintenant la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. D'abord, vous remercier pour votre présence puis pour la belle présentation, Mme Murray, puis à toute votre équipe. Puis je profite de l'opportunité pour féliciter la CCQ pour son engagement à faire en sorte qu'une industrie tellement fondamentale soit non seulement effervescente, mais inclusive, diversifiée et prospère. Et vous le mentionniez, Mme Murray, les besoins sont cruciaux au Québec dans toutes les missions essentielles de l'État, là, le logement, les infrastructures, les projets industriels, les hôpitaux, les écoles, et tout ce qui découle de la filière batterie, la filière énergie, et tout ce qui est associé à la transition énergétique, vous le mentionnez très bien, d'où l'importance d'un projet de loi, je répète souvent, Mme Murray, qui n'est pas une finalité, qui est un des éléments d'un grand casse-tête qui va faire en sorte qu'on soit respectueux de nos entrepreneurs, de nos syndicats et de nos travailleurs, travailleuses. Puis je sais à quel point la Commission de la construction du Québec doit être en quête constante d'un équilibre entre les parties, c'est ce qu'on appelle le paritarisme, et j'ai beaucoup de... d'estime pour votre position de ne pas vous immiscer dans le mérite du projet de loi. Je vous avoue qu'on a un peu le même défi, comme législateurs, hein, puis je me plais à répéter que, quand on travaille à écrire un projet de loi, on est aussi soucieux de l'importance d'être modéré, équilibré, puis de redire constamment qu'un projet de loi, il est aussi perfectible.

Les besoins, aussi, en main-d'œuvre, bon, vous référiez aux 17 000 par année d'ici 2028, je pense qu'on a des objectifs communs, puis les syndicats qu'on a entendus ont aussi des objectifs communs, je vois des représentants syndicaux qui sont avec nous, qui ont témoigné au début des consultations particulières, puis moi, je me plais à le rappeler. Et, quand on parle d'équilibre, c'est respecter les compétences, c'est s'assurer d'une bonne qualité et, au-delà de tout ça, la santé et sécurité de tous ceux qui oeuvrent dans l'industrie de la construction.

Il y a quelques points, puis je vais poser des questions assez rapides, Mme Murray, à l'égard desquels j'aimerais avoir vos commentaires. D'abord, l'inclusion des femmes. Vous avez parlé... puis je pense qu'on est rendu à 3,8 % de représentativité. Si on revient en 2015, on était pas mal en arrière. Il y a eu un programme d'accès à l'égalité pour les femmes. J'aimerais ça savoir de vous quel est l'état de ce programme d'accès et qu'est-ce qui est anticipé pour faire suite au programme actuel d'accès pour améliorer la représentativité des femmes.

Mme Murray (Audrey) :Merci, M. le ministre, de cette question. Mme la Présidente, en fait, effectivement, depuis 2015, il y a un programme d'accès à l'égalité qui a été mis de l'avant par la Commission de la construction du Québec, qui était ambitieux, qui visait une cible, effectivement, de 3,5 %, qu'on a atteinte, et on est à un moment crucial où on doit refaire nos devoirs pour proposer un...

Mme Murray (Audrey) :...vos programmes d'accès des femmes. Donc, je pense que vous le constatez, la... la marche est longue pour les femmes dans l'industrie de la construction. Bien sûr qu'il faut se réjouir du fait qu'on se rapproche au moins de la moyenne canadienne, donc on n'est pas la seule province où c'est difficile d'accueillir des femmes de métier sur les chantiers. La moyenne canadienne est à 3,9 %. Le Québec a réduit l'écart du départ de 2015, donc on est rendu à 3,8 %. Mais avec les besoins de main-d'œuvre qu'on a, bien sûr, je pense qu'il faut qu'on fasse un vrai examen de conscience pour voir quelles mesures on va relancer, qu'est ce qu'on va mettre au jeu pour être capable d'ouvrir davantage la porte et surtout les retenir davantage. Parce que je faisais évaluer par mon équipe si on avait eu le même taux de roulement qu'on a pour les hommes, pour les femmes aujourd'hui, on a 7 400 femmes sur nos chantiers de construction qui bâtissent le Québec, on en aurait 8 500. Donc, bien sûr qu'il faudra travailler dans ce programme d'accès là à revoir comment on les... on les... on sollicite l'intérêt des femmes pour nos métiers. Mais c'est toujours délicat de solliciter l'intérêt si on n'est pas capable d'offrir un milieu de travail qui soit adéquat. Donc, il faudra travailler, bien sûr, en même temps, avec les centres de formation professionnelle, je vous dirais, ça commence là, on veut davantage de femmes dans les programmes de formation, les des DEP, qu'on appelle, de nos métiers, bien sûr, dans l'industrie de la construction. On va demander la sollicité... la complicité des centres de formation pour travailler avec nous, s'assurer que ce premier milieu non traditionnel dans lequel les femmes se retrouvent, hein, parce que c'est majoritairement aussi des hommes qui sont dans nos programmes de formation, soit adéquats. Et, bien sûr, on va se questionner sur qu'est ce qui a bien marché, moins bien marché dans leur intégration, leur maintien.

• (15 h 30) •

On a lancé, cette semaine, un sondage auprès des 7 400 femmes actives et des femmes qui ont quitté l'industrie depuis cinq ans pour aller leur demander : Qu'est-ce qui a bien fonctionné dans les mesures qu'on a mises en place? Qu'est-ce qui a moins bien fonctionné? Qu'est-ce qu'on pourrait faire de plus, de mieux? Et évidemment, ça interpelle la commission, mais ça interpelle tout le monde. C'est une responsabilité collective parce que c'est un changement de culture qu'il y a derrière cet enjeu d'accueillir davantage et mieux les femmes qui choisissent nos métiers, et c'est un changement de culture qui va être à l'avantage du groupe en fait parce qu'on parle d'améliorer. On connaît les facteurs d'abandon, là. Donc, nos trois facteurs principaux d'abandon, hein, c'est... c'est le climat de travail, c'est la conciliation travail-famille et la difficulté d'exercice du métier. Donc, si on travaille ces éléments-là, on peut penser que ça va être bénéfique pour l'ensemble du groupe. Donc, il y a beaucoup à faire, et c'est certain que, mon espoir, c'est que le donneur d'ouvrage principal, qui est le donneur d'ouvrage public au Québec, soit aussi avec nous dans le fait de mettre au jeu des mesures qui pourraient nous permettre d'accueillir davantage de femmes sur nos chantiers.

M. Boulet : Tout à fait, et sur nos chantiers et dans les programmes de formation, notamment, qui mènent à un diplôme d'études professionnelles, c'est ce qu'on constat, notamment au ministère de l'Éducation, que le nombre de femmes est en augmentation. Je me référais à l'exemple de la cohorte en électricité à Trois-Rivières, où il y avait 11 filles et 11 garçons, ce qui est aussi bénéfique pour l'apprentissage et pour une intégration réussie qui mène à une meilleure rétention et ultimement. J'aimerais vous entendre de la même manière pour un programme d'accès pour les Premières Nations et Inuits. Quel est l'état de la situation et qu'est ce que vous anticipez?

Mme Murray (Audrey) :Merci, M. le ministre. Donc, Mme la Présidente, effectivement, là, la commission a mis en place, là, des démarches de concertation, de cocréation. On l'a fait pour les femmes, mais on l'a aussi fait, dans les dernières années, avec les Premières Nations, Inuits et Cris justement pour bâtir un plan de match collectif aussi avec les intervenants gouvernementaux pour... pour se donner une cible ambitieuse. On annoncera, dans les prochaines semaines, prochains mois, là, ledit programme et donc on l'appelle le pacte PNI pour vous amener un peu dans nos... dans nos acronymes. Donc effectivement, on a aussi fait un examen fin des enjeux propres aux Premières Nations qui freinent leur arrivée donc sur les chantiers et on a identifié les mesures qui pouvaient aider à les accueillir davantage dans des parcours de formation, toujours en misant sur la compétence, mais bien sûr aussi en accompagnant les entreprises et en accompagnant les différentes cohortes dans leur parcours pour qu'ils puissent et elles puissent s'y retrouver et... et s'épanouir. Parce que, en fait, la difficulté, quand on parle des groupes sous-représentés, il y a toujours une hésitation de nommer des enjeux, hein, puis de donner l'impression que ce n'est pas possible de s'épanouir, donc en même temps de ne pas inciter ni les femmes ni les Premières Nations à nous... à se joindre, dans le fond, à la main-d'œuvre dans l'industrie. Donc, je veux dire que quand même, on a près de 1 % de notre...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

Mme Murray (Audrey) :...de notre main-d'œuvre déjà qui est issue des Premières Nations, des Inuit et des Cris. Et il y a un grand intérêt de la part de ces communautés-là à se joindre à la commission.

M. Boulet : Totalement. Dans certaines régions...

Mme Murray (Audrey) :Pas la commission, au chantier, désolée.

M. Boulet : ...de façon plus particulière. Et je ne ferai pas le tour de tous les groupes issus de la diversité, mais vous avez remarqué que, dans le projet de loi, on veut s'assurer que les mesures d'inclusion et de diversité soient applicables à tous les groupes issus de la diversité, donc aussi les minorités visibles, les personnes en situation de handicap puis les personnes immigrantes. Souvent, on s'est fait dire au fil des années que les normes de reconnaissance des acquis, des compétences... que la formation et de l'expérience étaient encore à établir. Ça fait que c'est certain que le projet de loi vise à ce qu'on aille de l'avant. Je sais qu'on est limité dans le temps, mais vous parlez beaucoup des compétences.

Et évidemment on n'a pas tous les leviers, dans une loi qui concerne essentiellement les relations de travail, la gestion de la main-d'oeuvre, mais je sais que vous êtes à pied d'œuvre. Notamment, on se plaît à dire que la voie à privilégier, c'est le diplôme d'études professionnelles. Mais, comme il y a une forte pénurie de main-d'œuvre, ce déficit-là impose des impératifs de trouver des façons alternatives pour accroître les compétences des personnes qui intègrent l'industrie de la construction. Puis on a mis en place les attestations d'études professionnelles. Mais il y a une offre de formation, notamment, à laquelle on réfère constamment, c'est l'alternance travail-études. On sait qu'il y a près de 200 000 jeunes, au Québec, qui ne sont ni en emploi, ni aux études, ni en formation. Puis, quand vous parlez d'attractivité, c'est un potentiel humain immense. Et l'alternance travail-études, dans la mesure où ça confère une capacité de soutenir des besoins financiers et que ça consacre aussi la symbiose, l'essentiel entre le travail puis les études, c'est une voie certainement à développer. Puis vous savez que, depuis les derniers allègements réglementaires, même les étudiants dans le parcours D.E.P. peuvent travailler durant l'été, les périodes de congés puis les périodes de relâche, puis ça aussi, ça donne des bons résultats.

Mais j'aimerais ça que vous nous parliez de ce qu'on appelle le Comité de formation professionnelle dans l'industrie de la construction. Quel est son rôle? Quel est l'état de la situation aussi à l'égard de l'augmentation de l'offre de formation en alternance travail-études? Parce qu'on ne fera pas ça, malheureusement, dans le projet de loi. On se fie beaucoup... Puis moi, j'aime beaucoup la formation qui est assumée par ceux qui peuvent la faire, qui ont le potentiel pour le faire. Donc, je veux vous entendre là-dessus, Mme Murray, sur les compétences, donc ça réfère à la formation.

Mme Murray (Audrey) :Parfait. Donc, merci, M. le ministre. Donc, Mme la Présidente, effectivement, à la commission, il y a un comité qu'on appelle le CFPIC, un acronyme de plus, qui est notre comité dédié à la formation... à la formation dans l'industrie de la construction, qui réunit des représentants désignés par les associations patronales et syndicales. Il y a également un représentant du ministère de l'Éducation qui est présent et il incarne parfaitement, là, les discussions et, bien sûr, là, les stratégies qu'on peut se donner au sein de la commission avec le conseil d'administration sur certains aspects des responsabilités en matière de formation. Donc, sommairement, c'est un comité, hein, qui nous aide autant au niveau de notre prévision quantitative que sur les enjeux qualitatives... qualitatifs qui peuvent toucher la formation professionnelle. Et peut-être, à cet égard, vous donner des éléments de travaux, là, qui sont en cours ou à débuter. Bien sûr, la commission, je le disais d'entrée de jeu, a la responsabilité avec le comité, avec le CFPIC, et ses comités... sous-comités professionnels, j'aurais dû en parler. Donc, dans notre arborescence, on peut en plus bénéficier de sous-comités de métiers, de sous-comités régionaux, donc, qui ont chacun leur expertise et qui viennent dans notre écosystème, donc, alimenter cette intelligence collective qu'on met de l'avant pour faire évoluer les choses. Mais dire que, dans les travaux qu'on a entamés... qu'on a à faire ou qu'on a à mieux faire ensemble... Bon, d'abord, ça commence par notre estimation de besoins de main-d'œuvre, hein? Bien sûr, on a un modèle assez robuste, mais on voit qu'on a des opportunités peut-être de s'améliorer, notamment en se connectant davantage avec les donneurs d'ouvrage publics, la commission, pour mieux comprendre ce qui s'en vient en termes de travaux, ça va se passer quand, on va besoin de quel profil de main-d'œuvre, où ça va se passer sur le territoire. Donc, il y a des travaux d'amélioration qu'on peut faire au niveau de la prévision des besoins de main-d'œuvre. Et également, une fois qu'on a estimé, je le disais tout à l'heure, en termes de...

Mme Murray (Audrey) :...de nombre, il faut qu'on regarde d'où vont provenir ces personnes. À ce moment-ci, notre modèle prévoit que c'est 100 % de diplômés qu'on cherche, quand on estime les besoins de main-d'œuvre, mais là on voit bien qu'on a de la difficulté à ne répondre que par des diplômés, alors on a un travail d'industrie... moi, je vais travailler avec mes partenaires cette question-là, on n'a pas encore la réponse, mais il faudra qu'on soit capable d'aller plus loin sur nos stratégies, en termes d'aller chercher la main-d'œuvre dont on a besoin.

Et effectivement les partenaires au sein de la commission et du CFPIC, donc, se sont mis d'accord pour qu'on ouvre un chantier d'accélération de l'alternance travail-études dans nos métiers de la construction, comme étant un levier potentiel d'attrait pour les jeunes et également, donc, une façon, hein, d'amener rapidement les jeunes et les moins jeunes qui nous choisissent à vivre une expérience en chantier et à l'école. Et, ce faisant, on augmentera peut-être aussi le nombre de diplômés qui choisissent de venir chercher un certificat de compétence par la suite, hein, bien sûr, qui donne accès à la réalité du chantier puis qui pourrait nous faire espérer aller chercher davantage de gens diplômés pour qu'ils viennent chercher un certificat de compétence.

Donc, c'est un chantier qui est très important pour mes partenaires patronaux et syndicaux, il y a une réelle volonté dans ce chantier qu'on ouvre, il faut comprendre, on doit y réunir plusieurs joueurs. Donc, on a les centres de formation professionnelle, on a le ministère de l'Éducation dont on a besoin, on a besoin, bien sûr, des représentants des entreprises et du côté syndical. On doit comprendre ensemble le cycle de l'alternance travail-études, ça veut dire quoi, dans l'industrie de la construction, qui est responsable de quoi, et comment on fait pour résoudre les nœuds, s'il y en a, bien sûr, et également pour que chacun puisse jouer son rôle pour augmenter... augmenter le recours à ce modèle-là, je dirais, de formation.

• (15 h 40) •

M. Boulet : C'est important de rappeler, pour que chacun puisse jouer son rôle et que ce soit fait dans la meilleure concertation possible. Moi, je respecte beaucoup ces instances, puis, encore une fois, la fondation, c'est le paritarisme, que les parties dialoguent et en viennent à la formule la plus attrayante possible. Et ça, ça va être bénéfique pour la main-d'oeuvre, ça va être bénéfique pour la qualité, pour le respect des compétences, la santé et sécurité. Je pense qu'il y a des retombées qui sont extrêmement importantes, puis le taux de rétention, ultimement. Ça fait que...

La Présidente (Mme D'Amours) : En terminant.

M. Boulet : ...est-ce qu'il reste une minute?

La Présidente (Mme D'Amours) : Cinq secondes.

M. Boulet : Cinq secondes. Merci énormément. J'avais d'autres sujets à aborder. Merci. On se reparle bientôt, de toute façon.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Cadet : Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup, mesdames, M., donc, d'avoir accepté notre invitation, d'être présents cet après-midi. Mme Murray, donc, je commencerai de la même manière que le ministre, moi aussi, ce qui m'avait, donc, beaucoup accroché de votre mémoire, donc, c'est la question, donc, des femmes, de la présence des femmes dans l'industrie, mais également de leur rétention. Nous l'avions noté, mais vous l'avez mentionné également, donc, vous venez de lancer... vous avez mandaté la firme Léger pour évaluer la satisfaction des femmes dans l'industrie à l'égard du Programme d'accès à l'égalité. Vous avez dit, donc, les trois facteurs, donc, déjà, pour vous, c'est déjà documenté, c'est : le climat de travail, la conciliation famille-travail, les difficultés d'exercice du métier. Nous, comme législateurs, en regard de ce que vous avez vu dans le projet de loi sur ces questions-ci, comment, vous pensez que nous devrions, donc, être outillés pour bonifier les... ces enjeux, donc, de représentativité des femmes dans l'industrie?

Mme Murray (Audrey) :Oui, bien, en fait, comme je l'ai dit, hein, on est en train de faire un examen approfondi, là, bien sûr, du diagnostic, en allant chercher la voix des femmes, mais aussi celle des entreprises. Alors, c'est un peu tôt dans notre processus, actuellement, pour vous recommander de bonifier, je dirais, le projet de loi, surtout qu'on a pris une posture, aujourd'hui, je vous l'ai dit d'entrée de jeu, là, très respectueuse d'éléments qui ont peut-être, par ailleurs, été suggérés par les partis qui sont venus vous voir.

Mais je dirais, assurément, on sait qu'on peut modifier une culture d'industrie et d'entreprise, hein, quand on bascule à 30 % dans la diversité ou dans le... Alors, c'est certain qu'on cherche un effet... un effet de nombre aussi, tout en préservant la qualité puis en offrant un bon milieu de travail. Alors, le projet de loi propose des mesures incitatives pour d'autres groupes dans l'industrie, donc aborde la question de la diversité, d'ouvrir la porte aussi davantage, là, aux Premières Nations, ça fait que je pense que ça additionne les éléments dont on a besoin pour mener, avec nos partenaires clés, ce changement de culture, là, qui va être bénéfique pour tout le monde.

Mme Cadet : Merci. Effectivement, donc, ma question additionnelle, donc...

Mme Cadet : ...sur les autres groupes sous-représentés, que... que vous venez nommer aussi dans votre mémoire, donc vous dites vouloir des actions concrètes pour faciliter l'accès à la construction pour les personnes immigrantes. Donc, il faut qu'elles soient donc arrimées aux changements, donc, proposés dans... dans le projet de loi. Est-ce que vous voulez, donc, élaborer, donc, sur... sur les mesures, donc, quand vous dites, donc, vouloir des actions concrètes?

Mme Murray (Audrey) :Bien, en fait, ce que... ce qu'on comprend que le projet de loi vous propose, en fait, c'est de donner à la commission la possibilité d'élargir les outils dont elle dispose pour reconnaître, par exemple, l'expérience d'une personne immigrante, sa formation, ses diplômes. Donc, en fait, déjà, la commission a la possibilité, a des outils pour essayer de traduire en termes d'expérience les gens qui peuvent choisir de venir vivre au Québec, là, et de travailler sur les chantiers. Mais je dirais, ma compréhension, c'est que le projet de loi vous propose d'ajouter des leviers, là, à la commission pour qu'on soit capables de faire le travail.

Mme Cadet : Je vous écoutais un peu plus tôt, puis vous parliez des travaux de prévision des besoins de main-d'oeuvre. Dans votre mémoire, vous... donc, vous... et vous l'avez mentionné, donc, également, donc, les grands besoins de main-d'œuvre qui existent dans l'industrie, qui sont documentés. À travers ces travaux de prévision, est-ce que vous... en fait, vous êtes en mesure donc de mettre de l'avant la répartition régionale ou si c'est un élément, donc, qui va venir par la suite à travers ce que vous développez en ce moment?

Mme Murray (Audrey) :Oui, tout à fait. On est capables de décliner, je dirais, là, la prévision de besoins de main-d'oeuvre sous l'angle des métiers et régional pour avoir une meilleure vue et raffiner nos stratégies de recrutement par la suite, oui.

Mme Cadet : Et donc en ce moment, donc, est-ce que vous êtes en mesure de nous dire à quoi ressemblent donc les besoins de main-d'œuvre de grands centres versus les régions éloignées? Parce que je sais que dans le mémoire, vous parlez donc des besoins de façon générale, puis vous l'avez mentionné aussi.

Mme Murray (Audrey) :Non. En fait, je crois qu'on va rendre public prochainement le détail. Je ne l'ai pas avec moi, là. Donc, c'est une des activités annuelles de la Commission, là, de rendre publique l'actualisation des besoins de main-d'œuvre. Et là je n'ai pas l'information, mais je pourrai donner l'information à la Présidente dès qu'on l'aura, là. Oui, dans les prochaines semaines.

Mme Cadet : Ah! bien oui, certainement que ça va nous intéresser à ce moment-là. Vous avez entendu... j'imagine que vous avez suivi avec attention les différents intervenants qui sont venus nous voir. Certaines organisations, donc, ont des recommandations, notamment, donc, par exemple, donc, sur le savoir-être, donc de... donc de mettre en œuvre différentes formations à cet égard, sur la prévention du harcèlement, des violences, des inconduites, de la discrimination ou d'autres comportements inappropriés. Comment vous... puis sans vous prononcer, parce que je comprends très bien votre approche, sans vous prononcer sur les mesures précises qui ont été portées par... par différents intervenants, comment est-ce que vous recevez ce type de recommandation là? Puisque vous auriez les ressources nécessaires pour les mettre en application? Donc, nous, comme législateurs, avec la responsabilité, donc, de devoir mettre, donc, des... bien, de mettre en œuvre des recommandations qui soient applicables, donc comment est-ce que vous pensez avoir les ressources pour ce faire?

Mme Murray (Audrey) :Bien, je pense que dans toutes les études, là, qui traitent des plans d'accès à l'égalité ou des enjeux rencontrés dans des milieux non traditionnels, la question de la formation des équipes de travail, des dirigeants, elle est essentielle pour occasionner le changement de culture. Donc, évidemment, à ce moment-ci, je ne veux pas me prononcer sur devrait-il y avoir des obligations. Mais certainement... Et d'ailleurs la Commission, dans le programme d'accès qui se termine, a prévu une offre de formation en perfectionnement sur la mixité, qui était... est accompagnée d'incitatifs financiers, mais qui permet de réunir dans la formation les collègues de travail avec le contremaître, le dirigeant pour être capables d'avoir une approche qui intègre l'équipe au complet, finalement. Donc, je pense qu'à cet égard les études... Parce qu'il y en a des secteurs qui ont réussi cette transition à ne plus être non traditionnels, donc à accueillir de la mixité, et on a bien documenté ça au Québec. Donc, c'est un facteur de succès important, mais qui concerne l'ensemble de l'équipe de travail.

Bien sûr, il y a une difficulté particulière dans la construction, vous le savez, parce qu'il y a des relations multiemployeurs, le milieu de travail est... bien sûr, est... fluctue. Donc, il y a des contacts entre les travailleurs, travailleuses de différentes entreprises, donc il y a... il y a une certaine particularité. Mais donc, c'est pour ça, je pense qu'il faut approcher cette question0là comme une responsabilité partagée, parce qu'on a besoin que tout le monde avance en même temps. C'est plus complexe que quand on décide de faire un changement de culture dans une entreprise avec les mêmes employés, dans le fond, qui sont... qui y sont réunis, là.

Mme Cadet : Vous... On a aussi abondamment parlé, lors des échanges, de la question de la rétroactivité. Puis, dans le projet de loi, donc, on vous impute donc le mandat de...

Mme Cadet : ...gérer le fonds de rétroactivité. Comment est-ce que vous envisagez cette responsabilité-là?

Mme Murray (Audrey) :Bien, en fait, peut-être vous dire, là, je l'ai présenté... introduction, bien sûr, la commission, elle gère déjà 9 fonds. Elle est fiduciaire de 9 fonds, là, pour l'industrie de la construction. Donc, on a bien sûr une expertise pour administrer des fonds. Maintenant, ce fonds en particulier, là, vous comprenez qu'avec respect, là, je vais... Je pense qu'il y a beaucoup d'informations qui vous a été déposé, là, par les parties prenantes qui sont venues vous voir. C'est certain qu'il est très près, là, d'un enjeu de négociation. Et si vous me posiez la question : Est-ce que ça va être facile à mettre en place au niveau des modalités? Bien, la réponse, c'est non, ça ne sera pas facile. Mais bien sûr, aujourd'hui, là, je ne souhaite pas prendre parti sur cette question-là.

Mme Cadet : Merci. Dans le projet de loi, l'article 81, , donc, on touche le règlement sur le service de référence de main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. Je sais que vous n'allez pas vous prononcer sur les articles précis du projet de loi en raison de votre posture, mais d'emblée, donc, comment... comment est-ce que ça que ça se passe? Parce qu'évidemment, donc, la situation, donc,  s'est assainie dans les dernières années. Est-ce que vous diriez qu'il y a... qu'il existe encore, donc, du placement syndical dans le secteur, puis est-ce que vous trouvez qu'il faut continuer, donc, d'aller de l'avant avec des mesures législatives pour moduler la relation entre les parties à cet égard, au niveau du référencement?

• (15 h 50) •

Mme Murray (Audrey) :Bien, en fait, bon, vous le savez, là, le carnet... est né d'une réforme législative d'il y a quelques années. Bien sûr, la commission, là, elle a eu la mission de mettre ça en place, puis il y a des outils qui ont été donnés pour être capables de, comment dire, accompagner l'industrie dans ce changement de culture. Donc, à ce moment-ci, là, c'est certain que, je pense, la proposition qui est faite dans le projet de loi est issue de conversations préalables, de consultations, là, qui ont eu lieu. Alors, la commission, on n'a pas de... on n'a pas de posture à vous... à vous faire part, là. Le carnet, bien sûr, a maintenant, je ne sais pas combien d'années, quel âge il a, là. C'était en... il y a 11 ans. C'est ça, exactement, donc.... donc voilà.

Mme Cadet : Donc, vous dites, donc, ça évolue, ça évolue quand même bien, donc, il n'y a pas... Je sais que, bon, il y a des amendes qui ont été livrées à cet égard, là, lorsqu'il y avait des incidents de placement direct, mais ça va bien. C'est ce que vous nous dites avec l'instauration du carnet.

Mme Murray (Audrey) :Bien, en fait, tu sais, en termes d'utilisation, tu sais, ce n'est pas un outil, là, qu'on constate, qui est beaucoup utilisé, là. Dans le fond, le recours au carnet pour trouver de la main-d'œuvre a décliné dans le temps. Donc, c'est sûr que les entreprises, bien sûr, ont des noyaux durs, hein, connaissent des gens. Il y a des réseaux qui se développent, alors... et, on vous l'a dit, on a entré quand même beaucoup de nouvelles mains-d'œuvre, malheureusement non diplômées, là, par la mécanique des bassins, là, de main-d'œuvre. Mais donc le carnet existe, il va bien, mais il n'est pas tant utilisé pour le référencement.

La Présidente (Mme D'Amours) : ...

Mme Cadet : Merci. Vous avez aussi la responsabilité des enquêtes sur le chantier. On touche... Est-ce que vous pensez que le projet de loi va toucher la gestion des chantiers? La résolution des réclamations, ça va se complexifier? Peut être un petit commentaire là-dessus rapidement.

La Présidente (Mme D'Amours) : C'est terminé.

Mme Cadet : C'est terminé. Ma question était 30 secondes, elle était longue.

La Présidente (Mme D'Amours) : On n'a plus de temps. 10 secondes, c'est quasiment juste le temps de dire merci.

Mme Cadet : Merci.

Une voix : ...

Mme Cadet : Ah! j'ai entendu 30 secondes, pardon.

La Présidente (Mme D'Amours) : 10 secondes, pardon.

Mme Cadet : 10 secondes, pardon. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme D'Amours) : Donc, je cède maintenant la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous trois... à vous quatre, pardon. Bonsoir à vous quatre. ...il y a quatre personnes finalement, oui, quatre personnes. Vous avez... Si j'ai bien compris, vous venez de répondre à ma collègue que, sur la question de la rétroactivité, vous vous gardiez une certaine réserve. Puis je comprends, ça a débattu très fort, c'est très politique. Mais au-delà d'une appréciation, je dirais, de... de fond sur le dossier, moi, je cherche à comprendre les défis alentour de l'application ou la non-application d'une rétro, ou d'une forme ou d'une autre, là, au-delà de ce qui est proposé, puis de tout un chacun qui a sa vision. Qu'est-ce qui fait en sorte dans cette industrie-là puis de la façon qu'elle a été construite à travers les époques qui nous mène à penser que c'est quand même difficile à appliquer la rétroactivité?

Mme Murray (Audrey) :Bien, en fait, je pense que plusieurs vous ont informé, là, du modèle, hein... on a un code... un code du travail construction au Québec, là, tu sais. Puis je dirais, dans pratiquement toutes les juridictions, même si la portée n'est pas la même, il y a eu lieu de développer des lois du travail spécifiques pour le secteur de la construction. Je vous en parlais tout à l'heure, à savoir il y a... il n'y a pas de lien d'emploi permanent. Il y a une mobilité au niveau des chantiers. Il y a une mobilité au niveau des employeurs, mobilité potentielle régionale. Donc, on comprend que... et il y a une fluctuation, bon, de moins en moins saisonnière, mais il y a quand même une fluctuation dans le niveau d'activités. Donc, c'est certain qu'il y a...

Mme Murray (Audrey) :...tout le temps des normes du travail qui sont adaptées. Donc, en regard de la rétroactivité, sincèrement, je n'ai pas... comment dire, Je ne peux pas vous expliquer, sur le plan de l'évolution de la loi, pourquoi on en est là aujourd'hui. Puis je trouve ça aussi délicat, parce que ça m'amène sur la question de la pertinence, ce sur quoi je ne veux pas... la commission, elle ne veut pas se prononcer aujourd'hui. Donc, c'est plus le volet mécanique où là, comme je l'ai dit, bien sûr, on a l'expertise parce qu'on fait ça dans la vie à la commission. Il y a eu beaucoup de mutualisation des protections sociales dans l'industrie de la construction. C'est un des legs positifs de ce régime-là. Donc, on est capable, malgré le lien d'emploi qui bouge, etc., d'offrir des assurances, d'offrir de la retraite. Donc, on a mutualisé beaucoup de choses.

Alors, c'est plus au niveau de la mécanique, je pense, où là j'ai exprimé le fait qu'il pouvait y avoir des difficultés et que c'est un fonds qui est très près du rôle de négociation. Il faut comprendre que la commission, les matières négociables ne sont pas... ne font pas partie de nos échanges dans nos instances. Moi, le conseil d'administration n'a pas à, idéalement, se prononcer ou avancer sur des questions qui appartiennent à la négo, exactement.

M. Leduc : Je vous amènerais sur un autre sujet avec le temps qui me reste. Vous êtes une des rares organisations qui nous parle du travail non déclaré, dans votre mémoire, le travail au noir, la conformité sur les chantiers. Est-ce que c'est un dossier qu'on ne soulève peut-être pas assez dans les débats sur la construction, le travail au noir? Ce serait un oublié, il me semble, alors que c'est un gros morceau.

Mme Murray (Audrey) :Bien, en fait, c'est un secteur comme la restauration, là, et le tabac, à une certaine époque, dans toutes les juridictions, qui est sujet, hein, à faire l'objet de malversation, de travail non déclaré. Donc, je pense qu'au Québec on a notre histoire. On a eu une commission qui a été importante, qui a assaini, bien sûr, la situation, mais il faut toujours rester vigilant. On est dans un moment d'activité économique jamais vu, là. Donc...

M. Leduc : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme D'Amours) : C'est tout le temps que nous avions. Je cède maintenant la parole au député de Jean-Talon.

M. Paradis : Merci pour votre témoignage d'une grande limpidité pour votre mémoire. Vous nous dites, vous ne voulez pas prendre position, mais vous nous dites des choses très importantes : Pour la commission et l'ensemble des partenaires, la compétence est au sommet des priorités. Et ensuite, vous nous dites qu'il faut envisager la pénurie de main-d'oeuvre sous un angle davantage qualitatif, alors que les compétences apparaissent comme un facteur de rétention sur les chantiers, mais également comme un facteur de productivité. Et, après ça, vous nous parlez des difficultés de recrutement, de taux d'abandon dans l'industrie, et là vous nous parlez d'un inversement de la courbe sur le taux de personnes qui entrent dans l'industrie avec un diplôme, sans diplôme. La courbe s'inverse à partir de 2017-2018. Que s'est-il passé à partir de ce moment-là? Et quels sont les enseignements sur lesquels vous voudriez attirer notre attention pour faire la bonne chose, nous, sur cette question-là comme parlementaires?

Mme Murray (Audrey) :En fait, c'est la forte demande de main-d'œuvre liée à la croissance économique qui est corrélée dans le temps avec l'arrivée de non-diplômés. Je dirais que vous voyez aussi, dans les graphiques qu'on a présentés, qu'il y a une courbe du nombre de personnes qui s'inscrivent dans les programmes de formation. Donc, en fait, il y a probablement plusieurs causes qui se sont additionnés en même temps. Mais ce qui est certain, c'est qu'on voit qu'il y a une mécanique qui se veut une mécanique d'exception, dans le fond, dans les règlements de la commission, qui est l'ouverture de bassin de main-d'oeuvre, qui est devenu la soupape qui nous a permis de vivre la croissance économique. Et là c'est certain qu'on est à la croisée où, je pense, l'industrie le souhaite, le demande, il faut qu'on mette au jeu... Je parlais d'alternance travail-études. On veut aussi avoir une conversation sur la question du maintien. Donc, on veut regarder nos stratégies par rapport au bassin de main-d'oeuvre. Donc, on a une conversation à avoir sur ces éléments-là.

La Présidente (Mme D'Amours) : 40 secondes.

M. Paradis : Très bien. J'aimerais continuer sur la question qui vient de vous être posée sur le travail au noir. Vous dites que vous avez un nouveau chantier vous-mêmes là-dessus, est-ce qu'il y a quelque chose qu'on pourrait faire à l'intérieur de ce projet de loi qui aiderait sur ce... sur ce point de vue là?

Mme Murray (Audrey) :Bien, en fait, on n'avait pas d'élément à vous proposer, sinon vous dire que, du fait qu'il y a un fort niveau d'activité, on a des nouvelles entreprises, beaucoup de nouveaux travailleurs, travailleuses qui ne sont pas nécessairement formés. Donc, on a mis en place une approche de prévention pour favoriser l'autocorrection, depuis quelques mois, qui va s'intensifier. Donc, on a une responsabilité de bien informer les gens des droits et obligations qu'ils ont sur nos chantiers, là, on doit accélérer tout ça.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. C'est tout le temps que nous avions. Donc, je vous remercie pour votre contribution à nos travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre à nos prochains invités de s'installer. Merci. 

(Suspension de la séance à 15 h 58)

(Reprise à 16 h 01)

La Présidente (Mme D'Amours) : Nous reprenons nos travaux et je souhaite maintenant la bienvenue à la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour vous donner la chance de... pour nous présenter, pardon, votre exposé et puis nous procéderons à la période d'échange. Je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé, s'il vous plaît.

M. Vincent (François) : Merci. Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, bonjour. Je suis François Vincent. Je suis vice-président pour le Québec de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Je suis accompagné de mon bras droit qui est à gauche Francis Bérubé, directeur des affaires provinciales. La FCEI, Mme la Présidente, c'est 21 000 dirigeants de PME au Québec, dont 2000 qui oeuvrent en construction, qui sont membres de notre organisation, partout au Québec, dans toutes les régions administratives.

Nous vous remercions beaucoup de nous recevoir aujourd'hui dans le cadre du projet de loi n° 51. Ce projet de loi nous tient à cœur. Pourquoi? Parce que le secteur de la construction bat au rythme des petites entreprises. C'est près de 80 % des entreprises du secteur qui ont moins de cinq employés. En comparaison, la moyenne, au Québec, c'est de 53 %. Puis comment se portent les petites entreprises au Québec et celles de la construction? C'est dur, c'est dur actuellement. Selon les compilations annuelles des données du Baromètre des affaires de la FCEI, l'année 2023 a été la pire en 15 ans d'indicateurs économiques, de notre indicateur économique, à l'exception de... de 2020. Mais là, on a fermé l'économie. Le niveau de confiance des PME s'est établi en 2023 à 47,8, pour la construction, le niveau est encore plus bas, à 44,4. Pour donner un ordre de grandeur, pour que l'économie roule à plein régime, notre indicateur doit atteindre 65. On voit que l'écart est grand. Puis les...


 
 

16 h (version non révisée)

M. Vincent (François) : ...qui expliquent cette situation sont nombreux. Il y a l'augmentation des coûts, qui font très mal, augmentation des coûts d'emprunt, augmentation des coûts d'assurance, augmentation des coûts d'énergie, augmentation des coûts des matériaux, etc. Il y a aussi l'impact de la pénurie de main-d'œuvre qui affecte particulièrement le secteur de la construction au Québec. On a réalisé une étude, à la FCEI, sur les pertes économiques subies par les PME en raison du manque d'employés, et le secteur de la construction trônait en tête de liste avec des pertes économiques de l'ordre de 2,2 milliards en 2021.

Il est donc urgent que le gouvernement agisse pour aider les petites entreprises de ce secteur, surtout que les barrières sont plus grandes, car elles évoluent dans l'environnement fiscal et réglementaire le plus lourd du pays. D'abord, le Québec est la seule province qui ne donne pas accès à ses plus petites entreprises du secteur de la construction, celles qui ont moins de trois employés, au taux d'impôt réduit. Les employeurs de la construction assujettis à la R-20, il y en a 18511 sur 27 219 qui ont trois employés ou moins. Le ministre des Finances avait une belle opportunité de régler cette injustice fiscale là, la semaine passée, puis améliorer du même fait la productivité de ses entreprises visées, mais, malheureusement, il ne l'a pas fait. Puis à cela s'ajoutent aussi des taxes sur la masse salariale plus élevées, de 30 % de plus qu'en Ontario, puis ça, c'est sans prendre en considération les ponctions supplémentaires du secteur québécois de la construction.

Ce n'est pas fini. Il y a aussi la paperasse, puis le Québec est où l'environnement réglementaire est le plus lourd, et de loin, du pays. Mme la Présidente, vous pourriez me dire : Bien, ça fait quoi, c'est quoi... ça change quoi, dans la pratique, cette paperasse-là? Eh bien, le coût annuel de la réglementation et de la paperasserie pour les entreprises de moins de cinq employés au Canada s'élève à 7 023 $ par employé, comparativement à 1237$ pour les entreprises de 100 employés et plus. C'est donc cinq fois plus lourd pour les entreprises plus petites, puis le secteur de la construction est un qui est composé de très petites entreprises.

C'est ici que le projet de loi fait bien. Il propose de simplifier la vie des dirigeants d'entreprises pour réaliser des travaux et pour trouver la main-d'oeuvre nécessaire au projet. Cela répond directement aux enjeux des petites entreprises, et nous saluons le ministre d'agir pour moderniser l'industrie et pour réduire l'écart de productivité avec l'Ontario. Cette modernisation arrive à point, surtout pour aider à accélérer la cadence sur la construction des logements et la livraison des projets économiques. Cette modernisation est nécessaire, Mme la Présidente. Cette modernisation est urgente. Cette modernisation est attendue.

En effet, les résultats préliminaires d'un sondage que nous menons actuellement démontrent que c'est 81 % des PME au Québec qui estiment que la modernisation du secteur de la construction est nécessaire. Pour les entrepreneurs du secteur, ils sont 88 % à appuyer la proposition du projet de loi pour assurer une meilleure polyvalence, ils sont 69 % qui approuvent les mesures proposées concernant la mobilité de la main-d'oeuvre. C'est une démonstration d'un fort appui, certes, mais c'est aussi une expression que le statu quo ne tient tout simplement plus et que tout changement est le bienvenu. En effet, les dirigeants de PME de la construction voudraient aussi que le projet de loi aille plus loin. Ils sont 78 % qui croient que le Québec devrait viser un environnement réglementaire du secteur de la construction similaire au reste du Canada. Le message a pour mérite d'être clair.

Donc, pour la FCEI, il faut bouger sur les mesures proposées sur la polyvalence et la mobilité. Ça représente le gros minimum. Parlons des deux mesures plus en détail. D'abord, sur la question de la polyvalence, avec 3,5 fois plus de métiers qu'en Ontario ça crée plus de paperasse, plus de délais, des coûts supplémentaires pour les entreprises, pour les clients et, en bout de ligne, pour les Québécoises et les Québécois. Cette rigidité ne date pas d'hier. C'est en 1970, deux ans après l'adoption du Bill 290, que le gouvernement du Québec a fait le ménage dans les nombreux métiers et occupations des décrets régionaux. On est passé de 575 pour arriver à 24 métiers, en 1971. 53 ans plus tard, c'est peut-être le temps de s'ouvrir à plus de flexibilité. Mais nous ne pouvons cacher notre crainte que les dispositions actuelles du projet de loi soient contestées, que cela ralentisse les effets souhaités. Un vrai ménage pourrait être de mise pour sortir du...

M. Vincent (François) : ...des métiers qui défient toute logique. Oui, ça défie toute logique. Prenons l'exemple de ce commentaire, demande de la FCEI dans notre sondage, et je cite : «J'ai fait poser une serrure électrique sur la porte d'entrée du bureau. J'aurais pu le faire moi-même, mais j'ai dû appeler un serrurier qui lui a aussi fait venir un électricien pour faire passer un fil et un menuisier pour agrandir le trou de la porte. Le menuisier est venu avec son apprenti. Vous pouvez imaginer la facture. Dans la pratique, je n'ai même pas le droit de faire une réparation mineure sur le bâtiment qui m'appartient.» Fin de la citation.

Parlons maintenant de la mobilité de la main-d'œuvre et de la proposition du ministre, avec laquelle... qui apporte beaucoup de craintes et avec laquelle, je cite, «on va détruire les régions avec ça. Nos mères, nos pères de famille, ils vont faire quoi?» fin de la citation. C'est la citation d'un syndicat de la construction dans le Journal de Montréal du 2 février. Mais, Mme la Présidente, une petite entreprise ne va pas faire venir des employés d'une autre région par plaisir. Elle va employer les personnes proches du chantier, proches de son entreprise, point. Et rappelons que le secteur de la... de la construction est très majoritairement composé de très petites entreprises. Cette rigidité n'existe pas dans les autres provinces et le ratio de la grandeur des entreprises et du traitement des employés est similaire. Et, à ce que je sache, Mme la Présidente, les petites municipalités existent toujours dans le reste du Canada. Ici aussi, nous demandons aux parlementaires de minimalement adopter des articles permettant une plus grande mobilité. Mais nous vous invitons fortement à aller plus loin en... en abolissant tout simplement ce concept de frontières géographiques contre-productif, tant pour les employeurs que pour les employés.

• (16 h 10) •

Maintenant, passons au concept de la rétroactivité. Cela risque d'engendrer des coûts énormes qui ne sont pas analysés, d'ailleurs, dans l'analyse d'impact réglementaire, et d'allonger les conflits de travail. Pour la FCEI, les syndicats ont déjà le gros bout du bâton avec la syndicalisation obligatoire, ils gardent l'essentiel des... des concepts de protectionnisme territorial et de cloisonnement des métiers du secteur dans le projet de loi actuel. Nous demandons donc le retrait de ces articles. Comme vous voyez, nous appuyons plusieurs modifications, mais nous aimerions voir plus de mordant. C'est pourquoi nous proposons l'ajout, dans les dispositions transitoires et finales, d'une clause d'analyse des répercussions du projet de loi, qui serait réalisée par les ministères du Travail et de l'Économie, six ans suivant son adoption.

La Présidente (Mme D'Amours) : ...

M. Vincent (François) : Bien, nous demandons d'élargir les travaux de rénovation, l'élargir, l'exclusion aux travaux de rénovation. On aimerait ça en parler durant la période d'échange, puis on vous remercie de votre écoute et on est prêts à passer aux questions.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Merci pour votre exposé. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Merci, M. Vincent, M. Bérubé, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, pour votre participation, votre contribution à ces consultations particulières. Puis, vous le mentionnez bien, M. Vincent, c'est une industrie qui est fondamentale pour le Québec. Évidemment, si je vous résumais, c'est encore plus de polyvalence que dans le projet de loi, c'est encore plus de mobilité, en fait, aucun obstacle à la mobilité. C'est l'absence de rétroactivité salariale et un désassujettissement. Puis je vais vous donner l'opportunité de vous exprimer sur le travail de rénovation et de réparation. Mais simplement pour vous redire, sur la mobilité, il ne faut pas non plus que ce soit un bar ouvert. Ce qu'on veut, c'est que les travailleurs préférentiels puissent suivre leur employeur de manière plus fluide que dans l'état actuel de la loi et que des travailleurs un peu plus expérimentés puissent suivre l'employeur, peu importe son identité, parce qu'il y a des besoins, on le répète, mais, dans les projets industriels, il y a le logement, bien sûr, là, mais il y a la filière énergie, la filière batteries, les écoles, les hôpitaux. Il y en a, des besoins, partout, partout au Québec, et il y a un profond déficit de main-d'oeuvre. Mais rapidement, votre position sur la mobilité, si on dit : Pleine mobilité, comme ça existe dans les autres secteurs d'activité du domaine privé...

M. Boulet : ...qu'est-ce que vous pensez de la réaction que ça pourrait engendrer sur l'employabilité puis la conciliation travail-famille? Juste vous entendre une petite minute sur ce sujet-là.

M. Vincent (François) : Juste une minute?

M. Boulet : Oui, parce...

M. Vincent (François) : Bien, à la fin, oon en pense pas qu'il va y avoir d'impact puis que les régions, ils vont disparaître, là. Ça, c'est de la grosse démagogie. Si je prends Trois-Rivières, par exemple, comme exemple, je pense que vous connaissez bien la ville de Trois-Rivières. Il y a 4 881 entreprises dans Trois-Rivières et il y en a 525 de la construction, ça fait un ratio de 12 %. Le ratio d'entreprises en construction dans les villes est à peu près à 10,9 % au Canada. Je prends une ville similaire en termes de nombre d'entreprises. Là, on va prendre Chilliwack, 4 045 entreprises au total. 711 en construction. Il y a un ratio de 18 % en Colombie-Britannique. Il y a Lethbridge en Alberta, 4 893 entreprises au total, 552 en construction, 11 % du total des entreprises. Thunder Bay et 3 736 entreprises, 451 de la construction avec employés, là, ça, c'est... je veux préciser que c'est avec employés, 12 %. Donc, tu sais, ces villes-là,  je n'ai pas vraiment l'intention des visiteurs à court terme, mais si j'y... j'y visitais, bien, je veux dire, elles sont bien présentes, puis la mobilité, là, il n'y a pas de restrictions régionales. Ça fait que je ne pense pas qu'il faut partir en peur puis dire, du jour au lendemain : Oh! My God, là, c'est fini, on n'embauchera plus des personnes à Trois-Rivières. Ce n'est pas vrai.

Je veux dire aussi que ça serait bon pour les employés. Je donnais un exemple par rapport à ça, puis il y a d'autres associations avant nous qui sont venues en parler, qui avaient... proche de Montréal ou certaines régions, tu habites proche comme employé, tu ne peux même pas aller travailler proche de chez toi. Mais ce qui est justifié pour un employé, admettons un peintre de Terrebonne d'aller... de ne pas pouvoir aller travailler à Granby, un tuyauteur à Valleyfield, avec les fils de pas pouvoir exercer son métier à Repentigny. Les seules contraintes devraient être le trafic du pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine ou du pont de l'Île-aux-Tourtes. 

M. Boulet : O.K. Merci. Sur les juridictions de métiers, M. Vincent, je pense que c'est important pour moi de clarifier un élément. Tu sais, ce que vous souhaiteriez, c'est qu'on fusionne des métiers ou qu'on diminue le nombre de métiers, mais c'est une option qui a déjà été analysée par les parties puis qu'il faut redire que l'industrie de la construction repose sur la concertation entre les parties patronales et les syndicats. Il n'est pas de l'intention du législateur d'arriver puis de tout bulldozer non plus. Et je pense qu'il faut respecter les compétences acquises dans les métiers, il faut respecter une certaine juridiction dans les métiers et fusionner des métiers, imaginez, ça implique de... d'entreprendre une vaste réforme, une révolution des formations qui sont dispensées dans les centres de formation professionnelle pour s'adapter aux nouveaux métiers issus des fusions hypothétiques, et ça, ça ne répond pas à l'impératif d'agir dans les meilleurs délais possibles, ça ne répond pas à l'impératif de rendre ça simple. Et la façon la plus efficace et la plus diligente, c'était d'aller vers la polyvalence et encore là, sur la polyvalence, il ne faut pas que ça soit à tout crin, il faut que ce soit mesuré, respectueux de la santé, sécurité, des compétences des travailleurs, travailleuses, et de la qualité des travaux. C'est l'avenue qui a été empruntée après des consultations sur le concept de tâches partagées qui n'a pas donné de résultats tangibles, et c'est la raison pour laquelle on est allés dans cette direction-là. Vous, je ne vous limiterai pas dans le temps, sur la polyvalence, vous dites : On devrait quand même regrouper des métiers.

M. Vincent (François) : Bien. Nous, on recommande minimalement l'adoption des articles qui sont proposés. On pense qu'il faut aller de l'avant. Maintenant, on... ce n'est pas la première fois qu'on utilise ça. Plusieurs fois même le législateur a essayé de pousser, de voir comment il pouvait diminuer le nombre de métiers. Il y a même eu un rapport de la CCQ en 2013 qui démontrait, là, justement l'écart entre le Québec d'avec le reste du Canada, ou même certaines juridictions en Europe. On ne peut pas croire que ce n'est pas possible de... d'améliorer justement cette... cette... cette polyvalence-là ou de voir comment on est capable de regrouper des métiers pour faire ça le plus simple possible. Puis c'est quand même 78 % des PME du secteur qui disent : Ça serait bien de...

M. Vincent (François) : ...vient de tendre à aller vers un régime qui est semblable à celui au Canada. Donc, on... je sais que votre gouvernement se compare beaucoup à l'Ontario, bien, comment ils font, eux, pour avoir sept métiers? Est-ce que c'est possible d'arriver à faire sept métiers? Maintenant, on pense qu'il faudrait aller là, mais on est quand même satisfaits de la recommandation qui est sur la table parce que ça va quand même apporter certaines modifications.

M. Boulet : Je comprends.

M. Vincent (François) : Maintenant, c'est là que notre recommandation d'analyse de l'effet de la loi peut être intéressant, tant pour nous... Ah! vous voulez revenir dans une autre question ou...

M. Boulet : Non, non, non, j'ai bien compris.

M. Vincent (François) : O.K. Tant pour nous que pour la partie syndicale, parce qu'ils émettent des craintes. Si vous arrivez avec votre projet de loi, puis, dans six ans, les craintes, elles ne sont pas... elles ne sont pas démontrées, bien là, on peut voir ou aller plus loin. Si elles sont démontrées, bien là, ça permet au législateur d'apporter les correctifs nécessaires ou aux membres qui sont directement impliqués dans l'industrie de pouvoir prendre part à l'amélioration de l'industrie.

• (16 h 20) •

M. Boulet : J'apprécie vos commentaires sur la paperasse, la simplification de la vie des entrepreneurs, puis, on le sait, c'est un peu au-delà de 80 % des entrepreneurs dans le secteur de la construction qui ont moins de cinq employés, et votre sondage qui démontre que cette modernisation-là, elle est nécessaire, attendue et urgente. Et les pourcentages, moi, je les ai appris, là, je ne connaissais pas tous les détails du sondage, là, mais 81 %, modernisation nécessaire, 88 %, qui sont dans le secteur de la construction confirment, 69 %, pour la mobilité, puis 78 %, qu'on pourrait même aller plus loin. C'est quand même des chiffres qui révèlent un état d'esprit, là, pour les membres de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.

Et vous souhaitiez aborder le désassujettissement de tout travail de rénovation et de réparation, puis vous souhaitiez vous exprimer là-dessus, M. Vincent.

M. Vincent (François) : Bien, les parlementaires, vous allez avoir des discussions par rapport au projet de loi, vous pouvez analyser certains éléments. On pense que de regarder pour voir comment on peut exclure plus de... d'avoir plus d'exclusions dans les travaux de rénovation et de réparation. Là, vous ouvrez une porte de plus avec les offices d'habitation, mais pourquoi c'est bon pour elles puis pourquoi ça ne le serait pas pour une petite propriétaire d'un salon de coiffure, par exemple, un petit détaillant, également, ou le membre qui est ingénieur qui a fait changer sa porte de bureau puis qui a eu affaire à plusieurs métiers? Donc, ces entrepreneurs-là... ces petits commerçants là vont pouvoir faire affaire avec des entrepreneurs, comme les propriétaires résidentiels, mais ils ne seront pas assujettis à la R-20, ces entrepreneurs-là, qui ont quand même des obligations par rapport à la Régie des bâtiments pour assurer la qualité des travaux et des très bons employés qui vont pouvoir réaliser ces travaux-là.

Puis, tu sais, je pousserais l'analyse peut-être un petit peu plus loin. Tu sais, dans certains cas, il y a peut-être même des petits détaillants, admettons, un petit salon de coiffure en Abitibi qui peut être propriétaire de son commerce, commerce de détail, qui va avoir des revenus moins grands que, admettons, un médecin spécialiste de la même région, mais un va pouvoir avoir des travaux désassujettis, mais pas le petit commerçant, parce que c'est une entreprise, et donc elle est assujettie à la R-20. Je pense que, là, l'ouverture pour les offices d'habitation ouvre la place à une discussion plus large.

Puis, dans le passé, bien, il y a même eu le désassujettissement total du secteur résidentiel, en 1992, je pense, ou 1993, qui est revenu réassujetti en 1995. Donc, ça s'est fait, dans le passé, d'apporter des désassujettissements, donc ça serait peut-être intéressant de voir comment on peut mieux répondre à la réalité des petits commerces qui, des fois, vivent des situations similaires à un citoyen.

M. Boulet : Je pense que ça me donne l'occasion, puis j'en ai peu parlé depuis le début des consultations particulières... les offices d'habitation du Québec, ils sont... c'est des organismes à but non lucratif qui s'occupent de logements sociaux et/ou abordables, et, évidemment, ces logements-là doivent être disponibles le plus rapidement possible...

M. Boulet : ...quand la personne quitte ou à la fin d'un bail pour des personnes au Québec qui ont des besoins de logements sociaux, et c'est l'entretien, la réparation, et c'est avec des salariés permanents de ces offices d'habitation là qu'on permet... c'est à peu près l'équivalent de 200 000 heures de travail par année, là, mais c'est véritablement pour des raisons de nature sociale, pour s'assurer que les logements soient accessibles le plus rapidement possible. À défaut, les offices doivent faire des appels d'offres, obtenir des soumissions et faire exécuter les travaux sous l'empire, effectivement, de la loi sur les relations de travail, la loi R-20. Et ça, ça provoquait des enjeux de délais et éventuellement de coûts, et avec les impacts humains et sociaux que ça pouvait engendrer. Mais la rénovation résidentielle, tout n'est pas assujetti non plus, là, il y a des exemples que vous donniez où la loi R-20 n'a pas de juridiction.

Maintenant, peut-être, dernier sujet, la rétroactivité salariale. Vous semblez dire... Actuellement, dans la loi, il y a une interdiction aux parties de négocier une rétroactivité salariale. Pour plusieurs, c'est un accroc à la liberté contractuelle, c'est-à-dire de négocier à une table de négociation quand on renouvelle une convention collective de travail par secteur. Bon, le point de vue qui est exprimé dans la... le projet de loi n° 51, c'est qu'on abroge cet article-là, puis on permet aux parties de négocier une rétroactivité salariale, puis, pour s'assurer que ce soit appliqué de la manière la plus équitable possible... parce qu'il y a beaucoup de mouvance, Mme Murray en faisait de nouveau état, c'est d'un chantier à l'autre, d'un entrepreneur à l'autre, donc le suivi des heures et des employeurs après la date d'expiration des conventions collectives étant complexe, bien, qu'on crée un fonds de rétroactivité salariale qui puisse payer, le cas échéant. Mais c'est sous la réserve de la volonté de négocier et de convenir une rétroactivité salariale. C'est ce qui s'applique après la date d'expiration pour assurer un rapport de force peut-être plus équilibré, là, je dis bien «peut-être plus équilibré». Là-dessus, vous semblez exprimer un point de vue que l'article actuel, qui interdit de négocier une rétroactivité salariale, devrait rester suivant son libellé actuel ou vous proposez qu'il soit abrogé et que les parties conviennent ce qu'elles décident à la table de négociation?

M. Vincent (François) : Trois choses à dire. D'abord, sur le rapport de force, on croit qu'il est déjà disproportionné, le rapport de force. Il n'y a aucun autre secteur d'activité au Québec... obligation de syndicalisation. Il n'y a aucun autre secteur de la construction qui a l'obligation de syndicalisation. Donc, le rapport de force est déjà en faveur des syndicats, selon la FCEI. Puis on fait juste regarder l'histoire des relations de travail, là, je veux dire, c'est des mélodrames à chaque négociation de convention collective, puis ça a des impacts sur... Tu sais, ils disent : Oui, il y a eu moins de conflits par rapport au reste du Canada, mais là, je veux dire, vous gelez l'industrie de la construction au complet, puis ça a des impacts sur l'ensemble des autres industries pour... Là, on a... on a mis les chiffres qu'il y avait dans l'analyse d'impact réglementaire au dollar d'aujourd'hui, c'est 54 millions, je pense, d'impact par jour de conflit. Donc, pour nous, c'est déjà un rapport de force qui est en faveur de la partie syndicale.

Deuxièmement, vous avez parlé du paritarisme, de l'importance du paritarisme, notamment pour vos dispositions sur la polyvalence puis la mobilité, en disant que votre modernisation, ce n'était pas une révolution puis il fallait écouter les parties prenantes pour prendre la décision. Je pense que la partie patronale a été assez unanime sur la question qu'ils n'en voulaient pas. Donc, dans votre même volonté de ne pas faire de révolution, il faudrait peut-être voir comment on est capable de rapprocher les deux parties sur cette proposition-là.

Puis troisièmement...

La Présidente (Mme D'Amours) : ...c'est tout le temps que nous avions.

M. Vincent (François) : O.K.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je dois maintenant donner la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Cadet : Merci, Mme... Mme la Présidente. Merci, messieurs. M. Vincent, je vous écoutais, puis j'ai lu votre mémoire, puis j'entends, comme le ministre le mentionnait, que, pour vous, donc, à différents égards, donc...

Mme Cadet : ...souhaitez que le projet de loi aille plus loin, tant en matière donc de mobilité et de polyvalence et... et bon, donc, même au niveau, donc, de la notion de rétroactivité qui est introduite au projet de loi.

L'un des objectifs nommés par le gouvernement étant justement l'augmentation de la productivité, est-ce que, selon vous, tel que libellé, le projet de loi répond à cet objectif-là dans le secteur de la construction, ou selon vous est-ce qu'on rebrasse les cartes avec différents aménagements mais qu'au final on a un rééquilibrage, mais qu'on est au même niveau de productivité qu'avant le projet de loi? On sera au même niveau de productivité qu'avant le dépôt du projet de loi.

M. Vincent (François) : Pour bien répondre à cette question-là, j'aimerais ça que vous me réinvitiez dans six ans, après avoir adopté la recommandation 5 de notre mémoire parce que, là, on va vraiment être capables de voir quels ont été les impacts. On le voit dans l'analyse d'impact réglementaire qu'il y a une différence de productivité avec le reste... avec l'Ontario. Mais j'irais même plus loin. Nous, on a fait une analyse sur l'automatisation des PME en décembre dernier, puis on a vu une... une tangente assez importante, c'est-à-dire plus les entreprises se retrouvent en situation de pénurie de main-d'œuvre, plus elles ont tendance à adopter l'automatisation. Par contre, quand on regarde le tableau des différents secteurs d'activité économique, la construction tire de la patte. Puis nous, on avait demandé aussi de regarder pourquoi le secteur de la construction? Y a-t-il des raisons, au niveau du fardeau administratif et réglementaire, qui nuisent davantage à l'adoption de pratiques en automatisation?

• (16 h 30) •

Donc, pour... C'est sûr qu'il faut améliorer la polyvalence. Il faut améliorer la mobilité. Maintenant, l'impact concret sur... sur l'atteinte des objectifs, je n'ai pas de boule de cristal, mais c'est important de l'analyser, puis ensuite de ça, de maintenir une... maintenir une pression sur l'amélioration du secteur, puis après ça permettre au législateur puis au ministre de pouvoir agir sur... sur les impacts qui ont été créés dans ce projet de loi, puis même, je dirais, mobiliser les gens de l'industrie.

Mme Cadet : Merci. On a abordé un peu cette question-là, donc celle donc de la réduction du nombre de métiers. J'avais une question similaire à celle du ministre, un peu. Je me demandais, donc, si pour vous, donc, c'est réaliste comme... comme proposition, donc, en matière, donc, des aménagements que ça demanderait, mais peut-être aussi vous entendre sur les questions de santé, et sécurité au travail, et de qualité, donc, ce que ça amènerait, là, cette proposition-là de réduction du nombre de métiers.

M. Vincent (François) : Pouvez-vous préciser votre question?

Mme Cadet : Oui, des... des conséquences, donc, sur la santé et sécurité au travail, sur la qualité de la construction.

M. Vincent (François) : Bien, je ne pense pas qu'il va y avoir quelconque impact négatif que ce soit.

Mme Cadet : Donc, il n'y a tout simplement pas... Il n'y en a tout simplement pas.

M. Vincent (François) : Tu sais, il n'y a aucun entrepreneur qui veut faire des travaux qui est botché, qui ne soit pas bien, là. Puis, je veux dire, quand on regarde dans les autres provinces, il y a des belles constructions, il y a des grandes constructions qui n'ont pas les mêmes contraintes que nous. Puis les buildings tiennent encore. La tour du CN est toujours là.

Mme Cadet : Est-ce que ça aurait des conséquences sur le modèle d'affaires des entrepreneurs spécialisés?

M. Vincent (François) : Non, je ne pense pas. Il faudrait... Si je dis : Il y a des entrepreneurs spécialisés dans les autres provinces aussi, puis il n'y a pas des contraintes davantage par rapport à ça, même... Puis je pense même qu'il pourrait avoir des impacts positifs pour les employés. J'ai donné cet exemple-là, mais même dans le rapport de... dans le rapport de la Commission de la construction du Québec, on notait même que la... le cloisonnement nuit à l'emploi des... l'employabilité et à l'atteinte d'un revenu décent pour les travailleurs. Ça fait que ça pourrait même avoir un impact positif pour les employés au Québec.

Mme Cadet : Merci. En Suisse, en matière de mobilité, donc, pour vous, donc, la... votre... votre recommandation, c'est une mobilité complète. Évidemment, donc, nous comme législateurs, donc, on aura à faire ces arbitrages dans un avenir rapproché. Donc, ma question pour vous, donc, à défaut, donc, en regard de ce qui... au-delà de ce qui est déjà proposé dans le projet de loi aujourd'hui, est ce que vous avez des... des conseils pour nous, comme législateurs, donc, de façon subsidiaire, là. Donc, si nous n'adoptions pas, donc, la pleine mobilité que vous recommandez, est-ce qu'il y a une autre proposition qui permettrait d'améliorer, donc, les aménagements en matière de productivité sous cet angle-là?

M. Vincent (François) : Bien, je veux préciser, nous, on recommande l'adoption des articles, mais on invite le législateur à aller plus loin. Là, je pense... Tu sais, j'ai rarement vu un ministre déposer un projet de loi, puis revirer de 180 degrés sur qu'est-ce qu'il proposait. Donc... Puis nos membres disent à 88 % qu'ils sont satisfaits de cette recommandation-là... Non, pas nos membres parce qu'il y avait des non-membres qui ont répondu...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

M. Vincent (François) : ...puis, sur le sondage, là, on demande... on proposait spécifiquement qu'est-ce qui était dans le projet de loi. Il y avait un - excusez-moi l'anglicisme - un pop-up, puis après ça il y avait un résumé assez grand de ce que la recommandation faisait, parce que c'était assez complexe, là, mais les entrepreneurs pouvaient vraiment voir ce qui était proposé. Mais, comme je l'ai dit dans mon allocution, ils veulent aussi avoir un système qui ressemble au reste du Canada. Donc, on vous... tu sais, si le ministre a été convaincu des prestations de... d'autres groupes patronaux qui demandent plus de polyvalence, puis décide d'aller plus simple puis de donner un objectif à la CCQ dans deux ans d'arriver au même nombre de métiers qu'en Ontario, on va être contents. Maintenant, peut-être que ça peut être intéressant d'évaluer certains éléments comme ça. D'ailleurs, on demande, et on a vu qu'il y avait certaines associations qui demandaient, à ouvrir complètement l'embauche d'employés. Ça fait qu'on dit : Bien, mandatez une firme externe puis regardez c'est quoi, les avantages puis c'est quoi, les inconvénients. Allons chercher l'information pour vous permettre d'agir ou de ne pas agir sur certaines questions qui sont soulevées par les entreprises, par l'industrie pour améliorer justement la productivité des entreprises puis l'impact positif sur l'économie. Puis la construction de notre besoin, là, ça va... Tu sais, je l'ai dit, là, il y a des impacts... Tu sais, nos données économiques sont toutes au rouge. J'aimerais bien ça, dire que ça va bien, là, mais ce qu'on voit puis ce qu'on entend, c'est que c'est toffe pour les entreprises. Mais, si on veut une reprise économique, bien, la construction est névralgique. Dans le passé, il y a déjà eu des Corvée-habitation, il y a déjà eu... la construction a déjà été... il y a eu RénoVert pour stimuler la rénovation, pour stimuler l'économie. Donc, si on a une construction qui va bien, ça va aller... ça va aider l'ensemble de l'économie du Québec.

Mme Cadet : Vous venez de parler de Corvée-habitation et tout, puis ça me fait penser... Parce que l'un des autres objectifs du projet de loi, donc, c'est vraiment, donc, de résorber la crise de l'habitation. Avec ce qui nous est présenté, est-ce que vous trouvez que le projet de loi va dans ce sens-là? Je n'ai pas vu ces résultats-là dans votre sondage.

M. Vincent (François) : Bien, c'est une... c'est un élément qui va aider, là. Mais c'est... ça prend beaucoup plus, là, pour améliorer, là, la construction de logements au Québec, là. Puis, la Fédération des chambres de commerce est sortie hier, probablement ils vont en parler tantôt, là, ils demandent une politique de l'habitation, je pense, puis le taux d'inoccupation est dramatique dans plein de régions du Québec. Il y a plein, plein, plein de mesures qui doivent être prises, musclées, pour améliorer justement cette question-là. Dans le passé, il y avait eu aussi plusieurs groupes, puis on en faisait partie, qui avaient déposé des recommandations - je pense, ça fait deux ans de ça - pour justement améliorer la construction de logements. Mais c'est sûr que, si on améliore l'environnement réglementaire des entreprises, c'est une pièce qui va aider. Ça ne va pas régler la crise du logement, mais ça représente un des éléments qu'il faut faire.

Mme Cadet : On a aussi beaucoup parlé de planification des travaux comme facteur de productivité. J'aimerais vous entendre sur cet élément-là. Puis quelles recommandations vous nous faites à nous, aux législateurs, sur la question de la planification des travaux?

M. Vincent (François) : Oui, il faut le faire. Puis je... C'était... On en parlait dans les années 90 ou 80, là, de l'amélioration de la planification des travaux, si ce n'est pas avant, là. Ça fait longtemps qu'on le propose puis qu'il faut le faire. C'est clair et net que ça peut aider, là. Si tu lances tous les projets en même temps, c'est sûr que tu crées une surchauffe, là.

Mme Cadet : Ensuite, donc — on en a peu parlé — donc, vous, donc, dans votre mémoire, vous demandez l'introduction d'un ombudsman, que selon votre sondage, donc, il y a un entrepreneur de la construction sur cinq qui croit que cette mesure manque et qu'il s'agirait d'une nette amélioration du projet de loi actuel. Je vous laisserais peut-être élaborer sur cet élément-là de vos propositions et nous expliquer ce que ça apporterait de plus au milieu de nommer un ombudsman.

M. Bérubé (Francis) : Si je peux me permettre, c'est ça, en fait, on a quand même plusieurs commentaires de nos membres, de façon récurrente, à chaque année, qui nous arrivent avec des situations où ils jugent qu'ils sont traités de façon peut-être inéquitable de la part de la CCQ. On avait fait un sondage en 2018 qui démontrait qu'à peu près la moitié, un entrepreneur sur deux, en fait, juge que les inspecteurs font preuve d'une certaine partialité. Donc, on s'est dit : Pour peut-être améliorer la confiance dans l'organisation qu'est la CCQ, pour offrir aux entrepreneurs aussi une voie s'ils se jugent lésés, d'avoir accès à un ombudsman comme ça, pour cette organisation-là, ça pourrait être quelque chose de bien, en fait ce qui est juste positif. On le voit dans plusieurs organisations, on le voit à la ville de Montréal, au niveau du gouvernement, dans plusieurs organismes gouvernementaux, les ombudsmans existent. Donc...

M. Bérubé (Francis) : ...on s'est dit, quand la moitié des entrepreneurs nous disent qu'ils jugent qu'il y a une forme de partialité, on s'est dit qu'il y a un enjeu de confiance. Est-ce qu'on est dans la perception? Est-ce que, dans certains cas, c'est fondé? Si c'est fondé, avoir quelqu'un qui peut enquêter, faire des recommandations aussi, ce qui permettrait peut-être d'améliorer la gouvernance.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. C'est tout le temps que nous avions. Je cède maintenant la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous deux. Toujours un plaisir de vous voir en commission. Dossier fort important de la construction. J'ai lu votre mémoire, je ne peux pas m'empêcher de voir qu'il y a quand même un thème récurrent à travers les différentes propositions que vous faites. C'est souvent... on comprend ou on perçoit que, selon vous, en tout cas, les membres de votre organisation, le problème c'est les syndicats dans la construction. Est-ce que je me trompe? Il y a une perception très négative, syndicale dans ce que je lis à travers la mémoire.

M. Vincent (François) : Vous pouvez avoir l'interprétation que vous voulez de notre mémoire.

M. Leduc : Donc, est-ce que je constate que vous considérez que les syndicats sont une partie pertinente à l'industrie de la construction, ont une contribution pertinente à l'industrie de la construction?

M. Vincent (François) : Oui, elle a une partie est pertinente, mais est-ce que le fait d'avoir l'obligation de la syndicalisation, c'est quelque chose qui est bien pour le Québec? Je n'ai pas vu d'autres provinces de secteur dire : Hé! On va faire... On va donner la syndicalisation obligatoire partout. Je n'ai pas vu non plus d'autres secteurs d'activité économique le demander. Est-ce que vous pensez qu'on devrait avoir un taux de syndicalisation de 100 % dans tous les secteurs d'activité économique?

• (16 h 40) •

M. Leduc : Moi, si vous posez la question à moi, vous connaissez la réponse, je pense, mais ce n'est pas tellement la question... la réponse pertinente à cette commission. Je veux vous amener sur la question des bassins. Vous êtes une des rares organisations qui s'oppose à l'embauche par bassin, en tout cas, c'est une de vos recommandations, de sortir de ça ou de faire un comité d'étude pour évaluer l'embauche par bassin. J'étais un peu surpris, parce d'habitude l'embauche par bassin, c'est un peu, on va  le dire, l'embauche classique, je le dis, entre parenthèses arbitraires, où est-ce qu'on connaît quelqu'un puis on le fait rentrer par bassin plutôt qu'à travers une formation. Ça fait que là vous dites : Ce n'est pas tellement le bon chemin par bassin, mais si ce n'est pas par bassin, c'est par formation. J'essaie de comprendre où vous atterrissez par rapport à ça, comment on devrait entrer dans l'industrie de la construction.

M. Vincent (François) : Non, mais juste de pouvoir embaucher qui on veut, comme dans les autres secteurs d'activité économique. Si une entreprise veut embaucher quelqu'un, elle peut... pas embaucher, le CV qui fait son affaire par rapport aux compétences de la personne. On a vu que c'était une recommandation qui avait été faite, donc pas de bassin.  Je t'embauche quand tu as besoin, puis that's it, là. Mais on n'a pas... Notre recommandation, c'est : Bien, peut-être que ça va avoir des impacts négatifs, bien, analysons-les, puis faisons les pour, faisons les contre, mais, au moins, ayons l'information pertinente là-dessus. Puis c'est ça qu'on demande aux législateurs.

Mais, pour répondre... pour donner la bonne référence sur la question précédente, sur l'instauration du mécanisme de planification des travaux, c'était la commission Cliche qui le recommandait dans les années 70. Donc, ce n'est pas d'hier qu'on demande puis qu'on essaie d'améliorer la planification de...

M. Leduc : ...selon vous, ça? Pourquoi ça n'a pas été fait, à ce jour, selon vous, peu importe les gouvernements, qui...

M. Vincent (François) : Je ne le sais pas. C'est comme la place des femmes dans l'industrie de la construction. En 1993, le gouvernement avait mandaté... Il y avait un projet de loi n° 46, je pense, qu'il avait mandaté la Commission de la construction de faire quelque chose là-dessus. Puis notre taux, il est plus bas que dans le reste du Canada. Je reviens à votre... tu sais, on a le taux de... syndicalisation à 100 %, puis c'est des organisations progressistes, ça devrait être plus élevé.

M. Leduc : Vous savez qu'on a retiré le placement syndical obligatoire, puis on peut avoir un long débat là-dessus. Il y a eu une baisse de référencement de femmes, objective, les chiffres sont là. Est-ce que vous seriez ouverts à la suggestion de l'ATF, de dire qu'on devrait avoir des quotas d'embauche de femmes dans les contrats publics...

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. C'est tout le temps que nous avions.

M. Leduc : Merci.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je cède maintenant la parole au député de Jean-Talon.

M. Paradis : Merci beaucoup de votre présence. Merci aussi pour le mémoire. J'ai trouvé ça particulièrement intéressant que vous mettiez les détails du sondage réalisé auprès de vos membres, puis des témoignages, parce que ça met des mots clairs sur le vécu de plusieurs de vos membres. Et c'est justement sur cette question-là que j'aimerais m'attarder avec vous, on a peu de temps, mais outre les sondages, quelles sont les données probantes, dont on bénéficie, nous, pour bien faire notre travail, comme parlementaires, qui démontrent certaines des affirmations que vous faites, par exemple, de l'impact des mesures actuelles sur le manque de mobilité, sur le manque de polyvalence, puis des exemples probants d'ailleurs qui viennent nous dire : Bien, quand tu changes les règles, ça a un effet positif? Parce qu'on a beaucoup de sondages réalisés auprès des entrepreneurs, mais les données probantes, qui dit scientifiquement telle ou telle chose, est-ce qu'il y en a à la base des affirmations?

M. Vincent (François) : Bien oui, mais...

M. Vincent (François) : ...juste sur les villes où... la présence des entreprises, avec employés. Je peux déposer le document en commission. C'est des données de Statistique Canada qui sont disponibles. La part des entreprises de la construction, c'est des données de Statistique Canada aussi. Le salaire, le traitement des employés, qui n'est pas significativement différent dans les autres provinces, c'est des données de Statistique Canada également. Les données du baromètre des affaires, c'est des indicateurs économiques aussi, qui est regardé par la...

M. Paradis : ...sont des données économiques, mais des données sur l'impact des mesures dont vous demandez le retrait ou des nouvelles mesures que vous proposez, est-ce qu'il y en a? Parce que, vous savez, au moment où on commençait nos travaux, il y a eu des analyses économiques qui ont été présentées, puis qui disaient autres choses de celles qu'on avait jusqu'à maintenant, qui disent que, finalement, les coûts de production ne sont pas si élevés au Québec, puis que, finalement ça coûte moins cher, même, à Montréal, par exemple, qu'à Toronto, quand on compare, là. Est-ce qu'il y a des données probantes sur l'impact des mesures que vous proposez?

M. Vincent (François) : Bien, je vous inciterais à regarder l'analyse d'impact réglementaire, qui est une obligation du gouvernement du Québec d'analyser les impacts. Il y a des analyses qui ont été faites là-dessus. La seule chose qui n'a pas été analysée, puis qui devrait l'être, c'est sur la recommandation de la rétroactivité. Puis, selon le gouvernement, ils sont supposés, selon l'article 19, alinéa b, je... d... oui, bien, d'analyser les coûts pour les entreprises, puis la mesure qui pourrait avoir le plus de coûts pour les entreprises n'est pas analysée par le projet de loi. Ça, je n'ai pas eu le temps de le dire quand c'était mon... dans l'échange avec le ministre, mais, selon nous, avant de mettre cette disposition-là en place, il faudrait qu'il y ait une analyse de faite. On le dit dans l'analyse d'impact réglementaire, oui, mais on va le faire pendant le règlement. Bien là, à ce moment-là, on va dire : Bien, la loi, elle a été adoptée, ça fait qu'on va aller de l'avant quand même avec cette recommandation-là.

La Présidente (Mme D'Amours) : C'est tout le temps que nous avions. Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux prochains invités de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 46)

(Reprise à 16 h 49)

La Présidente (Mme D'Amours) : Nous reprenons nos travaux. Et je souhaite maintenant la bienvenue à la Fédération des chambres de commerce du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange. Je vous invite donc à vous présenter et à nous... à commencer votre exposé, s'il vous plaît.

(Visioconférence)

M. Milliard (Charles) : Alors, merci, Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes et MM. les députés, bonjour. Merci de nous accueillir pour échanger sur l'important projet de loi n° 51, loi modernisant l'industrie de la construction. Alors, je me présente, Charles Milliard, je suis P.D.G. de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Je suis accompagné de mes collègues, donc Alexandre Gagnon, qui est vice-président, Travail et capital humain, et Audrey Langlois, qui est conseillère principale, Main-d'œuvre et affaires publiques.

• (16 h 50) •

Alors, je suis désolé de ne pas être avec vous physiquement aujourd'hui, mais j'ai une excellente raison. J'ai le privilège en ce moment d'être au Nunavik, à Kuujjuaq, pour un sommet économique avec nos concitoyens inuits, sommet d'ailleurs qui abordera, ce soir, demain et jeudi, les conditions d'un meilleur développement économique ici, dont fait partie justement le secteur de la construction, ainsi que la contribution des Inuits à la main-d'œuvre dans plusieurs secteurs d'activité, dont le secteur de la construction. Alors, les hasards de la vie font parfois bien les choses et ont certainement nourri nos réflexions, alors qu'on s'adresse à vous aujourd'hui en commission.

Alors, pour fin de mémoire, la FCCQ est un organisme qui regroupe près de 1 200 chambres de commerce et près de 1 000 membres corporatifs. Nous représentons, vous le savez, plus de 45 000 entreprises. Partout au Québec, les membres de la Fédération exercent leurs activités dans tous les secteurs et évidemment sur l'ensemble du territoire. Étant le plus important réseau de gens d'affaires et d'entreprises au Québec, la FCCQ agit aussi comme chambre de commerce provincial, mettant de l'avant l'intérêt de ses membres en matière de politiques publiques.

Alors, aujourd'hui, on vous présente nos réflexions et recommandations pour assurer le succès de ce grand chantier, celui de moderniser l'industrie de la... de la construction. Une réforme de cette ampleur, évidemment, on en conviendra, est historique. Il est de la responsabilité de tous d'en faire un succès et d'imaginer les règles qui encadreront la construction au Québec pour les prochaines années.

Pour la communauté d'affaires, l'industrie de la construction est au cœur du développement économique des régions, développement économique des régions qui est le moteur premier de notre action, à la FCCQ. Alors, que ce soit pour le maintien des actifs en transport, la construction de tours de bureaux, d'hôpitaux, d'écoles, de garderies, de logements, le milieu de la construction, il est indissociable de l'activité économique du Québec.

Et pourtant, cette industrie névralgique est confrontée à deux défis immensément importants : évidemment, celui de la pénurie de main-d'œuvre, mais aussi ce qui nous concerne aujourd'hui, son incroyable et son incontestable complexité réglementaire.

Bien que cette industrie subit lourdement les enjeux démographiques qui découlent du vieillissement de la population, des solutions sont évidemment à portée de main. D'ailleurs, on reconnaît que le projet de loi n° 51, sans aller nécessairement aussi loin qu'on le désire, s'attaque clairement aux bons enjeux. Alors, si je peux imager la chose, le diagnostic est le bon, mais permettez-nous de vous suggérer quelques traitements supplémentaires pour soigner notre industrie le plus rapidement possible.

Alors, dans un premier temps, l'importance de la polyvalence, la mobilité de la main-d'oeuvre. Alors, pour la FCCQ, et je crois comprendre, d'après les auditions des derniers jours, nous ne sommes pas les seuls, la modernisation de cette industrie ne peut être possible qu'en valorisant la polyvalence des travailleurs et en favorisant la mobilité de la main-d'oeuvre dans l'ensemble des régions du Québec. Par conséquent, nous recommandons que vous vous inspiriez du rapport de la Commission de la construction du Québec, dont faisait état M. Vincent tout à l'heure, qui date de 2013, et que vous réduisiez considérablement le nombre de métiers réglementés en visant l'identification de 5 à 7 métiers plutôt que 26. Nous recommandons pour ce faire l'ajout d'une...

M. Milliard (Charles) : ...mesure transitoire qui obligerait la CCQ à faire adopter un règlement pour ce faire d'ici les cinq prochaines années, à défaut de quoi, le ministre du Travail pourrait procéder à cette adoption dans l'année suivante. Notons que ce type de mesures transitoires a fait ses preuves dans la récente modernisation du régime de santé-sécurité au travail qui, évidemment, a été sous l'impulsion du même ministre et du même ministère.

Pour ce qui est de la formation, il est impératif de lancer le message au ministère de l'Éducation, évidemment, c'est important de le préciser, afin qu'il intègre davantage de contenus aux formations menant à un DEP visant l'acquisition de compétences en lien avec la numératie, la littératie numérique, afin de favoriser l'implantation de davantage d'innovations sur nos chantiers. L'innovation, c'est bon dans tous les secteurs d'activités.

Nous proposons également de s'inspirer de travaux effectués en lien avec les emplois saisonniers afin d'encourager, voire même contraindre les travailleurs de l'industrie ayant fréquemment recours à l'assurance emploi à participer à des formations qui visent l'acquisition de métiers supplémentaires en construction et donc ainsi d'augmenter leurs heures annuelles de travail tout en augmentant la polyvalence sur les chantiers.

Sur la question de la priorité régionale d'embauche, nous saluons évidemment les avancées qui sont proposées par le ministre. En revanche, vous ne serez peut-être pas surpris, nous sommes d'avis que toute notion visant à limiter la mobilité de la main-d'œuvre devrait être abolie. Les modifications proposées permettraient à 73 % des détenteurs de certificats compagnon de se déplacer librement. Est-ce qu'on ne pourrait pas être un peu plus ambitieux ici sans nécessairement viser le total bar ouvert que j'ai entendu à quelques reprises dans les derniers jours? Respectueusement, selon nous, les freins à la mobilité nous semblent être des reliquats du passé qu'il convient d'adresser dans un forum aussi crucial que celui-ci.

Parlons maintenant de relations de travail. Alors, sur un autre sujet tout aussi important, donc on tient à saluer plusieurs améliorations dans les pratiques de relations de travail dans le projet de loi. Les nombreux conflits de travail au cours des dernières décennies nous ont démontré qu'il fallait faire des changements importants dans nos façons de faire. Le Québec, autant économiquement que socialement, ne peut pas se permettre des arrêts de travail dans cette industrie névralgique, tout simplement. Les différents changements proposés, dont le devancement de la période de maraudage, l'instauration de la notion de bonne foi lors des négociations ainsi que le dépôt des cahiers de demandes sont des pas évidemment dans la bonne direction.

En revanche, on estime que certaines autres améliorations seraient nécessaires. Dans un premier temps, on estime qu'il serait fondamental d'inclure un président indépendant nommé par le ministre du Travail au sein du Comité des relations de travail dans l'industrie de la construction afin d'optimiser les chances de succès de cette nouvelle entité, qu'on salue. Nous acceptons la volonté du gouvernement de permettre la négociation d'une rétroactivité, mais l'instauration du fonds de rétroactivité salariale nous inquiète quant au coût qu'il annonce et qui semble évident, mais également quant à la complexité d'appliquer la mesure proposée.

Finalement, afin de permettre... afin de reconnaître, pardon, l'importance de cette industrie pour les parties prenantes, mais surtout sur l'ensemble du Québec, il nous semble essentiel d'instaurer le recours à un arbitrage obligatoire lorsque le conciliateur désigné vient au constat que la conciliation, justement, n'est pas parvenue à faire émerger une entente entre les deux parties. L'échec d'une négociation ne devrait plus être une option, et le recours systématique à une loi spéciale ne nous semble plus la voie à suivre en 2024.

Sur la question de l'enjeu de la reconnaissance et des acquis de compétences, le parcours d'un travailleur provenant de l'extérieur du Québec pour faire reconnaître ses formations et diplômes constitue l'une des plus importantes barrières à l'entrée dans le milieu de la construction. C'est un réel parcours du combattant à bien des égards. Alors, quant à la contribution des personnes immigrantes à l'essor du secteur de la construction, écoutez, vous le savez, cette contribution-là, en ce moment, elle est famélique et elle mérite qu'on s'y attarde aujourd'hui. À cet effet, la FCCQ exige que... ou propose que la Commission de la construction du Québec adopte le règlement visant à déterminer la procédure ainsi que les normes qui seront utilisées pour simplifier cette reconnaissance-là de la formation et des diplômes délivrés dans un délai de 24 mois suivant la sanction de ce projet de loi.

Alors, en conclusion, nous estimons que le projet de loi n° 51 propose des avancées importantes qui méritent le respect, et je tiens à le souligner dans le cadre de la commission aujourd'hui. En revanche, nous croyons qu'on peut aller encore un peu plus loin pour assurer que toutes nos ambitions de construction, grandes ou petites, puissent être réalisées. La vitalité économique de l'ensemble des régions du Québec en dépend. Et, par un autre hasard de la vie, on tenait hier à la fédération une conférence de presse...

M. Milliard (Charles) : ...avec notre réseau de chambres pour rappeler l'urgence d'agir au Québec pour enrayer la crise du logement qui plombe nos ambitions collectives vers le bas. Pour nous, il est évident qu'un secteur de la construction réformé est plus efficace. C'est le plus bel outil qu'on peut se donner pour atteindre nos objectifs le plus efficacement possible. Merci pour votre temps, et au plaisir d'échanger ensemble.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci pour... Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Boulet : Oui, merci, Mme la Présidente. Merci à vous trois. Merci à la Fédération des chambres de commerce du Québec pour sa contribution, pour son engagement au développement économique du Québec, et la qualité de sa présentation aussi. M, Milliard, félicitations pour ce que vous faites actuellement. Vous êtes au Nunavik, et je ne peux pas m'empêcher de faire un clin d'oeil à l'Administration régionale Kativik. Hein, comme vous savez, dans le projet de loi, on rend accessible les mesures d'inclusion et de diversité qu'on a mises en place à la CCQ pour les femmes, aux personnes issues des Premières Nations, Inuits et Cris, et puis il y a des administrations qui ont des ententes intergouvernementales, dont l'Administration régionale Kativik, qui vont pouvoir bénéficier de permis de référencement de main-d'oeuvre tellement important pour leur réintégration. Puis moi, j'ai eu beaucoup de témoignages de travailleurs, travailleuses et de personnes impliquées dans les associations syndicales qui référaient au potentiel immense, et il faut continuer de travailler dans cette direction- là. Et je vous prierais de saluer les acteurs, les partenaires que vous allez rencontrer lors de vos assises, lors de vos échanges dans la région du Nunavik.

• (17 heures) •

Vous avez bien exprimé les enjeux main-d'œuvre, il y a productivité aussi parce qu'il y a des écarts qui nous séparent de l'Ontario et du reste du Canada. La main-d'oeuvre, bien sûr, c'est vécu partout. La complexité réglementaire, il y a effectivement une espèce d'opacité, hein, puis l'Institut du Québec révélait récemment que, dans notre industrie de la construction, c'était impossible d'y arriver quand on est une personne immigrante. Puis quand on constate le faible taux de représentativité des travailleurs étrangers temporaires par rapport aux autres secteurs ou dans la population active du Québec, c'est à peu près du simple au double. Donc, il faut véritablement faire un effort, puis j'ai bien compris, mais on va dans cette direction-là, dans le p. l. 51, qu'il y ait des normes de reconnaissance non seulement du travail effectué à l'étranger, mais aussi des heures de formation et des diplômes, et ça, c'est un impératif qui fait partie de ce projet de loi-là.

Sur la mobilité, je comprends votre point de vue. En même temps, moi j'ai une conviction profonde, M. Milliard, qu'il faille y aller de manière à contrôler qu'il n'y ait pas d'abus, qu'il n'y ait pas d'excès. Je comprends qu'on est dans un système d'économie de marché, mais la mobilité, on pense quand même d'un seuil qui baisse de moitié pour les hommes et qui baisse d'un pourcentage important pour les femmes et les autres groupes issus de la diversité. Et je ne dis pas qu'il faille y aller par étapes, mais la mobilité, ça doit être vécu, ça doit être expérimenté puis ça doit être fait dans le respect du paritarisme qui guide les travaux de la Commission de la construction du Québec. Mais je l'ai répété, la mobilité, il n'y a pas d'obstacles à la mobilité dans d'autres secteurs de l'économie du Québec, et là, ici, je comprends bien cette recommandation-là.

Pour la polyvalence, bien, rappelez-vous, puis c'est... bon, on appelle ça un sondage, ou une étude, ou un rapport, il y a certainement des impacts sur les heures, sur les coûts et donc ultimement sur la productivité. De fusionner des métiers, je ne sais pas si vous m'avez entendu, tout à l'heure, avec notamment la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, j'ai fait le commentaire à d'autres groupes, c'est une option, mais l'impact d'une fusion des métiers sur les tenants et aboutissants de la formation dispensée dans les centres de formation professionnelle qui donnent des diplômes d'études professionnelles serait magistral, un chantier...


 
 

17 h (version non révisée)

M. Boulet : ...un chantier énorme, et ça, ça aurait été une révolution. Puis je pense qu'on a des besoins, ça a été exprimé dans les sondages, d'une modernisation la plus rapide possible. On a des besoins immédiats pour répondre à des missions essentielles de l'État. Vous l'avez mentionné aussi, là, il n'y a pas que les logements, il y a les hôpitaux, les écoles, les projets industriels. Et je ne veux pas... Parce qu'on dit : Est-ce que ça va régler la crise du logement? Il ne faut pas le présenter de cette manière-là. Je pense qu'il y a plusieurs éléments dans la modernisation de l'industrie de la construction. Le p.l. 51, ce n'est pas une finalité, c'est un des éléments de l'ensemble du processus de modernisation qui a été amorcé. Puis on a parlé de planification des travaux, puis ça, ça relève d'une autre loi sur les contrats des organismes publics. Il y a le ministère de l'Éducation sur l'augmentation de l'offre de formation, notamment en alternance travail-études. Vous avez vu l'allègement réglementaire qui a été fait il y a deux ans pour permettre aux étudiants d'aller travailler pendant les périodes de relâche ou de congés. Donc, c'est véritablement une collégialité, une mobilisation de tous ceux qui sont engagés dans la modernisation, puis il faut le faire dans le respect. Puis votre propos puis votre mémoire me fait réaliser à quel point notre quête d'un équilibre puis d'une modération, elle est, je pense, bien assumée.

Les relations de travail, bon, évidemment, on parle d'un comité qui est paritaire. Vous, vous dites : Il devrait y avoir un président indépendant. Est-ce que vous pouvez juste me donner une motivation additionnelle à ce qu'il y ait un... Parce que le comité paritaire, c'est comme dans les comités de relations de travail qu'il y a dans les organisations privées, publiques, parapubliques. Mais je me questionne encore sur ajouter un président indépendant. Je vous écoute, M. Milliard.

M. Gagnon (Alexandre) :Oui, je peux peut-être y aller, oui, si ça vous va. Bonjour, M. le ministre. Bonjour, tout le monde. Dans l'ensemble des grandes instances qui font du dialogue social, il y a toujours quelqu'un qui va animer les discussions, qui va amener les sujets de conversation, qui va documenter les décisions à prendre. Ce comité qui est proposé de créer a des obligations ou a une mission très large, très importante. On voit tous les succès entourant la médiation, la conciliation exercée par le ministère du Travail dans des... dans des milieux complexes, dans des milieux où les relations de travail ne sont pas simples. D'ailleurs, la construction nous semble toute désignée de prévoir que la création même de ce comité de relations de travail là prévoie la présence d'un conciliateur, d'un médiateur qui permettra d'animer les discussions, qui permettra d'assurer que le tout se fasse de façon cordiale puis de... se fasse dans... le plus efficacement possible. Donc, on comprend que, dans les relations de travail, c'est toujours bipartite, mais, dans ce cas-là particulier, il nous faut un facilitateur, il y a un rôle primordial à mettre en place.

M. Boulet : Évidemment, il y a les services de conciliation, médiation du ministère du Travail, là, mais... je me questionnais sur la pertinence d'avoir un président indépendant un peu permanent, là. Mais j'aime bien que vous souligniez la volonté que nous avions de rendre les relations de travail les plus harmonieuses possible, là. Le devancement de la période de maraudage, vous savez l'impact que ça peut avoir, l'obligation de négocier de bonne foi puis l'obligation de déposer, là, les offres, les demandes, les propositions ou les contre-propositions.

Il y a... L'arbitrage obligatoire, je comprends, là, mais c'est une recommandation que vous faites en cas d'impasse, en cas de conflit, que le ministre nomme un arbitre de différends. Dans le Code du travail, on sait que, pour une première convention, c'est à la demande d'une partie, dans le cas d'un renouvellement de convention, ça prend le consentement des deux parties. Là, ce que vous recommandez, c'est que le ministre puisse le faire sans qu'il y ait de demande, mais, en cas d'échec, comme M. Milliard le mentionnait, de la médiation, qui est obligatoire dans le projet de loi, moi, ma préoccupation, là, M. Gagnon, vous me voyez venir, là, c'est eu égard à la...

M. Boulet : ...décision de la Cour suprême de 2015 en Saskatchewan et toutes les décisions qui ont suivi, le droit de grève a été constitutionnalisé, fait partie intégrante de la liberté d'association, donc il y aurait un enjeu. Évidemment, ce que vous vous dites, si on nomme un arbitre, ça permet d'éviter une loi imposant le retour au travail, loi qui, en 2017, a été adoptée par nos prédécesseurs, qui a été déclarée inconstitutionnelle l'année dernière ou l'année précédente, je pense que de nommer un arbitre aurait éventuellement le même effet, là. Mais je ne veux pas embarquer dans ces détails-là.

Mais je ne peux pas m'empêcher de vous poser la question qui va probablement être posée par mes collègues parlementaires. La rétroactivité, si je vous comprends bien, bon, dans la loi actuelle, on empêche aux parties de négocier une rétroactivité, et vous, vous... vous êtes d'accord à ce que nous abrogions cet article-là et qu'on laisse aux parties le soin de déterminer s'il y a ou non rétroactivité et comment elle se verse. Parce que, le fonds, nous, on voulait simplifier ça pour les employeurs, la simplification administrative, et s'assurer que les salariés puissent recevoir la rétroactivité. Vous, vous vous dites... vous nous dites : pas de fonds, mais possibilité de négocier une rétro. Est-ce que j'ai bien compris, M. Gagnon ou... ou Charles, là?

• (17 h 10) •

M. Gagnon (Alexandre) :Oui, vous avez bien compris, c'est exactement ça. Est-ce que ça fait... on pense que c'est très positif, d'éliminer la rétroactivité? Peut-être pas, mais, dans le... dans un contexte de recherche de consensus et de trouver un... une entente de principe, ça nous semble une belle piste de réflexion et on est quand même ouverts à cette perspective-là. Évidemment, ça amènera des complexités dans la rédaction contractuelle des contrats dans l'industrie de la construction pour prévoir ces... ces... ces éventuelles hausses, qui ne seront pas nécessairement identifiées au départ, lors de la signature des contrats de... d'infrastructures, notamment.

Quant au fonds, on comprend l'esprit, on comprend la mécanique qui est proposée jusqu'à un certain point. Mais on a l'impression que ce serait une négociation avant la négociation qui se ferait à la Commission de la construction du Québec plutôt qu'à la table de négociation, afin de cibler et de voir à quel... comment on va construire ce fonds-là. Donc, plutôt que d'imposer un mécanisme, invitons les parties à la table de négociation de s'entendre comment ils vont financer cette rétroactivité-là, le cas échéant, où ils négocient le fait qu'il y en ait une. Donc, le fait de... de négocier ne dit pas qu'il y en aura une, automatiquement. On se comprend.

M. Boulet : Est-ce que vous ne pensez pas qu'il y aurait un enjeu de gestion de versement de la rétroactivité? Parce qu'on comprend qu'il y a des tables de négociation sectorielles lors des renouvellements de conventions collectives. Et, si une entente sur une rétroactivité qui doit être versée employeur par employeur, on réalise que, dans l'industrie de la construction, il y a beaucoup, beaucoup de déplacements, de modifications de l'identité de l'employeur, de déplacements d'un chantier à l'autre, est-ce que vous, ce que vous nous soumettez : laissons les parties déterminer comment?

M. Gagnon (Alexandre) :Exactement. Ce n'est pas... vous l'avez bien précisé, c'est un enjeu complexe, ça serait difficile à administrer, mais ça nous semble tout de même malgré tout plus simple que la constitution d'un fonds de rétroactivité et de sa gestion.

M. Boulet : Vous allez rendre certains de mes collègues heureux, quand même, et c'est une belle recherche de consensus. J'ai beaucoup de respect pour ça et... Mais, si vous aviez... Est-ce que vous avez pensé à un... une façon pratique de le faire, tenant compte des réalités du... de l'industrie actuelle?

M. Gagnon (Alexandre) :L'une des choses qu'on présente devant vous aujourd'hui, là, c'est qu'on n'est pas les spécialistes de l'industrie de la construction puis on ne veut pas se mettre à la place des associations de la construction ou des syndicats pour y arriver. On est là pour mentionner, entre autres, qu'on est là pour représenter l'ensemble des parties prenantes en dehors de l'industrie de la construction, qui sont impactées par cette... par cette industrie-là, par les règles, mais également de doter les parties prenantes des bons outils pour en arriver à des consensus. Donc, laissons ces... les bonnes personnes décider, s'entendre, discuter, donnons-leur les bons outils pour y arriver. C'est... c'est... c'est notre message central aujourd'hui.

M. Boulet : Super. Moi, ça répond bien à mes interrogations. Puis je veux repartager votre commentaire...

M. Boulet : ...sur le fait que c'est presque un parcours du combattant pour une personne qui veut intégrer. Il y a des personnes qui arrivaient de l'Ukraine ou de plusieurs pays étrangers et qui me témoignaient, parce que j'ai eu l'opportunité d'en rencontrer plusieurs... puis des centres qui s'intéressent à l'accueil, puis à l'intégration, puis je me préoccupe toujours de l'équité aussi dans la représentativité dans les secteurs. Je sais qu'on a des réserves, parfois, mais on a déterminé qu'il y avait des secteurs névralgiques au Québec : la santé, l'éducation, les services de garde à l'enfance, le génie, les technologies de l'information et la construction. Et ça a fait l'objet d'une... d'un article détaillé, là, de Francis... récemment, là, le... ce que l'Institut du Québec a démontré, c'est 3 % dans l'industrie de la construction par rapport à 6 %, et beaucoup ont témoigné qu'elles avaient une expérience en charpenterie-menuiserie, ou peu importe le métier, et qu'elles n'étaient pas en mesure. Et la CCQ, avec ce projet de loi là, va permettre non seulement d'ouvrir les valves, mais de nous permettre de répondre à des besoins de main-d'œuvre partout au Québec. Alors, merci beaucoup, Charles. Bon séjour au Nunavik. Alexandre, Audrey, au plaisir de vous rencontrer de nouveau. Merci.

Des voix : Merci.

La Présidente (Mme D'Amours) : Maintenant, je cède la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Cadet : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. M. Milliard, M. Gagnon, Mme Langlois, merci d'être avec nous cet après-midi, puis merci pour votre mémoire également, donc, très étoffé. J'espère, M. Milliard, que vous appréciez votre séjour au Nunavik.

Donc, j'ai pris connaissance de vos différentes recommandations, et on va y aller dans l'ordre. La première, donc, étant de retirer les notions visant à limiter la mobilité de la main-d'œuvre. On en a parlé abondamment dans le cadre de ces différentes consultations. Je saisis bien le fond de votre recommandation ici. Ma question, donc, nous, comme législateurs, évidemment, donc, on aura à faire, donc, certains arbitrages. Je comprends que, pour vous, ce qui est proposé par... ce qui nous est proposé par le ministre, vous le voyez de façon positive, mais vous souhaitez aller plus loin. Subsidiairement, est-ce que vous auriez une autre proposition? Et notamment peut-être vous entendre, donc, sur les travailleurs, donc, qui sont à l'extérieur des grands centres. Est-ce que vous verriez, donc, d'autres... (Panne de son) ...de mobilité distincts pour ceux-là? Donc, je veux... je veux vous entendre élaborer sur cette recommandation-ci.

M. Milliard (Charles) : Peut-être juste un petit commentaire avant de laisser mes collègues répondre. Effectivement que la réforme peut se faire ou devrait se faire de façon progressive. Je comprends qu'on est en accord parce qu'il y a une amélioration sensible de la mobilité de la main-d'œuvre. Je vous parlais de 73 %. Par contre, je vous... je rétorquerais à ça qu'on ne fait pas une réforme à toutes... à toutes les années, ni à tous les cinq ans. On fait une réforme pas très souvent. Alors, c'est important d'avoir le plus de mesures qui vont permettre de débloquer cette question-là de la mobilité. Et je compléterais en disant qu'à l'époque il y avait aussi des régions qui ne vous... qui avaient un certain intérêt à avoir ces contraintes-là, et ce n'est pas vraiment ce qu'on observe maintenant. Puis je dirais même que c'est le... c'est le... c'est l'inverse, parce qu'on a maintenant des travailleurs en région qui voudraient peut-être pouvoir aller travailler aussi dans des grands centres, avec les différents projets, que ce soient les projets du PQI, d'Hydro-Québec, on peut tous les nommer. Donc, cette réticence-là régionale, qu'il y avait auparavant et qui a mené le législateur probablement à ça à l'époque, n'a pas la même... n'a plus la même valeur en ce moment. Donc, c'est pour ça qu'on aimerait dépasser l'image que je donnais de 73 %. Et je laisserais peut-être Alexandre compléter.

M. Gagnon (Alexandre) :Oui, effectivement, ça ne nous semble à première vue pas très adapté à un milieu de la construction puis à l'état du marché du travail d'aujourd'hui, mais aussi de ce qui est perçu pour les prochaines années puis même pour les prochaines décennies avec le vieillissement de la population puis les grands plans gouvernementaux, notamment au niveau de la construction. Donc, dans ces circonstances-là, et puisque nulle part ailleurs on n'a ce genre de limite régionale là, où on pouvait le voir auparavant, dans l'industrie... dans la santé, dans l'éducation. On sait tous les débats qu'il y a eu afin d'obtenir davantage de régionalisation, davantage de mobilité. On pense que vous avez une belle opportunité aujourd'hui de régler cette situation-là, de venir se mettre au même niveau que les autres industries, les autres secteurs d'activité. Ne manquons pas le bateau et allons-y pour l'avenir et pour... pour assurer une certaine mobilité de la main-d'œuvre autant que possible.

Mme Cadet : J'ai bien compris...

Mme Cadet : ...votre deuxième recommandation, donc, porte sur la notion de polyvalence, donc vous nous dites que la définition proposée laisse beaucoup de place à l'interprétation et devrait inévitablement être précisée devant les tribunaux. Donc, peut-être vous entendre là-dessus. Puis, d'autre part... bien, en fait, votre recommandation précise que... ça, c'est dans les paragraphes introductifs, mais dans votre recommandation, donc, vous nous dites, donc, d'indiquer, à l'article 4.0.1 du règlement, que l'employeur aurait l'autorité de déterminer la répartition des tâches octroyées. Donc, quelles seraient les conséquences ou les risques de ne pas prendre en considération cette recommandation-là sur le droit de gestion?

M. Gagnon (Alexandre) :En fait, le message qu'on a aujourd'hui, c'est beaucoup de dire, considérant que... On comprend qu'il n'y a pas eu de consensus... lorsqu'il y a pu avoir des discussions au préalable avant le dépôt du projet de loi. Ça a amené à une définition qui est quand même assez, assez vague de qu'est-ce que va être la polyvalence qui va être acceptée. Dans ces circonstances-là, on veut qu'il y ait un message clair que la volonté du législateur, la volonté du projet de loi, c'est que cette interprétation-là soit vue très largement. L'objectif, c'est de... que... qu'il y ait un message clair qui soit envoyé, parce que... Évidemment, il y aura des conflits, il y aura des litiges éventuellement. On veut qu'aujourd'hui qu'il soit exprimé clairement que la volonté était que ce soit interprété le plus largement possible.

• (17 h 20) •

Mme Cadet : ...donc, votre recommandation au législateur, c'est qu'on laisse, donc, cette définition-là de polyvalence telle quelle, puis ensuite, donc, ça se précisera. Mais, pour vous, c'est un continuum normal, régulier, donc vous préférez qu'on ne touche pas, qu'on ne précise pas, à l'heure actuelle, la définition qui nous est soumise. C'est bien ça?

M. Gagnon (Alexandre) :Bien, ça va... à notre autre recommandation qui suit, là, en lien avec le nombre de métiers. Si vous... si vous réduisez le nombre de métiers qui sont réglementés au Québec, hein, les faire passer de 26 à cinq ou à sept, évidemment, le besoin de polyvalence, qu'ils soient réglementés par cette définition-là, sera moins important. Mais tant et aussi longtemps qu'on n'a pas obtenu une certaine normalité dans les métiers qui sont réglementés, dans la flexibilité des tâches qui seront effectuées, on aura besoin d'une grande flexibilité dans l'interprétation des clauses qui nous sont présentées dans la définition.

Mme Cadet : D'accord. Puis juste...

M. Gagnon (Alexandre) :On pourra en reparler...

Mme Cadet : Oui, c'est ça. Puis juste pour être bien certaine, pour le deuxième volet de ma question, qui était sur le droit de gestion, là, je comprends bien ce que vous dites, donc, l'interprétation plus... assez large, avec une intention très claire du législateur au règlement, donc, permettrait, donc, d'éviter différents... des différends en la matière. Je vous vois hocher de la tête, donc c'est bien ça.

Bien, vous avez fait vous-même, donc, la transition vers votre prochaine recommandation, sur la réduction du nombre de métiers progressive. Vous l'amenez sous l'angle de la pénurie de main-d'œuvre, ce qui n'est pas nécessairement ce qu'on a vu précédemment, en fait, par le biais de vos prédécesseurs ici. Donc, vous, donc, en quoi cette proposition-là, donc, viendrait, donc, amoindrir, donc, la pénurie de main-d'œuvre dans un secteur où on sait que la main-d'œuvre va être amenée à croître dans les prochaines années, avec l'augmentation des besoins?

M. Gagnon (Alexandre) :C'est une réalité qui est davantage dans les plus petits secteurs, les plus petits chantiers, dans les plus petits chantiers, où quelqu'un est limité dans certaines tâches. Il y a beaucoup de temps de va-et-vient et de temps improductif dans le travail d'une personne, puisqu'il ne peut pas... faire les... il est obligé d'attendre que l'autre spécialiste passe, et que l'autre entrepreneur passe pour faire... continuer les travaux. Donc, en ayant autant de métiers, ça nécessite beaucoup de va-et-vient, beaucoup de temps improductif, de temps d'arrêt de chacun des entrepreneurs. Et il nous semble important, pour maximiser le temps travaillé, le temps de présence, que cette personne-là ait le maximum de flexibilité, pour faire le maximum de tâches, et qu'il puisse ainsi être beaucoup plus productif sur les chantiers et donc requérir moins d'embauches d'autres travailleurs. Donc, on peut engager plus de travailleurs ou on peut rendre nos travailleurs actuels beaucoup plus productifs. Les deux façons de faire, il faut y travailler pour les... il faut les rendre possibles.

Mme Cadet : Parfait, je comprends. C'est un continuum, donc ils interagissent l'un avec l'autre, comme critère. Évidemment, donc, moi aussi, donc, j'irais vers la question de la négociation de la rétroactivité. En effet, donc, vous arrivez avec une proposition mitoyenne. Ici, donc, vous nous proposez que le... donc, on a... donc, d'enlever le fonds, de laisser ça pleinement aux parties. Est-ce que... Donc, je comprends que, pour vous, donc, il n'y a pas de nécessité de mettre en œuvre un mécanisme pour accompagner la permission, là, de pouvoir négocier la rétroactivité dans les conventions collectives? Donc, j'ai souvent posé cette question-là, donc, si ces deux propositions là sont un peu indissociables. Le ministre a parlé, donc, des... difficultés...

Mme Cadet : ...donc qui viendrait avec le fait d'avoir la rétroactivité seule en fait, de vous entendre là-dessus, je comprends que c'est... que vous laisserez ça libre, mais est-ce que vous verriez un autre type de mécanisme, par exemple, qui ne serait pas aussi contraignant que... contraignant que le fond, mais qui pourrait être applicable pour pouvoir répondre à certaines des interrogations que le législateur pourrait avoir?

M. Gagnon (Alexandre) :On pourrait inventer tout type de mécanisme. On pourrait proposer plein de choses. On pourrait par exemple dire que la rétroactivité, puis quantifier, serait perçue à partir de cotisations dans l'avenir pour payer ces cotisations- là. Mais ne prenez pas ma recommandation... ne prenez pas notre recommandation aujourd'hui parmi ça. On n'est pas les intervenants pour ça. Il faut mettre les bons acteurs autour de la table pour négocier ça. C'est eux qui vont déterminer les meilleurs moyens. Puis nous, ce qu'on veut, c'est que vous leur donniez la... l'ensemble des outils à disposition pour les négocier, les possibilités potentielles, là.

Mme Cadet : Merci. Donc, je biffe les notes que j'ai prises, vous me dites de ne pas tenir ça en considération, à la blague. Donc, je rétropédalage un peu, là, sur la recommandation plus... plutôt curieuse, donc d'inciter, si nécessaire, contraindre des travailleurs de l'industrie de la construction ayant fréquemment recours à l'assurance-emploi à participer à des programmes de formation visant l'acquisition des métiers supplémentaires. Est-ce que ce serait applicable, ça, comme... comme proposition? Comment vous voyez ça?

M. Gagnon (Alexandre) :Oui. Je vais laisser ma collègue Audrey répondre.

Mme Langlois (Audrey) :Parfait. Donc, bonjour. Alors, oui, on sait, l'industrie de la construction, c'est quand même un secteur où est-ce que ça peut être saisonnier, où ça peut être cyclique, ça peut dépendre également des régions et du niveau d'activité. Donc, ce qu'on a remarqué, notamment avec l'étude d'impact réglementaire que le gouvernement a fournie en amont de la présentation du projet loi 51, c'est qu'il y a quand même certaines professions qui ont une moyenne annuelle d'heures travaillées en deçà de 1 000 heures de travail. Donc, on voulait justement proposer que ces travailleurs-là puissent développer de nouvelles compétences, acquérir peut-être des nouvelles cartes de...

La Présidente (Mme D'Amours) : Je suis désolée, Mme, je suis désolée, c'est tout le temps que nous avions. Je...

Une voix : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Je dois passer la parole maintenant au député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous trois. Toujours un plaisir de vous voir en commission. Je fais un peu de millage sur la question de ma prédécesseure, en lien avec la rétroactivité. Moi, je... j'ai honnêtement été surpris de votre proposition, là, de dire qu'on devrait permettre aux parties de la négocier. Et je dis «surpris», pas tant en fonction de votre organisme que elle détonne de l'ensemble des autres organisations, du côté patronal, on va dire, qui sont passées aujourd'hui. Donc, je me réjouis que vous ameniez un peu cette note de nuance, j'oserais dire, dans ce débat-là. Parce qu'à mon avis c'est une forme, je dirais, de... presque de discrimination d'un secteur économique, qu'on ait décidé qu'il n'y ait pas de possibilité. Après ça, est-ce qu'il va nécessairement y en avoir une? Moi, je ne suis pas en train de dire qu'il faut qu'il y en ait obligatoirement une. C'est pour ça que la solution du ministre, moi, ne me convenait pas tout à fait. Puis, là-dessus, on se rejoint visiblement. Je la trouvais un peu compliquée. Je pensais qu'elle avait... j'étais convaincu qu'il avait une bonne intention, mais je la trouvais un peu compliquée. Bref, donc, salut, bravo pour votre recommandation à ce niveau-là. Je pense qu'avec un peu d'espoir, c'est peut-être vers là qu'on s'enligne tranquillement. On verra bien l'étude détaillée dans les prochaines semaines.

Je voudrais vous amener sur le dossier de la... de la présence des femmes dans l'industrie la construction. Plusieurs groupes en ont parlé. Il y a, entre autres, Action travail des femmes qui a fait la recommandation d'avoir des espèces de quotas, là, des programmes ouverts ou, je ne me souviens plus du terme technique, là, mais un nombre minimal de présence de femmes dans les contrats publics. Puis on sait bien que c'est l'État qui est le principal donneur d'ouvrage dans beaucoup de domaines. Est-ce que c'est une notion pour vous qui est dans la... dans le domaine de la raisonnabilité, de mettre ce genre de quotas là pour, dans les faits, aller un peu plus vite en matière de présence de femmes dans l'industrie?

M. Gagnon (Alexandre) :Le gros défi dans l'industrie de la construction pour attirer les femmes vient avec le marketing de la profession d'attirer ces femmes-là, mais aussi de les retenir. On... Il y a... il y a eu d'énormes... vous avez participé d'ailleurs à plusieurs discussions récemment, notamment avec le projet de loi n° 42, avec le projet de loi n° 59 en santé et sécurité, qui a... qui a mis de l'avant certaines cultures parfois un peu difficiles, un peu passées date, jusqu'à un certain point, de la façon qu'on... que... que... que c'est géré parfois dans l'industrie de la construction, il y a des belles mesures qui ont été proposées, quant à de la formation, quant à prévenir, à identifier les situations de harcèlement puis de... de... en milieu de travail. Donc, il y a tout un cycle pour s'assurer que c'est une industrie qui va être plus attirante pour attirer des candidatures, pour attirer des femmes et intégrer l'industrie de la construction. Si aujourd'hui on intégrait un quota dans certains contrats, ça ne serait pas par la mauvaise volonté des parties prenantes...

M. Gagnon (Alexandre) :...des parties prenantes que ça ne serait pas acquis, ce serait par la difficulté de cette industrie à attirer les femmes à venir travailler dans l'industrie. Il faut travailler par rapport à cet enjeu-là avant même de penser à mettre en place des quotas qui seraient hors de contrôle des personnes de... de venir à les intégrer et à les respecter éventuellement. Donc, il y a un travail préalable bien important à faire auparavant.

M. Leduc : Pardon?

La Présidente (Mme D'Amours) : 20 secondes.

M. Leduc : 20 secondes. Vous faites... raison de parler de la culture, mais il y a aussi, des fois, les patrons qui peuvent dire : J'ai entendu des histoires, moi, je n'embauche pas ça, des femmes. Ça fait que comment on traite ça autrement que par des quotas comme ça?

Mme Langlois (Audrey) :Si je peux me permettre, assez rapidement, on a quand même un comité infrastructure construction à la CCQ. Notre président de comité est une femme, et moi, j'ai remarqué qu'on avait beaucoup de femmes...

La Présidente (Mme D'Amours) : Ça tombe sur vous. Je suis désolée, madame, ça tombe sur vous. On a peu de temps, désolée. Je cède maintenant la parole au député de Jean-Talon.

M. Paradis : Merci beaucoup pour votre mémoire et votre présence parmi nous aujourd'hui. Vous... Sur la question du nombre de métiers, vous proposez donc que la Commission de la construction soit chargée, d'ici cinq ans, de réduire le nombre de métiers, et qu'à défaut le ministre le fasse. De manière intéressante, la commission est venue témoigner aujourd'hui, puis elle nous rappelle qu'il y a quatre piliers, là, vraiment importants dans tout ça, et qu'il y en a un que c'est la concertation. Ça fait partie du modèle québécois, puis le ministre, je pense, a beaucoup insisté là-dessus aussi, et c'est pour ça que, sur cette question-là, il s'en remet un petit peu, je pense, au Comité des... des relations de travail. Il va dire : On va envoyer, puis les gens vont discuter. Quel est l'effet, selon vous, de ce que vous proposez, justement, sur cette partie du modèle québécois, qui semble être une de nos forces, la concertation?

• (17 h 30) •

M. Gagnon (Alexandre) :On est dans le cœur de cette... de cette force-là du modèle québécois, la concertation. On veut passer par cette concertation-là. On veut que les gens, autour de la table de négociation, autour de la table de la Commission de la construction du Québec, que les comités qui sont constitués par la Commission de la construction du Québec travaillent ensemble à arriver à ce résultat-là. Cependant, le passé nous a démontré que, sans une certaine pression utile, un certain délai, sans un objectif devant eux, puis c'est commun à n'importe quelle table de négociation, entendons-nous, c'est difficile d'en arriver à un consensus puis à arriver au résultat. Donc, il faut leur donner un délai. Ça a... On a eu des bons résultats, par le passé, en amenant des délais précis pour amener cette pression et amener les gens à travailler sérieusement à l'atteinte de ce résultat-là.

M. Paradis : Très bien. Sur la question de la mobilité, il y a une phrase de la page 4 de votre mémoire, là, qui dit que, bien, les limitations à la mobilité ne peuvent plus être motivées par un objectif de protéger la main-d'œuvre régionale. J'aurais aimé vous entendre aussi, là, sur cette question là de l'intérêt des régions face à votre proposition.

La Présidente (Mme D'Amours) : En 35 secondes.

M. Gagnon (Alexandre) :Oui. Audrey, est-ce que tu veux y aller? Oui?

Mme Langlois (Audrey) :Je peux aller assez rapidement. Ce qu'on a observé, c'est, quand même, plusieurs régions où est-ce que les bassins de main-d'œuvre sont souvent ouverts. Donc, il y a quand même un besoin de main-d'œuvre un peu partout au Québec. On a un taux de postes vacants qui demeure quand même relativement élevé en construction. Et, autrement dit, la mobilité de la... la mobilité régionale, là, il faut la regarder d'un point de vue d'un travailleur. Est-ce que ça veut dire qu'un travailleur qui est à Montréal va aller travailler nécessairement en Beauce? Pas obligatoirement, mais il peut y avoir des chantiers qui peuvent devenir très, très intéressants et qui peuvent inciter à se déplacer.

Donc, pour nous, cette restriction là, aujourd'hui, n'a plus sa raison d'être, dans un contexte où est-ce qu'on a des projets d'infrastructure de plus en plus importants. On a d'autres grands projets qui arrivent bientôt avec Hydro-Québec, où est-ce qu'on va avoir besoin de 35 000 travailleurs. Et ça, c'est une notion que je vais vous marteler aujourd'hui, c'est important de prendre en considération, les besoins sont grandissants, et les travailleurs qui souhaitent se déplacer d'une région à une autre devraient pouvoir le faire.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci, je suis désolée. Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin que nos prochains invités prennent place.

(Suspension de la séance à 17 h 33)


 
 

17 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 17 h 37)

La Présidente (Mme D'Amours) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite maintenant la bienvenue à la Régie du bâtiment du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à une période d'échange. Je vous invite donc à vous présenter et à nous donner votre exposé, s'il vous plaît.

M. Beaudoin (Michel) : Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes et MM. les députés, c'est avec grand plaisir que je m'adresse à vous dans le cadre de la consultation particulière sur le projet de loi no 51. Pour l'occasion, je suis accompagné de Mme Sylvia Garcia, vice-présidente à la réglementation et à l'innovation. M. Stéphane Petit, vice-président aux relations à la clientèle, et Jean-François Paquette, vice-président aux enquêtes. Je suis Michel Beaudoin, président-directeur général de la Régie du bâtiment du Québec.

D'emblée, je tiens tout d'abord à préciser que la RBQ est favorable aux objectifs poursuivis par le projet de loi de modernisation de l'industrie de la construction, notamment en ce qui a trait à la mise en place du principe de polyvalence dans l'organisation du travail. Nous aurons d'ailleurs l'occasion d'y revenir. La RBQ n'est bien sûr pas directement visée par le projet de loi no 51. Toutefois, à titre d'acteur clé de l'industrie, la RBQ contribue à améliorer la productivité dans l'industrie de la construction au Québec.

Ce projet de loi comporte des dispositions relatives à la mobilité et à la polyvalence des travailleurs de construction. Rappelons que les employeurs...

M. Beaudoin (Michel) : ...travailleurs doivent être titulaires d'une licence d'entrepreneur permettant la réalisation des travaux de construction. Par conséquent, toute modification apportée aux règlements applicables aux travailleurs de la construction peut avoir un effet sur l'entrepreneur de construction. À cet égard, notez que la RBQ a déjà... et est déjà en processus de modernisation. Nous vous exposerons aujourd'hui les principaux projets et, bien sûr, ses réalisations.

D'entrée de jeu, permettez-nous de vous présenter la RBQ en quelques mots. La RBQ a pour mission de surveiller l'application de la Loi sur le bâtiment, notamment en vue d'assurer la protection du public. Elle veille à la qualité des travaux de construction et à la sécurité des personnes en adoptant et en appliquant notamment le code de construction et le code de sécurité dans 11 domaines d'intervention. La RBQ encadre aussi la qualification professionnelle des entrepreneurs de même que leur probité. Au Québec, on compte près de 53 000 entrepreneurs détenteurs d'une licence, incluant ceux dont la qualification professionnelle relève de la Corporation des maîtres électriciens ou de la Corporation des maîtres tuyauteurs. Par ses actions, la RBQ joue un rôle clé pour assurer la qualité des travaux de construction et de sécurité du public. Cette responsabilité est toutefois partagée par l'ensemble des acteurs de l'industrie. Nous pensons, entre autres, aux concepteurs, tels que les architectes, les ingénieurs, les technologues, ou aux entrepreneurs, mais aussi aux travailleurs et aux propriétaires. Tous ont un rôle à jouer pour assurer la qualité des travaux de construction et la sécurité du public. La Régie du bâtiment n'est pas seule.

• (17 h 40) •

Le projet de loi n° 51 est un pas supplémentaire vers la modernisation de l'industrie de la construction. La RBQ contribue aussi à cette modernisation grâce à des projets importants en cours, entre autres en matière de réglementation et de qualification. La RBQ est responsable de faire évoluer le code de construction et le code de sécurité dans ces domaines d'intervention. Ces codes évoluent en fonction des normes les plus à jour et des nouvelles technologies. La RBQ siège sur près de 80 comités nationaux où on élabore les normes techniques applicables à l'industrie de la construction. En 2020, la régie... le Québec a signé un accord de conciliation qui vise à harmoniser les codes de construction applicables dans les différentes provinces et des territoires. Cette harmonisation permettra de faciliter la mobilité de main-d'œuvre et le commerce et de réduire les coûts pour les entreprises qui exercent leurs activités dans plusieurs provinces et territoires. De plus, l'accord prévoit de réduire les délais d'adoption pour avoir les normes les plus récentes. Déjà, depuis la signature de l'accord, nous avons réduit de deux ans les délais d'adoption par le Québec, qui étaient initialement de cinq ans. D'ailleurs, des projets de règlement visant l'adoption des codes visés par cet accord ont été publiés en décembre 2023 et en février 2024 pour obtenir les commentaires des publics.

La RBQ joue un rôle important dans les travaux d'harmonisation. Ses actions répondent aux objectifs de productivité sur les chantiers et de mobilité de main-d'œuvre. De plus, la Régie du bâtiment travaille à faire en sorte que les mêmes normes de construction soient applicables à l'ensemble des municipalités du Québec. En effet, la Loi modifiant diverses dispositions principalement aux fins d'allègement du fardeau réglementaire et administratif, c'est-à-dire le projet de loi n° 17, a été sanctionnée le 27 octobre dernier, qui octroie à la RBQ les pouvoirs requis pour atteindre cet objectif. Il sera alors plus facile pour un entrepreneur et ses travailleurs de construire des bâtiments, puisqu'ils devront respecter les mêmes normes sans égard aux municipalités. Cela réduira le risque d'erreur et améliorera la qualité de la construction, étant donné... les plus hauts standards s'appliqueront, que les bâtiments soient construits à Gaspé ou à Montréal. Cette simplification des règles applicables est un moyen concret pour favoriser la qualité de la construction et la productivité.

La qualité des travaux et la sécurité du public doivent également reposer sur la qualification adéquate des entrepreneurs. C'est pourquoi la RBQ poursuit ses travaux afin de moderniser son système de qualification. La RBQ évalue les compétences professionnelles des entrepreneurs dans plusieurs volets, soit l'administration, la gestion de sécurité sur les chantiers de construction, la gestion des projets de chantier et...

M. Beaudoin (Michel) : ...bien sûr, l'exécution de travaux de construction. Pour obtenir une licence de répondant, l'entreprise doit démontrer à la... à la RBQ qu'il détient les compétences dans ces domaines.

Depuis 2022, de nouvelles obligations de formation continue s'appliquent au répondant en exécution de travaux de certaines sous-catégories. Ces nouvelles obligations répondent aux demandes de l'industrie et ont été élaborées en partenariat avec la CMEQ et la CMMTQ. Ces corporations sont d'ailleurs venues en commission vous parler de cette obligation. La formation continue obligatoire vise à maintenir les compétences des répondants, notamment par la connaissance des règles de l'art, des codes et des normes les plus à jour.

Ce projet est attendu depuis plusieurs années. Il s'agit d'un changement de culture important dans l'industrie de la construction. Pour la RBQ, il s'agit d'une première phase qui servira d'assise pour des élargissements éventuels dans cette obligation à d'autres répondants. La première période de référence se termine d'ailleurs le 31 mars prochain.

La RBQ salue aussi la modification apportée par le projet de loi n° 51 qui vise à accroître la polyvalence dans certains métiers. Ce principe est en cohérence avec la notion de travaux connexes utilisée par le règlement sur la qualification professionnelle des entrepreneurs de construction pour un constructeur propriétaire établi par la RBQ. En effet, la notion de travaux connexes permet à une... une certaine flexibilité, je m'excuse, en prévoyant que le titulaire d'une licence peut exécuter certains travaux connexes à ceux compris dans les sous-catégories qui le détiennent. Nous souhaitons rassurer les parlementaires sur le fait que la RBQ verra à arrimer ces deux notions, et ce, afin d'assurer une cohérence entre la réglementation de la Commission de la construction du Québec et celle de la RBQ. Nous sommes d'avis que cette polyvalence doit répondre aux exigences de santé et sécurité autant pour les travailleurs que les occupants des bâtiments. Nous sommes heureux de constater que le principe de polyvalence est bien défini et encadré par le projet de loi n° 51.

En conclusion, nous tenons à souligner à nouveau l'appui de la RBQ au projet de loi n° 51. Comme le ministre l'a mentionné en commission parlementaire, ce projet de loi est un jalon dans les travaux de modernisation dans l'industrie de la construction. La RBQ collabore aux initiatives visant à cette modernisation. En plus des réalisations concrètes exposées par la RBQ, celle-ci travaille en collaboration avec ses partenaires afin de mettre en place un nouveau modèle d'inspection et de surveillance et assure la qualité des travaux et la sécurité du public. La RBQ aide aussi à mettre en œuvre également de nouveaux encadrements des inspecteurs en bâtiment et en habitation. De plus, il continue à faire progresser sa réglementation et ses pratiques. Soyez assurés que tout le personnel de la RBQ et même que les membres du Conseil d'administration sont investis et mobilisés et déterminés à réaliser ces mandats.

La RBQ remercie les parlementaires pour leur travail sur cet important projet de loi. Nous sommes disponibles pour vos questions.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons débuter notre période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Merci, M. Beaudoin, à vous et votre équipe, pour votre contribution, pour la préparation du mémoire puis pour la livraison que vous venez de faire. Évidemment, vous êtes un acteur éminemment intéressé par les objectifs du projet de loi. Je comprends que vous ne pouvez pas vous exprimer sur le mérite, mais en même temps, vous jouez un rôle. Puis j'aime bien le mot que vous utilisez, le projet de loi est un «jalon» parmi bien d'autres.

Ça fait que je vais y aller plus avec des questions de précision ou des commentaires que je pourrais faire. Mais vous émettez combien de licences d'entrepreneurs par année? Est-ce que c'est...

M. Beaudoin (Michel) : 53 000 licences.

M. Boulet : 53 000?

M. Beaudoin (Michel) : Incluant ceux de la CMEQ et de la CMMTQ.

M. Boulet : O.K., les maîtres électriciens et les maîtres tuyauteurs?

M. Beaudoin (Michel) : Tout à fait.

M. Boulet : Et il y a combien de ces licences-là qui réfèrent à la notion de travaux connexes? On nous parlait, un groupe qui est venu ici, de 4 %, 5 % des licences. Ou quand on définissait les tenants et aboutissants de ce à quoi l'entrepreneur était autorisé, on utilisait...

M. Beaudoin (Michel) : La notion de travaux connexes peut être utilisée dans tout domaine, principalement dans le domaine des licences touchant...

M. Beaudoin (Michel) : ...le domaine du... des licences générales ou, si jamais il y avait une proposition de faite où la licence... les spécialisés pourraient être interpellés, ça touche particulièrement ceux des... bien, j'allais dire à peu près l'équivalent... Je n'ai pas le nombre exact avec moi, mais peut-être Jean-François peut m'aider, là.

M. Paquet (Jean-François) : Oui, si vous voulez, bien, la notion de connexité peut s'appliquer à la majorité des entrepreneurs qui ont des... différentes sous-catégories. Dans le fond, c'est un principe qui permet justement d'avoir une flexibilité dans les travaux qui sont reliés ou qui sont nécessaires à l'exécution de leur contrat principal.

M. Boulet : O.K. Vous mentionnez aussi... on nous a parlé de l'importance de sensibiliser les détenteurs de licence à la diversité. On va commencer par la diversité. Après ça, il y a la prévention du harcèlement. Puis je sais que vous avez mis en place des obligations de formation continue pour ce que vous appelez les répondants en exécution de travaux, comme une première phase. Je pense que ça, c'est une réglementation qui date de 2022. Ma question : C'est quoi, la formation pour s'assurer que les entrepreneurs intègrent bien des concepts d'inclusion et de diversité dans l'industrie de la construction? Est-ce qu'il y a des notions, dans votre formation, qui réfèrent à l'inclusion et à la diversité?

• (17 h 50) •

M. Beaudoin (Michel) : Dans la notion qui touche la formation continue, on inclut des obligations de formation qui touchent, en principe... Puis là je vais être plus général. Pour les répondants techniques, 18 heures aux deux ans. Sur les 18 heures, il y a huit heures qui sont... touchent les normes. Et pour ce qui est du deuxième huit heures potentielles, ces huit heures-là sont desservies pour, entre autres, toucher l'inclusion, avoir de la formation touchant, entre autres, le harcèlement psychologique, ou des choses comme ça. Généralement, c'est aux... ces heures-là sont transférées chez nous et permettent, éventuellement, aux entrepreneurs d'être mieux formés, hein? Vous le savez, les normes évoluent rapidement. Et quand on parle d'inclusion, chez nous, inclusion des femmes, il y a tout près de 10 % des répondants techniques qui sont des femmes chez nous, dans les entreprises et dans les détenteurs de licence, alors c'est important que ces gens-là soient inclus.

On essaie aussi de se rapprocher... On est allés, dernièrement, voir les autorités, avec la CCQ, pour être capables de travailler et rapprocher la formation, pour que les gens et les Autochtones soient aussi impliqués. On veut rapprocher la régie des milieux en région aussi pour permettre d'avoir un plus grand accès à la licence d'entrepreneur. Alors, cette inclusion-là se fait par la formation, par la porte d'entrée éventuellement, qui est une licence d'entrepreneur et qui nous permet éventuellement d'avoir des gens un peu... un peu partout, qui peut aller se chercher une licence d'entrepreneur. Alors, l'inclusivité se fait à partir de l'entrepreneuriat d'une personne, que tu sois un Autochtone, un Québécois, une femme. Les gens sont de plus en plus intéressés à devenir entrepreneurs au Québec. Et, quand on regarde les chiffres, en 2024, il y avait tout près de 28 000 entrepreneurs. Aujourd'hui, on a tout près de 53 000 entrepreneurs. Donc ,il y a beaucoup, de plus en plus d'intérêt aux gens de devenir entrepreneurs au Québec.

M. Boulet : ...ce n'est pas la mission primaire de la Régie du bâtiment que de former nécessairement sur des concepts comme la diversité ou la prévention du harcèlement. Votre mandat, c'est de voir à l'application de la Loi sur le bâtiment, de vous assurer que les licences sont émises à des entrepreneurs qui ont les qualités puis les compétences pour bien construire le Québec et... Mais quand même, c'est devenu un enjeu tellement important, pas que dans l'industrie de la construction. Mais tenant compte de votre rôle, tenant compte des obligations de formation continue pour les répondants et tenant compte qu'il y a une nouvelle phase à venir, vous vous exprimez bien sur la diversité. La diversité, c'est les groupes qui sont reconnus et qui nous interpellent dans le projet de loi. Il y a les communautés autochtones. Au-delà des femmes, il y a les personnes immigrantes et les personnes des minorités visibles. J'imagine... Ce que vous me mentionnez, c'est qu'il y a 10 % des détenteurs de licence qui sont des femmes.

M. Beaudoin (Michel) : Des répondants techniques.

M. Boulet : O.K.

M. Beaudoin (Michel) : Vous avez quatre...

M. Boulet : Oui, allez-y.

M. Beaudoin (Michel) : Vous avez quatre répondants techniques dans le... pour avoir l'acquisition d'une licence, d'être propriétaire d'une licence ou d'être entrepreneur ou détenteur d'une licence de la Régie du bâtiment, et on a tout près de 10 % qui sont des femmes, qui sont répondantes dans des entreprises. Vous avez aussi des groupes qui se sont mis en place...

M. Beaudoin (Michel) : ...les Elles de la construction, je pense que vous en avez parlé d'ailleurs un peu, qui permettent à elles aussi d'aider à faire grandir l'industrie et à intéresser les femmes à venir dans l'industrie. Je vous parlerai qu'on a participé au Cercle économique régional des Premières Nations pour aider à intéresser et à rapprocher les Premières Nations à venir... à être détenteurs de licence. Il y a des entreprises qui ont aussi... des entreprises autochtones qui sont très proactives dans le Nord. Alors, cette ouverture-là est toujours très grande, et oui, il y a tout près de 10 % des femmes qui sont répondantes.

M. Boulet : Vous connaissez les Elles de la construction...

M. Beaudoin (Michel) : Très bien.

M. Boulet : ...vous savez que je les ai rencontrées au centre-ville de Montréal il y a deux semaines. Ils sont à construire une clinique de fertilité au centre-ville de Montréal. Puis effectivement j'ai rencontré une tuyauteuse, mais elle était la seule sur les 20 salariés ou travailleurs, travailleuses de la construction dans la construction de ce projet-là. Mais j'ai rencontré les membres de leur conseil puis les salariés présents sur le chantier. C'était vraiment intéressant, puis on a parlé beaucoup d'intégration des femmes.

Je veux aussi qu'on parle d'un sujet qu'on n'a pas tant abordé, c'est le travail au noir puis l'évasion fiscale. Évidemment, je vais me servir un peu de votre présence pour faire un peu de pédagogie, parce que le collègue de Jean-Talon en a fait référence, il y a des subventions qui sont consenties par Québec et il y a du travail en collaboration qui se fait par la CNESST, la CCQ et la RBQ. Donc, c'est des montants spécifiques à chacun. Puis, vous savez, parce que vous travaillez en collaboration avec les deux autres partenaires dont j'ai parlé, mais la CCQ, puis Mme Murray ne l'a pas détaillé, là, mais il y a des contrevenants chroniques. Et il y a des interventions qui se font, il y en a à peu près 200 par année. Il y a des... à peu près 5 000 visites de chantier puis il y a des ressources qui sont dédiées à ce qu'il y ait le moins d'évasion fiscale, puis on n'est malheureusement pas un secteur qui est à l'abri de l'évasion fiscale ou du travail au noir.

Il y a la CNESST qui fait des informations avec les ministères, puis avec la sécurité publique, puis des interventions. Mais la RBQ, je voyais, puis j'aimerais ça que vous m'en parliez, mais il y a à peu près 10,5 millions, en tout cas, il y a autour de 10 millions par année qui sont consentis par Québec à ces trois organismes-là pour lutter contre l'évasion fiscale. Mais je voyais à peu près 15 000 vérifications que vous faites, j'imagine, avant d'émettre des licences pour entrepreneur, faites des vérifications d'antécédents judiciaires et des suivis personnalisés de sécurité. Est-ce que vous pouvez nous en parler, puis je suis convaincu que ça intéresse tout le monde?

M. Beaudoin (Michel) : Grand plaisir. C'est pour ça que je me fais accompagner de mon vice-président... à la... aux enquêtes. Alors, allez-y, M. Paquet. 

M. Paquet (Jean-François) : Oui, Mme la Présidente. Pour ce qui est des vérifications d'antécédents criminels qu'on effectue en collaboration avec la Sûreté du Québec, on a un mandat de surveiller la probité, bien sûr, des entrepreneurs. Donc, s'ils ont été reconnus coupables dans les dernières années de, par exemple, de fraude ou de collusion, à ce moment-là, c'est des actes criminels qui empêchent d'avoir une licence. Donc, on fait des vérifications préalables avant la délivrance d'une licence, d'une part, et des suivis personnalisés de sécurité... Après la vérification, on a un automatisme, dans le fond, qui permet de s'assurer que, s'il y a des condamnations ultérieures après la délivrance de la licence, à ce moment-là, on peut reconvoquer l'entrepreneur devant les régisseurs de la régie pour soit suspendre ou annuler, le cas échéant, tout dépendamment des condamnations qui auraient fait l'objet pour s'assurer d'un suivi de la probité en continu des conditions de maintien de la licence, en somme.

M. Boulet : Ça va. Et vous faites à peu près 15 000 vérifications.

M. Paquet (Jean-François) : Oui, dans le fond, il y a des vérifications, comme vous avez mentionné, pour tout ce qui est antécédent, la probité, les suivis personnalisés, mais il y a aussi toutes les dénonciations qu'on reçoit des partenaires, les plaintes de la clientèle, mais on fait aussi, bien sûr, nos propres vérifications terrain, notamment dans le domaine de la construction résidentielle. Vous avez parlé d'accès construction, à juste titre, justement, avec nos partenaires, on a mis en place cette année, en 2023-2024, pour la Régie du bâtiment, une unité dédiée particulièrement d'inspecteurs en conformité réglementaire, qui s'adressent...  qui font des vérifications seulement pour le domaine résidentiel. Donc, on est rendu à près de 1 700 chantiers vérifiés au 31 décembre et plus de 2 000 entrepreneurs... 2800 entrepreneurs...

M. Paquet (Jean-François) : ...qui ont été vérifier sur les chantiers dans le... avec une priorisation pour le secteur résidentiel, incluant la rénovation.

M. Boulet : Super. Puis, quand vous dites : Accès construction, accès, c'est l'acronyme qui réfère à Action concertée pour contrer les économies souterraines. C'est bien ça?

M. Paquet (Jean-François) : Tout à fait.

M. Boulet : En plus, vous feriez à peu près 2000 interventions sur les chantiers. Ça, vous faites des interventions pour s'assurer de la conformité à la loi sur le bâtiment, puis vous... vous faites une vérification, j'imagine, de certains aspects de probité puis de...

M. Beaudoin (Michel) : Accès Construction est surtout axé sur la collaboration entre la CCQ, la CNESST, le ministère du Revenu, même la police, même l'UPAC, d'être capables ensemble de faire des échanges d'informations qui nous permettent d'agir adéquatement dans les chantiers.

M. Boulet : C'est tellement important, ne pas travailler en silos. Et là, je finissais avec ça, il y a à peu près 2000 interventions sur les chantiers, mais il y a 39 journées, ce que vous appelez des interventions concertées. Donc, la Régie du bâtiment, avec la commission de la construction, la CNESST et Revenu Québec, qui est concernée au premier plan.

M. Beaudoin (Michel) : Tout à fait.

M. Boulet : Et ça, comment ça fonctionne, ces journées-là d'interventions concertées?

• (18 heures) •

M. Beaudoin (Michel) : Je vais peut-être laisser Jean-François.

M. Paquet (Jean-François) : Oui, et effectivement, donc, à chaque mois, on a des journées dédiées avec nos partenaires pour intervenir, dans le fond, dans certaines régions, pour faire des vérifications. Ça nous permet à ce moment-là de partager de l'information et d'agir en commun justement par la suite dans... dans nos organisations respectives, on peut agir, faire de la récupération fiscale pour Revenu Québec ou encore pour CNESST, s'assurer de... que les salariés sont tous déclarés, sont dans les bonnes unités d'accréditation. Et, pour nous, on s'assure, évidemment, qu'ils sont conformes au niveau des répondants des catégories de licence. Et bien sûr que tout est en règle au niveau des personnes impliquées dans l'entreprise.

M. Beaudoin (Michel) : Je me permettrais d'ajouter, M. le ministre, je pense que ce qui est important, c'est surtout l'échange d'informations et la collaboration, elle est en amont, mais aussi le citoyen qui intervient dans ces domaines-là et qui nous aide aussi à dénoncer certaines situations. Et d'ailleurs, on porte beaucoup d'actions en disant qu'un travail fait souterrain ou un travail au noir, ce n'est pas une garantie de qualité. Alors, pour nous, on insiste sur le fait d'être... d'aller de l'avant et de dénoncer ces situations-là, s'il y avait des choses particulières.

M. Boulet : Il y a un impact sur les ressources fiscales au bénéfice des Québécois, Québécoises. Puis le ministère des Finances a toujours considéré qu'Accès construction avait un bénéfice pour le maintien de l'équilibre des finances publiques. Puis ça, c'est dans notre secteur.

M. Beaudoin (Michel) : On parle de 5 milliards d'évasion fiscale.

M. Boulet : Oui, tout à fait. Quand même. Et je veux simplement souligner en terminant le travail que vous faites puis l'engagement de la RBQ à continuer dans cette direction-là, puis ce que vous faites pour l'harmonisation des codes, pour la réduction des délais de construction, les coûts, ça aussi, ça joue un rôle qui est vital, là, dans le vaste chantier de modernisation de la construction. Et c'est tout à fait compatible avec ce que nous faisons dans le projet de loi n° 51. Ça fait qu'il y a une symbiose, il y a une concordance qui va nous aider, qui va faire du Québec non seulement un pionnier, mais un environnement où la construction est un secteur qui est inclusif, qui est diversifié, qui est performant puis qui fonctionne de la manière la plus harmonieuse possible. C'est sûr qu'on sera toujours perfectibles, c'est sûr qu'on aura constamment à s'analyser puis à se faire des plans pour nous permettre d'atteindre nos objectifs. Mais nos objectifs sont ceux des Québécois puis des Québécoises. Alors, merci de votre présence, merci de votre engagement. Puis transmettez nos remerciements à toute l'équipe de la Régie du bâtiment du Québec.

M. Beaudoin (Michel) : Oui, ils sont tous là, M. le ministre, pour vous.

M. Boulet : Ils sont tous là. Oui, j'en vois... j'en vois quelques-uns. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Donc, maintenant, je cède la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Cadet : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup, donc, à l'équipe de la Régie du bâtiment d'être avec nous cet après-midi. Donc, le dernier groupe, mais non le moindre. Donc, on termine avec les différentes notions que vous abordez dans votre mémoire et votre présentation. Le premier élément que j'ai en tête, c'est la question de la formation continue. Et évidemment, vous avez... bien, vous l'avez nommée, puis vous l'indiquez également, là, dans le document, là, que vous nous avez transmis, donc, vous avez... vous les...


 
 

18 h (version non révisée)

Mme Cadet : ...entrepreneurs ont certaines obligations en matière de formation continue, notamment des répondants. J'en comprends par là que vous avez une certaine expertise dans le domaine de la formation continue. Vous avez suivi des travaux, vous avez vu que plusieurs groupes sont venus, en fait, nous dire : Donc, on pourrait s'inspirer de ce qui se fait du côté de la RBQ en matière de formation continue et exiger le même type d'obligations du côté des travailleurs, notamment, bon, on l'a vu, donc, par exemple, qu'en matière, donc, de prévention, de harcèlement, etc.

Advenant le cas que nous, comme législateurs, donc, on adopterait, donc, ce type de proposition là, de dispositions législatives là, comment la RBQ pourrait être une ressource pour inspirer la CCQ? Donc, comment est-ce que vous pourriez déployer votre expertise pour que ce type de recommandation là soit mis sur pied de façon adéquate?

M. Beaudoin (Michel) : D'entrée de jeu, je veux juste quand même faire un historique sur la formation continue qui date de quelques années, et qu'on a fini par faire aboutir en 2019-2020. Merci, M. le ministre, parce que ça a permis d'aller de l'avant et faire en sorte qu'on ait des entrepreneurs, hein, parce que ça évolue rapidement les codes, et les codes changent, et pendant quelques années, pendant des années, on demandait de la formation continue pour nos répondants.

Je veux juste dire que la majorité des répondants sont des travailleurs dans la propre... dans leur propre industrie. Quand on parle de répondants, c'est des travailleurs qui sont sur le chantier et qui doivent... bien sûr, là, il y a 27 000 qui sont assujettis, c'est la première phase, et on veut à grandir ça à l'ensemble des répondants, et c'est les orientations qu'on peut prendre.

C'est sûr que s'il y avait des choix, pour nous, il y a des... des dispensionnaires, c'est Mme Garcia qui en est responsable puis qui pourrait vous en parler, mais pour nous, ce qui est important, il faut que l'entrepreneur, il faut que les répondants de l'entreprise soient au fait des normes des plus récentes pour qu'on soit capables ensemble de faire évoluer l'industrie de la construction rapidement. Il y a des nouvelles données qui rentrent, on parle du BIM, on parle des normes qui vont passer de cinq à trois à 18 mois, on a l'harmonisation des codes, alors tout évolue aussi rapidement et c'est certain que toute disposition qui peut aider à faire en sorte que les gens comprennent plus adéquatement, nous, on va être ouverts.

À cette heure, ma spécialité, c'est le domaine de l'entrepreneuriat, c'est les entreprises et les répondants. Et c'est sûr que notre expertise pourrait servir éventuellement à échanger avec nos collègues, ce qu'on fait déjà, et je pense que, dans ce contexte-là, il y a un beau travail qui se réalise.

Mme Cadet : Merci beaucoup. Sur une autre lancée, la question du cloisonnement, puis évidemment, ça, je comprends que vous ne vous prononcerez pas donc sur précisément sur les propositions qui ont été mises de l'avant par les groupes. Donc, puisque vous êtes du côté des entrepreneurs, peut-être de façon plus générale peut-être nous expliquer, donc, comment, le... en raison, donc, de l'historique qu'on a que le modèle d'affaires des entrepreneurs spécialisés s'est créé ou s'est adapté à notre législation, donc, en matière, donc, de cloisonnement des métiers. Et advenant, donc, le cas qu'il y ait des modifications, donc, à cet effet, évidemment on parle de polyvalence dans le projet de loi tel que libellé, mais on discute, on en... on verra où est-ce qu'on ira, donc, du côté de l'étude détaillée. Peut-être, vous entendre, donc, sur cet élément là, je pense que ça pourrait nous outiller, nous, comme législateurs.

M. Beaudoin (Michel) : Il est... il est un peu difficile pour moi de m'expliquer sur le cloisonnement, j'ai moins de spécialistes et de spécialités dans ce domaine-là, mais quand on parle de polyvalence, on sent une volonté des gens et des entrepreneurs de voir à faire en sorte qu'on puisse être plus polyvalents au Québec, et ça, c'est des demandes qui sont faites.

Pour moi, la notion de cloisonnement, je ne suis pas très spécialisé, j'aimerais mieux ne pas m'impliquer dans ce domaine-là et je vais m'en tenir bien sûr à la notion d'entrepreneur et de répondants techniques là-dessus.

Mme Cadet : Merci. Qualité des travaux. Évidemment, donc un peu plus votre spécialité ici. Nous comme législateurs, est ce que vous auriez des conseils, mais en fait ce qu'il ne faudrait pas faire, là? Pas nécessairement vous prononcer sur les dispositions du projet de loi, mais étant donné votre expertise, s'il y avait donc une avenue. Vous dites : Non, il ne faudrait pas que le législateur, donc, se dirige là parce que ça, ça pourrait affecter la qualité des travaux. Ce serait quoi vos conseils pour nous?

M. Beaudoin (Michel) : Je m'alimente beaucoup de ce qui s'est discuté durant la... cette consultation-là et je pense que ça revient souvent : les planifications fonctionnelles et techniques, de faire respecter les choix et de grandir adéquatement là-dedans. Je pense que, quand il y a des modifications qui sont faites en cours de chantier, ça peut être plus difficile aussi, autant pour les travailleurs que les entrepreneurs. Encore là, je vais me restreindre un peu plus dans... Ma bonne... ma bonne connaissance des licences et de la formation est de s'assurer que les normes évoluent adéquatement au Québec...

Mme Cadet : ...je me demandais aussi comment le projet de loi ou, en fait, l'essence donc de travailler sur la productivité et l'efficacité des travaux, quel impact, donc, ça pourrait avoir, donc, pour éviter des situations, là, comme celles qu'on a vues dans... dans le faubourg Boisbriand? Est-ce que vous avez une opinion là-dessus?

M. Beaudoin (Michel) : Dans un faubourg Boisbriand, c'est à peu près voilà 15 ans, c'est quand même... L'industrie a évolué depuis ce temps-là. Je pense que la responsabilité des entrepreneurs a aussi grandi. On parle de responsabilité partagée, autant des concepteurs. Il y a la notion qui touche aussi de la... du rôle des ingénieurs, du rôle du concepteur, de suivre les plans adéquatement. Alors, quand... Je pense que tout a évolué. Et vous allez éviter un peu, parce que c'est quand même un conflit qui est... qui est quand même là. La régie n'est pas nécessairement impliquée dans cette démarche-là. Je suis très empathique à ce qui se passe dans Boisbriand. Je ne trouve pas ça agréable parce que c'est encore une fois l'industrie qui paie. Mais en même temps on verra les résultats. Mais je le répète, les entreprises de construction au Québec, c'est des gens qui sont dévoués à leur industrie. Les travailleurs, ils sont dévoués aussi. Il n'y a pas personne qui rentre sur un chantier en voulant faire de la mauvaise construction. Et si c'était le cas, bien, on a des vice-présidents enquête puis on a des organisations qui travaillent à régulariser les situations qui pourraient être délicates ou au détriment d'un citoyen.

• (18 h 10) •

Mme Cadet : Donc, l'industrie a évolué, donc, dans les 15 dernières années, vous l'avez bien mentionné que c'est exact. Est-ce que vous pensez... Parce qu'évidemment, dans l'intervalle, on n'a pas ouvert la loi R-20. Donc, ma question, ici, c'est est-ce que, dans... en ouvrant la loi R-20, est-ce qu'il aurait des dispositions qui pourraient nous permettre, donc, d'améliorer encore plus, donc, le travail qui s'est fait dans la dernière décennie et demie à cet égard?

M. Beaudoin (Michel) : Je comprends ce que vous dites. C'est un peu difficile pour moi de parler R-20, mais quand j'entends parler de R-20 et que j'entends parler de... des enjeux de mobilité, ou des enjeux de polyvalence, ou les travaux connexes, l'importance d'avoir un code unique aussi au Québec, c'est ça qui évolue, hein? Je veux revenir sur cette notion-là, hein? On construisait avec un code totalement différent et moi... L'année dernière, on a réussi enfin à avoir la notion de code unique acceptée dans un projet de loi quand, pendant 20 ou 25 ans, il y avait des... des municipalités qui construisaient dans des normes datant de 1985, ce qui n'était tout à fait pas normal.

Alors, c'est dans ce rôle-là que la régie veut faire en sorte que, lorsque les façons vont être claires, la façon de travailler, avec des codes uniques, des actions concertées, une qualification adéquate, je pense que, dans ce contexte-là, on va améliorer l'industrie. Et l'industrie quand même... Il y a des beaux travaux qui se font au Québec, il y a des gens dévoués, il y a des entreprises dévouées. 80 % sont des PME, des petites entreprises. Il faut les appuyer et il faut être capables aussi de les faire grandir avec les normes qui changent aussi rapidement qu'on vit aujourd'hui, là.

Mme Cadet : Certains intervenants sont venus nous parler, donc, de réduction du nombre de métiers. Vous avez donc la polyvalence. Donc, pour vous, donc, c'est... c'est un élément, donc, c'est un principe que vous appuyez ici. Ces types de propositions là, donc, d'aller dans un modèle similaire à celui l'Ontario, est-ce que le pendant, pour vous, ça amènerait plus d'inspections.

M. Beaudoin (Michel) : De un, notre système québécois est analysé par les autres provinces. Je suis co-président d'un comité national, et les sous-ministres des autres provinces sont intéressés à voir des façons dont on travaille au Québec. On est la seule province qui a une qualification professionnelle de nos entrepreneurs. On nous pose des questions ailleurs et on nous dit ça nous intéresse. Les façons sont différentes à travailler dans d'autres provinces, mais en résumé, pour moi, c'est de continuer à faire évoluer la qualification de nos entrepreneurs. Et bien sûr, les entreprises et les travailleurs vont être intéressés à aller... à travailler avec des entrepreneurs compétents. Alors, c'est dans ce contexte-là qu'il faut continuer à construire, vraiment.

Mme Cadet : Et s'il fallait, puis indépendamment des différentes propositions, là, mises de l'avant par les groupes, là, s'il fallait que les aménagements que nous, comme législateurs, donc, on... qu'on veut adopter, donc, nous mènent à... en fait, comme résultat, qu'il y aurait plus d'inspections, est-ce que la RBQ aurait la capacité de pouvoir soutenir un nombre accru d'inspections?

La Présidente (Mme D'Amours) : ...en 30 secondes.

M. Beaudoin (Michel) : Bien, je pense que vous êtes consciente qu'on travaille à revoir le processus d'inspection au Québec. On a d'ailleurs eu un mandat du gouvernement actuel pour aller de l'avant et voir comment on peut mieux faire ensemble. La Régie du bâtiment est un joueur. Le vice-président aux enquêtes... aux enquêtes, à l'inspection et services client travaille à revoir le processus d'inspection. Et c'est clair qu'il faut voir... On a des gens à la CCQ, il y a des gens de la CNESST, il y a des inspecteurs municipaux, il y a l'AGCR qui intervient. Alors, c'est d'être capable ensemble d'agir adéquatement dans l'intérêt de l'industrie...

La Présidente (Mme D'Amours) : ...merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous quatre. On a parlé beaucoup de surspécialisation des entreprises, dans le cadre de ces audiences, que ça faisait, des fois, des multiples degrés de sous-traitance, des fois, jusqu'à trois, quatre, cinq degrés de sous-traitance. Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour traiter cet enjeu-là, qu'il y ait moins de sous-traitance à l'infini puis que ça vienne retarder, notamment, les travaux, parfois?

M. Beaudoin (Michel) : J'ai entendu ce que vous avez dit. J'ai entendu ce que les gens vous ont dit. La fibre entrepreneuriale, au Québec... quand un entrepreneur voit une occasion d'affaires pour aller de l'avant et voir comment il peut ajouter à son entreprise, et créer un revenu supplémentaire, et engager des gens supplémentaires... Il est difficile pour moi de laisser... comment je pourrais dire ça, d'annuler la fibre entrepreneuriale des gens au Québec et dire : Bien, si, toi, tu veux te spécialiser dans tel domaine ou aller dans tel domaine, je vais te bloquer. Je pense que ce serait mal vu. Je connais beaucoup de jeunes qui grandissent qui ont de la difficulté à l'école, et qui ont quand même intérêt à devenir des bons entrepreneurs au Québec, et qui réussissent très bien en affaires. Mais, pour ça, ils sont capables d'être multidisciplinaires et être capables d'agir. À cette heure, il faut s'assurer, nous, en tant que législateurs, qu'on soit capables... de législateurs, je m'excuse, en tant que... d'organisme de réglementation...

M. Leduc : De l'État, oui.

M. Beaudoin (Michel) : ...d'être capable d'agir adéquatement et s'assurer que le travail soit bien fait. Et on compte sur les gens pour les dénoncer quand les travaux ne seront pas bien faits.

M. Leduc : Deux courtes questions, puis je vous laisse aller... le temps file vite. Est-ce qu'on forme assez les employeurs, au Québec? On parle beaucoup de formation des travailleurs, mais est-ce qu'on forme assez les employeurs? Qu'est-ce qu'on peut faire pour lutter contre l'espèce de taux de roulement des entreprises qui, parfois, ferment, réouvrent sous un autre nom, mais que c'est à peu près la même personne? Il y a-tu quelque chose à faire à votre niveau par rapport à ce phénomène-là?

M. Beaudoin (Michel) : Je peux vous dire que ça fait quand même quelques années que je suis à la Régie du bâtiment du Québec, et ceux qui font ça aujourd'hui sont plus suivis, et les informations sont beaucoup plus à jour. On a un vice-président enquête et... d'une équipe d'enquête qui est fort bien dévouée, et les informations qui sont faites avec nos collaborateurs, les gens, les polices, les services de police, la CCQ, nous permettent de mieux agir quand il y a de ces enjeux-là au Québec. Mais il y a un travail efficace, il y a des lumières rouges qui s'ouvraient, la technologie a changé, il y a des méthodes d'enquête qui ont changé, et, pour nous, c'est important de les suivre adéquatement.

La Présidente (Mme D'Amours) : Une minute.

M. Leduc : Une minute? Mon Dieu! Il reste du temps. On y va, un y va.

M. Beaudoin (Michel) : C'est parce que vous êtes fatigués?

M. Leduc : Je suis habitué que vous complétiez mes réponses, mais là...

M. Beaudoin (Michel) : Je suis le dernier à passer, vous êtes tous fatigués.

M. Leduc : Bien, je vous posais la question...

M. Beaudoin (Michel) : ...

M. Leduc : Non, non, au contraire.

M. Beaudoin (Michel) : Je vous agace.

M. Leduc : Je vous posais la question sur la formation, est-ce que les employeurs, les gens qui ont des licences RBQ... Parce qu'on a parlé beaucoup de formation des travailleurs, etc., on a eu des débats sur les D.E.P. versus les formations courtes, versus l'alternance, mais les employeurs, les...

M. Beaudoin (Michel) : Bien, pour nous, ce qui est important, on parle de formation continue, et c'est totalement dévoué aux entrepreneurs de construction, ces formations-là sont faites par des organisations. On veut d'ailleurs... on a eu des discussions à élargir éventuellement aux autres répondants. L'employeur, 80 %, c'est lui-même qui se fait former en tant que répondant d'entreprise. Alors, dans l'objectif où on veut que les normes aillent plus rapidement, que ça change rapidement, il est clair que le 18 heures par deux ans nous aide, éventuellement, à avoir une meilleure formation et un meilleur suivi sur l'évolution des codes au Québec, et au Canada, bien sûr. Et...

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci beaucoup.

M. Beaudoin (Michel) : J'ai fini en même temps que vous.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je cède maintenant la parole au député de Jean-Talon.

M. Paradis : Bonjour. Merci pour le mémoire. Merci pour votre présence. Vous dites, au début du mémoire, que la régie est favorable aux objectifs poursuivis par le projet de loi. Puis, à la fin, vous dites que... vous parlez de l'appui de la régie au projet de loi no 51. Est-ce que vous appuyez les intentions ou vous appuyez les mesures, toutes les mesures qui sont dans le projet de loi?

M. Beaudoin (Michel) : Je dois vous avouer que tout ce qui peut aider et qui peut aider à l'évolution de l'industrie de la construction, on l'a eu. On a un répondant en santé et sécurité. Quand le ministre a fait son projet de loi sur la santé et sécurité, on a suivi ce qui s'est passé dans ces domaines-là, et ça a un impact sur le répondant technique, quand il y a des activités comme celle-là, et nous, on collabore efficacement. Pour nous, les intentions du projet de loi, on les suit. S'il y avait des modifications, on va aussi les suivre.

On veut être un acteur important. On travaille en collaboration avec les industries, avec les associations pour être capables de faire grandir notre industrie. Donc, dans ce contexte-là, nous, on est en appui sur la démarche de faire une modification, là, à cette loi.

M. Paradis : Je regardais l'article 111 de la Loi sur le bâtiment, là, qui énumère vos fonctions, puis vous les résumez, c'est la qualité des travaux, la sécurité. C'est quoi, les mesures, dans le projet de loi, là, qui, selon vous, contribuent à la qualité des travaux puis à améliorer la sécurité?

M. Beaudoin (Michel) : Bien, je pense qu'en ayant chez nous...

M. Beaudoin (Michel) : ...permettre une meilleure polyvalence en ayant des gens qui travaillent en compétences aussi, c'est dire que, quand je suis le projet de loi, pour moi, c'est d'être capable d'évoluer adéquatement avec l'industrie, faire grandir la loi quand on a des discussions parce qu'on est conseillés et consultés, lorsqu'il y a des discussions comme celle-là, et c'est sûr que, dans un cas comme ceux-là, on regarde une loi d'un collègue ou d'un organisme parallèle qui travaille avec nous, bien nous, pour nous, c'est d'être capable de travailler en collaboration ensemble.

M. Paradis : Vous êtes une institution publique, puis là, je vais reposer une question, je suis revenu souvent là-dedans, moi...

M. Beaudoin (Michel) : Bien, allez-y.

M. Paradis : ...sur les données probantes, puis les études, parce que, là, vous êtes la Régie du bâtiment.

M. Beaudoin (Michel) : Tout à fait.

M. Paradis : Donc, est-ce que vous avez des données sur lesquelles vous vous basez pour dire : Bien, nous, ce qu'on voit dans le projet de loi, on pense que ça va améliorer la qualité des travaux puis la sécurité sur les chantiers?

M. Beaudoin (Michel) : Quand on a vu la notion de... de polyvalence, c'est que, chez nous, on parle de travaux connexes, là était notre intérêt de se jumeler avec cette démarche-là pour être capable d'assurer que les gens puissent faire le travail adéquat et qu'on puisse jumeler avec un travail. Quand on est un organisme gouvernemental et qu'on travaille avec d'autres organismes gouvernementals et qu'on veut faire évoluer, pour nous, c'est important de faire grandir les organisations et voir ce qui impacte chez nous. Alors, dans un contexte comme celui-là, c'est pour ça qu'on proposait de jumeler et de voir comment on pourrait faire... annexer la notion de polyvalence avec la notion de travaux connexes chez nous.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci beaucoup. Avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus lors des auditions publiques. Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux, chers invités.

La commission ajourne ses travaux jusqu'à demain, après les avis touchant les travaux des commissions, où elle entreprendra un autre mandat. Merci.

(Fin de la séance à 18 h 20)


 
 

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