Journal des débats (Hansard) of the Committee on Labour and the Economy
Version préliminaire
42nd Legislature, 2nd Session
(October 19, 2021 au August 28, 2022)
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Tuesday, May 24, 2022
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Vol. 46 N° 21
Special consultations and public hearings on Bill 35, An Act to harmonize and modernize the rules relating to the professional status of artists
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9 h (version non révisée)
(Neuf heures une minute)
La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors,
bonjour, tout le monde. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la
Commission de l'économie et du travail ouverte. Je vous souhaite la bienvenue
et je vous demande de bien vous assurer d'éteindre la sonnerie de votre
appareil électronique.
La commission est réunie afin de procéder
aux consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi
n° 35, Loi visant à harmoniser et à moderniser les règles relatives au statut
professionnel de l'artiste.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente : Madame Lavallée (Repentigny) est remplacée par M. Lemieux (Saint-Jean);
M. Tanguay (LaFontaine) par madame St-Pierre (Acadie); et Monsieur Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)
par madame Dorion (Taschereau).
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci.
Alors, nous débutons ce matin par les remarques préliminaires puis nous
poursuivrons rapidement avec les organismes suivants : l'Union des
artistes et la Guilde des musiciens et des musiciennes du Québec. Ensuite, nous
entendrons l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec,
conjointement avec la Fédération nationale des communications et de la culture
et les Travailleuses et travailleurs regroupés des arts, de la culture et de l'événementiel.
Ensuite, nous entendrons l'Association nationale des éditeurs de livres et,
finalement, l'Association québécoise des autrices et des auteurs dramatiques,
conjointement avec l'Union des écrivaines et écrivains québécois.
Alors, nous commençons immédiatement les
remarques préliminaires. J'invite maintenant la ministre de la Culture et des
Communications à faire ses remarques. Vous disposez de six minutes.
Mme Roy : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Alors, je ne prendrai pas ce six minutes, parce qu'on a des
invités extrêmement importants, mais vous allez me permettre, un, de remercier
à l'avance tous les groupes qui vont venir nous parler, nous expliquer dans
quelle mesure le p.l. 35 va les aider, parce qu'on est ici pour améliorer les
conditions socioéconomiques des artistes.
Je veux aussi remercier, d'entrée de jeu,
naturellement, tous les députés qui sont autour de la table, les députés de la
partie gouvernementale, mais également les oppositions. D'abord, entre autres,
Québec solidaire, qui nous a fait la suggestion de changer de commission pour
pouvoir être ici, pour pouvoir procéder. Ça a fonctionné, merci, mais ça a
fonctionné pourquoi? Parce que tous les partis d'opposition se sont mis d'accord.
Alors, je veux saluer, là-dessus, la députée de l'Acadie, entre autres, qui est
ici avec nous pour faire avancer le projet. Sachez qu'avec l'accord des partis
d'opposition, nous avons déjà fait adopter en accéléré l'adoption de principe.
Donc, on a une étape qui est déjà franchie.
Maintenant, aujourd'hui, on y va avec les
groupes. Les groupes, vous allez voir, sont rassemblés, ça aussi, c'est à la
demande même des groupes pour accélérer le processus. C'est pour vous dire
jusqu'à quel point on souhaite adopter ce projet de loi. C'est une suggestion
des groupes, et les oppositions l'ont, encore une fois, acceptée. Et nous
allons tout faire pour que ce projet de loi soit adopté le plus rapidement
possible et que l'étude détaillée débute le plus rapidement possible.
Alors, je vais me taire ici pour laisser
mon temps aux groupes. Merci, Mme la Présidente. Merci à l'avance pour les
travaux.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci.
Alors, nous poursuivons maintenant avec la porte-parole de l'opposition
officielle et députée de l'Acadie à faire ses remarques préliminaires. Vous
disposez de quatre minutes.
Mme St-Pierre : Merci. Merci,
Mme la Présidente. Alors, je salue la ministre, toute l'équipe qui l'accompagne,
les députés aussi de la partie gouvernementale, ma collègue de Taschereau. Je
salue les invités qui sont avec nous ce matin et tous ceux et celles qui vont
participer à cette commission parlementaire, cette consultation.
Nous avons appelé de tous nos vœux ce
projet de loi depuis des mois. Nous avons demandé à ce qu'il soit déposé et
adopté avant la fin des travaux parlementaires, et je souhaite bien sûr qu'il
soit adopté. Je pense que c'est dans l'ordre des choses, et il y a énormément
de bonne volonté de notre côté.
J'ai lu, j'ai parcouru à la vitesse grand
V les mémoires. Le projet de loi n'est pas parfait, et je m'attends à ce qu'il
y ait une écoute très attentive de la part de l'équipe de la ministre. Parce
que moi, je n'ai pas, comme vous voyez, une armada d'avocats avec moi, et il y
a des éléments très, très pertinents qui sont soulevés. Moi, je n'ai pas l'intention
de faire en sorte que les travaux, là, s'éternisent puis qu'on s'accroche sur
les points puis les virgules, mais il y a des choses très pertinentes qui ont
été soulevées dans les mémoires, notamment, je vois l'UDA et la Guilde des
musiciens, qui vont être les premiers à nous parler. Alors, il faut que ce
projet de loi là aille rondement. Mais il faut aussi que l'équipe de la
ministre se mette au travail. Nous n'avons eu qu'une offre de briefing pour...
Mme St-Pierre : ...projet
de loi, une heure, alors que ça fait quatre ans que ce projet de loi doit être
analysé, déposé, enfin, doit être évidemment conçu avant de le déposer. Et
nous, nous avons eu une offre pour une heure de briefing. Alors, vous comprenez
que je vais faire tout ce que je peux. Je veux faire tout mon possible. J'ai
déjà été ministre de la Culture, et je comprends les attentes du milieu
culturel. Ça a été aussi un engagement dans la politique culturelle de revoir
la loi sur le statut d'artiste. Alors, tout le monde est unanime sur la
question de revoir, moderniser la loi sur le statut d'artiste. Le monde a
changé. Et il faut aussi, je pense, rendre hommage à Lise Bacon qui, à
l'époque, avec la complicité de l'UDA, avaient révolutionné le milieu artistique
et le monde artistique avec la Loi sur le statut d'artiste. Ces deux lois-là
n'étaient pas parfaites, bien évidemment. Le monde a changé aussi, les
nouvelles technologies, tout a évidemment changé depuis ce temps, mais c'était
vraiment une pierre d'assise pour faire en sorte que les artistes aient de
meilleures conditions de travail.
J'ai moi-même changé la loi en 2010.
Encore là, ce n'était peut-être pas complet, mais il y avait à ce moment-là,
vous vous souviendrez, une crise dans le milieu du cinéma, et les techniciens
de cinéma voulaient être reconnus dans la loi. C'est ce que nous avons fait.
Donc, je comprends vraiment l'urgence
d'agir. Il faut le faire. Je répète encore que je m'attends à ce qu'il y ait
des amendements. Il y a des notions très, très pertinentes qui ont été
présentées dans les mémoires. Et il faut absolument que cette loi-là soit la
plus parfaite possible. Elle ne sera pas parfaite parce qu'une loi n'est jamais
parfaite. Elle sera imparfaite puisque nous n'aurons pas pris tout le temps
nécessaire. Il aurait fallu, je pense, beaucoup plus de temps, d'heures de
travail en commission parlementaire. Nous allons nous soumettre à cet
échéancier très serré. La loi est prête, selon mes informations, depuis
plusieurs semaines. Elle aurait pu être déposée bien avant. On aurait pu
travailler encore plus en profondeur. Mais sachez que de notre côté, vous avez
toute notre collaboration et nous ferons évidemment de notre mieux. Alors, je
vous souhaite encore une fois la bienvenue. Puis j'ai bien hâte de vous
entendre parce que je vous ai lu, puis j'ai pas mal de questions. Merci.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, merci. Merci beaucoup. Alors, nous
poursuivons avec cette fois-ci la porte-parole du deuxième groupe d'opposition
et députée de Taschereau à faire ses remarques préliminaires. Vous disposez
d'une minute.
Mme Dorion : Merci. Ça
va aller vite. Moi, je n'ai jamais été ministre de la Culture. Moi, je suis une
militante pour l'art. Puis je suis très contente de voir qu'on a la ministre
Roy de notre côté. Merci d'avoir fait ce qu'il fallait, mais je ne sais pas
comment ça se passe au Conseil des ministres. Ça ne doit pas être toujours
facile, mais merci pour ça. Merci aussi au passage pour l'église
Saint-Sacrement. C'est vraiment, je le... C'est reconnu et c'est très apprécié
quand on voit une ministre qui fait ça.
Donc, ce qui est beau avec ce projet de
loi là, c'est que tout le monde veut aller dans la même direction.
Saint-Exupéry dit que s'aimer, ce n'est pas se regarder l'un l'autre, mais
regarder ensemble dans la même direction. Ça fait que si les Québécois aiment
la culture, aiment leur culture, bien, on est sur la bonne voie.
Bravo à toutes les organisations
d'artistes qui ont travaillé tellement fort pour ne pas que... pour échapper à
la politisation de cet enjeu-là. C'est merveilleux où on est en ce moment. Je
croise les doigts très, très fort pour que ça aille rondement, bien, et dans le
sens où les artistes veulent que ça aille, finalement. On est avec eux, on est
réunis aujourd'hui pour que ça avance. Je vais faire tout ce que je peux pour
que ça aille dans ce sens-là. Alors, merci et, bien, bonne commission, bonnes
auditions à tout le monde.
• (9 h 10) •
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci. Alors, nous souhaitons maintenant... nous
commençons donc les auditions. Nous souhaitons maintenant la bienvenue aux
représentants de l'Union des artistes, Mme Prégent et Mme Fortin. Je
vous invite, avant de commencer votre exposé, à bien vous présenter. Et vous
disposez de cinq minutes.
Mme Prégent (Sophie) : Bonjour,
Sophie Prégent. Je suis présidente de l'Union des artistes depuis 2013. Et
Christine Fortin, qui est avocate à l'Union des artistes depuis cinq, six ans?
Mme Fortin (Christine) : Oui.
Mme Prégent (Sophie) : Déjà,
ça va vite. Voilà. Alors, je ne vous présenterais pas l'Union des artistes. Je
pense que vous connaissez tous les 13 000 membres de l'Union des
artistes qui sont des chanteurs, des danseurs, des animateurs et des acteurs.
L'Union estime que le projet de loi
n° 35 apporte plusieurs modifications nécessaires à la Loi sur le statut
de l'artiste et qu'il importe d'adopter celui-ci avant la fin de la session
parlementaire afin de faire bénéficier les artistes des avancées qu'il contient
et qui sont attendues depuis fort longtemps. L'Union relève...
Mme Prégent (Sophie) : ...notamment,
à ce titre, l'élargissement des compétences du Tribunal administratif du
travail. Bravo! L'ajout de dispositions pour contrer le harcèlement
psychologique. Bravo encore. L'Union des artistes est par ailleurs d'avis que
certaines dispositions du projet de loi soulèvent des inquiétudes et
nécessitent certains ajustements. L'article 24.2 présente une
problématique majeure pour les associations d'artistes. Il impose un devoir de
représentation envers tous les artistes qui font partie des secteurs de
négociation pour lesquels une association d'artistes détient une
reconnaissance, même si aucune entente collective n'existe et même si
l'association ne reçoit aucune cotisation syndicale.
L'article 24.2 ne prend pas compte la
nature foncièrement différente de la Loi sur le statut de l'artiste par rapport
au régime des accréditations du code, par exemple. Une accréditation en vertu
du code ne peut se rattacher qu'à un seul employeur, alors que les
reconnaissances octroyées en vertu de la Loi sur le statut de l'artiste visent
la totalité d'un secteur et donc l'ensemble des producteurs. Toutefois, dans la
mesure où un producteur n'est pas membre d'une association liée par une entente
collective, nous devons négocier individuellement avec ceux-ci.
Enfin, notons que les associations
d'artistes ne détiennent pas le monopole exclusif de représentation et que la
défense de nos droits est à la hauteur des ressources financières limitées dont
nous disposons. Dans ce contexte, il serait impensable et voire même impossible
pour les associations d'artistes d'assumer un devoir de représentation qui
couvre l'entièreté des productions pour lesquelles elle détient une
reconnaissance. Il est donc primordial de modifier l'article 24.2 pour
qu'il vise les artistes assujettis à une entente collective négociée par une
association d'artistes. Donc, nous proposons que 24.2 pourrait se lire comme
suit : Une association d'artistes reconnue ne doit pas agir de mauvaise
foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire, ni faire preuve de... de
négligence, pardon, grave à l'endroit des artistes visés par une entente
collective à laquelle elle est partie, peu importe qu'ils soient ses membres ou
non.
Article 68.6. Pouvoir réglementaire
du ministre de décréter des conditions minimales. L'Union salue l'introduction
de ce nouveau mécanisme. Bravo! Il reste toutefois à préciser les conditions
dans lesquelles ce mécanisme est accessible et ses modalités d'application.
Nous estimons qu'il devrait être accessible pour viser toute situation où un
artiste ne bénéficie pas d'une entente collective. De plus, la fixation des
conditions minimales de cet article devrait être enclenchée sur demande sans
que cela soit assujetti à une discrétion. Nous sommes d'avis que cette demande
devrait provenir uniquement des associations d'artistes reconnues et non d'un
producteur ou d'une association de production. En effet, permettre à une
association de producteurs de faire une telle demande permettrait à celle-ci de
contourner le chapitre de la loi actuelle concernant l'obtention d'une
reconnaissance formelle entraînant pour elle des droits et des obligations. Une
telle demande provenant d'une association de producteurs pourrait entraîner une
baisse importante des conditions de travail de nos artistes. Enfin, une fois
que des conditions minimales auront été décrétées par le gouvernement,
celles-ci devraient être assimilées à une entente collective. Recommandations
concernant 68.6, qui pourraient débuter ainsi : Sur demande d'une
association d'artistes reconnue, le gouvernement peut, par règlement, après
consultation de l'association d'artistes et de l'association de producteurs
reconnues, etc.
Les aspects manquants, maintenant.
Première proposition. Ajouter dans la loi sur le statut de l'artiste un pouvoir
conféré au ministre d'ordonner aux organismes subventionnaires de la culture
d'exiger des producteurs l'application de conditions de travail minimales pour
les artistes avant de leur octroyer un sou de financement.
Proposition numéro deux. Modifier les
programmes de soutien de l'État, le CALQ, la SODEC, etc., de manière à préciser
que l'octroi de financement est conditionnel à l'application par les producteurs
de conditions de travail minimales pour les artistes ainsi que d'une reddition
de comptes obligatoire. Que fait-on avec notre argent?
Et finalement, prévoir un examen
périodique de la loi, donc un mécanisme de révision obligatoire et automatique
de la loi sur le statut de l'artiste aux cinq ans. Voilà. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci,
madame Prégent. Nous continuons cette fois-ci avec Monsieur Fortin et Monsieur
Lefebvre de la Guilde des musiciens et des musiciens du Québec. Vous disposez
également...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : ...cinq minutes.
M. Fortin (Luc) : Oui.
Alors, je me présente Luc Fortin, je suis président de la Guilde des musiciens
et musiciennes du Québec, et mon collègue Me Éric Lefebvre, qui est
secrétaire-trésorier, qui m'accompagne aujourd'hui. Et on tient à remercier la
ministre de la Culture et la commission de nous avoir invités à cette
consultation importante.
Beaucoup de choses que Mme Prégent a
dites, on les supporte, on les partage. Dans notre mémoire donc on a énuméré
beaucoup de points, six points qui représentent pour nous des avancées
importantes. Je vais mentionner là-dessus l'harmonisation et l'intégration des
deux lois en une seule, l'intégration des dispositions sur les normes du
travail visant le harcèlement psychologique, et aussi, bien, de pouvoir définir
par règlement des termes et expressions utilisés dans la NSA, soit le 68.5. Et
l'autre article important, c'est de fixer des conditions contractuelles
minimales dans un secteur par l'article 68.6. Et on est d'avis que le
projet de loi aura pour effet d'améliorer sensiblement l'encadrement des
relations contractuelles entre des artistes et les producteurs.
Il faut vous rappeler aussi que le but
premier de la révision de la Loi sur le statut de l'artiste était mentionné
déjà dans le Plan d'action gouvernemental 2018-2023 qui s'appelait Partout
la culture, puis o y mentionne très clairement que, pour améliorer les
conditions socioéconomiques des artistes, on doit mettre en œuvre à court terme
des solutions concrètes. Et là, dans ces solutions à court terme, il y avait en
tête de liste la révision des deux lois sur le statut de l'artiste. Ça fait
quatre ans que c'est écrit dans le plan d'action qu'on est rendu là. On
souligne aussi que selon un récent sondage commandé par la FNCC, la vaste
majorité des répondants appuient nos revendications. On parle de 80 %. Et
75 % des Québécois sondés pensent que le gouvernement de respecter sa
promesse et adopter la loi le plus tôt possible.
Donc maintenant quelques remarques. Je
vais vous parler aussi de 24.2 qui suscite des préoccupations. On pense que,
tel que rédigé ça imposerait un fardeau démesuré aux associations d'artistes.
Ce fardeau-là n'est pas imposé aux syndicats de travailleurs par exemple. Ils
sont tenus de représenter seulement les employés qui travaillent pour un seul
employeur et dans le cadre d'une convention collective. Bien que les
associations d'artistes représentent en principe tous les artistes dans le
secteur de négociation qui lui a été conféré, ça nous serait pratiquement
impossible de représenter tout le monde dans certains secteurs où il n'y a pas
d'entente puis il n'y a pas d'interlocuteur commun, il n'y a pas d'association
avec qui négocie. Ça se complique beaucoup dans ces secteurs-là, puis ça
devient ingérable pour nous. Si on avait des demandes de représentation dans
ces secteurs-là, il faudrait y aller au cas par cas avec une multitude
d'employeurs. Ça serait ingouvernable. Donc, on ne peut pas parler de
négligence de représentation dans ces cas-là. Et on appuie aussi ce qu'a dit
madame Prégent par rapport à 68.6, il faut que ça soit demandé par les
associations d'artistes. Donc, il faut limiter la portée de l'article pour que,
le devoir de représentation, ça s'applique juste aux artistes visés par
l'entente collective à laquelle il est partie. Ensuite, ça, c'est 24.2. 68.6,
par règlement, on peut fixer des conditions minimales applicables. Comme elle
venait de dire tantôt, il faut que ça soit demandé par l'association
d'artistes. C'est un article quand même intéressant parce que ça permettrait de
structurer des secteurs qui ne sont pas structurés du tout, qui sont difficiles
à gérer comme je disais tantôt. Et ça nous permettrait de demander au
gouvernement de mettre de l'ordre dans certains secteurs qu'on considère un peu
anarchiques et dans lesquels il n'y a pas d'interlocuteurs. Donc, il est
nécessaire d'aussi, par contre, dans 68.6, de prévoir que les artistes puissent
avoir des recours si les conditions ne sont pas rencontrées par les
producteurs, puis s'ils ne suivent pas les règlements. À ce moment-là,
actuellement, dans le projet de loi, il n'y a pas d'instance à qui s'adresser.
Il faudrait que, comme tous les travailleurs du Québec, on puisse s'adresser à
la CNESST comme en cas de non-respect pour les normes du travail. Ça serait par
souci d'équité.
• (9 h 20) •
Et finalement on parle de responsabilité
de l'état et de reddition de comptes. On va taper sur le même clou que l'UDA.
Ça fait des années qu'on en parle. On pense que c'est obligatoire de prévoir
que le financement assuré par des sociétés d'État soit conditionnel au respect des
conventions de travail négociées par les associations reconnues. D'ailleurs,
pendant la pandémie, on était très heureux de voir que l'octroi des mesures
particulières à la diffusion de spectacles était conditionnel à une reddition
complète quant à la rémunération des artistes et artisans du spectacle
impliqués dans la production. C'est la première fois qu'on voyait une telle
politique qui semblait tellement évidente. Donc, le chemin est tracé.
Maintenant, l'État doit continuer dans la même direction...
M. Fortin (Luc) : ...tous
ces programmes de subventions en culture. Merci de votre attention.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Oui, effectivement, merci aussi, M. Fortin,
pour votre exposé, très intéressant. Alors, nous allons commencer la période
d'échange. Même la ministre, la parole est à vous. Vous disposez de 17 min 30
s.
Mme Roy : Parfait, merci
beaucoup. Merci pour vos mémoires, que j'ai lus avec attention. Juste pour le
bénéfice des gens qui nous écoutent, moi aussi, à mon tour, tout comme la
députée de l'Acadie l'a fait, j'aimerais saluer Mme Lise Bacon, qui est à
l'origine des premières lois sur le statut de l'artiste, 1987, 1988. Ça fait
quand même un petit bout de temps. Et cette refonte-là, elle était importante
pour vous, puis on l'a tous senti ici. Donc, on veut tous travailler dans cette
direction.
Et je veux aussi saluer Mmes Liza
Frulla et Louise Beaudoin parce qu'il faut savoir que cette promesse-là, oui,
il y a quatre ans qu'elle a été faite, vous avez raison. Elle était dans le
plan en culture du précédent gouvernement, que nous avons fait nôtre lorsque
nous sommes arrivés au pouvoir. Alors, vous avez raison que ce plan... que
cette adoption de loi, elle a été éditée en 2018, et avant notre arrivée, mais
nous avons dit: On reprend le flambeau puis on va y aller. Puis je voulais
spécifier que je salue Mmes Beaudoin et Frulla parce que, rappelez-vous,
en décembre 2019, on avait commencé les travaux, et j'avais demandé à ces deux
ex-ministres de la Culture de travailler avec nous. Malheureusement, la
pandémie est arrivée. On a dû arrêter les travaux, ce qui a fait que, bon, il a
fallu tout reprendre après un certain temps lorsque le milieu a été prêt à
reprendre et nous a envoyé les mémoires. Donc, on aurait aimé travailler plus
rapidement. Il y a eu des aléas de la vie, mais on est rendus ici. Mais je
pensais que c'était important aussi de signifier ça et de les remercier, toutes
ces ex-ministres de la Culture, pour le travail précédent.
Et d'ailleurs vous avez remarqué que
certains nous ont déjà parlé, dans les précédents mémoires, il y a
1 000 pages de mémoires ici, là, entre autres, de donner un statut
d'intermittent aux artistes. Ça, c'est la formule française, en France. Nous,
on a décidé de garder la formule québécoise, au Québec, mais de la bonifier
avec une refonte importante. Alors, je voulais spécifier ces choses et
remercier les ex-ministres d'avoir travaillé avec nous. Et on voulait aussi
lancer le message qu'il s'agit ici d'un projet de loi non partisan. Alors, on
est là pour vous, pour vous aider, pour aider les artistes.
Maintenant, revenons aux mémoires. Dans
votre rédaction de mémoire, il y a des choses extrêmement intéressantes, et
j'aimerais que vous nous disiez, dans le pratico-pratique, autant à l'UDA, à
l'Union des artistes, qu'à la Guilde des musiciens, qu'est-ce que l'adoption du
projet de loi va changer concrètement dans la vie de vos artistes?
Mme Prégent (Sophie) : C'est
une bonne question, mais on avait une sectorielle la semaine dernière, ils
m'ont posé la même question: Qu'est-ce que ça va changer dans nos vies?
Ça va essentiellement changer beaucoup de
choses pour la défense de nos artistes parce que ça va donner beaucoup plus
d'encadrement à la loi. Nous, ça va être beaucoup plus profitable pour nous.
Ça, c'est ce qui n'est pas concret pour eux. Ce qui est concret, c'est que,
dans certains secteurs, ça a toujours été un peu le far west, pour m'exprimer
ainsi, puis là on va pouvoir donc améliorer leur travail, leurs conditions de
travail. C'est sûr que, si on se bute à un phénomène de non-communication, puis
de, à la limite, mauvaise foi, mais qu'on ne peut pas l'adresser, bien,
forcément, là, le train, il reste à la gare, il n'avance pas. Alors là,
l'entente devient complètement désuète, elle n'a plus rapport avec la réalité.
Après ça, on se fait reprocher de ne pas avoir de prise sur la réalité. Ça, ça
va permettre d'être toujours à jour, de vous adresser les problèmes qu'on est
incapables de régler depuis des années et qu'on traîne, qui sont énergivores,
chers, dispendieux. Et, pendant ce temps-là, sur le terrain, on est moins
présents.
Alors, c'est fou, mais une loi avec des
bons règlements, ça fait en sorte que nous, au bout du compte, on est
physiquement plus présents pour nos artistes. Plus qu'on l'est là, là,
présentement. Parce qu'on se bat devant les tribunaux. C'est ça qu'on fait pour
l'instant, avec beaucoup, beaucoup de coûts engendrés à ça. Puis ça, ça ne fait
pas qu'on fait de la vigie. Ça, ça ne fait pas qu'on améliore nos relations
avec les producteurs. Parce que moi, je suis sur le terrain, dans la vie, là,
je m'en vais tourner, moi, cet après-midi. Ce ne sont pas nos ennemis, ces
gens-là. On travaille avec eux.
Par contre, quand l'encadrement est mou,
forcément, c'est nous, parce que c'est une chaîne, c'est toujours le dernier
qui pogne le choc électrique. Le choc électrique, c'est nous qui le pognons. Si
tout ça est clair, ça va être encore plus facile d'avoir de bonnes relations
avec les producteurs. Je suis convaincue de ça. Veux-tu ajouter quelque chose?
Mme Fortin (Christine) : ...ajouter
quelque chose, le pouvoir réglementaire qui est instauré à 686, c'est une très
belle avancée dans les secteurs, comme Sophie disait, où est-ce qu'on a de la
difficulté à conclure des ententes...
Mme Fortin (Christine) : ...parlons
du secteur de la danse, de la scène en général, il y a beaucoup de
problématiques. Donc, le pouvoir réglementaire va nous aider à aller chercher
le règlement du gouvernement dont on a besoin. Après ça, évidemment, il va
falloir le préciser. Mais ça va permettre enfin à des artistes qui sont sans
filet social, sans conditions de travail minimales d'obtenir ce qu'ils
devraient avoir via la LSA.
Et également une très belle avancée, c'est
le Tribunal administratif du travail. La liberté d'association, ça doit venir
avec un tribunal accessible et peu coûteux et rapide et spécialisé. Enfin, le
TAT va pouvoir traiter l'ensemble des litiges qui découlent de la LSA. Donc,
c'est ce qui était demandé depuis plusieurs années et même par nos amis les
producteurs. Alors, c'est clair que ça, c'est une excellente avancée dans des
cas, justement, des négociations de mauvaise foi sur une table de négociation
ou d'ingérence ou quoi que ce soit. On va pouvoir aller devant le TAT et
traiter tout litige de manière efficace.
Mme Roy : Et du côté de la
Guilde?
M. Fortin (Luc) : Oui, je
vais vous laisser la parole, M. Lefebvre.
M. Lefebvre (Eric) : Oui,
bien, en fait, j'aimerais souligner un élément. Il y a quelques années, en
fait, de 1976, je crois, à 1989, il existait un décret applicable aux musiciens
dans la région de Montréal. Lorsque la première Loi sur le statut de l'artiste
a été adoptée, en 1987, si je me souviens bien, eh bien... c'est-à-dire, la
Guilde et les associations des producteurs ont décidé d'abandonner, dans le
fond, le décret. Il a été par la suite abrogé. C'est un juste retour, dans le
fond, des choses que, dans certains secteurs, il est très difficile de faire en
sorte que les conditions de travail minimales soient respectées. Dans ce cas-ci,
c'était un décret qui visait essentiellement la musique, qui concernait les
musiciens de scène.
Et effectivement l'article 68.6 est un
élément important dans la stratégie à venir. En tout cas, on espère que le
gouvernement ira de l'avant lorsqu'on fera des demandes pour effectivement
structurer certains secteurs culturels... qui est nécessaire, en fait, que la
structure est nécessaire afin d'améliorer les conditions. Pour ça que 68.6,
c'est une première étape. Mais 68.6 a effectivement besoin d'être modifié afin
de faire en sorte que, lorsqu'un règlement est adopté par le gouvernement pour
fixer des conditions de travail minimales, il est nécessaire d'avoir certaines
dispositions, dans la loi, qui permettent de faire respecter ces conditions-là
une fois que le règlement a été adopté.
C'est pour ça, dans le fond, que nous, ce
qu'on propose, c'est que ce règlement-là devient comme... est réputé une
entente collective entre l'association d'artistes et les producteurs visés par
le... bien, je dis «par le décret», mais c'est un règlement dans ce cas-ci,
justement pour faire en sorte que l'association d'artistes puisse déposer un
grief si, par la suite, des producteurs ne respectent pas les conditions qui
sont fixées par règlement. C'est l'élément qui manque actuellement dans la loi,
la Loi sur les décrets des conventions collectives, qui est une autre loi qui
vise l'adoption de décrets justement pour assujettir tout un secteur d'activité
à des conditions minimales. Bien, il y a un comité paritaire, il y a déjà des
ententes collectives qui sont étendues juridiquement. Mais là, dans ce cas-ci,
on a une disposition, l'article 68.6, qui demande un petit peu plus
d'agressivité au plan législatif pour faire en sorte que les conditions
minimales, une fois que le règlement... puissent être véritablement appliquées
sur le terrain.
Mme Roy : ...combien de
temps?
La Présidente (Mme IsaBelle) : Il
vous reste 9 minutes.
Mme Roy : Parfait. Vous
parlez, dans vos mémoires, tous les deux, dans des termes un peu différents,
mais c'est la même chose... puis juste pour référence pour les collègues, entre
autres, dans le mémoire de la Guilde des musiciens, dans vos recommandations,
au point cinq, vous nous demandez d'introduire dans notre nouvelle loi un
mécanisme semblable à celui de l'article 154 de la Loi sur les sociétés par
actions, afin que la responsabilité des administrateurs d'une société soit
engagée en cas de non-paiement du cachet des artistes. Pouvez-vous me dire en
quoi ce mécanisme-là, qui serait calqué sur le 154 de la Loi sur les sociétés
par actions, ça serait utile pour vos membres?
• (9 h 30) •
Mme Fortin (Christine) : Mme
la ministre, à l'UDA, nous avons à peu près une vingtaine de sentences
arbitrales qu'on n'est pas en mesure d'exécuter sur le terrain. Donc, des
producteurs partent des compagnies, obtiennent des subventions du gouvernement,
tournent un film, signent des contrats UDA, se lient à des ententes collectives
existantes... fait travailler nos artistes puis, au bout de la production, ne
paie pas les artistes. Donc, j'ai beaucoup de sentences arbitrales à l'UDA où
est-ce que... là, je vous parle, un cas, là, à peu près 100 000 $ de
cachets où est-ce que je ne suis pas en mesure d'aller chercher ces sous-là
pour les artistes. Alors, même si j'attends de poursuivre le producteur,
j'obtiens une sentence arbitrale en ma faveur, mais je ne suis pas capable de
l'exécuter puisque la personne n'a pas d'actif. La compagnie qu'elle a
constituée n'a pas d'actif. Elle tente même, par exemple, d'aller faire le film
ailleurs. J'essaie de faire toutes sortes de moyens pour bloquer...
9 h 30 (version non révisée)
Mme Fortin (Christine) : ...la
diffusion du film, ce n'est pas possible. C'est très coûteux d'aller chercher
ces sous-là. Donc, ce que ça ferait en sorte, c'est que la responsabilité des
administrateurs, en fait, de cette compagnie-là seraient importants pour
pouvoir aller chercher cela ces sous-là en cas de non-paiement des artistes.
Alors, une personne qui va partir une compagnie va devoir être sérieuse. Si
elle sait que sa responsabilité personnelle serait engagée en cas de
non-paiement, elle va faire ce qu'il faut pour payer les artistes. J'ai plein d'exemples.
On l'a cité dans le mémoire en février, alors ça, c'est très important parce qu'on
en a beaucoup, beaucoup, beaucoup. Évidemment, des producteurs sérieux qui sont
membres d'une association de producteurs, les... au Québec, on n'a pas de
problème puisque toutes les sociétés sont liées. Ils ont des statuts et
règlements à l'effet qu'ils sont responsables des cachets, c'est beaucoup plus
facile. Mais tous les petits producteurs émergents qui font des excellents
films, ceci dit, bien, ils doivent avoir un... ils doivent être sérieux pour
faire un film, puis ils doivent payer nos artistes.
Mme Roy : ...oui, du
côté de La Guilde.
M. Lefebvre (Eric) : Oui,
j'ai un élément supplémentaire, peut-être, pour vous expliquer pourquoi on... L'article 154,
de la façon dont il est érigé actuellement, s'applique aux salariés d'une
entreprise, mais elle ne s'applique pas aux travailleurs autonomes.
Essentiellement, les artistes qui sont représentés par nos associations sont
des travailleurs autonomes à peut-être 85 % ou 90 %. Donc, dans ce
cas-là, l'article 154 n'est pas applicable puisque ce ne sont pas des
salariés. Alors, c'est dans cet esprit-là, dans le fond, qu'on demande une
modification pour que, justement, ce que Christine vient de décrire puisse nous
donner des outils supplémentaires afin de poursuivre personnellement les
administrateurs d'une corporation qui serait, dans le fond, débiteur de cachets
des artistes.
Mme Prégent (Sophie) : La
même personne pourrait, en plus, faire un autre film après en n'ayant pas payé
les artistes dans le premier film, mais avoir quand même le droit à certaines
subventions pour faire un deuxième film. Nous, comme l'imputabilité ne suit
pas, on n'a rien, on est pieds et poings liés et on ne peut rien faire. Ce n'est
pas normal que quelqu'un puisse retourner un film alors qu'il n'a pas respecté
les contrats initiaux de son œuvre initiale.
Mme Roy : Si je
comprends bien, c'est une façon... Puis je l'ai lu, là, c'est vraiment une
façon de lever le voile corporatif, entre autres, sur ces coquilles pour aller
chercher la personne, le mauvais payeur, finalement, pour permettre aussi,
quand vous avez des sentences arbitrales, qu'elles soient exécutoires parce que
vous savez qui est le débiteur. C'est ce que je comprends bien? Je vous ai bien
entendus.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Il vous reste cinq minutes.
Mme Roy : Cinq minutes.
J'ai mon collègue, le député de... Où est-il? Il est là. De Saint-Jean, qui
aimerait intervenir. Et comme c'est quelqu'un du milieu des communications,
vous le connaissez bien. Je ne peux pas dire son nom, hein, je n'ai pas le
droit de dire son non, je suis obligée de dire le député de Saint-Jean, qui aimerait
prendre la parole. Alors, je vais lui céder.
M. Lemieux : Merci
beaucoup, Mme la ministre. Bonjour. Pour la petite histoire, on est en mode,
disons, accéléré et particulier, non partisan dans la mesure du possible. Vous
aussi, dans la mesure où vous avez regroupé les intervenants ici, aujourd'hui,
vous avez regroupé les recommandations par rapport au projet de loi que vous
avez, mais ça fait des années que vous intervenez et que vous discutez. J'étais
curieux de savoir jusqu'à quel point, sans aller dans chacune des
recommandations, jusqu'à quel point c'est aussi, pour vous, gagnant-gagnant
dans la mesure où tout ce qu'on va pouvoir sortir de plus que ce qu'on avait, c'est
des gains importants.
Et là-dessus, Mme Prégent, et d'ailleurs.
Me Fortin en a parlé, vous avez dit dans... un mot en particulier dans une
question en particulier : C'est énergivore, c'est cher, c'est dispendieux.
Le TAT ne réglera pas tout, mais le TAT, c'est un des outils que vous n'aviez
pas dans votre coffre à outils. Est-ce que c'est un bon exemple de ce que vous
allez retrouver dans le projet de loi n° 35 qui deviendra, je l'espère,
loi avant la fin de la législature? Ce genre d'outil que vous n'aviez pas, qui
vient - et le nom du projet de loi le dit bien - moderniser, harmoniser d'abord,
puis ça, on va en parler plus tard avec ceux qui sont vraiment... qui étaient
dans la deuxième loi, qui avaient beaucoup moins d'outils, là, et de dents, en
réalité, mais effectivement, c'est les outils que vous allez trouver dans l'harmonisation
et dans la modernisation.
Mme Prégent (Sophie) : Exactement.
Quelqu'un d'intelligent me disait : Une loi, c'est une idéologie. L'encadrement
et les règlements font en sorte que cette idéologie-là se poursuit. Si une loi,
c'est fait pour améliorer les conditions socioéconomiques des artistes, il faut
encadrer cette loi-là pour faire en sorte que, nous, sur le terrain, on ne
perde pas notre temps à faire tout le temps des serpents au jeu de l'échelle et
du serpent où il n'y a pas d'échelle, il n'y a que des serpents. Il y a des
choses qu'on n'est pas capables de régler présentement. Le tribunal nous...
Mme Prégent (Sophie) : ...dit :
Je n'ai pas la compétence pour régler ceci ou cela. Adressez-vous à un autre
tribunal, qui nous répond la même chose. Pendant ce temps là, ça coûte
1 million à l'Union des artistes, à 2.5 de cotisations syndicales. Pendant
ce temps là, on n'est pas sur le terrain. On ne vérifie pas si nos ententes
collectives sont bien suivies. Puis, à chaque fois qu'on débarque, on les
met... tout d'un coup, ils deviennent sans connaissance. Mais si on y allait un
peu, toujours, puis qu'on réussissait à travailler sur le terrain, c'est plus
la philosophie qui aurait de nous, que tout d'un coup, le gros méchant de
l'Union des artistes débarque, juste pour voir. Non, o aurait, dans le travail
quotidien, une relation tout à fait normale, comme dans tous les autres
secteurs, qui la construction, la santé, peu importe, je ne sais trop, mais
bref, c'est... Mme Roy l'a dit, madame St-Pierre aussi, merci, madame
Bacon, c'est une bonne loi. Je vois à la Fédération internationale des acteurs,
je le sais, cette loi-là n'existe pas ailleurs. C'est pour nous, à nous, ça,
faut que ça reste. Faut juste lui donner un petit peu plus de mordant.
M. Lemieux : ...pour
faire œuvre utile pour ceux qui nous regardent, d'aventure, et qui essayent de
comprendre, parce qu'on est presque entre initiés ici. Ça fait, comme je le
disais, des années que vous faites des... Quand vous parlez de tribunal, juste
pour être très clair, je vous ai parlé du TAT, c'est le tribunal administratif
du travail, auquel vous n'aviez pas accès. Quand vous disiez tantôt : On
va au tribunal, ça coûte des fortunes. C'est que vous étiez un peu condamnés à
monter dans les tribunaux de hautes instances, dans le fond.
Mme Prégent (Sophie) : Ce
qu'il faut comprendre, c'est que nous, l'union des artistes, on défend tous nos
membres devant le Tribunal administratif du travail. Les producteurs, comme ils
ne sont pas associés, défendent leurs griefs. Un grief. Nous, on défend tous
les griefs. Imaginez-vous ce que ça coûte à l'Union des artistes de défendre
tous les griefs déposés. Ce n'est pas AQPM qui défend ses griefs. C'est le
producteur en question avec qui on a déposé un grief. C'est une autre façon de
voir. C'est ça, l'argent que ça coûte.
M. Lemieux : ...Mme la
Présidente.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Il ne vous reste que 40 secondes. 39, 38...
Parfait.
M. Lemieux : Vous me
savez très docile. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Et c'est surtout...
Une voix : ...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Oui, allez-y. 30 secondes.
M. Fortin (Luc) : ...député
de Saint-Jean, si vous permettez. Par rapport au TAT, là, le Tribunal
administratif du travail, par le passé, si on avait eu ça, on avait sauvé des
centaines de milliers de dollars en frais d'avocats. Il y a des causes qui se
sont ramassées à la Cour d'appel. Ça commence par la commission des relations
artistes producteurs. Ça s'en va en révision. Ça s'en va là, ça s'en va là,
c'est hallucinant. Alors, si on avait eu notre tribunal spécialisé, ça aurait
probablement arrêté au premier niveau, ça aurait été réglé. On parle de deux
causes célèbres, entre autres, la fameuse saga Festival contre l'UDA, etc., et
d'autres....
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci. Vous aurez sûrement l'occasion d'en
reparler. Pardon. Pardon, monsieur Fortin, il faut respecter le temps. Je vous
remercie. Alors, nous poursuivons cette fois-ci avec la députée de l'Acadie.
Mme St-Pierre : Merci
Mme la Présidente, j'aime bien vos décomptes. Bon, alors oui, c'était fort
intéressant, votre présentation. Il y a des questions qui surgissent.
J'aimerais ça, quand vous me parlez de l'article 24, pour que je comprenne
vraiment bien ce que vous avez voulu nous dire tout à l'heure, pouvez-vous nous
donner un exemple concret d'une situation qui devra être... Bien, en fait, je
pense que vous demandez à ce qu'il soit changé, l'article 24. Une
situation qui échapperait à ce qu'on veut faire aujourd'hui, c'est-à-dire une
meilleure protection des artistes.
• (9 h 40) •
Mme Fortin (Christine) : En
ce moment, dans la mouture actuelle, avec 24.2, on a importé textuellement le
47.2 du Code du travail sans faire les nuances. Donc, comme disait tantôt
Sophie, ce code du travail, les syndicats ont le monopole exclusif du
travail... de représentation, pardon. Alors, un exemple concret dans le secteur
de la danse, où est-ce que nous n'avons pas d'entente collective, un danseur
qui aurait un problème avec son producteur pourrait venir dire à l'union :
Bien, viens m'aider, j'ai un problème. J'ai une situation particulière avec mon
contrat. Voulez-vous faire un recours, etc., me représenter jusqu'à la fin? Et
là, on serait obligés, par le nouvel article 24.2, de le faire, lorsque
dans ce secteur-là nous n'avons pas d'entente collective. Donc, nous allons
prendre des cotisations syndicales de nos membres dans des secteurs visés par
une entente collective et nous allons devoir déployer des ressources
financières pour défendre ce danseur-là qui est dans une situation fort
problématique. Alors, c'est quand même injuste pour nous et c'est fort
problématique parce que là on ne connaît pas la situation litigieuse avec cette
personne-là, ce danseur-là face à un producteur. On n'est pas dans le milieu,
on n'est pas son représentant officiel parce qu'il n'y a pas d'entente
collective. Alors il y a une panoplie de situations où est ce qu'on est... on
va devoir la représenter sans avoir une représentation au niveau de ses
conditions de travail.
Également, la loi prévoit la possibilité
de négocier individuellement des cachets supérieurs à la loi, donc tout ce qui
échappe à la négociation collective par l'UDA, par exemple, un problème...
Mme Fortin (Christine) : ...qui
touche un excédent négocié par un acteur, par exemple, bien là, est-ce qu'on va
devoir le représenter pour ce litige-là, qui ne concerne pas une condition
minimale de travail?
Mme St-Pierre : Donc,
qu'est-ce que vous voulez au juste qu'on ajoute pour que ça, là, ça soit réglé,
là? Donc, il faudrait ajouter «visé par une entente collective à laquelle elle
est partie».
Mme Fortin (Christine) : Voilà.
Oui.
Mme St-Pierre : Mais si vous
n'avez pas d'entente collective avec le producteur pour le danseur.
Mme Fortin (Christine) : Bien,
justement, on ne veut pas avoir l'obligation de juste représentation s'il n'y a
pas d'entente collective. Nous voulons le statu quo, tel qu'elle est
actuellement. S'il y a une entente collective visée, je n'ai aucun problème à
représenter le danseur, qu'il soit membre ou non membre chez nous, mais s'il
n'y a pas d'entente collective, comment voulez-vous que je le représente? Je ne
connais pas la situation du tout d'un contractuel.
Mme St-Pierre : Ce
danseur-là, s'il n'a pas d'entente collective, ce danseur-là, il est laissé
dans...
Mme Prégent (Sophie) : Bien,
c'est-à-dire qu'avec le 68.8 qu'on a, là, présentement, on pourrait avoir une
poigne justement dans un secteur au grand complet, faire en sorte qu'il y ait
une entente collective, ou alors la responsabilité, ce dont on parlait, le 68.6
pourrait permettre justement d'aller attacher tout ce secteur-là, puis, après
ça, quand on l'aura rattaché, forcément, il va y avoir... il va... une entente
collective ou semblable, et là, on va pouvoir mieux les défendre, on va être au
courant.
Mme St-Pierre : C'est très
lié, c'est très lié, il faut qu'on fasse la modification à 28, il faut qu'on
aille faire la modification à 68 pour que ce soit sur demande.
Mme Prégent (Sophie) : Exactement.
Mme St-Pierre : Sur demande,
je n'ai pas beaucoup de temps puis j'ai beaucoup de questions, sur demande, ça
veut dire après combien de temps, est-ce que c'est sur demande, parce que pouf,
il arrive un scandale, puis là, boum, on demande, ou s'il faut qu'il... Est-ce
qu'il faudrait préciser... moi, je suis d'accord avec le «sur demande», je vous
le dis tout de suite, puis j'envoie le message aux personnes qui tiennent le
crayon de l'autre bord. Mais, sur demande, après combien de temps? Ça ne peut
pas être sur demande après deux jours de négo ou deux jours de... il faut qu'il
y ait quand même une possibilité que les parties s'entendent avant que le
gouvernement intervienne, parce que là, on demande au gouvernement
d'intervenir.
M. Fortin (Luc) : Si vous
permettez, il y a des secteurs que ça fait éternellement qui ne sont pas
structurés. Je vais donner un exemple, l'événementiel puis les congrès, c'est
n'importe quoi, ça, il n'y a pas d'interlocuteur commun, ça «poppe» un peu
partout, ça apparaît, ça disparaît, c'est impossible de...
Mme St-Pierre : Mais la loi
ne vous donne pas d'interlocuteur commun.
M. Fortin (Luc) : Non, mais,
c'est parce que, mettons, que j'ai 50 organisateurs d'un congrès au Québec, je
ne peux pas aller négocier individuellement avec chacun d'eux, ça va me prendre
50 ans avant d'en venir à bout, là.
Mme St-Pierre : Alors, ce que
vous...
M. Fortin (Luc) : Il n'y a
pas des ressources pour ça, mais un article comme 68.6, on pourrait dire,
exemple, là : Bien là, on aimerait qu'il y ait des conditions minimales dans
ce secteur-là, à ce moment-là, on est en business, on peut commencer même à
représenter...
Mme St-Pierre : C'est le
gouvernement qui ferait ce cadre-là, cette entente-cadre-là.
M. Fortin (Luc) : C'est ça,
comme les bars, c'est pareil...
Mme St-Pierre : O.K. Mais
pour le «sur demande», ce serait après combien de temps?
Mme Fortin (Christine) : Dès
que l'association d'artistes est prête. Nous, dans le secteur de la danse, là,
on a juste à monter un projet de règlement qu'on soumettrait au gouvernement.
On analyse la situation, on a des ententes collectives avec certains
producteurs. Dès qu'on est prêts, on y va, là, on dépose, puis le gouvernement
doit faire ses consultations et décréter.
Mme St-Pierre : O.K. Vous
parlez de l'article 12, là, puis, là aussi, je vais vraiment vouloir avoir des
explications, vous demandez à ce qu'on mette une modification «rassemble le
plus grand nombre d'artistes», à l'article 12.
Mme Fortin (Christine) : ...
Mme St-Pierre : J'essaie de
vous suivre, là.
Mme Fortin (Christine) : On
veut une harmonisation puisque, en ce moment, vous avez changé le critère...
dans le projet de loi, on a changé le critère de la majorité pour le plus grand
nombre. Alors, on veut juste... on veut harmoniser ça, et surtout,
effectivement, l'article 12, «rassemble le plus grand nombre» puisque vous
utilisez deux terminologies... en fait, le gouvernement utilise deux
terminologies, la plus représentative et le plus grand nombre. Donc, on veut
juste harmoniser la terminologie, et surtout l'article 20, il faut changer ça,
parce qu'on parle de 25 % de l'effectif de l'association pour annuler une
demande de reconnaissance. Or, il y a un problème juridique, puisqu'on a
plusieurs reconnaissances, c'est impossible d'aller chercher 25 % de
l'effectif de l'Union des artistes, par exemple, pour aller chercher...
Mme St-Pierre : Il y a un
autre méli-mélo, ici, là. L'UDA estime que la terminologie devrait être
uniformisée, il y a du méli-mélo. Gardez la formulation de l'article 8, soit
les termes «conditions contractuelles», parce qu'ailleurs, si on parle de
«conditions minimales applicables aux contrats conclus»... enfin, c'est un peu
mélangé.
Mme Fortin (Christine) : Nous,
on veut juste...
Mme St-Pierre : Les gens qui
ont les gens qui ont conçu ce projet de loi là, c'est des spécialistes. Alors,
j'essaie de comprendre pourquoi ils ont utilisé ces termes-là plutôt
qu'uniformiser, comme vous le demandez.
Mme Fortin (Christine) : Bien,
c'est une très bonne question, on va le demander au législateur...
Mme St-Pierre : ...crayon,
donc ils pourront changer leur texte.
Mme Fortin (Christine) : En
fait, notre point de vue là-dessus, c'est juste, justement, d'uniformiser et
d'utiliser la condition contractuelle. Alors, on a importé, dans le fond, ce
qu'on a compris de nos appels avec le ministère, c'est qu'on a importé la loi
no 2, là, S-3201, dans notre loi. Alors, il y avait plusieurs
terminologies différentes. Alors, l'idée, c'est de juste harmoniser quand on
parle de conditions d'engagement, versus conditions contractuelles. On parle
de... contrats professionnels. Alors, ça, devant un juge, moi, en tant que
juriste, ça peut être plus compliqué de faire la distinction. Alors, pour
uniformiser, on soumet au gouvernement d'uniformiser la terminologie pour être
la plus englobante possible, à savoir des conditions contractuelles minimales,
tout simplement, partout dans la loi, pour uniformiser. Parce qu'on comprend
que c'est une importation de la deuxième loi, là, qui a fait peut-être un peu
dévier, là, les termes.
Mme St-Pierre : Vous parlez
de plusieurs aspects manquants aussi dans votre mémoire. Vous n'avez pas eu le
temps d'élaborer là-dessus. Quelles sont les priorités dans vos aspects manquants
qu'il faudrait ajouter? Vous comprenez, cette loi-là, là, la dernière, elle
date des années 80, il y a eu un changement en 2010, puis là on est
peut-être dans un processus qui ne sera pas changé avant les 30 prochaines
années, là. Alors, je comprends que la loi, c'est l'idéologie, mais la loi, à
un moment donné, elle peut devenir hyper rigide. Alors, vous souhaitez... Vous
dites qu'il y a des aspects manquants dans la loi. Est-ce qu'il y a des choses
qu'on devrait vraiment... sur lesquelles on devrait se pencher, puis bonifier
cette loi-là?
Mme Prégent (Sophie) : Entre
autres, la reddition de comptes, là, l'obligation d'être en règle avec les
associations à partir du moment où quelqu'un a un financement public, là...
Mme St-Pierre : Ça, ça m'apparaît
vraiment...
Mme Prégent (Sophie) : Bon,
ça, c'est l'essentiel. Puis, si ce n'est pas dans la loi, ça pourrait être
autrement, là, on est bien ouverts, là, à toutes sortes de solutions, nous
autres, là...
Mme St-Pierre : Dans un autre
dossier qui est...
Mme Prégent (Sophie) : Mais
le début étant ça, parce que c'est ça qui n'est pas normal. On ne peut pas
recevoir de l'argent public, puis faire un peu n'importe quoi, ne pas être en
règle avec les associations, pas payer les musiciens, pas payer les artistes,
mais ce n'est pas grave, on va faire un deuxième film, puis je vais me
racheter, puis ça va bien aller le deuxième, là. Ça ne peut pas fonctionner
comme ça. Ça...
Mme St-Pierre : Ça m'étonne,
parce que quand on donne une subvention, il me semble que la subvention vient
avec... en fait, la subvention ne vient pas avec une reddition de compte? Donc,
je donne 3 millions pour un film, puis je n'ai jamais personne qui dit
comment l'argent a été dépensé.
Mme Fortin (Christine) : Bien,
je ne sais pas... gouvernement l'a dit, mais certainement on n'a pas... il n'y
a pas d'obligation conditionnelle à ce que les artistes soient payés. Il n'y a
pas d'obligation d'avoir... de signer des contrats.
Mme Prégent (Sophie) : Il y a
probablement un budget de déposé ou je ne sais trop, mais s'il n'y a pas de
reddition de comptes, puis si ce n'est pas une condition sine qua non, être en
règle avec les associations, merci, bonjour.
Mme St-Pierre : Puis le
mécanisme de révision, tous les cinq ans?
Mme Prégent (Sophie) : Oui,
ça, ça éviterait ce qu'on est en train de vivre, c'est-à-dire 30 ans ou
20 ans, sans avoir ... tu sais... je vais le dire un peu en langage de
Shakespeare, mais"up to date", tu sais, faire en sorte...
Mme St-Pierre : Mais ça ne
garantit pas un changement, mais quand même ça pourrait rafraîchir.
Mme Prégent (Sophie) : Non,
non, mais si tel est le besoin, par contre, là, il y a quand même une certaine
accumulation, là, depuis les années, là.
Mme St-Pierre : Hum-hum.
Est-ce qu'il me reste du temps?
La Présidente (Mme IsaBelle) : Il
vous reste 1 min 40 s.
Mme St-Pierre : Ah! Bien, mon
Dieu! C'est formidable. Sur le projet de loi en général, tout le monde s'entend
qu'on va y arriver, mais je pense que votre message est vraiment très clair
qu'il n'est pas encore... il est perfectible, là, il faut vraiment y
apporter... parce qu'il va y avoir des trous, là, dans lesquels on pourra
peut-être s'incruster et faire en sorte que les artistes n'aient pas toute la
protection qui est nécessaire. Combien de producteurs devront... les
négociations ne se feront pas avec un ensemble de producteurs, mais ça sera des
producteurs. Combien vous prévoyez de négociations?
Mme Prégent (Sophie) : Avec
des producteurs?
Mme St-Pierre : Oui.
Mme Prégent (Sophie) : À
l'Union des artistes, on a 57 ententes collectives et 200 lettres
d'entente.
Mme St-Pierre : Puis celle
qui est désuète depuis 20 ans?
Mme Prégent (Sophie) : Ah!
ça, c'est tout dans le milieu de la musique, avec ADISQ, pour ne pas les
nommer, désolée, même chose avec la guilde.
• (9 h 50) •
M. Fortin (Luc) : Oui, on a
des... énormément d'ententes, mais il y a énormément d'ententes qu'on n'a pas
non plus dans des secteurs qui ne sont pas structurés, qui sont un peu
anarchiques.
Mme St-Pierre : Mais la loi
ne vous prévoit pas comme une entente-cadre, la loi prévoit que vous allez être
obligés de prendre le processus avec chacune de ces...
Mme Prégent (Sophie) : 68.6,
pourrait régler ça, encore une fois, 67.6 pourrait faire en sorte qu'on fait
une forme de décret dans un secteur bien précis. Puis là, bien, on va avancer.
Moi... on l'a dit puis on le redit, hein, 68.6, là, ah! c'est ça pour nous, là,
tu sais, c'est un peu ça.
Mme St-Pierre : Mais vous ne
serez peut-être pas plus contents, parce que, là, ce n'est pas vous autres qui
va les décider, des conditions, ça va être le...
Mme Prégent (Sophie) : Bien,
au moins, on va avancer, tu sais, au moins, on va pouvoir l'adresser, au moins,
il y a quelqu'un qui va nous entendre, tu sais, c'est déjà bien.
Mme St-Pierre : Donc, ma
question : Après combien de temps vous allez... Quand vous dites :
Sur demande, là, vous comprenez que ça ne peut pas, pour le ministre, là,
dire... on reçoit une lettre, puis si le ministre dit : O.K., on y va
demain matin.
Mme Prégent (Sophie) : Bien,
ça fait partie de nos demandes, là, que ces modalités-là d'application soient
plus claires, là...
Mme Prégent (Sophie) : Parce
qu'effectivement, là, l'idée, elle est bonne, mais comment ça va se traduire,
tout ça? Puis comment ça va fonctionner, ça? Pour nous, ce n'est pas clair,
encore, là.
Mme Fortin (Christine) : C'est
sûr que la priorité, ça va être d'utiliser 68.6 dans les secteurs où est-ce
qu'il n'y a pas d'entente collective clairement. Des négociations qui durent
depuis 20 ans, le mécanisme que je vois, d'emblée, c'est d'aller au TAQ
puis dire : attention, on est en train de faire la négociation de mauvaise
foi, il y a quelque chose qui ne marche pas, on refuse systématiquement toutes
les demandes, il y a de l'obstruction. On va aller chercher une ordonnance du
TAQ pour dire : ça suffit, assoyez-vous et terminez cette négociation-là.
Donc, ça, c'est une première chose.
Pour le 68.6, moi, en tout cas, à l'Union
des artistes, on va se dire : bien, quels sont les secteurs à prioriser?
Où est-ce qu'on n'a pas d'entente collective présentement.
Mme St-Pierre : ...Conscients
que le TAQ a aussi des délais qui peuvent être longs.
Mme Fortin (Christine) : Ah,
ça peut aller vite au niveau... En tout cas, ça va être beaucoup plus vite
qu'en ce moment, je peux vous le dire.
Mme St-Pierre : Qu'en ce
moment.
Mme Fortin (Christine) : Mais
les ordonnances de négociation de mauvaise foi, ça va très vite, là.
Mme St-Pierre : O.K.
Merci.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, merci. Nous poursuivons cette fois-ci
avec la parole... Avec la... nous donnons maintenant la parole à la députée de
Taschereau. Vous disposez de deux minutes 55 secondes.
Mme Dorion : Moi, je
m'intéresse à l'aspect manquant de l'imputabilité de ceux qui reçoivent des
subventions. C'est vrai, chaque artiste que je connais, là, a des histoires de
producteur qui va chercher des subventions puis qui ne paye pas les artistes.
Ça fait que ce n'est pas tous les producteurs, c'est loin d'être tous les
producteurs, mais il y en a, ça existe parce que la loi est floue, parce qu'il
y a une possibilité de faire ça. Donc, moi, je me demande ça serait quoi,
l'idéal, tu sais, Parce que pour les gros producteurs, c'est extraordinaire
qu'on puisse savoir... Que l'État surveille est-ce que tu as payé les artistes.
Ça serait quoi, la meilleure manière? Puis pour les petits producteurs, après,
tu sais, pour ceux qui font des shows de théâtre, ils sont quatre, c'est
autoproduit, ils essaient d'aller chercher des sous à gauche, à droite, ils ne
veulent pas avoir une tonne de paperasse, donc, question générale là-dessus, là :
comment, dans les faits, ça se ferait, cette vérification-là?
Mme Prégent (Sophie) : Bien,
pour les petits producteurs, ce n'est pas un problème, on a tout ce que ça
prend dans nos ententes collectives. On a des artistes entrepreneurs, il y a
même des artistes interprètes qui ne veulent pas nécessairement s'associer à
une association de producteurs. Nous, on fait ça avec eux, tu sais, on les
suit. À Québec, il y a beaucoup de théâtres, entre autres, on le sait, c'est
toutes des petites compagnies de théâtre, on ne fait pas mourir ces gens-là,
là. Donc, il faut quand même une mesure flexible de dérogation, par exemple, à
des ententes collectives, etc., Etc. Peut-être que tu pourrais...
Mme Fortin (Christine) : Bien,
c'est exactement ça. Puis après ça, ils le font d'emblée. Mais, si au moins
dans les programmes de la SODEC ou du CALQ, on dit : regarde, va chercher
des contrats UDA à l'union puis nous, on va faire un plan de match adapté avec
le théâtre en question, ce qu'on fait déjà tous les jours, mais au moins, ça va
lui donner un incitatif. S'il est obligé de déposer des contrats UDA pour avoir
sa subvention, bien, on va aller tous les chercher, les petits théâtres, là,
puis les gens vont avoir leur filet social. Donc, voilà.
M. Fortin (Luc) : Je vais
vous donner l'exemple des artistes qui... Des demandes... qui ont des bourses
de création du CALQ, on soumet beaucoup plus de redditions de comptes qu'à un
gros producteur qui reçoit 200 000 $. Parce que quand tu as fini ton...
quand tu fais ton rapport de bourse, il faut que tu prouves toutes tes
dépenses, de A à Z. S'il te manque quelque chose, tu ne pourras plus avoir de
bourse après; dans les cas extrêmes, il faut que tu rembourses. Les producteurs
ne sont pas soumis à la même chose. Quelqu'un à la SODEC m'a déjà dit... je lui
avais demandé : Est-ce que vous êtes certain, une fois que le projet est
terminé, que tout le monde a été payé correct? Il me disait : Non. C'était
clair comme de l'eau de roche parce qu'il n'y a pas de mécanisme, aussi simple
que ça.
Mme Dorion : Là, mon
2 minutes est quasiment fini. Pour les gros, comment qu'on ferait? Ça
serait quoi, le mécanisme idéal, tu sais, pour vérifier?
M. Fortin (Luc) : Bien,
comme pour les petits, quand tu as fini ton rapport... Tu fais ton rapport puis
tu prouves que tout le monde a été payé, c'est tout, sans ça, tu n'en auras pas
d'autres après. Voilà.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Parfait. Il vous restait 20 secondes.
Mme Dorion : Parfait.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
C'est beau? Merci. Alors, nous poursuivons cette fois-ci avec le député de
Matane-Matapédia. Vous disposez, vous aussi, de deux minutes 55 secondes.
M. Bérubé : Merci, Mme
la Présidente. Je veux, d'entrée de jeu, révéler un intérêt : Ma conjointe
est membre de l'Union des artistes. Alors, ce que je vais faire, c'est que je
vais offrir tout mon temps à l'Union des artistes pour nous parler d'un élément
qui ne se retrouve pas dans le projet de loi ou un élément qui ne devrait pas
se retrouver. Alors, je vous donne tout le mon temps pour vous adresser à nous.
Mme Prégent (Sophie) : C'est
trop gentil, monsieur Bérubé.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : ...2 min 40 s, hein?
M. Bérubé : ...
Mme Prégent (Sophie) : Vas-y.
M. Bérubé : ...
Mme Fortin (Christine) : Bien,
moi, je parlerais... Dans notre mémoire, on a parlé des fonctions réputées, à
l'article 1.2, qu'on ne retrouve pas. Nous avons beaucoup d'artistes qui
travaillent dans le milieu de la scène, par exemple, des régisseurs, des
assistants-metteurs en scène qui sont toujours non syndicables en ce moment
puisque le 1.2, pour tout ce qui est fonction réputée, est limité au secteur de
l'audiovisuel. Nous, c'est un enjeu important. Il y a des gens qui viennent
nous voir pour avoir des conditions de travail, mais on ne peut pas aller
chercher une reconnaissance pour ces gens-là puisque les fonctions réputées,
donc toutes les assistants-metteurs en scène, régisseurs, il y a une panoplie
de techniciens, également, qui ne peuvent pas aller chercher une reconnaissance
syndicale puisque l'article 1.2 de la loi actuelle est limité...
Mme Fortin (Christine) :
...à l'audiovisuel. Donc, nous, ce qu'on voudrait, c'est élargir à tous les
domaines de production artistique, qui pourrait enfin donner la chance à
d'autres artistes d'aller chercher la protection syndicale.
M. Bérubé : D'autres
éléments... porter à l'attention de la commission?
Mme Prégent (Sophie) : Bien,
peut-être un dernier mot. Tu sais, je sais qu'on a l'air un peu, prêcher pour
nos paroisses en disant : Ça prend des contrats union des artistes ou ça
prend des contrats guildes. Mais la seule façon d'améliorer les conditions
socioéconomiques des artistes, c'est qu'ils soient liés avec nous, c'est comme
ça qu'ils vont avoir des assurances. Puis au bout de 20 ans, ils sont
contents d'avoir des assurances bronze, argent, platine ou peu importe. C'est
la même chose avec le filet social, avec le congé payé, 4 %. C'est la
seule façon, en tout cas, c'est la seule que je connais... Et ceux qui sont les
plus vulnérables, le secteur de la danse, par exemple, ou même de la musique,
c'est les endroits où ils travaillent sans contrat parce qu'ils n'ont pas de
filet social, parce qu'ils ne réussissent pas à mettre l'argent de côté, ils
n'ont pas de REER, il n'y a pas la part producteur. La part producteur sur un
contrat, c'est 10 % que ça va dans notre REER, plus l'ajout qu'on y fait
nous-mêmes. Bien, au bout du compte, quand tu as un peu travaillé, dans la vie,
tu as un REER, un REER qui a été payé par le producteur, puis que, nous, on
négocie avec la Caisse de sécurité des artistes d'année en année, à raison de
1 % de plus. Moi, c'est la seule façon que je connaisse qui puisse
améliorer les conditions socioéconomiques des artistes.
J'entends beaucoup le mot «culture» dans
la vie. Je tiens à dire qu'il n'y a pas de culture sans artiste, c'est tout. Si
Fred Pellerin ne nous racontait pas ses histoires, on ne les connaîtrait pas,
puis notre culture, elle serait autre chose. Elle est ça parce qu'il existe,
parce qu'il vous parle, et que les gens s'identifient à lui. Voilà.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci.
Une voix : C'est tout. Non...
temps.
M. Bérubé : ...mais c'était
important de vous révéler mon intérêt.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : C'est bien. Alors, merci, Mme Prégent,
Mme Fortin, M. Fortin et M. Lefebvre, pour votre bonne
contribution et belle contribution aux travaux de la commission.
Nous allons donc maintenant suspendre les
travaux, le temps de donner au prochain groupe... de s'installer. Merci
beaucoup. Merci encore.
(Suspension de la séance à 9 h 59)
10 h (version non révisée)
(Reprise à 10 h 9)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, nous accueillons maintenant la Fédération nationale des
communications et de la culture ainsi... qui sont réunis ensemble,
conjointement, les Travailleuses et travailleurs regroupés des arts, de la
culture et de l'événementiel. Mme Charette et Mme Baril-Jannard, je
vous invite à bien vous présenter avant de commencer votre exposé.
Mme Charette (Annick) : Bonjour.
Annick Charette, présidente de la Fédération nationale des communications et de
la culture. Je viens du milieu de la télévision et je suis fille de chanteurs
lyriques, donc je connais très bien la condition d'être élevée sous la Loi du
statut de l'artiste.
Mme Baril-Jannard (Mathilde) :
Bonjour, Mathilde Baril-Jannard. Je travaille pour le service juridique de
la CSN depuis plus de huit ans. Merci de l'invitation.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, vous pouvez commencer votre exposé.
• (10 h 10) •
Mme Charette (Annick) : D'abord,
la FNCC est très, très contente d'être assise ici pour pouvoir discuter de ce
projet de loi avec vous. Et en tant qu'organisation syndicale, la raison d'être
de la FNCC est d'assurer et de promouvoir la liberté d'association, le droit à
la négociation collective et la liberté de presse et d'expression et l'amélioration
des conditions de pratique et de travail de ses membres : des artistes,
des artisans, du milieu de la communication et de la culture en général, y
compris les travailleurs regroupés des arts, de la culture et de l'événementiel.
Dans un premier temps, la FNCC est très
contente de souligner l'aspect historique du projet de loi n° 35 pour l'amélioration
de nos institutions de travail, en premier, et la promotion et la liberté d'association
par l'instauration d'un processus de négociation collective pour les artistes
professionnels exerçant dans les domaines des arts visuels, des métiers d'art
et de la littérature. C'est très important pour nous que nous soyons tous sous
le même régime.
Nous tenons également à mentionner que l'introduction
des dispositions en matière de harcèlement psychologique et sexuel dans la loi
est une avancée essentielle pour le bien être et la santé au travail des
artistes. Et c'est quelque chose qui me tient particulièrement à coeur. Avec
cette insertion législative, contrer le harcèlement psychologique et sexuel
dans les milieux artistiques ne sera dorénavant plus une monnaie d'échange dans
la négociation des conventions collectives, mais un droit à respecter pour les
artistes et les artisans, les femmes et les hommes qui oeuvrent dans ce...
Mme Charette (Annick) : ...et
qui ont été sous la loi de l'omerta pendant tant de temps. D'autre part, nous
soulignons l'élargissement des pouvoirs du Tribunal administratif du travail,
notamment à l'égard de l'entrave à l'intimidation des activités syndicales, de
la négociation de mauvaise foi et des actions concertées. Cet élargissement des
compétences du TAT était d'ailleurs une autre de nos revendications à la FNCC.
Cette demande est donc comblée et même au-delà de nos attentes puisque les
associations d'artistes auront désormais un recours en matière de prélèvement
de cotisations syndicales. En somme, la FNCC considère que ces apports
législatifs comme étant les plus significatifs du projet de loi no8 35 et
ce faisant, elle désire les voir subsister sans aucune modification. Par
contre, nous avons quelques commentaires sur d'autres aspects du projet de loi,
et je passe la parole à Mathilde ici présente.
Mme Baril-Jannard
(Mathilde) : Oui. Donc, bonjour. Ma présentation va axer sur les
modifications et les précisions que la FNCC-CSN recherche dans le cadre du
projet de loi n° 35. Dans le mémoire qui a été déposé
par la FNCC-CSN, le 1ᵉʳ février 2021, la FNCC, la fédération
recherchait en fait un mécanisme, une adhésion forcée obligatoire pour les
producteurs et les diffuseurs dorénavant, en fait obligation de s'associer à
une association de producteurs ou de diffuseurs parce qu'actuellement un
producteur ou un diffuseur non-membre d'une association n'est pas lié par les
ententes collectives du secteur. Alors, cette obligation... mais en fait cette
adhésion obligatoire aurait permis d'obtenir un régime de rapports collectifs
sectoriels, un réel régime de rapports collectifs sectoriels. Le législateur
n'a pas pris cette voie. Il a plutôt pris la voie qui est en fait
l'article 68.6 dont... et sur lequel l'UDA et la guilde a parlé ce matin.
C'est une voie qui est intéressante effectivement, surtout dans les secteurs
que l'on dit à découvert, notamment le secteur de la danse où il n'y a pas
d'entente collective, et également, c'est une voie intéressante aussi pour les
secteurs où il y a des ententes collectives, mais pour... En fait, il pourrait
y avoir également une réglementation qui viendrait lier les producteurs et les
diffuseurs non membres des associations. Donc, par exemple, dans le milieu des
concepteurs de l'Association des professionnels des arts de la scène où il y a
des ententes collectives, mais ça fait en sorte que, lorsque les producteurs et
diffuseurs sont non-membres, l'association d'artistes doit faire une chasse à
la négociation des producteurs, et souvent les productions sont déjà terminées
avant même qu'une entente collective soit conclue. Par conséquent, un règlement
dans un secteur où il y a déjà une entente, mais qui lierait les producteurs et
les diffuseurs non-membres des associations, permettrait donc d'obtenir un
peu... en fait cette visée d'avoir un réel régime de rapports collectifs
sectoriels. Bien entendu, nous espérons que le gouvernement puisse... en fait
exerce ce devoir. Et là, on appuie également la revendication de l'UDA que ça
soit sur demande et que ça devienne obligatoire lorsque c'est sur demande d'une
association d'artistes.
Alors, à la page 5 également de notre
mémoire, nous faisons une... c'est la même recommandation que l'UDA, donc que
les associations d'artistes se sont concertées pour offrir une modification en
fait consensuelle à travers les associations d'artistes. Alors, à la
page 5 de notre mémoire, vous avez donc la modification que nous
recherchions à l'article 68.5... 68.6, pardonnez-moi.
Le deuxième point que nous souhaiterions
avoir une précision à l'égard du projet de loi, c'est la question du devoir de
juste représentation qui est instauré à l'article 24.2. Nous tenons
toutefois à indiquer d'emblée que la FNCC-CSN et que la CSN ne remettent
aucunement en question l'importance d'avoir de juste représentation lorsqu'une
association syndicale exerce son... en fait, exerce sa représentation
lorsqu'elle est dans le cadre de sa représentation exclusive. Or, le projet de
loi n° 35 est un calque de l'article 47.2. Nous
tenons également à indiquer que ce calque est inexact puisque le Code du
travail impose un monopole de représentation exclusive à l'association... à l'association
de personnes salariées. Et le corollaire de ce monopole de représentation
exclusif, le devoir de représentation. Il n'y a aucun espace de négociation
entre une personne salariée et un employeur. Il n'y a pas de négociation
individuelle. Dans le contexte bien particulier de la loi S-32.1, il y a
un espace de négociation entre un artiste et un producteur. Par conséquent,
l'association d'artistes n'a pas un monopole de représentation exclusif. Alors,
la disposition 24.2 doit refléter ce particularisme et cette
idiosyncrasie.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci. Alors, merci. Nous poursuivons, cette
fois-ci, avec l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec,
avec M. Delorme...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : ...
M. Delorme-Bouchard
(Cédric) : Merci. Bien, je commencerais tout de suite en disant que
j'appuie les revendications...
En fait, je présente aussi
Mme Viviane Morin, directrice générale de l'APASQ. Cédric
Delorme-Bouchard, président de l'APASQ.
Donc, nous appuyons évidemment les
revendications de nos collègues de la FNCC et de l'UDA, aussi de la Guilde des
musiciens, qui sont passés juste avant nous.
Durant le temps qui m'est imparti, ce que
j'aimerais, c'est pointer sur une particularité qui est vraiment au domaine des
personnes conceptrices, donc des artistes concepteurs. Et ici je parle comme
président de l'APASQ, mais aussi comme artiste concepteur. Je suis scénographe,
metteur en scène. J'ai signé quelque 300 conceptions de théâtre, de danse,
d'opéra, autant à Québec qu'à l'étranger. J'enseigne la conception au niveau
collégial, universitaire. C'est mon domaine, c'est mon univers, donc c'est de
ça que je viens vous parler aujourd'hui.
Présentement, dans le projet de loi, il y
a un angle mort pour les artistes concepteurs, et ça faisait partie d'une des
recommandations déposées par L'APASQ dans le mémoire de janvier 2021, qui était
d'élargir la définition d'artiste pour inclure la portion conception et la
portion réalisation. Et là c'est vraiment quelque chose qui est propre au
domaine des artistes concepteurs de théâtre, scénographes, concepteurs
costumes, concepteurs lumières, compositeurs musique pour les arts de la scène,
etc.
Donc, pour bien comprendre la différence,
la portion conception, si on prend une personne conceptrice de costumes, par
exemple, la portion conception, ça va être l'étape d'idéation, de croquis,
d'esquisse et du dessin de toutes ces maquettes qui vont représenter l'ensemble
des éléments de costumes d'une production. Évidemment, ça s'applique à tous les
métiers, je prends costumes en exemple. Lorsqu'on rentre dans la phase de
réalisation, présentement, on cesse d'être reconnus comme des artistes au sens
de la loi. Donc, on n'est plus couverts par cette portion, contrairement à la
loi de l'audiovisuel, où les concepteurs, les artistes sont reconnus comme
artistes du début à la fin du processus. Ça, c'est une différence majeure et ça
crée d'énormes inéquités dans le milieu.
Je reviens à l'exemple d'un artiste
concepteur de costumes. Donc, à partir du moment qu'on rentre en réalisation,
en fabrication, on ne se poserait pas de questions si on était en présence d'un
artiste peintre qui applique de la peinture sur sa toile, d'un sculpteur qui
qui manipule l'argile pour lui donner forme. C'est la même chose. L'artiste
concepteur fait appel à son savoir-faire et aussi à son idéation du projet pour
lui donner forme par le médium qu'il maîtrise, que ce soit la lumière,
l'espace, le costume, etc.
Donc, à partir de ça, ça cause deux grands
problèmes pour le domaine de la conception. Le premier, à partir de la phase de
réalisation, comme on n'est plus considérés comme artistes concepteurs, les
associations d'artistes, on n'a pas de moyens d'aller négocier des conditions
de travail pour cette portion-là. Et malheureusement ça représente... La
portion réalisation commence très, très tôt dans le processus, donc à partir du
tiers et même des fois du quart du calendrier de production, on n'est plus des
artistes. Et toute cette portion-là, les associations ne peuvent pas négocier
des cachets décents, des conditions de travail décentes. Et, même si ça se
passe bien avec certains producteurs dans d'autres domaines, ça peut arriver
que les artistes sont très mal payés, voire parfois même la rémunération
disparaît complètement. Il n'y a pas de moyen de réussir à se faire rémunérer
pour ce travail, qui est obligatoire et qu'on ne peut pas séparer de la
conception. C'est deux choses qui vont ensemble. On essaierait de diviser ces
deux aspects entre deux personnes différentes, on n'y arriverait pas. C'est
inclus à l'intérieur. La conception inclut de la réalisation.
J'arrive à mon 3 min 30. Je
terminerai avec... On n'est pas non plus couverts au chapitre III sur la
loi pour la... bien, en fait, pour la protection contre le harcèlement
psychologique. Donc, on cesse, dans la nouvelle loi, d'être protégés pour
harcèlement psychologique au tiers du contrat. Merci.
• (10 h 20) •
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, merci pour vos exposés très instructifs.
Nous allons maintenant, effectivement, débuter la période d'échange avec Mme la
ministre. À vous la parole. Vous disposez de 17 min 30 s.
Mme Roy : Merci. Merci
beaucoup d'être là. On s'est vu, la plupart d'entre nous, en Teams. On en a
fait, des réunions, cet hiver, et on a discuté de beaucoup de choses. Et merci
pour votre présentation. La présentation... Je n'avais pas la présentation
écrite de ce que vous venez de me dire, mais il y a matière à réflexion. On a
pris des notes.
Maintenant, j'aimerais savoir, plus
techniquement, vous avez commencé à en parler du côté de la FNCC, entre autres,
vous proposez un amendement - puis là on rentre vraiment dans le corps du
sujet, parce qu'on n'avait pas terminé - à l'article 24 deux du p.l. no 35,
ce fameux article qui nous parle de la représentation. Vous nous dites... Je
vous apporte à la page 6. Vous nous recommandez une modification sur le
juste devoir de représentation, puis la modification que vous nous demandez de
faire, elle est différente de celle qui a été faite ou présentée juste avant
par l'UDA et la guilde, entre autres. Vous nous dites, et c'est votre
modification : «Une association d'artistes reconnue ne doit pas agir de
mauvaise foi ou de...
Mme Roy : ...manière
arbitraire, discriminatoire ni faire preuve»... attendez un petit peu. Je ne
veux pas... Je veux être au bon endroit, oui. Alors, je poursuis.
«...arbitraire, discriminatoire ni faire preuve de négligence grave à l'endroit
des artistes visés par une entente collective ou lorsqu'une entente prévue à
l'article 26.1 a été conclue, à laquelle l'association est partie, peu
importe qu'il soit membre ou non». Donc, cet amendement que vous proposez à
24.2, on n'en avait pas parlé, mais il est dans votre mémoire. Pourquoi est-il
différent de celui qui a été proposé par les collègues de La Guilde et de
l'UDA?
Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Oui,
je vais y aller. Donc, j'y vais parce que c'est un point assez technique. Mais
c'est que l'article 26.1 actuel de la loi prévoit qu'à compter du moment
où l'avis de négociation prévu à l'article 28 a été transmis, une
association reconnue d'artistes, une association de producteurs ou un
producteur ne faisant pas partie d'une association de producteurs peuvent
convenir par écrit qu'un producteur devra retenir, sur la rémunération, la
cotisation syndicale. Alors, s'il y a une entente de cette nature-là, suivant
l'avis de négociation, une cotisation syndicale est donc prélevée sur le cachet
que reçoit... sur le montant, la rémunération que reçoit un artiste.
Par conséquent, et je me suis basée sur
les enseignements du Pr Jean-Yves Brière, c'est que, pour lui, la cotisation
syndicale est aussi une contrepartie au devoir de juste représentation.
Lorsqu'une personne salariée donne une cotisation syndicale, alors, là,
c'est... en fait, il dit que «l'intégration de l'obligation. En effet, cette
obligation syndicale serait, en quelque sorte, la contrepartie de l'obligation
faite à chaque salarié de contribuer aux frais collectifs». Alors, la FNCC se
disait donc, et c'était un souci des associations d'artistes, que le devoir de
juste représentation s'applique dans un cas où il n'y a aucune cotisation
syndicale, notamment lorsque... considérant qu'il n'y a pas d'entente
collective. Toutefois, si une telle entente est faite, bien, il y a une
cotisation syndicale qui est perçue sur la rémunération de l'artiste, alors
c'est pour ça que nous avons mis cette distinction-là. Donc, le devoir de juste
représentation débuterait à ce moment-là puisque les personnes artistes
déboursent déjà des cotisations syndicales. Alors, c'était pour nous,
également, un compromis qu'on verrait.
Mme Roy : Merci. Je vous
ramène à la page 5 de votre mémoire, encore toujours sur le devoir de
juste représentation qui, lui, est l'article 15 du projet de loi
n° 35. Vous nous dites : «La disposition 24.2 est, en somme, un
calque de la disposition 47.2 du Code du travail.» Vous avez totalement
raison, c'est exactement ce qu'on a fait et on l'a fait parce qu'entre autres
c'est un projet de loi qui a été travaillé avec trois ministères. Le ministère
de la Culture, avec les spécialistes au ministère de la Culture, avec,
également, les spécialistes de la direction des affaires juridiques du
gouvernement, donc, le ministère de la Justice et avec les collègues juristes
du ministère de l'Emploi, du Travail. Et ces collègues nous ont dit : Ça
va nous prendre cet article-là parce qu'il est important.
Mais vous arrivez en disant : Faites
attention, ici, on est... et c'est vrai, vous avez raison, je vous le dis, là,
d'entrée de jeu, vous avez raison, et les deux autres groupes ont fait la même
remarque ce matin. Vous avez raison, on a fait une adaptation peut-être un peu
trop identique à l'article 47.2 et je crois qu'il y a des adaptations...
pourrait faire, compte tenu du fait, entre autres, que ce fameux corollaire,
là, du monopole de la représentation est exclusif quand on parle de salariés.
Mais dans le cas présent, c'est ça qu'il est extrêmement important de
comprendre, les artistes ne sont pas des salariés au sens de la loi, ils sont
des travailleurs autonomes. C'est une loi d'exception qu'on est en train de
créer, sur laquelle on travaille. C'était déjà une loi d'exception. Et je pense
vraiment que vos remarques à cet égard-là sont judicieuses, tout comme les deux
autres groupes qu'on a entendus. Alors, sachez-le, là, je pense qu'il y a des
adaptations qui pourraient s'imposer et je vous invite à élaborer sur les
adaptations que vous aimeriez voir parce qu'il est important, cet
article 47.2. Alors, quelles sont les adaptations que vous aimeriez y
voir?
Mme Charette (Annick) : On en
a parlé, mais je vais laisser Mathilde, qui a le langage juridique un peu plus
évolué que le mien, vous en reparler.
Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Bien,
en fait, c'est vraiment... Les adaptations que nous souhaiterions voir à
l'article 24.2, c'est vraiment la modification qu'on vous propose à la
page 6 de notre mémoire. Pour nous, dans ce contexte-là, le législateur
québécois a déjà fait, dans d'autres régimes particuliers de rapports
collectifs... et là, je pense notamment à la Loi sur les relations de travail
dans le milieu de la construction. À l'article 27, où on importe également
le devoir de juste représentation dans cette loi-là, le législateur, à ce
moment-là, a choisi le vocable «avec les adaptations nécessaires», donc, pour
refléter le particularisme, l'idiosyncrasie de ce régime, qui est... ce régime
particulier qui s'applique au...
Mme Baril-Jannard (Mathilde) :
...de la construction. Toutefois, donc, le législateur aurait pu prendre
cette voie-là. Toutefois, on vous soumet une voie plus précise parce qu'il est
clair que dans certains secteurs où il n'y a pas d'entente collective, c'est
qu'il faut comprendre que l'association d'artistes exerce son pouvoir de
représentation exclusif lorsqu'elle négocie une entente collective et
lorsqu'elle applique les conditions minimales d'une entente collective. Alors,
c'est pour ça qu'à l'article 22.2, nous souhaiterions avoir, à l'instar de
l'UDA, que cette précision-là, que les artistes visés par une entente
collective. Et on a également rajouté notre petite subtilité CSN, FNCC sur
l'entente prévue à l'article 26.1. Mais c'est vraiment... Ce sont les
modifications que nous souhaiterions avoir.
Mme Roy : Merci. Et on
va travailler ensemble pour que tout soit plus précis à cet égard. Je vais vous
dire ça comme ça. Je ne peux pas présumer de rien, mais on est là pour vous
aider. On est tous là pour vous aider.
Mme Charette, je voudrais vous parler
de deux choses. D'abord, dans votre mémoire, vous dites : des
recommandations non prises en considération. Puis je vais le dire tout de
suite, d'entrée de jeu, vous nous avez demandé que les journalistes
indépendants soient sous l'égide de la Loi sur le statut de l'artiste. On en a
parlé ensemble. Mme la députée de l'Acadie, vous avez été journaliste une bonne
partie de votre vie, moi également. Donc, vous connaissez le travail. Et pour
nous, les journalistes ne sont pas des artistes. On veut vraiment aider les
artistes, alors c'est la raison pour laquelle... mais il y aura d'autres
choses, on peut aider les journalistes de différentes façons. Mais je voulais
le spécifier parce qu'on a une sensibilité à l'égard des journalistes
également.
Par ailleurs, Mme Charette,
j'aimerais savoir dans quelle mesure... puis vous nous disiez, d'entrée de jeu,
que ça vous avait particulièrement touché les... vous tenez particulièrement
aux mesures qui font en sorte que nous allons transposer les dispositions de la
Loi sur les normes du travail qui concernent le harcèlement psychologique, le
harcèlement sexuel dans cette loi pour les artistes. Expliquez-nous
concrètement qu'est-ce que ça va changer pour les artistes selon votre lecture
du p.l. 35.
Mme Charette (Annick) : Bien,
ça va officialiser ou peut-être faire la promotion qu'il existe un filet à cet
égard-là dans le milieu de la communication et de la culture, qui est un milieu
qui a été, ma foi, assez interpellé sur ce type de conditions de harcèlement
sexuel et psychologique. Et je pense que ça marque d'une pierre le fait que
maintenant, notamment au niveau des conventions collectives, quand il fallait
«trader» des dispositions de prévention en matière, excusez l'anglicisme, de
matière de prévention de harcèlement psychologique et sexuel contre d'autres
dispositions quand les associations négociaient avec les producteurs. Je pense
que le fait que ce soit maintenant à l'intérieur de la loi, ça enlève cette
chose-là d'un aléatoire possible, donc ça devient officiel.
Et c'est un message fort important pour
l'ensemble du milieu d'entendre que des artistes, parce que les artistes sont
toujours... participent à quelque chose qui est souvent plus grand que soi. Ils
sont en relation de dépendance au niveau de pouvoir. Souvent, si tu veux
exister comme artiste, tu dois être produit, tu dois pouvoir te faire entendre,
te faire voir, te faire lire, te faire... Donc, tu dépends toujours d'un tiers.
Le tiers étant le producteur, le metteur en scène qui va te choisir, l'éditeur
qui va t'éditer. Et ce tiers-là a toujours un rapport de force prédominant sur
plusieurs aspects, dont celui-là, et je l'ai dit dans un autre contexte, la loi
de l'omerta doit terminer dans ces milieux-là à cet égard-là. Et je pense que
ceci va marquer d'une pierre, je vous en remercie à cet égard-là.
• (10 h 30) •
Il y a d'autres dispositions d'ailleurs
qui ont été instaurées par le projet p.l. 59 qui est devenu la loi 27
qui vont devoir, j'en ai parlé avec Mme Doucet, il y a une harmonisation
qui va devoir se faire aussi sur certaines normes de la loi du travail qui vont
pouvoir se répercuter là-dedans. Je ne sais pas encore lesquelles parce qu'on
n'a pas eu le temps de le faire comme exercice ni de votre côté, mais ça, ça va
s'associer à ça.
Pour l'AJIQ, je ne pouvais pas faire
d'économie de ne pas parler. On a eu cette conversation, je vous l'accorde, et
on va continuer à travailler avec Me Baril-Jannard, ici. On a des choses sur
lesquelles on va vous voir à cet égard-là, mais c'était quand même des gens qui
sont sans filet social, comme beaucoup d'artistes sont sans filet social. Donc,
c'était important de les mentionner à cet égard.
L'autre chose, la reddition de comptes.
Vous avez entendu parler dans ce qui n'a pas été... dans nos choses qu'on
souhaitait voir et qui ne sont pas là. On comprend qu'il y a peut-être d'autres
mécanismes. Et le fait d'être dans la loi, ça empêcherait que ces mécanismes-là
ne puissent pas être mis en place ou être soumis à la volonté de certains
dirigeants qui voudraient ne peut-être pas vouloir les promouvoir. Donc, la
reddition de comptes est très importante. Moi, j'ai travaillé pendant des
années dans le milieu de la télévision. Ce n'est pas qu'il n'y a pas de
reddition de comptes, notamment en audiovisuel, de producteurs qui reçoivent de
l'argent. Il y en a une certaine forme parce qu'évidemment ils doivent fournir
des états financiers vérifiés, mais il n'est pas dit dans ces états
financiers...
10 h 30 (version non révisée)
Mme Charette (Annick) : ...que
ça a respecté des ententes minimums, c'est le step au dessus, la marche qu'on
doit monter pour avoir ces redditions de comptes là, à l'image de ce qu'elles
devraient être, c'est-à-dire tenir compte des artistes, qui sont la matière
première de toute production culturelle et l'essence de notre vitalité, je
dirais, identitaire québécoise.
Mme Roy : ...Madame Charette.
Je vous hocher la tête, monsieur, quand madame Charette parlait des
dispositions pour contrer le harcèlement et le harcèlement psychologique et
sexuel. Et du côté des arts de la scène, dans quelle mesure l'adoption de ces
articles, que nous souhaitons, vont vous aider concrètement, là?
M. Delorme-Bouchard (Cédric) :
Bien, évidemment, on disait le rapport avec le producteur, le metteur en scène,
avec toute personne en position d'autorité pour programmer un artiste, pour
l'inclure dans une saison officielle. Je pense qu'on ne peut même pas comparer
ça, un rapport traditionnel entre un employeur et un salarié. Le pouvoir d'un
producteur, d'un metteur en scène d'engager ou non, de choisir ou non, a un
impact sur une carrière, c'est immense. Donc, le pouvoir qui est conféré est
très, très grand. Le fait qu'il n'y ait aucune protection pour harcèlement
psychologique, c'est un angle mort immense.
Et comme je le disais à la fin aussi, la
portion très spécifique aux artistes concepteurs, donc toute personne
conceptrice pour les arts de la scène, présentement, fait aussi qu'à partir
d'un moment dans le calendrier, comme je disais tout à l'heure, ça arrive très
tôt dans le processus parce que la portion réalisation, ce n'est pas ce qui
arrive une semaine avant la représentation. Ça commence des fois deux
semaines... pas de semaines, deux mois après le début du processus, on tombe en
réalisation. Il nous reste un an de travail, ce qui fait que cette portion-là
n'est plus couverte. Et s'il y a des problèmes de harcèlement qui vont
apparaître, ce sera peut-être pas dans les deux premiers mois du projet et, au
contraire, ça risque de se concrétiser, surtout dans la ligne finale, dans les
moments de grand stress, dans les moments de pression, dans les moments où la
première approche, dans les moments où les échéanciers, les contraintes
budgétaires, la réalité rattrape le projet, et c'est dans ces moments-là que ça
risque d'arriver. Donc, la section trois, le chapitre trois de la nouvelle loi
permet de protéger en partie, mais pour les artistes concepteurs, il faut
penser à eux jusqu'à la fin du processus de création, et pas seulement en début
uniquement, sinon on retomberait comme dans l'ancienne loi, on tomberait... les
personnes conceptrices non couvertes à la moitié du parcours.
Mme Roy : Une précision.
Madame la présidente, il me reste combien de temps?
La Présidente (Mme IsaBelle) : Quatre
minutes.
Mme Roy : O.K. Je vais y
aller avec une autre question qui est plus pointue, qui est plus technique.
Mais vous êtes la FNCC, vous connaissez le droit du travail, alors c'est pour
vous. Vous avez remarqué qu'on a ajouté, dans le projet de loi, l'article 42,
une interdiction de représailles à l'encontre d'un artiste qui exercerait un
droit prévu. Est-ce que ça aussi c'est quelque chose qui va aider les artistes
concrètement? Dans quelle mesure? Pourquoi? Avez-vous des exemples?
Mme Charette (Annick) : Bien,
c'est certain, parce que je l'ai mentionné, d'ailleurs, peut être rapidement en
entrée de jeu, là, mais c'est certain que ça va aider. Parce qu'à partir du
moment où tu as la sensation ou le sentiment que tu as une certaine protection,
tu vas peut-être faire un pas en avant pour t'autoreprésenter dans des intérêts
que tu as, mais Mathilde, tu veux peut-être... d'autre chose à rajouter là
dessus. Mais c'est vraiment essentiel aussi, là, comme dans les milieux de
travail, quand tu es protégé de ton droit de faire une action pour faire valoir
tes droits, c'est essentiel.
Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Si
je peux me permettre, en fait l'article 42 qui est instauré par l'article 24,
effectivement, c'est un article qui est très similaire également à l'article
quinze et suivants du Code du travail pour contrer les mesures de représailles
dans les milieux de travail. Et c'est certain que l'article 42 de la loi
est une illustration, en fait, permet de concrétiser l'exercice de la liberté
d'association puisqu'on octroie, en fait, on insère, on met, on interdit, on
prohibe un tel comportement d'un producteur à l'égard des personnes artistes.
Alors très... il est certain que pour la FNCC et même la... que j'en suis
certaine, si une personne artiste exerce un droit à l'égard de cette loi là,
disons qu'il exerce, il fait une plainte pour harcèlement psychologique, donc,
et que ça passe mal auprès d'un producteur, la personne de Cédric
Delorme-Bouchard vous l'a dit, le pouvoir d'un metteur en scène et d'un
producteur à l'égard d'une personne artiste sur sa carrière est immense. Alors,
ce type de recours là va permettre ainsi aux personnes artistes, en fait, de
mieux survivre. Donc c'était vraiment... c'était également dans notre...
Mme Baril-Jannard (Mathilde) : ...nous
soulignons également cet apport-là de la loi.
Puis j'avais... Si je peux me permettre,
Mme la ministre, c'était simplement pour supporter également les propos du
président de l'APASQ à l'égard des dispositions de harcèlement psychologique.
C'est qu'en fait la loi, à l'article 1.2, et ça, ça a été instauré en 2009, là,
pour les personnes de l'audiovisuel, donc les personnes qu'on dit
techniciennes, donc en 2009, pour des considérations, disons, économiques, en
ce sens que le législateur québécois avait éclairci le régime de rapport
collectif qui s'appliquait aux artistes suivant le conflit, en fait, le conflit
qui est survenu dans le milieu du cinéma, mais les personnes des arts, par
exemple, ne sont pas visées par un tel élargissement de la notion d'artiste.
C'est pourquoi, lorsqu'ils font la réalisation, ils ne sont pas couverts par la
loi. Et donc c'est certain que c'est un écueil majeur du projet de loi n° 35,
et nous en discutons d'ailleurs dans notre mémoire. Je vous remercie.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Il
ne reste que 20 secondes.
Mme Roy : 20 secondes... Vous
n'aurez pas le temps de répondre à mes questions. Je laisse aux oppositions.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.
Merci. Alors, nous poursuivons cette fois-ci avec la députée de l'Acadie.
Mme St-Pierre : Merci, merci
beaucoup. Alors, merci d'être parmi nous ce matin. C'est très intéressant de
vous entendre, mais je suis vraiment restée sur la notion d'introduire dans la
loi la protection aussi des concepteurs, comme c'est le cas pour l'audiovisuel.
Donc, ça serait un amendement qui irait à l'article 1.2, c'est-à-dire de
l'inclure.
Donc, ici, ça dit : «1.2. Dans le
cadre d'une production audiovisuelle mentionnée à l'annexe I, est assimilée à
un artiste...» Puis là on donne toutes les fonctions, les fonctions liées à la
conception, la planification, la mise en place ou la réalisation de costumes,
de coiffures, de prothèses, de maquillages, de marionnettes. Ça, c'est pour
l'audiovisuel uniquement, et vous n'êtes pas inclus dans cette catégorie-là.
Alors, ça serait assez simple, là, de le faire. Vous avez dû en faire des
représentations quand il y a eu la conception de ce projet de loi là. Ça fait
quatre ans, là, que le ministère est là-dessus. Pourquoi vous n'avez pas été
entendus, vous pensez?
Mme Morin (Viviane) : Je peux
y aller. Bien, je ne veux pas présumer de rien, mais à l'APASQ, on est une toute
petite association, on représente 280 artistes. On n'est pas donc, j'imagine,
les plus entendus ou... Bon, tu sais, c'est qu'est-ce que je pense.
Une voix : ...
Mme Morin (Viviane) : Bien,
on essaye, on essaye. Mais peut-être qu'on ne nous entend pas aussi bien que
d'autres, parce que, surtout, on représente des personnes qui sont derrière la
scène, donc qui sont, tu sais, plus dans les coulisses, qui travaillent... tu
sais, qui ne sont pas au-devant de la scène. Ça fait que ça a peut-être un lien.
Mais effectivement, quand les personnes
conceptrices... Dans nos ententes collectives, quand ils sont la portion
conception, ils sont couverts, on peut négocier des ententes collectives. Mais
la portion réalisation, qu'est-ce qui est mentionné dans nos ententes, c'est
que ça ne fait pas partie du cachet de conception, et il y a un budget de
réalisation qui est entendu entre la personne conceptrice et le producteur. Et
les budgets sont tellement petits, et ça vient souvent sur les épaules de la
personne conceptrice de budgéter. Et à la fin de ça, il reste aussi pas
nécessairement de montant pour se payer. Puis il y a beaucoup de producteurs
qui pensent que le travail de réalisation va être couvert par l'entièreté du
cachet de conception. C'est une méconnaissance des ententes collectives,
qu'est-ce qui fait qu'ils sont très peu rémunérés ou pas rémunérés des fois
pour la réalisation.
Bref, donc, à partir du moment où ils
réalisent, ils ne sont plus considérés comme des artistes. Mais Cédric pourra
l'expliquer, le travail de conception, même si la réalisation n'est pas
incluse, la plupart des personnes conceptrices réalisent leurs conceptions, et
c'est...
Mme St-Pierre : ...
Mme Morin (Viviane) : Oui,
mais la conception est là pour les personnes conceptrices, mais pas la
réalisation. Et pour l'audiovisuel, la réalisation, elle est là.
Mme St-Pierre : Oui, c'est
ça.
• (10 h 40) •
Mme Morin (Viviane) : C'est
ça. C'est la portion qui nous manque pour être reconnus du début à la fin comme
un artiste.
Mme St-Pierre : Oui, monsieur
Delorme? Je pense que vous vouliez ajouter quelque chose… Mais là, vous êtes
conjoints dans cette portion-là de nos consultations avec la CSN. Est-ce qu'on
peut imaginer que c'est la CSN qui pourrait vous représenter? Vous avez dit que
vous êtes une petite association.
Mme Charette (Annick) : L'APASQ
est sous le chapeau... est un des membres de la FNCC.
Mme St-Pierre : O.K. Donc,
c'est...
Mme Charette (Annick) : Et
dans le mémoire que nous avons produit...
Mme St-Pierre : Oui, bien,
vous en parlez dans votre mémoire, justement.
Mme Charette (Annick) : Dans
celui-là, mais dans celui qu'on a produit précédemment aussi, on en a parlé...
Mme St-Pierre : Ah! l'autre
avant, l'autre qu'on n'a pas vu.
Mme Charette (Annick) : ...et
c'est une...
Mme Charette (Annick) : ...qu'on
a fait de façon constante, est-ce que ça n'a pas été entendu dans sa subtilité?
Peut-être, mais je pense qu'aujourd'hui la subtilité est moins subtile et plus
évidente.
Mme St-Pierre : Bien, moi,
j'invite à ce qu'on le fasse puis je pense qu'il faut le faire. Parce que j'ai
été là quand on l'a fait pour l'audiovisuel en 2009, et ça a été un gros plus,
puis ça a été... Puis je peux vous dire que les producteurs qui sont venus en
commission parlementaire disaient : Ça va, arrêtez les productions, il n'y
aura plus de production, ça va être bien épouvantable, puis ça ne s'est pas
produit du tout. Puis mon estimée amie, madame... il y avait Mme Solange Drouin
qui était vraiment montée aux barricades, puis je l'aime beaucoup, mais on
prédisait le pire et ce n'est pas arrivé. Alors, je pense qu'il y en a qui
peuvent en témoigner, là, qui sont ici, dans la salle, là, peuvent en témoigner
que le pire n'est pas arrivé. Alors, moi, je pense qu'il faut absolument que la
ministre et son équipe penchent sur cette possibilité-là. C'est un oubli qui
est regrettable à mon avis et c'est important de le faire.
Sur la question du harcèlement sexuel et
psychologique, je suis d'accord puis je trouve que c'est vraiment important de
l'inclure dans la loi, mais l'artiste qui va subir ça, est-ce qu'il va avoir...
est-ce qu'il va être capable encore aujourd'hui, avec tout ce qui a été... ce
qui s'est passé dans les médias dans les dernières années, même s'il est
enchâssé dans la loi, puis je pense qu'il faut que ça le soit, est-ce qu'on
peut penser qu'il va encore hésiter à aller déposer une plainte pour
harcèlement sexuel et psychologique?
Mme Charette (Annick) : Je
pense qu'il y a quelque chose d'important à... la nature humaine va toujours
être la nature humaine. À la FNCC, on a lancé une étude dernièrement pour, en
collaboration avec le Département des sciences juridiques et le Département des
sciences sociales de l'UQAM, pour documenter, en fait, la loi de l'omerta dans
nos milieux de communication et de la culture, à cet égard là, c'est vraiment
le but de l'opération, c'est ça, dans une condition de rapport de force, parce
que c'est... précarité, les liens de précarité et de rapports de pouvoir. Donc,
nous espérons que ces résultats-là vont nous aider à illustrer et à faire de
l'éducation dans nos milieux pour faire reculer ça. Le fait que ce soit dans la
loi, c'est quelque chose qu'on peut évoquer, alors que tu ne pouvais pas
l'évoquer de façon... c'était silencieux avant.
Je pense qu'il y a une force quand même à
mettre ça dans la loi. Tu sais, je l'ai dit dans un autre contexte, la loi ne
précède jamais la société, mais je pense que la société ici est rendue là et
que la loi y répond en ce moment, et c'est... je salue encore.
Mme St-Pierre : Vous avez
parlé, la ministre l'a mentionné aussi, de la question des journalistes
indépendants. C'est une question qui, je pense, est encore plus d'actualité
aujourd'hui que dans mon temps, puis je me souviens qu'on en avait discuté.
Moi, j'avais voulu, à l'époque, introduire la notion d'un statut de journaliste
professionnel, ce n'était pas un ordre professionnel, c'était un journaliste
professionnel. Je vous fais un petit sourire, parce que la CSN n'avait pas
voulu accompagner le processus. Mais effectivement je pense qu'aujourd'hui avec
la multiplication des réseaux sociaux et des médias, il faut accorder une
protection aux journalistes indépendants, c'est majeur, majeur, majeur.
Pourquoi on ne pourrait pas, justement... La ministre a dit : Il va avoir
quelque chose pour les journalistes indépendants, puis c'est une loi pour les
artistes, mais on pourrait faire un chapitre pour les journalistes indépendants.
Est-ce que vous auriez une idée d'amendement qu'on pourrait apporter?
Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Bien,
en fait, à mon sens, ça serait dans la définition d'artiste, donc c'est qu'on
mettrait... on inclurait également, dans la notion d'artiste, la question des
journalistes indépendants.
Mme St-Pierre : ...ça serait
faisable dans l'esprit de la loi selon vous?
Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Oui,
exact, avec les adaptations nécessaires s'il doit y avoir, là, entre les
milieux journalistiques et culturels. Mais de cette façon-là, en les incluant
dans la définition de ce qu'est une personne artiste... puis les journalistes
contribuent à la culture, là, très certainement, dans une certaine...
Mme Baril-Jannard (Mathilde) : En
effet, je suis bien d'accord avec vous.
Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Alors,
ils pourraient bénéficier de cette façon-là de la loi.
Mme St-Pierre : Puis pour la
négociation, ça serait... les vis-à-vis seraient qui? Parce que le journaliste
indépendant, il peut travailler pour plusieurs médias.
Mme Charette (Annick) : Bien,
de la même façon que les artistes négocient avec plusieurs producteurs ou
plusieurs associations de producteurs, je pense qu'il faudrait négocier avec
l'ensemble des...
Mme St-Pierre : Des acheteurs
de contenu?
Mme Charette (Annick) : ...des
embaucheurs pour les journalistes indépendants. Mais notre préoccupation pour
les journalistes indépendants, c'est l'absence totale, totale de rapport de
force, et l'absence totale de filet de protection sociale, et les conditions de
pratique qui sont de moins en moins évidentes.
Mme St-Pierre : Bien, je
pense qu'on a l'occasion ici... Déposer une loi, ce n'est pas simple, ça prend
du temps, celle-là a pris quatre ans. Essayer de vraiment donner gain de cause
aux journalistes indépendants, moi, je plaide pour ça. J'appelle la ministre à
faire... à poser un geste. Et on pourrait, je suis convaincue, l'écrire...
l'inclure dans la loi. Puis, s'il faut changer le titre de la loi, on pourra le
changer...
Mme St-Pierre : ...mais
je pense que le temps est venu pour... pour une telle protection.
Mme Baril-Jannard
(Mathilde) : Pour votre réflexion, il y a le rapport Payette qui...
Mme St-Pierre : Que
j'avais commandé.
Mme Baril-Jannard
(Mathilde) : Oui, que vous avez commandé et qui donne également
beaucoup de recommandations, notamment l'instauration d'un régime qui est
similaire à la Loi sur les artistes. Ça fait que, concrètement, il pourrait y
avoir introduction dans la définition d'artiste, et un chapitre peut-être plus
précis pour la question des journalistes, ou en annexe. Donc, ça serait des
possibilités, là.
Mme St-Pierre : Merci
beaucoup. Il me reste deux minutes. Bon, bien, je pense que j'ai fait le tour,
moi, pour mes questions de ce côté-là. Je vous remercie beaucoup. Je vous
félicite M. Delorme-Bouchard, pour votre carrière parce qu'on vous définit
comme étant une étoile montante, et vous êtes.... Et, Mme Charette, je
veux en profiter parce que ça a été public, je veux vous féliciter pour votre
courage et parce que, dans la loi, bien, on retrouve un peu de vous là-dedans,
je pense, puis du courage que vous avez eu, puis vous avez donné l'exemple,
vous allez donner l'exemple encore. Merci beaucoup.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, merci. Nouspoursuivons cette fois-ci avec
la députée de Taschereau. Vous disposez de 2 min 55 s. On pourra
aller un peu plus.
Mme Dorion : Mon Dieu!
je n'utiliserai jamais tout ça. Pour parler du dorénavant fameux
article 68.6, moi, je suis intéressé de savoir, tu sais, c'est super
intéressant la notion de... que, par règlement, on puisse fixer des conditions
de travail minimales, surtout quand il y a une pléthore de producteurs, et que là
c'est impossible d'y aller à la pièce. Mais je commence à voir que ça fait...
ça comporte aussi une... bien, il y a des inquiétudes par rapport à ça.
Qu'est-ce qu'on veut? Puis c'est écrit dans, dans le... dans votre mémoire.
Qu'est-ce qu'il faut éviter avec ça? Qu'est-ce... tu sais, on voit cette
capacité d'appeler pour qu'il y ait un règlement, demander au ministre qu'il y
ait un règlement devrait être réservé aux associations d'artistes.
Spontanément, j'en suis, mais expliquez-nous pourquoi. Puis on veut éviter
quels problèmes aussi? Ça fait que comment est-ce que ça pourrait être
spécifié, ce mécanisme-là, pour que ça serve le bien commun, finalement, des
artistes?
Mme Charette (Annick) : Le
bien commun étant le mot à retenir ici. Mathilde.
Mme Baril-Jannard
(Mathilde) : Bien, le fait que ça soit sur demande d'une ou plusieurs
associations d'artistes, je pense que c'est l'idée que ça soit que le besoin
vienne des associations d'artistes. Alors, très certainement, le fait que ça
soit précisé dans la loi viendrait concrétiser cette nécessité-là. Parce qu'on
ne souhaite pas non plus que ce soient les associations de producteurs qui
viennent, eux, par déposer un projet de conditions minimales. Toutefois, on l'a
dit dans notre mémoire, il faut qu'il y ait un dialogue social suivant cette
demande, il faut qu'il y ait des consultations, là, et nous sommes tout à fait
pour le dialogue social. Alors, très certainement, il devrait y avoir des
consultations. L'idée... ce qu'il faut, je crois, obtenir là-dedans, c'est une
précision que le gouvernement va exercer ce pouvoir-là parce que, dans la
loi S-32.01, bien que l'article était différent, mais il y avait un
pouvoir de réglementation et également dans la loi S-32.01 et le
gouvernement n'a jamais... n'a jamais exercé ce pouvoir-là. Alors là, il
faut... il faut que vous... donc, dès qu'il y a demande, que le gouvernement
enclenche un processus de consultation.
Mme Dorion : Donc, dès qu'une
association d'artistes reconnue fait une demande, il faut absolument... il y
aurait comme obligation pour le ou la ministre de dire : On arrive à un
règlement à la fin d'un processus.
Mme Charette (Annick) : Puis
il y a sûrement aussi peut être préciser, ce qu'en fait on souhaitait, hein,
avoir des précisions sur la mécanique qui pouvait mener à ça. Le bien commun,
c'est bien, mais quoi et comment. C'est un peu... c'était un peu flou.
Mme Baril-Jannard
(Mathilde) : Puis également la modification, comme on disait, c'était
la même de l'UDA et la guilde. Là, on souhaite le règlement lie les producteurs
et les associations de producteurs non membres, et que ce règlement confère les
mêmes droits et pouvoirs qu'une entente collective à l'association d'artistes.
Ça serait très important, là, de venir préciser ça, l'effet.
Mme Dorion : Donc, si je
comprends bien, que ça soit... que ce soit juste les associations d'artistes
qui puissent faire cette demande-là, et que ça lie tout le monde, peu importe
qu'ils soient membres ou pas.
Mme Baril-Jannard
(Mathilde) : Suivant l'adoption, puis il y avait...
Mme Dorion : Tout le
monde des producteurs.
• (10 h 50) •
Mme Baril-Jannard
(Mathilde) : Il y avait une question à savoir après combien de temps.
C'est certain que je ne pense pas que les associations d'artistes ni les
associations de producteurs souhaitent. On veut laisser libre cours à la
négociation collective. Toutefois, l'historique des relations a démontré, dans
certains secteurs, surtout la danse, que certaines ententes collectives étaient
impossibles à obtenir. Alors, je crois qu'un tel mécanisme, dans une telle
circonstance, est nécessaire, puis également dans les secteurs où il y a des
ententes collectives, mais où il y a une multiplicité des producteurs ou
diffuseurs qui sont non-membres. Alors ça, c'est vraiment... c'est une voie
très intéressante, mais encore là il faut, comme disait, je pense, Sophie
Prégent, du mordant.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Il ne vous reste que 25 secondes.
Mme Dorion : Bien moi,
je veux juste ajouter que les concepteurs sont particulièrement vulnérables.
Souvent, c'est des artistes de la scène qui vont partir un projet, même dans
les milieux où, tu sais, les gens commencent dans la relève. Les concepteurs
sont face à des producteurs...
Mme Dorion : ...qui sont
des fois eux-mêmes des artistes, qui gèrent l'argent comme ils peuvent, qui
n'arrivent pas toujours. Puis il y a vraiment... il y a des situations où ils
sont vraiment les derniers payés puis à être très souvent pas payés, en fait, à
espérer être vus, puis tout. Ça fait qu'il y a vraiment... J'ajoute un peu de
poids à la demande que fait l'APASQ, là, ça serait super important. La
conception, c'est dans la tête, puis c'est dans les mains aussi puis c'est dans
tout ce qu'on fait, c'est du début à la fin, ça fait que voilà.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Bien, merci. Merci beaucoup. Nous poursuivons,
cette fois-ci, avec le député de Matane-Matapédia. Vous disposez de - on vous
en donne un petit peu plus cette fois-ci - trois minutes 40 secondes.
M. Bérubé : Votre
mansuétude vous honore, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Oui, oui grâce... effectivement.
M. Bérubé : Je veux
souhaiter la bienvenue à l'ensemble des représentants de ces organisations.
Vous avez parlé du devoir de juste représentation. J'aimerais qu'on puisse
approfondir, qu'est-ce que ça veut dire. Souvent, les organisations viennent
nous voir, alors je vous offrirais mon temps pour bien expliquer ce concept-là
et vos attentes à l'égard du projet de loi. Qu'est-ce que ça veut dire puis
qu'est-ce qu'on peut faire, dans le projet de loi, pour aider.
Mme Baril-Jannard
(Mathilde) : Bien, le devoir de juste représentation est un
incontournable en droit du travail nord-américain. Je veux dire, c'est quelque
chose qui a été établi par la jurisprudence américaine, et c'était d'une
nécessité absolue. Je pense, c'est l'arrêt Steel de la Cour suprême des
États-Unis qui a fait en sorte d'établir un devoir de juste représentation qui
s'exerce... En fait, une association ne peut être discriminatoire, négligente
ou agir de manière arbitraire. Alors, c'est certain qu'une association... Et
c'est pour ça que je l'ai dit d'emblée, la FNCC-CSN et la CSN ne remettent pas
en question ce devoir de juste représentation, soit de ne pas agir de manière
arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi à l'égard des artistes.
Toutefois, comme on l'indiquait tout à
l'heure, le devoir de juste représentation doit être adapté à la réalité du
régime particulier de rapports collectifs qui gouverne les artistes, là. Alors,
c'est pour ça que nous souhaitons une modification, que nous retrouvons à notre
rapport.
Puis peut-être je ne l'ai pas dit tout à
l'heure, mais même le Tribunal administratif du travail a reconnu le
particularisme de ce régime -à. En fait, je crois que c'était le juge
administratif Guy Roy qui a dit que l'association reconnue, donc l'association
d'artistes, a donc le pouvoir exclusif de négocier des conditions minimales,
mais elle ne possède pas le monopole de représentation. Alors, ce
particularisme-là doit se refléter dans la loi, et c'est pour ça que nous
demandons... Si je vais relire la modification qu'on souhaite, c'est : Une
association d'artistes reconnue ne doit pas agir de mauvaise foi ou de manière
arbitraire ou discriminatoire ni faire preuve de négligence grave à l'endroit
des artistes visés par une entente collective - j'ai indiqué les raisons tout à
l'heure - ou lorsqu'une entente prévue à l'article 26.1, alinéa un, a été
conclue, à laquelle l'association est partie, peu importe qu'il soit membre ou
non-membre. Ça, c'est fondamental, qu'il soit membre ou non-membre.
Mme Charette (Annick) : J'allais
ajouter que, quand on a commencé à discuter de ce projet de loi là et
d'analyser les avenues et les réalités existantes, pour avoir un point de
comparaison, on a pas mal discuté de la loi qui... Puis là je n'ai pas les
numéros parce que, ça, c'est Mathilde, là, mais la loi qui régit la
construction, en fait. Parce que les artistes sont souvent dans la même
condition que les travailleurs de la construction, c'est-à-dire
multiemployeurs, mutlicontrats. Et ceci, c'est un particularisme qu'il faut...
dont il faut tenir compte quand tu... du devoir de représentation. Au niveau de
la loi de la construction... ce n'est plus un décret, là, il y a un autre nom,
que je ne me souviens plus parce que je ne travaille pas dans la construction.
Mais il y a cette particularité-là qu'ils ont réussie... que le législateur a
réussie à introduire qu'il y avait quand même un devoir d'égalité et de
traitement égal de l'ensemble des travailleurs dans ces conditions-là, et c'est
un petit peu ce qui est souhaité aussi avec la juste représentation. Notre...
business à nous, notre... c'est de représenter les travailleurs, qu'ils soient
travailleurs autonomes ou qu'ils soient salariés, dans un rapport collectif qui
vise l'équité et le traitement à égalité.
Donc, la juste représentation est à la
fois ce que... les devoirs qui doivent être rendus et les exigences par rapport
au fait d'être syndiqué. Tu sais, on n'a pas la formule Rand ici, donc la juste
représentation a quand même sa limite.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci.
Mme Charette (Annick) : Merci.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, c'est tout le temps que nous disposons.
Merci beaucoup, hein, pour votre contribution très instructive aux travaux de
la commission.
Alors, nous allons suspendre les travaux quelques
instants pour donner la chance au prochain groupe de s'installer. Merci
beaucoup encore.
(Suspension de la séance à 10 h 57)
11 h (version non révisée)
(Reprise à 11 h 5)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, bonjour. Nous accueillons cette fois-ci l'Association nationale des
éditeurs de livres avec M. Foulon, Mme Pigeon et Mme Vachon. Je
vous inviterais, avant de commencer votre exposé, à vous présenter également.
M. Foulon (Arnaud) : Donc,
je suis Arnaud Foulon. Je suis vice-président éditions Groupe HMH et président
de l'Association nationale des éditeurs de livres.
Mme Pigeon (Geneviève) : Je
suis Geneviève Pigeon, directrice, présidente des éditions L'instant même,
membre du conseil d'administration de l'ANEL et présidente du comité du droit
de l'ANEL.
Mme Vachon (Karine) : Je
suis Karine Vachon, directrice générale de l'ANEL.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Alors, vous pouvez commencer votre exposé de 10 minutes.
M. Foulon (Arnaud) : Merci.
Bien, j'aimerais d'abord remercier la commission d'avoir invité notre
association à prendre part à ses consultations sur le projet de loi n° 35.
La loi du statut de l'artiste est
fondamentale dans l'exercice de notre métier et nous sommes reconnaissants de l'occasion
qui nous est donnée aujourd'hui de commenter ce projet de loi.
C'est avec une inquiétude certaine que
nous avons accueilli la fusion des lois S32.1 et S32.01. L'ANEL s'étant
toujours montrée favorable au maintien de deux lois distinctes, estimant que la
loi S32.01 protégeait les particularités de l'écosystème du livre et
favorisait sa bibliodiversité. En effet, notre milieu réunit une panoplie d'auteurs
et d'autrices qui écrivent une diversité de type d'ouvrages et qui ne
revendiquent pas tous le statut d'artiste dans l'exercice de leurs projets d'écriture.
À notre avis, nous sommes aujourd'hui devant un changement de paradigme qui a
de quoi donner le vertige à certains et à certains éditeurs.
Néanmoins, nous comprenons la voie que
souhaite prendre le gouvernement pour améliorer les conditions socioéconomiques
des artistes et nous l'accueillant avec ouverture. Nous recommanderons quelques
modifications, dans une optique de clarification, de cohérence et afin d'éviter
les contrecoups qui auraient l'effet malheureux de freiner une industrie qui
connaît finalement, après des années difficiles, une croissance, celle-là même
qui favorise l'augmentation des revenus des créateurs.
Avant d'entrer...
M. Foulon (Arnaud) : ...dans
le vif du sujet, vous me permettrez de rappeler que l'industrie du livre est
également régie et encadrée par une autre loi, la loi 51 ou Loi sur le
livre, dont on nous annonce des changements dans les réglementations depuis un
certain temps. Nous nous étonnons d'ailleurs que le gouvernement souhaite
rapidement entériner le projet de loi n° 35, mais que l'on ait pu nous
donner, après des années de consultation, les conclusions finales et les
changements au règlement de la loi 51 sur le livre. Ces changements
auront-ils, par ailleurs, une incidence sur le projet de loi n° 35? On ne
le sait pas. Toutes ces lois et réglementations, comme toutes les subventions
et aides qui touchent le livre, ont un impact sur notre industrie, sur sa
production et sur ses artisans.
Nous avons une première préoccupation
concernant l'article 1, qui indique que la loi s'applique aux artistes du
domaine de la littérature, en ce qui nous concerne, et aux diffuseurs qui
contractent avec eux en vue de la diffusion d'œuvres préalablement créées ou
qui retiennent leurs services professionnels. Rappelons ici, pardon, que c'est
un contrat sur la publication et la diffusion d'une œuvre qui lie l'artiste
littéraire et l'éditeur. Nous avions, dans notre mémoire et lors des
consultations, expliqué le rapport qui lie les écrivains et les maisons
d'édition. Ces dernières s'engagent dans un contrat par lequel l'auteur d'une
œuvre leur cède ou leur octroie par licence le droit de fabriquer, de
reproduire des exemplaires d'une œuvre à l'issue d'un processus éditorial entre
l'éditeur et l'auteur, et selon des conditions déterminées de gré à gré.
L'éditeur assume ensuite seul le risque financier lié à la publication et à la
diffusion de l'œuvre. Si, de manière générale, les maisons d'édition reçoivent
des œuvres préalablement écrites, un contrat peut aussi être signé à la
suggestion des parties avant la rédaction d'une œuvre. Peu importe le contexte
de création, l'auteur demeure toujours le seul détenteur des droits moraux sur
son œuvre. Il ne cède à l'éditeur que les droits en lien avec la
commercialisation de ladite œuvre. Il serait donc faux de considérer que
l'éditeur retient les services de l'auteur. Nous demandons donc au
législateur : Qu'entend-on, dans le domaine de la littérature, par
«retient les services professionnels»? Est-ce des services postcréation, par
exemple, pour les enjeux de promotion ou quelques services rendus au moment de
la création? Une précision s'impose pour éviter des discussions et litiges
potentiels relatifs à l'application de la loi.
Mme Pigeon (Geneviève) : Ensuite,
dans ce contexte de refonte en profondeur des lois sur le statut de l'artiste,
il nous semble fondamental de mieux définir la littérature à l'article 2.
La définition présente dans le projet de loi reprend celle qu'on retrouvait
dans la loi S-32.01, soit «la littérature est la création et la traduction
d'œuvres littéraires originales, exprimée par le roman, le conte, la nouvelle,
l'œuvre dramatique, la poésie, l'essai ou toute œuvre écrite de même nature».
La fin de l'énoncé, donc «toute œuvre écrite de même nature», est un concept
flou, problématique dans une optique de négociations collectives souhaitée par
le gouvernement. Cette formulation ouvre la porte à de nombreuses contestations
devant les tribunaux.
• (11 h 10) •
Nous proposons deux avenues pour y
remédier, soit, premièrement, ajouter le mot «littéraire», donc «toute œuvre
littéraire écrite de même nature», et, deuxièmement, s'appuyer sur les genres
littéraires admissibles à la SODEC, où on cite les catégories suivantes :
poésie, théâtre, bandes dessinées, romans, nouvelles, contes, albums pour la
jeunesse, essais en sciences humaines, recueils de chansons. Cette énumération
nous semble représentative de la littérature.
M. Foulon (Arnaud) : Au
chapitre 3.3, il est prévu que les articles 30 à 36 et 38 à 42 de la
loi S-32.01, portant sur les obligations des contrats individuels dans le
domaine des arts visuels, des métiers d'art et de la littérature, soient
ajoutés à l'article 40 du présent projet de loi. L'ANEL reconnaît qu'il
est cohérent d'avoir conservé ces obligations relatives aux contrats
individuels dans le domaine de la littérature. Cela signifie également que l'on
retrouve, dans la nouvelle mouture, le deuxième paragraphe de l'ancien
article 30, qui indique que la loi s'applique également à tout contrat
entre un diffuseur et une personne non visée par les chapitres I et II, et
ayant pour objet la publication d'un livre.
Deux choses ici. Nous estimons que la
nouvelle loi doit clarifier que tous les contrats individuels — contrats
d'édition — sont soumis aux exigences de la loi, mais que seuls les artistes
dans le domaine de la littérature ont droit à la représentation de
l'association d'artistes reconnus dans le domaine de la littérature aux fins de
négociation de quelque entente collective et de quelque représentations en lien
avec l'exécution de leur contrat individuel. Car la loi, revenons à son titre,
a pour but de protéger les artistes. Dans cette optique, nous suggérons au
législateur qu'il aurait intérêt à ne pas supprimer l'article 37 de la
loi S-32.01, qui précise que, et je cite : «Sauf renonciation
expresse, tout différend sur l'interprétation du contrat est soumis à la
demande d'une partie à un...
M. Foulon (Arnaud) : ...et
un peu plus loin : «suivant les dispositions du titre deux du livre sept
du Code de procédure civile.» En effet, il nous apparaît que cet article
demeure pertinent pour les auteurs qui ne sont pas des artistes au sens de la
loi et qui ne sont pas visés par la reconnaissance d'associations d'artistes
reconnues dans le domaine de la littérature et dont les livres échappent à la
portée de la littérature au sens de la loi. Rappelons que les auteurs et
autrices qui ne sont pas visés par cette reconnaissance sont nombreux, car il
se publie grand nombre de livres pratiques, de documentaires, d'ouvrages
scolaires ou universitaires au Québec. Cette zone d'ombre risque de nuire à la
cohérence de la nouvelle loi et à son application.
Mme Pigeon (Geneviève) : Nous
souhaitons proposer des changements à l'article 24.1 indiquant que «dans
l'exercice de ses fonctions, l'association reconnue peut notamment :
«1° représenter ses membres aux fins de la
négociation et de l'exécution de leur contrat.»
L'ANEL propose deux modifications.
Premièrement, remplacer le terme «représenter» par «assister». Étant donné le
nombre de contrats d'édition littéraire qui sont signés chaque année au Québec,
selon les plus récentes données de la BANQ, il s'est publié
3 500 titres de littérature en un an, nous croyons qu'il est
impensable de demander à l'association d'artistes reconnue de représenter les
auteurs dans les négociations individuelles. Cela risque d'étirer d'une manière
substantielle les délais de signature et donc de retarder des parutions, une
situation qui fragiliserait notre industrie devant la concurrence éditoriale
internationale.
Nous suggérons aussi de préciser par le
fait même que les contrats dont on parle dans cet article sont les contrats
d'artistes ou les contrats d'édition, dans notre cas, qui interviendront à la
suite de la conclusion d'une entente collective applicable. Nous sommes
reconnaissants que le gouvernement ait proposé à l'article 27 que la
négociation d'ententes collectives doivent prendre en considération l'objectif
de faciliter l'intégration des artistes de la relève ainsi que les conditions
économiques particulières qui caractérisent les producteurs émergents et les
divers types de production. Nous proposons plutôt de mentionner les petites
entreprises de production et de diffusion ainsi que les producteurs et diffuseurs
émergents. Rappelons qu'au Québec les maisons d'édition demeurent souvent de
très petites... des petites structures. Par exemple, sur les 115 membres
de l'ANEL, 40 % ont un chiffre d'affaires qui ne dépasse pas
250 000 $ par année. Ces petites structures, publiant principalement des
œuvres littéraires, sont importantes pour notre industrie, mais ne sont pas
toutes émergentes.
M. Foulon (Arnaud) : Finalement,
les articles 68.5 et 68.6 du chapitre 4.2 sont particulièrement
surprenants. On y lit que, et je cite : «Le gouvernement peut, par
règlement, définir les termes et les expressions utilisés dans la présente loi
ou préciser les définitions qui y sont prévues - et un peu plus loin - et qu'il
peut fixer des conditions minimales applicables dans la rémunération et les
avantages sociaux.» L'ANEL questionne ce besoin d'instaurer un pouvoir de
réglementation. De plus, nous recommandons de circonscrire davantage les
circonstances qui motiveraient le gouvernement à faire usage de ce pouvoir.
En conclusion, je tiens à préciser que les
éditeurs de livres oeuvrent avec passion et dans le plus grand respect des
auteurs. Ils font partie d'un écosystème fragile. Il y a dans le milieu de
l'édition une multitude de modèles de contrats puisqu'il existe une grande possibilité
de projets éditoriaux, lesquels ne se limitent pas à la seule réalité
littéraire. Si le gouvernement souhaite que la refonte des lois sur le statut
de l'artiste puisse s'appliquer adéquatement dans le domaine de la littérature,
il importe en priorité de clarifier que seuls les artistes du domaine de la
littérature ont droit à la représentation de l'association d'artistes reconnue
dans le domaine de la littérature aux fins de la négociation de quelque entente
collective et de revoir la définition de la littérature afin d'en proposer une
plus complète et exempte de termes flous.
Nous vous remercions de votre écoute,
votre ouverture aux enjeux du domaine de la littérature, et nous vous
remercions à l'avance des considérations que vous porterez aux modifications
que nous proposons et aux réflexions que nous vous soumettons.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci. Merci pour l'exposé. Nous commençons donc
la période d'échange avec Mme la ministre. À vous la parole.
Mme Roy : Merci beaucoup.
Merci. Merci, M. Foulon, merci à vous tous d'être là, tous et toutes.
J'aimerais, d'entrée de jeu, dire que vous
avez raison. C'est un changement de paradigme que nous faisons aujourd'hui.
Nous le faisons après mûre réflexion, une réflexion qui a commencé très
sérieusement lorsqu'on a finalement reçu tous les mémoires, il y a un an à peu
près, parce qu'on n'avait pas les mémoires avant, même si on avait débuté, là.
Ce changement de paradigme là, nous considérons qu'il est rendu nécessaire. Et,
pour le bénéfice des gens qui nous écoutent... Puis je vais répondre à vos
interrogations puis à vos craintes, à certaines de vos craintes, parce que vous
dites des choses, puis je veux justement vous rassurer sur l'interprétation que
vous en faites ou la lecture que vous en faites. On est tous conscients que
c'est hypercompliqué, que ce sont des lois du travail. Et ce changement de
paradigme là vient du fait, entre autres, que les fameuses lois sur le statut
de l'artiste...
Mme Roy : ...deux, au Québec,
ce que les gens ignorent. Il y en a une première, on va l'appeler la première
qui, elle, touche les artistes de la scène, de l'audiovisuel, de la musique,
qui sont nos artistes des arts vivants, si vous voulez, là, je ne vais pas tous
les énumérer. Puis il y en a une deuxième qui touche les artistes de la
littérature, des métiers d'art et des arts visuels. Et c'est cette loi-là avec
laquelle vous travaillez depuis près de 25 ans. C'est important de le
souligner.
Naturellement, à 25 ans, les choses
changent, les réalités changent, et force est de constater que dans la deuxième
loi, c'est-à-dire celle qui s'applique spécifiquement à votre domaine
d'intervention, le législateur de l'époque avait dit : Bien, les artistes
et leurs diffuseurs, parce qu'on les appelle les diffuseurs, dans la deuxième
loi, qui ne sont pas les mêmes diffuseurs de la première, juste pour mêler tout
le monde, là, pourront se négocier des ententes. Bien, force est de constater
qu'après 25 ans, il n'y a pas d'ententes qui ont été négociées. On y va
par contrat, puis c'est correct. C'est ce que la loi prévoyait. Vous avez
raison, la loi, c'est ce qu'elle prévoyait à l'époque. Mais nous sommes rendus
à un changement de paradigme, vous l'avez dit. Et oui, dorénavant, ce que nous
faisons, pour la compréhension des gens qui nous écoutent, nous prenons ces
deux lois, nous incorporons la deuxième, c'est-à-dire celle qui touche à la
littérature, aux arts visuels et aux métiers d'art, nous l'incorporons dans la
première, pour ne plus qu'il n'y ait deux catégories d'artistes professionnels
au Québec, mais une seule. Ils sont tous sous le même chapeau. Naturellement,
avec les adaptations qui s'imposent, dépendamment des domaines très spécifiques
et des réalités spécifiques à chacune des pratiques, entre autres à l'égard de
la littérature.
Alors, c'est la raison pour laquelle il
n'y a qu'une seule loi, que nous vous présentons aujourd'hui, qui est le
PL 35. Nous harmonisons les articles qui peuvent l'être et d'autres
demeureront parce que votre domaine est particulier, puis le domaine des arts
de la scène est particulier, donc ce ne sont pas nécessairement les modalités
qui doivent être les mêmes. Cependant, les grands pans du projet de loi
n° 35, qui touchent entre autres tous les artistes que nous... pardons,
les artistes, les articles que nous allons transférer de la Loi sur les normes
du travail, qui touchent entre autres le harcèlement psychologique, le
harcèlement sexuel, seront transposés à tout le monde. Ça, c'est important de
le spécifier, ça, c'était des demandes qui sont faites depuis quelques années
déjà par tout le milieu culturel, qu'on soit un auteur, un danseur, un artiste.
Donc, c'est pour vous dire qu'il y a des dispositions qui s'appliquent d'emblée
à tous, qui nous viennent de la Loi sur les normes du travail, que nous
incorporons dans ce p.l. 35, et d'autres dispositions qui, à juste titre,
sont vraiment les dispositions d'origine de votre loi, la deuxième loi, et qui
sont reprises, même, textuellement, entre autres, à l'égard de la définition.
J.
• (11 h 20) •
Je suis un petit peu surprise quand vous
nous dites que vous avez un problème avec la définition de la littérature qu'on
retrouve dans le PL 35, alors qu'on a repris exactement la définition de
la littérature avec laquelle vous travaillez depuis 25 ans. C'est juste
pour vous dire, c'est la même définition que nous avons conservée. Alors,
probablement qu'on pourra ouvrir la discussion à cet égard là, mais c'est pour
vous dire que des dispositions qui vous sont... qui sont strictement liées au
milieu de la littérature, puisque c'est de ça qu'on parle avec vous aujourd'hui
et non des arts visuels ou encore des métiers d'art, demeurent, demeureront
dans ce PL 35.
Entre autres, les dispositions que nous
avons mises en place relativement à l'élargissement de l'application des
règles, parce que... puis je le souligne pour les gens qui nous écoutent, les
artistes ne sont pas des salariés. La Loi sur les normes du travail ne
s'applique pas aux artistes. Alors ce qu'on fait avec cette loi, qui est une
loi d'exception, on utilise des moyens exceptionnels et on a travaillé
énormément avec le ministère de l'Emploi et du Travail pour nous dire :
Bien, quels sont les pans de la loi sur les normes du travail qui s'appliquent
pour des salariés, pas pour des travailleurs autonomes, que nous pourrions
transposer pour rendre la vie plus facile aux artistes, oui, mais aussi aux
employeurs. Et à cet égard, on est allé chercher des pans de la Loi sur les
normes du travail qui nous permet et qui permettra aux deux parties, autant
employeurs qu'artistes, d'utiliser des recours devant le Tribunal administratif
du travail, ce qui est beaucoup plus facile, rapide et moins coûteux
qu'actuellement. Parce qu'actuellement, dans les lois, il n'y a pas beaucoup de
recours au Tribunal administratif du travail, mais beaucoup de recours qui
doivent se faire devant les tribunaux de droit commun, ce qui est très onéreux,
vous le savez. Donc on a tenté, avec ce projet de loi, de trouver un équilibre
entre les différentes forces en présence et les différentes parties, parce que,
c'est important de le dire, tout ce monde-là, ce n'est pas des antagonistes, ce
sont tous des gens qui...
Mme Roy : ...travailler
ensemble. Et j'ai beaucoup aimé, puis on a fait des réunions TEAMS d'ailleurs
ensemble cet hiver, j'ai beaucoup aimé entendre tous les éditeurs me dire
jusqu'à quel point les contrats qu'ils faisaient respectaient les artistes,
étaient adaptés aux artistes, etc. Parce que, dans le fond, ce que ce projet de
loi nous dit, c'est que dorénavant, bien, il y aura aussi cette obligation de
négocier des ententes collectives. Alors, j'ai tellement entendu de bonne foi
et de bonne volonté venant de la part des éditeurs que ce sera l'occasion, je
pense, pour la communauté littéraire et pour le monde du livre... De l'édition,
de s'asseoir et de négocier des ententes avec les auteurs et dans l'optique
d'avoir de meilleures conditions de travail, en quelque part, parce que c'est
aussi du travail.
Donc, le changement de paradigme, oui,
vous avez raison, il est là, mais soyez rassurés à l'effet que nous conservons
des pans de votre loi pour votre domaine, entre autres, à l'égard de la
définition, nous nous reprenions la même. Alors, là, je comprends que vous
n'êtes pas d'accord avec ça.
Par ailleurs, vous nous dites, d'entrée de
jeu, à votre point 9.3, vous dites : «Nous demandons donc au
législateur que signifie «qui retiennent les services professionnels dans le
domaine de la littérature? Est-ce des services postcréation, par exemple, pour
des enjeux de promotion ou quelques services rendus au moment de la création?
Une précision s'impose pour éviter les discussions et litiges potentiels
relatifs à l'application de la loi.» Je vais vous la donner tout de suite, la
précision : ne vous inquiétez pas, ça ne vous touche pas. Et je vais vous
dire pourquoi. Le texte, la façon dont il est rédigé... Puis on comprend qu'il
y a des petites redites puis il y a des... tout à l'heure, on parlait avec
d'autres groupes, Il y avait des termes qui étaient là, puis qui apparaissaient
de façon soudaine. On va affiner le projet de loi pour qu'il y ait le plus de
clarté possible.
Mais dans le cas de la remarque que vous
nous faites, vous nous dites, à l'article un, déjà, vous y voyez un problème,
alors je voulais vous rassurer tout de suite. Alors, j'ai fait un long
préambule parce que l'article 1, c'est ce qu'il fait, il nous dit :
au paragraphe premier, quand on parle... «les services professionnels», bon,
«s'applique aux artistes et aux producteurs qui retiennent leurs services
professionnels.» Dans le paragraphe un de l'article un, on parle de ceux de la
première loi, vous, vous n'êtes pas là, ça fait que ça, ça ne s'applique pas à
vous, vous, vous êtes dans le deuxième paragraphe. Quand on dit «texte proposé,
la loi s'applique également aux artistes qui oeuvrent dans les domaines des
arts visuels, des métiers d'art, en littérature qui contractent avec eux en vue
de la diffusion d'oeuvres préalablement créées ou qui retiennent leurs services
professionnels.» Ces deux-là, là, c'est... Les deux paragraphes de
l'article 1 sont distincts parce que le premier touche ceux de la première
loi et le deuxième touche ceux de la seconde loi. Alors, je voulais vous
rassurer à cet égard-là : on juxtapose deux réalités. Ça fait que je
voulais vous rassurer.
Par ailleurs, et on transpose aussi les
obligations de vos contrats, on les a gardées. Puis vous nous dites :
«L'ANEL reconnaît qu'il est cohérent d'avoir conservé les obligations relatives
aux contraintes visuelles.» Ça reste là, ça. C'est pour ça que je vous disais
je suis très contente de vous avoir entendu dire que vos contrats, vous les
négociez puis c'est vraiment du cas par cas, dépendamment des auteurs, du type
d'oeuvre. Etc. Donc, on a vraiment transposé des portions de la loi qui vous
touchent directement.
Par ailleurs - peut-être, on pourra
discuter - j'aimerais que vous me disiez pourquoi, tiens, quand vous nous
dites, au point dix... Vous nous parlez de la définition de la
littérature, à l'article deux, puis qu'on reprend celle qui se trouve dans
votre loi. Pourquoi vous voudriez changer cette définition-là maintenant
puisque c'est la définition avec laquelle vous travaillez depuis 25 ans?
M. Foulon (Arnaud) : Je
peux peut-être commencer. Il y a plusieurs éléments là-dedans. La définition de
la loi S-32.01 date donc, je pense, de madame Bacon; il y avait déjà eu
même un débat, à ce moment-là, pour ne pas y faire paraître la bande dessinée.
Un exemple anodin, mais en 30 ans, la bande dessinée a complètement
changé, donc il faut profiter de la loi pour être au goût du jour, ça, je pense
que c'est important.
L'autre chose, c'est que les sociétés
d'État avec lesquelles on travaille, la SODEC, le CALQ, notamment, ont des
définitions qui sont beaucoup plus précises que celles de la loi et nous, on
pense qu'il faut s'arrimer avec celles que vous avez même suggérées ou, en tout
cas, encouragé vos sociétés d'État à utiliser, qui sont plus récentes que
celles-là, qui laissent place à moins de flous et qui sont plus adaptées à la
littérature d'aujourd'hui. C'est dans cette optique-là qu'on a fait la
remarque.
Mme Roy : Et j'aimerais
rajouter que, lors de négociations d'ententes, vous pourrez y aller,
effectivement, du contenu de la littérature - Pour vous, c'est quoi, ça
signifie quoi - alors, il y a des discussions qui seront...
Mme Roy : ...avec le milieu,
puis je pense que c'est pertinent de le faire à cet égard-là.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Il
vous reste six minutes.
Mme Roy : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Je lis vos inquiétudes, entre autres. Moi, je plutôt positive.
Je crois qu'on est rendus, 25 ans plus tard, à faire une refonte, dans la
mesure... Et puis vous le dites, à juste titre : C'est une industrie qui a
connu et qui connaît finalement, après des années ardues, une croissance. Puis
je pense qu'il faut le souligner puis féliciter tout le milieu, toute la chaîne
du livre qui a travaillé hyperfort. Puis on l'a vu durant la pandémie, je pense
que les gens ont redécouvert la lecture, la littérature. Nos libraires ont fait
de bonnes ventes puis nos artistes québécois ont été découverts. Alors, je ne
peux que vous féliciter pour le travail qui est fait au niveau de l'édition.
Donc, le travail devait être bon puisque les lecteurs étaient au rendez-vous.
Dans quelle mesure vous craignez... et là, vous nous dites que vous craignez
que ça freine votre croissance. Pouvez-vous me dire dans quelle mesure, quelles
sont vos craintes de cette nature-là?
Mme Pigeon (Geneviève) : Je
peux donner une réponse qui relève plutôt du concret, en fait, de la pratique
d'une éditrice littéraire. Parmi les inquiétudes qui ont été véhiculées, qu'on
a entendues de la part des éditeurs, il y a notamment le fait que, si des charges
administratives supplémentaires devaient s'imposer, il y a un moment où des
petites structures comme les nôtres ne peuvent pas faire face à énormément de
dépenses supplémentaires. Et, quand on parle de dépenses, on ne parle pas juste
de, malheureusement, ce qui pourrait être redonné aux artistes, alors que c'est
là qu'on voudrait bien dépenser plus, mais plutôt des dépenses, justement, si
on doit alourdir par exemple, la gestion des contrats, la gestion des
contraintes administratives ou fiscales, il faut embaucher du personnel
supplémentaire, il faut avoir recours à des expertises légales. Et là, c'est de
l'argent qui s'en va dans l'administration plutôt que d'aller, justement, dans
le soutien de la diffusion des œuvres littéraires. Et c'est une des grandes
inquiétudes qu'on a entendues, c'est-à-dire ce potentiel alourdissement de la
charge administrative ou comptable, finalement, qui serait imposée aux éditeurs
et aux éditrices.
• (11 h 30) •
Mme Roy : Je voudrais quand
même souligner, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, que le milieu du
livre est extrêmement important. C'est hyperimportant, les livres, je pense, la
littératie, la littérature, on doit lire davantage. Ça nous fait une société
qui est allumée, une société qui est avertie, qui est instruite et qui prend de
meilleures décisions. Et c'est la raison pour laquelle les gouvernements, tous
les gouvernements précédents et le gouvernement actuel, investissent des
sommes, et croient en la littérature, et soutiennent l'industrie, et la chaîne
du livre. Donc, à cet égard-là, je pense que les sommes que nous avons
investies au cours des dernières années ont été conséquentes, demeurent là. Il
y a des subventions, il y a des crédits d'impôt. Donc, compte tenu du fait que
le gouvernement investit de façon importante... parce que la culture, je crois
foncièrement qu'au Québec, la culture, on doit la protéger puis on doit aussi
l'aider financièrement. Parce que, vous avez raison, ça coûte cher, ça coûte
cher créer des œuvres. Et à cet égard-là, nous croyons, et je crois et je
persiste, et je signe que, lorsque des industries sont subventionnées
minimalement, je pense qu'il serait favorable et il est souhaitable, et nous le
mettons dans un projet de loi, que les conditions et les conditions,
ultimement, socioéconomiques des artistes soient prises en considération et
qu'il est important de négocier des ententes.
Alors, je vous soumets juste que le
gouvernement demeure là, le crédit d'impôt demeure là, la SODEC demeure là pour
vous aider. Puis on est conséquents avec, entre autres, l'achat de livres.
Notre gouvernement a investi des sommes colossales, colossales au cours des
quatre dernières années. Là, on parle de centaines de millions de dollars pour
l'achat de livres, entre autres, pour nos bibliothèques scolaires. Alors, je
pense que vous pouvez voir l'importance que nous vouons à la littérature, aux
livres, aux maisons d'édition. Et je suis optimiste pour la suite des choses.
Je pense qu'entre parlementaires de bonne volonté, on est capables de faire
avancer un projet de loi. Puis on est là pour le faire avancer. Puis moi, je
suis surtout là pour vous rassurer à l'égard des craintes que vous avez. Je
pense qu'on est rendus, 25 ans plus tard, à prendre en considération, et
c'est pour ça qu'on est là, là, c'est vraiment une loi sur le statut de
l'artiste, les conditions socioéconomiques de nos artistes à l'égard de leurs
relations avec ce qu'on appelle les diffuseurs, ça s'appelle comme ça dans la
deuxième loi, qui n'a rien à voir avec un diffuseur de la première loi qui...
une télévision, par exemple. Et oui, c'est une loi qui est complexe, mais je
pense...
11 h 30 (version non révisée)
Mme Roy : ...en bout de piste,
nous y trouverons tous... nous y trouverons tous un avantage, puis au bénéfice
des lecteurs, des artistes et également des éditeurs des maisons d'édition de
toute la chaîne. C'est extrêmement important pour nous. Moi, je vous remercie
pour le mémoire que vous nous avez soumis, que j'ai lu entre les interventions
pendant la pause. Je vous remercie.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.
Merci. Alors, nous poursuivons cette fois-ci avec la députée de l'Acadie.
Mme St-Pierre : Merci, Mme la
Présidente, merci. Merci d'être avec nous ce matin. C'est absolument important
votre présence ici ce matin parce qu'on a besoin d'entendre aussi vos
préoccupations. On a eu des rencontres et je vous ai écoutés et j'ai vraiment...
j'ai à cœur que vous ayez aussi... que vous participiez à ce processus-là parce
que c'est un processus qui fait en sorte qu'on va mieux traiter les artistes
québécois.
Je déclare, Mme la Présidente, mon conflit
d'intérêts parce que j'ai publié en 2020 un livre et j'ai été très, très bien
traitée par mon éditeur. Ça a été vraiment, effectivement très, très bien
traité, mais moi, je n'en fais pas mon métier, je n'en fais pas mon gagne-pain.
Ça a été un geste que j'ai posé. En fait, ça a été une aventure, mais ça sera
probablement la dernière pour moi. Alors, il n'y en aura probablement pas d'autres
puis c'est, je ne sais pas, une affaire unique qui s'est passée dans ma vie.
Puis j'ai eu une très belle expérience. Mais convenez avec moi qu'il y a des
maisons d'édition qui sont très voraces et qui vont ratisser très large. Et
celui ou celle qui sort le minerai de la mine, bien, c'est la personne qui est
sur son ordinateur puis qui a écrit l'oeuvre. Et je pense que ça, je sens qu'il
y a eu une évolution chez vous pour dire : En effet, il y a des gens qui
sont de véritables artistes dans ce domaine-là.
Donc, ce que vous proposez, vous, c'est de
dire : Limitons la protection à des gens qui œuvrent dans différents
genres littéraires et non pas à tous les genres. Par exemple, j'ai beaucoup de
respect pour les gens qui écrivent des livres de cuisine ou des livres de
mécanique, mais vous ne les voyez pas dans cette catégorie-là. Est-ce que c'est
ça que je comprends?
Mme Vachon (Karine) : Bien,
en fait, on ne les considère pas dans la catégorie de la littérature au sens
large de la littérature, mais c'est pourquoi on reconnaissait, en fait, que les
obligations individuelles de la loi S-32.01 a été transmis dans le nouveau
projet de loi, justement parce qu'on a là des obligations nécessaires aux
contrats qui vont toucher l'ensemble des auteurs, qu'ils soient, donc, des
artistes de la littérature ou non. Donc, on considère qu'ils sont quand même
protégés par des obligations qu'on demande aux éditeurs, mais que, pour la
négociation d'ententes collectives, comme c'est une loi sur le statut de l'artiste
et que des associations reconnues sont reconnues du domaine de la littérature,
bien, que ça concerne des auteurs littéraires du domaine de la littérature.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Donc,
les auteurs... c'est-à-dire ce qui est couvert par la SODEC.
M. Foulon (Arnaud) : Bien, c'est
un peu le parallèle qu'on faisait. Nous, on travaille beaucoup avec la SODEC,
vous le savez. Donc, il y a un lien étroit. Comme vous le disiez tout à l'heure,
un livre pour faire son patio, à moins que ça soit devenu un métier d'art, mais
je pense que ça n'a pas rapport avec le milieu artistique. C'est vraiment une
spécificité technique de quelqu'un qui apporte son expertise, et puis qui la
transmet dans un livre dans le cadre d'une proposition qui est faite pour
quelqu'un qui voudrait construire un patio. Mais ce n'est pas du tout la même
chose que quelqu'un qui écrit un roman, quelqu'un qui écrit de la poésie,
quelqu'un qui écrit un album jeunesse où là on se retrouve davantage, comme
disait Mme la ministre, notamment dans les achats de bibliothèques scolaires,
et donc dans... Il y a un écosystème qui est différent pour ce genre de livre
littéraire. Donc, il y a une distinction qui doit être faite par rapport à ce
qui est imposé dans des ententes collectives, effectivement.
Mme St-Pierre : Mais je
cherche à comprendre vos craintes. Parce que vous êtes des amoureux du domaine.
Quelle est la... Quelles sont les craintes qui surgissent? Madame a parlé...
pas de tracasseries, mais de surcharges administratives pour des petites
maisons d'édition. Mais outre cela, quelles sont vos craintes par rapport à
la... au fait qu'on amène les écrivains et les écrivaines dans la Loi sur le
statut de l'artiste.
Mme Vachon (Karine) : C'est
que les contrats varient beaucoup d'un genre de livre à l'autre. Donc, le
domaine de l'édition scolaire, par exemple, c'est une réalité en soi. Les
auteurs ont des très bonnes conditions qui oeuvrent dans le secteur du livre
scolaire. Dans le domaine du livre pratique, il y a une multitude de modèles d'affaires
aussi qui sont derrière la publication d'un livre. Donc, on a de la difficulté
à voir comment on peut arriver à faire des ententes collectives pour une si
large diversité de livres, alors que, dans le domaine de la littérature, bien
là, on est capable de voir qu'on peut effectivement établir des conditions
minimales, donc des ententes qui vont s'appuyer vraiment, là, sur...
Mme Vachon (Karine) : ...des
contrats qui sont équivalents.
Mme St-Pierre : Je suis
peut-être naïve, mais pourquoi vous ne pourriez pas être le principal
interlocuteur de votre vis-à-vis? C'est à dire là, ce que je comprends, peut
être que je suis dans le champ, là, c'est que le vis-à-vis pourrait, devrait
négocier avec plusieurs maisons d'édition différents contrats, qui pourront
être différents les uns et des autres, alors que s'il y avait un tronc commun
de votre association comme étant le principal négociateur de cette... de ce
beau projet-là, je trouve, de société, ça ne serait pas une avenue, ça?
M. Foulon (Arnaud) : Le tronc
commun, comme disait Karine, peut être lié à un type de livre identique, Si on
revient aux livres scolaires, si un éditeur décide, par exemple, dans le cadre
d'un projet scolaire, de libérer le salaire d'un enseignant pour lui permettre
d'écrire, ça ne se compare pas avec quelqu'un qui a déjà écrit un roman, qui
vient de déposer. Ce n'est pas du tout le même genre de contrats qui vont être
signés. Si on essaie de les comparer, les gens vont dire : Ça ne se
compare pas. Donc est-ce que ça veut dire, sinon, qu'il faut avoir une panoplie
d'ententes collectives? Donc c'est pour ça que pour nous, puis revenons à
l'énoncé même de la loi, la loi sur le statut de l'artiste doit s'adresser aux
artistes et non pas à tous les gens qui écrivent des livres. Il y a une nuance
qui est importante là-dedans parce que sinon, on n'y arrivera jamais, là. Il
n'y a pas de... le terrain de jeu est trop vaste, j'ai envie de dire, là.
Mme St-Pierre : Oui. Mais
vous convenez avec moi que si on regarde en termes de cotisations syndicales,
si un auteur vend 200 livres dans l'année, puis qu'il y en a... quelqu'un
qui vend des livres de recettes en vend 10 000, bien, il va rapporter à
votre vis-à-vis, de l'autre côté, plus de cotisations syndicales, ce qui va
faire que... en fait,ça va être un tronc commun qui va aider d'autres artistes
aussi, d'autres créateurs.
J'essaie... Vous savez, c'est comme quand
on est dans un syndicat, je le sais, je suis une vieille syndicaliste, quand on
est dans un syndicat, il y a des gens dans le syndicat qui gagnent beaucoup
plus cher que d'autres. Mais tout ça s'équivalait valait parce qu'on payait des
cotisations syndicales, les cotisations syndicales s'en allaient à la CSN, puis
la CSN représentait tout le monde, les plus faibles comme les plus forts.
Autrement dit, il y a des faibles puis il y a des forts. Faibles dans le
sens... pas dans le sens négatif du terme, mais faibles dans le sens que le
marché n'est pas nécessairement un marché pour des livres à grand public. Donc
il y aurait une protection, à mon avis, pour tout le monde, pour les plus...
bien, ceux qui essaient de faire de la littérature leur métier. Est-ce que vous
me suivez?
Mme Vachon (Karine) : Bien,
ça serait aux aux auteurs des secteurs non littéraires de vérifier leur volonté
ou non de faire partie d'ententes collectives et d'associations d'artistes
reconnus aussi. Donc, pour l'instant, l'association reconnue, elle représente
le domaine de la littérature. Est-ce que des auteurs plus larges souhaitent en
faire partie, des auteurs d'autres secteurs? Au sein des maisons d'édition, on
n'a pas reçu de volonté d'auteurs de secteurs variés de négocier des ententes
collectives avec nous pour le moment.
• (11 h 40) •
Mme St-Pierre : Quand vous
parlez, ici, de remplacer le terme «représenter» par «assister», je ne sais pas
si c'est la bonne.... vous faites la bonne lecture du mot"
représenter". Représenter, ça ne voudrait pas dire nécessairement que
l'auteur qui publie un livre puis qui discute avec la maison d'édition serait
obligatoirement représenté. Ce ne serait pas lui ou elle qui discuterait, que
ça serait son... j'appelle ça son syndicat, là, son union que c'est....
Faudrait... La façon dont, je pense, vous le voyez, c'est qu'il faudrait qu'à
chaque fois cette personne là aille chercher l'aval de son association pour
pouvoir négocier, pour pouvoir parler, discuter de son contrat.
Mme Pigeon (Geneviève) : ...en
fait, oui et non. Je pense que l'inquiétude, ce n'est pas tellement... bien,
enfin. Effectivement, c'est vrai qu'il y a peut-être une nuance à préciser ici,
mais l'inquiétude, c'est vraiment une question aussi de délais. C'est à dire
que même si ce n'est pas systématique que l'auteur soit représenté par son
association, si, à chaque fois que l'auteur a une question, doit passer par un
processus ou quelqu'un de l'association doit intervenir, à ce moment-là, avec 3550,
bon, ils disaient, contrats annuels, par exemple, on craint d'être face à des
délais et de retarder des projets de publication parce qu'on discute avec... en
tout cas, personnellement, je discute avec les auteurs de contrats. Ça peut
durer plusieurs heures, on clarifie des points, on jase, on explique des
situations concrètes. Mais si à chaque fois une tierce partie doit intervenir,
même, dans une discussion, pour expliquer un point ça pourrait devenir très
lourd, effectivement. Donc je pense que c'est là l'inquiétude entre représenter
et assister. En fait, c'est la lecture qu'on en a faite, nous, ici.
Mme St-Pierre : ...il y a une
entente-cadre, il me semble que ça simplifierait votre travail, non?
Mme Pigeon (Geneviève) : Bien,
c'est-à-dire qu'on...
Mme Pigeon (Geneviève) : ...on
travaille déjà avec les paradigmes de la S-32.01, qui est déjà... donc, c'est
déjà reproduit dans le projet de loi n° 35, là, dicte un certain nombre de
conditions qu'on doit respecter. À partir de là, ce seraient des conditions
minimales. Ce qui veut dire que chaque auteur pourrait quand même souhaiter
discuter davantage et augmenter ses conditions, ou nuancer, ou préciser. Donc,
je pense qu'on n'échappe pas, quand même, au risque ou à la possibilité que des
discussions supplémentaires soient nécessaires pour les contrats de toute
façon.
Mme St-Pierre : Quand il
y a des salons du livre, les auteurs que vous invitez ne sont pas rémunérés
dans... que les éditeurs invitent dans leurs différents secteurs, là, les
auteurs ne sont pas rémunérés. Est-ce que vous trouvez ça normal qu'un auteur
ne soit pas rémunéré pour aller dans un salon du livre, alors que la personne
qui va s'occuper de vendre des billets va être rémunérée?
M. Foulon (Arnaud) : En
fait, il y a deux éléments. Il y a des activités, des tables rondes, dans les
salons du livre, organisés par les... Et ils sont rémunérés dans ces tables
rondes, là, les auteurs, là, il faut faire attention, là. C'est pour ça, je
corrige cet aspect-là. Un auteur qui est invité à participer à une table ronde
avec d'autres auteurs ou à une entrevue avec un animateur va être rémunéré pour
ça, et il faut qu'il le soit, c'est important. Un auteur qui fait des tournées
scolaires, dans les écoles, va être rémunéré pour ça par rapport à être
rémunéré pour faire une séance de signatures - c'est peut-être ça votre
question. Effectivement, ça, c'est une activité de promotion pour son livre qui
est incité par la maison d'édition même. Si la maison d'édition devait
rémunérer ça, bien là, on s'en va vers peut-être une bestsellerisation des
auteurs que vous allez avoir dans les salons du livre. Vous n'en aurez pas
1 500 au Salon du livre de Montréal, vous en aurez peut-être 200 ou 300.
Parce que ce qu'on oublie, il y a un aspect quand même important, c'est que
cette loi-là ne fait pas apparaître de l'argent dans le milieu du livre. Donc,
on est quand même contraint par un domaine où les salaires sont très peu élevés
par rapport à beaucoup d'autres domaines culturels, puis ça, c'est vrai pour
plusieurs gens dans la chaîne du livre. Le Libraire, vous n'êtes pas sans
savoir que, même si la loi du livre octroie 40 % de remise, bien, la marge
bénéficiaire des libraires n'est pas énorme aujourd'hui. C'est vrai pour
l'ensemble des artisans, donc il faut faire attention à cet aspect-là. J'ai
l'impression que, des fois, quand on lit les propositions, on a l'impression
que c'est la panacée puis que l'argent va apparaître. Ça, c'est une inquiétude
qu'on a, elle n'apparaîtra pas, mais elle va amener une certaine surcharge,
dont les éditeurs ne peuvent pas absorber seuls les frais. Il va falloir que ça
se fasse en partage pour le bénéfice et le ruissellement jusqu'aux artistes,
ça, c'est important.
Mme St-Pierre : Donc,
votre proposition, c'est que vous êtes ouvert à ce qu'il soit inclus dans la
loi un certain type d'œuvres littéraires et que certains autres ne soient pas
dans la loi, et ça, vous seriez capables de vivre avec ça.
M. Foulon (Arnaud) : En
fait, ils vont être dans la loi, mais qu'ils ne soient pas couverts par des
ententes collectives. C'est pour ça que je fais la nuance. C'était le cas dans
S-32.01, il y avait aussi cette nuance-là, qui était quand même assez claire.
Quand on parle des personnes non visées, c'est les personnes non visées par les
artistes... les clauses au niveau artistique, mais qui ont écrit un livre, donc
ils doivent être régis par une loi quand on écrit un livre. Quelqu'un qui écrit
un livre - pour revenir au livre de jardinage ou autre - pourrait avoir un conflit
avec son éditeur, puis il faut qu'il y ait un recours... il faut qu'il y ait un
recours qui existe devant les tribunaux pour pouvoir contester la chose, là.
C'est important que ça existe, ça.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci.
Mme St-Pierre : ...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, nous poursuivons, cette fois-ci, avec la
députée de Taschereau.
Mme Dorion : Bonjour.
Contente de vous revoir. J'ai réfléchi aux discussions qu'on avait eues - j'ai
juste deux minutes, je vais aller vite - à mon bureau de comté, puis j'ai
reparlé aussi à beaucoup d'auteurs.
Bon, l'argument qu'ils disaient
c'est : On comprend les difficultés dans lesquelles pourraient se trouver
les éditeurs parce qu'effectivement l'argent ne tombe pas du ciel. Mais, nous,
comme auteurs, on est souvent pris pour espérer que l'argent tombe des
éditeurs, puis, eux, ils nous disent : Bien, nous, on n'en a pas d'argent.
Et donc ils disaient... Vous pouvez peut-être m'aider à répondre à ça, mais ils
disaient : Au moins, si on est régi et si tous, tous les livres font
partie aussi de ce règlement-là, on va être un plus grand nombre à dire «Bien,
l'argent, on en a besoin» et on ne sera pas les auteurs dépendant d'un
ruissellement qui n'arrivera peut-être jamais.
C'est la question que je me pose
aujourd'hui parce que ça pourrait... Je comprends que vous voulez faire une
distinction entre les artistes qui écrivent et les non-artistes qui écrivent,
mais il ne faudrait pas créer une situation où tout à coup ceux qui ne sont pas
des artistes, c'est plus avantageux pour des éditeurs de faire affaire avec
eux. Et, moi, j'ai peur de ça aussi.
Donc, ces deux craintes là, ces deux
soucis là, si vous pouvez juste me dire votre avis là-dessus. Votre
intelligence collective d'éditeur... Je n'ai jamais fait ce job-là, ça fait que
je suis bien curieuse de savoir.
Mme Vachon (Karine) : Les
éditeurs de livres valorisent toujours la bibliodiversité, donc, c'est-à-dire
de publier une vaste catégorie de livres de tous genres, et la littérature est
la partie la...
Mme Vachon (Karine) : ...plus
importante de la création au Québec, là. Donc, je pense qu'il y aura toujours
cette volonté de publier les œuvres de création, de publier donc les œuvres
littéraires, et tout ça. Mais les livres d'autres genres, les livres pratiques
puis les livres scolaires, et tout ça, sont créés, selon d'autres modèles
aussi, qui nécessitent aussi un investissement important quand on fait du livre
illustré, quand on fait des ouvrages universitaires avec des tableaux, des
graphiques, et tout ça, d'un nombre de pages important.
Donc, je pense qu'il n'y a pas d'avantage
à publier un genre de livre plus qu'un autre. Une oeuvre littéraire peut
devenir un best-seller comme un livre de cuisine peut l'être, mais... et vice
versa. Donc, c'est... Je ne pense pas que les éditeurs vont faire des choix en
fonction de ce qui est couvert ou non par une loi. Ils vont faire des choix par
rapport c'est quoi, le créneau de la maison d'édition, qu'est-ce qu'ils souhaitent
publier. Et, à certains égards, bien, les conditions vont être les mêmes dans
les contrats de toute façon, c'est juste que, dans certains types de livres,
des fois, il y a des modèles d'affaires qui sont différents, il y a des
conditions qui sont différentes, qui sont négociées avec les auteurs aussi, qui
ne sont pas nécessairement désavantageuses pour le créateur pour autant, là.
M. Foulon (Arnaud) : Puis,
si je peux compléter, il y a des livres qui ne sont pas subventionnés, des
livres pratiques. Revenons au guide jardinage, il n'est pas subventionné, il ne
s'en fait pas moins pour autant au Québec, ou le livre de cuisine. La SODEC, ce
n'est pas son mandat. Donc, il faut faire attention. Il y a des livres qui se
font, mais les... investissements, pardon, financiers sont quand même
colossaux. Il y a l'embauche, notamment, je vais vous donner un exemple, de
photographes pour ce genre de livres, là, bien, c'est quand même important, les
dépenses qui sont liées à ça. Donc, ça amène un montage financier qui est
différent, mais, heureusement, le milieu du livre au Québec est rendu
concurrentiel avec l'international, et il s'en fait beaucoup, des livres comme
ça, ce qui n'était pas le cas il y a 20 ans.
Donc, la crainte que vous avez, je ne la
partage pas. Je pense vraiment que ces livres-là, si on laisse la latitude de
travail, devraient continuer à se faire. L'exemple, c'est que sans certaines
des subventions, ils se font quand même.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Parfait. C'est tout. Alors, c'est tout le temps
que nous disposons. Nous poursuivons avec le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Merci, Mme
la Présidente. Bienvenue à l'Assemblée nationale. La question de la reddition
de comptes est vraiment importante, pour vous et pour nous. C'est de l'argent
public qui est donné à des entreprises. Donc, les éditeurs de livres reçoivent
tous de l'argent public. Qu'est-ce qu'on peut faire de plus? Qu'est-ce qui
devrait se retrouver dans le projet de loi pour améliorer la reddition de
comptes et s'assurer que, d'abord, les créateurs puissent être les premiers
servis?
M. Foulon (Arnaud) : Je
dirais... Je ferais juste une correction, il y a des éditeurs qui ne reçoivent
pas d'argent public, il y en a qui n'ont pas de subventions parce qu'ils ne
respectent pas certains des critères.
M. Bérubé : Alors, pour
ceux qui en reçoivent.
M. Foulon (Arnaud) : Pour
ceux qui en reçoivent, je pense... puis là-dessus il faut que je lève mon
chapeau au gouvernement et à la ministre, il y a eu beaucoup de choses qui ont
été faites récemment. L'investissement dans les bibliothèques scolaires est un
bon exemple. Donc, il y a plusieurs programmes qui existent. Là où il y a
encore des lacunes aujourd'hui, je peux me permettre, au niveau des artistes,
c'est... les bourses d'écriture au CALQ ne sont absolument pas concurrentielles
avec ce qui existe au niveau fédéral. Il y a certains aspects où je vous dirais
qu'il y a encore du travail qui peut être fait pour encourager la création et
pour aider la création de nos artistes pour être plus concurrentiels sur la
scène internationale. Donc, il y a des choses qui peuvent être faites.
• (11 h 50) •
Par rapport au projet de loi, nous, on a
fait nos revendications par rapport à ce qui nous semble le plus logique pour
aller de l'avant et dans un esprit d'ouverture, parce que, même si on n'était
pas, et je le répète, d'accord avec la fusion de ces deux lois là, aujourd'hui,
on se rend compte qu'on doit avancer tous ensemble, on est dans le même bateau,
auteurs, éditeurs, distributeurs, libraires,nais, si on veut que le bateau
continue à avancer, bien, je pense qu'il faut faire preuve aussi d'avancement
dans ce sens-là.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Il vous reste une minute.
M. Bérubé : Est-ce qu'il
y a un élément de votre présentation qu'on n'a pas discuté que vous aimeriez
mettre en lumière ou préciser, avec le temps qui nous reste, que je vous offre?
M. Foulon (Arnaud) : Je
suis surpris. Je...
M. Bérubé : Vous ne
devriez pas l'être avec moi.
Mme Pigeon (Geneviève) : ...sur
la question qui concernait le choix des éditeurs, est-ce qu'on va privilégier
certains types de livres ou d'autres, parce que ça m'interpelle de façon
personnelle dans la mesure où j'ai fait le choix d'être propriétaire d'une
maison d'édition qui fait du très littéraire. Et je n'aurai... bien, enfin, je
ne dirai pas «je n'aurai jamais», mais la best-sellerisation ne fait pas partie
de mon quotidien, on va dire ça comme ça. Et, malgré tout ça, je n'estime pas
avoir les compétences, l'énergie, l'envie de me lancer dans d'autres types
d'œuvres, de publications. C'est ma passion, c'est ce que j'aime, c'est ce que
je connais. Donc, en ce qui me concerne, ce risque-là n'existe pas. Je vais
continuer à faire ce que je sais faire et ce que je fais bien. Et, en ce sens,
je pense que chaque éditeur aurait pu venir à ma place et dire la même chose.
Donc, ce qu'on souhaite vraiment, c'est plutôt d'avoir les moyens de pouvoir
continuer à avancer et de bien le faire, en fait.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Alors, merci, M. Foulon,
Mme Pigeon et Mme Vachon pour votre contribution aux travaux de la
commission. Merci encore.
Et nous allons suspendre quelques
instants.
(Suspension de la séance à 11 h 52)
(Reprise à 12 heures)
La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors,
bonjour. Pour ce bloc-ci, nous allons entendre deux groupes : l'Union des
écrivaines et écrivains du Québec... ou québécois, pardon, et l'Association
québécoise des autrices et des auteurs dramatiques.
Nous commençons d'abord par l'Union des
écrivaines et écrivains québécois, avec madame Aubry. À vous la parole. Je vous
demanderais de bien vous présenter avant de commencer votre exposé de huit
minutes, si j'ai bien compris.
Mme Aubry (Suzanne) : Merci,
Mme la Présidente. Je me présente, Suzanne Aubry, présidente de l'Union des
écrivaines et des écrivains québécois, écrivaine et autrice dramatique. Mme la
Présidente, Mme la ministre de la Culture et des Communications, Mme la députée
de l'Acadie. Mme la députée de Taschereau, M. le député de Matane-Matapédia,
Mmes et MM. les députés, nous souhaitons d'abord vous remercier infiniment
d'avoir fait ce projet de loi, de l'avoir déposé et de nous recevoir
aujourd'hui à cette commission parlementaire. Maintenant, je cède la parole à
Laurent Dubois.
M. Dubois (Laurent) : Bonjour
à toutes et tous. Laurent Dubois, directeur général de l'UNEQ, l'Union des
écrivaines et écrivains québécois, qui est un syndicat professionnel fondé le
21 mars 1977, ça fait donc 45 ans. L'Union des écrivaines et des écrivains
regroupe aujourd'hui plus de 1600 écrivaines et écrivains dans tous les genres,
dans tous les genres littéraires : poésie, roman, théâtre, essai jeunesse,
ouvrage scientifique et pratique, manuel scolaire, etc., guide de l'auto, et
j'en passe. L'UNEQ protège un métier et non pas un genre.
Depuis 45 ans, l'UNEQ travaille à la
défense des droits socioéconomiques des écrivaines et des écrivains ainsi qu'à
la valorisation de la littérature québécoise. Et l'UNEQ a été reconnue en 1990
comme l'association la plus représentative des artistes du domaine de la
littérature en vertu de la Loi sur le statut professionnel des artistes en arts
visuels, des métiers d'art et de littérature, appelée loi S.3201...
12 h (version non révisée)
M. Dubois (Laurent) : ...pendant
plus de 30 ans, les écrivaines et les écrivains que nous représentons ont
dû vivre avec la loi 32.01 qui n'obligeait d'aucune façon les éditeurs et les
producteurs à négocier des ententes collectives fixant les conditions minimales
de contrat. Résultat : zéro entente en 30 ans.
Pendant plus de 30 ans, contrairement
à la majorité des artistes, les autrices et auteurs ont exercé leur métier sans
bénéficier d'ententes collectives encadrant leurs conditions de travail, sans filet
social, sans recours à l'arbitrage ou au tribunal administratif du travail en
cas de litige.
Pendant plus de 30 ans, les autrices
et les auteurs ont dû négocier leurs contrats seuls face à des éditeurs de plus
en plus puissants. Peu familiers avec le jargon juridique, embourbés dans des
négociations de gré à gré, ils sont nombreux à signer des contrats abusifs qui
vont les suivre pendant des décennies, souvent même après leur décès, avec des
répercussions incalculables sur la suite de leur carrière.
Voici quelques exemples les plus criants
des clauses tellement abusives qui ont été imposées dans les contrats des
écrivaines et écrivains au fil des années.
Les clauses de préférence, par exemple, qu'imposent
certaines maisons d'édition, qui condamnent l'artiste à réserver ses œuvres
futures exclusivement aux diffuseurs, et ce, parfois, sans aucune limite dans
le temps, ce qui revient à dire que vous êtes pieds et poings liés avec votre
éditeur pour la suite de votre carrière.
Autre exemple des cessions de droits
complètes, qui dépossèdent les autrices et les auteurs de tout contrôle sur les
diverses exploitations futures de leurs œuvres, adaptations cinématographiques,
livres audios, traductions, adaptations au théâtre, par exemple.
Et enfin des clauses appelées paiements
intertitres qui permettent aux éditeurs de compenser l'éventuel manque de
rentabilité d'une publication en ponctionnant les redevances à verser pour une
autre œuvre.
Pendant plus de 30 ans, un abus de
position dominante dû au déséquilibre du rapport de force entre les écrivains
et les diffuseurs a favorisé un climat de travail parfois toxique, pouvant
mener à du harcèlement psychologique ou, dans des cas rares, heureusement, à
des situations d'agressions sexuelles, sans que la loi n'offre quelque
protection que ce soit en cas d'abus. Aucun grief, aucune médiation, aucun
recours facilement accessible.
Pendant plus de 30 ans, les autrices
et les auteurs se sont vu offrir de participer à des activités de promotion ou
de valorisation de la littérature sans contrepartie financière ou avec une
rémunération indécente, bien en dessous des recommandations de l'UNEQ.
Pendant plus de 30 ans, l'UNEQ a été
privée de son pouvoir de représenter comme il se doit les écrivains membres et non-membres,
et par le fait même, ceux-ci ont été privés d'une partie importante de leur
liberté de s'associer pour améliorer leurs conditions socioéconomiques.
Pendant plus de 30 ans, la loi S-32.01
a démontré qu'elle était inéquitable, injuste et inapplicable.
Mme Aubry (Suzanne) : Mme la
ministre, Mmes et MM les députés, fort heureusement, aujourd'hui, un nouveau
chapitre peut s'écrire en intégrant la littérature, le théâtre et les arts
visuels parmi la liste des secteurs qui étaient auparavant encadrés par la loi S-32.01.
Le projet de loi n° 35 instaure enfin une obligation pour les diffuseurs et
producteurs de s'asseoir avec les syndicats pour négocier de bonne foi des
ententes collectives fixant les conditions minimales des contrats.
En instituant une loi commune à toutes les
disciplines artistiques, le législateur permet un rééquilibrage du rapport de
force. Il sort les autrices et les auteurs et les auteurs de l'ornière du
contrat négocié de gré à gré et donne à l'UNEQ le pouvoir de négocier des
ententes collectives avec les différents partenaires du milieu du livre.
Ainsi, nos artistes ne seront plus jamais
isolés dans cette étape cruciale qui est la signature d'un contrat. Des
conditions minimales auront été négociées préalablement entre les parties, et
la discussion ne porterait alors que sur une possible bonification de ces
planchers.
Grâce au projet de loi n° 35, l'UNEQ
entreprendra, aussi rapidement que possible, des négociations de bonne foi avec
les éditeurs et autres diffuseurs afin de signer autant d'ententes collectives
que nécessaire, et je le souligne ici, secteur par secteur, et ce, dans le but
de tenir compte des différentes réalités dans la chaîne livre, ce qui répond
aux interrogations de l'ANEL tantôt.
En élargissant les pouvoirs du Tribunal
administratif du travail aux artistes, le projet de loi n° 35 favorise l'accès
à la justice pour une catégorie de travailleurs et travailleuses obligés jusqu'alors
en cas de litige de se tourner vers les tribunaux de droit commun aux procédures
souvent longues et coûteuses.
Pour ce qui est du harcèlement
psychologique ou sexuel, le projet de loi n° 35 donne enfin à tous les artistes
les mêmes dispositions que celles qui s'appliquent aux travailleurs et
travailleuses québécois qui figurent dans la Loi sur les normes du travail. Ces
questions si fondamentales ne feront plus l'objet de négociations entente par
entente. Le...
Mme Aubry (Suzanne) : ...le
projet de loi no 35 donnera à l'UNEQ des moyens essentiels pour négocier
avec tous les diffuseurs, que ce soit les salons du livre, les bibliothèques,
les librairies, institutions scolaires. L'UNEQ salue la volonté politique du
gouvernement et les efforts transpartisans de tous les partis politiques au
soutien du projet de loi no 35 afin qu'il puisse être adopté rapidement.
Le projet de loi no 35 doit à tout prix vivre, car il instaure équité et
justice pour les écrivaines et les écrivains qui seront enfin considérés comme
des artistes à part entière et auront les mêmes droits et les mêmes protections
que les autres artistes. Nous appuyons fortement le projet de loi no 35 et
demandons son adoption avant la fin des travaux parlementaires. Pour toutes ces
raisons, le projet de loi no 35 est historique. Il constitue un projet...
un progrès socioéconomique sans précédent pour les écrivaines et les écrivains.
Il y aura un avant et un après-projet de loi pour notre amitié.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Nous poursuivons avec Mme Gagnon, de
l'Association québécoise des autrices et des auteurs dramatiques. Je vous
invite à bien vous présenter Mme Gagnon avant de commencer votre exposé de
2 min 20 s
Mme Gagnon (Marie-Eve) : Mon
nom est Marie-Ève Gagnon. Je suis directrice générale de l'Association
québécoise des autrices et auteurs dramatiques. L'AQAD salue le dépôt du projet
de loi no 35 qui constitue une avancée absolument essentielle pour
l'amélioration des conditions des artistes que nous représentons. Qui sont ces
artistes que nous représentons? Ce sont ceux qui écrivent, traduisent ou
adaptent les histoires que vous allez voir sur les scènes de théâtre et dans
d'autres lieux, sur tout le territoire. Il faut savoir que l'AQAD est la seule
association d'artistes visée par les deux lois sur le statut de l'artiste.
Donc, on est à même de voir les différences très grandes des effets de chacune
des lois.
Concrètement, ça veut dire qu'un auteur,
une autrice qui a un contrat AQAD quand elle est engagée pour écrire une œuvre,
si tout va bien, le producteur doit respecter les conditions minimales de
l'entente collective. L'artiste écrit, est payé et reçoit des avantages
sociaux. Toutefois, l'autre loi s'applique quand s'enclenche le travail de
production et de diffusion de l'œuvre. Ça a pour conséquence que l'auteur se
retrouve alors sans normes minimales, tout seul pour une négociation de gré à
gré avec le producteur. Permettez-moi de citer Emmanuelle Jimenez, autrice et
vice-présidente de l'AQAD : «J'exerce le métier d'autrice dramatique
depuis près de 25 ans, mais j'éprouve une grande fatigue culturelle. Et
cette fatigue, je l'ai ressentie dès mon premier contrat de licence. J'ai tout
de suite constaté que je n'étais pas sur un pied d'égalité avec mes collègues
artistes qui, eux et elles, voyaient leur patrie... leurs pratiques encadrées
par un régime de travail. Mes collègues metteurs en scène, par exemple,
auraient droit à une contribution du producteur à leur fonds de pension. Moi,
non. Moi, pour avoir un minimum décent par représentation, il faut que je me
batte, que je gagne mes conditions de travail à l'arraché. Il n'y a jamais rien
d'acquis, même après 25 ans de pratique. À chaque contrat, c'est toujours
à recommencer. Et ça, ça use. Je veux arrêter de me dire que, tous les jours,
que la Loi sur le statut de l'artiste est contre moi.» Fin de la citation. Il
faut absolument adopter ce projet de loi pour que les auteurs et autrices
puissent enfin avoir un véritable impact sur leurs conditions de travail.
Merci.
• (12 h 10) •
Mme Roy : Alors, merci,
effectivement.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci à vous aussi. Nous allons commencer la
période d'échanges. Mme la ministre, à vous la parole.
Mme Roy : Merci,
Mme Aubry, M. Dubois, Mme Gagnon. Merci d'être ici. Merci pour
votre témoignage. Merci pour votre résilience et votre combativité. On s'est
rencontrés, on s'est vus même en personne à certains moments. C'est
extraordinaire. On s'est vu aussi par Teams, Zoom, etc. Je veux vous dire que
ce projet de loi là, la pierre angulaire de cette refonte, c'est entre autres
le fait que, maintenant, il n'y a plus deux classes d'artistes au Québec, il y
en a une seule, une seule classe d'artistes professionnels. Vous serez tous
sous la même loi, naturellement, quand nous réussirons à l'adopter tous
ensemble. Je ne veux rien, mais j'ai confiance, j'ai confiance. On est là pour
vous, pour les artistes. Cette loi-là est pour les artistes. Et il n'est pas
question, ici, d'antagoniser qui que ce soit ou quoi que ce soit. On est rendus
ailleurs, je pense, en 2022, maintenant. J'aimerais très concrètement... Je
sais, je vous ai lu. J'ai lu les articles que vous avez faits. J'avais même
répondu à un journaliste qui me questionnait que j'avais un préjugé favorable à
votre recommandation. Alors, le...
Mme Roy : ...vous avez lu
entre les lignes, lisez tous entre les lignes, là. Mais l'idée de n'avoir
qu'une seule loi et surtout de nous assurer que le secteur, donc, de la
deuxième loi, qui était le secteur de la littérature, des arts visuels et des
métiers d'art, fasse désormais partie de la même loi, d'une seule loi. Pour
moi, c'était fondamental, ça allait de soi. Maintenant, on est rendu ailleurs.
Je vais vous poser des questions très
concrètes maintenant dans l'application. Et puis, tout comme vous, je souhaite
qu'elle soit adoptée d'ici la fin de la session, mais je veux juste vous
rassurer dans la mesure où c'est possible, il y a suffisamment de temps, puis
on écoute très attentivement pour voir dans quelle mesure on peut bonifier les
choses. Entre autres, vous nous parlez du devoir de juste représentation, le
fameux article 24.2. Naturellement, c'est l'AQAD qui nous parle de ça.
C'est le fameux article 15 du projet de loi n° 35. Vous n'êtes pas le
premier groupe qui nous en parler. Je pense qu'on peut faire des ajustements
qui pourraient être intéressants. Je vais dire ça comme ça. Maintenant, je veux
poser des questions parce que de façon plus concrète, puis il y a tout un pan
aussi du projet de loi qui touche des articles de la Loi sur les normes du
travail que nous transposons, que nous apportons à plusieurs égards, entre
autres, vraiment à l'égard des tribunaux administratifs, du tribunal
administratif du travail, mais également à l'égard... les dispositions à
l'égard du harcèlement psychologique et sexuel. Dans quelle mesure, si le
projet de loi est adopté, ces mesures-là vont pouvoir aider les artistes du
milieu de la littérature, entre autres?
M. Dubois (Laurent) : Ça
va tout changer, Mme la ministre, tout changer. Vous parlez des... notamment,
vous faites allusion aux situations de harcèlement, vous savez... vous n'êtes
pas sans savoir qu'en juillet 2020, on a eu droit dans le milieu à #MoiAussi
littéraire où finalement on a eu plus de 150 victimes qui ont pu exprimer
des plaintes qui ont été déposées au niveau de l'UNEQ, etc. Puis ces
plaintes-là, moi, je ne peux rien en faire, je ne peux absolument rien en
faire. En tant que directeur d'un syndicat, je ne peux pas contraindre un
éditeur à s'intéresser à la question, à me parler, à s'asseoir pour qu'on
regarde le cas, pour faire ce qu'on pourrait appeler une médiation ou pour
entrer dans un processus d'accompagnement de la plainte. Je ne peux pas le
faire aujourd'hui. Bien, avec ce projet de loi, tout ça est réglé. Donc, c'est
sûr que s'il y a des écrivaines et des écrivains qui ont été victimes et qui
nous écoutent, elles savent très bien... savent très bien que les choses
peuvent changer grâce à ce projet de loi. Donc, bravo et merci pour ça.
Mme Roy : Merci à vous.
Vous nous dites : Il est important que le projet de loi soit adopté avant
la fin de la session parlementaire. Pourquoi cette urgence-là, là? J'ai une
bonne idée, mais je veux juste vous entendre.
Mme Aubry (Suzanne) : Bien,
parce que ça fait plus de 30 ans qu'on vit cette situation-là. Moi, quand je
suis arrivé à l'UNEQ, mon seul but, quand j'ai constaté... je suis scénariste
aussi, et j'ai constaté que j'étais protégée en vertu des ententes collectives
qui avaient été négociées par la SARTEC. Et je suis devenue écrivaine et je
n'avais aucune protection, rien, aucun filet social, aucune entente collective.
Je suis arrivé à l'UNEQ, je me suis fait élire et j'ai annoncé que moi, ce que
je voulais, mon seul but, c'était qu'il y ait une loi... enfin, qu'on puisse
avoir des ententes collectives, qu'on puisse avoir la même protection et le
même statut que les autres écrivains. Comme scénariste, j'étais en dichotomie
avec l'écrivaine, et je trouvais ça insensé. Les métiers d'écriture, c'est
d'écrire qu'on fasse un livre de botanique, qu'on écrive de la poésie, qu'on
écrive un essai sur l'automobile. Quel que soit le genre, on est des écrivains
à part entière. Or, cette loi le reconnaît. Et nous, on ne veut pas, en tant
que syndicat, avoir des catégories d'artistes dont certains seraient protégés
et d'autres pas. Ça va complètement à l'encontre de notre ADN. On veut protéger
toutes les écrivaines et tous les écrivains, quel que soit le genre d'écriture.
Comme le disait Laurent, tout à l'heure, on ne représente, on représente les artistes.
Mme Roy : J'aimerais
vous poser une question, Mme Gagnon, à l'égard, plus précisément de votre
association, l'Association québécoise des auteurs dramatiques. Dans ce projet
de loi là, je vous ai dit qu'on a importé plusieurs dispositions qui sont des
dispositions qu'on retrouve dans la Loi sur les normes du travail qui ne
s'appliquent pas aux artistes. Donc, on va chercher des dispositions pour les
appliquer aux artistes. Celles sur le harcèlement, on vient d'en parler, mais
également des dispositions à l'égard du fameux tribunal administratif du
travail. Et donc, on donne de nouveaux pouvoirs au Tribunal administratif du
travail. Alors, s'il était adopté, ce projet de loi là, dans quelle mesure ça
viendrait régler certains problèmes pour vous? Puis là, on parle de toute la
dynamique syndicale, là.
Mme Gagnon (Marie-Eve) : Bien,
en fait, ça nous...
Mme Gagnon (Marie-Eve) : ...à
accélérer les processus de négociation, comme Mme Fortin, de l'UDA, en a parlé
ce matin, c'est-à-dire que, si on peut... Par exemple, sur la négociation de
bonne foi, ça va accélérer les processus de négociation, qui sont souvent
beaucoup trop longs. Dans notre cas, il y a une négociation qui a duré sept
ans. Donc, c'est sûr que, si on peut avoir certains outils, donc les nouveaux
pouvoirs du Tribunal administratif du travail, bien, ça va pouvoir nous aider à
mieux faire notre travail puis à accélérer le processus de négociation.
Mme Roy : Et, pour le
bénéfice des gens qui nous écoutent, entre autres la disposition qui traite de
la négociation de bonne foi, qui vient d'apparaître.
Comment est-ce que vous entrevoyez... On a
entendu tantôt les éditeurs. Comment est-ce que vous entrevoyez la négociation
d'ententes collectives une fois que le p.l. n° 35 sera adopté? Comment vous
voyez ça pour la suite des choses?
M. Dubois (Laurent) : Très,
très bien. Non, mais c'est vrai, c'est un progrès social. Je veux dire, on ne
peut pas imaginer aujourd'hui qu'il y ait encore des secteurs qui ne soient pas
obligés de se parler quand ils collaborent. Donc, là, tout à coup, on va
pouvoir se parler, on va s'asseoir et on va négocier. Aujourd'hui, on gagne
juste ça avec le projet de loi n° 35. Votre projet de loi, il ne contient pas
les conditions minimales de nos futures ententes, il ne donne rien de tout ça,
et c'est bien normal, c'est à nous de faire ce travail-là, puis on est enfin
contents de pouvoir le faire. Donc, on va le faire. On espère pouvoir le faire
avec un interlocuteur unique qui acceptera l'idée qu'on pourrait négocier
plusieurs ententes collectives différentes pour tenir compte des réalités,
parce que, oui, des réalités... entre le milieu de la poésie et le milieu du
guide pratique, le «business model», le modèle d'affaires n'est pas le même,
mais ça n'en reste pas moins que dans les deux cas on a besoin d'encadrer la
pratique.
Et tout à l'heure, j'ai entendu qu'il y
avait beaucoup de modèles d'affaires. Oui, mais il y a aussi beaucoup de
modèles d'affaires qui méritent d'être encadrés pour ne pas dériver, et donc,
nous, on est là. On va prendre notre temps, on va tendre la main, il n'y a pas
de... - on a attendu 30 ans, donc on n'est plus à deux semaines près - et on va
s'asseoir, et on va parler, et on va progresser, et pour le bien de tout le
monde. Et je suis convaincu, Mme la ministre, que si on se reparle, si on a la
chance de se reparler, là, tous ensemble dans quelques années, on trouvera que
c'était un vrai progrès social pour toute la chaîne du livre. Parce que ça va
aider tout le monde à assainir aussi un milieu, et à valoriser les bonnes
pratiques, et à mettre de côté les joueurs qui abusent, et c'est toujours les
mêmes 15 joueurs qui abusent, c'est les gros joueurs, puis ces joueurs-là, il
faut les mettre à l'index, puis on va leur dire que maintenant ils n'ont plus
le choix de s'asseoir et de faire la même chose que les petits éditeurs, qui,
eux, essayent de faire tout comme il faut.
Mme Roy : Merci. Il y a mon
collègue le député de Saint-Jean qui aimerait vous poser une question. Vous le
connaissez. Je ne peux pas mentionner son nom, je suis obligée de dire «le
député de Saint-Jean», alors... qui est un grand lecteur également.
M. Lemieux : Merci, madame la
ministre. Il reste combien de temps, madame?
La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors,
M. le député de Saint-Jean, il vous reste huit minutes.
M. Lemieux : D'accord. Mais
j'ai peut-être des collègues qui vont vouloir se lancer, mais j'y vais tout de
go.
Mme Gagnon, Mme Aubry, M. Dubois, de toute
évidence, c'est un projet de loi qui n'était pas juste inattendu et... très
attendu et nécessaire, mais qui va tout changer, de ce que je comprends de
votre enthousiasme. Bon. Cela est juste et bon. Tant mieux. Mais il y a quand
même... Dans les arguments qui flottent ici et qui vont se répercuter dans la
société, il y a quand même des choses qui ont... qui méritent explication et
arguments, éventuellement. Entre autres, votre formule est belle, M. Dubois:
tous les genres, tu sais. J'oublie votre formule tellement elle était belle, je
ne l'ai pas notée, là, mais le genre a frappé. Expliquez-nous ça pour quelqu'un
qui nous regarde, là, puis qui dit: Eh! Un guide de réparation de motoneige
puis de la littérature puis de la poésie, ça n'a rien à voir, là. Pourquoi on
beurre si large, dirait-il?
• (12 h 20) •
M. Dubois (Laurent) : Ça va
me prendre 30 secondes pour vous faire la démonstration. Prenons l'UDA, un
comédien. Le comédien, quand il est au théâtre, quand il est dans un film, là,
il est au meilleur de sa pratique. Il joue, il incarne un personnage, Cyrano,
passez-en, il est bon. Quand il fait une pub pour Canadian Tire, la question de
la pratique artistique peut peut-être être remise en question, mais son métier,
c'est le même, il est comédien, et dans les deux cas il doit être encadré par
des minimums, il travaille comme comédien.
Nous, c'est ça qu'on raconte, c'est qu'en
réalité, ce qu'on encadre, nous, comme syndicat, ce sont les travailleurs et
les travailleuses qu'on représente, qui sont des écrivains. Maintenant, ce
qu'ils écrivent, ce n'est pas notre problème. Ils écrivent dans un milieu, dans
un contexte, dans un univers, dans un écosystème, et c'est ça qu'on doit encadrer,
l'écosystème. Qu'ils écrivent de la poésie - les pauvres, ils ne se mettront
pas riches avec ça - ou qu'ils écrivent des best-sellers, ils doivent être
accompagnés pareil.
M. Lemieux : Bien,
justement... Et, juste pour référence, si jamais vous vous demandez pourquoi
j'ai parlé de motoneiges, c'est à cause du député de Mégantic, ici. Bon. Il
pourrait en écrire un guide. Mais, justement, les gens...
M. Lemieux : ...sont tellement
différents, et les modèles d'affaires qui vont avec aussi. Vous venez de le
dire, les pauvres, ils ne se mettront pas riches. Est-ce qu'on n'a pas affaire
à deux bêtes complètement différentes?
M. Dubois (Laurent) : On a
affaire à des conditions de pratique qui sont vraiment différentes, à des
réalités économiques qui sont différentes, et c'est très clair qu'on va en
tenir compte, parce que ce serait complètement irresponsable, de notre part,
que d'essayer de négocier des ententes sans tenir compte du contexte dans
lequel évoluent et le producteur et l'artiste. Et je parlais de la poésie, et,
avec tout l'amour qu'on porte pour la poésie... mais c'est vrai que la poésie,
ça reste, bien souvent, bien trop souvent, un marché limité. Évidemment qu'on
va en tenir compte quand on va négocier. On ne peut pas avoir la même approche,
les mêmes exigences, les mêmes demandes que quand on est dans un autre univers,
qui va partir à l'international, qui va être traduit, qui va avoir une vie, une
adaptation cinématographique.
M. Lemieux : Je m'en doutais
bien, en fait, j'en étais certain, mais je croyais qu'il était important de
vous l'entendre dire, tout comme la ministre, qui vous a fait dire, tout à
l'heure, ou qui vous a demandé de dire comment ça allait se passer, ces négos.
Parce qu'on s'est fait dire juste avant : Elle ne sera pas facile, là, là,
on change tout, là, là, on va être dans le trouble, là. Alors, l'a priori que
vous venez de me donner, il est fondamental, là, parce que, demain matin, la
motoneige, voiture qui se vend à un prix de fou, ou qui se vend tellement bien
que ça finit par rapporter d'énormes revenus, ce n'est pas la même chose que la
poésie, pour revenir à cet exemple-là. Il va falloir non seulement que vous en
soyez conscients, mais si vous voulez que tout le monde soit heureux, dans trois
ans, quand on va se reparler, comme vous disiez, là, il va falloir que tout le
monde soit content, pas juste vous, là.
M. Dubois (Laurent) : C'est
notre objectif.
M. Lemieux : D'accord, bon.
Mme Aubry (Suzanne) : On va
négocier secteur par secteur, avec pragmatisme et réalisme, comme on l'a
toujours fait depuis le début de notre grande bataille.
M. Lemieux : C'est ce que je
voulais vous entendre dire, Mme Aubry, merci beaucoup.
Je voudrais aussi que vous parliez de ceux
dont vous avez dit... «les gros joueurs». On s'est fait, avec le député, qui va
vous poser des questions dans quelques minutes... on a parlé, plus tôt, du fait
que, par exemple, dans un salon du livre, une séance de signatures ne rapporte
pas nécessairement, puis ce qu'on veut éviter, c'est... comment il a dit ça?...
une best-sellarisation des salons du livre, parce qu'on veut que tous les
auteurs puissent y aller, mais on n'a pas les moyens de payer tout le monde,
bon. Je comprends ce bout-là de l'histoire, comme je comprends que, quand ils
vont discuter à une radio, Radio-Canada, pour ne pas la nommer, dans un salon
du livre, ils sont payés par la radio aussi, bon. Donc, je comprends tous ces
bouts-là.
Mais je voulais voir jusqu'à quel point...
quand vous parlez des gros joueurs, toujours les mêmes, avez-vous dit...
jusqu'à quel point est-ce que c'était devenu invivable et intenable pour
certains d'entre vous. Par exemple, j'ai lu, avant d'arriver ici, dans des
notes de préparation, les droits à perpétuité, qui sont exigés dans certains
cas, et vous, vous avez soulevé, tout à l'heure, une autre... quelque chose qui
ressemble à ça, un droit à être obligé de signer pour toujours avec cet
éditeur-là, pas nécessairement les droits à perpétuité. Ça, c'est de l'anecdote
ou c'est...
Mme Aubry (Suzanne) : Non, ce
n'est pas de l'anecdote, monsieur, c'est vraiment... je l'ai vécu
personnellement. Je me suis battu continuellement pour faire... pour enlever la
clause de préférence, qui était dans mon premier contrat. Ce qu'il faut
comprendre, c'est que le premier contrat d'une écrivaine, d'un écrivain le suit
ensuite très longtemps, et c'est extrêmement difficile de faire enlever une
clause qui a été... qui est déjà apparue. Et pour un premier roman, on n'a pas
beaucoup de marge de manœuvre, évidemment, on n'a pas de pouvoir de
négociation. Et le grand avantage qu'on aurait avec des ententes collectives,
c'est qu'on aurait la force du syndicat, qui protégerait aussi les
primo-romanciers, qui acceptent souvent des conditions inacceptables, parce
qu'ils n'ont pas le choix, à cause de cette fameuse négociation de gré à gré.
Je peux vous donner aussi un exemple,
celui qu'on a donné, des intertitres, les paiements intertitres. Je l'ai encore
dans mes contrats. C'est inacceptable. Quel risque prend l'éditeur quand il
peut se repayer d'une œuvre à l'autre, alors que c'est censé être des contrats
individuels? Je pose la question. Je n'ai jamais eu de réponse claire de la
part de mon éditeur là-dessus, mais je suis... j'ai réussi à réduire la portée
de la clause récemment, mais elle est encore là. Ça va même à l'encontre des
lois, ça n'a aucun sens de se repayer d'un titre à l'autre. C'est révoltant, et
je le vis depuis que j'écris des romans.
M. Lemieux : Il me reste
combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme IsaBelle) : 1 min 30 s.
M. Lemieux : Tant mieux,
parce que je ne voulais pas que Mme Gagnon pense que je l'avais oubliée. Ce que
j'apprécie de votre... ce n'est pas un témoignage, mais... oui, c'est un
témoignage, dans le fond, c'est une consultation... ce que vous nous avez dit,
c'est que vous vivez des deux côtés de la barrière. Bien, vos membres et les
gens que vous représentez vivent des deux côtés de la barrière. Donc, on ramène
deux lois dans une. Est-ce que tout le monde va être content, ou il y a des
gens, de l'autre côté de la barrière, qui ne seront pas nécessairement... ils
ne seront nécessairement pas aussi satisfaits...
M. Lemieux : ...ils ont moins
de gain ou est-ce que, de ce côté-là, il y a des gains aussi?
Mme Gagnon (Marie-Eve) : Bien,
c'est sûr que je ne crois pas qu'ils vont être totalement satisfaits. Mais, en
même temps, le secteur du théâtre est très structuré. Il y a déjà des ententes
collectives pour tous les métiers, donc que l'auteur se rajoute pour la
diffusion des œuvres, je ne pense pas que ça va poser, je dirais,
financièrement, quelque chose qui pourrait les mettre en péril. Donc, je crois
que c'est quelque chose... qu'on est rendu là, comme disait Mme la ministre,
puis je pense qu'il faut briser le paradigme. Et puis je pense qu'eux
comprennent qu'on est rendus à ce moment-là de dépasser le paradigme.
M. Lemieux : Madame Gagnon,
Mme Aubry, M. Dubois, merci beaucoup. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci.
Alors, nous poursuivons avec la députée de l'Acadie.
Mme St-Pierre : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Donc, si je comprends bien, madame Aubry, quand
vous écrivez un scénario de télévision, par exemple, vous avez votre chapeau
SARTEC, et là vous êtes... votre contrat est... En fait, votre négociation est
protégée par le contrat SARTEC. Si vous écrivez un livre, vous n'avez pas de
protection autre que celle que vous vous êtes négociée vous-même.
Mme Aubry (Suzanne) : Exactement.
L'avantage, à la SARTEC, comme scénariste, c'est qu'il y a déjà des clauses
minimales qui sont négociées, je n'ai pas à les négocier, c'est déjà acquis. Ce
que je peux faire, avec un agent ou moi-même : négocier des conventions supérieures,
le cas échéant.
Mme St-Pierre : Alors, ce
que... nous disait, tout à l'heure, si j'ai bien compris, c'est qu'on parlait
d'être représenté ou d'être assisté, là, donc l'obligation d'être représenté
automatiquement par quelqu'un qui vient de l'UNEQ, c'est... Vous, vous voulez
négocier touts seuls vos contrats à Radio-Canada. Vous n'avez pas besoin de la
SARTEC pour négocier votre contrat.
Mme Aubry (Suzanne) : Bien,
ce qu'il faut comprendre, là-dedans, c'est que des ententes collectives qui
seraient négociées par l'UNEQ, par exemple, déjà, ça poserait un cadre. Après
ça, il pourrait y avoir une négociation individuelle pour augmenter, par
exemple, certains montants ou améliorer ce qu'il y aurait à la base.
Mais ça, déjà, j'aimerais... C'est une
bonne question, parce que j'aimerais répondre à l'ANEL, à sa préoccupation du
fait que ça ajouterait une charge à leur travail. Je pense le contraire. Je
pense que le fait d'unir les bonnes pratiques contractuelles, de bonnes
ententes collectives feraient un bon ménage. Il y a des éditeurs qui ont de
mauvaises pratiques. Il y en a beaucoup qui en ont de bonnes. Et donc le fait
qu'on se parle et qu'on puisse identifier les bonnes pratiques, et avoir un
encadrement simple, et négocier de bonne foi va énormément changer pour le
mieux, en fait, l'écologique du système.
Et ça n'empêchera pas une négociation
individuelle. On la fait déjà avec nos éditeurs, ça va continuer, ça. Mais il
va y avoir des normes minimales qui vont être établies qui vont énormément
simplifier les choses. On ne voit pas ça comme une charge, on voit ça comme une
simplification.
Mme St-Pierre : L'article qui
prévoit le pouvoir réglementaire, c'est votre, comme, police d'assurance, parce
que vous n'avez pas de droit de grève, là, les écrivains ne pourront pas
décréter la grève puis aller se promener avec des pancartes, là.
Mme Aubry (Suzanne) : On
appuie cette clause-là parce que...
Mme St-Pierre : Mais est-ce
que vous ajouteriez à la demande? Comme, ce matin, l'UDA nous disait qu'il
faudrait ajouter un élément à cette...
M. Dubois (Laurent) : Oui,
évidemment, on aimerait faire la proposition que soit ajoutée une mention pour
que ce soit à l'initiative des associations d'artistes, que ce pouvoir
réglementaire puisse être sollicité.
Mme St-Pierre : Je pense que
l'éléphant dans la pièce, ce sont surtout les géants, là, du monde de
l'édition. Je pense qu'on est là, comme éléphant dans la pièce, là. Est-ce que
vous avez... comment entrevoyez-vous cette relation-là avec géants-là du monde
de l'édition?
• (12 h 30) •
M. Dubois (Laurent) : Bien,
idéalement, dans un monde parfait, ces géants-là de l'édition seraient membres
d'une association représentative et qui négocierait pour eux, également.
Maintenant, est-ce qu'ils vont vouloir ça? Ça, je ne le sais pas, et puis ils
sont tellement puissants et lourds dans le milieu de l'édition que leur parole,
j'imagine, a du poids, y compris chez nos collègues de l'ANEL, et je le
comprends tout à fait.
Eh bien, écoutez, nous, on ira... Soit on
est capable de les approcher via un interlocuteur commun soit on les approchera
en direct. On sait que ce sera difficile, là on sait que ça va être difficile
et long, mais on est déterminés parce que je vais vous lire les pires contrats
que je peux lire, c'est de chez eux qu'ils viennent. Il n'y a pas de hasard.
Mme St-Pierre : Bien, c'est
ce que je pensais que vous disiez tantôt, là...
M. Dubois (Laurent) : Il n'y
a pas de hasard.
Mme St-Pierre : ...quand on
lisait entre les lignes. Mais moi, ma crainte, puis je suis d'accord pour qu'on
ait une loi, là, n'ayez pas de crainte là-dessus, mais ma crainte, c'est de
vous voir embarquer dans un processus où vous allez vous retrouver à devoir
négocier à la pièce. Et ça peut prendre des années, des années, des années, et
je cherche un peu comment on pourrait...
12 h 30 (version non révisée)
Mme St-Pierre : ...amener ce
processus-là où on aurait la possibilité d'avoir quelque chose de cadre qui
pourrait satisfaire vos membres à l'UNEQ. Mais je ne la vois pas, la solution.
M. Dubois (Laurent) : Bien,
la reddition de comptes, dont vous avait déjà entendu parler, en serait une, c'est-à-dire
qu'à partir du moment où il y a une entente qui est signée dans un secteur et
qu'une maison d'édition, qu'elle soit membre ou non d'une association d'éditeurs,
reçoit une subvention, elle pourrait avoir l'obligation d'adhérer à la
convention collective qui a été signée. Ce serait une solution. Il existe des
pratiques négociées sur lesquelles on s'est entendus, vous recevez de l'argent
public, vous êtes en devoir de respecter ces ententes qui ont été négociées. Et
voilà. C'est possible, par exemple, d'adhérer à une convention. Moi, je ne m'attends
pas à ce que tout le monde vienne négocier directement. D'ailleurs, les petites
maisons d'édition, elles vont avoir intérêt à se regrouper auprès de mes collègues
de l'ANEL ou ailleurs, mais de se regrouper, parce que ça coûte cher, une
négociation, c'est long, c'est fatigant, ça prend des experts. On ne veut pas
faire ça à la pièce. On veut faire ça collectivement. C'est tout l'enjeu du
projet de loi. C'est justement le mot collectif qui est le plus important, mais
on n'a pas toutes les cartes en main, malheureusement, pour décider de comment
les producteurs vont réagir.
Mme St-Pierre : Est-ce que
votre prochaine négociation est rédigée, déjà?
M. Dubois (Laurent) : Pas mal
avancée, je vous dirais. Mais je... voilà.
Mme St-Pierre : Je voudrais
parler des salons du livre. Les salons du livre ne sont pas organisés par les
éditeurs. Le Salon du livre, c'est organisé par les Salons du livre. Comment
vous allez vous assurer que les... ceux qui vont dans les salons, ceux et
celles qui vont dans les salons du livre puissent... Est-ce que ça serait une
avenue? C'est-à-dire si l'éditeur dit : Bien, c'est que ça va être
difficile pour moi de payer l'auteur qui va venir faire 1 heure de
signature. Est-ce que ça pourrait être le Salon du livre qui rémunère les
auteurs?
M. Dubois (Laurent) : Le
salon du livre, c'est un diffuseur, dans cet... au sens noble du terme, là.
Mme St-Pierre : Oui, c'est un
diffuseur. Est-ce que vous allez négocier avec les diffuseurs?
M. Dubois (Laurent) : Donc,
on va négocier avec eux, évidemment, et on avait déjà commencé, d'ailleurs, il
faut être complètement transparents. On avait commencé à avoir des
conversations avec l'Association québécoise des salons du livre. Il y a des
salons qui étaient très ouverts, il y en a d'autres qui étaient plus fermés.
Mais voilà, là, on a... on tient contient quelque chose. Mais oui, c'est un
diffuseur. Donc, il faut comprendre que le temps où on invite un écrivain en
lui disant : Est-ce que tu n'aurais pas une tante ou un oncle qui ne dort
pas trop loin? Parce que ça nous arrangerait bien, puis si tu pouvais venir en
voiture ou prendre un bus partagé avec quelqu'un, parce qu'on n'a pas trop de
sous, puis, tu sais, au nom de la promotion, si tu pouvais bien être présent 8 heures
sur le stand pour signer des autographes, ça nous ferait... Voilà, il a passé
quatre jours, il a dormi chez sa tante, on a beau aimer nos tantes, on n'a pas
toujours envie de dormir chez elles.
Mme St-Pierre : Oui, mais si
les salons du livre avaient des subventions, avec des redditions de comptes,
des subventions plus importantes, pourraient défrayer, pas chez ma tante, mais
à l'hôtel.
M. Dubois (Laurent) : Vous
avez raison, Mme St-Pierre, si je peux me permettre, en fait, ce qui se passe
en ce moment, là, puis on l'a illustré, nous, dans la sphère publique, dans les
médias, on est sortis plusieurs fois l'année dernière sur des sujets comme
ceux-là. En fait, ce qui se passe, c'est comme ce n'est pas réglementé, la
ligne budgétaire qui concerne les écrivains, c'est la première ligne qu'on va
faire sauter quand on n'a plus de budget. Vous ne pouvez pas faire sauter la
ligne des gens qui vont installer les kiosques dans un salon du livre. Ces
gens-là, ils sont payés, c'est un sous-traitant, il doit les payer, il y a un
tarif, on ne peut pas le faire sauter. Nous, c'est toujours la ligne qui est
optionnelle, dans le fond, puis on a eu le cas avec la Fête nationale de
Québec, on a eu le cas avec le Salon du livre de Québec. On a eu des exemples.
On est allés dans les médias avec ça. Je comprends...
Mme St-Pierre : La fête
nationale?
M. Dubois (Laurent) : Oh!
oui, mais c'est normal, c'est la seule ligne qu'ils pouvaient faire sauter une
fois que leur budget était déficitaire.
Mme Aubry (Suzanne) : Ce qu'on
appelle la ligne : Paie ton auteur.
M. Dubois (Laurent) : C'est
ça.
Mme St-Pierre : Sur le
mécanisme qui était proposé qu'à tous les cinq ans la loi soit soumise à une
révision, est-ce que... je pense que ça, c'est quelque chose sur lequel on
devrait plancher puis on devoir l'inclure dans la nouvelle mouture, là?
Mme Aubry (Suzanne) : Moi, je
pense que oui. Je crois que ça ne serait pas compliqué à faire, ceci. Les lois
sont imparfaites, comme nous tous, et donc ce n'est pas de mauvaise chose de
pouvoir revenir. Si, en cinq ans, on peut avoir éprouvé la loi, savoir qu'est-ce
qui fonctionne, qu'est-ce qui fonctionne moins bien, puis il pourrait y avoir
peut-être des améliorations à apporter. Alors, oui, on ne croit pas que ça
serait compliqué à ajouter. Enfin, on l'espère. On espère que ce ne soit pas
compliqué parce qu'on veut à tout prix que cette loi passe, comme vous le
savez, on l'a répété à de nombreuses reprises, je le redis encore, c'est une
loi si importante pour nous.
Mme St-Pierre : Dans le cas
de ce qu'on appelle en bon français un "ghostwriter", là, quelqu'un
qui... en fait, on avoir une vedette qui va publier un livre, mais tout le
monde sait que ce n'est pas les vedettes qui l'a écrit, le livre. Est-ce que
cette personne-là serait considérée comme une écrivaine ou un écrivain?
Mme Aubry (Suzanne) : Si on ne
la connaît pas, ça serait difficile de la...
Mme St-Pierre : Le
"ghostwriter" n'est pas considéré comme écrivain, écrivaine. Comment
ça va.. Comment ça fonctionne, dans votre tête?
Mme Aubry (Suzanne) : Le
problème de ce qu'on appelle le "ghostwriting", c'est qu'on ne
connaît pas l'identité de la personne qui... il y a des pratiques dans d'autres
pays où il y a... On dit nommément qu'il y a une personne qui écrit un livre
que ce n'est pas la personne...
Mme Aubry (Suzanne) : ...une
personne qui signe le livre, mais ce n'est pas des pratiques... On voit ça,
moi, j'ai vu ça surtout à la télévision. Mais, dans le domaine du livre, c'est
quand même plus rare. Mais c'est une des questions qu'on aura se poser quand on
négociera.
M. Dubois (Laurent) : Il
va falloir regarder de près. Est-ce que cette personne est salariée par la
maison d'édition? Que, si elle est salariée, là, elle tombe dans un autre... un
autre cadre de protection du personnel de la maison d'édition, soit les pas
salariés. Puis, effectivement, on va regarder de près à pouvoir élargir notre
champ de compétence pour pouvoir protéger ces gens-là aussi qui, après tout,
écrivent et gagnent leur vie de l'écriture.
Mme St-Pierre : Mais la
personne qui ne l'a pas écrit mais qui met son visage sur la couverture.
M. Dubois (Laurent) : Mais
cette personne-là, elle est protégée par son contrat d'édition, et là, on parle
du contrat d'édition. Elle est protégée et à la fois par la Loi sur le statut
de l'artiste ici, par la Loi sur le droit d'auteur au fédéral. Elle devient
l'écrivain qui signe le contrat d'édition.
Mme St-Pierre : O.K.
Elle est considérée comme l'écrivain qui a signé.
M. Dubois (Laurent) : Oui,
oui.
Mme
St-Pierre
:
D'accord. Donc, je pense que pour moi, ça fait le tour. Je veux vous féliciter
pour votre détermination. J'espère que ça se fera dans l'harmonie parce que je
pense qu'il n'y a personne qui un intérêt, dans ce milieu-là, de chiquer de la
guenille, là. Il faut que ça se fasse en harmonie. Puis il faut que ça se fasse
en ouverture aussi. Alors, vous avez quand même un temps qui est quand même
assez, je dirais, rassembleur. Quand même, vous avez... vous êtes bien
déterminés. Vous avez travaillé très fort. Puis, moi, je vous souhaite beaucoup
de succès dans cette entreprise gigantesque que vous allez entreprendre parce
que, la loi, c'est une chose, mais, après ça, il faut l'appliquer. Merci
beaucoup.
Mme Aubry (Suzanne) : Merci.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci. Alors nous poursuivons avec la députée de
Taschereau.
Mme Dorion : Merci.
Bonjour. Merci pour tout, tout, tout ce que vous avez fait depuis des années.
Moi, je veux être auteure depuis que j'ai
cinq ans... autrice, maintenant qu'on dit, depuis que j'ai cinq ans. Je me
souviens avoir lu, adolescente dans le journal, qu'un auteur gagnait en moyenne
6 000 $, 8 000 $ par année. Ça fait que ça réoriente quelqu'un.
Et combien d'auteurs ne seront jamais devenus des auteurs à cause de ça?
Il y a, c'est vrai, moi, je l'ai
expérimenté, mais j'entends aussi beaucoup de témoignages de gens qui m'en
parlent face aux gros joueurs, et on avait vraiment une différence à faire en
général, là, tu sais. Face aux gros joueurs, il y a des enjeux qu'on ne retrouve
jamais ou presque jamais auprès des plus petits. C'est quoi les choses qui sont
très fréquentes dans les contrats d'édition ou dans les façons de fonctionner
des gros joueurs que vous avez vues souvent et qui, pour vous, doivent
absolument prendre le bord dès la première négociation?
• (12 h 40) •
M. Dubois (Laurent) : Bien,
la première, là, c'est... écoutez, c'est les clauses d'exclusivité,
c'est-à-dire que, là, un grand groupe qui rassemble plusieurs maisons d'édition
que je ne citerai pas, mais qui représente quand même un gros pourcentage du
milieu d'édition, a intégré, dans ses clauses récemment, une clause de premier
et de dernier refus. Ça veut dire quoi? Ça veut dire que, si vous écrivez un
livre et que vous voulez une adaptation de ce livre au théâtre, au cinéma,
traduction, etc., eh bien votre éditeur se réserve un premier refus. Vous devez
d'abord lui montrer puis, si jamais ça l'intéresse, il va le faire. Si ça ne
l'intéresse pas, il va vous dire : O.K. tu peux aller voir avec quelqu'un
d'autre. Là, vous allez voir avec quelqu'un d'autre, puis là vous allez trouver
un autre éditeur ou Radio-Canada, dire : Je veux faire une version en
livres audio, ça marche, voici, etc. Et bien là, vous avez maintenant un droit
de dernier refus. Ça veut dire que vous devez revenir devant ce groupe et
présenter votre contrat que vous avez réussi à négocier avec Radio-Canada, et
le groupe se dit ça me donne une deuxième chance. Ah! finalement, ça me tente,
je vais le faire, ça ne coûtait pas si cher. Donc là, on est dans des pratiques
qui sont vraiment complètement abusives, qui sont d'ailleurs abusives au sens
de 32.01 aujourd'hui. Le seul problème, c'est que 32.01 n'ayant pas de recours,
on doit aller dans les tribunaux de droit commun, et personne n'est capable,
pour les quelques milliers de dollars que ça représente, d'aller jusqu'en Cour
supérieure.
Mme Aubry (Suzanne) : On
doit dire que ces clauses-là sont souvent imposées à des primo-romanciers ou
romancières qui, comme j'ai dit en amont, c'est extrêmement difficile après
d'enlever une clause pareille. Puis même la clause de préférence... de dernier
refus, c'est apparu récemment. Tout ça quand on parlait de l'urgence, là,
d'adopter la loi, mais ça fait partie de l'urgence, là, parce que c'est des
pratiques qui s'insèrent et puis avec lesquelles on doit se battre avec aucun
recours. Donc, c'est vital.
Mme Dorion : Et est ce
que, que ce soit pour l'univers entier et pour jusqu'à 50 ans après votre
mort, ça fait-u partie de ces choses-là?
M. Dubois (Laurent) : Bien,
oui, ça n'a pas d'allure, ça n'a pas d'allure. La cession de droits, ça n'a pas
d'allure. Un écrivain qui travaille des années sur son roman, qui cède
complètement ses droits à quelqu'un d'autre, ça n'a pas de sens. On doit parler
d'une licence d'exploitation, une licence d'utilisation qu'on limite dans le
temps, cinq, sept, huit, 10 ans, pourquoi pas. Mais, à partir de là, la
possession doit quand même rester à l'artiste qui a créé cette œuvre. Je vais
dire c'est par principe, c'est la base. Et là... et donc on voit que finalement
l'absence d'encadrement fait que même ce qu'on croyait être acquis parce
qu'étant la base, le bon sens comme on dit, est complètement...
Mme Aubry (Suzanne) : ...on
parle souvent de redevances, de questions monétaires, mais les droits dérivés
sont extrêmement importants. Je vais vous donner l'exemple de Margaret Atwood
avec La Servante écarlate. Elle a signé une cession complète quand elle a écrit
son roman. Personne n'aurait pu prévoir à l'époque que ça serait un tel succès.
Alors, quand ça a été présenté à la télévision, elle a touché zéro sous pour
son œuvre, son œuvre. Et je donne cet exemple-là parce que quand j'avais lu
là-dessus, ça m'avait totalement scandalisé. Et c'est la même chose avec les sessions
de droits ici. C'est ce qui arrive. Si notre œuvre connaît un grand succès, on
ne peut pas le prévoir, on va être dissocié du succès de son œuvre et c'est
insensé. Ça ne devrait jamais arriver. On parlait de... je pense que c'est
Mme St-Pierre qui parlait de...
La Présidente (Mme IsaBelle) : Je
dois vous couper, mais probablement que, connaissant le député de
Matane-Matapédia, il va vous laisser la parole.
M. Bérubé : Continuez.
Mme Aubry (Suzanne) : Vous
parlez de matière première, de la mine, ce que les écrivains et écrivaines vont
chercher, cette matière première là. Et ce n'est pas juste de la matière
première, elle est transformée en mots sur le papier qui va devenir des livres
qui vont être lus par des lectrices et lecteurs. C'est un énorme travail.
J'adore ça. Je le fais par passion. Je l'ai fait depuis depuis plusieurs
décennies. Je ne m'en lasse pas. Mais je veux juste que les conditions dans
lesquelles on le fait soient décentes. C'est tout ce qu'on demande.
M. Bérubé : Bonjour.
Bienvenue à l'Assemblée nationale. La question de la reddition de comptes,
évidemment, c'est des fonds publics importants. Je voulais qu'on puisse revenir
là-dessus, l'importance de bien surveiller ce qui se passe, de s'assurer que
les premiers payés, ça devrait être les artisans au début de la chaîne. Le
talent d'abord là. Alors, est-ce que vous voulez ajouter quelque chose sur
cette importance, sur les mécanismes de reddition de comptes qu'on devrait se
doter dans la loi?
Mme Aubry (Suzanne) : Je veux
juste parler d'un premier mécanisme de reddition de comptes, puis après ça, je
te... On avait discuté avec l'ANEL pendant des années d'un processus de
reddition de comptes, les comptes pour les redevances annuelles, là. Et on est
arrivé à un assez bon résultat. Mais quand est venu le moment de l'appliquer,
évidemment, ce n'était pas obligatoire parce qu'on n'avait pas d'entente
collective, et donc il y avait à peu près 6 % à 7 % des éditeurs qui
l'appliquaient. La reddition de comptes, c'est très important parce qu'on a
beau avoir un bon contrat, si on ne sait pas combien de livres se sont vendus,
si les chiffres ne sont pas pris ici, on se retrouve Gros-Jean comme devant.
Alors, la reddition de comptes, c'est une des questions, qu'on avait déjà
discutée avec l'ANEL, ça s'était bien passé.
Maintenant, avec une négociation d'entente
collective, la reddition de comptes va pouvoir être incorporée à une entente et
appliquée à tout le monde. Et je pense que ça va faire l'affaire de l'ANEL aussi.
Parce que, s'il y a un mauvais payeur, bien, il va être identifié puis on va
pouvoir le retracer plus facilement. Mais il y a un autre concept aussi de
reddition de comptes.
La Présidente (Mme IsaBelle) : ...
M. Dubois (Laurent) : Bien,
je pense, M. le député, que vous faisiez allusion à la reddition de comptes de
manière... l'argent public qui est donné à des producteurs.
M. Bérubé : Bien, oui, il y
en a beaucoup.
M. Dubois (Laurent) : Il y en
a énormément. En fait, c'est ça. Moi, ça ne me paraît pas compliqué. Voilà, il
y a quelque chose que je n'ai pas compris. Ça ne me paraît pas compliqué de
partir du principe que, quand il y a de l'argent public qui est utilisé pour
quelque chose, construire une route, écrire un livre, faire un film, peu
importe, si c'est de l'argent public, ça doit respecter la loi. Une entente
collective, ça fait, ça fait force de loi, ça fait partie de la loi. À partir
du moment que c'est négocié entre les parties, c'est ça qui compte. Ce n'est
pas compliqué pour un bailleur de fonds d'exiger que l'argent soit utilisé
conformément à la loi en vigueur dans le secteur. Moi, ça me paraît très
simple. Je dépose ça ici.
M. Bérubé : Je n'ai rien à
ajouter, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est
parfait.
M. Bérubé : C'était le mot de
la fin, c'était très bien comme ça.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci.
Alors, merci, Mme Gagnon, Mme Aubry et M. Dubois pour votre
précieuse contribution à la commission.
Alors, compte tenu de l'heure, la
commission suspend ses travaux jusqu'après les affaires courantes. Merci. Merci
beaucoup. Bon dîner à tous et à toutes.
(Suspension de la séance à 12 h 46)
15 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 15 h 42)
La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors,
bonjour, tout le monde. La Commission de l'économie et du travail reprend ses
travaux. Je...
La Présidente (Mme IsaBelle) : ...à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs appareils électroniques.
Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 35, Loi visant à
harmoniser et à moderniser les règles relatives au statut professionnel de
l'artiste.
Cet après-midi, nous entendrons les
personnes et les organismes suivants : la professeure Martine D'Amour; la
Guilde canadienne des réalisateurs, Conseil du Québec; conjointement avec
l'alliance québécoise des techniciennes, techniciens de l'image et du son,
section locale 514 IASTE; l'Association des réalisateurs et réalisatrices
du Québec; conjointement avec la Société des auteurs de radio, télévision et
cinéma; et l'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et
de la vidéo; conjointement avec l'Association québécoise de la production
médiatique.
Alors, madame D'Amours, si vous êtes
prête... Vous m'entendez bien?
Mme D'Amours (Martine) : Oui,
je vous entends bien.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors,
madame D'Amours, avant de commencer votre exposé de 10 minutes, je vous
demanderais de bien vous présenter puisque maintenant la parole est à vous.
Mme D'Amours (Martine) : Merci,
Mme la Présidente. Alors, je suis Martine D'Amours, je suis professeure au
Département des relations industrielles de l'Université Laval. Mes intérêts de
recherche et d'enseignement portent sur le travail atypique. Alors, en gros,
c'est tout ce qui n'est pas à l'emploi salarié permanent pour un seul
employeur, et je m'intéresse, en particulier, aux enjeux relatifs à la
protection sociale et à la représentation collective de ces travailleurs et
travailleuses. Et c'est ce qui m'a amené à étudier différents régimes
dérogatoires au Code du travail comme les décrets de conventions collectives,
le régime applicable à l'industrie de la construction et les lois sur le statut
de l'artiste.
Alors, Mme la ministre, Mmes et MM. les
députés, d'abord, je vous remercie de m'avoir invité à vous adresser la parole
dans le cadre de ces consultations particulières. Et, avant de parler
directement du projet de loi à l'étude, j'aimerais rappeler que les artistes
sont des travailleurs et des travailleuses précaires sur trois des quatre
caractéristiques de la précarité en emploi, qui ont été initialement énoncés
par Rogers, mais qui font l'objet d'un vaste consensus dans le monde de la
recherche. Alors, trois des quatre éléments de la précarité, premièrement,
l'insécurité du lien d'emploi, deuxièmement, le peu de protection
réglementaire, ça veut dire le peu de protection par les lois du travail et les
régimes de protection sociale, et finalement, la faiblesse du revenu. Je vous
épargne toutes les données là-dessus qu'il y a dans mon mémoire.
Pour tout de suite vous dire qu'en raison
de cette précarité, en raison des caractéristiques particulières de leurs
activités, c'est-à-dire la courte durée de leurs engagements, leur mobilité à
l'intérieur d'un secteur artistique, le fait qu'ils ont plusieurs prestations, soit
cumulées ou soit successives, avec plusieurs donneurs d'ouvrage, les artistes
font partie de ces groupes de travailleurs, travailleuses pour qui le
législateur a prévu des régimes de relations de travail mieux adaptés à cette
activité ou à leurs activités. Autrement dit, ces gens-là avaient du mal à
accéder à la négociation collective efficace en vertu du Code du travail. Et
moi, je trouve que c'est nécessaire d'avoir de tels régimes, mais à la
condition que ces régimes aient les mêmes caractéristiques protectrices que le
Code du travail. Pour reprendre les termes de Leah Vosko et autres collègues,
il est souhaitable d'avoir une pluralité mais aussi une parité des régimes de
rapports collectifs de travail.
Alors, selon moi, mon ex-collègue, le
regretté professeur Rodrigue Blouin, tout régime de rapports collectifs de
travail doit comporter trois piliers. Premier pilier, un mécanisme
d'identification des associations représentatives. Deuxième pilier, un
processus de négociation et de règlement des conflits. Et troisième pilier, des
voies de résolution des litiges au sujet des conditions de travail.
Alors, c'est à l'aune de ces trois piliers
que je vais commenter certains éléments du projet de loi n° 35.
Sur le premier pilier, mécanisme
d'identification des associations représentatives, le projet de loi n° 35
apporte assez peu de changements, sinon l'ajout de l'obligation de juste
représentation, qui est un copier-coller du Code du travail. D'autres
intervenants avant moi ont bien mentionné que le libellé du nouvel article
nécessiterait des adaptations. En revanche, ce que le projet de loi n° 35
change au premier pilier, et c'est majeur, c'est l'effet de cette
reconnaissance pour les associations regroupant les artistes des arts visuels,
des métiers d'art et de la littérature. Et ça, pour moi, ça constitue le
changement, l'apport majeur du projet de loi.
En effet, en fusionnant les deux lois, le
projet de loi n° 35...
Mme D'Amours (Martine) : ...fournit
aux artistes des arts visuels, des métiers d'art et de la littérature un accès
autre que volontaire à la négociation d'ententes collectives. En d'autres
termes, la reconnaissance d'associations représentatives aura pour eux et elles
le même effet que pour les artistes qui sont actuellement couverts par 32.1, à
savoir un cadre permettant un accès réel à la négociation de bonne foi des
conditions d'exercice de leur travail. Donc, je me réjouis de ce qu'en
présentant ce projet de loi la ministre de la Culture et des Communications ait
pris en compte divers éléments, dont le plus important est le fait qu'il n'y
avait eu aucune entente collective conclue en vertu de 32.01, et cela, depuis
l'adoption de la loi en 1988. Ça fait plus de 30 ans. Bon.
Mais, au-delà de ces éléments contextuels,
on peut se demander ce qui, plus fondamentalement, fonde le besoin de
négociations collectives pour ces catégories d'artistes. Et la réponse réside
dans leur dépendance économique à l'égard d'entités qui sont habituellement la
partie forte au contrat. Mises à part les vedettes, à qui leur notoriété assure
un traitement particulier, les artistes, donc la vaste majorité des artistes,
n'ont guère de pouvoir de négociation individuelle. Les conditions qu'on leur
offre sont souvent à prendre ou à laisser dans un contexte où l'artiste a
besoin que son œuvre soit diffusée non seulement pour des motifs économiques,
mais également parce qu'il en va de sa reconnaissance comme artiste
professionnel. Bon.
Alors, doter tous les groupes d'artistes,
sans égard à la nature de leur contrat, d'un cadre juridique créant
l'obligation de négocier avec diligence et bonne foi des conditions minimales
d'exercice de leur activité, pour moi, c'est un immense pas en avant. Et je
suis convaincue qu'à l'intérieur de ce cadre, les parties vont aménager leurs
relations avec les producteurs. Et le résultat serait certainement différent
selon les secteurs de négociation. Donc, on peut d'ores et déjà prévoir qu'il y
aura plusieurs ententes collectives pour s'adapter aux particularités de chacun
des sous-secteurs de négociation.
Sur le deuxième pilier, un processus de
négociation et de règlement des conflits. Là, ici, il faut souligner que même
si 32.1, donc la LSA, prévoit que la représentation et la négociation
collectives s'exercent sur la base d'un secteur au sein duquel les artistes
partagent une communauté d'intérêts, ce ne sont pas tous les artistes d'un
secteur qui bénéficient des conditions négociées. Je pense que l'intention
initiale du législateur, je n'étais pas là en 1987, mais je pense que l'intention
initiale du législateur, c'était de créer un véritable régime de négociation
par secteur. Mais il faut bien se rendre à l'évidence qu'il n'y a en ce moment
aucune contrainte légale pour un producteur ou une productrice de respecter les
conditions de travail minimales des artistes s'il n'est pas membre d'une
association de producteurs ayant conclu une entente collective ou s'il n'a pas
conclu individuellement une entente collective. Je reprends ici, entre
guillemets, les termes du mémoire de l'Association des réalisateurs,
réalisatrices du Québec.
• (15 h 50) •
Donc, en l'absence de contraintes légales,
la multiplicité des entreprises de production, la courte durée des productions,
la malléabilité des formes corporatives, on a parlé de voile corporatif, hein,
il y a des gens qui sont très imaginatifs pour créer toutes sortes de
structures qui font en sorte qu'ils vont échapper à l'application des ententes
collectives, ça fait en sorte qu'effectivement, l'artiste, ses conditions
varient selon avec qui il ou elle contracte et, dans certains cas, eh bien, il
se retrouve ramené à son pouvoir individuel de négociation dont j'ai dit
antérieurement qu'il n'était pas important, sauf pour les vedettes.
Alors, cette situation, elle n'est pas
souhaitable, quant à moi, pour des motifs d'équité. Elle n'est pas équitable,
d'une part, à l'égard des artistes qui, pour certaines productions, travaillent
en deçà des minimas prévus aux ententes collectives. Elle n'est pas équitable à
l'égard des producteurs qui ont des pratiques contractuelles respectueuses des
droits des artistes, lesquels se trouvent désavantagés face à ceux qui ne
développent pas de telles pratiques. Et elle n'est pas équitable à l'égard des
associations d'artistes qui sont forcées de multiplier les processus de
négociation, alors que la majorité d'entre elles ne disposent pas des
ressources humaines et financières pour ce faire.
La question est discutée depuis le rapport
L'Allier de 2010, et même avant. Si on refuse d'imposer la reconnaissance obligatoire
des associations de producteurs, et il semble que la ministre n'ait pas voulu
aller dans le sens d'imposer une reconnaissance obligatoire, alors, si on ne va
pas dans ce sens-là, il faut trouver un mécanisme permettant d'assurer que les
conditions...
Mme D'Amours (Martine) : ...minimales
négociées seront appliquées par toutes les entreprises relevant d'un même
secteur.
Alors, on possède au Québec un dispositif
juridique unique en Amérique du Nord, qui s'appelle la Loi sur les décrets de conventions
collectives. Cette loi donne au ministre le pouvoir, à la demande d'une partie
à une convention collective, de recommander au gouvernement d'étendre à un
métier, une industrie, un commerce ou à une profession les conditions négociées
par certaines associations représentatives et certains employeurs. Avant de
recommander une telle extension...
La Présidente (Mme IsaBelle) : Mme
D'Amours, en conclusion. 30 secondes.
Mme D'Amours (Martine) : En
conclusion, alors je voulais vous dire que dans les secteurs où est ce qu'il y
a déjà des ententes collectives, on devrait prévoir un mécanisme d'extension.
Dans les secteurs où il n'y en a pas, c'est là qu'on pourrait appliquer le
fameux article 60... Excusez, là, bon. L'article qui permet au ministre de
décréter des conditions minimales à la demande d'une association d'artistes.
Mais s'il y a des conditions négociées, s'il y a une entente collective, on ne
voit pas pourquoi il ne serait pas étendu.
Troisièmement, sur le troisième pilier, je
veux dire que le fait d'inclure dans le projet de loi ce qui est prévu au Code
du travail concernant l'arbitrage de griefs et l'extension des pouvoirs du
Tribunal administratif du travail, c'est certainement un moyen de renforcer le
troisième pilier de tout régime de rapport collectif de travail. Je m'excuse
pour la longueur.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Pas
de souci. Merci. Alors nous allons commencer la période d'échanges. Alors Mme
la ministre, à vous la parole.
Mme Roy : ...bonjour, madame
D'Amours. Merci d'être là. Merci d'être avec nous. J'ai lu avec attention votre
mémoire et quand vous nous parliez de ces trois piliers, j'ai appris beaucoup,
on sent le professeur en vous. On le sent aussi, la chercheuse. Dans vos
documents, j'ai même compris que vous avez déjà fait un mandat, minimalement,
pour le ministère de la Culture. Donc vous êtes une professionnelle,
dirons-nous, du milieu du travail, mais des artistes. Et comme vous le dites
d'entrée de jeu, des... travail, mais travail atypique et c'est là qu'on est.
La loi, cette loi que nous déposons, ce
projet de loi n° 35, et vous l'avez dit à juste titre, c'est un régime
d'exception. C'est une loi d'exception. C'est un régime d'exception pour ces
travailleurs qui ne sont pas des salariés. Et toute la complexité de trouver un
équilibre là-dedans, c'est le fait que ces travailleurs du milieu culturel, ces
artistes ne sont pas des salariés au sens de nos fameuses lois sur les normes
du travail. Et nous tentons de faire basculer plusieurs des articles de la loi
sur les normes du travail dans cette loi, dans ce projet de loi n° 35,
pour aider les artistes.
J'aimerais vous entendre, selon votre expertise,
votre expérience sur la fusion des deux lois, parce que vous l'avez... et vous
avez vraiment mis le doigt dessus, c'est ce qu'on tente de faire, de faire en
sorte qu'il n'y ait plus deux classes d'artistes mais une seule. Et selon vous,
cette fusion là, dans quelle mesure sera-t-elle bénéfique pour les artistes de
la deuxième loi, hein, ceux de la littérature, des arts visuels et des métiers
d'art? Selon vous, quels seront les plus... les gains que ces artistes de la
deuxième loi feront avec l'adoption de ces dispositions?
Mme D'Amours (Martine) : Bien.
Merci pour la question. Donc effectivement, le projet... la loi 32.01
prévoyait la possibilité de négociation d'ententes collectives, qu'on appelait
des ententes générales. Il n'y en a pas eu, alors c'était la négociation
volontaire. Ça ne fonctionne pas, pas plus qu'avant l'adoption de la loi sur
les relations ouvrières, qui est l'ancêtre du Code du travail. Il y avait des
lois qui prévoyaient la négociation volontaire, mais ça a donné des gains à
partir du moment où on a rendu la négociation obligatoire, à partir du moment
où un certain nombre de conditions sont remplies, à savoir des associations
représentatives, l'envoi d'avis de négociation, etc. Donc de créer l'obligation
de négocier des conditions d'exercice du travail de bonne foi, avec diligence
et bonne foi, c'est pour moi une clé pour mettre en œuvre des dispositifs qui
vont permettre d'améliorer les conditions de travail et d'emploi. C'est
l'élément clé. Jusqu'ici, il y avait une possibilité, mais elle ne s'est jamais
concrétisée.
Mme Roy : Vous avez raison.
Puis c'est ce qui a mené à nos travaux, justement, le fait qu'il n'y en a
jamais eu. On a vu, à l'usage, au terme de ces 30 quelques années, que personne
n'avait été là. Et donc c'est le moyen que nous avons trouvé et je pense...
jusqu'à présent, je pense que c'est un moyen qui est apprécié et qui est
souligné.
À l'égard... vous avez dit quelque chose
d'autre aussi puis...
Mme Roy : ...je ne le
vois pas dans votre mémoire précisément. Vous avez parlé du fameux voile
corporatif, là, le fait de lever le voile corporatif. Il y a les groupes
précédemment entendus ce matin, entre autres, la Guilde des musiciens et l'UDA,
qui nous disaient : Bien, écoutez, madame, peut-être pourrions nous faire
un calque de l'article 154 de la fameuse Loi sur les sociétés par actions
pour rendre responsables les administrateurs des sociétés, tout le fameux
dossier des coquilles, des fameuses coquilles. Les administrateurs se partent
des coquilles, et disparaissent, et ne paient pas, ils repartent sous un autre
nom. Donc, des groupes nous ont demandé d'ajouter au projet de loi un
amendement qui pourrait être un calque de l'article 154 de la Loi sur les
sociétés par actions. Vous en pensez quoi?
Mme D'Amours (Martine) : Écoutez,
je n'ai pas étudié cette loi-là en détail, alors j'aurais du mal à me
prononcer, mais il me semble que le principe est intéressant, d'étudier la
possibilité de dire : Bien, si vous... En fait, c'est de bloquer la
possibilité d'échappatoire à la loi, hein? Il y a une norme et puis il y a des
gens qui jouent avec la norme, qui trouvent toutes sortes de moyens de
contourner la norme. Alors, il faut essayer de bloquer les échappatoires
possibles. Une échappatoire, c'est de créer une structure qui va disparaître
aussitôt la production terminée. Alors, ça nuit non seulement à régler des...
je dirais, des problèmes de sommes dues qui ne sont pas versées aux artistes,
mais également pour l'application de l'ensemble... d'un ensemble de clauses des
ententes collectives.
Donc, en principe, il y a toutes sortes de
débats, là, plus largement sur : est-ce qu'il faut, autrement dit, que les
principes du droit du travail soient pris en compte par le droit commercial? Et
moi, je dis oui, là, non seulement dans ces questions-là, mais sur les
questions de sous-traitance. Et la Loi sur les décrets de convention
collective, elle permet ça. Et je vous dirais même... la Loi sur les normes du
travail permet... pas exactement ça, mais qui dit : Bon, bien, il faut que
le... en cas de sous-traitance, il faut que le donneur d'ordre principal soit
tenu responsable. Donc, le principe de responsabilité doit être étendu. Mais je
ne suis pas juriste et je ne connais pas suffisamment la loi pour me prononcer,
mais je peux vous dire je suis d'accord avec le principe.
• (16 heures) •
Mme Roy : Parfait,
merci. J'ai beaucoup appris à l'égard de vos trois piliers. J'ignorais que
c'était la façon dont... On parlait d'«un mécanisme d'identification des
associations représentatives, un processus de négociation et de règlement des
conflits et des voies de résolution des litiges au sujet des conditions de
travail».
J'aimerais vous apporter au troisième
pilier, les voies de résolution des litiges au sujet des conditions de travail.
On en parle, entre autres, pour le bénéfice des collègues, à la page 10 de
votre mémoire, le troisième pilier, voies de résolution. On a tenté d'amener le
plus possible d'articles de la Loi sur les normes du travail, donc articles de
loi qui sont pour des salariés, et de les adapter, de les transposer, de les
faire migrer dans le projet de loi 35. Entre autres, et j'aimerais que
vous nous en parlez, parce que vous élaborez un peu plus, en ce qui a trait à
l'arbitrage de griefs. Si on parle des dispositions des articles 100 à 109
du Code du travail, qui sont maintenant réputées faire partie des ententes
collectives et constituer en tout ou en partie la procédure d'arbitrage de
griefs. Selon vous, dans quelle mesure c'est une bonne chose et pourquoi? Si
vous pouviez un petit peu élaborer à cet égard-là.
Mme D'Amours (Martine) : Au
fond, le troisième pilier, là, juste pour expliquer un peu, c'est ce qui... ce
sont les outils qu'on donne aux parties pour appliquer ce qu'ils ont négocié.
Parce qu'on a beau avoir négocié quelque chose, ça, c'est beau, c'est le
deuxième pilier, on ne s'entend pas nécessairement sur la façon d'interpréter
ce qu'on a négocié. Et c'est là qu'intervient l'outil de l'arbitrage de griefs.
Jusqu'ici, il fallait que les parties la négocient à l'intérieur d'une entente
collective. Maintenant... Alors, maintenant, on dit : Ces articles du Code
du travail, ils sont réputés... donc sur les pouvoirs de l'arbitre, sur les
matières sur lesquels il peut se prononcer, ça va faire partie de chacune des
ententes collectives. Donc, on n'a pas à le négocier parce que, jusqu'ici, ça
donnait, je dirais, des résultats inégaux. Alors, jusqu'ici, on a dit :
Bien, on va... L'outil qui est fort, là, qui a été expérimenté dans le cadre du
travail, soit les pouvoirs de l'arbitre de griefs, comment il peut se
prononcer, sur quoi il peut se prononcer, etc., on va l'inclure dans toute
entente collective. Et vous avez fait la même chose à l'égard de la Loi sur les
normes du travail en disant : Les clauses sur le harcèlement...
16 h (version non révisée)
Mme D'Amours (Martine) : ...psychogique
qui inclut le harcèlement sexuel. On les prend et on présume qu'ils vont
faire... en fait, ils vont être considérés comme faisant partie d'emblée de
toute entente collective, comme les articles équivalents du code font d'emblée
partie de toute convention collective. Alors, bravo pour ça aussi, en passant.
Mme Roy : Est-ce qu'en
en travaillant de la sorte, en faisant ces transferts de bonnes portions d'articles
de la loi sur les normes vers le p.l. no 35 et donc pour donner des outils
supplémentaires aux artistes et naturellement aux associations, est-ce que,
selon vous, ça va alléger peut-être le processus de la négociation d'ententes
et fournir une protection supérieure pour les artistes ?
Mme D'Amours (Martine) : Bien,
ça dépend de quels artistes... de quels articles de la Loi sur les normes du
travail vous parlez.
Mme Roy : À l'égard, par
exemple, de ceux pour l'arbitrage de griefs. Parce que je pense que ce que vous
avez mis le doigt sur quelque chose d'important. Ça devait être négocié dans
chaque entente individuelle. Là, ça ne sera plus le cas. Ça va... D'emblée, ça
en fera partie. Alors, je...
Mme D'Amours (Martine) : D'emblée
ça en fera partie, ce qui n'empêche pas les parties de négocier au-dessus de
ça. Mais ça demeure la base, ça demeure la base. Alors, on va dire, dans le cas
de mésentente, etc., c'est un recours possible, et il est présumé faire partie
de toute entente collective. Alors, ça va, je pense, faciliter le règlement des
mésententes qui surviennent en cas d'entente collective. Et, je dirais, c'est
même... Étant donné que, pendant la plainte collective, on ne peut pas exercer
de moyens de pression, hein ?
La durée de l'entente collective, c'est une période de paix industrielle. Mais
même en période de paix, si on ne s'entend pas, il faut trouver un moyen de
résoudre les mésententes. Alors, c'est un moyen qui est codifié dans la loi et
qui deviendrait partie prenante. Donc, je pense que c'est facilitant et même
pour les deux parties, pour les deux parties.
Et c'est la même chose pour les clauses
qui concernent la précision apportée aux pouvoirs du tribunal du travail, du
Tribunal administratif du travail, oui, du TAT. Effectivement, jusqu'ici, sa
compétence était relativement limitée. Puis là elle va être étendue à toute une
série d'éléments, là, qui sont mentionnés. Je ne veux pas nécessairement tous
les redire, mais négociation de mauvaise foi, déclenchement de l'action
concertée, reconnaissance, etc. Bon. Alors, ça aussi, pour moi, ça fait partie
de... d'un arsenal, là, beaucoup plus solide pour permettre aux parties de
résoudre les litiges qui peuvent survenir en cours d'entente collective.
Mme Roy : J'aime
beaucoup vous entendre parce que c'est ce qu'on a tenté de faire, d'avoir un
projet de loi équilibré qui colmatait des brèches qu'on a vues avec l'usage,
avec le temps, mais aussi y apporter des articles, quand vous dites,
facilitants pour les deux parties. Et ça, c'est important pour nous, de garder
une harmonie, autant pour les artistes que pour ceux qui les emploieront. Donc,
le fait qu'il y ait des articles qui plaisent aux deux, c'est... On a beaucoup
tenté de trouver des... des chemins d'entente, des chemins pour arriver avec
ces nouvelles dispositions. Donc, vous nous dites, un arsenal plus solide. Je
suis... je suis... Je le prends en note. J'aime les termes que vous employez.
Mme D'Amours, moi, je vous remercie pour votre collaboration. Je vous remercie
pour le mémoire. Je sais entre autres que vous êtes une invitée qui a été
chaudement recommandée par nos collègues de la deuxième opposition. Alors, moi,
je vais céder mon temps de parole. Il y reste peut-être mon collègue de
Saint-Jean qui...
Une voix : Joëlle.
Mme Roy : Joëlle ? Ah ! Pardon. Excusez-moi.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Ah ! Pardon ? Le député de... Parfait. Pas
de problème.
Mme Roy : La députée de
Jean-Talon. La députée de Jean-Talon, qui aimerait vous poser une question.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Ah ! La parole...
Députée de Jean-Talon, il vous reste 4 min 20 s
Mme Boutin : Mme D'Amours,
merci pour votre mémoire. C'est vraiment très, très intéressant. J'en apprends
beaucoup. Puis mon... Nous, on siège sur cette commission-ci. Donc, ce n'est
pas le premier projet de loi qui touche justement la sécurité ou les normes du
travail de certaines catégories dans la société. Donc, on aime ça toucher un
secteur qui est aussi névralgique et, je dirais, émotif au Québec quand même,
les artistes. À la page 11 de votre mémoire, vous parlez, bon, que oui,
là, le p.l. no 35, là, est susceptible de réduire la précarité
socioéconomique des artistes. Puis je pense qu'on répons aussi aux
recommandations, là, du rapport de l'UNESCO de 1980, justement, en ce sens-là.
J'ai deux petites questions. Je vais vous les dire d'emblée. Premièrement,
est-ce que, par rapport à ce qui se fait ailleurs, notamment en France, comment
est-ce que vous pourriez comparer, justement, le projet de loi no 35...
Mme Boutin : ...les conditions
en France, est-ce qu'il y a une amélioration?
Mme D'Amours (Martine) : Est-ce
que vous parlez du régime des intermittents du spectacle?
Mme Boutin : Oui, j'ai lu un
peu. Puis je me demandais, justement, est-ce qu'on se démarque au Québec avec
ce projet de loi là.
Mme D'Amours (Martine) : Bien,
c'est parce que ça ne porte pas sur les mêmes objets. Le régime des
intermittents du spectacle, c'est un régime d'assurance chômage, si on veut,
adapté aux artistes et, d'ailleurs, aux ouvriers ou aux techniciens. Ce n'est
pas seulement les artistes, c'est aussi tous les travailleurs qui sont de près
ou de loin associés à la production des œuvres parce qu'ils vivent les mêmes
problématiques que les artistes.
Mme Boutin : Bien,
d'ailleurs, dans votre mémoire, vous faites un petit peu de recommandations...
mais ce n'était pas vraiment ma question, là, au niveau du régime, là, allemand
d'assurance sociale, puis de protection sociale, vous faisiez la recommandation
d'aller plus vers cette direction-là. Mais moi, ma question, c'est par rapport
à l'enjeu de la santé, la sécurité du travail. Vous dites... Moi, ma question,
puis je ne suis pas intervenu beaucoup, mais je sais que la plupart des
artistes au Québec oeuvrent à titre de travailleur autonome. Puis, bon, bien,
pour avoir accès, justement, au régime la CNESST, les gens doivent faire une
demande de protection personnelle ou individuelle, mais c'est personnel. Est-ce
que vous savez s'il y a des artistes qui vont faire une demande comme ça?
Est-ce que vous croyez que le projet de loi, là, 35 est suffisant en ce sens
là? Avez-vous des recommandations?
Mme D'Amours (Martine) : C'est
très particulier la question de la santé et sécurité du travail, hein. Certains
groupes d'artistes, ceux qui correspondent à 32.1, là, certains groupes
d'artistes de la scène ont bénéficié d'une couverture SST pour des activités
prévues dans le cadre de leur contrat d'engagement. Cependant, pour tous les
autres, et toutes les autres situations, ils doivent adhérer individuellement.
Autrement dit, l'ensemble des travailleurs québécois... pour l'ensemble des
salariés québécois, c'est l'employeur qui paye la cotisation CSST. Et on
voudrait nous dire que, ah, bien, si tu ne tombes pas... d'abord, si tu n'es
pas salarié, puis si tu ne fais pas partie des catégories d'artistes de la
scène qui bénéficient d'une couverture SST dans le cadre de ton contrat
d'engagement, par exemple, si tu es comédien, danseur, bon, puis tu te blesses
pendant une prestation, tu vas être couvert. Et si tu ne fais pas partie de ces
catégories, tu devras cotiser individuellement. Alors, on dit la même chose
d'ailleurs aux travailleuses domestiques. Je pense qu'il y a un nombre minime
de travailleurs, travailleuses au Québec qui paye elle-même ou lui-même la
cotisation, parce que c'est des coûts prohibitifs pour des gens qui sont
précaires et qui gagnent des faibles revenus. Donc, ça, pour moi, c'est un vœu
pieux, c'est complètement inadéquat. Par ailleurs, la question de la SST, c'est
quelque chose de très particulier. Moi, j'hésiterai à dire : Il faut
l'intégrer dans la loi à ce moment-ci parce que ça mériterait une étude en
profondeur, et de comment on peut prévenir les blessures au travail et comment
on peut indemniser les personnes lorsqu'elles sont blessées. C'est ce que je
peux vous dire.
La Présidente (Mme IsaBelle) : En
20 secondes... À moins que ça soit terminé déjà.
Mme Boutin : Merci beaucoup,
Mme D'Amours. C'est vraiment très, très intéressant.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.
Alors, nous poursuivons la période d'échange, cette fois-ci avec la députée de
l'Acadie.
• (16 h 10) •
Mme St-Pierre : Merci. Merci
pour votre présence. C'est effectivement très intéressant. Moi, je regarde
votre quatrième principe, là, en page 13, puis vous dites, vous parlez de
la multiactivité et des avantages sociaux qui peuvent être payés pour quelqu'un
qui pourrait, par exemple, être un concepteur, puis écrire, puis jouer. Donc,
on ferait affaire avec trois, peut-être trois conventions collectives
différentes. Et on l'avait vu avec AQTIS puis IATSE, à ce moment-là, dans le
domaine du cinéma, qu'il y avait... des avantages sociaux ont été fusionnés. Je
me souviens plus si on l'avait fait dans la loi ou dans le cadre d'une entente
à part, là, on pourrait avoir des gens pour nous éclairer là-dessus, mais ça
s'est fait. Là, ça veut dire que quelqu'un qui serait en multiactivité ne
serait pas protégé totalement pour l'ensemble de son activité. Est-ce que c'est
exact ce que je vous dis là?
Mme D'Amours (Martine) : C'est
à dire qu'actuellement, si vous êtes couvert par une entente collective, vous
avez droit à des protections. Mais les protections... le niveau de la protection
dépend du niveau de revenu que vous avez fait dans cette activité. Alors, si
vous avez des activités dans plusieurs champs artistiques, vous allez avoir le
minimum. Autrement dit, vous allez avoir cumulé le niveau... le niveau de
protection va correspondre au niveau de revenu que vous avez cumulé...
Mme D'Amours (Martine) : ...pour
vous donner l'exemple que je trouve inspirant, dans l'industrie de la
construction, peu importe que le travailleur de la construction travaille dans
le résidentiel, le commercial, l'industriel, sur chaque paie, la cotisation de
l'employeur, de l'entrepreneur est prélevée, celle du travailleur est prélevée,
ça va tout dans le même fonds, et c'est vrai pour les assurances collectives et
c'est vrai pour la retraite, si bien qu'il n'y a pas ce fractionnement selon le
type d'activités que vous faites. Et, bien sûr, si on cumule les cotisations à
l'échelle du secteur, bien, au bout du compte, hein, si on additionne ça dans
un même régime, les bénéfices vont être encore plus grands. Parce que les
bénéfices d'un régime de protection sociale, c'est lié à deux caractéristiques,
hein, votre niveau de revenu puis la quantité d'activités que vous faites,
hein, votre présence sur le marché du travail. Alors, si vous êtes présents la
majorité du temps, vous devriez bénéficier des retombées ou des bénéfices qui
sont liés à l'ensemble de votre activité et non pas l'avoir fractionnée entre
différents régimes. Puis ça, c'est ma conviction.
Mme St-Pierre : J'ouvre
peut-être un trop grand chapitre, mais est-ce que c'est quelque chose que l'on
devrait prévoir dans la loi, ou si c'est possible, ou si ça veut dire qu'on,
vraiment, on ouvrirait quelque chose... prendrait des mois et des mois, ou si
on peut suggérer d'en faire, je ne sais pas, un règlement ou... autrement dit,
est-ce qu'il y a une voie pour que nous puissions régler cette situation-là?
Mme D'Amours (Martine) : Moi,
je ne suggère pas que vous l'intégriez dans la loi, tout simplement parce qu'il
n'y a pas eu de discussions avec les partenaires sociaux sur cette question-là.
Ça serait la première étape.
Je pense que le chantier de la protection
sociale, comme tel, à la fois les programmes de protection que j'appelle
privés, c'est-à-dire ceux qui se négocient à l'intérieur des ententes
collectives où on prévoit une contribution du travailleur... pardon, et une
contribution du donneur d'ordre, et à la fois les programmes publics doivent
être repensés, hein, doivent être ou doivent faire l'objet d'un chantier. C'est
pour ça que j'avais mis ça dans mon mémoire à la fin, en disant : Bon,
bien, c'est un pas en avant le projet de loi, je souhaite son adoption d'ici la
fin de la présente législature, mais ça ne fait pas le tour, hein? Ce n'est pas
un projet de loi, une loi qui va régler l'ensemble de la problématique de la
précarité des artistes, et le dossier de la santé et sécurité, et le dossier
général de la protection sociale, dont les programmes publics.
Je me faisais... je me permettais de
souhaiter que ça fasse l'objet de projets chantiers gouvernementaux et pas dans
30 ans, là. Parce que dites-vous bien qu'un artiste même, ou un
travailleur autonome, en général, même s'il performe très bien, qu'il gagne un
bon revenu, il suffit qu'il tombe malade, hein, qui... et actuellement il n'y a
pas de protection, alors il peut basculer dans la pauvreté la plus abjecte du
jour au lendemain, par défaut de filet suffisant de protection sociale.
Mme St-Pierre : Oui. Alors
donc, je comprends qu'il faudrait qu'on se penche là-dessus éventuellement. Ça
serait comme un complément puis on viendrait encore donner plus de protection.
Mais je me demandais si ça pouvait se faire par une voie réglementaire,
c'est-à-dire pas nécessairement le faire, là, dans la loi, mais laisser le
champ libre pour une voie réglementaire, mais on en reparlera. Je voudrais vous
poser une question sur... J'ai deux autres questions. Entre autres, vous avez
parlé d'un mécanisme d'extension, vous avez dit... je ne vous ai peut-être pas
bien compris, mais vous avez dit : S'il y a des conventions existantes, il
faudrait que ce soit un mécanisme d'extension et qu'il n'y ait pas de
négociation nécessairement. Je ne sais pas si je vous ai bien suivi, et... Mais
il y a quelqu'un ce matin qui est venu nous dire qu'il y a une convention
collective qui est là depuis 20 ans, puis elle devrait être revue, puis le
vis-à-vis est complètement barré, puis il ne veut pas. Alors là, avec cette
loi-là qu'on va adopter, bien, s'il continue à barrer, là, c'est le règlement
qui va entrer puis qui va forcer une renégociation. Qu'est-ce que vous voulez
dire par mesure d'extension?
Mme D'Amours (Martine) : O.K.
Bien, je dirais qu'il y a trois cas de figure. Premier cas de figure, il y a
des ententes collectives dans un secteur, mais il y a toutes sortes de
subterfuges qui sont utilisés pour faire en sorte de ne pas l'appliquer. Alors,
il y a certains producteurs par... je vous donne un exemple, il va démarrer une
entreprise pour une production, il va la fermer ensuite. Alors, on n'a même pas
le temps, l'association d'artistes n'a même pas le temps de négocier et d'avoir
le rapport... bon. Donc, s'il y a des ententes collectives dans des secteurs,
mais que, dans les faits, elles ne s'appliquent pas, un mécanisme d'extension
juridique permettrait au gouvernement de dire...
Mme D'Amours (Martine) : ...on
va l'étendre à tout le secteur. Quant à moi, c'est un incitatif aux parties à
négocier parce que tu dis : Bien, si je ne négocie pas, il va y avoir
quelque chose d'autre que peut-être je n'aimerai pas. Alors, ça, c'est une
première chose. Deuxième cas de figure, des secteurs où il n'y a pas d'entente
collective. Là, je pense qu'à la demande d'une association d'artistes, oui, le
ministre, la ministre ou enfin le gouvernement pourrait établir un minimum. Et
ce que vous me disiez, c'est le cas de secteurs... Là, je ne sais pas auxquels
cas au juste vous faites allusion.
Mme St-Pierre : où les
négociations... où il n'y a jamais... où il n'y a plus... il n'y a pas de
négociation depuis plusieurs années alors qu'il y a quand même une demande de
la partie qui veut négocier vers le vis-à-vis, puis le vis-à-vis, c'est barré
depuis 20 ans. C'est ça que je voulais savoir, quand vous parlez de
mécanisme d'extension, si vous vouliez dire... On devrait dire : Bien,
cette convention-là, elle va se poursuivre, mais ce n'est pas ça que vous
vouliez dire.
Mme D'Amours (Martine) : Bien,
ce n'est pas ce que je voulais dire, puis ce cas-là, je ne le connais pas,
j'aurais du mal à me prononcer dessus... là-dessus.
Mme St-Pierre : C'est
dans le cas d'une maison de production qui ouvrirait ses portes pour une
production, ferme ses portes, s'en va sur une autre production puis qu'il n'y a
pas de lien entre les deux.
Mme D'Amours (Martine) : Bien,
en fait, c'est dans tous les cas où les associations n'arrivent pas à négocier
avec des producteurs dans des secteurs. Parce que, bon, ils réussissent avec
certains à négocier, entre autres, avec l'ADISQ, l'AQPM, mais il y en a
d'autres qui ne sont pas membres de ces associations et qui trouvent toutes
sortes de moyens d'échapper à la négociation collective. Alors, je dis :
Bon, bien, si on ne veut pas rendre obligatoire leur adhésion à une association
de producteurs... Ça pourrait être le cas, hein, dans la construction, tous les
entrepreneurs sont obligés d'être membres de l'Association des entrepreneurs en
construction du Québec, alors ils sont obligés d'être membres et c'est
l'association qui négocie en leur nom le tronc commun des conventions collectives.
Puis il y a aussi des associations d'employeurs sectorielles, mais il y a une
obligation d'appartenance. Alors, autrement dit, ce qui est négocié dans la
construction, ça va automatiquement être appliqué par l'ensemble.
Mme St-Pierre : Je pense
que dans un monde idéal, c'est ça qui devrait arriver, là, que le vis-à-vis...
En tout cas, dans le domaine du livre.
J'ai une question sur le tribunal... Je
n'ai pas... Je ne connais pas beaucoup le volume d'activité du tribunal, mais
je présume que c'est un gros volume d'activité. Est-ce que les gens qui siègent
au tribunal sont des gens qui vont être équipés, à court terme, pour prendre
des dossiers qui vont leur être soumis? Est-ce qu'ils ont l'expertise pour ça?
Est-ce que ça prend une expertise particulière pour être capable de gérer une
cause qui viendrait devant le tribunal? Parce que peut-être que ça devrait être
tribunal spécialisé sur la question des artistes, mais...
Mme D'Amours (Martine) : Mais
il y en a déjà, hein? Au départ, là, dans la loi, il y avait la commission de
reconnaissance des associations d'artistes et des associations de producteurs,
puis on a, ensuite, transféré... On a aboli cette commission. Donc, ça, c'était
un tribunal spécialisé sur les questions des artistes. Alors là, je pense
qu'eux on a plutôt trouvé qu'ils manquaient peut-être d'expertise en relations
du travail, au contraire, et puis on a confié le mandat à la Commission des
relations de travail, qui est aujourd'hui le Tribunal administratif du travail.
Je pense que votre question, elle aurait peut-être pu se poser au moment de ce
transfert, hein, alors que la Commission des relations du travail n'était pas
familière. Mais maintenant, ça fait quand même un certain nombre d'années
qu'ils ont cette responsabilité alors je ne serais pas trop inquiète. Est-ce
qu'ils ont les ressources? Ça, je pense peut-être qu'il faut leur fournir
davantage de ressources pour le faire, je ne suis pas au courant.
Mme St-Pierre : en tout
respect, ça va être nouveau pour eux, là, parce que les causes, elles
n'allaient pas là, les causes s'en allaient sur les tribunaux réguliers.
• (16 h 20) •
Mme D'Amours (Martine) : Bien,
les causes allaient là pour certains éléments, sur toutes les demandes de
reconnaissance, et tout ça, donc ils en ont étudié. Moi, j'ai vu de la
jurisprudence du Tribunal administratif du travail, sauf qu'ils étaient
restreints à certains objets, ils ne pouvaient pas se prononcer sur, par
exemple, négociation de mauvaise foi, des choses comme ça, mais ils ont... ils
connaissent quand même la problématique des artistes, beaucoup plus qu'au
moment où ils ont eu ce mandat.
Mme St-Pierre : ...Netflix,
qui produit aussi... est-ce que Netflix échapperait à cette loi-là?
La Présidente (Mme IsaBelle) :
...secondes.
Mme D'Amours (Martine) : Netflix,
ce n'est pas un producteur du Québec, hein?
Mme St-Pierre : Mais il
produit, il pourrait acheter des... il pourrait faire de la production pour le
Québec.
Mme D'Amours (Martine) : Écoutez,
en principe, là, si on avait un vrai régime de... collectif de travail, il
s'appliquerait à tout producteur qui exerce... qui fait sa production sur le
territoire du Québec. Cependant, je...
Mme D'Amours (Martine) : ...je
ne suis pas assez, comment dire, connaissante en droit international et en
droit comparé pour vous dire s'il y aurait des compétences partagées, et tout
ça. Moi, ce que je note, c'est qu'il me semble que l'intention originale du
législateur, c'était un vrai régime sectoriel qui couvre l'ensemble. Et là on
s'aperçoit qu'il y a trop d'échappatoires, il y a trop de situations où des
artistes ne sont pas couverts par des ententes.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Merci, Mme D'Amours. Nous
poursuivons, cette fois-ci, avec la députée de Taschereau. Elle ne dispose que
de deux minutes 55 secondes, alors il faut être bref dans nos réponses.
Mme Dorion : Merci
beaucoup. Merci, Mme D'Amours. Très intéressant, donc, on en retient que là une
loi sur le statut de l'artiste, une réforme, mais qu'un jour il va falloir des
programmes, et on va les attendre avec beaucoup d'espoir.
Donc, on voit, dans la loi, que ce qui est
demandé, c'est que ce qui pourrait avancer, c'est que, bon, là où il n'y a pas
de convention collective, là où il n'existe pas de règlement, bien, le ministre
ou la ministre pourra déterminer par règlement des conditions.
Et beaucoup d'associations d'artistes sont
venues, ils ont dit : Oui, mais c'est important de savoir quel sera le
processus, qui peut faire cette demande-là à la ministre. Est-ce que la
ministre est obligée de répondre si c'est une organisation d'artistes reconnue
qui fait la demande? Bon, c'est des questions importantes, et comme on va avoir
en discuter, puis ça ne sera peut-être pas si compliqué à régler, mais on...
j'aimerais avoir votre point de vue là-dessus. Comment ça devrait fonctionner?
Est-ce que c'est juste des associations d'artistes qui devraient pouvoir faire
cette demande-là? Et est-ce que la ministre devrait obligatoirement arriver à
mettre les parties ensemble pour les faire s'entendre? Comment ça pourrait
fonctionner? Voilà, question large sur le processus.
Mme D'Amours (Martine) : C'est...
Tu sais, le diable est dans les détails, là. Alors, j'aurais pu vous dire comme
chercheur en relations de travail : Oui, oui, il aurait suffi qu'une des
parties demande... Mais j'ai entendu, ce matin, le témoignage des représentants
et représentantes de l'UDA et qui disait : Ah! bien, oui, si c'était c'est
un producteur qui le demanderait, il pourrait complètement contourner l'esprit
de la loi, en se disant on va se contenter de conditions minimales, on ne va
pas négocier.
Alors, ce n'est pas ça l'esprit de la loi.
L'Esprit de la loi, c'est de dire : On veut favoriser au maximum la
conclusion d'ententes collectives. Là où elles sont conclues, on veut qu'elles
s'appliquent à tout le monde, hein, à tous les producteurs, à tous les
artistes. Et, bien là, si pour x raisons, après négociations, etc. ou parce
que les parties à la relation d'emploi ne sont pas assez constituées en
association - tu sais, il y a des domaines plus émergents - alors, à ce
moment-là, qu'il y ait, à la demande d'une association d'artistes, une
intervention du législateur, je serais favorable. Mais je pense que le premier
temps, c'est toujours de favoriser la négociation collective et de mettre à la
disposition des parties des outils pour les aider en ce sens, donc l'arbitrage,
la première convention, ça fait partie de ça.
Mme Dorion : O.K. Mais
quand il y a trop de producteurs différents, par exemple, quand on parlait de
conférences ou de colloques, tu sais, on ne peut pas faire des négociations à
la pièce avec chaque employeur parce qu'ils sont trop petits et trop nombreux.
C'est une occasion ou ça pourrait être une bonne idée qu'il y ait un règlement
de la part de la ministre. Mais c'est ça, on se demandait quel processus,
quelle forme ça pourrait prendre, s'il y aurait des obligations. Mais là je
pense que... À moins que M. le député de Matane-Matapédia...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Je vais vous laisser une minute additionnelle,
Mme Daoust, pour répondre... Mme D'Amours - pardon - pour répondre à la
question.
Mme D'Amours (Martine) : Bien,
ça ne serait pas très long parce que j'ai du mal à vous répondre. J'ai du mal à
imaginer quelle serait la procédure exacte, mais qu'à la demande d'une
association d'artistes il y ait consultation de la ministre ou du ministre
auprès des associations d'artistes et de producteurs pour déterminer des normes
minimales, que ce soit donc liant, hein, que ce ne soit pas seulement un vœu
pieux. Et là-dessus, bien, le libellé de l'article était peut-être un peu mou.
J'essaie de retrouver le libellé. Le gouvernement peut par règlement, après
consultation, etc.
Donc, il n'y a pas de déclencheur,
autrement dit, pour le moment, il n'y a pas de critère qui dit : Bien,
qu'est-ce qui fait qu'à partir du moment où tel et tel critère sont présents
qu'il y a, comme, quelque chose qui s'enclenche pour les déterminer, hein, pour
faire des consultations, pour faire des études, déterminer, bon, ça serait quoi
ces normes-là.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Merci, Mme D'Amours pour votre
contribution aux travaux de la commission.
Alors, nous allons suspendre quelques
instants. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 27)
(Reprise à 16 h 29)
La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors,
pour le prochain grand bloc ou groupe, si vous voulez, on reçoit deux groupes,
la Guilde canadienne des réalisateurs, Conseil du Québec, et l'Alliance
québécoise des techniciens et des techniciennes de l'image et du son, section
locale 514 IATSE. Alors, nous commençons d'abord par Mme Barrette. Avant
de commencer votre exposé de cinq minutes, je vous inviterais à bien vous
présenter.
Mme Barrette (Chantal) : Oui,
bonjour. Je me présente Chantal Barrette, agente d'affaires pour le Conseil du
Québec. Je suis accompagnée de notre avocate, Me Lisane Bertrand.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.
Alors, vous pouvez commencer votre exposé.
• (16 h 30) •
Mme Barrette (Chantal) : Donc,
bonjour, Mme la ministre, Mme Roy, Mme la Présidente et membres de la
Commission de l'économie et du travail, merci de nous recevoir aujourd'hui. La
Guilde est un syndicat pancanadien de 6 600 membres.
Le Conseil du Québec compte quant à lui plus de 800 membres oeuvrant au
niveau créatif et de production et logistique, tant en production, cinéma,
télévision et nouveaux médias. Nous négocions des ententes collectives avec l'AQPM,
avec l'Association des producteurs publicitaires, et des ententes collectives
promulguées avec les producteurs américains.
Tout d'abord, parlons des éléments
présentés dans le projet de loi n° 35 pour lesquels nous avons des
préoccupations. Premièrement, l'article 24.2 sur le devoir de
représentation. Nous sommes tout à fait d'accord avec la proposition de l'UDA
de ce matin pour les raisons qu'ils ont invoquées. C'est pourquoi le devoir de
représentation devrait, selon nous, concerner les artistes qui sont visés par
une entente collective. L'article suivant, sur lequel nous désirons attirer
votre attention, est l'article 68.6. Pour ce qui est de la Guilde, notre
réalité est un peu différente des autres associations qui couvrent des secteurs
autres que l'audiovisuel. C'est pourquoi nous ne croyons pas que nous en ayons
besoin, d'un tel article, mais nous comprenons que d'autres associations
pourraient en avoir besoin. Toutefois, étant donné que cet article serait dans
la loi, la proposition, dans son état actuel, nous préoccupe, et nous croyons
que celle-ci devrait prévoir des éléments suivants. Tout d'abord, que ce soit
sur demande d'une association d'artistes seulement, qu'il y ait une procédure
de grief intégrée, que le règlement ait une durée limitée dans le temps, et
notre recommandation est de deux ans, et que pendant l'application de la loi,
les parties doivent... peuvent négocier une entente collective et faire en
sorte que le règlement cesse de s'appliquer si une entente collective est
conclue.
Maintenant, permettez-nous de vous parler
de ce qui n'est pas dans le projet de loi n° 35 et qui nous préoccupe. En
2009, fin de régler un conflit syndical entre l'artiste et IATSE, le
gouvernement a fait les deux principales modifications suivantes. Ils ont
brillamment reconnu les 150 fonctions de travail et ils ont mis en place
de façon artificielle cinq secteurs de...
16 h 30 (version non révisée)
Mme Barrette (Chantal) : ...production
selon l'origine du producteur, les secteurs 1 à 4 et le secteur des annonces
publicitaires. C'est pourquoi, en 2009, les fonctions de travail suivantes ont
été assimilées, à juste titre, à l'artiste. On parle de chauffeur, cantinier,
assistant à la réalisation, gréeur, assistant-coiffeur, et j'en passe.
Toutefois, certaines personnes n'ont pas eu cette chance. Certaines ont plutôt
été nommément exclues de la loi, les privant automatiquement du droit à la
syndicalisation. On pense, entre autres, aux comptable et assistant comptable
de production. De plus, ces dernières années, de nouvelles fonctions sont
apparues ou apparaîtront au fil des transformations technologiques, et parce qu'elles
n'existaient pas en 2009, les associations d'artistes devront continuer à faire
la preuve que ces formations sont artistiques ou devraient être assimilées à l'artiste.
Vous comprendrez, mesdames et messieurs,
qu'il est très difficile de comprendre et encore plus d'expliquer à des membres
pourquoi un cantinier, à juste titre, a eu le droit et le privilège d'être
assimilé à un artiste, alors qu'une autre personne faisant partie de la même
équipe de production ne puisse avoir le même droit. Nous tenons à mentionner
que les producteurs américains qui viennent tourner sur notre territoire les
reconnaissent volontairement. Ils sont donc couverts par nos ententes
collectives avec les producteurs. Toutefois, ce n'est pas le cas avec les
producteurs québécois.
Afin de permettre la reconnaissance et le
droit à la syndicalisation de toutes les personnes travaillant au sein d'une
équipe de production, nous vous recommandons d'amender l'article 1.2 de la loi
afin d'y inclure tous les artistes, les techniciens et les autres personnes
dont les services sont retenus à la pige et qui occupent des fonctions
permettant à ce qu'une œuvre audiovisuelle puisse voir le jour.
Maintenant, parlons de l'impact de l'implantation
des cinq secteurs. Pour un technicien, cela signifiait que s'il désirait
travailler à la fois sur les productions québécoises et sur les productions
américaines, il devait être membre de deux syndicats différents, même si le
travail, les méthodes de travail et les enjeux restaient les mêmes. Or, en
janvier 2021, les deux... ont fusionné avec l'AQTIS, réglant une fois pour
toutes leurs conflits syndicaux. On les en félicite. Aujourd'hui, en 2022, tout
semble réglé entre les syndicats grâce à la fusion. Malheureusement, non,
certains membres de la guilde continuent d'être double allégeance car leur
fonction est scindée entre nous et l'AQTIS, selon les secteurs. Nous vous
invitons d'ailleurs à consulter le tableau de représentation actuel figurant à
la page 9 dans notre mémoire.
Nos démarches légales effectuées en 2019
pour les représenter afin qu'ils soient tous réunis sous la guilde se sont
soldées par un échec. Ils sont actuellement pris dans un cul-de-sac juridique
malgré leur volonté clairement exprimée, comme en témoignent les deux pétitions
signées par 239 membres. Ces 239 membres doivent continuer à payer deux
cotisations à deux syndicats pour le même travail fait de la même façon, mais
avec des employeurs différents. Cette double allégeance comporte plusieurs
désavantages, dont un frein à leur carrière. Pour toutes ces raisons, nous vous
demandons d'ajouter l'article 44.1 au projet de loi n° 35 afin d'établir que la
guilde représente pleinement ses membres dans tous les secteurs. Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci,
Mme Barrette. Nous poursuivons maintenant avec l'Alliance québécoise des
techniciennes et techniciens de son et de l'image. Je vous invite à vous
présenter avant de commencer votre exposé de cinq minutes.
M. Lemay (Christian) : Merci,
Mme la Présidente. Mon nom est Christian Lemay. Je suis le président du
syndicat récemment fusionné, AQTIS 514 IATSE. Je suis accompagné de Me Étienne
Lafleur, qui est aussi le directeur des relations de travail de notre syndicat.
Mme la ministre, Mmes et MM. les députés
et membres de la commission, l'Association québécoise des techniciens et
techniciennes de l'image et du son. AQTIS 514 IATSE, affiliée à la FTQ, tient à
vous remercier de votre invitation. Nous représentons 8000 professionnels
pigistes qui oeuvrent dans plus de 200 métiers liés à la production
audiovisuelle travaillant derrière la caméra. Notre organisation propulse la
passion et le talent de ses membres et contribue ainsi au rayonnement de l'industrie
ainsi qu'à la vitalité économique de la province.
Nous sommes devant vous aujourd'hui afin
de vous présenter notre mémoire commentant le projet de loi n° 35. D'emblée,
reconnaissons tout de suite une chose, l'exercice de révision de la LSA était
plus que nécessaire, et nous considérons que c'est un début, un début, dans la
mesure où ce projet de loi n° 35 propose une avancée importante sur plusieurs
aspects. Dorénavant, tous les artistes de la province seront couverts par un
seul et unique et plus avantageux régime.
De plus, notre association est heureuse d'avoir
constaté que plusieurs de nos propositions de notre mémoire initiale sont
retenues dans le projet de loi n° 35, tel que la reconnaissance générale du
Tribunal administratif du travail...
M. Lemay (Christian) : ...qu'il
soit le seul tribunal compétent afin d'entendre les litiges découlant de la
LSA. Bien entendu, l'ajout d'une protection législative contre le harcèlement
psychologique et sexuel était plus que nécessaire.
Nous aimerions profiter de notre présence
afin de vous indiquer certaines préoccupations, entre autres à l'égard de
l'article 22 du projet de loi et qui aura un impact important sur nos membres
et les artistes en général si l'article n'est pas modifié. Il était grandement
temps que les artistes et artisans couverts par la LSA puissent bénéficier de
la même protection que leurs collègues salariés au sens du Code du travail.
Toutefois, il est important de vous indiquer, contrairement à l'article 59 du
Code du travail et à l'article 32 b de la loi sur le statut de l'artiste
fédérale, que le gel des conditions de travail suggéré par le projet de loi est
incomplet. Incomplet, car l'article 22 du projet de loi, tel que rédigé, ne
contient aucune protection pour nos membres et les artistes en général contre
une possible modification unilatérale des conditions d'engagement par un
producteur, et ce, durant la période de grande vulnérabilité qu'est celle
suivant l'envoi d'un avis de négociation collective et avant qu'une entente
collective ne soit conclue. C'est à ce moment que les artistes ont besoin de la
protection plus étendue de la loi. Les artistes oeuvrent déjà dans un milieu à
grande précarité. Alors, pourquoi rajouter un souci de plus en permettant une
potentielle modification unilatérale de leurs conditions de travail?
Une autre préoccupation que nous tenons à
vous soumettre aujourd'hui et qui n'apparaît pas dans la mouture actuelle du
projet de loi est à l'égard de l'importance de rendre les sociétés liées
solidairement responsables les unes envers les autres pour les dettes et
obligations découlant d'une entente collective. Il s'agit d'un problème réel
pour les associations d'artistes. Trop souvent, nous sommes confrontés à des
coquilles vides qui ont tôt fait de disparaître après les productions, rendant
ainsi difficile, voire même impossible en quelques situations l'exécution
d'obligations qui peuvent notamment découler d'un jugement ou d'une sentence
arbitrale.
En guise de conclusion, nous voulons vous
indiquer... nous voulons indiquer, pardon, aux membres de la commission que si
ce projet de loi n'est pas traité en profondeur par l'Assemblée nationale, il y
a lieu de croire que l'objectif d'améliorer les conditions socioéconomiques des
techniciennes et techniciens de l'audiovisuel du Québec ne soit pas atteint.
Convenons ensemble que le dialogue doit continuer. Le moment est trop important
afin de prendre cet exercice à la légère et c'est pour cette raison que nous
voulons vous indiquer que nous sommes solidaires des autres associations
d'artistes du principe d'une révision de la Loi sur le statut de l'artiste à
chaque cinq ans, surtout sachant que de nombreuses transformations
technologiques sont à venir dans les prochaines années, qui auront un impact
important sur les conditions d'engagement des travailleuses et travailleurs de
l'audiovisuel. Merci, Mme la Présidente.
• (16 h 40) •
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci.
Merci pour vos exposés. Nous allons donc commencer immédiatement la période
d'échange avec Mme la ministre. Vous disposez de 10 minutes 30 secondes.
Mme Roy : Hi là là! Merci,
tout le monde, d'être là. Je suis contente de vous voir, M. Lemay, entre
autres, Maître, Maître, Maître. On a fait des Teams, on a fait des Zoom, on
s'est beaucoup parlé. J'apprécie beaucoup votre mémoire. J'apprécie aussi le
fait que vous soulignez qu'on a retenu des demandes que vous nous aviez faites.
Et je souhaite vivement que ces modifications, qui ouvrent davantage la porte à
l'utilisation du Tribunal administratif du travail pour régler vos différends,
parce qu'on parle vraiment ici à des syndicats qui sont des experts en la
matière, ça va vous aider, c'est le but. Et puis c'est quelque chose qui, je
pense... puis la professeure qui était juste avant vous parlait de moyens qui
peuvent aider toutes les parties en cause ici. Alors, je suis contente de voir
qu'à cet égard-là, vous le soulignez à juste titre, là, on vous a vraiment
entendus, on vous a écoutés. Et ne vous inquiétez pas, le travail ne sera pas
bâclé. Vous me connaissez un petit peu. On a travaillé fort ensemble et on va
continuer le dialogue.
D'ailleurs, d'entrée de jeu, les deux
groupes qui sont devant nous avaient les mêmes réticences qu'on entend depuis
ce matin. Alors, comprenez que, quand on entend depuis ce matin : Il y a
un bobo à un endroit, on va tout faire pour voir dans quelle mesure on peut
améliorer la situation. C'est la raison pour laquelle on est ici, pour
travailler ensemble puis de façon absolument... dans un seul but : aider
les artistes. C'est la loi... c'est une fameuse loi sur le statut des artistes
professionnels...
Mme Roy : ...vous
accrochez sur l'article 15, vous n'êtes pas les seuls, tous les syndicats
ce matin sont venus nous le dire, le fameux devoir de juste représentation.
Alors, je pense qu'à cet égard là, il y a des modifications qui pourraient être
apportées. J'aimerais que vous élaboriez dans quelle mesure, pour vous, il faut
amener un amendement, puis qu'est-ce qui vous ...qu'est-ce qui vous qui vous
dérange? Votre vision à cet égard-là, parce que je pense que vous vous faites
pratiquement vôtres, les observations qui ont été faites, entre autres, par
l'UDA et la guilde à cet égard là. Mais j'aimerais vous entendre un petit peu
parler du devoir de juste représentation.
Mme Bertrand (Lisane) : C'est
bon, je vais y aller. Alors, oui, en fait, c'est qu'effectivement, comme l'UDA
l'a mentionné ce matin, c'est... c'est que pour plusieurs raisons, des fois
c'est parce qu'on n'arrive pas à négocier une entente collective dans un
secteur ou avec un producteur donné, mais ça fait en sorte que, lorsqu'il n'y a
pas d'entente collective qui s'applique, évidemment, bien, les artistes sont un
peu... sont laissés à eux-mêmes pour négocier. Si le devoir de représentation
s'applique, et on doit représenter aussi ces artistes-là alors qu'il n'y a pas
d'entente collective, on vient en quelque sorte obliger les associations
d'artistes à représenter et à défendre les intérêts d'un artiste qui a négocié
lui-même son contrat avec un producteur alors qu'il n'y a pas d'entente
collective, quelque chose qui n'existe pas dans le monde du travail. En vertu
du Code du travail, là, il y a vraiment des ententes collectives, et on est
liés par les ententes collectives. Donc, la proposition qui était faite par
l'UDA, ce matin, bien, nous apparaissait tout à fait pertinente, de dire :
Mais ça doit viser, ça doit être ouvert, ce recours-là ou cette protection-là
pour le devoir de juste représentation lorsqu'il y a une entente collective
applicable aux artistes.
Je donne un exemple, par exemple, le GQGCR
- excusez, je dis l'acronyme, là, ça va plus vite - le GQGCR n'a pas d'entente
qui couvre l'animation. Et est-ce qu'il pourrait y avoir quelqu'un, un
réalisateur en animation qui viendrait dire... déposer une plainte contre le
CQGCR en disant : Bien, vous n'avez pas négocié d'entente collective donc
vous manquez à votre devoir de représentation. Et on se retrouve devant le
tribunal administratif alors qu'il n'y a pas d'entente collective. Alors, ça
devient un problème. C'est très difficile à gérer. Lorsqu'il n'y a pas d'entente
collective, il y a une multitude de situations qui peuvent se poser. C'est pour
ça que c'est nécessaire que le devoir de représentation soit lié à la présence
d'une entente collective. Sinon, on se retrouve à devoir défendre. Et je ne
vous le dis pas par connaissance de cause parce que je suis impliquée dans un
autre dossier qui est maintenant rendu en Cour supérieure, mais où la partie
adverse a justement plaidé que, mais indépendamment qu'il y ait une entente
collective ou pas, l'association d'artistes doit représenter. C'est elle qui
doit déposer des griefs. On n'a pas d'entente collective. Je ne sais pas
comment on peut faire ça. Donc, c'est pour ça qu'il doit y avoir... ça doit
être lié à une entente collective.
Mme Roy : Alors, si je comprends
bien ce que vous dites, c'est que, dans le fond, le libellé de la façon qu'il y
est actuellement cet article-là, l'article 15, vient vous faire porter un
fardeau trop lourd sur les épaules.
Mme Bertrand (Lisane) : Tout
à fait.
Mme Roy : C'est ça. O.K.
Il faut que vous sachiez, puis je l'ai dit à d'autres groupes ce matin, mais je
pense que c'est bon que je vous le dise pour vous rassurer, il avait été mis là
à la demande, entre autres, du ministère du Travail, parce que c'est pertinent.
Vous, vous l'avez vu, vous connaissez...
Une voix : ...
Mme Roy : Oui, à la
demande du Tribunal administratif du travail qui, lui, relève du ministère du
Travail, parce que c'est un calque de l'article 47.2. Vous l'avez vu, mais
vous avez aussi vu, puis c'est pour ça que... c'est à ça que ça sert les
commissions. Vous avez aussi vu que, oui, c'est un bon article, mais il y a un
aménagement qu'il faut faire parce que le fardeau sera trop lourd pour nous.
Alors, nous l'avons entendu. Les oppositions l'ont aussi entendue. Alors, on va
voir dans quelle mesure on peut travailler cet article-là pour aider, pour nous
assurer que le Tribunal administratif du travail y trouve son compte. Mais
c'est pour ça que je vous dis, c'est ce n'est pas que de la transposition
d'articles du Tribunal administratif du travail ou de la Loi sur les normes que
nous faisons, mais nous faisons les adaptations au milieu artistique, au milieu
culturel qui est très particulier aux artistes. Donc, merci de le soulever vous
aussi. Alors, je pense qu'à force de l'entendre on en est convaincu déjà depuis
ce matin, mais on va travailler à cet égard là, ça fait que je voulais vous
vous rassurer à cet égard-là.
Vous faites mention- moi, j'ai gardé ça
ici, oui - vous nous parlez entre autres... vous parliez des fameuses coquilles
pour de nous assurer qu'on en soit capable... vous émettez le souhait qu'on
soit capable de retracer les administrateurs des entreprises qui, je pense...
puis c'est important de le souligner, là, la majorité du monde, c'est du bon
monde, puis ils respectent les ententes, puis ça travaille bien. Vous n'avez
pas le choix, vous êtes condamnés à travailler ensemble, que vous avez besoin
l'un de l'autre. Mais si arrive d'aventure où il y a certaines personnes qui ne
respectent pas...
Mme Roy : ...des ententes, à
cet égard-là, ou qui crée des entreprises qui ne respectent pas les contrats
signés et puis qui disparaissent, la possibilité de se faire payer devient
difficile. Alors, à cet égard-là, qu'est-ce que vous nous demandez pour qu'on
puisse les retracer?
Mme Barrette (Chantal) : En
fait, je vais juste... à cet égard-là, je vais juste, peut-être, vous
relater... On a un dossier... Ce matin, l'UDA vous a dit qu'ils ont une
vingtaine de sentences non exécutées. Malheureusement, à la guilde, nous en
avons eu une aussi, également. Puis je dois vous dire qu'on a tout fait en
notre... on a déposé un grief, le producteur a essayé d'aller en Cour d'appel.
Vraiment...
Une voix : ...
Mme Barrette (Chantal) : Pardon?
Une voix : ...
Mme Barrette (Chantal) : On a
saisi les... on est allés jusqu'à la limite, qui est de saisir les bobines.
Alors, je vous confirme que, durant huit ans de temps, nous avons dû payer ces
bobines-là qui étaient, naturellement, en sauvegarde pour tenter de récupérer
le paiement dû au réalisateur, qui était la sentence arbitrale. Et, après huit
ans de temps, vraiment, là, parce qu'on payait des frais à tous les mois, ça
nous a coûté une fortune. Nous avons... J'ai contacté moi-même le producteur
pour lui dire : Viens reprendre tes bobines, je vais te les envoyer parce
que ça me coûte plus cher de garder les bobines. Et notre réalisateur n'a
jamais été payé. Malheureusement, il est mort dans la... vraiment, dans la
déchéance. Et c'est vraiment dommage parce qu'on a une sentence arbitrale qui
n'a servi absolument à rien. Ce producteur-là, par la suite, a produit une
autre production, tu sais.
C'est sûr qu'on ne peut pas dire que les
producteurs sont tous comme ça, puis ce n'est pas vrai. Puis, tu sais, moi,
vraiment, généralement, il y a un respect qui se fait. Par contre,
malheureusement, on a eu la preuve que ça peut arriver. L'UDA en a la preuve
aussi que ça peut arriver également qu'on ait des sentences arbitrales qu'on
n'est pas capables de faire exécuter. Ça fait qu'est-ce qu'on fait une fois
qu'on a saisi les bobines, la compagnie est vidée, il n'y a pas d'actif, il n'y
a rien? Que reste-t-il? Que pouvons-nous faire? Puis c'est pour ça que, dans
notre mémoire, ce qu'on avait demandé, c'est vraiment les compagnies de... les
productions qui bénéficient d'une subvention gouvernementale doivent s'assurer,
doivent payer les artistes pour lesquels ils sont engagés. Tu sais, c'est
incroyable.
Puis je vous dirais aussi, là, il y a quelqu'un
qui a parlé aussi, là, de faire une reddition de comptes. Moi, je vous
confirme, là, pour l'avoir fait dans notre cas, malheureusement, autant... on a
fait des demandes à Téléfilm, tout ça, dans les comptes, ça ne paraissait pas
que le réalisateur n'était pas payé tout simplement parce que le producteur
s'était versé lui-même l'argent. Ça fait que, sérieusement, tu sais, il y a du
travail à faire, là, à ce niveau-là. Puis ce n'est pas... On en a parlé dans
notre chose. Puis je vais laisser notre avocate, peut-être, au niveau légal,
mais moi, je peux vous dire, réalistement, c'est ce qui est arrivé à notre
membre, malheureusement.
• (16 h 50) •
Mme Bertrand (Lisane) : C'est
certain que, ce qui serait utile pour nous, c'est d'avoir un mécanisme, à tout
le moins, que, lorsqu'un producteur fasse une demande de financement aux
organismes qui financent les productions dans le milieu, bien, qu'il y ait non
seulement... qu'ils doivent montrer patte blanche, mais peut-être une
vérification soit faite auprès des associations d'artistes. Parce que le
producteur peut bien dire, comme dans le cas que Chantal vient de vous
expliquer, que, bien, finalement, oui, oui, ça a été payé, puis ça paraît bien,
oui, on a fait le budget, voici, tout a été payé, mais, dans les faits, il
reste des sentences à exécuter. On en a, il y en a à la guilde, il y en a dans
d'autres associations d'artistes. Donc, soit un mécanisme où, les producteurs,
qu'ils puissent se retourner et avoir du financement public, alors qu'il y a
des dettes et qu'il n'y a pas de vérification qui est faite auprès des
associations d'artistes, ça, ça devrait être une première étape.
La deuxième étape, c'est aussi... En fait,
l'AQTIS a parlé de productions liées, je pense je vais... des maisons des
compagnies liées, je vais leur laisser la balle au bond parce que c'était leur
proposition. Mais on serait d'accord avec ça, que la production qui s'ouvre...
je vais donner des... excusez, District 31 1, 2, 3, en fonction des
saisons, bien, qu'on les lie les unes entre les autres. Je vais laisser
l'AQTIS...
M. Lafleur (Étienne) : Toute
est une question d'aller rechercher la solidarisation des compagnies, des
coquilles avec avec les maisons mères. Donc, manifestement, on peut comprendre
que l'écosystème du financement fonctionne de cette manière-là. Mais, au final,
il faut que la compagnie mère, peu importe le nombre de coquilles ou le nombre
de structures corporatives qu'elle peut mettre en place pour obtenir le
financement nécessaire à créer les oeuvres, mais soit ultimement responsable
des obligations qui en découlent pour toute et chacune, que ce soit en vertu
d'une sentence arbitrale, des obligations en vertu des contrats qui ont été
négociés. Donc, pour nous, ça, c'est très important d'aller rechercher cette solidarisation...
M. Lafleur (Étienne) : ...cette
solidarité-là entre les mères... entre les sociétés mères et les sociétés
filles, c'est un point qu'on a mis beaucoup d'emphase dans notre mémoire déposé
en février 2021, qu'on n'a pas nécessairement repris dans le cadre de... en
réponse au projet de loi no 35 parce qu'on voulait, disons, prioriser
certains points qui avaient été inclus dans le p.l. no 35. Mais, en
prenant la balle au bond, je pense que ça serait quelque chose qu'il serait
très important de réfléchir à intégrer, d'aller pouvoir retenir la solidarité
entre les différentes coquilles pour le financement.
Mme Roy : Et la
responsabilité personnelle des administrateurs. Ça, je pense qu'on l'a entendu
aussi.
M. Lafleur (Étienne) : Également,
aussi, à l'instar des... Je fais miens les propos des autres associations qui
ont été mentionnés aujourd'hui.
Mme Roy : Selon vous,
parce qu'on en a... une des choses que vous demandiez dans le gros mémoire
initial de février dernier, c'était d'ouvrir le Tribunal administratif du
travail davantage. Dans quelle mesure, de façon concrète, ça va avantager dans
quelle mesure, vos membres lorsque viendra le temps, justement, de régler des
litiges ou... Je voulais avoir vraiment le pouls de... S'il est adopté tel
qu'il est là, dans quelle mesure ça va aider à l'égard, par exemple, de tout ce
qui touche le harcèlement. Parce qu'on a mis des pans de la Loi sur les normes
du travail touchant le harcèlement psychologique, le harcèlement sexuel, on l'a
adapté et fait transférer dans ce projet de loi, en ce qui a trait à
l'arbitrage de griefs, en ce qui a trait aux pouvoirs du Tribunal administratif
du travail d'y avoir recours. Dans quelle mesure ça va vous simplifier la vie?
Ou pas, on espère que ça vous la simplifie. Avez-vous des exemples à me donner?
M. Lafleur (Étienne) : Bien,
ça va simplifier la vie... des artistes. Nous, à l'AQTIS, on a déjà intégré,
avec la majorité des associations patronales avec qui qu'on travaille, les
dispositions relatives au harcèlement psychologique. Donc, les membres qu'on
représente bénéficiaient déjà d'un recours en vertu des ententes collectives. Donc,
ils pouvaient déposer ou exercer leur droit de déposer un grief à l'égard des
productions x, y, z pour faire valoir leurs droits.
Là où est-ce que ça va changer, c'est que
ça va nous permettre d'avoir un tribunal compétent et unique qui va être à même
d'entendre les litiges potentiels qui découlent de la LSA, au-delà d'une simple
petite proportion qui était prévue avant. Donc, je pense que ça va aider la
majorité des artistes qui ne pouvaient pas bénéficier d'avoir inclus... ou
notamment, même, de ne pas avoir... de bénéficier de conventions collectives,
de pouvoir aller s'adresser à ce tribunal-là, de déposer des plaintes. Donc, ça
va certainement leur faciliter la vie pour ces personnes-là. Malheureusement,
nous, les membres qu'on représente bénéficiaient déjà de cette protection-là.
Mme Roy : Parfait.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Il vous reste trois minutes.
Mme Roy : Il me reste
trois minutes. Donc, moi, je tiens à vous dire que le dialogue reste ouvert et
que nous allons travailler pour voir dans quelle mesure on peut bonifier ce
projet de loi. Je vais être très, très transparente et directe avec vous. Je
comprends que vous souhaitiez qu'on ouvre davantage... à davantage de
professions la loi. Vous comprenez que je n'irai pas jouer dans les amendements
qui ont été faits en 2009 par ma collègue de l'Acadie. Je n'ouvre pas ce pan de
possibilités, je vais dire comme ça, parce qu'on tentait de régler les
problématiques, pallier aux brèches qui sont là, qui sont les plus... qui
étaient les plus grandes et les plus... qui couvraient le plus grand nombre
d'artistes actuellement pour lesquels il y a des problématiques. Et
comprenez-moi bien, c'est à l'égard du fait qu'il s'agit de la Loi sur le
statut professionnel des artistes et que, dans mon âme et conscience et dans
notre cœur à tous, le comptable, l'assistant comptable n'est pas un artiste,
mais je... au même titre où je ne le fais pas pour les journalistes
indépendants, un journaliste n'est pas un artiste.
Mais je sais que vous êtes déçus à cet
égard-là, que vous vouliez ouvrir bien davantage. Nous n'irons pas là, là, mais
tout est possible dans le futur, mais on veut vraiment resserrer cette loi-ci
en donnant plus de pouvoir, actuellement, à vos associations, aux syndicats, aux
artistes et pour pouvoir travailler d'une façon plus efficace. Mais je suis
très transparente et je ne vous fais pas de cachotteries, mais je veux vraiment
améliorer des points que vous avez soulevés qu'on pourrait améliorer aussi.
Alors, voilà, je tente de trouver un équilibre dans tout ça. Mais je veux
vous...
Mme Roy : ...merci pour votre
mémoire, et puis le dialogue reste ouvert, et on continue à travailler
ensemble. Merci infiniment.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci,
Mme la ministre. Nous poursuivons l'échange avec la députée de l'Acadie.
Mme St-Pierre : Merci, Mme la
Présidente. Je pense qu'on est dans un exercice qui est rare, c'est-à-dire
celui d'une loi sur le statut d'artiste, qui a été adoptée dans les années 80,
qui a été revue dans les années... en 2009, puis là on était rendus en 2022.
Alors, on ne fait pas ça tous les jours. Je pense que la ministre doit
comprendre qu'il faut aussi peut-être être ouverts à certains aménagements qui
sont réclamés. C'est sûr que, quand vous nous parlez des exceptions, comme les
comptables et... si ma mémoire est bonne, à l'époque, ça touchait les
techniciens d'AQTIS et IATSE, et je pense que les comptables n'étaient pas sous
ces deux chapeaux là, ces deux syndicats là. Alors, c'était ça, l'idée. Moi, je
serais ouverte à le faire, parce qu'effectivement il peut y avoir une certaine
inéquité pour des gens qui travaillent sur les mêmes productions. Et sur la
question des journalistes, on en parlera, mais je pense qu'il faut que la ministre
soit un peu plus ouverte à cette question-là, parce qu'on ne fait pas ça tous
les jours.
Je voudrais avoir... Je voudrais bien
comprendre la question de l'article 22, qui a l'air à être un sérieux problème,
là. Expliquez-nous exactement qu'est-ce que vous voyez là-dedans, pour qu'on le
comprenne bien comme il faut, et quel serait l'amendement qui devrait être
apporté, là.
M. Lafleur (Étienne) : Pour
nous, c'est sûr et certain que, dès le moment du dépôt de l'avis de
négociation, les masques tombent. Donc, on voit qu'il y a une intention réelle
de vouloir négocier des conditions de travail. Présentement... Et là c'est sûr
qu'on salue l'intégration et l'arrivée d'un gel partiel des conditions de
travail au moment où est-ce que les obligations de la convention collective
échoient. Sauf que là, nous, ce qu'on dit, et ce qu'on demande, et ce qu'on
considère qui est nécessaire pour protéger les artistes, c'est surtout au
moment où est-ce qu'on dépose l'avis de négociation, et d'arrimer aussi l'idée
derrière la loi avec le droit fédéral. Le droit fédéral, il prévoit déjà
aussi... la Loi sur le statut de l'artiste, fédérale, prévoit déjà que, dès le
dépôt de l'avis de négociation, les conditions de travail sont gelées, et ne
peuvent être modifiées de manière unilatérale par l'employeur. Présentement, la
mouture du projet de loi, à l'article 22, ne mentionne pas ça, donc elle ne
protège que les artistes a posteriori, et nous, c'est le ab initio qui nous
importe, pour que la protection soit complète, et pour qu'on puisse favoriser
également la liberté d'association.
On se doit... Parce que la Cour suprême,
elle l'a mentionné, Mme la députée, que le gel des conditions de travail est...
favorise aussi la négociation collective, favorise aussi le maintien du rapport
de force. Donc, pour nous, c'est capital d'apporter cet amendement-là pour
protéger les artistes au complet, dès le moment du... bien, dans tout le
processus de négociation collective, que ce soit avant, pendant ou après. Donc,
elle est là. C'est une courte modification qui, selon nous, ne coûte pas
grand-chose, et de juste... de prévoir dès le dépôt de l'avis de négociation,
après...
• (17 heures) •
Mme St-Pierre : Je pense que
les juristes vont peut-être entendre votre message, ils vont peut-être se
mettre sur la rédaction. Mais si vous pouviez nous aider, moi, je suis prête à
déposer un amendement et... Si vous pouviez m'aider dans la rédaction, parce
que, vous voyez, on a de bien bonnes personnes qui travaillent de notre côté,
mais on n'a pas toute une armada d'avocats. Ce serait important de nous faire
des suggestions d'amendements.
M. Lafleur (Étienne) : Si
vous me permettez, Mme la députée, je peux vous lire la suggestion qu'on a
d'incluse dans notre mémoire.
Mme St-Pierre : O.K.,
allez-y.
M. Lafleur (Étienne) : Donc,
on propose de modifier 36.1, à l'article 22 du p.l. n° 35, de la manière
suivante : «À compter du dépôt, par une association d'artistes, d'une
demande de reconnaissance, et tant que le droit énoncé à l'article 34 n'est pas
exercé ou qu'une décision arbitrale suivant l'article 33 n'est pas intervenue,
un producteur ne doit pas modifier les conditions de travail des artistes dont
il retient les services sans le consentement écrit de l'association.» Alinéa 2° : «Il
en est de même à compter de l'expiration de l'entente collective, et tant
qu'une nouvelle entente collective n'a pas été conclue ou qu'une décision
arbitrale suivant l'article 33 n'est pas intervenue.» Alors, voilà.
Mme St-Pierre : Parfait, donc
c'est bien noté. On va essayer de faire le changement.
Sur la question des coquilles, est-ce...
17 h (version non révisée)
Mme St-Pierre : ...est-ce que
c'est possible... par exemple, une maison de production qui s'appellerait les
productions CSP pourrait avoir une mégaproduction et contracter certains
éléments de la mégaproduction à d'autres petites maisons de production, mais qu'il
n'y a pas de lien... c'est-à-dire il n'y a pas de responsabilité de la grande
maison de production par rapport à ces petites maisons de production là qui
pourraient se sauver une fois le produit fini. Est-ce que c'est... une fois la production
faite, c'est-u ça?
M. Lemay (Christian) : Je
peux vous donner un peu le sens de ce que vous décrivez. Ça existe déjà,
malheureusement.
Mme St-Pierre : Oui, bien, c'est
parce que c'est ce que j'avais compris, là.
M. Lemay (Christian) : Ça
existe déjà, surtout en postproduction. Il y a de nombreuses entreprises qui
font de la sous-traitance en postproduction, c'est monnaie courante dans l'audiovisuel.
On en a parlé dans notre mémoire initial de février 2021.
Mme St-Pierre : Alors, quel
serait le remède, là, approprié dans la loi qu'on est en train de... sur
laquelle on est en train de travailler?
M. Lemay (Christian) : Une
seule suggestion, c'est d'abolir la sous-traitance, c'est aussi simple que ça.
Mme St-Pierre : Mais, sans
abolir sous-traitance, on pourrait exiger une responsabilité, un lien, parce
que ce n'est pas possible, là, d'abolir la sous-traitance, là.
M. Lemay (Christian) : Effectivement,
non, garder le lien de subordination du producteur employeur à l'égard de tous
les aspects de la production.
Mme St-Pierre : O.K. Mon
autre question, c'est la reddition de comptes. La question peut être à l'un ou
l'une de vous. La reddition de comptes, on la comprend quand on reçoit... si le
producteur reçoit des subventions du gouvernement, qu'il y a une reddition de
comptes, mais il y a d'autres types de productions qui ne reçoivent pas de
subvention mais qui ont des crédits d'impôt. Est-ce qu'on pourrait appliquer la
reddition de comptes aux crédits d'impôt?
Mme Bertrand (Lisane) : En
fait, ça fonctionne... en tout cas, pour la guilde, là, je vais parler vraiment
pour la guilde, ça fonctionne un peu différemment avec les productions
américaines. Généralement, on demande le dépôt en garantie avec les employeurs
américains. Donc, un producteur américain qui viendra à Montréal,
automatiquement, nous, on va demander un dépôt en garantie ou, si jamais il
fait partie d'un studio, une lettre du studio confirmant qu'ils vont absorber
en cas de difficulté, qu'ils vont payer les sommes dues. Donc, généralement, le
problème n'est pas nécessairement là. C'est arrivé. Je ne dis pas que ce n'est
jamais arrivé, là, qu'un producteur américain indépendant de bas budgets, qui
vienne, puis qui parle, puis qui ne paie pas, oui, mais c'est plus rare. En
tout cas, pour la guilde, c'est moins un problème récurrent. On le voit plus
avec les producteurs d'ici où est-ce qu'ils ont des petits budgets, ils n'ont
pas beaucoup de moyens, ils veulent produire à tout prix : Peu importe, je
veux le faire pareil, alors... puis, bon, malheureusement, il arrive ce qui
arrive, là., tu sais. Mais au niveau des productions américaines, ce n'est
jamais un enjeu.
Mme St-Pierre : Mais on ne
pourrait pas avoir de dépôt... on ne pourrait pas exiger dépôt en garantie ici
aussi Parce que, si le producteur reçoit une subvention, il n'est pas dans un
état précaire, là.
Mme Bertrand (Lisane) : Certaines
dispositions des ententes collectives qu'on a à la guilde prévoient qu'on peut
dans certaines circonstances demander des dépôts en garantie. Généralement, des
permissionnaires, des producteurs qui ne produisent pas souvent, oui, c'est
possible de pouvoir le faire. Tu sais, bon, des fois, ça va arriver qu'un
producteur va nous dire... qui est très inquiétant, là, à quelque part, qui va
nous dire : Bien, désolé, je n'ai pas d'argent pour te donner un dépôt de
garantie, je n'ai pas assez de liquidité. Déjà, moi, ça nous donne un drôle de
signal d'alarme. Généralement, on informe nos membres dans des cas comme ça,
parce que… bon, que voulez-vous faire, là, on a averti les gens qu'on ne peut
pas avoir de dépôt de garantie, mais que nos membres décident de rester sur la
production, on comprend que, s'il arrive un pépin, on va pouvoir peut-être
faire un grief. Mais, tu sais, ça va être difficile de récupérer cet argent-là,
là. C'est toujours le problème de la production, les gens veulent collaborer,
les artistes veulent travailler, ils comprennent le projet, sont intéressés,
donc c'est difficile des fois d'arrêter la machine, de dire : Bien, O.K.,
on vous demande de vous retirer. Généralement, là, c'est difficile à faire
auprès des membres, là. Je ne sais pas si M. Lemay a quelque chose à ajouter
là-dessus.
M. Lemay (Christian) : Je
voudrais peut-être juste ajouter, pour vous donner un peu la mesure... et je
suis tout à fait d'accord avec ma consœur de la… mais sachez que les dépôts en
garantie, sur certaines productions, pour les membres qu'on représente, sont
très volumineux, là, on parle de 250 000 $, 300 000 $. Alors, pour
certains producteurs québécois, ça pourrait... on peut envisager que c'est...
difficile à faire...
M. Lemay (Christian) : ...de
dépôt-là. La première réflexion qui m'est venue lorsqu'on a entendu ou discuté
avec la ministre à ce sujet là dans une consultation, c'est peut-être, et vous
saurez mieux m'indiquer, en tant que parlementaires, si c'est une piste de
solution, mais la loi sur le financement public, il y a des règles qui
s'appliquent à ceux qui touchent du financement, là, que ça soit dans le milieu
de la construction ou autre. Alors, il y aurait peut-être une mesure ou des
mesures qui pourraient inspirer un peu une pratique similaire, via le
financement de la SODEC, par exemple. Mais je crois que la solution devrait
être équitable pour tous et toutes les producteurs, productrices, et non pas de
trouver des solutions mitoyennes. Je crois qu'on est rendus, à ce stade-ci,
dans des mesures qui doivent être vraiment très sérieuses.
M. Lafleur (Étienne) : Si je
puis me permettre, Mme la députée, juste de compléter la réponse de mon
collègue Christian par rapport à la question de la sous-traitante. Mais c'est
sûr qu'une solution serait de rendre solidaires le producteur et le
sous-traitant des obligations. Donc ça, pour moi, c'est manifeste. Ça s'inscrit
dans la même logique de la solidarisation entre les compagnies-mères et les
compagnies coquilles ou les compagnies... Donc, pour nous, c'est un petit peu
la même mécanique qui existe encore. On s'est grandement inspirés, là, vous
avez pu entendre, là, aujourd'hui, de l'industrie de la construction et de la
réalité des sous-traitants. Et sans vouloir simplement importer mais plutôt,
peut-être, avec les adaptations qui s'imposent, on considère que de solidariser
les obligations serait très importantes entre le producteur et les
sous-traitants, notamment pour ce qui est des salaires qui sont dus aux
artistes qui travaillent.
Mme St-Pierre : Donc, ça
serait possible de le faire, d'avoir un amendement dans cette loi, dans cette
loi-ci, pour les rendre responsables, là, imputables.
M. Lemay (Christian) : Je le
considère, je le considère. Là, je n'en ai pas à vous suggérer, là, à
brûle-pourpoint, comme ça, mais...
Mme St-Pierre : C'est
faisable. O.K. Mais on va vous demander votre aide. On va travailler fort, vous
allez voir. Sur la question... rafraîchissez-moi la mémoire sur la question des
avantages sociaux, là, qui avaient été fusionnés, comment... c'était, quoi le
mécanisme, là? Parce que l'intervenante, auparavant, avait soulevé ça dans son
mémoire.
M. Lemay (Christian) : On en
a discuté quand on vous a entendue. Je vais laisser Chantal, qui a eu la
mémoire plus alerte que moi.
Mme St-Pierre : Meilleure que
la mienne.
Mme Barrette (Chantal) : En
fait, j'étais auparavant...
La Présidente (Mme IsaBelle) : Un
instant, là. Je vais vous inviter à conclure parce qu'on est déjà dans le
rouge, comme je dirais, là. Allez-y rapidement.
Mme Barrette (Chantal) : Parfait.
Très brièvement. J'ai déjà... avant, j'ai auparavant travaillé à
AQTIS 514, donc j'étais personnellement impliquée au niveau du plan du
régime d'assurance. Effectivement, il y avait une entente qui avait été signée,
que les participants tenteraient, l'AQTIS 514... tenterait de faire un
seul et unique plan d'assurance. Malheureusement, ça n'a pas fonctionné.
Toutefois, on a trouvé une autre solution. On a été créatifs. On a des ententes
de réciprocité entre les syndicats. Donc entre nous, la Guilde et l'AQTIS,
lATSE, il y a des ententes de réciprocité, ça fait que donc un membre travaille
sous l'une ou l'autre des juridictions. Il peut choisir. Il peut choisir
d'envoyer les contributions à l'un endroit ou l'autre, ce qui fait que, donc,
nos plans d'assurance... et il y a des plans d'assurance. Tantôt, il a
quelqu'un qui parlait, là, Mme D'Amours, je crois, qui parlait, au niveau... si
quelqu'un est malade. Mais je vous rassure. En milieu d'audiovisuel, en tout
cas, pour la Guilde, on a des couvertures d'assurance qui existent pour les membres
dans certaines circonstances.
• (17 h 10) •
La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.
Merci. Alors nous poursuivons. Nous poursuivons avec la députée de Taschereau.
Mme Dorion : Oui. Bien, c'est
très intéressant et très éclairant. Merci pour vos mémoires, pour vos
présentations. Moi, j'aimerais ça juste avoir des exemples qui vont marquer
l'imaginaire, de qu'est-ce qui est possible en ce moment, pour les travailleurs
que vous représentez, qui n'a pas d'allure, puis qui va pouvoir être réglé
grâce à cette loi-là si vos deux principales revendications, là, sont incluses
aussi? C'est quoi les situations que vous voyez arriver, que vos membres vous
rapportent, que vous faites, comme, mon Dieu! ça, ça arrive tout le temps puis
ça n'a pas de bon sens?
M. Lemay (Christian) : Ce
n'est pas une question facile à répondre parce qu'on voit souvent le négatif,
hein, dans ces choses-là. Je crois, ce qui fait le plus mal à l'heure actuelle,
et on attend avec impatience la possibilité d'un amendement à cette loi là,
c'est la question de la sous-traitante. Il y a des travailleurs pigistes
concentrés, je dirais, en grande partie en postproduction, mais aussi des
photographes de plateau, dont les diffuseurs oublient totalement que c'est des
postes qu'on représente sur des plateaux de tournage. Et ces gens-là sont
engagés par un diffuseur et/ou un producteur qui fait...
M. Lemay (Christian) : ...de
la sous-traitance en postproduction où le pigiste monteur, par exemple, sonore
ou image, est engagé par une maison de postproduction en sous-traitance pour un
projet qui a été financé par la SODEC ou... Alors, c'est... si cet
amendement-là est honoré, c'est sûr que ça sera un gain en capital pour nous.
Mais à l'heure actuelle, je pense que l'élargissement du Tribunal administratif
du travail, c'est un excellent ajout. Ça va nous permettre que les... puis je
crois que l'expertise d'ailleurs au tribunal est de plus en plus fort et
l'exercice du droit au tribunal aussi se fait de plus en plus rapidement.
Alors, ça, c'est des gains importants. Je pense que vous avez parlé aussi de
programmes, hein? Ça prendrait des programmes. Bien, je crois que ça, c'est une
lancée, que le tribunal soit appuyé pour écouter les causes qui découlent de la
LSA, c'est certain que ça va aider toute la communauté.
Mme Dorion : Par exemple, en
sous-traitent, ce qui arrive, c'est que... ou quand c'est des filiales puis
qu'ils contournent un peu les ententes, ce qui arrive, c'est qu'il n'y a juste
pas de conditions minimales, c'est comme... si ce n'est pas toi, ça va être un
autre, ça fait que prend le chèque, puis c'est tout?
M. Lemay (Christian) : Je
dirais, en réponse à ça, que le plus dramatique, c'est la perte des avantages
sociaux. Ces gens-là ont un demi-filet social, et là plus ça va, moins ils en
ont. Alors, sachez que les organisations syndicales, pour la grande majorité,
dans l'industrie, font la gestion des régimes d'assurance collective et de
REER. Et je dirais qu'à la lueur de ce que la députée St-Pierre posait comme question
avec la fusion de... on est en train de faire une réforme de tous les régimes
d'assurance collective et de REER. Alors, on a trouvé des solutions, malgré la
rivalité et la nouvelle fusion suite à 2009.
Mme Dorion : O.K.
La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est
tout?
Mme Dorion : Oui.
La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est
bien. Alors, merci, Mme Barrette, Mme Bertrand, M. Lafleur, M. Lemay, merci
pour votre contribution aux travaux de la commission. Nous allons suspendre
quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 14)
(Reprise à 17 h 23)
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, bonjour. Pour le prochain bloc, nous
allons entendre la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma et
l'Association des réalisateurs et des réalisatrices du Québec. Nous commençons
d'abord par la société des auteurs avec Mme Cadieux. Je vous invite, avant
de commencer votre exposé, à bien vous présenter, les deux personnes de la
société.
Mme Cadieux (Chantal) : Merci.
Alors, bonjour. Je suis Chantal Cadieux, présidente de la SARTEC. Au cours de
ma carrière, j'ai écrit des romans jeunesse ainsi que des oeuvres pour le
théâtre, la télévision et le cinéma. Je suis accompagnée de notre directrice
générale, Me Stéphanie Hénault.
La SARTEC regroupe les auteurs et
recherchistes francophones de la radio, de la télévision, du cinéma et du
doublage. En général, la Loi sur le statut professionnel et les conditions
d'engagement des artistes de la scène, du disque et du cinéma a produit des
résultats très positifs en audiovisuel, permettant aux auteurs de négocier des
ententes collectives couvrant la recherche, l'écriture et l'adaptation, que ce
soit en fiction, un documentaire ou en variété. Si ces négociations ont parfois
été laborieuses, les mécanismes de la loi se sont révélés fort utiles, mais ils
sont insuffisants pour en atteindre pleinement les objectifs, ce que peut
corriger le projet de loi n° 35 déposé par la ministre de la Culture et
des Communications, Mme Nathalie Roy.
Le projet de loi n° 35 considère
enfin tous les auteurs de la littérature comme des artistes à part entière,
bénéficiant du droit fondamental à la négociation collective. Comme lorsqu'ils
écrivent pour le cinéma ou la télévision, ils auront enfin droit à des
conditions minimales d'exercice de leur métier, une nécessité pour assurer leur
protection. La SARTEC applaudit donc cette avancée et se réjouit également que
le projet de loi n° 35 introduise des dispositions pour contrer le
harcèlement psychologique et sexuel et confère des pouvoirs plus importants au
Tribunal administratif du travail...
Mme Cadieux (Chantal) : ...au
nom de la SARTEC, nous demandons aux parlementaires d'adopter le projet de loi
no 35 en y apportant toutefois huit points d'amélioration, et ce, dans
l'intérêt des artistes, des gens oeuvrant dans le milieu culturel et du public
québécois.
Premier point. Investir plus
judicieusement l'argent public en culture. Comme indiqué dans notre mémoire
déposé le 1ᵉʳ février 2021, disponible en ligne, les programmes de la
Société de développement des entreprises culturelles, SODEC, échouent parfois
encore à soutenir nos auteurs malgré l'aide publique leur étant destinée via
des entreprises de productions non engagées envers la SARTEC ou irrespectueuses
de leur engagement envers la SARTEC. La seule façon de nous assurer que
l'argent public investi le soit de façon régulière et responsable envers les
auteurs en audiovisuel est d'engager le producteur à respecter les normes
minimales dont la SARTEC est la gardienne, en développement comme en production
d'une œuvre. Il conviendrait donc d'apporter cette précision dans la loi comme
suit : «Les organismes publics subventionnaires du milieu culturel doivent
exiger des producteurs, avant de leur octroyer du financement, qu'ils
respectent des conditions contractuelles minimales avec l'association
d'artistes reconnus ainsi que des conditions négociées par l'artiste».
Notre deuxième point. Encadrer la
responsabilité des administrateurs d'une entreprise de production. Même
lorsqu'un producteur est lié par une entente collective, il arrive que la
SARTEC ne parvienne pas à obtenir l'exécution de ses obligations en raison du
paravent de sa personne morale. Des administrateurs mettent leur compagnie en faillite
ou constituent d'autres compagnies en dépouillant leur compagnie débitrice de
ses biens pour ne pas payer les auteurs, sans toutefois être tenus responsables
des cachets impayés. Il y a donc lieu d'introduire dans la loi des dispositions
afin de solliciter la responsabilité personnelle des administrateurs lorsque
des sommes dues aux auteurs demeurent impayées. Nous suggérons donc
l'introduction d'un nouvel article dans la loi qui irait comme suit : «Les
sociétés liées sont solidairement responsables les unes envers les autres des
dettes dues par l'une d'elles découlant d'une entente collective ou d'un
contrat d'artiste. De plus, ses administrateurs sont solidairement responsables
avec leur société de ces dettes».
Troisième point. Améliorer les pouvoirs du
Tribunal administratif du travail en ajoutant au troisième paragraphe de
l'article 56 de la loi l'article 7 concernant la liberté
d'association des artistes.
Quatrième point. Adapter au milieu
culturel le juste devoir de représentation de l'article 24.2, en précisant
qu'il vise les artistes assujettis à une entente collective.
Cinquième point. Préciser le pouvoir
réglementaire de l'article 68.6, en ajoutant qu'il devrait découler d'une
demande d'une association reconnue d'artiste. Il faudrait aussi préciser que le
règlement adopté en vertu du présent article tient lieu d'entente collective et
lie les producteurs du secteur en cause et les artistes qu'ils engagent.
Sixième point. Ajuster le libellé de la
définition d'artiste... de l'artiste, 1.1, afin de le simplifier en omettant la
répétition des termes «professionnel» et «professionnellement».
Point 7. Ajuster l'article 8 sur
le droit à la négociation individuelle en enlevant les termes «sous réserve des
dispositions de la présente loi».
Et le huitième point. Uniformiser la
terminologie de «contrat d'engagement» par «conditions contractuelles».
En conclusion, la SARTEC vous demande
respectueusement d'adopter le projet de loi no 35 en y apportant ces
quelques améliorations. Nous vous remercions de nous avoir entendus, et il nous
fera plaisir, à Me Hénault et moi, de répondre à vos questions.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci, Mme Cadieux. Nous poursuivons avec
le deuxième groupe de l'Association des réalisateurs et des réalisatrices du
Québec. M. Pelletier, à vous la parole. Et bien vous présenter avant de
commencer votre exposé.
M. Pelletier (Gabriel) : Merci.
Bien, tout d'abord, permettez-moi de vous remercier, Mme la ministre et Mme la
Présidente, ainsi que les membres de la Commission de l'Économie et du Travail,
de nous donner l'opportunité de nous exprimer devant vous aujourd'hui. Mon nom
est Gabriel Pelletier. Je suis président de l'Association des réalisateurs et
réalisatrices du Québec. Ainsi, je suis aussi réalisateur. L'ARRQ est une
association d'artistes et un syndicat professionnel qui a légalement été
accrédité et reconnu en vertu de la Loi sur le statut des artistes (S-32.1)
pour représenter et défendre les intérêts de tous les réalisateurs et
réalisatrices qui oeuvrent au Québec, en français ou en toute autre langue que
l'anglais, dans les domaines du cinéma, de la télévision, du web et de
l'animation. Notre association compte plus de 850 membres. L'ARRQ attend
depuis plusieurs années des modifications à cette loi puisque dans...
M. Pelletier (Gabriel) : ...son
état actuel, elle a atteint ses limites. Il est essentiel d'adopter, avant la
fin de la session parlementaire, ce projet de loi avec les modifications
proposées afin qu'elle atteigne son but premier, soit d'améliorer les
conditions d'engagement des artistes.
Je vais maintenant céder la parole à
madame Mylène Cyr, directrice générale de l'Association, qui vous fera état de
dispositions qui, selon nous, méritent quelques modifications et celles que
nous aimerions également inclure.
Mme Cyr (Mylène) : Merci.
Alors, je confirme, mon nom est Mylène Cyr, et je suis la directrice générale
de l'ARRQ. Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre, messieurs et mesdames les
députés et membres de la Commission, je vous remercie de nous recevoir
aujourd'hui. C'est un moment que l'on attendait avec beaucoup d'anxiété et de
joie, et ça nous fait extrêmement plaisir d'être là aujourd'hui.
Alors, il est essentiel pour nous de
bonifier les droits des artistes et de rétablir une équité entre les fardeaux
de la loi imposés aux associations d'artistes en comparaison à ceux des
associations de producteurs. Nous saluons ainsi les avancées du projet de loi
quant aux dispositions visant le harcèlement, l'élargissement des pouvoirs du
Tribunal administratif du travail ainsi que ceux de l'arbitre. Cependant,
certaines dispositions du projet de loi méritent, selon nous, des modifications
afin de leur donner plein effet.
Le pouvoir réglementaire de l'article
68.6. La première négociation de l'entente collective avec l'APFTQ pour la
télévision a duré 15 ans. Sur près de 30 ans, l'ARRQ n'a eu que deux ententes
collectives. Deux nouvelles ententes se sont ajoutées dernièrement, dont une
qui a nécessité près de cinq ans de négociation. Face à la difficulté de
négocier de façon globale pour un secteur, l'ARRQ proposait notamment de rendre
obligatoire la reconnaissance des associations de producteurs. Le gouvernement
a plutôt prévu, à l'article 68.6, de se doter d'un pouvoir réglementaire lui
permettant de fixer les conditions minimales dans les secteurs où il n'y a pas
d'entente collective. Nous saluons toutefois cette initiative qui semble
répondre en partie aux préoccupations soulevées et espérons qu'elle saura faire
une différence quant à cette partie de l'industrie culturelle qui n'est
toujours pas sous entente collective.
L'ARRQ suggère donc d'apporter certaines
précisions à l'article 68.6 afin que celui-ci atteigne les objectifs souhaités.
Au premier alinéa de l'article 68.6, il nous apparaît important de faire en
sorte que cette demande soit limitée aux associations d'artistes reconnues. Le
libellé actuel de l'article 68.6 ne donne pas de précision sur la façon
d'assurer le respect des conditions édictées. Nous croyons donc essentiel de
prévoir qu'une procédure d'arbitrage devra obligatoirement faire partie
intégrante du règlement. De plus, malgré l'application du règlement, nous
sommes d'avis que les parties devraient toujours être en mesure de convenir
d'une entente collective entre elles.
• (17 h 30) •
Le devoir de juste représentation. La
rédaction actuelle de l'article 24.2 ne tient pas compte des spécificités des
relations de travail dans le domaine culturel et ne fait qu'alourdir le fardeau
des associations d'artistes. Le devoir de représentation est le corollaire du
monopole de représentation qu'ont les syndicats envers les salariés qu'ils
représentent. Or, la loi ne confère pas aux associations d'artistes le même
monopole. Contrairement à ce qui est applicable en droit du travail selon la
formule Rand, des cotisations syndicales ne sont pas retenues sur l'ensemble
des rémunérations reçues par les artistes, mais seulement lorsqu'une entente
collective couvre leur prestation de service. L'ARRQ reconnaît le bien-fondé du
devoir de juste représentation, mais suggère de limiter la portée seulement
lorsqu'il y a une entente collective qui s'applique.
Le financement conditionnel et la
reddition de comptes. Les conditions socioéconomiques précaires des artistes,
depuis toujours préoccupantes, ont été exacerbées par la pandémie. Des données
recueillies en 2013 par les associations d'artistes démontraient que près de
50 % des productions subventionnées par les institutions gouvernementales
n'avaient pas déposé de contrat auprès des associations d'artistes. Rien ne
nous laisse croire aujourd'hui que cette situation est différente. Cela crée
des injustices flagrantes tant chez les artistes que chez les producteurs. Nous
proposons que l'aide gouvernementale soit conditionnelle à l'obligation
d'appliquer des conditions de travail minimales découlant d'ententes
collectives et également une reddition de comptes. L'application de cette
solution ne nécessite aucun coût et pourrait faire une énorme différence pour
assurer des conditions décentes et un filet social à la presque majorité des
artistes.
Certaines dispositions applicables en
matière de santé et sécurité au travail. Afin que les artistes bénéficient des
mêmes protections que les salariés au Québec, l'ARRQ estime que les
dispositions encadrant le droit de refus de travailler lorsqu'il y a danger ou
encore le retrait préventif de la femme enceinte devraient être incorporées au
projet de loi.
Nous vous remercions de votre intérêt et
nous sommes disposés à répondre...
17 h 30 (version non révisée)
Une voix : ...à vos
Questions. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Alors, merci pour vos exposés. Nous allons commencer la période d'échange
avec Mme la ministre.
Mme Roy : Merci. Merci à
vous, à distance, merci à vous tous d'être ici. Merci pour vos deux mémoires.
Je suis très contente de vous voir en personne, ça fait du bien. Vous avez
travaillé fort et là on peut... on recueille les fruits de votre réflexion sur
ce projet de loi pour lequel... De notre côté, on a tenté de colmater le plus
de brèches qui sont apparues au fil des années et puis de donner à vos
associations, aux syndicats le plus d'outils possibles et, également, aux
parties patronales pour régler des différends, pour avancer dans leurs
négociations, puis pour permettre de la négociation pour ouvrir davantage.
Vous saluiez le fait, tout à l'heure,
madame Cadieux, que nos artistes de la deuxième loi entrent maintenant dans la
première. Alors, on parle ici de nos artistes en littérature et ça me fait
chaud au cœur que vous le souligniez parce que je pense que c'est important qu'il
n'y ait plus deux catégories d'artistes, mais bien une seule, au Québec, je
crois qu'on est rendus là.
Vous disiez quelque chose, puis là, je
vais juste me permettre une petite précision, une petite information. Vous
parliez de l'argent, j'ai trouvé ça intéressant : «Investir plus
judicieusement l'argent public en culture», ce que vous avez mentionné à votre
point numéro un dans la mémoire de la SARTEC. Je voulais juste vous mettre au
courant qu'à cet égard-là - parce que, là, on parle pour les auteurs, là,
naturellement, là - que j'ai commandé à la SODEC, qui est une de ces sociétés d'État
sous ma responsabilité, de créer un programme pour nous assurer que les œuvres
audiovisuelles issues de la littérature québécoise, bien, soient soutenues; j'ai
vraiment spécifié ici la littérature québécoise, ce qui fait qu'on aura plus de
productions audiovisuelles qui parlent de nos romans, de nos histoires. Alors, je
veux juste souligner qu'un des privilèges d'être ministre de la Culture c'est
aussi de demander des programmes spécifiques pour voir dans quelle mesure on
peut soutenir davantage notre milieu et nous assurer que les œuvres québécoises
brillent. Alors, je voulais... C'est juste une petite parenthèse, là. Mais je
comprends ce que vous disiez, ce que vous disiez va plus loin que ça.
Et puis on y travaille, je tiens à tous
vous le dire, là, on y travaille. Puis on l'a vu - puis quelqu'un l'a mentionné
ce matin dans les audiences... Oui, ce matin - à l'égard de l'argent qui doit
ruisseler, puis nous assurer que le donneur d'ouvrage paie ses artistes. Ça, c'est
une... À la suite d'une discussion que j'ai eue durant la pandémie, entre
autres, avec madame Prégent, de l'UDA, qui nous disait qu'il faut que l'argent
ruisselle. Au CALQ, on l'a mis dans les programmes pour nous assurer que la
mesure à la billetterie, par exemple... Bien, pour nous assurer qu'avant que le
producteur ait tout l'argent qu'il réclame en fonction du programme auquel il a
droit à des subventions, de faire la démonstration que les artistes, les
artisans sont payés. Alors, je pense qu'on s'en va vers cette façon d'agir,
vers cette réflexion dans nos programmes. Alors, ce n'est pas parce que ce n'est
pas nécessairement dans le projet de loi là qu'on n'agit pas. Il y a... et je
le disais à tous les groupes auxquels j'ai parlé durant l'hiver, c'est qu'on a
des solutions qui ne seront pas nécessairement dans la loi, mais qui vont nous
permettre d'avancer puis d'atteindre le même objectif.
Maintenant, pour ce qui est des demandes
spécifiques que vous nous faites, là, il y en a qui sont intéressantes. Vous
soulevez ici des petites coquilles aussi de rédaction. On n'en a pas parlé,
mais le fait qu'on parle d'artistes ou artistes professionnels, des fois,
professionnels, des fois, pas professionnels, ça, je pense qu'on va corriger
ça, là, pour avoir la même terminologie d'un bout à l'autre du projet de loi.
Je pense que ce n'est pas une problématique, là, c'est plutôt une coquille de
notre part.
Vous, cependant, avez des... À peu près, et
c'est ça qui est fascinant, les mêmes demandes ou modifications que les autres
groupes, entre autres, que l'UDA à l'égard, entre autres, du devoir de juste
représentation. Puis on se l'est fait expliquer aussi. J'ai posé la question
aux groupes, précédemment, entre autres, la Guilde canadienne des réalisateurs
puis l'Alliance québécoise des techniciennes, des techniciens... Bien, on va le
dire, là, l'AQTIS, ça va plus vite, et j'ai posé la question à l'égard de ce
devoir de juste représentation. Vous nous dites, dans le mémoire... C'est l'article 15
du projet de loi, mais qui porte le numéro 24.2, en tout cas, il y a bien
des numéros, là, mais on parle du 15 du projet de loi ici. Et ils nous ont dit,
les groupes précédents, qu'en quelque part de la façon dont c'est libellé, ça
ne faisait qu'alourdir le fardeau des associations. Et c'est à ça que ça sert,
les audiences puis j'aimerais vous entendre parler de ce devoir de juste
représentation parce que vous nous dites : oui, c'est un article qui est
important puis vous avez compris que c'était un calque de ce qui existe déjà
dans la...
Mme Roy : ...loi sur les
normes. Alors, on est là pour ajuster, donc dans quelle mesure il faudrait
l'ajuster pour vous puis pourquoi c'est important de l'ajuster?
Mme Cyr (Mylène) : Oui, bien,
je peux y aller. Oui, alors juste représentation, effectivement, et d'emblée,
je vous ai dit qu'une préoccupation majeure, pour nous, c'était en fait
justement le fardeau qui n'était pas équitable au niveau des associations
d'artistes, versus les associations de producteurs. Je vous ai aussi dit la
peine qu'on a eue à avoir des ententes collectives dans notre secteur. Donc, il
y a beaucoup de secteurs qui ne sont pas couverts par des ententes collectives.
Et je vous ai aussi parlé des durées de négociations, dont une qui a duré 15
ans, cinq ans, etc. Donc, vous avez compris qu'on n'a pas les ressources
nécessaires pour arriver à couvrir tous ces gens avec des ententes collectives.
Donc, c'est sûr que, pour nous, tel que
libellé, ça fait en sorte que l'association d'artistes a le devoir de défendre
un artiste qui négocierait un contrat avec un producteur qui n'est pas sous
entente collective, alors... Et là je pense que, d'ailleurs, la... vous en a
donné un exemple concret, où elle a dit : Bien, on nous demande de faire
un grief, mais il n'y a pas de grief applicable parce qu'il n'y a pas d'entente
collective. Donc, on est soumis à aller devant les tribunaux de juridiction
commune. Donc, dans ce sens-là, je pense que vous l'avez souligné.
En fait, vous avez entendu nos collègues
ce matin, cet après-midi, vous dire qu'il faudrait, en fait... Oui, on a aussi
souligné que c'était un calque qui venait du Code du travail et qu'il faut donc
l'adapter à notre réalité. Et notre réalité, c'est qu'on travaille avec... on
est capable de faire cette juste représentation lorsque les artistes sont sous
entente collective. Et donc oui... Et d'ailleurs on est tout à fait pour la
juste représentation. Bien sûr, ça fait partie des devoirs des syndicats. Mais
je pense que, si on faisait cet amendement à l'article 24.2 de façon à ce que
ça soit seulement dans les cas où il y a des ententes collectives applicables,
je pense que ça répondrait tout à fait à l'objectif.
Mme Roy : Parfait. Si on y va
très concrètement l'adoption du projet de loi n° 35 changerait concrètement
quoi dans la vie de vos membres?
Alors, écoutez, je pense que, de façon
générale, vous avez compris qu'on accueille favorablement le projet de loi
parce qu'il y a des avancées importantes là-dedans. Alors, je vous dirais que
c'est à deux niveaux, donc : qu'est-ce que ça changerait pour nos artistes
et pour nous, les associations. Donc, pour les artistes, donc, vous avez
intégré les dispositions sur le harcèlement, et ça, on s'entend que,
dorénavant, donc, un artiste qui n'est pas sous entente collective est
maintenant couvert par ces dispositions. Alors, ça, ça fait une énorme
différence.
• (17 h 40) •
Par rapport aux associations d'artistes,
bien que, dans certaines ententes collectives, on avait déjà adopté des
dispositions par rapport au harcèlement, une politique contre le harcèlement,
bien sûr, chaque fois que nous devons négocier une nouvelle entente, on doit
renégocier cette partie-là. Donc, c'est sûr que, pour nous, chaque fois que des
dispositions s'appliquent d'emblée, ça allège notre fardeau, et on a moins de
temps passer en négociation, et on peut arriver à une entente plus vite. Donc,
c'est sûr, la même chose au niveau, donc, au pouvoir... tribunal du travail,
c'est la même chose. Donc, on va être devant un tribunal, donc au niveau des
associations d'artistes, un tribunal spécialisé qui pourra entendre, en fait,
toutes les causes qui découlent des obligations de la loi plutôt que de se
retrouver, sur certaines parties, devant le TAT, et d'autres devant les
tribunaux de droit commun. Alors, je pense que c'est... Dans ce sens-là, c'est
une grande avancée qui va faciliter la vie des associations et, par ricochet,
la vie de nos artistes, puisqu'ils auront des ententes collectives plus
rapidement.
M. Pelletier (Gabriel) : Si
je peux ajouter, en fonde beaucoup d'espoir dans le 68.6, c'est-à-dire qu'on
aurait aimé une reconnaissance des associations de producteurs. Mais, pour
nous, on l'a mentionné, on est une relativement petite association dans le
domaine de l'audiovisuel, le fait qu'on puisse représenter des membres,
actuellement, qui ne sont pas sous entente collective, c'est une énorme
avancée. On a des membres qui peuvent travailler, par exemple, en télévision et
qui sont donc couverts par une entente collective, avec les protections que ça
amène. Mais quand ils travaillent...
M. Pelletier (Gabriel) : ...qui
travaillent sur le Web, par exemple, jusqu'à dernièrement, il n'y avait pas
d'entente collective, et à ce moment-là, le temps qu'ils consacraient là et les
efforts, ils n'avaient pas de protection telle que des assurances collectives,
telle qu'un REER, et donc ils n'avaient pas ces protections-là. Concrètement,
donc pour eux 68.6, et ça, dépendamment des modalités que vous allez amener, et
c'est pour ça que ça nous intéresse de savoir comment fonctionnerait ce
processus-là, mais c'est une capacité d'aller chercher des domaines où est ce
qu'on n'a pas d'entente collective encore, et ça existe en publicité, par
exemple, en corporatif jusqu'à dernièrement, donc dans les productions
numériques.
Mme Roy : Merci. Votre
réponse claire. J'aimerais vous entendre parler des dispositions maintenant
relativement à l'arbitrage de griefs, parce qu'ici le but était recherché,
c'était de simplifier la vie et de vos membres et de tout le monde finalement,
de toutes les parties impliquées, parce que je pense que c'est... c'est l'objectif
de ce projet de loi là améliorer les conditions puis aussi simplifier la vie de
tout le monde. Alors, je voulais vous entendre à l'égard des dispositions sur
l'arbitrage de griefs.
M. Pelletier (Gabriel) : Bien,
ça découle un peu de ce que je disais, c'est-à-dire que, quand on a des
négociations, disons, de mauvaise foi ou, en tout cas, qu'il y a énormément de
résistances qui durent quinze ans, de pouvoir se fier à l'arbitrage, c'est déjà
une façon d'accélérer le processus. C'est de justement de ramener les parties
pour qu'il y ait une négociation de bonne foi. Veux-tu ajouter?
Mme Roy : Et on ajoute
aussi, dans le projet de loi, ces articles de la Loi sur les normes concernant
la négociation de bonne foi. Alors là, on l'inclut, là. Donc on souhaite que
les gens s'assoient ensemble et discutent pour arriver à des ententes.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Mme la ministre, je ne sais pas si
Mme Cadieux voudrait intervenir.
Mme Roy : Oui.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : On l'oublie peut-être. Mme Cadieux, je ne
sais pas si, des fois, vous aviez...
Mme Cadieux (Chantal) : Non,
non, ça va.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Ça va.
Mme Cadieux (Chantal) : Non,
non, j'approuve, là, je suis comme ça.
Des voix : ...
Mme Cadieux (Chantal) : Vous
êtes vraiment intéressante. Écoute, Gabriel parle, on dirait qu'il parle en mon
nom. Là, je blague. Mais Me Hénault pourra parler peut-être à ce moment-là,
plus précisément, là. Allez.
Mme Hénault (Stéphanie) : Je
suis d'accord avec mes... on est d'accord avec nos collègues de l'ARRQ,
Mme Roy : C'est bien.
Merci. Je regarde vos mémoires, mais je constate aussi que plusieurs des
recommandations que vous formulez, puis je pense... je parle du mémoire de la
SARTEC, entre autres, ressemble beaucoup, beaucoup au mémoire de l'UDA, entre
autres. Je pense qu'il y a ici une communion d'idées. Et comme je vous disais,
entre autres, à votre... là, je pense, je parle à la SARTEC, votre
recommandation 6 : Ajuster le libellé, la définition de l'artiste
artiste, artiste professionnel. Je pense qu'ensemble on va être capable
d'ajuster ça compte tenu du fait que c'est... que ce sont deux lois, comme vous
avez compris, que nous avons amalgamées. Nous avons pris le meilleur de chacune
pour... et nous avons ajouté plusieurs dispositions. Donc, on va le corriger
facilement. Donc, tout de suite, vous pouvez dire que c'est... déjà, il y a des
choses qui vont se régler facilement, qu'on pourra ajouter.
C'est précis. En fait, ce que vous dites
est très précis, et ça correspond à ce qu'on a entendu depuis... depuis ce
matin. Juste vérifier mes notes.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Mme la ministre, il vous reste
2 min 30 s, est-ce que vous voulez laisser la parole au député
de Saint-Jean ou...
M. Lemieux : Si la
ministre a d'autres questions, je la laisser aller, là.
Mme Roy : Bien, je ne
veux pas être redondante. Alors, vous avez sûrement une idée différente, une
façon différente de l'amener.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, en 2 min 15 s.
M. Lemieux : Merci, Mme
la Présidente. J'espère ne pas vous décevoir, Mme la ministre. Bonjour,
messieurs, dames.
Une voix : Bonjour.
M. Lemieux : Il y a par
rapport... D'abord félicitations, vous avez dû jaser beaucoup, beaucoup,
beaucoup dans l'industrie parce que vous êtes arrivé avec des choses qui se
ressemblent, en fait qui sont pareilles. Ça nous force à bien comprendre où
vous allez. Mais ne serait-ce que pour ça, je pense qu'on a gagné parce qu'il y
a une certaine unicité de pensée, là-dedans, là, par rapport au 68.6. Je suis
curieux parce que ça revient tout le temps. Comment vous voyez la négo
maintenant qu'il y aura cette possibilité de décréter des conditions minimums?
Forcément, c'est comme un levier si vous le demandez si vous l'obtenez. Mais la
négo, elle, considérant ce nouveau, ce nouvel outil là, vous la voyez comment?
J'ai posé la question plus tôt, puis aux auteurs qui disaient...
M. Lemieux : Ah mon Dieu!
Ça va être la belle vie, bon, mais dans la vraie vie, là?
M. Pelletier (Gabriel) : En
fait, ça n'affecte pas tant la négo que d'aller chercher des secteurs où il n'y
en a un pas encore, c'est-à-dire que, pour une petite association comme nous,
d'aller chercher individuellement chacun des producteurs, c'est beaucoup trop
lourd.
M. Lemieux : ...pas vous
interrompre, mais je vais le faire parce qu'il me reste juste 30 secondes.
Vous avez dit que ça a pris 15 ans dans un cas, cinq ans dans un autre.
Avec cette loi-là, ça va aller plus vite.
M. Pelletier (Gabriel) : Bien
oui, justement, avec le pouvoir d'un règlement. Alors, c'est très bon.
M. Lemieux : C'est ça je
voulais savoir. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Il vous reste une minute, si vous voulez, là, 50 secondes. Allez-y si
vous avez autre chose à ajouter à la question.
M. Lemieux : Oui, parce
que je vous ai interrompu, désolé.
M. Pelletier (Gabriel) : Bien,
en fait, c'est...
Mme Cyr (Mylène) : Bien,
en fait...
M. Pelletier (Gabriel) : Vas-y,
Mylène.
Mme Cyr (Mylène) : Si
vous permettez. Certainement que ça va changer notre façon de voir la
négociation, parce que j'ai dit que, pendant longtemps, on n'avait eu que deux
parce qu'on est obligés de prioriser compte tenu des ressources limitées qu'on
a. Alors là, on va pouvoir aller dans des secteurs où il y a de multiples
producteurs, où on n'est pas capables d'aller, et même, je vous dirais, dans
des secteurs où on a une entente collective avec une association de
producteurs, mais où il y a d'autres producteurs qui ne sont pas membres de
cette association-là. Alors, ça vient combler une faille importante. Comme le
disait M. Pelletier, pour nous, c'est vraiment important, ce pouvoir
réglementaire. Je pense que, si on l'applique et que ça va de l'avant, ça va
faire une différence pour nous, oui.
M. Lemieux : Merci.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Parfait, merci beaucoup. Nous poursuivons
l'échange avec la députée de l'Acadie.
Mme St-Pierre : Merci,
Mme la Présidente. Merci à nos invités. Merci, Mme Cadieux, pour votre
votre témoignage, qui est fort important puis qui... évidemment, qui concorde
avec ce qu'on a entendu ce matin et au cours de la journée. On revient sur les
mêmes éléments, puis je pense que ça, c'est très, très important, puis la
reddition de comptes est importante aussi. Il faut s'assurer qu'on retrouve,
dans l'argent qui est donné par nos gouvernements, qu'on retrouve une certaine
transparence et une véritable reddition de comptes.
Je voudrais savoir: Les réalisateurs, on
les retrouve où dans la loi initiale? Est-ce qu'ils sont à l'article 1.2?
Moi, je pense que l'article 1.2, ça touche plus les techniciens. Les
réalisateurs... Parce qu'on parle... Ah! les fonctions... Non, «fonctions liées
à la réalisation de montages, d'enchaînements sur les plans sonore et visuel».
Vous vous retrouvez dans l'article 1.2, les réalisateurs. Est-ce que c'est
là que vous êtes?
Mme Cyr (Mylène) : Non,
pas 1.2, En fait, nous on est à 1, là, dans... oui, dans le film. Et c'est
parce qu'ils sont des auteurs, ce sont des créateurs, donc ce sont des
artistes, là.
M. Pelletier (Gabriel) : Ce
ne sont pas des techniciens, mais des artistes.
M. Lemieux : OK. Mais,
quand vous voulez... vous dites que vous voulez, évidemment, puis je le
comprends très bien, là, négocier avec... Vous êtes une petite association,
vous voulez négocier avec des producteurs. Les producteurs peuvent être des
gros géants, là. Puis 68 va protéger, dans une certaine mesure, cette
volonté-là d'arriver à quelque chose, à une entente. Mais, dans un premier
temps, vous allez devoir faire une tentative de négociation.
Une voix : Absolument.
Mme St-Pierre : Qui vont
être... ou qui va être votre vis-à-vis? Vous allez commencer par qui?
• (17 h 50) •
Mme Cyr (Mylène) : Ça
sera une question de... comme je disais tantôt, de priorisation, je... En fait,
ce qu'on comprend, c'est que cette demande pourra être adressée au ministre, en
fait, pour couvrir un secteur, et il y aura des consultations. Et ce qu'on
comprend, c'est qu'il n'y a pas nécessairement de négociation dès le départ.
Cette demande pourra être faite, selon ce qu'on en comprend, dans des secteurs
où il y a une multitude de producteurs. Alors, avec la consultation, ce qu'on
nous a expliqué, c'est qu'il y aura, à ce moment-là, du côté du ministère, des
consultations qui seront faites, évidemment, au niveau de l'association
d'artistes qui dépose la demande et du secteur, en fait, des producteurs qui
seront visés par le règlement. Alors, je pense que c'est ça, l'idée ici.
Mme St-Pierre : Mais là
vous parlez du règlement, mais, avant l'étape du règlement, il faut qu'il y ait
une certaine tentative de faite. Est-ce que c'est... vous...
M. Pelletier (Gabriel) : Il
faut qu'il y ait une association qui existe. Et donc c'est sûr que, d'abord,
la... Pour nous, on priorise des représentants d'associations de producteurs,
mais, dans certains cas, il y a des producteurs qui ne sont pas membres
d'associations, et c'est là qu'il faut aller...
M. Pelletier (Gabriel) : ...aller
les chercher. Et même certains secteurs... Tu sais, je parlais du numérique
tantôt. Ce secteur-là n'était pas organisé au départ, et il y a donc des compagnies
de production qui se sont créées et qui n'avaient pas, donc, de... Il n'y avait
pas d'entente, il n'y avait pas de standard, même au niveau du financement, on
était... on partait de zéro finalement. Et donc il faut qu'il y ait une
certaine structure pour qu'on puisse négocier.
Mme St-Pierre : Mais la
structure, vous comptez sur le ministère pour vous...
Mme Cyr (Mylène) : En
fait, ce qu'on nous a expliqué, c'est que...
Mme St-Pierre : Qui ça
«on nous a expliqué»?
Mme Cyr (Mylène) : Ce
qu'on comprend de 68.6, en fait, c'est que notre demande de règlement devrait
viser, par exemple, des producteurs dans tel secteur qui ne sont pas membres.
Dans notre secteur à nous, nous avons une entente avec l'AQPM, mais le
règlement pourrait, à ce moment-là, prévoir des conditions minimales dans ce
secteur pour les producteurs non membres de l'AQPM parce que ça répond à ce
besoin où est-ce qu'on est totalement dans l'impossibilité d'envoyer... Pour
toutes les raisons que vous avez entendues aujourd'hui, particulièrement dans
le secteur de l'audiovisuel, on n'est pas en mesure d'envoyer des avis à tous
ces producteurs de façon individuelle, on n'a pas les ressources.
Et deuxièmement, particulièrement en
audiovisuel, ce sont des structures, donc, légales, qui naissent souvent le
temps d'une production. Donc, envoyer un avis de négociation, c'est
physiquement impossible d'arriver à finir la négociation avant la fin de la
production. Donc, vous avez entendu plusieurs associations faire état du fait
qu'ils obtiennent une sentence arbitrale puis que c'est impossible, en fait, de
passer à l'exécution parce que cette coquille est vide ou n'existe plus.
Donc, je pense que ça peut être une façon,
en fait, d'aller chercher des producteurs d'un secteur, mais qui ne sont pas
membres, par exemple, d'une association de producteurs.
Mme St-Pierre : Oui.
Peut-être qu'on comprend mal la procédure, mais, moi, dans mon esprit, ce que
je comprends, c'est que, dans un premier temps - puis je l'ai dit tantôt - dans
un premier temps, vous avez comme une... la loi vous donne la poignée pour
aller voir des producteurs. Mais si vous avez 30 producteurs à voir, qui
sont des producteurs qui ne sont pas au sein d'une association, ça va être gros
pour votre association à vous, parce que vous l'avez dit vous-même, vous l'avez
dit à quelques reprises, vous êtes une petite association.
Mme Cyr (Mylène) : Oui,
tout à fait.
Mme St-Pierre : C'est là
que je ne vois pas comment il va y avoir une certaine rapidité pour y arriver.
Mme Cyr (Mylène) : Bien,
en fait, moi, je comprends ça un peu comme la Loi sur les décrets de convention
collective finalement où on a une entente collective qui est élargie à un
secteur. Alors, je pense que l'idée en arrière de ça, c'est un peu la même
chose, c'est d'être capable... parce que sinon ce n'est pas possible, et on...
Mme St-Pierre : Donc,
c'est le règlement qui va faire le job.
Mme Cyr (Mylène) : Oui,
qui va édicter les conditions minimales.
Mme St-Pierre : Donc,
dans votre esprit, vous ne faites pas la... vous ne vous dites pas : On va
faire la démarche en premier, puis, si ça accroche puis ça ne bouge pas, là on
va demander au gouvernement d'intervenir. Autrement dit, vous demandez au
gouvernement d'intervenir, dès l'adoption du projet de loi...
Mme Cyr (Mylène) : Oui.
Mme St-Pierre : ...pour
régler un secteur, certains secteurs qui seraient peut-être des secteurs un
peu... bien, enfin, il y en a beaucoup, là.
Mme Cyr (Mylène) : Oui.
Mme
St-Pierre
:
Mais ça, on ne l'avait pas... Je vous avoue que, moi, je ne l'avais pas
compris comme ça, puis c'est important, là, cette précision-là que vous faites.
Parce que, moi, je n'avais pas compris comme ça, j'avais compris que... Puis on
n'a pas aussi, dans 68, «à la demande de».
Donc, dès que la loi va être adoptée, vous
allez demander au ministère de réglementer. C'est ça?
Mme Cyr (Mylène) : On
pourrait le faire. On pourrait le faire?
M. Pelletier (Gabriel) : Oui.
Mme St-Pierre : O.K.
M. Pelletier (Gabriel) : Et
il y a quand même des normes, certaines normes établies, c'est-à-dire que dans
un secteur où est-ce qu'on a déjà des ententes, par exemple avec l'AQPM, il y a
quand même des normes minimales qui ont déjà été négociées.
Alors, on peut demander un règlement pour
des producteurs qui ne seraient pas membres de l'AQPM.
Mme Cyr (Mylène) : Tout
à fait.
M. Pelletier (Gabriel) : Donc,
il y a des... Et c'est ce qu'on fait, je veux dire, on documente des conditions
de travail aussi. Même dans un secteur où il n'y a pas d'entente collective, on
est capables d'aller voir aussi, auprès de nos membres, les contrats qui sont
signés et certaines normes, donc, des contrats de travail qui sont existants.
Il y a quand même une documentation des contrats de travail qui existe, et on
peut se baser, donc, sur ces normes-là pour appliquer, donc, un règlement, là,
faire une demande de règlement.
Mme St-Pierre : Je fais
un peu un parallèle avec l'UNEQ ce matin. Parce que l'UNEQ vis-à-vis l'ANEL -
l'ANEL représente plein d'éditeurs - l'ANEL ne se voit pas manifestement comme
étant...
Mme St-Pierre : ...la partie
en face, là. Ça veut dire que l'UNEQ pourrait faire la même chose, dire au
gouvernement : Passons immédiatement à l'étape du règlement, sans essayer
de faire des négociations.
M. Pelletier (Gabriel) : Bien,
il y a déjà, quand même, une association qui existe. L'ANEL est là, et donc ils
peuvent, oui, entamer des négociations avec l'ANEL. Et après, si là ça achoppe,
là, c'est autre chose, là, mais...
Mme St-Pierre : Mais, vous,
de votre côté, en face, vous en avez qui ne sont pas membres d'une association.
M. Pelletier (Gabriel) : Exactement.
Mme St-Pierre : Mais c'est la
même chose chez les éditeurs.
M. Pelletier (Gabriel) : C'est
ça.
Mme St-Pierre : Ils ne sont
pas tous de l'ANEL.
M. Pelletier (Gabriel) : Ils
ne sont pas tous membres. Mais c'est, en fait, de trouver des intervenants
crédibles, dans un premier temps, puis d'établir des normes. Je veux dire, pour
nous, on négocie avec l'AQPM prioritairement. On considère que c'est des bons
citoyens corporatifs, si vous voulez. Et on négocie des normes considérées
minimales. Alors, ce qu'on irait chercher avec un règlement, c'est d'étendre ces
normes minimales là chez des producteurs qui ne sont pas membres.
Mme Cyr (Mylène) : 68.6, moi,
je le vois vraiment comme un levier supplémentaire.
Mme St-Pierre : Est-ce qu'il
faut absolument mettre le mot «à la demande»?
M. Pelletier (Gabriel) : Bien,
oui, ça devrait être à la demande des associations d'artistes.
Mme St-Pierre : Il faut qu'il
y ait cet amendement-là. Ça, vous le demandez. Vous n'êtes pas les premiers à
le demander, là, mais il faut absolument que ça se retrouve là.
M. Pelletier (Gabriel) : Tout
à fait, oui. Et on le fait en coeur avec certains autres de nos collègues que
vous avez entendus.
Mme St-Pierre : Ça, ça veut
dire que, si ce n'est pas là, ce changement-là, il y a comme un flou
artistique.
M. Pelletier (Gabriel) : C'est
certain que, là, il y a un flou. Tu sais, on discute, entre nous, déjà, des
modalités puis de ce qu'on comprend et on l'interprète comme on le comprend.
Mais effectivement il y a un flou à combler, c'est-à-dire au niveau des modalités
puis de comment ce processus-là s'entamerait et de l'obligation d'arriver au
bout du processus.
Mme St-Pierre : Parfait.
Bien, moi, je n'ai pas d'autre question, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.
Merci. Alors, nous allons poursuivre avec la députée de Taschereau.
Mme Dorion : Merci. Je n'ai
pas beaucoup de temps, ça fait que je vais y aller vraiment vite. On a...
La Présidente (Mme IsaBelle) : Vous
avez plus de temps parce qu'effectivement elle peut vous donner... elle vous
donne une minute, et on peut prendre quelques minutes de votre collègue.
Mme Dorion : Ça fait plus
33 % de temps. C'est ça, là, on discute beaucoup, depuis ce matin, de
cette fameuse... de ce règlement que la ministre pourrait faire pour
réglementer, effectivement, toutes ces espèces de zones où il y a une pléthore
de producteurs différents. C'est impossible, pour les associations, d'y aller
comme ça. Puis... Donc là, on se demande quel processus devrait, tu sais...
Parce que, bon, «à la demande des associations d'artistes», ça, on est avec
vous. Après, comment ça se fait? Tu sais, est-ce que c'est comme un arbitrage?
Est-ce que c'est... Tu sais, dans votre monde idéal, ce serait comment?
Puis une question un petit peu plus
précise, sous-question : Est-ce que c'est... On pourrait dire : Bon,
bien, allons-y avec tous les producteurs qui ne sont pas dans les ententes
collectives déjà, donc comme le sac final pour tous ceux qui ne rentrent pas
dans les ententes collectives. Où est-ce que vous aimeriez y aller mieux comme
avec tel type, tel type, tel type puis vous-mêmes les diviser en sorte de
producteurs?
M. Pelletier (Gabriel) : Bien,
c'est certain que nos ententes sont divisées par type. Je veux dire, en
réalisation, nous, on représente autant de la fiction, du documentaire, du
magazine, etc. Et donc, oui, il faut s'adresser à certains sites de production,
là. Donc, ça ne peut pas être...
• (18 heures) •
Mme Dorion : Tout ce qui
reste, O.K. Ça serait par type. Puis c'est ça, est-ce que ça serait... Un
processus qui vous paraîtrait bien, là, ce serait quoi?
Mme Cyr (Mylène) : Bien, on
est d'accord avec une consultation. Je pense que, dans la demande, je pense
que, ce qu'on va faire, c'est qu'on va, en fait, indiquer qui est visé et
quelles sont, en fait, les conditions qu'on aimerait voir appliquer. Et donc je
pense qu'à partir de là, effectivement, il y aura... il pourra y avoir des
consultations et voir dans quelle mesure c'est applicable. Puis comme je disais
tantôt, l'exemple du secteur où on a déjà une entente collective puis qu'on
veut aller chercher les producteurs de ce secteur qui ne sont pas membres et
qui ne sont pas liés par cette entente collective, donc c'est une façon de le
faire. Et donc, la consultation, à ce moment-là, il y a déjà quelque chose qui
s'applique dans le secteur. Donc, pour nous, ça devrait s'appliquer, là,
facilement au reste du secteur.
Et puis, je pense que le plus de latitude
on peut avoir, plus ça va être facilitant pour nous, c'est-à-dire qu'on puisse
agir par...
18 h (version non révisée)
Mme Cyr (Mylène) : ...secteur,
qu'on puisse agir par tous les non-membres. C'est ce qui va nous aider. Et c'était
vraiment à la base de nos demandes à nous. Je pense que le plaidoyer qu'on a
fait pendant toutes ces années-là, c'est de dire : Écoutez, il faut nous
donner des outils pour qu'on arrive à faire ce pour quoi on a été créé, et c'est-à-dire
négocier des ententes collectives. Et c'est... quand on regarde ça après 30 ans,
c'est trop peu d'ententes collectives et trop peu d'artistes. Moi, je vous ai
parlé des 50 % des productions subventionnées qui n'avaient pas déposé. C'est
énorme et c'est de l'argent public. Et c'est en 2013 qu'on a fait cet examen
exhaustif. Et je vous dirais que quand on a préparé le mémoire, on est allés
dans nos données internes. Et il n'y a rien qui me laisse sous-entendre que
cette situation-là s'est améliorée avec le temps. C'est moins de 50 % de
nos membres qui ont accès aux REER et aux assurances collectives.
Mme Dorion : Donc, ça
serait dans l'idéal, par exemple, une des associations d'artistes reconnues
fait une demande de règlement, puis la ministre serait liée. Donc, ça ne serait
pas genre «on va regarder ça», ça serait presque la loi... obligerait
finalement.
M. Pelletier (Gabriel) : Ou
une obligation que le processus arrive à terme, à un moment donné.
Mme Dorion : O.K., dans
un certain délai.
M. Pelletier (Gabriel) : Oui.
Mme Hénault (Stéphanie) : Si
je peux compléter. La SARTEC, il arrive que notre interlocuteur, l'association de
producteurs refuse de négocier pour certains types de productions. Donc, on se
retrouve sans interlocuteur. Alors, c'est certainement un mécanisme, cette
disposition-là de la loi, qu'on pourrait utiliser, par exemple, pour négocier
dans un secteur où on n'a pas pu négocier avec notre interlocuteur.
Mme Dorion : Parfait.
Très intéressant.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Intéressant. Merci. Alors, merci, Mme Cadieux, Mme Hénault, M. Pelletier
et Mme Cyr pour votre contribution à l'avancement des travaux de la
commission. Merci beaucoup d'être venus.
Une voix : Merci à vous.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 18 h 4)
(Reprise à 18 h 13)
La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors,
pour notre dernier bloc de la journée, nous avons deux groupes, deux
associations : l'Association québécoise de l'industrie du disque, du
spectacle et de la vidéo, ainsi que l'Association québécoise de la production
médiatique. Nous commençons donc par la première association avec Mme Bouchard.
Je vous invite à vous présenter et ensuite commencer votre exposé pour cinq
minutes.
Mme Bouchard (Lyette) : Merci.
Alors, je suis Lyette Bouchard, directrice générale adjointe de l'ADISQ, et je
suis accompagnée de ma collègue Me Stéphanie... Sophie...
Mme Hébert (Sophie) : Un
relan du passé.
Mme Bouchard (Lyette) : Un
relan du passé. Sophie Hubert, Directrice des relations de travail, donc,
à l'ADISQ, avec moi. Mme la ministre, Mmes et MM. députés, nous vous remercions
de l'invitation qui nous est faite aujourd'hui de participer aux travaux de
cette commission.
Notre association, qui représente non
moins de 150 entrepreneurs de la musique du Québec, a pour mission de protéger,
de faire grandir et d'outiller les entreprises de la musique d'ici pour qu'elle
rayonne au Québec et au-delà de nos frontières. La mission d'outiller et de
professionnaliser notre secteur passe notamment par l'éducation des producteurs
et des artistes au régime de relations de travail découlant de la Loi sur le
statut de l'artiste. Nos membres producteurs connaissent ce régime et sont
tenus d'appliquer, depuis plus de 30 ans, des conventions collectives
négociées par l'ADISQ pour la production de spectacles, d'enregistrements
sonores, de vidéoclips et de captations de spectacles. La loi, mieux connue
sous le vocable de loi 32.1, a eu ses effets dans notre secteur, en ce
sens que des ententes collectives ont été négociées et le sont encore. Par
contre, les chamboulements importants connus par l'industrie de la musique,
dans les deux dernières décennies, auront notamment eu comme conséquence le
développement de modèles d'affaires se distinguant du modèle de production
traditionnel. Le phénomène de l'autoproduction a connu un essor important de
façon encore plus marquée dans la production d'enregistrements sonores. Nous
constatons toutefois que cette autoproduction se fait en grande partie en marge
de la Loi sur le statut de l'artiste, créant ainsi un déséquilibre entre les
producteurs membres de l'ADISQ qui appliquent des ententes collectives, et tout
l'administratif qui en découle, et les autoproducteurs non membres de l'ADISQ
qui ne sont soumis à aucun régime.
Encore une fois, je le répète, l'ADISQ est
pour la professionnalisation du secteur de la musique et la mise en place d'un
meilleur filet social pour ses artistes et artisans. Et en ce sens, l'ADISQ est
d'avis que la Loi sur le statut de l'artiste devrait s'appliquer à toutes les
productions musicales professionnelles. Nous croyons d'ailleurs comprendre que
cela aurait... que cela pourrait aussi être un des objectifs visés par le
nouvel article 68.6 proposé par le projet de loi. Nous sommes toutefois
d'avis que d'importantes précisions quant au cadre d'application de cet article
devraient être apportées à même la loi, comme nous le précisons dans notre
mémoire.
À noter que nous abordons dans notre
mémoire quatre autres sujets à l'égard desquels nous soulevons certaines
préoccupations, à savoir le pouvoir de réglementation de l'article 68.5,
qui nous apparaît trop large et non avenu... En troisième lieu, donc, la
définition d'artiste de l'artiste 1.1, qui, dans sa mouture actuelle,
laisse place à une ambiguïté qu'il serait important de dissiper dès maintenant
pour éviter des débats absolument non nécessaires. Mais je comprends, Mme la
ministre, vous avez indiqué tout à l'heure que, déjà, c'est noté, et qu'il y
aurait des modifications.
Quatrième point, la représentativité d'une
association au sens de l'article 9 à l'égard de laquelle le critère du
plus grand nombre représenté nous apparaît beaucoup trop vague. Finalement, en
ce qui concerne... ce qui nous semble être l'introduction de
l'article 24.1, le pouvoir de représentation individuel des associations,
par opposition à leur pouvoir de représentation collective, nous apparaît donc
un élément important. Et nous le soulevons dans le mémoire.
Il nous fera évidemment plaisir de
répondre à vos questions sur ces cinq préoccupations que nous avons soulevées
dans notre mémoire durant la période d'échange qui suivra. Nous avons
d'ailleurs soumis des pistes de solution dans notre mémoire, qui se veulent
pragmatiques et qui, selon nous, répondront aux besoins et intérêts de la
majorité des parties prenantes. Cela étant dit, les discussions entourant le
projet de loi n° 35 s'inscrivent dans une grande réflexion collective sur
l'état de notre industrie de la musique et de ses acteurs. Les besoins sont
criants, et c'est encore plus vrai en cette période pandémique et
postpandémique. L'état d'urgence en musique, il est encore bien présent.
Pénurie de main-d'oeuvre...
Mme Bouchard (Lyette) : ...de
santé psychologique plus précaire que jamais, revenu instable et fragile, et
tout cela pour tous les acteurs de la chaîne industrielle. Mais on persiste et
signe, notre musique, elle est belle. Notre musique, nous en sommes fiers.
Notre musique, c'est notre identité et on ne doit pas la laisser tomber. Selon
nous, les discussions entourant la Loi sur le statut de l'artiste devraient
être l'occasion de rallier les forces de tous les partenaires du milieu de la
musique, incluant le gouvernement, bien évidemment, pour bâtir une structure
pérenne de professionnalisation et de protection au bénéfice de tous les
acteurs de la chaîne.
Ensemble, agissons notamment pour des
mesures de financement adéquates, pour un développement professionnel porteur,
pour des droits d'auteur signifiants, pour une fiscalité encore plus efficace,
car quiconque comprend bien le carré de sable d'application de la Loi sur le
statut de l'artiste comprend qu'on ne réglera pas tout par cette loi. Mais
c'est l'occasion ou jamais de poursuivre notre réflexion collective et de
mettre en place des mesures complémentaires à la loi qui sauront appuyer l'ensemble
d'une industrie qui se veut des plus fondamentales pour notre société. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci.
Alors, nous poursuivons avec la deuxième association. Je vous invite à prendre
la parole, mais avant, de bien vous présenter.
Mme Leduc (Geneviève) : Oui,
bonjour. Geneviève Leduc, je suis directrice des relations de travail et des
affaires juridiques à l'AQPM et je suis accompagnée de Me Frédéric Massé, qui
est associé chez BLG.
Alors, l'Association québécoise de la production
médiatique vous remercie de l'invitation dans le cadre des consultations du
projet de loi n° 35. L'AQPM conseille bon an mal an 160 entreprises
de production en audiovisuel dans le domaine cinéma, télévision, Web. Donc,
quand vous regardez la télé, que ce soit émissions jeunesse, documentaire ou
fiction, souvent vous regardez des productions produites par des producteurs
membres de l'AQPM, qui démarre le projet du développement jusqu'à
l'exploitation ultime de l'œuvre. Donc, c'est des gens très passionnés souvent
par leur métier.
L'AQPM, c'est l'association de producteurs
qui a négocié le plus d'ententes collectives depuis l'histoire de l'entrée en
vigueur de la loi. Présentement, on a 17 ententes collectives en vigueur
et on négocie avec sept associations d'artistes reconnus. Nous investissons
énormément de temps et d'énergie quotidiennement pour négocier des conditions
d'engagement pour les artistes... entre les producteurs et les artistes. L'AQPM
est aussi l'association qui a eu peut-être le plus grand nombre de litiges
fondés sur la Loi sur le statut de l'artiste.
En somme, l'AQPM et ses membres sont
l'association qui vit peut-être le plus et compose le plus avec la Loi sur le
statut professionnel des artistes, et ce, depuis des années. Il faut savoir
que, même avant l'adoption de la loi, l'AQPM avant l'autre acronyme, l'APFTQ,
avait négocié déjà des ententes collectives, et ce, avant même l'adoption de la
loi.
Dans le domaine de l'audiovisuel, la loi
fonctionne donc relativement bien. Elle a porté ses fruits. On est donc heureux
de constater que le gouvernement ne propose pas de changements majeurs pour le
domaine de l'audiovisuel. Le projet de loi compose néanmoins quelques
modifications qui préoccupent l'AQPM et on va en identifier trois. Je vous
dirais que certains articles vont être une redite et un terme pour la journée,
mais je commencerais brièvement sur l'article 24.1.
• (18 h 20) •
Le gouvernement semble donner aux
associations d'artistes la prérogative de négocier des contrats individuels
d'engagement. Or, la loi est une loi de rapports collectifs de travail, donc
l'essence même, la mission même des associations d'artistes. Ils négocient avec
des associations de producteurs ou des producteurs des conditions de manière
globale, dans un cadre de rapports collectifs, et non pas comme un agent
d'artistes de manière individuelle. Ça me semble donc un facteur qui peut
compliquer les négociations ou entre la capacité de négocier collectivement,
qui est un minimum d'entente collective, et celui individuellement, qui est
souvent le rôle, comme je disais, soit de l'artiste, le fait seul ou par le
biais d'un agent d'artistes.
Le deuxième article qui nous préoccupe,
c'est l'article 68.5 du projet de loi qui permet au gouvernement
d'intervenir par règlement pour modifier soit les notions ou les définitions
qui pourraient être celles d'artistes ou de producteurs. Je pense qu'un constat
aujourd'hui, c'est des notions sensibles qui sont fondamentales dans
l'application de la Loi sur le statut de l'artiste. Donc, ce qu'on suggère
plutôt, c'est de rayer cet artiste qui et de garder la faculté de faire des
modifications dans le cadre d'une révision subséquente de la loi. Il a été
mentionné que la possibilité que la loi soit révisée aux cinq ans...
Mme Leduc (Geneviève) : ...s'apprêtent,
à ce moment-là, une bonne opportunité de faire cette révision-là, si c'est le
souhait du gouvernement.
En terminant, puis... pas tout à fait.
Avant, juste concernant l'article 68.6 qui donne au gouvernement le pouvoir de
fixer les conditions minimales d'engagement, parce que c'est ce qui est prévu
dans l'article 68.6, seulement être conscients que c'est le travail aussi des
associations de producteurs de négocier des conditions d'engagement avec les
associations d'artistes.
Ne pas sous-estimer la difficulté de fixer
des conditions minimales d'engagement dans des secteurs qui prend en
considération les besoins d'une variété de producteurs. Que ce soit, comme je
disais, le documentaire ou la jeunesse, il y a des réalités différentes
auxquelles les associations doivent composer quand ils fixent les minimums
d'engagement. Donc, pour ce domaine-là, ce pouvoir-là, ce qu'on propose, et je
crois que c'est bien détaillé dans notre mémoire, c'est vraiment de l'utiliser
seulement quand c'est des domaines où il y a absence de conditions d'engagement
et non pas comme un concurrent à la l'AQPM ou une autre association comme
l'ADISQ, qui a comme mission de négocier des conditions minimales d'engagement
avec ses partenaires. Parce que nous, on les voit comme les partenaires, les
associations d'artistes.
Ici, par exemple, en audiovisuel, le
gouvernement émettait des règlements concurrents à celles négociées par l'AQPM.
La question que je me pose, c'est : Pourquoi que les membres de l'AQPM
resteraient chez nous? Parce qu'à ce moment-là il y a un règlement qui
viendrait régir vraiment les relations de travail et notre raison d'être serait
questionnable.
En terminant le cinq minutes, s'il m'en
reste au moins une, je céderais la parole à... bon, c'est parfait, à Me
Frédéric Massé, concernant deux autres points sur...
M. Massé (Frédéric) : En
fait, Mme la Présidente, je comprends qu'il me reste peu de temps. Simplement,
on m'avait demandé de rétroagir par rapport à plusieurs commentaires qui ont
été faits par d'autres associations précédemment. Et je mentionnerai que, si
des questions sont posées, il y a des commentaires qui ont été faits, qui nous
apparaissent très particuliers sur trois notions.
La question de la responsabilité des tiers
où il y a beaucoup de commentaires qui ont été faits, il y a été mention de
peut-être faire des amendements. On aurait des observations, parce que ce qui a
été dit nous apparaît curieux.
Toute la discussion sur le gel relatif,
l'article 36.1. Suite aux commentaires qui ont été faits par... nous aurions
aussi des commentaires à vous faire, parce que ce qui a été mentionné nous
apparaît un peu curieux.
Et peut-être une brève note sur le devoir
de juste représentation, car on a semblé vouloir distinguer beaucoup, beaucoup
le Code du travail de la loi sur le statut de l'artiste. Or, ma foi, ce n'est
pas assez différent. Donc, on aurait peut-être une observation à faire sur ce
point-là. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors,
merci pour vos exposés. Nous allons commencer la période d'échanges. Mme la
ministre.
Mme Roy : Oui. Bien, allez-y.
Bonjour. Bonjour, tout le monde. Allez-y
M. Massé (Frédéric) : Très
brièvement sur c'est sur ces trois thèmes-là, Mme la ministre. D'abord, la responsabilité
des tiers. D'abord, je veux souligner qu'on a parlé très vite de trois choses
complètement différentes : la question des sociétés liées, la question de
la sous-traitance et la question des administrateurs. C'est complètement
différent.
La responsabilité des administrateurs,
c'est une chose. Il y a beaucoup de législation en droit du travail qui
responsabilise les administrateurs. Vous l'avez mentionné, l'article 154 de la
Loi sur les sociétés par actions prévoit une mécanique de cette nature-là. A
priori, ce n'est pas choquant. C'est curieux, mais ce n'est pas une
modification qui serait choquante. C'est quelque chose qu'on voit ailleurs.
Les deux autres notions, elles, soit de
responsabilité... les sociétés liées, et d'interdire, ou d'empêcher, ou de
responsabiliser les sous-traitants, ça serait très, très, très déstructurant
pour l'industrie, à tout le moins l'industrie de l'audiovisuel.
La notion des sociétés liées, si on devait
les responsabiliser non seulement ça poserait des questions immenses pour des
producteurs étrangers, ça poserait aussi énormément de questions dans le
financement même des sociétés québécoises, leur fonctionnement. Il y a
plusieurs règles de la SODEC ou d'autres organismes qui ne permettent pas
d'utiliser des sommes d'une société X pour une société Y. Donc, ça
contreviendrait à plusieurs notions.
Et la question de la sous-traitance, comme
vous l'avez dit vous-même, Mme la ministre, d'interdire la sous-traitance dans
notre industrie, c'est à toutes fins pratiques impossible de punir des
sous-traitants ou de responsabilité des gens entre eux parmi les
sous-traitants. Ça pose des enjeux très conséquents et ça pourrait, je dirais,
faire disparaître un certain nombre d'entreprises. Donc, ça aussi, c'est un
enjeu très majeur.
Donc, de ces trois approches là,
administrateurs, probablement la plus simple, les deux autres nous apparaissent
très, très difficiles à atteindre.
La question du gel relatif. Donc, pour
ceux d'entre vous qui ne fait pas régulièrement du droit du travail, il faut
comprendre que la notion de gel relatif, donc le maintien des relations de
travail... des conditions de travail, il y a trois principes, il y en a...
M. Massé (Frédéric) : ...il y
a un gel partiel, il y a un gel complet. La loi actuelle ne prévoit rien, O.K.,
elle prévoit que les parties peuvent négocier quelque chose, mais elle n'impose
pas un gel relatif. Le projet de loi imposerait un gel relatif, partiel, mais
pas complet, O.K. L'AQPM est d'accord avec ça, ça ne pose pas d'enjeu dominant,
nos ententes prévoient toutes, déjà, ces clauses-là, de toute façon.
Un gel complet, c'est quoi la différence?
Ce qu'il faut comprendre, c'est quand c'est un gel partiel, si on déclenche une
grève, par la suite, il n'y a plus d'entente. Donc, il y a une liberté qui est
réacquise, O.K. Il y a une espèce de rapport de force qui se refait. Si on a un
gel complet et qu'il y a une grève, on appelle ça des grèves perlées, O.K., qui
se déclenchent, le lendemain de cette grève perlée là, les producteurs sont
encore tenus par les ententes collectives. Sans autre moyen de contrer ce
pouvoir de force là, ça débalance complètement les négociations.
Je donne un exemple. On a un gros show, il
vaut 10 millions. C'est un immense show. Disons, c'est la finale de Star
Académie. Un syndicat manifeste sur ce show-là, un soir. Le rapport de force
qu'il obtient en faisant ça est immense. En théorie, s'il fait ça dans le
contexte actuel des ententes collectives, le lendemain, l'AQPM peut faire des
recommandations de modification de conditions d'engagement et se donner un
rapport de force réciproque, O.K. Si on avait un gel complet, on ne pourrait
pas faire ça. Le rapport de force serait complètement déséquilibré.
Dans l'éventualité ou le gouvernement
envisagerait de faire un amendement de cette nature-là, et ça nous apparaît
être un immense amendement à faire à la vitesse à laquelle on procède
actuellement, il serait impératif selon nous, à tout le moins, de considérer de
faire l'amendement que nous proposions à l'article 23 du projet de loi,
c'est-à-dire de préciser c'est quoi, les moyens de pression dans notre
industrie. L'AQPM avait fait des représentations par rapport à ce point-là dans
son mémoire initial, il y a déjà de cela un an et demi, et elles n'ont pas été
retenues. Ça ne nous posait pas d'inconvénient majeur parce que, par ailleurs,
on ne voulait pas changer l'exercice du droit de grève, mais si on voulait
changer l'exercice du droit de grève, pour nous, ça redeviendrait d'actualité
de façon très importante de considérer cette réalité-là. On avait d'ailleurs
fait une proposition dans notre mémoire très, très récent, pour un autre texte
sur l'article 35.1, qui est la contrepartie, donc l'article 23 du
projet de loi, et on vous inviterait à la considérer très sérieusement.
Pour ce qui est du devoir de
représentation, un très court... une très courte note. Même sous le Code du
travail, tu n'es pas obligé de négocier pour tout le monde. Ce n'est pas une
réalité, là, tu peux négocier seulement pour certaines personnes. Et en vertu
de la LSA, tu peux demander d'avoir des cotisations syndicales de n'importe
qui. Il suffit juste que tu envoies un avis de négociation. Donc, les réalités
ne sont pas si différentes.
J'ajouterai que les syndicats définissent
ce qu'ils veulent représenter, O.K. C'est l'UDA, à titre d'exemple, qui a
demandé de représenter les interprètes dans tous les domaines artistiques.
C'est l'ARC qui a demandé de représenter les réalisateurs dans tous les
domaines. À partir du moment où l'Arc représente les réalisateurs dans tous les
domaines, aucune autre association ne peut le faire. Ce que ça veut dire, c'est
que si l'Arc, à titre d'exemple, n'a pas envoyé d'avis de négociation pour les
producteurs de publicité pendant quinze ans, personne d'autre ne pouvait le
faire à la place. Et si l'Arc n'avait pas de bonnes raisons de ne pas envoyer
d'avis de négociation, les gens qui étaient dans ce sous-groupe-là étaient
dépourvus de tout droit. Donc, il est utile, quant à nous, qu'il y ait un
devoir de juste représentation. Ça ne veut pas dire que l'Arc serait obligé de
négocier pour tout le monde, mais ça voudrait dire qu'il justifie.
• (18 h 30) •
La même chose en danse, pour l'UDA. L'UDA,
pendant de très, très, très nombreuses années, a tenté par à-coups, je vais
dire ça comme ça, de négocier des ententes collectives. Mais pendant qu'elles
le faisaient, aucune autre association de danseurs ne pouvait demander à être
reconnue. Et si un jour certains danseurs avaient voulu dire : Faites en
plus pour nous, vous avez demandé à être... à nous représenter, c'est vous qui
avez fait ce choix-là, faites-en plus pour nous. Ils n'avaient pas ce
pouvoir-là. Le projet de loi, dans sa facture actuelle, permettrait d'avoir ce
débat-là, cette discussion-là qui nous apparaît saine pour un mouvement
syndical, et conséquemment, le texte, tel que proposé, pour nous, il n'est pas
choquant, il n'est pas dérangeant. Il correspond à une réalité qui est adaptée
à notre milieu.
Mme Roy : Merci, c'est très
éclairant vous entendre, puis c'est intéressant pour le bénéfice des gens qui
nous écoutent. C'est que l'ADISQ et l'AQPM, c'est l'autre côté de la médaille,
c'est les employeurs, c'est les patrons et c'est pour ça que c'est important
d'avoir tout le monde autour d'une table.
Vous disiez quelque chose... je vais juste
me permettre quelques petits apartés, là. Vous avez dit quelque chose, madame
Bouchard, d'intéressant, vous dites : Ce projet de loi là ne réglera pas
tout, puis on s'en était parlé. Ça ne réglera pas tout, mais on a aussi
travaillé d'autres...
18 h 30 (version non révisée)
Mme Roy : ...d'autres moyens,
d'autres mesures, des mesures complémentaires. Je vais vous donner un exemple.
Vous l'avez sûrement vu passer. Le gouvernement, donc, nous avons décidé d'augmenter
les cachets des artistes, les artistes qui vont se produire dans les écoles. On
a fait passer les cachets pour les artistes qui sont reconnus par le répertoire
la culture à l'école, on a fait passer leur cachet de 325$ à 515$, et c'est
indexé. Donc, ça va monter tout, tout, tout au fil des années qui viennent.
Donc, c'est pour vous dire qu'on tente aussi par différents mécanismes d'aider...
d'aider le milieu. Donc, je voulais juste le souligner parce que je pense que c'est
à mon droit de dire que c'est... Ça ne règle pas tout, mais il y a aussi la
possibilité de mettre des mesures dans d'autres... dans d'autres outils. Voilà!
Maintenant, il y a quelque chose d'intéressant
que j'ai lu dans votre mémoire et que j'aimerais... Puis il y a des petites
corrections qu'on apportera, on en a parlé. J'aimerais revenir. Vous nous
parlez... Là, je parle l'ADISQ. Vous nous parlez dans votre mémoire du deuxième
paragraphe de l'article 27 qui établit les facteurs à considérer lors d'une
négociation. Nous, on nous a expliqué qu'il fallait considérer la hauteur d'un
budget de production plutôt que la taille de l'entreprise. Donc, on a modifié
paragraphe en conséquence. Conditions économiques qui caractérisent les divers
types de production. Vous, vous nous dites : Attention. Alors, j'aimerais
que vous nous expliquiez pourquoi vous souhaitez que nous réintégrions dans ce
paragraphe les petites entreprises de production comme facteur à considérer. En
d'autres mots, si je vulgarise, tu peux être petite et avoir un bien gros
budget de production. Ça fait que c'est pour ça que, nous, on a voulu axer sur
la grosseur du budget et pas la grosseur de l'entreprise. Puis vous, vous me
dites : Non, Mme la ministre, il faut que ça soit la grosseur de l'entreprise.
Expliquez-moi pourquoi.
Mme Bouchard (Lyette) : Je
pense que ça peut être tout ça. Ça peut être tout ça. C'est-à-dire qu'on peut
aussi être une petite entreprise et avoir de très petits budgets aussi.
Mme Roy : Totalement.
Mme Bouchard (Lyette) : Donc,
c'est ça l'objectif. Dans notre... Au sein de notre association, la grande
majorité des entreprises ont deux employés ou moins. Ce sont souvent de petites
productions aussi. Donc, c'est pour ça que, pour nous, il est important dans le
cas des négociations de s'assurer qu'on tienne compte aussi des petites
entreprises de production. Alors, on voulait le ramener, l'ajouter aux critères
que vous avez amenés, donc d'émergence et autres critères.
Mme Hébert (Sophie) : S'il y
a un point à ajouter là-dessus, c'est que dans notre secteur, un point
extrêmement soulevé par l'ensemble des producteurs que nous représentons et des
producteurs que nous ne représentons pas, mais qu'on peut leur parler aussi, c'est
tout l'administratif qui découle des applications des ententes collectives.
Vous le savez, on a eu du papier carbone, on en a encore. Ça va partir. Merci.
On est... On est vers la sortie du papier carbone, mais c'est ce qui est décrié
le plus fortement, tout l'administratif qui découle. Le fait d'appliquer des
ententes collectives exige l'embauche d'une personne supplémentaire en
comptabilité. Et c'est majeur pour les petites entreprises de production qui ne
comptent que deux personnes ou moins, incluant le propriétaire ou la
propriétaire de la boîte, là. Donc, c'est pour ça. Puis on a consulté aussi, on
a parlé à d'autres associations soeurs, notamment dans le théâtre, et ils ont
le même problème, le même problème, la même réalité. Et pour nous tous, après
discussion, on a considéré que c'était important de ramener ce concept-là de la
petite entreprise de production. On se le disait entre nous, on est tous des...
majoritairement, on représente tous des petites entreprises de production. Mais
il y a un corollaire extrêmement important qu'on ne doit pas garder... qu'on
doit garder en concertation, c'est le fait qu'il n'y a pas beaucoup de gens
pour appliquer les ententes collectives et l'administratif qui en découle.
Mme Roy : O.K. Je vous
entends. Puis nous, on avait enlevé la grosseur de l'entreprise parce qu'on se
disait, dans le fond, ce qui compte, c'est la grosseur du budget. Il arrive...
Que tu sois gros ou que tu sois petit, combien d'argent est-ce qu'on consacre à
la réalisation du projet?
Mme Hébert (Sophie) : Il peut
y avoir des projets avec un très gros budget, mais avec deux personnes dans l'entreprise
pour faire tout ce qui en découle. Donc, c'est pour cette raison-là qu'on a
considéré que c'était important de réintégrer la notion de petite entreprise de
production parce que, oui, on prend en considération les conditions
économiques, mais c'est inclus là-dedans le fait que la main-d'oeuvre est très
mince à l'intérieur de l'entreprise. Donc, c'est important pour nous de ramener
le concept de petite entreprise de production.
Mme Roy : Je vous entends.
Maintenant, je vais poser la même question à chacun des groupes, à l'ADISQ puis
à l'AQPM. Le projet de loi, tel que rédigé, selon vous, quelles seraient les
plus importantes avancées pour justement vos membres?
Mme Bouchard (Lyette) : Elle
est à nous la question.
Mme Roy
: Oui, chacun votre
tour.
Mme Bouchard (Lyette) : Le
projet de loi... bien, c'est sûr que le 68.6 est un article important. Je l'ai
dit tantôt, hein, nous, on souhaite que les conventions collectives s'appliquent
le plus largement possible. Le phénomène de l'autoproduction fait en sorte qu'il
y a un nombre important de petites entreprises de production qui passent sous
le radar et qui ne respectent pas les conventions collectives que nous avons
négociées dans notre secteur...
Mme Bouchard (Lyette) : ...nous,
ce qu'on souhaite, c'est que ces petites entreprises-là appliquent aussi les
conventions collectives. Quand une ou un artiste autoproducteur gère sa propre
compagnie, fait sa propre production, engage des choristes, il engage des
musiciens, on souhaite qu'il/elle applique les conventions collectives que nos
membres, petites entreprises, appliquent également. Pour nous, c'est important
pour notre secteur que ces entreprises-là qui passent sous le radar, bien,
agissent dans le... sont dans le même carré de sable, qu'ils appliquent les
mêmes règles que nos membres. Et il y a des producteurs qui ne sont pas des
artistes autoproducteurs, qui ne sont pas au sein de l'ADISQ et n'appliquent
pas les conventions collectives. On souhaite évidemment que ces entreprises-là appliquent
aussi les conventions collectives. Et pourquoi ils ne rejoignent pas les rangs
de l'ADISQ? Justement parce qu'ils ne veulent pas appliquer de convention
collective.
Alors, nous, ce qu'on dit 68.6 est
important pour justement faire en sorte qu'il y ait un régime qui s'applique de
façon large, uniforme, avec des règles qui sont en lien, en phase avec
l'écosystème d'aujourd'hui, qui puissent accueillir. Nous, ce qu'on rêve, c'est
que la convention soit tellement attrayante, qu'on ait envie de venir la
respecter. C'est ça qu'on souhaite, et c'est ce qu'on s'attelle à faire en ce
moment justement avec l'Union des artistes et à la Guilde, notamment dans le
domaine du phonogramme.
Mme Roy : Merci. Et l'AQPM?
Mme Leduc (Geneviève) : Donc,
sur l'apport... Oui, je comprends la question, c'est l'apport des modifications
dans notre domaine ou l'ajout.
Mme Roy : Oui, exact.
Mme Leduc (Geneviève) : Je
dirais que... Je vais mettre la AQPM un peu comme avant-gardiste parce qu'il y
a beaucoup de choses qu'on avait déjà dans les ententes collectives. Donc, au
niveau du harcèlement, au niveau de beaucoup de dispositions qui étaient déjà
prévues dans le projet de loi, sont déjà intégrées dans les ententes
collectives négociées par l'AQPM depuis 2018, 2019.
Par ailleurs, il y a des dispositions
comme le pouvoir du tribunal qui est un plus, négociation de mauvaise foi
également. Je vous dirais que je rejoins ma collègue sur une grande
préoccupation, par exemple, sur notre capacité de négocier des ententes
collectives. Et là, on revient à ce moment-là à l'article 68.6.
Donc, comme je vous disais, on a une très
grande variété de types de production. On a eu l'occasion d'échanger sur le
fait que c'est des fois des très petits budgets, court métrage de
15 000 $ qui n'est pas la même réalité d'un long métrage de
15 millions de dollars. Et c'est sûr que c'est un défi. C'est un défi
pour les producteurs, c'est un défi pour l'AQPM elle-même. Donc, c'est sûr que
68.6 il est tout de même une source de préoccupation.
Mme Roy : Puis je vais
poursuivre dans la foulée. Puis je pense que tout le monde ici autour de la
table puis les artistes, mais il n'en reste plus beaucoup dans la salle, mais
il y en a quand même, devront, je le souhaite ardemment, s'asseoir autour de la
table parce qu'effectivement, on ne peut pas commander les mêmes conditions à
un producteur qui aurait une toute petite production avec un tout petit budget.
Et de toute évidence, il ne peut pas payer les mêmes salaires qui sont payés sur
les grosses productions de plusieurs millions. Je pense qu'il faut vraiment
assimiler cette réalité-là. Alors, je souhaite que dans les négociations, on le
prenne vraiment en considération. Il y a une grande différence à cet égard pour
qu'il y ait ce partage des ressources entre tous. Puis ce qu'on veut, c'est
autant faire grandir les petites entreprises que continuer à faire briller les
grandes. Ça fait que je pense que ça, c'est... en tout cas, c'est mon souhait
le plus cher que tous puissent s'asseoir à la table et prendre en considération
la taille et le budget des entreprises pour en ce qui a trait au respect des
obligations, des obligations qui peuvent être différentes aussi. Je veux vous
remercier pour votre... Il me reste-tu du temps?
• (18 h 40) •
La Présidente (Mme IsaBelle) : 1 min 40 s
Mme Roy : Hi, là, là. Aussi
bien dire qu'il reste très peu de temps.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Pour
les remerciements.
Mme Roy : Pour les
remerciements. Écoutez, oui, puis ça permettra à la collègue de l'opposition
officielle de poursuivre. Mais je veux vraiment vous remercier pour votre
disponibilité et votre mémoire, les lumières que vous nous avez apportées à
l'égard de l'application. Puis on est vraiment là-dedans, là, depuis ce matin,
là, de voir dans quelle mesure on peut peaufiner, aider. Il y aura des
amendements, pas tout comme je dis depuis le début, ce sera... on tente de
colmater des brèches et puis réunir davantage de gens. On ne pourra pas tout
accepter comme modifications parce qu'il y a des règles de droit qu'il faut
appliquer, là, mais on va essayer d'améliorer de belle façon. Alors, je vous
remercie beaucoup pour vos travaux. Merci pour votre participation.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci.
Alors, nous poursuivons la période d'échange avec la députée de l'Acadie.
Mme St-Pierre : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Ça a été une
très longue journée, mais très, très, très enrichissante. Vous avez dû un peu sursauter
lorsque vous avez... tous ceux et celles qui sont venus nous dire qu'il faut
que la demande de règlement... en fait, que le règlement soit à la demande...
Mme St-Pierre : ...vous allez
plus loin. En fait, vous allez plus loin... Vous allez complètement dans
l'autre sens. C'est l'article 68.5, qui est comme, pour vous, quelque chose qui
va être catastrophique, si je comprends bien.
Mme Hébert (Sophie) : 68.5 ou
68.6?
Mme St-Pierre : Bien, il y a
les deux, là.
Mme Hébert (Sophie) : Le
68.5, c'est de réglementer...
Mme St-Pierre : Il y a 68.5,
il y a 68.6.
Mme Hébert (Sophie) : Bien,
pour nous, ce sont deux choses différentes, là, ce sont deux pouvoirs de
réglementation, le 68.5 étant de réglementer sur notamment des définitions. On
considère que le travail est en train de se faire et sera complété.
Mme St-Pierre : O.K. C'est
celui-là que vous demandez qu'on enlève.
Mme Hébert (Sophie) : Exactement.
Le 68.6, du côté de l'ADISQ, on ne demande pas de l'enlever, mais, comme les
associations d'artistes l'ont fait, nous demandons aussi qu'il soit davantage
structuré et encadré, parce qu'effectivement il ne faudrait pas que 68.6 soit
utilisé comme une manière de court-circuiter un processus de négociation dûment
entamé. C'est un peu comme une loi spéciale. On ne sort pas la loi spéciale dès
la première approche, là.
Mme St-Pierre : Bien, en
fait, vous avez entendu ceux qui sont venus plutôt dire : Nous, nous
sommes des réalisateurs, nous sommes une petite association. Moi, ce que j'ai
compris, c'est que ça ne sera pas long qu'ils vont demander au gouvernement de
faire la job à leur place parce qu'ils sont trop petits puis ils n'ont pas les
moyens d'aller voir tout le monde. Et ça, c'est pour ça, la notion de «à la
demande». Ils vont le demander rapidement. C'est ce que j'ai compris, moi.
Mme Hébert (Sophie) : Oui,
bien, c'est ce qu'on comprend aussi puis... Allez-y, allez-y. Bien sûr,
allez-y.
Mme St-Pierre : Puis vous,
vous voyez une compétition. Vous voyez une compétition entre ces...
M. Massé (Frédéric) : Le
danger, Mme la députée...
Mme St-Pierre : Oui, c'est ça
que j'essaie de...
M. Massé (Frédéric) : ...puis
il faut bien le comprendre, là, parce que c'est ça qu'il faut voir, là, c'est
que le règlement établirait des conditions minimales. Les ententes font la même
chose. Il faut voir que, dans notre milieu, la raison de devenir membre d'une
association de producteurs, c'est d'avoir accès à des pools de main-d'œuvre,
O.K.? La seule façon normalement d'avoir du talent syndiqué, tu sais, «go
union», c'est d'être membre d'une association parce que ça me donne accès à
l'entente collective.
Mme St-Pierre : Mais ce n'est
pas obligatoire d'être membre.
M. Massé (Frédéric) : Vous avez
tout à fait raison. Si, pour une raison ou une autre, il y a un règlement qui
établit des conditions minimales d'engagement qui est adopté, les associations
de producteurs comme l'AQPM et l'ADISQ n'ont à toutes fins pratiques plus de
raison d'être. Parce que vous allez établir des planchers qui vont permettre
aux gens d'avoir accès à ces conditions-là.
Or, je peux vous assurer, Mme la députée,
que la meilleure façon d'augmenter les conditions d'engagement des artistes,
c'est plutôt d'avoir plus d'associations de producteurs. Parce que l'AQPM,
avant même qu'il y ait une loi, elle négociait des conditions d'engagement qui
étaient très avantageuses. La plupart des éléments que vous mettez dans la loi
présentement, ce sont des choses que l'AQPM a insérées dans ses ententes
collectives il y a dix ans. Nous, on n'en a plus, de débat sur le harcèlement
psychologique, c'est réglé depuis longtemps.
Le danger, c'est que les règlements
deviendraient la voie facile pour tout milieu où il y a une potentialité que ça
soit adopté, que les producteurs se disent : Moi, je n'investirai pas de
l'argent, ça coûte une fortune négocier une entente collective, là, moi, je
n'investirai pas de l'argent, des ressources, des cotisations dans des
associations de producteurs pour qu'ils viennent négocier plus, je le sais que,
dans trois ans ou dans cinq ans, le gouvernement va faire le travail pour nous.
Parce que c'est très différent, à titre d'exemple, d'un décret de conventions
collectives. Un décret de conventions collectives, c'est un minimum. Une
convention collective, c'est «above». Mais les associations de producteurs, ils
négocient des minimums. Donc, ça serait exactement des compétiteurs.
Et, dans ce contexte-là, c'est pour ça que
l'AQPM, ce qu'ils disent, c'est : Il y a certainement des milieux qui ne
sont pas assez structurés, O.K., où est-ce que, pour tout un paquet de raisons,
il n'y a pas assez d'argent, il n'y a pas assez de profits, ça ne vaut pas la
peine de se constituer des grosses associations de producteurs. Dans ces
milieux-là où il n'y en a pas d'ententes collectives, là, ça vaut la peine que
le gouvernement agisse parce que, là, vous pourriez avoir une valeur ajoutée,
vous ne feriez pas double usage avec des ententes prénégociées. Mais, si vous
vous servez du pouvoir réglementaire pour patcher des trous, il y a un domaine,
disons, l'audiovisuel, 80 % ou 75 % des productions sont couvertes
par une entente collective, si vous adoptez un règlement pour couvrir le
25 % qui manque, un, ça va être très, très, très compliqué. Au départ, là,
je pense qu'on sous-estime la difficulté, tu sais, il n'y en a pas d'autre
modèle, au Québec, qui fait ça, là. Le décret de convention collective, vous
prenez une convention qui existe déjà puis vous l'appliquez à tout le monde.
S'il fallait que vous...
Mme St-Pierre : Bien, il
pourrait faire un copier-coller de votre entente?
M. Massé (Frédéric) : Et là
vous feriez disparaître 25 %. J'assume que la raison pour laquelle le
gouvernement n'a pas mis de l'avant le fait de nous rendre obligatoires ou de
décréter nos ententes, c'est parce qu'on accepte le fait qu'il y a un certain
nombre de productions qui, pour tout un paquet de bonnes ou mauvaises raisons,
ne peuvent pas se faire avec nos conditions, on est trop chers. Donc, pour que
ces choses-là subsistent, soit ils sont dans une «union»... mais là, si vous
mettez des règlements...
M. Massé (Frédéric) : ...nous,
nos ententes, c'est... Vos règlements vont être des minimums. Nos ententes,
c'est des minimums. Prochaine négociation, on va s'asseoir puis on va
dire : Très bien. On sait c'est quoi, le minimum, c'est ça. Puis,
rapidement, les associations... sur un horizon de cinq à 10 ans, les
associations de producteurs vont perdre de leur utilité.
Donc, ce que, nous, on propose - puis on
répond, je pense, à toutes les préoccupations qui ont été mises de l'avant
autant par l'UDA que par l'AQTIS, puis un peu aussi à une question que vous
avez posée - nous, ce qu'on dit, c'est : Il faut que ça soit à la demande
d'une association d'artistes reconnue. On est tout à fait d'accord avec ça.
Nous, on répond à la question que vous aviez posée à l'AQTIS, vous leur
demandiez combien de temps... C'est à l'UDA, excusez-moi, que vous demandiez
cette question-là.
Mme St-Pierre : Oui, ce
matin, oui.
M. Massé (Frédéric) : Nous,
on dit : Minimum, trois ans, il faut que tu aies essayé pendant 3 ans.
Mme St-Pierre : O.K.
M. Massé (Frédéric) : Et
c'est court. Soyons honnêtes, là, on aurait pu mettre cinq ans, parce que c'est...
Mme St-Pierre : C'est court?
M. Massé (Frédéric) : ...long,
le processus, mais on comprend que dans certains domaines il y a une forme de
préoccupation rapide, là, puis vous les avez entendus : en danse,
peut-être dans l'événementiel, quoique dans l'événementiel, je n'aimerais pas
être le législateur qui adopte un règlement, parce que le minimum, ça risque
d'être difficile à écrire, mais je comprends qu'il pourrait y avoir une
intervention. Mais, dans ces domaines-là, où ils ne sont pas structurés, ça
peut être utile. Alors, nous, ce qu'on ajoute comme critère, c'est : ça
pourrait être fait à la demande après que le Tribunal administratif du travail
ait attesté - puis ça peut se faire très vite, c'est un exercice qu'on fait
souvent devant le Tribunal administratif du travail - qu'il n'y a pas
d'entente, entre parenthèses, dominante dans ce domaine-là.
Donc, à titre d'exemple, nous, en
audiovisuel, ce qu'on dit, c'est : Ce n'est pas un domaine où cette espèce
de juxtaposition entre un règlement probablement plus bas que ce qu'on
offrirait puis nos ententes est susceptible d'être efficace. Alors, on les
pousse vers les domaines où est-ce qu'il n'y a pas d'entente collective. Et ça
correspond à l'essentiel des domaines où est-ce qu'historiquement les
associations d'artistes ont dit : On n'est pas capables d'avoir des
conditions de travail minimalement décentes. Parce que ce n'est pas un argument
que vous entendrez beaucoup, à titre d'exemple, de l'audiovisuel. En
audiovisuel, souvent, les gens vont avoir l'impression qu'ils viennent en
audiovisuel pour augmenter leur rémunération.
Mais le but, nous, de ce qu'on dit,
c'est : les secteurs où la loi a bien fonctionné, laissons-là fonctionner.
Vous avez ajouté la plainte de négociation de mauvaise foi, qui va faire
d'immenses différences, là, ça va vraiment changer significativement la
dynamique entre les parties, ça risque d'être coûteux, là, mais ça va beaucoup,
beaucoup changer la dynamique entre les parties. Voyons comment ça, ça
fonctionne. Puis, dans les domaines où il n'y a pas d'association de
producteurs, donc, de toute évidence, il ne peut pas vraiment y avoir de
plainte de négociation de mauvaise foi, là, on ne négocie pas, dans ces
domaines-là, un règlement peut être...
Mme St-Pierre : O.K.. Donc,
dans votre esprit, il faudrait ajouter une notion de temps.
M. Massé (Frédéric) : Notre
proposition est à cet effet-là, Mme la députée.
Mme St-Pierre : C'est ce que
c'est la question que je posais ce matin, comme vous l'avez dit, il y a une
notion de temps. Puis, tout à l'heure, on a vu le contraire en disant :
Aussitôt que la loi est adoptée, nous autres...
M. Massé (Frédéric) : Cette
approche-là, Mme la députée, nous terrorise et, bien honnêtement, va scléroser
nos négociations. Parce que, soyons candides, les secteurs, à titre d'exemple,
pour prendre cet exemple-là, l'ARRQ vous parlait de la publicité. Et je sais
pour un fait que l'ARRQ, pendant, justement, une quinzaine d'années, depuis
qu'ils sont reconnus, n'ont jamais tenté de négocier dans ce secteur-là, O.K.?
Là, mettons que vous leur dites : Oui, sur demande, on va... Là, je sais
qu'ils viennent, il y a deux semaines, d'envoyer un avis de négociation, O.K.?
Là, disons qu'eux savent, puis les producteurs aussi vont le savoir, qu'il est
possible que vous émettiez un règlement sur demande dans trois mois. Il est à
peu près certain que les producteurs publicitaires vont dire : Très bien,
je vais attendre le règlement, le gouvernement va faire le travail à ma place.
Mme St-Pierre : Oui. Mais la
crainte, ça peut être aussi l'inverse. La crainte, ça peut être, s'il n'y a pas
«à la demande» et que le gouvernement s'assoit puis dise : Bien, ils nous
ont demandé un règlement, mais on le fera bien quand on voudra, notre
règlement, là.
• (18 h 50) •
M. Massé (Frédéric) : Ah! ça,
c'est possible. Mais ça, rendu-là, ça devient une décision...
Mme St-Pierre : Mais c'était
ça, leur crainte, tantôt, là. S'il n'y avait pas...
M. Massé (Frédéric) : Eux, je
comprends qu'ils voudraient vous y contraindre, ils voudraient changer le mot
«peut» par le mot «doit». Mais je serais surpris que le gouvernement accepte de
devenir la créature des parties.
Mme St-Pierre : J'en viens,
je voudrais parler des autoproducteurs. Parce que les autoproducteurs, ce que
je comprends, pourquoi ils deviennent autoproducteurs, c'est parce qu'ils ne
sont pas... ils ne sentent pas qu'ils ont le service qu'ils méritent avec les
grands producteurs. Et...
Mme Hébert (Sophie) : Il y a
différentes raisons. En fait...
Mme St-Pierre : Attendez un
petit peu.
Mme Hébert (Sophie) : Pardon.
Excusez.
Mme St-Pierre : Puis les
technologies ont changé. Tu n'as plus besoin d'un immense studio à la Morin
Heights pour, maintenant, faire des productions de disques, hein? Et ils n'ont
pas accès aux subventions de la SODEC. Alors, si vous voulez faire en sorte que
les autoproducteurs soient traités différemment, enfin, soient dans...
Mme Hébert (Sophie) : Dans le
giron.
Mme St-Pierre : ...dans la
gang, il faut qu'ils aient les mêmes avantages que les grandes maisons de
production, ce qu'ils n'ont pas présentement. Il faut qu'ils aillent faire une
génuflexion au CALQ pour avoir un peu d'argent puis prouver qu'ils ont
peut-être un petit projet de...
Mme St-Pierre : ...faire un
petit disque?
Mme Bouchard (Lyette) : Bon,
maintenant, ils ont déjà... ils ont eu de l'argent, les autoproducteurs...
Mme St-Pierre : Par le CALQ.
Mme Bouchard (Lyette) : Et
par la SODEC, par la SODEC également. Il y a 1 million de dollars qui
a été donné aux autoproducteurs, par année, pour les trois prochaines années. Maintenant,
c'est à nous, en négociation, de nous assurer que nos conditions soient
suffisamment attrayantes pour attirer l'autoproduction, pour que les conditions
minimales soient des conditions d'application générale, et ainsi, faire en
sorte que ces autoproducteurs-là, qui, des fois, le sont, autoproducteurs,
parce qu'ils ont envie, des fois, parce qu'il n'y a pas d'autres maisons de
disques qui ont voulu les produire, des fois, parce qu'ils sont autoproducteurs
de leurs bandes maîtresses, détenteurs des droits sur leurs bandes maîtresses,
mais pas vraiment des autoproducteurs, parce qu'après ils font du «label
servicing», donc ils vont faire appel à une maison de disque pour
commercialisation, un agent de promo pour la promotion radio, etc., et un distributeur,
donc ils vont faire ce qu'on appelle des ententes de services, mais ils vont
détenir leurs bandes maîtresses.
Donc, il y a toutes sortes de modèles, la
SODEC est en train d'étudier tout ça. Donc, c'est ça qu'on vise. Nous, on se
dit : Ces gens-là, ils veulent avoir accès à du financement parfait, il
faut aussi qu'ils jouent avec des règles syndicales, comme nos petites
entreprises de production, au quotidien, avec toute la paperasse qui s'ensuit.
Donc, c'est, pour nous, essentiel qu'ils aient... Nos producteurs paient
9 %, 10 %, 11 %, 15 % de frais producteurs, en vertu des
conventions collectives, ce qui passe sous le radar quand il s'agit
d'autoproduction. Alors, il n'y a pas ces frais-là qui sont versés au fonds
vacances, au fonds... aux REER, à toutes sortes de fonds, donc, qui sont versés
aux syndicats. Nous, on dit : Bien, ça doit s'appliquer à tout le monde.
Et qu'il y a du financement, bravo, oui, on n'est pas contre ça, et... mais
c'est les conventions collectives aussi.
Mme St-Pierre : ...par
rapport à ce que l'ADISQ reçoit, que les grands producteurs reçoivent, c'est...
on n'est pas...
Mme Bouchard (Lyette) : Non,
je suis d'accord, je suis d'accord, mais on ne parle pas des mêmes niveaux...
Mme St-Pierre : ...on n'est
pas dans le trèfle à quatre feuilles, là.
Mme Bouchard (Lyette) : Non,
mais on ne parle pas des mêmes niveaux de production non plus. Une grande
entreprise de production va avoir combien de productions dans son année, ne va
pas produire... L'autoproducteur, il se produit lui-même, il n'investit pas
dans la carrière d'autres artistes, alors que des grandes entreprises... nos
producteurs indépendants vont investir dans la carrière de plusieurs artistes
et vont miser, investir sur de la relève et de l'émergence.
Mme St-Pierre : Donc, comment
les contraint, dans la loi qu'on a devant nous, pour...
Mme Hébert (Sophie) : Bien,
selon nous, c'est un peu ce qu'on voyait dans 68.6. Quand on a lu cet
article-là, première lecture, on s'est dit : Peut-être que ça vise notre
phénomène de l'autoproduction. On ne pouvait pas se mettre la main dans le feu.
On n'avait pas la réponse, mais c'est de cette façon-là qu'on l'a vu. Et de ce
qu'on comprend des autoproducteurs, encore une fois, ce n'est pas un problème de
cachets, par exemple, ça ne serait pas les cachets dans nos ententes
collectives qui pourraient les rebuter. Premier point important, la loi sur le
statut de l'artiste, sur le terrain, dans le milieu de la musique, elle est
méconnue. Quand on parle de mesures complémentaires à la loi sur le statut de
l'artiste qui pourraient grandement aider le milieu de la musique, c'est de
l'aide à la formation. Dans le milieu de la musique, ce sont des gens qui
deviennent entrepreneurs un peu sans s'en rendre compte, qu'on ne se le cache
pas, c'est souvent ce qui arrive. La ligne, elle est ténue entre l'amateur et
le professionnel. Celui qu'on pourrait croire amateur dans son sous-sol peut
connaître un succès fulgurant du jour au lendemain et devenir un professionnel.
Ils ne savaient même pas qu'il devait appliquer une entente collective, ou,
même s'il était membre d'une association d'artistes ou non, il ne sait même pas
qu'il y a des ententes collectives négociées par l'Association d'artistes. On
part de là là, dans notre secteur.
On a entendu des artistes autoproducteurs
avec de forts succès nous avouer ne même pas savoir qu'il y avait des ententes
collectives applicables dans notre secteur. Et ce n'est pas par manque
d'efforts de la part des associations d'artistes ou de la part de l'association
de producteurs, mais il y a clairement des efforts encore plus grands qui
devront être faits en matière de formation. C'est notamment à ça qu'on faisait
référence en matière de mesures complémentaires. Donc, on est conscients que
les associations d'artistes se trouvent dans une situation un peu difficile, à
savoir envoyer des avis de négo à leurs propres membres.
Mme St-Pierre : ...avis
légaux... à lui-même, l'autoproducteur?
Mme Hébert (Sophie) : Bien,
il va retenir les services de d'autres personnes, donc nécessairement, en
retenant les services d'artistes... Puis, encore une fois, comme on vous dit,
ce n'est pas nécessairement une question de cachet, le problème, c'est soit que
c'est méconnu ou ils ont peur de l'administratif qui peut en découler. Il en
revient à nous maintenant de négocier des ententes qui seront faciles
d'application puis intéressantes pour tout le monde. Mais... et c'est
d'ailleurs ce qu'on a écrit dans notre mémoire. Si on allait vers cette avenue-là,
il ne faudrait certainement pas que le règlement vienne enlever... on rejoint
l'AQPM là-dessus, là, que ce soit une iniquité concurrentielle totale. Puis on
serait d'accord à ce que les ententes collectives qui sont négociées dans notre
secteur actuellement puissent s'appliquer au plus grand nombre possible.
Mme St-Pierre : Donc, selon
vous, il faut vraiment qu'il y ait...
Mme St-Pierre : ...à la
demande de, il faut qu'il y ait eu un processus avant d'engager?
M. Massé (Frédéric) : Mme
la députée, je veux juste mettre une chose bien au clair, c'est parce qu'on
parle de deux dynamiques, je pense, totalement différentes, O.K.? Ce qui
existe, puis Mme D'Amours, si elle était encore là, nous le dirait, là, dans le
monde des pigistes, là, il existe trois façons, il n'y en a 150 000, trois
façons d'élargir les ententes collectives. On peut forcer l'adhésion à des
associations de producteurs ou à des associations d'employeurs, là, on peut
forcer... eux vont avoir des conventions, donc les conventions deviennent
applicables automatiquement, O.K.? Ça peut être vu comme anticoncurrentiel, ça
pose plein de problèmes, là, mais ça peut être fait. L'autre façon, c'est des
décrets. Puis on en a eu, au Québec, ce n'est pas superefficace, c'est cher, il
faut créer des comités d'application.
Mme St-Pierre : On
connaît ça, les décrets, ici.
M. Massé (Frédéric) : Voilà.
Il y a une troisième façon que tout le monde sait, c'est qu'on peut rendre
conditionnel à l'application d'une... Ou d'une entente ou d'un ensemble de
règles du financement public, O.K. L'AQPM, quand on a lu le projet de loi, ce
qu'on a retenu, c'est que le gouvernement, quant à nous, à bon droit, n'avait
pas retenu l'option un car problématique, n'avait pas retenu l'option deux car
aussi problématique pour d'autres raisons, O.K. restait l'option trois. Vous
demandez : Qu'est-ce qu'on pouvait faire dans la loi? O.K. L'option trois,
elle n'est pas dans la loi, l'option trois, c'est dans les règles de
financement, c'est dans les politiques de la SODEC. Et, pour nous, cette
option-là, elle a l'avantage d'être excessivement facile à manier avec beaucoup
de finesse. C'est-à-dire qu'aujourd'hui en commission parlementaire, en cinq
minutes, on ne peut pas vous donner tous les exemples qu'on pourrait vous
donner, mais il y a des cas où ce n'est pas parfait, d'appliquer une entente
collective, pour tout un paquet de bonnes ou mauvaises raisons. Mais ça, la
SODEC ou d'autres organismes de financement pourraient jouer avec ça puis
rencontrer à 100 % les objectifs de l'ADISQ sans miner le travail, je
pense, très utile des associations de producteurs pour faire monter les
conditions d'engagement des artistes.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Parfrait. Merci.
M. Massé (Frédéric) : Donc,
ce modèle-là...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci, merci, merci, vous êtes déjà dans le
rouge...
M. Massé (Frédéric) : ...Fonctionne
mieux, mais n'est pas dans la loi.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : ...de beaucoup, beaucoup, beaucoup. Et alors, si
on veut pouvoir sortir de la salle, il faut en finir à un moment donné. Merci
beaucoup, très intéressant. Alors, merci, madame Bouchard, madame Hébert,
madame Leduc et monsieur Massé, merci pour votre contribution à l'avancement
des travaux de la commission.
Avant d'ajourner les travaux, je dépose
les mémoires des personnes et organismes qui n'ont pas été entendus.
Compte tenu de l'heure, la commission,
ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci beaucoup et
bonne soirée à tous et à toutes.
(Fin de la séance à 19 heures)