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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Thursday, June 10, 2021 - Vol. 45 N° 106

Clause-by-clause consideration of Bill 59, An Act to modernize the occupational health and safety regime


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Table des matières

Étude détaillée (suite)

Intervenants

Mme Claire IsaBelle, présidente

M. Jean Boulet

M. Alexandre Leduc

M. Sylvain Gaudreault

Mme Chantale Jeannotte

M. Monsef Derraji

Journal des débats

(Onze heures quarante minutes)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, bonjour à toutes et à tous.

Des voix : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Attention, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte.

La commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme Boutin (Jean-Talon) est remplacée par M. Lemieux (Saint-Jean); Mme Chassé (Châteauguay) est remplacée par M. Caron (Portneuf); et Mme Richard (Duplessis) est remplacée par M. Gaudreault (Jonquière).

Étude détaillée (suite)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci beaucoup. Alors, ce matin, nous poursuivons avec le sujet 4, «Fonctionnement», deuxième partie, la section 4.2, «L'optimisation des recours», sous-section 4.2.2, «Le Bureau d'évaluation médicale».

Lors de l'ajournement de nos travaux hier, les échanges portaient sur l'amendement du député d'Hochelaga-Maisonneuve, qui introduisait un nouvel article à 61.1, et je crois que M. le ministre veut prendre la parole. C'est bien cela? Ou, enfin, hier, on a terminé avec... Ou est-ce que le député d'Hochelaga... Oui? Le député d'Hochelaga-Maisonneuve, allons-y.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. On a eu des échanges, M. le ministre et moi, en attendant l'ouverture de la commission, et ma compréhension, donc, est qu'il a travaillé quelque chose sur le thème, là, que je tentais de soulever via mon amendement. Et puis ce quelque chose m'intéresse et me plaît, j'oserais dire, jusqu'à preuve du contraire. Alors, je vais retirer mon amendement pour qu'on puisse débattre de celui que le ministre a préparé.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Donc, vous retirez immédiatement votre amendement?

M. Leduc : Exact.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Nous avons le consentement, tout le monde? Parfait. Alors, l'amendement proposant le nouvel article est retiré. La parole est maintenant au ministre.

M. Boulet : Oui, merci, Mme la Pésidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Est-ce que, M. le ministre, vous allez soumettre un amendement?

M. Boulet : Oui.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Est-ce qu'il est prêt?

M. Boulet : Oui. Je peux le lire, dans un premier temps, puis après ça donner des explications, là, mais...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Mais on ne l'a pas reçu, nous, là.

Une voix : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Ah! d'accord. On vient de me dire qu'on l'a reçu, mais on ne l'a pas traité. Alors...

M. Boulet : Alors, je peux parler, d'abord...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, allez-y.

M. Boulet : ...donner les explications, au préalable.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.

M. Boulet : En fait, l'amendement qui était soumis par le collègue visait à s'assurer de la probité... de la probité, notamment, des membres qui sont au Bureau d'évaluation médicale. Et c'est le Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre qui confectionne la liste des membres du BEM, me soumet des recommandations, et les nominations se font de cette manière-là.

Or, de prévoir dans une loi que, si quelqu'un a déjà été radié, il ne peut plus être éligible pour être un membre du BEM... bon, les consultations juridiques que j'ai faites, c'est qu'il faudrait obtenir l'aval de l'ordre professionnel parce qu'il y aurait un risque de violation de la Charte des droits et libertés de la personne, parce qu'une personne peut avoir été radiée, puis être réintégrée, puis que la radiation n'ait aucun rapport avec la compétence qui est recherchée par le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve.

Alors, j'ai réalisé qu'il y avait une politique générale concernant la confection puis la gestion de la liste des professionnels de la santé qui acceptent d'agir à titre de membres du Bureau d'évaluation médicale. Et, dans cette politique-là, ils doivent obtenir un certificat de conduite professionnelle délivré par son ordre professionnel. Ils obtiennent les informations pertinentes, ils s'assurent que la probité, l'intégrité de la personne soit compatible avec sa nomination à titre de membre du Bureau d'évaluation médicale, ce qui m'amène à proposer... Puis cette politique-là, elle n'est pas publique, elle est utilisée par le CCTM. Excusez-moi d'utiliser un acronyme, là, mais, tu sais, on finit par le répéter tellement souvent. Je pense que tous ceux et celles qui sont dans la salle me permettront...

Alors donc, à... on rajouterait... Je lirais l'amendement : 61.1...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Pardon, M. le ministre, juste vous informer qu'elle a réussi à mettre l'amendement rapidement sur le Greffier, donc vous devriez y avoir accès, là, rapidement. On n'a pas suspendu, là, mais elle a été rapide. C'est beau? À vous la parole, M. le ministre.

M. Boulet : 61.1. Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 216, du suivant :

«216.1. Le Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre doit diffuser la politique générale qu'il prend aux fins de donner suite à la consultation du ministre concernant la liste des professionnels de la santé qui acceptent d'agir comme membres du Bureau d'évaluation médicale. Cette politique comprend des critères d'appréciation relatifs à la compétence et à la conduite des professionnels.»

C'est complet. Donc, je pense que j'ai donné mon explication, mais le but, évidemment, c'est de rassurer les travailleurs puis les employeurs que le processus de vérification diligente, là, comme on l'appelle fréquemment, est dans une politique utilisée par le CCTM. Et cette politique-là sera diffusée, donc ça rassurera tout le monde quant à la probité de ces membres-là. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Y a-t-il des interventions? Alors, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Je trouve que c'est une belle main tendue, là, de la part du ministre, là, qui ne reçoit pas tel quel mon amendement, mais qui fait un bout de chemin pour aller voir ce qu'il est capable de faire, là, dans le thème que j'avais soulevé.

Il m'a présenté ladite politique générale, là, concernant la confection et la gestion de la liste des professionnels de la santé qui acceptent d'agir à titre de membre du Bureau d'évaluation médicale. J'ai eu le temps de la parcourir rapidement, tantôt, là, avant qu'on commence, et puis c'est vrai qu'il y a quand même quelques éléments intéressants là-dedans, là, qui balisent, en tout cas, la façon dont sont gérés, peut-être, les potentielles inconduites ou les potentiels manquements des membres du BEM. C'est vrai qu'il y a, en effet, la Charte des droits, aussi, qu'il ne faut jamais oublier.

Alors, dans le fond, l'enjeu ici, c'est la question de la confiance puis la confiance envers notre système, en général la confiance plus précisément dans le système de l'évaluation médicale qui est quand même, je pense, mal perçue par les salariés, par plusieurs salariés. Je ne sais pas à quel point il peut être mal perçu aussi par certains employeurs, mais ce qui est certain, c'est que ce n'est pas quelque chose qui est dans la liste des tops 10 des institutions, donc, qui ont la confiance des travailleurs, travailleuses.

Alors, si on a ce genre de politique là plus facilement accessible, un peu comme, si j'ai bien compris, c'est le cas pour les arbitres de grief, bien, peut-être que ça peut participer, ne serait-ce que légèrement, à instaurer un meilleur climat de confiance envers l'appareil judiciaire et toutes ses composantes. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Y a-t-il d'autres interventions à l'amendement? Oui, député de Jonquière.

M. Gaudreault : Cette politique, cette politique générale du Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, est-ce qu'elle est déjà publique, ou c'est un document de travail interne?

M. Boulet : C'est un document interne, mais qui peut être obtenu sur demande, qui est public aussi...

Une voix : ...

M. Boulet : ...qui est sur le site, qui peut être sur le site de la CCTM... du CCTM.

M. Gaudreault : Qui peut ou qui est sur le site?

M. Boulet : Qui est sur le site.

M. Gaudreault : O.K. C'est parce que, bien, moi, je ne l'ai pas vu, le document, là. Je ne sais pas si on peut le déposer ici, à la commission, ou...

M. Boulet : Absolument.

M. Gaudreault : O.K.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, M. le ministre, vous vous engagez à le déposer? Oui? Alors, on me dit que oui.

M. Boulet : Pardon? Oui, absolument.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.

M. Boulet : Oui. J'en ai remis une copie, d'ailleurs, au collègue d'Hochelaga-Maisonneuve. Ça fait qu'on va déposer une copie de cette politique-là au Greffier.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Vous allez remettre une copie à la CET? Excellent.

M. Boulet : Tout à fait.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Ça vous va? Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Simple question de curiosité, est-ce qu'il y a des politiques similaires concernant les autres comités, là, comme par exemple le comité sur les maladies pulmonaires ou oncologiques? Il y a des gens qui siègent là aussi. Est-ce qu'ils sont encadrés par une politique similaire, à votre connaissance, la façon de les nommer?

M. Boulet : Je ne comprends pas. Sur le processus de nomination des membres du comité des maladies professionnelles pulmonaires?

M. Leduc : Oui, exact.

M. Boulet : Il y a certainement une politique qui peut être accessible, là. Je vais faire vérifier, un instant.

M. Leduc : O.K.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Est-ce que vous aimeriez une suspension ou on continue?

M. Boulet : On peut peut-être suspendre deux minutes.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, d'accord. Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 49)

(Reprise à 11 h 50)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, oui, M. le ministre, à vous la parole.

M. Boulet : À la question du collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, oui, il y a une politique, et elle est accessible sur le site de la CNESST.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.

Une voix : ...

M. Boulet : Du CCTM? O.K., CCTM.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement déposé par le ministre introduisant le nouvel article 61.1? Alors, nous allons procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Pour.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, le nouvel article 61.1 est adopté.

Nous poursuivons, M. le ministre, avec l'article 62, c'est bien ça?

M. Boulet : Merci. L'article 217 de cette loi est remplacé par le suivant :

«217. La commission transmet sans délai au Bureau d'évaluation médicale les contestations prévues aux articles 205.1, 206 et 212.1 ainsi que le dossier médical complet qu'elle possède au sujet de la lésion professionnelle dont a été victime un travailleur et qui fait l'objet de la contestation. Elle avise également le ministre de l'objet en litige et l'informe des noms et adresses des parties et des professionnels de la santé concernés.»

Explications : Bon, ça prévoit que les contestations qui y sont prévues sont transmises au Bureau d'évaluation médicale et qu'on transmet aussi le dossier médical complet.

Il a été une époque... puis ce n'est pas prévu dans la loi, donc on ne fait que codifier une pratique. Quand on réfère au Bureau d'évaluation médicale, on s'assure de transmettre en même temps le dossier médical complet, donc confirmation d'une pratique établie à la CNESST. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Y a-t-il des interventions à l'article 62? S'il n'y a pas d'intervention, nous allons procéder à la mise aux... Oui, député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Hier, nous avons eu l'occasion de discuter du rapport de la Commission de l'économie et du travail de 2006, notamment sur le Bureau d'évaluation médicale. Le ministre nous avait dit qu'il nous déposerait un document faisant état du suivi des recommandations et des constats de ce comité... de cette commission parlementaire, c'est-à-dire. Est-ce qu'il est en mesure de nous le déposer tout de suite? Parce que, moi, ça m'aiderait à me faire une meilleure tête sur les interventions que je dois faire sur les projets... sur les articles qui concernent le Bureau d'évaluation médicale, quand je disais, par exemple, qu'un des constats du comité de 2006... la commission de 2006, c'était de dire, par exemple, qu'il y a un flou entre l'aspect scientifique et l'aspect juridique, que le Bureau d'évaluation médicale, par exemple, est devenu une façon pour des employeurs d'alourdir le système ou de ralentir le processus, etc. Alors, c'est sûr que, quand on aborde une question comme celle de transmettre au Bureau d'évaluation médicale les contestations qui sont prévues et le dossier médical complet, si on avait un suivi du rapport de 2006, moi, ça me permettrait, là, de faire de meilleures interventions pour voir s'il y a eu des corrections, s'il y en a encore à faire.

Alors, je ne sais pas si le ministre peut nous indiquer, là, où il en est avec ce compte rendu du rapport de 2006.

M. Boulet : ...puis évidemment je pense que c'est... c'est parallèle aussi à l'article 62, où on vient codifier une façon de faire. Les équipes travaillent fort pour colliger toutes les informations, toutes les mesures qui ont été prises suite au rapport de 2006. Puis ce n'est pas complet, mais on me dit que demain ce serait complet, mais j'ai une... j'ai quand même une partie, là, une feuille 8 ½ X 14 qui a été préparée hier soir, mais il y a encore la... on doit encore colliger certaines informations. Mais celle-là, je peux la partager, c'est une feuille recto verso 8 ½ X 14, c'est les informations complémentaires, étude de crédits...

Une voix : ...

M. Boulet : En fait, il y a plusieurs feuilles, j'avais vu seulement celle-là. Mais il y a combien de feuilles, Anne?

Une voix : ...

M. Boulet : O.K. Donc, oui, mais je pense qu'on pourrait vous les transmettre. J'aimerais peut-être mieux, collègue, ceci dit, par respect, là, attendre que le document soit complet, cohérent, puis qu'on puisse vous le transmettre à ce moment-là, si vous le souhaitez, mais en même temps je ne suis pas fermé à transmettre des informations.

Des voix : ...

M. Boulet : O.K. Les recommandations qui concernent le Bureau d'évaluation médicale sont toutes dedans. Il y a d'autres recommandations, dans ce rapport-là, qui concernent la CNESST, et c'est ça qui reste à colliger. Alors, si vous me permettez, on pourrait peut-être suspendre deux minutes puis on pourrait le déposer au bureau du Greffier ou continuer avec les articles. Je pense qu'on peut continuer parce que ce n'est pas des informations qui sont nécessaires. On ne change rien au BEM, là, actuellement, de toute façon.

La Présidente (Mme IsaBelle) : O.K. Est-ce que ça vous convient, député de Jonquière? C'est-à-dire qu'il va le transmettre ici, à la CET, qu'on va déposer au Greffier.

M. Gaudreault : Bien, mon seul enjeu, c'est que j'aurais aimé ça, quand même, être capable de le regarder un peu, minimalement, avant de pouvoir voter, ou d'avancer, ou de réfléchir, ou d'intervenir sur les amendements qui touchent le BEM.

M. Boulet : Mais il n'y a pas... ceci dit avec respect, il n'y a pas d'amendement qui touche le BEM. Dans cette section-là, on ne fait, ici, que codifier une façon de faire pour s'assurer que le dossier médical soit complet et pour prévoir... Puis ça pourrait ne pas être, là, là, collègue, là, mais c'est la façon de faire, puis c'est ce qui est efficace. C'est ce qui permet que ce soit fait de manière ordonnée. Puis les autres articles, là, de la section du BEM, ça a tout été retiré, là. Il y en a un autre, là, qui concerne un amendement avec le texte en anglais, mais moi, je ne vois pas d'enjeu, là, je ne vois d'enjeu eu égard aux recommandations qui ont été faites dans le rapport de 2006. C'est de l'information qu'on peut considérer comme étant en parallèle.

M. Gaudreault : O.K. Bien, c'est parce que, vu qu'on est dans les articles qui concernent le BEM et qu'on ouvre la loi, ça peut nous donner l'occasion de faire un suivi, quand même, du rapport, d'une certaine manière, là. Donc...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, député de Jonquière, donnez-vous la parole un peu à... Je pense qu'il veut vraiment prendre la parole, le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Peut-être une pierre deux coups, là, j'ai un autre amendement que j'ai travaillé hier sur la question du BEM que je pourrais profiter de la suspension pour présenter au ministre. Ça fait qu'on pourrait avoir une suspension, attendre le document, puis je pourrais présenter tout de suite l'amendement qui vient un peu plus tard...

M. Gaudreault : Et, pendant la même suspension... ce que le député d'Hochelaga-Maisonneuve dit, c'est que, pendant la même suspension, on pourrait prendre connaissance un peu du début du rapport.

M. Leduc : Exact.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Est-ce que...

M. Boulet : Absolument. Puis tout ce qui concerne le BEM est là-dedans, là, ça fait qu'on va... on peut suspendre. Nous, ça va nous permettre de déposer le rapport partiel et que je puisse avoir une discussion avec le projet d'amendement du collègue d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Gaudreault : O.K., mais peut-être juste une question bien précise, là. Ça a l'air un peu niaiseux, mais, si on a le rapport, c'est parce que... Il va-tu être déposé électroniquement ou on peut faire des photocopies, malgré les...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui. Il va être déposé...

M. Gaudreault : ...c'est ça, on se met trois paires de gants puis un scaphandre...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Est-ce que...

M. Boulet : Bien, deux choses, là...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Me donnez-vous deux minutes, là? Je pourrais faire une suggestion aussi, là. M. le ministre pourrait nous déposer ce fameux rapport. Je comprends, moi, M. le ministre, que vous dites que vous avez une série d'articles qui sont des amendements qui annulent...

M. Boulet : Il n'y a rien de changé au Bureau d'évaluation médicale, là, dans cette section-là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : ...qui ne changeraient rien. Alors...

M. Boulet : Ça fait que moi, je pense qu'il n'y a pas d'enjeu, là, sous réserve de...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, ce qu'on... si vous êtes d'accord, on pourrait suspendre les deux articles qu'il restait, qui touchaient spécifiquement le BEM. J'avais cru comprendre que... le 62 et le 66. Les autres, c'est des amendements qui annulent les articles ou abrogent les articles.

M. Boulet : Tout a été abrogé, oui.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, on pourrait faire ceux-là. Après ça, vous auriez... on arriverait à la période du dîner, ça fait qu'on terminerait plus tôt, s'il faut, là, plutôt que de faire un amendement qui risque d'être... un amendement... une suspension d'au moins 15, 20 minutes, là, que vous allez demander. Je ne sais pas qu'est-ce que vous en pensez.

M. Leduc : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Vous comprenez mal, hein? De tous les articles qu'il reste du Bureau d'évaluation, M. le ministre, il dit qu'il y a deux articles qui touchent le BEM spécifiquement, ça va? Alors, on va suspendre ces deux-là, le 62 et le 66.

M. Boulet : Oui, mais là...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Après ça, on pourrait faire ceux qui touchent... où, vous dites, ça ne... c'est d'abroger, tout simplement, des articles. Le 63, le 64, le 68, le 69, le 67... Mais, si vous ne voulez pas ça... Parce que ces articles-là ne font qu'abroger des articles.

M. Leduc : Moi, le nouvel amendement que je voulais présenter au ministre, que j'ai travaillé hier soir, c'était un 62.1. Ça fait que je ne sais pas il s'insère où dans votre plan, là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il s'annule... pas s'annule, on va le suspendre, mais on peut aller avec vous. C'est parce que, là, si on suspend, le temps de vous donner à lire tout ça...

• (12 heures) •

M. Boulet : C'est parce que ce que Mme la Présidente dit, là, dans la section BEM, comme je l'avais dit avant qu'on aborde cette section-là, dans... il y a 61, 62, 63, 64, 66, 68, 69 puis 67. Tous les articles, sauf 61, qui a déjà été adopté, 62, qu'on parle actuellement, qui codifie une pratique, puis 66 qui réfère à une obligation de se prononcer sur l'APIPP, l'atteinte permanente et les limitations fonctionnelles, quand c'est consolidé... tout le reste, par des amendements, on avait abrogé les modifications qui étaient contenues dans le p.l. n° 59. Ce que vous dites, c'est qu'on pourrait adopter ces amendements-là...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Si on avait le consentement.

M. Boulet : ...puis après ça il nous resterait 62 et 66, puis ça nous permettrait, après ça, de dire...

La politique, d'ailleurs, générale du CCTM pour la nomination des membres du BEM, elle est déjà au bureau du Greffier, et moi, j'enverrais les recommandations que veut le collègue de Jonquière...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Comme on parle un peu de procédure, là, si vous êtes d'accord, on va suspendre, on va s'en parler puis on verra par la suite. Ça vous va?

(Suspension de la séance à 12 h 01)

(Reprise à 12 h 26)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, y a-t-il des interventions à l'article 62? Y a-t-il d'autres interventions?

Et je dois signifier, oui, effectivement, que nous avons déjà reçu les deux documents, qui ont été déposés dans le Greffier pour les rendre disponibles. Alors, merci, M. le ministre.

Est-ce qu'il y a d'autres interventions à l'article 62? Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Très rapidement, Mme la Présidente, une question de compréhension. Ce genre d'article là, est-ce que c'est moi qui le lis mal, mais ça me semble mettre sur papier quelque chose qui se fait déjà?

M. Boulet : Tout à fait. C'est ce que j'ai mentionné tout à l'heure, ça ne fait que confirmer une pratique. Mais ce n'était pas prévu dans la loi, donc on l'a prévu pour s'assurer que ça ne nuise pas à la fluidité puis à l'efficacité du processus.

M. Leduc : Et donc, en quelque sorte, on vient verrouiller cette pratique-là?

M. Boulet : Exact.

M. Leduc : Elle ne pourrait pas changer par la suite sans une modification législative.

M. Boulet : Exact.

M. Leduc : Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Y a-t-il d'autres interventions à l'article 62? S'il n'y a pas d'autre intervention à l'article 62, nous allons procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Pour.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Abstention.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'article 62 est adopté.

Nous poursuivons. Je crois que le... Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : J'aurais un 62.1, Mme la Présidente. Il est déjà sur le Greffier, je pense.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il est déjà sur le Greffier, et nous avons déjà une version papier pour moi.

M. Leduc : Je peux le lire, donc?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, on est prêts.

• (12 h 30) •

M. Leduc : Merveilleux. 62.1. L'article 218 de la Loi sur les accidents du travail et des maladies professionnelles est modifié :

1° par le remplacement, dans le premier alinéa, de «ministre» par «professionnel de la santé qui a charge du travailleur»;

2° par le remplacement, dans le deuxième alinéa, de «ministre ou la personne qu'il désigne à cette fin» par «professionnel de la santé qui a charge du travailleur»; et

3° par le remplacement du troisième alinéa par le suivant :

«Le ministre ou la personne qu'il désigne à cette fin informe les parties à la contestation, la commission et les professionnels de la santé concernés des nom et adresse du membre que le professionnel de la santé qui a charge du travailleur [désigne].»

Quelques explications, Mme la Présidente, dans le fond, c'est aussi une approche qu'on a imaginée, là, hier soir, qu'on voulait soumettre pour fins de discussion afin de renforcer, encore une fois, la confiance envers l'appareil du BEM et l'appareil de contestation judiciaire au sens plus large, là, alentour de la santé et sécurité du travail. Il nous apparaît que... Dans le fond, les médecins du BEM, il y en a quand même plusieurs, plusieurs dizaines, hein? J'ai cru comprendre, dans les échanges tantôt, puis on me le confirmera, mais qu'on est alentour de 60 à 80 médecins du BEM en ce moment. Moi, j'avais consulté un rapport de l'UTTAM qui avait analysé des chiffres de 2014‑2015, là, c'était plus dans un ordre, je pense, de 158, mais je pense que c'était un total de 158 sur une plus longue période.

Dans tous les cas, c'était pour dire que c'est quand même un faible taux de pourcentage des médecins du BEM qui font une majorité ou une grande partie des évaluations médicales. Alors, il y a comme un bassin de médecins, de membres du BEM, et seulement une petite portion font presque la moitié des évaluations, et ça, ça peut participer à renforcer une image ou une supposition que les choses sont arrangées d'avance, les dés sont pipés d'avance et que le système fonctionne à l'encontre de nos intérêts quand on est un travailleur ou une travailleuse. Et afin, un peu, dans le fond, de décloisonner, en quelque sorte, ce petit nombre de médecins qui font la majorité ou presque la majorité des cas d'évaluation médicale, on se dit : Pourquoi ça ne serait pas le médecin traitant qui pourrait identifier lequel des médecins membres du BEM va faire l'évaluation médicale? Ça pourrait probablement participer à défaire, en quelque sorte, donc, la concentration des examens, des évaluations médicales dans les mains de quelques membres du BEM.

Ce n'est pas quelque chose, encore une fois, qu'on sort de notre chapeau, parce que c'est... Hier, dans le fond, je vous ai fait référence, dans le débat précédent, là, toujours sur le BEM, d'un gros rapport de la Commission de l'économie et du travail de 2006, qui, à la page 9 du rapport, là, faisait mention exactement, là... Je vous lis un rapide passage : «Cependant plusieurs des mesures administratives proposées en 1997 et sur lesquelles le BEM était tenu de faire rapport n'ont pas été mises en place de façon satisfaisante, complète [et] continue. La Loi instituant la Commission des lésions professionnelles et modifiant diverses dispositions législatives imposait l'examen du rapport d'évaluation du BEM par la Commission de l'économie et du travail. Cet examen n'a pas permis de dissiper toutes les inquiétudes relatives au fonctionnement du BEM. La mise en application des mesures suivantes s'avère notamment incomplète ou problématique», et là il y a une de ces mesures-là, donc, qui est la «répartition plus égale des dossiers entre les membres du BEM».

C'est pour arriver à cet objectif-là que je vous propose l'amendement que je vous ai soumis. Dans le fond, c'est la recherche d'un meilleur équilibre, et le fait que le médecin traitant ou le médecin qui a charge, là, selon le terme qui est utilisé dans la loi, ait une plus grande place dans la sélection de la personne qui va faire l'évaluation participe aussi dans les différentes pistes de déjudiciarisation qui avaient été identifiées dans le rapport de 1994 de la CSST, auquel j'ai également fait référence hier.

Et je vous lis, en terminant, un rapide passage de ce rapport-là : «La nouvelle approche proposée, en substituant un climat de collaboration à l'actuel climat de confrontation, rétablira la confiance des travailleurs, des employeurs et des médecins dans le processus décisionnel de la CSST et ainsi réduira sensiblement le nombre de contestations des décisions relatives à une question médicale.» Voilà.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. M. le ministre.

M. Boulet : Oui, merci. Je comprends le fondement de l'amendement. En même temps, bon, on a eu des discussions à micro fermé, j'ai expliqué la façon dont les désignations concrètes, là, dans l'application quotidienne, se faisaient, et ce n'est pas fait de manière... tu sais, ce n'est pas fait... ce n'est pas une sélection professionnelle, c'est une assistante qui a la liste, puis, en fonction de la spécialité et de la région, elle vérifie la disponibilité des membres du BEM et assigne, donc tout se fait de manière purement administrative. Donc, si je peux, par mes propos, contribuer à combattre la perception qu'il y a des choix qui sont faits en fonction des dossiers puis... non, c'est vraiment une mécanique appliquée très, très simplement.

Si c'est à Sherbrooke, comme je mentionnais un peu plus tôt, puis qu'on a besoin d'un psychiatre ou d'un ORL, on va regarder les membres du BEM de cette région-là à défaut, parce qu'il y a des régions où il n'y a pas toutes les spécialités, nécessairement. Mais, s'il y en a un dans la région, on va aller au premier, puis au deuxième, et en fonction des disponibilités. Puis, s'il y en a deux puis il y en a un qui est disponible plus rapidement, bien, c'est lui qui va agir à titre de membre du BEM.

À la limite, s'il n'y a pas la spécialité recherchée à Sherbrooke... ce qui serait étonnant, là, parce que, Sherbrooke, on a à peu près toutes les spécialités, ce n'est peut-être pas une bonne... mais, tu sais, si c'est à Val-d'Or ou ailleurs, bien là on va assumer les frais de déplacement de la personne pour qu'elle vienne à Montréal, ou, dans le cas de l'Est du Québec ou Saguenay—Lac-Saint-Jean, c'est la même mécanique pour Québec, donc c'est de cette manière-là que ça se fait, c'est plus un... c'est un processus qui est clérical.

M. Leduc : Merci des explications, M. le ministre. Peut-être, en terminant, des questions périphériques, mais qui sont quand même importantes, là. Je vous disais que je m'inspirais, entre autres, d'une analyse qui avait été faite par l'UTTAM, là, en 2015. On y faisait mention également qu'il y a quand même, semble-t-il, puis vous pourrez me corriger si ce n'est pas le cas, mais des défis de recrutement pour des médecins au BEM, là. Peut-être me rappeler la statistique qu'on a parlé à micro fermé. Il y a combien de membres du BEM en ce moment?

M. Boulet : Puis le P.D.G. du CCTM me parle à l'occasion, puis les syndicats puis les leaders patronaux m'ont soumis une liste de 11 nouveaux membres à désigner au BEM, je vous dirais, il y a à peu près un mois et demi, je pense que je ne me trompe pas, mais ils sont constamment à l'affût de ça, là, tant les associations patronales que syndicales, et ils s'assurent qu'on soit en mesure de répondre aux besoins des travailleurs, travailleuses dans les meilleurs délais possible. Ça fait que c'est un défi, le recrutement. Puis la pénurie de main-d'oeuvre, bien, comme j'ai mentionné hier, il y en a aussi pour les médecins spécialistes, il faudrait qu'on en forme plus.

Une voix : ...

M. Boulet : C'est la responsabilité.

Une voix : ...

M. Leduc : C'est dit.

M. Boulet : Bien, je suis en partie d'accord. Je pense qu'on doit... Mais là c'est parce que c'est un autre débat, là, c'est un autre débat.

M. Derraji : Mais je ne veux absolument pas qu'on dérape, mais c'est une responsabilité gouvernementale, parce que, si on ne règle pas... si on ne règle pas la problématique des spécialistes, c'est le cercle qu'on va vivre avec les délais. Vous avez vu, hier, le Collège des médecins, suite à l'enquête sur le nombre de cas, la médecine familiale ou les troubles de santé mentale, troubles musculosquelettiques, c'est très complexe. Donc, oui, c'est très bien qu'on améliore les choses, qu'on essaie de moderniser, mais ce n'est pas uniquement au ministère de l'Emploi et du Travail, au niveau de la CNESST que les solutions existent. Il y a un travail à l'extérieur du ministère qui doit être fait. Et l'élément clé par rapport au BEM, l'élément clé, je ne pense même pas que c'est uniquement la CNESST ou le BEM lui-même qui va trouver ces solutions, mais, premièrement, c'est le réseau de la santé. La disponibilité des professionnels de la santé, c'est la condition sine qua non de faire avancer les choses au BEM, et ça...

M. Boulet : Oui, mais... puis c'est intéressant, puis ça met en relief l'importance de l'entente qu'il y a entre le CCTM et le Collège des médecins parce que tout se fait en collaboration entre les deux, là. Quand ils m'ont soumis 11 recommandations, un, ils ont suivi le processus de vérification diligente, qui est dans la politique qu'on a déposée au bureau du Greffier, et ils font ça en collaboration avec le Collège des médecins, là, pour les certificats de conduite professionnelle, et autres, là. Mais, oui, c'est un défi, vous avez raison, puis c'est un défi que nous allons devoir relever collectivement, là, pendant des années.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Député.

M. Leduc : Est-ce que la difficulté de recrutement... parce que vous ne m'avez pas contredit, là, mais à moins que je me sois trompé, mais donc, la difficulté de recrutement de médecins pour être membre du BEM, n'y a-t-il pas là, souvent, ce que j'en comprends par différentes lectures, une hésitation de plusieurs médecins d'aller s'embarquer dans un processus qu'on peut certainement qualifier de confrontationnel, où il y a, des deux côtés, deux expertises qui s'affrontent, et eux, ils doivent... tu sais, on est moins dans la collaboration et la concertation que dans l'espèce d'arbitrage, quasiment comme un grief, en quelque sorte, et ça serait un élément important qui freine le recrutement de médecins au BEM.

M. Boulet : Il y en a qui ne veulent pas... mais l'aspect confrontationnel n'est pas important là-dedans parce que le membre du BEM, il ne parle pas aux médecins, il travaille sur dossier puis avec le travailleur, mais il ne parle pas du tout aux médecins. Les médecins qui viennent témoigner devant le Tribunal administratif du travail, eux autres, il y en a, puis il y en a dans des cliniques privées, des spécialistes en santé et sécurité du travail, il commence à en avoir beaucoup. Puis il y a des témoins experts qui aiment ça, mais eux autres, ils sont vraiment dans la confrontation parce qu'ils subissent des interrogatoires, des contre-interrogatoires, ils participent à la construction de l'argumentaire avec les conseillers syndicaux puis les conseillers patronaux. Mais les arbitres ne sont pas dans cette dynamique confrontationnelle là, ce qui n'empêche pas qu'il y ait quand même aussi des difficultés d'en recruter. Il y en a 80 quelques, là, actuellement, puis, si on en avait 20 de plus, on les prendrait, absolument.

M. Leduc : Mais qu'est-ce qui explique, donc, la difficulté de recrutement, alors?

M. Boulet : Bien, comme je vous dis, il y a une politique au CCTM, puis le CCTM est constamment à l'affût de soumettre des nouvelles recommandations, puis, il y a un mois et demi, 11 recommandations, puis, si je remonte à il y a six mois, il y en a eu d'autres, là. Il y en a qui s'ajoutent, là. Il y a des départs à la retraite. Comme vous le savez, c'est une profession qui n'est pas exempte du vieillissement de ses membres. Il y a des départs à la retraite, ça fait qu'on comble les postes vacants, puis je pense que ça va quand même relativement bien, mais, quand même, je ne peux pas nier que c'est aussi un défi de recruter.

• (12 h 40) •

M. Leduc : Quand vous dites qu'ils travaillent sur des dossiers, là, j'imagine que, dans un contexte de télétravail, tout le monde fait ça à distance. Mais, avant le télétravail, ils ne faisaient que recevoir chez eux, peu importe leur région, les deux évaluations médicales, ils lisaient ça?

M. Boulet : Ah non, avant la pandémie, ils rencontraient le travailleur aussi, ils l'examinaient, le travailleur. Non, non, c'est quand même un avis scientifique, là, c'est pour ça que...

C'est sûr qu'il n'y a pas une étanchéité tout le temps complète, là — puis le collègue de Jonquière en parlait — entre le scientifique puis le juridique, là, mais il n'est pas dans la dynamique confrontationnelle, dans la mesure où il rencontre le travailleur. C'est sûr que, durant la pandémie, ça s'est fait différemment pour les raisons de respect de normes sanitaires, ça fait que... mais, non, il y a une rencontre.

M. Leduc : Donc, une rencontre physique.

M. Boulet : Ah! oui, oui.

M. Leduc : Et donc il y a des bureaux physiques du BEM, ou ils font ça dans leur cabinet?

M. Boulet : À leur bureau, à leur bureau. Il n'y a pas de bureau...

Des voix : ...

M. Boulet : Donc, il y a une clinique médicale. Il y a une clinique médicale dans les bureaux du ministère.

M. Leduc : Du BEM?

M. Boulet : Exact.

M. Leduc : Le BEM a un espace clinique médicale à l'intérieur du ministère de l'Emploi?

M. Boulet : Exact. Donc, les travailleurs se rendent là.

M. Leduc : Donc, à Montréal, c'est...

M. Boulet : Dans les bureaux du ministère du Travail.

M. Leduc : Au centre-ville, là?

M. Boulet : Oui. C'est au 35, Port-Royal, à Montréal.

M. Leduc : Port-Royal. Dans le Vieux-Port, ça?

M. Boulet : C'est-tu là où il y a la... les bureaux du...

Une voix : Au métro Sauvé.

M. Leduc : Métro Sauvé.

M. Boulet : Métro Sauvé.

M. Leduc : O.K., intéressant. Il y a combien, donc, de cliniques comme ça, physiques, où les travailleurs doivent se rendre? Il y en a une dans chaque région?

M. Boulet : Il y en a une à Québec, une à Montréal.

M. Leduc : Donc, il n'y en a pas à Sherbrooke.

Une voix : ...

M. Boulet : Donc, il y en a un qui reçoit à Sherbrooke, il y en a un qui reçoit à Trois-Rivières. Sinon, les personnes se déplacent à Montréal et à Québec, au bureau du BEM, dans les locaux du ministère.

M. Leduc : Et, quand il reçoit à Sherbrooke ou à Trois-Rivières, c'est dans sa clinique à lui?

M. Boulet : Exact, exact.

M. Leduc : Je comprends.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, député de Nelligan, oui.

M. Derraji : Oui. Je veux juste me permettre... c'est dans la même logique, je veux revenir à ce que...

(Interruption) Désolé, c'est comme j'ai un... j'ai comme avalé ma salive. Je ne sais pas si vous avez eu le temps de voir... Mais je vais le repréciser parce que ça m'inquiète vraiment, ça m'inquiète vraiment, au-delà de la bonne volonté qu'on a tous, le BEM, lors de la première vague, comptait plus de 4 000 dossiers en retard. Je ne sais pas si c'est possible d'avoir le portrait des dossiers en retard. Est-ce qu'il n'y a pas de dossiers en retard, présentement, ou la situation est sous contrôle? Parce qu'avec ce qui se passe au niveau du réseau de la santé ça mérite d'avoir une clarification.

Mais je vais vous lire un peu deux paragraphes. Je vais juste vous lire...

M. Boulet : Il y a des dossiers qui sont en retard, mais surtout en psychiatrie, là, parce que, dans les spécialités, là où la pénurie est la plus réelle et la plus importante, c'est au niveau des psychiatres, ça fait que ça varie d'une spécialité à l'autre. C'est la raison pour laquelle il y a des efforts de recrutement, de recommandations du CCTM et de nominations de la part du ministre pour essayer d'atténuer ça le plus possible.

M. Derraji : Oui, mais... C'est très bien, je vous remercie pour cette réponse. Mais là est-ce que, vraiment, on est en train de moderniser la façon de faire du BEM?

M. Boulet : Le BEM, non.

M. Derraji : Parce que le... Je veux juste être vraiment très direct par rapport à ce point. On ne peut pas, M. le ministre, résoudre la question de la pénurie de main-d'oeuvre ou la pénurie en psychiatres ni cette année, ni l'année prochaine, ni même dans les trois prochaines années. C'est très difficile, vous l'avez très, très bien mentionné. Et vous l'avez même dit — je vais utiliser, probablement, le parallèle — que ce n'est pas une seule solution unique, c'est l'ensemble des solutions qui vont nous aider. Aujourd'hui, le BEM comptait, lors de la première pandémie, 4 000 dossiers en retard.

Je lis le rapport — malheureusement, on n'a pas l'expertise autour de la table — du Collège des médecins, le rapport du Collège des médecins, en plus du rapport qui a été ajouté sur le site du Greffier : «Cela a obligé les gestionnaires à recourir à des alternatives...» Moi, c'est inquiétant que... quand j'entends cette phrase, c'est que je comprends la logique des gens, c'est qu'ils veulent trouver des solutions, mais est-ce qu'on utilise les bonnes solutions pour la problématique qu'on a devant nous? Je continue : «...soit des études sur dossier permettant de traiter les demandes d'évaluation en atténuant ou en contournant l'évaluation individuelle avec entrevue...» C'est ce qu'on vient de répondre au collègue député d'Hochelaga, c'est que... Est-ce que vous pouvez me confirmer aujourd'hui que la plupart des personnes ont, dans le temps requis, une évaluation individuelle avec entrevue et examen? Ce que je lis aujourd'hui de la part du Collège des médecins, c'est qu'ils disent le contraire. C'est que le délai... le nombre de dossiers en retard a obligé les gestionnaires, avec raison, parce qu'ils veulent avancer les dossiers, à recourir à des alternatives, soit des études sur dossier, permettant de traiter les demandes d'évaluation en atténuant ou en contournant l'évaluation individuelle avec entrevue et examen qui est généralement préconisée. C'est ce qui est préconisé. C'est ce que vous venez de dire au collègue, c'est les entrevues individuelles. Un, il y a une disparité régionale de la présence des professionnels. Vous avez mentionné qu'il y a une liste d'attente et qu'il y a une problématique au niveau de certains, notamment au niveau des psychiatres. On sait que les troubles musculosquelettiques et la santé mentale, c'est parmi les troubles où il y a le plus de problèmes.

«À titre d'exemple — et c'est là où j'ai un inconfort, j'ai vraiment un malaise — des médecins ont sollicité l'opinion du collège en raison de leur inconfort dans un contexte où ils se sentaient divisés entre le respect de leurs obligations, notamment la nécessité de procéder à une expertise rigoureuse avec examen du travailleur — examen du travailleur — et la nécessité de répondre à une règle administrative, étude sur dossier ou téléexpertise, imposée par certains organismes.

«Il semble que, dans certaines circonstances, les décisions d'indemnisation seraient prises par des fonctionnaires, faute d'une opinion médicale obtenue dans un délai utile.»

Donc, un, il y a un retard qui nuit au retour du travailleur et qui nuit à la productivité dans un contexte de pénurie, deux, il y a la pénurie des professions de la santé, vous l'avez dit M. le ministre, le recours aux téléexpertises, et qu'on nous dit aujourd'hui que, dans certaines circonstances, les décisions d'indemnisation seraient prises par des fonctionnaires, donc ce n'est plus l'opinion médicale.

Donc, à quoi sert le BEM? Si ce n'est pas l'opinion médicale, ça veut dire que c'est une décision d'un fonctionnaire. Et je comprends la logique derrière, parce qu'il y a trop de demandes, et on n'arrive pas à satisfaire et à répondre à la demande faute de spécialistes, faute de médecins du travail. Donc, est-ce que, vraiment, on règle la situation avec ce que vous proposez comme amendement au niveau du BEM?

M. Boulet : En fait, il n'y a pas d'amendement au niveau du BEM, 62 ne fait que confirmer une pratique établie. Deuxièmement, ce n'est pas des fonctionnaires qui rendent les avis du BEM, c'est des personnes qui sont membres parce qu'ils ont été recommandés par le CCTM suite à une entente avec le Collège des médecins, après ça ils sont nommés et ils donnent un avis scientifique.

Et je vous dirais... j'ai posé la question, là, et c'est extrêmement rare que le membre du BEM va rendre une décision sur dossier. Il évalue, il rencontre en entrevue le travailleur, et donc c'est un processus qui est fait dans les règles, selon les normes et les standards acceptés par le Collège des médecins et... Puis je pense que, encore une fois, les délais comme... Bon, évidemment, ce n'est pas la première fois qu'on m'interpelle sur les délais. C'est sûr qu'il y a des pénuries de spécialistes dans certaines régions, ce qui fait que la commission assume les frais de déplacement des personnes qui doivent se déplacer pour être analysées par le membre du Bureau d'évaluation médicale, et ça fonctionne dans une relative harmonie, je vous dirais. Ce n'est pas parfait, ce sera perfectible. Moi, je le disais au collègue de Jonquière, dans le Bureau d'évaluation médicale, ou la CNESST, ou quelque instance que ce soit, les porte-parole des partis d'opposition en matière de travail savent qu'on peut redresser, corriger, améliorer.

Ici, bon, je le répète, je pensais que c'était important de, comme le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve disait, enraciner une façon de faire qui est bénéfique, qui assure une meilleure fluidité puis une meilleure diligence, là, dans les demandes de référence au Bureau d'évaluation médicale, là. Voilà, en gros, c'est ça.

Mais ça m'interpelle, c'est sûr, ce que vous dites. C'est sûr que... Mais, en même temps, c'est vraiment des scientifiques, c'est vraiment des membres d'ordres professionnels qui ont passé à travers un processus, un entonnoir qui est vraiment serré avant d'être nommés... bien, d'abord, recommandés par le CM et nommés par le ministre.

• (12 h 50) •

M. Derraji : Je comprends, mais, devant le constat qu'on a devant nous maintenant, M. le ministre — vous avez dit et avoué qu'on a un problème par rapport aux... des listes d'attente, surtout, qui touchent la santé mentale, j'ai ajouté hier les troubles musculosquelettiques — ces enjeux, c'est difficile de les régler, ni pour cette année ni pour l'année prochaine, faute de main-d'oeuvre spécialisée pour ce dossier.

La question, c'est sur le fond même : Comment on peut, aujourd'hui, dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre... pas uniquement les professionnels qui vont suivre ces personnes, mais ce qu'on veut depuis le début, ce que j'ai compris de ce projet de loi de modernisation, c'est faciliter le retour sur le marché du travail des travailleurs. Là, maintenant, on a un autre problème qui se rajoute, c'est de l'expertise, où on vit une rareté. Donc, la rareté, elle est exacerbée, que ce soit pour l'employeur qui ne va pas voir le retour de l'employé... ce qui est anormal parce que le but de moderniser, c'est se donner des structures, des instances qui vont prendre en charge le travailleur pour un retour immédiat. Et vous avez même eu des commentaires dans ce sens, M. le ministre, sur le délai maximal pour la désignation d'un membre au BEM, délai maximal pour que ce soit évalué par le travailleur, par un membre du BEM, suite à la démarche d'un employeur. Ça, c'est des recommandations et des commentaires du Conseil du patronat du Québec.

Donc là, ce que je vois... et je suis sur un débat de fond, je comprends que le collègue a déposé un amendement, mais pensez-vous que ce qu'on fait maintenant au niveau de la modernisation ne va pas aller dans le sens où on va favoriser le retour de ces travailleurs sur le marché du travail, surtout quand il s'agit de troubles de santé mentale et de troubles musculosquelettiques?

M. Boulet : Bien, écoutez, évidemment, là c'est un débat plus global. Puis vous avez raison sur le fond, je pense qu'on en a... ce n'est pas la première fois puis ni la la dernière fois qu'on va discuter de ça, la modernisation, évidemment, c'est deux lois majestueuses, et ce n'est pas chaque article qui est passé au crible fin. Je pense qu'on a des objectifs de fond. Puis vous faites référence à un des grands enjeux majeurs qu'on avait dans notre régime d'indemnisation, c'est le temps d'absence en raison d'une lésion professionnelle, et ce qui fait... plus le temps d'absence est long, plus on crée des laissés-pour-compte, puis l'UTTAM l'a bien précisé aussi, puis plus les personnes sont laissées sans processus de réadaptation, plus il y a des risques de chronicisation de leurs lésions professionnelles.

Puis, dans les articles que nous avons déjà adoptés, évidemment, on a fait, selon moi, là, des grands pas en avant pour faciliter la réadaptation, parce qu'actuellement il n'y avait pas de possibilité de réadaptation, comme vous le savez, avant la date de consolidation et l'atteinte permanente. Dorénavant, il y aura possibilité, dès le premier jour, qu'un travailleur puisse bénéficier des services de réadaptation, avec la collaboration, bien sûr, de son médecin traitant, et aura des retours au travail, soit à son emploi ou dans un emploi qui respecte ses limitations, là, ce sera soit via une assignation temporaire ou un retour éventuel dans un emploi équivalent ou un emploi convenable plus tard dans le processus.

Donc, il y a une globalité de changements dans notre projet de modernisation qui, selon nous, vont diminuer la fréquence et la gravité des lésions professionnelles, puis ça passe notamment par un retour plus rapide au travail. Puis ça, la réadaptation, ça va relativement bien, sauf que c'est trop tard. Puis, comme Morneau Shepell le mentionnaient, le CPQ avait mis en valeur ce rapport-là, quand il y avait des comparaisons avec les autres provinces canadiennes, la durée moyenne d'absence des accidentés du travail au Québec était nettement plus élevée qu'ailleurs. Donc, je pense qu'on s'est donné déjà, collègue, des outils pour améliorer cette situation de fait là.

Pour revenir à la pénurie, bien, ceci dit, on aura l'occasion d'en reparler avec le Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, c'est un défi qui les interpelle énormément. Puis, dans le recrutement des membres du BEM, ils ont une procédure très... ils sont extrêmement diligents, ils sont à l'affût, ils font des recommandations le plus rapidement possible. Et, de façon occasionnelle, le P.D.G. du CCTM me l'a dit : On est, tant du côté syndical que patronal, préoccupés par cet enjeu-là et on fait tous les efforts qui s'imposent.

Ceci dit, en santé mentale, comme vous le soulevez, moi, je n'aime pas ça... Tu sais, il y en a qui disent : Bon, est-ce que c'est vraiment l'enfant pauvre du système? Peut-être. Moi, je comprends cette perception-là. Puis je ne suis pas un spécialiste, là, je ne suis vraiment pas mon collègue qui est ministre délégué aux Services sociaux ni mon collègue qui est ministre de la Santé. Il y a des enjeux spécifiques à la santé mentale, puis je pense qu'ils ont vraiment des plans d'action qui sont concrets avec des mesures puis les programmes qui visent à répondre aux besoins des Québécois et des Québécoises en matière de santé mentale.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, député de Nelligan.

M. Derraji : Oui. C'est en tout respect, M. le ministre, j'ai vraiment un doute sur le retour au travail. On a lu le même rapport Morneau Shepell, on a lu le même rapport, et les questions soulevées sur la chronicité et la réadaptation, malheureusement, par rapport à ce qui a été soulevé par le Collège des médecins, notamment la santé mentale et les troubles musculosquelettiques, ce que j'ai devant moi aujourd'hui ne permet pas un retour au travail rapide de ces travailleurs. Donc, la chronicité, je ne pense pas qu'on répond aujourd'hui à ce qu'on diminue cette chronicité avec une réadaptation, un retour au travail ou même avec l'assignation temporaire pour la simple et unique raison que ce travailleur n'a pas encore eu lieu... n'a pas encore eu la chance de rencontrer son professionnel.

Vous avez vu que le Collège des médecins a soulevé que, rien que lors de la première vague, il y avait 4 000 dossiers en retard. On voit très bien que ce que, encore une fois, le Collège des médecins avance, c'est que les deux troubles où il y a un réel problème, c'est la santé mentale et les troubles musculosquelettiques.

Donc, vous savez que je ne veux pas vous ramener sur un terrain où ce n'est pas vous, le responsable, mais je tiens à vous rappeler qu'il y a une liste qui traîne au niveau de la santé mentale et qu'il y a un réel problème, il y a un réel problème. Je ne veux pas faire de la politique sur cet enjeu. Aujourd'hui même, au salon bleu, vous avez vu qu'on a posé une question par rapport à trouver d'autres solutions, et je suis de votre école, que ce n'est pas une solution unique que ça prend pour résoudre un problème, que ce soit la pénurie de main-d'oeuvre ou la santé mentale.

Ma préoccupation : Est-ce qu'aujourd'hui le ministre est conscient qu'on ne règle pas la chronicité d'une manière efficace, la pénurie frappe le BEM, la pénurie annihile les efforts du retour au travail par la réadaptation et... agir sur la chronicité? Je comprends que c'est un débat de fond, probablement pas à 100 % lié avec l'amendement en question, mais nous sommes en train de parler du BEM, et le BEM joue un rôle important dans le retour au travail des travailleurs. Donc, la question soulevée par Morneau Shepell, soulevée par le Conseil du patronat, soulevée par l'ensemble des associations patronales sur... que cette modernisation doit absolument viser aussi un retour au travail. Vous avez même dit ça à plusieurs reprises, M. le ministre, on a un problème de pénurie de main-d'oeuvre. Donc, on n'a pas besoin de prolonger cette chronicité parce que ça ne va pas aider ni... personne, ni le travailleur, ni les représentants des travailleurs, ni les patrons, ni nos entreprises. Et on ne le règle pas aujourd'hui, parce que ça prend une coordination avec la santé, avec les services sociaux, parce qu'il y a une pénurie qui les affecte.

M. Boulet : Oui, puis ça fait écho, puis on ne réglera pas la pénurie de main-d'oeuvre dans le cadre de notre commission parlementaire, mais la recommandation 18 le dit, comme vous le mentionnez, «que le ministère de la Santé et des Services sociaux, en collaboration avec le Collège des médecins[...], les ministères et organismes concernés — puis ils référaient à l'Enseignement supérieur — [...]les organisations patronales et syndicales[...], lance une réflexion et recommande des pistes de solution» sur, notamment, la pénurie des médecins formés en médecine du travail, l'amélioration de la formation, etc., là. Mais, oui, vous avez raison, je pense que ça va être le fruit d'une collaboration de toutes les parties intéressées par ça.

Ceci dit, la diminution de la chronicisation va passer par la diminution des durées d'absence en raison des accidents de travail et maladies professionnelles, et on s'est donné un outil qui va être puissant, selon moi, de permettre à des travailleurs accidentés de bénéficier des services de réadaptation avant la consolidation et l'atteinte permanente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.

• (13 heures) •

M. Boulet : Et vous avez totalement raison, là, sur... ça ne doit pas se faire en vase clos. Puis je suis content de constater que vous êtes d'accord qu'il n'y a pas de solution unique. Comme j'ai dit au salon bleu ce matin, c'est la multiplicité des efforts de tout le monde qui va contribuer à permettre au Québec de bien lutter contre la pénurie de main-d'oeuvre. Et ça ne se réglera pas demain. Le pire, ça va être en 2030, là. Vous le savez, hein, il y a beaucoup de départs à la retraite, puis la population, au Québec, vieillit de manière assez effarante, là, même quand on se compare au reste du Canada.

O.K., ça va. Je comprends que vous êtes...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci, M. le ministre, là. Merci. Merci, vous êtes bien gentil.

Deux précisions. Je voulais juste savoir s'il y avait d'autres... sur l'amendement même, est-ce qu'il y avait d'autres interventions? S'il n'y avait pas d'autre intervention, est-ce qu'on procéderait tout de suite à la mise aux voix?

M. Gaudreault : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Pardon?

M. Gaudreault : On va attendre.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Vous aimez mieux attendre après le dîner? Bon.

Avant ça, j'ai une autre précision à apporter également. L'état de la situation que le ministre vous a soumis ou que vous avez reçu, il ne sera pas déposé à la commission, il était pour vous, à l'interne. Il a été distribué, mais il ne sera pas déposé à la commission. Donc, ça va? Je vous remercie.

Donc, je vous souhaite un bon dîner, et nous revenons... nous devons suspendre pour le dîner et nous revenons pour les travaux à 15 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 13 h 01)

(Reprise à 15 h 01)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, bonjour à nouveau.

Des voix : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Attention, s'il vous plaît! La Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail.

Lors de notre suspension des travaux ce matin, nous en étions rendus à un amendement qui avait été discuté, un amendement déposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve. Il avait été discuté, mais je vais quand même prendre le temps. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement déposé introduisant le nouvel article 62.1? Alors, député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui, merci, Mme la Présidente. Alors, j'ai écouté les commentaires de mes collègues avant la suspension de nos travaux, le député de Nelligan, le député d'Hochelaga-Maisonneuve, évidemment, avec son amendement, j'ai écouté également le ministre et ses propos. Moi, je regardais ça, là, durant la pause, l'amendement et l'article 218. Dans le fond, l'enjeu, c'est que, dans le 218, on dit «le ministre désigne un membre», et là le député d'Hochelaga-Maisonneuve nous propose de changer ça par «le professionnel de la santé qui a charge du travailleur désigne un membre du Bureau d'évaluation médicale», etc.

Et j'ai réfléchi à ça comme il faut. Et je suis allé voir avec l'article 224 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, où on dit : «Aux fins de rendre une décision en vertu de la présente loi, [...]la commission est liée par le diagnostic et les autres conclusions établis par le professionnel de la santé qui a charge du travailleur...» Alors, pour moi, il y a comme une colonne vertébrale, je dirais, là, ou une ligne directrice en ce qui concerne l'évaluation du travailleur ou de la travailleuse, en ce qui concerne son traitement, en ce qui concerne, également, les évaluations de son état de santé à la suite de la lésion ou de l'accident. Et le ministre lui-même, de toute façon, l'a dit à plusieurs reprises dans ses interventions précédentes, que le médecin qui a charge du travailleur est prépondérant. Donc, moi, c'est là que ça me rejoint, au sens où, si c'est un des principes fondateurs de la loi que le professionnel qui traite l'accidenté du travail ou le lésé du travail — je ne sais pas si ça se dit, mais ça revient un peu à ça — bien, il faut que ça apparaisse à quelque part. Donc, de faire ressortir ce principe à l'article 218, moi, je trouve que c'est cohérent, c'est en droite ligne avec la trame derrière la loi, qui est de dire que le médecin traitant a prépondérance.

Et je l'ai dit à plusieurs reprises, le ministre était d'accord avec moi hier, sur un autre sujet, mais on avait eu l'occasion de dire que les professionnels de la santé, quels qu'ils soient, étant membres d'un ordre, étant membres du Collège des médecins, ont des responsabilités, ont des responsabilités face au public, ont des responsabilités face à leur syndic, ont des responsabilités face à leur propre ordre professionnel. Et moi, je fais confiance aux professionnels de la santé. Donc, de remplacer «le ministre» par «professionnel de la santé qui a charge du travailleur», je trouve que c'est cohérent et je trouve également, de toute façon, que ça vient clarifier. Parce qu'on sait bien que, quand on dit, dans un article comme celui-là, le ministre peut, le ministre peut, le ministre doit, c'est... le ministre, ce n'est pas lui qui va regarder, là, le dossier d'une personne ou d'un travailleur qui est blessé puis qui va désigner un membre du bureau. On sait bien que c'est un pouvoir délégué, un pouvoir délégué envers d'autres personnes du ministère, soit un directeur ou une directrice du ministère, des directeurs régionaux, peu importe la situation. Donc, quand on dit, dans l'article 218 actuel, «le ministre désigne un membre du bureau», je trouve ça fort, tu sais. Je comprends, puis je le répète, c'est... On le dit, même, «le ministre ou la personne qu'il désigne à cette fin». Donc, on sait bien, là, que c'est souvent... c'est la personne qu'il désigne à cette fin. Si ça se trouve, le ministre ne sait même pas c'est qui, la personne qu'il a désignée à cette fin, parce qu'elle est désignée par les processus administratifs auxquels... en bout de ligne, le ministre signe. Mais moi, je pense que de préciser, dès le premier alinéa, «le médecin traitant»... bien, je dis «le médecin», là, mais «le professionnel de la santé qui a charge du travailleur», je pense que c'est beaucoup plus conforme, beaucoup plus réaliste, puis ça nous permet d'identifier clairement une personne, un professionnel.

Donc, pour toutes ces raisons, Mme la Présidente, moi, je vais appuyer, là, l'amendement du député d'Hochelaga-Maisonneuve.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. M. le ministre, voulez-vous... Non? Parfait.

M. Boulet : Je respecte et je comprends le commentaire du collègue. Ceci dit, je vais juste réitérer que la prépondérance de l'opinion du médecin traitant, elle est reconnue à l'article 224. La commission, elle est liée par l'opinion du médecin traitant sur les aspects médicaux. Tu sais, on disait, il y avait à peu près, quoi, 130 000 dossiers avec un potentiel de BEM, il y en a à peu près 10 000, 11 000, avis du Bureau d'évaluation médicale, et cet avis-là, comme j'ai expliqué, il demeure prépondérant.

Puis c'est sûr que le médecin traitant n'aurait pas non plus la connaissance du réseau des membres du BEM, là, parce que, même si tu as besoin d'un orthopédiste, il y en a, au Québec, qui sont spécialisés dans les membres inférieurs, d'autres, dans les membres supérieurs, d'autres, dans les lésions musculosquelettiques, donc ça permet une identification du profil du membre du BEM dont on a besoin. Puis après ça le processus de nomination, il est clérical, là, purement administratif, là. Il y a une liste avec les spécialités puis les surspécialités, parfois, et ça se fait en fonction des disponibilités de ces médecins-là.

Mais, ceci dit, je comprends très bien et je respecte l'opinion du collègue de Jonquière.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Y a-t-il d'autres interventions à l'amendement? Oui? Député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Très rapidement, Mme la Présidente, moi, ce que je veux juste retenir de cette histoire-là, dans le fond — puis ça aurait pu être un commentaire qui aurait été fait plus tôt, là, mais je le fais maintenant — c'est qu'une personne qui commence son calvaire, là, de lésion, là, il va avoir son expertise médicale de son médecin traitant, mais, à partir du moment où l'employeur conteste, ou la commission, potentiellement, aussi, bien là il va y avoir, très certainement, ou, en tout cas... oui, très probablement, probablement très certainement, deux autres expertises, deux autres rencontres, celle du médecin et de l'employeur ou de la CNESST puis celui du BEM qui va avoir lieu, ça fait que c'est des étapes, des étapes, des étapes. Puis là ça va être contesté au TAT, probablement, rebelote avec les expertises médicales.

Ça fait que, vraiment, on multiplie les moments anxiogènes, les moments stressants. Ça ne m'est jamais arrivé, évidemment, mais j'ose à peine imaginer comment se sent une personne qui a une lésion, qui a son papier de son médecin, que son patron, en quelque sorte, le conteste, ou ne le croit pas, ou peu importe, l'envoie voir le médecin de l'entreprise, comment on se sent quand on se présente au médecin de l'entreprise. Ça ne doit pas être une situation particulièrement agréable. Surtout que, quand on va voir le médecin de l'entreprise, de ce que j'en comprends des différentes statistiques qu'on a étudiées depuis le début de cette commission, il y a des maudites bonnes chances que vous ayez aussi, après ça, à aller voir le médecin du BEM. Ce n'est pas très fréquent, j'imagine, que le médecin de l'entreprise dise que votre médecin à vous avait raison.

Alors, c'est ça que je retiens, puis je pense que mon amendement avait peut-être une perspective de pouvoir éviter, dans la mesure du possible, ces moments-là anxiogènes. Mais, voilà, on a fait le tour de la question, je pense.

• (15 h 10) •

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention à l'amendement déposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve introduisant le nouvel article 62.1, nous allons procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Abstention.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté.

On me signale de ne pas oublier de porter le masque ou de tenir... de respecter les mesures sanitaires, là, lorsque vous ne parlez pas. Alors, il faut faire attention.

Nous poursuivons donc avec l'article 63. M. le ministre.

M. Gaudreault : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. J'aurais un amendement à déposer.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Après 62, c'est ça?

M. Gaudreault : Oui, un 62.1.

La Présidente (Mme IsaBelle) : 62.1. Il devient 62.1 parce que le... D'accord.

M. Gaudreault : C'est parce que le 62.1 d'Hochelaga-Maisonneuve a été battu, donc un nouveau 62.1.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est ça. Est-ce qu'il a déjà été acheminé? Non? Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 11)

(Reprise à 15 h 21)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous avons reçu un amendement de la part du député de Jonquière. Je vous invite à le lire et à l'expliquer, s'il y a lieu.

M. Gaudreault : Oui, alors, je vais juste... Parfait. Donc, Mme la Présidente, voici, l'amendement est le suivant :

Insérer, après l'article 62 du projet de loi, le suivant :

62.1. L'article 209 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles est remplacé par le suivant...

(Interruption)

La Présidente (Mme IsaBelle) : ...de Jonquière, je suis obligée de vous arrêter, il y a un vote, il y a un vote. Alors, je ne sais pas s'il y en a d'autres qui doivent aller voter au bleu. Il y a un vote, actuellement, au bleu, alors...

M. Gaudreault : O.K., on va attendre.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui. On doit donc suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 22)

(Reprise à 15 h 27)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, attention, nous sommes de retour. Alors, lorsque nous avons suspendu, le député de Jonquière était en train de lire son amendement. Alors, je vous invite à le lire.

M. Gaudreault : Oui. Insérer, après l'article 62 du projet de loi, le suivant :

62.1. L'article 209 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles est remplacé par le suivant :

«209. L'employeur qui a droit d'accès au dossier que la commission possède au sujet d'une lésion professionnelle dont a été victime un travailleur peut faire une requête auprès de la commission pour que celle-ci évalue la possibilité d'imposer qu'un travailleur victime d'une lésion professionnelle se soumette à l'examen du professionnel de la santé qu'elle désigne, à chaque fois que le professionnel de la santé qui a charge de ce travailleur fournit à la commission un rapport qu'il doit fournir et portant sur un ou plusieurs des sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212.

«L'employeur qui se prévaut des dispositions du premier alinéa peut également demander à la commission la possibilité que le professionnel de la santé désigné par celui-ci donne son opinion sur la relation entre la blessure ou la maladie du travailleur d'une part, et d'autre part, l'accident du travail que celui-ci a subi ou le travail qu'il exerce ou qu'il a exercé.»

Bon, Mme la Présidente, je sais que vous allez trouver qu'il y a beaucoup de phrases, mais c'est la formule qu'on a trouvé la meilleure, plutôt que d'essayer de dire : On remplace, puis on supprime, puis on rajoute, parce qu'à un moment donné c'est plus simple de réécrire, là, le projet de loi... pas le projet de loi... bien, on pourrait réécrire le projet de loi, oui, mais réécrire un article.

• (15 h 30) •

Dans le fond, c'est quoi? C'est que moi, j'ai fait de la concordance entre le rapport de la Commission sur l'économie et du travail de 2006 et le document de suivi de ce rapport qui nous a été transmis par le ministre avant la pause, et je constate que... puis là je vais aller le rechercher, je constate que le fameux suivi du rapport... oui, je l'ai ici, le fameux suivi du rapport de la Commission de l'économie et du travail de 2006 énonce des éléments assez techniques. Par exemple, bon, il y a eu une campagne de promotion qui a été faite du BEM. Ils ont mis en place un plan de communication insistant sur le rôle médical du BEM. Le BEM a implanté une série de mesures afin d'améliorer la qualité des avis et mis en place un mécanisme de suivi, a fait une restructuration organisationnelle. Il y a eu l'amélioration du processus de recrutement et de sélection des membres, formation, support-conseil, relecture des avis, disponibilité et support-conseil accrus, examen de la conformité, etc., là. Allez voir le rapport, Mme la Présidente.

Le suivi du rapport, ce n'est pas mauvais, là, mais c'est des choses assez techniques, alors qu'il y avait une recommandation très claire, que je vais aller vous rechercher dans le rapport de 2006, une recommandation très claire qui dit la chose suivante — voilà, écoutez bien : «Que seule la commission de la santé et sécurité du travail puisse demander au Bureau d'évaluation médicale d'émettre un avis.» Donc, encore là, l'idée est de mettre au centre de la loi, le pilier principal au coeur de la loi... je ne sais plus quel synonyme je peux sortir, de mettre le travailleur au coeur de cette loi. Le rapport de 2006 nous dit la recommandation que la Commission de la santé-sécurité puisse être la seule à demander au Bureau d'évaluation médicale d'émettre un avis.

Alors, c'est pour ça que je fais cet amendement qui vient modifier l'article 209, parce que, par cet amendement, on vient dire... on se donne une étape de plus, mais je vais revenir tout à l'heure sur la judiciarisation, on se donne une étape de plus. On a essayé de formuler le mieux possible l'article 209 pour atteindre nos fins. Si le ministre nous dit que mon amendement est bon mais mal formulé, si c'est juste ça, moi, je suis prêt à m'asseoir puis à regarder avec le ministre comment on peut le réécrire, parce qu'il a beaucoup plus de ressources que moi, donc moi, je n'aurais pas de problème là-dessus, mais, avec les ressources que nous avons puis avec le temps qu'on a, c'est comme ça qu'on l'a écrit.

Donc, ce qu'on fait, c'est qu'on vient... Si vous regardez le libellé d'origine de l'article 209, on dit que «l'employeur peut exiger — ce n'est pas rien, peut exiger — que le travailleur se soumette à l'examen d'un professionnel de la santé qu'il désigne». C'est fort. C'est fort. Alors, nous, pour respecter la recommandation de la commission... de notre commission parlementaire en 2006, on vient ajouter une formalité qui est : «L'employeur [...] peut faire une requête auprès de la [CNESST] pour que celle-ci évalue la possibilité d'imposer qu'un travailleur victime d'une lésion professionnelle», blablabla. Donc, ce n'est pas obligé d'être très complexe. Ça peut être un formulaire, ça peut être une procédure décentralisée dans les régions, dans les bureaux de la CNESST, où l'employeur pourrait demander à la commission d'évaluer la possibilité d'imposer un examen supplémentaire à un travailleur pour respecter cette recommandation de 2006, qui est toujours sur une tablette. Parce que, dans le suivi de ce rapport de 2006, à moins que le ministre me montre un élément contraire, dans le suivi du rapport de 2006 qu'il nous a déposé, il n'y a pas ça.

Donc, moi, je veux respecter la recommandation de 2006. Je veux qu'on envoie un signal clair, dans cette loi, et dans ce projet de loi, et dans cette réouverture, depuis 40 ans, de cette loi fondamentale, que le travailleur, la travailleuse lésée, blessée, est le seul, est la seule à être au coeur de ce système parce qu'elle est victime, elle est la partie la plus vulnérable dans l'ensemble du processus. Alors, c'est pour ça. Puis je ne crois pas, je ne crois pas, que cela vient affecter le droit des employeurs. Peut-être que le ministre pourra me répondre ça, mais on vient ajouter, dans le fond, une formalité qui assoit davantage le rôle de la commission comme instance désignée, comme instance aussi administrative, quasi judiciaire, qui vient dire : Ce sera mon rôle de déterminer l'avis supplémentaire, la pertinence d'un avis supplémentaire, et ce n'est pas un droit exclusif d'un employeur d'exiger.

Maintenant, je sais que l'autre argument qui va venir sera de dire : Oui, mais on dénonce déjà la surjudiciarisation du système, là on ajoute une bureaucratie, on ajoute un formulaire ou une procédure. Attention, moi, je pense qu'au contraire ça vient envoyer le signal aux employeurs de ne pas surutiliser ou mal utiliser un BEM dédié à des avis scientifiques. Le ministre lui-même nous a dit hier... hier ou ce matin, je viens mêlé dans le temps, mais a répondu à ma question : Est-ce scientifique ou juridique? Sans nuance, puis j'aime ça quand c'est comme ça, le ministre a dit : C'est scientifique. Alors, il ne faut pas déformer le rôle du BEM et de lui donner... de faire en sorte, plutôt, que des employeurs s'en servent à des fins judiciaires. C'est là qu'on alourdit le système. Alors, au contraire, on vient mettre une barrière qui, à sa face même, a l'air d'une procédure supplémentaire, mais, au contraire, qui vient dire aux employeurs : Ne m'utilisez pas à outrance, parce que, si vous voulez demander un avis supplémentaire, vous aurez à le démontrer, à le justifier, puis c'est la commission qui prendra la décision, comme le dit la recommandation du rapport de 2006. Alors, c'est ça, l'objectif.

Donc, moi, je crois qu'au lieu de surjudiciariser davantage ou de surbureaucratiser — je ne sais pas si ça se dit — on vient au contraire dire à l'employeur : Prépare-toi, on ne t'enlève pas le droit de demander un avis, mais, par exemple, ce n'est pas vrai que ça va devenir un bar ouvert. Donc, c'est l'objet de mon amendement, cet après-midi, sur cet aspect-là, que je trouve à tout point conforme à une recommandation de nos prédécesseurs à la Commission de l'économie et du travail.

Je vais m'arrêter ici pour l'instant, Mme la Présidente, puis j'ai hâte d'entendre mes collègues, là, sur cet amendement.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, M. le ministre.

• (15 h 40) •

M. Boulet : Oui, merci, Mme la Présidente. Donc, si on va au fond de l'amendement, ce que vous demandez, c'est que l'employeur ne puisse exiger de son travailleur lésé qu'il se soumette à un examen de son médecin désigné pour éventuellement le soumettre au Bureau d'évaluation médicale sans d'abord avoir passé par... en fait, que ce ne soit que la CNESST qui puisse référer au Bureau d'évaluation médicale.

Je rappelle que c'est de l'arbitrage médical puis c'est... la CNESST, elle est là pour appliquer la loi, puis il y a un travailleur puis un employeur. Les statistiques que je mentionnais plus tôt aujourd'hui, 130 000 dossiers actifs, bon an, mal an, c'est 10 000, 11 000. Il n'y en a pas tant que ça, là. En pourcentage, c'est assez faible, le nombre d'avis de Bureau d'évaluation médicale qui sont rendus sur l'ensemble, la totalité des dossiers, du nombre de dossiers.

Et ce que vous voulez atteindre comme objectif a pour effet, selon moi, de judiciariser encore plus, de mettre une nouvelle couche, de demander aux employeurs du Québec, les petits, les moyens, les grands, je répète, de faire une demande, une requête à la CNESST pour pouvoir faire examiner son travailleur et pour pouvoir référer éventuellement au Bureau d'évaluation médicale, mais selon quels critères? S'il y a un désaccord entre les deux médecins, c'est normal qu'on puisse référer. Puis c'est normal que, dans un contexte d'accident de travail ou de maladie professionnelle, un employeur puisse vouloir faire examiner, c'est des choses d'experts, le diagnostic, les traitements, la consolidation, l'atteinte puis les limitations. Il ne peut pas, lui... Vous le savez, vous avez pratiqué, vous savez qu'un employeur, quand il y a un contentieux, il demande à un expert de venir témoigner au soutien de sa prétention. Il peut ne pas y avoir eu d'accident, il peut ne pas y avoir eu de maladie ou les aspects médicaux déterminés par le médecin traitant.

Je vous rappelle que le médecin traitant est prépondérant, 224 le dit clairement. Ça fait que vous essayez de régler une question en hypothéquant les employeurs, en les privant de l'exercice d'un droit qui m'apparaît fondamental, c'est-à-dire le droit d'ester, de préparer son dossier. Et il ne faut pas oublier qu'en matière de santé... puis mon collègue connaît bien les décisions des tribunaux supérieurs, tu sais, en matière de santé, quand il y a un enjeu entre un travailleur et un employeur, il y a un consentement implicite du travailleur à ce que l'employeur puisse obtenir un examen médical, tu sais, dans les cas d'absentéisme pour des raisons de santé et autres, donc... Puis on dit «peut exiger»... en fait, oui, il demande puis il peut exiger, parce qu'il ne veut pas se faire opposer par un travailleur : Je ne suis pas obligé. Puis, si, les travailleurs, on leur disait... puis ceci dit avec respect, là, parce que, si un travailleur, il dit : Moi, je ne veux pas me faire examiner... en fait, s'il n'y avait pas le «peut exiger», les employeurs, ils pourraient décider en masse de ne pas se faire expertiser.

Puis je reviens à la base, là, tu sais, c'est un système d'arbitres. Le médecin traitant, il fait son attestation médicale initiale, il se prononce sur les aspects médicaux. L'employeur peut faire examiner le travailleur. Il peut, s'il y a un désaccord entre son médecin puis le médecin traitant, demander de référer au BEM. La CNESST a toujours ce droit-là dans la loi actuelle. La CNESST a toujours ce droit, même si l'employeur l'a, mais c'est des corridors distincts. Et là on viendrait dire à l'employeur : Il faut tu franchisses une autre étape, puis tu peux ne pas aboutir à ce que tu souhaites, là. Pourquoi la CNESST dirait non à une demande de... Tu sais, je ne comprends pas la retombée pratique puis la retombée positive en matière de structure administrative puis de palier additionnel pour simplement priver les employeurs d'un droit qui m'apparaît fondamental.

Puis le collègue, bon, le sait, depuis le début du projet de loi, j'essaie toujours de trouver des bons compromis puis je comprends l'équilibre qui doit exister entre les travailleurs et les employeurs, mais je ne peux pas, au nom de la prépondérance de l'opinion du médecin traitant, priver les employeurs complètement de leur droit de faire examiner le travailleur. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Il y a d'autres... Oui, député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui, peut-être un petit commentaire avant de laisser les collègues prendre la parole, on ne prive pas, là, l'employeur, quand même, d'exercer un droit. J'aurais le goût de dire : L'amendement vient l'obliger à être crédible dans sa démarche. Alors, ce n'est même... tu sais, ce n'est pas plus que ça. Puis, encore une fois, je répète que je me colle quand même à une recommandation importante qui dort sur les tablettes depuis 2006. Alors, pour l'instant, je vais en arrêter là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui. M. le ministre.

M. Boulet : Oui, moi, je suis toujours un partisan de la présomption de bonne foi. Mais, peut-être, je peux laisser les... si les autres collègues n'ont pas d'intervention, je pourrai peut-être répondre, donner une réponse additionnelle, mais...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, y a-t-il d'autres interventions sur l'amendement déposé?

M. Leduc : J'aurais d'abord entendu le ministre, là, mais...

M. Boulet : O.K. Bon, je me suis...

La Présidente (Mme IsaBelle) : O.K. M. le ministre.

M. Boulet : Je voulais simplement informer, puis ça fait suite, d'ailleurs, aux propos du collègue de Nelligan de ce matin, au CCTM, M. François Lamoureux, là, qui est président du CCTM, que vous connaissez peut-être, me confirmait qu'il y avait des travaux. Ils ont formé un sous-comité, les syndicats et les patrons, un sous-comité qui appelle sur l'évaluation médicale pour améliorer le fonctionnent du BEM, recrutement des médecins puis réduire les délais. Donc, ils sont constamment en action. Puis, bon, encore une fois, ce n'est pas parfait, là, mais il y a quand même des travaux, il y a un sous-comité qui a été formé puis il y a un plan d'action.

Puis, moi, ce que je pourrais ultimement demander au CCTM, de voir la légitimité, là, que seule la commission, la CNESST, puisse demander au Bureau d'évaluation médicale un avis, qu'il y ait au moins une réflexion sur ce volet-là. Moi, c'est le compromis que je suggère, que j'ai fait souvent avec les collègues de Nelligan et d'Hochelaga-Maisonneuve, puis ça nous permettrait d'aller de l'avant puis de laisser ça dans les mains des experts que sont les syndicats et les patrons.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Bien, j'allais juste simplement saluer l'initiative de mon collègue de Jonquière. Là, je pense que ce qu'il a proposé et qu'on est en train de débattre est une autre voie, là, qui vise à un objectif assez proche de celui qu'on avait défendu, que j'avais défendu la semaine dernière — ou c'est-tu hier? En tout cas, je perds le fil — récemment, que j'ai défendu récemment, et qui vise donc à déjudiciariser, qui vise à cesser cette espèce, parfois, d'automatisme à tout de suite contester. Puis on ne fera pas le débat au complet, là, mais je pense que c'est assez ingénieux, là, d'avoir pensé à ce chemin-là puis je vais voter en faveur de son amendement.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Y a-t-il d'autres interventions?

M. Boulet : Non.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui, merci au député d'Hochelaga-Maisonneuve. Je vous dirais... bon, je comprends le positionnement du ministre, là, je ne pense pas que je vais le changer à ce stade-ci, mais je veux quand même ajouter un argument, là, avant de conclure, c'est qu'admettons qu'il arrive un accident dans une usine ou dans une entreprise, il peut arriver que le travailleur se retrouve rapidement à l'urgence, il va au plus vite, puis là il se retrouve avec un orthopédiste qu'il n'a pas choisi parce qu'il faut tout de suite réparer sa jambe qui est fracturée au fémur, et à deux endroits, puis là il se retrouve dans un contexte d'urgence. Tandis que, l'article 209, la manière dont il est présentement libellé, c'est comme si ça amenait un déséquilibre parce que l'employeur, lui, il peut... il a comme deux avantages, il peut exiger un deuxième avis ou un examen par un médecin, deuxièmement, de son choix, l'employé, lui, le travailleur, n'a pas nécessairement le choix de son médecin traitant, donc il y a comme un déséquilibre à cet égard-là. Je pense que mon amendement vient un peu rééquilibrer ça.

Maintenant, j'ai entendu le ministre qui m'a parlé du comité consultatif sur la main-d'oeuvre et des études, ou des recherches, ou des informations supplémentaires que le comité peut nous faire. Moi, j'ai appris une chose en politique, Mme la Présidente, c'est qu'à un moment donné il faut ramasser nos billes. Alors là, je vois que le ministre ne peut pas ou ne veut pas... puis on pourrait débattre longuement, là, de mon amendement, il ne veut pas adopter mon amendement, il a la majorité, mais on va au moins ramasser nos billes. Il nous a dit qu'il était prêt à mandater le comité consultatif pour examiner l'impact, à tout le moins, du fait que la CNESST n'est pas la seule instance à pouvoir demander un avis supplémentaire, d'évaluer cette question-là. Moi, j'aimerais qu'il... moi, en tout cas, j'accepte ça, minimalement, puis j'aimerais qu'il nous dise, là, qu'il va effectivement demander au comité de le faire, puis éventuellement, bien, on pourra obtenir le rapport du comité consultatif sur cette question-là. Parce que c'est quand même un enjeu important qui a été énoncé en 2006, qui n'est toujours pas réglé, qui est un principe fondateur de la loi. Et, si au moins le comité peut faire un travail supplémentaire là-dessus, bien, on va être preneurs, c'est sûr.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait, merci. M. le ministre.

M. Boulet : Oui, je le confirme, absolument, que le CCTM fasse une réflexion sur le fait que la CNESST doit être le conduit qui permet à l'employeur de faire examiner et de référer au Bureau d'évaluation médicale, et ce sera fait. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Y a-t-il d'autres interventions à l'amendement déposé par le député de Jonquière? Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix de l'amendement introduisant le nouvel article 62.1.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Abstention.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté.

Nous poursuivons donc avec, cette fois-ci, l'article 63. M. le ministre.

• (15 h 50) •

M. Boulet : Oui, merci, Mme la Présidente. Donc, ça, il y a une succession d'articles, là, il y a eu... c'est un amendement, c'est : Retirer l'article 63 du projet de loi.

Et puis je vais expliquer, là, en fait, l'amendement fait suite aux commentaires de certains groupes, formulés clairement, là, lors des consultations particulières. C'est tout. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Est-ce qu'il y a des interventions? Donc, s'il n'y a pas d'intervention sur l'amendement concernant l'article 63, nous allons procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Pour.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté, et l'article 63 est donc supprimé.

Nous poursuivons, M. le ministre, avec l'article 64.

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Donc : Remplacer l'article 64 du projet de loi par le suivant :

64. L'article 219 de cette loi est abrogé.

Donc, c'était par amendement.

Explication... Il n'y a pas d'explication, là, c'est suite aux recommandations lors des consultations particulières, donc même raison. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Y a-t-il des interventions sur l'amendement? Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : ...préciser, là, j'aurais dû le poser à l'article précédent, mais c'est quels groupes auxquels le ministre fait référence, là, qui l'a convaincu de retirer l'article? Est-ce que c'étaient les débats avec les médecins de santé publique?

M. Boulet : La CSD, l'UTTAM puis un autre organisme, là, qui s'étaient prononcés là-dessus et qui nous demandaient le statu quo.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est bien? Alors, est-ce qu'il y a d'autres questions sur l'amendement déposé à l'article 64? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons voter... nous allons aller à la mise aux voix pour l'amendement à l'article 64.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Pour.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'amendement à l'article 64 est adopté.

Nous allons maintenant aller à la mise... D'abord, y a-t-il des interventions à l'article 64 tel qu'amendé? Oui?

M. Leduc : Non. Bien...

La Présidente (Mme IsaBelle) : L'article 64.

M. Leduc : Il n'est pas rejeté?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Non. Ce n'est pas la même chose, on m'a bien expliqué que ce n'est pas tout à fait pareil, là.

M. Boulet : Ça revient au même.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, mais il faut quand même qu'on passe à la mise aux voix de l'article 64 tel qu'amendé.

M. Boulet : O.K. C'est beau.

M. Leduc : O.K. Qui vise à le biffer?

M. Boulet : C'est parce qu'il est abrogé, c'est ça, exactement.

M. Leduc : C'est beau. Je pensais que c'était...

M. Boulet : O.K. Moi aussi, je pensais ça.

M. Leduc : Bien, parce que, pour votre précédent, vous n'avez pas... vous n'avez pas fait deux votes au vote précédent.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parce que ce n'est pas pareil. Un, on supprime littéralement l'article, alors qu'ici on ne supprimait pas l'article...

M. Boulet : On abroge l'article 219.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est ça.

M. Boulet : O.K., je comprends.

La Présidente (Mme IsaBelle) : On abroge un autre article, c'est ça.

M. Boulet : O.K., c'est beau.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Ça vous va?

M. Boulet : Oui.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il y a une différence entre les deux.

Alors, je reviens. Est-ce que l'article 64... On va passe à la mise aux voix de l'article 64 tel qu'amendé.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Pour.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'article 64, tel qu'amendé, est adopté.

Nous allons maintenant à l'article 66. Oui, député de... d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Vous ne vous rappelez pas de ma circonscription, Mme la Présidente? Ça fait 100 heures qu'on travaille ensemble, là...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, oui, oui.

M. Leduc : ...plus les autres projets de loi. J'aurais un 64.1.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oh! un 64.1. O.K.

M. Leduc : Oui, c'est ça. Mais je ne me ferai pas prendre deux fois, là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Non, non, non, je pensais que vous alliez me dire un 66.1. Je me disais : Attendez, vous, là, là.

M. Leduc : Je ne me ferai pas prendre deux fois, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : D'accord. Écoutez, vous avez... Nous allons... Est-ce qu'il est prêt et tout? Il a été acheminé? Mais nous allons quand même suspendre...

M. Leduc : O.K. Oui, puis je peux en parler au ministre, s'il le désire.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, pour prendre le temps. D'accord? Alors, nous allons suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 55)

(Reprises à 16 h 27)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, député d'Hochelaga-Maisonneuve, vous aimeriez prendre la parole? C'est bien ça?

M. Leduc : Oui, Mme la Présidente, merci. J'aurais voulu avoir un échange à micro ouvert avec M. le ministre concernant un aspect qui me semble assez important, là, de discuter dans le cadre de cette réforme de la santé et sécurité au travail, et plus précisément de ce bloc sur le Bureau d'évaluation médicale, qui est la possibilité, voire le droit qu'on pourrait et qu'on devrait, à mon avis, reconnaître à une personne qui est obligée, là — je pense que c'est le bon mot — de se rendre devant un médecin du BEM, donc son droit de pouvoir être accompagnée par une personne de son choix lorsqu'elle est convoquée, en quelque sorte, devant un médecin du BEM. Ce n'est pas le cas, actuellement, puis ça fait quand même longtemps que c'est un enjeu qui est soulevé par différents groupes qui ont eu des échos et des témoignages de personnes qui ont trouvé l'exercice très anxiogène, je l'ai dit, et je pense que je pourrais aller jusqu'à dire «très traumatisant».

On comprend que, quand on se rend devant un médecin du BEM, c'est qu'on a eu notre première évaluation par notre médecin qui a charge, bien sûr, mais il y a aussi eu, probablement... en fait, il y a certainement eu l'évaluation du médecin de l'employeur ou celui de la CNESST, puis là on se ramasse devant le médecin du BEM. Ce n'est pas un moment agréable, c'est un moment tendu, un moment où est-ce qu'on se fait réexaminer pour une troisième fois de la tête aux pieds. Et ils ne sont pas tenus, les médecins du BEM, dans l'ordre actuel des choses, d'accepter qu'une personne puisse accompagner le salarié ou la salariée qui se présente devant eux, alors que, comme je vous le dis, ça peut être très stressant, et que d'avoir une personne qui nous accompagne... Et c'est souvent le cas dans plein d'autres domaines, dans le droit — on a siégé pendant combien de mois, ici, sur l'exploitation sexuelle du mineur? — à quel point c'est important, des fois, dans les étapes devant un tribunal, par exemple, de se faire accompagner, d'avoir une personne de confiance avec soi. Le BEM, ce n'est pas un tribunal, on s'entend, mais ça fait partie d'un système judiciaire très complexe, très difficile, très anxiogène. C'est une étape, hein? Souvent, ça ne s'arrête pas là, au BEM, ça va continuer au tribunal, au TAT. Or, la possibilité d'être accompagné à ce moment-là me semble assez importante.

• (16 h 30) •

Et puis, encore une fois, Mme la Présidente, je ne sors pas ça d'un chapeau, c'est une recommandation qui était... c'est un enjeu qui était soulevé par la Commission de l'économie et du travail, notre commission, au fameux rapport de 2006 — ça fait quelques fois qu'on y fait référence — puis, dans des mesures qui étaient... dont la mise en application était identifiée dans le rapport comme incomplète ou problématique, la commission a souligné, à la page 9, de son rapport, l'«amélioration des rapports humains entre [le médecin expert] et [le travailleur accidenté]».

Puis il y a un petit extrait qui est assez intéressant que je vais vous lire avant de voir ce que le ministre peut me dire à ce sujet-là : L'aspect humain du processus d'évaluation médicale. On est à la page 18-19 du rapport : «L'une des priorités de la Commission de l'économie et du travail consiste à ce que l'aspect humain de l'évaluation médicale dans le cadre d'un processus de contestation soit amélioré. D'abord, il s'avère inconcevable que le travailleur accidenté qui le désire ne puisse pas être accompagné d'une personne de confiance lors d'un examen au BEM. Dans le rapport entre le médecin membre du BEM et le travailleur accidenté, la relation de confiance médecin-patient est plus que fragile. En effet, l'expert du BEM est souvent considéré comme celui qui cherche à contredire le médecin traitant et à "couper l'indemnité", et ce, malgré le fait qu'officiellement son rôle soit neutre. S'il était un véritable tribunal, appliquant la loi de façon large et libérale, il en serait autrement. Mais puisqu'il intervient plutôt à titre d'expert et que son avis lie la CSST, le travailleur accidenté, qui [...] est peut-être»... qui est seul, peut-être, à son énième... «qui en est peut-être — pardon — à [sa énième expérience]... expertise médicale — on va y arriver — peut ressentir une certaine méfiance à son endroit. Le fait d'interdire la présence d'un accompagnant de confiance pour le travailleur renforce cette perception et contribue à fragiliser davantage la victime d'une lésion professionnelle.

«De la même façon, le comportement de l'expert du BEM doit être irréprochable. Son intervention s'intègre dans un processus judiciaire ou quasi judiciaire et, conséquemment, la qualité de son approche doit être exemplaire.»

Alors, je le disais tantôt, je le répète, notre objectif initial, c'était d'abolir le BEM. Ça n'a pas été possible, donc on essaie, cette fois-ci, de s'inscrire dans la volonté du ministre, qui est de l'améliorer le plus possible, de le rendre le moins anxiogène possible. Il me semble que cette idée-là, de pouvoir permettre à la personne qui est, en quelque sorte, convoquée au BEM d'être accompagnée par une personne de son choix soit une solution particulièrement intéressante à envisager. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Est-ce que M. le ministre veut répondre à cette remarque?

M. Boulet : Absolument. Je pense que c'est important, je l'ai réalisé, je le réalise encore dans cette commission parlementaire là, à quel point il y a un côté anxiogène tant pour les travailleurs que les entrepreneurs. C'est des matières spécialisées, c'est un bureau d'évaluation médicale.

Mais je tiens quand même à rassurer le collègue, c'est un processus qui est administratif, là. Ce n'est pas, à ce stade-là, des représentations puis de l'argumentation parce qu'il ne rencontre pas les médecins, ni le médecin traitant ni le médecin désigné par l'employeur. Il évalue le travailleur, et c'est clair que, quand il fait ça, il est soumis à son code de déontologie. Il doit traiter le travailleur avec humanité, avec respect, avec civilité, avec dignité. Ça, c'est acquis. Puis il y a aussi un guide de l'expertise, donc pour le bénéfice du médecin qui fait des expertises, qui est préparé par le Collège des médecins.

Puis je regardais un article, tout à l'heure : «...un tiers peut être présent au cours [d'une] entrevue [quand] un interprète est requis ou que la personne soumise à l'expertise est vulnérable et a besoin d'être représentée.» Donc, ça, c'est acquis. Puis est-ce que c'est le médecin du BEM qui détermine si la personne est vulnérable? Oui, mais il faut se fier à son humanité puis à sa conscience professionnelle, puis c'est important que je le mentionne.

Puis on dit : «Le médecin expert peut toutefois accepter cette présence — il peut toutefois — si elle ne nuit pas à son indépendance professionnelle, à la protection du secret professionnel ou à la capacité du patient d'aborder certains sujets.» C'est un guide de l'expertise qui découle du code de déontologie. L'impossibilité technique que j'ai, c'est d'écrire, dans une loi, une matière déontologique qui ne relève pas de nous, en vertu du Code des professions puis en vertu des codes de déontologie de chaque profession.

Il y a aussi une jurisprudence, je ne dirais pas abondante, là, qui est assez claire. En fait, il y en a deux natures : quand c'est une question de nature médicale qui est soulevée, le travailleur consent implicitement, il y a un consentement implicite à se faire examiner par l'employeur dans le cas présent; puis il y a aussi une jurisprudence qui dit que le médecin a le droit de refuser une autre personne, un tiers, pour préserver son indépendance professionnelle. Donc, c'est, selon moi, important de rassurer les travailleurs, de leur dire que nous comprenons la réaction que ça peut engendrer. En même temps, il faut faire confiance aux membres du BEM, ils sont soumis à des codes de déontologie. Il y a un guide de l'expertise qui est préparé par leur corporation professionnelle.

Puis je veux juste, parce que je l'ai mis dans le bureau... ou au bureau du Greffier, plutôt, le guide préparé par le CCTM, où là il y a une imposition, au CCTM, de vérifier la probité, la réputation, s'il y a déjà eu des plaintes à l'égard des médecins qui sont recommandés au ministre du Travail, et d'obtenir des lettres de référence puis des lettres de recommandation. Ça fait qu'il y a un processus, en amont, de sélection qui est très serré puis après ça il y a un faisceau de règles déontologiques qui impose au médecin de respecter le travailleur. Mais de dire... Tu sais, je pense, mes commentaires devraient contribuer, là, à rassurer puis à répondre à vos préoccupations.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Je comprends qu'il y a un enjeu de respect, en quelque sorte, des pouvoirs qu'on octroie aux différentes organisations, là, qui représentent, par exemple, les médecins, là, ici, qui visent à autodéterminer un peu leur patinoire puis leur façon de fonctionner. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'explorer... puis j'y pense, pendant qu'on échange, là, mais le ministre est certainement un habitué des conventions collectives comme je le suis, et des nombreuses références, puis même dans le Code du travail ou, en tout cas, certainement dans les normes du travail, au concept de «sans motif raisonnable»? Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'aller insérer quelque chose du genre, que le médecin du BEM ne peut refuser l'accompagnement d'une personne sans motif raisonnable? On viendrait peut-être, avec ce genre de libellé là, encadrer plus que nier...

M. Boulet : C'est quel article?

M. Leduc : ...le pouvoir... je ne sais pas trop comment on l'appellerait, là, mais le pouvoir de décision ou d'autodétermination des médecins d'un point de vue professionnel, des ordres professionnels.

M. Boulet : Malheureusement, c'est sûr que je ne peux pas écrire dans une loi que le médecin doit respecter son code de déontologie, là, je pense que c'est clair, il y a des possibilités de plainte. Là où je peux, cependant, rassurer le collègue, c'est qu'il y a même des plaintes... puis ça, ce n'est peut-être pas connu, que je le dise, c'est important, un travailleur pourrait faire une plainte au BEM, au directeur médical du Bureau d'évaluation médicale, et le directeur médical va rapporter toutes les plaintes au Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre. Et donc le CCTM pourrait me recommander de retirer... Tu sais, quand tu nommes, tu as le droit de destituer, là, tu as le droit de dénommer. Et c'est quand même assez... En fait, c'est très, très peu connu. Moi, je ne savais pas qu'on pouvait aller jusque-là. Puis évidemment il y a la plainte au syndic, aussi, qui peut... qui est toujours possible, qui génère une enquête.

Mais il y a comme... au-delà du processus de sélection, qui est très, très serré en termes de vérification de la probité puis de la façon de faire, en plus, il y a le code de déontologie, le guide de l'expertise. Pour le tiers, on dit qu'il peut... si une personne vulnérable a besoin d'accompagnement puis... Mais, pour des raisons d'indépendance professionnelle, c'est difficile, là, d'embarquer dans un processus au-delà de ça. Mais la plainte, je le redis, là, au directeur médical du BEM, ça peut avoir un effet assez important parce que c'est référé au CCTM, puis le CCTM, bien, avec son guide de sélection, il serait contraint de recommander que cette personne-là, dépendamment de la nature de la plainte, puis de sa gravité, puis... Mais il y aura une enquête, puis le syndic aussi fait une enquête. Merci.

M. Leduc : Mais, quand vous me parlez d'une plainte, on parle, ici, d'une plainte d'un médecin qui aurait refusé qu'une personne soit accompagnée?

M. Boulet : Non, une plainte d'un médecin qui ne s'est pas bien comporté, qui n'a pas agi avec humanité, civilité, dignité puis respect. Parce que, tu sais, quelqu'un qui est anxieux puis qui se présente devant un médecin qui bouscule, ce n'est pas acceptable, puis ça... C'est certain qu'un travailleur ou une travailleuse peut dire : Ça n'a pas de bon sens parce que... Il y a quand même, tu sais, une vie privée, là. Tu sais, c'est médical, puis vous le dites, la personne doit être examinée pour ce qui est nécessaire pour les fins de... tu sais, puis, si tu as un problème à un doigt, est-ce que ça requiert un examen... Tu sais, la personne peut se sentir envahie ou être victime d'une intrusion qui n'est pas acceptable ou tolérable, puis elle peut faire une plainte, puis ça, ça peut faire l'objet d'une enquête. Ça fait que les membres du BEM, ils sont soumis à probablement des comportements qui sont parfois supérieurs à des médecins. C'est sûr qu'on ne se mettra jamais totalement à l'abri des abus ou des comportements qui ne sont pas corrects mais, au moins, on a des mécanismes de plainte puis de redressement.

• (16 h 40) •

M. Leduc : Vous l'avez reconnu tantôt, c'est un processus au complet, ou, en tout cas, cette section-là, qui est certainement anxiogène. C'est certain que, si vous me dites qu'il est possible, là, de faire une plainte envers un médecin, pour une personne qui est déjà dans une situation anxiogène, imaginez, après ça, faire une plainte au syndic ou au CCTM contre un médecin. Vous n'êtes peut-être même pas syndiqué, pas représenté, vous êtes tout seul. Si vous faites une plainte, il va falloir que vous donniez une version des faits, ça va être votre parole contre celle du médecin.

Sur papier, c'est intéressant, ce que vous me dites. Dans le réel, puis encore une fois, dans l'effectivité du droit, c'est une tout autre réalité, d'où l'intérêt et, je trouve, l'importance d'évaluer la possibilité d'avoir une personne qui l'accompagne. Pour faire une plainte...

M. Boulet : Quand tu fais une plainte...

M. Leduc : ... — si vous me laissez juste terminer mon idée, M. le ministre — pour faire une plainte, là, contre un médecin, quand c'est votre parole contre la sienne, il n'y aura pas de témoin, là, tu sais, on peut imaginer qu'on part avec deux prises, là, quand tu es un simple salarié face à un médecin. Donc, s'il y a un témoin avec vous, on lui donne plus de chances.

M. Boulet : Tu sais, la plainte, là, tu n'embarques pas dans un contentieux. Et on me confirme que, récemment, quand même, il faut que je le dise à micro ouvert, là, il y a deux membres du BEM qui ont quitté suite à des plaintes, parce que le directeur médical transmet ça au CCTM, et ils ne voulaient pas être contraints d'être enquêtés, donc ils quittent d'eux-mêmes. Ce n'est quand même pas peu dire quant à l'impact qu'une plainte peut avoir. Puis on n'a pas 2 000 médecins au BEM, là, il y en a à peu près 80, ça fait que c'est dire comment dénoncer, c'est important. Dire ce que tu subis, dire l'irrespect, puis l'incivilité, puis le comportement qui n'est pas correct, il faut le dénoncer, puis ça donne des résultats.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Y a-t-il d'autres interventions, député d'Hochelaga-Maisonneuve? Parce qu'il y a aussi le député de Jonquière qui aimerait intervenir. Moi, je tiens à vous dire qu'on est dans une discussion libre, là, hein, parce qu'on n'est pas sur un amendement ni sur un article.

M. Leduc : Dernière question, Mme la Présidente, si vous me permettez : Est-ce qu'on a les chiffres du nombre de dossiers traités par le BEM qui vont être traînés devant le TAT, la proportion?

M. Boulet : En fait, les décisions de la CNESST qui font suite à l'avis du BEM, qui font l'objet d'une contestation au Tribunal administratif du travail...

Des voix : ...

M. Leduc : On peut peut-être passer au député de Jonquière en attendant, là, mais c'est un chiffre qui m'apparaît essentiel à avoir sous la main.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.

M. Boulet : Bien oui, bien sûr.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Alors, on va y aller, bonne idée. Député de Jonquière, à vous la parole.

M. Gaudreault : O.K. Juste pour être clair, on est... là, on est sur le temps de l'article 64?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Non, c'est ce que je viens de dire, là on n'est sur aucun, là, ni sur amendement ni sur un article, alors...

M. Gaudreault : Sur rien?

M. Boulet : En fait, collègue, c'est juste qu'il y avait une intention de déposer un amendement, puis, comme on a eu une discussion, on a convenu de faire... plutôt qu'il y ait un amendement, qu'on ait une discussion à micro ouvert, comme on le fait.

M. Gaudreault : Ah! O.K., O.K. Bien, c'est correct, là. Je veux dire, c'est... on fait du droit parlementaire nouveau, parce que c'est...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, c'est ça, c'est très rare. Moi, je vais vous dire... C'est vrai.

M. Boulet : Est-ce que c'est correct?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, oui.

M. Gaudreault : Oui, oui, c'est correct. C'est juste que, tu sais, il faut qu'on... En tout cas, moi, je suis peut-être trop formaté, on a besoin de temps en fonction de tel article, mais je n'ai pas de problème avec ça, là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est vrai que c'est rare.

M. Gaudreault : Mais je veux juste savoir... Parce que ce que je comprends du ministre, c'est qu'il nous dit : Il y a une forme d'équité, tu sais, pour... quasiment une équité procédurale, là. Donc, quelqu'un qui se sent non respecté dans sa dignité ou qui vit de l'anxiété pourrait faire une plainte au CCTM, c'est ça?

M. Boulet : Il peut faire une plainte au BEM, puis le directeur médical, il soumet ça au CCTM, puis, bien sûr, parallèlement, il peut faire une plainte au syndic, mais la plainte au directeur médical qui va au CCTM, bien, ça a presque un impact immédiat. Évidemment, ça dépend de la nature de la plainte, là, mais, oui, tout à fait, c'est ...

M. Gaudreault : Oui, oui, mais est-ce que le CCTM a le nom du médecin?

M. Boulet : Oui, tout à fait. Puis, dès que le nom... je peux vous assurer, là, dans les cas récents, là, dès que le nom arrive sur la table du CCTM, les médecins, ils se retirent.

M. Gaudreault : Donc, le CCTM, lui, il reçoit la plainte avec le nom du médecin traitant.

M. Boulet : Oui, puis il détermine... puis, comme c'est lui qui recommande puis qui fait le processus de vérification diligente, là, dans le guide... dans la politique que j'ai déposée ce matin, bien, il va recommander que cette personne-là, encore une fois, dépendamment de la nature de la plainte, soit dénommée.

M. Gaudreault : O.K. Ce n'est pas, comme, juste une plainte générale, le CCTM est capable d'identifier le problème.

M. Boulet : Oui, oui, puis j'ai donné des exemples tout à l'heure, puis le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve a été clair aussi là-dessus, là, sur le caractère anxiogène puis l'obligation du médecin de traiter avec respect puis humanité le travailleur.

M. Gaudreault : O.K. Une fois, donc, que cette plainte est transmise au CCTM avec le nom du médecin, c'est quoi, la suite? Est-ce que c'est le... cette situation est versée dans le dossier du travailleur dans le processus, là, au CNESST?

M. Boulet : Non, non.

M. Gaudreault : Est-ce que ça se rend juste... Est-ce que ça... il va rester des traces jusqu'au tribunal, disons, si ça se rendait au Tribunal administratif?

M. Boulet : Non, c'est totalement privé, c'est une affaire entre le médecin et le CCTM puis, ultimement, le ministre qui dénomme sous recommandation du CCTM, puis ça ne va absolument pas dans le dossier CNESST.

M. Gaudreault : O.K. Est-ce que ça devrait?

M. Boulet : Si le travailleur le souhaite, moi, je pense que ça pourrait faire partie des notes évolutives, là, qui sont dans le dossier. Si le travailleur communique avec son agent d'indemnisation puis qu'il rapporte les faits, l'agent, normalement, il collige toute l'information, et ça serait partie intégrante du dossier, dans un cas comme ça.

M. Gaudreault : Donc, ça serait à la discrétion du travailleur, à ce moment-là.

M. Boulet : Bien, c'est si un travailleur veut garder ça. Je ne sais pas, peut-être qu'il y a eu une atteinte... pas à la pudeur ou de quoi que le travailleur veut garder confidentiel, il ne serait pas contraint de le dire à la CNESST. S'il prend l'initiative parce qu'il se dit que ça peut avoir un impact sur la décision finale ou sur la légitimité de l'avis du BEM... puis là c'est super hypothétique, là, c'est des scénarios, à mon avis, qui existent... qui sont très rares, mais, si ça peut avoir un impact sur la décision ultime puis si ça va au Tribunal administratif du travail, bien, il va le dire à l'agent d'indemnisation, puis lui, il fait des pages, là, des notes évolutives, puis ça serait dans le dossier, oui, il n'y a pas d'inquiétude.

M. Gaudreault : Ça veut dire que, si le travailleur, à ce moment-là, dit : Je souhaite que cette plainte soit versée à mon dossier ou à la CNESST, à ce moment-là, ça peut laisser des traces, si jamais ça se rend jusqu'au Tribunal administratif.

M. Boulet : Absolument, bon point, puis, oui, tout à fait. Ça fait que c'est quand même un excellent filet de protection, puis ça, ça rajoute aux commentaires que j'ai échangés avec le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Gaudreault : Ça va jusqu'à maintenant, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, député d'Hochelaga-Maisonneuve... ou, M. le ministre, est-ce qu'on a obtenu les statistiques?

M. Boulet : Les statistiques, oui, je vais vous les donner.

Des voix : ...

M. Boulet : Donc, ce n'est pas parfait comme statistique, là, mais, à la question les avis du Bureau d'évaluation médicale — puis, tu sais, on disait, bon an, mal an, là, il y en a 11 000 — il y en a 7 953. La statistique la plus récente que j'ai, en 2018, 7 953 sur 11 000.

M. Leduc : ...la commission va être contestée au TAT.

M. Boulet : Exact, qui confirme l'avis du BEM, du Bureau d'évaluation médicale.

M. Leduc : C'est quand même beaucoup. C'est quoi, à l'oeil? 75 %, 80 %, peut-être?

M. Boulet : Pardon?

M. Leduc : Ça doit être 75 %, 80 %, dans ces eaux-là.

M. Boulet : Oui, oui.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions?

• (16 h 50) •

M. Leduc : Oui, oui, rapidement, Mme la Présidente, oui. Est-ce que... Bon, vous venez de mentionner, M. le ministre, deux plaintes qui ont fait... deux médecins qui ont fait l'objet d'une plainte et qui se sont retiré...

Ah! vous regardez les friandises distribuées par le Parti libéral, hein? J'ai perdu votre attention.

M. Boulet : Oui, mais c'est parce que j'anticipe que ça vienne de notre côté, mais elle ne nous écoute pas. Parce que j'ai l'impression qu'elle va faire le tour. C'est Mélissa, hein?

M. Leduc : Les oppositions avant. Il faudrait que vous acceptiez plus d'amendements de la part du Parti libéral, peut-être.

M. Boulet : Mélissa, on parle de toi, là, Mélissa.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous pouvons poursuivre.

M. Leduc : Oui, oui, nous poursuivons, Mme la Présidente.

Alors, plus sérieusement — il est temps que ça achève, la session parlementaire, mon Dieu! — alors, deux médecins ont fait l'objet d'une plainte et se sont donc retiré, c'est ce que vous m'avez expliqué tantôt. Est-ce que la nature de ces plaintes sont publiques? Est-ce qu'on peut avoir une idée de ce qui a été soulevé puis qui fait en sorte que les deux médecins se sont retiré?

M. Boulet : Ah! absolument pas, c'est totalement confidentiel. C'est des plaintes privées, et ce n'est pas public.

M. Leduc : Tantôt, vous disiez que la plainte était faite soit au syndic ou soit au CCTM.

M. Boulet : Ah! bien, évidemment, quand c'est dans le contexte d'une évaluation par le Bureau d'évaluation médicale, il y a un processus de plainte là, mais ça n'enlève pas le droit d'une personne de faire une plainte au syndic, soit une plainte au syndic, ou l'autre, ou les deux à la fois. Ce qui est recommandé, c'est de faire une plainte au BEM. Le directeur médical, il doit soumettre ça au CCTM. Moi, je pense, c'est l'avenue privilégiée, là, puis c'est moins anxiogène qu'un syndic qui fait une enquête.

M. Leduc : Donc, la plainte n'est pas publique au sens de grand public, mais certainement, donc, les administrateurs du CCTM, donc le paritarisme syndical-patronal, en ont une description ou carrément accès, là.

M. Boulet : Bien, ils ont, d'ailleurs... vous avez vu, dans la politique générale, là, quand ils font la vérification diligente, ils obtiennent des lettres de recommandation puis ils vérifient s'il y a eu des plaintes. Ça fait qu'ils font un examen, c'est comme une entrevue complète, là : ils font une vérification des plaintes passées au syndic, la nature des plaintes, ça fait que... Est-ce qu'ultimement... Oui, à mon sens, les membres du CCTM, ils vont savoir que ce médecin-là... Puis peut-être que les deux qui ont quitté, c'est qu'ils se sont fait dire : Regarde, tu sais... mais ils ont quitté de leur propre initiative.

M. Leduc : Et là, quand ils quittent de leur propre initiative suite à une plainte, vous me confirmez que les membres du CCTM ont accès à la plainte et donc aussi au nom du médecin qui a fait l'objet de la plainte. S'il quitte de sa propre initiative, est-ce que, dans le fond, lui, il s'évite cette déclaration-là interne, si je peux dire? Voulez-vous que je reformule?

M. Boulet : Si les membres du CCTM ont accès à l'information relativement à la nature de la plainte? Oui. Je vous réponds de nouveau, c'est oui.

M. Leduc : Et, si le médecin, lui, s'est exclu de lui-même, est-ce que ça a bloqué cette séquence-là?

M. Boulet : Non, absolument pas, absolument pas, parce qu'il faut éviter aussi qu'il soit de nouveau recommandé.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, c'est tout comme échange, bref échange? Oui? Est-ce que je comprends, député d'Hochelaga-Maisonneuve, que votre intention de déposer un amendement est annihilée?

M. Leduc : Vous alliez dire «rejetée», hein?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, bien, pas «rejetée», là, mais elle ne...

M. Leduc : On se connaît tellement, maintenant, Mme la Présidente, qu'on se devine les mots qu'on va utiliser.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui. Donc, il n'y aura pas d'amendement de déposé?

M. Boulet : Non.

M. Leduc : Je vais m'abstenir de le déposer, oui.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Alors, nous continuons à l'article 66. M. le ministre.

M. Boulet : Oui, merci, Mme la Présidente.

L'article 221 de cette loi est modifié par le remplacement du deuxième alinéa par les suivants :

«Lorsqu'il se prononce sur la date de consolidation d'une lésion professionnelle, le membre du bureau doit également se prononcer sur l'existence et le pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique du travailleur ainsi que l'existence et l'évaluation de ses limitations fonctionnelles, lorsque cette atteinte et ces limitations n'ont pas été déterminées. Il n'a pas à se prononcer si des raisons d'ordre médical l'en empêchent. Il doit alors exposer ces raisons dans son avis.

«Lorsqu'il est d'avis que la lésion ne requiert plus de soins ni de traitements, le membre du bureau peut se prononcer sur la date de consolidation, auquel cas le deuxième alinéa s'applique.»

Explications : Bien, c'est de demander, comme j'ai déjà expliqué, aux membres du Bureau d'évaluation médicale, quand la lésion est consolidée — donc qu'il n'y a plus... la consolidation, vous savez que c'est la stabilisation de la lésion au point où il n'y a plus d'amélioration prévisible, c'est comme ça que c'est défini dans la LATMP — donc, qu'ils se prononcent aussi sur l'atteinte permanente et les limitations fonctionnelles. Puis également, s'ils se prononcent sur la suffisance des soins ou traitements, ils se prononcent sur la date de consolidation.

Puis évidemment le but, c'est d'éviter le va-et-vient, parce que l'employeur pourrait redemander, si c'est consolidé — donc, je répète, c'est stabilisé, il n'y a plus d'amélioration prévisible — qu'ils se prononcent aussi sur l'atteinte permanente et les limitations fonctionnelles parce que c'est relié, c'est un corollaire logique, l'atteinte et les limitations sont un corollaire logique de la date de consolidation. Et, bon, je pense que ça diminue le nombre de fréquentations au Bureau d'évaluation médicale de la part des travailleurs. Et voilà, ça complète cet article 66.

Une voix : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait, mais n'y a-t-il pas un amendement, M. le ministre? Oui?

M. Boulet : Oui, j'ai un amendement, puis c'est pour le texte en anglais :

Remplacer — donc, amendement — dans le texte anglais du deuxième alinéa de l'article 221 de la loi proposé... Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles proposé par l'article 66 du projet de loi, «degree» par «percentage».

Explications : C'est proposé par la Traduction afin que le texte anglais concorde avec le texte français. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Y a-t-il donc des interventions portant sur l'amendement déposé par le ministre à l'article 66?

M. Leduc : ...traduction à l'amendement, c'est ça?

M. Boulet : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, tout à fait.

M. Leduc : On reviendra sur la principale, là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, s'il n'y a pas d'intervention, nous allons procéder à la mise aux voix de l'amendement à l'article 66, qui n'est qu'une question de traduction.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Pour.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Abstention.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'amendement à l'article 66 est adopté.

Est-ce qu'il y a des interventions à l'article 66 tel qu'amendé? Alors, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : J'aimerais comprendre, quand le ministre fait référence au va-et-vient... ça m'échappe un peu, là, quand il dit «ça va éviter les va-et-vient».

M. Boulet : Je vous dirais que, dans la pratique actuelle, dans la majorité des cas, quand le BEM constate la date de consolidation, il se prononce aussi sur l'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique ainsi que sur les limitations fonctionnelles permanentes. Mais il y a quand même une minorité de cas où il ne le fait pas, et, s'il ne le fait pas, bien, l'employeur ou le travailleur pourrait demander de nouveau de référer le travailleur au Bureau d'évaluation médicale, ça fait que c'est comme un va, viens, puis tu retournes, puis ça, ça peut provoquer une multiplication des présences au BEM.

Puis la même affaire pour... si ça ne requiert plus de soins ou traitements, bien, prononce-toi sur la date de consolidation. Puis, si tu te prononces sur la date de consolidation... Puis, je le répète, «consolidation», c'est guéri, stabilisé, sans amélioration prévisible. Quand qu'il n'y a pas plus d'amélioration, c'est normal que le BEM se prononce aussi sur l'atteinte et les limitations. Je pense que ça donne un portrait global, un portrait clair au moment où il peut le faire.

Évidemment, s'il y a des raisons d'ordre médical qui lui permettent de ne pas le faire, il peut les exposer dans son avis. Mais, moi, cet article-là, il vise essentiellement à simplifier puis à éviter les expériences anxiogènes qui peuvent être... pas à répétition, mais ça peut être deux fois ou trois fois. Parce que, je le répète, la majorité le font, mais ils ne sont pas obligés, et, comme ils ne sont pas obligés, bien, il y en a, des BEM, qui ne se prononcent pas ni sur l'atteinte ni sur les limitations.

Je pense, c'est bénéfique pour les travailleurs puis c'est bénéfique pour les employeurs aussi parce que ça évite... au moins, quand il y a une contestation au Tribunal administratif du travail, bien, tu as le portrait global.

M. Leduc : Mais ce que je ne comprends pas... En fait, il y a plusieurs choses que je ne comprends pas. Pourquoi, à la base... C'est-à-dire que, si le médecin traitant, le médecin qui a charge ne le fait pas, là, se prononcer sur les autres éléments qu'on souligne ici, c'est-tu si grave que ça? S'il ne le fait pas, c'est qu'il y a une raison. C'est quoi, la raison de ne pas se prononcer? C'est que ce n'est pas ça qui est en litige?

• (17 heures) •

M. Boulet : Ce n'est pas tant que «c'est-tu si grave que ça», c'est que ça prolonge le processus, ça impose, dans certains cas, là, dans... Je dis la majorité, là, mettons 80 % des cas, ils le font, de toute manière. Dans le 20 % des cas où ils ne le font pas, c'est-à-dire ils ne se prononcent pas sur l'atteinte et les limitations, il y a un... ça retourne après parce qu'il n'y a pas d'avis sur l'atteinte et les limitations, et donc ça impose aux travailleurs de revenir devant le Bureau d'évaluation médicale et ça retarde le processus, d'une part, donc ça allonge les délais...

M. Leduc : Attendez, je me permets de vous interrompre, désolé. C'est que, là, vous dites : Si le BEM... si le médecin traitant ne se prononce pas, là le BEM dit : O.K., moi, je me prononce sur les affaires qu'il ne s'est pas prononcées, le médecin traitant, mais il pourrait aussi dire : Je le renvoie voir son médecin traitant. Mais, en donnant la consigne au médecin traitant de se prononcer, bien là ça ne reviendra pas au BEM après, là.

M. Boulet : Non, mais, s'il y a des raisons d'ordre médical comme ça, il peut les exposer. Et on m'informe, collègue, 98 %, 99 % des cas, c'est comme ça, ça fait que c'est ce qu'on appelle codifier une pratique établie au sein des BEM.

M. Leduc : Oui, bien, justement...

M. Boulet : Ça fait que c'est juste dans le 1 % ou 2 % des cas, ce qui veut dire, à peu près, dans une centaine...

Une voix : ...

M. Boulet : Entre 50 et 75 cas de BEM sur les 11 000 ne le font pas. Ça fait que c'est... On s'attend... Tu sais, c'est vraiment une codification d'une pratique établie puis éviter les... pas les rebelles, là, mais les... ceux qui ne le font pas. Puis, encore une fois, on va plus loin, puis ça va peut-être faire en sorte qu'il y en a plus parce qu'on prévoit la possibilité... si tu as des raisons médicales qui t'en empêchent, tu peux les expliquer dans ton avis.

M. Leduc : Ça, je comprends que ce n'est pas nécessairement super fréquent, mais, à mon avis, là n'est pas la question. Ce que je comprends certainement, c'est que vous voulez codifier une pratique existante, puis c'est justement pour ça que je soulève des objections. C'est que moi, je ne suis pas sûr que je suis d'accord avec la pratique existante. Ça fait que, si vous voulez la codifier, moi, c'est drôle, je la codifierais de l'autre bord.

M. Boulet : Bien oui, mais, collègue, il va faire un aller-retour.

M. Leduc : Bien, c'est là que je veux comprendre, là. Vous, vous dites qu'il y a un balancier, mais, si le médecin qui a charge de poste n'a pas fait les spécifications que vous attendiez, que le BEM le constate, si le BEM dit à son médecin qui a charge : Je vous demande de préciser les éléments que vous avez oublié de préciser, bien, ça ne retourne pas au BEM après, là, ce n'est pas un... ce n'est pas deux fois l'aller-retour, là.

M. Boulet : Bien oui, parce que, quand il y a une demande de référence au BEM, la CNESST est liée par l'avis du BEM. Puis, je le répète, à part 50 à 75 cas, ils le font systématiquement. Et imaginez le cas du travailleur qui ne fait pas... qui ne reçoit pas le bénéfice d'un avis qui se prononce sur l'atteinte et les limitations, l'employeur pourrait de nouveau demander une référence au Bureau d'évaluation médicale.

M. Leduc : Mais pourquoi il le ferait si ce n'était pas en litige, à la base?

M. Boulet : Bien, parce qu'il est consolidé, puis il faut qu'il y ait une détermination : Est-ce qu'il y a une atteinte? Il peut être consolidé avec zéro atteinte puis zéro limitation. Il peut être consolidé avec 5 % d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, puis là c'est identifié, puis il pourrait avoir droit à une indemnité pour dommages corporels s'il y a une atteinte permanente, s'il y a des atteintes pour... des atteintes permanentes qui donnent lieu à des bénéfices, là, des indemnités pour dommages corporels. Puis je pense que c'est de clore le processus, c'est la raison pour laquelle ils le font tous.

Mais de le codifier, ça évite de laisser la porte ouverte à ne pas le faire, à moins que tu aies des raisons, parce que c'est prévu, à moins que tu aies des raisons puis là tu les donnes, tes raisons. Ça fait que je pense que ça ne changera pas beaucoup l'état actuel des choses. Même pour les 50 à 75, ils vont continuer de faire la même chose. Mais, je le répète, sinon... puis le médecin désigné s'est prononcé sur l'atteinte et les limitations, puis là le Bureau d'évaluation médicale ne se prononce pas, c'est clair que ça va faire un deuxième BEM, puis ça, je pense qu'il faut l'éviter, en fait, je suis convaincu.

M. Leduc : O.K. Mais vous voulez l'éviter, mais l'effet concret de ça, c'est la limitation du médecin traitant, en fait.

M. Boulet : Bien, pas la limitation du médecin. Je veux dire, s'il y a des raisons de croire qu'il y a besoin de l'avis ou de l'opinion du médecin traitant, il est en échange, tu sais, il a toutes ses notes évolutives, puis c'est un avis scientifique qu'il rend, ce n'est pas un avis juridique, il rend un avis médical. Et moi, je suis... bien, en tout cas, moi, c'est ma conviction, prononce-toi sur tout ce sur quoi tu peux te prononcer; si tu ne peux pas te prononcer, dis pourquoi, puis, sur 98,5 %, disons, des cas, c'est ce qu'ils font.

M. Leduc : Mais qu'est-ce que ça veut dire, rendu là, d'abord, un médecin qui a charge? Parce que, si c'est le médecin du BEM qui finit par boucher quelques trous ou quelques éléments qui n'étaient pas précisés...

M. Boulet : Bon, je vais vous donner une statistique que je ne devrais pas vous donner, là, mais, tu sais, j'ai posé la question tout à l'heure. Tu sais, mettons, il y a 6 900 avis de BEM qui sont confirmés par la CNESST, qui font l'objet d'une contestation au Tribunal administratif du travail, je pense que 75 % des contestations, c'est des employeurs, ça fait que, forcément, 75 % et plus des avis du Bureau d'évaluation médicale sont favorables et confirment l'opinion du médecin traitant. Puis je disais, à un échange avec le collègue de Jonquière, au-delà de sa prépondérance... parce que, sur les 130 000 dossiers, il y en a seulement 11 000 qui vont au BEM, tu sais, les autres... la prépondérance a son plein effet. Mais, devant le BEM ou même devant le TAT, on le sait, c'est quoi, un contentieux, puis le médecin traitant a beaucoup plus de valeur probante parce qu'il a fait l'examen, il a fait l'attestation médicale initiale, il a fait les suivis, il a fait les rapports d'évolution, puis c'est souvent le médecin qui suit le travailleur... tu sais, c'est souvent des médecins de famille, ça fait qu'ils ont une valeur probante importante. C'est pour ça, même au BEM, il y a 17 % des cas où l'avis du BEM est infirmé, tu sais, c'est comme... ou plutôt au Tribunal administratif du travail. Ça fait que...

Puis là, juste pour revenir à l'article 66, pour moi, c'est faire la job au complet, puis c'est ce qu'ils font. Puis c'est juste de préciser dans la loi que c'est un... ils doivent le faire, à moins d'avoir des raisons. Ça ne changera vraiment pas l'état actuel des choses.

M. Leduc : Il y a une variable qu'on n'a pas abordée encore dans le cadre de cet échange-là puis c'est celui des indemnités. Quand le BEM ne se prononce pas sur une limitation, bien, le travailleur continue d'être indemnisé. Ça fait que, là, en le forçant à se prononcer, il y a une décision qui n'est pas nécessairement celle qui va être... qui serait la même que son médecin traitant, notamment parce qu'il n'a pas tous les éléments, notamment parce qu'il n'a pas tout l'historique puis la connaissance du patient, pourrait avoir une incidence quant à l'accès à l'indemnité du salarié. Est-ce que... et là je n'ai pas le rapport d'impact sous la main, mais est-ce que... l'étude d'impact, pardon. Est-ce qu'il y a des évaluations de coûts qui ont été faites dans l'étude d'impact par rapport à cet article-là?

M. Boulet : Non. Non, mais j'ai vu des cas, par exemple, où c'est l'inverse, là. C'est sûr que, si on particularise ou on individualise, il y a beaucoup de cas, mais il y a des travailleurs, des fois, que... parce que le BEM peut consolider ou qu'il est consolidé, les employeurs vont dire : Tu es consolidé, tu peux revenir, alors qu'il peut y avoir des limitations fonctionnelles, et il peut y avoir une atteinte permanente qui donne droit à d'autres formes d'indemnisation. Ça fait que toutes les situations peuvent arriver. Je pense que c'est au bénéfice de tout le monde de savoir où on en est.

Puis, quand tu es consolidé, bien, il n'y a plus d'amélioration prévisible, ça fait que, tu sais, au moins, disons les choses. Puis ça a un impact sur la capacité de retour au travail. C'est sûr que, s'il est consolidé, puis il y a zéro atteinte, puis il y a zéro limitation, bien, normalement, il est capable de revenir au travail, à moins qu'il y ait d'autres raisons, et on n'a pas intérêt à retarder ça parce que l'employeur, il va retourner le travailleur au BEM, il va faire un deuxième BEM.

Mais, encore une fois, j'ai l'impression qu'on discute tellement de 1 %, 1,5 % des cas. En général, tu sais, c'est tout le temps comme ça que ça se fait. Puis, encore une fois, je pense que c'est au bénéfice tant des travailleurs que des employeurs. Puis il y a eu des cas où ça a pu aider un, nuire à l'autre, mais je pense que, nous, notre intérêt commun, c'est de s'assurer que ça fonctionne le mieux possible.

M. Leduc : Vous me dites que c'est des rares cas, je l'entends, sauf que, ces rares cas là, il risque d'y avoir un impact très lourd, plus spécifiquement l'accès à l'indemnité, si l'article est adopté.

Je pense qu'à ce moment-ci, Mme la Présidente, je vais demander une légère suspension pour un amendement.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Mais je vais d'abord demander s'il y a d'autres interventions à l'article 66 tel qu'amendé. Il n'y a pas d'autres interventions? Non.

Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 10)

(Reprise à 17 h 25)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous avons reçu un amendement de la part du député d'Hochelaga-Maisonneuve à l'article 66.

M. Leduc : Oui. Alors, l'article 66 : Remplacer l'article 66 du projet de loi par le suivant :

66. L'article 221 de cette loi est modifié par :

1° l'insertion, dans le premier alinéa, après «212», de «sur lesquels un désaccord existe entre le professionnel de la santé désigné et celui qui a charge»;

2° la suppression du deuxième alinéa.

Dans le fond, c'est un peu la suite logique, là, des éléments que j'ai soulevés dans la discussion précédente avec M. le ministre. Dans le fond, moi, mon amendement vise à limiter l'avis du BEM aux questions médicales qui sont en litige et non sur tous les autres aspects qui pourraient ne pas avoir été soulevés ou complétés par le médecin qui a charge. Puis vraiment l'objectif, c'est de faire en sorte que le médecin traitant, le médecin qui a charge conserve autant que possible son rôle central puis que le médecin du BEM ne puisse pas le remplacer, dans les faits, quand en plus il y a absence de litige. Voilà.

M. Boulet : Évidemment, je comprends l'amendement. Je vais, encore une fois, de façon télégraphique, reprendre mes commentaires, mais peut-être en ajouter. Ça peut causer des préjudices à des droits des travailleurs, de recevoir des indemnités pour dommage corporel en cas d'atteinte permanente juste parce que son médecin ne s'est pas prononcé, et ça, ça peut avoir un effet quand même assez préjudiciable.

Deuxièmement, dans 98,5 % des cas, ils le font. Et là, si on impose une restriction additionnelle que ça prend un désaccord, ce pourcentage-là, je ne le sais pas, mais il risque de baisser considérablement, et c'est là que ça va créer un nouvel aller-retour, donc une double ou une triple expérience anxiogène.

Troisième point, les médecins qui ont charge, c'est parfois des médecins de famille puis, quand même assez souvent, qui n'ont pas... parfois, ils ne veulent pas se prononcer, nécessairement, sur l'atteinte parce qu'ils ne veulent pas aller se prononcer parce que c'est leur patient puis ils ne veulent pas demander un avis externe ou le référer à un autre professionnel de la santé qui a charge mais qui peut le soutenir. Ça, ça peut imposer un stress au médecin qui s'occupe du travailleur.

Autre élément, c'est le retour au travail, il a une durée limitée aussi, là. Puis les allers-retours au BEM peuvent avoir pour impact d'aller au-delà du deux ans, bon, quand il y a plus de 20 personnes dans l'établissement, deux ans du droit d'exercice, de retour au travail. Ça aussi, ça peut causer un préjudice additionnel, donc une perte potentielle d'indemnisation, médecins qui ont charge pas toujours désireux ou ayant les qualifications pour le faire, retour au travail, risque d'expiration. Avec le dédoublement des avis du Bureau d'évaluation médicale, moi, je pense qu'on atteint un objectif qui est au détriment des travailleurs beaucoup plus que les employeurs. Et, pour ces raisons-là, je pense que l'amendement n'a pas, selon moi, d'utilité bénéfique pour les travailleurs et, pour cette raison-là, je pense qu'on est bien — et de loin — mieux de codifier la pratique actuelle.

Puis il n'y a pas d'impact, là, c'est 1,5 % des cas. Puis 1,5 % des cas, même avec ce que nous codifions là, parce qu'on écrit clairement que tu peux avoir des raisons de ne pas le faire, tu les exprimes dans ton avis, il y a des membres du BEM qui vont dire : Bien, sais-tu... puis ça va peut-être baisser de 98,5 % à 94 % parce que les membres du BEM, ils vont réaliser que, s'ils ont des motifs de ne pas s'exprimer sur l'atteinte et les limitations, bien, ils peuvent ne pas le faire en vertu de ce qui est prévu dans le p.l. n° 59. C'était vraiment un objectif d'efficience, puis d'éviter le dédoublement, puis de respecter les façons actuelles de faire.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Y a-t-il d'autres interventions? Député d'Hochelaga-Maisonneuve.

• (17 h 30) •

M. Leduc : Je ne veux pas étirer la sauce, là, on aura eu un bon échange puis on pourra peut-être passer au vote par la suite, mais, moi, ce qui m'occupait l'esprit dans cette logique-là... puis je vous avoue que mon amendement aussi, c'est une question de cohérence avec les propos et les amendements que j'ai déposés précédemment, à savoir qu'il faut respecter la prépondérance du médecin traitant, on l'a dit à plusieurs reprises, et que, là, si on donne la possibilité, quitte... peu importe si c'est déjà une pratique établie ou pas, là, mais, si on codifie cette possibilité-là, d'un médecin du BEM d'aller, en quelque sorte, au-delà du médecin traitant s'il n'a pas couvert des aspects dans son rapport, je ne comprends pas comment ça puisse être compatible avec la prépondérance du médecin traitant, on n'a même pas la position du médecin traitant, à la base.

Alors, quitte à ce que ça fasse potentiellement une allée et venue, moi, j'avais la solution pour éviter ça, c'était l'abolition du BEM. Ça n'a pas été retenu. On verra ce qui donnera suite à tout ça, mais je pense que la prépondérance du médecin traitant m'apparaît plus importante que les avantages que vous y voyez, vous, M. le ministre, à codifier la pratique actuelle.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Il y a aussi le député de Jonquière qui aimerait intervenir.

M. Gaudreault : Oui, je voulais intervenir sur l'amendement du député d'Hochelaga-Maisonneuve. Puis ce que vient de dire le député, c'était exactement là-dessus que je voulais insister, sur la cohérence par rapport au principe de la prépondérance du médecin traitant. Alors, moi, je pense que d'ajouter «sur lesquels un désaccord existe entre le professionnel de la santé désigné et celui qui a charge» vient renforcer le fait que le médecin traitant a prépondérance, parce qu'il peut y avoir, par exemple, un diagnostic dans lequel il y a beaucoup d'impacts ou d'éléments différents et il peut y avoir un accord, par exemple, sur la nature, je ne le sais pas, moi, de la fracture, mais un désaccord sur le moment où il va être en mesure de retourner au travail, par exemple. Et moi, je pense qu'il faut vraiment que ça soit le... il faut bien diviser les choses, bien partager les éléments, et je pense qu'il faut toujours maintenir et être très, très jaloux de la prépondérance du médecin traitant.

Donc, un peu comme vient de le dire le député d'Hochelaga-Maisonneuve, moi, je pense qu'en disant... en précisant «sur lesquels il y a un désaccord entre le professionnel de la santé désigné et celui qui a charge», bien là on vient au moins spécifier ce que je viens de dire, donc la prépondérance du médecin traitant. Alors, dans cet esprit, moi, je vais être favorable à cet amendement.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Y a-t-il d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention sur l'amendement proposé à l'article 66, nous allons procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Contre.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'amendement proposé à l'article 66 est rejeté.

Nous poursuivons maintenant avec l'article 66 tel qu'amendé. Y a-t-il d'autres interventions? Oui, député de... non, député de Jonquière, pardon.

M. Gaudreault : Oui. Je voudrais bien comprendre ce qui est apporté par le ministre, le deuxième alinéa, finalement, qui ajoute à l'article 221... quand on dit, bon : «Lorsqu'il se prononce sur la date de consolidation d'une lésion professionnelle, le membre du bureau doit également se prononcer sur l'existence et le pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique [...] ainsi que sur l'existence et l'évaluation de ses limitations fonctionnelles, lorsque cette atteinte et ces limitations n'ont pas été déterminées.» Je voudrais bien comprendre ce bout-là, là, «lorsque cette atteinte et ces limitations n'ont pas été déterminées». Est-ce que ça veut dire que ça pourrait ouvrir la porte à donner davantage de pouvoirs, on va dire ça comme ça, ou de rôles au médecin désigné, le membre du bureau? Pourtant, l'atteinte et les limitations n'ont pas été déterminées. Je veux juste bien comprendre ce bout-là, là.

M. Boulet : Mais... Oui, puis c'est une bonne intervention, mais il l'avait déjà, le pouvoir, mais il était à sa discrétion, alors que, là, c'est prévu pour clore le dossier. Quand c'est guéri, quand c'est stabilisé... prononce soit sur l'atteinte puis les limitations, puis c'est 98,5 % des cas.

Puis je reviens, collègue de Jonquière, parce que je sais que ça vous préoccupe beaucoup, comme le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, comme moi, d'ailleurs, que l'opinion du médecin traitant soit prépondérante, puis c'est d'ailleurs prévu à 224, la CNESST est liée par l'opinion du médecin traitant sur le diagnostic, les soins, les traitements, la consolidation, l'atteinte, les limitations. Je vous rappellerai que, sur 130 000 dossiers actifs, il y a à peu près, bon an, mal an, 10 000, 11 000 avis du BEM. Ça fait qu'un peu moins de 10 % des dossiers font l'objet d'une demande à un arbitre médical. La vaste majorité des cas, la prépondérance, elle est pleinement effective. Puis je le dis parce que vous connaissez l'impact de la valeur probante. La valeur probante de celui qui a examiné, suivi, évalué, elle est quand même assez fondamentale.

Ça fait que c'est comme j'expliquais au collègue tout à l'heure, c'est juste pour permettre d'enrober... d'éviter des allers-retours puis d'éviter... pour permettre que le dossier soit vraiment complet.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Y a-t-il d'autres interventions? Oui, député.

M. Gaudreault : Oui. Et, «il n'a pas à se prononcer si des raisons d'ordre médical l'en empêchent», est-ce que le ministre peut nous expliquer un petit peu plus, par des exemples, par exemple, en quoi... comment ça pourrait s'incarner, ce bout-là, là, «il n'a pas à se prononcer si des raisons d'ordre médical l'en empêchent»?

M. Boulet : Mais ça peut arriver. Ce n'est pas facile d'identifier des hypothèses, là, mais, tu sais, il peut être guéri, mais il n'est pas en mesure de donner un pourcentage d'atteinte permanente ou de clairement identifier qu'est-ce qui le limite au plan fonctionnel, et ça, il pourrait dire : Ça, on a besoin d'un autre délai, ou on a besoin d'un autre moment, ou j'ai besoin d'obtenir un complément d'information du médecin traitant. Tu sais, il peut y avoir une... j'allais dire une multiplicité, mais ce n'est pas le cas, il peut y avoir plusieurs raisons. Comme dans le 1,5 % des cas, actuellement, il y a peut-être des raisons qui les justifient de ne pas se prononcer sur l'atteinte et les limitations. Là, ils vont devoir le préciser. Au contraire, je pense que ça... pas que ça encarcane, mais ça délimite les paramètres d'action du membre du BEM dans un contexte où la lésion est guérie.

M. Gaudreault : O.K. Si on poursuit avec le troisième alinéa, «lorsqu'il est d'avis que la lésion ne requiert plus de soins ni de traitements, le membre du bureau peut se prononcer sur la date de consolidation», pourquoi on dit «peut»? Rendu là, si je suis la logique du ministre, où il veut, dans le fond, c'est le cas de le dire, consolider la pratique actuelle qui est faite au BEM, pourquoi il ne va pas jusqu'au bout? Et je ne dis pas que je suis d'accord avec ça, là, mais est-ce que ça ne devrait pas... «lorsqu'il est d'avis que la lésion ne requiert plus de soins ni de traitements, le membre du bureau doit se prononcer»? Puis là je le dis a contrario, là.

M. Boulet : Ah non, mais c'est mieux... En fait, il n'y a pas de changement à cette phrase-là.

Mais je vais vous donner un cas classique, là : il n'y a plus de soins, il n'y a plus de traitements, il n'y a plus rien qui est requis... parce qu'il se prononce sur la nature, la durée, la suffisance des soins, traitements, il peut dire : Il n'y a plus de soins, plus de traitements. Ça fait que, là, on dit : S'il n'y a plus de soins et de traitements, tu peux te prononcer sur la date de consolidation. Mais il y a des cas où il n'y a plus de soins puis plus de traitements, puis le temps seul, le repos seul, sans être un soin ou un traitement, peut avoir un impact sur la date de consolidation, il peut dire : Ça va prendre encore un mois, ça va prendre encore deux mois. Ça fait que le travailleur n'est peut-être pas dans une condition de santé qui a atteint un plateau à tous égards. Ça fait que, s'il n'a pas atteint le plateau, puis qu'il y a encore de l'amélioration prévisible, sans égard au fait qu'il n'y ait plus de soins et traitements, bien, ça peut le justifier, là, de se prononcer ou de ne pas se prononcer. Je pense que je l'explique du mieux que je peux.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Est-ce que ça va, député de Jonquière?

• (17 h 40) •

M. Gaudreault : Bien, écoutez, moi, je demeure avec un fond de crainte, là, que, même si le ministre nous dit : Ah! c'est... on vient codifier une pratique existante, moi, j'ai l'impression qu'on ouvre la porte à une extension du rôle du BEM, donc ça pourrait permettre encore plus d'interventions de la part du BEM.

Moi, je demeure... Je veux dire, je ne vois pas pourquoi c'est nécessaire, à ce moment-là, de venir le codifier, s'il y a une pratique. Ne donnons pas de chances à étendre le rôle du BEM au-delà de sa pratique actuelle. Alors, je demeure avec ce doute en moi.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est bien. Y a-t-il d'autres interventions?

M. Boulet : Je ne pourrai...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Ah! vouliez-vous... Oh! excusez-moi.

M. Boulet : Je ne pourrai jamais éteindre complètement le doute en vous, collègue. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Y a-t-il, donc, d'autres interventions à l'article 66 tel qu'amendé? Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Pour.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Contre.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Contre.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'article 66, tel qu'amendé, est adopté.

M. le ministre, nous poursuivons avec l'article 68, et il y a effectivement un amendement.

M. Boulet : Écoutez, on peut... 68, 69 et 67, je vous propose, Mme la Présidente, que nous les fassions en bloc, là. C'est tous des amendements où on retire ce qui était dans le p.l. n° 59, et donc c'est des retraits suite aux consultations particulières.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Est-ce qu'on a le consentement?

M. Leduc : ...numéros, là?

M. Boulet : 68, 69 et 67.

M. Leduc : Moi, j'avais un 68.1.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Ayoye!

M. Leduc : Alors, si vous me permettez de le déposer après, ça ne me dérange pas qu'on fasse les trois en bloc, mais je ne voudrais pas me refaire pincer comme hier.

M. Boulet : On peut peut-être faire les trois en bloc et que vous déposiez votre 68.1. Moi, je n'ai pas de problème, là. Au moins, ça...

M. Leduc : De consentement, tout est possible.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Si on a le consentement de tout le monde qu'on peut faire ça?

M. Leduc : Bien, juste vérifier...

La Présidente (Mme IsaBelle) : On supprime les trois en bloc et... Parfait. Vous devez quand même les présenter un après l'autre, là, amendement 68, hein, monsieur...

M. Boulet : On peut peut-être les faire en ordre aussi, si c'est ce que vous souhaitez, là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : En tout cas, là on prend du temps à savoir qu'est-ce qu'on préfère, mais on peut...

M. Boulet : On peut les faire en bloc, là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Vous aimez mieux en ordre?

M. Leduc : ...pas certain si ça a un effet ou pas, là, dans les autres. Ça fait qu'on est peut-être mieux... Oui, oui.

La Présidente (Mme IsaBelle) : O.K. Alors, on y va en ordre. 68. M. le ministre.

M. Boulet : O.K., 68. On peut faire le 68 puis après...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Allons-y.

M. Boulet : O.K. Donc, 68 : L'article 224.1 de cette loi est modifié :

1° dans le premier alinéa :

a) par le remplacement de «en vertu de l'article 221 dans le délai prescrit à l'article 222» par «dans les 120 jours de l'envoi des contestations visées à l'article 217»;

b) par l'ajout, à la fin, de la phrase suivante : «Dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article 218.1, ce délai est de 150 jours.»;

2° par le remplacement, dans le deuxième alinéa, de «prescrit à l'article 222» par «prévu au premier alinéa».

Donc, je ne donnerai pas d'explication, là, parce que c'est retiré suite aux consultations particulières.

L'amendement, c'est simplement : Retirer... Je ne l'ai pas, excusez-moi. 68, c'est simplement : Retirer l'article 68 du projet de loi. C'est tout. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Y a-t-il des interventions sur l'amendement? Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Simplement demander au ministre qui avait demandé, donc, le retrait, juste pour faire le suivi.

M. Boulet : C'est CSD, UTTAM, puis il y en avait un autre, là, qu'on n'est pas capables d'identifier, là, mais il y avait trois groupes, en consultations particulières, qui avaient demandé qu'on...

M. Leduc : Vous n'avez pas les noms des groupes?

M. Boulet : CSD, UTTAM, puis l'autre...

M. Leduc : Ah! le même que tantôt, là?

M. Boulet : Oui.

M. Leduc : Les mêmes que tantôt? O.K.

M. Boulet : C'est Novo SST, Novo santé et sécurité du travail.

M. Leduc : Oui, oui, oui. La firme, là?

M. Boulet : Exact. Ça fait que c'est les trois.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, y a-t-il des interventions sur l'amendement? S'il n'y a pas d'intervention, nous allons procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Pour.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'article 68 est supprimé.

Nous poursuivons...

Une voix : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Ah oui, l'amendement est adopté quand même, oui, oui, oui. L'amendement est d'adopté, et l'article 68 est supprimé.

Alors, nous poursuivons. Je crois que vous aviez un amendement, député d'Hochelaga-Maisonneuve, c'est bien ça?

M. Leduc : Oui, mais là il faut que je révise... C'est ça, il faut juste que je révise si, en supprimant 224... En tout cas, j'ai besoin d'une suspension.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 45)

(Reprise à 17 h 56)

La Présidente (Mme IsaBelle) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous avons reçu un amendement déposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve. Donc, je vous invite à le lire.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente.

Insérer, après l'article 68 du projet de loi, le suivant :

68.1. L'article 361 de cette loi est modifié par l'insertion, après «sauf s'il s'agit», de «d'une décision prévue par l'article 224.1 ou».

Alors, je ne lirai pas, là, ce que ça donnerait, là, comme nouvelle lecture, là, on l'intégrera si nécessaire. Mais, en gros, comme explication, Mme la Présidente, ça fait un peu écho à une discussion qu'on a eue précédemment. Donc, encore une fois, c'est par cohérence que je le dépose. On le sait, que c'est un... ça, on l'a consenti, d'ailleurs, de manière assez unanime depuis le début, c'est un événement assez anxiogène, là, l'idée de se rendre devant un médecin du Bureau d'évaluation médicale. Il y en a même qui peuvent soutenir que, parfois, ça peut mener à une nuisance à la guérison.

Et là ce qu'il faut bien comprendre, là, c'est que la... quand le BEM se prononce, ça lie la CNESST, qui rend sa décision en conséquence, et, comme on l'a vu aussi tantôt, c'est très souvent contesté au tribunal. Sauf que c'est à partir du moment que la CNESST prend sa décision que s'appliquent les conséquences, et ça... Moi, je considère ça un peu particulier que, sur la séquence judiciaire, de A à Z, il y a comme juste... il y a une section où est-ce que les droits, notamment le maintien de l'IRR, sont préservés pour le travailleur, mais cet état de fait là s'arrête au moment où la CNESST rend sa décision postavis du BEM. Et alors, quand on part, mettons, jusqu'au... Là, il y a la DRA puis il y a le TAT, mais là il n'y a plus... là, le caractère exécutoire de la décision, là, est irrévocable, et on perd des droits.

Puis la proposition que je vous soumets, Mme la Présidente, que je soumets au ministre a pour effet, dans le fond, de retarder l'effet exécutoire de la décision de la commission au regard d'un avis du BEM. Ça fait en sorte... Là, il y a quelques conséquences que ça peut avoir, là. Moi, la plus importante, là, que j'ai soulevée d'emblée dans mes explications, c'est celle du maintien des IRR. Il y a aussi le fait que les victimes ne seront plus dans l'obligation de rechercher un emploi alors même qu'ils prétendent que leur lésion les rend incapables de l'exercer. Il y a aussi l'aspect que le maintien des soins et traitements permet de continuer à soigner la victime. Ça peut d'ailleurs avoir un effet intéressant de déjudiciarisation parce que, si on permet le maintien des soins et traitements, et que les délais qu'on a déjà abordés hier puis avant-hier du TAT sont ce qu'ils sont, et ça se prolonge, bien, le fait d'avoir encore accès aux soins et aux traitements, ça donne quasiment une chance de consolider sa lésion avant même le tribunal du TAT... avant même l'audience au TAT, pardon. Alors, ça a quand même un effet intéressant de déjudiciarisation, là, ce que je vous propose.

Puis finalement, pour les employeurs, bien, ils ne sont imputés que si les victimes ont gain de cause, au final. Alors, si en effet on a une consolidation avant qu'on se rende en audience au TAT, bien, ça peut éviter, en effet, que l'employeur soit imputé en matière de cotisations. Voilà.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. M. le ministre, est-ce que vous voulez intervenir? Il reste à peine une minute.

• (18 heures) •

M. Boulet : Oui, rapidement. Bien, écoutez, on a fait cette discussion-là déjà dans le projet de loi en ce qui concernait les amendements à la Loi sur le Tribunal administratif du travail. Je vous rappellerai que la majorité des décisions de la CNESST qui font suite à des avis du BEM, la majorité sont favorables aux travailleurs, parce qu'on peut en faire la déduction dans la mesure où c'est, 75 % des fois, des employeurs qui font des contestations au Tribunal administratif du travail. Puis, comme on a vu, si un préjudice... subi par un travailleur, il a la possibilité de demander simplement au Tribunal administratif de surseoir.

Mais je ne voudrais pas que, pour des cas... je ne dirais pas isolés, là, pour des cas particuliers, on modifie une règle, un principe général du caractère exécutoire des décisions. Puis, je le répète, là, s'ils ne sont pas exécutoires puis ils sont favorables aux travailleurs, comment on va faire ça? Puis, tu sais, moi, je pense qu'il y a un risque d'effet préjudiciable pour les travailleurs puis je ne voudrais pas faire un accroc à un principe général qui risque de nuire à des travailleurs. Puis, si la décision est favorable au travailleur puis qu'elle est... sauf s'il s'agit... donc elle n'est pas exécutoire parce que c'est une décision rendue en vertu de 224.1, est-ce qu'il va aller demander un sursis parce que la décision n'est pas exécutoire?

Mais on a eu cette discussion-là. Je pense que nos arguments ont déjà été faits. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Alors, écoutez, compte tenu de l'heure... Nous pourrons, de toute façon, poursuivre après le repas.

Alors, nous suspendons les travaux, merci, jusqu'à 19 h 30.

(Suspension de la séance à 18 h 01)

(Reprise à 19 h 34)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, votre attention, s'il vous plaît! La Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux.

Nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail.

Lors de notre suspension des travaux cet après-midi, nous en étions à l'étude d'un amendement déposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve qui introduisait un nouvel article 68.1. Alors, est-ce qu'il y avait encore des interventions sur cet amendement? Député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Oui, merci, Mme la Présidente. Comme parfois les pauses-repas ont tendance à alléger l'humeur de notre ministre, peut-être que celle-ci aura mis le ministre dans une disposition plus favorable à mon intervention, alors je m'essaie. En fait, est-ce qu'il a eu le temps de réfléchir à mon amendement sur l'heure du souper, en dehors des entrevues qu'il a faites, là, à Zone économie, par exemple?

M. Boulet : Mon Dieu! Malgré les protéines, non, ma position demeure inchangée. Non, mais je n'ai pas pris de verre de vin non plus, ça fait que je me sens très bien.

M. Leduc : Vous auriez le droit, hein? Il n'y a pas d'interdiction.

M. Boulet : Je pense que demain ce sera approprié. Puis je pense que ce sera le cas pour vous aussi, hein?

M. Leduc : Une fois que la route sera complétée, de retour à la maison, par exemple.

M. Boulet : Ah! bien, j'espère.

M. Leduc : Oui. Vous, vous avez la chance d'avoir quelqu'un qui peut conduire à votre place; moi, je vais être au volant.

M. Boulet : C'est un privilège.

M. Leduc : C'est un privilège qui est bien correct.

Écoutez, je ne veux pas refaire le grand débat au grand complet sur l'amendement que je vous ai déposé tantôt. Puis là je comprends que, malgré un bon souper, ça n'a pas été nécessairement suffisant pour vous convaincre de l'envisager. Dans ce cas-là... C'est parce que j'en avais un autre de préparé qui restreignait la portée, puis peut-être, à la place, là, de le retirer, celui-là, en redéposer un autre, je pourrais avoir l'échange verbal avec vous, voir s'il est possible d'aller dans un des aspects que j'ai ouverts.

Donc, j'avais un autre amendement en réserve qui recherchait, donc, le même effet, c'est-à-dire retarder l'effet exécutoire d'une décision de la commission qui est, évidemment, liée par le diagnostic du BEM, mais, à la place d'avoir son application sur tous les enjeux, la recherche d'emploi, les soins et traitements, l'imputation et compagnie, je le limitais vraiment à la question des indemnités de remplacement de revenu, puis ça, encore une fois, c'est, je pense, quelque chose qui est cohérent dans mon approche depuis le début de cette commission. Je suis très soucieux d'imaginer des alternatives, des idées qui pourraient faire en sorte d'éviter des scénarios, qui sont le cas actuellement, où des salariés se retrouvent sans revenu. Moi, je trouve ça dommage, même plus que dommage, en quelque part, déplorable que notre système permette ces situations-là. Je l'ai répété 100 fois, c'est anxiogène, vivre une lésion, c'est anxiogène, vivre un parcours de contestation au sein de l'appareil de la CNESST, du TAT, du BEM. Ce qui est encore plus anxiogène, Mme la Présidente, c'est quand on perd son revenu. Et c'est bête parce que, quand on perd son revenu, son IRR dans ce cas-ci, bien, ça fait réfléchir pas mal à la suite des choses en matière de contestation.

Alors, je sais que M. le ministre est très soucieux du maintien des droits, du maintien des options. C'est un peu pour ça qu'on n'a pas été de l'avant au complet avec l'abolition de la DRA, par exemple, c'est pour ça... pas plus tard qu'hier, il refusait que les employeurs puissent... qu'on limite, en fait, la portée de la contestation du médecin traitant qu'à la commission et non à l'employeur. Il veut maintenir les droits des justiciables, en quelque sorte, mais il me semble que ça serait le cas, ici présent, de l'appliquer réellement, parce que, si on veut maintenir le droit du justiciable, encore faut-il qu'il y ait les moyens de les maintenir. Et vous comprendrez que, si on perd son IRR, la possibilité financière de gérer les coûts, les coûts de santé mentale, même d'aller devant le tribunal, devant le TAT, bien, ce n'est pas à prendre à la légère, là, ce n'est pas automatique. Si on perd son IRR, on ne reçoit plus pantoute de revenu, soit potentiellement des revenus d'aide sociale, c'est souvent ce qui arrive. Décider de faire la bataille juridique jusqu'au bout avec le TAT sous l'aide sociale, ce n'est pas une décision facile, ce n'est pas une décision à prendre, encore une fois, à la légère.

Alors, est-ce que peut-être que M. le ministre pourrait envisager de vraiment restreindre, là, la portée de mon amendement, de mon article? Puis je serais entièrement, évidemment, disposé à le retirer pour le réécrire, mais donc maintenir vraiment la portée de l'effet exécutoire de la décision, là, de la commission liée au BEM, exclure la question de l'IRR pour protéger l'IRR, protéger le revenu? Puis je pense qu'il a tout à y gagner, M. le ministre, de le considérer parce qu'il est également ministre de la Solidarité sociale. Alors, si on retire l'IRR d'un salarié, c'est encore le ministre qui va être responsable de son revenu à la fin de la journée, comme on le dit en mauvais français, parce que c'est probablement là qu'il va aller, à l'aide sociale.

Alors qu'on a la chance d'avoir le ministre des deux ministères dans la même personne — c'est d'ailleurs souvent le cas au Québec — n'y a-t-il pas là un intérêt pour aussi le coût des contribuables québécois, hein? On sait que l'aide sociale est payée à travers les impôts, les taxes et impôts, de manière générale. L'IRR est payée par les employeurs, par les cotisations des employeurs. On ne refera pas le débat au complet, mais il y a quelque chose qui m'irrite dans cette idée de vouloir socialiser les coûts parce que, si on dit que l'IRR n'est plus possible pour un travailleur et que, nécessairement, on le sait, qu'il va se réfugier dans l'aide sociale, bien, on est en train de socialiser des coûts qui devraient normalement être sur les épaules des cotisations des employeurs. Moi, ce n'est pas quelque chose qui me plaît, je vous dirais, ce n'est pas quelque chose qui me semble aller de soi non plus.

Et là on a le ministre qui est responsable des deux dossiers. Tant mieux. Est-ce que, donc, si on... si je fais une intervention chirurgicale sur l'enjeu du maintien de l'IRR, il y aurait là plus de chances d'obtenir l'adhésion du ministre à mon amendement?

• (19 h 40) •

La Présidente (Mme IsaBelle) : M. le ministre.

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Tout d'abord, il faut que je reconnaisse l'empathie de notre collègue d'Hochelaga-Maisonneuve pour les travailleurs qui... C'est des cas, selon moi, très, très particuliers, là, où il y a un avis rendu par le BEM. La CNESST rend une décision entérinant l'avis du BEM, dit : Le travailleur, il est consolidé, il n'a pas d'atteinte permanente, il n'a pas de limitation fonctionnelle. La CNESST rend donc une décision de capacité de retour au travail, et là il cesse de recevoir l'indemnité de remplacement de revenu. Puis ce n'est pas en raison de l'avis du BEM qu'il arrête de recevoir l'indemnité de remplacement de revenu, c'est en raison de la décision de la CNESST, qui, évidemment, conclut que le travailleur est capable parce qu'il est guéri, il n'a pas d'atteinte puis il n'a aucune limitation fonctionnelle.

Il y a des cas, à la limite, qui peuvent arriver, mais on ne peut pas faire une règle générale à partir de cas particuliers. Et il y a un principe qui est fondamental en droit, c'est que les décisions sont exécutoires, sauf des circonstances exceptionnelles. Ici, c'est des cas vraiment particuliers, puis on ferait comme un deux poids, deux mesures parce que, pour l'employeur, tu n'as pas la pareille. Puis qu'est-ce qu'on fait avec l'indemnité pour dommage corporel, quelqu'un qui a une atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique de tant de pourcentage qui lui donne accès à une indemnité pour dommage corporel — puis, des fois, donc, la décision est exécutoire tout de suite — puis que l'employeur conteste, puis le montant est payé? Donc, il n'y a pas que... Tu sais, il y a plusieurs enjeux, là, d'aller vers une règle générale de cette nature-là.

Puis je reviens à l'article 235, je pense que, si quelqu'un subit un préjudice, il fait une requête au Tribunal administratif du travail en même temps que l'employeur fait sa contestation, puis, 20 à 25 jours après, on a vu que c'était le délai pour entendre un dossier urgent, il va obtenir un sursis. Quelqu'un qui est mis dans une situation où... qui lui est préjudiciable, les juges vont faire preuve d'humanité, vont comprendre le cas.

Mais c'est parce qu'on a fait déjà aussi ce débat-là, puis, ceci dit avec respect, je ne pense pas que la personne va faire une demande pour recevoir des prestations d'aide sociale. Elle peut recevoir des prestations d'assurance maladie en vertu du régime d'assurance collective qu'il y a au sein de son employeur. Mais il y a des travailleurs qui ne bénéficient d'aucune... puis là je vois Guillaume... aucun régime d'assurance collective, mais il y a les prestations d'assurance maladie en vertu de la loi fédérale sur l'assurance-emploi, là, qui peuvent bénéficier au travailleur. Je n'ai jamais... en tout cas, à ma connaissance, on ne m'a jamais dit : Il y a une personne qui va recevoir des prestations d'aide sociale parce qu'elle a cessé de recevoir ses indemnités de remplacement de revenu. Puis, dans un cas comme ça, manifestement, en amont, tu vas faire une demande au Tribunal administratif du travail, tu vas récupérer le droit de recevoir.

Puis, tu sais, c'est dans des cas vraiment particuliers où on ne peut pas présumer de la mauvaise foi de l'employeur, là. Si c'est, par ailleurs, légitime au plan médical, ça veut dire que, normalement, le travailleur est en mesure de faire son travail. Puis, à la limite, s'il y avait une rechute, récidive, aggravation sans nouvel événement, il peut retourner voir son médecin puis faire une nouvelle réclamation en démontrant qu'il y a une détérioration qui est capable d'objectiver, là, de son état de santé. Ça fait que moi, je trouve qu'il y a plein d'avenues. Mais je comprends votre empathie, puis je respecte ça, là, mais... Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Y a-t-il d'autres interventions à l'amendement? Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. M. le ministre a raison de faire référence à l'assurance-emploi. Par contre, la précision qu'il faudrait faire, c'est que c'est... les semaines de maladie, là, c'est 15 semaines de maladie. On a eu, en long et en large, le débat sur les délais, là, au TAT : 15 semaines d'assurance maladie pour des délais qui peuvent aller jusqu'à un an, un an et demi, des fois.

M. Boulet : ...le sursis, c'est 20... entre 20 et 25 jours.

M. Leduc : Oui, mais, ça aussi, on a eu le débat sur le sursis. Ça ne marche pas... ça ne marche jamais, le sursis. On les a vues, les statistiques, là.

M. Boulet : C'est 20, 25... Oui, mais...

M. Leduc : Ils ne sont pas accordés. Ils sont...

M. Boulet : Je n'ai pas vu de statistique que les sursis ne sont jamais accordés. Ils sont accordés au mérite. Puis moi, je me fie, encore une fois, à l'objectivité puis la compétence des juges du Tribunal administratif du travail, là.

M. Leduc : Il y a des praticiens qui m'envoyaient des exemples, hier puis avant-hier, que j'analysais un peu, des décisions du TAT, par exemple, sur des intoxications à l'arsenic. Elles avaient été coupées, là, leurs indemnités, suite à une décision du BEM, à l'examen du BEM qui lie à la CNESST. Elles avaient été coupées à l'été 2015, puis la décision du tribunal est arrivée en 2018. Trois ans, trois ans sans IRR. Alors, les 15 semaines de l'assurance-emploi sont bienvenues, mais ça ne couvre pas les trois ans d'attente avant la décision finale, ça, c'est certain. Alors, oui, il y a des gens qui vont à l'aide sociale, là, en quelque part dans ce chemin-là. Ce n'est pas rare, là, ce n'est pas... Je ne vous en parlerais pas si c'était une anecdote, un sur 1 000, là.

Une chose qu'il faut préciser aussi, c'est que les dommages corporels, ils ne sont pas payables avant la décision finale. Ça fait que la comparaison que vous me faisiez tantôt, je pense, elle est peut-être un peu limitée.

Puis finalement la raison pour laquelle je vous soumets un amendement aujourd'hui, puis même que je suis prêt à réduire la portée, vraiment, sur la question de l'indemnité de revenu, c'est que ce n'est pas des cas... Vous disiez, en ouverture, que : Ah! bien, il y a peut-être des cas par-ci, par-là, ou, en tout cas, je reprends vos mots ou je reprends votre... ce que j'en ai perçu. Les praticiens du terrain me disent que c'est leur routine, là, des gens qui perdent leur IRR à cause de cette façon-là dont on a construit le système de contestation médicolégale et qui se retrouvent dans des trous noirs de finances, là.

M. Boulet : Oui, mais 75 % des contestations à la CLP en matière médicale proviennent des employeurs. L'autre 25 %, ce n'est pas... il faudrait faire une déclinaison, mais c'est certainement des cas particuliers.

Puis, je le répète, quelqu'un qui est sans indemnité de remplacement de revenu, c'est parce que le Bureau d'évaluation médicale a considéré qu'il était consolidé sans atteinte ni limitation. Puis, s'il y a une rechute, récidive, aggravation, il peut présenter une nouvelle réclamation. Puis je connais les praticiens, mais il y a plein de corridors là-dedans, là, tu sais, comme dans tout système. Le Code de procédure civile, pour les tribunaux judiciaires, c'est 10 fois ce dont on parle. Il peut... Si un juge du Tribunal administratif du travail n'a pas accordé un sursis, c'est que ça ne le justifiait pas, je le présume. Puis, même encore là, s'il y a un juge du Tribunal administratif du travail qui est à côté, il peut faire l'objet d'une révision.

Puis moi, je crois en ce modèle-là. Puis, je le répète, il ne faut pas utiliser des cas particuliers pour en faire une règle générale, qu'à chaque fois... ça veut dire qu'à chaque fois que quelqu'un n'a pas... est consolidé sans atteinte ni limitation, puis qu'il est capable, puis qu'il y a une contestation, puis qu'on attend... Tu sais, les délais sont longs avant d'aller... d'être entendu au Tribunal administratif du travail, puis il y a tout le processus de conciliation prédécisionnelle. On va demander aux employeurs d'assumer l'indemnité de remplacement de revenu de ces personnes-là jusqu'à tant qu'il y ait une décision finale. Il me semble que c'est...

Mais je reprends les arguments que je vous ai déjà soumis, là, mais... puis je redis la même chose que je vous avais mentionnée. On ne peut pas aller dans cette direction-là puis... malheureusement.

• (19 h 50) •

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Vous avez raison, là, vous avez donné des chiffres tantôt, là : sur les avis du BEM, il y en avait 11 000, puis plus ou moins 8 000, là, qui étaient contestés et qui se rendaient, donc, au tribunal. Puis vous nous avez dit que, de ce 8 000 là, 75 %, environ, étaient contestés par les employeurs. Bien, si c'est le 25 %, la balance, là, sur lequel on discute en ce moment, ça fait toujours bien 1 000, 2 000 travailleurs par année, là, c'est beaucoup de gens.

M. Boulet : ...ils peuvent contester sur les aspects médicaux, là, mais... Dans les 25 %, il y a probablement un nombre limité que ça concerne des décisions de capacité de retour au travail, parce que ça peut être sur bien d'autres aspects, là. Donc, les motifs de contestation au TAT, je ne peux pas les décliner, là, mais ce n'est pas... ce n'est certainement pas suite à une décision de capacité. Le travailleur, il ne conteste pas la décision tout le temps quand la CNESST rend une décision de capacité.

M. Leduc : Ainsi qu'une audience pour un sursis, une audience pour une révision pour cause ou une audience au fond. Ce n'est pas gratuit, ça aussi, là. Ça demande du temps, ça demande de l'énergie, ça demande de la représentation, potentiellement, encore une fois, d'autres expertises, souvent. Puis on a vu que ça coûtait cher, cette expertise-là. Ça fait que si, en plus, vous perdez votre IRR à cause de tout ça... Vous demandez, dans le fond, aux justiciables de dépasser leurs conditions matérielles d'existence, là, qui est probablement la pauvreté, rendu là, si on perd son IRR ou, du moins, la précarité, on va le dire comme ça, vous leur demandez de dépasser leurs conditions matérielles d'existence pour évoluer comme un justiciable dans le droit tel qu'il est écrit dans nos belles lois du Québec. Moi, je vous dis bravo, c'est des belles lois, puis, dans leur essence, elles sont bien construites; dans leur pratique, souvent, il y a des failles.

Et moi, je trouve... et c'est là que j'aurais espéré avoir votre adhésion, c'est qu'on devrait tout faire, ici, nous, les législateurs, pour aller colmater ces brèches qui existent, en particulier sur la question de la sécurité du revenu dans le cadre de ce labyrinthe de contestations médicolégales. Parce que, oui, vous évoquez les sursis, mais ce n'est pas suffisant, ça ne fonctionne pas super bien, ces sursis-là, on en a amplement débattu dans la dernière journée, dans les deux dernières journées. Moi, je pense qu'il y a un pas supplémentaire qu'on doit faire pour protéger l'indemnité de revenu.

M. Boulet : Savez-vous pourquoi ça ne fonctionnait pas si bien? Parce que je ne prétendrai jamais que ça roulait comme sur des roues bien huilées, mais c'est la raison pour laquelle, à l'article 235, quand on amende la loi sur le Tribunal administratif du travail, on vient codifier le droit du Tribunal administratif du travail de surseoir, parce qu'il y avait une jurisprudence, pas abondante, mais il y avait une jurisprudence qui reconnaissait le droit du TAT de surseoir, mais qui en doutait, parce que, dans les décisions, c'était remis en question. Ça fait qu'on en faisait, mais un peu... un peu avec le pied sur le frein, alors que, là, avec l'amendement qu'on a déjà adopté puis avec la notion de préjudice, ça va ouvrir la porte beaucoup plus facilement. Puis actuellement, c'était 20, 25 jours, puis avec les remarques puis les intentions qu'on a exprimées en commission parlementaire.

Moi, j'exprime le souhait clairement que ce soit entendu dans les meilleurs délais et que l'on soit sensibles et empathiques au Tribunal administratif du travail, à la situation d'un travailleur qui pourrait être dans un contexte de précarité financière. Il y a les prestations d'assurance-emploi, il y a les régimes d'assurance maladie, mais je ne veux pas voir de cas de travailleurs qui se ramassent à faire des demandes de prestation d'aide sociale, non. Puis on parlera à leurs conseillers, s'il le faut, là, mais ils peuvent faire des nouvelles réclamations, ils peuvent faire une demande de sursis pour récupérer un droit de recevoir l'indemnité de remplacement de revenu. Ce n'est pas... C'est sûr qu'on ne peut pas accepter des situations de cette nature-là, mais on ne peut pas dire : Pour ces cas-là, la décision ne sera pas exécutoire, systématiquement, puis, dans tous les cas où il est question d'un droit à l'IRR, de demander aux employeurs d'assumer le paiement de ces coûts-là systématiquement dans tous les cas. C'est pour ça qu'on a une règle qui s'applique à des cas particuliers, c'est-à-dire notamment la demande de sursis.

M. Leduc : Moi, je pense qu'il y a un choix de verbe qu'il faut clarifier, ici. Quand vous dites «on ne peut pas», bien sûr qu'on peut. Ce n'est pas contraire à aucune charte du Québec ou du Canada des droits de la personne, là, ce que je vous propose aujourd'hui, là, auquel cas vous l'auriez sûrement soulevé puis vous auriez questionné sa recevabilité, comme vous l'avez fait hier. Puis, si ça avait été irrecevable, je me serais plié, bien sûr, au jugement.

Mais je pense qu'on peut très bien faire ce que je vous propose ce soir. La question, la vraie question, c'est : Est-ce qu'on veut le faire? Moi, quand vous me dites «on ne peut pas», j'entends «on ne veut pas». Ce n'est pas la même chose. Bien sûr qu'on peut. On a certainement la capacité technique. Ce sont nous, les législateurs ici, qui construisons les règles, discutons des règles, essayons de trouver des compromis. Quand ce n'est pas possible, il y a un système démocratique qui a élu une majorité au Parlement et qui tranche. Alors, quand on dit «on ne peut pas», soyons honnêtes, là, ce n'est pas qu'on ne peut pas, c'est qu'on ne veut pas.

M. Boulet : Je n'ai plus de commentaire.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est bien. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement? Oui. Est-ce que vous laisseriez la parole au député de Jonquière également?

M. Leduc : Une dernière intervention, puis ça va me faire plaisir de passer la puck après.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est parfait.

M. Leduc : Tu sais, dans le fond, M. le ministre, vous faites référence au fait que, là, vous avez beaucoup d'espoir que ça s'améliore, les délais, etc. Tu sais, ce n'est pas quelque chose qui va se changer facilement et rapidement. Puis, dans les jours... aujourd'hui, hier, avant-hier, on a eu tout un débat au salon bleu sur la pénurie d'éducatrices en service de garde, puis votre collègue le ministre de la Famille réfère toujours au même argument en disant : Je n'ai pas une baguette magique, il y a une pénurie d'éducatrices, il faut les former, ça prend du temps, etc., et il utilise beaucoup cet argument-là, de dire : Bien, laissez-moi, tu sais, mettre en place quelque chose et que la situation évolue. D'accord. Moi, je veux bien jouer un petit peu dans ce film-là pour les délais au TAT et les nouvelles dispositions que vous nous avez proposées jusqu'à ce moment-ci, mais certainement, en attendant que peut-être la situation s'améliore, il va encore y avoir du monde qui vont souffrir de cette perte d'IRR, qui ne seront pas capables d'aller chercher un sursis. Malgré que ça soit bien écrit dans la loi puis sur un beau papier, ils ne seront pas capables d'y aller, et ça sera le quotidien de beaucoup de personnes. Ce sera le quotidien de groupes populaires qui les défendent, qui essaient de les orienter. Ce sera le quotidien de gens qui, perdant leur revenu, ont-ils le temps, l'énergie et les ressources d'aller monter, financer un sursis, une demande, une requête, une contestation au TAT? La réponse bien franche, c'est non, là. Le choix qu'ils vont faire ou qu'ils vont être forcés de faire, c'est de prendre en condition... prendre en compte leurs conditions matérielles d'existence, et d'essayer de se réfugier dans une solution mi-figue et mi-raisin, puis peut-être renoncer à aller au bout de la logique qu'ils devraient pouvoir avoir le droit de faire, s'ils étaient dans une... dans un minimum d'aisance matérielle, ce qui, la perte de leur IRR, leur empêche de bénéficier. Mais, bon, je pense avoir fait...

M. Boulet : Non, mais... mais je comprends quand même, mais il y a... il y a un recours, puis qu'on a enraciné maintenant, c'est le pouvoir du tribunal d'ordonner un sursis, donc la capacité des travailleurs d'obtenir un sursis. Et là, de demander aux employeurs d'assumer systématiquement, quand c'est un cas d'IRR, le paiement au travailleur qui est jugé par un avis d'un spécialiste comme étant capable, c'est-à-dire consolidé, sans atteinte puis ni limitation, c'est là que le... c'est ça qui nous préoccupe, là.

Puis, vous avez raison, entre le «peut» puis le «veut», en fait... C'est sûr que, quand on fait un projet de loi, on essaie d'aller le plus loin possible, mais dans le respect des droits des deux parties, soit les employeurs puis les travailleurs. Puis, ici, je pense que nos arguments sont suffisamment précis. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, la parole est au député de Jonquière.

• (20 heures) •

M. Gaudreault : Oui, merci, Mme la Présidente. Alors, j'écoutais avec beaucoup d'attention l'échange entre le ministre et le député d'Hochelaga-Maisonneuve, et il y a quelque chose que je retiens de l'argument du ministre, qui est une règle juridique, une règle de droit, qui dit : On ne peut pas tirer une règle générale d'un cas particulier, il faut avoir des règles qui s'appliquent à tous, universelles. Je suis bien d'accord avec ça, c'est une règle de droit, mais il faut bien démêler ce qui est le général et ce qui est le particulier. Alors, ce qui m'a amené, moi, à faire la réflexion suivante, je me suis dit : Retournons à l'objet même de la loi qui nous... qui nous réunit ici depuis plusieurs heures et qui va nous réunir visiblement encore pendant plusieurs heures puis même au retour de l'été. Donc, je suis retourné à l'objet de la loi, à l'article 1. Moi, je pense que le général, il est là, la règle du général.

L'article 1 dit : «La présente loi a pour objet la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu'elles entraînent pour les bénéficiaires.

«Le processus de réparation — entre parenthèses, on est vraiment là-dedans, là, avec l'article 361 puis l'amendement à l'article qui crée l'article 68.1, donc — des lésions professionnelles comprend la fourniture des soins nécessaires à la consolidation d'une lésion, la réadaptation physique, sociale et professionnelle du travailleur victime d'une lésion, le paiement d'indemnités de remplacement du revenu, d'indemnités pour préjudice corporel et, le cas échéant, d'indemnités de décès.

«La présente loi confère en outre, dans les limites prévues au chapitre VII, le droit au retour au travail du travailleur victime d'une lésion professionnelle.»

Alors, moi, je pense que la règle générale, elle est là. Elle doit inspirer l'ensemble de notre législation, l'ensemble de notre réflexion, l'ensemble de notre travail. Puis le ministre nous dit : Au fond, ça touche peu de cas. Je suis prêt à dire... à reconnaître ça. C'est vrai, au fond, ça touche peu de cas, et on va tout faire... Donc, en disant qu'on va tout faire, c'est une admission qu'il peut y avoir des cas qui tombent entre deux chaises, sans indemnité. Le ministre nous dit : Il faut tout faire pour éviter une situation comme ça, mais moi, j'ai le goût d'ajouter : Il n'y en aurait qu'un, ça serait un de trop qui se retrouverait dans une situation sans indemnité.

Et je reviens constamment à l'objet de la loi, à l'article 1, «réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu'elles entraînent pour les bénéficiaires». Ce dont on parle ici, c'est vraiment les conséquences d'une lésion professionnelle, et on dit : «Le processus de réparation des lésions professionnelles comprend la fourniture des soins[...], [...]le paiement d'indemnités de remplacement[...], d'indemnités pour [le] préjudice corporel», etc.

Alors, considérant tout ça, moi, je pense que d'aller dans le sens qui est proposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve n'est pas d'une lourdeur démesurée, n'est pas... n'ajoute pas un poids trop lourd quand on prend l'ensemble des conséquences, qu'on fait la balance des avantages et des inconvénients. Je ne crois pas qu'il y a un poids démesuré d'inconvénients sur le dos des employeurs ou des... des employeurs, effectivement, ou des entreprises, alors qu'il peut y avoir des inconvénients très lourds sur le dos du travailleur lésé. Et, je répète, ne serait-ce qu'un seul, il y en aurait un depuis la première adoption de la loi que ce serait un de trop.

Donc, quand on regarde ça dans cet ensemble-là, pour moi, le particulier puis le général, bien, c'est... justement, c'est de couvrir l'ensemble des cas pour s'assurer de respecter l'objet de la loi, c'est-à-dire que le processus de réparation des lésions professionnelles comprend le paiement d'indemnités de remplacement de revenu parce que la présente loi a pour objet de réparer les lésions professionnelles et les conséquences qu'elles entraînent pour les bénéficiaires, toutes les conséquences qu'elles entraînent pour les bénéficiaires. Moi, je ne connais personne qui souhaiterait se retrouver volontairement dans une situation comme celle-là, alors, s'il s'y retrouve, c'est une conséquence de sa première lésion professionnelle qu'il n'a pas souhaitée. Il n'y a personne qui va souhaiter tomber dans un puits, ou de se passer une scie sur une main, ou d'avoir un... ou de subir des problèmes psychologiques, ou quoi que ce soit au travail. Donc, quand je regarde l'ensemble du portrait, pour moi, même si... je répète, qu'il y aurait un seul cas, ça serait déjà trop par rapport au risque que nous avons en adoptant l'amendement du député d'Hochelaga-Maisonneuve.

Alors, moi, pour toutes ces raisons, quand je reviens à l'article 1 de la loi, qui est l'objet de la loi, ce n'est quand même pas rien, bien, je suis obligé de dire que je vais appuyer l'amendement proposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Y a-t-il d'autres interventions à l'amendement déposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve? Je vous souligne qu'il vous reste cinq minutes, le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Ça va être plus court que ça, Mme la Présidente, c'était juste... j'avais oublié un élément, tantôt. Cette idée-là, encore une fois, je ne la sors pas de mon chapeau, c'est une recommandation du rapport de la Commission de l'économie et du travail de décembre 2006, on y a fait référence à plusieurs reprises. À la page 21, on peut lire ceci : «Qu'un mécanisme de soutien financier soit mis en place afin de protéger les travailleurs accidentés des préjudices attribuables, d'une part, aux délais indus menant à une décision de la CLP — qui est devenue le TAT — et, d'autre part, à [une] suspension du versement des indemnités de remplacement [de] revenu à la suite d'un avis du BEM.» Voilà. Alors, c'était de cette recommandation-là qu'on s'inspirait pour faire vivre ce rapport de 2006 dans cette commission, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention à l'amendement déposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve concernant l'introduction d'un nouvel article à 68.1, alors nous allons procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Abstention.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté.

Nous poursuivons, cette fois-ci, avec l'article 69. M. le député... M. le député! M. le ministre.

M. Boulet : Oui. Si vous me permettez, je ne lirai pas l'article...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Non, c'est ça.

M. Boulet : ...mais l'amendement, parce que ça se tient avec les autres retraits, là.

Donc, article 69, ce serait : Retirer l'article 69 du projet de loi. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Y a-t-il des interventions sur l'amendement? S'il n'y a pas d'intervention, nous allons procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Pour.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté, et l'article 69 est rejeté... est rejeté... voyons, est abrogé... supprimé. Parfait. Eh! on va y arriver.

Des voix : Ha, ha, ha!

Une voix : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Je suis d'accord avec vous. On va se ressaisir, vous allez voir.

M. Leduc : ...du chocolat de l'opposition officielle, ça pourrait être...

La Présidente (Mme IsaBelle) : J'en ai, j'en ai.

On poursuit, M. le ministre, avec l'article 67.

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Donc, je vais lire l'amendement. Donc, c'est : Retirer l'article 67 du projet de loi.

Pour les mêmes motifs. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Y a-t-il des interventions à l'amendement déposé à... ou à l'amendement, oui, de l'article 67? S'il n'y a pas d'intervention, nous allons procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Pour.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté, et l'article 67 est supprimé.

Alors, nous venons de terminer le sous-bloc 4.2.2... 4.2.2, c'est ça.

Nous allons commencer un nouveau bloc, mais je crois que vous avez demandé une suspension, c'est bien cela?

M. Boulet : S'il vous plaît, oui, s'il vous plaît, pour...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 20 h 10)

(Reprise à 20 h 24)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous continuons. Nous commençons une nouvelle sous-section à la section, justement, 4, «Fonctionnement», 2e partie, section 4.2, «L'optimisation des recours», et la sous-section 4.2.3, «Les dispositions d'exception en imputation».

M. Boulet : Oui, merci, Mme la Présidente. Alors, l'article 93... Bon, nous avons un amendement. Si vous me dispensez de lire, on enlevait «ou d'obérer injustement un employeur».

Puis l'amendement se lit comme suit : Retirer l'article 93 du projet de loi.

Je vous rappelle qu'on est dans la section des imputations, c'est des dispositions d'exception. C'est des dispositions uniquement en matière de financement qui n'affectent pas les droits des travailleurs d'aucune manière, c'est une affaire de financement. Et ici notre amendement... comme pour les autres amendements que nous avons déposés, j'ai toujours dit qu'on allait écouter les groupes. Lors des consultations particulières, ceux qui nous ont demandé de remettre la notion «d'obérer injustement» sont la AAC, l'Association de l'aluminium du Canada, l'Association minière du Québec, Bombardier, le CPQ, la Fédération des centres de services scolaires, les MEQ, donc Manufacturiers exportateurs, Morneau Shepell, l'Union des municipalités du Québec, la ville de Montréal, Novo SST, l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés et le Réseau de coopération des entreprises d'économie sociale en aide à domicile, donc c'est des organisations extrêmement variées. Évidemment, comme c'est une affaire de financement, c'est surtout les groupes qui étaient extrêmement préoccupés par le retrait de cette notion-là qui, par amendement, est réintégrée. Donc, l'article 326 se lit exactement comme dans la loi actuelle. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Y a-t-il des interventions sur l'amendement? On va y aller avec le député d'Hochelaga-Maisonneuve et ensuite le député de Jonquière.

M. Leduc : Je parle beaucoup.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Vous laissez la place à l'aîné?

M. Leduc : Oui, oui, oui.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.

M. Gaudreault : À l'aîné?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, député de Jonquière.

M. Leduc : Quoi?

M. Gaudreault : Là, vous venez de me couper tout le... de me couper le sifflet, comme dirait ma grand-mère.

M. Boulet : Ah! pourquoi?

M. Gaudreault : Il y a une différence entre être aîné et doyen, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Ah oui!

M. Gaudreault : Alors...

M. Boulet : Ça, c'est vrai. Ça, c'est vrai.

M. Gaudreault : Parce que, si on commence à essayer d'identifier qui est l'aîné ici, pas sûr que ça va être moi qui va être ciblé. Alors, on va faire... on va choisir les bons vocabulaires.

Écoutez, je comprends que, dans une situation où on fait juste abolir un article, on peut passer vite, vite, là, mais j'ai un peu de misère, honnêtement, là... Je me demande si le ministre n'aurait pas été mieux de lire ce qu'il voulait faire avant de faire la proposition de le retirer pour être sûr de bien comprendre, là, tu sais, parce que... comment je pourrais dire, je vais tout dire, là, puis après ça on verra comment on s'ajuste.

Mais, quand j'entends le ministre nous dire : Bon, on a eu l'Association de l'aluminium, moi, c'est sûr que ça me fait sursauter... bien, sursauter dans le sens que ça m'interpelle parce que... chez nous, en tout cas, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, l'Association de l'aluminium a un rôle extrêmement important à jouer. Donc là, l'Association de l'aluminium, le Conseil du patronat, la ville de Montréal, il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup d'intervenants, et pas des mini-intervenants, c'est des gros joueurs. Bien, l'Association de l'aluminium, la ville de Montréal, on s'entend qu'on n'est pas dans des bineries, là, tu sais, alors c'est des gros joueurs.

Mais moi, j'essaie juste de comprendre comment ça s'était retrouvé dans la loi puis que, là, il le retire. Quand on fait un projet de loi aussi important que celui-là, on consulte avant. Tu sais, on ne s'assoit pas autour de la table à rédiger des choses puis à... on consulte avant. Alors, j'essaie de comprendre comment ça se fait que ça s'était retrouvé dans la loi, puis là on le retire.

Remarquez que moi, je suis assez content qu'on le retire parce que je... en tout cas, la manière dont moi, je l'avais compris, je voulais qu'on arrive avec un amendement comme ça, mais je veux comprendre comme il faut. Autrement dit, je veux comprendre comme il faut ce qu'on ne fera pas. Pourquoi on le faisait, puis là pourquoi on ne le fait pas?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.

• (20 h 30) •

M. Gaudreault : Puis, moi, les raisons, en tout cas, qui me poussaient à le faire, ce n'est pas nécessairement pour des motifs de Conseil du patronat puis d'Association de l'aluminium du Canada, mais c'était pour protéger des petits joueurs. Je comprends qu'il y a beaucoup, beaucoup de sous-traitants dans l'industrie de l'aluminium, alors, je veux bien comprendre.

En passant, c'est un beau mot, «obérer». Je suis content qu'on le laisse dans le corpus législatif québécois parce que c'est un mot qui est payant au Scrabble, quand on a beaucoup de voyelles.

Et je pense, en tout cas, que le ministre doit nous fournir un petit peu plus d'explications sur ce qu'il veut faire parce que, là, il a sauté une étape, hein? Il nous a expliqué tout de suite l'amendement sans nous expliquer pourquoi il faisait ça. Tu sais, moi, je suis bien ouvert à plein de procédures, là, je n'ai pas de problème avec ça, mais normalement, il lit l'article, les explications, les notes explicatives, après ça, woups! là, il arrive avec son amendement. Là, il a fait tout ça ensemble. Je veux comprendre ce qu'on ne fera pas.

M. Boulet : Oui, tout à fait.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, M. le ministre, oui.

M. Boulet : Si vous me laissez deux minutes... Oui, puis j'ai oublié deux groupes, la Fédération des chambres de commerce du Québec puis la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Puis, dans la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, il y a énormément de petites, petites entreprises et il y a aussi des petits groupes, collègue, hein? Novo SST puis l'ordre des conseillers en ressources humaines du Québec agréés, ils sont au-delà de 10 000 membres, puis c'est tous des consultants, des travailleurs autonomes, le réseau de coopératives des entreprises d'économie sociale et d'aide à domicile, ainsi que la Fédération des centres de services scolaires.

Bon, moi, je l'ai souvent répété, c'est un projet de loi qui est perfectible. Les consultations particulières, pour moi, ce n'est pas un écran de fumée. On a entendu 30 groupes, des groupes qu'on a entendus à la demande des collègues de Nelligan, d'Hochelaga-Maisonneuve puis de Bonaventure, bien sûr. On a entendu tous les groupes. Indépendamment des points de vue, on a lu toutes les recommandations puis on a fait beaucoup d'amendements suite à ça, suite à des recommandations syndicales, suite à des recommandations de l'UTTAM, suite à des recommandations patronales puis des groupes, parce que, la santé et sécurité, il y a un faisceau immense de groupes d'intérêts, puis c'est pour ça qu'on en entend beaucoup parler, il y a beaucoup, beaucoup d'intérêts variés.

Donc, il y a des petits groupes, il y a des petits joueurs. Je rappelle que l'imputation, c'est du financement, c'est les employeurs qui assument 100 % des cotisations, ça n'affecte nullement les droits des travailleurs. Et on l'a fait pour une raison, puis je vais finir avec ça, c'est bien simple, on cherchait à déjudiciariser, mais on a réalisé que ça heurtait beaucoup parce que les fois où c'est obéré injustement, ça n'affecte pas le droit à l'IRR, mais ça peut être une assignation temporaire qui est cessée en raison d'une condition personnelle ou un retour progressif. Il y avait différentes circonstances, mais c'était laissé, bien sûr, à l'appréciation. Puis au début, il y a un certain temps, un employeur dont la situation financière était précaire... mais c'est laissé à l'appréciation du tribunal.

Puis je suis d'accord avec vous, le mot «obérer», même en dehors du Scrabble, est un mot que les tribunaux utilisent à juste titre. Puis moi, encore une fois, j'ai tout le temps une confiance absolue dans notre justice administrative, du moins dans les compétences et les habilités de nos juges. Et, si un employeur est obéré injustement, bien, il en fait la demande, puis il faut qu'il fasse la preuve, puis il va au Tribunal administratif du travail, puis il y a la décision qui en découle. Merci. Moi, ça complète pas mal mes commentaires.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Y a-t-il d'autres interventions sur l'amendement déposé par le ministre à l'article 93? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons... Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Une légère suspension, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Comment?

M. Leduc : Légère suspension, très rapide.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Une légère suspension? D'accord.

Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 20 h 35)

(Reprise à 20 h 36 )

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci pour les informations d'«obérer», là. Alors, oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve, vous voulez intervenir sur l'amendement?

M. Leduc : ...à micro fermé, sur le mot «obérer». Moi, je ne l'avais jamais entendu dans ma vie, là, je le découvre aujourd'hui. Pour notre curiosité, là, le dictionnaire Le Robert dit : «Faire peser une lourde charge financière sur ou compromettre le développement de, nuire à», et LeLarousse dit : «Accabler quelqu'un, quelque chose d'une lourde charge financière.»

M. Boulet : C'est un débat d'employeurs, c'est pour ça que je dis tout le temps : C'est des dispositions d'exception, c'est du financement, puis ça n'a aucun rapport avec les droits des travailleurs. Tu sais, c'est... c'est pour ça que vous n'en avez jamais entendu parler, collègue.

M. Leduc : Bien, c'est-à-dire, j'ai entendu parler de la question de la désimputation, des charges, et tout ça, mais le mot «obérer»...

M. Boulet : Mais obérer...

M. Leduc : ...oui, c'est ça, ce n'est pas un terme avec lequel j'ai été habitué.

Mais justement je veux profiter de cet article-là et du fait que, là, bon, vous semblez vouloir retirer, là, le «obérer injustement l'employeur», que vous... que vous retiriez, mais là on le garde, en tout cas, peut-être pour que vous nous expliquiez bien comme il faut pour qu'on le saisisse, là, comment ça fonctionne, là, la désimputation. J'ai comme plein de questions, je peux vous en livrer quelques-unes, là, pour mettre la table, là. Est-ce que toutes les entreprises peuvent demander une désimputation? Est-ce qu'il y a des critères sur lesquels ça se base? Est-ce qu'il y en a beaucoup qui le font par année? Bien là, pourquoi elles le font, on en a un peu parlé, mais, bref, c'est quoi, l'abc, là, d'une désimputation?

M. Boulet : Il y a deux cas classiques, il y a 326 puis 329. La règle, puis là je vais simplifier, c'est que les coûts sont imputés à l'employeur chez qui le salarié subit sa lésion professionnelle. Donc, c'est l'employeur. C'est pour ça qu'on dit : L'imputation des coûts, c'est des dispositions d'exception.

Le cas classique, c'est le handicap, le handicap préexistant. Ça, c'est à 329. Nous l'avions retiré en essayant de définir ce qu'était un handicap parce que le handicap est devenu interprété très largement. Il y a eu un débat, à l'époque, à la... puis à la CLP, entre : Une condition, est-ce qu'elle devait être symptomatique ou asymptomatique? Puis finalement le courant dominant, c'est de dire : Un handicap, c'est l'équivalent de ce qui est défini par la Cour suprême du Canada, en application des chartes de droits et libertés de la personne, et c'est donc toute condition incapacitante ou toute déviation par rapport à une norme médicale généralement reconnue. Et, quand une personne avait, donc, un handicap avant la survenance de la lésion, l'employeur disait : Si ça se consolide en 20 semaines, alors que, normalement, la période normale, c'est quatre semaines, je devrais être désimputé de 80 % des coûts. C'est ce qui amène la logique : je fais une demande de partage, et, quand il est désimputé, ça va dans le fonds commun, ça va dans le... j'allais dire le «bucket», mais dans le baril commun de toutes les cotisations, on appelle ça le fonds commun. Et donc parce que c'est associé à une condition personnelle préexistante, ce qu'on appelle un handicap, il est désimputé. Ça, on l'avait mis, mais ça... il y a beaucoup de groupes, dans les consultations particulières, notamment l'Office des personnes handicapées, qui ont dit : Il y a un risque d'effet pervers que ça nuise à l'embauche des personnes handicapées. J'ai réalisé, il y avait des levées de boucliers partout.

L'autre cas classique, c'est quand un accident survient en raison d'une cause extérieure à la nature de tes activités, peut-être un cas que... tu sais, quelqu'un qui fait du travail d'ambulance puis qui est contraint d'aller à quelque part où c'est un environnement de travail où il y a des risques importants, il y a de la négligence. Bon, si c'est une cause extérieure ou... bon, le cas dont on parle, là, c'est obéré injustement. Si ça risque de te précariser financièrement, s'il y a un retour progressif qui est interrompu en raison d'une condition personnelle ou une assignation temporaire que le travailleur doit interrompre en raison d'une maladie personnelle, là c'est des cas d'obérer injustement, là. Il y a un certain nombre de cas. Je pense que je vous dis les principaux, là. O.K., on me dit oui, là. C'est les cas que je connais, mais c'est laissé à l'appréciation du tribunal.

Ça fait que c'est... la règle, c'est chaque employeur, c'est les accidents de tes travailleurs, mais il y a une exception, on partage tout le monde ensemble parce que c'est soit des handicaps, ou soit que tu es obéré injustement, ou soit que c'est une cause qui est complètement étrangère à la nature de tes activités.

• (20 h 40) •

M. Leduc : ...de la responsabilité que tu avais, comme employeur, d'assurer la santé et sécurité de tes employés.

M. Boulet : Exact, mais tu es désimputé en fonction d'un pourcentage, souvent. Tu sais, dans le cas d'un handicap, il y a une grille des périodes normales de consolidation. Mettons, une entorse légère, mettons, la période normale de consolidation, c'est quatre semaines puis que ça dure 20 semaines — c'est le cas que je donnais tout à l'heure — si la personne a de l'arthrose dans le dos au-delà de l'évolution normale d'une personne — parce que tout le monde en fait, de l'arthrose, là, tout le monde ici, là, mais à des degrés divers — puis, si tu fais de l'arthrose de façon anormale, au-delà de la norme reconnue, bien là, à ce moment-là, l'employeur peut faire une demande de partage de coûts, mais il doit le justifier.

Moi, je vous avoue que j'en ai fait. Est-ce qu'il s'en fait beaucoup? Oui, il peut s'en faire, dans certains cas, plus régulièrement, mais ça doit être démontré, ça prend une preuve. Puis moi, j'ai travaillé beaucoup de dossiers avec des parties syndicales puis avec... Bon, ce n'est pas vraiment... ce n'est pas un enjeu pour les travailleurs, véritablement, mais je pense... Je ne sais pas si je suis assez clair, là, mais c'est le fonctionnement général de la désimputation.

M. Leduc : Mais ce n'est pas parce que ce n'est pas d'intérêt pour les travailleurs que ça ne m'intéresse pas, moi, M. le ministre.

M. Boulet : Ah! mais j'apprécie beaucoup... j'apprécie beaucoup vous donner l'explication.

M. Leduc : Justement. Donc, merci, d'ailleurs, pour vos saines explications. J'ai déjà dit, hein, que vous feriez un bon chargé de cours dans une deuxième ou une troisième carrière, peut-être, quand la...

M. Boulet : ...pas exclu.

M. Leduc : Parfait, on le retient. Donc, une désimputation, c'est un employeur ou son avocat, mais, bref, un employeur, qui en fait la demande. Ce n'est pas automatique?

M. Boulet : Non.

M. Leduc : Il en fait la demande à la CNESST?

M. Boulet : Oui.

M. Leduc : La CNESST dit oui ou non.

M. Boulet : Oui.

M. Leduc : Et est-ce que c'est la même procédure, après ça, DRA et TAT?

M. Boulet : Oui. Évidemment, elle pourrait le faire de sa propre initiative, mais c'est à la demande de l'employeur. C'est une décision en matière de financement et c'est une décision, comme les articles qu'on a adoptés, qui peut aller soit à la direction de la révision administrative ou au TAT, et donc c'est l'employeur qui va opter entre les deux.

M. Leduc : Puis j'imagine que, pour baser sa décision à la commission et autant, j'imagine, au TAT, si c'est contesté, il y a une série de critères, de jurisprudence?

M. Boulet : Oui, oui, tout à fait, sur la définition de handicap. Puis la CNESST peut être partie intervenante au Tribunal administratif du travail, et le juge s'assure du respect des règles de preuve puis que les expertises soient déposées.

M. Leduc : Est-ce qu'il y a aussi, donc, jurisprudence et critères sur la notion d'obérer injustement?

M. Boulet : Ah mon Dieu! Oui, il y en a sur handicap, obérer injustement puis un accident attribuable à un tiers. Il y a une jurisprudence, je vous dirais, abondante.

M. Leduc : Sur le niveau de fardeau qu'on...

M. Boulet : Je vous dirais, la plus abondante, c'est sur la notion de handicap, parce que j'ai vu la jurisprudence. Il a été une période où... je ne sais pas si je peux me permettre de dire ça, là, mais, dépendamment de la personne devant qui tu plaidais, tu savais si tu allais gagner ou non ta cause. Mais ça s'applique dans tous les types de dossiers, parce que l'état du droit était en train de se développer, puis il y a parfois des courants jurisprudentiels qui s'affrontent, puis, à un moment donné, ça s'est fusionné, puis c'est... Le courant, maintenant, c'est le handicap puis c'est l'équivalent de la définition découlant de ce même concept-là, qui est dans la Charte des droits et libertés de la personne, et la Cour suprême a rendu des décisions, là, sur cette définition-là.

M. Leduc : Dans les taux, là — parce que de ce qu'on désimpute, c'est le taux de cotisation, dans le fond, de chaque employeur — vous me direz si je me trompe, mais c'était ma compréhension qu'il y avait deux grandes familles de taux, des taux personnalisés puis des taux fixes, je ne sais pas trop si c'est comme ça qu'ils s'appellent.

M. Boulet : Il y a trois... puis je ne suis pas un spécialiste en financement, là, mais il y a un taux de l'unité, donc ton unité de classification, il y a un taux personnalisé puis il y a un taux rétrospectif, puis là ça dépend d'un certain nombre de critères, là, mais ta masse salariale puis ta fréquence, gravité de lésions, là, mais c'est possible d'obtenir une désimputation indépendamment de ton régime.

M. Leduc : Peu importent ces trois taux-là, ces trois familles de taux là?

M. Boulet : Oui.

Des voix : ...

M. Boulet : Dans tous les cas. Mais évidemment, dépendamment de ton régime auquel tu es assujetti, si c'est rétrospectif, unité ou personnalisé, l'incidence peut varier. Mais tu peux être désimputé, là, mais là il y a des calculs actuariels, là, et mathématiques, là, mais...

M. Leduc : Puis c'est dans laquelle catégorie, par exemple, que l'incidence est la plus faible?

M. Boulet : Ah mon Dieu! Au rétrospectif, c'est là que...

M. Leduc : Ou la plus élevée, là, si on avait à les classer, là?

Des voix : ...

M. Boulet : ...taux personnalisé. Je pense que c'est... ça a de l'incidence, là, mais c'est... il y a une variation, mais je ne suis pas en mesure de répondre clairement à ça.

Des voix : ...

M. Boulet : ...taux d'unité, ça n'a à peu près pas d'impact. Donc là, il n'y en aurait pas, de demande de partage, mais au taux personnalisé puis au régime rétrospectif, oui. Donc...

M. Leduc : Quand on dit que ça n'a pas d'impact au taux d'unité, c'est parce que c'est comme un forfait, si je peux m'exprimer ainsi, là?

M. Boulet : Bien, c'est plus un pool, là, tu sais, toutes les entreprises qui sont dans une unité de classification. Donc, si ça va dans le fonds commun, ça n'a vraiment pas d'impact, là, parce qu'ils sont plusieurs à partager, là, ça fait que l'incidence est à peu près nulle, là.

M. Leduc : Ça fait que c'est comme mutualisé, en quelque sorte?

M. Boulet : Oui, oui.

M. Leduc : Puis ça, est-ce que c'est un choix, d'aller s'inscrire dans tel ou tel taux?

M. Boulet : Non, il faut que tu respectes des conditions. Mais je pense que la condition primaire, c'est le montant de ta masse salariale. Puis posez-moi pas trop de questions parce que je ne suis pas... Il y a peu de spécialistes au Québec ou peu d'actuaires qui sont en mesure de faire toutes les distinctions.

M. Leduc : Bien, jusqu'à date...

M. Boulet : Mais, si jamais il y a des questions, ça me fera plaisir d'y répondre par l'intermédiaire d'autres personnes.

M. Leduc : Je comprends, mais, sincèrement, jusqu'à date, vous m'expliquez quand même les fondamentaux, puis ça m'aide à me situer dans la discussion, qui est très importante. Donc, c'est ça, l'entreprise ne choisit pas d'elle-même dans quelle catégorie elle va être, c'est-à-dire qu'il y aura des critères, encore une fois. Vous avez fait référence à la masse salariale qui va déterminer dans quelle des familles on va tomber. Et donc, si on tombe dans les taux d'unité de classification, là, ce que je comprends, c'est que... c'est quoi? C'est des secteurs économiques dans lesquels on est attitrés?

M. Boulet : Non, mon Dieu! Il y a un règlement sur les unités de classification qui est publié sur une base annuelle, puis les entreprises sont classifiées selon des secteurs d'activité économique. Puis c'est un règlement qui peut faire l'objet d'une contestation. Tu sais, si un employeur considère qu'il n'est pas dans la bonne unité de classification, il peut faire une demande de révision, quand même. Je ne suis pas si pire, là, mais...

M. Leduc : Ça va très bien.

M. Boulet : Donc, il peut faire une demande de révision puis dire : Je veux être reclassifié dans une autre unité.

Puis je vais vous donner un peu plus de détails, j'ai une petite infographie, là, mais le taux de l'unité, collègue, là, c'est les petites entreprises, les cotisations sont inférieures à 9 000 $. Il y a 145 000 entreprises, ça représente 13 % des cotisations totales, puis on appelle ça, comme, un régime de pleine assurance.

M. Leduc : 13 %, vous avez dit?

• (20 h 50) •

M. Boulet : Oui, des cotisations totales. Le taux personnalisé, c'est les moyennes et les grandes entreprises. Les cotisations versées, c'est entre 9 000 $ et 400 000 $ par entreprise. Il y a 54 000 entreprises qui sont au taux personnalisé. Ça représente, ce qu'ils versent, 50 % des cotisations totales. Puis on reconnaît, ici, l'expérience en santé. Là, tout à l'heure, la fréquence puis la gravité, au-delà des cotisations puis de la masse salariale, on reconnaît l'expérience. L'expérience, c'est la fréquence puis la gravité dans les années antérieures. Le mode rétrospectif, ça, c'est les très grandes entreprises. Elles cotisent plus de 400 000 $ à la CNESST, quand même.

M. Leduc : On parle d'un montant annuel, ici?

M. Boulet : Montant annuel. Il y a 1 500 entreprises, ça représente 37 % des cotisations totales et ça reflète, dans leur cas, directement le coût des lésions. Ça fait qu'eux autres... Et le mode rétrospectif puis le taux personnalisé, on comprendra que c'est là que se font les demandes de partage de coûts.

M. Leduc : Ça fait que, si je comprends bien, on a construit un régime de taux qui était relativement simple pour les très petites entreprises, où est-ce que c'est c'est un taux assez stable, puis il n'y a pas, dans les faits, des imputations. C'est des relativement petits montants de... On a-tu dit 9 000 $, tantôt, environ?

M. Boulet : C'est moins que 9 000 $.

M. Leduc : Oui, moins que 9 000 $, mais il y a quand même beaucoup d'entreprises qui sont là, là, 145 000, qu'on nous avait dit. Donc, ça, c'est la... Donc, ce que je comprends, c'est la majorité des entreprises, mais, par définition, vu que c'est les plus petites, c'est la minorité des cotisations.

M. Boulet : C'est 13 % seulement des cotisations.

M. Leduc : On a une espèce de jeu similaire aux impôts, par exemple, où beaucoup de gens ne paient individuellement pas tant d'impôt que ça, mais ça joue sur le total.

M. Boulet : Absolument. Oui, oui, c'est un bon parallèle.

M. Leduc : O.K. Puis après ça vous avez fait une autre catégorie qui s'appelle «personnalisé», où là c'est plus moyenne, grande. Là, on entre dans une espèce de jeu où est-ce qu'on peut faire varier la cotisation. Et là ça varie, là, de 9 000 $ à 400 000 $?

M. Boulet : Oui.

M. Leduc : C'est une pas pire grande variation, quand même.

M. Boulet : Il y a 54 000 entreprises, ici.

M. Leduc : Oui, puis ça, ça représente la majorité des cotisations.

M. Boulet : 50 %.

M. Leduc : C'est comme la classe moyenne, mettons.

M. Boulet : Oui.

M. Leduc : On pourrait dire ça.

M. Boulet : Oui.

M. Leduc : Puis après ça les très grandes entreprises sont des bons payeurs de cotisations quand même, 37 %. Ils sont beaucoup moins nombreux.

M. Boulet : Puis il y a 1 500 entreprises, là, ce qui n'est pas négligeable non plus, là.

M. Leduc : 1 500? C'est ça. Ça fait que, quand vous faisiez référence, tantôt...

M. Boulet : Oui. Il y en a au Saguenay—Lac-Saint-Jean, dans Hochelaga-Maisonneuve puis dans Nelligan, il y en a partout au Québec, là.

M. Leduc : Sûrement.

M. Boulet : Mais c'est quand même plus de 400 000 $ de cotisations annuelles puis c'est 37 % des cotisations totales.

M. Leduc : Mais celui-là, il est désimputable aussi, il est modulable, là.

M. Boulet : Ah! c'est... tout à fait. Les...

M. Leduc : Même chose que la catégorie «personnalisé».

M. Boulet : Absolument.

M. Leduc : O.K. Ça fait que c'est juste le taux d'unité de classification qui, lui, est pas mal fixe.

M. Boulet : Où il n'y a pas d'incidence.

M. Leduc : O.K. Donc, vous avez référence, tantôt, dans les mémoires qu'on avait reçus... par exemple, là, j'ai — le nom m'est resté, là — Bombardier, eux, ils sont très probablement dans le taux rétrospectif, là, c'est une immense entreprise.

M. Boulet : C'est sûr.

M. Leduc : C'est sûr. O.K., je comprends.

M. Boulet : Mais l'AECQ, là, qui est l'Association des entrepreneurs en construction, 82 % des entrepreneurs en construction au Québec ont moins de cinq employés, là. Ça fait qu'il y en a... tu sais, il y a beaucoup de petites entreprises. Le Réseau de coopération des entreprises d'économie sociale en aide à domicile, il y a beaucoup de... Puis la FCEI, je sais que c'est une fédération que vous connaissez bien, vous connaissez bien le vice-président québécois, il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de PME, puis il y en a beaucoup qui sont au taux personnalisé.

M. Leduc : Les ME plutôt que les P dans le PME.

M. Boulet : Bien, oui, oui, on va plus vers les ME, là, ou les grosses petites, là.

M. Leduc : Est-ce que, dans ces trois groupes-là, donc les trois taux différents qui ont une grosseur variable quand même sur l'assiette de revenus, dans le fond, c'est les revenus, essentiellement, de la CNESST? Il y a les placements aussi, là, qui sont quand même non négligeables, là. Mais, d'un point de vue de revenus annuels, c'est là que se trouve l'essentiel des revenus, là?

M. Boulet : Oui, en cotisations, c'est...

Une voix : ...

M. Boulet : Oui, c'est les seuls revenus. Ça représente 2,4 milliards par année, là, à peu près, au Québec, là. On verse... Ou c'est 2,9 milliards, qu'on m'avait dit, il me semble, en 2019.

M. Leduc : ...revenus, mais il y avait quand même des placements, non, à la CNESST? Pas des petits montants, là.

M. Boulet : Oui, mais les revenus d'opération, là, c'est les cotisations.

M. Leduc : Ah! d'accord. Ma question : Est-ce qu'entre ces taux-là, c'est comme des enveloppes distinctes ou c'est une seule grande enveloppe avec...

M. Boulet : C'est un seul fonds...

M. Leduc : C'est un seul fonds.

M. Boulet : ...qu'on appelle le fonds commun. Puis c'est pour ça que je dis : Quand tu obtiens une... tu fais une demande de partage de coûts qui est acceptée, donc, ça fait une désimputation, puis le 80 % de désimputation, si tu as démontré qu'il y avait un handicap préexistant, bien, il est chargé au fonds commun, et c'est le fonds commun qui l'assume.

M. Leduc : O.K., mais, si Bombardier, par exemple, ne réussit pas à faire de la bonne prévention, puis là il se fait... il y a des lésions, mais là, bon, il essaie de se faire désimputer, lui, il va se faire désimputer de son taux à lui, mais ça va être réparti sur 100 % des entreprises et non 37 % des cotisations de sa catégorie de taux rétrospectifs.

Des voix : ...

M. Leduc : On pourrait peut-être suspendre un petit instant.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui. Est-ce que vous aimeriez une suspension? Bonne idée.

M. Boulet : C'est juste que je ne suis pas tout à fait certain à 100 %.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 20 h 56)

(Reprise à 21 h 01)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions à l'amendement déposé à l'article 93?

M. Boulet : Bon, des précisions additionnelles. D'abord, vous dire qu'il y a des petites entreprises qui sont au taux de l'unité qui se mutualisent. On avait vu qu'il y avait 104 mutuelles de prévention au Québec, et, quand ils se mutualisent, ils vont au taux personnalisé. Ça fait qu'il y a beaucoup de petites entreprises qui sont là-dedans, et les mutuelles font des demandes de partage de coûts pour obtenir des désimputations. Je pense, c'est important de le mentionner parce que la question allait vraisemblablement venir du collègue d'Hochelaga-Maisonneuve pour les mutuelles de prévention.

Maintenant, quand il y a une désimputation, comme j'expliquais, ça va au fonds commun. Puis, quand c'est des entreprises qui sont au régime rétrospectif, ça n'a d'impact que sur leurs dossiers pris individuellement, alors que les demandes de partage ou les désimputations, quand on est dans des mutuelles ou au régime personnalisé, ça a d'impact... sur le fonds commun, sur eux autres, parce que le taux de l'unité, ça a peu d'incidence, là.

M. Leduc : O.K. Je n'ai juste pas saisi l'histoire du taux rétrospectif qui n'a d'impact que sur lui-même.

M. Boulet : Bien, ça s'en va au fonds commun, c'est assumé par le fonds commun, et ça a un impact de désimputation sur l'entreprise qui est au régime rétrospectif. Donc, au lieu de payer une cotisation en tenant compte de la... Bien, tu sais, un accident de travail de sa gravité, si c'est quatre semaines de consolidation au lieu de 20, bien, il est comme désimputé dans son régime rétrospectif, dans sa boîte de 80 % des coûts associés à cette lésion professionnelle là.

M. Leduc : Attention, mais dans sa boîte ou dans son enveloppe avec ses collègues du taux rétrospectif?

M. Boulet : C'est tout le régime rétrospectif. C'est toute la boîte des entreprises qui sont au régime rétrospectif.

M. Leduc : Il y a une sous-section là-dedans.

M. Boulet : Tout à fait, exact.

M. Leduc : Mais seulement pour le taux rétrospectif.

M. Boulet : Exact.

M. Leduc : Qui n'est donc pas dans le régime commun, si je comprends bien.

M. Boulet : C'est assumé par le fonds commun, mais ça a un impact sur les coûts des entreprises du rétrospectif pour les désimputations qui proviennent de ce bloc-là, de ces entreprises-là, et c'est comme ça que ça fonctionne.

M. Leduc : Mais comment ça peut avoir un impact sur le fonds commun si la désimputation ne touche que l'enveloppe du taux rétrospectif?

M. Boulet : Bon, encore une fois, c'est le fonds commun qui assume et l'entreprise... les entreprises qui sont au régime rétrospectif bénéficient de la désimputation, du montant de la désimputation dans leur bloc de régime rétrospectif.

M. Leduc : Mais le montant de la désimputation, mettons, dans le taux personnalisé, s'applique aussi à l'entreprise en question, non?

M. Boulet : Bien oui, il y a une méthode de calcul, là, qui tient compte d'un facteur de chargement, là. Mais là vous allez dans des détails techniques, là, où ça prend... ça prendrait des heures de formation.

Une voix : ...

M. Leduc : Ah! il n'y avait pas... O.K. Ce que je cherche vraiment à comprendre, c'est est-ce qu'il y a une différence entre l'enveloppe taux personnalisé puis taux rétrospectif, à savoir, quand je réussis à me faire désimputer devant la commission, est-ce que la conséquence de socialiser le coût envers l'ensemble des entreprises, l'ensemble des cotisations, est-ce qu'elle est vraiment socialisée pour tout le monde, peu importe si on est dans personnalisé ou rétrospectif. Parce qu'on s'entend que la désimputation, évidemment, s'applique à l'entreprise, mais le fait de décider de désimputer, ça a un impact sur l'enveloppe globale, bien sûr, là. On décide qu'une personne, sa cotisation, elle va baisser individuellement. Donc, le fait qu'on avait prévu, actuairement parlant, d'avoir des hausses de cotisation en fonction des lésions, si on décide que telle entreprise qui a une lésion, donc qui a des coûts qui vont devoir être payés, là, dans... C'est des entrants, des sortants. Vous voyez, je connais ça quand même, l'argent, les finances, là. Vous doutiez parfois de...

M. Boulet : ...là quand même.

M. Leduc : Vous doutiez parfois des compétences de ma formation politique à cet égard. On ne parlera pas du tunnel à 10 milliards ce soir, je vous rassure.

J'atterris sur ma question : Est-ce que la désimputation... est-ce que la socialisation du coût de la désimputation, elle est différente si on est dans le taux rétrospectif que si on est dans le taux personnalisé?

M. Boulet : Mon Dieu! Je ne suis pas sûr que je vous suis, là, mais, quand tu es au rétrospectif, c'est socialisé, personnalisé, c'est personnalisé, donc c'est en fonction de ton taux personnalisé. Ça fait que la socialisation n'est pas... n'a pas nécessairement les mêmes effets, là. Je ne sais pas si je réponds clairement à votre question, là, mais...

M. Leduc : Parce que, dans le fond, ce que je comprends, là, c'est que vous avez, à la CNESST, d'un point de vue annuel, une moyenne de coûts, une moyenne d'indemnités et de remboursements de toutes sortes de choses qu'on a évoquées, là, depuis le début de cette commission, qui donne un chiffre x. Puis là vous dites : Pour une année donnée, je vais devoir dépenser 2,4... ou je ne sais plus trop, là, le chiffre que vous référiez tantôt. On va dire, mettons, un chiffre rond, 2,5 milliards, ça va nous coûter 2,5 milliards cette année, le régime, alors il faut que j'aille chercher 2,5 milliards d'entrants. Alors, c'est ça, la tarte que je dois aller découper à l'intérieur des cotisants, qui sont les entreprises.

Et là, moi, ma question, c'est : Quand on décide... Puis là on a décidé de construire cette tarte-là alentour d'un système où, si vous aviez beaucoup de lésions, votre part à vous va augmenter dans la construction de cette tarte de revenus. Moi, ce que je veux savoir, c'est : Est-ce que, peu importe... En fait, là on a déjà clarifié que, si vous êtes dans le taux d'unité de classification, qui est un taux particulier, plus petit pour une réalité d'une entreprise plus petite, ça, il n'y a pas de désimputation. C'est un taux fixe, puis il ne changera pas, peu importe votre niveau de lésions dans votre entreprise. Donc, ça, sortons-le de la question.

Là, mon questionnement, c'est : Est-ce que, taux personnalisé... donc les deux autres morceaux de la tarte qui restent, là, taux personnalisé, taux rétrospectif, est-ce que ces deux-là ont la même logique, à savoir que, si je suis désimputé, est-ce que la conséquence qu'il faut aller chercher la même tarte globale, là, de 2,5 milliards... est-ce que la conséquence, elle est isolée à l'intérieur de ma pointe de tarte pour mon entreprise à moi ou est-ce qu'elle est rajoutée à l'entièreté de la tarte? Je ne sais pas si vous comprenez mieux, là, ma question, là.

M. Boulet : La réponse simple, c'est que c'est absorbé par les taux personnalisés et les taux rétrospectifs, donc par les deux.

M. Leduc : Peu importe d'où...

M. Boulet : Les taux de l'unité.

M. Leduc : Donc, toute la tarte va assumer?

M. Boulet : Exact, oui.

M. Leduc : D'accord, ça répond à ma question. On va terminer votre amendement sur celui-là, mais je vais travailler puis je viendrai vous en parler, peut-être, à micro fermé. J'ai une idée qui me trotte en tête depuis tantôt sur un amendement qui pourrait revoir un peu cette logique-là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Donc, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement déposé par le ministre à l'article 93? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, oui, député de Nelligan.

M. Derraji : Là, on n'a pas... C'est juste l'amendement? On n'a pas encore parlé de l'article en entier.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Bien, l'article... bien, l'amendement demande de retirer l'article, alors l'article va être supprimé.

M. Derraji : Oui, oui. J'ai quelques secondes, je peux? Parce que vous avez dit : On peut voter...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, oui, oui.

M. Derraji : O.K. Bon.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Vous avez d'autres interventions? Oui, oui.

M. Derraji : Oui. Bien, moi, je pense que, très rapidement, ça a été la solution à faire, de retirer l'article, parce que j'écoute le ministre, tout à l'heure, et effectivement beaucoup de groupes l'ont mentionné. Et ce qui reste sur la table, c'est la question de l'équité aussi. Donc, je pense qu'on va l'avoir dans le prochain article, 327.

(Interruption)

M. Derraji : Ça va? J'ai entendu comme un bruit. C'est pour ça, je dis : Écoute, qu'est-ce qui se passe?

Donc, oui, absolument. Donc, moi, je pense que ça a été la solution à faire, c'est retirer complètement l'article, parce que beaucoup de groupes, surtout ceux qui cotisent... J'ai entendu le ministre parler des trois groupes, petites, mais surtout les très petites entreprises. On veut beaucoup de grandes entreprises qui paient, qui contribuent à ce fonds, mais je pense que c'est la solution à faire et à mettre en place parce qu'il y a beaucoup de groupes, surtout ceux qui contribuent, on l'oublie. Tu contribues, et on t'oblige à suivre un certain règlement qui ne fait pas affaire aux gens qui contribuent dans le fonds. Mais je pense que... Je remercie le ministre d'avoir pris en considération les points de groupes... le point de vue des groupes qui sont venus en commission.

Mais j'ai bien hâte de voir la suite des choses, surtout au niveau de l'équité, parce que ça a été mentionné aussi, donc conserver le principe d'équité entre les droits du travailleur et les droits de l'employeur. Donc, c'est ce que je voulais dire, Mme la Présidente. Merci.

• (21 h 10) •

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Alors, y a-t-il d'autres interventions à l'amendement déposé à l'article 93? Sinon, nous allons procéder à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Pour.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Abstention.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté, et l'article 93 est supprimé.

Alors, on m'indique de ne pas oublier, là, les mesures sanitaires, s'il vous plaît.

Oui, on poursuit. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Une voix : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Qu'est-ce qu'il y a, M. le ministre?

M. Boulet : Ah non, ça va.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est correct?

M. Leduc : Je demanderais une suspension, comme je l'avais annoncé, là...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui. D'accord.

M. Leduc : ...pour regarder un amendement. Puis je pourrais aller voir M. le ministre pour lui...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 11)

(Reprise à 21 h 31)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous reprenons. Je comprends que le député d'Hochelaga-Maisonneuve veut déposer un amendement. Alors, je vous invite à le lire et à l'expliquer.

M. Leduc : Oui, merci. Alors, ça va comme suit : Article 93. Remplacer l'article 93 du projet de loi par le suivant :

L'article...

Une voix : ...

M. Leduc : Un instant... 93.1. Alors : Insérer, après l'article 93 du projet de loi, le suivant :

93.1. Le deuxième alinéa de l'article 326 de cette loi est modifié par l'insertion après «unités» de «parmi tous les employeurs au taux de cotisation de l'unité lorsque la lésion est survenue chez un employeur au taux de cotisation de l'unité, parmi tous les employeurs au taux de cotisation personnalisé lorsque la lésion est survenue chez un employeur au taux de cotisation personnalisé et parmi tous les employeurs au taux de cotisation d'ajustement rétrospectif lorsque la lésion est survenue chez un employeur au taux de cotisation d'ajustement rétrospectif».

L'explication est très simple, Mme la Présidente, ça fait suite à ce que j'étais en train d'expliquer ou, en tout cas, que je découvrais dans ma compréhension de ce labyrinthe de cotisations à la CNESST. Moi, je suis surpris de comprendre que la désimputation a surtout un impact chez deux catégories sur trois, en fait, des différents taux et... par contre... c'est-à-dire un impact sur le coût de la cotisation, là. L'impact recherché de la désimputation est, bien sûr, la baisse de sa cotisation.

Mais ce qui est clair, puis ce que le ministre m'a confirmé quand on a terminé, là, juste avant la suspension, c'est que la conséquence de la socialisation des coûts, en quelque sorte, elle, elle est vraiment complète à l'entièreté des entreprises, peu importe qu'elles soient au taux personnalisé, au taux d'unité de classification ou au taux rétrospectif. Et je trouve qu'il y a quelque chose d'assez injuste pour les petites entreprises, qui sont beaucoup dans le taux unité de classification. On a parlé de 145 000, tantôt, entreprises dans ce taux-là. C'est sans aucun doute, des trois taux, le taux le plus large, là, le plus largement utilisé par le plus grand nombre d'entreprises au Québec, les petites et peut-être certaines moyennes, mais surtout les petites entreprises. Et je trouve ça injuste qu'elles aient à supporter la conséquence de la désimputation, qui est, elle, essentiellement ou majoritairement faite par des entreprises dans les deux autres catégories, soit les taux rétrospectifs et les taux personnalisés.

Ça fait en sorte, par exemple, là... Je pense que ça, c'est issu, entre autres, du rapport de l'IRIS. On y a fait référence plus tôt dans cette commission, mais il y a eu un gros rapport de l'IRIS, l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques, en 2020, donc l'an dernier. On savait que ça s'en venait, là, la commission, ça fait que j'imagine que c'est un peu dans ce cadre-là, tout comme le rapport de Morneau Shepell, qu'ils ont publié, là, à l'IRIS, le gros rapport. Ils avaient donc une statistique, ici, tirée de la page 27, là. Dans les faits, 27 % des employeurs, taux personnalisé et ajustement rétrospectif, s'organisent pour redistribuer leurs factures à tous les employeurs, dont 73 % sont des petites entreprises. Il y a donc là quelque chose qui est injuste, à mon avis. Et en plus je considère que ça a aussi un effet sur la judiciarisation, qui est un autre des thèmes qui est transversal dans cette commission, en tout cas certainement dans mon prisme d'analyse, dans mes interventions ici, à cette commission, Mme la Présidente.

Alors, les effets sont directs de cette façon-là de fonctionner sur le nombre de contestations médicales qui sont logées devant le BEM, surtout si ça l'a... si ça a, pardon, un effet immédiat sur la cotisation, en tout cas, recherchée auprès des grandes entreprises, des grandes institutions qui veulent aller chercher la répartition des coûts de la désimputation, mais, dans les faits, ils la transfèrent... bien, c'est-à-dire, ils la transfèrent également à tout le monde, mais ce qui devient une inégalité ou une équité pour les petites entreprises, qui n'ont pas nécessairement la même possibilité d'aller chercher cette désimputation-là et qui doivent cependant subir la conséquence, parce qu'il faut, au final, maintenir la même grandeur de l'assiette, hein? Je le disais tantôt, si on a des dépenses projetées d'un... Je disais le chiffre, là, effectif, là, 2,5 milliards, là. Je ne sais pas c'est quoi, le chiffre exact, je n'ai pas eu le temps de le regarder, mais, disons, 2,5 milliards de dépenses projetées. Il faut aller chercher 2,5 milliards de revenus par les cotisations, mais c'est certain que, s'il y a seulement deux catégories qui peuvent bénéficier de l'effet recherché de la désimputation, à savoir la baisse de cotisation, bien, si on socialise le coût... C'est sûr que, si on baisse la cotisation des gros qui peuvent se permettent ça, qui ont les moyens d'aller chercher ça et qui peuvent, à travers les règlements qu'on a adoptés et les catégories qu'on a créées... bien, c'est certain que, s'il faut qu'on garde la même assiette de revenus qu'on doit aller chercher, bien, c'est sûr que l'effet, il est également sur les petites entreprises.

C'est quelque chose qui était aussi abordé dans le rapport Morneau Shepell, j'en parlais à l'instant, à la page 85, entre autres, qui parlait qu'il y a des grands employeurs qui déchargent leurs coûts par désimputation. La seule nuance que je ferais, c'est que, dans le rapport de Morneau Shepell, ils visaient essentiellement l'État québécois, là, comme grand employeur, qui fait certainement partie de la catégorie du taux rétrospectif... rétrospectif, oui, c'est bien ça, mais évidemment toutes sortes d'autres grandes corporations, on a fait référence, tantôt, à Bombardier, par exemple, qui ont exactement la même culture de désimputation que celle de l'État.

Alors, dans le fond, ce qu'on vient créer avec l'amendement, c'est des catégories. Alors, vous voulez vous faire désimputer, là, vous êtes une entreprise dans le taux rétrospectif, vous voulez vous faire désimputer? D'accord, allez-y, continuez de le faire, on ne remet pas ça en question. Cependant, la socialisation du coût de votre désimputation ne sera pas à 100 % des entreprises, sera à 100 % des entreprises de votre catégorie, de la catégorie du taux rétrospectif, ce qui n'est pas 100 % des entreprises. Alors, la conséquence, elle ne sera directe que sur les gens de votre catégorie qui bénéficient de cet effet-là de désimputation. C'est, il me semble, quelque chose qui est à l'avantage des petites entreprises. Ça me semble quelque chose qui est plus juste, aussi, comme répartition des coûts et qui pourrait, je le pense, favoriser une déjudiciarisation. C'est comme je le disais tantôt, c'est surtout des entreprises dans les taux personnalisés, les taux rétrospectifs qui utilisent ça parce que ça a une conséquence sur leur cotisation.

Si la conséquence est moindre ou légèrement moindre parce que, là, c'est juste leur catégorie qui va devoir subir la répartition du coût, on peut imaginer qu'il y aura peut-être moins d'utilisations de cette possibilité-là de désimputer. Et on le sait, que c'est quand même quelque chose qui embourbe aussi les tribunaux, ces demandes de désimputation là et ces contestations-là, désimputations-là, la DRA, le TAT, on en a parlé tantôt avec le ministre. Alors, si vraiment on redirige la conséquence de la désimputation sur sa propre catégorie, peut-être que ça va être moins tentant ou moins rentable, dans les grands calculs de certaines mutuelles de prévention, par exemple, ou certaines catégories d'entreprises, d'aller de l'avant avec cette idée-là et que ça pourrait mettre une pression à la baisse sur le nombre de contestations en matière de désimputation. Voilà, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. M. le ministre.

M. Boulet : Je vais essayer d'être simple, là, c'est un pouvoir réglementaire. Actuellement, il y a un règlement sur le financement, et au-delà de 300 articles. Il est paramétré, il est bâti par des actuaires, il existe depuis des années. Donc, ce n'est pas le but. Je comprends que le collègue dépose un amendement, mais en même temps je veux juste vous redire que ceux qui sont au taux de l'unité ne subissent pas les incidences, là, des effets de la désimputation. Puis, dans les 145 000, il y en a beaucoup, beaucoup qui font partie des 104 mutuelles de prévention. Puis, dans les consultations particulières, on n'a pas été... il n'y a pas eu de... Le financement, ça n'a pas fait l'objet de préoccupations du CCTM et dans les consultations particulières, ça fait que...

Mais tout ceci, là, pour conclure en disant que c'est un pouvoir réglementaire, c'est dans un règlement sur le financement, c'est bâti par des actuaires. Puis c'est sûr qu'on pourrait avoir 20 actuaires autour de la table, puis il pourrait y avoir des débats pendant des années, là, mais... Voilà. Essentiellement, c'est mes commentaires. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

• (21 h 40) •

M. Leduc : Petite question. Quand... Vous venez de dire que ça n'a pas de conséquence sur les taux d'unité de classification. Pourquoi vous dites ça? Parce que, si on réduit la taille de la cotisation d'une entreprise donnée, nécessairement, si on cherche la même assiette de revenus...

M. Boulet : ...dans les mutuelles de prévention où le taux de l'unité, il demeure tel qu'il est, là, donc il n'y a pas de...

M. Leduc : Mais, s'ils sont dans une mutuelle de prévention, ils sont dans le taux personnalisé, pas dans le taux de l'unité.

M. Boulet : Oui. Non, non, c'est ça. C'est pour ça que je vous réponds : La désimputation n'a pas d'incidence sur les entreprises qui sont dans le taux de l'unité.

Des voix : ...

M. Boulet : Puis c'est le taux rétrospectif qui est réactif, pas le taux personnalisé.

Mais, ceci dit, c'est un débat, moi, qui ne m'appartient pas, là. Moi, je ne suis pas... Encore une fois, c'est un règlement sur le financement puis c'est un pouvoir réglementaire qu'on... On ne peut pas amender le règlement par la loi, là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Y a-t-il d'autres... Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Je comprends que le débat ne vous appartient pas, mais en même temps vous aviez un article, là, qu'on vient de discuter précédemment, où vous vouliez modifier une possibilité, là, qui était celle d'obérer injustement un employeur, ça fait que vous aviez quand même un pied dans le débat de la cotisation.

M. Boulet : ...c'est des dispositions d'exception qui permettent à un employeur de faire une demande de partage de coûts et d'être désimputé dans des circonstances exceptionnelles, qui sont le handicap, ou l'obérer injustement, ou des accidents qui surviennent pour des causes extérieures à l'environnement de travail de l'employeur.

M. Leduc : Je comprends que vous dites qu'on ne veut pas... qu'il y a déjà un règlement, mais j'imagine que vous serez d'accord avec moi que, si on décide, aujourd'hui — et nous sommes les législateurs, ici — de modifier la loi, bien, si c'est pour avoir une incidence sur le règlement, le règlement devra être modifié en conséquence. On s'entend là-dessus.

M. Boulet : Je n'ai pas de commentaire.

M. Leduc : Là, je veux dire, au-delà de l'objet de notre discussion, ça serait la suite logique des choses. Si on s'entendait sur un changement de loi qui avait une incidence réglementaire, la suite logique, ça serait...

M. Boulet : Mais, comme je vous explique, il y a un règlement sur le financement, il a au-delà de 300 articles, puis tout est au quart de tour, préparé par des actuaires. Puis il y a des formations, des blocs de 45 heures de formation, là, pour les gens qui veulent devenir des spécialistes en financement. Il y en a peu au Québec. Mais, pour moi, ce n'est pas l'objet de notre projet de loi, mais vraiment pas.

M. Leduc : Mais vraiment, sur le principe, là, que les plus petits partagent la facture de la conséquence des gros, il n'y a pas quelque chose qui vous chicote un peu?

M. Boulet : Je ne serais pas capable d'aller dans le détail puis dans les méandres des calculs parce que des spécialistes actuaires, ici, pourraient dire : Oui, mais on... il y a tel facteur de chargement ou tel facteur de déchargement. Mais, encore une fois, je ne suis pas en mesure de faire d'autres commentaires.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Donc... Oui?

M. Leduc : Est-ce qu'on pourrait alors juste avoir une compréhension de la conséquence sur le TAT? Est-ce que vous avez une idée de combien de causes se rendent au tribunal sur la question de la désimputation?

M. Boulet : En fait, ça va continuer comme c'était avant. Il n'y aura pas d'impact à la hausse parce que les articles demeurent tels qu'ils étaient. Le «obérer injustement» était déjà dans l'article 326. Et le handicap, qu'on va voir un peu plus tard, il était déjà là. Et je vous dirais que le nombre de causes, il ne variera pas en fonction du p.l. n° 59.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait.

M. Leduc : Bien, oui, d'accord. Bien, c'est-à-dire, tel quel, non, mais, si on avait, donc, exploré mon amendement plus en avant, il aurait pu y avoir des conséquences sur le nombre de...

M. Boulet : ...vraiment pas en mesure de dire ça, vraiment pas capable de répondre.

M. Leduc : O.K. Mais, dans ce cas-là, pouvez-vous, à la limite, m'indiquer le nombre de causes au TAT sur la question de la désimputation? Est-ce qu'on a ce chiffre-là?

M. Boulet : Vous voulez savoir le nombre de cas qui vont au Tribunal administratif du travail en matière de partage de coûts? On peut suspendre une couple de minutes puis on va vous donner la réponse.

La Présidente (Mme IsaBelle) : D'accord.

M. Leduc : Bien, à moins que mon collègue veuille continuer ou...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Est-ce qu'il y avait d'autres interventions sur l'amendement déposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve? Non. Alors, vous n'en aviez pas, député de Jonquière, non?

M. Gaudreault : ...après la suspension, je vais avoir des questions.

La Présidente (Mme IsaBelle) : D'accord. Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 44)

(Reprise à 21 h 46)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, à la question posée par le député d'Hochelaga-Maisonneuve, je pense que le ministre a une réponse. M. le ministre, la réponse... la parole est à vous, pardon.

M. Boulet : Oui. Excusez-moi. Sur les 37 281 contestations reçues entre le 1er avril 2019 et le 31 mars 2020, il y en avait 4 499 en imputation puis il y en a à peu près 20 % qui se règlent en conciliation. Ça fait que des audiences, nombre de dossiers fermés, vous voyez, à peu près 3 500. Mais ça vous donne une bonne idée, à peu près un dossier sur huit.

M. Leduc : Merci d'avoir pris le temps de chercher le chiffre. C'est intéressant. Puis est-ce qu'on a une idée, donc, au final, sur une année, les causes gagnées, les désimputations accordées d'office, ça donne... Sur l'assiette des revenus recherchés, là, on désimpute combien, environ, là, par année?

M. Boulet : En 2019, les coûts désimputés, là, qui vont au fond commun, 612 millions. Donc, 612 millions sur le 2,5 milliards, il me semble, 2,9 milliards... en tout cas. Mais...

M. Leduc : ...chiffre-là, là, on le cherche depuis tantôt. C'était...

M. Boulet : Oui. Non, mais je l'ai ici.

Des voix : ...

M. Boulet : Donc, c'est 612 millions sur la valeur du fond. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Je pense... Oui.

M. Leduc : Donc, le chiffre total, c'est quoi?

M. Boulet : 612 millions en 2019.

M. Leduc : Oui, mais sur le revenu annuel de la CNESST?

M. Boulet : L'impact sur la valeur du fonds commun. Donc, ce qui est versé dans le fonds commun, donc le 2 point quelques milliards de cotisations.

M. Leduc : Bien, c'est ça, je voulais qu'on le clarifie une fois pour toutes, là. On jongle avec lui depuis tantôt. 2,4 milliards? 2,5 milliards?

Des voix : ...

M. Boulet : C'est 2,2 ou 2,3.

M. Leduc : 2,2 à 2,3 de revenus de cotisation?

M. Boulet : Oui.

M. Leduc : 2,3 milliards. On va dire, mettons, 2,3, donc 612 millions d'imputations... de désimputations sur 2,3 milliards de cotisations. C'est quand même beaucoup. Je n'ai pas le pourcentage, là. Combien?

M. Boulet : Non, non, c'est l'ensemble des coûts découlant des handicaps préexistants, l'ensemble des coûts découlant des événements survenus dans un contexte où l'employeur n'a pas le contrôle des risques, les cas où ils sont obérés injustement. Puis, tu sais, c'est l'ensemble de ça, là. Et ça... Je pense que c'est un coût qui est quand même correct, là. Moi, en tout cas, ça...

Mais, encore une fois, je le répète, là, on fait une discussion financement, puis ça n'a pas d'impact sur les droits des travailleurs. Tu sais, c'est un régime de financement qui est paramétré dans un règlement sur le financement puis...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Est-ce qu'il y a d'autres interventions...

• (21 h 50) •

M. Leduc : Oui, je serais prêt, volontiers, à céder la parole. Je veux juste réinsister. Je sais que ça n'a pas d'impact sur le travailleur... bien, c'est-à-dire, on pourrait en trouver un, mais ce n'est pas parce que ça n'a pas d'impact sur le travailleur que ça ne m'intéresse pas, là. Ça m'intéresse, la façon dont on finance nos institutions.

La Présidente (Mme IsaBelle) : ...laisser la parole au député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui, peut-être juste une petite question technique, là. Vous gardez le risque d'obérer, là, injustement un employeur dans la... O.K. C'est parce que, dans le texte de l'alinéa, tel que modifié, il n'y apparaît plus. Ça fait que je voulais juste être sûr, là, de savoir c'était quoi, la bonne version, là, mais l'«obérer» est là. O.K.

Donc, moi, ce que je comprends, c'est que, dans le fond, par cet amendement, le député d'Hochelaga-Maisonneuve vient, comment je pourrais dire, segmenter la désimputation selon le lieu où est arrivée la lésion. Si la lésion est survenue chez un employeur au taux de cotisation de l'unité, on va partager parmi tous les employeurs au taux de cotisation de l'unité. Si la lésion est arrivée chez un employeur au taux de cotisation personnalisé, on va partager... Est-ce qu'on peut dire ça, «partager»? Là, j'essaie... parce que moi, je navigue dans un milieu que... des notions que je connais moins, là. Mais donc on va partager parmi tous les employeurs au taux de cotisation personnalisé, et la même chose si la lésion arrive chez un employeur au taux de cotisation d'ajustement rétrospectif.

Là, M. le ministre, avec votre expérience et votre éclairage, vous allez peut-être pouvoir m'aider, à moins que le député d'Hochelaga-Maisonneuve veuille répondre. Question naïve : Il doit arriver des moments où la lésion survient chez un employeur à un taux de cotisation x, mais il y a plusieurs employeurs avec plusieurs types de taux qui sont impliqués, alors il se passe quoi dans ces circonstances-là? Vous n'avez pas saisi, hein?

M. Boulet : C'est une question sur le... juste pour être sûr de bien comprendre, sur le «obéré injustement» ou sur...

M. Gaudreault : Non, ça, c'est correct, pour «obéré injustement», on l'a réglé.

M. Boulet : O.K. Sur le financement, je ne suis pas en mesure... et je ne suis pas sûr que je comprends...

M. Gaudreault : Bien, c'est parce que ce que je comprends de la proposition d'amendement, c'est qu'on fragmente ou on segmente en trois types, selon la cotisation. C'est ça, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve? Bon. Mais il peut arriver une situation où il y a plusieurs employeurs de touchés mais qui n'ont pas le même type de cotisation.

M. Boulet : Bien, peut-être qu'en me donnant un exemple, je comprendrais, là. Mais ce que vous dites...

M. Gaudreault : ...être sûr de bien comprendre, là.

M. Boulet : Mais, à mon avis, la règle... Il faut toujours revenir à la base. C'est imputé à l'employeur chez qui survient la lésion, donc ça ne peut pas être deux employeurs qui sont dans des catégories différentes. Donc, la règle, c'est l'employeur chez qui ça survient. Il y a trois régimes de financement.

M. Gaudreault : Oui, exact.

M. Boulet : Puis donc il y a des demandes de partage de coûts.

M. Gaudreault : Exact.

M. Boulet : Puis la désimputation a un impact chez les membres du rétrospectif pour les demandes de partage qui proviennent de ce groupe-là et chez les groupes du personnalisé, pour les demandes...

M. Gaudreault : De tout le groupe. De tout ce groupe-là.

M. Boulet : ...de tout le groupe, pour les demandes qui proviennent du personnalisé, qui impliquent aussi les petites entreprises qui sont mutualisées, qui font partie de mutuelles de prévention. Puis c'est pour ça que je dis... Puis, bon, je n'ai pas soulevé de recevabilité, de problématique de recevabilité, là, mais c'est une dynamique qui découle de l'expertise d'actuaires. Puis, comme j'expliquais tout à l'heure, là, c'est paramétré dans un règlement sur le financement, puis il y a probablement plein d'indices de pondération. Puis est-ce que c'est parfaitement équitable? Moi, je le souhaite. Et je pense qu'il faut que je dise au collègue de...

M. Gaudreault : Je comprends.

M. Boulet : ...à vous autres : Si jamais, en dehors de notre p.l. n° 59, on peut se faire une discussion puis mettre en contact des actuaires pour modifier, éventuellement, ou faire des projets d'amendement au Règlement sur le financement, je suis totalement ouvert.

M. Gaudreault : O.K., je comprends. L'article habilitant, dans la loi... l'article habilitant pour le pouvoir réglementaire, c'est lequel?

M. Boulet : Il y en a plusieurs.

M. Gaudreault : Il y en a plusieurs, mais particulièrement sur le financement?

M. Boulet : C'est à partir de 454, là, et suivants.

M. Gaudreault : De la loi?

M. Boulet : Oui.

M. Gaudreault : Qu'il y a les articles habilitants pour le règlement?

M. Boulet : Exact.

M. Gaudreault : O.K. Et ça, c'est un règlement à part, le financement. C'est ce que dit le ministre.

M. Boulet : C'est un... Bien, il y a plusieurs règlements, mais le Règlement sur le financement, c'en est un.

M. Gaudreault : Le Règlement sur le financement, il a été adopté quand ou il a été modifié quand la dernière fois?

M. Boulet : Ah mon Dieu! Il y a plusieurs années?

Des voix : ...

M. Boulet : Bien, il est modifié annuellement parce qu'ils doivent modifier les taux. Mais ça...

M. Gaudreault : Modifié annuellement, mais on ne change pas la mécanique comme telle. C'est juste...

M. Boulet : Non, non.

M. Gaudreault : Mais la structure même du règlement date de...

M. Boulet : La structure, l'ossature du Règlement sur le financement? On le vérifie.

Mais, collègue de Jonquière, le pouvoir habilitant, bien, c'est 454, comme je vous mentionnais, là. Il y a 5°, il y a 6°, il y a 7°, il y a 8°. Donc, 5°, c'est les unités de classifications, les secteurs; 6°, c'est le taux de cotisation; 7°, c'est les conditions d'assujettissement à un taux personnalisé; 8°, c'est la fixation au taux, les ratios d'expérience, les unités de classification; l'augmentation des taux, c'est 8.1°. Mais c'est tous ces paragraphes-là.

M. Gaudreault : Oui, je le vois, là, je l'ai devant moi.

M. Boulet : C'est, je vous avouerais, là, d'un niveau de complexité très élevé.

M. Gaudreault : Oui, je suis d'accord avec vous, mais je ne veux pas que le niveau de complexité nous empêche de réfléchir.

M. Boulet : Mais on pourra, puis je l'ai dit au collègue de... oui, on pourra faire une réflexion avec les experts.

M. Gaudreault : Exact. Mais, moi, là où je veux aller, c'est que... Moi, je ne suis pas nécessairement contre la suggestion du député d'Hochelaga-Maisonneuve. Et c'est pour ça je voulais savoir à quel moment la structure du règlement avait été adoptée, à la base, parce que, dans le fond, ça va être lors de la révision réglementaire.

M. Boulet : 1996.

M. Gaudreault : 1996?

M. Boulet : Oui.

M. Gaudreault : Donc, ça fait 25 ans.

M. Boulet : Oui. C'est solide.

M. Gaudreault : Bon. C'est l'année du déluge, l'année du déluge du Saguenay. Alors...

M. Boulet : Avec la petite maison blanche, oui.

M. Gaudreault : Oui, mais il faut dépetitemaisonblanchiser, parce qu'il y a eu beaucoup d'autres dommages, là.

M. Boulet : Je m'excuse. Vous avez raison, oui.

M. Gaudreault : Non, non, mais c'est ça. Bien, ce n'est pas grave, là. C'est mon objectif, cette année, en tout cas, de montrer que c'était beaucoup plus large que ça, sans rien enlever à la maison blanche, mais, bon, peu importe.

Ce que je veux dire, c'est qu'il va falloir amener cette réflexion-là dans une révision réglementaire, avec tout le processus de révision réglementaire qu'on connaît, les consultations, processus de consultation, etc. Mais, pour ça, il va falloir faire une révision réglementaire, alors... Et ça, c'est entre les mains du gouvernement. C'est ça qui est frustrant dans notre rôle de député, parce que nous, on fait un travail législatif. Le pouvoir réglementaire... pour ça je voulais savoir c'était quoi, les articles habilitants.

M. Boulet : ...oui.

M. Gaudreault : Pardon?

M. Boulet : Oui, c'est le pouvoir exécutif, oui.

M. Gaudreault : Bien, c'est ça, c'est le pouvoir exécutif. Ça fait que moi, je pense, la question à poser, c'est plus : Après 25 ans d'un règlement sur le financement, qu'il soit bon, qu'il soit mauvais, si ça fait 40 ans qu'on avait cette loi, puis là on l'ouvre, est-ce que... après l'adoption de la loi, si jamais on y arrive, est-ce que le gouvernement a l'intention de faire une modification réglementaire incluant ce Règlement sur le financement? Moi, je pense que la question est là. Et le jour où le gouvernement va ouvrir ce règlement, bien là on fera les représentations nécessaires. Moi, c'est mon point de vue.

M. Boulet : O.K., mais que je partage. C'est certainement mon intention de faire une réflexion, de faire une analyse, et, le cas échéant, après consultation, après analyse, si c'est mérité, si c'est justifié, tout à fait.

M. Gaudreault : O.K. Et ce règlement-là dont on parle, c'est vraiment un règlement? Ce n'est pas un règlement... une politique de la CNESST?

M. Boulet : C'est un règlement du pouvoir exécutif.

M. Gaudreault : Un règlement du pouvoir exécutif?

M. Boulet : Exact.

M. Gaudreault : Avec toutes les démarches à la Gazette officielle et tout?

M. Boulet : Exact. Tout à fait.

M. Gaudreault : O.K. Donc, ce que vous nous... ce que le ministre nous dit, Mme la Présidente, c'est qu'une fois que la loi va être adoptée il a l'intention d'entamer une réforme réglementaire également.

• (22 heures) •

M. Boulet : Une réflexion sur le Règlement sur le financement. Et on pourra amorcer cette réflexion-là, nous. On pourra décider de voir comment on fait la consultation, puis qui on implique, qui sont les experts concernés. Mais je pense que ça... Absolument, moi, je suis tout à fait d'accord avec ça.

M. Gaudreault : O.K. Donc, c'est un report de ce débat. Moi, je pense que le député d'Hochelaga-Maisonneuve a lancé un débat important puis intéressant, que je vais essayer de mieux connaître. Mais il va falloir faire un chantier important, un dépoussiérage de la réglementation. Moi, honnêtement... Oui?

M. Boulet : Puis il y a des règlements, puis celui-là, là, il faudrait que je le vérifie, là, est-ce que c'est un règlement adopté par le gouvernement ou un règlement de la CNESST, là, mais c'est un règlement complet en soi, puis il va falloir procéder à une réflexion là-dessus.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Ah!

M. Gaudreault : Oui. Bien, c'est parce que, tantôt, le ministre disait : C'est un règlement du pouvoir exécutif, là c'est peut-être un règlement interne de la CNESST. Ce serait important qu'on le sache.

M. Boulet : Je vais vérifier puis je...

Des voix : ...

M. Boulet : C'est un règlement de l'exécutif, mais, dans le pouvoir habilitant, la CNESST pourrait adopter ce règlement-là. Mais le Règlement sur le financement, en 1996, est-ce que c'est un règlement adopté par le pouvoir exécutif ou...

Une voix : ...

M. Boulet : O.K., par la CSST, qui fait partie du pouvoir exécutif. Donc, ça a été adopté par le... Évidemment, ça fait partie du pouvoir exécutif.

M. Gaudreault : Oui, ma question, c'est vraiment : Est-ce que ça respecte les procédures d'adoption réglementaires...

M. Boulet : ...un règlement en bonne et due forme. Ce n'est pas un règlement interne, là.

M. Gaudreault : Non, ce n'est pas un règlement interne. Mais, ce que je veux dire, avec période de consultation...

M. Boulet : Exact.

M. Gaudreault : ...possibilité de déposer des mémoires... bien, des mémoires, je veux dire, des... oui, des mémoires pour... dans la période de consultation?

M. Boulet : Je ne le sais pas, qu'est-ce qui a été fait à l'époque, là.

Une voix : ...

M. Boulet : Mais je vais faire vérifier, là, sur la procédure d'adoption de ce règlement-là, là, qui a été fait par la Commission santé et sécurité à l'époque. Mais, sur la volonté de le revoir, bien sûr.

M. Gaudreault : O.K. Mais en fait ma question, c'est... Il faut la volonté de le revoir, mais il ne faut pas que ça se fasse derrière des portes closes, c'est ça que je veux dire. Il faut qu'on permette aux groupes ou aux partis politiques de pouvoir déposer leurs avis ou leurs opinions. Je ne parle pas d'une commission parlementaire, là, évidemment, là, ce n'est de ça que je parle.

M. Boulet : Non, non, mais il faut faire des consultations.

M. Gaudreault : C'est ça.

M. Boulet : Puis on verra la manière dont on fait les consultations puis qui sont les experts qu'on consulte aussi, là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement déposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve? Alors, député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Moi, je voulais juste dire... Je ne sais pas s'il y a des gens qui sont dehors qui nous écoutent ce soir, mais, en tout cas, ils ont l'air d'avoir beaucoup de plaisir en face de l'Assemblée.

Bref, oui, il y a un chiffre, là, que j'ai oublié d'évoquer tantôt qui est quand même important. Dans l'analyse d'impact réglementaire de la loi, là, qui a été préparée, évidemment, par le ministre, il y a une section, là, sur les dispositions d'exception en imputation, la section 1.4.5, qui va comme suit : «La proportion du coût des prestations non imputé à des dossiers d'employeurs, donc réparti à plus d'un employeur, est passée de 13 % en 1994 à 28 % en 2018 — après ça, ils donnent des chiffres, là, qui ne sont pas loin de ce que vous nous avez donné tantôt, donc — les coûts non imputés représentaient un montant de 195 millions dans la tarification de 1994, alors qu'ils sont estimés à 612 millions en 2019.» C'est exactement ce que vous nous avez donné, 612 millions en 2019, tantôt.

M. Boulet : Et c'est clair que le... il y a eu une augmentation, la jurisprudence s'est établie. Avant, il y avait un courant restrictif sur la notion de handicap. Maintenant, c'est un courant qui est plus connecté à la définition d'un handicap qui est dans la charte. Ça fait que c'est sûr qu'il y en a plus, mais c'est l'état de la jurisprudence puis c'est les juges qui en ont décidé ainsi. Puis c'est du financement, encore une fois, il n'y a pas d'impact sur l'exercice des droits des travailleurs. Je pense, c'est important de le redire. Mais c'est sûr qu'il y a eu une augmentation, je pense que tout le monde le constate et le reconnaît.

M. Leduc : Oui, mais pourquoi vous soulevez encore l'histoire de l'intérêt des travailleurs?

M. Boulet : Non, mais je dis c'est sûr qu'il y a une augmentation du nombre de demandes de partage de coûts. Et il y en a plus, de désimputation, en raison des concepts qui sont interprétés de façon beaucoup plus large et libérale par le Tribunal administratif du travail.

M. Leduc : Pourquoi, là, que vous soulevez «mais ça n'a pas d'impact sur l'intérêt du travailleur»? Je ne comprends pas pourquoi vous le ramenez, là.

M. Boulet : Non, non, mais je l'ai dit au départ, là, parce que c'est plus une question de désimputation, ça fait partie des dispositions d'exception. Excusez-moi, là, si je l'ai répété trop souvent, là.

M. Leduc : Il n'y a pas de... Ah! non, non, mais ce n'est pas... Vous n'avez pas à vous excuser pour ça, il n'y a aucun problème.

Je termine avec un autre extrait, toujours de l'étude d'impact, là, déposé par le gouvernement sur la loi, ça va comme suit : «Le fait qu'un volume important des coûts échappe à la tarification fragilise l'équilibre financier du régime et l'efficacité de la méthode de tarification. La hausse des coûts non imputés est un enjeu important puisqu'elle pose des problèmes d'équité entre les employeurs, en plus de nuire à l'atteinte des objectifs de la tarification basée sur l'expérience.»

C'est exactement ça que mon amendement vise à traiter, là, problème d'équité entre les employeurs. C'est... Je suis les deux pieds dedans, là, avec mon amendement, là. Il n'est peut-être pas rédigé dans les bonnes façons, il n'est peut-être pas... Je sais que c'est compliqué avec le règlement, mais vous avez, en quelque sorte, vous-même soulevé cet enjeu-là à travers votre étude d'impact réglementaire sur votre projet de loi.

Moi, j'ai de la misère à comprendre qu'on sortirait de cette étude détaillée là bredouilles en matière de solution. J'en ai mis une sur la table. Vous ne semblez pas vouloir la retenir, c'est votre prérogative, bien sûr. Ce que je vous suggérerais... puis en fait je vous l'annonce, on va la voter, là, ma suggestion, vous allez certainement... en tout cas, probablement la battre, mais j'ai préparé, donc, un amendement qui fait un peu suite à ce que disait mon collègue de Jonquière précédemment, à savoir qu'on ne peut pas en rester là, il y a un problème. Passer de 13 % à 28 % de proportion, là, de désimputation de coûts, ce n'est pas banal. Moi, ça m'intrigue. Je veux en savoir plus. Je veux qu'on y réfléchisse plus.

Là, visiblement, on a eu l'occasion d'en discuter ce soir. On a eu l'occasion de mieux comprendre ce soir — en tout cas, c'est mon cas — comment ça fonctionne, c'est quoi, les conséquences. Et j'apprécie encore vos explications au début de l'échange, merci de nouveau. Cependant, on ne peut pas rester bredouilles avec ce dossier-là. Vous le soulevez vous-même dans votre étude d'impact. Je vais... Votons, votons cet amendement-là. J'en ai un autre de préparé, on pourra rapidement le traiter, c'est la question de se donner un mandat, dans le fond, là, en commission, ici, avec un échéancier. Je pourrais peut-être vous en parler quand on suspendra, si vous voulez, en attendant que vous en preniez connaissance pour qu'on le traite rapidement.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, oui, merci. Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention à l'amendement déposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve, à l'article 93.1, nous allons passer à la mise aux voix.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Boulet (Trois-Rivières)?

M. Boulet : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Abstention.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)?

M. Gaudreault : Abstention.

La Secrétaire : Mme IsaBelle (Huntingdon)?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté.

Nous poursuivons ou vous demandez une suspension, député d'Hochelaga-Maisonneuve?

M. Leduc : Oui. On vous achemine un nouveau 93.1. Il est déjà envoyé.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Vous allez prendre le temps de consulter? Parfait. Alors, nous allons...

M. Leduc : Ça serait peut-être plus simple.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 22 h 08)

(Reprise à 22 h 17)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, oui, M. le ministre, je pense que vous voulez intervenir?

M. Boulet : Bon, écoutez, malgré l'absence de représentation, bon, des fédérations, comme la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante et autres, moi, je suis assez sensible aux propos du collègue de Jonquière et d'Hochelaga-Maisonneuve. Puis moi, j'avoue que des spécialistes en financement, il y en a peu, mais il faut être quand même interpelé, ça date de 1996.

Donc, moi, je vais faire préparer une lettre mandat, je vais faire préparer une lettre mandat que je pourrai vous partager demain, qui va être... demain ou plus tard, là, mais qui va être transmise au C.A. de la CNESST. Comme vous le savez, l'expertise en santé et sécurité, elle est concentrée à ce C.A. là, qui peut consulter, qui peut s'adjoindre des experts, et ça, ça fait suite à une proposition qui allait dans ce sens-là du collègue d'Hochelaga-Maisonneuve. Donc, dans les deux ans de la sanction de la présente loi, le mandat qui va être confié au C.A. de la CNESST, c'est d'examiner et de faire des recommandations sur les règles de financement qui sont prévues au chapitre IX de la LATMP, puis ça va être un mandat large, de s'assurer non seulement d'examiner, mais de nous faire des recommandations qui vont pouvoir guider la commission et le gouvernement dans la suite à apporter. Voilà.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Y a-t-il des interventions? Oui, député de Nelligan.

M. Derraji : Oui. Je pense que c'est une bonne chose de le voir, mais est-ce que, dans le cadre de cet exercice, il va y avoir des discussions sur la désimputation? Parce que, moi, ce que j'ai entendu, au-delà de parler du financement, la structure du financement — je veux juste terminer — c'est que, si la CNESST acceptait plus facilement la désimputation, il y aurait moins de contestations. Donc, il y aura... on ne va pas toucher à la désimputation.

M. Boulet : Non.

M. Derraji : Donc là, c'est vraiment la structure du financement par les trois catégories.

M. Boulet : Exact. Ce qui a été soulevé par les collègues d'Hochelaga-Maisonneuve et Jonquière. C'est la structure de financement, les règles de financement, puis la question d'équité, là, qui a été soulevée, là, notamment par...

M. Derraji : La question d'équité est pas mal soulevée, on va le voir aussi dans l'article 325. Mais ce que j'ai entendu, d'après l'ensemble des rencontres, c'est plutôt la désimputation qui cause problème aux employeurs, mais, bon, ça, c'est un autre sujet.

M. Boulet : Oui.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Député d'Hochelaga-Maisonneuve.

• (22 h 20) •

M. Leduc : Bien, je... En tout cas, voyons où ça mène, tout ça, là. Mais, pour faire suite à ce que j'ai dit avant la suspension, c'est vrai que j'avais pensé faire un amendement. On a discuté à micro fermé, puis là on a trouvé, je pense, un compromis. J'avais l'idée de faire peut-être une commission ou un mandat d'initiative. Là, on se dirige plus vers la lettre mandat, donc, du C.A. de la CNESST, ce qui me convient, là. Je pense qu'on peut jouer sur cette patinoire-là.

Je voulais clarifier peut-être quelques éléments sur les délais. Je ne sais pas si vous l'aviez dit, j'ai peut-être manqué, mais que c'était un deux ans, là.

M. Boulet : Oui, dans les deux ans de la sanction. C'est exactement ce que j'ai repris, oui.

M. Leduc : Voilà, donc, deux ans de la sanction. Puis, dans le mandat, on a parlé d'un rapport d'évaluation de règles de financement prévu à la LATMP, mais il faut aussi rajouter le lien. L'important, c'est de faire aussi le lien avec les mesures de prévention prévues par la LSST. Puis, de toute façon, bien, si vous dites un mandat large d'étude des règles de financement, nécessairement, c'est parce que...

M. Boulet : Oui, oui.

M. Leduc : ...c'est parce que tout... puis là c'est là qui m'a mis la puce à l'oreille, vous dites : On ne touchera pas à la désimputation. Moi, je ne suis pas en train de vouloir télégraphier la conclusion de l'étude, mais il faut que la désimputation y soit traitée, nécessairement, non?

M. Boulet : Bien, la désimputation...

M. Leduc : Mais c'est parce que c'est là, le... c'est ça, le noeud du problème.

M. Boulet : Bien, en fait, oui puis non, mais pas revoir la possibilité d'avoir une désimputation fondée sur le handicap ou sur les causes prévues à 326, mais les impacts de la désimputation, donc la façon dont le financement est bâti puis les incidences sur la façon dont la désimputation se fait, là. Mais je vais faire faire une lettre mandat, là, quand même assez générale, là. Je ne veux pas que ça soit limitatif, mais que ce soit une analyse qui est complète, là.

M. Leduc : O.K. Bien, afin de peut-être vous alimenter sur la rédaction de cette lettre mandat — tant mieux si elle arrive demain, ça veut dire qu'il y a du monde qui ne dormiront pas beaucoup ce soir ou qui n'écouteront pas la période des questions demain matin, au pire, ça sera plus tard — mais je veux juste vous lire un petit extrait du rapport de l'IRIS, là, que j'ai fait référence tantôt, pour que vous compreniez un peu ma pensée par rapport à ça, puis vous verrez ce que vous en retiendrez pour la rédaction de votre lettre.

Donc, ça se retrouve, entre autres, aux pages 53, 54 du rapport de l'IRIS, ça va comme suit : «En effet, l'une des justifications principales de la personnalisation du financement est qu'elle contribue à la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. Or, il n'existe aucun consensus scientifique sur le lien entre tarification par expérience et prévention en SST. À cet égard, depuis la mise en place des mutuelles de prévention en 1998, dont l'objectif déclaré était de responsabiliser les employeurs en matière de prévention, ni la CNESST ni la littérature scientifique n'ont, à notre connaissance, procédé à l'analyse de leurs retombées en matière de SST.

«En regard de l'état des connaissances scientifiques et étant donné la judiciarisation du régime générée par la personnalisation de son financement, les importantes limites des statistiques [des] lésions professionnelles et le manque d'études qualitatives de l'ensemble des effets néfastes de la tarification par incidences dans le contexte québécois, nous recommandons de soumettre la CNESST à un bilan complet des réformes des années 1990.»

Là, ils proposent de faire ça à travers une commission d'enquête. On passe par-dessus la méthode, mais après ça ils donnent des objectifs, il y en a cinq : «1° les effets»... examiner, donc : «1° les effets adverses de la tarification par incidences, notamment : l'impact de la gestion active des dossiers de réclamation et de l'affrontement médicolégal sur la santé physique et psychologique des [travailleurs] et [travailleuses]; [le phénomène] de non-déclaration et de sous-déclaration des lésions professionnelles; les pratiques de retour trop hâtif en emploi [de travailleurs, travailleuses] victimes de lésions; la discrimination à l'embauche des personnes souffrant de limitations fonctionnelles, de handicaps et de problèmes de santé mentale; et l'expérience de la complexité bureaucratique vécue par les personnes lésées;

«2° les coûts engendrés par le système de contestation médicolégale;

«3° les coûts des lésions professionnelles supportés par le régime public et universel [des] soins de santé et les coûts humains non financés et non indemnisés par le régime de la CNESST;

«4° le lien entre tarification par incidences et prévention de la SST; et

«5° — finalement — la pertinence de l'abolition de la tarification par incidences et de la mise en place d'un mode de financement alternatif en fonction des efforts de prévention.»

Comme je vous dis, là, je ne suis pas en train de l'écrire à votre place, cette lettre mandat là, mais il me semble que c'est ça, l'objectif, de faire un débat assez large, vous l'avez dit vous-mêmes, sur ce thème-là. Il faut donc forcément aborder, d'une façon ou d'une autre, la désimputation et l'inscrire dans ce lien qu'on avait prétendu, à l'origine, être l'objectif de la désimputation, soit favoriser la prévention. Et force est de constater que ce n'est pas nécessairement le cas, en tout cas, il n'y a pas beaucoup d'études qui le soulignent. Par contre, il y a des effets néfastes, qu'il faut bien les identifier, et peut-être, au final, sous-peser les avantages et inconvénients, et y réfléchir. Encore une fois, on n'écrira pas les conclusions d'avance. Je suis content que vous acceptiez, d'une manière qui est la vôtre, là, donc, faire la lettre mandat et je m'en réjouis.

J'ai peut-être une dernière question... en fait, on verra bien la nature de la lettre que vous nous déposerez, mais est-ce que vous envisagez que cette étude-là, qui sera faite par le C.A. de la CNESST, puisse nous être déposée ici, à la Commission de l'économie et du travail?

M. Boulet : Moi, je suis tout à fait à l'aise que ça puisse se faire. Puis je suis aussi d'accord avec vous sur... dans la lettre mandat, qu'on prévoie l'examen, l'analyse des incidences des catégories, aussi, de la grille de tarification, de l'impact que ça a pu avoir sur les réclamations, sur la prévention aussi, quand vous référez à la réparation, absolument, tu sais, c'est le socle du financement, quel est son impact, ses répercussions, et que le C.A. de la CNESST nous fasse des recommandations. Puis effectivement, le rapport de l'IRIS, je l'ai déjà lu, là, puis il faut s'en inspirer, absolument, pour bâtir une lettre mandat qui est quand même assez large.

M. Leduc : C'est une bonne nouvelle, Mme la Présidente. Je pense que ça termine la soirée sur une belle note. Puis, si le rapport est déposé ici, à la commission, dans deux ans on pourra éventuellement envisager d'en faire peut-être un, mandat d'initiative pour l'étudier, on verra bien rendu là. Mais, encore une fois, merci, M. le ministre, pour votre ouverture.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, merci. Député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Bien, à mon tour de reconnaître cette lettre mandat, là, comme une bonne nouvelle, parce qu'en tout cas, moi, en ce qui me concerne, je trouvais que c'était complexe d'arriver dans la loi avec la proposition d'amendement du député.

Je suis allé relire le pouvoir réglementaire en vertu de l'article 454, et je l'avais lu vite, en premier, quand je vous ai posé des questions, tantôt, parce que c'est vraiment inscrit «la commission peut faire des règlements».

M. Boulet : Oui, tout à fait. Je l'ai vérifié, moi aussi.

M. Gaudreault : Oui, c'est ça. Alors donc, pour ça... c'est pour ça qu'en arrivant avec la lettre mandat, là ça devient un petit peu plus...

M. Boulet : Contraignant.

M. Gaudreault : ...contraignant envers la commission. Ma seule question, je comprends que ce n'est quand même pas écrire un haïku, là, mais, quand même, est-ce que, deux ans, ce n'est pas un peu trop long? Parce que, moi, je vois aussi l'échéance électorale, puis ça n'a rien à voir avec le parti, c'est juste qu'on a une échéance électorale à date fixe. Donc, si la loi est adoptée, rentre en vigueur, deux ans, là on se retrouve dans la prochaine législature. Donc, je ne sais pas si on n'est pas capables d'avoir une lettre... à tout le moins une lettre mandat, peut-être avec un rapport intérimaire.

M. Boulet : Non, mais, collègue, je suis d'accord avec vous. En même temps, c'est un règlement de 300 articles, là, puis celui qui va avoir l'audace de le maîtriser... Tu sais, c'est quand même un chantier qui est extrêmement important, puis je pense qu'il faut donner le temps requis. Des fois, on pense que ça peut se faire en un an, un an et demi, mais plus c'est fait rapidement...

M. Gaudreault : Oui, je sais.

M. Boulet : Je pense que deux ans, le... je pense que c'est un délai qui est correct et raisonnable. Il faut bien faire les choses, de manière ordonnée, je crois. Puis, collègue, aussi, le C.A. de la CNESST va éventuellement s'adjoindre des experts actuaires, puis consulter, puis... Donc, je pense que deux ans, c'est une belle période de temps, ceci dit avec...

M. Gaudreault : O.K. En tout cas, c'est sûr qu'à l'étude des crédits on pourra demander un suivi, entre-temps.

M. Boulet : Très bonne idée. C'est là qu'on voit l'importance d'être accompagné par des doyens.

Une voix : ...

M. Gaudreault : Oui, c'est ça.

Des voix : ...

M. Gaudreault : Mme la Présidente, O.K., bien, c'est beau. Moi, je veux...

M. Boulet : Mais on va le faire.

M. Gaudreault : ...je veux souligner la bonne nouvelle. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Écoutez, il reste deux minutes. Je ne sais pas si vous voulez qu'on commence l'article 94, il reste une minute.

M. Boulet : Bien, vous savez que moi, normalement, je dirais oui, là, mais, si on... on ne va rien qu'avoir le temps de lire, puis je pense qu'à 10 h 30 tout le monde a besoin d'un peu de repos.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est parfait, M. le ministre. Vous avez écoulé le temps, c'est parfait. Alors, compte tenu de l'heure... Merci pour la journée. Effectivement, ça a été une longue journée. Vous avez réussi quand même.

Alors, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die. Demain, on se retrouve à la salle Marois.

(Fin de la séance à 22 h 30)

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