(Onze heures quinze minutes)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, bonjour. Attention, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je
souligne que cette séance se déroulera à la fois dans la salle
Louis-Joseph-Papineau, où nous sommes
présentement, et dans la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.
La commission est réunie afin de poursuivre l'étude
détaillée du projet de loi n° 59, Loi modernisant le régime
de santé et de sécurité du travail.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Chassé (Châteauguay) sera remplacée par M. Caron
(Portneuf) et Mme Richard (Duplessis), par M. Roy (Bonaventure).
Étude détaillée (suite)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Alors, ce matin, nous poursuivons avec le sujet 4, Fonctionnement,
deuxième partie, la section IV.2, l'optimisation des recours, et la
sous-section IV.2.1, la révision des décisions de la CNESST. Nous en étions
rendus à l'étude de l'article 108, mais je crois que le député d'Hochelaga-Maisonneuve
va déposer un amendement. Est-ce qu'il a déjà été acheminé?
M. Leduc : C'est en cours, Mme la
Présidente. Ça ne sera pas bien long.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Il
est en cours.
Alors, nous allons suspendre quelques instants.
Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 16)
(Reprise à 11 h 22)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, nous avons reçu un amendement de la part du député
d'Hochelaga-Maisonneuve. Je vous invite à lire l'amendement et à l'expliquer,
s'il y a lieu.
M.
Leduc : Merci, Mme la
Présidente. L'amendement va comme suit : L'article suivant est ajouté au
projet de loi :
106.1. Le premier alinéa de l'article 358 de
cette loi est modifié par le remplacement de «30» par «60».
On parle bien sûr, ici, de la LATMP et non de la
LSST.
C'est une question de délai. On est contents de
constater, un peu plus loin dans le projet de loi, qu'il y aura un allongement
du délai pour contester une décision de la révision au tribunal, et le ministre
propose de passer de 45 à 60 pour cette étape-là de la révision. C'est une
bonne chose, on va l'appuyer quand on sera rendus à ce moment-là, et on
considère que ça serait tout à fait logique, même en certaines mesures, une
certaine concordance, que le délai de révision pour la révision administrative
soit aussi de 60 jours. Actuellement, il est à 30. Alors, il faudrait que
ça s'approche de ce 60 jours là pour les mêmes raisons qui font en sorte qu'on
le fait passer à 60 jours dans la révision du tribunal. Voilà, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, M. le ministre.
M. Boulet : Merci. Je pense que
c'est important, à un amendement comme celui-là qui est soumis par Québec
solidaire, de rappeler l'économie générale qui se dégage du projet de loi
n° 59 pour tous les recours et procédures. L'objectif, c'est que ce soit
diligent et qu'on déjudiciarise autant que faire se peut.
Et je pense que la décision de première
instance... on a besoin de stabilité. Puis je pense toujours au travailleur qui
bénéficie d'une indemnité pour dommage corporel qui n'est pas versée tant que
le délai de 30 jours n'est pas écoulé et qu'on ne sache pas qu'il n'y a
pas eu de demande de révision. Là, ça passerait de 30 à 60 jours, donc ce
serait beaucoup plus difficile à gérer et ça pourrait avoir un impact négatif
parfois sur certains prestataires.
Par ailleurs, comme vous le mentionnez très
bien, on augmente le délai pour aller
au tribunal administratif pour
le faire passer de 45 à 60 jours. Puis
on prévoit même une option dans certains cas pour aller soit en révision
administrative ou au TAT. Il y en a qui
plaidaient même en faveur d'une abolition, purement et systématiquement, de la
direction administrative.
Ça fait que, pour ces raisons-là, je ne suis pas
ouvert à un amendement de cette nature-là puis, en plus, je vous rappellerai que la loi permet d'obtenir une
prolongation de délai, si tu as une urgence ou tu as un motif
raisonnable ou une raison qui permet à la CNESST de
prolonger. Vous l'avez d'ailleurs à 358.2. Et dans une perspective, encore
une fois, de déjudiciariser, et c'est ce que nous voulons faire, ce n'est pas
en augmentant les délais puis en donnant... puis je le dis autant pour les
travailleurs que pour les employeurs, on a intérêt à ce que le système soit
efficace, fonctionnel, diligent et qu'il y ait le moins d'opportunités possible
de judiciarisation.
Donc, ça complète mes commentaires pour cette
proposition d'amendement.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Y a-t-il d'autres interventions? Député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Je suis surpris
d'entendre le ministre parler de déjudiciarisation, parce que
déjudiciarisation, ça ne veut pas dire
priver de droits des personnes. Ça veut dire essayer, dans la mesure du
possible, d'avoir des mécanismes qui vont favoriser le règlement, qui
vont favoriser des pistes alternatives à des conflits.
Quand moi, je propose de passer de 30 à
60 jours pour le droit de faire appel, de faire une révision
administrative, ce n'est pas contraire à un esprit de déjudiciarisation. Ce
n'est pas du tout la même chose, ce n'est pas du tout le même débat. Des tonnes
de choses qu'on pourrait faire pour déjudiciariser la CNESST, abolir la DRA en
serait une. Je ne l'ai pas vu dans votre projet de loi. J'assume que ce n'est
pas nécessairement ça, votre vision de la chose. Mais c'est parce que si vous
me dites que prolonger des délais, ça s'inscrit mal dans une perspective de
déjudiciarisation, bien, vous le faites vous-même dans un article qui s'en
vient. Vous faites passer le délai de 45 à 65 jours pour le
tribunal. Il n'y a pas une contradiction avec cet argument-là?
La Présidente (Mme IsaBelle) :
M. le ministre.
M. Boulet : J'ai fait mes
commentaires, Mme la Présidente. C'est complet.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Alors, y a-t-il d'autres interventions?
M. Leduc : Oui, Mme la
Présidente. Moi, j'y vois une contradiction très forte. On me dit qu'on est
contents de passer de 45 à 65 jours pour la révision au tribunal.
C'est une bonne chose. Moi, je lui dis que j'approuve ça, puis que je vais
voter pour cet amendement-là, puis que je suis content, moi aussi.
Alors, moi, je dis, par souci de
concordance : Pourquoi ce délai-là, qu'on passe de 45 à 60 jours? Déjà
que le délai était différent, il y avait 45 d'un bord, 30 de l'autre.
Pourquoi exactement, ça, je n'ai pas de réponse par rapport à ça. Est-ce que,
dans ce cas-ci, lorsqu'on passe à 60, il n'y aurait pas lieu de faire ce pas-là
aussi, de dire : Bien, pour la révision administrative, on va le passer à
60 aussi? Ça serait la chose la plus logique et ça éviterait beaucoup de
confusion. Parce que, là, il va y avoir deux délais très différents, le double,
l'un qui est le double de l'autre. Ce n'est pas banal. Moi, je ne vois pas la...
je ne comprends la réticence par rapport à ça.
M. Boulet : Je vais rajouter un
commentaire, là, puis vous le savez très bien, là, collègue
d'Hochelaga-Maisonneuve, avant le Tribunal administratif du travail, vous savez
qu'il y a un service de conciliation qui est offert préaudience, et il faut
donner du temps aux parties pour leur permettre d'embarquer dans un processus de
recherche de solutions et de trouver une entente négociée entre elles-mêmes.
Puis ça se fait beaucoup, d'ailleurs, il y a un nombre considérable de dossiers
qui se règlent à ce stade-là, ce qui n'est pas le cas pour la révision
administrative. Ça fait qu'il faut éviter d'augmenter indûment les délais.
Ils sont augmentés au Tribunal administratif du
travail, puis la personne pourra, dans bien des cas, là, surtout de nature
médicale ou de financement, opter entre la Direction de la révision
administrative et le Tribunal administratif du travail. Le délai, il passe de
45 à 60 jours, surtout pour cet élément-là que vous connaissez bien. Quand
on déjudiciarise, il faut donner aussi, en même temps, des outils pour
permettre aux parties de discuter.
M. Leduc : Donc, c'est l'argument de
la conciliation que vous m'avancez.
M. Boulet : Entre autres, oui, tout
à fait. Au-delà de tous les commentaires que je vous ai faits, celui-là, je
tenais à le rajouter. Merci.
M. Leduc : Puis vous faites bien de
le faire parce que c'est un élément intéressant. Et ce que je comprends, c'est
que, dans la révision administrative, il n'y a aucune forme de conciliation que
ce soit, là, qui... en tout cas, qui est formellement prévue.
M. Boulet : Bien, il n'y a pas de
facilitateurs ou des conciliateurs. Les parties peuvent, mais il n'y a parfois
pas un rapport de force équivalent, alors que, quand tu es avec un conciliateur
avant l'audience au Tribunal administratif du travail, c'est une personne qui
est spécialisée pour aider les parties à trouver un terrain d'entente. Ça fait
que cet élément-là, il doit être...
M. Leduc : Puis ce que je comprends,
c'est que ça a un certain succès, là.
M. Boulet : Oh mon Dieu!
• (11 h 30) •
M. Leduc :
Puis c'est ce que j'entends, moi aussi, dans les normes du travail également,
cette logique-là de conciliation a un certain succès.
M. Boulet : Ah! totalement. Je suis
un fervent partisan, puis vous le savez, collègue, des alternatives de
résolution de litige. Conciliation, médiation ou médiation-arbitrage,
appelons-les comme on veut, c'est l'avenir de nos systèmes contentieux et c'est
amorcé depuis des années, j'oserais dire, des décennies dans d'autres pays.
Puis, au Québec, ça prend aussi beaucoup d'ampleur, puis vous l'avez vu même
avec les arbitres nommés par... les arbitres suggérés par le CCTM, il y a beaucoup
d'arbitrage accéléré. Les arbitres, aujourd'hui, font autant de médiations, de
conciliations que d'audiences formelles. Ça fait que, oui, je suis un partisan
de ça.
M. Leduc : Moi, je trouve que
c'est intéressant aussi. Il y a quand même une critique qui existe dans
certains cercles d'experts en droit par rapport au fait de dire que ça crée
moins de décisions, donc moins de jurisprudence. Moi, c'est une critique que
j'entends, mais on n'est pas là pour refaire le monde de la conciliation
préaudience.
Là, ce qui est devant nous, par contre, c'est la
question du délai. J'avoue que je suis un peu coincé, parce que je propose de
l'amener à 60 jours pour être dans une même logique que celle du tribunal.
Là, votre argument, c'est : D'accord, mais la comparaison est limitée parce
qu'il y a de la conciliation au tribunal. C'est parfait, mais, dans ce cas-là, est-ce
que le fait de passer de 45 à
60 jours pour le tribunal, c'était pour qu'il y ait encore plus de
conciliation? Peut-être que, là, il y a quelque chose qui m'échappe avec cet
argument-là de la conciliation.
M. Boulet : Je ne comprends pas
le...
M. Leduc : O.K. Je vais
reformuler ma question. Si vous me dites : Je ne veux pas passer de 30 à
60 jours pour la révision administrative... puis vous me dites : La
comparaison ne tient pas avec le tribunal, où je fais passer la révision de 45
à 60 jours.
M. Boulet : Entre autres pour
ça, oui.
M. Leduc : Entre autres pour
ça, puis vous me dites que c'est à cause de la conciliation.
M. Boulet : Bien non, j'ai
dit : Entre autres, c'est un des éléments qu'on doit considérer. Là, c'est
sûr que je vais me mettre à répéter les mêmes arguments. J'ai référé à la
stabilité des décisions. Plus les délais sont longs, plus ça engendre des
potentielles instabilités, et ça, c'est dans toutes lois, sociales, du travail,
et autres.
Deuxièmement, il y a la gestion qui se
complexifie. Plus tu attends longtemps avant de mettre en exécution des décisions, notamment en faveur d'un
prestataire, puis là je réfère à l'indemnité pour préjudice corporel, plus
c'est long, plus ça génère cette instabilité.
Et deuxièmement, je vous ai dit : N'oubliez pas qu'on peut toujours
demander une prolongation de délai dans les circonstances prévues à
358.2. Trois, j'ai parlé de déjudiciarisation. Quatre, j'ai parlé
que, vous le savez, à l'article prochain, on augmente le délai de
contestation au Tribunal administratif du travail.
On rallonge le délai ici, particulièrement parce
qu'on veut favoriser la déjudiciarisation par la voie de processus de recherche
de solutions permettant aux parties d'être accompagnées par des conciliateurs.
Donc, je ne veux pas limiter ça à un motif, là, mais c'est l'ensemble de notre
raisonnement qui finit par me convaincre que le 30 jours, il est tout à
fait correct, là.
M. Leduc : Quand vous parlez de
358.2, c'est intéressant, l'article, donc, de la loi qui dit qu'on peut en
effet prolonger le délai ou relever les personnes des conséquences de son
défaut de le respecter, c'est-à-dire, donc, de ne pas pouvoir avoir la
révision, s'il est démontré que la demande de révision n'a pu être faite dans
le délai prescrit par un motif raisonnable. Est-ce qu'il existe des
statistiques à la CNESST sur, comment je dirais ça, l'utilisation? Est-ce que
cette clause-là, elle est souvent utilisée, annuellement, par exemple?
M. Boulet : Je n'ai pas de donnée
précise, là, mais c'est une possibilité. Une personne qui a été empêchée, qui a
un contexte d'urgence ou qui... peut faire une demande de prolongation de
délai. Moi, je me souviens, en pratique, j'en ai vu des deux côtés, de côté des
travailleurs puis du côté des employeurs, mais, je vous dirais, ce n'est pas
fréquent.
Je pense que... Le 30 jours, c'est de la
notification, là. Il ne faut pas oublier, ce n'est pas de la reddition ou de la
décision, c'est de sa notification. C'est un délai qui... en pratique, là, je
n'ai jamais eu, entendu de commentaires que c'était un délai insuffisant.
M.
Leduc : Puis «motif raisonnable», on dit quoi, je ne sais pas, de la
mortalité dans la famille? On parle de...
M. Boulet : Ah mon Dieu! C'est vraiment
du cas par cas. C'est vraiment du cas par cas, je ne peux pas entrer dans les circonstances
personnelles ou particulières, là. J'ai quelques idées en tête, là, mais ça
varie tellement.
Puis j'inviterais mon collègue à prendre l'Alter
Ego, là, en santé et sécurité du travail, puis allez à 358.2, puis vous allez voir quelques pages, puis il y a des
résumés de décisions de trois, quatre lignes. Ça fait que vous allez en
voir.
M. Leduc : Ce qu'on appelle la loi
annotée, là?
M.
Boulet : C'est des résumés
de décisions de jurisprudence rendues en vertu de toutes les lois de la
LATMP. C'est un guide que moi, je trouve utile, là.
M. Leduc : C'est les grosses briques
qui traînent dans les bibliothèques d'avocats?
M. Boulet : Bien, ce n'est pas des
grosses briques, là, c'est 1,5 pouce, 2 pouces, là.
M. Leduc : Mais elle est faite à
chaque année, c'est pour ça que...
M. Boulet : Bien, il y a des
conseillers syndicaux en masse. Moi, j'ai négocié, j'ai fait des audiences avec
des conseillers syndicaux qui connaissaient l'Alter Ego aussi bien que
moi.
M. Leduc : Il y a plusieurs
conseillers syndicaux qui sont avocats aussi, M. le ministre.
M. Boulet : Aussi, en plus.
M. Leduc : Des très bonnes personnes.
M. Boulet : Puis il y a des
conseillers d'employeurs qui ne sont pas des avocats aussi.
M. Leduc : C'est vrai, des ressources
humaines
M. Boulet : Il y a de tout, là, des
diplômés en ressources humaines ou en relations de travail.
M.
Leduc : On les a entendus
ici, là. L'OCRHQ? Je ne me souviens... l'ordre des conseillers des ressources
humaines.
M. Boulet : Les CRHA.
M. Leduc : CRHA, plutôt, oui, c'est
ça, agréés.
M.
Boulet : Oui, c'est une corporation professionnelle où il y a
énormément de membres puis il y a beaucoup de conseillers qui font des
audiences, qui font de la négociation, puis évidemment, ils le font très bien.
M. Leduc : Ils avaient soutenu,
d'ailleurs, ma proposition de droit à la déconnexion dans les normes du
travail, mais ça, c'est un autre sujet, dont nous aurons peut-être à reparler
d'ici la fin de la législature.
Ça fait que, donc, 358.2 existe, 358.2 est
utilisé, en tout cas, vous me parlez de votre expérience de praticien.
M. Boulet : Ah oui! c'est utilisé.
Vous le verrez dans l'Alter Ego.
M. Leduc : Ça fait qu'on n'a pas
nécessairement de statistique à la CNESST? Parce que ça aurait pu être
intéressant de voir s'il est sous-utilisé ou surutilisé. Ça aurait pu avoir une
influence sur notre analyse du délai. Là, je comprends qu'on n'a pas
nécessairement le chiffre exact, mais, en tout cas, je me fie à votre pratique
pour nous dire qu'il est utilisé. Donc, c'est sûr que c'est une possibilité.
Puis, encore une fois, dans toute l'approche
qu'on doit avoir à propos du droit, puis je suis sûr que vous êtes d'accord
avec cette approche-là, sur l'effectivité au niveau du droit, il faut avoir un
droit qui est quand même assez généreux pour le, comment je dirais ça, pour le
non-initié, hein? C'est toute la philosophie de ce qu'on appelle le droit
administratif qui vise à rendre le droit accessible, qu'il ne soit pas trop
dans son langage, dans sa méthode, dans sa culture, dans son habillement, hein?
À l'époque, on avait des toges, il y avait même une différence d'habillement entre
les gens qui pratiquaient le droit puis ceux qui ne le font pas. Il y a encore
ça un peu dans certaines cours. Heureusement, dans le droit du travail, on est
sorti de ça, mais donc toute cette logique-là d'un droit accessible, d'un
droit, j'oserais dire, quasiment populaire, dans une certaine mesure, bien, il
faut qu'il soit facilement travaillable, puis c'est certain qu'un délai de
30 jours, c'est très rapide.
Moi, je pense à une personne qui a subi une
lésion, qui est refusée par la CNESST, qui ne connaît pas ses droits du tout,
qui n'est peut-être pas syndiquée et qui n'a pas la chance de savoir qu'il y a
des groupes comme l'UTTAM ou tous les autres
groupes dans la région du Québec qui pourraient l'aider. Bien, 30 jours,
ça passe vite. Ça passe vite, surtout si on est blessé, si on a une
lésion. On a des rendez-vous, il faut adapter sa vie, il faut faire des... se
construire un réseau de soutien, toutes sortes d'accommodements auxquels il
faut penser. 30 jours, ça passe très vite.
M. Boulet : Je comprends cet
argument-là, mais ne mésestimons pas l'impact d'un délai sur les petites et
moyennes entreprises aussi. Il y a beaucoup de PME qui n'ont pas de département
de ressources humaines. Ils ont des gens qui s'occupent des opérations, qui
s'occupent des finances, et c'est des personnes, souvent, qui n'ont pas
l'information, qui n'ont pas le niveau de préparation, qui n'ont pas le niveau
de connaissance, comme le travailleur.
Nous, on est
des parlementaires, collègue, puis je vous invite à penser à l'ensemble des
personnes. Je comprends que vous êtes
en discussion avec des groupes, que je respecte énormément, mais il y a
593 articles, là, dans la LATMP, puis on
pourrait faire des amendements puis des débats sur chacun des articles, sur
chacun des articles. Je pense que, quand on fait une modernisation comme on la
fait, il faut tenir compte des préoccupations, des sensibilités les plus
profondes. Parce que c'est sûr qu'on pourrait les passer un après l'autre, puis
regarder la jurisprudence sur chacun des articles, puis dire : On devrait
faire tel et tel amendement, mais, ceci dit, il n'y a pas de préoccupation
profonde. Oui, pour des travailleurs, je le
reconnais, mais reconnaissez-le pour des PME puis des microentreprises. Il faut
penser à ces entreprises-là. Elles veulent avoir un régime qui est simple, qui
est efficace, qui est bien géré. N'oublions pas non plus les employeurs. Ils
sont très concernés, d'ailleurs, par un régime dont ils assument 100 % des
cotisations. Ça fait que n'oublions pas ça, là. Je n'ai aucun problème à ce que
vous me rappeliez constamment l'impact de notre projet de loi sur le
travailleur mais il y a aussi l'impact sur les employeurs. Voilà. Merci.
• (11 h 40) •
M.
Leduc : Puis votre mise au
point est tout à fait pertinente, M. le ministre. Vous avez raison, peut-être
que je n'évoque personnellement pas
assez souvent la question des entreprises ou des PME. C'est un argument qui
peut se faire.
Dans le cas qui nous intéresse en ce moment, je
trouve que, quand vous, vous l'invoquez, bien, on dirait que c'est un argument
qui me pousse à encore plus tenir aux 60 jours. Parce que, si vous
dites que les PME n'ont pas de département de ressources humaines, puis que,
là, il y a une décision qui est acceptée par la CNESST, puis là le département
de ressources humaines de la PME ne veut pas se faire imputer un coût, bien,
son 30 jours... Si le patron d'une petite entreprise ou d'une très petite
entreprise ne connaît pas ça, la CNESST, tout ce qu'il en connaît, c'est les
lettres qu'il reçoit puis la cotisation qu'il doit payer, bien, si c'est tout
ce qu'il en connaît, 30 jours, encore une fois, pour s'approprier un
dossier, ce n'est pas banal.
M. Boulet : Ce n'est pas toutes les PME,
mais c'est certaines PME. Mais tous les commentaires que j'ai donnés depuis le
début, dans mon esprit, ça s'appliquait autant pour les travailleurs que pour
les employeurs. Ça fait que je n'ai pas à reprendre les arguments de stabilité,
de gestion, de motif raisonnable, de déjudiciarisation, puis du délai au TAT,
puis quand on parle de conciliation préaudience au Tribunal administratif du
travail. Ces PME là font l'objet... Quand je
parlais d'accompagnement, je n'avais pas qu'en tête les travailleurs, j'avais
aussi en tête les employeurs qui bénéficient de l'accompagnement de
personnes qui sont par ailleurs très spécialisées puis qui travaillent à la
CNESST. Puis on ne loue pas assez souvent leur travail, puis je vous invite à
les considérer.
M. Leduc : Puis vous avez
entièrement raison, puis j'entends ce que vous dites, puis, comme je vous dis,
c'est un peu aussi pour cette raison-là, je trouve, que ça soutient mon
argument de dire : Peut-être qu'on devrait... un petit peu plus de délai
pour ces gens-là, parce que c'est loin d'être le cas. Puis moi-même étant
devenu un employeur lors de mon élection en 2018, comme nous tous ici
présents, je n'avais absolument aucune forme de préparation à devenir
employeur, et puis ce n'est pas un passage facile, de syndicaliste à employeur.
Ça a créé toutes sortes de contradictions personnelles, mais c'est notre
fardeau, alors on l'assume. Mais tout ça pour vous dire que devenir employeur,
connaître ses responsabilités en matière de santé, sécurité, ce n'est pas banal.
Juste sur la question du harcèlement
psychologique, quand il y a deux employés... s'il y a deux employés qui se
harcèlent entre eux, bien, c'est quand même vous le responsable, l'employeur,
de l'environnement sain, même si ce n'est pas vous qui avez fait un commentaire
désobligeant, par exemple, mais ça, il y a peu d'employeurs qui commencent leur
carrière d'employeur qui sont au courant de ça. Alors, d'imaginer que tout le
monde connaît nécessairement tous les délais, je pense qu'on s'entendra pour
dire que c'est très rare.
Après ça, est-ce qu'on peut leur permettre à
eux, comme aux travailleurs, d'avoir un petit peu plus d'espace? 30 jours,
ça passe très vite lorsqu'un incident arrive, lorsqu'une lésion est repérée,
lorsqu'une décision de la CNESST est donnée,
pour s'approprier ce dossier-là, peut-être aller chercher de l'aide. Dans le
cas d'une PME, est-ce que ce sera une mutuelle de prévention? Est-ce que
ça sera un conseiller en ressources humaines à contrat? Je ne le sais pas, mais
il aura probablement autant besoin, ou envie, en tout cas, d'aller chercher de
l'aide pour voir comment bien se préparer à la tenue de ce dossier-là.
Puis M. le ministre a raison de me dire qu'il
faut penser aussi aux employeurs, puis ça m'amène une autre forme de réflexion,
mais on dirait qu'elle soutient encore plus mon point que quand j'avais
uniquement l'exemple des travailleurs en tête.
M. Boulet :
Bon, écoutez, je ne reprendrai pas l'ensemble de mes commentaires, là, mais il
ne faut pas laisser traîner les
dossiers, puis le temps qu'on veut consentir aux parties, c'est le temps
raisonnable pour bénéficier d'un accompagnement préaudience au tribunal
administratif avec les conciliateurs de de la CNESST. Merci, madame... c'est
tout.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Y a-t-il d'autres interventions sur l'amendement? Oui, alors, député
d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Le ministre a fait
référence, là, à l'instant, sur le fait qu'on ne peut pas faire un article ou
un amendement sur tous les articles de la LATMP. Je ne sais pas s'il entendait
par là l'idée que j'en faisais peut-être trop, des amendements, je ne sais pas.
C'est peut-être moi qui vais entendre ça, puis ce n'est pas ce qu'il a dit. Ce
n'est certainement pas ce qu'il a dit.
En tout cas,
on va en rester là, mais une chose est certaine, Mme la Présidente, un projet
de loi qui comporte... c'était quoi
déjà, 360 articles qui couvrent des lois qui en comportent des centaines,
elles aussi, c'est bien normal pour des députés
d'opposition de prendre un peu de temps et de regarder les réflexions qui ont
peut-être été faites du côté ministériel, qui font en sorte qu'ils n'ont pas
d'amendement sur un article donné de la loi originale mais que nous, on a quand
même besoin de soulever, parce qu'on a des discussions, parce qu'on a, nous
aussi, des réflexions.
C'est rendu cliché, mais combien de fois j'ai
entendu des collègues dire : Ce n'est pas tous les ans qu'on ouvre cette
loi? Tout le monde dit ça, dans tous les projets de loi, avec raison peut-être,
mais ça s'applique clairement à celle-ci, là, une loi qui date de 40 ans,
qu'on a modifiée à quelques moments dans l'histoire, bien sûr, mais des
réformes de fond, comme ça, on n'en a pas fait beaucoup. Il y a eu des
tentatives, plusieurs ministres se sont brisé les dents. Celle-là semble être
alignée pour se terminer avec une fin heureuse, en tout cas, c'est le souhait
de tout le monde ici, mais certainement que moi, je vais me permettre de faire quelques
amendements qui n'étaient pas prévus par le ministre. Je ne me sens pas mal du
tout de faire ça, c'est ma responsabilité, c'est mon... j'oserais dire que
c'est quasiment mon devoir de député d'opposition.
Après ça, tout est dans la mesure. Je serais
curieux de voir, avec mon collègue à la recherche, comment on en a fait, des amendements
sur des sujets qui n'étaient pas soulevés par le projet de loi. Je ne suis même
pas sûr qu'on en a fait une douzaine. On a plein d'amendements sur des points
du ministre, mais des amendements sur des points qui ne sont pas soulevés par
le ministre, je ne suis même pas sûr que j'en ai une douzaine. Là, j'en ai un,
je le trouve important, je prends le temps de l'argumenter. Ça me semble tout à
fait normal, Mme la Présidente.
Il y a un aspect qu'on n'a pas abordé. Le ministre
a fait référence à l'instabilité de décisions, du moins, à un risque
d'instabilité des décisions si on prolongeait le délai à 60 jours.
J'entends l'argument, mais je pense que je ne le saisis pas. Qu'est-ce qui
deviendrait moins stable? Est-ce que c'est déjà instable à 30 jours?
Est-ce que ça va devenir... C'est quoi, le jeu, là, avec le 60 jours? Où
est-ce que ça devient instable?
M. Boulet : Ce qu'il est important
de rementionner, c'est que la révision administrative, vous le savez, c'est un processus de révision sur dossier. Les parties
peuvent demander, je pense que c'est en vertu de 358.3, de soumettre des
observations écrites, mais ce n'est pas...
il n'y a pas d'audience sur le fond. C'est un processus qui permet
simplement de confirmer ou d'infirmer la
décision. C'est sûr que, oui, dans la gestion, c'est plus simple, dans la
stabilité décisionnelle, c'est un atout que le délai ne soit pas trop
long. Plus c'est long, plus ça génère de l'insécurité. Puis, encore une fois,
quelqu'un qui a des motifs qui permettent d'obtenir une prolongation du délai,
il l'obtient, ça fait que c'est sûr que...
Une voix : ...
M. Boulet : Bien oui, puis, bien,
c'est l'exemple que j'ai utilisé tout à l'heure, là, le travailleur qui a à recevoir
une indemnité pour préjudice corporel, elle n'est effective, elle n'est versée
qu'à l'expiration du délai de 30 jours, s'il n'y a pas eu de demande de
révision. Je vous l'ai expliqué tout à l'heure. Puis monter ça à 60 jours,
bien, ça créerait énormément d'insécurité, là, tu sais, il faudrait... c'est
dire, dans ces cas-là, il y aurait des exceptions. Puis, encore une fois, on ne
m'a jamais fait part de préoccupation profonde, là, puis peut-être que, dans
votre milieu ou le milieu qui vous alimente en information, ça peut être une
source d'inquiétude, mais je le dis aussi, pour les micros, et les petites, et
moyennes entreprises, il y a des délais. Je n'oserais pas dire : Nul n'est
censé ignorer la loi, mais, quand tu as des motifs qui justifient une
prolongation de délai, tu les obtiens.
Puis c'est vraiment dans la perspective où on
demandait même d'abolir ce processus-là. Ce n'est pas... puis je le dis avec
respect pour les réviseurs, mais ce n'est pas une étape décisionnelle,
fondamentale. Le 30 jours, il est totalement respectueux de la capacité
des parties d'exercer leurs droits dans un délai qui est, somme toute, très
raisonnable, là. On n'en était même pas à être sensible ou préoccupé par la
longueur de ce délai-là. Au contraire, on disait : Ce n'est même pas nécessaire.
Là, non seulement vous ne me dites pas : Ce
n'est pas nécessaire, même si je pense que vous auriez été favorable à une
abolition pure et simple de la révision administrative, vous dites :
Augmentons le délai, alors que, par ailleurs, vous le savez, puis je vous le
mentionnais hier... attendez de voir l'économie générale des articles qui
suivent et vous allez voir que l'objectif, c'est de déjudiciariser, de donner
un délai plus long et de permettre aux parties, dans des affaires de nature
médicale ou de financement, de décider. La partie qui conteste, je vous le
rappellerai, je vous le mentionnais hier, soit le travailleur soit l'employeur,
pour ces matières-là, on décide si on va en révision administrative ou au Tribunal
administratif du travail. Cette section-là, pour moi, elle s'articule autour de
ce tronc commun là. Et, pour moi, je comprends ce que vous me soulevez, là,
puis je respecte les discussions qu'on a, mais, par souci de diligence, bon,
pour le processus décisionnel, je pense que le délai est très, très correct,
là.
• (11 h 50) •
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Y a-t-il d'autres interventions?
M. Leduc : Bien oui, je vous fais
référence à l'économie générale de votre approche. Je veux dire, je vous
confirme que je l'ai lu, le projet de loi, d'un couvert à l'autre, puis je sais
ce qui s'en vient. Je faisais d'ailleurs référence, il y a quelques instants,
du fait que vous allez faire passer de 45 à 60 jours le délai pour la
décision de la révision au TAT, au tribunal.
Donc, oui, je le sais, ce qui s'en vient, puis,
oui, je la comprends, votre approche, votre économie générale, comme vous le dites si bien. Et c'est justement
parce que je vois où vous voulez aller que j'amène cet amendement-là. Parce que moi, dans l'absolu, là, puis je pense
vous en avoir déjà parlé en privé, puis vous l'avez, de toute façon,
entendu, et on l'a tous et toutes entendu pendant les audiences, moi, je
balancerais ça aux poubelles, là, la division de la révision administrative.
Elle n'a, à toutes fins pratiques, très peu d'utilité, je n'ose pas dire pas
d'utilité, mais très peu d'utilité, les statistiques le démontrent. C'est quoi, au-delà de 95 % des décisions de première instance qui
sont confirmées? C'est fascinant. 95 % des décisions sont
confirmées, d'un bord comme de l'autre, autant les acceptations de prestations
que les refus. C'est énorme. Si on a une instance de révision qui confirme
95 % des décisions, on est-tu... à quoi ça sert? À quoi ça sert d'avoir
ça?
M. Boulet : Écoutez, c'est
intéressant, puis là je vais discuter parce que ça concerne ce qui suit, là,
les articles qui suivent. Je vous l'ai expliqué hier, mon idée première, c'eût
été de l'abolir, purement et simplement. En même temps, il faut se confronter à
la réalité, là. Il y a la loi québécoise sur la justice administrative. Les
décisions rendues par la CNESST affectent les droits des parties, donc c'est
des décisions qu'on appelle quasi judiciaires, et, systématiquement, il y a la
possibilité de demander une révision administrative de cette décision-là. Ça
fait que c'est par souci de cohésion, par souci de sécurisation des
travailleurs et des employeurs qui peuvent être affectés par ces décisions-là et aussi pour éviter d'engorger
indûment. Puis, bon, je pense qu'on a trouvé un compromis qui est
vraiment acceptable, là, c'est de permettre
l'option, puis ça permet de maintenir la révision administrative, ça sécurise
le monde.
On va voir, au fil du temps... tu sais, on s'est
déjà entendus sur, dans cinq ans de l'entrée en vigueur de la loi, on va faire
un rapport sur sa mise en application. Est-ce que c'est une première étape vers
une abolition définitive? Peut-être. Peut-être, mais c'est une hypothèse. On
verra quelles conséquences ça peut avoir au niveau juridique, au niveau
administratif, au niveau de la gestion des dossiers, mais c'est bien reçu dans
les communautés de savoir que tu peux décider ce que tu fais. Puis c'est super
respectueux des droits des travailleurs et des employeurs qui sont affectés par
les décisions rendues par la CNESST. Ça fait que je crois fondamentalement que
c'est le meilleur compromis, tenant compte du contexte, et ça, c'est le coeur
de toute cette section-là.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Y a-t-il d'autres interventions? Ah!
pardon. Mon Dieu! Député de Bonaventure, à vous la parole.
M. Roy : Bonjour, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Bonjour.
M. Roy : Bien content de
m'enlever le masque. Bien, écoutez, on va déposer un amendement.
La Présidente (Mme IsaBelle) : On a
déjà un amendement, donc vous voulez faire un...
M. Roy : Oui, O.K., peut-être
en disposer puis...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, on va voter cet amendement-ci?
Une voix : ...
M. Roy : Un
sous-amendement, on me parle à l'oreille.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Donc,
vous voulez faire un sous-amendement à l'amendement ou on vote cet amendement-ci
avant?
M. Roy : 30 secondes, on...
La Présidente (Mme IsaBelle) : D'accord.
Alors, nous allons suspendre quelques instants, mais, dans le fond, vous voulez
juste discuter rapidement, là, peut-être? Non?
Une voix : ...
La Présidente (Mme IsaBelle) : O.K.
On va suspendre.
(Suspension de la séance à 11 h 55)
(Reprise à 12 h 01)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, nous avons reçu un sous-amendement de la part du député de Bonaventure.
Je vous invite à le lire et à l'expliquer, s'il y a lieu.
M. Roy : Oui, merci, Mme la
Présidente. Donc, bien, écoutez, on essaie de couper la poire en deux par
rapport aux propositions que mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve a faites tout
à l'heure, là.
Modifier l'amendement... Bon, je vais vous lire l'amendement :
Modifier l'amendement proposant l'introduction à
l'article 106.1. par le remplacement de «30» par «45».
Bon, mon collègue, tout à
l'heure, demandait de prolonger à 60 jours. Nous, nous proposons 45. Le ministre
nous a fait part d'un article, le 358.1, qui dit la chose suivante, c'est que
la demande de révision... un travailleur peut demander une demande de révision.
O.K. Donc, ça viendrait compenser le fait que le 30 jours n'est pas
suffisant pour aller chercher de l'aide. Mais la problématique, bon, qui semble
se manifester ici, c'est qu'un travailleur... pour avoir un délai, le
travailleur ne peut pas évoquer la recherche d'aide, c'est-à-dire avoir l'aide
d'un médecin ou d'un avocat pour prolonger son délai. Mais là on a un problème.
Quand on sait que beaucoup de médecins refusent de prendre des cas de
travailleurs accidentés, on peut se ramasser dans la position où on va avoir
des travailleurs qui n'auront pas été en mesure de trouver de l'aide, bon, pour
demander, bon, une révision de la décision de la CNESST.
Donc, l'article 358 dit quoi? «La demande
de révision doit être faite par écrit. Celle-ci expose brièvement les
principaux motifs sur lesquels elle s'appuie ainsi que l'objet de la décision
sur laquelle elle porte.» Mais, si on exclut la demande d'aide, pas de
prolongement possible pour les gens qui n'auront pas eu accès à un avocat puis
à un médecin dans un contexte de pénurie d'offre ou d'expertise de médecin et
potentiellement d'avocat pour les accidentés du travail. Ça fait que je pense
qu'on a un... je dirais, on arrive avec une formule qui n'est pas exagérée et
qui pourrait donner un peu de temps à ceux et celles qui n'arrivent pas à aller
chercher les ressources nécessaires pour faire une révision des décisions.
Voilà, M. le ministre... Mme la Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Je voudrais juste lire le sous-amendement parce qu'il y a une petite
coquille qui a été dite. Alors, c'est :
Modifier l'amendement proposant l'introduction
de l'article 106.1 par le remplacement de «60» par «45». Parce qu'on amende l'amendement,
là, t l'amendement était rendu à 60. Parfait. Alors...
M. Roy : Nous acquiesçons,
Mme la Présidente. Pas de problème.
La Présidente (Mme IsaBelle) : En
fait, c'est votre attaché qui nous en a fait part. Donc, M. le ministre.
M. Boulet : Bien, merci, collègue,
pour le dépôt de ce sous-amendement. En même temps, je réitère les commentaires
que j'ai formulés un peu plus tôt. Je pense que, pour des raisons de stabilité
et de saine gestion, on n'a pas avantage à augmenter ce délai-là. Au contraire,
on parlait même d'abolition potentielle de cette étape-là. Vous savez, parce
que je viens de vous le rappeler, qu'il y a toujours la possibilité de demander
une prolongation de ce délai-là pour les
motifs prévus à 358.2. Puis, par souci de ce qui suit, de l'économie
générale du projet de loi n° 59,
il y a une option entre la révision administrative et le TAT. Et autre
point, collègue de Bonaventure, une question de cohésion ici avec le corpus
législatif québécois, quand tu fais une demande de révision d'une décision
initiale qui affecte les droits des personnes, le délai, c'est 30 jours,
donc c'est cohérent avec les lois du Québec. Merci.
Est-ce que vous m'entendez bien même si je
parle...
La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui.
Bien, c'est sûr que... Effectivement, comme la salle, elle est grande, je vous invite vraiment à être vis-à-vis votre micro
ici, là. C'est plus difficile à vous entendre si vous n'êtes pas vis-à-vis.
Député de Bonaventure.
M. Roy : Écoutez, j'ai lu le
mauvais article tout à l'heure. Désolé, là. Je me suis trompé un peu par
rapport à ce que le ministre, bon, avait fait référence, 358.2 : «La
commission peut prolonger le délai prévu à l'article 358 ou relever une
personne des conséquences de son défaut de le respecter, s'il est démontré que
la demande de révision n'a pu être faite dans le délai prescrit pour un motif
raisonnable.» C'est le motif raisonnable, là. O.K. Si... On jase, M. le
ministre, là. Moi, je pense qu'il y aurait peut-être un amendement à faire à
358.2, parce que ce qu'on sait, ce qu'on entend, c'est que la recherche d'aide
n'est pas un motif... ou l'incapacité à trouver de l'aide n'est pas un motif
raisonnable, selon l'article 358.2. Quelqu'un qui n'arrive pas à avoir de
l'aide dans le délai et qui explique qu'il ne peut avoir de l'aide parce qu'il
ne trouve pas un médecin ou un avocat, bien, va perdre sa prérogative et va
perdre son droit de demander une révision.
Donc, si on ne peut pas s'entendre sur une
modification du 358.1, je pense qu'un amendement... oui, c'est ça, un
amendement à 358.2 à venir pourrait dénouer l'impasse et nous permettre de
protéger ceux et celles qui n'arrivent pas à
trouver l'aide dans le délai prescrit. Et vous le savez comme moi, on a des
médecins qui refusent de prendre des cas d'accidentés de travail parce
que c'est trop lourd, trop compliqué et ça fait en sorte que ça lèse les
travailleurs qui demandent de l'aide. Voilà. On discute, M. le ministre, là...
M. Boulet : Non, mais je comprends,
mais c'est simplement que ce n'est pas un amendement à 358.2, puis 358.2 est
quand même assez large, là. On réfère au motif raisonnable, c'est vraiment en
fonction du cas particulier. Si une personne n'a pu, pour un motif raisonnable,
pouvoir le faire ou était dans une situation d'incapacité de le faire, ça va
être considéré comme un motif raisonnable. Et je dis ça pour un employeur
aussi, là, parce qu'on réfère constamment au travailleur, mais pour les
employeurs aussi.
Je pense que, pour des raisons de stabilité, ça
a aussi été appliqué sans que ça génère des préoccupations particulières.
Peut-être que certaines petites entreprises ont été préoccupées par l'absence
de délai. D'ailleurs, la statistique que j'ai en tête, c'est qu'à peu près deux
tiers des demandes de révision sont faits par les employeurs, là, ça fait que c'est... dans des circonstances où ces
entreprises-là ou ces travailleurs-là ont des motifs raisonnables, ils
peuvent obtenir une prolongation de délai.
Ça fait que, écoutez, je
pense que ça assure une meilleure stabilité. Il faut embarquer dans une voie
qui nous mène à une déjudiciarisation la plus... pas complète, mais la plus
partielle possible. Et, encore une fois, je pense qu'ultimement c'est les
travailleurs qui pourraient être les plus lésés par des augmentations de délai.
30 jours, je vous rappellerais, collègue de Bonaventure, que c'est
30 jours de la notification, donc quand tu as reçu la décision.
Puis c'est sûr qu'on pourrait parler de
30 jours, 45 jours, 60 jours, puis il peut y avoir des délais de
90 jours, mais on a quand même un délai
suffisant pour un processus qui ne requiert pas, collègue, l'assignation de
témoins, là. Les médecins, les témoins experts ou les témoins
d'événement, ce n'est pas là que ça se fait. C'est souvent un processus qui se
fait par une autre personne de la CNESST qui est spécialisée en révision. Puis
les parties peuvent envoyer des observations écrites, mais ça se limite à ça,
c'est un écrit. Moi, je me souviens qu'on en faisait, puis j'ai vu des
travailleurs puis des syndicats en faire, c'est des observations sur deux,
trois pages. Il y en a qui disent : Je n'ai pas besoin de faire
d'observation, rendez une décision sur dossier. Puis c'est, je pense, dans la
vaste majorité des cas encore aujourd'hui, là, j'en suis convaincu, c'est des
décisions qui sont rendues sur dossier, collègue. Merci.
• (12 h 10) •
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Y a-t-il d'autres interventions sur le sous-amendement? Député de Bonaventure.
M. Roy : Est-ce que vous
pouvez me confirmer, M. le ministre, que la difficulté à trouver de l'aide
peut être un motif raisonnable?
M. Boulet : Je vous dirais, c'est
vraiment un cas d'espèce. Il faudrait que j'aie beaucoup plus de contenu pour
me mettre dans les bottines d'un réviseur. Mais je vous dirais que la notion de
motif raisonnable, elle est interprétée de
façon large et respectueuse de l'exercice des droits des parties qui demandent
la révision. J'en ai vu, des décisions,
où ils acceptaient que ce soit un motif raisonnable puis... tu sais, je vous
dirais, si c'est quelques jours, c'est beaucoup plus facile, mais, si
c'est un retard de deux mois, c'est moins facile à justifier. Vous comprenez?
C'est vraiment dépendant des circonstances
spécifiques du cas d'espèce. Je vous dirais, si c'est quelques jours, ça va
passer beaucoup plus facilement, c'est beaucoup plus facile à justifier, autant
pour une entreprise, autant pour un employeur que pour un travailleur. Mais
quelqu'un qui était dans l'incapacité, qui ne comprenait pas, qui est en mesure
de le démontrer qu'il ne comprenait pas les conséquences de la décision, puis
que, là, il a trouvé un représentant, puis que ce représentant-là articule bien
la motivation du travailleur ou de l'employeur, je pense qu'il l'obtiendrait,
là, en vertu de 358.2. Les chances de l'obtenir sont solides.
M. Roy : Dernière question : Quand on invoque
l'article 358.2, combien de cas sont retenus dans les statistiques
ou... Quand les gens demandent une prolongation, là, sur, je ne sais pas, moi,
sur 100, combien sont retenus puis combien sont refusés? La CNESST doit avoir
des données là-dessus?
Des voix : ...
La Présidente (Mme IsaBelle) : M. le
député.
M. Roy : Une question statistique.
M. Boulet : Ah mon Dieu! Est-ce
qu'on a une statistique?
M. Roy : Ne mêlez pas le bon
Dieu là-dedans, monsieur.
M. Boulet : ...
M. Roy : Non, mais quand il y
a une demande de révision, là, quand il y a une demande de... Excusez. Je
recommence. Quand il y a une demande de prolongation, O.K., on accepte combien
sur 100, sur 10 ou sur 1 000, là? Je ne
sais pas combien il peut y en avoir. Mais est-ce qu'on acquiesce plus
facilement ou c'est un refus systématique? Peut-être juste pour
éclairer...
M. Boulet : On n'a pas de statistiques,
mais, comme je vous dis, on acquiesce plus facilement. C'est une autre façon d'exprimer mon propos d'un peu plus
tôt, là. Quand c'est des motifs raisonnables puis que le délai au-delà
de 30 jours n'est pas trop long, je pense que c'est généralement bien
accueilli.
Puis on me rappelait qu'une décision, un petit
peu par analogie, mais je sais qu'il y en a, là, des demandes de prolongation
de délai de personne, soit employeurs ou employés qui n'ont pas été capables
d'avoir de l'aide, puis je pense que c'est vraiment du cas par cas.
Mais, tu
sais, il y a un autre article dans le Code
du travail, là, 47.2, là, que vous connaissez bien. Un travailleur dont
le syndicat n'a pas fait le recours qui s'imposait dans le délai prévu au Code
du travail, puis qui a été lésé, puis il a demandé une prolongation de délai
puis ça a été obtenu... parce qu'il y a aussi des cas, collègue, où tu
donnes mandat, puis ça, ça peut être un
employeur comme un travailleur, tu donnes mandat à ton spécialiste, à ton
conseiller, ton avocat, puis il oublie ou il passe le délai. Puis là la
personne est lésée, puis ça, c'est un motif raisonnable, là, à moins d'un
cas... mais ça peut être un motif raisonnable. Tu sais, si moi, j'ai donné
mandat au conseiller Y, puis qu'il n'exerce pas le droit
dans les délais prévus, puis je demande la révision avec un autre conseiller,
évidemment, ou avec le même conseiller, je pourrais, là. Merci.
M. Roy :
C'est bon.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : C'est tout? Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Oui,
député de Nelligan.
M. Derraji :
Oui, très rapidement, parce que j'essaie juste de suivre la logique pourquoi.
Au début, en tout respect, au 60, je n'étais pas très chaud à poser des
questions, mais, à 45, je pense que je ne comprends pas la logique derrière,
même si j'ai entendu tous les arguments de M. le ministre. Mais je pense que
c'est quand même une bonne porte de sortie,
c'est une façon de permettre à des travailleurs que, s'il y a un enjeu, bien,
au moins d'avoir cette porte de sortie. Je pense que c'est une solution
où... Tu sais, on a fait le débat, mais...
M. Boulet :
Si ça avait été pris isolément, collègue, je pense que j'aurais été assez
favorable, mais c'est plus... puis comme je le disais au collègue
d'Hochelaga-Maisonneuve hier, c'est plus dans la philosophie de ce qu'on soumet
dans cette section-là. On veut que ça soit rapide, on veut que ce soit efficace
puis on veut que ça soit le moins judiciarisé possible. Puis le délai, il est
augmenté pour le TAT. Puis tu sais, à la limite, là, tu peux demander une
prolongation du délai. Puis 358.2, même si on le met à 45 jours, puis tu
peux demander une prolongation de délai, c'est parce que ça prolonge puis
parfois de façon indue. Mais c'est sûr qu'on peut toujours dire : On va
couper la poire en deux puis... Oui.
M. Derraji :
Oui, mais parce que... en fait, je vais utiliser vos mêmes arguments. On veut
tous que ça aille très rapide, mais... on veut tous que ça aille très rapide,
efficace, et tout, mais pas au détriment des travailleurs. Parce que, là, le problème, c'est que, s'il y a un
risque... C'est pour cela, moi, je trouve l'idée que c'est une voie de passage
et on passe à autre chose, parce que le
débat depuis tout à l'heure, ça touche... Sérieux, moi, je le vois de loin.
Pour une fois, j'écoute plus que je
parle. De nature, je parle beaucoup, mais, depuis tout à l'heure, j'écoute.
J'ai écouté les arguments de mon collègue d'Hochelaga et j'ai écouté les
arguments du... mon collègue de...
Une voix :
...
M. Derraji :
...de Bonaventure. Non, non, je vais... de Bonaventure. Je pense que le débat a
été pas mal fait et, sérieux, je souscris
dans les arguments qu'on veut tous ce que vous venez de dire, mais c'est juste,
il y a un bout qu'il manque, «mais
pas au détriment d'un travailleur», que, pour une raison ou une autre, il
risque de payer pour x, y raison.
Donc, le législateur,
qu'est-ce qu'il fait pour écrire une loi? C'est justement éviter les x, y
variables pour donner les chances à tout le monde, que ce soit l'employeur ou
le travailleur.
Donc, moi, je pense
que la solution proposée pour le 45, ce n'est pas extrême et ça va nous
permettre de passer à autre chose, M. le ministre.
M. Boulet :
Je vous demanderais une suspension de deux minutes, là, pour aller l'autre
côté, dans le corridor, si vous me le permettez.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Parfait. Alors, nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à
12 h 18)
(Reprise à 12 h 22)
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, nous reprenons. M. le ministre, à vous la
parole.
M. Boulet :
Oui, Mme la Présidente. Je vais être assez bref. Il n'y a pas de préoccupation,
il n'y a pas d'irritant puis, en plus, à la législation, on me confirme que ce
n'est pas compatible, ça ne passe pas dans le corpus législatif québécois.
30 jours, c'est un délai qui est tout
à fait correct. Il y a possibilité de prolongation. Assurons-nous de la meilleure stabilité
possible de notre régime, et 30 jours est un excellent délai. Merci, et
ceci dit, là, en respect des propositions, des sous-amendements des collègues
de Bonaventure et de Nelligan et de l'argumentaire soumis par notre collègue d'Hochelaga-Maisonneuve.
Merci.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, merci. Y a-t-il d'autres interventions
sur le sous-amendement déposé par le député de Bonaventure? Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc :
Merci, Mme la Présidente. Bien, je trouve ça un peu dommage, parce qu'en effet,
là, j'apprécie le sous-amendement de mon collègue de Bonaventure pour faire
couper la poire en deux, mais là le ministre vient de dire : Ça ne passe pas dans le corpus législatif. Je pense que je
ne comprends pas. Il y a comme un avis juridique ou...
M. Boulet :
Bien, quand on écrit des lois, vous le savez, ce n'est pas la première fois que
je vous le mentionne, il faut écrire dans un souci de cohésion avec les
autres lois du Québec de même nature dans des matières similaires. Et, quand on
crée un précédent ou quand on se déconnecte du corpus législatif québécois, ça
crée un précédent, à moins d'un impératif incontournable, ce qui n'est pas le
cas présentement.
Donc, dans le but d'assurer la stabilité des
droits que peuvent exercer les justiciables, au sens très large du terme, c'est
important de maintenir cette cohésion-là.
M. Leduc : Mais donc est-ce que cet
exercice-là, de compatibilité avec le corpus législatif, je ne sais pas si j'ai
les bons mots, là, mais est-ce qu'il a été fait pour ce qu'on va traiter tantôt,
là, du 45 à 60 jours pour la révision au tribunal?
M. Boulet : Oui, tout à fait.
L'exercice a été fait ce matin même, pour le 30 jours... parce que, là,
c'est un processus de révision administrative, je le rappelle, ce n'est vraiment
pas de même nature, alors que le 60 jours pour le TAT, oui, l'exercice est
fait, et c'est cohérent. C'est tout.
M. Leduc : Bien, c'est cohérent
avec... parce que je veux comprendre, là. On compare avec d'autres types de loi
qui ont des révisions administratives aussi. Vous êtes en train de me dire que,
quoi, toutes les autres lois ont 30 jours et que c'est à cause de ça qu'on
doit garder 30 jours dans celle-là?
M. Boulet : Pas nécessairement dans
toutes les lois, mais des lois de même nature, des droits de même nature, par
souci de cohésion, oui. C'est la réponse que je vous ai donnée.
M. Leduc : O.K. Mais comme
lesquelles?
M. Boulet : Et pour la contestation
qui n'est pas de même nature au Tribunal administratif du travail, le
60 jours, il est cohérent.
M. Leduc : Est-ce qu'il y a comme un
document...
M. Boulet : Ça ne veut pas dire
qu'il y a une uniformité, mais il y a une cohésion.
M. Leduc : Je comprends. Donc,
l'uniformité n'est pas nécessairement ce qui est recherché pour assurer la
cohérence du corpus législatif. Est-ce que, quand vous dites : Ça,
aujourd'hui, là, on a vérifié, puis ce n'est pas possible, avez-vous comme un
document qui vous a été soumis avec la comparaison avec les autres lois?
M. Boulet : Non.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Non.
D'accord.
M. Leduc : Bien là, donc, vous vous
êtes basé sur quoi pour dire ce que vous venez de dire, d'abord?
M. Boulet : Bien, ça, on pourra
faire un échange, mais oui, il y a des juristes qui sont avec nous, qui sont en
contact avec des conseillers à la
législation, puis on s'assure que la façon... Ça fait quelques commissions
parlementaires que nous faisons ensemble, vous le savez, d'ailleurs. Puis vous
soumettez des amendements, on vous accompagne dans
l'écriture, le libellé, les mots utilisés, la sémantique. Ce n'est pas une
première, là. Ça fait qu'on travaille, c'est sûr, avec des conseillers,
des experts en rédaction législative. Vous savez qu'il y avait même une
maîtrise en rédaction législative. Oui, il y a des spécialistes au
gouvernement, puis ça me rassure, moi, de savoir, depuis que je suis en
politique, qu'il y a ces comités-là puis ces experts-là, là.
Puis c'est
sûr que, quand on parle de délais, puis de montants, puis... tu sais, pour les
pénalités, les amendes, bien... Je
pense que vous me faites parler plus qu'autre chose, là. Vous le savez qu'il y
a des conseillers à la législation, puis on s'assure non seulement d'une cohésion dans les libellés, les
sémantiques, mais dans les délais, les montants, les amendes, les pénalités. Il y a un ensemble d'éléments qui font
l'objet d'un examen pour s'assurer que le corpus législatif québécois
forme un tout relativement cohérent. Puis vous savez qu'il y a une loi québécoise
sur l'interprétation puis il faut s'assurer qu'il y ait une relative stabilité,
là, pour ceux qui font l'objet d'application de ces lois-là.
M.
Leduc : Bien, justement,
vous me dites que ce n'est pas la première commission qu'on
fait ensemble puis vous avez entièrement raison. Puis, dans d'autres commissions,
j'ai notamment celle en tête du RQAP, où, sur des points précis et assez techniques
comme ceux-là, on peut entendre une explication des gens qui accompagnent le ministre.
Alors, j'assume que la personne qui vous a fait
cette recommandation-là, à savoir que le 60 jours, ou même le
45 jours qui est en débat en ce moment, n'est pas applicable, bien,
j'imagine qu'elle vous accompagne aujourd'hui ou quelqu'un peut représenter
cette personne-là qui vous accompagne aujourd'hui.
La Présidente (Mme IsaBelle) : M. le
ministre, il y avait une demande si vous voulez laisser la parole à une personne
qui vous accompagne pour répondre à la question ou vous aimez mieux répondre
vous-même?
M.
Boulet : Pouvez-vous juste repréciser votre...
M.
Leduc : Alors, dans les...
Vous faites référence au fait que, dans les... ça ne fait pas
la première commission qu'on a ensemble, vous avez raison, dans les commissions
précédentes, notamment celle sur le RQAP, il arrivait qu'on puisse entendre,
pendant la commission, pendant l'étude détaillée, les experts qui vous
accompagnent de vos ministères ou des agences qui vous sont redevables.
Alors, la personne
qui vous a fait cette recommandation-là, de dire que le 60 ou le 45 jours
de délai ne serait pas conforme à une application, là, la plus cohérente
possible du corpus législatif, est-ce qu'on pourrait l'entendre, cette personne?
Est-ce qu'elle vous accompagne aujourd'hui?
M. Boulet :
Est-ce que la personne m'accompagne?
M. Leduc :
Oui.
M. Boulet :
Elle n'est pas ici, non.
M. Leduc :
Mais est-ce qu'il y a quelqu'un qui...
• (12 h 30) •
M. Boulet :
C'est des avocats puis des avocates à la législation. Et, vous savez,
notamment, je regardais dans la Loi sur les normes du travail, c'est le même
délai de 30 jours, puis je n'ai jamais entendu de problématique. Et cette
loi-là a fait l'objet d'une révision en profondeur par nos prédécesseurs, loi
qui est entrée en vigueur en juin 2018.
Et c'étaient des travailleurs pris individuellement, là. Ce n'étaient même pas
des syndicats, ce n'était même pas des...
mais les travailleurs... Parce que la Loi sur les normes du travail, c'est les
conditions minimales, c'est des standards minimaux qui s'appliquent et dont en bénéficient, je vous dirais,
généralement, les travailleurs qui ne sont pas couverts par une accréditation syndicale, donc ne
bénéficient pas de conditions de travail qui sont dans une convention
collective. Et le 30 jours était...
Ce n'est pas une
préoccupation, le 30 jours. Puis, quand je vous dis «cohésion», c'est un
des éléments, là, parce que je vous ai soulevé plusieurs éléments. Quand même
qu'on en isolerait un puis qu'on le débattrait pendant deux heures, j'ai plusieurs
éléments de réponse que je vous ai donnés, là, puis il y a des éléments qui
sont discutables un peu plus, mais je pense que c'est important de le
redire, le 30 jours n'est pas une problématique dans le milieu. Puis je
n'ai pas... au lieu de me demander des cas où le délai était prolongé, je n'ai
pas eu de cas, jamais dans ma pratique puis jamais depuis que je suis ici en
politique.
Tu sais, vous me
demandez souvent de démontrer, de faire la démonstration... moi, je n'ai pas de
cas de personnes qui ont été préjudiciées. Au contraire, de monter le délai à
45 jours, je le répète, ça serait la même dynamique pour un travailleur
qui bénéficie d'une indemnité pour préjudice corporel. Son droit serait retardé
jusqu'à 45 jours, il n'aurait pas accès
à son indemnité tant que le 45 jours ne serait pas écoulé, et qu'on
saurait, à ce moment-là, qu'il n'y a pas de demande de révision. Ça fait
que je ne le sais pas, je peux réarticuler tous mes arguments, tous mes
éléments, mais je pense que j'ai fait le tour de la question puis...
La
Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Merci, M. le ministre. Y a-t-il d'autres interventions sur le
sous-amendement? Député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc :
Quand, M. le ministre, vous dites : Ce n'est pas une préoccupation,
puis vous le dites avec une affirmation convaincue, une certitude, bien...
M. Boulet :
Non.
M. Leduc :
Non, quoi?
M. Boulet :
Non, non, mais ce n'est pas une préoccupation majeure. Ça n'a jamais été
exprimé de cette manière-là, là, tu sais. Puis, encore une fois, il faut
remettre le délai dans le contexte de ce que nous faisons. On rallonge le délai
de contestation au TAT, on donne une option à la partie contestante d'aller en
RA plutôt qu'au TAT... La RA, on demandait, dans certains milieux, de l'abolir
complètement, puis vous savez pourquoi on ne peut le faire, il y a la cohésion.
Mais je n'ai plus de commentaire.
M. Leduc :
Mais vous dites... O.K., mais c'est parce qu'il y a plein de choses, là. Vous
dites : Ce n'est pas une préoccupation.
Du moins, là, vous avez corrigé, vous avez dit : Ce n'est pas une
préoccupation que j'ai entendue. Déjà là, je suis plus à l'aise avec
l'affirmation.
Une chose qu'il faut
clarifier, là, ce n'est pas parce, que dans sa propre pratique ou même dans le
cadre des audiences, ici, on n'a pas entendu un point que ça ne veut pas dire
que ce n'est pas un enjeu. Ce n'est peut-être pas le gros enjeu du projet de
loi, ça, je pense qu'il n'y a personne qui va argumenter en défaveur de ça,
mais ça peut devenir un enjeu quand même.
M. Boulet : Dans le... On a reçu,
quoi, 78, 80 mémoires, il y en a deux qui ont demandé une prolongation du délai puis il y en a un, groupe, que vous
connaissez bien, c'est l'UTTAM. C'est l'UTTAM puis la FIQ, c'est les
deux seuls groupes. Tous les autres groupes... il n'y a
aucun autre groupe qui a demandé de prolonger ce délai-là, puis ce n'était pas
une recommandation forte de la FIQ. Il y a simplement l'UTTAM, puis c'est le
groupe qui demandait que le délai pour faire une demande de révision soit
prolongé.
Puis je sais,
probablement qu'il y
a quelqu'un de l'UTTAM qui nous
écoute, puis je les salue, puis je
comprends cette volonté-là, mais je leur demande à eux aussi de considérer l'ensemble
des changements que nous faisons dans cette section-là. Et on a pensé autant
aux travailleurs non représentés par des syndicats... que par des travailleurs
syndiqués ou des employeurs.
Ça fait que c'est là-dessus que je me base pour
dire : Ce n'est pas une... Tu sais, quand c'est vraiment une préoccupation importante, on le voit dans plusieurs mémoires... puis pas dans plusieurs,
dans la plupart des mémoires. Ici, ce n'est pas une préoccupation qui
est exprimée ni du côté syndical, ni du côté patronal, ni du côté des groupes
qui sont venus soit se faire entendre lors des consultations particulières ou
qui ont présenté un mémoire.
M. Leduc : C'est intéressant
que vous fassiez référence à ça puis aux mémoires, M. le ministre, parce que
moi, dans mon ancienne vie, j'étais responsable d'écrire des mémoires pour une
centrale syndicale. C'était mon métier, je travaillais dans un service de
recherche de la FTQ, pour la nommer, ce n'est pas un secret, de toute façon, et
c'était ma job de faire ça.
Quand on avait des projets de loi, sur lesquels
j'ai travaillé, puis qui avaient bien, bien, bien des articles, c'était un casse-tête parce qu'il fallait, en effet, faire des priorités, parce qu'on ne déposera pas... D'abord, on a rarement le temps d'écrire un mémoire plus que 15, 20 pages, souvent parce qu'il y a des délais très serrés entre la convocation et l'audience. C'est
des délais qui sont à peu près systématiquement décriés par les différents
groupes, qui doivent complètement se mettre en mode panique pour rédiger un mémoire.
Puis ensuite, bien, il faut bien qu'ils fassent
des priorités eux autres aussi, hein? Puis parce que, s'il fallait qu'ils traitent
de tous les enjeux qu'ils considèrent importants, s'il fallait qu'ils donnent
un commentaire, ne serait-ce qu'un commentaire, sur ce qu'ils pensent de chacun
des articles, tous les groupes... Je veux dire, on aurait des 80 pages par groupe qui nous auraient été
déposés pour le projet de loi en cours puis là je suis relativement conservateur avec le
chiffre 80.
Alors, qu'on me dise qu'il y ait juste deux
mémoires qui en aient parlé, d'accord, mais moi, ça... Ça ne veut pas dire que,
vu qu'il y a juste deux mémoires qui en ont parlé, tous les autres étaient absolument
confortables avec le délai de 30 jours et que ce n'était pas du tout une préoccupation.
Je serais bien curieux, moi, qu'on fasse la tournée des téléphones, autant
syndicale, patronale, populaire et que... Les expertes, qu'est-ce que vous
pensez, vous, du 30 jours? Je pense que le ministre pourrait être surpris.
Il pourrait être surpris qu'il y a bien des personnes qui vous diraient :
Non, on pense qu'un petit délai supplémentaire, ce n'est pas de refus.
M. Boulet : Bien, évidemment, il y a
une variété d'opinions puis même de faire passer le délai de 45 à 60 jours
pour la contestation. Autant qu'il y en a, si on faisait ce type de
consultation là, qui diraient : Montez-le pas. Tu sais, il y a des opinions très, très variées, là, quant à
l'application d'une loi de cette nature-là. Mais mes commentaires sont
faits, ma décision est prise. Puis je comprends le bien-fondé des amendements
et des sous-amendements, je les comprends, mais, ceci dit, mes commentaires ont
été faits.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Il y a d'autres... Est-ce qu'il y a encore des interventions sur le
sous-amendement? Alors, député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Le ministre a dit tantôt...
puis c'était une bonne réplique, parce que je lui ai fait souvent la remarque
que je trouvais qu'il ne démontrait pas beaucoup d'arguments pour motiver ses
différents amendements, puis là il me le renvoie. Puis c'est bien, c'est de
bonne guerre, en ce sens que je ne l'aurais pas nécessairement beaucoup motivé,
moi, mon amendement, aujourd'hui.
Il faut juste prendre en compte une chose, c'est
que moi, je n'ai pas accès aux statistiques de la CNESST puis je n'ai pas accès à... J'ai mon fidèle camarade Guillaume,
qui m'accompagne depuis le début, j'ai quelques amis, quelques contacts
dans certains groupes qui nous envoient des réflexions, mais je ne bénéficie
pas de l'appareil de l'État pour me fournir des chiffres, des arguments, des
analyses. Je ne peux m'imposer un fardeau argumentatif similaire à celui que je pense est sur vos épaules en tant que
ministre responsable du projet de loi. C'est pour ça que, tantôt, j'ai
demandé : Est-ce qu'il y a des chiffres qui existent sur l'utilisation de
358.2, si je ne me trompe pas, qui est le chiffre?
M. Boulet : Non, mais la réponse,
c'est non. Puis s'il y en avait... Je réitère, hein, puis on l'a déjà fait, on peut faire des rencontres personnelles de façon
épisodique. Et envoyez-moi les informations, puis, dans la mesure où les
chiffres existent et les statistiques sont
compilées, moi, je n'ai jamais eu de problème à le faire... on l'a fait à
l'étude de crédits, depuis quelques
années qu'on est ensemble, n'hésitez pas. Puis je comprends très bien ce que vous
me dites. Vous me dites un peu :
Vous avez une équipe avec vous, vous n'avez pas les mêmes ressources. Puis j'ai
énormément de respect pour ça puis je
comprends très bien votre point de vue puis... mais c'est comme ça que ça
fonctionne. Puis on fait des projets de
loi, puis ce projet de loi là ne sera pas parfait. Puis il va vous déplaire quand vous allez mettre l'accent sur les
points qui ne sont pas compatibles avec les
intérêts des groupes que vous représentez. Vous ne serez pas content, mais, si
vous mettez l'accent sur d'autres points qui sont favorables, bien là,
vous allez dire oui. Donc, il y a des plus et il y a des moins.
Puis moi, je fais appel à l'ensemble des groupes
pour écouter ce qui se fait dans le cadre de cette commission parlementaire là.
Ça se fait dans une philosophie de recherche de solutions puis d'établir des
consensus. Il y en a déjà beaucoup qui avaient été
établis par le CCTM, Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, il y
en a d'autres qu'on fait ici puis il y en a d'autres qui ne feront pas votre
affaire. Puis vous allez dire : parce que le ministre, il a le vote
majoritaire... Oui, c'est vrai, puis, si j'étais à votre place, je raisonnerais
pareil puis je me dirais : Je suis déçu, j'ai voté contre. Puis c'est votre
droit de voter contre ou de vous abstenir. Je le respecte, mais je me
dis : Avance...
Tu sais, à un moment donné, oui, j'ai écouté vos
arguments, vous avez écouté les miens. Puis bon, moi, je pense qu'encore une fois vous pouvez utiliser...
faire d'autres amendements. C'est votre choix. Si vous voulez
prendre le temps, prenez le temps. Moi, je ne vous bulldozerai pas avec ça. Je
le constate, mais, à un moment donné, on fait un projet de loi puis, si vous
voulez qu'on arrête à cet article-là, on arrêtera à cet article-là, là. Moi, je
vais vous écouter, mais moi, j'ai dit ce que
j'avais à dire, puis, pour moi, ça arrête à ce moment-ci. Ceci dit, je
vais respecter ce que mon collègue décide de faire, là.
• (12 h 40) •
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Donc, y a-t-il d'autres interventions sur le sous-amendement du député
de Bonaventure? Député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Juste une invitation très
amicale à la prudence, là. Je comprends qu'on a un échange puis que ça ne va peut-être
pas au rythme que le ministre souhaiterait. Puis, si j'étais dans ses
chaussures, probablement que j'aurais la même réaction, mais, quand le ministre
dit : Les groupes que vous représentez, en parlant de mon travail, je
trouve qu'on est dans une ligne, là, délicate ici, là. Moi, je ne représente
pas des groupes, je représente des citoyens, ce sont ceux d'Hochelaga-Maisonneuve
qui m'ont donné un mandat, comme ceux de Trois-Rivières vous ont donné le
vôtre, M. le ministre, de venir travailler ici puis d'essayer de bâtir les
meilleures lois possible.
Bien sûr que je travaille avec des groupes,
mais, si on commence à jouer au jeu de qui vous représentez, je ne pense pas
qu'on va aller bien, bien loin avec ça. Donc, je ne pense pas que c'était
l'intention du ministre de me peinturer ou
de restreindre la portée de ce que je dis à de la simple... comment je dirais
ça, de la simple représentation, de la simple répétition de ce qu'on
pourrait me dire, là, comme si... j'utilise une image, là, comme si j'étais une
marionnette. Je ne pense pas qu'il voulait aller là, mais je l'invite peut-être
à la prudence, parce que ce chemin-là peut mener à des endroits moins polis,
moins agréables.
M. Boulet : Ah! puis, Mme la
Présidente, oui, je comprends l'invitation puis je ne veux pas être mal perçu.
Vous savez l'estime que j'ai pour vous, puis je sais que, comme parlementaires,
au-delà des citoyens de nos circonscriptions respectives, quand on travaille un
projet de loi en commission parlementaire, on représente l'ensemble des Québécois,
des Québécoises, indépendamment de leur statut, indépendamment de leur origine.
Puis ici, quand on parle de santé-sécurité du travail, on réfère à l'ensemble
des travailleurs et des employeurs.
Puis je le répète, moi, ce qui m'anime dans ce projet
de loi là, c'est de diminuer le nombre d'accidents de travail, c'est de
s'assurer qu'il y ait le plus de travailleurs et de travailleuses au Québec
possible, le plus possible, qui soient protégés par des mécanismes de
prévention et de participation des travailleurs. C'est ça, mon but ultime.
Puis est-ce que ce sera parfait? Non. Puis est-ce
que ce sera tout en fonction de ce que je souhaiterais ou de ce que je pense
est le meilleur? Non. Même, même approche pour chacun de nous, mais je pense
qu'on fait des pas de géant en avant. Puis je sais que vous avez vos réserves,
il y a des points négatifs. Il y a beaucoup de points positifs. Depuis, on a un peu
plus qu'une centaine d'articles
adoptés, puis je pense qu'on a fait des choses relativement intéressantes.
Puis il y a eu des amendements, en cours de route, qui, je pense, vous ont
permis, encore une fois, de savoir que j'étais un chercheur de solutions.
Puis je n'aime pas ne pas trouver de solution,
je n'aime pas les impasses, mais, à un moment donné, je suis dans une
mécanique. Je ne suis pas une table de négociation purement et simplement. Je
suis dans une mécanique parlementaire législative où il faut faire avancer des projets
de loi, puis c'est ça qui me motive. Puis je pense que vous me connaissez assez bien pour savoir que tout ce que je fais, c'est
par sincérité pour les travailleurs puis pour les employeurs. Puis je vais continuer à aller dans la
même direction et en étant convaincu que, le jour où on adoptera, ce
sera quand même un document perfectible, qu'on perfectionnera, dans deux ans, dans
cinq ans ou dans huit ans, mais on aura fait des avancées quand même intéressantes.
Puis l'UTTAM, comme les milieux patronaux, comme
les milieux syndicaux, je les respecte énormément puis je les écoute, mais il
n'y a personne qui m'a dit qu'on n'avait pas fait des avancées intéressantes. Il
y a un dépoussiérage qui s'imposait à bien
des égards, puis on essaie de le faire de la manière la plus équilibrée
possible. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Alors, y a-t-il d'autres interventions sur le sous-amendement? Député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Moi, je suis convaincu qu'il
y a une raison pour laquelle, dans nos règlements, que ça soit au salon bleu ou en commission parlementaire, on
ne peut pas imputer des motifs, c'est parce que je crois, fondamentalement,
que toutes les personnes ici présentes sont animées de motifs vertueux. Puis M. le
ministre en fait un étalage, depuis les dernières minutes, puis je ne peux
qu'être d'accord avec ça. Bien sûr qu'il a raison de dire qu'il est animé par
une sincère volonté d'améliorer, pour tout le monde, la loi, pour les
travailleurs, les travailleuses, pour les patrons, pour les cadres, pour les citoyens,
pour tout le monde. Là-dessus, on ne peut qu'être d'accord. Puis je pense qu'on
ne sert pas grand-chose... en tout cas, on ne sert pas à grand-chose en
politique quand on commence à imputer des motifs à gauche, à droite. Ça peut
être bon pour le clic, pour le clic des réseaux sociaux, mais, au final, ça
n'avance pas à grand-chose. Alors, là-dessus, il peut compter sur notre totale
collaboration.
J'ai la même intention que
lui, j'ai la même volonté que lui d'arriver à la fin de l'exercice et d'avoir
une bonne loi qui améliore, concrètement, la
condition de travail des millions de travailleurs et de travailleuses au
Québec. Et c'est pour ça que je travaille en ce sens-là, c'est pour ça que je
réfléchis à des amendements. J'essaie de lui en envoyer le plus possible
d'avance. Des fois, ce n'est pas possible, parce que nous, on y réfléchit
nous-mêmes le jour avant, on les écrit rapidement. Il y a des éléments... Tu
sais, tantôt, quand je vous parlais de statistiques, bien, j'y ai pensé pendant
qu'on échangeait. C'est à ça que ça sert aussi, le travail parlementaire, c'est...
Des fois, on utilise l'image du choc des idées, mais c'est l'échange et c'est
en échangeant qu'on réalise : Ah mon Dieu! bien, même avec ma réflexion
préalable, je n'avais pas nécessairement pensé à tel ou tel élément. Puis là
j'y pense, là, je le soulève, là, j'aimerais ça avoir les chiffres. C'est sûr
que, si j'y pensais bien avant, je lui enverrais la requête. Je vais essayer de
me... faire l'effort, en fait, pour ce qu'il nous reste de travaux.
M. Boulet : ...chiffres sur le
nombre de demandes faites en vertu de 358.2, de prolongation de délai, ça fait
que je ne peux pas... je n'aurais pas pu les fournir de toute façon.
M.
Leduc : Non, mais je comprends, mais c'est parce que vous me disiez
tantôt que j'aurais pu vous demander ces chiffres-là plus tôt. Puis vous
aviez raison, puis je vous donne raison, j'aurais pu vous le demander plus tôt.
Ce que je vous dis, c'est que je n'y avais pas pensé plus tôt. Puis c'est
l'essence même de l'étude détaillée, qui, moi, est un des moments parlementaires
que je préfère, où l'échange, je pense, est le plus pertinent dans cette
enceinte...
M. Boulet : Je vais revenir sur
un point. Moi, je pense que les Québécois qui nous regardent discuter, depuis
presque deux heures, d'un délai, d'une demande de révision, d'un processus
qu'on abolit partiellement... Moi, je trouve que ce n'est pas une saine utilisation
du temps parlementaire. Je pense que c'est énormément de temps pour un amendement
et un sous-amendement. Je ne pense pas que les Québécois puis les Québécoises, en
général, seraient fiers de notre travail de ce matin.
Puis ça, je le dis de façon très respectueuse,
là, puis je m'inclus là-dedans. Ça fait que ce n'est pas pour me tirer un rang,
je m'inclus là-dedans, puis je m'en vais sur le balcon, puis je me regarde
aller, puis je ne serais pas fier de ma matinée. Je ne serais pas fier de ce
que les législateurs, des personnes élues démocratiquement, font de l'utilisation
d'un temps précieux en commission parlementaire. C'est mon opinion, puis je
tenais à l'exprimer.
M. Leduc : Je l'entends. Après
ça, tout un chacun est libre de faire son jugement par rapport, en effet, à ce
qui s'est dit ce matin. Moi, je n'ai pas l'impression qu'on a des débats
impertinents, j'ai l'impression que tout ce qui a été soulevé était des enjeux
réels, des enjeux qui touchent des vraies personnes dans la vraie vie.
Encore une fois, est-ce que ça va aussi vite que
vous le souhaiteriez? Visiblement, là, vous nous faites bien comprendre que
non. Puis encore une fois, si moi, j'étais dans vos chaussures, probablement
que j'aimerais ça que ça aille plus vite.
Mais moi, mon
travail ici, ce n'est pas de vous donner raison. Mon travail ici est
d'argumenter, de chercher des compromis, de voir où est-ce qu'on peut aller
vous convaincre. C'est sûr que, si vous nous aviez dit oui au 60 jours...
45 jours, on aurait passé, quoi, 10 minutes sur cet article-là. Ça
fait que, tu sais, je veux dire, ça joue des deux côtés.
Maintenant, il y a quelque chose qu'on n'a pas beaucoup
soulevé à ce moment-ci. Vous faisiez, par exemple, des comparaisons sur... je
reviens à ce qu'on disait plus tôt sur la cohérence du corpus législatif. On
a... Mon collègue Guillaume a eu le temps de vérifier pendant nos échanges.
Semble-t-il que le délai de révision à la SAAQ est de 60 jours et le délai
de révision à l'aide sociale est de 90 jours.
Alors, tantôt, vous parliez... référence, là,
qu'à 30 jours c'est le délai similaire, mettons, pour les normes du
travail. Je n'ai pas eu le temps de vérifier, mais on vous croit. Mais là on
vient de m'informer qu'il y a d'autres délais
qui sont passablement plus élevés, jusqu'à 90 jours pour la révision à l'aide sociale.
Là, encore une fois, je demeure stupéfait qu'on vous
recommande que, pour la cohérence du corpus législatif... pas bouger à 45, si
c'est déjà 60 à la SAAQ, si c'est déjà 90
à l'aide sociale. On dirait que cet argument-là, il pèse de moins en moins
lourd, là, à mon regard.
• (12 h 50) •
M. Boulet : Comme je vous ai dit,
c'est un des éléments que j'ai soulevés, puis, dans les lois du travail, c'est
30 jours. Puis c'est le 45 jours qui n'est pas cohérent, mais il y a
du 30, il y a du 60 jours, ça, effectivement, mais des lois d'autre
nature. Mais, en droit du travail, c'est des délais de 30 jours. Je
référais notamment, je pense, c'est 107.1 ou
107.2 de la Loi sur les normes du travail. C'est ça. L'élément de cohésion, je
le soulevais par rapport aux 45 jours. Tous les autres éléments
que j'ai soulevés, les autres arguments, ça s'appliquait tant pour le délai de
45 que de 60 jours.
M. Leduc : Mais là ça veut dire que
l'exercice de recherche de cohérence, il ne doit pas nécessairement s'appliquer
à toutes les lois. Ce que vous me dites, c'est qu'il doit s'appliquer
principalement pour les lois du travail?
M. Boulet : Non. J'ai soulevé
l'argument de cohérence ou de cohésion pour le 45 jours. Je ne l'avais pas
soulevé pour le 60, mais c'est eu égard au 45. Donc, je ne suis pas sûr que
vous aviez bien saisi, là, mais je ne l'avais pas soulevé. Je l'ai soulevé au sous-amendement
de mon collègue de Bonaventure. Donc, c'est 30 ou 60, mais, dans les lois du
travail, ce qu'on retrouve, c'est 30 jours. Puis, je reviens sur le fait,
la problématique a été soulevée seulement dans deux mémoires, dans à peu près 3 %
des mémoires que nous avons reçus.
Et, quand je
fais référence à l'utilisation de notre temps en commission parlementaire, ce qui
est superemballant, c'est de travailler à trouver des solutions pour
améliorer la santé des travailleurs, pour diminuer la fréquence et la gravité des lésions, diminuer le nombre de décès. Je pense
que s'attarder, pendant deux heures, à un délai, c'est simplement ce que je
voulais dire, ce n'est pas, selon moi, une saine utilisation du temps. Puis,
encore une fois, vous avez vos droits, vous les exercez puis vous utilisez le
temps selon ce que bon vous semble, mais moi, ce qui m'anime ici, c'est de trouver
des façons d'améliorer un régime pour le bénéfice des travailleurs qui sont
indemnisés et des employeurs qui paient des cotisations.
M. Leduc : Donc là, si je comprends
bien, le problème de la cohérence... puis là vous avez raison de dire que vous
ne l'avez pas soulevé, cet argument-là au 60, vous l'avez soulevé au 45.
Parfait, là, je comprends mieux.
Ça soulève d'autres questions, par exemple, parce
que... Qu'est-ce que la cohérence, l'objectif qui est recherché? C'est
exactement les mêmes chiffres ou plutôt une fourchette de délais, parce que, si
on considère que la cohérence... Puis il me semble, spontanément, c'est ça que
j'ai l'impression qui devrait être l'objectif de la cohérence, c'est de
maintenir une forme de fourchette de délais. Bien, entre 30 et 60, le milieu,
c'est 45. Pourquoi la cohérence doit nécessairement être soit 30 ou soit 60?
Parce qu'à la limite, si, dans l'ensemble de l'assiette de délais, il y a des
délais de 90 jours, bien, j'aurais pu dire «passer de 30 à
90 jours», puis j'aurais été cohérent avec le corpus législatif. Il y a
quelque chose qui m'échappe, là.
M. Boulet : Je n'ai plus d'autre
commentaire, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Alors, y a-t-il d'autres interventions? Oui.
M. Leduc : Dans cette idée-là, donc,
de bien comprendre quel est l'objectif d'une fameuse cohérence de corpus
législatif, parce que c'est un des arguments qui est soulevé pour refuser le
sous-amendement de mon collègue de Bonaventure, à 45 jours, bien, moi,
j'aimerais ça qu'on puisse parler à quelqu'un, peut-être, du ministère, là, qui
a eu à étudier ça. Est-ce que ce serait possible?
M. Boulet : Bien non. S'il y a des
avis juridiques, c'est des avis juridiques qui sont confidentiels, mais vous
pouvez... Moi, je vous donne le contenu de ce qui m'est donné comme information.
Puis encore une fois, bien, écoutez, j'ai l'impression de me répéter encore une
fois, là. Je n'ai plus de commentaire, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Pas
de problème.
M. Leduc : Mais là ça veut-tu
dire... Attendez, là. Le 30, 60 jours, la cohérence... parce que, tantôt,
je vous ai posé la question : Est-ce qu'il y a des avis juridiques? Vous
m'avez dit non.
M. Boulet : Regardez, je vais vous
répéter, encore une fois, j'ai dit... L'argument de cohésion, je l'ai soulevé
eu égard au sous-amendement du collègue de Bonaventure, je ne l'ai pas soulevé
à votre amendement. J'ai parlé de stabilité, de gestion, d'indemnité pour
préjudice corporel, de possibilité de demander une prolongation du délai de
déjudiciarisation et d'économie générale de notre section. J'ai tout pris ça en
note, j'ai rajouté ces arguments-là au collègue de Bonaventure et j'ai, en
plus, parlé de cohésion eu égard au 45, pas eu égard au 60 jours. Mais
j'ai des arguments variés, tant pour le 45
que pour le 60 jours. Tu sais, je veux juste m'assurer que vous aviez bien
compris, là.
M. Leduc : Bien, j'ai très bien
compris cette portion-là puis je ne suis pas en train de dire que vous n'avez
aucun autre argument. Moi, je me concentre dans seulement cet argument-là.
M. Boulet : Bien non, non, je n'en
ai pas. Bien, si vous voulez vous concentrer sur un argument... mais je ne sais
pas c'est quoi, l'objectif, collègue. Je ne sais pas c'est quoi, le but.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Je
veux revenir ici, M. le ministre, je veux revenir, là. Vous, vous voulez
revenir sur le 60, mais là on est sur le sous-amendement.
M. Boulet : Bien oui.
M. Leduc : Non, non, je n'ai jamais
dit ça, j'ai dit que je veux comprendre le 45.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Ah! d'accord.
Alors, je m'excuse. J'avais compris que vous vouliez revenir au 60. Je
m'excuse.
M. Boulet : Là, soyons francs, là,
les arguments, je les ai donnés. Vous voulez revenir sur mes arguments, ce que
vous dites, je les ai explicités. Je ne peux pas répéter cinq fois les mêmes
arguments. Vous pouvez être en désaccord avec mes arguments, mais moi, je suis
en désaccord avec les vôtres, puis on peut s'entendre qu'on est en désaccord
puis...
M. Leduc :
Là, ma question que je vous ai posée, puis je vais peut-être la reformuler,
désolé si elle n'était pas claire, c'est certainement mon problème, là, je
l'ai... Ce n'est pas un aspect qu'on a abordé à ce jour-ci. Alors, dans le cadre du 45, vous me dites qu'un des arguments que vous
avez, si j'ai bien compris... mais celui-là que vous avez, qu'on discute en ce
moment, c'est la cohérence du corpus législatif. Et là j'ai compris, dans votre
dernière intervention, que le problème de la cohérence du corpus législatif,
c'était avec le chiffre 45. C'est pour ça que vous n'aviez pas soulevé ce
débat-là lors de l'amendement principal à 60.
Et moi, ce que je
cherche à comprendre, c'est, donc, ce fardeau qui est imposé à l'État, du
moins, cet objectif que l'État se donne, d'avoir la cohérence du corpus législatif.
J'avais l'impression que c'était de s'inscrire dans une fourchette de délais,
mais là vous me dites que non, il faut que ça soit, nommément, les mêmes
délais. Est-ce donc à dire que, si j'avais
un amendement aussi à 90 jours ou, si d'aventure, il y avait
un... par exemple, si d'aventure, il y avait un délai, en quelque part, de, je ne sais pas, moi,
50 jours, ça serait recevable?
M. Boulet :
J'ai répondu à ça, 30 ou 60. 50, non, il y aurait un problème de cohésion. J'ai
été clair, là, je ne sais pas pourquoi
vous me reposez la question différemment. J'ai dit : 30 et 60, il n'y avait pas cette problématique-là de cohésion.
Je ne sais pas, puis peut-être
que je ne parle pas assez clairement, là, peut-être que j'ai des problèmes
d'articulation ou peut-être qu'on est trop loin, mais, tu sais, 30 ou 60... 50,
il y a une problématique, 45, il y a une problématique, 40, il y en a une,
comme 35, comme 65, comme 70. Il y a...
Cette cohésion-là,
c'est des spécialistes en rédaction législative qui s'assurent qu'il y ait
cette cohésion-là. Puis dans les lois du travail, que vous connaissez bien,
vous savez que c'est généralement 30 jours aussi. Dans la Loi sur les
normes du travail, moi, je ne me souviens pas, je n'étais pas en commission
parlementaire... Je sais qu'en commission parlementaire ça n'avait pas fait
l'objet d'échos, de préoccupations. Ce n'était pas un irritant, le délai.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Parfait. Alors, écoutez, compte tenu de l'heure,
nous suspendons les travaux jusqu'à 14 h 30 et nous nous retrouverons
dans la même salle. Merci. Alors, bon dîner.
(Suspension de la séance à
13 heures)
(Reprise à 14 h 31)
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Alors, votre attention. Bonjour. La Commission de
l'économie et du travail reprend ses travaux.
Nous poursuivons
l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi modernisant le
régime de santé et de sécurité du travail.
Lors de la suspension
de nos travaux, cet avant-midi, nous en étions à l'étude du sous-amendement
déposé par le député de Bonaventure et nous avions effectivement aussi reçu un
amendement du député d'Hochelaga-Maisonneuve.
Donc, sur le
sous-amendement déposé par le député de Bonaventure, y a-t-il encore des
interventions? Sinon, nous allons procéder à la mise aux voix. Député
d'Hochelaga-Maisonneuve, vous...
M. Leduc :
Oui.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : D'accord. Alors, à vous.
M. Leduc :
Vous allez me permettre de m'installer, là, deux petites secondes.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Je vous indique, d'ailleurs, qu'il vous reste
cinq minutes, hein, pour ce sous-amendement.
M. Leduc :
Merci. Alors, nous étions à l'amendement...
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Sous-amendement
M. Leduc :
Sous-amendement de 45. Ah oui! c'est ça. En fait, je vais vous demander une
petite suspension, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : On va l'accorder, mais... On va l'accorder, on va
l'accorder. C'est parce que vous voulez vérifier des choses ou...
M. Leduc :
Bien oui, là, je m'assois deux secondes, là.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Parfait. On va l'accorder.
(Suspension de la séance à
14 h 32)
(Reprise à 14 h 36)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, député d'Hochelaga-Maisonneuve, vous avez une intervention sur le
sous-amendement.
M. Leduc : Oui, tout à fait. Alors,
sur le sous-amendement, par rapport au 45 jours plutôt que le 60, qui
était une tentative de mon collègue de Bonaventure de couper la poire en deux,
en quelque sorte, par rapport à mon amendement original, tentative que j'ai
saluée, qui est appuyée par mon collègue de Nelligan également, il y a un argument... On a fait beaucoup de discussions
alentour de ça, différentes pierres qu'on a retournées. Il y a un
argument qu'on n'a pas étudié et, je pense, qui rejoint l'intention du ministre
de déjudiciariser le processus à la CNESST, et c'est le suivant.
Donc, quand un travailleur ou une travailleuse
ou... encore une fois, là, je me pratique à répondre à votre invitation
d'inclure aussi les entrepreneurs dans mes exemples. Donc, quand un
travailleur, ou une travailleuse, ou un
entrepreneur, ou une entrepreneure ne connaît pas la loi, ne connaît pas,
nécessairement, ses droits ou ses obligations, fait face à une décision
qu'elle désirerait contester, le fait d'aller consulter, d'aller chercher de
l'aide, que ce soit d'un bord ou de l'autre, encore une fois, travailleur ou
employeur, le fait d'aller chercher de l'aide peut mener et mène souvent, dans
les faits, à finalement décider de ne pas contester.
Donc, ce délai-là, qui est de 30 jours, qui
est très court, bien, il peut avoir des effets pervers. Il peut avoir l'effet
pervers, là, d'une part, que la personne ne connaît pas ce délai-là, et donc
elle perd un droit, si le délai est échu, ou, d'autre part, si elle s'en rend
compte trop à la dernière minute, n'étant pas trop au courant de son dossier,
il est-tu solide ou pas, bien, elle va contester de toute façon.
Alors, si on donne un petit peu plus de temps...
Puis là on ne propose pas une révolution, là. À 60 jours, il y a des
comparatifs qu'on a nous-mêmes soulevés et que le ministre a soulevés tantôt. À
45 jours, je pense que c'est le point milieu entre les deux, mais, dans
les deux scénarios, on peut permettre du temps pour la personne d'aller
consulter et, je pense, prendre une décision éclairée et éviter,
potentiellement, d'aller contester, éviter d'aller allumer la machine de la révision administrative,
d'initier cette démarche-là. Et, en ce sens-là, ça serait, je pense, une
démarche qui participerait à déjudiciariser notre système, qui est un
malheureux champion, au Canada, de la judiciarisation.
M. Boulet : Il faut, Mme la
Présidente, faire une distinction entre une contestation et une révision. Ici,
c'est simplement une révision
administrative. Les décisions qui sont rendues, qui font l'objet d'une demande
de révision sont non seulement notifiées, donc envoyées par courrier
recommandé ou par un moyen permettant à la personne d'en prendre connaissance... Et vous le savez, collègue, c'est
vraiment indiqué, là, il y a deux lignes. Si vous n'êtes pas d'accord,
vous pouvez faire une demande de révision
administrative dans un délai de 30 jours de la réception de la présente
décision.
Ça fait que c'est supersimple. Ce délai-là, il
est le même depuis des décennies. Il n'a jamais causé de problématique, au
point où seulement 3 % des groupes qui sont venus devant nous ont référé à
ce délai-là sans en faire une priorité. Moi, je pense qu'on fait un débat sur
un sujet qui n'est pas dans le projet de loi n° 59, qui ne fait pas
l'objet d'un irritant dans la pratique, et tout le monde...
Puis ultimement, je le comprends, une petite
entreprise ou un travailleur seul qui dit : Moi, je ne le sais pas si je
dois... Mais, tu sais, encore une fois, c'est une révision, tu dis oui ou tu
dis non, il va... il rencontre la personne, puis il respecte le délai, puis, à
défaut, il fait une demande de prolongation de délai.
Puis, tu sais, j'ai fait vérifier, ce midi, là,
pour qu'il compute, là. La donnée n'était pas disponible, mais c'est seulement
10 % des dossiers qui sont déposés après le délai. Donc, 90 % des
demandes de révision respectent le délai. C'est quand même assez... un juste
reflet de l'absence de préoccupation profonde par rapport au sujet que nous
discutons. Et moi, j'aimerais ça qu'on revienne à ce qui nous concerne,
l'amélioration de la santé et sécurité des travailleurs au Québec.
• (14 h 40) •
M. Leduc : Merci d'avoir fait
vérifier la statistique sur l'heure du dîner, c'est apprécié. Je pense que ça
nous... en tout cas, moi, ça m'aide dans ma réflexion. Quand vous dites :
10 % déposés après le délai, j'assume que c'est le délai de 30 jours,
là, dont il est question. Vous dites que c'est très peu, mais on dirait que
moi, j'ai l'impression... bien, pas nécessairement inverse, mais ce n'est pas
banal, 10 %. Quand même, ça veut dire que, sur toutes les demandes de
révision qui sont déposées, si j'ai bien compris la statistique, là,
l'entièreté des demandes de révision qui sont déposées, une sur 10 est déposée
hors délai, c'est ça, hors délai du 30 jours?
M. Boulet : Oui, 90 % des
demandes de révision respectent le délai, ce qui est quand même un taux
extrêmement important. Et évidemment, dans le 10 %, il y en a un certain
pourcentage qui doit... qui font l'objet de demandes de prolongation de délai
en vertu de 358.2. Et la statistique, là, sans que ce soit nécessairement très
précis, les personnes sont relevées du défaut de respecter le délai de
30 jours dans un peu plus que 60 % des cas.
Donc, on se retrouve avec un bassin potentiel
extrêmement mineur où des personnes ont fait les demandes de révision trois mois... J'en ai vu, là, des
demandes de révision des mois après. Puis, comme les deux tiers des
demandes de révision proviennent des employeurs, bien, il y en a beaucoup du
côté des employeurs puis il y en a du côté des travailleurs, mais ça, ce
délai-là, il incite à la diligence puis il incite à ce que nous procédions avec
efficacité.
Puis je le répète, important de faire la nuance
entre une révision et une contestation. Une révision, là, tu dis :
Pouvez-vous réviser mon dossier? Puis c'est tout, tu peux ne pas faire
d'observation, tu peux ne rien faire. Puis tu reçois la décision en révision
peu de temps après.
M. Leduc :
Puis c'est une révision qui se fait sur dossier, il n'y a pas de nouvelle
audience contrairement à une contestation au TAT.
M. Boulet :
Totalement, totalement.
M. Leduc :
Vous avez raison de le préciser. C'est moi qui ai utilisé le terme «contester»
tantôt, qui n'était pas le bon, je pense, dans la circonstance, et vous faites
bien de le préciser.
Je pense que j'ai
loupé un bout, là. Vous avez dit un 60 % des cas, tantôt. C'est
60 % des cas qui sont hors délai, c'est le 60 % du 10 %?
M. Boulet :
Non. O.K., je vais reprendre.
M. Leduc :
Je suis désolé, j'ai juste mal compris ce bout-là.
M. Boulet :
Non, mais c'est peut-être moi qui ne s'exprime pas bien, là, mais 60 % des
demandes de prolongation de délai, en vertu
de 358.2, sont acceptées. Donc, dit autrement, la CNESST relève du défaut de
respecter le délai de 30 jours dans 60 % des cas.
M. Leduc :
Ce que vous me dites puis ce que j'entends, c'est que... dans le fond, votre
analyse, c'est que 358.2 fonctionne, comme
60 % des cas qui sont y acheminés à travers 358.2 fonctionnent, sauf que,
là, ce qui... Peut-être, la donnée qui nous manquerait, c'est : Ça
représente quoi, ça, les cas de 358.2 par rapport aux 10 %? Est-ce que la
majorité du 10 % hors délai est envoyée à 358.2?
M. Boulet :
On n'a pas le nombre de personnes. On n'a pas cette information brute là.
M. Leduc :
O.K., je comprends. Ça aurait pu compléter le portrait, mais déjà, avec ces
deux chiffres-là, ça...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Il vous reste 40 secondes.
M. Leduc :
Merci, Mme la Présidente. Bien, ça aide à comprendre un peu pourquoi je faisais
ça. Moi, je trouve que 10 %, ce n'est pas banal. C'est quand même un bon
chiffre, c'est beaucoup de personnes qui déposent hors délai. J'aurais été
curieux de savoir, ce 10 % là, ça représente combien de cas. Ces cas-là,
j'imagine que... Bien, nécessairement, c'est ces cas-là qui traversent à 358.2.
Combien sont-ils à le faire? Ceux qui le font, tant mieux, ça fonctionne.
Est-ce que c'est un problème d'information? Est-ce que les gens savent qu'ils
peuvent faire 358.2? Ça aurait été intéressant de le savoir, mais déjà qu'il y
a ces deux chiffres-là qui a été acheminé, je l'apprécie, M. le ministre. Et
merci, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, merci. C'est tout le temps que vous
disposez. Y a-t-il d'autres interventions sur le sous-amendement déposé par le
député de Bonaventure? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons
procéder à la mise aux voix.
La Secrétaire :
Veuillez répondre : pour, contre ou abstention. M. Boulet
(Trois-Rivières)?
M. Boulet :
Contre.
La
Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant
le gouvernement, Mme Boutin (Jean-Talon)?
Mme Boutin :
Contre.
La Secrétaire :
Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?
M. Derraji :
Abstention.
La Secrétaire :
M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?
M. Leduc :
Pour.
La Secrétaire :
Et Mme IsaBelle (Huntingdon)?
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, le sous-amendement est donc
rejeté. Nous revenons à l'amendement déposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve. Je veux vous rappeler, député d'Hochelaga-Maisonneuve, qu'il vous reste, sur cet amendement-là,
4 min 30 s. Alors, y
a-t-il des interventions? Oui, député
d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc :
Je comprends que... en tout cas, j'assume que l'amendement ne sera pas accepté,
si on vient de battre le sous-amendement, ça fait que je ne veux pas m'étendre
trop longtemps. C'est juste que le ministre a évoqué, dans un des échanges
qu'on a eus ce matin, ce que j'ai compris être sa position personnelle, mais
qui était difficilement applicable dans le contexte, à savoir que, s'il n'en
tenait que de lui, puis là-dessus je le rejoins, on abolirait carrément et tout
simplement la direction des révisions
administratives. J'assume que sa
position personnelle, sur laquelle nous sommes d'accord, est
probablement basée sur le fameux chiffre que je vous ai soumis, là, plus tôt, là, les 95 % des décisions qui sont maintenues,
ce qui apparaît être une étape peu pertinente dans la machine
judiciaire.
Et je veux
juste m'assurer... et je n'ai pas nécessairement besoin d'une longue réponse,
là, mais je veux vraiment m'assurer
que la vision du ministre, qu'il nous présente aujourd'hui, à savoir qu'il
pense que ce n'est pas nécessairement la chose la plus... Bien, en tout
cas, je ne veux pas lui mettre des mots dans la bouche, là, mais qu'il pense
que ça aurait pu être retiré en soi, la DRA, mais qu'il ne le fait pas, potentiellement
à cause d'un certain ordre législatif qu'il faut maintenir, de la possibilité
d'avoir une révision qui est dans ce qu'on peut peut-être appeler, des fois,
les principes de justice naturelle. Mais
après ça, plus tard dans la conversation, il a évoqué le fait que plus tard,
une autre révision, un bilan, ou
éventuellement un autre gouvernement, ou ce même gouvernement, ou dans une
autre étape, bref, il pourra y avoir une étude de l'efficacité de la
DRA, de la révision administrative.
Mais là je veux bien départager les choses.
Est-ce que... Quand il nous dit qu'il ne peut pas aller de l'avant avec sa
vision, qui serait l'abolition de la DRA, à cause de l'ordre législatif des
choses, est-ce que c'est compatible avec ce qu'il a dit un peu après en disant :
Peut-être qu'on pourrait l'évaluer plus tard? Est-ce que le blocage de ne pas
l'avoir fait aujourd'hui, du moins, dans ce projet de loi là... Est-ce que le
blocage est principalement d'ordre, je dirais, technicojuridique, ou plutôt un
blocage, ou une hésitation, peu importe le terme, là, mais un refus d'y aller
de nature plus politique, par rapport à ce qu'il voulait faire dans l'économie
générale de son projet de loi?
M. Boulet : Bien, je vais essayer
d'être assez succinct. En fait, ce que j'ai dit, c'est que c'est un scénario
que je trouvais intéressant au départ. J'avais entendu ce que le comité
consultatif recommandait. Ceci dit, quand on prépare un projet de loi, on
discute, on analyse et on réfléchit, et j'ai réalisé que l'abolir purement et
simplement, ce n'était pas une option envisageable. Puis on va faire la
discussion, on aura fait la discussion en amont, là, parce qu'on s'en va vers ces articles-là, en raison,
notamment, de l'impact de la décision de première instance,
l'application de la Loi sur la justice
administrative, la qualité, la célérité qui est requise en matière de décisions
administratives. Puis souvent, la révision,
c'est une opportunité de donner une observation nouvelle, de faire un
commentaire qui n'avait pas pu être fait avant la reddition de la décision initiale. Évidemment, il y avait
l'impact aussi sur le Tribunal
administratif du travail.
Ça fait que c'était de dire c'est quoi, les
décisions qui requerraient ou qui permettraient qu'on puisse opter entre la
révision administrative et le Tribunal administratif du travail. Ceci
dit, c'est une nouvelle façon de faire qui m'apparaît être un très bon
compromis, et on va voir, dans l'application, comment ça s'exprime sur le
terrain. Puis est-ce que ça permettra d'aller un pas plus loin dans
cinq ans, dans huit ans? Je ne le sais pas, mais tout est possible,
là. On verra au moment opportun.
M. Leduc : O.K. Bien, je trouve ça
intéressant parce que j'entends qu'il n'y a pas une fermeture de la porte quant
à cette idée-là. Parce que je m'étais fait poser une question... dans une
entrevue, je pense que c'était pour le magazine,
là, du dimanche, Dimanche magazine, à Radio-Canada, à la radio de
Radio-Canada, et ils nous demandaient : Qu'est-ce qui est fait en matière de déjudiciarisation? Moi, à part ce
qu'on va discuter tantôt, où on offre la possibilité, éventuellement, de
sauter par-dessus la révision administrative, moi, je ne voyais pas beaucoup
d'autres choses dans le projet de loi pour participer à déjudiciariser.
Il y aura toute une discussion qu'on aura aussi
sur le Bureau d'évaluation médicale, mais au moins, si j'entends, du côté du
ministre, qu'il est prêt à reparler de ça, éventuellement, que ce soit une
étude de crédits, que ce soit à travers, j'imagine, le C.A. de la CNESST, qui
pourrait demander, dans son autonomie, une évaluation de comment ça fonctionne
à sa direction de la CNESST, toujours, moi, ça me réjouit. Je suis content
qu'on ait fait le tour du débat, je suis content qu'on ait soulevé toutes les
pierres. Malheureusement, là, le délai ne sera peut-être pas possible... de
l'avoir aujourd'hui, mais je pense qu'on a fait un bon tour de la question.
• (14 h 50) •
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Alors, y a-t-il d'autres interventions sur l'amendement déposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve concernant l'ajout d'un nouvel article, 106.1?
S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux
voix.
La Secrétaire : M. Leduc
(Hochelaga-Maisonneuve)?
M. Leduc : Pour.
La Secrétaire : M. Boulet
(Trois-Rivières)?
M. Boulet : Contre.
La
Secrétaire : Pour les
membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Boutin (Jean-Talon)?
Mme Boutin : Contre.
La Secrétaire :
Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?
M. Derraji : Abstention.
La Secrétaire :
Mme IsaBelle (Huntingdon)?
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Abstention. Donc, l'amendement déposé est rejeté. Nous poursuivons avec
l'article 108. M. le ministre.
M. Boulet : Merci. L'article 359 de
cette loi est modifié :
1° par le remplacement, dans le premier alinéa,
de «45» par «60»;
2° par l'insertion, après le deuxième alinéa, du
suivant :
«En outre, une personne peut contester devant le
tribunal la décision dont elle a demandé la révision si la commission n'a pas
disposé de la demande dans les 90 jours de sa réception. Lorsque la
personne qui a demandé la révision a requis un
délai pour présenter ses observations ou produire des documents, le délai de
90 jours court à partir de cette présentation ou de cette
production.»
Explication. La première modification fait
passer le délai pour contester une décision de la révision administrative au
Tribunal administratif du travail de 45 à 60 jours.
La seconde modification permet à une personne de
contester au Tribunal administratif du travail une décision dont elle a demandé la révision, si la révision
administrative n'a pas rendu sa décision dans les 90 jours de la
réception de la contestation. Ce délai commence à courir au moment de la
production des documents ou des observations lorsque la personne qui a demandé
la révision a annoncé qu'elle désirait en produire.
Donc, évidemment, vous comprendrez que c'est une
modification qui permet à une personne d'accélérer le traitement de son
dossier, si elle l'estime souhaitable, là, tout en donnant le temps nécessaire
à la révision administrative d'exercer sa compétence de manière diligente.
Voilà. Merci.
La
Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Y a-t-il des interventions à l'article 108? Député
d'Hochelaga-Maisonneuve.
M.
Leduc : Merci. Est-ce qu'il
y a des politiques administratives à la CNESST alentour de cet exercice de la
révision?
M. Boulet : Pardon, collègue?
M.
Leduc : Est-ce qu'il y a des politiques administratives à la CNESST
qui traitent de ce processus de révision?
M. Boulet : De ce que nous parlons
dans le...
M. Leduc : Oui.
M. Boulet : Non, de ça, non. Je
pense que c'est une justice administrative, elle se veut selon la Loi sur la
justice administrative, sans être expéditive, là, mais être... se faire dans la
célérité. Et ce que nous proposons ici, c'est, au-delà de monter le délai de 45
à 60 jours, de dire : Tu peux contester devant le tribunal, si la
révision administrative ne rend pas sa décision dans un délai raisonnable, là,
90 jours suivant la réception de la demande. Puis évidemment, quand tu as
demandé de faire des observations ou déposer des documents, c'est une autre
dynamique.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Y a-t-il d'autres...
M. Leduc : L'objectif, donc, du
nouveau paragraphe, là, que vous rajoutez, j'essaie de le saisir. Donc :
«En outre, une personne peut contester devant le tribunal la décision dont elle
a demandé la révision si la commission n'a pas disposé de la demande dans les
90 jours...» Qu'est-ce qui pourrait faire en sorte que la commission n'a
pas disposé de la demande dans les 90 jours? Il y a un délai de
ressources, un défaut de ressources?
M. Boulet : Moi, je pense qu'il
faut le voir comme un incitatif à rendre la décision rapidement. À défaut, la
CNESST va être confrontée devant le fait ou la décision de l'administré de
présenter au Tribunal administratif du travail. Donc, c'est vraiment dans cette
perspective-là que ça a été présenté.
M. Leduc : Est-ce que ça arrive
souvent?
M. Boulet : Ah mon Dieu! Est-ce
qu'on a des statistiques sur le pourcentage de décisions rendues au-delà du
90 jours? Je peux le vérifier, là, mais encore une fois, oui, je suis prêt
à faire la discussion, mais c'est au bénéfice de l'administré, qu'il soit un
travailleur ou un employeur, qu'on prévoit ici... C'est une façon... Tu sais,
la Direction de la révision administrative,
vous le savez, hein, probablement que les partenaires syndicaux et patronaux
considéraient que c'était une étape qui n'était pas totalement utile et
pertinente. Puis probablement que les délais faisaient partie des facteurs qui
étaient considérés par les partenaires du marché du travail en disant :
C'est long, ça ne donne rien puis c'est souvent entériné.
Mais les délais, ça fait
partie des enjeux, des irritants. Ici, on vient dire : C'est une forme
d'incitation à rendre la décision dans ce
délai-là, à défaut... Puis je trouve ça extrêmement intéressant, là. Je ne sais
pas ce qu'on peut reprocher à une disposition de cette nature-là, là.
C'est vraiment au bénéfice de l'administré, là.
M. Leduc : Qu'est-ce qui va
arriver? Ce que je comprends, c'est qu'il faut les... Ça, c'est votre
intention, là. Il faut les deux, il faut l'accord des deux, là, pour sauter la
révision administrative puis aller directement au TAT.
Une voix : ...
M. Boulet : Excusez-moi, j'ai
eu un chiffre, là, puis je vais vous le donner après.
M. Leduc : Bien, je peux... je
vous écoute.
M. Boulet : Non, mais votre
commentaire, c'était quoi?
M. Leduc : O.K. Ce que je
comprends, c'est qu'il faut avoir l'accord des deux parties pour sauter l'étape
de la révision, directement aller au TAT.
M. Boulet : Non, c'est une
personne... Une personne peut contester, c'est bien écrit. Une personne peut
contester devant le tribunal la décision dont elle a demandé la révision, là,
je pense que c'est écrit très clairement. Et, collègue,
quand je vous disais... Les délais, là,
sont un des motifs qui amenaient les partenaires à dire : 68 % des décisions l'ont été au-delà
d'un délai de 90 jours. Ça fait que c'est quand même assez intéressant. Ça
fait que ça donne encore plus de sens à notre disposition.
M. Leduc : Et est-ce qu'on a
une analyse de pourquoi la situation est comme ça?
M. Boulet : Non.
M. Leduc : Pas d'analyse de
disponible?
M. Boulet : Non, mais, tu sais,
il faut faire attention, là, puis je ne vais pas tout le temps lancer la balle
à ceux qui font la révision administrative. Il y a des travailleurs puis des
employeurs qui disent : Je vais t'envoyer des observations, ils demandent
un délai, les observations ne sont pas reçues. Moi, j'ai beaucoup de personnes
avec qui je faisais affaire qui tenaient à transmettre des observations et qui
demandaient un délai de deux semaines, trois semaines, un mois, puis ce n'était
pas respecté, puis ils envoyaient les observations, puis, après ça, ils
appelaient. Ça fait que je ne sais pas, de ce 68 % là, il y en a combien
que c'était en raison de dossier incomplet, observations, commentaires non
reçus. Ça fait que c'est ce que je peux vous donner comme information.
M. Leduc : O.K. Bien, c'est
intéressant. Puis là je trouve qu'il y a une motivation, là, quand vous me
dites 60 % des dossiers qui sont rendus post 90 jours. C'est
quand même long, 90 jours, toujours pour une révision où il n'y a pas d'audience, où c'est sur dossier.
J'essaie de penser à qu'est-ce qui pourrait être des motifs qui
expliquent ça au-delà, peut-être, d'un enjeu de ressources humaines, là, ou
d'explosion de demandes de révision, puis le phénomène de l'imputation des
coûts qu'on connaît bien.
Mais, en tout cas, au-delà de l'explication où
vous nous dites : Moi, je cherche à resserrer un peu cette... rendre cette mesure-là... Puis force est de
constater, en tout cas, c'est mon analyse, que de mettre ce délai-là de
90 jours semble être dans une optique de déjudiciarisation.
M. Boulet : Oui, tout à fait.
Tout à fait, parce que, quand je parlais de l'option... depuis le début du
dépôt du projet de loi, je parle de l'option
entre le tribunal administratif et la Direction de la révision administrative
dans certaines matières. Là, on se donne encore des moyens additionnels
permettant à la partie qui veut avoir une décision dans les meilleurs délais
possibles puis dans un contexte le moins judiciarisé possible. C'est un moyen
ou un outil mis à leur disposition.
• (15 heures) •
M. Leduc : Est-ce que de mettre
un délai de cette nature-là ne peut pas aussi avoir une espèce d'effet pervers
où les réviseurs, potentiellement... puis je ne dis pas que c'est votre
intention, là, mais les réviseurs auraient comme une espèce de tendance à
devoir boucler plus rapidement des dossiers pour ne pas avoir une mauvaise
statistique personnelle, par exemple, pour dire : Bien, lui ou elle, tel
ou tel réviseur, n'a pas été capable de remplir son délai de 90 jours dans
x nombres de cas, puis là il y a une espèce de petit classement, de petit
concours maison qui s'instaure soit implicitement ou tacitement? Est-ce qu'il
n'y a pas cet effet-là, potentiel, que vous avez envisagé?
M. Boulet : Bien, à l'entrée en
vigueur du projet de loi, ce qui est anticipé, ce qui est planifié, c'est qu'on
améliore les outils informatiques à la disposition notamment des réviseurs pour
leur aider à rendre des décisions avec plus de célérité. Puis, en même temps,
vous le savez, hein, parce que vous avez déjà travaillé dans des dossiers de
santé-sécurité, ce n'est pas toujours des dossiers simples, hein? Puis, des
fois, souvenez-vous, hein, les dossiers constitués par maintenant
le Tribunal administratif du travail, c'est des dossiers qui sont épais, qui
requièrent un examen parfois assez approfondi. Mais, si on améliore les outils
informatiques à la disposition des réviseurs, je pense que ça va être un
bénéfice. Mais c'est sûr qu'un début recherché, c'est de s'assurer de respecter
la célérité qui est recherchée par la Loi sur la justice administrative.
M. Leduc : Oui, puis je pense que ça
doit être ce qui anime toutes les entités gouvernementales puis toutes les
personnes qui travaillent dans cette enceinte au Parlement ou dans différents
ministères, O.K.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Député d'Hochelaga-Maisonneuve, donneriez-vous la chance au député de Nelligan
de prendre la parole?
M. Leduc : Ah! bien oui. Je n'avais
pas vu. Je suis désolé, je ne l'avais pas vu, bien sûr.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Merci. Allez-y, député.
M. Derraji : ...le ministre a
répondu en partie. Je voulais juste comprendre une chose. Vous dites que vous
voulez diminuer le processus de judiciarisation, mais qu'en est-il de la
révision administrative dans le processus? Est-ce que ce n'est pas pousser plus
les gens à aller directement au tribunal? C'est quoi, la mécanique derrière
tout cela? Donc, est-ce que la révision administrative est au début, on arrive
à un blocage, on part au TAT?
M. Boulet : Ça, ici, cet article-là,
c'est pour s'assurer que, si la décision du réviseur n'est pas rendue dans un
délai de 90 jours, tu peux décider d'aller directement au Tribunal
administratif du travail. Donc, tu fais abstraction de l'étape de la révision
administrative. On va voir un peu plus loin, collègue, que l'option à laquelle
je fais souvent référence, c'est de permettre à celui qui veut contester, soit
l'employeur, soit le travailleur, de décider s'il va aller en révision administrative
ou devant le tribunal administratif quand c'est des affaires médicales ou de
financement, là, de partage des coûts. Ça, ça va contribuer à une importante
déjudiciarisation du processus, parce que, quand on parle de déjudiciariser,
c'est d'enlever des étapes et de rendre ça moins complexe.
M. Derraji : Oui, je comprends
et je veux juste comprendre le lien avec augmenter le délai. Donc, augmenter le
délai, c'est donner plus de chances à la CNESST de régler ou d'agir?
M. Boulet : Oui, tout à fait.
Bien, augmenter le délai...
M. Derraji : Mais vous ne
pensez pas qu'on tombe... J'essaie juste de comprendre la logique. Vous ne
pensez pas qu'on ne tombe pas plus dans...
M. Boulet : Pardon?
M. Derraji : Vous ne pensez pas
qu'on tombe plus dans l'autre aspect, qu'on va se dire : Bien, écoute, on
a plus de temps, on va agir... tu sais, on va prendre notre temps et on va
finir par ne pas agir? Parce que, déjà, à 45 jours, on avait des
problèmes. Pensez-vous que l'ajout de 60 jours va vraiment diminuer la
déjudiciarisation?
M. Boulet : Bien, c'est un
excellent point, hein? Mais, en même temps, notre analyse nous a permis de
conclure que les dossiers en matière de santé et sécurité étaient passablement
évolutifs. Et, contrairement au délai de demandes de révision, le délai pour contester...
Évidemment, là, devant le tribunal, c'est une grosse audience. On donne un peu
plus de temps pour tenir compte de l'évolution du dossier puis pour permettre
une meilleure décision de contester ou non. Est-ce que l'augmentation du délai
va avoir un impact de diminuer le nombre de contestations au Tribunal
administratif du travail? Je ne serais pas en mesure de répondre, mais je
comprends votre point.
M. Derraji : Oui, mais c'est
très honnête de votre part de le dire, parce que c'est là où j'ai un malaise,
parce que, si je n'ai pas une preuve que, même en augmentant le délai, je
vais...
Des voix : ...
M. Derraji : C'est bon? Au fait,
merci pour la réponse, parce que, pour moi, c'est clair que, même en augmentant
le délai, je n'ai aucune garantie de ne pas aller alourdir mon TAT, là. Parce
que, si je ne rajoute pas des mécanismes au niveau de la révision
administrative ou des processus à l'interne de conciliation, de médiateur,
c'est sûr, ça va être «business as usual», on a plus de temps, et ça va finir
chez le TAT.
Parce que, si la volonté du législateur, c'est
exactement ce que vous avez dit au début, où je souscris à 100 %... c'est
éviter qu'on s'en va vers le TAT. Moi, je ne pense pas que votre volonté, c'est
aller au TAT ou pousser les deux parties, que ce soit employeur ou travailleur,
à aller au TAT. Je ne pense pas que... Le TAT, il est là, mais le plus que les
gens ne se rendent pas au TAT, le plus qu'on va gagner à l'intérieur.
Mais ma question : Est-ce qu'on a assez mis
de mécanismes pour ne pas se rendre au TAT? Parce que pas sûr que c'est le
délai qui va le régler. J'espère qu'on ne va pas faire fausse route.
M. Boulet :
Non, le délai, ça fait partie, mais c'est secondaire dans l'ensemble des
mécanismes, mais le délai...
Tu sais, je disais : L'évolution du
dossier, des fois, ça permet à la lésion de se consolider. Souvent, ça permet
de convaincre une personne de ne pas faire la contestation. Là où il faut
mettre le plus d'accent, c'est sur les mécanismes de résolution.
M. Derraji : Mais ils ne sont pas
là. Mais c'est quel article?
M. Boulet : Bien, les articles sur
la conciliation, je vais vous les donner, là, mais ce n'est pas dans le... Je
vais vous les donner.
M. Derraji : Mais vous comprenez
pourquoi. Parce que je peux accepter l'augmentation de délai si la volonté
derrière du législateur...
M. Boulet : Ah! tout à fait.
M.
Derraji : ...c'est donner
des mécanismes pour ne pas se rendre au TAT. Sinon, votre argumentaire, en
tout respect, au début, sur diminuer la judiciarisation, je ne le vois pas.
M. Boulet : Oui. Mon intention,
c'est clair, là, puis je suis content que vous me donniez l'opportunité de
l'exprimer, là, c'est de mettre beaucoup l'accent sur la conciliation
prédécisionnelle et les accords. Et ça, vous avez ça dans la loi sur le Tribunal
administratif du travail à l'article 21. Il y a cinq, six articles qui
concernent ça sur... Évidemment, les parties y consentent, on nomme un
conciliateur, tout le processus est prévu là, et on favorise ça énormément. Et
je vous dirais que le pourcentage de dossiers qui se règlent en conciliation
est en augmentation graduelle, mais c'est certain que c'est notre intention.
M. Derraji : O.K., excellent.
Excellent. Là, je réfléchis avec vous à haute voix. Est-ce que vous êtes ouvert
à ce que, dans cet article, une personne qui se croit lésée par une décision rendue
à la suite et après avoir épuisé tout... Bien,
en fait, parce qu'il y a un processus à... En fait, quand je le lis, quand je lis comme ça...
là, vous venez de m'expliquer, c'est très clair, mais, quand je le lis
seul... je sais que la loi, il faut la lire en entier, mais... faire référence
à la révision administrative, faire référence au processus à l'interne pour
éviter, justement, que le dossier se rende au TAT.
M. Boulet : Bien, on pourra le faire
plus tard. Moi, je n'ai pas de problème, là, faire référence à la conciliation
prédécisionnelle, mais là ça va être plus tard, là, dans les articles un peu
plus loin, juste avant d'arriver au Tribunal administratif du travail. Mais au
moins...
M. Derraji : Mais pourquoi alors
parler du délai maintenant? En fait, je tiens juste à suivre votre logique du
départ parce que vous voulez éviter... vous voulez vraiment...
M. Boulet : Bien, c'est parce que la
consultation prédécisionnelle, c'est après la contestation. La partie conteste,
et, avant d'aller en audience, avant d'aller en procès devant le tribunal
administratif, ils ont le bénéfice d'avoir un conciliateur qui les accompagne,
et c'est à ce moment-là qu'on met l'accent sur le processus de conciliation
prédécisionnelle et les accords qui sont entérinés après ça par le tribunal
administratif. Il règle... on me confirme, 50 % des dossiers sont réglés
là. C'est vraiment intéressant.
M. Derraji : Ah! tout le processus
avant...
• (15 h 10) •
M. Boulet : Conciliation prédécisionnelle.
M. Derraji : O.K., excellent.
Question piège : Là, maintenant, si on augmente le délai, est-ce qu'on va
augmenter plus de cinq ans ou ça n'a rien à voir?
M. Boulet : Non, non, ça n'a rien à
voir, véritablement.
M. Derraji : Donc, le délai n'a rien
à voir? Augmenter le délai n'a aucun impact sur tout le processus qui se fait
avant?
Des voix :
...
M. Boulet : Moi, je pense que c'est
plus pour tenir compte de l'évolution des aspects médicaux du dossier, la consolidation. Puis, avant de contester, il faut
que tu prennes une décision qui est bien réfléchie. Souvent, les
personnes vont opter pour aller directement
au tribunal administratif sans aller en révision administrative. Ça fait que ça
prend plus de temps pour analyser le
dossier, tenir compte de ces dernières évolutions et faire la contestation au
moment jugé opportun.
M. Derraji : C'est qui, le groupe
qui a demandé d'augmenter de 45 à 60? C'est qui qui recommande ça?
M. Boulet : Il n'y a pas
de recommandation du CCTM, mais est-ce qu'il y a des groupes qui ont
recommandé? Il y a en un certain nombre, de groupes, ce délai-là, qui
ont demandé. Moi, je m'en souviens d'en avoir entendu.
M. Derraji :
Non, quand je dis «groupe», je viens au CCTM, au consensus.
M. Boulet :
Oui. Je vais vous la trouver, la recommandation du CCTM là-dessus.
M. Derraji :
Oui, parce que sérieux, jusqu'à maintenant, je n'ai pas encore... Je comprends
la logique de la déjudiciarisation, mais je ne suis pas convaincu qu'en
augmentant le délai on va gagner quelque chose. Ça, c'est ma propre lecture. Si vous me dites que déjà, avec ce
que la CNESST fait maintenant, on arrive à régler 50 % des
dossiers, j'ai cru que, si on augmente le
délai, on va aller chercher un autre 20 % et donc, là, on ne s'en va pas
vers la judiciarisation des dossiers des travailleurs ou des employeurs.
M. Boulet :
Ce ne sera pas long, collègue.
M. Derraji :
Non, non, ce n'est pas grave.
M. Boulet :
Mais oui, je pense que, pris isolément, ça n'a pas d'impact majeur. Je pense
que c'est pour permettre une décision plus
réfléchie de la part de la personne qui conteste. Deuxièmement, parce que,
maintenant, il y a la possibilité d'opter entre la révision puis la
contestation au Tribunal administratif du travail et... Un instant. Et la
recommandation du CCTM, c'est la 45, les parties font la recommandation
suivante sur le délai de contestation : « Que le délai pour contester la
décisionau Tribunal administratif du travail soit de 60 jours.»
M. Derraji :
Est-ce qu'ils disent pourquoi?
M. Boulet :
Oui, avant, là.
M. Derraji :
Ou bien c'est juste une recommandation?
M. Boulet :
Oui, elle est tout expliquée, là, avant, là, mais... Je n'ai pas tout le
rapport, mais je pourrai vous le donner, là, mais c'est la recommandation 45.
Je pense que je vous ai donné globalement ce qui sous-tend la motivation du
CCTM, là, mais... Est-ce que tu as le rapport avec toi, du CCTM, Fanny?
M.
Derraji : Non, non, mais ce
n'est pas grave. Au fait, c'est juste... Le CCTM, est-ce qu'il s'est basé... Est-ce
qu'il était plus en mode, comme vous, la déjudiciarisation?
M. Boulet :
Ah! tout à fait. Ah! tout à fait. Il demandait même qu'on annule complètement
la révision administrative. Donc, il allait même un peu plus loin.
M. Derraji :
Annuler la révision administrative? Dans quel sens? C'est qui qui l'a demandé?
M. Boulet :
Éliminer cette étape-là.
M. Derraji :
O.K., éliminer complètement la conciliation entre les deux...
M. Boulet :
Oui. Il éliminait complètement l'étape de la révision.
M. Derraji :
Ça veut dire : On passe directement au TAT?
M. Boulet :
Pardon?
M. Derraji :
Et on passe directement au tribunal?
M. Boulet :
Oui, exact. Ah! puis on trouvait... Bien, c'est ça.
M. Derraji :
Est-ce que ça, notre collègue d'Hochelaga l'a entendu?
M. Boulet :
Oui, oui, il l'a entendu. Il connaît même mon esprit positif à l'égard de ce
scénario-là. Mais, après avoir analysé, avec les légistes, la Loi sur la
justice administrative, là, on avait une problématique, là, parce qu'en justice
administrative, quand les droits des administrés sont affectés, il est prévu
que la personne puisse bénéficier d'un processus de révision pour rajouter des
observations, donner des commentaires, éviter qu'il y ait des éléments qui se
soient échappés en révision, et c'est la raison pour laquelle on a opté pour le
choix.
Donc, tu choisis
toi-même, là, tu décides. Si tu contestes, tu vas directement au TAT ou tu vas
en révision administrative pour les matières médicales et de financement. Et
c'est un excellent compromis qu'on a partagé notamment avec le CCTM puis...
M.
Derraji : Et le délai du TAT, c'est de combien?
M. Boulet :
Le délai du TAT, c'est 60...
M. Derraji :
Une fois...
M. Boulet :
...bien, c'est 45, il passerait à 60 jours.
M. Derraji :
À 60 jours. C'est bon. Merci.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : C'est bien? Y a-t-il d'autres interventions sur l'article 108?
Député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc :
Merci, Mme la Présidente. Il y a toute une section originale de l'articl 359
de la LATMP qu'on modifie, là, à travers le 108 du projet de loi, plus vers la
fin, là, et ça... de la façon que je le lis, on dirait que c'est ça qui est
remplacé par le nouveau paragraphe qui introduit notamment le 90 jours
puis la possibilité d'aller directement au TAT, là, si ce n'est pas respecté.
Puis je ne le lirai pas au complet, là, mais ça fait référence à «sont
instruites et décidées d'urgence», puis là il y a des exemples, «sont
instruites et décidées en priorité», puis il y a des exemples. Je veux juste
comprendre pourquoi on efface cette section-là de l'article original.
Des
voix : ...
M.
Leduc : Bien, je peux
peut-être le lire pour qu'on comprenne, là. Donc, dans l'article original de
359, il y a une section qui se lit comme suit à la fin, qui, je
l'assume, là, est effacée :
«Sont instruites et
décidées d'urgence :
«1° la contestation
visée au deuxième alinéa;
«2° la contestation
formée en vertu du présent article portant sur la réduction ou la suspension
d'une indemnité établie en vertu du sous-paragraphe e du
paragraphe 2° de l'article 142.
«Sont instruites et
décidées en priorité :
«1° la contestation
formée en vertu du présent article portant sur l'existence d'une lésion
professionnelle autre qu'une récidive,
rechute ou aggravation, ou sur le fait qu'une personne est un travailleur ou
est considérée comme un travailleur;
«2°
la contestation formée en vertu du présent article portant sur la date ou la
période prévisible de consolidation de la lésion professionnelle du
travailleur, ou l'existence ou l'évaluation des limitations fonctionnelles de
celui-ci.»
Et finalement :
«La décision concernant une contestation visée au quatrième alinéa doit être
rendue dans les 90 jours qui suivent le dépôt de [l'article] introductif
et dans les 60 jours de la prise en délibéré de l'affaire.»
Des
voix : ...
M. Boulet :
Je vais le vérifier, collègue. Est-ce que c'est un oubli ou une... C'est une
coquille. Donc, ce n'est pas enlevé, là. Ça demeure tel quel, et c'est ce que
j'anticipais, là, mais je voulais vérifier si ce n'était pas un aspect de
concordance. Mais vous faites très bien de le soulever, là, c'est vraiment une
coquille.
M. Leduc :
Donc, il faudrait réécrire l'article, si je comprends bien?
M. Boulet :
Et les seuls changements à 359, c'est ce qui est exprimé dans 108, de 45 à 60,
puis après ça le deuxième paragraphe.
M. Leduc :
Je comprends. Donc, on n'a pas besoin de réécrire l'article, c'est
l'explication à côté qui est incomplète. C'est ça? C'est l'article, tel que
modifié, qui est incomplet? D'accord, d'accord. Alors, insertion... D'accord. Alors, ça reste là. Mais là ça veut dire
qu'on fait deux fois des références aux 90 jours dans votre nouvel
article puis dans l'article original. Est-ce que c'est... Est-ce qu'on parle
bien du même 90 jours dans les deux endroits?
M. Boulet :
Mais non, je fais juste reprendre ce que je viens de mentionner. Les seuls
changements, c'est 45 à 60 puis l'ajout après le deuxième alinéa, mais le reste
de l'article 359, le libellé demeure exactement le même. Puis c'est
simplement une coquille dans le document qui vous a été transmis. Dans la
deuxième colonne, là, quand vous référez à, notamment, «sont instruites et
décidées en priorité», il n'y a pas de changement. Ça demeure là.
M. Leduc :
Mais il va peut-être falloir de la réécriture pareil, parce qu'à la fin de
cette section-là c'est écrit : «La décision concernant une contestation
visée au quatrième alinéa». Mais est-ce que ce quatrième alinéa est encore le
quatrième, si on en a rajouté un?
M.
Boulet : Bien, je présume
que oui, là, mais on va s'en assurer. Mais le texte demeure tel quel, là. Puis
est-ce qu'avec les changements ça modifie quatrième pour cinquième, je
ne suis pas capable de répondre à ça, là. Si c'est le cas, c'est parce c'est
qu'une coquille.
M.
Leduc : Non, je comprends. Tant mieux si on l'a soulevé, puis on
pourra peut-être la modifier avant la fin de la discussion, mais dans... Ça,
c'est sur la forme.
Sur le fond,
maintenant, le dernier, dernier paragraphe, là, quand on dit, justement :
«La décision concernant une contestation visée au quatrième alinéa doit être
rendue dans les 90 jours qui suivent le dépôt», là, je parle de l'article
original qui n'est pas nécessairement changé... en fait, qui n'est pas changé
par votre article de projet de loi, mais on fait référence ici à un
90 jours. Est-ce que c'est le même 90 jours que celui que vous
introduisez?
M. Boulet :
Non, bien non, parce que le 90 jours auquel on fait référence, c'est en
rapport avec une décision de la révision administrative, alors qu'ici ça fait
référence à... une «décision concernant une contestation visée au quatrième
alinéa doit être rendue dans les 90 jours du dépôt de l'acte introductif
et dans les 60 jours de la prise en délibéré de l'affaire». Non, ce n'est
pas la même affaire.
• (15 h 20) •
M.
Leduc : Ah oui! d'accord.
Parce que, là, on ne parle plus de la révision, on parle de la contestation du
tribunal.
M. Boulet :
Exact, exact.
M. Leduc :
Là, on est dans le morceau tribunal.
M. Boulet :
Tout à fait, tout à fait.
M.
Leduc : D'accord, d'accord.
Puis vous avez bien fait de me rappeler à l'ordre tantôt, contestation,
révision, ce n'est pas la même chose. Alors,
on ne parle plus du tout de révision, c'est bon. Alors, ce n'est pas la même
chose. Parfait.
C'était quoi, l'autre
question que j'avais sur le... Quand vous avez dit tantôt : Le 68 %,
au-delà du 90 jours, est-ce que cette... C'est pour faire un lien avec la
discussion précédente. Est-ce que le 90 jours, lui... Il sort d'où, ce
chiffre-là? Est-ce que c'est encore une logique de concordance ou de cohérence
avec le reste du corpus législatif? Pourquoi pas 60? Pourquoi pas... Ça aurait
pu être 60, en théorie, si tantôt on disait que c'était...
M.
Boulet : Non, mais... puis là c'est ma connaissance à moi, là,
90 jours, c'est un délai qui est jugé raisonnable, là, dans le corpus législatif, pour rendre une décision, je le rappelle, qui est purement
de révision administrative. J'ai demandé de vérifier si le CCTM avait une recommandation ou un avis à ce
sujet-là, mais pas à mon souvenir. Mais peut-être, là, puis je le
vérifie, mais 90 jours, c'est un délai qui est raisonnable. Il faut que ce
soit rendu dans les meilleurs délais possible. Évidemment, ça peut être
42 jours ou 64, mais, si ce n'est pas rendu au moins dans ce délai-là, tu
peux aller au tribunal administratif...
M. Leduc :
On s'entend.
M. Boulet :
...ce qui est un avantage avec lequel vous devriez être relativement
confortable.
M. Leduc :
Oh oui! Puis je l'ai déjà mentionné précédemment. Mais, si votre objectif...
c'est-à-dire, non, je me répète... je
recommence. Si votre idée initiale était d'aller... de ne plus avoir la
Direction de la révision administrative, vous avez décidé de la garder
pour des motifs de justice naturelle ou, en tout cas, de reconnaissance de
certains principes de justice de base, mais
est-ce que ça n'aurait pas été possible de jumeler ça avec un objectif de
déjudiciarisation et justement d'envisager un délai plus court pour
dire «chop, chop»?
M. Boulet :
Bien, ça n'existait pas, ce délai-là. Puis je pense que ça vise deux objectifs
en même temps, un objectif de célérité pour la reddition de la décision du
réviseur administratif et, deuxièmement, un objectif de déjudiciarisation parce
que ça permet à la personne qui n'a pas la célérité attendue, c'est-à-dire
90 jours, d'aller directement au tribunal administratif et donc de ne pas
tenir compte de l'étape de la révision administrative.
M. Leduc :
Mais justement est-ce qu'un 60 jours... s'entendre qu'en théorie,
60 jours, ça accélérerait les...
M. Boulet :
Bien, si 68 % des décisions sont rendues au-delà de 90 jours, on ne
peut pas diminuer ce délai-là. Comme je vous mentionnais un peu plus
tôt, on va s'assurer que les réviseurs bénéficient de tous les outils
informatiques les plus performants et les plus modernes, ça fait qu'on va
s'assurer de diminuer considérablement ce pourcentage-là. Ça fait qu'il ne faut
pas, à mon avis, diminuer ce 90 jours là.
M. Leduc :
Oui, O.K., je comprends. Mais, en même temps, on aurait pu se dire :
Allons...
Des voix :
...
M. Leduc :
On aurait pu se dire : Allons... Donnons un vrai coup de barre, là. Déjà
que je reconnais que le 90 jours est en soi,
déjà, un certain coup de barre, mais on aurait pu se dire : On va vraiment
plus loin puis là on met toute la
gomme. Et, de toute façon, à peu près unanimement, tout le monde dit que la
révision ne sert pas à grand-chose, 95 % des décisions sont confirmées, toutes les parties
patronales, syndicales veulent faire sauter ça. 60 jours, ça aurait pu,
comme, être un méchant signal.
M.
Boulet : Ah! tout à fait, mais c'eut été, à mon avis, trop rude, trop
brutal. 90 jours, quand je dis 68 %, c'est au-delà de ça. Puis il n'y
a pas de recommandation du CCTM, mais c'est un compromis pour éviter
l'abolition complète, purement et simplement, de la Direction de la révision
administrative.
Mais, vous avez
raison, on aurait pu aller à 60, on aurait pu aller à 120. Puis, à 120, il y
aurait probablement un pourcentage pas mal plus bas de décisions qui ne
respectent pas ce délai-là. Je pense qu'on a trouvé, encore une fois, un bon
équilibre.
M. Leduc :
Et ce que je comprends, c'est qu'on n'aurait pas pu aller à 45.
M. Boulet :
Bien, aller à 45... Non, mais l'autre incidence que vous ne devez pas ignorer,
il ne faut non plus engorger le TAT, là. L'autre problème qu'on va avoir,
collègue, si c'est trop bas, c'est qu'il va y avoir plus de contestations
potentielles au TAT, puis ça va engorger le TAT, ça va augmenter les délais. Je
pense qu'on a trouvé un compromis qui fait l'affaire des acteurs du marché de
la santé et sécurité du travail.
M. Leduc :
Qui vivra verra, mais, en effet, c'est mieux que l'état actuel des choses, ça,
c'est certain.
Vous me dites,
justement : Est-ce que ça va... Il faut trouver un équilibre pour ne pas
engorger le TAT. Moi, ça me semble aller de soi que quelqu'un qui demande une
révision a son oeil fixé sur le TAT, là. Là-dessus, est-ce qu'il existe des chiffres sur un nombre de
personnes qui demandent une révision qui ne vont pas au TAT après? Est-ce
que c'est une minorité? Une majorité? Il y en a quelques-uns? Parce qu'encore
une fois, si l'écrasante majorité, une fois la décision rendue de révision,
s'en va au TAT, bien...
M.
Boulet : Le chiffre que
j'ai, le total, c'est 58 % des
décisions qui sont contestées au Tribunal administratif du travail.
Donc, c'est quand même un pourcentage important, là.
M. Leduc :
Alors, 58 % des décisions...
M. Boulet :
58,5 %, oui.
M. Leduc :
...qui ont fait l'objet d'une révision... ou de l'ensemble des décisions?
M. Boulet :
Bien, forcément. Là, actuellement...
M. Leduc :
Des décisions, oui. Excusez. Oui, oui...
M. Boulet :
Absolument. Vous connaissez la réponse, collègue.
M. Leduc :
Oui, c'est bon, c'est bon. Excusez. Donc, une très forte majorité.
M. Boulet : Bien, 58,5 %, c'est une majorité. Est-ce que c'est une très forte?
Quand il y a un vote à une assemblée...
M. Leduc :
On aurait un pays à 58 %, M. le ministre.
M. Boulet :
Pardon?
M. Leduc :
On aurait un pays à 58 %.
M. Boulet :
Est-ce que vous parlez au collègue de Nelligan ou moi?
M. Leduc :
...c'est pour ça que je la trouve assez forte, moi, la majorité.
Mais, blague à part,
58 %, je trouve ça assez fort. Ça ne me surprend pas, parce que ça veut
dire que les gens, ils décident d'y aller jusqu'au bout. Et c'est probablement
ce genre de chiffre-là qui a mené le CCTM à se dire : Bien, coudon, on
saute l'étape.
M. Boulet :
Mais, en même temps, elle a une certaine utilité parce qu'il y a à peu près 30 000 dossiers
qui se finissent à la révision administrative. Ça fait que, tu sais, je pense
qu'on est dans une belle avenue, disons. Je pense que c'est un beau compromis,
ce qu'on fait, puis ça va nous permettre, comme on le disait tout à l'heure,
d'évaluer au fur et à mesure. Je pense qu'on
déjudiciarise passablement, on accélère le processus, puis moi, je suis
extrêmement confiant que ça va nous permettre de rencontrer nos objectifs, là,
en matière de recours et procédures.
M. Leduc :
Et là la proposition que vous nous faites, qui est intéressante, là, le
90 jours, est-ce que, dans votre analyse et celle de votre ministère, elle
va faire monter ou baisser ce chiffre de 58 %?
Des
voix : ...
M.
Boulet : Ça peut baisser parce qu'ils peuvent aller directement au
tribunal administratif plutôt qu'en révision
administrative. Puis il y en a un certain pourcentage, de révisions
administratives, qui ne vont pas au Tribunal administratif du travail,
mais c'est difficile à évaluer. On va le voir, je pense, au fur et à mesure de
l'application.
Je pense, comme le
collègue de Nelligan le suggérait, c'est qu'il va falloir continuer de mettre
beaucoup l'accent sur la conciliation prédécisionnelle, et, sur les accords qui
sont entérinés par le Tribunal administratif du travail, il y en a déjà 50 % qui se règlent là. Ça fait qu'il y en
a quand même un certain nombre, puis on peut faire beaucoup
d'hypothèses, là, mais un certain nombre qui vont passer à côté de la révision
administrative, ils vont décider d'aller au TAT puis ils vont régler en
conciliation.
Quelqu'un qui a une
volonté... Puis je pense qu'il va falloir faire de la pédagogie, puis on pourra
le faire en équipe, là. Tu sais, quand on parle de déjudiciarisation, ça
implique sensibiliser et promotionner aux alternatives de résolution de litiges
et le dire que ça existe, le dire qu'on a des personnes qui sont bonnes puis
que nos pourcentages de règlements préaudiences sont en augmentation. Il faut
le favoriser.
Puis je sais que,
dans des environnements de travail, puis vous en connaissez aussi, il y a une
culture de conciliation prédécisionnelle où on va aller... où la partie
contestante, que ce soit le travailleur ou l'employeur, ils vont développer
cette approche-là : Allons directement au TAT, au Tribunal administratif
du travail — excusez
les acronymes — et
ils vont bénéficier des services d'un conciliateur, et donc ça va être... Moi,
je trouve, c'est une... en tout cas, encore une fois, c'est de la prospective,
là, mais je pense que ça va aller dans cette direction-là.
• (15 h 30) •
M. Leduc :
C'est intéressant. Moi, j'en ai fait un peu, de conciliation, plus en normes du
travail, mais je veux juste mettre un petit bémol sur la conciliation. Ce n'est
pas une mauvaise chose en soi, mais j'en ai vu, des gens, aller dans la
conciliation, que j'ai accompagnés, puis se sentir... comment je dirais ça,
bien hésitants d'aller au bout, comme si le
fait d'aller, finalement, plaider sa cause était en soi un affront. Puis cette
étape de... vous savez à quel point ça peut être stressant pour
quelqu'un qui ne connaît pas le milieu judiciaire, cette idée-là de la
conciliation obligatoire. Souvent, elle est obligatoire, hein? Cette
notion-là d'obligation de la conciliation avait quand même un effet psychologique
non négligeable auprès des salariés en général, qui n'avaient pas
nécessairement une expérience ou un
historique de contestation ou de vie judiciaire. Ça fait que moi, c'est le
petit bémol que je mets sur la conciliation.
Loin
de moi l'idée de vouloir jeter ça aux poubelles, ça a certainement ses effets,
mais, souvent, il y a comme un caractère
obligatoire ou semi-obligatoire, puis c'est là que je trouve que, des fois, on
peut être sur la ligne quant à l'efficacité de la mesure puis...
c'est-à-dire, est-elle efficace ou est-ce qu'on est en train, des fois,
pardonnez-moi l'expression, mais de la rentrer dans la gorge de force, la
conciliation, auprès de certaines personnes qui ne voudraient pas la faire?
M. Boulet :
Mais, collègue, vous le savez bien, puis c'est prévu dans la loi sur le Tribunal
administratif du travail, il faut que les deux parties y consentent. On ne peut
pas concilier à la demande d'une partie, ça prend... «it takes two to tango»,
puis c'est «it takes two» pour réussir une conciliation, pour embarquer dans un
processus de recherche de solution. Ça fait que c'est hyperimportant.
Juste avant que je
l'oublie, on va soumettre un amendement sur le dernier paragraphe. C'est
«cinquième alinéa» plutôt que «quatrième alinéa», donc ça va être corrigé. Cest
une coquille puis c'est un oubli.
M. Leduc :
On peut le faire tout de suite, là, il n'y a pas de problème.
M. Boulet :
Oui, ce sera fait et envoyé.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : ...
M. Leduc :
O.K., c'est bon. Excusez, j'avais mal compris.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Mais ce n'est pas fait, là, c'est ça?
M. Boulet :
Ça va être envoyé sous peu, là.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : On le prépare, M. le ministre?
M.
Boulet : Oui, on va le
préparer, puis on va le transmettre, puis, après ça, on pourra... On peut peut-être ajourner.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Parfait, mais on va continuer l'échange. Je pense qu'on
n'a pas besoin de suspendre, à moins que vous vouliez suspendre, M. le
ministre. Non, on continue l'échange?
M. Boulet :
On peut peut-être continuer un petit peu, là, mais... Oui, allons-y.
M. Leduc :
Moi, j'avais peut-être une suggestion d'amendement. Ça fait que, peut-être, si
on suspendait, je pourrais en parler au ministre pendant que...
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Est-ce que ça vous convient comme ça? Parfait.
M. Leduc :
Tant qu'à utiliser le temps, là, utilisons-le efficacement.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
D'accord. Alors, nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 33)
(Reprise à 15 h 46)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, M. le ministre.
M. Boulet : Merci.
Article 108 :
Ajouter, à la fin de l'article 108 du
projet de loi, le paragraphe suivant :
3° par le remplacement, dans le dernier alinéa,
de «quatrième» par «cinquième». Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Donc, l'amendement déposé par le ministre... y a-t-il des interventions
sur l'amendement? S'il n'y a pas d'intervention, nous allons procéder à la mise
aux voix.
La Secrétaire : M. Boulet
(Trois-Rivières)?
M. Boulet : Pour.
La
Secrétaire : Pour les
membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, Mme Boutin (Jean-Talon)?
Mme Boutin : Pour.
La Secrétaire : Pour les
membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?
M. Derraji : Pour.
La Secrétaire : M. Leduc
(Hochelaga-Maisonneuve)?
M. Leduc : Pour.
La Secrétaire : Et Mme IsaBelle
(Huntingdon)?
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Abstention. Donc, l'amendement déposé à l'article 108 est adopté.
Nous poursuivons cette fois avec un autre amendement,
qui n'a pas encore été reçu, qu'on me dit. Non? Il a bien été acheminé? Alors,
nous serons obligés de suspendre, dans ce cas-là. Toujours pas reçu?
Une voix : ...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
D'accord. Alors, nous allons suspendre, dans ce cas-là.
(Suspension de la séance à 15 h 47)
(Reprise à 15 h 48)
La
Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, nous avons reçu un amendement de la part du député d'Hochelaga-Maisonneuve. Je vous invite à
nous le lire, s'il vous plaît, et à l'expliquer.
M. Leduc : Bien sûr. Merci, Mme la
Présidente. Article 108 :
À l'article 108 du projet de loi, remplacer
le paragraphe 2° par le suivant :
«Si la commission n'a pas disposé de la demande
de révision dans les 90 jours suivant sa réception, la personne qui a
demandé la révision est réputée avoir valablement contesté la décision faisant
l'objet de la demande de révision devant le tribunal.
«Dans ce cas, la commission défère immédiatement
l'affaire au tribunal pour qu'il en dispose comme si la personne ayant demandé
la révision avait introduit une contestation auprès du tribunal.»
La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui,
M. le ministre.
M. Boulet :
Bien, écoutez, mon commentaire sera simple. On transforme une faculté, on
transforme un choix en impératif, en obligation. Moi, ça m'apparaît ne pas
respecter la volonté de la partie qui conteste. Si la décision n'est pas rendue dans les
90 jours, la personne peut aller au TAT, mais la personne peut décider
d'attendre la décision de la révision administrative.
Donc, moi, dans une
loi, quand on veut transformer une faculté en obligation, il faut véritablement
qu'il y ait une saine motivation, que je ne décèle pas. Merci.
• (15 h 50) •
M. Leduc :
L'obligation que vous voyez, M. le ministre... moi, ce que je vois plutôt,
c'est un trait d'union qui va accélérer le processus complet. Parce que ce qui
peut se passer et ce qui se passe souvent, c'est qu'entre la décision de la révision administrative et
l'éventuelle contestation il peut se passer plusieurs semaines, plusieurs mois,
soit parce que la personne n'a pas pris conscience de ce qui se passe soit
parce que... il y a toutes sortes d'autres raisons.
Et on le sait que le
problème de la surjudiciarisation, il est à deux niveaux. Essentiellement, il
est au niveau des multiples étapes : la DRA, le BEM, le TAT. Et on est
désolés pour les acronymes, mais, en tout cas, on peut prendre pour acquis que
les gens qui nous écoutent sont intéressés par le sujet de la santé-sécurité,
donc connaissent ces trois acronymes-là. Donc, il y a cet enjeu-là des
différentes étapes qui sont lourdes. On aurait aimé ça en faire sauter deux,
c'est-à-dire la DRA puis le BEM. Malheureusement, ce n'est pas dans le projet
de loi, ni un ni l'autre. Mais l'autre problème, c'est le délai au total. Plus
il y a des étapes, plus il y a nécessairement un délai, mais plus on laisse courir des espèces de zones grises entre
chacune de ces étapes-là, plus on étire, presque artificiellement, un
processus.
Quand
on le sait, là... puis M. le ministre l'a dit tantôt, la grosse majorité des
décisions de révision administrative sont apportées au TAT. Ce n'est pas
très surprenant, c'est parce que les décisions, à 95 % du temps, ne font
que confirmer la décision initiale. Alors, sachant cela, sachant que c'est le
cas de la grosse majorité qui vont aller au TAT de toute manière, bien,
pourquoi on n'accélère pas la procédure entre les deux en envoyant ça
automatiquement, «chop-chop», en bon français?
M.
Boulet : Non, mais c'est parce que,
comme je l'expliquais tout à l'heure, actuellement, 68 %
des décisions ne sont pas rendues
dans le délai de 90 jours. Imaginez, si on... Puis c'est sûr qu'on va
renforcer les outils informatiques. Le but,
c'est de réduire le délai moyen, mais demain matin, ça aurait un impact tout à
fait opposé parce que ça engorgerait le Tribunal administratif du
travail, ça augmenterait les délais et ça judiciariserait encore plus, alors
que, là, on se dit : Vous avez la possibilité, c'est une faculté.
Une faculté, c'est
pouvoir choisir, pouvoir décider. Qu'on soit un employeur ou un salarié, on
décide d'aller à la révision administrative ou on décide d'aller au TAT — ça,
on va le voir plus tard — au
Tribunal administratif du travail. On met une barrière additionnelle, on
dit : Si la décision n'est pas rendue dans les 90 jours, tu peux déjà
exercer ton option. Tu peux, au départ, là, dans certaines matières, mais ici,
tu peux. Si ce n'est pas rendu, tu décides. Puis, pour contester, on ne peut
pas. La commission ne peut pas déférer ça au Tribunal administratif du travail,
ça prend... le tribunal administratif, c'est un tribunal qui est indépendant,
comme vous le savez. Ça fait que ce n'est pas nous qui allons déférer ça, il faut
que la partie décide elle-même.
Et moi, je le répète,
dans une matière de cette nature-là, il faut laisser le choix à la partie qui
conteste d'utiliser le véhicule qu'elle
considère le plus approprié. Puis il y a plusieurs employeurs et travailleurs qui
ne veulent pas aller devant le TAT, avec toutes les règles de procédure.
C'est un vrai procès, il y a des témoins, il y a des experts qui sont entendus,
il y a des conseillers, il y a des avocats qui plaident des décisions de
jurisprudence. Moi, je ne voudrais pas. Moi, personnellement, là, on me
dirait : Tu es obligé, si ce n'est pas rendu dans les 90 jours...
donc, mon sort dépend du respect, par un réviseur administratif de la CNESST,
d'un délai qui est dans la loi. Non, moi, j'aimerais conserver ma faculté puis
je pense que, si on faisait un sondage, la vaste majorité... D'ailleurs, c'est
un compromis du CCTM, qui souhaiterait que ce soit une faculté, pas une
obligation puis pas que systématiquement on réfère ça au Tribunal administratif
du travail. Je pense qu'on n'atteint pas notre objectif. Merci.
M. Leduc :
Bien, une chose qui est très, très claire pour moi, c'est que personne ne
pourra jamais vous obliger à aller plaider. C'est une chose, de déférer le
dossier immédiatement au tribunal, c'en est une tout autre de se présenter puis
de plaider son dossier. N'importe quand, dans cette idée-là de déférer
immédiatement l'affaire au tribunal, un des deux procureurs peut dire :
Oh! Savez-vous quoi? Ça me tente moyen d'y aller, puis là, bien, voilà,
l'affaire tombe. Ce n'est pas plus compliqué que ça, sauf qu'on n'aura pas
perdu de temps dans cette espèce d'imbroglio de délai entre le moment où la
décision est rendue... la révision est rendue et le moment qu'on appelle au
tribunal. On n'aura pas perdu de temps, pour toutes sortes de bonnes ou de
mauvaises raisons. Ce n'est pas moi ici...
M. Boulet :
Non, vous autres, vous dites : Si ce n'est pas rendu dans les
90 jours, ça s'en va au TAT, puis la révision administrative, c'est fini.
Il n'y a pas de décision... Tu ne peux pas contester automatiquement puis maintenir
active une demande de révision à la Direction de la révision administrative, ça
ne peut pas marcher. Tu ne peux pas contester une décision qui n'a pas été
rendue en révision administrative. Il y a une impasse dans votre amendement. Ça
ne m'apparaît pas réalisable, ce n'est pas pratique.
M. Leduc :
Ce n'est pas exactement ce que vous proposez dans votre amendement?
M. Boulet :
Non, on dit que, si ce n'est pas rendu, tu peux contester devant le tribunal,
tu peux décider de passer outre. Là, vous, vous dites automatiquement... Donc,
on tasse la révision administrative dans tous les cas, puis tous les cas sont
référés directement au Tribunal administratif du travail.
M.
Leduc : O.K., là, il y a confusion totale, parce que moi, ce que
j'avais compris dans votre proposition, c'est qu'après le 90 jours on peut
aller au TAT, mais, si on décide d'y aller, il n'y a plus de révision
administrative.
M. Boulet :
Bien non, évidemment, mais c'est un choix que tu fais.
M. Leduc :
Bien, c'est la même chose que je fais ici.
M.
Boulet : Non, toi, tu l'obliges... vous — excusez-moi — vous, vous l'obligez. Donc, vous
dites : Si ce n'est pas le 90
jours, ciao, bye, plus de révision administrative, tu n'as plus le choix. Donc,
si on faisait cet amendement-là, moi, l'administré,
je n'ai plus le choix, bien, je serais en fusil après le législateur. Ça ne
marche pas. Puis, en plus, je serais inscrit au rôle, puis, comme il y
aurait probablement un «backlog», un inventaire qui deviendrait de plus en plus
important, peut-être qu'il y en a qui se désisteraient au TAT puis qui se
retrouvent le bec à l'eau.
Je vous le dis, là,
par respect pour les travailleurs et les employeurs, ne faisons pas ça. Je
pense qu'on a un beau compromis, on ne peut pas obliger le monde à... L'option,
la faculté ou le choix, c'est toujours la meilleure avenue. Puis vous êtes un
conseiller, puis je suis convaincu que vous conseilleriez à vos clients,
collègue, à l'époque où vous pratiquiez... On va voir, là, tu sais. On va
appeler à la CNESST : Est-ce qu'on peut avoir un délai approximatif? Avec
les outils informatiques, est-ce qu'on peut anticiper un délai plus rapide?
Puis il y a des clients qui vous diraient, collègue : Moi, je ne veux rien
savoir du TAT, peu importe le délai, je n'irais pas au Tribunal administratif
du travail, avec toutes les conséquences que ça engendre, les coûts, la
préparation des témoins, obtenir les rapports d'expertise, les recherches en
jurisprudence. Moi, honnêtement, là, je suis foncièrement inconfortable avec
ça.
M. Leduc :
Moi, là, il y a quelque chose que je veux vraiment bien, bien clarifier, puis
ça touche autant mon amendement que le vôtre. Dans les deux scénarios, on
dit : 90 jours, on passe à l'autre étape. Moi, je dis : On passe
automatiquement. Vous, vous dites : On peut passer. Là, on a un débat là-dessus,
là.
M. Boulet :
Mais c'est la partie qui mène son dossier, qui mène la contestation qui décide.
M. Leduc : D'accord. On a un débat là-dessus, c'est correct, mais
là je veux juste mettre une parenthèse sur ce débat-là puis bien comprendre l'ossature de votre proposition, sur laquelle on se base, nous, pour faire un sous-amendement. Vous, là, dans votre
vision de la chose, après le 90 jours, quand on peut aller immédiatement
au TAT, qu'est-ce qui se passe avec la décision qui n'a pas été... la décision
de révision qui n'a pas été rendue?
M. Boulet :
Ah mon Dieu! Bien, la partie décide de mettre la révision administrative de
côté puis de faire une contestation de la décision initiale de la CNESST
directement au Tribunal administratif du travail.
M. Leduc :
Oui, mais, quand vous dites «de côté», c'est la mettre aux poubelles? Ça veut
dire qu'il n'y en aura pas?
M. Boulet :
Il n'y en aura pas. La partie, à partir du moment où elle soumet une demande de
contestation selon les règles de preuve et de procédure au Tribunal
administratif du travail, ça met de côté le...
M. Leduc :
Ça dispose de la non-décision.
M. Boulet :
Oui, tout à fait, parce que tu ne peux pas faire les deux parallèlement.
M. Leduc :
Je comprends, mais c'est ça qui n'était pas clair. Puis là...
M. Boulet :
Ah! bien, moi, pour moi, c'est... O.K., mais je comprends.
M. Leduc :
Ça fait que ça, c'est clair pour vous...
M. Boulet :
Oui, tout à fait.
M. Leduc :
...que, dans ce scénario-là, 90 jours, pour toutes sortes de raisons, ça
n'a pas été possible de rendre une décision à la CNESST sur ma révision, moi,
je voulais aller au TAT de toute façon, je pèse sur le piton, on part au TAT,
et ça dispose, il n'y aura donc jamais de révision.
M. Boulet :
Exact. Puis il y a une multitude de choix. Il y a celui qui dit : Moi, je
voulais aller au TAT, puis je pouvais même y aller au départ, puis j'aurais...
Tu sais, il y a des personnes qui ne feront pas de demande de révision, il y en
a d'autres qui vont en faire, il y en a d'autres qui vont, après 90 jours,
dire : Moi, je m'en vais directement au TAT, il y en a qui vont
dire : Je continue, il y en a d'autres... tu sais, il va y avoir une
multitude, mais, au moins, on va emprunter l'avenue qui est la plus conséquente
avec les aspirations de la partie contestante.
M. Leduc :
O.K. Là, Mme la Présidente, cette compréhension-là, ce n'est pas celle que
j'avais de ça. Ça fait que ça influence peut-être un peu mon amendement. Je
vais prendre... temps de suspension pour consulter mon collègue, pour voir si
on le laisse tel quel ou si on doit le modifier en vertu de ce que je viens de
comprendre.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Alors, nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 heures)
(Reprise à 16 h 07)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, je comprends que, député d'Hochelaga-Maisonneuve, vous voulez... vous
avez encore des questions.
M. Leduc : Oui. Merci, Mme la
Présidente. J'aimerais comprendre quel mécanisme va être mis en place pour faire le lien entre le tribunal... le TAT et
la CNESST pour appliquer ce que le ministre dit, à savoir qu'à partir du
moment qu'on déclenche la procédure, soit celle du ministre ou soit celle que
je propose, là, qu'à partir du moment qu'on déclenche la procédure post
90 jours le sujet est mort, à la révision, elle est comme nulle et non
avenue.
Comment ça va
fonctionner? Est-ce qu'il y a comme une espèce de réponse automatique, que, dès
que quelqu'un fait une demande de contestation au TAT, un courriel est
envoyé automatiquement à la CNESST l'informant que x dossier est maintenant
devant le TAT? Comment ça va fonctionner?
M.
Boulet : C'est une bonne question.
À partir du moment où la personne décide de soumettre une contestation...
parce que tu peux, là, comme tu peux faire une demande de révision, tu peux
faire bien des choses, dans la loi, là, ici, tu peux contester, le délai de
90 jours n'a pas été respecté... On va former, dès l'entrée en vigueur de
la loi, un comité paritaire, le TAT et la
CNESST, pour s'assurer que l'information soit bien transmise à la CNESST. Et, dès
production de la contestation, elle va être transmise à la CNESST et ça va
mettre fin au processus de révision administrative, là. Ça fait que c'est comme
ça que ça va fonctionner et ça va être par une simple procédure administrative
comme ça.
M. Leduc : Mais donc un courriel, un
logiciel informatique?
M. Boulet : Non, mais il va y avoir
un canal de communication, il va y avoir des personnes du TAT qui vont former un comité conjoint — j'ai dit paritaire, là, mais conjoint — et ils vont trouver le meilleur véhicule
d'information pour transmettre à la CNESST, pour que le TAT, le Tribunal
administratif du travail, transmette à la CNESST les contestations pour
permettre à la CNESST de mettre fin au processus de révision administrative.
• (16 h 10) •
M. Leduc : Parce qu'avec des
milliers et des milliers de dossiers on peut perdre le contrôle assez vite, là,
s'il n'y a pas une excellente connexion entre les deux, là.
M. Boulet : Non, avec les outils
informatiques appropriés, je n'ai aucune appréhension. Puis, tu sais, tu ne peux pas perdre rien, là. L'important, c'est
d'informer : Monsieur X contre la compagnie Y, demande de
contestation, ça fait qu'on met fin à la révision administrative. Ça peut être
très, très simple.
M. Leduc : Je comprends que c'est
l'intention du législateur, l'intention du ministre de faire ça, c'est-à-dire
que la révision est réputée nulle si l'exercice du droit à la contestation, là,
est fait, mais, je veux dire, ce n'est écrit nulle part, là, dans la loi, là.
On ne peut certainement pas dire que c'est clair et limpide, avec le texte qui
est devant nous, d'où mon incompréhension
puis ma surprise, là, à ce que vous avez mentionné ça tantôt. Il y aurait
certainement lieu de l'écrire, parce que je trouve que, là, on est rendu
ailleurs que l'interprétation de l'orientation d'un ministre, là. Si on dit
qu'une décision de révision est nulle, si le droit est exercé, ce n'est pas du
tout, du tout précisé ou implicite avec le texte qui est devant moi, là.
M. Boulet : Pour moi, c'est... Ceci
dit, là, avec respect, là, je comprends votre incompréhension, mais, si tu
décides de contester, tu ne peux pas faire les deux. Puis, si tu décides de
contester devant le Tribunal administratif, si la commission n'a pas disposé de
la demande de révision dans les 90 jours, c'est qu'il va y avoir un canal
de communication entre le tribunal et la
commission pour s'assurer qu'on mette fin au processus de révision
administrative. Ça, ça va se faire. À mon avis, c'est un processus
administratif, là, c'est important de le... Puis, en droit, puis votre collègue
pourra vous le dire, dès qu'un tribunal a la saisie de la contestation, ça
dessaisit l'autre instance. Ça fait que, dès qu'il y a contestation, l'autre
contestation, qui est une demande de révision, elle est mise de côté parce que
tu ne peux pas contester, à deux endroits différents, la même décision.
M. Leduc : Je comprends que c'est un
modèle qui peut se tenir en théorie. Je cherche à comprendre dans la pratique.
C'est certain que, si on disait, tantôt, là, que 78 % étaient au-delà des
90 jours, je comprends qu'il y aura des efforts pour réduire ça, etc.,
mais on peut imaginer qu'il y aura quand même des décisions qui vont arriver,
soit carrément le même jour ou dans les jours avoisinants cette demande de
transfert à la contestation. Qu'est-ce qui arrive à...
Là, ce que vous, vous dites, c'est : À la seconde, là, où je fais la
demande... là, je ne sais pas trop à quel point ça va être automatique, là,
l'aller-retour entre le TAT et la CNESST, mais vous, vous dites : Ça va
être nul, la décision. Mais, si elle arrive le lendemain et le surlendemain
puis si d'aventure elle venait, dans les 5 % du temps, renverser la
décision de la CNESST originale et donc rendre, pour le travailleur, par
exemple, non pertinente l'idée d'aller devant le TAT, est-ce que, là, il n'y a
pas...
O.K. Je recommence. Moi, je veux faire
reconnaître une lésion. La CNESST refuse. Je demande une révision. C'est long, c'est long. Je profite de la
nouvelle clause des 90 jours pour aller au TAT, mais le jour même ou
dans les jours suivants, finalement, je reçois la décision qui avait déjà été
prise ou qui allait être rendue dans les instants suivants puis qui me donne
raison, finalement. Ça arrive rarement, mais elle me donne raison, elle
renverse la décision originale de la CNESST. Avoir su ça, je ne serais pas allé
au TAT, non? Est-ce que mon raisonnement est logique?
M. Boulet : Le TAT n'entendrait pas
la décision, mais je pense qu'il faut s'assurer de l'instantanéité de la
communication. Dès qu'il y a dépôt au TAT, il va y avoir communication à la
CNESST. Est-ce qu'il peut s'échapper un cas, je ne peux pas l'anticiper, où il
n'y a pas eu... mais il va y avoir communication électronique, là, ça fait que
le risque, il n'est pas là, mais, si jamais il existait, ce risque-là, s'il y
avait une décision de la révision administrative, le TAT ne peut pas... Tu
sais, on ne peut pas être, les deux, saisis en même temps, ça fait qu'il y a
toujours possibilité de se désister, là, à la limite, là. Mais là je joue au
consultant, là. Ça m'apparaît être une hypothèse invraisemblable, mais, à la
limite, je me... moi, c'est... puis je suis certain que vous donneriez le même
conseil.
M. Leduc : Oui, parce que... Bien,
encore faut-il que la décision de révision soit applicable, alors que vous nous
dites depuis tantôt qu'elle serait nulle.
M. Boulet : Pardon?
M. Leduc : Encore faudrait-il que la
décision de révision soit applicable, alors que vous nous dites depuis tantôt
que, dès que j'appuie sur le bouton du TAT, la décision serait nulle.
M. Boulet : Mon Dieu! Mais tu te
désistes, là, à la limite, là, mais ce qui est important... pour vous rassurer,
là, déjà, actuellement, le TAT envoie, à toutes les semaines, les décisions qui
font l'objet d'une contestation. C'est pour ça qu'on est en mesure de compiler
les statistiques. Donc, à la commission des normes, toutes les décisions qui font l'objet d'une contestation au tribunal
administratif... Ça fait que c'est... là, il va falloir s'assurer qu'il y a un canal de communication qui soit
quotidien, pour s'assurer que, dès réception de la contestation au TAT, la
commission soit informée. Et la décision de révision, il n'y en aura pas, la
personne aura décidé d'aller directement au tribunal administratif. Ça fait que
c'est pour ça que je vous dis : Le risque que vous soulevez m'apparaît
invraisemblable.
M. Leduc : Ah! bien, je ne vous dis
pas que ça arriverait systématiquement et nécessairement très, très souvent,
mais ça me semblait peut-être une certaine faille dans l'élaboration de...
M.
Boulet : Non, je comprends la question, mais moi, comme je vous dis,
et vous rendriez le même conseil, c'est : Parfait, la décision fait
ton affaire, ils l'ont rendue, tu sais, on était pile, puis désiste-toi au
tribunal administratif, puis ça réglerait la question.
M.
Leduc : Donc là, je comprends que, dans votre interprétation, s'il y a
une décision qui est rendue le même jour où j'ai pesé sur le piton du
tribunal, on aurait un délai, dans le fond, de grâce pour cette journée-là.
M. Boulet : Bien oui. Bien, je pense
qu'il faut être pratique, là, le risque est à peu... selon moi, il est nul, mais, dans cette hypothèse-là que vous soulevez...
puis la personne a reçu la décision, bon, elle aurait été rendue, et, si
la personne, le travailleur ou l'employeur
décide de se désister au tribunal administratif, elle aura toujours le loisir
de le faire.
M. Leduc : Moi, je trouve ça, à la
limite, intéressant, mais, encore une fois, je reviens avec mon argument que ça, c'est une nouvelle chose qu'on apprend,
qui est votre intention du législateur, mais ce n'est pas du tout
précisé dans la loi, puis il me semble que ce serait important de le faire.
M. Boulet : Mais je le répète, là,
c'est évident, quand le TAT, quand le Tribunal administratif est saisi du
dossier, la révision administrative en est dessaisie, là, mais bon, pour moi,
c'est clair, puis votre collègue avec qui vous êtes va vous le confirmer, là,
ça ne peut pas être les deux saisis d'une même contestation.
M. Leduc : Oui, c'est ça, on ne peut
pas être à la fois à la DRA et... Non, non, ça, je comprends. Est-ce que j'ai
tort de penser que ce mécanisme-là que vous nous proposez aujourd'hui est
inspiré de ce qui se fait avec la Loi sur l'aide sociale?
M. Boulet : Je ne saurais répondre à
cette question puis, avec moi... Je ne sais pas.
M. Leduc : Vous ne savez pas.
M. Boulet :
Évidemment, c'est une loi qui est complètement différente de la nôtre, là, mais
peut-être. Est-ce qu'il y a un mécanisme similaire, je ne le sais pas, mais ça
s'inspire du compromis CCTM, puis moi, je trouve ça intéressant d'aller dans cette direction-là, là. Je vais redire que ça
rencontre deux objectifs : célérité, déjudiciarisation.
M. Leduc : Objectifs que je partage,
évidemment. C'est qu'on m'a informé, puis je n'ai pas eu le temps de faire la
recherche détaillée, là, mais on m'a informé qu'il y avait un mécanisme
vraiment, vraiment similaire dans la Loi sur l'aide sociale, où, après une
demande de révision non répondue dans un délai de 90 jours, on peut en
effet automatiquement aller au TAQ, Tribunal administratif du Québec, qui est
le tribunal pour l'aide sociale.
M. Boulet : ...bonne idée. C'est
probablement que... Si ça existe dans la Loi sur l'aide sociale, est-ce que
c'est là que vient l'inspiration initiale des discussions que moi, j'ai eues,
que certains partenaires ont eues, du marché du travail? Peut-être, mais si
c'est ça, tant mieux, je trouve que c'est une excellente idée.
M. Leduc : L'enjeu, M. le ministre,
c'est qu'on m'informe aussi, puis, encore une fois, ça mériterait d'être
vérifié, mais que, dans ces scénarios-là, le fait d'aller devant le TAQ
n'abolit pas la révision administrative en cours comme ce que vous nous
proposez ici. Je ne suis pas en train de vous dire que j'aime nécessairement
mieux l'une que l'autre, mais semblerait-il que, là-dessus, il y aurait une
différence.
M. Boulet : Je ne sais pas qui vous
donne cette information-là, là, vous avez certainement une
source, que je ne suis pas en mesure ni de confirmer ni d'infirmer, mais
moi, ça m'apparaît invraisemblable qu'on maintienne en vie deux recours. Donc,
ce que vous me dites, c'est qu'il pourrait y avoir une contestation mais qu'on
maintient en vie la révision administrative puis qu'après ça on décide
d'annuler ou non la contestation, dépendamment de la décision de la révision
administrative. Je ne sais pas. Je ne suis vraiment pas en mesure de répondre.
M. Leduc : Mais est-ce que vous
convenez avec moi que, si c'est bel et bien le cas, il y aurait comme une... ça
serait une drôle d'idée d'avoir une mesure qui y ressemble beaucoup, mais
qui...
M. Boulet : Oui, mais c'est curieux parce
que, si tu fais une contestation, c'est de quoi, de la décision initiale? Puis
la... Tu sais, normalement, c'est une contestation de la décision initiale. Si
tu maintiens en vie le processus de révision administrative, tu dédoubles. En
fait, il y a deux corridors parallèles, deux... une commission puis un tribunal
qui sont saisis de la contestation de la même décision, mais, bon, je ne peux
pas répondre à ça.
M. Leduc : Je comprends, mais, au
même titre que quand on va devant un tribunal, on a de la médiation qui nous
est recommandée, imposée.
M. Boulet : C'est complètement...
M. Leduc : Non, non, mais ce que je
veux dire, c'est que la médiation, vous la faites, mais elle n'abolit pas
l'autre recours en cours, qui est celui...
M. Boulet : Bien, non, parce que la
conciliation, c'est du prédécisionnel. C'est pour permettre un accord, un règlement
hors cour. On appelle ça des règlements... des quittances, transactions, c'est toujours
des règlements qui sont faits pour éviter d'aller en cour. Ça fait que c'est
une alternative, alors que, là, ce serait une duplication.
M. Leduc : Je comprends. Ce que je
veux dire, c'est qu'il est possible des fois de commencer un processus ou, du
moins, d'activer le processus, de peser sur le bouton sans qu'on soit rendu
devant le juge, là, pour commencer à plaider. Puis c'est peut-être là la
différence entre le système de l'aide sociale, qui mériterait d'être
vérifié, et le système que vous nous proposez aujourd'hui, c'est que, là,
il pourrait y avoir une possibilité d'avoir une décision qui arrive après qu'on
ait pesé sur le piton, mais avant qu'on soit rendu devant le juge. Vous
connaissez les délais, là. Le jour où on pèse sur le piton pour dire : O.K.,
je vais aller au TAT, ce n'est pas le lendemain matin, là, que vous allez
devant un juge. Ça va prendre plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Je ne
me souviens plus c'est rendu combien, le délai, au TAT, là, mais ce n'est pas
deux journées, là. Il va se passer plusieurs, plusieurs journées, et c'est
là... la question à savoir, c'est : Est-ce que, quand je pèse sur le piton
du TAT, la décision de la révision, si elle arrive dans les jours qui suivent,
la semaine après ou, du moins, dans n'importe quel délai, tant qu'on n'est pas
devant le juge...
• (16 h 20) •
M. Boulet : Je pense qu'on a discuté
de cette hypothèse-là. Je n'ai pas d'autre commentaire à ajouter, là.
M. Leduc : Mais est-ce qu'on
pourrait faire vérifier la comparaison avec l'aide sociale? Parce que je trouve
ça quand même pertinent.
M. Boulet : Bien, vous pouvez...
Écoutez, ce n'est pas pertinent à notre débat sur le p.l. n° 59.
C'est une demande d'information, on peut peut-être... mais vous avez... Est-ce
que votre collègue ne peut pas le vérifier, en vertu de la Loi sur l'aide
sociale? Oui, je pourrais vérifier puis vous donner une opinion à un autre
moment, là. Je peux le vérifier. Ça n'a pas d'impact sur ce que nous discutons
actuellement, là.
M. Leduc :
Qu'est-ce qui va arriver... peut-être qu'on pourra... on aura le temps de le
trouver d'ici là. Là, je vais peut-être aller sur d'autres types de questions.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Est-ce qu'on a d'autres...
M. Boulet : Je vais quand même le
vérifier aussi, pour mon bénéfice, parce que je ne peux pas confirmer ni
infirmer. Ça m'apparaît un peu curieux comme façon de faire, mais ça peut être
différent d'une loi à l'autre, là.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Député d'Hochelaga-Maisonneuve, est-ce que
vous avez d'autres interventions sur l'amendement?
M. Leduc : Bien là, j'imagine qu'on
peut peut-être suspendre quelques instants, là, pour vérifier.
M. Boulet : Non, non, mais là je ne
vérifierai pas ça aujourd'hui, là.
M. Leduc : Ah! bien, c'est-à-dire,
on est à la veille d'adopter un nouveau système, là.
M. Boulet : Oui, mais ça n'aura pas
d'impact. Oui, mais...
M. Leduc : Mais c'est vous, tantôt,
qui plaidiez la cohérence du corpus législatif.
M. Boulet : Non, non, mais ça peut
être des mécanismes différents, là. Je parlais des délais, je ne parlais pas de
ça, là. Ça, c'est un mécanisme qui permet d'atteindre un objectif de célérité
puis de déjudiciarisation, là. Ce n'est pas la même chose.
Une voix : ...
M. Boulet : ...collègue, elle me
dit : Le cheminement des contestations est complètement différent, le
processus n'est pas le même à l'aide sociale, puis ce n'est pas le même. C'est
comparer des pommes avec des tomates, là, ce
n'est pas la même mécanique, là, vraiment pas, puis on n'a pas... je n'ai pas
de spécialiste en aide sociale
avec moi, mais... puis la clientèle n'est pas la même non plus.
M.
Leduc : Non, non, ça, c'est certain, mais, de toute façon, il y a
toujours certaines limites à comparer des lois les unes avec les autres.
On a eu une partie de ce débat-là tantôt avec le concept de la cohérence du
corpus législatif.
Revenons, dans ce cas-ci, à l'essence de mon
amendement, maintenant qu'on a mieux compris l'essence du vôtre, en fait, sur
lequel le mien se reposait. Malgré ma compréhension du vôtre, là, sur la
disparition, du moins, la disposition de la révision non rendue — je
vais le garder tel quel, là, pour le bénéfice du débat — moi,
j'essaie de saisir, parce que je dois aller...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Allez-y... d'Hochelaga-Maisonneuve, allez-y.
M. Leduc : Je dois aller de l'avant
avec mon amendement, parce que l'argument de la déjudiciarisation, puis
là-dessus, on a passé vite tantôt, c'est de raccourcir l'expérience, je dirais,
totale. Et, pour raccourcir l'expérience totale, il n'y a pas 56 modèles,
soit on fait sauter une des étapes ou soit on raccourcit les délais entre les
étapes. Moi, ce que je vous dis ici, c'est qu'en déférant immédiatement au TAT
on raccourcit quand même un délai entre deux de ces étapes-là. On colle, dans
le fond.
Quand on fait des cours de droit, là... quand
j'ai fait mes cours de droit au certificat à l'UQAM, en droit du travail, on avait
toujours des tableaux par nos professeurs. C'était une ligne du temps, tu avais
le jour zéro de l'événement, peu importe c'était quoi, le chômage, le droit du
travail, etc., après ça, tu avais toutes sortes de marques de temps, c'étaient
des délais, puis, après ça, ça additionnait des délais, puis, après ça, telle
date, tu as tant de jours pour aller devant le tribunal pour contester, pour...
bon, etc.
Donc, je reprends cette image-là de la ligne du
temps avec des délais puis avec des marqueurs. Si on veut raccourcir la
judiciarisation, réduire la judiciarisation, on peut le faire en sautant une
étape ou en collant des étapes. Moi, c'est ça que je propose. Moi, je
dis : Collons immédiatement l'étape de la contestation au TAT à celle de
la révision administrative et, dans ce cas-ci, dans la non-révision
administrative après 90 jours. Pourquoi attendre si on peut immédiatement
le renvoyer?
Puis vous le disiez vous-même tantôt, bien, un
procureur, qu'il soit patronal, ou syndical, ou populaire, bien, pourra très
bien se désister pour dire : Ah! bien, sais-tu quoi, finalement, je n'irai
pas au tribunal pour x, y raison, finalement, le dossier, il n'est pas si
solide, finalement, c'est trop long, finalement, le membre ou le client n'a pas
envie d'aller vivre cette expérience qui, somme toute, est un peu
traumatisante. Pour toutes sortes de bonnes raisons, il peut dire : O.K.,
finalement, c'est vrai, je me désiste, mais, au moins, il n'a pas perdu de
temps, il n'a pas perdu une seule journée, une seule semaine, un seul mois dans les limbes parce que
la décision est passée dans le tapis, il y en avait trop ce jour-là, parce
que les gens ne connaissaient pas le mécanisme. On passe directement de l'un à
l'autre, on sauve du temps, du temps hypothétique mais du temps réel aussi.
Et,
après ça, si la personne... Comme je le disais tantôt, là, on ne se rend pas
devant le juge le lendemain de la contestation inscrite au tribunal, là, loin
de là. Ça va prendre beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps avant qu'on soit
assis dans une salle d'audience, devant le juge du TAT. On aura donc amplement,
mais amplement le temps de réfléchir avec le membre, le salarié ou l'entrepreneur,
pour dire : Ouf! finalement, là, la... comment on dirait ça, des fois, on
utilise l'image de la machine à saucisses, là, la machine à saucisses, elle
continue, elle n'arrête jamais pour qu'on aille réduire un maximum le délai
entre le jour un puis le jour... le jour un, là, de la révision puis la fin, où
on a une décision finale. C'est ça, dans le fond, l'objectif, c'est réduire,
rapprocher ces deux moments-là, mais on y va, on pousse, on pousse, on
pousse. Le ministre fait un pas, je l'apprécie. Moi, je trouve qu'il n'en
manque pas gros pour faire un pas encore supplémentaire — il ne
coûterait pas grand-chose, là — qui, à mon avis, ne remet en question
aucun principe de justice. Personne ne va forcer personne à aller s'asseoir
devant un juge. Si la personne ne veut pas, elle se désiste, c'est la fin de
l'histoire.
• (16 h 30) •
M. Boulet :
En fait, c'est important de dire, personne ne va forcer personne à aller devant
un juge, mais c'est le contraire que vous demandez de faire, de forcer les personnes
à aller au TAT si la décision n'est pas rendue dans les 90 jours, puis la commission
va déférer immédiatement au TAT si la personne... comme si la personne ayant
demandé la révision avait déposé une contestation, donc sans qu'elle ait déposé
une contestation. Ça ne marche pas. Il faut que la partie prenne l'initiative,
il faut qu'elle ait la faculté de le faire.
Puis, en plus, collègue,
vous dites même : Elle est réputée avoir valablement contesté. Puis
«réputée», bien, il peut y avoir une preuve contraire, là, tu sais, une personne
pourrait dire : Oui, dans la loi, je suis réputée, mais je vais faire une
preuve à l'effet contraire, que je ne voulais pas aller au TAT, que je
voulais... Donc, vous rejudiciarisez, vous créez un autre palier de
contestation potentielle. Je ne sais pas si vous me suivez, là, mais «réputée»,
c'est une présomption, puis votre collègue va vous le confirmer, une personne
qui est réputée avoir valablement contesté, il pourrait vouloir faire une
preuve contraire et renverser la présomption que vous créez. Vous judiciarisez
encore plus.
Puis, quand on défère
immédiatement, c'est quoi les motifs de contestation? Quand tu contestes,
est-ce que c'est la CNESST qui va dire les
motifs? Parce que, pour respecter les règles de preuve et de procédure, puis
votre collègue va vous le dire, il faut marquer c'est quoi, les motifs
de contestation. C'est-tu la commission qui va les inventer? Parce que, quand tu fais une demande de révision, tu
expliques tes motifs sommairement, et, la plupart du temps, ils ne sont
pas soumis. Mais, pour aller en contestation devant le TAT, ça prend des
motifs. Qui va les identifier, ces motifs-là?
Puis, quand vous
dites que ça va sauver du temps, c'est faux parce que ça va engorger le TAT
puis ça va faire perdre du temps à plein de monde qu'on en inscrive... à peu
près, si on se basait au délai d'aujourd'hui, 68 % qui ne bénéficient pas
d'une décision dans ce délai-là. Je pense que tous les objectifs que vous
partagez avec moi, vous les mettez de côté avec un amendement de cette
nature-là.
Je le répète, là, sur
le fond, laissons donc la faculté aux personnes affectées par les décisions de
décider par elle-même. Ce n'est pas nous à leur dire : C'est ça, vous
devez faire ça. Ça ne marche pas. L'article, tel que libellé, il ne fait pas de
sens, selon moi. Puis votre collègue va probablement le réaliser après les
commentaires qu'on fait, on ne peut pas créer une présomption, on ne peut pas,
la commission, contester au nom des travailleurs, on ne peut pas savoir d'avance
c'est quoi, les motifs de contestation. On peut certainement, en plus,
anticiper une augmentation de l'inventaire des dossiers en attente au Tribunal
administratif du travail. Ça fait que célérité, déjudiciarisation puis
j'oserais rajouter équilibre. Laissons donc les personnes décider.
Puis il y en a plein
qui ne veulent pas y aller, au TAT, il y en a plein qui ne se préoccupent
pas... Il y a des décisions dont le délai
n'a pas d'impact, pas d'importance. Je pense qu'on se donne une barrière, je
pense qu'on se donne un barrage qui
est suffisant pour bien contrôler le nombre de contestations au Tribunal
administratif du travail. Merci.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Il reste trois minutes à votre échange. Député
d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc :
Merci, Mme la Présidente. Le ministre soulève des points intéressants. Il dit
qu'on ne peut pas nécessairement présumer
des motifs si on envoie automatiquement au TAT. C'est intéressant, mais il a
raison aussi de préciser qu'il y a
déjà certains motifs qui sont inscrits quand on fait de la demande de révision.
Est-ce que c'est des motifs aussi complets que ceux qu'on inscrirait
dans une demande au TAT? Moi aussi, ça me semble une évidence que non.
M. Boulet :
Non, mais c'est intéressant parce que, dans la loi, on parle de motifs
sommaires, mais souvent les travailleurs puis les entreprises, là, ils
mettent... parce que la décision n'est pas fondée en fait puis en droit. Ils ne
mettent pas de motif. Mais, quand tu vas en contestation parce que tu vas
devant un tribunal, vous le savez, vous en avez déjà fait, des contestations,
et les règles de procédure et... les règles de preuve et de procédure sont
claires, ça prend les motifs de contestation. Ça, c'est un point que j'ai
soulevé, là.
Puis
je le répète, là, «réputée avoir valablement contesté», mon Dieu que c'est
complexe comme libellé, puis c'est une
présomption, encore une fois. On ne dit pas : Il a contesté. On dit :
Il est réputé avoir valablement contesté. Moi, je trouve que c'est un texte alambiqué qui crée une
présomption qui pourrait être renversée. Si moi, on me dit : M. le
ministre, vous êtes réputé avoir fait ça, je pourrais dire : Oui, mais
c'est une présomption que je peux renverser. Je peux faire la preuve du
contraire. Je ne suis pas réputé avoir fait ci, puis, ça, vous allez le
reconnaître avec moi. Ça fait qu'on rejudiciarise en créant un autre palier de
contestation potentielle. Moi, je suis fermement, encore une fois, convaincu de
l'équilibre de notre approche.
M. Leduc : Moi, je vois très bien un scénario où... Ce que
vous me dites, ça fait beaucoup de sens à mes oreilles, mais je vois donc
très bien un scénario où on pourrait dire que, quand on... Moi, ce que je vois
dans le texte... Puis il ne faut pas s'enfarger sur les mots, là. Bon, comme je vous le dis, moi,
même si mon collègue est avocat, que j'ai un beau certificat en
droit du travail, là, on n'est quand même pas... on n'a pas, là, les ressources
comme vous les avez au ministère, ça, on en a discuté tantôt, mais...
M. Boulet : Aïe! ils n'ont pas
analysé. Moi, je l'ai vu, le... en même temps que tout le monde.
M. Leduc : Non, je comprends, mais
ce que je veux dire, c'est que, si vous étiez d'accord avec le principe, on
suspendrait, puis vous le réécriviez d'une meilleure façon. C'est pour ça que
je ne veux pas m'enfarger dans les mots, je veux plus parler du principe. Si le
problème ou un des problèmes, c'est que le motif de révision qu'on
transférerait au TAT n'est pas complet, bien, moi, je n'ai aucune misère à
imaginer qu'on pourrait préciser un délai pour lequel la personne aurait
quelques jours supplémentaires pour bonifier ses motifs, mais que le dossier
soit automatiquement envoyé, encore une fois, pour réduire l'échelle.
M. Boulet : Mais, à chaque fois qu'on
échange, vous vous attardez à des arguments secondaires ou subsidiaires que je
soumets, c'est-à-dire, dans le cas présent, les motifs qui ne sont pas clairement...
qui ne sont pas exprimés. Mais il n'y a
pas que ça. Ce qui est l'argument principal de ma présentation, c'est qu'on ne
peut pas transformer une faculté, un choix en une obligation. C'est ça,
l'argument central. On ne peut pas imposer à quelqu'un d'aller au TAT parce que
la décision n'est pas rendue dans un délai de 90 jours.
Le 68 %, souhaitons qu'il baisse, mais il y
a une proportion importante de personnes à qui Québec solidaire dit : Vous autres, là, vous allez direct au
TAT parce que la commission n'a pas
respecté le délai. «That's it». Je trouve tellement que ce n'est pas compatible avec ce que vous dégagez comme
conseiller syndical, ce que vous faisiez avant la politique. J'ai de la misère à vous comprendre
puis j'ai de la misère à comprendre que vous puissiez partager les mêmes
objectifs de célérité et de déjudiciarisation
que moi en proposant de quoi qui va mettre une autre couche de
judiciarisation.
Mais bon, c'est pour ça que je vous dis... c'est
sûr qu'on peut avoir des discussions, là, sur des amendements, mais, si on
s'attarde à un argument secondaire en disant : Vous dites ça, mais ça, je
ne suis pas d'accord... mais il y a un ensemble d'arguments. Puis j'essaie
d'être le plus efficace possible dans nos échanges. J'essaie de vous dire tous
les points en même temps puis je pense que c'est fructueux comme argumentation
que nous avons, mais je ne voudrais pas que vous limitiez mon argumentaire à un
point.
M. Leduc : Non, non, puis ce n'est
pas mon intention. Puis c'est vrai que vous mettez de l'avant plusieurs
arguments puis je l'apprécie. C'est juste que, justement, quand j'en vois un
que je me dis : peut-être que, là-dessus, il y a un autre aspect qu'on n'a
pas évalué, bien, je le soulève, tout simplement.
J'en ai donc un dernier, là. Après ça, j'imagine
qu'on aura vraiment fait le tour de mon amendement à ce niveau-là. Mon dernier
argument c'est... puis ça reprend un peu ce que vous avez dit tantôt, je
dis : On ne veut pas... on ne veut pas imposer personne à aller au TAT. Ça
n'a jamais été mon intention, et ce n'est certainement pas ce que dit mon amendement
non plus. Personne ne va être forcé de s'asseoir devant un juge du TAT avec mon
amendement. Tout ce qu'on veut faire, là, c'est attacher le wagon de la
révision administrative à celui du TAT. On l'attache tout de suite. On ne perd
pas de temps. Après ça, la personne, elle peut bien le détacher. Si elle
dit : Ah! finalement, moi, cette... la locomotive du... tiens, on va
prendre... la locomotive du TAT ne m'intéresse pas, plouc, j'ôte le wagon tout
de suite. Mais au moins il a été attaché. On n'a pas perdu de temps.
Ça arrive souvent qu'on a, dans la loi, plein
d'endroits, une réputation, on a fait quelque chose, on n'a pas fait quelque
chose, «est réputé», ta, ta, ta. On a même des définitions de travailleur, «est
réputé un travailleur».
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci.
M. Leduc : Donc, moi, ça fait le
tour de mon argument pour ça. Ça fait qu'on peut passer au vote.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui?
Alors, le temps est écoulé pour le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
Est-ce qu'il y d'autres interventions sur
l'amendement déposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve? S'il n'y a pas
d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix.
La Secrétaire : M. Leduc
(Hochelaga-Maisonneuve)?
M. Leduc : Pour.
La Secrétaire :
M. Boulet (Trois-Rivières)?
M. Boulet : Contre.
La
Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant
le gouvernement, Mme Boutin (Jean-Talon)?
Mme Boutin : Contre.
La Secrétaire : Pour les
membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?
M. Derraji :
Abstention.
La Secrétaire : Et
Mme IsaBelle (Huntingdon)?
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Abstention. Donc, l'amendement déposé à l'article 108 est rejeté.
Nous
poursuivons avec l'article 108 tel que déjà amendé. Y a-t-il des
interventions? Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.
• (16 h 40) •
M. Leduc : Alors, Mme la Présidente,
chose promise, chose due. Pendant qu'on discutait d'autres aspects, mon
collègue a fait des vérifications quant à ce qui est similaire, très similaire,
même, comme procédure dans la loi sur l'aide financière de dernier recours, et
on a trouvé une partie du site Web du ministère du Travail, de l'Emploi et de
la Solidarité sociale, et je vais en lire un extrait pour qu'on comprenne bien
la comparaison. Donc, c'est un extrait qui s'appelle Demande ou requête au
Tribunal administratif du Québec.
«La demande — ou requête — au
TAQ est présentée par écrit. Elle indique :
«La décision contestée ou les faits justifiant
le recours;
«Un exposé sommaire des motifs invoqués ainsi
que les conclusions recherchées; et
«Les renseignements sur la personne requérante
ou sa procureure ou son procureur — nom, adresse, numéro de
téléphone ou télécopieur.
«La requête est généralement déposée au
tribunal, mais peut aussi être déposée à l'un des greffes de la Cour du Québec
qui la transmet sans délai au secrétariat du TAQ.
«Pour obtenir plus de renseignements sur la
procédure pour procéder à une requête [...] se référer au site du tribunal
administratif.»
Et c'est là que ça devient intéressant :
«Recours lorsque la décision de révision n'est pas rendue dans les
90 jours. Une personne qui demande une révision peut poursuivre sa
contestation directement au TAQ lorsque la décision de révision n'a pas été
rendue dans un délai de 90 jours suivant — et là il y a trois
options :
«La date de réception de sa demande de
révision au premier endroit où elle est entrée au ministère;
«La date de décision du TAQ retournant
le dossier en révision si le tribunal conclut que la demande de révision
n'était pas hors délai, ou, le cas échéant, était malgré ce délai recevable; et
«La date de la présentation de ses
observations ou de la production de documents lorsque la personne a
demandé un délai pour ce faire.
«À partir du moment où la personne réviseure est
en défaut de rendre sa décision dans le délai de 90 jours, la personne
peut déposer son recours au TAQ, et ce, tant que la décision de la révision
n'est pas rendue.
«Le fait qu'une personne se soit prévalue de ce
droit n'empêche pas la personne réviseure de rendre sa décision par la suite,
et ce, tant que le dossier n'a pas été pris en délibéré par les membres du
tribunal.
«Quand la décision de
révision est rendue après l'introduction du recours au TAQ, le
tribunal doit statuer sur la décision de révision, sauf si un
désistement écrit a été produit par la personne requérante.»
M. Boulet : Je n'ai pas de
commentaire. Puis ce qu'on me dit, c'est que généralement, dans un contexte,
puis c'est exactement ce que j'ai expliqué
tout à l'heure, si d'aventure, il y avait une décision en révision
administrative dans la période intermédiaire, les gens, ce qu'ils font,
c'est un désistement au TAQ, au Tribunal administratif du Québec.
Ici, c'est le Tribunal administratif du travail.
Ça fait qu'il n'y a rien qui se perd, il n'y a rien qui se crée, puis on évite
une judiciarisation excessive, là, puis...
Tu sais, c'est exactement ce que j'ai répondu
tout à l'heure. Ça peut...
M. Leduc : Oui, mais sauf...
M. Boulet : C'est un mécanisme qui peut
exister dans d'autres lois. Dans notre cas, au lieu d'éliminer complètement, on
encadre la possibilité d'aller au TAT directement, au Tribunal administratif du
travail, d'où l'option que nous créons dans un article plus loin et d'où la
possibilité ici... Ce que vous demandez, c'est d'imposer d'aller... si le délai
n'est pas respecté, on impose la contestation au Tribunal administratif du
travail. Ça fait que moi, je n'ai pas d'autres commentaires à faire que ceux
que j'ai faits préalablement.
M. Leduc : Mais là on a disposé de
ce débat-là tantôt, là. Ça, c'était mon amendement qu'on vient de battre.
M. Boulet : Mais je viens de
répondre à ce que vous avez expliqué. Si d'aventure, il y avait une décision en
révision administrative avant que la communication soit faite, si la personne
veut se désister du Tribunal administratif du travail, elle le fait. Et
c'est ce qu'ils font, manifestement, là, je présume, en aide sociale, mais je
ne connais pas assez ce régime-là, là.
M.
Leduc : Oui, d'accord, mais ce n'est pas ça que vous avez dit tantôt.
Tantôt, vous avez dit que la décision, elle va être nulle.
M. Boulet :
Non, non, non. Je n'ai jamais dit qu'elle était nulle. J'ai dit : À partir
du moment où la contestation est faite, on met fin au processus de révision administrative.
Je n'ai jamais dit que la décision était nulle. Ça, c'est
ce que vous avez dit, mais moi, je n'ai jamais dit que ça annule la décision.
Je dis simplement, je l'ai dit à trois reprises, si la décision est rendue puis
que la contestation est introduite, autant par la personne, elle pourrait se
désister. Ça, pour moi, c'est évident.
M. Leduc :
Oui, ça, on s'entend complètement. Mais moi, le bout qui me surprend ici, quand
c'est écrit : «Le fait qu'une personne se soit prévalue de ce droit
n'empêche pas la personne réviseure de rendre sa décision par la suite, et ce,
tant que le dossier n'a pas été pris en délibéré par les membres du tribunal»,
là, là, je ne suis pas avocat, mais il me semble que le «délibéré par les
membres du tribunal», c'est une fois les plaidoyers faits, là.
Donc, c'est un
méchant délai. C'est non seulement... la révision peut arriver non seulement
après qu'on ait pesé sur le piton du TAQ, mais... il y a le délai en attendant
la date d'audience, il y a la ou les dates d'audience, puis il y a, après ça,
le délibéré par les membres du tribunal.
M. Boulet :
Puis, à l'aide financière de dernier recours, le libellé est semblable au
nôtre. C'est pour ça qu'il n'y a rien d'incompatible là-dedans. À partir du
moment où la contestation... Ça met fin au processus de révision administrative, mais le processus qui est en aboutissement
ou qui se termine peut se compléter puis donner la possibilité à la
personne de se désister, au tribunal, de sa contestation au Tribunal
administratif du travail, là. Mais on revient à la discussion de base, là.
C'est vraiment une faculté.
M. Leduc :
Là, je suis complètement confus, là. Est-ce que la révision peut ou ne peut pas
compléter son exercice à partir du moment qu'on a pesé sur le TAT? Il vient de
dire le contraire.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, M. le ministre.
Une voix :
...
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Donc, ça va être plus long que je pensais. Alors, M. le
ministre, nous allons suspendre?
M. Boulet :
...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : D'accord. Alors, nous allons suspendre.
(Suspension de la séance à
16 h 48)
(Reprise à 16 h 54)
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Alors, M. le ministre, vous voulez intervenir ou répondre
à la question?
M. Boulet :
Non, j'ai dit tout ce que j'avais à dire puis je n'ai plus de commentaire.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Ah! parfait. Alors, député d'Hochelaga-Maisonneuve,
avez-vous encore des commentaires sur l'article 108 tel qu'amendé?
M.
Leduc : Bien oui, mais je pensais que, là, la suspension, on allait
nous arriver avec peut-être une correction, là, parce que...
M. Boulet :
Non. En fait, c'est exactement ce que j'ai mentionné tout à l'heure. Est-ce que
le TAQ peut, dans certains cas, recevoir des désistements de travailleurs qui
bénéficient d'une décision rendue en révision administrative? Dans le cas de la
loi actuelle, ce qui est écrit, c'est que, quand la partie conteste et qu'elle
saisit le Tribunal administratif du travail,
la révision administrative en est dessaisie. Si, pendant un intervalle x, qui
m'apparaît hypothétique, il y a une décision
qui est rendue par la révision administrative puis que la partie a exercé la
faculté d'aller devant la table,
décide de se désister, elle le fera. C'est exactement les commentaires que j'ai
exprimés un peu plus tôt.
M. Leduc :
Vous décidez consciemment de ne pas reprendre le modèle du TAQ ou, du moins, de
l'adapter pour la CSST. C'est ce que je comprends bien?
M. Boulet :
Est-ce qu'il y a un niveau de tolérance ailleurs ou il y a des façons de faire,
moi, que je n'ai pas l'intention de reproduire à la commission? Je pense qu'il
faut atteindre l'objectif de célérité, il faut que ça soit clair puis il faut
que la personne ait la faculté de décider ce qu'elle veut faire.
M. Leduc :
Sur un autre sujet, la question... Quand on dit qu'on peut aller porter des
motifs de révision, après ça qu'on peut
aller au TAQ, là. on donne la possibilité... au TAT, pardon, là on donne la
possibilité, après 90 jours, d'y aller immédiatement. Mais, dans la
façon dont vous le proposez, c'est : une personne peut contester devant le
tribunal. Et on imagine que cette
personne-là va le contester au tribunal, là, après les 90 jours en
fonction de ses motifs.
Mais il peut y arriver
parfois qu'il y a une révision, une demande de révision qui soit quasiment, je
n'oserais pas dire conjointe, mais à deux paliers en même temps mais pour des
motifs différents. Par exemple, sur une décision d'emploi convenable, de retour
au travail, de baisse de salaire, d'indemnité de revenus de remplacement, alors
il y a une décision de la CNESST, puis les deux parties, patronale et
travailleur, ne sont pas d'accord, pas pour les mêmes raisons, vous vous en
doutez. Par exemple, sur un montant, une indemnité, moi, je veux... je donne un
chiffre, la CNESST donne 100 $, moi, j'en voulais 200 $, le patron,
il voudrait juste que ça soit 50 $, les deux ont des motifs pour contester, pour réviser. Mais là, si c'est une des deux
parties qui amène ça devant le tribunal, il y en a juste une des deux
qui va pouvoir utiliser ses motifs, puis ça a quand même une incidence, après
ça, sur comment le tribunal va approcher le dossier. Comment ça va fonctionner?
M. Boulet : Oui. On va le voir un
peu plus loin, là, à l'article 110, là, vous allez voir, dans le projet de loi
proposé, là, quand «une décision qui fait l'objet d'une demande de révision est
également contestée devant le tribunal, ce dernier défère l'affaire à la commission
pour qu'elle en dispose en révision», d'abord.
M. Leduc : Mais est-ce que les deux
motifs sont reproduits? Parce qu'une demande de révision peut avoir deux motifs
différents.
M. Boulet : Oui.
M. Leduc : Mais là, après ça, quand
on l'envoie au tribunal, après le 90 jours, est-ce que les deux motifs
sont reproduits aussi, alors que c'est une
personne qui peut contester devant le tribunal, selon ce que vous avez écrit? Est-ce que vous comprenez?
M. Boulet : Je ne suis pas sûr que
je comprends, là.
M. Leduc : Vous, vous écrivez «en
outre, une personne peut contester devant le tribunal» si le délai de
90 jours n'est pas respecté. Alors, cette personne-là va, on imagine,
reprendre les motifs qui étaient à l'origine de la révision, de la demande de
révision, pour les reprendre au tribunal. Mais qu'en est-il de l'autre partie?
M. Boulet : Un instant.
Des voix :
...
M. Boulet : Parce que, dans le fond,
si je vous reprends bien, collègue, c'est que, si les deux parties, le travailleur
et l'employeur, font tous les deux une demande de révision, puis la décision
n'est pas rendue dans les 90 jours,
puis une personne décide d'aller au Tribunal
administratif du travail, l'autre
anticipe une décision de la révision administrative, ça, on a une disposition
là-dessus. Le tribunal, dans ce cas-là, fait déférence et défère l'affaire, la commission,
elle, en dispose.
Mais ce qui est intéressant, c'est... vous me
dites : Si les motifs de contestation, les motifs sommaires qui sont
exprimés par un et l'autre ne sont pas les mêmes.
M. Leduc : Forcément, ils ne sont
pas les mêmes.
M. Boulet : Non. Bien, oui, ça
pourrait être les mêmes, là. Je vais obtenir la réponse plus clairement, là, en
pratique, là.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Est-ce
que vous désirez qu'on suspende quelques instants, M. le ministre?
M. Leduc : S'il vous plaît.
M. Boulet : Donc, j'ai la réponse,
là. C'est un peu ce que je mentionnais tout à l'heure, là, la révision
administrative va traiter les deux, que ce soit le même ou deux motifs
distincts.
M. Leduc : Oui, oui, ça, je le sais,
pour la révision administrative, mais pour le TAT, après?
M. Boulet : Bien, il y a toujours la
possibilité, après ça, de poursuivre au tribunal administratif.
M. Leduc : Mais, dans la possibilité
que vous ouvrez, là, le post 90 jours, une personne qui pèse sur le piton,
mais qu'est-ce qui arrive avec l'autre, ses motifs à l'autre?
M. Boulet : Oui. La révision
administrative va quand même rendre la décision.
M. Leduc : Non, non, mais on est
rendus au TAT, là. Là, il n'y a pas de décision...
• (17 heures) •
M. Boulet :
Oui, mais le TAT ne s'est pas entendu avant un certain délai, là, puis il y a
un délai qui se passe, puis la révision administrative va rendre sa décision
puis, après ça, ça va s'en aller au Tribunal administratif du travail, là, à
moins que la personne se désiste. Ça revient à l'hypothèse que vous souleviez
tout à l'heure et à laquelle on répond à
l'article 110. Tu sais, là, c'est différent, là, c'est les deux personnes qui
contestent, le travailleur et l'employeur. Puis il y en a un qui, au
bout de 90 jours, parce que la décision n'est pas rendue, il dit :
Moi, j'exerce la faculté d'aller directement au TAT, je vais au TAT, puis
l'autre, il ne l'exerce pas. Dans ce cas-là, la révision administrative va
rendre la décision, puis même si c'est deux motifs distincts. Que ce soit le
même motif ou deux motifs distincts, le réviseur va rendre la décision, puis,
après ça, ça va s'en aller au TAT, à moins qu'il y ait un désistement.
Tu sais,
celui qui a décidé d'aller au TAT, il pourrait décider de se désister, puis
l'autre pourrait, lui, décider de faire une contestation. Tu sais, si
c'est l'employeur, par exemple, qui a décidé d'exercer la faculté d'aller
directement au TAT, il pourrait se désister,
puis le travailleur, lui, il pourrait dire : Aïe! tu t'es désisté, mais
moi, je conteste pareil.
M. Leduc : Là, qu'est-ce qui se
passe? On recommence une nouvelle demande?
M. Boulet : Il conteste, le délai
continue, puis l'audience va avoir lieu selon l'appel du rôle du Tribunal
administratif du travail. L'audience va avoir lieu, puis les délais se
poursuivent.
M. Leduc : Je vais demander une
légère suspension, Mme la Présidente.
M. Boulet : Je pense, c'est quand
même assez clair.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Nous
allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 02)
(Reprise à 17 h 16)
La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors,
on y va avec le député d'Hochelaga-Maisonneuve, qui vient de nous remettre un amendement.
Je vous invite à le lire et à l'expliquer, s'il y a lieu.
M. Leduc : À l'article 108 du
projet de loi, ajouter à la fin de l'alinéa proposé par le
paragraphe 2° :
«Le fait qu'une personne se soit prévalue de ce
droit n'empêche pas la personne réviseure de rendre sa décision par la suite,
et ce, tant que le dossier n'a pas été pris en délibéré par les membres du
tribunal.»
Tantôt, M. le ministre a évoqué le fait que le
libellé qui était devant nous, à l'article 108 du projet de loi n° 59,
était très, très similaire avec ce qui était dans la Loi sur l'aide sociale...
l'aide aux personnes et aux familles. On est allés vérifier, c'est en effet le
cas. À l'article 118 de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles,
il y a une phrase, là, qui, à quelques mots près, reprend les mêmes termes, les
mêmes logiques, la même séquence que ce qui nous est proposé dans le paragraphe
additionnel à l'article 108.
Or, comment se fait-il que le même libellé ne
produise pas le même effet? Parce que, tantôt, j'ai lu un extrait du site du
ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale qui explique la
procédure alentour de la révision. Et il y a une phrase que j'ai lue tantôt,
qui est la suivante : «Le fait qu'une personne se soit prévalue de ce
droit n'empêche pas la personne réviseure de rendre sa décision par la suite,
et ce, tant que le dossier n'a pas été pris en délibéré par les membres du
tribunal.» On ne retrouve pas cette phrase dans la loi de... personnes et de
l'aide sociale. Ce n'est pas écrit. C'est donc, ce qu'on imagine, une interprétation,
ce qui découle de l'interprétation de l'article de la loi sur les personnes à
l'aide sociale, qui relève toujours du même ministre.
Alors, comment se fait-il qu'un même libellé, à
quelques mots près, là, mais l'essence d'un même libellé, produise un effet x
dans une loi mais un effet y dans une autre? Ça nous semblait surprenant.
Alors, nous, on voulait venir corriger la situation.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. M. le ministre.
• (17 h 20) •
M. Boulet : Écoutez, Mme la
Présidente, je ne suis pas en accord avec le propos de mon collègue. Et, quand
je lis l'amendement, ça me confirme encore plus que ce qui est écrit là ne
m'apparaît pas compatible avec l'intention que m'avait partagée le collègue. Tu
sais, au départ, il était même d'avis qu'il fallait éliminer la révision administrative
puis là il dit : «Le fait qu'une personne se soit prévalue de ce droit
n'empêche pas la réviseure de rendre sa décision par la suite tant que le
dossier n'a pas été pris en délibéré par les membres du tribunal.» C'est comme
vouloir le beurre et l'argent du beurre. Je vais aller au TAT, mais je garde
mon autre recours. J'en garde deux, les deux vitesses en même temps, les deux,
la révision administrative et le TAT. Puis on va jusqu'à pousser ça jusqu'à la
prise en délibéré par les membres du tribunal. Ça m'apparaît complètement... En
tout cas, je ne sais pas si ça pourrait arriver en réalité, mais ça m'apparaît
invraisemblable qu'on aille là.
Puis je le répète, c'est le beurre et l'argent
du beurre. Si ce n'est pas rendu dans les 90 jours, je fais ma
contestation au TAT, puis avant que ça soit entendu, ça prend généralement
des mois, pour ceux qui vont au TAT à l'occasion, ça prend des mois. Et là vous
dites : Tant que ça n'a pas été pris en délibéré. Donc, on est sur le
point... Quand c'est pris en délibéré, on n'est pas loin
de la décision. Donc, quand qu'on n'est pas loin de la décision rendue par le
TAT, la révision administrative a cours et doit rendre sa décision.
Mais j'ai tellement envie de redire que j'ai
hâte de parler des objectifs fondamentaux de la loi, de la modernisation. C'est
de diminuer les accidents, de protéger la santé puis la sécurité des
travailleurs, puis parler de prévention, puis de diminuer la chronicisation des
lésions. On s'attarde depuis hier à des articles qui n'ont tellement pas tant
d'impacts sur la santé, en fait, qui n'en ont pas sur la santé et sécurité des travailleurs.
Puis on avait trouvé un bon équilibre. Ça fait l'objet d'un compromis. Je ne le
comprends pas. Il partage l'objectif de célérité puis de judiciarisation, et là
c'est un nouvel amendement qui rejudiciarise. Tout à l'heure, c'était «réputé
avoir valablement fait une contestation», puis là c'est d'un tout autre ordre,
là, mais c'est continuer...
Puis est-ce que
le TAQ... Ils n'ont même pas cette disposition-là. Ils ont la même disposition que nous. Est-ce qu'il
y a une tolérance que, si la décision de la révision administrative est sur le
point d'être rendue, qu'elle soit rendue puis que la personne ait la possibilité
de se désister? Mais, en droit, ce n'est pas la réalité puis ce n'est pas ce
que nous souhaitons. C'est, si on saisit le tribunal administratif, on
dessaisit la révision administrative. Si, entre les deux, il y a une décision
qui est rendue puis que la personne qui contestait en bénéficie et décide de se
désister, j'ai dit : Oui, ça peut se faire.
Mais aller jusque-là, c'est de dire :
Encore une fois, les deux autos sont parties, puis, tant qu'il y en a une des
deux qui n'est pas prête à arriver, nous, on va prendre la meilleure des deux.
Puis c'est en délibéré, là, en délibéré. Ça, ça veut dire que le TAT a dépensé
ses ressources, a entendu des témoins, a entendu des experts, a entendu les conseillers avocats. Puis vous savez que les
journées... le nombre de journées d'audience au TAT, c'est parfois élevé,
là.
En fait, je ne comprends pas la... puis je le
sais que vous allez me l'expliquer clairement, mais, pour moi, là, ça
m'apparaît incompatible avec l'objectif de déjudiciarisation. Puis, au lieu de
nous attarder sur des dispositions de recours et de procédure, attardons-nous à
la santé et sécurité des travailleurs. Mon Dieu! Voilà. C'est tout.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Y a-t-il d'autres interventions? Député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Il y a quelque chose
de très surprenant dans tout ça parce que le... J'ai posé plusieurs questions
tantôt sur le sens du libellé qui nous était déposé par le ministre. Je ne le
sais pas si le ministre avait nécessairement préparé ou été au bout de sa
réflexion sur cet enjeu-là qui, je n'ai pas de la misère à le reconnaître, n'est
pas le centre de son projet de loi. Ça, je
n'ai jamais plaidé le contraire, là. Ce n'est pas parce que ce n'est pas le
centre qu'on ne peut pas passer du temps à bien l'étudier et à le
comprendre comme il faut. Et je me rends compte qu'une maudite bonne chance que
je vous aie posé les bonnes questions parce que, là, je vois une certaine
contradiction.
Alors, je vous ai posé des questions, vous avez
développé une interprétation de votre libellé à travers les questions-réponses.
Après ça, j'ai dit : Mais c'est-tu comme ça que ça marche en aide sociale?
Il m'a dit : Non, ce n'est pas la même chose... ou, en tout cas, on va
aller voir. On est allés voir, c'est pas mal la même chose, puis, après ça,
vous nous avez dit : Oui, mais, de toute façon, c'est quasiment le même
libellé. Puis on est allés voir, c'est à peu près le même libellé.
Mais là, là, ça ne fonctionne pas, là. Si le
même libellé, dans une procédure de révision qui est semblable, là, à bien des
égards... comment se fait-il que ce n'est pas le même résultat? Parce que ce
n'est pas une chose banale de dire que la
révision va être disposée ou pas. Le ministre l'a affirmé avec conviction
tantôt. Il a dit : Dans mon modèle sur le TAT, oui, ce texte-là
présuppose que la révision va être disposée dès que je pèse sur le piton de la
contestation du TAT. C'est son interprétation qu'il a faite, qu'il nous a
livrée avec beaucoup de tact et d'assurance, mais...
M. Boulet : Et je vais le refaire.
Puis je serais particulièrement étonné que le TAQ soit en délibéré puis qu'on
dise, même en pratique, indépendamment du contenu de la loi, le réviseur
continue jusqu'à la fin, tant que la décision du TAQ ne soit pas rendue. Si
c'est ça, moi, je n'ai pas à déterminer comment le TAT va se comporter et le
processus de révision en vertu d'une autre loi.
Ce qui nous concerne aujourd'hui, c'est le
processus avec la CNESST. Puis, pour moi, c'est clair que quand tu saisis,
quand tu exerces un choix, bien, tu ne peux pas dire : Je fais ça mais je
garde l'autre à côté. Tu peux avoir une décision qui est rendue dans un
intervalle dans des cas rares, mais ce que vous déposez comme amendement...
vous étirez l'élastique passablement, parce que, là, vous dites : Tant que
le dossier n'a pas été pris en délibéré par les membres du tribunal. Vous le
savez, pris en délibéré, c'est... tout est fait, les témoins sont entendus, les
plaidoiries sont complétées, l'audience est faite, puis, tant que tu n'as pas
écrit ta décision... en fait, tu peux même l'avoir écrite, mais tant que le
dossier n'a pas été pris en délibéré, ça continue.
M. Leduc : Bien là, la décision...
M. Boulet : Il est pris en délibéré
après la fin de l'audience. Quand l'audience finit, il est pris en délibéré à
ce moment-là, puis la révision administrative...
Là, dans votre esprit, collègue, c'est que vous
dites que, quand il est pris en délibéré, là, le processus de révision
administrative finit. C'est ça, votre approche? Puis est-ce que c'est une
philosophie de déjudiciarisation que vous avez?
M. Leduc : Bien, M. le
ministre, ce n'est pas mon approche, c'est votre approche. C'est votre site
Internet que j'ai lu tantôt.
M. Boulet :
Bien non, c'est votre amendement.
M. Leduc : Oui, oui, mais cet
amendement-là, je l'ai pris, là, mot pour mot à partir de votre site Internet
du ministère du Travail. Je l'ai lu tantôt, toute la procédure de l'aide
sociale.
M. Boulet : Mais c'est une autre
loi, puis on est hors sujet, là, à dire : Ils font... Moi, je ne
discuterai pas, là, de ce qu'ils font dans la façon d'appliquer la Loi sur
l'aide sociale. Ce qui me préoccupe, c'est notre loi. Ça fait que moi, le
contexte de la... puis c'est tout à fait un autre contexte.
Bon, ici, on parlait d'abolir la révision
administrative. C'était ça, le consensus, la recommandation du CCTM. Vous savez
tout le cheminement qu'on a suivi, puis vous savez les choix qu'on a faits,
vous connaissez les raisons puis nos motivations, puis vous étiez totalement du
même avis, ce que je comprenais. Puis vous voulez déjudiciariser, puis vous
disiez même : «Une personne doit, après 90 jours», puis «est réputée
avoir valablement contesté». Ça fait que, là, quand vous avez réalisé que tu ne
pouvais pas contester puis maintenir ta révision administrative — bon,
je comprenais, un temps, que ce soit une obligation plutôt qu'une faculté parce
que ce n'était pas totalement incompatible avec la déjudiciarisation — bien
là, je vois que le chat sort un peu du sac, puis ce que vous voulez, c'est,
encore une fois, le beurre et l'argent du beurre. Il peut... En fait, le fait
qu'une personne se soit prévalue de ce droit-là, ce n'est plus une obligation.
Vous revenez à notre «peut». C'est ce que je comprends? Vous revenez à notre
texte initial : «Il peut, si la décision n'est pas rendue dans les
90 jours».
Donc, ce que je comprends de votre texte, que,
si elle a exercé cette faculté-là, ça n'empêche pas, mais est-ce que ça
pourrait empêcher dans certaines circonstances? Je ne le sais pas. Vous
remplacez un libellé qui est simple par un, encore une fois, qui est alambiqué,
«n'empêche pas la personne réviseure de rendre sa décision». En fait, vous
auriez pu dire : «fait en sorte que le réviseur doit rendre sa décision».
Je ne le sais pas. «N'empêche pas la personne réviseure», quand je lis ça, ça
ne m'empêche pas de le faire. Est-ce que je peux le faire? Est-ce que je dois
le faire? Puis ensuite vous dites : Tant que ça n'a pas été pris en
délibéré. Je le dis, là, on est dans le temps. Puis c'est des mois, ce n'est
pas des semaines, puis la preuve est faite, toutes les ressources du TAT ont
été utilisées. On est allés en conciliation prédécisionnelle, on n'a pas trouvé
d'accord. On a fait le contentieux, on a témoigné, on a plaidé. Là, c'est pris
en délibéré puis c'est là qu'on dit, à ce moment-là... puis là je ne le
comprends pas trop, là, mais, de votre propos, c'est : Là, le réviseur, il
faudrait que le TAT informe la commission que c'est pris en délibéré ce
jour-ci, ça fait qu'arrêtez le processus. Des mois, puis des mois, puis des
mois, puis un an et demi après, probablement la demande de révision. Je ne
sais pas. Moi, je trouve que c'est incompatible avec, un, l'objectif de
célérité puis, deux, incompatible avec la déjudiciarisation.
Puis, encore une fois, la Loi sur l'aide
sociale, c'est différent. Le raisonnement, les échanges, les analyses et les
réflexions qui nous ont menés au projet de loi n° 59, notamment pour la révision
administrative et le Tribunal administratif du travail, c'est complètement
distinct.
• (17 h 30) •
M. Leduc : Vous dites que mon
libellé est alambiqué. Moi, je suis surpris d'entendre ça parce que, comme je
le disais tantôt, c'est textuellement ce qui se retrouve sur votre site
Internet, le site du ministère du Travail. C'est textuellement. Je l'ai
copié-collé, M. le ministre. Ce n'est pas dans la loi sur les personnes à
l'aide sociale et c'est là mon point dans votre loi originale.
M. Boulet : ...
M. Leduc : Exactement. Suivez-moi,
là. Donc, dans votre loi sur les personnes de l'aide sociale, vous dites :
J'ai un libellé que j'ai repris à quelques mots près dans la ma loi sur la
santé et sécurité. Ces mêmes mots, dans la Loi sur l'aide sociale, ont un effet
que vous décrivez, vous, sur votre site Internet. Cet effet, c'est qu'une
décision, na, na, na... «Le fait qu'une personne se soit prévalue de ce droit
n'empêche pas la personne réviseure de rendre sa décision par la suite, et ce,
tant que le dossier n'a pas été pris en délibéré par les membres du tribunal.»
M.
Boulet : Mais ici, j'ai clairement exprimé que l'intention, notre
intention de législateur... que la commission ne se comporte pas de la
même façon. C'est pour ça que je dis, on ne peut pas transposer, on ne peut pas
importer ce qui se fait dans un contexte qui est totalement... qui peut être
totalement différent. Puis ce qui nous amené à raisonner comme on le fait,
c'est manifestement pour des raisons de célérité puis de déjudiciarisation.
Je comprends
ce que vous me dites, mais je ne veux pas qu'on calque ce qui se fait là puis
je ne veux pas aller dans une analyse en profondeur de ce qui se fait
là. Selon moi, c'est hors sujet. Ce que nous faisons dans notre projet de loi
n° 59, c'est ce que j'ai mentionné un peu plus tôt puis, en fait, que je
mentionne depuis le début de l'après-midi.
M. Leduc : Moi, je peux
difficilement laisser passer l'idée que les mêmes mots, dans deux lois
distinctes, mais qui relèvent du même ministre vont avoir une application
foncièrement différente dans une loi et dans une autre pour un processus de
révision qui, on va se le dire, n'est pas si différent que ça.
Est-ce à dire que, demain matin, vous allez vous
réveiller, M. le ministre, puis vous allez dire : Finalement, le libellé dans la loi sur l'aide sociale et les
personnes, je ne l'interprète plus de la même façon? Je change mon
interprétation et je décide, en fonction des mêmes mots sur lesquels je me
base, qu'il n'y aura pas de révision post 90 jours? Je décide aussi,
demain matin, moi, le ministre, en me réveillant, qu'il n'y en aura plus, de
révision, non plus? Est-ce à dire que c'est comme ça que ça fonctionne?
M.
Boulet : Non. Je vais le
redire d'une autre façon. Ce n'est pas la même loi, ce n'est pas le même
contexte, ce n'est pas le même régime et ce n'est pas le même tribunal. Et ce
n'est pas le même impératif de déjudiciarisation puis de célérité. Ce n'est pas
le même impératif d'engorgement. Tout est différent.
On ne peut pas importer... Ce n'est pas parce
qu'on fait une chose d'une manière qu'elle doit nécessairement se faire de la même manière si ce n'est pas le
même contexte, le même régime, la même loi puis encore moins le même tribunal. Ça fait que c'est pour ça que je
dis : On n'est pas dans le même sujet. Puis, si on débattait de la Loi sur
l'aide aux personnes et aux familles, ou la Loi sur l'aide sociale, ou la
loi... ou peu importe la loi, ce serait une autre discussion.
M. Leduc : Mais ça a quand même une
limite de dire : Ce n'est pas le même sujet. Puis bien sûr que, dans l'absolu, ce n'est jamais le même sujet, mais, de
toute façon... Tantôt, on a comparé des délais d'une loi à l'autre. Ce
n'était pas les mêmes sujets, mais vous teniez mordicus à ce que ça soit les
mêmes jours. On ne pouvait même pas avoir un chiffre différent. Ça fait qu'à un
moment donné on compare ou on ne compare pas, là.
Moi, là, ce que je trouve sidérant, pour vous le
dire honnêtement, c'est que vous nous dites vous-même que vous vous êtes
inspiré du libellé d'une loi que vous avez retravaillé avec quelques virgules
différentes, mais qu'il n'aura pas le même effet. Puis là ce que j'essaie de
saisir, c'est : Est-ce que c'est l'essence même de ce texte-là qui produit
cet effet-là? Puis visiblement non. Visiblement, ce n'est pas l'essence du
texte parce que, dans une loi, il fait tel effet, il fait un effet x, puis,
dans une loi, le même texte fait un effet y. Alors, qu'est-ce qui produit cet
effet différent là? C'est-tu l'interprétation du législateur? Auquel cas, ça me
semble évident qu'on n'est pas dans un cas d'interprétation de législateur, là.
Parce que
vous pouvez difficilement mettre sur votre propre site Intenet... qui est
clairement indiqué, là, comment ça
fonctionne, qui est de l'information publique, qui dit : Voici comment
fonctionne un processus de révision. Moi, le ministre du Travail qui gère cette loi-là, j'interprète ce même texte
dans ce contexte-là qui donne cet effet-là, mais je décide que, dans un autre contexte, il n'aura pas le même
effet. Mais, je veux dire, ça fait plusieurs lois qu'on travaille
ensemble, puis souvent je vous le fais dire, quelle est l'intention du
législateur, mais là on n'est pas dans ce scénario-là, là.
M. Boulet : Non, mais je vous l'ai
mentionné tout à l'heure que, si la décision de la révision administrative est
sur le point d'être rendue ou elle est envoyée, avant qu'il y ait une
communication, la personne pourra bénéficier du
dispositif de la décision de la révision administrative et se désister de la
contestation au Tribunal
administratif du travail. On n'a pas le même, et je le répète, le même impératif de déjudiciarisation. Ce n'est pas
la même loi, ce n'est pas le même régime,
ce n'est pas le même tribunal, ce n'est pas les mêmes objectifs. Et d'écrire
qu'on conserve les deux contestations jusqu'à tant qu'un des deux ait
pris en délibéré, c'est-à-dire celui où il y a un processus totalement quasi
judiciaire avec présentation des témoins puis des argumentations, ça
m'apparaît, ce que je vous mentionne, incompatible avec l'objectif de
déjudiciarisation et de célérité.
Ça me dépasse. Et je comprends ce que vous me
dites, très bien, puis, encore une fois, ce n'est pas le même environnement, ce
n'est pas le même contexte. On l'applique ici pour s'assurer de déjudiciariser
puis de mettre la révision administrative graduellement de côté et permettre
d'accélérer le processus visant à obtenir une décision finale de la part,
notamment, du Tribunal administratif du travail. Puis aller dans une direction
comme celle-là serait complètement contradictoire, selon ma compréhension.
M. Leduc : Est-ce à dire qu'advenant
que, là, l'on en reste avec votre libellé original, puis qu'on rejette mon
amendement, et que, là, bon, le projet de loi passe, la CNESST est saisie de
cette nouvelle loi là et de tous ses articles et fait tout un travail d'application
de cette réforme, est-ce à dire qu'elle va avoir... elle écoute probablement
tout ce qu'on dit, là, depuis le début, elle aura pris plein de notes, surtout
quand vous, vous vous exprimez, pour bien saisir
l'intention du législateur. Est-ce à dire qu'elle va appliquer, donc, ce que
vous voulez, c'est-à-dire que, post 90 jours, une personne peut aller
devant le tribunal, et que ça dispose complètement de la révision, ce qui
n'était pas nécessairement le cas dans la loi sur laquelle on s'est inspirés pour
bâtir celle démarche-là? Est-ce à dire que, si d'aventure, il y a un nouveau
ministre, peu importe, du même parti ou d'un autre parti, qui reprend vos
grandes responsabilités, est-ce à dire que
ce nouveau ministre là, de sa propre volonté, au-delà d'un changement
législatif, pourrait, lui,
décider : Ah! finalement, moi, je décide que j'ai la même interprétation
que de la loi sur l'aide sociale et
aux personnes? Que, oui, en effet, le texte qui est écrit là ne le
mentionne ni de près ni de loin? Donc, moi, je pense personnellement qu'on peut
en effet faire continuer à rouler la révision administrative et qu'elle n'est
pas disposée, cette révision-là.
• (17 h 40) •
M.
Boulet : Non, non. S'il
respecte la philosophie qui a guidé la modernisation, non. S'il respecte la
philosophie qui a guidé la rencontre des objectifs de célérité et de
déjudiciarisation, non.
Puis je veux juste revenir sur notre texte, là,
parce que je ne veux pas non plus que vous ayez l'impression que,
90 jours, c'est un automatisme. Tu sais, les personnes peuvent contester
94 jours ou 108 jours après, et c'est à partir de ce moment-là... On
comprend que c'est la personne contestante, que ce soit le travailleur ou
l'employeur, qui guide le processus. Je reviens toujours à la faculté qui est
consentie à cette personne-là, là.
M.
Leduc : Là, vous
dites : S'il respecte la philosophie, il ne le fera pas. D'accord. Mais,
s'il décide de ne pas respecter la
philosophie, il peut le faire, selon votre compréhension? Parce que, là, vous,
aujourd'hui, là, vous mentionnez une volonté du législateur, là, parce
que, là, on est devant le micro, c'est notifié, ça peut... Bon, on connaît bien
le concept, mais l'intention du législateur peut-elle s'exprimer ailleurs,
peut-elle s'exprimer demain matin, quand on se lève, quand il y a un changement
de ministre? La volonté du législateur peut-elle s'exprimer à ce moment-là
aussi?
M. Boulet :
Non, parce qu'en plus il y a des compromis qui ont été faits par des acteurs du
marché du travail. En plus, les objectifs du projet de loi modernisant le
régime de santé et sécurité sont clairs. Et ça nous apparaît tout à fait
contradictoire avec ces objectifs-là de penser qu'un ministre, dans x années,
dise : Nous... il changerait la loi. Parce qu'en plus vous savez que la
pratique a un effet, a une valeur interprétative dans l'application d'une loi. Ça fait que, dans cinq, huit,
10 ans, s'il y avait un texte qui n'est pas clair, bien, la pratique, à la
limite, pourrait être utilisée pour... comme élément d'interprétation.
Ça fait que non. Ça m'apparaît... J'ai répondu à votre question.
M.
Leduc : Oui, d'accord, mais
vous dites : Il faudrait qu'il change la loi, mais la loi ne dit rien par
rapport à...
M. Boulet : Mon Dieu! La loi est
très, très claire. Je vais relire notre texte. Je dis, ce texte-là, il est
alambiqué. L'autre était pire, là, parce que... «est réputé s'être valablement
prévalu d'un droit», là...
M. Leduc : Vous dites ça en tout
respect, là?
M. Boulet : Ah! bien oui. Bien oui.
Quand je dis «alambiqué», c'est un...
M. Leduc : C'est une blague.
M. Boulet : ...c'est un adjectif que
les personnes qui font des relations de travail connaissent bien. À des tables
de négociation de renouvellement de conventions, on en voit souvent...
M. Leduc : Oui, tout à fait.
M. Boulet : ...qui viennent des employeurs
puis des syndicats.
Mais je relis, là, notre texte :
«En outre, une personne peut contester devant le
tribunal la décision dont elle a demandé la révision si la commission n'a pas
disposé de sa demande dans les délais de 90 jours suivant sa réception.»
Donc, ça, ça veut dire que, 90 jours, c'est un élément déclencheur. Ça
peut être 94, 98, 102, peu importe.
Puis l'autre, c'est même un... comme un
tempérament :
«Lorsque la personne qui a demandé la révision a
requis un délai pour présenter ses observations», ce qu'on voit fréquemment
aussi, je demande un délai de trois semaines pour présenter mes
observations ou produire des documents, «le délai de 90 jours court à
partir de la production ou de la présentation» de ces observations-là. Donc, si
on a demandé trois semaines plus 90 jours, à partir de ce moment-là,
tu peux décider de contester, mais...
Tu peux même décider, collègue, d'attendre la
décision de la révision administrative, ce qui est un... ce qui est vraiment
bénéfique aussi, là. Si tu as décidé de faire confiance à un réviseur... parce
que c'est une simple révision par dossier, là, plus les observations, plus la
réanalyse, je dirais, d'un autre agent qui est un réviseur. Tu peux décider de
poursuivre. Tu attends la décision de la révision administrative puis, après
ça, tu décides de contester. Mais, si tu décides
de contester, bien, tu te dis... si tu saisis... De toute façon, tu vas avoir
une décision finale, puis c'est ta faculté, purement et simplement. Tu
peux le faire, puis je ne suis même pas capable d'anticiper le nombre de
personnes qui vont ultimement le faire, mais je sais que c'est souhaité par
plusieurs partenaires du marché du travail.
M. Leduc : Mais, là-dessus, on est
d'accord, M. le ministre. Je pense que le débat n'est pas tout à fait là, puis
on comprend l'objectif, on comprend la logique.
Moi, ce qui me chicote dans mon for intérieur,
c'est que l'interprétation que vous nous offrez, sur le point précis de la
disposition de la révision, du fait que la révision meurt, la révision non
rendue meurt, vous, vous dites : Ma lecture de ce texte, c'est que la
décision non rendue meurt lorsque je pèse sur le piton du tribunal, de la
contestation au tribunal. Moi, ce que je lis, pour une procédure très
similaire, dans une autre loi, bien sûr, mais une procédure très similaire,
puis vous avez dit vous-même que vous vous en étiez inspiré, pour le même
texte, non, la décision de meurt pas... La non-décision de révision ne meurt
pas, elle continue puis elle continue passablement loin. Est-ce qu'on continue
trop loin ou pas? On en débat, c'est bien, mais elle ne meurt pas du tout.
Et là, moi, ce que je soutiens, c'est : O.K.,
mais là, si ce n'est pas écrit dans la loi... Ce n'est pas du tout précisé dans
la loi que la non-décision de révision meurt. C'est pour ça qu'on a eu un
échange tantôt, puis j'ai été surpris de votre analyse. Mais, si ce n'est pas
précisé dans la loi ici et que ce n'est pas précisé dans la loi sur les
personnes à l'aide sociale, j'en déduis donc que c'est vous, le ministre, qui
choisissez l'interprétation de ça, et donc d'où ma question : Si le ministre
change, est-ce qu'il peut décider, lui aussi, d'avoir une nouvelle interprétation
de cette loi-là? Qui l'en empêcherait, finalement?
Puis, si quelqu'un voulait, d'aventure, l'en
empêcher... Je fais souvent référence au fait que j'aimerais occuper votre
siège éventuellement dans la vie. Si d'aventure, je deviens ministre du
Travail, que je dis : Tiens, moi, mon interprétation, c'est que, oui, il faut que la décision continue, la possibilité de rendre une décision doit continuer, même si on conteste au
tribunal après 90 jours, si moi, c'est ma nouvelle interprétation, puis
que je suis devenu ministre, et que je le
fais, bien, qu'est-ce qui va...
comment ça va fonctionner? Est-ce que je vais me faire contester? Puis, si je
me fais contester, bien là, je ne sais pas
par qui, par un syndicat, peut-être, je ne sais pas, ou par une association
patronale, si on se retrouve devant
le tribunal par rapport à une interprétation de la loi, je vais toujours bien
me référer à la loi sur les personnes de
l'aide sociale, que j'interprète d'une autre manière pour un même texte. Il y a
quelque chose qui ne fonctionne pas, là.
M.
Boulet : Avec votre permission, une suspension de deux minutes,
Mme la Présidente. Merci.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Parfait. Alors, nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à
17 h 47)
(Reprise à 17 h 50)
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Alors, M. le ministre, à vous la parole.
M.
Boulet : De consentement, je
demanderais qu'on suspende cet article-là. Moi, je vais faire une vérification
avec l'équipe d'aide financière de dernier recours, et on pourrait revenir demain
matin.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Sauf que, là, on a un amendement. Donc, on va suspendre l'amendement
ainsi que l'article. C'est bien ce que vous désirez?
M. Boulet :
On peut suspendre l'amendement inclus.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Et l'article? Est-ce qu'on a l'accord, le consentement?
M. Leduc :
Oui, oui.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Même chose pour le député de Nelligan?
M. Derraji :
Oui.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Parfait. Alors, on s'entend là-dessus. Parfait.
Alors donc, nous
poursuivons avec l'article... voyons! 109. M. le ministre.
M. Boulet :
Merci. L'article 359.1 de cette loi est modifié par le remplacement de «45» par
«60».
Cette disposition
propose que le délai pour contester une décision qui statue sur une plainte
d'un travailleur à la suite d'une sanction soit porté de 45 à 60 jours. En
fait, c'est les plaintes... En vertu de l'article 32 de la LATMP, de la Loi sur
les accidents de travail et maladies professionnelles, un travailleur qui fait
l'objet d'un congédiement, d'une mesure de représailles, d'une suspension ou
autre en raison d'un accident de travail ou de l'exercice d'un droit prévu à la
loi peut faire une plainte, puis c'est pour s'assurer que ça soit le même
délai. C'est tout.
La Présidente (Mme
IsaBelle) : Parfait. Merci. Y a-t-il des interventions? Il n'y a pas
d'intervention? Donc, nous allons procéder à la mise aux voix de l'article 109.
La Secrétaire :
M. Boulet (Trois-Rivières)?
M. Boulet :
Pour.
La
Secrétaire : Pour les
membres du groupe parlementaire
formant le gouvernement, Mme Boutin (Jean-Talon)?
Mme Boutin :
Pour.
La Secrétaire :
Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?
M. Derraji :
Pour.
La Secrétaire :
M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?
M. Leduc :
Pour.
La Secrétaire :
Et Mme IsaBelle (Huntingdon)?
La
Présidente (Mme IsaBelle) :
Abstention. Donc, l'article 109 est adopté. Nous poursuivons avec
l'article 110. M. le ministre.
M. Boulet :
Merci. Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 359.1, du
suivant :
«360. Une personne
qui se croit lésée par une décision rendue par la commission peut, à son choix,
en demander la révision dans les 30 jours de sa notification ou la contester
devant le Tribunal administratif du travail dans les 60 jours de sa
notification dans les cas suivants :
«1°
lorsque la décision porte sur un sujet visé aux paragraphes 1° à 5° du premier
alinéa de l'article 212 à la suite d'un avis rendu par le Bureau d'évaluation
médicale, au deuxième alinéa de l'article 230 à la suite d'un avis rendu par un
comité spécial ou au deuxième alinéa de l'article 233.5 à la suite d'un rapport
produit par un comité des maladies professionnelles oncologiques;
«2° lorsque la
décision est rendue en vertu des chapitres IX ou X.
«Dans les cas visés
au paragraphe 1° du premier alinéa, la commission ou le tribunal peut, le cas
échéant, décider de toute question faisant l'objet de la décision.
«Lorsqu'une décision
qui fait l'objet d'une demande de révision est également contestée devant le
tribunal, ce dernier défère l'affaire à la commission pour qu'elle en dispose
en révision.».
Donc, explications...
Évidemment, on en a parlé en long et en large depuis le début du dépôt de notre
commission parlementaire, mais explications. Donc, cette nouvelle disposition
offre le choix de demander la révision d'une
décision de la commission en révision administrative ou de la contester directement devant le Tribunal
administratif du travail, si elle porte sur une question médicale déterminée à
la suite d'un avis du Bureau d'évaluation médicale, du comité spécial dans le
cas des maladies professionnelles pulmonaires ou d'un comité oncologique dans
les cas de maladies professionnelles oncologiques. Les décisions en matière de financement
sont aussi visées.
Le délai pour
contester est de 30 jours, si la personne choisit de demander la révision
de la décision et de 60 jours, si elle choisit de contester devant le Tribunal
administratif du travail.
Donc, comme j'ai souvent
répété, si c'est des questions de nature médicale ou des questions d'imputation
ou de financement, il y a une possibilité d'opter entre la révision administrative et le Tribunal administratif du travail. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Y a-t-il des interventions à
l'article 110? Député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc :
Ce n'est pas sur toutes les décisions qu'on peut faire une...
M. Boulet :
Non.
M. Leduc :
«...dans le cas d'une maladie professionnelle pulmonaire ou d'un comité
oncologique...»
M. Boulet :
C'est toutes les affaires médicales où le TAT a généralement une valeur
ajoutée. Puis, tu sais, ça nous permet de respecter l'esprit de la Loi sur la
justice administrative, là, comme j'ai souvent répété, qui permet à un
administré d'avoir toujours accès à un recours en révision qui est simple et
peu coûteux, mais elle permet quand même d'exercer l'option et d'aller, dans le
cas de certaines décisions, au tribunal administratif. Puis c'est vraiment des
décisions qui concernent des sujets auxquels la valeur ajoutée de la révision
administrative est souvent peu significative, puis ça allonge le traitement du
dossier.
Ces questions
médicales, bien, vous le savez, là, la révision administrative est liée aux
opinions médicales, là, tout comme la première instance, de sorte qu'elle peut
très rarement modifier la décision initiale. Puis, en matière de financement,
les dossiers se retrouvent devant le tribunal puisqu'une seule partie,
généralement, là, hormis la commission qui s'implique dans les dossiers de financement,
est impliquée.
M. Leduc :
Est-ce que c'est... Là, c'est moi qui est limité dans mes connaissances, là.
Mais le fait d'avoir ciblé certaines maladies pour permettre ce processus-là,
c'est nouveau, ça?
M. Boulet :
Bien, tout l'article est de droit nouveau.
M. Leduc :
C'est ça.
M. Boulet :
Puis, tu sais, quand on réfère à 212, c'est les cinq aspects médicaux usuels
qu'on connaît, là. C'est le diagnostic, la date de consolidation, la
nature, la durée, la suffisance des soins et traitements, c'est les limitations
fonctionnelles, le cas échéant, puis c'est l'atteinte permanente à l'intégrité
physique ou psychique, le cas échéant. Puis
«de même nature», c'est ce qui découle de l'examen du comité des maladies
professionnelles pulmonaires et celui du comité des maladies
professionnelles oncologiques qu'on a créés.
Et toutes les
décisions en matière de partage de coûts, soit le handicap, soit le...
justement, comme ça existe dans la loi actuelle, ces dossiers-là qui
requièrent... bien, qui impliquent généralement une valeur, puis je ne vais pas
diminuer l'importance des autres, là, mais
qui donnent généralement une valeur ajoutée, où souvent il y a des
témoignages d'expert, c'est des dossiers plus costauds, là, en termes de
complexité, où, là, on donne un passage direct au Tribunal administratif du
travail.
M. Leduc :
Plutôt qu'à la révision?
M. Boulet :
Oui, puis c'est tous des dossiers... Puis vous le savez parce que vous avez
pratiqué, quand il y a des aspects médicaux puis des aspects de financement,
c'est long. C'est long puis, la révision administrative, c'est là qu'il y avait
le plus d'impacts sur la durée de traitement des dossiers dans ce type de
matière là. Donc, c'est ce qui apparaît dans cet article-là, là, qui est, du
début à la fin, de droit nouveau.
M.
Leduc : Parce que quand... Si je reprends mon exemple de la ligne, là,
dans mes cours de droit, dans des dossiers médicaux, en plus de la DRA puis du
TAT, il y avait le BEM qui s'introduisait en premier, si je comprends bien. Il
y a le BEM, après ça la DRA, après ça le TAT, et là on veut sauter par-dessus
la DRA.
M. Boulet :
Mon Dieu! Bien, je ne sais pas, là. Vous connaissez le processus, là. Tu sais,
il y a le médecin traitant puis, si, sur un des cinq aspects de 212, il y
a un désaccord avec le médecin, soit de l'employeur ou désigné par la CNESST,
le désaccord est acheminé au Bureau d'évaluation médicale, puis, après ça, la
CNESST rend une décision qui confirme l'avis du BEM. Et plutôt que d'aller à la
révision administrative, parce qu'ils sont contraints, là, sauf des circonstances particulières, d'entériner ce qui a déjà été
décidé, dans ces cinq aspects là, que j'ai mentionnés un petit peu plus tôt, le travailleur ou
l'employeur aurait la possibilité d'aller directement au Tribunal administratif du travail.
Sur la désimputation,
un cas d'obérer injustement, par exemple, ou de handicap, plutôt que d'aller en
révision administrative, parce
qu'on sait qu'ultimement ça va se ramasser au Tribunal administratif du travail pour accélérer le traitement du dossier et le déjudiciariser — c'est
toujours mes mots clés, hein, célérité puis déjudiciarisation — on
permet d'opter, mais on respecte, encore une fois, pour les autres, le principe
fondamental de la Loi sur la justice administrative, là, qui veut s'assurer
qu'un administré a toujours recours à une révision administrative, à un
processus de révision qui est simple et peu coûteux, là, même dans ces
matières-là où il y a une valeur ajoutée, là.
Donc, une personne
pourrait décider, puis je pense que c'est la philosophie qui nous a guidés
aussi à l'article 108, de permettre à la partie contestante d'opter. Puis,
encore une fois, les partenaires, je pense que c'est un beau compromis, c'est
un bel équilibre.
• (18 heures) •
M. Leduc :
J'essaie de comprendre la logique d'écriture de votre loi, puis là c'est moi
qui est confus, là. Je n'ai pas eu le temps de tout lire. Je ne pensais pas
qu'on... J'ai peut-être sous-évalué, là, le fait qu'on avait le BEM devant nous
aujourd'hui.
Donc, tantôt, à 108,
on parlait de décisions de la DRA, qu'on pouvait passer directement au
tribunal.
M. Boulet :
Mon Dieu...
M. Leduc :
Là, ici, on parle... parce que j'essaie de voir pourquoi le 90 jours ne se
retrouve pas... J'aurais pris pour acquis que ce soit le même 90 jours
ici, mais là c'est...
M. Boulet :
Mais ce n'est vraiment pas la même chose, là, c'est... Mon Dieu! Bon, je vais
revenir à l'article précédent, là, puis pourtant on en a discuté de long en
large, c'est dans le cas où une décision en révision administrative n'est pas
rendue avec diligence ou avec célérité. Là, la personne peut aller directement
au TAT.
Là, ici, on revient à
la base et on parle véritablement de... plutôt qu'abolir, purement et
simplement, la direction de la révision administrative, pour respecter la Loi
sur la justice administrative — je pense qu'on s'est bien compris
là-dessus — on
prévoit la possibilité de choisir entre la révision administrative et le Tribunal
administratif du travail dans les cas de questions médicales et de questions de
financement. Mais il y en a plusieurs, là. Il y a les cinq volets de 212, puis
il y a ce qui est pulmonaire, puis il y a ce qui est oncologique.
M. Leduc :
Ça n'aurait pas pu être sur tous les cas?
M.
Leduc : Bien, ce qu'on considérait, c'est que, dans les autres cas, la
valeur ajoutée du tribunal administratif n'est pas évidente. Puis là où il y avait le moins de célérité, c'est...
bien, vous le savez, vous avez pratiqué, dès qu'il y a un aspect médical
et dès qu'il y a un aspect de financement, c'est là que ça prend énormément de
temps.
M. Leduc :
Oui, d'accord. Juste pour précision, oui, j'ai pratiqué, mais pas beaucoup sur
la santé et sécurité. J'étais, comme je vous disais tantôt, plutôt dans la
recherche. J'ai fait de la syndicalisation aussi, un tout petit peu de griefs, mais la santé et sécurité, je n'y ai
pas... presque pas touché, en fait, pour être honnête. J'ai quelques
formations et autres, là, dans mon parcours
syndical, mais ce n'était pas du tout dans ma matière de prédilection, d'où mes
nombreuses questions.
Donc, ça, c'est...
O.K., ça, c'est comme le truc de base. Puis ce qu'on a discuté tantôt, c'est
peut-être ça qui a créé ma confusion, là, c'est que peut-être j'avais compris
qu'on aurait traité celui-là avant de l'autre, mais bon, peu importe. Donc, ça,
c'est le truc de base pour la plupart des décisions, la plupart des sujets. On
dit, dans la même logique que tantôt : On peut sauter par-dessus la DRA
sur x, y sujet en fonction de x, y délai, qu'on précise, 30 et 60 jours.
Puis tantôt on disait... oui, c'est ça, vous l'avez bien expliqué, là, tantôt,
où on disait c'est vraiment les 90 jours
mais pour une absence de décision. Puis
là on peut dire : Je ne veux même pas en avoir, de décision. C'est
bien ça?
M. Boulet :
Oui, tout à fait. Puis, encore une fois, c'est important de le faire dans le
respect de la Loi sur la justice administrative, qui demande d'avoir un processus
de révision simple. Donc, en le maintenant dans des cas où il n'y a pas de
valeur ajoutée, dans des cas où le niveau de complexité n'est pas le même, ça
respecte la Loi sur la justice administrative, qui réfère toujours à un recours
en révision simple et peu coûteux, alors que... L'option, ce n'est pas une...
je pense que c'est un beau compromis. Puis il faut dire aussi que c'est une
personne qui peut opter, puis vous comprenez que je peux le prendre de
différentes façons, là. Mais, si l'employeur décide d'opter puis il va directement
au Tribunal administratif du travail, ça peut être incompatible avec l'intérêt
du travailleur. Si c'est une simple question d'admissibilité, ça n'aurait pas nécessairement
de bon sens, là.
Mais je ne veux pas entrer
dans toutes les figures, mais je pense que vous comprenez l'impact que, si ça
avait lieu dans tout, bien, il y a probablement des personnes, puis sans
identifier les employeurs ou les travailleurs, qui iraient systématiquement au Tribunal
administratif du travail. Ça fait qu'il faut être conséquent. Il faut
dire : Oui, tu peux opter, mais pas pour n'importe quoi.
M. Leduc : Vous craignez de l'abus, potentiellement,
peu importe les deux parties, là, mais...
M. Boulet : Bien, je pense que, comme
parlementaires, on ne se mettra jamais à l'abri totalement des abus, mais il
faut s'assurer qu'il y en ait le moins possible. Puis je sais que, dans cette
matière-là, en santé et sécurité, il y a toujours des risques d'abus, tant du
côté des travailleurs que des employeurs.
M. Leduc : Comme dans tous les
domaines, là.
M. Boulet : Malheureusement.
M. Leduc : Bien oui.
M. Boulet : On ne se mettra jamais à
l'abri complètement.
M. Leduc : Là où il y a de l'homme,
il y a de l'hommerie, une citation bien connue.
Quand vous dites... vous référiez... en fait,
pas vous, mais votre article, puis vous le faisiez aussi, référiez à 212... c'est à la fin, je pense... non, c'est au premier alinéa,
lorsque la décision porte sur un sujet visé aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212... suite à
un avis rendu du BEM, puis là vous l'avez dit tantôt, là, il y avait cinq
enjeux : diagnostic, date ou période prévisible de consultation, nature,
nécessité, suffisance ou durée des soins et traitements administrés ou
prescrits, l'existence ou le pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité
physique ou psychique du travailleur, et finalement, 5°, l'existence ou
l'évaluation des limitations fonctionnelles du travailleur.
Quand vous dites : lorsque la décision
porte sur un sujet, c'est ça qui est écrit dans le texte, porte sur un
sujet visé aux paragraphes 1° à 5°,
l'employeur, logiquement, considère qu'il y a un des sujets ici, au moins un, en
tout cas, qui est sujet à contestation suite à un avis du BEM. Et est-ce
que le fait d'après ça l'amener au TAT ouvre la contestation du TAT sur
l'ensemble des cinq sujets? Est-ce que vous comprenez ce que je veux dire?
Est-ce que le fait d'avoir... Est-ce que c'est sur un seul aspect qu'il va y
avoir une audience au tribunal?
M. Boulet : Je ne suis pas sûr de
bien vous comprendre, là, mais normalement c'est sur le sujet contesté. Parce que, si vous référez aux cinq éléments
médicaux de 212, il y a un désaccord à la base. Ça peut être un
désaccord entre des médecins sur un, deux, trois, quatre ou cinq sujets, et
c'est ce qui confère la compétence du TAT. Le TAT ne se prononcera pas sur ce sur quoi il n'y a pas de désaccord entre les
médecins, là. Ça fait que je pense... Je ne sais pas si ça répond bien à votre question, là, mais ça
limite la compétence du tribunal administratif. Le tribunal
administratif n'aurait pas compétence de se prononcer là où il n'y a pas de
désaccord. Je pense que...
M. Leduc : Mais, c'est-à-dire,
est-ce que l'employeur pourrait, a posteriori, rendu aux audiences, soulever
des nouveaux désaccords?
M. Boulet : Ah! mais non parce que
le désaccord s'est cristallisé. Non, je pense que c'est... Là, vous avez un peu peur d'avoir peur des employeurs. Et donc vous
me dites : Le cas d'un employeur qui... il n'y a pas eu de
désaccord ou il y a eu un désaccord sur un sujet, ou deux sujets, ou trois
sujets de 212, puis qui arrive au TAT, puis là il arrive avec une preuve, puis
il conteste quatre et cinq... Non, quand même.
M. Leduc : C'est-à-dire que, s'il
s'essayait, il se ferait un petit peu revirer de bord par le juge ou, du moins,
ça serait un coup d'épée dans l'eau?
M. Boulet : Bien, à un moment donné,
le désaccord se cristallise. Puis tu ne peux pas non plus mettre, sur la table
du juge du TAT, un nouveau désaccord que tu crées au moment de l'audience, là.
M. Leduc : Non, c'est ça, c'est-à-dire,
si d'aventure, tu t'essaies, tu as bien beau t'essayer, mais là, après ça, ça
devient ta crédibilité que tu mets sur la table.
M. Boulet : Bien, puis, tu sais, les
employeurs — encore
une fois, j'espère qu'on présume tous de la bonne foi des employeurs — les
employeurs sont là puis ils paient 100 % des cotisations. Ils sont là pour
que le régime soit bien géré puis ils ne font pas, j'espère, sauf une
minorité... ils font des contestations en bonne et due forme, de manière
légitime, et ils s'appuient sur des preuves médicales. Puis je pourrais
renvoyer la balle du côté d'un travailleur qui ne pourrait pas non plus, là.
C'est tout le temps réciproque, là.
M. Leduc :
Je comprends. Parce que j'avais quand même une certaine crainte, puis vous
semblez me rassurer, à l'effet que l'ouverture, donc, d'un recours basé
sur un enjeu, bien, rouvre au complet le dossier, même si, en effet, il n'y avait pas de désaccord médical et que ça permettrait éventuellement
à un procureur patronal d'aller contester plusieurs choses qui n'étaient
pourtant pas, à l'origine, contestées par le médecin ni par celui du BEM. Mais
vous me confirmez que ce n'est pas le cas. Ça me semble intéressant et...
M. Boulet : Bien, c'est parce
que, tu sais... puis même, dans les procédures, tu sais, quand tu fais une requête
introductive, tu sais, quand tu fais ta requête en contestation, tu exprimes
tes motifs puis tu expliques les conclusions recherchées. Et donc c'est ce qui
confère la compétence au tribunal.
M. Leduc : Il faudrait donc une
espèce de circonstance exceptionnelle avec des faits nouveaux, par exemple,
pour qu'il y ait légitimité de tenter cette... d'ouvrir sur d'autres aspects
qui n'étaient pas contestés à l'origine.
M. Boulet : Je l'assume.
M. Leduc : Ce qui est,
j'imagine, assez rare dans ces circonstances-là.
Mme la Présidente, en fonction des réponses du ministre,
je ne sais pas si je vais déposer ou pas mon amendement. Alors, je vais juste
prendre une suspension pour en discuter rapidement.
La Présidente (Mme IsaBelle) : D'accord.
Alors, nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 18 h 10)
(Reprise à 18 h 25)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, y a-t-il d'autres interventions à l'article 110? Oui? Alors, député
d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc :
Merci, Mme la Présidente. Puis désolé si ça a pris un peu de temps parce qu'il
a fallu vraiment qu'on se casse la
tête pour bien comprendre les implications de l'article 108, qui est
suspendu maintenant, et du 110 en discussion. Puis je veux vous montrer le petit graphique qu'on a fait avec les
flèches pour les délais, de qui fait quoi puis de quelle colonne. Je pense que c'est la bonne lecture qu'on
a faite, mon collègue Guillaume et moi, mais je ne suis pas certain.
Alors, dans le fond, au lieu de faire un
amendement qui ne serait probablement pas correct parce qu'on aurait mal
compris, je vais y aller avec des questions pour saisir ce qui est devant nous.
Et là, en fait, je réalise, suite à la discussion avec mon collègue puis parce
qu'on a fouiné un peu, puis je ne l'avais pas compris tantôt, que là le 108 ne
concernait pas toutes les discussions... les types de décision ou les types de
révision.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, M. le ministre, 108 contient tous les types?
M. Leduc : Oui?
M. Boulet : Je n'ai jamais fait
de nuance...
M. Leduc : Bien, je sais,
mais...
M. Boulet : Je ne sais pas où
vous avez pris ça, là. Pour moi, c'est... Là, c'est on ne peut plus clair, là.
C'est «crystal clear», là. C'est «peut contester devant le tribunal la
décision dont elle a demandé la révision, donc, si la commission n'a pas
disposé de la révision dans les 90 jours». Donc, c'est sans égard à la
nature de la décision. Je pense que, là, il y a un peu de confusion de votre
part, là.
L'autre
article, l'article 110, c'est là qu'on réfère aux décisions qui concernent
les aspects médicaux, les cinq aspects médicaux de 212, et les décisions
en matière de financement. Évidemment, le comité des maladies professionnelles
pulmonaires et oncologiques... mais je ne vois pas de confusion dans les
textes, là, à moins de vouloir en inventer une. Je ne sais pas.
M. Leduc : Ce n'est pas mon
intention.
M. Boulet : Ça, c'est le reflet de
la créativité de Québec solidaire, hein?
M. Leduc : Oui, on est créatifs. Ça,
je vous le concède. Il n'y a pas de problème.
M. Boulet : Vous voyez des
limitations où il n'y en a pas.
M. Leduc : Sauf que, dans
l'article 359...
M. Boulet : Est-ce que c'est le
reflet de désir, collègue?
M.
Leduc : De désir? Désir de
confusion? Non, non, quand même pas. Désir de créativité, certainement, mais pas de confusion.
Mais là c'est peut-être nous qui l'avons lu tout
croche, là, mais, quand vous dites, dans 359, modifié par 108 qui est donc
suspendu, mais : «Une personne qui se croit lésée par une décision rendue
à la suite d'une demande faite en vertu de l'article 358», c'est ça qu'on
est allé revérifier. Mais là on l'a peut-être lu tout croche, là, puis je vais
le relire pour le bénéfice, mais la loi... la LATMP, à 358, dit ceci :
«Une personne qui se croit lésée
par une décision rendue par la commission en vertu de la présente loi peut,
dans les 30 jours de sa notification, en demander la révision.
«Cependant, une personne ne peut
demander la révision d'une question d'ordre médical sur laquelle la commission
est liée en vertu de l'article 224 ou d'une décision que la commission a
rendue en vertu de la section III du chapitre VII, ni demander une
révision de refus de la commission de reconsidérer sa décision en vertu du
premier alinéa de l'article 365.
«Une personne ne peut demander la
révision de l'acceptation ou du refus de la commission de conclure une
entente...» bon, là je ne lis pas au complet.
Puis : «Une personne ne peut
demander la révision du taux provisoire fixé par la commission en vertu de l'article 315.2.»
Notre lecture rapide de ça, ça
donnait l'impression que ça ne donnait pas...
M. Boulet : Oui. Non,
mais je comprends, mais 359, c'est toutes les décisions, c'est la création de
la possibilité de demander la révision d'une décision de la CNESST.
M. Leduc : Non, mais
c'est parce que votre article fait référence à 358.
M. Boulet : Mais 358,
c'est toutes les révisions, collègue. Je ne l'ai pas devant moi, là...
M. Leduc : O.K., bien,
c'est ça. Donc, c'est nous... O.K.
M. Boulet : ...mais
358, c'est : «Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par
la commission en vertu de la présente loi», là, indépendamment de sa nature,
là, je le dis moi-même, là, mais en vertu de la présente loi, donc sans égard à
la matière, «peut, dans les 30 jours de sa notification, en demander la
révision.»
M. Leduc : Mais après,
quand on dit «ne peut demander la révision d'une question d'ordre médical
sur laquelle la commission est liée», ça, ça n'a pas rapport?
M. Boulet : Non. Bien,
ça, c'est lié sur les cinq aspects de 212, mais il y a des irrégularités. Des
fois, il y a des demandes de révision qui concernent des irrégularités dans la
procédure. Puis, même si c'est de nature médicale, ça va devant le demandeur en
révision.
M. Leduc : O.K. Bon,
bien, j'ai bien fait de vous poser la question parce qu'on pensait peut-être
faire un amendement pour ce qu'on avait l'impression qui était de combler la
question du post 90 jours. Mais là vous me confirmez bel et bien, là, que,
dans le 108 qui est suspendu, ça concerne l'entièreté des types de
décision. Puis, en effet, on n'avait pas évoqué, dans notre échange, qu'il y
avait des limitations de quelconque nature, là.
M. Boulet : O.K. Je comprends.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, écoutez, compte tenu de l'heure, nous ajournons les travaux jusqu'à demain, sine die. Alors, bon dodo à tout le monde.
Je pense qu'il a été suggéré... C'est bien. Bonne soirée à tous et à
toutes.
(Fin de la séance à 18 h 30)