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(Dix heures huit minutes)
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'économie et du travail entreprend, ce matin,
deux jours de consultations particulières sur le dossier de la
sous-traitance à Hydro-Québec.
D'abord, je voudrais demander au secrétaire de la commission s'il
y a des remplacements.
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Il y a deux
remplacements. M. Claveau (Ungava) est remplacé par M. Chevrette
(Joliette) et M. Cusano (Viau) est remplacé par M. Gardner
(Arthabaska).
Le Président (M. Charbonneau): Est-ce que le
député de Vanter...
M. Lemieux: Le député de Vanier n'effectue pas de
remplacement ce matin, mais il demandera le consentement de l'Opposition s'il
désire intervenir. Je pense qu'il est permis par le règlement
que, sur consentement, je puisse intervenir...
Le Président (M. Charbonneau): Oui, oui.
M. Lemieux: ...sans avoir droit de vote.
Le Président (M. Charbonneau): Sur le temps de votre
équipe.
M. Lemieux: Merci.
Le Président (M. Charbonneau): L'ordre du jour pour les
deux jours, tel que convenu entre les deux formations politiques, est le
suivant. D'abord, des remarques préliminaires seront faites par le
ministre et par le porte-parole de l'Opposition. Ensuite, nous recevrons, ce
matin, l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du
Québec; cet après-midi, à 15 heures, nous recevrons le
Syndicat des employés de métiers d'Hydro-Québec, le
Syndicat des employés de bureau d'Hydro-Québec et le Syndicat des
techniciens d'Hydro-Québec; à 16 h 30, le Syndicat professionnel
des ingénieurs d'Hydro-Québec; en soirée, l'Association
des entrepreneurs en construction du Québec. Demain matin, à 10
heures, nous recevrons la Fédération des travailleurs du
Québec, FTQ-Construction, la
Fraternité provinciale des ouvriers en électricité,
Montréal et Québec et, par la suite, l'Association des
ingénieurs-conseils du Québec; en après-midi,
Hydro-Québec, d'abord, et on terminera avec les remarques finales du
porte-parole de l'Opposition, le député de Roberval, et avec
celles du ministre.
S'il n'y a pas de problème particulier, on va considérer
le procès-verbal comme adopté.
Nous allons immédiatement passer aux remarques
préliminaires. M. le ministre.
Remarques préliminaires M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Permettez-moi,
premièrement, d'attirer votre attention sur le fait que, aujourd'hui,
c'est une journée que je considère historique, parce que c'est le
27 octobre 1979 qu'a eu lieu l'inauguration de LG 2. Je dois vous dire que le
choix de faire siéger aujourd'hui la commission parlementaire, c'est
simplement une pure coïncidence. On vient de porter à mon
attention, ce matin, que c'est le 27 octobre 1979 que le premier ministre de
l'époque, M. René Lévesque, a inauguré LG 2.
Le Président (M. Charbonneau): C'est comme tes messages au
début des projections cinématographiques.
M. Ciaccia: Cela inaugure bien nos travaux.
Mmes et MM. les membres de la commission, la commission de
l'économie et du travail a été convoquée pour
examiner au cours des prochains jours la gestion de la sous-traitance à
Hydro-Québec. La chute des investissements d'Hydro-Québec au
cours des dernières années a posé avec beaucoup
d'acuité la question de l'impartition. La sous-traitance fut l'un des
points importants des dernières négociations des conditions de
travail à Hydro-Québec. Il en est résulté un
nouveau libellé de l'article 34 dans les conventions collectives
signées avec les techniciens, les employés de bureau et les
employés de métiers. Cet article qui pose les règles de
recours à la sous-traitance a été introduit pour la
première fois dans la convention collective des ingénieurs.
Les parties se sont entendues par
rapport au travail à forfait en inscrivant dans les conventions
toute une liste d'activités qui ne seront confiées qu'aux
employés d'Hydro-Québec. Seules les situations exceptionnelles
pourront justifier le recours aux services des entrepreneurs privés.
C'est la première fois qu'Hydro-Québee énonce de telle
façon sa position face à la sous-traitance et la traduit dans les
textes des conventions collectives, incluant celle du Syndicat professionnel
des ingénieurs.
Cette position a causé de nombreux remous chez les partenaires
privés d'Hydro-Québec. C'est avec beaucoup d'appréhension
qu'on a vu inscrite noir sur blanc cette précision de la position
d'Hydro-Québec. Certains craignent que l'équilibre qui
prévalait précédemment ne soit ainsi rompu allant
même jusqu'à remettre en cause la viabilité de certaines
entreprises.
C'est donc avec beaucoup d'intérêt que mes collègues
et moi-même étudierons les points de vue des différents
intervenants sur ces changements. Mais, auparavant, j'aimerais que noue ayons
à l'esprit toute l'importance d'Hydro-Québec pour notre
économie. De plus, il vaut la peine de rappeler l'environnement dans
lequel se situe la gestion de la sous-traitance.
Depuis plus de 40 ans, Hydro-Québec travaille à fournir de
l'électricité à la population du Québec et ce, dans
toutes les régions. Hydro-Québec est une société
d'envergure qui se classe parmi les grandes entreprises
nord-américaines. Son actif total a été multiplié
par douze depuis 1964, pour atteindre près de 31 000 000 000 $ en 1986.
Ses services rejoignent plus de 2 800 000 abonnés à travers un
réseau de distribution qui dépasse les 100 000 kilomètres.
En 1986, Hydro-Québec a vendu 144 000 000 000 de kilowattheures, dont 27
000 000 000 à l'exportation. Ceci la positionne comme la plus importante
compagnie de services publics au Canada.
C'est grâce au développement du potentiel
hydroélectrique de notre territoire qu'Hydro-Québec a pu
atteindre une taille aussi considérable. Ainsi, la puissance
installée est passée d'environ 11 000 mégawatts au
début des années soixante-dix à près de 24 500
mégawatts en 1986. Le développement de la Baie James a permis
l'addition de plus de 10 000 mégawatts, suscité des
investissements d'environ 15 000 000 000 $ et entraîné la
création de milliers d'emplois. Ces travaux se réalisaient dans
un contexte d'augmentation de la demande de 6 % en moyenne par année de
1975 à 1981. En 1982, un affaissement de la demande s'est fait sentir.
Il en est résulté un ralentissement du rythme d'investissement.
Ce n'est qu'en 1987 que l'on peut observer une reprise significative des
investissements d'Hydro-Québec.
Par-delà les investissements, Hydro-
Québec représente un moteur de développement
économique important pour le Québec. En effet, de nos jours,
l'énergie est présente dans toutes nos filières de
production. Une société qui réussit à obtenir un
avantage comparatif à ce chapitre influencera favorablement toute
l'économie. Avec la crise pétrolière des années
quatre-vingt-dix, le Québec a fait un très grand effort pour
faire pénétrer l'électricité. Cette politique avait
pour objectif d'assurer nos approvisionnements, tout en fournissant à
tous une source d'énergie à prix compétitif.
Dans le seul secteur industriel, Hydro-Québec fournit de
l'électricité à plus de 12 000 entreprises de toute nature
et de toute taille réparties dans toutes les régions du
Québec. Ces entreprises comptent sur une électricité
disponible, fiable et compétitive pour assurer leurs activités.
Elles ont, d'ailleurs, utilisé 48 000 000 000 de kilowattheures en
1986., L'industrie des pâtes et papiers accapare à elle seule 42 %
de ce total.
Le rayonnement d'Hydro-Québec se concrétise, entre autres,
par les emplois que ses activités génèrent. Chez
Hydro-Québec, il y a plus de 18 000 travailleurs permanents. D'ailleurs,
cette entreprise est le deuxième plus gros employeur du secteur
industriel québécois. On peut ajouter à cela plus de 40
000 emplois associés de différentes façons aux
activités d'Hydro-Québec, dont 4000 emplois directement
associés à la sous-traitance. Hydro-Québec fait affaire
avec des sous-traitants sur tout le territoire; ils se partagent annuellement
plus de 6000 contrats qui totalisent quelque 500 000 000 $.
Au-delà de son importance économique, il ne faut pas
oublier qu'Hydro-Québec produit un service dont aucun ménage,
aucune entreprise ne peut se passer. C'est sans doute à cause du
caractère essentiel de l'électricité qu'Hydro n'est pas
une entreprise comme les autres, mais plutôt une société
d'État. C'est ce qui nous permet d'assurer à tous et à
chacun sur le territoire du Québec un accès facile et
économique à cette forme d'énergie. Aussi, peu importent
les différents objectifs que nous souhaitons qu'Hydro-Québec
poursuive, il ne faudrait pas oublier qu'avant tout, particulièrement
sans notre climat, le rôle premier d'Hydro-Québec est de livrer
aux Québécois l'électricité qui leur est
nécessaire et cela, de façon économique.
Autant il est important qu'Hydro-Québec fasse appel à la
sous-traitance de façon à insuffler un dynamisme multiplicateur
d'activités dans le secteur privé, autant il est
nécessaire que cela ne remette pas en cause le fonctionnement efficace
de l'organisme.
Hydro-Québec est reconnue comme une entreprise ouverte et
coopérante avec le secteur privé. Que l'on pense au
développement du génie-conseil québécois et
à son
rayonnement dans le monde qui n'aurait pas été possible
sans les travaux confiés par Hydro-Québec dans le secteur du
génie-conseil.
Cette .position a, d'ailleurs, été citée en
exemple. Le ministère du Trésor et de l'Économie de
l'Ontario, dans un rapport en octobre 1986, mentionnait: "Dans certains cas, la
politique d'approvisionnement du gouvernement peut jouer un rôle
important en mettant à la disposition des entreprises ontariennes un
marché domestique considérable. L'expérience du
Québec est intéressante en cette matière.
L'émergence dans cette province de trois grandes firmes de
génie-conseil actives sur le marché international, Lavalin, SNC,
Monenco, est largement attribuable au fait que les travaux
d'Hydro-Québec découlant de ses grands projets
hydroélectriques étaient confiés au secteur
privé."
Il s'agit là d'une constatation importante, puisque 16 000
emplois directs sont reliés au génie-conseil au Québec.
Bien que tous ces emplois ne soient pas attribuables qu'aux activités
d'Hydro-Québec, celles-ci ont fourni une base de développement
indispensable. En effet, les plus grandes firmes d'ingénieurs-conseils
canadiennes se retrouvent au Québec. Si, aujourd'hui, elles peuvent
soumissionner sur des travaux à l'extérieur, en Chine, en
Afrique, c'est grâce aux politiques antérieures de sous-traitance.
Il faut s'assurer qu'une telle formule, gagnante par le passé, demeure.
D'ailleurs, des représentants d'Hydro-Ontario nous ont fait part de leur
intention de l'adopter.
La sous-traitance est également importante dans d'autres
secteurs. Par exemple, le réseau de transport de la Baie James a
occupé plusieurs entrepreneurs. Sur une période d'une dizaine
d'années, ils se sont partagé 950 000 000 $ en contrats
correspondant à plus de 7000 personnes/années. Plusieurs
entreprises ont été créées pour répondre aux
différents besoins d'Hydro-Québec. On y retrouve aujourd'hui une
expertise de grande valeur, tout aussi profitable à Hydro-Québec
qu'à l'ensemble de la société.
La stimulation de l'activité économique par le recours
à la sous-traitance ne doit pas, pour autant, négliger
l'importance d'une gestion saine de l'organisation. Ceci se reflète,
entre autres, par le maintien du savoir-faire à l'interne et par une
gestion efficace de l'organisation du travail. Les réalisations des
employés d'Hydro-Québec, depuis des années, ne sont plus
à démontrer, elles non plus. Les efforts déployés
en vue d'acquérir un haut niveau de compétence technique ont
permis à Hydro-Québec d'établir sa réputation au
plan international comme un leader du développement technologique. Il
est donc important qu'Hydro-Québec maintienne le savoir-faire
nécessaire à la réalisation de sa mission et ce, tant au
niveau des services de génie qu'au niveau technique. Le maintien d'un
service de qualité à la clientèle en dépend.
Par ailleurs, les décisions sur la sous-traitance affectent
l'organisation du travail. Normalement, une entreprise cherche à
utiliser sa main-d'oeuvre de la façon la plus productive, tout en se
donnant de la flexibilité dans l'utilisation de celle-ci.
M. le Président, nous venons de voir que la sous-traitance
à Hydro-Québec représente une activité importante
dont la gestion porte à conséquence non seulement sur son
fonctionnement, mais aussi sur notre environnement économique. La
sous-traitance se trouve donc à la jonction de deux milieux. La
signature des dernières conventions collectives semble avoir
modifié l'équilibre qui existait entre les deux. Il
apparaît donc qu'il faille actuellement s'assurer que la nouvelle
situation corresponde à une position d'équilibre entre, d'une
part, les intérêts d'Hydro-Québec et de ses employés
et, d'autre part, les intérêts de tous les
Québécois, qu'ils soient travailleurs ou consommateurs
d'électricité.
Voilà donc dans quel esprit nous allons aborder les interventions
des prochains jours. Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M.
le député de Roberval.
M. Michel Gauthier
M. Gauthier: Oui, M. le Président. Nous attendions tous du
ministre, ce matin, au moins des orientations quant à la position qu'il
entendait prendre au cours de cette commission parlementaire. II s'est
contenté de faire l'éloge d'Hydro-Québec, de nous
expliquer ce qu'était Hydro-Québec, ce que la plupart des gens
réunis dans cette salle savent déjà très bien, et
de nous faire l'éloge du génie-conseil québécois,
autre chose qui est partagée par beaucoup de gens dans cette salie.
Nous nous retrouvons aujourd'hui dans une situation conflictuelle pour
la simple raison que chaque fois qu'il m'a été donné de
demander au ministre de l'Énergie et des Ressources quelle est la
politique du gouvernement dans le domaine énergétique, quelle est
la politique du gouvernement dans tel secteur, les réponses,
principalement celles du ministre de l'Énergie et des Ressources, sont
toujours que ce gouvernement n'est pas un gouvernement de livres blancs et de
livres verts, ce gouvernement prend des décisions quotidiennement et
c'est ce qui fait notre politique en fonction de ce qui se passe chaque jour.
J'appelle cela un gouvernement qui gère sans politique ou qui n'a de
politique que celle des ballons d'essai.
Voilà pourquoi nous nous retrouvons
aujourd'hui en commission parlementaire dans une situation qu'il sera
certainement très difficile de départager. D'abord, le
gouvernement en place, après nous avoir promis et après avoir
promis à tous les intervenants dans cette salle, c'est-à-dire aux
gens d'Hydro-Québec, aux gens de l'entreprise privée, aux
entrepreneurs, après avoir fait pendant quelques années les beaux
jours électoraux du Québec avec une promesse d'aménager 25
000 mégawatts dans le nord du Québec, nous arrive aujourd'hui et
nous présente une réalité tellement décevante, M.
le Président, qu'à peine le quart des contrats prévus par
l'ancienne administration gouvernementale pour l'enclenchement de travaux dans
le nord du Québec - je vous rappelle qu'au lieu de 25 000 la position de
l'ancien gouvernement était de 3500 à 4500 mégawatts -
sont maintenant signés après deux ans d'activité de ce
gouvernement. C'est vous dire combien le niveau d'attente a été
poussé au maximum chez l'ensemble des Québécoises et des
Québécois, chez les travailleurs d'Hydro-Québec, chez les
entrepreneurs, les ingénieurs-conseils, bref chez tous les intervenants
qui pouvaient être intéressés par 1b question., La
réalité est bien décevante.
Ce gouvernement s'est également fait élire et a fait ses
premiers beaux jours à la tête de l'État en parlant de
privatiser, en voulant éliminer du champ de l'activité
gouvernementale le plus d'emplois possible. Par contre, dans d'autres
circonstances, dans des situations conflictuelles, ce gouvernement va poser des
gestes à l'encontre de sa philosophie de base et j'oserais dire que,
dans un cas comme dans l'autre, les gestes vont d'une extrémité
à l'autre du balancier parce qu'il n'y a pas de politique, parce que ces
gens-là ne savent pas où ils s'en vont.
Le problème, aujourd'hui, est de savoir si, dans
l'activité d'Hydro-Québec, il y a place pour la protection de
l'ensemble des travailleurs d'Hydro-Québec et s'il y a, en même
temps, dans le champ d'activité, au-delà de vaines promesses de
travaux extraordinaires qui ne se réaliseront peut-être jamais,
place pour les entrepreneurs, les ingénieurs du Québec et,
surtout, pour ceux et celles qui gagnent leur vie quotidiennement au service de
ces entrepreneurs, c'est-à-dire les travailleurs de l'industrie de la
construction.
Durant cette commission parlementaire, l'Opposition fera en sorte de
faire la lumière sur la question qui nous est soumise et essaiera
d'évaluer très justement si la protection nécessaire de
l'emploi des travailleurs d'Hydro-Québec est conciliable avec
l'activité économique qui doit appartenir et qui fournit du
travail et de la protection de travail à ceux et celles qui sont encore
plus vulnérables, c'est-à-dire les travailleurs de l'industrie de
la construction.
Il est difficile d'intervenir en pleine situation conflictuelle, mais
toujours est-il que, le manque de lignes directrices, le manque de
prévoyance du gouvernement nous situant maintenant en plein coeur de ce
conflit, nous ferons en sorte, par nos questions, de mettre en lumière
tous les éléments de la problématique. Nous interrogerons
avec un pareil intérêt et sans préjugé
défavorable l'ensemble des groupes qui se présenteront devant
nous et qui voudront bien éclairer notre lanterne de leur expertise.
Nous ferons en sorte que le gouvernement se branche pour une fois, qu'on sache
où il s'en va dans le domaine de l'hydroélectricité, qu'on
sache également quelles sont les perspectives d'avenir pour l'ensemble
des travailleurs et des travailleuses du Québec et quelles sont aussi
les actions qu'il entend prendre comme gouvernement pour assumer ses
responsabilités face à la situation difficile dans laquelle on se
trouve aujourd'hui. Je vous remercie. (10 h 30)
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le
député. Sur ces remarques préliminaires, j'invite
maintenant l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du
Québec à prendre place à la table des invités.
Auditions
Mesdames, messieurs, bonjour et bienvenue à la commission de
l'économie et du travail. On m'a indiqué que le porte-parole
était M. Forget. Alors, M. Forget, je pense que, pour vous, ce n'est pas
un retour aux sources, mais un retour, je l'espère, à des
anciennes amours. Je vous demanderais, puisque vous connaissez un peu les
règles de fonctionnement de notre commission, d'abord de
présenter les personnes qui vous accompagnent. Je vous indique que vous
avez 20 minutes pour votre présentation, initialement, et, par la suite,
le reste du temps, c'est-à-dire 70 minutes, est répartis
également de part et d'autre de la commission pour des discussions, des
échanges avec vous. Je vous indique, également, parce que
plusieurs membres de la commission me l'ont signalé, que ce sujet,
autant de ce côté-là de la salle que de ce
côté-ci, intéresse beaucoup de gens et qu'il y a beaucoup
de députés qui voudraient intervenir.
La seule façon dont on puisse le faire, c'est qu'on ait, dans la
mesure du possible, des réponses les plus précises possible et
les plus concises possible, ce qui permettra à plus de personnes
d'intervenir. Sur ce, je vous cède la parole.
Association des constructeurs de routes et grands
travaux du Québec
M. Forget (Claude): Merci, M. le Président.
Conformément à votre invitation,
j'aimerais présenter ceux qui sont ici devant vous. En
commençant par mon extrême droite, M, Gérald
Désourdy, président de l'Association canadienne de la
construction; M. Gabriel Richard, directeur général de
l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec,
que je désignerai maintenant comme l'"association". À mon
extrême gauche, Me Gisèle Bourque, avocate pour l'association; M.
Pierre Roux, président du conseil d'administration de l'association, Mme
Marie Bourbonnière, conseillère chez SECOR. Je vous remercie, M.
le Président, de vos mots de bienvenue. Je m'empresse de mettre à
exécution votre invitation à être concis et rapide.
M. le Président, M. le ministre, MM. et Mme les membres de la
commission, la convocation de cette commission parlementaire aujourd'hui, je
pense que tout le monde en convient, s'est faite à la suite de
représentations largement formulées par notre association.
J'aimerais, très brièvement, indiquer quel sens nous attachons
à cette séance et quels sont, à notre avis, les enjeux qui
sont soumis à votre attention et à vos
délibérations.
Il y a une tradition bien Connue à l'Assemblée nationale
de séances où l'on entend, tous les ans, Hydro-Québec pour
faire un examen général de sa situation et porter -
ordinairement, à l'occasion d'une demande de majoration des tarifs - un
diagnostic général, un diagnostic global sur la situation de
l'ensemble de l'entreprise. C'est toujours une tâche difficile pour les
membres de l'Assemblée nationale, même, peut-on dire, très
souvent une source de frustration, étant donné l'immense
complexité du sujet, la grosseur de l'entreprise et la difficulté
de porter rapidement des jugements sur une situation aussi
compliquée.
Aujourd'hui, cependant, le propos que nous soumettons à votre
attention est extrêmement différent. Pourquoi? J'essaierai de
l'expliquer très brièvement. Il semble qu'il y ait deux aspects
qui méritent notre attention.
Le problème qui vous est soumis aujourd'hui, contrairement
à celui qui fait l'objet des comparutions annuelles
d'Hydro-Québec, constitue un objet précis et simple. La
commission, que vous constituez aujourd'hui, est confrontée à une
impasse au sujet du rôle des monteurs de lignes à contrat,
essentiellement les membres représentés par notre
association.
Nous voulons, à ce sujet précis, poser des questions et
obtenir des réponses quant au rôle de ces monteurs de lignes
privés ou à contrat, à leur utilité pour
Hydro-Québec, au coût relatif qu'entraîne leur utilisation
par opposition aux ressources internes d'Hydro-Québec et à la
nature générale des relations qui doivent exister entre un
organisme d'État de l'importance d'Hydro-
Québec et des entreprises comme celle que nous
représentons.
C'est un sujet qui n'est pas compliqué, c'est un sujet qui est
à la portée de tous. Pour caricaturer un peu, on peut dire qu'il
s'agit essentiellement de planter des poteaux et d'y accrocher des fils; c'est,
avec un peu d'exagération, essentiellement le travail dont il est
question. Il n'est pas besoin d'être des ingénieurs, des
scientifiques ou des experts en administration pour comprendre, de quoi il
s'agit. Il devrait donc être possible d'obtenir sur un sujet comme
celui-là des explications compréhensibles, des explications
précises et qui permettent de faire le point sur un aspect relativement
modeste de l'ensemble des problèmes de gestion
d'Hydro-Québec.
La commission parlementaire, nous nous permettons de le souligner, est
la seule instance pour évaluer la manière dont HydroQuébec
prend des décisions, quels critères elle utilise dans ses choix,
quelle est la nature du processus décisionnel qu'elle utilise, bref,
pour faire une évaluation sur un cas d'espèce simple, à la
portée de tous, de la qualité de la gestion
d'Hydro-Québec.
Il n'existe pas, comme vous le savez, au Québec, de régie
ou de tribunal administratif qui aurait le pouvoir de poser des questions
détaillées sur tous les aspects de la gestion et de faire une
expertise. C'est une situation avec laquelle il faut compter et, qui, bien
sûr, rend difficile la tâche impartie à l'Assemblée
nationale quand il s'agit de poser des jugements sur la façon dont est
gérée Hydro-Québec. Donc, cette commission est un lieu
privilégié. Il n'y a pas, non plus, traditionnellement de
souhait, ni du côté gouvernemental, ni du côté
d'Hydro-Québec, pour qu'il y ait des interventions ad hoc, à la
pièce, dans l'administration interne d'Hydro-Québec.
Comme on le sait, il est important pour préserver la
réputation de professionnalisme d'Hydro-Québec, qu'il y ait une
certaine distance entre le gouvernement et Hydro-Québec, qu'il y ait une
certaine autonomie de gestion. C'est important, entre parenthèses, pour
préserver auprès des institutions financières la
réputation de professionnalisme et d'autonomie de l'entreprise.
Donc, cette commission parlementaire est la seule instance devant
laquelle il est possible à une partie comme notre association, qui a un
grief à soulever sur le plan de la gestion d'Hydro-Québec, de se
présenter. C'est une évaluation a posteriori. On n'essaie pas
d'influencer nécessairement ou d'intervenir dans des pratiques actuelles
ou futures, mais il s'agit, d'abord et avant tout, de juger ce qui s'est
passé dans le passé récent et de porter un jugement sur
cela. C'est une occasion par excellence en
commission parlementaire d'exiger en d'autres termes une reddition de
comptes devant l'Assemblée nationale de la part d'Hydro-Québec,
encore une fois, sur un sujet précis et bien circonscrit.
C'est donc un défi pour Hydro-Québec de démontrer
dans ce cas précis la rationalité des motifs ayant inspiré
ses décisions. Il ne s'agit pas d'un exercice de relations publiques. II
ne s'agit pas d'invoquer tout simplement les succès passés de
l'entreprise qui sont indéniables. Il ne s'agit pas pour
Hydro-Québec, nous semble-t-il, d'invoquer de notre part, de votre part,
une espèce de confiance aveugle, mais de fournir des réponses
précises à une question précise. Nous allons, très
simplement, vous dire que, selon nous, et à la lecture, par exemple, du
mémoire qui a été déposé devant vous par
Hydro-Québec, ce défi, Hydro-Québec ne l'a pas
relevé.
Un deuxième élément que nous voulons porter
à votre attention, c'est que ce problème précis, comme,
d'ailleurs, l'a indiqué le ministre dans ses remarques
préliminaires, a des implications de très grande portée.
L'association que nous représentons ici est une association assez
modeste. Effectivement, le nombre d'entreprises qui sont directement
impliquées dans les travaux sur les lignes de distribution ne se chiffre
guère à plus d'une douzaine. Ce sont toutes, ou à peu
près, des PME dont Hydro-Québec est, dans la plupart des cas,
l'unique client.
Ce phénomène doit, à mon avis, retenir votre
attention parce qu'il est évident, il tombe sous le sens commun que la
dernière chose qu'une entreprise qui dépend d'un seul client veut
faire, c'est compliquer ses relations avec ce client. Elle veut certainement
éviter de troubler cette relation, éviter de se placer dans une
situation de conflit. Il a donc dû y avoir quelque chose
d'extrêmement sérieux pour que des entreprises qui
dépendent aussi exclusivement et aussi lourdement d'un seul client
aillent jusqu'au point de demander une commission parlementaire. Dans la tenue
même de cette commission parlementaire, il y a là un symbole, un
symptôme d'un malaise profond, d'un malaise dont il faut absolument
connaître la cause.
Les griefs que nos membres avaient vis-à-vis
d'Hydro-Québec, d'ailleurs dans une disproportion écrasante avec
Hydro-Québec, ont même atteint un tel niveau qu'ils ont
cherché, avant même d'avoir la promesse qu'une commission
parlementaire soit tenue, à invoquer l'intervention des tribunaux.
Je dois vous dire, puisque ceci peut être utile pour permettre un
débat libre et ouvert, que l'association s'est désistée de
cette action, sous réserve, bien sûr, de ses droits, de
manière que personne ne puisse invoquer l'existence d'un litige devant
les tribunaux pour limiter de quelque façon que ce soit la nature des
réponses à fournir devant vous.
Question pertinente pour l'Assemblée nationale: l'aspect
particulier de la politique d'achat d'Hydro-Québec. Encore là, le
ministre y a fait allusion dans ses remarques préliminaires, depuis 1964
au moins, Hydro-Québec a appliqué une telle politique d'achat et
en a même fait à certaines périodes un
élément important du rôle qu'elle s'attribuait et que,
d'ailleurs, tout le monde lui reconnaissait comme un agent important du
développement économique» De ce côté, un bilan
serait certainement intéressant. Il est clair que, du côté
de l'achat de biens, par l'octroi d'une marge préférentielle,
HydroQuébec n'a probablement pas obtenu des résultats autres que
douteux. Cependant, comme le ministre l'a souligné, du côté
de l'achat de services, il y a eu des résultats intéressants.
Cependant, les exemples que l'on cite, les exemples que le ministre
lui-même a cités, sont des résultats dans le domaine de la
grande entreprise et il semble qu'effectivement Hydro-Québec ait eu
beaucoup de succès et qu'elle en ait encore dans ses relations avec de
grandes entreprises d'une taille qui, d'une façon ou d'une autre, est
comparable à la sienne. Cependant - et c'est la question que nous
voulons soulever aujourd'hui - comment se comporte Hydro-Québec dans ses
relations avec la petite et la moyenne entreprises?
On peut tirer beaucoup de leçons de l'expérience
passée. II est beaucoup plus important, pour le succès d'une
politique d'achat de services et la création d'entreprises
reliées à Hydro-Québec, de maintenir un environnement
stable, un environnement prévisible, selon des règles du jeu qui
sont connues, d'avoir des relations qui sont harmonieuses et qui ne
créent pas, plus qu'il n'est absolument inévitable, des
incertitudes, des frictions. (10 h 45)
Or, on se rend compte que, pour ce qui est des monteurs de lignes
à contrat, ces conditions de stabilité, de
prévisibilité, de confiance mutuelle sont désormais
absentes. Encore une fois, la tenue même de cette commission
parlementaire le montre. Donc, il s'agit déjà d'un échec
qui est indéniable.
Il y a eu des décennies de services fidèles et apparemment
satisfaisants et appréciés de la part des entrepreneurs
privés dans le domaine de la distribution. Cependant, sont apparues des
règles arbitraires décidées par Hydro-Québec sous
la pression de tierces parties, donc, des règles subjectives et
appliquées - du moins, c'est notre conviction - de manière
passablement vexatoire.
Dans ce dossier, en résumé, HydroQuébec ne s'est
pas comportée comme une entreprise publique de grande taille,
consciente de ses responsabilités, entre autres, celle de vivre
dans un état de symbiose et de collaboration avec les PME qui sont
complémentaires à son rôle.
Les monteurs de lignes à contrat - je le dis avec autant de force
que j'en suis capable - ne demandent pas de préférence, ne
demandent pas d'être traités de manière
privilégiée. Ils sont prêts à donner un service de
qualité au meilleur coût et à vivre ou à
périr en fonction de ce critère-là.
J'aimerais utiliser, M. le Président, avec votre permission, les
quelques minutes qui nous restent pour examiner avec vous à vol d'oiseau
la position d'Hydro-Québec telle qu'elle est reflétée dans
son mémoire.
Cette position se résume à quatre propositions qui
manifestement sont bien en deçà des exigences minimales d'une
réponse articulée aux griefs qui sont présentés par
l'association. En premier lieu, Hydro-Québec, dans son mémoire,
nous dit que la sous-traitance a été importante historiquement
dans l'ensemble des activités d'Hydro-Québec. Personne ne le nie,
mais ce n'est pas une réponse adéquate au grief particulier qui
est soumis par notre association.
On semble, dans ce mémoire d'Hydro-Québec, presque faire
reproche aux entrepreneurs privés de leur cupidité. On semble
suggérer qu'avec 700 000 000 $ consacrés aux lignes de transport,
avec 200 000 000 $ de travaux pour les postes, avec les 7400
personnes-année que tous ces travaux ont impliquées relativement
aux grands travaux de la Baie James, ils devraient être satisfaits, ils
devraient être contents et ils ne devraient pas avoir l'audace de s'en
plaindre.
Malheureusement, ceux qui ont bénéficié de ces
travaux ne sont pas principalement les membres de notre association. Ce n'est
donc pas une réponse adéquate à leur faire que de leur
opposer l'importance de ces travaux.
Les décisions, de toute manière, qui ont été
prises de ce côté-là, il faut présumer qu'elles ont
été prises dans les meilleurs intérêts
d'Hydro-Québec. Donc, il ne s'agissait pas d'une faveur; il s'agissait
d'une politique qui était adoptée pour des raisons qui n'ont rien
à voir avec leur grief actuel. Ce n'est pas pertinent au litige actuel
vis-à-vis de la distribution. On observe dans les chiffres mêmes
d'Hydro-Québec qu'un pourcentage extrêmement faible - de 5 %
à 35 % au maximum - des travaux a été confié
à l'externe. Pourquoi un si faible pourcentage? Le mémoire
d'Hydro-Québec est silencieux là-dessus.
Deuxièmement, Hydro-Québec dit essentiellement que la
réduction dans les travaux de sous-traitance est attribuable à la
baisse des besoins. C'est le résultat, en quelque sorte,
mécanique de l'évolution des circonstances. Cela ne
reflète pas une décision de la part des autorités
d'Hydro-Québec.
Eh bien, encore une fois, cette affirmation peut être vraie, en
général, pour l'ensemble des travaux d'Hydro-Québec. Tout
le monde est conscient qu'on ne construit pas la Baie James à tous les
ans. Il reste que ce n'est pas du tout évident, du côté des
travaux de distribution. Il y a, dans le mémoire d'Hydro-Québec,
une invitation aux membres de notre association à se diversifier. C'est
une affirmation qui peut être valable lorsqu'on transige avec de grandes
entreprises, mais, lorsque l'on transige avec des PME, comme c'est
essentiellement le cas ici, c'est une suggestion qui est presque insultante. Il
n'y a pas de pertinence, là non plus, entre les arguments
invoqués par Hydro-Québec et le grief particulier et
précis soulevé par l'association.
En troisième lieu, Hydro-Québec prétend ne pas
avoir modifié sa politique de sous-traitance, qu'elle a toujours eu la
même attitude et que notre association se plaint donc sans justification.
Pourtant, dans le mémoire même d'Hydro-Québec, on trouve
une affirmation factuelle dans le sens que, depuis 1978, du côté
des activités de production, il y a effectivement eu des changements de
politique. Il y a une politique différente relativement à la
distribution et aux autres secteurs d'activités d'Hydro-Québec.
Pourquoi cette différence"? Nulle part dans le mémoire ne
trouve-t-on une explication raisonnée de la différence entre le
pourcentage de 100 % des travaux dans certains secteurs et le pourcentage
extrêmement faible, que j'ai cité tout à l'heure,
applicable aux activités de distribution. S'il y a des raisons et si ces
raisons sont rationnelles, si elles sont reliées aux objectifs de
l'entreprise, pourquoi ne pas en avoir fait état et les soumettre
à votre attention?
De toute façon, si l'on accepte l'hypothèse
d'Hydro-Québec à savoir qu'il n'y a pas eu effectivement de
changements de politiques, pourquoi alors convenir avec le syndicat
d'insérer des dispositions nouvelles et sans précédent
dans les conventions collectives? C'est donc qu'il y a eu modifications des
politiques.
Un quatrième et dernier point, M. le Président, va dans le
sens qu'Hydro-Québec allègue qu'elle est préoccupée
par la productivité, par l'amélioration générale de
cette productivité. C'est un fait que sa productivité s'est
améliorée, mais, encore une fois et quels que soient les
progrès qui restent encore à faire au plan général,
du côté de la distribution, on semble exclure les
préoccupations de productivité. Pourtant, notre association a
fourni non pas une démonstration car ce n'était pas à
notre portée, mais des indications sérieuses qu'il y
avait un écart important de productivité et que, si
Hydro-Québec se préoccupe de productivité, elle aurait
dû répondre spécifiquement aux arguments, aux débuts
de preuve, aux indications sérieuses qu'il y a là un
problème important et, plus important, que son non-recours à la
sous-traitance constitue une dérogation par rapport au principe qu'elle
proclame de rechercher une meilleure productivité.
On allègue, pour écarter les éléments que
nous avons évoqués, que la nature des travaux est
différente. C'est une affirmation gratuite qui n'est en aucun cas
justifiée. Je crois qu'il y a un fardeau de la preuve de ce
côté-là qui n'a pas été relevé par
HydroQuébec. On semble contredire le principe général
énoncé dans l'introduction du rapport d'Hydro-Québec que
l'on veut rechercher de toutes les façons possibles une
amélioration de la productivité. Quand on voit un cas
précis où une telle possibilité est soulevée, on
semble du côté d'Hydro-Québec s'en
désintéresser.
Encore une fois, nous n'avons pas de réponse à nos
questions. Vous n'avez pas non plus, comme membres de la commission
parlementaire, à notre avis, une réponse satisfaisante au grief
présenté et à la question que nous avons posée.
M. le Président, je crois que vous m'avez fait signe et je dois
donc m'arrêter ici. Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. Forget. M. le
ministre, en vous rappelant, ainsi qu'à tous les membres de la
commission parlementaire et à nos invités, qu'il nous reste
encore une heure et dix minutes de séance et que plus les questions et
les réponses seront concises, plus de députés et de
membres de la commission pourront participer à l'exercice. M. le
ministre.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je veux remercier les
représentants de l'association pour leur exposé. Si vous le
voulez, j'aimerais reprendre brièvement les principaux points de votre
mémoire, car vous nous citez certains chiffres. Je veux m'assurer que
nous comprenons bien la position de votre association vis-à-vis de la
sous-traitance.
La raison fondamentale de votre insatisfaction envers
Hydro-Québec dans ce dossier est le refus de cette dernière de
revoir son intention de réduire son recours à l'externe pour
exécuter des travaux sur les lignes de distribution. Vous dites: Tel que
spécifié dans la dernière convention collective de travail
entre Hydro-Québec et le Syndicat des employés de métiers
d'Hydro-Québec, le nombre maximal de personnes-année, pour les
contrats concernant Ies monteurs de lignes, passera de 1000
personnes-année à 500 personnes-année en 1988. Cette
clause découle d'une modification de l'attitude d'Hydro-Québec au
sujet de la sous-traitance. Hydro-Québec rapatrie à l'interne des
travaux que vous effectuiez auparavant.
Cette décision vous incommode à deux points de vue: D'une
part, plusieurs de vos travailleurs se retrouveront au chômage; d'autre
part, les entrepreneurs ont investi dans de l'équipement qui sera mis au
rancart. Une telle situation vous est d'autant plus difficile à accepter
qu'Hydro-Québec, de son côté, s'est mise à acheter
des équipements semblables aux vôtres et engage de nouveaux
monteurs de lignes, d'après les représentations incluses dans
votre mémoire.
En conséquence, pour vous, la décision
d'Hydro-Québec n'est pas la résultante d'une diminution des
travaux sur les lignes de distribution. Vous craignez même
qu'Hydro-Québec n'en arrive à cesser totalement son recours
à l'externe pour ce genre de travaux. Pour vous, le comportement
d'Hydro-Québec dans ce dossier est dicté par les syndicats
internes et non pas par des principes de saine gestion. En effet,
Hydro-Québec a besoin des sous-traitants pour l'aider en cas d'urgence.
Or, d'après vous, vous ne pouvez être présents en cas
d'urgence si vous n'avez pas un minimum de travail régulier pour assurer
cette présence, et la majorité de vos contrats sont
octroyés par Hydro-Québec.
D'autre part, selon votre mémoire, sur la question des
coûts, vous êtes très concurrentiels. En conséquence,
l'utilisation de vos services sur une base permanente signifierait des
économies de coûts significatives pour l'entreprise; consommateurs
et contribuables en bénéficieraient.
Êtes-vous d'accord avec ce petit résumé, cette
description d'une partie de votre position?
M. Forget (Claude): Tout à fait, M. le ministre. Il y a
deux dimensions; la première est la qualité du service. Nous
prétendons que les membres de notre association sont plus en mesure que
les employés internes d'Hydro-Québec de contribuer, par exemple,
à la solution rapide de pannes dans les cas de force majeure où
un événement fortuit intervient, comme on en a fait
l'expérience presque tous les hivers et même l'été
dernier. La disponibilité des équipes des entrepreneurs
privés est un élément important des avantages qu'ils font
valoir. Us ont, dans le passé, été en mesure d'intervenir
rapidement et, si on continue d'avoir recours à leurs services, ils
permettront à Hydro-Québec de maintenir, sur le plan de la
réparation des pannes, un délai de réponse
extrêmement court. Cela suppose, bien sûr, qu'on ne fait pas appel
à eux seulement dans les cas de pannes puisqu'il est difficile de
maintenir une
entreprise seulement lorsqu'il y a du verglas en janvier ou une
inondation en juillet. Cela suppose un niveau minimum de services
réguliers et une disponibilité constante.
Le deuxième élément auquel vous avez fait allusion,
ce sont, bien sûr, les études et les affirmations
d'Hydro-Québec, dans bien des cas, selon lesquelles il y a une
différence de coûts significative. Plusieurs pourcentages ont
été cités; ils sont repris dans notre mémoire. Les
données que nous avons colligées, si elles n'indiquent pas une
différence importante d'efficacité entre l'interne et l'externe,
du moins, créent un doute sérieux que nous ne sommes pas en
mesure de résoudre puisque nous n'avons pas accès aux
données détaillées d'Hdro-Québec, bien
évidemment. Mais, nous estimons qu'il y a là, pour
Hydro-Québec, un fardeau de la preuve à relever qui devrait
démontrer à la commission parlementaire et à l'opinion
publique que ce doute sérieux, après étude, ne doit pas
être retenu.
Au contraire, ils disent: On compare des pommes et des oranges, mais ils
n'en fournissent aucunement la preuve. La différence est de l'ordre de
65 %, selon nous. Peut-être arriverait-on, avec une étude
détaillée, à un autre pourcentage. Le point principal
n'est pas là; il y a un fardeau de la preuve, il y a une
présomption qu'il y a là un problème et on aimerait que
quelqu'un l'examine de façon objective et approfondie.
M. Ciaccia: Lors de la commission parlementaire du 4 mars
dernier, Hydro-Québec a effectivement affirmé que sa politique de
sous-traitance est basée sur la répartition suivante des travaux.
Règle générale, les contrats de construction sont
octroyés aux entrepreneurs du secteur privé et l'entretien aux
travailleurs internes. Dans le cas des travaux sur les lignes de distribution,
vos propos indiquent que cette répartition des tâches ne
s'applique pas de façon aussi tranchée. (11 heures)
J'aimerais que vous expliquiez davantage aux membres de cette commission
le type de travaux qu'Hydro-Québec avait l'habitude de vous confier.
Êtes-vous capable de nous dire quel pourcentage des travaux s'associait
à la construction et lequel à l'entretien? Y a-t-il eu
évolution dans cette répartition des tâches et est-ce que
l'attitude d'Hydro-Québec a été constante dans le
temps?
M. Forget (Claude): D'abord, M- le ministre, un signe
extérieur qu'à l'intérieur même
d'Hydro-Québec ces règles font l'objet d'un certain flottement et
d'un flottement qui est progressivement interprété au
désavantage des gens de l'extérieur, des entrepreneurs, c'est
qu'il y a eu au cours des derniers mois, en 1986 et en 1987 - notre
mémoire en fait état et je n'entrerai pas dans les détails
- des contrats sans préciser si c'était de la construction ou de
l'entretien, puisque, justement, il y a une zone grise, des contrats que la
direction d'Hydro-Québec semblait considérer comme des contrats
admissibles pour des entrepreneurs privés et, apparemment, à la
suite de pressions du syndicat interne, ayant accordé ces contrats les a
retirés, les a annulés ou abrégés; on a un certain
nombre de données dans le mémoire qui l'indiquent. Donc, il y a
un flottement à l'intérieur d'Hydro-Québec quant à
la façon dont on applique cette distinction et c'est un flottement qu'on
interprète de plus en plus de manière à exclure les
entrepreneurs privés. Quant à vous dire comment on pourrait
définir cela, il y a dans le mémoire d'Hydro-Québec,
relativement à une autre catégorie de travaux, une
énumération de différentes Glasses d'activité qui
peuvent être rangées dans une catégorie ou une autre et on
se rend compte à la lecture de cette énumération qu'il y a
certains travaux, même avec cette définition, qui demeurent
extrêmement difficiles à catégoriser. Par exemple, le
remplacement d'un équipement ancien et endommagé par un
équipement moderne reflétant une nouvelle technologie, dans
quelle mesure est-ce de la construction ou de l'entretien? On se rend compte
tout de suite qu'il y a place pour énormément
d'interprétations subjectives et on pourrait, bien sûr, si on
avait l'occasion ou si on y était invité, arriver avec notre
propre définitition, ce qu'on n'a pas fait jusqu'à maintenant.
Mais il est clair qu'il est probablement possible d'en arriver à une
définition, pourvu qu'on ait l'assurance que cette définition
sera appliquée de bonne foi, sans pressions indues pour faire pencher la
balance d'un seul côté.
M. Ciaccia: Prenons un exemple spécifique dont vous
pourriez peut-être nous parler un peu, nous donner plus de
détails, le remplacement des disjoncteurs; c'est un
élément de votre mémoire... Est-ce un travail d'entretien
et est-ce un exemple type du travail que vous faisiez et qui sera
dorénavant fait par les employés d'Hydro-Québec?
M. Forget (Claude): Pour ne pas dépasser mon seuil
d'incompétence, M. le ministre, je vais demander à mes
collègues à la table, peut-être à M. Richard, de
répondre.
M. Richard (Gabriel): Oui. Le remplacement de disjoncteurs...
M. Ciaccia: Je suis heureux de voir que vous appliquez le "Peter
Principle".
M. Forget (Claude): Exactement! M. Ciaccia: Ha! Ha!
Ha!
M. Richard (Gabriel): Le remplacement de disjoncteurs pour
fournir le même service est un travail d'entretien.
M. Ciaccia: Excusez-moi.
M. Richard (Gabriel): Le remplacement de disjoncteurs par des
disjoncteurs semblables pour fournir le même service est un travail qu'on
peut qualifier de travail d'entretien.
M. Ciaccia: Est-ce que c'est un travail qui n'est plus
considéré comme de l'entretien? Est-ce que cela a
été changé?
M. Richard (Gabriel): Non, le travail n'a pas été
changé comme tel.
M. Roux (Pierre): ...du travail comme tel a été
changé.
M. Ciaccia: C'est cela que je veux dire. Je ne parle pas du
travail comme tel, mais est-ce que dans la qualification, d'Hydro-Québec
vous faisiez ce travail auparavant et maintenant, avec la nouvelle convention,
vous ne le faites plus? Est-ce que c'est un exemple?
M. Roux: Je peux vous dire que, présentement, on n'en fait
presque plus sinon pas du tout et qu'auparavant on les faisait tous, tous les
travaux de disjoncteurs.
Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre?
M. le député de Roberval.
M. Gauthier: Oui, M. le Président. En partant de
l'idée, on s'entend bien avec le ministre, on fait chacun le bout qu'on
a envie de faire et on revient par alternance dans la mesure où il reste
du temps...
M. Ciaccia: C'est cela.
M. Gauthier: D'accord. M. le Président, j'aimerais d'abord
remercier nos invités d'avoir présenté leur mémoire
et j'aimerais leur demander de brosser un tableau bien clair de la situation.
Il y a beaucoup de gens qui s'intéressent à cela et qui ne sont
pas tous des experts. Je voudrais savoir quelle est la situation actuelle
relativement au nombre d'entrepreneurs qui sont touchés par le sujet
dont on discute aujourd'hui et quel est l'impact actuel sur l'emploi des
travailleurs. Combien y a-t-il de travailleurs à votre emploi ou qui
étaient à votre emploi il y a deux ans et qui ne sont plus
à votre emploi vu les nouvelles dispositions de la convention collective
et la nouvelle façon, surtout, qu'a Hydro-Québec
d'interpréter ces choses? Pourriez-vous nous dire ça bien
clairement?
M. Forget (Claude): Le nombre d'emplois en jeu, strictement des
emplois des entrepreneurs sans toucher aux emplois qui, indirectement, peuvent
être affectés par ça -donc, c'est une estimation minimaie -
le nombre d'emplois en jeu est de 500. Depuis l'application du programme PAQS
jusqu'en 1988, il était prévu que les entrepreneurs privés
fonctionnaient, quoique ce ne soit pas nécessairement le cas en
réalité, à un plafond maximum de 1000
hommes-années. Avec l'application des dispositions prévues
à la convention collective, à compter de 1988, ce total serait
réduit de moitié- Donc, de 1000 à 500. C'est ce dont on
parle. Ce sont 500 emplois.
Comme nous attirons l'attention dans notre mémoire, il s'agit de
500 employés des entrepreneurs privés dont une bonne partie sont
des travailleurs qui sont à l'emploi de ces entreprises depuis un bon
nombre d'années. Ce que l'on observe à cause de l'application de
cette règle ou ce qu'on risque d'observer à cause de
l'application de cette règle, c'est la mise à pied par les
entrepreneurs privés, si ça va aussi loin que cela, et si
certaines d'entre elles, à plus forte raison, sont forcées de
fermer parce qu'elles n'atteignent plus de seuil de rentabilité, on est
devant la perspective du renvoi de travailleurs de plus de 40 ans avec
plusieurs années d'expérience alors qu'au, même moment
Hydro-Québec engage de jeunes employés qui, normalement, n'est-ce
pas, ne devraient pas avoir la préférence.
Si cette politique de substitution, à supposer même qu'on
en accepte le mérite, s'appliquait normalement, le moins qu'on aurait pu
espérer, et je parle là dans la perspective des employés
eux-mêmes, c'est qu'Hydro-Québec engage, dans le fond, les
employés mis à pied par les entrepreneurs privés. Ce n'est
pas du tout ce à quoi on peut s'attendre dans les circonstances et le
renvoi de travailleurs expérimentés et parfois âgés
de plus de 40 ou 45 ans et leur remplacement par de jeunes travailleurs qui
sont nouveaux venus dans l'industrie, il me semble que simplement sur ce plan,
cette politique a un aspect social assez peu acceptable.
M. Gauthier: Oui, je vous remercie. Vous portez un jugement assez
sévère quant à l'efficacité des employés,
des services internes d'Hydro-Québec par rapport à vos propres
services, par rapport aux gens qui travaillent pour vos entreprises. Vous dites
avoir fait une étude qui révélait une différence
dans l'efficacité assez impressionnante que je n'ose mentionner.
Pourriez-vous nous indiquer à partir de quelle méthode,
avec quelle méthodologie avez-vous pu établir un taux aussi
énorme dans l'efficacité de vos employés par rapport
à ceux d'Hydro-Québec?
M. Forget (Claude): Nous pourrions faire circuler auprès
des membres de la commission qui s'y intéressent la source,
l'étude de base qui a servi à faire ces affirmations. C'est un
travail qui est paradoxal dans un certain sens puisque l'on parle d'une
entreprise publique. Malheureusement, la transparence du fonctionnement
d'Hydro-Québec relativement à l'utilisation de son personnel
n'est pas parfaite. Donc, il n'y avait aucun moyen direct de connaître,
de la part d'Hydro-Québec elle-même, comment elle utilisait son
personnel. Les membres de l'association ont donc résolu de faire faire
une enquête à leurs frais pour examiner le comportement des
équipes de travail d'Hydro-Québec et de les comparer au
comportement d'équipes de travail des entrepreneurs privés.
Encore une fois, nous pourrons faire circuler cette étude. C'est
un travail simplement d'observation fait par une entreprise professionnelle en
la matière et où l'on a calculé essentiellement les heures
passées au travail, d'une part, et les heures passées en dehors
du travail. Je souligne ici que les heures définies comme étant
passées au travail incluent les périodes de déplacement
vers le travail ou au retour du travail. Donc, tout ce qui était des
heures travaillées par opposition à des heures non
travaillées, utilisées pour les périodes de repas, les
périodes de repos, etc. L'observation qui a été faite par
cette enquête, c'est qu'il y avait une différence marquée;
environ un peu plus de sept heures étaient effectivement
travaillées, c'est-à-dire soit au travail ou en transport par les
équipes privées et environ quatre heures seulement par les
équipes d'Hydro-Québec. C'est donc là une
différence très marquée.
Dans la production du pourcentage de 65 %, comme c'est indiqué en
annexe au mémoire, ont été ignorées les
observations relatives à une équipe d'Hydro-Québec qui n'a
pas travaillé du tout pendant une journée, c'était
considéré comme un cas extrême qui a été
exclu; également, ont été éliminées toutes
les observations portant sur une partie seulement de la journée
plutôt que sur l'ensemble de la journée. C'est à partir de
la comparaison des moyennes d'Hydro-Québec et de celles de l'entreprise
privée que l'on obtient la différence de 65 %.
Remarquez, M. le député, que nous ne faisons aucune
affirmation basée sur le caractère scientifique de cette
observation. Tout ce que nous disons, c'est qu'à supposer qu'il s'agisse
là d'un échantillon qui ne soit pas trop biaisé - cela n'a
pas été fait, il n'y avait aucune intention de choisir les pires
équipes, etc., cela a été fait au hasard, mais,
malgré tout, ce n'est pas un échantillon scientifique - il y a au
moins une indication sérieuse qu'il y a un écart de l'ordre de 65
%.
Il est bien sûr qu'une entreprise spécialisée dans
l'étude du travail, qui pourrait avoir accès, chronomètre
en main, aux équipes de travail des deux côtés et observer
ce travail, pourrait arriver à un total différent. Nous croyons
que, puisque c'est la meilleure preuve que nous pouvons avancer, qu'il existe
effectivement une différence de productivité, nous avions le
devoir de la présenter pour au moins dire: II y a un doute
sérieux, il y a un doute documenté. Si on a des
hésitations quant à son caractère scientifique ou sa
fiabilité, libre à Hydro-Québec de commander une
étude et d'en faire part à la commission parlementaire. Mais, ce
n'est pas suffisant de nous dire: Ces chiffres, ce n'est pas une étude
scientifique, c'est tout ce que l'on pouvait faire avec les ressources
limitées. N'oublions pas, nous avons douze PME face à un
géant. Comment est-ce que l'on peut comparer nos capacités de
produire des preuves à la capacité d'Hydro-Québec d'y
répondre? Malgré tout, à notre grand désarroi,
Hydro-Québec n'y répond même pas.
M. Gauthier: Est-ce que cela va, M. le Président? À
la page 15 de votre mémoire, on dit et je cite: "Si on considère
le cas de sociétés hydroélectriques des autres provinces
du Canada, il nous est dit qu'il n'y a aucune hausse dans l'utilisation
d'équipes internes en matière de construction et d'entretien de
réseaux de distribution électrique." Puisque vous avez
très certainement fouillé un peu plus la question, surtout sur ce
qui se faisait ailleurs, est-ce que vous avez des chiffres quant à une
proportion de travaux qui pourrait exister ailleurs, principalement en Ontario,
par rapport à ce qui se fait au Québec? Est-ce
qu'Hydro-Québec concède davantage de contrats à des
entreprises privées que d'autres sociétés moins
importantes, soit, mais du même type ailleurs? Avez-vous des
données là-dessus?
M. Forget (Claude): Nous avons des données où
certainement nous avons effectué des sondages auprès d'autres
entreprises dans le domaine des utilités publiques au Québec, au
Canada et aux États-Unis et les observations que nous avons faites
à ce sujet sont consignées dans notre rapport. Il y a,
effectivement, des indications dans le sens qu'il n'y a pas, dans la plupart
des autres sociétés d'utilités publiques, un mouvement
pour réduire la sous-traitance. Au contraire, dans la plupart, il y a
une tendance inverse puisqu'on en réalise graduellement les
avantages.
Malheureusement, M. Le député, nous ne pouvons pas citer
des chiffres précis étant donné la nature de ce travail.
Nous ne sommes pas un tribunal, nous ne pouvons pas citer, par subpoena, des
témoins d'autres entreprises et ils considèrent qu'il s'agit
là de questions d'administration interne; ils ne sont pas prêts,
évidemment, à déposer leurs chiffres sur la table. Les
affirmations sont concordantes de la part de plusieurs sociétés
d'utilités publiques aux Etats-Unis, dans d'autres provinces et au
Québec. (11 h 15)
M. Gauthier: Pour avoir échangé avec certains
membres de votre groupe, il est bien évident que vous soutenez que, si
Hydro-Québec continue de mettre en application sa politique
d'élimination de la sous-traitance, cela a déjà un impact
sérieux quant à la qualité du service et que cela aura
davantage un impact très négatif pour le consommateur maintenant
et dans les années à venir, parce qu'il faut l'avoir
présent en tête lorsqu'on discute de ces questions. Est-ce que
vous avez des données sur cela? Pouvez-vous nous expliquer cette...
M. Forget (Claude): II y a eu, à Montréal, la
célèbre tempête et inondation du 14 juillet. Il y avait en
disponibilité, dans la région de Montréal, auprès
des entrepreneurs privés, des équipes qui auraient pu se mettre
immédiatement au travail. On a fait appel, je pense, à l'une ou
deux d'entre elles, alors qu'on aurait pu faire appel à un plus grand
nombre et donc, rétablir les services plus rapidement. Dans d'autres
cas, je crois que c'est arrivé dans la région de Hull où
il y a eu une interruption de courant, on a fait appel à des
entrepreneurs privés, mais en attendant qu'arrivent des équipes
d'Hydro-Québec qu'on a fait venir, je pense, de la région de
Trois-Rivières. Quand ces équipes sont arrivées, on a dit
tout simplement aux entrepreneurs privés: Bien, allez-vous-en chez vous,
on n'a plus besoin de vous.
II est clair que, si l'on utilise les entrepreneurs privés
seulement comme bouche-trous, de cette façon, il n'y a pas de
justification économique pour maintenir des équipes en
disponibilité pour des périodes de travail qui peuvent ne jamais
se matérialiser ou, si elles se matérialisent, sont d'une
durée telle que, finalement, il n'y a rien à y gagner. Je passe
sous silence le fait qu'en appelant des équipes d'Hydro-Québec en
dehors d'une région cela engendre évidemment des coûts
additionnels de déplacements et de séjours pour ces
équipes, alors que des équipes locales fournies par les
entrepreneurs n'entraînent pas des coûts additionnels. Cela
s'ajoute aux différences de productivité que nous
alléguons et cela contribue encore plus à charger le dossier, si
vous voulez, sur le plan strictement du coût et, bien sûr, sur le
plan de la qualité, tous ces retards et tous ces délais.
Éventuellement, la non disponibilité d'équipes
privées, si on leur donne plus de travail à faire, va menacer la
capacité d'Hydro-Québec de restaurer le service rapidement dans
les cas de pannes.
II y a, d'ailleurs, des références précises dans
notre mémoire, à la page 25 et à la page 28, relativement
aux événements que je viens de relater. Dans certaines
régions, vous avez une fréquence de pannes. Vous avez un
document, en annexe au mémoire, qui indique que la fréquence des
pannes - les données sont d'Hydro-Québec elle-même - n'a
pas montré une amélioration spectaculaire, c'est le moins qu'on
puisse dire, ou a même montré une aggravation au cours des
dernières années. Ce n'est pas un problème qui est en
train d'être résolu. C'est un problème qui, s'il y a
quelque chose, s'aggrave. Il y a une augmentation de la fréquence des
pannes de l'ordre de 26 % depuis quelques années. Ce n'est pas quelque
chose qui est en train d'être réglé très gentiment
par le recours exclusif aux équipes internes.
M. Gauthier: J'ai encore quelques questions à poser.
Le Président (M. Charbonneau): Allez-y!
M. Gauthier: Cela fait une douzaine de minutes, je pense.
Dans votre mémoire, voua énoncez le fait que des
entrepreneurs ont dû faire l'acquisition d'équipements pour
répondre à la demande consécutive au programme
d'amélioration de la qualité du service. Le printemps dernier,
quand des représentants d'Hydro-Québec se sont
présentés en commission parlementaire, j'ai abordé le
problème de la sous-traitance. J'ai demandé à
Hydro-Québec: Écoutez, pourquoi les entrepreneurs privés
commencent-ils à brasser la cage aussi fort? Qu'est-ce qui se produit?
Ils m'ont dit que le programme d'amélioration de la qualité du
service avait été mis en place pour maintenir un certain taux
d'activités dans ce domaine, puisque la construction était au
ralenti. Bref, que les grands projets ne fonctionnaient pas tellement fort, par
les temps qui couraient, et que, ils ont offert aux entrepreneurs des travaux
à faire dans différents coins du Québec, à partir
de ce programme d'amélioration de la qualité du service, mais que
des entrepreneurs se sont acheté de l'équipement - de ce que j'ai
pu comprendre - de leur propre chef. Ils se sont très bien
équipés pour répondre à la demande sans être
très prévoyants et, maintenant, ils réclament de faire
travailler ces équipements, ce personnel régulièrement.
Quelle est
votre réaction à cela?
M. Forget (Claude): Je crois qu'il est normal que les
entrepreneurs à qui on confie les contrats s'assurent qu'ils ont un
équipement adéquat. S'ils n'avaient pas acheté
d'équipement, on leur ferait le reproche d'avoir un équipement
vétuste ou insuffisant. Ils ont donc acheté l'équipement
nécessaire pour exécuter les travaux qu'Hydro-Québec leur
demandait.
Le reste de l'argument laisse songer qu'on leur impute une espèce
d'ingratitude. On dit que ces gens-là ont bénéficié
des bonnes années et, maintenant qu'ils savent qu'il y a de mauvaises
années, ils viennent se plaindre. Entre les lignes, on semble les taxer
un peu d'enfantillage ou de se plaindre et d'être des enfanta
gâtés. C'est plus sérieux que cela.
Il reste que, bien sûr, il y a une accélération. Il
y a eu une accélération des travaux par le programme PAQS, mais
songeons aux raisons qu'Hydro-Québec invoque elle-même pour
justifier le programme PAQS. Elle nous dit que, de 1973 à 1984, il y
avait 720 personnes-années du côté des entrepreneurs pour
s'occuper des activités dans le domaine de la distribution.
Malgré 720 personnes-années, on a accumulé un retard et on
a voulu, à partir de 1983, combler le retard. Fort bien! On a donc
comblé le retard de 1983 à 1988 - c'est un motif admirable - et,
bien sûr, les membres de notre association ont, si vous voulez,
profité, sur le plan des chiffres d'affaires, d'un accroissement
d'activités.
Comment justifier qu'après avoir voulu combler un retard on
veuille les retourner à un niveau inférieur au niveau d'emploi
qui a permis justement d'accumuler un retard? Avec 720 personnes, de 1973
à 1984, on n'avait pas assez de gens pour faire le travail, on a voulu
se rattraper pendant cinq ans pour combler cette erreur, et après, on
leur dit: Vous allez retourner à un niveau qui est de 30 %
inférieur à celui qui a généré un retard.
Alors, de deux choses l'une: ou Hydro-Québec planifie un autre retard
et, en 1992, elle va arriver en disant qu'il faut un programme PAQS
numéro 2 ou alors, elle change les règles du jeu et dit: On n'a
plus besoin de vous et utilise le prétexte du rattrapage de 1983
à 1988 pour changer les règles du jeu et, comble d'ironie,
blâmer les entrepreneurs en disant que c'est leur faute. Il nous semble
que c'est, comme on dit en anglais: "Add insult to injury".
M. Gauthier: Merci, M. le Président. C'est tout pour
l'instant.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va. M. le
député de Saguenay.
M. Maltais: Merci, M. le Président. Il y a une chose qui
nous frappe drôlement dans votre mémoire lorsque vous nous dites
que, à la suite d'une enquête, même si elle n'est pas
vraiment scientifique, comme vous l'avez dit, on démontre un taux
d'inefficacité de 65 %. Si on se base là-dessus, on pourrait dire
que les monteurs d'Hydro-Québec sont efficaces à 35 % et que cela
coûte finalement aux Québécois, 39 200 000 $ sur leur
facture d'électricité. Votre argumentation est-elle assez solide
pour démontrer que c'est une tendance générale ou si ce
sont simplement des cas particuliers donnés par votre maison
d'enquête? Le public québécois est-il en mesure de prendre
cela au sérieux, oui ou non?
M. Forget (Claude): J'ai indiqué, M. le
député, toutes les précautions qu'il fallait prendre
vis-à-vis de ces chiffres. Nous n'avons pas accès aux
données d'Hydro-Québec et nous ne sommes pas en mesure de suivre,
chronomètre en main, les activités d'Hydro-Québec, nous ne
pouvons nous baser que sur ce qui nous est accessible. Sur cette base, nous
avons posé cette question et il y a un doute sérieux, je pense,
qu'il n'est pas possible d'écarter du revers de la main, à moins
de fournir une réponse sérieuse justement.
D'autre part, la deuxième réserve, notre objectif n'est
évidemment pas de faire le procès de l'ensemble
d'Hydro-Québec. Nous reconnaissons qu'il y a eu des efforts pour une
amélioration de la productivité de façon
générale. Ce qui semble s'être passé, c'est que
cette question de la distribution n'était pas assez importante pour
mériter la même qualité d'attention, de la part des
dirigeants d'Hydro-Québec, que d'autres grands problèmes. C'est
peut-être trop secondaire dans leur vision des choses pour qu'ils aient
accordé la même attention que dans d'autres secteurs à
l'amélioration de la productivité dans ce secteur. De toute
façon, il ne nous appartient pas de poser un jugement sur l'ensemble
d'Hydro-Québec. On n'a pas la compétence ni les ressources pour
le faire. Dans le secteur qui nous intéresse, on s'est bornés
à poser une question d'après les seuls chiffres qu'on avait. Il y
a un grand point d'interrogation. Je pense qu'il ne nous appartient pas de
trouver la réponse. Encore une fois, nous n'en avons pas les ressources.
Il me semble que le fardeau de cette preuve revient à
Hydro-Québec, sur ce point précis.
Même si ces gens ont amélioré leur efficacité
de façon générale, je crois qu'ils n'ont pas
démontré qu'ils l'avaient améliorée dans tous les
cas et dans ce cas-là, en particulier.
M. Maltais: Mais vous conviendrez avec moi que le montant de 39
000 000 $ impressionne un peu, surtout sur la facture
d'électricité des contribuables. Est-ce que les
sous-traitants ont la même feuille de route de travail que les
employés d'Hydro-Québec?
M. Forget (Claude): Je m'excuse, mais pourriez-vous
répéter la question?
M. Maltais: Est-ce que les employés des sous-traitants ont
la même feuille de travail horaire que les autres, dans une
journée? Est-ce que c'est selon le même principe ou si ce sont les
contremaîtres des sous-traitants qui suivent pendant toute la
journée les employés des sous-traitants?
M. Forget (Claude): Si je fais erreur dans ma réponse, je
pense qu'on pourra compléter, mais je pense que ce sont les
contremaîtres et Hydro-Québec qui surveillent les employés
des sous-traitants. Ils ont essentiellement la même période de
travail, mais pas tout à fait les mêmes conditions de travail.
Comme vous le savez, les employés des sous-traitants sont soumis au
régime du décret des travailleurs de la construction, alors que
les employés d'Hydro-Québec ont leur propre convention collective
et sont spécifiquement exemptés de l'application du décret
de la construction. D'une façon générale, les
régimes salariais et de travail des employés des entrepreneurs
privés sont certainement comparables et même supérieurs,
à certains égards, à ceux des employés
d'Hydro-Québec. Mais ils sont sous la surveillance, à moins que
je ne fasse erreur, des contremaîtres d'Hydro-Québec
M. Roux: Pour compléter, je pense que je pourrais ajouter
que nos hommes sont payés temps fait, temps payé. Par exemple, si
le contremaître d'Hydro-Québec voit, une journée, que nos
gars n'ont travaillé que six heures, il signe une feuille de temps de
six heures, nous payons nos gars pour six heures et nous faisons une facture de
six heures à Hydro-Québec. C'est la même chose que pour les
périodes de pluie: nos gars sont payés pour une heure de
présentation au travail et pour trois heures, mais non pas pour la
journée. Nous faisons une facture de quatre heures à
Hydro-Québec, tel que spécifié dans l'entente.
Par contre, j'aimerais vous ramener à la page 6, afin d'apporter
une petite précision sur ce qui a été dit tantôt.
HydroQuébec porte la mention suivante quand elle fait des appels
d'offres: "Services d'équipes de construction, d'entretien, de
modifications du réseau". Je pense qu'on en viendra tantôt
à une discussion sur la fameuse clause 34.03 qui définit ce que
sont la distribution, l'entretien et la construction.
M. Maltais: Je vous remercie.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Je voudrais me permettre d'abord un commentaire, M.
le Président, et finir par une question. Je ne crois pas qu'elle
s'adressera aux porte-paroles de l'association, mais plutôt au
ministre.
D'abord, vous me permettrez de vous dire qu'après 17 ans de
syndicalisme j'ai toujours été malheureux de constater qu'une
centrale syndicale maraudait l'autre. Donc, vous comprendrez que je suis encore
plus malheureux de constater que deux syndicats affiliés à une
même centrale cherchent à se manger l'un et l'autre. Je le dis en
toute candeur. J'accepte plus ou moins cela. Je suis d'accord qu'un syndicat
protège ses membres à tout prix, mais je ne suis pas d'accord
qu'un syndicat tente d'aller chercher le gagne-pain d'un autre syndicat. Ceci
dit, j'aurai des questions très précises à poser aux
syndicats qui se présenteront devant nous. J'en aurai pour
Hydro-Québec également, parce que le fruit de cette chicane est
le résultat d'une convention collective, si j'ai bien compris le
dossier, en vertu de l'article 34 de la convention d'Hydro-Québec.
Ce qui m'étonne, c'est le déroulement des
négociations. Normalement, Hydro-Québec obtient ses mandats du
Conseil du trésor. En tout cas, pour avoir été au
gouvernement, Hydro-Québec devait présenter ses mandats au
Conseil du trésor avant de présenter ses offres à ses
employés, et le conseil était responsable de la
négociation.
Ma question ne s'adressera pas à M. Forget ni à
l'équipe qui est là, mais au ministre de l'Énergie et des
Ressources. Est-ce que le ministre de l'Énergie et des Ressources
était au courant des offres qu'Hydro-Québec devait faire à
ses syndicats? Si oui, a-t-il suivi le déroulement de ces
négociations? Est-il intervenu auprès d'Hydro-Québec afin
que les conventions collectives reflètent un peu l'esprit du
gouvernement en ce qui concerne la privatisation et l'efficacité des
travailleurs? (11 h 30)
Le Président (M. Charbonneau): L'objet de la commission
étant une consultation particulière, M. le député
de Joliette, je pense que le ministre est libre de répondre ou non. S'il
le fait, il le fait sur votre temps.
M. Chevrette: Oui, d'accord.
Le Président (M. Charbonneau): Sauf qu'il n'est pas
obligé de le faire à ce moment-ci.
M. Ciaccia: Je voudrais simplement porter à l'attention du
député de Joliette le fait que la modification à la
convention collective a été faite en 1984.
M. Chevrette: La dernière? D'accord.
M. Ciaccia: L'article 34 a été inclus en 1984 et
c'est sur la base de cet article 34 qu'on...
M. Chevrette: M. le ministre, M. le Président, je pense
que vous avez des coaches qui ne sont pas tout à fait à l'heure
juste, parce que la dernière convention, telle que signée pour
descendre à 500, c'est dans une fin de négociation qui n'en
finissait plus. C'est votre gouvernement qui a signé la dernière
entente, oui ou non?
M. Ciaccia: Écoutez, le programme PAQS a été
fait en 1984. Quand cela a monté de 720 à 1000, c'était en
1984. Alors, je pense que vous devriez poser votre question au ministre de
l'Énergie de 1984.
M. Chevrette: Mais celui de 1986-1987?
M. Ciaccia: Alors, si vous voulez, je pense qu'on va continuer
avec nos invités.
M. Chevrette: M. le Président, dans ce cas-là, je
m'en tiendrai au commentaire que ce sont bel et bien les députés
du gouvernement actuel. Je comprends qu'ils ont hâte de commencer
à gouverner; cela fait deux ans qu'ils sont là, mais ce sont eux
qui ont signé la dernière convention, malgré les
revendications, précisément, des groupes. Hydro-Québec
était consciente des problèmes que cela apportait. Elle avait
été alertée du fait que les jobs diminuaient pour les
sous-traitants qui, soit dit en passant, donnent de l'ouvrage à la
main-d'oeuvre régionale et, cela, j'y crois fondamentalement.
Il y a des gens qui m'ont écrit dans mon milieu, tous ceux qui
travaillent pour Tucker, anciennement. Je ne me souviens pas de la nouvelle
appellation. Ce sont des gens qui travaillent en régions, près de
chez nous, et qui répondaient vite aux demandes, en plus de cela. Vous
vous informerez du cas de Hull et vous verrez si on a répondu vite
à la demande de réfection d'une panne qui a duré
jusqu'à huit jours dans certains coins de la région de Hull.
Ceci dit, le gouvernement a sans doute une part de
responsabilité, parce que c'est lui qui, en dernier ressort, accorde les
mandats de négociation ultime. En cas de conflit, on sait ce qui se
passe. Hydro est branchée directement sur le Trésor. Elle dit:
Voici les trois points en litige. Qu'est-ce que le Conseil du trésor
fait? Le ministre du Conseil du trésor convoque les responsables de la
négociation, ses comités ministériels et il décide
d'émettre des mandats. Donc, qu'on ne vienne pas me dire que seule
Hydro-Québec... Je ne veux pas avoir à défendre
Hydro-Québec; je lui poserai la question quand elle viendra. Mais
j'aurais aimé que le ministre nous dise s'il était conscient,
s'il était au courant du processus de négociations, de la
façon que cela se déroulait, s'il a vu venir cela, s'il avait
senti venir cela...
M. Ciaccia: M. le Président.
M. Chevrette: S'il ne veut pas répondre, je ne vois pas
pourquoi il me couperait.
M. Ciaccia: Mais vous venez de poser une autre question et vous
venez de faire d'autres affirmations que vous n'aviez pas faites avant.
Vous étiez membre du gouvernement. Vous savez comment le Conseil
du trésor donne ses mandats. Les mandats du Conseil du trésor ne
vont pas dans tous les détails, les moindres petits détails.
Quand on se fait assurer par Hydro-Québec qu'il n'y a pas de changements
dans ses politiques et que l'article 34 est là, le mandat a
été respecté, le mandat, en général, a
été respecté.
Pour Hydro-Québec, c'était une question de gestion
interne, de la façon qu'ils négociaient sur l'article 34. Ils
n'ont pas dérogé au mandat général et ce
n'était pas inclus dans le mandat général
qu'Hydro-Québec leur a donné. Vous devez savoir cela; vous
étiez au Conseil du trésor. Vous devez savoir comment ces mandats
sont donnés et comment les négociations se déroulent.
Voyons!
M. Chevrette: Je suis assez au courant de la façon dont
cela marchait pour vous dire que, quand une convention collective arrivait
à échéance et qu'il y avait deux ou trois points
d'accrochage, souvent, cela faisait même l'objet de discussions au
Conseil des ministres, donc, non pas seulement au Conseil du trésor.
Qu'on ne vienne pas me dire que cela ne suivait pas un processus normal.
Cela va même jusqu'au Conseil des ministres, quand il y a une
grève appréhendée sur les contenus des mandats et c'est le
Conseil du trésor, bien sûr, qui décide. Mais, souvent,
c'est après avoir fait un tour de table au Conseil des ministres. Donc,
le ministre peut bien se défiler devant la question. De toute
façon, il refusait de répondre tantôt.
Ceci dit, M. le Président, j'aurais une seule question pour le
groupe. Est-ce qu'Hydro-Québec vous a consulté comme groupe avant
de signer la convention collective?
M. Forget (Claude): Non, il n'y a pas eu de consultation.
M. Chevrette: Est-ce qu'elle vous a mis au courant que
c'était un point d'accrochage et qu'elle s'apprêtait à
signer?
M. Roux: Non, sauf qu'on pourrait
ajouter à votre question, M. le député, que la
fameuse clause 34.03 met des barrières un peu partout. On parle de
distribution présentement, mais on peut dire que, dans les postes de
transformation, on a beaucoup de problèmes; non seulement là,
mais dans les lignes de transmission. Hydro-Québec dit qu'elle ne touche
pas aux lignes de transmission, mais on a connu des exemples tout
dernièrement où Hydro-Québec a fait le raccordement de
sections de fil à la Baie James, dans le nord de Chibougamau et
même à Trois-Rivières, sur un petit projet que notre
compagnie avait, il y a quelques semaines.,
M. Chevrette: Est-ce que vous avez eu la chance de faire des
représentations?
M. Roux: Pardon?
M. Chevrette: Est-ce que vous avez eu la chance de faire des
représentations? Et cela remonte à quand?
M. Roux: Disons que ce dossier, on le brasse - si on peut appeler
cela brasser -depuis un peu plus de deux ans. Pour en venir à cette
commission parlementaire, je dois vous avouer en toute sincérité
que c'est vrai qu'il a fallu brasser plusieurs personnes, poser plusieurs
questions. Encore là, on attend après les résultats.
M. Chevrette: Est-ce que vous avez demandé à
Hydro-Québec - ce sera ma dernière question - d'essayer de
clarifier ce qu'était la construction, l'entretien et tout pour essayer
de définir des champs d'action propres à chaque groupe?
M. Roux: Je suis certain que la question a été
posée à Hydro-Québec. Je l'ai moi-même posée
à M. Coulombe, il n'y a pas tellement longtemps, il y a peut-être
deux ou trois semaines. Je pense qu'à l'intérieur même
d'Hydro-Québec, entre les administrateurs d'Hydro-Québec et les
représentants du syndicat, il y a un drôle de conflit à
savoir, ce que veut dire construction, ce que veut dire entretien.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Vimont.
M. Théorêt: Merci, M. le Président. En fait,
j'aurais deux questions à vous poser. Vous avez soulevé, dans
votre mémoire, le problème de l'embauche des monteurs de lignes.
Est-ce que vous considérez que le libellé actuel de l'article 34
constitue un changement d'attitude d'Hydro-Québec dans la
sous-traitance? Les précisions apportées dans ce libellé,
qu'est-ce que cela signifie pour vous?
M. Forget (Claude): Cela signifie, en clair, sans entrer dans les
détails du libellé, un changement d'orientation au
désavantage de la sous-traitance.
M. Théorêt: À la page 18 de votre
mémoire, M. Forget9 vous faites état ques "...le
coût de cette inefficacité relative des monteurs de lignes
internes représente 13 % du bénéfice net de 1986" et
qu'Hydro-Québec "a obtenu du gouvernement une augmentation
générale des tarifs d'électricité de 4,6 % au 1er
mai 1987..." Est-ce que, à votre avis, Hydro-Québec aurait pu
éviter cette augmentation? Comment aurait-elle pu l'éviter?
M. Forget (Claude): M. le député, l'effort qui a
été fait en citant ce pourcentage visait à le mettre en
relation avec quelque chose d'autre. Quand on parle d'Hydro-Québec, on
parle toujours de milliards de dollars; 39 000 000 $, c'est certainement
important pour vous et moi, mais est-ce que c'est important pour
HydroQuébec? Pour donner un ordre de grandeur de la signification ou de
l'importance d'une dépense additionnelle de 39 000 000 $, nous faisons
le rapprochement avec l'ensemble du surplus d'Hydro-Québec et aussi,
bien sûr, de la majoration des tarifs.
Maintenant, je vais plaider un peu la même chose que tout à
l'heure. Nous ne sommes vraiment pas en mesure de dire quelle aurait dû
être la tarification d'Hydro-Québec si cette économie avait
été réalisée. Il est certain que soit
Hydro-Québec elle-même, soit l'actionnaire principal qui est
l'ensemble de la population, soit les utilisateurs d'électricité,
par le biais de la tarification, en auraient bénéficié. Ce
montant ne se serait pas évanoui, il y a certainement quelqu'un qui en
aurait bénéficié et cela aurait ouvert un certain nombre
d'options: diminuer la majoration de tarifs, augmenter l'autofinancement,
verser des dividendes additionnels au gouvernement, mais ce n'est pas un
montant insignifiant, c'est une proportion significative du surplus.
M. Théorêt: Si je comprends bien, est-ce que vous
nous dites que ces 39 000 000 $ auraient pu être appliqués
à une réduction ou à l'élimination de
l'augmentation des tarifs.
M. Forget (Claude): Cela aurait pu être utilisé
ainsi.
M. Théorêt: Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): M. le Président,
je tiens d'abord à apporter certains commentaires. Je trouve le
mémoire très bien étoffé, mais je trouve un peu
dommage qu'on se retrouve, le 27 octobre 1987, en commission parlementaire
parce qu'une telle situation qui prévaut actuellement est due
particulièrement au fait que le gouvernement n'a pas été
clair jusqu'à maintenant et a laissé aller les choses. Vous avez
vous-même mentionné, M. Forget, qu'il n'y a pas eu de changement
de politique officiel, de la façon que je l'ai compris. Dans les autres
mémoires dont on peut prendre connaissance, ceux qui viendront devant
nous, il n'y a pas eu, effectivement, de changement de politique.
D'une part, Hydro-Québec s'en lave un peu les mains; d'autre
part, de votre côté, vous avez un constat d'un changement
important qui est en train de se faire et qui se traduit par des pertes
d'emplois et par une douzaine de PME qui sont en danger. D'un autre
côté, on a un gouvernement qui a une politique très claire,
que vous mentionnez dans votre mémoire. Je cite particulièrement
la page 13, concernant les grandes orientations sur la privatisation: "Le
gouvernement reconnaît à l'entreprise privée le rôle
prioritaire de la production commerciale de biens et services..." Le ministre
nous a dit, ce matin, quelle était l'importance pour lui de la
sous-traitance, pour autant qu'elle ne se faisait pas au prix de
l'inefficacité. Du même souffle, vous nous démontrez que
l'entreprise privée, par l'expérience passée, n'a pas
été inefficace; au contraire, elle a été plus
efficace.
À cet effet, votre annexe 5, si j'ai bien compris, est un
document interne d'Hydro-Québec qui démontre très
clairement, sur un dossier en particulier, l'écart important entre ce
qu'on peut appeler "fait à l'interne" et "fait à l'externe"
concernant le remplacement des disjoncteurs. Je pense que ce document interne
d'Hydro-Québec, l'annexe 5, est une pièce à conviction
fort importante tout comme l'annexe 6, le fameux montant de 39 000 000 $ qui
aurait pu être économisé.
Face à cette situation, tout le monde semble tirer la couverture
de son bord, mais je comprends très bien que vous ayez à vous
défendre contre cette position. Dans un premier temps, depuis que vous
avez porté cela à l'attention du gouvernement,
particulièrement depuis la dernière année, j'aimerais
savoir si les démarches que vous avez faites auprès
d'Hydro-Québec ont été vaines. L'actionnaire principal
d'Hydro-Québec étant le gouvernement du Québec et le
ministre responsable, est-ce que vous avez porté vos revendications et
votre démonstration, avant aujourd'hui, devant le ministre de
l'Énergie et des Ressources, responsable d'Hydro-Québec, et
quelle a été son attitude face à cette situation qui
prévaut actuellement, qui s'aggrave et qui fait en sorte que, là
aussi, ce n'est pas un statut particulier que vous réclamez, si j'ai
bien compris? Vous réclamez tout simplement une espèce de droits
acquis ou, on pourrait dire, une situation qui prévalait auparavant et
qui, aujourd'hui, semble, par le cours des choses, vous glisser entre les
mains. Est-ce que le ministre lui-même s'est mouillé? Est-ce que
le ministre lui-même a donné des indications quant à ce
qu'il avait l'intention de faire? D'après vous, est-ce que le
gouvernement ne devrait pas, aujourd'hui, en commission parlementaire indiquer
très clairement où il s'en va afin que celte situation qui est en
train de devenir intenable pour vous autres se rétablisse et que vous
puissiez savoir exactement où vous vous en allez?
M. Forget (Claude): M. le député, je crois que la
tenue même aujourd'hui de cette commission parlementaire
représente le fruit de démarches entreprises par l'association
auprès du gouvernement et pour l'instant sa réponse est de
confier à vous-même comme commission parlementaire l'étude
des différents points de vue en présence, et nous souhaitons
ardemment qu'il va se dégager de cela un consensus de la part de la
commission qui va nous permettre d'espérer que le problème qu'on
soumet à votre attention va recevoir une solution. Mais cette commission
parlementaire représente une première réponse seulement,
espérons-nous, au grief formulé par l'association auprès
du gouvernement. (11 h 45)
M. Parent (Bertrand): Y a-t-il eu des rencontres
antérieures avec le ministre ou avec d'autres ministres du gouvernement
pour les sensibiliser à cette situation?
M. Forget (Claude): Comme je suis intervenu dans ce dossier
seulement au moment où la décision de tenir la commission
parlementaire a été prise, je pense que je
référerais votre question à M. Roux, président de
l'association.
M. Roux: Comme M. Forget le dit, si on en est rendu aujourd'hui
à une commission parlementaire, c'est parce qu'il y a eu plusieurs
rencontres, plusieurs demandes pour qu'une solution soit trouvée. Vous
nous avez reportés à l'annexe 5, dans une lettre de
correspondance interne, c'est certain qu'on l'avait remise à qui de
droit. Vous parlez de l'annexe 6 également. Mais si on se reporte au
mois de mars dernier, quand M. Coulombe a déposé en commission
parlementaire ici ses budgets pour les faire accepter, il a dit à cette
commission qu'il acceptait au départ qu'en distribution cela
coûtait entre 15 % et 20 % plus cher quand c'était
Hydro-Québec qui le faisait. Si on revient au mémoire
qu'Hydro-Québec a déposé la semaine passée
ici et qui va être lu demain, M. Coulombe ne parle plus de 15 % à
20 %, mais de 10 %.
Nous autres, on croit que c'est beaucoup plus que cela. D'ailleurs, on
vous l'a présenté dans notre mémoire ici aujourd'hui. Pour
répondre à votre question comme telle, M. le
député, on a fait beaucoup de pressions et on espère avoir
les résultats espérés.,
M. Parent (Bertrand): Je vous remercie, M. le
président.
Le Président (M. Charbonneau): Ça va? M. le
député d'Iberville.
M. Tremblay (Iberville): M. le Président, j'ai une
question qui s'adresse à l'association, évidemment. Ici, on fait
référence - j'y reviens encore - au 14 juillet dernier à
Montréal, alors que vous dites que de nombreux entrepreneurs de la
région se sont déclarés prêts à mettre leur
équipe à la disposition d'Hydro-Québec. En fait, seulement
quelques-unes d'entre elles furent appelées. Finalement, après
plusieurs heures, Hydro-Québec décide de faire appel aux
entrepreneurs. Qu'est-ce qui fait qu'elle a attendu si longtemps? N'y avait-il
pas de personnel? Que s'est-il passé pour qu'Hydro-Québec n'ait
pas réagi plus vite que ça?
M. Forget (Claude): II faudrait d'abord poser la question
à ces gens. Ils seraient mieux en mesure de répondre.
M. Tremblay (Iberville): Vous remettez toujours en question
l'efficacité d'Hydro-Québec, alors, je vous pose la question.
Vous dites que la situation est arrivée et qu'il s'est passé
beaucoup d'heures. En dernier, on fait appel à l'entrepreneur.
D'après vous, qu'est-ce qui pourrait être fait pour que cela aille
plus vite à l'avenir?
M. Roux: Si vous allez à la page 26, à 4.2, c'est:
La convention collective stipule que: "...dans le cas de pannes majeures, la
direction pourra recourir à des effectifs à forfait lorsque les
employés monteurs de distribution ne sont pas disponibles dans le
secteur affecté ou dans les secteurs avoisinants." Cela veut dire
qu'avant de faire appel à un entrepreneur il faut que les
employés d'Hydro-Québec aient été
appelés.
M. Tremblay (Iberville): Donc, actuellement, vous insinuez, vous
pensez que la procédure qui fait qu'il faut faire appel au personnel a
été tellement longue qu'il y a des heures qui s'écoulent
avant de s'apercevoir qu'il n'y a pas le personnel nécessaire. Ensuite,
ils font appel aux gens du secteur privé.
M. Roux: Je n'insinue rien, je dis que c'est cela qui est en
application. On n'a qu'à retourner dans le secteur de Hull où,
l'an passé, un entrepreneur avait 22 équipes de disponibles
à faire feu en tout temps. Avant qu'on fasse appel à
l'entrepreneur, cela a pris quelques jours parce qu'ils ont fait appel à
tout le secteur des Laurentides pour trouver du monde d'Hydro-Québec
pour aller réparer la panne-, Ils ont même débordé
du secteur des Laurentides, ils sont allés dans le secteur de
Montréal et peut-être un peu plus loin.
M. Tremblay (Iberville): Ah bon! Aussi, vous pariez du secteur de
Trois-Rivières où il y a de 20 à 30 plaintes par
année concernant des interruptions d'électricité.
Qu'est-ce que vous suggérez pour améliorer cette situation?
Est-ce que l'entreprise privée peut vraiment être plus
efficace?
M. Roux: Possiblement la même formule qui existait avant
1984. Lorsqu'il y avait des pannes, les employés d'Hydro-Québec
et les entrepreneurs étaient appelés en même temps afin que
ce soit réparé le plus vite possible.
M. Tremblay (Iberville): Donc, vous dites qu'avant 1984,
assurément...
M. Roux: En 1984 ou en 1982, le temps passe assez vite. Mais je
sais que depuis que cette fameuse clause a été incluse dans le
contrat, on ne fait plus appel aux entrepreneurs à moins d'extrême
urgence et en dernier lieu.
M. Tremblay (Iberville): Merci, M. le Président.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Roberval.
M. Gauthier: M. le Président, il me reste à peine
une minute. D'une façon !a plus concise possible, vous nous avez
établi une situation: de 1000 à 500, c'est ce que la convention
collective ainsi que les politiques d'Hydro-Québec nous amènent
à envisager pour les prochaines années, 720
personnes-années étant une phase où Hydro-Québec a
pris du retard dans son réseau. Ce sont des chiffres intéressants
qu'il faut mettre en perspective et sur lesquels on interrogera très
certainement les autres groupes.
J'aimerais savoir, à court terme, compte tenu de ce qui existe
actuellement, si vous avez des recommandations à nous faire avant qu'on
se quitte afin qu'on puisse stabiliser la situation ou que l'on puisse
s'assurer que les citoyens du Québec aient une bonne qualité de
service, que les travailleurs d'Hydro-Québec soient
protégés dans leur emploi, mais aussi que vos
membres, vos travailleurs puissent avoir droit à cette
activité qui est la leur. Est-ce que vous ave2 des suggestions à
nous faire en terminant?
M. Forget (Claude): M. le Président, M. le
député, il y a plusieurs suggestions qu'il est possible de faire.
Il est possible de faire des suggestions à très court terme. Je
suggérerais, par exemple, des interprétations plus strictes de la
clause 34.03, des directives en ce sens, revenir à la situation
antérieure où les règles nouvelles n'étaient pas en
vigueur, n'existaient pas; arrêter, par exemple, du côté
d'Hydro-Québec, de s'équiper, d'acheter des camions, etc., alors
que ces équipements existent déjà du côté des
entrepreneurs privés; éliminer, s'il y en a - mais je crois qu'il
y en a - des employés temporaires à Hydro-Québec dans le
domaine de la distribution. Ce sont des solutions à très court
terme.
À plus long terme, il faut se poser la question: Comment
définir des règles du jeu plus équitables pour les
entrepreneurs dans des domaines complémentaires aux activités
d'Hydro-Québec? Pourquoi devrait-il y avoir des contingentements?
Pourquoi devrait-il y avoir des règles arbitraires? Pourquoi la
décision ne serait-elle pas prise en fonction des principes
invoqués par Hydro-Québec elle-même? La qualité du
service; des standards rigoureusement définis de qualité, de
promptitude dans le service, de coût, etc.
Encore une fois, les membres de notre association ne demandent pas un
tarif préférentiel. Ils ne demandent pas d'être
avantagés. Ils demandent d'avoir une chance égale de participer
aux activités d'Hydro-Québec. Ils ont prouvé dans le
passé qu'ils étaient capables de le faire et de donner un service
de qualité. On demande tout simplement d'être traités sur
un pied d'égalité avec les employés internes
d'Hydro-Québec et d'être soumis aux mêmes règles et
exigences. Us sont confiants que, dans un contexte qui n'est pas biaisé
au départ, leur avenir est plus qu'assuré.
Le Président (M. Charbonneau): Merci. M. le
député de Vanier.
M. Lemieux: Merci, M. le Président. Est-ce qu'il y a
consentement?
Le Président (M. Charbonneau): Je pense qu'il y a
consentement, M. le député.
M. Lemieux: J'aimerais tout simplement revenir sur un aspect
particulier dont M. le ministre a parlé tout à l'heure. Je pense
que l'on s'entend tous sur la même chose. Lorsqu'il a parlé d'une
gestion saine de l'organisation du travail chez Hydro-Québec, vous avez
repris, M. Forget, en disant: Ce qui est important pour nous, c'est la
qualité de gestion. On ne demande pas de préférence. On
veut donner un service de qualité à meilleur coût. Dans un
premier temps, j'aimerais aussi en arriver à ce que soulignait le
député de Joliette lorsqu'il a fait état des
problèmes syndicaux comme tels. À mon avis, ils sont
précisément la clé de ce qui fait que nous sommes ici
devant cette commission parlementaire.
Je veux simplement lui rappeler qu'à la page 1 du mémoire
on lit, au deuxième paragraphe: "Le 29 juin 1984, Hydro-Québec et
le syndicat de ses employés (section locale 1500) ont signé une
entente dans le cadre d'un Programme d'amélioration de la qualité
du service (PAQS), entente qui fut intégrée à la
convention collective... 1986-1989."
J'aimerais vous ramener maintenant à la page 5 de votre
mémoire. Je pose ma question, parce que vous savez que nous sommes
limités dans le temps, et elle rejoint aussi celle du
député d'Arthabaska qui n'aura peut-être pas le temps
d'intervenir sur ce sujet. Au dernier paragraphe de la page 5, vous nous dites,
à la quatrième ligne: "...à Hydro-Québec est le
reflet d'un conflit d'intérêts flagrant, où
l'égoïsme d'un syndicat et ses intérêts corporatifs
l'emportent sur les principes généralement reconnus de l'ensemble
du mouvement syndical auquel il appartient." Si vous allez à la page
suivante, au bas, vous dites que pour "...les dirigeants d'Hydro-Québec,
lors de la commission parlementaire de l'économie et du travail des 4 et
5 mars 1987, la philosophie est très claire (...) que les travaux de
construction sont réservés à l'externe, les travaux
d'entretien sont réservés à l'interne." Il semble que cela
soit contraire à l'habitude. À la page 7, vous nous dites, au
troisième paragraphe: "En fait, Hydro-Québec n'a pas de
philosophie dans ce domaine. C'est le syndicat interne qui en a une: son
objectif est clair; il réclame la disparition pure et simple de la
sous-traitance." Dans un premier temps, ce que j'aimerais vous demander, c'est
de donner des précisions sur ces aspects et, dans un deuxième
temps, quelles sont les conséquences pour l'emploi en
régions.
M. Forget (Claude): M. le député, je pense que nous
avons fait abondamment dans le mémoire la démonstration que les
conditions de travail des employés des entrepreneurs ne sont en rien
inférieures aux conditions de travail des employés
d'Hydro-Québec, avec une réserve, bien sûr, c'est que
l'emploi des employés des entrepreneurs est soumis beaucoup plus que
l'emploi des employés internes d'Hydro-Québec aux aléas
des demandes qui viennent ou qui ne viennent pas de la part
d'Hydro-Québec. Sous cette réserve, les conditions de travail, la
qualité du travail sur le plan de la santé et
de Sa sécurité, l'ensemble des conditions de travail et
des avantages sociaux sont tout à fait comparables. Il ne s'agit pas
d'un conflit entre des employés syndiqués, d'une part, et du
"cheap labor" non syndiqué, d'autre part; il ne s'agit pas de cela du
tout.
Donc, l'élément de lutte syndicale classique où un
syndicat essaie de préserver les acquis face à une concurrence
qu'il peut juger déloyale n'est pas présent? loin de là-Ce
devant quoi on est en présence, c'est une opposition
d'intérêts entre deux syndicats, affiliés d'ailleurs
à la même centrale et qui, dans l'application de leurs objectifs
propres, se trouvent à produire une situation qui a été
jugée - je pourrais citer la déclaration, mais je crois que vous
l'avez probablement déjà observée - par la
déclaration d'un chef syndical lui-même de politique antisociale.
Pour la raison à laquelle j'ai fait allusion tout à l'heure, si
jamais l'objectif syndical avait été de faire disparaître
la sous-traitance et d'intégrer ces travailleurs, c'est justement par
une intégration qu'on aurait procédé en fonction de
l'ordre d'ancienneté relatif. Or, l'ancienneté se retrouve du
côté des travailleurs privés, des travailleurs à
contrat.
Donc, simplement sur le plan de la philosophie syndicale, l'application
de cette règle aboutit à un non-sens. Ce n'est pas relié
à l'amélioration des conditions de travail, ce n'est pas
relié au respect des règles d'ancienneté; au contraire,
cela contredit les deux principes. Il s'agit d'une pure querelle entre deux
syndicats. Malheureusement, on a donné quasiment force de loi à
la convention collective signée avec Hydro-Québec. C'est ce
à quoi on fait allusion dans ce paragraphe. Il ne s'agit pas d'un
débat idéologique, d'un débat social, d'un débat
mettant en présence la question de savoir s'il faut être
syndiqué ou non. Ce n'est pas cela du tout. La question est: Deux
groupes en présence qui sont bien rémunérés
n'ont-ils pas droit à des règles équitables, à des
règles qui ne débalancent pas et ne préjugent pas de leurs
capacités respectives à donner un bon service à la
population? (12 heures)
M. Lemieux: Peut-on vous entendre sur l'emploi en régions,
sur les conséquences de l'emploi en régions?
M. Forget (Claude): Certains députés ont
déjà fait allusion à l'emploi en régions. Bien
sûr, ces entreprises et les entreprises qui sont membres de l'association
sont dispersées sur tout le territoire du Québec. Le fait de
mettre en jeu non seulement leur volume de travail mais même leur
existence peut avoir des conséquences déplorables, beaucoup plus
déplorables que le nombre absolu d'emplois en jeu ne pourrait
l'indiquer. C'est une dimension sur laquelle on n'a pas beaucoup insisté
dans le mémoire, mais elle est très certainement présente.
C'est une préoccupation des membres individuels qui représentent
justement des entreprises dans des régions où, relativement
parlant, elles jouent un rôle significatif comme employeurs.
Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre, il vous
reste cinq minutes.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Le
député de Joliette a mentionné tantôt qu'il n'aimait
pas les chicanes entre syndicats et que, nécessairement, pour
éviter de prendre une position sur le fond de ce dont nous parlons, il
lance la balle au ministre et il dit: C'est la faute du ministre parce qu'il
savait, lui, qu'il y avait des mandats et il les a approuvés. Si la
situation se trouve aujourd'hui telle qu'elle est, c'est la faute du
gouvernement. C'est de bonne guerre d'essayer de faire ce genre de débat
et d'essayer de se disculper des positions sur le fond. Originellement, dans
mes remarques préliminaires, j'ai essayé de donner un peu
l'orientation de notre gouvernement en ce qui concerne l'équilibre.
Pour répondre à la question du député de
Joliette et pour rétablir les faits - pour ne pas se demander à
chaque mémoire, si c'est la faute du gouvernement et qu'on ne discute
pas du fond du problème - je voudrais seulement apporter les
clarifications suivantes au député de Joliette et aux membres de
la commission. Il y a eu une convention collective signée en 1984. Il y
a eu une lettre d'entente, à ce moment, en ce sens que l'effectif pour
la sous-traitance qui était de 720 monterait à 1000 pour le
programme PAQS et serait réduit à 500. Cela s'est produit en
1984. C'est clair que les mandats qui ont été donnés en
1986 ou en 1987 devaient respecter la convention collective de 1984 et les
ententes qui ont été prises. Alors, le gouvernement, en 1986, ne
pouvait pas aller à l'encontre des ententes qui avaient
déjà été prises. Je voudrais porter à
l'attention de la commission parlementaire et du député de
Joliette que, si nous nous trouvons, aujourd'hui, avec un maximum de 500 pour
la sous-traitance et les problèmes que cela peut engendrer, c'est
à la suite d'une entente qui a été prise en 1984 et
entérinée par un mandat du gouvernement précédent,
et par hasard, c'était à la veille de la dernière
élection.
Je crois que, si on comprend cette situation, on va pouvoir aller sur le
fond du problème qui existe. Pourquoi tenons-nous cette commission
parlementaire? Quelles sont les recommandations, les orientations et les
décisions qu'Hydro-Québec doit prendre avec le milieu et avec ses
travailleurs tout en respectant l'équilibre qui existait auparavant et
qui semblait être une formule non seulement pour les entrepreneurs, mais
aussi pour
les ingénieurs-conseils?
En terminant, je voudrais vous poser une dernière question. Dans
votre mémoire, vous nous indiquez votre crainte que la situation
actuelle n'amène la disparition de la sous-traitance. Pourriez-vous nous
expliquer sur quelle base s'appuient vos craintes?
M. Forget (Claude): Nous faisons peut-être un procès
d'intention, mais je crois que l'histoire récente peut nous donner au
moins un début de justification de le faire. Nous croyons qu'on a le
bras pris dans l'engrenage, en quelque sorte, et qu'une réduction de
1000 à 500 de l'effectif des entrepreneurs ne fait que présager
un objectif encore plus ambitieux de réduction peut-être 250, lors
de la prochaine ronde et ayant un niveau... Malheureusement, on ne peut pas
vous dire lequel puisqu'il faudrait une analyse détaillée de la
structure financière des opérations de chaque entreprise. Nous
n'avons pas eu le temps ni l'occasion de la faire. Il y a un moment où
le volume devient tellement minime qu'il est évidemment impossible de
continuer les activités. Est-ce que ce sera 500 dans certains cas, dans
certaines régions? Il se peut que, dès que le niveau de 500 sera
atteint, certaines entreprises ' devront fermer leurs portes. Certainement, si
le niveau devait continuer à être réduit, très
rapidement l'ensemble des sous-traitants devraient fermer leurs portes ou au
moins cesser leurs activités dans ce domaine. Dans la plupart des cas,
les activités qu'ils ont dans le domaine de la distribution
électrique sont les seules.
M. Ciaccia: Seulement une dernière brève question,
si j'ai le temps, M. le Président.
Le Président (M. Charbonneau): Oui, une
dernière.
M. Ciaccia: Vous avez parlé du nouvel équipement
que des entrepreneurs ont acheté. Je crois que vous aviez acheté
ce nouvel équipement avec la mise en place du programme PAQS. Depuis le
début de ce programme, était-ce clair que ce n'était qu'un
programme temporaire?
M. Forget (Claude): Le caractère temporaire- du programme
n'a jamais été mis en doute. Ce qui intervient comme un
élément nouveau et plus perturbant, c'est qu'au lieu de retourner
au statu quo ante on diminue de 720 à 500. C'est une diminution de 35 %
par rapport au niveau normal maintenu pendant les dix années
antérieures. Encore une fois, c'est un niveau qui a été
jugé par Hydro-Québec elle-même comme insuffisant pour
maintenir une qualité de service, d'où la nécessité
du rattrapage.
C'est cet élément de réduction plus fort qu'il ne
serait nécessaire pour simplement revenir à la normale qui est
l'élément perturbant.
Comme conséquence de cela, par exemple, si on réduit
à 500, il y a environ 200 camions qui ne sont pas complètement
dépréciés et qui vont devoir être mis au rancart.
Ils ont donc entraîné des pertes considérables à ces
entreprises et, dans une certaine mesure, à l'ensemble de la
société parce qu'au même moment Hydro-Québec fait
l'acquisition d'un équipement comparable.
M. Ciaccia: Mais c'est bon pour tes vendeurs de camions.
M. Forget (Claude): Oui.
M. Ciaccia: Est-ce que vous nous dites qu'au moment où le
programme PAQS a été mis en vigueur vous saviez qu'il
était temporaire, mais vous ne saviez pas que vos effectifs devaient
être réduits à 500? Est-ce bien ce que vous nous dites?
*
M. Forget (Claude): C'est cela. M. Ciaccia: Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Sur cette réponse,
je voudrais vous remercier, M. Forget, mesdames et messieurs, d'avoir
participé à cette consultation particulière. Â ce
stade-ci, je ne crois pas que l'on puisse être en mesure de vous indiquer
quelle sera l'orientation que prendra la commission et si la commission fera
d'une certaine façon des recommandations précises, mais une chose
est certaine, je pense que votre présence a ouvert le débat d'une
façon importante. Les travaux sont suspendus à cet
après-midi, après la période de questions.
(Suspension de la séance à 12 h 7)
(Reprise à 15 h 31)
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous
plaît! Nous reprenons, cet après-midi, la consultation
particulière sur le dossier de la sous-traitance à
Hydro-Québec. Nous allons d'abord accueillir les syndicats des
employés d'Hydro-Québec, c'est-à-dire le Syndicat des
employés de métiers d'Hydro-Québec, le Syndicat des
employés de bureau d'Hydro-Québec et le Syndicat des techniciens
d'Hydro-Québec. Si les représentants de ces syndicats veulent se
présenter à la table.
Messieurs, bonjour. Bienvenue à la commission de
l'économie et du travail. Je pense que vous étiez ici ce matin.
Donc, vous connaissez un peu les règles du jeu. On a vingt minutes,
d'abord, de présentation de
vos points de vue. Par la suite, le temps est divisé de part et
d'autre pour la discussion avec les membres de la commission., Comme on l'a vu
ce matin, dans la mesure où il y a beaucoup de députés qui
veulent intervenir, alors, autant les membres de la commission que vous, les
invités, si vous pouvez faire en sorte que les réponses et les
questions permettent à un maximum de personnes d'intervenir, ce sera
idéal.
Je ne sais pas lequel d'entre vous agit comme représentant de la
délégation. C'est monsieur...
M. Chabot (Luc): Luc Chabot.
Le Président (M. Charbonneau): Luc Chabot. Alors, M.
Chabot, bienvenue. Avant de commencer la présentation, je vous
demanderais de présenter les personnes qui vous accompagnent.
Syndicat des employés de métiers
d'Hydro-Québec, Syndicat des
employés
de bureau d'Hydro-Québec et Syndicat
des
techniciens d'Hydro-Québec
M. Chabot: C'est parfait. Je voudrais vous identifier les gens
autour de la table: À ma gauche, M. André Charbonneau,
président de la section locale 2000 du SCFP, le Syndicat des
employés de bureau d'Hydro-Québec; à ma droite, M. Charles
Cuerrier, président du Syndicat des employés de métiers
d'Hydro-Québec, section locale 1500; à l'extrémité
droite, M, Pacelli Desrosiers, président du Syndicat des techniciens
d'Hydro-Québec, section locale 957. Si vous me le permettez, j'aimerais
en même temps souligner la présence dans la salle des
exécutifs respectifs de chacun des trois syndicats du SCFP à
Hydro-Québec.
Mesdames et Messieurs les parlementaires, M. le Président, c'est
avec étonnement que nous avons appris que cette commission permanente de
l'économie et du travail devait examiner le dossier de la sous-traitance
à Hydro-Québec. Nous essayons encore de comprendre l'objectif de
la tenue d'un tel débat, puisqu'il nous semble évident que
l'ampleur de ce mandat dépasse largement le problème
soulevé par l'Association des constructeurs de routes et grands travaux
du Québec.
Il est de notoriété publique que cette association exerce
depuis plusieurs mois un lobby constant auprès de certains
ministères. La tenue de cette commission est tout simplement
l'aboutissement de ce lobbying pernicieux. Peut-être devrions-nous aussi
profiter de l'occasion pour étudier le dossier de la sous-traitance chez
Bell Canada! Ou Québec Téléphone! Ils seraient sans doute
peu nombreux ceux qui oseraient reprocher à ces compagnies
d'exécuter des travaux en régie. Pourtant, ces travaux sont du
même genre que ceux d'Hydro-Québec!
Que s'est-il donc passé pour que nous soyons rendus à
discuter de la rentabilité de l'entreprise privée sous le couvert
de la sous-traitance à Hydro-Québec?
Il nous apparaît de plus en plus évident que les gens
d'affaires ont mal planifié ou ont oublié de diversifier leurs
activités commerciales. Pourtant, il s'est passé 24 ans depuis la
nationalisation d'Hydro-Québec et cinq ans depuis qu'elle a inclus
certaines de ces entreprises dans un programme temporaire d'amélioration
du réseau de distribution. Là-dessus, si vous me le permettez, il
s'agit effectivement d'un programme temporaire. C'est ce qu'on a connu sous
l'appellation de programme PAQS. 11 s'agit d'un programme qui n'avait pas pour
objectif de reprendre les retards de travaux, d'aucune sorte. Il s'agit d'un
programme qui a été devancé. Il était prévu
que ce programme s'échelonnerait sur une période de sept ou huit
ans. Il a été devancé par Hydro-Québec au cours de
l'année 1984. Par ce programme, qui vise l'amélioration du
réseau, l'amélioration de la qualité du service,
Hydro-Québec, dans les années où le Québec
était dans une période économique difficile, a
injecté dans l'économie du Québec un montant de 400 000
000 $. Il l'a concentré sur une période de trois ans. Cela ne
pouvait se faire tout seul. Cela nécessitait, pour l'accomplissement de
ce programme, l'accord des trois syndicats d'Hydro-Québec,
particulièrement celui du Syndicat des employés de
métiers, parce qu'il existait, depuis 1976, dans la convention
collective, une disposition qui limitait l'utilisation d'un certain nombre de
monteurs d'entrepreneurs. Le Syndicat des employés de métiers a
compris à ce moment les raisons de l'injection de ces 400 000 000 $ et a
aussi fait sa part pour permettre qu'il y ait plus de monteurs d'entrepreneurs
qui travaillent à une période où, à
l'intérieur de la société, le niveau de l'emploi dans la
construction était difficile. Ce sont ces raisons qui ont fait en sorte
que les syndicats d'Hydro-Québec ont accepté de hausser les
quotas initialement prévus et en ont fait part à leurs membres.
L'ensemble des membres du syndicat des employés de métiers a
compris la situation.
Je poursuis. Il s'agit d'un programme... Il s'est passé cinq ans
depuis qu'elle a inclus certaines de ces entreprises dans un programme
temporaire d'amélioration du réseau de distribution.
Malgré leur manque de prévoyance, il nous semble que les effets
présents font partie des risques inhérents à la
philosophie de la libre entreprise. Drôle de pratique que de recourir au
gouvernement pour corriger ses propres erreurs de juge-mentî
Pourtant, l'État a déjà fait largement sa part pour
aider l'ensemble des entreprises
privées. Il l'a fait de deux façons: premièrement,
par des subventions offertes par chacun des ministères du gouvernement
du Québec et, deuxièmement, par sa permissivité face aux
nombreux abris fiscaux.
Ces avantages aux entreprises coûtent une fortune aux citoyens et
aux citoyennes du Québec. Nous croyons qu'il s'agit là de toute
autre chose que de la sous-traitance. Il semble que certains groupes voudraient
procéder à la privatisation d'Hydro-Québec sous le couvert
de la sous-traitance! Plusieurs indices nous laissent soupçonner cette
éventualité. Sinon, comment expliquer la création de la
société de la Baie James qui permettait à des consortiums
privés de devenir maître d'oeuvre d'un si grand chantier? Comment
expliquer le démantèlement de la vice-présidence, division
équipement, qui regroupait un énorme potentiel de
compétences humaines? Comment expliquer la récente
décision d'Hydro-Québec d'acheter l'électricité de
petites centrales construites, entretenues et exploitées par des
producteurs autonomes au lieu de fabriquer elle-même toute
l'électricité?
Si tel est le cas, nous vous mettons en garde contre cette tentative de
privatisation fort malicieuse. Il nous semble que le gouvernement n'a alors pas
le choix de poser la question fondamentale et de consulter la population du
Québec, comme il l'avait fait en 1962. Mais si nous nous étions
trompés sur les véritables objectifs de cette commission! Et s'il
n'avait jamais été question de privatiser Hydro-Québec!
Alors, nous serions quand même surpris de voir des parlementaires se
pencher sur des règles de gestion. À quand une ocmmission
parlementaire sur le système de gestion par objectifs, ou encore sur le
budget à base zéro? À moins que la raison ne soit tout
autre, que les gestionnaires que vous avez choisis aient perdu votre confiance.
Même dans ce cas, il y aurait eu moyen de faire les choses autrement.
S'il est impossible de saisir les véritables motifs de ces audiences,
les trois syndicats du SCFP à Hydro-Québec sont tout de
même prêts à vous présenter leur vision de la
sous-traitance dans l'entreprise.
Nous croyons utile, au départ, de vous rappeler certains faits.
Hydro-Québec est un citoyen corporatif pour qui s'appliquent toutes les
lois du Québec, incluant celles du travail et celles du régime de
négociations dans la fonction parapublique. Dans le cadre de ces lois il
est normal qu'Hydro-Québec, comme tout autre employeur, fasse l'objet de
demandes syndicales visant à limiter le droit de la direction de
recourir à la sous-traitance. Ce genre de demande est chose courante et
a toujours fait l'objet de négociations à Hydro-Québec
depuis 1966. Les réponses plus ou moins favorables d'Hydro-Québec
dépendent de ses politiques de gestion. Nous comprendrions difficilement
que l'Assemblée nationale vienne s'immiscer dans la gestion de
l'entreprise ou, pire encore, veuille empêcher le jeu de la libre
négociation.
Dans le cas présent, l'actionnaire ne doit pas limiter la
latitude que possèdent les gestionnaires qu'il a mis en place pour
satisfaire à ses objectifs. Le principal objectif - tout le monde en
conviendra - est le respect de la loi créant Hydro-Québec ainsi
que sa modification de 1983. Cette loi - permettez-nous de vous le rappeler -
ne confie pas à Hydro-Québec le soin de régler le sort de
la libre entreprise au Québec, ni de soutenir l'entreprise
privée, ni de la sauver en cas de mauvaise gestion. Il nous
apparaît de plus en plus clair que certains groupes dans la
société confondent Hydro-Québec et le ministère de
l'Industrie et du Commerce. Ils souhaitent peut-être que l'administration
leur fasse des paiements de transfert.
Pour nous, le mandat d'Hydro-Québec a toujours été
évident: c'est de produire et de distribuer de
l'électricité selon des tarifs et des conditions basés sur
une saine gestion financière. À notre avis, cela implique donc
qu'il appartient aux gestionnaires d'Hydro-Québec de choisir leurs
propres règles de gestion. La sous-traitance en est une. La
sous-traitance se définit comme une forme de contrat permettant à
un tiers d'effectuer une partie des travaux ou certaines tâches
habituellement faites par les salariés de l'employeur. Donc, si cela
s'avérait rentable et efficace, Hydro-Québec pourrait
décider une fois pour toutes de ne plus faire appel à la
sous-traitance et de tout faire en régie. Ce geste serait alors
qualifié et évalué comme en étant un de saine
gestion financière.
D'ailleurs, le gouvernement du Québec, à une plus grande
échelle, a déjà posé ce genre de jugement. C'est
ainsi qu'est née Hydro-Québec, en 1944, pour la région de
Montréal et en 1963, pour l'ensemble du Québec. Même si on
a tendance à oublier facilement l'histoire, nous sommes assurés
que des gens de ce gouvernement se souviennent du "Maître chez nous" de
Jean Lesage.
Qu'ils se souviennent que les Québécois et les
Québécoises ont dû payer le gros prix pour le rapatriement
de notre pouvoir électrique auparavant exploité par le secteur
privé. (15 h 45)
Mais ce n'est pas tout. Qu'on se souvienne aussi des années
quarante et cinquante, alors que les entreprises privées n'avaient pas
jugé bon d'assumer les risques inhérents à la libre
entreprise. Qu'on se souvienne qu'elles avaient négligé de
développer le potentiel électrique du Québec. Qu'on se
souvienne de la discrimination
tarifaire élevée en système et imposée aux
gens les plus démunis. Qu'on se souvienne de la piètre
qualité de service que subissait la population demeurant dans les
régions éloignées. Mal gérées, peu rentables
et profondément conservatrices, les attitudes de ces entreprises furent
néfastes et retardèrent le développement du
Québec.
C'est à la nationalisation d'Hydro-Québec que l'on doit en
bonne partie le développement du Québec. Et c'est è la
concentration en régie du savoir-faire, du développement
technologique et de la formation des travailleurs et travailleuses que l'on
doit la réalisation d'une infrastructure d'entreprise forte. Une
infrastructure qui a permis aux hydro-québécois de
réaliser Manic 5.
Quelques années plus tard, les syndicats du SCFP à
Hydro-Québec ont pu évaluer les bénéfices que
représentaient l'uniformisation des méthodes et des conditions de
travail, l'uniformisation de l'application des nouvelles technologies, des
méthodes de gestion et des règles de sécurité sur
tout le territoire du Québec. Tous ont convenu qu'il s'agissait de
réelles économies pour toute la société
québécoise. Tout ça, grâce à une gestion en
régie étatique.
Par contre, nous nous sommes toujours inquiétés du fait
que la nationalisation ne soit jamais complétée. Pensons aux
villes qui continuent de distribuer l'électricité aux
abonnés de Westmount, Joliette, Sherbrooke. Pensons à toutes ces
entreprises privées qui continuent d'oeuvrer sur les travaux de
production, de transport et de distribution de l'électricité.
Les syndiqués d'Hydro-Québec sont fiers de leurs
réalisations et ils ont toujours été conscients des effets
bénéfiques d'une gestion en régie. C'est pourquoi ils nous
mandatèrent, à plusieurs reprises, pour sonner l'alarme à
la suite de pressions souvent occultes qui poussaient Hydro-Québec
à se départir de son savoir-faire. Ce n'est pas la
première fois que les lobbies privés viennent quémander le
droit de démanteler une partie de cette société
d'État pourtant essentielle à la stabilité
économique du Québec. C'est ainsi que, publiquement, nous avions
souligné les dangers de créer la société de la Baie
James et que nous nous étions apposés au
démantèlement de la vice-présidence, division
équipement, qui a constitué un véritable gaspillage de
ressources humaines. Et, plus récemment encore, nous dénoncions
le danger de laisser produire l'électricité par des compagnies
privées.
Mais les gouvernements font la sourde oreille et la sous-traitance
continue d'augmenter toujours sans qu'on en évalue les impacts
économiques et sociaux. C'est pourquoi, à chacune des
négociations, depuis des années, nous nous sommes efforcés
de convaincre Hydro-Québec de restreindre l'utilisation de la
sous-traitance et de revenir à son mandat initial. Bien que les clauses
des trois conventions collectives semblent théoriquement restreindre
l'usage de ce mode de gestion, c'est une tout autre histoire dans la
pratique.
Regardons de plus près comment HydroQuébec a
cédé peu à peu du terrain à l'entreprise
privée de même que l'évolution de la sous-traitance dans le
genre de services et de travaux où des travailleurs et des travailleuses
syndiqués du SCFP sont impliqués. On constate une augmentation,
de 1972 à 1985s de 79 000 000 $ qu'elle était en 1972, elle passe
au-delà de 261 000 000 $ en 1985, donc, une hausse de 230 %
correspondant à une augmentation annuelle de 16,4 %. Chacun se
souviendra que c'est vers 1980 qu'Hydro-Québec a mis fin à ses
grands travaux. Malgré cela, il n'y a pas eu de diminution de la
croissance de la sous-traitance. L'ensemble des contrats passés à
l'extérieur représente une augmentation de 35,7 %. De 137 000 000
$ en 1980, ce* chiffre est passé à 186 000 000 $ en 1985.
En analysant ces résultats par type de contrats,, on constate les
augmentations suivantes. Construction de lignes de distribution: 118,4 %°;
sous la rubrique entretien et réparation de lignes et de réseaux:
580,3 %; de ponts, de routes et de barrages: 342,6 %; de postes et de
centrales; 1143,6 %; de véhicules? 287,2 %; de publicité et de
photographie; 190,5 %; de services professionnels: 132,5 %. Il est à
noter que nous n'avons' pas retenu le déboisement et l'excavation, car
ce sont des travaux mineurs qui fluctuent énormément d'une
année à l'autre.
En résumé, les contrats du secteur de l'entretien et de la
réparation qui représentent les principales fonctions des trois
groupes syndiqués du SCFP sont passés de 24 714 000 $ en 1972
à 135 641 000 $ en 1985, ce qui correspond à une hausse de 476,2
%. Ces chiffres, bien qu'incomplets, nous démontrent
qu'Hydro-Québec a une nette tendance à revenir sur ses
orientations de départ. Des questions doivent se poser. Nos
gestionnaires seraient-ils atteints de "rationalité" aiguë? Nous ne
le croyons pas.
Nous sommes même en mesure d'affirmer qu'à l'heure actuelle
Hydro-Québec ne possède pas les capacités statistiques
d'évaluer les coûts comparatifs du travail réalisé
à l'interne et de celui réalisé à l'externe.
Le Président (M. Théûrêt): M. Chabot,
je m'excuse. Je veux vous rappeler qu'il reste environ deux minutes et je vois
qu'il vous reste neuf pages de texte. Est-ce qu'il vous serait possible
d'essayer de résumer ces neuf pages à tout le moins, puisqu'on a
déjà accumulé du retard qui n'est évidemment
pas
occasionné par votre présentation?
M. Chabot: Je vais tenter de conclure en essayant de n'esquiver
aucun des éléments importants de notre mémoire.
Le Président (M. Théorêt): Parfait.
M. Chabot: II n'est pas question pour nous de prêter foi
à certains calculs de coûts effectués sur une base ad hoc
en ne tenant pas compte de l'ensemble de ce qu'on appelle les coûts
cachés. Si on veut faire des comparaisons, on doit considérer les
frais d'administration pour préparer le cahier de charges (plans, devis,
descriptions), les frais de vérification des textes contractuels, les
frais découlant des poursuites et bris de contrats, les frais
découlant des clauses de contrats pour travaux non prévus, les
frais reliés au processus de soumissions publiques, les frais de
surveillance des travaux, les frais d'écriture reliés à la
gestion des sous-contrats, le coût du personnel qualifié
sous-utilisé.
Une personne a déjà publié des ouvrages
relativement à la sous-traitance et a identifié les avantages et
les désavantages de confier en sous-traitance, c'est M. Pierre-Yves
Barreyre qui a... Dans notre mémoire, on reprend les différents
avantages qui ont été confiés... Quand on analyse la
nécessité de confier en sous-traitance, certains avantages sauf
un ne s'appliquent pas à Hydro-Québec, celle-ci étant une
société d'État. On dit, à l'énoncé
que l'on retrouve à la page 22 de notre mémoire, que la
sous-traitance représente un moyen d'économiser du temps afin de
répondre aux stimulis de l'environnement. On dit que cela peut toujours
trouver application à Hydro-Québec, mais que les syndicats du
SCFP, à cet égard, ont toujours reconnu que, dans certaines
conditions comme les cas d'urgence, l'employeur pouvait recourir à la
sous-traitance. Le même auteur identifie également plusieurs
inconvénients relatifs à la décision de sous-traiter ou de
confier en régie. On fait également mention dans notre
mémoire de la limite des contrôles. Vous savez que, lorsqu'on
confie des contrats en sous-traitance, on doit nécessairement associer
à l'adjudication de ces contrats certains contrôles. Mais qui dit
contrôle dit nécessairement limite de ces contrôles.
Évidemment, on veut vous rappeler également l'impact sur
l'emploi du fait de confier en régie, compte tenu de la situation
précaire de l'emploi au Québec, situation par laquelle on
parvient, par des emplois permanents à Hydro-Québec, à
donner plus d'importance à l'emploi permanent qu'à l'emploi
précaire.
Donc, en conclusion, qu'il nous soit permis d'avoir des aspirations.
Dans cet esprit, nous croyons qu'Hydro-Québec devrait amorcer un vrai
programme de rapatriement du savoir-faire et, entre autres, rétablir la
vice-présidence, division équipement. Hydro-Québec,
prévoyant maintenir 22 000 employés permanents et temporaires,
devrait reconnaître l'expérience des travailleurs et des
travailleuses qui ont oeuvré pour des sous-traitants et accorder
à ses personnes une priorité d'emploi avant de procéder
à de nouveaux embauchages. J'aimerais, avant de conclure
définitivement, peut-être rappeler le début de notre
présentation, de notre mémoire, à savoir que si les
intentions sont d'envisager la privatisation d'Hydro-Québec, on
souhaiterait qu'on s'adresse directement à la population comme on l'a
fait pour nationaliser les sociétés d'État.
Nous vous remercions d'avoir accordé votre attention à
notre présentation.
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. Chabot. M. le
ministre.
M. Ciaccia: Je vous remercie d'avoir accepté d'exposer vos
vues, concernant la gestion de la sous-traitance chez Hydro-Québec,
devant cette commission.
Avant d'aborder le fond de la question, il m'apparaît que votre
mémoire nécessite, de ma part, des mises au point
immédiates.
Premièrement, je tiens à vous dire que les
représentants élus, et, plus particulièrement, le ministre
de l'Énergie sont directement concernés par le problème de
la sous-traitance, qui représente, non seulement un problème de
gestion interne, mais aussi un problème d'équilibre entre
différents partenaires économiques. Quand vous dites, dans votre
mémoire, que ce problème n'appartient aucunement au Parlement, je
voudrais porter à votre attention qu'Hydro-Québec est une
société d'État. J'admets que, en conséquence,
contrairement au reste de l'appareil gouvernemental, nous avons voulu lui
accorder une grande autonomie, mais elle n'est pas pour autant une entreprise
privée et le gouvernement, en tant qu'actionnaire unique, en demeure
responsable devant l'opinion publique. C'est pour assurer cette
responsabilité qu'en tant que ministre de l'Énergie et des
Ressources je suis le ministre tuteur d'Hydro-Québec. S'il y a des
mesures prises par Hydro-Québec qui peuvent avoir des incidences sur les
dépenses et sur les tarifs, c'est le Conseil des ministres qui doit
approuver ces tarifs et c'est le gouvernement qui doit répondre à
la population de ces augmentations de tarif. Dire que ce n'est pas du tout de
notre ressort d'examiner certains gestes d'Hydro-Québec, je crois que
cela va un peu loin, étant donné le fait que le gouvernement est
l'unique actionnaire d'Hydro-Québec.
Deuxièmement, vous affirmez que, sous le couvert d'une discussion
sur la sous-traitance, c'est de la privatisation d'Hydro-
Québec que nous voulons discuter. Non seulement ce n'est pas le
cas, mais c'est totalement faux et je ne voudrais pas voir le débat
dévier sur un autre sujet. Je voudrais qu'on examine le fond du
problème. Je voudrais vous référer au rapport du
comité sur la privatisation des sociétés d'État de
juin 1986 où il y avait trois catégories de
sociétés. La deuxième catégorie, le second groupe,
comportait sept sociétés qui constituent le monopole public,
telle HydroQuébec.
II y avait un troisième groupe qui représentait les dix
sociétés d'État que l'on peut qualifier d'entreprises
stratégiques. On ne parlait que de privatisation et de revoir
possiblement les orientations de ce troisième groupe. Il était
clairement spécifié dans le rapport qu'il n'était
aucunement question de la privatisation d'Hydro-Québec. La privatisation
ne s'appliquait pas à HydroQuébec et ne s'y applique pas
aujourd'hui. Ce n'est pas du tout la question ni les enjeux que nous discutons
devant cette commission parlementaire. (16 heures)
Enfin, j'aimerais revenir à vos remarques sur le soutien aux
entreprises, aux pages 7 et 8, quand vous dites: "Pourtant, l'État a
déjà fait sa large part pour aider l'ensemble des entreprises
privées." Puis, vous citez un chiffre de 1 383 000 000 $ pour
l'année 1986. "Et il l'a fait par sa permissivité face aux
nombreux abris fiscaux. Ces avantages aux entreprises coûtent une fortune
aux citoyens et citoyennes du Québecl"
Permettez-moi de vous rappeler que 1 600 000 personnes au Québec
travaillent dans des entreprises. Lorsque nous appuyons les entreprises, nous
appuyons toute la base économique de notre société. C'est
grâce à cette base que nous pouvons offrir à l'ensemble de
nos citoyens les services publics reconnus essentiels pour leur
bien-être. Le soutien à l'emploi passe par le soutien aux
entreprises. Si celles-ci sont viables, les emplois demeureront, sinon ils
disparaîtront. Avec 330 000 chômeurs au Québec, 260 000
ménages dont le chef est apte au travail bénéficiant de
l'aide sociale, non seulement devons-nous assurer aux Québécois
notre appui aux emplois actuels, mais encore devons-nous voir à la
présence d'outils stimulateurs d'emplois et un de ces outils
stimulateurs est le développement d'une expertise réputée
et en demande.
C'est ce qu'Hydro-Québec a fourni par le passé et nous
vouions que cela continue. Hydro-Québec est un monopole,
protégé par la volonté de l'État. Vous
bénéficiez, en ce sens, d'un statut privilégié et
sécurisant que ne partage pas la grande majorité des
travailleurs. Ce statut se justifie par l'impact de l'entreprise sur
l'économie québécoise. Je ne voudrais pas que ce statut de
monopole ne profite' qu'à Hydro-Québec et à ses
employés. J'ai la responsabilité d'en tirer le maximum d'effets
d'entraînement sur les emplois au Québec.
Ceci étant posé, comme je vous l'ai mentionné et si
vous voulez connaître le but de la commission, je suis à la
recherche d'un équilibre. Je suis conscient de toute l'importance du bon
fonctionnement d'Hydro-Québec pour rendre un service de qualité
à la population. En conséquence, je voudrais vous poser quelques
questions.
À la page 12 de votre mémoire, vous dites: "Pour nous, le
mandat d'Hydro-Québec a toujours été évident: c'est
de produire et de distribuer de l'électricité selon des tarifs et
des conditions basés sur une saine gestion financière."
Est-ce que vous pourriez me dire en quoi les modifications
apportées à la clause 34 et à la réduction des
effectifs de sous-traitances de 720 è 500 personnes-années,
apporteront des avantages à l'ensemble des citoyens du
Québec?
M. Chabot: M. le ministre, si vous me le permettez, nous avons
peut-être, d'une part, été mal compris. Si votre
compréhension de notre mémoire est à savoir qu'on dit au
gouvernements Vous n'avez pas d'affaire à vous mêler de la gestion
d'Hydro-Québec, ce n'est pas ce qu'on dit. Le gouvernement doit se
mêler de la gestion d'Hydro-Québec, mais ce qu'on dit, c'est que
le gouvernement n'a pas à se mêler de règles de gestion.
C'est pour cela qu'on dit, dans notre mémoire: Â quand une
commission parlementaire sur une gestion par objectifs, etc.?
Pour répondre directement à votre question relativement
à la lettre d'entente qui est communément appelée;
Programme d'amélioration de la qualité du service, quant à
savoir comment cette lettre d'entente a pu bénéficier à
l'ensemble de la population du Québec, cette lettre d'entente-là
a permis d'utiliser un nombre supérieur de monteurs d'entrepreneurs que
ceux qui étaient initialement prévus de façon à
améliorer le réseau de distribution, qui se rend directement chez
la totalité de la population du Québec, et à rendre le
réseau, de cette façon-là, beaucoup plus fiable, beaucoup
plus à l'abri de pannes ou de choses qui peuvent arriver dans ce
sens-là.
M. Ciaccia: Je n'ai pas mal interprété vos propos,
vous allez m'excuser. Je lis, dans votre résumé du
mémoire: "Les problèmes de gestion interne ne font pas partie des
prérogatives du gouvernement" et à la page 26: "En conclusion, le
choix de sous-traîter ou d'exécuter en régie est un choix
de gestion. Ce choix relève des gestionnaires d'Hydro-Québec et
n'appartient aucunement au Parlement." Vous allez m'excuser si j'ai
interprété ces paroles en disant qu'on n'avait
pas d'affaire, au Parlement, à discuter de gestion interne,
spécifiquement de la question de la sous-traitance.
Si vous voulez amender votre mémoire, libre à vous de le
faire. Je vous en serai très reconnaissant et je changerai les propos
que j'ai clarifiés, à la suite du contenu de votre
mémoire.
Une deuxième question, M. le Président, parce qu'on parle
d'emplois et de création d'emplois et qu'on ne veut pas mettre en jeu
les emplois. Comment l'ancien libellé de l'article 34 affectait-il les
emplois chez Hydro-Québec? Y avait-il réduction d'emplois?
M. Chabot: L'ancien libellé de l'article 34, l'article qui
traitait de la sous-traitance, datait de 1976. Ce libellé indiquait que
le nombre de monteurs d'entrepreneurs ne pouvait augmenter plus que le taux de
l'indice des prix à la consommation, ce qui aurait fait en sorte, de
toute façon, à la fin de la mise en application de ladite lettre
d'entente qu'on a connue en 1984, ce qui représentait à toutes
fins utiles l'accomplissement du libellé de 1976... Les emplois
augmentaient à Hydro-Québec à un rythme différent
d'une année à l'autre. Les emplois de monteurs d'entrepreneurs
pouvaient également augmenter. L'année de référence
était l'année 1975, qui a été une très
grosse année dans l'utilisation de monteurs d'entrepreneurs. La clause
qui existait à l'époque a fait en sorte que, tranquillement, de
par l'application d'un système mathématique, le nombre a
diminué graduellement. Lorsque cette clause est apparue en 1976, on n'a
vu personne venir nous dire qu'on venait de créer du chômage.
Personne n'est venu nous dire cela. Pourtant, aujourd'hui à la fin de
1987, si on avait gardé le même texte de convention collective, on
se retrouverait à toutes fins utiles devant la même
éventualité.
Ce qu'on a fait, M. le ministre, c'est qu'on a accepté de
surseoir à l'application de la convention collective pour une
période temporaire de trois ans, permettant ainsi à des
entreprises privées d'avoir plus de contrats pour Hydro-Québec,
d'utiliser plus de monteurs entrepreneurs que les quotas qui étaient
initialement prévus. Hydro-Québec a injecté, des montants
comme je l'ai dit tantôt, dans le but de relancer une certaine
économie. On a également fait notre part, toujours dans cet
esprit. On se retrouve en bout de piste avec la conséquence de la fin
d'un programme temporaire, mais de toute façon - je dis bien, de toute
façon -l'application d'une clause de 1976 nous aurait menés au
même endroit.
M. Ciaccia: Mais, si je vous comprends bien, vous avez dit qu'il
n'y avait pas de réduction d'emplois. Vous avez mentionné, j'ai
pris des notes, corrigez-moi si je n'ai pas pris les bonnes notes, que l'emploi
à l'interne à Hydro-Québec augmentait avec l'ancienne
clause 34. Là est arrivé un programme PAQS et on a
augmenté les effectifs ou les contrats de sous-traitance. Est-ce que, en
augmentant les contrats de sous-traitance, on a diminué l'emploi
à l'interne?
M. Chabot: En augmentant par le programme PAQS les contrats de
sous-traitance, on a augmenté l'emploi à l'interne.
M. Ciaccia: L'emploi à l'interne a augmenté avec
PAQS.
M. Chabot: Oui, et cela s'explique.
M. Ciaccia: Avec la fin du programme PAQS, on ne retourne pas au
statu quo de 720, on retourne à un nouveau chiffre qui a
été négocié en 1984, à 500.
M. Chabot: Qui était de 500.
M. Ciaccia: Alors, il y a baisse des effectifs dans la
sous-traitance, mais il y a toujours augmentation des effectifs à
l'interne.
M. Chabot: Et cela s'explique. La baisse des effectifs en
sous-traitance au chiffre de 500 à la fin du programme temporaire et la
hausse des effectifs à l'interne sont directement reliées au
Programme d'amélioration de la qualité du service. Le
réseau étant adéquat, le réseau étant
renouvelé et capable de faire face à plus d'intempéries
nécessite moins de nouvelles constructions, et peut-être plus de
personnes à l'interne pour faire l'entretien de ce réseau. C'est
comme cela que ça s'explique.
M. Ciaccia: On reviendra plus tard avec mes collègues pour
poser des questions sur l'entretien, mais je voulais juste savoir une chose: Il
y a eu une augmentation à l'interne avec l'ancien 34, mais est-ce que
l'ancien 34 empêchait l'augmentation de l'emploi à l'interne?
Maintenant, on se retrouve face à une situation où on met un
maximum pour la sous-traitance à 500, qui était à 220
avant 1983. Alors, si on empêche l'augmentation à l'externe,
est-ce qu'il y a des clauses qui empêchent l'augmentation à
l'interne?
M. Chabot: Vous avez l'ancien 34, vous me dites.
M. Ciaccia: Oui, est-ce qu'il y avait des clauses qui
empêchaient l'augmentation à l'interne?
M. Chabot: Évidemment que non. Il n'y
a pas de clause dans les conventions collectives qui empêchait
l'employeur de faire de l'embauche. Il n'y a pas un syndicat, à ma
connaissance, qui empêcherait un employeur de faire de l'embauche.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Roberval.
M. Gauthier: Oui; merci, M. le Président. Ma question
s'adresse évidemment aux représentants des syndicats
d'Hydro-Québec que je remercie de nous avoir présenté ce
texte aujourd'hui et de bien vouloir répondre à nos
questions.
Il y a un certain nombre de choses qui nous préoccupent à
cette étape-ci, dont une - je ne sais pas à quelle page du
mémoire, dans le résumé du mémoire, à la
deuxième page au début, vous dites... Je me permets de vous citer
le texte: "Nous sommes convaincus que la sous-traitance à
HydroQuébec n'a que des effets pervers pour les raisons suivantes:
Hydro-Québec n'a jamais voulu mesurer l'impact réel de la
sous-traitance. Les calculs actuels ne tiennent pas compte des coûts
réels de la sous-traitance." Est-ce que vous pourriez, s'il vous
plaît, monsieur, m'expliquer ce que cet énoncé veut dire?
Est-ce que vous l'avez retrouvé? Je m'excuse, là'
M. Chabot: Oui, évidemment la page du résumé
fait référence à la page du mémoire où l'on
dit, à la page 19, particulièrement, que pour mesurer l'impact
des coûts dans le but de faire des comparaisons entre un travail en
régie et un travail confié en sous-traitance, on doit, si on veut
vraiment faire des coûts comparatifs, inclure dans ces coûts toutes
les données.
Or, ce qu'on dit dans notre résumé, c'est que
Hydro-Québec n'avait pas de statistiques disponibles pour effectuer ces
coûts et que les calculs actuels ne tiennent pas compte des coûts
réels.
Dans les coûts réels, on dit: II y a des coûts qu'il
faut comptabiliser pour être en mesure d'effectuer des études
comparatives: les frais d'administration pour préparation du cahier de
charges (plans, devis, descriptions); les frais de vérification de
textes contractuels; les frais découlant de bris de contrats; les frais
découlant des clauses de contrats pour travaux non prévus ou une
modification des travaux; les frais reliés au processus de soumissions
publiques ou de soumissions sur invitation; les frais de surveillance des
travaux; les frais d'écriture reliés à la gestion des
sous-contrats, le coût du personnel qualifié sous-utilisé.
Ce sont tous des frais qui doivent entrer en ligne de compte lorsqu'on veut
faire une étude comparative de coûts entre un travail en
régie et un travail en sous-traitance. Ce sont ces coûts
réels qu'il faut vraiment utiliser pour être en mesure de faire
une comparaison qui soit dans l'ordre. (16 h 15)
M. Gauthier: D'accord. À la page 22, vous parlez des
inconvénients et vous dites que le donneur d'ouvrage - à peu
près au milieu de la page - n'a pas de contrôle sur la
sécurité des approvisionnements, sur la quantité, sur les
délais et sur les coûts. Vous faites référence
à quoi, exactement? Pourriez-vous m'expliquer cet
énoncé?
M. Chabot: Oui. Lé donneur d'ouvrage, cela veut dire que
l'entreprise qui soustraite, l'entreprise qui donne des contrats en
sous-traitance n'est pas en mesure d'avoir de contrôle sur les
approvisionnements du sous-traitant, ne connaît pas ses prix... Elle
connaît ses prix, mais elle n'a pas de contrâle sur les
fluctuations de ses prix. Le sous-traitant peut négocier avec ses
employés des conditions de travail, des conditions de salaire.
L'entreprise, si on l'applique à notre exemple, Hydro-Québec, n'a
pas de contrôle sur une négociation qui se passe avec une
entreprise privée et son syndicat. Le sous-traitant pourrait emprunter
sur des marchés, à des banques et Hydro-Québec n'aurait
pas de contrôle sur les taux d'intérêt. Alors, c'est
l'ensemble de la situation, de la sécurité des
approvisionnements, des délais et des coûts associés au
sous-traitant en rapport avec ce contrat, sur lesquels le donneur d'ouvrage n'a
pas de contrôle.
M. Gauthier: Merci. Dans le problème qui nous
préoccupe aujourd'hui de façon beaucoup plus grande que ces
quelques précisions, on nous présentait ce matin -vous
étiez, je crois, présents dans cette salle - un point de vue,
évidemment, qui va à l'extrême opposé de ce que vous
nous demandez. Les entrepreneurs nous expliquaient que, si on remonte à
quelques années - vous avez échangé tout à l'heure
avec le ministre sur cela - il y avait, je pense, 720 postes assurés aux
sous-traitants. Les choses ont changé avec le programme spécial,
cela a augmenté sensiblement. Maintenant, on se dirige vers le chiffre
de 500. Vous avez indiqué au ministre tout à l'heure
également que, évidemment, à l'interne, le programme
d'amélioration des équipements n'avait pas eu pour effet de
diminuer le nombre de syndiqués puisqu'il y avait des travaux
d'entretien, si j'ai bien compris, qui devaient être faits pour
entretenir ce réseau amélioré. Donc, votre groupe de
syndiqués avaient conservé leur emploi. Évidemment, on ne
peut dire la même chose de l'autre groupe de syndiqués qui est du
côté des entrepreneurs où la baisse est significative.
Est-ce que vous pouvez nous dire... L'application de la clause de la convention
collective, telle que prévue maintenant, vous donne comme nombre de
personnes... Vous avez aussi des employés à temps partiel
en assez grande quantité qui sont touchés par l'application de
cette clause. Pourriez-vous nous indiquer, toute proportion gardée, quel
était le nombre de personnes à l'interne regroupées dans
votre syndicat voilà, je ne sais pas, deux ans et maintenant, avec les
employés permanents à temps partiel? J'ai l'impression qu'il y a
une augmentation sensible des employés temporaires depuis quelque temps.
Est-ce exact?
M. Chabot: Bon. Effectivement, le nombre de membres qu'on
représente à Hydro-Québec dans l'ensemble des trois
sections locales est grosso modo d'environ 14 000. En effet, vous avez raison
quand vous dites qu'il vous semble que le nombre d'emplois temporaires a
augmenté à Hydro-Québec ces dernières
années. Oui, cela a augmenté. Donc, le nombre d'emplois
permanents n'a pas augmenté. Le phénomène qu'on retrouve
depuis plusieurs années est un phénomène d'emplois
temporaires qui n'a pas permis d'augmenter, dans les mêmes proportions,
le nombre d'emplois permanents.
Si l'on regarde les chiffres et les données que nous avons, en
1989, le nombre de syndiqués à Hydro-Québec va être
le même que celui qui existait en 1980. Pourtant, il se sera passé
neuf ans. Il faut aussi se rappeler qu'avant juin 1984, au moment de la
signature de la lettre d'entente en question, la lettre d'entente PAQS,
l'embauche à Hydro-Québec était gelée. Pendant ces
années qu'on a traversées, il n'y avait pas d'embauche qui se
faisait. Alors, la lettre d'entente PAQS est arrivée au moment
même où il ne se faisait plus d'embauche à
Hydro-Québec depuis un certain nombre d'années. Ce qui a eu pour
effet, évidemment, de favoriser le vieillissement de la population
d'Hydro. On assurait moins une relève que par le passé. Je ne
sais pas si cela répond à votre question, M. le
député.
M. Gauthier: Est-ce que vous avez... Là, on a le nombre de
personnes syndiquées. Est-ce que vous avez, de façon plus
précise, l'évolution du nombre d'occasionnels? Je n'ai pas saisi,
si vous nous l'avez donné.
M. Chabot: On n'a pas une évolution plus précise
qu'il ne le faut, mais je dois, afin de répondre à votre
question, me référer aux années 1979, 1982 où le
taux d'utilisation d'employés temporaires était très
limité. C'est depuis 1982 qu'il y a eu vraiment une remontée
impartante, assez importante pour justifier des négociations, des
conditions de travail particulières pour ces groupes-là. Vous
n'êtes pas sans savoir que les conventions collectives comportent des
dispositions maintenant, concernant les groupes d'employés temporaires.
Ce qu'elles ne comportaient pas auparavant. C'est la première convention
collective où l'on retrouve des dispositions, concernant les
employés temporaires. Les conventions précédentes n'en
contenaient pas. Non pas que le besoin n'était pas là, mais la
demande n'était pas là. Il n'y avait pas nécessairement
suffisamment de demandes pour justifier l'ampleur d'un article comme
celui-là.
M. Gauthier: Vous savez, une commission parlementaire comme
celle-là, c'est souvent l'occasion pour des groupes d'échanger de
gros mots par personne interposée, la personne importante étant
la commission parlementaire. Ce matin, les entrepreneurs nous ont dit que
certaines de vos équipes souffraient d'un degré
d'inefficacité allant jusqu'à 65 %. Chiffre qui,
évidemment, m'a fait un peu sursauter, mais on a essayé de
démontrer, du côté des entrepreneurs, que c'était
exact quand on prenait pour fins de comparaison la rentabilité des
équipes sur le terrain par rapport à vos équipes,
semble-t-il, tout en nous précisant que la méthodologie - les
entrepreneurs l'on fait ce matin, cependant -de l'étude n'était
pas tellement scientifique, mais qu'il s'agissait d'observations faites le plus
sérieusement du monde.
Par contre, vous n'êtes pas non plus très très
gentils pour les entrepreneurs et je vous comprends. Vous dites à la
page 7 qu'on n'a pas à discuter de la rentabilité de l'entreprise
privée, sous le couvert de la sous-traitance à
Hydro-Québec, et que les gens d'affaires ont mal planifié, ont
oublié de diversifier leurs activités commerciales. Bon, il s'est
passé 24 ans depuis la nationalisation d'Hydro. Bref, ces gens-là
ont été imprévoyants et c'est pour cela qu'aujourd'hui, de
vos dires, ils viennent se lamenter en commission parlementaire. Bon
procédé pour bon procédé, moi, je voudrais vous
questionner sur celui-ci. Si vous voulez, évidemment, commenter l'autre,
vous pourrez le faire aussi. Vous avez toute latitude.
Mais expliquez-moi sérieusement, parce que j'avoue que j'ai de la
misère à prendre cela au sérieux, comment un
sous-entrepreneur en installations électriques peut-il être
prévoyant, se recycler dans quelque chose alors qu'il y a un programme
d'amélioration du réseau à Hydro-Québec qui assure
du travail et qui demande même des ajouts d'équipements, des
achats d'équipements, etc, pour faire face à la demande.
Pouvez-vous m'expliquer en quoi les entrepreneurs ont été si
terriblement imprévoyants que cela, et leurs employés, victimes
de cette imprévoyance dans le contexte?
M. Chabot: Ce qu'on dit, c'est qu'il
s'agissait au départ d'un programme temporaire. Les entreprises
concernées en étaient informées. On a eu besoin d'acheter
de nouveaux équipements, soit, mais cela devait, en termes de gestion,
j'imagine, se rentabiliser à l'intérieur d'une période
déjà préalablement identifiée, dite temporaire. En
ce sens, à l'expiration de ce programme temporaire, on fait des
démarches pour obtenir une commission parlementaire pour venir dires
Écoutez, le programme prend fin. On a investi et acheté de
l'équipement et on n'aura plus de contrat tantôt. C'était
connu. Il aurait peut-être fallu qu'on s'organise pour rentabiliser ces
équipements à l'intérieur de la durée du programme
ou, à tout le moins, ne pas s'équiper en tenant pour acquis que
le programme serait prolongé.
Vous savez, lorsqu'on regarde les chiffres, c'est intéressant.
N'eût été de la lettre d'entente en question, l'utilisation
de monteurs d'entrepreneurs aurait été bon an mal an 300 à
350 monteurs-années* La lettre d'entente est arrivée et elle
permettait 1000 personnes-années. En 1984, il y a eu, pour les monteurs
d'entrepreneurs, 771 personnes-années, en 1985, ce sont 965
personnes-années, en 1986, 946 personnes-années et en 1987,
à ce jour, 950 personnes-années. Ces chiffres que je viens de
vous donner sont des chiffres qui regardent les monteurs d'entrepreneurs et les
employés de soutien de ces entreprises. Quand on les transpose et qu'on
regarde l'utilisation de monteurs d'entrepreneurs purs, on se rend compte que,
pour l'année 1984, on a utilisé 684 personnes-annéesj en
1985, 825 personnes-années; en 1986, 816 personnes-années et en
1987, 820 personnes-années, au moment où on se parle. Pourtant,
la possibilité qu'on avait négociée était
d'atteindre 1000 personnes-années alors que cette nouvelle disposition,
cette lettre d'entente PAQS devant faire face au programme temporaire dans le
but d'améliorer la qualité du réseau, la qualité du
service à la population, qui avait une durée limitée, a
permis, au moment où elle est arrivée, dans le temps, d'utiliser
plus de monteurs que ce qui était initialement prévu dans une
clause négociée et signée en 1976 et qui était en
application, bon an mal an. (16 h 30)
Qu'on vienne nous dire aujourd'hui que nous sommes corporatifs, qu'on
vienne nous dire aujourd'hui que nous sommes des syndicats égoïstes
et qu'on vienne nous dire aujourd'hui qu'on a mis des familles au chômage
ou au bien-être social, je dois vous dire, M. le député,
que ce n'est pas cette opinion qu'on a de nous-mêmes. L'opinion qu'on a
de nous-mêmes, c'est qu'également on a fait notre part dans la
relance de l'économie dans les années les plus difficiles au
Québec, comme nos confrères de la construction l'ont fait, avec
leur régime de retraite, pour Corvée-habitation. On a fait chacun
notre part. Pourtant, ce ne sont sûrement pas nos confrères de la
construction qui ont empêché les entrepreneurs d'utiliser le
maximum de monteurs prévus, ce n'est sûrement pas eux.
Là-dessus, on vous dit que la lettre d'entente a permis l'utilisation de
plus que les quotas initialement prévus. Cette lettre d'entente a
été conclue avec Hydro-Québec dans un esprit bien
particulier, alors qu'Hydro-Québec relançait l'économie,
injectait de nouveaux capitaux dans l'économie. Il m'apparaît
important de ramener cela à cette dimension et de dire
qu'Hydro-Québec a fait sa part, que les syndicats de la construction ont
fait leur part dans la relance de cette économie, que les syndicats
d'Hydro-Québec ont aussi fait leur part dans la relance de cette
économie. Les monteurs entrepreneurs ont participé à
l'amélioration de la qualité du réseau de distribution.
Cela fait en sorte qu'on va être rendus à la fin du programme avec
un réseau hydroélectrique de distribution avec une qualité
de beaucoup supérieure à ce qu'elle était de façon
à priver le moins possible la population du service de
l'électricité à cause de pannes ou de toutes sortes
d'événements.
Je pense, M. le député, que l'intention était, au
départ, très louable et c'est la conséquence du fait qu'on
a amélioré un réseau, qu'on n'a plus nécessairement
besoin d'autant de personnes pour en construire, mais qu'on va avoir besoin de
monde pour les entretenir. Ce sont ces éléments qui nous ont
amenés à vous faire, dans notre mémoire, une des deux
recommandations.
M. Gauthier: Je vous remercie pour l'instant.
Le Président (M. Charbonneau): M, le député
de Vimont.
M. Théorêt: Merci, M. le Président. Je vous
demanderais si vous voulez bien essayer, dans les questions qui vont suivre,
étant donné que plusieurs députés veulent
intervenir du côté ministériel, de raccourcir les
réponses.
J'aimerais, dans un premier temps, relever deux réponses que vous
avez faites à la suite des questions posées par le
député de Roberval. Si j'ai bien compris, vous avez
mentionné que le nombre d'emplois était gelé avant le
programme PAQS.
M. Chabot: Je m'excuse, M. le député, c'est
l'embauche qui était gelée.
M. Théorêt: L'embauche. D'accord! Alors, dans le
rapport déposé dont HydroQuébec va nous parler demain, de
1978 à 1986 inclusivement, si on prend les corps de métiers, les
chiffres passent de 5039 à 5489,
en connaissant des croissances annuelles. J'aimerais que vous
m'expliquiez les données d'Hydro-Québec concernant votre
déclaration que l'embauche était gelée avant le programme
PAQS. D'autre part, également, si je ne me suis pas trompé - vous
me corrigerez si j'ai mal compris - vous avez mentionné, en
réponse au député de Roberval, que les emplois temporaires
avaient effectivement augmenté ces dernières années. Or,
toujours dans le même mémoire d'Hydro-Québec à la
page 9, la direction d'Hydro-Québec déclare qu'au cours des
dernières années le nombre d'employés temporaires à
l'exploitation n'a pas augmenté globalement. En fait, il passait
à 2326 années-personnes, comparativement à 2520
années-personnes en 1982. Or, dans un premier temps, est-ce que vous
pouvez m'expliquer ces contradictions, à tout le moins?
M. Chabot: La réponse à votre première
question sur l'augmentation de l'emploi parmi des emplois-métiers, je
pense que c'est ce que vous m'avez mentionné: Vous faites effectivement
référence à l'ensemble des emplois-métiers, la
lettre d'entente PAQS, elle, est exclusive, parce que c'est cela qui nous
préoccupe particulièrement, à ce qu'on sent, à des
monteurs. Je vous dis que, à ce moment-là, dans ces
années-là, l'embauche était gelée parmi les
monteurs. Il y a probablement eu des ouvriers d'entretien d'embauchés,
il y a probablement eu des électriciens d'appareillage, des
mécaniciens de véhicules ou des opérateurs de
réseaux, ce sont tous des emplois à l'intérieur de ce
même syndicat. Ce que je vous disais, c'est que, globalement, l'embauche
concernant les monteurs dans les années en question était
gelée. Si vous me dites qu'il y a eu, à toutes fins utiles, 400
emplois additionnels à l'intérieur d'une période de huit
ans dans la même section locale, ce qui représente 50 emplois par
année sur une période de huit ans, à l'intérieur
d'un syndicat qui regroupe l'ensemble des emplois de métiers, il est
alors probable qu'il y a eu une augmentation parmi les monteurs, dans une
proportion minime. Ce qui, à toutes fins utiles, correspond à de
l'embauche gelée dans ces emplois-là.
À votre deuxième question je vais répondre par un
exemple, pour essayer d'illustrer ce que je veux dire. Chez les employés
temporaires parmi les techniciens d'Hydro-Québec, on retrouvait en 1985,
bon an, mal an, plus ou moins 5 techniciens temporaires, sur une
possibilité de 1800. En 1987, on est rendu à 212 techniciens
temporaires, sur une possibilité de 1900. C'est une proportion
évidente et c'est ce même phénomène, à une
autre échelle, qu'on a retrouvé dans chaque section locale dans
les dernières années, concernant l'emploi temporaire.
M. Théorêt: Mais vous ne contestez pas les chiffres
de décroissance de 1982 à 1986 que je viens de vous citer. En
fait, c'est Hydro-Québec que je cite.
M. Chabot: Il y a eu décroissance des effectifs. Il y a eu
des programmes d'incitation au départ volontaire et il y a eu, si ma
mémoire est fidèle, entre 1000 et 1500 départs
volontaires. Ces gens-là ont quitté Hydro-Québec et ils
n'ont pas été remplacés.
M. Théorêt: Pouvez-vous me confirmer ou m'infirmer,
en ce qui concerne les monteurs de lignes, que de 1983 à aujourd'hui le
nombre est passé de 1673 à 1778? A-t-on effectivement connu une
augmentation depuis 1983 en ce qui concerne les monteurs de lignes
internes?
M. Chabot: Depuis 1983, c'est bien cela?
M. Théorêt: Depuis 1983, effectivement.
M. Chabot: Cela peut représenter effectivement une
augmentation de 100 monteurs de lignes de 1983 à 1987. Il est possible
que cela corresponde au gel de l'embauche des années difficiles, puisque
ces personnes ont été embauchées dernièrement,
plutôt vers l'année 1987 que vers l'année 1983.
M. Théorêt: D'accord. Alors, il y a eu effectivement
augmentation. Dans un deuxième ordre d'idées, j'aimerais vous
demander ceci: Dans l'article 34, il est spécifié
qu'Hydro-Québec pourra recourir aux services à forfait en cas de
panne si des employés ne sont pas disponibles dans un endroit
donné. Comment interprétez-vous cet article? Comment devons-nous
interpréter cet article, dans un premier temps?
M. Chabot: Cet article signifie que, dans
l'éventualité d'une panne, Hydro-Québec fait appel - cela
a toujours été ainsi - à son personnel régulier. Si
l'envergure de la panne dépasse le nombre d'employés disponibles,
à ce moment-là, l'article de la convention collective vient dire:
Utilisons les services du personnel régulier d'Hydro-Québec, dont
la compétence a été prouvée, dont
l'efficacité a également été prouvée, pour
réparer ces pannes dans les secteurs avoisinants. Le secteur avoisinant
Hull n'est pas le secteur de Trois-Rivières. Par exemple, le secteur
avoisinant Montréal pourrait aussi bien être Laval que
Saint-Maxime, c'est-à-dire la rive sud. Il y a un pont entre les
deux.
M. Théorêt: Vous savez que, quand il y a une panne,
surtout une panne majeure, la population est inquiète. Elle veut
absolument que ces pannes soient réparées le plus rapidement
possible. Je pense donc que la population devrait être en droit de
connaître les priorités des syndicats dans ces cas-là.
Qu'est-ce qui est prioritaire pour vous? Est-ce une réparation rapide
des pannes pour le mieux-être de la population? Est-ce le fait de faire
travailler à tout prix vos membres qui viennent d'autres régions
plus éloignées, ce qui peut occasionner par le fait même
-et cela l'a fait, je pense, dans le passé, des délais aux
réparations ou est-ce encore le fait de garder les sommes
associées à l'accumulation de temps supplémentaire? Quels
quels sont les critères qui dirigent les priorités de vos
syndicats?
M. Chabot: C'est très simple, M. le député,
les critères qui dirigent nos priorités sont le
rétablissement du service à la population. C'est trop facile de
prétendre que nous souhaitons beaucoup plus faire venir des gens de
Trois-Rivières pour aller réparer une panne à Hull alors
qu'on ne va pas fouiller vraiment ce qui s'est passé.
Il y a des limites dans l'addition de personnel à cause de la
réparation d'une panne. Si on fait référence à ce
qui s'est passé au mois de juillet à Montréal, ce qui n'a
pas été mentionné, c'est qu'on n'avait plus à
Hydro-Québec d'équipements et de matériel pour faire les
réparations. Il y avait du personnel pour travailler autant chez les
employés d'Hydro-Québec que chez les entrepreneurs, quoique les
entrepreneurs étaient en vacances. Il y avait du personnel, mais on
manquait de transformateurs. HydroQuébec l'a publié dans sa revue
interne Hydro-Presse. Ces gens ont été obligés de faire
ouvrir une compagnie qui fabrique des transformateurs, pour des livraisons
spéciales. Ce sont des délais complètement en dehors du
contrôle des gens qu'on représente.
Il y a cela qu'il faut considérer dans les délais
associés à une panne et il y a aussi d'autres choses importantes
à considérer, comme la limite à la supervision de tous les
travailleurs qui sont en train de réparer les pannes. Or,
Hydro-Québec atteint, à un moment donné, la saturation en
termes de supervision et on ne peut plus dépasser cela, il faut
embaucher d'autres gens. Ces équipes doivent être
coordonnées.
M. Théorêt: Je connais et, évidemment, nous
connaissons tous votre préoccupation pour la sauvegarde des emplois de
vos membres et ce sera ma dernière question. Quelle est la
différence pour vous entre un travailleur membre d'un syndicat
affilié à la FTQ, père d'une famille de deux enfants, et
un père d'une famille de deux enfants membre de la FTQ qui, lui,
travaille pour un entrepreneur privé. Quelle est la
différence?
M. Chabot: Écoutez, ce sont deux pères de famille
avec des responsabilités qui ont un emploi et qui ont un syndicat pour
défendre leurs intérêts respectifs.
Le Président (M. Charbonneau): Merci. M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: M. Chabot, ma première question est la
suivantes Le temps que le programme a existé, est-ce que cela a
occasionné des mises à pied chez vous? Le fait de baisser le
quota d'hommes, des scus-contractants, est-ce que cela a occasionné de
l'embauche chez vous?
M. Chabot: C'est prévu dans la lettre d'entente.
M. Chevrette: II y aura donc plus d'embauche chez vous.
M. Chabot: Ce n'est pas qu'il y aura plus d'embauche, le fait de
passer à 1000 pour une période temporaire et de revenir à
la fin de la période temporaire en question à 500, cela baisse
l'utilisation de sous-traitants. Les effectifs permanents, dans la même
lettre d'entente, on prévoit qu'ils vont augmenter, évidemment,
pour faire l'entretien d'un tout nouveau réseau.
M. Chevrette: Donc, les salariés risquent d'être
embauchés à la suite de l'application intégrale de
l'article 34, ou de la lettre d'entente telle que...
M. Chabot: C'est déjà commencé.
M. Chevrette: Bon. Il risque d'y avoir -je ne sais pas, moi - 200
à 300 embauches. Si c'était 720, par exemple, ce serait 220.
M. Chabot: Écoutez, le chiffre qu'on connaît
à ce jour, qui est prévu dans la lettre d'entente, est de
200.
M. Chevrette: Si on était dans l'entreprise privée
et non pas dans le secteur public et parapublic, si on achetait l'entreprise
privée, il y aurait l'article 45 du Code du travail qui dirait:
L'embauche va automatiquement à ceux qui ont été
achetés, c'est-à-dire qu'ils ont eux aussi un syndicat et ils
sont représentés. Je veux faire un parallèle pour bien
vous le démontrer parce que vous avez fait une ouverture dans votre
mémoire qui m'avait échappé, c'était l'embauche
prioritaire selon l'ancienneté des travailleurs chez les sous-traitants.
(16 h 45)
M. Chabot: Il y a des nuances.
M. Chevrette: J'ai cru comprendre cela dans votre conclusion
tantôt.
M. Chabot: C'est cela.
M. Chevrette: Qu'est-ce qui nous certifie à ce
moment-ci... Il y a 200 ou 300 travailleurs qui sont sur le carreau et, en
vertu de la loi ou du cadre de négocation de la fonction publique, qui
n'est pas celui du Code du travail, soit dit en passant, l'article 45 du Code
du travail ne s'applique pas pour ces travailleurs... Il n'y a aucune clause...
Vous n'avez pas signé une clause, vous, disant que les effectifs
additionnels qui vont venir gonfler nos rangs devront venir des sous-traitants.
À ce que je sache, ce n'est pas la lettre d'entente.
M. Chabot: Non.
M. Chevrette: La lettre d'entente spécifie qu'Hydro doit
augmenter son nombre proportionnellement à la diminution des
sous-traitants, ou à peu près; comme esprit, non pas comme
libellé, mais comme esprit. Vous êtes deux syndicats d'une
même centrale. Vous n'avez pas cru bon d'introduire dans votre convention
la protection des salariés qui, entre vous et moi, s'inscrivent à
l'inverse de la fonction publique et sur cela, je vais m'expliquer.
Quand on parie de sous-traitance dans les hôpitaux, cela
n'existait pas, c'est du nouveau et les gens se battent pour qu'il n'y ait pas
de sous-traitance dans les hôpitaux. Avant qu'existe Hydro-Québec,
il existait des entreprises qui faisaient affaire avec des travailleurs. Il y a
des travailleurs qui ont plus d'ancienneté que chez vous. C'est un peu
à l'inverse, c'est un phénomène inverse qui s'est produit.
C'est une étatisation qui s'est produite avec Hydro-Québec. Puis,
vous nous demandez comme parlementaire...
Moi, j'ai un passé syndical, je me dis que le gars qui a
travaillé pour la Shawinigan Water and Power ou bien comme sous-traitant
pour la Shawinigan Water and Power - il serait vieux pas mal, mais quand
même, il y en a qui ont beaucoup d'ancienneté chez les
sous-traitants - il n'a plus aucune protection. lis n'ont plus aucune
sécurité d'embauche contrairement à l'ouverture que vous
faites, par rapport au fait, je parle, par rapport à la lettre
d'entente. Il n'y a aucune priorité d'embauche au moment où on se
parle. Je disais ce matin, et je le répète: II me semble que
votre objectif ne doit pas être et doit être loin d'être
celui de priver des individus d'un emploi qu'ils exercent depuis des
années. Cela ne doit pas être l'objectif de votre entente puisque
vous ouvrez la porte, à la fin de votre mémoire, disant que ces
gens devraient être engagés selon leur ancienneté. Au
moment où on se parle, comme il n'y a pas entente entre les syndicats,
pour avoir convoqué une commission parlementaire, le ministre doit
constater qu'il y a quelque chose qui se brasse. Qu'est-ce que je
réponds au gars de chez nous qui vient me voir et me dit: Moi, je
travaillais pour Tucker et je travaille maintenant pour - je ne me rappelle pas
plus le nom que ce matin - cela fait 20 ans que je travaille là. Et il
voit des gars embauchés à Hydro-Québec comme monteurs de
lignes, plus jeunes que lui, avec moins d'expérience que lui at lui, il
est sur le carreau chez lui. Que répondriez-vous à ce gars si
vous étiez à ma place?
M. Chabot: Vous n'êtes pas sans savoir, M. Chevrette, la
difficulté que peut représenter la négociation de
conventions collectives. Vous n'êtes pas sans savoir non plus ce que cela
peut représenter comme difficulté que de restreindre des droits
de gérance d'un employeur. Vous n'êtes surtout pas sans savoir la
difficulté que cela peut représenter que de négocier avec
l'employeur l'embauche de nouveau personnel. C'est une chose. Pour
répondre à votre deuxième question, s'il y a des personnes
qui sont refusées, des monteurs de lignes qui sont refusés
à Hydro-Québec en raison de leur âge, l'article 9 de la
charte prévoit qu'on ne doit pas exercer de discrimination en fonction
de l'âge. C'est ma réponse, à partir du moment où
les conventions collectives ne contiennent pas de telles dispositions
permettant l'embauche, où la difficulté de négociation de
telles dispositions est énorme. C'est ma réponse. La
journée où il y aura de telles dispositions, je suis convaincu
qu'une personne qui serait refusée en raison de son âge va venir
nous voir et qu'on va la représenter là où on devra la
représenter.
M. Chevrette: M. Chabot, puisque vous savez qu'il y a des gens
assez âgés dans cela et compte tenu du fait que cela ne prive pas
d'emploi ou que cela n'insécurise pas vos employés ou ceux que
vous représentez, c'est-à-dire vos syndiqués, à
partir du moment où cela ne met en péril aucun emploi d'aucun de
vos membres, quel est votre acharnement, parce que vous semblez être
déterminés, ou votre volonté ferme de priver
potentiellement de travail un groupe assez important, qui a de
l'expérience? Quel est votre objectif?
M. Chabot: Vous nous mettez tous les péchés du
monde...
M. Chevrette: Non, ce ne sont pas des péchés, on
discute là.
M. Chabot: II y a des choses qui ne sont pas comprises. C'est
trop facile, justement, on a l'impression qu'on nous met tous
les péchés du monde sur les épaules. La lettre
d'entente PAQS a justement permis l'embauche supplémentaire de ce qui
existait. N'eût été de PAQS, 350 personnes-années de
moins auraient été utilisées. Est-ce qu'on aurait
attaqué Hydro-Québec pour lui dire: Cela n'a pas de bon sens, ce
n'est pas social; il y a du monde qui est en chômage? Il y a toutes
sortes de personnes qui sont malheureusement en chômage.
Il y a eu de l'injection de faite. II y a des gens qui sont venus
travailler. Maintenant, le travail diminue. II y a moins d'ouvrage. Ii y a
moins de nécessités d'utilisation. On va, par contre,
prévoir plus d'emplois permanents. Il y a, actuellement, cela se passe
ces jours-ci dans un secteur de la région de Montréal, douze
monteurs d'entrepreneurs qui vont entrer à HydroQuébec. C'est
actuel, cela. Or, se faire dire: Écoutez, qu'est-ce que vous faites?
Vous mettez des familles dans la rue. Je pense qu'on n'a pas mis des familles
dans la rue. Ce n'est pas l'objectif qu'on poursuit.
L'objectif qu'on poursuit, c'est de défendre, évidemment,
l'intérêt des membres qu'on représente,
l'intérêt social et économique et, dans toute cette
dimension, je pense qu'on a fait nos preuves, à cet
égard-là.
M. Chevrette: Mais, M. Chabot, je veux bien comprendre. Il n'est
pas question de vous lancer des péchés. C'est une question de
fait où l'on se retrouve avec deux syndicats affiliés à
une même centrale syndicale, quand même. Ce que je vous dis, moi,
c'est ceci: vous êtes deux syndicats affiliés à une
même centrale et vous avez la chance de protéger, tous les deux,
l'ensemble de vos membres syndiqués. Mais, en vertu d'une clause obtenue
en 1976, en catastrophe, avant l'élection du 15 novembre 1976 - je me le
rappelle, c'est Jean Cournoyer qui l'a signée avec vous - ...
M. Chabot: Exactement.
M. Chevrette: Bon. Je me le rappelle très bien. Donc,
à partir de cette entente signée en catastrophe en 1976, on
risque et c'est cela, le risque... Moi, c'est simplement ce que je veux vous
faire évaluer. J'aimerais vous dire: Comment réagissez-vous
devant le risque? Deux syndicats affiliés à une même
centrale, vous avez l'opportunité de rendre sécuritaire
l'ensemble du gâteau. Vous venez d'avoir l'assurance qu'il n'y avait pas
privatisation. S'il était allé sur cette piste-là, on vous
suivait à mort. Donc, au moins, cela a l'air acquis. C'est la
première chose concrète - puis bang! - qu'on a eue, et
catégorique, du ministre.
À partir de ce fait-là, vous ne pensez pas qu'on aurait
avantage à trouver une solution syndicale à votre
problème, que les deux syndicats, en l'occurrence, s'assoient avec
beaucoup de maturité pour ne pas laisser le gouvernement trancher? II
n'y a pas un proverbe qui dit qu'on n'est jamais mieux servi que par
soi-même?
M. Chabot: M. le député, on n'a jamais
prétendu que les deux syndicats à l'intérieur de la FTQ
n'étaient pas à la recherche de pistes de solutions. On n'a
jamais prétendu cela. Si l'on est confrontés à se
présenter devant vous, c'est à la demande d'associations non pas
syndicales, mais patronales, qui voient malheureusement, par la fin du
programme PAQS, évidemment, les travaux se terminer.
On ne prétendra pas qu'il y a une chicane syndicale, parce que la
chicane syndicale, ce n'est pas ce dont il est question. On a une centrale
syndicale et cela nous permet de se parler. Alors, à partir de
là, la commission parlementaire, devant laquelle on se présente,
a été obtenue par des pressions de l'Association des
constructeurs de routes et grands travaux du Québec. C'est devant cette
même commission parlementaire-là qu'on vient vous présenter
notre point de vue. Et ce point de vue efface le dossier de la sous-traitance
à Hydro-Québec, on vous l'a présenté. On n'est pas,
ici, en train de vous indiquer qu'il y a une chicane entre deux syndicats de la
FTQ. Ce n'est pas le cas.
On vient vous présenter notre position; ils viennent vous
présenter la leur. On a une centrale syndicale qui permet à des
syndicats de se parler. On n'a jamais prétendu qu'il n'y avait pas,
à l'intérieur de la FTQ, des discussions pour essayer d'envisager
des pistes de solutions.
M. Chevrette: J'ai l'habitude de passer directement à la
pratique. Pour moi, des discours théoriques, je ne suis pas sûr
que cela fasse avancer quelque chose. Je voudrais vous poser une seule petite
question. S'il n'y avait pas d'article 34 ou de lettre d'entente, est-ce qu'il
y aurait un membre syndiqué, chez vous, qui serait
congédié?
M. Chabot: C'est possible parce qu'à l'intérieur de
l'article 34 il est prévu que le fait de donner un contrat en
sous-traitance ne peut avoir pour effet de causer une mise à pied. Si on
l'enlève cela pourrait arriver.
M. Chevrette: Ne peut avoir pour effet... Répétez
donc.
M. Chabot: Dans l'article 34.1, les conventions collectives
prévoient que le fait de donner un contrat ne peut causer de mise
à pied. Alors, si on enlève l'article 34, pour répondre
à votre question, oui, cela peut arriver.
Le Président (M. Charbonneau): Cela termine le temps qui
était octroyé à l'Opposition.
M. le député de Saguenay, il reste quelques minutes.
M. Maltais: Merci, M. le Président. À la page 24 de
votre mémoire, vous indiquez, pour ce qui est du contrôle de la
qualité qu'Hydro-Québec n'a pas les moyens statistiques pour
s'assurer le contrôle de la qualité des travaux effectués
par les sous-traitants. Que voulez-vous dire par là, exactement? Est-ce
que les travaux faits par les sous-traitants peuvent être dangereux?
Est-ce que les travaux sont mal faits ou je ne sais quoi? Que voulez-vous dire
exactement par cela?
M. Chabot: Ce qu'on dit, c'est que tout gestionnaire ou tout
fonctionnaire expérimenté pourrait expliquer comment on atteint
rapidement des limites lorsqu'il s'agit de contrôler la qualité
des travaux effectués par des sous-traitants. On ne peut tout
contrôler. C'est ce qu'on veut dire. Lorsqu'on se retrouve dans une
situation où une entreprise obtient un contrat d'Hydro-Québec et
qu'on confie à une filiale de cette même entreprise un contrat
d'inspection des travaux, nous disons que le contrôle a ses limites.
M. Ciaccia: M. le Président, il reste quelques
minutes.
Le Président (M. Charbonneau): Quelques minutes. Si vous
en prenez moins, il en restera quelques-unes ou peut-être une pour un de
vos collègues.
M. Ciaccia: Très brièvement. Vous avez
mentionné que, sans l'article 34, il est possible d'avoir des
congédiements. Avant la lettre d'entente qui baisse les effectifs de
sous-traitance de 720 à 500 personnes-années, effectivement,
est-ce qu'il n'y a jamais eu des congédiements à
Hydro-Québec dus à la sous-traitance?
M. Chabot: Non. Cette supposition de convention était
déjà existante.
M. Ciaccia: Alors, il n'y a jamais eu de congédiements
parce qu'ils ont donné de la sous-traitance?
M. Chabot: Non, on avait prévu cela dans les textes de
conventions.
M. Ciaccia: Une des grandes préoccupations que nous avons,
ce n'est pas de dire qu'il faut que des entrepreneurs fassent des profits, ce
n'est pas la préoccupation qu'on a. On parle d'une expertise des
ingénieurs-conseils et on va examiner cela tantôt. Mais on parle
aussi de la main-d'oeuvre. C'est une de nos préoccupations. On est
particulièrement préoccupés par ceux qui vont se trouver
sans emploi. Je veux vous demander, parce que vous avez mentionné qu'il
n'y a pas eu de congédiements à Hydro-Québec qui
étaient dus à la sous-traitance, si vous êtes prêts
à collaborer pour trouver une solution pour ceux qui vont se trouver
sans emploi parce qu'on baisse de 720 à 500 personnes-années, des
pères de famille, des gens qui font ce métier qui existe
seulement à Hydro-Québec. C'est un monopole, il n'y a pas
d'autres monteurs de lignes. Est-ce que vous seriez prêts à
collaborer pour trouver une solution à ce problème? (17
heures)
M. Chabot: Dans une de nos recommandations, M. le ministre, soit
la deuxième, on dit qu'Hydro-Québec prévoit, par son plan
de développement, maintenir 22 000 emplois permanents. Dans le plan de
développement d'Hydro-Québec, présenté au mois de
mars dernier, on indique un pourcentage de croissance de l'emploi, permanent
comme temporaire. À ce moment-là, je pense qu'on a là une
piste permettant d'accorder aux monteurs d'entrepreneurs un emploi à
Hydro-Québec.
M. Ciaccia: Est-ce que vous nous dites qu'on devrait leur trouver
d'autres choix? C'est une recommandation un peu vague, ce n'est pas assez
spécifique pour ceux qui vont se trouver sans emploi dans les mois qui
suivent.
M. Chabot: Les indications qu'on a, si Hydro-Québec a du
travail à faire effectuer et qu'elle a besoin de personnel chez les
monteurs d'entrepreneurs, si elle a du personnel parmi ces sous-traitants, des
gens qui sont formés, pourquoi ne pas les embaucher? Mais la question
que vous me posez, c'est: Est-ce qu'on peut imaginer des pistes ou est-ce qu'on
est prêts à faire quelque chose? Parce que l'employeur, de son
côté, nous dit qu'il n'y aura plus de demande ou de
nécessité d'emplois comme dans les années passées.
S'il y a une nécessité d'emplois, comme les années
passées, et que cela nécessite des embauches de plus, je pense
que la recommandation qu'on fait à Hydro-Québec pourrait
s'insérer à l'intérieur de ce que j'appellerais une
solution.
M. Ciaccia: Bon, je pense que votre position est claire.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Bertrand, avec consentement, on pourrait peut-être... Je sais qu'il y
avait une question. Cela va. Alors, M. le député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Oui, brièvement parce que le temps
est déjà écoulé. Puisqu'on a devant nous les
présidents des employés de métiers, des employés de
bureau et des techniciens, j'aurais aimé, pour des fins de
compréhension et pour les travaux de cette commission? qu'on puisse
avoir quelques chiffres très précis. D'abord, M. Cuerrier, qui
est président des employés de métiers. Dans le groupe des
employés de métiers, on retrouvait, dans les dernières
statistiques de 1985, les employés permanents, en 1985, au nombre de
5403 et en 1986, au nombre de 5484. J'aurais aimé avoir, pour 1987, le
nombre d'employés permanents et aussi, si vous l'avez, le nombre
d'employés temporaires pour les deux dernières années.
Est-ce que ces chiffres sont disponibles maintenant ou pourraient nous
être fournis?
M. Cuerrier (Charles): Disons que ces chiffres pourraient vous
être fournis. Pour donner des chiffres précis, il faudrait quand
même les trouver, ils sont faciles à trouver, remarquez bien. On
pourrait vous les fournir assez rapidement.
M. Parent (Bertrand): Est-ce qu'il serait possible de les avoir,
M. le Président, pour demain matin, pour la continuation des travaux? Je
demanderais la même chose M. André Charbonneau, en ce qui concerne
les employés de bureau, et à M. Desrosiers, en ce qui concerne
les techniciens, à partir du tableau, entre autres, qui se retrouve dans
le mémoire d'Hydro-Québec, à la page 9. Alors, on a les
chiffres jusqu'à 1986. J'aimerais avoir, en ce qui concerne les
employés permanents, les chiffres pour 1987, autrement dit, pour
maintenant: Qu'est-ce qu'on a comme employés permanents par groupe,
à partir des données que vous avez, et aussi, comme
employés temporaires, on n'a pas cette
référence-là. Vous avez apporté quelques chiffres
tantôt en ce qui concerne les techniciens: 5 par rapport à 200. Ce
serait intéressant d'avoir ces comparaisons 1986-1987 pour les
temporaires aussi. Si c'était possible de nous remettre cela demain
matin, pour la continuation des travaux, cela risque de nous être
très utile. Cela va, M. le Président? Les réponses
devraient venir incessamment.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va. Une
dernière question et une dernière réponse brève
à la question du député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Baril: Je suis chanceux, le dernier!
M. Chabot, j'aimerais aborder un petit détail, à la page
25 de votre mémoire. Vous faites référence aux "conditions
de travail souvent moins stables constatées chez les
sous-traitants".
Or, précédemment, l'Association des constructeurs de
routes et grands travaux du Québec nous a précisé, ce
matin, que les monteurs de lignes embauchés dans le secteur privé
ne souffraient pas d'une rémunération inférieure à
celle des monteurs de lignes d'Hydro-Québec. De plus, l'association
affirme que l'on accorde beaucoup de soin à la santé et à
la sécurité au travail des travailleurs du secteur privé.
Qu'est-ce que vous entendez par la précarité des emplois dans la
firme de sous-traitance?
M. Chabot: Ce qu'on dit, c'est qu'on fait référence
à la situation de l'emploi précaire au Québec. Il y a eu
des études qui ont démontré qu'il y avait une forte
proportion, entre autres, de fonctionnaires, autour de 50 %, qui occupent un
emploi précaire par leur statut, qui est autre que permanent. Ces
études révèlent également qu'un tiers des
professionnels, au gouvernement, sont des contractuels. Elles
révèlent également que 53 % des employés
d'hôpitaux sont des employés sur appel, des employés
temporaires, des employés à temps partiel. C'est ce à quoi
on veut faire référence quand on vous parle de la situation de
l'emploi précaire au Québec. On ne veut pas que vous associiez la
précarité de l'emploi à des conditions de travail, ce
n'est pas en ce sens.
M. Baril: Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va. Je voudrais vous
remercier, M. Chabot, ainsi que vos collègues, d'avoir participé
a cette consultation particulière. Pour le reste, on verra la suite qui
sera donnée à ces travaux. Je vous remercie et bon retour.
J'invite maintenant le Syndicat professionnel des ingénieurs
d'Hydro-Québec à prendre place à la table des
invités.
Nous poursuivons cette consultation particulière. M. Potvin, je
crois que vous êtes le responsable de la délégation. Vous
avez vu un peu comment on fonctionne. Vous avez 20 minutes pour votre
présentation et le reste du temps est réparti de part et d'autre
entre les membres de la commission. Je vous invite à débuter sans
plus tarder et à présenter, auparavant, les personnes qui vous
accompagnent. Je vous indique que le vice-président de la commission, le
député de Vimont, va prendre la barre jusqu'à la fin de la
séance. Merci.
Syndicat professionnel des ingénieurs
d'Hydro-Québec inc.
M. Potvin (André): Merci, M. le Président. Il y a,
à ma gauche, M. Michel Touchette, secrétaire du syndicat, et,
à ma droite, M. Michel Hudon, premier vice-président du
syndicat.
M. le Président, M. le ministre,
mesdames et messieurs les députés, mesdames et messieurs,
au nom des membres du Syndicat professionnel des ingénieurs
d'Hydro-Québec inc., le SPIHQ, je tiens à vous remercier de votre
invitation à participer à cette importante consultation. Cet
exposé portera principalement sur les principes de base que
défend le SPIHQ pour le recours à l'externe par
Hydro-Québec.
Mais auparavant, il importe de présenter notre organisme et nos
membres. Le SPIHQ a été fondé en 1964. Il
représente aujourd'hui plus de 1100 ingénieurs répartis
partout en province, ce qui en fait l'un des plus importants syndicats de
professionnels au Québec et certainement le plus important syndicat
d'ingénieurs.
La compétence des ingénieurs d'Hydro-Québec n'est
plus à démontrer. Certaines de leurs réalisations
techniques sont mondialement connues et leur ont valu une renommée
internationale. Il suffit de penser au réseau de transport à 735
kV considéré comme une des grandes réalisations du
génie canadien.
De plus, l'attribution à Hydro-Québec de nombreux contrats
internationaux illustre bien la qualité de ses ingénieurs. La
compétence de tous les employés d'Hydro-Québec et le
résultat de leur travail se manifeste, par ailleurs, en ce moment
même, par le fait qu'on puisse tenir une réunion dans cette salle
alors que l'énergie servant à l'éclairage est
générée à des centaines de kilomètres
d'ici.
Bien que la compétence et l'efficacité des employés
d'Hydro-Québec soient généralement reconnues, certains
travaux de l'entreprise sont confiés à des firmes externes. Deux
raisons principales expliquent cela, les pointes imprévues de travail et
le manque d'expertise ou de personnel disponible dans certains domaines. Ce
recours à l'externe est régi par différentes politiques de
l'entreprise dont l'une s'applique aux ingénieurs.
Il existe une politique de recours aux ingénieurs-conseils
à Hydro-Québec depuis 1980. À ce moment-là, le
SPIHQ avait été consulté pour l'élaboration de
cette politique. Il existait alors à Hydro-Québec une
volonté de gérer les ressources humaines en réduisant les
pointes et les creux d'activités tout en conservant et en
développant un savoir-faire suffisant pour préserver la
spécificité de l'entreprise et en faire un "propriétaire
averti".
Bref, l'évolution de l'entreprise était planifiée.
Les années quatre-vingt ont fait place à des changements
importants dans l'entreprise: réorganisations, décroissance,
décentralisation, mises à la retraite et mises en
disponibilité massives. Préoccupés par une gestion
à courte vue de la décroissance, les dirigeants
d'Hydro-Québec ont négligé les principes directeurs de la
politique originale de recours è l'externe.
L'adhésion à des principes de base est essentielle
à une utilisation rationnelle des ressources dans l'exécution des
travaux d'Hydro-Québec. La discussion et l'évolution de cette
politique doivent respecter les intérêts de la communauté,
les besoins d'Hydro-Québec et les aspirations de ses
ingénieurs.
Pour le SPIHQ, la politique de recours aux ingénieurs-conseils
doit poursuivre trois objectifs: premièrement, faire en sorte
qu'Hydro-Québec réalise elle-même les activités dont
dépendent ses décisions stratégiques; deuxièmement,
avoir un savoir-faire suffisant pour qu'Hydro-Québec demeure un
"propriétaire averti"; troisièmement, permettre à
Hydro-Québec d'exercer un leadership technologique.
Le premier objectif préconisé pour le SPIHQ par la
politique est de faire en sorte qu'Hydro-Québec réalise
elle-même les activités dont dépendent ses décisions
stratégiques. En effet, une part importante des activités
réalisées par les ingénieurs d'Hydro-Québec est
consacrée à des études, des analyses et des
recommandations qui guident, par la suite, la haute direction dans ses prises
de décision sur les orientations stratégiques de l'entreprise.
Ces recommandations nécessitent la prise en considération par les
ingénieurs d'Hydro-Québec d'une foule d'éléments
techniques, économiques, sociaux et environnementaux qui doivent
être pondérés les uns par rapport aux autres. Cette
pondération découle, d'ailleurs, des volontés de la
société québécoise traduites dans les orientations
gouvernementales.
En pratique, à Hydro-Québec, ces études et analyses
de caractère stratégique concernent principalement les
activités de planification du réseau, les orientations relatives
à l'ingénierie et à la conception des équipements,
la recherche et le développement, la normalisation et la gestion du
réseau.
Les grandes orientations de l'entreprise quant au développement
et à l'affectation de ses ressources découlent de ces
études et analyses. Celles-ci constituent le devenir de la
collectivité québécoise en matière de
développement énergétique. Il est donc inconcevable
qu'elles puissent être réalisées ailleurs qu'à
Hydro-Québec.
Le caractère stratégique de ces activités et leur
importance ne laissent place à aucun compromis. Hydro-Québec doit
réserver en tout temps ces études et analyses à son propre
personnel.
Récemment, certains signaux ont suscité des
inquiétudes parmi les ingénieurs quant à la volonté
de l'entreprise de conserver ces travaux stratégiques à
l'interne. Ainsi, l'attribution d'un contrat à une firme externe
concernant une étude préliminaire aux centrales Chelsea et
Farmers a constitué, pour les ingénieurs
d'Hydro-Québec, un dangereux précédent à cet
égard.
Le deuxième objectif est d'assurer un savoir-faire suffisant pour
qu'Hydro-Québec demeure un "propriétaire averti". Cette notion,
intimement liée à la conservation du savoir-faire, fait appel au
jugement de l'entreprise dans l'attribution des travaux non
stratégiques. En effets Hydro-Québec a le choix de confier ces
travaux soit à ses ingénieurs, soit à des firmes externes.
(17 h 15)
Cependant, le partage des travaux entre ingénieurs
d'Hydro-Québec et ingénieurs-conseils doit respecter les normes
qualitatives et quantitatives afin d'assurer à l'entreprise la
capacité d'évaluer et de critiquer le travail effectué
à l'externe, afin que celui-ci ne soit pas accepté
aveuglément. Autrement, il deviendrait trop facile pour une firme de
favoriser une solution restrictive mettant en valeur le champ de
compétence où elle excelle. Hydro-Québec doit, en somme,
demeurer, pour ses travaux confiés à l'externe, un
propriétaire averti.
Ce rôle de "propriétaire averti" devient une obligation
pour l'entreprise si elle veut répondre le plus adéquatement
possible aux besoins et aux attentes de la collectivité
québécoise. En effet, Hydro-Québec doit continuellement
s'assurer de la sécurité de ses ouvrages, de la fiabilité
de son alimentation et de la rentabilité de ses choix. Le traitement
inadéquat effectué par l'entreprise pour solutionner des
problèmes de fissures encourus au barrage Daniel-Johnson illustre bien
cette nécessité de demeurer un "propriétaire averti".
Le troisième objectif préconisé par le SPIHQ pour
la politique de recours à l'externe est qu'elle puisse permettre
à Hydro-Québec d'exercer un leadership technologique. À
cause de sa taille, de sa situation de monopole, des moyens mis à sa
disposition et de la configuration particulière de son réseau,
Hydro-Québec a, en effet, la responsabilité de développer
l'expertise québécoise et d'exercer un leadership en
matière d'énergie électrique. Elle doit aussi favoriser
l'intégration des technologies nouvelles dans les outils utilisés
par son personnel technique. Toutefois, la direction, dans sa planification des
ressources humaines, néglige cet aspect.
Depuis quelques années, on constate une tendance de l'entreprise
à faire appel à des firmes externes pour la fourniture de biens
et de services dans des domaines aussi importants que la conception de nouveaux
pylônes, l'utilisation du courant continu, la conception de la
sixième ligne de transport ou la traversée sous-fluviale de cette
ligne. Les besoins dans ces domaines sont connus depuis longtemps et, pourtant,
on doit encore recourir à des tiers faute d'expertise ou de
personnel.
Cette situation peut s'expliquer dans le cas de la fourniture de biens.
Il faut nécessairement aller chercher ces biens là où ils
se trouvent. Mais, le fait pour HydroQuébec de ne pas développer
son expertise dans ces nouvelles technologies l'oblige soit à rejeter
des solutions innovatrices, soit à consentir des contrats clés en
main. Ces contrats entraînent, par la suite, une dépendance
d'Hydro-Québec face aux problèmes techniques associés
à la mise en service et à l'exploitation de ces
équipements.
Ce fut le cas, notamment, au poste Châteauguay où,
résultat de l'attribution d'un contrat clés en main,
Hydro-Québec a subi, en 1985, une perte de revenus de 140 000 000 $,
pertes qui ont continué de s'accumuler en 1986.
Lorsqu'il s'agit de nouvelles technologies, la négligence
d'Hydro-Québec de développer sa propre expertise permet aux
firmes externes auxquelles les contrats sont octroyés de
développer la leur aux frais de l'entreprise.
Cette planification à courte vue entraîne une gestion de
panique et vient ainsi entacher la réputation internationale
d'Hydro-Québec. Les gestionnaires de l'entreprise se sont
déjà inquiétés de cette situation, mais rien ne
semble avoir été fait pour y remédier.
Le SPIHQ juge inacceptable le fait que des experts n'aient pas
été formés dans des domaines de première importance
pour l'avenir de l'entreprise. Le SPIHQ s'inquiète également de
l'effet futur de telles pratiques et de l'absence de volonté
d'Hydro-Québec de remédier à cette situation. L'entreprise
pourrait, par exemple, inclure, dans les contrats alloués à
l'externe, des clauses de transfert de technologie. Hydro-Québec doit
maintenir sa compétence à un niveau suffisamment
élevé pour ne pas être à la merci de quelques
firmes, si compétentes soient-elles.
L'adhésion aux objectifs préconisés, la poursuite
de ces objectifs, l'application adéquate de la politique ont pour
corollaire immédiat et direct une planification structurée des
ressources humaines. Cette planification doit, en tout temps, assurer
l'entreprise qu'elle dispose du personnel requis pour la réalisation des
activités stratégiques, qu'elle développe son savoir-faire
et qu'elle reste un chef de file en matière technologique.
Afin de réussir cela, il est indispensable pour la direction de
planifier adéquatement la gestion de ses pointes de travail. Le SPIHQ
reconnaît et a toujours reconnu qu'il y a des pointes de travail
imprévisibles et des cas où l'entreprise ne dispose pas des
délais nécessaires pour développer sa propre expertise. En
ce sens, le recours à des
firmes d'ingénieurs-conseils est justifié à
certaines occasions et le SPIHQ ne s'y oppose pas. Toutefois, le SPIHQ s'oppose
vivement à ce que le recours aux ingénieurs-conseils devienne une
obligation économique ou politique ou encore une solution de
dépannage résultant de l'absence d'une planification de la
main-d'oeuvre. Un tel recours institutionnalisé ne peut que conduire
à des excès dans l'attribution de contrats à l'externe. Il
est primordial d'éviter qu'Hydro-Québec ne devienne une
entreprise vouée à ce que l'on peut appeler le "bien-être
social corporatif". Si des firmes d'ingénieurs-conseils ont pu se
développer grâce à HydroQuébec, c'est tant mieux,
mais il n'appartient pas à Hydro-Québec et à ses clients
de subventionner ces entreprises.
Le recours à l'externe représente annuellement un minimum
de 20 % des travaux de génie effectués pour HydroQuébec et
ce, même pendant les années du plus fort ralentissement des grands
travaux. Ce recours étant continuel, on ne peut plus l'expliquer par les
pointes imprévues de travail, mais par une volonté avouée
de la direction à cet effet. Pourtant, la direction n'a pas
hésité à procéder à des mises en
disponibilité massives sous prétexte d'un manque de travail, en
1983, pour ensuite confier des projets à l'externe, alléguant,
alors le manque de ressources disponibles.
En plus de gérer efficacement ses pointes de travail, il est
essentiel pour Hydro-Québec de renouveler son personnel par l'embauche
de nouveaux diplômés. Le SPIHQ est préoccupé par le
développement professionnel harmonieux des ingénieurs et de
l'entreprise. Toutefois, le SPIHQ a constaté que le manque de
planification d'Hydro-Québec en matière de ressources humaines
conduisait à des dérogations dans l'application de la politique.
En conséquence, le SPIHQ a obtenu de l'entreprise, lors des
dernières négociations, l'inclusion de cette politique dans la
convention collective et l'établissement d'un mécanisme de
consultation concernant l'application de cette politique.
En guise de conclusion, les ingénieurs d'Hydro-Québec sont
fiers de leurs réalisations et de l'entreprise qui les emploie. Ils ont,
depuis toujours, combattu pour la reconnaissance de leur compétence, que
ce soit par l'élaboration d'un plan de carrière permettant la
progression dans des domaines techniques ou encore par la promotion
basée sur la compétence. Ils désirent également
assurer leur expertise dans tous les domaines où ils ont à
intervenir.
Pour ce faire, il exigent d'Hydro-Québec un engagement clair sur
son soutien à la politique de recours aux ingénieurs-conseils et
sur son adhésion aux principes de base de cette politique. Ils
réclament aussi une planification efficace des ressources humaines,
permettant l'acquisition et le développement du savoir-faire par
l'entreprise, tant dans les domaines traditionnels que dans les domaines
faisant appel aux nouvelles technologies.
Les ingénieurs d'Hydro-Québec ne s'opposent pas au recours
à des firmes d'ingénieurs-conseils lorsque le besoin s'en fait
réellement sentir. La cohabitation est passible et même
souhaitable, mais elle doit être soumise à certaines règles
afin de respecter les intérêts de la communauté, les
besoins d'Hydro-Québec et les aspirations de ses ingénieurs.
Les mécanismes actuels de discussion de la politique de recours
aux ingénieurs-conseils sont en mesure de permettre l'atteinte d'un
équilibre entre l'interne et l'externe dans l'attribution du travail.
L'inclusion de la politique dans la convention collective permet
d'espérer une gestion juste et efficace de celle-ci. Les
ingénieurs d'Hydro-Québec considèrent que des
améliorations pourraient être apportées à la
politique et à sa gestion par l'entreprise. Ils se montrent toutefois
satisfaits des mécanismes actuels de discussion de cette politique et
considèrent que le gouvernement ne peut que se montrer, lui aussi,
satisfait du travail accompli dans ce sens. La discussion sur cette politique
n'est cependant pas terminée. Le SPIHQ demeure disponible, en tout
temps, pour des échanges plus soutenus avec les autorités
gouvernementales.
Je vous remercie de votre attention et nous sommes prêts à
répondre à toutes vos questions.
Le Président (M. Théorêt): Je vous remercie,
M. Potvin. Je cède donc immédiatement la parole au ministre. M.
le ministre.
M. Ciaccia: Merci! Je vous remercie de l'exposé, que vous
venez de nous faire, M. Potvin. Il me semble établir clairement le point
de vue de votre syndicat sur la question du faire-faire quant aux travaux
touchant les ingénieurs d'Hydro-Québec.
Si je comprends bien, vous êtes les interlocuteurs
privilégiés des ingénieurs-conseils dans le cadre de
l'exécution des mandats confiés par Hydro-Québec. Cette
relation prend, cependant, des formes multiples et varie selon le type de
contrat. Vous nous faites remarquer l'importance des réalisations des
ingénieurs d'Hydro-Québec. Ceux-ci, au cours des années,
ont développé une expertise qui leur a valu une renommée
internationale.
Au sein d'une politique de recours aux ingénieurs-conseils, vous
établissez trois objectifs à poursuivre. Le premier concerne la
nécessité pour Hydro-Québec de réaliser
les activités dont dépendent ses décisions
stratégiques. En effet, ces activités sont à la base des
décisions sur le devenir énergétique du Québec. Le
deuxième objectif concerne le maintien d'un savoir-faire suffisant au
plan des études non stratégiques. Il s'agit, en fait, de ne pas
être à la merci de l'externe pour la fourniture de services et de
conserver, en même temps, une capacité de juger de la
qualité et de la pertinence des travaux qui sont réalisés
pour le compte d'Hydro-Québec. Votre dernier objectif concerne la
responsabilité qu'a Hydro-Québec d'exercer un leadership
technologique. Et, afin de rencontrer ces objectifs, vous estimez
nécessaire qu'il y ait une politique structurée de gestion des
ressources humaines. Vous avez constaté un manque de planification en
cette matière par la direction d'Hydro-Québec. Ceci aurait
conduit à des dérogations dans l'application de la politique de
recours aux ingénieurs-conseils qui existe à Hydro-Québec
depuis 1980. Et, devant cette situation, votre syndicat a demandé et
obtenu, lors des dernières négociations, l'inclusion à
votre convention collective de cette politique. Donc, si j'ai bien compris, le
nouvel article 34 de votre convention devrait éviter les
dérogations que vous avez connues. Pouvez-vous me dire en quoi ces
dérogations étaient si importantes que vous avez jugé
nécessaire de demander l'introduction de dispositions sur le travail
à forfait dans votre convention? Est-ce que ces dérogations
étaient nombreuses? Quel genre de travaux touchaient-elles? Et est-ce
que je pourrais comprendre, finalement, qu'avec l'article 34 il n'y aura plus
de dérogations du type de celles que vous avez connues dans le
passé?
M. Potvin: Pour répondre à votre question, il faut
être bien conscient du climat qui existait chez les employés
d'Hydro-Québec en 1982. L'entreprise, après les travaux de la
Baie James, se retrouvait dans une phase de réorganisation et plusieurs
employés - environ 1200 employés de l'entreprise, dont environ
une centaine d'ingénieurs, particulièrement au groupe
équipement - se retrouvaient du jour au lendemain mis en
disponibilité et relocalisés à l'intérieur de
l'entreprise, un peu partout dans la province, dans des domaines de travail
dans lesquels ils n'avaient pas été initialement formés.
On notait une forte diminution du groupe équipement, groupe qui avait
été historiquement celui qui construisait et qui s'occupait des
grands travaux. Donc, chez les ingénieurs, il y avait une crainte
massive de voir que cette tendance était une volonté
d'Hydro-Québec de limiter au minimum les ressources internes pour
pouvoir faire appel à peu près uniquement à l'externe en
utilisant tout simplement ses ingénieurs comme des gestionnaires de
projets.
Dans ce contexte, les signes qu'on a découverts,
c'est-à-dire, les signes de dérogation par rapport à la
politique, sans être très nombreux, portent sur deux domaines
particuliers: le domaine des études stratégiques, qui doivent
rester à l'intérieur, et le domaine de la notion de
propriétaire averti. Dans ces deux domaines, les exemples que l'on peut
trouver de dérogations sont minimes, mais ont été
perçus par les ingénieurs comme très inquiétants
quant è la volonté de l'entreprise de maintenir une notion de
savoir-faire suffisante à l'intérieur de l'entreprise. Où
la différence est particulièrement notable, cependant, ou plus
inquiétante, c'est dans le domaine des nouvelles technologies et, en
particulier, dans le domaine du courant continu et des convertisseurs.
Hydro-Québec, depuis quelques années, a tendance à
se diriger fortement vers ces technologies. Cependant, la formation du
personnel technique pour faire face à ces nouveaux "challenges"
technologiques à l'intérieur de l'entreprise laisse à
désirer, c'est-à-dire que, lorsque, par exemple, on a
décidé de fonctionner à courant continu, il n'y a pas eu
de programmes de formation ou de planification stratégique de
l'entreprise pour créer une connaissance chez les ingénieurs
d'Hydro-Québec dans ce domaine spécifique. Et c'est le domaine
qui nous inquiète le plus. Lorsqu'on implante des nouvelles technologies
dans une entreprise comme Hydro-Québec, on croit que le personnel
technique devrait être formé pour pouvoir faire face à
ceci. Ce sont particulièrement ces dérogations à cette
troisième facette de notre politique qui causent de plus grandes
inquiétudes.
C'est pourquoi nous avons demandé à Hydro-Québec,
puisque c'était une politique qui était acceptée par
l'entreprise depuis 1979 et par le conseil d'administration et que
c'était tout simplement un genre de photographie de ce qui avait
été historiquement le partage entre l'interne et l'externe, de
statuer et d'inclure ceci dans la clause de la convention collective, clause
que vous retrouverez, d'ailleurs, en annexe A de notre convention. Vous
remarquerez que le texte utilise beaucoup de termes qui en font plus un
objectif qu'une obligation strictement légale, point qu'il est quand
même important de se rappeler. Donc, on espère que les
dérogations de l'entreprise seront minimes et que l'article 34 sera
suffisant pour éviter de telles choses.
Le Président (M. Théorêt): M. Potvin, je
m'excuse d'intervenir à ce moment-ci. Je sais qu'il est toujours
difficile de raccourcir les réponses, mais il y a tellement de
députés qui veulent intervenir et nous avons un mandat d'aller
seulement jusqu'à 18
heures. Je vous demanderais, si possible, de raccourcir vos
réponses.
M. Potvin: Je vais faire mon possible.
M. Ciaccia: De notre côté, on va essayer
d'être plus bref, M. le Président.
À la page 14 de votre exposé, vous mentionnez
qu'"Hydro-Québec a la responsabilité de développer
l'expertise québécoise et d'exercer un leadership en
matière d'énergie électrique". L'expertise
québécoise se mesure, d'une part, par le savoir-faire
présent à Hydro-Québec et, d'autre part, par l'expertise
développée à l'externe, notamment par la sous-traitance.
(17 h 30)
Je vais essayer de vous le dire aussi brièvement que possible
parce que ce peut être assez long. Selon vous, y a-t-il une solution qui
permettrait de procurer un savoir-faire suffisant à l'interne, tout en
assurant à l'entreprise privée le développement d'une
expertise lui permettant de continuer, elle aussi, de développer ses
marchés domestiques et internationaux? Y a-t-il une ligne?
M. Potvin: La ligne est effectivement assez floue et
peut-être difficile à tracer. Cependant, on croit que, pour que
les firmes de génie-conseil puissent utiliser adéquatement les
travaux qui pourraient leur être confiés dans des domaines de
nouvelles technologies, un prérequis à cela doit exister,
c'est-à-dire qu'à l'intérieur de l'entreprise
Hydro-Québec doit être suffisamment autonome pour pouvoir
réaliser elle-même ces travaux. Autrement dit, on ne devrait pas
confier à des firmes de génie-conseil des travaux que nous, on ne
sait pas faire à l'intérieur de la boîte, autant que
possible.
M. Ciaccia: Selon vous, les études qui permettent aux
décideurs de faire des choix stratégiques devraient être
gardées à l'interne plutôt que confiées à
l'externe. Vous avez mentionné cela. Les études, par exemple,
concernant la traversée sous-fluviale entrent-elles dans cette
catégorie?
M. Potvin: La traversée sous-fluviale est un cas
très intéressant parce que toutes sortes de choses s'y sont
passées. Les ingénieurs d'Hydro-Québec ont eu, entre
autres, à travailler - c'est l'ensemble de la problématique de la
sixième ligne - dans un projet d'envergure avec des délais
fixés à l'intérieur desquels ils ne pouvaient à peu
près pas bouger. Dans ces cas, on a tendance a prendre et utiliser les
moyens dans lesquels on a une expertise et une connaissance qui sont
assurées, c'est-à-dire qu'on utilise des moyens techniques
reconnus et historiquement utilisés. La traversée sous-fluviale
est un domaine de nouvelle pointe technologique. Ce n'est, cependant, pas la
première fois qu'Hydro-Québec a à envisager la
possibilité de faire des liens à courant continu de
manière sous-marine. On a eu à le faire, entre autres, pour les
Îles-de-la-Madeleine et des projets d'envergure ont déjà
été planifiés par Hydro-Québec pour relier les deux
rives du fleuve Saint-Laurent à l'est de Québec.
Dans ce sens, il est important qu'Hydro-Québec se crée
elle-même une expertise à l'intérieur pour pouvoir
répondre à des questions aussi importantes que la
traversée sous-fluviale, parce qu'on risque de se ramasser avec des
rapports d'experts divergents où plus personne n'est capable de
trancher. Ce sont 'des rapports qui se promènent d'un côté
à l'autre du public et personne n'est capable de faire une analyse
adéquate de l'ensemble des risques et des solutions optimales.
M. Ciaccia: Je vous remercie. M. le Président. Je suis
prêt à céder mon droit de parole, mais pourrait-on avoir
avant une entente sur le partage du temps jusqu'à six heures? Combien de
temps ai-je pris?
Le Président (M. Théorêt): Cela va être
séparé en parts égales, M. le ministre, il n'y a aucun
problème là-dessus. M. le député de Roberval, vous
avez la parole.
M. Gauthier: Je suis entièrement d'accord, d'autant plus
que je la réclame depuis tantôt. Je voudrais simplement demander:
Combien de temps cela veut-il dire?
Le Président (M. Théorêt): On va vous donner
cela. Étant donné qu'il vient à peine de terminer, il y a
deux secondes, je vais vous le dire exactement. Si vous voulez débuter,
M. le député de Roberval, on va vous donner les chiffres
immédiatement.
M. Gauthier: D'accord. J'aimerais, d'abord, monsieur, vous
remercier de votre présentation. J'aimerais savoir si vous avez en main
- si vous ne les avez pas, j'aimerais que vous puissiez nous les fournir
dès demain l'évolution des chiffres concernant le "membership" au
syndicat des ingénieurs à Hydro-Québec au cours, disons,
des quatre dernières années. Disposez-vous de cette information
maintenant?
M. Potvin: Le "membership" des membres du SPIHQ...
Entendons-nous, il va falloir faire une petite distinction par rapport au
mémoire d'Hydro-Québec, où on fait référence
à l'ensemble des groupes d'employés d'Hydro-Québec. Si
vous regardez le nombre d'ingénieurs, vous allez remarquer une certaine
tendance à l'accroissement. Cependant, quand on regarde les membres du
SPIHQ en tant que tels, depuis environ
quatre ans, on est actuellement stables à 1120 ingénieurs
syndiqués dans l'entreprise. La différence entre les 1120 et le
chiffre utilisé par l'entreprise vient de deux facteurs. Il vient, entre
autres, des ingénieurs de l'IREQ, qui ne sont pas syndiqués. Il
vient aussi du fait que, si vous regardez le nombre de cadres de l'entreprise,
vous allez remarquer qu'il y a eu une baisse notable du nombre de cadres.
Plusieurs de ces cadres étaient des ingénieurs. Selon notre
juridiction, à partir du moment où l'ingénieur à
l'emploi d'Hydro-Québec cesse d'occuper des fonctions de gestionnaire de
deuxième niveau ou supérieur, il devient syndicable. Le syndicat
défend, à l'heure actuelle, sa cause devant le ministère
du Travail pour obtenir environ 80 de ses membres, ce qui fait la
différence, grosso modo, entre les 1120 plus 80 ingénieurs dont
on revendique la juridiction et ceux de l'IREQ. Cela donnerait à peu
près le chiffre qu'Hydro-Québec donne.
M. Gauthier: Existe-t-il, chez les ingénieurs, des
ingénieurs occasionnels pour Hydro-Québec, comme dans les autres
corps d'emploi?
M. Potvin: II en existe quelques-uns, mais c'est minime. C'est
moins que dix.
M. Gauthier: Alors, c'est très marginal?
M. Potvin: C'est très rare, très marginal.
M. Gauthier: D'accord. À la lecture de votre
mémoire et à vous entendre, je trouve que vous avez une
préoccupation fort intéressante qui est celle de conserver
à Hydro-Québec une expertise à l'interne. Vous donnez
comme raison la possibilité, d'abord, d'être un
propriétaire averti ou quelque chose comme ça - je ne me souviens
pas de l'expression exacte - et cela est louable en soi, sauf que cette
commission parlementaire se penche sur un problème délicat qui
est celui, dans un souci de justice et d'équité, d'établir
une juste proportion de travail à confier à l'interne et à
l'externe et cela, pour les différents niveaux d'emploi à
Hydro-Québec dans un but bien évident qui est celui, en quelque
sorte, de préserver les emplois d'une certaine quantité de
personnes et cela touche aussi les ingénieurs. Demain ou ce soir - je ne
sais trop - les ingénieurs-conseils vont venir nous rencontrer et nous
dire que les travaux diminuent, qu'ils ont moins de chances de conserver des
divisions intéressantes au sein de leurs firmes.
À partir de l'objectif de préserver une expertise à
Hydro-Québec, dans une commission parlementaire comme celle-ci, quelles
suggestions pourriez-vous nous faire pour nous aider à partager
véritablement? J'ai cru comprendre que les critères que vous ncus
proposez sont des critères quant è l'entreprise: les choix
stratégiques, les développements technologiques nouveaux, etc.
C'est très intéressant, mais vous traitez peu ou pas, à
moins que je n'aie mal compris, de l'aspect économique des choses, celui
de partager équitablement et de maintenir autant sur le plan externe
qu'interne - mais surtout à l'externe pour l'instant - des firmes qui
ont de l'expertise, qui ont la capacité d'exporter des technologies, qui
ont la capacité d'intervenir ailleurs aussi qu'au Québec parce
que ce n'est pas le moindre des avantages, vous l'admettrez. Est-ce que vous
avez un point de vue à nous exprimer là-dessus?
M. Potvin: Écoutez, la politique qu'on préconise
n'est pas nouvelle en soi; au contraire, c'est la politique qui a permis de
faire en sorte que le génie-conseil au Québec se développe
et devienne ce qu'il est aujourd'hui, c'est-à-dire que la politique,
dans ce qu'on préconise, est celle qui existe depuis la création
de Hydro-Québec. C'est ce qui a permis, entre autres, par exemple, que
le barrage Daniel-Johnson soit, dans ses détails, conçu par des
firmes hors d'Hydro-Québec. Or, dans ce sens-là, la politique
qu'on continue de préconiser est la même. Il n'y a pas de
changement par rapport à cela.
Là où la difficulté surgit, c'est que cette
politique ne suscite pas de problème et crée une croissance
lorsque l'ensemble des besoins d'ingénierie dans la province sont
croissants. Malheureusement, depuis quelques années, on constate non
seulement une stagnation, mais une diminution de ces besoins
d'ingénierie là.
Je crois qu'en tant que parlementaires la question importante est de
savoir où il est le plus important de maintenir une certaine masse
critique de compétence. Est-ce que, pour la communauté
québécoise, la masse critique de compétence doit
être prioritairement maintenue à Hydro-Québec ou si elle
doit être prioritairement maintenue dans le génie-conseil?
Selon nous, évidemment, elle doit être maintenue à
l'intérieur d'Hydro-Québec à cause, justement, de la
notion de propriétaire averti. Si on ne crée pas et qu'on ne
maintient pas une masse critique de compétence à
l'intérieur d'Hydro-Québec, lorsqu'on aura besoin de retourner
à l'externe et de refaire de grands ouvrages, on ne trouvera plus,
à l'intérieur d'Hydro-Québec, le personnel
nécessaire pour être capable de porter des jugements
adéquats sur les solutions techniques d'envergure que le Québec
aura à prendre à ce moment-là.
M. Gauthier: M. le Président, il me semble que, dans
l'état actuel des choses et selon ce que vous nous avez décrit,
le nombre d'ingénieurs est en augmentation
constante, même si ce n'est pas une augmentation faramineuse. On
comprend que ce sont des domaines un peu plus spécialisés; il ne
faut pas s'attendre à augmenter de 300 ingénieurs par
année, je n'ai pas compris que c'était votre objectif. Est-ce que
la situation actuelle ne garantit pas largement que cette expertise à
l'interne se maintiendra, se perpétuera, se développera compte
tenu du fait que le "staff" - permettez-moi l'expression - augmente constamment
de façon assez impressionnante pour des professionnels?
M. Potvin: Soit dit en passant pour l'augmentation, je vous mets
en garde, il faut toujours se rappeler le nombre de cadres qui ont
été réintégrés dans nos rangs. Pour
répondre à votre question, il faut se rappeler que, depuis 1980,
le mandat d'Hydro-Québec n'est plus uniquement de réaliser des
grands travaux. Depuis les années quatre-vingt, les grands travaux sont
arrêtés à Hydro-Québec et il ne s'en fait plus. On
a, cependant, demandé aux ingénieurs d'Hydro-Québec de se
spécialiser dans un paquet d'autres domaines, qui sont des domaines
d'importance pour l'entreprise. Par exemple au niveau de la distribution, on a
amplement fait état aujourd'hui du fameux PAQS. Le PAQS découle
de décisions qui ont été prises par des ingénieurs,
a savoir: Où doit-on investir l'argent pour le PAQS? Donc, il y a des
ingénieurs qui ont dû travailler dans les
électrotechnologies pour vendre, entre autres, l'énergie
excédentaire qui était disponible à ce moment. Il y a eu
des nouveaux besoins en distribution et on est rendu avec un réseau
électrique de plus en plus complexe. Non seulement on confie maintenant
à Hydro-Québec la tâche de fournir les clients
d'Hydro-Québec, mais aussi d'aller sur les marchés
américains. Elle doit prévoir un paquet d'études de
planification et d'analyses sur l'intégration avec un réseau
différent du nôtre et qui nécessite, somme toute, avec les
nouvelles technologies utilisées, un accroissement minime - parce que
100 ingénieurs en cinq ans, on ne peut pas considérer que c'est
un accroissement énorme - des compétences d'Hydro-Québec
dans ces domaines. On utilise de plus en plus les compétences techniques
de ces ingénieurs dans différentes études et on en fait de
plus en plus.
Mais, dans le domaine où les ingénieurs-conseils
traditionnellement faisaient affaire avec Hydro-Québec,
c'est-à-dire le groupe équipement, il y a eu une baisse notable
des effectifs d'ingénieurs. Donc, l'augmentation minime
d'ingénieurs ne devrait pas toucher le génie-conseil parce que ce
ne sont pas les domaines traditionnels où le génie-conseil a eu
à faire affaire avec Hydro-Québec, c'est-à-dire les grands
travaux.
M. Gauthier: À la page 10 de votre mémoire, vous
nous expliquez qu'il y a, selon votre syndicat, trois objectifs qu'une
politique de recours aux ingénieurs-conseils devrait poursuivre et vous
les mentionnez. Dites-moi: Est-ce que la politique de 1980 d'Hydro, dont vous
faites mention dans la page précédente, était basée
sur ces trois éléments?
M. Potvin: C'est plutôt l'inverse, c'est-à-dire que
cela était basé sur la politique de 1980, mais ce sont les trois
mêmes objectifs qu'on retrouve dans les deux politiques.
M. Gauthier: C'est-à-dire, je voudrais bien qu'on se
comprenne, qu'en 1980 Hydro s'est donné une politique, elle vous a
consulté, le syndicat des ingénieurs.
M. Potvin: Oui.
M. Gauthier: Et puis, vous me dites que les trois points
mentionnés sont inclus dans la politique ou découlent de la
politique.
M. Potvin: De 1980, c'est cela.
M. Gauthier: Bref, on les retrouve dans les deux.
M. Potvin: Ces objectifs sont la représentation
fidèle de la résolution du conseil d'administration de 1980 sur
le partage entre l'externe et l'interne.
M. Gauthier: Est-ce que vous avez des exemples à nous
donner de cas précis dans lesquels Hydro-Québec aurait
dérogé à ces principes? J'aimerais connaître les
effets de ces dérogations sur le travail des ingénieurs
d'Hydro-Québec. S'il y a eu des dérogations, il y a certainement
eu une conséquence néfaste.
M. Potvin: On a cité, comme je vous le disais, deux
exemples pour le premier et le deuxième point. On a eu un exemple
particulier dans le premier cas, c'est-à-dire les activités
stratégiques. Prenons le cas des centrales Chelsea et Farmers; on a
confié les études préliminaires de ces centrales à
une firme de génie-conseil, ce qui était une nouveauté
à Hydro-Québec. Dans les études préliminaires, on a
demandé de définir une façon de résoudre un
problème de façon qu'après, de manière
générale, on puisse confier à quelqu'un la
réalisation pratique de la solution.
Dans le deuxième cas, on croit qu'Hydro-Québec n'a pas
démontré une notion suffisante de propriétaire averti dans
le cas des fissures du barrage Daniel-Johnson. Rappelons que ces fissures ont
été détectées au début des années
quatre-vingt - en 1982 environ - et qu'à l'heure actuelle, en 1987,
on n'a pas encore de décision ultime de l'entreprise à
savoir dans quel sens on va aller. Tout cela découle du fait
qu'initialement la conception même détaillée du barrage
Daniel-Johnson n'a jamais été suivie de très très
près à l'interne et que les ingénieurs
d'Hydro-Québec, aussi bizarre que cela puisse paraître, n'ont
jamais réalisé dans le détail une centrale
complète. C'est-à-dire qu'on n'a pas créé, à
l'intérieur de l'entreprise des expertises dans des domaines de
génie civil où on utilise, par exemple, ce qu'on appelle les
méthodes de calcul aux éléments finis qui sont des
nouvelles méthodes; on n'a pas créé d'expertise dans ces
domaines. Résultat: quand on découvre des fissures, on va
à l'externe. L'externe fait une étude, trouve une solution et
dit: II faut faire un confortement, le coût: environ 300 000 000 $. Les
ingénieurs d'Hydro-Québec, qui analysent le rapport de la firme
d'ingénieurs-conseils, se mettent à douter des résultats,
parce que ce que la firme d'ingénieurs-conseils prévoyait comme
évolution des fissures n'est pas corroboré par ce qu'on
découvre dans les faits. Et eux, les ingénieurs
d'Hydro-Québec, prétendent que le problème des fissures du
barrage Daniel-Johnson, c'est plus une question de chaud et de froid, de choc
thermique et, donc, que la solution à cela, c'est d'isoler thermiquement
le barrage Daniel-Johnson à un coût d'environ 50 000 000 $. (17 h
45)
Donc, là, on a deux études, et on ne sait pas trop comment
s'y prendre pour savoir laquelle des deux a raison. Ce qu'on fait, c'est qu'on
fait appel à une firme, pas à une firme, mais plutôt
à des experts internationaux. On forme un comité d'experts et on
leur renvoie la balle. Entre-temps, Hydro-Québec n'a pas de solution.
Ça, on trouve que c'est grave. C'est grave dans le sens
qu'Hydro-Québec n'est plus en état de juger elle-même de
ses ouvrages quitte, après cela, à le faire corroborer, elle
n'est pas en état, elle-même, de porter un jugement sur des
ouvrages qui sont, quand même, importants.
M. Gauthier: Oui, mais ce que vous me dites là, ce sont
des exemples intéressants et cela nous aide à comprendre. Est-ce
que le problème ne relève pas plutôt d'une
répartition du travail à l'intérieur même des cadres
d'Hydro-Québec plutôt que de la quantité de sous-traitance
à donner ou pas? Moi, j'ai l'impression - vous me corrigerez, c'est
peut-être erroné, ce que je vais dire - que ce que vous
réclamez à partir d'énoncés ou d'exemples comme
ceux-là, c'est que, parmi ses - je ne sais pas combien - 1273
ingénieurs, Hydro-Québec devrait en affecter quelques-uns
à des travaux un peu plus spécialisés plutôt
qu'à des travaux routiniers, quitte à confier de ces travaux
routiniers à des sous-traitants. Est-ce que ce n'est pas plus ça
le problème que le fait de donner moins de sous-traitance à
l'extérieur?
M. Potvin: II n'y a pas seulement un problème de
quantité de sous-traitance, il y a un problème de qualité
de sous-traitance, aussi. C'est-à-dire que, si on donne toujours
à l'extérieur d'Hydro-Québec des domaines... Par exemple,
prenons le cas du barrage Daniel-Johnson, puisqu'on parle de lui. C'est un
barrage à voûtes multiples qui est à peu près unique
au monde» C'est le plus gros au monde et le seul qui existe appartient
à Hydro-Québec.
Ce barrage-là a été totalement conçu par une
firme de génie-conseil et il n'y a pas eu d'ingénieurs
d'Hydro-Québec qui ont suivi la conception détaillée de A
à Z. Il n'y a pas encore aujourd'hui à Hydro-Québec de
spécialistes en barrage à voûtes multiples, alors
qu'Hydro-Québec possède le plus gros barrage à
voûtes multiples au monde. Ce qu'on veut dire par savoir-faire, c'est
qu'en tant que propriétaire de ce barrage-là, lorsque quelque
chose s'y passe, la seule façon dont Hydro-Québec peut juger si,
oui ou non, il y a quelque chose de grave, c'est de se tourner vers la firme de
génie-conseil qui l'a initialement conçu et de dires Est-ce que
c'est grave?
Là, on se trouve dans une situation un peu difficile.
C'est-à-dire que tu as une situation de juge et partie. La personne qui
a elle-même conçu le barrage va te dire si elle s'est
trompée ou pas. C'est pour le moins délicat. Ce qu'on veut dire,
c'est qu'il y a une certaine quantité de travail qui doit demeurer
à l'interne pour maintenir un noyau critique. Et il doit y avoir une
certaine qualité de travail qui doit demeurer à l'interne. On ne
doit pas confier à l'externe quelque chose qu'on ne sait pas faire parce
qu'après Hydro-Québec va avoir à travailler et va avoir
à vivre avec cet équipement-là. Et, si elle ne
connaît pas cet équipement, un jour ou l'autre, il va y avoir un
problème et elle ne sera pas capable d'y faire face. Ça, c'est
grave.
M. Gauthier: Dans la pratique des choses, est-ce qu'il arrive
parfois qu'Hydro-Québec demande à certains de ses
ingénieurs de l'interne de collaborer, de travailler conjointement avec
des firmes d'ingénieurs de l'externe à la préparation,
à des études, etc., à différents travaux de
génie un peu plus complexes? Est-ce que ça ne serait pas
là la solution? J'ai bien hâte qu'Hydro-Québec vienne
comparaître ici. Mais moi, j'ai l'impression qu'elle va nous dire que,
dans tous les cas, quelque catégorie de personnel que ce soit,
même les ingénieurs, elle ne veut pas se ramasser avec un "staff"
trop gros. Bon, il est important pour elle de garder des liens avec
l'extérieur et une certaine mobilité. Ça, cela peut
arriver qu'on
comprenne cet argument-là. À ce moment-là, c'est
drôle, moi, j'ai l'impression, de toute l'argumentation que vous nous
avez tenue, qu'il s'agit plus, au niveau de l'organisation des travaux, de
permettre à des ingénieurs de collaborer conjointement avec le
secteur privé et que la quantité de sous-traitance, en quelque
sorte, n'est pas vraiment en cause dans le domaine très technique qui
est le vôtre.
M. Potvin: On est, en effet, d'accord avec ce que vous dites. La
preuve de cela, c'est que vous remarquerez que, dans notre mémoire, on
attache beaucoup d'importance à ce qu'on appelle la planification
stratégique de la main-d'oeuvre. Hydro-Québec remet son
mémoire à toutes les années sur l'évolution de la
main-d'oeuvre et on dit qu'on va avoir besoin de tant de milliers de personnes
dans tes X années à venir. Sauf que cette planification des
besoins n'est pas redistribuée au niveau de la gestion quotidienne. Il
n'y aura personne dans l'entreprise qui va, tout d'un coup, s'asseoir et dire:
L'entreprise est en train de faire un virage technologique vers le courant
continu, par exemple; on doit immédiatement se créer des
équipes techniques sur, par exemple, le courant continu pour pouvoir,
adéquatement, être capable de répondre aux questions et aux
problèmes techniques qui vont découler de l'approche de cette
nouvelle technique. C'est-à-dire qu'on l'a construit et qu'ensuite on
vit avec. C'est ce qui est arrivé à Chateauguay, par exemple. On
a construit un convertisseur tout à fait nouveau et, à un moment
donné, il y a eu des problèmes. Là, on a donné le
manuel d'entretien aux ingénieurs qui avaient à résoudre
le problème. On leur a dit: Prenez le manuel d'entretien, commencez
à fouiller, découvrez, étudiez et trouvez la solution
plutôt que de planifier et de structurer une approche qui aurait permis
de dire: Écoutez, on s'en va vers une nouvelle technologie
là-dedans et on va envoyer des ingénieurs d'Hydro-Québec,
par exemple, se former ailleurs si cela est nécessaire, soit en
Suède parce qu'ils en ont déjà fait ou ailleurs en Europe
parce que cela a déjà été fait. En Afrique, ils ont
eu des expériences de courant continu comme cela a été
fait quand Hydro-Québec a créé la centrale Gentilly 2.
Hydro-Québec a envoyé de ses ingénieurs en formation
à l'Énergie atomique du Canada parce que c'est une nouvelle
approche, c'est une nouvelle technique. Le résultat, c'est que ces
ingénieurs d'Hydro-Québec ont acquis une expérience
importance dans le domaine nucléaire, tellement importante qu'ils ont pu
aller vendre leur expertise en Argentine.
Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le
député de Roberval. Je vais essayer, M. Potvin, de formuler mes
questions de façon que vous me donniez une réponse la plus courte
possible.
Depuis le début des travaux, ce matin, j'ai essayé de bien
comprendre toute la portée de l'article 34. J'aimerais donc savoir de
votre part si les firmes de génie-conseil qui se sont
développées pendant les années soixante-dix, par exemple,
auraient connu le même rythme de développement si cet article 34
avait existé à ce moment-là.
M. Potvin: Dans le cas de l'article 34 de la convention
collective des ingénieurs, la réponse est oui...
Le Président (M. Théorêt): Oui.
M. Potvin: ...puisque c'est un reflet fidèle de ce qui
existait dans le cas de la convention collective des ingénieurs.
Le Président (M. Théorêt): C'est oui.
Merci.
Ma deuxième question. Je voudrais savoir si je lis bien votre
mémoire et si je vous comprends bien surtout quand vous dites que le
recours futur aux firmes d'ingénieurs-conseils devrait se limiter aux
pointes de travail imprévisibles et aux domaines où l'entreprise
- Hydro-Québec donc - ne possède pas l'expertise
nécessaire pour réaliser ses mandats. Est-ce que je vous
comprends bien quand je lis cette position dans votre mémoire?
M. Potvin: Ce qu'on dit comme toujours, c'est que, si
l'entreprise a de gros travaux à réaliser qui nécessitent
un impact massif d'ingénierie, une embauche forte de personnel pour des
durées ponctuelles, on considère que ces travaux peuvent
continuer à être confiés à des firmes de
génie-conseil. La même chose lorsque le temps ne le permet pas et
qu'on ne peut pas créer une expertise particulière dans un
domaine donné. Prenons un exemple. Un problème de bruit
apparaît dans un des postes d'Hydro-Québec. On n'a pas le temps de
commencer à créer un spécialiste dans ce domaine. On peut
faire appel dans les domaines de cette nature à une firme
spécialisée, mais cela devrait être de manière
ponctuelle et ne devrait pas devenir répétitif. Si
HydroQuébec a toujours des problèmes de bruit, elle devrait
être capable de les résoudre elle-même.
Le Président (M. Théorêt): Merci. L'article
34.04...
M. Potvin: Oui.
Le Président (M. Théorêt): ...de votre
convention prévoit la formation d'un comité conjoint qui devra
identifier les domaines d'activités qui pourraient être
réalisées par
le personnel d'Hydro-Québec à la condition que vous ayez,
évidemment, les compétences requises à l'interne. Est-ce
que cela veut dire, M. Potvin, que vous proposerez lors d'une prochaine
négociation de restreindre davantage le recours aux
ingénieurs-conseils en rapatriant à l'interne les travaux
actuellement confiés à l'externe?
M. Potvin: Ce qu'on dit par cela, c'est qu'à l'heure
actuelle on a défini une politique avec l'entreprise dans laquelle il va
falloir qu'on vive. On considère que cette politique basée sur
les objectifs est une politique importante pour l'ensemble de la
communauté québécoise. Dans ce sens, on est prêt
à discuter avec Hydro-Québec. Si on constate, comme je vous le
disais tout à l'heure, que répétitivement, de
manière régulière, Hydro-Québec utilise des firmes
externes dans un domaine d'importance parce qu'elle ne se crée pas la
compétence, on va dire à l'entreprise: Écoutez, vous
devriez au moins vous créer un minimum de compétence à
l'interne pour pouvoir être un propriétaire averti dans ce domaine
et, ensuite, confier à des firmes d'ingénieurs-conseils, si
nécessaire, les pointes de travail associées à ce travail
de telle façon qu'Hydro-Québec sache la qualité des
travaux qui lui sont fournis et s'ils sont adéquats ou non. C'est ce
qu'on veut dire par cela. Donc, c'est une chose qui est vivante et c'est une
chose qui évolue dans le temps dans le domaine technique et
technologique., Ce qui est aujourd'hui une technologie de pointe va être
dans dix ans une technologie standard et normalement utilisée et qui ne
nécessitera plus les mêmes efforts de participation de la part de
l'entreprise et des syndiqués.
Le Président (M. Théorêt): Entre vous et
nous, c'est bien l'objectif de l'article 34.04, de rapatrier à l'interne
des travaux qui se font dans le moment à l'externe?
M. Potvin: Non.
Le Président (M. Théorêt): Non. Une
dernière question. Je ne sais pas, mais je pense que le
député de Roberval l'a peut-être mentionné. Si oui,
est-ce qu'on vous a demandé de déposer le nombre de membres pour
l'année 1987 parce qu'on a, évidemment, pour l'année 1986
le chiffre de 1273? Est-ce qu'on vous a demandé de déposer le
chiffre de 1987?
M. Potvin: J'ai répondu à la question. À
l'heure actuelle, on a 1120 ingénieurs cotisants au Syndicat
professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec sur le dernier
chèque de paie.
Le Président (M. Théorêt): Je vous
remercie.
Vu que les députés de l'Opposition ont demandé des
données là-dessus, je voudrais juste rappeler à ces
gens-là que les données doivent être déposées
au secrétariat pour que tous les membres puissent
bénéficier, finalement, de cette information. Alors, je vous
remercie et je cède maintenant la parole au ministre de l'Énergie
et des Ressources.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je voudrais juste
avoir une clarification. Tantôt, à la suite d'une question que je
vous avais posée, je crois, sur l'article 34, vous avez mentionné
- je voudrais que vous me corrigiez si j'ai mal compris - que ce sont des
objectifs plutôt que des obligations légales. Est-ce que vous
pourriez élaborer un peu là-dessus?
M. Potvin: Ce qu'on veut dire, c'est qu'à l'heure actuelle
la politique qu'on a incluse dans la convention collective représente ce
qu'Hydro-Québec elle-même avait accepté comme politique.
Donc, dans ce sens-là, on croit qu'Hydro-Québec a tout avantage
de continuer à fonctionner selon cette politique puisqu'elle a permis un
partage que l'on considère équitable avec les firmes de
génie-conseil, historiquement.
Je tiens simplement à vous faire remarquer certains termes qui
apparaissent régulièrement dans la phraséologie de notre
article 34 qui va vous faire comprendre pourquoi c'est plus un objectif moral,
l'inclusion dans la convention collective, que quelque chose de strictement
légal. Entre autres, d'accord, à l'article 34.02, on dit que "la
direction confie ordinairement à son personnel technique les
activités suivantes". Vous conviendrez avec moi que, lorsqu'on utilise
"ordinairement", c'est plus une question de souhait qu'une question strictement
légale. On considère, cependant, qu'Hydro-Québec ne
devrait pas déroger à ce principe-là puisque c'est un
principe important pour elle et c'est un principe qu'historiquement elle a
utilisé. Et c'est pour ça qu'on dît que c'est une politique
ou un objectif plus qu'un texte légal.
M. Ciaccia: C'est intéressant, votre
interprétation. Pour comparaison, prenons, par exemple, l'entente avec
la sous-traitance. Cela va tomber de 720 à 500. Cela, c'est clair. Ce
n'est pas un objectif, c'est une obligation qu'Hydro-Québec s'est
imposée ou elle s'est entendue avec les syndicats. Maintenant vous me
dites, vous, que dans l'article 34, c'est un objectif. Est-ce que ça
veut dire, par exemple - parce qu'on a reçu des plaintes où les
ingénieurs-conseils se plaignent des avant-projets -
qu'Hydro-Québec pourrait confier des avant-projets à une firme
d'ingénieurs-conseils parce que, dans l'article 34.02, vous parlez
d'études préliminaires et d'avant-projets?
M. Potvin: Si vous regardez le mémoire
d'Hydro-Québec, entre autres dans les centrales, vous allez constater
que, historiquement, Hydro-Québec a déjà confié des
travaux d'avant-projet à des firmes. Cependant, dans d'autres domaines,
à un certain moment dans l'évolution d'un projet, l'avant-projet,
c'est lorsqu'on définit ce que sera le projet, ce que seront les
coûts, ce que sera l'échéancier, ce qu'il va y avoir dans
cet avant-projet-là. Cela, d'après nous, c'est une
décision stratégique de l'entreprise, dans certains domaines.
M. Ciaccia: Mais vous dites que c'est un objectif
qu'Hydro-Québec a et que légalement Hydro-Québec pourrait
le confier à un autre.
M. Potvin: Écoutez, quand on dit qu'Hydro-Québec a
utilisé ordinairement ça, d'accord, on en comprend
qu'effectivement Hydro-Québec ne devrait pas, à moins de raisons
très graves, y déroger. Parce que, historiquement, c'est toujours
comme ça que cela a fonctionné. Évidemment, il ne faudra
pas se cacher. On croit que c'est une politique juste et honnête parce
que c'est une politique qui reflète ce qui a toujours existé,
historiquement, à Hydro-Québec. Cependant - et il faudrait
être clair là-dessus - si les ingénieurs
d'Hydro-Québec se rendent compte qu'on passe à côté
de cette politique-là régulièrement, un jour ou l'autre
ils vont vouloir avoir quelque chose de plus solide que ça*
M. Ciaccia: Est-ce que vous dites que, historiquement, les
avant-projets avaient toujours été confiés par
Hydro-Québec à des ingénieurs-conseils internes et qu'ils
n'étaient pas confiés aux ingénieurs-conseils
externes?
M. Potvin: Dans le cas des avant-projets, c'est un peu plus
difficile à expliquer. Certains types de projets étaient
confiés à l'externe et il y avait d'autres types d'avant-projets
qui ne l'étaient pas.
M. Ciaccia: Est-ce que cela a changé... M. Potvin:
Non.
M. Ciaccia: ...avec 34.02? C'est la même chose.
M. Potvin: Et ça ne devrait pas changer dans le futur,
d'après nous.
M. Ciaccia: Cela ne devrait pas changer.
Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le
ministre. M. Potvin et vos collègues, au nom des membres de la
commission, je vous remercie de votre excellente collaboration et d'avoir
rapidement répondu à nos questions; cela a permis à plus
de députés d'intervenir. Alors, je vous remercie. Je vous
souhaite un bon voyage de retour chez vous.
M. Potvin: Merci.
Le Président (M. Théorêt): Les travaux de la
commission sont suspendus jusqu'à 20 heures ce soir.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 20 h 3)
Le Président (M. Charbonneau): La commission de
l'économie et du travail reprend sa consultation particulière sur
le dossier de la sous-traitance à Hydro-Québec.
Nous recevons ce soir l'Association des entrepreneurs en construction du
Québec. C'est M. Daoust, je crois, qui est président de
l'association. Je ne sais pas si c'est vous, M. Daoust, qui allez diriger la
délégation ou monsieur...
Une voix: Dion.
Association des entrepreneurs en construction du
Québec
Le Président (M. Charbonneau): Alors, M. Dion, je vous
demanderais de présenter les personnes qui vous accompagnent avant de
commencer votre exposé qui doit durer au maximum 20 minutes. Le reste du
temps, réparti équitablement, sera consacré aux membres de
la commission pour l'étude de la question. Alors, sans plus tarder, M.
Dion.
M. Dion (Michel): Bonsoir, M. le Président. Bonsoir,
madame, bonsoir, messieurs. La représentation de l'AECQ: le
président, M. Claude Daoust, va faire la première partie de
l'exposé, qui est en deux parties. M. le président Claude Daoust,
d'Erecto Steel, ou, si vous voulez, Les érections d'acier, va faire une
première partie sur le champ d'application. Pour la deuxième
partie, qui traite de la question de la productivité, de la
main-d'oeuvre, des différences de coût entre l'entreprise
privée et l'entreprise publique, ce sera M. Franco Fava,
ex-président de l'AECQ. Sont également assis à la table,
ce soir, deux membres du personnel: Me Joëlle L'Heureux, à
l'extrémité de la table, à droite, et M. Robert Brown, du
bureau de l'AECQ. Alors, sans plus tarder, on vous expose notre mémoire,
notre résumé - parce qu'on a résumé nos documents
depuis.
M. Daoust (Claude): M. le Président, la partie que je vais
vous présenter est quand même assez courte. J'imagine que M.
Fava
va prendre un peu plus de temps que moi. J'aimerais me pencher un peu
plus sur ce qui nous concerne directement, nous, à l'AECQ, les effets
des politiques semblables à celles d'Hydro-Québec, l'arrêt
ou la diminution de la sous-traitance, les effets que cela a sur le champ
d'application de la construction.
La loi de la construction, qui a été sanctionnée en
1968, a pris bien garde de ne pas identifier clairement ce qu'était le
champ d'application. Ce qui arrive, c'est qu'avec les années on
s'aperçoit que les différents gouvernements qui se sont
succédé pour des raisons politiques ont sorti du champ
d'application de la construction différents travaux qui se faisaient. On
pense, par exemple, au verre plat qui faisait partie de la construction, qui a
été enlevé à un moment donné. On pense aux
travaux d'entretien, et ainsi de suite, qui sont faits par les hôpitaux,
les organismes para-gouvernementaux. On pense à l'installation, au
montage, à la réparation, à l'entretien de la machinerie
de production qui appartenaient, à un moment donné, au domaine de
la construction. Et, naturellement, on pense aux travaux d'Hydro-Québec
qui sont exempts du champ d'application. Chaque fois que la partie qui est
exempte du champ d'application augmente, c'est bien apparent que notre partie
diminue. II faut réaliser que les organismes créés par les
différents gouvernements sont constants, eux, qu'ils ont des coûts
assez constants, telle la Commission de la construction, telle la CSST, qui
établit ses taux en fonction de la quantité de travailleurs; des
fois, on a l'impression qu'elle établit ses taux en fonction d'une note
globale et, après ça, si la quantité de travaux est
réduite, on a la même note totale. On a plusieurs organismes comme
ça qui sont là, permanents, indépendamment du volume de
construction qui se fait. Alors, si les différents organismes
gouvernementaux ou para-gouvernementaux commencent à réduire leur
champ d'application de la construction en minimisant les sous-contrats qui sont
donnés, vous pouvez imaginer les effets que cela va avoir.
Un autre effet qui me vient à l'idée, c'est la loi 119 qui
a été adoptée l'an dernier, qui traite de la formation
dans la construction. Là encore, si on réduit la quantité
de sous-traitance qui est donnée à l'extérieur, c'est bien
apparent qu'il va y avoir moins de travailleurs de la construction
qualifiés pour faire les travaux. Donc, éventuellement, si on
fait un demande en cas d'urgence ou si on change la politique pour revenir
à un système de sous-traitance comme il y avait auparavant, il va
certainement manquer de main-d'oeuvre qualifiée. On sait très
bien que, pour créer une main-d'oeuvre qualifiée, selon les
métiers, ça peut aller jusqu'à 10 000 heures dans le
moment. Alors, penser simplement à réduire arbitrairement la
quantité de travaux de construction, ça pourrait naturellement
amener des dangers, si jamais on les retourne. On s'aperçoit que
différents organismes, quand ils entendent dire qu'un organisme pose un
geste, ils y prennent goût. Drôle de coïncidence, en fin de
semaine, samedi, je voyais dans le journal The Gazette un avis officiel de la
ville de Montréal qui se propose de déposer un projet de loi
privé, à la prochaine session du Parlement, pour demander le
droit, justement, de faire de la construction neuve avec ses employés
sans que ce soit couvert par le décret de la construction. On a vu dans
le passé des demandes des municipalités qui voulaient faire tous
leurs travaux sans que ce soit couvert par le décret de la construction.
On ne peut pas avoir un mélange de règlements qui
déterminent les règles de la construction et en même temps
permettre à tout le monde de s'y soustraire à volonté,
quand cela fait leur affaire. On va même plus loin que cela. Nous, on dit
que l'exemption qui existe pour Hydro-Québec dans le moment, de faire
ces travaux hors construction, ne devrait pas exister. Nous recommandons donc
que cette exemption soit éliminée complètement et que tous
les travaux qui sont faits par HydroQuébec pour l'entretien ou pour
l'installation de lignes soient considérés comme de la
construction, parce qu'effectivement c'est de la construction.
Je vous disais tantôt que, si HydroQuébec continue à
réduire ses travaux de sous-traitance, cela pourrait avoir des effets.
On s'explique très mal la nécessité d'avoir un changement
de politique de sous-traitance, à part le fait, naturellement, qu'il y a
eu un contrat de travail. Pendant des années, le système a
fonctionné pour Hydro-Québec. Donc, s'il a si bien
fonctionné pendant tant d'années, c'est bien apparent que la
seule raison pour laquelle on a proposé de le changer, c'était
pour régler un problème de relations du travail interne
plutôt que pour des questions d'efficacité. J'essaie de me limiter
à 20 minutes, alors, je passe à travers mon texte assez
rapidement.
Donc, le fait immédiat de la réduction des contrats
octroyés en sous-traitance se traduira par une réduction
substantielle des heures de travail des monteurs de lignes. Elle conduira
plusieurs au chômage, faute de pouvoir exercer leur emploi. D'autres
salariés seront contraints de quitter l'industrie de la construction,
parce qu'il y a quand même beaucoup de travaux connexes aux travaux de
construction de lignes. Je vous ai parlé de l'apprentissage qui,
naturellement, en souffrira. Il faut même penser que les nouveaux
règlements régissant la délivrance des certificats de
compétence, les règlements
écrits en fonction de la loi 119 sur la formation, pourraient
justement, vu que les heures sont réduites par les travailleurs de la
construction, bloquer l'entrée dans l'industrie de nouveaux travailleurs
monteurs de lignes, De fait, l'accès à la construction est en
fonction des heures travaillées dans la construction - je vous le dis,
j'essaie de passer le plus rapidement possible, parce que je sais que M. Fava a
besoin de plus de temps que moi. Je vais conclure très vite. La position
adoptée par Hydro-Québec constitue finalement une
abnégation des services compétents que lui ont rendus
l'entreprise privée et sa main-d'oeuvre dans l'industrie de la
construction.
Avant de céder la parole à M. Fava, je voudrais vous lire
le texte d'une lettre qui sera adressée au ministère provenant
des autres associations patronales et qu'on m'a demandé de vous lire.
C'est très court, une page. Elle se lit comme suit: "Vu l'importance
économique des investissements publics et privés effectués
chaque année au Québec au titre de la construction; vu la vaste
expertise développée par les entreprises de construction et de
fabrication pour cette industrie au Québec et la compétence de la
main-d'oeuvre qui y trouve de l'emploi, qui permettent la réalisation
compétente et experte de tout type de travaux généraux ou
spécialisés à titre concurrentiel par des entreprises; vu
l'opportunité de maintenir l'existence au Québec de telles
compétences et de telles capacités et des nombreux emplois
afférents, et de préserver en conséquence les
marchés qui s'offrent à l'industrie québécoise de
la construction; vu l'érosion de ces marchés qu'a
entraînée et que risque d'aggraver l'exécution des travaux
de construction par des entreprises non engagées principalement dans
cette industrie, à la faveur d'exclusions ou d'exceptions
créées par des lois ou des règlements favorisant de telles
entreprises; les associations soussignées et leurs membres ici
représentés par leurs présidents respectifs prient
unanimement le gouvernement du Québec d'affirmer et d'appliquer une
politique générale voulant que le gouvernement lui-même et
ses ministères, les organismes para et péripublics et toute autre
instance agissant aux fins de servir le public, qu'ils soient provinciaux ou
municipaux et sans exception, soient tenus quant à tous travaux de
construction, de lancer des appels d'offres publics générateurs
de concurrence entre le plus grand nombre possible de soumissionnaires
qualifiés provenant de l'entreprise privée."
C'est signé par les six associations patronales, l'Association de
construction de Montréal et du Québec, l'Association des
constructeurs de routes et grands travaux du Québec, l'Association
provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, la
Corporation des maîtres électriciens, la Corporation des
maîtres mécaniciens en tuyauterie et la Fédération
de la construction du Québec, et, naturellement, l'AECQ endosse cette
position.
Alors, je vois passer à M. Fava pour le reste de l'exposé.
Je m'excuse si ma voix n'était pas trop claire, je suis encore au
dernier stade d'une grippe, malheureusement. (20 h 15)
Le Président (M. Charbonneau): Cela va.
Une voix: Gardez-la pour vous.
Le Président (M. Charbonneau): II y en a aussi qui en
terminent une et qui ne voudraient pas en attraper une autre. Allez-y, M.
Fava!
M. Fava (Franco): En fait, M. Daoust vous a parlé surtout
du champ d'application de la loi depuis un certain nombre d'années. Je
me souviens d'avoir discuté essentiellement des mêmes
problèmes en ce qui a trait au champ d'application de la loi au mois
d'août 1984 et, malheureusement, on attend toujours le projet de loi qui
devait remédier, à l'époque, à tous ces
problèmes. Effectivement, je pense que ce n'est pas nécessaire de
revenir sur le fait que les entrepreneurs en construction dans ce domaine ont
développé une expertise, que ce soit en matière de
transport d'énergie dans la construction de postes de transformation ou
dans l'entretien du réseau comme tel.
Il y a évidemment toute la question de la diminution constante
des travaux qui sont confiés par Hydro-Québec qui conduira,
d'après nous, inévitablement à l'élimination
complète de la capacité du secteur privé à assurer
l'entretien du réseau, puisque, effectivement, d'après nous, pour
pouvoir maintenir des services comme ceux qui ont été offerts
à Hydro-Québec dans le passé, cela prend
nécessairement un minimum de capital investi. On parlait, tout à
l'heure ou ce matin, d'une unité qui peut coûter jusqu'à
150 000 $, en plus des coûts rattachés à l'outillage. On a
suffisamment parlé aussi, je pense, de l'entente conclue le 29 juin 1984
entre Hydro-Québec et le syndicat, qui impose les restrictions qu'on
mentionnait cet après-midi encore en ce qui concerne l'effectif en
nombre d'heures-homme travaillées par année. On a parlé
aussi largement de la clause 34.03 et je me souviens d'une question qui a
été posée par un des députés, à
savoir que, si on éliminait cette clause, est-ce que, à ce
moment-là, cela ouvrirait les portes grandes et larges à
Hydro-Québec pour qu'elle réduise ses effectifs? La
réponse, évidemment, des représentants syndicaux
était que, si on éliminait cette clause, le syndicat s'exposait
à des mises à pied. Je pense qu'on oublie
trop souvent l'article 32 de la convention collective qui prévoit
justement qu'à partir du moment où un employé atteint 12
mots de permanence au sein d'Hydro-Québec, à ce moment, il a sa
garantie d'emploi. Quant à moi, l'élimination de l'article 34 ne
présuppose pas nécessairement qu'on ouvrirait ainsi le champ
à Hydro-Québec pour qu'elle procède à des mises
à pied.
À toutes fins utiles, l'entente comme telle signifie
carrément l'abandon par HydroQuébec du recours à la
sous-traitance pour l'entretien du réseau. Encore là, je reviens
sur des remarques que faisait le représentant du syndicat, qui nous
disait: Écoutez, à la suite du programme PAQS, on a étendu
le réseau, on a mis le réseau au point et, maintenant, il ne nous
reste que l'entretien. Donc, on sort de l'entretien du réseau les
entrepreneurs du secteur privé, ce qui explique le fait qu'on veuille
réduire, à toutes fins utiles, la sous-traitance parce que ce qui
reste, finalement, c'est de l'entretien et on veut le faire à l'interne.
Je pense qu'il y a des dangers à une politique semblable et un des
dangers au sujet duquel il faut être constamment vigilant, c'est
qu'à toutes fins utiles, on voit bien que le syndicat
d'Hydro-Québec tente de se constituer un monopole pour l'entretien du
réseau d'Hydro-Québec. On sait ce que cela veut dire. À
partir du moment où on donne un monopole absolu à un groupe
quelconque pour effectuer, à l'exclusion de tout autre groupe, un
certain nombre de travaux, vous savez aussi bien que moi ce que cela implique
en période de négociations et tout le reste.
Il y a aussi une autre chose à laquelle il faut songer. Si on
élimine la sous-traitance, tel qu'on semble vouloir le faire, à
ce moment-là, il faut tenir compte des pertes d'investissement, il faut
tenir compte de la perte de l'expertise que ces entrepreneurs ont pu
développer au cours des années, où ils ont oeuvré
à l'entretien du réseau. Il faut aussi penser au recyclage de la
main-d'oeuvre. Je pense que je n'aurai pas un long exposé à vous
faire pour vous dire que, dans le domaine la construction, à cause de
toutes sortes de contraintes qu'on a également en ce qui concerne
l'embauche, nous aussi, nous nous sommes retrouvés avec une
main-d'oeuvre vieillissante. Alors, c'est bien clair qu'à partir du
moment où on élimine la sous-traitance, on est pris avec le
problème du recyclage de toute cette main-d'oeuvre. À la
période des questions, il y a certains députés qui ont
soulevé justement, tout à l'heure, la problématique. Que
fait-on avec ces employés, ces travailleurs qui sont rendus à un
certain âge et qui ne sont peut-être pas aussi recyclables que
d'autres, si je puis utiliser cette expression?
Quant aux effets de la politique d'Hydro-Québec sur les
contribuables, je pense que les contribuables sont trop souvent
négligés là-dedans. On parle souvent
d'intérêts corporatistes, de syndicats, d'employeurs et ainsi de
suite. Il faut aussi tenir compte des conséquences d'une politique
semblable sur le public qui, finalement, endosse les coûts de ce service.
On peut parler des conséquences que cela peut avoir sur la
qualité ou le coût du service. On peut aussi parler, ce que je
mentionnais tout à l'heure, des conséquences que cela peut avoir
en ce qui concerne la sécurité du service par rapport au public,
quand on parle de concentrer l'entretien de tout ce réseau entre les
mains d'un groupe qui monopolise, à toutes fins utiles, tous ces
travaux.
On peut s'imaginer facilement la situation suivante: Que fera
Hydro-Québec au moment où on se retrouvera face à une
situation d'urgence qui requerra une main-d'oeuvre supplémentaire de
façon bien ponctuelle? On mentionnait l'exemple de la région de
Montréal dernièrement! Que fait-on à Hydro-Québec
lorsqu'on fait face à une situation semblable? On sait qu'on a
dépanné certains États de la Nouvelle-Angleterre lors de
problèmes assez sérieux qu'ils ont eus dans le réseau et
qu'on y a dépêché des équipes de
l'Hydro-Québec pour donner un coup de main. Qui viendra aider nos
équipes d'Hydro-Québec au moment où on aura
éliminé toute cette expertise qu'on a accumulée depuis un
certain nombre d'années avec les travaux qu'on a exécutés
pour Hydro-Québec?
Il y a aussi toute la question de la continuité du service et
toute la question de la disponibilité, de la rapidité
d'intervention, je pense qu'il faut en tenir compte. Quand le syndicat
mentionnait lors de la présentation de son mémoire, qu'il n'y
avait aucune étude au sein d'Hydro-Québec qui pouvait l'amener
à établir un écart de coût possible entre les
coûts que représentent la sous-traitance et les coûts que
cela représente à HydroQuébec, j'ai le plaisir de vous
informer que, d'après un document interne d'Hydro-Québec, on
reconnaît d'ores et déjà dans ce document qu'il y a un
écart de coût de 15 à 20 % supérieur pour les
travaux qui sont exécutés par Hydro-Québec. Si vous me le
permettez, je vous lirais un extrait de ce document. On dit ceci:
Hydro-Québec reconnaît, à cause de sa fonction de
distributeur, que toutes les comparaisons de coûts établies selon
les règles de l'art entre les coûts de la main-d'oeuvre interne et
de la main-d'oeuvre externe affectées à des travaux similaires
dans les domaines des lignes et des postes font apparaître un
écart entre 15 et 20 % par rapport aux entrepreneurs. Voyez la suite:
Hydro-Québec est prête à assumer cet écart pour
plusieurs raisons qui tiennent tant à la qualité du service
à la clientèle qu'à la philosophie de gestion qui explique
ce choix de gestion".
Quand le représentant des syndicats me
dit qu'il n'y a pas de document interne, qu'il n'y a pas d'étude
interne à Hydro-Québec qui puisse établir des
écarts de coûts, je regrette. Je pense qu'on a un exemple frappant
d'un document de régie interne d'Hydro dans lequel on semble dire que,
bon, on est prêt à assumer un écart de 20 % dans les
coûts d'entretien de ces réseaux. Encore là, je fais le
lien avec le public payeur à l'autre bout. Si on est prêt à
faire assumer 20% de plus au public en général pour le plaisir de
donner le monopole de ces travaux à un syndicat qui relève
d'Hydro-Québec, c'est un choix à faire, mais il faut le faire en
connaissance de cause et en sachant les conséquences. Je pense aussi
qu'au niveau de la productivité... Je sais que le mémoire de
l'ACRGTQ a fait grand état de cette situation. Je ne reviendrai pas
là-dessus. II est clair que la politique, sans vouloir mettre en marche
ou sans vouloir impliquer le syndicat là-dedans, vise graduellement
à éliminer la concurrence et du même coup,
évidemment, la compétitivité, ainsi qu'une baisse de
productivité concernant ces travaux-là. Je pense que la
réduction de la sous-traitance va carrément dans ce
sens-là et qu'il faut être très vigilant quand on sait ce
que cela peut impliquer comme coûts. On le dit et on le
répète souvent, Hydro-Québec doit se présenter ici
pour obtenir des augmentations de tarifs et il est bien évident
qu'à partir du moment où on laisse Hydro aller vers une politique
qui implique des coûts supérieurs de l'ordre de 20 % pour faire
exécuter des travaux à l'interne ou à l'externe, il est
bien évident qu'à partir de ce moment-là on peut arriver
ici et demander les augmentations de tarifs qu'on voudra, cela va de soi, l'un
entraîne l'autre. Si on permet à Hydro-Québec de ne pas
s'administrer de la façon la plus efficace possible et qu'on permet
à Hydro-Québec d'accepter de payer 20% de plus pour le plaisir de
faire exécuter ses propres travaux à l'interne, je pense que tout
à l'heure vous aurez à répondre là-dessus aussi en
ce qui concerne les augmentations de tarifs d'Hydro-Québec. Finalement,
c'est le public qui va payer.
Alors, si vous me permettez, il y a deux conclusions à notre
mémoire. Il est clair que, d'après nous, on devrait tout
simplement et carrément extraire la clause 34.03 de la convention
d'Hydro-Québec et amender la loi d'Hydro-Québec pour qu'il soit
clairement établi dans la loi qu'elle doit favoriser la sous-traitance
au maximum de ce qui est possible et faisable. Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Merci. M. le ministre.
M. Ciaccia: Merci, messieurs, de nous avoir transmis l'opinion de
votre association. Votre mémoire particulièrement
étoffé ouvre un large éventail de questions et de
perspectives possibles.
Dans un premier temps, vous nous avez fait une description du champ
d'application de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la
construction. Vous nous indiquez, en substance, qu'il est grand temps de
procéder à une revue complète du champ d'application de la
loi. Pour ce faire, vous proposez une nouvelle définition du mot
"construction" dans la loi afin d'en élargir la portée. De la
même façon, vous souhaitez que les exceptions prévues
à la loi soient éliminées ou restreintes. En ce qui
concerne la sous-traitance à Hydro-Québec, vous indiquez que le
contexte actuel nous amènerait à l'élimination de la
sous-traitance. Il y aurait des pertes pour les entrepreneurs et des mises
à pied. Vous en concluez donc qu'il faut retirer de la convention
collective des employés de métier d'Hydro-Québec l'article
34.03.
Votre exposé est aussi particulièrement intéressant
quant aux solutions qu'il propose, soit pour Hydro-Québec, soit pour le
gouvernement de façon plus large. Vous nous faites, part de
l'expérience américaine en matière de "faire-faire" et des
avantages qu'on pourrait retirer de l'application d'une politique analogue au
Québec. Je crois que mes collègues et moi-même serons
très intéressés à vous entendre donner des
précisions à ce sujet. Mais, avant, j'aimerais vous poser
quelques questions. D'abord, en rapport avec la première partie de votre
mémoire, pourriez-vous expliquer brièvement la portée des
modifications que vous proposez à la Loi sur les relations du travail
dans l'industrie de la construction? Quel serait l'impact sur une
société comme Hydro-Québec?
M. Daoust: En ce qui concerne HydroQuébec, ce serait que,
comme on vous le disait, nous, on n'a jamais accepté ou compris que les
travaux de construction qui sont effectués par Hydro-Québec
soient effectués hors décret. Les règles du jeu devraient
être les mêmes pour tous. D'ailleurs, cela a amené de
drôles de situations. J'ai effectué beaucoup de travaux à
la Baie James. On voyait la société d'énergie, qui est
quand même assez parallèle à Hydro-Québec, et on
voyait aussi les employés d'Hydro-Québec qui étaient
là, avec des conditions de travail, je peux vous l'assurer, que le
secteur privé n'a pas les moyens de se payer. Les voyages pour revenir
à Montréal ont été beaucoup plus fréquents
que ce que le décret de la construction prévoyait. Cela a
amené, naturellement, des conditions assez difficiles en ce qui concerne
les relations du travail avec le secteur privé. Notre position, non
seulement avec Hydro-Québec mais aussi avec les municipalités et
ainsi de suite, c'est
que tout ce qui est construction devrait être sous le
décret de la construction et effectué par des entrepreneurs.
C'est la seule façon de pouvoir garder une main-d'oeuvre
qualifiée et assurer une industrie saine. (20 h 30)
On a des structures, comme je le disais tantôt, qui sont
volumineuses, qui coûtent des fortunes. Je siège au conseil
d'administration de la construction du Québec. On a un budget de 34 000
000 $ ou 35 000 000 $ cette année. On va monter à 40 000 000 $ ou
45 000 000 $ d'ici è deux ans, avec la formation. Ce sont tous des
organismes qui sont fixes, qui sont permanents. II ne faut pas prendre des
mesures pour couper les heures dans la construction mais plutôt pour
augmenter le bassin de la main-d'oeuvre dans la construction.
M. Ciaccia: Concernant la sous-traitance à
Hydro-Québec, vous indiquez que la politique de sous-traitance
poursuivie entraînerait, je pense - vous le dites dans votre
mémoire - environ 2000 mises à pied. Pourriez-vous expliquer
comment vous êtes arrivés à ce constat?
M. Daoust: Je pense qu'on se basait, si je me rappelle bien, sur
le fait qu'en réduisant la sous-traitance, premièrement, à
un niveau de 500, on parlait tout de suite de 500 emplois à donner.
Ensuite, nous, on est persuadés que c'est la première
étape parce qu'aux prochaines négociations..,, Je pense que vous
avez tous été impliqués à un moment donné
dans des négociations à un niveau ou à un autre. C'est
rare que le patronat reprend quelque chose. Ordinairement, il donne quelque
chose, il concède quelque chose. Une fois qu'Hydro a commencé
à concéder au niveau de la sous-traitance, au volume de la
sous-traitance, éventuellement, je pense que l'objet, à
l'intérieur du syndicat, c'est d'éliminer la sous-traitance au
complet. Alors, à ce moment-là, la coupure ne serait pas de 500,
mais de 1000; ensuite, il y a toutes les fonctions connexes aux travaux de
construction dans les autres industries, comme le camionnage, etc. On donne un
paquet: le génie civil, le bâtiment, le transport, les finances.
Il y a toutes sortes d'industries connexes à la construction qui sont
touchées par à peu près autant d'emplois que ceux qui sont
éliminés.
M. Ciaccia: Vous indiquez dans votre mémoire, et je crois
que c'est là un de vos griefs principaux, qu'Hydro-Québec vous a
incités, lors du démarrage du programme PAQS, à
acquérir de nouveaux équipements en vue de remplir les contrats
découlant du programme. J'aimerais que vous nous précisiez plus
clairement comment se sont faites ces communications. Est-ce qu'il y a eu
incompréhension entre Hydro-Québec et vous? Est-ce que ce
n'était pas clair que le programme PAQS était un programme de
nature temporaire?
M. Daoust: Ce que j'ai cru comprendre à ce
moment-là, lors des réunions, c'est que, pour pouvoir remplir la
fonction du programme adéquatement, il était nécessaire
d'acheter, d'obtenir un nouvel équipement. L'idée, ce
n'était pas de se servir de cet équipement durant une
période de trois ou quatre ans, parce qu'à ce moment-là il
n'était pas question de couper la sous-traitance après la fin du
programme» L'idée, c'était de s'équiper pour le
programme et, naturellement, l'équipement aurait été
disponible après.
M. Ciaccia: Vous avez dit quelque chose. Vous avez dit
qu'à ce moment-là il n'était pas question que le programme
soit coupé après. Autrement dit, est-ce que vous nous dites que
vous aviez 720, que le seuil d'emploi de la sous-traitance était de 720?
Quand le programme a été mis en vigueur, est-ce que vous saviez
que c'était pour être réduit à 500?
M. Daoust: Pas à ma connaissance. Non. Il y avait
peut-être eu certaines discussions, mais, à ma connaissance, il
n'y avait pas eu d'élaboration dans ce sens-là.
M. Ciaccia: Merci.
Le Président (M. Charbonneau): M, le député
de Roberval.
M. Gauthier: Oui, merci, M. le Président. Je vous remercie
d'avoir déposé votre mémoire et d'avoir accepté de
répondre à nos questions. Un certain nombre de choses me
préoccupent cependant, et la première de ces questions est la
suivante: Vous semblez vous soucier beaucoup - et nous partageons ce souci,
d'ailleurs - des travailleurs de la construction, de ceux qui travaillent pour
les entrepreneurs et qui sont mis à pied ou qui se cherchent du travail.
Mais un peu plus loin dans votre mémoire, quand on lit, quand on vous
écoute, vous proposez, à toutes fins utiles, de confier toute la
construction à des entreprises de construction, de confier la
moitié de l'entretien à peu près - en tout cas, j'ai vu
des pourcentages qui s'établissent à 50 % -aux sous-traitants.
Les employés qui sont actuellement à Hydro-Québec, eux, on
parle de 2000 qui risquent d'être condamnés au chômage et au
bien-être social, pour employer vos termes. Mais, si je suis votre
logique et qu'on vous suit dans ce que vous demandez, les personnes qui
travaillent actuellement comme monteurs de lignes,
comme ouvriers, à Hydro-Québec, elles vont faire quoi,
sinon être condamnées au chômage et à l'aide sociale?
Est-ce que vous n'avez pas l'impression que c'est un peu trop à l'autre
bout de la balance, votre position? Je veux bien croire qu'on se soucie des
uns, mais je pense que la commission parlementaire doit se soucier des uns et
des autres. J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Daoust: J'essaie de comprendre vos 2000 travailleurs.
M. Gauthier: Oui, bien, je vais vous l'expliquer plus clairement.
D'une part, vous dites: Si on élimine la sous-traitance à
Hydro-Québec, il y a 2000 travailleurs qui vont perdre leur emploi et
qui vont être au chômage ou à l'aide sociale. C'est
écrit dans le mémoire. Vous dites, évidemment, qu'il ne
faut pas qu'il en soit ainsi, qu'il faut préserver cette main-d'oeuvre,
qu'il faut permettre à ces gens d'un certain âge de travailler. On
est d'accord avec cela. Mais là où je ne vous suis pas, c'est
que, si on pousse votre raisonnement à la limite, vous réclamez
toute la construction et la moitié de l'entretien; il y a quelques
milliers de travailleurs à Hydro-Québec aussi qui gagnent leur
vie avec cela. Vous ne semblez pas avoir la même préoccupation
pour ces gens-là.
M. Fava: Si vous me permettez, je vais répondre à
la question. Je pense que si vous regardez bien dans notre mémoire les
conclusions, ce qu'on propose, ce n'est pas l'application du jour au lendemain
d'une politique semblable. Je pense qu'il faut être très
réaliste. Si vous lisez notre recommandation 3 dans notre
mémoire, on préconise que cette politique soit implantée
progressivement à raison de 5 % par année, de sorte que cela
puisse permettre l'ajustement du flot de main-d'oeuvre qui peut se faire ou le
déplacement de la main-d'oeuvre qui peut se faire d'Hydro-Québec
vers la construction. C'est un peu le même souci que vous aviez tout
à l'heure quand vous posiez la question au syndicat d'Hydro: Pourquoi ne
vous entendez-vous pas avec vos confrères de la FTQ pour les engager,
ces travailleurs qui seraient mis en disponibilité? Je pense qu'il faut
regarder un programme comme celui-là échelonné sur une
certaine période de temps, de sorte qu'une politique semblable soit
appliquée sur une certaine période de temps et que ces frictions
soient quand même réduites au minimum.
M. Dion: M. le Président, si vous me le permettez, il y
aurait une précision à apporter. Je pense que nulle part dans
notre mémoire il n'a été mentionné, à ma
connaissance, que le fait que l'industrie de la construction veuille conserver
ta sous- traitance provoquerait 2000 pertes de jobs à
Hydro-Québec. Nulle part il n'est mentionné cela. Nous, on dit
qu'il se perdrait 2000 jobs dans l'industrie de la construction si les contrats
étaient transférés à Hydro. Cela est une partie de
la question, mais je pense qu'il faut aussi se préoccuper - et c'est
aussi le devoir du gouvernement de s'en préoccuper -des travailleurs qui
perdraient leur job, dans le sens qu'ils seraient obligés d'aller
travailler ailleurs. Il pourraient partir de l'industrie pour aller travailler
à Hydro. Mais il faut aussi que vous compreniez qu'il y a des
entrepreneurs, qu'il y a des employeurs dans l'industrie de la construction qui
sont des "metteurs" de fonds, qui investissent de l'argent dans l'industrie de
la construction pour faire travailler du monde. En forçant cette
main-d'oeuvre à aller travailler pour Hydro, parce qu'on ne donnera plus
de sous-traitance, on prive quand même des individus qui ont des
entreprises de construction de gagner leur vie tout simplement en faisant un
transfert de main-d'oeuvre de l'entreprise privée vers l'entreprise
publique. Dans le fond, c'est cela le problème. On ne prétend pas
qu'il y a des gens qui vont se retrouver au chômage. Il y a 2000
personnes qui vont être recyclées à Hydro. Mais il y a x
entrepreneurs en construction qui, eux, n'auront plus de travail dans
l'industrie. Ils vont être obligés de se recycler eux aussi.
M. Gauthier: D'accord, M. le Président, je pense
qu'on se comprend à se parler, sauf que j'avais lu le texte
intégral et on parlait de 2000 travailleurs au bien-être social ou
au chômage.
M. Dion: ...qui allait changer.
M. Gauthier: Une autre question qui me préoccupe tous les
gens qui sont passés ici, et les parlementaires également, ce
matin, ont exprimé leurs points de vue - c'est que tout le monde
recherche une solution qui se situe à peu près dans le juste
milieu. D'une part, on veut bien préserver aux employés d'Hydro -
et c'est leur droit - leurs emplois, conserver à Hydro un certain nombre
d'emplois pour ces personnes-là, mais on veut aussi sauver les emplois
qui sont actuellement menacés, sauf que cette opération, tout le
monde la veut plus ou moins. Le syndicat des employés d'Hydro, que je
sache, à moins que je n'aie bien mal compris son intervention, n'a pas
exigé la totalité des travaux, peut-être dans la
perspective d'une autre négociation de convention collective. Je pense
que monsieur tout à l'heure l'a expliqué. On pourrait penser
cela, mais, de fait, il n'a pas réclamé à ce stade-ci
autant de choses et, d'autre part, il y a eu des représentants patronaux
qui sont venus ce matin et qui ont déposé un mémoire
extrêmement intéressant, qui va beaucoup
faire réfléchir la commission, et qui réclament une
part des travaux d'Hydro, une juste part. Le problème qui se pose et la
question qu'on essaie de poser à tout le monde, c'est: Quelle est cette
juste part? Ce que je comprends de votre mémoire -corrigez-moi si je me
trompe - c'est qu'il y a, au-delà de cela, une intention manifeste
d'accaparer d'abord la totalité du champ de la construction et au moins
la moitié du champ de l'entretien. Or, cette position va un peu plus
loin que ce qu!on a vu jusqu'à maintenant, mais tout le monde a
été unanime à reconnaître qu'Hydro devait garder en
son sein des équipes qui ont une expertise. D'ailleurs, avant de souper,
les ingénieurs nous ont démontré - en tout cas, en ce qui
me concerne, sans l'ombre d'un doute - qu'il fallait conserver à Hydro
une expertise technique. Les travailleurs nous ont démontré qu'il
fallait conserver à Hydro une expertise d'entretien et même les
patrons qui sont passés ce matin ont démontré et
accepté l'idée qu'Hydro conserve un minimum de "staff"
d'entretien et une équipe viable qui puisse pallier les problèmes
qui se posent. Comment réagissez-vous à cette demande? J'ai
l'impression que vous ne voyez pas cette expertise nécessaire à
Hydro puisque le rôle que vous voyez pour Hydro est un rôle
d'encadrement, de gérance et de contrôle des travaux faits par les
entrepreneurs.
M. Daoust: J'ai avancé l'idée que les travaux de la
construction devraient demeurer à l'intérieur du champ
d'application de la construction, indépendamment de qui les fait. Si,
pour garder une expertise - et je comprends très bien le point qui a
été mentionné par tout le monde - Hydro-Québec doit
continuer à exécuter une certaine partie des travaux, mais que
cette partie-là constitue des travaux de construction assujettis au
décret de la construction, avec les mêmes conditions de travail,
les mêmes conditions salariales, etc., plutôt qu'être exempte
de la construction, comme elle l'est actuellement... C'est une entrée,
une porte ouverte et on s'aperçoit actuellement que d'autres organismes,
dans le passé - et cela continue de s'aggraver - se sont servis de cela
comme exemple et ont essayé de justifier que c'était tout aussi
nécessaire pour eux que pour Hydro-Québec d'être exempts de
la construction. C'est cela notre problème.
M. Fava: Si vous le permettez...
M. Gauthier: Je m'excuse, je voudrais poser une sous-question. Je
veux bien comprendre ce que vous avez indiqué à la page 53: "On
peut comprendre qu'Hydro-Québec se garde la responsabilité de
l'entretien du réseau et se dote, à cet effet, d'équipes
et d'outillages en conséquence. Pour assurer une telle
responsabilité - celle de l'entretien - cependant, Hydro-Québec
n'a pas à assurer la totalité des activités d'entretien
mais seulement la gérance et le contrôle, quitte à disposer
de ressources d'appoint pour les crises..."
Si je comprends bien, votre position, c'ests la construction dans un
bloc aux entrepreneurs et l'entretien aux entrepreneurs, avec Hydro qui se
charge de la gérance, de l'encadrement et du contrôle. Est-ce bien
cela?
M. Daoust: Vous devez comprendre qu'il y a certainement... Je
suis sûr qu'il y a une formule de compromis quelque part. Le document que
vous regardez est basé sur un document qu'on avait commandé de
l'institut national d'administration publique. Il a été
basé sur un document rédigé à la demande du
gouvernement pour voir ce que pouvait donner la privatisation dans
différents domaines. C'étaient peut-être des objectifs
théoriques, rêveurs, à ce moment-là, de l'institut
national d'administration. On s'est bien gardé de dire que
c'étaient des documents sur lesquels notre mémoire était
basé, que ce n'était pas effectivement notre mémoire comme
tel. C'est un document qui provenait de l'institut national d'administration
publique, comme je vous l'ai dit, qui partait peut-être en disant: Si on
avait à recommencer à zéro, comment cela devrait-il
être? Mais, dans la pratique, il est bien évident qu'il faut une
formule de compromis quelque part.
M. Fava: Je pense qu'en réponse à votre question,
vous vous référez à la page 53, mais, si vous vous
référez à la page 82 du même document, vous allez
trouver la réponse à cette question. On y dit: "D'autre part, le
gouvernement prétend qu'il poursuit une politique de privatisation des
services non essentiels de l'administration publique, alors
qu'Hydro-Québec, pour sa part, retire progressivement l'entretien du
réseau de ses activités imparties. Dans ces conditions, il
semblerait normal que le gouvernement oblige Hydro-Québec à
impartir systématiquement ses tâches d'entretien du réseau
(dans une proportion minimale de 50 %) étant bien entendu qu'il est tout
à fait admissible qu'elle conserve une capacité de production
dans ce domaine en vue de perpétuer son expertise à gérer
cette politique managérielle, à garantir la
sécurité du service et à faire face à
l'imprévisible." (20 h 45)
Alors, dans ce contexte, nous, on dit: C'est tout à fait normal,
pour qu'Hydro-Québec ne soit pas placée dans une situation
où elle perd cette expertise après l'avoir totalement
confiée à l'entreprise privée, il est normal qu'elle se
garde une partie des
travaux pour assurer la continuité de ce "know-how" et qu'elle ne
se retrouve pas, demain matin, à la merci totale de l'entreprise
privée, comme on ne veut pas qu'Hydro se retrouve à la merci
totale du syndicat, qui veut monopoliser ces travaux. Alors, je pense que c'est
une norme qu'on peut impartir au maximum tout en gardant à
Hydro-Québec cette expertise qu'on prétend qu'elle pourra
conserver facilement et aisément en se gardant Une proportion d'à
peu près 50 % de ces travaux.
M. Gauthier: Oui. Est-ce que, en termes de chiffres... Ce matin,
on a situé le débat à peu près comme ceci: on a
parlé d'une hypothèse de 1000 hommes-années; les
constructeurs s'étaient tenus, semble-t-il, aux environs de 800 ou 900
hommes-années dans des sous-contrats pour Hydro. Les clauses
prévoient une baisse de ce nombre-là à 500; du moins,
c'est la position syndicale qui a négocié cette clause. Alors, on
avait l'impression de travailler entre 500 et 1000, 1000 étant ce qui
est souhaitable pour les entreprises et les travailleurs qui cherchent de
l'emploi actuellement dans ce domaine, et 500 étant une position,
semble-t-il, acceptable pour le syndicat puisque cela a été
négocié et signé. Un nombre aux environs de 720 personnes,
c'est une situation qui a existé pendant de nombreuses années et
qui avait satisfait plus ou moins l'une des parties. Est-ce que votre position
par rapport à 500, 720 et 1000 hommes-années est quantifiable
chez vous? Est-ce 1000, 2000 ou 1500?
M. Fava: Je pense qu'à partir du moment où on veut
cerner le problème avec des chiffres de 500, 1000 ou 2000, c'est
complètement fausser le débat. Ce qu'on essaie d'identifier,
c'est une tendance vers laquelle on devrait aller tout en posant la question
suivante: Â quel degré faut-il arrêter pour préserver
cette expertise à Hydro-Québec? Si on juge que 30 % ou 40 %,
c'est suffisant pour préserver cette expertise à
Hydro-Québec, tout en ne la mettant pas uniquement à la merci de
l'entreprise privée, en assurant la continuité et en
s1 assurant qu'en période de catastrophe ou de crise il y ait
quand même des ressources auxquelles on pourrait faire appel pour
l'entretien du réseau, je pense que c'est là la vraie question.
C'est sûr que tout cela est une question de degré. Moi, de
l'entreprise privée, je vous dirai que 30 %, c'est suffisant pour
qu'Hydro-Québec conserve son expertise dans ce domaine. Hydro vous dira
que cela lui prend la totalité de l'entretien du réseau.
D'après nous, il faudra que cela se situe entre 30 % et 50 %, qui serait
le maximum qu'on devrait préserver à Hydro, à ce
niveau.
M. Gauthier: Une dernière question. Je comprends le
dégagement que vous manifestez à l'endroit de cette question en
disant que c'est fausser le débat, sauf que cela fait des années
que ça marche. C'est un débat tout de travers dans ce
cas-là puisqu'on parle de 500, 720 et 1000 et quelque chose entre cela,
mais, sur le plan théorique, je suis d'accord avec vous qu'on pourrait
parler théoriquement de 30 %, 35 % ou 40 %, s'asseoir avec Hydro et
essayer de chiffrer cela. C'est bien gentil tout cela, mais notre
préoccupation est aussi sociale. Ce n'est pas qu'une
préoccupation économique, froidement et bêtement, c'est une
préoccupation sociale qu'on a. Il y a, d'un côté, un bloc
d'employés a Hydro, pour notre part, à qui il n'est pas question
de faire perdre du travail; là, on se comprend. Il y a, de l'autre
côté, un autre bloc de personnes qui elles-mêmes - ce n'est
pas nous qui avons inventé cela - quantifient le travail à faire
pour préserver des emplois dans ce secteur par des chiffres qui se
situent entre 500 et 1000, et il semble qu'aux alentours de 750 à 800
tout le monde est heureux. Ce ne sont pas des chiffres que j'ai
inventés, on nous les a donnés aujourd'hui. Alors, vous
m'excuserez de les ramener. Puisque le débat s'est enclenché
là-dessus, tout en comprenant qu'économiquement on pourrait
regarder cela bien différemment, avec une perspective un peu sociale et
en pensant au monde qui est derrière ces chiffres, votre position et le
"faire-faire" poussé à 100 % pour la construction et à 50
% pour l'entretien, qu'est-ce que cela représenterait comme chiffres?
J'aimerais avoir un ordre de grandeur par rapport aux ordres de grandeur que
les autres nous ont donnés.
M. Fava: En fait, ce que nous avons proposé dans notre
document, c'est que toute politique qui sera décidée par rapport
à cette sous-traitance, on devra la mettre en application de
façon échelonnée à raison de 5 % par année
pour justement répondre au problème de déplacement de la
main-d'oeuvre. Comme vous le dites, tout en préservant les emplois
actuels à HydroQuébec concernant l'entretien du réseau, si
on décide, à partir du moment où ces emplois sont
garantis, qu'on doit aller vers une politique d'impartition, nous disons,
à ce moment-là, qu'en y allant à raison de 5 % par
annnée, on est en mesure de le faire sans le moindre heurt pour un bloc
de travailleurs ou l'autre. Que ce soit Hydro-Québec ou l'entreprise
privée, on est en mesure d'absorber 5 % par année sans que cela
ne crée de déplacements qui fassent mal aux travailleurs à
la base. Je dois m'arrêter là parce que cette question de
chiffres, entre 500, 1000 ou 720, comme vous le disiez tout à l'heure,
il y a de quoi
se perdre là-dedans. Pourquoi parle-t-on de 700 ou de 500? Tout
simplement parce qu'on s'y réfère dans une entente signée
entre Hydro-Québec . et le syndicat. C'est un chiffre
complètement arbitraire selon moi qui est sorti d'un chapeau comme cela.
On a convenu de 500 et personne n'a pu expliquer devant cette commission
d'où venait ce chiffre de 500. C'est strictement un point de
référence qu'on a trouvé à un moment donné
et tous semblent partir les discussions à partir de ce chiffre.
M. Gauthier: Je vous remercie.
M. Daoust: Si vous me le permettez, M. le
député...
M. Gauthier: Oui.
M. Daoust: ...j'entendais dire ce matin que 720, si je rappelle
bien le chiffre exact, c'est ce qui existait précédemment, mais
que l'ouvrage ne se faisait pas adéquatement. On nous a dit aussi que le
réseau n'était pas maintenu de la bonne façon. Alors,
comment peut-on arriver aujourd'hui avec des chiffres basés sur quelque
chose qui n'était pas adéquat? Qu'on commence par établir
la quantité nécessaire pour avoir un système qui marche
et, après cela, on établira les chiffres dont on a besoin pour
faire marcher le système. C'est pour cela qu'on s'en tient à des
principes, à des pourcentages pour le moment.
M. Gauthier: M. le Président, il faut faire attention
à l'argumentation. On nous a dit très justement que 720
hommes-années réservés à l'entreprise privée
dans l'entretien du réseau n'étaient pas suffisants. Il faut
l'augmenter si on veut garder le réseau bien entretenu. La question est
de savoir à quelle place on l'augmente. Est-ce qu'on l'augmente chez les
syndiqués d'Hydro-Québec ou si on l'augmente en permettant aux
entrepreneurs de faire travailler davantage leur monde? C'est la question.
C'est pour cela qu'il faut faire attention. Comme vous le dites, quand on
manipule tous ces chiffres, on finit par s'y perdre. On va faire attention pour
garder les idées claires. Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Merci. Alors, M. le
député de Mégantic... Je m'excuse, Mme la
députée de Mégantic.
Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Vous nous
dites dans votre mémoire que l'entretien du réseau coûte
plus cher à Hydro-Québec parce qu'il se fait à l'interne.
Vous avancez même que le coût additionnel serait de l'ordre de 100
000 000 $ par année. Pourriez-vous nous expliquer d'une façon
plus détaillée sur quelle approche vous basez cette
conclusion?
M. Fava: En fait, ce n'est pas moi qui le dis. L'affirmation
selon laquelle cela coûte 20 % de plus lorsque les travaux sont
exécutés par Hydro-Québec, c'est Hydro-Québec
elle-même qui le dit dans un document interne qu'elle a
préparé et qui est une étude comparative des coûts
par rapport à ce qu'elle peut obtenir en sous-traitance., À la
question qu'on a posée tout à l'heure, il s'agit de savoir, si on
décide d'augmenter, si on va dans la direction où cela nous
coûte 20 % de moins ou si on augmente dans la direction où cela
nous coûte 20 % de plus. Essentiellement, je pense que la décision
qu'on a à prendre porte là-dessus. Le chiffre que vous avez
mentionné tout à l'heure, je pense que vous allez le retrouver
dans le mémoire de l'ACRGTQ où on parle d'un maximum de 100 000
000 $ et d'un minimum de 30 000 000 $ environ, si ma mémoire est bonne.
Mais il est clair que, dans le document soumis par l'ACRGTQ, on situait le
problème à l'intérieur de ces deux chiffres»
Maintenant, vous allez me dire qu'entre 30 000 000 $ et 100 000 000 $, il y a
quand même un écart important, sauf que ce qu'on a pris, c'est la
meilleure des hypothèses: on l'a comparée à la pire des
hypothèses et on s'est dit que c'était quelque part entre ces
deux chiffres. C'est sûrement au minimum environ 30 000 000 $ et au
maximum 100 000 000 $.
Mme Bélanger: J'aimerais que vous me précisiez
davantage comment vous en êtes arrivés à ces chiffres.
M. Fava: Bon. Si je peux vous référer au
mémoire - est-ce le mémoire de l'ACRGTQ - au document qui est
notre mémoire, à l'annexe G. C'est ce document-là, en
fait.
Une voix: Je ne l'ai pas.
M. Fava: C'est l'avant-dernière page, le document de
référence. À l'annexe G de notre mémoire, au
paragraphe 5, on parle des coûts supplémentaires résultant
des 1000 employés supplémentaires. On parle des salaires annuels
qui nous amènent à un écart de... On parle de 1000
travailleurs à 30 000 $ par année, donc de 30 000 000 $ par
année. On parle d'avantages sociaux de 9 000 000 $, de frais
d'administration de 39 000 000 $ à 10 %, ce qui nous donne un autre 3
900 000 $, donc 42 900 000 $. Si on ajoute là-dessus le coût des
équipements et des outillages pour un autre 42 900 000 $ et celui des
contingences de 15 %, pour un autre 12 900 000 $, cela nous mène
à un coût de 98 700 000 $. D'après nous, ce sont les
coûts d'Hydro-Québec par rapport aux coûts des entrepreneurs
pour l'entretien du réseau. On a alors évidemment un chiffre de
98 000 000 $, qui est la pire hypothèse, et
on vous dit que dans les meilleures circonstances, on pourrait limiter
les dégâts à 30 000 000 $ et quelque. La
vérité est sûrement quelque part entre ces deux
chiffres.
Mme Bélanger: Mais quand vous parlez de 20 % de plus,
quand c'est fait à l'interne, sur quelle opération est-ce
basé? Est-ce sur la construction ou sur l'entretien?
M. Fava: Je vais vous lire le document d'Hydro-Québec,
puisque c'est un document d'Hydro-Québec. On dit ici:
Hydro-Québec reconnaît, à cause de sa fonction de
distributeur, que toutes les comparaisons de coûts établies selon
les règles de l'art entre les coûts de la main-d'oeuvre interne et
externe et effectuées à des travaux similaires dans le domaine
des lignes et des postes font apparaître un écart entre 15 et 20 %
par rapport aux entrepreneurs. HydroQuébec est prête à
assumer cet écart. Plusieurs raisons qui tiennent compte tant de la
qualité du service, du service à la clientèle que de sa
philosophie de gestion expliquent ce choix.
En fait, c'est tout simplement un choix qu'Hydro-Québec fait.
Elle dit: On reconnaît qu'en exécutant les travaux
nous-mêmes, cela nous coûte 20 % de plus. Mais pour des raisons
philosophiques - et encore là ce n'est pas moi qui le dis, c'est
Hydro-Québec - on est prêt à payer ces 20 % de plus pour
exécuter nos travaux à l'interne.
Je pense que c'est une question que vous devriez poser aux
représentants d'Hydro-Québec: D'où vient ce chiffre? Nous,
on l'a retracé dans un document interne d'Hydro-Québec.
Malheureusement, je ne peux pas vous l'expliquer davantage, parce qu'on nous
dit qu'il y a eu des études de faites pour comparer les coûts,
selon toutes les règles de l'art reconnues en matière de
comparaison de coûts, et on arrive à un écart de 20 %.
Mme Bélanger: Alors, vous voulez dire que sur un contrat
de 500 000 000 $, il y a 20 % qui est...
M. Fava: Si je me fie au document d'Hydro-Québec, oui.
D'après nous, c'est probablement supérieur à ce
chiffre.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va, Mme la
députée?
Mme Bélanger: ...et encore.
M. Daoust: Si vous me le permettez, nous, on n'a pas de
façon de vérifier les 15 à 20 %. Alors, si quelqu'un
à l'interne admet candidement comme cela que c'est 15 ou 20 %, on a de
bonnes raisons de se douter que cela doit être beaucoup plus
substantiel.
On peut vous donner un exemple qui est très frappant. Un
entrepreneur fait des travaux sur une base horaire. S'il travaille deux heures,
il est payé deux heures. Tandis qu'Hydro-Québec paie son homme
huit heures. Cela saute aux yeux tout de suite. On peut certainement vous
donner un paquet d'autres exemples comme cela.
M. Fava: Peut-être que les 20 % représentent
uniquement les raisons philosophiques.
Mme Bélanger: D'accord. Vous mentionnez que l'entente du
29 juin 1984 sur le programme d'amélioration de la qualité du
service a pour effet de réduire progressivement le recours à la
sous-traitance, soit de 1000 à 500. Cet article a été
inclus dans la convention collective du Syndicat des employés de
métiers d'Hydro-Québec. De plus, vous soulignez que l'article
34.03 vient limiter encore davantage le recours à la sous-traitance.
Pourriez-vous nous préciser en quoi le contenu de cet article a
affecté ou affectera les pratiques et les usages
précédents d'Hydro-Québec? (21 heures)
M. Daoust: Voici. J'entendais le représentant des
constructeurs de routes expliquer ce matin que, maintenant, il y a non
seulement une quantité maximum d'heures-hommes par année, mais
qu'avant de pouvoir donner un sous-contrat, il faut maintenant faire
l'épuration des employés d'Hydro-Québec, voir s'ils sont
disponibles ou non dans la région et dans la sous-région. On nous
expliquait aussi que cela cause des délais énormes. Cela peut
prendre une journée, deux jours, trois jours. J'ai vécu une panne
d'électricité dans ma région, durant l'été,
comme tout le monde, qui a duré trois jours et je trouvais cela
incroyable que des employés d'Hydro-Québec travaillent huit
heures et s'en aillent chez eux. Je peux vous assurer que, s'il y avait eu un
entrepreneur privé là, cela n'aurait pas été un
poste de huit heures, cela aurait été un poste de douze heures,
ou deux postes de huit heures et même trois postes de huit heures. Quand
cela fait deux, trois ou quatre jours qu'on n'a pas
d'électricité, qu'on demeure dans un secteur où il n'y a
pas d'aqueduc et donc, pour avoir de l'eau, que cela prend une pompe, de
l'électricité, je pense que c'est critique. Il ne faut pas se
limiter à huit heures par jour et s'en aller chez soi. Je comprends
très bien que les travailleurs d'Hydro-Québec étaient
fatigués. Je sympathise, je ne veux pas insinuer que ce sont des
paresseux, rien de cela, mais ce que je dis, c'est que avec la sous-traitance,
il y aurait eu l'option certainement de travailler deux ou trois postes, chose
qui n'existait pas.
M. Fava: II faut dire aussi que l'article
34 nous dit qu'on a le droit de se rendre jusqu'à un maximum de
500 heures, mais c'est uniquement en cas d'urgence qu'on va puiser dans cette
banque de 500 heures-là. Il est clair que cela va être 500 heures
et moins, d'après nous, et uniquement dans les cas d'urgence. Alors,
maintenir des équipes en place uniquement pour les cas d'urgence
d'Hydro-Québec quand on a des immobilisations à assumer comme
celles qu'on vous a mentionnées au courant de toute la journée,
c'est très aléatoire merci. Je pense qu'il n'y a pas beaucoup
d'entreprises qui peuvent rentabiliser leurs équipes en les maintenant
au bon vouloir d'Hydro-Québec uniquement pour satisfaire à ses
cas d'urgence et dans la mesure où on veut bien faire appel à
nous. Il est là, le problème.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va? Alors, M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: M. le Président, j'écoute cela...
J'ai eu la chance de lire les mémoires et je vous avoue que ce n'est pas
de nature a se rapprocher. Je faisais quasiment une crise au syndicat
d'Hydro-Québec parce qu'il ne donnait pas de chance et là, vous
êtes en train de lui enlever ce qu'il a. J'avoue qu'on passe d'un
extrême à un autre. Le champ d'application de l'industrie de la
construction, si vous leur enlever cela, que je sache, c'est à peu
près - vous me corrigerez - entre 25 % et 30 % de la construction qui
est occupée par des gars d'Hydro-Québec comme tels. Et nous
autres, on leur demande de nous en donner, dans notre réaction à
ce problème qui est sur la table. Je ne pense pas que la solution soit
dans l'exclusivité des champs parce que, autant vous pourriez
réclamer l'exclusivité du champ d'application du décret de
la construction, autant eux vont réclamer le respect de la convention
collective signée. C'est à Hydro-Québec à
s'expliquer bientôt, elle va témoigner demain. Moi, c'est
drôle, je vois la situation... C'est une solution mitoyenne entre vos
aspirations et vos désirs, puis les aspirations du syndicat
d'Hydro-Québec. La question fondamentale qu'on doit se poser, ce n'est
pas sur le plan légal. Si on veut trouver une situation au point de vue
légal, on n'a pas à se réunir ici parce qu'on a seulement
à respecter les contrats signés. C'est comme ça que je le
vois. Si c'était une situation légale, on n'en parlerait pas.
C'est une situation de gros bon sens et d'équité, c'est une
question humaine que je vois dans ce problème-là. Y a-t-il une
place dans les deux secteurs pour satisfaire la sécurité d'emploi
de l'ensemble de ces travailleurs? Si vous commencez à finasser -et ce
n'est pas cela que vous faites là - si on commence à finasser
tout le monde, pensez-vous qu'on va trouver une solution?
Pour entrer "moppologiste" à Hydro-Québec, cela prend un
secondaire V. Il n'y a pas un "maudit" monteur de lignes chez vous qui va
pouvoir entrer. Donc, les critères de sélection, on sait comment
ils sont faits. Pour entrer dans un hôpital comme "moppologiste", cela
prend un secondaire V maintenant. Vous essaierez de placer un gars de 48 ans
dans un hôpital pour essayer de récupérer, vous ne serez
pas capable. Donc, il y a une question humaine, concrète, qui se
pose.
Je ne suis pas sûr, moi, qu'il y a des gars d'Hydro-Québec
qui pourraient entrer chez vous dans le secteur de la construction avec la loi
119 et puis vos nouveaux codes sur le nombre d'heures. Est-ce que vous
reconnaissez les heures faites ailleurs. Non, vous ne les reconnaissez pas en
industrie, vous ne les reconnaissez pas en usine. Vous ne les reconnaissez pas,
vous le savez. J'ai essayé de plaider cela devant vous autres, la loi
119, et vous étiez pour. Ne venez pas me dire que la loi 119
règle le problème des gars d'Hydro-Québec qui entreraient
chez vous. Arrêtons d'argumenter sur ce terrain-là. Pas un secteur
ne peut répondre à l'autre. Moi, la question fondamentale que je
vous pose, c'est: Y a-t-il moyen, sans vouloir accroître les champs
d'action délibérément de part et d'autre, de sauver les
emplois de tous ceux qui travaillent présentement à
Hydro-Québec et de sauver les emplois de ceux qui travaillent chez les
sous-traitants? C'est ça, la situation. Moi, je pense qu'on n'aurait pas
à élaborer longuement et à finasser sur les
méthodes, c'est 5 % par année. Je vous voyais aller à 5 %
par année. Selon quels critères allez-vous entrer chez-vous?
Supposons que vous récupérez 50 % de la maintenance, comme vous
le disiez tantôt, à raison de 5 %, qui va aller chez-vous? Ce
n'est pas vous autres qui allez négocier les critères de la
sortie d'Hydro. Supposons qu'on s'en aille vers une formule semblable, ce
serait au syndicat d'Hydro à négocier sa sortie. Allez-vous
prendre un syndicat qui va négocier sa sortie, alors qu'il veut
l'élargir? Cela n'a pas d'allure. On n'arrivera à rien.
Moi, il me semble que l'ensemble de ceux qui oeuvrent dans ces
secteurs-là... C'est un commentaire, ce n'est pas une question. Je
m'excuse, mais c'est un commentaire qui me vient à l'idée, parce
que j'ai lu les mémoires: Est-ce qu'il y a place pour garder les emplois
de ce monde-là dans les deux secteurs? C'est ça la seule et
simple question. Je vous garantis qu'on n'aura pas à finasser sur la
technique, si on dit: Est-ce qu'il y a de la place pour cela? Il y a du monde
qui s'identifie, il y a des feuilles de paie qui relatent exactement combien
ont travaillé, année après année. Des moyennes se
dégagent. La sécurité d'emploi est-elle absolue et totale
pour les travailleurs d'Hydro qui y oeuvrent? Il faut
le déterminer. Tu ne demanderas pas à un syndicat de
négocier ses mises à pied, ce n'est pas vrai. Je le sais comment
cela marche.
Il me semble que c'est dans ce sens-là, les solutions. Si les
employeurs, d'une part, sont pointilleux au point de dire: Moi, cela me prend
tout le champ d'application de la construction et cela me prend 50 % du champ
de la maintenance, vous allez durcir davantage la position des syndicats
d'Hydro, probablement avec raison, à part cela, car ils vont dire:
Là, vous empiétez. Il me semble que la réaction normale
devant un tel problème, qui est un problème fondamentalement
humain, c'est plutôt de chercher à regarder le portrait exact,
puis à le 'geler dans le temps et à dire que toute
évolution, à partir de ce moment-ci, se fera comme cela.
M. Fava: Je pense qu'en posant la question, vous y
répondez. Écoutez, sur le champ d'application de la loi, nous
n'avons pas eu un mot à dire, c'est une loi qui nous a été
imposée. Vous vous référiez au règlement de
placement dans l'industrie de la construction. On n'a pas eu le choix, c'est
une loi qui nous a été imposée. Alors, aujourd'hui, vous
venez me dire que le champ est bloqué au niveau de la construction,
qu'il n'y a pas moyen d'en entrer, bien, je regrette, cela fait des
années qu'on se bat pour faire éliminer ce règlement de
placement et on est encore pris avec.
Revenons à l'essentiel de la question que vous posez. Je pense
que les représentants du syndicat d'Hydro-Québec vous ont
mentionné cet après-midi qu'effectivement ils procédaient
à l'embauche à raison de x nombre de travailleurs par
année. Je pense qu'on pourrait d'ores et déjà
arrêter cette embauche-là, c'est un minimun. Là, on ne
parle pas de perte d'emplois. On a dit à Hydro, comme vous mentionniez
cet après-midi: Gardez les emplois que vous avez. D'ailleurs, la clause
32 de la convention vous protège au maximum. Vous avez douze mois
d'engagement à Hydro, pas moyen de mettre à pied personne. Vous
gardez votre monde. Je pense que c'est une question de direction, dans quelle
direction on s'en va. Est-ce qu'on permet à Hydro de continuer à
embaucher et d'assurer de plus en plus, l'entretien du réseau aux
dépens de l'entreprise privée ou est-ce qu'on laisse cette
croissance possible au niveau des travaux additionnels à effectuer
à l'entreprise privée ou est-ce qu'on en donne à Hydro?
Moi, je vous dis que, dans le fond, ce n'est pas une question d'emploi. S'il
faut engager du monde pour exécuter ces travaux-là, que ce soit
Hydro qui engage ou que ce soit l'entreprise privée, c'est le même
nombre d'emplois, à 20 % moins cher, mais avec la différence que
si on laisse Hydro engager, vous allez vous retrouver demain matin avec des
entrepreneurs qui auront effectué des investissements substantiels et
qui vont se retrouver avec des équipements sur les bras. Ce sont ces
gens-là, finalement, qui vont se retrouver au chômage, parce que
les travailleurs, si on laisse Hydro comme cela, ça va être Hydro
qui va les engager, ou l'inverse si on décide d'aller vers une politique
à l'inverse, à la différence près, comme je le
mentionnais tout à l'heure, que, si c'est Hydro qui continue à
croître et qui continue à exécuter de plus en plus
l'entretien de son réseau, on va se retrouver avec des
équipements dans le privé qui vont devenir tout à fait
désuets et qui ne serviront pas. Il est là le problème. Ce
sont finalement ces équipements-là qu'on va mettre en
chômage. Nous, ce qu'on vous dit, c'est d'arrêter l'embauche
à ce niveau-là et d'aller plutôt dans le sens inverse pour
ces embauches-là, pour préserver ces équipements de
l'entreprise privée. Il n'y aura pas de perte d'emploi nulle part, parce
que, si Hydro engage, moi, je ne vois pas pourquoi des emplois se perdraient
entre les deux. Alors, je ne vois vraiment pas le problème en termes de
perte d'emplois. Je pense qu'on est en train de décider qu'on va prendre
un paquet de capital et un paquet d'équipement et que c'est cet
équipement-là qu'on va mettre en chômage.
M. Chevrette: Vous avez dit tantôt -vous ou M. Daoust, je
ne sais pas - vous avez dit tantôt que, lorsqu'on a négocié
le programme à 1000, à 750 et à 500, vous n'aviez pas
été prévenus au départ?
M. Fava: Le chiffre de 500, M. Chevrette, on l'a appris quelques
mois après que l'entente a été signée. On nous a
parlé d'augmentation d'équipements. On nous a demandé de
nous préparer parce qu'effectivement le programme entrerait en vigueur
et qu'on ferait appel à nos services davantage qu'avant que cette
entente-là soit signée. Mais le chiffre de 500, qui allait faire
en sorte que la période de décroissance, au bout de la
troisième année, arriverait, c'est un chiffre qui a
été appris quelques mois après que l'entente a
été signée.
M. Chevrette: J'aurais une dernière question. À
partir de votre mémoire, vous semblez exposer une situation
idéale. Si j'avais à vous poser une question concrète, ce
serait. Qu'est-ce qu'il y a de possible dans les circonstances?
M. Fava: Je pense qu'on vient d'y répondre. Moi, ce que je
vous dis, c'est qu'à l'heure actuelle Hydro-Québec procède
à de l'embauche pour mettre en application cette
disposition de la convention collective. Moi, ce que je vous dis, c'est
que cette embauche devrait se faire dans le domaine privé pour maintenir
les emplois et maintenir à l'ouvrage les équipements qui sont
là. Moi, je pense qu'on devrait plutôt geler à l'inverse.
Je pense que ce n'est pas une question de perte d'emplois. On devrait limiter
l'embauche en ce qui concerne l'Hydro-Québec et aller plutôt dans
le sens opposé. Moi, je pense que là-dessus, quant à la
direction qu'on doit prendre, pour moi, c'est très clair. Est-ce que la
situation actuelle est la situation idéale? Cela, c'est une autre
question. Mais vous me dites; Vers où, qu'est-ce qu'on devrait faire
demain matin pour tenter... On devrait au moins stopper l'hémorragie. Je
pense que cela s'impose avant que le problème ne s'aggrave, et
après ça je pense qu'on devrait tenter de trouver des solutions
pour voir si, déjà, au moment où l'hémorragie a
été stoppée, la situation est adéquate ou pas.
Après ça, on s'attaquera aux problèmes existants. Mais on
devra, au moins pour l'avenir, arrêter d'aller dans ce
sens-là.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Rosemont.
M. Rivard: Vous devez soupçonner que, lorsque nous cessons
d'être membres d'une commission parlementaire et que nous redevenons des
députés chacun dans nos comtés, nous sommes en relation
beaucoup plus fréquente avec le public payeur, comme vous l'avez
appelé tout à l'heure, qu'avec les hauts dirigeants
d'Hydro-Québec. Je voudrais vous entendre parler sur la
productivité ou la différence de productivité entre
HydroQuébec et les entreprises qui pourraient agir en sous-traitance. Je
ne pense pas qu'à la fin de cette commission parlementaire on en arrive
à la conclusion qu'il n'y a pas de différence de
productivité. Je pense qu'on retrouve dans chacun des mémoires,
et même dans le mémoire d'Hydro-Québec, des chiffres qui
sont mentionnés. Est-ce que ce sera 10 %, 15 %, 17,5 % ou 20 %, je ne le
sais pas, mais on arrivera à une différence de
productivité.
L'an passé, lors de la commission parlementaire,
c'est-à-dire cette année, au printemps dernier, les
représentants d'Hydro-Québec avaient émis une
hypothèse, une interprétation quant à cet écart de
productivité qui existerait entre les monteurs du secteur privé
et les monteurs d'Hydro-Québec. Ils nous ont dit alors: C'est
essentiellement dû à la nature des travaux. Par exemple, dans le
cas de la sous-traitance, il s'agit de travaux de longue durée, alors
que dans le cas d'Hydro-Québec il s'agit davantage de travaux faits
d'urgence ou de plus courte de durée. Est-ce que vous, messieurs, vous
acceptez cette interprétation d'Hydro-Québec?
M. Fava: Je pense que c'est une interprétation qui est
réfutée par les documents d'Hydro-Québec même. Hydro
nous dit: Écoutez, quand on compare les chiffres, en utilisant les
règles de l'art qui existent en matière de comparaison de
chiffres, de notre propre aveu, on arrive à un écart de 20 %.
Comme je vous le dis, ce sont des documents internes d'Hydro. Elle nous dit
qu'elle a procédé là-dessus à une comparaison des
chiffres selon les règles de l'art et qu'effectivement, en
matière de lignes et de postes, elle arrive à ce
chiffre-là. On nous dit carrément que ce chiffre-là peut
s'expliquer pour des raisons philosophiques. (21 h 15)
Maintenant, moi, je vous avoue honnêtement que je ne voudrais pas
me retrouver à votre place, pris à siéger pour
décider si je dois permettre à Hydro-Québec d'augmenter
ses tarifs ou pas d'expliquer au public payeur que j'ai accepté
d'augmenter ses tarifs parce que, pour des raisons philosophiques, on doit
permettre à Hydro de faire des travaux de 20 % plus cher qu'elle
pourrait obtenir en faisant appel à l'entreprise privée. Je pense
que c'est là la question qu'on doit se poser.
M. Rivard: L'Association des constructeurs de routes et grands
travaux du Québec, ce matin, a semblé dire qu'elle n'était
pas en mesure, elle, de faire des études à ce point de vue. Elle
a fait une démonstration - qui vaut ce qu'elle vaut -qui allume,
n'est-ce-pas, qui attire notre attention quant à la possibilité
d'une productivité différente. Est-ce que, vous, de votre
côté, en vous sortant de ces documents d'Hydro-Québec
auxquels vous faites référence et qu'Hydro-Québec pourrait
peut-être réfuter demain, est-ce que vous êtes en mesure de
confirmer cette différence de productivité et de
l'interpréter?
M. Daoust: Comme il vous a été expliqué ce
matin justement, c'est qu'on n'a pas accès aux différents
documents d'Hydro, mais on a toujours soupçonné que la
comparaison qui avait été faite à la Baie James, parce
qu'on parlait d'un même genre d'organisation - ce n'étaient
peut-être pas les mêmes individus, ce n'étaient pas des
monteurs de lignes, mais on parlait quand même d'opérations qui
provenaient de la même organisation - à ce moment, on avait pu
observer facilement des différences de 35 % à 40 %. Alors, moi,
je serais très curieux d'avoir une étude impartiale faite par
quelqu'un de l'extérieur de la boîte et qui arriverait à 20
%. J'ai l'impression que 20 %, c'était gênant de dire moins que
cela. J'ai l'impression que c'est substantiellement
plus que cela.
M. Rivard: D'accord. Toujours en restant très près
de ce public payeur et de ce qu'on pourrait appeler la qualité du
service à la clientèle, je reviendrais un peu sur une question
qui a été posée tout à l'heure, je pense, par le
député de Roberval au sujet de cette recommandation que vous
faites, eu égard aux tâches d'entretien, de confier 50 % de
l'entretien du réseau de transport au secteur privé. Je comprends
que vous basez cette recommandation sur votre définition qui veut que
l'entretien soit une partie, un secteur de la construction, et que vous
recherchez - comme nous, d'ailleurs -une solution équilibrée dans
ce dossier qui est très complexe.
Comment fonctionnerait une politique, une recommandation comme celle que
vous faites en termes de service à la clientèle, parce que je
pense toujours aux payeurs du service d'électricité oui viennent
à mon bureau de comté? Est-ce que ces 50 % d'entretien
confiés au secteur privé sous la gérance
d'Hydro-Québec pourraient se traduire par un service
amélioré à la clientèle
québécoise?
M. Fava: Écoutez, vous pouvez prendre l'exemple d'autres
organismes publics. Comme entrepreneur en construction, on travaille
continuellement avec la Société d'assainissement des eaux du
Québec et la société n'exécute aucuns travaux, elle
donne tout à contrat à l'entreprise privée. Elle fait
confectionner des plans, des cahiers de charges et devis, et elle va en appels
d'offres, et c'est à partir des appels d'offres que les entrepreneurs
sont choisis.
Je vous dis honnêtement qu'outre le fait, comme on le mentionnait
tout à l'heure, qu'il s'agit d'un service quand même essentiel
d'une société d'État, on doit retenir les critères
qu'on mentionnait tout à l'heure, soit de préserver quand
même un certain volume de travail à Hydro pour qu'elle maintienne
cette expertise-là, qu'elle l'améliore même, et qu'il y ait
quand même une certaine sécurité en ce qui concerne
l'approvisionnement, qu'on ne se lie pas carrément, complètement.
Évidemment, la Société d'assainissement des eaux, en
principe, peut faire appel à 300, 400 ou 500 entrepreneurs dans la
province de Québec pour faire exécuter ses travaux, alors
qu'à Hydro-Québec on parle quand même d'un nombre
d'entrepreneurs suffisamment limité. Alors, c'est sûr qu'il y a
des différences à ce niveau-là. Je pense que le
critère, c'est ce qu'il faut préserver à Hydro pour
qu'elle maintienne son expertise. D'après nous, par la suite, Hydro
n'aurait plus affaire là-dedans. Ces travaux devraient être
carrément confiés à l'entreprise privée.
M. Rivard: Je vous remercie, M. Fava.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Taschereau.
M. Leclerc: Vous avez souligné dans votre mémoire
que, de 1983 à 1988, les effectifs d'Hydro-Québec -
évidemment, on parle toujours des monteurs - ont crû de 8 % et
qu'inversement les effectifs des entrepreneurs ont décru d'autant.
Avez-vous regardé à quoi on peut attribuer la baisse des
effectifs chez les entrepreneurs? Est-elle essentiellement attribuable à
la baisse du niveau des investissements ou l'attribuez-vous, en tout ou en
partie, à l'effet de l'article 34.03 de la lettre d'entente?
M. Fava: Écoutez, en 1983, on parlait d'un certain nombre
de monteurs» Le syndicat d'Hydro nous disait cet après-midi qu'on
était dans une période de décroissance de la demande et
qu'on était arrivé avec un programme qui s'appelle PAQS justement
pour tenter de préserver un certain degré d'emplois dans ce
domaine-là. Ce qu'on a vécu - je compare un peu cela à
notre petite Corvée-habitation dans l'industrie de la construction -
finalement, on est arrivé avec un programme qui a fait
accélérer la demande normale qu'on aurait eue dans un secteur, on
a pris cette demande, on l'a concentrée sur une période de trois
ans et on a dit: Tous ceux qui se bâtiront durant ces trois années
bénéficieront d'un certain nombre de subventions. Ce qu'on a fait
là-dedans, c'est un peu la même chose. Voyant l'emploi
décroître dans ce domaine-là, Hydro est arrivée avec
son programme PAQS et a dit: Écoutez, on va accélérer nos
investissements dans ce domaine, on va améliorer le réseau. On
est arrivé avec cette entente et on a dit aux entrepreneurs:
Équipez-vous. Vous aurez, dans le cadre de ce programme-là,
davantage de travaux à exécuter. Sauf qu'on a omis de dire
qu'à la fin du programme non seulement on va être limités,
mais qu'à toutes fins utiles on va être éliminés,
parce que, de la façon dont la clause est rédigée, on dit
qu'Hydro peut recourir à la sous-traitance ou à l'impartition
dans les cas d'urgence, mais dans une situation qui ne doit dans aucun cas
dépasser 500 heures-hommes-années. Alors, il est clair
qu'à partir de ce moment, on voit les tendances que vous voyez
là. Alors, à partir du moment où le programme entre en
vigueur, vous voyez le renversement des chiffres. Merci.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
d'Iberville.
M. Tremblay (Iberville): Oui, M. le Président, j'aurais
une question. Dans le mémoire, on dit, que le Syndicat des
employés de métiers d'Hydro-Québec cherche à
élargir la zone grise pour aller vers des activités susceptibles
d'être incluses parmi celles qui sont réservées aux
employés d'Hydro-Québec. En quoi consiste la zone grise?
J'aimerais que vous expliquiez de quelle façon on profite de la zone
grise.
M. Fava: En fait, je pense que l'ACRGTQ aurait été
mieux placée que moi pour répondre à cette
question-là, sauf qu'on parle essentiellement de la construction par
rapport à l'entretien. Ce qu'on a dit, finalement, dans le programme
PAQS, c'est qu'on va améliorer le réseau et qu'on va le mettre
à la fine pointe. À partir du moment où on aura mis le
réseau à la fine pointe, sortez de là, nous, on s'occupe
de l'entretien. Alors, c'est clair que c'est la carte qu'on a jouée. On
a amené les entrepreneurs à croire que l'augmentation des heures
seraient presque constantes. Pendant ces trois années-là on
était bien heureux d'avoir ces heures additionnelles, mais, le
lendemain, on se retrouve avec rien. Lorsqu'on dit qu'on veut élargir la
zone grise, c'est toujours le jeu qui se fait entre la construction et
l'entretien du réseau. De plus en plus, on accapare ces deux champs.
Alors, on gruge dans la nouvelle construction, on gruge dans l'entretien du
réseau de sorte que, tranquillement, on se voit placé dans une
situation où, à toutes fins utiles, la construction neuve, on
n'en a plus, et l'entretien du réseau, on en a uniquement au moment
où il y a des urgences et uniquement à la demande d'Hydro, et
encore là avec le critère des 500 qu'on ne peut pas
dépasser.
M. Tremblay (Iberville): Oui, mais d'après vous où
devrait se situer exactement la démarcation entre l'entretien et la
construction? Est-ce clair? Est-ce flou? Exactement, comment cela peut
se...
M. Fava: D'après moi, si on se réfère...
M. Tremblay (Iberville): Parce que, si ce n'est pas clair, c'est
sujet à litige. Si on peut le clarifier, j'imagine qu'on va
donner...
M. Fava: En fait, la ligne de démarcation traditionnelle,
si vous voulez, c'est que les travaux de construction étaient
confiés à des entrepreneurs de l'extérieur et l'entretien
du réseau se faisait à l'interne. Alors, on voit de plus en plus
de zones grises qui apparaissent entre ces deux secteurs. En fait, avec le
programme PAQS, on a assimilé tout cela et on a dit: Écoutez, on
améliore le réseau. Mais, finalement, est-ce que c'est de
l'amélioration du réseau ou si c'est de l'entretien du
réseau qu'on fait? À partir du moment où on remet ce
réseau en état, on vous dit: Pour l'entretien, allez- vous-en,
c'est nous qui allons le faire. Finalement, il y a une espèce de
confusion entre l'entretien du réseau et la construction du
réseau. C'est cela qu'on veut dire finalement. Dans trop souvent de cas,
on mêle la construction et l'entretien du réseau; qu'on fait une
espèce de mélange des deux pour s'arroger de plus en plus ces
travaux.
M. Tremblay (Iberville): Mais vous n'avez pas répondu
à ma question., Où cela finit-il exactement et où cela
commence-t-il? Est-ce que l'entretien va...
M. Fava: Bien...
M. Tremblay (Iberville): Est-ce que la construction peut
être interprétée comme des modifications majeures à
la ligne lorsque vous faites de l'entretien, par exemple, ou si, l'entretien,
il s'agit de remplacer un transformateur par un autre?
M. Fava: C'est un peu ce que je vous disais. Finalement, la ligne
de démarcation se situe entre ce qu'est la construction et ce qu'est
l'entretien. Dans trop souvent de cas, ces deux notions sont tellement
mélangées qu'on ne réussit pas à discerner ce qui
est de la construction et ce qui est de l'entretien.
M. Tremblay (Iberville): D'accord. Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va. M. le
député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): M. le Président, l'essentiel du
message que vous avez livré tantôt, c'est de dire: On voudrait
voir arrêter le mouvement d'embauche à HydroQuébec, on
voudrait voir arrêter le mouvement de désengagement qui se produit
actuellement par rapport à l'entreprise privée. Si on pouvait, de
façon théorique, prendre le portrait de la situation actuelle, le
27 octobre 1987, et dire: On est dans une situation où il y a de moins
en moins de contrats de donnés au secteur privé et de plus en
plus de travaux faits à l'interne, si on arrêtait le pendule de
l'horloge qui est reparti sur l'autre bord - vous, vous réclamez non
seulement que le pendule arrête, mais qu'il reparte dans le sens que vous
demandez - et si on pouvait trouver une formule à partir de la situation
actuelle, est-il pensable, non pas de repartir le pendule en faveur d'un bord
ou de l'autre, mais, à partir de ce qu'on a actuellement, d'avoir une
situation où, face à l'avenir, les emplois créés
devront se partager dans une formule de 50-50 où chacun tirera sa part?
Est-ce que cela est envisageable, pensable, ou si vous tenez absolument
à repartir le pendule de sorte que vous puissiez regagner
le terrain perdu?
M. Daoust: Je ne sais pas. J'ai l'impression qu'on mélange
le problème. Vous avez l'air de dire que la situation qui existe doit
continuer d'exister, qu'elle peut être améliorée, qu'il y a
peut-être une formule pour l'améliorer, mais qu'elle doit
continuer d'exister. Nous, on déplore une situation qui permet que des
travaux coûtent trop cher, à comparer à ce qu'ils
pourraient coûter. Je comprends mal comment on peut envisager de dire:
D'accord, c'est parfait, cela coûte trop cher, ce n'est peut-être
pas efficace, mais peut-on aller à moitié chemin? Je comprends
mal comment on peut envisager cela de cette façon. Je comprends
très bien le problème de ne pas faire perdre d'emploi à
ceux qui en ont déjà. C'est d'ailleurs pour cela qu'on
prévoyait une formule de récupération au rythme de 5 % par
année. On se disait: C'est probablement le taux d'employés qui
quittent, qui meurent ou qui prennent leur retraite, et ainsi de suite.
Plutôt que de les remplacer, c'est simplement cette portion-là qui
sera redonnée à la construction, jusqu'à temps qu'on
arrive au niveau mentionné dans notre mémoire. Cela se fait sans
faire de mal à personne. Je pense que c'est plus abordable que de dire:
Indépendamment du fait que cela coûte trop cher, on va aller
à moitié chemin et arrêter là.
M. Parent (Bertrand): C'est-à-dire que je ne cherche pas
à vous dire que c'est la solution idéale. Je veux savoir de votre
part ce qui est acceptable. Il ne s'agit pas juste de trancher la poire en
deux. D'un autre côté, on ne s'entend même pas sur ce qui va
être entretien et ce qui va être construction. (21 h 30)
C'est actuellement la confusion la plus totale parce qu'il y a de la
construction qui est maintenant comprise dans l'entretien, et ainsi de suite.
On ne s'entend plus non plus quant à l'interprétation de la
clause 34. Il n'y a pas seulement la question des emplois qui sont en jeu. Je
pense que cela a été déterminé au cours de la
journée, le nombre d'emplois créés d'un bord et
recréés de l'autre. Je pense qu'il y a un principe très
important de la masse critique qui doit être minimale, acceptable pour
Hydro-Québec pour qu'elle soit capable de garder une expertise à
l'interne. Une fois qu'on l'a établi ou une fois qu'on s'est entendu
là-dessus, les problèmes fondamentaux étant
réglés, quant à l'avenir, ce qui va se passer ou de quelle
façon le pendule va repartir... D'une part, les gens du syndicat
à Hydro-Québec sont préoccupés de savoir si le
pendule repart de l'autre bord, et si, finalement, on retourne à la
situation que vous réclamez, qui est une situation de droits acquis que
je peux comprendre, ou du passé, ou une formule selon laquelle c'est
plus rentable. Mais, là, on s'embarque dans une formule dont je ne suis
pas sûr qu'on soit capable de se sortir, à moins que le
gouvernement ne fasse son lit, et qu'il le fasse dans les prochaines heures,
dans les prochains jours. Sinon, on va être en commission parlementaire
dans un an, dans deux ans et ce ne sera pas résolu. De votre
réaction, moi, je comprends que vous ne voulez pas de demi-mesure,
trancher en deux pour essayer de satisfaire tout le monde. Vous dites: Si c'est
carrément prouvé que c'est plus rentable d'aller vers cette
formule-là - c'est cela que je veux comprendre - c'est carrément
plus rentable de choisir cette formule, c'est-à-dire la formule que vous
préconisez, il faut repartir le pendule de l'autre bord. On se
comprend?
M. Daoust: Je comprendrais très bien une formule
transitoire, à court terme, que j'appellerais politique pour
régler un problème politique à court terme. Je pense que
ce serait se cacher la tête dans le sable que de dire: Cette formule
à court terme on va l'appliquer à vie. Il faut regarder le
problème dans toute sa profondeur, puis déterminer une fois pour
toutes si c'est 15 %, 20 % ou 35 % ou 40 % pour ce qui est de
l'efficacité. Â partir de là, peut-être que la
solution à court terme ne sera pas du tout envisageable à long
terme.
M. Parent (Bertrand): II ne s'agit pas juste d'une... En tout
cas, un dernier point parce qu'on me dit que je n'ai plus de temps. Il ne
s'agit pas juste d'avoir une solution dite politique il faut avoir aussi une
solution économique.
M. Daoust: Moi, quand un organisme admet candidement un taux
d'inefficacité de 20 %, je me poserais des "maudites" questions.
M. Fava: Je pense que ce qu'on a fait, c'est de façon
ponctuelle. On a réglé une convention collective sur le dos de
tierces parties. Je pense que ce n'est pas quelque chose qu'il faut encourager,
d'autant plus que le représentant syndical qui présentait le
mémoire vous donnait l'exemple des problèmes qu'il y a eu dans la
région de Montréal. Il a dit: Écoutez, on n'a pas pu
répondre à la demande, pas parce qu'on n'avait pas d'hommes, on a
manqué d'équipement. Vous en avez en masse des hommes à
Hydro-Québec. Je me demande ce qu'ils "foutent" si on a des hommes et
qu'ils n'ont pas d'équipement pour travailler. Cela m'a surpris que
personne n'ait soulevé cette question-là. On nous dit:
Écoutez, quand on eu a des problèmes à Montréal, ce
n'est pas les hommes qui ont manqué, on n'avait pas d'équipement
pour les sortir dans le champ, pour aller réparer les
dégâts qui avaient été
causés par la tempête. Alors, qu'est-ce qu'ils "foutent"
ces hommes-là si on n'a pas d'équipement à leur donner
pour aller travailler? C'est cela la question qu'il faut se poser. Quand on
parle de 20 % d'inefficacité, cela peut peut-être en expliquer une
partie.
Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir
aux événements du 14 juillet. Ce n'est pas encore évident
dans mon esprit ce qui est arrivé. Est-ce que vous aviez des
équipes et est-ce qu'Hydro-Québec a utilisé toutes les
équipes que vous aviez organisées durant les inondations du 14
juillet? Premièrement, aviez-vous des équipes? Je ne sais pas si
c'était la période des vacances. Deuxièmement, si vous
aviez des équipes, est-ce qu'elles ont toutes été
utilisées par Hydro-Québec?
M. Fava: Écoutez, pour la première partie de la
question, il n'y a pas de vacances au niveau des lignes. Alors, je pense que
c'est clair, s'il y avait des équipes...
M. Ciaccia: Beaucoup de gens pensent qu'il y a une période
de vacances.
M. Fava: S'il n'y avait pas d'équipes, ce n'était
pas à cause des vacances.
M. Ciaccia: Alors, ce n'est pas ia question des vacances.
Maintenant, aviez-vous des équipes et, si oui, est-ce que les
équipes que vous aviez ont toutes été utilisées par
Hydro-Québec?
M. Daoust: Si je me rappelle bien les commentaires de
l'association des constructeurs de routes ce matin, il y avait eu une ou deux
demandes. Ce sont les commentaires que j'ai entendus ce matin. Moi, je ne
pourrais pas vous répondre en connaissance de cause. Je me base sur les
commentaires que j'ai entendus ce matin. Il me semble que c'est ça la
remarque, qu'il y avait eu une ou deux demandes, après qu'Hydro eut fait
le tour de toute la région et de la sous-région.
M. Ciaccia: II y a eu seulement une ou deux demandes face
aux...
M. Daoust: C'est ce que j'ai saisi ce matin.
M. Ciaccia: ...et qu'il restait d'autres équipes
disponibles pour aller faire les travaux.
M. Daoust: Effectivement.
M. Ciaccia: Dans votre mémoire, ne croyez-vous pas,
honnêtement... Je sais qu'il faut toujours demander plus pour en avoir
moins, on fait tous cela. C'est de bonne guerre et tout le monde le
reconnaît. Mais aujourd'hui, la raison pour laquelle on a une commission
parlementaire, c'est qu'il y a un problème. Ne croyez-vous pas que vous
exagérez un peu dans votre demande, en disants Vous voulez vous
accaparer le travail? Même à 5 % par année, vous voulez 100
% de la construction et 50 % de l'entretien. Ne trouvez-vous pas,
honnêtement - on est à la veille d'ajourner nos travaux
jusqu'à demain, c'est la fin de votre mémoire - ne croyez-vous
pas que vous exagérez un peu et seriez-vous prêts à vous
rallier à l'objectif que, moi, je vise, qui est d'arriver à un
juste équilibre?
M. Fava: Je pense que, M. le ministre, si vous permettez,
indépendemment de la question philosophique, moi, je suis d'avis que, de
toute façon, à partir du moment où on a assuré un
volume suffisant à Hydro pour qu'elle préserve ses expertises,
ses connaissances et tout cela, je pense qu'à partir de là,
Hydro-Québec n'a plus d'affaire dans le système. En tout cas,
c'est une opinion, une question philosophique.
M. Ciaccia: Mais vous reconnaissez qu'il faut avoir des travaux
à l'interne et des équipes à Hydro, qu'il faut une
partie...
M. Fava: À ma connaissance, il n'y a eu aucun
mémoire ou aucun intervenant devant la commission qui ait
préconisé le contraire. Je pense qu'on dit clairement dans notre
mémoire aussi qu'il faut préserver un nombre minimal d'heures de
travail à Hydro pour qu'elle préserve cette
expertise-là.
On a également dit tout à l'heure, en réponse
à une question qui venait, je pense, de M. Chevrette, qu'il faut tout au
moins pour l'instant, stopper l'hémorragie. Je pense qu'il faut qu'Hydro
arrête sa politique d'embauche à ce niveau-là, on a
déjà assez de dégâts comme c'est là.
M. Ciaccia: Êtes-vous prêts à vous rallier
à l'objectif que je vise, c'est-à-dire un juste équilibre?
Seriez-vous prêts à vous rallier à cet objectif?
M. Fava: Je vous demanderais de définir ce qu'est un juste
équilibre pour vous. Ce sont des définitions. C'est quoi un juste
équilibre? Finalement, c'est ça la question qu'on se pose.
M. Ciaccia: Je vais vous dire ce que ça n'est pas. Ce
n'est pas 100 % des travaux de construction et 5 % par année
jusqu'à... Je ne pense pas, dans le contexte actuel, que ce soit un
juste équilibre.
M. Fava: Si je comprends bien, M. le ministre, dans votre esprit,
ce n'est pas de zéro à 500 non plus?
M. Ciaccia: Non, parce que - je l'ai dit dans mes remarques
préliminaires - il semble que l'équilibre ait été
changé entre la sous-traitance et les travaux internes. C'est pour
ça qu'on est ici.
M. Fava: Exact.
M. Ciaccia: Cela, je l'ai dit dès le début et je
pense que cela devient de plus en plus évident.
M. Daoust: C'est bien apparent que, s'il n'y avait pas eu de
changements, on ne serait pas ici. Les chiffres qu'on avance dans le
mémoire, je vous ai mentionné tantôt que c'était
basé... D'ailleurs, c'est une reproduction partielle d'une étude
commandée par le gouvernement à l'institut national
d'administration publique. Alors, c'était leur recommandation d'aller
à 100 % pour la construction et 50 % pour l'entretien.
M. Fava: À ma connaissance, avant qu'on ne modifie cet
équilibre-là, il n'y avait pas de problème dans ce
secteur-là. Le problème provient de cette fameuse entente qui est
devenue partie intégrante de la convention collective.
M. Ciaccia: C'est pour ça que nous avons convoqué
une commission parlementaire, pour entendre toutes les parties. Merci.
M. Daoust: M. le ministre, est-ce que je pourrais vous faire un
dernier commentaire, s'il vous plaît? J'étais présent
à une table ronde du Conference Board of Canada la semaine
dernière où étaient présents des
représentants syndicaux et on regardait ce qui nous attendait en 1988
dans les négociations à la fonction publique ou dans le secteur
privé. Tous les représentants syndicaux présents mettaient
beaucoup d'emphase sur les clauses de sous-traitance, disant que c'était
probablement cela qui serait le gros champ de bataille des négociations
dans les différents secteurs l'an prochain. Alors, vous comprendrez, je
pense, notre préoccupation d'essayer d'établir des règles
du jeu parce qu'il y a quelqu'un qui va les regarder étroitement et qui
va s'assurer d'avoir quelque chose de semblable. On ne voudrait pas que
l'hémorragie qui a commencé continue, c'est simple.
M. Ciaccia: Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Alors, sur cette
dernière intervention, je vous remercie, messieurs, d'avoir
participé à cette consultation particulière. Je vous
souhaite bon retour et à la prochaine.
Les travaux de la commission sont ajournés à demain matin,
10 heures, alors que nous reprendrons la consultation particulière.
(Fin de la séance à 21 h 41)