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(Dix heures dix minutes)
Le Président (M. Baril): À l'ordre, s'il vous
plaît! Bonjour mesdames, messieurs, messieurs les députés
et monsieur le ministre. Je tiens à rappeler l'objet de la séance
ce matin, c'est la continuation d'hier. Nous procédons à une
consultation particulière sur le projet de loi 161, Loi sur les
mines.
Je demanderais, à ce stade-ci, au secrétaire d'annoncer
les remplacements.
Le Secrétaire: II y a deux remplacements, M. le
Président. M. Farrah (ÎLes-de-la-Madeleine) est remplacé
par M. Ciaccia (Mont-Royal). M. Rivard (Rosemont) est remplacé par M.
Vallières (Richmond).
Le Président (M. Baril): Aujourd'hui, nous avons une
journée bien remplie. Je vais vous donner l'ordre du jour. À 10
heures, nous recevons la Chambre des notaires du Québec; à 11
heures le Barreau du Québec; à 12 heures, l'Ordre des
arpenteurs-géomètres du Québec; à 16 heures,
l'Université d'Ottawa, Faculté de droit, qui sera
représentée par M. Jean-Paul Lacasse; à 17 heures, nous
recevons l'Association des banquiers canadiens. Est-ce que l'ordre du jour est
adopté? Adopté.
J'invite la Chambre des notaires du Québec, je vois qu'elle est
en place. Messieurs, je vous souhaite la bienvenue et je tiens à vous
rappeler que le temps alloué à chaque organisme est d'une heure.
Vous avez vingt minutes pour présenter votre mémoire, les
représentants ministériels auront vingt minutes pour commenter et
les membres de l'Opposition vingt minutes.
Messieurs, bonjour et bienvenue!
Chambre des notaires du Québec
M. Lambert (Jean): M. le Président, je me présente:
Jean Lambert, président de la Chambre des notaires. J'ai
également le plaisir de vous présenter les confrères qui
m'accompagnent ce matins À ma droite, le notaire Denys-Claude
Lamontagne, qui a rédigé le mémoire et coordonné
les travaux du comité. À ma droite immédiate, le notaire
Armand Gilbert, de Val-d'Or, je pense que c'est un peu significatif dès
l'instant qu'on mentionne le lieu d'origine qui est familier. Je crois que les
gens du ministère qui ont un certain âge ont entendu parler
à plusieurs reprises du notaire Gilbert alors qu'il vient nous aider
à éclairer la commission sur les points que l'on va porter
à votre attention. À ma gauche, le notaire Julien S. Mackay,
directeur du service de la recherche et de l'information à la Chambre
des notaires.
M. le Président, M. le ministre, messieurs les
députés, nous sommes heureux de venir collaborer à vos
travaux concernant le projet de loi 161 sur les mines. Notre
présentation se divisera en deux volets: un premier sera traité
rapidement, puisqu'on veut saisir l'occasion de parler d'un code du domaine
public. Donc, on ne parlera peut-être pas spécifiquement du projet
de loi 161, mais dans quel cadre on aimerait qu'il puisse s'inscrire à
l'avenir. Par la suite, nous entrerons dans une démarche plus
spécifique sur des aspects précis du projet de loi à
l'étude.
M. le Président, de nouveau la Chambre des notaires invite le
qouvernement du Québec à faire preuve d'originalité et
d'initiative en regroupant les lois qui touchent les éléments
fondamentaux de la vie sur notre territoire: l'eau, la terre, l'air et, par
extension, les forêts et le sous-sol minier.
Donc, la Loi sur les terres du domaine public, la Loi sur les
forêts, la Loi sur les mines, la loi sur les terrains agricoles et sur le
milieu hydrique devraient, à cause d'une liaison évidente,
être regroupées dans un seul et même document
législatif, une oeuvre législative qu'on appelle code.
D'ailleurs, si on se réfère à la définition
du mot "code", on voit qu'on le définit comme un recueil de lois
renfermant un système complet de législation sur certaines
matières. L'encyclopédie juridique Dalloz fournit une explication
encore plus poussée... "On réservera le nom de code à des
recueils de dispositions concernant une même matière et ayant la
prétention de la traiter entièrement."
Lorsqu'on parle des lois précitées, on est en
présence de la même matière, soit le domaine public sous
différents aspects. Nous constatons même que nous passons du
général au particulier quand on parle, dans un premier projet de
loi, des terres du domaine public et dans les trois autres d'une application
particulière du domaine public, soit les forêts, les mines, les
terres publiques agricoles et ajoutez évidemment le milieu hydrique.
II nous semble donc essentiel qu'un regroupement des lignes directrices
de l'utilisation des biens du domaine public soit effectué à
l'intérieur d'une loi d'ensemble, ce qui permettrait aussi une meilleure
cohésion et une meilleure unicité dans l'application de ces
directions par les différents ministères concernés. Ce ne
serait pas sans précédent dans notre édifice
législatif puisque nous retrouvons des codes. Nous avons
évidemment - et c'est bien connu - le Code civil, le Code de
procédure civile et également le Code de la route où on a
senti le besoin de regrouper dans une oeuvre législative qui avait sa
dynamique et une unicité tous les aspects reliés aux
véhicules routiers et au système routier. On le retrouve
également en ce qui a trait aux professions au Québec puisque le
législateur, au début des années soixante-dix, a senti le
besoin de regrouper, sous un même ensemble de règles
législatives, les règles et règlements qui
régissent l'exercice des professions au Québec; ce fut donc le
Code des professions.
Le temps étant précieux, j'invite M. le président,
le notaire Denys-CIaude Lamontagne, à traiter d'une façon
précise les dispositions du projet de loi 161 qui ont retenu notre
attention. M. Lamontagne.
Le Président (M. Baril): M. Lamontagne.
M. Lamontagne (Denys-CIaude): Merci beaucoup. Je vais limiter mon
exposé à trois ou quatre points: tout d'abord, la clarification
des droits du propriétaire foncier, ensuite la question du registre
foncier, la question des mesures préventives et aussi l'identification
des lettres patentes. D'autres points sont traités dans le
mémoire et on pourra y faire référence.
En ce qui concerne le premier point, les droits du propriétaire
foncier, on sait que, en vertu de l'article 414 du Code civil, le
propriétaire foncier est propriétaire du dessus et du dessous de
son terrain. La Loi sur les mines limite grosso modo les droits du
propriétaire foncier à la couche arable. Supposons que le lot de
terre soit constitué de roc seulement, quels sont les droits du
propriétaire foncier? C'est un exemple qui vous fait voir qu'il faut une
définition claire des droits du propriétaire foncier dans la loi.
Cette définition est nécessaire aussi puisqu'il peut se produire
des problèmes comme il s'en est produit à Belmoral.
Si les travaux miniers sont effectués sous le terrain, sans
limite aucune, un moment donné il peut se produire une
cathédrale, c'est que les mineurs peuvent se rendre très proche
de la surface et il peut y avoir des effondrements, il y a donc danger
évidemment pour ceux qui sont en dessous et pour ceux qui sont
au-dessus. On a pensé, pour clarifier ces droits, qu'il y ait une limite
dans la loi. On veut que soit consacré le principe que le
propriétaire du fond est propriétaire aussi de la couche arable
et du mort-terrain de 300 pieds dans le "bedrock". Il y a une remarque du Dr
Morin, un géologue assez connu, à savoir que si on ne fait pas de
travaux miniers dans les 300 pieds du "bedrock", les risques d'effondrement
sont pratiquement nuls. Donc, tout d'abord, le premier point est de clarifier
les droits du propriétaire foncier dans la loi.
Le deuxième point porte sur la question de l'enregistrement. Tout
d'abord, nous sommes très satisfaits qu'on ait spécifié
d'une façon claire ce qui doit être enregistré et
déposé au bureau d'enregistrement. On a fait plusieurs remarques
techniques en ce qui concerne le registre foncier. Je voudrais simplement
insister sur un ou deux points. D'abord, nous insistons sur le point à
savoir que lorsque commenceront les enregistrements au bureau d'enregistrement,
que cela soit au registre foncier ou à l'Index des immeubles, peu
importe, le seul document valable sera celui qui est présenté
pour enregistrement. Tous les documents qui précèdent n'auront
plus aucune validité. Autrement dit, si un notaire - on va prêcher
un peu pour notre paroisse; vous m'excuserez, mais on est là un peu pour
cela aussi - fait un examen de titres au bureau d'enregistrement, il ne devrait
pas être obligé d'aller au Service des mines. Il faudrait que son
examen se limite strictement au document à enregistrer, qui devra,
être le seul valable, le dernier enregistrement annulant les autres.
On a discuté plus à fond de la question du registre
foncier ces derniers jours. On se demande s'il est vraiment nécessaire
d'instituer un registre foncier. On se demande s'il ne serait pas possible de
s'en tenir à l'Index des immeubles, tel qu'il existe actuellement.
Enfin, c'est une interrogation que l'on vous soumet. Il n'en est pas question
dans le mémoire. Mais, on se demande si les entrées ou les
inscriptions qui sont faites surchargent véritablement l'Index des
immeubles. Sinon, il y aurait peut-être moyen de fonctionner en gardant
les principes de la loi tout en s'en tenant à l'outil actuel.
Il y a ici le notaire Gilbert, qui a pratiqué dans la
région de Val-d'Or, qui pourrait peut-être revenir sur ce point,
l'expérience étant très importante dans ce domaine.
Pour ce qui est du registre foncier, l'on s'en tiendra aux remarques qui
ont été faites ici au point de vue technique. Toutefois, on se
demande si ce registre est véritablement nécessaire. Est-ce qu'on
ne pourrait pas s'en remettre à l'index des immeubles actuel?
Un autre point a trait à l'identification des lettres patentes.
Les lettres patentes qui sont délivrées aux mines créent
parfois de la
confusion. On en a parlé dans notre mémoire. Par exemple,
il y a 40 Joseph Poulin dans un certain comté. Il y a des lettres
patentes au nom de Joseph Poulin. Lequel des Joseph Poulin est-ce? On vous
suggère donc dans notre mémoire d'améliorer le
système d'identification des documents qui sont délivrés
par le ministère du ministre délégué aux Mines.
Une dernière série de remarques concernent les mesures
préventives dans la loi. Le problème, entre autres, qui peut
surgir est en milieu agricole. Vous avez un fermier, par exemple, qui a
évidemment besoin d'eau pour ses animaux. Des travaux miniers sont
effectués dans les environs. À un moment donné, c'est que
la source d'approvisionnement en eau peut être tarie. C'est un type de
problème qui se produit. Vous en avez d'autres aussi. Vous avez les
trouées, les dégâts qui sont effectués sur les
terrains privés par des exploitants miniers. Est-ce qu'il serait
possible d'avoir des mesures préventives dans le projet de loi,
c'est-à-dire de prévoir un certain mécanisme d'arbitrage
par l'inspecteur des mines, par exemple, quitte même à
rétablir le poste de juge des mines, pour faciliter la conciliation et
résoudre les problèmes le plus rapidement possible, sans attendre
que les dommages s'accentuent?
Ainsi, notre fermier ou notre propriétaire privé pourrait
s'adresser au Service des mines et par le fonctionnaire autorisé, en
arriver à une entente avec la partie opposée. En gros ce sont les
points dont il est question dans notre mémoire.
M. Lambert: M. le Président, le mémoire qui a
été déposé va spécifiquement aux
détails des articles. Nous avons cru bon, pour la présentation de
ce matin, de faire un survol laissant par la suite le soin de regarder des
articles sur lesquels on fait des observations à caractère
très technique. Voilà, c'est tout. Nous sommes maintenant
prêts à répondre à vos questions.
Le Président (M. Baril): Merci beaucoup. M. le
ministre.
M. Savoie: D'accord. Merci, M. le Président. C'est
agréable de voir les officiers de la Chambre des notaires ici ce matin,
en particulier M. le notaire Gilbert. Je vais d'abord faire quelques
commentaires. Pour le domaine public, c'est très intéressant et
j'en prends note, quitte à intervenir à un moment plus
approprié, mais vous comprendrez que dans le cadre de la
présentation de la Loi sur les mines, il est assez difficile de tenir
compte de vos recommandations. Je pense que c'est quelque chose qui pourrait un
jour faire son chemin et peut-être susciter beaucoup plus
d'intérêt.
Un des points qui m'intéresse particulièrement c'est vos
commentaires concernant le registre foncier où vous dites
qu'effectivement ce qui doit être utilisé sera l'Index aux
immeubles et qu'il n'est pas nécessaire de créer un
quatrième registre. Vous comprendrez qu'au niveau minier il y a
également le pétrole. Vous comprendrez qu'il y a plusieurs
implications et nous en ressentons la nécessité. Je vous
demanderais de détailler davantage la façon dont vous voyez la
résolution des problèmes par exemple en ce qui concerne des lots
non cadastrés, des régions qui ne sont pas
arpentées...?
M. Gilbert (Armand): Me permettez-vous de répondre?
M. Savoie: Oui, certainement, notaire Gilbert.
M. Gilbert: Voici. Vous pratiquez dans les mêmes endroits
que moi. On a déjà -vous allez très bien me comprendre,
les autres vont faire leurs déductions - les titres de l'AMAQ et les
autres sont déjà enregistrés à l'Index aux
immeubles et votre nouveau projet qui est très bien, les fameux claims
et les permis de développement. Autrefois, quand on ne les faisait pas
enregistrer vu que c'était des droits fonciers, on ne suivait pas la
loi. Là, vous dites dans votre projet qui est très bien: claims,
permis d'exploitation, on fait seulement l'enregistrement au Service des mines.
Le notaire Lamontagne vous soulignait qu'on partira du bureau d'enregistrement,
c'est-à-dire qu'on partira du bail minier ou des lettres patentes.
Alors, quelle objection à continuer comme avant? Parce qu'en partant du
bail minier, on n'en a quasiment pas. Quand on examine nos titres - vous allez
me comprendre très bien - Northern Townsite et l'AMAQ, c'est là
qu'on voit les lettres patentes. Alors, ce serait la même chose parce que
le problème était de ne pas avoir les fameux claims et les permis
d'exploitation avec des titres faits avec... Vous savez comment c'est fait, au
service, c'est sous seing privé et ce n'est même pas bon. On dit,
en partant du bail minier, on ne veut pas que ce qui précède...
Le titre sur lequel on part c'est du bail minier ou de la concession
minière. Cela finit là. Tout ce qui a été fait en
claim ou en permis d'exploitation, on n'a pas besoin de cela au Bureau
d'enregistrement. On commence au Bureau d'enregistrement avec le bail minier et
la lettre patente. Tout ce qui a été fait avant, on l'efface.
D'ailleurs, il y a une partie du projet de Loi sur les mines qui en parle un
peu. Mais on dit: Mettez cela général.
M. Savoie: Pour l'enregistrement des droits
M. Gilbert: On part du bail minier seulement.
M. Savoie: C'est cela qu'on fait, justement.
M. Gilbert: C'est une très belle amélioration que
vous avez. Si vous dites que concernant les claims et les permis de
développement autrefois vous étiez obligés d'enregistrer
au bureau d'enregistrement et vous ne le faisiez pas. Aujourd'hui, on vous en
exempte. Faites-le seulement au Service des mines, cela va être
suffisant. Mais au Bureau d'enregistrement on va continuer comme on faisait
avant.
M. Savoie: Je crois que, lorsque le lot est cadastré et
numéroté, ceta doit s'enregistrer à l'Index aux immeubles.
Mais lorsqu'il n'y en a pas, lorsqu'on doit enregistrer des droits en vertu de
la Loi sur les mines, à ce moment-là il faut utiliser notre
registre. (10 h 30)
M. Gilbert: Ah là, c'est un... Mais mettons, sur la partie
telle qu'on marchait, sur les terrains subdivisés, on pourrait continuer
la même chose. Comprenez-vous? Est-ce que l'on se comprend?
M. Savoie: Oui, on se comprend, je croîs. En
conséquence, maintenez-vous toujours votre position que le registre
foncier n'est pas souhaitable? Est-ce toujours cela?
M. Gilbert: On avait une opinion et ensuite on a changé
d'opinion. C'est pour cela qu'on est un peu sur une variation. Il faut une
étude.
M. Lambert: Je pense que le principe qui doit nous guider, c'est
qu'il ne faut pas multiplier les registres, et c'est toujours le
problème que l'on a.
On pourrait peut-être résumer notre position comme ceci:
Lorsqu'il y a un registre, donc lorsqu'il y a déjà
accessibilité pour le public et tous les intéressés
à un registre où on peut constater des droits, à ce
moment-là, je pense que le gouvernement doit imposer l'enregistrement
à ce registre. Je fais référence au bureau de la division
d'enregistrement. Lorsqu'on est en régions non cadastrées,
à ce moment-là, le ministère peut très bien tenir
un registre. L'observation que j'ajouterais, c'est qu'il faudrait, à ce
moment-là, qu'il y ait un lien d'information avec la division du
cadastre et celui qui est responsable. Lorsqu'on procédera à une
division cadastrale, à un moment donné, lorsqu'on
décidera, en territoire non organisé, de l'organiser, qu'à
ce moment, on puisse porter cela au nouveau registre qui sera alors
créé pour les rendre semblables à ceux qui existent dans
les régions organisées de la province. L'information que votre
ministère détiendra afin qu'on ait toujours... Lorsqu'il y aura
existence de plans et livres de renvois et d'index, que l'on sache que c'est le
registre fiable. Là où il n'y en aura pas, on pourra, à ce
moment-là, se référer à votre ministère.
C'est clair?
M. Savoie: II y a aussi le fait que le droit immobilier, tel
qu'il existe dans le Code civil, porte sur le droit de surface. Ici, on est
dans le droit minier. On ne peut pas avoir deux immeubles, on ne peut pas
avoir... Oui?
M. Lamontagne: Je veux juste faire remarquer qu'il y a des
servitudes pour fins aériennes et on les enregistre à l'index des
immeubles. C'est l'espace aérien, alors pourquoi faire...
M. Savoie: Oui, des servitudes, cela ne...
M. Lamontagne: ...une différence entre le dessous et le
dessus? Si on enregistre pour le dessus, on peut enregistrer pour le
dessous.
M. Gilbert: II ne faudrait tout de même pas maintenir
l'opinion que les gens avaient, que le droit minier, c'était en dessous
et le droit de surface... On retombe avec l'article 414, que le
propriétaire foncier était tout... L'opinion de Cardinal, ici, on
est en train de la saccager. L'opinion de Cardinal, dans son Traité Le
droit de superficie, est complètement rejetée. Alors, on dit:
Notre propriétaire foncier est propriétaire de quoi? De la couche
arable. On arrive avec les enregistrements... Non, les enregistrements, claims,
permis d'exploitation: service des mines. On part avec un titre final qui est
le bail minier et la lettre patente au bureau d'enregistrement et on continue.
C'est le cadre général. Est-on d'accord?
M. Savoie: C'est assez difficile parce que cela demande un
enregistrement également au gouvernement pour être opposable
à la couronne ou au gouvernement. On voyait le registre foncier comme la
solution idéale pour permettre l'enregistrement des droits d'une
façon claire et précise pour enlever toute ambiguïté
et présenter une formule d'approche qui serait relativement facile, un
accès direct à l'information et qui faciliterait grandement la
tâche de ceux qui devront travailler à ce niveau. On voyait le
registre foncier comme une amélioration nette sur la situation existante
et une solution aux problèmes qui sont soulevés. Lorsque vous...
Je croyais qu'on aurait peut-être plus d'échanges de points de vue
à ce sujet, avec la Chambre des notaires.
M. Gilbert: On a à peu près la même opinion.
Il y a peut-être juste une... Établissons que le claim, le permis
d'exploitation: service des mines seulement. Le titre est final, on va au
bureau d'enregistrement pour le bail minier et les autres titres, les
transferts. Je ne comprends pas votre question.
M. Savoie: C'est cela. Est-ce que vous voulez les enregistrements
à l'Index des immeubles ou au registre foncier?
M. Gilbert: On le met plutôt secondaire. Peut-être
que mon confrère a des suggestions.
M. Savoie: C'est le notaire Lamontagne.
M. Gilbert: Mais, pour autant qu'on divise claim, permis
d'exploitation, service des mines, le titre qui sort de là, on n'en
parle plus parce qu'on a trop de problèmes et les titres, à mon
point de vue, sont très mauvais souhait.
On arrive avec un bail, on part du bureau d'enregistrement et on ne
s'occupe pas de ce qui précède. Là, je laisse la parole
à Me Lamontagne. On se comprend très bien?
M. Lamontagne: C'est un peu ce qu'on mentionnait tantôt.
Quand il s'agit d'un lot cadastré, on ne voit pas pourquoi il faudrait
se référer à un autre registre. À l'Index des
immeubles, on prend la peine de se référer à un autre
registre, faire une concordance. Pourquoi ne pas mentionner
immédiatement à l'Index des immeubles quels sont les droits
miniers enregistrés? Pourquoi prend-on la peine de se
référer à un autre registre quand on pourrait
immédiatement inscrire les droits?
M. Gilbert: Est-ce qu'il y aurait beaucoup d'actes à
partir du bail minier? Quasiment pas ou très peu.
M. Savoie: Des actes de fiducie, des affaires comme cela.
M. Gilbert: Alors, évidemment, c'est difficile de dire, M.
le ministre: On vous impose ceci. D'ailleurs, on ne peut pas imposer cela. On
est ici pour conseiller, on est bien d'accord là-dessus. Mais, cela
devient une question qui pourrait être discutée, mais pour autant
qu'on met notre fameuse transition entre nos claims, nos permis de
développement et qu'on commence au bureau d'enregistrement avec un
système là-bas. Me Lamontagne aimerait peut-être...
M. Lamontagne: Moi, je ne vois pas beaucoup de...
M. Lambert: M. le ministre, vous savez, la Chambre des notaires
intervient auprès de différents ministères lorsqu'ils
mettent de l'avant des projets de loi qui touchent dans le fond au territoire.
Je pense qu'il faut mentionner cela. On gère le territoire.
Le gouvernement du Québec a peut-être l'outil de gestion le
plus étendu, le plus vaste qui est l'ensemble des divisions
d'enregistrement et des bureaux où l'on retrouve les registres. Avec les
années, malheureusement, on a vu proliférer des registres
parallèles, et tout le monde essaie d'éviter le système
d'enregistrement. C'est devenu une vraie risée. Depuis deux ou trois
ans, partout où on intervient, on incite autant le gouvernement
fédéral que le gouvernement du Québec - mais d'abord, au
premier chef, je pense, le gouvernement du Québec, qui doit se servir de
ses propres outils - à revenir à cet outil qu'il a
créé qui est le réseau des bureaux d'enregistrement et les
territoires cadastraux.
C'est la même chose en matière de protection du territoire
agricole où, encore là, on faisait très peu usage des
registres qui existent. Alors, on dit: S'il y a des droits qui s'appliquent
à l'usage du fond, parce qu'on parle de l'usage en matière de
protection du territoire agricole, mettons-le là. C'est la même
chose qu'on vous suggère pour l'utilisation du sous-sol, parce que
finalement il y a toujours une référence au-dessus. Je comprends
bien que l'activité majeure de la mine se passe en dessous et à
une certaine profondeur, mais il reste que cela correspond toujours à
une gestion en surface. Je ne vois pas pourquoi, à ce moment-là,
lorsqu'un registre existe, on ne l'utilise pas. C'est la position qu'on
maintient. On voudrait que, finalement, le bureau d'enregistrement soit
l'endroit où on puisse constater tous les droits qui touchent à
l'immeuble, au fond.
M. Savoie: Oui, c'est cela. C'est parce que la structure du
droit... Par exemple, on me dit qu'on peut hypothéquer un claim.
M. Gilbert: Mais là...
M. Savoie: Alors, comment fait-on pour enregistrer
l'hypothèque sur un claim?
M. Gilbert: Au Service des mines parce que votre projet de loi
dit: iI n'y a qu'un seul système d'enregistrement avant
l'émission du bail.
M. Savoie: On ne peut pas créer une hypothèque
à l'extérieur du Code civil, tout de même.
M. Gilbert: Non, mais votre système d'enregistrement est
au Service des mines. C'est ce que vous dites dans votre projet de loi. Vous
dites: Vous ne serez plus obligés
d'enregistrer au bureau d'enregistrement, ce que vous ne faisiez pas
avant. Vous en êtes dispensés parce que vous êtes avant le
bail minier. Si vous n'avez qu'un claim ou un permis d'exploitation, vous
n'êtes plus obligés d'enregistrer au bureau d'enregistrement comme
c'était obligatoire avant. Vous le faites enregistrer au Service des
mines. C'est ce que votre projet de loi dit, à moins que je le comprenne
mal. On n'a plus d'enregistrement au bureau d'enregistrement avant le bail
minier. Tout ce qui précède, vous nous dites: On vous en dispense
parce que vous ne le faites pas. Cela crée un paquet de
problèmes.
J'admire beaucoup l'idée qui est mise dans votre projet de loi
sur les mines. C'est qu'au lieu de créer des imbroglios et de mettre le
monde dans l'embarras et d'être contraire et d'être illégal,
on dit: Vous ne voulez pas le faire, ne le faites plus. Faites-le au Service
des mines par exemple.
M. Savoie: Je pense que cela clarifie grandement les
problèmes d'enregistrement qu'on avait où on devait enregistrer
comme cela devait se faire.
M. Gilbert: Exactement. Vous avez bien raison dans votre projet.
C'est une beauté.
M. Savoie: Merci. L'autre affaire, c'est qu'un claim qui
s'enregistre à Québec, c'est le transfert. Lorsqu'on veut
créer un droit sur un claim, c'est là l'avantage du registre
foncier. C'est que là, où on pouvait enregistrer un droit sur un
claim...
M. Gilbert: Ils ne pourront pas le faire...
M. Savoie: Un permis spécial.
M. Gilbert: ...et cela va se faire seulement au service des mines
où ils devront avoir le registre pour cela. Il va falloir que le Service
des mines ait son service pour les claims et les permis d'exploitation. Il a
son système d'enregistrement qui va être valable. Avant cela, pour
être légal, on était obligé d'enregistrer aux deux
endroits. Il y avait des privilèges et toutes sortes de choses, mais on
ne les enregistrait pas au bureau d'enregistrement. Donc, c'était
illégal. Tandis qu'aujourd'hui, vous dites: On donne la
bénédiction. Tu es trop paresseux pour le faire là-bas, on
te permet de le faire.
M. Savoie: D'accord.
M. Gilbert: C'est cela que vous dites dans votre projet et c'est
ce que j'ai trouvé beau.
M. Savoie: D'accord. Je pense que... Oui?
M. Mackay (Julien S.): Il y a un parallèle qu'on peut
faire avec les terres publiques. Aussitôt que le droit est sorti de la
couronne, il faudrait que le seul registre qui puisse le recevoir soit celui du
bureau d'enregistrement, pour autant qu'il y ait un cadastre. C'est un autre
problème pour les terres non cadastrées. Le registre du
ministère va pouvoir le donner. Mais là où il y a danger,
c'est qu'il y ait deux registres parallèles. Dans les terres publiques,
c'est ce qui est arrivé. Le ministère avait son enregistrement.
Il émettait un billet de location et là, au fur et à
mesure qu'il y avait des transferts, les gens devaient notifier le
ministère de l'Agriculture et de la Colonisation. Mais on a permis quand
même que, parallèlement, on puisse enregistrer au bureau
d'enregistrement local pour les terres cadastrées. Ce qui est
arrivé, c'est que des gens ont eu une apparence de droits pendant 80 ou
90 ans - le président en a eu un l'été dernier - et ces
gens ont seulement une apparence de droits. Mais comme le titre n'a jamais
été donné officiellement par la couronne, elle a dit: Nous
avions notre propre registre qui n'a pas été suivi. Alors, on
leur dit: II devrait y avoir un seul registre à partir du moment
où le titre sort de la couronne. Le seul registre qui devrait être
respecté, c'est celui maintenu dans les bureaux d'enregistrement et
qu'on appelle l'Index des immeubles. Antérieurement à la sortie
de la couronne, par exemple, dans le cas d'un claim, c'est le seul registre qui
va être maintenu au ministère. Dans les cas où il n'y a pas
de terres cadastrées, cela va être encore le registre du
ministère. C'est le seul endroit où on va pouvoir communiquer.
Mais on saura qu'on n'a pas à vérifier à un endroit ou
l'autre. Il n'y a qu'un seul registre tant que le droit de la terre n'est pas
sorti de la couronne. Une fois qu'il est sorti de la couronne, c'est le
système des bureaux d'enregistrement.
M. Savoie: Je suis d'accord pour dire qu'effectivement, il ne
devrait avoir qu'un seul registre ou registrateur dès que le droit sort
de la couronne. Cela doit relever des bureaux d'enregistrement. C'est là
qu'on doit travailler. C'est là qu'on doit tout trouver. À ce
moment-là, on fait face à la situation. Est-ce qu'on peut
transmettre tous ces droits à même l'Index aux immeubles ou est-ce
que la création d'un autre registre, avec tous les inconvénients
que cela comporte, est absolument nécessaire? D'après ce qu'on me
dit, la réflexion faite, ils sont arrivés à la conclusion
que la seule façon convenable d'administrer les droits était un
registre foncier spécifique au droit minier.
M. Lambert: Je pense qu'on peut vous inviter, M. le ministre,
à regarder à nouveau cette proposition. Évidemment, la
décision
vous appartient. Mais je pense que ce qu'on essaie de souligner, c'est
la différence lorsque les droits sont à caractère plus
temporaire ou plus éphémère. La couronne les
contrôle beaucoup plus au premier registre. Dès l'instant qu'on
les concède avec un terme plus long, avec un droit plus précis
qu'on accorde, à ce moment-là, on le dépose, on le notifie
au registre qui existe actuellement dans les bureaux d'enregistrement qui est
l'Index des immeubles. Je pense que si on prend cette division, c'est pour les
gens de s'y retrouver. Si on parle d'un claim ou d'un permis, on sait que c'est
un premier registre qui sera le vôtre. S'il s'agit d'un bail ou d'une
concession - on parlait de patente à ce moment-là - c'est le
bureau d'enregistrement, c'est l'Index des immeubles. En tout cas, on vous le
soumet.
M. Savoie: Oui. (10 h 45)
M. Lamontagne: Je veux simplement indiquer qu'en ce qui concerne
les permis et les claims qui seraient enregistrés au 5ervice des mines,
en vertu de la règle de l'accessoire qui suit le principal, je ne vois
pas pourquoi une hypothèque ne pourrait pas être
enregistrée au Service des mines si la loi le prévoit. D'autres
lois prévoient l'enregistrement de charges ailleurs qu'au bureau
d'enregistrement. Pour vous donner trois ou quatre exemples:
l'hypothèque maritime; en ce qui concerne l'aéronautique, les
hypothèques sur les avions ne s'enregistrent pas au bureau
d'enregistrement. En vertu de la Loi sur les banques, à l'article 178,
pour mémoire, cela s'enregistre à la Banque du Canada. Donc, il y
a moyen de prévoir dans la loi que les charges relatives aux claims ou
les transferts s'enregistrent au Service des mines.
M. Savoie: Je vais céder la parole à M. Claveau, le
député d'Ungava et, ensuite, je reprendrai pour la
clôture.
Une voix: II va vous rester quatre minutes.
M. Savoie: D'accord.
Le Président (M. Baril): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
remercier les représentants de la Chambre des notaires du Québec
pour l'excellente présentation qu'ils nous ont faite sur le projet de
loi 161. Je comprends très bien tout l'aspect technique que vous avancez
là-dedans étant donné que c'est peut-être avec cela
que vous avez à travailler le plus souvent. J'ai été
agréablement surpris en constatant le retour que vous faites sur la
question d'un code du domaine public étant donné qu'on en avait
déjà parlé au moment de la présentation du projet
de (ai 102 sur les terres et que I'idée avait même commencé
à germer d'une certaine façon au moment de votre
présentation sur la Loi sur les forêts l'automne dernier. Je vois
que c'est quelque chose qui prend encore et qui, de commission parlementaire en
commission parlementaire, devient plus évident, plus cernable. Je ne
peux que souhaiter que vous continuiez sur cette lancée jusqu'à
ce que le léqislateur ait enfin décidé d'accepter votre
point de vue et de faire en sorte que l'ensemble des interventions dans le
domaine public relèvent d'un même code, d'une même
éthique, d'une approche conjointe et non parallèle comme on a
tendance à le voir assez souvent.
J'aimerais vous poser une première question concernant, entre
autres, la page 17 de votre mémoire où vous parlez de l'article
154 du projet de loi 161. Vous semblez très préoccupé par
le fait que l'on ne prévoit pas dans la loi de mécanisme de
protection pour les propriétaires fonciers ou toute personne qui
pourrait être lésée dans ses droits à cause d'une
intervention minière, tant dans l'exploration que dans l'exploitation.
Quand vous faites référence à l'île Siscoe que vous
donnez comme exemple, je suppose que vous parlez là du problème
d'utilisation de l'eau à l'île Siscoe, problème d'ailleurs
que Cambior aura à traiter dans les prochaines semaines et auquel il
devra trouver une solution. Vous revenez aussi sur la même chose deux
pages plus loin, à la page 19. On fait référence à
une procédure qui s'applique dans les cas d'expropriation et vous
demandez pourquoi la même procédure ne pourrait-elle pas
être utilisée en ce qui concerne les dommages causés par le
propriétaire d'un claim ou d'un permis de mise en valeur sur un terrain
privé? À mon point de vue, cela fait référence
à votre critique de l'article 154 qu'on avait deux pages avant ou, du
moins, cela va dans le même sens. Vous faites référence,
entre autres, à l'article 277 de l'actuelle Loi sur les mines qui dit:
"Toute personne qui subît des dommages dans ses biens ou dont les droits
sont lésés par suite de travaux miniers, a droit de recevoir une
indemnité du responsable de ces travaux, conformément aux lois du
Québec."
On continue dans la même veine à la page 25 où vous
parlez de la protection du territoire agricole. Vous dites: "Rien dans cette
loi ne permet à la commission de protéger le propriétaire
de la ferme." Je vois que c'est une préoccupation fondamentale pour
vous. J'aimerais vous entendre expliquer la façon dont, d'après
vous, on pourrait légalement articuler dans la nouvelle loi, un genre
d'éthique qui ferait en sorte que l'ensemble des droits des
résidents du Québec seraient protégés contre toute
intervention minière qui pourrait leur être dommageable.
M. Gilbert: D'abord quant à la question de l'article sur
les dommages, c'est moi qui l'avais demandé en commission Langevin,
parce que j'avais eu le cas d'un colon, de la compagnie North Trinity et qui
avait fait un puits et avait reçu une subvention d'environ 800 $ ou 900
$ pour faire son puits. À un moment donné, rendu au
quatrième niveau, mon colon n'avait plus d'eau dans son puits. Je
l'avais alors demandé spécifiquement, parce que la compagnie...
Je le regrette et je suis obligé de l'avouer, j'en étais le
secrétaire, et on n'avait plus une "maudite cenne" quand il a
porté plainte. Il a perdu son puits.
Dans le même ordre d'idées, si Je gouvernement avait un
représentant qui était nommé. Autrefois, il y avait le
juge des mines. C'est malheureux que le juge des mines soit disparu aujourd'hui
parce que ce juge avait une belle fonction et une belle expérience. Si
un conciliateur était nommé par le gouvernement, lorsqu'il y
aurait un problème, la personne, au lieu d'aller plaider, au lieu
d'attendre d'être dépouillée ou de risquer qu'une compagnie
devienne insolvable par la suite, une fois que les dommages sont causés
et qu'ils ne sont plus capables de payer, ce serait immédiatement et le
gouvernement pourrait avoir des officiers spéciaux ou des conciliateurs
qui pourraient intervenir. La personne pourrait s'adresser au gouvernement et
lui dire: Protégez-mot! Je suis un pauvre diable. Je n'ai rien et je ne
veux pas perdre le peu qui me reste. Il ne me reste qu'une petite cabane et un
petit terrain, mais, "mautadit", je veux être protégé pour
avoir encore de l'eau à boire. Comprenez-vous? S'il y a un danger
quelconque, qu'il y ait un service de conciliation donné par un
conciliateur. Très souvent, cela exempterait des procès.
C'est le même ordre d'idées dans le cas des expropriations.
Je l'ai demandé à des compagnies. Elles m'ont dit que notre
pouvoir d'expropriation était trop long, que ça n'avait pas de
sens. Souvent, si on avait un conciliateur... Après trois semaines ou un
mois, peut-être qu'une conciliation serait faite avec l'exploitant
minier. Mais il faut toujours qu'il y ait un procès avant d'avoir des
résultats. Qu'on ait un conciliateur. Il y a de la conciliation dans les
syndicats. Pourquoi les syndicats ont-ils des conciliateurs et que nous n'en
avons pas sur les questions minières? Qu'on en nomme un.
Autrefois, il y avait une personne qui était attitrée
à cela, c'était le juge des mines. Mais on l'a retiré.
Pourquoi? Je ne sais pas. Je ne critique pas et je ne fais pas de politique,
moi. Je vous parle du principe où l'on doit protéger le pauvre,
comme on fait avec la Loi sur la protection du consommateur. Disons qu'il
pourrait survenir quelque chose à un moment donné où un
pauvre diable est fait, oh! il appelle son député et lui dit:
Écoutez... Ah! Je vous envoie au service des mines où on a un
service spécial à cet effet. Ils vont aller voir. Parfois, cela
peut se faire entre pauvres diables. Par exemple, le qars qui a une
exploitation et qui a un "crane". Il passe avec son camion sur le terrain et il
cause des dommages. Supposons que l'exploitant ou le gars qui a le "crane"
n'est pas tellement riche, et qu'il existe un service de conciliation entre les
deux, ça se ferait avant d'en arriver au procès qui prend souvent
cinq ans avant d'être réglé. C'est ce qu'on demande. C'est
ce qui pourrait être appliqué dans le cas des expropriations
également, de même qu'à tous les autres problèmes
qui traînent.
Je parlais à un exploitant minier du service d'expropriations et
il disait: Ah! C'est trop long. On ne s'en sert pas. Donc, on ne fait pas
d'exploitation minière où on pourrait en faire. Ce n'est pas
seulement pour la protection du pauvre diable, c'est pour que la question des
mines fonctionne. Donc, que le gouvernement veille à nommer un
conciliateur ou une personne qui peut servir... Quand il y a une chicane avec
des syndicats, qu'est-ce que vous faites? Vous nommez des conciliateurs. Dans
ce cas-ci, il pourrait y en avoir, sans que ce soit autant... Ecoutez,
l'idée est encore à l'état de l'ébauche mais qu'il
ait quelque chose qui nous permette de circuler. On reproche toujours au
système gouvernemental de prendre beaucoup de temps. Il nous faut
quelque chose pour fonctionner. Dans les mines, quand le fer est chaud, c'est
le temps de fonctionner et on a besoin que cela fonctionne, dans ce
domaine.
La pauvre diable, lui, qui est mal pris, il appelle tout de suite au
Service des mines et demande qu'on lui envoie quelqu'un parce qu'il a tel ou
tel problème. D'accord, On va examiner le problème et on essaie
de procéder par conciliation et cela peut parfois se régler dans
peu de temps. C'est le principe de ce que vous m'avez demandé, monsieur.
Est-ce que j'ai bien répondu à votre question?
M. Claveau: Vous avez été très explicite et
je vous remercie de votre réponse qui me semble être très
complète. Par ailleurs, vous avez fait une référence dans
la réponse au fait qu'un propriétaire pouvait être
lésé dans ses droits parce qu'un propriétaire de claims
doit passer sur ses propriétés pour avoir accès à
ses claims. Dans la loi, on prévoit un mécanisme qui obligerait
le propriétaire du droit minier à demander à un tiers qui
devrait utiliser son territoire, un droit de passaqe ou un droit d'utilisation;
ce qui n'existe pas pour le moment.
M. Gilbert: Ne vous fiez pas à cela. En
fait, l'exploitant est pressé et la première nouvelle
qu'il a, c'est qu'il s'en va à son chalet et il s'aperçoit qu'il
y a un paquet d'arbres par terre et des gars ont commencé à
couper cela, mais ils doivent revenir le lundi. Voulez-vous mettre en
application ce que vous me dites ou si le gars n'est pas mieux d'appeler le
service des mines et de dire: On va t'envoyer un inspecteur minier tout de
suite lundi. Vous ne trouvez pas que c'est plus pratique d'avoir des mesures
préventives?
M. Claveau: C'est ce que je voulais vous demander dans le fond.
Du côté des prospecteurs, on semble s'opposer fortement à
cette mesure qui va les obliger à demander des droits et des permissions
à tout le monde pour avoir accès à leur territoire. D'un
autre côté, on a des revendications de la part de ceux qui ont un
terrain de chalet ou un camp de chasse où l'on passe, pas
nécessairement pour qu'il se fasse de l'exploration sur leur
propriété, mais que leur propriété doive être
traversée par les prospecteurs pour arriver à leur claim. Vous
pensez qu'un mécanisme de conciliation soit suffisant pour régler
le problème?
M. Gilbert: Voici. J'ai les deux genres de clients. Les deux me
consultent là-dessus. À Val-d'Or, on est une petite paroisse, en
fin de compte, ce n'est pas le centre de Montréal. Alors, tout le monde
se connaît. J'ai les deux genres de clients et ils peuvent se concilier
facilement. Il s'agit de les faire se rencontrer. On a un inspecteur minier qui
immédiatement irait les voir et leur parler. C'est ce que l'on demande.
Cela peut être un inspecteur ou autre, mais qu'il y ait un
représentant nommé par les mines pour régler ces petits
problèmes. On avait un inspecteur minier autrefois, on n'en entend plus
parler sur ces questions. Mais c'est ce que l'on dit: il faudrait
peut-être nommer quelqu'un qui pourrait avoir un certain pouvoir de
conciliation. Il sera toujours temps d'aller se chicaner et de se donner des
coups de bâton sur la tête, mais avant c'est la mesure
préventive et expéditive qu'il faudrait rechercher. Est-ce que je
vous demande trop, M. le député ou M. le ministre?
M. Claveau: Non. II y a juste un ministre ici et il est de
l'autre côté. Dans la même foulée, que pensez-vous de
la question de l'arbitrage par le tirage au sort concernant les gens, tous ceux
qui feraient des demandes de claims en même temps?
M. Gilbert: C'est un système général qui
manque. Pourquoi les syndicats l'ont-ils en vertu de la loi sur le travail et
pourquoi l'a-t-on dans différentes lois? Pourquoi n'aurait-on pas le
même principe? Là, je ne sais pas jusqu'où cela doit aller,
mais il faudrait que j'étudie cela de façon très
détaillée, pour vous répondre, mais au point de vue du
principe, c'est d'avoir des mesures expéditives qui peuvent servir de
conciliation.
J'ai mal répondu, mais c'était ce que je voulais dire.
Dans ces circonstances, le tirage au sort, j'y crois plus ou moins. Si on
faisait une analyse des faits, peut-être que ce serait... Faites votre
tirage au sort, mais après l'analyse des faits par l'arbitre, si vous
voulez. (11 heures)
M. Claveau: Moi non plus je ne veux pas faire de politique, mais
c'est le ministre qui veut tirer au sort. Nous, on est contre cela. Nous
croyons effectivement qu'il y a moyen de régler des problèmes sur
le terrain. On sait que cela arrive à l'occasion que deux prospecteurs
vont mettre leur "tag" en même temps sur un territoire et la plupart du
temps ils s'entendent sur le terrain pour dire: Tu passes par là, moi je
passe par là et on ne se fait pas de difficulté. On ne voit pas
pourquoi on obligerait ces gens ou on les mettrait dans une situation qui les
inciterait à aller au tirage au sort chaque fois sous prétexte
qu'ils vont en gagner plus. Ce sont des gens qui aiment cela... Ce sont un peu
des "gamblers" aussi. Je pense que cela peut les inciter à aller au
tirage au sort régulièrement pour régler les litiges.
Est-ce que vous partagez mon point de vue?
M. Gilbert: J'avoue que je suis assez mal pris. En fait, le
piquetage n'est pas toujours fait. Très souvent, c'est ce qui arrive. Il
y a une autre hypothèse, on suppose que le piquetage a été
très bien fait. En pratique, je ne crois pas que cela puisse arriver
exactement si on va au fond de la situation. Parce que quand il y en a un qui
voit qu'un autre est en train de piqueter, il coupe et il va vers un autre
district. Comment voulez-vous qu'il soit au même coin à la
même heure le matin? C'est passible. Je sais que les gars se
lèvent de bonne heure et souvent, à 7 heures cela démarre.
Si réellement il le faisait à fond, le tirage au sort je pourrais
l'accepter. J'avoue que je suis un peu mal placé pour me prononcer d'une
façon ou d'une autre.
M. Claveau: D'accord. On va changer de sujet. Je voudrais revenir
sur la question des 300 pieds de profondeur que vous préconisez comme
droit de propriété dans la roche mère. C'est
peut-être un hasard, mais vous faites votre approche à partir du
respect des cimetières et d'autres situations semblables pour
éviter que se produise - comme vous disiez - un nouveau Belmoral.
J'aimerais que vous m'expliquiez la raison pour laquelle vous partez de
300 pieds
et non pas de 450 ou de 200? Pourquoi ne prenez-vous pas les limites qui
doivent être respectées sous les lacs ou des trucs semblables?
M. Gilbert: L'idée est venue du Dr Morin, un
spécialiste en mines, qui a dit: On ne devrait jamais toucher aux 300
premiers pieds du "bedrock". On ne devrait jamais y toucher, c'est trop
dangereux. En venant à cela, notre propriétaire foncier est
menacé de tout perdre avec l'article car il a seulement la surface, et
c'est tout ce qu'il a. Il a le mort-terrain et la couche arable. Il n'a
même plus le droit, si on va plus loin, et l'interprétation qu'on
craint, c'est qu'il n'ait même plus le droit d'aller placer son solage
sur le "bedrock". Si vous lisez l'article, cela sera interprété
un jour comme signifiant cela. J'en ai énormément peur.
Il faut que notre propriétaire ait droit à une certaine
profondeur. Pourquoi 300 pieds, pourquoi pas 305, 295? L'origine vient du Dr
Morin qui a parlé de 300 pieds. Nous on a dit: D'accord. On fonctionne
avec vous pour 300 pieds. La couche arable, le mort-terrain et les 300 pieds et
on dit au propriétaire foncier: Avant, vous aviez tout, mais au moins on
vous laisse cela. S'il y a du minerai, on vous expropriera pour vous l'enlever,
mais au moins, vous savez que vous avez cela. C'est ce principe qu'on veut
avoir, qu'il y ait cela. Notre propriétaire foncier se fait
dépouiller et nous on veut le protéger. Il faut qu'il ait quelque
chose qui soit certain. Actuellement, il n'a plus rien. On craint cela. J'ai
peur que l'article tel qu'il va être interprété, dans le
sens où il ne restera plus rien au propriétaire foncier. Il va
peut-être être obligé d'aller voir au ministère des
mines et dire: Comment m'allouez-vous de pieds pour que je puisse mettre mon
solage sur le roc? J'ai peur de cette interprétation. La porte sera
ouverte.
M. Claveau: Je vous remercie de vos réponses. Est-ce qu'il
me reste encore beaucoup de temps?
Le Président (M. Cannon): II vous reste quatre minutes, M.
le député.
M. Claveau: Quatre minutes, on a pratiquement fini. Si le
ministre veut prendre son temps de parole, je pourrai terminer.
Le Président (M. Cannon): II vous reste trois minutes.
M. Savoie: Vous me laissez vos quatre minutes?
Le Président (M. Cannon): Je ne crois pas qu'il y ait
consentement.
M. Savoie: Évidemment, votre mémoire contenait
plusieurs éléments dont plusieurs font suite à une
analyse, et je crois qu'il y a moyen de s'entendre sur l'ensemble des
recommandations que vous avez faites. On comprend bien la situation de la
Chambre des notaires en ce qui concerne le registre foncier, on trouve cela
louable. Toutefois, on me dit que techniquement on n'est pas capable
d'administrer un cadastre de surface et un cadastre souterrain. Cela
présenterait trop de difficultés. On est techniquement devant une
impossibilité, d'une part les coûts d'administration seraient
énormes, et le registre foncier, le registre minier, présente des
avantages très marqués. Alors, étant donné que cela
avantage également l'exercice de la profession, vous comprendrez
que...
Pour ce qui est des 300 pieds, Me Gilbert, je sympathise beaucoup avec
votre position, mais il y a un autre principe qui entre en ligne de compte. Il
y a le droit de propriété, bien sûr, mais il y a un autre
principe qui dit que les minéraux appartiennent à
l'État.
M. Gilbert: Quel est l'autre principe?
M. Savoie: Les minéraux appartiennent à
l'État. Ce ne sont pas les minéraux après 300 pieds, ce ne
sont pas les minéraux après 250 pieds. Les minéraux
appartiennent à l'État. Vous comprendrez qu'il y a une opposition
de principe concernant le jeu de tomber sur un chiffre. Il va bien sûr
falloir y réfléchir parce que je suis au courant aussi qu'il y en
a eu souvent, et qu'il va continuer à y en avoir, j'imagine, tant qu'on
n'aura pas trouvé une solution satisfaisante concernant la cohabitation
des deux droits de propriété, et cela va continuer à
exister. On devra continuer à faire face à cela et je sympathise
beaucoup avec les cas auxquels vous avez fait référence. On y est
sensible. J'en ai vu lorsque je pratiquais à Val-d'Or, c'est souvent
difficile. Il faut comprendre que l'État ne peut renoncer aux 300
premiers pieds.
M. Claveau: Voici, on parle de ceci. Le minerai, s'il y en a,
à ce moment c'est facile et que le gouvernement dise: D'accord, je donne
le minerai en exploitation, on accorde la concession. Mais pour l'exploiter, la
personne devra exproprier le propriétaire. Alors, vous ne perdez pas
votre minerai.
M. Savoie: Je crois que c'est l'article 114.
M. Gilbert: Oui, mais que cela soit clair car si le
propriétaire veut hypothéquer, ou s'il veut faire n'importe quoi,
qu'il se dise qu'il a au moins cela. Et on ne l'attaque pas. Tandis que, si on
fait des travaux dans les 300 pieds, et qu'il ne veut pas se ramasser dans le
fond. Ce qui arrive c'est
qu'on gruge ses 300 pieds. Comprenez-vous? C'est qu'il y a une
sécurité. Que le gouvernement garde son minerai, qu'il
s'enrichisse avec, on paiera moins de taxes, d'accord. Mais que le
propriétaire foncier ait un minimum... Avant cela, l'opinion de Cardinal
disait: À l'infini. Là, il est rendu qu'il n'a plus rien. Il n'a
plus que sa couche arable. Il dit: Écoutez les gars, on va faire un
moyen terme. Mais si tu as besoin d'aller chercher des minerais jusqu'à
300 pieds, exproprie-moi, et prends-le. Cela ne me donne pas ton minerai, mais
au moins j'ai ma garantie que j'ai telle chose. Est-ce que
j'exagère?
M. Savoie: Non, notaire Gilbert. Je pense qu'il y aura lieu de
continuer notre discussion à un autre moment. On m'avise que mon temps
est terminé. Je voudrais remercier sincèrement la Chambre des
notaires pour avoir présenté un mémoire. Cela nous a
permis de revoir plusieurs des positions qu'on avait prises, cela nous a permis
également d'en modifier quelques-unes et de porter poids à ceux
qui présentaient la même argumentation. J'aurai certainement
l'occasion de continuer mes discussions avec le notaire Gilbert à
Val-d'Or. Cela me fera un grand plaisir.
Est-ce que tu prends tes quatre minutes?
M. Claveau: Je vais prendre au moins deux ou trois de mes quatre
minutes.
M. Savoie: M'en donnez-vous une?
M. Claveau: Je vous en demanderai une pour...
M. Savoie: Allez-y, je vous laisse la parole.
M. Claveau: Si le ministre veut prendre trois ou quatre...
Le Président (M. Baril): Est-ce que vous voulez terminer,
M. le ministre?
M. Savoie: Oui. Je voulais savoir, pour ce qui est des
modalités d'enregistrement, est-ce que la technique est à votre
satisfaction une fois qu'on a accepté le principe du registre
minier?
M. Gilbert: C'est Me Lamontagne. Quant à moi, je vais me
plier facilement. C'est surtout le point de Me Lamontagne.
M. Lambert: M. le ministre, il y aurait peut-être lieu de
vous souligner qu'en droit civil québécois il existe une telle
chose et qu'un acte qui est un peu meilleur que les autres. C'est un participe
de notre spécificité en droit comme la langue française et
c'est l'acte authentique. Dès qu'il est question de constater des droits
importants, moi, évidemment, je me fais l'apôtre de recourir au
meilleur moyen qui est l'acte authentique. On n'en a pas parlé dans le
mémoire, mais je ne vois pas pourquoi ces droits ne seraient pas
constatés par un acte, par exemple, où il est impossible de
trafiquer la date et où l'identité des parties est certaine.
C'est un fait qui est reconnu, qui est un instrument particulier de notre droit
privilégié par notre droit. Pourquoi, n'y recourrait-on pas? Je
vous laisse faire votre réflexion.
Si c'est ma dernière occasion, je prends dix secondes avec la
permission du président, peut-être M. le ministre, pour vous dire
que l'activité des mines comme celle des pêches, comme celle de
l'aéronautique, toutes les activités sont là pour le
bénéfice des citoyens du Québec qui, eux, vivent assis sur
un territoire. Je pense qu'il y a lieu dans l'art du possible qui est de
gouverner, de faire un compromis. Je pense que les 300 pieds dont on parlait
tantôt participent à ce genre de compromis. Merci.
Le Président (M. Baril): Je vous remercie. Pour terminer,
M. le député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Peut-être une
dernière question pour un petit éclaircissement. Vos commentaires
par rapport à l'article 8 où vous dites: Cet article est
nécessaire car il y a plusieurs conflits à ce sujet. Par contre,
l'article 8 qui est très court et qui se lit comme suit: "Les
résidus miniers appartiennent au propriétaire du sol sur lequel
ils ont été déposés avec son consentement", me
semble être un texte ex-cathedra. Je veux dire vraiment sur lequel on n'a
plus à discuter. Dans un premier temps, ne croyez-vous pas que le texte
pourrait être un peu plus flexible ou devrait du moins comporter,
peut-être des modalités d'entente? II peut arriver qu'il y ait des
résidus miniers qui puissent avoir une valeur commerciale plus tard,
mais qu'on ne peut exploiter en ce moment, et que le propriétaire puisse
être intéressé à en garder la
propriété, même s'ils ne sont pas entreposés sur ses
terrains, ce qu'il ne pourrait pas faire en fonction de cet article tel que
rédigé? D'autre part, quand vous nous dites dans votre
mémoire, en page 10, qu'il y a plusieurs conflits à ce sujet,
est-ce que vous pourriez nous donner des exemples de conflits existants dans le
moment? -
M. Gilbert: Oui, vous en avez eu ici, le ministère des
Mines a été obligé de donner une opinion. Dans le temps,
c'était le notaire Hamel. C'était une carrière de pierre
à Saint-Marc-des-Carrières. En tout cas, Me Hamel a eu un
problème à régler. Je me
rappelle qu'on a communiqué ensemble à ce
moment-là. Moi, j'ai eu le même problème à Val-d'Or.
Juste l'autre bord de la voie ferrée, il y avait la compagnie Harricana
qui avait creusé un puits, et dans le temps, le prix de l'or
était très bas. À un moment donné, c'est la ville
de Val-d'Or qui a acheté le terrain. Il y avait un résidu minier
et il y avait une compagnie minière qui était
intéressée. C'est là qu'il y a eu un conflit. Je me
rappelle, j'avais parlé avec Me Hamel et je lui avais dit: On est tous
les deux de la même opinion. J'ai eu le problème de
Saint-Marc-des-Carrières à régler et là je donne la
même opinion.
Le résidu, c'est du restant, mais s'il reprend de la valeur et
que l'opérateur minier l'a jeté... Moi, si je jette mon mouchoir,
et qu'à un moment donné je m'aperçois que quelqu'un le
ramasse, je dis: C'était un souvenir de famille, mais, il y en a un qui
l'a ramassé et est parti avec. Je l'ai jeté mon "mosus" de
mouchoir. Comprenez-vous? J'ai fait une erreur, je l'ai jeté, c'est un
résidu. Si on le jette, jetons-le, décidons-nous.
Si le propriétaire de surface devient propriétaire par la
suite, et si l'autre revient après cela, à ce moment-là,
il n'a plus ses claims, il n'a plus rien. Comprenez-vous? II fait partie du
résidu du terrain. Le propriétaire en fin de compte, lorsque
l'opérateur minier a fini ses travaux, qu'est-ce qui arrive? Justement,
on demande de clarifier la loi à ce sujet. Qu'est-ce qui est
laissé dans le fond? Quand un autre prend un claim plus tard, que ce
soit clair, ce qu'il a laissé dans la mine. Le texte de loi n'est pas
tout à fait clair. Il parle de ce qui est laissé sur le terrain,
on voit cela dans un autre article, mais il ne parle pas de ce qui est
en-dessous. (11 h 15)
Alors, cela veut dire que tous les puits tout ce qui a été
mis dedans, celui qui prend le claim plus tard, l'ancien propriétaire ne
peut pas lui faire de réclamation. Ce n'est pas tout à fait clair
dans la Loi sur les mines. C'est écrit: Tout ce qui est laissé
sur le terrain, mais "sur" ne veut pas dire "en dessous". Si je mets mon crayon
sur la table et si je le mets dans le tiroir, ou plutôt quand je le mets
dans le tiroir, quelqu'un ne me fera pas prétendre que cela veut dire
que c'est dessus. L'article dit "sur", alors il faut qu'il y ait une
amélioration du texte qui dit "dessus" et "dedans". Celui qui prend son
claim minier, la situation est réglée, il le prend. S'il n'y a
pas de propriétaire de surface ou s'il y en a un qui a jeté des
résidus, à ce moment, il n'a plus droit parce que cela fait
partie de la surface.
Le Président (M. Baril): Me Gilbert, si vous voulez
conclure, s'il vous plaît. M. le député d'Ungava, notre
temps est terminé. Si vous avez autre chose, s'il y a un
consentement...
M. Claveau: On n'a malheureusement jamais assez de temps pour ces
discussions.
Le Président (M. Baril): Alors, si vous voulez conclure,
s'il vous plaît.
M. Claveau: Je vous remercie de votre présentation, au nom
de l'Opposition. Je croîs que vous avez un texte qui porte à
réflexion et surtout sur un tas de technicités qui, souvent, dans
la pratique, enfin, sur le terrain, semblent des choses anodines. Quand on a un
recul par rapport à l'activité du terrain et qu'on doit aller au
niveau de l'application du suivi légal de toutes les étapes, on
se rend compte que votre intervention est tout à fait justifiée
et tout à fait à point. Pour s'assurer que tout ce qui est
légal puisse être fait dans les meilleures conditions possible et
pour faire en sorte qu'après, on puisse travailler sur le terrain afin
de développer des sites miniers sans avoir de problèmes. Dans ce
sens, je tiens à vous dire que j'ai trouvé votre mémoire
particulièrement intéressant et que nous en tiendrons
sûrement compte au moment de la discussion du projet de loi pour un texte
final. Merci.
Le Président (M. Baril): Alors, messieurs de la Chambre
des notaires, je vous remercie beaucoup de vous être
présentés et, M. Gilbert, je vous souhaite un bon voyage de
retour. Je vous remercie.
M. Gilbert: Excusez-moi si j'ai trop parlé.
Le Président (M. Baril): Votre expérience, M.
Gilbert, va certainement servir à améliorer la Loi sur les mines.
Merci beaucoup.
M. Gilbert: Excusez-moi si j'ai trop parlé.
Le Président (M. Baril): Non, surtout pas. Alors,
j'appelle le Barreau du Québec, s'il vous plaît. Excusez-moi, on
va prendre deux minutes de répit pour laisser les gens se
dégourdir les jambes ou aller griller une cigarette parce que, avec la
nouvelle loi, nous devons respecter...
Une voix: ...
Le Président (M. Baril): Nous allons prendre deux minutes
de répit.
(Suspension de la séance à 11 h 18)
(Reprise à 11 h 23)
Le Président (M. Baril): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Si le secrétaire voudrait bien prendre place, s'il vous
plaît.
Messieurs du Barreau du Québec, si vous voulez bien vous
présenter.
Mesdames et messieurs, je vous souhaite la bienvenue. Je tiens à
vous faire remarquer que vous avez une heure, soit 20 minutes pour
présenter votre mémoire, 20 minutes pour le côté
ministériel et 20 minutes pour les membres de l'Opposition. Je vous
laisse la parole.
Barreau du Québec
M. Ménard (Serge): Je vous remercie.
Le Président (M. Baril): Si vous voulez vous
présenter, s'il vous plaît, pour les rapports de
l'Assemblée.
M. Ménard: C'est ce que j'allais faire. Je vous
remercie.
Je suis Serge Ménard, bâtonnier du Québec. Je suis
accompagné ce matin, à ma droite, de Me Suzanne Vadboncoeur qui
est directrice de notre service de recherche. À ma gauche, Me Jacques
Beausoleil et à mon extrême droite, Me Jean Roberge.
Le Barreau est heureux d'avoir répondu à l'invitation du
ministre Raymond Savoie pour commenter le projet de loi 161 sur les mines. Nous
le faisons, tout en étant conscients que c'est dans l'exercice de notre
rôle de protection de l'intérêt public. Nous
réalisons qu'il est important de concilier dans un projet de loi comme
celui-là, plusieurs notions comme le fait que les minéraux du
Québec sont une richesse naturelle et un patrimoine collectif. Par
contre, il faut assurer aussi aux investisseurs qui investissent des capitaux
considérables, et à ceux qui ont l'imagination et le sens du
risque de se lancer dans cette activité, la sécurité de
leurs investissements et l'assurance que le profit de leur travail n'ira pas
à d'autres, et qu'ils n'en seront pas privés de façon trop
arbitraire. Dans tout cela, on est conscients aussi que les travaux miniers
sont dangereux et qu'il est important de diminuer ces dangers le plus possible,
et d'en assurer la plus grande sécurité.
Le Barreau ne veut absolument pas s'immiscer dans la politique
minière du gouvernement qui est élu pour choisir cette politique.
Nous nous contentons de faire des suggestions sur l'aspect juridique et
concernant la protection des droits des citoyens, droits qui y sont
accordés. Aussi, le Barreau est heureux de venir ici parce que nous
estimons que nous pouvons avoir accès à des bassins de
compétence contradictoire, et que c'est là un désavantage.
Nous pouvons toujours réunir des représentants, pour ainsi dire,
des deux côtés, ou des gens qui ont acquis leur expertise dans
divers milieux. C'est ce que nous avons fait pour préparer le rapport de
ce comité. Nous nous sommes entourés de Me Jacques Beausoleil qui
est ici d'ailleurs. Me Jacques Beausoleil a travaillé huit ans au
ministère des Richesses naturelles. Il s'est exclusivement occupé
des mines. Il est maintenant en pratique privé et ne fait que du droit
minier. II y a Me Jean-Paul Lacasse qui nous a aidé également, et
qui a sa maîtrise en droit. De plus, il a fait sa thèse en droit
minier. II est aussi l'auteur d'un des seuls volumes qui soit publié en
droit minier au Québec. Lui aussi a consacré toute ss vie
professionnelle à ce droit. Me Jean Roberge a passé six ans aux
ministère des Richesses naturelles. Depuis un an, il est adjoint au
directeur général de l'Association des mines et métaux du
Québec. Il a donc, encore, lui aussi, consacré toute sa pratique
professionnelle dans ce domaine.
Me André Valiquette est un avocat d'expérience -
au-delà de 25 ans d'expérience - et a consacré toute sa
pratique au droit minier. Me Suzanne Vadboncoeur est la directrice de notre
service de recherche et elle présentera notre rapport. Quant à
moi je n'ai pas d'autre compétence, mais il me semble que ce soit
suffisant pour d'autres d'avoir été élu par l'ensemble de
mes confrères. Le hasard a aussi voulu que j'aie à consacrer huit
ans de ma vie à enquêter sur un des plus importants
désastres miniers qui a eu lieu au Québec, à la mine
Belmoral dans les années quatre-vingt. J'ai été
particulièrement conscient de ce que voulait dire le capital de risques
en matière de mines, mais aussi la nécessité de
l'inspection pour assurer la sécurité des travailleurs.
Cependant, le Barreau tient à déplorer le peu de temps
qu'on lui a accordé pour étudier un projet de loi, qui nous
apparaît considérable et qui représente une refonte majeure
dans la Loi sur les mines. Nous estimons que dans des projets de loi de cette
importance, pour que nous puissions en faire une étude et vous livrer le
meilleur de l'expertise de nos membres, nous aurions généralement
besoin d'un peu plus de temps. Ceci dit, c'est quand même avec plaisir
que nous venons et nous sommes reconnaissants que vous nous ayez
consultés sur ce sujet. Je vais maintenant passer la parole à Me
Suzanne Vadboncoeur qui a travaillé plusieurs soirs et quelques nuits
à préparer ce rapport.
Le Président (M. Baril): Mme
Vadboncoeur.
Mme Vadboncoeur (Suzanne): Merci, M. le bâtonnier. M. le
Président, M. le ministre et M. le député, il me fait
plaisir de vous livrer le mémoire du Barreau qui, malheureusement,
compte tenu des remarques précédentes du bâtonnier, vous
est arrivé un peu tard. Vous avez cependant eu un plan
détaillé il y a déjà quelques semaines.
Alors, je vais vous résumer quand même la teneur du
mémoire.
Le mémoire commence avec des commentaires généraux,
à savoir que ce que l'on attendait était davantage une
réforme administrative de la loi. Or, on s'aperçoit qu'il s'agit
beaucoup plus d'un nouveau code minier qui change énormément de
choses, qui change beaucoup de pouvoirs, en accorde énormément
à l'administration, en enlève également au domaine
judiciaire. Donc, dans cette perspective, cela nécessite peut-être
un peu plus d'attention et une réflexion quant aux droits
conférés par ce projet de loi, notamment, les droits miniers qui
sont considérés par le projet de loi comme étant des
droits réels immobiliers, alors que plusieurs doivent plutôt
être considérés comme des droits personnels. Alors, il y
aurait peut-être une réflexion qui serait requise à ce
niveau-là, parce que, comme les juristes le savent, les droits
réels et les droits personnels doivent être traités de
façon bien différente et ont des conséquences
évidemment bien différentes pour les titulaires de ces
droits.
La première partie du mémoire concerne les structures que
l'on a divisées en structures administratives, d'une part, et structures
judiciaires et quasi judiciaires. Dans les structures administratives on parle
du registre des droits miniers et le comité du Barreau a trouvé
que la différence entre les deux registres, soit le registre du
ministère qui existe actuellement en vertu de la Loi sur les mines, et
le registre minier en vertu de l'article 2161 du Code civil du Bas-Canada
n'était pas tellement explicite. On parle aux articles 11, 12 et 13 des
deux registres, c'est-à-dire qu'on parle de certains droits qui sont
exempts d'enregistrement au bureau d'enregistrement. Par contre, on dit aux
articles 12 et 13 que tous les droits miniers, tous les transferts, enfin, tout
acte relatif au droit minier, doit être enregistré au registre des
droits miniers. Il y a peut-être un petit peu de confusion qui ressort du
texte du projet de loi.
Deuxièmement, au point de vue de la structure du projet de loi,
il est assez étonnant de retrouver l'énoncé des fonctions
du registrateur au chapitre de la propriété des substances
minérales, des réservoirs souterrains, de même qu'à
celui qui traite des droits miniers, alors que la loi actuelle consacre un
chapitre complet à l'administration et à l'énoncé
de ces fonctions. Il y aurait peut-être lieu de modifier la structure du
projet de loi à cet égard.
En ce qui concerne le registre des droits miniers, soit le registre du
ministère, on ignore s'il existera uniquement un seul registre ou s'il
en existera plusieurs. On ne sait pas où il sera. On ne connaît
pas vraiment les modalités d'accès à ce registre.
Peut-être que le projet de loi aurait avantage à le clarifier.
Quant au registre tenu par le registrateur, celui qui est prévu en vertu
du Code civil, on voudrait d'abord souligner une apparente contradiction entre
le nouvel article 2129v du Code civil du Bas-Canada et le nouveau paragraphe 6
de l'article 2161, qui font état tous les deux de la tenue d'une liste
alphabétique des titulaires de droits miniers. Il semble y avoir une
contradiction à cet égard.
En dernier lieu, en ce qui concerne les registres, le Barreau du
Québec a toujours défendu la position dans le sens que le Code
civil du Bas-Canada et, éventuellement, le Code civil du Québec,
qui constituent la loi de base régissant les relations de droit
privé entre les individus, doit être complet en lui-même et
ne jamais faire appel à des dispositions réglementaires comme les
autres lois statutaires peuvent le faire. Or, le projet de loi,
précisément, donne ouverture à des dispositions
réglementaires dont la loi habilitante serait le Code civil.
On voit dans le Code civil actuel que la tenue des livres, index,
registres, etc., enfin tous ces documents qui sont prévus à
l'article 2161 du Code civil, sont tous prescrits dans le Code civil
même. On devrait faire la même chose pour le nouveau registre
minier qui sera prévu au nouveau paragraphe 6 de cet article 2161. Comme
conclusion à ce chapitre, les articles 2129u et 2129v, qui sont
édictés par l'article 308, devraient être
retranchés.
Quant à l'inspection et à l'enquête ainsi qu'aux
détenteurs de ces deux pouvoirs, le comité déplore
l'absence de qualifications précisées dans la loi, alors que la
loi actuelle, comme vous le savez, mentionne à l'article 334 que les
inspecteurs doivent détenir un diplôme universitaire en
qénie des mines ou l'équivalent. Ils doivent avoir exercé
leur profession pendant un minimum de cinq ans avant de pouvoir devenir
inspecteurs. Ces précisions sont d'autant plus utiles et
nécessaires que les pouvoirs d'inspection sont quand même
relativement vagues et larges et qu'ils peuvent même donner ouverture
à la commission d'infractions par quiconque offrirait quelque
résistance à l'inspecteur. On aimerait bien que les
qualifications des inspecteurs soient mieux précisées.
En ce qui concerne les enquêteurs, le comité du Barreau
souhaiterait qu'à cause des pouvoirs quasi judiciaires qu'ils
détiennent, ils soient indépendants du ministère, comme
c'est le cas actuellement, puisque c'est le juqe des mines, maintenant le juge
désigné de la Cour provinciale, qui détient tous ces
pouvoirs d'enquête et, évidemment, qui est une personne tout
à fait indépendante du ministère. Cela pourra assurer une
certaine impartialité et une
certaine indépendance. Ainsi, le transfert des pouvoirs
d'enquête du juge des mines au ministre ou à son
délégué nous apparaît dangereux pour la protection
des droits des individus, parce qu'on n'est pas sûr - et la loi ne
prévoit pas non plus - que ces enquêteurs devront respecter les
règles de justice naturelle.
Quant aux structures judiciaires et quasi judiciaires, les instances
décisionnelles qui sont, dans la loi actuelle, confiées au
registraire des claims et au ministre, étaient habituellement d'ordre
purement législatif, sauf les pouvoirs qui étaient susceptibles
d'appel devant le juge des mines. Le nouveau projet de loi élargit
substantiellement ces pouvoirs. Par exemple, le ministre est appelé
à rendre plusieurs décisions qui ne sont pas susceptibles d'appel
et qui affectent les droits des parties. On mentionne, par exemple, à
l'article 76, qui est l'ordonnance pour des motifs d'intérêt
public - je reviendrai à cette notion tout a l'heure - la cessation des
travaux d'exploration, le non-renouvellement des droits miniers, lorsque le
ministre est d'avis que le titulaire n'a pas respecté les dispositions
de la loi ou des règlements. Vous constaterez dans le mémoire que
je fais une liste des articles qui confèrent un tel pouvoir au ministre.
Je répète que ces pouvoirs ne sont pas susceptibles d'appel.
Encore une fois, on se demande si le délégué va
respecter les règles de justice naturelle étant donné que
ce sont des pouvoirs qui affectent la situation juridique des parties. Il y a
lieu, par contre, de souligner, certains aspects positifs des pouvoirs
détenus par le ministre. Par exemple, celui de corriger une erreur dans
l'enregistrement d'un claim, ce qui n'existait pas dans la loi actuelle, ou de
prolonger la période d'invalidité d'un droit minier en cas de
décès de son titulaire.
Quant à la Cour provinciale, on l'analyse sous deux aspects:
d'abord, comme tribunal d'appel et, ensuite, comme tribunal de première
instance. Comme tribunal d'appel, on constate que la Cour provinciale est le
seul et unique tribunal, donc l'unique titulaire d'un pouvoir judiciaire
à intervenir dans le règlement des conflits et découlant
de l'application de la loi. Cet état de fait comporte certains
inconvénients. D'abord, que le pouvoir de l'administration, donc la
première étape décisionnelle qui appartient à
l'administration - je le répète encore une fois - ne nous
garantit pas l'indépendance et l'impartialité nécessaires
au respect des droits des parties, parce que, dans bien des cas, le titulaire
du pouvoir de l'administration sera à la fois juge et partie puisqu'il
représente évidemment les intérêts de la
couronne.
Le deuxième inconvénient au fait que la Cour provinciale
soit le seul tribunal et intervienne en appel est que, contrairement à
la loi actuelle où le juge des mines a plusieurs pouvoirs, la Cour
provinciale, elle, n'interviendra que comme tribunal d'appel, donc, sur le
dossier que leur transmettra le ministère et qui pourra, à
certains égards, être incomplet et sur les faits que pourra
prouver l'appelant, alors qu'actuellement le juge des mines a non seulement le
pouvoir d'enquêter, mais d'assigner des témoins et d'apporter un
complément de preuve. Enfin, il a des pouvoirs beaucoup plus
étendus que la Cour provinciale aura ou aurait comme tribunal
d'appel.
Comme tribunal de première instance, la Cour provinciale
intervient en vertu de l'article 276 du projet de loi, dans tous les cas
où la couronne est partie autrement que mise en cause. Vous pourrez
constater que je fais référence au jugement de la Cour
suprême dans la cause de Dupont contre Inglis qui est particulière
au droit des mines et qui mentionne que dans les contestations d'avis de
jalonnement, il s'agit d'un litige entre le jalonneur et la couronne. De sorte
que si la couronne est partie, l'article 276 devra évidemment
s'appliquer et la Cour provinciale devra décider de la cause en
première instance.
Le Président (M. Baril): Mme
Vadboncoeur, excusez-moi, mais il vous reste deux minutes. Alors, si
vous voulez bien conclure, s'il vous plaît!
Mme Vadboncoeur: Bon. Alors, je vais aller assez vite dans ce
cas.
La deuxième partie concerne les pouvoirs. Nous nous
référons au principe de la délégation des pouvoirs
qui peut être dangereuse, encore une fois, parce que dans bien des cas il
s'agit de pouvoirs quasi judiciaires non susceptibles d'appel. On ne
réfère également aux pouvoirs discrétionnaires qui
nous apparaissent dangereux, notamment l'appréciation par le ministre de
la notion d'intérêt public, la fixation par le ministre des
indemnités, de même que la fixation par le ministre de plusieurs
conditions rattachées à l'exercice d'un droit.
Certains articles, également, constituent selon nous une forme
d'expropriation déguisée sans indemnité et, encore une
fois, les droits des parties sont en cause là-dedans.
Les pouvoirs réglementaires. Certains devraient se retrouver dans
la loi, notamment le territoire qui devrait être décrit en annexe,
comme dans la loi actuelle, les règles de jalonnement, tes avis de
jalonnement et la liste des aménagements, devraient se retrouver dans la
loi et non dans un règlement.
L'article 361 du projet est un pouvoir réglementaire qui nous
semble exorbitant. On l'avait d'ailleurs déjà souligné
dans le
mémoire sur la Loi sur les forêts. Nous considérons
que ce pouvoir ne devrait pas exister, tout simplement, et que le gouvernement
devrait se limiter aux pouvoirs réglementaires déjà
prévus.
J'ai un peu parlé tout à l'heure du pouvoir d'inspection
et d'enquête. Je n'y reviendrai pas.
La troisième partie concerne les droits des justiciables. On
commence à analyser le processus de règlement des conflits et on
constate que plusieurs sanctions sont possibles à l'égard d'un
même défaut. Par exempte, en cas du non-respect de la loi et des
règlements, comme première sanction, il y a le non-renouvellement
du droit minier, et il peut y avoir également une révocation ou
suspension du droit minier. Les conséquences de ces trois sanctions sont
tout à fait différentes. On peut bien imaginer que le
non-renouvellement va pouvoir entraîner, pour le titulaire du droit, la
cessation de toute activité, donc, des pertes financières
énormes, alors que cette sanction de révocation et de suspension,
ou même une amende qui pourrait être imposée lors d'une
infraction pénale du non-respect de la loi, va quand même
permettre au titulaire du droit de continuer son activité.
Le Président (M. Baril): Si vous voulez bien conclure,
madame, s'il vous plaît!
Mme Vadboncoeur: Je vais conclure tout simplement en vous
référant au chapitre concernant les infractions, où l'on
considère que l'article 288.32, qui permet de créer des
infractions par voie réglementaire nous apparaît tout à
fait inacceptable. Je vous réfère également au chapitre
concernant la protection des droits des justiciables et aux modifications de
forme que l'on suggère de même qu'aux dispositions transitoires
qui se trouvent à la fin du mémoire. Je vous remercie.
Le Président (M. Baril): On vous remercie beaucoup. M. le
ministre.
M. Savoie: Merci. Je voudrais d'abord remercier le Barreau pour
avoir pris le temps quand même de présenter un mémoire
malgré un échéancier très serré. Vous
comprendrez que nous n'avons reçu votre mémoire que vendredi. Une
analyse a été faîte, mais je pense qu'il nous reste
passablement de travail à faire. Comme remarques
générales, je voudrais vous faire part qu'il y a plusieurs de vos
recommendations qui ont fait l'objet déjà de modifications pour
nous, à l'intérieur de notre projet de loi. Je crois que vous
rejoignez d'autres intervenants, qui sont venus ou qui vont venir, en ce qui
concerne, par exemple, des thèmes comme le pouvoir administratif et la
discrétion. Dans ce sens, cela fait partie de la réflexion qu'on
est en train de faire. (11 h 45)
Je voudrais remercier Me Vadhoncoeur pour avoir pris tout le temps
nécessaire, et fait tout ce travail pour nous assister dans la
préparation de ce projet de loi qui, comme l'a souligné Me
Ménard, est de toute première importance pour le
développement du Québec et particulièrement le
développement des régions. Je crois que, bien que la loi
introduise certaines nouvelles structures, en gros, on peut parler d'un
réaménagement et d'un rajeunissement de la loi afin de mieux
l'adapter au contexte actuel.
Vous avez soulevé de nombreux points. Je pense que la question
d'appel ne représente pas de difficulté, compte tenu du nombre de
mémoires, et malgré une position qui disait qu'il y avait
toujours appel de la décision du jugement de la Cour provinciale. Je
pense que pour acquiescer à la demande de l'ensemble des
mémoires, puisqu'il s'agit d'un échange de points de vue, nous
sommes actuellement très favorables à cette position.
Il y a des points où, selon les explications que vous nous
présentez et selon l'information que nous avons, il n'y a pas
concordance. Je pense qu'en maintenant notre discussion même à
l'extérieur de la présentation de votre mémoire, cela va
servir pour l'intérêt des deux parties puisqu'il faut que le
Barreau soit très satisfait et très confortable avec la nouvelle
Loi sur les mines.
J'aurais quelques questions à vous poser, si vous me permettez.
Concernant le pouvoir, en page 4 du plan détaillé de votre
mémoire, vous critiquez la délégation du pouvoir en ce qui
concerne la machine administrative prévue à l'article 287 du
projet de loi. Ne croyez-vous pas qu'une telle clause est obligatoire pour
permettre au ministre de déléguer des pouvoirs de nature quasi
judiciaire et discrétionnaire'?
M. Beausoleil (Jacques): Il n'y a pas de problème. Si vous
voulez déléguer des pouvoirs, vous devez l'indiquer dans votre
loi.
M. Savoie: Est-ce que vous voulez qu'on indique à qui...
des chefs de département ou...
M. Beausoleil: Ce serait important, comme cela se produit
actuellement lorsque vous faites des délégations de signature,
que dans un décret, les personnes à qui les pouvoirs sont
délégués soient indiquées avec le genre de pouvoir
qui leur est délégué pour que le justiciable puisse
savoir, lorsqu'un fonctionnaire prend une décision, si réellement
ce fonctionnaire a les pouvoirs de prendre cette décision.
M. Savoie: D'accord, cela va.
M. Roberge (Jean): Je peux ajouter quelque chose sur la question
de délégation. Il est bien évident qu'un ministre ne peut
pas tout faire et doit être assisté de collaborateurs. La liste
des discrétions à être exercées dans la Loi sur les
mines fait en sorte qu'il va y avoir peut-être plusieurs fonctionnaires,
plusieurs façons de penser. Si la discrétion ministérielle
n'était utilisée que dans certains cas bien particuliers, bien
circonscrits avec des critères, cela irait un peu mieux.
Hier, on mentionnait qu'il y a environ 82 occasions dans la Loi sur les
mines où le ministre donne une autorisation, assortit une autorisation
de travaux spéciaux ou exige des conditions particulières. On va
se retrouver avec des fonctionnaires qui sont nommés intimement au sein
du ministère, publiquement on ne le saura pas, et qui auront des
pouvoirs qui seront un éventail de pouvoirs assez large.
Mme Vadboncoeur: Une dernière remarque, M. le ministre, si
vous me permettez. Étant donné qu'il n'y a aucun critère
de délégation et qu'on ne sait pas à qui ces pouvoirs
seront délégués, certains de ces pouvoirs peuvent
être inquiétants. Par exemple, l'appréciation de la notion
d'intérêt public qui, normalement, est réservée aux
tribunaux, si c'est n'importe quel fonctionnaire qui l'a, cela peut devenir
inquiétant. Cela peut devenir inquiétant également pour la
fixation des indemnités en vertu de l'article 76. Cela peut devenir
inquiétant aussi, par rapport au non-renouvellement des droits miniers,
alors que ce sera le fonctionnaire ou le délégué qui devra
baser sa décision sur l'opinion qu'il se fait de l'observance, ou de
l'inobservance de la loi et des règlements par le titulaire du
droit.
Le Président (M. Baril): M. le ministre.
M. Savoie: On va tenir compte de cela. Pour ce qui est du juge de
la Cour provinciale, dans la critique justement de l'article 285, ne
croyez-vous pas que cette disposition est conforme à la Loi sur les
tribunaux judiciaires qui accorde une juridiction partagée au juge en
chef et au juge en chef associé?
Mme Vadboncoeur: En ce qui concerne la juridiction
territoriale?
M. Savoie: Oui.
Mme Vadboncoeur: Oui, effectivement, j'ai vérifié
dans la Loi sur les tribunaux judiciaires après, et le juge a une
juridiction sur tout le Québec même s'il est désigné
a un district judiciaire en particulier.
M. Savoie: Pour ce qui est de la réglementation que vous
avez abordée, compte tenu qu'on a adopté une loi l'année
dernière, en juin 1986, concernant la Loi sur les règlements, ne
sentez-vous pas que vos craintes au sujet de la maniabilité d'un
règlement est en grande partie réduite grâce à
l'adoption de cette loi et aux mesures qui y sont contenues? Je pense, par
exemple, à la vie nécessaire de 45 jours. Ne sentez-vous pas que
vos craintes peuvent en quelque sorte être, en partie tout au moins,
dissipées grâce à la Loi sur les règlements?
M. Roberge: Oui, je vais vous donner un exemple: concernant les
travaux à réaliser pour conserver des claims et les renouveler,
ils seront maintenant déterminés par le règlement au lieu
d'être dans la loi. II serait nécessaire, à notre point de
vue, que l'Assemblée nationale s'assure que les travaux correspondent
bien à des travaux raisonnables et concordent avec l'exercice des droits
miniers. Avec la loi actuelle, des travaux d'exploration et des travaux de mise
en valeur peuvent valoir, mais maintenant, avec l'article 67, seulement des
travaux d'exploration seront valides. L'Assemblée nationale ne pourra
pas y revenir et, dans des règlements conçus par des
fonctionnaires, ce sera uniquement des travaux d'exploration et même s'il
y a une consultation de 45 jours, ce ne sera pas suffisant. C'est un exemple et
dans les autres articles, c'est semblable pour les autres pouvoirs de
réglementation. Les normes de fond devraient se retrouver dans la loi
elle-même et non pas dans des règlements parce qu'il sera trop
tard.
M. Savoie: Me Roberge, c'était déjà dans les
règlements. Par exemple, les travaux étaient déjà
sous la forme réglementaire. Vous voulez qu'on passe de la forme
réglementaire dans la loi... Notre souci, quant à nous,
était d'avoir une bonne efficacité, être capable de
répondre rapidement. Ce qui a fait en quelque sorte qu'il y a eu,
à vos yeux, selon vos commentaires, un agrandissement du pouvoir
discrétionnaire, si vous voulez; c'est pour être en mesure de
mieux répondre. Si on introduit beaucoup plus du côté
réglementaire, et si on réduit le pouvoir décisionnel du
ministre, on alourdit la structure administrative, on est beaucoup moins apte
à répondre rapidement, et efficacement. Vous savez qu'en 1987
l'individu a beaucoup plus de recours; il y a toute une gamme de recours.
Aujourd'hui, critiquer une décision administrative, aller en appel d'une
décision est relativement facile.
M. Roberge: Oui, mais je pense qu'il ne serait pas souhaitable
qu'une loi soit adoptée et qu'on s'en remette à la cour
régulièrement et carrément pour régler des
choses.
D'autres exemples qui pourraient facilement se retrouver dans la Loi sur
les mines: la désignation sur carte. Même si on a un délai
de 45 jours pour décider si c'est raisonnable ou non et qu'une
discussion se fasse, si le territoire qu'on veut désigner sur carte est
déjà prévu et qu'on sait sur quels barèmes ou
quelles normes on a décidé que tel territoire sera, par
désignation, sur carte, on pourrait aisément le mettre dans la
Loi sur les mines. D'autres exemples: les soustractions au jalonnement, il y a
peut-être des catégories dans cela ou des principes ou
critères qu'on pourait indiquer dans la loi et sur lesquels on sait
qu'il y aura soustraction au jalonnement pour, par exemple, une ligne
d'électricité. Dans quel critère sera-t-elle?Est-ce que ce sera n'importe quelle ligne d'électricité? Il
n'y a pas de critère, c'est vraiment "at large" que des
règlements pourront être adoptés sous divers aspects et
même plus, adopter même des règlements qui n'auraient pas
été prévus - 32 - ce que mentionnait Me Vadboncoeur.
M. Savoie: Je vais passer la parole au député
d'Ungava. Je tiendrais à souligner qu'il y a quand même plusieurs
choses. Par exemple, l'article 276 est sujet à une reformulation. Je
pense qu'étant donné que vous vous sentiez pressés pour
déposer votre mémoire et qu'on ne l'a reçu, finalement,
que vendredi, une rencontre entre le Barreau et le ministère serait
opportune pour qu'on puisse discuter davantage. Je ne crois pas qu'il serait
utile de laisser passer votre mémoire tout simplement sous la forme de
présentation et avec la courte rencontre que nous avons eue aujourd'hui.
Il serait opportun qu'il y ait une rencontre et qu'on continue les discussions
afin de mieux se comprendre de part et d'autres afin qu'on puisse dans la
mesure du possible s'entendre sur différents aspects. Pour que vous
puissiez vous sentir confortables avec ce qu'on propose et que vous vous
sentiez confortables également avec votre position, je pense qu'un
échange d'opinions additionnel... Je me réserverai le temps
d'intervenir après les interventions du...
Le Président (M. Baril): Merci, M. le ministre. M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais
féliciter le Barreau du Québec pour l'excellente réflexion
qu'il nous a faite sur le projet de loi sur les mines qui soulève un
nombre quasi incalculable d'interrogations. Dans ce sens, je partagerais un peu
la préoccupation du ministre, comme il vient de le dire, qu'un
mémoire comme le vôtre et d'autres mémoires
présentés auparavant ne devraient pas rester seulement au stade
de cette consultation. Par contre, j'inviterais le ministre à bien
réfléchir quant à la façon dont il entendrait
traiter cela par la suite. Il ne faut pas oublier que nous avons devant nous un
projet de loi qui a déjà été déposé
devant la Chambre qui est entre les mains des parlementaires, donc, qui ne lui
appartient plus à lui comme ministre mais qui appartient aux
parlementaires. Tout mécanisme de consultation plus large concernant vos
mémoires, à mon humble avis, devrait prendre en
considération ou devrait se faire conjointement avec la participation
des parlementaires dans le cadre d'une mécanique sûrement
prévue à cet effet dans la Loi sur l'Assemblée nationale.
Entre autres, à l'intérieur des commissions parlementaires il y a
moyen de s'arranger et je crois qu'il serait de bon aloi de s'entendre avec le
ministre pour savoir de quelle façon, s'il en a vraiment l'intention, on
pourrait travailler ensemble à bonifier au maximum ce projet de loi
à partir des commentaires comme le vôtre et comme d'autres qui
nous ont été faits depuis le début de cette consultation
et qui nous seront sûrement faits jusqu'à la fin de la
consultation.
Ceci étant dit, j'ai personnellement dégagé trois
ou quatre lignes maîtresses qui me semblent importantes, dans votre
mémoire, et sur lesquelles j'aurais des questions à vous poser
pour compléter ce que vous y avancez. Entre autres, dès le
début, à la page 3, aux commentaires généraux, vous
dites et je cite: "...le projet de loi 161 ne constitue nullement une refonte
ou une mise à jour de la loi actuelle sur les mines, comme tous s'y
attendaient, mais plutôt un nouveau code minier avec des notions
nouvelles et des changements fondamentaux dans l'octroi des pouvoirs". Je
trouve que c'est là un jugement très sévère par
rapport au projet de loi 161. J'aimerais bien vous entendre vous exprimer un
peu plus à fond sur ce jugement que vous portez.
M. Beausoleil: Ici, à la lecture même du projet de
161, on constate qu'il y a plusieurs principes de base qui sont revus surtout
en ce qui a trait aux décisions prises par le ministre et par les
fonctionnaires, le déplacement du pouvoir à partir du juge des
mines à aller vers le ministre. Je dirais aussi une centralisation des
pouvoirs au ministère à Québec. Je regarde l'exemple de
l'Ontario qui avait déjà une loi décentralisée qui
décentralise sa loi. Il est même question qu'une partie du
ministère soit déménagée dans le nord de l'Ontario.
Ici, au Québec, on avait dans la loi actuelle, au moins dans la loi si
ce n'est pas dans les faits, des registraires dans les régions avec
même, jadis, des inspecteurs dans les régions. Tout cela semble
être modifié pour être centralisé à
Québec. Je sais qu'à Québec, actuellement, pour le
règlement des conflits, il y a deux inspecteurs. Les conflits, on les
compte par
centaines par année. Que l'on pense à Casa-Berardi, avec
tous les problèmes de jalonnement qui se posent là, et il n'y a
que deux inspecteurs au ministère. (12 heures)
Le changement fondamental est une centralisation des pouvoirs au niveau
du ministère à Québec. C'est un changement de philosophie.
Jadis, c'était en régions. Maintenant, c'est à
Québec. De plus, les pouvoirs qui étaient conférés
aux fonctionnaires dans les régions, sont maintenant donnés au
ministre ici à Québec, avec la disparition du juge des mines. Ce
dernier, au moins, pouvait superviser juridiquement ce qui se passait au
ministère. On ne l'a plus. C'est dans ce sens-là qu'on a
réellement un nouveau projet de loi. C'est tout à fait
nouveau.
M. Claveau: Vous avez l'impression, si j'interprète bien
votre réponse, que par ce projet de loi, les décisions en
régions deviennent tout à fait secondaires, et que c'est
finalement au cabinet du ministre que vont se prendre l'ensemble des
décisions, et que les compagnies ou les différents intervenants
du domaine minier, comme nous avions tendance à le dire, auraient
tendance à traiter les cas un par un avec le personnel du bureau du
ministre plutôt que d'essayer de régler leurs problèmes
dans la région.
M. Beausoleil: Administrativement, je ne sais pas de quelle
façon le ministère veut appliquer la loi. 11 est évident
que le ministère peut appliquer la loi de la façon qu'il le veut,
mais si on regarde le texte du projet de loi, que les pouvoirs sont au
ministère, à Québec. Je vous donne un exemple. Dans la loi
actuelle, il y a un registraire en chef des claims et plusieurs registraires.
Il y avait, jadis, des registraires dans les régions. Il y en avait un
à Amos, un à Noranda, un à Chibougamau et un à
Montréal. Maintenant, les registraires sont à Québec. En
vertu du nouveau projet de loi, il y a seulement un registraire mais il n'y a
plus de registraire en chef des claims. Il y a seulement un registraire. Donc,
tout est centralisé à Québec.
Au plan du règlement des conflits, je vous donne aussi cet
exemple, les conflits se règlent à partir de Québec. Il
n'y a pas de conflit à Québec, les conflits sont à
Val-d'Or, sur la Côte-Nord, dans la Beauce, à Sept-îles. Ici
à Québec, il n'y en a pas. À l'origine, cela a
été un des problèmes du juge des mines, à mon avis.
C'est qu'on a installé le juge des mines à Québec, et le
juge des mines n'a pas d'affaires à Québec. Il n'y a pas de
problèmes miniers à Québec. Le juge des mines aurait
dû être à Val-d'Or, où les gens avaient accès
à lui facilement. On avait déjà prévu une
procédure facile pour avoir accès au juge des mines.
M. Claveau: Je vous remercie pour votre réponse qui
éclaire ma lanterne concernant le jugement que vous portez sur
l'ensemble du projet de loi.
Une autre ligne maîtresse que l'on retrouve dans votre
mémoire concerne toute la question du droit d'appel. Encore là,
vous portez un jugement pour le moins ferme concernant la disposition de
l'article 283 qui enlève le droit d'appel. Vous dites, au
deuxième paragraphe de la page 10 de votre mémoire, tout en
critiquant la question de l'impossibilité d'en appeler, qu'en fait, ce
n'est pas comme dans les lois actuelles où "les décisions sont
prises par le juge des mines, qui est la garantie du respect des principes de
justice naturelle du droit de la représentation par avocat, de la
communication à l'administré de toute la documentation et des
renseignements pertinents à sa cause." En fait, vous interprétez
la notion de la disparition du juge des mines, d'une part, et, d'autre part,
l'impossibilité d'en appeler d'un jugement de la Cour provinciale comme
mettant, à toutes fins utiles, le principal intéressé dans
l'impossibilité de se prévaloir d'un avocat ou de pouvoir
préparer une preuve suffisante. Dans ce sens-là, si je comprends
bien, vous croyez que cela lui enlève tout droit à la justice
naturelle tel qu'on l'exerce généralement dans notre
système judiciaire?
M. Beausoleil: Pour comparer avec ce qu'on a actuellement, le
juge des mines, ou la Cour provinciale qui exerce les pouvoirs du juge des
mines a un pouvoir d'inquisition. La Cour provinciale peut aller au
ministère, ou aller n'importe où, chercher la preuve
nécessaire pour compléter le dossier. Ce n'est pas aux avocats ou
aux deux parties à monter leur propre preuve. Elles peuvent le faire
mais le juge des mines ou la Cour provinciale qui exerce cette juridiction a le
pouvoir d'essayer de réellement réqler le conflit en allant
chercher les éléments de preuve nécessaires un peu partout
où ils se trouvent. On ne retrouve pas cela dans le projet.
Deuxièmement, ce qu'on ne retrouve pas non plus, c'est l'appel
à la Cour d'appel et éventuellement à la Cour
suprême du Canada qui, étant donné l'importance des sommes
en jeu dans les conflits miniers parfois, est justifié.
M. Claveau: Vous croyez qu'il est absolument nécessaire de
maintenir un droit d'appel, entre autres, en ce qui concerne l'importance des
sommes et des enjeux de ces causes.
Mme Vadboncoeur: Si vous me permettez, c'est que dans la loi
actuelle les pouvoirs quasi judiciaires sont exercés par le juge des
mines qui a un pouvoir d'inquisition.
Ses décisions sont appelables en Cour d'appel. Là, c'est
transposé à un échelon plus bas, si vous me passez
l'expression. La première étape est décidée par
l'administration et, je ne pourrais pas dire la majorité, une grande
partie de ces décisions, qui affectent pourtant le droit des parties,
n'est même pas appelable à la Cour provinciale.
Quand la Cour provinciale agit en appel, elle n'a plus le pouvoir que le
juge des mines a présentement, c'est-à-dire d'aller chercher des
morceaux de preuve un peu partout.
M. Claveau: Elle doit se contenter de la preuve qui est
déjà faite par le juge des mines.
Mme Vadboncoeur: Exact, c'est cela. Elle doit se contenter du
dossier qui est fait par l'administration dont certains éléments
peuvent avoir été mis de côté, parce que
jugés inutiles lors de la prise de décision, et se contenter du
dossier préparé par l'appelant en Cour provinciale.
M. Claveau: Je vous remercie de votre réponse.
J'aimerais aussi entendre vos commentaires sur la notion
d'intérêt public que vous critiquez sensiblement, à la page
16 de votre mémoire où, à la première phrase du
deuxième paragraphe de l'alinéa 2, vous dites:
"L'appréciation par le ministre ou son délégué de
la notion d'intérêt public nous apparaît fort dangereuse. Il
a toujours appartenu aux tribunaux de définir ce qu'est, dans des
circonstances données, l'intérêt public." J'aimerais que
vous soyez un peu plus explicite concernant le rapatriement au ministre de la
définition de l'intérêt public.
M. Roberge: Concernant l'intérêt public, les
tribunaux l'ont décrit à certaines occasions et cela tourne
autour de la santé et la sécurité publique. Dans le droit
minier, l'intérêt public on en n'a pas traité
jusqu'à maintenant.
Prenons, par exemple, le pouvoir pour l'intérêt public de
faire cesser des travaux selon certains critères. On nomme des
critères pour faire un inventaire minier ou pour réaliser une
ligne d'électricité. Qu'est-ce que vient faire une ligne
d'électricité dans l'intérêt public, ou qu'est-ce
que vient faire l'installation d'un pipeline par rapport à
l'intérêt public? Je pense que c'est prendre un prétexte
d'intérêt public pour aller un peu loin, et ajouter dans une loi
sur les mines, des pouvoirs de cessation ou d'arrêt de travaux, ou de
soustraire au jalonnement ou à l'exploitation. Par exemple, l'article
286: Conduites souterraines, l'aménagement et l'utilisation des forces
hydrauliques, de réservoirs d'emmagasinage ou de réservoirs
souterrains, création de parcs ou de réserves écologiques,
ce sont des sujets importants. Mais de diluer l'intérêt public,
qui a toujours été la santé et la sécurité
publiques et l'amener dans des intérêts qui sont de faire un
inventaire minier ou de la recherche, de faire des conduites souterraines
où Trans-Canada Pipe Lines voudrait installer un tuyau et, par
intérêt public, selon l'article 286, on enlève des droits
miniers... On devrait plutôt convertir cela en une possibilité que
les deux coexistent ou qu'ils s'entendent, et qu'ils en viennent à un
consensus pour arriver à quelque chose.
La Chambre des notaires parlait d'un arbitrage. C'est une autre
possibilité où, au lieu d'avoir un pouvoir discrétionnaire
pour l'intérêt public, soustraire de l'exploitation, de
l'exploration minière qui est importante pour l'économie du
Québec, il devrait y avoir plutôt une possibilité qu'il y
ait coexistence de ces activités.
Tout à l'heure, vous me demandiez en quoi le projet de loi est
plus qu'une refonte. C'est un point important. D'autres points sont importants.
Tout à l'heure vous avez enchaîné sur une autre question.
Je voulais ajouter la question des travaux d'exploration et de mise en valeur.
Je l'ai mentionné un peu plus tôt, c'étaient des travaux
pour maintenir des droits. Maintenant ce ne seront que des travaux
d'exploration.
Ensuite, les résidus miniers. On arrive avec une nouvelle
définition des résidus miniers. On règle leur sort
concernant la propriété. C'est un élément assez
important qui ne relève pas d'une simple réforme. Dans le projet
de loi, on parle d'un environnement où il faudra avoir une confirmation
que la qualité de l'environnement a été respectée.
C'est du nouveau important. Ensuite, on parle de l'intérêt public
qu'on vient de mentionner. Les chemins miniers qui seront carrément
réglés par le ministre des Transports. La définition des
résidus miniers, la propriété, je les ai
mentionnés. L'articte 66 est un autre exemple flagrant. L'actuelle loi
prévoit que la couronne peut prendre le sable et le gravier dont elle a
besoin pour ses chemins. C'est bien et c'est normal que ce soit comme cela.
Sauf que maintenant, avec la phraséologie de l'article 66, c'est tout
entrepreneur qui aura à réaliser des travaux qui pourra venir
piger çà et là du sable et du gravier. Il y a plusieurs
exemples comme cela. C'est pour cela que je revenais sur ce sujet. En quoi
est-ce plus qu'une refonte? C'est parce qu'il y a des sujets de fond qu'on
change, et cela mérite une discussion plus large.
M. Claveau: Je vous remercie. Je suppose et je suis même
convaincu que vous avez porté une grande attention à l'article
288 qui décrit les 32 pouvoirs réglementaires que le ministre
pourra exercer à l'occasion,
quand le besoin s'en fera sentir. D'après vous, quels devraient
être les pouvoirs réglementaires que le ministre devrait conserver
dans une loi comme celle-là? Est-ce que ce qui est écrit
là vous semble exagéré? Si oui, quel devrait être,
à votre point de vue, le cadre dans lequel devraient s'exercer des
pouvoirs réglementaires?
M. Ménard: Je vais laisser les experts compléter ma
réponse, mais je peux vous dire que le dernier m'apparaît
absolument inadmissible dans une société démocratique.
Celui de faire des infractions par règlement, cela dépasse le
droit des mines et cela dépasse le droit de n'importe quoi. Le pouvoir
de créer des infractions punissables par des pénalités
doit être laissé à l'Assemblée nationale, au
législateur. D'autant plus qu'en droit pénal, il faut toujours
savoir avant... Il faut toujours que la pénalité soit...
Une voix: Avant...
M. Beausoleil: Si on regarde la loi actuelle, elle contient
à peu près autant de pouvoirs réglementaires que le projet
de loi en prévoit. Par contre, je sais pertinemment que la plupart de
ces pouvoirs n'ont jamais été exercés. Les pouvoirs
réglementaires en vertu de l'article 296 n'ont pas tous
été exercés. Si le gouvernement décide de faire la
même chose avec l'article 288, il n'aura pas de problème. Ce sont
des pouvoirs qui sont habituellement nécessaires pour l'application de
la loi.
Mme Vadboncoeur: Moi, je n'ai pas trop de problèmes avec
l'article 288, sauf l'alinéa 32 qui est absolument épouvantable.
Mais on mentionnait tout à l'heure que la loi actuelle prévoyait,
par exemple, en annexe, le territoire décrit pour fins de
désignation sur carte. Le territoire pourrait être annexé
à la loi et non pas au règlement. Les règles de
jalonnement qui sont énoncées actuellement, aux articles 31 et
suivants de la loi, sont dans la loi. Pourquoi les mettre dans un
règlement? Pour le contenu de l'avis de jalonnement, c'est la même
chose. Le contenu de l'avis de jalonnement est dans l'article 42 de la loi
actuelle. Pourquoi ne serait-ce pas par règlement? La liste des
aménagements, c'est la même chose. C'est prévu dans le
projet de règlement qu'on a eu à la toute dernière minute,
d'ailleurs. Ce n'est pas un mal épouvantable, mais cela pourrait se
retrouver dans la loi.
Maintenant, le bâtonnier a précisé le paragraphe 32,
qui est absolument abominable. Je voudrais toucher un mot de l'article 361 qui
constitue un pouvoir réglementaire - passez-moi l'expression -
fourre-tout, qui permet au gouvernement, par voie réglementaire,
d'édicter toute autre disposi- tion provisoire ou transitoire, afin
d'assurer l'application de la présente loi. Il s'agit, encore une fois -
on l'a déjà déploré à maintes reprises -
d'un pouvoir auquel plusieurs gouvernements - vous n'êtes pas te premier
- font appel et il s'aqit d'un pouvoir réglementaire fourre-tout qui est
absolument inacceptable, compte tenu de l'obligation morale que le
législateur doit avoir auprès des justiciables de façon
qu'ils puissent savoir tout à fait l'étendue de leurs droits et
de leurs obligations. (12 h 15)
Le Président (M. Baril): Merci, Mme Vadboncoeur.
J'aimerais demander au député d'Ungava de conclure parce que son
temps est terminé.
M. Claveau: Le ministre a-t-il fini son temps aussi?
Le Président (M. Baril): Il reste huit minutes au
ministre.
M. Claveau: Je peux peut-être vous emprunter une
minute?
Le Président (M. Baril): Non, il ne lui reste plus de
temps, il doit conclure, mais il vous demande si vous avez le consentement...
Mais avant, si vous le permettez, j'ai l'impression que le ministre va
consentir à vous laisser un peu de temps. Je laisserais la parole au
ministre, M. Ciaccia, une seconde, s'il vous plaît.
M. Ciaccia: Les questions que je voulais vous poser... Vous avez
répondu à plusieurs questions de l'Opposition. La question que je
voulais vous poser était... Vous apportiez des critiques au projet de
loi, sauf quelques exceptions quant au principe d'équité, quant
au principe de pouvoir discrétionnaire qui ne s'appliquaient pas
à la loi actuelle, mais je pense que vous avez souligné beaucoup
de termes du présent projet de loi qui sont différents de la loi
actuelle et que vous critiquez nommément. Je voulais juste dire que je
souscris aux propos du ministre Savoie à savoir que cela prendrait des
rencontres additionnelles entre le Barreau et le ministère pour discuter
plus longuement de certaines des réserves que vous exprimez. Je souscris
entièrement à cette suggestion du ministre Savoie pour essayer
d'aller plus en profondeur et essayer d'éliminer quelques-unes des
réserves assez sérieuses que vous soulevez quant à
certains aspects du projet de loi.
Le Président (M. Baril): Merci, M. le ministre.
Permettez-vous, M. le ministre Savoie, de redonner votre minute de tout
à l'heure à M. le député d'Ungava?
M. Savoie: II n'y a pas de problème.
Effectivement, il semble y avoir beaucoup de travail dans votre
mémoire, une volonté, vraiment, d'être confortable avec la
loi et tout cela fonctionne bien. Je voudrais vous souligner, par exemple,
qu'il y a certains de vos commentaires ou des représentations que vous
faites qui, je pense, profiteraient énormément de cet
échange proposé. On comprend mal le fait que l'article 288,32 par
exemple, qui, en apparence évidemment, soulève tant de
réactions vives de votre part alors qu'il existe dans d'autres lois. Je
pense à la Loi sur les forêts dont j'ai copie ici et qui
stipule... effectivement, qui est adoptée, qui est en vigueur et qui
semble faire... On m'avise que cela semble être un courant. Tout cela
pourrait, tout au moins, donner lieu à des échanges
d'opinions.
Mme Vadboncoeur: On l'avait critiqué dans la Loi sur les
forêts aussi.
M. Savoie: Mais cela a passé quand même.
Mme Vadboncoeur: Ah bien, cela...
M. Savoie: Évidemment, on veut coopérer. Si ces
dispositions existent, s'il y a une tendance au niveau administratif, vous
comprendrez notre hésitation à vouloir au moins s'expliquer et
s'entendre. Vous avez parlé tout à l'heure de la question du
registraire, le fait que lorsqu'on avait différents registraires
à travers différentes régions, les enregistrements sur la
même propriété pouvaient se faire dans plus de deux
bureaux. Cela soulevait des difficultés d'administration et on a
cherché à homogénéiser l'administration.
Évidemment, cela implique un bureau, du "string lining" qu'on a dû
faire pour mieux adapter la loi aux besoins de l'industrie. Nous ne sommes pas
du tout disposés à concentrer les services des mines à
Québec bien au contraire. Nous avons posé des gestes dans le
passé et je pense que nous allons en poser d'autres à court terme
pour nous assurer que les régions participent pleinement à
l'exécution et à l'administration de la Loi sur les mines, afin
qu'elles soient présentes partout. Toutefois, il doit y avoir un
aménagement. Je pense que la loi prévoit carrément un net
avantage en ce qui concerne à tout le moins l'enregistrement du claim.
Là-dessus, vous savez que le nouveau projet de loi favorise la
cohabitation. Le nouveau projet de loi favorise toujours le droit minier. On
dit que le ministre peut. On ne dit pas que le ministre ne peut pas. On cherche
à cohabiter avec les autres. Lorsque vous avez vu l'article 286, par
exemple, il y a quelques dispositions là-dedans qui édictent que
le ministre peut, à des conditions qu'il jugera opportunes...
Le but visé par le projet de loi est précisément.,.
Par exemple, on a soulevé dans un autre mémoire la question d'un
centre de ski par rapport au droit minier. Dans la confrontation entre un
exploitant et la population, est-ce qu'on doit édicter des
règlements, établir des normes et permettre à d'autres de
s'ingérer dans les activités minières? Je ne crois pas. Je
pense, lorsque cela arrive, et cela n'arrive pas nécessairement souvent,
qu'il y a toujours moyen de s'entendre. On espère que ce sera
précisément le rôle du ministre, qui doit avoir un
préjugé favorable à l'industrie, de s'asseoir avec ceux
qui veulent restreindre le droit de l'exploitant et de les inviter à
accepter un compromis.
On voit dans ces articles une formule de cohabitation qui permet de
mieux régler les conflits qui pourraient facilement surgir à la
suite de ce frottement entre l'industrie et la population.
Le Président (M. Baril): M. le ministre, il vous reste une
minute, si vous voulez conclure.
M. Savoie: Oui.
Mme Vadboncoeur: Là-dessus, M. le Président, je
pense que tout le monde partage ce que vous venez de dire, mais ce qui semble
manquer au projet de loi, ce sont les critères. On n'a absolument aucun
critère. Je vous donne l'exemple de l'article 111. L'article 99 du
projet de loi dit que, sous réserve évidemment des restrictions,
"le locataire et le concessionnaire ont, sur le terrain qui fait l'objet du
bail ou de la concession, les droits et obligations d'un propriétaire".
Or, le deuxième alinéa de l'article 111 dit ceci: "Toutefois, le
ministre peut, lorsqu'il le juge à propos, prolonger ce délai aux
conditions, moyennant le loyer et pour la période qu'il fixe."
M. Savoie: Si vous me permettez d'intervenir tout de suite, c'est
précisément le but de notre rencontre. Pour mieux s'entendre, on
a déjà proposé une modification qui devrait dire:
"Toutefois, le ministre peut, pour raison valable, prolonger ce
délai..."
Mme Vadboncoeur: Ah!
M. Savoie: Vous voyez que l'on gagnerait peut-être à
s'asseoir autour d'une table pour discuter. Je crois qu'on a été
très sensible aux points que vous avez soulevés lors des
consultations que nous avons effectuées lors des discussions que nous
avons eues entre nous. Effectivement, je pense qu'on aurait à gagner
davantage à s'asseoir avec vous lors d'une prochaine rencontre et
échanger les informations qu'on a, afin de permettre que le Barreau soit
à
l'aise. Comme je l'ai dit tout à l'heure...
Le Président (M. Baril): Merci, M. le ministre. Si vous
voulez conclure, s'il vous plaît.
M. Savoie: Oui. Je voudrais remercier les représentants du
Barreau du Québec d'avoir présenté leur mémoire. Il
y a eu, comme je l'ai indiqué au début, des questions concernant
les échéanciers. Nous serons très
intéressés, lors de cette rencontre, à faire des
échanges. Je suis certain que vous sortirez gagnants de ce qui en
résultera, et nous également. Je vous remercie.
Le Président (M. Baril): Merci beaucoup. M. le
député d'Ungava, s'il vous plaît, si vous voulez
conclure.
M. Claveau: Merci, M. le Président. En fait, j'avais une
question à poser, mais étant donné que le temps est
restreint, je vais la transformer en une remarque envers le ministre concernant
l'article 288,32. Il dit qu'on l'a retenu dans la Loi sur les forêts,
malgré notre opposition d'ailleurs et malgré les
représentations du Barreau du Québec. Dans la même logique,
je lui ferais remarquer que l'article 361, qui était à l'origine
dans le projet de loi sur les forêts, a bel et bien été
rayé de ce projet de loi, dans sa version finale. Il devrait au moins
continuer son raisonnement jusqu'à l'élimination de l'article 361
du projet de loi sur les mines.
Cela dit, je félicite les représentants du Barreau du
Québec pour leur excellente présentation, très
complète, qui soulève, comme l'a dit à juste titre le
ministre, tout un questionnement par rapport à l'ampleur et à
l'application du nouveau projet de loi, de la nouvelle Loi sur les mines que le
gouvernement s'apprête à adopter. Je crois, à l'instar du
ministre, qu'il y aurait probablement avantage à pousser un peu la
réflexion par rapport à toutes les implications légales de
la loi 161 avant d'en arriver à sa version finale pour adoption en
troisième lecture.
Je vous remercie, au nom de l'Opposition, de votre excellente
collaboration.
Le Président (M. Baril): Je vous remercie. Madame,
messieurs du Barreau, on vous remercie beaucoup de votre présentation et
on vous souhaite bon retour chez vous.
Mme Vadboncoeur: Merci bien!
Le Président (M. Baril): J'appelle tout de suite l'Ordre
des arpenteurs-géomètres du Québec, s'il vous
plaît.
À l'ordre! Messieurs, je vous souhaite la bienvenue et je tiens
à vous rappeler le temps alloué à votre organisme, soit
une heure: 20 minutes pour présenter votre mémoire, 20 minutes
pour les membres du gouvernement et 20 minutes pour les membres de
l'Opposition. Je vous laisse la parole.
Ordre des arpenteurs-géomètres du
Québec
M. Gamache (André): M. le Président, M. le
ministre.
Le Président (M. Baril): Un instant, s'il vous
plaît, j'aimerais que vous vous présentiez. Je m'excuse.
M. Gamache: Cela va se faire, naturellement. André
Gamache, arpenteur-géomètre et vice-président de l'Ordre
des arpenteurs-géomètres du Québec. À ma gauche, M.
Jacques Sylvestre, arpenteur-géomètre d'une région
fortement minière. M. Jocelyn Fortin, secrétaire
général de l'Ordre des arpenteurs-géomètres du
Québec.
Le Président (M. Baril): Bienvenue et on vous laisse la
parole.
M. Gamache: L'Ordre des arpenteurs-géomètres du
Québec est content de faire ses représentations et ses
commentaires sur le projet de loi 161, Loi sur les mines.
L'Ordre des arpenteurs-géomètres a étudié le
projet de loi selon son champ de compétences au regard de la protection
du public de façon générale.
Ce projet de loi, comme son nom l'indique, vise à régir
l'ensemble de l'exploration et de l'exploitation des substances
minérales de même que les réservoirs souterrains. (12 h
30)
Le secteur minier a ceci de particulier que plusieurs expressions qu'on
y emploie sont des dérivés de l'anglais ou encore de
l'américain. Et, plus particulièrement, le mot "claim". Dans ce
contexte, il y aurait lieu de définir les droits miniers suivants,
accordés par la couronne sur les substances minérales ou tes
réservoirs souterrains: claim, permis d'exploration minière, bail
minier, concession minière, permis de recherche dans les fonds marins,
bail d'exploitation dans les fonds marins, permis de recherche de substances
minérales de surface, bail d'exploitation de substances minérales
de surface, permis de recherche de pétrole et de gaz naturel, permis de
recherche de saumure, permis de recherche de réservoir souterrain, bail
d'exploitation de pétrole et de gaz naturel, bail d'exploitation de
saumure, bail d'exploitation de réservoir souterrain. L'ensemble des
droits qui précèdent sont énumérés à
l'article 9 du présent projet. Il est en effet étranqe de
constater que ces droits ne sont pas définis à l'intérieur
de la loi. Étant donné que tout au long de celui-ci,
on retrouve les expressions qui précèdent, nous croyons
qu'il serait bon de fixer les définitions de ces termes dans la loi
plutôt que d'attendre les règlements qui vont suivre. Il faudrait,
de même, définir les mots "jalonner" et "prospecter".
Remarque à l'article 11. L'article 11 fait mention des droits
réels immobiliers, miniers, qui sont exemptés de l'enregistrement
au bureau de la division d'enregistrement. Cependant, on remarque que
l'enregistrement est exigé pour le bail minier, la concession
minière, le bail exclusif d'exploitation de substances minérales
de surface, le bail d'exploitation de pétrole et de gaz naturel, le bail
d'exploitation de saumure, de même que le bail d'exploitation de
réservoir souterrain.
Remarque à l'article 12. A l'article 12, on mentionne que le
registraire est chargé de "tenir un registre public des droits miniers,
réels et immobiliers, accordés en vertu de la présente
loi" et "d'y enregistrer sommairement ces droits ainsi que leurs
renouvellement, transfert, abandon, révocation ou expiration; d'y
conserver les titres qui constatent ces droits" et, finalement, "d'y
enregistrer tout autre acte relatif à ces droits".
Le complément de cet article est l'article 308, qui modifie le
Code civil par l'ajout de l'ensemble des règles qui régissent le
registre minier. À notre avis, il serait beaucoup plus simple et
beaucoup moins onéreux pour l'administration gouvernementale d'obliger
le cadastre sur les six droits réels immobiliers miniers qui sont soumis
à l'enregistrement, de façon que ces droits soient directement
portés à l'Index des immeubles. Celui-ci est déjà
existant et le volume d'inscriptions qui s'y font quotidiennement fait en sorte
que l'ajout de quelques enregistrements annuels ne saurait modifier le volume
de travail des bureaux d'enregistrement de façon remarquable.
Toutefois, les règles pour le cadastre et l'enregistrement de ces
droits, et plus particulièrement la façon de
l'arpenteur-géomètre de procéder lors de ces travaux,
devront être définies par le service de l'arpentage et être
conformes aux normes du service du cadastre. Il faut remarquer le double but du
cadastre à l'intérieur de l'enregistrement des droits miniers,
soit, premièrement, de se servir d'un outil très efficace qui est
l'Index des immeubles, index dont l'utilisation est déjà connue
de la plupart des professionnels liés aux transactions
immobilières et, deuxièmement, la publicité reliée
au cadastre qui va dans le même sens que le nouveau cadastre
québécois et l'avant-projet de loi portant réforme au Code
civil du Québec du droit des sûretés réelles et de
la publicité des droits. Nous croyons que tout ce qui touche à la
publicité des droits devrait se trouver à un seul et même
endroit, soît l'Index des immeubles ou le registre foncier, comme on se
propose de l'appeler.
À l'article 24 de la loi, on remarque que le gouvernement peut
décréter les endroits où le jalonnement se fera par
désignation sur carte. Un décret peut être fait
directement, et ce sans consultation. Il faut donc se poser la question si le
jalonnement effectif sur le terrain sera appelé à
disparaître et, plus particulièrement, si le gouvernement,
lorsqu'il prendra une telle décision pour certains territoires,
consultera la population de ce secteur. Alors il y a des endroits où le
jalonnement sur carte sera acceptable - exemple: l'ensemble des territoires
arpentés et lotis - il est par contre d'autres secteurs où
celui-cî sera très ardu. Pour n'en nommer que quelques-uns, il
suffit de penser aux cantons de Bourlamaque, Louivicourt, Bouillon et Pascalis,
qui sont tous des comtés dont les limites extérieures ont
été définies mais dont l'intérieur demeure non
loti.
Commentaire à l'article 43. Les articles 43 et suivants font
mention de l'enregistrement et de la validité des claims. Nous attirons
votre attention sur l'article 47, qui énumère les conditions dans
lesquelles le registraire refuse un avis de jalonnement dans un territoire
où le jalonnement se fait effectivement sur le terrain. Il arrive
très fréquemment que lorsqu'un territoire est ouvert, le
jalonneur déborde un peu celui-ci, de façon à s'assurer
qu'il couvre bien l'ensemble du territoire couvert. Ce jalonneur se trouve donc
à jalonner une partie d'un territoire déjà jalonné
et, ce faisant, il ne satisfait pas l'ensemble des exigences de la loi. Nous
suggérons un mécanisme faisant en sorte que dans les territoires
où le jalonnement se fait effectivement sur le terrain, que la partie
empiétée par le jalonneur soit déduite ou soit
ajoutée à son claim lorsque le claim adjacent cesse
d'exister.
L'article 67: À l'article 67, on mentionne que le titulaire du
claim est tenu d'effectuer sur le terrain qui en fait l'objet, avant le
soixantième jour qui précède la date de son expiration,
des travaux d'exploration dont la nature et le coût minimum sont
déterminés par le règlement. On mentionne aussi que les
sommes dépensées en travaux d'examen de propriété
et en études d'évaluation technique, ne doivent pas
dépasser le quart de ce coût minimum.
Je crois qu'il y aurait lieu de spécifier si les travaux
d'arpentage effectués par les compagnies minières font
effectivement partie des travaux d'exploration, ou si ceux-ci sont plutôt
considérés comme faisant partie des travaux d'examens de
propriété, ou encore d'études d'évaluation
technique ou encore que, dépendant du travail effectué, ils
peuvent être dans l'une ou l'autre catégorie.
L'article 75: II y aurait lieu d'ajouter
les levés d'arpentage aux levés géologiques,
géophysiques et géochimiques, qui peuvent compter comme travaux
appliqués à la première période de validité
d'un claim.
L'article 106. Aux articles 106 et suivants, il n'est plus fait mention
que toute concession d'un droit de surface faite avant le 1er janvier 1971 par
bail dit emphytéotique sur une concession minière, est
considérée comme vente pure et simple. On retrouve, encore de nos
jours, plusieurs cas où cet article s'applique. Je crois qu'il est
encore trop tôt pour le laisser tomber en désuétude et que,
l'ensemble de ce qui est inscrit à l'article 129 de la loi actuelle,
devrait être reporté dans la nouvelle loi.
À l'article 117, on remarque qu'après l'abandon d'un bail
ou d'une concession minière le locataire ou le concessionnaire peuvent
rejalonner ceux-ci sur carte. Or, il existe une situation comme celle-ci qui se
produit assez fréquemment. Quand une concession minière est assez
ancienne, ses limites sur le terrain qui avait été
arpenté, sont disparues. De plus, il est mentionné que la limite
arpentée demeure en force tant que le claim, le bail ou la concession le
demeure. C'est donc dire que lorsque ceux-ci tombent, les limites
arpentées tombent également. Les voisins jalonnent et souvent
vont empiéter sur le terrain de la concession. Cet empiétement
n'est pas réel tant que ladite concession existe. Quand la concession
est annulée, le claim qui avait été plus ou moins bien
jalonné prend une partie de cette concession. Donc, le jalonnement sur
carte crée un autre empiétement. Il y aurait donc lieu de
retravailler cet article de façon à définir une fois pour
toutes de quelle façon fonctionner dans ces cas. Les mêmes
remarques s'appliquent dans le cas des articles 259 et 274.
Finalement, comme mentionné précédemment, l'article
308 crée un registre minier, et nous en recommandons l'abandon au profit
du registre foncier, ou ce qui existe présentement à l'Index des
immeubles. Cependant, si le registre minier est conservé, voici nos
suggestions: Situé au bureau régional des mines, ce registre
pourrait être sous forme informatisée, un reflet de ce qui existe
déjà à l'Index des immeubles. C'est-à-dire que
chaque claim pourrait y avoir sa page dite "index", sur laquelle serait
inscrite la date d'entrée en vigueur du claim, le jalonneur, les
transactions qui ont affecté ce claim, les conflits éventuels, le
fait que ce claim soit devenu ou non l'objet d'un bail, de même que
l'ensemble des travaux effectués. Ces informations sont
présentement disponibles mais centralisées à
Québec. Lorsqu'un arpenteur-géomètre doit effectuer un
travail, souvent, il faut attendre de longs délais pour les obtenir. Il
y aurait également lieu qu'une copie du croquis de jalonnement soit
annexée à cette feuille. Ce registre faciliterait de beaucoup la
publicité reliée au claim minier, alors que d'un autre
côté, l'Index des immeubles, par sa structure et son envergure,
permettrait de publiciser les droits qui ont un caractère plus
permanent, c'est-à-dire l'ensemble des baux.
Enfin, on remarque à travers la loi que les mines ne sont pas
soumises aux réglementations municipales. À cet effet, il semble
évident qu'on ne peut définir l'endroit où sera
située une mine avant que celle-ci soit trouvée ou
localisée. Toutefois, lorsqu'une mine se développe, plusieurs
bâtiments y sont érigés. C'est à ce moment-ci qu'une
réglementation municipale pourrait intervenir, de façon à
régir l'ordre et la disposition des structures servant à
l'exploitation minière. Cette inclusion dans la loi permettrait une
meilleure gestion du territoire urbain.
Ce sont là quelques commentaires de l'Ordre des
arpenteurs-géomètres du Québec. Nous croyons que les
modifications suggérées vont dans le sens d'une tenue à
jour de la carte cadastrale québécoise en évitant toute
échappatoire. Si nous commençons à créer des
exceptions, il s'ensuivra une impossibilité de garder la carte de
morcellement foncier à jour. Il ne faudrait pas répéter
l'erreur de 1860 lorsque le cadastre avait été mis en vigueur.
Nous pourrions ajouter que, compte tenu du contexte de la loi - il y a beaucoup
de sujets sur lesquels on n'est pas ici pour discuter de la sorte de
réglementation - les arpenteurs-géomètres souhaitent
participer activement au processus d'élaboration des politiques qui
peuvent concerner l'arpentage dans le domaine des mines. La
réglementation est la responsabilité du ministre, mais nous
aimerions faire partie, à tout le moins de façon consultative, de
l'élaboration de certains règlements. On vous remercie de votre
attention.
Le Président (M. Cannon): Merci beaucoup, M. Gamache. 0e
cède maintenant la parole au ministre pour son intervention.
M. Savoie: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
remercier l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec
d'avoir présenté un mémoire, qui va certainement aider
à notre analyse et au travail qu'on a fait. Je voudrais également
souligner la présence de l'arpenteur Jacques Sylvestre, membre d'une
famille qui, de père en fils, travaille dans la région de
Val-d'Or et qui participe très activement à l'industrie
minière dans notre région.
Vous avez soulevé quelques points. Je me permettrai d'abord
d'intervenir sur ces quelques points précis et ensuite, je
céderai la parole à mon confrère, quitte à revenir
plus tard et à discuter peut-être de quelques principes que vous
avez soulevés.
D'abord, vous réclamez davantage de
définitions. Nous n'avons pas cru nécessaire de
définir au début du projet de loi la nature des droits miniers
octroyés, puisqu'on retrouve ces définitions dans le corps de la
loi. Ainsi, les articles 37, 78, 94, 121, 124, 134, 159 et 186,
présentent les définitions lorsque c'est la première fois
qu'on les rencontre. Il y a d'autres termes comme le mot "jalonnement" ou le
mot "claim", qui sont des termes proprement français et qui se trouvent
dans le Robert, et qui doivent être utilisés selon son sens
courant. À partir du principe de jurisprudence, nous avons pris cette
orientation. Pour ce qui est du jalonnement, l'article 41, je crois,
prévoit que les règles de jalonnement seront
précisées aux règlements. Étant donné que
vous avez fait des commentaires sur le règlement, vers la fin de votre
exposé, je pourrai peut-être y revenir après les questions
que pourrait vous poser le député d'Ungava.
Également, vous ne voulez pas que le territoire sujet à
désignation sur carte soit défini par décret. Alors, nous
prenons bonne note de ce commentaire. La désignation de ce territoire
pourrait être en annexe au projet de loi, et toute modification à
la superficie de ce territoire impliquerait une modification législative
à ce moment-là.
Vous dites que les travaux d'arpentage doivent être vus comme des
travaux d'exploration. Les travaux d'arpentage sont effectivement
considérés comme des travaux d'exploration minière en
vertu de l'article 32 du projet de règlement sur les substances
minières autres que le pétrole, le gaz naturel et la saumure. (12
h 45)
En page 5 de votre mémoire, vous demandez de
réintégrer l'article 129 de la loi actuelle. Ne croyez-vous pas
que les articles 340 et 341 reprennent cette disposition, et compte tenu de la
nature de cette clause, qui vient ratifier législativement certaines
transactions, ne serait-il pas préférable de l'inclure en droit
transitoire?
M. Gamache: Effectivement, sauf qu'en revenant sur la partie
réglementaire. Vu que beaucoup de choses vont venir par
règlement, il y a peut-être des dispositions. À ce
moment-là, est-ce que l'on pourra participer à
l'élaboration de la réglementation pour mieux définir des
cas particuliers qui avaient été soulevés par les
arpenteurs-géomètres qui pratiquent dans le secteur minier? Des
points techniques avaient été soulevés auxquels on
répondra par règlement. Alors, une participation à cette
réglementation serait de bon augure.
M. Savoie: Vous parlez également, à la page 5, de
l'exigence de cadastrer tous les droits miniers. Vu la dimension des droits
miniers, des baux d'exploitation de pétrole et de gaz naturel, de
saumure et des réservoirs souterrains, il nous semble très
difficile, pour ne pas dire impossible, d'exiger la désignation
cadastrale de ces titres. On note que la dispense de l'enregistrement a
été consentie au permis de recherche de pétrole, de gaz
naturel, de saumure et de réservoirs souterrains. Lorsque l'on regarde
des facteurs comme les coûts de l'arpentage et du cadastre, qui sont
très élevés, souvent la recherche pétrolière
est faite dans des régions non cadastrées - on parle de la
Gaspésie, d'Anticosti. La superficie qui fait l'objet à des
permis de recherche peut atteindre jusqu'à 25 000 hectares. Vous faites
référence à l'article 161. La superficie des baux peut
atteindre jusqu'à 2000 hectares en vertu de l'article 188. Alors, on
parle également de coûts de 15 000 $ pour la méthode de
transfert d'images. On sent que c'est vraiment beaucoup demander que d'exiger
de cadastrer les droits miniers. Avez-vous des commentaires?
M. Sylvestre (Jacques): Le cadastre que l'on demande, c'est
strictement réservé aux cinq baux au début,
c'est-à-dire ce que l'on doit enregistrer actuellement dans le registre
minier.
On prévoit déjà, d'après les conversations
que j'ai pu avoir avec les fonctionnaires, que quand on parle d'un bail minier,
cela va être cadastré. J'ai entendu dire que si dans le golfe du
Saint-Laurent, un jour, on trouvait un peu de pétrole et qu'il fallait
le cadastrer, cela coûterait les yeux de la tête. Avec la
technologie qui existe aujourd'hui, c'est une niaiserie de viser les satellites
géostationnaires, de calculer ton positionnement et, de là, de
donner ta position par coordonnées géographiques. Alors, ce sont
toutes des méthodes qui existent; il suffit tout simplement de les
mettre à profit. Déjà on demande quand même une
description des territoires. Tant qu'à décrire un territoire, le
pas n'est pas bien grand pour aller jusqu'au cadastre.
M. Savoie: Vous ne sentez pas, par exemple... Cela pourrait
coûter combien de cadastrer une partie du fleuve?
M. Sylvestre: Cadastrer une partie du fleuve?
M. Savoie: Oui.
M. Sylvestre: Créer un bloc, c'est tout simplement
être sûr de la localisation du secteur au-dessus et ce n'est pas
pire que quand tu vas dans le Grand-Nord. La méthode de viser des points
ne m'est pas familière. Je l'ai apprise à l'université. Il
y a un professeur en arrière qui pourrait vous en parler,
peut-être. Mais c'est un coût, ce
n'est même pas 10 000 $ et si tu regardes ce que cela coûte
d'installer une plate-forme de forage, c'est minime.
M. Savoie: Et pour les réservoirs souterrains?
M. Sylvestre: Pour les réservoirs souterrains, dans les
trois quarts des endroits... Est-ce que vous voulez dire au-dessous de l'eau ou
au-dessous de la terre ferme?
M. Savoie: Au-dessous de la terre ferme.
M. Sylvestre: Si c'est au-dessous de la terre ferme, il y a de
fortes chances qu'un cadastre existe déjà. Si, par exemple, le
réservoir souterrain est situé au-dessous du rang 1 de tel
canton, à partir du lot 46 jusqu'au lot 60, on a juste à porter
à l'Index des immeubles les notes qui concernent le bail qui y sera
consenti. Pour un réservoir souterrain, cela n'affectera en rien les
droits de surface. S'il y a une parcelle en surface qui doit être
affectée, on ne cadastrera pas cette parcelle-là et tout va
être clair.
M. Savoie: Je vais prendre bonne note de cet
éclaircissement. Évidemment, quant à vos commentaires, en
ce qui concerne le registre minier qui devrait s'apparenter à l'Index
des immeubles, c'est ce qui va probablement se faire. Ensuite, vous parlez de
la nécessité d'une réglementation municipale en ce qui
concerne l'exploitation municipale. Pourrais-je avoir des
éclaircissements sur cette position, à la fin de votre
mémoire?
M. Sylvestre: C'est simple, c'est qu'aujourd'hui, si on prend
l'exemple de mines déjà existantes, ils prennent un territoire et
dans l'agencement des bâtiments reliés à une exploitation
minière, il y a moyen de diriger cet agencement de façon que,
pour l'oeil, cela paraisse mieux. Actuellement, une mine n'est pas régie
par des marges de recul ou des dégagements latéraux par rapport
à des rues existantes. C'est sûr que le "shaft" de la mine va
aller où est la mine. Mais s'il y a des bâtiments à
côté d'un moulin qui est créé, ou d'autres choses
comme cela, à l'intérieur de la concession minière, il
faudrait quand même que la municipalité, à
l'intérieur du territoire où c'est situé, puisse avoir un
droit de regard pour imposer à la mine une façon de
procéder.
M. Savoie: Je reconnais l'échevin qui parle. D'accord.
Le Président (M. Baril): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le ministre. C'est avec beaucoup
d'intérêt que j'ai pris connaissance du mémoire et de tout
l'intérêt que vous portez, en tant qu'Ordre des
arpenteurs-géomètres, à la question de la Loi sur les
mines. Je veux, en même temps, profiter de l'occasion pour vous souhaiter
la bienvenue et faire en sorte que cet échange soit des plus fructueux
pour le ministre, qui aura sûrement une lourde tâche au moment de
ramasser toutes les nombreuses suggestions qui lui sont faites, et d'en faire
un véritable projet de loi.
Vous semblez particulièrement préoccupés, dans
votre mémoire, par la question de la désignation sur carte. En
effet, en pages 3 et 4 de votre mémoire, vous vous étendez un peu
sur ce sujet. Comme vous l'avez dit dans votre présentation, où
vous avez donné des exemples de cantons où ce serait pratiquement
impossible de se faire. Enfin, en ce qui me concerne, je crois que ce sont des
exemples qui sont vraiment très restrictifs, parce que l'ensemble du
Moyen-Nord, du Nord québécois et de la fosse du Labrador, de
l'Ungava, ainsi que dans l'ensemble des Appalaches, il semble que cela serait
assez difficile d'y aller par désignation sur carte. Par contre, dans
votre texte, je ne vois pas vraiment vos suggestions par rapport à cela,
comment voyez-vous le balancement, comment croyez-vous qu'on devrait faire la
part des choses entre la désignation sur carte et la désignation
sur le terrain, plus traditionnel?
Le Président (M. Baril): M. le député
d'Ungava.
M. Sylvestre: M. le Président, je pense que c'est quand
même indiqué, en haut de la page 4 car on dit qu'il y a des
endroits où le jalonnement sur carte serait acceptable. Par exemple,
l'ensemble des territoires arpentés et lotis, et il y en a d'autres
où cela va être plus ardu. Alors où c'est loti, dans les
cantons où il y a des rangs, des lots, c'est sûr que le
jalonnement sur carte, ce qu'on appelle dans la loi actuelle, le territoire
arpenté, le jalonnement sur carte devient très facile.
M. Claveau: Ce n'est pas ce qui se passe déjà dans
la réalité, du moins dans plusieurs régions du
Québec.
M. Sylvestre: Pas actuellement. Je parle pour la région
que je connais, soit l'Abitibi.
M. Claveau: II y a quand même tout un secteur dans l'Estrie
qui est déjà désigné sur carte de cette
façon. D'après ce que j'ai cru comprendre des intentions du
ministre, il ne s'agissait pas d'étendre, du moins dans un
premier temps, la désignation sur carte pour l'Abitibi, mais
plutôt d'étendre la limite actuelle vers le bas du fleuve, et un
peu vers le sud de Montréal.
M. Sylvestre: J'irais même jusqu'à le faire en
Abitibi pour les endroits où les territoires sont arpentés.
M. Claveau: Vous préconisez clairement que c'est
l'ensemble des lots occupés, finalement, arpentés, tout ce qui
peut être du domaine rural, par exemple, ou qui pourrait recouvrir la Loi
sur la protection des terres agricoles.
M. Sylvestre: C'est qu'aujourd'hui, on se rend compte de plus en
plus que les lignes de rang cela devient - passez-moi l'expression - des
"trails de ski-doo", et les poteaux disparaissent. Le territoire est
déjà défini au moyen de plans qui sont officiels. Si on
désigne sur carte, on sait exactement où le terrain va être
mais quand on va sur le terrain, le jalonneur peut se tromper d'un lot. Donc,
c'est une source de conflits, alors que si c'est désigné sur
carte, et qu'il n'est pas sûr de son coup, il va s'arranger pour
être certain de savoir où il commence et où il finit.
Tandis que quand cela se passe en jalonnant, il va aller jalonner le lot 9 et
11 va déclarer que c'était le lot 8 quand il va
l'enregistrer.
M. Claveau: Selon votre raisonnement, ce que vous demandez, c'est
d'aller encore plus loin que ce que le ministre a en tête au moment
où on se parle...
M. Sylvestre: Oui.
M. Claveau: ...et de recouvrir l'ensemble des territoires
agricoles et urbanisés par une désignation sur carte.
M. Sylvestre: Où c'est déjà
arpenté.
M. Claveau: À la page 4, dans votre critique de l'article
43, vous me semblez introduire une notion dangereuse quand vous parlez de
l'empiétement d'un claim sur un autre. Dans le but de s'assurer qu'on va
prendre tout le territoire qui nous est concédé, on a tendance
à déborder un peu. Cela se voit souvent dans le domaine municipal
quand les terrains ne sont pas tout à fait bien désignés,
surtout dans les villes minières. Si quelqu'un y achetait un terrain, il
faisait le remplissage de huit à dix pieds sur le terrain voisin qui
allait peut-être être vendu un jour. Aujourd'hui, on se retrouve
avec des situations souvent difficiles à régler parce que tous
les terrains sont vendus. Il y en a un qui achète un terrain plus petit
et c'est l'autre qui a fait tout le terrassement, dix ans plus tôt.
J'ai l'impression que votre suggestion de mettre en place, dans ces cas,
un mécanisme qui ferait en sorte que le territoire sur lequel on a
empiété un peu, par mesure de sécurité, soit
automatiquement ajouté au claim de base, au moment où l'autre
territoire est abandonné, pourrait comporter un danger et pourrait
porter à l'exagération. Non'? D'abord, il faudrait quasiment
imaginer un article de loi dans lequel on prévoirait des
dépassements et des dépassements qui ne pourraient pas aller plus
loin que telle limite. Cette affaire devient difficile à juger, ne
croyez-vous pas?
M. Sylvestre: Si vous vous reportez à la page 4 du
mémoire, on mentionne que la partie empiétée par le
jalonneur devrait être déduite ou ajoutée. Qu'on prenne une
décision ou l'autre, mais qu'on en prenne une. Actuellement, le
jalonnement se fait au moyen d'une boussole et souvent ils s'en vont avec du
"topo fil", et ils placent leur piquet. Les autres passent quatre ans
après, et il y en a beaucoup aujourd'hui qui placent du ruban aux arbres
mais après quatre ans, le ruban n'est plus là. On ne retrouve pas
le vieux poteau de l'autre. On s'en va souvent, et pour être certain, on
déborde sur le terrain du voisin. C'est sûr que si on se fie aux
prescriptions actuelles de la loi, il y a les trois quart des claims qui ne
sont pas bons parce que justement, cela déborde chez le voisin et qu'on
se retrouve avec un territoire ouvert. Égelement, quand un claim tombe,
on ne peut pas remonter dans la chaîne de titres ad vitam aeternam pour
savoir où était la ligne à tel moment.
Si le deuxième claim qui a été jalonné
empiète un peu sur le premier, actuellement quand le premier tombe, le
deuxième se trouve à gagner un morceau. C'est le même
facteur qui se produit quand on introduit la notion de jalonnement sur carte
pour des concessions minières qui seraient abandonnées. Quand la
concession minière est abandonnée, s'il y a un claim qui a
été jalonné juste à côté, si le gars a
débordé parce que la ligne n'était pas visible et si la
concession tombe, le claim devient prioritaire. L'autre qui jalonne ensuite sur
carte tombe après celui qui était prioritaire. Donc, on a un
autre conflit possible. La situation est là et il faut prévoir un
mécanisme qui va la régler, et faire en sorte que cela ne se
reproduise plus.
M. Claveau: Ne croyez-vous pas qu'en établissant un
mécanisme qui essaierait de régler ce cas, qui va toujours se
présenter de toute façon, et qui ne me semble pas avoir
créé jusqu'à maintenant, sauf erreur, des remous
insurmontables dans l'industrie minière, en touchant à cela on
risque, au contraire, de créer l'exagération et que tout le monde
va essayer d'empiéter le plus
possible sur le claim voisin, dans la mesure où il a des chances
de pouvoir agrandir son territoire, sans payer de droits supplémentaires
le jour où le claim voisin ou le droit voisin va tomber?
M. Sylvestre: On est quand même limité dans cela
parce qu'il y a une décision qui a déjà été
rendue par le juge des mines et qui dit qu'un claim doit avoir un temps de
superficie où il y a plus ou moins un pourcentage de 10 % qui semble
être appliqué. On ne pourra quand même pas faire un claim et
empiéter sur un autre claim à côté, sans en avoir
deux de créés.
Je suis d'accord avec vous qu'il n'y a pas eu de conflit dans le monde
minier, mais - passez-moi l'expression - il y a une "gang" d'arpenteurs qui se
sont gratté la tête pour savoir quoi faire, par exemple. (13
heures)
M. Gamache: Concernant ce point, ce sont des états de fait
que les arpenteurs-géomètres constatent. Nous soulignons,
évidemment, que cela ne fait pas de remous parce que ce ne sont pas des
sommes et des dossiers qui nécessitent des interventions de part et
d'autre. Il reste que c'est un problème soulevé. Nous le
soulignons pour y apporter des correctifs.
En ce qui concerne les correctifs à apporter, nous ne pouvons pas
vous dire à ce stade d'inclure dans la loi telle et telle chose, ou par
règlement, mais à tout le moins de vous en préoccuper pour
être en mesure d'avoir des situations claires. Pour vous faire un
parallèle, lorsque les situations ne sont pas claires, que ce soit par
rapport à cela ou par rapport à ce que vous disiez tantôt
des jalonnements sur carte, dans le système québécois
d'enregistrement des droits, la base est le cadastre. Or, il est évident
que dans tous les secteurs cadastrés et arpentés, il est facile
de travailler sur carte et lorsqu'on dépasse ces territoires, on tombe,
par le jalonnement, sur le terrain. Ce sont des problèmes que nous
vivons et que nous voulons souligner afin que nous puissions avoir, à un
moment donné, des guides.
Juste pour vous faire un parallèle, si l'on parle de la fameuse
réserve des trois chaînes qui a soulevé et qui
soulève un problème présentement, nous pourrions vous
souligner que depuis de nombreuses années, le problème, quant
à nous dans le milieu, ce n'est pas l'application des réserves,
c'est de savoir des ministères et du gouvernement quel lac et quelle
rivière sont ou ne sont pas navigables. Nous avons été
laissés dans le doute et les citoyens aussi pendant de nombreuses
années. Aujourd'hui, il intervient un jugement de la Cour suprême
et nous devons vivre avec. Le mémoire et ces points sont dans cette
optique. Nous constatons qu'il y a certaines faiblesses et nous
suggérons d'y remédier d'une façon ou d'une autre, mais
que les situations soient claires et précises, tout simplement.
Le Président (M. Baril): On me fait remarquer, et c'est
vrai, je m'en excuse, que nous devons avoir le consentement pour continuer
après 13 heures. Est-ce que nous avons le consentement? Alors, nous
continuons. Je m'excuse, monsieur.
M. Claveau: Votre réponse me semble très
pertinente. J'aurais une dernière question puisque c'est
vous-mêmes qui soulevez le problème, à la page 6 de votre
mémoire, en parlant de la réglementation municipale. Je serais
porté à vous demander au-delà de ce que vous voulez
dire... J'ai cru comprendre - c'est M. Sylvestre, je crois, qui nous l'a dit -
qu'il s'agissait de savoir où et comment situer et dans quel angle
mettre le puits de la mine ou - comment dit-on en français le "shaft
house" - la cabane qui se trouve au-dessus du puits; c'est une chose. II reste
que, de toute façon, ce n'est quand même pas fixe non plus. Vous
savez, on peut faire le puits en plein milieu du gisement, on peut le faire
à côté avec des voies d'accès -enfin, il y a toutes
sortes de possibilités - et avec des rampes. Par contre, là
où votre petit paragraphe donne prise à des questions, c'est
concernant le pouvoir que se donne le ministre de délimiter
lui-même le périmètre urbain qui serait
protégé contre ce que d'aucuns oseraient appeler l'invasion
minière, alors que nous avons déjà, de par la loi 125, des
plans d'aménagement qui devraient être produits par les MRC et qui
devraient, à moins que l'on modifie la loi 125, avoir priorité
sur les autres lois sectorielles qui viendraient contrecarrer les
prévisions des administrateurs municipaux en ce qui concerne les plans
d'aménagement du territoire et, en l'occurence, aussi les
décisions qui seraient prises aux conseils de ville relativement aux
plans de zonage. Vous n'êtes pas sans savoir que lorsque l'on veut
modifier un plan de zonage, il faut d'abord avoir recours à toute une
procédure qui prévoit, entre autres, le référendum
dans le secteur concerné. Ce qui risque de compliquer
énormément le problème, par exemple, dans le cas
où, par référendum, on refuserait de modifier le plan de
zonage et où, par contre, le ministre, dans son projet de loi, se
réserverait le droit d'intervenir en disant que cela ne fait pas partie
de son périmètre urbain, tel qu'il le définit comme
ministre, même si la municipalité a un autre
périmètre urbain.
Je ne sais pas comment vous, en tant
qu'arpenteurs-géomètres, qui avez peut-être l'habitude de
jouer un peu avec ces questions et de passer un coup de transit à
l'occasion pour délimiter des territoires, vous vous situez par rapport
à la proposition que l'on a dans le projet de loi.
M. Gamache: En ce qui a trait au pouvoir discrétionnaire,
je vous ferai remarquer qu'on est peut-être mal assis pour
répondre à cela. De façon générale, je
dirais que si les pouvoirs discrétionnaires ou la question de
règlement, ne sont pas dans le projet de loi, pour assurer la protection
du public, pour autant que les organismes, comme l'Ordre des
arpenteurs-géomètres ou d'autres corporations, les MRC ou
d'autres ministères sont concernés et que la population est
consultée de façon générale, il faut retenir
l'intérêt public et la protection du public. À ce
moment-là, je serais inconfortable quant à savoir quels sont les
moyens législatifs ou administratifs qui pourraient régler une
telle situation.
Par contre, voici ce qu'on veut mentionner, et c'est un point qui a
déjà été soulevé: lorsqu'on dit que les
municipalités n'ont pas de regard sur l'infrastructure, on n'a pas
l'idée de commencer à donner des orientations ou à
vouloir, au nom des municipalités, ou de qui que ce soit... On
soulève le point, mais cela ne veut pas dire que l'on pense régir
la construction, la couleur des bâtiments ou leur direction, etc. C'est
tout simplement une question de zonage, de façon générale,
ou un mécanisme où une municipalité a quand même son
mot à dire. Sauf que si dix autres intervenants trouvent que cette
remarque crée plus de problèmes qu'autre chose, il appartient
à nos élus, en commission parlementaire, de faire le tri et de
juger les remarques des intervenants. Nous faisons donc cette remarque dans ce
cadre-là. Il y a du pour et du contre. On vous le souligne et on vous
laisse la responsabilité en tant qu'élus de porter votre
jugement.
M. Claveau: Je vous remercie. En ce qui me concerne, je n'aurais
pas d'autres questions.
Le Président (M. Baril): Merci. M. le ministre.
M. Savoie: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier
M. Gamache de s'être déplacé, avec MM. Sylvestre et Fortin,
et d'avoir présenté un mémoire qui nous a permis d'obtenir
des éclaircissements sur des questions qu'on a soulevées, et
même sur des opinions qu'on a émises en ce qui concerne certains
aspects du cadastre et de l'arpentage.
Il y avait une petite question qui me trottait dans la tête. Dans
votre mémoire, il y a quelque chose concernant les travaux de cadastrage
faits avant l'obtention du claim qui pourraient être déduits de
moitié lorsqu'on obtiendrait le claim. Je me demandais si vous ne
pourriez pas m'expliquer cela un petit peu. Vous avez fait état du fait
que les travaux d'arpentage... à la page 5, me dit-on.
M. Gamache: À l'article 75? M. Savoie: Oui.
M. Sylvestre: On parle des levés géologiques,
géophysiques et géochimiques...
M. Savoie: Oui.
M. Sylvestre: On ne parle pas des levés d'arpentage et il
arrive souvent qu'un claim est pris et que des travaux ont déjà
été faits dans le passé. Pour les travaux qui ont
été faits dans le passé, vous retrouverez souvent un
"casing". Pour mettre tout cela ensemble et avoir un tableau fidèle, il
faut presque y aller avec des transits et faire des travaux d'arpentage pour
être capable de compiler cela, et de se servir de ce qui a
déjà été enregistré comme travaux. C'est
à ce moment-là qu'on demande d'inclure les levés
d'arpentage avec les autres levés. La seule modification qu'on apporte
est d'ajouter les mots "levés d'arpentage" en plus des autres
"levés" qui sont déjà indiqués.
M. Savoie: Merci. Je voudrais vous remercier. Cela nous a fait
plaisir de vous recevoir et nous espérons que nous pourrons continuer
à compter sur l'Ordre des arpenteurs pour leur bonne participation dans
l'élaboration de notre projet de loi.
Le Président (M. Baril): Pour le mot de la fin, M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Au nom de l'Opposition
officielle, je tiens à vous remercier aussi pour l'excellente
présentation que vous nous avez faite, et à vous assurer que nous
profiterons de la pertinence de vos propos pour tenter d'éclairer la
lanterne ministérielle dans la modification de certaines approches, qui
nous semblent être discutables, dans le projet de loi actuel. Merci et
bon retour.
Le Président (M. Baril): Je vous remercie beaucoup de vous
être présentés et je vous souhaite un bon retour chacun
chez vous. Je tiens à faire remarquer aux membres de la commission que
nous suspendons les travaux jusqu'à la fin de la période des
affaires courantes de l'Assemblée de cet après-midi, soit jusque
vers 16 heures. Cet après-midi, je serai remplacé par un autre
président en fin d'après-midi. Je tiens à faire remarquer
aux intéressés que, demain, nous aurons une très grosse
journée, et je tiens à vous préciser que nous commencerons
à 10 heures pile. Alors, je vous remercie.
(Suspension de la séance à 13 h 10)
(Reprise à 16 h 13)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je rappelle le mandat de la commission de l'économie et du
travail qui est de procéder à une consultation
particulière sur le projet de loi 161, Loi sur les mines. Le prochain
mémoire que nous entendrons est celui de la Faculté de droit de
l'Université d'Ottawa qui est représentée par M. Jean-Paul
Lacasse, avocat et professeur.
M. Lacasse, je vous rappelle que le temps alloué à chaque
organisme dans le cadre de cette commission parlementaire est d'une heure
réparti ainsi: 20 minutes pour la présentation de votre
mémoire - j'imagine que cela sera un résumé - 20 minutes
pour discuter avec le gouvernement et 20 minutes de discussion entre
vous-même et l'Opposition,
Alors, vous pouvez procéder immédiatement, s'il vous
plaît.
Faculté de droit de l'Université
d'Ottawa
M. Lacasse (Jean-Paul): Merci, M. le Président. M. le
ministre, MM. les membres de la commission, je voudrais d'abord me
présenter à ceux qui ne me connaissent pas déjà.
Après avoir fait mes études de droit, je suis devenu conseiller
juridique au ministère des Richesses naturelles du temps, de 1965
à 1969. À la même époque et jusqu'en 1975, j'ai
aussi oeuvré au sein de diverses commissions gouvernementales. J'ai
également publié divers textes de droit minier, dont un volume
intitulé Le Claim en droit québécois, et j'ai
apporté des exemplaires pour les membres de la commission qui voudraient
en prendre connaissance, à titre de document d'arrière-pian.
Le Président (M. Desbiens): Voulez-vous le distribuer aux
membres de la commission?
M. Lacasse: Oui. Merci beaucoup.
Depuis 1975, je suis professeur à la Faculté de droit de
l'Université d'Ottawa. Je suis très reconnaissant au ministre et
aux membres de la commission d'avoir bien voulu m'inviter à formuler mes
commentaires sur le projet de loi 161 devant cette commission.
La partie introductive du mémoire signale que le projet de loi
constitue un outil de travail utile, malgré quelques carences, lacunes
et insuffisances, en ce sens qu'il nous fait voir la perception qu'en ont les
gestionnaires du domaine minier, tout en apportant des initiatives
intéressantes.
La deuxième partie du mémoire traite du régime du
claim. Bon nombre d'innovations, comme l'instauration d'un permis de
prospection d'une durée de cinq ans, la durée du claim
portée à deux ans, la nouvelle possibilité de jalonner sur
le territoire non urbanisé d'une ville ou encore les nouvelles
limitations de temps prévues pour la contestation de claims sont
excellentes. Par ailleurs, il faut à mon avis déplorer la fin de
la gratuité du claim en ce sens que cela vient à l'encontre du
principe de ne pas taxer l'exploration à son stade initial. Il faut
aussi déplorer le fait que le territoire assujetti à la
désignation sur carte le serait par décret du gouvernement
plutôt que précisé dans la loi. Cette partie du
mémoire fait aussi état de quelques questions qui se posent face
à diverses situations faisant suite à des jalonnements, tout en
formulant des suggestions pour améliorer le projet de loi.
La troisième partie du mémoire est plus descriptive et
concerne les litiges et l'exercice du pouvoir quasi judiciaire sous la loi
actuelle. Celle-ci prévoit des pouvoirs quasi judiciaires se rapportant
à l'existence à la validité et à la
déchéance des titres miniers qui sont exercés, tant en
première instance qu'en appel, par le juge des mines et, depuis le 1er
juillet 1986, par le juge désigné de la Cour provinciale.
L'institution du juge des mines, ce protecteur du prospecteur, a
été abolie de façon soudaine et sans aucune consultation
en 1986, en raison, semble-t-il, de statistiques - qui n'étaient pas
bonnes, en passant - sur le nombre de litiges portés devant elle.
Cependant, le juge désigné de la Cour provinciale a, depuis le
1er juillet 1986, la même juridiction et les mêmes pouvoirs
qu'avait le juge des mines.
Notre propos peut peut-être être illustré, à
titre d'exemple, par l'analyse de la série de décisions rendues
en 1986. Est-ce que je pourrais faire circuler ce document parmi les membres de
la commission? Il y a eu, en 1986, six décisions du juge des mines. Dans
trois cas, la requête avait été formulée par le
ministre selon la procédure de renvoi. L'une des requêtes visait
huit litiges alors que les deux autres requêtes visaient des litiges
uniques. Dans les trois autres cas, la requête a été
formulée par un prospecteur ou une compagnie minière. L'une de
ces trois requêtes est en première instance, les deux autres en
appel d'une décision du ministre. Afin de simplifier l'enquête et
de réduire le temps consacré à l'audition, le juge des
mines a fait venir le dossier du ministère, a rassemblé tous les
faits et documents pertinents et a préparé un
procès-verbal des conférences préparatoires, au besoin
après consultation des parties, qu'il a ensuite transmis aux parties
pour leur approbation. J'ai ici l'exemple de l'une de ces affaires et je
demanderais, si possible, qu'il puisse circuler parmi les membres de la
commission. Merci. Le juge convoque ensuite les parties à une audition
et, par la suite, il
rend sa décision.
Le mémoire fait état, aux pages 20, 21 et 22, de trois
affaires où la requête avait été formulée par
un prospecteur ou une compagnie minière avec le ministre comme
intimé. Dans chaque cas, l'affaire aurait pu, ou même aurait
dû, à mon avis, dès le départ faire l'objet d'un
renvoi au juge des mines et non pas d'une décision par les
représentants du ministre. Dans l'un des cas, la décision du
ministre a été confirmée et dans les deux autres cas la
décision du préposé du ministre a été
renversée. Dans l'un de ces cas, il s'agissait d'un refus de travaux de
la part de l'un des préposés du ministère.
La quatrième partie du mémoire traite de l'exercice des
pouvoirs quasi judiciaires en vertu du projet de loi 161. Le projet de loi
propose de donner au ministre, ou à un enquêteur qu'il nomme selon
des critères inconnus, le pouvoir de régler les litiges, de
refuser les travaux et de révoquer les droits. À ces fins, les
pouvoirs d'enquête actuellement attribués aux juges seraient entre
leurs mains. Cela va, à mon avis, à l'encontre d'un principe de
base de notre droit minier voulant que de tels litiges relèvent ou
doivent relever d'un organisme indépendant de l'administration sur des
questions affectant les droits de l'administré.
Je rappelle à ce sujet que le projet de loi 87, entré en
vigueur le 1er juillet 1986, ne changeait rien aux pouvoirs d'enquête du
juge des mines, lesquels tout simplement étaient désormais
confiés à la Cour provinciale. Mais le projet de loi 161
chambarde totalement la situation en ce sens qu'il confierait ces pouvoirs au
ministre ou à son ou ses enquêteurs. On peut se demander si
l'enquêteur que le ministre nomme peut se transformer subitement en un
organisme quasi judiciaire lorsqu'on constate la façon quasi
secrète dont les préposés du ministre exercent
actuellement les quelques pouvoirs quasi judiciaires qu'ils détiennent.
Donc, peuvent-ils subitement se transformer en un organisme quasi judiciaire
qui respecterait les règles de la justice naturelle, y compris celle qui
ferait en sorte que l'administré bénéficierait de toute la
documentation afférente au litige, y compris ce qui peut aller à
l'encontre de l'interprétation que le ministère donne à la
loi? L'affaire Nicholson sur le "duty to act fairly" a fait l'objet d'un
arrêt de la Cour suprême du Canada en 1979, mais jusqu'à ce
jour les représentants du ministère n'ont sûrement pas agi
selon les principes énoncés dans cet arrêt. Cela est
d'autant plus difficile que le ministre et ses préposés sont
habituellement juge et partie dans de tels litiges qui les opposent à
l'administré en ce sens que, représentant la couronne, ils
appliquent alors leur propre interprétation de la loi pour conclure
à la perte ou non de droits de l'administré sur ce même
territoire de la couronne.
Il est vrai qu'il y aurait, selon le projet de loi 161, appel à
la Cour provinciale de bon nombre de décisions du ministre, mais de tels
appels seraient portés devant une cour civile qui n'aurait pas les
pouvoirs d'enquête du juqe des mines, forçant ainsi
l'administré à bâtir sa propre cause et a être
presque obligatoirement représenté par avocat, le tout à
un coût plus élevé. Il en résulterait que la seule
intervention du pouvoir judiciaire dans le processus décisionnel serait
l'équivalent, à un palier moins élevé, de
l'intervention de la Cour d'appel en vertu de la loi actuelle,
c'est-à-dire sans possibilité pour le juge d'assigner ses
témoins, sans déplacement de la part du juge, sans qu'il
intervienne directement pour compléter la preuve, sans qu'on soit
assuré qu'il connaît le droit minier, le tout selon une
procédure contradictoire plutôt qu'inquisitoire, alors que la
nature des litiges ne s'y prête pas toujours. Le projet de loi ferait
disparaître le recours en première instance à un tribunal
indépendant du ministre. Il ferait également disparaître le
droit du juge de rouvrir le dossier en appel. Il ferait disparaître le
pouvoir du juge, tant en première instance qu'en appel, de
compléter la preuve par les moyens qu'il juge appropriés.
On peut alors craindre que la Cour provinciale ne puisse pas toujours
rendre une décision éclairée, dans le cas où il y
aura appel, puisqu'elle n'aurait devant elle que les faits que l'appelant sera
capable de prouver ainsi que le dossier du ministère, dans lequel
certains éléments, faits ou documents pertinents pourraient avoir
'été exclus parce que jugés inutiles par l'enquêteur
en première instance. Tout cela parce que le juge ne pourra plus
ordonner de lui-même la preuve de faits non invoqués par les
parties, ni la production de documents que les parties ont omis de soumettre en
première instance, ni la comparution de témoins que
l'enquêteur ou les parties n'auront pas jugé bon d'entendre.
Il est nécessaire non seulement de conserver en première
instance ce pouvoir judiciaire indépendant du ministère, mais
aussi de ressusciter le juge des mines et même d'élargir sa
juridiction en ce sens que, chaque fois que le processus décisionnel est
susceptible d'affecter la situation juridique du détenteur de titres
miniers ou de celui qui prétend avoir un droit, le ministre ne doit pas
s'en mêler et l'affaire doit relever du juge des mines.
La cinquième partie du mémoire traite de
considérations d'ordre général. Le mémoire fait
état de divers aspects positifs du projet de loi et de quelques erreurs
à corriger et observations quant à la forme, tout en signalant un
certain nombre de dispositions abusives quant aux pouvoirs
discrétionnaires exagérés du ministre.
En ce qui a trait au bail minier - c'est l'article 111 - la disposition
obligeant le détenteur à commencer son exploitation dans les
quatre ans ne tient pas suffisamment compte des impératifs de
financement et de construction d'infrastructures. La prolongation possible
prévue au projet de loi place le détenteur à la merci du
pouvoir discrétionnaire du ministre. J'ai cru comprendre, à la
fin de l'avant-midi, que cette disposition ferait probablement l'objet d'une
modification, qui serait la bienvenue, bien sûr!
En conclusion, le mémoire va au-delà des aspects
juridiques et il soumet que, puisque le projet de loi a été
élaboré par une partie seulement des intervenants du domaine
minier, soit ses gestionnaires, il ne reflète pas l'ensemble des
aspirations du milieu minier, en particulier en ce qui a trait à la
protection des droits des administrés.
Vous avez déjà entendu divers points de vue à ce
sujet. Dans ce sens, il est recommandé à la commission
parlementaire de créer un groupe de travail externe qui lui ferait
rapport, dans six mois disons, sur le contenu du projet de loi, à la
lumière des divers mémoires qui lui auront été
soumis. Il est de plus suggéré que la commission parlementaire
tienne des auditions publiques en région. Si la commission ne souhaite
pas aqir de cette façon, le projet de loi pourrait sans doute être
retiré afin de permettre au ministre de procéder selon la formule
habituelle, soit de faire préparer par une commission de refonte une
révision de la Loi sur les mines en fonction des besoins et de la
protection des administrés, tout autant qu'en fonction des besoins des
gestionnaires.
J'ai également joint en annexe au mémoire, pour
l'utilité des membres de la commission, le texte de deux communications
présentées l'an dernier à Toronto relatives aux litiges
portant sur les claims au Québec et en Ontario et qui viennent
d'être publiées dans la Revue générale de droit.
Or, messieurs, je suis à votre disposition.
Le Président (M. Desbiens): Je vous remercie. M. le
ministre.
M. Savoie: Évidemment, M. Lacasse, votre mémoire
est à la hauteur de votre réputation. On a eu l'occasion,
à plusieurs reprises, de discuter des différents
éléments qu'il contient. Plusieurs points que vous soulevez ont
déjà été pris en considération. Entre
autres, je puis vous dire que l'appel de la décision de la Cour
provinciale est acquis, à toutes fins utiles. On sait que vous avez
participé à la rédaction du mémoire de l'APQ. C'est
bien que cela se soit produit ainsi. Vous avez également aidé le
Barreau du Québec. Je suis certain que votre opinion pèse
lourdement auprès de l'AMMQ.
On peut - et je crois que le député d'Ungava sera d'accord
- dire que le coeur de votre argumentation repose sur trois principes. D'une
part, la question du juge des mines est vraiment l'un des
éléments clés de la discussion de la présente loi
en ce qui vous concerne. Également, il y a cette crainte que vous avez
quant à l'aspect juge et partie. Toute la question y est liée et
elle pourrait constituer un troisième point, la question de la
révision ou de l'appel des décisions que pourrait rendre de temps
à autre le ministre ou l'appareil gouvernemental, des pouvoirs que le
ministre pourrait déléguer aux hauts fonctionnaires. (16 h
30)
Je pense qu'on se connaît assez pour dire que lorsque j'affirme...
Je suis très sensible à ces revendications. On s'est posé
beaucoup de questions à ce sujet. Lors de nos séances
d'études on a fait référence à Kafka que
j'utilisais comme image type de l'administré d'aujourd'hui face à
la machine gouvernementale. Ce souci qu'on a pour l'administré fait en
sorte qu'on a débattu de long en large les questions que vous avez
soulevées et qui constituent, je crois, un des points principaux de la
révision et des commentaires des différents mémoires qui
nous ont été soumis à ce jour. Je crois que cela va
continuer jusqu'à mardi prochain.
Vous avez discuté du juge des mines. Je suis d'accord avec vous
lorsque vous dites qu'en 1986 on a vu disparaître le juge des mines, qui
était une institution fort utile dans l'administration de la loi, je
crois. Personne ne peut indiquer que ce n'était pas le cas. On sent
qu'une institution est disparue. Le juge qui exécutait cette fonction
l'exécutait d'une façon admirable, mais, des décisions ont
motivé le ministère de la Justice à abolir ce poste.
Lorsqu'on pense que plus de 200 décisions ont été rendues
dans une année par la machine administrative, qu'il y en a seulement 7
qui sont allées en appel de la décision du juge des mines et
qu'il y a eu 2 désistements là-dessus, on sent qu'il y a un
glissement. Le juge des mines exécutait sa fonction avec l'admiration de
tous, je pense.
J'ai ici un petit texte de Me Marx, qui est ministre de la Justice, qui
dit: "Cet éclatement de structures - parlant de la multiplicité
des tribunaux administratifs -nous amène à nous interroger sur
leur raison d'être dans les cas où il est question essentiellement
d'un démembrement d'une activité ministérielle, telle
l'émission de permis. Il en est de même dans le cas où le
nombre peu élevé de dossiers traités annuellement par un
tribunal ne justifie pas le maintien d'effectifs particuliers. Il nous faut, en
somme, accepter que la situation a évolué au cours des
dernières décennies et qu'il est probable que l'institution d'un
tribunal à une époque donnée, bien qu'alors
nécessaire, ne soit plus justifiée aujourd'hui."
Je suis certain, M. Lacasse, que votre position n'est pas de dire que le
ministre des mines ne doit pas avoir à sa disposition des pouvoirs
discrétionnaires. Je suis certain également que vous ne voudriez
pas que le ministre des mines ne possède pas ou ne soit pas en mesure de
prendre des décisions d'ordre quasi judiciaire. Je pense qu'il est dans
la pratique de l'ensemble de nos lois constitutives que ces pouvoirs existent
et qu'ils soient exécutés normalement dans l'exercice de nos
fonctions. Bien sûr, cela présente des désavantages, mais
nous y reviendrons un peu plus tard. Pour le moment, je crois que
l'administration de la loi et le droit de l'administré à des
décisions immédiates, efficaces et responsables doivent donner
naissance à ce pouvoir administratif.
Vous soulevez l'objection de juge et partie. Lorsque le ministre prend
une décision ou délibère sur une question en vertu de la
Loi sur les mines, il est juge et partie. C'est votre crainte. Je sympathise
énormément avec vous. Je crois que vous avez raison de craindre
car moi aussi, je crains, étant de ceux qui prétendent que Kafka,
a raison, finalement! Mais cela ne veut pas dire qu'on doit paralyser notre
action gouvernementale, cela ne veut pas dire qu'on doive paralyser l'exercice
du pouvoir pour autant. On peut être méfiant, on peut être
hésitant, mais on doit agir.
Je voudrais vous lire, si vous me le permettez, un petit texte que j'ai
trouvé particulièrement éclairant. "La partialité
-lorsqu'on parle de la question de juge et partie - est un concept
essentiellement subjectif, auquel on rattache habituellement des notions comme
celle de préjugé ou d'idée préconçue en
faveur ou en défaveur d'une partie ou d'un principe tel que le souligne
l'extrait suivant de l'arrêt Valente contre la couronne, devant la Cour
suprême, en 1985, où on dit: "L'impartialité désigne
un état d'esprit ou une attitude du tribunal vis-à-vis des points
en litige et des parties dont une instance donnée. Le terme "impartial"
connote - évidemment - une absence de préjugés
réels ou apparents. Nous ne voyons pas comment on peut raisonnablement
soutenir que le ministre - en pratique, il s'agira peut-être d'un
fonctionnaire désigné par celui-ci - se trouve
nécessairement placé en situation de juge et partie dès
qu'il est appelé à décider de certains droits ou à
évaluer certains droits - d'un administré en application de la
loi qu'il est chargé d'appliquer."
Bien sûr, je suis d'accord avec vous, la crainte existe, la
possibilité existe; personne ne conteste cela. Mais, d'impliquer que
cela va subsister, que cela va se maintenir, ou qu'il va y avoir
nécessairement une situation de juge et partie chaque fois qu'on
administrera la loi, cela me semble curieux, puisqu'on est là pour
l'administrer. C'est notre fonction, justement, d'émettre ou d'annuler
des permis, de dire à un type: Vous, monsieur, vous êtes en train
d'écrémer une propriété. L'État, la
population du Québec, le gouvernement ne le permettra pas.
Dans nos structures juridiques, il existe tout un ensemble de mesures de
révision, tout un ensemble de structures d'appel. Vous savez, on vous a
- certains vont dire concédé, je trouve que ce n'est pas le terme
approprié, mais - concédé la question de "sans appel". On
a dit: On va l'enlever, on va accorder l'appel, non pas parce qu'on sentait que
cela accorderait davantage de droits à l'administré, car
l'ensemble des structures est déjà là. Il y a toujours
appel sur une question de droit. La décision d'un ministre est toujours
l'objet d'une révision. La Cour provinciale, si ma mémoire est
bonne - je suis certain que vous êtes docteur en ce domaine - est
toujours sujette à la Cour supérieure, soit par un bref
d'évocation, soit par un pouvoir de contrôle et de surveillance.
Il existe, je crois, dans notre droit, qui est un des droits les plus
démocratiques, suffisamment de mesures de contrôle pour
empêcher et contrôler l'abus de pouvoir.
Évidemment, le fait que vous souleviez ces points avec
insistance, le fait que cela ait été repris dans plusieurs
mémoires nous fait réfléchir et me révèle -
et j'en suis flatté - que j'avais raison. Lorsqu'on m'a expliqué
pour la première fois les nouvelles modifications que l'on proposait
à la Loi sur les mines, mon réflexe a été bon: Oui,
effectivement, il y a un danger. J'ai examiné cela, je me suis
penché là-dessus. Merde! II faut faire quelque chose. Est-ce
qu'on m'enlève tout le pouvoir judiciaire que j'ai? Est-ce que celui qui
va me suivre sera en mesure de dire: Là, il faut entreprendre un
procès qui va durer un an, un an et demi, parce qu'il se peut que je
sois en situation d'abus de pouvoir ou que la bonne foi ne se présume
pas dans notre droit? Je ne croîs pas. Malgré le fait qu'on soit
sensible à vos revendications - des plus sensibles - malgré le
fait qu'on veuille, dans les jours qui viennent, adapter notre projet de loi
à vos recommandations le plus complètement possible, on ne peut
pas se rabattre entièrement sur vos recommandations. Il y en a qu'on
doit mettre de côté.
Cela dit, je vous félicite pour le travail. Je sais que cela fait
un an qu'on se côtoie; cela a commencé l'année
dernière à Malartie où vous avez commencé -
même bien avant Malartic à ma résidence - à me faire
parvenir des notes, pour que je vienne à la défense du juge des
mines. Je les ai lues avec intérêt; j'en ai parlé avec le
ministre de la Justice, M. Marx et j'ai tâché à plusieurs
reprises... Mais lorsqu'on
m'expliquait que le juge Langevin, le juge des mines, ne s'en rappellera
plus... Il sera à la Cour provinciale et c'est lui qui va recevoir les
causes sur les mines. Il perd un pouvoir d'enquête, pouvoir qui ne tombe
pas dans un vacuum, mais qu'on remplace en l'accordant au ministre
délégué aux Mines. Je me dis: Ce n'est pas si pire que
cela dans le fond.
La question de juge et partie, je dis: Merdei il a raison! Oui, c'est
vrai qu'il y a un danger! Je suis d'accord avec lui que les fonctionnaires,
c'est dangereux. C'est comme un politicien, remarquez, mais je
préfère accuser les fonctionnaires. Par contre, la bonne foi se
présume. On n'est pas dans un champ isolé. L'administration des
lois se fait dans notre système de façon trèsdémocratique; les pouvoirs de révision, de contrôle et
d'appel existent en abondance. Si je me rappelle bien mon cours de droit, il
est impossible d'empêcher un appel de la décision d'un tribunal
sur une question de droit. Il y a toujours des recours extraordinaires, il y a
toujours des cas... Cela n'existe pas chez nous. Il n'y pas dans la loi de
clauses privatives; il n'y a pas dans la loi une volonté qui donne
à l'administré le pouvoir de faire la preuve... Elle repose
toujours sur le ministre ou le ministère. Tout cela pour dire que, oui -
vous avez soulevé, je crois, les points les plus probants - votre devoir
a été bien accompli en agissant comme consultant pour l'AMMQ,
l'APQ. Oui, on est fier de vos interventions. Finalement, on devrait
s'accommoder davantage, je crois.
Sans vouloir terminer, parce que je crois qu'il me reste encore du
temps, je vais céder la parole, s'il en convient, à mon
collègue, le député d'Ungava.
Le Président (M. Desbiens): À moins que M. Lacasse
n'ait des...
M. Lacasse: Peut-être une observation de 20 ou 30 secondes,
simplement pour signaler que j'ai répondu à l'argument du volume
trop restreint aux pages 25, 26 et 27 du mémoire et j'ai
également signalé qu'à mon avis, ce n'était pas une
raison pour abolir le juge des mines parce qu'il pouvait faire autre chose, si
jamais il y avait un volume restreint.
Le deuxième point - seulement 10 secondes encore - sur la
question de juge et partie. Évidemment, je ne suis pas partie de ma
propre perception, mais de l'arrêt de la Cour suprême du Canada
dans l'affaire de Dupont contre Inglis qui explique bien la relation, lorsqu'il
y a litige, entre la couronne et le ministre. On en a conclu que, dans un
conflit, il n'y avait pas de rapport entre deux individus, mais plutôt un
rapport entre chacun des individus, de part et d'autre, et le ministre.
Le Président (M. Desbiens): Je vous remercie. M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Je vais commencer par
souhaiter la bienvenue à M. Lacasse qui nous arrive avec un
mémoire qui est, comme le soulignait le ministre au début de son
intervention, à la hauteur de ses compétences et qui nous laisse
sans l'ombre d'un doute sur la qualité de votre réflexion depuis
de nombreuses années concernant toute la problématique de la
situation de l'industrie minière à l'intérieur de la
législation canadienne et québécoise, ainsi que le
rôle qu'elle a à jouer dans l'ensemble de notre structure
économique. (16 h 45)
Je vous dirais que je suis, à toutes fins utiles, bouche
bée devant votre intervention. Il y a beaucoup de questions qui en
ressortent. C'est une véritable lancée à fond de train qui
soulève derrière elle toute la poussière sur le chemin que
tente de baliser le ministre avec sa nouvelle loi.
Je me contenterai donc de vous poser quelques questions d'ordre
général, entre autres, concernant les grands principes sur
lesquels vous semblez insister particulièrement touchant ce domaine. Le
ministre nous disait tout à l'heure qu'il divisait votre intervention en
trois grandes branches: la question du juge des mines, la question du juge et
partie et la question de la possibilité d'appel. Le ministre dira ce
qu'il voudra dans son projet de loi, il nie carrément la
possibilité d'appel après la décision de la Cour
provinciale.
Je dégage quand même autre chose. Entre autres, j'aimerais
que vous explicitiez davantage la notion de la gratuité des claims,
à laquelle vous semblez attacher beaucoup d'importance. Vous dites,
entre autres, que ce n'est pas au moment de commencer à dépister
la ressource sur le terrain qu'on doit déjà imaginer qu'on va
ramasser quelques millions en taxation. Vous dites que cela nous enlève
une capacité concurrentielle, enfin la possibilité d'une
situation concurrentielle avec l'Ontario, où les claims ne sont pas
taxés dès le départ. J'aimerais vous entendre davantage
sur cet aspect du problème.
M. Lacasse: D'abord, le claim est actuellement gratuit, pour un
an. C'est la période initiale. On jalonne, bien sûr, et on a
peut-être dépensé de l'argent pour jalonner, mais, cela
étant dit, c'est gratuit. Le projet de loi prévoit des droits
d'enregistrement. Le claim dure deux ans, un an de plus, alors on
prévoit des droits d'enregistrement.
En Ontario, il y a également des droits d'enregistrement, mais ce
sont des droits de type nominal. En Ontario, le claim dure cinq ans. Lorsque
vous enregistrez votre claim, vous payez 10 $ de frais d'enregistrement.
Dans le cas du projet de loi 161, le claim n'est plus gratuit - c'est
mentionné aux pages 7, 8 et 9 du mémoire - il faut payer des
honoraires d'après la tarification prévue, équivalant
probablement à 1 $ l'hectare. Prenons le cas d'un claim ordinaire en
territoire arpenté en Abitibi-Témiscamingue, soit un claim de 100
acres, 40 hectares, donc, vous payez 40 $ pour la première
période initiale de deux ans. Il faudra payer 40 $ encore, après
deux ans; alors que, pendant tout ce temps en Ontario, vous ne paierez que les
premiers 10 $ et plus rien. C'est dans ce sens que je dis que c'est non
concurrentiel avec l'Ontario.
Mais ce n'est pas mon principal motif. Même si on était
concurrentiel, j'aurais un autre motif. Alors que l'État tente, par des
stimulants d'ordre fiscal, d'encourager l'exploration minière, ce ne
sont pas les quelque centaines de milliers de dollars ou peut-être 1 000
000 $ ou 2 000 000 $ par année de plus, que l'État percevrait en
droits d'enregistrement, qui vont faire une différence dans le
déficit du Québec. J'ai employé le mot "principe". Ce
n'est peut-être pas un principe sacramental, mais il me semble qu'on peut
presque élever à la dignité de principe le fait qu'on ne
devrait pas aller taxer l'exploration, du moins à ses tout
débuts.
On peut possiblement le défendre lorsqu'il s'agit de claims sur
avis de désignation sur carte, alors que les gens n'ont aucune
dépense de jalonnement sur le terrain, ou encore pour les permis
d'exploration au Nouveau-Québec, c'est la même chose. Mais,
lorsqu'il s'agit du jalonnement de claims, selon le régime du
"free-mining" traditionnel d'occupation unilatérale du territoire par
l'administré, il me semble que c'est contraire - je le pense, du moins -
à l'inhérence du claim, si je puis employer l'expression, de le
taxer lors de sa première période de validité. Pour le
renouvellement, c'est autre chose. Je parle de la première
période. Est-ce que cela répond à votre question?
M. Claveau: Oui, cela répond très bien à ma
question.
Je vais passer par-dessus toutes sortes de considérations
techniques auxquelles le ministre s'est d'ailleurs permis de donner ses propres
réponses, avant même d'avoir questionné, et je vais aller
plus loin dans votre texte sur une autre considération d'ordre
général concernant la notion d'intérêt public. Vous
semblez accorder aussi beaucoup d'importance au fait que le ministre se
réserve l'ultime droit de définir dans son projet de loi ce que
doit être l'intérêt public dans le cas où il y aurait
conflit entre certains intérêts et l'implantation ou le
développement d'un site minier. Est-ce que vous pourriez nous
préciser votre point de vue là-dessus?
M. Lacasse: C'est une réticence en ce sens que d'habitude,
c'est une notion qui ferait qu'on s'attendrait que ce soit le tribunal ou un
tribunal qui se prononce là-dessus. C'est que, dans le projet de loi,
vous avez des choses étranges. Par exemple, si vous prenez l'article
286, cela laisse trop de discrétion au ministre. Ce n'est pas la
personne du ministre que j'attaque ici. C'est que le ministre n'agit pas
toujours de lui-même. Il peut agir par ses préposés.
Vous avez la cinquième ligne de l'article 286 où on parle
de réserver et de soustraire à la prospection, les terrains
nécessaires à tout objet qu'il juqe d'intérêt
public, notamment. Vous avez deux choses très vagues, soit le mot
"notamment" d'abord, mais aussi les mots "d'intérêt public". Mais
qui juge de l'intérêt public? Bien sûr, c'est le ministre.
Je me pose des questions là-dessus. Il me semble que cela devrait
être un tribunal. Il me semble que la loi devrait avoir des dispositions
plus objectives que subjectives comme celle-là. Je n'en fais pas le
point principal de mon mémoire, mais je soulève cela. C'est
quelque chose que je trouve un peu inélégant vis-à-vis de
l'administré. Ce n'est peut-être pas illégal, mais il me
semble que ce n'est pas gentil.
M. Claveau: De même, à la page 58 de votre
mémoire, vous revenez avec une demande qu'on avait ce matin. Le Barreau
du Québec demandait au ministre de soustraire de son projet de loi
l'article 361. Vous dites de cet article qu'il enlève de la
crédibilité au ministre. Est-ce que vous voudriez expliquer votre
point de vue là-dessus?
M. Lacasse: C'est parce qu'on aime bien notre ministre qu'on ne
voudrait pas qu'un règlement adopté en vertu de cet article soit
jugé illéqal par les tribunaux parce que trop imprécis,
trop vague ou basé sur rien, enfin, basé sur l'article 361. Je
trouve qu'il y a des risques que de tels règlements soient
déclarés invalides. À ce moment-là, je dis que
c'est le ministre qui en subirait les conséquences dans l'opinion
publique. Les journaux diraient: Le règlement du gouvernement
proposé par le ministre a été déclaré
invalide, illégal. Je suggère d'enlever l'article 361 tout
simplement. J'ai inséré cela dans le chapitre sur la protection
du ministre.
M. Claveau: On est d'accord avec vous là-dessus, M.
Lacasse.
J'irai encore plus loin en ce qui concerne une autre notion, enfin un
autre grand principe dont vous débattez en page 61 de votre
mémoire, concernant plus précisé-
ment la question de la discrétion que se réserve le
ministre de soustraire au jalonnement minier les bassins de certaines
rivières ayant un potentiel hydroélectrique supérieur
à 225 kilowatts. Vous faites référence à l'article
144 qui traite effectivement de ce point. Il y a d'abord cela. J'aimerais avoir
votre point de vue là-dessus, soit sur la prépondérance.
Je veux savoir si le ministre, en tant que ministre sectoriel, doit se donner
la peine de réfléchir au nom du ministre de l'Énergie et
des Ressources et avoir pour le moins un préjugé concernant la
prépondérance d'une activité économique par rapport
à une autre activité économique. C'est une façon
spécifique. D'une façon plus large, j'aimerais vous entendre
discourir quelque peu sur l'importance ou la prépondérance que
vous donnez à l'industrie minière dans l'ensemble du contexte
économique québécois et, par le fait même, où
vous en situez l'importance au niveau des priorités d'intervention sur
le terrain, face à différentes autres possibilités
d'intervenir économiquement sur un même territoire.
M. Lacasse: D'abord, je dois avouer que je suis juge et partie.
Je dois avouer que je suis biaisé. Il y a un article dans la loi
actuelle que je trouve très beau et qui reflète un peu ma
pensée. On dit dans la loi actuelle - je ne me rappelle pas à
quel article - qu'un permis de coupe de bois cesse deux ou trois ans
après qu'un claim est reconnu. La loi actuelle donne la priorité,
face aux multiples utilisations possibles de la surface et du sol, dans
plusieurs cas, à la mine. Je voudrais que cela continue, bien
sûr.
Maintenant, pour répondre plus précisément à
la question que vous avez soulevée . au sujet de l'article 144 et le
fait que le ministre puisse soustraire du bail une superficie nécessaire
pour l'aménagement de forces hydrauliques, si je m'interrogeais, ce
serait sur le moment où il faisait cela. Je disais: Avant
l'émission du bail, avant que le bail soit conclu, parfait. Le ministre
conclut le bail qu'il veut bien et il peut soustraire toute portion de
territoire nécessaire pour l'aménagement de forces hydrauliques.
Ce à quoi je m'oppose - je m'y opposais dans le mémoire et je m'y
oppose toujours - c'est que le ministre, après la conclusion du bail,
ajoute une réserve, diminue la portion du territoire, la superficie
visée par le bail à cause... Autrement dit, il doit y penser
avant. Ce n'est pas une fois que le bail est conclu que le ministre devrait
aller diminuer la superficie.
M. Claveau: Pour aller à la limite de votre raisonnement,
est-ce que cela voudrait dire que vous seriez d'accord pour que le ministre
soustraie d'ores et déjà, à la superficie totale
explorable au Québec, tous les futurs bassins hydroélectriques
prévus dans le plan d'aménagement d'Hydro-Québec, par
exemple le bassin de la Chamouchouane; tout le secteur au nord de Matagami,
où un prévoit un éventuel aménagement de NBR; des
inondations tout le tour du lac Mistassinî qui, on sait, sera
drôlement relevé de niveau, si jamais il y a la conclusion, la
réalisation du projet NBR, etc.?
M. Lacasse: Non, seulement s'il est déterminé, hors
de tout doute raisonnable, qu'il n'y a pas de substance minérale dans
ces régions. C'est bien prématuré, il n'y a pas de
décision de prise.
M. Claveau: Les plans existent déjà, les cours de
niveau sont déjà là dans les plans d'Hydro-Québec
concernant les zones qui vont être inondées éventuellement
en 2010.
M. Lacasse: Oui, je comprends, mais on peut exploiter une mine
qui est sous une nappe d'eau. Si, par exemple, on découvrait un jour...
on avait découvert une mine dans le réservoir Manicouagan... Il
existe à Val-d'Or des mines dans des lacs, près de l'île
Siscoe, je veux dire. Il ne faut pas, en pensant que peut-être telle
région va être inondée, tout de suite aller soustraire un
jalonnement, à mon avis. Évidemment, lorsque Hydro-Québec,
ou la Société d'énergie de la baie James, ou un autre
organisme vaudrait implanter ses barrages, c'est entendu qu'on ne veut pas
qu'un prospecteur aille faire du jalonnement de nuisance et jalonne le site du
barrage pour ensuite réclamer des dommages et intérêts ou
des compensations de la part d'Hydro-Québec, tout simplement parce que,
prétendument, ses droits vont être affectés. Entre-temps,
je ne vois pas pourquoi on irait soustraire le jalonnement. Maintenant, la
question que vous posez est peut-être intéressante, mais dans la
mesure où le territoire visé se trouve au nord du 52e
parallèle, de toute façon, on ne peut pas jalonner
actuellement.
M. Claveau: C'est ouvert, le jalonnement au nord du 50e
actuellement.
M. Lacasse: Non, non, mais avec le projet de loi. Le projet de
loi prévoit qu'on ne peut pas jalonner au nord du 52e
parallèle.
M. Claveau: À moins d'autorisation spéciale.
M. Lacasse: Je ne sais pas à quel article c'est... Il y a
un article dans le projet de loi qui dit qu'on ne peut pas jalonner sur le
territoire... mais pas sur le territoire du Nouveau-Québec, mais au nord
du 52e parallèle. L'article 27...
M. Claveau: Je pense qu'il prévoit qu'on...
M. Lacasse: La prohibition est complète, M. le
député, sauf le cas de celui qui a un permis d'exploration
minière. "Il est interdit, sauf au titulaire de permis d'exploration
minière, de jalonner sans autorisation du ministre un terrain
situé au nord du cinquante-deuxième degré de latitude", ce
qui voudrait dire qu'il y a prohibition absolue, à moins que... À
ce moment-là, si le permis est accordé dans une zone inondable,
peut-être que le ministre n'accorderait pas de permis dans une zone
inondable s'il le savait. Alors à ce moment-là, il est possible
que la situation que vous mentionnez ne pourrait se produire. (17 heures)
M. Claveau: Oui. De toute façon, même si on applique
intégralement de la façon la plus restrictive possible l'article
27 pour la limite du 52e, il reste qu'il y a encore une grosse partie du bassin
hydroélectrique qui serait prévu par le projet NBR, entre autres
le lac Mistassini, tout le bassin de la rivière Nottaway-Broadback qui
sont au sud du 52e, la bassin de la Chamouchouane qui est au sud du 52e, le
pourtour du lac Mistassini qui est au sud du 52e. L'article 144 aussi dit que
toute rivière ayant une puissance hydroélectrique potentielle
supérieure à 225 kilowatts - cela commence à faire quand
même passablement de petites rivières au Québec - ne
trouvez-vous pas que c'est peut-être un peu fort en termes de
restrictions?
M. Lacasse: Votre question est intéressante, mais elle
contient beaucoup de choses. C'est que d'abord l'article 144 s'applique
uniquement aux exploitations, uniquement aux baux miniers. C'est lorsqu'un
gisement est assez rentable pour que le ministre accorde un bail minier qu'on
va dire: Voici ce qui est exclu du bail. Donc, a combien de gisements est-ce
que cela s'appliquerait dans les régions inondables du projet
Nottaway-Broadback-Rupert? Je ne le sais pas. Peut-être à aucune.
Maintenant, pour ce qui est du sud du Québec, vous avez raison. Ce n'est
pas très gros comme puissance, 25 kilowatts ou plus et c'est dans ce
contexte que je trouve que la restriction ne devrait pas se faire en cours de
route une fois le bail émis. Maintenant, c'est une disposition qui
existe sous la loi actuelle et, que je sache, cela n'a pas posé vraiment
beaucoup de difficultés. Remarquez que les territoires qui sont
visés par les baux miniers ou les anciennes concessions minières
sont très petits relativement à l'ensemble de la superficie
totale du Québec ou même de la région. À ma
connaissance, cela n'a pas posé tellement de problèmes dans le
passé.
M. Claveau: Je vous remercie pour votre réponse. On me dit
que mon temps est pratiquement fini. Je vais donc laisser la parole au
ministre.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Savoie: Merci. Je pense que j'ai expliqué au
début qu'il y avait un ensemble de points qu'a soulevés le
mémoire de Me Lacasse, qu'on a traités, qu'on a soutenus. Vous
avez soulevé comme premier point la gratuité du claim.
Effectivement, c'est actuellement à l'étude, on est en train
d'examiner cela. Ce n'est pas 25 kilowatts, c'est 225. Plusieurs points ont
été soulevés par Me Lacasse et sont en révision.
Comme j'ai eu l'occasion de le mentionner tout à l'heure, je pense que
ce mémoire a été fort utile pour le processus
d'amélioration de ce projet de loi. Évidemment, il y a des points
sur lesquels on n'est pas d'accord et je pense que Me Lacasse reconnaît
que, quand il faut trancher, il faut trancher. Même nous, nous sommes
élus à 50 plus un, on a 50 % des votes. Ce n'est pas tout le
monde qui est d'accord avec les choix respectifs. C'est un peu le jeu de notre
démocratie et lorsqu'il faut trancher, il faut trancher. Je pense que Me
Lacasse est d'accord pour reconnaître que si on doit trancher et si le
juge des mines a été mis de côté, on ne peut plus
revenir sur ce projet de loi, il faut travailler avec ce qu'on a. Je suis
certain que si je lis bien votre mémoire, vous n'êtes pas contre
le fait que le ministre détienne des pouvoirs quasi judiciaires, mais
vous craignez des abus. Est-ce que ce serait...?
M. Lacasse: C'est exact, sauf que j'aimerais mieux, je voudrais
en fait, que les pouvoirs d'enquête ne soient pas entre les mains du
ministre, mais plutôt entre les mains du juge.
M. Savoie: On ne peut pas, par contre...
M. Lacasse: Mais il peut être le juge de la Cour
provinciale.
M. Savoie: Oui, il pourrait l'être.
M. Lacasse: Comme il l'est actuellement.
M. Savoie: Oui. Par contre, vous êtes toujours d'accord
pour dire que le ministre doit avoir des pouvoirs quasi judiciaires pour
l'administration de la loi.
M. Lacasse: Oui, à la condition que le juge
désigné ait aussi une compétence ratione materiae de
première instance pour celui qui veut s'opposer à la façon
dont le ministre exerce les pouvoirs lorsqu'il n'y a
pas d'appel, par exemple.
M. Savoie: Oui, c'est cela, mais il y a toujours
possibilité pour ce faire.
M. Lacasse: Pas actuellement, il faut aller devant la Cour
supérieure. Avec le projet de loi, si quelqu'un se plaint que le
ministre ou ses préposés excèdent leurs pouvoirs, il va
devoir procéder par voie de mandamus ou évocation vers la Cour
supérieure...
M. Savoie: C'est cela.
M. Lacasse: ...ce qui est plus lourd et coûte plus cher que
devant le juge désigné.
M. Savoie: Oui, mais par contre, vous comprendrez que dans
l'administration quotidienne de la loi où la bonne foi se
présume, le pouvoir du ministre, comme dans la majorité des lois,
est beaucoup plus efficace et que, si la bonne foi et une situation normale
existent, il n'y a pas trop de problèmes.
M. Lacasse: Mais n'oubliez pas que les articles 308 et 309 de la
loi actuelle sont, à toutes fins utiles, abolis. Il n'y a plus de
compétence ratione materiae.
M. Savoie: C'est cela, oui.
M. Lacasse: Ce sera à un juge
spécialisé.
M. Savoie: C'est cela.
M. Lacasse: Ce sera la Cour supérieure.
M. Savoie: C'est cela.
M. Lacasse: Donc, le processus est beaucoup plus lourd, c'est
cela mon point.
M. Savoie: C'est cela, c'est beaucoup plus long,
effectivement.
Le Président (M. Desbiens): Je vais devoir, M. le
ministre, vous demander de conclure.
M. Savoie: Je vous remercie beaucoup. Comme vous le savez fort
bien, on a eu l'occasion de discuter de votre mémoire. Sur les points
que vous avez soulevés et qui ont été reçus, on va
continuer à travailler; plusieurs points ont été convenus
dans votre mémoire et, peut-être à votre insu, font l'objet
actuellement d'examen pour être incorporés dans notre projet de
loi. J'imagine que d'ici une dizaine de jours, nous aurons certainement
l'occasion de se revoir à plusieurs reprises. Je suis très
heureux de votre présence constante à cette commission depuis le
début et je suis certain - du moins, je l'espère - que vous
partagerez encore votre temps avec nous jusqu'à la fin pour qu'on puisse
profiter de votre grande expérience. Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Ungava, en conclusion également.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Au nom de l'Opposition
officielle, je voudrais remercier à mon tour M. Lacasse pour nous avoir
fait partager pendant ces quelques minutes d'importantes bribes de son
expertise dans le domaine minier. Je suis convaincu que la qualité de
son intervention et celle de son mémoire sauront nous donner tant
à nous de l'Opposition qu'au ministre, les outils nécessaires
pour bonifier ce projet de loi au meilleur intérêt de l'industrie
minière. Merci, M. Lacasse.
Le Président (M. Desbiens): M. Lacasse.
M. Lacasse: C'est moi qui vous remercie. Je ne sais pas quoi
dire, je n'ai jamais été aussi flatté de ma vie. Je vous
remercie beaucoup de vos très gentils propos. Cela m'a fait plaisir de
collaborer à une bonification possible de la Loi sur les mines.
Le Président (M. Desbiens): Je vous remercie...
M. Savoie: Prenez cela pendant que ça passe, Me
Lacasse.
Le Président (M. Desbiens): ...de votre participation.
Entre-temps, j'invite les représentants de l'Association des banquiers
canadiens à s'approcher s'il vous plaît.
Je rappelle d'abord, avant que vous ne vous identifiiez et que vous nous
fassiez part de votre mémoire, que le temps alloué à
chaque organisme est d'une heure répartie de la façon suivante:
20 minutes pour la présentation du mémoire, 20 minutes pour
discuter avec les membres du gouvernement et 20 minutes pour discuter avec les
membres de l'Opposition. Je demanderais, s'il vous plaît, de vous
identifier.
Association des banquiers canadiens
M. Dufresne (Martin): Martin Dufresne, vice-président de
l'Association des banquiers canadiens pour le Québec; à ma
gauche, M. Paul Chaput, conseiller juridique auprès de
l'association.
M. le Président, nous sommes honorés d'être ici
aujourd'hui. L'Association des banquiers canadiens voit d'un très bon
oeil le projet de loi sur les mines lequel, dans l'ensemble, contient des
éléments qui se révéleront sans doute très
bénéfiques pour toutes les parties intéressées.
L'Association
des banquiers canadiens donne son appui total à cette
réforme proposée par le gouvernement, d'autant plus, comme vous
le savez, que les banques en général ont joué un
rôle très actif dans le secteur minier et se proposent de jouer un
rôle encore plus actif à l'avenir. Il y a, par contre, certains
éclaircissements et certains éléments que les
prêteurs voudraient préciser et qui font justement partie du
mémoire qui vous a été soumis. C'est notamment que les
droits soient cessibles en garantie, que la publicité d'enregistrement
des droits soit bien organisée et que nous ne soyons pas sujets à
des révocations, des annulations, des suspensions sans avis aux
créanciers. Je crois que ces éléments ont
été cités dans le mémoire qui a été
préparé.
Si vous voulez que nous procédions par article, peut-être
que ce serait la meilleure façon.
Si vous prenez notre mémoire en page i, et que vous faites la
relation entre l'article 3 et l'article 6, il y a une énumération
des substances minérales qui semble beaucoup plus élaborée
dans l'article 6 que dans l'article 3. Je crois qu'il y a une correction et une
concordance à établir.
M. Savoie: C'est la question de la révocation au
bénéfice de la couronne, du droit aux substances minérales
de surface non énumérées à l'article 6 du projet de
loi. Les substances minérales de surface non
énumérées à l'article 238 de la loi actuelle ont
été révoquées au bénéfice de
l'État. Il est évident que, pour l'exploitation des substances
minérales de surface appartenant à la couronne, il pourrait y
avoir un bail d'exploitation de substances minérales de surface sur les
terres de particuliers. Les articles 143 et 228 s'appliqueront et le titulaire
du droit minier ne pourra exercer ses activités d'exploitation
qu'après entente à l'amiable ou expropriation du
propriétaire privé. Est-ce que cela va?
M. Chaput (Paul): Notre préoccupation à ce sujet
est reportée un peu plus loin. Je dirais, qu'à ce moment-ci, cela
a trait à une préoccupation qui ne traite pas directement du
financement en matière minière comme telle. La
préoccupation pour un prêteur hypothécaire, par exemple,
est la suivante. Le prêteur hypothécaire qui aurait pris en
garantie des terres, il a pris des hypothèques pour garantir des
prêts sur des terres qui se trouveraient éventuellement
assujetties à un bail de substances minérales de surface, verrait
son hypothèque anéantie. Est-ce que vous comprenez la situation?
Autrement dit, complètement en dehors du cadre minier, quelqu'un donne
en garantie des forêts privées. Par exemple, je pense aux banques
qui sont actives aussi dans le financement des compagnies forestières,
il n'y en a plus, mais enfin... Subséquemment, à
l'intérieur de ces forêts privées, le gouvernement donne un
bail minier des substances minérales de surface. Le propriétaire,
pour les exploiter...
M. Savoie: Oui.
M. Chaput: ...le détenteur du bail minier, peut
procéder ou devra procéder éventuellement à
l'expropriation. Qu'est-ce qu'il arrivera à l'hypothèque qu'on a
prise sur cette terre? Vous allez dire: S'il y a une expropriation, cela va
suivre la procédure d'expropriation normale et on va être
colloqué par le protonotaire. Je peux vous dire que le banquier, en
général, est bien prêt à s'exposer à ce que
sa garantie hypothécaire puisse être affectée par une
expropriation dans l'intérêt public, par exemple par la province,
par l'Etat fédéral, par un hôpital et ainsi de suite, mais
qu'il se trouve exposé à voir sa garantie hypothécaire
disparaître par une expropriation qui, à toutes fins utiles, est
faite en vue d'une utilisation privée, je pense qu'il y a de quoi
préoccuper le prêteur. Je dois vous dire qu'en ce qui concerne les
praticiens qui vont, par exemple, dans le cadre d'un financement
hypothécaire, fournir à ce prêteur un rapport sur le titre,
une opinion sur le titre, que ce soit un notaire ou un avocat, il va
nécessairement être amené à répondre sous
toutes réserves. Si, par exemple, la garantie hypothécaire a
été accordée dans une région où
l'activité minière est assez forte, il sera amené à
dire à son créancier: Écoutez, je ne peux me prononcer sur
la pérennité du titre de votre prêteur. Il est toujours
sujet à la Loi sur les mines. La surface peut disparaître. (17 h
15)
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Est-ce que je dois comprendre que la
présentation de l'Association des banquiers est terminée et qu'on
est sur les 20 minutes d'interpellation du ministre?
Le Président (M. Desbiens): C'est ce que je voulais
éclairer comme situation. Est-ce que vous avez terminé la
présentation de votre mémoire? Le ministre...
M. Chaput: C'est-à-dire qu'on procédait par...
M. Savoie: On pourrait combiner nos 40 minutes.
M. Claveau: Je n'ai pas d'objection.
M. Chaput: Le mémoire n'est pas tellement long. Si on peut
procéder à un échange de vues sur le mémoire.
M. Savoie: Oui, cela serait beaucoup plus intelligent si on avait
un échange que s'il y avait un exposé durant 20 minutes et que,
ensuite, on exposait l'autre point de vue. On peut faire un échange de
propos, comme cela, durant 40 minutes. Je n'ai pas d'objection.
M. Claveau: II n'y a pas de problème. Je vais
écouter durant 40 minutes et je poserai mes questions.
Le Président (M. Desbiens): Vous les poserez par la
suite?
M. Savoie: Est-ce que le règlement empêche une telle
procédure?
Le Président (M. Desbiens): Non. On veut s'entendre entre
nous, s'il y a consentement.
M. Savoie: Bon. Si rien ne l'empêche, avec le
consentement.
Le Président (M. Desbiens): À ce moment-là,
est-ce que vous maintenez votre réserve de 20 minutes?
M. Claveau: Je maintiens mes 20 minutes en dehors de la
discussion.
Le Président (M. Desbiens): En dehors de la discussion de
40 minutes en cours. D'accord, on y va.
M. Savoie: M. Lacasse, le pouvoir discrétionnaire qui
vient d'être exercé de bonne foi...
Une voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! Excusez! II
semble que ce ne soit pas encore clair.
M. Claveau: Je suis bien prêt à consentir, pour
autant qu'on me garantisse le consentement pour prolonger après 18
heures.
M. Savoie: Oui, évidemment.
Une voix: Accordé.
M. Claveau: Merci, M. le ministre.
Le Président (M. Desbiens): Vos 20 minutes seront
garanties, M. le député d'Ungava. M. le ministre.
M. Claveau: Merci, M. le ministre.
M. Savoie: D'accord. Malheureusement, il y a un aspect de
pérennité au titre.
M. Chaput: Malheureusement?
M. Savoie: J'ai dit malheureusement. M. Chaput: Oui.
M. Savoie: Vous me demandez, si on accorde un prêt
hypothécaire sur un titre, comment on fait pour en assurer la
pérennité face à une expropriation.
M. Chaput: Oui. Quand vous parlez à un prêteur
d'expropriation...
M. Savoie: II entend...
M. Chaput: ...il lui vient à l'esprit qu'il s'agit des
grandes expropriations par l'État. Si vous commencez à lui parler
des expropriations possibles par des compagnies minières, par exemple,
je pense que cela va le troubler.
M. Savoie: Mais, cela existe de droit dans le Code civil actuel,
en vertu de l'article 414.
M. Chaput: Oui, pour fins publiques.
M. Savoie: Oui, pour fins d'exploitation d'une mine. On peut
exproprier actuellement.
M. Chaput: Parce que la Loi sur les mines le dit. Mais, selon
l'article du Code civil qui traite d'expropriation, ce sont quand même
des expropriations pour fins d'utilité publique.
M. Savoie: C'est l'exploitation d'une mine.
M. Chaput: Oui, mais ce n'est pas l'État qui fait
l'exploitation.
M. Savoie: Pardon?
M. Chaput: Ce n'est pas l'État qui fait
l'exploitation.
M. Savoie: Non, c'est cela.
M. Chaput: II reste quand même qu'on sera assujettis
à un régime où les droits traditionnels, par exemple
hypothécaires, peuvent se trouver... Vous savez, qu'un créancier
hypothécaire sache que le tréfonds de la propriété
de son débiteur pourrait éventuellement servir à des
exploitations minières, cela peut aller.
M. Savoie: Oui. Cela passe.
M. Chaput: Mais, au niveau de la surface, c'est un peu plus
troublant, parce que, avec les exploitations minières de surface, c'est
clairement la surface qui va disparaître. C'est le titre de
propriété qui s'en va, matériellement parlant. Je suis
inquiet... Que cela se produise dans les terres concédées
par l'État, je serais prêt à dire que cela a un sens.
M. Savoie: Cela passe, oui.
M. Chaput: Mais je suis préoccupé quant à ce
qui continue d'être les terres privées.
M. Savoie: Oui, craignez-vous que ce qu'on fait actuellement
modifie en quelque sorte la situation future d'un prêteur?
M. Chaput: Bien sûr.
M. Savoie: C'est la situation actuelle. On n'a fait que
reconduire ce qui existe au moment où l'on se parle.
M. Chaput: Mais on n'a pas de baux de substance minérale
de surface actuellement.
M. Savoie: Je comprends votre inquiétude. La banque
prête de l'argent à quelqu'un sur une hypothèque et il se
fait exproprier par une mine...
M. Chaput: Une compagnie minière.
M. Savoie: ...une compagnie minière. C'est la situation
actuelle. On peut faire cela pour une tourbière. Une tourbière
peut amener l'expropriation.
M. Chaput: Des tourbières, dans la province de
Québec, il y en a, mais...
M. Savoie: Parlez-en à M. Bélanger. Vous allez voir
qu'il a une autre opinion de la situation. Ha! Ha! Ha!
M. Chaput: Oui, je le sais très bien. Il y en a, mais il
n'y en a pas énormément. Ce que je veux dire, c'est qu'il n'y a
pas de baux miniers de substance minérale de surface à la
grandeur, selon la définition de l'article 6 du projet de loi.
M. Savoie: On est en train de, justement... Écoutez, on
prend note de votre demande, mais, d'une part, il s'agit de la situation
actuelle. Actuellement, le détenteur d'une résidence, qui a un
droit de surface, qui occupe une maison sur laquelle une banque détient
une hypothèque, peut faire l'objet d'une expropriation en vertu de la
Loi sur les mines actuelle ainsi que de la nouvelle.
M. Chaput: Oui. Je vous suis en ce qui concerne les
minéraux en tréfonds et, possiblement, certains types de
substances comme la tourbe. Mais, si vous lisez votre définition du
nouvel - non, pas l'article 6, je m'excuse - article 3, vous avez beaucoup plus
de substances minérales de surface que par le passé. Par exemple
- je ne sais pas -je pense à la chaux.
M. Savoie: Le claim donne droit à cela. On peut jalonner,
on peut "staker" un claim, en sortir de la chaux seulement et exproprier en
vertu de ce claim. C'est la situation actuelle. Il n'y a pas de modification
substantielle de la loi au droit d'expropriation.
M. Chaput: À moins que ne ce soient des substances exclues
de la révocation de 1982, ce qui n'est pas nécessairement le cas
pour les substances de la définition de l'article 3; ce ne sont pas les
mêmes.
M. Savoie: Je ne crois pas. Je pense que c'est compris dans
l'article 6. Si vous voulez, on pourra en discuter davantage en...
M. Chaput: Écoutez, quant à moi, il suffit de
comparer la liste de la définition de l'article 3 et celle de l'article
6 pour voir que les substances ne sont pas les mêmes. J'ai l'impression
que le pouvoir d'accorder des baux de substances minérales de surface
est beaucoup plus étendu qu'il l'est par rapport à la situation
actuelle.
M. Savoie: C'est la même chose, il n'y a pas de...
J'aimerais vous dire: Oui, vous avez raison, bon, on passe à l'autre.
Mais, je ne peux pas. Il n'y a pas eu de modification substantielle, cela a
toujours existé. Je comprends que ce soit triste pour quelqu'un de se
faire exproprier par M. Bélanger et son groupe de tourbières,
mais le droit est là. C'est la même chose pour la chaux. Cela a
toujours existé. Lorsqu'on jalonne un claim, on n'indique pas le
minéral qu'on veut aller chercher. Cela peut être...
M. Chaput: Non, je suis...
M. Savoie: ...aussi près de la surface que possible.
À ce moment-là, il n'y a plus de différence. La nation de
tréfonds... Une mine ne s'identifie pas au tréfonds. Elle peut
fort bien s'identifier à la surface. L'article 3 - d'après une
note qu'on me présente - parle des substances minérales de
surface.
M. Chaput: Oui.
M. Savoie: L'article 6 parle des matériaux
inférieurs.
M. Chaput: Pourtant, quand je le lis, cela semble se ressembler
pas mal. Je veux dire que, par exemple, on parle de la tourbe dans les
substances minérales de surface et on parle de sable et de gravier
à l'article 6 aussi. Est-ce qu'entre l'article 6 et l'article 3 il y a
une relation au point que l'on puisse
se retrouver dans la situation que j'ai évoquée quant au
bail minier de surface?
M. Savoie: Non.
M. Chaput: Par rapport aux terres privées?
M. Savoie: II pourrait y avoir expropriation.
M. Chaput: Dans tous les cas? Je pense qu'au fond, votre
réponse est: oui, il peut y avoir expropriation...
M. Savoie: C'est cela.
M. Chaput: ...et on n'envisage aucun changement à cette
situation.
M. Savoie: Oui, mais c'est la situation actuelle. C'est ce qui
existe aujourd'hui, au moment où on se parle, sans que la nouvelle loi
soit en vigueur. Ce que je suis en train de vous dire...
M. Chaput: Oui, oui.
M. Savoie: ...c'est que je peux vous exproprier si j'exploite une
tourbière et que vous êtes dans mon coin...
M. Chaput: Oui.
M. Savoie: ...actuellement...
M. Chaput: Oui.
M. Savoie: ...dans le cadre où vous prêtez sur
hypothèque.
M. Chaput: Oui, oui, sûrement.
M. Savoie: Oui. C'est la même chose pour la chaux.
M. Chaput: Bien non! Pas dans la mesure où la chaux n'est
pas révoquée. Je vous dis qu'à cause de la
non-révocation de certaines substances minérales en 1982, vous ne
pouvez pas accorder un bail de substances minérales de surface pour les
substances qui sont définies à l'article 6.
M. Savoie: D'accord.
M. Chaput: C'est exact. Bon! Cependant, si vous avez des
substances, celui pour la surface, par rapport à ces substances, il est
certainement protégé. Ils ne sont pas révoqués, ils
n'appartiennent pas à la couronne. Est-ce que par dessus cela, sur la
base de l'article 6, on pourrait cependant être exposé à un
bail de surface? À lire le texte, je comprends qu'il y a certainement
des substances communes.
Enfin, an n'élaborera pas là-dessus, cela ne vaut
pas...
M. Savoie: II y aurait peut-être M. Lebuis. Peut-être
que cela va clarifier la position, étant donné qu'on n'y
réussit pas. Est-ce qu'on peut avoir le consentement? II ne
soulève que quatre ou cinq points dans leur mémoire et c'est un
excellent mémoire.
Mme Poudrier (Lise): Je m'appelle Lise Poudrier, je travaille au
ministère de l'Énergie et des Ressources. En fait, ce dont il
faut convenir, c'est qu'à certaines époques, ce qui est reproduit
à l'article 6, ce sont les matériaux inférieurs qui sont
abandonnés au propriétaire du sol. Avant 1966, la tourbe
appartient au propriétaire du sol. Sur ces terrains-là, il ne
pourra naturellement pas y avoir délivrance d'un bail d'exploitation
pour la recherche de la tourbe. Mais si les substances minérales de
surface appartiennent à la couronne, il pourrait très bien y
avoir délivrance d'un tel bail.
M. Chaput: Ça va. Je comprends. Mme Poudrier: Ca
va?
M. Savoie: On va revoir cela succinctement afin de
vérifier si l'article ne peut pas être clarifié afin
d'éviter toute autre question semblable.
M. Dufresne: D'après nous, l'article 9 devrait
établir clairement que les droits miniers qui sont
énumérés peuvent être donnés en garantie. Je
crois que ce n'est pas tout à fait le cas.
M. Chaput: Sur cet article, on dit à l'article 10 que le
droit minier réel immobilier est un droit de propriété
distinct et, à l'article 13, on fait allusion que tout transfert ou
autre acte peut être enregistré. Étant donné que ce
sont des droits qui sont accordés par la couronne, ce n'est pas un droit
qui vient du droit commun. Nous suggérons qu'il soit peut-être
éclairci qu'ils peuvent être explicitement cédés,
donnés en garantie, pour des prêts par exemple ou des ouvertures
de crédit.
M. Savoie: Je pense que cela ne présente pas de
difficulté. C'est superflu, mais cela demande un
éclaircissement.
Mme Poudrier: Je ne comprends pas ce que vous voulez comme
éclaircissement, au fait. Est-ce qu'on dit clairement que cela peut
être donné?
M. Chaput: Oui, que c'est cessible.
Mme Poudrier: Si c'est un droit de propriété
distinct, est-ce que toutes les
règles ne viennent pas s'appliquer? On pourrait
hypothéquer, c'est un immeuble distinct. L'article 2016 du Code civil
dit que l'hypothèque porte sur un immeuble, le droit minier est un
immeuble.
M. Savoie: Remarquez que quand un créancier
hypothécaire prend une hypothèque, il est intéressé
à l'immeuble physique. Il va s'assurer que son débiteur est bien
propriétaire. Mais c'est la chose qu'il va chercher. Vous savez, si je
vous fais vendre une servitude en justice, cela ne vous donnera pas
grand-chose. On m'avise qu'on va à l'encontre de toutes les
règles de droit civil en le spécifiant.
Mme Poudrier: C'est difficile à spécifier. Ce n'est
pas spécifié nulle part ailleurs. Je vois cela difficilement et
je pense qu'en disant que c'est un immeuble distinct...
M. Chaput: Remarquez que dans la nouvelle Loi sur les
forêts on dit textuellement que le contrat est cessible en garantie.
Mme Poudrier: Oui, mais les garanties d'approvisionnement,
c'est-à-dire les contrats d'aménagement ne sont pas des
immeubles. Ce n'est pas une propriété distincte. C'est un contrat
conclu avec la couronne.
M. Chaput: Oui, mais le bail minier est un contrat qui est conclu
avec la couronne.
Mme Poudrier: Mais c'est un immeuble distinct. C'est un droit
réel immobilier.
M. Chaput: Si vous avez des difficultés... Nous
préférons des éclaircissements pour simplement
établir qu'il n'y a pas de problème à les prendre en
garantie, qu'ils sont absolument...
M. Savoie: Ce qu'on pourrait faire, c'est vérifier
auprès du ministère de la Justice si c'est possible, s'il n'y a
pas d'objection à ce que cela soit inclus et, dans la mesure du
possible, on l'inclura. Est-ce que cela marche?
M. Chaput: Oui.
M. Savoie: D'accord.
M. Dufresne: La même chose s'applique à l'article
16.
M. Savoie: À l'article 16, nous prenons bonne note de ce
bon commentaire. (17 h 30)
M. Chaput: D'accord. Finalement, sur les articles 77, 116 et 270,
ce sont des articles d'abandon, d'annulation, de révocation, de
suspension des droits. Je comprends les dispositions de la loi, leur objet, la
préoccupation des créanciers qui ont prêté et qui
ont pris des garanties sur ces droits, ils ne voudraient pas être
à la merci d'une suspension, d'une révocation ou d'une annulation
des droits qui entraînerait la déchéance des garanties sans
être avisés préalablement et peut-être pouvoir faire
quelque chose. Je songe au cas où la rente annuelle n'est pas
payée, par exemple. On pourrait intervenir et la payer. Il y aurait
peut-être des mesures conservatoires à prendre et on aimerait, je
ne sais pas par quelle mécanique, être averti par le
ministère, dans la mesure où on a enregistré un droit,
peut-être une trentaine de jours d'avance, qu'il va se passer une
révocation ou quelque chose du genre. Je ne sais pas dans quelle mesure,
au point de vue administratif, cela peut être possible.
M. Savoie: Les commentaires qui ont été
préparés signalent que nous prenons bonne note de ces suggestions
et nous évaluerons la possibilité d'instaurer un tel
système au niveau des titres d'exploitation.
Mme Poudrier: Ce que je pourrais dire sur cela, c'est qu'on prend
note de ce commentaire. On pense que cela s'inscrit vraiment dans le cadre des
règles de justice naturelle si vous êtes des personnes dont les
droits vont être affectés. On va évaluer la
possibilité d'intégrer cela au projet de loi lorsque la
déchéance provient d'un fait de l'administration,
c'est-à-dire lorsque l'administration elle-même décide de
révoquer un titre ou accepte un abandon. Ce qui devient plus difficile
pour nous, naturellement, c'est le défaut du titulaire du titre,
c'est-à-dire, lorsqu'il ne fait pas de demande de renouvellement. Pour
nous, cela deviendrait vraiment très laborieux. Mais dans le cadre des
règles de justice naturelle, lorsque cela provient de l'administration
ou que c'est un acte unilatéral d'administration, on est bien prêt
à évaluer cela et on pourra discuter des...
M. Chaput: Le cas qui nous préoccupe peut-être le
plus, c'est celui, par exemple, des situations financières
délicates comme la période de récession que l'on a connue
en 1981-1982 où, au fond, on se rend compte que le débiteur est
négligent et qu'il laisse aller les choses. S'il ne renouvelle pas ses
titres miniers, par exemple, pour un prêteur, cela peut être
désastreux. Il aimerait bien pouvoir poser un geste. Prenez le cas d'un
acte de fiducie, par exemple, où à toutes fins utiles il est
stipulé que le fiduciaire aura le droit de poser des gestes pour
protéger le bien. Il nous paraîtrait important de pouvoir
intervenir pour conserver les droits dans la mesure où le
débiteur serait
négligent de le faire, même s'il n'y a pas de geste
posé de la part de l'administration.
Mme Poudrier: Mais il y a quand même un contrôle qui
pourrait se faire. La personne doit déposer sa demande de renouvellement
soixante jours à l'avance. En théorie, elle doit la
déposer soixante jours à l'avance. Vous pourriez vérifier
si cela a été déposé et là vous avez
soixante jours pour... Pour nous, quand nous avons le nombre de claims qui sont
émis et le nombre qui expire après la première
validité, cela devient difficile...
M. Chaput: Remarquez que mon commentaire vaut peut-être...
Je pense qu'on pourrait même songer à une exception pour les
claims proprement dits. À ma connaissance, les gros financements dans le
domaine minier ne se font pas sur des claims, ils se font surtout sur les
anciennes concessions minières ou sur les baux miniers proprement dits.
C'est peut-être surtout à ce niveau que cela a de
l'importance.
Mme Poudrier: Écoutez, on pourrait en rediscuster mais je
pense que pour les baux... En tout cas, on pourrait certainement évaluer
cela. On comprend votre situation.
M. Chaput: Oui, cela va, je n'ai pas d'autres commentaires
à ce sujet.
M. Savoie: Bien, pour les titres d'exploitation, pas pour les
claims. Ils comprennent que cela ne peut pas...
Mme Poudrier: Oui, oui. Pas pour les renouvellements de
claim.
M. Savoie: Vous savez que pour les claims, ce n'est pas
possible.
M. Chaput: Non, je m'en rends compte. On me disait au
ministère des Mines cet après-midi que l'an passé, je
pense, on a enregistré 55 000 claims dans la province de Québec.
J'envisage très bien qu'il n'est pas question d'aviser tout le monde
à un moment donné que les claims vont tomber. Cela, je le
comprends.
M. Dufresne: Les articles 102 et 134 ont été
discutés. À l'article 308, je crois qu'on a proposé que le
droit ou régime d'enregistrement, disons, s'étende
également aux droits miniers consentis dans des terres
privées.
Une voix: L'article 308?
M. Dufresne: L'article 308, M. le ministre.
M. Savoie: D'accord. Oui, mais cela suit...
M. Dufresne: Ce qu'on a discuté tout à l'heure.
M. Savoie: Oui, c'est cela. On ne peut pas s'engager pour l'avis
d'adresse à ce stade-ci. Nous allons faire notre possible.
Une voix: Vous voulez dire... Excusez-moi.
M. Savoie: On veut dire qu'on va en parler au ministère de
la Justice, qu'on va faire valoir vos points, qu'on va chercher à vous
donner satisfaction. On vous avisera...
M. Chaput: II s'agit des commentaires faits sur le nouveau
système d'enregistrement.
M. Savoie: On parle de l'avis d'adresse, oui.
M. Dufresne: Oui. Bien, enfin...
M. Savoie: On parle de l'article 308...
M. Chaput: Trois cent...
M. Savoie: C'est cela. ...qui porte sur tout le module
d'enregistrement. Je crois que votre seul point, c'était l'avis
d'adresse.
M. Chaput: Non. Il y a quelques points qui ont été
soulevés, dont l'avis d'adresse, étant donné que
déjà un système d'avis d'adresse existe. Est-ce qu'on ne
pourrait pas l'étendre au nouveau registre minier aussi?
Un autre point qu'on a soulevé à ce sujet, et c'est
déjà une difficulté qu'on éprouve actuellement dans
certains cas, c'est l'enregistrement qui concerne des titres miniers dans les
régions où le territoire n'est pas organisé. On nous dit
qu'il va falloir enregistrer cela dans la division d'enregistrement où
se trouve l'immeuble, mais il y a des régions où il n'y a pas de
division d'enregistrement. En Abitibi, on est obligé de choisir,
à un moment donné, si c'est le Lac-Saint-Jean ou l'Abitibi. Il y
a peut-être moyen d'éclaircir cela.
M. Savoie: Pouvez-vous me donner un exemple?
M. Chaput: Je pense à quelqu'un qui aurait des titres
miniers en Ungava. Est-ce qu'il y a une division d'enregistrement pour
l'Ungava? Ce sera Sept-Îles, je suppose. Au-delà du 50e
parallèle, il y a peut-être des régions qui ne sont pas
dans un territoire organisé. Je parle au point de vue cadastral.
L'enregistrement proposé ici suppose le système des
cadastres.
M. Savoie: Selon l'information que j'ai, suivant la Loi sur la
division territoriale, tous les territoires du Québec, organisés
ou non, sont divisés entre les 81 divisions d'enregistrement
existantes.
M. Chaput: Quand un cadastre n'est pas ouvert?
M. Savoie: Oui. Il est enregistré quand même au
bureau d'engistrement duquel il relève.
M. Chaput: Même si c'est un territoire non
organisé?
M. Savoie: Même si c'est un territoire non
organisé.
M. Chaput: La réponse me satisfait dans la mesure
où on peut effectivement se rattacher à une division
d'enregistrement.
M. Savoie: Apparemment, c'est bien clair...
M. Chaput: Cela va.
M. Savoie: ...et c'est vérifié.
M. Chaput: J'ajouterais juste un dernier commentaire qui n'est
pas dans le mémoire, j'y ai pensé par la suite. Dans la mesure
où on prévoit un enregistrement au bureau d'enregistrement de
certains des titres miniers qui nous sont donnés à l'article 9 du
projet de loi, est-ce qu'il serait possible de prévoir, au
ministère, que les documents qui nous seront remis pour ces titres
miniers soient dans une forme enregistrable au bureau d'enregistrement?
Lorsqu'on veut enregistrer un document au ministère des mines, il n'y a
pas de problème; on prend à peu près n'importe quel
papier. Au bureau d'enregistrement, il faut qu'il y ait un cadre, il faut que
ce soit tête-bêche, il faut des affidavits. À cet
égard, je ferai une recommandation. On a instauré la cession des
biens en stock avec un système d'enregistrement très simple pour
les formulaires. Si on pouvait avoir quelque chose d'analogue, ce serait utile
et pratique.
M. Savoie: On travaille là-dessus actuellement.
M. Chaput: Je n'ai pas d'autres commentaires.
M. Savoie: J'ai toujours appris qu'il fallait écouter son
banquier avec attention et, dans la mesure du possible, se soumettre à
ses exigences.
M. Dufresne: Cela termine l'exposé de l'Association des
banquiers canadiens.
M. Savoie: D'accord. Je vous remercie beaucoup pour votre
mémoire. On m'a souligné à plusieurs reprises qu"il
n'était pas très volumineux, mais que les points qu'il soulevait
soulignaient des problèmes et qu'il fallait prendre bonne note des
recommandations que vous faites. Je pense qu'en faisant le survol de vos
recommandations, vous constaterez que plusieurs sont à l'étude
actuellement, c'est-à-dire qu'on cherche à vous donner
satisfaction, ou elles sont déjà acceptées. Je vous
remercie et je vous félicite.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Je voudrais tout
d'abord souhaiter la bienvenue à l'Association des banquiers canadiens
et à ses représentants, qui se donnent la peine de creuser le
projet de loi qu'on a sur la table actuellement et de nous soumettre une
réflexion tout à fait justifiée. Dans les circonstances,
il y a un certain nombre de problèmes auxquels vous devrez faire face si
le projet de loi est adopté tel que présenté
actuellement.
J'aurais une question - moitié question et moitié
réflexion - dans un premier temps, concernant les bureaux
d'enregistrement. Effectivement, je croîs que vous aviez tout à
fait raison d'évoquer, tout à l'heure, la problématique de
la localisation géographique des bureaux d'enregistrement en ce qui
concerne toute la bande à partir de l'Abitibi, en passant par le secteur
de Chapais et de Chibougamau, du Lac-Saint-Jean, de la Côte-Nord et de
l'Ungava. Il y a tout un contexte géographique et économique qui
fait que le secteur de Chapais et Chibouganau relève du bureau
d'enregistrement de Roberval, alors que, souvent, les compagnies ont leur
principal port d'attache du côté de l'Abitibi ou, si on saute une
ligne précise sur la route 113, on change de région et il faut
enregistrer une mine en Abitibi, à Val-d'Or pour Amos, et l'autre
à Roberval. Les lignes aériennes vers le nord partent souvent de
Val-d'Or, alors que le bureau d'enregistrement est à Sept-Îles. Il
y a toute une conjoncture qui rend la vie pratiquement impossible à tout
le monde.
Je suppose qu'il serait possible de simplifier cela ou de prévoir
la possibilité de s'enregistrer à deux ou trois bureaux
différents, quitte à ce que les bureaux se fassent ensuite des
échanges de matériel et qu'on n'ait pas à se rendre
physiquement à un endroit ou à l'autre, ce qui, souvent,
complique beaucoup le problème. Admettons qu'une compagnie de
Chibougamau fasse de l'exploration dans la fosse du Labrador, cela lui
complique drôlement les choses si elle doit passer par Sept-Îles
chaque fois qu'elle a besoin d'un papier ou d'une modification à
son enregistrement. Peut-être auriez-vous des suggestions
concrètes là-dessus.
M. Chaput: Je ferais peut-être une recommandation qui
rejoint l'esprit de la Loi sur la cession des biens en stock qui est
saluée comme efficace par les prêteurs. L'enregistrement est
centralisé à Montréal. C'est un enregistrement
informatisé, facile à consulter et facile à utiliser.
Est-ce qu'au fond on ne pourrait pas prévoir que tout
enregistrement des titres miniers, concédés par la couronne et
qui relèvent de la Loi sur les mines, soient faits exclusivement, comme
par le passé, au ministère des Mines, mais que ce soit le seul et
qu'il soit opposable à tout le monde? Que cela ne vaille pas seulement
pour le ministre, mais qu'on dise: Si vous faites quelque chose qui a trait
à un titre minier et relevant de la Loi sur les mines, l'enregistrement
se fait à Québec, point, au ministère de l'Énergie
et des Ressources, que ce soit pour n'importe où dans la province.
À ce moment-là, tout ce que le prêteur a à
faire, c'est de vérifier le registre des mines à Québec et
le tour est joué. Il n'a pas besoin de se préoccuper du bureau
d'enregistrement.
M. Claveau: Avec des terminaux informatiques comme à la
Régie de l'assurance automobile.
M. Chaput: C'est déjà disponible. Si on veut
vérifier des titres miniers, on va au bureau sur la rue Drummond
à Montréal et on obtient les registres. Quant à la
jurisprudence, la Cour d'appel s'est déjà prononcée pour
dire que l'enregistrement au ministère des Mines vaut pour le
gouvernement, mais ne vaut pas nécessairement vis-à-vis des
tiers.
Si la loi disait que tout enregistrement qui concerne un droit minier
régi par la Loi sur les mines se fait exclusivement au ministère,
pour le ministre comme pour les tiers, à mon sens, le tour serait
joué. On vérifierait à un endroit et on n'aurait pas
besoin de vérifier ailleurs. (17 h 45)
M. Claveau: Pour la vérification, vous avez probablement
raison en ce qui concerne la capacité de localiser la banque de
mémoire du service d'enregistrement à un endroit précis
pour l'ensemble du Québec. Mais, pour le fait d'aller s'enregistrer,
est-ce qu'on va demander à un prospecteur ou à un
détenteur de titre minier de La Sarre ou d'ailleurs de venir à
Québec s'enregistrer? Ne pourrait-il pas le faire sur place
là-bas et la donnée serait centralisée par la suite?
M. Chaput: On les dépose déjà dans les
bureaux régionaux. Je pense qu'on pourrait faire comme pour la Loi sur
la cession des biens en stock: on dépose dans la division
d'enregistrement et c'est acheminé à Montréal pour le
registre central.
M. Claveau: D'accord. Alors, vous n'éliminez pas du
service la présence régionale des bureaux d'enregistrement?
M. Chaput: Non. Je pense que je verrais plutôt une
centralisation de la vérification à un endroit et, surtout -
c'est important - que la loi dise que c'est cela, l'enregistrement, qu'on n'a
pas besoin d'un autre. En ce qui concerne les mines, notre préoccupation
sur la base de la jurisprudence, c'est toujours la même chose: on
enregistre à Québec et on essaie de délimiter la
propriété au point de vue cadastral pour ensuite l'enregistrer au
bureau d'enregistrement.
Je vais vous donner un exemple. Si je finance une opération
minière et que mon banquier dit: Bon, voici, on fait un prêt, on
avance 25 000 000 $ pour cette opération minière. Donnez-moi des
garanties. Si je veux enregistrer un acte de fiducie, je vais l'enregistrer au
ministère, mais je vais être obligé de l'enregistrer aussi
au cadastre. Pourquoi? Parce qu'il y a des choses qui ne sont pas couvertes si
je l'enregistre seulement à Québec, par exemple, les
installations minières: le puits, les installations souterraines, les
qaleries, etc. L'enregistrement de cela n'est pas nécessairement garanti
si je l'enregistre à Québec. Alors, on est obligé de
l'enregistrer contre le titre. On est obligé de trouver la description
cadastrale correspondante et de s'assurer que cela sera visé. Je ne dis
pas qu'il ne faudrait pas avoir les descriptions, mais que, si un seul
enregistrement était fait, je pense qu'on aurait simplifié le
problème de bien des gens.
M. Claveau: Je vous remercie. Avec le ministre, vous avez aussi
beaucoup insisté sur la question des droits fonciers et de
l'expropriation qui vous laisse, semble-t-il, démuni devant la
possibilité que se garde le ministre de donner
prépondérance à toute activité minière, ce
qui pourrait, comme vous le disiez si bien, aller jusqu'à
l'élimination totale du fond de terrain sur lequel vous aviez des
garanties, entre autres, par le biais des exploitations à ciel ouvert.
Excusez mon ignorance, mais je voudrais vous demander comment cela fonctionne
dans un cas bien précis, celui de l'amiante. On sait que des compagnies
d'amiante ont eu à déplacer jusqu'à des quartiers de ville
entiers pour développer leur site minier. Je suppose qu'à ce
moment-là il y avait des mécanismes de prévus et que,
finalement, les créanciers, en règle générale,
n'avaient pas trop à se plaindre des conséquences de tels
déménagements, de tels enfouissements, de telles
disparitions de leurs anciens titres de créance dans des titres
miniers.
M. Chaput: Je vous avoue que ne j'ai pas d'expérience du
côté des compagnies d'amiante. Je pense simplement, par analogie,
au jugement récent de la Cour suprême sur la réserve des
trois chaînes. Je me souviens de réflexions de banquiers qui
avaient refusé de prêter sur certaines propriétés,
sachant qu'il y avait la possibilité qu'un jour la Cour suprême
déclare que la réserve de trois chaînes s'applique. Au
fond, où est rendu le titre de propriété? Il n'y a rien.
Quant à une expropriation du type auquel on pense, à ce
moment-là, comme vous l'avez signalé, c'est pire. La
propriété elle-même disparaît. Remarquez que je me
rends à l'argument de M. le ministre à savoir qu'au fond, dans la
loi actuelle, c'est la situation, sauf qu'il y a deux choses, je pense. Il n'y
avait pas de baux de substances minérales de surface de façon
aussi étendue qu'on va en avoir maintenant; deuxièmement, la
procédure d'expropriation était quand même sujette à
une autorisation ministérielle ou du Conseil des ministres, ce qui ne
semble plus être le cas dans la nouvelle loi, de telle sorte qu'on va
peut-être se trouver dans une situation beaucoup plus précaire que
par le passé, étant donné qu'il y a des baux de surface
maintenant et que la procédure d'expropriation est peut-être
beaucoup plus rapide et facile que par le passé.
M. Claveau: Merci. À la page iii de votre mémoire,
à mon sens, vous exprimez certaines réserves quant à
l'utilisation du mot "concession" dans les articles 101 et 102 du projet de
loi, en disant même: Est-ce qu'il ne s'agit pas là d'une
référence a posteriori à quelque chose qui ne se fait plus
depuis déjà 1966, je crois, les derniers baux qui ont
été accordés?
Si je comprends bien, est-ce que, par ce point, vous ne demandez pas au
ministre de changer ses termes ou, s'il veut revenir à l'ancien principe
de la concession qui a déjà été
abandonné?
M. Chaput: Ah non! Je ne suggère pas du tout qu'on
revienne à l'ancienne concession. On l'a signalé ici une fois
relativement à l'article 16.
M. Claveau: Vous le signalez plus loin dans votre texte aussi,
une deuxième fois.
M. Chaput: Oui. Le texte est fait aussi avec une
présentation plus élaborée par la suite. Le projet de loi
comporte des mentions à certains endroits. Je vous réfère,
par exemple, à l'article 4 qui concerne le droit de
propriété. La loi parle au présent. Quand elle parle au
présent, on est porté à se demander à l'occasion si
elle a une référence, par contre, au passé. Quand on dit:
"Sous réserve des articles 5 et 6, font partie du domaine public et sont
réservés de plein droit à la couronne les substances
minérales, sauf celles de la couche arable, et les réservoirs
souterrains situés dans des terres du domaine public qui sont
concédées ou aliénées par la couronne...", est-ce
que "qui sont concédées ou aliénées par la
couronne" signifie seulement à partir de la mise en vigueur de la
nouvelle loi ou tout ce que la couronne peut avoir cédé ou
aliéné par le passé?
C'est la même chose pour l'article 16. C'est une façon de
rédiger qui amène peut-être des interrogations sur les
effets rétroactifs possibles.
M. Claveau: D'accord. Je ne sais pas si vous voulez avoir des
éclaircissement immédiats de la part du ministre quant à
la question que vous posez. En ce qui me concerne, je voulais surtout savoir si
on s'entendait bien à savoir que vous ne préconisez pas le retour
à l'ancienne concession minière telle qu'on l'avait au
début des années soixante.
M. Chaput: Si je plaidais pour une compagnie minière, je
dirais oui, car, à mon avis, les titres étaient meilleurs et
beaucoup plus étendus, mais je ne suis pas ici pour représenter
les compagnies minières. Toutefois, je pourrais bien dire qu'un banquier
qui prenait une concession minière en garantie, prenait plus que ce
qu'il aura à l'avenir. C'est un débat dans lequel on ne doit pas
s'engager.
M. Claveau: Au bas de la page 1 de votre mémoire, à
l'introduction, vous dites, au dernier paragraphe: le "projet de loi 161 -... -
contient dans l'ensemble des éléments de réforme qui
s'avèrent sans aucun doute extrêmement bénéfiques.
En ce sens, l'ABC ne peut faire autrement qu'accorder son appui total à
la réforme de la Loi sur les mines proposée par le
gouvernement".
À la lumière des autres mémoires qu'on a
étudiés depuis hier matin et qui ont été dans
certains cas assez durs et particulièrement critiques quant à un
certain nombre de choses qui étaient proposées dans ce projet de
loi, est-ce que I'ABC maintient la position qu'elle a exprimée au moment
de la rédaction de son mémoire ou ne s'allie-t-elle pas à
des recommandations en ce qui concerne, entre autres, le Barreau du
Québec et l'Association des prospecteurs qui vont même
jusqu'à demander carrément au ministre de retirer son projet de
loi en le considérant beaucoup plus comme un avant-projet de loi et de
retourner à une consultation nouvelle et plus globale qui lui
permettrait de faire quelque chose tout à fait nouveau en comparaison
avec ce qui est
présenté actuellement?
M. Chaput: Écoutez, du point de vue des banquiers, la
préoccupation concerne essentiellement la validité des garanties.
Me Poudrier l'a souligné tantôt, les éclaircissements qui
sont apportés sur la qualité des droits accordés, les
droits de propriété distincts, bien qu'on ait mentionné
qu'on aimerait peut-être une insistance sur la cessibilité de ces
droits, je pense que, lié à des précautions qui pourraient
être prises vis-à-vis de la révocation et de
l'aliénation des titres miniers, et si le système
d'enregistrement est bonifié, on maintient notre position. On n'a pas de
remarque à faire concernant toute la mécanique, par exemple, des
nouvelles propositions sur le jalonnement et sur la désignation sur
carte. Je suis prêt à partager les préoccupations de Me
Lacasse jusqu'à un certain point en ce qui concerne l'abolition du juge
des mines, mais ce n'est pas d'abord cela, la préoccupation du banquier.
Le banquier qui prête son argent veut être sûr que son
emprunteur a un bon titre minier, que sa garantie est bonne et que s'il exerce
ses recours, il va être assuré de son remboursement.
M. Claveau: Je comprends très bien que cela soit votre
première préoccupation. Par contre, je comprends aussi que la
première préoccupation d'un ministre délégué
aux Mines, d'un ministre responsable du secteur minier, c'est de s'asssurer de
faire une loi qui soit la plus avantageuse possible et la plus acceptable quant
aux intérêts de l'industrie minière et à la
possibilité de développer cette industrie. Dans ce sens, je
trouve que les critiques - et l'approche - qui viennent des principaux
intervenants dans le milieu doivent être écoutées d'une
oreille très attentive par le ministre parce que ce sont eux qui
investissent.
Vous prenez des risques, mais vous avez des garanties pour ces risques
alors que l'investisseur, lui, prend vraiment un risque même s'il le fait
avec votre aide. Si cela ne marche pas, il faudra qu'il trouve le moyen de vous
rembourser un jour ou l'autre et d'une façon ou d'une autre aussi. Je
crois que le principal but de la loi est de s'assurer que les investisseurs,
dans le domaine minier, puissent développer l'industrie minière
dans le meilleur intérêt de l'ensemble de la collectivité
québécoise. Dans ce sens, quand vous dites que vous donnez un
accord, que vous accordez un appui total à la réforme de la loi
actuellement, cela me semble plus fort qu'un avis. Vous disiez tout à
l'heure que vous ne vous y opposiez pas et que vous ne donnez pas d'avis
là-dessus. Cela me semble, au contraire, être un avis, car vous
dites que vous appuyez le ministre dans tout ce qu'il propose là-dedans.
Est-ce que cela ne pourrait pas aller à l'encontre des
intérêts de l'industrie minière qui, elle, semble
très réservée par rapport à ce qu'il y a dans le
projet de loi?
M. Chaput: Oui. La seule réponse que je peux vous donner,
c'est que nous n'avons pas entendu les remarques, les réflexions ou lu
les rapports de l'industrie minière, de la Chambre des notaires ou du
Barreau. Je pense que M. Dufresne pourrait aussi dire que les banquiers n'ont
pas entendu dire de leur clientèle minière que le nouveau projet
de loi sur les mines leur posait des problèmes particuliers. Les
banquiers l'ont envisagé sous l'angle où ils sont appelés
à oeuvrer dans la société qui est essentiellement une
fonction de financement, du moins, dans une industrie comme celle-ci.
M. Ctaveau: D'accord. Dans un dernier temps, j'aurais
peut-être une dernière question. J'aimerais savoir, en ce qui
concerne l'Association des banquiers canadiens et peut-être plus
particulièrement les grands créanciers qui oeuvrent sur le
territoire québécois dans l'industrie minière, quel
rôle, quelle importance vous donnez à l'industrie minière
par rapport à l'ensemble de autres secteurs économiques au
Québec.
M. Dufresne: Je pense que, en général, les banques
attachent beaucoup d'importance à ce secteur. Je dois dire - je peux
vous flatter - que je demeurais à Toronto l'an dernier. Votre
ministère est perçu, au Canada, comme étant celui qui
soutient le mieux l'industrie minière, même mieux que l'Ontario.
Je pense que c'est tout à votre honneur. Mais, l'industrie bancaire est
là, mon cher monsieur, pour desservir les besoins de la
communauté. Les besoins, ce sont les investisseurs qui vont les
créer, quel que soit l'endroit où ils s'installent. Dans le Nord
québécois, vous verrez que plusieurs banques y sont
représentées pour justement faciliter la mise en chantier de ces
projets miniers. Nous regardons ce secteur de façon positive. Ce qui
s'est passé dernièrement dans ce secteur est certainement un
signe positif. Je crois que, en général, les banques regardent
cela avec une vue d'ensemble très positive.
M. Claveau: Je vous remercie pour les réponses que vous
avez bien voulu donner à mes questions.
Le Président (M. Desbiens): II est 18 heures. Je rappelle
qu'il a été convenu qu'on pouvait dépasser le temps, si
nécessaire. M. le ministre, est-ce que vous avez d'autres
commentaires?
M. Savoie: Avez-vous terminé, M. le
député?
M. Claveau: J'ai écoulé mon temps, M. le ministre,
malheureusement,
M. Savoie: Je voudrais terminer rapidement moi aussi. Tout
simplement un petit rappel pour vous dire qu'effectivement la Loi sur
l'expropriation continue à primer. L'article 35 de la loi dit que le
présent titre, c'est-à-dire les dispositions
générales de la Loi sur l'expropriation, régit toutes les
expropriations permises par les lois du Québec et prévaut sur les
dispositions inconciliables de toute loi générale ou
spéciale et qu'il faut, dans tous les cas, aller au gouvernement du
Québec pour une expropriation. Le ministre ne peut pas exproprier de son
propre chef.
M. Chaput: Non, mais selon la Loi sur les mines actuelle, pour
l'exercice des pouvoirs d'expropriation, il faut faire une demande. On ne peut
pas procéder à l'expropriation sans autorisation,
actuellement.
M. Savoie: C'est cela. On ne peut pas...
M. Chaput: Si je lis la nouvelle disposition de l'article 228, on
parle d'expropriation. J'ai tenu pour acquis, en lisant la disposition, que la
compagnie minière qui voudrait exproprier déposerait un avis
d'expropriation en vertu de la Loi sur l'expropriation comme n'importe qui
d'autre le fait, tandis que selon la disposition de la loi actuelle, il fallait
quand même aller chercher une autorisation préalable.
M. Savoie: Oui, mais la première Loi sur les mines a
été rédigée il y a 20 ans, avant l'entrée en
vigueur de la présente Loi sur l'expropriation. Dans la nouvelle loi, on
s'ajuste en vertu de la Loi sur l'expropriation.
M. Chaput: Oui. Je voulais seulement dire que, avec la demande
d'autorisation qu'on faisait auprès du ministre, une certaine
discrétion pouvait peut-être être exercée pour
protéger des gens, des titres ou des biens dans la mesure où le
ministère aurait pu juger que l'expropriation, dans un cas donné,
ne devrait pas avoir lieu.
M. Savoie: Dans l'ancienne loi, il y avait une discrétion
du ministre en ce qui concerne l'expropriation et vous la jugez favorable.
M. Chaput: Moi? Oui, certainement. Étant donné
que...
M. Savoie: ...M. Lacasse.
M. Chaput: De la façon dont on envisage l'expropriation en
général, dans nos systèmes, cela est un droit très
exorbitant qui, traditionnellement, relève des pouvoirs publics,
c'est-à-dîre de l'État, des municipalités, des
hôpitaux, des écoles, etc., et non pas de l'intérêt
privé. Remarquez que je ne dis pas que la proposition qui est faite dans
le projet de loi n'est pas intéressante pour les industries
minières qui veulent prendre de l'expansion de façon intense.
Mais le créancier qui se verrait lésé en perdant
ses garanties par l'expropriation dira peut-être: J'aurais
préféré qu'un ministre ou quelqu'un regarde cela d'un
certain oeil avant de dire oui.
M. Savoie: D'accord. On le fera, je vous l'assure.
Je vous remercie beaucoup pour votre exposé et pour votre
mémoire. Ce fut très agréable. Je pense que c'est la
première fois qu'on prend le temps d'échanger des points de vue
directement avec la personne qui dépose le mémoire. Je pense que
cela s'est avéré particulièrement expéditif et,
à mon avis, c'est une formule beaucoup plus apte à nous
servir.
Le Président (M. Desbiens): C'est peut-être un
précédent.
M. Savoie: Oui.
Le Président (M. Desbiens): Nous vous remercions, MM.
Dufresne et Chaput, de votre participation aux travaux de la commission.
M. Chaput: Merci.
Le Président (M. Desbiens): Oh!
Excusez-moi, M. le député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Je voudrais dire au
ministre qu'une fois n'est pas coutume.
Toujours est-il que je tiens, au nom de l'Opposition, à remercier
l'Association des banquiers canadiens et ses porte-parole pour le très
bel exposé qu'ils ont fait concernant leurs préoccupations, et
plus spécifiquement les principaux créanciers dans l'exploration
et l'exploitation minières qui, on le sait, est un secteur terriblement
coûteux où les risques sont très élevés. Nous
comprenons vos préoccupations et soyez certains que nous en prenons
bonne note.
Merci de votre présentation.
M. Chaput: Merci.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que vous avez une
intervention? Cela va.
La commission de l'économie et du travail ajourne ses travaux
à demain matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 18 h 5)