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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Wednesday, March 4, 1987 - Vol. 29 N° 42

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude de la proposition tarifaire d'Hydro-Québec pour l'année 1987


Journal des débats

 

(Dix heures onze minutes)

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous plaît! La séance de la commission est ouverte. Je rappelle le mandat qui nous a été confié par l'Assemblée nationale, qui est d'étudier la proposition tarifaire d'Hydro-Ouébec pour l'année 1987 et d'entendre, à cette fin, les membres du conseil de direction d'Hydro-Québec.

Organisation des travaux

Je vous rappelle que, selon l'avis de la Chambre, le ministre est membre d'office de cette commission. Ce dernier et le député de Roberval se sont entendus sur l'ordre du jour qui serait le suivant: ce matin, nous allons d'abord entendre l'exposé du ministre de l'Énergie et des Ressources; par la suite, nous entendrons le porte-parole de l'Opposition; viendra ensuite l'exposé des représentants d'Hydro-Ouébec et, finalement, des questions d'ordre général.

Cet après-midi, la séance sera consacrée à l'étude de deux questions: le marché interne québécois et les exportations d'électricité. La séance se terminera à 18 heures ce soir.

Demain matin, nous aborderons le plan d'équipement proprement dit et, par la suite, les questions reliées à l'environnement. Demain après-midi, nous étudierons la situation financière ainsi que la question des tarifs proprement dits. Nous avons indiqué un "varia" pour un certain nombre d'autres questions dans la mesure où il resterait du temps. Il faudrait également se réserver du temps pour les commentaires de clôture, à la fois du ministre et du critique de l'Opposition.

Est-ce que le secrétaire de la commission pourrait nous dire s'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président, il y a un remplacement. M. Lefebvre (Frontenac) est remplacé par M. Doyon (Louis-Hébert).

M. Cannon: Je m'excuse, M. le Président, ce remplacement ne fonctionne pas.

Une voix: M. Doyon ne fonctionne pas?

M. Cannon: Le remplacement, M. le député. On va voir, tantôt, si vous, vous fonctionnez.

Le Président (M. Charbormeau): Tout le monde est branché? Nous allons commencer. M. le ministre.

Déclarations d'ouverture M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, chers collègues membres de cette commission, messieurs les dirigeants et représentants d'Hydro-Québec, mesdames et messieurs, la commission de l'économie et du travail entame, aujourd'hui, l'étude du plan de développement d'Hydro-Ouébec pour la période 1987-1989 ainsi que l'analyse de la proposition tarifaire présentée par la société d'État pour l'année 1987-1988.

Par ses implications sur notre situation énergétique ou, plus globalement, par son impact sur l'activité et la croissance, le plan de développement d'Hydro-Québec comporte des orientations et des interventions qui influeront directement sur l'économie québécoise. Il est donc essentiel que l'analyse que nous allons effectuer aujourd'hui et demain du plan de développement corresponde aux enjeux en cause. Pour bien comprendre ces enjeux, il m'apparaît nécessaire tout d'abord de situer l'importance de l'électricité dans l'économie québécoise et le progrès de ses citoyens, ensuite de rappeler les grandes orientations du gouvernement en matière d'électricité et, finalement, de décrire les principaux changements qui ont eu lieu dans le contexte énergétique depuis les derniers travaux de cette commission. Je terminerai mon intervention par quelques remarques sur le nouveau plan de développement en tenant compte du contexte énergétique qui s'est dessiné depuis un an.

En ce qui concerne l'importance de l'électricité dans l'économie québécoise, permettez-moi de souligner que le développement du potentiel hydroélectrique québécois, et ce grâce à la réalisation de la phase I de la Baie James, a permis de renforcer grandement la sécurité énergétique du Québec. Une plus grande sécurité énergétique pour le Québec signifie non seulement un meilleur contrôle de la facture énerqétique que doivent payer nos consommateurs

résidentiels et industriels, mais également la mise en valeur d'une ressource naturelle propre au Québec. De plus, une plus grande sécurité énergétique signifie également !e développement chez nous et par des gens de chez nous d'une expertise mondiale en matière de génération, de transport et de distribution d'électricité. Enfin, elle signifie la création d'emplois ici même au Québec.

Pour illustrer l'importance de l'électricité dans l'économie québécoise, mentionnons que le degré d'autonomie énergétique du Québec a atteint 76 % en 1985, alors qu'il n'était que de 50 % en 1974, soit dix ans auparavant. Ce niveau est nettement plus élevé que celui de l'Ontario qui se situe à environ 29 % seulement et se compare avantageusement au degré d'autonomie énergétique des pays de la Communauté économique européenne. Cette amélioration du degré d'autonomie énergétique est d'autant plus importante que plusieurs milliers d'emplois proviennent du secteur primaire et de l'industrie de première transformation dont les procédés sont énergivores.

Pour mieux refléter l'importance de l'électricité dans l'économie québécoise, il serait peut-être opportun d'envisager quelle serait la position concurrentielle de nos industries si on appliquait à nos usagers industriels les tarifs d'électricité payés aujourd'hui par l'Ontario, le Nouveau-Brunswick et les États américains voisins. Si on prenait ceux de l'Ontario, nos entreprises paieraient en moyenne 21 % plus cher, avec ceux du Nouveau-Brunswick, 31 % et, avec les tarifs de New York, ce serait 76 % plus cher. Les avantages comparatifs dont bénéficie le Québec en matière d'électricité contribuent à la croissance économique du Québec qui, d'ailleurs, dépassait en 1986 celle du Canada.

Voilà donc l'importance de l'électricité dans l'économie québécoise, importance que le gouvernement du Québec désire reconnaître et promouvoir par les quatre orientations et moyens suivants: premièrement, le développement de notre potentiel hydroélectrique et une pénétration accrue de la part de l'électricité dans le bilan énergétique québécois. Deuxièmement, la poursuite d'une politique visant à privilégier le développement économique du Québec au moyen de tarifs d'électricité avantageux. Troisièmement, le maintien des meilleurs tarifs possible aux usagers québécois et quatrièmement, le renforcement de nos ventes sur les marchés d'exportation.

Ce sera donc à la lumière de ces quatre éléments que nous allons faire l'examen du plan de développement. Mais permettez-moi d'abord de décrire les principaux changements qui se sont produits dans le contexte énergétique depuis un an, à la suite desquels Hydro-Québec propose plusieurs actions à entreprendre.

Le premier changement sur lequel je désire attirer l'attention est la chute du prix du pétrole. Au moment où la commission se réunissait l'an dernier, on venait d'assister à la chute du prix du pétrole brut qui a fini par s'établir à 15 $ US en moyenne. Aussi, la baisse du prix du pétrole a provoqué une baisse du bénéfice net d'Hydro-Québec d'environ 225 000 000 $. Ceci confirme la présence d'un contexte énergétique incertain dans lequel doit évoluer Hydro-Québec.

Un deuxième changement sur lequel j'attire votre attention est l'accroissement des ventes d'électricité régulière au Québec, qui se situent à un niveau supérieur aux prévisions faites par Hydro-Québec l'an dernier. Ce dernier changement coïncide avec la forte reprise économique du Québec au cours de l'année 1986.

Un troisième changement qui est apparu depuis l'an dernier est l'ouverture de plus en plus grande des marchés d'exportation pour la vente d'électricité québécoise et la percée qu'est en train de réaliser Hydro-Québec sur ces marchés, notamment par la signature d'une lettre d'entente en vue de la conclusion d'un contrat de 900 mégawatts avec la Central Maine Power. En somme, le développement de nos ressources hydroélectriques comporte un grand nombre de considérations financières et économiques.

Dans son nouveau plan de développement, Hydro-Québec propose une stratégie globale qui incorpore l'ensemble de ces considérations. La commission parlementaire se penchera aujourd'hui et demain sur les propositions d'Hydro-Québec et plus particulièrement sur la nature de ce qu'Hydro-Québec a appelé les principaux arbitrages du plan. J'aimerais auparavant vous livrer quelques commentaires sur le contenu du nouveau plan de développement lesquels, je l'espère, contribueront à replacer dans leur contexte les éléments qui seront discutés durant les travaux de cette commission. Mes commentaires quant au plan de développement porteront sur la situation financière d'Hydro-Québec, les exportations d'électricité, la position concurrentielle de nos industries et, finalement, sur le développement des équipements.

En ce qui concerne la situation financière d'Hydro-Québec, j'ai déjà indiqué qu'un facteur principal était venu affecter la société d'État à ce chapitre, soit la baisse du prix du pétrole en 1986. Au cours des dernières années, Hydro-Québec subissait d'autres pertes financières dues à la baisse du taux de change du dollar canadien et à la hausse des taux d'intérêt. Quand on parle des augmentations du dollar canadien vis-à-vis de la devise américaine, il faut cependant reconnaître que, même s'il y a eu une légère augmentation vis-à-vis de la devise américaine, le dollar canadien est à la baisse

vis-à-vis des autres devises étrangères. Cela affecte la performance d'Hydro-Québec: les remboursements qu'Hydro-Québec doit faire en raison de son endettement.

Aussi, il m1 apparaît souhaitable qu'Hydro-Québec soit encouragée à maintenir ses critères financiers minimums. Pour ce faire, Hydro-Québec propose une croissance tarifaire modérée au cours des trois prochaines années. La hausse de tarifs demandée pour 1987 s'élève à une moyenne de 4,6 %. Cette demande se situe dans l'échelle du taux d'inflation de 4,9 % au Québec. Cette hausse tarifaire peut être considérée comme raisonnable, compte tenu des impératifs financiers auxquels Hydro-Québec doit faire face. J'ai certaines interrogations toutefois sur l'opportunité de différencier les hausses selon les secteurs de consommation. Je demande donc à HydroQuébec de nous expliquer l'impact d'une telle proposition.

La proposition de la politique tarifaire devra être étudiée non seulement à la lumière des impératifs financiers de l'entreprise, mais aussi en tenant compte des mesures mises de l'avant par Hydro-Québec pour réduire la facture énergétique de ses clients. Par exemple, depuis 1982, environ 150 000 unités de logement ont adopté le système de chauffage bi-énergie et HydroQuébec prévoit offrir une nouvelle option de tarifs à ses clients, ce qui leur permettra de réaliser une économie annuelle de 140 $ à 180 $. Il m'apparaît important aussi de rappeler que les usagers québécois des secteurs résidentiels bénéficient des tarifs d'électricité parmi les plus bas en Amérique du Nord. Les Canadiens paient leur facture énergétique en moyenne 33 % plus cher que les Québécois.

Mon deuxième commentaire aura trait à la question des exportations. J'ai déjà indiqué auparavant que depuis un an, nous assistons à une ouverture de plus en plus grande des marchés d'exportation pour l'électricité québécoise. Il faut mentionner à ce sujet la publication aux États-Unis d'importants rapports sur la demande d'électricité, notamment en Nouvelle-Angleterre où on aurait établi qu'il existe pour l'ensemble de la région une demande d'énergie additionnelle de plus de 6000 mégawatts d'ici à l'an 2000. Plus récemment, un rapport effectué à la demande des gouverneurs de la Nouvelle-Angleterre pour leur rencontre de décembre 1986 indiquait un déficit à combler variant de 2800 mégawatts à 11 200 mégawatts en l'an 2000. D'autres rapports ont également été publiés sur la demande d'électricité pour l'État de New York et ils démontrent la présence de nouvelles possibilités de vente d'électricité québécoise sur ce marché.

Une plus grande ouverture des marchés d'exportation a conduit tout récemment Hydro-Québec à la signature d'une lettre d'entente avec la Central Maine Power. Elle comporte plusieurs caractéristiques qui méritent d'être soulignées. Il s'agit de la vente de puissance et d'énergie ferme à long terme, pendant 29 ans, de 122 000 000 000 de kilowattheures, ce qui représente 15 000 000 000 $ de revenus pour HydroQuébec. Ces revenus auront pour effet à long terme de contribuer au maintien de tarifs d'électricité avantageux pour l'ensemble de nos usagers.

Ce contrat prévoit une formule de prix indexé au taux de l'inflation - une première en son genre - plutôt qu'en fonction de l'évolution du prix du pétrole. Il est important de rappeler qu'une baisse du prix du pétrole diminue les revenus d'Hydro-Québec en raison de l'indexation des ventes d'énergie excédentaire sur les prix du mazout et touche ainsi directement la situation financière de la société d'État. Cette nouvelle formule de prix présente une meilleure garantie de stabilité qu'une formule liée aux fluctuations des prix pétroliers.

L'entente avec la Central Maine Power prévoit l'établissement d'une nouvelle entreprise en sol américain pour la construction de lignes de transport. HydroQuébec sera un partenaire dans cette nouvelle entreprise, ce qui lui assurera une percée durable sur les marchés de la Nouvelle-Angleterre.

Mon troisième commentaire porte sur le développement de nos industries à l'aide de tarifs d'électricité avantageux. En effet, les ventes d'électricité régulières au Québec ont dû être révisées à la hausse dans le nouveau plan de développement par rapport aux prévisions qui nous ont été présentées l'an dernier. Au lieu d'une augmentation de 4,4 %, les ventes d'électricité régulières au Québec se sont accrues de 8,9 % à cause d'une forte reprise économique au Québec. Le gouvernement du Québec entend encourager le développement industriel du Québec à l'aide de divers programmes. Mentionnons, à titre d'exemple, le programme de partage de risques et de bénéfices. Ce dernier fait partie d'une nouvelle génération de programmes à HydroQuébec et déjà les résultats sont encourageants. C'est d'ailleurs dans le cadre de ce proqramme qu'une entente avec Norsk Hydro a été convenue pour la livraison de 175 mégawatts.

Mon dernier commentaire a trait à la question du développement des équipements. Le nouveau plan de développement prévoit le devancement de la construction de nouveaux équipements tels que les centrales LG 1, Laforge, Brisay et Sainte-Marguerite. En ce qui a trait aux investissements, HydroQuébec procédera en 1987 à des dépenses d'investissements de 1 900 000 000 $ équivalant à environ 10 % du total des investissements privés prévus dans l'ensemble

de l'économie québécoise. Ces dépenses ont des effets importants. À titre d'exemple, en 1985, avec des investissements de 1 500 000 000 $, Hydro-Québec a versé 917 000 000 $ en salaires et a, de plus, acheté des biens et services pour plus de 1 300 000 000 $. Ces achats ont été en majeure partie effectués au Québec. Elle a, par ailleurs, versé 246 000 000 $ en impôt et taxes. Au cours des dix prochaines années, Hydro-Québec compte investir 37 000 000 000 $ dans les projets hydroélectriques. Pour la période 1987-1989, l'entreprise prévoit des investissements de 7 600 000 000 $, ce qui représente un apport majeur à notre activité économique, dont 600 000 000 $ pour accroître la fiabilité des réseaux qui contribueront à améliorer la qualité du service auprès des utilisateurs québécois.

En termes d'emplois, les résultats sont tout aussi impressionnants. Les activités d'Hydro-Québec, au cours des trois prochaines années, assureront, sur une base annuelle, 27 600 emplois directs, soit 3600 de plus qu'en 1986, 17 400 emplois indirects, soit 4500 de plus qu'en 1986, et 14 000 emplois liés aux activités de commercialisation, soit au total 59 000 emplois.

Par ailleurs, il faut être conscient que tout ce développement de notre potentiel hydroélectrique implique que l'énergie doit être transportée. L'ajout de nouvelles lignes de transport est une facette importante du plan d'équipement. Quand le Québec a choisi l'hydroélectricité plutôt que l'aventure nucléaire, il a aussi choisi d'amener l'énergie produite dans le nord aux résidences et aux entreprises situées au sud.

À cet égard, il m'apparaît important d'impliquer davantage les Québécois dans les orientations du Québec en matière de transport d'électricité. C'est pourquoi nous élargirons les mécanismes qui permettent aux Québécois d'exprimer leurs attentes face à cette question. En effet, avec l'ampleur des projets envisagés, il faut en arriver à ce que la population dispose d'une occasion de s'exprimer suffisamment tôt dans le processus de décision pour que l'on puisse, s'il y a lieu, ajuster ces projets sans compromettre les échéanciers de mise en service.

À la lumière de ce qui précède, il m'apparaît évident; que le plan de développement que présenteront dans quelques instants les représentants d'Hydro-Québec se situe au coeur de certains enjeux majeurs pour le développement du Québec. La santé financière d'Hydro-Québec, le maintien au Québec de tarifs très concurrentiels par rapport à nos voisins, les occasions qu'offrent les marchés d'exportation ou encore l'attrait, en sol québécois, de projets d'investissements majeurs sont autant d'éléments à la lumière desquels doit être évalué le plan de développement qui nous est proposé aujourd'hui. Merci, M. le Président. (10 h 30)

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M. le député de Roberval.

M. Michel Gauthier

M. Gauthier: Merci, M. le Président. Distingués membres de la commission, messieurs les dirigeants d'Hydro-Québec, permettez-moi tout d'abord de souligner, encore une fois cette année, la très grande qualité des documents qui nous sont présentés par Hydro-Québec. Bien que les ayant reçus que trop récemment, hélas, nous constatons que beaucoup de soin a été apporté à la présentation clarifiée de l'ensemble des données encore plus complètes ainsi qu'à l'élaboration détaillée des énoncés. Le plan de développement 1987-1989 Horizon 1996 s'inscrit directement dans la continuité du bilan et de l'ensemble des prévisions du plan 1986-1988, présenté l'an dernier. Permettez-moi donc brièvement de faire un tour d'horizon sur l'évolution des principaux éléments.

La construction de la première phase du complexe La Grande a nécessité des déboursés énormes. En 1979, le niveau des investissements a atteint 2 800 000 000 $ comparativement à des investissements de 1 500 000 000 % en 1986. On se souviendra que la période des travaux intenses de la phase I du complexe La Grande a été précédée par une forte réévaluation à la hausse des coûts prévus, de telle sorte que malgré son grand pouvoir d'emprunt, HydroQuébec a dû augmenter ses tarifs pour investir et couvrir les intérêts de sa dette; de là les augmentations de tarifs de 17 % en 1978, de 13,8 % en 1979 et de 13 % en 1982, soit plus que l'inflation, et de manière significative.

Au début des années quatre-vingt, alors que les installations du complexe La Grande phase I commençaient à entrer en production, la croissance de la demande d'électricité diminua rapidement. De plus, les investissements à la Baie James n'étaient pas terminés et les taux d'intérêt montèrent en flèche. Hydro-Québec dut donc augmenter encore ses tarifs de façon significative, soit de 16,7 % en 1982. Dans les années qui suivirent, avec la baisse de l'inflation, la baisse des investissements, la concurrence accrue des autres formes d'énergie, les surplus d'énergie et la nécessité de laisser souffler un peu le consommateur québécois ont donné lieu à des hausses de tarifs moins importantes.

Bref, la situation financière d'Hydro-Québec qui s'est dégradée jusqu'en 1985 a commencé à s'améliorer à partir de 3986, à la suite d'une amélioration de la demande.

On ne peut pas imputer la situation financière actuelle d'Hydro-Québec aux faibles hausses de tarifs, c'est le moins qu'on puisse dire. C'est plutôt à la crise économique liée à une baisse générale de la demande non prévue et à l'obligation de vendre à rabais les surplus d'énergie qu'il faut l'imputer.

La situation a été amplifiée par la baisse des prix du pétrole et du gaz au cours des trois dernières années, ce qui a affecté les entrées de fonds et accru la concurrence sur le marché de l'énergie. L'entreprise est aujourd'hui servie par une reprise de la demande et un environnement économique beaucoup plus stable.

Ainsi, les ventes d'énergie régulières au Québec, qui avaient augmenté de 1,3 %, 2,7 % et 1,9 % en 1981, 1982 et 1983, ont augmenté de 6,9 %, 7,3 % et 6 % en 1984, 1985 et 1986. Les hausses prévues pour 1987 sont de l'ordre de 6,2 %. Aussi, les ventes de surplus, sous forme de livraison garantie, assureront sans aucun doute des hausses de revenus.

Les prix du pétrole devraient également se maintenir et même s'accroître légèrement. Les taux d'intérêt devraient demeurer assez bas et le dollar canadien devrait se raffermir. De même, on ne prévoit pas de baisse marquée dans la croissance économique. Hydro-Québec a connu ses périodes difficiles, mais les perspectives d'avenir, pensons-nous, sont bonnes.

La situation financière d'Hydro-Québec a de bonnes chances de se rétablir en période de niveau raisonnable d'investissements, ceci sans hausses trop marquées des tarifs.

En 1986, les revenus de ventes d'électricité à l'exportation perçus par Hydro-Québec s'élevaient à 650 000 000 $, soit 14 % de ses revenus. En 1978, c'est 129 000 000 $ qu'elle retirait des exportations, soit 8 % de ses revenus. Du côté de l'énergie, en 1986, ce sont 27 térawattheures que Hydro-Québec a exportés, soit 18 % de ses ventes comparativement à 13 térawattheures en 1978, soit 12 % de ses ventes. Cette hausse des ventes est étroitement reliée à la pénétration du marché américain et ce, en particulier au cours des dernières années, aux ventes d'énergie excédentaire qui prendront fin au milieu des années quatre-vingt-dix.

Progressivement, les ventes d'énergie garanties prendront le relais. Ce type d'énergie rapporte beaucoup plus, de telle sorte que, malgré une certaine stagnation de l'énergie exportée, les revenus des ventes des exportations devraient tout de même s'accroître de façon significative.

Hydro-Québec prévoit qu'au cours des années à venir, c'est-à-dire jusqu'en l'an 2000, les déficits de puissance de base qui nécessiteraient la construction de nouvelles centrales chez nos voisins sont de l'ordre de 5900 mégawatts. Hydro-Québec prévoit pouvoir accaparer de 3500 à 4500 mégawatts de ce marché potentiel, ce qui nous est toujours apparu et nous apparaît toujours comme fort réaliste.

Nous savons également que le Québec doit faire face à une concurrence sévère sur les marchés externes. Il faudra donc que le gouvernement et Hydro-Québec adoptent une attitude agressive pour s'assurer de cette part des marchés extérieurs. Dans le contexte où l'on parle d'exportation de puissance garantie sur des périodes de 15 à 30 ans, tant que l'on s'en tient à des contrats totalisant environ 3500 mégawatts, il s'agit du devancement de construction de centrales qui, de toute façon, auraient dû, à un moment ou à un autre, être construites pour nos besoins. Ainsi, la négociation de prix de vente garantit un certain profit, puisque celui-ci est calculé à partir du coût de devancement plutôt qu'à partir du coût total de construction. De plus, les risques sont moins élevés et l'approvisionnement futur du Québec en électricité à meilleur marché possible n'est pas compromis. Finalement, des exportations de cet ordre n'exiqent pas la construction de plusieurs nouvelles interconnexions, mais plutôt, pour l'essentiel, l'utilisation des interconnexions existantes.

Il demeure néanmoins que, pour des contrats sur 30 ans, il existe certains risques sur lesquels nous aimerions avoir des éclaircissements de la part d'Hydro-Québec, d'autant plus que l'exportation de puissance et d'énergie ferme nécessitera des investissements énormes, notamment pour la fiabilité du réseau. Je trouve donc très important dans ce contexte de ne pas refiler ces dépenses aux consommateurs québécois, notamment par des hausses tarifaires.

Au lendemain de la phase I du complexe La Grande, à cause des surplus, les investissements d'Hydro-Québec ont diminué, et cette baisse des investissements, liée à d'autres facteurs, permettra à Hydro-Québec de retrouver sa marge de manoeuvre financière. Pour les dix prochaines années, en l'absence de nouveaux développements, Hydro-Québec évalue à 30 000 000 000 $ les investissements nécessaires pour satisfaire les besoins d'électricité au Québec, lesquels devraient augmenter en moyenne de 2,7 % par an jusqu'en l'an 2006.

Ces prévisions sont, bien entendu, discutables. On sait que, l'an dernier, HydroQuébec a sous-évalué de quatre points de pourcentage la croissance de la demande. Étant donné l'impact que peuvent avoir ces erreurs de prévision à long terme sur les investissements, nous aimerions avoir plus de précision sur la fiabilité des données et sur la souplesse dont Hydro-Québec bénéficie pour s'ajuster à des erreurs potentielles.

D'autre part, selon les prévisions

d'Hydro-Québec, nous devrions pouvoir siqner des contrats afin d'exporter 3500 mégawatts de puissance garantie. Ces exportations nécessiteront des devancements de travaux et des investissements accrus de l'ordre de 6 000 000 000 $ à partir de 1990 et pour les dix prochaines années. Cette hausse des investissements générera plus d'emplois, mais combien? Également, comment faire pour maximiser les retombées économigues au Québec? D'autre part, ces investissements plus élevés nécessitent des besoins financiers plus importants. Comment seront-ils comblés?Par des emprunts ou par des hausses tarifaires?

Le moins qu'on puisse dire, c'est que l'aménagement de ressources hydroélectriques de même que le transport d'électricité sont des développements très visibles qui ont un impact indéniable sur l'environnement. Bien que l'électricité soit aujourd'hui un bien essentiel utilisé chaque jour par l'ensemble des Québécois, il importe dès maintenant, je pense, d'établir dans quelle mesure nous sommes prêts à en assumer les impacts souvent permanents et irrémédiables qui peuvent affecter notre environnement.

Dans cette perspective, il importe d'accorder prépondérance aux études d'impact dans le processus de décisions relié aux choix de développements, mais surtout d'étudier sérieusement les moyens de les diminuer. Les premiers jalons datent de 1978-1979, sous le gouvernement du Parti québécois, avec des réalisations comme la Loi sur la qualité de l'environnement, la mise sur pied du BAPE et de la Commission de protection du territoire agricole, mais nous sommes inquiets du silence du gouvernement actuel en matière d'environnement relié au développement hydroélectrique et des agissements du ministre, notamment dans le cas de la sixième ligne, qui en est un bon exemple.

Les emplois générés par la construction de barrages sont importants, mais ces investissements génèrent relativement peu d'emplois permanents. Plusieurs études démontrent que le problème de l'aménagement de nos ressources hydroélectriques vient du peu de retombées de la construction de barrages et de lignes de transport dans le secteur manufacturier québécois. Par exemple, le contrat accordé récemment à ASEA, une firme suédoise, de 315 000 000 $ n'assure au Québec que des retombées minimales de 31 %.

En fait, au-delà de l'ingénierie, avons-nous développé une véritable industrie dans le secteur hydroélectrique au Québec? Allons-nous devenir au Québec de gros exportateurs d'électricité et demeurer des importateurs d'équipements? À la lumière de ce que fait le gouvernement avec Cégelec, cela risque malheureusement de perdurer. (10 h 45)

Pour ma part, je juge nécessaire que l'État québécois et Hydro-Québec s'engaqent à développer une véritable industrie manufacturière reliée à nos ressources hydroélectriques, même si, pour cela, HydroQuébec ou une autre société, comme la SGF, doivent devenir des partenaires financiers de sociétés privées.

De plus, la considération des impacts environnementaux devrait découler non seulement d'une politique interne d'Hydro-Québec, mais elle devrait s'insérer directement dans le cadre d'une politique énergétique québécoise. Il en coûte toujours moins cher d'économiser l'énergie que de construire des barrages. À cet égard, les propositions d'Hydro-Québec concernant la réduction de la demande de pointe sont intéressantes, mais que fera le gouvernement de cette proposition puisque le ministre m'a répété à plusieurs occasions ne pas avoir de politique d'énergie écrite et connue des Québécois, exception faite des quelques principes énoncés tout à l'heure et dans lesquels la question des économies d'énergie était absente.

Il nous apparaît clair que tant que ce gouvernement n'énoncera pas de politique énergétique, il demeurera inapte à établir les enjeux que comportent les choix collectifs en matière de développement énergétique.

Je terminerai en parlant de la proposition tarifaire d'Hydro-Québec, qui est tout de même l'enjeu principal de cette commission parlementaire. Cette année, HydroQuébec demande une hausse tarifaire générale de 4,6 %. La société nous indique que cette hausse est basée sur la nécessité de rétablir sa marge de manoeuvre financière, considérant les prévisions d'investissements accrus au cours des prochaines années, ce qui signifie: avoir plus de profits, auqmenter son niveau de capitalisation, augmenter le niveau de rendement sur les investissements et verser des dividendes au gouvernement.

Nous nous interrogeons sur l'opportunité d'avoir une hausse tarifaire aussi importante, compte tenu du fait que la hausse de la demande, plus de 6 % par année au cours des trois dernières années, devrait permettre à Hydro-Québec de rétablir sa situation financière à moyen terme. De plus, l'environnement économique que l'on prévoit relativement stable au cours des prochaines années contribue, à notre avis, à diminuer considérablement les risques de l'entreprise.

Finalement, lorsque nous constatons que la politique tarifaire conduira au versement de 292 000 000 $ de dividendes en 1989, il y a lieu de se demander si la hausse des tarifs vise à améliorer la situation financière d'Hydro-Québec ou à accroître la marge de manoeuvre du gouvernement. Hydro-Québec propose de hausser plus fortement les tarifs des consommateurs domestiques, soit l'ensemble des contribuables québécois.

L'argumentation développée dans la proposition tarifaire me semble inappropriée, car il s'agit là du marché le plus captif, qui compte plus de 2 500 000 d'usagers.

On dit que le secteur domestique n'est pas rentable, mais doit-on véritablement mettre en parallèle le niveau de rendement des différents marchés? L'électricité n'est-elle pas un bien essentiel pour l'ensemble des Québécois?

De plus, l'interfinancement entre les produits vendus par des entreprises d'utilité publique n'est pas un phénomène unique à Hydro-Québec. Ne devrait-on pas, dans la continuité de la mission d'Hydro-Québec, veiller à ce que les Québécois reçoivent, sous forme de tarifs réduits, une partie de la rente associée à la présence au Québec d'une ressource naturelle abondante? Dans le contexte actuel, il nous apparaît raisonnable que la hausse de tarifs ne dépasse pas le niveau d'inflation prévu et soit uniforme pour l'ensemble des usagers. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député de Roberval. Je présume que c'est M. Coulombe qui, au nom d'Hydro-Québec... Ah bon! D'accord. Alors, c'est M. Hébert, président du conseil d'administration, qui prendra d'abord la parole. Je crois qu'on m'indique que ce sera M. Coulombe par la suite.

M. Hébert, avant d'aborder votre présentation, est-ce que vous pourriez présenter les collègues qui vous accompagnent à la table?

Exposé d'Hydro-Québec M. Hervé Hébert

M. Hébert: M. le Président, je pourrais laisser M. Coulombe faire cela tantôt. C'est son équipe. J'aimerais qu'il les présente lui-même.

Le Président (M. Charbonneau):

D'accord.

M. Hébert: Cela va. M. le Président, M. le ministre, Mme, MM. les membres de la commission de l'économie et du travail. Il me fait plaisir, comme président du conseil d'administration d'Hydro-Québec, de me présenter devant cette commission pour discuter du plan de développement d'Hydro-Québec 1987-1989, Horizon 1996, rendu public il y a environ une semaine.

Comme vous l'aurez sans doute remarqué dans cette édition du plan, HydroQuébec a cherché à mieux expliciter les liens existant entre sa mission et les objectifs proposés, lesquels visent à satisfaire les attentes de ses clients, de son actionnaire et de ses prêteurs. De ces objectifs découla sa stratégie qui se situe dans le cadre du double rôle d'Hydro-Québec, soit celui de service public et celui de moteur de développement économique.

Encore cette année, le conseil d'administration a pu participer étroitement à la préparation de ce document fondamental. À chaque étape des travaux, prévision de la demande d'électricité, équipement requis, échéance de réalisation, cadre financier, le conseil d'administration a été consulté et a pu faire connaître ses opinions. Le plan de développement faisant l'objet de nos discussions à la présente rencontre a donc reçu l'assentiment du conseil d'administration d'Hydro-Québec, qui l'appuie sans réserve.

Comme il se doit, c'est le président-directeur général d'Hydro-Québec, M. Guy Coulombe, et les cadres supérieurs qui l'accompagnent qui se chargeront de répondre à vos questions et, avec votre permission, je céderai la parole à M. Guy Coulombe. Je vous remercie.

Le Président (M. Charbonneau): M.

Coulombe.

M. Guy Coulombe

M. Coulombe: M. le Président, je voudrais d'abord présenter mes collègues qui sont immédiatement à cette table et réservant pour d'autres interventions lors d'autres sujets le soin de présenter les autres collègues qui m'accompagnent. Vous avez à ma gauche M. Jean Bernier, secrétaire général d'Hydro-Québec. M. Jacques Guevremont, vice-président exécutif des marchés externes. M. Hébert, président du conseil. M. Pierre Godin, vice-président exécutif à l'exploitation. M. Claude Boivin, vice-président exécutif au marché interne. Je présenterai les autres au fur et à mesure des sujets qu'on traitera.

Je voudrais aussi souligner la présence ici des présidents de nos syndicats à HydroQuébec: M. Charles Cuerrier, qui est président du Syndicat des métiers, le 1500, affilié au Syndicat canadien de la fonction publique; M. Charbonneau et de M. Montoudis, qui sont respectivement président et secrétaire-trésorier du Syndicat des bureaux, local 2000; M. Pacelli Desrosiers, président du Syndicat des techniciens du local 957; ainsi que de M. Luc Chabot, qui est le permanent, conseiller technique à ces syndicats.

Ce matin, nous voudrions, en quelques minutes, vous donner peut-être un résumé du plan de développement. Je pense que ce serait peut-être plus vivant si on procédait par diapositives et, à cette fin, je demanderais à M. Neveu, qui est directeur général de la planification et M. Claude Boivin, qui est vice-président exécutif, le soin de présenter en un quart d'heure les

principales facettes du plan de développement. Avant, j'aimerais souligner le travail immense que représente ce plan de développement et qui est un travail annuel et, évidemment, on ne peut pas s'attendre à chaque année à avoir un plan complètement nouveau. D'ailleurs, ce serait un peu étrange que chaque année la situation change aussi radicalement. Au nom de l'équipe, je voudrais les féliciter du travail qui a été fait cette année. Je pense que le plan de développement d'Hydro-Québec a atteint un niveau de maturité dans ses principales caractéristiques et je pense qu'on peut le comparer avantageusement avec n'importe quel plan de développement des compagnies, soit privées ou d'État au Québec, au Canada ou ailleurs.

Évidemment, c'est rempli de risques. Plus le plan est précis ou se veut précis, plus il faut de la précision dans les prévisions, et là-dessus on voudrait vous rassurer: on n'a nullement l'intention de se prendre pour d'autres, et nous savons tes risques qui sont impliqués dans toute forme de prévision. Nous savons les marges d'erreurs qui peuvent exister dans un plan de développement où toutes les facettes de l'entreprise et passablement d'autres facettes économiques du Québec sont étudiées. C'est dans cet esprit qu'on voudrait vous présenter ces travaux. Je demanderais encore à MM. Neveu et Boivin de présenter les principales caractéristiques du plan qui vont peut-être éclairer les discussions des deux prochains jours.

M. Gilbert Neveu

M. Neveu: La présentation va être assez brève. Néanmoins, vu qu'on couvre la plupart des aspects du plan de développement, cela va prendre quand même un certain temps. Je vais d'abord commencer par les paramètres d'encadrement du plan de développement: d'abord la population, l'hypothèse de croissance de 0,4 % entre 1986 et 2006; pour les ménages, une croissance de 1,3 % d'ici à 2006; pour le PIB, une croissance de 2,7 % d'ici à l'horizon 2006. J'insiste sur l'horizon 2006, parce que, l'année précédente, l'horizon était limité à 2001, mais étant donné que cela nous prend un horizon d'une vingtaine d'années pour planifier le plan d'équipement, alors l'horizon a été allongé cette année de cinq ans.

En ce qui concerne le prix du pétrole, les hypothèses sur lesquelles est basé le plan de développement, c'est une hypothèse de 16 $ en 1987, qui rejoint un prix de 20 $ en 1991 et, ensuite, on a une hypothèse générale de 2 % de plus que l'inflation.

Un mot sur le prix de 16 $ en 1987. Ce prix représente une moyenne pour l'année et il suppose une fluctuation saisonnière. Actuellement, notre prévision est à peu près conforme à la réalité, qui est de 17 $ à 18 $ le baril, mais qui devrait retomber selon nos prévisions à 34 % durant l'été. Les prévisions financières ont été faites avec ce genre de prévision.

Ce qui résulte de cet environnement économique et énergétique, c'est, pour la demande, une croissance moyenne de 2,7 % entre 1986 et 2006. Pour les fins de comparaison, par rapport a l'an dernier où le réseau était limité à 2001, le taux de croissance était, de 1985 à 2001, à 3 %; cette année, cela donne un taux de croissance de 3,2 % sur la même base, donc, une légère croissance par rapport à l'année dernière. Cette fourchette de 2,7 % s'inscrit à l'intérieur d'une fourchette haute de 3,5 % et d'une fourchette basse de 1,5 % par année.

Comme je viens de le dire, la demande cette année a été rehaussée légèrement à l'horizon 1996 et 2001, une hausse de 4,7 térawattheures en 1996 et 4,9 téra-wattheures en 2001 pour ce qui est de l'énergie. En ce qui concerne les besoins prioritaires en puissance, donc la puissance de pointe appelée, cela représente à peu près une hausse de 1500 mégawatts.

Les données que je viens de mentionner à l'instant correspondent au scénario de référence. Donc, cela suppose que les tarifs suivent l'inflation en moyenne, qu'il n'y a pas de tarif spécial dans la biénergie et que la puissance interruptible est maintenue au potentiel actuel de 500 mégawatts. Mais, cette année, le plan d'équipement a été présenté selon un scénario cible qui suppose une intervention sur la demande et, en particulier pour les tarifs, cela suppose un rattrapage graduel des prix de revient comptables, c'est-à-dire qu'on va faire en sorte que les tarifs rejoignent à long terme les coûts de fourniture, ce qui implique, au niveau résidentiel, une hausse un peu plus élevée que la moyenne et, au niveau général, une hausse un peu plus faible que la moyenne. Cela suppose également l'introduction d'un tarif spécial - j'imagine qu'on aura l'occasion d'y revenir - pointe, hors pointe qui serait introduit à l'automne. Cela permettrait de maintenir le parc biénergie et même de l'augmenter.

Actuellement, ce parc se situe autour de 140 000 unités et, selon nos prévisions, nous avons inclus une provision pour 171 000 unités au parc biénergie, compte tenu du tarif incitatif et du programme d'entretien qu'Hydro-Québec entend promouvoir pour inciter les clients à adopter la biénergie. Il en résulterait qu'en pointe, avec ces tarifs incitatifs, la biénergie fonctionnerait à 85 %, c'est-à-dire qu'on pourrait compter à 85 % sur la fiabilité de cette biénergie qui pourrait s'interrompre plus tôt qu'actuellement, où, étant donné qu'il n'y a pas d'incitation pour les clients de le faire, on

compte actuellement sur à peu près 50 %. En ce qui a trait à la puissance interruptible, le potentiel actuel de 500 mégawatts pourrait être étendu à 2000 mégawatts, le potentiel étant surtout dans le secteur des pâtes et papiers.

L'effet de ce scénario cible par rapport au scénario de référence, ce n'est pas de réduire la consommation, comme on le voit en ce qui concerne les térawattheures; l'impact est absolument négligeable. Donc, pour les térawattheures, c'est-à-dire ce qui correspond à l'hydroélectricité, c'est-à-dire là où Hydro-Québec a un avantage concurrentiel comparatif par rapport aux autres pays. Mais, l'impact est surtout en ce qui a trait à la pointe, donc, à la très fine pointe. Cela veut dire des économies d'équipements de pointe du genre des turbines à gaz. Cela représente des économies de l'ordre de 1000 mégawatts à l'horizon 2000, 2006, qui se décomposent à environ 700 mégawatts à cause du maintien de la biénergie, donc le programme incitatif dont j'ai parlé tout à l'heure, et finalement, l'impact de la politique tarifaire, qui pourrait être de 300 à 400 mégawatts selon nos estimations.

Cela termine ce que je voulais dire sur les marchés internes. On a défini la croissance de la demande cible sur les marchés internes. Maintenant, je vais parler du développement des marchés externes, avec un rappel de la stratégie de l'an dernier qui, fondamentalement, n'est pas changée. La première étape concerne, comme l'année dernière, l'écoulement des surplus existants qui devrait se terminer vers 1995. Le deuxième volet de la stratégie est la vente de puissance et d'énergie garanties. Contrairement, à la première étape où on parle alors de vente d'énergie excédentaire pour écouler ces surplus, vente d'énergie excédentaire, c'est-à-dire de vente où ni l'acheteur, ni le vendeur n'ont d'engagement mutuellement. (11 heures)

Dans le cas de la vente de puissance et d'énergie garanties, dont le Maine est un exemple, l'acheteur s'engage à acheter, sinon il a des pénalités et inversement le vendeur s'engage à vendre cette puissance et énergie garanties; donc, c'est un produit de bien meilleure qualité et, dans une deuxième étape de développement dont l'objectif est de vendre 3500 mégawatts d'ici à la fin du siècle, basés sur une formule de prix qui correspond au coût évité de l'acheteur, donc selon le genre de formule du Maine et, finalement, la troisième étape de développement, qui concerne des ventes au-delà des 3500 mégawatts, mais qui comporte également l'installation vraisemblablement d'interconnexions beaucoup plus longues; à ce moment-là, cela nécessitera vraisemblablement une formule de prix vraiment différente qui pourrait être basée sur nos coûts et, naturellement, ce qu'on va vendre à cette troisième étape va dépendre de l'évolution du marché.

L'année dernière, on avait un volet de vente d'énergie garantie; en remplacement de mazout, on avait une provision pour 40 térawattheures, à raison de cinq térawattheures échelonnés sur les années de 1995 à 2000. Cette année, compte tenu de l'évolution des prix du pétrole, cette stratégie est en suspens.

J'ai effleuré le potentiel. Le potentiel dans les réseaux voisins, selon les hypothèses de leur plan de développement, le potentiel de déficit de puissance à l'horizon de 2001 est de 5900 mégawatts; c'est-à-dire qu'Hydro-Québec veut vendre de la puissance d'énergie garantie, c'est essentiellement pour remplacer ou pour éviter à nos réseaux voisins de construire des centrales de base; ce potentiel est donc évalué à 5900, selon ces mêmes réseaux voisins. Ainsi, en Nouvelle-Angleterre, ils estiment à 5200 mégawatts leur déficit de puissance, basé sur une hypothèse de croissance de la demande de 2,3 % d'ici à la fin du siècle. Supposons que la demande ne serait que de 0,5 % de plus que ces 2,3 %, donc de 2,3 % à 2,8 %, à ce moment-là, le potentiel monterait à 7500 mégawatts.

Donc, on peut voir qu'il y a une très grande sensibilité de ce potentiel à l'évolution de la demande dans ces réseaux voisins, et notamment sur le marché de New York, où selon l'hypothèse actuelle des réseaux voisins d'une croissance de 1,4 % par année d'ici à la fin du siècle, si on ajoute 0,5 %, donc de 1,4 % à 1,9 %, cela porterait le potentiel à 2800 mégawatts; le potentiel total passerait donc de 5900 à 13 900 mégawatts, simplement en augmentant de 0,5 % la croissance de la demande.

Seulement pour donner une perspective: vous retrouvez ici le chiffre de 5900 qui correspond à l'hypothèse moyenne et de 13 900 qui correspond à l'hypothèse élevée, mais c'est un potentiel qui va se développer graduellement. Le chiffre que je vais donner est pour 2001, mais étant donné qu'actuellement les réseaux sont en surplus, ce surplus va se résorber graduellement, et les déficits vont apparaître vers le milieu des années quatre-vingt-dix.

Je vais passer au développement des installations, qui correspond au scénario de demandes internes et externes dont on vient de parler. Vous retrouvez ici la croissance de la demande cible sur les marchés internes, donc la croissance de 2,7 % dont j'ai parlé initialement. Au-delà de eette demande interne, Hydro-Québec a déjà des engagements contractuels à l'exportation que vous trouvez sur la ligne bleue ici; ces engagements contractuels, à court terme, correspondent aux exportations du Vermont

ou vers NYPA et, à partir du début des années quatre-vingt-dix, cela correspond essentiellement au contrat de NEPOOL de 7 térawattheures par année d'ici à l'an 2000. C'est l'engagement contractuel; donc, s'il n'y avait pas d'objectif d'exportation au-delà de ces engagements contractuels existants, la demande à satisfaire serait celle-ci. Mais compte tenu de l'objectif de vendre 3500 mégawatts ou de pénétrer le marché d'exportations de 3500 mégawatts de puissance d'énergie ferme, à ce moment-là, la croissance de la demande totale à satisfaire correspond à cette courbe verte ici.

Vous retrouvez ici la même courbe que je viens de représenter, la courbe "demandes internes" plus "demandes externes", et ici, la courbe que l'on aurait si l'on avait que les marchés internes plus les engagements contractuels existants à l'exportation. Et, par ailleurs, vous avez l'offre existante du parc, c'est-à-dire qu'actuellement, on a un parc capable de fournir 170 térawattheures, alors que la demande régulière est de l'ordre de 145; cette demande régulière plus les exportations vont augmenter graduellement et, à un moment donné, cela va finir par croiser l'offre et, dès que la demande et l'offre se croisent, cela veut dire qu'il faut de nouveaux équipements pour satisfaire cette augmentation de la demande. Les premiers équipements dans le programme d'équipements sont la phase II du complexe La Grande, avec la mise en service de LG 1 qui entrera en production en 1995 et 1996, suivie de Brisay et Laforge, ensuite, Sainte-Marguerite qui intervient en 1998, suivie de Grande Baleine en 1999, Ashuapmuchuan qui intervient en 2002, et NBR après l'an 2000.

On peut voir sur ce graphique l'impact des ventes à l'exportation des 3500 mégawatts par rapport à une situation où on n'aurait que les engagements contractuels existants. Dans ce cas, si on n'avait pas l'objectif des 3500 mégawatts d'exportation, on peut voir que les premiers équipements pourraient apparaître en 1999 seulement.

Je viens de vous parler des dates de mise en service, c'est-à-dire le moment où les équipements doivent entrer en production. On retrouve, pour LG 1, 1995 et 1996; alors en faisant un compte à rebours, la construction devrait débuter en 1989, ce qui implique une décision au début de 1989. D'ici là, il s'agit de faire les études, les permis et la préparation de la décision. C'est la même chose pour Brisay; mise en service en 1996, ce qui implique un début de construction et une décision au début de 1991, et les travaux de préparation de ces études et des permis devront débuter dès maintenant. Il en va de même pour Laforge et Sainte-Marguerite, même si les dates de mise en service sont plus éloignées.

Au niveau des équipements de pointe, il y a la phase II de LG 2; la phase I est prévue pour 1992 et la phase II, dans le scénario cible actuel, serait pour ]993. Comme autre équipement de pointe, nous avons les suréquipements de Manic 3, de Manic 2 et de Manic 1, qui devraient entrer en service en 1995. Pour mettre en service ces suréquipements à Manic, il faudrait d'abord une ligne sur la Côte-Nord qui entrerait en service à peu près au même moment, ce qui implique un début de construction vers les années 1991 et la préparation des études et des permis dès maintenant. Par ailleurs, vous avez la sixième ligne à courant alternatif de la Baie James - ce n'est pas la ligne à courant continu dont on parle actuellement - qui devrait entrer en service en 1995, ce qui implique un début de construction en 1991.

Par rapport à l'année dernière, vous trouverez la liste des équipements de pointe, des équipements de base, avec les puissances installées correspondantes, et vous avez ici les dates de mise en service qui étaient prévues dans le plan de l'année dernière, dans le plan 1986-1988, et elles sont comparées avec celles du plan 1987-1989. En ce qui touche les principaux équipements de base, pour LG 1, la première date de mise en service se trouve devancée d'une année, donc de 1996 à 1995. Pour les deux autres aménagements de Laforge et Brisay, qui complètent la deuxième phase du complexe La Grande, les devancements sont de trois ans et un an respectivement. Ensuite, Sainte-Marguerite, c'est devancé d'un an. Pour ce qui de Ashuapmuchuan, le devancement est de six ans parce qu'il y a eu un réarrangement dans l'ordre économique; par exemple, La Romaine s'est trouvée reportée, alors que Ashuapmuchuan s'est trouvée devancée.

Quant aux investissements pour les dix prochaines années correspondant à ces programmes d'équipements, investissements en production, en transport et en distribution, les investissements prévus sont de 36 700 000 000 %' dont 1 900 000 000 % en 1987. Cela, c'est le scénario cible, à 2,7 % sur les marchés internes, et qui comporte un objectif de 3500 mégawatts à l'exportation. On a également, pour fins d'analyse et de sensibilité, présenté un scénario faible, fort et un scénario de référence, donc sans gestion de la demande et sans exportation de 3500 méqawatts. À ce moment-là, les investissements seraient respectivement de 21 000 000 000 $, 43 000 000 000 $ et 30 000 000 000 "$.

Cela termine la présentation. Je vais céder la parole à Claude Boivin, qui parlera des tarifs et de la situation financière.

M. Claude Boivin

M. Boivin: Au niveau des tarifs, un bref rappel de l'an dernier. Nous avions déposé

les paramètres d'une politique tarifaire ainsi que les résultats des études de coûts de fourniture qu'Hydro-Québec a effectuées et mises à jour au cours des dernières années. Un bref rappel de la position de nos prix de vente actuels par rapport à nos coûts de fourniture. Nous avons ici, sur le graphique, les prix moyens auxquels nous vendons présentement notre énergie régulière au Québec. Pour se souvenir: le D signifie notre tarif domestique; le G est l'usage général petite puissance, c'est-à-dire le tarif ou les prix auxquels nous vendons à nos clients commerciaux et industriels pour des puissances jusqu'à 100 kw; le M. tarif d'usage général, encore là, de 100 à 5000 kw pour nos clients commerciaux et industriels; et le tarif L, la grande puissance, au-delà de 5000 kw.

Donc, nous faisons présentement des ventes régulières à un prix moyen de 0,037 $ le kw/h, qui se répartit à 4,2, 5,5, 4,4 et 2,8 pour les différentes catégories. Si on compare maintenant ce prix moyen de vente au prix de revient comptable, le prix de revient comptable signifie - en fait, le prix de revient en tenant compte de toutes nos installations présentement en exploitation, donc, leur valeur aux livres, comprenant également les frais d'exploitation et d'amortissement, et une provision pour un retour sur l'avoir propre de l'ordre de 13 %, c'est-à-dire une marge de profit de l'ordre de 13 %.

À ce moment-là, on s'aperçoit que, chez nos clients résidentiels, présentement, nous vendons à 0,042 $; notre prix de revient comptable est de 0,049 $, c'est-à-dire qu'il y a un écart: le prix de revient comptable est supérieur de 16,7 % à notre prix de vente. Pour les autres catégories, l'usage général, petite et moyenne puissance, en général, c'est l'inverse; nous vendons plus cher que nos prix de revient comptables, par environ un écart de 16 % à 17 %. Pour nos clients grande puissance, nous sommes à peu près en position d'équilibre, avec un écart de 3,6 %. Ce qui nous donne finalement un résultat global d'un prix moyen de 3,7 %, par rapport à un prix de revient comptable de 4 %, pour un écart de 8,1 %.

Une autre façon de voir les résultats globaux entraînés par ces écarts de prix par rapport au coût de revient est de voir dans chaque catégorie, en fait, le rendement découlant de chacune de nos catégories de vente régulière au Québec. Nous voyons ici, dans le haut du graphique, que les clients résidentiels produisent un rendement de 1,9 %, soit au total une somme de 43 000 000 $. Nos clients au tarif G et au tarif M produisent un rendement de près de 30 %, pour des montants respectifs de 158 000 000 $ et 220 000 000 $, alors que les clients au tarif L produisent un rendement de 10,5 %, pour un montant de 90 000 000 $.

Donc, au global, nos ventes régulières au Québec produisent un taux de rendement de notre avoir propre de 11,4 %, pour un montant de 511 000 000 $. Si nous voulions éliminer cet interfinancement et, chez chacune de nos catégories de clients, un rendement uniforme de 11,4 %, à ce moment-là, chez nos clients domestiques, il faudrait aller chercher 263 000 000 $ plutôt que 43 000 000 $, soit un montant additionnel de 220 000 000 $. Par contre, chez nos clients commerciaux et industriels, petite et moyenne puissance, ces clients devraient produire respectivement 61 000 000 $ et 90 000 000 $; donc, il faudrait leur remettre en pratique 97 000 000 $ et 130 000 000 $, alors que pour les clients au tarif L, nous sommes à peu près en équilibre, avec un écart de 7 000 000 $; d'où la proposition tarifaire 1987 parce qu'un des principes de la politique tarifaire était de refléter graduellement et autant que possible les coûts de fourniture dans notre tarification.

Donc, pour 1987, nous proposons une hausse moyenne de 4,6 %. Je vous rappelle que l'indication que nous avions donnée dans le plan de développement l'an dernier, pour l'année 1987, se situait à 4,9 %. Nous proposons une légère différenciation, c'est-à-dire une augmentation légèrement plus rapide chez nos clients domestiques à 4,9 %, tandis que l'augmentation se situe en moyenne à 4,4 %, soit 4,3 %, 4,4 % et 4,5 % chez nos autres catégories de clients.

Voyons maintenant la gestion financière. Un bref rappel de l'évolution de la situation des principaux paramètres financiers de l'entreprise pour la période 1980-1986, quant à la couverture des intérêts. On se souviendra que la couverture des intérêts est l'un des critères financiers dans la Loi sur Hydro-Québec, qui doit être maintenu à 1. À ce moment-là, on voit que, de 1980 jusqu'à aujourd'hui, nous avons maintenu ce critère financier. (11 h 15)

Le deuxième critère financier fixé dans la Loi sur l'Hydro-Québec doit se situer au moins à 25 %. Au cours des années 1980 à 1984, il s'est maintenu effectivement à au-delà de 25 %. En 1985 et en 1986, compte tenu de l'évolution de la conjoncture, nous avons perdu ou échappé ce critère financier; il est descendu à 24,1 % en 1985 et s'est de nouveau détérioré légèrement en 1986, pour passer à 24 %.

Le rendement sur l'avoir propre, qui se maintenait au-delà de 10 % jusqu'en 1983, a chuté de façon draconienne en 1984-1985 pour s'établir à 3,2 %, et un léger redressement à 4,4 % en 1986. Au niveau du bénéfice net, même phénomène. Avec la fin des travaux de la phase I de la Baie James et la capitalisation, la mise en service des

ouvrages, notre bénéfice net a chuté de façon radicale au cours des années 1984, 1985 et 1986. Pour ce qui est du rapport entre le bénéfice net et les ventes, même phénomène que pour le bénéfice net lui-même, donc une baisse â 4,7 % et 6,5 % en 1985 et 1986 respectivement.

Les conséquences de la détérioration de ces critères financiers, c'est qu'aujourd'hui Hydro-Québec se retrouve dans une situation où elle n'a plus de ligne de défense contre des aléas. Si nous devions faire face à des conjonctures difficiles dans l'avenir, il faudrait, à ce moment-là, avoir recours soit à des hausses brutales de tarif ou encore accepter une détérioration chronique et plus marquée encore des principaux ratios financiers au-dessous du niveau minimum que nous avons vu tantôt. D'où la nécessité pour Hydro-Québec de reconstituer cette marge de manoeuvre, essentiellement constituée du rendement sur notre avoir propre.

Nous pensons que, dans les années qui viennent, le risque global de l'entreprise est important, notamment du côté du développement des marchés, par exemple, avec les formules de partage de risques que nous préconisons maintenant pour nos grands clients industriels. À long terme, ces formules devraient s'avérer bénéfiques tant pour Hydro-Québec que pour l'économie de la province, mais, dans des périodes difficiles, lors de récessions économiques, comme la plupart de ces entreprises oeuvrent dans des domaines cycliques, il pourrait y avoir des années où nous aurions une chute importante ou une réduction importante de nos revenus découlant de ces contrats. De même, les prix à l'exportation pour les ventes d'énergie ferme sont basés sur les coûts évités de l'acheteur. Donc, cela implique nécessairement un risque additionnel par rapport au passé.

Nous avons également des stratégies de réduction des coûts dans notre plan de développement, stratégies qui, à long terme, devraient s'avérer très bénéfiques pour l'ensemble des consommateurs québécois, mais qui impliquent pour certaines années des risques potentiels, par exemple, la gestion plus serrée de nos réservoirs, ce qui veut dire qu'à certaines années il pourrait se produire que, lors de cycles d'hydraulicité très faibles, nous devrions avoir recours à de la génération à partir de notre centrale de Tracy qui fonctionne au mazout, donc qui est plus dispendieuse, ou même pour des périodes courtes, à des achats de soutien de la part des réseaux voisins.

Nous avons également une stratégie d'augmenter le pourcentage de notre dette à taux variable. Dans des périodes de baisse d'intérêt, c'est très favorable mais, si nous devions être frappés par des hausses brutales d'intérêt, à ce moment-là pour certaines périodes il y a des risques addi- tionnels par rapport à ce que nous avions dans le passé.

Ce que nous demandons ou ce que nous visons maintenant comme taux de rendement... Une autre façon de le considérer, c'est le rapport entre le bénéfice net et nos revenus de vente. Nous visons en fait, à l'horizon 1993, à rétablir un rapport de 18 %, ce qui n'est pas exorbitant si on compare avec le passé. On voit ici en fait que la moyenne de ce rapport, pour les années 1963 à 1983 se situait à 23,7 %.

La reconstruction de la marge de manoeuvre financière dans les années qui viennent va se faire de deux façons: la première méthode sera nécessairement par les tarifs, comme nous l'avons indiqué, soit des hausses tarifaires qui seront voisines de l'inflation, mais également par une résorption du déséquilibre offre et demande. On voit ici qu'en 1986, la partie en bleu, qui représente nos ventes d'énergie régulière, produisait un taux de rendement de 11,4 %. Par contre, l'énergie excédentaire que nous avons vendue à nos clients québécois, principalement les industriels dans le programme des chaudières, nous vendions à perte par rapport à nos coûts de fourniture, donc un rendement négatif de moins 31 % et nos ventes intéqrées de l'excédentaire à l'exportation et dans d'autres secteurs, avec un rendement négatif de moins 2,3 %.

À l'horizon 1993, particulièrement les ventes d'excédentaire ici au Québec auront disparu, et nous visons en fait un taux de rendement sur nos ventes internes réqulières de 13 %. II y a une partie de la marge de manoeuvre financière qui sera rétablie par le passage de ces ventes à perte dans le secteur de l'excédentaire à des ventes d'énergie régulières qui, elles, sont faites avec une marge de profit, ainsi que sur les marchés de l'exportation où nous visons, pour la vente d'énergie ferme, de puissance et d'énergie fermes, des taux de rendement de l'ordre de 13,4 %. Le rendement global sur l'avoir propre devrait passer de 4,4 % à environ 13 % en 1993.

Pour ce qui est du cadre financier, tout d'abord un bref rappel de l'année 1986. Nous avons ici les prévisions que nous vous avions fournies l'automne dernier dans le plan de développement et les réalisations à la fin de 1986. Nous voyons effectivement que le bénéfice net s'est amélioré par rapport à la prévision que nous avions faite, qui était de 133 000 000 $. Il s'est effectivement situé à 303 000 000 $, soit une amélioration de 170 000 000 $.

D'où vient cet écart? II vient principalement des revenus d'exploitation, soit nos ventes d'électricité. Le ministre soulignait tantôt que les ventes d'électricité régulières se sont accrues plus rapidement que nous l'avions anticipé au Québec, pour une augmentation de 132 000 000 $, malgré

que les revenus des ventes à l'exportation aient chuté de 29 000 000 $ par rapport à nos prévisions, principalement à cause de la chute des prix du pétrole. Nos dépenses d'exploitation ont été de 59 000 000 $ inférieures à ce que nous avions prévu, principalement pour des raisons dans la façon de comptabiliser les fonds de retraite. Concernant les charges d'intérêt, nous avons eu des dépenses supérieures de 43 000 000 $ par rapport à ce que nous avions anticipé et, au chapitre de la perte de change, une réduction de 22 000 000 $.

Voyons maintenant rapidement pour 1987, 1988 et 1989, particulièrement pour l'année 1987. Nous anticipons des revenus de 5 003 000 000 $, dont 641 000 000 $ proviendraient de l'exportation. Au chapitre des dépenses d'exploitation, des dépenses de 2 107 000 000 $, des dépenses d'intérêt de 2 282 000 000 $ et des pertes de change de 277 000 000 $, pour un bénéfice net anticipé de 337 000 000 $. Je vous ferai remarquer qu'il n'y a pas de prévision de versement de dividendes à l'actionnaire en 1987 et 1988, parce que nous n'anticipons pas avoir retrouvé le critère financier minimal du taux de capitalisation à 25 avant l'année 1989.

M. Coulombe: Je voudrais simplement souligner aux membres de la commission que ce cadre financier est différent de celui que vous avez dans le plan, parce que celui du plan était basé sur une moyenne de 4,9 % et ça, c'est basé sur 4,6 %.

M. Boivin: Cela change les chiffres ici: dans le plan, c'était 5 900 000 000 $ pour les revenus, et c'est passé à 5 300 000 000 $.

Les différents paramètres qui sous-tendent ce cadre financier. Les ventes totales réalisées, 7,6 %; nous anticipons un taux de croissance de 5,7 % pour 1987, une augmentation de tarif effective de 4,6 %, comme nous l'avons vu tantôt, alors que les chiffres que vous avez dans le plan de développement étaient basés sur une hypothèse de 4,9 %. Nous voyons que nous anticipons, pour les années 1988 et 1989, des hausses moyennes de 5,2 %. Ces hausses de tarif se comparent à l'augmentation de l'inflation ou de l'indice des prix à la consommation anticipée de 4,4 % en 1987, 4,7 % en 1988 et 5,2 % en 1989. Les hypothèses d'évolution du prix du mazout: 16 $ le baril pour 1987, 17 $ pour 1988 et 18 $ US le baril pour 1989.

Au chapitre des taux d'intérêt, 10,2 % et 9,2 % respectivement pour l'argent canadien et l'intérêt sur l'argent américain; un taux de change de 71,5 % du dollar canadien par rapport au dollar US. Je vous ferai remarquer que, déjà, au moment où on se parle, par rapport à l'hypothèse qui a été envisagée lors de la préparation en décembre, le taux de change du dollar canadien se situe présentement à environ 0,75 $. Si, effectivement, cela devait se maintenir à ce niveau, c'est donc dire que nous aurions déjà une marge de manoeuvre par rapport au cadre financier qui vous est présenté.

L'analyse ou la grille de sensibilité, qui permet d'évaluer la sensibilité des différents paramètres du plan de développement. Nous voyons que, pour une variation de 1 % par rapport à ce que nous avons anticipé au chapitre des ventes d'énergie régulières, il en résulterait une variation de 42 000 000 $ du bénéfice net. Au chapitre des ventes d'électricité excédentaires au Québec, une augmentation de ces ventes de 1 % rapporte 1 000 000 $ additionnels. Pour ce qui est des ventes à l'exportation, une augmentation de 1 % produit un bénéfice net additionnel de 6 000 000 $.

Pour ce qui est des tarifs, une augmentation de tarif de 1 % pour nos ventes régulières au Québec à compter du 1er mai produit en 1987, donc du 1er mai au 31 décembre, des revenus additionnels de 23 000 000 $. Une variation du prix du pétrole de 1 $ US par baril amènerait une fluctuation de 19 000 000 $ dans notre bénéfice net. Une augmentation de nos frais d'exploitation de 1 % par rapport à ce que nous avons anticipé amènerait une réduction du bénéfice net de 12 000 000 $. Une variation de 1 % des taux d'intérêt amènerait une diminution de 24 000 000 $ du bénéfice net.

Pour ce qui est du taux de change, et nous avons vu à la diapositive suivante qu'il y a déjà des variations par rapport à ce que nous avions anticipé, une variation moyenne de 0,01 $ dans le taux de change du dollar canadien par rapport au dollar américain, variation moyenne qui se maintiendrait toute l'année représenterait en fait une augmentation du bénéfice net de 26 000 000 $.

Pour ce qui est des autres devises, parce qu'il y a 10 % de notre dette qui est constituée de devises autres que canadiennes et américaines, une variation de 1 % du taux de change amène une variation de 10 000 000 $. Cela termine un survol très rapide et nécessairement très condensé des grandes orientations du plan de développement.

Période de questions

Le Président (M. Théorêt): Merci. Nous allons maintenant passer à la période de questions d'ordre général et, si je ne m'abuse, nous allons commencer par le côté ministériel. M. le ministre.

Plan de développement

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je veux vous remercier pour votre présentation. Elle a été assez complète et assez détaillée. Vous êtes allés pas mal dans le détail sur les conséquences du plan de développement. Certains peuvent parler d'une continuité du plan de développement; j'en suis. Toutefois, on dénote une certaine évolution par rapport au plan que vous nous présentiez l'an dernier.

M. Coulombe, sans revenir sur tous les détails qui ont été présentés dans le plan de développement, est-ce qu'il serait possible de nous indiquer les changements qui ont été apportés sur certains grands paramètres du plan? Je pense ici à l'évaluation de la demande interne, aux marchés d'exportation, au développement des installations et aux investissements prévus. En général, quels sont les changements et les conséquences?

M. Coulombe: Évidemment, comme vous l'avez indiqué, il y a certainement une continuité. Dans la problématique générale, je pense que les grands encadrements sont restés passablement les mêmes. Toutefois, il y a des changements assez importants. Le premier touche à la demande. Je demanderais peut-être à M. Neveu d'expliquer ce qui s'est passé dans le domaine de la demande. Cela peut paraître curieux à un moment donné de changer un chiffre de même sur une si courte période. Je pense qu'il y a une raison très technique, vous allez comprendre facilement, qui explique un peu le changement dans la demande.

M. Neveu: Comme vous l'avez vu tout à l'heure, la demande a été augmentée d'à peu près quatre à cinq térawattheures à l'horizon 2001. Cette hausse est due essentiellement à deux raisons.

La première, c'est que, dans le secteur résidentiel, on a rehaussé la demande à cause d'une révision de la prévision du nombre de ménages d'ici à la fin du siècle. En fait, on avait une prévision qui était inférieure d'à peu près 138 000 ménages à la prévision du BSQ l'année dernière. On a eu des rencontres avec le Bureau de la statistique. Après discussion, on s'est rallié à la position, d'autant plus que nos estimations pour l'année en cours, pour l'année 1986, passaient un peu en bas de la réalité. Cela nous a donc amenés à rehausser cette prévision et, de cette façon, on était aligné sur la position du BSQ. Donc, cela explique à peu près la moitié de la hausse de cinq térawattheures.

L'autre moitié provient essentiellement du secteur industriel. Dans le secteur industriel, on a fait certaines modifications. Par exemple, on a enlevé une aluminerie dans la prévision de la demande. Par ailleurs, on a augmenté la consommation d'électricité dans le secteur du maqnésium. Naturellement, il y a l'usine de Norsk Hydro qui va entrer en service en ]989. Cela contribue donc à l'augmentation de la demande. On a également, dans le secteur industriel, une révision à la hausse de la pénétration des pâtes thermomécaniques dans les pâtes et papiers, c'est-à-dire que le secteur des pâtes et papiers est en voie de transformation. Il se transforme vers des procédés qui consomment beaucoup plus d'électricité, et on a révisé à la hausse à la suite d'études auprès de nos clients et auprès de consultants, on a révisé le taux de pénétration de ces pâtes thermomécaniques dans le secteur des pâtes et papiers. (11 h 30)

M. Coulombe: Un deuxième changement est intervenu, mais ce n'est pas tellement un changement qu'une beaucoup plus grande précision dans notre notion de plan cible, c'est-à-dire que là on a, je pense, beaucoup mieux intégré les variables et en distinguant un plan de référence et un plan cible. On espère que cela va être l'encadrement des prochains plans des autres années pour toujours bien distinguer l'approche un peu volontariste qu'on peut avoir dans le développement de l'hydroélectricité. Le plan de référence est un peu basé sur le fait qu'on laisse jouer les forces comme elles doivent jouer ou comme elles pourraient jouer et le plan cible est un plan beaucoup plus interventionniste.

On est interventionniste dans le cadre des exportations. On définit un objectif qui est à atteindre, qui n'est pas atteint encore, de 3500 et on se dit: Cette année, on a atteint 25 %, mais il nous en reste quand même 75 % à réaliser: cela, c'est à faire. Les 2000 mégawatts d'interruptibles, tel que M. Boivin vous l'a présenté tantôt, relèvent aussi d'une approche volontariste. Ces 2000 mégawatts d'interruptibles ne sont pas réalisés. Alors en distinguant bien ces deux notions, on voit la différence entre une approche beaucoup plus active et une approche plus réactive.

Dans le cadre financier aussi, une troisième précision plus grande est apportée. Je pense qu'on a amélioré notre concept de marge de manoeuvre. L'année dernière, il y avait une grande ambiguïté. On peut interpréter les marges de manoeuvre. Hydro-Québec veut faire des profits. Cela veut dire quoi au juste? En précisant que la notion de profit doit faire référence à une notion de marge de manoeuvre avec comme postulat de base - cela est très clair dans le plan et ce l'est beaucoup plus cette année que l'an passé - que notre objectif fondamental, c'est d'éviter des chocs tarifaires, on pense que le grand avantage de l'hydroélectricité, c'est une prévision des coûts qui est beaucoup plus facile à faire, facile entre guillemets, que dans le cas du pétrole ou dans le cas du gaz

qui sont soumis à des aléas passablement différents de ceux de l'électricité.

Si on veut profiter de cet avantage comparatif qu'a le Québec, on pense qu'il faut absolument avoir une stratégie qui élimine le plus possible la possibilité de choc tarifaire. Pour éliminer les chocs tarifaires, il est absolument essentiel que l'entreprise ait une marge de manoeuvre et cette marge de manoeuvre, on en a précisé les modalités de reconstitution. Je pense que ce sont les trois éléments clés qui sont, soit modifiés, soit un peu plus raffinés, je pense, que l'an dernier.

M. Ciaccia: Je trouve intéressante, M. Coulombe, et je dois vous en féliciter, votre idée de l'approche volontariste, parce que vous vous mettez en position d'action plutôt qu'en réaction au développement économique du Québec. Au niveau des exportations, est-ce que la lecture que je fais du plan est exacte, si je vous dis que les 3300 mégawatts sont maintenant considérés comme partie intégrante de votre planification corporative?

M. Coulombe: Oui, cela fait partie intégrante de notre plan cible, c'est-à-dire ce que j'appelle l'approche plus volontariste. Nous sommes relativement optimistes pour pouvoir dire que d'ici à deux ou trois ans, cela devrait être dans le sac. Maintenant, vous l'avez vu aussi, dans le cadre du plan d'équipement, c'est-à-dire du plan des installations, ces 3500 mégawatts sont aussi intégrés dans le cadre des devancements d'équipement.

J'insiste aussi sur l'autre dimension qui est la souplesse qu'on veut garder dans ce plan de développement, qui est une autre caractéristique de base. On est prêts à faire face aux éventualités, c'est-à-dire que les devancements n'auront pas lieu si les marchés externes, pour une raison qu'on ignore à l'heure actuelle, ne se concrétisaient pas en termes de contrat. On a la souplesse nécessaire dans le plan des installations pour faire face à cette donnée. Vous avez raison de dire que c'est carrément intégré dans notre planification corporative à l'heure actuelle.

Augmentation des tarifs

M. Ciaccia: Nous aurons l'occasion de revenir plus tard dans nos travaux sur les demandes tarifaires. Pour le moment, j'aimerais vous demander quelques précisions sur une question purement technique. Au plan de développement, vous faites référence à une hausse tarifaire moyenne de 4,9 % et d'autre part, vous nous présentez votre demande tarifaire moyenne de 4,6 %. Vous l'avez soulevée tout à l'heure dans la présentation des tableaux. Évidemment, nous ne pouvons que nous réjouir de cette modification pour les contribuables, pour le consommateur. Est-ce que vous pourriez nous indiquer les éléments qui vous ont amenés à faire cette révision à la baisse? Quels pourraient être les impacts de votre décision sur le cadre financier de l'entreprise?

M. Coulombe: Quant au cadre financier, vous avez vu tantôt que sur les revenus de l'année 1987, cela a très peu d'impact. On parle d'à peu près 6 000 000 $ ou 7 000 000 $ pour l'année 1987. Évidemment, si vous projetez cela sur l'horizon du plan, en 1989, vous vous apercevrez que ce 0,3 % donne à peu près 30 000 000 $ de moins de revenus. Ce qui absorbe ces 30 000 000 $, ce sont carrément les dividendes moins élevés que vous avez vus tantôt. Les dividendes seront moins élevés de 30 000 000 $, toutes les autres variables étant équivalentes en termes de comportement. C'est un impact financier, en 1987, de 6 000 000 $ ou environ 7 000 000 $. Cela, reporté sur trois ans, représente 30 000 000 $ de moins en 1989. Ces 30 000 000 $ ne sont pas absorbés par le consommateur, mais par le gouvernement qui aura 30 000 000 $ de moins en dividendes.

Pourquoi cela a-t-il été changé? II y a deux raisons: la première, c'est qu'il y a une question d'échéancier. Lorsque le plan de développement est présenté au conseil d'administration, on essaie de régler le plan au conseil d'administration aux mois de novembre, décembre et janvier. Lors de ces trois réunions du conseil d'administration, on regarde le plan en profondeur. On voulait terminer ce plan vers la fin de janvier. Pour donner une signification à l'ensemble du plan, il fallait se fixer sur un tarif; sans cela, il n'y a pas moyen de faire les cadres financiers. On avait mis 4,9 % qui représentait à peu près, je pense, l'équivalent de ce qu'il y avait dans le plan de l'an passé. On a pris le montant prévu pour l'an passé et on a fait nos cadres financiers là-dessus.

Depuis ce temps est intervenue une remontée du dollar canadien qui nous a rendus un peu plus optimistes face à l'évolution financière de l'année quoique, depuis les cinq dernières années, on se soit toujours trompé sur l'évolution du dollar. Il a toujours été plus bas que ce qu'on a prévu. On s'est dit que, peut-être cette année, la loi de la statistique jouera pour nous autres et que ce sera le contraire. Il y a eu un peu plus d'optimisme sur l'évolution de cette variable financière.

Il y a une troisième raison - je vais être très franc avec vous - c'est que nous tenons, comme entreprise, au concept de la différenciation des tarifs. J'ai écouté le critique de l'Opposition et vous-mêmes, vous avez des questions. Je sais que ce n'est pas

la notion la plus populaire, mais nous y tenons et nous en faisons une recommandation très ferme. Pour vous donner clairement cette troisième raison, on pensait avoir plus de chances de passer cela entre 4,6 % et 4,9 % qu'entre 4,9 % et 5,2 %, pour être très franc avec vous. Ce sont les trois raisons pour lesquelles il y s eu une modification de ces tarifs.

Politique de la sous-traitance

M. Ciaccia: Je sais que Pan dernier vous avez tenté de faire cette différence et vous essayez encore de le faire. Nous allons y revenir quand nous discuterons des tarifs. Pour le moment, on va discuter seulement des questions d'ordre général. On aura des questions à vous poser sur cette approche et sur votre philosophie quant aux petits consommateurs.

Je voudrais toucher en général un autre sujet. Nous avons tous pu constater, ce matin, qu'il existe un mécontentement - je pourrais utiliser ce mot - relativement à la sous-traitance à Hydro-Québec. Des gens sont venus nous le signaler assez clairement.

Je comprends que des recours ont été exercés devant les tribunaux et qu'une certaine prudence est de rigueur. Seulement, j'ai devant moi une copie d'une procédure où le ministre de l'Énergie, moi-même, est mis en cause. Tout en étant bien conscient de cette situation devant les tribunaux, vous serait-il possible de faire un exposé factuel sur ce dossier? Pourriez-vous expliquer brièvement votre politique de sous-traitance?

M. Coulombe: Je vais être le plus clair possible et je vais demander au secrétaire général, vu que nous avons une action, nous aussi, dans ce domaine, de me surveiller étroitement et, si je m'écarte trop des principes juridiques, il m'arrêtera. Tout le monde sait que le fond du problème à Hydro-Québec existe depuis 40 ans et surtout depuis les 20 dernières années. Il y a toujours eu une tension entre ce qu'on fait faire à l'externe et ce qu'on fait à l'interne; c'est un problème de base à Hydro-Québec qui a toujours existé et qui a été résolu par d'autres services publics de façon différente aussi. Par exemple, Hydro-Ontario a beaucoup plus d'ingénieurs nucléaires à cause de sa filière énergétique et donne moins de choses à l'externe qu'Hydro-Québec.

L'une des philosophies de base d'Hydro-Québec a toujours été d'en donner le plus possible à l'externe, compte tenu des exigences de qualité de service qu'on doit avoir. Cela a donné historiquement, vous le savez, la constitution au Québec probablement des plus grandes firmes d'ingénieurs du Canada et, en très grande partie, c'est à cause de la politique d'Hydro-Québec, qui était de donner ces choses à l'externe. Je vous prie de croire que ce n'est pas très populaire comme politique chez nos 1100 ingénieurs à Hydro, avec lesquels on a actuellement des difficultés de négociations; c'est une tension qui a toujours existé. Dans le cas de la construction et de l'entretien, cela a toujours été la même chose aussi, il y a toujours eu des tensions entre les travaux faits à l'interne et ceux faits à l'externe.

La politique d'Hydro-Québec dans le conflit actuel - je l'ai dit aux entrepreneurs qu'on a rencontrés cinq ou six fois, notamment jeudi dernier lorsqu'on a présenté toute notre position en détail - la position fondamentale d'Hydro-Québec n'a pas changé, c'est-à-dire que pour tous les travaux de construction dans les centrales, dans les postes, dans la répartition et sur les lignes et, pour la plus grande partie, dans le domaine de la distribution, les éléments de construction sont donnés à l'externe. Cette philosophie n'a pas changé. Hydro-Québec se réserve les problèmes d'entretien. On peut remettre en cause cette philosophie, mais on pense qu'elle a fait ses preuves, car on est persuadé que, dans l'entretien, cela demande des caractéristiques assez spéciales de disponibilité, de matériel, de crises qui arrivent, de raccordements soudains à faire pour des clients et ainsi de suite.

Le type de travaux faits à HydroQuébec exige, a exigé dans le passé et va continuer d'exiger que les travaux d'entretien et une petite partie des travaux - parce qu'il y a toujours une zone délicate entre l'entretien et la construction - dans le domaine de la distribution soient faits à l'interne. On n'a pas changé cela. Ce qui a bouleversé la situation et ce qu'on a de la difficulté à faire comprendre aux entrepreneurs, et je suppose a fortiori aussi aux syndicats de ces entrepreneurs, c'est que l'ensemble du gâteau que tout le monde se partageait a rapetissé. Les proportions sont restées presque les mêmes; chaque morceau de gâteau est resté à peu près le même, mais comme le gâteau a rapetissé, le problème est devenu encore plus considérable. Il est évident que, dans les années de la Baie James, les entrepreneurs ne se plaignaient pas de la construction. Quand on a construit cinq lignes à la Baie James, pour 3 000 000 000 $, 4 000 000 000 $ ou 5 000 000 000 $, les entrepreneurs ne se plaignaient pas. Mais - vous l'avez vu dans le plan de développement - en ce qui concerne l'ensemble des immobilisations, la tarte s'est rétrécie; donc, chaque morceau a eu plus de valeur; on s'arrachait chaque morceau de gâteau et on se l'arrache encore.

Il y a des représentants des syndicats d'Hydro-Québec dans la salle et ils savent fort bien toutes les discussions épiques qu'on a eues sur ia nécessité de conserver un équilibre entre les travaux externes et les

travaux internes. Je sais qu'ils ne sont pas tout à fait d'accord avec notre position là-dessus, ils en voudraient plus pour l'interne, et je sais que les entrepreneurs et leurs syndicats en voudraient plus pour l'externe. On vit dans cette tension de façon continuelle, à partir de la philosophie très claire que j'ai exprimée, c'est-à-dire que les travaux de construction sont réservés à l'externe et les travaux d'entretien à l'interne. Tout en admettant qu'il y a une zone grise qui n'est pas facile à définir, à savoir ce qui en est de l'entretien. Un gros entretien devient-il une petite construction ou ainsi de suite? Il y a là une zone qui n'est pas facile.

De façon plus explicite encore, ce qui est arrivé aussi, c'est que, en 1982 et 1983, lorsqu'on a décidé, avec l'approbation du gouvernement, de diminuer très considérablement les immobilisations parce qu'on n'avait pas le choix - je pense que tout le phénomème a été bien expliqué dans le discours du critique de l'Opposition - on s'est dit quand même qu'il s'était établi un retard quant à la distribution dans l'entreprise à cause de la priorité donnée à la construction. Il s'était établi un retard dans l'ensemble de notre réseau de distribution. Il y avait des raccordements, des câbles qui dataient de 40 ou 50 ans, des poteaux pourris, etc. On a voulu profiter de la baisse dans la construction pour donner un coup dans la distribution. D'abord, cela aura comme effet de faire travailler davantage les entrepreneurs, de créer plus d'emplois, et cela modernisera notre réseau. Comme on construit moins, on va investir plus d'argent là-dedans. D'où le programme que vous connaissez, le programme PAQS, c'est-à-dire le programme d'amélioration de la qualité du service. On y a injecté 1 000 000 000 $, dont à peu près 300 000 000 $ dans la distribution. Les chiffres ne sont peut-être pas exacts, mais c'est de cet ordre de grandeur. (11 h 45)

On s'est dit: C'est un programme spécial qui va durer trois ou quatre ans. On a dit à nos syndicats internes: Écoutez, c'est pour trois ou quatre ans, on n'est pas pour engager des gens permanents qui vont rester à Hydro-Québec pendant trente ans. On a négocié avec eux la possibilité de donner aux entrepreneurs ce surcroît de travail apporté par une augmentation de 300 000 000 $ de travaux. Cela a été accepté, et l'augmentation des travaux - c'est un peu ironique dans tout le dossier, à l'heure actuelle - a été donnée aux entrepreneurs. On les a avertis - c'est peut-être un point de litige qui existe entre eux et nous - par les voies normales de communication que c'était un programme temporaire, qu'il y aurait beaucoup plus de travail qu'avant, qu'il fallait être assez prudents dans les investissements à faire pour des camions, etc. On leur a exposé le dossier tel qu'on le percevait à ce moment-là.

Cela impliquait qu'il y aurait moins d'activités lorsque le programme serait fini. Quand on a repris Je retard et qu'on a injecté 300 000 000 $, on n'est pas pour injecter 300 000 000 $ tous les trois ans sans justification. Le programme va s'arrêter à la fin de 1987 ou 1988, et on reviendra à la normale. Comme la qualité de notre réseau a augmenté, cela veut dire qu'il y aura moins de travail pour l'ensemble des gens, puisqu'on aura rattrapé les retards. Je vous donnerai juste deux chiffres. On nous dit: Vous avez fait cela sur le dos des entrepreneurs et des syndicats des entrepreneurs. Nous répondons que la majeure partie des travaux supplémentaires faits dans les dernières années ont été faits par les entrepreneurs, donc par les employés des entrepreneurs.

Je vais vous donner deux chiffres. En 1981, nous avions 2405 monteurs internes et monteurs externes; par externes, j'entends les monteurs d'entrepreneurs qui, entre parenthèses, font partie de la même centrale syndicale. Ce chiffre de 2400 est monté à 2700 pendant deux ans, et cette augmentation, ce sont les entrepreneurs qui en ont bénéficié. Mais on va redescendre à 2278 lorsque le travail sera terminé, alors qu'il y en avait 2405 dix ans avant.

Je pense que c'est tout a fait logique. Après avoir donné un coup pour remodeler notre système de distribution, c'est terminé, on passe à de l'entretien beaucoup plus régulier. C'est ce qui implique qu'il y aura moins de monteurs d'entrepreneurs que dans le gros des travaux, moins aussi qu'au cours des années normales, entre 1976 et 1985. Ceci a été négocié avec le syndicat, on n'a nullement l'intention de changer d'idée là-dessus. La convention se termine à la fin de 1988, on va la respecter. Que se passera-t-il en 1989, 1990, 1991? Je ne le sais pas. Nos objectifs de négociations pour la prochaine ronde ne sont pas arrêtés. On a l'année 1987 et une partie de l'année 1988 pour y penser. Je suis persuadé que le problème de sous-traitance continuera d'être un problème. Je suis persuadé que nos syndicats demanderont d'arrêter la sous-traitance, et je suis persuadé que les entrepreneurs diront: Cela n'a pas de bon sens d'arrêter, et on va recommencer le cycle des ajustements nécessaires, à partir, on l'espère, de la philosophie de base que je vous ai expliquée: les grands travaux de construction devraient rester à l'externe, et les travaux d'entretien devraient rester à l'interne. C'est un peu le résumé de la situation.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va, M. le ministre? M. le député de Roberval.

M. Gauthier: Merci, M. le Président. M. Coulombe, une société comme Hydro-Québec, lorsqu'elle se prépare à produire un plan de développement aussi substantiel que celui que vous nous proposez, doit forcément s'appuyer, puisque c'est une société d'État, sur des orientations gouvernementales. C'est propre à notre système et à la manière dont la loi constitutive d'Hydro-Québec est faite. Qu'on se réfère à l'article 22: "La société prévoit notamment les besoins du Québec en énergie et les moyens de les satisfaire dans le cadre des politiques énergétiques" que le gouvernement peut se donner. J'aimerais savoir, M. Coulombe, lorsque vous avez bâti ce plan de développement, sur quelle politique énergétique du gouvernement vous vous êtes basés. Est-ce que vous avez en main cette politique? Est-ce que vous pouvez nous donner des éclaircissements là-dessus?

M. Coulombe: Le cadre de référence sur lequel on se base en relation avec le gouvernement, je pense que c'est un cadre de référence qui, au moment où l'on se parle, est implicite. Il y a eu un changement de gouvernement. Le nouveau gouvernement avait des objectifs précis dans le domaine de l'exportation et avait aussi l'exigence, qui nous a été maintes fois répétée, d'être une entreprise rentable et efficace. Dans toutes les discussions de planification avec le gouvernement, et plus particulièrement avec le ministère de l'Énergie et des Ressources, qui est le ministère responsable d'Hydro-Québec, qui est en fait le responsable gouvernemental d'Hydro-Québec, nous avons une multitude de contacts, de réunions, de rencontres. Les données de base d'Hydro-Québec, c'est-à-dire les plans qui existaient, qui ont été faits au fil des années, ont été expliqués, triturés, questionnés. Il y avait un encadrement global, qui était la volonté très explicite d'exporter, et il y avait aussi la volonté d'avoir une entreprise saine, rentable et efficace. Cela a demandé énormément de contacts avec le ministère, avec le ministre et ses collègues que l'on a rencontrés dans le cadre du Comité de développement économique et ainsi de suite. Ce sont des ajustements dans ce sens.

Si vous me demandez s'il y a un texte de la page 1 à la page 32, je vous réponds non, moi, je ne le connais pas. Je pense que les orientations, l'encadrement implicite, sont explicités de façon très claire dans la multitude de rencontres dont je vous parle. Dans ces rencontres, nous étions très clairs dans nos objectifs, très clairs dans nos raisonnements, etc. Lorsqu'ils n'étaient pas d'accord, ils nous le disaient et on a eu des échanges très nombreux là-dessus et c'est comme cela que cela s'est fait.

Quand je parle de l'objectif fondamental de l'exportation, ce n'était pas un objectif qui, pour Hydro-Québec, était étranger. Puisque la première phase des exportations était déjà à toutes fins utiles réglée et que la phase d'exportation de puissance et d'énergie est en marche à l'heure actuelle. C'est comme cela que je résumerais, c'est tout à fait simple. C'est très complexe quand on commence à travailler ensemble avec une nouvelle équipe, c'est normal, mais c'est très simple dans le quotidien, puisque ce sont des multitudes de réunions où chaque point est interrogé, discuté. Il y a eu des fois où cela a été tendu et d'autres fois où cela l'a été moins. On s'entend sur un ensemble de concepts.

Effets du plan de redressement

M. Gauthier: D'accord, je vous remercie. Ce sont évidemment des questions d'ordre très général à ce stade-ci. À la page 3 du plan de développement, on dit au début de la deuxième colonne que, depuis le début des années quatre-vingt, le profond déséquilibre apparu entre l'offre et la demande d'électricité, exacerbé par la récession, la pire depuis 50 ans, a détérioré significativement la situation financière de l'entreprise. Un peu plus loin dans le paragraphe, on dit qu'Hydro-Québec a agi avec célérité, c'est-à-dire rapidement, énergiquement sur ses engagements financiers, sur ses dépenses et sur ses revenus tout en minimisant les effets de cette adaptation sur sa clientèle, son personnel, son actionnaire et l'économie du Québec.

L'année dernière, vous nous avez présenté un plan de redressement énergique au point de vue de la gestion de l'entreprise et on a dû forcer le plus possible les exportations. Il y a un autre aspect, celui de la clientèle. J'aimerais savoir, M. Coulombe, dans un premier temps, en termes clairs, si ce bout de paragraphe veut dire qu'à partir du moment où on a fait des mises en service importantes d'équipement à la Baie James, cela a placé, à cause du contexte défavorable, disons-le, Hydro-Québec dans une situation financière difficile qui l'a obligée à faire absorber ce problème de - je n'emploierai pas le mot "suréquipement" -mais celui d'une quantité d'équipement trop grande par des hausses de tarif aux contribuables. C'est bien ce que cette expression veut dire?

M. Coulombe: Non, c'est à peu près exactement le contraire.

M. Gauthier: Bon, allez-y!

M. Coulombe: Lorsqu'en 1982, on s'est rendu compte de la situation, les gestes assez brutaux qui ont été posés à ce moment-là ont été de plusieurs ordres. Le premier était de dire à l'ensemble - on

revient au problème de tantôt, les entrepreneurs, etc. - des entreprises privées du Québec - je vous ai parlé de grands gâteaux tantôt - qui contemplaient le gâteau qui s'en venait: Le gâteau ne sera plus de 55 000 000 000 $, mais de 18 000 000 000 $. C'est un geste qui a été absorbé par une multitude d'entreprises qui ont dû rajuster leurs prévisions. Mais Hydro-Québec s'est rajustée aussi. Des mesures internes ont été prises où le personnel syndiqué et les cadres ont eu à subir des transformations extrêmement considérables qui étaient l'équivalent de ce qui s'est passé dans n'importe quelle entreprise privée et, dans certains cas, même plus directement compte tenu du contexte historique d'Hydro-Québec. Lorsque 2000 personnes sont parties, lorsqu'il y a eu une décroissance dans l'augmentation salariale de façon très considérable, lorsque 2000 personnes ont changé de fonctions à l'intérieur d'Hydro-Québec, lorsqu'on a dit à des ingénieurs qui étaient là depuis 25 ans qu'il n'y avait plus de travail et qu'ils devaient se recycler pour faire d'autres choses, ce furent des traumatismes internes considérables vécus par l'ensemble du personnel et par l'entreprise.

Par contre, le consommateur a eu, à ce moment-là, des augmentations de tarifs inférieures à l'inflation. Cela était dû à l'ensemble des mesures d'économie qu'on avait prises de façon interne et aussi à une détérioration volontaire de certains des critères financiers, une détérioration volontaire de la part de l'entreprise qui s'est dit: Le gaz s'en vient, la situation économique n'est pas favorable au Québec de façon générale parce qu'on est en récession assez intense. On était persuadés que tôt ou tard ces critères allaient se relever tout simplement parce que si on ne construisait plus, les surplus se résorbant, vous l'avez expliqué tantôt, la marge de manoeuvre se reconstituerait. Donc, on s'est dit: ce n'est pas le temps de le faire payer aux consommateurs. C'est exactement ce qu'on a fait; les augmentations de tarifs ont été parmi les plus basses depuis les années 1972-1973. C'est donc ce qui s'est passé dans cette période-là et c'est ce qui est expliqué. Vous avez le tableau à la page 6 qui vous montre exactement les deux grands équilibres, l'ancien et le nouveau, avec des chiffres précis qui représentent toutes les conséquences de cette phase-là.

Actuellement, nous pensons - évidemment, après avoir dit cela, il peut y avoir une crise économique, il peut se passer beaucoup de choses - que cette phase-là se termine a l'heure actuelle, en 1986 et 1987. À mon avis, toutes ces mesures vont porter leurs fruits, la marge de manoeuvre va se reconstituer, l'activité va reprendre et on aura passé à travers une crise majeure sans affecter les consommateurs d'électricité.

Diversification des activités

M. Gauthier: D'accord. Une autre question: Dans les orientations fondamentales, à la page 4 du plan de développement, sous-titrées Orientation à long terme, Orientation fondamentale, je me permets de lire les trois ou quatre lignes qui sont écrites: "Fournir l'électricité au Québec aux meilleures conditions, optimiser l'avantage comparatif que constitue l'hydroélectricité pour le Québec et diversifier ses activités dans des domaines connexes ou reliés à l'énergie." M. Coulombe, pourriez-vous me dire si des actions ont été entreprises par Hydro-Québec pour atteindre cette orientation fondamentale, cet objectif de diversifier ses activités dans les domaines connexes ou reliés à l'énergie?

M. Coulombe: Oui. C'est cela. Évidemment, c'est la première partie qui accapare la quasi-totalité des énerqies humaines à Hydro-Québec, c'est-à-dire fournir l'électricité aux meilleures conditions et optimiser l'avantage comparatif que constitue l'hydroélectricité pour le Québec. C'est la tension fondamentale de l'entreprise. On est persuadés qu'à long terme - c'est bien indiqué "Orientation à long terme" -lorsque les marchés internes auront un certain degré de saturation, lorsque les marchés de la grande entreprise des exportations auront aussi atteint un degré de saturation - on ne peut pas indéfiniment mettre au service des Américains jusqu'en l'an 2100 toutes nos centrales, il faudra les récupérer pour la demande interne - lorsque ce processus sera bien engagé, nous pensons qu'Hydro-Québec peut avoir un rôle extrêmement valable à moyen et à long terme pour diversifier une partie de ses activités dans des activités reliées au domaine énergétique. (12 heures)

Lorsqu'on parle de diversification, c'est un processus à long terme. C'est se servir du "know-how" qui existe à Hydro-Québec, de la capacité financière, de la capacité humaine et des développements technologiques. On est quand même - peut-être pas lorsqu'on parle des barrages, mais dans tous les autres domaines - dans une industrie qui est très sophistiquée au point de vue de l'électricité. Donc, il y a moyen de faire servir cela à l'économie du Québec, soit pour développer de nouveaux produits - c'est une orientation qu'on donne à l'IREQ à l'heure actuelle; j'espère qu'on aura l'occasion dans les deux prochains jours de revenir là-dessus; on transforme un peu les règles pour développer des choses technologiques; on pense que c'est un rôle qui peut être extrêmement important - soit pour susciter, si possible, à long terme, de l'entrepreneurship qui va permettre à ces produits de se développer.

Il y a aussi une autre forme de diversification, qu'on ne devrait pas appeler

diversification, mais c'est un élément nouveau. C'est ce qu'on pourrait appeler nos investissements à l'extérieur dans le domaine de l'électricité. Par exemple, le contrat de Central Maine suppose un "joint venture" avec des Américains pour développer une ligne de transport d'électricité. On pense que c'est un développement intéressant pour Hydro-Québec. D'abord, cela nous rend citoyens corporatifs américains et cela élimine un peu l'angoisse que certains groupes de pression américains ont d'être à la merci de X, Y, Z. Deuxièmement, je pense que si c'est un succès, cela va permettre aussi - il ne faut pas le dire trop fort - à capacité égale, à compétence égale et à coûts égaux, à des entreprises du Québec d'élargir leur marché à l'extérieur.

C'est un peu l'idée de base en ce qui concerne la diversification. On pense que c'est un projet de base qui n'est pas prioritaire au moment où l'on se parle, car il y a d'autres chats à fouetter, mais c'est la tension qu'il faut mettre dans l'entreprise pour essayer de voir, à un moment donné, surtout au développement technologique de produits. Le ministre, ou c'est vous qui, je pense, avez posé la question: Qu'est-ce que fait Hydro-Québec au point de vue industriel au Québec? La réponse, c'est que parmi beaucoup d'industries, l'industrie électrique au Québec s'est développée en très grande partie, évidemment, à cause d'Hydro-Québec, et on fabrique actuellement - c'est la seule place au Canada - des turbines et ainsi de suite.

Je pense qu'on pourrait aller plus loin. Je pense qu'on pourra développer des produits technologiques plus sophistiqués, soit dans nos laboratoires de l'IREQ, soit lors d'ententes avec des compagnies... On a un exemple de choses qu'on a faites avec la compagnie française Air Liquide, Claude Boivin pourra en parler; sur le développement de la filière de l'hydrogène, on a fait des investissements et cela va profiter en termes d'emplois et de nouvelles technologies au Québec. C'est une activité qui sera lente à partir. Cela demande des qualités et cela demande des fonctions d'entrepreneurship qui ne sont pas toujours présentes à Hydro-Québec. Cela va demander un changement de culture. C'est un projet à long terme et on pense que du point de vue technologique, cela peut Être extrêmement important pour le Québec.

M. Gauthier: Parmi les efforts qui sont faits par Hydro-Québec, même si je comprends bien votre explication, à savoir que c'est une orientation à plus long terme et que ce n'est pas là vraiment pour l'instant votre grande priorité, j'aimerais avoir un renseignement particulier. Étant donné qu'Hydro-Québec - c'est ce qui amène ma question - investit dans une ligne de transport d'énergie dans une nouvelle société aux États-Unis, avec ses partenaires américains - je sais qu'Hydro-Québec n'a pas fermé complètement cette porte-là, et votre explication est excellente - est-ce qu'elle a fait une offre ou s'est intéressée à Cégelec au moment où le gouvernement s'est défait de ses parts dans cette entreprise?

M. Coulombe: Non, absolument pas. Je dois vous avouer clairement que cela n'a jamais été discuté à Hydro-Québec pour une raison très simple: Cégelec fait quand même des produits très bien connus à Hydro-Québec, homologués. C'est une filiale d'une compagnie française extrêmement puissante et très équipée en ce qui concerne la technologie. Je ne pense pas que cela aurait été le rôle d'Hydro-Québec de s'impliquer dans cela, puisqu'il s'agit de produits relativement connus. Les procédés de fabrication sont connus aussi, sont contrôlés. Je ne pense pas qu'Hydro-Québec aurait apporté quoi que ce soit à une firme comme Alsthom ou Cégelec au Québec en y mettant des fonds ou en s'impliquant. Je vous donne un avis personnel. Cela n'a jamais été discuté à Hydro-Québec. Pour ma part, je ne verrais pas l'utilité de s'impliquer dans des entreprises qui sont "matures" elles-mêmes, qui ont leurs technologies et leurs recherches. Ce qui n'empêche pas - et c'est exactement ce qui est arrivé avec Cégelec -d'avoir des accords de fabrication avec elles.

Actuellement, avec Cégelec, peu importe qui possède Cégelec, on a un accord actuellement entre l'IREQ et Cégelec pour une recherche précise sur des types de disjoncteurs spécifiques. Donc, cela n'empêche pas ce genre d'entente, mais je ne verrais pas l'utilité pour Hydro-Québec en tant que telle d'investir là-dedans. Maintenant, c'est un débat qui n'a jamais été discuté à Hydro-Québec.

Prévisions de la demande

M. Gauthier: D'accord. Une dernière question d'ordre général. Dans mon texte, au début de la commission, j'ai fait allusion à la grande différence qui existait entre les prévisions de l'an dernier et la réalité des choses concernant la demande d'électricité. J'aimerais savoir comment on peut expliquer cela. Je comprends que dans le domaine des prévisions, c'est difficile. Il y a différentes techniques qui sont utilisées pour faire des prévisions, mais il m'apparaît pour le moins que l'écart est fort important. J'aimerais que vous nous parliez quelque peu de la technique utilisée et de l'explication de cet écart.

M. Coulombe: Vous faites référence à la demande d'électricité prévue pour 1986 et la réalité 1986. Bon. Je vais donner un

premier type d'explication et je demanderai à Claude Boivin de la compléter. Vous vous rappelez que l'an passé, on a été très explicite sur un point. C'est dans le Journal des débats. On a dit qu'on s'était pris une réserve d'un écart type de température. Vous vous souviendrez, on a dit: On n'a pas pris la température moyenne, on a pris un écart type en bas de la moyenne de température, ce qui donnait environ 50 000 000 $. On vous a dit qu'on avait une marge de 50 000 000 $ là-dedans. Pourquoi? Je pense que, dans des grands ensembles comme ceux-là, surtout devant notre impossibilité de contrôler le dollar canadien, les taux d'intérêt et le prix du pétrole, on n'a aucune espèce de pouvoir sur ces trois aspects, il faut se garder ce genre de réserve au cas où il arriverait un coup dur, toujours au nom de la même philosophie, pour éviter qu'à un moment donné, on calcule tellement serré qu'il faut augmenter les tarifs un peu plus parce que cela n'arrive pas. On veut éviter cela à tout prix.

Donc, on avait carrément une marge de 50 000 000 $ et on vous l'a dit l'an passé. On a 150 000 000 $ de plus de ventes. Cela vous l'explique. Pour les premiers 50 000 000 $, on l'avait dit clairement: c'est une marge de manoeuvre qu'on se donne. La température a été non seulement moyenne, elle a été plus élevée. En plus, l'activité économique a été plus forte. C'est ce qui explique les autres 100 000 000 $. Maintenant, Claude Boivin peut peut-être...

M. Boivin: M. Neveu a tous les détails. On les a reconstitués en entier.

M. Neveu: Tout à l'heure, vous avez fait allusion à une hausse de 4 % des ventes en 1986. M. Coulombe vient de le dire, la provision de température explique entre 1 % et 1,5 % de cet écart.

L'autre élément, c'est que l'Aluminerie de Bécancour a été mise en service plus rapidement. Enfin, cela a bien été pour les rodages. Sa consommation a été plus élevée que ce qui avait été anticipé. Vous savez que lorsqu'on joue avec de très gros blocs d'énergie comme cela, il suffit que cela démarre deux mois plus tôt et cela fait beaucoup d'énergie vendue en plus. Cela explique à peu près également 0,5 % de l'écart.

Puis, il y a l'activité économique et les mises en chantier. Comme vous le savez, les mises en chantier ont été très élevées. En 1985 et 1986, les mises en chantier ont été de 48 000 et 58 000 respectivement alors que les prévisions étaient de 40 000 et 32 000, ce qui est un niveau moyen d'activité. Cela explique un peu plus qu'un autre 0,5 %. Finalement, pour le reste, l'activité économique a été plus élevée.

Donc, tous ces éléments s'expliquent bien. Il faut être bien conscient que les prévisions à court terme, comme le disait M. Coulombe, peuvent varier énormément selon la température. On parlait d'un écart de 1,5 % à la baisse s'il avait fait plus chaud. S'il avait fait plus froid, cela aurait été un autre 1,5 % de plus. Donc, au total, cela fait 3 % qui auraient pu varier seulement à cause de la température. Quand on met en service des gros blocs d'énergie, on joue facilement avec des 0,5 % et 1 %. Donc, ce sont essentiellement des éléments conjoncturels.

M. Coulombe: Je vais vous donner un exemple précis. Je viens juste de recevoir les résultats de janvier. Au domestique, même s'il a fait très froid pendant les quinze derniers jours, comme vous le savez, on a oublié qu'il n'a pas fait froid pendant les quinze premiers jours. On remarque que dans nos statistiques de janvier, il y a une baisse au domestique de 5 % de consommation d'électricité au mois de janvier. Alors qu'apparemment, avec le froid et ainsi de suite, c'aurait dû être... Évidemment, on ne peut pas se fier à ce mois-là, mais cela vous montre la volatilité de ce genre de choses.

Il ne faut pas oublier non plus que l'année passée, je vous le répète, on vous avait dit qu'on avait une réserve de 50 000 000 $ là-dedans et c'était une réserve. Mais cette année, je vous dis qu'en 1987, il n'y a pas de réserve. On a pris la température moyenne. Si on se trompe, on n'aura pas cette raison.

M. Gauthier: Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va, M. le député de Roberval. M. le député de Vimont.

M. Théorêt: Oui, merci. M. Coulombe, quant à discuter d'écart, j'aimerais me faire éclairer sur un écart en particulier, qui est apparu dans la présentation de ce matin et qui me semble assez important, c'est sur le taux d'échange. On parlait de 1986. Vos prévisions étaient basées sur 0,71 $, sur 211 000 000 $, pour le dollar canadien. La réalité a été une perte de 189 000 000 $ ou 0,72 $ pour la valeur canadienne. Pour les prévisions de 1987 on fait un bond assez important; 277 000 000 $. Ma compréhension est que même si depuis quelques semaines, le dollar canadien se maintient à 0,75 $, vous prévoyez un dollar canadien à 0,69 $ près. Cela fait une grosse différence entre la réalité et la prévision.

M. Coulombe: Oui.

M. Théorêt: C'est énorme. C'est 75 000 000 $ à peu près.

M. Coulombe: Ce qu'on prévoit en termes de dollar canadien, ce qu'on a dit plutôt, parce que, comme je vous l'ai dit, on ne fait pas de prévision sur le dollar. Ce qui est dans le plan, c'est qu'on présume que le 31 décembre 1987, le dollar va être à 0,715 $. Nos prévisions sur le dollar se font par trimestre. Par exemple, pour le premier trimestre 1987, on a supposé que le dollar allait être à 0,724 $ au 31 mars 1987, et qu'il allait y avoir une petite détérioration jusqu'à 0,715 $. Au moment où l'on se parle, on n'est pas à la fin de mars, mais presque, c'est de 0,75 $. Donc, entre 0,724 $ qui est notre prévision au 31 mars et 0,75 $, on a donc pour un trimestre 0,03 $ et là il y a une marge de manoeuvre.

Sur l'aspect global des pertes de change, je vais demander à André Dubuc, qui est vice-président aux finances. Je pense qu'il faudrait vous expliquer certains changements comptables qu'il y a eu l'an passé et qu'on a expliqués dans notre rapport public du mois de septembre, qu'on appelle tout le problème de la règle comptable, de la comptabilisation des taux de change à la fin de l'année et des réserves qu'il faut prendre et la technique qu'on a prise parfaitement compatible avec la vérification externe d'Hydro et l'Ordre des comptables, tout le problème du revenu "edging" et ainsi de suite. Je pense qu'il faut comprendre cela même si c'est très technique.

M. Dubuc (André): Effectivement, la hausse de la perte de change peut sembler surprenante. Elle est due, en fait, à deux facteurs. C'est la perte de change sur les devises autres que le dollar américain qui, naturellement, est cause de l'évolution de ces devises et qui explique donc une partie de la perte. Il y a aussi le cas, comme le mentionne M. Coulombe, de la perte de change sur la dette en dollars américains. La méthode de comptabilisation de la perte a été modifiée en 1986. Cela correspond donc à une méthode où nos pertes de change sont couvertes par nos entrées de devises venant de nos ventes d'électricité. C'est une méthode qui a été acceptée par les comptables et nos vérificateurs.

En 1987, ce qui se produit en particulier, c'est qu'il y a beaucoup d'échéances en dollars américains sur lesquelles des pertes de change doivent être reconnues. Cela explique en bonne partie le bond qui se produit. Ce volume élevé d'échéance est un facteur spécifique à 1987.

Politique de la sous-traitance (suite)

M. Théorêt: Je vous remercie. J'aimerais me faire éclairer sur un deuxième point et revenir, si vous le permettez, M. Coulombe, sur les problèmes de la sous-traitance. Le Syndicat des employés et des entrepreneurs - et je voudrais que vous m'éclairiez là-dessus - laisse entendre que les montants de contrats vont diminuer d'environ 90 000 000 $ à 45 000 000 $ dans une année. Ils disent qu'à la suite d'une entente que vous avez eue et que vous avez signée lors de votre dernière convention, vous réduisez d'à peu près 50 % le montant alloué pour le travail fait en sous-traitance et que deuxièmement, si ces travaux retournaient à l'interne ils coûteraient plus cher au niveau de la production. J'aimerais bien que vous m'éclairiez sur ces deux données en particulier qui sont publiques, comme vous le savez. Premièrement, sont-elles exactes. J'aimerais connaître vos commentaires, également.

M. Coulombe: Camille Gaudreault qui est directeur de la distribution va vous donner les chiffres de nos immobilisations. Rappelez-vous l'explication que je vous ai donnée. Je vous ai dit qu'on avait investi 300 000 000 % supplémentaires pendant quelques années. C'est évident qu'on va être bientôt rendu à la fin de ce rattrapage qu'on a fait. Maintenant, pouvez-vous fournir des chiffres?(12 h 15)

M. Gaudreault (Camille): Oui. En ce qui concerne les coûts de la main-d'oeuvre des équipes, pour nous, à Hydro-Québec, si on prend le coût d'une équipe comparé au coût d'une équipe d'entrepreneurs, c'est identique. C'est à peu près identique à peut-être 1 % ou 2 % en plus ou en moins selon les années. Maintenant, la différence provient de l'utilisation, de la façon dont on utilise les équipes. On demande aux équipes d'entrepreneurs d'être sur les lieux du travail à 8 heures le matin, étant donné qu'on leur donne des travaux de plus longue durée, tandis que les équipes d'Hydro-Québec, pour les raisons qui ont été mentionnées tout à l'heure par M. Coulombe, sont à leur centre de ralliement le matin. Pourquoi? C'est parce qu'à ce moment-là, elles peuvent être appelées pour des urgences ou pour faire certains travaux qui sont de plus courte durée. La différence de coût réside essentiellement dans la façon d'utiliser les équipes. Mais si on regarde les chiffres sur une période de 5 ans, le taux horaire d'une équipe d'entrepreneurs comparé au taux horaire d'une équipe d'Hydro-Québec, en comptabilisant tous nos coûts, c'est-à-dire la formation, les avantages sociaux, etc.,. c'est à peu près l'équivalent. Je ne sais pas si cela répond à votre interrogation.

M. Théorêt: Pas tout à fait. J'ai bien compris qu'au taux horaire, c'était à peu près la même chose. Je ne pense pas que c'est l'accusation que lançaient, je pense, les syndicats des employés des entrepreneurs. Ce qu'ils disent, eux, et c'est là que j'aimerais

bien avoir des éclaircissements, c'est qu'au niveau de la production - et peut-être que vous venez d'en confirmer une partie puisque les gens chez vous à l'interne s'en vont dans un centre, alors qu'eux s'en vont directement sur le chantier - ils prennent moins d'heures pour un même travail. Est-ce parce qu'ils s'en vont à l'interne dans un centre ou que l'équipe des entrepreneurs, elle, s'en va directement au chantier? C'est là qu'on cherche la réponse plus précise et non pas sur le taux horaire parce que je pense que cela n'a jamais été...

M. Gaudreault: C'est-à-dire que sur les lieux de travail, à pied d'oeuvre, l'efficacité est la même. La différence, comme je viens de le mentionner, réside dans le fait que nos équipes à Hydro-Québec voyagent plus que les équipes d'entrepreneurs. La différence de 15 % à 20 % est due à cette façon différente d'utiliser les équipes,

M. Théorêt: Vous me confirmez que cela fait un coût plus élevé.

M. Coulombe: Mais pour un travail différent.

M. Gaudreault: Si on utilisait les équipes d'entrepreneurs de la même façon, on aurait les mêmes coûts, c'est-à-dire qu'on aurait une production moindre pour les entrepreneurs, étant donné qu'ils seraient appelés à voyager davantage.

M. Coulombe: Je pense que cela vaudrait la peine de donner plus d'exemples pour mieux faire comprendre cela aux membres. Quand on dit qu'ils s'en vont dans un centre de ralliement, ce n'est pas pour jouer aux cartes ou pour perdre leur temps. Et les voyagements, ce n'est pas parce qu'ils aiment voyager particulièrement, non plus. Pourquoi ne donnez-vous pas des exemples précis?

M. Gaudreault: Toutes les manoeuvres sur notre réseau sont faites par nos employés. Lorsque des manoeuvres sont requises pour dégager une ligne ou pour permettre des travaux, on utilise nos employés. Cela veut dire que pour effectuer des manoeuvres, si on prend cet exemple, ils sont appelés à voyager le long de la ligne pour aller ouvrir les interrupteurs ou sectionneurs aux différents endroits et pour faire les transferts ou fermer l'appareillage afin de pouvoir dégager la ligne. Il y a ce type-là. Il y a également des raccordements, par exemple, qu'il faut faire à la journée à la suite d'une demande d'un client. À ce moment-là, la demande arrive la veille ou quelques jours avant et nos équipes sont appelées à aller faire ce raccordement. Cela ne veut pas dire qu'on ne donne pas ce type d'ouvrage aux entrepreneurs, cela veut dire que, lorsqu'on en donne aux entrepreneurs, dans notre planification, on reqroupe ce type de travaux dans un même environnement, ce qui minimise leur temps de voyagement. Il y a la pose de compteurs et toute une série de petits travaux pour lesquels nos équipes vont aller sur les lieux de travail, vont revenir à leur centre de ralliement et vont retourner. C'est fondamentalement dans la façon d'utiliser les équipes.

M. Théorêt: Est-il exact, M. Coulombe, que, selon leur déclaration, ils vont voir leur contrat réduit de 50 % - non pas basé sur leur surplus, le gros boum de 300 000 000 $, mais basé sur...

M. Coulombe: Historiquement, ils étaient environ 720, et on en prévoit 500 pour 1988 et 1989; c'est donc exact.

M. Théorêt: C'est exact.

M- Coulombe: C'est exact, mais ils sont montés à 1000 dans le "peak", enfin dans la...

M. Théorêt: ...pointe...

M. Coulombe: ...pointe des travaux. Ils étaient 700, ils sont montés à 1000; avant cela, ils étaient 700 et ils vont redescendre à 500. C'est ce qu'on prévoit à l'heure actuelle.

M. Théorêt: D'accord. Ma dernière question porte sur l'entretien. Si j'ai bien compris, le syndicat des travailleurs des entrepreneurs faisait de l'entretien auparavant, et ce n'était pas à l'interne, mais seulement à l'externe. Maintenant, tout l'entretien sera rapatrié à l'interne, ou peut-être que j'ai mal compris.

M. Coulombe: II n'y a pas de changement de philosophie.

M. Théorêt: D'accord.

M. Coulombe: De façon qénérale, tous les travaux de construction, sauf une partie des travaux de distribution. Mais, pour tous les autres travaux de construction, c'est l'externe; pour les travaux d'entretien, c'est l'interne. Je vous ai dit aussi qu'il y avait une zone grise, à savoir ce qu'est un gros entretien. On peut se chicaner là-dessus; d'ailleurs, il y a eu des chicanes là-dessus, à savoir qu'un gros entretien devient une petite construction et une petite construction devient un gros entretien. Là il y a de la place et, effectivement, tout le monde prend cette place-là pour se chicaner sur les concepts. Mais c'est cela, la philosophie de base. Maintenant, il n'y a pas eu de change-

merits fondamentaux là-dessus.

M. Théorêt: C'était déjà à l'interne qu'ils s'occupaient de cela auparavant...

M. Coulombe: C'est cela.

M. Théorêt: ...il n'y a pas eu de changement de politique là-dessus. Merci.

M. Coulombe: Dans le domaine de la construction par rapport au dossier dont on discute actuellement, il n'y a pas eu de changement.

M. Théorêt: Merci.

M. Coulombe: Mais sur un autre élément de la convention collective, par exemple dans les centres régionaux où on avait des garages, on a envoyé des mécaniciens dans ces garages tout simplement parce que les équipements étaient en place depuis des années. Alors, c'était une question de logique administrative; on peut avoir des équipements et ne pas s'en servir. Mais dans nos autres centres administratifs, il n'y en aura pas.

Le Président (M. Charbonneau); M. le député de Bertrand. M. le député de Trois-Rivières.

M. Philibert: Je ne sais pas si le député de Bertrand va poser des questions sur le même sujet que le député de Vimont, mais j'aurais une question additionnelle. Alors, pour plus de cohérence, si lui devait changer de sujet et si on avait le consentement, je pourrais demander une précision.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va, consentement; allez-y.

M. Philibert: M. Coulombe, le député de Vimont vous a posé des questions sur la réaction des entrepreneurs et la diminution de 1000 à 500 du nombre d'intervenants. Dans ma région, on fait beaucoup de sous-traitance; dans la grande région de La Mauricie, beaucoup de gens se sont spécialisés. Évidemment, j'ai eu la visite d'entrepreneurs qui sont venus discuter avec moi, et ils me disent, comme le disait le député de Vimont, que les contrats diminuent de façon très substantielle pour les raisons qui ont été évoquées. Ils trouvent difficile que, dans un même temps, même si les contrats diminuent - donc, les emplois de sous-traitance sont moins nombreux l'effectif d'Hydro-Québec pour ces emplois a augmenté, à la suite de la convention collective qui a été signée, de 250 et cela risque d'augmenter jusqu'à 500. Cela me peinerait beaucoup si c'étaient les résultantes d'une convention collective d'employés qui font le même travail, pour des employeurs différents, mais représentés par le même syndicat.

M. Coulombe: Prenons cela globalernent. Après avoir donné le coup de rattraper la qualité de notre service de distribution, il est normal qu'on fasse moins de travaux de reconstruction, etc. Par contre, il faut bien penser aussi que la clientèle continue d'augmenter à Hydro-Québec; en termes de clientèle, vous avez un nombre de clients, vous avez une augmentation annuelle de 2,8 %; cela ne semble pas beaucoup, mais cela veut dire que, entre 1982 et 1986, on a eu 300 000 clients de plus.

Si on ne veut pas prendre un autre retard dans l'ensemble du réseau et injecter encore 300 000 000 $ à 400 000 000 $ dans quelques années d'une façon subite, l'entretien doit être à la hauteur de la qualité du service qu'on veut donner, ce qui va exiger une augmentation de personnel pour l'entretien. C'est tout à fait normal. Il y a de nouvelles industries, il y a 300 000 nouveaux clients, la clientèle augmente à peu près de 50 000 par année. On pense avoir remis le réseau en place en termes de qualité, il faut continuer à l'entretenir. Je vous ai dit tantôt que la philosophie de base était que l'entretien était fait à l'interne. Donc, il est normal qu'il y ait une augmentation des effectifs reliée à l'entretien. Il est normal aussi qu'il y ait moins de construction puisqu'on a terminé le rattrapage. On ne va pas recommencer cela tous les deux ans.

Les effectifs permanents d'Hydro-Québec, du groupe exploitation, ont toute la responsabilité non seulement de la distribution dans ce cas, mais de l'ensemble de l'exploitation. Il y a eu une augmentation de 300 000 clients, comme je viens de vous le dire, donc 2,8 % par année. Les réseaux de distribution augmentent de 1 % par année. Le réseau de transport, qui fait partie du même concept général, a augmenté de 3,6 %. On est passé de 138 000 kilomètres à 165 000 kilomètres. Donc, cela demande encore des équipes d'entretien. On a 30 000 kilomètres de plus de transport au Québec entre 1982 et 1986.

Les effectifs permanents du groupe exploitation ont augmenté de 0 %, malgré l'augmentation de clientèle de 2,8 % et l'augmentation des réseaux de 1 % et de 3,6 % au transport. Les effectifs permanents à Hydro-Québec dans le groupe exploitation ont augmenté de 0 % dans la même période. Donc, c'est carrément une augmentation de la productivité. Mais notre objectif n'est pas de ne pas augmenter le personnel d'Hydro-Québec, notre objectif demeure celui de donner un service de qualité. Au niveau de l'entretien, s'il faut des gens, on va en engager, c'est tout à fait normal, dans les

limites de l'efficacité et de la rationalité. C'est normal dans le cadre de l'entretion, étant donné que la phase de construction est plus derrière nous dans ce domaine.

M. Philibert: Si je comprends bien ce que vous nous dites, c'est que la philosophie de base d'Hydro-Québec à ce sujet n'a pas été changée par la convention collective et que la zone grise que vous évoquez n'est pas du tout mise en cause par cet aspect des changements vers l'entretien plutôt que vers la construction.

M. Coulombe: Non, ce n'est pas cela. La philosophie de base n'a pas changé, mais je n'ai pas dit que la zone grise n'était mise en cause par personne. La zone grise restera zone grise, et je suis convaincu que nos syndicats nous diront que la zone grise devrait être large comme ça, et je suis convaincu que les entrepreneurs nous diront que la zone grise devrait être comme ça. Je n'y peux rien, c'est une tension qui ne changera pas à Hydro-Québec, cela va toujours rester ainsi. C'est un rapport de forces, et c'est tout à fait normal, dans n'importe quel rapport de forces, qu'il y ait des négociations, qu'il y ait des compromis. Il s'en est fait avec les entrepreneurs et on a dit: À un moment donné, on va profiter de ce moment-là pour rétablir la qualité de notre réseau; en conséquence, on va donner aux entrepreneurs, pendant trois ans, 300 années-personnes de plus et beaucoup plus de contrats qu'avant.

Quand nos syndicats ont vu cela, ils ont dit: Comment se fait-il que ça s'en va chez les entrepreneurs? On a dit: Écoutez, on n'engagera pas des gens à temps plein pendant trente ans pour faire un travail de trois ans. Ces discussions n'ont pas été faciles. Ils ne se sont pas promenés en camion, mais ça n'a pas été facile. Cette zone grise va rester et elle fera l'objet de compromis et de discussions acharnées. Elle va durer des années, ce ne sera jamais réglé. On espère la contenir dans des limites raisonnables en termes d'efficacité et productivité, et un peu d'équité générale, du moins dans la meilleure mesure possible.

Mais il y a un autre point que je n'ai pas mentionné et qu'il faudrait bien comprendre, c'est qu'il y a eu une transformation de certains types de travaux à Hydro-Québec. Vous savez que le travail souterrain dans les centres-villes prend de plus en plus d'importance et prendra, à notre avis, de plus en plus d'importance d'ici à la fin du siècle. C'est une spécialisation qui n'était pas aussi disponible il y a quelques années, parce qu'on faisait moins de travaux souterrains. Je n'ai pas le chiffre ou la courbe à portée de la main, mais on démontre justement que l'ouverture du marché du souterrain est une occasion très intéressante pour ces entrepreneurs. Tous les travaux civils, par exemple, qui sont faits dans les travaux souterrains sont donnés à des entrepreneurs. Je peux vous montrer la courbe qui démontre que l'augmentation prévisible des travaux souterrains au Québec est très considérable et c'est une occasion pour les entrepreneurs.

J'admets que ce n'est pas facile de modifier des comportements, j'admets que ce n'est pas facile de transformer des monteurs en "jointeurs", si je peux employer l'expression. Ce n'est pas facile au point de vue personnel pour un syndiqué. Je suis totalement d'accord avec cela. Les conditions économiques changent et voici un nouveau marché qui s'ouvre. Encore là, notre philosophie est claire. La construction, ce sont les entrepreneurs qui la feront; les travaux électriques à l'intérieur du souterrain seront faits par du personnel d'Hydro-Québec. (12 h 30)

Cela se rattache un peu à un autre débat qui existe à Hydro-Québec qui concerne la santé et la sécurité. Avec les nouvelles lois du travail, l'élimination du danger à la source, on est dans un secteur, le domaine de l'électricité, où il y a un minimum de danger. Vous le savez aussi bien que moi. Donc, cela se relie aussi à l'utilisation de nos équipes en fonction des travaux électriques. M. Gaudreault vous mentionnait tantôt toute une série de manoeuvres qui doivent être faites par nos employés au point de vue de la santé et de la sécurité, au point de vue de la cohérence de l'organisation; sans cela, on s'aventure dans des problèmes quasiment insolubles en termes de santé et de sécurité.

Donc, on vit là-dedans et, graduellement, les entrepreneurs vont vivre là-dedans aussi en tenant compte des problèmes de santé et de sécurité. Notre code des travaux va être ajusté de telle sorte qu'on ne pourra pas avoir deux classes de monteurs, monteurs privés ou monteurs d'Hydro. Il va donc y avoir un ajustement. Encore là, de nouveaux marchés s'ouvrent, je parle du souterrain, qui est un marché immense pour les dix prochaines années. C'est aux entrepreneurs à s'organiser pour saisir ce marché, comme nous nous sommes organisés, nous, à HydroQuébec, pour contrôler nos coûts. Quand je vous ai dit que nous avions 0 % d'auqmentation de main-d'oeuvre, c'est un chiffre clair et précis par rapport à des augmentations du réseau; donc, c'est une augmentation réelle de productivité. D'ailleurs, on va avoir moins de monteurs internes et externes en 1989 qu'on en avait en 1980.

M. Philibert: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le député de Bertrand.

Dépenses d'exploitation

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. J'aurais cinq points qui touchent l'ensemble de la présentation. D'abord, concernant les dépenses d'exploitation. Au cours des deux dernières années 1985-1986, on a une moyenne d'environ 2 % d'augmentation des dépenses d'exploitation. Vous nous avez expliqué, l'année dernière, toute cette compression et ce travail qui a été fait et qui a été bien fait. Par contre, quand on regarde les trois prochaines années 1987-1988-1989, au poste des dépenses d'exploitation, on s'aperçoit qu'il y a un peu plus de 26 % d'augmentation prévue pour trois ans par rapport aux deux dernières années. Est-ce qu'on peut me donner quelques explications?

M. Coulombe: Vous allez sans doute dire qu'on était fatigué de notre effort et qu'on se relâche pour les prochaines années...

M. Parent (Bertrand): Je n'ai pas dit cela.

M. Coulombe: Mais cela y ressemble, effectivement.

M. Parent (Bertrand): Cela y ressemble.

M. Coulombe: II y a des explications assez précises là-dessus. D'abord, vous remarquerez qu'en 1986, il y a une baisse des dépenses d'exploitation de moins 2,9 %. Là-dessus, je ne voudrais pas qu'on se fasse des illusions, il ne s'agit pas uniquement d'efforts de gestion. On a parlé tantôt d'une nouvelle règle comptable préparée par l'Institut des comptables et qui demande de redéfinir la façon dont on calcule les sorties du fonds de retraite. Je voyais le rapport financier des banques, au mois de janvier et au mois de février, elles ont toutes pris cette nouvelle méthode. Dans le cas d'Hydro-Québec, cela a signifié 75 000 000 $ de moins de dépenses d'exploitation. Je ne dis pas de déboursés, parce qu'on a déboursé quand même, les 75 000 000 $, mais on les a mis dans un autre poste comptable. Si vous voulez qu'on vous l'explique, il n'y a pas de problème. Le moins 2,9 % est dû en partie à ces 75 000 000 $ de moins de dépenses sur les fonds* de retraite. Donc, notre base est tombée en 1986, il y a eu une décroissance des dépenses d'exploitation, mais, en réalité, ce n'est pas vrai. En réalité, cela a été à peu près égal, au point de vue des dépenses d'exploitation.

En 1987, les deux chiffres les plus frappants sont 9,9 % et 10,6 %. Ce que je voudrais vous expliquer, c'est que dans notre effort de rationalisation, on continue de travailler sur deux domaines dont on ne parle pas dans le plan. Je voudrais vous expliquer brièvement qu'il va y avoir un impact sur les dépenses d'exploitation. Ces deux problèmes sont tout notre système de comptabilité quant aux imputations. Vous savez qu'on a beaucoup de travaux d'immobilisation et on a des dépenses d'exploitation. La technique d'imputer aux dépenses d'immobilisation des frais d'exploitation, on est en train de la revoir de fond en comble, parce qu'on pense qu'il y a des incohérences dans l'interprétation, qui ne donnent pas la vraie vérité des coûts à Hydro-Québec.

Cet effort qui est commencé va durer peut-être un an ou deux, mais nous sommes certains que la conséquence sera une augmentation de nos frais d'exploitation par la clarification de ce qui est une immobilisation et de ce qui est un frais d'exploitation. C'est en marche à l'heure actuelle et on a une provision - j'ai employé le mot "provision" tantôt - pour 1988 et 1989 parce qu'on espère qu'à la fin de 1987, il y aura des décisions à ce sujet. On a donc une provision d'augmentation des frais d'exploitation due à cette clarification dans nos méthodes comptables des frais d'imputation.

Il y a un deuxième point aussi. Dans les années 1988 et 1989, on s'est gardé une marge de manoeuvre. Je vous ai dit que l'an passé on avait une marge de manoeuvre au niveau de la température. Je vous dis cette année qu'en 1988 et 1989, on a une marge de manoeuvre au niveau de nos frais d'exploitation. On a mis des montants en réserve. Au lieu de les mettre dans la température, on les a mis là cette année, parce que la température nous amenait des problèmes au point de vue de croissance de la demande et que cela pouvait fausser les chiffres. On en a mis dans les dépenses d'exploitation de 1988 et 1989. Donc, il y a cet encadrement financier de nos dépenses d'exploitation, ce changement de la méthode d'imputation qui surviendra et une réserve financière qu'on s'est mise là en vue de coups durs qui pourraient nous arriver. Donc, il y a une marqe de réserve. Je peux vous dire tout de suite que cela est peu probable. Cela ne devrait pas, dans la réalité concrète, être à ces niveaux-là. Ce sera plus bas que cela.

M. Parent (Bertrand): Ce que je voulais entendre, en fait, c'est qu'il y avait là-dedans aussi une marge de manoeuvre nouvelle ou un coussin nouveau.

M. Coulombe: Exactement. C'est exactement l'expression, c'est un coussin. Il ne faut pas oublier qu'on a un plan de développement de trois ans. Vous l'avez dans les tarifs. D'ailleurs, vous voyez ce qui vient d'arriver dans les tarifs. Notre encadrement de l'an dernier était de 4,9 %. On a travaillé, on a présenté 4,9 % au conseil

d'administration au mois de janvier, Ensuite, on s'est rajusté à 4,6 %. L'année prochaine, on présentera 5,2 % - vous l'avez en haut de la page - pour 1988. À la même date, si on a une commission parlementaire l'an prochain, je ne peux pas vous garantir aujourd'hui qu'on présentera 5,2 % mais c'est l'encadrement financier qu'on a là. Donc, l'année 1987 est ferme, mais pour 1988 et 1989, on se place dans un encadrement plus général. Je ne sais pas si ce sera 5,2 % qu'on recommandera l'an prochain, mais comme il faut avoir un cadre cohérent, il faut placer des hypothèses.

Évidemment, plus on s'éloigne dans le temps, plus cela devient des hypothèses et plus il faut, si on veut être rationnel, se placer des coussins pour permettre une cohérence financière là-dedans. Chaque année, soit qu'il arrive quelque chose et que ces coussins disparaissent ou qu'on en profite comme on l'a vu avec la température l'an dernier. C'est notre technique de travail au point de vue de la planification. J'admets que le mettre au niveau des frais d'exploitation, cela peut faire sursauter un peu parce que c'est anormal que nos revenus montent de 5 % et que nos dépenses d'exploitation montent de 10 %. Je le concède.

Concurrence gaz-électricité

M. Parent (Bertrand): Merci beaucoup. Un deuxième point, la compétitivité. L'année dernière, vous avez traité de ce point-là en long et en large. On y reviendra probablement demain, sauf que, de façon générale, je suis un peu inquiet quant à la concurrence. On parle des différents concurrents dans le gaz naturel. Ma question serait la suivante: comme l'a mentionné mon collègue de Roberval, en l'absence d'une politique réelle énergétique au Québec, comment voyez-vous cela? Est-ce que vous voyez avec autant d'inquiétudes que l'année dernière cette concurrence entre autres au niveau du gaz face au fait que vous soyez obligés de monter les tarifs d'à peu près 5 %? Finalement, vous avez une clientèle commerciale et industrielle qui vous échappe. Est-ce que c'est relié aussi à votre nouvelle structure d'augmentation de tarification?

M. Coulombe: Claude Boivin pourra donner des chiffres plus précis sur la question de la concurrence, mais d'une façon générale on reste persuadé... D'abord, il y a eu la phase d'implantation du gaz qui nous a inquiétés. Il y a eu une inquiétude générale parce qu'Hydro-Québec n'était pas trop habituée à avoir de la concurrence. Donc, cela a été sain comme inquiétude, cela a donné d'excellents résultats parce que beaucoup de gens se sont réveillés et des programmes extrêmement dynamiques ont été faits. Donc, cela a été l'aspect positif. Il y avait aussi le fait qu'on perdait des clients. Là-dessus, on s'est battu - dans le même cadre que je vous ai expliqué tantôt - au niveau des tarifs et on les a gardés bas pour la période de pénétration du gaz, surtout que, paradoxalement, cela arrivait au moment où on avait des surplus giqantesques. Cela ne pouvait pas plus mal tomber en ce qui nous concernait.

Cette phase que j'appellerais de pénétration qui a été subventionnée par les deux niveaux de gouvernement, 500 000 000 $ pour faire le pipeline et enlever la taxe sur le gaz, donc une pénétration subventionnée, nous a inquiétés à cette époque et on a réagi. Cette étape que j'appellerais la période de pénétration nous semble terminée. Leurs prévisions coïncident avec les nôtres et même avec celles du gouvernement. Ils auront une stabilisation dans leur croissance, je ne sais pas, de l'ordre de 18 % ou 19 % du marché; ils sont actuellement à 16 %...

Une voix: 14 %.

M. Coulombe: 14 %, 15 %. Cela va se stabiliser, selon leurs prévisions, celles du gouvernement et les nôtres, autour de 18 %, 19 %. Cette phase étant terminée, on entre dans une phase plus à long terme. À long terme, on considère qu'au point de vue de l'hydroélectricité, on a un avantage que ni le gaz ni le pétrole n'ont. C'est comme je vous l'ai dit tantôt, qu'on est capable de calculer nos coûts à Iong terme dans une fourchette que ni le gaz ni le pétrole ne peuvent se permettre. Donc, la pression de la pénétration étant terminée, on entre dans la phase que j'appellerais plus de stabilisation. Dans cette phase, que, pendant un ou deux ans, on ait des tarifs plus élevés que le qaz, à condition que ce ne soit pas exagéré, c'est plus ou moins important tout simplement parce qu'à long terme, on est convaincu que notre stabilité tarifaire sera plus qrande que la leur. C'est un peu la stratégie. Maintenant, de façon plus spécifique, sur certains chiffres, peut-être que Claude Boivin pourra...

M. Boivin: Nous avons, à la paqe 21 du plan de développement, un tableau qui résume la position concurrentielle de l'électricité au secteur domestique par rapport au gaz et au mazout. Je vous ferai remarquer, comme l'a dit M. Coulombe, que la stabilité tarifaire d'Hydro-Québec est certainement plus grande. À titre d'exemple, les chiffres indiqués pour le mazout sont des chiffres établis sur la position ou le prix du mazout au secteur domestique, qui prévalaient au mois de décembre. C'était, à ce moment-là, de l'ordre de 0,225 $ le litre. Au moment où on se parle, aujourd'hui, le

mazout au secteur résidentiel se vend 0,255 $ le litre. Déjà, la position concurrentielle que vous avez là s'est améliorée en faveur de l'électricité depuis décembre. Est-ce qu'elle va se détériorer le mois prochain? Je ne le sais pas. C'est très difficile de prévoir l'évolution des prix du mazout au secteur domestique.

Dans les autres secteurs, pour les applications thermiques, il est évident - on l'avait indiqué l'an dernier - que, règle générale, sauf lorsqu'on vend de l'excédentaire, notre position concurrentielle est défavorable. Du côté de l'excédentaire, avec la fin des contrats de bouilloires en 1988, on prévoit qu'une partie de ce marché va retourner au gaz et au mazout, principalement au gaz. La plupart des clients industriels qui bénéficient présentement du programme de bouilloires sont des clients triénergie, c'est-à-dire qu'ils ont de disponible chez eux, selon leur installation, la possibilité d'utiliser de l'électricité, du gaz ou du mazout. Les options vont être ouvertes.

II est évident que la concurrence est vive, et Hydro-Québec, sur ce plan, a développé et va continuer à se battre dans ces marchés, notamment par les programmes biénergie. On a mis sur pied des programmes biénergie, tant dans le secteur résidentiel que dans le secteur commercial et industriel, où on est capable d'offrir des tarifs hors pointe qui sont hautement concurrentiels. Ils sont même favorables par rapport au gaz ou au mazout, pourvu que le client ne soit pas là aux heures de pointe et qu'en période de pointe, il utilise le mazout.

M. Coulombe: II y a également la position concurrentielle du gaz. Il y a eu des augmentations du prix du gaz récemment. Cela n'a peut-être pas eu l'impact des tarifs d'électricité dans les journaux, mais il y a eu effectivement des augmentations. Peut-être que Claude Boivin pourrait les donner. Deuxièmement, je vous inciterais à regarder ces augmentations de près parce que vous allez y retrouver un concept avec lequel on est bien d'accord, qui est la différenciation. Les tarifs du gaz sont différenciés entre le domestique et les autres catégories de clients. Je ne dis pas que c'est un exemple à suivre nécessairement, mais je vous mentionne le cas.

Fiabilité du réseau

M. Parent (Bertrand): Merci. J'ai une autre question qui touche la fiabilité du réseau. On sait qu'une de vos préoccupations, et c'est dans vos orientations d'améliorer toute cette question de fiabilité... Au cours des cinq prochaines années, je pense qu'on verra quelque 600 000 000 $ mis dans ce qu'on appelle la fiabilité du réseau.

J'aimerais savoir, M. le Président, si cette somme impartante pour l'amélioration du réseau va servir principalement aux Québécois ou si cette fiabilité est aussi en fonction de la préoccupation première des clients américains qui concerne cette fiabilité qui nous a été confirmée lors de la rencontre avec les goupes d'Américains à quelques reprises. (12 h 45)

M. Coulombe: Je vais laisser André Mercier répondre sur les caractéristiques techniques de la fiabilité. Qu'est-ce qu'on entend par la fiabilité? Tout ce que je voudrais faire, c'est une brève introduction à ce problème qui est effectivement extrêmement important.

Vous avez au Québec, depuis l'instauration des grandes lignes de transport dans les années 1963, les grandes lignes qui partent de Manic, de Churchill et celles qui ont été ajoutées à la Raie James, les grandes lignes de transport, c'est 135. Vous avez eu une occurrence de pannes générales qui, au début, était très forte: une presque tous les ans ou tous les deux ans ou tous les trois ans.

Évidemment, le nombre de lignes s'ajoutant graduellement a stabilisé notre réseau et les pannes sont moins fréquentes aujourd'hui: une à peu près tous les quatre ou cinq ans. En fait, on va se croiser les doigts, mais il n'y a pas eu de panne générale depuis novembre 1982. Donc, il y a déjà une stabilisation qui s'instaure.

Pour le marché québécois et strictement pour le marché québécois, nous, on pense que cette stabilité devrait être augmentée parce que les industries s'en viennent de plus en plus sophistiquées, de plus en plus exigeantes dans leur système de production, surtout celles qui emploient l'électricité, et on veut augmenter cette stabilité. Ce qu'on a prévu, c'est d'augmenter, de faire des investissements pour le marché québécois pendant les quinze prochaines années. Ces 600 000 000 % pour le marché québécois, et uniquement pour le marché québécois, il s'aqit de les étaler sur une quinzaine d'années.

Dans ce contexte arrivent tes exportations et la nécessité - j'aimerais que M. Mercier insiste là-dessus tantôt - d'avoir une plus grande stabilité par rapport au réseau américain. Ce qu'on fait, c'est qu'au lieu de l'étaler sur quinze ans, on l'étale sur cinq ans. Cela va donc coûter plus cher. Le coût de devancement - et c'est exactement le même raisonnement que dans les centrales - va être chargé aux contrats d'exportation.

Donc, l'ensemble de l'opération est fait à long terme pour la clientèle du Québec; son accélération est due aux exportations. Le coût de devancement de ces 600 000 000 $ sera intégré dans les contrats de vente à l'exportation. Pour être plus clair, le contrat

de Central Maine contient une somme dans notre prix de vente de ces 600 000 000 $, même si on n'a pas dépensé un cent encore parce qu'on ne commencera pas cela avant l'année prochaine.

Donc, intégré dans le contrat de Maine, il y a un coût de devancement des 600 000 000 $ qui est intégré dans le prix de vente aux Américains. Mais cela sert essentiellement, à long terme, pour le marché québécois et pour résoudre un problème d'interconnexion avec les États-Unis dans notre phase d'exportation.

C'est l'allure générale maintenant. Je pense que pour bien se comprendre sur les termes, l'aspect de la stabilité interne, je pense que tout le monde va le comprendre. Mais il y a surtout nos relations avec les marchés externes, c'est-à-dire en quoi consiste exactement la fiabilité entre les deux réseaux. M. Mercier qui est vice-président à la planification des équipements.

M. Mercier (André): Effectivement, comme l'a dit M. Coulombe, les 600 000 000 $ représentent un montant prévu pour augmenter la fiabilité du réseau d'Hydro-Québec. C'est un problème d'interconnexion entre les réseaux comme tels.

Finalement, il faut comprendre que le réseau d'Hydro-Québec est un réseau qui a des caractéristiques différentes du réseau américain. C'est d'abord un réseau qui est hydroélectrique presque à 98 %. C'est un réseau qui, à cause de cette nature de génération hydroélectrique, demande de très longues lignes. Quand on le compare, finalement, au réseau américain, au réseau ontarien, au réseau du Nouveau-Brunswick, ce sont des réseaux qui sont beaucoup plus à caractère thermique - donc, une génération thermique - où la génération est beaucoup plus concentrée près des centres de charge.

Dans ce cas, les caractéristiques du réseau, la structure du réseau américain, de ceux du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario est totalement différente de celui du Québec. Lorsqu'on parle d'interconnexions, il faut comprendre aussi que le réseau américain est interconnecté directement avec le réseau du Nouveau-Brunswick, avec le réseau de l'Ontario. Cela forme un tout, cela forme un bloc. Le réseau du Québec comme tel ne fait pas partie de ce réseau. Lorsqu'on veut s'interconnecter pour augmenter nos exportations vers les Américains, finalement, il faut que ces réseaux puissent s'interconnecter correctement. Dans le passé, comme M. Coulombe le présentait, on a eu beaucoup plus de pannes générales. C'est un choix d'investissement qu'on avait fait sur le réseau d'Hydro-Québec, de choisir - parce que tous les critères de conception qu'on peut se donner pour construire un réseau sont un choix - entre les investissements qu'on veut placer sur le réseau, soit les équipements qu'on veut installer, et la qualité de service qu'on veut en obtenir.

Lorsqu'on fait cet équilibre, on obtient un certain partage entre les investissements qu'on veut avoir et la qualité de service. Lorsqu'on a un réseau hydroélectrique, la remise en service du réseau se fait beaucoup plus rapidement qu'avec un réseau thermique. Les réseaux, comme ceux de New York ou ceux de la Nouvelle-Angleterre, sont des réseaux thermiques qui, lorsqu'ils ont une panne générale, mettent au moins de 24 à 48 heures à se remettre en service. Le nôtre peut se remettre en service à l'intérieur de deux à quatre heures. Dans le passé, ce qu'on a fait comme choix, c'est de dire: Les investissements qu'on est prêt à faire sur notre réseau sont en fonction de la qualité des services qu'on veut obtenir. Maintenant, les pannes générales sont moins dommageables sur notre réseau que, par exemple, sur le réseau américain.

Pour cette raison, on s'est dit dans le passé: Ce serait acceptable sans doute parce que les investissements qu'on devait faire étaient extrêmement importants en raison des très longues lignes qu'on avait. À ce moment, on a fait un choix en se disant: On accepte peut-être d'avoir une qualité de service moins importante, moins bonne, si on veut, et d'avoir des investissements moins élevés. On s'est aperçu, ces dernières années que le nombre de pannes était beaucoup plus élevé que prévu. À cause de cela, on prévoyait pour l'avenir améliorer l'ensemble du réseau pour les besoins du Québec. Comme l'a dit M. Coulombe, on prévoyait peut-être faire cet investissement à l'intérieur des dix, quinze prochaines années.

Tout le problème des interconnexions a accéléré la prise de conscience qu'on avait de la fiabilité du réseau et il fallait se ramener avec un réseau qui était beaucoup plus conforme au réseau américain. À l'heure actuelle, on est limité aux environs de 2200 mégawatts comme interconnexion directe avec le réseau américain. Ce que cela veut dire en termes clairs, c'est que s'il y avait la perte du réseau d'Hydro-Québec, il ne faudrait pas qu'on ait un impact supérieur à 2200 mégawatts sur le réseau américain. Si c'est supérieur à cela, finalement, il y a un risque qu'on entraîne avec nous une perte générale du réseau américain. C'est ça évidemment qui est une grande préoccupation du côté américain.

Pour contrer cela, ce qu'on propose, nous, c'est de dire: On va ramener la fiabilité du réseau québécois selon les mêmes standards et il va falloir qu'ils soient acceptés par l'ensemble des réseaux américains et ceux de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick, comme étant équivalents en termes de fiabilité de sorte qu'ils vont

considérer la perte du réseau d'Hydro-Québec comme étant un événement aussi peu probable que la perte totale de leur réseau. C'est dans ce sens qu'on propose, dans le plan de développement, d'avoir un montant de 600 000 000 $ et de devancer maintenant cet investissement qu'on aurait fait, peut-être, dans dix ans, quinze ans, pour être capable d'augmenter nos exportations vers l'extérieur.

M. Coulombe: J'insiste sur le fait que le coût de ce devancement va être imputé au contrat d'exportation. Cela va être compris dans nos prix de vente.

M. Parent (Bertrand): M. Coulombe, quel est le pourcentage du coût de devancement par rapport aux 600 000 000 $?

M. Coulombe: Je ne peux pas vous répondre en disant: Écoutez, si on dépensait 600 000 000 $ en 15 ans par rapport aux exportations, parce qu'il faudrait que je vous dise exactement quand, pour les 2000 autres 600 mégawatts, on va les signer. Tout ce que je peux vous dire, c'est que dans le contrat de la Central Maine Power, on a une somme de 50 000 000 $ impliquée dans notre structure de prix de vente pour répondre à ce besoin.

M. Parent (Bertrand): Ce qui représente à peu près 10 %.

Dans un autre domaine...

M. Coulombe: Je voudrais souliqner aussi - cela fait référence à une autre question qui a été posée - que quand on parle de dépenses d'exploitation à HydroQuébec, on dit: Comme nos centrales ne requièrent pas beaucoup de monde, les tarifs ne devraient pas augmenter ou ainsi de suite. Regardez les sommes dont on parle comme dépenses d'exploitation éventuelles, on parle de 600 000 000 $, cela ne génère pas d'électricité. On parlait tantôt avec les entrepreneurs de 300 000 000 $ qu'on a mis dans la distribution. En fait, c'est 1 000 000 000 $ qu'on a mis pour améliorer le réseau. C'est 1 000 000 000 $ qui entre éventuellement dans les dépenses d'exploitation et qui ne génère pas en soi de revenus. Évidemment, cela diminue à la longue nos dépenses; on l'a vu d'ailleurs dans les chiffres que je vous ai donnés. Mais ce ne sont pas des investissements générateurs de revenus immédiats. Il faut que cela soit compris parce que ce sont des sommes énormes pour la qualité du service qui sont mises là-dedans et qu'il faut payer d'une certaine façon.

IREQ M. Parent (Bertrand): Merci. Dans un autre domaine, celui de la recherche et du développement relié au développement d'Hydro-Québec, vous avez touché très brièvement à l'IREQ et cela me préoccupe d'autant que cela se trouve dans mon comté. Personnellement, j'ai toujours trouvé que beaucoup de choses sont faites en recherche à Hydro-Québec, mais finalement peu de choses sont mises en application. Ce que je veux dire, c'est qu'essentiellement, il y a beaucoup de projets de recherche sur les tablettes qui ont été mis au point, mais qui n'ont jamais été vraiment transformés pour en permettre la mise sur pied. Je pense qu'il y a un projet ou deux qui semblent vouloir accoucher. Pour les dirigeants d'Hydro-Québec, il semble y avoir un changement de philosophie ou d'approche qui s'en vient de ce côté, à savoir que vous allez favoriser l'émerqence même de certains cadres avec l'entreprise privée en "partnership", de façon que des projets concrets par rapport à cette recherche puissent voir le jour.

Voici ma question. Cela va-t-il prendre forme sous une nouvelle politique qui sera autorisée par Hydro-Québec, concernant l'application comme telle et le rôle que devra jouer l'IREQ dans le futur et les retombées économiques? Parce que je pense qu'on peut parler aussi dans ce domaine de la création d'emplois. Pouvez-vous brosser un tableau pour savoir vers quoi s'oriente cette recherche et le développement?

M. Coulombe: Je vais demander à M. Benoît Michel, vice-président du secteur de la recherche à l'IREQ et de l'aspect international à Hydro-Québec, de vous donner un peu plus de détails. Mais juste pour vous situer, il faut bien penser que le laboratoire de l'IREQ qui emploie environ 500 personnes et qui coûte environ 60 000 000 % par année a été conçu comme un laboratoire de recherche relié à l'électricité. Les problèmes majeurs à ce moment-là étaient surtout des problèmes reliés au transport d'électricité. Ce laboratoire a également une fonction d'essai au service des compagnies pour les essais de matériaux et ainsi de suite. Donc, ce n'est pas de la recherche qui devait nécessairement conduire à des applications pratiques. Il y a eu l'aspect de recherche fondamentale. Tous nos appareils de simulation de réseau, de simulateur de réseau, c'est extrêmement important. On vend des services, mais on ne met pas de produit au point nécessairement dans ce vaste secteur.

Depuis quelques années, c'est un virage fondamental qu'on veut prendre à Hydro-Québec - parce que l'IREQ c'est Hydro-Québec, ce n'est pas une coquille en dehors - celui de s'orienter de plus en plus, tout en gardant l'aspect de recherche de base dans les secteurs que je vous ai mentionnés, vers le développement de technologies. Cela est

relié aussi à ce que je vous ai dit en ce qui concerne l'aspect diversification à moyen terme. On a fait des expériences. Vous parliez tantôt d'émergence. Deux ou trois chercheurs de l'IREQ se sont formés une compagnie avec notre aide afin de commercialiser un produit dont j'ignore exactement la nature - M. Michel pourra en parler - mais qui concerne les logiciels. Donc, on l'a fait. On commence. Je voudrais simplement dire, avant de laisser la parole à M. Benoît Michel, qu'il s'agit d'un changement de culture assez important.

Deuxièmement, on a quand même un groupe de chercheurs qui ont été orientés vers une perspective de travail et qu'il faut modifier. C'est un changement de cap difficile au point de vue humain et au point de vue de la structure. On est en plein dedans actuellement. Des équipes nouvelles sont mises en place, de même que du personnel nouveau est recruté. Il y a eu un renouvellement de la structure supérieure dans ce domaine, et on a bon espoir que ça va s'accélérer. Mais c'est un tournant qui n'est pas facile, même si beaucoup de gestes ont été posés.

M. Michel (Benoît): C'est en ce sens que la réorganisation du groupe s'articule présentement. Certaines valeurs fondamentales sont véhiculées. Vous l'avez vu dans le plan de développement. Les défis technologiques auxquels l'entreprise fait face sont nombreux, et si on veut réussir... Les répercussions financières d'un échec dans certains de ces développements sont majeurs. Vous avez vu tantôt 2000 mégawatts en pointe; à titre d'exemple: turbine à gaz. Bref, il y a une réorganisation de l'IREQ en cours qui vise justement à faciliter l'identification par un débat d'entreprise sur les priorités technologiques afin que nos investissements dans ce domaine soient consentis aux heures réelles où on veut investir.

De plus, on veut rentabiliser la recherche, comme M. Coulombe l'a mentionné, dans le sens qu'on veut la diriger vers nos besoins précis. D'autre part, on veut accentuer notre marketing des services. Les laboratoires qu'on a à l'IREQ, qui représentent des investissements de l'ordre de 90 000 000 $, ont bénéficié d'un contrat externe, que ce soit de l'Association canadienne d'électricité, EPRI ou un autre organisme, on veut identifier notre marketing au niveau de l'IREQ pour aller chercher des fonds additionnels.

Troisièmement, la structure qu'on est en train de mettre sur pied vise à séparer de façon plus formelle les diverses phases. La recherche à long terme demeurera, bien sûr, un segment de notre activité. Par ailleurs, on veut appliquer cette recherche davantage aux besoins qui auront été identifiés au préalable. On veut aussi, par une gestion par projet, développer les produits dont l'entreprise a besoin, les développer avec une mentalité pratique et mercantile de façon que ces produits, une fois développés pour l'Hydro, puissent être commercialisés ailleurs par d'autres firmes. Présentement, on a Nouveler qui est le bras d'Hydro-Québec au niveau de la diversification. Nouveler oeuvre dans des segments de marché où il n'y a pas d'offre au Québec, dans des produits qui ne sont pas fabriqués au Québec, Nouveler pourra à ce moment-là décider de former un "joint venture" avec une autre entreprise et développer un produit pour viser des marchés autres qu'Hydro-Québec seulement, pour éviter cette captivité de marché.

M. Coulombe: II faudrait peut-être mentionner aussi qu'il y a une certaine pesanteur du passé dont on ne peut pas se débarrasser. Les époques changent et les priorités de la fin des années soixante-dix étaient pour les nouvelles énergies. L'Hydro s'est orientée vers ces nouvelles technologies et c'est évident qu'aujourd'hui, la question des éoles est moins prioritaire qu'il y a sept ou huit ans. Par contre, on est embarqué aussi dans un programme de développement avec le fédéral, le programme de fusion nucléaire Tokamak, qui, dans les meilleures hypothèses possible, ne verra pas le jour de façon concrète avant vingt-cinq ou trente ans. Cela fait quinze ans qu'on dit que cela va prendre vingt ans. C'est un programme extrêmement lourd et chargé. On est maintenant partenaire au niveau canadien. Le fédéral en paie donc la moitié et ainsi de suite. C'est ce que j'appelle des lourdeurs qu'on ne peut pas changer dans 24 heures. Je pense qu'il reste quand même un intérêt fondamental dans ce genre de recherche. Il s'aqira de savoir si ce secteur ne devrait pas être plus limité. On devrait mettre l'accent sur ce que M. Benoît Michel vient d'expliquer. C'est l'orientation qu'on a prise finalement.

Le Président (M. Charbonneau): Sur cette réponse, M. Coulombe, madame et messieurs, nous allons suspendre les travaux de la commission jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 3) (Reprise à 15 h 11)

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre!

La commission de l'économie et du travail reprend cet après-midi l'étude de la proposition tarifaire d'Hydro-Québec pour l'année 1987. Nous avions convenu que, cet après-midi, nous parlerions d'abord du marché interne et des exportations. Il semble qu'il y

ait quelques questions sur des sujets d'ordre générai qui soient restées en suspens ce matin. Je pourrais peut-être permettre quelques questions afin qu'on puisse, par la suite, respecter l'ordre du jour. Cela va? M. Perron, je crois, le député de Duplessis, remplace...

M. Gauthier: M. Paré (Shefford) serait remplacé par M. Perron (Duplessis).

Le Président (M. Charbormeau):

Consentement? Cela va. Le remplacement est fait. Je crois que le député de Rosemont voulait poser une question.

Qualité du service

M. Rivard: M. Coulombe, j'aimerais qu'on regarde un peu les 2 500 000 clients d'Hydro-Québec qui sont en même temps nos commettants. Ce sont des gens que l'on retrouve dans nos bureaux et qui nous font des représentations quant à l'augmentation du tarif. Quelle que soit cette augmentation du tarif - l'an passé, elle était peut-être à première vue un peu plus difficile à accepter puisqu'elle était supérieure à l'inflation, mais quand même - déjà, cette année, nous avons tous reçu des représentations.

L'une des choses que nous essayons de vendre, c'est la qualité du service offert par Hydro-Québec. On a déjà entamé ce chapitre ce matin en parlant de la fiabilité; c'est important, c'est une question de "all or none", on a de l'électricité ou on n'en a pas. Une fois que j'ai exposé cette question de fiabilité, personnellement, je manque un peu d'arguments pour expliquer au citoyen qui vient me voir la qualité des services rendus par Hydro-Québec. En particulier, quand je vois dans votre document que vous parlez de la qualité des pratiques d'affaires, j'aimerais que, d'une façon résumée, vous nous disiez ce que vous entendez par qualité du service chez Hydro-Québec.

M. Coulombe: Je vais demander à Claude Boivin, vice-président exécutif, marchés internes, de vous répondre.

M. Boivin: Vous avez parfaitement raison de parler de qualité du service parce que, à notre point de vue, quand on parle de la qualité du service, il y a un premier volet qui est la qualité du service électrique lui-même, c'est-à-dire sa continuité, sa stabilité, etc. Le deuxième volet est tout aussi important, c'est la qualité des pratiques d'affaires, des relations que nous avons avec notre clientèle. De ce côté, vous n'êtes pas sans savoir que, fondamentalement, à Hydro-Québec, il y a environ 2000 personnes qui s'occupent de la clientèle, de ce qu'on appelle l'aspect commercial de la clientèle. Elles doivent recevoir les appels, effectuer les transactions commerciales avec nos clients, s'occuper de la relève des compteurs, de la facturation, des encaissements et, hélasl occasionnellement, des recouvrements.

Sur ce plan, nous avons, au cours de la dernière année, amorcé ce que je peux appeler une vaste offensive de révision de nos pratiques commerciales. Les conclusions de ces travaux ne font pas partie du plan de développement, cette année, parce que ce n'est pas terminé. J'espère qu'on pourra annoncer, l'an prochain, des révisions de nos pratiques commerciales. Une des choses très importantes qu'il faut mentionner, c'est que dans le cadre de la révision de ces pratiques commerciales, nous avons amorcé un dialogue très soutenu depuis un an avec les différentes associations de consommateurs à travers la province de Québec. Nous sommes dans un processus de consultation sur nos différentes pratiques d'affaires, sur les orientations, les choses qui sont des irritants dans nos pratiques d'affaires, sur nos politiques d'interruption de services hélasl dans les cas où les clients ne nous paient pas, sur nos pratiques de facturation. Cette amorce a déjà conduit à l'implantation -encore là, ce n'est pas quelque chose qui est réalisé présentement mais qui le sera vers la fin de l'année 1987 - d'une nouvelle facture d'électricité. En effet, la facture que nous avons présentement, en vigueur depuis de nombreuses années, est souvent assez difficile à comprendre pour nos clients. Nous avons donc un nouveau format de facture qui devrait être implanté à la fin de l'année 1987. Il devrait permettre à nos clients, premièrement, de mieux comprendre la structure de coûts, de tarifs que nous avons; deuxièmement, de connaître l'historique de leur consommation, pourquoi leur consommation peut varier occasionnellement, etc. Nous avons non seulement un projet, mais un nouveau format de facture qui a fait l'objet de consultations auprès des associations de consommateurs et qui sera implanté à la fin de l'année ]987.

Ce sont toutes ces différentes pratiques qui, comme je le dis, depuis un an, ont fait l'objet d'une réflexion profonde à l'intérieur de l'entreprise, sont en voie d'être révisées, également à travers un processus de consultation. Sur cet aspect-là, cette année, le plan de développement est muet parce que le processus n'est pas terminé. Il y a un tas de choses qui sont en marche de façon très sommaire.

Je devrais peut-être également mentionner que, depuis un an, nous avons fait un effort important pour normaliser nos pratiques de fourniture d'énergie. Cela a fait l'objet d'un projet de règlement, le règlement 411, qui régirait à l'avenir les pratiques de fourniture d'énergie à travers la province. D'ailleurs, ce règlement avait été

déposé au gouvernement l'été dernier. Il a fait l'objet de publication à la Gazette officielle, de consultation à la suite de mémoires qui ont été soumis par les différentes associations de consommateurs, dont l'Union des producteurs agricoles et certains intervenants au niveau de corporations d'installateurs, de sorte que nous avons apporté des modifications récemment lors du dernier conseil d'administration d'Hydro-Québec de février. Nous avons proposé des modifications, et ce règlement est présentement dans sa phase finale d'approbation. Ce sera une amélioration. Aussi, nous aurons un règlement qui régira de façon uniforme, pour l'ensemble des consommateurs, les différentes conditions de fourniture d'énergie.

M. Rivard: Merci, M. Boivin.

Le Président (M. Charbormeau): M. le député d'Ungava, vous n'avez pas d'autres questions d'ordre général. On va commencer immédiatement l'étude des marchés internes. M. le ministre.

Marché interne

M. Ciaccia: M. le Président, on est très conscient que, sur le marché interne, c'est le marché industriel qui offre le plus grand potentiel d'expansion. Vous en faites d'ailleurs mention dans votre plan de développement. Il existe actuellement des programmes pour pénétrer ce marché. Nous en avons parlé au début des travaux de la commission. M. Boivin a parlé de certains de ces programmes, ce matin. J'aimerais, M. Coulombe, que vous nous fassiez part plus globalement de votre stratégie de pénétration de ce marché.

M. Coulombe: Je vais demander à Claude de préciser davantage. Je pense qu'il faut mettre l'accent sur l'ensemble de nos programmes et sur le virage qu'on a pris l'an dernier surtout avec le programme de partage de risques avec l'industrie. Je demanderais à M. Boivin de préciser un peu plus là-dessus sans oublier la question des électrotechnologies qui est extrêmement importante au point de vue industriel au Québec.

Partage des risques

M. Boivin: Concernant le grand virage que nous avons amorcé, l'an dernier, du côté commercial, nous avons eu, au cours des dernières années, un certain nombre de programmes qui visaient à éliminer le plus rapidement possible les surplus. Donc, on avait des programmes de vente à rabais, le programme des bouilloires où nous avons vendu beaucoup d'énergie excédentaire. Cette phase étant, à toutes fins utiles, terminée, nous avons orienté notre stratégie vers le développement d'un marché rentable où l'avantage comparatif de l'hydroélectricité peut être un facteur important. Quand on regarde la situation des différents marchés, dans le marché domiciliaire, il est évident que l'électricité, présentement, a atteint ce qu'on peut qualifier je pense de maturité. Le marché de l'électricité, dans le secteur domestique, représente au-delà de 60 % du chauffage d'espaces et tout près de 80 % des applications de chauffage de l'eau. Les autres applications peuvent être qualifiées de captives, telles que la réfrigération, la cuisson, l'éclairage, les appareils audio. Dans le marché domiciliaire, nous avons atteint la maturité. Il reste, comme possibilité de croissance, particulièrement, le marché industriel où l'avantage comparatif de l'hydroélectricité est important pour le Québec et assez unique par rapport au reste de l'Amérique du Nord. Du côté du marché commercial, là également, c'est un marché où nous avons atteint une certaine maturité même si elle n'est pas aussi avancée que dans le secteur domestique.

Nous avons développé deux grands axes ou deux grandes stratégies. L'un touche tout d'abord la gestion de la consommation, c'est-à-dire, notamment, dans le marché commercial où, - pour les applications thermiques - notre position concurrentielle est défavorable. Par contre, nous pouvons offrir une tarification hors pointe qui, à ce moment, est très avantageuse pour la clientèle. Donc, dans ce marché, nous travaillons avec les programmes biénerqie qui comportent déjà des tarifications particulières. Quand je dis particulières, cela ne veut pas dire que ce sont des tarifications ou des tarifs à rabais. Cela comporte des tarifs hors pointe hautement concurrentiels avec les autres sources d'énergie pourvu qu'en période de pointe, dans les très qrands froids en hiver, une autre source d'énergie prenne la relève.

D'ailleurs, ces programmes ont eu un très qrand succès. Les programmes historiques se sont terminés. Nous avons proposé, en fait, pour l'année 1987 un nouveau programme pour continuer dans ce secteur. Pour parler de façon plus précise du développement du marché industriel, nous avons deux stratégies ou deux façons d'aborder les choses pour faire bénéficier les industriels du Québec de l'avantage de l'hydroélectricité. La première stratégie va aux entreprises énerqivores, c'est-à-dire les entreprises pour lesquelles les coûts de l'électricité représentent une part importante, substantielle des coûts de production. À ce moment, nous avons remplacé le programme de rabais tarifaire, qui nous a permis d'écouler des surplus, par une stratégie de partage de risques et des

bénéfices. Partage de risques, présentement, je dirais que c'est plus un concept. Cela peut se traduire par de nombreuses formules, mais des formules conçues et adaptées sur mesure pour tenir compte de la situation particulière du client. Des exemples de cela, nous en avons. Il y en a un qui a été mentionné ce matin, le contrat avec la norvégienne Norsk Hydro en vue de l'implantation d'une usine de magnésium à Bécancour. Nous avions eu un contrat semblable avec la compagnie QIT-Fer et Titane de Sorel dont nous avions parlé Pan dernier. Nous avons présentement six contrats de ce genre, soit auprès de nouvelles entreprises ou auprès d'entreprises existantes qui veulent prendre de l'expansion ou qui étaient en difficulté. Nous sommes présentement en négociation avec six ou sept autres clients industriels suivant la même approche. Cette approche signifie fondamentalement qu'Hydro-Québec est prête à absorber une partie des aléas ou une partie des risques de la conjoncture sur un horizon de 10 ans, 15 ans ou 20 ans avec le client. Ainsi, les tarifs d'électricité pourront, à l'intérieur de certaines balises, être modulés soit selon la rentabilité même de l'entreprise ou selon l'évolution des prix des produits de ces entreprises, la plupart d'entre elles vendant ces produits sur le marché international. Ces formules de partage de risques sont également assorties ou comportent également des formules de stabilisation tarifaire ipso facto, donc certaines garanties sur l'évolution des tarifs d'électricité, de sorte que pour l'entreprise qui doit investir des montants importants pour une nouvelle usine ou pour une expansion, Hydro-Québec est prête à partager avec elle le risque qu'elle prend sur sa rentabilité future. À venir jusqu'à maintenant, je pense que nous sommes la seule compagnie d'électricité en Amérique du Nord à offrir ce genre de formule. C'est une approche qui a un potentiel très intéressant tant pour Hydro-Québec que pour sa clientèle.

Le deuxième volet de notre action s'adresse surtout à nos entreprises existantes au Québec et veut remplacer dans les différents procédés industriels des sources d'énergie conventionnelle de type fossile par des technologies électriques plus performantes. En général, ce genre d'initiative implique pour la compagnie ou pour le client des investissements assez importants qui sont souvent un obstacle à la modernisation. À ce moment, Hydro-Québec a développé et a, depuis deux ans maintenant, un programme d'implantation des électrotechnologies qui fait qu'on est prêt à offrir des subventions qui, fondamentalement, sont équivalentes à un an et demi de la facture d'électricité en vue de remplacer des procédés énergivores par des procédés électriques beaucoup plus efficaces.

On pourrait donner plusieurs exemples de- cela, mais comme ordre de grandeur, à ce jour, nous avons engagé un montant de 22 000 000 $ dans des subventions pour la réalisation de 185 ou 186 implantations d'électrotechnologies de toutes sortes dans l'industrie québécoise.

M. Ciaccia: Vous mentionnez, M. Boivin, que le programme de partage des risques s'applique aux nouvelles entreprises. Je pense que vous l'avez mentionné, mais je voulais juste que vous l'expliquiez un peu parce que les représentations qu'on nous fait, parfois, sont en ce sens que vous avez des programmes spéciaux pour attirer de nouvelles industries. Avez-vous des programmes pour encourager l'expansion des industries existantes? Votre programme de partage de risques peut s'appliquer aussi aux industries qui existent au Québec mais qui veulent prendre une expansion importante.

M. Boivin: Vous avez parfaitement raison, M. le ministre. Effectivement, notre programme de partage des risques s'adresse à de nouvelles entreprises, mais également à des entreprises existantes qui veulent prendre de l'expansion et même à des entreprises existantes qui sont en période difficile. Un exemple de cela est la compagnie QIT que je mentionnais tantôt. En fait, au moment où nous avons négocié avec elle un contrat de partage de risques, elle était en difficulté. Effectivement, le contrat que nous avons néqocié avec Gette entreprise existant depuis de nombreuses années au Québec lui a permis non seulement de prendre des risques additionnels, mais de faire de nouvelles percées sur le marché, d'investir dans une mini-aciérie pour valoriser la fonte en gueuse qui était un sous-produit avec lequel elle était aux prises, de sorte qu'aujourd'hui, en fait, c'est une entreprise qui va très bien. Je pourrais en mentionner d'autres, parce qu'il y a certaines autres entreprises au Québec avec lesquelles nous sommes en discussion, ou avec lesquelles nous avons conclu des contrats de ce type.

Attrait de nouvelles industries

M. Ciaccia: Étudiez-vous ou envisagez-vous d'autres possibilités de nouveaux programmes ou des programmes additionnels pour encourager de nouvelles industries soit à venir au Québec, soit à faire de nouveaux investissements, ou même pour augmenter la possibilité que des industries qui existent déjà au Québec puissent transformer leur produit au Québec plutôt que de l'exporter et de le transformer ailleurs?

M. Coulombe: L'une des dimensions importantes est la transformation de produits

finis au Québec de ces grands utilisateurs d'électricité. Quant aux grands utilisateurs d'aluminium ou de magnésium, il est extrêmement intéressant pour l'économie du Québec d'avoir ces grands producteurs. Mais, si cela sort continuellement du Québec en lingots, on perd peut-être des occasions. On ne se fait pas d'illusion sur la possibilité avec le marché interne du Québec d'avoir une transformation complète parce qu'on ne voit pas comment le marché pourrait supporter ce genre de choses-là, mais il reste néanmoins qu'il pourrait y avoir des programmes spécifiques pour l'aspect de la transformation ultérieure de ces produits. On est en train de réfléchir là-dessus. En toute honnêteté, on n'a pas de programme de ce genre encore arrêté, mais on réfléchit là-dessus. De plus, je sais que notre programme de partage de risques est un programme intéressant pour un grand utilisateur, mais ce n'est pas un programme de rabais tarifaire. Comment attirer de nouvelles industries indépendamment du problème de la transformation au Québec? II y a un comité qui existe actuellement entre le gouvernement et nous. Il a commencé à se réunir pour creuser cela. (15 h 30)

Tout ce que nous pouvons dire là-dessus, c'est qu'on serait extrêmement réticent à revenir à des périodes de rabais purs et simples des tarifs d'électricité parce qu'on est convaincu que des rabais purs, indépendamment des coûts à l'Hydro, strictement en termes de développement industriel, ce n'est pas une bonne méthode pour attirer l'industrie. Non seulement des rabais tarifaires coûtent énormément cher mais de plus, cela n'incite pas l'industrie à se moderniser lorsque la conjoncture est changeante. C'est l'expérience des 25 dernières années à l'Hydro où il y a eu plusieurs centaines de millions de rabais tarifaires, plusieurs centaines de millions de dollars dans des secteurs industriels qui se sont trouvés en difficulté à un moment donné. On travaille surtout pour essayer de trouver des idées innovatrices quant à la transformation. On n'en a pas encore d'arrêtées, mais on travaille là-dessus.

M. Boivin: Un des problèmes qu'on a avec l'approche de la transformation comme le dit M. Coulombe, on a plusieurs études en cours à ce sujet - c'est que dans la transformation, en règle générale, l'électricité est un facteur marginal ou faible dans les coûts de production. L'avantage comparatif, à ce moment-là, de l'hydroélectricité se fait moins sentir. Il faut donc essayer de se creuser la tête pour inventer de nouvelles formules, de nouvelles façons de voir les choses.

M. Ciaccia: Sur un autre sujet, le plan de développement prévoit un taux de croissance moyen de la demande interne de 2,7 %. Est-ce que vous pourriez nous dire comment cela peut se traduire, ce que cela peut représenter annuellement en mégawatts, et pourriez-vous nous illustrer ce que cela peut représenter en termes d'installation?

M. Neveu: Est-ce qu'on pourrait avoir la diapositive no 21?

Ce matin, je vous ai présenté un graphique qui représente la demande totale, donc qui inclut également les exportations. Je vous ai présenté le graphique en térawattheures, c'est-à-dire qui représente les installations d'équipement de base. Quant aux mégawatts, vous avez le même graphique ici avec la demande totale, incluant les 3500 mégawatts d'exportation. Là, on retrouve non seulement les installations dont je vous ai parlé ce matin, mais également les installations de pointe. Ainsi, pour satisfaire à la croissance de la demande, actuellement, on a un parc qui dispose de 28 000 à 29 000 mégawatts, avec une mise en service de Manic 5 en 1989 - on devrait alors satisfaire les besoins jusqu'en 1992 - suivie du LG 2 A qui nous mène jusqu'en 1995. C'est là que LG 1 et la pointe additionnelle entrent en service pour satisfaire les besoins par la suite, suivi de LA 1 et de Brisay, Sainte-Marguerite en 1998 et Grande Baleine en 1999.

M. Ciaccia: Est-ce qu'on pourrait dire que les 2,7 % de croissance annuelle peuvent représenter 800 ou 900 mégawatts par année? Est-ce qu'on pourrait traduire cela en ces termes?

M. Neveu: Je pourrai vous donner la réponse détaillée.

M. Ciaccia: Pour clarifier, non seulement en termes de devancements ou de projets, mais tous les ans, si c'est 2,7 %, qu'est-ce que cela représente? 800 ou 900 mégawatts?

M. Boivin: Vous avez raison. Par exemple, à l'horizon 1989, environ 30 000 mégawatts, la demande de pointe, si on ajoute à cela un taux de croissance de l'ordre de 2,7 %, prenons 3 %, 3 % de 30 000, cela veut dire 900 mégawatts par année, plus ou moins.

M. Ciaccia: Quel barraqe produit à peu près 900 mégawatts? LG 1, c'est à peu près 1300. Cela représente vraiment un nouveau barraqe tous les ans. Naturellement, Grande Baleine, c'est 2900 mégawatts; alors quand vous construisez à Grande Baleine, c'est à une étape où vous avez besoin de 2900 mégawatts. Juste pour essayer de comprendre, la demande interne du Québec

peut représenter un nouveau barrage par année de 900 mégawatts.

M. Coulombe: En fait, cette expression peut être utilisée. Il faut distinguer entre la puissance de pointe et la puissance de base. Évidemment, quand on parle de barrage, on se réfère surtout à des équipements de puissance de base. Prenez, par exemple, LG 2 A. Ce sont des machines de plus qui sont installées, ce sont des turbines de plus. Cela n'ajoute pas à l'énergie totale produite, cela intensifie la production de l'énergie dans une période de l'année quand on parle de pointe. Des centrales de base... Évidemment, c'est très difficile aussi de découper les projets en blocs de 900 mégawatts. Il y a des projets qui ne sont pas économiques à décomposer en 900 mégawatts; donc, cela fonctionne un peu comme des marches d'escalier. À un moment donné, cela va se stabiliser, il va y avoir des surplus temporaires; les autres projets vont rentrer...

Prenez le NBR qui a 7000 ou 8000 mégawatts; c'est très difficile de le décomposer en blocs de 900 mégawatts. Vous avez raison, comme stratégie générale ou comme investissement global, c'est l'équivalent, si les prévisions de la demande sont correctes. Maintenant, dans la réalité, cela ne se produira pas ainsi, mais c'est l'équivalent.

M. Ciaccia: Merci.

Le Président (M. Théorêt): M. le député de Roberval et critique officiel, je vous cède la parole.

Coût en période de pointe

M. Gauthier: Merci, M. le Président. Je m'excuse d'avoir troublé vos savantes discussions avec le ministre. Une question me préoccupe concernant la demande à l'interne. C'est la suivante. On sait que dans un contexte de surplus d'énergie - c'est le cas actuellement et encore pour quelques années - la préoccupation d'Hydro-Québec... Avant toute chose, je vais expliquer le contexte. J'essaie de me situer comme le font l'ensemble des citoyens qui nous écoutent, qui suivent une commission parlementaire comme celle-là et qui se demandent un peu pourquoi Hydro-Québec, d'une part, parle de programmes pour stimuler, disons-le, la consommation d'électricité à l'interne et, d'autre part, parle de réduire la consommation par des programmes de biénergie, par exemple, ou d'autres du genre.

Il faut comprendre que dans un contexte de surplus, le défi qui s'offre, qui se présente plutôt à une entreprise comme Hydro-Québec, c'est d'augmenter, évidemment, la consommation, l'utilisation de l'électricité dans les périodes plus tranquilles de l'année et de diminuer en quelque sorte l'utilisation de l'électricité en période de pointe. Il y a, lors de la période de pointe, sauf erreur - vous me corrigerez si je me trompe - un coût extrêmement élevé pour fournir de l'électricité. II s'agit d'installations qui coûtent cher, il faut bien le dire, et qui, de façon générale, vont servir pendant quinze jours, une semaine, quelques jours ou même pas du tout.

On m'a dit - d'ailleurs, on en a déjà causé, on a déjà échangé des avis sur ce sujet - qu'Hydro-Québec possédait des équipements de pointe et que ces équipements n'étaient que peu ou pas du tout utilisés. J'aimerais que le président-directeur général ou quelqu'un d'autre, peu importe, nous fasse un portrait de ce que sont ces équipements de pointe et nous donne une idée de l'impact que cela peut avoir sur le coût du kilowatt en période de pointe. Cela nous aiderait à comprendre pourquoi il faut absolument essayer de réduire cette pointe.

M. Coulombe: Vous avez parfaitement raison de dire que pour la population, c'est complexe. Les citoyens disent: Ces gens ont des programmes pour réduire la construction et ils vendent pour devancer les équipements; cela a l'air contradictoire, mais ça ne l'est pas. Les équipements qu'on ne veut pas construire sont des équipements de pointe, comme vous l'avez dit, qui ne servent que quelques heures ou quelques dizaines d'heures par année, un certain type d'équipements. On n'est pas intéressé à immobiliser des centaines de millions de dollars dans des équipements qui ne servent que quelques heures. Évidemment, l'hiver, notre organisation étant telle, on ne pourra jamais éviter qu'il y ait de grosses journées dans l'année où il faudra des équipements. Si on peut avoir des programmes... C'est l'aspect commercial, c'est-à-dire qu'on va faire des programmes qui vont augmenter la consommation dans les périodes où on utilise moins nos équipements et on va diminuer la pointe.

Il y a plusieurs types de pointe: la pointe de quelques heures par année. Habituellement, ce qui est bâti dans ce temps-là, ce sont des centrales, des turbines à gaz. Ce n'est pas une technologie qu'on contrôle, ce n'est pas une technologie dans laquelle on a des choses particulièrement brillantes à dire ou à faire parce que c'est reconnu partout, etc. Donc, on n'a pas d'intérêt particulier ni pour cette technologie-là, ni pour les retombées économiques de ça ou les investissements nécessaires. Là-dessus, je demanderais à Jean-Claude Roy de nous dire, quant aux deux centrales de turbines à gaz qu'on a à Cadillac et dans le sud de Montréal, quelle a été leur utilisation dans les cinq dernières années.

Vous avez une pointe un peu plus longue pendant plusieurs dizaines d'heures. Là, on peut aller dans les centrales thermiques comme Tracy. Encore là, M. Roy pourra en parler un peu plus.

Vous avez aussi une pointe un peu plus longue de quelques centaines d'heures. Là, on tombe dans du suréquipement comme on le fait à LG 2 A et comme on a l'intention de faire - vous l'avez vu ce matin - à Manic 1, Manic 2, Manic 3, et comme on fait à Manic 5 aussi. C'est donc du suréquipement hydraulique. On ajoute des turbines. Cela ne change pas l'énergie totale, mais cela concentre la fabrication d'énergie. On ajoute donc des groupes.

Ce sont les trois types de projets de pointe. Le premier n'est carrément pas intéressant pour nous autres. Le deuxième, Jean-Claude Roy expliquera comment on se sert de la centrale de Tracy. Quant au troisième, le suréquipement hydraulique, il peut être un peu plus intéressant. D'abord, la période est beaucoup plus longue et, encore là, on tombe dans des technologies qui sont connues et dans des sites connus, ce qui rentabilise l'ensemble de l'équipement en place. C'est le cas de la rivière La Grande, par exemple, où LG 3, LG 4 et LG 2 vont être suréquipés. Quand on construira LG 1, on le construira suréquipé. Jean-Claude.

M. Roy (Jean-Claude): Nous avons actuellement, dans le réseau, la centrale Cadillac en Abitibi qui fait à peu près 160 mégawatts. C'est une centrale de turbines à gaz. On s'en sert très très peu parce que les coûts de production, seulement les coûts d'huile qu'il faut brûler pour la centrale, sont de l'ordre de 0,07 $ à 0,08 $ du kilowattheure. Quand on le vend à 0,03 $ ou 0,04 $, évidemment, il n'y a aucun intérêt. C'est donc une centrale dont on se sert uniquement pour se dépanner et, principalement dans la région de l'Abitibi. Si on a des problèmes de transport entre le réseau de l'Abitibi et le réseau principal, on démarre la centrale Cadillac. C'est arrivé à quelques reprises au cours des dernières années qu'on s'en est servi. On peut s'en servir également comme la centrale la Citière qui est tout près de Montréal, au sud de Montréal. C'est également une centrale de turbines à gaz dont les coûts de production sont à peu près similaires. On s'en sert uniquement en pointe lorsqu'on a de la difficulté à faire face à notre demande interne. Cela arrive quelques heures par année. On s'en est servi quelquefois cette année, quelques jours durant quelques heures seulement. C'est simplement que les coûts sont trop élevés.

M. Coulombe: Ce sont des investissements de combien pour les deux centrales?

M. Roy: C'était de l'ordre de 200 $ du kilowatt lorsque cela a été construit. Cela a été construit très rapidement. Maintenant, c'est près de 800 $ du kilowatt, les coûts de construction.

M. Gauthier: Vous voulez dire que dans les équipements comparables, cela coûterait 800 $...

M. Roy: Pour construire une nouvelle centrale de turbines à qaz dont on se sert seulement en pointe pour se dépanner, le coût d'investissement est de l'ordre de 500 $ du kilowatt et les coûts de fonctionnement sont de l'ordre de 0,06.5 $, donc de 0,06 $ à 0,07 $ du kilowattheure, les coûts d'utilisation.

Il y a aussi la centrale de Tracy, une centrale thermique où on brûle de l'huile. Ce n'est pas une centrale de turbines à gaz, c'est une centrale où on peut avoir un facteur d'utilisation plus élevé. Les coûts de cette centrale sont de l'ordre de 0,03 $ à 0,04 $ du kilowattheure. (15 h 45)

Encore là, c'est déjà au-dessus de nos coûts normaux d'hydraulique pour le fonctionnement. D'elle aussi, on s'en est servi cet hiver à quelques reprises. Évidemment, c'est une centrale thermique de base; donc, il faut la réchauffer longtemps à l'avance. Alors, il y a des coûts pour la réchauffer et, quand on la produit, cela aussi coûte très cher.

M. Gauthier: Quand vous parlez de coût d'utilisation, si je comprends bien, dans les 0,03 $ à 0,04 $, vous n'incluez pas du tout la question de l'investissement.

M. Roy: Non, c'est uniquement le coût de l'huile.

M. Gauthier: C'est strictement pour la faire fonctionner.

M. Roy: Le coût de l'huile, les coûts d'entretien. Ce sont uniquement les coûts de fonctionnement.

M. Gauthier: D'accord. J'imagine qu'au moment où ces équipements ont été construits, c'était l'utilisation qui était prévue, c'est-à-dire que c'était au cas où, point à la ligne; ou encore, est-ce que le fait que vous vous en serviez si peu, c'est un élément nouveau pour Hydro-Québec?

M. Roy: Non. La centrale de Tracy, qui est une centrale thermique conventionnelle, avait été construite dans le temps par Shawinigan Water and Power, avant la nationalisation.

M. Gauthier: C'est très vieux.

M. Roy: C'était un moyen d'aller vers sa nouvelle production. C'était le secteur thermique à ce moment-là. Quand cela a été nationalisé, cela a fait partie du parc de production et, évidemment, vu que nous avons beaucoup d'hydraulique, on ne s'en sert pas...

M. Coulombe: II faut mentionner que la centrale de Tracy datait d'il y a si longtemps qu'il a fallu, il y a trois ou quatre ans, y investir 50 000 000 $ pour des questions d'environnement.

M. Gauthier: D'accord.

M. Boivin: Je voudrais revenir sur ce que vous mentionniez pour la clientèle, ce qui semble une incohérence: En période de surplus on veut vendre et, après, on dit qu'on veut ménager. Si on regarde la période de surplus, on a vendu de l'excédentaire dans les bouilloires industrielles, dans un marché limité dans le temps, et on disait: À la fin, quand on n'en aura plus, on débranchera ces installations-là. Par contre, le secteur domestique, au début des années quatre-vingt, de toute façon, était en train de se convertir massivement au chauffage électrique. Plutôt que de le laisser faire de façon anarchique, c'est-à-dire la conversion à l'électricité, vu que c'étaient des marchés avec lesquels on devait composer à long terme, c'est là qu'on a développé le programme biénergie, dans le secteur domestique, et on a dit à nos clients du secteur domestique: On est prêt à vous subventionner pour vous convertir à l'électricité - donc, cela nous aidait à écouler les surplus - mais pas pour vous convertir n'importe comment. Vous allez vous convertir en gardant votre système au mazout et en installant un système électrique; donc, vous aurez un système biénergie qui va permettre d'utiliser de l'énergie hors pointe, donc de maximiser l'utilisation des installations que nous avons et qui ne taxera pas nos installations en pointe. Aujourd'hui, ces installations, à toutes fins utiles, avec 140 000 logements biénergie, éliminent à peu près 700 mégawatts aux heures de pointe au réseau pendant 200 à 300 heures par an. La politique que nous avions était cohérente non seulement en vue d'écouler les surplus, mais en vue d'assurer des marchés qui étaient rentables pour Hydro-Québec et pour le consommateur à long terme.

Biénergie et télécommande

M. Gauthier: D'accord. Une brève question supplémentaire, puisqu'on prend bien conscience de l'importance pour Hydro-Québec, justement, de diminuer la consommation à la pointe, surtout celle de quelques heures, non seulement qui risque, mais qui coûte extrêmement cher aux contribuables. Vous avez parlé de la biénergie et, l'an dernier, vous aviez le fameux programme de commande à distance, à partir d'Hydro-Québec, pour la gestion du chauffage dans des résidences privées sur la rive sud. Vous l'avez peut-être fait tout à l'heure et j'ai pu perdre un instant de l'échange avec le ministre. Si c'est le cas, vous m'en excuserez, mais si ce n'est pas le cas, j'aimerais que vous nous en fassiez un bilan très bref. Où cela en est-il? Quelle est la quantité de foyers qu'on veut atteindre dans les prochaines années? Est-ce qu'on peut s'attendre que d'ici à quelques années, dans une perspective de quelques années, vous mettiez là-dessus un accent tout à fait particulier?

M. Boivin: Nous avons indiqué l'an dernier que nous avions un programme expérimental pour valider deux choses au sujet de la télécommande. Premièrement, faire une expérience pilote pour faire un choix éclairé, après expérience, de la technologie la mieux adaptée à la télécommande. Deuxièmement - volet également très important - vérifier l'acceptabilité de l'apport à la clientèle d'avoir des charqes dans leurs installations qui sont télécommandées par Hydro-Québec. Ce programme est présentement appliqué à peu près tel que nous vous l'avions expliqué l'an dernier avec, cependant, un retard sur l'échéancier d'environ quatre mois. Nous vous avions indiqué l'an dernier, si ma mémoire est bonne, que nous envisagions avoir une centaine de clients qui seraient télécommandés dans la région de Brassard pour l'hiver 1986-1987. Présentement, il y en a seulement cinq ou six. Dans les mois qui viennent 400 autres vont être installés, et vraiment, on aura les résultats de cette expérience après la prochaine saison de chauffage.

Parallèlement à cela, nous introduisons cette année un tarif biénergie et un programme de maintien du parc biénergie qui va s'adresser à toute notre clientèle domestique qui a présentement un système biénergie, donc, un tarif préférentiel au sens que ce n'est pas un rabais qu'on lui donne. Comme ces clients coûtent moins cher à servir - parce qu'en période de pointe ils effacent leurs charqes, ils évitent des coûts d'investissement dans des centrales à qaz -on va les facturer au coût réel, en fait ce que cela nous coûte, en tenant compte de l'économie que nous faisons. C'est là une économie pour ces clients d'environ 140 $ à 180 $ par année sur leurs factures énergétiques totales.

M. Gauthier: Là-dessus, pour être sûr que j'ai bien compris, l'économie de 140 $ à

180 $ estimée pour ces clients se traduit, si j'ai bien saisi, par l'économie qu'Hydro estime faire sur le fait que ces gens ne demandent pas de puissance à ce moment.

M. Boivin: C'est exact. C'est-à-dire que nous transmettons directement au consommateur une partie de l'économie que nous faisons. Ce programme de tarifs particuliers va être assorti d'un programme d'entretien ou d'un programme d'assurance-entretien de l'installation qui va prendre une autre partie des économies. Le reste des économies, finalement, est réparti chez l'ensemble de notre clientèle, dans le sens que cela va avoir comme résultat net de maintenir nos coûts de fourniture plus bas qu'ils auraient été s'il avait fallu immobiliser dans les turbines à gaz.

Le Président (M. Théorêt): Merci. Juste une question. Est-ce que ce programme connaît une croissance importante? Est-ce qu'il est populaire? Est-ce que vous l'annoncez beaucoup ou si vous avez l'intention de le faire?

M. Boivin: C'est-à-dire que le programme d'implantation de la biénergie au secteur résidentiel est terminé depuis un an. Donc, nous n'avons plus de subvention pour la conversion de systèmes de chauffage vers la biénergie dans le secteur résidentiel. Nous avons eu, à peu près, 148 000 installations, comme on a indiqué ce matin. Hydro-Québec doit prendre action maintenant. Présentement, le client qui a un système de biénergie paie le même tarif d'électricité que le client qui a un système tout à l'électricité, et il doit maintenir deux systèmes de chauffage en bon état de fonctionnement. Il doit également acheter du mazout pour faire fonctionner son système en période de pointe. Donc, le coût de fonctionnement d'un système biénergie sans tarif adapté serait théoriquement plus cher que le coût d'un système tout à l'électricité.

C'est cette situation que nous voulons corriger par le tarif que nous proposons présentement dans le règlement tarifaire qui est devant vous.

Le Président (M. Théorêt): Merci. On parle toujours du marché interne. Je cède la parole au ministre. Est-ce qu'il y a d'autres collègues qui ont des questions à poser au sujet du marché interne? M. le député de Roberval.

M. Gauthier: Une question qu'il serait intéressant de poser rapidement. Concernant les programmes généraux de conservation de l'énergie à l'interne, sauf ces programmes particuliers qui visent des clientèles bien spéciales et à des moments bien précis, est-ce qu'il existe encore de ces programmes d'économie d'énerqie qui permettaient globalement et de façon générale de réduire la pression qui pourrait être trop grande sur la demande?

M. Boivin: Concernant le secteur résidentiel, les différents programmes d'amélioration énergétique sont terminés parce qu'ils ont atteint les résultats visés. Au secteur résidentiel, je pense qu'on peut dire aujourd'hui que la majorité des résidences du Québec a amélioré son enveloppe thermique grâce à ces différents programmes. Je pense, entre autres, au programme Énergain Québec qui était administré par Hydro-Québec. Le potentiel de l'économie d'énergie au secteur domestique est maintenant beaucoup plus faible qu'il l'était. Le gros de l'effort a été fait. Un endroit où il reste énormément de possibilité d'amélioration énergétique, c'est dans le secteur industriel. Dans le secteur industriel, notre programme d'implantation des électrotechnologies vise exactement à remplacer des technologies à faible performance avec des combustibles fossiles par des technoloqies électriques à haute performance. On travaille présentement au niveau de la conservation d'énergie ou de l'efficacité énergétique dans le secteur où le potentiel est le plus important, soit dans celui des procédés industriels.

M. Coulombe: Je voudrais rajouter un point. Dans le cas des économies d'énergie, c'est très important parce qu'on a vu des groupes, le groupe SVP, ainsi de suite, reprocher à Hydro-Québec de ne pas tenir compte de l'aspect conservation d'énergie. Là-dessus, on a un dossier qui est extrêmement clair parce que, comme M. Boivin vient de le dire, on s'est rendu au bout dans le domaine résidentiel. On a une preuve extrêmement concrète: c'est qu'à la fin, les subventions qu'on donnait et l'argent que cela nous coûtait pour faire les inspections, ainsi de suite, étaient supérieurs aux dépenses que les individus faisaient pour faire de la conservation. On a atteint la limite. Au début, lorsque cela nous coûtait 100 $, il y avait pour 500 $, 600 $ ou 700 $ de réparations dans la maison, les fenêtres, ainsi de suite, mais à la fin du programme - c'était logique de l'arrêter -cela nous coûtait plus cher de l'administrer que les investissements qui étaient faits pour conserver l'énergie. À moins de chanqer radicalement toute la conception des maisons et des habitudes de vie des gens, on s'est rendu à la limite de ce programme de subventions pour la conservation d'énergie compte tenu de notre climat et des possibilités offertes aux gens. La preuve est extrêmement simple: cela nous coûtait plus cher à administrer que les sommes dépensées pour conserver l'énergie.

Le Président (M. Théorèt): Merci. S'il n'y a pas d'autres interventions sur le marché interne, nous allons passer au marché de l'exportation. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

Exportations

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Dans vos documents, on constate une baisse des revenus d'exportation entre 1985 et 1986. Ceci est sans doute imputable en bonne partie au prix du pétrole, qui a forcé HydroQuébec à réduire le prix de l'énergie excédentaire vendue au réseau américain. Pouvez-vous nous dire de quelle façon un contrat de type énergie-puissance tel que celui de Central Maine Power protège Hydro-Québec d'obtenir un prix au kilowattheure largement supérieur à celui que la société obtient, actuellement, dans ces contrats à l'exportation? Peut-on conclure que le type de contrat d'énergie-puissance contribuera à donner aux Québécois, dans l'avenir, des tarifs plus stables et qui pourraient même être réduits?

Une voix: Vas-y, Jacques. M. Guevremont est vice-président exécutif pour les marchés externes.

M. Guevremont (Jacques): La plupart de nos ventes actuelles, disons environ 75 %, sont faites comme vous le savez dans le marché interruptible. C'est un marché qui est là pour remplacer de l'électricité qui proviendrait d'usines existantes. En général, le prix qu'on vend est environ 80 % du prix que cela coûterait pour générer cette électricité à partir de sources existantes. Or, le contrat de Central Maine Power n'est pas bâti du tout de cette façon. Il n'a aucune relation directe avec le combustible fossile, qui est généralement ce qu'on remplace. En Ontario, c'est le charbon et aux Etats-Unis et au Nouveau-Brunswick, c'est généralement le pétrole. Le contrat de Central Maine Power n'a pas de relation établie avec les combustibles fossiles. Le contrat de Central Maine Power est basé sur une indexation répartie grosso modo en deux parties, dont une représente la partie investissements indexée à un index qu'on appelle Whitman, qui est un indice représentant le coût de construction de centrales thermiques au nord-est des États-Unis. L'autre partie de ce contrat est basée sur GNP Implicit Price Deflator, qui est un indice très large aux États-Unis. On n'aura pas dans ce genre de contrat ferme de relation d'établie avec les combustibles fossiles.

Une voix: En relation avec les tarifs. (16 heures)

M. Guevremont: En relation avec les tarifs. C'est que les rendements sur les devancements pour alimenter un tel contrat font qu'on s'assure, dans la négociation d'un tel contrat, qu'on a un rendement supérieur à ce qu'on obtiendrait dans nos investissements au Québec, donc une marge de profit suffisante. De ce profit additionnel qu'Hydro-Québec obtiendra par ce genre de contrat résultera un impact négatif sur les tarifs, c'est-à-dire que cela aura pour effet de maintenir ou de diminuer les tarifs à long terme, et, à court terme, les investissements. De la façon dont ce contrat sera alimenté, on ne voit aucune influence sur les tarifs du Québec.

M. Ciaccia: Vous dites que vous ne voyez aucune influence. Autrement dit, l'augmentation des tarifs que vous demandez aujourd'hui, les 4,6 %, cela n'a rien à faire du tout avec le contrat de Central Maine. Vous ne demandez pas une augmentation de tarifs pour donner suite au contrat de Central Maine.

M. Guevremont: II n'y a aucune relation, M. le ministre. D'autant plus que, comme vous le savez, nous avons signé une lettre d'entente. Le contrat lui-même n'est pas signé et, de toute façon, même s'il était signé, il n'y a aucune relation, le contrat doit être lui-même payant; il ne doit pas -ce sont des critères assez bien établis aller chercher des revenus d'Hydro-Québec qui sont obtenus d'autre part par sa clientèle interne. Il n'est pas question de négocier ou dépasser un contrat avec des entreprises où on aurait une charge additionnelle pour Hydro-Québec.

M. Ciaccia: Autrement dît, le contrat lui-même va fournir des revenus additionnels...

M. Guevremont: C'est cela. M. Ciaccia: ...à Hydro-Québec.

M. Guevremont: C'est cela, absolument, il fournira des revenus. On a donné le chiffre de 13,5 % sur l'investissement global, non pas sur l'équité d'Hydro-Québec, mais sur l'investissement global; 13,5 % est un revenu adéquat, croyons-nous, pour ce genre d'investissement.

M. Ciaccia: Merci.

Le Président (M. Théorêt): Si vous me le permettez, j'ai une question toujours dans la même veine. À moins que je n'aie mal compris, ce matin, dans l'exposé qu'on faisait concernant le portrait financier, on disait qu'à l'avenir, la vente d'électricité pour l'exportation, basée en fonction des coûts évités, devenait un risque additionnel. Ce que vous venez de dire me semble être le

contraire, c'est-à-dire que c'est beaucoup plus sécuritaire et qu'on ne sera pas à la merci du prix du baril de pétrole ou du charbon, etc. Pourriez-vous m'éclairer là-dessus?

M. Coulombe: La notion de risque associée à ceci a donné lieu à beaucoup de débats. On dit là-dessus qu'il est bien évident qu'un contrat de 20 ou de 25 ans qui... Si on prend le contrat de Central Maine, on est persuadé d'avoir mis là-dedans toutes les possibilités de limites de risques, soit les facteurs d'utilisation, les bris d'équipements, etc. On a toute une série de clauses dans le contrat éventuel à être signé qui limite nos risques. Mais il reste quand même que c'est un contrat à long terme. Par rapport au tarif interne au Québec, l'actionnaire, le gouvernement, peut toujours agir rapidement, s'il arrive une catastrophe ou ainsi de suite. On est dans un contexte contractuel, de long terme; donc, en soi, c'est un élément différent du marché interne. C'est dans ce sens-là qu'on parle d'un risque un peu plus élevé: tout simplement parce qu'on est dans une relation contractuelle. En d'autres mots, s'il arrive quelque chose qu'on n'a pas prévu, même si on pense avoir tout prévu, il va falloir vivre avec le contrat qu'on a signé; c'est dans ce sens-là qu'on parle de risque. Mais associé à ce risque-là, il y a un rendement supérieur. C'est pour cela que pour tous nos contrats, notre objectif, dans la mesure où le risque est supérieur, c'est que le rendement soit supérieur. C'est pour cela qu'on parle de 13,5 % sur l'investissement total et d'un rendement sur l'équité qui est beaucoup plus élevé que 13,5 %. C'est supérieur à tout ce qu'on fait dans le marché interne, à tout ce que les Québécois paient, tout simplement parce qu'on est persuadé que c'est un investissement qui, ayant des risques plus grands, doit être rémunéré de façon plus grande, donc les prix sont en conséquence. C'est cela la notion de risque.

Le Président (M. Théorêt): Donc, sur le plan financier, les revenus sont beaucoup plus prévisibles et stables que s'ils sont basés sur le prix du baril de pétrole à 80 %.

M. Coulombe: Ah! Par rapport au pétrole, il est évident que le risque est beaucoup plus grand. Remarquez que si, pendant deux ou trois ans, le baril de pétrole est à 100 $, cela peut être très payant, mais si cinq ans après, il retombe à 10 $, c'est la catastrophe. Le contrat de Central Maine élimine ces risques-là. La marge de risque est plus étroite. Dans ce sens, c'est plus avantageux.

Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le député de Roberval.

Besoins financiers

M. Gauthier: M. le Président, j'aimerais qu'on m'explique quelque chose. Dans le plan de développement, on fait état à quelques endroits, principalement à la page 77 entre autres, du fait que le développement des marchés externes amène un risque accru et des éléments d'incertitude supplémentaires pour Hydro-Québec. Je pense que cela se conçoit; évidemment, quand on doit se lancer dans des constructions, quand on doit immobiliser et qu'on est, comme vous le dites, lié par un contrat, il y a des éléments d'incertitude. Hydro-Québec, sauf erreur, demande une marge de manoeuvre un peu plus grande, financièrement parlant, pour faire face à ces risques-là et à d'autres risques aussi qui coûtent cher. Il y a des questions de taux du change, des questions de taux d'intérêt, il y a bien des éléments qui entrent là-dedans. Est-ce que je me trompe en disant qu'un des éléments - en tout cas, je l'ai compris comme cela - que vous semblez indiquer comme un facteur de risque pour Hydro, justifiant une partie non quantifiée de la marge de manoeuvre nécessaire, c'est la vigueur des marchés externes?

M. Coulombe: Là-dessus, je pense qu'il faut être extrêmement clair. Lorsqu'on parle de risques accrus pour l'entreprise, on entend des risques internes. Il faut très bien séparer les deux aspects. Je vous ai dit tantôt que l'élément de risque dans le marché externe est assumé par une rémunération plus grande sur le capital investi. Le marché externe tient compte de ses propres risques. On demande des prix plus élevés à cause de cela. Donc, l'élément de risque des marchés externes est l'élément de prix. Ce qu'on peut vous dire dans le contrat de Central Maine, sans avoir une boule de cristal pour prédire l'avenir, c'est qu'on est parfaitement satisfait et le risque est rémunéré à sa juste valeur. Je ne vous donne pas de garantie pour les 5000 et 8000 autres mégawatts. Je n'en sais rien et je ne sais pas comment cela va finir comme négociation de prix. Quand on aura un deuxième contrat on pourra faire ou ne pas faire ces affirmations; mais, pour le contrat de Central Maine, on est convaincu.

Pour les risques internes, quand on parle de marge de manoeuvre de l'entreprise, c'est pour des risques internes. On a parlé ce matin d'une approche un peu plus volontariste. Plutôt que de s'asseoir et d'attendre de voir ce qui se passe, à partir de l'hypothèse que l'hydroélectricité est un avantage comparatif énorme pour le Québec, on se dit que cela vaut peut-être la peine de prendre des risques, mais des risques internes. On en a mentionné quelques-uns. On a dit, par exemple, qu'on va gérer nos

réservoirs de façon plus serrée. Plutôt que d'avoir des réservoirs où on a de l'eau à perte de vue, on va essayer d'augmenter la productivité. Mais il y a un risque là-dedans. Nous sommes convaincus que ce risque va être payant à long terme parce que, sans immobiliser, on va se servir de plus d'eau; donc, cela va être plus payant. Mais il se peut que - prenons une période où, pendant quatre ou cinq ans, il y a 15 % ou 20 % de moins d'hydraulicité, il y a moins d'eau, carrément - pendant un an ou deux ans, on soit obligé de faire démarrer la centrale de Tracy pendant 200 ou 500 heures au lieu de 25 heures par année. Cela va donc coûter plus cher cette année-là. C'est un élément de risque. On a donc un immense avantage à augmenter la productivité de notre parc de production. Par contre on augmente les risques, et c'est alors qu'on parle de marge de manoeuvre. Cela n'a rien à voir avec les marchés externes.

C'est un exemple que je vous souligne. Il y en a d'autres que je pourrais vous souligner. On a parlé, dans le cas des entrepreneurs, ce matin, du risque à moyen terme des travaux souterrains. Je pense que l'enfouissement des lignes dans les centres-villes va devenir une valeur un peu plus universellement reconnue. Les gens vont être de moins en moins satisfaits d'avoir des poteaux avec des lignes pour la distribution. Mais, il va falloir investir. Le souterrain coûte beaucoup plus cher. Ce sont des aléas que nous avons devant nous. Cela concerne les marchés internes. Et c'est pour cela que la marge de manoeuvre existe. Chaque fois qu'il surviendra quelque chose, on ne veut pas être obligé de dire à la clientèle: Écoutez, on a une immobilisation importante à faire dans le souterrain, on va augmenter les tarifs de deux fois l'inflation cette année parce qu'on a un problème. Notre grande force, c'est d'avoir une stabilisation des hausses tarifaires au point de vue industriel, et même au point de vue domestique. C'est une très grande force, c'est celle que l'hydroélectricité possède. Les autres formes d'énergie sont soumises à des aléas totalement différents, en plus, on ne les contrôle pas, et les aléas internationaux les affectent beaucoup plus considérablement que hydroélectricité.

Si on veut conserver cet avantage comparatif, la stabilisation de l'augmentation des prix, on dit: Cela prend une marge de manoeuvre pour faire face aux aléas qui s'en viennent.

M. Gauthier: Vous avez déjà mentionné que 3500 mégawatts qu'on réussirait à vendre sur les marchés externes amèneraient - c'est mentionné dans le plan - des investissements supplémentaires importants pour Hydro-Québec de l'ordre de 6 000 000 000 $, si ma mémoire est fidèle, en plus des coûts - je ne sais pas si c'est inclus ou pas - sur la fiabilité du réseau.

J'aimerais savoir quel est l'effet de ces investissements devancés sur les besoins financiers nets d'Hydro-Québec. Finalement, lorsqu'on se prépare à investir des sommes importantes comme celles-là, plutôt que de le faire pour les besoins internes, il y a un impact. Hydro-Québec a des besoins financiers plus importants et elle doit les couvrir parce qu'elle a des paramètres à respecter. J'aimerais que vous fassiez le tour de la question.

M. Coulombe: Je pense que dans le cas des perspectives financières, dans la mesure où la politique générale de rétablissement financier qu'on propose peut se tenir, je pense qu'on est dans une ère de risques parfaitement supportables par Hydro-Québec. Vous voyez les investissements de 37 000 000 000 $ mentionnés dans le plan, dont 28 000 000 000 $ ou 29 000 000 000 $ spécifiquement pour production-transport, on pense que c'est une marge de manoeuvre qu'Hydro-Québec peut parfaitement se permettre étant donné l'ampleur de l'entreprise et les besoins financiers stricts. On est certain d'en financer 25 % par l'équité, par les bénéfices accumulés, ainsi de suite. On voit qu'en 1989, on retrouve notre niveau de 25 %. Donc, la qénération interne d'équité ou de marge de manoeuvre propre à l'entreprise en finance 25 %. Les autres 75 % sur les marchés financiers, c'est dans des ordres de grandeur parfaitement compatibles avec une entreprise qui aura 8 000 000 000 $, 10 000 000 000 $, 12 000 000 000 $ de revenus par année au milieu des années quatre-vingt-dix.

Un autre aspect qu'on a mentionné l'an dernier et qu'on retrouve dans le plan, c'est lorsqu'on parle de la troisième phase des exportations, c'est-à-dire des blocs peut-être plus considérables qui vont nécessiter de grandes interconnexions nouvelles. Là, le problème du financement est à l'étude; on vous l'a dit l'an dernier et on a continué de le faire. On pense qu'il y aurait peut-être des méthodes différentes de financement qui pourraient intervenir au niveau de ces grands contrats. Mais on n'a pas de proposition à faire aujourd'hui, on continue d'y penser, soit du "project financing", soit des financements de type différent, partagés, ainsi de suite. C'est à l'étude à l'heure actuelle. Dans l'horizon des 3500 mégawatts, on ne voit pas de problèmes fondamentaux de financement pour Hydro-Québec.

M. Gauthier: Si les besoins financiers nets d'Hydro-Québec sont plus importants, et de façon pas mal significative, est-ce que cela ne risque pas, à un moment donné, d'avoir un impact quelconque sur les tarifs à

l'interne ou s'il y a un autre moyen de couvrir cela pour Hydro-Québec? (16 h 15)

M. Coulombe: C'est évident que si vous faites l'hypothèse que la demande interne au Québec, au lieu de croître à 2,7 %, croît à 4 %, soit qu'il y ait un boom économique ou une immigration massive, ou je ne sais pas trop pour quelle raison, mais cela croît deux fois plus vite, cela a un impact immédiat sur les besoins de construction pour les marchés internes, C'est évident que cela peut avoir un impact sur les marchés d'exportation aussi parce qu'on a toujours dit qu'on avait un parc de 17 000 mégawatts pouvant être développé de façon rentable. C'est un peu l'exemple des entrepreneurs ce matin, le parc a 17 000 mégawatts. Nous pensons qu'il y a moyen d'en prendre un morceau de cette tarte et le vendre plus cher aux Américains et que, finalement, cela va nous revenir sous forme des centrales. On fait cette hypothèse. Mais si la demande croît deux fois plus vite, c'est évident que les marchés d'exportation seront diminués, c'est tout à fait logique et normal. Parce que, à moins d'un changement technologique fondamental, on a plus que cela en termes de rivières et de possibilités de développement. Lorsqu'on parle des mégawatts économiquement développables, on en a de l'ordre de 17 000. On prévoit une croissance de 2,7 % d'ici à l'an 2006. Si ce n'est pas 2,7 %, c'est 4 %. C'est évident qu'on va avoir besoin de ces mégawatts pour le Québec et que des contrats d'exportation ne pourront pas être signés. Cela, c'est très clair.

Donc, ce n'est pas tellement un problème de financement, il s'agit de prévoir, le plus exactement possible, les besoins internes. On pense être sur une bonne piste avec l'ordre de 2,7 %. Vous avez vu nos fourchettes ce matin, je pense que c'est 3,5 % et 1,5 %. Dans cette perspective, on pense que, au point de vue du financement, on n'a pas de problème. Les 17 000 mégawatts seront développés pour le Québec, tôt ou tard. Le seul élément qu'on ajoute, c'est qu'on dit: Plutôt que de les développer au rythme uniquement de la demande québécoise, on peut les développer en les devançant, en ayant des prix plus élevés pour les marchés externes et en récupérant ces centrales. Mais tôt ou tard, ils seront développés. Le problème d'exportation n'intervient là-dedans que sur le rythme de développement. Si le rythme est plus fort à l'interne, vous allez en avoir moins pour l'exportation, à moins d'une révolution technologique. Mais toutes choses étant égales, les 17 000 mégawatts seront développés pour le Québec et, avec l'exportation, si possible, parce que cela va en payer une partie. Si la demande est trop forte au Québec, cela servira pour le Québec, comme prévu.

Contrat de Central Maine Power

M. Gauthier: D'une autre façon, si Hydro-Québec investit, par exemple, 30 000 000 000 $, elle a des besoins, elle doit couvrir des intérêts, elle doit fournir une certaine capitalisation de ces projets, j'imagine, non seulement j'imagine, mais il ne s'agit pas des mêmes chiffres. Si HydroQuébec investit, dans la même période, disons 36 000 000 000 $ au lieu de 30 000 000 000 $ ou 40 000 000 000 $ j'imagine que les sommes que doit fournir Hydro-Québec pour couvrir intérêt et capital, remboursement de cet investissement, ne sont pas les mêmes. Je sais, bien sûr, qu'un jour il va y avoir des rentrées d'argent des ventes à l'exportation; est-ce qu'il ne risque pas, à un moment donné, d'y avoir une différence sur les tarifs à l'interne ou si les contrats signés, tel que le dernier qui a été signé, se supportent entièrement, est-ce que les profits générés en tout temps réussissent à couvrir les frais, même ceux enclenchés maintenant? Étant donné que l'argent va rentrer plus tard - il y a quand même une période - j'aimerais que vous nous clarifiiez cela.

M. Coulombe: C'est évident que, pendant que les équipements se construisent, votre question, c'est: Qui va payer pendant ce temps, pendant que les revenus n'entrent pas? Je pense qu'il faut distinquer deux points; il y a le contrat de Central Maine Power et les autres qui vont venir. Le contrat de Central Maine Power a ceci de particulier, comme on l'a dit publiquement, que, durant les trois premières années, ce sont des surplus qui vont fournir l'électricité des trois premières années de ce contrat. Donc, c'est ce qui nous permet de dire... Vous vous rappelez, dans le plan, on dit: Nos surplus finissent en 1995. Si on réalise notre objectif de 3500 mégawatts, le début des travaux sera pour 1989 afin d'être prêts en 1995-1996. Donc, le contrat de Central Maine, c'est ce qui nous permet d'affirmer catégoriquement que cela n'a pas d'impact sur les tarifs au Québec.

Je ne peux pas vous faire la même réponse pour tous tes autres contrats qui seront signés, je ne peux pas vous la donner parce que, d'abord, je ne connais pas les prix qui vont signifier la fin de la négociation. Je ne peux pas affirmer, aujourd'hui, que cela n'aura jamais d'impact sur les tarifs durant la petite période où il va falloir construire avant d'avoir des revenus. Je l'affirme pour le Central Maine, et je viens de vous démontrer pourquoi; pour les autres contrats à venir, je ne peux pas vous répondre aujourd'hui. Il se peut que les prix ou d'autres choses puissent avoir un impact infime sur les tarifs. Je vous répondrai en toute honnêteté quand on aura le deuxième

contrat, quand on aura fait l'économique et la rentabilité du deuxième contrat. Mais dans le contrat de Central Maine, on peut l'affirmer catégoriquement, cela n'a pas d'impact sur les tarifs.

M. Gauthier: Ce contrat, et surtout cette formule de prix, c'est l'élément intéressant dans le contrat avec Central Maine, qui, éventuellement, risque d'être fort intéressant dans les prochains contrats. La formule de prix garantit un bon profit, un profit honnête à Hydro-Québec dans la mesure où au départ, il faut bien le comprendre, on disposait tout de même de surplus d'énergie qu'on vend à 0,063 $ au lieu de 0,01 $, sauf erreur. C'est donc dire, M. Coulombe - je pense que vous l'avez dit et j'aimerais le vérifier à nouveau - qu'au-delà du contrat de Central Maine par rapport à la situation des surplus, on serait dans une situation fragile de négocier un autre contrat de 900 mégawatts - gardons la même grosseur - avec la même formule de prix.

M. Coulombe: Je serai extrêmement clair. Avec la même formule de prix, il n'y aurait pas de problème. Ce que j'ai dit et ce que je veux dire, c'est que, dans les autres contrats, je ne peux pas vous affirmer catégoriquement, cet après-midi, qu'il n'y aura pas d'impact sur les tarifs à court terme. Ce que je peux affirmer catégoriquement, c'est que si cette formule de prix est retenue dans le deuxième contrat, cela aura certainement une influence à long terme sur les tarifs pour les Québécois, pour les baisser ou en baisser la croissance. On peut être catégorique là-dessus, à moins de se tromper radicalement en pleine négociation.

Le seul point où je veux être très clair et ne pas m'engager au-delà de ce que je peux dire, parce que je ne le sais pas, c'est la période dans les autres contrats qui s'écoulera entre le moment de la signature et le moment où les travaux de devancement seront nécessités par ce contrat-là et le début des rentrées de fonds du contrat, qui peut être de trois, quatre ou cinq ans, je n'en sais rien, je ne peux pas affirmer catégoriquement que cela n'aura pas d'impact sur les tarifs. Il faudra que la population comprenne que s'il y a un bénéfice énorme à moyen terme, à court terme il peut y avoir des coûts. Ce n'est pas le cas dans le contrat de Central Maine. Quant aux autres contrats, je ne le sais pas, je n'ai pas de réponse. Quand on aura le deuxième contrat, on répondra très clairement.

M. Gauthier: D'accord.

M. Coulombe: S'il y a une influence sur les tarifs, on le dira clairement.

M. Gauthier: D'accord. Dans le cas de

Central Maine et probablement de quelques prochains contrats Hydro-Québec part, pour sa négociation, sauf erreur, d'un prix de devancement de construction de barrages. Est-ce exact que c'est un coût de devancement?

M. Coulombe: L'encadrement de la négociation - je vais céder la parole à Jacques Guevremont qui a été là-dedans à temps plein - est exactement celui dont on vous a parlé l'an passé lors de la commission parlementaire. On est parti de ce qu'était notre vision de leur coût. On a dit: Vous avez besoin d'électricité en 1992 ou 1995. On sait à peu près combien cela vous coûtera pour construire une centrale. Ce n'était pas de l'intuition, c'était basé sur des études très précises. M. Guevremont a fait référence à un indice Handy-Whitman qui suit toutes les constructions de centrales au charbon. Donc, on a dit: On sait combien cela vous coûtera. Cette seule phase-là a duré six mois de négociation parce qu'ils nous ont dit: Ce n'est pas sûr que ce soit ce que cela coûtera, ce sera peut-être moins cher. Là, il y a eu de la négociation pour s'entendre sur ce que cela coûterait. Nous connaissons nos coûts de devancement. C'est l'autre partie de l'équation. On a dit: Pour devancer LG 1 de 1999 à 1997, ça nous coûte tant. Pour devancer LA Brisay de l'an 2000 à l'an 1999, ça nous coûte tant, etc. On avait cela d'une partie de l'équation et on avait l'autre. Il y avait évidemment une différence entre les deux, parce que nos coûts sont moins élevés que les leurs pour construire une centrale. Entre les deux, il y avait une marge. Les six autres mois de négociation ont été pour dire que nous voulions aller au maximum de la marge et qu'ils voulaient aller au minimum. Cela a fini comme n'importe quelle négociation, pas mathématiquement dans le milieu, mais un peu plus que le milieu en ce qui nous concerne. C'est donc ça l'encadrement de la négociation.

Dans le contrat qui sera signé, il n'y a pas de référence à nos coûts, il n'y a pas de référence à leurs coûts, ce sont des prix qui seront indiqués. C'est là la problématique de la négociation.

M. Gauthier: D'accord. Vous faites également allusion, dans le plan d'équipement, à la possibilité que la déficience... D'abord, vous dites que la déficience des réseaux américains, selon l'ensemble des probabilités, serait aux environs de 5200 mégawatts, si ma mémoire est exacte, et que sur ces 5200, Hydro-Québec peut penser raisonnablement aller vendre et signer des contrats pour environ 3500 mégawatts. Ces chiffres sont sensiblement les mêmes que l'an dernier. L'an dernier, c'était exactement de cet ordre. On parlait de 3500 à 4500

mégawatts. Cette année, on parle de 3500 mégawatts comme étant très probables, j'imagine, tout en pensant que 4500 mégawatts, ce n'est pas disparu pour autant. Je ne le sais pas.

M. Coulombe: D'abord, il faut dire que, dans le plan, c'est 5900.

M. Gauthier: 5900. D'accord.

M. Coulombe: Disons 6000. Ce qu'on a dit et ce qu'on maintient, c'est 3500 et ce n'est pas invraisemblable 4500. Je vous ai mentionné, ce matin, qu'on avait un scénario cible. On ne pouvait pas, dans cette cible, commencer à trop jouer de 3500 à 4500, ainsi de suite. On a pris 3500. Ce n'est pas la déduction mathématique. Des probabilités de signer, est-ce que c'est plus fort 3500 ou 3700? Non. On a pris 3500 parce qu'il fallait, à un moment donné, se brancher sur un chiffre. Cela nous semble raisonnable d'après notre connaissance du marché et cela nous semble une cible raisonnable. L'année dernière, quand on vous disait cela, quelqu'un aurait pu, avec raison, nous dire: Oui, 3500, et ainsi de suite. Ce qu'on peut vous dire cette année, c'est: On a réalisé 900. Ce n'est pas 3500, mais c'est 900, donc à peu près 25 %. J'espère, à la prochaine commission parlementaire, ne pas être dans la position de vous expliquer pourquoi il n'y a pas un autre 900 qui a été manqué. J'espère pouvoir vous dire qu'il va y en avoir un autre et qu'on sera rendu à 50 % et à 60 %. Mais il ne faut pas voir là-dedans des chiffres absolus. II ne faut pas voir des déductions mathématiques et dire que c'est 3500 et non pas 3700. C'est une cible qu'on s'est fixée, compte tenu de notre connaissance des marchés.

M. Gauthier: D'accord. Vous faites également référence à un chiffre nouveau -c'est la première fois que je le vois - avec un taux de variation de 0,5 % sur la demande aux États-Unis, de 13 000 et quelques centaines de mégawatts. J'aimerais savoir, M. Coulombe, si tel était le cas, si la demande était significativement plus forte aux États-Unis et que, si on allait chercher 13 000 et que le déficit était de 13 000 et quelques centaines de mégawatts pour nos voisins, d'abord cela fait référence, je pense, à un contexte économique particulièrement intéressant et à un secteur de l'énergie en croissance de façon significative... Est-ce que c'est exact"?

M. Coulombe: Écoutez. Vous savez qu'on a un comité consultatif américain composé d'ex-membres d'Utilité publique américaine, de professeurs à l'Université Harvard, du MIT, et ainsi de suite. À la dernière réunion, il y a eu une longue discussion là-dessus et cela s'est séparé en deux camps, les universitaires étant d'avis que le taux de croissance de l'énergie dans le Nord-Est américain était beaucoup trop élevé, alors que les praticiens et ceux d'autres tendances disaient que ce n'était pas assez élevé. Je pense qu'ils prévoient 1,4 dans l'État de New York. Actuellement, en Nouvelle-Angleterre, tout le monde admet qu'il y a un boom économique. C'était la thèse d'un des professeurs du MIT, je crois, de dire que ce boom ne durera pas. C'était la thèse d'un économiste du MIT. Est-ce qu'il a raison? Est-ce qu'il a tort? Je serais incapable de vous le dire. Le chiffre de 13 500 était dans le plan de l'an dernier; c'était 11 000...

M. Gauthier: 11 000.

M. Coulombe: 11 000, mais la variation, je pense...

M. Gauthier: C'était l'an 2000, l'an passé. Là c'est l'an 2001.

M. Coulombe: Bon. Mais indépendamment de cela, c'est le même raisonnement. On dit: On prend leur plan de développement. On est très mal placé, comme on ne sera pas d'accord tout a fait que quelqu'un de la Nouvelle-Angleterre vienne nous dire que notre plan de développement est mal fait, on ne veut pas leur dire non plus. Donc, on prend leurs chiffres et cela donne ces résultats-là. Ce n'est pas une prévision. On émet simplement l'hypothèse de 0,5 de plus de croissance. On ne le prévoit pas. Pas nécessairement. Ce n'est pas une prévision. C'est une hypothèse de travail pour montrer la sensibilité. Mais, en toute honnêteté, l'Hydro n'a pas les moyens de faire une étude en profondeur dans l'économie nord-américaine, du Nord-Est américain, comme on le fait pour le Québec. Donc, on prend le chiffre de leur plan de développement et on fait simplement l'hypothèse d'une croissance plus grande. C'est une hypothèse, ce n'est pas une prévision. (16 h 30)

M. Gauthier: M. Coulombe, parce que les économies sont quand même très reliées, surtout lorsqu'on parle du Nord-Est des États-Unis, partant de l'hypothèse que cet optimisme devient la réalité des choses et que la croissance de la demande d'énergie est très importante et très significative, comme on peut le voir, au Québec, j'imagine, puisque les économies sont très reliées - je l'ai dit tout à l'heure - qu'il doit y avoir aussi un impact. On peut penser qu'il y aurait, au Québec, une demande beaucoup plus qrande, beaucoup plus significative. Cette demande serait de quel ordre - pour bien se comprendre - dans le scénario

moyen? Vous avez travaillé là-dessus ici au Québec. Aux États-Unis, le scénario moyen ou raisonnable, c'est environ 5900 ou quelque chose comme ça, mettons 6000 comme vous avez dit tout à l'heure. Le scénario optimiste amène aux États-Unis un chiffre de quelque 13 000. Au Québec, le scénario optimiste - parce que si l'un se réalise, j'imagine que l'autre devrait se réaliser également - ce serait quoi? Cela représenterait quoi comme défi pour HydroQuébec à l'interne, à ce moment?

M. Coulombe: Prenez la fourchette supérieure de nos hypothèses qui est de 3,5 et cela vous donne à peu près le même degré d'optimisme. Personnellement, je ne me prononcerais pas pour dire qu'il y a une corrélation parfaite entre un boom économique dans le Nord-Est et un boom économique au Québec. Il se peut qu'ils ne viennent pas dans les mêmes années. Il se peut qu'il y ait des causes différentes. Le boom économique du Nord-Est et la reconversion industrielle vers la haute technologie, dans le cas de la Nouvelle-Angleterre, cela ne s'est pas produit au Québec. Entre les phénomènes économiques, je serais bien embêté de dire s'il y a une corrélation parfaite, mais ce serait plausible de penser que, s'il y a un boom économique aux États-Unis, il va y en avoir un au Québec avec quelques années de retard, comme d'habitude.

Donc, notre fourchette supérieure prévoit cette hypothèse qui est d'environ 3,5 % au lieu de 2,7 %.

Énergie et environnement

M. Gauthier: Un des problèmes extrêmement importants quand on parte d'exportation d'énergie aux États-Unis, c'est le problème environnemental. M. Coulombe, j'aimerais savoir - non pas dans le contrat puisqu'il n'est pas encore signé; sauf erreur, il y a une lettre d'entente - si, dans l'entente avec Central Maine Power, des conditions sont prévues au cas où vous ne pourriez pas livrer ou au cas où eux autres ne pourraient pas acheter, cela est prévu. Maintenant, il y a une entreprise dans laquelle vous êtes partie conjointe, c'est-à-dire la fameuse ligne de transport sur le territoire des États-Unis. J'aimerais savoir, M. Coulombe, s'il arrivait, par exemple, qu'Hydro-Québec enclenche ici tout le processus des travaux nécessaires pour faire face à ce contrat, tout le devancement nécessaire, et que le lobby environnemental américain fasse en sorte que vous ayez dans votre filiale, avec les Américains de façon conjointe, des problèmes pour passer les lignes en temps et lieu... On sait que le coût de devancement est extrêmement élevé. Si le Québec bâtissait, par exemple, pour une année trop rapidement un barraqe important, cela aurait des répercussions extraordinaires. Comment, dans la lettre d'entente, se départage la responsabilité qui ferait qu'Hydro-Québec aurait commencé à faire des choses ici et qu'elle se verrait bloquée comme partenaire dans la construction de la ligne aux États-?nis par le lobby d'environnementalistes?

M. Coulombe: Est-ce qu'on peut avoir les fiches 14 et 15. J'aimerais qu'on se rappelle que la lettre d'entente...

Une voix: Le dossier à l'exportation.

M. Coulombe: Les fiches 14 et 15. Ce n'est pas cela?

Une voix: Non.

Une voix: Le carrousel des exportations, s'il vous plaît.

M. Coulombe: Pendant qu'il s'organise, la lettre d'entente prévoit toute une série d'approbations très précises qu'il faut absolument avoir en main avant de commencer les travaux en question. Vous en avez un exemple. Ce sont les listes d'approbation par lesquelles il faut passer. II faut que Central Maine Power passe par cela avant que le contrat soit effectif. Évidemment, s'il y a quelque chose là-dedans qui ne marche pas, il n'y a pas de contrat. Rappelez-vous que - je vous l'ai dit tantôt -pour Central Maine Power, même si on n'avait pas d'autre contrat que Central Maine Power, les devancements d'équipements - on peut vous montrer la fiche après pour comparer avec le plan cible - devancent LG 1 de 99 à 97. Si on n'avait pas d'autre contrat que Central Maine Power, on a deux, trois, quatre ans devant nous avant de faire quelque investissement que ce soit dans ce cas. Vous avez la liste là...

M. Guevremont: C'est la deuxième page.

M. Coulombe: C'est la deuxième paqe de la liste des approbations que Central Maine Power doit avoir en main avant que le contrat ne devienne effectif. On peut regarder l'autre fiche qui est la liste des approbations canadiennes.

M. Guevremont: C'est 13 et 14.

M. Coulombe: Ce sont les États-Unis.

M. Guevremont: C'est 13 et 14.

M. Coulombe: L'autre avant.

M. Guevremont: 12 et 13, je m'excuse.

12 et 13.

M. Coulombe: En tout cas, vous en avez une liste aussi longue.

M. Guevremont: Cela l'est.

M. Coulombe: Voilà, vous l'avez. C'est correct.

Une voix: 12 et 13.

Une voix: 15?

Une voix: On ne veut pas 15, on veut 12 et 13. Cela c'est 14. On veut 12 et 13.

M. Coulombe: Alors, toutes ces étapes devront être franchies pour que le contrat entre en vigueur.

M. Gauthier: C'est donc dire que toutes ces étapes sont nécessaires. Hydro-Québec n'engagera pas de dépenses ou...

M. Coulombe: N'engagera pas de dépenses majeures.

M. Gauthier: Majeures. D'accord.

M. Coulombe: C'est évident qu'il va falloir préparer l'ingénierie de certaines choses, ainsi de suite, mais je parle de dépenses majeures, de grands investissements impliquant des centaines de millions, tant que ces approbations ne seront pas données. Mais en attendant, il va falloir faire des travaux, dépenser de l'argent pour terminer les études, ainsi de suite.

Maintenant, cela a l'air épouvantable de montrer cela de cette façon parce que c'est un peu affolant de voir toutes les étapes à franchir. Mais, il ne faut pas non plus dramatiser parce que dans tous les autres contrats, même d'énergie excédentaire, on a passé à peu près à travers les mêmes étapes, de façon cahoteuse certaines fois et de façon harmonieuse d'autres fois. Quand c'est harmonieux, on n'en entend pas parler nulle part. Toutes ces étapes ont été franchies pour tous les contrats qu'on a signés avec les États-Unis depuis cinq ans. On parle beaucoup de la sixième ligne, mais il faut bien penser que, depuis cinq ans, on en a vendu pour l'équivalent de 5 000 000 000 $. Dans des contrats d'envergure, toutes ces étapes ont été franchies. Il y en a même actuellement, comme celui de NEPOOL où les trois quarts des étapes sont terminées et il reste l'autre quart à compléter tranquillement, pas vite.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Roberval, comme vous avez utilisé votre temps en ce qui a trait aux questions, on va passer de l'autre côté et on reviendra à vous par la suite.

M. le député de La Peltrie.

M. Ciaccia: Si j'avais une question, est-ce que je pourrais la poser et céder la parole ensuite?

Le Président (M. Charbonneau): Oui, c'est dans les dix minutes qui vous sont imparties.

M. Ciaccia: J'ai seulement une question. Pour revenir aux augmentations tarifaires, on vous a posé la question à savoir si le contrat de Central Maine exigeait des augmentations tarifaires. Vous avez dit catégoriquement, non. L'Opposition vous a posé d'autres questions concernant les futurs contrats. Vous avez dit que l'une des raisons pour lesquelles le contrat de Central Maine ne nécessitait pas d'augmentation tarifaire était qu'il y avait des surplus au début. L'Opposition vous a posé d'autres questions et vous avez affirmé que vous ne pouviez pas, à ce stade-ci, affirmer catégoriquement que les futurs contrats ne nécessitaient pas, à court terme au début, des hausses tarifaires. C'est clair qu'il y a ceux qui voudraient absolument établir le point que les exportations vont nécessiter des augmentations tarifaires. Ce n'est pas ce que vous avez dit, mais c'est la conclusion que certains vont tirer de vos propos.

Je vaudrais vous poser une question. Est-ce que c'est possible de trouver d'autres formules dans les négociations? Est-ce que d'autres formules pourraient être envisagées qui auraient pour effet de ne pas augmenter les tarifs, même à court terme?

M. Coulombe: La réponse est extrêmement difficile à donner, mais j'aurais tendance à dire oui.

M. Ciaccia: Je vais vous en donner seulement un exemple pour vos commentaires. Supposons qu'une formule aurait un préfinancement, supposons qu'un réseau, ce que je vous dis est très théorique, peut-être que cela ne se produira pas comme cela, mais on est dans le domaine de la théorie parce que les autres contrats ne sont pas ici... Par un préfinancement ou par une participation dans le financement ou selon une autre formule, pourrait-on trouver une formule par laquelle, pour ce petit court terme de deux ou trois ans, il n'y aurait pas nécessité d'auqmenter les tarifs?

M. Coulombe: Oui, les formules que vous mentionnez sont envisageables, mais il y en a peut-être d'autres aussi qui sont moins compliquées que celles-là qui pourraient être envisagées. Une vente de puissance et d'énergie ferme pourrait s'accompagner, pendant une certaine période, de ventes

excédentaires; cela ferait partie du même contexte global de contrat. Je ne dis pas que c'est ce qu'on va suggérer. Je dis que c'est une hypothèse qui, justement, si elle s'accompagne par un certain segment d'énergie excédentaire dans une période de l'année où nos coûts sont très bas, cela peut bonifier ce contrat pendant deux ou trois ans. Encore une fois, je ne dis pas que c'est ce qu'on va faire...

M. Ciaccia: Non.

M. Coulombe: ...je dis que c'est une hypothèse...

M. Ciaccia: Oui.

M. Coulombe: ...que, dans tel cas, cela serait l'équivalent du contrat de Central Maine, c'est-à-dire que les deux ou trois premières années, on éliminerait cette hypothèse d'augmentation de tarifs.

M. Ciaccia: Exactement. Alors on ne pourrait pas déduire aujourd'hui que, parce qu'il n'y a pas de surplus après le contrat de Central Maine, nécessairement les tarifs doivent être augmentés; ce n'est pas la conclusion à laquelle on peut en venir aujourd'hui.

M. Coulombe: C'est rigoureusement ce que je n'ai pas dit. Je n'ai pas dit que c'était cela, tout ce que j'ai dit, c'est que je n'étais pas en mesure de démontrer clairement avec un contrat à l'appui qu'il n'y a pas d'impact sur les tarifs ou qu'il y en a un.

M. Ciaccia: Oui, mais ce n'est pas...

M. Coulombe: Ce que j'ai dit, c'est simplement que, lorsque le prochain contrat arrivera, tout ce que je peux garantir à la commission, c'est que s'il y a un impact sur les tarifs, on va le dire.

M. Ciaccia: Oui, et ce n'est pas...

M. Coulombe: Et s'il n'y en a pas, on va le démontrer.

M. Ciaccia: C'est possible d'envisager des formules...

M. Coulombe: ...des hypothèses qu'on peut envisager.

M. Ciaccia: ...des hypothèses où il n'y en aura pas.

M. Coulombe: De toute façon, il ne faut pas se faire d'illusion. Après avoir dit tout ce que j'ai dit, je peux aussi affirmer que si les prix sont valables, l'impact potentiel - je ne dis pas obligatoire - sera d'un ordre très restreint et on le démontrera en temps et lieu. Comme on a dit, on peut envisager des hypothèses où on pourrait éliminer l'impact. On le verra lors du deuxième contrat et je ne veux pas m'engaqer aujourd'hui à dire qu'il y en a ou non. Je veux tout simplement dire que, lorsqu'on aura le contrat, si on n'a pas été capable de trouver de formule pour limiter l'impact pendant deux ou trois ans, on va le dire clairement.

M. Ciaccia: Alors s'il n'y avait pas, et qu'on a été capable de trouver les formules, vous allez le dire et vous allez aussi évaluer à long terme que même si...

M. Coulombe: Exact, mais le long terme...

M. Ciaccia: ...une augmentation à court terme, les bénéfices à long terme qui vont...

M. Coulombe: Mais le long terme, je pense qu'on...

M. Ciaccia: II est évident que, même pour nous-mêmes, le gouvernement ne voudra pas signer un contrat qui va avoir comme résultat d'être négatif pour augmenter les tarifs. C'est le bon sens même.

M. Coulombe: Mais sur le long terme, on n'a aucune inquiétude, il est évident que cela aura un impact bénéfique sur les tarifs.

M. Ciaccia: Merci.

Lobby et libre-échange

M. Cannon: M. Coulombe, j'ai deux questions. On sait actuellement que le Québec exporte tout près de 15 000 000 000 $ de marchandises vers les États-Unis; près de la moitié va à la Nouvelle-Angleterre et à New York. Parmi la gamme des produits que nous exportons aux Etats-Unis, évidemment celle qui figure comme élément le plus prépondérant, c'est, bien sûr, l'électricité. Je pense que, en 1990, on estime à tout près de 1 000 000 000 $ les ventes qui seront en provenance des États-Unis. Une chose me tracasse un peu; j'imagine que chez vous aussi, cela doit vous tracasser un peu lorsqu'on voit le fait que, aux États-Unis, il y a une vague de plus en plus protectionniste. Bien sûr, il n'y a pas de mesures législatives devant le Congrès américain qui viseraient à restreindre l'accès de l'hydroélectricité québécoise vers les marchés américains, mais il y a la création d'une coalition entre International Electric Power Trade, qui a été formée il n'y a pas longtemps. Connaissant, la situation qu'on a connue sur les bois d'oeuvre et des

phénomènes comme cela, j'aimerais que vous puissiez commenter un peu et dire aux membres de la commission ce qu'Hydro-Québec entend faire pour dire aux gens que, non, le gouvernement ne subventionne pas nécessairement l'hydroénergie ici, au Québec. (16 h 45)

M. Coulombe: C'est la relation entre nos exportations et le problème du libre-échange. Juste avant d'introduire ce sujet, il y a un autre aspect que j'ai oublié dans l'autre réponse. Il ne faut pas oublier que, avec les contrats d'exportation, on diversifie nos risques financiers. Vous savez quel est l'impact de la baisse du dollar canadien par rapport au dollar américain. Vous savez qu'on a une dizaine de milliards d'emprunt en dollars américains. Vous savez quel coût cela représente lorsqu'il y a des fluctuations. Avec les contrats d'exportation, on diversifie un peu notre risque. En d'autres mots, cela a un impact contraire et cela va stabiliser aussi l'aspect financier d'Hydro-Québec. Cela va atténuer le risque de perte de change en augmentant nos revenus en dollars américains. Cette forme de diversification de nos risques est extrêmement intéressante pour Hydro-Québec et va avoir un impact sur la situation financière d'Hydro-Québec. L'impact sur les tarifs est extrêmement difficile à calculer en détail, mais il va être incontestable parce qu'on va stabiliser nos risques des deux côtés. C'est très important au point de vue de la situation financière surtout lorsqu'on va parler de revenus de 1 000 000 000 $, 1 500 000 000 $ ou 2 000 000 000 $ en dollars américains. L'impact va être énorme sur la situation financière d'Hydro. Strictement pour ce qui est du dollar.

Quant aux relations entre les exportations et le libre-échange, c'est évident qu'il y a des lobbies américains contre l'importation d'électricité canadienne ou québécoise aux États-Unis, ne serait-ce que les lobbies du charbon et les lobbies syndicaux. S'il y a moins de construction, là-bas, c'est évident que cela les affecte au point de vue syndical et il y a moins d'activités économiques au sens le plus direct; donc, il y a des lobbies. Est-ce qu'ils vont se servir du contexte protectionniste ou de libre-échance? C'est bien évident que toutes les armes seront bonnes pour eux. Là-dessus, notre stratégie, pour être très honnêtes, est qu'on n'y fait pas face directement. On y fait face en travaillant concrètement avec des compagnies et des États pour essayer de placer nos contrats et c'est exactement ce qui est arrivé dans le cas de Central Maine, à travers tout ce brouhaha. Il y a eu une négociation très explicite et très claire et elle s'est terminée par une lettre d'entente. On favorise, plutôt qu'un affrontement au point de vue des lobbies qui, à notre avis, est un peu stérile.

Concernant le libre-échange, Hydro-Québec est très bien placée, à notre avis, parmi les utilités canadiennes. Tout simplement parce que, en toute objectivité, on est capables de démontrer que le gouvernement du Québec ne subventionne en aucune façon Hydro-Québec. De plus, la stratéqie financière de Hydro-Québec nous oriente vers une entreprise qui a une marge financière suffisante pour avoir un rendement sur l'équité et un rendement sur son capital investi qui se compare avantageusement à n'importe quelle utilité américaine, dont plusieurs sont subventionnées de différentes façons. Aussi, la structure de nos relations avec l'industrie, quand on a mis de côté les rabais tarifaires purs pour aller dans le partage de risques, c'est encore un avantage dans notre cas, parce qu'on peut affirmer avec raison que ce ne sont pas des subventions à l'industrie qu'on donne. C'est un partage de risques, c'est une relation d'affaires tout à fait normale. On est donc très avantagé à Hydro-Québec parmi les utilités canadiennes en ce qui concerne nos structures financières et nos objectifs très explicites de rentabilité, de rationalité de l'entreprise et de rendement sur l'équité, qui sont les critères les plus précis.

Dans cette perspective, nous pensons que la question du libre-échange aura peu d'impact sur la stratégie d'exportation. Je m'aventure beaucoup parce que je ne sais rigoureusement rien de la façon dont va finir le libre-échange. Mais, compte tenu des documents qu'on a en main, compte tenu des critères dont ils se servent pour critiquer tel aspect du commerce entre les deux pays, nous pensons être dans une excellente situation et de beaucoup supérieure aux autres utilités canadiennes dans le contexte de l'exportation de l'électricité.

M. Cannon: Une sous-question là-dessus. Le comité dont je vous parlais, le Ad Hoc Coalition on International Electric Power Trade, qui a été formé et qui est dans une phase d'organisation, a effectivement comme objectif d'aller chercher de quinze à vinqt "utilities", donc des entreprises ou des compagnies qui, évidemment, vendent de l'hydroélectricité et ils en ont cinq jusqu'à présent. Ma question spécifique est: Etiez-vous au courant de ces agissements et est-ce que, déjà, la stratégie dont vous avez parlé globalement... Est-ce qu'aux États-Unis on a quelqu'un qui travaille au Congrès américain, est-ce qu'on a un organisme? Qu'est-ce qu'on fait concrètement?

M. Coulombe: Ce qu'on fait concrètement, fondamentalement, c'est agir, négocier, signer des contrats. Cela, c'est notre priorité absolue dans le minimum de... Comment dirais-je? Pas de silence mais de...

Une voix: D'intervention à...

M. Coulombe: C'est cela. En d'autres mots, on multiplie nos interrelations avec nos interlocuteurs. La position dans le Nord-Est américain n'est pas celle du Colorado ou des États en bas de l'Ontario, ainsi de suite, où vous avez un lobby de charbon et où ils peuvent produire sur place, la question des pluies acides, ainsi de suite. Ce n'est pas le réseau d'intervention qui est majeur en ce qui nous concerne. On sait que ces entreprises, dans un marché qui nous favorise de plus en plus, qui ne nous favorisait pas il y a quelques années parce qu'on avait trop de surplus, mais qui nous favorise de plus en plus à mesure que les années passent, comme elles retardent leur construction, elles seront à un moment donné assises à la table de négociation, comme cela commence à se produire. C'est cela, notre stratégie de base, finalement.

Donc, toute la question des lobbies, on suit cela, et on a quelqu'un sur place. D'abord, vous savez qu'on a un bureau à New York qui est en communication avec tous ces mouvements, ces interventions. On n'a personne à Washington et on n'a pas l'intention d'avoir quelqu'un. On a d'excellents contacts là-dessus. On a notre comité consultatif qui nous tient au courant régulièrement de ce qui se passe dans son réseau personnel. Donc, nous sommes très informés. Nous ne voulons pas intervenir d'une façon directe, en tant qu'Hydro-Québec, parce qu'on est persuadé que notre stratégie est la meilleure, c'est-à-dire de s'asseoir avec ceux qui décident de signer un contrat ou de ne pas signer un contrat, et de travailler au maximum.

Évidemment, je peux le dire avec un peu plus de certitude que je le pouvais l'année dernière, quoique c'est exactement ce qu'on disait l'an dernier aussi, parce qu'au moins, on en a fait un. J'espère que l'année prochaine, on pourra dire: La stratégie s'est avérée pas pire parce qu'on en a un deuxième, mais cela reste à voir. C'est notre stratégie, à l'heure actuelle.

M. Cannon: En changeant de sujet, M. Coulombe - peut-être que M. Guevremont pourra répondre, ou M. Boivin - le département de l'Énergie, aux États-Unis, vient de rendre public un rapport qui s'intitule "Electric Power Supply and Demand for the Contiguous United States 1986-1995", dans lequel on indique qu'il y aura une croissance de 22,9 % durant cette période en termes de demande. On fait aussi l'analyse du rapport qui avait été déposé par la North-East Power Coordinating Council. Je pense que le rapport qui a été déposé pour les gouverneurs vous est familier.

Évidemment, la conversion n'est pas faite parce qu'on parle de gigawatts. On dit notamment qu'à New York, on prévoit durant cette période une augmentation de 127 500 gigawatts à 145 752, soit une augmentation de 14,3 %. Sous toutes réserves des tables de comparaisons de gigawatts à mégawatts -je n'ai pas fait la conversion - il y a quand même une augmentation. Aujourd'hui, dans vos tableaux, j'ai noté que nous ne prévoyions pas, pour cette période, une augmentation de vente d'énergie ou une augmentation de la demande aux États-Unis, dans l'État de New York.

M. Coulombe: Vous faites référence à New York précisément.

M. Cannon: Oui.

M. Coulombe: Notre conviction, c'est que New York n'a pas besoin de puissance de base avant l'an 2000, d'après les chiffres de leurs plans de développement à eux. C'est cela qu'on a indiqué là-dedans.

M. Cannon: Cela, c'est 1,4 %.

M. Coulombe: Avec une croissance de 1,4 %, ces gens n'ont pas besoin de puissance avant l'an 2000. Maintenant, ce sont leurs chiffres. Est-ce qu'ils ont des stratégies, comme plusieurs soupçonnent, de baisser volontairement la demande parce qu'ils sont coincés dans leurs centrales nucléaires, au point de vue de la construction? Toutes les hypothèses sont permises. Ce que nous disons dans des plans officiels - notre plan est public, il est rendu chez les financiers de New York, ainsi de suite - c'est qu'on ne peut se permettre de mettre en doute la parole des autorités de NYPAL, des autorités de ces États. C'est pour cela qu'on se donne une fourchette. Dans le cas de cinq dixièmes de plus à New York, il y aurait un déficit de 2800 mégawatts. Si au lieu d'être à 1,4 %, c'est à 1,9 %, immédiatement, ils ont besoin de 2800 mégawatts.

La présentation de nos chiffres, il faut toujours se le rappeler, ce ne sont pas des prévisions d'Hydro-Ouébec. On n'est pas placé pour faire des prévisions dans ces pays.

M. Cannon: Je comprends.

M. Coulombe: On prend leurs chiffres et on donne une analyse de sensibilité. D'ailleurs, dans le rapport des gouverneurs...

Prévision de la demande (suite)

M. Cannon: Voici ce que je voulais savoir. Le rapport dont je vous parle, "Electric Power Supply and Demand for the Contiguous United States, 1986-1995", est-ce que vous en avez tenu compte lorsque vous avez fait la prévision ou la planification qui

semble tout au moins...

M. Coulombe: On a tenu compte du rapport des gouverneurs, mais sur ce rapport spécifique, je vais laisser parler Jacques.

M. Guevremont: On est familier avec ces prévisions de demande, ce sont ces interlocuteurs qui ont fourni leur plan de développement qu'on voit à la page 42 de notre plan de développement. Or, les gens qui veulent acheter de l'électricité ne se baseront pas sur un plan de développement ou une demande qui n'est pas la leur, c'est-à-dire qu'on peut avoir différentes opinions, les gens qui veulent acheter de l'électricité ne vont pas construire au cas où ce soit quelque chose de différent de leur plan de développement. C'est bien hypothétique, dans le fond, qu'il en sorte une prévision par un comité quelconque ou celui qui a même été soumis aux gouverneurs parce que, en fin de compte, quand NEPOOL, les gens du Vermont ou les autres nous disent: Notre demande, c'est cela. Ils ne vont pas acheter quelque chose qui ne représente pas leurs prévisions à eux. Comme nous, on ne construirait pas sur une prévision qui ne serait pas la nôtre; c'est la même dynamique. On ne peut pas vendre de l'électricité à quelqu'un sur la base du fait qu'on a, nous, une croyance différente de leur demande.

M. Cannon: Pourriez-vous me dire, M. Guevremont, la croissance actuelle...

M. Guevremont: De?

M. Cannon: ...d'énergie à New York?

M. Guevremont: 1,4 %.

M. Cannon: De prévision. À l'heure actuelle, c'est plus élevé que cela.

M. Guevremont: De prévision.

M. Cannon: Comme en Nouvelle-Angleterre, c'est plus élevé.

M. Guevremont: À court terme et comme la nôtre, d'ailleurs. Si vous regardez notre prévision de demande, d'année en année, cela se modifie. Par cette prévision de demande, ils n'ont pas besoin de puissance avant l'an 2000.

M. Cannon: C'est le taux de croissance réel. Je ne veux pas la prévision de 1,4 %.

M. Coulombe: Dans les deux cas, Nouvelle-Angleterre et New York, c'est plus élevé que le 1,4 %, exactement, comme nous prévoyons 2,7 % et on fonctionne à 5,6 % cette année et l'année prochaine et peut-être encore... selon nos prévisions.

M. Cannon: Donc, ce que je veux dire...

M. Coulombe: Mais la construction est en fonction d'une demande à moyen et à long terme.

M. Cannon: D'accord, sauf qu'au moment où on se parle, c'est plus fort que 1,4 %.

M. Coulombe: C'est juste.

M. Cannon: Je les ai ici. En Nouvelle-Angleterre, de janvier à novembre 1986, 5,2 % alors qu'ils ont dans leur plan 2,6 % jusqu'en 2001. Selon les dates que je vous ai données, de janvier à novembre 1986, 5,2 %. New York prévoit 1,5 % à long terme; ils ont 2,5 % pendant la même période. L'Ontario prévoit 2,6 % à long terme; ils ont eu durant cette période 4,4 %. Nouveau-Brunswick, 2,7 %, 8,2 %.

M. Guevremont: Pour ajouter à cela, il faudrait dire que le parc de New York, par exemple, en 1985, est de 30 800 mégawatts alors que leur demande de pointe est de 22 500 mégawatts. Regardez la marge entre leur parc actuel et leur demande de pointe. Tout de suite, vous avez la réponse.

M. Cannon: Sauf...

M. Guevremont: Enfin...

M. Cannon: ... qu'on sait, M.

Guevremont, que leur parc, oui, représente cela, mais c'est un parc qui est de plus en plus désuet.

M. Guevremont: Oui, mais il peut être amélioré et cela coûterait peut-être moins cher que d'acheter de nous.

M. Coulombe: D'ailleurs, si vous lisez le rapport des gouverneurs de la Nouvelle-Angleterre, vous pouvez faire deux lectures du même rapport. Vous pouvez en faire une lecture optimiste et une lecture pessimiste; c'est énorme, la différence entre les deux. Ils vont vous dire: On a besoin de tant de milliers de mégawatts, mais on peut faire de la cogénération. Quelqu'un peut répondre: On ne croit pas cela; ils n'en feront pas. On va faire de la conservation; quelqu'un peut répondre: Ils ne réussiront pas à en faire. Ils vont investir dans des vieilles centrales pour les rénover; quelqu'un peut bien dire:. Non, ils ne le feront pas. Toute une série d'hypothèses qui vont faire, que vous les acceptiez ou non, cela peut varier de façon incroyable.

M. Cannon: En terminant, je voudrais juste vous faire lecture du rapport qui a été déposé au département de l'énergie, de ce

qu'il a dit relativement à cet élément: Beginning with Summer 1993, it would appear that additional capacity would be desirable either as new generating units or as additional purchases. In order to improve the adjusted reserves from 1993 on, it may be useful to consider the availability of Canadian capacity beyond the level now contemplated. C'est en discutant des besoins du NPCC. (17 heures)

M. Guevremont: En ce qui concerne les besoins du NPCC, il faut bien se comprendre. Le NPCC n'a pas de besoins. Il y a une incompréhension. Le North-East Power Coordinating Council n'a pas de besoins comme tels. C'est une organisation libre qui discute des critères de fiabilité des réseaux...

M. Cannon: Non, j'en suis, M. Guevremont. Je vous livrais l'essentiel des commentaires du rapport qui a été déposé au département américain de l'Énergie, sur ce qui avait été fait par le NPCC.

M. Coulombe: Au fait, il faut bien se comprendre. On n'est pas en désaccord du tout avec ces rapports-là. Tout ce qu'on vous dit, c'est que ce sont des rapports qui s'empilent les uns par-dessus les autres et qu'il faut interpréter. Il y a une série d'hypothèses là-dedans. On serait très heureux si cela se passait comme cela parce que le marché serait encore plus grand que prévu. Donc, la négociation serait plus intéressante pour nous autres et on aurait de meilleurs prix. Tout ce qu'on veut dire, c'est qu'il faut attacher de l'importance à la grande fresque, mais il ne faut pas trop attacher d'importance aux petits morceaux parce qu'ils sont tellement contradictoires. Ce qu'on veut, c'est de s'asseoir avec ceux qui décident d'acheter ou non de l'électricité. C'est vers eux autres qu'on va.

M. Cannon: C'est bien sûr, vous avez raison là-dessus. On pourrait parler aussi de Seabrook.

M. Coulombe: Exact.

M. Cannon: Par exemple, est-ce que, dans votre réévaluation, cela va fonctionner ou non...

M. Coulombe: Exact.

M. Cannon: Ce que je retiens, c'est qu'on a des chiffres - sans que ce soit trop conservateur - qui sont un peu en bas des conservateurs. Ce devrait être un peu plus haut que ce qui est prévu.

M. Coulombe: C'est ce que je m'évertue à dire à Jacques Guevremont quand il négocie.

M. Cannon: D'accord.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Roberval.

M. Gauthier: Justement, M. Coulombe, je veux continuer dans le même sens que mon collègue de La Peltrie. En prenant le chiffre de 13 900 mégawatts, qui m'intéresse particulièrement, et considérant les autres façons dont les Américains peuvent faire pour combler ce déficit, si, sur 5900, on peut penser aller en chercher raisonnablement 3500 à 4000, est-ce que vous avez une idée de la proportion que cela pourrait représenter sur 13 900 qu'on pourrait aller chercher advenant que ce scénario très optimiste...

M. Coulombe: La seule réponse valable que je puisse donner à cela, c'est que, si vous me garantissez que la demande intérieure aura telle courbe dans les 20 prochaines années, on pourra vous donner une réponse. Si on tient cela pour acquis... N'oubliez pas que, dans l'état actuel de notre technologie, on vous dit qu'il y a 17 000 mégawatts à développer au Québec de façon économique. Peut-être que la technologie changera dans dix ou quinze ans, je n'en sais rien, mais avec ce qu'on connaît actuellement, il y a 17 000 mégawatts. Ils sont dans le plan, ils sont nommés projet par projet. J'ai dit tantôt que c'était et pour les marchés internes et pour les marchés externes. Cela me surprendrait énormément qu'on construise des centrales nucléaires pour exporter. Donc, l'avantaqe comparatif de l'électricité est bloqué à 17 000 mégawatts. Si la demande interne est de 10 000, il nous en reste X comme potentiel d'exportation. Si la demande est de 12 000, il y a un potentiel X. Si la demande est moindre... C'est une interrelation entre les deux parce qu'on parle toujours d'équipements qui, tôt ou tard, serviront au Québec. On ne parle pas d'équipements qu'on bâtit, avec lesquels on va exporter et qu'on va démanteler ensuite. On parle d'équipements qui, fondamentalement, sont prévus pour le marché québécois. On estime ces équipements à environ 17 000 mégawatts. On dit: On va en prendre un bloc. On en a environ 27 000 ou 28 000 actuellement en production dans notre parc. On va en ajouter 17 000. Est-ce qu'on va les ajouter dans 20 ans, dans 25 ans, dans 30 ans? Cela dépend de la demande interne. Actuellement, il y a possibilité d'exportation. On se dit: Allons chercher au plus tôt cette possibilité parce que cela valorise l'ensemble de notre parc, ça baisse notre coût moyen comptable, ça baisse les tarifs et ça donne de l'activité économique au Québec. C'est le raisonnement

qu'on fait.

Je suis toutefois incapable de vous dire, si la demande augmentait plus vite aux États-Unis et qu'il y avait un marché de 13 000, comment on irait en chercher. Je pense que je ferais de la futurologie. On peut avoir des objectifs, des souhaits, mais si vous me posez carrément la question, je me dis que, lorsque les 3500 seront dans le sac avec de bons prix, il se peut qu'il y en ait d'autres... Par exemple, l'Ontario est un marché dont on parle peu à l'heure actuelle. Je vous l'ai expliqué l'an passé, la situation est la même cette année. On ne pense pas que l'Ontario puisse se développer avant un an ou deux. Il faudra qu'ils règlent leur problème nucléaire. Lorsqu'ils auront pris la décision de continuer ou non dans le nucléaire, c'est évident qu'on aura un marché extrêmement intéressant avec les Ontariens. Aujourd'hui, on n'est pas capable de le compter nécessairement, la décision n'est pas prise au gouvernement de l'Ontario et à Hydro-Ontario.

Donc, toute spéculation sur le... Ce sont des vases communicants. Tout ce que je sais, c'est qu'on en a 17 000 à développer, que la demande interne au Québec aura telle courbe, que cela va demander tant de mégawatts, qu'on a l'occasion de profiter actuellement, pour les dix prochaines années, de l'occasion d'exporter, devancer, baisser nos coûts, et que cela profite au Québec. En dehors de cela, je ne suis pas capable de vous répondre.

Vente à l'Ontario

M. Gauthier: Vous avez mentionné l'Ontario. J'en étais rendu à vous parler des gens avec qui vous êtes actuellement en négociation, sans vous faire dévoiler évidemment des choses que vous ne voudriez pas dévoiler pour des raisons de stratégie d'affaires. L'Ontario, c'est un marché potentiel intéressant. Vous avez cité quelques chiffres concernant la possibilité qu'on puisse vendre de l'électricité à l'Ontario. J'aimerais que vous nous disiez d'une façon plus claire, si vous pouvez le faire, dans l'ordre actuel des choses, soit avec les prévisions de l'Ontario ou celles que nous faisons pour cette province, à quel moment, à peu près, on pourrait penser signer un contrat de vente d'électricité avec l'Ontario et de quel ordre il pourrait être, dans un avenir prévisible. Je ne vous parle pas de l'an 2025.

M. Coulombe: Dans le cas de l'Ontario, la première hypothèse, la première question qu'il faut se poser, c'est: Qu'est-ce que ces gens vont faire avec le nucléaire? On n'a pas la réponse à Hydro-Québec; je pense qu'Hydro-Ontario ne l'a même pas. Je ne sais pas si le gouvernement de l'Ontario est en train d'en discuter. Des échéances gouvernementales en Ontario s'en viennent et cela va préciser leur stratégie. À un moment donné, ils vont être obligés de décider si la fin de la construction de Darlinqton signifie la fin du nucléaire en Ontario ou si ce n'est que le recommencement par d'autres centrales nucléaires. S'ils décident de poursuivre la centrale nucléaire pour des raisons qui leur appartiennent, notre marché se rétrécira considérablement. S'ils décident d'abandonner la filière nucléaire, et on ne le sait pas au moment où l'on se parle, il est évident qu'il leur reste le charbon, il leur reste le Manitoba et il leur reste le Québec. On pense qu'on est très bien placé dans ce marché. Si toutes ces conditions étaient remplies, on pense que ce ne serait pas déraisonnable d'aller avec 1500 ou 2000 mégawatts avec l'Ontario pour la fin des années quatre-vingt-dix. En 1998 ou 1999, début de la livraison pour une période de 15 ou 20 ans, ce ne serait pas déraisonnable de faire cette hypothèse aujourd'hui. Mais il ne faut pas oublier les préalahles. Il faut qu'il y ait une décision politique, une décision administrative sur le nucléaire, sur le charbon, sur leurs choix, et on n'a même pas encore commencé à parler du prix.

M. Gauthier: Évidemment. M. Coulombe, à cet égard, à la page 42 du plan de développement, mon collègue me souligne qu'il y a justement une très petite pointe de prévue pour l'Ontario à compter de l'an 2000. Il y a une très petite pointe de couleur pourpre dans votre graphique qui, en tout cas, semble nous dire...

M. Coulombe: C'est tout simplement parce qu'on n'a pas osé se prononcer sur les décisions qui leur appartiennent, c'est-à-dire le nucléaire. On indique, dans l'autre tableau qu'on vous a montré ce matin, qu'à l'horizon 2000, en Ontario, la fourchette varie entre 400 et 3100 mégawatts. Évidemment, 3100 mégawatts, cela suppose qu'ils vont prendre une décision entre les sources d'énergie, mais ils auront besoin, selon cette fourchette, d'entre 400 et 3100 mégawatts. La décision sur le nucléaire, c'est strictement une décision qui leur appartient.

M. Gauthier: M. Coulombe, j'y reviens encore et je le fais un peu à saute-mouton, mais vous me le pardonnerez, étant donné que vous aviez ouvert le front de l'Ontario, j'en ai parlé. J'aimerais revenir à l'exportation avec nos voisins du Sud, là où les perspectives sont nettement plus encourageantes. On entend tellement parler de problèmes avec les fameuses lignes de transport d'énergie. On en a une qui fait parler d'elle d'une façon remarquable depuis quelques mois. Si on signe pour 3500 mégawatts - vous me pardonnerez mon ignorance; peut-être avez-vous déjà inclus la

réponse quelque part dans vos documents; je ne l'ai pas vue; j'aimerais donc que vous m'éclairiez là-dessus - avec les États-Unis, en termes de lignes de transport d'énergie, qu'est-ce que cela veut dire? Est-ce que la sixième ligne est suffisante pour faire cela ou si cela prend une autre ligne, deux autres lignes? C'est quoi l'équipement qui sera nécessaire dans le transport de l'énergie pour combler ces 3500 mégawatts pour lesquels on pourrait éventuellement signer?

M. Coulombe: Dans le plan de développement, vous avez, à la page 60, deux lignes qui sont prévues, et sans rapport nécessaire avec les exportations. Je reviendrai aux exportations après.

M. Gauthier: D'accord.

M. Coulombe: Deux lignes sont prévues. C'est malheureux là, on a un problème de vocabulaire, nous autres, parce que ce qu'on appelle ici la Baie-James, la sixième ligne, j'espère ne pas ajouter à la confusion générale, mais c'est la vraie sixième ligne de courant alternatif. On va la rebaptiser. Il y a cette ligne de prévue évidemment pour prévoir la construction de LG 1 et vous avez sur la Côte-Nord, le suréquipement des centrales de Manic qui vont nécessiter une autre ligne. C'est dans le plan. C'est selon le scénario cible.

Pour revenir aux exportations, 3500 mégawatts, rappelez-vous qu'il existe déjà des interconnexions. Je vais demander à M. Jacques Guevremont de les mentionner de façon précise. Il existe des interconnexions actuellement. Il existe des lignes aux États-Unis actuellement qui sont interconnectées. Notre stratégie, c'est de se servir de ces lignes. On a actuellement une possibilité d'exportation au moment où on se parle, d'ici 1990, je crois de 5000...

M. Guevremont: On a 6265 mégawatts de lignes d'interconnexion avec l'ensemble de nos voisins.

M. Coulombe: Là on transite de l'énergie excédentaire. Notre stratégie de la deuxième phase, c'est de remplir ces lignes d'énergie de puissance et d'énergie ferme. Le problème du transport dans les 3500 mégawatts - je dis bien de transport global, des grandes lignes - ne devrait pas se poser. Je dis bien ne devrait pas, parce qu'encore là, les contrats, je ne les ai pas en main. Cela se peut que ce soit modifié. Dans notre stratégie actuelle, on se sert des lignes, des interconnexions qui existent ou qui vont exister d'ici 1990, on l'espère, pour transiter les futurs contrats de puissance et d'énergie ferme.

Quant à la troisième phase, j'inclus là-dedans l'hypothèse de l'Ontario, New York, etc., on a dit que sa caractéristique nécessiterait des lignes de nouvelles interconnexions. Là, il se peut qu'on se dirige vers des problèmes de lignes de transport dans ces contrats. C'est cela. Maintenant, c'est évident que quand on parle des interconnexions actuelles, je parle bien de lignes de transport. Je ne nie pas le fait qu'à un moment donné cela puisse prendre un petit bout de ligne quelque part pour interconnecter. C'est un problème différent sauf pour les terrains de ceux sur lesquels elle passe. Globalement, c'est un problème différent.

Si vous voulez parler du problème du transport, c'est évident que cet élément manque dans le plan. On a dit, la semaine passée, que d'ici deux mois on rendrait public le plan de développement du transport. Mais indépendamment des aspects qu'on va mettre dedans, il faut toujours se rappeler que l'équation n'est pas si compliquée que cela. Je fais encore référence aux 17 000 mégawatts. Je fais encore référence aux sources d'énergie que vous connaissez. Elles sont toutes nommées dans le plan. Vous savez où sont les centrales, vous savez où sont les bassins hydrauliques, vous savez où est la population. À moins qu'il y ait un changement technologique majeur, 17 000 mégawatts, cela veut dire sept, huit lignes de plus au Québec.

Je pense que ce n'est pas mystérieux. C'est l'histoire des 20 dernières années. Cela va être peut-être l'histoire des 20 prochaines années, à moins que survienne un changement technologique qu'on ne prévoit pas à l'heure actuelle. Bon. Maintenant, ces huit lignes ou ces sept, huit lignes dont on va parler plus abondamment dans deux mois, ne se construiront pas dans une journée, ni dans un an. L'une va se construire en telle année, l'autre quatre ans après, huit ans après. Le rythme d'implantation de ces lignes va être différent selon la discussion qu'on a, le rythme de développement de la croissance interne et le rythme de développement des exportations. Mais tôt ou tard, encore une fois, sous réserve de changements technologiques, on espère que le Québec va profiter à fond du développement de ces 17 000 mégawatts à des coûts concurrentiels à n'importe quelle forme d'énergie. Et, à moins que quelqu'un nous renseiqne ou à moins que quelqu'un nous informe que la technologie existe, cela va prendre des lignes de transport. Québec va devoir y réfléchir, en examiner l'impact sur l'ensemble du territoire et les divers problèmes que cela pose. Nous, de toute façon, c'est un débat qui ne nous répugne pas. On souhaite et on est prêt à mettre notre partie sur la table. Les gens réfléchiront à cela. Le problème de l'exportation n'intervient pas tellement là-dedans parce que tôt ou tard il va falloir les avoir les lignes pour le Québec.

Le problème de l'exportation vient devancer ou en modifier le parcours dans certains cas. Mais fondamentalement, cela ne change pas le problème réel du Québec qui a 17 000 mégawatts à développer et huit lignes à construire. (17 h 15)

M. Gauthier: M. Coulombe, revenons à l'hypothèse de votre plan de développement, qui fait état des 13 900 mégawatts et qui a fait sursauter certaines personnes positivement, dans certains cas, et plutôt de façon inquiétante, dans d'autres cas. Si l'hypothèse de 13 900 mégawatts se réalisait, comme déficience de capacité chez nos voisins et si - encore là, on fait de la futurologie comme vous avez dit tantôt, mais puisque c'est mentionné dans le plan d'Hydro, j'imagine qu'il y a un minimum de sérieux là-dedans et cela a d'ailleurs été repris, par M. Hébert, à certaines occasions - Hydro-Québec réussit de façon agressive à accaparer, sur 13 900 mégawatts, 8000 mégawatts, cela peut représenter... Parce qu'il faudrait livrer... Cela serait enthousiasmant de construire 8000 mégawatts pour vendre aux États-Unis, en supposant qu'on ait une formule de prix acceptable et qu'on puisse récupérer les barrages au moment où on en a besoin pour notre consommation interne. Advenant que tous ces éléments sont réglés, cela peut représenter quoi 8000 mégawatts - vous excuserez mon ignorance, mais il y a beaucoup de gens qui ne connaissent pas la réponse - si on signait, d'ici dix ans ou d'ici sept ou huit ans, avec les États-Unis un 8000 mégawatts dans l'hypothèse des 13 900 mégawatts soulevés dans le plan? Cela veut dire qu'on peut s'attendre à voir passer combien de lignes au-dessus de nos têtes pour livrer cette énergie aux États-Unis?

M. Coulombe: Vous parlez des grandes lignes de transport?

M. Gauthier: Les grandes lignes.

M. Coulombe: L'équation ne sera pas changée. C'est exactement celle que je viens de vous donner, peu importe le scénario que vous prenez. La seule chose qui va changer, c'est l'échéancier. Vous allez avoir encore vos 17 000 mégawatts à développer et vous allez avoir encore, éventuellement, les mêmes bassins de population au Québec et aux frontières américaines, à moins qu'il y ait un gros bouleversement, mais je ne pense pas qu'on trouve beaucoup de clients dans le Nord. On sait à peu près la configuration et on revient toujours à la même équation. Pour transporter 17 000 mégawatts, cela prend sept ou huit lignes. C'est seulement l'échéancier qui peut être accéléré, si on a beaucoup de succès dans les exportations, ou retardé, si la demande interne est plus lente que prévue, ou ainsi de suite. L'équation est toujours la même. Je parle des lignes de transport.

M. Gauthier: Oui, d'accord.

M. Coulombe: Je ne parle pas des bouts de ligne aux frontières pour raccorder des choses. Je parle des grandes lignes de transport.

M. Gauthier: J'aimerais savoir, M. Coulombe, puisqu'on a parlé un peu, tout à l'heure, du contrat avec CMP, cette petite entreprise dont la taille est très modeste en comparaison avec Hydro-Québec. Je sais que vous avez, je pense, une diapositive qui peut nous donner une bonne idée de la grosseur de CMP par rapport à Hydro-Québec. Après cela, j'aurai une question à vous poser quand on aura constaté les choses.

M. Coulombe: Est-ce qu'on peut trouver rapidement le numéro?

M. Guevremont: Je ne crois pas que nous l'ayons.

M. Coulombe: Malheureusement, on ne l'a pas dans notre...

M. Guevremont: Ce qu'on peut vous dire, c'est que c'est la plus importante compagnie d'électricité au Maine. Il y en a trois: II y a Bangor Electric, Maine Public Services et Central Main Power, la compagnie avec laquelle on traite. Cette compagnie a eu, en 1985, une pointe de 1400 mégawatts et le total de l'État du Maine est d'à peu près 1700 ou 1800 mégawatts.

M. Coulombe: Pour vous la décrire dans d'autres dimensions, c'est une compagnie qui fait à peu près un chiffre d'affaires de 500 000 000 % par année. Elle a à peu près 500 000 clients. Actuellement, ils ont fait beaucoup de rationalisation financière et se sont dégagés de l'hypothèque en énergie nucléaire, etc. C'est une compagnie qui, d'après Moody's, Standard & Pour, est bien cotée. Il y a une relation de dette-équité de l'ordre de 45-55. Donc, c'est une compagnie saine et qui s'est assainie encore plus en se débarrassant de ses hypothèques en énerqie nucléaire. C'est la situation.

Maintenant, si votre question est: Comme c'est dix fois plus petit qu'Hydro en ordre de grandeur et en revenus, si cette compagnie va mal, qu'est-ce qui se passe? D'abord, on pense qu'il n'y a aucune raison qu'elle aille mal parce qu'elle est un peu dans la même situation d'un marché qui existe, qui croît, etc. Deuxièmement, on pense que, dans la situation d'énergie dans ce coin, ni l'État du Maine ni aucune autorité ne pourra permettre qu'une mauvaise situation financière... Cela pourrait peut-être

découler dans une faillite pour les actionnaires parce que c'est une compagnie privée, mais le besoin d'électricité ne changerait pas. Les mécanismes d'approvisionnement, avec les investissements qui seraient faits, ne changeraient pas. C'est une hypothèse qui, pour nous, n'est pas un risque réel. Il y aurait peut-être une période un peu bousculée pour négocier certaines choses, mais on y a pensé, on y a réfléchi, on l'a examinée et ce n'est pas une hypothèse qui nous inquiète.

M. Gauthier: Ma question ne se dirigeait pas véritablement dans ce sens-là, quoique j'apprécie l'explication. On en serait venu à en parler à un de ces moments donnés, un peu plus tard pendant la commission possiblement. Là où cela me préoccupe un peu, j'aimerais comprendre les choses d'une façon convenable. Il s'agit finalement d'une compagnie dont le potentiel est de 1300...

M. Guevremont: La pointe en 1985 était de 1300 mégawatts.

M. Gauthier: Bon, 1300 mégawatts. Ce qui m'étonne un peu, c'est qu'une compagnie qui produit l'équivalent de 1300 mégawatts signe un contrat de 900. J'imagine que cela ne doit pas être pour ses propres besoins qu'elle signe un contrat aussi énorme, qui permet presque de doubler, à peu de chose près, sa capacité. Peut-on comprendre que Central Maine Power va revendre de notre électricité à des endroits autres que sur son territoire et pourrait-on savoir dans quel ordre et où?

M. Guevremont: D'abord, les livraisons commencent en 1992. Elle achète actuellement 200 mégawatts au Nouveau-Brunswick. Vous avez raison de penser qu'elle en revendra une partie - d'ailleurs, une référence a été faite à cela dans la lettre d'entente - pour un certain temps. Mais, en 1992, les livraisons commencent à 400 mégawatts et, en 1995, elles seront à 600. Ce n'est qu'en l'an 2000 qu'on atteindra les 900 mégawatts. Or, vu la façon dont le contrat est structuré, une certaine quantité sera revendue par Central Maine Power, mais une bonne quantité sera absorbée aussi par le Maine parce que, comme vous le voyez, le contrat s'échelonne et il atteint 900 mégawatts uniquement en l'an 2000.

M. Gauthier: Pourrais-je savoir, M. Coulombe, la raison - c'est très certainement une excellente raison, je n'en doute pas, mais j'aimerais que vous nous la fassiez connaître - qui a motivé Hydro-Québec à investir, je dirais en compagnie de Central Maine Power, dans la ligne de transport d'énergie aux États-Unis? D'abord, je pense que c'est nouveau qu'Hydro aille investir à l'extérieur. Quel est l'intérêt pour HydroQuébec d'agir de cette façon?

M. Coulombe: II y a deux raisons fondamentales et une troisième qui est très importante. La première, c'est que, dans le cadre des négociations, la compagnie nous a fait cette offre-là. Il est évident que, pour la compagnie, cela bonifie un peu l'ensemble du contrat que d'avoir Hydro-Québec comme partenaire dans son territoire. On a très bien compris cela. J'en arrive à la deuxième raison fondamentale. On a dit oui à cette proposition dans le cadre suivant. L'une des inquiétudes des marchés américains est l'aspect de la fiabilité, de savoir si les contrats seront respectés et beaucoup de questions qui se posent. L'intention qui a été soulevée plusieurs fois par notre comité consultatif et d'autres personnes, c'est d'essayer d'être de plus en plus perçu comme un citoyen corporatif américain. Donc, cette deuxième raison nous a semblé importante, compte tenu du fait qu'il n'y a pas de risque ou très peu de risque, là-dedans parce que la législation qui régit les questions du transport d'électricité est un peu comme nos réqies ici: la Régie de l'électricité et du gaz et ainsi de suite. La compagnie se présente et a un rendement sur ses investissements qui est accepté par la régie, et cela coûte tant pour transporter l'électricité.

Notre participation là-dedans sera très limitée en termes de comptant, si on veut, d'investissements très précis; on l'évalue, les négociations ne sont pas terminées, à une quizaine de millions. Là-dessus il y a un rendement assuré, comme je vous ai dit tantôt, par le mécanisme des réqies, qui accepte chaque année les frais de... Donc, cela ne sera pas une comptabilité ou ce n'est pas une compagnie qui va influer sur le résultat d'Hydro, sinon en ajoutant un dividende ou un profit à Hydro. Mais ce ne sera pas mêlé à Hydro et ainsi de suite, ce sera une compagnie "at arm's length" qui aura sa propre comptabilité, sa propre organisation, dans laquelle on sera partenaire à 30 %; c'est cela en termes d'équité. Maintenant, on va partager aussi les responsabilités du financement. Mais c'est un financement qui va reposer sur un actif de l'ordre de - je dis bien, les négociations ne sont pas terminées - 200 000 000 $ en termes d'investissement total. Mais l'actif va être là, une partie de l'équité, il y a un rendement sur l'équité et c'est une compagnie en soi.

Il y a une troisième raison avec laquelle je voudrais être prudent, compte tenu de la discussion qu'on a eue sur le libre-échange et ainsi de suite. Je pense, moi aussi, que cela pourrait avoir un impact sur la pénétration de Québécois dans ces milieux, à capacité, à compétence et à prix égaux.

Je ne veux pas provoquer d'autres débats, mais je pense que cela ouvre un marché pour nos entrepreneurs. Je ne dis pas que cela sera demain matin, mais c'est un potentiel. Lorsqu'on devient un citoyen corporatif avec un minimum de risques cela peut être intéressant. Mais c'est la troisième raison.

M. Gauthier: D'accord. M. le Président, je ne sais pas où j'en suis dans le temps.

Le Président (M. Charbonneau): II vous reste trois minutes sur le bloc de dix minutes de questions que vous posez actuellement. Par la suite, ce sera le député de Vimont et le député de Bertrand. Il nous reste à peu près une demi-heure d'ici 18 heures. Je vous indique que les réponses ne comptent pas dans le temps d'un député.

M. Gauthier: Cela dit, M. le Président, vous me causez des problèmes, mais j'accepte cela volontiers, je sais que mes collègues ont des questions importantes à poser. Je vais juste revenir, c'est pour cela que cela paraît un peu mêlé, j'aurais aimé pouvoir revenir dans un autre bloc un peu séparé. De toute façon, je vais poser ma dernière question puisqu'il me reste trois minutes. Vous comprendrez que je vais essayer de ramasser cela.

M. Coulombe, je voudrais revenir encore une fois sur la question de la base de prix sur laquelle on va négocier dans nos ventes éventuelles avec nos voisins. Quand on va excéder la quantité de 3500 mégawatts, si on réussit éventuellement à le faire, j'ai vu dans le plan de développement - à tout le moins c'était dans le plan de développement de l'an dernier et je pense que c'est repris cette année - qu'il y a trois phases à l'exportation. Vous en avez parlé ce matin lors de la présentation, et quand on excède les 3500 mégawatts de vente potentielle à l'extérieur, on tombe dans cette partie qu'on appelle la troisième phase. La question des prix me préoccupe toujours dans cette phase. Cela ne semble pas défini. J'aimerais savoir si vous pouvez nous donner le plus de précisions possible. À partir de quel coût l'Hydro pense être en mesure de négocier au-delà des 3500? Je pose la question. Elle a son sens parce qu'il y a toujours un scénario possible optimiste auquel Hydro va peut-être devoir faire face incidemment.

M. Coulombe: Pour la question des formules de prix, pour que cela soit très clair, pour la phase 1, formule de prix en fonction des énergies de substitution, donc 80 % du prix de l'énergie que cela prend pour produire de l'électricité dans le coin. Phase I, c'est la formule de prix, cette phase est terminée même si la livraison n'est pas terminée. Pour la phase II, ce qu'on essaie et qu'on a réussi dans le cas de

Central Maine - est-ce qu'on va réussir pour les 2600 autres qui restent? Je n'en sais rien - notre cible est de fixer des prix en fonction des coûts évités par l'acheteur. C'est ce qu'on a réalisé pleinement dans le contrat de Central Maine et on espère continuer sur cette hase pour la deuxième phase. Quant à la troisième phase, pour la question des prix, on émet l'hypothèse à l'heure actuelle que cela va être surtout en fonction de nos coûts. Cela va être un "mark up" sur nos coûts. Cela va être une marge bénéficiaire. Remarquez que quand vous signez le contrat à la fin de tout, ces deux formules se ressemblent beaucoup. Quand on regarde le prix final, si on veut. Je vous ai dit tantôt que le coût évité était là, nos coûts étaient là et c'est entre les deux qu'on a négocié. Quand on signe, le prix précis est l'équivalent d'avoir une partie de nos coûts et d'avoir mis un "mark up" de X. Mais notre position de négociation, à notre avis, est beaucoup plus intéressante à partir des coûts évités. C'est pour cela que certains de nos clients ne veulent pas en entendre parler. Ils veulent partir du coût de LG 1. Nous disons non. Je ne sais pas si les trois formules de prix sont claires.

M. Gauthier: Vous avez dit que la formule de prix, à partir des coûts évités, est extrêmement intéressante actuellement. J'en conviens, bien sûr, mais elle devient de moins en moins intéressante au fur et à mesure que la quantité augmente.

M. Coulombe: C'est exact. C'est pour cela qu'on va probablement revenir à nos coûts dans la troisième phase. À moins qu'il y ait de nouvelles inventions. On va probablement revenir à nos coûts réels.

M. Gauthier: Je vous remercie beaucoup, bien à regret, j'avais bien d'autres choses... (17 h 30)

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Vimont.

Programme de marketing

M. Théorêt: Tantôt, mon collègue de La Peltrie a fait état du lobbying par les producteurs de charbon. On sait qu'il y a un autre groupe de lobbyistes fort importants, ce sont les groupes écologiques, préoccupés par la question environnementale. Lors de notre dernière rencontre de deux jours avec les parlementaires américains à Montréal, plusieurs nous ont dit clairement: Nous, on est vendus à l'idée d'acheter de l'électricité, on en connaît les avantages. On connaît l'expertise d'Hydro-Québec, et c'est pour cela qu'on négocie avec elle parce que c'est elle qu'on aimerait bien avoir chez nous. Mais on aimerait que vous veniez dire à

notre population quels sont les avantages d'acheter l'hydroélectricité.

Ma question est la suivante: Existe-t-il, dans le moment, un programme de marketing, ou est-ce qu'il y en a un de prévu, qui s'adresse directement à la population de la Nouvelle-Angleterre ou de New York: Voici les avantages de l'hydroélectricité par rapport à d'autres sources d'énergie. Existe-t-il un moyen pour contrer ce lobby qui me semble important, selon les représentants américains?

M. Coulombe: Vous me demandez si Hydro-Québec a un programme de marketing s'adressant à la population américaine? La réponse est non, on n'a pas de programme. Si vous me demandez: Est-ce qu'on devrait en avoir un? Je suis presque tenté de dire qu'on ne devrait pas non plus en avoir. Je sais que ce n'est peut-être pas partagé par tout le monde. Nous pensons que des interventions directes auprès de la population américaine nous causeraient plus de problèmes, car elles réveilleraient les lobbies plus qu'autre chose. On peut se tromper là-dessus, remarquez que plusieurs stratégies sont possibles. Je parle d'Hydro-Québec, je ne parle pas du gouvernement du Québec, qui peut faire cette vente auprès des hommes politiques de là-bas; cela est un autre débat. Je parle d'Hydro-Québec en tant qu'entreprise. On tient énormément à être considérés comme une entreprise par nos partenaires avec lesquels on va signer, je pense que ce ne serait pas tout à fait de mise d'aller carrément dans leurs plates-bandes et vanter une chose avec laquelle ils sont obligés de se tailler une place à travers tous les organismes de réglementation, leurs propres députés, leur propre législature, etc. On pense que ce ne serait pas stratégiquement bon. Maintenant, on ne dit pas qu'on a la vérité là-dessus, mais c'est notre hypothèse de travail, à l'heure actuelle.

Deuxièmement, on voulait absolument démontrer par un contrat que c'était possible d'en avoir. Jusqu'à il y a un an, nos contrats avec les États-Unis concernaient l'électricité excédentaire et beaucoup de gens disaient: Hydro-Québec va peut-être construire de toute façon et, si elle construit, il y aura encore des surplus et on sera capable d'avoir de l'énergie au prix de l'électricité excédentaire. Là, on vient de démontrer que ce n'est pas vrai et s'ils veulent avoir de l'électricité, il faudra qu'ils paient pour. Je pense que le contrat avec Central Maine vient de déclencher un processus qui peut être intéressant vis-à-vis de nos autres clients. Enfin, il y en a un!

II y a aussi une autre raison. On vous a parlé de la question de fiabilité du réseau, André Mercier vous l'a expliqué ce matin. Cette question, on veut la régler définitivement d'ici un an, avant de trop déborder les sujets. On se donne un an non seulement pour négocier un autre contrat, mais pour régler le problème de fiabilité. Tant qu'il ne sera pas réglé, les lobbies auront des arguments. Si on règle cela, on pourra peut-être entrer dans une autre ère de communication, mais, à l'heure actuelle, c'est à peu près cela, notre stratégie.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Dans le cas de la nouvelle filiale, à la suite du contrat qui vient d'être signé, est-ce qu'il y a une politique bien arrêtée au niveau de l'achat des services et des retombées que le Québec aura par rapport à ce qui se passera aux Etats-Unis?

M. Coulombe: Dans la lettre d'entente, il y a une annexe qui décrit la structure globale. Vous savez qu'on veut signer le contrat vers l'été, si certaines approbations ont été obtenues avant. Durant cette période, on va négocier un autre document que le contrat d'électricité et qui s'appelle "Entente entre actionnaires". Les négociations réelles, paragraphe par paragraphe de cette entente vont commencer dans les jours qui suivent. Là-dedans, on va examiner notre rôle, on va examiner notre situation dans la compagnie même, on va examiner notre rôle au conseil d'administration, les pouvoirs qu'on veut se réserver sur certaines choses tout en agissant comme un actionnaire minoritaire, parce qu'on n'est pas majoritaire dans cette compagnie, et on va aborder dans l'entente les problèmes auxquels vous faites allusion. Ils seront abordés dans l'entente entre actionnaires, dont la négociation va commencer dans quelques jours.

Devancement des travaux - pénalités

M. Parent (Bertrand): Merci. L'autre question concerne le devancement des travaux tels que planifiés actuellement dans le plan, dans le but de fournir de l'électricité aux Américains à la suite du contrat qui a été signé. Je sais qu'il y a des clauses de pénalités prévues par rapport au fait que lorsque viendra le moment de se brancher comme tel, on peut décider, pour une raison ou pour une autre, de ne pas l'utiliser. Ma question est la suivante. L'enclenchement de ces coûts, ce qu'on a appelé le coût de devancement de ces travaux, même l'ensemble des coûts, puisque ces travaux ne sont pas nécessaires aux besoins du marché intérieur, est-ce que les mesures prévues - parce qu'il pourrait arriver toutes sortes de choses quant aux clauses de pénalité - sont suffisantes pour qu'Hydro-Québec soit capable de supporter les frais encourus?

M. Coulombe: II y a plusieurs éléments dans votre question. Il y a la question des pénalités, et je voudrais que Jacques Guevremont explique au moins la structure même des vraies pénalités qu'on va avoir, ou qu'ils auront, selon tel scénario. Mais il y a l'autre dimension aussi qui est plus globale, c'est-à-dire l'ensemble des investissements. Vous vous rappellerez que notre cible de 3500, il va falloir l'atteindre d'ici deux ans ou deux ans et demi. Cela déclenche le programme de devancement qui vous a été expliqué dans le programme cible, qui se situe vers l'année 1989. Il est évident que s'il n'y en a pas 3500 exactement, il va falloir avoir des hypothèses. Si on en a 2500 dans le sac ou 2800 et qu'il en manque 300, est-ce qu'on le fait quand même? Est-ce qu'on devance tout de suite ou non? Là, cela va dépendre aussi de la demande intérieure.

Notre scénario cible, c'est que les investissements majeurs de devancement commencent à ce moment-là. Donc, c'est dans les deux prochaines années et demie qu'il va falloir réévaluer la situation, demander: Est-ce réaliste, les 3500, ou non? Là, il y aura des décisions à prendre. Si on a atteint notre cible, les travaux commencent; si on ne l'a pas atteinte, il va falloir examiner la situation. Donc, pour les grands investissements - je parle des grands investissements, je ne parle pas de l'ingénierie préliminaire, etc., qui représente quand même des sommes importantes, selon certaines comparaisons, mais qui sont minimes par rapport aux milliards de dollars investis sur 10 ou 15 ans - on a deux ans ou deux ans et demi pour voir la souplesse devant nous pour s'adapter là-dedans.

Si d'ici deux ans et demi ou trois ans, par exemple, dans le cas de Central Maine, on n'a pas réussi à passer à travers la majeure partie des permis, là, il faudra se poser de sérieuses questions. Donc, c'est tout ce scénario qu'il faut examiner, mais c'est prévu. Vous comprenez la séquence des événements. On ne s'embarquera pas là-dedans si la cible n'est pas atteinte, ou n'est pas atteinte en grande partie.

Parce que si on ne parle que du contrat, rappelez-vous que le devancement nécessité par le Central Maine, ce n'est pas LG 1 en 1989, c'est LG 1 en 1991-1992, seulement le contrat de Central Maine. Il faut se le rappeler; ce sont les 3500 qui déclenchent le processus. Si on regarde les pénalités du contrat lui-même, je pense que Jacques peut en expliquer certains éléments et je pense que c'est assez important de comprendre cela parce que là, on a vraiment des barrières qui nous protègent énormément.

M. Guevremont: Des pénalités, évidemment, on pourrait en parler pendant une heure, je n'ai pas l'intention de prendre autant de votre temps. Les pénalités comme celles de ne pas livrer, par exemple, sont assez importantes dans un tel contrat et celles de ne pas prendre, de leur côté, sont très importantes. Si on fait l'hypothèse qu'en 1993, en dollars US, il leur en coûterait 64 $ le mégawattheure, dans le cas où ils ne prendraient pas l'électricité, il faudrait quand même qu'ils paient 59 $ le mégawattheure, et on garderait l'énergie. En d'autres mots, cela devient une pénalité énorme puisque, si notre électricité vaut ce prix à ce moment-là, non seulement ils seront obligés de payer 59 $ le mégawattheure, s'ils n'acceptent pas la livraison, mais nous resterons avec l'électricité, qui pourrait valoir à peu près 64 $. Dans le cas où Hydro-Québec ne livrerait pas, on aurait à payer 20 $ le mégawattheure, mais on garderait l'électricité qu'on n'a pas livrée. C'est un type de pénalité pour non-livraison à partir de problèmes dans notre réseau de production et transport et chez eux de la même nature. C'est ce genre de pénalité qu'il y a.

Au sujet de la date, pour que le contrat soit valable, il faudrait que les livraisons commencent en 1992 et pas plus tard qu'un an et demi plus tard, autrement les parties ont le droit de se retirer si, pour une raison quelconque, on ne peut pas s'en sortir. Il faudra alors réajuster nos programmes de construction en conséquence, comme l'a expliqué M. Coulombe.

M. Parent (Bertrand): Une dernière question qui touche la libéralisation des échanges à 3.3.1. Vous mentionnez dans votre exposé que, bien sûr, tous les ratios sont fort importants pour ne pas être interprétés du côté américain comme étant une entreprise subventionnée et particulièrement les ratios qui, par rapport au rendement sur l'avoir propre... Dans votre redressement ou dans votre proposition où vous demandez de la marge de manoeuvre, il est essentiel de rétablir différents ratios actuellement. Ma question est à savoir si, au niveau du libre-échange, si, pour une raison ou pour une autre, cela débloquait de ce côté-là et qu'on se ramassait dans une situation relativement à court terme où des ententes seraient signées, Hydro-Québec ne pourrait pas, à court terme, je parle d'ici un an ou deux, se trouver dans une situation et être pénalisée.

M. Coulombe: Je ne crois pas tout simplement parce que... À moins que le gouvernement n'oblige Hydro-Québec à changer radicalement de stratégie, je pense que c'est très clair dans le plan de développement. L'interprétation des financiers ou des analystes financiers ne se trompe pas là-dessus. C'est tellement clair comme objectif que d'ici un an ou deux, il ne peut rien se produire. À moins qu'il y ait changement de stratégie complète, je ne pense pas que cela ait de l'impact d'ici un an ou deux.

Par contre, si, de façon systématique, ces analystes se rendaient compte que c'est impossible d'atteindre ce rendement-là, le problème global dont vous parliez tantôt se poserait, mais je ne pense pas qu'à court terme cela ait de l'impact, même si on reste... Actuellement, on est aux alentours de 4\ %, même si l'année prochaine on ne monte qu'à 5 % ou 6 %, cela aurait peu d'impact et on est capable de démontrer que, toutes choses étant égales, on reconstitue notre marge de manoeuvre avec des tarifs autour ou en bas de l'inflation, tout simplement par le jeu des surplus qui deviennent de l'électricité régulière à deux fois et à trois fois le prix. Actuellement, on vend dans les chaudières à deux fois moins cher que l'électricité régulière. Aussitôt que cela embarquera dans le régulier, nos ratios vont se replacer. Là-dessus, je ne vois aucun problème d'interprétation à court terme à moins d'un changement radical de stratégie.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre. M. le député d'Ungava avait aussi des questions mais si vous voulez...

M. Ciaccia: J'aurais deux petites questions.

Le Président (M. Charbonneau): Allez-y!

M. Ciaccia: Si on prend comme référence le cas de Central Maine, pourriez-vous nous indiquer le prix moyen ou le prix du kilowattheure de l'électricité qui sera vendue aux Américains et le comparer avec le tarif L grande puissance? Pouvez-vous faire la même chose, sur la même question en ce qui a trait au taux de rendement?

M. Guevremont: La diapositive no 6 de l'exportation, s'il vous plaît.

Cette diapositive vous montre l'évolution prévue du prix du contrat en rapport avec le tarif L. Vous vous apercevez qu'il y a une marge considérable entre le tarif L et les prix prévus pour le contrat. Si on va en...

M. Coulombe: C'est un tarif L qui croît à peu près au même rythme que l'inflation, avec un facteur d'utilisation comparable à celui du contrat. On compare ces deux choses-là tout simplement parce que ce sont deux produits comparables. On ne peut pas comparer le contrat de Central Maine au prix de distribution au Québec, parce que tous les coûts de distribution ne sont pas dans ce contrat. C'est Central Maine qui s'organise avec cela.

M. Guevremont: Ce sont des livraisons en gros ici. Le prix, en 1985, est d'à peu près 0,06 $ comparativement au tarif L qui est de combien?

Une voix: 0,026 $. (17 h 45)

M. Guevremont: 0,026 $. C'est à partir de 1985 que commencent les indexations, M. le ministre, pour ce contrat.

M. Ciaccia: Si je comprends bien, ce genre de contrat élimine vraiment les possibilités que notre électricité soit vendue à de meilleures conditions aux entreprises américaines et qu'on vienne ainsi diminuer l'avantage concurrentiel de nos entreprises. Il y a là assez de marge.

M. Coulombe: C'est exact, parce que, pour qu'une entreprise puisse s'installer, qui a besoin de beaucoup d'électricité... Pour une entreprise dont le facteur d'utilisation d'électricité est très faible, cela n'a pas d'importance; mais pour une entreprise dont les coûts de production sont fortement influencés par le coût d'électricité, cela prendrait quelqu'un de masochiste pour aller payer deux fois et demie plus cher ailleurs.

M. Ciaccia: Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Cela va.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va.

M. le député de Roberval, est-ce que vous avez d'autres questions? Vous nous avez indiqué, tantôt, que vous auriez souhaité avoir plus de temps.

M. Gauthier: Vous me faites faire, M. le Président, des efforts de synthèse et, après, vous me demandez de les défaire. Une seule question en terminant; de toute façon, il est 17 h 50. Effectivement, le type de contrat avec le produit de haute gamme d'Hydro-Québec est beaucoup plus intéressant que les contrats précédents, car ceux-ci ne servaient, finalement, qu'à écouler des surplus d'énergie. Dans le même sens de ce que le ministre vient de demander, quand on parle de taux de rendement d'un contrat, on se croit obligé, ne serait-ce que par curiosité, de regarder quel est, proportionnellement à l'électricité vendue à l'interne, le taux de rendement des contrats de surplus. C'est très faible; je sais que le prix est dérisoire, compte tenu du prix réel, mais on n'a pas le choix. C'est préférable que de laisser couler l'eau dans la rivière. J'aimerais connaître un peu...

M. Coulombe: En fait, ce que vous voulez comparer, ce sont les prix auxquels on vend notre énergie excédentaire par rapport au prix que les Québécois paient.

M. Gauthier: Oui.

M. Guevremont: L'excédentaire à l'extérieur du Québec, en 1987, c'est autour de 20 $ à 25 $ le mégawattheure. Le prix de référence du contrat ici, où commencent les indexations, c'est un peu plus de 0,06 $, c'est-à-dire 60 $ le mégawattheure. Il y a un multiple important.

M. Gauthier: Je m'excuse. J'ai l'impression qu'on ne s'est pas bien compris. On a vu qu'à l'interne, par exemple, le consommateur domestique québécois paie un prix X le kilowattheure. Le contrat de Central Maine Power est beaucoup plus intéressant. Il est aux alentours de quelque 0,06 $. Des contrats existent actuellement qui sont des ventes de surplus qu'on n'avait pas le choix de vendre à rabais. Cela représente quoi comme prix?

M. Guevremont: Parlez-vous au Québec ou à l'externe?

M. Gauthier: À l'extérieur.

M. Guevremont: On n'a aucune obligation. Quant aux contrats que nous avons actuellement, que nous alimentons, il n'y a aucune obligation de la part d'Hydro-Québec. Au moment où on est capable d'écouler ces surplus sur le marché québécois ou ailleurs à un meilleur prix, on abandonne ces marchés. Des conventions d'interconnexions que nous avons nous laissent complètement libres d'interrompre ces livraisons. On ne le fait que pour se départir. Je peux vous donner le prix qu'on retire de cela.

M. Gauthier: Si vous permettez, par rapport au prix de revient comptable, cela représente quoi les sommes qu'on retire de cela? Je sais que le prix n'est pas ce qu'on voudrait avoir évidemment. J'aimerais avoir une idée de ce que cela représente en moyenne.

M. Guevremont: À l'Ontario, par exemple, l'interruptible qu'on a vendu l'an passé se situait à peu près à 0,017 $. Maintenant, quel est le revenu comptable, je ne sais pas.

M. Boivin: Pour répondre à votre question, on a vu ce matin que les ventes régulières au Québec, donc, les ventes qu'on fait à nos clients québécois selon les tarifs normalisés, nous apportent un taux moyen de rendement de 11,4 %. Les ventes qu'on fait d'énergie excédentaire au Québec, soit l'énergie qu'on vend pour les bouilloires, nous apportent un rendement négatif de moins 31 %. Les ventes d'énergie ferme qu'on fait aux États-Unis présentement - parce qu'on a quelques petits contrats avec le Vermont -nous rapportent un rendement de 51 %. Les ventes d'énergie excédentaire qu'on fait au Canada, aux provinces voisines, nous apportent un rendement négatif de moins 12,5 %. Les ventes d'énergie excédentaire qu'on fait aux États-Unis nous rapportent un rendement de 2,5 %. Ce sont les données pour 1986. Je ne sais pas si cela répond à votre question. Cela fait beaucoup de chiffres.

M. Gauthier: Oui, cela répond très bien. C'est exactement le parallèle que je voulais avoir. On comprend, évidemment, l'intérêt de remplacer au plus vite l'énergie excédentaire par le produit de haut de gamme qui est beaucoup plus rentable. Je vous remercie beaucoup, compte tenu de l'heure, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau):

Écoutez, je pense qu'aucun autre membre de la commission a manifesté l'intention d'intervenir à nouveau. À l'heure qu'il est, je vais ajourner les travaux de la commission à demain, 10 heures, alors que nous reprendrons jusqu'à 12 h 30 sur le plan d'équipement et les questions d'environnement. Par la suite, demain après-midi, nous aborderons la situation financière et les tarifs. Mesdames, messieurs, bonsoir.

(Fin de la séance à 17 h 52)

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