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(Dix heures onze minutes)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît;
La commission élue permanente de l'énergie et des
ressources reprend ses travaux aux fins d'examiner les circonstances entourant
la décision du conseil d'administration de la Société
d'énergie de la Baie James de régler hors cour la poursuite
civile intentée à la suite du saccage du chantier de LG 2 survenu
en 1974 et, plus spécifiquement, le rôle du premier ministre et de
son bureau à cet égard.
Les membres de cette commission sont: M. Vaillancourt
(Jonquière), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Duhaime (Saint-Maurice), M.
Bourbeau (Laporte), M. Laplante (Bourassa), M. Gratton (Gatineau), M. Lavigne
(Beauharnois), M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet), M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), M. Perron (Duplessis), M. Rodrigue (Vimont).
Les intervenants sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), M. Desbiens (Dubuc), M. Dussault
(Châteauguay), Mme Harel (Maisonneuve), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M.
Pagé (Portneuf), M. Doyon (Louis-Hébert), M. Tremblay (Chambly),
M. Saintonge (Laprairie). Le rapporteur est toujours M. LeBlanc
(Montmagny-L'Islet).
Au moment où nous nous sommes quittés, hier, nous avions
Me Gauthier avec nous. Avant qu'il intervienne au niveau des réponses
à donner aux questions du député de Laporte, j'aimerais
simplement donner l'horaire de la journée.
Normalement, nous devrions siéger jusqu'à 12 h 30 à
partir de maintenant. Eu égard aux décisions qui seront prises
à l'Assemblée nationale, sachant qu'il y a la réplique au
discours sur le budget, décisions concernant le nombre de commissions
qui pourront siéger après la période de questions, nous
devrions normalement revenir après la période de questions,
c'est-à-dire vers 15 heures ou 15 h 30 jusqu'à 18 heures et
siéger ensuite de 20 heures jusqu'à 22 heures ce soir.
Normalement, à la suite des ententes intervenues - du moins, c'est ce
que j'ai cru comprendre des discussions que j'ai eues avant le début de
cette commission -nous siégerions demain de 10 heures à 13 heures
et de 15 heures à 18 heures. Ceci est l'horaire pour les deux prochains
jours.
La personne qui est devant nous est Me
Yves Gauthier, toujours sous le même serment. Le
député de Laporte est celui qui a le droit de parole. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys avant.
L'audition du juge Jasmin
M. Lalonde: Excusez-moi, M. le Président, je ne veux pas
interrompre vos déclarations d'ouverture. On le fait d'habitude en
début de journée. Compte tenu des événements
récents, vous le savez et vous n'en avez pas fait état à
cette commission. Je ne vous en fais pas reproche et je pense que c'est tout
à fait correct.
Même si M. le juge Jasmin a été invité ici
à cette commission, un de ses anciens clients avait fait objection
à ce qu'il soit entendu et s'était adressé à la
Cour supérieure. Je crois qu'hier, il y a eu un rejet de cette demande
d'injonction. J'aimerais tout simplement demander au ministre quels sont les
projets du gouvernement en ce qui concerne l'audition de M. le juge Jasmin.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, je n'ai pas pris
personnellement connaissance du jugement qui a été rendu hier, je
crois, par la Cour supérieure sur la demande d'injonction
interlocutoire. Tout ce que j'en sais, c'est que cela a été
rejeté pour différents motifs. Dans un de ces motifs, l'honorable
juge Pinard statue que l'Assemblée nationale et ses commissions sont
maîtresses de leurs travaux. Par voie de conséquence et sous
réserve de ce qui pourrait éventuellement se produire demain
devant la Cour supérieure à Montréal sur l'audition de la
requête au fond, je ne vois pas en quoi les travaux de notre commission
parlementaire, si je me fie au premier jugement qui a été rendu,
pourraient être mis en péril de quelque façon que ce
soit.
Le seul problème que j'ai actuellement... Je pourrais
peut-être retourner ma question au député de
Marguerite-Bourgeoys. Si j'avais une évaluation du nombre d'heures que
l'Opposition entend utiliser... Si vous voulez avoir mon sentiment, j'ai
l'impression que, si les questions ne sont pas épuisées de votre
côté, elles doivent être sur le point de
l'être, sans préjuger de vos intentions et de vos
très savantes stratégies. Mais je dois vous avouer que vous ne me
facilitez pas du tout la tâche parce que je ne peux prévoir en
aucune manière quel peut être l'agencement normal des travaux
normaux d'une commission normale. Si vous me disiez que d'ici à 13
heures, nous en aurions terminé avec Me Gauthier, je pourrais vous
répondre tout de suite sur ce qui se produira ensuite, mais, si vous me
dites que vous allez "bretter" jusqu'à demain après-midi, je suis
obligé de tenir toutes mes affaires en suspens. J'ai
décalé mon horaire du mois de mai, et je vous avais
prévenu. Maintenant, je suis en train d'entamer mon mois de juillet, en
tassant mes choses.
Que l'on appelle l'honorable juge Jasmin après Me Gauthier ou
qu'on appelle Me Boivin, je pense que ce ne sera une surprise pour personne; de
toute manière, ce sera l'un des deux. Alors, cela permettra à vos
très brillants recherchistes de continuer de poursuivre leurs travaux et
de vous préparer un excellent dossier. Je n'ai pas été
impressionné par les travaux d'hier, je dois l'admettre, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Cela fait peut-être partie de nos...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ...de ce que le ministre a qualifié de nos
savantes stratégies. La seule stratégie que nous ayons, c'est
celle d'obtenir le plus de renseignements possibles pour éclairer la
commission. Je veux en assurer le ministre, mais, malheureusement, quelquefois
cela prend plus de temps que d'autres.
M. Duhaime: Surtout quand les questions ne viennent pas vite. Le
député de Laporte manquait de gaz un peu hier.
M. Lalonde: Le rythme des questions, c'est souvent une
conséquence de l'allure de la commission aussi. On voit les
péquistes réunis en aréopage devant le conseiller
spécial du premier ministre s'esclaffer à chaque blague - il y en
avait de drôles -avec un enthousiasme tout à fait délirant.
Oui, naturel. Quand le "boss" est là, assis à la table, ou son
représentant, comme on rit fort. Cela va bien, n'est-ce pas? Alors, cela
dépend...
M. Duhaime: Vous ne pouvez pas avoir ce plaisir, vous autres,
vous n'avez pas de chef; c'est cela votre problème.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Lalonde: Et on n'en a pas, non plus, qui a été
accusé par un journal d'avoir trompé l'Assemblée
nationale.
M. Duhaime: Cela c'est vrai, par exemple.
M. Lalonde: M. le Président, en ce qui concerne
donc...
M. Rodrigue: Le président de ce journal-là ne
cherchait pas...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Lalonde: Je ne peux pas assurer le ministre que nous pourrons
avoir terminé à 12 h 30 lorsque nous ajournerons nos travaux.
M. Duhaime: La presse... En russe, vous savez comment on dit
cela, la presse? C'est la Pravda. En russe.
M. Lalonde: Ah, quelle culture!
M. Duhaime: C'est un organe officiel.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Je
laisse aller un peu les blagues, mais je pense qu'on devrait redevenir un peu
plus sérieux. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, c'est
vous qui avez la parole, et j'aimerais qu'on ne vous interrompe pas.
M. Lalonde: Oui. Enfin, j'avais une petite remarque à
faire. La culture, c'est comme la confiture, moins on en a, plus on
l'étale. Mais cela fait deux fois que je la fais, alors... Il semble que
le ministre ne l'a pas encore comprise.
M. Duhaime: J'avoue que c'est la première fois que je
l'entends. Vous devriez la répéter et l'appliquer dans votre
cas.
M. Lalonde: Je vous donnerai l'auteur, à part cela. Elle
n'est pas de moi.
M. Rodrigue: On pourrait lui répéter le mot
d'esprit: L'esprit, c'est comme un parapluie...
M. Lalonde: M. le Président, on n'a pas l'intention de
"bretter". On veut simplement avoir le plus de réponses possible, le
plus rapidement possible.
M. Duhaime: Des confitures aux fraises, si possible.
M. Lalonde: Maintenant, j'ai cru comprendre que le ministre a
mentionné l'audition de la requête en jugement
déclaratoire. Est-ce que, dans l'esprit du ministre, l'audition de M. le
juge Jasmin
dépend du sort de cette requête-là? Autrement dit,
est-ce qu'il a l'intention de suspendre cette audition jusqu'à ce que
cette requête ait été entendue ou décidée
d'une façon ou d'une autre?
M. Duhaime: Je serais tenté, instinctivement, de
répondre oui. Mais, si vous me le permettez, M. le Président, je
vais vous lire le jugement - je l'ai en main, on vient de me le donner - du 11
mai 1983, de l'honorable juge Pierre Pinard. À la page 6, il y a quelque
chose qui m'apparaît central.
M. Lalonde: Est-ce qu'on pourrait distribuer le document?
M. Duhaime: Avec plaisir. Je m'excuse, je viens de l'avoir.
Même que les feuilles sont chaudes.
M. Lalonde: Ah bon. Est-ce que ce sont nos services de recherche
qui vous l'ont envoyé?
M. Bourbeau: II vient de le recevoir et il est déjà
rendu à la page 6. Il ne commence pas par la page 1, non?
M. Duhaime: Pardon?
M. Bourbeau: Vous ne commencez pas par la page 1?
Le Président (M. Jolivet): Non, je ne demanderais pas que
vous fassiez la lecture au complet. De toute façon, ce n'est pas cela
qui est important.
M. Duhaime: Vous voulez savoir si votre nom y est? Oui. Vous
êtes mentionné: M. André Bourbeau, ès
qualités: intimé.
M. Bourbeau: Intimé mais pas intimidé,
cependant...
M. Lalonde: ...mais pas intimidé...
Le Président (M. Jolivet): Tout ce que je veux
simplement...
M. Duhaime: Mais sérieusement, M. le Président, je
voudrais qu'on procède-Le Président (M. Jolivet): Oui,
c'est cela. Je trouve, actuellement, qu'il est normal qu'on ait quelques
discussions préliminaires, mais je ne voudrais pas que cela dure toute
la matinée car on n'aura pas terminé avec Me Yves Gauthier pour
12 h 30, c'est sûr, si vous continuez comme cela. Mais allez-y rapidement
pour qu'on puisse vraiment passer à l'objet de notre rencontre de ce
matin.
M. Duhaime: Alors, à la page 6, M. le Président.
Cela ne correspond pas à la page 27 d'hier. Le juge dit: "Par
conséquent, rien dans la requête ne permet raisonnablement de
conclure que le droit à la confidentialité de la
requérante serait sérieusement mis en péril. La
requête est prématurée, c'est le moins qu'on puisse dire
et, à ce stade, vu l'absence d'intérêt réel de la
requérante à intenter ce recours en injonction, la requête
doit être rejetée. "Il ne sera donc pas nécessaire que je
décide si je peux délivrer une injonction provisoire à
l'encontre d'une commission élue du Parlement, mais je dois dire
qu'aucune autorité ne m'a été citée par la
requérante, qui permettrait de penser le moindrement que le Parlement
serait maintenant assujetti aux pouvoirs de réforme et de surveillance
de la Cour supérieure. "Cette proposition constitutionnelle irait,
certes, à l'encontre de principes séculaires et rien dans la Loi
sur l'Assemblée nationale ne m'indique une volonté du Parlement
d'être assujetti à d'autres règles de procédure que
les siennes."
Le juge continue sur la séparation des pouvoirs au coeur de notre
système en citant des autorités britanniques, etc. Alors, pour
répondre à la question du député de
Marguerite-Bourgeoys, ma réponse va être claire et simple. La
commission élue de l'énergie et des ressources, étant une
commission de l'Assemblée nationale, n'est pas, à mon sens,
assujettie à quelque contrôle judiciaire que ce soit. Pour
employer un langage un peu plus technique, je dirais que notre commission
devrait ignorer ce qui se passe actuellement devant la Cour supérieure.
Mais l'agencement de nos travaux, dans mon esprit, ne saurait en aucune
façon être influencé par ce qui pourrait se produire en
Cour supérieure, demain ou la semaine prochaine.
Tout ce que j'essaie de savoir - le député de
Marguerite-Bourgeoys m'a posé plusieurs questions, j'ai répondu,
mais j'attends encore les réponses aux questions que j'ai
posées... Je pourrais vous dire, si vous me donnez une idée de
l'échéancier que vous avez en tête, ce qu'on va faire et
vous le dire vite à part cela.
M. Lalonde: En fait, je vous l'ai dit et je vais vous
répéter qu'on n'a pas d'indication à savoir que ce sera
terminé à 12 h 30. Il reste à savoir si on siège
cet après-midi aussi, parce que c'est la réplique du porte-parole
de l'Opposition officielle au discours sur le budget. On sait que pendant le
discours sur le budget, il n'y a pas eu de séance de commission, et il
faut que je règle cela avec le leader du gouvernement. Je lui en ai
déjà parlé, il y a des précédents
contraires, mais il est possible qu'il n'y ait pas de consentement pour une
troisième
commission cet après-midi, à cause de ce discours en
Chambre.
M. Duhaime: Vous voulez nous priver de votre présence!
M. Lalonde: Non, la retarder pour me faire désirer un peu;
c'est tout.
Le Président (M. Jolivet): Ceci étant dit, nous
passons la parole au député de Laporte.
Témoignages M. Yves Gauthier (suite)
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Je voudrais poser une
ou deux questions à Me Gauthier au sujet de son voyage à
Washington, au mois de mars 1978, voyage au cours duquel en tant que
président du local 791, il avait rencontré les membres du
syndicat américain et leurs avocats et au cours duquel il avait
suggéré aux Américains une liste de noms d'avocats qu'ils
pourraient engager pour défendre leur cause. Parmi ces noms, vous aviez
suggéré celui de Me Rosaire Beaulé et, par un heureux
hasard, du moins pour Me Beaulé, son nom a été retenu.
En revenant de Washington, est-ce que vous avez mentionné
à Me Beaulé que vous aviez recommandé son nom?
M. Gauthier (Yves): M. le Président, je ne me souviens
pas, mais je sais que j'avais appelé Me Aquin. C'est là que j'ai
su. Il a dit: Je ne peux pas le prendre; c'est nous qui avons la cause. Je me
souviens de cela.
Avant d'aller plus loin, je ne sais pas si je peux dire quelque chose.
Je ne voudrais pas qu'il y ait de malentendu. M'entendez-vous?
Le Président (M. Jolivet): Allez, oui, cela va.
M. Gauthier (Yves): Oui.
Hier, quand j'ai parlé du Parti libéral, du conseiller
juridique, du trésorier, de M. Desrochers et de M. Bourassa, je voudrais
bien qu'il soit compris que c'était avec absence de malice. Je n'avais
pas d'arrière-pensée, c'était par déférence.
J'aimerais que ce soit bien compris. Ce sont des amis. En campagne
électorale on peut se tuer, mais quand la campagne électorale est
finie, elle est finie. C'est seulement cela que je voulais dire.
M. Lalonde: Quand vous avez fait référence au
député de Marguerite-Bourgeoys, je m'imagine aussi que
c'était sans malice. C'est ainsi que je l'ai pris.
M. Gauthier (Yves): C'était sans malice. Écoutez,
c'est lui qui a pris ma place quand j'ai lâché mon travail, je
n'ai rien contre lui.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: Je présume qu'à l'égard du
député de Laporte aussi, c'était sans malice. C'est bien
ce que j'ai pensé.
M. Gauthier (Yves): Oui, oui. Vous avez joué au hockey
pour moi, vous.
M. Bourbeau: Est-ce que vous étiez l'organisateur en chef
à ce moment-là?
M. Gauthier (Yves): Oui. Me Aquin, je l'avais appelé, de
cela je me souviens. Il m'a dit: Écoute, c'est moi qui ai la cause.
M. Bourbeau: Quand vous avez rencontré Me Beaulé au
début de juillet, lors d'un lunch, est-ce que vous lui aviez
mentionné que vous aviez suggéré son nom?
M. Gauthier (Yves): Je pense qu'il le savait. Les gars de
Washington le lui avaient dit.
M. Bourbeau: Que vous aviez suggéré son nom? Est-ce
que Me Beaulé vous a remercié?
M. Gauthier (Yves): Connaissez-vous Beaulé?
M. Bourbeau: Non... Un peu, oui. Oui, je le connais un peu.
M. Gauthier (Yves): Je vais vous répondre. Il ne m'a pas
remercié plus que cela.
M. Bourbeau: II ne vous a pas remercié?
M. Gauthier (Yves): D'abord, pour lui, cela lui revenait, il
était bon.
M. Bourbeau: Est-ce que Me Beaulé vous a parlé de
cela?
M. Gauthier (Yves): Non, mais il ne m'a pas dit merci plus qu'il
ne faut.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il vous a parlé du fait que, lors
de son voyage à Washington, on vous avait...
M. Gauthier (Yves): Non, il ne m'a pas parlé de son voyage
à Washington.
M. Bourbeau: Non.
M. Gauthier (Yves): Non, M. le
Président.
M. Bourbeau: Hier, vous avez dit que vous aviez envoyé
votre dernier compte d'honoraires pour la tutelle, avant votre départ
pour des vacances, au début de septembre 1978, et que vous aviez le
compte avec vous ici.
M. Gauthier (Yves): Je pense que je l'ai. Je sais que je l'ai
envoyé le 8 parce que j'ai vérifié la liste de tous mes
comptes.
M. Bourbeau: Est-ce que vous pourriez le déposer à
la commission?
M. Gauthier (Yves): J'espère que je l'ai. Ici, c'en est
un... ah non. Reçu du 14 septembre 1978. Ce doit être
celui-là, n'est-ce pas? C'est un chèque que m'a fait le
gouvernement. Ah oui! le compte. Le compte, je ne l'ai pas. J'ai le
chèque, par exemple, ici, une photocopie du chèque. Mais cela ne
devait pas être mon dernier... Oui, oui, c'est cela: 525 $. C'est le
chèque qui m'avait été envoyé et la
secrétaire qui s'occupait de la comptabilité avait inscrit B5610,
parce que nous fonctionnions par lettres chez nous pour nos comptes. Pour un,
c'était "A", moi c'était "B". Alors, c'était mon compte:
5610 au montant de 525 $. C'est cela. Date: 78-09-05, janvier, février,
mars, avril, mai, juin, juillet, août, septembre.
M. Bourbeau: C'est le compte auquel vous avez fait allusion
hier?
M. Gauthier (Yves): Non, non, c'est un chèque. C'est le
dernier chèque que j'ai reçu.
M. Bourbeau: Vous avez la photocopie du chèque?
M. Gauthier (Yves): Oui, oui. Je l'ai ici.
M. Bourbeau: Mais vous n'avez pas de copie du compte
même?
M. Gauthier (Yves): Je n'ai pas le compte. Je pensais que je
l'avais, mais je ne l'ai pas.
M. Bourbeau: Alors, hier, lorsque nous nous sommes
quittés, je venais de commencer à parler de la rencontre qui
s'est tenue au bureau du ministre Pierre-Marc Johnson, le 28 août 1978.
Pouvez-vous nous dire qui assistait à cette rencontre en plus de
vous?
M. Gauthier (Yves): D'après moi, il y avait les deux
avocats américains, Me Rosaire Beaulé, je ne pense pas que M.
Beaudry y était, je ne sais pas si Me Jasmin y était, mais
je me souviens que les deux avocats étaient là. Me Rosaire
Beaulé et moi étions là. Je pense qu'il y avait M. Claude
Filion aussi, qui assistait à la réunion.
M. Bourbeau: Pouvez-vous nous dire qui était Claude
Filion?
M. Gauthier (Yves): II était le chef de cabinet dans ce
temps-là.
M. Bourbeau: De M. Johnson?
M. Gauthier (Yves): De M. Johnson.
M. Bourbeau: Vous souvenez-vous de quoi il a été
question à cette réunion? (10 h 30)
M. Gauthier (Yves): Non, mais comme je le disais hier, tout ce
qu'ils voulaient, c'était de sensibiliser le ministre à
l'idée qu'il pouvait y avoir des répercussions sur les chantiers,
parce que tous les syndicats, qui sont l'un à côté de
l'autre, s'inquiétaient de cela, et, comme je vous le disais, il y a un
de ces avocats qui était aussi l'avocat des locaux 89 et du 101, pour
les ascenseurs. Alors, ils voyaient d'un mauvais oeil qu'il y ait des
procédures de prises. Ils n'aimaient pas cela.
M. Bourbeau: N'est-il pas normal que des défendeurs dans
une cause n'aiment pas cela?
M. Gauthier (Yves): Eh bien, je le comprends!
Le Président (M. Jolivet): C'est une question
d'opinion.
M. Bourbeau: Que recherchaient exactement les avocats
américains par cette démarche?
M. Gauthier (Yves): D'après moi, c'était seulement
pour dire: Écoutez, ce n'est pas bon pour les relations. Pourquoi
sont-ils allés jusque-là? C'est de la projection, j'ai
l'impression que ces avocats étaient très près du
gouvernement des États-Unis et qu'ils ne voulaient pas avoir de
problème avec le Canada, parce que, si cela allait mal, comme je le
disais hier, on aurait peut-être pu déclarer le chantier "unfair".
C'est ce que j'ai cru comprendre.
M. Bourbeau: Pouvez-vous m'expliquer ce que veut dire
déclarer un chantier "unfair"?
M. Gauthier (Yves): Déclarer un chantier "unfair", cela
veut dire qu'on va donner des avis à tous les corps de métiers
qui peuvent être sur les chantiers. Quand on
dit que c'est "unfair", le mot "unfair" veut dire que ce n'est pas un
chantier qui est bon ou que les relations du travail ne sont pas bonnes, de ces
choses-là.
M. Bourbeau: C'est un genre de menace, quoi?
M. Gauthier (Yves): Non, je ne pense pas. Ils n'étaient
pas forts sur la menace. Je pense qu'ils voulaient plutôt expliquer le
point de vue qui, selon moi, ne leur avait jamais été
expliqué. Je n'avais même pas parlé de cela à M.
Johnson, je ne savais pas leur attitude.
M. Bourbeau: Quelle a été la réaction de M.
Johnson?
M. Gauthier (Yves): Je ne m'en souviens pas. Je ne m'en souviens
pas, parce que je suis allé, je les ai présentés. Je suis
ressorti; je suis allé jaser avec d'autres personnes. Je ne le sais
pas.
M. Bourbeau: Est-ce que votre avocat, M. Jasmin, était
là?
M. Gauthier (Yves): Je ne m'en souviens pas. Je sais que Me
Rosaire Beaulé y était, je sais cela. Je le sais parce que -comme
je vous le disais hier - je leur ai dit de penser à payer leur
avocat.
M. Bourbeau: Vous voulez dire de payer Me Beaulé?
M. Gauthier (Yves): Bien oui, c'était leur avocat.
M. Bourbeau: Pourquoi vous préoc-cupiez-vous des
honoraires de Me Beaulé?
M. Gauthier (Yves): Je suppose qu'il pensait que sa paie serait
longue à venir, les gars étaient loin. Je ne le sais pas.
M. Bourbeau: Est-ce que Me Beaulé vous avait chargé
de plaider auprès des Américains pour ses honoraires?
M. Gauthier (Yves): Non. Il fait ses affaires lui-même.
C'est moi qui ai dit cela, je l'ai peut-être dit pour faire une farce.
Les gars sont loin. Je trouvais que les relations étaient plus ou moins
bonnes. Je me suis dit: Tout à coup ils l'engagent et ne le paient pas.
Il sera en maudit, parce qu'il aime bien être payé quand il
travaille.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il aurait été en maudit
contre vous, parce que vous aviez recommandé son nom?
M. Gauthier (Yves): Non, je ne pense pas.
M. Bourbeau: Est-ce que vous avez fait rapport au premier
ministre de cette rencontre?
M. Gauthier (Yves): Bien non. Il l'a peut-être su par M.
Johnson. Je ne le sais pas, M. le Président. Mais, moi, je ne lui en ai
pas parlé.
M. Bourbeau: Lors de cette rencontre du 28 août au bureau
du ministre Johnson, est-ce que vous saviez, à ce moment-là, que
vous alliez solliciter le poste de conseiller spécial auprès du
premier ministre deux mois plus tard?
M. Lalonde: Non, ce n'est pas à cette réunion.
M. Gauthier (Yves): J'ai répondu hier, mais ce n'est pas
grave. Si j'en étais conscient?
M. Bourbeau: Oui, est-ce que...
M. Gauthier (Yves): Bien oui, j'avais commencé à
faire des démarches, mais ce n'était pas définitif.
M. Bourbeau: Vous aviez commencé à faire des
démarches à ce moment-là?
M. Gauthier (Yves): Oui. Mais, vous savez, quand on fait des
démarches de ce genre, on ne parle pas trois ou quatre heures. J'ai dit:
Je suis prêt à servir. S'il y a quelque chose, ne vous gênez
pas. Je pensais que cela marcherait, mais je ne savais pas dans quel sens. Pour
moi, j'orientais ma carrière d'une autre façon. J'avais
été notaire assez longtemps, selon moi. Je voulais aller
ailleurs. Comme j'aime faire de la politique, servir la chose publique, je
voulais aller là, mais pas plus que cela.
M. Bourbeau: Me Gauthier, est-ce que vous pourriez approcher un
peu le microphone? Vous ne parlez pas tellement fort, on a de la
difficulté à entendre exactement ce que vous dites.
M. Gauthier (Yves): Je vais enlever mes papiers de là.
M. Bourbeau: Lors de cette rencontre au bureau du ministre
Pierre-Marc Johnson, est-ce qu'il a été question d'autres
problèmes que ceux des syndicats américains?
M. Gauthier (Yves): Je ne le pense pas, M. le Président.
Je ne me souviens pas de cela.
M. Bourbeau: Vous ne vous souvenez pas que Me Michel Jasmin
assistait à cette rencontre?
M. Gauthier (Yves): Je ne me souviens pas, M. le
Président. Normalement, il aurait dû y être, selon moi.
Mais, dans mon cas, c'est Me Beaulé qui m'avait demandé
d'organiser le meeting. Je ne le sais pas.
M. Bourbeau: À compter de votre nomination au bureau du
premier ministre le 18 octobre, mais de votre présence le 3 octobre,
avez-vous eu des entretiens avec M. Guy Joron, qui était le ministre de
l'Énergie, afin de discuter de la poursuite de la Société
d'énergie de la Baie James?
M. Gauthier (Yves): Jamais, M. le Président. J'ai
téléphoné à M. Joron une fois et il ne m'a pas
rappelé. Ce n'était pas pour cela, c'était du temps
où je n'étais pas même au bureau du premier ministre.
M. Bourbeau: Avez-vous eu des entretiens avec son chef de
cabinet, M. Claude Dumas?
M. Gauthier (Yves): Pas avec M. Dumas.
M. Bourbeau: Est-ce que vous en avez eu avec d'autres
personnes...
M. Gauthier (Yves): Non.
M. Bourbeau: ...du cabinet de M. Joron?
M. Gauthier (Yves): Non. Peut-être une fois un nommé
Renaud, qui m'a appelé, mais je ne savais pas ce qu'il faisait
là. Ce n'était pas pour cela, c'était pour autre
chose.
M. Bourbeau: Vous dites que M. Renaud vous a appelé
peut-être une fois pour...
M. Gauthier (Yves): Je ne le sais pas.
M. Bourbeau: Mais ce n'était pas pour discuter.
M. Gauthier (Yves): Peut-être pour vérifier un nom.
Je ne le sais pas. Il me semble que c'était pour un nom.
M. Bourbeau: Vous vous souvenez que M. Renaud vous a
appelé à ce moment-là?
M. Gauthier (Yves): J'ai dit que je ne me souviens pas que M.
Dumas m'ait téléphoné, mais je dis que je pense me
souvenir que M. Renaud m'a appelé. Je ne savais pas quel était
son poste et je ne sais pas de quoi il m'a parlé. D'après moi,
c'était plutôt pour vérifier un nom ou quelque chose de
même.
M. Bourbeau: Vous vous souvenez que M. Renaud vous ait
appelé, mais vous vous ne souvenez pas de quoi il vous a
parlé?
M. Gauthier (Yves): Non, je ne me souviens pas. J'ai dit que je
pense que M.
Renaud m'a appelé, parce que cela me dit quelque chose,
Renaud.
M. Bourbeau: Le nom de Renaud vous dit quelque chose?
M. Gauthier (Yves): Oui.
Le Président (M. Jolivet): Une vérification, vous
permettez?
M. Gauthier (Yves): Oui.
Le Président (M. Jolivet): M. Renaud, est-ce que c'est son
prénom ou son nom?
M. Gauthier (Yves): Excusez, ce doit être cela. Je me
souviens que quelqu'un avait dit c'est Renaud, peut-être Renaud Lapierre.
C'est cela.
M. Duhaime: Renaud, Olier Renaud?
M. Gauthier (Yves): Monsieur vient de le dire, c'est Renaud
Lapierre.
M. Bourbeau: Vous vous souvenez très bien que M. Renaud
Lapierre vous a appelé?
M. Gauthier (Yves): Je me souviens que
M. Renaud m'a appelé. Je n'ai pas dit M.
Renaud Lapierre. On me dit que c'est Lapierre, M. le
Président.
M. Bourbeau: Bon, d'accord. Êtes-vous au courant
qu'à la suite de votre rencontre avec M. Pierre-Marc Johnson, la
rencontre dont on vient de parler, une autre rencontre aurait eu lieu
subséquemment entre le premier ministre, M. Johnson, ministre du
Travail, et des membres de son cabinet ainsi que M. Guy Joron?
M. Gauthier (Yves): Absolument pas, M. le Président.
M. Bourbeau: À la suite de cette
réunion-là?
M. Gauthier (Yves): Absolument pas, M. le Président.
M. Bourbeau: On ne vous a jamais mis au courant d'une telle
rencontre?
M. Gauthier (Yves): On ne m'a jamais mis au courant, M. le
Président.
M. Bourbeau: Le 17 octobre 1978, deux semaines après avoir
pris possession de vos locaux, je ne sais pas si je dois dire de vos locaux,
puisque vous dites que vous n'aviez pas de locaux...
M. Gauthier (Yves): Je me permets de vous corriger. Je n'ai pas
dit que j'en avais pris possession le 3 octobre, mais j'ai dit que ma
nomination datait du 3 octobre. C'est cela que j'ai dit hier et c'est ce que je
dis encore aujourd'hui. Le 18, c'est la date de l'arrêté en
conseil et, le 17, j'étais possiblement là, parce que M. Jasmin
est venu me voir.
M. Bourbeau: Je comprends. Mais les documents que nous avons nous
disent que vous avez commencé à travailler, à être
sur la liste de paie du premier ministre le 3 octobre.
M. Gauthier (Yves): Ah! si c'est cela, c'est cela. Je sais quand
j'y suis allé me chercher un bureau.
M. Bourbeau: D'accord. Le 17 octobre, de toute façon, vous
étiez là?
M. Gauthier (Yves): Oui.
M. Bourbeau: Bon!
M. Gauthier (Yves): Oui, M. le Président.
M. Bourbeau: Vous étiez conseillé spécial du
premier ministre et vous avez reçu la visite de Me Michel Jasmin.
M. Gauthier (Yves): Oui, M. le Président.
M. Bourbeau: C'était l'avocat qui représentait les
syndicats québécois dans la poursuite que la
Société d'énergie de la Baie James avait intentée.
Qui a sollicité cette rencontre?
M. Gauthier (Yves): Je n'en ai aucune idée. Je pense
qu'elle est arrivée de même.
M. Bourbeau: Elle est arrivée comme cela?
M. Gauthier (Yves): Je sais que je ne l'ai pas appelé. Je
pense que je l'ai dit hier, il était venu pour me jaser, parce que
j'entrais en fonction. Il m'avait parlé aussi du dossier des cuisines,
parce qu'on ne s'était pas vu depuis ce temps-là.
M. Bourbeau: Le dossier des cuisines n'était-il pas alors
réglé?
M. Gauthier (Yves): Oui, cela avait été
réglé à la fin d'août ou au commencement de
septembre, mais j'étais parti en vacances et il était allé
à la pêche pendant une couple de jours.
M. Bourbeau: Combien de temps a duré la visite?
M. Gauthier (Yves): Je ne sais pas, une heure, une heure et
demie.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il y avait d'autres personnes que
vous-même et Me Jasmin?
M. Gauthier (Yves): Non.
M. Bourbeau: Est-ce que Me Jasmin a passé toute cette
période dans votre bureau?
M. Gauthier (Yves): Je ne le sais pas, M. le Président. Je
sais qu'il est venu me voir... Comme je vous dis, je n'avais pas de bureau,
j'étais peut-être dans le bureau de M. Michel Carpentier, je ne le
sais pas. Je n'avais pas de lieu physique.
M. Bourbeau: C'était quand même dans les bureaux du
premier ministre.
M. Gauthier (Yves): Ah oui! C'était au 17e étage,
oui.
M. Bourbeau: À Montréal?
M. Gauthier (Yves): Oui, à Montréal, M. le
Président.
M. Bourbeau: De quoi avez-vous discuté avec Me Jasmin?
M. Gauthier (Yves): De tout et de rien. On a surtout parlé
de ma nomination. Il a révisé le cas de l'affaire des cusines,
qui avait été assez long.
M. Bourbeau: On était à peu près à
trois mois de l'ouverture du procès pour la cause de 31 000 000 $,
est-ce qu'il en a été question?
M. Gauthier (Yves): Je ne m'en souviens pas. Je ne le pense pas.
C'est improbable. Cela se peut, mais je ne m'en souviens pas.
M. Bourbeau: C'est improbable. Est-ce que j'ai bien compris
improbable?
M. Gauthier (Yves): C'est cela.
M. Bourbeau: Pourquoi dites-vous que c'était
improbable?
M. Gauthier (Yves): Parce que je dis que c'était
improbable; c'est possible, mais
c'est improbable. Je ne me souviens pas d'avoir parlé de la
Baie-James. On a parlé de la Baie-James, mais pour les cuisines
seulement, pour autant que je me souvienne.
M. Bourbeau: Vous vous souvenez très bien qu'il a
été question de la Baie-James...
M. Gauthier (Yves): ...des cuisines...
M. Bourbeau: ...des cusines à la Baie-James...
M. Gauthier (Yves): Ah oui! Cela, je m'en souviens.
M. Bourbeau: ...mais c'est improbable que vous ayez parlé
de la cause de 31 000 000 $.
M. Gauthier (Yves): On en a peut-être parlé, mais je
vous dis que je ne m'en souviens pas.
M. Bourbeau: La cause des cuisines était
réglée, mais l'autre s'en venait dans trois mois.
M. Gauthier (Yves): Oui, mais je ne savais pas comment cela
s'était réglé pour les cuisines, je voulais le savoir.
M. Bourbeau: Est-ce que les préoccupations de Me Jasmin
étaient les cuisines ou la cause qui s'en venait?
M. Gauthier (Yves): Je n'en ai aucune idée.
Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une
autre, il n'a pas à répondre...
M. Gauthier (Yves): Je n'ai aucune idée de ce qui le
préoccupait.
Le Président (M. Jolivet): C'est autre chose, la question
était mal posée.
M. Bourbeau: M. le Président, je vais la reposer. Est-ce
que Me Jasmin vous a parlé de ses préoccupations par rapport
à la cause qui s'en venait?
M. Gauthier (Yves): Le 17 octobre? Je ne m'en souviens pas.
M. Bourbeau: En aucune façon, si vous grattez votre
mémoire, vous ne pouvez vous souvenir s'il a été question
de cette cause?
M. Gauthier (Yves): C'est cela, M. le Président.
M. Bourbeau: Pourtant, la rencontre a duré une heure et
demie, même d'après nous...
M. Gauthier (Yves): Ah oui!
M. Bourbeau: ...d'après les documents qu'on nous a remis,
elle a duré deux heures. Ce sont des documents qui ont remis par le
bureau du premier ministre: de 15 h 40 à 17 h 45.
M. Gauthier (Yves): Bien oui, c'est marqué, mais il n'a
peut-être pas été tout le temps avec moi. Tu signes quand
tu entres, tu signes quand tu sors, mais il a peut-être été
ailleurs aussi, je ne le sais pas. Il a peut-être attendu dans
l'antichambre. Si c'est deux heures, c'est deux heures. Je me souviens d'une
fois où il était venu et qu'il avait oublié son
imperméable; nous sommes allés manger et il est remonté,
il a resigné. Il aurait pu être là trois heures, il aurait
pu être dans un autre bureau.
M. Bourbeau: Bon! Vous vous souvenez très bien de
l'imperméable, mais vous ne vous souvenez pas de la cause de 31 000 000
$.
M. Gauthier (Yves): Ce n'est pas cela. Cela ne me fait rien
d'essayer d'entrer dans le jeu de M. le député, mais je me
souviens de l'imperméable et je ne me souviens pas de la cause de 31 000
000 $... Je comprends qu'il y a une grosse différence dans le prix, mais
cela ne me dérange pas. Je me souviens de l'imperméable, parce
qu'il avait été obligé de remonter pour signer et il
n'était pas content. C'était un hasard, comme on a acheté
le livre des 36 cordes sensibles des Québécois, on l'a
acheté à deux et je l'ai encore; je ne le lui ai pas donné
sa... Je ne lui ai pas encore donné; il ne me l'a pas demandé; ce
sont des détails niaiseux, mais je m'en souviens.
M. Bourbeau: Si vous voulez, on va revenir aux choses
importantes, on va laisser faire les 36 cordes sensibles. Parlons donc de la
cause de 31 000 000 $.
M. Gauthier (Yves): On peut parler, monsieur, toute la
journée de la cause de 31 000 000 $, mais je vous dis que, lorsque M.
Jasmin est venu le 17 octobre, j'entrais en fonction. Je me cherchais un bureau
et je me promenais un peu partout; je me ramassais des documents, des chaises
et tout cela. Me Jasmin, je ne dis pas qu'il m'aidait à transporter mes
meubles, mais il était là et il jasait; il était fier que
je sois là, je suppose; c'est un ami, alors... Mais j'étais assez
préoccupé de m'installer là que la cause de la Baie-James
ne me préoccupait pas. C'était de me trouver une place qui
était important pour moi. (10 h 45)
M. Bourbeau: Est-ce à ce moment-là que M. Jean-Roch
Boivin est passé et qu'il a
noté la présence de Me Jasmin dans votre bureau?
M. Gauthier (Yves): Non, ce n'est pas à ce
moment-là.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Gauthier (Yves): Ce n'est pas à ce
moment-là.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, je pense que vous avez
déjà rendu une décision importante concernant la marche
des travaux de notre commission. Je vais lever une question de
règlement. Ce que le député de Laporte fait, c'est qu'il
retourne à de vieilles habitudes. Il reprend la roulière, comme
on dit, ce qui consiste à poser une question qui contient une suggestion
dans la réponse.
M. Paradis: Oh! non.
M. Duhaime: Vous parlerez, si vous avez à parler, vous, M.
le député de Brome-Missisquoi, sur la question de
règlement. Ce que je vous dis, M. le Président, c'est qu'il
s'agit...
M. Paradis: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Un instant, je vais commencer
par entendre...
M. Paradis: Non, sur la question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): Non, attendez une minute. Ce
n'est pas parce que le ministre vous a demandé de parler sur la question
de règlement que je vais interrompre le ministre. Je vais commencer par
entendre sa question de règlement.
M. Paradis: Est-ce qu'il veut que je parle?
Le Président (M. Jolivet): Après. Je vais vous le
permettre après. M. le ministre.
M. Duhaime: Vous ne vous êtes pas levé du bon
côté, vous, ce matin.
M. le Président, si on commence à permettre... J'aime
autant m'opposer tout de suite à cette façon de procéder.
Cela s'appelle des questions suggestives. Et une question suggestive est
caractéristique d'un contre-interrogatoire. Vous avez déjà
statué que les personnes qui sont devant cette commission ne sont pas
ici à la demande de l'une ou l'autre des parties, c'est-à-dire de
l'un ou l'autre des côtés de cette commission parlementaire, mais
elles sont ici sont en tant qu'invités de la commission. On peut les
interroger. Que je sache, vous n'avez pas permis de contre-interrogatoire. Et
je dis tout de suite au député de Laporte que, si telle est son
intention, il va avoir un petit problème de fonctionnement. Je vais
m'opposer à chaque fois.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, la vigilance tout à
fait nouvelle du ministre...
M. Duhaime: Elle n'est pas nouvelle. Vous ne lisez pas la presse,
certain.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Lalonde: Voulez-vous que je vous lise L'agneau du
printemps?
Le Président (M. Jolivet): Non, non, ne commencez pas
à lire quoi que ce soit.
M. Lalonde: L'agneau du printemps! Non?
Le Président (M. Jolivet): Non, s'il vous plaît!
Répondez à la question de règlement.
M. Lalonde: Et les bébés phoques qu'on y
retrouve?
Le Président (M. Jolivet): M. le député. M.
le député.
M. Lalonde: M. le Président, la question du...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Lalonde: La question du député de Laporte
était tout à fait correcte et je vais vous dire pourquoi. Me
Gauthier, hier, a fait état d'un événement où M.
Boivin, son patron, chef de cabinet, directeur du cabinet du premier ministre,
l'ayant vu - d'après le témoignage de Me Gauthier - en
présence de Me Jasmin, lui aurait fait de gros yeux et lui aurait dit:
Es-tu encore tuteur? Bon...
Une voix: Et les lunettes baissées.
M. Lalonde: ...et les lunettes baissées. Cela, à
l'occasion d'une rencontre avec Me Jasmin. Tout ce que le député
de Laporte demande, c'est si cet événement est arrivé le
17 octobre. Ce n'est pas une suggestion. C'est le témoignage même
du témoin qui a
établi cet événement-là. On veut simplement
le situer dans le temps. C'est tout à fait permis.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Brome-Missisquoi, vous avez la parole, tout en vous disant que je suis quand
même prêt à rendre ma décision.
M. Paradis: Je peux vous dire que le député de
Marguerite-Bourgeoys a dit ce que j'avais à dire, sauf que j'ajouterais
l'élément suivant. Si cela avait été une objection
valable et non dans le but de retarder nos travaux et si le
député de Marguerite-Bourgeoys n'avait pas eu raison, l'excellent
procureur qui accompagne Me Gauthier aurait fait lui-même cette
objection.
Le Président (M. Jolivet): Ce problème
n'était pas nécessairement à propos d'une question
suggestive qui n'est pas permise par le règlement et pour laquelle
j'aurais interrompu le député. La question qui m'importait,
c'était la répétition de la question. Et je pense que Me
Gauthier a répondu à plusieurs questions concernant cette
chose-là hier.
M. Lalonde: À mon souvenir, cela n'a pas été
établi...
Le Président (M. Jolivet): Je vais demander à Me
Gauthier s'il s'en souvient. Moi, j'ai encore une bonne mémoire. Me
Gauthier, est-ce qu'hier vous avez répondu à cette question?
M. Gauthier (Yves): Laquelle?
Le Président (M. Jolivet): La question de savoir si
c'était lors de la rencontre du 17 octobre avec Me Jasmin que M.
Boivin...
M. Gauthier (Yves): Qu'il m'aurait dit cela? Non, c'est en
janvier. Ce n'était pas à cette époque-là.
Écoutez, il faut quand même... M. Boivin est là le lundi et
le vendredi. Si je suis rentré là physiquement vers le 15 ou
quelque chose comme cela, j'ai eu la chance de le voir peut-être huit
fois parce qu'il ne vient que le lundi et le vendredi. C'est pour cela que je
situe en janvier le moment où il m'aurait dit cela. Et puis, j'ai
été absent pendant tout un mois en décembre, soit du 15
décembre au 15 janvier. Alors, c'est plutôt autour du 17 janvier
que M. Jasmin est venu me voir.
Le Président (M. Jolivet): C'est pour cela que je disais
que vous aviez répondu à une question au sujet du 17
janvier...
M. Gauthier (Yves): Ah oui! J'ai répondu hier, oui.
Le Président (M. Jolivet): Vous nous avez répondu
cela hier.
M. Gauthier (Yves): Oui.
Le Président (M. Jolivet): C'est pour cela que je vous
disais qu'il ne s'agit pas de poser deux fois une question. Il a dit hier
à quel moment c'était.
M. Gauthier (Yves): Ah oui! M. Duhaime: Oui.
M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais faire un point
de règlement à ce moment-ci.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Bourbeau: Cela fait plusieurs fois qu'on me dit, de l'autre
côté, que j'ai posé des questions à deux reprises et
hier...
Le Président (M. Jolivet): Non, je n'accepterai pas...
M. Bourbeau: M. le Président, je veux soulever un point de
règlement sur autre chose.
Le Président (M. Jolivet): Oui, juste avant... Simplement,
avant que vous ne commenciez votre question de règlement, ce que j'avais
compris, c'est qu'il y avait une question à laquelle on avait
répondu hier au sujet d'une autre date. Donc, si vous posez la question
pour savoir si c'était au mois d'octobre et qu'il vous a répondu
hier que c'était vers le mois de janvier, je pense, à ce
moment-là, qu'il faut quand même être clair.
M. Bourbeau: M. le Président, tout à l'heure quand
j'ai commencé à poser des questions, on a dit, de l'autre
côté de la table, que ces questions avaient été
posées hier. Hier, quand j'ai commencé à poser des
questions au début de l'après-midi, on m'a fait toute une
série d'objections dans le sens que j'avais déjà
posé ces questions le matin. Entre autres, je pourrais vous dire, par
exemple, quand j'ai commencé à interroger Me Gauthier au sujet de
M. Laferrière, que je lui ai demandé depuis combien de temps il
connaissait M. Laferrière. Il m'a dit, depuis 1968, peut-être 1970
et aussi qu'il avait déjà répondu à cette
question.
Le Président (M. Jolivet): Effectivement, c'était
à la demande du ministre.
Une voix: C'est cela.
M. Bourbeau: Et vous, vous m'avez dit
que la question avait déjà été posée
et que c'était moi-même qui l'avais posée. J'ai
révisé toute la transcription, M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Et vous avez raison. Je vous
donnerai raison.
M. Bourbeau: ...pendant plusieurs heures, cette nuit... enfin,
hier soir plutôt que cette nuit...
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Bourbeau: J'ai noté une chose à ce
sujet-là. Quand j'ai posé la question au sujet de M.
Laferrière, M. Gauthier m'a dit: j'ai déjà répondu
à cela, c'est depuis 1968 ou 1970. Or, M. Gauthier n'avait
répondu cela à personne, ni à moi ni au ministre.
C'était la première fois qu'il nous disait qu'il connaissait M.
Laferrière, et ce depuis 1968 ou 1970 et qu'il l'avait rencontré
au cours de campagnes électorales. Je dis bien depuis 1968 ou 1970. Il a
confondu avec ce qu'il nous avait dit au sujet de Me Jasmin qu'il avait
rencontré au cours de campagnes électorales ou d'activités
politiques en 1968 ou en 1970. Ce sont les mots exacts qu'il avait
employés au sujet de M. Jasmin. Également, il a confondu
probablement avec Me Bachand qui était le chef de cabinet de M. Johnson
et qu'il avait également connu lors d'activités politiques en
1970.
Or, M. le Président, je comprends que le témoin ait
confondu parce qu'il semble que tout ce monde s'est connu vers 1970, lors
d'activités politiques. Ce n'est pas ma faute, M. le Président,
si on est toujours dans la même famille et si tout ce monde s'est connu
en 1970. Je vous dis que je n'ai pas fait d'erreur hier et que je n'avais pas
posé de questions sur M. Laferrière. Je vous répète
que j'ai relu toute la transcription et que je vais faire des efforts pour ne
pas poser les questions deux fois.
Le Président (M. Jolivet): D'accord.
M. Lalonde: J'aimerais, M. le Président, soulever une
question de règlement là-dessus.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: D'autres témoins avant Me Gauthier ont pris
l'habitude de faire la réponse: j'ai déjà répondu
à cela quatre fois, cinq fois... Effectivement, il arrive que la
question est posée, mais d'une façon différente ou pour
une précision sur le même événement, plus d'une
fois. Cette attitude n'est pas de nature à aider le déroulement
de nos travaux. Nous avons essayé, hier soir, de tout réviser
pour être bien sûrs de s'entendre là-dessus: que ce n'est
pas pour harceler un témoin, que ce n'est pas pour retarder les travaux,
mais souvent pour avoir une précision. Le témoin, lorsqu'il dit:
J'ai répondu à cela, le dit en étant autant sous serment
que lorsqu'il donne une réponse. Je pense qu'il doit être
mis en garde contre cette forme d'affirmation avant d'avoir bien
vérifié si c'est bien à cette question qu'il a
répondu.
Le Président (M. Jolivet): D'accord. Il y a seulement une
chose que je voudrais tout de même dire quant aux questions qui sont
posées. Elles peuvent provenir soit de ma droite ou de ma gauche, mais
la question ayant été posée, il ne faut pas la
répéter deux fois. C'est en ce sens que j'ai dit, que ce soit le
député de Laporte qui l'ait posée, soit aussi pour
l'ensemble des questions, il a peut-être pu y avoir des
difficultés puisqu'on n'avait pas les transcriptions: la question avait
été posée. Qu'elle soit posée de la même
façon ou qu'elle ait pour but recherché d'avoir une
réponse qui a déjà été donnée, je
pense que Me Gauthier, quand il a lu ses notes préliminaires, si on les
a bien écoutées, a répondu, sans peut-être avoir
été interrogé, à bien des questions. Il s'agit de
savoir si on doit répéter la question à droite et à
gauche et vice-versa. C'est tout ce que je veux savoir.
Dans ce contexte, ce que je vais demander à tout le monde, aussi
bien à la personne qui doit répondre à nos questions
qu'à tous ceux qui sont ici, c'est de faire attention de ne pas
répéter deux fois la même question. M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, au sujet des deux rencontres
que M. Gauthier a eues avec Me Jasmin avant Noël 1978, celle du 17 octobre
et celle du 12 novembre, je vous signale que M. le ministre de l'Énergie
et des Ressources n'a posé aucune question sur ces deux rencontres et
les a ignorées totalement. Je pense bien qu'on peut en poser et sur les
autres également, parce qu'il n'a pas couvert tout le sujet, loin de
là.
Me Gauthier, lors de la rencontre à votre bureau, le 17 octobre
1978, avec Me Jasmin, le procureur des syndicats québécois,
est-ce qu'il vous a montré la défense qu'il se proposait de
déposer dans les deux ou trois jours suivants? A-t-il fait allusion
à cette défense?
M. Gauthier (Yves): Non, M. le Président.
M. Bourbeau: Comment s'est terminée cette rencontre du 17
octobre?
M. Gauthier (Yves): Je ne le sais pas.
M. Bourbeau: Est-ce que c'est à ce moment que
l'imperméable a été oublié?
M. Gauthier (Yves): Non, M. le Président.
M. Bourbeau: Est-ce que vous avez fait rapport au premier
ministre de cette rencontre?
M. Gauthier (Yves): Non, M. le Président.
M. Bourbeau: N'était-ce pas votre obligation de faire
rapport?
M. Gauthier (Yves): Non, ce n'était pas mon
obligation.
M. Bourbeau: Avez-vous fait rapport à Me Jean-Roch
Boivin?
M. Gauthier (Yves): Non, je n'ai pas fait rapport à Me
Jean-Roch Boivin.
M. Bourbeau: Quel suivi avez-vous donné à cette
rencontre?
M. Gauthier (Yves): Excusez, je n'ai pas entendu.
M. Bourbeau: Quel suivi avez-vous donné?
M. Gauthier (Yves): Aucun.
M. Bourbeau: Le 12 novembre 1978, vous avez reçu à
votre bureau Me Michel Jasmin, le procureur des syndicats
québécois, à votre bureau qui est à 42 pieds du
bureau du premier ministre, M. Lévesque, si j'ai bien compris? Votre
réponse.
M. Gauthier (Yves): Oui, M. le Président.
M. Bourbeau: Me Jasmin à ce moment était sur le
point de déposer une autre défense, est-ce qu'il vous en a
exhibé une copie?
M. Gauthier (Yves): Le 12 novembre? M. Bourbeau: Oui.
M. Gauthier (Yves): Non. D'ailleurs, il n'a pas été
longtemps. Il a été cinq minutes dans le bureau. Je ne sais pas
trop s'il ne m'a pas attendu devant aussi. On est allé manger
ensemble.
M. Bourbeau: Ah boni Vous êtes allés manger à
quel endroit? Vous en souvenez-vous?
M. Gauthier (Yves): La plupart du temps, c'était au
Méridien, ce n'est pas loin. C'est juste à côté, on
part et on prend le tunnel.
M. Bourbeau: Lors de cette visite à votre bureau et de la
rencontre qui a suivi, a-t-il été question de la poursuite de la
Société d'énergie de la Baie James?
M. Gauthier (Yves): Le 12 novembre, non.
M. Bourbeau: De quoi a-t-il été question?
M. Gauthier (Yves): De son party d'huîtres.
M. Bourbeau: Pourriez-vous expliciter un peu?
M. Gauthier (Yves): II faisait un party d'huîtres et il m'a
invité à ce party. On a parlé des gens qu'on
inviterait.
M. Bourbeau: Est-ce que Me Boivin était au courant de
cette visite?
M. Gauthier (Yves): Non.
M. Bourbeau: Est-ce que le premier ministre était au
courant?
M. Gauthier (Yves): Non, je suis bien certain que M.
Lévesque n'était pas au courant. Remarquez bien, je dis que Me
Boivin n'était pas au courant, mais il l'était peut-être et
il ne me le disait pas. Moi, je ne lui ai pas dit.
M. Bourbeau: En plus du party d'huîtres, quels ont
été les sujets que vous avez abordés?
M. Gauthier (Yves): Je ne m'en souviens pas. On jase, on se
connaît depuis assez longtemps qu'on parle à peu près de
tout. Il est sûr qu'on parle de politique, mais le cas de la
Société d'énergie de la Baie James, je ne m'en souviens
pas.
M. Bourbeau: Me Jasmin était-il préoccupé
par la poursuite? On était à deux mois du procès.
Le Président (M. Jolivet): La question n'est pas recevable
sous cette forme.
M. Bourbeau: Me Gauthier, est-ce que Me Jasmin vous a dit qu'il
était préoccupé par la poursuite qui commençait
dans deux mois?
M. Gauthier (Yves): Je ne peux pas dire qu'il me l'a dit, mais je
sentais que cela l'achalait. Il ne m'a pas dit: cela m'énerve et je ne
sais pas si je vais gagner ou quoi. Il n'a pas parlé de cela.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il a parlé du
dossier?
M. Gauthier (Yves): Je ne peux pas dire qu'il a parlé du
dossier. On parlait en général, de la situation syndicale parce
qu'il s'occupait encore de syndicats. Je sais qu'il devait rencontrer M.
Beaulé, à ce qu'il me disait, mais je ne le sais pas. (11
heures)
M. Bourbeau: Est-ce qu'il a fait état de discussions
visant à obtenir éventuellement le retrait de la cause?
M. Gauthier (Yves): Non. Non. Non, M. le Président.
M. Bourbeau: Quand vous avez parlé... Enfin, vous me dites
que... Si j'ai bien compris ce que vous dites, vous ne vous souvenez pas des
propos exacts mais il a été question de la poursuite de la SEBJ,
n'est-ce pas?
M. Gauthier (Yves): Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. Bourbeau: Alors, est-ce que vous pourriez préciser?
J'ai peut-être mal saisi ce que vous avez dit.
M. Gauthier (Yves): J'ai dit que je n'avais pas parlé de
la poursuite de la Baie-James, qu'on avait parlé des syndicats en
général et de politique parce qu'il s'occupait beaucoup de
syndicalisme. Il était l'avocat de plusieurs syndicats, comme la CTCUM,
etc.
M. Bourbeau: Entre autres, vous avez dit que vous sentiez que la
poursuite l'achalait. Comment l'avez-vous senti si vous n'en avez pas
parlé?
M. Gauthier (Yves): II ne m'en a pas parlé. Je pense qu'il
aurait voulu m'en parler mais je ne voulais pas lui en parler; ce n'est pas
compliqué.
M. Bourbeau: Si je comprends bien, vous avez entendu des regards
qu'il croyait muets?
Le Président (M. Jolivet): Monsieur, ce n'est pas...
M. Gauthier (Yves): Non. D'accord. Je peux bien en parler toute
la journée...
Le Président (M. Jolivet): Non, non.
M. Gauthier (Yves): ...mais je sais que ne voulais pas parler de
la cause et je n'en ai pas parlé. S'il avait voulu m'en parler, je lui
aurais dit: Écoute! Il est de bonne heure encore. Mais, par exemple, il
m'avait dit qu'il rencontrerait Me Beaulé.
M. Bourbeau: Au sujet de la cause? M. Gauthier (Yves):
Oui.
M. Bourbeau: Donc, vous avez parlé de la cause?
M. Gauthier (Yves): Écoutez, il ne faut pas tirer cela par
les cheveux. Si vous voulez que je dise que j'en ai parlé, j'en ai
parlé dans ce sens.
M. Bourbeau: Donc, dans un sens vous en avez parlé?
M. Gauthier (Yves): Je pense que cela ne vaut même pas la
peine de répondre, M. le Président. Voyonsl
M. Bourbeau: Au contraire. Je pense que cela vaut bien la peine
d'y répondre.
M. Gauthier (Yves): Non, Monsieur. Je ne réponds pas parce
que j'ai déjà répondu. J'ai dit que je ne voulais pas lui
parler de la cause et il m'a dit qu'il rencontrerait Me Beaulé:
Rencontre-le! Arrange-toi avec!
M. Bourbeau: Quand vous avez parlé de Me Beaulé,
vous avez parlé de la cause?
M. Gauthier (Yves): Mon doux! Si vous voulez, oui.
Le Président (M. Jolivet): Oui... N'allez pas
répondre.
M. Gauthier (Yves): J'en ai parlé de la cause.
Arrêtons l'affaire là. J'en ai parlé.
Le Président (M. JoUvet): Juste un instant.
M. Gauthier (Yves): Franchement. Cela ne me fait rien de rester
ici deux jours, mais si c'est pour être toujours comme cela...
Le Président (M. JoUvet): Non.
M. Bourbeau: Cela va être comme cela si vous continuez
à répondre comme cela.
M. Gauthier (Yves): Les gars qui paient des taxes ne seront pas
contents.
Le Président (M. Jolivet): Non. M. le député
de Laporte, je n'accepterai pas cependant que l'on fasse, par vos commentaires,
des questions. Vous allez poser des questions. Qu'elles soient claires, nettes
et on verra!
M. Bourbeau: C'est cela, on verra. M. le Président, je
comprends que le témoin soit impatient, mais...
Le Président (M. Jolivet): Non, non. C'est moi aussi qui
suis impatient, je dois vous le dire. Parce que de la façon dont vous
posez vos questions, ce ne sont pas des questions recevables. Je ne les
permettrai pas.
M. Paradis: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député
de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Sur la question de règlement, lorsque vous
dites: "La façon dont vous posez vos questions", je voudrais seulement
une petite précision. Vous n'avez quasiment pas interrompu le
député de Laporte ce matin, je tiens pour acquis...
Le Président (M. Jolivet): Je parle des questions qu'il
est en train de poser.
M. Paradis: La dernière?
Le Président (M. Jolivet): C'est cela.
M. Paradis: Les autres étaient toutes très
recevables.
Le Président (M. Jolivet): Ah non! Je lui ai même
dit, à un certain moment, de formuler sa question à nouveau, ce
qu'il a, d'ailleurs fait ce matin même.
M. Paradis: Donc, la quasi-totalité était
bonne.
Le Président (M. Jolivet): Ah non! Ne me faites pas dire
ce que je ne veux pas dire. Ce que je veux dire, c'est que celles qu'il pose
actuellement ne sont pas recevables.
M. Paradis: D'accord. C'est cela.
Le Président (M. Jolivet): Pour le reste, je m'en
occuperai en temps et lieu.
M. Paradis: C'était ce que je voulais comme
précision, M. le Président.
M. Bourbeau: M. le Président, en toute
déférence pour la présidence, je peux vous assurer que si
vous trouvez qu'une de mes questions n'est pas recevable, je vous prie de m'en
aviser et...
Le Président (M. Jolivet): Je l'ai fait d'ailleurs et je
vais continuer à le faire.
M. Bourbeau: ...je vous assure que je vais la formuler à
nouveau pour qu'elle le soit.
Lorsque vous avez rencontré Me Jasmin au mois de novembre, il est
venu à votre bureau, au bureau du premier ministre et, après
quelques minutes, vous êtes partis. Étiez-vous conscient, à
ce moment, que vous étiez conseiller spécial du premier ministre
et que vous rencontriez l'avocat des syndicats? L'avocat de la partie adverse,
si je peux dire.
M. Gauthier (Yves): Non. J'étais conscient de rencontrer
un ami. C'est tout.
M. Bourbeau: L'arrêté en conseil ou le décret
que je vous ai exhibé hier et que vous avez lu en partie, indique que
vous avez été président du conseil, président du
syndicat, tuteur, jusqu'au 18 décembre 1978. Légalement, vous
étiez jusqu'au 18 décembre le président du syndicat et
vous étiez également, à la même époque,
conseiller spécial du premier ministre - du chef du gouvernement d'un
gouvernement représentant ou étant l'actionnaire de la SEBJ via
HydroQuébec - n'étiez-vous pas, à ce moment, dans une
position difficile où vous conseilliez spécialement le premier
ministre et, d'autre part, vous étiez également président
du syndicat défendeur...
M. Jutras (Germain): M. le Président, je fais une
objection...
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Jutras: ...parce que ce n'est pas du tout ce que dit
l'arrêté en conseil. L'arrêté en conseil du 13
décembre 1978 dit que les nominations de M. Gauthier cessent d'avoir
effet, ce qui ne veut pas dire que la démission faite par M. Gauthier au
mois de septembre n'était pas valable. Alors, que le gouvernement prenne
trois mois pour remplacer quelqu'un, c'est bien possible, mais ça ne
peut pas dépendre du témoin. Il vous a dit qu'il avait
démissionné au mois de septembre. Son dernier compte a
été envoyé au mois de septembre. Alors, qu'on ne fasse pas
dire à M. Gauthier qu'il est resté en fonction jusqu'au mois de
décembre, parce que cela a pris trois mois au gouvernement pour
remplacer quelqu'un.
Le Président (M. Jolivet): Effectivement. M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai devant moi le texte de
l'arrêté en conseil du 13 décembre 1978. Le texte dit ceci:
Les nominations - parce que Me Gauthier était président de
plusieurs syndicats - faites en vertu de l'arrêté en conseil du 26
octobre 1977, cessent d'avoir effet. On ne dit pas à partir de quelle
date, on dit: cessent d'avoir effet. À la dernière ligne, on dit:
Le présent arrêté en conseil entre en vigueur le jour de
son adoption qui est le 13 décembre 1978. On ne fait aucunement mention
là-dedans d'une démission ou d'une cessation d'emploi
rétroactive. C'est à la date même où cela a
été passé, le 13 décembre 1978. Donc, je pense que
ma question était très pertinente, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, sauf que l'invité a
répondu qu'il avait démissionné en date du mois de
septembre. Il l'a fait sous serment, et à partir de cela, qu'il y ait
une démission de sa part et un remplacement à un autre moment
n'est pas de son ressort. Il s'agit de poser la question comme il le faut.
M. Bourbeau: M. le Président, vous savez que la devise des
notaires, c'est: Les écrits demeurent. Nous avons un écrit ici.
Avez-vous votre lettre de démission, M. Gauthier?
M. Gauthier (Yves): Non, je n'ai pas ma lettre de
démission, mais j'aimerais essayer de...
Le Président (M. Jolivet): Oui, allez.
M. Gauthier (Yves): Je ne veux pas jouer au plus fin, mais
j'aimerais essayer de situer la chose. Je ne peux pas porter deux chapeaux.
Selon moi, quand j'ai envoyé mon dernier compte, mon affaire avec la
tutelle était finie. J'ai appelé M. Yves Paré. J'ai
appelé M. Gérard Beaudry, le cotuteur, pour lui dire: Viens
chercher les dossiers. C'est parce qu'ils n'avaient trouvé personne
encore pour me remplacer. Ils cherchaient quelqu'un et ils n'en trouvaient pas.
Alors, cela leur avait pris quelque temps, mais moi, moralement, lorsque j'ai
envoyé mon dernier compte, c'est parce que je n'étais plus
là. Je l'ai envoyé le 8 septembre: Le 9 septembre, je ne pouvais
plus travailler à la tutelle, j'étais parti en vacances jusqu'au
30 septembre. J'ai amené ma feuille de vacances. Je pourrais vous dire
où je suis allé, cela ne me dérange pas: Quand je suis
revenu le 30 septembre qui tombait une fin de semaine, je m'en suis venu ici
à Québec pour négocier le contrat avec M. Tremblay. Alors,
même si j'avais voulu les porter, les deux chapeaux, du 1er septembre au
12 octobre, c'était pas mal difficile. C'est peut-être pour cela
qu'au bout d'un ou deux mois, Jean-Roch Boivin m'a demandé: Es-tu encore
tuteur? C'est peut-être cela: il voyait que Me Jasmin venait. Mais il me
semble, et je ne veux pas jouer à la vierge offensée, le notaire
me connaît assez, que ce n'est pas mon genre de faire deux jobs à
la fois. Je ne peux pas porter deux chapeaux. Il me semble que c'est la simple
décence. Quand j'étais tuteur, j'étais tuteur. J'ai
été marqué par mon passage là et, dans le fond,
Jean-Roch Boivin a peut-être bien fait de me demander si j'étais
encore tuteur. Il s'est peut-être dit: II a encore une tendance avec ces
gars-là: Je ne le sais pas, mais je sais que, consciemment, quand j'ai
lâché mon bureau de notaire, le 1er septembre, et que le 8
septembre, j'ai envoyé mon dernier compte, pour moi, c'était
fini. J'ai parlé à Yves Paré, vous pouvez vérifier
avec lui; j'ai parlé à M. Beaudry, je lui ai remis les documents
que j'avais. Je suis parti le lendemain en vacances.
Quand je suis revenu à la fin de septembre, je ne m'en occupais
plus. J'étais venu ici quelques jours pour ma position et pour essayer
de me trouver un bureau à Hydro-Québec. Mais effectivement, il
est bien sûr qu'elle est datée du 13 septembre; ce n'est pas que
je sois bien fin et bien bon, mais cela ne court par les rues les gars pour me
remplacer. Il y a du trouble là-dedans: M. Van De Weghe a
accepté, mais le temps qu'on procède et que cela passe dans toute
leur paperasse - c'est une grosse machine -cela a abouti en décembre.
Mais, effectivement, si on veut regarder le côté juridique, c'est
vrai que, du 3 octobre au 13 décembre, j'avais peut-être deux
jobs, officiellement, mais je n'étais pas payé par les tuteurs.
J'espère que cela répond à la question de la
commission.
M. Bourbeau: Oui. Je pense que cela répond à la
question. Est-ce que vous étiez mal à l'aise de recevoir votre
ancien avocat dans le bureau du premier ministre...
M. Gauthier (Yves): Non, pas du tout.
M. Bourbeau: ...une fois que vous aviez changé de
bord?
M. Gauthier (Yves): Non, pas du tout. Changer de bord, je ne peux
pas dire que ce soit cela non plus. Je pense que cela est mal
interpréter les choses, M. le député. Ce n'est pas une
affaire de changement de bord, cela. M. Jasmin, c'est un ami. Il vient me voir.
J'ai de l'affection pour lui. Je suis plus vieux que lui. Je ne sais pas s'il
me prend pour son père, mais il aimait cela se confier à moi.
J'aurais été ailleurs, j'aurais été dans le Parti
libéral, j'aurais changé, mais je l'aurais reçu quand
même, M. Jasmin. C'est un ami. Ce sont des liens comme j'ai des liens
avec vous autres, du Parti libéral, et je peux vous dire que j'ai
peut-être de meilleurs liens avec certains de ceux-là que
d'autres. C'est une affaire d'amitié. M. Jasmin, je l'aurais reçu
- c'est pour répondre à la question, je vais arrêter de
parler trop longtemps - quand même, où que j'aie
été, c'est un ami.
M. Bourbeau: Je comprends que c'est un ami. Mais, M. Jasmin, vous
avez dit que c'était la plus grosse cause de sa vie qu'il était
en train de plaider...
M. Gauthier (Yves): Non, excusez-moi.
Je pense que je n'ai pas dit que M. Jasmin avait dit que c'était
la plus grosse cause de sa vie, j'ai dit que, moi, je pensais que
c'était la plus grosse de sa vie. Pour lui, c'était important. Je
pense que c'était seulement...
M. Bourbeau: D'accord, c'était important.
M. Gauthier (Yves): Dans le fond, s'il n'était pas venu me
voir, selon moi, il aurait été niaiseux. Un avocat, lorsqu'il a
une cause, selon moi, il va voir le plus de gens qu'il peut, il faut qu'il
gagne sa cause.
M. Bourbeau: Surtout au bureau du premier ministre.
M. Gauthier (Yves): Que ce soit au bureau du premier ministre,
cela a tombé comme cela. Cela aurait pu être ailleurs. Cela aurait
pu être le président de la CIL, de Bell Canada. Les gars vont
où leur cause peut être servie. Moi, cela ne m'a pas
offusqué qu'il vienne me voir. M. Beaulé, je ne le rencontrais
pas, parce qu'on ne s'entendait pas plus qu'il faut. M. Jasmin, il aurait pu
venir tous les jours et je l'aurais reçu, pour votre information. Cela
ne faisait rien, parce qu'on ne parlait pas plus qu'il faut de la cause. On
parlait de politique, on parlait d'autre chose. C'est un ami, c'est comme un
frère. Je n'ai pas de frère. J'étais toujours avec lui.
J'aimais cela jaser avec lui. Cela s'arrête là, ces
affaires-là.
Je voudrais bien qu'on prenne conscience qu'on ne peut pas porter deux
chapeaux, dans la vie. Tu ne peux pas servir deux gars. Moi, je vous le dis,
j'ai été marqué par les syndicats. Dans le fond, quand
Jean-Roch m'a demandé si j'étais tuteur, je pense qu'il a eu
mauditement raison. Je ne dis pas que j'étais pour les aider, mais cela
ne m'a rien fait. Je l'ai pris de bonne part. Je l'ai pris comme un
avertissement honnête, sincère.
M. Bourbeau: Si vous voulez, on va faire un peu le
résumé de tout cela.
M. Gauthier (Yves): Oui.
M. Bourbeau: Dans la cause de la SEBJ, il y avait un demandeur et
un défendeur. Le défendeur, c'étaient les syndicats, il y
en avait deux, il y avait les syndicats québécois et le syndicat
américain. Le demandeur était la SEBJ, dont l'actionnaire est
Hydro-Québec, dont l'actionnaire est le gouvernement du Québec.
Vous, à un moment donné, vous étiez le président
d'un syndicat poursuivi. Vous étiez le défendeur. Votre avocat
était Me Jasmin. Vous essayiez de vous en sortir. Vous aviez une
poursuite de 31 000 000 $ sur le dos, comme on dit. À un moment
donné, vous changez de camp, vous passez du côté du
défendeur et vous devenez le conseiller spécial du premier
ministre. Donc, par rapport à la cause, vous devenez le conseiller
spécial de celui qui représente les actionnaires du demandeur.
Quand on regarde cela et quand vous receviez à votre bureau l'avocat de
la partie adverse, est-ce que vous aviez l'avocat de la partie adverse dans
votre bureau ou si vous aviez un allié?
M. Gauthier (Yves): J'avais un ami, M. le Président.
M. Bourbeau: Un ami. Bon!
M. Gauthier (Yves): Pour moi, ce n'est pas parce qu'il
était pour ou contre le gouvernement. D'ailleurs, je pense que ma
position était assez connue. Je pense bien que j'ai dû vous la
dire hier. D'après moi, la cause ne valait pas cinq cents. Cela, je le
dis, cela aurait été n'importe quel gouvernement, c'était
ma pensée. Je ne dis pas que j'avais raison, mais c'est comme cela que
je le voyais. Je n'ai jamais vu en Me Jasmin un ennemi, un adversaire dans une
cause. Je ne l'ai pas vu comme cela.
M. Bourbeau: Tantôt, vous avez dit que vous n'aimez pas
porter deux chapeaux. À l'égard de la poursuite de la SEBJ, quel
chapeau portiez-vous à ce moment-là?
M. Gauthier (Yves): J'en avais... M. Jutras: M. le
Président...
Le Président (M. Jolivet): Me Jutras.
(11 h 15)
M. Jutras: M. le Président, cela a été
couvert amplement par une déclaration assermentée faite par le
notaire Gauthier qui dit en toutes lettres qu'il n'avait jamais reçu
quelque mandat que ce soit concernant la SEBJ et qu'il ne s'est jamais
mêlé au bureau du premier ministre du dossier de la SEBJ. Une fois
qu'il a dit cela, je me demande pourquoi le député continue
à le questionner là-dessus, si c'est clair, et ceci a
été assermenté.
M. Bourbeau: M. le Président.
M. Jutras: "À mon arrivée au bureau du premier
ministre, je ne me suis pas mêlé de ce dossier, je n'en ai
parlé ni à M. Lévesque ni à M. Boivin ni à
quelque autre personne du bureau du premier ministre, et ce à cause de
mes connaissances antérieures de ce dossier qui me liaient en quelque
sorte à la partie syndicale. Il n'y a aucun conflit
d'intérêts de quelque nature que ce soit, quand on ne
reçoit pas un mandat de s'occuper d'un dossier de la part de la partie
gouvernementale."
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, sur la question de
règlement et en toute déférence pour l'honorable
bâtonnier, le témoin nous dit qu'il n'a pas parlé. Le
bâtonnier nous dit qu'il n'avait pas de mandat. Je ne discute pas cela,
car le témoin l'a dit aussi. Sans avoir de mandat, M. le
Président, il est cependant fort possible qu'il en ait parlé.
D'ailleurs, Me Gadbois nous a dit que le témoin lui en a parlé.
M. Laferrière nous a dit qu'il lui en avait amplement parlé lors
de leur rencontre. Tout à l'heure, on vient de faire état d'une
rencontre avec M. Jasmin où il a été question de Me
Beaulé et, semble-t-il, le témoin a eu l'impression que, etc.. Je
pense qu'on a fait état depuis le début qu'à plusieurs
reprises le témoin a parlé de la poursuite de la SEBJ, même
s'il n'en avait pas le mandat. Je ne vois pourquoi il y aurait objection
à ce que je continue mes questions sur ce sujet-là.
M. Jutras: Je vais vous préciser, M. le Président,
qu'on laisse entendre par des questions que le témoin pourrait
être en conflit d'intérêts. Pour avoir un conflit
d'intérêts il aurait fallu qu'il reçoive un mandat
quelconque. N'ayant pas de mandat, il ne pouvait pas être en conflit
d'intérêts. Il vous a dit clairement qu'il était lié
à la partie syndicale.
M. Bourbeau: M. le Président, question de
règlement, question de règlement, M. le Président, je
demande la parole.
Le Président (M. Jolivet): Un instant! M. le
député de Laporte sur une question de règlement.
M. Bourbeau: M. le Président, on vient de parler de
conflit d'intérêts. En aucun cas, je n'ai parlé de conflit
d'intérêts...
Le Président (M. Jolivet): ...juste un instant! juste un
instant!
M. Bourbeau: ...et c'est très important que je continue
là-dessus.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
non, non...
M. Bourbeau: ...je n'ai pas parlé de conflit
d'intérêts...
Le Président (M. Jolivet): ...juste un instant; juste un
instant! M. le député de
Laporte, continuez, j'ai intérêt à écouter ce
que vous avez l'intention de dire.
M. Bourbeau: C'est très grave, le bâtonnier vient de
parler de conflit d'intérêts. Je n'ai pas parlé de conflit
d'intérêts. Je n'ai fait que relever le fait que le témoin,
tout à l'heure, a dit qu'il avait deux emplois et ce sont les mots
mêmes qu'il a prononcés. Donc, je ne fais que reprendre ce qu'il a
dit et je n'ai pas parlé de conflit d'intérêts.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député, mais vous venez d'interpréter une réponse
donnée par Me Gauthier et je ne peux accepter cette partie-là.
Quand vous dites qu'il a dit qu'il avait deux emplois, ce n'est pas ce qu'il a
dit.
M. Bourbeau: Ah! bien oui! C'est ce qu'il a dit.
Le Président (M. Jolivet): Non, ce n'est pas ce qu'il a
dit. Il a dit: Si vous voulez l'interpréter comme cela, vous pouvez bien
l'interpréter comme vous le voulez, mais ce n'est pas cela. Je pense que
c'était clair à ce niveau-là.
M. Paradis: M. le Président, sur cette
précision-là.
Le Président (M. Jolivet): Oui, mais je pense que la
meilleure façon de le régler, c'est de demander à Me
Gauthier de répéter bien comme il le faut et, à ce
moment-là, on va savoir à quoi s'en tenir.
Me Gauthier, est-ce que vous pouvez répéter, pour qu'on la
comprenne, la réponse que vous avez donnée concernant le fait
qu'il vous a, à un moment donné, dit, dans ses questions, que
vous aviez deux emplois entre le mois d'octobre et le mois de décembre
et que vous avez répondu: Si j'ai bien compris, si vous voulez
l'interpréter comme cela, vous pouvez bien l'interpréter comme
cela légalement, mais je sais que je n'ai pas eu deux emplois. C'est ce
que j'ai compris.
M. Gauthier (Yves): J'ai dit que je ne portais pas deux
chapeaux.
Le Président (M. Jolivet): J'ai bien compris.
M. Rodrigue: M. le Président, c'est une question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Vimont.
M. Rodrigue: M. le Président, depuis quatre ou cinq
minutes, le député de Laporte a modifié un peu la
façon de poser ses questions. On se demande s'il est en train de faire
des commentaires, parce qu'il précède ses questions de
considérations, il essaie de résumer le témoignage en
l'interprétant à sa façon d'ailleurs. Finalement, cela
contient des hypothèses, cela contient des expressions
d'opinions qui sont les siennes, il fait des déductions et,
parfois même, il modifie carrément, pour ne pas dire qu'il les
inverse, des réponses que nous a données Me Gauthier au
début. Je voudrais vous demander de l'inviter soit à poser des
questions, soit à faire ses propres commentaires, si c'est ce qu'il
désire, mais pas les deux en même temps. Il me semble que le fait
de mêler les deux comme cela est de nature à fausser les travaux
de la commission et en particulier à donner une impression qui ne
correspond pas aux réponses qu'a données Me Gauthier depuis le
début.
M. le Président, j'apprécierais qu'on nous dise si on a
l'intention de faire des commentaires ou de poser des questions. Si on pose des
questions, soit, mais qu'on ne les précède pas de
préambules et d'hypothèses comme le fait le député
de Laporte depuis à peu près cinq minutes.
M. Paradis: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: On a une objection qui est soulevée par le
procureur qui accompagne le témoin. La question d'objection porte sur la
déclaration assermentée que nous a faite le témoin au
début. Le terme exact, et c'est peut-être là où se
situe l'imbroglio, cela porte sur le mandat. Il nous dit: Vous avez une
déclaration assermentée et, finalement, il n'avait pas le mandat
de faire cela. Le député de Laporte a précisé sa
question sans préambule. Il a dit que ce n'était pas sur le
mandat. J'accepte sa réponse, il l'a peut-être fait sans mandat,
mais on a des indications qu'il a parlé de la chose avec M.
Laferrière, d'après le témoignage de M. Laferrière:
II a parlé de la chose avec Me Gadbois, d'après le
témoignage de celui-ci. On ne le questionne pas pour savoir s'il l'a
fait avec ou sans mandat; c'est ce sur quoi vous devez vous prononcer
présentement et je vous invite à le faire tout simplement.
Le Président (M. Jolivet): Ce que je veux bien clarifier,
c'est que M. le député de Laporte avait commencé en
disant: "Résumons" et il a posé une question. Si cela avait
été dans le sens de faire des commentaires, je l'aurais
invité à le faire comme je l'avais demandé au
député de Gatineau, s'il n'avait plus de questions, d'accord:
faites vos commentaires, faites vos interprétations si vous voulez, sauf
que je sois assuré que... J'avais crainte, au départ, mais comme
il a été rapidement à la question, je l'ai laissé
aller. La seule chose que je ne permettrai pas et là-dessous
j'étais d'accord avec l'objection apportée par Me Jutras, du
moins sur une partie, soit que l'on faisait en posant la question des
interprétations personnelles pour en arriver à une question et il
n'est pas possible de faire cela. Donc, je pense que le député de
Laporte ira directement aux questions, comme je lui avais demandé. Je
suis assuré qu'il va, comme il me l'a garanti, faire en sorte que les
questions soient claires, directes et précises. M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, j'essaie de poser des
questions les plus courtes possible. Je pense que, depuis le début, je
n'ai pas exagéré. Vous avez dit tout à l'heure, Me
Gauthier: "Légalement, j'avais deux jobs du 3 octobre au 13
décembre 1978." Ce sont les mots que vous avez prononcés. Est-ce
que Me Jasmin vous a dit qu'il était mal à l'aise, lorsque vous
l'avez rencontré, de savoir qu'en tant qu'ex-président du
syndicat dont il était l'avocat, vous possédiez des informations
privilégiées susceptibles d'éclairer la partie adverse,
soit la Société d'énergie de la Baie James, et de nuire
à sa propre cause.
Le Président (M. Jolivet): Juste avant que vous ne
répondiez, j'aimerais d'abord qu'on clarifie bien la question parce que
vous avez encore, au début de votre question, donné une partie de
la réponse de Me Gauthier et cela ne rend pas justice à Me
Gauthier. Je pense qu'il a bien clarifié cette question du décret
du 13 décembre 1978 par rapport à son engagement. La façon
dont vous avez posé votre question laisse sous-entendre une partie
simplement de la réponse qu'il a donnée et cela ne rend pas
justice à Me Gauthier. J'aimerais qu'il le clarifie; une fois que ce
sera clarifié, qu'on arrête de poser des questions dans ce
sens.
Me Gauthier, pouvez-vous clarifier comme il faut cette réponse
que vous avez donnée tout à l'heure?
M. Gauthier (Yves): Essayons de nous replacer. Vous parlez tous
en même temps je ne comprends pas....
Le Président (M. Jolivet): Dans la question que M. le
député de Laporte vous a posée...
M. Gauthier (Yves): Oui.
Le Président (M. Jolivet): II a dit: Vous avez dit tout
à l'heure que, légalement, vous aviez deux jobs... Ce n'est pas
tout à fait la réponse que vous avez donnée.
M. Gauthier (Yves): Non, non.
Le Président (M. Jolivet): Donc, allez-y. Clarifiez cette
partie.
M. Gauthier (Yves): Je veux dire que, pour lui,
légalement, il y a un texte - cela a l'air niaiseux - qui dit que c'est
le 13, mais en tant que je suis concerné, quand j'ai envoyé mon
compte, la tutelle était terminée; elle venait de se terminer.
Quand j'ai appelé Me Beaudry, je lui ai dit de venir chercher les
papiers, que moi, je m'en allais. Quand j'ai appelé M. Paré qui
était gérant du local, je lui ai dit: "Je ne suis plus dans la
tutelle." D'après moi, cela était bien clair que je
n'étais plus là. Sauf que pour eux, avant qu'ils ne trouvent
quelqu'un, cela a pris du temps. J'ai cru comprendre aussi que Me Beaudry, le
13, était non seulement président et membre, il était
président de tous les syndicats, contrairement à ce qu'il y avait
dans mon temps où j'étais président de deux et où
il était président de deux. J'ai l'impression qu'ils ont
négocié cela aussi. Ils ont nommé Me Beaudry
président de tous les syndicats et les autres étaient membres
seulement. Pour trouver quelqu'un pour me remplacer, cela a pris quelque temps.
Pour autant que je suis concerné, j'ai arrêté le 8
septembre; d'après moi, j'ai arrêté moralement et selon les
faits, en envoyant mon compte et en parlant à M. Paré et à
Me Beaudry et, en plus, je suis parti jusqu'au 30 septembre.
Le Président (M. Jolivet): Donc, cette partie est claire,
quant à moi.
M. Gauthier (Yves): D'après moi, oui.
Le Président (M. Jolivet): Maintenant, à partir de
cela, reposez votre question, M. le député de Laporte.
M. Bourbeau: Me Gauthier, est-ce que Me Jasmin vous a
demandé de ne pas utiliser votre connaissance de son dossier contre lui
dans la cause?
M. Gauthier (Yves): Jamais, M. le Président, jamais.
M. Bourbeau: Vous avez dit tout à l'heure que vous aviez
démissionné au début de septembre. Est-ce que vous avez
remis une lettre de démission?
M. Gauthier (Yves): Non, je ne pense pas avoir remis une lettre.
C'est cela que je cherchais, je ne pense pas. Je suis certain que, quand j'ai
appelé Me Beaudry et que je lui ai dit que je lui remettais les papiers,
il a bien compris que je ne l'étais plus. Il ne m'a plus rappelé.
Dans le cas de M. Paré, c'était la même chose.
M. Bourbeau: Si vous voulez, on va passer maintenant au 15
janvier 1979, la date de l'ouverture du procès où la SEBJ
poursuivait les syndicats pour 31 000 000 $. Il y avait certains syndicats
québécois représentés par Me Jasmin et un syndicat
américain représenté par Me Beaulé. Le même
jour, le 15 janvier, les deux avocats de la défense, Me Jasmin et Me
Beaulé, ont rendu visite au bureau du premier ministre et ont
parlé à son chef de cabinet, Me Boivin. Avez-vous eu connaissance
de cette visite?
M. Gauthier (Yves): Non, je n'en ai pas eu connaissance, M. le
Président.
M. Bourbeau: Le lendemain, le 16 janvier, le deuxième jour
du procès, Me Michel Jasmin, l'avocat des syndicats
québécois, s'est rendu au bureau du premier ministre rencontrer
Me Jean-Roch Boivin, son chef de cabinet. Avez-vous eu connaissance de cette
visite?
M. Gauthier (Yves): Non, M. le Président.
M. Bourbeau: Le surlendemain, le 17 janvier 1979,
troisième journée du procès, Me Jasmin s'est rendu
à votre bureau. Est-ce exact?
M. Gauthier (Yves): Oui, c'est exact, M. le Président.
M. Bourbeau: Qui avait convoqué la réunion?
M. Gauthier (Yves): Je ne le sais pas. Ce n'est pas moi.
M. Bourbeau: Quel a été...
M. Gauthier (Yves): C'est Me Jasmin qui a dû venir, parce
que là, vous dites qu'il est venu le 15 et le 16. Il venait tous les
jours: les 15, 16, 17. C'est cela.
M. Bourbeau: C'est cela, il venait tous les jours.
M. Gauthier (Yves): Bien, il est venu le 15, le 16 et le 17. Le
17, il est venu me voir. Il n'est pas allé voir Jean-Roch en même
temps? Non?
M. Bourbeau: Est-ce que je peux vous poser des questions?
M. Gauthier (Yves): Oui, mais vous avez l'air d'en savoir plus
que moi. Le 17 janvier, apparemment, il n'a vu que moi. Oui.
M. Bourbeau: Est-ce que vous vous souvenez de cette
rencontre?
M. Gauthier (Yves): Oui. C'est la fois où il m'a dit qu'il
y aurait neuf mois - c'est vrai, la cause venait de commencer - il m'a dit
qu'il y en aurait pour neuf mois
d'auditions et que la cause serait longue.
M. Bourbeau: De quoi a-t-il été question lors de
cet entretien?
M. Gauthier (Yves): C'est ce que je viens de vous dire: que la
cause serait longue. Il y aurait neuf mois d'auditions, un paquet de
témoins. Il faisait venir M. Hamel, M. Boyd. Il avait une liste; il ne
me l'a pas montrée, mais il m'a dit qu'il fallait que M. Hamel vienne,
que M. Boyd vienne et qu'ils allaient tous y passer.
M. Bourbeau: Combien de temps a duré la rencontre?
M. Gauthier (Yves): On est allé dîner. De 11 h 45...
On l'a ici. Vous l'avez, je pense. L'avez-vous? De 11 h 45 à 14 h 45.
C'est cela, on est allé dîner.
M. Bourbeau: Donc, trois heures?
M. Gauthier (Yves): Oui, c'est cela. On est encore allé
dîner au Méridien. C'est là qu'il a oublié son
"coat".
M. Bourbeau: II l'a oublié au Méridien ou à
votre bureau?
M. Gauthier (Yves): Non, non, à mon bureau. Remarquez que
c'est peut-être une tactique d'avocats, je ne le sais pas. En tout cas,
il est venu chercher son "coat". Cela, je le sais.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Gauthier (Yves): II se faisait peut-être payer à
l'heure par ses clients, je ne sais pas!
M. Bourbeau: Y avait-il d'autres personnes que vous et Me Jasmin
lors de cet entretien?
M. Gauthier (Yves): Non, il n'y en avait pas d'autres, M. le
Président. Avez-vous compris? Il n'y en avait pas d'autres.
M. Bourbeau: Alors, si je comprends bien, il y a eu une partie de
l'entretien à votre bureau et une partie au Méridien?
M. Gauthier (Yves): J'ai plutôt l'impression qu'à
l'heure où il est arrivé, on est allé manger tout de
suite. Moi, d'habitude, à midi j'ai faim.
M. Bourbeau: En plus du fait que Me Jasmin vous ait
mentionné que le procès serait long, de quoi avez-vous
discuté?
M. Gauthier (Yves): Je ne le sais pas, M. le Président. Je
sais qu'il m'a dit que ce serait long en maudit. C'est tout ce qu'il m'a dit.
Il a parlé des témoins qu'il ferait venir: M. Hamel, M. Boyd, M.
Saulnier. C'est là que j'ai cru comprendre que peut-être - il m'en
avait déjà parlé un peu - moi aussi, je serais
appelé à témoigner.
M. Bourbeau: Donc, vous avez parlé de la poursuite, ce
jour-là?
M. Gauthier (Yves): Non, on n'a pas parlé de la poursuite.
Vous, vous dites la poursuite, moi je parlais du procès. Il m'a dit
qu'il y aurait neuf mois d'auditions. Je comprends bien que quand on dit
auditions, c'est seulement le commencement. Ce ne sont pas les débats,
c'est l'audition des témoins, je pense.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il vous a fait part de ses
préoccupations concernant la poursuite?
M. Gauthier (Yves): Pas plus qu'il ne faut. Mais, M. Jasmin est
un homme assez nerveux de nature. C'est un genre nerveux, que voulez-vous que
je vous dise? C'est pour cela que je dis qu'il était
préoccupé. Mais, à part cela... Lui, il disait que sa
cause était bonne. (11 h 30)
M. Bourbeau: Et vous, que disiez-vous?
M. Gauthier (Yves): Moi, j'ai toujours dit qu'elle ne valait pas
0,05 $. C'est-à-dire que j'allais dans le même sens que lui. Parce
que, lui, il était sûr - dans un procès, tu n'es jamais
sûr - et il pensait bien gagner.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il vous a fait savoir les gestes qu'il
entendait poser pour assurer la défense?
M. Gauthier (Yves): Non, non. J'aimerais bien que ce soit - et je
ne veux pas jouer au "smart" - bien clair. Ces affaires de procédure ne
me regardaient pas et je ne voulais surtout pas les savoir, parce que je
prévoyais qu'il y aurait peut-être des frictions entre Me
Beaulé et Me Jasmin, là-dessus. Je l'ai dit hier. Je ne sais pas
qui parlait devant le juge. J'ai l'impression que l'un parlait et que l'autre
faisait du travail, je ne le sais pas... C'est à peu près comme
pour vous autres, vous avez vos gars pour parler et vous avez vos gars, en
arrière, qui vous donnent les documents. J'ai l'impression que Me Jasmin
devait faire cela, mais je ne voulais pas me mêler de cela, cela ne me
regardait pas. Je ne suis pas avocat et j'avais assez de mes problèmes.
Il faut penser que la Baie-James, c'est bien beau pour vous tous, mais, moi,
j'avais bien d'autres cas à voir, parfois. Du monde, j'en recevais.
Alors, pour moi... Il venait me voir. Si cela avait été un autre
avocat qui m'avait
demandé de venir, je ne sais pas si je l'aurais reçu comme
cela.
M. Bourbeau: Comme conseiller spécial du premier ministre,
quelle a été votre réaction quand il vous a parlé
de cela?
M. Gauthier (Yves): Je n'avais pas de réaction, je l'avais
eue, il y a bien longtemps, ma réaction... La cause ne valait pas 0,05
$.
M. Bourbeau: Vous avez dit que Me Jasmin était
préoccupé...
M. Gauthier (Yves): Bien oui, voyons! Pour lui, c'était sa
cause et il voulait la gagner.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il venait "pratiquer" avec vous, comme
vous nous avez dit hier?
M. Gauthier (Yves): Bien, savez-vous, j'ai lu un article - moi,
je ne lis jamais les journaux, mais il y en a un qui m'a passé le Soleil
- où c'est marqué "les gars s'exerçaient au bureau du
premier ministre". C'est parfait! S'ils appellent cela de la "pratique", pour
moi, il n'aurait pas eu beaucoup de "strike out" à la fin, Jasmin. Pour
le temps qu'il restait, je comprends que... La seule fois, d'après moi,
où il aurait pu essayer son affaire, c'est le 6 février. On a eu
une rencontre ici, à neuf heures du matin, c'est le seul temps où
je sentais bien que... Là, j'ai compris, d'après les
résumés que j'ai lus, que le 6 il y avait une réunion de
la SEBJ et que cela marchait aussi en cour. Alors, pour moi, c'est dans ce
temps-là. Mais, si c'est cela, l'exercice, ce n'est pas fort! Il
n'aurait pas gagné sa cause sur cela, pour moi. S'il est ici, il va me
haïr, mais...
M. Bourbeau: Le 17 janvier, quand vous avez rencontré Me
Jasmin...
M. Gauthier (Yves): Oui.
M. Bourbeau: ...est-ce qu'il a fait état du fait qu'il
devait rencontrer le P.-D.G. de la SEBJ, M. Claude Laliberté, le jour
même?
M. Gauthier (Yves): Le 17?
M. Bourbeau: Oui.
M. Gauthier (Yves): Non, M. le Président. Moi, les gars ne
me parlaient pas bien, bien. Quand je dis, dans ma déclaration, que je
ne suis pas au courant des visites qui ont été faites par les
avocats ou par les membres du conseil d'administration de la SEBJ, moi, j'ai
toujours compris qu'ils étaient venus le 1er janvier. J'ai appris ici
que c'était le 1er février qu'ils étaient venus. Je n'ai
jamais su cette affaire-là.
M. Bourbeau: Êtes-vous au courant que, le jour même,
Me Jasmin a rencontré certaines personnes, dont le président de
la SEBJ?
M. Gauthier (Yves): Non. C'est ce que je viens de vous dire, M.
le Président. Non, je n'étais pas au courant.
M. Bourbeau: Alors, lors de cette rencontre du 17 janvier,
où il a été question de la poursuite de la SEBJ, est-ce
que Me Jasmin vous en a parlé?
M. Gauthier (Yves): Neuf mois d'audition.
M. Bourbeau: Est-ce tout ce qu'il a dit pendant les trois
heures?
M. Gauthier (Yves): II a peut-être dit autre chose, mais je
me rappelle cela parce qu'il m'a dit que ce serait long et il m'a parlé
des témoins qui viendraient, c'est tout.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il vous a parlé d'autre chose?
M. Gauthier (Yves): Non. On a encore parlé de politique
parce qu'on aime cela faire de la politique. Mais on n'a pas parlé
d'autre chose en ce qui concerne la Baie-James. Mais je sais qu'il m'a dit
qu'il fallait qu'il fasse descendre les gars de LG 2.
M. Bourbeau: Et vous, de quoi avez-vous parlé?
M. Gauthier (Yves): Écoutez, cela fait déjà
quatre ou cinq ans...
M. Rodrigue: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Un instant! J'ai une question
de règlement de la part du député de Vimont.
M. Rodrigue: M. le Président, j'apprécierais que
vous demandiez au député de Laporte de poser des questions en
rapport avec l'objet de cette commission, c'est-à-dire sur le saccage et
sur tout ce qui entoure le règlement de LG 2. De quoi a-t-il
parlé? Il a pu parler de la pluie et du beau temps, mais cela ne nous
intéresse pas. Alors, si le député de Laporte pouvait
préciser ses questions un peu, il me semble que cela aiderait à
faire avancer les travaux de cette commission.
Le Président (M. Jolivet): La seule chose que je pourrais
demander à l'invité,
c'est de lui dire qu'il n'a pas parlé de la question qui est
devant nous. Cela ferait simplement en sorte qu'on n'aurait plus besoin de la
poser. Simplement, cela permettrait bien clarifier la situation.
M. Bourbeau: Me Gauthier, est-ce que Me Jasmin vous a dit qu'il
avait déposé une offre de règlement deux jours plus
tôt?
M. Gauthier (Yves): Non, Me Jasmin ne m'a pas dit qu'il avait
déposé d'offre à la SEBJ ou à la cour.
M. Bourbeau: Étiez-vous au courant qu'il avait
déposé une offre de règlement?
M. Gauthier (Yves): Non. Je pense que c'est ce que je viens de
dire, je n'étais pas au courant.
M. Bourbeau: Non, ce n'est pas la même chose.
M. Gauthier (Yves): Excusez. Répétez-la.
M. Bourbeau: La première question, c'est: Est-ce qu'il
vous a dit qu'il avait déposé une offre? La deuxième:
Étiez-vous au courant qu'il avait fait une offre?
M. Gauthier (Yves): Je n'étais pas au courant.
M. Bourbeau: Au cours des trois heures de votre entretien, vous
avez parlé de la Baie-James à quelques reprises...
M. Gauthier (Yves): Excusez-moi, je vous ai dit, sur la
Baie-James, qu'on avait parlé des neuf mois d'audition, que cela serait
long, qu'il ferait venir des témoins. Je n'ai pas parlé durant
trois heures sur la Baie-James, je voudrais bien que cela soit compris.
M. Bourbeau: Je n'ai pas dit cela non plus.
M. Gauthier (Yves): On a parlé d'autres choses qui ne
concernent pas la cause.
M. Bourbeau: Je n'ai pas dit cela non plus.
M. Gauthier (Yves): C'est comme cela que je l'ai compris, je
m'excuse.
Le Président (M. Jolivet): Le problème que j'ai,
c'est qu'au début de la question, il y avait quelque chose qui
n'était pas clair pour moi et j'avais l'intention de vous arrêter,
mais je savais que vous n'aviez pas terminé votre question. Allez.
M. Lalonde: C'est cela.
M. Bourbeau: Me Gauthier, je vous prierais d'écouter
peut-être plus attentivement mes questions.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. M. le
député, je n'accepte pas cette invitation. Ce que j'ai compris du
début a produit la même réaction chez Me Gauthier, celle de
vous arrêter dès maintenant parce que le seul moyen qu'il a de
rectifier ce que vous dites, c'est de le faire immédiatement. Je
m'excuse auprès de notre invité, mais il n'avait pas le droit de
faire cette chose.
M. Gauthier (Yves): Qu'a-t-il fait? A-t-il dit
d'écouter?
Le Président (M. Jolivet): Non, c'est parce qu'il a
simplement dit de bien écouter mais je crois que vous écoutiez
très bien. J'écoutais très bien et j'avais l'intention de
vous arrêter.
M. le député de Laporte. Allez.
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai dit: "Au cours des
trois heures d'entretien, est-ce que vous avez?" Je n'ai pas dit qu'ils avaient
parlé pendant trois heures du sujet.
Le Président (M. Jolivet): Je dois vous dire qu'on
revérifiera les galées. On aura l'occasion de se revoir cet
après-midi. Je ne parlerai pas pour le moment pour ne pas me tromper.
Mais je n'ai pas compris la deuxième façon dont vous avez
posé votre question. Ce n'est pas comme cela que vous l'avez
posée au début.
M. le député de Laporte.
M. Lalonde: M. le Président, une question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Lalonde: Avant qu'on déclare une question irrecevable,
j'aimerais qu'on la laisse terminer. J'ai compris, moi aussi, le
député de Laporte lorsqu'il a dit: au cours de ces trois heures.
On peut dire, je pensais...
Le Président (M. JoUvet): M. le
député...
M. Lalonde: ...M. le Président, c'est très
important parce...
Le Président (M. Jolivet): ...non, non, je vais vous
arrêter parce qu'on va perdre du temps pour le moment. Ce que j'ai
compris et c'est pour cela j'ai laissé la réaction de Me
Gauthier... Je voulais quand même bien comprendre, c'est peut-être
la façon dont le député a posé sa question, mais
j'avais
l'intention de l'arrêter. Je ne voulais pas revenir tant qu'on
n'aura pas les galées, pour ne pas me faire accuser de me tromper.
J'essaie de suivre les discussions, les conversations, les questions et les
réponses. Ce que j'ai compris, c'est: Au cours des trois heures de
discussions sur la Baie-James. C'est pour cela que j'avais l'intention de
réagir. Peut-être que cela a été mal posé. Il
s'agira...
M. Lalonde: La question, ce n'est pas qu'elle a été
mal posée, c'est qu'on n'a pas laissé le temps au
député de Laporte de la poser.
Le Président (M. Jolivet): Ah! cela est autre chose.
M. Lalonde: Je vais vous donner un exemple. Sans cela, si on
interrompt à la première phrase de sa question, on ne saura
jamais la question. Par exemple: Au cours des trois heures d'entretien, il a
été question de la longueur de la cause. S'il arrête
là, vous avez raison. Il a été question de la longueur de
la cause pendant combien de temps? C'est une bonne question. C'était
peut-être la question du député de Laporte, je ne le sais
pas, il ne me les souffle pas. Mais si on ne laisse pas terminer les questions
à ce moment...
Le Président (M. Jolivet): Le problème, c'est que
par votre question de règlement, vous lui soufflez la question par
exemple.
M. le député de Jonquière.
S'il vous plaît.
M. Vaillancourt (Jonquière): À moins que je ne sois
sourd - les galées nous le prouveront cet après-midi - j'ai
très bien compris.
M. Lalonde: II n'avait pas terminé sa question.
M. Vaillancourt (Jonquière): II n'avait pas terminé
sa question, mais dès le préambule...
M. Lalonde: Bien oui.
M. Vaillancourt (Jonquière): ...il changeait la
réponse et il interprétait les réponses du témoin
parce qu'il a dit textuellement ceci: Au cours de vos trois heures d'entretien
sur la Baie-James. M. le Président, c'est textuellement et mot à
mot, littéralement ce qu'il a dit. Si c'est cela qu'il a dit, le
député de Marguerite-Bourgeoys conviendra avec moi qu'à ce
moment il présume, il décide que les trois heures d'entretien ont
porté exclusivement sur la Baie-James, ce qui n'est pas le cas.
M. Lalonde: Si c'est cela, vous avez raison.
Le Président (M. Jolivet): Si c'est cela que j'avais bien
compris et que Me Gauthier avait compris, sa réaction était
naturelle. Il avait le droit, à mon avis, d'interrompre dès ce
moment.
M. Lalonde: Recommençons.
Le Président (M. Jolivet): Recommencez votre question et
cela va clarifier la situation.
M. Bourbeau: Si c'est cela, la question était irrecevable,
M. le Président?
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Bourbeau: Alors, M. le Président, pour qu'il n'y ait
pas de confusion, au cours des trois heures d'entretien que vous avez eues avec
Me Jasmin, le procureur des syndicats québécois, le 17 janvier,
vous nous dites que Me Jasmin vous a parlé de la cause de la poursuite
de la SEBJ, entre autres, en disant que ce serait très long, que cela
pourrait durer jusqu'à neuf mois. Cela le préoccupait. C'est
exact?
M. Gauthier (Yves): Neuf mois d'audition.
M. Bourbeau: Neuf mois d'audition, oui.
M. Gauthier (Yves): Est-ce que mon micro fonctionne? Oui. Neuf
mois d'audition.
M. Bourbeau: Bon, neuf mois d'audition. Par contre, deux jours
auparavant il avait commencé, lui, à négocier des offres
de règlement. Il avait déposé une offre de
règlement; c'est moi qui le dis. Les autres témoins nous l'ont
affirmé et nous avons eu des preuves, on a eu les documents. On est tous
au courant de cela.
M. Lalonde: C'est bon de le dire.
M. Bourbeau: Exactement. Je pense qu'il faut le dire parce que
les négociations étaient amorcées à ce moment, les
offres de règlement étaient amorcées, on commençait
à négocier. Est-ce qu'au cours des trois heures qu'a duré
votre entretien - si vous fouillez votre mémoire - Me Jasmin, quand il
vous a parlé de la SEBJ, en plus de vous parler des neuf mois d'audition
possibles, n'aurait pas également parlé des négociations
qui venaient de débuter?
M. Perron: M. le Président, le témoin a
déjà répondu à cette question.
Le Président (M. Jolivet): Juste un
instant. Juste un instant.
M. Bourbeau: Elle n'était pas posée comme cela.
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant. Je pense
que...
M. Gauthier (Yves): Je peux répondre, cela ne me
dérange pas.
M. Bourbeau: Oui, j'aimerais cela.
M. Gauthier (Yves): Je peux parler de cela.
Le Président (M. Jolivet): Allez, Me Gauthier,
répondez.
M. Gauthier (Yves): II ne m'a jamais dit qu'il avait fait des
offres au... Là j'ai compris que la cause commençait, par
exemple. Mais il ne m'a pas dit: On a déposé des offres et des
choses comme cela. Cela fait quelques fois que je le dis, cela ne me
dérange pas de le dire et je ne le dis pas choqué, rien; je n'ai
jamais vu de leurs papiers et je ne voulais pas en voir. C'était une
affaire d'avocats et je ne voulais pas m'en mêler. C'est bien simple. Et
là le député me dit qu'il avait déposé des
offres avant. Je ne le savais pas. Je trouve curieux qu'il ait
déposé des offres et que le procès ait commencé en
même temps, par exemple. Je ne comprends pas.
M. Bourbeau: Sans avoir vu de papiers -vous dites que vous n'avez
pas vu de papiers - il aurait quand même pu être question du
règlement.
M. Gauthier (Yves): II aurait pu en être question mais il
n'en a pas été question, M. le Président.
M. Bourbeau: À ce moment - le 17 janvier, vous avez
parlé de la cause, vous l'avez dit tout à l'heure -
n'étiez-vous pas mal à l'aise en tant que conseiller
spécial du premier ministre de discuter de la cause avec l'avocat de la
partie adverse?
M. Gauthier (Yves): Non, je n'étais pas du tout mal
à l'aise parce que je n'ai pas parlé de la cause. C'est lui qui a
dit qu'il y aurait neuf mois d'audition et qu'il ferait venir ses
témoins. Je l'écoutais parler. Je n'étais pas du tout mal
à l'aise.
M. Bourbeau: Au cours des trois heures qu'a duré
l'entretien...
M. Gauthier (Yves): Au cours des trois heures, et même si
cela avait été quatre heures, je m'excuse, mais je ne vois pas ce
que j'avais à être mal à l'aise à parler à un
ami.
M. Bourbeau: L'amitié mise à part, en ce qui
concerne la cause...
M. Gauthier (Yves): Non, non, pas l'amitié mise à
part. Pour moi l'amitié cela compte. Cela passe pas mal avant bien des
choses et je n'étais pas mal à l'aise. Pour répondre
à la question, je vais arrêter de parler pendant dix minutes. Je
n'étais pas mal à l'aise.
M. Bourbeau: Est-ce que Me Jasmin vous a dit que lui était
mal à l'aise de discuter de la cause avec le conseiller spécial
du premier ministre?
M. Gauthier (Yves): Pas du tout, pas du tout. Pour lui, il jasait
avec un ami, ce n'était pas avec un conseiller spécial.
M. Bourbeau: II jasait de la cause avec un ami à un moment
donné.
M. Gauthier (Yves): Pardon. Il a dit qu'il y aurait neuf mois
d'audition. Je vais le répéter encore. Il a dit qu'il y aurait
neuf mois d'audition. Il a dit qu'il y aurait neuf mois d'audition. Et il a dit
qu'il ferait venir des témoins dont, je m'en souviens, M. Hamel parce
que je pense que c'était son premier témoin. C'était
apparemment qu'il était là dans le saccage. Pas dans le saccage,
mais il était le gérant ou je ne sais quoi. Alors je
n'étais pas mal à l'aise et je n'ai pas l'impression que lui non
plus l'était. Remarquez bien que cela ne me dérangeait pas parce
que, d'après moi, il faut qu'un avocat fasse... S'il a quelqu'un
à aller voir, il va aller le voir pour gagner sa cause. Il me semble
qu'il n'y a rien de mal là-dedans, mais en tout cas... Cela ne me
dérangeait pas.
M. Bourbeau: Surtout au bureau du premier ministre.
M. Gauthier (Yves): Ah! Au bureau du premier ministre ou à
l'hôtel Windsor ou n'importe où, cela ne me dérangeait pas.
Je ne vois pas ce qu'il y a là.
M. Bourbeau: Est-ce que vous...
M. Gauthier (Yves): Surtout que cet entretien s'est
déroulé à l'hôtel, c'est-à-dire au
Méridien.
M. Bourbeau: En partie à votre bureau et en partie
à l'hôtel?
M. Gauthier (Yves): Non.
M. Bourbeau: Alors comment se fait-il
que Me Jasmin ait signé à votre...
M. Gauthier (Yves): Non. Comment se fait-il? Regardez l'heure.
C'est 11 h 45. À cette heure-là, je vais dîner.
M. Bourbeau: Je comprends, mais quand vous sortez est-ce que vos
invités ne doivent pas signer en sortant?
M. Gauthier (Yves): Oui, mais il est revenu.
M. Bourbeau: Alors quand il est sorti il n'a pas
signé?
M. Gauthier (Yves): Non.
M. Bourbeau: Alors il n'a pas signé en sortant?
M. Gauthier (Yves): Non, il n'a pas signé en sortant,
regardez donc celai
M. Bourbeau: Et quand il est rentré après le lunch
il n'a pas signé?
M. Gauthier (Yves): C'est simple, il est revenu.
M. Bourbeau: Et quand il est revenu il n'a pas signé non
plus?
M. Gauthier (Yves): Ah non! Il a signé seulement en
ressortant. Il est venu chercher son "coat". (11 h 45)
M. Bourbeau: Mais si je me présente au bureau du premier
ministre pour aller chercher mon "coat", est-ce qu'il ne me fera pas signer en
entrant?
M. Gauthier (Yves): Non, parce que vous êtes venu avant, on
est pas stupide, on va se dire: Ah, il est venu avant, il s'en retourne,
c'est tout. Il a dit: Je m'en vais chercher mon "coat". Son paletot.
M. Bourbeau: Bon, de toute façon, admettez-vous que M.
Jasmin est allé à votre bureau et qu'il a signé pour
entrer?
M. Gauthier (Yves): Ah bien, c'est bien évident, c'est
là, je ne suis pas pour dire non, voyons donc.
M. Bourbeau: Alors je reprends ma question de tout à
l'heure. Est-ce que l'entrevue a eu lieu en partie à votre bureau et en
partie à l'hôtel Méridien?
M. Gauthier (Yves): Surtout au restaurant en haut du
Méridien.
M. Bourbeau: Avez-vous fait rapport au premier ministre de cet
entretien avec M.
Jasmin?
M. Gauthier (Yves): Non, je n'ai pas fait de rapport à M.
le premier ministre de cet entretien.
M. Bourbeau: Avez-vous fait rapport à Me Jean-Roch Boivin
de cet entretien?
M. Gauthier (Yves): Non, non, non, M. le Président.
M. Bourbeau: Si je me souviens bien, c'est lors de cet entretien
que, enfin, vous me corrigerez si je me trompe, que Me Boivin a aperçu
Me Jasmin dans votre bureau?
M. Gauthier (Yves): Cela, je ne le sais pas quand il l'a
aperçu. C'est peut-être à ce moment-là, je ne le
sais pas, je ne peux pas vous dire quand, M. le Président.
M. Bourbeau: Est-ce que vous ne nous avez pas dit au début
de la séance que c'était le 17 janvier?
M. Lalonde: En janvier.
M. Gauthier (Yves): Non, je n'ai pas dit que c'était cela,
si vous voulez vérifier, prenez le temps...
M. Lalonde: II a dit en janvier.
M. Gauthier (Yves): ...je ne pense pas que cela soit le 17
janvier. Regardez donc, s'il vous plaît! on pourra parler
après.
M. Bourbeau: Vous avez dit au mois de janvier tout à
l'heure.
M. Gauthier (Yves): Oui, mais regardez si c'est le 17 janvier,
s'il vous plaîtl
M. Lalonde: II y en a rien qu'une.
M. Bourbeau: Alors, est-ce qu'il y a eu d'autres rencontres avec
Me Jasmin à votre bureau au mois de janvier 1979?
M. Gauthier (Yves): Non.
M. Bourbeau: Alors il faut que ce soit celle-là.
M. Gauthier (Yves): II l'a peut-être vu, il y a
peut-être quelqu'un qui lui a dit aussi, je ne le sais pas, moi.
M. Bourbeau: Pardon? Je ne comprends pas votre
réponse.
M. Gauthier (Yves): J'ai dit: II a peut-être vu Me Jasmin
ou quelqu'un lui a peut-être dit: Me Jasmin est venu ici. Je ne le
sais pas, parce que, d'après ce que je peux voir, il y est
allé les 15, 16 et 17. Il doit y avoir quelqu'un qui lui a dit: Me
Jasmin vient ici souvent, c'est comme rien.
M. Bourbeau: On trouve cela nous aussi.
M. Gauthier (Yves): On le voit tous, c'est là, c'est bien
évident. Il doit y avoir quelqu'un qui lui a dit, je ne le sais pas, ou
il l'a vu, mais je ne le sais pas.
M. Bourbeau: Qui lui a dit quoi?
M. Gauthier (Yves): Que j'étais venu... Que Me Jasmin
était venu.
M. Bourbeau: Vous nous avez dit hier que Me Jasmin était
dans votre bureau, enfin, c'est ce que j'ai compris, et que M. Boivin est
passé...
M. Gauthier (Yves): Non, non, non, je m'excuse, vous vous
trompez.
Le Président (M. Jolivet): Oui, allez-y,
répétez et on va clarifier.
M. Gauthier (Yves): Non, je ne répète pas. Je veux
qu'il le relise. S'il dit que j'ai dit cela, qu'il me le montre, s'il vous
plaît!
M. Bourbeau: Bon alors...
M. Gauthier (Yves): Qu'on me le dise, qu'on me le cite au
texte.
M. Duhaime: M. le Président.
M. Bourbeau: Est-ce que vous pourriez nous...?
M. Gauthier (Yves): Non, je veux qu'on me le dise.
Le Président (M. Jolivet): Oui, d'accord.
M. Gauthier (Yves): Je ne réponds pas si on ne me le dit
pas là.
Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. Duhaime: M.
le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.
M. Duhaime: Une question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, question de
règlement.
M. Duhaime: Je pense que cet incident qui est en train de se
produire illustre très bien le bien-fondé des objections que j'ai
formulées, depuis cinq ou six semaines maintenant, au sujet du grand
danger, quant aux députés de l'Opposition, de résumer des
témoignages, d'y inclure leurs petits commentaires, leurs petites
interprétations et leurs petites opinions et, ensuite, de poser une
question remplie de suspicion, d'acrobaties douteuses, pour tenter, en faisant
des contorsions au cours d'un interrogatoire, d'obtenir les réponses
qu'ils souhaiteraient. C'est de valeur, M. le Président, mais ce n'est
la faute de personne ici si les réponses qui viennent ne font pas
l'affaire du Parti libéral du Québec, qui se rend compte ce
matin, peut-être plus qu'à un autre moment...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: ...qu'il est en train de faire...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: ...la démonstration qu'il n'a pas une grosse
cause.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Je vous le dis, M. le Président, je pense
qu'on devrait...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: ...être plus serré encore...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, s'il vous
plaît!
M. Duhaime: ...interdire ce genre de question...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Lalonde: Quelle est votre cause? M. Duhaime: Cela n'a pas de
bon sens.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Lalonde: En avez-vous une cause?
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Duhaime: Vous lirez la Presse.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! La seule
chose, c'est que Me Gauthier a demandé, à moins que le
député désire ne
plus poser sa question, de la retirer et poser d'autres questions - je
peux lui permettre d'autres questions - mais Me Gauthier a raison. S'il a dit
des choses que vous avez comprises, montrez-lui, et après il verra s'il
l'a dit ou non, mais, à mon avis, ce n'est pas ce qu'il a dit comme
réponse hier.
M. le député de Laporte, avez-vous l'intention de passer
à d'autres questions?
M. Bourbeau: M. le Président, le témoin nous a
demandé de vérifier la transcription. Si vous voulez, on va la
vérifier, mais, pour ne pas faire perdre le temps de la commission, on
va passer à d'autres questions. Quand on aura trouvé la
transcription, on pourra revenir sur la question. Êtes-vous d'accord?
Le Président (M. Jolivet): Oui, on termine à 12 h
30.
M. Bourbeau: À moins qu'on suspende, puis qu'on
attende.
M. Gauthier (Yves): Pendant qu'il va chercher son texte, je vais
aller ailleurs.
Le Président (M. Jolivet): Oui, donc suspension de
quelques minutes.
(Suspension de la séance à 11 h 50)
(Reprise de la séance à 11 h 53)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Si on veut bien reprendre son siège, nous allons reprendre nos
travaux. S'il vous plaît!
Donc, nous en étions toujours rendus au député de
Laporte qui reformule sa question, fait les vérifications ou bien passe
à autre chose.
M. Bourbeau: M. le Président, le témoin m'a
demandé de vérifier les transcriptions. Je voudrais signaler
que...
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît;
M. Bourbeau: Je voudrais vous référer au ruban
1186, page 1, des transcriptions. La question venait du ministre...
Une voix: De l'honorable ministre.
M. Bourbeau: ...de l'honorable ministre. "M. Duhaime: Dans vos
conversations, soit avec M. Laferrière ou soit avec Me François
Aquin - je reviens à page 1185 - a-t-il été question
spécifiquement du règlement de la poursuite qui avait
été intentée? "M. Gauthier (Yves): Non, M. le
Président. "M. Duhaime: En aucune manière? Je vous demanderais,
Me Gauthier, pour les fins d'enregistrement de vos réponses au journal
des Débats... "M. Gauthier (Yves): De dire oui ou non, oui. "M. Duhaime:
...de nous répondre par oui ou par non. Vous nous répondrez ce
que vous voudrez, mais, si vous parlez par signes, on va avoir de la
difficulté. "M. Gauthier (Yves): D'accord, M. le Président. Non,
je n'ai jamais parlé de règlement. "M. Duhaime: Maintenant, avec
Me Boivin, vous-même, est-ce que vous avez discuté de ce dossier
quant au fond et ensuite est-ce que vous en avez discuté quant à
un moyen de règlement ou encore discuté du règlement comme
tel? "M. Gauthier (Yves): Non, je n'en ai pas parlé à Me Boivin.
Lui, par exemple, à un moment donné, j'ai compris qu'il m'en
parlait. "M. Duhaime: Qu'est-ce que vous voulez dire? "M. Gauthier (Yves): II
m'a demandé si j'étais encore tuteur. Il passait dans le bureau
et j'ai l'impression qu'il avait vu M. Jasmin à mon bureau et il m'a
dit: Es-tu encore tuteur "Ti-Lou"? Connaissant Jean-Roch, je savais ce qu'il
voulait dire. Je n'avais plus d'affaire à me mêler de cela,
même si j'avais voulu."
Tout à l'heure, quand on a parlé de cet
événement, vous avez dit que c'était en janvier. Est-ce
que c'est exact?
M. Gauthier (Yves): J'ai dit que c'était en janvier,
oui.
M. Bourbeau: Bon; Combien avez-vous eu de rencontres avec Me
Jasmin à votre bureau en janvier 1979?
M. Gauthier (Yves): En janvier, j'en ai eu une. J'en avais eu
d'autres avant en novembre et en octobre.
M. Bourbeau: Le 17 janvier, à votre réunion.
M. Gauthier (Yves): C'est cela. M. Bourbeau: C'est exact?
M. Gauthier (Yves): Oui.
M. Bourbeau: Si j'ai bien compris, c'était à votre
bureau. Enfin, c'est ce que je viens de lire. Vous avez dit que Me Jasmin
était à votre bureau.
M. Gauthier (Yves): Oui, mais je pense que vous
interprétez mal ou que vous lisez mal. "Il m'a demandé si
j'étais encore
tuteur. Il passait dans le bureau et j'ai l'impression - je le redis
encore, j'ai l'impression - qu'il avait vu Me Jasmin à mon bureau." Je
ne veux pas dire dans le bureau physique, mais dans le bureau sur
l'étage. Il m'a dit: Es-tu encore tuteur? Si vous me demandez: Vous
a-t-il dit cela le 17? je vous réponds que je ne pense pas.
M. Lalonde: Ah, bon! D'accord.
M. Gauthier (Yves): Puis quand je dis que j'avais l'impression
qu'il l'avait vu dans mon bureau, je ne voulais pas dire que c'était le
17 non plus. Je voudrais bien qu'on se comprenne.
M. Bourbeau: Très bien. Le 19 janvier, c'était un
vendredi et c'était le cinquième jour du procès. Me Jasmin
était allé au bureau de Me Boivin le lundi et le mardi, et il
était allé à votre bureau le mercredi, et le vendredi Me
Jasmin et Me Beaulé se sont tous les deux rendus au bureau du premier
ministre pour rencontrer Me Jean-Roch Boivin. Avez-vous eu connaissance de
cette visite?
M. Gauthier (Yves): Non, M. le Président.
M. Bourbeau: Le 22 janvier, pourquoi M. Luc Cyr s'est-il rendu
à votre bureau?
M. Gauthier (Yves): Je n'en ai aucune idée, M. le
Président.
M. Bourbeau: Est-ce que vous avez rencontré M. Luc Cyr ce
jour-là?
M. Gauthier (Yves): Je...
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant...
M. Gauthier (Yves): Pas d'après moi.
Le Président (M. Jolivet): Je ne permettrai pas ces
questions-là.
M. Gauthier (Yves): Je n'en ai aucune idée.
Le Président (M. Jolivet): Je ne permettrai pas ces
questions-là.
M. Lalonde: Pourquoi?
M. Paradis: Ce sont des réparations majeures.
Le Président (M. Jolivet): Non, il y a des
décisions qui ont été prises à un autre niveau
qu'à la présidence et je ne permettrai pas ces
questions-là.
M. Lalonde: Pour quelle raison, M. le Président? M. le
Président, une question de règlement. Est-ce qu'on pourrait
savoir - j'en fais une demande de directive - dans quelle mesure on peut se
référer à des visites, soit de M. Luc Cyr ou de quelqu'un
d'autre, si la question suivante est pour savoir s'il a été
question de la cause?
Le Président (M. Jolivet): Non, je ne permettrai pas des
questions sur des personnes qui ne seront pas invitées devant cette
commission. Les décisions que je rends, c'est en vertu du mandat. Si
vous avez des questions à poser sur la Baie-James au niveau du mandat
que nous avons, posez-les. Je ne permettrai pas qu'on aille à la
pêche.
M. Lalonde: M. le Président, on n'a pas l'intention
d'aller à la pêche. On a parlé de M. Bachand, de M. Woll,
de M. Fanning, de M. Turner, qui ne seront pas invités, d'après
ce que je comprends, devant cette commission. Il a été question
de Me Gadbois à combien de reprises avant qu'il soit invité. En
fin de compte, il a été invité. Il a même
été question de M. Latouche. Le témoin actuel a
raconté d'ailleurs, je pense, dans ses notes préliminaires, la
rencontre avec M. Yvan Latouche que le ministre refuse d'inviter à cette
commission.
J'ai de la difficulté à comprendre qu'on ne puisse poser
des questions qu'à propos des personnes que le ministre, dans sa
discrétion, peut décider d'inviter.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, sur la question de
règlement. Je n'aurais pas d'objection à ce que les
députés de l'Opposition posent des questions dans la mesure
où on n'ouvre pas un second dossier ou un troisième dossier.
C'était le truc de Maurice Duplessis, ce que vous essayez de faire. J'ai
l'impression qu'on recule nos montres d'une bonne trentaine
d'années.
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Lalonde: Si le ministre veut absolument lire
l'éditorial...
M. Duhaime: Est-ce que je peux faire ma question de
règlement?
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Lalonde: ...qu'il a tenté de lire hier...
Le Président (M. Joli vet): Non, non, je n'ai pas
l'impression...
M. Lalonde: ...j'en ai quelques-uns à lui lire...
Le Président (M. Jolivet): D'ailleurs, c'est M. le
ministre qui a la parole.
M- Lalonde: On va s'échanger cela.
M. Duhaime: M. le Président, je tiens pour acquis -
peut-être que je me tromperai - que le Parti libéral du
Québec a réussi à mettre la main sur la liste des
rendez-vous de tout le personnel politique au bureau du premier ministre du
Québec. On saura peut-être un jour comment ils l'ont obtenue.
M. Lalonde: M. le Président...
M. Duhaime: Et je m'opposerai très fermement...
M. Lalonde: ...question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, question de
règlement de la part du député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Duhaime: II y a des sourires qui en disent long.
M. Lalonde: Le ministre peut avoir des sautes d'humeur tant qu'il
voudra...
M. Duhaime: Ce n'est pas une saute d'humeur.
M. Lalonde: On est habitué; en fait, on les met à
la banque, ses sautes d'humeur, on les compte. On vous révélera
combien il y en a eu à la fin, M. le Président. On fera un
tirage. Cela ne lui permet pas de faire des accusations contre le Parti
libéral ou contre quiconque a mis la main sur... C'est comme si on
était allé voler quelque chose.
M. Duhaime: Ah'. Je n'ai jamais dit cela.
M. Lalonde: Cela donne à penser à toutes sortes de
gestes dérogatoires. Je pense que le ministre, s'il a une accusation
à faire, qu'il la fasse en Chambre et qu'il mette son siège en
jeu.
M. Duhaime: Ah mon Dieu! C'est une belle invitation.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, mais en vous
disant qu'il ne faudrait pas que cela dure longtemps.
M. Duhaime: J'avoue, M. le Président, que c'est tentant.
Pour rassurer le Parti libéral, puisque dans la presse on a parlé
d'Hercule, je vous dirai que je n'ai jamais eu la moindre intention d'associer
les parlementaires à ma gauche à la bande de Cacus. En
conséquence, je dis que le Parti libéral a probablement mis la
main sur la liste des rendez-vous. Peut-être que je me trompe, on n'a
qu'à me le dire, mais...
M. Lalonde: M. le Président, là encore, c'est
dérogatoire.
M. Duhaime: On dit: Le 22 janvier, est-ce que M. Luc Cyr
était au...
M. Lalonde: On a une liste qui nous a été fournie
par le premier ministre.
M. Duhaime: Pourquoi pas le 23?
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Lalonde: La liste que nous avons et qui nous sert ici, c'est
la liste qui a été fournie par le premier ministre.
M. Duhaime: Comment quelqu'un peut-il nous inventer que le 22
janvier, un dénommé Luc Cyr serait allé au bureau du
premier ministre? Pourquoi pas le 23 ou le 24 ou le 25, ou le 6
décembre?
M. Lalonde: Est-ce que le ministre admet que c'est dans le
registre?
Le Président (M. Jolivet): Je pense que, d'une
façon ou d'une autre...
M. Duhaime: Je n'admets rien: je ne l'ai jamais vu.
Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une
autre...
M. Lalonde: Bien, à ce moment-là, allez
vérifier.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Duhaime: Vous êtes mieux informés qu'on ne
l'est.
Le Président (M. Jolivet): Je pense que cette partie
constitue un incident qu'il faudrait oublier rapidement. La seule chose que je
dis, quand on parle de personnes qui se trouvent dans les cabinets de ministre
qui ont participé à des rencontres, c'est qu'il est tout à
fait normal que l'on ait des questions. Quand on parle de Me Gadbois, qui
représentait la Société d'énergie de la Baie James,
soit comme secrétaire ou à d'autres niveaux, c'est normal qu'on
ait des questions. Il a participé à l'ensemble des
décisions qui
ont été prises. Quand on parle de rencontres qu'il y a eu,
qu'on parle de M. Bachand ou qu'on parle de M. Filion ce matin, qui sont des
membres du cabinet du ministre Pierre-Marc Johnson, c'est tout à fait
normal. Mais qu'on vienne poser des questions sur des personnes qui s'appellent
- comme actuellement - Luc Cyr et qui ne sont dans aucune des listes qui ont
été déposées, à moins qu'on ne pose une
question et qu'on ne la pose comme il faut... Mais la question qui est
posée est une question de pêche. Je ne l'accepterai pas.
M. Bourbeau: Comment peut-on savoir que M. Luc Cyr n'a rien eu
à voir avec le dossier, à moins de pouvoir poser la question?
Le Président (M. Jolivet): C'était de la
pêche, de la façon que vous l'avez posée.
M. Lalonde: II demande si, à telle date, M. Luc Cyr est
allé à son bureau. La deuxième question est, j'imagine:
Est-ce qu'il a été question du...
M. Bourbeau: Si j'avais pu la lui poser, oui...
M. Lalonde: ...saccage de la Baie-James? On verra sa
réponse.
M. Duhaime: C'est cela, allez-y. Le Président (M.
Jolivet): Allez.
M. Bourbeau: II faut quand même poser les questions avant
de savoir les réponses. En ce qui concerne les travaux d'Hercule du
ministre...
M. Duhaime: Cela confirmera que vous allez à la
pêche...
Le Président (M. Jolivet): Allez, allez. Laissez tomber
les autres paroles.
M. Bourbeau: ...je dirai au ministre qu'on...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, M.
le député, je ne vous le permets pas.
M. Bourbeau: ...est en train de nettoyer une écurie
d'Augias...
Le Président (M. Jolivet): Allez aux questions, M. le
député.
M. Duhaime: De qui? M. Bourbeau: Pardon? Le
Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Duhaime: Mes écuries sont propres, vous apprendrez
cela.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît. Je vous
rappelle que vous ouvrez une discussion dont je ne veux pas.
M. Lalonde: C'est le ministre qui l'a ouverte.
Le Président (M. Jolivet): Non, non. S'il vous
plaît! Le ministre a utilisé un droit. Mais, vous, c'était
un droit de parole pour une question. Si vous aviez soulevé une question
de règlement, je vous aurais répondu autrement. Je vous ai
donné le droit de poser des questions et de ne pas faire de commentaire
pour le moment.
M. Bourbeau: M. le Président, vous admettez que le
ministre a dit tantôt...
Le Président (M. Jolivet): Non, je m'excuse. Le ministre a
dit des choses dans une question de règlement. Je l'ai
arrêté en cours de route pour permettre au député de
Marguerite-Bourgeoys de poser la sienne. Mais je ne vous permettrai pas de
faire des commentaires. Je l'ai refusé au député de
Gatineau. Je vais vous refuser aussi, en vous disant, si vous avez des
commentaires, de les faire. Faites-les...
M. Bourbeau: Je vais les faire, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): ...mais pas... Non, non. Posez
vos questions. Si vous voulez faire des commentaires, vous les ferez et vous me
direz: Je n'ai plus de question à poser, j'ai des commentaires à
faire. Et je vous le permettrai.
M. Tremblay: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Chambly.
M. Tremblay: II me semble que cela fait plus de deux fois que
vous rappelez à l'ordre le député de...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Ce n'est
pas sur la même question.
M. le député de Laporte, allez. Les questions, s'il vous
plaîtl
M. Bourbeau: M. Gauthier, est-ce que vous avez...
M. Lalonde: Merveilleux! Félicitations!
M. Bourbeau: ...rencontré M. Luc Cyr, au bureau du premier
ministre, le 22 janvier 1979?
M. Gauthier (Yves): Non, M. le Président, pas à mon
souvenir.
M. Bourbeau: Est-ce que vous l'avez rencontré à
votre bureau à vous?
M. Gauthier (Yves): Peut-être une fois.
Le Président (M. Jolivet): II vient de dire non.
M. Jutras: M. le Président.
M. Bourbeau: Un instant, un instant.
Une voix: II a dit peut-être.
M. Bourbeau: Voulez-vous laisser répondre le
témoin, s'il vous plaît?
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
député. Me Jutras.
M. Jutras: Je fais une objection au nom du témoin, pour la
raison suivante. Avant de lui demander s'il a eu des rencontres avec M. Cyr, il
faudrait peut-être établir s'il y a une pertinence quelconque
relativement au mandat. Vous pouvez permettre, si l'honorable
député continue ainsi, 25 ou 30 questions et, à la 31e
question, on va apprendre que cela n'a aucun rapport. Alors, commencez donc par
savoir s'il y a un rapport et ensuite vous aurez à décider si les
questions sont permises.
Le Président (M. Jolivet): C'est exactement ce que je
cherchais à faire, Me Jutras, au début. Ce que je veux savoir,
c'est que, s'il n'y a aucun rapport, pourquoi poser des questions? Je n'en ai
aucune assurance. Allez, posez la question.
M. Bourbeau: Est-ce que je pourrais vous suggérer, M. le
Président, que je dois d'abord savoir s'il l'a rencontré avant de
savoir s'il a été question de la cause?
Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas si sûr que
cela, M. le député.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député
de Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne sais pas si je pourrais
faire une suggestion à mon collègue de Laporte.
M. Duhaime: Tu n'as qu'à t'en aller, tu vas reposer tout
le monde!
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
député de Jonquière. M. le député de
Jonquière, s'il vous plaît!
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, pour
répondre à l'objection très bien fondée de Me
Jutras, la question pourrait être la suivante: Est-ce que vous avez
déjà parlé avec M. Luc Cyr du saccage de la Baie-James, de
la poursuite de la Baie-James?
Le Président (M. Jolivet): Et, après cela, on
pourra poursuivre.
M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que je peux avoir le
choix de la façon de poser mes questions moi-même?
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est une suggestion. Elle
est certainement recevable.
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant. Justement,
justement. Moi, ce que je veux - quand on me parle de Me Gadbois, qu'on me
parle de rencontres avec le ministre Pierre-Marc Johnson - c'est qu'on
m'apporte ici des questions qui ont eu trait à ce qui a
été dit ici, à cette commission; jamais je ne refuserai.
Ce que je veux savoir... Je suis d'accord avec Me Jutras, c'était le
début de mon objection: on pourrait poser 40 ou 50 questions, faire
perdre le temps de cette commision et je n'ai pas l'intention de le faire
perdre. Malheureusement, on est train de le perdre en termes de question de
règlement. Votre question, c'est d'abord d'établir s'il y a eu un
fait avec le mandat que nous avons et, après cela, vous poserez les
questions que vous voudrez. Mais, ne commencez pas à l'inverse.
M. Ciaccia: M. le Président, question de directive.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député
de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Est-ce que cela veut dire qu'il faut qu'on sache la
réponse avant de poser la question?
M. Duhaime: Non.
Le Président (M. Jolivet): Non, M. le
député, ce n'est pas ce que je veux dire. J'ai besoin de savoir,
comme président, s'il y a pertinence ou non. Et je n'ai pas la moindre
ombre d'un début de queue - comme on dit souvent - de cette question. Je
veux savoir s'il y a actuellement, avec le mandat que nous avons, une
pertinence. S'il n'y en a pas, je ne permettrai aucune question. C'est
clair?
M. Ciaccia: Oui, M. le Président.
M. Lalonde: Le problème, M. le Président, c'est que
le témoin lui-même, M. Gauthier, dans sa déclaration, a
fait état d'une rencontre avec M. Yvan Latouche pour une cause
totalement différente, d'après ce que nous savons du
témoignage de Daniel Latouche et ensuite de Me Gauthier. Alors, si on
permet au témoin - que ce soit Me Gauthier ou un autre - de faire
état de rencontres qui n'ont rien à voir avec le mandat de la
commission - vous n'avez pas interrompu, à ce moment-là, Me
Gauthier -comment ne pourrait-on pas, nous, poser des questions sur d'autres
rencontres de Me Gauthier avec d'autres personnes, comme, par exemple, la
question concernant M. Luc Cyr? Et, ensuite, on verra la pertinence, s'il y en
a une.
Le Président (M. Jolivet): Je vais répondre. Non,
non, ce n'est pas comme cela qu'on va éclairer l'ensemble de la
commission sur un mandat que j'ai à faire respecter. Ce que je dis... Et
je vais répondre à la question puisqu'il en a été
longuement question devant cette commission, de choses qui ont
été dites et Me Gauthier était directement visé.
C'était son droit d'y répondre. Et je pense que je ne l'ai pas
interrompu et que je ne l'aurais pas interrompu, mais la façon dont les
questions sont posées actuellement n'a aucune pertinence. Je ne les
permettrai pas si on ne me dit pas d'abord qu'il y a pertinence. Après,
je verrai. Je vais commencer par régler un problème, celui de la
pertinence, et on verra ensuite pour les questions.
M. Bourbeau: Qui doit vous dire que c'est pertinent ou non?
M. Lalonde: Le témoin.
Le Président (M. Jolivet): Non, pas nécessairement
le témoin comme tel; quant à vos questions...
Des voix: Moi? Moi?
Le Président (M. Jolivet): Posez la question et on verra.
Pour le moment, je dois vous dire que la façon dont vous avez
commencé ne m'indique en aucune manière s'il y a pertinence ou
pas.
M. Bourbeau: M. le Président, moi, je pense que c'est
pertinent.
Le Président (M. Jolivet): Ah! C'est votre droit de le
croire, mais moi, comme président, j'ai à faire respecter la
pertinence du débat. Posez une question, comme on vous l'a un peu
mentionné tout à l'heure, d'après une suggestion de
question, et on verra ensuite.
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai une question qui n'est
pas suggestive et je vais la reposer. Si elle n'est pas recevable, vous me le
direz, M. le Président, mais je me dois de la poser. M. Gauthier, est-ce
que M. Luc Cyr vous a rendu visite le 22 janvier 1979, au bureau du premier
ministre?
M. Jutras: C'est la même question que celle de
tantôt; je renouvelle l'objection. C'est une question de pêche
parce qu'on n'établit d'aucune façon en quoi cela a un rapport
avec le mandat de votre commission.
M. Bourbeau: La question suivante, M. le Président, va
préciser...
Une voix: Faites-la en même temps.
M. Bourbeau: Mais il faut qu'il réponde avant. Si je peux
avoir l'occasion de poser la deuxième...
Le Président (M. Jolivet): Non, c'est justement le
problème que j'ai. Vous demanderiez: X, Y ou Z a-t-il eu une rencontre
avec vous? je ne pourrais pas plus le permettre. Je sais que vous avez le droit
de poser des questions. Mais je sais aussi...
M. Paradis: Posez les deux en même temps.
Le Président (M. Jolivet): ...que j'ai le droit de faire
respecter le mandat. Je dois vous dire que, actuellement, je ne vois pas en
quoi il y a pertinence. Je ne peux pas les permettre.
M. Bourbeau: M. le Président, je vais reprendre ma
question. J'espère, cette fois-ci, qu'elle va être recevable.
Le Président (M. Jolivet): On verra.
M. Bourbeau: M. Gauthier, est-ce que M. Luc Cyr vous a rendu
visite, le 22 janvier 1979, au bureau du premier ministre, afin de discuter du
dossier de M. Yvan Latouche?
M. Jutras: M. le Président, permettez que je fasse une
objection parce que la question est double.
Le Président (M. Jolivet): Non, non, laissez faire. Vous
n'avez même pas besoin de faire une objection, je n'accepte pas la
question. Allez...
M. Duhaime: Yvan Latouche, c'est votre
bénévole?
M. Bourbeau: C'est lui-même qui en a parlé, M. le
Président...
Le Président (M. Jolivet): Non.
M. Paradis: Le premier ministre en a parlé.
Le Président (M. Jolivet): Non. S'il vous plaît!
Vous pourrez poser ces questions où vous voudrez, mais pas à
cette commission. M. le député de Laporte.
M. Bourbeau: M. Gauthier, est-ce que M. Luc Cyr vous a rendu
visite, le 22 janvier 1979, afin de vous montrer une...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
vais...
M. Bourbeau: ...procédure contre M. Robert Boyd?
M. Duhaime: À l'ordre! À l'ordre!
Le Président (M. Jolivet): M. le député!
M. Bourbeau: ...contre M. Robert Boyd, M. le
Président?
Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas une question
recevable.
Une voix: ...contre la SEBJ? M. Lalonde: On ne le saura
pas.
Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas avoir
l'obligation d'utiliser un certain article du règlement qui m'obligerait
à vous dire d'arrêter de parler. M. le député, si
vous ne...
M. Bourbeau: Parlez-vous de l'article 68, M. le
Président?
Le Président (M. Jolivet): Non, M. le
député. L'article 68 s'adresse à moi. Il y en a d'autres,
qui sont les articles 40 et suivants.
M. Lalonde: Ah bon! Parce qu'on nous a menacés avec
l'article 68, hier.
Le Président (M. Jolivet): Non, non. Ce n'est pas ce qu'on
a dit. On a dit: Si vous voulez l'utiliser, utilisez-le. Mais ce que je veux
dire, c'est que moi, en vertu du règlement, je peux vous dire, que si
vous n'obtempérez pas à mes demandes sur la pertinence, comme
président, je devrai faire cesser vos questions.
M. Bourbeau: M. le Président, je me soumets à votre
décision, sauf que je vous ferai remarquer que je n'ai pas...
Le Président (M. Jolivet): Si vous vous soumettez, au
moins, ne prenez pas la mauvaise habitude de me contester.
M. Bourbeau: Non. Mais, M. le Président, je n'ai pas
posé deux fois la même question. J'ai tenté de poser des
questions qui étaient recevables et je vous ai demandé chaque
fois si elles l'étaient.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, ce
n'est pas cela, mais...
M. Bourbeau: Alors, je me suis soumis à votre
décision.
Le Président (M. Jolivet): ...de la façon dont vous
recommenciez... Non, laissez faire, je vais le régler moi-même.
Non, non, je ne veux pas de questions sur ce sujet-là.
M. Paradis: Question de directive, M. le Président.
Le Président (M. JoUvet): Allez, M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: On est ici pour faire toute la lumière...
Le Président (M. Jolivet): Oui, monsieur.
M. Paradis: ...à la suite d'accusations qui ont
été portées par le journal La Presse.
Le Président (M. Jolivet): Oui, monsieur.
M. Paradis: Le jeudi 17 mars 1983, sous le titre "Saccage de la
Baie-James: règlement hors cour. René Lévesque a
trompé l'Assemblée nationale. Jean-Roch Boivin a
négocié avec les avocats." On retrouve, à la
troisième colonne de l'article, ce qui suit, et cela vient de cette
accusation et c'est directement relié à la cause devant nous: "Le
bureau du premier ministre a même fourni des armes à la FTQ - je
cite le journal - pour l'aider à régler son litige contre la
SEBJ. C'est ainsi, par exemple, que, le 16 février 1979, le notaire
Gauthier avait invité Me Jasmin, de la FTQ-Construction, à
assister à une rencontre au cours de laquelle M. Yvan Latouche leur a
présenté un dossier, concernant une faute professionnelle, contre
le P.-D.G d'Hydro-Québec et un des principaux administrateurs de la
SEBJ, Robert A. Boyd. Ce dernier s'était toujours opposé avec
véhémence à tout règlement hors cour. Le notaire
Gauthier a lui-même fait deux copies de ce dossier, une pour le bureau du
premier ministre et une autre pour l'avocat Jasmin."
Le lendemain, dans la Presse...
Le Président (M. JoUvet): M. le député, je
vais juste vous arrêter un instant.
M. Lalonde: II ne peut pas faire seulement une moitié.
(12 h 15)
Le Président (M. Jolivet): Non, non. Ce n'est pas une
question de moitié, il y a aussi une question de jugement. Ici, comme
président, j'ai à faire respecter un mandat. Il n'y a personne
autre que moi qui va dire, à moins qu'il n'y ait des motions à
cette commission qui m'obligent à faire un tel geste, que ce soit un
journaliste, un journal, ou des individus, comment j'ai à mener cette
commission parlementaire sur le mandat de la Baie-James.
M. Paradis: Non, c'est juste pour établir le rapport.
Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas parce qu'il y a eu
des articles de journaux que j'ai l'obligation de passer outre à mon
mandat.
Allez.
M. Paradis: M. le Président, c'est sur la pertinence. Ce
qui nous intéresse présentement, c'est de savoir si la question
du député, même si elle est recevable dans sa forme, est
pertinente. C'est ce que vous avez dit, vous vous posez de sérieuses
questions quant à sa pertinence. J'essaie, en ce qui concerne la
question de règlement, de vous démontrer que c'est pertinent avec
le mandat de la commission.
Dans la Presse du lendemain, 18 mars 1983, le premier ministre
René Lévesque...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Brome-Missisquoi, j'ai rendu une décision et je la maintiens. Je ne veux
plus de questions sur cette partie.
Le député de Laporte a des questions, qu'il les pose.
M. Ciaccia: Juste une directive, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Non pas sur la même
question, j'espère.
M. Ciaccia: C'est une question de directive.
Le Président (M. Jolivet): Si vous avez l'intention de
remettre en cause ma façon de procéder...
M. Ciaccia: Je ne veux pas la mettre en cause, je voudrais la
réponse.
Le Président (M. Jolivet): D'accord, allez. Je vais
écouter d'abord.
M. Ciaccia: Je voudrais savoir pourquoi le fait qu'un ami du
premier ministre, M. Luc Cyr, je pense que tout le monde connaît
ceci...
Le Président (M. Jolivet): Allez, M. le
député.
M. Ciaccia: ...qui va le voir à son bureau et qui apporte
certains documents, ce ne serait pas dans le mandat du rôle du premier
ministre quand on veut essayer de faire sortir ce que M. Luc Cyr a fait.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
voudrais bien être clair. Ce n'est pas de savoir s'il y a eu des gestes
en dehors du mandat qui m'inquiète, c'est à l'intérieur du
mandat; c'est mon travail. La seule chose que j'ai de la difficulté
à comprendre c'est pour cela que je refuserai toute question c'est la
façon dont on a commencé les questions pour en arriver à
des choses, comme on en a fait mention comme objection, qui sont, à mon
avis, de la pêche purement et simplement. Je ne l'accepterai pas. Est-ce
clair?
M. le député de Laporte sur vos questions.
Une voix: Le premier ministre...
M. Bourbeau: Me Gauthier, le ou vers le 26 janvier 1979, vous
avez reçu un appel téléphonique de Me François
Aquin, un des procureurs de la SEBJ, lequel vous a parlé des visites de
ses adversaires, les avocats Jasmin et Beaulé, au bureau du premier
ministre. En quels termes Me Aquin s'est-il exprimé?
M. Gauthier (Yves): II m'a dit: J'ai entendu dire que Rosaire
Beaulé était allé au bureau du premier ministre. Est-ce
que c'est vrai? Je veux le vérifier parce qu'on a une cause avec eux, tu
le sais. Je lui ai dit: Je vais aller le voir et je t'en parlerai. Dans le
fond... Je l'ai dit et je vais le relire au cas où cela aurait
échappé à quelques-uns. Me Aquin m'a
téléphoné pour vérifier si les avocats des
syndicats étaient venus au bureau du premier ministre. C'était
à peu près dans ces termes: Est-ce que les gars vont au bureau du
premier ministre?
Je lui ai dit que je passerais chez lui le soir avec mon épouse.
Cela me donnait l'occasion d'aller voir son Riopelle. C'est un peintre, M.
Riopelle.
M. Bourbeau: On est assez au courant, oui.
M. Gauthier (Yves): Non, mais c'est parce que je pensais qu'il y
en avait qui ne le savaient pas. Je lui ai confirmé que Me Jasmin
était venu me voir, que je pensais que M. Rosaire Beaulé
était venu voir M. Jean-Roch Boivin et que, d'après ce que me
disait Me Jasmin, il pourrait y avoir un
règlement. J'ai aussi ajouté que, d'après moi... Je
ne me souviens pas, d'avoir dit à Me Aquin que le conseil de la SEBJ
était divisé parce que, connaissant Me Aquin qui était
leur avocat, il était bien plus en mesure de le savoir que moi.
M. Bourbeau: Pourquoi Me Aquin s'est-il adressé à
vous?
M. Gauthier (Yves): Je pense qu'il vous a dit - je l'ai lu dans
la transcription - que c'est parce que je le connais depuis trente ans et il
dit que c'est une démarche privée qu'il a faite, mais je suppose
qu'il a fait comme Me Jasmin. Il s'est dit: Si j'ai peut-être une chance
de lui arracher quelque chose, je vais le lui demander. Ce doit être son
raisonnement, sinon il ne m'aurait pas appelé. Je dois dire que je
connais Me Aquin depuis longtemps. C'est un avocat dont je me suis
déjà servi.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il vous a dit pourquoi il était si
préoccupé de cela?
M. Gauthier (Yves): Non, il ne me l'a pas dit.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il vous a expliqué en quoi cela le
dérangeait?
M. Gauthier (Yves): Non, il ne me l'a pas dit.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il vous aurait dit qu'il se sentait
déstabilisé d'apprendre que ses adversaires allaient au bureau du
premier ministre?
M. Gauthier (Yves): Non, il ne me l'a pas dit. Je ne suis pas
resté tellement longtemps non plus.
M. Bourbeau: Alors, vous avez dit qu'à la suite de ces
appels téléphoniques, vous êtes passé chez lui.
M. Gauthier (Yves): Oui.
M. Bourbeau: Est-ce que vous pourriez nous raconter comment cela
s'est fait?
M. Gauthier (Yves): Bien, comment cela s'est fait? J'ai pris mon
auto, je suis allé chercher mon épouse; on est allés chez
lui à Mont-Royal. C'est tout. Je suis allé voir son Riopelle.
M. Bourbeau: Mais le but de la visite n'était pas de voir
le Riopelle, si j'ai bien compris?
M. Gauthier (Yves): Vous avez mal compris, justement. Parce que
pour moi, l'affaire d'Aquin... Il m'appelait et c'est moi dans le fond qui ai
sauté sur l'occasion d'aller le voir parce qu'il m'avait parlé de
son Riopelle et je suis amateur de peintures. Je me suis dit: Je vais aller
voir son Riopelle. Ce n'est pas plus compliqué que cela parce que je ne
suis pas resté là longtemps.
M. Bourbeau: Quand vous étiez chez lui, combien de temps a
duré votre rencontre?
M. Gauthier (Yves): Pas tellement longtemps. Je ne peux pas vous
dire combien de temps, mais cela n'a pas été long. D'abord, on
n'a pas mangé et on n'a rien pris. Alors, je n'ai pas dû rester
tard. Non, je ne peux m'en souvenir exactement. Je n'ai pas dû rester
longtemps, mon épouse était fatiguée. Elle
commençait à ne pas se sentir bien.
M. Bourbeau: En plus d'admirer son tableau, est-ce que vous avez
parlé de la cause?
M. Gauthier (Yves): Presque pas. On a parlé de... Il m'a
demandé si Me Beaulé ou si Me Jasmin était allé au
bureau. Je lui ai dit: Me Jasmin vient me voir et j'ai l'impression que Rosaire
va voir Jean-Roch, mais on ne s'est pas éternisé
là-dessus.
M. Bourbeau: Quand vous lui avez dit que Rosaire allait voir
Jean-Roch et que Jasmin allait vous voir, est-ce que vous lui avez fait part du
contenu de ces rencontres?
M. Gauthier (Yves): Non. Non. D'abord, je ne savais pas ce que
Jean-Roch disait avec Rosaire Beaulé.
M. Bourbeau: Est-ce que Me Aquin vous a dit que des
négociations étaient entamées en vue d'un
règlement?
M. Gauthier (Yves): Je ne me souviens pas, non. S'il y a
quelqu'un qui m'a parlé de négociations, c'est plutôt Me
Jasmin.
M. Bourbeau: À quel moment?
M. Gauthier (Yves): Après le 17 janvier, je suppose, parce
que la cause était commencée dans ce temps-là. Je suppose
bien que les deux côtés ont vu que cela serait long, mais je ne
peux pas vous le dire.
M. Bourbeau: A-t-il été question du retrait de la
poursuite?
M. Gauthier (Yves): Jamais, M. le Président.
M. Bourbeau: Pouvez-vous nous dire exactement combien de temps la
rencontre a duré à la résidence?
M. Gauthier (Yves): Non, je ne peux pas vous le dire exactement.
Je ne suis pas resté longtemps, cela je le sais, parce que ma femme ne
"filait" pas.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, c'est la
deuxième fois que la question est posée.
M. Gauthier (Yves): Cela ne me fait rien.
Le Président (M. Jolivet): C'est la même
réponse.
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai des précisions
additionnelles cette fois-ci, sur ce qu'il vient de dire.
Le Président (M. Jolivet): Non, non, c'est la même
réponse.
M. Bourbeau: Non, ce n'est pas la même réponse.
M. Duhaime: Si vous parlez de Mme Gauthier, jamais je ne croirai
que vous allez me dire que c'est pertinent.
Le Président (M. Jolivet): C'est la même
réponse.
M. le député de Laporte.
M. Duhaime: Veuillez respecter le monde un peu. C'est
écrit dans le Droit: vous devriez retrouver votre dignité, si
vous l'avez lu.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
ministre.
M. Duhaime: ...parlementaire.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Bourbeau: En tant qu'avocat plaidant la cause de la SEBJ,
quelle a été la réaction de Me Aquin quand vous lui avez
dit qu'effectivement ses adversaires allaient au bureau du premier
ministre?
M. Gauthier (Yves): II n'en a pas eu. Me Aquin n'est pas un gars
qui se manifeste beaucoup. Il a dit: Oui? D'accord.
M. Bourbeau: A-t-il été déçu?
M. Gauthier (Yves): Je ne pense pas. Me Aquin est un gars qui
cache bien son jeu, vous savez.
M. Bourbeau: Pardon?
M. Gauthier (Yves): J'espère qu'il ne m'écoute pas.
J'ai dit que c'était un gars qui cachait bien son jeu. C'est un bon
avocat, mais il ne dit pas ce qui peut le mettre dans le "trouble". Il ne m'a
rien répondu. Il m'a dit: Oui? Ah! Cela finit là.
M. Bourbeau: Vous a-t-il fait part de sa surprise de constater
que ses adversaires allaient dans le bureau de sa cliente?
M. Gauthier (Yves): Non, je ne pense pas.
M. Bourbeau: Me Aquin a-t-il fait d'autres commentaires sur le
sujet?
M. Gauthier (Yves): Je ne m'en souviens pas, M. le
Président. Que voulez-vous que je vous dise? J'ai l'impression qu'il
avait peut-être une idée contraire à la mienne. Je disais
que la cause n'était pas très bonne, mais on n'a pas
commenté sur cela, M. le député.
M. Bourbeau: Avez-vous eu connaissance de la rencontre du 1er
février 1979 entre le premier ministre du Québec, M. René
Lévesque, et MM. Robert Boyd, Claude Laliberté et Lucien
Saulnier?
M. Gauthier (Yves): Si vous permettez, M. le Président, je
vais relire ce que j'ai dit. Je pourrai commenter, si M. le
député le veut. Je n'ai pas eu connaissance de la visite des
membres du conseil d'administration ou des avocats de la SEBJ au bureau du
premier ministre. Comme je l'ai dit hier - cela doit être dans la
transcription - j'ai toujours eu l'impression que cette affaire s'était
passée le 1er janvier et j'en ai entendu parler bien longtemps
après. Ici, on a dit que cela s'était passé le 1er ou le 2
février. Je n'étais pas au courant de cela.
M. Bourbeau: À quel moment avez-vous appris que cette
réunion avait eu lieu?
M. Gauthier (Yves): Je pense que je l'ai appris au mois de mars.
L'affaire était finie, je crois.
M. Bourbeau: Mars de quelle année? M. Gauthier (Yves):
1979.
M. Bourbeau: Qui vous a mis au courant?
M. Gauthier (Yves): Je ne le sais pas, mais je l'ai appris.
M. Bourbeau: Le lendemain de la réunion, le 2
février 1979, Me Michel Jasmin, l'avocat de votre ancien syndicat, se
rendait au bureau du premier ministre pour rencontrer Me Jean-Roch Boivin.
Avez-vous
eu connaissance de cette visite?
M. Gauthier (Yves): Non, M. le Président. Je n'ai pas eu
connaissance de cette visite. Je pense que Boivin... Non, je ne suis pas au
courant.
M. Bourbeau: En fait, cela s'est passé au bureau de Me
Boivin, tout près du vôtre?
M. Gauthier (Yves): Oui. Je peux vous faire un diagramme de
l'appartement. J'occupe le bureau de M. Lalonde, maintenant. Il est au courant
de la disposition. Quand quelqu'un passe dans le corridor, tu ne le vois
pas.
M. Lalonde: Je ne pense pas que cela puisse éclairer les
membres de la commission, d'autant plus que je me souviens d'avoir
occupé deux bureaux différents à des époques
différentes.
M. Gauthier (Yves): Oui. Il y a encore des "pitons" dans votre
bureau, pour votre information.
Une voix: Des quoi? Une voix:Des "pitons".
M. Gauthier (Yves): Des "pitons" pour avertir un autre bureau. En
tout cas, ce n'est pas grave! Il sait ce que je veux dire. Lui, quand il
sortait de son bureau, il n'arrivait pas tout de suite dans le corridor, il y
avait le bureau des secrétaires.
M. Lalonde: En tout cas, écoutez, M. le Président,
j'aimerais bien que le témoin parle de ce qu'il connaît.
Une voix: Les "pitons"!
M. Lalonde: J'ai encore un vague souvenir du diagramme. La
question des "pitons", j'avoue que ....
M. Gauthier (Yves): J'ai découvert cela par hasard, ne
vous en faites pas.
M. Duhaime: Qu'est-ce que vous faisiez dans ce
bureau-là?
Une voix: Si vous voulez le savoir...
Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas pertinent au
mandat.
M. Gauthier (Yves): Ne parlons pas de cela.
Le Président (M. Jolivet): Compte tenu...
M. Gauthier (Yves): Ne parlons pas de cela.
Le Président (M. Jolivet): Compte tenu...
M. Lalonde: Je ne rencontrais pas...
Le Président (M. Jolivet): Compte tenu de l'heure...
M. Lalonde: ...les avocats adversaires du gouvernement.
Le Président (M. Jolivet): D'accord. Compte tenu de
l'heure, je vais suspendre les travaux, comme on le dit normalement,
jusqu'après le discours prononcé à l'Assemblée
nationale par le représentant officiel de l'Opposition, le
député de Vau-dreuil-Soulanges, sur le discours sur le budget.
Nous reviendrons probablement vers 16 h 30 ou 17 heures pour reprendre nos
travaux de la journée.
(Fin de la séance à 12 h 29)