(Onze heures quarante-deux minutes)
La Présidente (Mme Guillemette) :
Bonne fin d'avant-midi. Donc, votre attention, s'il vous plaît! Ayant constaté
le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de
l'éducation ouverte.
La commission est réunie afin de poursuivre
l'étude détaillée du projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et
commune du Québec, le français.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements?
Le Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. M. Allaire (Maskinongé) est remplacé par M. Lévesque
(Chapleau); Mme Rizqy (Saint-Laurent) est remplacée par M. Barrette
(La Pinière); Mme St-Pierre (Acadie) est remplacée par M. Birnbaum
(D'Arcy-McGee); Mme Dorion (Taschereau) est remplacée par Mme Ghazal
(Mercier); et Mme Hivon (Joliette) est remplacée par M. Bérubé
(Matane-Matapédia).
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le secrétaire.
Étude détaillée (suite)
Donc, hier, lors de l'ajournement des travaux,
les échanges portaient sur l'article 22.2 proposé à l'article 15 du
projet de loi. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur cet article?
M. Barrette : Oui. Mme la
Présidente, si je ne me trompe pas, il me reste du temps.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Oui. Il vous reste, je vous dis, monsieur... six minutes, M. le député.
M. Barrette : Six minutes. Mme la
Présidente, vous me permettrez de brancher mon ordinateur.
La Présidente (Mme Guillemette) :
6 min 40 s, très précisément. Je vous cède la parole.
M. Barrette : Très bien. Merci, Mme
la... Alors, j'ai même annoncé cette question hier, en fin de séance, Mme la
Présidente, au ministre, alors il ne sera pas surpris de la question que je
vais lui poser. Hier, en fin de séance, je pense que c'était la dernière
question qui a été posée par le collègue de Matane-Matapédia. Il avait posé une
question intéressante dans le contexte actuel, particulièrement suite aux
échanges que nous avons eus, assez longs, hier
après-midi, et la question était approximativement, Mme la Présidente, la
suivante. Le député de Matane-Matapédia a repris une citation du mémoire
déposé par le syndicat des professionnels du gouvernement, et, dans ce
mémoire-là, il y avait un cas de figure qui était exprimé, qui inquiétait le
personnel, les fonctionnaires de notre gouvernement, et le cas de figure qui y
était exposé était le suivant, et je le reprends, alors c'était très
simple : dans le cas de figure où un individu, un citoyen avait communiqué
avec l'État dans divers organismes plus souvent qu'autrement en français, et
donc pas très souvent ou même, à la limite, rarement en anglais, l'expression
du syndicat était : Ça sera gagnant en vie...
anglais à vie. Alors, le ministre n'a pas répondu précisément à ce cas de
figure là, et j'aimerais qu'il réponde pourquoi.
Parce qu'hier, Mme la Présidente, vous vous souviendrez
que j'ai fait plusieurs interventions à savoir quelle serait la mécanique,
comment se ferait le chemin, pour l'État, pour déterminer... Parce qu'à la fin
c'est ça, là, on va ficher les individus en fonction de correspondance, s'ils
seront anglophones ou francophones, là, pour ce qui est de la correspondance.
Alors, le syndicat, lui... Puis là je vais
reprendre les propos du député de Matane-Matapédia. Puis il faut que je fasse
attention, Mme la Présidente, parce que le collègue va me reprocher si j'oublie
«Matapédia».
Une voix : ...
M. Barrette : Oui, il va me le
reprocher. Il dit non, là... à moins qu'il ait dit oui. Mais ce n'est pas
grave. Mme la Présidente, c'est important, cette affaire-là, là, parce que le
député de Matane-Matapédia avait louangé le syndicat
en disant : Leurs mémoires sont toujours très bons — puis
je ne porterai pas de commentaire là-dessus — ils sont
précis, ils lisent bien, ce qu'ils écrivent là-dedans... Donc, l'opinion du
député, c'était que le cas de figure est un vrai cas de figure. Ils ont donc raison en écrivant ça. Puis là je ne prête
pas d'intentions, là, je reprends les propos du collègue.
Alors, j'aimerais ça que le ministre réponde
clairement à la question du député de Matane-Matapédia quand lui reprend
l'hypothèse, que je viens d'émettre, du syndicat : Une fois, est-ce qu'on
est gagnant anglophone à vie?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le député. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Alors, Mme la Présidente, juste pour être sûr, là, on est rendus sur 22.2, on
avait voté l'amendement du député de Matane-Matapédia hier, donc on est sur
l'article, hein, c'est ça? O.K. Bien, écoutez, j'ai eu l'occasion de le dire
abondamment hier, puis, le député de La Pinière, ça m'étonne qu'il n'ait pas
saisi parce que je l'ai réitéré à plusieurs
reprises, c'est vraiment une photo avec l'organisme avec lequel il y avait une
correspondance. Donc, il n'y a pas de laissez-passer pour l'ensemble des
ministères et des organismes. C'est avec cet organisme-là. Si l'organisme
communiquait seulement en anglais avec... bien, en anglais... ou dans une autre
langue que le français avec le citoyen,
l'organisme pourra continuer d'envoyer la correspondance dans une autre langue
que le français. Et c'est une photo
de ce qui se produisait avant le dépôt du projet loi n° 96,
et ça va se poursuivre après. Donc, c'est ça, le critère.
Et surtout, quand le député de La Pinière
dit : Les gens vont être fichés, non, les gens ne sont pas fichés. Ils
sont déjà identifiés actuellement parce que les ministères et organismes
communiquent déjà dans une langue... en français ou dans une langue autre que
le français. La correspondance est déjà envoyée. Ça fait que c'est le statu quo
pour cela. La distinction, elle est pour les nouvelles personnes au Québec qui
décident de... qui arrivent au Québec. On va s'assurer de communiquer en
français avec eux.
La Présidente (Mme Guillemette) :
M. le député.
M. Barrette : Mme la
Présidente, vous allez convenir avec moi que le ministre est une personne
intelligente, qui comprend très bien les mots qui sont prononcés. Alors, je
vais lui poser une question bien simple : Est-ce qu'il considère qu'il
vient de répondre à ma question?
M. Jolin-Barrette : La réponse
à cette question-là, c'est oui.
M. Barrette : Évidemment, la
réponse, c'est non. Échec. Ce n'est pas compliqué, Mme la Présidente, j'ai pris
un cas de figure...
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, c'est de prêter des intentions.
M. Barrette : J'ai la parole?
Est-ce que vous m'accordez la parole?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Allez-y, M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Merci, Mme la
Présidente. J'ai posé une question simple. Le cas de figure du mémoire du
syndicat, est-ce que ce cas de figure là est possible, oui ou non? Le cas de
figure, c'est : pour un organisme donné, il est arrivé quelques fois que
j'ai communiqué en anglais. Même si la majorité du temps, c'est en français, au
jour de la photo, c'est en anglais si j'ai communiqué au jour de la photo en
anglais. Ça ne peut pas être plus simple comme question, Mme la Présidente. La
réponse, c'est oui ou c'est non.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, ça ne peut pas être plus simple comme réponse. C'est une photo
aussi au moment du projet de loi n° 96.
L'Administration communiquait dans une autre langue que le français.
L'Administration pourra continuer de communiquer dans une autre langue que le
français avec le citoyen sans qu'il n'ait à en faire la demande. Ça ne peut pas
être plus clair que ça, Mme la Présidente. Le député de La Pinière essaie de fendre les cheveux en quatre. C'est la même
situation. Donc, le 14 mai, la personne aurait reçu une correspondance.
Ça va se faire dans la même langue que ça se faisait le 12 mai.
• (11 h 50) •
M. Barrette : O.K. Très bien.
Alors, ça, là, dit comme ça, là, n'importe qui qui écoute, Mme la Présidente,
là, a compris mon cas de figure. Tout le monde l'a compris. Le 12 mai, là,
s'il y a eu une correspondance en anglais, s'il y en avait eu en français avant,
en majorité, mettons, bien, ça va être en anglais dorénavant. C'est ça qu'il
vient dire, alors qu'hier, quand moi, je posais la question, ce n'est pas ça
qu'il disait. Il disait : On prend une photo le 12, là, mais on va regarder en arrière. Alors, quel ne
fut pas mon étonnement, quand le député de Matane-Matapédia posait la
question en rappelant le cas de figure du syndicat, qu'il ne réponde pas. Je ne
suis pas surpris qu'il ne réponde pas plus à matin. Mais là ce qu'il vient de
dire, c'est contraire à ce qu'il a dit hier et même il y a quelques instants.
M. Jolin-Barrette : Mais non.
M. Barrette : Il dit, Mme la
Présidente : Bien, ce n'est pas compliqué, M. le député de La
Pinière, vous, vous coupez les cheveux en quatre. C'est simple pourtant, le 12,
si la dernière correspondance qu'il a eue était en anglais, ça va continuer en
anglais.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Ce n'est
pas ça, là. Le député de La Pinière est mélangé, Mme la Présidente. Et ce que
j'ai dit hier, et je le réfère au texte, hein : «De plus, l'organisme de
l'Administration qui, avant le (indiquer ici la date de la présentation du présent projet de loi), correspondait seulement en
anglais avec une personne physique en particulier relativement à un
dossier la concernant, pour un motif autre que l'état d'urgence sanitaire
déclaré en vertu de [...] 118 de la Loi sur la santé
publique, peut continuer à correspondre et autrement, communiquer par écrit
avec elle dans cette langue seulement.»
Donc, l'organisme, «communiquer avec la personne
dans cette autre langue», seulement avec cette autre langue, va pouvoir
continuer de communiquer seulement avec cette autre langue.
M. Barrette : Alors, Mme la
Présidente, combien de temps me reste-t-il?
La Présidente (Mme Guillemette) :
1 min 30 s.
M. Barrette : Une minute.
M. Jolin-Barrette : C'est fou,
Mme la Présidente, comment c'est important pour le député de La Pinière le
temps pour voir bien certainement... d'étirer le plus possible, hein, M. le
député de La Pinière.
M.
Barrette : Mme la
Présidente, est-ce que j'ai... Mme la Présidente, j'aimerais ça que vous jouiez
votre rôle.
La
Présidente (Mme Guillemette) : M. le ministre. On va laisser la parole à M. le député de La Pinière, M.
le ministre.
M. Barrette : On le sait, que
le ministre n'aime pas ça ne pas avoir raison. Et sa réponse réelle dans la
vraie vie — il
n'aime pas ça — c'est
qu'on va faire une photo le 12, mais on va regarder en arrière et, en fonction
du en arrière, on va prendre les décisions. C'est comme ça, Mme la Présidente.
Alors, ce n'est pas compliqué, est-ce que le ministre va admettre qu'on va
regarder derrière? Ce n'est pas juste une photo le 12, c'est une photo, disons,
de la période précédente.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, je l'ai toujours dit, c'est une photo de la situation. Est-ce que
l'État communiquait seulement dans une autre langue que le français avec le citoyen?
Je l'ai dit. Mme la Présidente, pour ce qui est d'avoir raison, je crois plutôt
que nous pourrions mettre ici un miroir et que les propos du député de La
Pinière s'appliqueraient à lui.
M. Barrette : Mais non, Mme la
Présidente.
M. Jolin-Barrette : Oh que oui!
M. Barrette : Mme la
Présidente, est-ce que j'ai la parole pour les quelques secondes qui me
restent?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Je vous laisse la parole pour 50 secondes, M. le député.
M. Barrette : Merci, Mme la
Présidente. Qu'est-ce que vous voulez, Mme la Présidente, le droit, c'est
une... ce n'est pas une science, c'est une situation où les mots ont un sens
et, quand les mots ont un sens, c'est ce sens-là qui est utilisé à la cour.
D'ailleurs, le ministre devrait le savoir, il vient de se faire ramasser par la
Cour supérieure pour cause d'illégalité. Mais, il l'a dit hier dans une envolée
lyrique, Mme la Présidente, ça ne le dérange pas. Ça ne le dérange pas. C'est
ça qui est le problème. Et, quand on lui dit : Regarde, là, c'est parce
que ce que tu dis, là, ça ne veut pas dire exactement ça, mais non! il revire
ça de bord en disant : Pour la photo, on va regarder en arrière. Oui, mais
ce n'est pas, donc, juste la photo le 12.
Ça fait qu'on comprend la Cour supérieure, Mme
la Présidente. La Cour supérieure a raison, c'est sûr, sûr, sûr, et ça, qu'est
ce que vous voulez, le ministre devra vivre avec.
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci.
Merci, M. le député de La Pinière. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Je veux
qu'il soit noté au procès-verbal de la commission que le député de La Pinière,
incluant sa formation politique, le Parti libéral du Québec, est en accord...
et il vient de le dire : La Cour supérieure a raison. Le député de La
Pinière, par ses propos, vient de nous dire qu'il est en accord avec la
décision de la Cour supérieure, parce qu'il avalise cette décision-là. Alors,
je comprends très clairement que le Parti libéral est d'accord avec le fait
que, systématiquement, l'exigence de la maîtrise de l'anglais soit exigée pour
tous les avocats qui souhaitent accéder à un poste de la magistrature, à un
poste de juge au Québec.
M. Barrette : ...
M. Jolin-Barrette : Alors, je
vais juste terminer, je vais juste terminer...
M. Barrette : ...
M. Jolin-Barrette : Je vais
terminer...
La Présidente
(Mme Guillemette) : ...M. le ministre.
M. Barrette : ... on me prête
des intentions. Ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. Jolin-Barrette : Mais oui.
M. Barrette : Je n'ai même pas
dit quelque chose qui était proche de ça. Ce que j'ai dit, Mme la Présidente,
ce n'est pas compliqué, j'ai dit que la Cour supérieure avait — avait,
Mme la Présidente — ...
C'est une question de privilège. J'ai dit que la Cour supérieure avait conclu,
Mme la Présidente, qu'il avait agi illégalement. C'est ça qu'elle a dit, la Cour supérieure. Je n'ai pas
porté de jugement, fait le commentaire qui peut induire que je suis en
accord ou désaccord avec ce que dit le
ministre. Alors, le ministre peut bien se permettre, là, de faire des envolées
politiques, mais, à un moment donné, il ne peut pas me me prêter des
intentions. Il y a un fait, ce que le ministre a fait, c'est...
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci,
M. le député. C'est tout le temps que vous aviez, M. le député, et... Allez-y,
M. le ministre, et par la suite je cède la parole au député de
Matane-Matapédia.
M. Barrette : ...si vous donnez la
parole...
M. Jolin-Barrette : J'ai entendu
«Matane-Matapédia».
M. Barrette : ...au ministre pour
dire n'importe quoi et que, moi, vous me...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le député de La Pinière, je vous demande respect. Je pense qu'on va repartir
sur une base plus calme et plus respectueuse. C'est un projet de loi important
pour tous les Québécois, les Québécoises, donc je pense qu'il faut prendre le
temps de bien faire les choses. Je vous remercie et je vais maintenant céder la
parole au député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Mme la Présidente, le
fier député du Parti québécois que je suis veut s'inscrire dans cet échange et
indiquer la chose suivante : le député de La Pinière peut bien indiquer dans
ses mots à lui que le ministre a été renversé par une décision de la Cour
supérieure, ça peut apparaître comme un fait, mais ce n'est certainement pas
matière à réjouissance. Pourquoi? D'abord, parce que la requête qu'il a faite,
au nom du Québec, auquel je souscris, est
légitime et nécessaire si on est sérieux en matière de promotion de la langue,
de défense de la langue et d'utilisation de la langue. Comme Procureur général, comme ministre de la Justice, il a
bien fait de faire ce qu'il a fait pour les raisons évidentes qu'il a
plaidées, c'est-à-dire que de réclamer la connaissance de l'anglais peut être
un frein à la nomination de candidats extrêmement valables qui n'ont pas cette
connaissance. Je suis d'accord avec cette demande.
Ceci étant dit, la Cour supérieure a renversé sa
décision. Je le déplore avec force. Je suis d'avis que les parlementaires que nous sommes, en cette
commission, à l'Assemblée nationale... le politique devrait, pour des
questions de cette nature-là, avoir préséance. Ce n'est pas la première fois
que ça arrive, au cours des dernières semaines, que la magistrature, les juges
aiment bien rappeler au ministre puis, à travers le ministre, aux
parlementaires que je suis et que mes
collègues sont qu'ultimement «vous pourrez bien dire ce que vous voulez, mais
les choses ont toujours fonctionné comme ça, il y a le pouvoir des
juges, puis ça se peut que ça reste comme ça, c'est notre souhait». Puis je
sais que le ministre a remarqué cela.
Moi, je dis, comme je l'ai dit hier, que ce
n'est pas de faire une politique appropriée de dire : Le ministre a perdu.
Ce n'est pas le ministre qui a perdu. C'est la capacité pour des élus de faire
des choix politiques et qu'ils puissent s'appliquer. Et je salue le choix qu'il
a fait. Et ce n'est pas la première fois. Quand des parlementaires de
l'Assemblée nationale se réjouissent à l'idée que vous allez peut-être vous
faire invalider à Ottawa, en Cour suprême, pour la laïcité, je n'aime pas plus
entendre ça. Je n'aime pas plus entendre ça parce que c'est une loi votée par
l'Assemblée nationale, puis, une fois qu'elle est votée, cette loi, bien, on
devrait tous la défendre, qu'on soit en faveur ou contre. Moi, je suis d'accord
avec ça, ce principe universel.
Donc, je ne sais pas ce que recherche le Parti
libéral dans ses plaidoyers. L'objectif, c'est vraiment de s'assurer que cette
loi nous permette d'améliorer la connaissance de la langue, la promotion de la
langue, la protection de la langue, le rayonnement de la langue, le prestige de
la langue, l'accès au travail, l'accès à des nominations. C'est ça, l'objectif.
Mais il me semble... puis là c'est très rare que je vais faire ça, je vais me
tourner vers mes collègues respectés du Parti libéral en disant : Il y a
des interventions, on dirait, vous trouvez que ça va trop loin — je
vous parle à vous, là, quand je dis ça, là, Mme la Présidente — puis
là, systématiquement, c'est comme de venir mettre en garde le gouvernement de
ne pas aller trop loin puis là c'est comme... c'est comme répétitif.
• (12 heures) •
Alors, je termine en disant, puis je vous
remercie de me permettre de le dire — bien, ce n'est pas
directement lié à un article, mais j'apprécie la mansuétude de mes collègues
qui n'en font pas de questions de règlement : Ce n'est pas le ministre qui
a perdu hier, là. À la rigueur, c'est le gouvernement du Québec, mais, non,
c'est tous ceux qui pensent que c'est légitime de se faire respecter, puis de
ne pas avoir de connaissance préalable de l'anglais, ça ne devrait pas être — ou
suffisante — un
frein. Là, c'est dans le domaine de la magistrature puis ça pourrait être dans d'autres domaines également. Alors, il y a matière à faire
front commun avec le ministre plutôt que s'en réjouir. Et moi, je dis au
ministre qu'il a bien fait de le faire. Il va analyser le jugement. Ils vont
certainement arriver avec une position un peu plus tard de qu'est-ce qu'ils
vont faire. Mais il peut compter sur notre concours et notre soutien, parce que
ça, ça transcende les enjeux politiques, c'est la capacité du politique, des
élus de l'Assemblée nationale de poser des gestes sans entrave de la
magistrature, que ça soit dans ce domaine ou dans d'autres domaines qui sont
l'initiative du gouvernement. Le gouvernement a pris des initiatives dans
d'autres domaines, évidemment, je ne tournerai
pas autour du pot, la création d'une chambre spécialisée. Je vous ai parlé du
volontarisme hier, le ministre a eu ce volontarisme-là, c'est le choix
de son gouvernement. Qu'il aille de l'avant, nous le soutenons, c'est
souhaitable, faisons-le comme élus.
Alors, il va falloir... puis c'est une question
grave, hein, réaffirmer le rôle des parlementaires. Et, s'il y a de l'abus, les
tribunaux sont là pour ça, mais je ne pense pas que ça soit abusif, Mme la
Présidente, en 2022, dans les conditions qu'on connaît, de plaider le plein
accès à des promotions à des francophones qui sont avocats. C'est ce que
j'avais à dire là-dessus, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Oui, M. le
ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, Mme la
Présidente, j'apprécie l'intervention du député de Matane-Matapédia. Et ça
démontre que le député de Matane-Matapédia a un sens de l'État et ça l'honore
également, parce qu'au-delà des opinions politiques différentes le député de
Matane-Matapédia est capable de s'élever et de voir quel est l'intérêt public,
l'intérêt de la nation sur certains éléments qui sont fondamentaux pour la
nation québécoise et pour l'État québécois, et pas juste à court terme, Mme la
Présidente, dans le temps. Parce qu'un coup que le gouvernement du Québec va
passer, il y en aura un autre, et ensuite un autre, et ensuite un autre, Mme la
Présidente, et ça, ça s'appelle la continuité de l'État. Et, comme
parlementaires, on est responsables de cela et de prendre des décisions qui
font en sorte que ça aura un impact pour les années à venir et qu'il y aura un
impact pour les générations futures.
Alors, la langue française doit être défendue
sans relâche, à tous les jours, dans toutes les facettes de l'État, et ça, le
député de Matane-Matapédia l'a très bien compris, sa formation politique également.
Malheureusement, ce que nous constatons encore aujourd'hui, c'est que le Parti
libéral, après avoir voté contre la loi 101 en 1977, après, encore
aujourd'hui, se positionner d'une façon tortueuse sur la loi n° 96,
se positionner d'une façon particulière relativement au jugement de la Cour
supérieure qui vient d'être rendu... Parce qu'on n'a pas de réponse claire. La cheffe du Parti libéral n'est pas capable de
répondre à la question. Le député de La Pinière n'est pas capable
d'exprimer son opinion à lui, en tant que député et en tant que membre du Parti
libéral, aujourd'hui, à savoir est-ce qu'il est d'accord avec les conclusions du jugement. Est-ce que le député de
La Pinière est d'accord avec le fait que des candidats ne puissent
pas soumettre leurs candidatures pour accéder aux postes à la magistrature?
Est-ce qu'il est d'accord avec le fait que ça soit systématiquement requis?
Alors, je vais m'arrêter là, Mme la Présidente,
parce que le dossier est devant les tribunaux, mais je dois dire que j'apprécie
l'intervention du député de Matane-Matapédia. Et sachez, Mme la Présidente,
qu'il y a des moments, dans la vie politique, où est-ce qu'on ne devrait pas
faire de partisanerie, de politique, et, sur la question de la langue, et sur
une question aussi fondamentale, le Parti libéral devrait réaliser qu'on est
dans un de ces moments-là. Et la cheffe du Parti libéral devrait réaliser
également la situation particulière du Québec au Canada, la situation
particulière du Québec en Amérique du Nord, et le député de D'Arcy-McGee aussi
devrait le réaliser.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le ministre. Donc, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur
l'article 22.2? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons passer à
l'article 22.3. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors :
«22.3. Un organisme de l'Administration peut déroger au paragraphe 1° de
l'article 13.2 en utilisant, en plus du français, une autre langue
lorsqu'il écrit, dans les cas suivants :
«1° lorsque la santé, la sécurité publique ou
les principes de justice naturelle l'exigent;
«2° pour l'accomplissement de l'une des fins
suivantes :
«a) fournir des services en anglais à la
personne déclarée admissible à recevoir l'enseignement en anglais en vertu des
dispositions de la section I du chapitre VIII, autres que les
articles 84.1 et 85;
«b) fournir des services aux organismes visés à
l'article 95 ou aux autochtones;
«c) fournir des services pour l'accueil au sein
de la société québécoise des personnes immigrantes durant les six premiers mois
de leur arrivée au Québec;
«d) fournir des services et entretenir des
relations à l'extérieur du Québec;
«e) fournir des services touristiques;
«f) toute autre fin prévue par règlement du
ministre.
«Malgré le premier alinéa, un organisme de
l'Administration peut utiliser une autre langue seulement lorsqu'il a pris ou
révisé la directive prévue à l'article 29.14 ou, s'il s'agit d'un
organisme visé à l'article 29.15, lorsque le ministère qui y est visé a
pris ou révisé la directive prévue à cet article, pourvu que la directive ait
été soit approuvée en vertu de l'un ou l'autre des articles 29.16 ou
29.18, soit transmise en vertu de l'article 29.17.»
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci,
M. le ministre. Donc, est-ce qu'il y a des interventions? M. le député de
La Pinière, la parole est à vous.
M. Barrette : Merci.
Et j'espère que vous allez faire respecter mon privilège. Alors, Mme la
Présidente, le législateur et le juridique, dans notre société, sont séparés.
C'est obligatoire en démocratie. C'est obligatoire, O.K.? Alors, le législateur
peut faire les lois qu'il veut, il a le droit, avec le fondement qu'il choisit.
Il a le droit. Ça, là, c'est le grand discours lyrique que vous venez
d'entendre des deux collègues. Mais, mais, en toute circonstance, le
législateur, le gouvernement doit respecter la loi en vigueur. Et ce qui a été
décidé hier, conclu par la cour, ce qui a été conclu, c'est que les lois en
vigueur n'ont pas été respectées. Point. Le législateur peut faire ce qu'il
veut dans le futur, mais, au moment de poser un geste, c'est légal ou illégal.
Rien à voir avec le fond. Je n'ai pas à répondre aux questions du ministre
parce que ça lui fait plaisir de faire un débat politiquement orienté partisan.
Je dis que c'est illégal, et illégal, ça veut dire que la lettre de la loi n'a
pas été respectée en l'occurrence.
Alors, je vais aller, donc, ici, à 22.3.1° et
lui poser une question, parce qu'on est sur 22.3, Mme la Présidente, ça fait...
M. Jolin-Barrette : ...juste une
seconde.
M. Barrette : Ça fait...
M. Jolin-Barrette : Je veux juste...
M. Barrette : Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le ministre.
M. Barrette : ...on est sur 22.3,
là?
La Présidente (Mme Guillemette) : Oui.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais je
veux juste informer le député de La Pinière qu'avant de pouvoir commencer je vous proposerais que je dépose
l'amendement que j'ai, comme ça, ça va être plus cohérent, parce que
22.3 va bouger. Donc, plutôt que de peut-être poser votre question qui sera
corrigée par l'article, je vous proposerais que je puisse déposer l'amendement
à l'article 22.3, pour que vous ayez l'amendement en question, pour avoir
le texte à jour.
M. Barrette : Mme la Présidente,
est-ce qu'on pourrait suspendre un instant?
La Présidente (Mme Guillemette) : Est-ce
que... On suspend, mais est-ce qu'il y a consentement pour...
M. Barrette : Après la suspension.
Ça va prendre cinq secondes, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci.
On suspend quelques instants.
(Suspension de la séance à 12 h 08)
(Reprise à 12 h 10)
La
Présidente (Mme Guillemette) : Donc, nous reprenons les travaux avec un amendement
de M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : ...Mme la
Présidente. À l'article 15 du projet de loi, dans l'article 22.3 de
la Charte de la langue française qu'il propose :
1° insérer, dans le premier alinéa, les
suivants :
«Les contrats de consommation suivants,
lorsqu'ils sont conclus par un organisme de l'Administration, peuvent, en
dérogation à l'article 21, être rédigés à la fois en français et dans une
autre langue :
«1° un contrat à exécution successive, dans les
cas visés au premier alinéa;
«2° un contrat visant la fourniture d'un
hébergement ou la location d'un bien pour accomplir la fin visée au
sous-paragraphe e du paragraphe 2° de cet alinéa.
«Les écrits et les communications visés aux
articles 21.3 et 21.8 peuvent, dans les cas visés au premier alinéa, être
rédigés à la fois en français et dans une autre langue lorsqu'ils sont relatifs
à un contrat de consommation ou lorsqu'ils sont nécessaires à sa conclusion.»;
2° remplacer, dans le deuxième alinéa, «le
premier alinéa» et «des articles 29.16 ou 29.18, soit transmise en vertu
de l'article 29.17» par, respectivement, «les premier, deuxième et
troisième alinéas» et «du premier alinéa de l'article 29.16 ou de l'article 29.18,
soit transmise en vertu du deuxième alinéa de l'article 29.16».
Commentaire. Cet
amendement propose d'ajouter deux alinéas à l'article 22.3. Le premier de
ces alinéas prévoit, d'une part, que les cas donnant ouverture aux exceptions à
l'utilisation exclusive du français, énumérés aux paragraphes 1° et 2° du premier alinéa, s'appliquent dans la
rédaction des contrats de consommation à exécution successive, comme un contrat de
fourniture d'électricité résidentielle, et, d'autre part, que l'exception
prévue au sous-paragraphe e de ce paragraphe 2°, relative à la
fourniture de services touristiques, s'applique à l'égard de certains contrats
visant la fourniture de tels services. Le second de ces alinéas prévoit une
exception de même nature à l'égard de la rédaction de certains écrits relatifs
à ces contrats ou à d'autres contrats de consommation qui, eux, demeureront
assujettis à la règle de l'utilisation exclusive du français.
Enfin, cet amendement
propose de modifier l'article 22.3 de la Charte de la langue française par
concordance avec des amendements qui seront apportés aux articles 29.16 et
29.17.
Donc,
en termes clairs, pour les fins d'explication, c'est un contrat de
consommation, exemple, d'hydroélectricité. Donc, on est... Lorsqu'une société d'État, comme Hydro-Québec, fait des
affaires commerciales, dans le fond, puisqu'on fait en sorte que,
exemple, un ayant droit puisse avoir sa facture d'Hydro-Québec en anglais,
bien, préalablement à la facture, à l'émission de la facture, il y a un contrat
de consommation qui est conclu. Donc, exemple, moi, j'ai 18 ans, je pars
de chez mes parents, O.K., je suis un ayant droit, j'appelle chez Hydro-Québec
pour me brancher, ou par Internet, et je conclus un contrat de consommation
avec Hydro-Québec. Hydro-Québec s'engage à me vendre de l'hydroélectricité. Et
donc l'amendement vise à faire en sorte de permettre que le contrat entre... le
citoyen ayant droit puisse conclure son contrat en anglais pour recevoir sa
facture en anglais.
Le deuxième volet, il
est sur l'exception pour les services touristiques de location. Donc, s'il y a
un bail, supposons... bien, pas un bail, là, mais des nuitées ou un hébergement
touristique de l'État, qu'il puisse le faire contracter, au-delà de la
facture... dans le fond, il y a un contrat de consommation qui est fait, ça
puisse être fait dans une autre langue que le français. Donc, l'amendement vise
à introduire ces deux exceptions-là.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Merci, M. le ministre. Donc, des interventions sur
l'amendement ou l'article 22.3?
M. Barrette :
On est sur l'amendement ou 22.3 au complet?
La Présidente (Mme
Guillemette) : Pardon?
M.
Jolin-Barrette : Allons-y sur l'amendement.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Sur l'amendement.
M. Barrette :
Alors là, on se rend... c'est quand même un amendement qui a une certaine
substance, là, au sens où ça touche beaucoup de choses, là, qui ne sont pas
usuelles, on va dire, là. Mais je comprends que ça, ça ne touche que les
contrats entre un organisme de l'organisation... ce n'est pas au sens large du
terme, là.
M.
Jolin-Barrette : Le principe de base, là, avec l'exemplarité de
l'État, là, c'est que les communications de l'État sont exclusivement en
français. Puis on a vu un petit peu plus tôt, dans le projet de loi, que,
lorsque vous êtes un ayant droit ou lorsque vous êtes quelqu'un qui faisait
déjà affaire avec l'État à la date du dépôt du projet de loi, vous pouvez
continuer en anglais.
M. Barrette :
À la photo.
M.
Jolin-Barrette : À la photo, O.K.? Ça, c'est pour les communications
puis les correspondances. Mais par contre, pour permettre les contrats... Parce
qu'on a vu également, plus tôt dans le projet de loi, que les contrats de
l'État allaient être exclusivement en français. Sauf qu'il y a des sociétés
commerciales de l'État, comme Hydro-Québec, c'est l'exemple que je vous
donnais, qu'on permet que la facture soit dans une autre langue que le
français, mais pour pouvoir avoir la facture, il faut qu'il y ait eu conclusion
du contrat de consommation. Donc, on permet, par cet amendement-là, la
conclusion du contrat de consommation dans une autre langue que le français.
Même chose pour la
conclusion d'un contrat, supposons, avec la SEPAQ. Vous louez... Le député de
La Pinière organise ses vacances pour cet été et souhaite louer une yourte
dans le parc de la Jacques-Cartier, s'il était un ayant droit, l'amendement va
faire en sorte qu'il va pouvoir contracter dans une autre langue que le français.
M. Barrette :
Y a-tu des yourtes, là, dans le parc de la Jacques-Cartier?
M.
Jolin-Barrette : Je crois que oui.
M. Barrette :
Je ne suis pas sûr.
M.
Jolin-Barrette : Je crois que oui.
Une voix :
...
M. Barrette :
Hein? À Matane, il y en a, hein? O.K.
M. Jolin-Barrette : Magnifique parc
dans la région de Québec.
M. Barrette :
Oui, oui, ça, c'est un fait.
M. Jolin-Barrette : Surtout que les
vacances vont sûrement se passer au Québec cette année aussi.
M. Barrette : O.K. Je n'ai pas de commentaire.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, il n'y a pas de commentaire sur l'amendement, pas d'autre commentaire.
Donc, est-ce qu'on vote l'amendement immédiatement?
Une voix : Oui.
La Présidente (Mme Guillemette) :
S'il n'y a pas d'autre intervention, par appel nominal, monsieur...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Guillemette) :
Pas nécessaire par appel nominal? D'accord. Donc, nous continuons les échanges.
L'amendement est adopté, de l'article 22.3?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, nous continuons les échanges sur l'article 22.3 amendé.
M. Barrette : Alors, amendé, oui, d'accord.
Alors, Mme la Présidente, j'ai une question qui me brûle depuis le début puis
que j'oublie toujours de poser. Une autre langue, là, au Québec, ça veut
dire... Je comprends que c'est une autre langue, là, mais quelles sont les
langues avec lesquelles le gouvernement communique? Puis c'est vraiment une
question de curiosité.
M. Jolin-Barrette : Bien,
généralement, l'État communique dans une autre langue, c'est en anglais, la
majorité du temps. Sauf que vous avez, dans certaines situations, des organismes
qui sont reconnus. Exemple, Santa Cabrini, dans le fond, c'est en italien, ça
peut être en italien. Donc, c'est des exemples où est-ce qu'une autre langue
peut être utilisée. Ou, exemple, ça arrive qu'au ministère de l'Immigration ils
communiquent dans une autre langue que le français, ce n'est pas nécessairement
en anglais, ça peut être dans une autre langue.
M. Barrette : O.K.
La Présidente (Mme Guillemette) : Ça
vous va, M. le député?
M. Barrette : Bien non, je vous
regarde pour que vous me donniez la parole.
La Présidente (Mme Guillemette) : Je
vous cède la parole et ensuite je vais donner la parole à la députée de
Mercier. Allez-y, M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Bon. Alors, est-ce
qu'il y a, donc, une référence, est-ce qu'il y a comme... Ça, c'est une
question d'information, là : Est-ce qu'il existe... Là, le ministre nous a
dit que c'étaient des organismes reconnus, donc il y a comme un point de
référence quelconque. Y a-tu une liste de ça?
M. Jolin-Barrette : Non, il n'y a
pas de liste de ça, parce que c'est l'Administration avec un grand A. Mais
vous m'avez demandé un exemple concret. Depuis 1977, dans le fond, la façon que
la Charte de la langue française a été
construite, ça fait toujours référence à la langue officielle. Puis, lorsqu'il
n'est pas question de la langue officielle, c'est dans une autre langue.
Donc, on rattache, dans le fond, au texte actuel de la Charte de la langue
française.
M. Barrette : O.K., mais il n'y a
pas de... Quand le ministre me dit : Il y a un organisme reconnu, c'est-tu
une obligation, ça, ou c'est juste un choix discrétionnaire de l'organisme?
M. Jolin-Barrette : S'il y a une
obligation de...
M. Barrette : Quand j'ai posé ma question,
Mme la Présidente, le ministre me disait, me répondait en premier lieu qu'on pouvait le faire, il prenait
l'exemple de Santa Cabrini, qui est un organisme reconnu. Je comprends très bien la situation. Alors là, j'ai demandé
s'il y avait une liste. Pas nécessairement. Alors donc, ce que je
comprends, c'est que, dans une certaine mesure, c'est une décision
discrétionnaire de l'organisme.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais je
donne un exemple, l'économie générale de la loi, là, exemple, dans la section sur les produits de consommation, O.K.,
dans la Charte de la langue française actuelle, là, pas le projet de loi
n° 96, actuelle, au niveau de l'étiquetage des produits de consommation,
la loi dit : Ça doit être inscrit en français et ça peut être inscrit dans une autre langue. Donc, exemple, il y a un
produit qui est importé, O.K., sur l'étiquetage, c'est en français, supposons,
je ne sais pas, là, je prends des...
M. Barrette : Une sauce chinoise.
M. Jolin-Barrette : Une sauce
chinoise. Alors, ça va être écrit «sauce au poisson» ou «sauce wonton», ce que
vous voulez, et il pourra... ça pourra être inscrit également, sur le produit,
dans une autre langue, mais ça ne veut pas
dire que ça va être en anglais, ça peut être en mandarin, ça peut être en
portugais, ça peut être dans d'autres langues également. Donc, les
personnes vont pouvoir... bien, les organismes... Dans le fond, on permet à
l'Administration, à travers ses différents
organismes, dans certaines situations de la loi, de communiquer dans une autre
langue que le français. Donc, le
principe est l'exclusivité du français, sauf les exceptions, mais ce n'est pas
nécessairement l'anglais. Exemple, au ministère
de l'Immigration, ils vont communiquer souvent dans plusieurs autres langues
qu'en français puis qu'en anglais.
• (12 h 20) •
M. Barrette : C'est clair. Donc, je
résume, là, Mme la Présidente, là. L'autre langue, on comprend, mais il n'y a
pas de référence, on va dire. Ce n'est pas très faux de dire qu'il y a un côté
discrétionnaire là-dedans, là. Je ne veux pas... Il n'y a pas de piège, là,
dans ma question, là. C'est selon le sujet, et, les sujets, on les énumère à la
suite.
M. Jolin-Barrette : Là, vous voulez
dire par rapport à l'article ou en général?
M. Barrette : Non, non, par rapport
à l'article.
M. Jolin-Barrette : Oui, ça, c'est
l'exception.
M.
Barrette : Les exceptions, là, on comprend que là il n'y a
pas de sauce wonton là-dedans, là. Alors là, il y a des exceptions.
M. Jolin-Barrette : En quelle
matière il est possible d'utiliser une autre langue que le français.
M.
Barrette : C'est correct. On s'entend. Bon, ça, ça clarifie
la chose. Et là on va aller au premier paragraphe des exceptions.
Alors...
M. Jolin-Barrette : Et, juste une
précision aux fins de compréhension de l'article, ce sont les exceptions pour
l'État québécois, pour l'Administration.
M. Barrette : Oui, oui, pour
l'Administration avec un grand A, et tout le reste.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Exactement.
M. Barrette : Bien, pas tout... Tout
le reste étant tout ce qu'on a rajouté dans cette loi-ci, là. Bon. Alors là,
là, c'est une exception. Et le premier paragraphe, «lorsque la santé, la
sécurité publique ou les principes de justice naturelle l'exigent», là, j'ai
bien de la misère avec ça, non pas sur le principe qui est exprimé là, là, on
comprend que ça a bien du bon sens, là, «la santé, la sécurité publique ou les
principes de justice naturelle l'exigent», mais j'ai un problème avec
«l'exigent». Comment on définit ça, «l'exigent»? Parce que... Et là je vais
donner tout de suite le cas de figure, là, je n'ai pas de piège, là. Moi, mes
questions sont très claires, puis je ne fais pas de la politique pendant
15 minutes après, là, puis je n'ai pas de question plantée.
M. Jolin-Barrette : ...c'est des
questions de mise en valeur.
M. Barrette : Oui, mise en valeur,
c'est bien. Alors, c'est très...
La Présidente (Mme Guillemette) :
Allez-y avec votre question, M. le député.
M. Barrette : Oui, mais je sais que
le ministre aime beaucoup ce qui le met en valeur.
M. Jolin-Barrette : Ah! pas du tout.
La Présidente (Mme Guillemette) : Allez-y
avec votre question, M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Ceci étant dit, Mme la
Présidente, oui, alors...
M. Jolin-Barrette : D'ailleurs, le
député de La Pinière aura remarqué que je n'ai pas d'objection à être le
mauvais objet.
M. Barrette : Le mauvais objet? Je
ne vois pas le sens ou l'opportunité du commentaire.
La
Présidente (Mme Guillemette) : Allez-y avec votre question, monsieur.
M. Barrette :
Alors, revenons à la santé, et je vais donner mon cas de figure, je vais
donner mon cas de figure, O.K.? Parce que prenons la santé, là... En fait, on
va prendre quelque chose de plus simple encore, la sécurité publique. Là, la
sécurité publique, là, on parle de choses très générales, puis, même à ça, on peut
se demander si... dans des situations très générales, qu'est-ce qui va
l'exiger.
En sécurité publique,
quand on arrive dans une période d'inondation, par exemple, là, on peut
imaginer qu'on a à mettre des panneaux de ceci, de cela, des panneaux d'information,
puis ça pourrait être une situation où on pourrait dire que la sécurité
publique l'exige parce que, dans cette région-là, il y a beaucoup
d'anglophones. On sait, par exemple, que,
dans le débordement de la rivière des Outaouais, quand on... il y a des
débordements dans la région de Hudson,
il y a beaucoup d'anglophones dans ce coin-là. Est-ce que, là, c'est quelque
chose qui va exiger une communication écrite en anglais?
C'est
important, ce point-là, pour moi, là. Parce que lui, il est plus banal, ça peut
être des patentes administratives. En santé, c'est une autre affaire.
Alors, «l'exigent», là, comment qu'on définit ça, comment qu'on balise ça?
Est-ce que... Puis là je vais prendre un exemple, là, parce que le ministre a
pris cet exemple-là lui-même, il a pris l'exemple de Santa Cabrini. Est-ce qu'en sécurité publique... là, je ne sais pas,
moi, il y a un désastre naturel, industriel, peu importe, on doit
afficher des panneaux, est-ce qu'à Saint-Léonard on va faire le pas de mettre
des affiches informatives, qui seraient jugées nécessaires par la Sécurité
publique, en français et en italien? Comment on fait ça? Bien, j'imagine que le
ministre est au fait que dans la région, dans la ville de Saint-Léonard, il y a
une forte communauté italienne. Je suis sûr qu'il sait ça.
La Présidente (Mme
Guillemette) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Alors, Mme la Présidente, je référerais à des
exemples concrets à l'époque où le député de La Pinière était au
gouvernement, entre 2014 et 2018 notamment, ils ont vécu certaines inondations
ou certaines situations... non, mais c'est juste pour illustrer. Les termes
qu'on a... Parce que c'est des situations qui ont été vécues par lui-même.
Donc,
nous, à 1°, on dit : «Lorsque la santé, la sécurité publique
ou les principes de justice naturelle l'exigent.» Donc, déjà, dans la
charte, actuellement, de la langue française, la loi 101, à
l'article 22, on avait déjà les dispositions également : «L'Administration n'utilise que le français dans
l'affichage, [...]lorsque la santé ou la sécurité publique exigent aussi
l'utilisation d'une autre langue.» Donc, depuis 1977, c'est là. Donc, c'est les
mêmes critères qui s'appliquent lorsqu'il y a une exigence rattachée à ça.
Donc,
l'article existe depuis 1977. Donc, on vient reprendre le critère, et c'est la
même interprétation qui est donnée depuis 1977. Donc, vous avez vécu des
causes de désastres naturels, et le gouvernement dont vous faisiez partie à
l'époque a notamment utilisé ces dispositions-là. Donc, c'est la continuité de
l'État, dans ce sens-là.
M. Barrette :
Alors, moi, je pose la question suivante. J'ai eu à me battre, comme ministre
de la Santé, pour m'assurer que certains pamphlets informatifs nécessaires en
santé pour des patients soient disponibles en anglais, puis on me rabâchait toujours la même affaire : Oui, mais là ce
n'est pas une région où il y a suffisamment d'anglophones, ta, ta, ta. C'est toujours la même affaire. Quand
arrive la question d'avoir accès à certains services et à certains
documents en santé et en services sociaux, il y a souvent l'argumentaire qui
est fait par les administrations locales : Nous ne sommes pas une région
visée.
Comment qu'on
concilie avec le projet de loi n° 96, là, qui... Là, je vais citer le
ministre approximativement, il nous a dit
qu'on vivait un grand moment, un grand moment, il nous a dit ça tantôt, là, un
grand, grand, grand moment, un grand virage. Mon collègue de D'Arcy-McGee,
malheureusement pour lui, n'a pas pu assister à ce moment-là.
Une voix :
...
M. Barrette :
Pardon?
M. Jolin-Barrette :
Vous n'avez pas le droit de faire ça.
M. Barrette :
Oui, mais je sais, mais c'est parce que, mon collègue, ça ne le vexera pas.
M.
Jolin-Barrette : Le député de D'Arcy-McGee va vous en vouloir.
M. Barrette :
Non. Non. Nous autres, on n'est pas comme vous autres, là, on n'en veut pas aux
gens.
Des voix :
...
La Présidente (Mme
Guillemette) : Continuez, M. le député de La Pinière, s'il vous
plaît.
M.
Jolin-Barrette : Voulez-vous qu'on parle...
M.
Barrette : On en parlera
hors d'ondes, parce que je ne sais pas exactement à quoi il fait référence, là,
mais...
La Présidente (Mme
Guillemette) : ...à notre article.
M. Barrette : Oui, Mme la
Présidente. Alors...
M. Jolin-Barrette : ...Parti libéral
du Québec.
M. Barrette : Bon, encore...
Voyez-vous, Mme la Présidente, c'est toujours des méchancetés, il ne peut pas
rester sur le sujet.
M. Jolin-Barrette : ...
M. Barrette : Oui, des méchancetés
pareil, parce qu'ils sont utilisés...
La Présidente (Mme Guillemette) :
S'il vous plaît! Je vais vous ramener à notre article, s'il vous plaît,
messieurs. M. le député de La Pinière.
M.
Barrette : Alors, comment
qu'on règle ça? On vit un moment charnière, là, puis on prépare le futur. Est-ce
qu'on peut préparer le futur avec certaines améliorations par rapport à ce qui
est écrit? Alors, je vais prendre un cas simple, là, très simple, là. Et ça, je
l'ai vécu, O.K., je l'ai vécu moi-même. Alors, les anglophones, en Estrie, qui
vont au CHUS, au CIUSSS de l'Estrie, ils
vont dans un hôpital universitaire, il leur arrive parfois de demander les
pamphlets qui sont donnés par la clinique
externe, là, ils sont là, là, et puis : Regardez, vous devez faire ça, là,
c'est écrit dans le pamphlet, monsieur, madame, là. Oui, mais c'est
parce que ma mère, là, elle ne comprend pas beaucoup le français. Bien, vous lui expliquerez. Mais, si on pouvait lui donner en
anglais d'une façon garantie... Il me semble que, pour cette
population-là qui sont des ayants droit, ils ne l'ont pas, la garantie, ils ne
l'ont pas. Et là, ici, je regarde ça puis je trouve ça correct, «l'exigent».
Alors... mais je pose la question sur qu'est-ce qui exige.
Moi, le cas de figure que je donne, Mme la
Présidente, c'est une évidence. La politique ne devrait pas impacter la santé.
Ça ne devrait pas être proportionnel ou conditionnel à la langue de l'individu,
ça ne devrait pas l'être. Alors là, je
limite mon intervention aux ayants droit, je le limite là. Parce que je sais
que le ministre va me dire : Oui, mais là, si je mets tous les
pamphlets dans les deux langues, ta, ta, ta, les autres vont les demander, ce
n'est pas vraiment... ils doivent être francisés ta, ta, ta. Non, les ayants
droit, là, eux autres, là, ayant droit, il me semble, à avoir cette
communication en anglais d'une façon garantie, il me semble que «l'exigent», ça
devrait prévoir ça. Et, dans la vraie vie, actuellement, là, ça ne le prévoit
pas.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le député. M. le ministre.
• (12 h 30) •
M. Jolin-Barrette : Alors, Mme la
Présidente, la loi sur la santé et les services sociaux et l'article 15
prévoient déjà ces cas-là et ces dispositions-là, et même on l'a inséré à
l'article 22.5, en termes d'exception, avec l'amendement de la députée de
Marguerite-Bourgeoys, même si ce n'était pas nécessaire de le faire. Or, on ne
touche pas à la loi sur la santé et les services sociaux, même on a fait un mécanisme
de renvoi, et l'article 15 s'applique aux situations qui sont visées là-dedans.
Autre élément, à 22.3, il faut bien comprendre
que c'est le concept d'exemplarité de l'État, et c'est les exceptions qui
bénéficient de ça. Donc, l'État pourra, pour des raisons de santé, lorsque
c'est exigé, ou la sécurité publique ou les principes de justice naturelle.
Donc, c'est une exception qu'on prévoit. Mais déjà le cas relaté par le député
de La Pinière est couvert par l'article 15 de la loi sur la santé et les
services sociaux.
M. Barrette : Et, Mme la
Présidente, j'informe le ministre que l'article 15, là, dans la vraie vie,
là, il est conditionnel à certaines quantités, hein? L'île de Montréal, là,
O.K., c'est correct, ça, c'est bilingue. Bon, après ça, là, la disponibilité
d'accès en service de signalisation, dans une institution en anglais, ça, ça
dépend de la situation démographique de la région en question. Et, dans les
faits, là, dans les faits, ces ayants droit là doivent se battre, parce que ce n'est
pas automatique.
Dans l'article 15 en question, là, un
hôpital comme le CIUSSS de l'Estrie... Puis je ne prends pas celui-là... je ne
veux pas leur lancer des pierres, là, ce n'est pas ça, là, je pourrais avoir
exactement le même discours en Gaspésie, la
même affaire. Parce que, sur le terrain, les gens, localement, vont dire :
Non, non, non, il y en a, là, mais, bon... Mais ce qui est demandé, c'est d'avoir la possibilité,
essentiellement, de pouvoir être servi en anglais pour les soins de santé.
Je parle de la santé. Donc, on embauche des gens dans une certaine quantité,
puis ça ne veut pas dire que, tout le temps, il y a du monde, tout ça. Et ça va
aussi loin que de s'obstiner sur la signalisation. Ça fait que, quand on arrive
sur les petits pamphlets, là, qui doivent
être donnés aux patients, là, bien, mettons qu'ils ne l'ont pas, leurs petits
pamphlets, là.
Alors, moi, ce que je trouve malheureux de la
part du projet de loi, dans cette matière-là, c'est qu'on doit être exemplaire
pour tout ce qui touche le français, et j'en suis, mais on n'est jamais obligé
d'être exemplaire pour tout ce qui touche les ayants droit, jamais, jamais,
jamais, particulièrement en santé.
Et, lorsque les... C'est marqué «l'exigent», là.
Moi, là, pour moi, là, c'est une évidence, les exemples que je prends, là, et je donne des exemples vécus encore
aujourd'hui, où ça devrait être exemplaire puis ça ne l'est pas, ça ne
l'est pas. Alors, comment régler ça? Est-ce que c'est possible, dans le projet
de loi n° 96, de régler ça? Le premier paragraphe, là, «la santé», là...
Bon, «la sécurité publique», c'est une autre affaire, ça, la sécurité publique,
je trouve. «Les principes de justice naturelle», bien là,
on pourrait trouver des exemples dramatiques, tout le monde, là. Mais la santé,
ça, c'est du quotidien, et l'État québécois n'est pas exemplaire, hein, envers
les ayants droit, il ne l'est pas.
Alors là,
j'ai donné des exemples hospitaliers,
cliniques externes, suivis
chirurgicaux, mais c'est la même affaire dans les services sociaux, là. Les services
sociaux, là, tous les services qui sont donnés à différentes clientèles,
handicapées, troubles de santé mentale, psychiatrie sur le terrain et ses
suites, là, en termes de communication, là, sur le territoire du Québec, pour une
clientèle anglophone dans un environnement très, très, très majoritairement
francophone, ce n'est pas exemplaire.
Alors, le ministre, dans son projet de loi, là,
appuyé par au moins un de mes collègues à ma gauche, qui va être d'accord avec
ce que je vais dire, veut aller... veut être exemplaire et aller très loin sur
la francisation, la société francophone, et ainsi de suite, mais théoriquement
en respectant les ayants droit de la communauté anglophone. Mais je dis
simplement que ce ne l'est pas dans la vraie vie. On fait quoi pour que ça le
soit? Le principe d'être exemplaire vis-à-vis la communauté anglophone,
c'est-tu un principe qui est irrecevable pour le ministre?
La Présidente (Mme Guillemette) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, Mme
la Présidente, le projet de loi ne change pas l'état de la situation, le statu quo par rapport à l'article 15 de la loi sur
la santé et les services sociaux. Et, même, je l'ai inséré dans le projet de
loi n° 96. Et donc je comprends ce que dit le député de La Pinière,
mais je note, Mme la Présidente, qu'à l'époque où la loi sur les services de santé et des services sociaux
était sous sa responsabilité, il n'a pas souhaité modifier l'article 15 de
la loi sur la santé et services sociaux, il n'a pas déposé de projet de
loi en ce sens-là, et la disposition est demeurée intacte.
Alors, le projet de loi n° 96, c'est un
projet de loi qui vise l'exemplarité de l'État en matière de langue française,
et l'exception qui est prévue, notamment, c'est pour s'assurer de couvrir des
cas d'exception, notamment la santé, mais c'est en continuité de
l'article 15 de la loi sur la santé et les services sociaux.
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci,
M. le ministre.
M. Barrette : Alors, Mme la
Présidente, j'imagine que le ministre a noté aussi qu'en tant que ministre de
la Santé et des Services sociaux je n'avais pas de pouvoir sur la langue
française, là, ou la langue anglaise. Je n'ai pas ce pouvoir-là. Mais, comme
ministre de la Santé, je peux le rassurer, je suis intervenu sur les sujets
dont je viens de traiter. Je lui rappelle, Mme la Présidente, que, la loi n° 10 qui a été faite, et la communauté anglophone l'a
reconnu, nous avons défendu, défendu le droit de ces ayants droit là. Je n'ai
pas de leçons à recevoir du ministre en cette matière-là. Par contre,
aujourd'hui, puisque c'est un projet de loi dont le thème principal est
l'exemplarité, il me semble raisonnable d'exiger une exemplarité envers les
ayants droit, c'est tout. Alors, est-ce que c'est un concept que le ministre
peut aborder?
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci,
M. le député. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, j'ai déjà répondu à la question, c'est le statu quo en vertu de l'article 15
de la loi sur la santé et les services sociaux. Et il y a quelque chose qui est
tout de même intéressant lorsque le ministre... — le ministre! — l'ancien
ministre, le député nous dit : Je n'avais pas de pouvoir, je n'avais pas
rien, à ce que je sache, la loi sur la santé et les services sociaux est sous
la responsabilité du ministre de la Santé, c'était sa loi. Ça ne l'a pas
empêché, Mme la Présidente, de modifier ladite loi sur d'autres aspects. Alors,
durant ces quatre années et huit mois là... non, moins que ça, quatre ans et
demi...
M. Barrette : ...
M. Jolin-Barrette : ...quatre ans et
demi, l'ancien ministre de la Santé aurait pu modifier cette loi, il ne l'a pas
fait. Et ce n'est pas parce qu'il n'a pas déposé de projet de loi, là, il y en
a eu quelques-uns.
M. Barrette : Mme la Présidente,
c'est ça qui est désagréable. Ça, c'est vraiment désagréable. C'est toujours la
même affaire, Mme la Présidente, c'est toujours la même affaire. Le ministre,
ce qu'il dit, là, ce n'est pas bien, bien compliqué : Vous ne l'avez pas
améliorée à votre goût, je ne l'améliorerai pas, moi non plus. Ça, c'est assez
particulier, c'est très, très, très particulier comme raisonnement. Alors, je
lui rappellerai qu'il y a des limites à tout ce qu'on peut faire quand on est
un ministre, là. Mais de dire que je ne suis pas intervenu... bien, qu'est-ce
que vous voulez, il peut bien dire ce qu'il voudra, mais c'est n'importe quoi.
C'est comme ça.
Alors, moi, je dis, Mme la Présidente, je
reprends le langage du ministre : Nous sommes à un moment charnière,
historique, blablabla. Alors, le thème du changement historique, c'est
l'exemplarité? Parfait. O.K. Alors, soyons exemplaires des deux bords de la
clôture, c'est tout.
Alors, le
ministre dit : Le passé n'était pas exemplaire. Nous, nous, la CAQ... moi,
ministre qui va faire l'histoire, j'ai choisi de déposer un projet de
loi qui va amener l'exemplarité. Alors, je lui dis : Ah! bien, O.K. on
n'était pas exemplaires en français? O.K.
Là, vous voulez l'être? Parfait. On n'était pas exemplaires en anglais? O.K.
Bon, bien là, on peut-tu être
exemplaires en anglais? Réponse du ministre : faux-fuyant, on va parler du
passé, c'est de ta faute, puis blablabla.
Alors, je reprends ma question : Est-ce que
le concept d'être exemplaire pour la population anglophone ayant droit est un
concept abordable? Puis là on fera des amendements un petit peu partout.
La
Présidente (Mme Guillemette) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, j'ai déjà répondu à la question.
Dans le cadre des exceptions qui sont là, ça couvre la santé, la sécurité
publique et les principes de justice naturelle, conformément à
l'article 15 de la loi sur la santé et les services sociaux. C'est le
statu quo qui est maintenu, et les exceptions sont maintenues.
M. Barrette :
Alors, Mme la Présidente, c'est très clair, on a la réponse : on change le
statu quo en français, mais on le maintient en anglais, puis c'est merveilleux.
Je vais faire une pause, il me reste du temps, puis je vais laisser mes
collègues prendre la parole, je suis sûr que ça leur tente.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Merci beaucoup, M. le député. Donc, je cède la parole à
Mme la députée de Mercier.
• (12 h 40) •
Mme Ghazal : Merci.
Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'aurais aimé être présente, juste avant
j'ai manqué l'autre article sur
l'exemplarité de l'État et le fait de mettre fin ou de réduire, si on veut, le
bilinguisme étatique, de l'État, mais il y a des choses... On ne peut
pas se reprocher, ni aux collègues ni à soi-même, notre absence.
Et donc je vais
annoncer tout de suite que j'ai un amendement, qui est déjà sur Greffier, que
je vais présenter. Mais j'aurais quand même quelques questions d'ordre général
sur le 22.3 puis...
La Présidente (Mme
Guillemette) : ...on dépose l'amendement tout de suite?
Mme Ghazal :
Parce que la discussion, si on le dépose, va être là-dessus.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Parfait.
Mme Ghazal :
Je vais juste poser comme, peut-être, une question puis après ça je le dépose?
La Présidente (Mme
Guillemette) : Tout à fait.
Mme Ghazal :
Oui. Donc, 22.3, ce dont on parle ici, c'est vraiment des communications à
l'écrit?
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, plus tôt dans le projet de loi... Je
vais juste vous expliquer la mécanique. Dans le fond, on a vu, au début du
projet de loi, que les exceptions, dans le fond, rattachées... Bien, en fait,
je reprends. Le principe de base, en termes d'exemplarité de l'État, c'est que
l'État s'exprime exclusivement en français. Ça, c'est le principe de base.
Ensuite, on est venus avec des articles pour dire : L'État est exemplaire
lorsqu'il utilise exclusivement, à l'écrit, le français. Et on est venus
rajouter une disposition, par la suite, suite à celle-ci, pour dire : Dans
le fond, l'oral suit l'écrit. Donc, lorsque c'est possible d'utiliser l'écrit
dans une autre langue que le français, à ce moment-là, l'oral, ça sera possible
aussi. Tu sais, dans le fond, la disposition générale au début du chapitre, c'est
ce qu'elle dit, elle dit : S'il y a une exception pour l'écrit, bien, la
même exception s'applique pour communiquer à l'oral dans une autre langue que
le français. Donc, quand c'est écrit «à l'écrit», ça couvre également l'oral.
Mme Ghazal :
Mais, si c'est juste... C'est-à-dire, ça n'existe pas, des dispositions
uniquement pour l'oral?
M.
Jolin-Barrette : Non. Tout est rattaché à l'écrit.
Mme Ghazal :
O.K. Et donc on aurait pu ne pas écrire «à l'écrit» puis dire «communication de
façon générale», ça aurait inclus oral et écrit?
M.
Jolin-Barrette : Non, mais c'est parce que, dans le fond, ça prend un
facteur de rattachement. Donc, pour permettre à l'État de communiquer dans une
autre langue que le français, dans le fond, on le rattache à l'écrit. Donc,
quand c'est possible de le faire à l'écrit, c'est possible de le faire à
l'oral.
Mme Ghazal :
Donc, ce que je comprends ici, à 22.3, lorsque c'est écrit «lorsqu'il écrit»,
il faut aussi que ce soit à l'oral? Ça va suivre, s'il y a... l'exception ici
s'applique?
M. Jolin-Barrette : Dans le fond, vu que l'exception à l'écrit, elle est là, ça inclut
l'oral aussi, à cause de la...
Mme Ghazal :
O.K. Donc, il ne faut pas que je la voie de façon exclusive?
M.
Jolin-Barrette : Non, à cause de la disposition qui est plus tôt dans
le chapitre.
Mme Ghazal :
O.K., je comprends. Très bien. Bien, écoutez, je vais déposer mon amendement.
La Présidente (Mme
Guillemette) : ...pour l'amendement. Est-ce qu'il est sur le Greffier
déjà, M. le secrétaire? Donc, comme il est déjà sur le Greffier, on n'a pas
besoin de suspendre quelques instants. Je vais vous le... je vais vous laisser
l'opportunité de le lire, Mme la députée.
Mme Ghazal : Donc, dans le
sous-paragraphe c du paragraphe 2° du premier alinéa de
l'article 22.3 introduit par l'article 15 du projet de loi, remplacer
«six premiers mois» par «trois premières années».
Et là, ici... oui, c'est ça, dans les six premiers
mois de leur arrivée au Québec. Et l'idée derrière ça, ça nous a été présenté
par plusieurs organisations qui sont venues en commission parlementaire. Il y a
eu aussi des communications, ensuite, notamment dans les médias, pour nous
parler de cette inquiétude de dire que, quand des immigrants, même des
immigrants reçus, temporaires, des réfugiés encore plus, toutes les personnes
qui arrivent au Québec, dans les six premiers mois... Il y a beaucoup,
beaucoup, beaucoup de choses à faire dans une vie. Moi, j'avais 10 ans et
demi, je me rappelle de ce moment-là, puis on est venus dans des belles
conditions, quand même, au Québec, il y a plusieurs années. Et donc ce n'est
pas réaliste de penser que les nouveaux arrivants vont parler le français. On
comprend que le gouvernement n'est pas en train de dire qu'ils vont devenir
parfaitement bilingues, et toutes leurs communications vont être en français,
on comprend que ça va être baragouiné, puis c'est accepté. Mais même ce
niveau-là n'est pas évident, surtout si ces immigrants-là vont communiquer à
l'écrit, à l'oral, de toutes les façons, avec les services de l'État.
Il y a une... je vais référer à une lettre qui a
été écrite, une lettre publiée dans La Presse le 27 novembre
dernier, Les services publics essentiels doivent être exemptés. Mais ce
qui est important, dans la lettre, et à plusieurs moments c'est écrit, et je
veux quand même poser la question au ministre, là, même si je suis en train de
parler de mon amendement : Est-ce qu'ils prennent pour acquis que le
recours à des interprètes payés par l'État va être prohibé, interdit? Un des
collègues avait posé la question, un peu plus tôt cette semaine, en demandant
au ministre : Est-ce que le recours aux interprètes est permis ou pas? Le
ministre, il a dit : C'est permis. Mais ce qui manque dans l'information
et dans la réponse du ministre : Est-ce que le recours à des interprètes
est permis même pour les nouveaux arrivants après six mois? Ça, ce n'était pas
clair. Et, partout dans les communications des organisations et des groupes... cette lettre-là a été signée par
1 000 chercheurs, professionnels et intervenants impliqués auprès des
personnes immigrantes et réfugiées, partout, partout dans leurs communications,
ils sont sûrs et certains qu'après six mois on ne peut plus faire affaire aux
interprètes de l'État. Et je voudrais entendre le ministre là-dessus, est-ce
que c'est vrai?
La Présidente (Mme Guillemette) : Donc,
on va y aller sur l'amendement, Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Oui.
La
Présidente (Mme Guillemette) :
Puis ensuite on reviendra sur la grande discussion. Donc, est-ce qu'il y
a des interventions sur l'amendement...
Mme Ghazal : Bien, en fait, c'est
que la discussion... Peut-être que j'aurais pu poser la question des
interprètes avant de déposer, parce que ça fait partie de la discussion,
donc.... Oui.
La Présidente (Mme Guillemette) : Allez-y,
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Non, ce n'est
pas interdit, les interprètes. Ça sera toujours possible d'avoir un interprète.
En aucun cas on ne prohibe l'utilisation d'un interprète. Il faut bien
comprendre la disposition...
Mme Ghazal : ...
M. Jolin-Barrette : Bien, ça dépend
des situations. Exemple, à la cour, bien entendu, il y a des interprètes qui
sont payés par l'État. Ce qu'il faut comprendre, c'est que... le portrait de la
situation actuellement. Actuellement, on est dans une situation où l'État
québécois a une sorte de bilinguisme institutionnel, donc c'est du clientélisme.
La personne souhaite parler dans une autre langue que le français, l'État lui
parle dans une autre langue que le français. Ça,
il faut changer ça. Parce que, si on veut changer la situation du français au
Québec, il faut que l'État soit exemplaire. Donc, les communications de l'État sont exclusivement en français avec
tout le monde, sauf les exceptions. On a vu les exceptions : les
ayants droit ou ceux qui communiquaient déjà avec l'État dans une autre langue
que le français au moment du dépôt du projet de loi.
Pour ce qui est de la situation des nouveaux
arrivants, le principe dans la loi, de base, c'est : jour 1 où la
personne immigrante arrive au Québec, c'est exclusivement en français aussi.
Ça, c'est le principe de base, l'État va parler en français avec les nouveaux
arrivants. Parce que, si on veut réussir l'intégration, il faut que l'État soit
exemplaire, et la langue de l'État, la langue de la nation, c'est le français.
Ça, c'est indéniable puis c'est ce qui n'a pas été fait au cours des années. C'est
pour ça qu'on se retrouve avec un déclin du français, notamment, parce que
l'État n'a pas été exemplaire pour favoriser, pour faire la promotion puis pour
surtout intégrer en français.
Puis vous m'avez souvent posé des questions sur
les cours de francisation, la disponibilité. Là, quand j'étais au ministère de
l'Immigration, on a rajouté des sommes, on a ouvert aux temporaires, on a
ouvert à temps partiel, des allocations aussi. Mais il faut continuer dans ce
sens-là. Puis c'est pour ça que Francisation Québec est là, aussi, pour aller
franciser en entreprise.
Donc, je reviens à la
question du six mois. Le six mois est une période de temps supplémentaire,
c'est une exception, comme l'exception pour les ayants droit et pour ceux qui
communiquaient avec l'État, avant, dans une autre langue que le français. On
permet une période tampon de six mois pour permettre à l'État de communiquer
dans une autre langue que le français avec les nouveaux arrivants. Parce que le
message, il est très clair : c'est en français qu'on accueille et qu'on
fait l'intégration des personnes immigrantes. Parallèlement à ça, l'objectif
étant de faire en sorte que l'inscription à l'école puisse être faite : un
logement, le travail, l'inscription à l'assurance maladie, toutes les démarches
administratives pour que ça se fasse de la bonne façon. Mais, après une période
de six mois, l'État communiquera en français avec les personnes immigrantes.
À votre question : Est-ce que c'est
possible d'avoir un interprète?, la question, c'est oui. L'objectif est de
faire en sorte que tout le monde qui demande un service public pourra avoir son
service public.
Mme Ghazal : J'ai plein de choses à
discuter avec le ministre, je dois aller voter. Est-ce que je peux demander
qu'on suspende, s'il vous plaît?
La Présidente (Mme Guillemette) : On
va suspendre...
M. Jolin-Barrette : ...en attendant,
tu sais, ne roulons pas sur l'amendement, mais, si les collègues du Parti
libéral ont des questions...
La Présidente (Mme Guillemette) : Si
on suspend...
Mme Ghazal : C'est quelque chose qui
a été voté, comme... je pense que le leader le sait.
La Présidente (Mme Guillemette) : ...la
suspension pendant les votes. Donc...
M. Jolin-Barrette : Ah! c'est pour
ça, vous représentez votre groupe parlementaire. C'est bon.
La Présidente (Mme Guillemette) : Oui.
Donc, on va respecter l'entente et nous allons suspendre quelques instants, le
temps de laisser le temps pour le vote.
Donc, suspension.
(Suspension de la séance à 12 h 49)
(Reprise à 12 h 57)
La Présidente (Mme Guillemette) : Donc,
nous reprenons les travaux. Nous sommes sur un amendement déposé par Mme la
députée de Mercier.
Mme
Ghazal : Merci, Mme la Présidente. Donc, j'ai écouté la
réponse du ministre, donc ce que je comprends, c'est que, par rapport à
la question des interprètes... Parce que ce n'est pas clair. Ça, c'est un
élément fondamental. Si le ministre avait dit, maintenant... il avait répondu,
à ma question, oui, comme il avait répondu, il y a quelques jours, par
rapport aux interprètes, même après six mois, je pense que, là, ça aurait été
beaucoup, beaucoup plus, peut-être, compréhensible, la question des six mois.
Mais de dire que, six mois et un jour, quand une
personne immigrante, réfugiée, hein, parce qu'il y a toutes sortes de situations d'immigration, qui fait appel
au gouvernement pour des services essentiels en santé, pour les enfants,
par exemple... est-ce que, pour ces services-là, il est possible d'avoir des
interprètes ou pas? J'aimerais savoir. Parce qu'il a dit : Oui, il est
possible. Mais ça, c'est une question fondamentale et importante. Parce qu'à un
moment donné j'y ai pensé, quand il a répondu, ah! que c'est possible d'avoir
des interprètes même après six mois, ça vient changer beaucoup les choses. Est-ce que c'est le cas ou pas? Puis, s'il dit «ça
dépend», qu'il nous explique plus en profondeur dans quelle situation,
dans quel cas. Ça, c'est un élément très, très, très important qu'il devrait
clarifier. Merci.
La Présidente (Mme Guillemette) : Deux
minutes, M. le député... M. le ministre, il vous reste deux minutes pour
la réponse.
M. Jolin-Barrette : Oui. O.K. Bien,
dans le fond, en lien avec la question, la députée de Mercier nous dit,
exemple : Pour la santé des enfants, là, bien, déjà, 22.3.1°,
«lorsque la santé [...] naturelle l'exigent», donc on est... Même si vous êtes
une personne immigrante, au-delà de six mois, là vous tombez sous le coup
de 1°, de l'exception à 1°, donc
l'État pourra communiquer avec vous dans une autre langue que le français.
Même chose, l'article 15, la loi sur la
santé et services sociaux, prévoit déjà que les services peuvent être donnés dans une autre langue que le français, peu
importe si vous êtes un ayant droit, peu importe si vous communiquiez
avant avec l'État. Donc, un nouvel arrivant qui... je ne sais pas, ça fait deux
ans, O.K., qu'il reçoit des soins de santé, c'est possible pour lui que l'État communique
avec lui dans une autre langue que le français. C'est déjà prévu à l'article 15 de la loi sur la santé et
services sociaux. Ça, il n'y a rien qui change par rapport à ça, ça fait que...
Allez-y.
Mme Ghazal : L'article 15,
c'est dans une autre langue ou c'est juste l'anglais? Il me semble que j'avais
lu l'anglais aussi. Là, je ne l'ai pas devant moi, là, l'article 15 de la
loi sur la santé et services sociaux, j'avais compris que ce n'était pas pour
les... c'était juste pour les ayants droit et que c'était applicable à toutes
les institutions francophones ou anglophones, là. C'est juste pour l'anglais ou
c'est une autre langue, qui est écrit dans l'article, là? Je ne l'ai plus
devant moi.
M. Jolin-Barrette : Ce n'est pas...
l'article 15, ce n'est pas pour les ayants droit. La façon dont il est
formulé... et c'est en anglais.
• (13 heures) •
Mme Ghazal : C'est ça. Mais moi, je
parle... Oui, c'est ça, je l'ai ici, devant moi, c'est ça, exact, anglais. Et, dans mon esprit... parce qu'il ne faut pas faire
l'amalgame que, quand c'est une personne immigrante, automatiquement
elle parle en anglais. Il y en a qui vont baragouiner, il faut penser ça. Moi,
je parle d'interprètes de toutes les langues.
M. Jolin-Barrette : Bien, vous
marquez un très bon point. Puis ça, c'est le coeur du débat aussi. Parce que,
souvent, on se fait dire, dans différents domaines, dans le fond... Bien, une
personne qui est allophone, prenons le cas de la cour, O.K., quand vous allez à
la cour...
La Présidente (Mme Guillemette) : Il
est 13 heures, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Rapidement, je
termine. Je termine.
La
Présidente (Mme Guillemette) : Je vous laisse quelques secondes. On continuera
nos échanges après le dîner.
M. Jolin-Barrette : Vous marquez un
excellent point, Mme la députée de Mercier. Ça ne veut pas dire qu'une personne
qui n'est pas de langue maternelle française et qui est un allophone,
nécessairement il s'exprime en anglais. Vous avez tout à fait raison.
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci.
Donc, compte tenu de l'heure, la commission
suspend ses travaux jusqu'à 14 heures, où nous pourrons continuer nos
discussions. Merci. Bon appétit, tout le monde.
(Suspension de la séance à 13 h 01)
(Reprise à 14 h 06)
La Présidente (Mme Guillemette) :
Bon après-midi, tout le monde. Donc, la Commission de la culture et de
l'éducation reprend ses travaux. Nous poursuivons l'étude détaillée du projet
de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune
du Québec, le français.
Donc, lors de la suspension de nos travaux, nous
étions à l'étude de l'amendement à 22.3 de Mme la députée de Mercier. Mme la
députée.
Mme Ghazal : Oui, merci, Mme la
Présidente. Donc, quand on a arrêté, le ministre disait que j'avais posé une excellente question, celle de dire que, quand
les immigrants arrivent au Québec, il ne faut pas nécessairement leur parler en anglais, parce qu'il y en a beaucoup qui
ne parlent pas nécessairement l'anglais, contrairement à la croyance
générale. Et ma question, c'était par rapport aux interprètes. Parce que, moi,
ce que je demande, c'est de prolonger la période
de six mois, si on veut, la période de grâce pendant laquelle on pourrait parler
d'autres langues, pas nécessairement, uniquement l'anglais, d'autres
langues avec les nouveaux arrivants, qu'ils soient permanents, réfugiés,
temporaires, tout le monde, qui ont tous des situations de vie différentes et
arrivent avec des difficultés différentes.
Donc, la question, c'est par rapport aux
interprètes. Et à date... Il y a beaucoup, beaucoup de services, hein, publics
auxquels les gens vont faire appel, il y a la santé, l'éducation, etc., mais
commençons par la santé, puisqu'on parlait de ça. Et le ministre référait à
l'article 15 qui est dans la loi sur la santé et les services sociaux, qui
parle de l'utilisation de la langue anglaise. Donc, j'aimerais que le ministre
continue sa réflexion. Pourquoi est-ce qu'il fait référence à cet article-là?
Est-ce que cet article-là fait en sorte que les gens qui sont ici, les nouveaux
arrivants qui sont ici depuis plus de six mois peuvent de façon systématique
faire appel à un interprète, mais juste en anglais? J'aimerais qu'il précise sa
pensée.
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, l'amendement, là, de la députée de
Mercier est sur le fait de passer de six mois à trois ans. L'article 15 de
la loi sur la santé et services sociaux, ce que ça fait, c'est que la personne
peut recevoir des soins de santé soit en français soit en anglais au Québec.
Donc, l'article 15 n'est pas limité uniquement aux ayants droit. Mais,
moi, mon souhait, c'est de faire en sorte que les personnes s'intègrent en
français à la société québécoise. Et ce qu'on dit, c'est : Vous choisissez
le Québec, la langue officielle de l'État, c'est le français, et ça se passe en français. Donc,
on donne une période, un délai de six mois pour l'État, à titre d'exception,
pour communiquer avec les nouveaux arrivants dans une autre langue que
le français. Les autres exceptions prévues à 22.3 s'appliquent également aux
nouveaux arrivants.
Mme Ghazal :
Et la question des interprètes?
M.
Jolin-Barrette : La question des interprètes, ce n'est pas interdit
d'avoir recours à un interprète, là.
Mme Ghazal :
Payé par l'État.
M.
Jolin-Barrette : Bien, ça, ça dépend des circonstances.
Mme Ghazal :
C'est ça que je veux entendre. C'est quoi, les circonstances?
M.
Jolin-Barrette : Oui, mais l'État ne s'engagera pas à avoir un
interprète pour dans 30 ans à toutes les situations qui sont présentes,
là. On va faire en sorte de donner le service public destiné à la personne.
• (14 h 10) •
Mme Ghazal :
Mais moi, je veux juste être sûre qu'on revienne à ce que je dis. Moi, je n'ai
pas dit 30 ans. Puis je ne veux pas,
comme à chaque fois que je pose une question, le ministre me dise : Le
français, c'est important, tout ça.
Je veux dire, il m'entend, il sait que je suis une personne qui défend
énormément la langue française, et je suis très, très sincère, puis je
ne le fais pas uniquement dans cette Assemblée, je le fais partout dans ma vie
depuis très longtemps.
Donc, je veux revenir
à la question que je pose. Les interprètes, est-ce que c'est possible, par
exemple, pour un... Quand on dit ici «santé», pour un examen de routine, on va
voir un médecin ou on rencontre une infirmière, une personne qui est ici depuis
sept mois, et elle ne parle ni français ni anglais, de toute façon,
l'article 15, de parler en anglais, ne s'appliquerait pas à cette
personne-là parce qu'elle est ici après la loi, donc après l'adoption de la
loi, donc cette personne-là, est-ce que... Les professionnels de la santé qu'elle
va rencontrer, est-ce qu'ils peuvent faire appel à un interprète pour bien
communiquer avec cette personne-là qui est ici depuis sept mois?
M.
Jolin-Barrette : Il n'y a rien qui interdit de faire appel à un
interprète.
Mme Ghazal :
O.K. Donc, pourquoi, quand je pose la question : Est-ce que c'est possible
après une période de six mois, bien, le ministre me dit : Il ne faut pas
que ça dure 30 ans? Donc, s'il me dit qu'il n'y a rien qui interdit de
faire appel à un interprète après six mois...
M.
Jolin-Barrette : ...votre question.
Mme Ghazal :
O.K.
M. Jolin-Barrette : Ce que je vous dis, c'est qu'il n'y a rien qui interdit de faire appel
à un interprète. Au-delà de six mois ou en tout temps, quelqu'un peut
avoir recours à un interprète.
Mme Ghazal :
Payé par l'État?
M.
Jolin-Barrette : Pas nécessairement.
Mme Ghazal :
O.K. Pourquoi le «pas nécessairement»? Pourquoi il ne dit pas : Non, pas
du tout, et le ministre dit : Pas nécessairement?
M.
Jolin-Barrette : Bien, ce n'est pas un droit à ce que l'État paie un
interprète.
Mme Ghazal :
Et pourquoi, des fois, on va le faire? Parce qu'on va avoir pitié de la dame
avec laquelle on n'est pas capable de parler?
M.
Jolin-Barrette : Ça dépend de chacune des circonstances.
Mme Ghazal :
Et qui va décider quelles sont les circonstances qui vont permettre aux
professionnels de la santé de faire appel à un interprète?
M.
Jolin-Barrette : Ce n'est pas différent de la situation actuelle.
Mme Ghazal :
Je ne comprends pas.
M.
Jolin-Barrette : Bien, actuellement, l'État ou le citoyen peut avoir
recours à un interprète.
Mme Ghazal : Payé par l'État?
M.
Jolin-Barrette : Non.
Mme Ghazal :
Moi, les interprètes payés par les gens riches qui ont l'argent pour payer les
interprètes, ça, ce n'est pas quelque chose... ce n'est pas là ma discussion,
ça ne me préoccupe pas. Je parle des interprètes payés par l'État, ce qu'on
appelle la banque d'interprètes interculturels, par exemple, du ministère de la
Santé et des Services sociaux. Une dame réfugiée...
M.
Jolin-Barrette : Je veux juste qu'on revienne au principe, là.
Mme Ghazal :
Le principe... Non, mais c'est très important, moi, je ne veux pas que le
ministre me fasse... défende la langue française à moi, même je trouve ça,
même, insultant de me défendre la langue française et son importance au Québec
à moi.
M.
Jolin-Barrette : Je le fais à tout le monde.
Mme Ghazal :
Mais je l'ai déjà entendu mille fois...
M.
Jolin-Barrette : Bien, je l'ai déjà entendu...
Mme Ghazal :
...et on est d'accord.
M.
Jolin-Barrette : ...mais vous ne voulez pas entendre.
Mme Ghazal :
Je ne veux pas parce qu'on perd du temps. Le ministre veut qu'on adopte le
projet de loi.
M.
Jolin-Barrette : Vous voulez avoir une réponse que je ne vous donnerai
pas.
Mme Ghazal :
Moi, j'ai fait très, très, très peu de temps parce que je veux aller sur le
fond des choses puis les sujets les plus importants dans cette loi qui est
importante. Donc, ma question, c'est... elle est très claire, je vais donner un
exemple très concret. Une femme réfugiée qui vient d'accoucher, admettons, puis
là ça fait sept mois qu'elle est au Québec,
et elle veut faire... en fait, elle veut des services de santé, là, des soins
de santé pour son enfant, et elle ne parle pas un mot ni de français ni
d'anglais. Est-ce qu'elle a le droit d'avoir... de faire appel... Est-ce
qu'elle peut demander, elle peut exiger qu'il y ait un interprète payé par
l'État qui vienne faire... en fait, interpréter, faire la... dans ses
communications entre elle et le professionnel de la santé? Est-ce que c'est
permis?
M. Jolin-Barrette : Donc, dans l'état actuel du droit, ne prenez pas le projet de loi
n° 96, là, on oublie le projet de loi
n° 96, à votre question, actuellement, est-ce qu'une personne, sur le
territoire québécois, a le droit d'exiger d'avoir un interprète pour
recevoir tout service public dans n'importe quelle langue existante au monde?,
la réponse, c'est non.
Mme Ghazal :
La réponse, dans l'état actuel, c'est non. Pourquoi?
M. Jolin-Barrette : Je ne sais pas, c'est comme ça. Mais je comprends que la proposition de
Québec solidaire, là, ça serait de dire... On enlève le projet de loi
n° 96, là, l'état actuel, là, ça arrive parfois qu'il y a des interprètes,
dans certaines circonstances. Ce que Québec solidaire nous dit, c'est que
l'État québécois devrait, dans tous les cas, conférer un droit à toute personne
présente sur le territoire du Québec d'obtenir des services publics dans toutes
les langues qui existent au monde.
Mme Ghazal :
Non. En fait...
M.
Jolin-Barrette : C'est ça, votre proposition.
Mme Ghazal :
Dans l'état actuel, dans l'état actuel... et il y a eu le Syndicat de la
fonction publique qui nous a dit qu'il n'y en a peut-être pas assez, il n'y en
a pas assez, d'interprètes, qu'il faudrait qu'il y ait une banque, qu'il
faudrait mettre des ressources et investir. Ça, c'est comme un autre sujet.
Est-ce que, dans
l'état actuel, la personne qui est ici depuis plus de six mois, c'est le
statu quo par rapport aux interprètes, que la situation... C'est-à-dire, est-ce
que... Est-ce qu'après l'adoption du projet de loi la personne qui est ici, le
nouvel arrivant, depuis plus de six mois, est-ce qu'il va être... est-ce
qu'on... il va être dans le statu quo par rapport à la situation actuelle?
Je ne sais pas si le ministre comprend ma question.
M.
Jolin-Barrette : La réponse, c'est oui, c'est le statu quo par
rapport à la situation actuelle.
Mme Ghazal :
O.K. Et est-ce que la situation actuelle est acceptable? Ça, ça serait... ça,
c'est une autre question. Et, comme je le disais, le Syndicat de la fonction
publique disait qu'il faudrait qu'il y ait plus... qu'on fasse plus appel à des
interprètes, d'investir un peu plus. Et ça, j'y reviendrai un peu plus loin.
Pourquoi six mois? Moi, je propose trois ans.
M.
Jolin-Barrette : Bien, en
fait, le... ce n'est pas six mois, c'est zéro mois, hein, le principe, là,
c'est zéro mois. L'État québécois s'exprime en français aux nouveaux
arrivants dès leur arrivée au Québec. Au Québec, c'est en français que ça se
passe. Ce qu'on met, c'est qu'on met une clause d'exception pour une période de
six mois, une clause transitoire pour une
période de six mois où l'État peut communiquer dans une autre langue que le
français. Et je vous poserais la question : Pourquoi trois ans? Six
mois, c'est une période qui est raisonnable, c'est une période d'exception, c'est une période qui fait en sorte,
là, que la langue de l'État, c'est le français, on vous accueille en
français.
Cela étant
dit, toute personne qui requiert un service public auquel il a droit au-delà de
la période de six mois, supposons, où il y a une exception, l'État
québécois va faire comme actuellement, il va s'assurer de donner le service
public auquel la personne a droit. Et ça pourra être un recours à un
interprète, comme c'est le cas actuellement, c'est sur demande, selon les
besoins.
Mme Ghazal : Puis est-ce que... Si,
par exemple, la nouvelle, le nouvel immigrant parle un peu anglais ou le
baragouine, est-ce que ça va être possible aussi de lui parler en anglais? La
réponse, c'est oui, à cause de l'article 15. Non, l'article 15, ce
n'est pas pour les nouveaux, c'est juste pour les ayants droit et ceux qui sont
ici avant l'adoption du projet de loi n° 96.
M.
Jolin-Barrette : Non,
l'article 15 de la loi sur la santé et services sociaux ne fait pas
référence aux ayants droit.
Mme Ghazal : Il fait référence à
qui?
M. Jolin-Barrette : Il dit que des
services en langue anglaise peuvent être donnés.
Mme Ghazal : À n'importe qui qui le
demande parce que c'est de la santé.
M. Jolin-Barrette : Mais la façon
dont est constitué l'article 15 fait en sorte qu'il ne vise pas un groupe
populationnel particulier. Donc, une personne qui se présente à l'hôpital, qui
veut être servie en anglais, en fonction de l'article 15, peut l'être.
Mme Ghazal : O.K. Et dans le système
de l'éducation, par exemple, est-ce que c'est le cas?
M. Jolin-Barrette : Bien, dans le
système d'éducation, c'est différent, les enfants issus de l'immigration
doivent aller à l'école française.
Mme Ghazal : Je parle, par exemple,
des parents. Je vais vous donner... Je me rappelle, là, moi, quand je suis
arrivée au Québec, j'étais dans une classe d'accueil. Donc, je suis restée dans
une classe d'accueil, c'était deuxième cycle du primaire, pendant un an. Et, à l'approche
de la fin de l'année ou un petit peu avant, là, mes parents ont rencontré mon
professeur. Mes parents parlaient anglais, et je me rappelle de ce moment-là où
mon professeur parlait de la classe d'accueil, parlait avec mes parents en
anglais pour leur dire à quel point j'étais une élève exemplaire, qui apprenait
très bien le français. Et donc il y a eu cette discussion-là en anglais, mais
ça faisait plus que six mois qu'on était là. Est-ce que cette situation-là va
continuer même après l'adoption du projet de loi?
M.
Jolin-Barrette : On va
s'assurer que les communications puissent être faites pour qu'elles soient
comprises.
Mme Ghazal : Ça veut dire quoi?
M. Jolin-Barrette : Bien, ça
signifie que le principe est au niveau de l'exemplarité de l'État. Le principe,
à la base, c'est que c'est en français que
les communications de l'État ont lieu et qu'il y a une période transitoire de
six mois pour les nouveaux arrivants, mais la langue au Québec, la
langue d'intégration, la langue commune, c'est le français. Parce que, si on
continue dans le statu quo, là, de toujours avoir du bilinguisme institutionnel
au sein de l'État québécois, là, on n'en sort pas, là. Vous savez quels sont les
défis à Montréal particulièrement, là. Ce n'est pas... Le Québec, ce n'est pas
le Canada, là. Et il y a un message très clair à envoyer que, lorsqu'on vient
au Québec, c'est en français, et on intègre
en français, on va mettre toutes les démarches nécessaires, les cours de
francisation, Francisation Québec est là également. Donc, il faut
vraiment s'assurer que ça se passe en français.
Mme Ghazal : Mais, pour le
bilinguisme institutionnel, le ministre a accepté qu'il continue dans la
fonction publique, qu'il continue pour les
personnes qui sont ici, par exemple, depuis 40 ans, puis qui n'ont jamais
appris l'anglais ou qui ont toujours
communiqué... Ça fait que le ministre accepte un certain bilinguisme
institutionnel. C'est la décision.
Maintenant, pour les nouveaux arrivants, pour
les nouveaux arrivants, je vais répéter ma question. On a parlé du système de
santé, et le ministre a répondu que, oui, c'est possible pour même un examen de
routine, pas uniquement pour des urgences, c'est possible d'utiliser un
interprète. Maintenant, pour l'éducation, l'exemple que je lui ai donné, qui
est réel et qui arrive aujourd'hui, est-ce que c'est possible, dans le système
d'éducation, quand il y a une conversation
avec l'enseignant qui essaie d'expliquer s'il y a des problèmes ou pas avec
l'enfant de ces personnes-là qui sont ici depuis sept, huit mois, par
exemple... est-ce que c'est possible que les communications se passent, là, je
ne vais pas dire un interprète, là, parce que ça devient compliqué, mais, disons,
en anglais?
M.
Jolin-Barrette : On va s'assurer que les communications puissent être
comprises par la personne. Je donne un exemple, la personne qui est ici depuis
cinq ans, qui ne parle pas français et qui a droit à un service public, on va
s'assurer de pouvoir lui donner le service public également.
• (14 h 20) •
Mme Ghazal : Comment on va s'assurer
de ça? J'ai besoin des moyens, parce qu'on est dans les exceptions. Le
principe, on est tous d'accord, puis c'est facile à comprendre. Maintenant, les
exceptions, il y a beaucoup de détails, et le diable est dans les détails.
Comment est-ce qu'on va s'assurer... C'est quoi, les moyens que le ministre se donne pour s'en assurer? Et jusqu'à quelle
période? Le ministre m'a parlé de cinq ans. Il est beaucoup plus
permissif que moi. Moi, je dis trois ans, après ça on suppose qu'avec tous les
moyens que le gouvernement va mettre en place, parce qu'ils ne sont pas encore
là tout à fait, tout le monde va pouvoir parler le français correctement. Donc...
M.
Jolin-Barrette : Actuellement, là, enlevez le projet de loi n° 96, là, on a des gens au Québec
qui ne parlent ni français ni anglais, et ils reçoivent des services
publics, et l'État s'arrange pour qu'ils reçoivent des services publics.
Mme
Ghazal : Et comment il
s'arrange, par exemple, pour l'éducation? Il permet... C'est-à-dire que
l'enseignant ou le professionnel du système de l'éducation ne sera pas pénalisé
s'il parle une autre langue pour s'assurer que les citoyens aient l'information.
C'est accepté. Il ne sera pas pénalisé.
M. Jolin-Barrette : Il y a des
banques d'interprètes qui existent. Vous avez, là, dans les écoles, à Montréal,
des gens de différentes provenances,
différentes cultures, différentes langues, et les écoles réussissent à
communiquer avec les parents et à fonctionner. Et ça ne changera pas.
Mme Ghazal : Donc, c'est le statu
quo.
M. Jolin-Barrette : C'est le statu
quo pour faire en sorte que les gens obtiennent les services publics auxquels
ils ont droit. Chaque personne recevra les services publics auxquels il a
droit. Mais chaque situation est un cas d'espèce, donc chacune des
situations... et c'est selon le besoin, selon la situation que c'est évalué,
là.
Mme Ghazal : Donc, le six mois, il
vient changer quoi, puisque c'est le statu quo?
M. Jolin-Barrette : Parce que ça ne
passe pas par l'anglais systématiquement. Parce que ça ne passe pas par du
bilinguisme institutionnel. Parce que...
Mme Ghazal : ...
M. Jolin-Barrette : Parce que l'État
québécois, il doit cesser d'être institutionnellement bilingue. Là, actuellement, si on ne change rien, là, ça va
continuer. Vous avez vu les études du Conseil
supérieur de la langue française, de l'OQLF également, là, où est-ce que
les fonctionnaires... puis ils sont venus nous le dire, là, les membres du Syndicat
de la fonction publique puis les membres du syndicat des professionnels du
gouvernement du Québec également, ils sont venus nous le dire, là, à quel point
leurs membres devaient absolument utiliser une autre langue que le français
dans le cadre des communications. Ça, ça signifie qu'on ne réussit pas à
intégrer en français les personnes immigrantes. Donc, il faut faire en sorte
que l'État communique en français. On se donne un délai de six mois comme marge
de manoeuvre, mais, très clairement, au départ, la personne est accueillie en
français. On fait les efforts pour l'intégrer en français puis la servir en
français, pour lui donner son service public.
Mme Ghazal : Donc, le six mois,
l'objectif, c'est que ça ne soit pas en anglais, mais ça peut être en arabe, en
italien, en grec, en lituanien, en d'autres langues. C'est ça que je comprends.
M. Jolin-Barrette : Bien non, c'est
que tout soit en français.
Mme
Ghazal : O.K.
Parce que, je ne sais pas, j'avais compris que... O.K., alors c'est quand même
le statu quo, c'est ça que le
ministre me dit, c'est le statu quo. On met le six mois comme de manière
symbolique. Si c'est la même
chose puis rien ne change... Je ne comprends pas, il faudrait plus de
précisions, M. le ministre, c'est un peu confus.
M. Jolin-Barrette : Vous m'avez
demandé dans un continuum de services, O.K.? Actuellement, l'État, dans les
services, du jour au lendemain, la personne veut parler en anglais, ça se passe
en anglais. La personne veut parler en français, ça se passe en français, O.K.?
L'État est institutionnellement bilingue. Ce qu'on fait, c'est qu'on dit... on
envoie un message très clair aux gens qui choisissent de venir au Québec :
ils arrivent, c'est en français. Puis, même en
amont, savez-vous quoi, on donne des cours de français en ligne à l'étranger.
J'ai même, lorsque j'étais ministre de l'Immigration, renforcé cette
disposition-là pour qu'on mette davantage d'efforts pour dire : Attention,
vous venez au Québec, ça se passe en français au Québec. J'espère que vous
n'êtes pas en train de me dire que vous ne voulez pas que ça se passe en
français au Québec pour les nouveaux arrivants. Parce que ça...
Mme Ghazal : ...sur mon sujet, là,
ne me dites pas tous les efforts que vous faites pour franciser le Québec.
M.
Jolin-Barrette : Bien, pourquoi pas?
Mme Ghazal :
Je les connais.
M.
Jolin-Barrette : Je vous explique le portrait global puis la mécanique
de la loi. Alors, c'est bien important de comprendre ça.
Mme Ghazal :
J'ai compris.
M. Jolin-Barrette :
Bien, je pense, pas encore. Donc là, on est dans une situation où la personne
arrive au Québec, jour 1, c'est en français que ça se passe. C'est ça, le
principe. La personne qui va répondre aux nouveaux arrivants va dire :
Bonjour, et ça ne sera pas «Hi!» Si la personne souhaite communiquer en
anglais, on va quand même tout de même tenter de communiquer en français, hein,
pour faire les efforts pour intégrer au sein de la société québécoise en
français. Si, manifestement, ce n'est pas le cas, on permet une exception à
l'État de dire : Vous pouvez communiquer dans une autre langue pour une
durée de six mois. Au-delà du six mois, ça sera en français.
Mme Ghazal :
Sauf exception.
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, l'objectif, là, c'est de ne pas
laisser personne sur la paille. Donc, on n'est pas dogmatique et on fait en
sorte de s'assurer de trouver une façon que la personne reçoive son service
public.
Mme Ghazal :
Moi, j'ai déjà entendu le ministre beaucoup plus convaincant que ça dans
d'autres sujets. Sur le six mois, quand je pose la question : Pourquoi six
mois, pourquoi pas sept mois, pourquoi pas... Moi, j'ai dit trois ans. Le
Regroupement des organismes en francisation, je leur ai posé la question :
Que pensez-vous de deux ans? Parce qu'eux autres, ils contestaient le six mois,
ils disaient que ça n'a pas de bon sens, je veux dire, ce n'est pas réaliste,
c'est vraiment ne rien comprendre à la réalité des personnes issues de
l'immigration, qu'eux et elles côtoient tous les jours. Et là je leur ai posé
la question : Deux ans? Ils ont dit : C'est déjà... oui, c'est
raisonnable. Six mois, ce n'est pas raisonnable. Moi, je propose trois ans. Je
veux dire, après ça, quelqu'un d'autre pourrait dire cinq ans. Le ministre, tout
à l'heure, quand je lui ai posé la question, il a dit : Imaginons
quelqu'un qui est là depuis cinq ans, si on
veut s'assurer qu'il comprenne, bien là, on va pouvoir s'assurer qu'il
comprenne puis, s'il faut utiliser un interprète, on va l'utiliser, parce
que c'est ça qui est important.
Donc, c'est quoi, la
raison du six mois si les exceptions peuvent durer même après le six mois? Moi,
quand je dis trois ans, je le faisais beaucoup plus sérieusement, dans le sens
que c'est trois ans, puis, trois ans et un jour, c'est terminé, là, il n'y a
pas d'exception, tu as appris le français. Mais le ministre est prêt à ce qu'il
y ait des exceptions jusqu'à cinq ans.
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, ça me surprend un petit peu
d'entendre ça de Québec solidaire, vraiment, parce que je ne mets pas en doute
la position, mais qu'est-ce qui arriverait avec une personne qui voudrait un
service public au-delà de trois ans? Actuellement, on trouve des solutions puis
on va continuer de trouver des solutions. Ce n'est pas une exception après six
mois, là. Après six mois, c'est la fin, l'État québécois continue de
communiquer en français avec la personne. Puis c'est le plus beau geste qu'on
peut faire, d'accueillir en français, d'inviter en français, d'intégrer en
français. C'est ça qu'il faut changer. Donc, la personne sait que, dès le
départ, c'est en français que la personne, elle communique avec l'État. On met
une clause de six mois pour faire en sorte d'amener
une certaine transition, mais, au-delà de six mois, c'est en français. Si
jamais il y a des situations particulières
en fonction des besoins particuliers, puis on est vraiment dans une
impossibilité impossible, on va s'arranger pour que la personne reçoive
ses services publics.
• (14 h 30) •
Mme Ghazal : Je
suis une enseignante dans une école où... Écoutez, je l'ai déjà vu, je suis
allée visiter mon école secondaire à Laval, où j'ai été étudier. On était,
quoi, 50-50, peut-être 40 % immigration, 60 %... puis là je vous parle il y a très, très longtemps, là,
30 ans, puis 60 % des gens de la majorité, là. Puis là, récemment, je
suis allée, puis c'était... écoutez, c'était... je pense, c'était
97 %, selon ce que les gens m'ont dit, de population immigrante. Même les
professeurs, il y en avait beaucoup.
Je suis une
enseignante, et la loi est adoptée, et la loi m'exige... je suis un employé de
l'État, exige qu'après six mois je ne peux pas m'adresser aux gens, ni à l'oral
ni à l'écrit, dans une autre langue que le français. Quel message je dois
entendre du ministre? Qu'est-ce qu'il dit en ce moment? J'ai une famille devant
moi, je veux parler, il y a des difficultés
avec son enfant, et je veux que la famille donne son consentement, par exemple,
pour des services d'orthophonie ou peu importe quel service, je ne suis
pas enseignante, donc je ne connais pas très bien ça, mais on a besoin... ils ont... l'enfant a besoin de
services, et on a besoin d'en parler et d'obtenir le consentement des parents, et ils ne me
comprennent pas, puis ça fait quelques années qu'ils sont ici. Je suis
enseignant. Là, c'est l'enseignant. Le ministre dit : Il y a un
message qu'on veut envoyer. Donc, je comprends qu'en tant qu'employé de l'État
il y a un message qui m'est envoyé de ne pas communiquer dans une autre langue
que le français pour des gens qui sont ici depuis plus de six mois. Je fais
quoi? J'entends le ministre et, comme enseignante, je ne sais pas qu'est-ce que
je dois faire. Est-ce que ça devient une exception? Mais le ministre dit qu'il
n'y a pas d'exception après six mois. Il dit que c'est la situation actuelle.
La situation actuelle, c'est jusqu'à la fin de la vie, là. On n'exige pas que
ce soit en français. La situation actuelle, c'est systématiquement bilingue.
M.
Jolin-Barrette : Madame... Est-ce que vous avez fini votre
intervention?
Mme Ghazal : Bien,
allez-y. Je suis... essayais d'imaginer l'enseignant. Qu'est-ce que vous lui
dites dans cette situation particulière?
M.
Jolin-Barrette : Non, je n'irai pas dans des cas particuliers puis des
cas d'exception. Ce que je vais vous dire, c'est qu'actuellement l'anglais
prédomine, et il n'y a pas de limite, hein? Et, dans le fond, le fait de ne pas
encadrer cela, ça fait en sorte que ça amène une bilinguisation
institutionnelle dans l'ensemble des services de l'État québécois, et c'est à
ça qu'on s'attaque. On met fin à ça par le projet de loi n° 96. Et donc le
fait de ne pas légiférer à ce niveau-là, ça fait en sorte que l'État, dans le
fond, si on ne légifère pas, va continuer comme il fonctionne et va donner tous
les services au gré de la clientèle. La personne préfère se faire servir en
anglais? Ça va être en anglais. Je ne pense pas que c'est ça que vous
souhaitez.
Mme Ghazal : Ça,
c'est les principes, puis, tous les principes, je les comprends. Je suis dans
les exceptions. J'aurais pu être, je vais utiliser le mot que le ministre a
utilisé, dogmatique et dire : Il faut exempter tous les services publics
du six mois, sauf quelques-uns. Je n'ai pas dit ça. Je n'ai pas dit qu'il faut
exempter pour toujours. Je dis de prolonger le six mois à trois ans. Est-ce que
le ministre est d'accord avec ça? Je vois qu'il hoche de la tête. Est-ce qu'il est d'accord? Est-ce qu'il trouve que six
mois, c'est raisonnable pour une personne normale qui change de pays,
qui change de situation, qui vient avec sa famille, qui doit travailler, apprendre
le français, etc.? Est-ce qu'il trouve que c'est
raisonnable d'apprendre une langue étrangère en six mois? Supposons que notre
langue maternelle n'est pas une langue proche du français, là, est-ce
qu'il y a des experts que... Est-ce que le ministre a consulté des experts qui
disent que c'est possible?
M.
Jolin-Barrette : Ce n'est pas une question d'apprentissage de la
langue. C'est une question de la langue de
l'État et la dispensation des services publics, et ce n'est pas six mois, c'est
à l'arrivée. À l'arrivée, c'est en français, et la clause de
l'exception, elle est à six mois. Allez dans les autres États dans le monde,
c'est la langue de l'État nationale qui s'applique. Le Québec n'est pas
différent, ici, au Québec, et, si on veut changer l'usage linguistique du
Québec, il faut faire des efforts, et c'est ce qu'on fait.
Mme Ghazal : Dans
les autres États dans le monde, quand on a quelqu'un devant nous qui ne
comprend pas la langue, même si ce n'est pas
écrit ni six mois, ni zéro, ni rien, même si on dit qu'il faut que vous...
qu'on va communiquer avec vous avec
la langue nationale dès que vous descendez de l'avion, même si on dit ça, sur
la réalité... dans la réalité, sur le terrain, il y a de l'anglais, il y
a d'autres langues qui sont parlées, parce que l'objectif, c'est que les
personnes puissent avoir les services puis qu'elles comprennent. Maintenant,
comme le ministre a décidé de mettre six mois... et, encore une fois, je ne
conteste pas le principe, je conteste le délai.
M.
Jolin-Barrette : Et, si on veut faire en sorte de vraiment amener les
personnes à faire des efforts à s'intégrer en français, le message que l'État
doit envoyer... autant, au niveau de l'exemplarité, il doit changer ses
comportements, mais aussi le message envers les gens qui choisissent de venir
au Québec, c'est un délai qui permet de fonctionner au niveau de la vie
courante, de s'installer au Québec, mais de tout de suite migrer vers la langue
française. Et, l'argumentaire relativement à l'apprentissage, il y a des gens
qui, pendant 20 ans, suivent des cours, et ne maîtrisent pas, et ne font
pas l'apprentissage d'une langue. Donc, si je suis le raisonnement de la...
Mme Ghazal : Pourquoi?
Est-ce que c'est par mauvaise volonté?
M. Jolin-Barrette :
Aucune idée, mais c'est une situation factuelle. Ça arrive qu'il y en a qui
ne réussiront pas à apprendre une langue.
Mme Ghazal : Mais
comment ils font pour vivre, ces gens-là qui ne parlent pas la langue du
Québec, la langue officielle commune?
M.
Jolin-Barrette : Comme dans n'importe quel autre pays, la question se
pose aussi.
Mme Ghazal : Mais
comment ils font pour vivre leur vie, pour mettre du pain sur la table de la
famille? Comment ils font s'ils ne parlent pas la langue?
M.
Jolin-Barrette : C'est la question que je vous pose. Est-ce que c'est
différent en Allemagne? Est-ce que c'est différent au Brésil? Est-ce que c'est
différent aux États-Unis? Non. Mais là on est vraiment dans une question, et
vous le savez, relativement aux défis auxquels nous faisons face. Nous devons,
au Québec, envoyer un signal très fort que nous accueillons en français les
personnes immigrantes et que l'État ne communique pas dans une autre langue que
le français avec les personnes immigrantes. L'État québécois, il est de langue
française, et il faut arrêter et cesser le bilinguisme institutionnel au sein
de l'État.
Mme Ghazal : Donc, le six mois,
la raison pourquoi il est là, c'est un message, mais la langue française, au
Québec, ne doit pas être juste un message. Elle doit être un outil pour vivre.
Et, s'il y a des gens qui sont capables de vivre avec une
autre langue que le français, c'est parce que, pour vivre, c'est-à-dire pour
nourrir leurs familles, pour travailler, ils
peuvent, en ce moment, travailler dans une autre langue. Donc, même si on exige
des employés de l'État de ne pas
parler, après six mois, quand la... six mois après l'arrivée du nouvel
arrivant, dans une autre langue que le français, ces personnes-là, pour
trouver du travail, surtout dans la grande région de Montréal, pour travailler,
pour vivre, peuvent vivre dans une autre langue totalement. Donc, que le monde
du travail privé...
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Ah! il aurait fallu me
dire combien de temps j'avais.
La Présidente (Mme Guillemette) :
C'est tout le temps que nous avions.
Mme Ghazal : Je n'ai pas pensé poser
la question.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement qui a été déposé par
Mme la députée de Mercier? M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Oui. Je vais continuer
sur la même ligne parce que c'est une ligne qui est pertinente, et l'enjeu, ici...
Puis c'est désagréable de se faire répondre qu'on ne comprend pas, puis que
c'est clair pourtant, puis... Je veux dire, il n'y a personne, là, qui,
actuellement, ne considère pas l'enjeu du français comme étant quelque chose à
régler, personne, personne.
M. Jolin-Barrette : ...pas.
M. Barrette : Non, Mme la
Présidente...
M. Jolin-Barrette : Ça ne paraissait
pas à la période des questions non plus puis ça ne paraissait pas au point de
presse d'André Fortin...
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le ministre, s'il vous plaît...
M. Jolin-Barrette : ...ni du
collègue de D'Arcy-McGee.
La Présidente (Mme Guillemette) : ...on
reste sur la discussion d'aujourd'hui, s'il vous plaît.
M. Barrette : Mme la Présidente,
puisque le ministre veut absolument aller là-dessus, je peux y aller, ça ne
dérange pas... ça ne me dérange absolument pas.
La Présidente (Mme Guillemette) : On
se concentre sur l'amendement de Mme la députée de Mercier, s'il vous plaît.
M. Barrette : Bien, Mme la
Présidente, vous avez bien raison, mais vous devriez plutôt suggérer au
ministre de rester sur l'amendement et ne pas faire ce genre de commentaire là
qui ouvre la porte...
Alors, à l'affirmation selon laquelle un
caquiste, c'est un Québécois, bien, ça veut dire que ceux qui ne sont pas caquistes ne sont pas des Québécois et ça
traduit toujours... Vous savez, Mme la Présidente, moi, ce que j'aime
dans cette situation-là, je vais vous le dire. Là, là, quand on se met les
pieds dans les plats, on se cherche des excuses, et puis là, là, des excuses
qui ont été exprimées : est fatigué, c'est la pandémie. Mais moi, je vais
vous dire une chose, Mme la Présidente, là, quand on est fatigué, certaines
barrières tombent, et la vérité sort, et j'ai l'impression que ça ressemble à
la vérité. J'ai l'impression. Je ne prête pas d'intentions, Mme la Présidente.
J'ai l'impression que ça ressemble à ça. Et,
quand je regarde l'ardeur que le ministre vient de prendre pour défendre...
faire ce commentaire-là, ça me donne comme la certitude maintenant
d'avoir raison. Ça fait que...
Et, ce matin, pour ce qui est de ses
commentaires, mon collègue, qui a fait ses commentaires tout à fait bien
articulés, respectueux, factuels, n'a pas du tout, du tout, du tout remis en
cause l'importance du français. Je pense qu'il commence toutes ses phrases par
l'importance du français. Ça fait que c'est désagréable. Alors, on nous prête tout le temps des intentions, et, à chaque fois
qu'on dépose un argument qui ne va pas dans le sens absolu du discours
du ministre, ah! on est contre ci, on est contre ça, puis, bon, on est pour la
bilinguisation de la société.
• (14 h 40) •
Bon, j'en reviens, Mme la Présidente, à
l'amendement déposé par la collègue de Mercier. L'enjeu de l'amendement, là... Si la collègue de Mercier
n'était pas là, j'aurais déposé moi-même un amendement, parce que
l'enjeu de l'amendement, ce n'est pas la
défense du français. Ce n'est pas ça, l'enjeu de l'amendement. L'enjeu de
l'amendement, c'est de s'assurer que la
personne immigrante, en l'occurrence, soit capable de réussir à se franciser en
six mois. Et, selon tous les gens du
milieu... Moi, j'ai le même message, Mme
la Présidente. Dépendamment d'où on
vient, dépendamment de ses référents linguistiques, moi, je peux vous
dire une chose, évidemment, vous ne serez pas surprise, c'est mon comté, je peux vous dire que de passer du mandarin
au français, ce n'est pas simple. Je vais même vous dire une chose aussi surprenante : Passer du français au mandarin, ce
n'est pas simple, et passer du russe au français, ce n'est pas simple. Toutes les langues de l'Europe de l'Est,
ce n'est pas simple. D'autres régions de la planète, ce n'est pas
simple. Passer de l'espagnol au français,
là, passer de l'italien au français, ce n'est pas compliqué. C'est vrai, là,
qu'en six mois, là, ça se fait. Moi,
je le vois dans mon comté. On a aussi beaucoup d'immigration d'Amérique du Sud.
C'est spectaculaire, Mme la Présidente. Les enfants, ça leur prend deux
mois max, ils parlent français. Les adultes, s'ils sont dans le bon environnement, je suis convaincu qu'en
six mois c'est raisonnable. D'autres pays d'origine, c'est, en quelque
part, déraisonnable.
Alors, il y a une espèce de couperet. C'est
comme une guillotine, là, qu'on applique. On arrive arbitrairement puis on dit
«six mois». Nous, on arrive puis on dit : Bon, M. le ministre,
pourriez-vous slaquer un peu, là, puis mettre un délai plus long? C'est ça
qu'on dit. Alors, ce n'est pas compliqué. Alors, ça, ça ne veut pas dire qu'on
est pour la bilinguisation de l'État, pour ceci, qu'on est contre ci puis
contre ça, non. On est-tu capables, ici, en commission parlementaire, comme
législateurs, de prendre l'article vu du citoyen, considérer qu'un citoyen
immigrant qui vient d'un pays où la langue est très, linguistiquement parlant,
loin du français puisse avoir besoin de plus de six mois?
Là, j'entends déjà le ministre me
répondre : Bien, nous, on veut qu'il fasse un effort. Oui, c'est correct
et c'est ça que ça va... La loi n° 96, Mme la
Présidente, faites-vous en pas, ça va demander bien des efforts à cette
catégorie de citoyens là. Bon, on sait que, s'ils ne sont pas caquistes, ils ne
sont pas Québécois, là, apparemment, mais on le sait, que ça va demander des
efforts. Est-ce qu'on peut leur donner une chance de succès plus garanti,
qui'ils ne viendront pas leur nuire après ou, par exemple, qu'ils ne viendront
pas les inciter à sacrer leur camp, hein, dans une autre province? On peut-tu
faire ça?
Alors, je vais poser une question bien simple au
ministre, là, bien, bien, bien simple : Est-ce qu'il a des données qui
montrent, là, qu'apprendre le français... il est raisonnable de décréter, à toutes
fins utiles, que six mois, c'est assez? Son
six mois, là, il est venu comment? Il est venu d'une idéologie caquiste ou il
est venu d'une expertise de gens qui
l'ont en matière d'apprentissage d'une langue seconde, qui devient primaire,
mais une langue étrangère? Parce que, pour eux, là, le français, là,
c'est une langue étrangère. Alors, question, elle est simple : Ça sort
d'où, le six mois?
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Alors, Mme la Présidente, ce n'est pas le six
mois, c'est le zéro. Dès l'accueil, dès l'arrivée, c'est en français que
ça se passe. Puis je tiens à souligner à cette commission, là, Mme la
Présidente, que le député de La Pinière, là, vient faire l'argument de la Sun
Life comme en 1977, l'argument du Parti libéral, hein : Ils vont quitter
le Québec, hein, les capitaux vont fuir parce que les Québécois décident de
protéger leur langue nationale, de protéger le français, d'affirmer qu'au
Québec on vit, on travaille, on intègre les personnes en français, ils vont
fuir le Québec, un message de peur comme les libéraux font depuis 43 ans,
hein? Qu'est-ce qu'ils faisaient quand ici même, hein, il y avait l'étude
détaillée du projet de loi de la loi 101? Ils faisaient le même genre
d'argument : Ils vont s'en aller, hein, comme la Sun Life, le même
argument que Michel Leblanc a fait quand il est venu en commission
parlementaire, la même chose.
Honnêtement, la cheffe du Parti libéral nous
disait jusqu'à récemment : Ah! nous, le Parti libéral, on est rendus nationalistes. Manifestement, ça a changé
entre avant Noël puis aujourd'hui parce qu'on est revenus à l'époque de
l'ancien gouvernement, plus canadien qu'il le faut. C'est ça, la position du Parti
libéral. À chaque fois qu'il est question d'améliorer concrètement la situation
linguistique au Québec, le Parti libéral mets du bâton dans les roues. Et
savez-vous ce qui me fait rire, Mme la Présidente? Le député de La Pinière fait
référence au député de d'Arcy-McGee qui dit : Mme la Présidente, le ministre,
ce n'est pas correct, là, ce qu'il dit, il dit... À chaque fois que le député de d'Arcy-McGee intervient, là, il nous dit
à quel point c'était important pour lui, le français, il nous dit ça.
Bien, c'est vrai, je suis d'accord avec le député de La Pinière, c'est vrai
qu'à chaque fois que le député de D'Arcy-McGee intervient il dit : Ah! c'est important, le français. Avez-vous vu
un geste, un geste, de la part du député de D'Arcy-McGee, pour protéger
et promouvoir le français? Non. C'est les deux pieds sur le brake puis c'est ça
que le Parti libéral fait.
Puis je ne voudrais pas être dans les souliers
du député de La Pinière, parce que son mandat, actuellement, c'est de faire en sorte qu'on n'avance pas sur la
protection des droits par rapport à la langue française, et c'est la
position que le Parti libéral a choisie. C'est la même position qu'on a vue au
salon bleu aujourd'hui, c'est la position de la Sun Life, hein : Ils vont
quitter le Québec parce qu'on affirme qu'au Québec le français est important,
qu'on protège la langue française.
Puis vous ne me direz pas qu'il n'y a pas des
problématiques, là, hein? Mais c'est sûr qu'entre 2014 puis 2018, quand ça demandait du courage, suite à un
jugement de la Cour d'appel, de rouvrir la loi 101, qu'est-ce que le
Parti libéral a fait? Ils ont adopté un
règlement. Ils n'ont pas voulu avoir la nette prédominance du français. On
s'est contentés de la présence
suffisante du français. Ça, là, c'est le Parti libéral, quand il est temps de
défendre la langue française, ils ne sont pas là. Puis la démonstration,
encore cet après-midi, qu'on a, c'est celle exercée par le député de La
Pinière.
Alors, sur le fond, Mme la Présidente, j'ai
répondu aux questions relativement aux six mois tout à l'heure, relativement au fait que c'est un délai qui permet
notamment l'inscription des enfants à l'école, l'obtention des premiers
services publics. C'est une clause transitoire. Au bout d'une période de six
mois, ce sera uniquement en français.
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci,
M. le ministre. M. le député.
M. Barrette : Alors, Mme la
Présidente, avez-vous entendu un seul mot, une syllabe d'un mot qui répond à la question : Ça vient d'où, ça, le six mois?
Avez-vous entendu une seule syllabe d'un seul mot qui répond à ma
question : C'est basé sur quoi, le six mois, basé...
hein, parce que moi, si je suis un ministre, puis que je regarde ça en fonction
du citoyen, puis que je me dis : Je vais lui demander de faire un effort...
O.K., je le sais, que je lui demande de faire un effort, je le sais là, O.K.,
mais moi, je suis un ministre, je suis bienveillant, hein? Je m'attends à ce
qu'il fasse un effort, puis, dans ma
bienveillance, qui n'est pas autoritaire, mais là elle l'est peut-être un peu
pas mal, je vais lui donner un délai
pour être sûr qu'il réussisse parce que je veux qu'il soit bien au Québec,
hein? La population immigrante, elle vient au Parti libéral pour une
raison, c'est parce que nous, on les respecte. Et, si nous, on est dans une
situation similaire...
Une voix : ...
M.
Barrette : Mme la Présidente, j'ai la parole. Est-ce qu'il y
a une question de privilège ici, Mme la Présidente?
M. Jolin-Barrette : ...c'est en
vertu de l'article 35. Le député prête des intentions.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Guillemette) : S'il
vous plaît, s'il vous plaît! On va continuer nos discussions dans le respect. Je l'ai dit ce matin, c'est un projet de
loi important, on se doit d'être respectueux et d'entretenir une
discussion saine et sereine.
• (14 h 50) •
M. Barrette : ...important, ce que
vous dites là. Alors, nous, ce qu'on dit, au Parti libéral, là, c'est que, si
on est dans cette situation-là, on va comprendre qu'on va demander un effort et
on va avoir une attitude bienveillante. L'attitude bienveillante envers
l'immigrant qui vient au Québec, qu'on veut franciser, hein, cette attitude-là
exige essentiellement deux choses : un, qu'on lui donne accès à des cours
de francisation dans les délais appropriés, on a eu ce débat-là dans le passé, au début du projet de loi, et qu'on lui
donne une chance raisonnable de réussir. Pourquoi? Parce qu'on lui
demande un effort, c'est... Il y a deux voies là-dedans, là. Si on demande un
effort pour atteindre un but, il y a des
conséquences après. La conséquence après, on le sait, on l'a compris, là, c'est
qu'il n'y a plus de services en français... en anglais ou dans une autre
langue pour l'immigrant qui vient. C'est ça, la conséquence.
Alors, moi, là, si j'ai à faire ça, je vais
m'entourer d'experts qui vont me dire : Le six mois, là, M. le ministre, là, sept mois, huit mois, neuf mois, 10 mois,
un an, deux ans, deux jours sûrement pas, mais je vais me baser sur
quelque chose, d'où ma question... J'ai posé
une question bien simple, bien simple. Il n'y a pas de Sun Life là-dedans, Mme
la Présidente. Il n'y en a pas, parce que, nous, nos chiffres d'immigration,
ils étaient plus élevés que les leurs, un, et, deux, nous, on souhaitait qu'ils
se francisent aussi, et on le souhaite encore. Puis là le ministre va répondre
encore en politique, tout pour faire de la politique ici, en commission, jamais
pour répondre aux questions et jamais pour s'adresser aux vrais problèmes. Je
repose la question : D'où vient le critère de six mois, point d'interrogation?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le député. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, nous, on prend nos responsabilités par rapport à l'intégration puis
à la francisation des personnes immigrantes. On le fait. On a été le premier
gouvernement à s'assurer que l'entièreté de la
somme de l'entente Canada-Québec, l'accord Gagnon-McDougall-Tremblay, soit
consacrée à 100 % à l'intégration des personnes immigrantes.
Qu'est-ce que faisait le collègue de Robert-Baldwin à l'époque où il était
ministre des Finances? Il mettait ça dans le
fonds consolidé du revenu puis il n'envoyait pas ça au ministère de
l'Immigration. Les services de francisation étaient sous-financés par le
Parti libéral. Les services d'intégration étaient sous-financés par le Parti libéral. L'allocation qui était donnée
aux personnes immigrantes pour apprendre le français, ce n'était
pratiquement rien. On l'a augmentée, on en a
créé une à temps partiel et, même, on a ouvert les cours de francisation aux
personnes en situation temporaire.
Et d'ailleurs
ça devrait réjouir le député de D'Arcy-McGee, qui faisait ça... référence à ça,
mais je m'explique mal comment son gouvernement n'a pas fait toutes ces
démarches-là pour bien s'assurer d'intégrer en français les personnes
immigrantes. Mais la réalité des choses, c'est que le Parti libéral n'en avait
rien à cirer, d'intégrer en français les
personnes immigrantes, parce que tout ce que souhaite le Parti libéral du
Québec, c'est le bilinguisme institutionnel de l'État québécois. Il
souhaite que ça continue mur à mur, d'une façon qui est bilingue, nonobstant le
fait que la langue française, c'est la langue de l'État québécois. Alors, Mme
la Présidente, si le député de La Pinière veut faire du temps, c'est son
choix. Je vais le laisser faire du temps, mais j'ai déjà répondu à la question.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le ministre. M. le député de La Pinière.
M. Barrette : La députée de
Mercier lui a posé la question presque dans les mêmes mots que moi. Je lui pose
la question. Tout ce qu'on a, c'est de la rhétorique, ce n'est que de la
rhétorique, c'est un discours.... Tu sais, les gens qui nous écoutent, là,
quand je pose une question, là, pour savoir ce qui se passe, ils peuvent
l'écouter puis, après, ils peuvent mettre «mute» pendant la réponse du ministre
parce qu'il ne répond pas à la question.
Alors, Mme la Présidente, voici ce que l'on a
obtenu du ministère de l'Immigration aux derniers crédits de 2021. Ça, ce sont... La question qui était posée,
elle était simple. C'est drôle, hein, parce que les fonctionnaires, eux
autres, ils sont capables de répondre aux questions. Alors, la réponse, ce
n'était pas bien, bien compliqué, là, c'était le délai moyen entre la date
d'émission de l'avis d'admissibilité et le début des cours de français au
Québec sous le régime caquiste, O.K.? Je vous énumère
pour toutes les régions du Québec, là, sans m'arrêter dans aucune région, parce
que ça prendrait beaucoup trop de
temps : 57, 72, 52, 52 — c'est
les jours, Mme la Présidente — 69,
50, 79 — j'arrondis,
je ne donne pas de décimale — 60, 40, 90, 66, 59, 31 jours avant
de pouvoir commencer son cours de francisation. Et, à la personne à qui on dit
que tu as six mois pour l'apprendre, le français, mais tu vas attendre
66 jours, ce qui est plus de deux mois, eh bien, ça, ça veut dire que cet
immigrant-là, là, il lui reste quatre mois pour apprendre le français. Pas
pire, hein? Bien, le 66 jours en question, Mme la Présidente, c'est
Montréal, et le 90, Mme la Présidente, c'est la Montérégie, alors, et Laval,
c'est 60.
Dans le discours... Tu sais, quand il refuse de
répondre, le ministre, à la question, bien, ma question devient encore plus
légitime, parce qu'avec ces chiffres-là dans les trois régions du Québec où la
majorité des immigrants s'installent, Montréal, Montérégie, Laval, ça prend
deux à trois mois avant d'avoir accès au cours de francisation, O.K., ce qui signifie qu'avec la règle de 96 ils
vont devoir apprendre le français en trois à quatre mois, et là on est
étonnés de voir ça. On est étonnés. On se
dit : Le ministre a dû réfléchir, le ministre a dû consulter des experts.
Le ministre, quand il est dans son bureau, là, il ne doit pas passer sa
journée à se dire : Là, je vais regarder toutes les déclarations passées
du Parti libéral parce que, si je tords un peu la question, je vais pouvoir répondre
de cette manière-là, ce qui fait un spectacle intéressant mais pas du bon
parlementarisme.
Alors, si on est ici, là, pour améliorer le
projet de loi sur cet enjeu-là, là... Parce que c'est de cet enjeu-là dont on parle, Mme la Présidente. On parle d'un
amendement, là, l'amendement de la collègue de Mercier, qui, si j'ai
bien compris son amendement, suggère d'avoir une période de transition de trois
ans, pas d'empêcher la francisation. Ce n'est pas ça qu'elle a dit, ni moi. On
peut-tu leur donner la chance de réussir avant d'être pénalisés par :
c'est plate, là, mais vous ne les comprendrez pas, vos communications avec le
gouvernement, puis on ne fera plus rien pour vous autres, arrangez-vous? C'est
ça, la réalité.
Alors, encore
une fois, Mme la Présidente, je repose la question : Quelles sont les
données d'expertises, s'il y en a... Peut-être qu'il n'y en a pas.
Alors, je vais reposer ma question : Y a-t-il des données scientifiques
d'expertises, d'expériences qui ont permis au ministre de déterminer que six
mois, c'était raisonnable? Je reprends le discours du ministre : On leur
demande un effort. J'imagine qu'il espère qu'ils vont réussir. Alors, il peut
me dire ça aussi. Est-ce qu'il espère qu'ils vont réussir? Alors, je repose ma
question : Y a-t-il des données? Peut-il nous les déposer?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le député. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, j'ai eu l'occasion de répondre, et c'est à l'accueil, donc, c'est
zéro, et le six mois permet une clause de transition. Et je l'ai réitéré à la
députée de Mercier, il ne s'agit pas d'une question liée à l'apprentissage,
c'est une question de faire en sorte que les services publics sont donnés en
français. Alors, ça ne peut pas être plus clair que ça. Alors, Mme la
Présidente, je suis en désaccord avec l'amendement qui est proposé par la
députée de Mercier, et nous, on est prêts à voter.
M. Barrette : Mme la
Présidente, malheureusement, l'horloge est de mon bord, alors je vais continuer
à utiliser mon temps qui... Il m'en reste combien, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Il reste combien de temps, monsieur... Cinq minutes, M. le député.
M. Barrette : Très bien, Mme la
Présidente. Est-ce que vous me donnez la parole, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Je vais... oui.
• (15 heures) •
M. Barrette : Merci. Alors
donc, Mme la Présidente, c'est important, je reprends spécifiquement les propos
du ministre, c'est au jour 0 qu'il doit parler français, mais on lui
donne... On lui fait la faveur d'avoir une période de transition. C'est une faveur parce que, pour le ministre, il faudrait
que ça soit le jour 0. C'est ça qu'il veut, lui, là, zéro, mais il a décidé de permettre une période de
transition. Bien, j'imagine que la période de transition, c'est pour
apprendre le français, après laquelle période de transition il y a un couperet
qui tombe, là, il n'y a plus rien, c'est en français, «that's it». C'est
correct, pas de problème avec ça. L'enjeu, c'est la transition. Je n'ai
toujours pas eu d'explication qui justifie la période en question, le six mois,
particulièrement avec des chiffres comme ceux qui viennent de son ministère.
C'est leurs chiffres, c'est eux autres qui disent que, là où les immigrants
s'installent le plus, ça prend trois à quatre mois avant d'avoir accès au
cours.
Alors, n'importe qui qui nous écoute, là, puis
qui se dit : Bon, est-ce que, pour quelqu'un qui vient, je ne sais pas, moi... On va peut-être recevoir bientôt des
gens de l'Ukraine, parce que, là, ça va mal, peut-être qu'on va avoir
une vague d'immigration ukrainienne. L'ukrainien, ce n'est pas loin du russe,
là, puis le russe puis le français, ce n'est pas
des langues vraiment similaires, ce n'est pas comme italien, espagnol,
français. Est-ce qu'il est raisonnable de demander à ces gens-là de
l'apprendre en trois à quatre mois dans la région de Montréal, la grande région
de Montréal, comme c'est le cas actuellement? C'est non, ça m'apparaît non, à
moins qu'il y ait des données provenant d'experts qui nous disent : Bien
oui, ça se fait, c'est sûr, sûr, sûr. Après trois, quatre mois, on l'a vérifié,
une personne, même si elle travaille, qu'elle fait un effort, oui, c'est raisonnable.
Bon. C'est correct. Je vais accepter ça, Mme la Présidente, si c'est vrai. Je
doute que ça le soit et je repose, je pense, pour la quatrième fois la même
question parce que je n'ai pas de réponse. Et, quand le ministre nous
dit : J'ai déjà répondu, bien non, ce n'est pas parce qu'il ne répond pas
quatre fois qu'il a répondu. Alors, y a-t-il des données justifiant le six
mois? Et, s'il y en a, est-ce qu'on peut les déposer et en
discuter, tout simplement, Mme la Présidente? Ce n'est pas favoriser la bilinguisation
du Québec, ça, là, là. Alors, j'ai posé ma question, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci. M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : J'ai déjà
donné ma réponse quatre fois. Je peux verser mes propos dans cette réponse-ci
aussi.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci.
M.
Barrette : Alors, est-ce que
je dois comprendre, Mme la Présidente, que le ministre n'en a pas, de
données?
M. Jolin-Barrette : Le député de La
Pinière ne doit pas tirer des inférences de ses propres questions qu'il pose
simplement pour écouler du temps et étirer le débat. La démonstration de ça,
Mme la Présidente, c'est que, systématiquement, il demande : Combien de
temps il me reste, combien de temps il me reste, combien de temps il me reste?,
juste pour pouvoir remplir du temps et ralentir le projet de loi. C'est son
mandat, je le conçois. Je trouve ça très déplorable sur le plan parlementaire.
M. Barrette : Mme la Présidente, on
me prête des intentions. Comme vous avez remarqué, Mme la Présidente, les
argumentaires que je fais sont longs. J'essaie d'avoir une phrase claire, puis
ça consomme du temps, pour que le ministre la comprenne bien et qu'il ne puisse
pas me dire : J'ai répondu à la question. Alors, c'est sûr que je vous
demande combien de temps qu'il me reste, parce que j'essaie d'être clair pour
éviter les réponses du ministre.
Alors, je recommence. Est-ce que, donc, son
absence de réponse signifie qu'il n'en a pas, de données?
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, je réitère, ce n'est pas une notion d'apprentissage du français.
Et, dès le départ... Et même, vous savez,
quand vous faites votre demande d'immigration, on donne des cours de
francisation en ligne également, dès le
départ, qui sont offerts à l'étranger pour s'assurer que, dès le départ, la
personne immigrante développe des
compétences langagières en langue française. Mais le message, il est très
clair : Au Québec, on accueille en français, on intègre en
français.
Je comprends que ça choque le Parti libéral
parce qu'il n'y a aucun effort qui a été fait au fil des années pour
véritablement faire en sorte de franciser les personnes immigrantes et surtout
d'envoyer un message clair de dire que c'est en français que ça se passe. Le Parti
libéral était bien assis, bien comme il faut, pour dire : C'est le statu
quo. Le Parti libéral avait des données linguistiques, notamment dans la région
métropolitaine de Montréal, où il voyait un déclin du français, où le Parti
libéral a participé à la contribution du déclin du français au Québec, Mme la Présidente. Et aujourd'hui on se retrouve dans la
situation périlleuse dans laquelle on est par rapport à langue française
parce que le Parti libéral souhaite que le Québec s'assimile en langue
anglaise. Le Parti libéral n'a aucune volonté, et c'est la démonstration la
plus concrète, de protéger la langue française.
Alors, que le Parti libéral agisse pour vrai,
qu'ils nous appuient dans le projet de loi n° 96, s'ils veulent vraiment
démontrer qu'ils protègent la langue française.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci. M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Mme la Présidente,
j'ai un amendement, mais j'ai... Il me reste combien de temps pour que je
puisse commenter ça et quand même présenter mon amendement?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Une minute.
M.
Barrette : Une minute. Ça va
être bref pour le commentaire du ministre, Mme la Présidente :
Franchement. Franchement! Je suis sûr, Mme la Présidente, que le ministre est
un adepte de la voile, compte tenu de sa capacité de louvoyer.
Ceci dit, je vais déposer un amendement, Mme la
Présidente. Je pense qu'il est sur Greffier.
La Présidente (Mme Guillemette) : On
va devoir voter sur cet amendement-là avant que vous puissiez déposer un nouvel
amendement, M. le député. Donc, on va devoir voter sur l'amendement déposé par
Mme la députée de Mercier.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Guillemette) :
Vote par appel nominal, s'il vous plaît.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. Mme Ghazal (Mercier)?
Mme Ghazal : Pour.
Le Secrétaire : M. Jolin-Barrette
(Borduas)?
M.
Jolin-Barrette : Contre.
Le Secrétaire : M. Lévesque
(Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) : Contre.
Le Secrétaire : M. Chassin (Saint-Jérôme)?
M. Chassin :
Contre.
Le Secrétaire : M. Émond
(Richelieu)?
M. Émond : Contre.
Le Secrétaire : Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?
Mme Foster : Contre.
Le Secrétaire : M. Poulin
(Beauce-Sud)?
M. Poulin : Contre.
Le Secrétaire : M. Lemieux
(Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
Le Secrétaire : M. Barrette (La
Pinière)?
M. Barrette : Pour.
Le Secrétaire : Et M. Bérubé
(Matane-Matapédia)?
M. Bérubé : Abstention.
Le Secrétaire : Mme Guillemette
(Roberval)?
La
Présidente (Mme Guillemette) : Abstention. Donc, l'amendement de Mme la députée de Mercier est
rejeté. M. le député de La Pinière, vous avez un nouvel amendement à nous
déposer?
M. Barrette : Oui. Je pense
qu'il est déjà sur Greffier.
La Présidente (Mme Guillemette) :
...quelques instants.
M. Barrette : Oui. D'accord.
La Présidente (Mme Guillemette) : On
va suspendre, le temps de déposer l'amendement. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 05)
(Reprise à 15 h 12)
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, nous reprenons les travaux, et M. le député de La Pinière a un amendement
à nous présenter. Donc, M. le député, la parole est à vous.
M. Barrette : Merci. Alors,
l'article 15 du projet de loi introduisant l'article 22.3 de la Charte
de la langue française est modifié par le remplacement, dans le sous-paragraphe
c du deuxième alinéa, des mots «les six premiers mois» par les mots «à la
première»... «la premiere année», pardon.
Ainsi, là, Mme la Présidente, le sous-paragraphe
c se lirait comme suit : «Fournir des services pour l'accueil au sein de
la société québécoise des personnes immigrantes durant la première année de
leur arrivée au Québec.»
Bon, je pense que c'est assez clair. Je vais
quand même faire un ou deux commentaires, Mme la Présidente, compte tenu des
échanges qu'on a eus précédemment.
Alors, je me plais
souvent à dire qu'on doit porter attention à la façon dont les gens s'expriment
pour comprendre leur façon d'organiser une pensée, dans leur esprit, qui est
verbalisée. Et ici, là, c'est un bel exemple. Et là il
n'y a pas de critique, il n'y a pas de jugement de valeur, il n'y a pas
d'intention, il n'y a pas d'insulte, il n'y a rien de ça, Mme la Présidente.
Le ministre,
régulièrement, nous a dit, dans ce dossier-là, sur ce sujet-là : Ce n'est
pas une question d'apprentissage, ce n'est
pas une question d'apprentissage parce que c'est en français depuis le
jour 0. Quand on lit c, Mme la Présidente, on comprend pourquoi le
ministre répond ça, parce que c'est vrai que dans c, il n'y a pas de question
d'apprentissage. C'est clair dans c. Ça, c'est comme ça que le ministre le
pense. Il nous dit : «Fournir des services pour l'accueil au sein de la
société québécoise des personnes immigrantes durant la première année de leur
arrivée au Québec.» Ce qu'il dit, là, c'est qu'ils pourraient communiquer en
anglais, là, ou une autre langue pendant la première année, mais la règle,
c'est français jour 0. O.K. Mais ce qui est implicite, et non explicite,
c'est que ça sous-entend qu'il doit y avoir un apprentissage. C'est vrai que ce
n'est pas nommé.
Alors, quand le
ministre dit : Bien oui, bien, il n'y a pas... ce n'est pas l'enjeu,
l'apprentissage, bien, je comprends le
ministre parce que, lui, là, c'est jour 0. Pour lui, le fait de mettre la
première année de transition, il n'y a pas de notion, dans son esprit,
d'apprentissage. Bien là, ça ne marche pas, là. C'est là que ça ne marche pas.
La faille, elle est là, Mme la Présidente.
On ne conteste pas sa
règle de jour 0 en français. On ne la conteste pas. On ne la conteste pas.
Tout ce qu'on dit et qu'on débat, c'est : La transition, elle est écrite
dans le texte de loi proposée à 96, elle est écrite pour permettre un
apprentissage. Ce n'est pas écrit explicitement, mais c'est ça que ça veut
dire.
Alors,
ça m'amène à poser une question : Est-ce que le ministre, là, quand il met
sa période de transition, est-ce que... la finalité de la transition,
est-ce qu'elle a d'autres buts que de faire l'apprentissage du français?
La Présidente (Mme
Guillemette) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, il n'y a pas de lien avec
l'apprentissage du français. Je l'ai dit et je le redis, ce n'est pas un
critère en lien avec l'apprentissage du français, c'est le fait que les
services de l'État... L'État s'exprime exclusivement en français, et c'est pour
l'accueil. Donc, dès le départ, c'est en français. Mais ce qu'on fait, c'est
qu'on fait une exception pour six mois, pour l'accueil. Ça signifie trouver un
logement, obtenir, supposons, des prestations gouvernementales, c'est-à-dire
inscrire les enfants à l'école, c'est-à-dire obtenir sa carte d'assurance
maladie ou son permis, le tout à l'intérieur de six mois. C'est pour l'accueil,
l'exception, à l'intérieur de six mois.
Et ce qui est
ironique dans les propos du député de La Pinière, c'est le fait qu'une
personne, là, qui vient au Québec, là, qui
décide de ne jamais se franciser, là, elle n'apprendra jamais le français.
Alors, son argument ne tient pas.
M. Barrette :
Fini?
M. Jolin-Barrette : Point. Son argument ne tient pas. Point. Je vais ponctuer mes
interventions, Mme la Présidente.
M. Barrette :
Bien, c'est parce que «son argument ne tient pas», ça n'a pas l'air de... C'est
une affirmation, là. Il n'y avait pas de fin. Mais là, O.K., c'est correct,
c'est fini.
Mme la Présidente,
alors je repose la question au ministre parce que son argument ne tient pas,
parce qu'il n'a pas d'argument d'exprimé : Quelle est la finalité d'avoir
mis ce texte-là? Là, le ministre me répond en donnant des exemples
d'application. Les exemples d'application, ce n'est pas une finalité :
avoir un loyer, un service gouvernemental... Non, non, ça, c'est de
l'application de c.
C'est quoi, la
finalité d'avoir mis une transition si ce n'est pas l'apprentissage du
français? C'est quoi, la finalité? Si la
finalité, c'est simplement... En fait, je ne la comprends pas, la finalité. Si
ce n'est pas l'apprentissage, je ne vois
même pas pourquoi on met ça là. Si on le met, c'est parce qu'il y a une
finalité, un objectif à atteindre, un résultat.
Si on prend l'exemple
du ministre puis qu'il dit... Mettons qu'on prend un immigrant qui n'apprendra
jamais, puis il ne veut pas l'apprendre, le français, bien là, j'imagine qu'il
ne pense pas que tous les immigrants sont comme ça, là, mais, pour celui-là,
c'est sûr que ça n'a aucun intérêt, là, cette phrase-là, il ne l'apprendra
jamais.
M. Jolin-Barrette :
...
M. Barrette :
Bon, vous voyez, Mme la Présidente, Michael Rousseau, ce n'est pas un
immigrant. Toujours, toujours à côté de la coche. Tout le temps, tout le temps,
tout le temps. Jamais sur le sujet. Mais ce n'est pas grave, les gens s'en
rendent compte. Aïe, aïe, aïe! Voter pour le Bloc, c'est voter pour à côté de
la coche. Ça, c'est... je veux dire, c'est
ça, le message aujourd'hui, là. Je fais de l'humour. Pas le Bloc, je m'excuse.
Bien, c'est le petit frère, la CAQ. Ah non! Je ne veux pas insulter le
député de... Aïe! Là, je m'embarque dans quelque chose. Oublions cette
phrase-là.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Député de La Pinière, s'il vous plaît, on revient...
M. Barrette :
Oublions cette phrase-là, Mme la Présidente. C'est un lapsus révélateur.
La Présidente (Mme
Guillemette) : M. le député de La Pinière, on revient sur le sujet,
s'il vous plaît.
M. Barrette :
Vous avez raison. Alors...
Des voix : ...
La Présidente (Mme
Guillemette) : Tout à l'heure, je vous donne un droit de parole, M. le
député de Matane-Matapédia.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Guillemette) : On
revient sur le sujet, s'il vous plaît.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Guillemette) :
Tout à l'heure, je vous donne le droit de parole, M. le député de
Matane-Matapédia.
Des voix : ...
M. Barrette : Alors, Mme la
Présidente, la question au ministre : C'est quoi, la finalité de ce
texte-là?
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, on voit que le député de La Pinière est lui-même mélangé dans ses
propos puis dans les concepts. Alors, le principe, c'est zéro, hein? À
l'accueil, à l'arrivée des personnes immigrantes, c'est en français que ça se
passe. Par contre, ce qu'on fait pour l'accueil, pour l'accueil des personnes
immigrantes, on donne une marge de manoeuvre de six mois à l'État québécois,
qui est tout à fait raisonnable pour l'accueil. L'intégration se déroule en
français.
• (15 h 20) •
M. Barrette : Mme la Présidente, je
n'ai toujours pas eu de réponse. Il me dit ce que ça fait à une question...
Première réponse, c'étaient les applications. Deuxième réponse, il me lit le
texte. Bien, c'est quoi, la finalité? Je lui demande la finalité. Il me dit que
ça n'a pas de lien avec l'apprentissage. La collègue de Mercier, là, a passé
tout son temps, avec raison, à vouloir avoir un délai pour l'apprentissage du
français. Moi, je fais des interventions qui vont dans le même sens avec un délai
différent.
Là, c'est assez spécial, là, Mme la Présidente,
là. Je serais curieux, si je posais la question à chacun des députés de la
partie gouvernementale — là,
maintenant, bon, je ne peux pas le faire — si eux autres pensent que la
finalité, c'est, oui ou non, d'apprendre le français. Je serais aussi curieux,
je pense que je vais le faire sur Twitter, là, puis... si vous écoutez la
commission : Pensez-vous que le délai, c'est pour l'apprentissage du
français? Je parie, Mme la Présidente, que les gens vont dire oui comme à
99 %, parce que, si le ministre répond, il ne va pas dire oui. Alors,
c'est quoi, la finalité si ce n'est pas l'apprentissage?
M. Jolin-Barrette : Alors, pour
l'ixième fois, c'est pour l'accueil de la personne immigrante. Le délai, c'est
zéro, O.K.? Zéro. Ça se passe en français dès le départ. Par contre, c'est une
marge de manoeuvre pour l'accueil, O.K.? On met dans le projet de loi
Francisation Québec, pour franciser les entreprises, pour franciser les
personnes immigrantes, pour le guichet unique, qui était d'ailleurs une
recommandation de la Vérificatrice générale sous votre gouvernement, que vous
n'avez pas mis en application. Je vous rappellerais que le rapport, en 2007,
était lapidaire ou même pire que ça par rapport au bordel qu'il y avait au
ministère de l'Immigration du Québec sous votre gouverne, mais ça, c'est autre
chose.
Alors, l'objectif, c'est, dans le cadre des
premières interactions, que ça se fasse en français, mais on donne la
possibilité que ça puisse être fait dans une langue autre que le français à
l'intérieur d'un délai de six mois. Ce n'est pas pour l'apprentissage du
français. Je ne peux pas être plus clair que cela.
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le député.
M. Barrette : Bon. Alors, on a... je
l'ai dit tantôt, Mme la Présidente, là, je comprends que ce n'est pas écrit
«pour l'apprentissage du français», mais là, de me dire que, même
implicitement, ce n'est pas ça, ça, ça veut dire, là, que, pour le ministre,
là, même implicitement, ce n'est pas une période de transition pour permettre à
ce citoyen-là, québécois en devenir, d'apprendre le français? Point
d'interrogation.
M. Jolin-Barrette : Ce n'est pas
relié à l'apprentissage du français, c'est un délai pour l'accueil, comme je
vous l'ai exposé tout à l'heure.
M. Barrette : Alors, quelle est la
finalité du délai? Il sert à quoi, ce délai-là? Pourquoi il ne met pas ça à
zéro, «that's it, that's all»? Oh! excusez, pardon, j'ai dit deux mots en
anglais, là.
M. Jolin-Barrette : Ça va. Vous avez
droit de vous exprimer dans la langue de votre choix ici, qu'elle soit en
anglais ou en français.
Des voix : ...
M. Jolin-Barrette : Mais il y a une
chose qui est sûre, je l'ai dit...
M.
Barrette : ...les plexiglas, Mme la Présidente, parce que ça m'empêche
d'entendre les pointes d'humour qui sont parfois amusantes.
M.
Jolin-Barrette : Vous n'êtes pas contre les directives de la Santé
publique?
M. Barrette :
Non. Regardez comment il est, Mme la Présidente. Je dis que j'haïs les
plexiglas, puis il suggère que je suis contre les directives de la Santé
publique.
M.
Jolin-Barrette : Ce n'est pas ça que j'ai dit. Je n'ai pas...
M. Barrette :
Bien oui, c'est ça qu'il a dit, Mme la Présidente.
M.
Jolin-Barrette : Je n'ai pas dit : Je vous suggère. Ce n'est pas
ça que j'ai dit.
La Présidente (Mme
Guillemette) : On revient sur le sujet, s'il vous plaît, messieurs. M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, c'est pour faire en sorte de permettre, dans une
certaine mesure, l'accueil, hein,
pour les services d'accueil. C'est en français dès le départ. C'est zéro. Hein,
on accueille en français les personnes immigrantes. Il y a une marge de
manoeuvre à l'intérieur de six mois pour utiliser une autre langue que le
français.
M. Barrette :
Pardon? Il y a une marge de manoeuvre pour utiliser une autre langue que le
français. O.K. Parfait. Il y a une marge de manoeuvre pour utiliser une autre
langue que le français.
M.
Jolin-Barrette : Vous savez que, cette phrase-là, Mme la Présidente,
je l'ai dite à deux autres reprises dans mes interventions précédentes.
Textuellement, la même, même phrase. Là, je comprends que le député de La
Pinière, comme... cherche une prise pour relancer tout ça, mais c'est la même
réponse.
M. Barrette :
Mme la Présidente, je l'ai, la prise. Je n'ai pas besoin de la chercher, je
l'ai dans les mains, là, puis je l'utilise abondamment, là. Ce n'est pas
subtil, cette situation-là, là.
Alors,
il va permettre l'utilisation d'une autre langue, et il va y avoir un couperet
après six mois, puis il n'y aura plus
l'utilisation d'autre langue. N'importe quelle personne raisonnable va conclure
qu'on veut que la personne apprenne le français, si elle ne l'a pas
encore appris. C'est un souhait. Et, au couperet, bien, il n'y aura plus
d'utilisation de l'autre langue. C'est tout,
là. Ce n'est pas bien, bien compliqué, là. Et, nous autres, ce qu'on dit
essentiellement, c'est qu'on devrait augmenter le délai.
Ça fait que c'est
quoi qu'on a aujourd'hui devant nous, là? On a un ministre, là, qui a une façon
que je qualifierai de simple, je vais le mettre juste de même, l'adjectif
«simple», de voir les choses. Bien non, regardez, Mme la Présidente, ce
délai-là, là, ce n'est pas pour apprendre le français, non. Le délai, là, c'est
un délai parce que c'est jour zéro en français. Mais non, là, ce n'est pas pour
apprendre le français, pas pour lui donner... c'est juste pour l'inciter à
apprendre le français. Puis même pas inciter. Puis, s'il ne veut pas
l'apprendre, qu'il ne l'apprenne pas, là, on va lui parler en anglais ou dans
une autre langue pendant six mois, puis après c'est fini. Alors, entre les deux, là, non, il n'y a aucune référence, là.
C'est juste une période de transition, puis c'est tout. C'est ça que je
comprends, là. Il n'y a pas de référence à l'apprentissage.
Conclusion :
Cher immigrant, quand tu arrives au Québec, ça se passe en français. On te fait
la faveur pendant six mois de parler une autre langue. On ne te demande même
pas d'apprendre le français, parce qu'il n'y a pas de référence. Si tu veux
parler en anglais après, bien, c'est à tes risques et périls parce qu'après six
mois, bien, ça va se passer en français. Vis ta vie. C'est tout. Ce n'est pas
plus compliqué que ça. C'est ça qu'il nous dit. Est-ce que, ça... c'est-tu
correct, ça, comme ça, point d'interrogation?
M. Jolin-Barrette :
Ce sont les propos du député de La Pinière. Moi, j'ai déjà répondu à sa
question à de multiples reprises. Je n'ai plus rien à rajouter.
La Présidente
(Mme Guillemette) : Merci, M. le ministre.
M. Barrette :
Est-ce que le ministre peut m'expliquer — là, me donner des vraies
raisons, là, des raisons basées sur des conséquences, là — quelle
serait la conséquence négative de passer à un an, tel que proposé?
M. Jolin-Barrette :
Mme la Présidente, ça, c'est l'approche du Parti libéral, et on la reconnaît
très bien : toujours, le plus possible, moins faire en sorte que l'État
québécois s'exprime en français, toujours tenter de limiter la protection associée à la langue française et à
l'exemplarité de l'État. Le Parti
libéral est à l'aise avec le
«free-for-all», puis ils veulent continuer dans ce sens-là. Le plus
possible où la loi sera la moins... la moins, je vous dirais...
Une voix :
...
M. Jolin-Barrette :
Moi, je veux utiliser le bon mot. Mais la démonstration, Mme la Présidente, est
à l'effet que toujours le Parti libéral tente d'amoindrir la loi et d'amener
des assouplissements dans la loi, toujours de dire : C'est
un souhait, vous le savez, nous, on souhaite protéger la langue française, on
est en faveur de la protection du français, mais sans aucune mesure.
Alors, pour le Parti
libéral, idéalement, l'article, il ne serait pas là pour dire, dans le
fond : Bien, c'est un délai qui est très long, comme c'était le cas
actuellement, où il n'y avait pas de délai, où est ce qu'il y avait un
bilinguisme institutionnel de l'État. Nous, ce qu'on dit, c'est : Dès
l'accueil, c'est en français. Par contre, on donne une marge de manoeuvre à
l'État québécois pour une période de six mois, pour pouvoir communiquer dans
une autre langue que le français pendant cette période-là. Ça m'apparaît tout à
fait raisonnable. Et, pour les motifs que j'ai énoncés précédemment, notamment
l'inscription à l'école, l'obtention des documents, pour l'accueil, trouver un
logement, tout ça, ça se fait dans l'accueil. Après six mois, vous... vous êtes
installés.
M. Barrette :
Vous avez remarqué, Mme la Présidente, que le ministre a cherché un mot
puis il ne l'a pas trouvé. Puis on est passés à un autre sujet, comme toujours,
la même affaire, Mme la Présidente.
Regardez, Mme la
Présidente, là, il n'y a personne, là, qui lit cet article-là qui ne comprend
pas que la conséquence de cet article-là est de nature de l'apprentissage du
français. C'est impossible. Il y a impossible... C'est impossible qu'une
personne qui regarde ça de l'extérieur, objectivement, même de l'intérieur, n'y
voie pas là une période de transition pour apprendre le français.
Bon. Le ministre
me... ah! comme d'habitude, là, il fait de la politique, là, puis il a bien,
bien fait l'histoire, là, il l'a apprise, là, de tout ce qui a été adopté, pas
adopté, puis ça l'amuse, puis tant mieux. Puis d'ailleurs je l'en félicite
parce qu'il est très bon pour ça. Vraiment, là, il a acquis, au fil du temps,
emmagasiné et structuré, dans son esprit,
une quantité très importante de données parlementaires. Je l'en félicite. Je
trouve ça toujours agréable d'entendre ça parce que c'est remarquable.
Je le remarque. Alors, si c'est remarquable, ce n'est quand même pas pire que
je le remarque en plus.
Mais, ceci étant dit,
c'est à côté de la track, comme d'habitude. Mme la Présidente, le
ministre, là, qui est dans ses grandes accusations éditoriales, là : Le Parti
libéral veut assouplir, ta, ta, ta... L'espérance de vie, Mme la Présidente,
pour l'être humain, là, au Québec, là, c'est, mettons, à peu près, là, une
moyenne hommes, femmes, là, 84 ans. Six mois de plus, là, ça va faire une
grosse différence, là. Ça peut en faire une, par exemple pour la qualité de
l'apprentissage, pour la conséquence qui vient avec le non-apprentissage dans
le délai requis.
Alors, ce qu'on me
reproche, ça ne tient évidemment pas la route. Puis la question que je lui ai
posée, c'était bien simple : C'est quoi, la conséquence de mettre ça à un
an? Qu'est-ce qui... en quoi ça nuirait, en termes de francisation de la société, on va le dire comme ça, parce que c'est ça
qui est l'objectif recherché par le projet de loi n° 96, une
francisation maximale? Je pense que ça, ce n'est pas un grand affront au projet
de loi de dire ça. C'est quoi, la conséquence négative de mettre ça à un an?
Moi, je n'y vois qu'une seule conséquence, puis elle est positive : donner
à l'immigrant le temps d'apprendre correctement le français et de ne pas être
pénalisé à la date butoir. Je ne vois qu'une
conséquence, une seule, elle est positive. Est-ce que le ministre peut
m'expliquer s'il y a une conséquence négative? C'était ça, ma question,
et je n'ai pas de réponse. Peut-être que, là, je vais l'avoir, on ne sait
jamais.
• (15 h 30) •
La Présidente (Mme
Guillemette) : Merci, M. le député, M. le ministre, avez-vous une
réponse?
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, j'ai déjà répondu. Moi, ce que je
souhaite savoir de la part du Parti libéral du Québec : Est-ce qu'ils sont
d'accord pour que l'intégration des personnes immigrantes, ça se fasse en
français au Québec?
M. Barrette :
Mme la Présidente, il n'y a aucun doute que nous souhaitons que la population
immigrante soit l'objet de la francisation la plus efficace possible. On n'a
pas de problème avec ça. Aucun.
M.
Jolin-Barrette : ...les moyens requis pour que l'intégration se fasse
en français, parce que manifestement votre bilan en la matière est peu
reluisant.
M. Barrette :
Si j'étais à la télévision, là, je ferais «Familiprix!» C'est toujours à côté
de la plaque. Tout le temps. J'ai posé une question simple, toutes mes
questions sont simples et directes. Quelles sont les justifications du six
mois? Quelles seraient les conséquences négatives de mettre ça à un an? Je peux
comprendre, là, qu'il ne veuille pas le mettre à trois ans, mais quelles
seraient les conséquences de le mettre à un an? Puis je ne dis pas que trois
ans, c'était mauvais, là, je dis que c'est plus intuitivement questionnable. Ce
n'est pas mauvais, c'est questionnable. Mais, entre six mois puis un an, là...
Puis l'autre
question, c'est : Comment ne pas penser que le délai n'a pas comme
finalité l'apprentissage? Bien là, là, écoutez, Mme la Présidente, c'est crois
ou meurs, là. Ça veut dire que, quand le ministre dit quelque chose, c'est
vrai, c'est absolu, j'ai raison, puis les autres ne peuvent pas émettre de
critique parce que toutes les critiques sont non recevables. Ça fait que, là,
dans ce débat-là, ce n'est pas compliqué, là, c'est irrecevable de penser que la transition avait pour objectif un
apprentissage adéquat. C'est inacceptable de penser que six mois, c'est
peut-être trop court et c'est absolument hérétique de penser qu'un an, ça
serait sans dommage, là, pour la politique du ministre. Là, c'est sûr
que les débats sont difficiles, là.
Alors, je repose la
question encore une fois : C'est quoi, la conséquence négative de mettre
ça à un an?
M. Jolin-Barrette : Alors, Mme la
Présidente, nous, on a fait le choix que ce soit à la date d'arrivée, donc
zéro, et de mettre une marge de manoeuvre jusqu'à six mois, qui est tout à fait
un délai raisonnable au niveau des services pour
l'accueil. Mais on souhaite tout de même les donner en français, ces
services-là, et c'est une marge de manoeuvre pour les donner dans une autre
langue que le français, si nécessaire, à l'intérieur d'un délai de six mois. Je
comprends que le Parti libéral veut toujours plus de souplesse, toujours
reporter. Nous, on est très clairs là-dessus, c'est :
dès l'arrivée, c'est en français. Et même avant. Le ministère de l'Immigration
s'assure de pouvoir offrir des cours de
francisation et de connaissance du français avant l'arrivée, des notions de
français. Et, au Québec, c'est le français, la langue officielle, et
c'est très clair. Mais je comprends que le Parti libéral veut toujours
repousser. Alors, nous, notre choix, c'est : dès le départ, c'est en
français. Est-ce que le Parti libéral est en désaccord avec ça, d'accueillir en
français dès le départ?
M. Barrette : Mme la Présidente, ça
revient toujours à la même chose. On passe à côté de la question. Je n'ai pas
la réponse à ça. Parce que son projet de loi, là, ce qu'il vise, c'est
franciser. Et, écoutez, Mme la Présidente, le ministre a le culot de dire que
ce six mois-là, ce n'est pas une finalité de francisation. Il faut le faire!
Ça, il faut vraiment le faire, vraiment, vraiment, vraiment le faire. Je trouve
ça fort le café, là, mais, bon, je n'aime pas le café, là. Ça, c'est du thé,
Mme la Présidente, je ne bois jamais de café, je n'en ai pas besoin. Alors, je
trouve ça assez fort intellectuellement de dire qu'il n'y a pas de lien entre
les deux.
Je n'ai toujours pas eu de réponse, mais le
ministre, là, il vient de nous dire que... là, il a dit que c'était raisonnable
d'avoir une... c'est ça, raisonnable, puis il me semble que le sujet de la
phrase était la transition. Bien là, je pourrais très bien lui demander :
Raisonnable basé sur quoi? C'est quoi, le critère de raisonnabilité? Savez-vous
quoi, Mme la Présidente? Je suis d'accord avec lui, c'est raisonnable, mais le
critère à la fin, là, il vient d'où? Et pourquoi, encore une fois, un an, ce
serait irrecevable sur une période de vie de 80 ans, là? Est-ce que le
citoyen va risquer de mal... de ne pas se franciser parce qu'il va avoir eu un
délai d'un an? Est-ce que la loi n° 96 n'atteindra
pas son effet? Si la loi est adoptée, si on donne un an, la conséquence est si
dramatique que ça? Évidemment, toutes ces questions-là sont irrecevables si,
comme le ministre dit, il n'y a aucun lien avec l'apprentissage du français. Il
faut le faire, Mme la Présidente, là. On fait une période de transition, mais
la transition en matière de langue française, ce n'est pas pour
l'apprentissage. C'est pour être fin, c'est pouvoir avoir le plaisir de parler
au citoyen en anglais ou une autre langue pendant le six mois. C'est pour ça.
Là, moi, je ne comprends plus rien, là.
La
Présidente (Mme Guillemette) : M. le député de La Pinière, je pense que j'ai le
député de Matane-Matapédia et la députée de Mercier qui voudraient
intervenir sur votre amendement. Est-ce que vous me permettez de leur...
M. Barrette : Mme la Présidente,
est-ce que vous allez commencer par le député de Matane-Matapédia?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Vous me permettez de leur passer la parole?
M. Barrette : Avec plaisir, parce
que je veux entendre...
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, M. le député de Matane-Matapédia, je vous cède la parole.
M.
Bérubé : Mme la
Présidente, je ne prendrai pas mon intervention pour ne pas allonger indûment
ce débat, et attendre les points importants. Alors, je vais donner l'exemple,
mais sachez que le peu d'interventions que je fais, il n'y a pas de corrélation
avec la pertinence de mes interventions. Merci.
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci,
M. le député. Donc, je vais céder la parole à Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Oui, merci, Mme la
Présidente. Donc, quand je le lis, c'est : «Fournir des services pour
l'accueil au sein de la société québécoise des personnes immigrantes durant les
six premiers mois de leur arrivée au Québec.»
Et le ministre a répété à plusieurs reprises, en répondant au député de La
Pinière, que l'objectif des six mois, c'est vraiment l'accueil des
personnes immigrantes. Je comprends que, pour les autres services, il n'y aura
pas de délai de six mois. Les autres
services éducation, santé, c'est juste l'anglais, là, et tous les autres
services, là... la RAMQ, je ne sais
pas, Revenu Québec, peu importe, là, ou Emploi-Québec, tous ces services-là, il
n'y a pas de délai de six mois. C'est dès qu'on met le pied sur le
tarmac que ça se passe en français?
M. Jolin-Barrette : L'accueil...
vous arrivez au Québec. Donc, on intègre, on accueille en français, c'est le
principe, tout est en français, mais on se donne une marge de manoeuvre pour
l'accueil, donc pour démarrer. Quand on accueille quelqu'un, c'est les services
au départ au niveau de l'accueil. Mais ce qui est bien important, c'est que
l'accueil et l'intégration, ça se fasse en français au Québec.
Mme
Ghazal : C'est quoi, la
définition de services d'accueil tel qu'écrit dans la loi? Ça veut dire quoi,
«services pour l'accueil au sein de
la société québécoise», dans la loi? Ça veut dire quoi quand ça, c'est écrit?
On fait référence à quoi?
M. Jolin-Barrette : Services
d'accueil, c'est les premiers contacts pour accueillir une personne, les
premiers services publics pour inscrire les enfants à l'école, pour les
inscrire à la garderie, pour obtenir la carte de la RAMQ, ils pourraient
obtenir le permis de conduire.
Mme Ghazal :
Puis, si on fait appel aux services publics, sans que ça ait un lien avec le
fait qu'on vient de s'établir... là, je n'ai pas d'exemple en tête. De toute
façon, quand je pose des questions sur des exemples précis, le ministre ne veut
pas répondre à des exemples, il veut rester sur les principes. Donc, si, par
exemple, un nouvel arrivant a besoin d'un service de l'État mais qui n'est pas
en lien avec le fait qu'il vient de s'établir, il aurait été dans son pays puis
aurait eu besoin de ce service-là... si ce n'est pas en lien avec le service
pour l'accueil, le six mois ne s'applique plus? C'est en français?
M. Jolin-Barrette : C'est en
français. Même l'accueil est en français. Tout est en français, c'est le
principe de base. Donc, une personne qui arrive ici, tout se déroule en
français, sauf...
• (15 h 40) •
Mme Ghazal : ...qui n'est pas en
lien avec l'accueil, si c'est un service qui n'est pas pour l'accueil... Parce
que, là je fais comme c'est écrit, ce n'est pas écrit : Tous les services
publics requis. Ça fait partie de l'exemption, là, durant les six premiers
mois. Ce qui est écrit, c'est vraiment spécifié «services pour l'accueil au
sein de la société québécoise». Mais il peut arriver qu'il y ait des services
qui ne soient pas définis comme des services d'accueil.
M. Jolin-Barrette : ...services
d'accueil, c'est les premières interactions avec l'État québécois.
Mme Ghazal : Peu importe la raison,
même si on fait appel à l'État québécois, même si ce n'est pas en lien avec notre
arrivée? Je n'ai pas d'exemple, comme je vous dis, en tête. J'essaie de
comprendre la portée.
M. Jolin-Barrette : Bien, vous venez
d'arriver, là, c'est pas mal... Il y a beaucoup...
Mme Ghazal : Tout est un service
d'accueil?
M. Jolin-Barrette : Bien, quand vous
arrivez, il y a beaucoup de choses qui vont rentrer dans les services
d'accueil. C'est les premières interactions. Vous arrivez d'un autre pays, vous
êtes accueilli, tout ça.
Mme Ghazal : Puis les services d'accueil,
ça inclut les organismes et ministères?
M. Jolin-Barrette : Je reviens à la
définition de la loi. Dans le fond, l'Administration, c'est tout ce qui rentre
dans l'administration au niveau de l'exemplarité de l'État, donc l'ensemble des
ministères, des organismes qui sont sous le couvert de l'Administration,
l'Administration au sens large.
Mme
Ghazal : Je vais donner un exemple farfelu. Je suis un
nouvel arrivant. Ça fait un mois que je suis ici, puis je veux appeler le ministère de la Faune, Forêts et
Parcs pour une raison quelconque. On n'a pas besoin, quand on arrive,
pour avoir un service d'accueil de l'État de parler au ministère de la Faune,
Forêts et Parcs. Je ne pense pas qu'un fonctionnaire
du ministère de la Faune et Forêts et Parcs offre des services d'accueil.
Est-ce qu'il y a un délai de six mois pour le fonctionnaire qui
travaille à ce ministère-là quand il parle avec une personne durant les six
premiers mois?
M.
Jolin-Barrette : Si vous appelez le ministère de la Forêt, Faune et
Parcs, je ne sais pas, vous êtes peut-être un forestier. Vous arrivez...
C'est dans le cadre des premières interactions.
Mme Ghazal : Donc, vu que c'est la
première fois que je... c'est-à-dire que le fonctionnaire peut parler en une autre langue que le français, le fonctionnaire
du ministère de la Faune, Forêts et Parcs peut parler avec une personne
qui l'appelle, s'il vérifie que cette personne-là est au Québec depuis moins de
six mois, peut parler en anglais.
M.
Jolin-Barrette : Comme je l'ai dit, c'est pour les services
d'accueil dans le cadre des premières interactions.
Mme
Ghazal : Est-ce qu'il peut... Est-ce que le... Je vais
répéter ma question : Est-ce que... Là, Mme la Présidente, moi, je
suis une passionnée, je parle et j'oublie tout autour de moi dans ces échanges.
Cinq minutes à l'avance, s'il vous plaît, rappelez-moi ça.
La Présidente (Mme Guillemette) : Cinq minutes
avant la fin? D'accord, Mme la députée.
Mme
Ghazal : Donc, est-ce que le fonctionnaire du ministère de
la Faune, Forêts et Parc qui parle avec une... un nouvel arrivant qui
est ici, au Québec, depuis moins de six mois, est-ce qu'il a le droit de lui
parler en anglais?
M. Jolin-Barrette : À la base, c'est
en français.
Mme Ghazal : Donc, il n'a pas le
droit.
M. Jolin-Barrette : Non. Ce n'est
pas ce que j'ai dit. J'ai dit : À la base, c'est en français. Si ça vise
un service d'accueil, à ce moment-là, une autre langue peut être utilisée que
le français. C'est une exception qui est prévue. C'est une marge de manoeuvre,
mais le principe demeure toujours de tenter de donner le service en français.
Mme
Ghazal : Donc, si un nouvel arrivant appelle au ministère, ou, en tout
cas, je ne sais pas à qui, pour demander un permis de pêche, ça fait un mois
qu'il est au Québec, est-ce que le fonctionnaire a le droit de lui parler... ou
la personne employée de l'État a le droit de lui parler en anglais?
M.
Jolin-Barrette : Si c'est en lien avec l'accueil.
Mme Ghazal : Est-ce
qu'un permis de pêche est en lien avec l'accueil? Demander un permis de pêche
pour la première fois, quand on arrive au Québec, est ce que c'est un service
d'accueil?
M.
Jolin-Barrette : Ça dépend de chacune des circonstances. Est-ce que la
profession, c'est d'être un pêcheur, tu sais?
Mme Ghazal : La
réponse est non. C'est pour le plaisir.
M.
Jolin-Barrette : La situation, c'est une situation hypothétique.
Mme Ghazal : C'est
parce que ce que j'essaie de comprendre, évidemment, c'est c'est quoi, la
définition de services pour l'accueil au sein de la société québécoise. C'est
le fait d'interagir pour la première fois avec un service de l'État, avec une personne qui travaille, un
employé de l'État, peu importe ce que je demande ou pour certains
services? Est-ce qu'il y a des exceptions? Le permis de pêche, demander un
permis de pêche puis interagir avec l'État pour en demander un, est-ce que ça
fait partie de la définition d'un service pour l'accueil au sein de la société
québécoise?
M.
Jolin-Barrette : Les services d'accueil visent l'établissement de la
personne au Québec. Je vous ai donné des exemples : carte d'assurance
maladie, permis de conduire, l'inscription des enfants à l'école.
Mme Ghazal : Donc,
pour un permis de pêche, c'est interdit de parler en anglais. Pourquoi le
ministre ne le dit pas? C'est interdit pour demander un permis de pêche de
parler en anglais. Si le ministre ne dit pas que c'est interdit, ça veut dire
qu'il permet le bilinguisme institutionnel.
M.
Jolin-Barrette : Ça dépend des circonstances en lien avec chacun des
dossiers, avec chacun des cas d'espèce, qu'est-ce que vise la demande du
citoyen en fonction de l'accueil. L'objectif, là, c'est en français, là, dès le
départ, c'est en français. L'article c vise à créer une marge de manoeuvre
pour que l'État puisse donner des services publics en lien avec l'accueil. Mais
le principe de base, c'est que c'est en français.
Mme Ghazal :
J'ai de la misère à obtenir des réponses claires. Le ministre aurait pu très
bien me dire : Non, il ne peut pas parler en anglais, mais il ne veut pas.
C'est parce que le ministre dit : Je ne veux pas répondre à... donner des
exemples, mais il en donne lui-même, RAMQ, inscrire les enfants à l'école. Là,
je lui demande permis de pêche, ça, il ne le dit pas. Donc, il doit avoir une
définition, il nous liste c'est quoi, un service pour l'accueil au sein de la
société québécoise. Parce que la définition peut être : dès que j'interagis
pour la première fois de toute ma vie en arrivant au Québec. Ça peut être ça,
la définition. Est-ce que c'est ça? Est-ce qu'un juriste peut nous le dire?
M.
Jolin-Barrette : Ça dépend des circonstances. Prenez le cas de votre
permis de pêche, là, vous pouvez rentrer
dans l'exception des services touristiques aussi. Vous allez, là, décider, là,
d'aller pêcher, là, au réservoir Baskatong, là, supposons, vous faites du tourisme au Québec, bien, il y a une
exception pour les services touristiques qui sont prévus également, peu
importe la nature.
Alors, voyez-vous,
l'objectif de cette exception à c, hein, de cette marge de manoeuvre, c'est
que... le principe, c'est que c'est en
français uniquement, puis on veut le plus possible que ça se passe exclusivement
en français. C'est le principe de l'exemplarité de l'État, mais on
comprend que, pour certaines personnes immigrantes, pour l'accueil, pour
l'inscription à l'école, pour aller chercher un permis de conduire, pour aller
chercher une carte de la RAMQ, on puisse, dans certaines circonstances, pouvoir
permettre à l'État d'utiliser une autre langue que le français.
Mme Ghazal :
Le principe qui est dans la loi, est-ce que le ministre... Comment il me
l'explique, il est très clair, mais les exceptions ne sont pas très claires.
Parce que, si elles ne sont pas claires, c'est là que le principe peut
s'effriter. Si les exceptions ne sont pas claires, ça met en danger le principe
qui est de parler en français, donc ça va à l'encontre de ce que la loi vise.
Et c'est ça, moi, mon inquiétude.
M.
Jolin-Barrette : Oui, je comprends...
Mme Ghazal :
Mon inquiétude, ce n'est pas qu'on parle avec tout le monde en anglais, ce
n'est pas ça. Moi, mon inquiétude, c'est qu'on... il y ait tellement
d'exceptions, et elles ne sont tellement pas claires, et on peut rentrer
partout que, finalement, le bilinguisme institutionnel sera comme aujourd'hui.
M.
Jolin-Barrette : Mais je comprends que vous m'invitez à ne pas faire
d'exceptions puis à dire : Dès l'arrivée, c'est en français, point net
barre, puis on finit ça là, on ne met pas de marge de manoeuvre pour les
services d'accueil. Ça serait plus simple.
Mme Ghazal :
Il y a des marges de manoeuvre. Je suis d'accord qu'il y en ait, mais il faut
qu'elles soient claires, sinon ça peut aller d'un bord ou de l'autre.
C'est-à-dire que...
M. Jolin-Barrette : Non, mais, juste
pour vous expliquer, là...
Mme Ghazal : Est-ce que quelqu'un...
comme on dit, le législateur ne peut pas parler pour rien dire, est-ce qu'il y a un législateur pour nous dire
pourquoi... c'est quoi... quelle est la définition de services pour l'accueil
au sein de la société québécoise?
M. Jolin-Barrette : Pour votre
information, dans le fond, on va... Chacun des ministères et organismes,
relativement aux exceptions, vont venir spécifier les exceptions dans le cadre
de la politique linguistique de l'État.
Mme Ghazal : Donc, juste répéter,
chacune des institutions...
M. Jolin-Barrette : Chacun des
ministères et organismes va venir définir les exceptions dans le cadre de la
politique linguistique de l'État
Mme Ghazal : Des ministères et
organismes. O.K. Et les critères sur lesquels ils vont... Ça veut dire que
chaque ministère va définir les exceptions.
M. Jolin-Barrette : Qui devront être
approuvées...
Mme Ghazal : Donc, par exemple, le
ministère de la Faune, Forêts et Parcs pourrait dire : Demander un permis
de pêche n'est pas un service d'accueil.
M. Jolin-Barrette : Il pourrait.
Dans le fond, les exceptions vont être validées par le ministre de la Langue
française.
Mme Ghazal : Et, s'il y a des... il
y a des ministères ou des organismes qui vont donner des exceptions très, très,
très larges, tout en disant : Oui, oui, c'est ça, le principe, et voici
les exceptions.
M. Jolin-Barrette : Non, dans le
fond, le tout doit être approuvé par le ministre de la Langue française.
• (15 h 50) •
Mme Ghazal : Et, si le ministre de
la Langue française... C'est lui qui approuve. Mais est-ce que c'est quand même possible... Parce que je... Parce que là on
laisse la porte ouverte, en fonction des gestionnaires dans les
différents ministères et organismes, à toutes sortes de choses beaucoup,
beaucoup plus restrictives par rapport aux exceptions puis, ailleurs, beaucoup,
beaucoup plus larges, peut être qu'un ministre de la Langue française pourrait
approuver tout ça, même si dans un ministère, on est beaucoup plus permissif et
dans un autre beaucoup moins, il pourrait tout approuver. Ça va dépendre de
lui. Est-ce que c'est possible d'avoir un juriste pour vrai — là,
je suis sérieuse — qui
nous explique c'est quoi, le service pour l'accueil au sein de la société
québécoise des personnes immigrantes?
M. Jolin-Barrette : Bien, comme je
viens de vous dire, les services d'accueil visent à accueillir la personne.
Donc, chacun des ministères va avoir... le principe de base, c'est que tout se
passe en français. Les ministères et organismes pourront soumettre des
exceptions qui devront être approuvées par le ministre de la Langue française.
Mme Ghazal : Donc, ce n'est pas le
principe, on va gérer par exceptions, et non seulement par exceptions qui sont
listées dans la loi, mais ça va être des exceptions qui vont sortir de la tête
des gestionnaires des différents ministères et organismes, et, en plus, qui
vont être approuvées par le ministre de la Langue française. Donc, il y a
beaucoup, beaucoup, beaucoup de flous, et le principe se trouve... que tout se
passe en français, se trouve... pourrait se trouver très, très, très, très
affaibli. C'est la première fois que j'ai juste un oui ou un non. Pourquoi?
M. Jolin-Barrette : Bien, parce que
le principe de base, c'est très clairement que ça se passe en français. Mais
chacun des ministères et organismes connaît la clientèle en lien avec laquelle
ils font des services d'accueil, donc ils soumettront leurs demandes de
dérogation, qui seront approuvées par la suite. Donc, voyez-vous, le régime
juridique applicable... vous avez la loi, ensuite les règlements, ensuite la
directive, puis ensuite les cas particuliers. C'est toujours comme ça que le
régime législatif fonctionne. Et ensuite... ensuite, il y a le jugement.
Mme Ghazal : Le quoi?
M. Jolin-Barrette : Le jugement.
Mme Ghazal : Mais... O.K. Donc,
autant d'exceptions, parce que là on ne parle pas juste de maintenant, peut-être dans plusieurs années, cette loi-là va
durer longtemps, rassurent le ministre pour la protection de la langue
française.
M.
Jolin-Barrette : Oui, tout à fait. Tout à fait parce qu'on vient
mettre en place un régime juridique, un régime législatif qui vient encadrer.
Il faut voir d'où on part, là. Actuellement, il n'y a pas de règle,
c'est : français et anglais, pas de
différence. Là, on vient dire : l'État, pour être exemplaire, c'est en
français. Donc, ça, c'est le critère. C'est en français.
Mais là, si je n'avais pas mis d'exception, vous
m'auriez dit : Ça n'a pas de bon sens. Donc, ça prend des exceptions qui
sont circonscrites, mais avec des modalités qui vont faire en sorte que ça soit
applicable.
Mme Ghazal : Moi, je ne suis pas
contre, je ne suis pas contre les exceptions, mais il faut qu'elles soient claires, parce que, si elles ne sont pas claires
et qu'on laisse ça à l'arbitraire des différents gestionnaires des
ministères et organismes et du ministre de la Langue française, c'est là que ça
peut être...
M.
Jolin-Barrette : Un point qui est important, pour votre
information, là, à partir du moment où les exceptions vont été identifiées et qu'elles vont être
approuvées par le ministre de la Langue française, dans l'éventualité, là, où
vous auriez un ministre de la Langue française libéral, là, pour qui ce n'est
vraiment pas important, la protection de langue française, puis qui veulent
ouvrir le plus possible, puis que, pour eux, la défense du français, ce n'est
vraiment pas important, puis qui veulent faire le minimum, minimum, minimum,
puis encadrer le moins possible, on a déjà vu ça au Parti libéral...
Une voix : ...
M.
Jolin-Barrette : Bien, oui, mais je prends un exemple qui...
factuel, véridique et qui risque de se matérialiser probablement un
jour. Ça fait que je veux juste être sûr, tu sais, qu'on identifie bien le
problème. Vous avez toujours... et c'est la
beauté du projet de loi, on vient créer un commissaire à la langue française.
Donc, avec le Commissaire à la langue française, celui-ci va être chargé
d'être le chien de garde de la langue française. Donc, lui, qui va être nommé
aux deux tiers à l'Assemblée nationale, si jamais le ministre libéral de la
langue française fait des affaires qui n'ont pas d'allure, là, bien, le
Commissaire à la langue française, qui va être nommé par l'Assemblée nationale,
il va vérifier ce que le ministre de la Langue française fait. Il va vérifier
que... Si ça n'a pas de bon sens, les directives qui sont autorisées, les
exceptions, que c'est trop large puis que ça met en péril la protection de la
langue française, bien, il va rendre des
rapports annuels. Il va rendre des rapports intérimaires. Il va pouvoir mener
des enquêtes. Il va pouvoir informer les parlementaires de la véritable
situation linguistique au Québec. Donc, on vient s'assurer, véritablement, que
l'Exécutif va être surveillé par une institution indépendante qui relève de
l'Assemblée nationale pour assurer la pérennité de la langue française.
Mme Ghazal : Donc, vous avez une
superbelle opportunité pour renforcer la langue française, pour mettre des
exceptions qui auraient pu être beaucoup plus claires et rassurantes pour les
gens qui nous écoutent, et vous décidez de pelleter ça dans la cour du
Commissaire à la langue française pour les générations à venir.
M. Jolin-Barrette : Ce n'est pas ce
que je vous ai dit, là. Ce n'est pas du tout ce que je vous ai dit. Ce que je vous ai dit, c'est que vous allez avoir, dans un
premier temps, le principe : c'est en français que ça se passe.
Jour 1, c'est en français. Par contre, il y a une marge de
manoeuvre pour l'État d'avoir la possibilité d'offrir des services d'accueil
dans une autre langue que le français, si nécessaire. Les exceptions seront
notamment identifiées par les ministères et organismes, qui seront validées,
dans le cadre de la politique linguistique de l'État, par le ministre de la
Langue française. Si jamais ce n'est pas
opportun, si jamais c'est trop large, si jamais ce n'est pas appliqué de la
bonne façon, bien, le Commissaire à la langue française aura tous les
pouvoirs pour faire enquête et pour rendre publiques ces informations-là. Dans le fond, c'est un verrou de
sécurité que je viens ajouter dans le projet de loi, avec le Commissaire
à la langue française, pour avoir un véritable portrait de la situation
linguistique et des services publics qui sont donnés et dans quelle langue
sont-ils donnés. Parce que je vous rappellerais que de nombreuses études de
l'OQLF n'ont pas été publiées au cours des années. Surprenant.
Mme Ghazal : Moi, je suis d'accord
avec le commissaire, tout ça, on a tout salué ça. Ça fait partie des points positifs du projet de loi. Mais donc vous
justifiez le flou qui est dans le projet de loi avec les exceptions, qui
inquiètent des gens d'un bord et de l'autre, vous comprenez ce que je veux
dire, et vous dites : Bien, ce n'est pas grave, on a un chien de garde, ça
va être le commissaire, au lieu de renforcer puis de rendre ça beaucoup plus
clair. Pour moi, ça reste pas clair, «services pour l'accueil au sein de la
société québécoise». Est-ce que c'est la première fois ou pas? Je comprends que
vous mettez ça entre les mains du ministère, organismes de langue française et
du Commissaire à la langue française, qui vont pouvoir, à un moment donné,
rendre ça plus clair. Parce que ça ne l'est pas du tout, dans la loi,
actuellement. Je n'ai pas des réponses claires, et c'est inquiétant et pour la
langue française et pour les gens, les nouveaux arrivants.
Maintenant,
ce que j'ai entendu le ministre répéter à plus d'une reprise... C'est quoi, le
six mois? Qui avez-vous consulté pour que ça soit six mois? On n'a pas
eu aucune réponse. On a l'impression que c'est vraiment arbitraire. Moi, j'ai
ma réponse, c'est un six mois arbitraire. Il a répété à plus d'une reprise que
c'est un message, c'est un message envoyé à
toute la société, un message envoyé aux nouveaux arrivants, mais surtout aussi
un message envoyé aux gens... aux employés de l'État, à la fonction
publique, etc., qui lui demande d'ailleurs que le français soit encore plus
protégé et plus renforcé.
Donc,
dans le fond, l'objectif n'est pas de donner le temps aux gens d'apprendre le
français en six mois. Le ministre est d'accord qu'on ne peut pas apprendre le
français en six mois. Ça, il me l'a assuré, il est conscient qu'il n'y a pas...
ce n'est pas raisonnable d'apprendre le français en six mois. Le six mois est
un message symbolique. On est juste au niveau de la symbolique. Moi, ce que je
lui demande... si le six mois, et ce délai-là, est un symbole, je lui
demande... et je vais voter évidemment pour le délai d'un an, je lui demande
d'envoyer aussi un autre message, aujourd'hui, à toutes les personnes qui sont
inquiètes sur le discours qui est souvent prononcé par le gouvernement, par le ministre, et le discours qui s'est envenimé
dans l'espace public entre la majorité et les minorités,
malheureusement. Et j'en suis très, très
malheureuse et très triste de ça. Puis, moi, ce que j'ai envie, c'est que le
français, quand on en parle, ce soit quelque chose de toujours perçu
comme positif pour tout le monde, pas seulement ma génération, mais les
nouveaux, ceux qui vont arriver. Et, en ce moment, ce n'est pas ça qu'on
entend.
Donc, dans le but
d'envoyer un message bienveillant, d'accepter de prolonger le six mois à un an,
c'est une main tendue du ministre en disant : Écoutez, je veux que le
principe de la langue française, comme toutes les nations qui sont des pays,
nous n'en sommes pas encore, malheureusement... comme dans toutes les nations,
quand les gens arrivent dans un pays, ils vont être accueillis dans la langue
de la nation. Et c'est tout à fait normal, et on veut que ça soit la même chose
au Québec. Mais évidemment il y a une bienveillance. On peut parler, par
exemple, d'autres langues parce qu'on veut s'assurer que ces personnes-là
n'aient pas peur d'aller dans les services publics, ne soient pas inquiètes de
ne pas comprendre, de ne pas bien se faire servir. Et qu'elles y aillent. Parce
qu'elles pourraient aussi dire : Hum, je ne comprends pas, j'ai peur, je
suis inquiète, je ne vais pas aller voir mon médecin, par exemple, parce qu'on
ne peut pas avoir un service d'interprète, puisque ce n'est pas très, très
clair dans la loi que c'est systématique, et le ministre trouve qu'en ce moment
c'est suffisant, alors qu'il y a beaucoup, beaucoup de gens qui sont venus en commission et ont dit : Ce
n'est pas suffisant. Donc, ça serait... d'accepter de prolonger le délai de six
mois à un an serait aussi un message qui serait envoyé en disant : Je suis
beaucoup plus ouvert que ce que vous pensez, et il n'y a pas d'inquiétude à
avoir quand je dis que le principe est d'accueillir tout le monde, les nouveaux
arrivants en français. C'est vraiment comme ça qu'il doit être vu... et mettre
l'ego de côté en disant : Ah! je ne peux pas reculer sur le six mois.
Ce n'est pas une question d'ego. De changer, de dire : Je change le six
mois à un an, c'est juste une question d'ouverture et de rassurer les gens qui
sont inquiets.
• (16 heures) •
La Présidente
(Mme Guillemette) : ...M. le ministre. Je céderais la parole au
député de La Pinière, qui voulait nous revenir...
Mme Ghazal : ...Mme la Présidente, que, quand le ministre dit : Je veux envoyer
un message avec le six mois, et moi, je lui demande d'envoyer aussi un
message avec le un an et qu'il refuse de répondre, c'est triste.
La Présidente
(Mme Guillemette) : Donc, je cède la parole au député de La
Pinière. M. le député, il vous reste 3 min 30 s sur votre amendement.
M. Barrette :
Je dirais que c'est... en plus d'être triste, c'est habituel. C'est habituel,
on n'a pas de réponse. On n'a pas de réponse. Puis ce que je retiens, Mme la
Présidente, là, c'est vraiment, là, quelque chose, là, le ministre, là, lui,
là, ce n'est pas compliqué, là, dans tous les échanges qu'on a eus, là,
c'est-à-dire les échanges sur le projet de loi, là, pas les échanges ponctuels,
peu fréquents, mais éditoriaux de mon collègue de Matane-Matapédia, à qui je
dis ça amicalement, là, bien, on n'en a pas, de réponses. Et l'absence de
réponse, essentiellement, Mme la Présidente, ça montre la rigidité du ministre.
M. Lévesque
(Chapleau) : ...des intentions au ministre...
M. Barrette :
Quelles intentions que je... Mme la Présidente, quelles intentions que je
porte?
M. Lévesque
(Chapleau) : On utilise des qualificatifs qui ne représentent pas et
ne caractérisent pas le ministre. Donc, j'aimerais peut-être que le collègue de
La Pinière soit respectueux dans ses interventions puis dans ce qu'il dit
actuellement.
Et, peut-être
également pour répondre à la collègue de Mercier rapidement, là, justement,
l'ouverture dont le ministre fait preuve, c'est le six mois, parce que le
principe, c'est, justement, le moment à l'arrivée, donc on doit parler le
français. Et le six mois, c'est l'ouverture, c'est la main tendue. Donc, voilà.
La Présidente
(Mme Guillemette) : Merci, M. le député. Donc, j'invite tout le
monde à la prudence dans ses propos. Et, M. le député de La Pinière, je vous
cède la parole.
M. Barrette : Merci, Mme la Présidente. Mais mes propos sont très prudents, ils sont
factuels. Ils sont factuels.
M. Jolin-Barrette :
...pas rigide.
M. Barrette :
Pardon?
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, le député de La Pinière a dit dans ses propos que j'étais rigide,
alors que je suis d'une souplesse légendaire.
M. Barrette : Mme la Présidente, après les pointes d'humour du
député de Matane-Matapédia, on a maintenant celles du député... du
ministre. Il faut l'appeler par son titre. Alors, des fois, ce n'est pas drôle.
Alors, Mme la Présidente, je vais recommencer.
Alors, de dire que le ministre est rigide, ce n'est pas une insulte, là. Ce
n'est pas une insulte, là. Sa position envers sa politique du fait français est
rigide. Pourquoi? Parce que ça fait quelques heures qu'on demande simplement
des assouplissements. Il n'aime pas le mot «assouplissements». On demande des
aménagements, là, des aménagements pour que son affaire fonctionne le mieux
possible. Alors, on pose des questions, on n'a pas de réponse directe.
Et là on en a rajouté une couche, là. Hein, j'y
serai arrivé. J'ai bien apprécié l'approche de la collègue de Mercier. Mme la
Présidente, là, à la question bien simple de qu'est-ce qui constitue un contact
lié à l'accueil, la réponse est : Bien, ça va dépendre des ministères.
Oui, mais connaissez-vous la liste, au moins vous devez... Non, ça va dépendre.
Puis là il nous fait la hiérarchie de la loi, le principe en haut, la
direction. Mais là ce que je comprends, c'est
que ça va être de l'à-peu-près rendu en bas, puis après ça il y a les
exceptions. Puis ça, bien là, Mme la Présidente, là, «God knows», là. Qui vraiment, aujourd'hui, peut savoir comment ça
va marcher? Aujourd'hui, on sait une chose, là, c'est qu'on ne le sait
pas, Mme la Présidente. On ne le sait pas. Et ça, ça touche une catégorie de
citoyens, là. Ça fait qu'on est rigide quand c'est les francophones et, quand
c'est une autre catégorie de citoyens, on ne l'est pas. Ça, je trouve ça... Il
y a des mots pour ça, Mme la Présidente, que je n'utiliserai pas, ils ne sont
pas parlementaires.
Ceci dit, je vais avoir un amendement, mais je
pense que mon collègue voudrait prendre la parole, je ne suis pas sûr. Sinon,
j'ai un amendement.
Une voix : ...déjà un amendement.
M. Barrette : Je sais. Je vais avoir
après un amendement, je veux juste l'annoncer à l'avance. Il y aura le vote,
là, mais, mon collègue, je pense qu'il veut...
La Présidente (Mme Guillemette) :
Alors, je cède la parole au député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Merci, Mme la
Présidente. Je veux m'assurer de laisser du temps pour qu'on dépose
l'amendement, parce que ce serait sans doute pertinent, compte tenu de manque
d'ouverture et de rigidité.
Une voix : ...
La
Présidente (Mme Guillemette) :
S'il vous plaît! La parole est au député de D'Arcy-McGee, s'il vous
plaît.
M. Birnbaum : Oui. C'est ça, je vais
m'assurer de laisser le temps pour mon collègue, parce que la rigidité évidente
du ministre démontre que l'amendement devant nous risque de ne pas avoir la fin
qui aurait été souhaitée.
J'ai peut-être quelques petites questions. Dans
un premier temps, «la main tendue», quelle absurdité, du député de Chapleau, ce n'est pas le «Liberal» qui
parle. Nous étions ensemble devant plusieurs, plusieurs regroupements
d'experts, des groupes d'entraide communautaires, qui font un travail héroïque
sur le terrain, des professeurs, des associations
d'enseignantes, enseignants de français langue seconde, chacun qui parlait de
façon émouvante et sérieuse de leurs efforts pour épauler, pour
accompagner avec une vraie main tendue les nouveaux arrivants dans leur
processus de francisation.
Dans un
premier temps, j'aimerais... il me semble que, de mes souvenirs, et j'invite le
ministre à nous partager les siens, ces discussions, assez
intéressantes, assez importantes, sur ce délai de six mois se penchaient sur la
question de donner le temps aux gens d'avoir la capacité d'acquérir la langue,
donc d'apprendre. Je suis juste curieux de savoir si le ministre est satisfait
que ces groupes-là, les plus proches du terrain, ces groupes qui ont...
regroupements et ces individus qui ont un rôle primordial dans l'effort qui est
au centre de ce projet de loi, de faire franciser les nouveaux arrivants, s'il
est satisfait qu'ils ont bien compris le raisonnement ainsi que le bien-fondé
de son article.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le député. M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Alors,
comme j'ai eu l'occasion de le dire, il ne faut pas faire un lien avec
l'apprentissage en langue française. Le
principe est à l'effet que nous accueillons en français. Tout à l'heure, on
parlait de bienveillance. La bienveillance,
c'est d'accueillir les personnes immigrantes qui choisissent le Québec en
français. C'est de leur donner les outils d'apprendre le français,
notamment. Et c'est ce qu'on fait avec Francisation Québec. Mais, pour ce qui
est des services d'accueil, c'est en français que ça se déroule, et il y a une
marge de manoeuvre qui est indiquée avec un délai de six mois, et ça, j'ai eu
l'occasion de l'exprimer à plusieurs reprises, dès le départ.
M. Birnbaum : Je me permets de
poursuivre juste un tout petit peu. Comme je dis, ces intervenants qui... ont
un rôle clé à continuer à poursuivre dans nos efforts collectifs de
francisation et qui ont un rôle assez primordial en ce qui a trait à voir si
les nouveaux arrivants vont se sentir alliés ou adversaires dans ces
efforts-là. Et, comme je dis, il me semble que les questions qu'on se pose...
et, bon, je dirais, dans une commission scolaire... parlementaire plutôt, mais
j'ai l'impression que ces questions sont posées par d'autres membres des
formations de l'opposition aussi, les questions qu'on se pose, elles sont sur
l'efficacité et la probabilité de faire en sorte que ces mesures soient
crédibles et réalisables.
Et ces groupes-là, sans
exception, ont parlé de délai plus que six mois. Alors, moi aussi, je répète la
question : Y a-t-il... la question de
mon collègue de La Pinière : Est-ce qu'on peut identifier, quantifier le
moindrement, même... ou qualifier, même, en
termes d'appui symbolique, ce geste-là? Qu'est-ce qu'on risque de perdre si on
accepte l'amendement dûment présenté par mon collègue?
• (16 h 10) •
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le député. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, le Parti libéral suggère une année. Moi, ce que je souhaite, c'est
que ça soit dès l'arrivée. Dès l'arrivée, on accueille en français et on fait
en sorte de donner une marge de manoeuvre de six mois, mais on va continuer, à
l'intérieur du délai de six mois, de communiquer exclusivement en français,
sauf certains cas d'exception où on pourra utiliser... où l'État pourra
utiliser une autre langue. Mais ce qui est souhaité, ce qui est désiré, c'est
uniquement que ça soit exclusivement en français. Alors, je ne vois pas la
pertinence.
Et, surtout, quand on sait à quel point l'État
québécois n'a pas fait sa part en termes d'utilisation exemplaire de la langue
française, bien, je comprends que, de la part du Parti libéral, on souhaite
toujours le moins d'éléments qui vont faire en sorte de changer la tendance
linguistique et de perpétuer cet état de fait là qu'au Québec on continue
d'utiliser une autre langue que le français, alors que la priorité devrait être
mise au français. Et c'est ce qu'on fait. C'est ce qu'on fait. C'est ce qu'on a
fait, au ministère de l'Immigration, avec les différents programmes et c'est ce
qu'on fait avec la Charte de la langue française actuellement. Alors, je comprends
que mes collègues souhaiteraient un délai plus long. Moi, je suis très à l'aise
avec le délai de six mois. Je pense que tout a été dit, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le ministre. M. le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Bon, il semble que...
Une voix : ...
M. Birnbaum : Bien, je me permets,
là, peut-être quelques secondes. Ces regroupements crédibles, comme je le dis,
qui font un travail formidable, qui est fondé sur une idée que les remarques du
ministre ont l'air de mettre en question
l'idée qu'on n'arrive pas, au Québec, avec l'idée de faire la bataille contre
le fait français du Québec, est-ce que
le ministre n'a pas peur que son rejet imminent de notre amendement risque
d'être vu comme un constat que, non, six mois, c'est assez même si vous
me dites... pas le libéral, que ces groupes-là disent que ce n'est pas assez,
tant pis? J'ai peur que vous ayez le message que ça ne se passe pas en français
ici, que vous êtes contre l'idée de vous franciser.
Alors, voilà, mon idée et votre idée exprimées de façon unanime par les
regroupements les plus crédibles sur ce sujet-là, qui ont comparu devant
nous. Ils ont tort et le ministre a raison. Alors, c'est ça, le message qu'il
souhaite donner à ces groupes-là, en rejetant notre amendement.
La
Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le député. Donc, j'ai la députée de Mercier qui voulait
intervenir sur l'amendement. Donc, Mme la députée.
Mme Ghazal : Oui. Merci, Mme la
Présidente. Je trouvais ça comique de dire que six mois, c'est la main tendue.
Je veux dire, elle n'est vraiment pas tendue très, très loin, six mois. Vous
savez, comme le ministre, moi, ce que j'ai compris de tous les échanges, depuis
qu'on est en... depuis tout à l'heure, c'est que le six mois, c'est symbolique.
Parce qu'en réalité comme dans tous les pays normaux, il n'y aurait même pas eu
aucun délai, même si, sur le terrain, en réalité, ça ne peut pas être
uniquement dans la langue du pays où les gens arrivent, où les nouveaux
arrivants arrivent, puisqu'ils ne parlent pas la langue. Donc, en réalité, ça
va être le statu quo parce que, même après six mois, on va pouvoir....
L'objectif, c'est que les gens comprennent les services, qu'ils puissent être
accueillis aussi dans une langue qu'ils comprennent pour pouvoir avoir les
services. Donc, la réalité, c'est que le six mois, il est symbolique,
c'est un message. Et, sur le terrain, ça sera le statu quo, comme c'est le cas
en ce moment avec la loi actuelle. C'est ce que j'ai compris des échanges qu'on
a avec le ministre.
Et donc, vu que c'est symbolique, pourquoi ne
pas tendre la main un peu plus loin, à un an, et là donner un message symbolique de... Moi, j'aurais aimé que ça
soit zéro, je mets un accommodement, six mois, et j'accepte un an, mais, par exemple, pas deux ans, pas trois
ans, comme... je pense que le SFPQ et d'autres organisations disaient
deux ans. Donc, si le six mois est symbolique et que le ministre,
normalement, lui, il aurait... et que c'est un message... Un message, c'est un
symbole, ce n'est pas un fait. Il l'a dit, le six mois, c'est un message. Il
l'a dit à plusieurs reprises.
M. Jolin-Barrette : Non, non, non.
Ce n'est pas symbolique du tout.
Mme Ghazal : ...voir.
M. Jolin-Barrette : Non, c'est
l'exemplarité de l'État qui est un message. Le zéro, c'est un message, pas
l'exception, le principe. La disposition qui fait en sorte que l'État est
exemplaire, ça, c'est le message, ça, c'est le principe. J'espère que vous êtes
d'accord avec moi pour dire que ça a assez duré, le bilinguisme institutionnel,
puis qu'on y met fin à l'adoption du projet de loi n° 96. D'ailleurs, Mme
la Présidente, vous me permettrez de souligner que le député de La Pinière nous a dit : Moi, mon objectif, c'est
le 10 juin. Alors, quand j'entends ça, Mme la Présidente, qu'on souhaite faire traîner les travaux de l'étude
détaillée du projet de loi n° 96 jusqu'au 10 juin, j'y vois un enjeu
sérieux de la part du Parti libéral, parce que dans le projet de loi
n° 96, il y a plein...
M. Barrette : ...moi, mon objectif,
ce n'est pas le 10 juin pour amener le projet de loi, là. Le 10 juin,
Mme la Présidente, c'est ma date de retraite de la vie politique. «That's it,
that's all.» Je lui ai dit avec le sourire, là, et il fait encore de la
politique, puis c'est désagréable. C'est tout le temps des procès d'intention.
Il se prend pour un autre. Et, à un moment donné...
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le député. La parole est à la députée de Mercier.
M. Barrette : ...
La Présidente (Mme Guillemette) :
S'il vous plaît! Il nous reste...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Guillemette) :
S'il vous plaît, messieurs! Il nous reste quelques minutes. Je pense qu'on se
doit de terminer dans le calme et dans le respect.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Guillemette) :
S'il vous plaît! On se doit de terminer ça dans le calme et dans le respect.
Mme la députée.
Mme Ghazal : ...que le ministre,
quand je lui pose des questions, il ne parle pas des autres partis puis qu'il
prenne au sérieux ce que je lui dis, parce que moi, je ne suis pas ici pour
faire le clown. Moi, je prends cette loi-là très au sérieux. Donc, j'aimerais
que le ministre parle avec moi quand je lui pose des questions et non pas qu'il
réponde à d'autres interventions avant, il va avoir l'occasion de le faire tant
qu'il veut.
Et moi, je n'ai fait aucun temps... aucun temps
inutile. Quand je prends la parole, c'est parce que c'est sérieux. J'essaie
uniquement de sensibiliser le ministre au fait que ça serait important qu'il
fasse preuve d'écoute et que, pour protéger la langue française et le principe,
il faut que les exceptions soient claires. Et, en ce moment, dans la loi, elles
ne le sont pas. Il l'a dit lui-même, ce n'est pas dans la loi qu'on le fait, ça
va être dans les ministères et organismes.
Après ça, ça va être entre les mains du ministre de la Langue française. Après
ça, le commissaire va pouvoir intervenir, puisqu'il va y avoir beaucoup,
beaucoup d'exceptions, et ça va dépendre aussi des gestionnaires dans les
différentes organisations. Parce que, si on regarde du point de vue des
employés de l'État, il y en a qui vont avoir peur, qui vont dire : Non,
moi, je ne parle pas français, je ne peux pas. Et, même si la personne ne me
comprend pas, on va essayer de faire des mimiques, et des symboles, et des
gestes pour qu'on puisse se comprendre. Et d'autres vont dire : Non, non,
on va faire appel à un interprète parce que la personne ne comprend pas, et
c'est nécessaire, et c'est essentiel pour sa santé, pour l'éducation, pour tout
autre service qui est donné par l'État, que la personne comprenne. Donc, ça va
être arbitraire et ça va dépendre des gens et de leur sensibilité.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, Mme la députée. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Je peux
répondre?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Tout à fait. Allez-y.
• (16 h 20) •
M. Jolin-Barrette : Alors, Mme la
Présidente, ce que la députée de Mercier vient de dire, c'est inexact et ce
n'est pas arbitraire. Et, juste pour la renseigner, les commentaires que je
donne le sont au bénéfice de l'ensemble des parlementaires de la commission.
Alors, si je veux répondre au député de La Pinière, notamment sur ses propos,
je vais le faire également sur mon temps de parole. Et d'ailleurs juste
souligner au député de La Pinière que ça ne se termine pas le 10 juin, le
mandat, mais plutôt à l'élection du 3 octobre. Donc, c'est un petit peu
plus tard que ça aussi, durant l'été aussi.
Autre
élément, l'objectif, c'est de faire en sorte clairement qu'on accueille en
français les personnes immigrantes. Et là-dessus, lorsque les services
seront requis, l'État québécois doit absolument faire en sorte d'accueillir en
français, parce que, trop longtemps... et c'est un de nos défis en termes
d'intégration linguistique, le fait que tout va vers une autre langue que le
français. Or, on déploie l'ensemble des mesures pour accueillir en français.
Mais le meilleur outil qu'on peut donner pour l'intégration, pour l'accueil,
c'est le fait, dès le départ, qu'on communique en français, qu'on communique dans la langue officielle de l'État. Et ce
n'est pas symbolique, on change les façons de faire. On dit très clairement, là, notamment pour le
visage linguistique de Montréal : C'est assez, le bilinguisme
institutionnel. Sachez qu'au Québec ça se passe en français.
Et le délai, dans le fond... Parce que vous avez
repris l'explication que je vous ai donnée tout à l'heure, mais en... Je vais
la redonner, là. C'est vraiment... la mécanique de la loi, le principe,
c'est : en français. Ensuite, vous avez le délai de six mois, qui
constitue une marge de manoeuvre pour l'État. Et les exceptions seront établies
en fonction des exceptions qui seront autorisées par le
ministre de la Langue française, qui seront identifiées par chacun des
ministères et organismes en vertu de la politique linguistique étatique. Donc,
vous avez les différentes couches, c'est comme des poupées russes, et ça
descend, pour faire en sorte de bien cerner quelles sont ces exceptions. Et,
par-dessus cela, pour vérifier que l'ensemble des directives sont respectées,
l'ensemble des exceptions sont circonscrites, là, vous avez le commissaire.
Donc, tous les outils nous permettent d'être bien encadrés et de faire en sorte
que ça soit la langue française qui prime dans le fait de donner des services
publics aux citoyens.
Mme Ghazal : Moi, ce que
j'entends, c'est que c'est le statu quo mais avec quelques changements, avec le
commissaire, avec les exceptions qui vont être écrites. C'est ce que j'entends,
c'est le statu quo. Puis, puisque de toute façon le ministre ne met pas fin au
bilinguisme institutionnel comme il nous le dit, combien de personnes vont
continuer à être servies en anglais, parce qu'avant la loi, alors que c'est des
nouveaux arrivants... ou des arrivants depuis
30 ans, admettons, alors qu'avant la loi elles... parce qu'avant la loi
elles communiquaient avec le gouvernement en anglais? Moi, j'en connais personnellement. Par exemple, avec Revenu
Québec, tout se passe en anglais. Ça fait 30 ans que les personnes sont là. C'est le statu quo
après l'adoption du projet de loi n° 96. Donc, c'est faux
quand le ministre dit : Ça met
fin au bilinguisme institutionnel et c'est important pour l'exemplarité de
l'État. C'est faux avec l'article précédent.
M. Jolin-Barrette : Comment je pourrais dire ça, Mme la Présidente?
C'est loin, loin, loin d'être le statu quo, loin, loin, loin. La
démonstration, c'est que le Parti libéral est très contre. Ça, c'est un bon
indicateur de démontrer que ce n'est pas le statu quo. Alors, l'alinéa
précédent...
Mme Ghazal : Est contre?
M. Jolin-Barrette : Est contre.
Mme Ghazal : Contre quoi?
M. Jolin-Barrette : Contre la
loi.
Mme Ghazal : Ah oui?
M. Jolin-Barrette : Alors,
l'article précédent auquel vous faites référence vise à faire en sorte...
M. Barrette : Mme la Présidente,
question de privilège.
M. Jolin-Barrette : Ce n'est
pas un privilège.
M. Barrette : La dernière
affirmation. Article... La dernière affirmation du ministre...
M. Jolin-Barrette : Ce n'est
pas une question de privilège.
M. Barrette : Pensez-vous
vraiment que ça, ce n'était pas un prêt d'intention?
Des voix : ...
La
Présidente (Mme Guillemette) : Il nous reste moins de 10... Il nous reste cinq minutes. On va laisser
M. le ministre répondre à Mme la députée de Mercier. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors,
l'article précédent auquel vous faites référence, c'est relativement aux
exceptions pour faire en sorte qu'il y a une transition pour les gens qui
correspondaient déjà. Ça, on l'a réglé. Là, ici, c'est pour les nouveaux
arrivants par rapport à la situation actuelle, où on peut communiquer dans
n'importe quelle langue pour n'importe quelle durée, mais ça, on change ça, on
fait en sorte que c'est en français dès le départ. Mais, comme dans toute
chose, il existe des situations d'exception.
Mme Ghazal : Puis ça fait
combien de personnes... Je sais, je suis désolée, je fais le débat de l'autre
article, mais ce n'est pas grave, on est quand même dans le même article 15.
C'est combien de personnes à qui va s'appliquer l'exception de parler en français,
celles qui ont déjà communiqué avec le gouvernement en anglais et qui vont
continuer jusqu'à la fin de leurs jours à communiquer avec le gouvernement en
anglais sans avoir été des ayants droit? C'est combien de personnes, ça?
M. Jolin-Barrette : Je ne peux
pas vous dire le nombre de personnes parce que ça dépend du nombre de personnes
qui vont utiliser cette disposition-là. Moi, j'invite... Et aussi on élargit
les cours de francisation pour faire en
sorte que l'ensemble des Québécois aient accès à des compétences langagières en
français. Et donc, éventuellement, si tout le monde peut communiquer ou
veut communiquer en français avec l'État, bien entendu que l'État du Québec
sera là. Et nous, on va mettre les efforts pour le faire, pour que les services
publics soient donnés en français. Mais...
Mme Ghazal :
Mais ça, c'est une grande ouverture et une grande... plus qu'une main tendue,
c'est les bras et tout ça, d'accepter que des gens qui communiquent depuis très
longtemps en anglais, alors que ça n'aurait pas dû avoir lieu, à cause du
bilinguisme de l'État qui existait... on leur permet de continuer jusqu'à la
fin de leurs jours, même s'ils ont... disons 40 ans, 45 ans, parce
qu'ils ont communiqué une fois avec le gouvernement en anglais, ils vont
continuer jusqu'à la fin de leurs jours de le faire.
M. Jolin-Barrette :
Bien, théoriquement, ils ont plus que 45 ans, là.
Mme Ghazal :
Oui, c'est vrai.
M. Jolin-Barrette :
Ils ont au moins...
Mme Ghazal :
Oui, plus que 45. C'est l'année de ma...
M. Jolin-Barrette :
77...
Mme Ghazal :
C'est parce que je me rajeunis tout le temps. En tout cas, ce n'est pas
grave. On va dire une personne de 50 ans, elle ne va pas mourir demain
matin.
M. Jolin-Barrette :
Donc, théoriquement, bien...
Mme Ghazal : Si elle vit jusqu'à
100 ans, elle va communiquer avec l'État jusqu'à... pendant 50 ans en
anglais? C'est plus que... c'est plus qu'un bras tendu, c'est beaucoup plus. Et
là on demande de six mois à un an, et c'est : Mon Dieu! on...
c'est le principe, il est remis en question, etc. Ce n'est pas logique.
M. Jolin-Barrette : C'est votre opinion, je
ne la partage pas. C'est zéro mois, sauf avec une marge de manoeuvre de
six mois. Alors, moi...
Mme Ghazal :
...50 ans. Ceux d'avant, c'est 50 ans?
M. Jolin-Barrette :
C'était l'autre article. Je ne suis pas tributaire du fait que la loi n'ait
pas été changée avant que la CAQ prenne ses responsabilités.
Mme Ghazal :
Mais vous avez quand même refusé l'amendement.
M. Jolin-Barrette :
Je pense qu'on peut voter l'amendement du député de La Pinière.
Mme Ghazal :
...donc, ça permet le bilinguisme institutionnel? Pas beaucoup d'arguments,
pas beaucoup d'arguments.
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci,
Mme la députée. Le député de La Pinière, il vous reste 10 secondes.
M. Barrette :
Oui. Je constate aujourd'hui qu'il y a plusieurs façons de perdre son temps
en commission parlementaire. Alors, Mme la
Présidente, je pourrais même faire le vote avant de partir, si vous le
souhaitez. Appel nominal.
La Présidente
(Mme Guillemette) : Merci. Est-ce qu'il reste d'autres
interventions? Donc, M. le secrétaire, nous pouvons passer à la mise aux voix
par appel nominal, s'il vous plaît.
Le
Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Barrette (La Pinière)?
M. Barrette :
Pour.
Le Secrétaire :
M. Birnbaum (D'Arcy-McGee)?
M. Birnbaum :
Pour.
Le Secrétaire :
M. Jolin-Barette (Borduas)?
M. Jolin-Barrette :
Contre.
Le Secrétaire :
M. Lévesque (Chapleau)?
M. Lévesque
(Chapleau) : Contre.
Le Secrétaire :
M. Chassin (Saint-Jérôme)?
M. Chassin :
Contre.
Le Secrétaire : M. Émond
(Richelieu)?
M. Émond : Contre.
Le Secrétaire :
Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?
Mme Foster : Contre.
Le Secrétaire :
M. Poulin (Beauce-Sud)?
M. Poulin : Contre.
Le Secrétaire :
M. Lemieux (Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
Le Secrétaire :
Mme Ghazal (Mercier)?
Mme Ghazal : Pour.
Le Secrétaire :
M. Bérubé (Matane-Matapédia)?
Une voix : Il n'est pas là.
Le Secrétaire : Mme Guillemette
(Roberval)?
La Présidente (Mme Guillemette) : Abstention.
Donc, l'amendement, le 22.3, est rejeté.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Guillemette) :
On serait prêts à voter l'article 15. On a... Je pense qu'il reste 22.4 et
22.5 à discuter, monsieur...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Guillemette) : Est-ce
qu'il reste des interventions, par contre, sur le 22.3?
M. Barrette : Mme la
Présidente, j'avais annoncé que j'avais des amendements, là. Je comprends, là,
que le ministre, là, il aime ça avoir
l'autorité et le pouvoir, là. Là, je pense que vous avez le pouvoir de lever la
séance, parce que j'ai encore des amendements.
La Présidente (Mme Guillemette) : Vous
avez des amendements à déposer sur l'article 22.3? Parfait. Donc merci
pour votre collaboration, tout le monde.
Et, compte tenu de l'heure, la commission
ajourne ses travaux au mardi 8 février, à 11 heures. Bonne fin
de semaine à tous.
(Fin de la séance à 16 h 29)