(Quatorze heures cinq minutes)
Le
Président (M. Asselin) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant
constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes
les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs appareils électroniques.
La commission est réunie afin de procéder à des auditions
publiques dans le cadre de la consultation particulière sur le projet
de loi n° 5,
la Loi modifiant la Loi de
l'instruction publique et d'autres dispositions à l'égard des services de l'éducation préscolaire destinés aux élèves âgés de 4 ans.
Mme la
secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Melançon (Verdun)
sera remplacée par Mme Sauvé (Fabre).
Le Président (M. Asselin) : Très bien. Alors,
cet après-midi, nous allons débuter par des remarques préliminaires et nous entendrons Mme Carlyn
Rahynes, directrice à la petite enfance au conseil d'administration pour le
district 9 de la ville de New
York, M. Richard Leonard, on va entendre aussi l'Association québécoise de
la garde scolaire, le Conseil québécois des services éducatifs à la
petite enfance et la Confédération des syndicats nationaux.
Remarques préliminaires
D'abord, avant de passer à Mme Rahynes, je voudrais
céder la parole au ministre de l'Éducation pour ses remarques préliminaires. Vous disposez de six minutes, M. Roberge.
M. Jean-François Roberge
M.
Roberge : Merci bien, M. le Président. Bien content de vous voir,
prendre une minute pour saluer tous mes collègues de la partie gouvernementale,
merci d'être présents et présentes, pareillement pour mes collègues des partis
d'opposition. Bien content d'être avec vous aujourd'hui.
Je sais qu'il y a beaucoup de gens qui nous écoutent, c'est
un projet de loi qui suscite beaucoup d'intérêt. Je veux remercier à l'avance
tous ceux et toutes celles qui vont venir éclairer le débat, nous donner des
arguments et nous aider, au
fond, en tenant compte de tout ce qui sera dit, à réussir cette implantation,
parce que nous allons réussir cette implantation, M. le Président, parce qu'on le fait tout
simplement pour les bonnes raisons. On le fait dans l'intérêt des enfants. On
le fait parce qu'on croit à l'égalité des chances. On le fait parce qu'on croit
qu'il est nécessaire d'investir dans la plus tendre enfance, comme on dit, d'agir tôt pour prévenir plus tard
les écarts. On souhaite qu'à l'entrée de la première année, quand les enfants
auront six ans, bien, ils auront toutes les
chances de réussir leur parcours scolaire, toutes les chances de prendre leur
place dans la société québécoise et dans le monde.
Et,
vous savez, le statu quo est très dur avec nous. En ce moment, il faut bien se
le dire, à peu près 33 % des enfants
qui sont vulnérables obtiennent leur diplôme d'études secondaires. Voici ce qui
se passe à 16, 17, 18, 19 ans si on
ne change pas le système. Et, plus tôt que ça, à l'entrée de la maternelle, à
peu près 27 % des enfants arrivent en maternelle en étant vulnérables dans
au moins un domaine de développement. On pourrait dire : Oui, mais c'est
une photo, ça, ça va en s'améliorant. Bien non, ça va en se détériorant.
Donc, le système tel qu'on le connaît nous fait reculer.
Alors, il y a des choses qui se font bien, et on va
continuer de les faire. Il y a des choses qui se font bien dans notre réseau de
services de garde à la petite enfance. Mon collègue le ministre Lacombe
investit énormément de temps, d'énergie. Il y aura des fonds publics aussi qui seront là pour améliorer les
services dans notre réseau de services de garde éducatifs pour améliorer les suivis entre ce qui se passe
entre la famille et les réseaux de services de garde éducatifs. On va déployer
le réseau des CPE, hein? On veut ajouter, d'ici, je crois, deux ans, plus de
10 000 places en CPE. C'est très bien, mais ce ne sera pas
assez parce qu'il y a plus de 40 000 enfants qui attendent une place
en CPE.
• (14 h 10) •
Il y a un réseau encore marginal au Québec, c'est le réseau
des maternelles quatre ans. Et mes collègues des partis d'opposition, je pense
qu'ils croient dans ce réseau-là parce qu'en 2013 il y a un projet de loi qui a
été adopté à l'unanimité à l'Assemblée nationale, un projet de loi qui a
été déposé et adopté alors que c'était le Parti québécois qui était au pouvoir, pour déployer le réseau des maternelles
quatre ans dans les milieux défavorisés, temps plein, TPMD, temps plein,
milieu défavorisé. Je pense, c'était une
bonne chose. C'était un bon premier
pas. C'était certainement une bonne idée de le déposer.
Maintenant,
c'est le temps de l'étendre à l'ensemble du Québec, pas de l'obliger. Il
n'est pas question d'obliger personne à fréquenter la maternelle quatre ans,
mais il faut libérer des possibilités. Il faut offrir cette opportunité à
l'ensemble des enfants, à l'ensemble des parents. On veut que, dans cinq
ans... pas demain matin, pas en septembre prochain, ça serait trop rapide, mais on veut qu'à l'intérieur
de cinq ans, bien, tous les parents aient cette opportunité — c'est
pour ça qu'on l'appelle
l'universalité d'accès — d'inscrire
leurs enfants en maternelle quatre ans, temps plein. On veut le faire parce qu'il y aura, dans ces maternelles quatre ans, un
programme extraordinaire, un programme cycle intégré pour les enfants de quatre ans qui, ensuite, poursuivent leurs
apprentissages en maternelle cinq ans, un vrai cycle d'apprentissage,
apprentissage par le jeu, parce que, vous savez, il y a...
L'idée de
l'apprentissage global, c'est simplement de faire jouer les enfants. Il y a
l'idée d'une scolarisation hâtive, qui est vraiment
de forcer les jeunes à apprendre des notions. On n'est ni d'un côté ni de
l'autre, on est pour une approche mixte. Ça veut dire socialisation,
gestion de ses émotions, apprendre à attendre son tour, tout simplement, ensuite le développement moteur des
enfants, qui est nécessaire aux apprentissages par la suite. Puis, oui, un
peu en maternelle quatre ans, bien sûr,
ça commence, plus en maternelle cinq ans... eh bien, par le jeu encore, par des
comptines, par toutes sortes
d'activités ludiques, bien, des prémathématiques, du dénombrement, des choses
comme ça, et de la prélittératie. C'est ce qu'on appelle l'approche mixte, l'approche équilibrée. C'est cette approche
qui a fait ses preuves. C'est cette approche qui est implantée en ce
moment à New York, sur laquelle ils misent, sur le «social-emotional», après ça
développement global, etc. C'est ça aussi qu'il y a en Ontario.
On ne jouera pas aux
apprentis sorciers avec nos enfants, M. le Président. Il s'agit d'implanter
ici, chez nous, quelque chose qui a fait ses preuves chez nos voisins, pas en
faisant du copier-coller, parce que c'est toujours une erreur
d'essayer d'implanter au Québec un modèle de l'extérieur, mais en
l'interprétant à notre façon, en le faisant avec nos acteurs à nous, avec un
comité sur lequel siègent des Québécois d'une grande expertise, pour avoir un
vrai programme d'apprentissage par le jeu,
un vrai programme cycle qui sera piloté par un duo de feu, enseignant et
éducatrice, quelque chose
qu'on ne peut avoir que dans nos maternelles quatre ans.
Le Président (M. Asselin) : Je vous remercie beaucoup de vos remarques
préliminaires. J'invite maintenant la porte-parole de l'opposition
officielle en matière d'éducation et
d'enseignement supérieur et députée de Saint-Laurent à faire ses remarques préliminaires pour
une durée maximale de quatre minutes. À vous la parole.
Mme Marwah Rizqy
Mme Rizqy : Merci beaucoup, M. le
Président. En parlant de duo de feu,
je me serais attendue de voir le ministre
de la Famille pour avoir un vrai duo de feu.
Alors,
commençons. Nous sommes, en ce moment, avec la maternelle quatre ans, je
rappelle, qui était le projet-phare du gouvernement de la CAQ. Lorsqu'en
campagne électorale M. Legault, le premier ministre actuel, avait dit :
Moi, s'il y a un enjeu qui m'importe, c'est
la maternelle quatre ans, il avait chiffré sa promesse à une centaine de
millions de dollars. Puis par la
suite nous, on a fait nos devoirs, hein? Vous savez, M. le Président, mon
collègue, qui était à l'époque le
ministre des Finances... et moi, je m'en rappelle comme si c'était hier, quand
il a dit son 250 millions, j'ai dit : D'où sort ce chiffre?
Alors,
j'appelle mon collègue, à l'époque le ministre des Finances, le député de
Robert-Baldwin. Nous, on l'a chiffré à
2 milliards, à ce moment-là, en
élection. Mais non, ça ne coûtera pas 2 milliards, vous exagérez,
disait-il, hein, le premier
ministre en devenir. Et finalement, oui, nous y sommes, c'est 2 milliards,
M. le Président. 2 milliards de dollars, bien investis dans l'éducation, là, j'en suis, tout le monde aime ça, mais
2 milliards investis dans du béton, dans des classes qu'on ne sait
pas si elles seront remplies ou vides, ça, non, ça, on est contre.
Quand on parle d'agir
tôt, M. le Président, n'importe quand, nous, si on a un projet de loi déposé
devant nous qui va vraiment aider les jeunes
enfants du Québec à l'égalité des chances, nous allons voter pour. Mais, en ce
moment, ce projet de loi n'aide aucunement à l'égalité des chances. Je
vais vous expliquer pourquoi. Maternelle quatre ans, lorsque ça a été déployé,
fin des années 90, c'était pour justement donner une occasion de pallier à un
manque à un enfant, par exemple, qui vient d'un milieu défavorisé, qui n'a pas
eu l'occasion d'être dans un service de garde ou dans un CPE.
Par
exemple, la députée qui vous parle présentement... Dans l'est de Montréal, vous
savez, il y a des quartiers — Hochelaga — un peu plus défavorisés. Moi, ma mère, elle
ne parlait pas le français, pas d'éducation, zéro, rien. Elle est arrivée ici, elle a appris par la suite.
Mais vous comprenez que, moi, on m'a mise dans une maternelle quatre ans en
milieu défavorisé. Ça a aidé énormément. Et par la suite, savez-vous quoi? Je
me suis rendue à l'université, j'ai eu un doctorat, égalité des chances,
rêve pour tous. J'ai même réalisé d'autres rêves, je suis devenue
parlementaire.
Et
là, maintenant, je suis ici avec vous, et qu'est-ce qui me déçoit, c'est que
moi, je suis présente, mais je me tourne puis je vois des gens de New York, mais je ne vois pas Dr Chicoine, qui,
lui, c'est un Québécois d'ici, un spécialiste de la petite enfance qui passe son temps à diagnostiquer... Qu'est-ce que
je vois aussi? Je n'ai pas l'Association des garderies privées, je n'ai
pas la CSD, je n'ai pas les commissions scolaires, qui ont demandé...
Puis
nous, on s'est battus pour les avoir, les commissions scolaires parce qu'en fin
de journée il faut qu'ils travaillent tous ensemble. Il a parlé de duo de feu,
les enseignants, les éducateurs. Bien, c'est drôle parce qu'il a fallu qu'on
se batte pour avoir la CSN. La CSN, là,
représente 10 500 travailleurs dans 400 CPE et 3 200 responsables de
services de garde en milieu familial.
Il a fallu qu'on se batte jusqu'à vendredi pour finalement qu'ils puissent
venir aujourd'hui. On est lundi, moins de 48 heures... bien, ce n'est
pas grave, ils vont être là.
Mais
je comprends que, quand on n'arrive plus à avoir d'alliés au Québec, il faut
aller en chercher à l'étranger. Donc, on reçoit ceux de l'extérieur, mais on ne
peut pas recevoir notre monde au Québec. Je trouve ça très dommage, parce
que c'est important de savoir d'abord et avant tout quel est l'état de
situation au Québec. Et, avant de dire qu'on va prendre les modèles extérieurs, moi, j'aurais invité le premier
ministre, avant de faire sa grande promesse, d'aller justement visiter
New York, d'aller, justement, en Ontario visiter. Il a même parlé de la France.
Bien, qu'il aille en France visiter avant,
pas après, parce qu'habituellement, quand on attache comme il faut nos affaires
et qu'on fait nos devoirs, bien, on fait tout ça
avant, pas après coup quand on se rend compte qu'au final, bien, cette
solution, les Québécois, les sondages démontrent qu'ils n'en veulent pas.
Le réseau de
l'éducation, la véritable priorité, savez-vous c'est quoi, M. le Président?
Le
Président (M. Asselin) : Non, mais...
Mme Rizqy :
Trouver des enseignants, c'est ça que ça prend.
Le
Président (M. Asselin) : Mme la députée de Saint-Laurent, je
vous remercie beaucoup pour vos remarques, le
quatre minutes est échu. J'invite maintenant la porte-parole du deuxième groupe
d'opposition en matière d'éducation et députée de Sherbrooke à faire ses
remarques préliminaires. Vous disposez, malheureusement, d'une minute.
Mme Christine Labrie
Mme
Labrie : Merci, M. le Président. Écoutez, oui, c'est vrai, nous, on
croit au projet de maternelles quatre ans en milieu défavorisé. C'est un
projet qu'on a appuyé dans le passé et qu'on appuie toujours.
Quelque
chose qui me dérange beaucoup avec le projet qui est sur la table en ce moment,
c'est qu'on perd de vue l'objectif qui était à l'origine des maternelles quatre
ans en milieu défavorisé, de s'adresser principalement, justement, à ces
enfants-là qui ont effectivement plus de facteurs de vulnérabilité. Je pense
qu'on devrait en premier déployer des maternelles quatre ans dans ces
milieux-là défavorisés.
Et
ce qui m'inquiète, c'est qu'avec le projet de loi qui nous est présenté, ce que
le gouvernement veut aller obtenir, c'est
le droit de déployer ces maternelles-là à peu près n'importe où, alors que sa cible est maintenant de
l'offrir à 50 % des enfants. Je pense que ces enfants-là qui
devraient être priorisés, ça devrait être ceux qui sont en milieu défavorisé.
Et, en ce moment, c'est comme si le gouvernement souhaite se décharger
de cette responsabilité-là d'offrir les maternelles quatre ans à temps plein en
milieu défavorisé en premier, donc ça m'inquiète beaucoup. Je vais m'arrêter
ici.
Le Président (M. Asselin) : Donc, malheureusement, c'est terminé. Je vous
remercie beaucoup. J'invite maintenant la porte-parole du troisième
groupe d'opposition en matière d'éducation et députée de Joliette à faire ses
remarques préliminaires pour un maximum d'une minute.
Mme Véronique Hivon
Mme
Hivon : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, de notre
côté, eh bien, nous partageons la priorité que le gouvernement accorde à l'éducation et aussi
l'importance de se donner comme objectif d'accompagner le mieux possible les
enfants du Québec pour qu'ils puissent se développer, s'épanouir et réussir le
mieux possible. Or, on aurait aimé, comme nous le demandons depuis des mois, qu'aujourd'hui, à l'ouverture des
consultations, le ministre nous dépose enfin le plan de déploiement de ce projet du gouvernement de
maternelles quatre ans et comment il va s'articuler en complémentarité avec les CPE, avec les services de garde éducatifs
et avec le projet du collègue des Services sociaux de dépister le plus tôt
possible, donc, en faisant des passerelles
entre les services de garde éducatifs, les ressources en CLSC, les experts et
non pas seulement à quatre ans...
Donc, évidemment, ce qu'on pense qui est fondamental, c'est de partir des
besoins des enfants et non pas d'une idée fixe. Merci beaucoup.
Auditions
Le Président (M. Asselin) : Merci beaucoup. Je voudrais souhaiter la
bienvenue aux représentants du district 9, du conseil d'administration,
pour la ville de New York, qui est représenté ici par Mme Rahynes et M.
Alvarez, qui est un de ses directeurs. On va procéder à un échange avec les
membres de la commission. Je vous invite à vous présenter.
• (14 h 20) •
Une voix :
...
Le Président (M. Asselin) : Oui, c'est vrai qu'on a 10 minutes d'exposé,
avant ça, qu'on a le droit de demander au ministre la parole...
Une voix :
...
Le Président (M. Asselin) : Non, alors, on a 10 minutes pour vous, pour vous
laisser prendre votre temps, et après ça on va échanger.
So,
Mr. Alvarez is coming here and Mme Rahynes will talk. We know them...
Mme Carlyn
Rahynes et M. Rafael Alvarez
Mme
Rahynes (Carlyn) : Good afternoon and thank you for having us here today.
In
today's world, we learn from each other, and our sole purpose today is to share
some of the practices that we've had in New York City. We are not here to
say : Implement what we have in New York, but we want to inspire you of
what could be when we invest in all of our children.
In 2015, our mayor made the announcement, in April, that
we were going to have Pre-K for All, which meant every four-year-old in New
York City would have free quality pre-k available to them and their families.
He made the announcement in April, the
program was implemented in September. We were like : Wow! We have four
months to get this program started, how do we do this?
Our
first thing was how would the families know, because the families were our
priority. We wanted them to know that this
was open to all of them. So, we had advertisements in the subway system, on
buses, we made phone calls, we visited parks, we found all the ways that
we could so that families know that this would be available to them.
Our next thing was how would we get
teachers, because now we have all of these children. How are we going to have teachers to serve them? One
of the things that we had was a pathway system because we did have some
teachers that were still in school,
but they did not have all of their credentials or certification. So, we set up
systems which allowed them to teach
while still getting their credentials, because we had all of these young
children that will be coming to us in September and a four-month period
of having a teacher stand before them.
M. Alvarez (Rafael) : We also implemented a system for the
teaching assistants. So, teaching assistants who were in the classrooms with
the teachers were provided opportunities with stipends to be able to go to
school in the evenings so that they can themselves become teachers in the
future... investing in the staff that we currently had to build the capacity of our working force.
Then we talked about some
infrastructures. So, we knew that infrastructure was
a concern. And so, what New York City did is we provided Pre-K for All in different
locations, such as faith-based organizations. We went with funding for new
locations, such as local storefronts. And then we also thought about what were
the existing spaces within schools that were being utilized for things such as storage or such as a second
lunchroom for staff. We then converted those into actual classrooms... that were, actually, originally created for
classrooms, and provided space for students to be able to be received at the school level.
Mme
Rahynes (Carlyn) : Then, the next thing was curriculum, OK, what are
the teachers going to be teaching the
children. So, our curriculum writers created a curriculum. But, with this
curriculum, we went by the standards of our State. However, within the curriculum, it allowed the children the
freedom to explore while having our standards being met. Also, we had to provide professional development
for the teachers because we have these brand-new teachers with a new curriculum.
How can we support them? So, we provide... Every Monday, they get an hour and a
half of professional development, which... they are trained towards the
curriculum. We also have mentors, which are teachers that have many years of teaching seniority and they would
support and guide the new teachers in the classroom as well as out of the
classroom.
M. Alvarez (Rafael) : So,
it's also important to know what our data shared. And so, this year... excuse
me, last school year was the first year that those
pre-k students, when we started the program, were in the pre-k classes. Their
third-grade scores, which are the first standardized assessments that they
received from our State, was at 39%, which was
an increase of
nearly 20%... students on
standardized tests. In other words, what we provided them in pre-k, through our pre-k program, through learning through play, implementing it
into kindergarten and across first, second... by the time they got to third grade, because they came to school prepared and
ready, they were able to be successful by 20% greater than the students
who didn't have those particular services.
Mme Rahynes (Carlyn) :
And, as we said, we're just trying to share the practices that worked for us.
Of course, you will tailor it to your children, to your
families. And that's another big component of our Pre-K for All, our families play such a key, key, key role in the
implementation of this Pre-K for All. We listen to what the parents need, what
they want. We're not only there to
serve the children, but for our parents. We have a parent association in which
the parents have a voice and they can
let us know what are some things that they would like to see within their
schools. They get supported as well.
Also, there are... We also... In our district, we are the lowest congressional
district in the State of New York, which means we have a lot of
low-income families. So, there are a lot of situations, we have families that
live in shelters, so we have social workers
and programs to support the families. So, within this program, it's not only
about the children, but we're also there to support the families.
M. Alvarez (Rafael) :
Within our district... We have a variety of socioeconomic statuses in our
district and we've been
trying to do is balance that. And so, one of the things that we've been able to
do, by having Pre-K for All, it gives the options for parents to choose. We haven't taken away day cares, we
haven't taken away the community-based pre-k programs as well. What we have done is we've enhanced the
pre-k program by putting knowledgeable educators that would actually
understand the developmental stages of the children, while supporting them
instructionally.
So, the program is still
learning-based, play-based. It's not curriculum instruction. But, when we say
units of study, the units of study are actual different units that we focus on.
For example, transportation would be a unit that they
would study over a course of time. So, when
they go to the drama center, when they go to the play center, the block center,
the art center, the painting center, all these different centers are aligned
through transportation so that students are being exposed to the
curriculum understanding.
One of the things that we want to know
is that to enter kindergarten in the United States, particularly in New York, children have to come in with 25,000 vocabulary words to be able to
be on grade level and be successful by the time they get to first, second and
third grade. Through the use of pre-k, we've been able to close the gap of the
vocabulary that children need to enter with, allowing them to be more
successful when they have to go to compulsory education.
Mme Rahynes (Carlyn) : And, because our program
was so successful, the mayor has now implemented 3-K for All, where we now have
students that are entering school at 2.9, and it's the same thing, it's all
play-based, and then they continue on to pre-k and then
all the grades forward.
Le
Président (M. Asselin) : Still two minutes. It's OK? Well, actually... On va débuter la période
d'échange avec le ministre de l'Éducation pour commencer. M. le
ministre, la parole est à vous.
M. Roberge : Combien de temps, M. le
Président?
Le Président (M.
Asselin) : 16 minutes.
M. Roberge : Merci bien, M. le
Président. Je vais commencer cette période-là, mais, si mes collègues veulent
intervenir, ça me fera plaisir de leur permettre aussi d'échanger.
D'abord, je vous remercie énormément d'être
venus ici pour échanger avec l'ensemble des parlementaires, qu'on puisse voir ce qui vous a influencé, les
résultats que vous constatez et peut-être même tirer des leçons des choses qui
ont peut-être moins bien été à certains égards.
Mais juste
voir... Je veux revenir sur une mesure. Vous savez, on a bien mesuré
l'efficacité de ce qu'on fait pour voir si, effectivement, il y a des impacts
favorables à ce que vous avez fait. Et vous avez parlé tout à l'heure
d'augmentation de succès scolaires, de réussite, mais on appelle ça la réussite
éducative, ce n'est pas seulement des notes. Est-ce que vous pourriez me
parler encore davantage de qu'est-ce que vous voyez comme impact positif sur
les élèves qui ont passé ou qui ont
bénéficié de la maternelle quatre ans? Qu'est-ce que vous constatez, chez ces
enfants-là, en termes de résultats, puis
nous préciser davantage dans quelle matière ou qu'est-ce que vous voyez comme
impact positif chez ces enfants-là?
• (14 h 30) •
M. Alvarez (Rafael) : So, in terms of entering school, one of the things that happens
when they enter in kindergarten is that they
come not ready because some families either have day care or do not. And so,
when they come into kindergarten, it's all about systems and structures
that have to be put in place.
Schools were spending about a
month to a month and a half of implementing systems and structures to prepare
school for children who were not ready to actually perform at academic level.
What the pre-k does is it provides the opportunity for students to learn some
structures while they are learning through play, but also learn some of those
structures that are necessary to be successful.
As they enter into
kindergarten, we have seen a huge reduction in the number of behavior
incidences that have occurred with particular students. We saw a huge reduction
in the number of special need services that were necessary for students to be placed in kindergarten. In
other words, there were less initial evaluations that were necessary for
students because of what are their
behavior or their academics because, when they were coming into kindergarten, they
were already prepared with basic
fundamental skills such as phonemic awareness, some phonic skills. They came
with some letter, number recognition at the preschool level.
When they entered into
kindergarten, because they had those particular abilities... and we did have a
range of those abilities, but because they
came in with some of those abilities, it increased their level academically,
reduced the number of socioemotional needs and concerns, while also
addressing the implication of academic success moving forward.
M. Roberge : Quand j'ai visité vos écoles ou les classes de
maternelle quatre ans et cinq ans, j'ai constaté que ça n'avait pas l'air d'une
classe d'école. On ne voyait pas des bureaux enlignés avec des enfants assis
derrière chacun de leur pupitre puis
une enseignante devant un tableau, devant la classe. Certains ici, au Québec,
ont peur qu'en implantant une maternelle quatre ans on fasse une scolarisation
hâtive, qu'on empêche les enfants d'être des enfants, qu'on les empêche
de jouer.
Alors, ma
question, ça serait : Est-ce que vous n'avez pas peur qu'avec la maternelle quatre
ans vous empêchiez les enfants d'être
heureux, d'être des enfants de quatre ans, de jouer, de s'amuser en les forçant
à devenir de petits élèves qui apprennent des choses et qu'on force dans
des matières académiques? Vous n'avez pas cette crainte-là?
Mme Rahynes
(Carlyn) : Non. Children, they learn and they develop
mentally through play. We had a unit on insects, and the children learned about
the different parts of insects. We had little toys that were shaped like
insects. So, the children were able to play, but also
identify the parts of the insects.
So, it's language development at its finest. As the children
are playing, the teachers are asking them questions : What do you think about that? So, they are
exploring, learning, and it really shows that it works. It is structured in the
sense of... based on the unit, but
the children have the freedom to explore. So, today, I want to play in the
sand, I want to learn about sand, I want to learn about the beach, I want to
learn about water. Then, they can go into the kitchen and pretend that
they are cooking something with water. And, again, having those conversations
and asking the children... or the questions
like : What can you do with this water? What can you tell me about the
water? What are some things that you love about insects? So, it gives
the children the ability to speak and guide the curriculum.
M.
Alvarez (Rafael) :
When the children go into what you consider kindergarten and first grade, the
curriculum requires that students have interactions with each other, and have
conversations, and learn how to interact with each other
in terms of working on projects and things
like that. In the pre-k program that we have, that is exactly what it does. It
teaches students the social developmental skills that are necessary to
interact with each other, to compete respectfully and responsibly,
but also becoming model citizens at an early age, so that they understand the
differences between working in a group versus working independently. And they
learn those particular skills that help them become more successful as they
move up into older grades.
M. Roberge : Donc, je comprends que les jeunes explorent,
découvrent, se développent et apprennent par le jeu, par des jeux qui sont parfois guidés, qui sont
parfois libres, mais dans un milieu qui est stimulant ou alors parfois des jeux
qui sont guidés par les enseignants qui sont dans la classe, puis on les laisse
être des enfants.
Est-ce que
dans vos classes le mobilier est adapté? Est-ce que vous considérez que
l'environnement de la classe... c'est
possible d'avoir un environnement dans une classe, mais qui est adapté à des
tout-petits de quatre ans — la
hauteur des tables, la hauteur des chaises? Est-ce que c'est possible
d'avoir ça dans une école?
Mme Rahynes
(Carlyn) : Absolutely. Environment is the number one key for when the children come in. There are structures. So, in the morning, they
have a morning meeting where the children sit down on the carpet, and the
teacher may read a book to them. And then, they go into their centers and
explore. But there are multiple opportunities throughout the day to have the
structure as well as the freedom.
M. Roberge : Très bien. Quand
ça a été le temps de développer le réseau au début, dans les premières années, évidemment, les gens n'étaient pas au courant de l'offre de la maternelle quatre ans. Est-ce
que vous avez attendu que les gens se rendent à l'école pour s'inscrire ou bien
vous avez pris des moyens pour informer les gens? Et quels moyens vous avez pris
pour informer les gens de New York que ce service existe?
Mme Rahynes (Carlyn) : So, we did have teams of people, they would go to playgrounds where
families were, they'd set up tables, they'd
give out literature. We made phone calls in our schools that have the upper
grades. We knew that there were siblings that would be four years old,
so we would contact the families. We set up... they call them enrollment fairs, where we'd have balloons
and popcorn, and the children would come, and we would talk to the families.
Social media, Facebook...
M. Alvarez (Rafael) : News advertisements, we also used news advertisements. We created
public forums for parents to come out to hear about what the programs would
entail, how they would support their children. We also did listening tours and
tours of schools that were already implementing the pre-k program, for parents
to actually come visit, and see, and observe
what structures were in place, so that it made parents feel comfortable about
what was being offered to their
children. We took questions from parents and we actually took suggestions from
parents on new ideas of what else to implement in the actual program.
M. Roberge : Donc, vous avez envoyé
sur le terrain des travailleurs de rue, des gens qui vont dans les parcs à la
rencontre des familles, vous avez fait des appels, vous avez envoyé des
courriels, vous avez utilisé les médias sociaux,
les médias traditionnels. Est-ce
qu'il n'y a pas des gens, dans des garderies privées ou dans d'autres
garderies, qui ne vous ont pas accusés de leur voler leur clientèle?
Mme Rahynes (Carlyn) : Non, because we...
M. Roberge : Non?
Mme
Rahynes (Carlyn) : Non. We wanted to make it an even... playing fair so we offered the same
opportunities to the
day cares while providing them the support, because our sole purpose was to
make sure that all the children were receiving an equitable education.
So, we reached out to them as well to make sure that they had the same
information.
M. Alvarez (Rafael) :
As a system, we included and invited those different private day cares,
day-care centers, ACS locations and community-based organizations as well as
the faith-based organizations to work together to develop the teachers and the staff so that they can implement
appropriately. We also made sure that they were provided with the same
units of study that the schools had in terms of their pre-k program, allowing
for communication, dialogue back-and-forth, to work together as opposed to
against each other.
M. Roberge : Il y a des gens qui
prétendent qu'il ne faudrait déployer la maternelle quatre ans qu'en milieu défavorisé. Donc, je sais qu'évidemment vous
l'avez déployée en milieu défavorisé, mais vous l'avez offerte à la grandeur
de votre territoire. Pourquoi ne pas avoir déployé ce programme-là seulement en
milieu défavorisé?
• (14 h 40) •
M. Alvarez (Rafael) :
So, originally, that's where it started and that's were the pilot began. As a
system, we knew that our underprivileged
students were coming in with less vocabulary than our more privileged children.
So, we did start in our system,
primarily my district, which is district 7... community schools of district 7,
in the entire United States, we're the
poorest congressional district. So, we started off with our district. When we
started to see the gains of our district, it then started to be
distributed amongst all other territories within our city.
So,
we put it in the most affluent, we put it across the city. And one of the main
reasons why we did that is because we wanted qualified
teachers providing the instructional support around the social-emotional
development of students. And it was critical for us to
see that these teachers had these particular skills to support the development
of our children. Because, if our end-goal,
our vision was to ensure that children came in socially, emotionally ready for
school as well as somewhat academically, with the language acquisition
and the vocabulary that was necessary, we wanted to make sure that they all brought it. So, we went from an
equity perspective to ensuring, then, an equality perspective. We still haven't
stopped the equity perspective, but we're
also focusing on, now, equality, ensuring that all programs throughout the city have the same thing.
M. Roberge : Je comprends que de l'offrir à tous, comme vous
l'avez fait, plutôt que de vous concentrer seulement en milieu
défavorisé, évidemment, ça a eu un enjeu, peut-être des problèmes à trouver des
locaux, des problèmes à trouver des professionnels, et c'est certainement qu'il
y a des coûts reliés à cette implantation-là. Est-ce que vous ne pensez pas que c'est trop coûteux, ça coûte trop
cher d'investir dans les jeunes comme ça et que ça aurait été mieux de ne
pas investir l'argent dans les enfants de quatre ans et de ne pas l'implanter à
la grandeur parce que ça coûte trop cher?
M. Alvarez (Rafael) : So, I would start off with saying : What is the most important
investment you make in your country, in your
province, in your city? And as an educator, it's my answer to say : Our
children. And so, if our children are
the most important investment that we make as a society, pre-k is essentially
critical to ensuring that every child receives an opportunity to be
successful in life.
In
addition to that, the cost can range depending on how a system creates the cost
savings. So, for example, one thing that we did as a city... The city oversees
30... excuse me, 46 districts. I am one of 46 districts. Within the city, we service 1.2 billion...
excuse me, 1.2 million students. The way we did the cost-effective analysis was
we created a system where we
said : These are the materials that you're going to need, for example, for
furniture, for our pre-k class, the most basic furniture needs you're going to need. We then made a list of that,
went to a vendor and decided to get one vendor to provide those
particular materials across our city. Those are the basic materials.
But,
when you do that, you reduce the cost because of the fact that you're
purchasing more. The more you purchase, the less it is.
And therefore, it was the cost-effective analysis to do things like that when
it came to the materials. When it came to
the curriculum, the curriculum was decided through what you would call your
Ministry of Education, where we would
develop the curricular for the entire city and then think about how we
implement it at the individual school districts such as my district.
So, there are many cost-effective
ways to provide the actual program and implementation. As a matter of fact, I would argue that there was less money to
support, then, all the intervention services and special needs services that we
needed prior to having pre-k, because now we were sending for more evaluations,
we were sending for more kids with special needs. In the United States, when
students have special needs, they get additional supports financially, but, in addition to the additional supports financially,
there's also additional requirements which requires more staff members to
provide the special-needs services like
occupational therapy, physical therapy, speech, and so on, and so forth. So,
having the pre-k, became something that actually reduced the cost... is
reducing the cost over time.
M. Roberge : Je veux bien
comprendre. Donc, vous nous expliquez que, oui, ça a coûté de l'argent, ça a
été un investissement massif, un investissement que vous continuez de faire,
mais vous considérez que, malgré le coût important de la maternelle quatre ans,
c'est un investissement payant et qu'à terme ça va même coûter moins cher parce qu'en ayant stimulé nos jeunes plus tôt, en
leur ayant donné les bonnes bases, bien, à terme, à l'intérieur du réseau
scolaire, dans leur parcours scolaire, ça coûtera moins cher de les aider plus
tard. Est-ce que c'est bien ce que vous dites?
M. Alvarez (Rafael) :
Essentially, yes.
M. Roberge : Merci. Donc, vous avez implanté ce programme-là.
En cours d'implantation, des fois, il peut survenir des enjeux, des difficultés, puis on regarde
derrière puis on dit : Oups! Dans les six derniers mois ou dans la
dernière année, on a fait quelque chose, on va agir différemment dans la
prochaine année. Donc, quelles ont peut-être été les erreurs ou les difficultés rencontrées que vous nous
recommandez de ne pas faire? Qu'est-ce que vous nous recommandez de faire,
considérant les embûches, les difficultés et tout ce que vous avez pu
rencontrer au cours d'implantation? Quels seraient vos recommandations,
vos conseils?
Le Président (M.
Asselin) : Je suis désolé, on ne pourra pas entendre vos
réponses, mais peut-être à travers le reste
de nos échanges vous pourrez aborder ce sujet-là. Je laisse la parole
maintenant à la députée de Saint-Laurent, qui pourra continuer, pour
10 min 40 s, les échanges.
Mme Rizqy : Merci beaucoup.
Bienvenue au Québec. Quand est-ce êtes-vous arrivés au Québec?
Mme Rahynes
(Carlyn) : Yesterday.
M. Alvarez
(Rafael) : Yesterday.
Mme Rizqy :
Avez-vous eu la chance de visiter un de nos services de garde ou centres de
petite enfance au Québec?
Mme Rahynes (Carlyn) : No.
Mme Rizqy :
Vous n'avez jamais visité aucun de nos centres de petite enfance québécois
avant, par exemple, d'implanter un projet à New York? Connaissez-vous notre
programme de centres de petite enfance ou nos services de garde québécois?
Mme Rahynes
(Carlyn) : Yes.
M. Alvarez (Rafael) : Yes. We have been looking up what has
been going on in Québec in terms of the day-care centers and the programs that are available.
Mme Rizqy :
O.K. Avez-vous quelque chose d'équivalent à New York?
M. Alvarez (Rafael) : Yes. The difference in New York is that for underprivileged... Here, you have a
set system in terms
of what's paid for for the day-care system. In New York, for the underprivileged families, they get what's called a voucher, and the voucher allows them to choose whichever day-care
system they would like to use within the system.
Mme Rizqy : Nous, nos centres de petite enfance... Vous,
entre zéro et trois ans, est-ce que vous avez quelque chose d'offert aux New-Yorkais, de zéro à trois ans.
M. Alvarez
(Rafael) : We have from zero to three, and
there is also zero to five and, some places, zero to six.
Mme Rizqy :
Zéro à trois ans, ça coûte combien pour un parent new-yorkais?
M. Alvarez (Rafael) : That is... We wouldn't know exactly
what expenses because that comes through the Department
of Health. From zero to three, currently, the program is run through the
Department of Health because it's self-identified by families as to whether or
not their children have special needs.
Mme Rizqy :
Oui, mais vous, vous êtes représentant élu, non? Oui?
M. Alvarez
(Rafael) : Superintendent.
Mme Rizqy :
O.K. Vous représentez le district 7, vous avez dit.
M. Alvarez
(Rafael) : Correct. Yes.
Mme Rizqy :
Donc, vous, vous êtes le district 7. District 7, comment ça coûte,
une place...
M. Alvarez
(Rafael) : Not as an elected official, as an
appointed official.
Mme Rizqy : O.K. Bien, pour une personne qui travaille au
district 7, connaissez-vous combien ça coûte, une place en garderie
entre zéro et trois ans à New York?
M. Alvarez (Rafael) : Again, in my district, it runs very
differently because I have the poorest congressional district, most families can't afford day
care. And so, what happens is the Government provides them a voucher to be able to place
their children into day care.
Mme Rizqy : Combien coûte une place en garderie entre zéro et
quatre ans? Est-ce que vous avez des services gratuits ou est-ce
que vous êtes capable de chiffrer? Parce que,
par exemple, la maternelle quatre ans, c'est chiffré, pour New York, à
1 milliard pour 70 000 enfants. Ça, c'est le chiffre
qui est disponible en ligne. Moi, je veux savoir de façon... 0-3 ans, disons
que j'ai une famille qui a un revenu moyen
de 200 000 $... Non, vous êtes dans le Bronx, on va réduire. Disons
que c'est moins et que c'est
100 000 $. Une famille moyenne, la classe moyenne, combien
paie-t-elle, le moins cher et le plus cher, environ, là? Le moins cher au plus cher, ça coûte combien?
M. Alvarez (Rafael) : So, the average, the average salary in
my district is $16,000 a year for a parent. That is their wage, their annual wage. So,
because we have supplemental programs from our Government, the families receive a voucher that allows them to go to a particular program for
free. They don't pay anything to it. And we are pretty much, essentially...
98% of our students are free or reduced lunch. So, we get federal funding,
state funding and city funding.
Mme Rizqy :
O.K. Merci. Puis à New York...
Le
Président (M. Asselin) : Mme la députée de Saint-Laurent,
n'hésitez pas à prendre votre temps parce qu'ils doivent entendre ce que vous
dites.
Mme Rizqy :
O.K. À New York, les salaires varient énormément. Vous êtes d'accord?
M. Alvarez (Rafael) : Correct.
Mme Rizqy : Donc,
oui, vous avez des gens qui font 16 000 $, vous avez d'autres de
classe moyenne et d'autres qui font plus que 100 000 $. Vous
êtes d'accord?
M. Alvarez (Rafael) :
Non.
Mme Rizqy :
À New York?
M.
Alvarez (Rafael) : In New York as a hole city,
but in district 7...
Mme
Rizqy : Not in district 7, New York, la ville de New York.
M. Alvarez (Rafael) : The
New York City's salaries range from anywhere between $5,000 to what... the
biggest billionaire has 1... or 15 billion...
Mme Rizqy :
O.K. La classe moyenne paie combien, généralement, une place en garderie entre
zéro et trois ans?
Mme Rahynes (Carlyn) : So, in terms of the three-year-olds, I
can speak for. The three-year-olds, we have 3-K for
All. 3-K for All is free for all three-year-old students.
M.
Alvarez (Rafael) : So, if I'm understanding your question correctly,
you're asking what is the average money that a parent pays for their child from
the age of zero to three for their own services such like a nanny, right?
Mme Rizqy : Not such as a
nanny. I'm asking for kindergarten between zero and three years old. I just want
to know if you do have the same system as here.
Because, here, you can pay $8 a day, you can put your kid from zero to four
years old. And that is why I'm asking the question.
M.
Alvarez (Rafael) : No, we don't.
Mme
Rizqy : You don't have the same system.
M.
Alvarez (Rafael) : Not for zero to three.
Mme
Rizqy : Do you want me to continue in English maybe? Maybe it's going
to be...
M. Alvarez (Rafael) : No,
no, it's OK. I understood. I just... I wasn't clear as to... You were asking
for zero to three. We were trying to make clarity as to
what you meant by zero to three.
• (14 h 50) •
Mme Rizqy :
C'est qu'on veut tous agir tôt. Mais, pour nous, agir tôt, ça commence le plus
tôt possible et ça ne commence pas
nécessairement à quatre ans. On peut le faire à zéro, à six mois, un an, deux
ans. Et nous, on a un service de
garde, et c'est pour ça que c'est très difficile de comparer. Vos enfants à
quatre ans, dans le programme Pre-K for All, est-ce que vous avez
des écoles avec 1 000 enfants?
M. Alvarez
(Rafael) : Yes.
Mme Rizqy :
Donc, vous avez des écoles où est-ce qu'on a des enfants de quatre ans dans une
bâtisse, avec un total... dans la même bâtisse, 1 000 enfants?
M. Alvarez (Rafael) : That depends. Yes, we do have some
schools that have that, but that depends which school.
There are schools with 200 kids, there are schools with 1,000 kids. It just
depends what school you're in.
Mme Rahynes (Carlyn) : In
the schools that have the 1,000 children with the different grades, the pre-k,
the early childhood center, it's set aside, it's in a
different section of the school, they are not with the upper-grade children.
Mme Rizqy :
Mais vous avez des écoles avec plus de 1 000 enfants. Dans une classe
de maternelle quatre ans, c'est quoi, votre limite d'enfants, le ratio?
M. Alvarez
(Rafael) : For four-year-olds, it's 18
students, with a teaching assistant.
Mme Rizqy :
O.K. Vous savez qu'ici, nous, c'est 10, hein? Combien... Une seconde...
M. Alvarez
(Rafael) : But you said : Here, it's...
Mme Rizqy :
Non, non. Que font vos enfants l'été après l'école?
Mme Rahynes (Carlyn) : So, we do
have some after-school programs within the school. Also, we have the day-care
centers which will provide after-school for the children. And, in the summer,
we have summer camps for the children to attend.
Mme Rizqy :
Qui paie pour le camp d'été?
Mme Rahynes (Carlyn) : Sometimes they're free, again
depending on the provider, and sometimes parents seek
private camps. It's all parent choice.
Mme Rizqy :
O.K. Ça coûte combien, les camps d'été, quand ce n'est pas gratuit?
Mme Rahynes (Carlyn) : It ranges. It ranges because the
camps, they are non-profit organizations, so they each
have their own set fees.
M. Alvarez (Rafael) : Many of them are also based on income.
So, if you're socially,
economically disadvantaged, you may get a voucher to be
in the...
Mme Rizqy :
Non, mais j'aimerais juste avoir une bracket, une fourchette de prix parce que
ça... Je comprends qu'il y en a que c'est gratuit. Par exemple, le
district 7, ça doit être gratuit...
M. Alvarez
(Rafael) : Between $0 and possibly $400,
depending on your wealth in terms of income.
Mme Rizqy :
O.K. Merci. Dites-moi, est-ce que vous avez eu la chance de lire l'étude de
l'Université Vanderbilt qui parle des
maternelles quatre ans, qui ont fait un programme? Lorsque le Tennessee ont
décidé d'implanter les maternelles quatre
ans, ils ont fait un «focus group», ils ont pris des élèves de quatre ans et
ils les ont suivi pendant plus de 10 ans pour faire une recherche pour vérifier les effets
positifs ou négatifs, les lacunes. Est-ce que vous avez pris connaissance de
l'étude de l'Université Vanderbilt?
Mme Rahynes
(Carlyn) : Yes, we have read the Vanderbilt
study.
Mme Rizqy :
O.K. Quelles sont les conclusions, dans vos mots?
M. Alvarez (Rafael) : The study says essentially that they
didn't see much of a difference. However, again, when
we're talking about this, we're talking about different states and different
ways that different states implement the program...
looks very differently. And so, for us as a city, we look at our own data to
determine if it made an improvement.
Mme
Rizqy : Ah! O.K. Vous avez parfaitement raison, hein, eux, c'est
l'État au complet qui l'a implanté. Vous, c'est une ville qui l'a implanté, hein? Il y a une grande différence.
C'est pour ça que vous vous distinguez de la recherche de Vanderbilt?
M. Alvarez (Rafael) : No, not distinguishing ourselves from
the respect of the study, but distinguishing how we went with implementation. We didn't do what every
city decided to do. We took what worked from the implementation of pre-k and started implementing it. And, to be
honest, we're not at 100 % fool-proof with what we're doing with our
pre-k. It's still something in development. But what we can see is that
it has made improvements and an impact in our school communities and the
students that we service.
Mme Rizqy :
O.K. Est-ce que vous avez décidé de demander à une université... Je vois que
vous, vous avez gradué à NYU. Est-ce que vous avez demandé, par exemple, qu'il
y ait des études pour vérifier à la fin, par exemple, sur un projet de 10 ans, les impacts positifs ou négatifs
ou les affaires à améliorer avec l'implantation des maternelles quatre ans pour
tous? Est-ce que vous allez faire comme Tennessee ou non, une recherche?
M. Alvarez (Rafael) : Essentially, New York City is in the
process of doing that, but we haven't hit the 10-year
mark, so we haven't actually fully implemented that.
Mme Rizqy :
Et c'est quelle université qui s'occupe de cette recherche?
M. Alvarez (Rafael) : New York City has several universities
looking at the data. So, we have things like Columbia
University, we have New York University, we have Fordham University. Several of
the state... excuse me, the private universities that are within our city are
actually looking at it on multiple levels.
Mme Rizqy :
O.K. Donc, il y a un groupe d'étude pour faire comme Tennessee, vérifier, qui
ont pris un groupe d'enfants, qui vont vérifier ceux qui ont fréquenté des
quatre ans, ceux qui n'ont pas fréquenté? Parce que je n'ai
pas trouvé ça nulle part.
M.
Alvarez (Rafael) : It hasn't been made public
because we haven't actually finalized it yet. They haven't finalized the study.
Mme Rizqy : O.K. Est-ce que...
Le Président (M.
Asselin) : Je vous remercie beaucoup.
Mme Rizqy : Il me reste une
minute, M. le Président. Alors...
Le Président (M.
Asselin) : Je ne vois pas la minute, moi.
Mme Rizqy : Ah!
Le
Président (M. Asselin) : Ce
que je vois c'est qu'il n'y a pas de minute. Alors, je vais donner la parole,
pour 2 min 40 s, à la députée de Sherbrooke.
Mme Labrie : Merci, M.
le Président. Tout à l'heure vous avez mentionné que la plupart des familles ne pouvaient payer la garderie, à New York,
avant l'implantation des maternelles quatre ans. Mais on n'a pas réussi... en tout cas, moi, je n'ai pas perçu la réponse ou de savoir combien ça
coûtait. Combien ça coûte, le prix moyen?
M. Alvarez (Rafael) : Again, average cost is dependant on what a family wants. There are
some very wealthy families that pay up to $32,000 a year for day care versus
other families who pay nothing for day care. It depends on where economically they are in the
system to determine which program they go to. Also, some programs are very
elitist and so they allow for
families who may have wealth to be able to place their children in. So, it's
really contingent upon the averages from
$0 to... I've seen up to $32,000 for day care services. It just really depends
on the socioeconomic status of the family and what they can actually
afford to provide their child.
Mme Labrie :
Et quelle proportion des familles ne payaient rien parce qu'elles recevaient un
coupon pour avoir accès à une garderie gratuite?
M. Alvarez
(Rafael) : In my district, probably 100% of
the families receive the voucher.
Mme Labrie :
100 %?
M.
Alvarez (Rafael) : About 100%, probably, received it in my district
because we have the poorest congressional district. But, throughout the city, I would
imagine about 60% to 70% of the families within the city would receive the
voucher.
Mme Labrie : Donc, c'était déjà
gratuit pour 60 % des familles avant... la garderie, avant l'implantation
de la maternelle quatre ans, c'était déjà gratuit pour 60 % des familles,
c'est ce que je comprends?
M. Alvarez
(Rafael) : On average, yes, in our district.
Mme Labrie :
O.K. Et quelle proportion des familles ne fréquentaient aucun milieu de garde,
gardaient les enfants à la maison?
Mme Rahynes (Carlyn) : That number was very small, especially
when we offered the Pre-K for All, which was free, most of the families attended.
It is very few families that did not. In fact, we had an overwhelming response
where we had to open
up additional classrooms because the demand at one point was more than the
supply that we had, so we had to open up additional classrooms.
Mme Labrie :
Et qu'est-ce qui ne fonctionnait pas bien avec ce système-là de donner un accès
gratuit aux familles qui en avaient besoin?
M. Alvarez (Rafael) : So, I think, because of the supply and
demand that we discussed earlier, one of the biggest problems was the implementation so quickly. What
we envy about what you're doing is that the plan looks like it's going
to be over the course of five years, which we wish we...
Le Président (M.
Asselin) : Merci beaucoup pour votre contribution. Maintenant,
la députée de Joliette pour 2 min 40 s.
Mme Hivon :
Oui. Merci beaucoup de votre présence. Je pense que vous entendez nos
questions, c'est parce qu'ici on a
déjà un système éducatif à la petite enfance avec un programme universel, mais
malheureusement il y a juste à peu près
23 % des enfants qui fréquentent, par exemple, les centres de la petite
enfance. Donc, il y a ce débat-là, je pense que vous êtes bien au fait. Moi, j'aimerais savoir pour quels
enfants vous avez le sentiment que de fréquenter la maternelle quatre ans fait la plus
grande différence. Est-ce que c'est les enfants qui avaient déjà des
vulnérabilités? Est-ce que c'est les enfants qui viennent de milieux
plus défavorisés? Je comprends que vous êtes dans des districts précis, mais,
si vous pouvez étendre pour la ville au complet, pour quels enfants vous avez
le sentiment que ça fait la plus grande différence?
• (15 heures)
•
M.
Alvarez (Rafael) : In all honesty, we think that it makes a difference
for all our children. And the reason why we
think it makes a difference for all of our children is because there are
children with... for example, who are wealthy, who may have vulnerabilities that their parents may not know or be
exposed to because of the high work demand or because of the ability to be with their children at many
times because they're with babysitters. And so, we see in our system that
all children... having the opportunity to early interventions helps them
understand and deal with their social-emotional development. Oftentimes some
parents of the wealthier children don't have access to as well because they're
busy working so much that their children are
with nannies or in a day-care throughout the day. And so, the idea is that if
all children receive these services, we better support a city as a whole.
Mme Hivon : Est-ce que vous pensez, donc, dans cette
optique-là, que ce serait une bonne chose de pouvoir dépister le plus
tôt possible, donc à deux ans, à trois ans, donc, de pouvoir détecter les vulnérabilités
le plus tôt possible?
M. Alvarez (Rafael) : Yes. In our city, we actually do that.
It's called the ESI-R. It's an assessment that's provided to children when they
all walk in to our 3-K or pre-k program to determine early needs for intervention. In addition to that, our
zero to three-years old are receiving support through the Department of Health,
that are already doing some early interventions. With
us starting the 3-K program, which is something new for us, we have now a
transitional coordinator who's helping us with our zero to three-year-olds figure out how to support
them before they get into the 3-K or pre-k program.
Mme Hivon : J'aurais une dernière question.
Dans les différents services de garderie, est-ce qu'il y a
un programme éducatif universel? Pas en maternelle quatre ans, mais
dans les garderies, est-ce qu'il y a un programme éducatif universel qui doit
être suivi?
M.
Alvarez (Rafael) : A curriculum is provided to
the actual day-cares that's universal across the entire city. We've now also
provided those particular day-care services copies of our own curriculum as
well.
Le
Président (M. Asselin) : Pour l'ensemble de votre témoignage,
il nous reste du temps. Étant donné que vous
n'avez pas utilisé votre 2 min 30 s. Est-ce qu'il y a
un consentement pour utiliser le temps restant, qui est autour de
deux minutes?
M. Roberge :
Oui, mais je ne sais pas comment on va en faire la répartition, bien honnêtement.
Le Président (M. Asselin) : Ce qui veut dire que... Oui, effectivement, vous avez 1 min 15 s de votre côté, puis l'opposition
va avoir environ 50 secondes pour poser des questions.
M. Roberge :
Moi, je suis disponible, bien sûr.
Le
Président (M. Asselin) : Allez-y, vous avez 50 secondes.
M. Roberge :
Oui, je vais faire ça très rapidement. D'abord, je vous remercie. Ensuite, je
veux vous demander, si vous aviez à
cibler une raison pour laquelle on devrait non pas copier, mais s'inspirer de
votre modèle, ce serait laquelle?
M. Alvarez
(Rafael) : We're seeing great progress. We're
seeing progress for our children, progress for the community and progress,
above all, for the parents. We're also supporting parents on how to parent and
support their children. So, we're seeing
progress across all constituencies and we're seeing mass improvements in our
education system because of it.
Mme Rahynes (Carlyn) : And
also, equity for all children. It's not a certain group of children get this, a
certain group get that. We're all on the same
playing field.
Le
Président (M. Asselin) : Alors, Mme la députée de
Saint-Laurent, vous avez 50 secondes.
Mme Rizqy :
Merci. Je suis allée voir... Mme Rahynes, je vois que vous êtes dans un
groupe sur Facebook, The Muslim Volunteers
for New York. C'est bien vous? J'aimerais savoir, lorsque vous avez fait des
visites d'écoles, est-ce que vos enseignants ont le droit de porter le
voile? Oui?
Mme Rahynes
(Carlyn) : Yes.
Mme Rizqy :
Ah! nous autres aussi, en ce moment. Mais vous savez que, prochainement, ça se
peut que non. Pas d'autre question.
Le Président (M. Asselin) : Très bien. Vous avez seulement 12 secondes.
Je ne sais pas si vous avez le temps de poser une question, mais bon.
Mme Labrie : Je vous remercie
de vous être déplacés jusqu'ici pour répondre à nos questions.
Le Président (M.
Asselin) : Mme la députée de Joliette.
Mme Hivon : Je
pense que ça va. Merci.
Le Président (M.
Asselin) : Ça va. Je vous remercie beaucoup de votre
contribution à nos échanges et je vous souhaite un bon retour à New York. Mme
Rahynes, M. Alvarez, thank you.
On suspend quelques instants pour laisser la
place au prochain groupe.
(Suspension de la séance à 15 h 4)
(Reprise à 15 h 9)
Le
Président (M. Asselin) :
Alors, on reprend. Maintenant, M. Leonard, M. Richard Leonard va nous
entretenir, auteur du livre Une école pour tous — L'intégration
des enfants handicapés ou en difficulté des Éditions du CHU de Sainte-Justine. Vous avez 10 minutes pour
nous présenter votre mémoire, et puis, après ça, on échangera. À vous la parole, M. Leonard.
M. Richard Leonard
M. Leonard
(Richard) : Alors, c'est
évident que c'est un gros défi en 10 minutes pour moi, un défi de
présenter puis un autre défi
d'arrêter de parler, mais je vais quand même profiter de ce moment-là. Vous
avez le mémoire, de toute
façon.
Mon mémoire
débute avec un petit peu d'historique. Au Québec, la fréquentation
scolaire a toujours été un enjeu majeur...
Le Président (M.
Asselin) : Prenez votre temps, on sait ce que c'est.
M. Leonard (Richard) : ...et la
maternelle quatre ans fait partie du contexte plus grand qu'est la
fréquentation scolaire. Alors, en 1964,
quand il y a eu la création du ministère de l'Éducation, il y a
eu des débats houleux. J'ai eu la
chance de discuter avec M. Gérin-Lajoie
quelques fois, et, comme on dit, plus ça change, plus c'est pareil. Ça commence
à ressembler à ça aussi. Moi, je ne voulais
pas vous donner un débat de chiffres ou de statistiques. Personnellement, j'ai
une maîtrise en recherche en éducation. J'ai
un diplôme de troisième cycle en gestion de l'éducation. Mais, comme je vous
disais, moi, ce que je voulais vous
présenter, c'était un point de vue différent de quelqu'un qui l'a vécu et comme
élève et comme personne dans toutes les autres fonctions qu'on a dans
les écoles.
Ma carrière a commencé à quatre ans, quand ils
ont annoncé à ma mère, les spécialistes, de ne pas m'envoyer à l'école, que c'était une perte complète de temps
et d'énergie. C'est sûr qu'on est dans les années 50. Là-dessus, ma mère
a insisté, je suis allé faire la première
année. Et je ne sais pas qui a trouvé ça le plus long, l'enseignante ou moi,
mais ça n'a pas bien été. Et à la fin
de l'année, on a dit à mes parents que c'était impossible que j'apprenne à lire
et à écrire, il fallait reprendre la première année. Ma mère leur a
répondu : Si c'est impossible qu'il apprenne à lire à l'école, pourquoi il
reprendrait sa première année? Ça fait qu'on
a été en deuxième année. Et, à la longue, dans ma formation d'orthopédagogue,
qui, bien qu'initiale... j'ai bien compris
que, quand j'étais arrivé à l'école, je n'étais pas prêt à la lecture, je
n'étais pas prêt à l'écriture, je n'étais pas prêt au reste. J'avais
d'autres défis langagiers, à être capable d'intégrer.
Par la suite,
bien, je suis devenu quelqu'un qui a performé assez bien à l'école. J'ai décidé
d'en faire une carrière comme enseignant. Et je suis toujours, dans mon
coeur, un enseignant. Et j'ai commencé dans les classes spécialisées comme enseignant. Et, dans le temps, les classes
spécialisées, ce n'était pas le Club Med, là, c'était assez diversifié. Et déjà
j'ai commencé à me poser des questions : Comment ça se fait qu'on attend
que les enfants soient si avancés dans leurs
difficultés pour intervenir? Qu'est-ce qui arrive... les élèves que j'ai soient
rendus si loin puis que ça soit difficile de les ramener? Alors, j'ai
bifurqué vers la tâche d'orthopédagogue et j'ai pratiqué pendant 12 ans,
10, 12 ans comme orthopédagogue dans des classes régulières où on sortait
les élèves ou on pouvait aller dans les classes.
Comme orthopédagogue, déjà, je voyais le
bien-être, le bien fondé d'intervenir rapidement, Mais au bout de quelques années, étant celui qui pose des
questions souvent, je me suis demandé : La plupart des élèves, on réussit
à les raccrocher, à les sauver,
qu'est-ce qui arrive avec ceux qu'on n'arrive pas à reprendre? Et, avec des
confrères, on s'est dit : Peut-être que les orthopédagogues
pourraient intervenir en maternelle et même, dans certains milieux, en
maternelle quatre ans. Il y a
des directions qui ont aimé ça, d'autres qui ont moins aimé ça, l'idée étant
qu'on attend officiellement qu'un élève
soit codé, ou etc., avant d'intervenir. Alors, déjà, on a avancé dans cette
pratique-là en envoyant des orthopédagogues, des spécialistes dès la
maternelle cinq ans et, dans certains milieux, dans les maternelles quatre ans.
Par la suite, j'ai accepté le poste de
conseiller pédagogique responsable de l'adaptation scolaire pour toute la commission scolaire. À ce moment-là, dans ces tâches-là, je me suis encore posé des
questions, évidemment. J'ai trouvé des réponses, c'est certain, à savoir... les
maternelles quatre ans étaient dans des milieux dits défavorisés, mais je
voyais aussi qu'on changeait les
milieux défavorisés à tous les trois ans. Les milieux défavorisés étaient
encore reliés à des critères comme la
scolarité de la mère, le salaire du père, et tout ça. Là, je me suis informé.
Mais, comme responsable de toute la commission scolaire, je me rappelle
très bien que les élèves qui avaient des difficultés, que ça soit des
dysphasies, des dyslexies, TSA, des TDAH — on
en a une liste, là, on l'a rapetissée au ministère, mais on a encore
une liste — que
ces enfants-là ne provenaient, pour la majorité, pas des zones dites
défavorisées. Il y en avait dans toutes les zones de notre territoire. Le fait d'avoir un défi de TDAH, par exemple, ça n'a rien à faire avec où je reste et mon code postal, ça a à faire
avec les défis que j'ai à relever dans les cinq sphères de vulnérabilité et
dans ma personne.
Alors, déjà, on
a commencé à travailler plus avec les CLSC, avec des CPE, avec des centres de
garde. Je n'ai aucun problème avec ça. Il faut faire en sorte que, l'élève, on
le connaisse, on connaisse ses parents, etc. Et le temps passe...
Le
Président (M. Asselin) :
Effectivement, vous avez raison que
le temps passe. Vous y avez fait référence, au départ. On a intérêt à
aller lire ce que vous nous avez dit.
M. Leonard (Richard) : Bien, je
peux peut-être vous donner la conclusion puis...
Le Président (M.
Asselin) : Parfait. On vous écoute.
M. Leonard
(Richard) : Moi, le milieu
de l'école, c'est un milieu bien financé, bien organisé. C'est un milieu où
il y a une pédagogie, des travailleurs, des équipes. On a un système de
centres de petite enfance. C'est un bon système, moi, je le dis ouvertement, mais c'est un système qui
n'arrive pas à rivaliser avec l'école quand il s'agit d'apprentissage, quand
il s'agit...
J'entendais, tantôt, beaucoup
parler d'intervention précoce. Oui, mais on peut aller plus loin que
ça, on peut même aller jusqu'à la prévention et le dépistage. C'est dans
cette optique-là que je favorise la maternelle quatre ans, ayant vu toutes les
recherches de l'Ontario et, d'ailleurs, qui nous disent que les seuils de vulnérabilité
des élèves qui passent deux ans en maternelle baissent et les résultats sont
meilleurs en la première année scolaire. Et on sait que la première année scolaire est un indicateur assez précis du
succès scolaire. Ce n'est pas parfait. Il y a... Oui, j'arrête de
parler pour le moment.
Le
Président (M. Asselin) :
Non, c'est intéressant, vous écouter, M. Leonard. On poursuit nos
échanges. Il nous reste environ
14 minutes, à partir de ce que le ministre va décider de produire comme conversation. Je
vous laisse la parole.
M. Roberge : Merci bien, M. Leonard, pour à la fois votre
témoignage et ce que vous apportez comme éclairage, comme expertise,
votre référence de ce que vous avez vécu, mais de ce que vous avez vu aussi
comme expériences scientifiques. Comme orthopédagogue, comme directeur, vous
avez un parcours inspirant.
Vous avez fait référence, tout à l'heure, au
fait que des fois, au début de quelque chose, il y a de l'opposition, qui s'estompe ensuite, hein? Au rapport Parent, au
dépôt du rapport Parent, il y a des gens qui n'étaient pas d'accord. Même de la création du ministère de l'Éducation, il y a
des gens qui n'étaient pas d'accord. Et, quand on a implanté la maternelle cinq ans temps plein, il s'est
trouvé des gens pour s'opposer à ça.
Est-ce que
vous pensez qu'en général l'opposition au déploiement de la maternelle quatre ans fera un peu comme l'opposition au ministère
de l'Éducation, à la maternelle cinq ans et au rapport Parent, ça s'estompera
avec les résultats probants qui viendront par la suite?
M. Leonard (Richard) :
Définitivement, dans mon esprit. Et il y a d'autres éléments qu'on a faits...
parce que j'ai participé, au ministère, à la première politique en adaptation
scolaire en 1988 et je me rappelle de l'avoir présentée à 600 enseignants, qui
n'étaient pas tous des croyants dans l'adaptation scolaire, et en bout de ligne
on a quand même réussi à faire un système d'adaptation scolaire et d'inclusion,
qui est loin d'être parfait, qui a toujours besoin d'être renouvelé. D'ailleurs, on vous en a parlé, ça fait
10, 15 ans qu'on n'a pas renouvelé la politique d'adaptation
scolaire, on est dus. Alors, oui, la
résistance, présentement, fait partie de la... et c'est à nous à vendre ou
à prouver que notre produit est bon.
Moi, ce que je
trouve aussi, c'est qu'on mélange l'objectif et le moyen. L'objectif, c'est d'augmenter la fréquentation scolaire, au Québec,
et au début et à la fin. Pourquoi? Pour faire en sorte qu'on ait moins de
décrochage, qu'on aille plus haut,
plus de diplomation et moins d'élèves en difficulté. On réussit très bien,
au Québec, pour 80 % des élèves. Les scores
sont excellents. On n'a pas à être... Mais, pour le 20 % des autres, on
est en queue de peloton.
• (15 h 20) •
M. Roberge : Une autre question
avant de laisser la parole à mon collègue. Je pense que vous avez collaboré avec le précédent gouvernement, le gouvernement libéral, pour poursuivre le déploiement, qui s'est poursuivi ces dernières
années, quand même. Pouvez-vous nous
parler de votre implication avec ce gouvernement-là? Et est-ce que vous pensez que c'est
allé dans la bonne direction et est-ce que c'est allé assez loin?
M. Leonard (Richard) : Bien, au
conseil général de ce gouvernement-là en 2016, il y a eu une résolution pour l'implantation graduelle des maternelles quatre
ans sur une période de cinq ans. On n'a pas eu le temps. Mais j'avais aussi
collaboré avec l'ancien gouvernement, dans
le temps, de Mme Marois. Ça fait que la cause est plus grande que les
partis politiques dans ces cas ici.
M. Roberge :
100 % d'accord pour dire que la cause nous dépasse tous ici. Je vais
laisser mon collègue poursuivre les échanges avec vous. Je vous
remercie.
Le
Président (M. Asselin) : M. le député de Beauce-Sud, à vous la
parole.
M. Poulin :
Merci beaucoup, M. le Président. C'est un plaisir de vous rencontrer. Très
inspirant, effectivement, votre message, d'entrée de jeu. J'aurais aimé
pouvoir vous entendre encore pendant de longues minutes parce que vous êtes certainement un modèle, une source d'inspiration,
M. Leonard, pour plusieurs personnes qui nous écoutent, que ce soient
des jeunes ou encore des gens qui vivent des moments plus difficiles.
J'ai
parcouru votre mémoire. Il y a des éléments fort intéressants sur l'égalité des
chances, sur faire en sorte qu'un jeune
qui se retrouve en milieu défavorisé ou non puisse avoir un service d'éducation
à la hauteur de ses ambitions. Vous dites
que 27 % des jeunes se présentent en maternelle cinq ans avec une ou
plusieurs vulnérabilités de développement, que ce taux augmente toujours aujourd'hui. Vous dites également — et ça, c'est fort intéressant — que plus de 200 000 élèves sont
identifiés en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage, et que la grande
majorité de ces jeunes ne vivent pas en milieu
dit défavorisé, et que l'on soit dysphasique, apraxique ou qu'on ait des
difficultés de langage, des difficultés d'écriture ou de lecture, ça dépasse le fait qu'on soit en
milieu défavorisé ou non. Alors, d'où l'importance d'offrir une prématernelle
quatre ans en milieu défavorisé ou non parce
que, comme vous l'avez dit, le code postal ne régit pas la personne ou le jeune
dont nous allons être dans la vie. Alors,
l'égalité des chances, c'est aussi de permettre une prématernelle quatre ans
aux jeunes du Québec, peu importe son
code postal, on s'entend bien. Et vous, dans le chiffre que vous nous donnez,
plus de 200 000 jeunes qui sont identifiés, ce n'est quand même pas
banal.
M. Leonard
(Richard) : On est rendus à 225, puis le compteur tourne encore. Il faut
le tourner de bord.
M. Poulin :
Bon, bien, certainement. Donc, pour tourner de bord, comme vous le dites, il
faut ouvrir ces prématernelles
quatre ans là, peu importe qu'ils se retrouvent en milieu défavorisé ou non.
M. Leonard
(Richard) : Bien, moi, je ne veux pas en tout l'approche systémique.
Non, maternelle quatre ans n'est pas la réponse miracle à tout, elle est
un des éléments centraux et importants de la fréquentation : commencer
plus tôt, accompagner mieux, travailler en
équipe, faire la fréquentation de 16 à 18 ans. On reviendra pour ça. Mais
l'idée, c'est d'offrir aux jeunes les meilleures chances possible pour
en arriver à une diplomation ou une qualification.
M. Poulin :
Peu importe où ils se trouvent.
M. Leonard
(Richard) : Exactement.
M. Poulin :
Et j'aimerais que vous me parliez un peu des parents, des commentaires que vous
avez des parents de ces jeunes-là, encore une fois, peu importe où ils
se trouvent, qu'ils soient en milieu défavorisé ou non. Quels sont les
commentaires des parents qui vivent la prématernelle quatre ans?
• (15 h 30) •
M. Leonard
(Richard) : Bien, moi, je suis retraité, mais je suis encore
consultant, puis on m'appelle — des fois, c'est des bureaux de
députés et ailleurs — quand
il y a des problèmes majeurs. Ce que les parents aiment le plus, c'est d'avoir deux ans pour préparer leur jeune à
l'école parce qu'ils arrivent... des fois ils ont beaucoup de mauvaises
expériences avec les écoles, beaucoup
de préjugés. Et moi, je me rappelle, comme directeur, des fois, je disais à des
parents : Tu n'as pas besoin de
défoncer ma porte, elle est déjà ouverte, ça fait que viens t'asseoir, on va
jaser. Et souvent ces parents-là, comme
ma mère, ils ont eu à se battre toute leur vie, alors quand ils arrivent à
l'école, ils ont la même attitude : On s'en va à la guerre. Et, quand on a deux ans pour être capable
de les sensibiliser au fait que... on veut autant que vous qu'ils avancent puis qu'ils aillent à son plein potentiel,
les parents deviennent très collaborateurs, ce qui n'est pas le cas quand
un enfant arrive en maternelle, et qu'on n'en a jamais entendu parler, puis que
ça a été, je dirais... ça n'a pas été décelé avant. Là, des fois, ça prend un,
deux, trois ans avant d'avoir une relation constructive avec la famille. Puis,
la famille, j'y crois beaucoup parce que c'est la famille qui est le noyau de
l'enfant.
M. Poulin :
Oui, il reste combien de temps?
Le
Président (M. Asselin) : Vous avez encore
4 min 30 s.
M. Poulin : Donc, ce que vous nous dites, c'est que c'est extrêmement rassurant pour les parents, ce dialogue-là en prématernelle
quatre ans, entre, bien entendu, le parent qui pourrait avoir des doutes, par
exemple, sur certains défis de l'enfant lors d'une préparation à l'école et...
le dialogue qu'il a avec un professionnel également du réseau scolaire, à bien identifier la problématique. On sait qu'il faut également travailler en parallèle avec le réseau de la
santé. On le fait également en offrant plus de services pour le diagnostic.
Mais on sait que, pour un parent, le plus important dans sa vie, ce sont ses enfants. Donc, ce dialogue-là
très tôt dans la vie d'un enfant, mais également dans cette discussion-là avec
l'enseignant, rassure énormément et, j'imagine, permet une meilleure
connaissance de l'enfant, permet une meilleure connaissance des services qui
peuvent être offerts à l'enfant au cours de sa vie aussi, là.
M. Leonard
(Richard) : Quand l'enfant arrive en première année, les parents et l'enfant
sont beaucoup plus à l'aise et rassurés. Ça
fait que ce qu'il ne faut pas oublier non plus... On est tous des parents ou...
On le sait que, quand notre enfant est malheureux à l'école... On est
parent, c'est notre rôle de parent. Alors, ça aide beaucoup, le fait qu'on
puisse intervenir avant d'arriver aux
apprentissages plus formels de la première année. D'ailleurs, bien, si on
regarde dans l'OCDE, il y a plusieurs, plusieurs pays qui ont la
maternelle quatre ans et trois...
Et
je reviens aux services de CPE, qui sont excellents. La vérité, c'est qu'on a
25 % ou 30 % de jeunes qui vont... ni l'un ni l'autre et qui
arrivent puis...
M. Poulin :
Et ça, c'est important, ce que vous dites. Quand des jeunes ne se retrouvent ni
en service de garde ou encore... ni à la
prématernelle quatre ans, bien, il faut se poser la question, ces jeunes-là
sont où, d'abord et avant tout. Et on
a une responsabilité, je dirais, plus... pas seulement comme gouvernement, mais
comme société, de prendre en main ces
jeunes-là et, bien entendu, selon le souhait des parents toujours, parce que
c'est non obligatoire, de bien les accompagner, selon les besoins.
Peut-être,
en terminant, vous glissez un mot fort intéressant sur la direction des écoles
qui ont eu à implanter la prématernelle
quatre ans. Vous qualifiez le tout... que ça s'est bien passé, que la formule a
bien été. Donc, j'aimerais vous entendre peut-être, en terminant, sur
l'implantation avec les directions d'école.
M. Leonard
(Richard) : Bien, dans mes écoles, pendant 15 ans, j'en ai eu
plusieurs. Les écoles où il y avait les maternelles quatre ans, on réussissait à les intégrer dans la vie de
l'école tout en tenant compte de leurs spécificités. C'est évident que ça demande de l'adaptation aux écoles,
ça demande une ouverture d'esprit, ça demande de la coopération avec les services de garde, avec les services de santé,
avec les parents. Je ne vous dis pas que c'est facile. C'est un défi, mais
je suis convaincu que le défi en vaut la chandelle.
Quand je regardais la
progression des enfants avec qui on a pu travailler pendant deux ans, puis que
je le comparais à ce que j'appelais mes
boîtes à surprise qui arrivaient, puis là on n'avait pas prévu ci, on n'avait
pas prévu... Je vois monsieur qui rit, mais c'est...
Le Président (M. Asselin) : Je réagis à ce que vous dites, M. Leonard,
c'est très instructif. Mais, pour le prochain
10 min 40 s, on va continuer avec Mme la députée de Saint-Laurent.
Mme Rizqy :
Merci beaucoup, M. le Président.
Le
Président (M. Asselin) : On peut poursuivre nos échanges. Ça
va bien. On ne lâche pas.
Mme Rizqy : Merci. J'ai eu l'occasion de lire votre livre. Et
votre mère est très courageuse. Elle vous a porté au deuxième étage, parce que le hasard a voulu
que, la deuxième année, la direction d'école mette votre classe à l'étage le
plus élevé pour vous mettre, probablement, une étape de plus à franchir lors de
votre éducation, alors...
M. Leonard
(Richard) : ...tellement subtil, mais...
Mme Rizqy : Non, ce n'était pas subtil, mais votre mère est
une battante et elle est venue le matin, les heures de récréation et le
soir, jusqu'à tant que, finalement, le concierge soit celui qui vous amène
jusqu'en haut à votre classe. Alors, merci
d'être présent avec nous. Votre parcours est très éloquent. Et j'aimerais...
j'ai des questions pour vous. À quel âge devrions-nous
commencer le dépistage?
M. Leonard
(Richard) : Le dépistage est
différent selon... mais on le sait maintenant que, même à la naissance, il y a
un test de dépistage qui est de 10 points. Alors, le dépistage, il n'y a
pas vraiment de début, c'est un continuum qui part à la
naissance puis qui continue.
Mais
la façon... Ce qui est en jeu ici, c'est les habiletés et la capacité de
dépister qui, à mon avis, sont plus grandes dans les milieux scolaires que
dans les CPE, que j'ai été voir, en passant. Bien, vous me posiez la question.
Oui, je vais voir là, les CPE, oui,
je vais voir dans les services de
garde et, oui, je trouve que c'est un
excellent service, mais il y a un pas de plus qui peut être fait.
Mme Rizqy : Mais vous êtes d'accord que le dépistage peut
se faire très tôt, beaucoup plus tôt qu'à quatre ans.
M. Leonard
(Richard) : Je vous l'ai dit, dès la naissance.
Mme Rizqy :
Dès la naissance, d'accord.
M. Leonard
(Richard) : Ce qui est en question,
c'est la qualité du dépistage par
rapport à ce que ça va apporter.
Mme Rizqy : Votre mère ressemble beaucoup
à la mienne. Ma soeur, lorsqu'elle est née... on a dit à ma mère que ma soeur ne pourra jamais parler. Alors là, ma
mère a pris son bâton de pèlerin, comme dans votre livre, puis elle a frappé
à plusieurs portes pour, justement, trouver...
Parce que,
vous, en première année, lorsque vous avez manqué votre première année, le
directeur d'école voulait vous faire
reprendre votre première année, même s'il a dit à votre mère que ça ne servait
à rien. Puis votre mère a dit : Bien, tant qu'à reprendre, si ça ne sert à rien, aussi
bien le mettre en deuxième année, là. Donc, vous avez pu aller en deuxième
année, mais vous avez eu aussi des services.
Et, en troisième année, vous avez eu une enseignante qui était dédiée à vous aider, et le hasard a voulu
qu'elle vous suive en quatrième année.
Mais, même
chose, ma soeur, ça a été beaucoup avec des orthophonistes et orthopédagogues,
et, croyez-le ou non, bien,
finalement, à l'âge de 12 ans, elle a dit ses deux premiers mots. Ce
n'était pas ni maman ni papa, mais c'était «du lait», elle avait soif.
Alors, elle a finalement commencé à parler, mais c'est vraiment avec des
services.
Alors, ma
question, c'est la suivante : Peu importe où est-ce qu'on regarde dans la
structure, l'important ne serait pas, une fois qu'on a dépisté... c'est d'avoir
vraiment tous les services, orthopédagogues, orthophonistes en priorité,
pour faire le suivi?
• (15 h 40) •
M. Leonard
(Richard) : D'accord avec ce principe-là, je ne peux pas le dédire,
mais, moi, ce que je considère, c'est qu'à l'école, en maternelle quatre
ans ou autre, c'est plus facile d'avoir accès à des services de psychologie,
des services d'orthophonie, ergo, et tout
ça. Mais je suis 100 % d'accord avec vous sur le fait que le plus
rapidement possible... Et qui peut le
faire? Moi, je suis appelé un peu partout dans le Québec pour des cas
difficiles où on me demande un point de vue professionnel. Pourquoi? Parce que j'en ai vu pendant 40 ans, donc j'ai plus d'expérience que l'enseignant
ou l'école qui n'en ont pas vu.
Mme
Rizqy : Le ratio dans les centres de la petite enfance, on parle de un pour 10. L'éducatrice est quand même avec l'enfant toute la journée. Vous êtes au courant de la situation en ce moment, au Québec, dans le réseau de
l'éducation. On a un manque criant
d'enseignants, et ce n'est pas rare pour un enfant de voir différents
intervenants, différents enseignants, voire même une étudiante
universitaire qui fait de la suppléance.
Alors, lorsqu'on compare avec une éducatrice qui
est formée en petite enfance, qui passe sa journée avec un groupe de 10 toute la semaine et qui développe,
évidemment, les habiletés d'affection, versus la réalité au Québec, en ce
moment, que nous vivons, là, avec la pénurie
d'enseignants et le roulement, parce qu'on en manque, là, des enseignants,
donc, pensez-vous qu'en ce moment peut-être que la priorité, ça devrait être
d'abord de s'assurer qu'on a suffisamment d'enseignants formés?
M. Leonard (Richard) : Bien, moi,
j'enseigne à la maîtrise en adaptation scolaire, et c'est tous des enseignants
qui ont cinq à 10 ans d'expérience. Et, oui, la valorisation de la
profession, et tout ça, il y a un gros travail à faire.
Par contre,
je crois qu'on peut grossir le bassin en quantité et qualité. Et moi, je
souscris à la théorie de M. Peter Senge, qui est le père de l'approche systématique, qui dit qu'on ne doit pas
s'empêcher de réaliser quelque chose parce que les moyens, présentement, ne sont pas adéquats. On
peut peut-être différer, on peut peut-être changer la façon de faire, mais,
éventuellement, moi, je crois profondément
que, dans la ligne du temps des pratiques pédagogiques, la maternelle quatre
ans est inévitable. Mais est-ce qu'on a du travail à faire? Oui.
Mme Rizqy : Oui, on a beaucoup de
travail à faire.
M. Leonard (Richard) : On va vivre
vieux.
Mme
Rizqy : En parlant de beaucoup de travail à faire, présentement, on a
notre réseau de CPE et de services de garde qui fonctionnent, qui ont
déjà des liens avec les services, les CLSC, avec des psychologues, des
intervenants qui s'assurent que, quand un
enfant est dépisté, il y a un travail qui est fait avec le CLSC et différents
intervenants. Mais, dans le réseau de
l'éducation, j'aimerais y revenir parce que je comprends que, vous, à terme,
votre souhait, c'est que ce soient les
maternelles quatre ans, puis vous dites : On pourrait différer. C'est ça
aussi que vous marquez dans votre rapport, qu'on pourrait différer.
Bien, j'aimerais juste vérifier quelque chose avec vous. C'est que,
présentement, il nous manque des enseignants
et il nous manque des espaces. Et vous avez pris, dans votre mémoire,
j'imagine, le chiffre de 27 % de vulnérabilité dans le rapport qui
a été déposé par la direction régionale de santé publique, en février dernier,
qui fait... c'est eux qui sortent ce
27 %. Et, quand on lit le rapport, oui, effectivement, on parle de...
c'est un groupe d'étude qui a été pris, des enfants qui ont fait la maternelle quatre ans et d'autres,
non... pardon, la maternelle cinq ans. Et la Dre Mylène Drouin, elle met
des bémols par rapport à la maternelle cinq ans et aussi sur le projet de
déployer les maternelles quatre ans. On parle d'abord de consolider nos acquis et d'assurer des
services, dans un premier temps. Et, dans un deuxième temps, on parle aussi des
ratios puis on parle aussi de s'assurer
d'avoir le même intervenant, probablement, toute la journée et non pas avoir un
roulement de personnel.
M. Leonard
(Richard) : C'est intéressant, parce que, dans mes travaux, je fais
aussi affaire à plusieurs médecins, pédiatres,
puis etc., à l'Hôpital Sainte-Justine et ailleurs, et dans mes consultations...
et ce que je m'aperçois, c'est que ces gens-là connaissent très bien le
domaine médical, connaissent très bien les stades de développement, etc., mais
ils ne semblent pas toujours au courant du fonctionnement dans les écoles et
dans les CPE, et c'est normal, ce n'est pas leur quotidien.
Moi, je vous
dis qu'en ayant passé 35, 40 et plus années dans les écoles, il y a...
Ça dépend où. Maintenant, je suis déménagé
en Gaspésie, exemple, j'ai parlé aux commissaires, j'ai parlé aux D.G.,
eux, ils ne demandent pas mieux. Ils ont de la place puis ils ont...
Le Président (M.
Asselin) : Mme la députée veut risquer... peu de secondes.
Allez-y.
Mme Rizqy :
Ah! il me reste quand même 45 secondes, M. le Président.
Le Président (M.
Asselin) : Oui, vous avez raison.
Mme Rizqy : Merci. Je vais aller rapidement,
vu qu'il ne me reste que 45 secondes. Vous avez dit, vous avez mentionné que vous travaillez avec l'Hôpital
Sainte‑Justine. Mais Dr Chicoine aussi est à l'Hôpital Sainte‑Justine, il
mentionne qu'on devrait investir dans
les services, dans les CPE, avoir encore plus de spécialistes. Même chose pour
Dre Drouin, toujours
investir dans les services.
Mais
j'aimerais savoir... parce que vous avez mentionné une affaire, puis là-dessus
j'aimerais vous entendre. Vous l'avez inscrit qu'en ce moment nos
enfants reçoivent beaucoup trop de médicaments. Pensez-vous que, justement, là,
maternelle quatre ans ou pas maternelle quatre ans, l'enjeu ne se situe pas là,
là?
Le Président (M.
Asselin) : En 10 secondes.
Mme Rizqy : L'enjeu va se situer
ailleurs parce que, si on a un trop gros taux de prescription, ce n'est pas la
maternelle quatre ans qui va régler ça.
M. Leonard
(Richard) : C'est un des éléments qui pourraient aider, dans le sens
que, quand le jeune a un problème
d'hyperactivité, le plus rapidement qu'on le décèle, le plus rapidement qu'on
peut essayer d'autres alternatives que la médication.
Puis, pour finir, on est
5 000 employés à Sainte‑Justine, ça fait qu'on ne connaît pas tout le
monde.
Le Président (M.
Asselin) : Alors, pour 2 min 40 s, on a maintenant la
députée de Sherbrooke. Allez-y.
Mme Labrie : Merci, M. le Président.
M. Leonard, tout à l'heure, vous avez mentionné qu'effectivement la maternelle quatre ans est un des éléments, et non pas une réforme
miracle, là, qui viendrait révolutionner le tout. Vous avez parlé beaucoup
de continuum de dépistage aussi, qu'il fallait commencer très, très tôt.
J'aimerais ça
vous entendre sur qu'est-ce qu'on peut faire pour mieux intervenir encore plus
tôt dans nos services de garde
pour améliorer les services qu'on déploie dans nos services de garde.
M. Leonard (Richard) : Bien, il y a
des instruments de mesure qui peuvent être employés à tous les âges pour regarder où on est rendus et repasser plus tard
pour voir la progression. Ces outils-là sont assez... il y en a
qui sont plutôt lourds et
encombrants, puis ceux qui sont lourds et encombrants, ils devraient être
utilisés avec les cas les plus lourds, mais il y en a qui sont assez
faciles.
Alors, oui,
tout ce qu'on peut faire pour essayer de dépister, puis de prévenir, puis
d'intervenir, je pense... Moi, je suggère,
que ça soit le CPE ou l'ensemble du Québec, que l'éducation change de paradigme puis qu'on devienne beaucoup plus
axés sur la prévention, le dépistage puis l'intervention, tout ça, mais
ailleurs aussi, hein, et je le dis dans mon mémoire. J'ai travaillé de très près avec des services
sociaux et des CLSC qui savaient qu'ils pouvaient m'appeler pour dire :
J'en ai un de deux ans, là, j'aimerais ça que, déjà, là, on se parle.
Mme
Labrie : Donc, on pourrait,
dès la première année de fréquentation en service de garde, déployer des
spécialistes pour utiliser ces outils-là dans les services de garde.
M. Leonard
(Richard) : Le dépistage est
plus facile, plus facile à faire parce que je les vois à tous les jours. L'intervention précoce, bien, ça, c'est beaucoup
plus fréquent. Les gens qui ont...
Le Président (M.
Asselin) : Merci beaucoup.
M. Leonard (Richard) : Il n'est pas
content, le monsieur.
Des voix : Ha, ha, ha!
Le
Président (M. Asselin) :
J'ai un temps à régler, hein, puis on a un 2 min 40 s qui s'en
vient avec Mme la députée de Joliette. Alors, on poursuit, on ne lâche
pas.
• (15 h 50) •
Mme
Hivon :
Je sympathise. Moi aussi, le couperet tombe, là, sans pitié. Donc, si vous,
vous étiez le ministre de l'Éducation,
imaginez, puis que vous aviez à commencer l'implantation, puis le ministre nous
dit qu'il veut faire ça sur cinq ans,
qu'est-ce que vous prioriseriez, mettons? Parce que, tantôt, vous nous avez
dit : C'est très inquiétant parce qu'il y a des enfants qui ne fréquentent aucun service de garde et pas la
maternelle quatre ans. Est-ce qu'on devrait commencer comme ça? Comment on devrait s'y prendre pour
déployer ça, en partant des enfants qui ont peut-être plus de vulnérabilité?
M. Leonard
(Richard) : ...pour commencer, je pense que le poste n'est pas ouvert.
Deuxièmement, je ne suis pas sûr que
je l'accepterais. Pour avoir travaillé avec quelques ministres et... Mais,
quand même, je pense que les filons que vous donnez... C'est les deux. Il y a des milieux, je parlais tantôt de
la Gaspésie, exemple, ou ma terre adoptive, avec ma patronne
là-bas... Et puis moi, je parle aux gens, je vois qu'ils ont de la place. Ils
sont prêts à avoir plus de maternelles quatre ans. Ils sont en région, je pense
qu'ils en ont de besoin pour... Je pense qu'on va commencer là.
En même
temps, les enfants vulnérables qui en ont de besoin, qu'on ne retrouve pas,
qu'ils soient à Montréal, ou à Gaspé,
ou ailleurs, il faut trouver des moyens d'intervenir plus rapidement. Les CLSC,
puis les CISSS, et de plus en plus... J'ai une nièce qui a eu un enfant
différent, puis je travaille avec elle, puis on a commencé à l'âge de 10,
12 mois avec des CLSC, etc., et on
arrive à faire en sorte que le parent se sente en mouvement, impliqué,
encouragé. Mme Marwah disait tantôt que sa mère, etc., qui, comme
la mienne, était une battante...
Le Président (M.
Asselin) : M. Leonard, malheureusement... Vous savez, on
vous écouterait pendant tout l'après-midi,
mais c'est terminé. Je vous remercie beaucoup d'être venu ici. C'est très
instructif, ce que vous êtes venu nous apporter.
Je vais
suspendre pour nous donner le temps de vous remercier beaucoup,
personnellement, d'être venu. J'invite d'ailleurs les gens qui nous écoutent
à venir. Merci beaucoup.
M. Leonard (Richard) : Ça me fait
plaisir de pouvoir aider les enfants du Québec.
Le Président (M.
Asselin) : On va suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 53)
(Reprise à 15 h 56)
Le Président (M.
Asselin) : On va reprendre avec l'Association québécoise de la
garde scolaire. Mme Miron, Mme Brodeur,
je vous laisse vous présenter. Vous avez 10 minutes pour présenter votre
mémoire, et puis après on commence les échanges. Bienvenue.
Association québécoise de la garde scolaire (AQGS)
Mme Miron (Diane) : Parfait, merci.
Alors, je me présente, Diane Miron, présidente et directrice générale par intérim de l'Association québécoise
de la garde scolaire. Alors, je suis accompagnée de Mme Réjeanne Brodeur, vice-présidente de l'association.
Alors,
bonjour, Mmes et MM. les membres de
la commission. Merci de nous avoir
invitées à venir vous présenter les préoccupations de l'Association québécoise de la garde scolaire, le seul organisme
qui représente la garde scolaire et qui s'est donné comme mission de
faire valoir le rôle complémentaire du service de garde dans la mission de
l'école.
Donc, un vif
débat social a cours, actuellement, sur l'opportunité d'offrir ou non une option
supplémentaire à tous les parents
d'enfants de quatre ans. Plusieurs organisations se sont positionnées soit en faveur ou en
défaveur du projet des maternelles
quatre ans. En ce qui nous concerne,
nous estimons qu'il ne nous appartient pas de nous positionner dans ce débat. Notre expertise concerne la garde scolaire,
et nous préférons laisser à d'autres spécialistes le soin de débattre du
cadre éducatif qu'il convient le mieux
d'offrir aux enfants de quatre ans. La question, pour nous, n'est pas de savoir si des maternelles quatre ans doivent être offertes à l'ensemble des enfants,
mais plutôt comment ces services doivent être développés.
À titre de
partenaire, notre association souhaite collaborer avec le gouvernement et l'ensemble des partenaires du milieu scolaire à faire en
sorte que les parents qui choisissent la maternelle quatre ans obtiennent pour
leurs enfants un environnement éducatif de
qualité, et ce, en tenant compte de tout le temps passé à l'école, que ce soit
en classe ou au service de
garde. C'est dans cet esprit que nous avons préparé le mémoire que nous vous
présentons aujourd'hui.
La première recommandation qui est faite à cette commission consiste à mettre en place un comité de
travail, auquel participerait notre association, évidemment, afin de faire un relevé des différentes
pratiques en garde scolaire qui devraient être adaptées pour correspondre aux besoins des enfants de quatre ans et
proposer un cadre réglementaire clair
qui fixe les conditions de service à mettre en place pour répondre aux
besoins de ces enfants et en assurer la qualité.
Actuellement,
près de 400 classes de maternelle quatre ans sont offertes dans certains
milieux défavorisés. Selon les
chiffres portés à notre connaissance, environ 24 % des enfants de ces
classes fréquentent le service de garde. La première tâche donnée à ce comité devrait être de dresser
le bilan de la situation dans ces milieux afin de pouvoir alimenter la
réflexion sur la base des pratiques actuelles.
Parmi
l'ensemble des éléments qui devront être examinés, nous voulons en souligner
quelques-uns qui nous apparaissent comme étant des plus prioritaires.
Premièrement, la formation du personnel. La formation initiale et la formation
continue ont une influence directe sur la qualité des interactions du personnel
éducateur avec les enfants et sur la qualité des activités qu'ils organisent. Si nous avons la conviction que le
personnel des services de garde en milieu scolaire détient les
compétences requises pour travailler avec des enfants de quatre ans, nous réitérons
l'importance, et cela constitue notre deuxième recommandation, d'évaluer si
l'attestation d'études professionnelles éducateur en service de garde en milieu
scolaire répond bien aux besoins et aux attentes, notamment au soutien à
apporter aux enfants qui présentent des défis particuliers.
Une préoccupation pour la formation continue devrait aussi faire partie d'un
plan de formation pour l'ensemble du personnel éducateur. Ça devient d'autant
plus nécessaire dans un contexte de rareté d'une main-d'oeuvre qualifiée
et du caractère peu attrayant des postes en garde scolaire qui créent un fort
roulement de personnel.
• (16 heures) •
Deuxièmement, le ratio
éducateur-élèves. Actuellement, le ratio en garde scolaire est de un pour 20,
il est le même pour tous les groupes d'âge. Est-ce que ce ratio est
adéquat pour les enfants de quatre ans, dont on peut présumer qu'ils nécessitent plus de temps, d'attention et d'un
encadrement plus serré que les élèves de 12 ans? À titre de comparaison,
comme vous le savez, le ratio dans un
service de garde régi est de un pour 10. La question du ratio est cruciale, puisqu'il a un impact direct sur le coût des
services et les besoins en ressources humaines.
Troisièmement, le programme
d'activités. Les services de garde ont une grande expertise dans le
développement d'une programmation
adaptée aux besoins d'enfants de cinq ans à 12 ans qui s'appuie sur des
connaissances fréquemment renouvelées, mais également sur un historique
de près de 40 ans. Qu'en est-il pour des enfants de quatre ans? Quels doivent être les objectifs éducatifs visés? Quels
aspects du développement global des enfants doivent être priorisés? Les services de garde auront besoin de balises et de
lignes directrices afin de développer une programmation appropriée aux
caractéristiques des enfants de quatre ans.
Quatrièmement,
les locaux et les installations. Plusieurs intervenants ont déjà pointé du
doigt le défi que représente l'ajout
de nouvelles classes dans des écoles déjà surpeuplées et qui manquent cruellement
de locaux. Nous estimons quand même nécessaire de mentionner que les
services de garde devront bénéficier de locaux et d'installations adéquats pour
l'ajout des groupes d'enfants de quatre ans.
Au-delà de l'espace, il faut réfléchir au type d'aménagement, au mobilier, aux accessoires, à l'organisation des dîners, bref,
établir des normes claires pour assurer un environnement sécuritaire et
convivial.
Cinquièmement,
les frais chargés aux parents. Bien qu'il soit établi que la fréquentation de
la maternelle quatre ans soit
gratuite, rien n'est annoncé concernant les frais qui seront exigés pour la
fréquentation du service de garde. On peut donc présumer que les modalités qui prévalent actuellement seront
appliquées. La contribution parentale pour la fréquentation du service
de garde en milieu scolaire est comparable à la contribution de base exigée
pour la fréquentation d'un CPE. Il faut
toutefois y ajouter les frais pour les journées pédagogiques, des coûts pour la
boîte à lunch, pour le camp de jour en période
estivale. Il faut s'assurer de bien mesurer l'impact de ces coûts pour assurer
une plus grande accessibilité et une meilleure équité entre les
différents services offerts aux parents.
Sixièmement,
le fonctionnement général du service de garde. Donc, pour être en mesure de
bien jouer son rôle, le service de garde devra disposer d'un budget
adéquat pour la formation du personnel. Celui-ci devra également pouvoir bénéficier d'un temps de planification pour
participer aux réunions, aux formations, développer le programme d'activités,
faire les suivis nécessaires avec les parents et les autres membres de
l'équipe-école.
Au
cours de la dernière année, notre association a entrepris une démarche qui vise
la valorisation de la garde scolaire, et
dont l'idée maîtresse est de travailler à la conception d'un programme éducatif
qui pourrait devenir le cadre de référence sur lequel l'ensemble des
services de garde s'appuie, comme ça se fait, par exemple, dans les CPE, avec
le programme J'accueille la petite enfance.
L'ensemble des éléments que nous venons de mentionner font partie intégrante
d'un programme éducatif comme celui auquel nous réfléchissons.
Notre
troisième recommandation consiste à suggérer au gouvernement de collaborer avec
nous et avec les différents partenaires
du milieu scolaire à la création d'un programme éducatif en garde scolaire
adapté, notamment, aux enfants de quatre
ans et à l'inscrire dans la réglementation afin d'assurer une qualité de
service uniforme dans tous les services de garde en milieu scolaire du
Québec.
En
terminant, j'aimerais dire quelques mots sur le fait que, même si plusieurs
éléments restent à être éclaircis sur les
modalités d'implantation des maternelles quatre ans, nous y voyons une belle
opportunité de renforcer les collaborations entre les services de garde et les autres services de l'école. En effet,
le gouvernement a annoncé son intention d'adjoindre à l'enseignante en
maternelle quatre ans une deuxième personne pour l'aider dans la gestion de la
classe. Nous voyons plusieurs bonnes raisons à ce que cette personne soit
choisie en priorité parmi les membres du personnel éducateur du service de garde de l'école. D'abord, le personnel
éducateur connaît déjà les élèves, et, tout au long du parcours scolaire de
l'élève, le service de garde soutient et
facilite la relation qui unit la famille et l'école. Nous rappelons qu'il
s'agit de personnel qualifié qui détient des compétences en
développement de l'enfant.
En plus d'avoir les
qualifications nécessaires, le personnel éducateur est généralement disponible,
et plusieurs d'entre eux ne demandent pas
mieux que d'allonger leur horaire de travail. En effet, le travail en garde
scolaire est généralement proposé à temps partiel et selon des horaires
brisés. En offrant au personnel éducateur de compléter son horaire en travaillant en classe avec l'enseignant, on fait
d'une pierre deux coups, on facilite le recrutement de ces nouvelles ressources
et on favorise la rétention du personnel
éducateur. Notre quatrième recommandation consiste donc à donner des directives
pour que le personnel qui sera embauché à
titre de deuxième ressource dans la classe de maternelle quatre ans soit choisi
en priorité parmi les membres du personnel éducateur en garde scolaire, selon
des critères préalablement établis.
En
conclusion, nous souhaitons réitérer notre engagement à collaborer à faire en
sorte que les enfants et leurs parents qui
feront le choix de la maternelle quatre ans puissent compter sur des services
de garde en milieu scolaire de grande qualité, avec une offre adaptée à ce groupe d'âge. Nous avons la ferme
conviction qu'en ayant le courage de briser les silos et de s'attaquer aux chasses gardées, qu'en adoptant une
vision innovatrice des rôles de chacun des services de l'école et qu'en travaillant tous ensemble nous pourrons assurer à
chaque enfant, peu importe son parcours, d'être appuyé dans le développement de son plein potentiel par un continuum de services humain, sensible et
performant. Merci de votre attention.
Le Président (M. Asselin) : Merci
beaucoup, Mme Miron. Vous êtes
rentrée dans le temps amplement, tout va bien. Alors, on débute la
période des échanges, et je vous propose le ministre de l'Éducation pour 16
minutes.
M. Roberge : Merci bien, M. le Président. Merci pour
votre présentation. Vous avez terminé par deux notions qui me sont chères, courage et vision novatrice.
Courage parce qu'il faut accepter parfois de changer les choses, il
faut accepter parfois de faire primer
les intérêts des enfants avant d'autres intérêts, vision novatrice parce que,
justement... pas parce que ça
se passait comme ça en 1990, en 1995 qu'il faut que ça se passe comme ça en
2020, en 2025.
Et
j'aime bien l'idée que vous apportez aussi de briser les silos puis d'utiliser
le talent qu'on a dans nos écoles, puis je pense que je l'ai démontré,
puis je l'ai dit, puis je veux le dire, que ça va se continuer. Je reconnais
grandement la compétence des équipes des
services de garde. On n'a pas fait encore un premier tour de roue, là, à
l'intérieur du mandat de ce gouvernement, mais ça va se refléter dans
les actions futures. Puis je pense que le personnel des services de garde de nos écoles est capable de jouer un rôle plus
grand dans nos écoles, de valoriser ces personnes qui passent énormément
de temps avec nos enfants, qui ont des
compétences et qui peuvent collaborer à plusieurs égards, parfois pour
surveiller des récréations en partenariat avec des enseignants, parfois
pour faire du coenseignement dans nos classes de maternelle quatre ans, là. Ce sont des éducatrices... font
partie du personnel éducateur de l'école, puis, je pense, c'est le temps qu'on
le dise, qu'on le reconnaisse.
Vous parlez
d'un autre avantage, celui de la stabilité. Quand une personne du service de garde
reste et peut faire une partie de la journée, des fois, avec les élèves...
c'est intéressant pour les enfants d'avoir une figure qui reste aussi.
Il faut le dire, dans les garderies, que ce
soient les CPE ou des garderies privées, il y a la notion aussi de services de
garde avant et après les heures. J'ai eu des enfants qui sont allés en
CPE, et, quand on arrive le matin, souvent, on est comme avant l'horaire
régulier, et nos enfants ne sont pas nécessairement dans la première heure et
dans la dernière heure avec leur éducatrice
qu'ils ont de jour. C'est quelque chose qui est similaire dans les garderies et
les CPE au réseau scolaire. Puis, je
pense, c'est important de le dire, pas pour dire que ce n'est pas bon, c'est un
fait qu'il y a en ce moment, qui est commun au réseau scolaire et dans
les garderies.
Vous avez
ciblé le ratio. Vous avez parlé de ce ratio 1-20. Est-ce que vous savez si
c'est au maximum partout au Québec,
c'est-à-dire que, si le maximum, c'est 1-20, tout le monde est à 1-20 ou si,
vraiment, ça dépend des milieux? Et, si, dans les écoles, on fait jouer un peu... les directions des services de
garde peuvent, à l'occasion, avoir une certaine marge de manoeuvre et choisir... Supposons, avec les
plus petits, on essaie d'avoir un ratio plus bas. Donc, pouvez-vous nous dire,
l'uniformité, est-ce qu'elle est présente ou
pas? Puis est-ce que ça joue, dans une école, la taille des groupes ou le
ratio, en fonction de l'âge des enfants?
• (16 h 10) •
Mme Brodeur (Réjeanne) : Il n'y
a pas rien de pareil partout, hein? Encore une fois, ça dépend beaucoup, peut-être, de l'organisation et de la vision de la
direction d'école. Il y a des endroits où est-ce que le ratio va être un petit peu diminué, justement, parce que les enfants
EHDAA et compagnie ne sont pas pondérés en service de garde. En classe, ils en valent deux, mais au service de garde ils
en valent un. Donc, le ratio 20, encore là, des fois, il peut y avoir un
aménagement à la baisse. Mais,
d'autres fois, il peut y avoir un aménagement à la hausse, à 22, 23, parce que,
pour l'autofinancement du service de
garde, engager une deuxième personne pour 23 enfants, ça ne marche pas, ça fait
que d'où là que des fois ça peut être le dépassement de ratio.
Ça fait qu'il
n'y a pas de norme. Le 20 est là, mais tout dépend des lieux, puis des
circonstances, puis de la clientèle. Puis la grosseur du service de
garde aussi va venir faire en sorte, là... qui va déterminer, là, au niveau du
ratio.
Mme Miron
(Diane) : C'est pour ça que
ça prend une directive claire, pour assurer un minimum, un ratio à ne
pas dépasser, au préscolaire, par exemple.
Mme Brodeur (Réjeanne) : Tout à
fait.
M. Roberge : Lors de mes visites à l'extérieur du Québec
dans les classes de maternelle quatre ans, j'ai remarqué que, très souvent, le local qui accueille ces
enfants-là est vraiment bien adapté, là, à l'âge, à la grandeur de ces
petits cocos. C'est souvent le cas aussi, je pense, dans les maternelles
cinq ans au Québec. Mais donc, en ce moment, il y a des maternelles cinq ans et
il y a quand même 394 classes de maternelle quatre ans, hein? On ne les a pas
inventées. Les gouvernements qui nous ont précédés les ont déployées, ces
classes. On l'oublie souvent, là, mais ce n'est pas un nouveau programme, c'est quelque chose qu'on déploie,
qu'on va bonifier. Mais en ce moment les enfants de cinq ans et les enfants
de quatre ans qui sont déjà
dans nos maternelles. Est-ce que ça arrive assez souvent ou assez rarement,
d'après vous, qu'ils utilisent ces locaux de classe après les heures de
classe, au moment où ils sont au service de garde?
Mme Brodeur (Réjeanne) :
Régulièrement, les locaux de classe, autant pour les quatre ans, les cinq ans
que pour les 5-12 ans aussi, là... Parce
qu'il n'y a pas de locaux services de
garde dans toutes les écoles. Ça fait
que ça, c'est une autre affaire. Ça fait que, donc, on doit utiliser
les classes, les locaux polyvalents, là, le gymnase, la grande salle, la bibliothèque, le local informatique, tout ça,
et ça devient tous des lieux d'apprentissage ludique, là. Les éducatrices font
ça de façon merveilleuse pour que l'enfant
puisse se réaliser, mais avec un esprit de jeu, etc., avec les enfants les plus
jeunes, là.
Donc, oui, on
utilise tous les locaux. Puis les classes existantes de cinq ans, présentement,
quatre ans, sont utilisées, là, pas partout, encore une fois, il y a des
chasses gardées dans certaines écoles. Mais où est-ce qu'il y a une belle
collaboration, justement, où est-ce qu'on travaille, services de garde, école,
équipe-école ensemble, il y a une très belle collaboration,
il y a une très belle façon... de la vision. On est là pour le même enfant. La
réussite éducative, ça n'appartient pas
seulement à un corps professoral. La réussite éducative appartient à
l'ensemble. On dit : Ça prend tout un village pour éduquer un
enfant. Bien, l'école, c'est tout un beau grand village plein de connaissances.
Ça fait que...
M. Roberge : Je vous remercie. Puis, oui, cette notion
d'équipe-école est importante. Et je trouve ça intéressant que vous le mentionnez que, peut-être
pas partout, mais en grande partie, on utilise des locaux de classes, on
utilise... Il faut le mentionner parce qu'il y a des gens qui sont des détracteurs.
On a le droit de s'opposer puis on a le droit de s'exprimer, mais il y a des gens qui font flèche de tout bois pour
faire peur : On va mettre des enfants de quatre ans avec des grands de 12,
puis, tiens, allons-y,
il y en a certains qui redoublent, ils sont avec des gens de 13 puis de 14,
puis allons-y, puis ils vont être dans la même salle, sur un banc trop
grand, puis ils vont se faire intimider.
Moi, je me souviens
que mes enfants avaient cinq ans, ils n'étaient pas à quatre ans, et pourtant,
dans une école publique à côté de chez moi,
la commission scolaire Marie-Victorin, ils passaient leurs journées pas mal
dans leur classe de maternelle cinq
ans. Si j'allais les chercher vraiment plus tard, c'est vrai qu'ils étaient au
local du service de garde, mais à ce
moment-là, des fois, il restait très, très peu d'élèves, mais bien souvent ils
étaient dans un local adapté à leur âge, leur local de classe. Et, quand je dis ça, je ne suis pas en train de parler
de l'exception, ce n'était pas la seule classe au Québec où les petits
étaient entre eux et utilisaient des locaux adaptés à leur grandeur et adaptés
à leurs besoins.
Mme Brodeur
(Réjeanne) : J'ai eu l'opportunité de vivre mes trois belles années,
les trois dernières années, dans une
nouvelle école où, justement, les locaux de classes maternelles, tout le
mobilier est bas, les toilettes, le lavabo, etc., donc... et des grands
espaces. Ça fait que c'est vraiment adapté, là, 4-5 ans, beaucoup d'endroits
que c'est vraiment bien adapté, là, un enfant s'y plaît bien.
M. Roberge :
Ceci dit, il est possible de faire mieux, puis vous mentionnez les choses où on
devrait faire mieux. Donc, le ratio,
d'avoir un ratio peut-être national, de l'imposer peut-être dans les règles
budgétaires, d'avoir un ratio plus petit,
de le préciser, même si plusieurs commissions scolaires, plusieurs services de
garde ont peut-être des ratios plus petits avec nos petits de cinq ans et,
donc, de quatre ans, l'idée de le préciser par règlement, c'est quelque chose
qui me parle. Puis souvent ce qu'il y a de si intéressant dans les
auditions particulières, c'est qu'il y a des choses qui peuvent nous amener à modifier
le projet de loi, mais même des règlements, des règles budgétaires, puis je
prends bonne note de ça.
Vous
parlez aussi de locaux et d'installations. On a dit un mot, formation continue.
Si un ministre, disons, bien avisé, à l'écoute voudrait tenir compte de vos
recommandations en formation continue, quels sont les leviers que je pourrais
actionner pour vous aider dans votre
formation continue, pour vous épauler davantage, autant pour les petits de
quatre ans que pour les grands de huit ans, neuf ans, 10 ans, 12 ans?
Mme Miron
(Diane) : J'ai envie de dire
que, d'entrée de jeu, il faudrait peut-être s'assurer qu'il y a
un responsable du dossier de la garde scolaire dans chacune des commissions
scolaires et que ce porteur de dossier là provienne des services éducatifs, d'une part; d'autre part, qu'on s'assure qu'il y a
un conseiller pédagogique de disponible à l'intention du personnel éducateur,
qu'il vienne les accompagner au besoin. Alors, je pense que ça, ça serait un
bon début. Et ensuite, bien, s'assurer
qu'il y a des budgets adéquats, intéressants, pour permettre à
ces personnes-là de participer à des formations, là, justement, qui sont
données, là, dans les milieux.
M. Roberge : Ensuite, on parle de déployer ce réseau, de
l'étendre à la grandeur du Québec, mais, comme je le dis, en fait, pas de l'imposer, mais bien de l'offrir,
c'est important de le mentionner. En ce moment, c'est seulement
en milieu défavorisé, donc ça se vit déjà.
Est-ce que vous recevez des échos du terrain? Sans doute que vous en recevez,
parce que ça fait depuis 2013 seulement, ça fait quoi, six ans à peu
près qu'on vit de la maternelle quatre ans temps plein, alors qu'est-ce que vous entendez des échos du terrain?
Est-ce que vous entendez de vos membres... Est-ce que vous entendez des choses qui vont bien, des problèmes à résoudre
par rapport à ce qui se passe avec vos membres et les petits
de quatre ans qui sont déjà dans nos écoles?
Mme Brodeur
(Réjeanne) : Je pourrais
vous mentionner que certains milieux disent qu'ils peuvent intervenir plus rapidement, O.K.? Déjà, à quatre ans, ces
milieux-là peuvent voir la vulnérabilité et déjà mettre un plan d'action en force pour, justement, quand ils vont
arriver en maternelle cinq ans, qu'il
y ait déjà des actions de prises. On voit aussi la relation de la
famille... La famille s'implique davantage à l'école parce que l'enfant est
plus jeune. C'est rarement au secondaire que
les parents s'impliquent, là. Ça fait que, dès la rentrée, le parent est déjà
partie prenante, là. Donc, il y a ça
aussi, là, il y a comme quelque chose qui s'installe, là, avec le parent, là.
Il y a une aisance aussi, pour le parent, là, d'être dans une école, des
fois, qui fait peur, là, tu sais, certains milieux, là.
M. Roberge :
Peut-être un bénéfice marginal qu'on n'aurait pas vu venir, c'est que, comme
l'enfant est petit, les parents ont
tendance à s'investir davantage. Et,
une fois que le parent s'investit, bien, on peut espérer, on peut souhaiter que,
s'il s'investit à quatre ans, il connaît
l'école puis il connaît le personnel, bien, peut-être continuera-t-il, à
cinq, à six, à sept, à huit ans, à soutenir son enfant.
Le
Président (M. Asselin) : Je vois que vous avez déjà été parent.
M. Roberge : Oui, oui, je suis encore parent. Je veux juste
vous rassurer pour vous dire que ce que vous dites, on en prend bonne note, puis sans doute qu'on va se
revoir. Parce qu'on s'est déjà engagés, comme gouvernement, à revoir le règlement sur la garde scolaire, donc on continuera de s'en
parler pour les quatre ans comme pour les autres. Mais je pense que je
vous ai presque interrompue, vous alliez dire quelque chose?
Mme Miron
(Diane) : Bien, j'allais
dire que, par rapport à votre question, c'est que, de la part du milieu, on nous
demande de la formation et du soutien, là, justement, pour développer le programme
d'activités, pour mieux être en réponse aux
besoins de ces enfants-là, parce que c'est... ils sont quand même
petits, hein? Alors, quand tu es habitué de travailler avec des grands
de neuf, 12 ans puis que tu arrives avec des enfants de quatre ans, ça te prend
une adaptation. Donc, on nous demande
d'offrir un soutien par rapport à... justement, pour mieux les accueillir, je dirais, dans les
groupes, là.
M. Roberge :
Et peut-être une petite dernière, le temps file. Mais concernant la précarité
de vos membres, actuellement, est-ce que vous pouvez nous donner des chiffres
un peu, combien d'heures travaillent, en
ce moment, les gens qui travaillent avec vous, combien sont à
statut précaire, combien sont à temps partiel, juste pour qu'on comprenne bien
la réalité puis peut-être qu'on saisisse même les opportunités pour ces
personnes-là?
• (16 h 20) •
Mme Brodeur
(Réjeanne) : Beaucoup
d'éducatrices n'ont pas de temps plein, là, c'est environ 25 heures
sur, des fois, deux ou trois plages
horaires, 7 heures à 8 heures le matin, 11 h 30 à 1
heure puis de 3 heures à 4 heures. Donc, ils ont du temps de disponible pour, justement,
accompagner dans les classes, si tel est le souhait. Mais je n'ai pas de
chiffre, là, de précarité, là. Moi, en tout cas, je ne suis pas en
mesure de mentionner... mais ce n'est pas la majorité qui ont un
35 heures, là, c'est plus autour de 15 à 25 heures que ça joue,
beaucoup midi et après-midi.
Donc, où est-ce qu'il y a des maternelles quatre
ans, ces personnes-là travaillent un peu plus parce qu'elles ont plus... La différence entre l'heure d'enseignement du primaire puis du préscolaire, il y a
une différence... 63 minutes par jour de plus, donc ça vient combler des
heures, là, pour eux autres, et ça donne aussi une belle opportunité de
travailler ensemble, l'enseignante, l'éducatrice, pour le même enfant.
Donc, on se partage les bons coups et les défis.
M. Roberge :
J'adore cette idée d'un duo enseignant-éducatrice qui travaillent chacun leurs
forces, chacun à leur niveau, mais en
équipe et pas seulement un après l'autre, mais même ensemble. Il y a un
avantage aussi que vos membres ont,
c'est qu'ils peuvent voir les mêmes enfants évoluer sur quelques années. Vous
savez, des fois même des parents se séparent,
on change d'enseignant à chaque année, parfois il y a des congés de maternité,
mais, s'il y a le personnel de garde qui peut accompagner les enfants au
fil des années, ça fait une belle stabilité.
J'ai déjà
parlé en commission, ici... le service de garde de mes filles à l'école de la
Mosaïque, commission scolaire Marie-Victorin, il y avait très, très,
très peu de roulement, puis on connaissait les éducateurs, les éducatrices par
leur prénom. Et puis il y avait un
personnage, Roger, qui était là, on a carrément nommé une salle en son nom. Il
y a une salle à l'école qui porte le
nom de l'éducateur. Il a tellement laissé sa marque auprès des élèves et l'équipe-école
qu'on va dans la salle Roger-Williams, donc c'est quand même quelque
chose comme empreinte.
Mme Brodeur (Réjeanne) : Les
parents, c'est... On voit les parents... Souvent, le matin, lorsqu'ils viennent
déposer leurs enfants, on a un premier contact,
et la fin de l'après-midi, tu sais, 5 heures, 5 h 30, on revoit le
même parent.
Le
Président (M. Asselin) :
On va poursuivre la conversation avec la députée de Saint-Laurent étant donné
que le temps est échu, mais je suis certain que ça va être aussi
captivant.
Mme Rizqy : Nous l'espérons
tous, M. le Président.
Le Président
(M. Asselin) : Bien oui.
Mme Rizqy :
Bonjour. Merci d'être présentes. Vous avez parlé tantôt de la question des
ratios. Vous avez dit que la question des ratios est une question
cruciale. Quel est le ratio, présentement, que vous avez? 1-20?
Mme Miron (Diane) : Selon le
Règlement sur les services de garde, le ratio est de 1-20.
Mme Rizqy : Et pensez-vous que,
pour les enfants de quatre ans, ça devrait être réduit?
Mme Miron (Diane) : Oui.
Mme Rizqy : Vous souhaitez être
quoi?
Mme Miron (Diane) : 1-15
minimum.
Mme Rizqy : O.K., parce que
vous savez que, par exemple, en ce moment, en CPE, c'est un pour 10, hein?
Mme Miron (Diane) : 1-10, oui.
Mme Rizqy :
Vous avez aussi parlé de l'enjeu de l'aménagement, pouvez-vous développer?
Parce que, tantôt, ça semblait être
un enjeu initialement, mais après ça, quand vous avez répondu,
Mme Brodeur, vous avez dit que, finalement, pas nécessairement,
mais...
Une voix : ...
Mme Rizqy :
Bien, les nouvelles écoles... Vous comprendrez que le parc immobilier du
Québec, ce n'est pas toutes des nouvelles écoles.
Mme Miron
(Diane) : 75 % des écoles ont été construites à l'ère de
Duplessis, alors on s'entend qu'il y a comme un petit peu de réaménagement à faire. Alors, c'est dans ce sens-là
qu'on dit... Bien, c'est sûr que, dans les nouvelles écoles, le
problème ne se pose pas, c'est prévu. Mais, dans les anciennes écoles, il
faudra s'assurer qu'il y ait des locaux. C'est vrai que, comme disait M. Roberge tantôt, les
locaux de classes vont pouvoir être utilisés au niveau du service de garde,
mais, c'est ça, on fait juste
rajouter le fait que, oui, ça va être important de s'assurer que les locaux
sont adéquats pour ces enfants-là.
Mme Rizqy :
Parce que des affaires aussi simples que, par exemple, les salles de bain, il y
a une grande différence pour un
enfant de quatre ans versus un enfant de huit ans, alors donc j'imagine que
c'est à ça aussi que vous faisiez référence. Parce que vous avez raison de dire que le parc immobilier de nos écoles
est composé principalement d'écoles qui ont été construites il y a plusieurs années, et à ce moment-là il n'y avait pas
de classes de maternelle quatre ans. Mais, si on ajoute des classes additionnelles, il va falloir,
effectivement... Pour les nouvelles écoles, à 800 000 $ la classe de
maternelle quatre ans, je suis
convaincue qu'il n'y aura pas de problème de plomberie, mais pour nos anciennes
écoles qui n'ont pas été rénovées, ça
peut être un enjeu important parce que l'enfant ne pourra vraiment pas avoir
accès à la même salle de bain qu'un enfant de sept, huit ans.
Mme Miron
(Diane) : On peut penser que les écoles d'aujourd'hui ont toutes des
maternelles cinq ans, alors il y a déjà, je
dirais, une bonne partance en termes d'équipements, de locaux. Mais peut-être
que, pour les enfants de quatre ans, ça va prendre un petit peu plus
d'ajustements, c'est de s'assurer que...
Mme Rizqy :
Mais sur l'ajout des élèves de quatre ans dans un réseau, ça va prendre non
seulement de la classe, mais ça prend aussi d'autres salles de bain
parce que, sinon, là, il va y avoir une congestion à la salle de bain, là.
Mme Miron
(Diane) : C'est sûr. Puis il faut des buvettes adaptées, puis des
toilettes adaptées, puis, bon, c'est sûr...
Mme Rizqy :
Oui. Tantôt, vous avez aussi parlé des frais. Vous avez dit... vous ne l'avez
pas dit, mais j'ai semblé comprendre
que ça prend de la transparence, parce que vous avez parlé d'argent. Vous avez
mentionné des points d'interrogation,
par exemple les frais chargés aux parents pour les journées pédagogiques, les
camps de jour l'été, vous avez parlé
aussi des boîtes à lunch qui devaient être fournies dans les journées
pédagogiques. Or, ça, en ce moment, est-ce que vous avez déjà, vous,
quantifié combien ça peut coûter, ces frais qui pourraient être facturés aux
parents?
Mme Miron
(Diane) : On ne les a pas quantifiés.
Un parent qui envoie son enfant au service
de garde, c'est 8,35 $ par
jour. Et, quand on fait la comparaison, par exemple, avec un CPE, où la
contribution de base est de 8,25 $, bon, à peu près, mais là il y a deux collations de fournies
puis un dîner de fourni. Alors, ce n'est pas vrai, hein, tu sais, ce n'est pas
le cas, là, en milieu scolaire...
Mme Rizqy :
Oui, oui, tout à fait.
Mme Miron
(Diane) : Puis on pose la question : Est-ce qu'en maternelle
quatre ans on va mettre des mesures pour assurer l'accessibilité?
Mme Rizqy :
Parce que, là, il est question de gratuité de maternelle quatre ans, mais un
parent qui inscrit son enfant à 8,25 $
dans un CPE s'attend justement à avoir son repas et deux collations par jour
qui sont inclus dans ce montant.
Mme Miron (Diane) :
C'est ça.
Mme Rizqy :
Mais, pour un parent qui ne le sait pas puis qui inscrit son enfant en
maternelle quatre ans, il va l'apprendre lorsqu'il va recevoir la facture pour
les collations et repas qui lui seront facturés à ce moment-là.
Mme Miron
(Diane) : Oui, effectivement.
Mme Rizqy :
D'accord... et plus les journées pédagogiques. Et, si je ne m'abuse, vous,
c'est 182 jours?
Mme Brodeur
(Réjeanne) : 180 jours plus 20 jours de journées pédagogiques.
Mme Rizqy :
O.K. Et est-ce que, l'été, vous avez un service de garde qui peut continuer?
Mme Miron
(Diane) : En principe, oui, mais on doit avouer que les règles
budgétaires, actuellement, ne favorisent pas beaucoup l'ouverture de
classes, l'ouverture de services de garde durant l'été.
Mme Rizqy :
Est-ce qu'il... Combien ça coûterait pour, justement, favoriser... Parce que
l'objectif, ce n'est pas que les parents se retrouvent, le 24 juin, avec
leur enfant en se demandant... Parce qu'on sait aussi... Parce qu'on a parlé
avec d'autres intervenants, des réseaux, des municipalités, l'UMQ, eux, leurs
camps de jour ne sont pas prêts, là.
Mme Miron
(Diane) : Ils ne sont pas... non.
Mme Rizqy :
Donc, c'est pour ça qu'on essaie de voir des solutions. Combien ça coûterait
pour être en mesure de continuer votre service durant l'été?
Mme Miron
(Diane) : Je ne sais pas. Évidemment, c'est toujours sur une base de
l'autofinancement. Alors, ça dépend du
nombre d'enfants qui sont présents. Alors, pour le moment, on n'est pas en
mesure de répondre à ça. On sait que,
par exemple, dans la semaine de relâche, là où on offre un service de garde,
des services durant la semaine de relâche, ça peut être 35 $,
40 $ par jour.
Mme Rizqy : O.K., quand même,
d'accord.
Mme Miron
(Diane) : Je voudrais rajouter... par rapport aux coûts, c'est qu'en
garde scolaire il n'y a pas de mesures pour
les familles nombreuses et quand tu es en milieu défavorisé aussi, là, alors ce
qui n'est pas tout à fait le cas en petite enfance.
Mme Rizqy :
D'accord. J'aimerais savoir, en ce moment, si on faisait un cas concret, vous
avez un enfant qui est dans votre réseau, est-ce que l'intervenante est capable
de dépister? Et, si oui, c'est comment, le mécanisme de dépistage, faire
le suivi?
Mme Brodeur
(Réjeanne) : Quand l'enfant est au service de garde, l'éducatrice va
noter des choses, va noter, dans des
fiches anecdotiques, là... puis va rencontrer l'enseignante pour voir si c'est
à peu près la même chose. Et, suite à ça, il y a tous les services
complémentaires, là, soit psychoéducateur, TES, des choses comme ça. Et on peut
assister au plan d'intervention aussi pour savoir quelles actions porter et
quels moyens utiliser pour aider l'enfant, là. Donc, il y a du dépistage qui se
fait, là, par nos observations, là, bon.
Mme Rizqy : Et la formation de
base, c'est quoi, initialement, pour travailler?
Mme Brodeur (Réjeanne) : Pour
technicienne en service de garde, c'est la technique d'éducation à l'enfance, au niveau collégial, éducatrice, là, depuis 2011,
c'est la formation d'attestation d'études professionnelles, là, postsecondaire,
là. C'est le nouveau cours depuis 2011, là...
Mme Rizqy : Le D.E.P.?
Mme Brodeur (Réjeanne) : Non,
attestation, A.E.P.
Mme Rizqy : Une attestation
de...
Mme Brodeur (Réjeanne) :
390 heures de...
Mme Rizqy : Combien d'heures,
pardon?
Mme Brodeur (Réjeanne) : 390
heures.
Mme Rizqy :
D'accord. Et, dans cette formation... Tantôt, vous avez parlé de soutien, vous
disiez que vos membres demandent du
soutien pour avoir davantage de formation. Dans ces formations-là, est-ce qu'il
y a quelque chose qui vous aide, justement, pour davantage de dépistage
précoce?
Mme Brodeur
(Réjeanne) : Il y a un cours sur les enfants à cheminement
particulier, là, donc. Puis, autant au collégial que l'A.E.P., il y a vraiment une formation, là, que ce soit de Gilles
de la Tourette ou peu importe, là, savoir reconnaître les signes, là,
etc., donc, oui, il y a de la formation à l'A.E.P. ou au D.E.C.
Mme
Rizqy : O.K. Tantôt, vous, Mme Miron, vous mentionniez que vous
avez besoin... vous demandiez plus de soutien
à la formation. Spécifiquement, pouvez-vous davantage préciser, là, ce que vous
avez de besoin aujourd'hui pour vos membres?
• (16 h 30) •
Mme Miron
(Diane) : Bien, en fait, c'est peut-être d'être plus au fait des
connaissances du développement des enfants de quatre ans, comment avoir
les bonnes attitudes, développer les bonnes aptitudes aussi pour mieux soutenir
ces enfants-là.
Et c'est pour cette raison-là qu'on demande que l'attestation, l'A.E.P., soit
réévaluée parce que, selon nous, mettons qu'il y aurait du...
Mme Brodeur (Réjeanne) : De
l'amélioration.
Mme Miron (Diane) : ...de
l'amélioration à apporter...
Mme Brodeur (Réjeanne) :
Bonifier, bonifier.
Mme Miron
(Diane) : ...une
bonification à apporter à la formation de base. Idéalement, ce serait que
toutes les éducatrices et tous les
éducateurs aient une attestation... pas une attestation, mais une formation de
techniques d'éducation à l'enfance, mais le choix
qui a été fait en 2011, ce n'est pas ça. Ce n'est pas ce choix-là qui a été
fait parce qu'on ne pouvait pas offrir
30 heures de travail, c'étaient des horaires brisés, et ci, et ça. Mais,
parallèlement à ça, on n'a pas cherché, mettons, à optimiser le travail du personnel pour donner des emplois qui étaient intéressants, alors on en a fait un
débat, je dirais, plus monétaire que d'essayer d'avoir une vision, finalement,
pour soutenir les enfants qui arrivent au service de garde.
Mme Rizqy :
Dites-moi, si jamais... Est-ce que, présentement, vous avez déjà un enjeu de
pénurie de main-d'oeuvre?
Mme Miron (Diane) : Oui.
Mme Rizqy :
Avec un ratio qui va être réduit probablement de un pour 10, ça va juste
accentuer davantage votre problème de pénurie de main-d'oeuvre.
Mme Brodeur
(Réjeanne) : Bien, peut-être... oui et non. Si on offre plus d'heures,
on va pouvoir être capables de faire de la rétention davantage dans ce
sens-là.
Mme Rizqy :
Mais dans le sens... Parce qu'un enfant, lorsqu'il fait son
4 h 30 min en classe, après ça il va faire son autre
4 h 30 min avec vous...
Mme Brodeur (Réjeanne) : Bien,
s'il y a des enfants de quatre ans...
Mme Rizqy :
Parce que la plage horaire ne va pas bouger, là, ça va juste... On va avoir
besoin de plus de locaux puis plus d'intervenants.
Mme Miron (Diane) : Bien, si le
personnel éducateur soutient l'enseignante, ça va faire plus de travail pour
ces personnes-là, plus de temps de présence en classe.
Mme Rizqy : O.K. Moi, je ne
parle pas d'enseignement dans la classe, là, je parle dans votre service de
garde.
Mme Miron (Diane) : Non, mais
ça fait partie de... O.K., mais...
Mme Rizqy :
Parce que la classe, c'est avec l'enseignant. Mais, lorsqu'il arrive, par
exemple, le matin, il est avec une
éducatrice. Le soir... bien, en fin de journée, il est avec une éducatrice. À
ce moment-là, ça veut dire que, dans ces plages horaires matin, fin
d'après-midi, ça va nous prendre d'autres éducatrices aussi, là, puis d'autres
locaux.
Mme Brodeur
(Réjeanne) : Bien, il y a de la place autant que de l'école. Il n'y a
pas de place au permis, contrairement aux CPE, là. Si l'école peut
accueillir 500 enfants à l'école dans le jour...
Mme Rizqy : Vous ne mettez...
Mme Brodeur (Réjeanne) :
...peut accueillir 500 enfants au service de garde sur les plages matin...
Mme Rizqy :
D'accord. Puis une dernière petite question : Êtes-vous prêts à recevoir
des enfants de trois ans? Parce qu'en
septembre un enfant qui a trois ans, mais qui aura quatre ans au courant de
l'année, il est admissible. Est-ce que vous êtes prêts à recevoir un
enfant de trois ans?
Mme Brodeur
(Réjeanne) : On en parlait, justement, là. Bien, c'est au
30 septembre, habituellement, bon, trois ans et 11 mois...
Le Président (M.
Asselin) : Merci beaucoup. On va laisser maintenant la parole à
la députée de Sherbrooke pour 2 min 40 s.
Mme Labrie : Merci, M. le
Président. Vous avez mentionné tout à l'heure que le ratio, c'était un pour 20.
Je comprends que c'est un ratio théorique
qui peut varier, mais est-ce que c'est le même ratio théorique que ce soit en
milieu défavorisé ou non ou ça change?
Mme Miron (Diane) : C'est le
même.
Mme Labrie :
C'est le même. Vous avez nommé, tout à l'heure, une proposition de un pour 15
comme ratio en préscolaire. Est-ce
que vous pensez que ce ratio-là devrait être le même en milieu défavorisé et en
milieu non défavorisé?
Mme Miron
(Diane) : Bien, oui, tu sais, c'est sûr qu'on cherche toujours à avoir
un ratio le plus bas possible, mais, bon,
c'est... Tu sais, je pense qu'on est dans un moment où on réfléchit l'école
puis, en réfléchissant à l'école, on doit réfléchir aussi au service de garde. C'est un peu ça, le
message qu'on vous dit, c'est : La contribution que le service de garde
peut amener à l'école, elle est importante, puis il faut la faire
valoir, puis il faut le reconnaître.
Alors,
le ratio, quel est le meilleur ratio? Bien, en quelque part, on a envie de
dire : Si vous êtes prêts à dégager des sommes pour avoir un ratio 1-10, nous autres, on va dire : «Yes»!
C'est ça qu'on veut. Mais, c'est ça, il faut réfléchir vraiment à ce
qu'on veut puis, la qualité des services qu'on veut donner à nos enfants, jusqu'où
on est prêts à aller.
Mme Labrie :
J'aurais une autre question par rapport à l'heure du dîner. Je sais qu'il y a
deux types de garde sur l'heure du
dîner : il y a le service de garde puis il y a aussi la surveillance. Les
ratios sont assez différents, corrigez-moi si je me trompe, ça peut être un
pour 60 en dehors du service de garde. Est-ce que vous recommandez que ce
ratio-là soit diminué aussi pour le préscolaire?
Mme Miron
(Diane) : Bien, en fait, à partir du moment où le ratio, mettons qu'il
est de 1-15, c'est que l'éducatrice est avec son groupe de 1-15. Le
ratio au dîner doit rester le même.
Mme Labrie :
Mais, pour ceux qui ne sont pas inscrits au service de garde mais qui sont
plutôt dîneurs, est-ce que vous recommandez que ce soit réduit aussi?
Mme Brodeur (Réjeanne) : Oui.
Mme Labrie : Oui?
Mme Miron (Diane) : Ce serait
dans la logique des choses.
Mme Brodeur (Réjeanne) : Oui.
Pour le bien-être de l'enfant, oui.
Mme Labrie :
Donc, ce serait soit que les enfants de quatre ans soient orientés vers le
service de garde pour l'heure du dîner ou soit qu'on en constitue un
groupe dont le ratio ne serait pas un pour 60, qui serait plutôt un pour 15.
Mme Brodeur
(Réjeanne) : Comme présentement pour les cinq ans, dans plusieurs écoles, c'est
ça qui se passe, et les
maternelles sont presque tous au service de garde cinq ans.
Mme Labrie : Parce que les
parents font ce choix-là ou parce que l'école les y...
Mme Brodeur (Réjeanne) : Parce
que les parents font beaucoup ce choix-là.
Mme Labrie : Donc, ils paient
pour ça.
Mme Brodeur (Réjeanne) : Oui.
Oui, par choix puis... c'est ça, oui.
Mme Labrie : Parfait. Bien, je
vous remercie.
Le Président (M. Asselin) : Très bien. Alors, on laisse la parole maintenant à la députée
de Joliette.
Mme Hivon : Oui, merci
beaucoup. Alors, je partage complètement votre point de vue, dans le sens où je pense qu'il est grand temps de s'arrêter aux services de garde en milieu scolaire, qui souvent accueillent les enfants presque autant
de temps que les enseignantes et les enseignants, et là ça va être vraiment
le cas pour les enfants de quatre ans puisqu'ils ont une heure de moins de classe, donc potentiellement ils sont à 50-50
entre les deux. Et le paradoxe... bien, en fait, le paradoxe ou peut-être
un fait à noter, c'est que, compte tenu de ces fameuses heures coupées, vous
vivez une pénurie importante puis, je pense, un défi de formation très grand
parce que les éducatrices qui sortent, qui sont formées vont aller beaucoup
plus dans des tâches complètes dans des centres de la petite enfance
ou autres. Donc, je pense qu'on a vraiment
à réfléchir là-dessus. Quand on dit qu'on
veut offrir le mieux à nos enfants de quatre ans, de cinq ans en les envoyant
en milieu scolaire, il faut penser à tout ce défi-là.
Dites-moi,
est-ce que vous avez un chiffre, une approximation du nombre d'éducatrices de
garde scolaire qui ont leur formation de niveau collégial?
Mme Miron (Diane) : Non.
Mme Hivon : Non? O.K.
Mme Miron (Diane) : On n'est
pas en mesure de vous fournir...
Mme Hivon : Vous
n'avez pas l'information.
Mme Miron
(Diane) : Non, non, effectivement. Ce qu'on sait, c'est qu'il y
a beaucoup d'éducatrices qui ont
un double D.E.C., qui ont un D.E.C., il y en a même qui ont une formation universitaire, il y en a même qui ont une formation d'enseignante qui ont fait
le choix de travailler en service de garde en milieu scolaire, mais, statistiquement
parlant, on n'est pas
capables de donner cette information-là. Il faudrait s'adresser à la Fédération des commissions scolaires pour pouvoir nous donner ces chiffres-là,
qui, eux, en principe, connaissent le profil de leur main-d'oeuvre.
Mme Hivon : Parfait. Donc, quand vous nous dites aujourd'hui : Il y a un défi de formation, c'est autant de manière
générale, si je comprends bien, qu'une
formation adaptée à cette nouvelle clientèle de quatre ans. C'est aux deux
égards, en fait, ce que vous nous dites.
Mme Miron (Diane) : Oui. En
fait, l'arrivée des maternelles quatre ans nous amène, je vous dirais, à
réfléchir à cette problématique-là davantage.
Mme Hivon : Oui.
Encore plus, oui.
Mme Miron (Diane) : Oui, encore
plus.
Mme Hivon : Puis,
dites-moi, tantôt, ma collègue vous a parlé de la possibilité que, l'été, les services
de garde puissent être ouverts, mais je n'ai pas tout à fait compris ce que
vous avez répondu, dans le sens où c'est une possibilité théorique, mais, dans
les faits, ça n'existe pas vraiment.
Mme Brodeur
(Réjeanne) : Les municipalités offrent beaucoup les camps de jour, donc, dans les écoles, ils
utilisent les locaux-écoles, donc c'est pour ça, là...
Mme Hivon : Ce
n'est pas quelque chose qui existe, là, juste pour qu'on soit clairs.
Mme Brodeur (Réjeanne) : Service
de garde scolaire estival, moi, je n'en connais pas.
Mme Hivon : Non.
Parfait. Merci.
Le Président (M.
Asselin) : Merci beaucoup pour votre contribution
aux travaux de la commission.
On va suspendre quelques instants, mais je tiens
vraiment à vous remercier.
(Suspension de la séance à 16 h 39)
(Reprise à 16 h 42)
Le Président
(M. Asselin) : Alors, on va reprendre avec le Conseil québécois
des services éducatifs à la petite enfance.
Je vais vous laisser le temps de vous présenter, et puis, après votre premier
10 minutes de présentation du mémoire, on échangera. À vous la parole.
Conseil québécois des services éducatifs à la petite
enfance (CQSEPE)
Mme Breton (Nathalie) : Alors,
Nathalie Breton, présidente au conseil québécois.
Mme Lessard (Francine) :
Francine Lessard, directrice générale du conseil québécois.
M. Moreau (Jacques) : Jacques
Moreau, professeur à l'École de travail social de l'Université de Montréal.
Le Président
(M. Asselin) : Allez-y, pour 10 minutes.
Mme Lessard
(Francine) : M. le Président, M. le
ministre, mesdames messieurs, membres
de la Commission de la culture et de l'éducation, permettez-moi d'entrée de jeu de vous
remercier d'avoir finalement accepté de nous entendre sur le sujet du déploiement universel des maternelles quatre ans, un dossier à portée sociétale qui préoccupe
grandement le réseau des services éducatifs à la petite enfance et aussi
les parents du Québec. À titre informatif, le conseil québécois représente
45 000 places consacrées aux enfants de zéro à cinq ans, et ce, en
installation et en milieu familial public.
Tout d'abord,
il est important de situer les propos de notre mémoire en lien direct avec le
respect des besoins réels des enfants
de quatre ans qu'aux préférences de leurs parents, et ce, en reconnaissant les
multiples avis scientifiques portant sur
la question. Ainsi, nous tenons d'entrée de jeu à féliciter le premier ministre
pour sa détermination à offrir à tous les enfants du Québec la possibilité d'un dépistage précoce, ce qui, sans
contredit, supportera une transition réussie à la maternelle à l'âge de
cinq ans.
Comme vous le
savez, et tel que la directrice d'une équipe de recherche en petite enfance du
l'UQAM l'indiquait encore aujourd'hui
dans La Presse, les enfants doivent être diagnostiqués tôt
si on veut les aider. À quatre ans, c'est déjà très tard.
Nous sommes à
même de constater que l'argumentaire du gouvernement est variable et évolue
selon le temps. En septembre 2018, le premier ministre mentionnait que
la scolarisation précoce en Ontario avait amélioré la diplomation. Or, la réforme n'est en
place que depuis quelques années, et il est impossible pour le moment d'en
mesurer les effets. Et surtout cette province ne compte pas sur un
réseau de services éducatifs comme le nôtre.
En novembre
2018, le gouvernement affirmait que les services seraient complémentaires. Or,
nous n'avons jamais cru à cette complémentarité. D'ailleurs, nous pouvons lire
ce matin dans Le Journal de Québec que les fonctionnaires du ministère de la Famille ont été tenus à l'écart du
déploiement des nouvelles classes. Il n'y a pas eu d'échange ou de document
produit entre les deux ministères, soit le ministère de l'Éducation et le
ministère de la Famille, depuis le 1er juin 2018.
Actuellement,
le gouvernement plaide son projet de déploiement universel de maternelles
quatre ans en s'associant à la liberté de choix des parents. De quelle
liberté de choix parle-t-on? D'une part, les parents du Québec n'ont tout simplement pas été consultés à savoir s'ils
désiraient que leurs tout petits enfants de quatre ans fréquentent une école.
D'autre part, afin de pouvoir faire
un choix, il nous faut une offre de services complétée, ce qui n'est
actuellement pas le cas. Encore 42 000 enfants sont toujours
inscrits sur la liste d'attente provinciale pour des services éducatifs.
Je peux
affirmer que les parents du Québec sont fiers de l'offre de services éducatifs
offerts par les centres de la petite
enfance et les milieux familiaux publics. J'ai fait le tour de la province,
accompagnée de la présidente de la FIPEQ, Mme Valérie Grenon, et ce, pour inviter la population du Québec à
signer une importante pétition demandant au gouvernement de cesser le déploiement universel des maternelles
quatre ans et de plutôt valoriser les
services éducatifs à la petite
enfance en complétant le développement de nouvelles places pour ainsi combler les besoins des familles
québécoises. Nous avons recueilli 40 000 signatures. Des milliers
de parents ont également sollicité les membres de la commission et les députés provinciaux pour tenir une consultation générale.
Une invitation a été transmise au ministre, M. Roberge, afin qu'il puisse
visiter des CPE et des milieux familiaux publics. Toutes ces demandes ont été
rejetées du revers de la main.
Nous tenons
aujourd'hui à vous souligner encore une fois que le Québec possède un réseau de
services éducatifs de grande qualité,
que les intervenants et intervenantes de ce réseau de professionnels à la
petite enfance procèdent, dès le jour 1, au dépistage des troubles
pouvant affecter le développement global des tout-petits, que ces intervenants
et intervenantes offrent le soutien à la
parentalité par des contacts quotidiens avec les familles, que ces milieux de
vie offrent notamment des milieux
sécuritaires, des ratios respectant les besoins des enfants de quatre ans,
l'application d'un programme éducatif édicté par la loi sur les services
éducatifs à l'enfance et des services continus toute l'année.
Je laisse à Mme Breton, la présidente du
conseil, le privilège de vous déposer nos recommandations.
Mme Breton (Nathalie) : Alors,
parmi celles-ci, le conseil québécois et ses membres recommandent que les enfants de quatre ans du Québec ou ceux qui auront
éventuellement quatre ans demeurent dans l'environnement des services éducatifs. En ce sens, le conseil québécois
recommande le retrait du projet de loi n° 5, qu'un amendement soit
effectué à la Loi sur les services de garde éducatifs afin qu'on y
intègre le droit de fréquentation des enfants de zéro à cinq ans au même titre que celui prévu à la Loi sur
l'instruction publique, que l'on prenne les moyens pour qu'à court terme la
gratuité universelle des services
éducatifs soit offerte à tous les enfants de quatre ans présents dans les
services de garde éducatifs, que l'on prenne les moyens nécessaires pour
renforcer les liens de collaboration entre les réseaux des services éducatifs à
la petite enfance et le réseau de la santé et des services sociaux afin de
maximiser les interventions précoces.
Afin de vous
démontrer l'importance de continuer à offrir et à développer des places pour
tous les enfants de 0-5 ans en
service de garde éducatif, je laisse la parole à M. Jacques Moreau,
professeur à l'École de travail social de l'Université de Montréal, expert en développement de l'enfant
et intervention précoce et, de 2016 à 2014, scientifique provincial principal,
services sociaux de l'INESSS.
M. Moreau
(Jacques) : Bonjour, tout le
monde. Dans cette initiative pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui, j'ai la
fâcheuse impression que les besoins développementaux des quatre ans ne sont pas
suffisamment pris en compte et que cette initiative pourrait même être vue
comme une menace aux besoins développementaux des quatre ans.
Les besoins
développementaux des quatre ans sont fortement concentrés, à ce moment-ci de
leur vie, sur l'aspect socioaffectif
du développement. Ça ne veut pas dire que les autres sphères du développement
disparaissent, au contraire, le développement est global, tout se passe en même
temps, mais il y a ici comme un focus particulier à cet âge-là, dans cet
univers-là, du développement socioaffectif qui se fait. Et il y a des jalons
développementaux qui sont très importants que
les enfants doivent rencontrer, et les enfants de quatre ans doivent accomplir
des tâches développementales pour arriver à rencontrer ces jalons. Ces jalons se réfèrent beaucoup à
l'autorégulation émotionnelle, à savoir gérer des conflits sans agression, sur le plan des interactions, sur le
plan du sentiment de sécurité à établir en groupe et un à un, et ainsi de suite,
et aussi continuer à raffiner le langage justement pour arriver à dépasser les
comportements agressants physiques.
Alors, les enfants qui sont actuellement dans
les services éducatifs à la petite enfance... Et je suis d'accord avec la
proposition qui a été faite, il faudrait peut-être réviser ce terme-là, «de
garde» parce que, justement, dans les services éducatifs à la petite enfance,
ces personnes-là qui sont là ne sont pas des gardiennes, ça fait longtemps
qu'elles ne le sont pas, et qu'il faudrait
que la société, par, justement, un changement à l'étiquette de l'Office des
services de garde et dans la loi...
peut-être que ça serait une bonne idée que ça soit reconnu, surtout que,
maintenant, bien, il y a les techniques au cégep qui sont là pour
l'appuyer.
Alors, ceci dit, je pense qu'il faut travailler à faire
en sorte que ces enfants-là restent dans le milieu de vie qui leur appartient en ce moment et qui contribue
grandement à faire en sorte qu'ils accomplissent les tâches développementales requises à leur âge pour
rencontrer les jalons développementaux des quatre ans. Changer le milieu de
vie, ça veut dire changer tout
l'environnement, et Dieu sait qu'à cet âge l'environnement des enfants est
extrêmement important, pas les infrastructures,
pas le mortier et les briques, l'environnement relationnel, l'environnement de
vie, le milieu de vie. Justement, les
quatre ans en services éducatifs à la petite enfance, en ce moment, sont dans
le milieu de vie qui est le mieux approprié pour eux, compte tenu des tâches développementales à accomplir. Les
changer pour un autre milieu qui devient un milieu scolaire
met les enfants dans des exigences développementales qui risquent de leur créer
des problèmes, en particulier les enfants qui sont déjà à risque dans leur
développement ou qui sont déjà atteints dans leur développement. Alors, c'est
pourquoi je suis ici aujourd'hui pour m'opposer à ce projet de loi. Merci.
• (16 h 50) •
Le
Président (M. Asselin) : M. Moreau, Mme Lessard,
Mme Breton, on va poursuivre nos échanges. On va commencer par le ministre
de l'Éducation. À vous la parole pour 16 minutes.
M. Roberge :
Merci bien, M. le Président. Merci pour votre présentation. Je pense qu'il y a
plus de points sur lesquels on s'entend que
de point sur lesquels on ne s'entend pas. Vous parlez de travailler pour les
enfants, de travailler en équipe, de
faire tout pour le développement des enfants. Bien, écoutez, on a développé, dans — dès les premiers mois — cette politique de la petite enfance, l'importance d'agir tôt de manière
concertée, Famille, Santé, Éducation, puis vous en saluez un peu aussi... À la page 12, là, vous avez :
«Par cette initiative louable, le gouvernement du Québec reconnaît donc que
le dépistage précoce ne se fait pas à partir
de quatre ans — pas
seulement à partir de quatre ans, en tout cas — mais le plus tôt possible comme c'est
le cas pour les tout-petits qui fréquentent un service éducatif.»
Je
suis bien d'accord avec vous pour dire qu'il se passe des choses avant quatre
ans, évidemment, qu'il se passe des choses
avant quatre ans puis qu'il y a quand même différents niveaux, hein? Il peut y
avoir des troubles neurologiques qu'on peut voir dès la naissance. Quelqu'un
avant vous le disait, il y a même... le test, je pense, s'appelle Apgar, je ne
sais pas si c'est le bon mot, quelque
chose comme ça, où dès... l'enfant a quelques minutes de vie, puis déjà on fait
quelques tests. Donc, il peut avoir : troubles neurologiques, troubles
neuromoteurs, dysphasie, dyspraxie. Plus qu'on avance, plus il peut y
avoir des retards de développement, puis là il peut y avoir des
développements... des problèmes d'apprentissage liés à ces retards-là ou pas. Puis je suis d'accord avec vous que ça ne
commence pas nécessairement à quatre ans, comme ça ne commence pas à
deux ans, comme ça ne commence pas à huit ans, c'est un continuum.
Vous
avez parlé du déploiement de la maternelle quatre ans comme carrément d'une
menace au développement des enfants de quatre ans en disant que ce qui
se faisait dans nos services de garde éducatifs à l'enfance était de qualité.
Je n'en doute pas, mais je ne comprends pas pourquoi ce serait une menace et
pourquoi, dans une classe adaptée aux tout-petits de quatre ans, avec du
matériel adapté aux tout-petits, et du mobilier, un programme, et un duo enseignante-éducatrice, ça devient dangereux, tout à coup,
puis que, là, on ne peut pas faire bien les choses, et que ça devient une
menace au développement de l'enfant, là.
Pouvez-vous
m'expliquer où est la menace, dans la mesure où on a, évidemment, un local
adapté, du matériel adapté, du mobilier adapté et un duo
enseignante-éducatrice, là? Où est la menace?
M. Moreau
(Jacques) : C'est à moi que vous posez la question?
M. Roberge :
Bien, c'est à l'ensemble des trois, vous présentez à trois.
Mme Lessard
(Francine) : Bien, je vais peut-être commencer, puis tu pourras
peut-être compléter. Je vous retournerais
même la question, à savoir : Pourquoi au Québec on doit développer des
maternelles quatre ans, considérant le
fait qu'on a une offre de services, qui n'est pas complétée, évidemment, qu'on
espère qui se complétera, mais on a déjà, au Québec... on s'est doté de
services de qualité pour les enfants de quatre ans? Ça existe déjà. Si on
n'avait rien, je comprendrais, on dirait : Aïe! On n'a rien pour les
enfants de quatre ans, il faut créer quelque chose. Mais on a déjà, au Québec, des services éducatifs qui nous font
honneur et même qui sont l'envie d'autres provinces et d'autres pays. Alors,
on ne comprend pas. Et la question, je vous
la pose à votre tour : Qui a demandé des maternelles quatre ans? Pourquoi
on a besoin de développer des maternelles quatre ans? Pourquoi on ne
consacre pas nos efforts à offrir à tous les enfants de quatre ans des places
éducatives? Un peu partout au Québec, on en manque, on le sait, il y a
42 000 enfants en liste d'attente, donc on manque de places pour accueillir tous nos enfants. Oui, il y a
des enfants qui ne fréquentent pas, il
y a des enfants qui ne
fréquenteront jamais non plus, il y a des enfants qui vivent avec leur mère
puis il y a des enfants qui vivent avec leur
père, et ça, au Québec, on doit reconnaître aussi que tous les enfants
n'ont pas nécessairement un cheminement vers un service éducatif ou une maternelle quatre ans. Je veux dire, il y a des enfants qui vont
habiter avec leurs parents, puis je
pense qu'on se doit même de féliciter ces parents-là qui peuvent, par leurs
conditions, passer des années avec leurs enfants, et les élever, et leur
donner toute la stimulation dont l'enfant a besoin.
Mais,
pour les parents qui ont besoin d'un service pour leurs enfants parce qu'ils
travaillent, parce qu'ils sont étudiants, bref, pour les raisons et les motifs qui leur appartiennent, on a déjà ça,
ça existe, au Québec. Le Québec
a mis... on a mis ensemble beaucoup
d'argent. Ça coûte quand même cher, les services éducatifs à la petite enfance.
On a dégagé beaucoup d'argent, on a
développé beaucoup d'expertise et on possède déjà des services éducatifs de
grande qualité pour les enfants de
quatre ans. Et la recherche et les scientifiques, M. Moreau et bien
d'autres, nous le démontrent et n'arrêtent pas de le dire sur toutes les tribunes : On a
exactement ce qu'il faut pour les enfants de quatre ans, alors pourquoi on
s'entête à vouloir développer un autre modèle dans les écoles?
Imaginez juste un
enfant de quatre ans qui va devoir prendre un autobus scolaire. Il n'a même pas
les jambes assez longues pour embarquer dans
l'autobus, les marches sont trop hautes pour lui. Alors, juste à ce moment-là,
on vient juste de débuter la journée,
il est 7 h 30, il est sur le bord de la rue avec un papa puis une
maman, il fait froid, on est en plein
hiver puis on attend l'autobus scolaire. Je ne sais pas qu'est-ce que ça va
apporter de plus à cet enfant-là pour assurer sa diplomation à l'âge de
25 ans. Je ne pense pas que c'est comme ça qu'on va réussir.
Alors, je laisse la parole aux experts. Mais
moi, je vous dis que la question, je vous la relance parce que, en tout cas, je n'ai pas pu lire, à ce jour, de
résultat d'enquête que vous auriez menée auprès des familles québécoises qui
sont venues vous indiquer qu'elles souhaitaient des maternelles quatre
ans universelles partout au Québec.
M. Roberge :
Bien...
Le Président (M.
Asselin) : ...va écouter M. Moreau.
M. Roberge : On m'a posé une question,
j'aimerais bien y répondre.
Le Président (M.
Asselin) : Ah oui.
M. Roberge : Bien, je pense qu'il y a des milliers de parents
qui ont répondu en inscrivant leurs enfants, au cours des dernières années, dans les maternelles quatre ans en milieu défavorisé. En ce moment, il y a quand
même 394 classes qui sont, à chaque année, utilisées. Il y en avait
moins l'année passée puis il y en avait moins l'année d'avant. Les précédents
gouvernements l'ont déployée, peut-être pas aussi vite qu'on l'aurait voulu, mais
manifestement il y a d'autres gouvernements avant
le nôtre qui ont choisi de le déployer. Il y a des parents qui ont
choisi d'envoyer leur enfant là. Et il
y a le fait qu'en ce moment on a un nombre assez élevé
d'enfants qui présentent un taux de vulnérabilité dans au moins un domaine de développement,
ça doit nous interpeler.
Il y a cette idée, que je ne comprends pas nécessairement,
d'opposer les maternelles quatre ans à tout le reste. Il y avait une lettre ouverte
ce matin dans le journal, un collectif, puis ils disaient : «Avec l'accès
universel à la maternelle quatre ans
et les CPE, notre gouvernement inscrit le Québec parmi les sociétés
progressistes qui ont à coeur l'égalité des chances à l'école et le développement
du plein potentiel de tous les enfants. Pas question de mettre en compétition
deux services de qualité!»
En fait, il y a
plus que deux services. Déjà, dans les maternelles quatre ans...
pardon, dans le réseau, en ce moment, il y a des maternelles
quatre ans, il y a
des CPE, il y a les garderies subventionnées, il y a
les garderies non subventionnées, il
y a les milieux familiaux régis, puis
je pense qu'il y a les milieux familiaux non régis. D'après vous,
lequel de tous ces services est le meilleur?
Mme Lessard (Francine) : Vous
vous adressez à M. Moreau?
M. Roberge : Je m'adresse à...
Mme Lessard (Francine) : À tout
le monde.
M. Roberge : Vous vous
présentez à trois, choisissez qui répond.
Mme Lessard (Francine) : Bien,
je vous dirais, les centres de la petite enfance et les milieux familiaux
régis, publics sont ceux que je connais,
alors je ne peux pas vous parler de ce que je ne connais pas. Donc, je ne
travaille pas avec les autres milieux
que vous avez nommés. En réponse à la question, oui, il
y a des classes maternelles quatre ans, actuellement. Le taux de fréquentation est à environ
neuf élèves par classe, alors ce n'est pas très élevé, ce n'est pas très couru.
Une voix : C'est 12.
• (17 heures) •
Mme Lessard
(Francine) : Pourquoi on
arrive avec, effectivement, des enfants qui arrivent à l'école et qui ont
un... on a quand même un pourcentage d'enfants qui arrivent à l'école, puis le petit
«packsack» n'est pas complété, on peut appeler
ça comme ça. Bien, moi, je vous dirais pourquoi, je pense, parce que le
dépistage précoce se fait dès le jour 1 dans les centres de la petite enfance et en milieu familial public. Par contre,
le suivi avec les professionnels de
la santé n'est pas établi et est offert de façon très azimuts un peu
partout dans la province.
Alors, oui,
il y a des endroits... On me disait encore... Vendredi matin, une directrice
d'un centre de la petite enfance de
Vaudreuil-Dorion me disait : Bien, nous, quand on fait un dépistage, on se
rend compte rapidement... l'enfant a 18 mois, l'enfant a 20 mois, 24 mois, il y a quelque chose
qui ne va pas parfaitement. On appelle au CIUSSS de notre région, on a un service immédiat ou presque immédiat,
merveilleux. C'est merveilleux parce que, là, on agit. On agit, on a dépisté
l'enfant. Tout de suite, un professionnel,
un orthophoniste, un psychoéducateur, bref, un spécialiste du monde de la santé
va venir travailler avec nous, travailler avec les parents, travailler avec les
éducateurs, avec les éducatrices, et on va préparer l'enfant à son
entrée à l'école.
Par contre, ce scénario-là n'est absolument pas
répandu à travers la province, ce qui fait en sorte que souvent les éducateurs, les éducatrices vont effectivement
dépister tôt des problématiques, et il n'y a pas de service au numéro qu'on
a composé. Donc, ça peut prendre des
semaines, voire des mois, voire même des années avant qu'il y ait un service,
et ça, je pense que c'est gage... Si
on était capables, au Québec, d'avoir une passerelle efficace entre le
dépistage qui est fait dans les services éducatifs et les services de la
santé, je pense qu'on viendrait de gagner un pourcentage beaucoup plus élevé
d'enfants qui rentreraient à l'école, qui arriveraient à la maternelle cinq ans
avec un petit «packsack» bien équipé.
Le Président (M.
Asselin) : M. le député de Richelieu.
M. Émond : Combien de temps,
monsieur...
Le Président (M.
Asselin) : On a 5 min 48 s.
M. Émond : D'accord.
Alors, bonjour à vous trois. Merci de votre présentation, puis je vous remercie
de ce que vous apportez au débat. Je
trouve ça très intéressant d'entendre votre point de vue, particulièrement
celui de monsieur, parce que je pense
que c'est important, dans ce domaine, d'écouter l'ensemble des spécialistes,
surtout pour quelqu'un comme moi,
nouvellement député. Ma formation en pédagogie de l'Université de Sherbrooke
est beaucoup plus axée sur l'éducation aux
adultes, et là on s'adresse à la petite enfance, donc j'en ai beaucoup à
apprendre dans ce domaine. Puis j'entends ce que vous dites, monsieur,
en tant que spécialiste.
J'entends
aussi, d'un autre côté, bien entendu, des spécialistes, comme M. Royer,
qui nous amènent un autre son de cloche.
Et je pense que c'est important de se nourrir et s'abreuver des commentaires,
de tout ce que ces spécialistes ont à nous
dire, mais en gardant toujours en tête, je pense, le bien-être de nos enfants
les plus jeunes, en pensant aux élèves et en pensant également aux
parents, je crois, parce que nous sommes tous parents.
Moi, pour la petite
histoire, je viens d'une famille nombreuse. Je suis le sixième de ma famille et
puis mon unique fille est le 21e
petit-enfant chez moi. Mes soeurs et mon frère se plaisent à me dire que je
n'ai pas été très productif, là, quand je pense à ma soeur Michèle, qui
en a huit. Mais tout ça pour vous dire que moi, je fais confiance, dans tout ce débat, également aux parents. Je pense que ce
qu'on est en train de faire, c'est d'ajouter dans le panier de services une
offre supplémentaire, qui existe déjà, d'ailleurs, et en pensant d'abord
et avant tout à nos tout-petits.
Moi,
dans mon expérience personnelle, là, pour ma fille, je saurais... Elle a eu un
parcours scolaire, et puis, à cet âge-là de quatre ans, je sais exactement à
quel endroit j'aurais aimé qu'elle puisse aller. Les deux enfants de ma
conjointe actuelle, probablement,
auraient bénéficié — je pense
à un — d'une
maternelle quatre ans; un, peut-être plus de vos excellents services.
Donc,
je pense qu'il ne faut pas oublier, dans tout ce débat, non seulement les
tout-petits, mais également les parents. Je pense qu'il faut faire confiance aux parents. Ce sont eux qui
connaissent leurs enfants, qui sont à même de connaître les services auxquels leurs enfants sont en droit de
bénéficier, et surtout le service le plus précis pour eux, dans certains cas,
avec vous, dans certains cas, par une
maternelle quatre ans, pourquoi pas, également. Puis j'ai de nombreux exemples
en tête dans ma famille, avec des
parents, comme vous l'avez souligné, qui souhaiteraient garder les jeunes à la
maison avec eux puis les amener plus tard dans le parcours scolaire.
Alors,
mon intervention se veut juste d'essayer que, collectivement, nous gardions en
tête le bien-être de nos enfants, mais
également de laisser le libre choix aux parents et en leur offrant un panier de
services complet. Puis ils seraient à même de juger, à l'intérieur de ça...
Le Président (M. Asselin) : Il reste 2 min 44 s. J'ai
l'impression que M. Moreau a beaucoup réagi quand M. Royer a
été nommé. Allez-y, M. Moreau.
M. Moreau
(Jacques) : Pas uniquement, non.
Le
Président (M. Asselin) : Ah bon.
M. Moreau
(Jacques) : J'aimerais nuancer mes propos. D'abord pour une question de... pour la menace, changer l'environnement, les infrastructures, déplacer les enfants
pourrait être une menace, justement, pour les quatre ans, compte tenu des tâches
développementales qu'ils ont à accomplir à cet âge-là, surtout ceux qui
présentent déjà du risque ou
une atteinte à leur développement en partant.
Ceci
dit, ça ne veut pas dire que de nouvelles infrastructures ne seraient pas
intéressantes, mais je rappelle encore que
celles qui existent déjà font très bien le travail et constituent un milieu de
vie qui rencontre bien les besoins développementaux des enfants. Alors, je ne vois pas pourquoi on
changerait ça sous prétexte qu'on a besoin d'avoir des maternelles quatre ans
pour des enfants défavorisés en milieu
défavorisé. Les maternelles quatre ans en milieu défavorisé, ça manque le
bateau un peu parce que ce n'est pas
tous les enfants qui vivent en milieu défavorisé qui sont défavorisés et qui
sont atteints dans leur développement.
Alors
donc, on manque ici d'une approche ciblée, et c'est de ça dont on a besoin, pas
de maternelles quatre ans partout
pour tout le monde. On n'a pas besoin de ça. Les infrastructures sont déjà là
pour avoir une belle approche ciblée pour
dépister les enfants de quatre ans qui sont déjà atteints ou même plus jeunes.
Donc, de déplacer tout ça, de créer de nouvelles infrastructures, ça implique
de déplacer un paquet d'enfants qui n'ont pas besoin d'être déplacés, et, en
cela, par rapport aux besoins développementaux, ça peut constituer, oui,
une menace à la qualité de leur développement.
Deuxièmement,
j'aimerais rappeler à tout le monde, et là c'est le chercheur qui parle, que
vos expériences personnelles ne sont
pas représentatives de la population. Alors, ceci étant dit, ce n'est pas parce
que vous, vous vivez des choses extraordinaires
avec vos enfants, qu'ils ont fréquenté une belle école, que ça s'est bien passé
à quatre ans et la transition... que
c'est vrai pour tout le monde. Alors, ici, vous êtes victimes de vos
présuppositions par votre expérience personnelle, et comme argument,
c'est un peu faible.
M. Émond :
M. le Président, juste me permettre...
Le
Président (M. Asselin) : En sept secondes.
M. Moreau
(Jacques) : Et, pour terminer...
M. Émond :
En sept secondes, je voudrais me porter en faux contre les... En tout respect
pour M. le chercheur, je pense que, collectivement, nos expériences
personnelles font en sorte d'alimenter, là...
Le
Président (M. Asselin) : Merci beaucoup, M. le député de
Richelieu. On poursuivra ce débat-là à un autre moment. Mme la députée de
Saint-Laurent, à vous la parole.
Mme Rizqy :
Bien, en tout respect, bien, moi-même, je suis chercheuse et je ne peux
qu'abonder dans le même sens. Il faut
faire attention aux biais que nous portons tous à l'intérieur de nous par nos
propres expériences personnelles, de ne pas généraliser. C'est ce que le
chercheur tentait de souligner.
Alors, avant
de commencer, M. le Président, moi, vous savez, les sondages, ce n'est pas ma
force, mais de temps en temps on en a. Vous savez, vous avez posé une
excellente question, vous avez demandé : Qui qui a demandé les maternelles
quatre ans? Moi aussi, je me suis posé la même question pendant plusieurs mois
parce que les parents, là... différents
sondages, bien, à 61 %... 65 %, bien, ils pensent que le CPE est le
meilleur endroit à quatre ans. À Laval, ça, ce n'est pas vous qui avez payé pour ça, là, ça, c'est des comités de
parents de Laval, ça n'a rien à voir avec vous, 61 % défavorables
pour les maternelles quatre ans. Pourtant, on persiste et signe, on continue.
J'ai une question pour vous. Est-ce que vous
auriez aimé voir ici, aujourd'hui, le ministre de la Famille?
Mme Lessard (Francine) : Vous
vous adressez à moi?
Mme Rizqy : Oui,
Mme Lessard.
Mme Lessard (Francine) : Mais
oui. Bien, j'ai rencontré le ministre de la Famille à quelques reprises au
cours des derniers mois, parce que le
ministre de la Famille a un mandat très large, en fait, de 0-12 ans. Alors, il
doit s'occuper d'offrir des services
aux enfants de 0-12 ans, c'est le mandat que la société québécoise a encadré
pour la Famille. Donc, moi, quand j'ai des questions concernant les enfants de
deux ans, ou de quatre ans, ou même un peu plus vieux, c'est à lui que je
m'adresse.
Par contre,
dans le dossier des maternelles quatre ans, je me suis fait diriger rapidement
vers le ministre de l'Éducation, que
je connais moins, mais que j'espère connaître. Mais, bref, voilà, oui,
effectivement, j'aurais aimé que M. Lacombe soit présent parce
qu'on parle des enfants qui sont sous sa gouverne.
• (17 h 10) •
Mme Rizqy :
Tout à fait. Puis, vous savez — ou, peut-être, vous ne le savez pas, je vais
vous l'apprendre — il siège
sur 57 comités interministériels, mais
aucun portant sur la maternelle quatre ans. Il faut le faire, quand même, parce
qu'apparemment on devait faire ça en complémentarité, hein? Est-ce que c'est
bien, habituellement, qu'un ministre de la
Famille et de l'Éducation se parlent puis que leurs fonctionnaires se parlent
pour s'assurer que, justement, s'ils disent que c'est en
complémentarité, bien, il y ait véritablement un comité interministériel au
travail pour nos enfants?
Mme Lessard (Francine) : Tout à
fait. Non, mais vous avez raison, dans ce débat sociétal qui dure maintenant depuis plusieurs mois, il y a quand même beaucoup
d'improvisation. Il y a beaucoup de... On vient tout juste de nommer encore... On veut offrir le libre choix aux
parents. Premièrement, il faudrait parler à ces parents-là. Ces parents-là ont
demandé d'être entendus, ils ont
demandé des auditions, ils ont demandé des consultations. Il n'y aura pas de
consultations, à ce que je peux constater, donc on n'entendra pas les
parents. On va décider que les parents...
Le Président
(M. Asselin) : ...
Mme Rizqy :
Alors, M. le Président, ce que Mme Lessard tente de souligner, c'est que
plusieurs personnes auraient aimé être entendues et qu'il y a des trous
dans l'horaire.
Le Président (M. Asselin) :
Oui. Vous comprenez qu'on est en consultations en ce moment...
Mme Rizqy :
Une seconde, M. le Président, une seconde, j'ai le micro. Il y a des trous dans
l'horaire, et, malgré les trous dans
l'horaire, les gens que nous avons tenté de faire asseoir ici pour les
consultations particulières, le gouvernement les a refusés.
Le
Président (M. Asselin) :
Les premiers que l'on voulait faire asseoir, ce sont eux, puis ils sont là,
alors on va les écouter.
Mme Rizqy :
Vous me permettez? J'ai ici une analyse d'impact pour la maternelle quatre ans
qui a été faite par le ministère de
l'Éducation. Est-ce que vous en avez trouvé une qui a été faite par le
ministère de la Famille? Parce que moi, j'ai cherché...
Mme Lessard (Francine) : Non,
aucune.
Mme Rizqy :
Ah! d'accord. Nous avons la chance d'avoir le Pr Moreau, qui est chercheur, et
vous avez plusieurs années derrière la cravate en recherche de la petite
enfance. J'ai quand même fait quelques recherches sur vous, là. Est-ce que quelqu'un vous a appelé avant de lancer
les maternelles quatre ans, s'asseoir et avoir une rencontre avec vous avant de lancer ça? Non. J'ai vu qu'il y a
quelques années vous avez fait une étude, avec plusieurs autres chercheurs, sur
le 0-5 ans. À ma connaissance, il n'y a pas grand monde qui a été appelé dans
votre groupe avant le déploiement de... bien, en fait, avant l'annonce de la maternelle
quatre ans, donc il n'y a personne qui a appelé nos bons chercheurs québécois,
les spécialistes de la petite enfance.
M. Moreau
(Jacques) : Bien, écoutez, c'est peut-être...
Mme Rizqy :
Avant l'annonce, là.
M. Moreau
(Jacques) : Oui, mais c'est peut-être tout simplement parce que je
suis comme... je suis à l'École de travail
social, donc les gens ne s'imaginent pas qu'un spécialiste de la petite enfance
puisse être en travail social. J'y suis tout simplement pour la raison
suivante, c'est que j'ai toujours cru à l'action collective beaucoup plus
qu'aux actions individuelles, et qu'en ce qui
concerne l'intervention auprès des enfants démunis, des enfants atteints dans
leur développement ou à risque dans
leur développement, bien, les actions collectives sont à privilégier sur les
actions individuelles. Donc, c'est pour ça que je suis là, c'est tout.
Mme Rizqy :
Oui, oui, il n'y a personne ici qui va douter de votre bonne foi. J'aimerais
juste citer un passage d'une de vos
plusieurs études, parce que vous êtes collaborateur : «Rappelons qu'une
intervention directe auprès de l'enfant, par exemple des services de garde éducatifs ou la prématernelle, est
conseillée pour les enfants vivant dans un contexte de vulnérabilité.» Nous, ça fait quand même plusieurs
mois qu'on répète que le déploiement des maternelles quatre ans en milieu défavorisé devrait continuer, mais non pas
le mur-à-mur ou universel parce que, lorsqu'on décide de prioriser tout
le monde, on ne priorise plus ceux qui en ont plus besoin. Vous êtes d'accord
avec ça?
M. Moreau
(Jacques) : C'est ça, oui, je suis d'accord avec ça.
Mme Rizqy :
D'accord, parfait.
M. Moreau
(Jacques) : Je vous rappelle que le Conseil supérieur de l'éducation,
en 2012, a émis un avis, hein? Et je
ne sais pas si le ministre est au courant, mais le Conseil supérieur de
l'éducation, à l'époque, recommandait de laisser les quatre ans là où
ils sont...
Mme Rizqy :
Tout à fait.
M. Moreau
(Jacques) : ...dans l'esprit de l'expérience finlandaise de pédagogie
sociale, à laquelle les CPE, dans la
structure où qu'elles étaient et qu'elles sont encore, correspondaient, en
termes de philosophie et d'action, au principe de pédagogie sociale.
Donc, dans cet esprit-là, encore une fois, je répète, je ne vois pas l'intérêt
de créer de nouvelles infrastructures.
Mme Rizqy :
Nous non plus. Dr Moreau, tantôt, vous avez parlé de quelque chose de très
important, vous avez mentionné de
diminuer, au fond, les changements. Dans le cadre du projet de loi des
maternelles quatre ans, le ministre de l'Éducation a demandé, là, aux
commissions scolaires : Envoyez-nous, là, des classes, des projets de
classes, pas des besoins d'élèves. Il parlait toujours de classes, donc du
béton.
M. Moreau
(Jacques) : Bien...
Mme Rizqy :
Et, si vous permettez, en Outaouais, on a une commission scolaire qui a fait la
proposition suivante, d'avoir une
école complète juste de maternelles quatre ans. Donc, si on suit cette logique,
de zéro à trois ans, ils pourraient être dans un CPE ou dans un service
de garde, à quatre ans on s'en va à l'école des quatre ans, et après ça on s'en
va à l'autre école, de cinq ans à 12 ans. Vous trouvez ça comment, ce...
M. Moreau
(Jacques) : Ça ne me paraît pas une bonne idée.
Mme Rizqy :
Non, hein? Moi non plus.
M. Moreau
(Jacques) : Non, non, non.
Une école complète de quatre ans, c'est beaucoup trop gros. À cet
âge-là, le sentiment de sécurité est
encore très important. Et, comme je le disais tantôt, les tâches développementales et les jalons développementaux sont beaucoup centrés sur les dimensions socioaffectives du développement à ce moment-là. Et donc, de créer des environnements à
l'intérieur desquels on va générer de
l'insécurité, genre, une maternelle, une école complète de, je ne sais
pas, 400, 500, 600...
Mme Rizqy :
On a des écoles à 1 000 élèves au...
M. Moreau
(Jacques) : Ah! au primaire, d'accord.
Mme Rizqy :
Oui, 1 000.
M. Moreau
(Jacques) : Alors, ça, ça dessert complètement les besoins
développementaux des quatre ans, des dimensions
pareilles. Ça va à l'encontre de leurs besoins et de ce qu'on connaît aussi de
ce qui est bon pour les enfants de cet
âge-là. Ce qui est bon pour les enfants de cet âge-là, c'est un milieu
sécuritaire, c'est un milieu prévisible, c'est un milieu dans lequel les
relations entre personnes, les enfants entre eux-mêmes et avec les adultes...
que ce soient des relations bienveillantes,
que ce soient des relations harmonieuses, que ce soient des relations où les
adultes vont servir de guides et de modèles,
alors, au sens scientifique, c'est-à-dire dans l'esprit de l'étayage de
Vygotsky et dans l'esprit du «modeling» de Bandura. Et, pour faire ça, ça prend des petits groupes et non seulement
des petits groupes, mais des petits groupes dans une petite
infrastructure, à l'échelle de la dimension de la vie de ces enfants-là. C'est
ça que ça prend.
Mme Rizqy : Tout à fait. Puis j'avais même assisté une fois à
une conférence... lorsqu'on imaginait les villes à l'échelle des enfants. Et
tantôt vous avez parlé des transports, Mme Lessard. Je me suis aussi
assise avec les transporteurs, et ils ont dit : Comment on va faire
pour prendre la première marche? Qu'est-ce qu'il en est de la ceinture de
sécurité? Il n'y en a pas.
Et j'aimerais aussi... Parce qu'en terminant...
Il ne me reste que quelques secondes, je vois le président qui me regarde.
Mme Lessard, pouvez-vous nous rassurer, vous, là, vous n'avez pas de CPE
avec 1 000 enfants, là?
Mme Lessard (Francine) :
Pardon? Je m'excuse...
Mme Rizqy : Vous n'avez pas
d'établissement, de CPE avec 1 000 enfants?
Mme Lessard (Francine) : Non,
80 au plus.
Mme Rizqy : Alors, c'est petit,
hein? C'est l'échelle très... enfant.
Mme Lessard
(Francine) : Une
installation, bien, selon les critères édictés par la loi, c'est au maximum
80 places.
Mme Rizqy :
Et moi, j'ai vu une vidéo sur Facebook d'une des éducatrices de CPE qui
pleurait, qui était alarmée, elle dit...
Eux autres, ils font encore de la formation continue, parce que, quand il y a
eu... le premier ministre a parlé du réseau
des services de garde en parlant de techniciennes de garde, elle a dit :
Nous autres, là, on fait de la formation continue. Je pense, dans un
contexte, aussi, de pénurie de main-d'oeuvre, êtes-vous d'accord que, si on
commence à prendre des enfants des CPE ou
des services de garde ainsi que les éducatrices, au fond, on n'est pas un peu
en train de déshabiller le ministre Lacombe pour habiller le ministre
Roberge?
Mme Lessard
(Francine) : Mais je pense
que le portrait que vous dressez est un portrait qu'on craint énormément
aussi, effectivement, parce que, si on a des
maternelles quatre ans un peu partout au Québec, évidemment, il est possible
que des éducatrices, nos bonnes
éducatrices, les éducatrices qui sont avec nous depuis longtemps et qui sont
performantes, fassent le choix aussi
de quitter pour aller travailler dans le milieu de l'éducation. Bien, oui, à ce
moment-là, on vient d'affaiblir le réseau des services éducatifs.
Mme Rizqy : En terminant...
Le
Président (M. Asselin) : On
a terminé, effectivement, vous avez raison. La parole est à la députée de
Sherbrooke maintenant.
Mme Labrie : Merci, M. le
Président. Je regarde votre mémoire. Il y a des recommandations très
intéressantes, notamment que la Loi sur les services éducatifs à l'enfance soit
modifiée pour que le droit à la fréquentation des enfants de 0-5 ans soit reconnu, également qu'on prenne
les moyens pour offrir la gratuité universelle des services éducatifs à tous
les enfants de quatre ans. Je pense que, si
on veut vraiment donner le choix aux parents, ce sont d'excellentes
recommandations. Moi, j'espère qu'elles seront entendues.
J'aimerais aussi vous entendre... Vous avez
nommé tout à l'heure qu'on avait besoin d'avoir une passerelle efficace entre le réseau des services éducatifs et
le système de santé parce qu'en ce moment, souvent, c'est là que ça accrochait.
Quand vous en faisiez, du dépistage dans vos
réseaux, le suivi ne se fait pas. Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour améliorer
cette passerelle-là? Est-ce que les mesures
d'Agir tôt qui ont été proposées dans les derniers mois sont suffisantes?
Qu'est-ce que vous voyez qu'on peut faire de plus?
• (17 h 20) •
Mme Lessard
(Francine) : Effectivement,
il faut poursuivre nos travaux. Il faut se questionner sur comment on peut faire, mais il faut faire... Il ne faut pas
juste se questionner, il faut passer à l'action, il faut être capables
d'organiser... Puis on est capables de le faire parce qu'on a un
gouvernement... On a plusieurs ministères, mais on a quand même un
gouvernement, au Québec. Alors, il faut que ce gouvernement-là soit capable de
faire des arrimages entre ses différents ministères
et d'arriver à, effectivement, prioriser des enveloppes budgétaires pour offrir
des passerelles efficaces entre le moment
où il y a une observation et le moment où l'enfant, et le parent, a besoin d'un
soutien qui appartient, là, au ministère de la Santé et des Services sociaux. Alors, c'est par des ententes,
c'est par des budgets... Effectivement, on va devoir mettre de l'argent. Mais
on est prêts à en mettre, de l'argent, vraiment beaucoup d'argent, pour
développer des maternelles quatre ans.
Alors, si on prenait ces argents-là
pour compléter le réseau actuel et pour lui donner la passerelle dont il a
besoin pour assurer que ces tout-petits-là, au Québec, quand ils ont un
problème, quand ils ont besoin d'aide, bien, on est capables d'avoir effectivement cette aide-là, et que les professionnels
prennent en charge la famille, parce que ce n'est pas juste l'enfant, souvent, c'est la famille... Donc,
il faut travailler à ça. Il faut y mettre le temps et l'argent pour être
capables justement de se reparler
dans quelques années puis de se dire : Bien, les enfants qui arrivent à
l'école à cinq ans avec encore des
petits «packsacks» plus ou moins complétés, bien, il y en a de moins en moins,
et pourquoi? Parce qu'on a agi rapidement. On a agi au jour 1 et on agit en complémentarité avec la Santé et les
Services sociaux. C'est de ce ministère-là qu'on a besoin.
Mme Labrie :
Parfait.
Le
Président (M. Asselin) : Merci beaucoup. Il vous restait
cinq secondes.
Mme Labrie :
Merci.
Le
Président (M. Asselin) : Alors, nos consultations
particulières se poursuivent avec la députée de Joliette.
Mme Hivon :
Merci beaucoup. Je pense qu'on décèle quelques paradoxes, puis je veux juste
nommer ça rapidement, là. D'abord, le gouvernement nous dit : C'est
tellement bon, la maternelle quatre ans, qu'il faut l'offrir à tout le
monde, mais en même temps il nous dit :
Il faut vraiment respecter le libre choix. Donc, il y a comme, dans ça, quelque
chose qui dit : Il faudrait l'offrir à tous, tous, tous les enfants
pour qu'ils se développent parfaitement, mais en même temps il faut évidemment laisser le libre choix aux parents. Ça
m'apparaît plus un argument pour faire atterrir les choses que plutôt d'être
fondé sur la science.
L'autre chose, c'est...
On dit le libre choix, mais le libre choix, il va être là parce qu'on va offrir
la maternelle quatre ans à tous les enfants.
Mais on n'offrira pas les CPE à tous les enfants, alors qu'il y a
42 000 enfants qui attendent une
place puis il y a beaucoup des parents que c'est là qu'ils souhaitent la place.
Puis l'autre chose, c'est qu'on nous dit : Agir tôt, c'est vraiment fondamental, mais il y a près de
20 000 enfants qui sont dans des services de garde complètement
non régis, sans programme éducatif, puis le gouvernement ne s'attaque pas à ça.
Donc, je voulais
juste le dire parce que je trouve qu'à un moment donné, quand on se réclame de
la science, il faut aussi être cohérent puis entendre tous les arguments.
Deux
choses. Le gouvernement nous dit : La maternelle quatre ans, c'est
prioritaire parce qu'on a des enseignants qui sont formés puis, l'autre
chose, parce qu'on a des spécialistes. On l'entend tout le temps, à quatre ans,
il va pouvoir y avoir des spécialistes, des
orthopédagogues, des gens, dans les écoles, qui sont là et vont pouvoir
accompagner les enfants. Qu'est-ce que vous répondez à ces deux
arguments-là?
M. Moreau
(Jacques) : Bien, ça dépend des spécialistes. Pour certains enfants,
pas pour tous... Je veux dire, la majorité des enfants se développent bien, là.
C'est 85 % des enfants, à peu près, qui se développent harmonieusement jusqu'à l'âge adulte. Donc, c'est autour de
15 %, entre 15 % et 20 %, selon les époques et les endroits, qui
vont être atteints dans leur
développement de façon plus ou moins sévère et il y a une proportion ici qui
vont être atteints à cause de raisons neurobiologiques que l'on connaît.
Les autres, c'est à cause de l'environnement qu'ils ne font pas leur travail
dès leur jeune âge. Et là ces enfants-là qui
sont atteints dans leur développement, avec eux, là, oui, on peut faire quelque
chose, et c'est avec ces enfants-là
qu'on a besoin justement de ressources supplémentaires pour que le travail pour
les aider à rattraper leur développement puisse se faire.
Donc,
oui, pour ces enfants-là en particulier, on a besoin de spécialistes
orthophoniques et autres, orthopédagogues, et ainsi de suite. Ça va de soi pour soutenir l'action éducative qui se
fait déjà en CPE. Donc, ce n'est pas nécessaire de créer des maternelles quatre ans. Ce qui est nécessaire,
c'est de soutenir le réseau qui existe déjà, qui fait son bon travail en termes
d'action éducative et de leur donner le
soutien nécessaire pour que, quand on rencontre, dans ces environnements-là,
des enfants atteints, on puisse le faire.
Le
Président (M. Asselin) : M. Moreau, Mme Lessard,
Mme Breton, je vous remercie de votre contribution à nos débats. C'est la
fin.
Alors, on va
suspendre quelques instants, en attente du prochain groupe. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à
17 h 24)
(Reprise à 17 h 27)
Le Président (M. Asselin) : M. Létourneau, si vous voulez bien, on va débuter par un consentement parce qu'on va déroger de la fin. On va dépasser l'heure prévue
de 18 heures. Est-ce que vous acceptez? Quelques minutes, 18 h 12, peut-être
18 h 15.
Alors,
on va écouter les gens de la CSN, nos amis, M. Létourneau,
Mme Longchamps, Mme Bénard, Mme Thibault-Bellerose.
Alors, je vous laisse vous présenter, vous le faites mieux que moi, de toute façon, et puis un premier 10 minutes...
Confédération des syndicats
nationaux (CSN)
M. Létourneau (Jacques) : Oui, merci, M. le Président. Je suis
accompagné de Lucie Longchamps, qui est, à la direction de la Fédération de
la santé et des services sociaux,
responsable du secteur privé, Mireille Bénard, qui est conseillère politique
à l'exécutif de la CSN, et Anne Thibault-Bellerose, qui est au Service de recherche
et qui a travaillé sur la rédaction de ce mémoire, et moi-même, Jacques
Létourneau, président de la CSN.
Le
Président (M. Asselin) : Excellent.
M. Létourneau (Jacques) : Alors, M.
le ministre, messieurs dames les
députés, ça nous fait extrêmement plaisir d'être là cet après-midi pour vous
entretenir du projet de loi n° 5.
Peut-être,
pour le bénéfice de la commission, rappeler que la CSN, c'est une organisation syndicale qui représente 300 000
travailleuses, travailleurs, à travers le Québec, tant dans le secteur public
que dans le secteur privé. Et, dans le sujet qui nous intéresse, c'est important de mentionner que nous représentons
10 500 travailleuses, travailleurs dans les CPE au Québec. On représente 3 200 responsables de
services de garde en milieu familial accrédités. On représente la majorité des
travailleuses et travailleurs qui sont dans
les services de garde dans les commissions scolaires et on représente aussi les
enseignants et les enseignantes qui enseignent au collégial, là, la technique
d'éducation à l'enfance.
Alors, évidemment,
nous, quand le gouvernement de la CAQ, et que le premier ministre, et que le
ministre de l'Éducation ont annoncé leur
volonté d'adresser la question des enfants en difficulté au Québec, on a salué,
évidemment, cette volonté-là
politique. J'avais moi-même parlé à M. Legault pour le féliciter et
insister, justement sur cette dimension que le Québec ne pouvait pas faire l'économie de s'occuper des jeunes,
de l'avenir, particulièrement des jeunes qui sont en difficulté et j'avais assuré le premier
ministre que la CSN participerait à l'ensemble des travaux qui pourraient mener
éventuellement à une prise en charge collective de cette question.
Vous savez, à la CSN,
depuis plusieurs années, on s'intéresse à la question de la petite enfance parce
qu'on représente des travailleuses et des travailleurs, mais aussi, et surtout, parce qu'on est une organisation qui intervient dans les grands enjeux
sociétaux et on a toujours considéré fondamental de s'occuper de nos jeunes au Québec.
On avait d'ailleurs appuyé fortement la politique familiale, en 1997, qui, faut-il le
rappeler, avait permis, là, de régulariser toute la gamme de services des centres de la petite
enfance, des RSG, tout en permettant, justement, l'arrivée importante des
femmes sur le marché du travail,
parce qu'on le sait, quand on parle du zéro à cinq ans, bien, on sait que ça
s'adresse particulièrement, là, en termes de besoins de services de
garde, pour les femmes.
• (17 h 30) •
Donc,
la CSN s'est inscrite dans cette perspective-là
dès 1997. Disons qu'on a trouvé dure la période ou les périodes d'austérité
qui ont malmené le réseau des CPE et des RSG, notamment. Et là, comme je l'ai
mentionné tantôt, quand la CAQ a été élue,
on a dit : Bon, on est-u capables de se rasseoir, au Québec, puis de
regarder comment qu'on va pogner ensemble
la question de la petite enfance puis des besoins particuliers des jeunes qui
sont en difficulté? Et là je dois vous avouer
qu'on a été un peu étonnés parce que les premiers échanges qu'on a eus,
notamment avec le ministre de l'Éducation, on comprenait qu'on n'était pas dans une approche maternelles quatre ans
mur à mur. On nous avait dit... même son de cloche du côté du ministère de la Famille, on nous avait dit : On
va y aller en complémentarité. L'idée, ce n'est pas de mettre en
opposition une proposition de services avec une autre, on va travailler dans
les complémentarités.
Parce
que je tiens à le souligner, là, la CSN, puis je l'ai même fait publiquement
dans une lettre ouverte au Devoir récemment, on n'est pas contre, dans les milieux défavorisés, le
principe de la maternelle quatre ans, on n'est pas en train de vous dire que
c'est épouvantable de faire ce débat-là. Mais en même temps, comme organisation
syndicale, on est extrêmement inquiets quand on voit le gouvernement
aller de l'avant avec une approche mur à mur où là on va carrément mettre la
maternelle quatre ans en concurrence avec le réseau des CPE et des RSG.
Et là il va sans dire
que, quand on voit ce que ça représente comme coûts pour le gouvernement du
Québec alors qu'on sort de périodes
d'austérité où il y a des nécessités de réinvestissement majeur en santé et
services sociaux, en éducation,
notamment pour traiter les cas d'élèves en difficulté, on pense que ce n'est
pas le bon choix de mettre 800 millions, 1 milliard, jusqu'à 2 milliards dans des classes de maternelle
quatre ans alors qu'on devrait consolider ce qui existe déjà.
Et
tantôt on parlait... il manque, quoi, 40 000, 45 000 places? La
CAQ nous avait dit : On va ajouter 30 000 places dans les CPE. On pense qu'on devrait dès
maintenant envoyer un signal clair qu'on va travailler à consolider les
services qui existent déjà pour
permettre, justement, à une prise en charge pas juste des enfants de quatre
ans, mais des enfants aussi de zéro à
quatre ans. Parce qu'il y a des spécialistes qui vous l'ont dit puis qui vont
vous le répéter... moi, je n'en suis pas un, là, je suis un syndicaliste, mais disons que, quand on regarde les
études, on comprend que le dépistage va souvent se faire et est
nécessaire avant l'âge de quatre ans. Puis, quand tu veux mettre en place des
services, là, les parents du Québec pourraient témoigner à la queue leu leu
pour vous dire que, dans toutes les écoles du Québec, essaie d'avoir un orthopédagogue, un orthophoniste, un éducateur
spécialisé, c'est des mois, des mois, des mois, voire des années d'attente
quand ton enfant n'est pas un enfant qui est
turbulent. Et donc consolidons ce qui existe déjà dans les CPE, dans les RSG
et travaillons en complémentarité.
Donc,
nous, on dit au gouvernement : Votre approche mur à mur, ce qu'elle risque
de faire, c'est d'engloutir des sommes
énormes dans une voie qui va non seulement se faire au désavantage de ce qui
existe déjà, mais pire, on est en train
de se donner une nouvelle perspective avec le changement du gouvernement, alors
qu'on avait déjà, au Québec, un modèle
particulier qui est le propre du Québec. On peut bien parler de l'Ontario puis
de New York, là, mais, à New York, faire
garder son enfant, là, dans une garderie privée, ça coûte 50 $ US par
jour, alors qu'au Québec on s'est donné collectivement les moyens, justement, de se donner ces services de
qualité pour permettre de répondre aux besoins des enfants puis de ceux
qui sont en difficulté. Il me reste-tu encore du temps?
Le Président (M. Asselin) :
3 min 28 s.
M. Létourneau (Jacques) : Ah! c'est bon, c'est bon. Peut-être un autre
élément sur lequel je veux insister. Je l'ai dit tantôt, on représente des travailleuses et travailleurs qui sont
dans les services de garde en milieu scolaire, et ce que l'on nous a dit... parce qu'il existe déjà des
maternelles quatre ans. Alors, j'ai entendu tantôt d'autres intervenants qui
ont précédé qui disaient que les
ratios, puis on peut vous le confirmer, dans les services de garde en milieu
scolaire sont extrêmement élevés, on
parle d'un technicien éducateur pour 20 enfants. Donc, il y a un problème
qu'on doit absolument attaquer, indépendamment
du débat qui se fera sur : on va-tu de l'avant ou pas avec plus de
maternelles quatre ans? Et dans ce qui existe
déjà sur le principe du mi-temps, là, tu sais, du partage des expertises, nous,
on nous le souligne, de notre côté, chez les gens qu'on représente, qu'on
devrait miser davantage sur une approche pédagogique plus inclusive avec les
personnels, que ce soient des
techniciens en service de garde ou des techniciennes ou des techniciens en
éducation spécialisée. Les gens qu'on
représente aussi dans les écoles nous ont dit : On devrait paire partie de
l'équipe-école parce que souvent les
gens ne sont pas considérés dans les plans d'intervention auprès des
enfants qui sont en difficulté.
Donc,
essentiellement, vous allez le voir à la fin de notre mémoire,
je ne sais pas si vous avez eu le temps de le lire parce qu'on n'a été convoqués que vendredi dernier, mais on a une série de recommandations où on met effectivement l'accent sur arrêter la généralisation de
la maternelle quatre ans partout sur le territoire du Québec, poursuivre le développement
des places en milieu familial et en CPE et, peut-être
pour finir, instaurer la gratuité des services
de garde éducatifs pour les familles à faibles revenus et la gratuité pour
tous les enfants de quatre ans. Parce
que, si on veut permettre, justement, aux gens qui sont dans les
milieux défavorisés d'intégrer le réseau de la petite enfance, des services
éducatifs, bien, on devrait permettre la
gratuité. Puis, pour les enfants de quatre ans, bien, si on veut effectivement s'en occuper, on devrait leur permettre d'avoir accès à des services
de garde éducatifs de façon gratuite.
Alors,
voilà pour l'essentiel. Ça fait le tour de notre propos. Évidemment,
mes collègues qui m'accompagnent vont se faire un
plaisir aussi de participer à l'échange et de répondre à vos questions.
Le
Président (M. Asselin) : Merci
beaucoup pour votre présentation, d'autant que nous avons reçu votre mémoire.
Alors, nous allons le lire ou nous l'avons déjà lu. Mes collègues
sont ici à témoin, on lit tout ce qu'on entend... on lit tout ce que
c'est qu'on reçoit.
M. Létourneau
(Jacques) : ...
Le
Président (M. Asselin) : Parfait, parfait.
M. Létourneau
(Jacques) : ...
Le Président (M. Asselin) : Bon. Alors, je laisse la parole pour
16 minutes au ministre de
l'Éducation, qui va vous...
diriger les échanges pour ce bout de temps là.
M. Roberge : Merci bien, M. le Président. Merci pour
votre présentation. Dans la conclusion de votre mémoire, on dit, dans le premier paragraphe : «La généralisation de la maternelle
quatre ans prendra des années et des
fonds publics par milliards pour atteindre ses objectifs». Bon,
«généralisation», je veux apporter quand même un bémol, on souhaite que ce soit accessible à tous et non pas l'imposer à tout le monde. Puis on ne
s'attend pas à ce que 100 % des
parents fassent ce choix-là, considérant qu'il y a une offre qui est
diversifiée, qui est déjà très diversifiée, hein? Tantôt, j'ai dit : CPE,
garderies subventionnées, garderies non subventionnées, milieu familial régi,
milieu familial non régi, puis j'en oublie peut-être. On est déjà à cinq, six
avec la maternelle quatre ans, donc il y a diversité d'offres en ce moment.
Mais,
quand on dit que, bon, d'offrir davantage de maternelles quatre ans, ça
prendrait du temps et ça coûterait de l'argent,
considérant qu'il y a déjà autour de 40 000 parents sur les listes
d'attente des CPE, on est d'accord que, si on voulait déployer davantage
de CPE, ça prendrait aussi du temps et de l'argent. Vous êtes d'accord avec ça?
M. Létourneau (Jacques) : Bien, absolument. Nous, on pense depuis plusieurs
années, et c'est ce qu'on réclamait il y a déjà... même avant, quand on a parlé
de politique familiale au Québec, on s'était déjà donné des objectifs assez
clairs d'investissement dans ce qui est en
train de se développer, notamment avec les CPE et les RSG. Bon, je vous l'ai
mentionné tantôt, on a eu la période
malheureuse, sous la gouvernance libérale, où on a été en austérité. Puis il ne
faut pas se le cacher, même les libéraux ont favorisé le développement
du privé au détriment même des CPE et des RSG.
Mais
c'est clair qu'à partir du moment où on dit demain matin : On doit
investir dans les CPE et les RSG, on vous le dit, on va investir dans ce qui existe déjà. Bien sûr que ça coûte de
l'argent. Je veux dire, à partir du moment où tu ouvres des places, il va
falloir que tu embauches des travailleurs et des travailleuses. Mes collègues
pourront mieux vous l'expliquer que
moi, mais c'est évident, pour nous, que l'expertise qui existe dans les CPE et
les RSG, à partir de la formation que les travailleuses et les
travailleurs reçoivent, c'est une formation qui est appropriée aux besoins des
jeunes.
Donc, nous, on
dit : Tant qu'à miser sur, au Québec, l'importance de prendre en charge
les enfants en difficulté, faisons-le à
partir des ressources qui existent déjà. Alors, oui, bien sûr, il va falloir
mettre des sous. Je n'ai pas de calculatrice pour savoir exactement comment ça va coûter, mais ce que je comprends,
par contre, c'est que pour inventer un nouveau modèle en le généralisant à travers le Québec, ce qu'on comprend, c'est
que ça va coûter pas mal d'argent. Nous, on dit : Investissons dans ce qui existe déjà puis,
peut-être, ajoutons aussi des ressources dans les écoles primaires et
secondaires pour soutenir les enfants
qui sont déjà en difficulté puis qui ont de la misère à avoir des services à
l'heure où on se parle.
• (17 h 40) •
M. Roberge :
Mais je pense qu'il faut aller au-delà du débat de chiffres quand on investit
dans nos services publics. C'est vrai
que le précédent gouvernement libéral a vraiment priorisé non pas les réseaux
publics, que ce soient les quatre
ans — au
compte-gouttes, il y en a eu, là, des quatre ans en milieu défavorisé — ou les CPE, ils sont vraiment allés à tout
crin vers le privé. Ce n'est pas notre orientation du tout, là. On le voit, là,
sur 13 000 places, il y en a facilement 11 000 qui seront autour des CPE. Puis le déploiement des
maternelles quatre ans, on peut en discuter, mais ce n'est certainement
pas une privatisation, on investit dans nos services publics.
Mais il faut
faire attention quand même avec les chiffres, parce que, dans le communiqué
diffusé par votre organisation aujourd'hui,
on dit : «Pourquoi dépenser près de 2 milliards de dollars en béton»,
en supposant que la maternelle quatre ans qu'on veut déployer, avec à peu près 50 % de fréquentation, ça
coûterait 2 milliards. Bon, je pense qu'il faut investir dans nos services publics, il faut investir dans la
jeunesse, puis ce n'est pas une dépense. Puis je ne veux pas en faire un débat
de chiffres, mais, quand on lance un chiffre
de 2 milliards, je pense qu'il faut faire attention quand même parce qu'on
se trompe de 100 %, là, c'est
quand même quelque chose. Parce que les commissions scolaires nous ont dit,
quand on les a consultées il y a
quelques mois à peine, que, pour offrir les services à 100 % des enfants,
ça prendrait en tout 5 200 classes. Ça, c'est les commissions
scolaires qui nous disent ça : Ça prendrait 5 200 classes.
Nous, on
pense qu'en cinq ans on va le déployer puis que 50 %, à peu près, des
parents vont faire ce choix. C'est une
estimation, d'accord? Bien ça, ça voudrait dire 2 600 classes en
tout. 2 600 classes en tout, quand il y en a, grosso modo, 400 de déjà ouvertes, bon, il en manque
2 200. On en ouvre 250 en septembre, il en reste 1 950 à ouvrir. Il y
a 709 classes de libres dans le
réseau scolaire, c'est ce que nous disent les commissions scolaires, il y a
709 classes, là, qui attendent. On les chauffées vides tout l'hiver. Il y a 709 classes qui disent :
On pourrait les utiliser. Il nous reste, grosso modo, 1 240,
1 250 classes à bâtir. Bien, à 800 000 $ chaque, ça
fait un peu moins de 1 milliard.
Donc, je ne
prétends pas que c'est gratuit. Je dis que, sur les 2 600 classes, il
y en a plus de la moitié qui sont déjà construites
et qu'avec une estimation de 800 000 $ par classe on est à moins de
1 milliard. C'est de l'argent, 1 milliard dans le Plan québécois des infrastructures. Et je vous
rappelle que notre PQI, sur 10 ans, c'est de 21 milliards. Notre PQI
qu'on a mis sur 10 ans en
éducation et enseignement supérieur, là, notre investissement pour agrandir,
construire, rénover, c'est 21 milliards.
Et là on est en train de dire : Grosso modo, il pourrait y avoir un peu
moins de 1 milliard pour construire des classes de maternelle
quatre ans.
Donc, de dire
qu'on met tous nos oeufs dans le même panier, ça serait... Vous ne l'avez pas
dit, d'autres l'ont dit avant vous.
Donc, 1 milliard sur 21, je ne pense pas qu'on peut nous accuser de tout
mettre dans le même panier. Et ce n'est
certainement pas 2 milliards, comme ce qui a été dit, c'est moins de la
moitié. Donc, je comprends qu'il ne faut pas faire qu'un débat de
chiffres, mais, quand on les utilise, il faut faire attention.
Et je vois
quelqu'un qui veut réagir. Je veux juste dire une dernière chose avant de vous
céder la parole pour qu'on échange
ensemble. C'est que non seulement 1 milliard sur 21, c'est loin d'être
100 %, là, c'est à peu près plus 5 % de l'argent qu'on met dans le PQI. Et ensuite on ne fait pas
que ça, on va en construire, des CPE, on va rajouter plus de
10 000 places dans notre réseau.
Une voix : ...
M. Roberge :
Voilà, voilà. Donc, juste question de chiffres, c'est ce que je voulais
apporter, tout de même. Et je vais vous laisser discuter de ce sujet-là,
je sens que les gens ont quelque chose à dire.
M. Létourneau
(Jacques) : Oui, bien, vas-y, Lucie, oui, oui.
Mme Longchamps
(Lucie) : Puis d'emblée je vais vous dire que moi, je suis une
éducatrice, je suis également une responsable de service de garde en
milieu familial qui maintenant est suspendue de ses fonctions parce que j'ai
d'autres fonctions à la fédération, qui a
été responsable des services de garde pendant plus de 25 ans. Moi, je vais
nous sortir du débat des chiffres
parce que c'est loin d'être ma fonction principale. Éducatrice, on n'est pas
dans les milliards, pas du tout. Mais ce que je nous rappellerais, c'est que ce
milliard-là, si on l'investissait dans le 0-5 ans, dans le tout-petit, il aurait un bien meilleur effet que ce
que l'on veut.
Ce que l'on veut, présentement, dans la
politique — puis
elle était noble, la politique que vous avez mise de l'avant — c'était
de détecter et d'aider les tout-petits à quatre ans. Présentement, puis on vous
l'a dit, puis on n'est pas les seuls
à vous le dire, les enfants, dès les premières semaines de leur entrée, autant
en centre de la petite enfance que chez les responsables des services de garde en milieu familial régis et
subventionnés, au bout de quelques semaines, on les détecte. Au bout de quelques semaines, on met toute une
famille, si ce n'est pas un village, en alerte parce qu'un enfant a un souci ou
une fragilité. Une fois ça fait, on n'a pas de services et on est en attente,
et on est en attente. Là, ce qu'on nous promet, c'est qu'avec l'entrée à la maternelle quatre ans il y aura des
services. Vous comprendrez qu'on a de la difficulté à croire ça parce que,
présentement, nous, on lève la main,
nous, on lève les drapeaux, et il n'y a pas de services pour ces parents-là.
On se demande
également il est où, l'empressement. Moi, pour avoir éduqué des enfants, à
quatre ans... Je vais vous les comparer puis je vais vous faire une image parce
que ça fait partie de ma formation d'éducatrice. Un enfant, c'est une chenille, c'est une toute petite chenille qui, on
espère, un jour, va prendre son envol. Je ne vois pas ce qu'il y a
dans... la précipiter, la petite
chenille, au bord du précipice et à lui dire : On doit attendre que tu
sois prête. On doit attendre qu'elle déploie
ses ailes et qu'elle ait hâte d'y aller. C'est ce qui arrive avec nos enfants à
ce temps-ci de l'année, là, ils ont hâte à l'entrée en septembre parce
qu'ils ont eu cinq ans au cours de l'année.
C'est quoi,
l'empressement, au Québec, à vouloir mettre des enfants dans les maternelles
quatre ans quand l'on sait ce qui se
fait en CPE et en milieux familiaux régis et subventionnés, qui est de qualité,
qu'on passe la rampe, que la loi ait été revue dernièrement et ses règlements,
qu'il y aura sous peu le dossier de l'enfant, que le
programme éducatif a été revu et que
la formation des responsables de service
de garde en milieu familial, on est
les premiers à dire qu'on voudrait une
adaptation plus grande, qu'on vous a présenté des projets pour que ça se fasse en douceur avec les
responsables, dans le respect de ce qu'elles sont et de ce qu'elles
font?
Donc,
sortons-nous du débat des chiffres, sortons-nous du panier de services. On est
là pour les enfants, pour les enfants.
Puis comprenez bien qu'en CPE, dans plusieurs CPE, ça ne les fragilisera pas.
Je ne dirais pas la même chose pour les
responsables de service de garde, dont... Moi, j'ai le coeur très collé à ça
parce que j'en suis une, mais on est là avant tout pour les enfants.
Moi, j'ai fait partie
du grand forum qu'il y a eu à l'Association québécoise des centres à la petite
enfance, 70 organismes tous azimuts, un
consensus : à quatre ans, ces enfants-là ne sont pas prêts pour la grande
école. Et, quand vous la décrivez,
bien, il y aura le matériel, il y aura les classes, il y aura les salles de...
bien, vous décrivez un centre de la petite
enfance ou une responsable de service de garde en milieu familial régi et
subventionné. Donc, vous voulez refaire ce qui est fait déjà.
Mettons
cet argent-là au bon endroit. Permettons à ces travailleuses-là... et
développons les places qui sont promises. Vous nous dites : Il y a
10 000 places qui seront ajoutées. Ça fait des années qu'on nous
promet des places, et elles ne s'ajoutent
pas. Ajoutons-les maintenant. Les parents, s'ils avaient le choix, c'est là
qu'ils iraient, les études le démontrent. Si vous voulez faire un parallèle équitable, mettez ça gratuit, les
services de garde éducatifs à l'enfance, on vous dit, idéalement avec les parents à faibles revenus et, dans le
meilleur des mondes, pour tous les parents du Québec. L'éducation, là, ça ne
commence pas à cinq ans, ça commence dès la pouponnière. On devrait permettre à
tous les enfants d'avoir des services éducatifs de qualité.
Mme Bénard (Mireille) : ...sans faire un débat de chiffres, là, mais le
problème, quand on dit... bon, on vise que 50 % des enfants puissent avoir accès à des maternelles quatre ans, le problème, c'est que le plan de développement, il n'est pas connu, et, pour
l'instant, ce qu'on dit aux commissions
scolaires, c'est : Offrez les maternelles quatre ans, mais c'est
un peu aléatoire. Alors, oui, il peut y avoir des classes qui sont prêtes à
recevoir des enfants, mais dans quel quartier, à quel endroit? Est-ce
que c'est dans un quartier ou dans une ville où on en a vraiment de besoin ou
c'est dans une ville où il y a
des CPE, des RSG autour puis que les besoins sont comblés? On ne connaît pas le
plan de développement, alors on
ne peut pas faire une adéquation entre : les places disponibles, on va les
utiliser... Si ces classes-là ne sont pas dans un endroit où on en a
besoin, bien, ça va être en pure perte.
Ce
qu'on demande, c'est qu'il y ait une bonne complémentarité entre les services
existants, et qu'on ne puisse pas ouvrir
des classes de maternelle dans les endroits où on n'en a pas besoin, puis qu'on
cible bien les endroits où on va les ouvrir pour ne pas qu'il y ait des
compétitions entre les différents milieux.
Le
Président (M. Asselin) : M. le ministre.
M. Roberge : Oui, bien, pour faire ce plan et finir de le
déployer, il va falloir, évidemment, adopter le projet de loi pour avancer. Je vais laisser mon collègue avancer.
Le
Président (M. Asselin) : Très bien. M. le
député de Beauce-Sud, à vous la parole.
M. Poulin :
Pour combien de temps, M. le Président?
Le
Président (M. Asselin) : Un gros quatre minutes.
M. Poulin :
30 minutes?
Le
Président (M. Asselin) : Quatre minutes.
M. Poulin :
Ah! O.K.
Une voix :
C'est bien essayé, c'est bien essayé.
M. Poulin : J'étais prêt, j'étais prêt. Effectivement, bien, pour le quatre minutes que nous avons ensemble, pour revenir un peu sur les propos du ministre,
effectivement, il y a
beaucoup plus de choses qui nous
unissent qui nous éloignent, surtout lorsqu'on parle de bien offrir des
services à nos enfants. Vous le soulignez même à l'intérieur de votre
mémoire, vous dites qu'il faut enquêter
sur les raisons qui expliquent que 20 % des enfants québécois
ne fréquentent pas un service éducatif de quatre ans. Alors, je pense
que, là-dessus, à quatre ans, donc, on a la même vision à ce niveau-là.
Et
entre autres il faut juste se le rappeler, là, je pense que
vous l'avez dit de bon aloi tout à
l'heure, que ce qui a fait très mal aux services de garde, c'est la
modulation des tarifs en fonction du salaire des parents qui a été faite par le
précédent gouvernement libéral, je
voulais en parler à Mme Lessard tout
à l'heure, parce que, lorsqu'on
regarde les archives, ça a été extrêmement difficile pour le service des réseaux des... les services de garde. Et en même temps ce que ça a fait aussi, c'est que ça a peut-être questionné certains parents, à l'âge de
0-4 ans, sur la façon dont on envoyait nos enfants dans le réseau.
Alors, ça, ça a fait excessivement mal.
Il
n'en demeure pas moins que je suis très heureux de vous entendre, somme toute,
confirmer les services de la prématernelle
quatre ans. Vous n'êtes pas contre, de ce que j'en comprends. Vous dites que
vous voulez arrêter la généralisation. C'est ce que j'en ai compris. Cependant,
vous qui êtes déployés à la grandeur du Québec, qui offrez un service
exceptionnel à nos enfants, j'imagine
que vous avez constaté que, les gens, qu'ils soient en milieu défavorisé ou
non, il y avait un détectage précoce
à faire et que, peu importe le code postal, peu importe le salaire des parents,
les gens risquaient... ou les jeunes, plutôt, risquaient d'avoir un diagnostic. Est-ce que vous êtes d'accord
avec cette affirmation-là, que, peu importe le statut dans lequel le
jeune se trouve, il a un risque, par exemple, d'être aphasique, dyspraxique et
qu'il risque d'avoir des difficultés à l'école?
• (17 h 50) •
Le
Président (M. Asselin) : M. le député a pris deux minutes.
Il vous reste deux minutes.
M. Létourneau (Jacques) : Oui, mais je... Je peux bien faire
30 secondes, là, puis je vais laisser mes collègues. Mais moi, je pense qu'une des difficultés, puis on le
dit dans notre document, c'est que, d'abord, il n'y a rien d'obligatoire dans
l'approche ni de votre côté, ni dans un CPE,
ni dans un RSG. Un parent qui décide de garder son enfant jusqu'à la
maternelle... Même la maternelle n'est pas obligatoire, encore
aujourd'hui, au Québec, alors, imaginons.
Bon,
une fois que j'ai dit ça, il faut qu'on se penche sur le phénomène du pourquoi,
parfois, dans des secteurs ou des milieux plus défavorisés, on n'est pas
portés à inscrire ses enfants. Alors, une de nos réponses à nous, c'est que le dépistage, il devrait se faire avant quatre ans.
Le dépistage devrait se faire au bas âge, là. Puis on a plusieurs exemples chez
les experts, semble-t-il, qui confirment
qu'un enfant qui est dépisté à deux ans et qui est pris en charge à trois ans,
bien, quand il va rentrer en
maternelle à cinq ans, déjà, il va être équipé pour affronter la question des
services plus adaptés à sa réalité. Mais je ne sais pas si...
M. Poulin :
...parce que vous avez une expertise incroyable à la grandeur du Québec. Est-ce
que des jeunes, qu'ils se retrouvent
en milieu défavorisé ou non, sont à l'abri de diagnostics? Parce qu'on parle
d'égalité des chances, particulièrement.
Mme Longchamps
(Lucie) : La réponse, elle est claire : Non. Puis la fragilité ne
va pas avec le code postal. Par contre, ce que je vais vous mettre de l'avant,
c'est qu'un enfant qui a une fragilité, il arrive à quatre ans puis il irait
dans une des maternelles quatre ans,
il a, quoi, 182 jours, 200 jours de classe par année? Moi, je ne suis
pas enseignante, là, je suis éducatrice. Vous le savez, quand on arrive dans un
nouveau milieu, il y a toute une adaptation : l'enfant devra s'adapter,
en plus de sa fragilité, à un nouveau groupe, à une nouvelle enseignante, à un
nouveau lieu, à traîner sa boîte à lunch, possiblement,
parce que sinon il y aurait bien des frais, aller au service de garde puis,
l'été qui suivra, à aller ailleurs parce que l'école sera fermée. Cet enfant-là qui a une fragilité, elle a été
détectée en services éducatifs, bien sûr, s'il a eu une place, bien sûr,
s'il y a eu accès. Pourquoi on voudrait déraciner cet enfant-là pour la dernière
année, croyant qu'en allant en maternelle quatre ans...
Le
Président (M. Asselin) : Mme Longchamps, je vous
remercie.
Mme Longchamps
(Lucie) : Merci.
Le
Président (M. Asselin) : On va écouter Mme la députée de
Saint-Laurent.
Mme Rizqy :
Continuez, Mme Longchamps, vous étiez sur une belle lancée.
Mme Longchamps
(Lucie) : Alors, pourquoi croire qu'en le déracinant puis en allant
dans la maternelle quatre ans cet enfant-là va tout à coup vivre différemment?
Cet enfant-là, on l'a déjà... et ce qu'on doit trouver, c'est pourquoi les
parents... Parce qu'un enfant qui a, souvent, une fragilité au Québec,
malheureusement, non, ça ne vient pas avec le code postal, mais malheureusement
parfois oui, et ça vient avec une famille qui a des fragilités également.
En centre de la
petite enfance et en responsable des services de garde en milieu familial régis
et subventionnés, il y a un lien de
proximité qui se crée, il y a une aide qui se crée, quotidienne. Ce parent-là,
il est rencontré deux fois par jour.
Ce parent-là, on fait des liens avez lui et on l'aide souvent à mieux faire
dans son rôle de parent. Cet enfant-là, il ne vient pas tout seul sur
une île, il a un village autour de lui. Donc, moi, je ne crois pas que
déraciner cet enfant-là en pensant qu'en le
mettant dans une maternelle quatre ans, ça va résoudre tous les problèmes au
Québec, bien au contraire.
Puis
je vous l'ai dit d'emblée, les sous doivent être mis préalablement. On n'est
pas contre la maternelle quatre ans, mais
pas de la façon dont elle se fait présentement, pas dans la façon que...
Certaines commissions scolaires, présentement, font des appels à
certains parents, et ça s'est vu. Il y a des endroits où on a eu des
indications, où il y a des services qui pourraient être donnés à un enfant, où
on lui a dit : Bien, tes services arriveront plus tôt si cet enfant-là va
à la maternelle quatre ans. Présentement, il se fait des choses déloyales qu'on
déplore également.
Mme Rizqy :
Continuons là-dessus, Mme Longchamps, les affaires déloyales. Parce que,
lorsqu'il a été question de déployer
les maternelles quatre ans de façon complémentaire aux services déjà existants
avec les services éducatifs, moi, je
m'attendais à ce que le ministre la compte... s'assure que le ministre de
l'Éducation et son ministère n'aillent pas piger non seulement les
enfants, mais aussi les éducatrices dans votre cour.
Mme Longchamps
(Lucie) : Et là ce n'est pas ce qui va se faire. Veux veux pas, il y a
un transvidement qui va se faire.
Mme Rizqy : J'ai
entendu dire que certains parents ont... des courriels ont été reçus par le
ministère de l'Éducation de parents
qui fréquentaient des services éducatifs, notamment en CPE, pour faire
de la publicité plus ciblée pour les inciter à fréquenter la maternelle
quatre ans parce que ça ne se bouscule pas aux portes pour les inscriptions.
Mme Longchamps
(Lucie) : On a entendu la même chose, Mme Rizqy. On a entendu la
même chose puis on a les mêmes
indications.
Mme Rizqy : Dites-moi, est-ce que, vous, vous avez pu
bénéficier, de la part du ministre Lacombe, le ministre de la Famille... est-ce que
vous avez pu bénéficier, du ministre
de la Famille, d'une publicité sur
Facebook à coup de 90 000 $
pour faire la promotion des CPE?
Mme Longchamps
(Lucie) : Non. Nous, on a défendu ce que l'on faisait en étant les
spécialistes de la petite enfance, en
mettant de l'avant la campagne 4 ans, c'pas grand, une campagne qui
fait bon train puis que les parents... Quand on explique bien tout ce qu'il y a derrière la maternelle quatre ans et ce
qui est dans le non-dit, donc la boîte à lunch, la période estivale, le congé de Noël, les congés
pédagogiques... Le parent, il ne le réalise pas, d'emblée que tous ces coûts-là
sont associés et, quand tu lui fais
le portrait clair, sans tomber dans le... tenter d'avantager un côté plus que
l'autre, le parent voit clairement où est l'avantage de son enfant.
Mme Rizqy :
J'ai eu l'occasion, moi, de voir la publicité sur Facebook pour faire la
promotion des maternelles quatre ans du gouvernement de la CAQ. Nulle part ce
n'était indiqué que les CPE, c'est 261 jours versus 182 jours. Nulle part ce n'était indiqué qu'en CPE... deux
collations, un repas fourni, alors que le parent, en maternelle quatre ans,
devra le fournir. Nulle part ce n'est
indiqué que l'été, bonne chance pour trouver un camp de jour si votre
municipalité l'offre et ils sont prêts pour l'offrir.
Bon,
vous n'êtes pas non plus avocats en protection du consommateur, là, mais
trouvez-vous que c'est transparent comme méthode de faire pour
dire : Libre choix aux parents de décider?
Mme Longchamps
(Lucie) : Moi, je vous dirais que non. Et, dans tout ce processus-là,
on ne compte pas l'été au terrain de
jeu. Admettons que, dans une certaine municipalité, oui, on mette de l'avant le
terrain de jeu, à quatre ans... puis
vous en avez probablement eu, certains
d'entre vous, des enfants de quatre ans, à quatre ans, un enfant, là, ça ne se
crème pas tout seul l'été. Et, vous
le savez, le soleil, au Québec... on les crème plusieurs fois par jour. Un
enfant de quatre ans, ça perd son chapeau au moins une fois par jour. Un
enfant de quatre ans, ça ne sait pas où ça a mis ses chaussures. Ça ne se rappelle plus, sa boîte à lunch, elle est de
quelle couleur. Puis je ne ferai pas dans le sexisme, mais principalement,
c'est un garçon, parfois tu lui
demandes : Est-ce que c'est à toi, ce chandail-là? Il ne le sait pas. Il
dit : Moi, je pense que oui. À matin, il était arrivé avec.
Une voix :
Wo! Wo! Wo!
Des voix :
Ha, ha, ha!
Mme Longchamps
(Lucie) : C'est fréquent. Écoutez, c'est sans tomber... parce que le
garçon, souvent, c'est maman qui
l'habille ou papa, puis la fille choisit plus, dans la coquetterie. Mais un
enfant de quatre ans, ça a des besoins qui ne seront pas répondus
minimalement dans les camps de jours, ça ne pourra pas.
Mme Rizqy :
Ma compréhension, c'est qu'en CPE, le maximum, c'est 80 enfants parce que
l'environnement est très important.
On a des écoles au Québec que, oui, c'est des écoles primaires à
300 élèves, mais on a d'autres écoles avec 1 000 élèves.
C'est une réalité que nous avons.
Vous,
là, vous représentez 300 000 travailleurs. Là-dedans, il doit y avoir
quand même quelques parents, j'imagine. Est-ce que vos parents que vous représentez, qui sont syndiqués chez
vous, est-ce qu'eux autres, ils ont déchiré leur chemise pour avoir des
maternelles quatre ans?
M. Létourneau (Jacques) : Moi, je n'ai rien entendu à ce compte.
Évidemment, on n'a pas fait de sondage, là, auprès de l'ensemble des travailleuses ou des travailleurs, mais disons
qu'à chaque fois que la question de la scolarisation des enfants en bas âge s'est posée... Par exemple,
dans un congrès de la CSN, moi, j'ai souvent entendu les travailleurs puis
les travailleuses témoigner... notamment, je dirais, depuis les années 90,
parce qu'avant ça ce sont les citoyens et les citoyennes
qui ont pris en charge la création des garderies populaires pour être capables
de répondre aux besoins, alors, moi, je
n'ai jamais entendu, honnêtement, là, puis ça fait 25 ans que je suis à la
CSN, dans les congrès, de militants ou militantes ou de travailleurs,
travailleurs venir nous dire : Ça n'a pas de sens. Au contraire,
développons.
J'ai même eu la chance de participer à une ligne ouverte,
récemment, sur cette question-là, puis il n'y a pas personne qui commande...
les gens de la population qui appellent, c'étaient des enseignantes, des
enseignants du primaire, secondaire qui appelaient pour dire : Nous, on a envoyé nos enfants
dans les CPE, dans les RSG, puis on l'a apprécié, puis, de grâce, mettez en
place les ressources financières pour soutenir les élèves qui sont déjà
diagnostiqués en difficulté puis qui ont de la misère à avoir une heure
d'orthopédagogue par semaine parce qu'on manque de ressources, là.
• (18 heures) •
Mme Rizqy : Moi, je
ne me suis pas promenée à New York ni en Ontario pour voir comment ça
fonctionnait, leurs maternelles
quatre ans à eux, mais je me suis promenée au Québec, puis ce que j'ai entendu
sur le terrain, c'est la chose suivante,
c'est qu'une fois qu'il y a un diagnostic en service de garde ou en CPE, c'est
la ressource qui est difficile à avoir.
Et,
Mme Longchamps, tantôt vous l'avez dit, ce n'est pas un débat de chiffres,
mais en même temps ce l'est. J'aimerais vous
amener sur un terrain... parce que moi, je l'ai quantifié, combien ça coûtait.
Pendant que certains pensent que ça
coûte 250 millions, moi, mon calcul, là, c'était le suivant, puis je ne
l'ai pas fait avec n'importe qui, je l'ai fait avec l'ancien ministre des Finances, je suis arrivée à
environ 2 milliards, parce que, oui, il y a une infrastructure, mais après
ça c'est les coûts du système. Puis
il faut savoir qu'on a environ 80 000 naissances au Québec par année,
donc 80 000 enfants en
maternelle quatre ans. Et du propre aveu, lors de l'étude de crédits, du
ministre de l'Éducation, c'est 10 600 $, un enfant en maternelle quatre ans, environ
5 500 $ pour une période de 180 jours. Si on faisait
180 jours, un enfant en CPE reviendrait à 5 500 $, mais,
si on étendait pour l'entièreté, c'est-à-dire 262 jours, on arrive à
7 090 $.
Donc,
un enfant en CPE, là, qui passe toute l'année, presque, là-dedans,
7 092 $, 180 jours en maternelle quatre ans, donc moins, pas de boîte à lunch,
10 500 $, 10 600 $ environ. Donc, on arrive environ à
1 953 000 000 $. Vous comprendrez, j'ai arrondi à 2 milliards. Ce 2 milliards,
vous, Mme Longchamps, si un jour vous étiez ministre des Finances, le
mettriez-vous en services ou dans du béton?
Mme Longchamps
(Lucie) : La réponse est claire, hein? La poser, c'est y répondre, on
le mettrait dans les services. Puis
effectivement les chiffres que vous avez portés, c'est des chiffres qui ont été
portés à notre attention. Parce que
j'ai voulu nous sortir de votre chiffre, parce que je voulais essentiellement
qu'on parle des enfants, parce que c'est la fonction principale que
j'ai, entre autres, à la fédération de la santé de la CSN, c'est de représenter
les travailleuses qui s'occupent de ces tout-petits-là. Et, dans tout ce
débat-là, on les a...
Mme Rizqy :
Oubliés?
Mme Longchamps
(Lucie) : Sans dire oubliés... probablement oubliés. On parle de
panier de services. Un enfant de
quatre ans, on ne devrait pas le mettre face à un panier de services, on
devrait le mettre face à un service qui devrait lui être donné quand il
a une fragilité.
Mme Rizqy :
Tout à fait. Et beaucoup... À plusieurs reprises, le ministre de l'Éducation a
parlé de classes disponibles, chauffées
l'hiver alors qu'elles étaient vides. Moi personnellement, quand une classe est
disponible puis qu'il y a un besoin, je
peux vous assurer qu'on a des directeurs d'école qui vont la remplir pour une
sixième année, une quatrième année. Vous comprendrez que, quand elle est vide, c'est parce qu'il n'y a pas
d'enfants dans cette école ou dans cette région administrative, alors
c'est normal qu'à ce moment-là ça ne sert pas à grand-chose d'ouvrir une
classe, là, de maternelle quatre ans.
Et j'ai regardé le
nombre d'inscriptions. On en a à certains endroits que c'est zéro, c'est deux,
trois élèves, et à d'autres endroits où est-ce que ça déborde dans le réseau de
l'éducation. Par exemple, à la commission scolaire Pointe-de-l'Île, 3 000 élèves... que nous devons trouver une
place pour l'automne. Alors, vous comprendrez que ma priorité, moi, ce n'est pas tant de trouver une classe, mais
de trouver l'élève en question puis d'offrir le service à l'élève. Alors, c'est
pour ça que le 2 milliards, pour moi, devrait toujours d'abord suivre
l'élève et non pas la classe de disponible.
M. Létourneau (Jacques) : Bien, moi, je... si vous me permettez, il faut
avoir fréquenté les écoles au cours des 10, 15 dernières années pour constater l'importance puis la nécessité de réinvestir pour les moderniser, hein,
parce qu'il y a quelqu'un qui disait
avant nous : Les écoles ont été construites à l'époque de Duplessis, là, des chaudières dans des classes de cours puis... alors donc, il y a
des besoins, là, bien «basic», là. Avant même de penser que tu vas
construire des nouvelles affaires, il y a des besoins bien «basic». Puis
évidemment il y a des besoins de personnel.
Mme Rizqy : Au
niveau du PQI, lorsqu'on
parle, justement, des besoins de base, le président du Conseil du trésor, il l'a
quand même admis, là, l'entièreté de l'argent
additionnel, seulement pour les maternelles
quatre ans... Alors, lorsqu'on parle
de 900 millions de dollars additionnels, ça s'en va pour les maternelles quatre ans. Il ne me reste que quelques
secondes. Est-ce que vous avez des personnes, des éducatrices qui ont peur de perdre leur emploi
étant donné que, si jamais la maternelle quatre ans est déployée, les
services de garde en milieu familial pourraient être à risque?
Mme Longchamps
(Lucie) : Absolument. Et l'analyse financière qui a été présentée
quand le projet de loi n° 5 est sorti,
effectivement, les responsables de services de garde en milieu familial régis
et subventionnés pourraient en faire les frais.
Le Président (M. Asselin) : Merci beaucoup. Alors, vous étiez présent depuis
le début, les gens de New York, etc., ont pu élaborer. Maintenant, on a,
pour 2 min 40 s, la députée de Sherbrooke.
Mme Labrie :
Merci, M. le Président. J'aimerais également vous remercier pour votre prise de
parole, je vais dire, enflammée. C'était très, très énergique, et merci
pour ça.
Puis,
pour les recommandations que vous avez faites aussi, je vais revenir, comme
d'autres l'on fait, sur la deuxième, enquêter sur les raisons expliquant
que 20 % des enfants québécois ne fréquentent pas un service éducatif à
quatre ans. C'est un des arguments qui est
souvent avancé par le gouvernement pour justifier ce projet-là. Puis
effectivement ce n'est pas clair du tout qu'on va réussir à les
rejoindre davantage avec le projet actuel.
Je souligne
aussi la recommandation n° 5, là, d'instaurer la gratuité pour tous les enfants
de quatre ans dans les services éducatifs. Je pense qu'effectivement, si on
veut offrir un choix réel aux parents, c'est là vers où il faut aller.
Vous avez nommé qu'un des enjeux en ce
moment, c'est le fait que les services ne sont pas là pour les parents, qu'ils
ne sont pas là quand les éducatrices
signalent des problèmes de développement avec des enfants qui sont dans les milieux de garde éducatifs. Souvent, ils
ne sont pas là non plus même quand l'enfant est rendu en milieu scolaire, hein?
Même si l'enfant a fréquenté une
maternelle quatre ans qui existe en ce moment, des fois, ils sont rendus en
quatrième année, ils n'ont toujours pas vu de spécialiste. Est-ce que
c'est quelque chose que vous constatez aussi auprès de vos membres? Vous avez
des membres en...
Mme Bénard (Mireille) : Bien, c'est quelque chose qu'on constate
auprès de nos membres, mais aussi que les parents qu'on représente... Puis la question a été posée à Jacques
Létourneau tantôt : Les parents, qu'est-ce qu'ils disent? Quand on fait ces discussions-là dans nos
instances, les gens viennent souvent intervenir en tant que parents, effectivement, et c'est ce dont ils nous
témoignent le plus, c'est les difficultés, personnellement, qu'ils ont eues à obtenir des services par
la suite et l'obligation souvent d'aller
au privé. Puis, même au privé, bon, c'est cher, mais il y a
aussi des attentes. C'est quand même assez long. Donc, le principal cri du coeur des
parents est beaucoup plus envers : Donnez-nous des services
pour nous soutenir, pour nous aider.
Mme Labrie : Donc, la priorité devrait être de plutôt réduire
les listes d'attente pour accéder à un spécialiste soit en milieu
éducatif soit en milieu scolaire?
M. Létourneau (Jacques) : Oui, puis, si vous permettez, de meilleurs
arrimages avec le réseau de la santé
et des services sociaux et tous ceux qui travaillent en santé mentale,
mais là aussi il y a eu beaucoup de compressions budgétaires ces dernières années. Mais il n'est pas rare
d'entendre des gens nous dire, quand ils ont des élèves... des enfants, pardon,
qui ont des problèmes d'apprentissage...
qu'ils vont se faire dire : J'espère que vous avez des assurances privées parce que, si vous n'avez pas d'assurance privée, vous allez attendre pendant un an
avant d'avoir un neuropsychologue qui va évaluer les difficultés de votre enfant. Donc, ça, c'est une réalité avec
laquelle on vit aujourd'hui. Mais que nous, on vive avec ça, c'est une chose, mais que les enfants, ils ne
bénéficient pas des services auxquels ils devraient avoir droit, ça, c'est beaucoup plus dramatique. Et, dans ce
sens-là, je pense que tout le monde fait pas mal consensus là-dessus.
Le
Président (M. Asselin) : Merci. On va vous permettre de rester
enflammés encore pour 2 min 40 s avec la députée de Joliette.
Mme Hivon : Oui, merci
beaucoup. Je pense
qu'on est très heureux d'être enfin dans le vif du débat. Donc, merci beaucoup d'être là.
Je
vous entendais tantôt souligner
que la politique de la petite enfance, en 1997, ça avait été une grande avancée.
Moi, ce que j'aimerais du gouvernement,
c'est justement qu'il nous dépose une politique. Parce qu'en ce moment il a
plein d'idées, il a un objectif louable d'accompagner les enfants, les
petits de la meilleure manière. Mais on a les maternelles quatre ans, on a la pseudocomplémentarité avec le
ministre de la Famille, sauf qu'on apprend, exemple après exemple, qu'il
n'y a pas vraiment de collégialité entre les
deux ministères. On nous dit qu'on va développer des places et on a le ministre
des Services sociaux, qui, lui, a tout un
programme, semble-t-il, pour accompagner le dépistage des tout-petits. Mais,
comme vous le dites très bien, c'est
une chose de dépister, mais après il faut que les services soient au
rendez-vous. Donc, j'aimerais vous
entendre, à savoir si on devrait miser là-dessus. Nous, ça fait des mois qu'on
demande un plan de déploiement et de complémentarité, on aimerait ça
l'avoir avant d'aller plus loin.
Puis
l'autre chose sur laquelle je veux vous entendre, c'est que le ministre dit
beaucoup que l'opposition s'oppose et que les groupes qui sont contre, ce sont
des lobbys. Donc, évidemment, vous êtes là uniquement pour défendre vos membres, qui sont des éducatrices, donc vous
n'êtes pas là pour le bien commun et la science. J'aimerais vous entendre par
rapport à ça, à savoir pourquoi, dans le
fond, ce ne serait pas mieux en maternelle quatre ans si on suit les
arguments : les gens sont formés, ils sont allés à l'université, il
y a des spécialistes. Alors, est-ce que vous êtes, dans le fond, un lobby
obnubilé par vos membres?
Mme Longchamps
(Lucie) : Je vais tenter
de... Mais un enfant de quatre ans, ça n'a pas la maturité, ni physiologique
ni psychologique, d'aller dans un grand groupe, d'aller à l'école. Et ça, ce
n'est pas moi qui le dis, ce sont les chercheurs Dr Chicoine, Claire Chamberland, une grande chercheure de l'UQAM. Les
enfants n'ont pas la maturité pour ça. Et, vous savez, j'aurais beaucoup de choses à dire et je vais tenter de vous le
dire en peu de mots, ce qui fait que, parfois, je m'enflamme parce que c'est un sujet qui me tient beaucoup,
beaucoup à coeur. On a souligné tout à l'heure, par des précédents, qu'ils pourraient
entrer à la maternelle quatre ans à trois ans. Vous savez, maintenant,
un enfant qui a une fragilité a possiblement aussi un problème avec ses
sphincters. Qu'arrivera-t-il s'il a trois ans, qu'il n'a pas de contrôle encore
et qu'il a encore une couche? Et on le voit
de plus en plus dans les centres de
la petite enfance, des enfants à
quatre ans encore avec une couche
parce qu'ils ont une fragilité. Donc, cet enfant-là, on va le déraciner parce
que peut-être que son parent n'aura pas fait toute l'analyse.
Puis on ne met pas en cause les parents au Québec, un parent, ça veut toujours
ce qu'il y a de mieux pour son enfant.
Le
Président (M. Asselin) : Je vous remercie beaucoup
pour la conclusion. M. Létourneau, Mme Bénard,
Mme Thibault-Larose, c'est terminé, malheureusement. Je vous remercie pour
la contribution à nos travaux.
La commission ajourne
ses travaux jusqu'à demain matin, 10 h 45, où on poursuivra nos
mandats. Merci.
(Fin de la séance à 18 h 10)