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(Neuf heures quarante-trois minutes)
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): À l'ordre, s'il
vous plaît! La commission des affaires sociales se réunit pour
l'étude des crédits du ministère de la Condition
féminine.
Sont membres de la commission: Mme Bélanger
(Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Blouin (Rousseau),
M. Bordeleau (Abitibi-Est), M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Champagne
(Saint-Jacques), M. Gravel (Limoilou), M. Lavigne (Beauharnois), Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Leduc (Fabre), M. Martel (Richelieu), M. Middlemiss
(Pontiac), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Paré (Shefford), M.
Rochefort (Gouin) et M. Sirros (Laurier).
Si nous commençons un peu plus tôt, c'est à la suite
d'une discussion avec la ministre pour pouvoir terminer un peu plus tôt,
compte tenu des engagements que certaines personnes ont cet après-midi.
Nous allons tout de suite établir les règles de jeu. Pour les
membres qui n'ont jamais assisté à cette commission, entre autres
ma collègue de Jonquière, sans vouloir être trop rigide, il
y a les notes d'ouverture de la ministre, votre réplique et, par la
suite, chaque député peut intervenir durant 20 minutes, mais en
comptant le temps de réplique de la ministre aux questions qui lui sont
adressées dans ces 20 minutes. Si on peut même le faire plus court
et plutôt revenir, je pense qu'il y a peut-être avantage, car on
échange ainsi davantage. Toutefois, au bout des 20 minutes, je devrai
vous ramener à l'ordre.
Mme la ministre, je vous cède la parole.
Exposés préliminaires Mme Denise Le
Blanc-Bantey
Mme Le Blanc-Bantey: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais
en partant présenter les dames qui m'accompagnent. Mme Wilhelmy,
secrétaire générale associée au ministère de
la Condition féminine, Mme Stella Guy, présidente de l'Office des
services de garde à l'enfance, et Mme Francine McKenzie,
présidente du Conseil du statut de la femme. Je vais y aller très
rapidement sur les réalisations du ministère, du Conseil du
statut de la femme et de l'Office des services de garde.
Le Secrétariat à la condition féminine a, au cours
de l'année 1983-1984, assumé la responsabilité, entre
autres, du groupe de travail sur la condition des femmes des communautés
culturelles. Ce groupe de travail, formé dans le cadre du CIPACC, s'est
réuni à plusieurs reprises au cours de l'année 1983-1984.
Par ailleurs, le secrétariat a en même temps continué de
participer au conseil d'administration de l'Office des services de garde
à l'enfance. Il a également participé au Comité de
surveillance de l'égalité en emploi dans la fonction publique, de
même qu'au comité portant sur la classification des
employés de secrétariat.
De plus, le secrétariat a travaillé avec le
ministère des Relations internationales à une politique relative
à la situation des conjoints des fonctionnaires affectés à
l'étranger. Il a participé aussi à d'autres comités
interministériels sur des sujets très divers: éducation
des adultes, livre blanc sur la fiscalité, implantation de la
bureautique, coordination de l'application de la Loi sur l'accès aux
documents des organismes publics et sur la protection des renseignements
personnels.
De plus, bien sûr, le secrétariat a émis des
commentaires sur différents projets de loi en provenance de
ministères sectoriels, dont, entre autres, le projet de loi sur le
cinéma et le matériel vidéo, le projet de loi modifiant le
Code du travail, le projet de loi sur la fonction publique et le projet de loi
modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse et d'autres dispositions
législatives applicables aux enfants. Il a aussi analysé les
mémoires déposés en commission parlementaire sur les
projets de réforme du droit des successions et du droit des
personnes.
Dans le cadre des mandats de la ministre déléguée
à la Condition féminine -à cette époque,
c'était encore Mme Marois -le secrétariat effectue des travaux
dans le cadre du comité économie et emploi. Il a également
participé aux travaux de la commission sur l'emploi dans le cadre de la
table de concertation sur l'électronique et l'informatique.
Le Conseil du statut de la femme, pour sa part, au cours de
l'année 1983-1984, a principalement centré ses études et
ses actions sur les questions économiques de la vie des femmes. Le forum
sur la question économique constitue la principale
réalisation
de cette période. L'événement a réuni
à Montréal, en octobre dernier, 1200 femmes de toutes les
régions, de tous les âges et de tous les milieux. La
démarche proposée a, d'abord, permis aux participantes
d'établir ensemble des constats sur les principaux aspects de la vie
économique qui les affectent, tels la production domestique, le travail
rémunéré, le plein emploi et l'insécurité
économique d'une multitude de femmes.
Il a aussi été question du développement
technologique, de l'entre-preneurship au féminin, du financement des
projets de femmes, de la consommation, de l'épargne et du pouvoir.
À partir de ces constats, elles ont pu dégager de nombreuses
pistes de solution qui leur permettraient de sortir de leur
insécurité économique. D'importants documents de recherche
ont été produits pour l'occasion et sont actuellement
disponibles, en nombre limité cependant.
Il y a bien d'autres réalisations d'importance que nous
désirons citer. Ce sont la réalisation d'un projet d'information
aux adolescentes sur les valeurs traditionnelles, sur la relation
mère-fille, leur orientation et leur sexualité; la
préparation de mémoires présentés au ministre de la
Justice sur la réforme du droit des personnes et des successions; la
formulation d'un avis au gouvernement sur les travailleuses au pourboire dans
la restauration; la préparation d'un mémoire pour la commission
parlementaire concernant le projet de loi sur les accidents du travail et les
maladies professionnelles; la production bimensuelle de la Gazette des femmes,
distribuée gratuitement à quelque 30 000 femmes; le maintien d'un
service téléphonique de renseignement sans frais d'appel pour
toutes les Québécoises, la présence en région
d'animatrices pour supporter l'action des groupes de femmes organisées
ou en voie de l'être et le maintien d'un centre de pointe en
documentation sur la condition féminine.
Aussi, en mars 1984, le Conseil du statut de la femme a
déposé chez l'Éditeur officiel - cela devrait sortir sous
peu - un document, intitulé Les femmes, ça compte, profil
socio-économique des Québécoises, qui devrait nous donner
des données - permettez-moi la répétition - sur la
participation des femmes à la main-d'oeuvre, sur les
caractéristiques de leur emploi, entre autres, de même que sur
leurs revenus. Il y a beaucoup d'autres statistiques, semble-t-il, que devrait
contenir ce document. On a aussi produit de nombreux documents d'information
sur la condition féminine, sur les lois et sur les moyens pour
protéger ces droits.
En ce qui concerne l'Office des services de garde, j'aurai l'occasion
d'y revenir un peu plus tard dans mon discours. Par ailleurs, avant de traiter
les sujets sur lesquels nous souhaitons attirer votre attention d'une
façon particulière, je désirerais souligner ici l'effort
considérable fourni par les répondantes à la condition
féminine à l'intérieur de leur ministère respectif.
Leur travail en est un d'équipe et les gains remportés par les
répondantes sont tributaires tant de leurs efforts personnels que de la
considération que chaque ministère accorde à l'avancement
de la condition de la femme dans la société
québécoise. Je dois dire là-dessus que ce n'est pas
toujours égal dans tous les ministères.
C'est à partir de cette constatation que nous avons fini par
considérer que, au-delà de l'effort fourni par les
ministères et organismes, chacun d'entre eux devrait rendre compte de
l'intérêt qu'il porte à la condition féminine. C'est
à cette condition que nous pourrons envisager une évolution
réaliste de la participation des femmes à notre
société. Et voilà bien ce que nous visons: une conscience
sociale grandissante et aiguisée à l'égard de toutes les
femmes du Québec.
J'en viens maintenant aux sujets principaux qui ont été
retenus en vertu de leur ampleur et de leur importance, et aussi parce qu'ils
couvrent une bonne partie, sinon l'ensemble des réalisations de cette
dernière année.
Tournons-nous, d'abord, vers le domaine de l'éducation. Pour ce
qui est de notre intervention en milieu scolaire auprès des jeunes, je
vous signale que la désexisation des manuels scolaires se poursuit. Bien
plus, le ministère de l'Éducation élargit cette
opération à l'ensemble du matériel didactique et voit
à l'élimination de stéréotypes en vue de s'assurer
que, dans le contenu du matériel utilisé, volumes d'histoire par
exemple, on fasse référence à des modèles de femmes
qui correspondent à la réalité présente et
fournissent des exemples de vie et de détermination
féminines.
Concernant cette formation et cette socialisation, le programme Pareil
pas pareille, fondé sur la collaboration du Conseil du statut de la
femme et de trois ministères dont les Affaires culturelles, les Affaires
sociales et l'Éducation, poursuit son objectif de sensibilisation en vue
de désexiser l'éducation des jeunes de 0 à 6 ans. Par
ailleurs, un dépliant et une affiche réalisés par le
Conseil du statut de la femme en collaboration avec le ministère des
Affaires sociales ont été joints à un vidéo
déjà existant. Ce dernier s'adresse aux étudiants et
étudiantes et leur propose des nouveaux modèles non sexistes, en
particulier en ce qui touche le langage et le partage des tâches
quotidiennes. De plus, une recherche a été entreprise par le
Conseil du statut de la femme, en collaboration avec le service de la condition
féminine au ministère de l'Éducation du Québec, sur
l'identité sexuée et sur l'apprentissage des rôles
homme-
femme par les enfants. Ensuite, au niveau secondaire, le programme ou
jeu Vire-Vie, qui a comme objectif de sensibiliser les adolescents et les
adolescentes à l'importance de leur choix de carrière et de les
rendre plus réalistes face à la signification du mariage dans
leur avenir, sera relancé pour la période d'accueil au mois
d'août prochain. Je rappelle que ce jeu est le produit de l'initiative,
encore une fois, du conseil et qu'il a été pris en charge par le
ministère de l'Éducation en 1980.
Il est également important de vous signaler qu'un nouvel
instrument d'information sortira tout probablement en novembre 1984. Il
consistera en un vidéo basé sur des témoignages de jeunes
travailleurs ayant participé à des programmes de travaux dits non
traditionnels et il aura pour but de sensibiliser les jeunes, et surtout les
filles, à des plans de carrière tout en rendant plus accessible
l'information sur les métiers non traditionnels. Nous devons, encore une
fois, ce nouvel instrument à l'initiative du conseil qui assumera une
partie du financement en collaboration, cette fois-ci, avec le ministère
de la Science et de la Technologie. La production du document, par contre, se
fera en collaboration avec le ministère de l'Éducation.
Le gouvernement du Québec était conscient qu'une politique
d'éducation chez les jeunes devait nécessairement être
complétée et améliorée par une politique
d'éducation des adultes. Cette politique amorcée depuis quelques
années vient de prendre un nouvel élan avec la sortie d'une
nouvelle politique d'éducation des adultes. Cette nouvelle politique
apporte des changements importants qui affecteront le ministère de
l'Éducation, spécialement au niveau du régime actuel des
prêts-bourses. Ces changements tiennent compte de la situation
particulière des étudiants mariés, des personnes ayant
charge d'enfants et des bénéficiaires d'aide sociale. Ces
changements, devrais-je dire, "tiendront compte", parce qu'ils ne sont pas tous
arrivés encore, malheureusement.
Les membres de cette commission ont sûrement pris connaissance
aussi de la politique lancée: un projet d'éducation permanente.
Le gouvernement du Québec, par cette politique, est fermement
résolu à mettre en oeuvre des moyens importants pour que cette
nouvelle politique d'éducation des adultes serve de levier à la
promotion sociale et professionnelle des femmes. Ainsi, tant la modification du
système de prêts-bourses que l'augmentation des places en service
de garde et les interventions en termes d'orientation scolaire et
professionnelle constituent des mesures de soutien considérables qui
joueront comme facteurs de redressement en faveur des femmes. La politique
prévoit également, sur une base régionale,
l'établissement de structures d'accueil souples et réceptives
où les femmes comme les hommes pourront prendre la mesure exacte de
leurs acquis et de leurs besoins personnels et professionnels, et pourront
trouver des orientations prometteuses vers des institutions et des programmes
mieux adaptés à leurs goûts et à leurs aptitudes. Un
des points majeurs de la politique est la mise en place d'un système
efficace de reconnaissance des acquis de formation. Nul doute que
l'élaboration de ces instruments ne réponde à des attentes
pressantes des femmes qui pourront ainsi voir reconnues leurs
expériences de vie comme source de savoir.
L'éducation doit nécessairement aboutir à la
participation au marché du travail. C'est là notre conviction. Je
me réjouis donc particulièrement de l'intention du gouvernement
de réserver des crédits aux institutions et entreprises dont les
plans d'action viseront l'intégration des femmes dans des secteurs non
traditionnels ou offriront aux femmes un recyclage ouvrant sur des
métiers ou professions d'avenir.
Par ailleurs, dans le contexte du plan de relance du gouvernement du
Québec, le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme a mis sur
pied un programme de bourses d'affaires aux jeunes entrepreneurs et un service
d'accueil pour les femmes entrepreneurs. Ce service, qui verra, d'abord,
à assurer la participation des femmes au programme de bourses
d'affaires, aura aussi comme mandat général de développer
et de proposer des stratégies et des outils propres à supporter
et à promouvoir l'entrepreneurship féminin dans l'entreprise. Le
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu,
pour sa part, a mis sur pied des programmes, comme vous le savez, de travaux
communautaires, de stages en milieu de travail et de rattrapage scolaire. Parmi
les objectifs spécifiques de ces mesures, on précise qu'on doit
viser dans chaque région une participation des hommes et des femmes qui
soit proportionnelle à leur présence dans le nombre total des
bénéficiaires admissibles dans la région.
Enfin, l'encouragement à l'entrepreneurship va de pair avec une
représentation féminine croissante à tous les niveaux de
la société québécoise. Cette augmentation de la
représentativité des femmes, tant désirée sur le
plan politique à l'Assemblée nationale, dans les
municipalités, dans le milieu scolaire et dans les syndicats, entre
autres, continue à se concrétiser dans les faits, bien que cette
évolution soit, malheureusement, encore trop lente. L'important est
qu'elle persiste et qu'elle continue. Nous sommes et serons de plus en plus
attentives à un avancement de la condition féminine dans
l'ensemble de la société.
Par ailleurs, le ministère de la Science et de la Technologie
poursuit des objectifs d'aide à l'enseignement supérieur. Il
étudie la possibilité de création de nouveaux centres de
recherche appliquée et de développement du design
québécois. À l'intérieur des mesures qui seront
développées sous chacun de ces chapitres, le ministre s'est
engagé non seulement à tenir compte de la présence des
femmes, mais également à prendre des moyens spéciaux pour
la stimuler. J'espère que nous aurons bientôt des nouvelles
là-dessus.
De plus, en regard des changements technologiques évidents, la
ministre déléguée à la Condition féminine a,
en mai 1983, participé au kiosque sur les femmes, la science et la
technologie au Salon de la science et de la technologie. Ce kiosque a
été tenu conjointement, bien sûr, avec le ministère
de la Science et de la Technologie. Dans le but de favoriser une concertation
avec les groupes de femmes sur ce sujet, la ministre a convoqué, en juin
1983, une trentaine d'intervenantes, chercheuses, représentantes de
groupes de femmes et de syndicats, pour connaître la position des femmes
face aux changements technologiques. Des contacts soutenus ont
été créés avec des porte-parole des femmes dans ce
dossier.
Je tiens également à souligner la participation de la
ministre déléguée à la Condition féminine au
comité ministériel sur l'électronique et l'informatique et
les interventions qui ont été nécessaires pour
réserver un siège à l'intention de deux associations de
femmes à la conférence sur l'électronique et
l'informatique, soit la Fédération des femmes du Québec et
le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au marché du
travail.
Dans un autre ordre d'idées, j'aborde maintenant un sujet non
moins d'actualité, soit le retrait préventif de la femme en
milieu de travail. Un comité de travail, composé du
secrétariat, de la Commision de la santé et de la
sécurité du travail, du ministère de la Main-d'Oeuvre et
de la Sécurité du revenu, a été mis sur pied en
septembre 1983 pour revoir les dispositions concernant le retrait
préventif de la femme enceinte et de la femme qui allaite, ainsi que les
modalités d'application. Ce comité désire, de plus,
suggérer certaines modifications à la Loi sur la santé et
la sécurité du travail. À l'hiver 1983, je faisais
parvenir au président de la CSST un document de réflexion sur
l'accessibilité au retrait préventif et sur l'impact d'un tel
programme sur la situation générale des femmes. Je suis sensible
aux inquiétudes des travailleuses et des intervenantes en santé
au travail et particulièrement aux directives qui auraient pour effet de
restreindre l'accessibilité au retrait préventif. Aussi, le
comité de travail que j'ai cité plus haut devra déposer un
rapport à cet effet en mai prochain.
Je rappelle, par ailleurs, des propos que j'ai tenus récemment,
à savoir que la CSST prévoit désormais certaines
règles permettant de mieux évaluer la conjugaison des facteurs
relevant de la condition médicale personnelle de la travailleuse et des
conditions du poste de travail. Une meilleure protection pourra être
fournie aux femmes dans la mesure où celles-ci seront mieux
informées. À cet égard, sont distribuées des
brochures tirées à 20 000 exemplaires, ainsi qu'un guide
tiré à 250 000 exemplaires décrivant les démarches
que la travailleuse enceinte ou qui allaite devra suivre pour se
prévaloir de son droit de retrait préventif. Les brochures et le
guide seront disponibles en plusieurs langues, soit en anglais, en
français, en grec, en italien et en portugais.
En somme, pour résumer ce chapitre, je considère que la
consolidation du programme du retrait préventif pour la travailleuse
enceinte ou qui allaite constitue une des pièces maîtresses d'un
ensemble de politiques visant à garantir aux Québécoises
le droit à la maternité et le droit au travail. D'autres
réalisations, non moins importantes au cours de l'année
1983-1984, portent sur la violence faite aux femmes. Le 16 février de
cette année, j'annonçais avec mon collègue de la Justice,
à titre de ministre déléguée à la Condition
féminine, la sortie d'un guide d'intervention dans les cas d'agression
à caractère sexuel. Le Conseil du statut de la femme a vu
à la finalisation et au lancement de ce protocole médical pour
les victimes de viol, en collaboration avec le ministère de la Justice,
le ministère des Affaires sociales et la Corporation des médecins
du Québec. Le guide d'intervention assurera à la victime un
accueil empathique et tous les soins requis par son état où
qu'elle soit au Québec. De plus, il facilitera les démarches
judiciaires lorsque la victime décidera de porter plainte contre son
agresseur. En outre, le guide sensibilisera les milieux médicaux,
communautaires et juridiques pour leur faire mieux comprendre les victimes
d'agression sexuelle et leur besoin de réconfort. Ce guide est
maintenant distribué par le ministère de la Justice et les
principaux centres d'hébergement. (10 heures)
Le ministère des Affaires sociales a aussi
développé une politique dans le domaine de la violence familiale
et entend jouer un rôle plus considérable. Son
intérêt peut se traduire par l'aide monétaire accrue qu'il
apportera au niveau des subventions à ces centres et à ces
maisons. Permettez-moi de donner ici un bref aperçu de
l'évolution de la situation au point de vue des montants alloués,
par exemple, à l'augmentation des centres depuis 1977. En 1977, une
maison
était subventionnée pour un montant de 100 000 $, alors
qu'en 1983-1984 47 maisons d'hébergement pour femmes victimes de
violence sexuelle sont subventionnées, pour un montant de 3 594 000 $.
J'ajoute aussi que le nombre de maisons et de centres d'aide aux victimes de
violence est passé à 71. Il s'en suit, effectivement, une
augmentation de places qui étaient de 600 en 1982-1983 et qui passent
à 687 en 1983-1984. Cette augmentation s'accentuera au cours de
l'année qui vient puisque plusieurs projets sont à l'étude
et seront mis en place. On me dit qu'il y a environ une dizaine de projets
à l'étude.
Pour vous donner une idée de l'ampleur de cette politique,
j'ajoute que les maisons subventionnées par le ministère des
Affaires sociales ont accueilli, en 1981-1982, 5537 personnes, pour un total de
61 307 jours d'hébergement. En 1982-1983, ces maisons ont reçu
2975 enfants et 3357 femmes, donc un total de 6332 personnes
hébergées. Ces chiffres se résument à 79 309 jours
d'hébergement. Nous sommes conscients que tout est loin d'être
fait dans ce domaine. Nous devons nous assurer, entre autres, que le
réseau s'étendra dans toutes les régions du
Québec.
Toujours sur le même sujet, je vous fais part d'autres programmes
qui seront mis sur pied à la suite d'enquêtes effectuées
dans les écoles, notamment. Une enquête de la CEQ, par exemple,
fut menée auprès de 2200 jeunes filles au Québec, des
niveaux primaire et secondaire, dans le but de mesurer l'ampleur de la violence
sexuelle vécue par nos filles dans les écoles à partir de
l'intimidation jusqu'à l'agression par actes ordinaires ou violents. Ces
informations recueillies, la CEQ prévoit élaborer avec le
ministère de l'Éducation des stratégies de sensibilisation
auprès des membres de la CEQ et auprès des jeunes filles. Des
actions, tant au niveau de la prévention qu'au niveau de la correction
de situations, seront prises. Pour clore ce sujet, je désire souligner
l'apport important d'un nombre croissant de femmes qui, à travers
plusieurs associations et même en dehors de structures définies,
dénoncent cette violence faite aux femmes et encouragent, par leurs
actions, l'élimination et la diminution de cette violence.
Je vous entretiendrai maintenant d'un dossier dont je suis très
fière d'avoir la responsabilité, d'une part, parce qu'il est en
soi extrêmement vivant et, d'autre part, parce que chaque
amélioration qu'on y apporte produit des résultats
immédiats, ce qui est gratifiant, contrairement à certains autres
dossiers, qui de par leur essence, ont une évolution plus lente. Il
s'agit, vous l'avez compris, des services de garde à l'enfance. Je vous
informerai donc des réalisations les plus marquantes de l'année
1983-1984. En soi, cette année aura été importante pour
l'évolution des services de garde au Québec. Les
événements qui ont eu cours sont des indications claires que
l'office est sorti de sa période d'implantation, s'est donné un
rythme de travail ambitieux et entend exercer ses fonctions selon les principes
d'une saine gestion.
En juin 1983, les membres de l'office adoptaient des orientations
générales fixant ainsi les premiers éléments d'une
politique de services de garde. Il est à prévoir que certains
principes de ces éléments se retrouveront à
l'intérieur de la politique familiale, assurant ainsi une
cohérence essentielle entre ces deux politiques. En septembre, trois ans
après la création de l'office, le gouvernement adoptait le
règlement sur les services de garde en garderie. À cette
même période, l'office publiait, dans un document intitulé
Situation actuelle et perspectives de développement des services de
garde à l'enfance au Québec 1983-1988, son plan quinquennal pour
le développement et la consolidation des services de garde au
Québec. Avec le règlement, l'office a maintenant en main un outil
majeur pour s'assurer qu'une qualité de services soit dispensés
aux enfants dans tous les services de garde en garderie. Avec une planification
à long terme à la base de son action, il s'assure de minimiser
les erreurs possibles dans l'attribution de nouvelles places de garde avec
permis. Il est également en mesure de mieux faire connaître
à la population ses intentions.
L'office a accordé une trentaine de permis pour l'ouverture de
garderies et a ajouté des places subventionnées dans une
vingtaine d'autres, pour un total, au 1er mars 1983, de 1458 places
subventionnées. À ce nombre s'ajoute 1232 autres places qui
seront opérationnelles d'ici au 1er septembre 1984. Le nombre de places
aménagées en garderie au cours de l'année 1983-1984
s'élève à 2690. À ce nombre, il convient d'ajouter
les 432 places non subventionnées ouvertes depuis le 1er
avril 1983, ce qui représente 13 garderies.
Du côté des agences en milieu familial, 417 nouvelles
places ont été ajoutées au réseau. Le bilan de
l'expansion se situera, par conséquent, autour de 3000 places pour la
dernière année.
Consolidation et redressement. L'attribution de subventions de
relocalisation, réaménagement, dépannage, logement, de
maintien des pouponnières et d'intégration des enfants
handicapés a permis d'assurer la vitalité du réseau, bien
que la situation financière des garderies reste précaire, nous en
convenons. Notons que 49 garderies ont eu recours à une subvention de
dépannage pour arriver à joindre les deux bouts. Cela
représente 10% du réseau. La subvention pour recours à un
conseiller en gestion a été
attribuée à neuf garderies ayant à faire face
à des problèmes majeurs relativement à la mise en place de
sytèmes comptables, d'organisation au niveau du conseil d'administration
ou encore d'évaluation de solutions pouvant entraîner des
coûts excessifs pour la garderie. Exemple: relocalisation à cause
d'une charpente dangereuse.
Les services aux citoyennes et aux citoyens. D'autre part plusieurs
actions ont été posées par l'office pour aider les
services de garde existants ou pour humaniser les services à la
clientèle. Une campagne publique de sensibilisation a été
effectuée dans trois régions du Québec:
Montérégie, Bas-Saint-Laurent-Gaspésie et Estrie. Elle
s'est accompagnée de la participation aux expositions régionales
de Sherbrooke et de Rimouski. Des efforts ont été consentis pour
doter les personnes oeuvrant dans les services de garde d'outils de travail et
d'ouvrages de référence. Mentionnons la préparation d'un
guide d'élaboration de programmes d'activités en garderie, la
révision et la réédition en trois volets de la
série La garderie, une expérience de vie pour l'enfant, la
réalisation d'un cahier éducocoop pour la tenue de sessions de
sensibilisation à l'implantation de services de garde en garderie sans
but lucratif et la diffusion d'un répertoire préliminaire des
recherches sur l'enfance préscolaire au Québec. Un vidéo,
intitulé Cela nous regarde, une vue d'ensemble des services de garde au
Québec, a aussi été produit en collaboration avec le
ministère des Communications. Deux nouveaux dépliants ont
été ajoutés à la série: Ouvrir une garderie
et La garde en milieu familial. Enfin, le guide-répertoire Où
faire garder nos enfants? a été mis à jour et
distribué largement.
Un intérêt grandissant pour la question des services de
garde se manifeste dans la population et s'exprime par des demandes accrues. Au
seul titre des renseignements téléphoniques, l'office est
passé cette année à un volume de 13 803 appels. Au
chapitre des subventions, en vertu de l'article 13 de la Loi sur les services
de garde, le titulaire d'un permis, sauf une corporation municipale et une
commission scolaire ou une corporation de syndic, doit au plus tard le 30 juin
de chaque année remettre à l'Office des services de garde
à l'enfance un rapport financier pour l'exercice financier
précédent. Pour l'exercice 1982-1983, toutes les garderies
subventionnées et 60% des garderies non subventionnées l'ont
soumis. L'office a uniformisé le rapport financier des garderies et
exige, pour tout bénéficiaire de plus de 10 000 $ de subventions,
que ce rapport soit rédigé par un comptable public. La
fiabilité et la standardisation des informations contenues dans les
rapports financiers permettent maintenant à l'office d'effectuer par
informatique l'analyse de la situation financière vécue par les
garderies au Québec.
En 1982, l'office avait publié des outils de travail visant
à faciliter les opérations financières des garderies.
Cette année, c'est à l'intention des promoteurs de nouveaux
services que des ateliers en planification budgétaire et en
comptabilité ont été conçus. Ces ateliers,
accompagnés des documents de support, ont pour but de sensibiliser les
promoteurs de garderies à l'importance d'une saine gestion et à
leur fournir des moyens pour y arriver. L'office également a
donné une cinquantaine de sessions de sensibilisation aux nouveaux
règlements. Le renouvellement des permis des 550 garderies et des 27
agences, renouvellement qui se poursuivra jusqu'à la fin de mai 1984, a
aussi fait l'objet de sessions d'information. L'office a également
amorcé tout un travail au sujet de la santé dans les services de
garde. Pour ce faire, il a formé un groupe de tâche avec des
représentants de départements de santé communautaire et de
centres locaux de services communautaires. Dans le cadre des travaux
d'élaboration d'une politique des locaux dans les services de garde, le
gouvernement a adopté en juillet dernier un volet de cette politique,
soit celui concernant l'accessibilité à des locaux dans les
édifices publics.
Le rapport annuel 1983-1984 explicitera davantage les travaux
effectués par l'office durant l'année qui vient de
s'écouler. Cette présentation n'avait pour but que de signaler
quelques-unes de ses réalisations. Celles-ci illustrent, je pense bien,
le dynamisme de l'organisme qui entreprend l'année 1984-1985 avec de
nombreux projets dont l'élaboration d'une politique globale des services
de garde et la révision éventuelle de la politique de financement
des services.
Je termine donc sur cela. Je vous remercie. Bien sûr, j'attends
vos commentaires et vos questions. Mes collègues participeront à
vous informer du mieux possible.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Merci, Mme la ministre.
Comme vous en avez fait une lecture assez rapide, seriez-vous prête
à déposer le document que vous avez lu pour qu'il puisse
être distribué?
Mme Le Blanc-Bantey: Ce sera très difficile de le
déposer. C'est un document de brouillon où j'ai enlevé des
choses, j'ai ajouté des notes, c'est tout griffonné.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Bon, d'accord. Cela va.
À ce moment-là on aura le journal des Débats, de toute
façon, mais cela nous aurait permis de nous y référer pour
ne pas revenir inutilement sur certaines
questions. Alors, je vous remercie et je passe la parole à Mme la
députée de Jonquière.
Mme Aline Saint-Amand
Mme Saint-Amand: Merci, Mme la Présidente. Il est bien
clair que j'aurais personnellement aimé, Mme la ministre, prendre
connaissance du volumineux dossier dont vous venez de faire la lecture. Ma
première constatation est peut-être de dire que, bien sûr,
il y a eu des pas de faits dans la condition féminine, mais ils ne se
sont sûrement pas faits aussi rapidement que le débit avec lequel
vous nous avez fait part de votre document.
Mme Le Blanc-Bantey: Parce que j'avais peur que ce soit trop
long. Vous auriez dû m'arrêter.
Mme Saint-Amand: C'était effectivement long. Cela nous a
vraiment empêchés, de prendre entièrement connaissance, du
moins autant qu'on aurait souhaité le faire, des réalisations de
votre ministère.
Mme Le Blanc-Bantey: À moins que je ne recommence.
Mme Saint-Amand: Je vous en prie, épargnez-nous cela, sauf
que j'aimerais, si c'est possible, répéter la demande de Mme la
présidente, à savoir qu'on puisse avoir ces données
dès que ce sera possible pour vous de le faire, afin qu'on puisse
ressortir l'essentiel des propos que vous avez tenus et qu'on puisse en prendre
plus ample connaissance.
Je vais, quand même, relever certaines choses qui ont
été passées sous silence ou dites si rapidement. Par
exemple, en ce qui concerne la santé des femmes, on en a fait peu
état dans le document que vous venez de lire.
Mme Le Blanc-Bantey: C'est vrai.
Mme Saint-Amand: II y a certains aspects de la santé des
femmes qui ont été mis en lumière depuis un certain temps.
Je vais également faire des commentaires sur la politique des maisons
d'hébergement pour les femmes violentées. Sur le recouvrement des
pensions alimentaires, a-t-on réussi à savoir de quelle
façon ces pensions sont récupérées par les femmes
qui sont en droit de les obtenir et on sait avec quelles difficultés
dans certains cas?
La pauvreté chez les femmes est un de mes soucis primordiaux, au
moment où l'on se parle, dans la condition féminine. Vous avez,
bien sûr, effleuré le sujet. En tout cas, c'est ce que je retiens
de votre propos de tout à l'heure. Quand on sait que des études
ont été publiées qui font très largement mention du
grand état de pauvreté dans lequel on retrouve les femmes
majoritairement rendues vers l'âge de 55 ans, cette situation
mérite qu'on s'y arrête de façon très
sérieuse. Il y a aussi le travail à temps partiel, non seulement
dans la fonction publique, mais dans l'industrie, qui est une autre de mes
préoccupations constantes. Ensuite, les femmes et leur maternité.
On sait qu'il y a des études ou, du moins, des réflexions qui se
font au ministère de l'Éducation, mais cela
m'intéresserait de savoir quand ces réflexions aboutiront ou
qu'on accouchera d'un document qui nous permettra de vraiment voir où le
gouvernement actuel veut aller dans ce secteur.
Si vous me le permettez je parlerai la santé des femmes. Un point
qui a été mis en lumière dernièrement par une
recherche effectuée par trois femmes de l'Université de
Montréal et qui a été publiée, d'ailleurs, dans la
revue Carrefour, des Affaires sociales, édition d'hiver, est
l'alcoolisme: les femmes et l'alcoolisme. Probablement que c'est le nouveau
contexte social de la condition féminine qui nous amène ce
phénomène-là, mais on retrouve de plus en plus de femmes
touchées par le problème de l'alcoolisme. On est même
porté à se demander, à la blague, du moins je le souhaite,
si c'est aussi cette forme d'égalité que les femmes souhaitent
avoir quand on parle d'accès à l'alcool ou aux problèmes
vécus par l'alcool. Cette étude a mis en lumière que la
population à risque se retrouve parmi les femmes les plus jeunes, de
même que celles qui vivent seules et aussi celles qui ont un emploi
rémunéré et habitent les grands centres. Cela correspond,
bien sûr, au mouvement sociodémographique de la population
féminine et à l'arrivée d'une nouvelle cohorte de femmes
ayant atteint l'âge légal de fréquenter les bars. On
s'aperçoit que, si certaines ont tendance à se diriger vers les
drogues, douces ou non, certaines autres semblent de plus en plus être
affectées par le problème de l'alcoolisme. Est-ce un choix ou une
nécessité? Est-ce une nouvelle béquille? Chez certaines
catégories de femmes, on est en droit de s'interroger à ce sujet.
Je me demande ce que la ministre a fait dans ce domaine au niveau, sinon de la
réflexion, du moins des interventions, en tout cas, de la
préparation d'un dossier qui pourrait être très
sérieux, qu'on pourrait étudier plus attentivement. (10 h 15)
On a observé aussi un taux de plus en plus élevé de
grandes buveuses chez les chômeuses. Comme les femmes ont
été extrêmement affectées depuis les
dernières années, les années de récession qu'on a
traversées et dont on n'est peut-être pas
tout à fait sorti, et qu'elles ont été grandement
frappées par le taux de chômage, on en retrouve de plus en plus
qui se servent aussi de l'alcoolisme comme d'une mesure compensatoire
peut-être, si je peux me permettre l'expression. On en retrouve aussi
beaucoup chez celles dont la scolarité, le statut professionnel - soit
leur satut ou celui de leur mari - est nettement plus élevé que
la moyenne.
En ce qui concerne les maisons d'accueil, les maisons
d'hébergement pour les femmes battues, vous nous avez mentionné
tout à l'heure une légère augmentation de places. De plus
en plus de régions tentent de mettre sur pied ces programmes
d'hébergement et d'accueil de femmes violentées. De plus en plus
on tente d'ouvrir des maisons d'accueil qui pourront également
accueillir les enfants de ces femmes.
Quelles sont les mesures que le gouvernement ou la ministre a
l'intention de mettre de l'avant dans le but de favoriser de plus en plus
l'ouverture de ces maisons d'hébergement qui sont sollicitées de
plus en plus et qui répondent à un besoin plus marqué
depuis que les femmes ont accepté le fait, d'abord, qu'elles ont le
droit et qu'elles ont surtout le devoir, d'abord envers elles, de sortir d'une
maison où elles sont maltraitées physiquement, sinon autrement,
et d'amener aussi leurs enfants? Il faudra voir jusqu'à quel point le
gouvernement actuel est prêt à donner un coup de main aux
régions qui veulent ouvrir de semblables maisons.
Je vous ai parlé tout à l'heure de l'état de
pauvreté chez les femmes de 50 ans et plus. C'est un problème qui
est de plus en plus mis en lumière parce que les femmes ont appris
à se confier. Certaines vivent des situations vraiment dramatiques et
peut-être que les députés de sexe féminin vont en
rencontrer davantage que nos collègues masculins de l'Assemblée
nationale n'en ont vu au cours des dernières années.
En ce qui concerne ma très jeune expérience de
députée, j'ai été appelée à recevoir
de nombreuses femmes dans un état de pauvreté vraiment
incroyable. On sait que, rendues à l'âge de 50 ans ou 55 ans, les
femmes ont donné l'ensemble de leurs belles années, de leurs
jeunes années et aussi de leurs énergies parmi les plus fortes,
à élever une famille et à permettre à leur mari
d'accumuler certains biens: maison, chalet, voiture, statut social avantageux
dans certains cas, sans jamais prendre en considération que cette femme
qui se retrouve au foyer n'a aucune forme de revenu. Certaines en sont à
quêter encore 7 $ pour aller se chercher une paire de bas. Il y a encore
des situations aberrantes. Il ne faut pas sous-estimer le contexte actuel
malgré les progrès qui ont été faits.
On sait qu'à cet âge-là aussi certains hommes se
sentent rajeunir, se sentent reverdir et ont le goût d'avoir une jeune
maîtresse, sinon une nouvelle jeune épouse. Ces femmes sont, dans
la plupart des cas qui nous sont mentionnés, abandonnées par leur
mari et se retrouvent vraiment tout à fait démunies, sans aucune
espèce de ressource. Elles n'osent pas se tourner vers leurs enfants
pour ne pas créer de conflit familial. Elles se retrouvent tout à
fait dépourvues.
Certaines, en tout cas la majorité de ces femmes, sont
très affectées intérieurement, d'abord, en raison de leurs
sentiments. Elles n'en aiment pas moins leur mari pour autant dans bien des
cas, même si la rancune est là. C'est une situation difficile
à traverser pour ces femmes. Il faut absolument trouver une
façon, au moins, de les soulager financièrement, sinon de mettre
en place toutes les mesures visant à améliorer leur condition
financière.
Depuis de nombreuses années, le gouvernement prétend se
pencher sur l'état de pauvreté des femmes de cet âge. Le
gouvernement nous répète continuellement qu'il est à
étudier la réforme des régimes de pension ou des mesures
incitatives de façon à trouver une manière de
rémunérer les femmes au foyer, les travailleuses au foyer comme
on les appelle, mais de plus en plus on vit ces situations qui sont
dramatiques. Je ne vais pas relever les commentaires de la semaine
dernière à l'Assemblée nationale, mais, quand on voit le
peu de place qu'occupe la condition féminine dans les
préoccupations du premier ministre, on se demande jusqu'à quel
point les réflexions qui peuvent être amenées au Conseil
des ministres lorsque, je suppose, vous en discutez, on peut les prendre en
considération et on peut les prendre au sérieux.
Il ne faut pas attendre. On n'aime pas voir les soulèvements, on
n'aime pas voir les protestations et les femmes sont probablement les
dernières à protester, mais un jour on assistera à un
mouvement tragique et il ne faut pas attendre d'être arrivés
là. Il faut agir immédiatement, tout mettre en oeuvre pour que le
travail des femmes au foyer, des travailleuses au foyer comme on les appelle,
puisse enfin être reconnu comme étant un apport économique,
sinon au produit national brut, au moins au revenu familial et qu'on leur
accorde tous les droits nécessaires. Parce que, même si on leur a
reconnu certains droits sur la maison familiale, dans les faits, cela ne se
produit pas comme cela lorsque la femme doit quitter le foyer ou se voit
abandonnée par son mari. Alors, il faut prendre toutes les mesures pour
assurer une certaine sécurité financière aux femmes ayant
atteint cet âge.
J'aimerais aussi m'attarder au travail à temps partiel.
J'espère que je ne serai pas trop longue. Le travail à temps
partiel
semble une mesure favorisée par le gouvernement dans la fonction
publique et certaines entreprises semblent de plus en plus mettre en
application la formule du travail à temps partiel. Il est bien sûr
que les syndicats ont protesté très fortement contre le travail
à temps partiel pour certaines raisons que je ne vais pas discuter ici
sauf qu'il y en a quelques-unes quand même qu'il faut mettre en
lumière quand on sait que, par exemple, un tiers des nouveaux emplois
sont des emplois à temps partiel, que 72% des travailleurs à
temps partiel sont des femmes et que 24% des employées féminines
travaillent à temps partiel.
Les femmes qui souhaitent un revenu additionnel, dans la majorité
des cas, c'est pour les aider à boucler le budget familial. Est-ce que
ce n'est pas les faire entrer dans un nouveau ghetto que de leur assurer
uniquement un emploi à temps partiel? S'il répond à
certains besoins du moment, à l'époque où la femme a de
jeunes enfants à la maison et où elle doit se partager entre les
corvées domestiques et un emploi rémunérateur, si c'est
avantageux pour elle à une certaine époque de sa vie, comment
l'en sortir au moment où elle décide de revenir sur le
marché du travail à plein temps? On sait que le travail à
plein temps offre très peu de sécurité aux femmes, par
exemple, très peu de chances de promotion, très peu de chances de
participer à des stages de formation, très peu de
sécurité d'emploi et aucun ou presque pas d'avantages sociaux.
Ces femmes sont cloisonnées dans les emplois à temps partiel et,
lorsqu'elles souhaitent trouver un emploi à plein temps, il est
impossible pour elles de le faire parce que l'entreprise s'est habituée
à fonctionner avec ce type d'emploi et ne veut pas créer de
nouveaux postes à plein temps. Toutes les opportunités qui sont
offertes en postes à plein temps le sont généralement en
dehors de ceux qui occupent déjà des postes à temps
partiel qui ont été vraiment bien encadrés.
Il faut favoriser ce type d'emplois pour celles qui le souhaitent
vraiment, mais il faut aussi que ce soit une question de choix dans cette forme
de travail comme dans d'autres avenues qu'on aménage toujours à
l'intention des femmes prétextant que c'est ce qu'elles souhaitent. Il
faut, bien sûr, s'occuper de chacun des groupes de femmes qui nous
mentionnent des revendications, qui expriment des besoins, mais il faut aussi
voir à ce que la majorité ait une voix, ait quelqu'un qui portera
sa parole aux lieux de décision. Ce n'est pas l'ensemble des
travailleuses qui souhaite trouver un emploi à temps partiel. Alors, il
ne faut pas mettre toutes les énergies, du moins c'est mon opinion
personnelle, uniquement à développer ce genre d'emplois.
Toujours en considération de la femme au travail, quelles sont
les mesures que Mme la ministre entend déployer pour faciliter le retour
au travail de celles qui ont été touchées
économiquement par le contexte qu'on a vécu depuis les
dernières années, soit la récession? Pour reprendre ce que
je disais tout à l'heure - d'ailleurs, les statistiques le prouvent -
les femmes ont été majoritairement touchées par le
chômage ces dernières années. Certains des postes
qu'occupaient ces femmes sont transformés par la nouvelle technologie.
Alors, qu'est-ce qu'on envisage comme mesure de recyclage pour ces femmes?
Est-ce qu'il est possible pour elles d'être assurées d'un retour
sur le marché du travail? Quelles sont les mesures qu'on
préconise pour les aider à se recycler?
En ce qui concerne les femmes et leur maternité, on sait qu'il y
a un domaine qui ressort depuis les dernières années au
Québec, c'est celui des sages-femmes. C'est un domaine où le
ministère de l'Éducation semble se pencher beaucoup pour
réfléchir. Est-ce que la ministre peut nous dire où le
ministre de l'Éducation en est rendu - le ou les ministres qui ont
précédé celui qui est en poste - dans leurs
réflexions en ce qui concerne les sages-femmes?
Avant de terminer, Mme la Présidente, j'aimerais peut-être
faire un commentaire à la suite de la nomination de notre nouvelle
présidente au Conseil du statut de la femme, Mme Francine McKenzie. Je
tiens, tout d'abord, à la féliciter pour sa nomination et
à lui offrir tous mes voeux de succès tout au cours de son mandat
de cinq ans. On est, bien sûr, en droit de s'interroger à la suite
du mouvement de contestation qui a été soulevé par la
nomination de Mme McKenzie. Il semble qu'une large consultation avait
été menée auprès des groupes de femmes. Sans
vouloir discréditer Mme McKenzie d'aucune façon, on est en droit
de se demander, à la suite des réflexions des groupes de femmes
qui ont contesté cette nomination, jusqu'à quel point il
était important de les consulter puisqu'on ne tenait pas compte de ces
consultations par la suite. Qu'est-ce qu'on a retenu des candidatures qui
avaient été soumises par les groupes de femmes qui avaient fait
certaines recommandations? Il est à souhaiter qu'on puisse très
tôt atténuer ce mouvement de contestation. On sait à quel
point il n'est pas facile de solidariser les femmes. On sait aussi qu'il n'est
pas facile de retrouver à l'intérieur de ces divers organismes
l'ensemble de la voix des femmes, du moins la majorité de la voix des
femmes. J'aimerais aussi qu'on me dise jusqu'à quel point on est
convaincu que la nouvelle présidente du Conseil du statut de la femme
tiendra compte des revendications de la femme de la base, de celle qui est
toujours oubliée dans toutes les revendications et dans toutes les
décisions qui sont prises parce que ce sont ces
femmes-là qui s'expriment le moins fort. C'est à peu
près l'ensemble de mes commentaires, Mme la Présidente. Je
reviendrai peut-être avec quelques questions.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Merci, Mme la
députée de Jonquière. Je voudrais simplement signaler que
je me réjouis de voir que, pour la première fois depuis huit ans,
il y a une nouvelle porte-parole fort efficace pour l'Opposition.
Peut-être que cela produira des résultats. J'ai l'impression que
je m'étais un peu usée à répéter les
mêmes choses pendant sept ans. En tout cas, je pense qu'il convient de
signaler ceci.
Mme la ministre voudrait peut-être donner la réplique. Je
lui demanderais de la faire assez brièvement pour qu'on puisse ensuite
aborder les questions.
Mme Denise Le Blanc-Bantey (réplique)
Mme Le Blanc-Bantey: Merci, Mme la Présidente. Moi aussi,
effectivement, je remercie la nouvelle porte-parole officielle du Parti
libéral qui a fait des commentaires, pour la plupart, très
pertinents. Mme la Présidente parle, vu qu'il y a une nouvelle
porte-parole officielle, comme si elle ne parlerait plus du dossier des femmes.
Je pense qu'elle aurait beaucoup de difficulté à ne pas demeurer
un peu, au besoin et à chaque occasion qui se présentera aussi,
porte-parole.
Ceci étant dit, je partage entièrement les
préoccupations qu'a la députée de Jonquière sur
tout le dossier de la pauvreté des femmes. C'est vrai qu'effectivement
une très grande majorité de nos femmes vit encore dans une
très grande pauvreté. Même celles qui sont sur le
marché du travail, on réalise qu'elles continuent de ne gagner
encore que 57% du salaire des hommes. Même celles qui sont
scolarisées, à l'université, etc. Cela reste un
phénomène absolument inacceptable et sur lequel il va, bien
sûr, falloir que le Conseil du statut de la femme, le ministère de
la Condition féminine et d'autre ministères ont travaillé
depuis quelques années, continuent de travailler avec acharnement. (10 h
30)
II y a, quand même, eu quelques réflexions au gouvernement
et même quelques actions qui prouvent que le gouvernement est sensible au
problème de la pauvreté chez les femmes. Comme tous les
gouvernements constitués majoritairement de mâles, il a besoin
d'être rappelé à l'ordre fréquemment. Je compte
bien, avec votre aide, m'en charger. Il faudrait peut-être souligner la
modification, entre autres, qu'il y a eu au Régime de rentes du
Québec qui est entrée en vigueur le 1er janvier 1984 et qui
donnait une augmentation d'environ 70 $ par mois pour la rente du conjoint
survivant pour les personnes âgées de 55 à 64 ans, ce qui
est une amélioration. Il en reste d'autres à venir.
Là-dessus, c'est vrai qu'il y a quelques années qu'on en parle.
J'ai eu l'occasion de participer récemment à des rencontres sur
la préparation d'un livre vert sur la réforme du régime de
rentes. J'espère que cela viendra assez rapidement et qu'effectivement
on tiendra compte, entre autres, dans ce nouveau livre vert, de la situation de
la travailleuse au foyer, en particulier de celle qui élève de
jeunes enfants, et qu'on reconnaîtra en partie la valeur, comme le disait
la députée de Jonquière, sociale et économique de
ces femmes dans notre société.
La politique de l'éducation des adultes, par ailleurs, a
été la grande préoccupation du ministère de la
Condition féminine au niveau des principes. Je suis d'accord avec celles
qui disent actuellement que ces principes sont très beaux, mais qu'on ne
mange pas des principes et qu'il va falloir un plan d'action concret de la part
du ministère de l'Éducation pour que les principes qui sont dans
la politique de l'éducation des adultes, par exemple toute la
"désexisation" des pratiques éducatives pour nos jeunes, soient
reconnus comme des acquis qui permettraient, justement, à beaucoup de
femmes qui ont vécu des expériences extrêmement
intéressantes et enrichissantes à la maison ou encore dans le
travail bénévole ou ailleurs de voir leurs expériences
reconnues tant au niveau de la scolarisation que pour l'accès au
marché du travail. J'espère qu'entre autres on va encourager
concrètement les entreprises par des subventions à engager des
femmes dans des secteurs non traditionnels. J'ai espoir que, d'ici quelques
années, il découlera de cette politique des plans d'action
concrets qui viseront l'ensemble des clientèles des femmes de notre
société en fonction de leurs besoins, tant les jeunes que les
femmes actuellement sur le marché du travail et qui ont besoin de
perfectionnement et de recyclage que les femmes qui sont sorties du
marché du travail depuis de nombreuses années et qui ont besoin
de retourner aux études pour avoir accès à une formation
académique qui leur permettrait, justement, d'aller sur le marché
du travail. En tout cas, on aura l'occasion dans les prochains mois d'en
discuter avec différents groupes. J'espère, encore une fois, que
concrètement le ministre de l'Éducation viendra nous prouver par
des actions que les principes que nous avons gagnés au niveau de la
politique dans les faits s'appliquent. C'est vrai - on le reconnaît tous
- qu'il y a eu des changements assez fondamentaux au niveau des lois au
Québec, sauf que dans les faits, comme vous le mentionnez, ce n'est pas
toujours aussi simple. On a des lois. Il y a de très beaux principes,
mais ils ne sont
pas, sur le terrain, toujours concrètement appliqués. Il
faut continuer de faire en sorte que tant ces lois que les nouvelles politiques
qui viendront rejoignent concrètement les clientèles de femmes
qui sont visées par ces lois et ces principes.
Vous avez beaucoup parlé du problème de la santé
des femmes. Ce que je peux vous dire là-dessus, c'est qu'il y a
actuellement une étude qui se fait surtout sur le problème de
l'alcoolisme et des drogues chez les femmes en collaboration avec le
ministère des Affaires sociales et de la Condition féminine. De
cette étude devraient découler des actions tant au niveau de la
prévention que de la réalité.
Du côté des maisons d'hébergement, on a
travaillé ces derniers mois avec le ministère des Affaires
sociales à la politique qui est actuellement en consultation
auprès des groupes concernés. Cette politique va garantir un
financement plus stable pour ces maisons d'hébergement et, en même
temps, devrait permettre au ministère des Affaires sociales d'accentuer
l'ouverture de ces maisons d'hébergement pour femmes battues,
violentées, ainsi que pour les enfants, et faire en sorte, comme je le
disais, je l'espère bien, que d'ici quelques années ce service
soit offert sur l'ensemble du territoire québécois parce qu'il y
a encore beaucoup de régions où il n'y a pas de maisons
d'hébergement et, dans certaines régions où il y en a,
elles ne sont pas en nombre suffisant.
Au sujet du temps partiel, je vous dirai que cela a été
une politique de gestion du temps partiel dans la fonction publique. Ce
n'était pas une politique de la Condition féminine. C'est
à titre de ministre de la Fonction publique que j'ai piloté cette
réforme qui visait deux choses: d'une part, à permettre aux
employés déjà dans la fonction publique sur une base
volontaire et pour une durée maximale de deux ans de réduire leur
temps de travail, bien sûr en accord avec les gestionnaires, et, au terme
de ces deux ans de réduction de temps de travail, de revenir à
leur poste à temps plein.
Quant à la politique proprement dite du temps partiel, elle a
comme objectif d'offrir des services directs à la clientèle. On
ne peut à partir de cette politique créer tous azimuts un
ensemble de postes à temps partiel dans la fonction publique. Il faut
que le gestionnaire fasse la preuve que c'est effectivement pour rendre un
service direct à la clientèle, que ce soit, par exemple, sur les
heures du midi, le soir, ou le samedi. Pourquoi certains services
gouvernementaux ne seraient-ils pas ouverts le samedi quand on pense qu'on
ouvre des magasins de la Société des alcools? Alors, on devrait
offrir d'autres services à des gens qui travaillent sur semaine et qui
ne peuvent, compte tenu de cela, utiliser les services gouvernementaux. Alors,
cela vise donc directement le service direct à la clientèle.
Même si j'ai, moi aussi, beaucoup de réserves et les
mêmes préoccupations que la députée de
Jonquière, que le Conseil du statut de la femme et que d'autres groupes
de femmes, à savoir qu'il ne faut pas que le temps partiel devienne un
ghetto pour les femmes, pour ne pas faire en sorte, non plus, de confiner les
femmes dans ces emplois, je pense que cela peut permettre à certaines
femmes, qui autrement ne viendraient pas sur le marché du travail, parce
que la double tâche est encore trop lourde, de venir
bénéficier d'une expérience de travail à la
fonction publique et de se positionner - parce que notre politique
prévoit aussi que ces personnes qui entreront sur un poste à
temps partiel dans la fonction publique vont acquérir une permanence sur
le temps partiel et vont avoir priorité sur d'autres personnes de
l'extérieur - pour les emplois à temps plein qui existent dans la
fonction publique. Donc, il faut éviter qu'il n'y ait une profusion de
temps partiel pour ne pas que cela devienne théorique comme droit pour
les femmes et les hommes, parce que, selon les statistiques qu'on avait dans la
fonction publique, pour une différence de 10%, il y avait autant de gens
intéressés d'un bord que de l'autre à une réduction
de temps de travail ou peut-être au temps partiel.
Du côté des conditions de travail, il faut admettre que
notre politique est exemplaire compte tenu de ce qui existe ailleurs. On a
vraiment essayé de donner le maximum d'avantages. Elle n'est pas
terminée. À la suite de la consultation avec les syndicats, il y
a probablement d'autres modifications qui viendront. Je tiens à
souligner que, entre autres, la question des régimes de retraite nous
préoccupe parce qu'il ne faudrait pas que les gens qui travaillent
à temps partiel se retrouvent comme actuellement avec des retraites
extrêmement désavantageuses. Mais, encore là, je pense que
cette problématique doit être étudiée dans
l'ensemble du temps partiel au Québec, tant dans le secteur privé
que dans le secteur public. Tout au moins le gouvernement s'est engagé
à amender la Loi sur les normes du travail pour améliorer aussi
les conditions des travailleuses à temps partiel dans le secteur
privé.
Je terminerai en disant, au sujet du dossier des sages-femmes, qu'il y a
un document actuellement en consultation entre les ministères de
l'Éducation, des Affaires sociales et de la Condition féminine.
J'espère que, d'ici les prochains mois, nous aurons l'occasion d'en
reparler.
Quant à la consultation par rapport à la nomination du
Conseil du statut de la femme - je terminerai là-dessus - vous savez que
cette consultation a suscité beaucoup de
ferveur et c'était normal. Il y a, je le rappelle, 1500 groupes
de femmes au Québec qui ont été invités à
participer à la consultation. Il y a une trentaine de femmes qui ont
été mises en nomination et Mme McKenzie, comme d'autres femmes, a
été mise en nomination par des groupes de femmes qui
n'étaient pas nécessairement la Fédération des
femmes du Québec, l'AFEAS ou des grandes fédérations. Dans
l'évaluation de cette consultation, j'ai mis sur une base égale
l'ensemble des suggestions, qu'importe si certains groupes avaient moins
d'importance au niveau national que d'autres. C'est un peu normal qu'il y ait
des réactions. Je trouve que c'est même très sain. Je pense
que cela faisait longtemps qu'on n'avait pas vécu un débat sur la
condition féminine aussi percutant. Ce débat fait la preuve que
nos groupes de femmes au Québec sont extrêmement vivants, qu'ils
sont solidaires et que, effectivement, tout est en place pour opérer ce
que j'appelle une relance du dossier de la condition féminine au
Québec. J'espère bien qu'à cause de la décennie de
l'ONU en 1985, où nous devrons faire le bilan de la situation des femmes
au Québec depuis dix ans, nous aurons l'occasion, avec la collaboration
des groupes de femmes, de l'Opposition et de l'ensemble des intervenantes, de
sensibiliser le gouvernement et de le faire bouger très
concrètement et très rapidement sur un certain nombre de dossiers
en matière de condition féminine. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Merci, Mme la ministre.
Je voudrais strictement dire quelques mots. Vous avez probablement raison de
dire que je ne me désintéresserai pas complètement de la
condition féminine, bien au contraire. D'ailleurs, les
prérogatives des nouvelles commissions parlementaires me permettent,
justement, de continuer d'intervenir.
Très brièvement, je voudrais revenir sur la question de la
pauvreté et de la santé. Je pense que ma collègue de
Jonquière a largement abordé - et je partage son point de vue
dans une large mesure - toute la question du travail à temps partiel.
Sur la question de la pauvreté, il est juste, comme Mme la ministre le
souligne, que maintenant la pension du conjoint survivant a été
augmentée de 70 $, mais ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que les
femmes de 55 à 65 ans, en particulier, sont souvent des femmes qui ne se
sont pas mariées, qui ont été abandonnées ou qui,
encore pour un bon nombre, sont sorties d'ordres religieux, etc., si bien que
ces femmes se trouvent dans des conditions extrêmement
pénibles.
Je vais revenir avec la même suggestion que j'avais faite l'an
dernier. Si vous voulez la prendre du Parti libéral, je ne vous
accuserai pas de l'avoir volée.
Mme Le Blanc-Bantey: II n'y a pas de partisanerie en
matière de condition féminine.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): C'est cela, mais au
moment de l'élection de 1976, on avait fait une recommandation - et
c'était la seule à laquelle je tenais compte tenu de la situation
économique - de porter les revenus, du moins dans un premier temps, des
femmes de 60 à 65 ans seules au même niveau que les femmes de 60
ans ou celles de 65 ans et plus qui bénéficient de la pension de
la sécurité de la vieillesse, plus du revenu minimum garanti.
Vous vous trouvez là avec un écart de revenu - je ne l'ai par
réexaminé dernièrement - au moment où l'on en
parlait, de 100 $, ce qui était énorme. Si vous avez 400 $ pour
vivre par mois plutôt que 300 $, avec des montants aussi restreints, la
marge est considérable. La seule raison pour laquelle ces femmes se
trouvent dans une situation différente, c'est que ou leur mari est
décédé avant qu'elles aient 65 ans, si elles sont
mariées, ou encore qu'elles ne se sont pas mariées. Cela
m'apparaît, à certains points de vue, vraiment discriminatoire. On
ne l'a jamais envisagée sous cet angle; même moi, je ne l'ai
jamais envisagée sous cet angle, mais bien davantage sous l'angle de la
pauvreté. Il y aurait peut-être lieu aussi de l'examiner sous cet
angle. Au moment où l'on avait pris cet engagement - je vous parle de
1981, c'était l'élection de 1981; cela aurait aussi pu toucher
des hommes seuls, mais strictement pour ces catégories de personnes de
60 à 65 ans qui n'avaient pas d'autre revenu que l'aide sociale -
c'était une dépense de l'ordre - je vous le donne sous
réserve, de mémoire - de 14 000 000 $, je pense. Je dois vous
dire que demain l'on s'apprête à abolir les poste de péage,
en tout cas, on en parle. Pendant ce temps, on aurait besoin de la
moitié de cette somme -c'est peut-être plus aujourd'hui, car il
faut quand même tenir compte de l'indexation depuis 1981 - pour des
femmes, et des hommes dans ce cas particulier, mais bien davantage des femmes,
qui sont dans un état de pauvreté extrême, comme l'a
signalé ma collègue. Est-ce qu'on peut descendre à 55 ans,
je ne le sais pas, mais je trouve que, dans le groupe de 60 à 65 ans, on
se trouve vis-à-vis vraiment d'une discrimination qui est le
résultat du fait qu'on n'a pas été marié ou que
notre mari est décédé avant que soi-même on puisse
devenir admissible à la sécurité du revenu. Je
m'arrête sur cela, c'est le premier point. (10 h 45)
Je reviens sur la santé pour la nième fois. Je dois dire
que c'est notre huitième budget qu'on étudie sur la condition
féminine. La première année, peut-être que je
n'en avais pas parlé. Il faudrait que je retourne en arrière.
D'ailleurs, on a juste à retourner au rapport sur Égalité
et indépendance qui, lui, remonte à 1978. Cela fait, quand
même, un bon six ans. Ce rapport faisait beaucoup état de
l'utilisation par les femmes, par exemple, d'interventions chirurgicales
beaucoup plus nombreuses que chez les hommes. Pour les traitements
psychiatriques, c'est de un à deux. Cela est un aspect particulier. On
faisait aussi état du nombre de ligatures de trompes qui étaient
devenues presque automatiques. Depuis 1978, c'est multiplié aussi, les
césariennes, etc. Enfin, je ne veux pas entrer dans une foule de
détails. Ma collègue a apporté le problème de
l'alcoolisme qui s'est accentué peut-être davantage durant les
dernières années, mais ces autres problèmes restent
exactement ce qu'ils étaient quand on en parlait en 1978. Vous n'avez
qu'à consulter les chiffres de la Régie de l'assurance-maladie.
Ils ont probablement augmenté ou encore ils sont les mêmes. Je ne
les ai pas regardés cette année, mais les rapports sont toujours
de un à deux. Les ligatures de trompes, les césariennes
augmentent constamment, etc. Je me dis: On a beau avoir un livre, on a beau
parler de la santé des femmes, on a beau dire que le ministère
des Affaires sociales fait des campagnes d'éducation, je pense qu'il ne
les fait pas à la bonne place. Je pourrai le leur dire mardi matin
prochain. Ils ne les font pas auprès des médecins, ils les font
auprès des femmes. Mais la femme qui arrive à l'hôpital,
qui est mal prise et qui est malade, ce n'est pas à elle de faire
l'éducation du médecin. Elle peut être sensibilisée
à cette dimension, mais il faut d'abord que le personnel médical
ait été sensibilisé lui-même et d'une façon
beaucoup plus énergique qu'on ne le fait présentement. Je
pourrais continuer, moi aussi, pendant une demi-heure.
Deux questions précises. Je voudrais demander à la
ministre quelle est sa perception du rapport qui a été
déposé à l'Assemblée nationale avant-hier ou
peut-être hier sur le problème de la natalité au
Québec. Comment en mesure-t-elle les recommandations ou quelle part
entend-elle prendre au débat qui aura lieu à l'intérieur
du gouvernement sur cette question pour que, dans les solutions qu'on
envisagera, les femmes ne fassent pas, encore une fois, les frais de politiques
gouvernementales qui n'auront peut-être pas été tellement
pensées par elles-mêmes de toute façon? Ma deuxième
question à Mme la présidente du Conseil du statut de la femme. En
passant, je la félicite pour sa nomination, l'assure de notre appui et
lui souhaite le meilleur succès possible. Je pense que nous n'avons pas
à nous immiscer dans les problèmes que la ministre a eus. De
toute façon, je pense, qu'on est ici pour travailler pour les femmes.
Quelles sont les orientations ou les priorités que vous envisagez pour
l'année 1984-1985? Merci.
Mme Le Blanc-Bantey: Je vais commencer par répondre. Je
dois vous dire, par rapport au premier problème que vous avez
soulevé, la très grande pauvreté dans laquelle se
retrouvent les femmes de 55 ans à 65 ans, que je partage
entièrement votre analyse et votre recommandation. Cela a
été, d'ailleurs, la recommandation du ministère à
la Condition féminine. Vous dites que vous en parlez depuis 1978; c'est,
d'ailleurs, la même recommandation que fait le Conseil du statut de la
femme. Ce que je peux vous dire, c'est que j'accepte de réacheminer
votre recommandation au comité qui s'occupe du livre vert sur le
régime de rentes.
J'espère que, tout au moins si on n'arrive pas à donner
entière satisfaction, encore là on fera un bout de chemin
là-dessus. Mais cela reste fondamental et c'est vrai, quand vous faites
la comparaison avec le péage, par exemple, versus d'autres besoins comme
celui-là, que cela fait la preuve que les arbitrages en termes de
ressources ne sont pas toujours en faveur des femmes.
Santé des femmes
Du côté du dossier de la santé des femmes, Mme Diane
Wilhelmy me dit que le ministère des Affaires sociales vient de nommer
dans chaque région une représentante qui a pour fonction de faire
le point sur les problèmes particuliers des femmes dans le but de
préparer pour le ministère des Affaires sociales une
stratégie d'intervention appropriée. Cette mesure administrative
est importante et j'espère, encore une fois, qu'elle donnera des
résultats.
Quant à la question sur la politique déposée par
mon collègue aux Affaires sociales cette semaine, je dois vous dire que,
malheureusement, je n'ai pas eu le temps d'en prendre connaissance. Par
ailleurs, j'ai la conviction que, si la société veut augmenter
son taux de fécondité, on doit faire en sorte que ce ne soit pas
pénalisant pour les femmes de mettre des enfants au monde et qu'on leur
donne les moyens et les services pour ce faire. On doit, en conséquence,
améliorer les congés de maternité qui existent
déjà et, à mon avis, s'orienter aussi vers des
congés parentaux, régler le problème des garderies et par
le biais d'une politique familiale, apporter aussi d'autres mesures de soutien.
Je pense que l'adéquation n'est pas nécessairement faite encore
dans l'esprit de tout le monde, et
certainement pas du côté de la minorité masculine,
qu'on ne retournera plus les femmes à la maison ou qu'on ne les laissera
plus à la maison faire des enfants si, effectivement, cela devient
pénalisant d'assumer la responsabilité, pour celles qui sont sur
le marché du travail, de la double tâche ou encore pour celles qui
sont à la maison, qui vivent très souvent des difficultés
économiques financières. Ma perception est que c'est certainement
aussi lié aux difficultés économiques, la réticence
des parents à faire des enfants en n'étant pas sûrs de
pouvoir leur offrir un minimum ou un maximum vital nécessaire.
Alors, je laisse la parole à Mme McKenzie, mais, en terminant, je
dois vous dire qu'on a l'intention de s'impliquer et de rappeler que, si on
veut que les femmes continuent de faire des enfants, il va falloir qu'ils nous
donnent les moyens.
Mme McKenzie (Francine): Merci, Mme la ministre. Je voudrais,
d'abord, remercier Mme la Présidente de ses bons voeux, de même
que Mme Aline Saint-Amand et mentionner que je suis frappée par la
similarité des problématiques qui ont été
listées par Mme Aline Saint-Amand avec ce que je sens devoir constituer
les préoccupations importantes au Conseil du statut de la femme.
En réponse à la question de Mme la Présidente, je
voudrais dire quatre choses: d'abord, rappeler que cette année
1984-1985, il avait été décidé par ma
prédécesseure et les membres du conseil qu'il s'agirait grosso
modo d'une année tampon entre deux plans triennaux. Je voudrais
également mentionner que, bien sûr, ce qui apparaît au
cahier des crédits comme étant des dossiers devant justifier ce
qui est annoncé, eh bien, nous avons la volonté de donner suite
à ces éléments qui sont essentiellement la question de la
formation des adultes, la question de la formation professionnelle des jeunes,
de l'éducation sexuelle et des adolescentes. Cela dit, il s'agit d'un
suivi à donner à ces dossiers et non pas des grandes orientations
qui devront être dégagées.
Nous avons la préoccupation de donner suite, en troisième
lieu, au forum qui a porté, comme vous le savez, sur la situation
économique des femmes. Ce forum, qui a été une initiative
du Conseil du statut de la femme, s'est tenu en novembre dernier. Ce grand
thème a mobilisé tout de suite - on le sent même maintenant
dans le débat actuel -la plupart des formations et des associations de
femmes au Québec. Il nous permet de tenir compte de l'ensemble de la
situation. Il nous permettra sans doute de pointer l'importante question de la
pauvreté des femmes, comme l'a mentionné Mme Saint-Amand,
notamment, non seulement de celles qui déjà la connaissent avec
acuité, mais aussi d'avoir en tête en quelque sorte les nouvelles
pauvres - il faut être très attentif au grossissement de ce bassin
- à la suite parfois des retombées des développements
technologiques. Je pense aux métiers qui sont traditionnellement
réservés au secrétariat, donc à la bureautique.
Également, au plan du vécu, les nouvelles pauvres - vous l'avez
mentionné - entrent surtout dans la catégorie d'âge de 60
à 65 ans et même il y en a de plus jeunes qui connaissent une
situation tout à fait nouvelle. Elles ont pu avoir un sort assez
confortable, mais, avec l'éclatement de la famille, le divorce et les
séparations, cette solitude ou cet accès à l'autonomie
constituent pour elles la découverte de la pauvreté et un choix
de pauvreté. Je pense que nous avons en tête la
nécessité de mettre l'accent là-dessus.
En ce qui a trait aux autres éléments, je voudrais
mentionner que le conseil entend faire une recherche sur les
bénéficiaires de l'aide sociale. Le conseil est très
préoccupé par la politique de la famille qui est annoncée
et entend la regarder très sérieusement, de même que la
question de la réforme de la fiscalité dont on connaît les
effets.
Le conseil - j'ai vu les membres à cet effet hier - est tout
à fait d'accord pour que l'on procède le plus rapidement possible
à une évaluation, à un bilan de ce qui a été
fait depuis la politique d'ensemble de façon à pouvoir
très bien circonscrire ce qui reste à faire, sachant, Dieu du
ciel, qu'il y en a beaucoup. Quand on aura identifié ces points majeurs,
on pourra arrêter un nouveau plan triennal d'action pour la condition
féminine au Conseil du statut de la femme. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): M. le
député de Rivière-du-Loup.
M. Boucher: Merci, Mme la Présidente. Vous comprendrez un
peu ma timidité.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Cela nous fait plaisir de
voir que, cette année, on a des collègues masculins à
l'étude des crédits. C'est peut-être un résultat de
la réforme parlementaire. Cela valait la peine.
M. Boucher: Pour moi, je pense que c'est la première fois
en sept ans que je vais prendre la parole à la commission pour
l'étude des crédits de la Condition féminine. J'ai un peu
peur que la langue me fourche, vu mon âge.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): On va vous rappeler
à l'ordre. Cela n'a rien à faire avec l'âge, M. le
député.
M. Boucher: Ah bon! D'ailleurs, je pense que cela me rassure un
peu. Étant
marié à une femme qui est abonnée à la revue
La Gazette des femmes et à La vie en rose et recevant une
thérapie hebdomadaire sur la condition féminine, je pense que
cette thérapie commence à avoir des effets assez
intéressants.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Radicaux?
M. Boucher: Radicaux. Mme la Présidente, étant
donné que mes questions vont toucher un peu différents domaines,
est-ce qu'on s'entend pour dire qu'à l'étude des crédits
on va lancer nos questions et qu'on adoptera les programmes par la suite?
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Je m'excuse, M. le
député de Rivière-du-Loup. D'ailleurs, on en avait
discuté à voix basse. Nous devons étudier le programme 3
du Conseil exécutif et le programme 6. Je pense que ce sont les deux
programmes qui vous touchent. Je pense qu'on pourrait aller d'un à
l'autre et on adoptera les deux globalement.
M. Boucher: Ma première question. En dehors de la
politique des maisons d'hébergement, il y a un réseau de maisons
de femmes qui est en train de se former au Québec. Du moins dans mon
comté, on éprouve beaucoup de difficulté à obtenir
des subventions pour le maintien de ces maisons qui existent pour réunir
les femmes, les informer, leur donner tous les renseignements sur leurs droits.
Ce sont des services que ces maisons peuvent rendre aux femmes. Pour ma part,
il en existe deux dans mon comté, dont l'une fonctionnait et, vu des
difficultés financières, elle a dû un peu fermer ses
portes. Finalement, je me demande si, en dehors du réseau de maisons
d'hébergement pour les femmes violentées, il n'y aurait pas
possibilité que la condition féminine essaie de sensibiliser les
ministères, comme le ministère des Affaires sociales, sur la
question du financement de ces maisons qui, à mon avis, sont
bénéfiques pour le développement de la condition
féminine et apportent aux femmes une ressource là où
n'existent pas de maisons d'hébergement. (11 heures)
Deuxième question: En ce qui concerne les services de garde, les
femmes se plaignent du fait que, compte tenu de la fiscalité, elles ont
énormément de difficulté à obtenir des reçus
lorsqu'elles font garder les enfants. Ceci occasionne, lors de leur
déclaration d'impôt, des difficultés pour obtenir un
remboursement. Elles réclament alors des déductions fixes, sans
reçu, pour leur permettre de récupérer une partie des
sommes qu'elles doivent dépenser lorsqu'elles font garder leurs enfants
pour travailler. Je ne sais pas si la réforme de la fiscalité
apportera des dédommagements ou des mesures concrètes pour
améliorer cette situation. Les femmes se plaignent d'avoir
énormément de difficulté à obtenir des reçus
qui leur permettent d'avoir les déductions fiscales pour la garde des
enfants lorsqu'elles travaillent.
Enfin, une dernière question qui concernerait - étant
donné que Mme la ministre de la Condition féminine était
au ministère de la Fonction publique - la fameuse clause moquette pour
les fonctionnaires. Où en est-on rendu dans les ajustements? Où
en est-on rendu dans l'évaluation des problèmes soulevés
par cette clause? J'aimerais que la ministre fasse le point sur la situation.
Je voudrais me joindre à Mme la députée de
Jonquière et à Mme la Présidente pour féliciter Mme
McKenzie, au nom de mes collègues, de sa nomination au Conseil du statut
de la femme.
Centres de femmes
Mme Le Blanc-Bantey: Je remercie mon collègue de ses
commentaires. J'ai eu l'occasion de dire, très souvent, qu'il y a des
nuances dans le degré de sensibilisation à la condition
féminine de mes collègues masculins. C'est vrai que mon
collègue de Rivière-du-Loup - il l'avoue lui-même en toute
modestie, à cause de l'influence de sa femme - est certainement un de
ceux qui sont en haut du palmarès. Je suis très heureuse qu'il se
préoccupe du dossier des centres de femmes parce que je crois
profondément à une formule comme celle que les femmes - à
cause de leur imagination, de leur bénévolat et de leur
volonté de s'en sortir - ont mise sur pied et qui est en train de
devenir de plus en plus importante au Québec, c'est-à-dire les
centres et les maisons de femmes. Cette formule offre beaucoup d'information
aux femmes; il y a un travail de solidarité entre les femmes mal
prises.
J'ai la conviction que ce type de ressource très proche des gens
de la base, auquel on a fait allusion à plusieurs reprises depuis le
début, tant pour les immigrantes que les assistées sociales ou
d'autres, est très efficace. Elle a certainement un effet
préventif important dans des dossiers comme celui de la santé des
femmes où le fait de se retrouver entre femmes, de pouvoir partager les
difficultés qu'on vit et d'essayer ensemble de se trouver des moyens
pour en sortir doit briser l'isolement d'un certain nombre de femmes, isolement
qui, dans certains cas, conduit ou à l'alcoolisme ou à l'abus de
médicaments. J'ai déjà entrepris de sensibiliser le
ministère des Affaires sociales à la réalité des
centres de femmes. Le contexte d'une politique d'hébergement pour les
femmes violentées se prêtait bien à le sensibiliser au fait
qu'il y avait d'autres
ressources qui sont aussi nécessaires sur le terrain dans le
milieu des femmes.
J'espère bien que le ministère des Affaires sociales
arrivera d'ici quelque temps avec une politique pour faire en sorte que ces
maisons survivent et qu'elles puissent se développer au Québec.
Nous travaillons actuellement en étroite collaboration avec le MAS
justement pour ne pas qu'il oublie la problématique des centres de
femmes. Je dois dire en toute honnêteté que j'ai eu la certitude
que, effectivement, le ministère des Affaires sociales croit aussi
à ce type de ressources, mais compte tenu de l'urgence qu'il y avait
à agir dans le domaine des femmes violentées la priorité
était mise, cette année, à tout le dossier, bon, de la
violence, que ce soit les femmes violentées, battues, le viol etc. Mon
impression est que le ministère des Affaires sociales n'en oublie pas
pour autant ses responsabilités à l'égard de ces centres
de femmes. Il faudra que mon collègue comme d'autres, comme moi, comme
les femmes de l'Opposition continuent de le rappeler, justement, aux
collègues des Affaires sociales et aux fonctionnaires aussi pour qu'ils
agissent en ce sens.
Je vais laisser à Mme Guy le soin de répondre aux frais de
garde. Par ailleurs, sur le classement moquette, qui est un long dossier qui a
fait couler beaucoup d'encre depuis dix ans parce que, effectivement, c'est un
dossier qui traîne depuis dix ans, je peux vous confirmer qu'on a fait
une proposition au syndicat des fonctionnaires sur une façon de
régler le dossier où non seulement on voulait régler le
problème du classement en fonction du statut de patron, mais on voulait
aussi donner aux femmes dans ces corps d'emploi des possibilités de
carrière autres que finalement agent de bureau, secrétaire et
leur permettre ce qu'on appelait un enrichissement de tâche pour qu'elles
puissent éventuellement postuler à des concours et se donner un
véritable plan de carrière.
La proposition qui a été déposée a
été en négociation tout l'automne. Il faut dire que, sur
le plan syndical, il y avait certains précédents qui
inquiétaient le syndicat. J'ai reçu une lettre aujourd'hui du
président du syndicat des fonctionnaires disant qu'à la suite de
la consultation les membres avaient rejeté la proposition ne la jugeant
pas assez avantageuse. Par ailleurs, je dois aussi vous dire que j'avais
déjà pris les devants pour qu'il y ait une nouvelle demande de
mandat auprès du Conseil du trésor à la suite, encore une
fois, des revendications et j'espère bien que nous serons en mesure de
déposer une nouvelle proposition au syndicat des fonctionnaires à
cet effet d'ici la fin mai. J'ai aussi pris la décision, comme ministre
déléguée à la Condition féminine, de garder
le dossier du classement moquette et de faire en sorte moi-même que cela
ne retourne pas sur les tablettes compte tenu des énergies, compte tenu
de la nécessité qu'il y a de régler le dossier et compte
tenu des énergies qu'on y a mis au ministère de la Fonction
publique depuis deux ans avec la collaboration, entre autres, du syndicat des
fonctionnaires et particulièrement de son comité de la condition
féminine, du Conseil du statut de la femme et du ministère de la
Condition féminine.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Mme McKenzie.
Mme Le Blanc-Bantey: Non, Mme Guy.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Mme Guy, pardon.
Services de garde non reconnus
Mme Guy (Stella): Pour la question des reçus, je vais
être obligée de vous répondre à partir de trois
niveaux, dans le sens que les femmes qui rencontrent les problèmes que
vous soulevez, c'est lorsqu'elles utilisent des services de garde non reconnus.
Si elles utilisent une garderie ou une agence de garde en milieu familial,
elles n'ont pas le problème des reçus. Tout cela parce que les
femmes qui gardent les enfants et font ce qu'on appelle du travail au noir, ne
veulent pas le déclarer. C'est une question d'équité par
rapport à l'ensemble des contribuables; quelqu'un qui gagne de l'argent
et qui ne le déclare pas parce qu'il ne veut pas payer d'impôt de
l'autre côté. Ce n'est pas en soi le problème du
reçu de l'impôt comme tel. Il faut qu'il y ait une preuve qu'il y
a eu des services donnés pour 2000 $. Lorsqu'elles utilisent un service
de garde reconnu, il n'y a jamais de problème parce que c'est
automatique, elles ont un reçu. Je pense que ce serait au gouvernement
de trancher s'il veut permettre encore le travail au noir de ce
côté. C'est une autre histoire.
Pour ce qui est du livre blanc, par contre, effectivement, il y a une
amélioration dans les propositions qui sont sur la table de
reconnaître des coûts plus élevés. Actuellement, on
reconnaît un maximum de 2000 $, même si, pour une femme qui
travaille et qui fait garder son enfant à temps plein, pour toute
l'année, c'est un coût moyen de 3200 $ par année si elle
utilise un service de garde reconnu ou va ailleurs aussi. Ils veulent augmenter
les déductions à 3000 $ et plus. Est-ce que ce seront des choses
qui seront maintenues? C'est sûrement une amélioration.
Mme Le Blanc-Bantey: J'ajouterai, si vous me le permettez, Mme la
Présidente, qu'effectivement on est très conscient du
problème de ces femmes. Il y a certaines
propositions dans le livre blanc. Il y a des discussions qui se font
pour tenter de faire en sorte qu'effectivement les femmes qui font du
gardiennage d'enfants aient intérêt à déclarer leurs
revenus afin de bénéficier des déductions fiscales
prévues à cet effet. Évidemment, on ne peut se permettre
d'en dire plus long aujourd'hui. Je voudrais seulement vous rassurer quant
à la préoccupation qu'on a tant vis-à-vis des services de
garde reconnus que vis-à-vis des femmes qui ne peuvent avoir
accès à ces services de garde reconnus parce qu'il n'y en a pas
sur tout le territoire et qui doivent, de toute façon, se
débrouiller pour faire garder leurs enfants.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Mme la
députée de Jonquière, avant de vous donner la parole, je
voudrais pour le journal des Débats faire une correction. Pour moi, la
députée de Jonquière était tellement membre de la
commission des affaires sociales que j'ai oublié d'effectuer un
remplacement. Je ne sais pas si on peut faire marche arrière comme cela?
Oui, c'est possible. Mme la députée de Jonquière remplace
le député de Brome-Missisquoi pour la séance
d'aujourd'hui. Je vous donner la parole, Mme la députée de
Jonquière.
Mme Saint-Amand: Merci, Mme la Présidente, d'autant plus
que j'en ai profité largement depuis que je suis assise en commission
parlementaire ce matin.
Je suis également très heureuse de retrouver quelques
collègues mâles, comme on les appelle entre nous, venir discuter
avec nous de la condition féminine. J'ai toujours dit que la condition
des hommes passait par la condition des femmes c'est-à-dire que plus les
femmes, sont heureuses mieux les hommes les apprécient, n'est-ce
pas?
J'aimerais peut-être revenir sur certains points, poser toutes mes
questions à la fois, vider les choses sur lesquelles je voulais revenir
et laisser ensuite la chance à la ministre de répondre à
ces questions. D'abord, je veux revenir sur le travail à temps partiel.
J'aimerais savoir s'il y a eu des études de faites, d'abord, pour
évaluer l'impact d'une politique de temps partiel chez les femmes. Je
m'inquiète aussi des risques, face à une prolifération de
postes à temps partiel, de voir des postes à temps plein fermer
pour autant, c'est-à-dire que, lorsqu'on confie un poste à temps
partiel à une personne, on peut profiter de cette occasion pour fermer
un poste à temps plein. Si ce n'est pas prévu à la
fonction publique, disons que c'est une forme de création d'emploi dont
l'entreprise privée use, pour ne pas dire abuse beaucoup depuis les
dernières années. Lorsqu'une personne prend sa préretraite
sur un poste à temps partiel, on sait que sa rente n'est pas tout
à fait la même, non plus, que lorsqu'elle quitte un poste à
temps plein.
Je m'inquiète aussi - la ministre en a fait état tout
à l'heure - des stages en entreprise. Pour l'avoir mentionné dans
mon intervention sur la réforme de la Loi sur l'aide sociale en ce qui
concerne les emplois chez les jeunes, on va se retrouver avec le même
phénomène quand on parle de femmes en stage en entreprise. Ces
entreprises, qui viennent de congédier les femmes, de mettre à
pied un grand nombre d'employés à cause de la période de
récession, bien sûr, sont habituées à fonctionner
avec moins de personnel. Je ne suis pas sûre qu'avec une certaine
reprise, pour ne pas dire une reprise certaine, on assiste à la
réouverture de ces postes qui seront, dans la plupart des cas,
compensés par la nouvelle technologie.
Je me demande jusqu'à quel point on peut croire que les
entreprises privées -peut-être que la fonction publique traite
différemment ces cas-là - seront prêtes à recevoir
une affluence nouvelle de main-d'oeuvre, même si ce sont des stages qui
ne coûtent rien à l'entreprise privée, de quelle
façon l'entreprise va pouvoir faire de la place à ce nouvel
arrivage de travailleuses et également de travailleurs, si on fait
référence à l'autre projet. Est-ce que ces stages en
entreprise vont assurer, pour autant, un emploi permanent à la femme qui
les aura suivis? (11 h 15)
Un autre point sur lequel je me suis interrogée tout à
l'heure et je n'ai pas encore eu de réponse. Je pose la question
différemment à la ministre. Est-ce qu'on a fait une recherche ou
est-ce qu'on a évalué l'efficacité des méthodes de
perception des pensions alimentaires depuis que la loi est mise en application?
On sait que ce n'est pas efficace partout. J'aimerais être
assurée, du moins, qu'on s'inquiète de la perception des pensions
alimentaires et qu'on s'informe auprès des femmes qui ont droit à
ces pensions si elles les reçoivent bien, de quelle façon la loi
est appliquée et avec quelle rapidité les pensions alimentaires
sont perçues.
Ensuite, j'aimerais savoir quelles sont les priorités que la
ministre veut voir traiter par le Conseil du statut de la femme au cours de la
prochaine année. Vous nous avez mentionné tout à l'heure
que 30 candidatures avaient été soumises. Est-ce possible d'avoir
la liste des 30 candidates? Par quels organismes avaient-elles
été proposées? Quel organisme ou quel groupe a
proposé Mme McKenzie?
Un autre point sur lequel j'aimerais revenir. Ce qui m'a donné
espérance que vous aimeriez peut-être en traiter à nouveau,
c'est lorsque vous avez parlé du droit au travail et à la
maternité chez les femmes et, bien sûr, de l'impact
économique que
cela représente pour une femme d'être retenue au foyer si
elle a des enfants. En tant que femme et que mère de famille aussi,
j'arrive toujours à traiter difficilement le cas d'un enfant, le cas
d'une maternité en signe de piastre. Pardonnez-moi cette
intervention-là, en tout cas, du moins si je l'énonce de cette
façon-là, mais comment peut-on comptabiliser la maternité
ou ce choix que les femmes font d'avoir des enfants?
Je vais peut-être rejoindre ici le thème que l'AFEAS
donnait à son dernier congrès qui était: La femme au
foyer, c'est un statut à réinventer. Même en 1984, Mme la
ministre, il y a encore des femmes qui sont heureuses au foyer; il y a encore
des femmes qui ont le goût d'être une travailleuse au foyer, une
éducatrice au foyer, d'avoir des enfants, de mettre au monde, de faire
des enfants et de rester au foyer pour s'en occuper. Il semble qu'à
travers la population depuis quelques années on véhicule un
message qui est tout autre. Tout en respectant le choix de celles qui veulent
contrôler leur maternité - c'est le choix qu'elles font et il faut
le respecter -il faut également respecter le choix de celles qui veulent
avoir des enfants et demeurer au foyer. Il faut, bien sûr, donner des
garderies à celles qui veulent aller sur le marché du travail,
qui veulent se partager entre le foyer et le marché du travail, mais il
faut également donner à celles qui souhaitent rester à la
maison pour s'occuper de leur famille toutes les chances d'avoir un certain
statut qui soit reconnu et qui leur apporte également la
sécurité financière qu'elles recherchent.
Premièrement - j'espère que c'est une fausse impression,
mais c'est, quand même, ce qu'on véhicule depuis quelques
années - il faut cesser à tout prix de minimiser l'importance du
rôle de la femme au foyer, de la travailleuse au foyer, et lui donner, au
contraire, toute l'importance que son rôle peut représenter pour
une société. La société repose sur sa plus infime
cellule, sa cellule de base qui est, en fait, la famille. Alors, il faut cesser
de discriminer la femme au foyer qui veut éduquer sa famille, qui veut
avoir des enfants et s'en occuper elle-même et, au contraire, lui donner
toutes les mesures et toutes les possibilités de s'épanouir
à travers ses maternités et à travers son vécu dans
son milieu familial qui, bien souvent, est complété dans la
majorité des cas par une présence active dans son milieu sous
forme de bénévolat.
Alors, je souhaite, comme les femmes de l'AFEAS l'ont manifesté
et le manifestent tout au cours de cette année, que ce statut soit enfin
reconnu. C'est à peu près l'essentiel de mon intervention.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): D'accord. Mme la
ministre.
Statut de la femme au foyer
Mme Le Blanc-Bantey: Je dois dire, sur la lancée de Mme la
députée de Jonquière quant au statut qu'on doit
reconnaître aux femmes qui font le choix de rester à la maison et
d'élever des enfants, que je partage entièrement son point de
vue. C'est un choix qui doit être libre et, effectivement, la
société doit revaloriser ce choix. Par ailleurs, quand on parle
de moyens à mettre à la disposition des femmes pour qu'elles
puissent faire des enfants, que ce soit des garderies ou autres, je ne pense
pas qu'il s'agisse de comptabiliser, sauf qu'il faut être
réaliste. Tant pour les femmes qui sont sur le marché du travail
que pour celles qui sont à la maison, s'il n'y a pas un certain nombre
de moyens mis à leur disposition tant sur le plan économique
qu'en termes de services, effectivement, le taux de fécondité va
demeurer ce qu'il est.
Quand je parle d'un dossier comme les garderies, je ne vois pas les
garderies strictement comme un service pour la femme qui travaille ou pour le
parent qui travaille. Je pense que, dans le dossier des garderies, on doit
partir des besoins de l'enfant. Je pense que les garderies sont excellentes,
sont bonnes. La preuve est faite que cela profite surtout - des études
qui ont été faites le démontrent - aux clientèles
les plus défavorisées en termes de réinsertion sociale,
etc. Je pense que les enfants ont besoin de services de garde de
qualité, compétents, comme mesures de socialisation,
d'éducation, etc. Quand je parle de garderies - je rêve toujours
et j'espère que la politique familiale le consacrera - c'est à
partir des besoins des enfants non seulement pour les parents qui travaillent,
mais aussi pour les mères qui sont à la maison. Je dirais
qu'elles aussi, elles auraient bien besoin, pour peu qu'on pense que la
garderie est un service à la mère, d'être capables
d'envoyer leur enfant à la garderie de temps en temps et
peut-être, effectivement, de se permettre, durant ces moments, de
s'occuper d'autres enfants ou encore, peut-être, de se payer des cours de
formation, d'éducation ou de faire ce qu'elles voudraient bien faire, de
toute façon, selon leurs choix. Je dis qu'il faut donner un statut
à la mère de famille qui reste à la maison, il faut que la
société reconnaisse ce rôle qui est fondamental pour sa
survie.
Par ailleurs, je crois que ce serait illusoire de penser qu'on pourrait
verser à la personne à la maison, à cause des
capacités financières de l'État, un salaire qui lui donne
une autonomie financière. Donc, tout en ayant certaines mesures - entre
autres, l'allocation de disponibilité en est une; espérons
qu'elle sera améliorée encore une fois - que ce soit sur le plan
des allocations
de disponiblité, sur le plan fiscal, le régime des rentes,
etc., je crois que ce serait rendre un mauvais service à ces femmes que
de ne pas, en même temps, les inciter, dans la mesure du possible,
à accéder au marché du travail un jour parce que les
statistiques prouvent, je crois, que trois femmes sur quatre se retrouvent,
à un moment ou l'autre, seules dans leur vie. Une fois que les enfants
ont grandi, que les maris sont partis ou sont morts, ces femmes se retrouvent
dans des situations de pauvreté qu'on dénonce tous
collectivement. Celles qui, par ailleurs, ont accédé au
marché du travail - il y a aussi des femmes très pauvres sur le
marché du travail et je ne dis pas, non plus, qu'il faut accéder
au marché du travail à n'importe quel prix, n'importe quoi -
assez jeunes dans leur vie ont plus de chances d'être moins pauvres
rendues à l'âge de la retraite ou de la préretraite ou
même dans la quarantaine. C'est toute cette problématique qu'il
faut regarder ensemble quand on parle du rôle et de l'importance du
travail que fait la mère de famille à la maison.
Conseil du statut de la femme
Quant à la liste des groupes qui ont fait des recommandations au
Conseil du statut de la femme, je dois vous dire que dès le début
il était clair - et j'ai eu l'occasion de le dire à plusieurs
reprises -que la consultation ne serait pas rendue publique parce qu'encore une
fois, je le répète, il y a peut-être - je ne le sais pas
-300 groupes qui ont fait des recommandations, tant locales, régionales
que nationales. Il y a des groupes qui, actuellement, disent officiellement
leur choix, la candidate qu'ils auraient privilégiée. Mais il
m'apparaissait que ce n'était pas respecter - parce que, quand les gens
ont fait des recommandations, c'était sous le sceau de la
confidentialité dans beaucoup de cas - l'esprit auquel s'attendaient ces
groupes que de donner publiquement la liste des recommandations de ces groupes.
Je dois souligner qu'il y a eu des groupes de femmes. J'avais aussi
élargi la consultation dans la perspective, comme vous y avez fait
allusion que, les problèmes de la condition féminine, c'est aussi
des problèmes de société et que l'ensemble de la
société doit se sentir responsable de l'évolution de la
cause de la condition féminine - quand je parle de l'ensemble, je parle
des hommes et des femmes - et qu'à cet égard il y a des groupes
socio-économiques, composés et de femmes et d'hommes, qui ont
aussi fait des recommandations et oui l'ont fait aussi dans une perspective de
confidentialité.
Quant à ce que j'attends du Conseil du statut de la femme, c'est
clair qu'un des grands dossiers sur lesquels il faut continuer de travailler,
c'est tout le dossier auquel vous avez fait allusion, qui est le dossier de la
pauvreté des femmes avec toute la discussion qu'il y a eu au forum
économique pour tenter de faire en sorte qu'il y ait de plus en plus de
mesures visant à assurer aux femmes leur autonomie financière.
Cela implique concrètement des dispositions et de la collaboration sur
des réformes comme celle de la fiscalité, comme celle sur le
régime de rentes, comme la politique d'éducation des adultes
qu'on vient de sortir et dans laquelle il manque - et on l'a dit à
plusieurs reprises - un plan d'action concret. Le dossier des garderies est
aussi un dossier important sur le plan de l'autonomie financière des
femmes. Il y a, bien sûr, tout le dossier, entre autres, relié
à la violence. Je sais que c'est une préoccupation du Conseil du
statut de la femme. Il a fait plusieurs interventions autant en ce qui concerne
les femmes battues que tout le dossier de la pornographie, entre autres.
J'espère, sur ce dossier, que j'aurai la collaboration du Conseil du
statut de la femme.
Il y a un dossier auquel j'ai fait allusion tout à l'heure, je
pense, qui est le dossier de la décennie de l'ONU où,
effectivement, j'ai dit que je voulais en profiter pour impliquer les
collègues dans ce que j'appelle une relance des dossiers de la condition
féminine et faire en sorte, encore une fois, je le répète,
que chaque ministère se sente concerné par les dossiers de la
condition féminine et se sente la responsabilité de nous faire
des propositions concrètes en termes d'améliorations. J'aurai
besoin à cet égard, encore une fois, de la collaboration du
Conseil du statut de la femme, justement, tant pour me conseiller sur certaines
actions à faire que pour, quand il le faudra bien, aussi rappeler mes
collègues à l'ordre, leur rappeler qu'ils n'ont pas bougé
ou qu'ils ne bougent pas, et effectivement, s'il y a lieu, dénoncer
l'inertie de certains collègues dans certains dossiers. Je mentionne
très rapidement ces trois types d'intervention. Vous voyez que nous
avons beaucoup de pain sur la planche seulement avec ces trois
priorités. Bien sûr, il y en a d'autres qui devront s'ajouter dans
les mois qui s'en viennent.
Perception des pensions alimentaires
Dans le dossier des perceptions de pensions alimentaires, on me dit au
ministère de la Justice qu'après trois ans d'implantation il y
une efficacité croissante des services de perception. Il faut noter que
plusieurs services ont été créés dans 56
localités du Québec, que ces services aident gratuitement les
personnes qui éprouvent des difficultés de perception des
pensions alimentaires. Par ailleurs, c'est vrai qu'entre
autres le Conseil du statut de la femme a reçu des plaintes, et
j'en ai reçu comme députée, sur les délais. Ces
délais sont dus à la difficulté de trouver le conjoint. Je
ne sais pas si, selon les informations, c'est la même chose au Conseil du
statut de la femme. On me dit que les délais sont
particulièrement éprouvants durant la saison d'été.
J'imagine que c'est encore une fois peut-être parce que c'est plus
difficile de trouver les conjoints en vacances ou parce que les fonctionnaires
eux-mêmes sont en vacances. C'est très difficile dans tous les
services gouvernementaux.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): On mange autant en
hiver.
Mme Le Blanc-Bantey: Pardon?
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): J'ai dit: On mange autant
en été qu'en hiver, Mme la ministre.
Mme Le Blanc-Bantey: C'est cela, je sais. Vous avez
entièrement raison de faire le commentaire, mais on nous dit, par
ailleurs - encore une fois, je tiens pour acquis que c'est vrai,
j'espère bien - que cela s'améliore et que les délais en
moyenne seraient d'environ trois mois.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): D'accord. Merci, Mme la
ministre. M. le député de Shefford.
M. Paré: Merci, Mme la Présidente. C'est surtout
des commentaires très brefs parce que je sais que vous voulez aussi
intervenir à nouveau avant la fin des débats. Je dois dire que je
suis plutôt optimiste sur la place que les femmes vont prendre non pas
nécessairement parce qu'elles sont 52%, mais parce qu'elles sont de plus
en plus structurées et qu'elles prennent de plus en plus leur place. Je
pense que c'est comme cela à la base qu'on pourra régler ce
problème. On dit souvent qu'on fonctionne dans des milieux d'hommes. Il
va falloir arrêter de le dire et fonctionner dans un milieu d'humains
tout simplement, mais à la condition que les groupes prennent leur
place.
En tout cas, cela finit bien une semaine d'être en commission ici
avec une présidente et avec la condition féminine. Demain, cela
commence bien une fin de la semaine aussi parce que je vais être avec les
AFEAS régionales. (11 h 30)
Mme Le Blanc-Bantey: De l'immersion intensive.
M. Paré: Oui. Immersion totale. Puis, demain, on va
être aussi toute la journée, les députés de la
région, avec les AFEAS
Richelieu-Yamaska.
Sur les femmes au foyer, je rejoins Mme la députée de
Jonquière. On a eu souvent l'impression - à mon avis, c'est bien
plus une impression qu'autre chose - que la femme au foyer pouvait être
dévalorisée. À mon avis, ce n'est pas cela. C'est qu'elle
n'était peut-être pas suffisamment structurée pour se faire
entendre.
Cela semble toujours être un budget de sensibilisation parce qu'on
dit promotion du droit et du statut de la femme. Les budgets sont
énormes là-dedans et je trouve cela tout à fait normal
parce que, à mon avis, en général la femme au foyer est
très heureuse parce que c'est par choix qu'elle y est.
Elle a aussi des préoccupations, des besoins et elle a le droit
de les exprimer. Ce n'est pas isolément qu'elle va pouvoir le faire,
mais en groupe. Ce qu'il faut leur donner, ce sont précisément
les moyens d'avoir des structures, des organisations parce que les groupes qui
obtiennent le plus - dans une société, je pense que c'est normal
- ce sont, tout simplement, les groupes les mieux structurés. Il faut
donc donner cette chance à chaque groupe.
La sensibilisation, à mon avis, en tout cas au niveau
gouvernemental, est faite. On est en commission parlementaire depuis plusieurs
jours déjà et je sais déjà, pour l'avoir entendu,
que la préoccupation est venue de chacun des ministères ou
presque, en tout cas, où il y a eu des discussions. À mon avis,
il y a vraiment des avenues pour régler des problèmes,
spécialement ceux des femmes les plus mal prises, sauf qu'il va falloir
aller plus vite. Pour la génération qui monte, la
génération active, c'est moins inquiétant. Entre autres,
Mme la ministre, au dépôt du livre sur la politique de
l'éducation permanente, j'étais heureux de voir que, sur trois
ministres impliqués, il y en avait deux du sexe féminin. Je ne
pense pas qu'on va pouvoir oublier que toutes les femmes doivent avoir leur
place dans l'éducation permanente, y compris celles qui sont au
foyer.
Une chose qui est importante, à mon avis, pour s'assurer que,
dans toutes les régions, on va tenir compte de ces besoins
spécifiques, c'est cette fameuse table régionale. Comme vous
êtes là au départ -j'ai vu avec quelle agressivité
vous avez défendu le dossier lors de la présentation de la
politique - je pense bien que les femmes ne sont pas oubliées au niveau
des cours qui vont répondre aux besoins dans chacune des régions.
C'est une chose.
Parmi toutes les politiques, quand on était avec le ministre des
Affaires sociales, par exemple, on a parlé précisément des
maisons d'hébergement et de toutes ces maisons de
bénévoles qui donnent différents services. Le budget a
considérablement augmenté cette année. Je trouve cela
important parce que, si c'est vrai qu'il faut les structurer pour que
nous soyons sensibilisés, il faut leur en donner les moyens localement.
Et c'est là un moyen, le regroupement spécialement des plus mal
prises. Il va falloir qu'il y ait une sensibilisation pour que celles qui n'en
profitent pas commencent à savoir qu'il y en a un peu partout parce que
je sais que chez nous - et je pense que c'est dans toutes les régions du
Québec maintenant - il y en a et il doit y en avoir plus que cela.
Il y a un autre ministère qui est arrivé. Cela rejoint la
préoccupation de la députée de Jonquière et celle
qu'on a tous, je pense. Cela concerne les femmes les plus mal prises de 55
à 65 ans, effectivement, moins structurées, très pauvres.
Là aussi, je pense qu'il y a des avenues qu'il va falloir envisager.
Vous disiez, Mme la ministre, qu'on ne peut pas envisager, surtout dans la
situation économique qu'on traverse, le salaire au foyer. Je pense qu'on
en est tous conscients. Sauf qu'il y a une demande qui fait qu'on pourrait
peut-être reconnaître, par contre, une façon pour que les
femmes puissent participer au Régime de rentes du Québec. On l'a
abaissé pour les travailleurs à 60 ans facultatif, s'ils y
avaient contribué. Si on faisait cela, il y en aurait un certain nombre,
assez important, à mon avis, qui seraient moins mal prises et c'est
important. Je pense que cette demande qui vient des AFEAS, il va falloir, soit
dans le livre vert, soit dans le livre blanc sur la fiscalité, qu'on
s'en préoccupe et qu'on voie comment on peut y répondre, si ce
n'est pas en totalité, au moins en partie.
J'étais heureux d'entendre le ministre de l'Habitation et de la
Protection du consommateur, pour ne pas le nommer, M. Tardif, qui disait que sa
principale priorité, s'il y a des fonds débloqués, c'est
que Logirente puisse s'appliquer à partir de 55 ans au lieu de 65 ans.
Je suis convaincu que ce seront presque en totalité des femmes qui
pourront en profiter. Il faudra le retenir. S'il faut leur donner les moyens de
s'informer et de se regrouper, il faut aussi que les politiques tiennent compte
des groupes les plus mal pris dans la société et les femmes de 55
à 65 font certainement partie de ces groupes. Je pense qu'il y a des
avenues, mais ce qu'il faut faire - et je reviens à ce que je disais au
début - c'est donner à toutes les femmes la chance de se
regrouper. Ce sont les groupes organisés qui en obtiennent le plus.
Si certaines personnes ont perçu que les femmes au foyer
pouvaient être dévalorisées, ce n'est probablement pas les
cas. Je pense qu'on est tous contents d'avoir une femme, une mère ou
quelqu'un au foyer par choix. Ce sont parfois les personnes les plus actives
dans leur quartier parce que, par le bénévolat, elles sont
là pour aider tout le monde, tout le temps. La contribution qu'elles
apportent à la société est inestimable. L'image qui a
peut-être été perçue est qu'elle ne se fait pas
entendre et qu'elle ne se valorise pas elle-même. Il faut que cela vienne
de chacun des milieux et la façon de le faire, c'est par les
associations. Je me rends compte que les associations participent de plus en
plus et se font entendre spécialement des femmes au foyer. Dans ce
sens-là, les associations de femmes doivent être aidées
pour se structurer même financièrement.
Je vais terminer là-dessus. J'avais surtout ces
préoccupations. Je ne sais pas si je suis dans la bonne direction. Je
suis là pour écouter et pour rapporter les commentaires. Je
félicite Mme McKenzie de sa nomination.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Merci, M. le
député de Shefford.
Mme Le Blanc-Bantey: Est-ce que je peux faire des
commentaires?
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Oui.
Mme Le Blanc-Bantey: Je me sens comblée par mes deux
collègues masculins aujourd'hui. Je les félicite de se
préoccuper avec coeur de la condition féminine. Je partage
entièrement la recommandation - j'ai la certitude que mes
collègues m'appuieront auprès de mes autres collègues qui
pourraient être moins convaincus - selon laquelle il faut aider les
femmes à se regrouper. Les groupes de femmes ont fait un travail
énorme pour rejoindre cette majorité silencieuse qui nous
préoccupe tous. Par ailleurs, il faut savoir que ces groupes de femmes
fonctionnent d'une façon héroïque, d'une façon
bénévole, avec très peu de moyens. Il y a effectivement
très peu de ressources du côté gouvernemental à
Québec pour aider ces groupes de femmes à rejoindre d'autres
femmes non organisées et faire en sorte que ces femmes puissent aussi
exprimer leurs besoins, leurs objectifs à travers ces groupes qui,
finalement, ont toujours été le fer de lance des
améliorations du dossier de la condition féminine. Ces groupes
qui, finalement, se font entendre finissent par sensibiliser le reste de la
société et l'ensemble du gouvernement à la
nécessité d'intervenir.
Je suis donc très heureuse que le député de
Shefford, à la suite de propositions que je ferai bientôt au
gouvernement, dise qu'on doive aider financièrement ces groupes. Si on
veut que les groupes déjà existants ou que d'autres groupes
viennent au monde, il faut que le gouvernement soit conscient qu'il faut un
minimum de ressources pour rejoindre le plus grand nombre de femmes
possible.
Ceci étant dit, le député de Shefford nous a fait
une recommandation que nous a déjà faite l'AFEAS sur la
contribution volontaire au Régime de rentes du Québec. C'est une
suggestion qui est à l'étude actuellement. Il ne faut pas, non
plus, en faire une panacée parce qu'il faut être conscient que les
femmes les plus démunies n'auront pas les moyens de participer
volontairement au Régime de rentes du Québec. On a peu de chance
de les rejoindre par une mesure comme celle-là; on risque de rejoindre
les hauts et les moyens salariés qui auraient peut-être les moyens
d'obtenir, par la persuasion et la bonne entente dans le couple, de leur mari
qu'il les aide à contribuer au Régime de rentes du Québec.
Ce n'est pas une mesure qui va rendre service à l'ensemble des
femmes.
Temps partiel
Je voudrais revenir sur un point que j'avais oublié: le temps
partiel dans la fonction publique. Mme Saint-Amand en a parlé tout
à l'heure. Je voudrais dire...
Mme Saint-Amand: Et en entreprise privée.
Mme Le Blanc-Bantey: Et en entreprise privée. Il n'y a pas
eu d'études faites dans la fonction publique comme telle sur l'impact.
La seule chose qu'il y a eu, ce sont des enquêtes sur les personnes se
disant intéressées.
Par ailleurs, le projet que nous avons déposé se veut une
expérience pilote aussi. J'avais aussi la préoccupation
qu'effectivement des gestionnaires se servent de cela pour peut-être
remplacer des postes à temps plein par des gens à temps partiel.
Je répète que c'est très limité parce que ce n'est
qu'en termes de services directs à la clientèle. Cela ne veut pas
dire que le danger n'est pas là.
On a essayé d'encadrer cela le mieux possible dans la politique,
mais j'espère qu'à la suite de la consultation avec le syndicat
il y aura peut-être lieu d'apporter des choses qui encadrent davantage et
qu'entre autres, une fois la politique mise en branle - parce qu'elle n'est pas
encore en branle - les syndicats vont être extrêmement vigilants
parce que, comme je l'ai dit souvent à l'occasion de la Loi sur la
fonction publique, même avec la loi la plus restrictive possible, on ne
peut jamais empêcher les abus. J'espère, entre autres,
précisément que les syndicats seront très vigilants et les
comités d'égalité en emploi dans les ministères,
parce que ces comités ont fait un travail fantastique et que c'est
précisément grâce à ces comités que certains
phénomènes ont pu être portés à notre
attention.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Merci, Mme la ministre.
Je vais vous poser des questions très précises. Si vous n'avez
pas les réponses, vous pouvez me les envoyer plus tard pour permettre
encore à Mme la députée de Jonquière, qui m'a
demandé d'intervenir, d'avoir la chance d'intervenir.
Sur la question de la femme au foyer, je pense que tout le monde est
d'accord sur le choix que les femmes au foyer peuvent faire d'aller travailler
ou d'avoir une expérience mixte. Ce que je voudrais dire, c'est que
c'est un peu plus complexe que cela ne l'était à cause de
l'instabilité des mariages. Quand on est rendu avec un divorce sur deux,
je pense que, par rapport à l'avenir, le problème se pose un peu
dans un contexte différent que celui que j'ai connu par rapport à
l'avenir parce que je suis d'un certain âge. C'est dans ce sens que si,
d'une part, il faut leur reconnaître un statut, etc., je pense qu'il
faut, d'autre part, leur permettre d'avoir les outils, quand le toit leur
tombera sur la tête, pour ne pas se retrouver dans une situation de
difficulté.
Greffée là-dessus, je voudrais revenir sur la question des
rentes du Québec, de la participation au Régime de rentes du
Québec. L'argument que Mme la ministre me sert est celui que je me suis
fait servir à l'intérieur de ma propre formation politique, soit
que les femmes les plus démunies ne pourront pas y avoir accès.
C'est vrai, mais à ce moment je me demande s'il n'y aurait pas, pour le
gouvernement, une façon de pallier à cela. En bas d'un certain
revenu, la participation du gouvernement pourrait peut-être... Enfin, je
ne suis pas fiscaliste, je ne suis pas actuaire, mais il faut bien se dire
qu'un grand nombre de femmes qui étaient, à ce qu'on disait, dans
un milieu moyen et même dans un milieu à l'aise, se sont
retrouvées dans la misère à 55 ou à 60 ans.
Alors, je pense qu'on ne peut pas dire: Parce qu'il y en a 25% qui n'en
bénéficieront pas, ne le donnons pas aux 75%. Je pense que c'est
aux actuaires, aux fiscalistes et aux gens qui développent les
politiques sociales de voir quel contrepoids on peut faire ou de quelle
façon on peut protéger les plus démunies. Je pense qu'on
ne peut plus se cacher derrière cet argument: Non, enlevons-le à
75% des femmes parce que, de toute façon, il y en a 25%... Dieu merci,
je pense que tout le monde sait que je suis très sensible aux 25% du bas
autant que les autres. Je pense que c'est simplement une "défaite" pour
ne rien faire.
Les questions précises que je voudrais vous poser: Quels sont les
montants qui ont été versés au niveau des allocations de
disponibilité cette année? Est-ce que le gouvernement entend
maintenir cette allocation de disponibilité, en maintenir le
régime universel, alors que tout à l'heure on a parlé
des autres besoins criants qui existent?
Les maisons d'hébergement. Est-ce qu'on peut me dire le budget
pour cette année comparativement à l'an dernier? L'augmentation,
en fait.
Est-ce qu'il y a eu des études faites à l'intérieur
du gouvernement dans les organismes publics et parapublics sur les effets de la
robotique sur l'emploi des femmes? S'il y en a dans l'entreprise privée,
est-ce qu'on peut nous les faire connaître? Je reviendrai
là-dessus. (11 h 45)
L'autre question est sur les garderies privées. Dans le contexte
actuel qui est un contexte difficile où peut-être on peut fournir
des services de garderie à un coût moindre parce que
l'administration est différente, est-ce que l'on va continuer dans cette
philosophie qui consiste à dire qu'il faut uniquement s'orienter vers un
service de garderie public? Pour qu'on ne se méprenne pas, je suis
prête à ce qu'on mette toutes les conditions nécessaires
pour qu'elles respectent des normes qui soient conformes, mais qu'on permette
aussi aux gens de décider un peu ce qu'ils veulent.
Pour ce qui est de la pornographie, on a parlé de la violence,
mais la pornographie rejoint la violence. Il ne semble pas y avoir beaucoup
d'action gouvernementale, ni même de la part du Conseil du statut de la
femme dans ce domaine.
Une dernière question. Si nous n'avez pas la réponse
aujourd'hui, vous me la donnerez plus tard. Combien de femmes ont pu retourner
dans le monde de l'éducation et compléter leurs études
secondaires à partir de 1976? Combien sont retournées au
cégep et ont pu compléter leurs études collégiales?
Sans ces chiffres, nous ne pouvons savoir si nous avançons ou reculons
ou si nous demeurons stables. Toutes ces questions c'est un peu le discours que
l'on se tient chaque année. Il n'y a que les chiffres qui nous
permettront de vérifier s'il y a du progrès ou non.
Il y a un dernier problème sur lequel j'aimerais attirer votre
attention et sur lequel je demanderais à la ministre
déléguée à la Condition féminine de se
pencher, c'est non pas le harcèlement sexuel - de celui-là, on
s'en préoccuppe déjà un peu - mais le harcèlement
que subissent les femmes lors de coupure de postes, lors de l'introduction de
la bureautique même dans les secteurs public et parapublic où les
femmes ont la sécurité d'emploi. Cela peut s'appliquer aussi
à des hommes, mais cela touche surtout les femmes qui ont les positions
de secrétaires, de réceptionnistes, etc. Elles ne sont pas mises
à pied officiellement. On leur donne très peu de temps pour se
recycler. On ne tient pas compte de leur âge dans le recyclage. C'est,
finalement, sous forme de harcèlement qu'on oblige les femmes à
démissionner. Le problème est beaucoup plus grand que les
chiffres que je ne saurais vous donner. Je ne veux même pas de
commentaires aujourd'hui sur ce sujet. J'en vois qui font des signes de la
tête. Il semble donc que je ne sois pas la seule à l'observer ou
la seule à qui on en ait parlé. Je voudrais, quand même,
que le ministère s'occupe de cette question. Tant mieux si elle rejoint
les hommes, car eux aussi peuvent être victimes de ce type de
harcèlement qui n'est pas, comme je le disais, sexuel; il s'agit de se
libérer des gens pour les remplacer par des machines. Je ne veux pas
faire de la dramatisation ici, mais c'est un problème réel
vécu par un grand nombre de femmes qui, par tradition, remplissent un
grand nombre de ces fonctions. Donnez-moi strictement les chiffres que vous
avez. Pour ce qui est du reste, on y reviendra quand vous les aurez.
Mme Le Blanc-Bantey: Je voudrais, d'abord, dire très
rapidement que je partage votre analyse du dossier femmes au foyer.
Deuxièmement, sur le RRQ, j'accepte d'aller défendre votre
suggestion au comité des rentes, lequel s'en occupe. Pour ce qui est du
harcèlement, effectivement il n'y a pas d'étude. C'est une
préoccupation que nous avions au ministère de la Fonction
publique dans le cadre des programmes d'égalité en emploi. On va
insister et on va le relancer.
En ce qui a trait à la pornographie, j'aimerais vous dire que
c'est un dossier prioritaire de Consult-Action cette année au Conseil du
statut de la femme. Il y a eu une petite amélioration au niveau de la
loi, avant Noël, grâce à l'Opposition - j'étais
très heureuse de la déposer - mais ce n'est pas suffisant. Il
faudra que l'on continue.
Pour ce qui est des garderies privées, il y a eu, l'an dernier,
432 places de développées avec le système de l'Office des
services de garde à l'enfance. Nous sommes présentement en
discussion parce qu'elles nous ont fait des demandes pour qu'on trouve des
façons de les subventionner. Nous étudions le dossier et nous
devrions avoir des réponses bientôt.
Du côté des études sur la pauvreté, entre
autres, liée au développement technologique, il y
présentement une étude au CSF. Il faudra, encore une fois,
accentuer cela. Le budget en 1983-84 pour les maisons d'hébergement...
Est-ce assez rapide, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Cela va aller, Mme la
ministre.
Mme Le Blanc-Bantey: Pour les maisons d'hébergement, on va
dépenser, en 1983-1984, 3 594 750 $.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux):
Quelle est l'augmentation en pourcentage?
Mme Le Blanc-Bantey: En pourcentage?
Mme Wilhelmy (Diane): 800 000 $ sur 2 800 000 $, donc, cela veut
dire plus que 20%. 2 800 000 $ sur 3 600 000 $?
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Alors, c'est plus que
20%, je pense.
Mme Wilhelmy: Plus de 20%, en tout cas, autour de 20%.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): D'accord, merci.
Mme Le Blanc-Bantey: Quant à l'allocation de
disponibilité, je vais vous dire que tout cela, actuellement, est en
discussion dans le cadre du livre blanc sur la fiscalité. Je ne peux,
malheureusement, pas vous dire ce qui en découlera. Je suis favorable au
maintien de l'allocation de disponibilité. Par ailleurs, quelles seront
les modalités? Vous verrez quand le livre de M. Parizeau sera
déposé. On n'a pas le montant total, mais c'est assez
imposant.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): On l'aura probablement
à la Sécurité du revenu, la semaine prochaine.
Mme Le Blanc-Bantey: Probablement. Voilà, je me suis
forcée pour répondre rapidement à toutes vos
questions.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Et les autres
études, vous en avez pris note.
Mme Le Blanc-Bantey: On en a pris note.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Sur les certifications
obtenues au secondaire...
Mme Le Blanc-Bantey: Oui.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): ...au cégep et
ainsi de suite.
Mme Le Blanc-Bantey: Oui.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): D'accord. Alors, je vous
remercie. Mme la députée de Jonquière.
Mme Saint-Amand: Alors, en dernière intervention, je me
réjouis de voir que tout le monde a les mêmes
préoccupations en ce qui concerne le statut de la femme au foyer, de la
mère au foyer, de la travailleuse au foyer, selon la nouvelle
appellation qu'on lui a donnée. Alors, je suis sûre que,
très prochainement, tout le monde se penchera très
sérieusement sur ce cas, sur la revalorisation de son statut, sinon de
son rôle.
J'écoutais les réflexions, tout à l'heure, et cela
me portait à me dire: Écoutez, la société ne peut
pas s'offrir des femmes au foyer parce qu'elles ont besoin de revenu. On ne
peut pas leur offrir de régime de rentes. La société ne
peut pas s'offrir trop d'enfants parce que cela coûte cher en garderie,
en une foule de choses, en allocations qu'on verse aux mères. La
société, l'industrie, les entreprises ne peuvent pas s'offrir la
main-d'oeuvre disponible des femmes qui pourraient aller sur le marché
du travail. Alors, qu'est-ce que notre société peut s'offrir si
elle ne peut s'offrir ni femmes, ni enfants, ni foyers stables, ni tout cela?
Alors, ce sont des réflexions que j'avais.
Je m'inquiète aussi lorsqu'on dit, par exemple, qu'on veut que
les femmes au foyer puissent se regrouper. Je ne veux pas faire la promotion
d'un organisme plus qu'un autre, mais on a mentionné, à plusieurs
reprises, l'AFEAS; vous-même, Mme la ministre, en avez parlé tout
à l'heure. Cet organisme, qui est composé de 35 000 membres
actuellement au Québec, regroupe, très majoritairement, des
femmes au foyer, des travailleuses au foyer. Toutes les revendications qui sont
apportées par l'AFEAS sont toujours celles devant lesquelles on se bute.
Ce sont toujours celles auxquelles on ne trouve aucune solution. Alors, est-ce
qu'on va, finalement, écouter les revendications de ce groupe de femmes
qui sont des femmes au foyer, des travailleuses au foyer, qui sont
déjà regroupées? On n'arrive jamais à trouver de
solutions à leurs problèmes.
Ensuite, à la blague, tout à l'heure, j'entendais le
député de Shefford dire que c'était une valeur
inestimable, une femme au foyer, une épouse, une mère. C'est
probablement pour cela qu'on n'aura jamais réussi à estimer son
salaire et qu'elle n'aura jamais rien eu, la pauvre!
En dernier lieu, en ce qui concerne les garderies dont je me
préoccupe beaucoup -malgré que la ministre semblait croire, toute
à l'heure, que ce n'était pas une préoccupation chez moi,
c'est également une préoccupation - je m'inquiète de la
différence entre l'exonération financière, par exemple,
qui est accordée aux parents, qui est donnée en milieu familial
comparativement à celle en garderie. Même le maximum admissible
est de 2 $ moins élevé pour les parents qui font garder en milieu
familial plutôt qu'en garderie. Est-ce qu'il y aura moyen de compenser
cette différence entre les deux systèmes qui coûtent
pourtant aux parents le même prix? Le coût des deux est,
approximativement, de 12 $ par jour, tandis qu'on donne 9 $ pour faire garder
les enfants en garderie et 7 $ en milieu familial. Lorsqu'on dit que les
garderies sont aussi à la disposition des femmes au foyer, est-ce
qu'on assurera aux femmes au foyer le moyen financier de profiter de ces
garderies, de se donner des cours de formation auxquels on semble croire
qu'elles pourraient être admissibles?
Mme Le Blanc-Bantey: D'abord, sur la dernière question,
l'exonération financière des parents, pour la garde en milieu
familial par rapport à la garderie, la différence qui a
existé jusqu'à maintenant s'explique par le fait qu'actuellement
la moyenne des services de garde en milieu familial a été plus
basse que celle en garderie. Dans les faits, la moyenne en milieu familial se
situe autour de 10 $, alors que, dans les garderies, elle se situe autour de 12
$.
Par ailleurs, je dirais que c'est un problème qui
préoccupe l'Office des services de garde, sous la présidence de
Mme Guy, parce que, effectivement, beaucoup de parents - j'ai eu l'occasion
d'en rencontrer une centaine à Montréal cette semaine - qui
utilisent les services de garde en milieu familial nous disent que les
coûts ont augmenté et qu'à toutes fins utiles il faudrait
réévaluer la situation. À la suite de différentes
demandes qui sont venues, l'office a mis sur pied un comité pour
étudier toutes les difficultés des agences de garde en milieu
familial. Le comité a fourni son rapport cette semaine, je crois. Ils
sont en train de l'étudier à l'Office des services de garde et
nous arriverons, peut-être, à la suite de l'étude de ces
rapports, avec des recommandations différentes.
Je dois rassurer la députée de Jonquière et lui
dire que je me suis fait véhiculer le problème, que j'en suis
consciente et que j'espère qu'effectivement, si les coûts sont
aussi élevés en garde en milieu familial qu'en garderie, nous
arriverons à faire l'équité entre les deux services de
garde. Mais, honnêtement, les chiffres que l'office avait indiquaient
que, jusqu'à cette année, les coûts étaient plus bas
en milieu familial.
Je voudrais faire un dernier commentaire - je ne sais si Mme la
députée a terminé - en disant que je n'ai pas voulu
laisser entendre que la société ne pouvait pas s'offrir
différentes mesures pour les femmes au foyer. Tout au contraire, je n'ai
fait ce commentaire qu'à l'occasion du salaire de la femme au foyer.
L'AFEAS ne recommande pas, d'ailleurs, cette mesure, pour le moment,
étant consciente qu'il y a peut-être d'autres mesures qui sont
moins coûteuses et plus vendables, si vous me permettez l'expression, au
gouvernement du Québec.
Je dois vous dire que j'espère très sincèrement
que, tant par la réforme sur la fiscalité que par celle du
régime de rentes, nous retiendrons quelques-unes des recommandations de
l'AFEAS, justement en ce qui concerne le dossier de la travailleuse au foyer.
Il y a des recommandations, à mon avis, qui sont très acceptables
et pour lesquelles le gouvernement ne devrait avoir aucune excuse. Je vais me
faire le porte-parole de certaines de ces recommandations. J'ai
déjà commencé les discussions. Ce serait certainement le
temps que, dans certaines mesures, justement, le gouvernement reconnaisse
l'apport social et économique des femmes qui mettent des enfants au
monde et les élèvent.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Merci, Mme la ministre. Y
a-t-il d'autres questions? Oui, M. le député de
Rivière-du-Loup.
M. Boucher: Est-ce qu'on peut adopter les crédits, compte
tenu de l'heure?
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): II me resterait une toute
petite question que je voudrais poser, qui n'est pas très importante.
Mais s'il reste quelques secondes, je voudrais porter à l'attention de
Mme la ministre la question de la déduction des dons aux campagnes de
financement des partis politiques. Si une femme travaille et qu'elle fait un
don, évidemment, elle peut le déduire. Selon les informations que
j'ai -c'est pour cela que je ne voulais pas "tatillonner"; si l'on n'avait pas
eu le temps, ce n'est vraiment pas primordial - si une femme reçoit un
crédit d'impôt, elle peut réclamer son crédit
d'impôt pour son don à un parti politique. Si elle se trouve dans
la catégorie, par exemple, des femmes qui n'ont plus d'enfants en bas de
six ans, elle ne reçoit pas son crédit d'impôt. Elle ne
peut pas le déduire. Je sais qu'au fédéral c'est
différent. Si elles sont à la maison et qu'elles ne travaillent
pas, on permet aux femmes de déduire le crédit d'impôt si
elles le reçoivent, mais on ne le leur permet pas si elles ne le
reçoivent pas. Du moins, ce sont des informations qu'on m'a
données et j'aimerais que ce soit vérifié.
Mme Le Blanc-Bantey: On va regarder ça.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Y a- t-il d'autres
questions?
Mme Le Blanc-Bantey: Non, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Est-ce que nos deux
programmes sont adoptés?
M. Boucher: Adoptés avec tous les
éléments.
La Présidente (Mme Lavoie-Roux): Je
dois dire qu'on a fonctionné avec beaucoup de
célérité. C'est peut-être le fait que tous les
députés parlaient très vite. Sentant que nous
étions limités par le temps, on voulait couvrir tout ce qu'il y
avait. Je veux remercier Mme la ministre et chacun des membres de la
commission. La commission ajourne ses travaux au mardi, 17 avril 1984, à
10 heures, à la salle 91 de l'Hôtel du Parlement, pour continuer
l'étude des crédits du ministère des Affaires
sociales.
(Fin de la séance à 12 heures)