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(Seize heures vingt-huit minutes)
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): À
l'ordre, s'il vous plaît! La commission des affaires sociales se
réunit pour procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 60, Loi modifiant la Loi sur la
protection de la jeunesse et d'autres dispositions législatives. Nous
avons le privilège ou l'inconvénient, aujourd'hui, d'avoir
à s'adapter, depuis la réforme parlementaire, à la fois
à un nouveau local et aussi à une nouvelle procédure.
C'est pour cela - pour les observateurs - qu'on n'a peut-être pas tout,
physiquement parlant. Pour ces raisons, je vais laisser la parole à Mme
la députée de L'Acadie, la présidente de la commission,
pour qu'elle nous fasse part des solutions qui ont été
discutées avec certains membres de la commission. Mme la
présidente.
Documents déposés
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je regrette que
la première nouvelle commission parlementaire à siéger
soit empêchée de le faire adéquatement, en raison de locaux
physiques qui n'apparaissent pas satisfaisants. Je pense que tout le monde est
d'accord là-dessus. Ce que je proposerais, pas immédiatement mais
dans quelques instants, ce serait que nous ajournions jusqu'à 20 heures,
pour permettre d'aménager des locaux qui nous assurent un fonctionnement
plus facile.
Je voudrais quand même porter à l'attention de mes
collègues un problème qui, normalement, aurait pu être
discuté en d'autres lieux. À 14 heures, j'ai reçu par
courrier spécial un mémoire d'un organisme, la Maison
Rouyn-Noranda, demandant à être entendu par la commission.
J'aimerais connaître le point de vue des autres membres là-dessus.
Le projet de loi 60 a été déposé au mois de
décembre dernier. Jusqu'à aujourd'hui, aucune
représentation ne m'avait été faite pour que des groupes
soient entendus. De toute façon, on n'aurait pas fonctionné de
cette façon. Cela coïncide avec l'avènement des nouvelles
commissions. Je n'ai pas eu de demande avant aujourd'hui, à l'exception
de deux appels téléphoniques, ce matin; ce n'était quand
même pas des demandes officielles jusqu'au moment où j'ai
reçu celle-ci, par livraison spéciale.
Compte tenu que tous les travaux de la commission ont été
cédulés tels que nous les connaissons maintenant, je demanderais
au Secrétariat des commissions de faire une copie de ce mémoire,
qu'il soit distribué aux membres de la commission afin qu'ils puissent
en tenir compte au moment de leurs discussions - compte tenu qu'il n'y en a
qu'un, ce n'est quand même pas trop de boulot que de le lire - et qu'il
soit déposé. Je pense qu'à ce moment il fait partie des
procès-verbaux de la commission, à moins que des membres
n'insistent, puisque le nouveau règlement le permettrait à la
limite, que ce groupe puisse être entendu. Nous n'avons pas eu l'occasion
de nous entendre auparavant, à savoir à quel moment nous
entendrons des groupes, car nous allons le faire, de quelle façon nous
allons procéder. Nous n'avons même pas établi notre
procédure pour l'audition des groupes.
C'est la suggestion que je fais, qui m'apparaît la plus pratique,
puisque nous sommes à la toute veille d'entamer l'étude
détaillée du projet de loi 60. J'aimerais avoir les
réactions de mes collègues.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
Vice-Président de la commission et député de Shefford.
M. Paré: M. le Président, à l'instar de Mme
la Présidente, je dois dire que je regrette un peu qu'on ne puisse
poursuivre, mais je suis heureux de voir jusqu'à quel point il est
possible de faire des consensus pour que la commission progresse,
améliore son fonctionnement ou établisse une façon de
procéder qui aille bien.
Je suis aussi d'accord avec la proposition que vous faites, à
savoir qu'on puisse prendre connaissance du mémoire qui vient
d'être déposé. Cela va nous permettre d'en connaître
le contenu. Je ne pense pas qu'il soit possible, de toute façon,
là où nous en sommes rendus actuellement, de commencer une
audition. Ce serait, à mon avis, ouvrir une porte à beaucoup
d'autres organismes, surtout maintenant que nous sommes rendus en commission
pour étudier le projet de loi en détail.
Je suis d'accord avec votre proposition. Je pense qu'on pourrait faire
l'unanimité là-dessus, étant donné qu'on prendrait
connaissance du mémoire soit lors de la séance de ce soir ou
même avant, si on pouvait le distribuer avant. Je suis tout à fait
d'accord et je vais dans le même sens
que votre proposition.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: Peut-être serait-il utile de demander au
ministre de la Justice, qui parraine le projet de loi, s'il accepterait aussi
de déposer les mémoires de trois associations importantes qui lui
ont transmis des commentaires. J'en ai reçu deux, parce que des copies
m'ont été transmises. J'ai entendu parler de l'autre lors d'un
reportage à la radio ce matin, c'est-à-dire le mémoire de
l'Association des centres de services sociaux, celui de la Commission des
services juridiques et celui du Comité de la protection de la
jeunesse.
M. Johnson (Anjou): Effectivement, nous avons reçu des
mémoires...
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député d'Anjou.
M. Johnson (Anjou): ...pardon. Effectivement, M. le
Président, nous avons reçu des mémoires sous forme de
lettres qui nous étaient adressées. Nous en avons fait parvenir
copie, je pense, au moins à des membres des deux côtés de
la Chambre, si ce n'est pas à tous les membres. Peut-être
pourrait-on, si vous êtes d'accord, faire en sorte qu'ils soient
déposés au même titre que l'autre, le document dont on
parlait tantôt, provenant d'un groupe. Quant à moi, je serais
prêt à déposer ce soir, à 20 heures, le nombre de
copies nécessaire. On pourrait considérer qu'ils sont
intégrés au procès-verbal, comme le reste.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Mme la
Présidente, la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Alors, tout le monde est d'accord que nous
prenions connaissance de ces mémoires. Nous ne pouvons pas
accéder à ce moment-ci à la demande du groupe de
Rouyn-Noranda, mais nous l'assurons que nous tiendrons compte de son
mémoire.
J'aimerais faire motion, M. le Président, pour que nous
suspendions nos travaux jusqu'à 20 heures, afin de les reprendre dans
des conditions physiques plus satisfaisantes.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): On retient
cette proposition. Considérant que c'est une nouvelle commission
parlementaire - c'était la première fois - on vient de me donner
les règles de procédure. J'avais oublié un détail.
Avant de conclure, il faut que je nomme les membres de la commission.
Les membres de la commission des affaires sociales sont: Mme
Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet... Les membres
présents sont: M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Gravel
(Limoilou), M. Lavigne (Beauharnois), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Brouillet
(Chauveau), M. Middlemiss (Pontiac), M. Paré (Shefford), M. Charbonneau
(Verchères), M. Sirros (Laurier) et M. Johnson (Anjou).
Sur ce, la commission des affaires sociales suspend ses travaux
jusqu'à 20 heures. Il y a tout lieu de croire que ce sera à la
salle du Conseil législatif.
(Fin de la séance à 16 h 36)
(Reprise de la séance à 20 h 17)
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): À
l'ordre! On demanderait aux gens de s'asseoir, s'il vous plaît. La
commission des affaires sociales se réunit pour procéder à
l'étude détaillé de la loi 60, Loi modifiant la Loi sur la
protection de la jeunesse et d'autres dispositions législatives.
Avant le souper, nous avons eu une première séance et nous
avons suspendu nos travaux. On se retrouve ce soir avec, en main, une
réforme parlementaire qu'on ne possède peut-être pas
complètement ou à 100%. C'est pour cela que je vais demander, de
part et d'autre, un consensus et beaucoup de bonne volonté pour que l'on
puisse mener à bien les travaux tout en essayant, le plus possible, de
s'adapter au nouveau règlement. On expliquera certains règlements
au fur et à mesure des travaux.
Nous avons nommé, avant le souper, les membres de cette
commission. Nous prolongeons cette séance, au moment où l'on se
parle, et je vais demander à M. le ministre, considérant que nous
avons un nouveau projet de loi, de faire ses remarques préliminaires.
Puis, on demandera à Mme la députée de L'Acadie de faire
une réplique à ces remarques préliminaires. Par la suite,
on va entamer l'étude détaillée, article par article, du
projet de loi.
M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Pierre-Marc
Johnson
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pense que je ne
peux ajouter beaucoup aux considérations faites lors de l'adoption du
principe du projet de loi. Je ne pense pas reprendre ici l'ensemble des
dispositions que le projet de loi 60 introduit pour modifier ce que l'on
appelait la loi 24, Loi sur la protection de la jeunesse. Cependant, je me
permettrai certains commentaires sur la nature et l'interprétation qu'il
faut donner au
fait que, dorénavant, cette loi ne touche plus le secteur de la
délinquance et ne touche que la protection. Il ne s'agit pas d'un choix
idéologique ou de principe. Il s'agit de se plier à cette
exigence puisque nous n'avons pas le choix de le faire, en vertu de deux
jugements de la Cour suprême et de la Loi sur les jeunes contrevenants,
au sujet de laquelle je recevais un télégramme ce matin de M.
Kaplan, le Solliciteur général du Canada, qui entrera en vigueur
le 2 avril prochain.
En vertu de cette loi comme en vertu des jugements récents de la
Cour suprême, il est considéré comme inconstitutionnel pour
les provinces de légiférer en matière de procédure
criminelle. Ces jugements, d'ailleurs, vont assez loin, mais disons que les
considérations que je pourrais avoir quant à cette
interprétation de la Cour suprême et de ses conséquences
pour le Québec relèveraient plus du ministre des Affaires
intergouvernementales canadiennes que du ministre de la Justice.
Il n'en demeure pas moins que l'État québécois est
dans une position où il doit accepter, se plier à cette
interprétation du droit constitutionnel des juridictions
fédérales et provinciales respectives en matière
d'administration de la justice et faire en sorte que tout ce qui touche
à la délinquance se fasse dans le cadre de la Loi sur les jeunes
contrevenants. Or, la Loi sur les jeunes contrevenants prévoit que l'on
peut avoir un traitement particulier pour les mineurs, en matière
criminelle, en passant par des programmes particuliers qui sont
approuvés par un ministre désigné par le Conseil des
ministres d'une province ou les personnes désignées par le
Conseil des ministres d'une province.
Donc, ce que nous avons fait, c'est de faire en sorte que la Loi sur la
protection de la jeunesse s'occupe exclusivement des cas de protection, mais,
en même temps, plutôt que d'attendre l'adoption des modifications
au projet de loi 60, nous avons déposé, le lendemain du
dépôt du projet de loi, un projet de décret qui serait,
à toutes fins utiles, la substance de l'application de la Loi sur les
jeunes contrevenants à l'égard des jeunes délinquants sur
le territoire québécois. Ce n'est donc pas, contrairement
à ce que j'ai pu entendre dans certains milieux, un choix
idéologique, mais bel et bien un choix imposé par la
réalité et le contexte constitutionnel.
Cela dit, en matière de protection, il nous apparaît
important et impératif de permettre au Québec de consolider ses
acquis dans ce domaine. Ses acquis, on le sait, font l'objet d'une certaine
admiration. Je le dis tout à fait modestement, puisque je pense que
cette admiration se porte sur l'ensemble de la société
québécoise et des instruments qu'elle s'est donnés depuis
une dizaine d'années dans le domaine.
Nous avons, en matière de protection, un régime qui nous a
permis de déployer des ressources sur l'ensemble du territoire du
Québec. Ces ressources sont centrées autour d'une action qui
s'inspire de quelques principes assez élémentaires: la
responsabilité des parents; le rôle accessoire, ou aidant, ou
supplétif de l'État; la nécessité de maintenir le
plus longtemps possible ou de réinsérer éventuellement le
ou la jeune dans son milieu naturel ou dans son milieu familial, notamment, et
la nécessité que les ressources institutionnelles que nous avons
tiennent compte de cette réalité juvénile, pour utiliser
l'expression consacrée historiquement, notamment dans le recours
à ce qu'on appelle les unités sécuritaires, les milieux
ouverts par opposition aux milieux fermés, et l'ensemble de la
programmation qui relève, pour l'essentiel, de la Direction de la
protection de la jeunesse dans les centres de services sociaux du
Québec. Ce projet de loi s'inspire, pour l'essentiel et très
majoritairement, des recommandations de la commission présidée
par mon collègue de Verchères et coprésidée, je
crois, par notre collègue de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Par notre collègue de Laurier.
M. Johnson (Anjou): Pardon, notre collègue de Laurier.
C'est pourquoi le projet de loi 60 vient, à toutes fins utiles, au
niveau législatif, consacrer les éléments de
réponse au diagnostic que la commission a si bien fait quant aux
difficultés d'application, notamment en matière de protection, de
la Loi sur la protection de la jeunesse.
Nous aurons l'occasion de discuter, en cours de route, dans
l'étude détaillée du projet de loi, du rôle des
directeurs de la protection de la jeunesse et des garanties dont nous voulons
les entourer dans leur existence administrative et leur marge de manoeuvre sur
le plan administratif.
Deuxièmement, nous aurons l'occasion de nous entretenir aussi du
rôle du Comité de la protection de la jeunesse en lui assignant,
comme le projet de loi le suggère - je me permettrai l'expression - une
sorte de rôle d'ombudsman, de protecteur des droits du jeune dans le
système, en permettant à ce comité de concentrer ses
activités autour de cette recherche du maintien constant des droits du
jeune et autour de la sanction de la lésion de ces droits dans le
système. Pour l'essentiel, le reste des principes que nous avons
introduits, je les ai évoqués en deuxième lecture.
Afin de permettre aux centres de services sociaux, notamment au
directeur de la protection de la jeunesse, aux centres d'accueil de
réadaptation du réseau des affaires sociales, de consacrer
l'essentiel de
leurs énergies là où il y a des problèmes -
il y en a et il va continuer à y en avoir dans notre
société; c'est caractéristique d'une société
qui connaît une mutation dans la situation économique que nous
avons connue: une mutation des valeurs, un fractionnement des entités
familiales, une remise en cause des valeurs traditionnelles - afin de permettre
à ces ressources du secteur social de concentrer leurs activités
là où il y a des problèmes, nous croyons qu'en
matière de droit pénal provincial, c'est-à-dire les
infractions au droit statutaire provincial, il faut, une fois pour toutes,
régler cette question et faire en sorte que nous ayons recours à
des mécanismes évidents, clairs, qui accordent une protection aux
jeunes au niveau de la procédure, mais qui fassent en sorte que ces
jeunes, à toutes fins pratiques, quand ils enfreignent des
règlements municipaux ou quand ils pêchent sans permis, se
retrouvent devant le Tribunal de la jeunesse, et non pas dans un processus qui
présupposerait qu'on va se mettre à faire des évaluations
sociales, à revoir l'ensemble de la réalité du jeune.
C'est, essentiellement, s'organiser pour qu'il comprenne que le droit
statutaire est une chose à respecter.
C'est probablement, d'ailleurs, le changement le plus substantiel qu'on
retrouvera quant à l'esprit de la loi par opposition à la loi 24,
indépendamment encore de ces considérations qui touchent la
nécessité de distinguer la clientèle de la
délinquance et celle de la protection pour les raisons
constitutionnelles et aussi, dans certains cas, pour des raisons d'ordre
pratique. C'est, je pense, l'essentiel de mes propos, puisque j'ai
évoqué les autres sujets: les personnes désignées
par le ministre de la Justice, les limites de cette loi et la
nécessité de recourir au pouvoir réglementaire, pour des
raisons techniques, dans certaines choses.
Je ferai une dernière remarque. J'ai retenu des propos de
certains de nos collègues, de part et d'autre de la Chambre, lors de
l'étude du principe du projet de loi, une préoccupation à
l'égard - comme c'était le cas, d'ailleurs, de la commission - de
la notion de prévention. On verra qu'un amendement que nous allons
apporter à l'un des articles veut tenir compte de cette
préoccupation des membres de la commission et des collègues qui
en ont parlé lors de l'étude sur le principe. C'était
l'essentiel de mes remarques, M. le Président.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Merci, M.
le ministre. Mme la députée de L'Acadie et présidente de
la commission des affaires sociales.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je pense que
c'est à cause d'un accident historique que je vais être le
porte-parole officiel de l'Opposition. Normalement, je ne devrais pas
l'être, mais il semble y avoir un consentement pour que je le sois ce
soir, puisque c'est la suite d'événements qui se déroulent
depuis maintenant au moins deux ans ou peut-être trois, je l'ignore.
Je ne voudrais pas refaire un discours de deuxième lecture,
d'autant plus que j'étais absente quand elle a eu lieu à
l'Assemblée nationale. Je voudrais quand même faire quelques
brèves remarques, M. le Président. (20 h 30)
D'abord, je pense qu'il faut se réjouir que l'arrimage - comme,
d'ailleurs, la commission parlementaire spéciale sur le projet de loi 24
l'avait conseillé - qui devait être fait entre la Loi sur les
jeunes contrevenants et la loi 24 ou, enfin, celle qui devait suivre, qui
devait venir la modifier, puisse se faire en toute satisfaction, sans tenir
compte des difficultés constitutionnelles qu'en bien d'autres occasions
le gouvernement ne déteste pas -c'est le moins qu'on puisse dire -
exploiter un peu. Je pense que tout le monde avait convenu qu'il ne fallait
surtout pas faire payer aux enfants ou mettre sur le dos des enfants des
querelles constitutionnelles. En procédant de la façon dont il
l'a fait, il faut reconnaître que le gouvernement actuel a suivi les
recommandations de la commission à cet égard.
Le résultat net apparaît dans l'ensemble, pour ce qui
concerne le décret... Je ne crois pas qu'on parle ici du décret,
puisque cela relève du Conseil des ministres; on ne peut même pas
en discuter, alors on va le laisser de côté pour le moment. D'une
façon qui m'apparaît assez générale, les gens sont
satisfaits du décret et des dispositions qui y sont contenues et qui
vont permettre justement, au moment de la proclamation de la Loi sur les jeunes
contrevenants, de fonctionner d'une façon satisfaisante dans
l'intérêt des enfants.
En ce qui a trait à la loi 60 qui, comme le ministre le disait,
touche essentiellement la protection de la jeunesse, je pense qu'il faut
souligner aussi que la majorité des recommandations de la commission
spéciale a été retenue, même si on sent que
certaines recommandations importantes ont peut-être été
laissées de côté ou, du moins, le gouvernement les
présente sous un angle assez différent, particulièrement
en ce qui touche le Comité de la protection de la jeunesse et ses
fonctions. On peut se demander jusqu'à un certain point s'il n'y aurait
pas eu une certaine hâte à la fin pour procéder à la
rédaction du projet de loi 60, alors qu'on sentait que les
échéances étaient de plus en plus courtes. Le ministre
nous déposera peut-être certains amendements même avant
de
commencer, tout à l'heure.
Certains de nos collègues ont souligné ce qui nous
apparaît être des pouvoirs un peu excessifs de la part du ministre.
J'aurais peut-être dû commencer par cet aspect-là. Je dois
regretter qu'on ait mis de côté une déclaration de
principes qui avait été fortement conseillée par la
commission spéciale en ce sens que ces principes soient clairement
inscrits dans la loi. On en retrouve quelques-uns ici et là, mais cette
enumeration de principes au point de départ le ministre pourra
peut-être nous l'expliquer au moment de l'étude
détaillée du projet - ne semble pas avoir été
retenue et il nous semblait important, pour ceux qui devront interpréter
la loi, que ces principes soient bien inscrits au départ dans la Loi sur
la protection de la jeunesse.
Je voudrais faire une autre remarque; le ministre pourra peut-être
répondre à ce moment-là. Il semblerait, selon les
représentations qui nous ont été faites, qu'il y aurait
peut-être lieu d'envisager la possibilité de retarder la mise en
vigueur de certains articles de la loi pour permettre aux gens de s'adapter.
Nous n'avons peut-être pas tout à fait mesuré l'impact de
certains articles de la loi. Même s'il y a une échéance
très serrée à respecter au sujet de la Loi sur les jeunes
contrevenants, peut-être que l'urgence n'est pas aussi grande du
côté de la protection. Si on doit la mettre en vigueur, il
faudrait essayer de le faire dans les meilleures conditions possible.
Je ne voudrais pas que le ministre interprète cela comme
étant une renonciation à toutes les demandes que j'avais faites
à l'Assemblée nationale pour qu'on procède à
l'étude de la Loi sur la protection de la jeunesse, loi qui est devant
nous, mais je pense qu'il ne faut pas brûler les étapes. Il y a
peut-être une échéance du côté de la
délinquance, alors qu'elle est peut-être un peu moins importante
du côté de la protection. Alors, il y aurait lieu de permettre que
les articles soient mis en application dans un délai raisonnable, mais
quand même pas avec une précipitation qui risquerait de
créer plus de problèmes que d'en résoudre.
Le ministre a indiqué qu'il avait certains amendements à
déposer. On se rappellera que tout le débat autour non pas de ce
projet de loi, mais de la Loi sur la protection de la jeunesse s'est fait dans
un climat non partisan et c'est dans ce sens que je demanderais au ministre -
je pense que cela pourrait tout simplement faire avancer nos débats ce
soir - s'il accepterait de déposer l'ensemble des amendements qu'il a
l'intention de proposer. Je veux l'assurer que, pour autant que l'Opposition
est concernée, il est dans notre intention, ce soir et dans les autres
heures qui vont suivre, de procéder absolument dans le même esprit
qui nous a animés au cours des travaux de la commission spéciale
sur la révision de la Loi sur la protection de la jeunesse. Nos
interventions seront essentiellement pour tenter d'améliorer encore, si
c'est possible, le projet de loi 60. Ce sera l'esprit dans lequel se feront nos
interventions. C'est dans ce sens-là que je demande au ministre de
déposer, s'il le veut, ses amendements.
M. le Président, je voudrais en dernier lieu, tel que le
prévoit notre nouveau règlement à l'article 158,
déposer plus officiellement, pour chacun des membres, le mémoire
qui nous a été acheminé par la Maison Rouyn-Noranda et par
Me Grenier. Je pense que chacun des membres pourrait en avoir copie.
Le Président (M. Champagne, Mille-îles): Si on fait
référence à l'article 158, un document ne peut être
déposé en commission qu'avec la permission de son
président et Mme la Présidente, quand même, s'autorise
à le déposer. Cela va. Allez-y, madame.
Mme Lavoie-Roux: Ce sont les seules remarques que je voulais
faire. Au lieu de discourir, il serait peut-être mieux d'être
pratiques et, si le ministre est d'accord, d'aborder immédiatement
l'étude article par article, en essayant de faire le travail le plus
sérieusement possible. Je crois reconnaître, à la
commission, plusieurs membres de la commission spéciale. Je suis
convaincue qu'ils partagent le même objectif que nous, de dire: C'est le
dernier effort que l'on peut faire à ce moment-ci et probablement pour
quelques années à venir, en vue de tenter d'offrir aux jeunes et
à la population le meilleur projet de loi possible sur la protection de
la jeunesse.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Est-ce que
M. le ministre veut répondre? Je reconnaîtrai ensuite le
député de Verchères.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, effectivement nous
aurons un certain nombre de papillons à présenter, qui sont de
deux natures. D'une part, certains papillons corrigent le langage de la loi,
comme cela arrive régulièrement. Notamment, je pense à un
article où on parle des directeurs de la protection de la jeunesse; on
dit "qu'il exécutera" et le "il" peut se référer à
l'ordonnance ou à l'enfant, alors il faudrait peut-être
préciser le texte. Il y a des choses de cette nature qui doivent
être corrigées. Deuxièmement, un certain nombre
d'amendements s'inspirent de certains commentaires du Comité de la
protection de la jeunesse, de l'Association des centres d'accueil, de
l'Association des centres de services sociaux ou de la Commission des services
juridiques à partir des mémoires
qu'ils nous ont transmis; des copies sont parvenues, je crois, à
l'ensemble des membres de la commission.
Ce soir, je pourrai déposer sûrement les amendements qui
vont permettre d'étudier, peut-être en vrac, les quinze premiers
articles. Pour le reste, le fignolage final qui devait être fait autour
de deux ou trois articles qui ne sont pas nécessairement substantiels,
pour des raisons techniques - je sais qu'il y a encore des pourparlers avec les
légistes - ce sera prêt demain matin. Je m'engage, demain matin,
à livrer tout le reste des articles, mais pour ce soir, je pense qu'il y
en a sept ou huit qu'on peut déposer, ce qui nous permettra de
travailler sur l'essentiel.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Oui, Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: ...mes collègues m'ont fait remarquer,
lors de la suspension de nos travaux, lesquels furent très courts cet
après-midi, qu'ils n'avaient pas eu copie des...
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles):
Mémoires?
Mme Lavoie-Roux: ...mémoires. J'en ai eu un parce que je
me trouvais un peu dans la circulation, mais les autres mémoires -non,
mais il y en a d'autres...
M. Johnson (Anjou): Je m'excuse...
Mme Lavoie-Roux: ...des centres de services sociaux, du
Comité de la protection de la jeunesse...
M. Johnson (Anjou): Je m'excuse. Effectivement, on me confirme
que deux copies ont été remises aux représentants de
l'Opposition, dont une à la présidente de la commission,
évidemment. Une autre copie a été remise à un des
responsables du côté ministériel. On verra à ce que
tous les membres aient des copies. Ce sont des documents assez longs, dans
certains cas; c'est peut-être ce qui a expliqué le délai ce
midi.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Verchères.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: Rapidement, M. le Président, je voudrais
simplement indiquer que j'ai l'impression de me retrouver dans une situation un
peu plus délicate que celle où j'étais président de
la commission parlementaire spéciale. Après avoir accompli le
travail qu'on a fait, après avoir présidé cette commission
et signé le rapport, aujourd'hui, je me retrouve dans une approche
différente: celle de défendre le projet de loi mais, en
même temps, de vouloir faire en sorte qu'on en arrive - parce que c'est
un sujet qui mérite qu'on laisse tomber toute considération
partisane - à faire un travail le plus adéquat possible.
Dans ce sens-là, je suis obligé de dire que je trouve
qu'inévitablement la méthode de travail de cette commission ne se
prêtera peut-être pas autant à une réflexion, comme
celle qu'on a pu connaître lorsqu'on a travaillé en commission
parlementaire spéciale. C'est pourquoi je demanderais qu'on soit assez
ouverts et si, éventuellement, on sentait le besoin, lors de
l'étude de certains articles, d'avoir des explications additionnelles
soit de gens qui ont fait partie de l'équipe de recherche de la
commission parlementaire spéciale, soit de gens qui ont soumis des
commentaires sur le projet de loi 60 - il n'y en a pas beaucoup, de gros
organismes, la plupart sont ici - sans ouvrir la porte à l'audition de
témoins, cela pourrait être intéressant.
Pour le reste, je crois qu'on va essayer de faire le meilleur travail
possible dans l'étude article par article pour faire en sorte que,
finalement, on en arrive à un produit qui soit le plus adéquat
possible, d'autant plus qu'on n'aura pas à y retoucher avant un certain
temps, j'ai bien l'impression, surtout avec le mécanisme de
réflexion qui a entouré le travail de la commission parlementaire
pour la rédaction du projet de loi actuel.
Étude détaillée
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Donc, cela
va pour les commentaires et les remarques préliminaires. J'appellerai
l'article 1 du projet de loi 60, mais avant, simplement pour s'habituer aux
nouvelles règles de procédure, je vais parler de deux articles.
Premièrement, le droit de parole: "Le temps de parole de vingt minutes
dont disposent les membres de la commission vaut pour chaque article,
alinéa ou paragraphe d'un projet de loi, chaque amendement ou
sous-amendement ou chaque article qu'on propose de modifier ou d'ajouter dans
une loi existante. Ce temps de parole peut être utilisé en une ou
plusieurs interventions." Alors, le droit de parole est de vingt minutes dans
le nouveau règlement.
Le temps de parole pour le ministre: "Le ministre ou le
député qui présente un projet de loi, outre le temps de
parole dont il dispose au même titre que les autres intervenants, a droit
à un temps de parole de cinq minutes après chaque intervention."
Alors, c'est pour s'habituer. Bien sûr, il faudrait garder cela à
l'esprit. Sur chacun
des articles, chacun des députés peut intervenir vingt
minutes. Je pense qu'on peut y aller, enfin.
M. Johnson (Anjou): On n'en abusera pas, M. le
Président.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que c'est pour être certain que le
ministre va toujours avoir le dernier mot?
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Ah
bien!
M. Johnson (Anjou): C'est bien la seule chose que prévoit
ce nouveau règlement à l'égard de l'exécutif.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Alors,
voici: Je ne pense pas qu'il y ait des abus de part et d'autre; on va le
souhaiter.
J'appelle l'article 1. M. le ministre, si vous voulez l'expliquer ou
faire des commentaires.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, il s'agit,
essentiellement, de remplacer l'intitulé du chapitre I de la Loi sur la
protection de la jeunesse par "Interprétation et application",
plutôt que "Interprétation".
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Est-ce que
l'article 1 est adopté?
Mme Lavoie-Roux: Adopté, M. le Président. (20 h
45)
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles):
Adopté. J'appelle l'article 2.
Interprétation et application
M. Johnson (Anjou): M. le Président, l'article 2 introduit
des modifications au paragraphe d qui permettront aux organismes qui
s'occupent, entre autres, de la défense des droits et de la promotion
des intérêts des enfants d'être considérés
comme des organismes aux fins de la loi, puisque certains organismes, on le
sait, s'occupent de cela entre autres et non pas exclusivement.
Par ailleurs, la notion de parent est modifiée afin de
l'harmoniser avec celle établie au Code civil dans le cadre de la
réforme du droit de la famille.
Finalement, la définition d'unité sécuritaire,
qu'on retrouve au paragraphe h, est supprimée. En matière de
protection, en effet, cette suppression est de concordance avec l'article 11.1
de la loi, introduit par l'article 8 du projet de loi, qui établit qu'en
matière de protection l'enfant hébergé dans un
établissement doit être gardé dans un milieu dit
approprié. En matière de délinquance, cette suppression
est évidemment concordante avec la Loi sur les jeunes délinquants
qui prévoit, pour sa part, la garde en milieu fermé
désigné par le gouvernement.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je pense que le ministre
ou ses conseillers, tout autant que nous, ont pris connaissance des remarques
de l'Association des centres de services sociaux du Québec sur ce point
particulier. Sans vouloir faire mienne recommandation qu'ils font, je trouve
qu'ils ont soulevé un point qui vaut quand même la peine
d'être examiné d'un peu plus près.
Comme vous le mentionnez, M. le ministre, la notion de parent est
modifiée pour y introduire la notion de titulaire de l'autorité
parentale, pour faire concordance avec le Code civil. Mais c'est la
définition de parent dans le sens d'y inclure à la fois le
père et la mère et je trouvais justifiée leur
réflexion suggérant que ceci pourrait impliquer qu'on soit
toujours obligé d'avoir les deux parents, alors que
particulièrement dans les cas d'enfant abandonné, de
ménage brisé, de discorde, etc., il y a de forts risques qu'on
ait des difficultés à rejoindre les deux. Alors, ils
suggéraient un amendement - je ne sais pas s'ils l'avaient
formulé - à savoir que ce soit remplacé par "le
père, la mère d'un enfant ou le père ou la mère",
mais pas nécessairement les deux. Cela me semblait fondé comme
remarque.
M. Johnson (Anjou): Essentiellement, c'est pour s'harmoniser avec
le Code civil. Dans l'ordre, au Québec, depuis un certain nombre
d'années, notamment avec les modifications récentes à la
Charte des droits et libertés de la personne, il y a d'abord la
constitution interne qui s'applique; deuxièmement, les cadres
constitutionnels dans lesquels nous vivons; troisièmement, la Charte des
droits et libertés de la personne et, quatrièmement, le Code
civil. Viennent ensuite les lois spécifiques.
Il aurait fallu, à ces fins, modifier ce que le
législateur a décidé quant au rôle respectif des
époux ou des conjoints, en termes de responsabilités face
à l'enfant. Cette loi particulière qui touche la protection de la
jeunesse renvoie au concept du droit civil tel que reconnu par les tribunaux.
On voit tout de suite le genre de situation dans laquelle on pourrait se
retrouver, lorsqu'on sait qu'il y a une désagrégation relative
des unités familiales traditionnelles, un taux de divorces d'environ 45%
en 1982, alors qu'il était de 8,5% en 1969. On voit le genre d'imbroglio
et de situation que cela peut poser.
Il reste que les tribunaux de droit familial doivent trancher, à
partir de
l'interprétation des faits et du Code civil, et assigner qui est
le dépositaire du droit parental dans certaines circonstances. Donc, il
nous apparaît plus prudent, même si c'est peut-être un peu
plus compliqué, de retenir la définition du Code civil.
Mme Lavoie-Roux: Si je me souviens bien, au moment de la
révision du Code civil, cette modification avait été
apportée dans l'esprit de reconnaître à la fois le
père et la mère, c'est-à-dire les deux parents, parce
qu'autrefois la mère était excluse, à toutes fins utiles.
En voulant corriger une chose on a peut-être créer, dans ces
cas-ci... À ce moment-là, il faudrait qu'on se
réfère à celui qui détient l'autorité
parentale ou qui exerce l'autorité parentale.
M. Johnson (Anjou): S'il y a une situation où,
effectivement, on ne peut plus présumer que ce sont les deux, ce qui est
une espèce de règle de base du Code civil, s'il y a une situation
où il y en a un des deux qui l'exerce parce que l'autre est dans
l'incapacité de le faire ou a été déchu de ses
droits en vertu du Code civil ou encore, par ordonnance du tribunal, sans avoir
été déchu de ses droits parentaux n'est pas celui qui les
exerce - au sens d'une ordonnance de la Cour supérieure dans une cause
de divorce, par exemple, dans une cause de séparation - la situation
sera celle déterminée par la cour dans le cadre de l'application
du droit familial et non pas de cette loi. Je présume que le directeur
de la protection de la jeunesse ou le Tribunal de la jeunesse, selon le cas,
appliquera le dispositif décidé par la cour. On ne peut pas
permettre à une organisation spécifique, notamment le
Comité de la protection de la jeunesse, de trancher à savoir qui
exerce l'autorité parentale. Le Code civil détermine que ce sont
les deux. Il prévoit des circonstances d'incapacité qui font que
c'est un des deux et il prévoit des circonstances de
déchéance ou de limite d'exercice de cette autorité. Je
pense qu'il faut que ce soit le Code civil qui prédomine.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Alors, s'il
n'y a pas de commentaire, est-ce que l'article 2 est adopté?
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais quand même, étant
donné que la suppression du paragraphe h faisait...
M. Johnson (Anjou): Des unités sécuritaires...
Mme Lavoie-Roux: ...des unités sécuritaires. Si
cela ne vous fait rien, pourriez-vous me répéter l'explication
que vous avez donnée? Vous avez dit que c'était en relation avec
l'article 11.1.
M. Johnson (Anjou): C'est l'article 8 du projet de loi.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Johnson (Anjou): Donc, c'est l'article 11.1 de la loi
amendée, qui prévoit que l'enfant hébergé dans un
établissement en vertu de la présente loi, c'est-à-dire la
Loi sur la protection de la jeunesse, doit être gardé dans un lieu
approprié. Alors, pour l'expliquer, je devrais peut-être faire un
tour de piste rapide de la notion d'unité sécuritaire.
L'unité sécuritaire est prévue dans la Loi sur la
protection de la jeunesse et ce, indépendamment des circonstances,
protection ou délinquance. Le critère en est plutôt un de
délinquance que de protection. L'unité sécuritaire,
très concrètement, c'est le centre d'accueil visé par
l'article lh que nous supprimons dans la Loi sur la protection de la jeunesse.
Cette désignation devait être faite par règlement; elle n'a
jamais été faite. Au sens strict, cela devait servir dans les cas
d'urgence en vertu de l'article 46c, pour les délinquants de quatorze
ans et plus, ou en vertu de l'article 91e, sur ordonnance du tribunal, dans les
cas de protection pour les enfants de quatorze ans et plus, s'il y avait un
danger pour eux-mêmes ou pour autrui ou encore s'ils tentaient de se
soustraire à la loi.
Quelle en a été l'application en pratique? On a
placé dans des centres d'accueil de réadaptation, en vertu de
l'article 91, des cas de protection. Si la désignation d'unité
sécuritaire avait été faite par règlement, en vertu
de l'ancienne loi, les cas de protection n'auraient pu se retrouver dans ces
centres. Par la suite, le 26 janvier 1984, un jugement de la Cour d'appel du
Québec est intervenu pour confirmer l'existence d'unités
sécuritaires, malgré l'absence d'un règlement qui devait
les définir en vertu de la loi 24. Or, le projet de loi 60, on se le
rappellera, a été déposé avant ce jugement de la
Cour d'appel. Depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur la protection de
la jeunesse, la pratique était d'agir comme s'il n'y avait pas
d'unités sécuritaires, compte tenu de l'absence de
règlement. Dans les faits, les mesures privatives de liberté, si
elles étaient nécessaires, étaient appliquées
même si le jugement ne le spécifiait pas - le jugement de
protection.
En pratique, on fait face à la situation suivante, et je vais
vous donner un exemple. Des jeunes garçons et filles - en
général des filles, selon les statistiques - dans les milieux de
la prostitution chez les mineurs, étaient introduits au niveau du
réseau par la voie de l'article 38, c'est-à-dire la voie de la
protection plutôt que la voie de la délinquance. Pour toutes
sortes de raisons
entourant le milieu dans lequel ces jeunes vivaient et leur
capacité de se plier à une réadaptation, il était
considéré comme plus utile de faire affaires avec les ressources
plus lourdes que sont les centres d'accueil de réadaptation qui, dans
certains cas, ont l'équivalent de ce que l'on appelle les unités
sécuritaires.
Il est très clair que ce n'est plus possible pour deux motifs. Le
premier motif, c'est que ce n'est pas possible pour des raisons juridiques. Le
deuxième motif, c'est qu'en soi il serait souhaitable de mettre à
l'abri d'une décision sans l'intervention du tribunal les jeunes dans un
contexte de privation de liberté comme celui qu'on retrouve dans les
unités sécuritaires - pour en avoir visité quelques-unes -
qui, même si elles sont destinées aux jeunes, ont beaucoup
d'encadrement et d'espaces communs de loisir et une programmation
particulière, n'en demeurent pas moins des lieux de
quasi-détention.
Il faut comprendre qu'historiquement, au moment de l'adoption de la loi
24 en 1977, nous n'avions pas la quantité de ressources que nous avons
aujourd'hui. Le développement des ressources sur le territoire a permis,
dans le contexte d'une politique qui vise à l'autosuffisance
régionale, de doter l'ensemble des régions du Québec de
ressources à la fois au niveau de l'encadrement humain qu'au niveau des
milieux dits sécuritaires plus adéquats, même si on sait
que ce n'est pas parfait et même si on a un certain nombre de projets en
plan au ministère des Affaires sociales, notamment dans le cas de la
rive sud de Montréal.
La décision est donc d'abolir la notion d'unité
sécuritaire parce qu'avec une Loi sur la protection de la jeunesse vous
n'avez pas besoin d'unités sécuritaires. Les seules unités
de ce type, ou analogues à celles-là, qui vont continuer
d'exister dans la réalité et par l'application de la loi sont
celles auxquelles se réfère la Loi sur les jeunes
délinquants fédérale, en matière de
délinquance. Effectivement, le ministère des Affaires sociales
devra, de façon administrative, s'assurer que les enfants qui
étaient des cas de protection maintenus dans des milieux dits
sécuritaires ne le soient plus, qu'on y substitue un encadrement humain
plutôt qu'un encadrement physique avec des barreaux ou des grilles. C'est
l'explication de la suppression du paragraphe h.
Mme Lavoie-Roux: Qu'advient-il des adolescents auxquels vous
faisiez allusion que, pour des raisons probablement à la fois humaines
et thérapeutiques, on choisissait de mettre en centre d'accueil en
invoquant l'article 38 plutôt que l'article 40. Si je vous ai bien
compris, M. le ministre, vous disiez que, même s'il n'y avait pas
d'unités sécuritaires dans ces centres d'accueil, il y avait
quand même plus d'encadrement pour servir ces jeunes que dans un centre
d'accueil où on a des cas de protection. Enfin, ce peuvent être
des cas d'enfants qui ont des troubles de comportement et ainsi de suite.
Est-ce qu'on pourra continuer - j'essaie de suivre votre raisonnement - de les
leur offrir, finalement? Les unités sécuritaires n'existaient pas
officiellement mais, dans les faits, elles existaient. Est-ce que c'est cette
situation qui se continue? J'essaie de comprendre. (21 heures)
M. Johnson (Anjou): Bon. En vertu de la loi 24, en principe, un
cas de protection ne devait pas aller dans une unité sécuritaire.
Comme il n'y a jamais eu d'unité sécuritaire définie par
le règlement, il y a des cas de protection qui se sont retrouvés
dans des emplacements physiques que le bon sens aurait décrits comme des
unités sécuritaires, indépendamment de ce que disaient les
textes. C'était une pratique réelle. Elle n'est pas nouvelle.
J'ai entendu, ce matin - je ne me souviens pas dans quelle
émission de radio -quelqu'un dire qu'il y avait là un recul
absolument épouvantable et ainsi de suite. C'était la pratique.
La pratique était que ces lieux étaient utilisés pour des
fins de protection, dans bien des cas. Je pense, entre autres, à un cas
bien connu à Montréal, celui des jeunes délinquantes. Les
conséquences de l'application de ce projet de loi et des mesures
administratives qui suivront seront doubles. D'une part, il y aura un
encadrement et des programmes, sur le plan des ressources humaines, qui seront
plus exigeants et sans doute plus coûteux; deuxièmement, la
désignation des centres se fera par règlement à cause de
la loi fédérale. Or, cette désignation, en pratique, va
amener le ministère des Affaires sociales à faire des
transformations physiques à certains centres d'accueil de
réadaptation, en transformant une partie des lieux qui serait
considérée comme des unités sécuritaires en des
lieux qui pourront être décrits comme étant ouverts, au
sens de la Loi sur les jeunes contrevenants.
Je présume que les cas de protection dont on parle, qui
n'étaient pas entrés par la voie de la délinquance,
continueront sans doute d'entrer par la voie de la protection. Quand on parle
de prostitution de mineurs, dans bien des cas, on a affaire à un
problème d'apparence délinquante, mais c'est peut-être plus
un problème de nature sociale, qui exige un contexte de protection, de
bien des façons. Je présume donc qu'il y aura et qu'il devra y
avoir au ministère des Affaires sociales une adaptation carrément
physique, à certains endroits, de certaines des ressources
disponibles.
La période transitoire je l'espère, pourra donner lieu au
genre de moratoire qu'on a connu dans le passé, étant
donné que ce n'est pas vrai que, du jour au lendemain, on va transformer
Notre-Dame-de-Laval c'est cela? -...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Johnson (Anjou): ...en autre chose que ce que c'est en ce
moment. Sur 112 lits ou clients permis, il y en a 103 qui sont entrés
par la voie de l'article 38 et non pas par la voie des articles sur la
délinquance. Cela ne veut pas dire que, le lendemain de l'adoption du
projet de loi 60, on va fermer ce centre d'accueil; soyons pratiques. Mais il
va falloir que le ministère des Affaires sociales s'ajuste à
cette nouvelle réalité et à cette loi. L'alternative
serait carrément de prévoir qu'en matière de protection
une telle chose, une unité sécuritaire, doit exister. Je pense
que cela pourrait être un peu plus dangereux, par exemple, sur le plan du
"recul", entre guillemets.
Dans la période transitoire qui pourra prendre un certain temps -
je ne pense pas que cela se règle en quelques mois, cela peut prendre un
certain nombre d'années dans certaines régions - le Comité
de la protection de la jeunesse sera, en vertu du reste du projet de loi,
puisqu'il verra à protéger l'enfant contre la lésion de
ses droits, celui qui appréciera la notion du milieu approprié.
Si un enfant en protection se retrouve dans des conditions dites
sécuritaires, pour les fins de la compréhension de ce que sont
ces endroits, il se pourrait, ad hoc, que le Comité de la protection de
la jeunesse considère que ce n'est pas le lieu approprié, comme
il se pourrait, dans un autre cas, qu'il décide que oui, c'est le lieu
approprié, compte tenu des circonstances. Je pense que c'est un bon
exemple de l'utilité des articles qui visent à donner ce genre de
pouvoirs au Comité de la protection de la jeunesse pour lui permettre
d'apprécier l'ensemble des circonstances et d'être en même
temps un surveillant de la protection du principe.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que je vous comprends bien en disant que,
comme résultat, d'autres adolescents vont se retrouver dans la
même situation? On souhaite, puisque c'est autant un problème
social et de protection, dans le fond, qu'un problème de
délinquance, qu'ils entrent - je ne sais pas si on peut parler d'entrer
- dans le système par la voie de la protection et, à ce
moment-là, alors qu'aujourd'hui on dispose de milieux physiques qui
s'apparentent à ce qu'on pourrait appeler des milieux
sécuritaires, le ministère des Affaires sociales devra modifier
son approche, sa forme d'encadrement vis-à-vis de ce genre d'enfant.
Est-ce ce que cela veut dire?
M. Johnson (Anjou): Je pense que c'est ce que cela veut dire.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Beauharnois.
M. Lavigne: M. le Président, dans le même sens, j'ai
connu un centre de réadaptation qui se disait, au début, non
sécuritaire. Cela avait comme effet pratique qu'un jeune pouvait y
entrer parce qu'il avait commis un délit durant l'avant-midi. Il y
était amené bien souvent par les policiers et on le retrouvait
dans les mêmes rues de la ville vers la fin de l'après-midi. Il y
a eu énormément de difficultés dans ce sens parce que,
soi-disant, le centre n'avait pas d'unité sécuritaire. Il n'y
avait pas une surveillance suffisamment étroite des jeunes
délinquants qui y étaient amenés. Les raisons pour
lesquelles le ministère des Affaires sociales a modifié, a
métamorphosé ce centre en un centre de réadaptation
à sécurité presque maximale - lorsqu'on le visite, comme
vous le disiez tantôt, il y a des barreaux, il y a vraiment des cellules,
c'est presque une prison - j'imagine qu'il y avait toute une gamme de raisons
qui nous poussaient à le faire.
Selon votre approche, on devrait plutôt alléger ce genre de
centres, les rendre moins sécuritaires et faire en sorte que nos jeunes
y restent parce qu'on y aura amélioré la pédagogie, les
programmes de réhabilitation et de redressement, mais, entre le moment
où le délit est commis et celui où le délinquant ou
la délinquante arrive au centre, il y a une période d'ajustement
difficile. Même le meilleur programme au monde, je pense, ne pourra avoir
un effet immédiat sur le jeune. Il faudrait que, pendant une
période déterminée, le centre ait certaines unités
sécuritaires en attendant que la pédagogie, les bons cours et les
bons moniteurs aient fait comprendre à ce jeune qu'il doit y demeurer un
peu volontairement. Au début, lorsqu'il entre au centre, sa seule
préoccupation est de trouver la première fenêtre sans
barreaux pour en sortir.
M. Johnson (Anjou): Je comprends la préoccupation du
député. Cependant, c'est peut-être l'habitude de la loi 24.
Mais je comprends très bien son réflexe. J'ai eu le même
réflexe durant plusieurs semaines, chaque fois que je regardais le
projet de loi et que j'en voyais certaines facettes. II y a une confusion entre
la clientèle de la délinquance et celle de la protection. On se
réfère, dans ce projet de loi, uniquement à la protection,
pour les raisons que j'ai évoquées tout à l'heure. On dit
que, dorénavant, en protection, il n'y a plus d'unités dites
sécuritaires. Cela ne veut pas
dire qu'il n'y en aura pas pour les cas de délinquance. Au
contraire, il devra y avoir des unités dites sécuritaires dans le
cas de ceux qui commettent des délits en délinquance.
Donc, le genre de situations que le député a décrit
va donner lieu à ceci: un ou une jeune pris dans une circonstance de
délit pourrait être amené à un centre. Le tribunal
ou les différents intervenants qu'on retrouve dans la Loi sur les jeunes
délinquants et dans l'application du programme québécois
qui en sera faite pourront assigner ou envoyer cet enfant ou ce jeune de
façon provisoire ou permanente, pour une durée
déterminée, à la suite d'une ordonnance, dans un centre de
réadaptation qui pourra, dans plusieurs cas, être un centre
sécuritaire.
Encore une fois, c'est toujours le même problème. On a
été habitué à travailler avec une loi qui
prévoyait les deux; cette loi ne touchant que la protection, ce n'est
que dans les cas de protection qu'on abolit la notion d'unité
sécuritaire et non pas dans les cas de délinquance. D'accord?
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: Est-ce qu'il n'y aurait pas intérêt,
M. le Président, à ce qu'on étudie, en parallèle,
l'article 11.1? C'est l'article 8, paragraphe 11.1 qui dit: "Un enfant
hébergé dans un établissement en vertu de la
présente loi doit être gardé dans un lieu
approprié." Ce serait peut-être plus cohérent, finalement,
aux fins de la discussion.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Aux fins de
la discussion, je suis d'accord peut-être qu'on s'y
réfère.
M. Charbonneau: Oui, mais qu'on fasse aussi la discussion sur cet
article-là. Quand on y sera arrivé, on aura seulement à
l'adopter.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Enfin, je
pense que...
M. Charbonneau: Le ministre y a fait allusion tout à
l'heure.
Le Président (M. Champagne, Mille-
Îles):
D'habitude, notre procédure, c'est d'étudier article par
article et s'il...
M. Johnson (Anjou): Pour les fins de la discussion, si notre
collègue nous le permet, M. le Président, je voudrais simplement
dire que l'article 8, quand il introduit des modifications à l'article
11.1, dit en une ligne et demie: "Un enfant hébergé dans un
établissement en vertu de la présente loi doit être
gardé dans un lieu approprié."
La notion du lieu approprié s'applique dans un contexte, encore
une fois, de protection. Les garanties et les garde-fous qu'il y a dans la loi
font que, d'une part, il y a une pratique au niveau des DPJ qui va s'appliquer,
il y a une pratique au niveau du Tribunal de la jeunesse et il y a la
capacité pour le Comité de la protection de la jeunesse
d'intervenir pour savoir si les droits de l'enfant sont lésés.
Or, dans la mesure où l'article 11.1 dit qu'un enfant
hébergé dans un établissement en vertu de la
présente loi doit être gardé dans un lieu approprié,
l'enfant, ses parents ou une autre personne qui a, en vertu de la loi, le droit
de s'en plaindre - ou cela peut être de l'initiative, dans certains cas,
du comité de protection, si le comité de protection est saisi de
la question - pourra juger si, oui ou non, le lieu est approprié. Il se
pourrait que certains cas de protection se retrouvent en milieu dit
sécuritaire physiquement, même s'il n'est pas
désigné comme tel, et le Comité de la protection de la
jeunesse, je pense, sera un garde-fou extrêmement important dans
l'application de cette notion.
M. Charbonneau: Ce qui veut dire que d'un côté on
aboli par l'article 1h...
M. Johnson (Anjou): Oui.
M. Charbonneau: ...la notion de sécurité et on la
remplace, à l'article 11.1, par "gardé dans un lieu
approprié."
M. Johnson (Anjou): Voilà!
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): S'il n'y a
pas d'autres commentaires et d'autres questions, est-ce que l'article 2 est
adopté?
Mme Lavoie-Roux: Oui, adopté.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): L'article 2
est adopté. J'appelle l'article 3.
M. Johnson (Anjou): L'article 3, M. le Président, vient
modifier les articles 2 et 2.1 de la loi. On définit le champ
d'application de la loi à l'article 2 et l'article 2.1 qui est
proposé prévoit qu'en matière de délinquance les
mesures de rechange et le mécanisme d'orientation des adolescents qui
auront commis une infraction à une loi ou à un règlement
du Canada sont établis dans le programme de mesures de rechange
autorisé par le gouvernement du Québec conformément
à la Loi sur les jeunes contrevenants du gouvernement
fédéral. Alors, à toutes fins utiles, c'est l'article de
loi qui se réfère à l'application de la Loi sur les jeunes
contrevenants pour l'essentiel en matière de délinquance.
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas de question, M. le
Président.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): S'il n'y a
pas de question, est-ce que l'article 3 est adopté?
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): L'article 3
est adopté. J'appelle l'article 4 et nous arrivons maintenant...
M. Johnson (Anjou): Avec un papillon.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): ...avec une
série d'amendements.
M. Johnson (Anjou): Je pense que l'ensemble des amendements,
jusqu'à l'article 37 du projet de loi, vous a été
déposé.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Alors, vous
avez l'amendement à l'article 4?
Principes généraux et droits des
enfants
M. Johnson (Anjou): M. le Président, d'abord, je prendrai
l'article 4 dans sa formulation actuelle; ensuite, je vous ferai lecture du
papillon et je vous lirai l'article tel qu'il devrait se lire par la suite.
L'article 4 du projet de loi introduit les principes généraux qui
doivent servir de guide aux personnes qui sont appelées à
intervenir auprès de l'enfant et des parents. À cet effet, il
introduit l'article 2.2 qui affirme la primauté de la
responsabilité parentale à l'égard de l'entretien, de
l'éducation, de la surveillance des enfants ainsi que des soins à
leur pourvoir. Il prévoit que l'intervention de l'État ne soit
donc que subsidiaire et visera à corriger une situation ou à
aider les parents dans l'exercice de leur autorité parentale.
Il introduit également, à l'article 2.3 dont je vais
maintenant faire la lecture, l'affirmation de l'importance de la
prévention et de la participation de la communauté comme principe
directeur d'une intervention en vertu de la loi. En effet, le papillon que nous
déposons se lit comme suit, M. le Président: L'article 4 du
projet de loi est modifié par le remplacement, dans les troisième
et quatrième lignes de l'article 2.3 proposé, des mots "les cas
qui donnent ouverture à cette intervention" par les mots "les situations
qui donnent ouverture à de telles interventions". (21 h 15)
L'article 2.3 de la loi se lira donc comme suit: "Toute intervention
auprès d'un enfant ou de ses parents par une personne à qui la
présente loi confie des responsabilités envers cet enfant doit
viser à prévenir les situations qui donnent ouverture à de
telles interventions et à favoriser l'implication de la
communauté."
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Nous allons
disposer de l'amendement. Est-ce qu'il y a des questions à poser ou des
commentaires à faire sur l'amendement?
Mme Lavoie-Roux: Un instant, s'il vous plaît, M. le
Président!
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Cela
val
Mme Lavoie-Roux: Avant de commenter l'amendement à
l'article 4, et l'ensemble de l'article, j'aimerais demander au ministre
pourquoi - et je pense que c'est ici que le problème se pose - on
retrouve, à l'article 2.2, un énoncé de principe rappelant
la responsabilité des parents eu égard à
l'éducation et à l'entretien de leurs enfants.
La commission avait demandé qu'une série de principes
soient insérés; je peux vous en nommer quelques-uns: le mineur
devait jouir des droits et libertés conférés par la Charte
des droits et libertés de la personne, compte tenu qu'il y avait eu de
nombreuses représentations faites à cet égard; le respect
des droits devait être conjugué à la promotion des
intérêts; reconnaître la responsabilité de l'enfant;
reconnaître la responsabilité de l'État à l'endroit
des mineurs; l'Etat, dans ses interventions, devait viser le maintien de
l'enfant dans son milieu naturel. Il y en avait deux autres qui m'apparaissent
peut-être plus, à ce moment-ci, des modalités que des
principes, à savoir d'impliquer les personnes et les organismes du
milieu. Un dernier touchait les responsabilités de l'État en
matière de prévention de la dégradation de la situation
des mineurs.
Je me demandais si, à ce moment-ci, au lieu de se contenter d'un
seul principe à l'article 2.2. Le 2.3 vise davantage les intervenants
tandis que l'article 2.2 affirme un principe. Pourquoi ne pas avoir retenu -et
ce n'est pas parce que je veux mettre l'amendement de côté, on va
y revenir - la possibilité de cette énumération de
principes qui nous semblent importants.
M. Johnson (Anjou): D'abord, en raison d'un certain conservatisme
législatif, à l'exception de quelques très rares lois, il
n'y a pas l'équivalent des dispositions déclaratoires qu'on
retrouve, par exemple, dans la loi fédérale depuis un certain
nombre d'années.
Deuxièmement, un certain nombre de principes qu'aurait voulu voir
retenir la commission sont déjà dans la Charte des droits et
libertés de la personne ou dans le Code civil. Il nous apparaissait que
la
redondance était inutile par définition.
Troisièmement, nous avons intégré, pour
l'essentiel, la plupart de ces principes dans la loi. Je donne des exemples.
Dans la proposition législative, en page 2, le principe de l'article 10:
L'intérêt du jeune et le respect de ses droits sont des motifs
déterminants d'une décision, d'une ordonnance ou d'un jugement
pris à son sujet; c'est l'article 3. Les parents sont les premiers
responsables de pourvoir au soin, à l'entretien, à
l'éducation du jeune et d'en assurer la surveillance; c'est l'article
2.2, tel qu'introduit par l'article 4 du projet de loi. Une décision,
une ordonnance ou un jugement en vertu de la présente loi doit tendre
à maintenir le jeune dans son milieu parental; si un tel maintien n'est
pas possible, dans l'intérêt du jeune, la décision,
l'ordonnance..., c'est l'article 4.
Je pourrais y aller comme cela pour au moins une quinzaine des notions
retenues et qu'on aurait voulu voir intégrer dans une déclaration
de principes. Celle que nous ne retenons pas, je le dirai, c'est: Une
décision, une ordonnance ou un jugement en vertu de la présente
doit viser à donner au jeune et à ses parents des mesures d'aide
et de "support". Je pense qu'on peut l'inférer de l'ensemble de la loi.
Évidemment, ce qui touche la délinquance n'y est pas, pour les
raisons que j'ai exposées tout à l'heure.
M. Charbonneau: M. le Président...
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: ...je comprends les arguments invoqués par
le ministre, y compris le conservatisme législatif de notre façon
de faire les choses, au Parlement du Québec. Néanmoins, je
considère que pour un projet de loi comme celui-là, d'un point de
vue pédagogique, il y aurait eu avantage, malgré le fait qu'il y
ait redondance, qu'on regroupe au début du projet de loi, dans un
chapitre préliminaire, une déclaration ou un énoncé
d'un certain nombre de principes que, de toute façon, le gouvernement
reconnaît lui-même, soit parce qu'ils sont déjà dans
d'autres lois ou parce qu'il est prêt à les introduire dans de
nouveaux articles.
On avait considéré à ce moment-là que -
étant donné, entre autres, les problèmes encourus dans
l'application de la loi 24, au niveau de l'interprétation - dans
l'opinion publique, cela aurait eu une valeur non négligeable. Je ne
sais pas si...
M. Johnson (Anjou): Encore une fois, M. le Président, je
pense que nous retenons la substance de ce qu'a proposé la commission
sauf que, plutôt que de le mettre au début du projet de loi, dans
une espèce de dispositif déclaratoire, on l'introduit dans ce qui
donnera, par la suite, des pouvoirs, ce qui justifiera des interventions, ce
qui initiera des procédures ou différents mécanismes
prévus dans le projet de loi. Disons qu'on ne peut pas tout faire en
même temps. Peut-être qu'un jour il serait intéressant de
réviser une série de lois et de voir si on ne devrait pas faire
comme au fédéral ou dans certains autres Parlements. Comme on a
déjà réformé le mode de fonctionnement des
commissions parlementaires - on a fait cela cette année, on a introduit
des principes que la commission nous laisse voir un à un...
Peut-être qu'un jour on introduira des articles déclaratoires aux
projets de loi. Je pense qu'on a déjà fait un certain nombre de
choses, cette année, y compris dans ce projet de loi, quant aux
recommandations de la commission.
Mme Lavoie-Roux: À ce moment-là, je trouve un peu
étonnant le titre du chapitre qui est quand même: Principes
généraux et droits des enfants. Je comprends que si on fouille
dans le projet de loi - je ne sais pas combien d'articles il contient, une
soixantaine peut-être - on peut dire: On le retrouve ici, le principe qui
rend les parents responsables; on retrouve là le principe même des
droits des enfants; le Comité de la protection de la jeunesse a une
responsabilité à cet endroit-là. Cependant, je pense que
cela aurait formé un tout beaucoup plus cohérent et beaucoup plus
facile à identifier, comme le disait le député de
Verchères, et cela aurait permis aussi une interprétation plus
facile du projet de loi. Enfin, cela semblait aussi répondre aux
nombreuses représentations qui nous avaient été faites
dans ce sens-là. Ce n'était pas, je pense, un caprice des membres
de la commission, ce désir de clarté. Vous dites: On ne veut pas
imiter le fédéral. Je pense que ce n'est pas dit dans un esprit
malin.
M. Johnson (Anjou): Je n'ai pas dit qu'on ne voulait pas
l'imiter.
Mme Lavoie-Roux: Oui, je m'excuse d'avoir déformé
votre pensée. Je suis même prête à retirer mes
paroles. On voit dans la Loi sur les jeunes contrevenants, à l'article
3, une déclaration de principes et je pense que cela... - je vais
être conservatrice, d'habitude vous aimez ignorer...
M. Johnson (Anjou): ...de la loi.
Des voix: Ah! Ah!
Mme Lavoie-Roux: ...je ne trouve pas que c'est une grosse
justification, que vous vouliez pratiquer un certain conservatisme. Je ne
comprends vraiment pas la raison fondamentale.
M. Johnson (Anjou): C'est parce qu'on a déjà, dans
le Code civil, une série de principes sur les droits de l'enfant. On a
déjà, dans la Charte des droits et libertés de la
personne, une série de principes sur les droits de l'enfant. Ce sont
deux textes fondamentaux dans la loi québécoise. En constitution
interne, la Charte des droits et libertés de la personne et le Code
civil sont les lois fondamentales du pays ou de la province. Il y a
déjà deux chapitres sur les principes généraux
à l'égard des enfants, à la fois dans le Code civil et
dans la Charte des droits et libertés de la personne.
Que dans une loi spécifique, à toutes fins utiles, on
répète des choses que l'on retrouve dans les lois fondamentales,
il y a quelque chose de redondant. Je comprends qu'il y a là une sorte
d'argument pédagogique, mais je vous dirai que je suis convaincu que,
dans la Charte des droits et libertés de la personne, il y a une
certaine pédagogie et c'est important. Je pense qu'au fil des
années les citoyens verront à s'y référer. Si, dans
le Code civil, au chapitre des droits de l'enfant, le législateur a
jugé bon, depuis un certain nombre d'années, d'y consacrer des
articles du Code civil, il a pris cette décision dans ce domaine. Si on
refait cela dans toutes les lois, c'est une autre paire de manches. Je ne pense
pas qu'on ait à le faire dans toutes les lois.
Mme Lavoie-Roux: Bon, espérons que ceux qui auront
à travailler avec la Loi sur la protection de la jeunesse l'auront
toujours en annexe. Je comprends que les tribunaux l'aient; ils connaissent
toutes les lois et...
M. Johnson (Anjou): Je présume que le réseau des
affaires sociales devrait connaître la Charte des droits et
libertés de la personne. S'il ne la connaît pas, je pense qu'il a
un problème.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais ce sont les spécialistes du
réseau. Les lois devraient être claires pour les gens
ordinaires.
M. Johnson (Anjou): Oui.
Mme Lavoie-Roux: Surtout pour les gens ordinaires. Alors, c'est
dans ce sens que l'insertion de certains principes, même... Je suis
d'accord avec vous. D'ailleurs, n'y a-t-il pas d'autres lois où il y
aurait de la redondance, à bien y penser?
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Laurier.
M. Sirros: M. le Président, dans toute cette discussion,
ce que j'ai cru comprendre de la part du ministre, c'est qu'il disait: Si vous
regardez bien soigneusement, vous allez retrouver les principes que vous voulez
voir tous ramassés ensemble dans un chapitre qui s'appellerait
"principes généraux". Dans ce sens, il semble dire qu'il n'est
pas contre l'idée d'avoir des principes généraux inscrits
dans la loi. Pourtant, il semble ne pas vouloir les inscrire de façon
claire et nette sous un chapitre qui serait intitulé "principes
généraux de la loi". Je vois là une certaine
incohérence; c'est peut-être l'aspect de l'exécutif qui
vient, dans cette nouvelle commission, imposer au législatif sa
façon de voir les choses. Finalement, cela revient à dire: Oui,
ils sont tous là, plus ou moins, sauf que vous allez devoir fouiller la
loi pour les retrouver.
Il me semble qu'il serait bien plus logique et cohérent si on
disait: Les principes généraux, on les regroupe et on intitule le
chapitre "principes généraux de la loi spécifique sur la
protection de la jeunesse". Ce serait là, visible, en pleine
lumière, pour tout le monde, et cela donnerait aussi au ministre
l'occasion de se détacher un peu de ce conversatisme qu'il semble
favoriser.
M. Johnson (Anjou): Ce n'est pas sans signification ou sans
conséquence de décider d'établir une série de
principes, même déclaratoires, dans un projet de loi, bien qu'il
semble y avoir une approche toute nouvelle. J'écoutais ma
collègue, la ministre de la santé fédérale,
récemment, expliquer que les articles déclaratoires n'avaient
aucune importance, qu'on ne pouvait pas en inférer que cela violait la
constitution, par exemple. Mais, objectivement, au niveau de
l'interprétation qu'en font les tribunaux, cela a des
conséquences. (21 h 30)
Dans la mesure où on retrouve un certain nombre des principes
dont on parle dans des lois tout aussi et je dirais même plus
fondamentales - parce que c'est la Charte des droits et libertés de la
personne qui prime et le Code civil, c'est la règle, ce sont les bases
de notre droit - dans la mesure où l'on reformulerait dans une loi
spéciale des principes analogues à ceux qu'on retrouve dans des
chapitres entiers de la Charte des droits et libertés de la personne et
du Code civil, cela pourrait engendrer des incohérences. Par contre,
d'affirmer un certain nombre de principes dans le cadre d'articles
générateurs de droits en plus d'être une affirmation de
principes, cela colle, sur le plan de l'interprétation des tribunaux, le
droit à ce qui est l'objet et la substance même du projet de loi
ou, enfin, de la loi qui est devant le juge et les plaideurs. Cela
m'apparaît important.
Ce n'est pas le conservatisme pour le plaisir du conservatisme mais,
avant de s'imaginer qu'on va peut-être provoquer des incohérences
dans l'application de la Loi sur la protection de la jeunesse à
l'égard de la
Charte des droits et libertés de la personne et du Code civil, il
faut y penser deux fois. Là, on a eu le temps d'y penser une fois et
peut-être qu'à l'expérience le législateur y
repensera deux fois. Mais le jour où il fera cela, je pense qu'il faudra
qu'il le fasse pour l'Environnement, le Loisir, l'Éducation et
l'ensemble des projets de loi. Le jour où il va faire cela, il saura
dans quoi il s'embarque. Je pense qu'on n'a pas à l'improviser, tout
important que soit ce projet de loi et tout fondamentale que soit la
préoccupation du Parlement à l'égard des droits des
enfants. Dans la mesure où, sur le plan de la substance, nous retenons
l'essentiel et nous nous inspirons des principes de la commission dans ce qui
provient du droit et ce qui initie à un processus précis à
l'égard des enfants dans certaines situations, je pense que nous allons
à l'essentiel et que le reste des inconvénients m'apparaît
évident à l'idée d'introduire un certain nombre de
dispositions déclaratoires au début de la loi.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, si vous me le permettez,
j'écoute le ministre qui dit: Cela va faire possiblement non pas un
dédoublement, mais une redondance quelconque avec nos lois
fondamentales, la Charte des droits et libertés de la personne et le
Code civil. J'ai devant moi une série de principes - c'est très
court, je les ai énumérés tout à l'heure pendant
que le ministre discutait avec un de ses conseillers, ce qui est tout à
fait légitime. Ces principes sont quand même ceux qui avaient
été recommandés par la commission, qu'on a tenté
d'écourter parce qu'il y avait peut-être des modalités dans
les recommandations de la commission; je viens de lui en lire, justement, et il
y en avait peut-être trop. Je ne les lirai même pas au complet,
pour ne pas que ce soit long.
Premièrement, le mineur jouit de tous les droits et
libertés conférés par la Charte des droits et
libertés de la personne. Admettons qu'il y a une redondance avec la
Charte des droits et libertés de la personne.
Deuxièmement, le respect des droits du mineur conjugué
à la promotion de ses intérêts doivent être les
motifs déterminants des décisions prises à son endroit. Je
ne pense pas que cela se retrouve dans le Code civil... Cela se retrouve dans
le Code civil? Cela se retrouve dans la loi 60 et on dit de les mettre
ensemble, mais cela ne se retrouve pas dans nos lois fondamentales.
Troisièmement, l'État reconnaît aux parents la
responsabilité première en matière de soutien et de
"support" aux mineurs tant au plan de la sécurité
matérielle et émotive qu'au plan du développement physique
et intellectuel. Cela, on le retrouve ici, on peut peut-être aussi
l'écourter.
Quatrièmement, l'État se reconnaît, cependant, une
responsabilité complémentaire à l'endroit des mineurs en
difficulté. Est-ce que vous retrouvez cela ailleurs dans vos lois
fondamentales?
M. Johnson (Anjou): C'est la raison de l'existence même de
la loi. Pensez-vous vraiment qu'on aurait fait travailler sept membres du
Parlement...
Mme Lavoie-Roux: Je parle de vos autres lois.
M. Johnson (Anjou): ..si l'État n'était pas
intéressé aux mineurs? On ne serait pas ici en train d'en
parler.
Mme Lavoie-Roux: Comme on le disait dans mon jeune temps: Ne
faites pas votre "smart".
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Faites
attention, enfini
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je réalise que le
langage n'était peut-être pas tout à fait parlementaire. Je
suis d'accord que c'est la raison d'être de la loi 24, mais votre
argumentation, c'est que cela va être une répétition de ce
qui existe dans nos lois fondamentales, entre autres, le Code civil et la
Charte des droits et libertés de la personne.
M. Johnson (Anjou): C'est un des arguments.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais je veux bien entendre l'autre.
M. Johnson (Anjou): J'ai droit à cinq minutes chaque fois
que vous parlez.
Mme Lavoie-Roux: Cinquièmement, l'État doit
favoriser dans ses interventions le maintien de l'enfant dans son milieu
parental. Le reste, je ne le lis pas.
M. Johnson (Anjou): C'est à l'article 4.
Mme Lavoie-Roux: Ah oui! L'autre, c'est: L'intervention
auprès d'un enfant et de ses parents doit favoriser dans toute la mesure
du possible l'implication des personnes ou organismes oeuvrant dans le milieu
de vie de l'enfant. Cela nous semblait extrêmement important du point de
vue de l'implication de la communauté.
Le dernier: L'État, se reconnaissant une responsabilité
particulière face à la jeunesse en difficulté, se
reconnaît aussi une obligation sociale de prévention de la
dégradation de la situation de ses mineurs. Cela était aux termes
des responsabilités en matière de prévention.
Cela se résume à cela. Comme je le
disais, on a écourté passablement les recommandations, on
les a peut-être mal écourtées, je suis prête à
admettre cela. Je suis même d'accord que cela soit encore
simplifié, mais je trouve qu'il n'y a pas beaucoup de recoupement avec
ce que vous retrouvez dans les lois fondamentales.
M. Johnson (Anjou): On les retrouve effectivement au chapitre II,
Principes généraux et droits des enfants. Les cinq premiers
paragraphes, c'est exactement cela: 2.2 "La responsabilité de pourvoir
au soin à l'entretien et à l'éducation d'un enfant et d'en
assurer la surveillance incombe en premier lieu à ses parents." 2.3
"Toute intervention auprès d'un enfant et de ses parents par une
personne à qui la présente loi confie des responsabilités
envers cet enfant doit viser à prévenir -selon le papillon qu'on
vous a donné - les situations qui donnent ouverture à de telles
interventions."
Ensuite, 3: "Les décisions prises en vertu de la présente
loi doivent l'être dans l'intérêt de l'enfant et dans le
respect de ses droits."
Mme Lavoie-Roux: ...le milieu parental.
M. Johnson (Anjou): 4 "Toute décision prise en vertu de la
présente loi doit tendre à maintenir l'enfant dans son milieu
parental." On a un papillon également là-dessus que vous avez vu
et qui amène la notion de retour à son milieu. On les a pour
l'essentiel; le reste, c'est dans la Charte des droits et libertés et le
Code civil.
Mme Lavoie-Roux: Bon, écoutez...
M. Johnson (Anjou): Ils sont là et ils sont dans l'ordre
présenté sous la rubrique: Principes généraux et
droits des enfants. Je pense que l'intervention de la députée de
L'Acadie aurait pu nous amener à conclure qu'il fallait une
déclaration de principes. À ce moment, il aurait fallu y
intégrer le reste et le reste, c'est dans le Code civil et dans la
charte des droits.
Mme Lavoie-Roux: De toute façon, j'ai l'impression que le
ministre veut continuer dans son conversatisme, alors, je pense que je vais
abandonner la partie ici.
M. Johnson (Anjou): Dans le fond, ce que vous voulez, c'est qu'on
fasse comme au fédéral et que ce soit toujours l'article 3.
Mme Lavoie-Roux: Non, cela aurait pu être...
M. Johnson (Anjou): Parce que l'article 3 dans une loi
fédérale, contient toujours des déclarations; nous autres,
c'est l'article 4.
Mme Lavoie-Roux: Cela aurait pu être l'article 2 aussi. Ce
n'est pas toujours l'article 4; là, vous êtes rendu aux articles
4, 5 et 6 au moins.
M. Charbonneau: En tout cas, le ministre ne pourra pas reprocher
aux membres de la commission spéciale de ne pas l'avoir amené
à expliciter clairement son point de vue.
M. Johnson (Anjou): Effectivement, et je pense que le
président de la commission ne pourra pas dire qu'on ne mentionne pas
dans le journal les Débats le fait qu'il y tenait.
Mme Lavoie-Roux: Vous savez, nous ne nous étions pas
concertés sur cela, M. le Président.
M. Charbonneau: Ah non!
Mme Lavoie-Roux: Absolument pas!
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Cela va
dans l'esprit de la réforme aussi et nous nous dirigeons vers des
consensus...
M. Charbonneau: Le ministre essaie de nous en passer une petite
vitel
Mme Lavoie-Roux: Les consensus se forment sans même les
rechercher, cela commence à être...
M. Johnson (Anjou): Cela commence à être
inquiétant pour l'exécutif.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Alors, si
on revient à l'amendement qui ....
Mme Lavoie-Roux: Je n'y comprends pas grand-chose à cet
amendement. Peut-être que le ministre va nous expliquer cela. J'ai
l'impression que ce sont des mots.
M. Johnson (Anjou): À 2.3?
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est celui-là.
M. Johnson (Anjou): Le premier papillon que vous avez, à
2.3, se lirait maintenant comme suit: "Toute intervention auprès d'un
enfant et des ses parents par une personne à qui la présente loi
confie des responsabilités envers cet enfant doit viser à
prévenir les situations qui donnent ouverture à de telles
interventions et à favoriser l'implication de la communauté."
Plutôt que de dire: "Toute intervention auprès d'un enfant et de
ses parents par une personne à qui la présente loi... envers cet
enfant doit viser à prévenir les cas qui donnent ouverture..."
Dans le
fond, la notion de situation, c'est la notion du contexte et de la
globalité que présuppose la notion même de
prévention en matière sociale.
Mme Lavoie-Roux: Au plan fonctionnel, M. le Président,
j'essaie de comprendre. Je pense que je comprends l'intention du
législateur qui est de dire: Si vous êtes impliqués dans la
Loi sur la protection de la jeunesse, non seulement devez-vous vous occuper des
cas qui vous sont confiés, mais vous devez également
prévenir les situations qui donnent ouverture à ces
problèmes. La préoccupation du législateur, c'est la
notion de prévention, mais il me semble que cela s'introduit mal au
travail cas par cas. Ce n'est pas sûr que ce soit l'endroit où
cette notion de prévention est la plus efficace.
Vous dites: Le DPJ confie à quelqu'un un cas rattaché a un
problème de drogue, disons. La responsabilité de celui qui prend
ce cas en main - dans le fond, c'est ce que cela veut dire - c'est aussi de
prévenir les situations qui donnent lieu à l'ouverture de tels
cas. Cela m'apparaît confus.
M. Johnson (Anjou): D'abord, ce n'est pas "l'ouverture de tels
cas". On dirait que c'est à prévenir les situations...
Mme Lavoie-Roux: Mais l'ouverture de telles situations qui ont
donné...
M. Johnson (Anjou): Voilà! C'est cela.
Mme Lavoie-Roux: ...lieu à de telles interventions.
M. Johnson (Anjou): Lieu à des interventions.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Johnson (Anjou): Mais on a pris exactement la formulation que
suggérait la commission qui dit, au no 15 de la page 3 de la proposition
législative...
Mme Lavoie-Roux: Là, je suis mal prise.
M. Charbonneau: On va apporter notre proposition
législative demain.
M. Johnson (Anjou): "Une intervention auprès d'un jeune et
de ses parents doit favoriser l'implication de la communauté et viser
à prévenir des cas qui donnent ouverture à cette
intervention."
Une voix: Là je suis d'accord avec le ministre.
Mme Lavoie-Roux: Pouvez-vous la relire, s'il vous plaît, M.
le ministre?
M. Johnson (Anjou): "Une intervention auprès d'un jeune et
de ses parents doit favoriser l'implication de la communauté et viser
à prévenir les cas qui donnent ouverture à cette
intervention."
Mme Lavoie-Roux: Je trouve que c'était dit beaucoup plus
clairement là, cependant. Honnêtement, c'était moins ambigu
comme style. Cela ne veut pas dire qu'on était d'accord avec tout ce
qu'il y a dans le rapport.
M. Johnson (Anjou): Des incidences se manifestent.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Madame,
pourrait-on revenir à l'amendement? Êtes-vous pour cet
amendement?
M. Charbonneau: M. le Président, de toute façon,
"les situations" plutôt que "les cas", c'est plus large. En fait, ce sont
des situations qui amènent des cas et non pas seulement des cas. Dans ce
sens-là, le ministre a raison. De toute façon, les interventions,
au pluriel, se réfèrent à toutes les interventions...
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est une amélioration.
M. Johnson (Anjou): C'est une amélioration.
Mme Lavoie-Roux: Honnêtement.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Alors,
peut-on présumer que vous adoptez l'amendement, madame?
Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Alors,
l'amendement est adopté. L'article 4 est-il adopté tel
qu'amendé?
Mme Lavoie-Roux: D'accord!
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): L'article 4
est adopté tel qu'amendé. J'appelle l'article 5.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas mauvais en soi.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, il y a
également un papillon à l'article 5. D'abord, je fais la lecture
de l'article 5, ensuite du papillon, puis de l'article tel qu'il devra se
lire.
Alors, l'article 5 modifie les articles 3 et 4 et dit ceci: 3 "Les
décisions prises en vertu de la présente loi doivent l'être
dans l'intérêt de l'enfant et dans le respect de
ses droits. 4 "Toute décision prise en vertu de la
présente loi doit tendre à maintenir l'enfant dans son milieu
parental. Si, dans l'intérêt de l'enfant, un tel maintien n'est
pas possible, la décision doit tendre à lui assurer la
continuité des soins et la stabilité des conditions de vie
appropriées à ses besoins et à son âge." (21 h
45)
Le papillon vise à introduire la modification suivante: L'article
5 du projet de loi est modifié par l'insertion, à la
troisième ligne de l'article 4 proposé, après le mot
"maintien", des mots "ou le retour dans son milieu parental". De telle sorte
que l'article 4 de la loi, modifié par l'article 5 du projet de loi, se
lirait comme suit: "Toute décision prise en vertu de la présente
loi doit tendre à maintenir l'enfant dans son milieu parental. Si, dans
l'intérêt de l'enfant, un tel maintien ou le retour dans son
milieu parental n'est pas possible, la décision doit tendre à lui
assurer la continuité des soins et la stabilité des conditions de
vie appropriées à ses besoins et à son âge."
En ce sens, nous donnons suite à une recommandation de la
Commission des services juridiques.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Est-ce que
l'amendement est adopté?
Mme Lavoie-Roux: On n'est pas pour revenir sur la question des
principes, n'est-ce pas, M. le Président?
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles):
L'amendement est adopté.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Est-ce que
l'article 5 est adopté tel qu'amendé?
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles):
Adopté. J'appelle l'article 6.
M. Johnson (Anjou): C'est article-mica, M. le Président,
c'est-à-dire de transparence. Il est de concordance avec le
précédent et avec le principe de la primauté de la
responsabilité parentale. Il prévoit que non seulement l'enfant
mais aussi ses parents obtiendront, lors d'une intervention en vertu de la loi,
une description des moyens de protection et de réadaptation qui sont
envisagés ainsi que les étapes prévues pour mettre fin
à l'intervention.
Je pense que cela va dans le sens de permettre que, dans la pratique
quotidienne, au-delà du projet de loi, les parents et les enfants, dans
certaines circonstances, soient saisis de ce qui leur arrive et de ce que va
être le cheminement de leur dossier ou de leur état ou de leur
situation.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): L'article 6
est-il adopté?
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles):
Adopté. J'appelle l'article 7.
M. Johnson (Anjou): Cet article vient préciser que le
directeur de la protection de la jeunesse ne prend pas en charge l'enfant
lui-même, mais plutôt sa situation. Il s'agit encore d'une
concordance qui découle du principe de la primauté de la
responsabilité parentale dans la prise en charge des enfants.
Le paragraphe 2 édicte que, lorsque le directeur
général d'un centre d'accueil décide d'empêcher un
enfant qui y est hébergé de communiquer avec une personne, cette
décision doit être écrite et motivée et remise
à l'enfant.
Quant au paragraphe 3, il apporte une concordance avec l'article 74.1 de
la loi actuel qui reconnaît tant aux parents qu'à l'enfant le
droit de contester devant le Tribunal de la jeunesse la décision du
directeur général dans cette matière.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): L'article 7
est adopté. J'appelle l'amendement à l'article 7.1.
M. Johnson (Anjou): Oui. M. le Président, cet article
propose de modifier la loi 24 par l'insersion, après l'article 11, des
articles suivants: 11.1: "Un enfant hébergé dans un
établissement en vertu de la présente loi doit être
gardé dans un lieu approprié." Je m'excuse.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Un
instant!
M. Johnson (Anjou): Je m'excuse. C'est une erreur.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): C'est qu'il
y a un amendement. Après l'article 7, il y a l'article 7.1.
M. Johnson (Anjou): Ah!
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): C'est un
amendement qui a été déposé, 7.1.
Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord avec votre amendement, le
7.1.
M. Johnson (Anjou): L'article 10 de la loi est modifié par
le remplacement, dans la première ligne, des mots "centre d'accueil" par
le mot "établissement". Je m'excuse.
Mme Lavoie-Roux: D'accord. Oui, c'est parce que les centres
d'accueil ne voulaient pas être identifiés comme étant les
seuls établissements à discipliner les enfants.
M. Johnson (Anjou): Voilà! Je ne vous l'ai pas fait
dire.
Mme Lavoie-Roux: C'est légitime. Je suis d'accord.
M. Johnson (Anjou): Adopté. Article 8.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles):
L'amendement introduisant l'article 7.1. est adopté. J'appelle
l'article 8.
M. Johnson (Anjou): L'article 8 insère l'article 11.1:
"L'enfant hébergé dans un établissement en vertu de la
présente loi doit être gardé dans un lieu
approprié."
Mme Lavoie-Roux: Oui. C'est le mot "approprié". Vous
n'avez pas un amendement là-dessus, n'est-ce pas?
M. Johnson (Anjou): Non.
Mme Lavoie-Roux: Non.
M. Brouillet: M. le Président.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Oui, M. le
député de Chauveau..
M. Brouillet: J'aimerais me référer à une
observation de l'Association des centres de services sociaux concernant cet
article. On nous fait part que cet article peut laisser ouverture à
l'intrusion constante du contrôle judiciaire dans des
responsabilités professionnelles et cliniques du réseau des
affaires sociales. Il y a, par ailleurs, un autre article dans la loi qui
accorde au directeur de la protection de la jeunesse le soin de désigner
un centre d'accueil. Si, en plus, on reconnaît un pouvoir à une
autre instance de venir juger du caractère approprié ou non du
centre d'accueil, est-ce que cela ne pourrait pas...
Il y aurait aussi dans la loi, par ailleurs, d'autres articles qui
garantissent que l'enfant reçoive les appropriés. Finalement, la
proposition, c'est qu'on puisse tout simplement rayer cet article.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: Je pense que j'étais assez d'accord
tantôt pour qu'on enlève l'article 1h de la loi actuelle et, par
le fait même, la notion de sécurité. La question que je me
pose vient un peu à la suite de l'intervention du député
de Chauveau quant au lieu approprié. Est-ce qu'on ne va pas donner
ouverture à de multiples contestations sur la valeur du lieu choisi?
Est-ce qu'on ne va pas se retrouver avec une série de batailles
juridiques ou des situations où l'on va utiliser cet article pour
contester le choix que les DPJ auront fait? Sans vouloir nécessairement
leur prêter de mauvaises intentions, au niveau de la défense, on
pourrait contester fréquemment les lieux choisis. On ferait jouer une
instance contre l'autre, soit le CPJ contre le DPJ.
M. Lavigne: Dans le même sens, M. le
Président...
Le Président (M. Champagne, Mille-
Îles): Voici, il y avait le député de
Beauharnois...
M. Lavigne: Je ne veux pas briser la discussion. Est-ce qu'il y a
différentes personnes de prévues dans la loi pour décider
de l'endroit approprié ou s'il n'y a qu'une personne qui peut en
décider? Est-ce qu'on reconnaît les compétences d'une seule
personne ou est-ce que les parents peuvent intervenir disant que ce n'est pas
un endroit approprié? Est-ce que l'enfant peut dire que l'endroit n'est
pas approprié pour lui, etc.? Est-ce que le travailleur social peut,
à un moment donné, aussi intervenir pour dire si l'endroit est
approprié ou non? Si tel est le cas, j'abonde un peu dans le même
sens que le député de Verchères; à un moment
donné, on n'en finira plus de dire que cela est approprié ou pas
et on reviendra toujours à la charge. Quelqu'un sera toujours en mesure
de revenir à la charge. Si la loi prévoit qu'une personne
autorisée doit décider si l'endroit est approprié, ce
serait peut-être moins pire. Si chacun peut décider, selon ses
connaissances, et juger si l'endroit est approprié ou non, on risque de
ne plus en finir.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Chauveau.
M. Brouillet: Je veux apporter une précision à la
dernière partie de mon intervention de tantôt. On fait allusion au
fait que déjà, à l'article 8, on garantit à
l'enfant le droit de recevoir des services de santé, des services
sociaux ou des services d'éducation adéquats sur les plans
scientifique, humain et social, avec continuité, etc.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je
partage l'inquiétude des collègues ministériels. Il
y a plusieurs droits de recours si les parents ne sont pas satisfaits. Je pense
que c'est un ajout qui va certainement donner lieu à des contestations
supplémentaires. Il faut d'abord se dire que, dans la structure
actuelle, il y a le DPJ qui a un droit de regard sur celui qui a la charge de
la situation; il y a le professionnel qui intervient. Le directeur de la
protection de la jeunesse a un droit de regard sur lui pour juger si c'est la
bonne chose ou pas. Il y a ensuite, dans la loi sur les services sociaux,
d'autres dispositions pour s'assurer de la bonne pratique. Il y a les
comités de plaintes jusqu'au CRSSS. Il y a le Comité de la
protection de la jeunesse. Je me dis que c'est une porte ouverte pour qui et
pourquoi, je ne le sais pas. Peut-être que le ministre pourrait nous
l'expliquer.
M. Johnson (Anjou): II y a un choix qui a été fait
dans l'élaboration du projet de loi qui, de toute évidence, ne
fait pas l'affaire de tout le monde. En général, il est rare que
les choix fassent l'affaire de tout le monde, sauf le choix d'une salle pour
les commissions. Encore là, on a vu cela aujourd'hui.
Le choix, c'est d'abord d'établir cette double notion de
l'intérêt et du droit de l'enfant en même temps que
d'affirmer la responsabilité des parents. Puis, il y a un
mécanisme qui prévoit que cela doit être respecté, y
compris par le réseau, ou les réseaux qui appliquent cette loi.
On peut présumer qu'en général le réseau applique
les lois, mais il faut s'assurer que, si les personnes directement
impliquées au premier chef, c'est-à-dire les enfants et les
parents, considèrent que leurs droits sont lésés en vertu
même de la loi, ils puissent exercer des recours quant au choix qui a
été fait. C'est donc dire que le Comité de la protection
de la jeunesse a un rôle de surveillance à l'égard de
l'application des principes pour s'assurer de la non-lésion des droits
de l'enfant.
Il se peut que dans un appareil aussi complexe, aussi vaste, des
personnes considèrent que leurs droits ne sont pas respectés. Il
se peut aussi que leurs droits ne soient pas respectés dans la
réalité, à l'occasion. C'est le rôle du tribunal
d'émettre des ordonnances et non pas toujours d'en faire un suivi,
d'où l'intervention du Comité de la protection de la jeunesse en
établissant des critères de surveillance de l'application de la
loi et du respect intégral des droits de l'enfant, ce que crée la
loi. On verra sans doute à développer une approche, une
surveillance des balises des principes dont il pourra faire la recommandation
auprès du Tribunal de la jeunesse qui, lui, verra, dans ses ordonnances
ad hoc comme dans le développement de sa jurisprudence, à tenir
compte des préoccupations de cet organisme de surveillance.
Il est très clair que c'est l'envers de la médaille. On
voudrait tous que cela fonctionne bien, qu'on écrive cela dans le texte
et que ce soit le bonheur pour tout le monde. Il reste que l'application d'une
loi, ce sont des êtres humains qui la font. C'est la même chose en
matière policière, en matière de droits des détenus
ou d'autres. On a des lois qui présupposent que chacun joue son
rôle dans la société de telle façon, mais ce n'est
pas comme cela que cela arrive tout le temps. Il faut qu'il y ait une forme de
surveillance. Dans la mesure où l'on affirme que la primauté est
accordée aux droits de l'enfant, à la responsabilité
parentale et au droit que l'État donne à l'enfant de recevoir un
certain nombre de services, il faut être certain que l'on a un
mécanisme pour s'assurer que ce soit respecté, qu'on ne se
contente pas de dire: On adopte la loi et c'est fini, on va regarder cela
aller.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que les parents ont le droit de saisir le
tribunal...
M. Johnson (Anjou): Le CPJ.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que le CPJ va pouvoir lui, à
propos de tout et de rien -je dois le savoir, parce que je pense que c'est dans
la loi - intervenir pour décider si un lieu est approprié
uniquement à la suite d'une plainte ou s'il peut, de sa propre
initiative, intervenir, et même dans tous les cas, si le coeur lui en
dit?
M. Johnson (Anjou): Le CPJ peut le faire de sa propre initiative,
de la même façon que les parents peuvent l'initier. Je n'ai pas
à tenir pour acquis que le Comité de la protection de la jeunesse
va se mettre à intervenir à propos de tout et de n'importe quoi.
D'abord, il aurait besoin de beaucoup d'effectif pour faire cela et je ne suis
pas sûr que l'on va lui donner les budgets pour qu'il remplace les CSS.
On n'a pas besoin de cela. Le CPJ a un rôle qui est, encore une fois, de
s'assurer de la protection et de la non-lésion des droits des enfants.
Il peut, de sa propre initiative, dans certaines circonstances, intervenir et
faire des recommandations au Tribunal de la jeunesse. C'est là son
rôle. Il se saisit du dossier et il a les pouvoirs qui découlent
de la Loi sur les commissions d'enquête. Il regarde les dossiers, en fait
le tour et fait de recommandations au Tribunal de la jeunesse dans un cas, ou
il peut être saisi du cas par un parent. C'est précisément
ce que décrivent mes collègues quant à l'objectif de ce
rôle du CPJ prévu dans la loi et c'est clair qu'il y a des
inconvénients. Si jamais le Comité de la protection de la
jeunesse avait
des velléités impériales et commençait
à les exercer à propos de tout et de n'importe quoi, il est vrai
qu'il a beaucoup de pouvoirs pour le faire. (22 heures)
II ne faut cependant pas oublier qu'en fin de compte, d'une part, il y a
une expertise qui s'est accumulée au CPJ. Deuxièmement, son
pouvoir en est un de recommandation et non pas de se substituer à tout
le réseau. Il fait des recommandations et, ensuite, il va devant le
tribunal. Éventuellement, c'est le tribunal qui peut décider par
ordonnance si, oui ou non, telle mesure doit être prise parce qu'il y a
lésion des droits de l'enfant.
Encore une fois, c'est un mécanisme que les Anglais appellent le
"check and balance" et je crois beaucoup à ce type d'approche parce que
je pense qu'elle donne des résultats parce qu'elle crée un
équilibre constant entre...
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
ministre, excusez-moi si je vous arrête.
M. Johnson (Anjou): Oui, pardon.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Cela
prendrait le consentement unanime de tous les membres de la commission pour
pouvoir poursuive.
M. Johnson (Anjou): Pour finir l'article, peut-être?
Le Président (M. Champagne, Mille-
Îles): On
finirait l'article.
M. Johnson (Anjou): Cinq minutes, dix minutes.
M. Sirros: Je suggérerais, M. le Président, que le
ministre y songe durant la nuit et qu'on y revienne demain.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): D'accord,
cela va. Alors, la commission des affaires sociales ajourne ses travaux
à demain matin, 10 heures, au salon rouge. Merci.
(Fin de la séance à 22 h 2)