Journal des débats (Hansard) of the Committee on Agriculture, Fisheries, Energy and Natural Resources
Version préliminaire
42nd Legislature, 2nd Session
(October 19, 2021 au August 28, 2022)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Tuesday, February 22, 2022
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Vol. 46 N° 2
Special consultations and public hearings on Bill 21, an Act mainly to end petroleum exploration and production and the public financing of those activities
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Intervenants par tranches d'heure
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Lemay, Mathieu
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Julien, Jonatan
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Arcand, Pierre
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Massé, Manon
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Gaudreault, Sylvain
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Arcand, Pierre
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Lemay, Mathieu
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Lessard-Therrien, Émilise
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Gaudreault, Sylvain
9 h 30 (version révisée)
(Neuf heures cinquante minutes)
Le Président (M. Lemay) : Je
déclare la séance de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie
et des ressources naturelles ouverte. Je demande à toutes les personnes
présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
Alors, aujourd'hui, nous sommes réunis
afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur
le projet de loi n° 21, la Loi visant principalement
à mettre fin à la recherche et à la production d'hydrocarbures ainsi qu'au
financement public de ces activités.
Alors, M. le secrétaire, est-ce qu'il y a
des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président, un seul remplacement. M. Tanguay (LaFontaine), est remplacé par M. Arcand
(Mont-Royal—Outremont).
Le Président (M. Lemay) : Merci.
Ce matin, nous débuterons par les remarques préliminaires puis nous nous
entendrons, par la suite, les témoins suivants : la Fédération québécoise
des municipalités, le Front commun pour la transition énergétique ainsi qu'Environnement
Vert-Plus.
Alors, nous débutons de ce pas avec les
remarques préliminaires, et j'invite d'abord le ministre de l'Énergie et des
Ressources naturelles à faire ses remarques préliminaires pour une durée
maximale de six minutes.
M. Julien : Oui, merci. Merci
infiniment, M. le Président. D'entrée de jeu, je tiens à saluer mes collègues
qui sont présents ici aujourd'hui pour nos discussions sur le projet de loi n°
21. Je tiens également à remercier toutes les personnes, tous les organismes
qui vont s'adresser à nous à l'occasion des consultations particulières sur le projet
de loi n° 21. Honnêtement, la participation de tous à cet exercice démocratique
est hyperimportante.
Comme vous le savez, ce projet de loi vise
principalement à mettre fin à la recherche et à la production d'hydrocarbures
ainsi qu'au financement public de ces activités sur l'ensemble du territoire
québécois. Je suis confiant, M. le Président, que nous réussirons tous
ensemble, avec les collègues, à faire cheminer rondement ce projet de loi en
vue de l'adopter le plus rapidement possible.
Je crois sincèrement qu'on a un objectif
commun, soit celui de mettre fin à l'exploration, à l'exploitation des
hydrocarbures au Québec. Je conviens également, M. le Président, que certains
éléments nécessiteront des discussions entre nous puisque, sur certains
aspects, sur certains enjeux, notre vision peut différer. Je pense, entre
autres, au volet indemnisation, je pense, entre autres, au volet pipeline, au
Québec, je pense également à la notion de projet pilote.
Mais, bien que ces éléments puissent nous
amener, certainement, à des échanges un peu plus corsés, avec des échanges un
peu plus fondamentaux, je crois qu'on ne doit pas laisser ceux-ci nous <distraire
et nous...
M. Julien :
...
fondamentaux, je crois qu'on ne doit pas laisser ceux-ci nous >distraire
et nous dévier de l'objectif commun qu'on a. Il y aura des discussions, certes,
mais je reste convaincu que le projet de loi qui est déposé actuellement est
raisonnable, qu'il est responsable, et ce, à tous les points de vue.
On l'a dit à plusieurs reprises, M. le
Président, pour nous, l'avenir, au Québec, est aux énergies vertes, pas aux
énergies fossiles. On s'est donné des objectifs ambitieux à atteindre pour
réduire, justement, l'empreinte carbone au Québec. Le gouvernement veut être
cohérent et respecter ses engagements. C'est une étape majeure qui démontre
clairement que le Québec est résolument sur le chemin de la transition
énergétique.
Le projet de loi n° 21 repose sur quatre
grands volets, M. le Président. Dans un premier temps, le projet de loi met fin
à la recherche d'hydrocarbures, ou des réservoirs souterrains, ou à la
production d'hydrocarbures, à l'exploitation de saumure. S'il est adopté, le
projet de loi révoquera les licences d'exploitation et de production d'hydrocarbures
ainsi que les autorisations d'exploiter de la saumure en vigueur sur tout le
territoire du Québec et il prévoit que les titulaires de licences révoquées
devront procéder à la fermeture définitive des puits ayant été forés en vertu
de ces dernières. Il prévoit également une restauration des sites.
Le deuxième volet, c'est... le projet de
loi prévoit un programme d'indemnisation qui vise à offrir des compensations
justes et équitables pour les titulaires voyant leurs licences révoquées. Ce
programme serait administré par le ministère de l'Énergie et des Ressources
naturelles pour assurer un traitement conforme aux critères établis. Il est
également prévu, M. le Président, qu'un vérificateur externe soit responsable
du calcul des indemnités. L'indemnité couvrirait les principaux frais depuis le
19 octobre 2015.
Dans un troisième temps, le projet de loi
prévoit de maintenir en vigueur certaines licences de stockage de gaz naturel
et la possibilité de construire et d'utiliser des conduites intraprovinciales
de gaz naturel et de pétrole. À cet égard, il est prévu que la Loi sur les
hydrocarbures soit modifiée pour s'appeler Loi sur le stockage de gaz naturel
et sur les conduites de gaz naturel et de pétrole.
Finalement, quatrième point, le dernier
volet, c'est le volet projet pilote qui prévoit que le ministre peut autoriser
la mise en place de projets pilotes. Mais, M. le Président, il faut bien le
spécifier, la loi permettrait au ministre d'autoriser la réalisation de projets
pilotes avant la fermeture définitive des puits et leur restauration, mais
uniquement pour favoriser l'acquisition de connaissances. En aucun temps, ces
projets pilotes ne pourraient permettre l'exploitation d'hydrocarbures au
Québec.
Alors, en terminant, M. le Président, c'est
le temps de fermer ensemble, ensemble, tous ensemble, ce chapitre une bonne
fois pour toutes. L'avenir économique du Québec n'est pas dans les
hydrocarbures. Au point de vue économique et pour le développement durable, on
doit miser sur notre hydroélectricité, l'hydrogène vert, la bioénergie. On a un
grand potentiel de développement avec des énergies vertes, parce qu'on a les
connaissances, on a l'expertise et surtout parce que c'est l'avenir du Québec.
En 2022, il apparaît clairement qu'il n'y
a pas d'acceptabilité sociale pour l'exploitation de gaz et de pétrole au
Québec. On est fiers de notre territoire, et c'est une richesse qu'on doit
protéger. Il faut, dès maintenant, se donner les moyens de nos ambitions afin
de construire une économie verte et prospère. C'est dans cet esprit que j'ai
déposé le projet de loi n° 21, et je pense que, tous
ensemble ici, dans cette salle, il est temps qu'on prenne position. Et aujourd'hui
je sens qu'on se met à la bonne place ensemble, justement, pour marquer l'avenir
du Québec. Alors, je vous remercie, tous et toutes.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
M. le ministre, pour ces remarques préliminaires. J'invite maintenant le député
de Mont-Royal—Outremont à faire ses remarques
préliminaires pour une durée maximale de quatre minutes.
M. Arcand : Merci, M. le
Président. Évidemment, à titre de député de Mont-Royal—Outremont
et ayant déjà exercé les fonctions de ministre de l'Énergie, je n'ai pas besoin
de vous dire jusqu'à quel point ce projet de loi nous semble important.
D'entrée de jeu, cependant, je dirais que
le projet de loi, comme tel... il y a un petit côté marketing de ce projet de
loi, parce qu'on annonce, évidemment, qu'il faut mettre fin à la recherche d'hydrocarbures,
au Québec. La réalité, M. le Président, c'est que, dans les faits, il y a eu,
pendant les 30 dernières années, minimum, d'énormes possibilités,
semble-t-il, mais qui n'ont jamais rien donné. Quand on regarde, M. le
Président, la situation au Québec, aujourd'hui, le Québec n'est même pas sur la
liste de Ressources naturelles Canada comme producteur de pétrole. Alors, c'est
pour ça que, quand on est intervenus, on a dit, bon : Ce qu'on <annonce...
M. Arcand :
...
pétrole. Alors, c'est pour ça que, quand on est intervenus, on a dit,
bon : Ce qu'on >annonce c'est véritablement quelque chose qui n'est
pas véritablement... qui n'existe pas, actuellement, au Québec, parce qu'on ne
produit pas de pétrole.
Ce qui me semble important à ce stade-ci,
dans le projet de loi, c'est beaucoup plus les vraies réalités, c'est-à-dire
les puits, entre autres, la question des puits, et cette question-là nous
semble particulièrement importante, et éventuellement, également, d'avoir les
opinions des gens sur un certain nombre d'enjeux. Et parmi ces enjeux
également, bien, évidemment, c'est quoi, les intentions du ministre... que ce
qu'on a bien vu, c'est que le gouvernement comme tel dit qu'il veut interdire
toute activité, entre autres, d'exploration ou d'exploitation, mais ce qu'on a
compris également, c'est la possibilité, peut-être, qu'il y ait des
échappatoires. Alors, il est clair, M. le Président, qu'on va poser
certainement des questions là-dessus.
On va poser des questions sur la valeur
des estimations, éventuellement, et des estimations à 100 millions de
dollars. Nous comprenons très bien, notre formation politique, qu'il y a
peut-être des coûts qui peuvent être remboursés, parce que, premièrement, quand
on donne un permis et qu'on le retire, il y a quand même une licence qui existe,
d'une part, et, d'autre part, il y avait des obligations, également, à avoir ce
permis. Mais il y aura certainement une discussion extrêmement serrée sur cette
question-là, parce qu'évidemment le rôle de l'État, dans ce cas-ci, c'est d'être
juste, mais, en même temps, de ne pas exagérer.
Et on a vu... moi, j'ai vu par le passé,
entre autres parce que j'ai vécu toute l'époque de l'île d'Anticosti, entre
autres, où certaines pétrolières ont véritablement exagéré, et on avait le
choix d'essayer de régler, d'aller en cour. C'était toujours le débat qui était
devant nous. Souvent, aller en cours coûte plus cher que de régler à l'extérieur.
Alors, c'était une situation que l'on devait faire, à ce stade-ci, et
évidemment on va espérer que, dans l'esprit du ministre, qu'on puisse,
évidemment, aller chercher le minimum de remboursement de la part du
gouvernement dans ces dossiers.
Alors, je vous dirais que ce sont les
éléments qui, à ce stade-ci, a priori, là, nous semblent les éléments les plus
importants. Il va falloir juste s'assurer, encore une fois : Est-ce qu'on
en a fini pour de bon avec l'exploitation des hydrocarbures? Est-ce qu'il y a
encore des trous, encore, dans cette loi-là? Je pense que c'est les questions
qu'on va se poser. Et est-ce qu'on va régler, finalement, la question des
puits, évidemment, une fois pour toutes? Alors, voilà, M. le Président.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup, M. le député de Mont-Royal—Outremont. Je cède
maintenant la parole au deuxième groupe d'opposition et la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques
à faire ses remarques préliminaires pour une durée d'une minute.
• (10 heures) •
Mme Massé : Merci, M. le
Président. Bonjour, tout le monde. En une minute, j'ai le temps de vous dire qu'il
est clair que notre vision peut différer, il est clair que notre vision
diffère. Notre vision diffère parce que, quand on parle de responsabilité, je n'ai
pas de responsabilité face à une industrie qui, depuis des décennies, crée la
crise climatique dans laquelle nous sommes. Elle a des responsabilités, cette
industrie, face au peuple québécois, face à la planète.
Alors, oui, qu'on mette fin, enfin, j'ai
envie de dire, à l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures, peu importe
sa forme, ici, au Québec, j'en suis. On va être là. On peut le bonifier, l'améliorer,
j'en suis certaine. Mais, là où on va batailler fort : Les Québécois et
Québécoises paient régulièrement, on le voit encore, ce matin, dans les puits
orphelins, paient encore et pour toujours ce que l'industrie, elle, n'a pas
payé. Alors, on va être au rendez-vous pour faire les débats et donner justice
au peuple québécois.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme la députée. Est-ce que vous avez une demande à faire?
Mme Massé : Oui, M. le
Président, je vais vous demander d'être remplacée par ma collègue de l'Abitibi-Témiscamingue,
après mes remarques préliminaires, si le... Mais je... Oui.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien, oui. Est-ce qu'il y a consentement?
Des voix : Consentement.
Le Président (M. Lemay) : Consentement.
Merci beaucoup, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Sur ce, je cède
maintenant la parole au troisième groupe d'opposition et le député de Jonquière
à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale d'une minute.
M. Gaudreault : Oui. Merci, M.
le Président. Trois choses. Il faut quand même constater l'évolution. Ce type
de projet de loi et de commission parlementaire était impensable, il y a cinq
ans, il y a six ans. Là-dessus, je veux reconnaître que le Québec évolue...
10 h (version non révisée)
M. Gaudreault : ...il y a
cinq ans, il y a six ans. Là-dessus, je veux reconnaître que le Québec évolue.
Le Québec a évolué. Puis il faut envoyer un signal à la population que ça
s'inscrit dans une dynamique mondiale de décarbonation, de se libérer de notre
dépendance à l'égard des hydrocarbures.
Deuxième élément. Après les fleurs, le
pot. Il faut aller beaucoup plus loin. Deux choses sur lesquelles j'insiste.
Évidemment, nous sommes contre toute indemnité à l'égard des entreprises qui
verront retirer leur permis. Trois précédents. Aucune compensation en 2011 avec
Nathalie Normandeau pour les droits d'exploitation dans le fleuve. Sur le gaz
de schiste, en 2010, le CQDE disait déjà qu'il n'y avait pas d'indemnité, et la
Loi sur la qualité de l'environnement actuel qui le prévoit.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
M. le député de Jonquière. Ceci termine la rubrique des remarques
préliminaires, et nous allons maintenant débuter les auditions.
Alors, je souhaite la bienvenue aux
représentants de la Fédération québécoise des municipalités et je vous rappelle
que vous disposez d'un temps de 10 minutes pour faire votre exposé. Par la
suite, il y aura une période d'échange avec les membres de la commission.
Alors, avant de débuter, je vous demande simplement de vous nommer ainsi que
votre titre, et vous pouvez y aller avec votre exposé. La parole est à vous.
Mme Boisjoly (Audrey) : Alors,
bonjour, M. le Président, M. le ministre de l'Énergie et des Ressources
naturelles, mesdames et messieurs les députés. Alors, bonjour, je me présente,
Audrey Boisjoly. Je suis mairesse de la municipalité de Saint-Félix-de-Valois
et également deuxième vice-présidente de la Fédération québécoise des
municipalités. Et aujourd'hui, je suis accompagnée de M. Pierre
Châteauvert, notre directeur des politiques à la Fédération québécoise des
municipalités.
Alors, premièrement, je remercie les
membres de la Commission pour cette opportunité donnée à la Fédération, à titre
de porte-parole des régions qui représente plus de 1 020 municipalités
locales et régionales qui sont membres sur une base volontaire, de vous
présenter nos commentaires sur le projet de loi 21.
La Fédération québécoise des municipalités
a été très active au cours des dernières années pour s'assurer que le
développement de ressources naturelles se fasse dans le respect de
l'environnement et de l'ensemble des communautés du Québec. Le dossier des
hydrocarbures a souvent été au cœur de ces débats, et de vives discussions ont
longtemps eu lieu sur le développement de cette filière, avec l'objectif de
trouver un encadrement acceptable.
Dès 2010, la Fédération québécoise des
municipalités recommandait au gouvernement dans un mémoire déposé à la
Commission sur le développement durable de l'industrie des gaz de schiste
qu'une nouvelle réglementation sur les hydrocarbures prenne en considération
l'arrimage des opérations gazières aux objectifs du schéma d'aménagement et de
développement de chaque MRC, qu'elle prenne aussi en considération la
réalisation obligatoire d'une étude d'impact sur l'environnement pour toute exploration
et exploitation gazière, qu'il y ait l'obligation pour les entreprises
d'informer les municipalités et les MRC avant les travaux d'exploration et
d'exploitation, et qu'elle instaure des redevances sur les ressources gazières
pour les régions afin, bien sûr, de maximiser les retombées économiques pour
les populations locales. De plus, la FQM ajoutait le remplacement des énergies
fossiles par les énergies propres renouvelables au tableau des objectifs à
atteindre dans ce domaine. En 2013, le débat a continué d'évoluer au sein de la
Fédération et elle demandait, lors des consultations sur les enjeux
énergétiques du Québec, le respect des 16 principes de la Loi sur le
développement durable pour développer correctement cette filière. Entre 2016 et
2018, la FQM a réitéré ses positions lors du dépôt de la politique énergétique 2030
et de l'étude de la législation qui en a découlé. L'acceptation sociale des
projets de recherche et d'exploitation d'hydrocarbures figurait alors au cœur
de nos préoccupations.
Comme vous pouvez le constater, nous avons
toujours souligné l'importance des enjeux environnementaux et communautaires,
la nécessité de protéger nos sources d'eau et l'aménagement de nos territoires
dans tout ce débat. Ces enjeux demeurent donc au coeur de nos préoccupations,
et ce sujet est donc important. Et le gouvernement, par le dépôt du projet de
loi 21, confirme qu'un pas de plus doit être fait. Pour la Fédération, ce
projet de loi s'inscrit dans la progression de l'opinion publique. Donc, le choix
du gouvernement pour nous est légitime et pertinent. Pour les régions, l'heure
est maintenant au développement des énergies renouvelables. Sur ces questions,
la Fédération québécoise des municipalités, de concert avec ses membres, oeuvre
à accentuer le développement des énergies propres comme la petite énergie
hydraulique et particulièrement l'énergie éolienne. Dans ce contexte, nous
comptons travailler, bien sûr, avec M. le ministre pour lui permettre
d'atteindre ses objectifs...
Mme Boisjoly (Audrey) : ...et
pour nous assurer que le retrait des promoteurs privés se fasse dans le respect
des plus hauts standards environnementaux et dans la plus grande transparence
possible.
Concernant les propositions contenues dans
le projet de loi, la FQM salue la volonté du ministre d'assurer la
réhabilitation des puits et la remise en état des sites comme condition
préalable à toute forme d'indemnisation. Selon nous, il incombe évidemment aux
entreprises ayant effectué des activités de forage de procéder à la
restauration des sites selon les critères environnementaux les plus stricts.
De plus, il est essentiel que le
gouvernement de proximité soit informé des opérations qui ont lieu sur leur
territoire. Pour suivre adéquatement la fermeture de ces sites, la fédération
souhaite que le gouvernement, premièrement, identifie l'ensemble des puits, la
municipalité touchée, le responsable de leur fermeture, l'état du puits avant
les travaux de fermeture, ainsi que le niveau de risque, qu'il informe
immédiatement les municipalités, dans l'éventualité où un puits changerait de
niveau de risque, et qu'il regroupe et donne accès au monde municipal à
l'ensemble de la documentation pour chacun des puits présents sur leur
territoire.
En plus des documents concernant la
fermeture des puits, la fédération souhaite que le gouvernement regroupe et
partage avec les communautés plus d'informations sur les activités qui ont lieu
sur chacun de ces sites. Ces informations sont essentielles pour nous pour
suivre l'évolution de ces sites à moyen et long terme. Les municipalités sont
très inquiètes des impacts de la filière hydrocarbures sur les différentes
sources d'eau potable, et ce, depuis plusieurs années. C'est pourquoi la FQM
recommande que le gouvernement s'assure que le territoire de l'étude
hydrogéologique couvre toutes les sources d'eau potable à proximité, dont les
bassins versants.
Nous rappelons d'ailleurs, encore une
fois, la nécessité d'éliminer la préséance de la planification de l'industrie
des hydrocarbures et de l'industrie minière sur celle du schéma d'aménagement
et de développement de chaque MRC. Le maintien de ce privilège prive le monde
municipal d'un véritable outil pour encadrer le développement des ressources
naturelles sur nos territoires. La FQM demande donc que le gouvernement modifie
la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme afin d'abroger l'article 246.
De plus, la permission, dans ce projet de
loi, d'effectuer des projets pilotes pour toute autre activité qui favorise la
transition énergétique ou qui participe à l'atteinte des objectifs de lutte
contre les changements climatiques ne doit en aucun cas permettre de contourner
l'esprit même de cette loi. La FQM recommande donc que le gouvernement
maintienne son intention de mettre fin à toute recherche et toute production
d'hydrocarbures, et ce, même dans les nouveaux projets pilotes. Cette
recommandation est particulièrement importante avec le retour du gaz de schiste
sous forme de projet pilote de gaz naturel au centre du Québec. D'ailleurs,
l'annonce récente d'une entente entre une entreprise et une communauté
autochtone nous inquiète au plus haut point. Il serait en effet dommage que des
revendications de territoires viennent à l'encontre des choix faits par
l'Assemblée nationale en ce domaine.
Je vous remercie et il nous fera plaisir
de répondre à vos questions.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Merci beaucoup. Donc, ce que je comprends, c'est qu'il n'y a pas de
commentaire supplémentaire de M. Châteauvert, c'est ça, à ce stade-ci?
M. Châteauvert
(Pierre) : C'est ça.
Mme Boisjoly (Audrey) : ...
Le Président (M. Lemay) : Parfait.
Très bien. Donc, on va passer tout de suite à la période d'échanges avec les
membres de la commission. Et je cède maintenant la parole au ministre pour un
temps de parole d'environ 16 minutes 30.
• (10 h 10) •
M. Julien : Oui. Oui,
merci. Merci, monsieur le Président. Je tiens à remercier, d'entrée de jeu, en
fin de compte, la FQM et ces représentants, là, pour le mémoire qui a été déposé,
qu'on a pris connaissance avec rigueur puis avec un certain plaisir aussi de
voir votre implication à ce niveau-là dans vos interventions.
Naturellement, j'ai quelques questions à
poser à la lumière de vos recommandations que vous avez soumises à l'intérieur
du mémoire. D'entrée de jeu, une question qui est peut-être plus générale.
Tantôt, j'entendais mon collègue de Jonquière mentionner qu'il y a cinq, six
ans, on n'aurait pas pensé, aujourd'hui, être à la place qu'on est.
Effectivement, on sent qu'il y a une évolution assez rapide du domaine de
l'énergie puis de l'acceptabilité sociale, du positionnement du Québec. Et ma
question, là, c'est, vous qui représentez au-dessus de 1 000 municipalités, certaines d'entre elles,
dans le passé, étaient favorables à certains projets d'exploration,
d'exploitation gazière et pétrolière sur leur territoire, notamment pour la
notion de perception de redevances ou de bénéfices, pensez-vous que la décision
de mettre un terme définitif à la filière des hydrocarbures fait la
quasi-unanimité, sinon l'unanimité, de vos membres?
Mme Boisjoly (Audrey) : Oui.
Bien, un peu comme M. le député disait tout à l'heure, effectivement,
l'évolution s'est faite au niveau des énergies. Il y a une... l'heure est aux
énergies renouvelables. Donc, évidemment, qu'il y ait eu cette transition-là
est pour nos membres...
Mme Boisjoly (Audrey) : ...le
projet de loi, comme on dit, il est tout à fait pertinent dans ce sens-là,
parce qu'effectivement, la FQM, elle représente des membres. Ces membres-là
sont des municipalités, des MRC qui, elles, représentent la population. Donc,
évidemment, on est rendu aux énergies renouvelables, cette transition devait
être fait. Et, aujourd'hui, les membres sont d'avis que cette transition-là est
pertinente.
M. Julien : Donc, si je
comprends bien, là, dans le dépôt du projet de loi qui a été fait il y a
quelques semaines déjà, dans l'énoncé qu'on avait fait déjà l'an dernier, il
n'y a pas eu de montée au créneau, en réalité, de vos membres pour dire: Bien,
on n'est pas confortables avec cette proposition-là.
Mme Boisjoly (Audrey) : Pas
du tout, M. le ministre.
M. Julien : Parfait. Je
voyais également, là, puis je voyais vous vos recommandations, là, puis on
prévoit, là, que, dans la mesure, dans le p.l. 21, là, notamment, un processus
d'approbation environnementale pour chaque fermeture de puits, donc d'une
consultation des parties prenantes. Est-ce que, pour vous, c'est suffisant?
Parce que, tantôt, j'écoutais, là... Je vais mettre deux questions dans la
même, là. Tu sais, il y a 182 licences au Québec. Elles sont connues.
Certaines licences détiennent des puits, donc il y a 62 puits. Moi, là, je
suis... j'entendais, ce matin, ou je voyais des articles, que ce n'était pas clair
où étaient ces puits-là, mais moi, c'est assez clair. Je pense qu'il y a des
comités de suivi qui sont en place. Alors, mais, si on doit en faire plus, moi,
je suis tout ouvert à en faire plus. Donc, qu'est-ce qui vous manque, là, en
termes de connaissance des enjeux par rapport aux 182 licences qui sont
visées par le projet de loi, et les 62 puits qui y sont relatifs?
Mme Boisjoly (Audrey) : Dans
le fond, ce que la Fédération demande, c'est surtout d'assurer que ce suivi-là
pour la fermeture des puits soit fait avec une rigueur, que les études soient
faites de façon rigoureuse, surtout, que les populations soient informées de la
fermeture, tout le processus dans la fermeture des puits, donc qu'on ait toute
l'information sur toutes les activités qui ont été faites par le passé. Donc,
par exemple, s'il y a eu la fracturation, s'il y a eu des produits qui ont été
utilisés, et autres, les municipalités veulent être informées de toutes les
activités passées, et également, qu'elles soient informées des activités à venir,
donc, dans le processus de la fermeture des puits.
On veut avoir ces informations-là, parce
que, bien, vous savez, les municipalités du Québec, notamment, investissent des
milliers de dollars en recherche d'eau potable, investissent des millions de dollars
pour forer des puits pour abreuver leur population. Et une des craintes des
populations locales, c'est la contamination, notamment, avec les puits, les
puits municipaux. Donc, c'est pour cette raison, notamment, qu'on demande que
les études hydrogéologiques s'étendent aux bassins versants et qu'on ait toutes
les informations pertinentes par rapport à la fermeture des puits.
Donc, je pense que, ça, c'est essentiel
pour le monde municipal, c'est essentiel pour les gens des territoires, de
savoir les activités qui vont se faire pour la fermeture des puits, mais aussi,
parce que, vous le savez, M. le ministre, les maires, mairesses des
municipalités sont les premiers en ligne de front, on est le gouvernement de
proximité, donc on est les premiers à être informés et questionnés sur les
activités qui se passent sur nos territoires. Donc, je pense que cette
transparence-là doit être faite et que toutes les informations soient
transmises aux municipalités pour que nous, par la suite, on peut mieux
informer nos populations, là, des échéanciers et des travaux qui auront lieu le
sauront sur ces territoires.
M. Julien : Soyez assuré que
je comprends très bien la notion de gouvernement de proximité des
municipalités. J'y étais il n'y a pas si longtemps, et effectivement, là, vous
êtes le premier rempart, définitivement, auprès de certaines préoccupations de
citoyennes et de citoyens. Il est prévu... Parce que le projet de loi ne vient
pas modifier, en soi, tant les exigences de fermeture des puits, c'est-à-dire
que, là, on vient exiger, en fin de compte, à l'intérieur d'un processus avec
indemnisation, mais... puis ce qu'on a en place actuellement ou ce qui est ce
qui est déjà sur la table, là, c'est un processus de fermeture des puits qui
est proposé, avec une approbation à la fois du MERN, mais surtout du MELCC, du
ministère de l'Environnement, qui prévoit, justement, un suivi des eaux
souterraines, une remise en état des sites, etc. Donc, ce que vous me dites, ce
n'est pas tant la force ou non de ce processus-là, mais la pleine transparence
de ce processus-là également pour vous informer des détails?
M. Châteauvert
(Pierre) :Si vous permettez... Oh!
excusez-moi. Si vous permettez, M. le ministre, par rapport à ça,
effectivement, on voit la volonté et elle est clairement exprimée dans le
projet de loi, et on l'apprécie, d'ailleurs, on est très content de ça. Nous,
on fait aussi affaire avec le gouvernement, quel que soit le parti au pouvoir
depuis plusieurs années, et ce n'est pas toujours ce que nous avons vécu comme
processus. De là...
M. Châteauvert
(Pierre) :...l'importance pour nous de
réitérer l'ensemble de ces éléments-là. Je vous signale qu'actuellement il y a
encore des municipalités qui voient, bon, quelqu'un qui débarque puis qui
creuse un trou, puis ils ne savent pas pourquoi, puis, dans le fond... c'est de
la prospection minière, et que le conseil municipal n'a pas été informé, ce qui
fait que les citoyens débarquent tous à la réunion. Vous savez, vous êtes
passés dans un conseil municipal, vous savez ce que c'est. Donc, par rapport à
ça, on tient à réitérer, on apprécie énormément la volonté qui est inscrite
dans la loi, mais on tient à réitérer quand même qu'on veut que le processus
soit rigoureux et que le politique s'assure que ça soit ainsi, et que... mais
aussi que, bon, il y a effectivement les puits qui sont cartographiés, qui sont
connus, mais il y a eu aussi, ce qu'on croit comprendre, sur le territoire,
qu'il y a beaucoup de puits aussi qui ne sont pas nécessairement... en fait,
les orphelins, les historiques qui, eux, causent problème aussi. Une
municipalité, on a plein de cas, là, nous sommes obligés, si on le fait, de
protéger nos sources d'eau potable, ça a des impacts sur les propriétaires
terriens, les agriculteurs aussi. En fait, c'est beaucoup d'argent et on veut
protéger ça. Nos membres tiennent à protéger ça.
M. Julien : Parfait. Bien, je
conçois très bien ça, puis voyons comment on peut s'assurer de renforcer ces
éléments-là, le cas échéant. Tantôt, j'écoutais mon collègue de
Westmount-Outremont, c'est... Mont-Royal, excusez-moi, mentionner qu'il ne se
faisait pas d'exploitation, d'exploration. Puis il parlait de marketing. Mais
essentiellement, vous avez probablement suivi, là, le processus qui était en
cours l'an dernier, spécifiquement, là, en Gaspésie, où une entreprise mettait
en doute le règlement, l'article 23 du règlement, qui émane aussi de la
Loi sur la protection des milieux hydriques, là, c'est-à-dire les lacs et les
rivières. Puis, à la fin, bien, en première instance, on est en appel, puis je
ne veux pas trop aller loin là-dessus, mais somme toute, là, le jugement de
première instance a mentionné que l'article 23, bien, il ne pouvait pas
être utilisé pour la protection du milieu hydrique, les lacs et les rivières.
Est-ce que cet élément là a amené des préoccupations chez vos membres ou, pour
eux, ce n'était pas un enjeu?
Mme Boisjoly (Audrey) : Je
vais te laisser répondre, Pierre.
M. Châteauvert
(Pierre) :D'accord, en fait, c'est... ça
s'ajoute aux préoccupations. Actuellement, les MRC sont en train de faire la
cartographie, ils sont en train de cartographier les milieux humides. C'est la
première fois qu'on le fait au Québec. Ça va avoir un impact. Moi, je considère
que... ça va avoir impact aussi important que le zonage agricole sur la gestion
du territoire. Ces milieux humides là, on s'aperçoit qu'ils sont encore plus
fondamentaux, ils sont absolument essentiels à la gestion, notamment de l'eau,
et que ce soit de l'eau souterraine, de l'eau de surface puis de l'ordre des
coûts d'eau, et tout ça. Donc, ce qui vient à... notre conception des choses,
c'est que si on arrive avec une application... et c'est pourquoi qu'on demande
aussi la modification à la loi sur l'aménagement, le schéma d'aménagement doit
être un élément essentiel et c'est là-dedans qu'on va gérer les milieux
humides, qu'on va les identifier, puis qu'on va les gérer en fonction aussi des
objectifs nationaux inscrits dans les lois et les règlements et aussi par
rapport à nos priorités. Donc, ce qui... ça s'ajoute. Tout ce qui vient à
l'encontre de ça, bien, ça s'ajoute, puis c'est un problème. Parce qu'on le
sait que si on ne gère pas quelque chose actuellement, plus tard, on va payer,
la société va payer, la communauté va payer, le territoire, et on va avoir des
problèmes. On n'est pas parfait par rapport à la gestion, mais disons que ça
avance assez rapidement. Donc, toutes ces questions-là nous préoccupent...
M. Julien : J'ai aussi...
Le Président (M. Lemay) : On
a d'autres collèges, M. le ministre, aussi.
M. Julien : Dernière
question.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien.
• (10 h 20) •
M. Julien : J'ai aussi
également noté que vous aviez des préoccupations par rapport aux projets pilotes.
Bon, pour nous, c'est clair, là, puis on le mentionne, puis je pense que c'est
clairement inscrit que les projets pilotes ne permettront pas d'extraction, là,
ou les dossiers que vous avez nommés, là, sans répéter leurs noms, là, qui
prétendent qu'on va faire de l'exploitation puis qu'on va faire ça carboneutre.
Nous, en fin de compte, c'est des projets pilotes de géothermie ou de captage
de carbone, alors sans extraction, sans exploitation. Est-ce que vous... Ceci
étant, est-ce que vous pensez que c'est assez fort, assez formel à l'intérieur
du projet de loi?
Mme Boisjoly (Audrey) : Dans
le fond, au niveau des projets pilotes, bien sûr, nous, dans le fond, ce qu'on
demande à la fédération, c'est que toutes les nouvelles filières se fassent
dans le même esprit que le projet de loi 21, donc que ça se fasse avec...
dans le fond que les MRC, les municipalités soient aussi impliquées dans les
démarches... et que, aussi, une rigueur aussi importante que pour la fermeture
des puits. Donc, pour tout nouveau projet, que ce soit ces projets pilotes là
d'hydrogène vert, et autres, on demande que les municipalités, les MRC soient
impliquées dans les démarches, qu'il y a des processus environnementaux qui
soient faits, parce que justement, bon, peu importe, là, ce qui va se faire sur
les milieux, bien, on va... comme je vous disais tout à l'heure, monsieur le
ministre, les citoyens viennent nous voir pour...
Mme Boisjoly (Audrey) : ...nous
questionner. Ils veulent savoir ce qui se passe sur leur territoire. Et on veut
aussi savoir c'est quoi, les impacts de ces projets pilotes là. Est-ce qu'il y
aura des risques pour les municipalités? Est-ce qu'il y aura des risques au
niveau de l'environnement? Donc, je pense que ce qu'on souhaite, c'est vraiment
avoir une transparence, et avoir toute l'information sur les projets, et de
s'assurer qu'il n'y aura pas de risque, là, pour les milieux.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Donc, M. le député de Bourget, la parole est à vous.
M. Campeau : Merci, M. le
Président. Mme Boisjoly, bonjour. M. Châteauvert, content de retrouver. La
dernière fois, on ne parlait pas d'hydrocarbures, on parlait d'eau. Je vous
ferai remarquer, il y a quelque chose qui ne marche pas dans votre
présentation, M. Châteauvert, parce qu'on parle de puits, puis vous avez une
pancarte, à côté, «Dig for victory». Il me semble qu'il y a quelque chose qui
ne marche pas. On veut les boucher, et puis ne pas creuser, là.
M. Châteauvert
(Pierre) :C'est une pancarte historique,
mon cher monsieur.
M. Campeau : Une question que
j'aurais, c'est, quand vous dites que vous voulez être informés, bien sûr,
c'est une excellente idée, mais vous voulez faire quoi avec ça? Voulez-vous en
faire partie? Juste d'être tenus au courant? Vous vous inquiétez de la sécurité
publique. Vous voyez-vous faire un travail relié à la fermeture des puits en
même temps, ou c'est uniquement une question d'être tenus au courant,
l'acceptabilité et sécurité?
Mme Boisjoly (Audrey) : Moi,
je vous dirais que ce qu'on veut comme information, notamment, c'est d'avoir
l'information, tu sais, le calendrier des travaux, donc, pour savoir exactement
quand est-ce que les travaux vont être faits, d'avoir le plan définitif des
travaux, donc d'avoir l'échéancier, donc à quel moment on peut s'attendre que
la fin des travaux va être... et que les sites seront restaurés. On veut avoir
les études hydrogéologiques qui auront été faites, comment... tantôt... puis on
demande aussi qu'ils s'étendent, pour s'assurer qu'il n'y a pas de
contamination qui aurait eu lieu, des puits de forage jusqu'à nos puits
municipaux, donc, même jusqu'aux bassins versants.
On veut également, là, s'assurer qu'il y
ait un expert qui se penche sur le dossier, puis qui atteste que les travaux
ont été faits conformément au projet de loi, donc au règlement qui en
découlera, et tout autre document, là, qui sera jugé pertinent. Dans le fond,
c'est vraiment l'information que l'on souhaite avoir pour s'assurer de suivre
le dossier, puis s'assurer qu'il n'y aura pas de contamination par la suite, et
que si... s'assurer également qu'un coup que les puits seront fermés, il n'y
aura pas de... S'il arrive quelque chose sur le territoire, que, bon, par
exemple, un puits municipal deviendrait contaminé, ou quoi que ce soit, bien,
on aura eu l'information des activités qu'il y a eu préalablement dans la
fermeture.
Donc, pour nous, c'est surtout au niveau
de l'information. On veut savoir ce qui se passe sur le territoire. On veut
savoir qu'est-ce qui a été fait avant, là. Donc, c'est vraiment au niveau de
l'information, je vous dirais.
M. Châteauvert
(Pierre) :Et, si vous permettez, M. le
député, d'ajouter quelque chose, effectivement, ce que Mme Boisjoly a dit, nous
devons être informés parce que les municipalités et les MRC sont responsables
de la gestion et de l'aménagement du territoire, et si on veut être de vrais
partenaires avec l'État, ça prend cette information-là. C'est parce que
c'est... Et en plus, Mme Boisjoly en a fait état, le ministre également, ce sont
les conseils municipaux, les conseils de MRC qui répondent directement...
M. Campeau : Je vous reposais
la même question par rapport aux projets pilotes. Vous voulez être informés ou
vous voulez participer?
M. Châteauvert
(Pierre) :On peut faire les deux. On est
ouverts à tout, hein? Je pense que Mme Boisjoly va le confirmer, mais nous, on
est ouverts à... Toute mesure importante... On parlait de géothermie tantôt.
Pourquoi pas? On est là-dedans. Nos membres foncent dans la... en fait, développent
un peu partout... Puis on le voit dans l'éolien. M. le ministre est au courant,
il se fait des expériences absolument fantastiques en termes d'énergies
renouvelables, l'Alliance de l'Est, puis un peu partout, là. C'est vraiment
intéressant. Donc, nos membres sont là. Le développement de... sous toutes ses
formes, on est toujours là, là. On sera toujours là, nos membres sont là, c'est
certain.
M. Campeau : Je vous remercie
beaucoup.
Le Président (M. Lemay) : M.
le député de Lac-Saint-Jean, il reste environ 1 min 30 s.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Oui,
je vais faire ça vite. Bonjour à vous deux. C'est agréable de vous entendre.
Moi, c'est... je vais me diriger vers les comités de suivi. Il existe des
comités de suivi qui ont été mis en place, suite à la Loi sur les
hydrocarbures, en 2018. J'aimerais ça vous entendre là-dessus, si c'est un bon
outil, là, au niveau de vos membres. Qu'est-ce que vous en pensez?
Mme Boisjoly (Audrey) : Je
vais te laisser répondre, Pierre.
M. Châteauvert
(Pierre) :Oui. Bien, oui, effectivement,
hein? Tous ces endroits-là où est-ce qu'il y a de la communication, à partir du
moment où est-ce que ce sont des sites connus, puis des sites où est-ce qu'on
a... Mais le problème, souvent, qu'on a, c'est selon les sites qu'on ne connaît
pas ou les sites orphelins, où est-ce qu'il n'y a plus de mesures de suivi,
puis la connaissance n'est pas suffisante. Il y en a, et on sait qu'il y en a
beaucoup sur le territoire. Mais, oui.
Et je peux vous dire que, lors des
dernières élections municipales, il y a beaucoup de maires...
M. Châteauvert
(Pierre) :...Et de conseillers, maires,
mairesses qui viennent... qui proviennent... qui étaient impliqués dans ce
dossier... dans ces dossiers-là, qui se sont faits... qui se sont présentés et
qui se sont refait élire. Donc... que nous, tout lieu d'échange... Mais dans le
processus d'aménagement du territoire, il y a un lien organique puis il y a...
Entre le gouvernement et la MRC via ce schéma puis après, ça s'en va au niveau
des municipalités locales.
Nous, c'est ce qu'on souhaite qui soit
valorisé encore plus. Parce que l'instance officielle qui gère le territoire et
qui gère des ressources par rapport au territoire, l'eau potable, on l'a
mentionnée, c'est la MRC, et après, la municipalité locale. Donc, c'est pour ça
qu'il faut aussi valoriser les liens organiques officiels entre l'État
québécois et le monde municipal.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
monsieur Châteauvert. Et sur ce, nous allons maintenant passer la parole à
l'opposition officielle. Monsieur le député de Mont-Royal Outremont, la parole
est à vous pour environ 11 minutes.
M. Arcand : Merci
infiniment. Mme Boisjoly, monsieur Châteauvert, un plaisir de vous revoir
et de discuter un peu de ce projet de loi qui, évidemment, est important. On a
parlé beaucoup, dans les discussions que vous avez eues avec le ministre et
avec les gens également du gouvernement, de tout l'aspect communication. Et je
voulais revenir sur un certain nombre de points importants, par exemple, le
règlement sur les hydrocarbures actuellement. Parce que, dans le fond, ce que
j'entends de vous, c'est que vous êtes un peu loin du ministère de l'Énergie et
des Ressources naturelles. Par exemple, le Règlement sur les hydrocarbures
oblige actuellement les détenteurs de permis à soumettre au ministère, chaque
semaine, un rapport détaillé sur leurs activités quotidiennes. Est-Ce que je
comprends que vous n'en recevez jamais une copie?
Mme Boisjoly (Audrey) : À
ma connaissance, Pierre, on ne reçoit pas ces informations-là. Puis d'ailleurs,
c'est ce qu'on demande dans nos recommandations, de recevoir les rapports
journaliers de toutes les activités qui ont été faites.
M. Châteauvert
(Pierre) :Ça, c'est... Effectivement, là
dessus, je vous avouerai qu'effectivement, historiquement, les relations entre
le municipal et... le processus d'aménagement des MRC et le Ministère n'ont pas
toujours été très faciles. Mais depuis quelques années, on discute notamment au
niveau... en fait, dans bon nombre de... et il y a des améliorations sensibles
qu'on apprécie. Il y a des orientations, dans ce projet de loi, qui nous
intéressent et on veut profiter de l'occasion pour consolider, notamment,
l'ensemble de cette information-là. Parce que les gens... Et on le dit,
l'article qui donne préséance à l'ensemble du monde... en fait l'ensemble des
hydrocarbures et du système... et de l'industrie minière sur le schéma
d'aménagement cause problème.
Et c'est cette approche-là qui est... qui
vient des temps immémoriaux puis de la gestion de l'État par rapport au
territoire. Et là, il y a un processus qui est plus local de gestion du
territoire. Nous, on prétend et on pense qu'il faut que le... C'est le
processus local. Et l'information doit circuler beaucoup mieux... Ces dernières
années, il y a des améliorations, mais on veut encore aller plus loin.
M. Arcand : D'accord.
Mais actuellement, par exemple, il y a quand même des éléments dans les lois.
Comme par exemple l'article 8 de la Loi sur les hydrocarbures qui exige du
ministre qu'il inscrive au registre foncier une déclaration qui fait état de la
localisation des puits. Alors, est-ce que... quelle est l'information... Une fois
qu'il a fait ça, quelle est l'information qui manque au milieu municipal?
• (10 h 30) •
M. Châteauvert
(Pierre) :Nous, ce qu'on... comme dans
notre mémoire, ce qu'on dit clairement, c'est, en fait, c'est de façon
systématique, bon, là, il faut aller chercher le registre, effectivement, il
est là, notre monde y vont. Les ressources ne sont pas illimitées, elles ne
sont pas aussi grandes que... dans un ministère, dans un domaine d'activité,
donc une MRC, une municipalité, avec les ressources qu'elles ont, les
territoires qu'elles ont, d'aller à chaque semaine sur le registre, c'est des
choses... chercher... faire la démarche, ça peut constituer aussi une
limitation à la transmission de l'information... transmission d'informations
aussi de la part de... Et on ne le voit pas juste au ministère de l'Énergie et
des Ressources naturelles. On le voit dans d'autres ministères.
Nous, ce qu'on demande, c'est qu'il y a un
processus, et avec les technologies... Ce n'est pas compliqué, et transmission
de l'information. Donc, pas nécessairement juste d'aller chercher toujours
l'information, parce que ça, ça demande des ressources et tout ça, avec
l'ensemble des... Mais on veut qu'il y ait transmission de l'information, vous
comprenez, qu'il y ait une approche un peu différente...
M. Arcand : D'accord.
Mais à part la localisation, qu'est ce que vous voulez avoir, d'une façon
supplémentaire?
M. Châteauvert
(Pierre) :regrouper l'information,
l'ensemble des informations. Tu sais, elles sont comme compartimentées, les regrouper
et qu'il y ait transmission...
10 h 30 (version révisée)
M. Châteauvert (Pierre) :...de l'information, au niveau peut-être de… pour ne pas
que… de la MRC qui, elle, va probablement transmettre l'ensemble à ses municipalités
membres. C'est… c'est ces habitudes-là qui ne sont pas là puis qui sont
héritées de la façon que ça a été géré dans le passé et... mais on a... Et, nous,
ce qu'on aimerait, c'est ça, c'est donc une transmission systématique d'informations
regroupées, dossiers complets, tu sais, pour faire le suivi, qui nous
permettrait de faire le suivi à court, à moyen et à long terme de ces puits-là
et de ces installations-là…
Mme Boisjoly (Audrey) : Tout
à fait, tout à fait, parce qu'il y a une différence entre avoir accès aux… à la
documentation et qu'elle soit transmise. Donc, on voit qu'il y a une approche
plus collaborative avec le milieu municipal, avec le milieu des MRC, si cette
transmission d'information là se fait, et qu'elle soit, comme M. Châteauvert
expliquait, toute regroupée, dans laquelle on va avoir accès à l'information de
façon rapide. Donc, on veut… on veut établir un certain partenariat avec le
ministère, dans ce sens-là, pour avoir des données à moyen… à court, moyen,
long terme, pour pouvoir suivre l'évolution, là, des travaux qui auront eu
lieu. Donc, c'est un changement de façon de faire qu'on souhaite, là,
instaurer.
M. Arcand : Donc, pour être
poli, ce partenariat aurait avantage à être amélioré. C'est un peu ce que vous
nous dites.
M. Châteauvert (Pierre) :...vous savez, M. le député que... En fait, ce que moi, je disais,
d'entrée de jeu, là, pour répondre à votre question, l'historique des relations
entre les MRC et le ministère n'ont pas toujours été de... si bonnes, mais il y
a un travail qui se fait, ces dernières années, qui est intéressant. On
comprend qu'il y a des intérêts, qu'il y a des pratiques, il y a des
responsabilités, et tout ça, puis ça va prendre du temps pour changer, mais
disons qu'il y a des choses qui changent, qui bougent, qui nous intéressent et
qui sont… qui sont intéressantes. Évidemment, nos membres revendiquent beaucoup
là-dedans aussi. Donc, il faut concilier tout ça.
M. Arcand : Non, je
comprends, mais la seule chose, c'est parce que c'est dans les lois, c'est… c'est
ça, mon… le point que j'essaie de vous expliquer puis qui est important, c'est
que c'est déjà... ça déjà été dans des lois qui ont été votées, dans des
règlements qui sont intervenus. Alors, c'est pour ça que je vous pose la
question. Par exemple, il y a les dispositions, par exemple, d'un article 28
de la loi actuelle sur les hydrocarbures qui parle de comité de suivi, qui
exige du ministre qu'il crée un comité de suivi avec la participation des
partenaires locaux pour chaque permis d'exploration. Alors, moi, je veux savoir
si les comités de suivi ont satisfait le milieu municipal. Est-ce qu'il y a une
démarche qui est manquante dans ça? Est-ce qu'il y a une information qui est…
qui est nécessaire? Est-ce que ça marche, les comités de suivi? C'est ça, ma
question.
M. Châteauvert (Pierre) :Ça semble fonctionner, dans la mesure où est-ce qu'ils se
réunissent, là, tu sais. Il y en a beaucoup, de ces comités-là, effectivement.
Mais, oui, il y a des choses qui peuvent se faire, mais nous, on pense que ce
serait encore plus efficace si l'information nous était transmise de façon
systématique et de façon regroupée. À ce moment-là, ce serait encore plus… Parce
qu'il y a comme une... c'est qu'on met en place comme une instance parallèle à
l'ensemble du processus, qui devrait être valorisé à ce moment-là. Vous savez,
le lien via l'aménagement du territoire entre… tu sais, entre une MRC et le ministère,
où est-ce que, si on y allait de façon systématique, la transmission de l'information
regroupée, à ce moment-là, localement… la MRC aurait la responsabilité, en
fait, transmettrait à l'ensemble des groupes, l'ensemble des municipalités
concernées, et il y aurait un suivi encore plus rigoureux. Là, ici, c'est… ça ne
se réunit pas toujours, c'est... là, mais, nous, ce qu'on pense c'est que... de
valoriser le système d'aménagement, en fait, de profiter du système qui est là,
le valoriser et l'utiliser serait encore plus efficace que le...
M. Arcand : De mémoire, une
des choses qui faisaient bien peur aux municipalités, et non sans raison d'ailleurs,
c'est le fait que, lorsqu'il a été question, à un moment donné, de fracturation
hydraulique ou d'exploration, on était très inquiets, du côté des
municipalités, entre autres, de l'utilisation des composés chimiques, par
exemple, des produits chimiques qui étaient utilisés. Est-ce que le milieu
municipal, de façon générale, a été adéquatement informé sur ces produits-là,
sur les nappes phréatiques, sur la qualité de l'eau potable? Est-ce que vous
êtes satisfaits à ce niveau-là?
M. Châteauvert (Pierre) :On ne peut pas dire… excusez-moi, là, vous me permettrez,
mais on ne peut pas dire qu'on était satisfaits, parce que le problème, dans
toutes ces notions-là, c'est que c'est la <dépendance...
M. Châteauvert
(Pierre) :
...satisfaits, parce que
le problème, dans toutes ces notions-là, c'est que c'est la >dépendance par
rapport à la… au promoteur, à celui qui veut réaliser le puits, qui veut faire
le puits, et tout ça. C'est… on est beaucoup les... ce qui est en place, actuellement,
on dépend pas mal de la volonté du promoteur là-dedans et on ne peut pas dire
que c'est... Et c'est de là notre demande d'être systématiquement informés, que
l'information nous soit transmise de façon regroupée. La MRC, qui est un corps
public dirigé par des élus, qui sont redevables devant la population, à ce
moment-là, eux autres, ils vont être en mesure d'informer. Donc, c'est pour ça
que nous, on pense que ça va être beaucoup plus efficient, et que la démarche
serait bonifiée et plus satisfaisante pour les citoyens qui ont à vivre ça sur
leur territoire. Donc, on trouve que c'est... il faut aller plus loin.
M. Arcand : D'accord. Je
voulais vous parler des montants, entre autres, que le gouvernement alloue pour
des différentes compensations. Le gouvernement s'est donné un montant de
100 millions. Est-ce que vous avez une opinion là-dessus? Est-ce que vous
avez un... est-ce que vous pensez que le gouvernement doit compenser? Est-ce
que vous pensez que… ce montant-là, selon ce que vous savez, vous semble
suffisant?
Mme Boisjoly (Audrey) : Pour
nous, M. le député, dans le fond, l'important, c'est comme on le martèle depuis
tout à l'heure, c'est vraiment la sécurité dans la fermeture des puits, la
transmission de l'information, la transparence. Puis, le processus du projet de
loi n° 21, comme on l'a dit tout à l'heure, on le
trouve pertinent. Ça s'inscrit dans une logique de tendre vers les énergies
renouvelables, puis les Québécois sont rendus là aujourd'hui. Donc, pour nous,
le projet de loi, il est pertinent.
Par contre, ce qu'on souhaite, c'est qu'on
soit informés dans toutes les étapes du processus de fermeture des puits, qu'on
nous transmette l'information, comme M. Châteauvert le précisait, que
cette transmission-là… de se faire de façon systématique et qu'elle soit
facile, donc qu'on établisse un partenariat avec avec le ministère. Donc, pour…
les questions des indemnisations, je vous dirais que, nous, c'est surtout la
sécurité, l'environnement puis la transparence, là, qui nous préoccupent pour
la suite des choses.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Boisjoly. Désolé, M. le député de Mont-Royal—Outremont,
ceci complète cette rubrique. Et je cède maintenant la parole à la députée d'Abitibi-Témiscamingue,
en vous rappelant que vous disposez d'environ 2 min 45 s.
Mme Lessard-Therrien : Merci,
M. le Président. De Rouyn-Noranda—Témiscamingue.
Le Président (M. Lemay) : Ah!
excusez-moi.
Mme Lessard-Therrien : Je
suis toujours flattée qu'on me prenne pour la représentante de cette belle
grande région. Merci, Mme Boisjoly, pour votre présentation. L'une des
recommandations de votre mémoire, c'est supprimer la préséance des
hydrocarbures, des mines sur les schémas d'aménagement des municipalités. En d'autres
mots, vous proposez d'abroger l'article 246 de la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme. Est-ce que vous avez des craintes que certains projets pilotes qui
découleraient du projet de loi n° 21 ne respectent
pas la volonté des municipalités?
Mme Boisjoly (Audrey) : Dans
le fond, quand on demande qu'effectivement la Loi sur les hydrocarbures ou la
Loi sur les mines n'aient pas préséance sur les SADR, donc nos outils qui sont
des outils de développement. Donc, dans le fond, ce qu'on souhaite, c'est que,
justement, toutes les industries, que ce soient les industries d'hydrocarbures,
mines, n'aient pas préséance sur nos outils d'aménagement, qui sont la
volonté... qui… dans le fond, qui sont des outils qu'on a eus des consultations
avec nos populations locales, nos régions et qui sont ces outils de
développement là. Donc, pour nous, que la Loi sur les hydrocarbures, la Loi sur
les mines passent par-dessus et viennent contraindre le développement de nos
régions, pour nous, bien, c'est une revendication depuis toujours. Et on
souhaite qu'effectivement cette loi-là... cet article de loi soit abrogé, là,
en ce sens-là.
• (10 h 40) •
M. Châteauvert
(Pierre) :Rapidement, si vous permettez.
On ne peut rien exclure sur nos territoires. Une municipalité, une MRC ne peut
pas exclure quelque chose, mais on veut... on pense qu'on est la meilleure
instance, nos membres sont la meilleure instance pour gérer le territoire, donc
en ce sens-là. Donc, c'est en ce sens-là. Donc, on ne peut rien exclure. Donc,
il y a un projet, il peut toujours être bon, et tout ça. Donc, il faut laisser
la chance au coureur à quelque part. On n'a pas le droit de dire : Non,
ça, on ne veut pas ça, mais on pense qu'on est la meilleure instance pour gérer
le territoire, de là notre revendication historique.
Mme Lessard-Therrien : Puis,
tu sais, à votre avis, ce serait quoi, tu sais, pour que vous soyez assis
autour de la table, là? Quelle forme devrait prendre cette collaboration-là
pour être inclus à toutes les étapes de la décision? Où est-ce que vous voyez… Comment
vous la voyez, cette collaboration-là?
Mme Boisjoly (Audrey) : Bien,
à vrai dire, je pense que, justement, cette revendication historique là d'abroger
l'article 246 viendrait faire en sorte qu'on pourrait planifier notre
territoire. Donc, on serait déjà en <avant...
Mme Boisjoly (Audrey) :
...viendrait
faire en sorte qu'on pourrait planifier notre territoire. Donc, on serait déjà
en >avant de ça, parce qu'on viendrait, justement, déterminer dans quels
territoires on souhaite faire ces explorations-là, ou autres projets pilotes.
Donc, je pense que, déjà, si on répond à cette demande-là en abrogeant l'article 246,
d'une certaine façon, les territoires vont être consultés, c'est les territoires
qui vont avoir préséance. Donc, on va pouvoir déterminer à quels endroits on va
faire ces projets pilotes là. Donc, je pense que ça viendrait répondre à votre
question.
Mme Lessard-Therrien : Bien…
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Boisjoly, c'est ce qui complète cette rubrique. Et je cède maintenant
la parole au troisième groupe d'opposition, M. le député de Jonquière, pour la
même chose, 2 min 45 s.
M. Gaudreault : Oui,
merci. Bonjour, bienvenue. Je voudrais que vous me donniez des exemples
récents, sur les territoires de municipalités qui sont membres chez vous, de
puits ou de forages qui sont mal entretenus ou laissés à l'abandon. Je ne parle
pas de puits, là, du 19e siècle, là, mais des… Avez-vous des exemples à nous
donner de choses récentes, d'événements récents?
Mme Boisjoly (Audrey) : Pierre,
en as-tu?
M. Châteauvert
(Pierre) :Oui, bien, en fait, au Centre-du-Québec,
il y a eu beaucoup d'activités en ce sens-là. D'ailleurs, il y a eu plusieurs municipalités
qui se sont mobilisées dans ce sens-là. Bien, vous les connaissez, là, toute l'expérience,
M. le ministre en a parlé, de la Gaspésie, au niveau de la protection des
sources d'eau potable. Dans le sud de Lanaudière aussi, il y a eu plusieurs municipalités
qui se sont mobilisées suite à des puits qui étaient là et qui… abandonnées,
parfois aussi encore sur les listes officielles, qui causent problème, tant au
niveau des communautés que des résidents. À plusieurs endroits sur le
territoire québécois, effectivement, on a ce genre d'exemples là, des élus qui…
des maires, et qui se retrouvent… D'ailleurs, ce matin, on en… on voyait dans
le journal, là, effectivement, dans Le Devoir, où est-ce qu'on citait
quelques cas, mais Centre-du-Québec , Gaspésie, coin de la Matapédia, le sud de
Lanaudière, c'est des endroits où est-ce qu'il y a beaucoup de cas, là.
M. Gaudreault : Et cela…
cela, évidemment, cause des problèmes sur votre territoire, des enjeux, des
inquiétudes, par exemple, reliées à l'eau potable, mais est-ce que vous ne
trouvez pas que ceci serait suffisant en soi pour dire à l'industrie :
Bien, c'est bien de valeur, mais il n'y aura pas d'indemnisation?
Mme Boisjoly (Audrey) : À
vrai dire que… nous, dans le fond, M. le député, ce qu'on demande, c'est qu'effectivement
le suivi soit fait. Donc, je vais oser me répéter, mais, dans le fond, c'est
que, pour la suite, ce qu'on souhaite, justement, c'est que les municipalités
et les régions soient consultées, soient informées de ce qui va se passer pour
la fermeture de ces puits-là. M. Châteauvert, je pense que vous vouliez
rajouter...
M. Châteauvert
(Pierre) :Oui, bien, c'est ça. C'est une
relation qui s'est faite entre le droit qui a été donné par l'État… donc c'est
à l'État, donc c'est à vous à décider par rapport à cette gestion-là. Nous, on
s'occupe de l'ensemble de la gestion du territoire au niveau local, et tout, puis
on se… nos commentaires sont… portent sur ces questions-là. La question des
droits et du… des compensations, et tout ça, c'est aux députés à l'Assemblée
nationale de se… de traiter de cette...
M. Gaudreault : Est-ce
que vous trouvez, sur les projets pilotes, que c'est suffisamment clair, dans
le projet de loi n° 21, qu'ils ne doivent s'inscrire que dans une optique
d'atteinte de la carboneutralité?
Le Président (M. Lemay) : Brièvement.
M. Châteauvert
(Pierre) :Nous, en fait, la volonté, elle
est là. Et on va discuter avec le ministre, effectivement, pour s'assurer,
comme on l'a dit, nous... C'est ce que le ministre nous a annoncé puis ce qu'il
nous a parlé encore ce matin. On est ouverts à tous les projets, mais, nous,
dans le cadre de ce qu'on a dit dans notre mémoire, donc le respect de l'environnement,
des communautés, l'acceptabilité sociale, protection des sources d'eau, et tout
ça. Donc, on est prêts à travailler avec le ministre, évidemment.
Le Président (M. Lemay) : Voilà.
Alors, merci beaucoup, Mme Boisjoly, ainsi que M. Châteauvert pour
votre contribution aux travaux de la commission.
Et je vais suspendre, dans quelques
instants, pour permettre au prochain groupe de prendre place, virtuellement,
bien entendu. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 47)
(Reprise à 10 h 54)
Le Président (M. Lemay) : Alors,
bonjour. Nous reprenons nos travaux, et la Commission de l'agriculture, des
pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles vous souhaite la bienvenue,
aux représentants du Front commun pour la transition énergétique. Je vous… je
vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. Par
la suite, il y aura une période d'échange avec les membres de la commission, mais,
avant de débuter, j'aimerais simplement que vous puissiez vous identifier, ainsi
que votre titre à la caméra, bien, à tous les membres de la commission. Et
ensuite, bien, vous… la parole est à vous.
Mme Prud'homme (Maude) : Alors
bonjour, je suis Maude Prud'homme, déléguée à la transition du Réseau québécois
des groupes écologistes et membre élue du comité de coordination du Front
commun pour la transition énergétique. Je suis en compagnie de Carole Dupuis,
porte-parole du Mouvement écocitoyen UNEplanète, elle aussi membre élue du
comité de coordination du Front commun pour la transition énergétique.
Le Président (M. Lemay) : Allez-y
avec votre exposé. Merci. Bienvenue à la commission.
Mme Prud'homme (Maude) : Merci
à vous. Alors, bien, on vous remercie d'abord de nous accueillir pour offrir
nos points de vue sur le projet de loi n° 21 visant principalement à
mettre fin à la recherche et à la production d'hydrocarbures ainsi qu'au
financement public de ces activités. Pour présenter un peu le front commun, d'abord,
pour s'assurer, là, qu'on soit bien compris, situé. Créé en 2015, le Front
commun pour la transition énergétique regroupe des organisations qui
contribuent à l'élaboration collective et à la mise en œuvre d'une transition
énergétique structurante et porteuse de justice sociale. Il regroupe
90 organisations environnementales, citoyennes, syndicales, communautaires
et étudiantes qui représentent collectivement 1,8 million de personnes
environ, soit près de la moitié de la population active du Québec.
Conscient de l'interdépendance des
dimensions écologiques, énergétiques, économiques et sociales et guidé par la
conviction que la transition énergétique est une occasion exceptionnelle de
transformations profondes à tous ces égards, le Front commun pour la transition
énergétique promeut une transition structurante et porteuse de justice sociale.
Fort de la diversité de ses membres, de leurs multiples ancrages dans toutes
les régions du Québec, il mise sur le dialogue social pour soutenir l'émergence
d'un mouvement collectif d'ampleur en faveur de ces transformations de fond.
Nous nous réjouissons vivement du dépôt du projet de loi qui nous réunit ce
matin. Nous avons toutefois certaines réserves, et je passe la parole à
Mme Dupuis pour expliciter plus avant ces éléments.
Mme Dupuis (Carole) : Bonjour.
Merci de nous accueillir, M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les
députés. Tout d'abord, la première chose très importante à dire, c'est qu'à nos
yeux le projet de loi n° 101 amène une loi qui est vraiment nécessaire. C'est
une pièce législative de première importance, dans le présent contexte d'urgence
climatique, parce que ça envoie un signal très fort au Canada et partout dans
le monde, le projet de... dans le contexte de l'urgence climatique actuelle,
évidemment. Le projet de loi n° 21 c'est aussi un projet de loi qui est
nécessaire pour les communautés touchées. <L'opposition...
Mme Dupuis (Carole) :
...c'est
aussi un projet de loi qui est nécessaire pour les communautés touchées. >L'opposition
au développement de la filière des hydrocarbures est intense, vous le savez,
depuis l'intrusion intempestive de l'industrie du gaz de schiste au Québec. Donc,
le projet de loi vient soulager des centaines de communautés qui s'étaient
retrouvées à la merci d'une industrie polluante et invasive.
Enfin, les représentants de la FQM l'ont
bien exprimé, la loi est nécessaire pour la protection des eaux, puisque l'exploitation
des réserves d'hydrocarbures au Québec aurait présenté des risques
inacceptables de contamination des eaux, tant souterraines et de surface. En
conséquence de ces… de ces différents éléments, bien, nous souhaitons vivement,
nous recommandons, que l'Assemblée nationale exerce toute la diligence possible
pour bonifier et adopter rapidement le projet de loi et que le gouvernement
mette la loi en vigueur avant la fin de la présente période de travaux
parlementaires.
Comme ma collègue l'a exprimé, c'est aussi
un projet de loi qui devrait, à notre avis, être bonifié, malgré toute la joie
qu'il nous inspire, et nos deux… les deux aspects sur lesquels j'ai le temps
de... que j'ai le temps de mentionner, ce matin, elles sont le programme d'indemnisation
et les projets pilotes.
En ce qui concerne le programme d'indemnisation,
à la lecture de ce qui est présenté dans le projet de loi, on… ça semble faire
abstraction de plusieurs facteurs qui doivent absolument être pris en compte
avant de décider d'ouvrir les coffres de l'État. Premièrement, selon l'analyse
du Centre québécois du droit de l'environnement, vous le savez, le Québec n'a
pas d'obligation légale d'indemniser les titulaires de licences annulées.
Deuxièmement, il n'a pas été démontré que
les titulaires des licences annulées vont subir un tort. Et je vous réfère ici
aux travaux de Marc Durand en géologie et d'Éric Pineault en économie qui
tendent à démontrer... peut-être pas à démontrer, mais qui demandent vraiment d'avoir
des chiffres très précis, dont nous ne disposons pas, qui démontreraient que ce
ne sont pas des actifs échoués, parce que tout tend à démontrer que ce sont
actuellement des actifs échoués qui n'ont pas de valeur, ces licences-là.
Enfin, troisièmement, l'interdiction d'extraire
des énergies fossiles était prévisible. Ce n'est pas une surprise pour les
compagnies. Quatrièmement, les coûts des dommages causés par les forages sur
les eaux avoisinant les puits déjà creusés ne sont pas connus, à ce moment-ci, et
doivent être pris en considération avant de penser à dédommager qui que ce
soit. Cinquièmement, il y a plusieurs facteurs, les puits existants
représentent une dette écologique illimitée. On sait que le... ni le ciment ni
l'acier ne sont des matériaux éternels, et ces puits-là, qui vont être fermés
éventuellement, vont laisser échapper du métal, et c'est une dette écologique
qui est laissée indéfiniment.
• (11 heures) •
Sixièmement, on ne connaît les avantages
fiscaux consentis aux investisseurs. On n'a pas de chiffres là-dessus. Qu'il
s'agisse d'investisseurs, de compagnies ou de particuliers, on sait qu'il y a
des crédits d'impôt importants qui sont accordés. Donc, ce ne serait pas
naturel que le gouvernement du Québec et la population du Québec remboursent
deux fois les mêmes montants à ces compagnies-là.
Et, enfin, les coûts sociaux, les coûts
des soins de santé attribuables aux tentatives d'intrusion de l'industrie
pétrolière et gazière dans les milieux de vie doivent être pris en
considération. On pense à des communautés divisées, on pense à des querelles
familiales, on pense à tout ce que ça a coûté en temps, et en énergie, et en
stress aux élus municipaux. C'est des coûts réels, et dont on devrait tenir
compte.
Pour toutes ces raisons, on recommande que
soient rendus publics, en complète transparence, tous les coûts que la société
québécoise a déjà absorbés et devra assumer à l'avenir en lien avec l'incursion
de l'industrie pétrolière et gazière, et que, sur cette base-là, aucun cadeau
ne soit donné aux compagnies titulaires de licences suite à l'adoption de la
loi.
Pour ce qui est du deuxième point... Ça
va?
Le Président (M. Lemay) : Oui.
Mme Dupuis (Carole) : Pour
ce qui est des projets pilotes, on lit au chapitre VII du projet de loi
que le ministre pourra autoriser des projets visant à acquérir des
connaissances géoscientifiques relatives au potentiel de diverses filières
liées à la transition énergétique. On reconnaît que c'est important de
poursuivre des recherches sur les nouvelles filières. Néanmoins, nous observons
que ce chapitre ouvre très largement des portes vers des perspectives... (Panne
de son) …très vagues, et cela nous inquiète.
Notamment, nous constatons… on parle de
deux compagnies, ça aurait pu être d'autres peut-être, mais on a analysé...
11 h (version non révisée)
Mme Dupuis (Carole) :
...on parle de deux compagnies, ça aurait pu être d'autres peut-être, mais on a
analysé plus précisément les cas de Questerre Energy et de Ressources Utica,
deux importants titulaires de licences qui vont être évoqués. Ces compagnies-là
sont aux premières loges pour tirer avantage du chapitre7. Ce sont des
compagnies qui sont toutes deux détenues majoritairement par des actionnaires
étrangers. Et ces compagnies-là, ou celles... parce qu'il y a eu des ventes
d'actifs importantes, là, celles qui les ont précédées, leur établissement au
Québec a été fait avec l'aide du gouvernement du Québec. Depuis qu'elles sont
ici, elles n'ont ménagé aucun effort de lobbyisme pour faire pencher nos lois
en leur faveur. Elles n'ont jamais renoncé à tenter d'enfoncer leurs projets
dans la gorge des communautés et des administrations municipales. Elles ont
intenté des procédures judiciaires à Gaspé, à Ristigouche-Sud-Est. Et elles ont
récemment intenté des procédures judiciaires contre le gouvernement du Québec
et lui réclament aujourd'hui, dans le contexte du projet de loi no 21, des
indemnisations qui totalisent des centaines de millions de dollars.
À présent, en consultant le Registre des
lobbyistes du Québec, on voit que ces compagnies-là reviennent à la charge sous
une bannière verte pour exploiter différemment les mêmes territoires, qu'ils
sont à nouveau en lice pour profiter de la manne gouvernementale associée aux
nouvelles filières. Cela suscite des appréhensions bien compréhensibles au sein
des groupes citoyens, qui luttent depuis plus de 10 ans pour se libérer de
leur emprise. Les nouvelles technologies dont il est question ici sont
probablement intéressantes jusqu'à un certain point, mais sont tout aussi
inconnues de la population que le gaz de schiste l'était en 2006. Il est très
important, à notre avis, d'avancer dans ce dossier-là sans plonger les
communautés dans des affrontements comparables à ceux que l'industrie
pétrolière et gazière a provoqué un passé récent. On ne sait pas de quel genre
d'installations il s'agit. On ne connaît pas les risques. On ne connaît pas
l'invasivité. Est-ce que c'est bruyant? Qu'est-ce que ça implique pour le
voisinage? Est-ce que c'est des situations de boom économie, comme le pétrole?
On ne sait pas.
Donc, dans ce contexte-là, on recommande
vraiment la plus grande prudence. Plus précisément, on voudrait que soit
précisé que les... Bien, première chose, il y ait une imprécision, là. On
voudrait qu'il soit précisé que des projets pilotes ne pourront être menés que
dans les puits existants, ce n'est pas écrit dans la loi comme telle, que les
projets pilotes soient explicitement assujettis à la Loi sur la qualité de
l'environnement, ce qui implique, dans les cas où ça s'impose, que les projets
pilotes fassent l'objet d'enquêtes publiques du BAPE. En parallèle...
Le Président (M. Lemay) :
Mme Dupuis, est-ce que vous avez encore beaucoup d'exposé? Parce que vous
avez atteint votre 10 minutes.
Mme Dupuis (Carole) : Oupelaïe!
Peut-être que je peux conclure...
Le Président (M. Lemay) : Allez-y,
en conclusion.
Mme Dupuis (Carole) : Oui,
que le... qu'on vous dirait que les projets pilotes soient... qu'il y ait une
évaluation environnementale stratégique suivie d'un BAPE sur l'ensemble des
filières de la transition, pas seulement celles qui sont prévues dans le projet
de loi, mais l'ensemble, et qu'on décide sur cette base-là avec la population
en informant la population et en évitant les tensions sociales, où est ce qu'on
investit collectivement, où est-ce qu'on met notre énergie et comment les
choses vont se passer
Le Président (M. Lemay) :
Très bien. Donc, merci beaucoup, madame Prud'homme et Mme Dupuis, pour
cet exposé. Nous allons maintenant passer à la période d'échange avec les
membres de la commission. Et, monsieur le ministre, la parole est à vous.
M. Julien : Oui, bonjour,
mesdames. Merci infiniment, là, pour le document que vous avez produit, qui est
hyperintéressant, qui révèle une dizaine de recommandations, qu'on a bien étudiées
de notre côté. Et, en réalité, je vais avoir des échanges avec vous puis même
des réponses, à plusieurs égards, là, à vos interrogations. Puis on aura
l'occasion de préciser ensemble, là, vos préoccupations.
Pour les projets pilotes, bon, l'article 42,
Mme Dupuis, mentionne clairement: "Le projet pilote mis en oeuvre en
vertu du présent chapitre ne peut avoir pour effet de permettre la recherche
d'hydrocarbures ou de réservoirs souterrains, la production d'hydrocarbures,
l'exploitation de saumure". Bref, l'exemple que vous avez mentionné,
Questerre, là, on s'entend clairement, là, que ça ne répond pas à l'article 42.
Puis je le réitère, là, les projets pilotes ne visent pas aucunement
l'exploitation, l'exploitation. Géothermie, captage de carbone, mais ce n'est
rien d'autre.
Vous avez mentionné également, Mme Dupuis,
que ce n'était pas précisé que c'étaient uniquement les puits existants, les 62 puits
des 182 licences. Je vais regarder avec les gens du juridique. Pour nous
autres, c'est implicite, c'est que ce n'est que ça. Et si, au besoin, là,
puisque c'est confirmé de notre bord, on va voir, est ce qu'on doit amener une
précision supplémentaire. Parce que...
M. Julien : ...c'est clair
que c'est vers ça qu'on souhaite aller.
Maintenant, j'aimerais vous entendre un
peu plus sur... Parce que moi, là, quand on donne, en réalité, là, «le ministre
peut déterminer»... Donc, je comprends bien, Mme Dupuis, que votre groupe
souhaiterait que cette détermination-là passe par un processus beaucoup plus
large, a priori, soit de consultation et d'approbation. Parlez-m'en un peu
plus, Mme Dupuis.
Mme Dupuis (Carole) : Un peu
à la manière de la Fédération québécoise des municipalités, qui s'est exprimée
ce matin, on pense que les promoteurs, et les promoteurs qu'on connaît, entre
autres, dont on connaît la culture, et tout, ne doivent pas être autorisés à
débarquer dans les milieux de vie ou dans les milieux naturels, hein, parce
qu'il y a des forêts aussi qui sont menacées dans ce genre de contexte là, sans
que les gens aient eu l'occasion de prendre connaissance des enjeux autant
matériels... On parle de risques, par exemple, stocker de l'hydrogène, est-ce
qu'il y a des risques rattachés à ça? Les gens ne le savent pas. Stocker de la
captation du carbone, est-ce que ça peut fuir, à un moment donné? Bon, ce genre
de choses là. Les impacts économiques qu'une arrivée... que ce genre de projet
là peuvent avoir dans la région et les impacts sociaux. On parlait... Dans le
cas du gaz de schiste, on parlait de boomtown, d'effet boomtown, de choses
comme ça. Quels sont les enjeux? Qu'est ce que ça implique et quels sont les
apports de ces filières potentielles à la transition? Donc, que la population
en général soit vraiment, véritablement, informée. C'est pour ça qu'on parle
d'une évaluation environnementale stratégique et que tout se soit passé en
revue.
Parce qu'il y a aussi plusieurs filières
qui ne sont pas du tout mentionnées ici. Et là on comprend que ce n'est pas
dans le contexte du projet de loi, mais les premières filières pour faire la
transition énergétique, c'est la sobriété énergétique, premièrement, c'est
l'efficacité énergétique, deuxièmement, et c'est l'électrification ensuite.
Donc, est ce que l'argent de la transition, est ce que les cerveaux, dans nos
administrations publiques, qui travaillent pour la transition vont être
concentrés sur des projets qui, finalement, sont marginaux par rapport aux
besoins de la transition, alors que d'autres aspects, ou des promoteurs
moins... Je vais utiliser un anglicisme, là, moins agressifs, moins insistants
ne sont pas là pour défendre nécessairement ces filières-là qui sont plus
nouvelles, qui sont un petit peu plus difficiles à développer. Ça répond à
votre question?
• (11 h 10) •
M. Julien : Oui, merci. Un
autre volet que vous avez apporté, Mme Dupuis, puis, encore là, je l'ai entendu
à quelques reprises, donc, je vais prendre le temps de le préciser, là, pour
pour les fins de tous... Vous avez parlé de crédit d'impôt, de l'aide
gouvernementale, etc. L'indemnisation qui est prévue au projet de loi vise à
retourner six ans derrière, c'est-à-dire 2015. Pourquoi? C'est le délai de
prescription des documents fiscaux. Alors, on veut être capable de toucher les
investissements qui ont été faits pour maintenir les licences, se conformer aux
lois et règlements. Donc, c'est des frais qui ont été faits dans les six
dernières années, on ne retourne pas aux calendes grecques. Et c'est des
montants qui vont être remboursés, nets de toute aide gouvernementale. Donc,
si, par exemple, il y a eu des investissements pour 1 million et que les
crédits, autre chose, c'est 500 000$, bien, le remboursement, le cas échéant,
serait de 500000$. Puis, naturellement, on ne retourne pas aux calendes
grecques.
Donc, je voudrais vous entendre, puis je
vais compléter ma question. Votre deuxième recommandation, c'est comme tous les
impacts, l'évaluation, en fin de compte, de tous les impacts de l'incursion de
l'industrie pétrolière et gazière sur le territoire du Québec. Mais on sait,
là, qu'actuellement, là, il n'y a aucun projet qui n'a jamais été en production
commerciale, au Québec, donc c'est beaucoup plus de la prospection. On retourne
dans les six dernières années, et j'essaie de voir, là, le lien entre ce
potentiel-là, tandis que nous autres, ça va être sur preuve d'investissements
nets des crédits, parce qu'on met un terme à un droit quasi immobilier.
Donc, j'essaie de faire le lien entre ces
deux volontés-là... puis vous entendre, maintenant que je vous dis qu'on va
faire la soustraction des aides financières gouvernementales. Comment vous
voyez ce processus d'indemnisation?
Mme Dupuis (Carole) : Écoutez,
il y a vraiment plusieurs éléments, là, dans votre question... dans notre
mémoire. Pour ce qui est des crédits d'impôt à l'exploration qui peuvent être
consentis à des personnes ou à des entreprises, s'ils ne sont pas dans le
champ, dans la durée, dans la période dont...
Mme Dupuis (Carole) : ...tenir
compte, j'imagine qu'on doit en faire abstraction. Mais cela dit, les dépenses,
si un investissant, si une entreprise décide d'engager des dépenses pour un
projet qui est voué à l'échec, soit parce que le gisement n'a pas de potentiel
exploitable comme tend à le démontrer... tendent à le démontrer certaines
analyses de Marc Durand, professeur de géologie à la retraite, ou si c'est des
actifs qui ne peuvent jamais être exploités, qui n'ont aucun potentiel
d'exploitation à cause de l'absence d'acceptabilité sociale qui était reconnue
par l'industrie dans son ensemble, et ici, je vous réfère au mémoire à venir de
Monsieur Eric Pinault du Collectif scientifique sur les questions énergétiques
au Québec, à ce moment-là, si une entreprise décide d'engager des dépenses,
c'est... responsabilité, on estime que c'est probablement la responsabilité de
l'entreprise et non celle de la population du Québec qui n'a pas demandé à
faire venir ces gens-là sur leur territoire. C'est en...
M. Julien : Mais, pour
faire du pouce là-dessus, madame Dupuis, si vous permettez, d'un autre côté on
ne retourne pas, je le mentionne, aux calendes grecques, on retourne en 2015.
Donc ça serait de venir dire aux investisseurs qui ont investi dans un cadre
légal qui le permettait, qui ont acquis des licences qui étaient exigées et qui
se sont conformés à un processus et une loi, une réglementation en 2015 et
aujourd'hui, c'est-à-dire dans les six dernières années, plus ou moins, je
comprends quelqu'un qui... si quelqu'un avait fait un investissement. C'est
pour ça aussi qu'on limite dans le temps, c'est... à un moment donné, il n'y a
pas d'expectative, mais vous, vous nous dites que les gens qui auraient
investi, le cas échéant, dans les six dernières années, l'ont fait, sachant
très bien qu'il n'y avait pas d'expectative. Je trouve ça particulier parce
que, tu sais, je ne retourne pas il y a 20 ans, là. Mais pourquoi ces
gens-là ce seraient investis dans les six dernières années, sachant que ce que
vous mentionnez?
Mme Dupuis (Carole) : Écoutez,
je ne peux que spéculer. Je n'aimerais pas prêter des intentions, mais je vois
qu'aujourd'hui, ils réclament 500 millions de dollars, c'est ça?
M. Julien : Ce n'est pas
ce que prévoit le projet de loi.
Mme Dupuis (Carole) : Je
ne veux pas faire de procès d'intention.
M. Julien : Mme Dupuis,
c'est très intéressant. Rapidement, là, avant de passer la parole à mes
collègues, je réitère que je vous remercie pour les 10 recommandations. Je
pense qu'il y en a certaines qui sont beaucoup plus larges que le projet de
loi, mais qui méritent certainement réflexion plus avant. Et honnêtement, là,
je pense que le travail a été fait, bien fait. Je retiens que vous êtes
favorable, mais qu'il y a des enjeux beaucoup sur les projets pilotes et sur le
volet indemnisation. Je vois qu'il y a peut-être une autre intervention, là, de
votre collègue.
Mme Prud'homme (Maude) : Bien,
c'est qu'il y a des aspects qui sont corollaires. Bien qu'on puisse se réjouir
du projet de loi, on se souviendra à l'époque, puis moi, je suis résidente de
la Gaspésie, on se faisait chauffer les oreilles, à dire : Ah! mais là, il faut
que vous soyez responsables, puis si on consomme des hydrocarbures, on devrait
en assumer la production en sol québécois. C'était un discours qui était très
fréquent.
Or, si on combine cet esprit de responsabilisation
à la situation climatique, à la situation écologique, ça nous amène
effectivement à se responsabiliser dans la réduction de notre consommation
d'hydrocarbures, dans la réduction de notre dépendance aux hydrocarbures, ce
qui amène à un projet de société beaucoup plus vaste que le cadre ici de cette
commission, mais qui est non moins nécessaire. Et c'est pour ça que notre
recommandation est beaucoup plus large au niveau d'un BAPE générique sur une
transition énergétique puisque c'est corollaire en termes de responsabilité. Je
pense qu'on le voit dans les circonstances, là, avec la COVID, lorsqu'il n'y a
pas cohésion, cohérence et partage et consensus autour de mesures drastiques à
prendre pour transformer des situations, bien, on s'en trouve fort dépourvu
lorsque l'application fut venue.
M. Julien : J'aime bien
La Fontaine ici. Écoutez, je suis parfaitement d'accord comme ministre
responsable de la transition énergétique, et je pense qu'il y a un chantier
bien plus large que le projet de loi ici, qui a une visée et un objectif très
clairs. Et je vous rejoins, tantôt je ne sais pas laquelle de vous deux a
mentionné, là, puis... quand je parle avec Sophie Brochu, ont convient tous les
deux que l'électron qui coûte le moins cher, c'est celui qu'on économise.
L'Énergie qui coûte le moins cher, c'est celle qu'on économise. Puis vous
prêchez à un converti. Merci, mesdames. Je ne sais pas s'il y a des collègues
qui sont intéressés à intervenir.
Le Président (M. Lemay) :
Très bien. Merci, Monsieur le ministre. Donc, monsieur le député de
Lac-Saint-Jean, la parole est à vous. Il reste environ 4 minutes à la
formation politique.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) :
Merci, Monsieur le Président. Bonjour madame Prudhomme et ainsi que Mme Dupuis.
Ça fait plaisir d'entendre, là, vos propos, et tout comme...
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : …comme
vous, le gouvernement, vous mentionnez que vous avez hâte que ce projet de loi
là soit adopté avant la fin des travaux parlementaires, que la loi soit en
vigueur, et vous mentionnez aussi que c'est un nouveau chapitre dans l'histoire
des ressources naturelles, vous l'avez même dit que c'est une victoire lors
d'une de vos sorties publiques. Et, tu sais, dans ce message-là qu'on envoie,
selon vous, un message... est-ce que ce message-là est positif aux acteurs du
secteur énergétique au Québec et voire dans le monde aussi?
Mme Prud'homme (Maude) : Bien,
certainement que le message positif dans la mesure où il s'accompagne
effectivement des corollaires, en termes d'investissement public nécessaire, à
savoir que fait-on des ressources que nous avons, est-ce que nous voulons
compenser des compagnies qui se sont aventurées de manière, somme toute, un peu
téméraire dans un contexte où le consentement était fort loin d'être acquis de
l'ensemble des communautés concernées, ou est-ce qu'on veut investir les
deniers publics dans les infrastructures et les processus collectifs qui vont
nous permettre d'effectivement sortir de notre dépendance aux hydrocarbures,
donc non seulement de les laisser dans le sol, mais d'être responsables de
notre vie énergétique? Donc, oui, bien sûr, cela peut tout à fait faire partie
d'un immense pas dans une direction exemplaire.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Toujours
dans une perspective de transition énergétique, j'imagine, tout comme moi, que
je sais que vous êtes conscients que, lorsqu'on investit dans des énergies
renouvelables, tels le solaire, l'éolien, les bioénergies, que ça prend
énormément de capitaux pour soutenir ces projets-là. Et je prends, à titre
d'exemple, un projet chez nous, dans ma région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, le
projet Valeo d'éoliennes qui, sans la participation de capitaux de grands partenaires,
n'aurait pas pu voir le jour, on sait qu'on est des leaders aussi en matière de
transition énergétique. Ce n'est pas souhaitable d'envoyer un message positif
aux investisseurs étrangers, comme l'a fait, en fait, le programme
d'indemnisation dans notre projet de loi?
Mme Dupuis (Carole) : Si je
peux répondre à cette question, je pense qu'on n'encourage pas le gouvernement
à ne pas respecter ses engagements légaux, c'est certain, ce qui pourrait
ternir la réputation du Québec. Pour ce qui est d'aller plus loin, je pense
qu'on ne veut pas envoyer le message non plus que le Québec est un État
complaisant ou naïf, où les investisseurs étrangers peuvent tout simplement
venir se servir et utiliser le territoire et partir avec les profits quand ça ne
fonctionne pas à leur guise de poursuivre à gauche et à droite, hein? On sait
que c'est une industrie qui a une culture d'intimidation juridique bien
enracinée. D'envoyer le message que le Québec ne tolère pas ce genre de
culture-là et n'encourage pas une industrie qui a sciemment travaillé pour
empirer la crise climatique, je ne vois pas en quoi ça pourrait ternir la
réputation du Québec.
Cela dit, mon âge me permet peut-être de
rappeler que le Québec a très bien développé son potentiel énergétique avec
certaines nuances importantes par rapport à certaines populations autochtones
et autres, mais, quoi qu'il en soit, a très bien développé son potentiel
énergétique sans dépendre des investisseurs étrangers dans le passé.
L'hydroélectricité est un modèle qu'on ne doit pas perdre de vue probablement.
• (11 h 20) •
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Dupuis. Ceci complète la période d'échange avec la partie gouvernementale,
et je seulement la parole au député de Mont-Royal-Outremont pour sa période d'échange.
M. Arcand : Merci, merci.
Alors, bonjour, Mme Dupuis, Mme Prudhomme. Très heureux de vous voir. Je vais
essayer de vous lire quelque chose à propos des compensations. J'aimerais que
vous me disiez si vous... si on peut essayer, j'écoutais les conversations que
vous avez eues avec le ministre et les collègues tout à l'heure de la partie
gouvernementale, mais si je disais la chose suivante: Il est justifié de
rembourser aux détenteurs de licence, révoquer les dépenses engagées afin
d'obtenir les licences en question, mais il est hors de question d'inclure
d'autres dépenses et, encore moins, les revenus que les entreprises concernées
espéraient réaliser éventuellement, est-ce que...
M. Arcand : ...c'est quelque
chose qui vous paraît acceptable?
Mme Dupuis (Carole) : Écoutez,
pour ce qui est de ne... Il y a de l'écho actuellement, bon. Pour ce qui est de
ne pas rembourser des présumés revenus anticipés, je pense qu'il n'y a aucune
ambiguïté sur ce point-là. Pour la première section de la citation que vous
lisez, honnêtement, on est une vaste coalition au front commun. On ne peut pas,
comment dire, parler au nom de tous nos membres, au dollar près, pour dire : Il
faut absolument que tel détail ou telle petite dépense soit remboursé ou pas.
Je peux vous dire qu'il y aurait probablement l'unanimité pour dire que les
dépenses de lobbyisme, on ne pense pas que... quelque chose de très intéressant
à rembourser.
M. Arcand : ...il y aurait
unanimité ici aussi.
Mme Dupuis (Carole) : Je
pense que oui. On parle quand même d'un million de dollars, là, si j'ai bien
vu. Mais je pense qu'il y a consensus aussi sur le fait que, quand on fait les
comptes, on met les plus, mais on met les moins aussi, et qu'on a... qu'il nous
manque beaucoup, beaucoup de chiffres pour savoir quel est l'état réel et que
c'est... de ce qui pourrait être dû ou ne pas être dû, et qu'il faut être...
qu'il ne faut pas tenir compte seulement des dépenses des compagnies, mais aussi
de celles du gouvernement et de la société québécoise.
M. Arcand : Très bien, merci.
Enfin, j'espère que, lorsqu'on en sera rendu à l'étude détaillée, on pourra
nous donner beaucoup plus d'informations justement sur ces montants-là. Parce
qu'il y a des gens qui nous disent : Écoutez, c'est beaucoup trop. Ça n'a aucun
sens. Puis il y en a d'autres qui nous disent : Le gouvernement n'a pas assez
d'argent. Alors, comme on n'a pas l'information que le ministre possède,
j'espère qu'à ce moment-là on pourra avoir beaucoup plus de détails lors de
l'étude en commission parlementaire, lorsqu'on sera rendu article par article.
Vous avez mentionné l'importance de procéder à des
études hydrogéologiques parce que, de toute façon, elles sont prévues au
règlement sur les eaux, sur la protection. Est-ce que je comprends que cette
étude avait été escamotée dans le passé? Est-ce que vous avez des cas à nous
signaler par rapport à ça?
Mme Dupuis (Carole) : Je
pensais que... Écoutez, ce qu'on sait, c'est que ces études-là n'ont pas été
complétées à ce moment-ci et qu'il ne semble pas... en tout cas, le texte du
projet de loi n'est pas explicite à savoir comment ces choses là seront faites.
Nous, on souhaite que ce soit fait de manière très exhaustive et avant que toute
indemnisation soit versée et que les coûts de décontamination soient pris en
compte. On connaît un cas, qui est celui de Bourque, actuellement, où il semble
y avoir eu contamination de la nappe... Je parle du puits Bourque, là, en
Gaspésie, où il semble y avoir eu, en territoire micmac, contamination de la
nappe phréatique. Et il y a énormément d'inconnues pour ce qui est du reste des
puits qui ont été forés récemment ou dans le passé plus lointain. Donc, voilà.
Ce qu'on souhaite, c'est que ce soit beaucoup plus encadré, beaucoup plus
clair, que les exigences soient beaucoup plus claires.
M. Arcand : J'aimerais que
vous me parliez de ce qui s'est passé aussi à Batiscan, parce qu'on a eu un
puits qui est entré en éruption à Batiscan, entre autres, et quatre résidences
ont dû être évacuées. Et encore aujourd'hui, c'est un puits qui est sur un
terrain qui appartient au ministère des Transports, qui provoque des fuites sur
les propriétés environnantes et, semble-t-il, qui n'est pas protégé ni sécurisé
actuellement. Comment ça peut être possible, d'après vous? Est-ce que vous avez
eu à gérer cet élément-là auprès de vos membres?
Mme Dupuis (Carole) : Oui,
c'est sûr que ça a fait partie des dossiers qui ont préoccupé plusieurs de nos
membres. Le puits de Batiscan, ce qui était vraiment troublant, ça a été de
découvrir, quand il y a eu l'éruption qui a donné lieu à l'explosion, que des
rapports d'inspection faisant état de problèmes avaient été déposés dans le
passé et qu'il n'y avait pas eu de suivi, que le travail n'avait pas été... que
la réfection n'avait pas été faite deux années de suite, là, les deux années
précédentes. Alors, c'est ce qui nous amène... et c'est un chapitre qu'on n'a
pas eu le temps de couvrir, là, de notre mémoire où, comment dire... Dans
l'intention, on est très en accord avec le projet de loi qui demande que la
fermeture des puits...
Mme Dupuis (Carole) : ...se
fasse avant que les indemnisations soient versées, que ce soit fait en
conformité avec les exigences du ministère, mais dans la pratique, on sait que
dans le passé, il y a eu vraiment un très grand nombre de situations où la
rigueur n'était pas au rendez-vous comme on aurait pu le souhaiter, où
l'industrie a semblé bénéficier de passe-droits importants. Entre autres, ça,
c'est l'épisode n'est plus marquant, sans doute, c'est le moment où on s'est
rendu compte qu'il y a 200 puits qui avaient été déclarés conformes aux
normes environnementales... en fait, n'avaient jamais été localisés par les
inspecteurs. Ça s'est passé il y a quelques années.
Donc, c'est une de nos recommandations
dont on n'a pas parlé, mais c'est d'être... de vraiment appliquer une très,
très grande rigueur dans ces examens-là, dans tout ce processus-là de fermeture
des puits, et par la suite, parce qu'on sait que les puits, ce n'est pas parce
qu'ils sont fermés qu'ils ne vont pas se mettre à causer des dégâts, des fuites
de méthane ou de contamination ultérieurement.
M. Arcand : ...ça. On a
parlé, entre autres, des... il semble qu'on parle des 82 puits qui sont
récents, dans lesquels, évidemment, on va retirer les permis, mais pour les
autres puits qui ont été creusés avant 2000, on n'a pas beaucoup
d'informations. Et comment cela, selon vous, est possible? Parce que tant qu'à
régler le dossier, il faut régler tous les dossiers.
Mme Dupuis (Carole) : Écoutez,
tu veux... c'est bon, Maude?
Mme Prud'homme (Maude) : Je
peux m'essayer, tu compléteras, là, au besoin. Bien, il y a un travail terrain
qui avait d'ailleurs déjà été amorcé par des citoyens et citoyennes qui étaient
préoccupés et qui faisaient le travail qui aurait dû être réalisé par des
employés du gouvernement. Dans nos membres, on compte d'ailleurs plusieurs
syndicats, et plusieurs sont à dire que les effectifs manquent pour réaliser
les ambitions des plans gouvernementaux.
Il y a aussi un investissement à faire
pour s'assurer qu'on a les forces en présence, les outils, le matériel et les
personnes, les gens... ont les connaissances pour effectuer ce travail-là, et
ce, ad vitam. Ce qui est l'autre aspect, à savoir que dans cette notion-là de
remboursement et de qui paie le prix de compensation, il est très difficile de
chiffrer quel sera le coût de cet entretien ad vitam de ces infrastructures,
qui demeureront source de risques inéluctablement. Tu sais, c'est sûr que ça va
s'user. Et comment, dans 300 ans, 400 ans, les communautés qui
vivront là devront être en mesure d'accéder à des produits comme du béton et de
l'acier? Dans quelles circonstances ils seront pour entretenir tout ça?
Bref, ce qui nous est légué comme
responsabilité puis comme dette est immense. Ça nous semble, dans ce sens-là,
un peu odieux de demander compensation de leur part. Puis c'est aussi comme si
c'étaient les seuls à avoir payé un prix de ces explorations là, alors que les
communautés qui vivent ce stress, qui ont vécu ces chocs-là, ont vu des puits
exploser, qui ont vu des forages se faire, qui sont inquiets pour leur eau
potable, qui ont vécu des déchirements sociaux, ont payé un prix immense sans y
avoir investi quoi que ce soit de manière consentie. Donc, dans ce sens-là
aussi, ça nous apparaît fort dommageable.
• (11 h 30) •
Puis pour ce qui est de l'investissement
massif et si on veut sécuriser les capitaux... puis je pense qu'on peut
apprendre de beaucoup des erreurs qui ont eu lieu, là, dans le cas des dossiers
d'exploration pétrolière, notamment la notion d'un consentement préalable,
libre et éclairé de toutes les communautés concernées, du respect des droits
des premiers peuples à travers le déploiement de toutes les technologies qui
seraient mises de l'avant, de toutes les infrastructures qui seraient mises de
l'avant.
Donc, je vais plus loin, mais je pense que
c'est en lien avec l'esprit de votre question, à savoir la responsabilité, les
communautés, la santé publique, la responsabilité gouvernementale à travers ça
et intrinsèquement systémique. On ne peut pas le traiter au cas par cas. Ça
implique tout un déploiement d'instances à la fois gouvernementales, de forces
sur le terrain, de vigilance des communautés, d'outils, de capacités, de
vigilance dans des lieux qui sont parfois éloignés, difficiles d'accès. Bref
s'il s'agit de sécuriser non seulement les investisseurs, mais aussi les
populations, le mandat est beaucoup plus vaste.
M. Arcand : Il y a des gens
qui, à une certaine époque, disaient que ça prendrait presque un organisme
indépendant pour s'assurer, justement, du suivi de ça. Est-ce que c'est quelque
chose que vous avez déjà regardé, que vous envisagez?
Mme Prud'homme (Maude) : C'est
quelque chose que plusieurs de nos membres ont effectivement déjà recommandé.
On pourrait espérer que...
11 h 30 (version non révisée)
Mme Prud'homme (Maude) : ...que
les ordres professionnels des personnes engagées lors de ce type de travaux
pourraient garantir une certaine indépendance des travaux. Une saine distance
entre les gouvernements et les compagnies concernées pourrait aussi entretenir
une certaine indépendance. Bref, il y a plusieurs facteurs, mais oui on
soutient l'esprit d'indépendance au niveau de l'évaluation.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Prud'homme. Alors, je cède maintenant la parole au deuxième groupe
d'opposition pour une durée d'environ 2 min 45 s
Mme Lessard-Therrien : Oui,
merci, M. le Président. Bonjour à vous, mesdames. Merci beaucoup pour cette
allocution, cette intervention qui est extrêmement riche et pertinente. Je
pense que vous ne serez pas surprise de savoir que Québec solidaire est pas mal
en phase avec le front commun et qu'on est des bons alliés sur ce projet de
loi. J'ai seulement deux minutes et demie, donc moi j'aimerais peut-être vous
donner encore un peu de temps sur la question, tu sais, des indemnités, puis la
recommandation que vous faites qu'aucun cadeau ne soit donné aux compagnies
pétrolières et gazières. Tu sais, dans le fond, là, il y a l'indemnisation pour
ce que ça va avoir coûté aux pétrolières, qu'est ce qu'ils ont investi au
moment de l'exploration, puis il y a toute la question de la réhabilitation des
puits. Donc, le cadeau il se situe où? Est-ce qu'on ferme, pour vous,
complètement le robinet sur la question des indemnisations, autant pour le
volet, ce qui s'est fait plus en exploration, que le volet restauration ou la
réhabilitation des puits? Moi, j'ai le goût de vous donner comme encore deux
minutes pour faire valoir votre point de vue, là, surtout auprès du ministre.
Mme Dupuis (Carole) : J'y
vais. Oui, merci de la question. Écoutez, comme je l'ai mentionné plus tôt, on
est une vaste coalition, donc on ne voudrait pas se prononcer au dollar près
est ce que telle dépense ou telle autre dépense devrait être admissible, ne pas
être admissible et tout? Mais là où on a la certitude d'avoir un consensus au
sein de notre membership, c'est vraiment que tous les investissements du
Québec, toutes les dépenses du Québec et de la population québécoise doivent
être pris en compte. Et ça ne donne pas... on n'a pas l'impression,
actuellement, que c'est le cas. Ça, c'est la première chose. Entre autres, on a
parlé de l'eau, là, vraiment, il faut savoir quel est l'état des eaux de
surface et des nappes phréatiques autour des puits forés par ces compagnies-là
avant de savoir qu'est-ce qui... quels seront les coûts pour le Québec de cette
aventure. Les coûts futurs des puits qui seront inactifs et qui vont devenir à
la charge de la population québécoise, ce n'est certainement pas quelque chose
de facile à évaluer, mais ça doit être pris en compte parce que c'est... on le
sait qu'il y a déjà un pourcentage important des puits qui ont été forés, y
compris dans les dernières décennies, qui fuient. Donc, à l'avenir, ça va être
pareil. Le ciment n'est pas éternel. Le béton n'est pas éternel. L'acier pas
éternel. Ça va arriver.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Mme Dupuis. Je dois vous interrompre à ce stade-ci. Donc, je vais
maintenant... merci, Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue. M. le
député de Jonquière, la parole est à vous.
M. Gaudreault : Oui.
Alors, bonjour, merci beaucoup pour votre présentation très, très pertinente.
Dans le fond, ce que je comprends, c'est que vous dites à l'industrie : Vous
voulez des indemnisations, on va faire les comptes. Tu sais, on va faire les
comptes des pour puis des contre, des coûts de santé, des coûts sociaux, etc.
Et je viens d'entendre la réponse que vous avez donnée à ma collègue, mais est-ce
que vous êtes capable d'estimer, tu sais, ça peut ressembler à combien ces
comptes? Quand on fait les comptes en question est ce que vous êtes capable de
l'estimer sur les coûts, par exemple, de santé, de captage des puits, etc.? Et
sinon, comment on pourrait faire pour bien le calculer, avez-vous des
suggestions à nous faire?
Mme Dupuis (Carole) : Écoutez,
je pense que d'abord, il faut tenir compte des dépenses réelles des compagnies.
Et je vous réfère encore ici au mémoire à venir de M. Pineau qui n'a pas
pu vous rencontrer ce matin, mais il va vous fournir des chiffres à cet
effet-là. Pour ce qui est des coûts sociaux et des coûts futurs, je pense, non,
on n'a pas de chiffres à vous présenter. Je crois qu'il faut se référer à
des...
Mme Dupuis (Carole) : ...des
spécialistes de la quantification de ces choses-là.
M. Gaudreault : Mais vous nous
dites : Ça serait important de faire ces comptes-là. Deuxième élément sur
lequel je veux vous entendre. Quand vous parlez des programmes rigoureux, là,
d'inspection des eaux souterraines et de surface, vous voulez que le ministère
des Ressources naturelles se dote de ces programmes pour bien évaluer et bien
inspecter les eaux souterraines et de surface. Est-ce que vous nous suggérez de
l'inclure dans la loi, carrément dans le projet de loi 21, d'arriver avec un
amendement pour dire qu'il faut avoir ces programmes-là?
Mme Dupuis (Carole) : Bien,
c'est à dire, en ce qui concerne les eaux, il y a déjà quelque chose dans le
projet de loi. On souhaite que ce soit beaucoup plus explicite, que ce soit...
que ces choses-là soient explicitement soumises aux RPEP, au fameux RPEP, là.
Mais pour ce qui est des autres aspects qui ne sont pas prévus, oui, que ça
devrait être pris en compte dans le texte de loi.
M. Gaudreault : O.K., quand
vous parlez des autres aspects qui ne sont pas prévus : le suivi, le contrôle
des opérations de fermeture, etc.
Mme Dupuis (Carole) : Oui,
bien, c'est à dire, c'est dans la mise en œuvre, là. Attendez un petit peu, je
cherche le... Bien, excusez, c'est... Oui.
M. Gaudreault : Bien... Oui,
mais ce n'est pas grave là, je comprends l'idée, donc, de préciser davantage
dans le projet de loi, là, tout ce volet sur les programmes d'inspection, mais
en amont et en aval, donc dans les suivis, et ainsi de suite. C'est ce que vous
nous dites, au fond.
Mme Dupuis (Carole) : Oui,
exactement.
Le Président (M. Lemay) :
Merci beaucoup, madame Prud'homme ainsi que madame Dupuis. Ceci termine les
périodes d'échanges avec les membres de la commission.
Et je vais maintenant suspendre quelques
instants pour permettre au prochain groupe de prendre place virtuellement.
Merci.
Une voix : Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 39)
(Reprise à 11 h 49)
Le Président (M. Lemay) : Alors,
la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources
naturelles reprend ses travaux. Et je souhaite la bienvenue aux représentants
d'Environnement Vert-Plus. Et je vous rappelle que vous disposez de dix minutes
pour faire votre exposé. Par la suite, il y aura une période d'échanges avec
les membres de la commission, mais tout d'abord, si vous voulez simplement vous
nommer et débuter avec votre exposé.
• (11 h 50) •
M. Bergeron (Pascal) : Je
m'appelle Pascal Bergeron. Je suis porte-parole d'Environnement Vert-Plus
depuis 2016. Mon groupe est beaucoup plus vieux que moi. Il a été fondé...
Bien, plus vieux que moi comme porte-parole, il a été fondé en 1986. On a
participé à plusieurs luttes au fil du temps... incinérateur de déchets
toxiques, à... qui a avorté suite à une mobilisation populaire. Il y a eu une
mine d'uranium qui était proposée à Pointe-à-la-Croix, qui était... par
Nathalie Normandeau, à l'époque, qui a avorté aussi en partie à cause de notre
action. Dans les deux cas, Environnement Vert-Plus a... beaucoup jeté un
éclairage sur ces projets industriels là, et l'information crédible, qu'on a
présentée au public, à des intervenants clés, combinée avec des actions terrain
ont joué un rôle crucial dans l'arrêt de ces projets industriels là. Bon, dans
le cas de la cimenterie, vous avez peut-être entendu parler de nous. On a
poursuivi pour avoir un BAP. Cette poursuite-là a été matée par une loi
confirmant l'assujettissement des projets de cimenteries, etc. Bien, en fait,
c'était la loi qui disait qu'il n'allait pas avoir de BAP. C'était, je pense,
la première fois qu'on faisait ça au Québec. Et dans ce cas-là, bien,
Environnement Vert-Plus a échoué, mais c'est tous les Québécois, toutes les
Québécoises qui ont échoué dans la mesure où on n'a pas eu l'information
essentielle sur ce projet-là avant qu'il soit implanté en Gaspésie. Et quand il
n'y a pas l'information essentielle par rapport à un projet industriel, c'est
toujours... du projet.
Dans le cas de l'industrie pétrogazière au
Québec, on a été aux premières loges quand Gastem est débarqué à Ristigouche-Sud-Est.
Finalement, on connait le résultat du procès. La facture qui est imposée par la
juge n'a toujours pas été payée. Environnement Vert-Plus a joué, par rapport à
cette industrie-là, un rôle de... de manière prédominante. Les sources
auxquelles on s'abreuvait, c'était majoritairement des documents obtenus en
vertu de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et de la
protection des renseignements personnels. Mais le régime d'accès à
l'information autour de l'industrie extractive ne tient pas exclusivement, dans
ce... là, il est encadré par trois lois. Là je tombe dans le cœur du sujet de
mes recommandations, c'est la Loi sur les mines, la Loi sur les hydrocarbures
et la Loi sur l'accès qui encadre l'accès à l'information dans le contexte des
projets extractifs au Québec et dans le contexte de l'industrie pétrogazière.
Pourquoi? Parce que jusqu'à l'adoption de la Loi sur les hydrocarbures, jusqu'à
son entrée en vigueur, en septembre 2018...
M. Bergeron (Pascal) : ...c'était
le régime d'accès à l'information de la Loi sur les mines qui prévalait. Puis
le régime d'accès de la Loi sur les mines, il est super intéressant parce que
depuis 2013 tous les documents et renseignements obtenus des titulaires de
droits miniers par le ministère aux fins de l'application de la Loi sur les
mines sont publics. Et le fait que ces renseignements-là soient publics nous a
permis d'avoir accès à des informations clés par rapport à des... à certains
projets en Gaspésie. Je vais vous en citer deux.
On a eu une demande de 800 quelques pages
dans lesquelles on a eu la soupe chimique qui a été à bas et on a eu toutes les
informations économiques par rapport au projet Galt de l'entreprise Junex à
l'époque. Et pourquoi c'est important? bien, parce que maintenant, on sait la
contamination qui a à bas d'où elle émane, c'est quoi les produits chimiques
qu'il y a dedans. Puis on sait aussi que le projet de Junex a Galt n'était, de
manière très, très, très probable, absolument pas rentable, sans un apport
massif de fonds publics.
Nos recommandations de l'accès à
l'information, c'est de poursuivre dans la démarche du p.l. 21. Le régime
d'accès à l'information du p.l. 21 est beaucoup plus ouvert que celui qui
prévalait dans la Loi sur les hydrocarbures. La Loi sur les hydrocarbures, en
fait, restreignait l'accès à tous les documents jusqu'à plusieurs années.
Jusqu'à 20, 25 ans après l'ouverture d'un puits, on ne pouvait pas avoir
accès aux documents déposés par une entreprise. Et ça, c'était un régime
lamentable, surtout considérant qu'on mettait fin à un régime d'accès de la Loi
sur les mines qui était beaucoup plus permissif.
Et on peut... le projet de loi 21. En
rendant l'ensemble des documents, l'ensemble des documents qui émane de la Loi
sur les hydrocarbures accessibles de la même manière que si cette industrie-là
était restée assujettie à la Loi sur les mines, bien, ces documents auraient
été publics. D'ailleurs, on fait des suggestions d'amendements qui vont en ce
sens-là.
Ensuite.... Ça fait que, ça, c'est pour le
volet accès à l'information. Pour moi, c'est vraiment une question centrale,
déterminante, même pour la fermeture de cette industrie-là. Il faut savoir
qu'est ce que cette industrie-là a fait. Il faut savoir qu'est-ce qu'elle nous
laisse. Puis il faut savoir ce qui reste dans le sol. Puis ça, qu'est-ce
qu'elle nous laisse, bien, il y a des inspections annuelles qui sont prévues
par la Loi sur les hydrocarbures. Les anciennes inspections annuelles, celles
qui se faisaient par les entreprises sous la Loi sur les mines étaient
accessibles au public. Les inspections annuelles qui sont maintenant faites par
les entreprises en vertu de la Loi sur les hydrocarbures sont secrètes. Et si
le p.l. 21 reste comme ça, bien, les inspections annuelles qui sont visées
par le chapitre, de mémoire, VIII, je crois, elles vont rester secrètes aussi,
inspections annuelles de l'entreprise.
Ensuite.... que le p.l. 21 va
maintenir une inspection annuelle après son adoption, il se pourrait que
l'article... Je ne l'ai pas fait vite de même, mais ce que le p.l. 21 prévoit,
c'est qu'il doivent faire une inspection annuelle, c'est l'article 11,
dans les 120 jours de la date de l'entrée en vigueur de la loi. Et après
ça, il n'y a pas d'autres inspections annuelles qui sont prévues, même si la
fermeture des puits peut s'échelonner... Puis vous allez voir dans mon mémoire,
je détaille un exemple de puits qui a... Je suis de retour.
Vous allez voir un exemple de puits qui a
explosé au Québec, c'est en février 2020 à Batiscan, et c'est un puits pour
lequel on avait des rapports d'inspection annuels. Ceux que j'ai réussi à
consulter démontrent qu'il y avait une non-conformité et que cette
non-conformité là était connue du ministère et que si elle avait été corrigée,
le puits n'aurait probablement pas explosé. Puis on parle d'un puits qui a
explosé... Ce n'était pas dans un centre urbain, mais c'était à un jet de
pierre du bureau de poste. Donc, c'est un lieu qui est extrêmement passant.
Puis si c'était arrivé pendant le jour, il aurait pu avoir des morts.
Donc, pour moi, il faut que tous les puits
qui ne sont pas fermés définitivement, il faut qu'ils soient inspectés
annuellement et qu'on... et que le public puisse avoir accès aux résultats de
ces inspections annuelles. Mais c'est ça, le p.l. 21, ce n'est pas clair...
M. Bergeron (Pascal) : ...qu'après
son adoption ce serait encore annuel, l'inspection, puis ça, il faudrait que ce
soit corrigé. Par rapport aux... C'est un pouvoir discrétionnaire du ministre
de l'Environnement de demander une étude hydrogéologique pour les puits. On
demande que ce ne soit pas discrétionnaire, mais que ce soit inscrit comme
obligatoire pour tous les puits qui ne sont pas fermés définitivement. Et on
suggère aussi, puis peut-être qu'avec des consultations avec vos hauts
fonctionnaires, vous allez trouver une autre solution, mais on suggère une
manière de procéder pour obtenir ce qui serait l'équivalent d'une
caractérisation initiale de l'eau autour des puits d'hydrocarbure. Parce que
c'est la comparaison avec l'état initial des échantillons d'eau autour du puits
avec l'état initial qui permet de déterminer, bien, s'il y a eu fuite, s'il y a
contamination.
Au chapitre de la responsabilité
corporative, j'ai mis deux recommandations, mais je vous en nomme une
maintenant...
Le Président (M. Lemay) : M. Bergeron.
M. Bergeron (Pascal) : Oui?
Le Président (M. Lemay) : Dans
le fond, vous êtes dans votre dernière minute, là, ça fait que si vous voulez
aller avec votre conclusion.
M. Bergeron (Pascal) : Je
vais terminer sur cette recommandation-là. Que ce ne soit pas juste le
gouvernement qui puisse poursuivre, qui puisse intenter une action en justice
pour la perte de valeur de non-usage, parce qu'on sait pertinemment que, si
c'est le cas, ça n'arrivera jamais. C'est comme le Canada qui inscrit, dans les
années 50, qu'il était le seul à pouvoir poursuivre pour génocide. Bien,
malgré les pensionnats, malgré toutes les horreurs les Premières Nations ont
subi au Québec puis au Canada, bien, le gouvernement canadien ne s'est jamais
autopoursuivi pour ça. Ça ne peut pas être juste le gouvernement qui peut
intenter ce genre de poursuites là, sinon, l'article est vain, il ne servira
tout simplement à rien. Il faut que tout citoyen intéressé puisse profiter de
ça. Puis sinon, bien, on veut que les projets pilotes soient assujettis à la
Loi sur la qualité de l'environnement, minimalement, s'ils sont pour rester
dans le projet de loi.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Donc, ceci complète la période d'exposer. Nous allons maintenant débuter
la période d'échanges. Et je cède la parole au ministre pour une durée
d'environ 16 min 30 s
M. Julien : Oui, merci,
monsieur le Président. Merci, Monsieur Bergeron, pour votre mémoire. Malheureusement,
on l'a reçu un peu tardivement, là. Je l'ai lu rapidement, là, ça doit être de
ma faute, là, je ne l'avais pas en main. Mais j'ai vu plein de choses puis je
vous ai également entendu. Et soyez assuré que, comme tous les mémoires qu'on
reçoit, là, je le vais faire usage à bon escient de vos recommandations pour
bien les comprendre et voir leur applicabilité. Une question simple en partant,
Monsieur Bergeron : Projet loi 21, c'est bon ou ce n'est pas bon?
M. Bergeron (Pascal) : Un
gros pas dans la bonne direction. Il était temps qu'on arrive, là, au Québec,
puis qu'on se débarrasse de cette industrie.
• (12 heures) •
M. Julien : Parfait.
Donc, question claire, réponse aussi claire. Vous avez mentionné à plusieurs
reprises les enjeux d'accès à l'information, de rendre disponibles ces
informations-à. Bon, de ce que j'en conçois, à l'intérieur de
l'article 63, puis encore là, de la façon qu'il est écrit, je ne suis pas
capable de le lire comme ça. Mais ce que ça résume, l'article 63, de
mémoire, c'est que tous les plans de fermeture définitive, des grilles
d'inspection annuelles, les plans d'intervention d'urgence, les plans de
communication avec les communautés locales, les rapports d'inspection à la fois
du MERN et des promoteurs vont être rendus publics. Clairement, c'est ce que
dégage l'article 63. Alors, ceci étant, est-ce que c'est suffisant ou...
Parce que je voyais, dans votre recommandation, qu'il y avait des ajouts, je
voudrais savoir ce que vous proposez comme ajouts.
M. Bergeron (Pascal) : Il
y a spécifiquement trois chapitres qui sont exclus par rapport à
l'article 63. Ce sont... Je vais les rechercher. Ce sont les programmes
d'indemnisation, les projets pilotes et tout ce qui relève des inspections et
des enquêtes, les chapitres 6, 7 et 8 de la loi mettant fin à cette
industrie-là. Et, pour moi, bien, tu sais, les projets pilotes, je peux
comprendre qu'il puisse y avoir des secrets industriels et commerciaux, mais il
faut vraiment délimiter le secret industriel et commercial à l'intérieur des
projets pilotes puis de ce qu'on empêche d'être accessible. Puis, moi,
là-dessus, je pense que ça devrait se limiter strictement à ce qui est relatif
au brevet. Parce qu'en ce moment, dans la Loi sur l'accès aux documents des
organismes...
12 h (version non révisée)
M. Bergeron (Pascal) : ...public,
un secret industriel et commercial, c'est tout renseignement financier,
technique, syndical, c'est les articles 23 et 24 de la loi sur l'accès,
puis ça, je le détaille dans mon mémoire. Bien, puis, après ça, c'est tout ce
qui pourrait... soit que c'est divulgué, nuire à la négociation. Le fardeau de
la preuve pour le tiers dans la Commission est tellement faible que c'est
pratiquement systématiquement donné. Je vous donne des exemples de ce qu'on
n'est pas capable d'obtenir en raison de comment c'est écrit, mais, par
exemple, il y a le montant des garanties que les entreprises ont déposées au
MERN pour la fermeture de... (Panne de son) ...ça, à ce moment, ce n'est pas
disponible. Ce n'est pas disponible. Je suis en train de me battre devant la
commission pour avoir ces informations-là, pour avoir le montant, pour avoir la
forme des garanties, parce que ce qui était prévu dans la Loi sur les
hydrocarbures, c'étaient que les états financiers pouvaient être déposés, mais
un état financier d'une compagnie qui est sur le bord de la banqueroute
maintenant, puis qui ne l'était peut être pas avant, bien, ça vaut le papier
sur lequel c'est écrit. Ça ne vaut pas plus cher que ça, là.
Donc, puis, par rapport aux projets
pilotes, bien, si on est pour implanter des projets pilotes dans nos
communautés, il faut avoir le maximum d'informations. Il faut que ces projets
pilotes là soient assujettis à la Loi sur la qualité de l'environnement. Il
faut que ces projets pilotes passent par le BAPE. Il faut qu'on ait
l'acceptabilité sociale. Il ne faudrait pas que les projets pilotes créent le
même genre de régime que celui qui a permis à l'industrie des hydrocarbures de
s'implanter sur le territoire au tournant des années 2000. Il manque de
précision sur cet aspect-là, les projets pilotes, il y a beaucoup
d'incertitudes dans le projet de loi. Donc, il y aurait lieu de bonifier ce
bout-là, mais minimalement, minimalement, que ce soit assujetti à la LQE puis
que les informations soient disponibles.
M. Julien : Parfait. Merci.
Un autre élément, d'entrée de jeu, lors des élocutions préliminaires, là, de
mon collègue de l'opposition, mon collègue de Mont-Royal-Outremont, celui-ci
mentionnait que le projet de loi qu'on a devant nous, c'est essentiellement un
projet de loi marketing. Vous devez vous rappeler que l'an dernier, j'ai passé
trois belles journées, là, au mois de mars, là, à défendre un règlement, là,
bec et ongles par rapport à l'industrie. Est-ce que vous considérez, ceci
étant, que le p.l. 21 est un projet de loi marketing ou qu'il amène une
différenciation importante pour le Québec?
M. Bergeron (Pascal) : Je me
souviens très bien du procès, j'ai assisté à chaque minute de ce procès-là. Je
pense que ce projet de loi là est essentiel pour mettre fin à la filière. Non,
je ne crois pas que c'est un coup de marketing. Je crois que les gens qui ont
appuyé la CAQ aux dernières élections dans la mouvance Québec Fier, qui est une
mouvance qui a été financée par Michael Binnion, le PDG de Questerre, je crois
que ces gens-là risquent de décrocher de la CAQ. Donc, je crois que vous perdez
une partie de votre électorat qui croyait que vous alliez être le parti qui
allait amener cette industrie-là jusqu'au bout au Québec. C'est la lecture
qu'on faisait, nous, avant les dernières élections. Donc, voilà.
M. Julien : ...décevoir par
rapport à notre position. Des fois, ça coupe un peu, mais je voulais vous
rassurer que mon collègue ici s'occupe d'Internet haute vitesse, ce qui n'avait
pas été fait aussi auparavant. Donc, dorénavant, ça va beaucoup moins couper
aussi nos interventions ensemble.
Écoutez, vous avez mentionné tantôt les
projets pilotes par rapport à certains assujettissements supplémentaires. On a
entendu ça aussi dans d'autres groupes. Moi, je ne suis pas fermé à l'idée, là,
on verra, là, au moment de l'étude article par article, puisque, naturellement,
les projets pilotes, pour moi, on le réitère, c'est des projets pilotes sans
extraction ni exploration et qui visent essentiellement, là, soit la géothermie
ou d'autres avancées technologiques ou captage de carbone. Dans votre
intervention, c'est comme, vous avez mentionné, si les projets pilotes sont
maintenus. Alors là, je voulais voir moi, est ce que, quand vous dites ça, c'est
parce que vous pensez qu'on ne devrait pas les maintenir, au-delà, en fin de
compte, du fait qu'ils devraient être, selon vous, assujettis à un plus large
éventail de contrôles?
M. Bergeron (Pascal) : Je
n'ai pas... Je crois qu'il y a des bonnes raisons pour maintenir les projets
pilotes. Ma position n'est pas complètement fixée là-dessus. Il va falloir voir
comment ça se passe. Je crois qu'il y a certains motifs qui sont plus légitimes
que d'autres pour les projets pilotes...
M. Bergeron (Pascal) : ...la
géothermie profonde peut apparaître comme une bonne idée. Le stockage de CO2
est... je déteste dire ça, mais il va falloir en faire, parce que l'échelle à
laquelle on éprouve les changements climatiques, en ce moment, n'est pas
soutenable pour l'humanité. Et il ne faut pas que ces projets de captation et
de stockage de carbone là soient un prétexte pour brûler plus de fossiles. Ça
fait que c'est là que j'ai des réserves... des réserves que j'ai, en fait.
Sinon, par rapport à la saumure, il y a comme un paradoxe que j'ai relevé entre
l'article 42 et 43, c'est-à-dire qu'on... pds5
Le Président (M. Lemay) : Simplement
vous mentionner qu'on a juste perdu la connexion quelques instants avec
monsieur Bergeron. On y travaille.
On va suspendre les travaux quelques
instants, juste pour permettre de rétablir la connexion.
(Suspension de la séance à 12 h 8)
(Reprise à 12 h 9)
Le Président (M. Lemay) : Donc,
sans la caméra de M. Bergeron, mais avec le son, nous reprenons les travaux.
Vous pouvez poursuivre votre réponse.
• (12 h 10) •
M. Bergeron (Pascal) : Oui.
J'ai relevé une contradiction apparente entre les articles 42 et 43 du
projet de loi, au chapitre des projets pilotes. L'article 42 interdit
l'exploitation de la saumure. L'article 43 permet des projets pilotes où
on exploiterait la saumure pour en extraire des minéraux critiques et
stratégiques. En faisant quelques recherches, ce qu'on comprend, c'est qu'il
est surtout question du lithium par rapport à la saumure. Ça prend des taux de
lithium significativement élevés p pour pouvoir en extraire de la saumure. Il
faudrait valider ça avant de l'autoriser, parce que, sinon, bien, on maintient
la contradiction dans le projet de loi.
Sinon, moi, il y a une autre chose qui...
Oui. Sinon, il y a une autre chose qui m'apparaît un peu, je ne sais pas
comment dire, là, un peu en porte à faux, c'est le fait que, bien, on autorise
des projets pilotes pour trois ans, maximum 5 ans, puis après ça, on ferme
tous les puits. Mais, si on fait de la géothermie dans un puits et qu'on est
capable, à long terme, d'extraire de la chaleur puis que, bien, au niveau
énergétique, on arrive à quelque chose de sensé, eh bien, pourquoi est-ce qu'on
le fermerait après 5 ans ce puits-là? Puis ce n'est pas ma... En tout cas,
voilà.
M. Julien : Parfait. Bien,
écoutez, si ce n'est pas limpide comme ça, on verra à apporter des ajustements.
Vous avez parfaitement raison que le projet pilote, dans sa durée, c'est en
termes de projet pilote, mais effectivement, à partir du moment où il
démontrerait une efficience ou une efficacité, en termes de géothermie, à titre
d'exemple, on comprend bien qu'on voudrait qu'il soit plus pérenne dans le
temps. Je vais voir, en fin de compte, comment, excusez-moi l'anglicisme,
adresser cette situation-là à l'intérieur du projet de loi. Là, ça a continué
de fonctionner? Tout est correct. C'est super. Mais, écoutez, pour moi, là, ça
fait... indemnisation sur les six dernières années, avec démonstration de
maintien des coûts de licence nets des subventions gouvernementales suite et
uniquement suite à la réhabilitation des puits acceptés par le MELCC, MERN, que
ces frais-là seraient déboursés, vous en pensez quoi?
M. Bergeron (Pascal) : A
priori, je pense que cette industrie-là ne devrait rien recevoir. Un, ils
savent depuis six ans qu'elle est vouée à fermer définitivement. Je veux dire,
les changements climatiques sont là. Mario Lévesque, d'après une personne très
près de lui, avait planifié poursuivre le gouvernement du Québec dès l'achat
licences... des actifs de Junex. Ça faisait partie de son plan d'affaires. On
n'est pas devant... Puis Questerre avait radié ses actifs au Québec en 2013,
Palliser Energy avait radié ses actifs au Québec en 2012, parce qu'il n'y avait
pas de rentabilité démontrée. Il n'y a jamais eu de rentabilité possible pour
cette industrie-là. Alors, ce que...
M. Bergeron (Pascal) : ...ce
qu'on croit, c'est que, bien, un coup qu'on a un billet de loterie perdant
entre les mains, bien, Loto-Québec ne donne rien au propriétaire de billet de
loterie perdant. Puis l'exploration pétrogazière, c'est une loterie. Puis ils
ont perdu à leur loterie, ils ne devraient rien avoir pour leur billet perdant
en retour. Ça, c'est la position de base. Maintenant, on peut comprendre qu'il
y a des craintes, en vertu du droit international, de subir des poursuites. On
pense que l'Assemblée nationale devrait beaucoup plus se pencher sur les
accords internationaux, puis la manière dont ils nous lient puis les mécanismes
de compensation, quand on met fin à une industrie comme celle-là, que de
compenser cette industrie-là. Puis...
M. Julien : Parfait. D'un
autre côté, votre analogie avec le billet de loterie venait, en fin de compte,
je l'ai entendu, là, plus de quelqu'un qui prétendait qu'on devait rembourser
de manière spéculative des gains potentiels assez faramineux. Mais ici, je
pense que qu'est ce qu'on fait, c'est qu'il n'y a pas de tirage, il n'y a pas
de gros lot, on rembourse le billet. Mais pour moi, c'est quand même une
distinction. Je ne sais pas si mes collègues ont des questions.
Le Président (M. Lemay) : ...donc,
monsieur le député de Lac-Saint-Jean, la parole est à vous. Il reste environ
3 minutes 30.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : O.K.
Bien, je vais faire ça vite parce que je sais que j'ai d'autres collègues
aussi. Donc, bonjour, monsieur Bergeron. Écoutez, j'ai regardé vitement aussi,
là, votre mémoire et ce que je comprends, c'est que vos préoccupations, vous
avez de grandes préoccupations pour la qualité des eaux souterraines, hein, on
parle des mesures de protection des eaux souterraines. Et moi, ma question,
c'est : Pensez-vous, là, que les garanties supplémentaires soient... que
des garanties supplémentaires soient requises?
M. Bergeron (Pascal) : Pour
la qualité des eaux souterraines... Bien, que oui, il faut que l'étude
hydrogéologique soit obligatoire et il faut prélever... puis je ne sais pas
comment on va le faire, mais il faut prélever des échantillons d'eau
supplémentaires. Normalement de la façon que ça fonctionne avec l'étude
hydrogéologique, c'est qu'on a 3 puits d'observation de la nappe
phréatique, un en amont, 2 en aval du puits d'hydrocarbures, et on prélève
l'eau avant de forer le puits d'hydrocarbure, donc on a une caractérisation
initiale. Mais là, le puits qu'on va forer en amont, on peut plus être certain
de sa caractérisation initiale. Donc, on doit reculer en amont hydrogéologique
du puits jusqu'à ce qu'on ait une constante pour s'assurer qu'on a quelque
chose qui ressemble vraiment à une caractérisation initiale à partir de
laquelle on peut comparer les résultats de la nappe phréatique autour du puits.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Merci, monsieur Bergeron. Monsieur le député de Bourget, à ce stade-ci,
je vous cède la parole. Il reste deux minutes.
M. Campeau : Juste un
commentaire. Votre commentaire sur le fait qu'on aurait perdu de la clientèle
de la CAQ m'a beaucoup surpris. Moi, j'ai démarré le comité environnement de la
CAQ en 2013, en 2014, au moment où je n'étais pas... puis je n'étais pas
député. Puis tout ce que j'ai essayé de faire, c'est d'être pragmatique puis je
ne vois pas ce que... une perte de clientèle là-dedans. Je suis très surpris du
commentaire.
Vous avez parlé que seul le gouvernement
pouvait poursuivre. Ça veut dire quoi? Je ne comprends pas. Est-ce qu'on veut
poursuivre, poursuivre, poursuivre, ou on veut juste finir de parler de ça? Ça
me surprend que... je ne comprenne pas l'esprit en arrière. S'il vous plaît.
M. Bergeron (Pascal) : Je
réfère par rapport à ce point-là en particulier, là, je réfère à
l'article 28 de la loi. Je vais essayer de les retrouver dans son
intégralité rapidement. 28. L'article 28 prévoit que le gouvernement...
qu'il peut y avoir une poursuite pour la perte de valeur de non-usage liée aux
ressources publiques, notamment en raison d'émanations, une migration de gaz ou
d'écoulement de pétrole ou d'autres liquides. Bon. Et bien, on veut recouvrer
les dommages, s'il y en a, de ce côté-là, puis proportionnellement à la
contamination qu'il va y avoir. Par contre, l'article 28 précise que seul
le gouvernement peut prendre une action en justice pour recouvrer la perte de
valeur de non-usage liée aux ressources publiques. Et ça, eh bien, c'est un libellé
qui est hérité de la Loi sur les hydrocarbures, qui visait...
M. Bergeron (Pascal) : ...limiter
le pouvoir des citoyens à intervenir sur cette question-là devant les
tribunaux. Puis ce que nous, on croit, c'est qu'il n'y a pas... Si seul le gouvernement
peut poursuivre, eh bien, il n'y aura pas d'action en justice et la
contamination risque d'être entièrement à la charge du gouvernement ou
simplement laissée derrière.
Le Président (M. Lemay) : Je
dois vous interrompre, désolé. Le temps est écoulé. Donc, je vais maintenant
céder la parole au député de Mont-Royal-Outremont, porte-parole de l'opposition
officielle.
M. Arcand : Merci beaucoup,
M. le Président. Bonjour, M. Bergeron, un plaisir de vous revoir. Et ma
première question, c'est qu'il y a beaucoup de choses dans votre document,
alors la première chose que je vais vous demander, c'est: Dites-moi, dans les
choses qu'il faut changer dans le projet de loi no21, qu'est ce qui, pour vous,
est la priorité des priorités?
M. Bergeron (Pascal) : Faites-moi
un signe de la main si la caméra coupe, là, si le son coupe, je vais fermer ma
caméra. Pour moi, la priorité des priorités, c'est le régime d'accès à
l'information. C'est vraiment de le rendre intégral à la Loi sur les hydrocarbures.
Donc, chapitres VI, VII, VIII, qu'on ait accès à tous les documents. Ça, c'est
le gros morceau qui, pour moi, est prioritaire.
Puis l'autre morceau qui est vraiment
prioritaire, c'est l'application de la Loi sur la qualité de l'environnement,
articles 31.1 à 31.9 au projet pilote. C'est à dire que, s'il y a un projet
pilote, le public doit être au courant, il doit pouvoir demander un BAPE puis
ne pas avoir à se battre. Il faut que ce soit automatique, parce que c'est des
technologies nouvelles, puis les risques technologiques... On est dans le
sous-sol, on est dans les projets qui ont les conséquences environnementales
potentiellement plus aléatoires. Il faut pouvoir en discuter publiquement. Ce
sont les deux priorités, pour moi, par rapport aux modifications...
M. Arcand : Le ministre, tout
à l'heure, parlait de projet pilote, parlait de géothermie, parlait
d'hydrogène. Il parlait de toutes sortes de choses. Est-ce qu'il y a des choses
là dedans qui vous inquiètent, dans ces nouvelles technologies là, plus que
d'autres?
• (12 h 20) •
M. Bergeron (Pascal) : L'hydrogène.
On ne croit pas que c'est une filière d'avenir, ça devrait être utilisé
exclusivement quand l'électrification des usages n'est pas possible. Là, de ce
qu'on voit du duo Énergir, Hydro-Québec, on voudrait aller beaucoup plus loin,
beaucoup plus rapidement, on voudrait injecter de l'hydrogène dans le réseau...
pour pouvoir maintenir le réseau. Pour nous, ce n'est pas une solution. Ça fait
que ce n'est pas une solution non plus de le stocker sous la terre. Puis les
projets de saumure, c'est les projets qui ont le potentiel du plus grand rejet
dans l'environnement. Ah non, ce n'est pas vrai. Les projets de stockage de
CO2, ça, je relate un épisode dans mon mémoire... aux États-Unis, il y a un
pipeline de CO2 qui a explosé puis il y a un village au complet qui a failli
être décimé par cette rupture de pipeline là. Donc, le CO2, quand il y en a des
grandes quantités dans l'air, ça devient toxique pour l'humain. Et, en ce
moment... plein de pipelines pétrogaziers au transport de CO2. Et c'est un pari
qui est hyper risqué, de croire que ces infrastructures-là, qui ont été faites
pour le méthane, pour le pétrole, peuvent toffer le CO2, qui est... en tout
cas, qui est potentiellement plus abrasif, ce n'est pas le mot que je... En
tout cas, vous comprenez ce que je veux dire.
M. Arcand : Oui. Oui. Mais,
si on parle des saumures, comme telles, la question, c'est: Pourquoi interdire,
par exemple, l'exploitation des saumures si cette exploitation n'a jamais eu
lieu? Vous comprenez ce que je veux dire? Pourquoi l'extraction, par exemple,
du lithium ou du niobium dans des réservoirs souterrains, par exemple,
serait-elle plus risquée ou nocive que l'extraction des mêmes ressources dans la
roche-mère, comme telle?
M. Bergeron (Pascal) : Je me
pose les mêmes questions. Je me pose les mêmes questions. Je n'ai pas de
certitudes, là-dessus, et je pense que c'est pour ça que, s'il y a un projet
comme celui-là qui doit voir le jour, il doit être soumis au BAPE.
Personnellement, je ne suis pas fermé à l'idée que l'exploitation des saumures
soit d'emblée exclue à l'article 42, mais ça prend des garde-fous, comme on en
a certains dans la loi sur...
M. Arcand : ...O.K. Je vais
revenir sur le côté, le côté information, vous m'avez dit: Voici, la priorité,
c'est l'information, il faut qu'il y ait beaucoup plus de transparence dans ce
qui se passe. Dans votre mémoire, vous expliquez, entre autres, il y a une
chose qui m'a intéressé, parce que, tout à l'heure, on parlait de Batiscan, et
vous avez dit: «Actuellement, dès qu'un tiers demande qu'un avis de
non-conformité soit gardé secret, le bureau d'accès à l'information du
ministère accepte, même s'il s'agit de contravention à des lois d'ordre public.
Cela expliquerait pourquoi les risques d'explosion à Batiscan ont été gardés
secrets pendant des années.»
Alors, est-ce que... je comprends le sens
de votre intervention en disant: Comment cela est-ce possible? Et c'est quelque
chose que vous voudriez changer dans le projet de loi?
M. Bergeron (Pascal) : Effectivement,
dans l'état actuel des choses, dans l'état actuel des choses... en tout cas, ma
compréhension, c'est que les rapports d'inspection annuels produits par
l'entreprise ne seraient pas, nécessairement, rétroactivement accessibles. Il y
a un puits au Québec, pour lequel on a les rapports d'inspection annuels des
entreprises... de l'entreprise, puis c'est celui qui a explosé, on n'a rien
d'autre. Le ministère nous dit qu'il n'a jamais reçu les documents, ça veut
dire qu'il n'a jamais...qu'il ne les aurait jamais même demandés aux
entreprises. Pour moi, il faut qu'il y ait un suivi qui soit fait sur tous les
puits fermés temporairement à ce niveau-là. Ça fait que oui, il y a déjà des risques
pour la population, il y a des risques pour l'environnement, et cela doit être
mitigé, corrigé rapidement.
M. Arcand : Et ce que vous
demandez également, c'est que, sur le fameux montant de 100 millions, que ce
soit rendu public, que ces compensations-là soient expliquées à la population,
c'est un peu ça que vous dites.
M. Bergeron (Pascal) : On
veut que l'ensemble... soit expliqué, on veut avoir de la transparence sur cet
aspect-là, et on veut surtout qu'il n'y ait pas de discrétionnaire, qu'il n'y
ait pas de surprise là-dessus. Il y a l'article 36 du projet de loi qui prévoit
qu'il... ce n'est pas clair à quoi ce montant forfaitaire là pourrait servir,
mais on veut de la clarté.
M. Arcand : Et est-ce que
vous croyez que le gouvernement est quand même justifié de rembourser les
licences, entre autres, qui ont été révoquées à tout le moins? Je comprends les
différentes demandes, là, des entreprises, mais, à tout le moins, au niveau des
licences, est-ce que vous pensez que ça peut être justifiable ou, dans votre
esprit, c'est zéro puis une barre?
M. Bergeron (Pascal) : Ce que
j'ai dit tantôt, c'est que c'était un billet de loterie perdant, puis ça fait
un bout qu'on le sait, ça fait un bout que les entreprises le savent. Le plan
d'affaires... c'était de poursuivre le gouvernement s'il ne réussissait pas à
forer dans la vallée du Saint-Laurent. Sachant que la population ne voulait
absolument pas cette filière-là, pour moi, c'est assez clair qu'il n'y a jamais
eu de valeur à ces licences-là, outre ce que les entreprises pouvaient en tirer
des fonds gouvernementaux. Le principal gisement au Québec, il n'est pas sous
terre, il est dans les poches des contribuables, puis c'est là que les
pétrogazières sont allées puiser, depuis des années, qui promettaient d'aller
puiser aussi. Si on regarde l'analyse économique du gisement Galt qui a été
produite par Junex, on parle d'aller continuellement chercher dans les poches
des contribuables pour maintenir l'exploitation à gaz. Pour nous, c'est un
modèle d'affaires qui ne tient pas la route puis, en conséquence, il n'y a pas
lieu de rembourser quoi que ce soit aux entreprises.
M. Arcand : Vous avez parlé,
M. Bergeron, vous avez parlé tout à l'heure, est-ce que j'ai bien compris, vous
avez dit: Écoutez, à toutes fins pratiques, même pour des questions de projet
pilote comme tel, ça prendrait un BAPE de façon à peu près automatique, on n'a
pas... dès que ça arrive dans un coin du Québec et même si c'est un... est-ce qu'il
y a des cas particuliers où il n'y aurait pas besoin de BAPE, ou si, pour vous,
ça prend un BAPE automatique à chaque fois?
M. Bergeron (Pascal) : Pour
nous, ça prend un BAPE automatique à chaque fois, comme ça aurait pris un BAPE
pour chaque puits foré...
M. Bergeron (Pascal) :
...il qu'il aurait fallu faire un BAPE par puits, mais il aurait fallu qu'il y
ait un BAPE générique, par exemple, en Gaspésie, sur la filière hydrocarbures.
On n'y a pas eu droit. Puis ça, c'est la loi no 106, que vous-même avez
passée sous bâillon en décembre 2016, qui empêchait que le public soit consulté
sur ces puits-là. C'était une grosse erreur, ça a déchaîné le mouvement
environnemental. C'était d'autant plus inacceptable qu'on se faisait bâillonner
sur la question. Je crois que les projets pilotes ne doivent pas passer par le
même chemin. Si on a un projet de stockage d'hydrogène, il y a des risques
technologiques importants, par exemple, des risques d'explosion. On doit bien
situer le projet, on doit... on doit prendre des garanties par rapport aux
puits, et le public doit être consulté là-dessus, puis la façon de le faire au
Québec, c'est par e BAPE. Bien, si on a un projet de stockage de séquestration
de CO2, il y a également beaucoup de risques technologiques, comme il y en a
dans une exploitation minière. Et ces projets là, avec des... eh bien, ils sont
soumis à une audience publique au Québec, et c'est ce qui doit être fait pour
les projets pilotes.
M. Arcand : Et, si
j'avais à vous demander, par exemple, lorsqu'on parle... est-ce qu'il y a
certaines filières qui, à vos yeux, peuvent être plus... si j'enlève la
question des hydrocarbures, mais, si j'allais, par exemple, dans le domaine du
lithium, par exemple, c'est-u quelque chose... Une mine de lithium, pour vous,
est-ce que c'est quelque chose de valable?
Le Président (M. Lemay) : Monsieur
Bergeron, vous pourrez peut-être répondre à cette question-là plus tard ou nous
transmettre à la commission... parce qu'on doit passer au deuxième groupe
d'opposition, madame la députée de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, pour une
période de 2 min 45 s.
Mme Lessard-Therrien :
Merci, monsieur le Président. Bonjour, monsieur Bergeron. Ça me fait grand
plaisir de vous retrouver ici aujourd'hui à la Commission. Je pense qu'on est
pas mal sur la même longueur d'onde sur beaucoup d'aspects sur ce projet de loi
là.
Moi, j'aurais envie de vous poser la
question, dans la petite fenêtre de temps que j'ai, sur la question des projets
pilotes. C'est sûr qu'on est toujours dans l'optique d'améliorer le projet de
loi. Une de vos recommandations sont que les comités de suivi incluent des
membres désignés par le milieu. Bon, là, vous allez prêcher à une convaincue.
Moi, je reconnais toute cette importance-là qu'ont air des... que les gens du
milieu soient représentés sur les comités de suivi. Mais j'aimerais vous
laisser le temps qu'il me reste pour faire valoir vos arguments puis cette
nécessité-là, à la partie gouvernementale, de s'assurer... puis pourquoi c'est
important, en fait, d'avoir des gens du milieu impliqués sur les comités de
suivi. Merci.
• (12 h 30) •
M. Bergeron (Pascal) :
Essentiellement, là, le projet de loi 21 reprend ce que la Loi sur les
hydrocarbures avait prévu en termes de comités de suivi. Puis ce qu'on a su par
notre personne infiltrée dans Utica Resources, c'est que les comités de suivi
sont bidon, en fait. C'était... Les gens qui sont choisis par l'entreprise,
c'est des gens qui n'ont pas l'indépendance requise. Et la preuve, on va essayer
de la faire, mais la preuve de... difficile à faire. On n'a pas réussi à faire
des grosses sorties publiques là dessus, et c'est quelque chose qui est resté
lettre morte, même si c'était un enjeu crucial, que l'outil chargé de
surveiller l'entreprise soit nommé par l'entreprise selon un processus que
lui-même met au point.
Donc, les deux suggestions, les deux
recommandations qu'on fait là-dessus, c'est que deux représentants des
groupes... un du Conseil régional en environnement, un autre des groupes
environnementaux autonomes, puissent effectuer une surveillance adéquate. C'est
les gens qui ont des dents en matière d'environnement, potentiellement. Je ne
dis pas c'est toujours le cas, mais c'est les... qui ont potentiellement des
dents en matière d'environnement puis qui peuvent poser des questions justes
aux entreprises. Puis ce qu'on a vu, par exemple, dans le cas du comité de
suivi à... c'est un comité qui ne s'informe pas du dossier, un comité qui est
complaisant puis qui n'était même pas au courant de la contamination du puits,
alors que ça fait trois ans que la compagnie le savait puis qu'ils n'en
parlaient pas. Il n'y avait pas de demandes de divulgation supplémentaires.
Mais d'avoir des gens qui sont nommés par le milieu, ça permet d'avoir des gens
qui sont critiques par rapport au projet puis qui vont poser des questions, des
questions qui vont être pertinentes par rapport à l'avenir de ce projet-là. Et
on va arrêter de se chercher des contacts pour peut-être ne pas en trouver pour
avoir nos réponses auprès d'entreprises. Puis en mettant des responsables
désignés du milieu bien, on va pouvoir aller chercher directement l'information
dont on a besoin, parce que l'entreprise, elle est obligée de répondre au
comité de suivi. C'est inscrit dans la loi...
Le Président (M. Lemay) :
Merci, M. Bergeron... complète ce segment. M. le député de Jonquière, la
parole est à vous.
M. Gaudreault : Oui,
merci. Bonjour. Bienvenue à la commission. Je voudrais revenir sur la question
des...
12 h 30 (version non révisée)
M. Gaudreault : ...Des
explosions ou de l'explosion du côté de Batiscan. Vous m'avez l'air d'un
spécialiste des demandes d'accès à l'information ou des demandes d'accès à la
non-information, alors, ça, en soi, c'est un enjeu, là. Est-ce que, selon vous,
il existe des rapports sur d'autres situations qui pourraient conduire à des
contextes semblables à ce qui est arrivé à Batiscan? Donc, est ce qu'il y a
d'autres rapports qui permettraient de prévenir, je dirais, des situations
semblables à ce qui est arrivé à Batiscan?
M. Bergeron (Pascal) : La
question est devant la... d'information, en ce moment, le débat n'est toujours
pas réglé. Et la réponse, c'est: je ne le sais pas s'il y en a d'autres. Du
côté du ministère de l'Énergie, on me dit que ces rapports-là n'ont jamais été
produits par l'entreprise... Par les entreprises, donc il n'y a pas d'autres
rapports qui existent. Les Puits n'étaient pas officiellement fermés
temporairement. Moi, j'ai des documents qui me démontrent qu'il y avait plein
de puits fermés temporairement à cette époque-là et qu'il devrait y avoir des
rapports. Et je veux questionner le ministère de l'Énergie et des Ressources
naturelles là-dessus devant la Commission d'accès à l'information. Et même ça,
ça semble s'enligner pour être très difficile, devant la commission.
M. Gaudreault : O.K. je
voudrais vous entendre un peu plus sur ce que vous appelez le modèle d'affaires
de l'industrie, qui serait basé un peu de la spéculation par rapport à faire
des poursuites, là, pour obtenir des gains. J'aimerais ça vous entendre
davantage là-dessus. Et quand même sur le fait qu'il y a un constat qu'on peut
établir, c'est qu'en matière d'industrie pétrolière et gazière au Québec, on
n'a jamais eu de majeures, là, dans le... tu sais, on n'a pas eu les Total, les
Valero de ce monde ou les Shell. Ça a toujours été des entreprises mineures par
rapport aux autres. Quelle est votre analyse par rapport à ça?
M. Bergeron (Pascal) : Effectivement,
les seniors ne se sont jamais pointées ici en disant qu'il y avait quelque
chose à faire, à part peut être un VP de Total qui a été sur UTICA, brièvement,
au début, là, un genre de... Mais sinon, il y a... une des choses, c'est que le
puits le plus profitable de l'histoire du Québec dans la vallée du
Saint-Laurent, la courbe de production est nettement inférieure à ce qui se
passe dans le... de l'UTICA. Puis ça, je le tire d'un blogue de Marc Durand,
ingénieur géologue, qui est très crédible quant à ces informations-là. Et ce
qu'on sait, c'est qu'aux États-Unis, le gaz de schiste n'a jamais été rentable.
En tout cas, au... De 2019, il n'y avait pas de rentabilité qui s'était dégagée
de cette industrie-là. Donc, au Québec, là où les courbes de production de gaz
sont inférieures dans les puits, on ne voit pas comment c'est possible qu'il y
ait une rentabilité.
Et, bien, le modèle d'affaires de
poursuite, on a... qui poursuit, on a UTICA qui poursuit et on a... qui
poursuit pour des dommages.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
M. Bergeron. Je dois vous interrompre puisqu'on a déjà atteint la limite
de notre temps d'échange. Je vous remercie pour votre contribution à nos
travaux.
Et la Commission suspend ses travaux
jusqu'après les affaires courantes. Merci à tous et à toutes.
(Suspension de la séance à 12 h 36)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 23)
Le Président (M. Lemay) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de l'agriculture, des pêcheries, de
l'énergie et des ressources naturelles reprend ses travaux, et je demande à
toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils technologiques.
Alors, nous poursuivons les consultations
particulières et les auditions publiques sur le projet de loi numéro 21,
la Loi visant principalement à mettre fin à la recherche et à la production
d'hydrocarbures, ainsi qu'au financement public de ces activités.
Et cet après-midi, nous entendrons les
témoins suivants : Solidarité Gaspésie, le Centre québécois du droit de
l'environnement, l'Association pétrolière et gazière du Québec ainsi que le
professeur Richard Ouellette. Mais tout d'abord, je souhaite souhaiter la
bienvenue aux représentants de Solidarité Gaspésie, et je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé, et par la suite il y
aura une période d'échange avec les membres de la commission. Tout d'abord, je
vous invite à vous nommer et vous pouvez y aller avec votre exposé. Merci.
M. Saucier (Carol) : Donc,
vous me voyez bien?
Le Président (M. Lemay) : Oui.
M. Saucier (Carol) : Parfait.
Alors, écoutez, Carol Saucier, citoyen de Gaspé et porte-parole du regroupement
Solidarité Gaspésie. Quelques mots en guise d'introduction, si vous le
permettez. Le Regroupement citoyen Solidarité Gaspésie tient à remercier les
membres de cette commission parlementaire de nous avoir invités à présenter un mémoire
dans le cadre du dépôt récent du projet de loi 21 par le ministre de
l'Énergie et des Ressources naturelles du Québec. Nous tenons à souligner que
le gouvernement du Québec a posé, le 2 février dernier, un geste important
en déposant à l'Assemblée nationale ce projet de loi. Comme de nombreuses
organisations, nous saluons ce geste décisif tout en souhaitant que ce projet
de loi soit bonifié à la suite de cette commission parlementaire et avant
d'être adoptée.
Quelques mots, donc, concernant le plan de
ma présentation. Qui sommes-nous? Il y aura un bref retour historique sur les
mobilisations citoyennes en Gaspésie concernant les hydrocarbures. L'exposé
aussi de cinq motifs qui ont donc appuyé nos démarches. La mobilisation plus
large au niveau du Québec. Et enfin, des questions et commentaires concernant
le projet de loi lui-même, et une brève conclusion.
Donc, qui sommes-nous Solidarité Gaspésie?
C'est sans doute... c'est peut-être la première fois que vous entendez parler
de nous. On ne sait pas. Alors, nous avons été créés en 2018. C'est un
regroupement citoyen non partisan, mobilisé pour le développement de la
Gaspésie. Nous nous intéressons à plusieurs enjeux socioéconomiques, culturels,
environnementaux et de gouvernance qui sont soulevés par ce développement. Nous
agissons en vue de créer un vaste mouvement citoyen capable de redonner un élan
soutenu et un pouvoir d'action accru aux habitants de notre territoire. En plus
de notre mobilisation à l'encontre du projet pétrolier Galt, nous travaillons
sur d'autres dossiers, notamment le transport aérien et ferroviaire,
l'importance d'élire au suffrage universel les préfets de la MRC et bien
d'autres encore. Alors, voilà qui nous sommes.
Un bref historique, maintenant, des
mobilisations citoyennes en Gaspésie. Rappelons, hein, que la Gaspésie est
depuis fort longtemps questionnée par la problématique du développement
potentiel des énergies fossiles. La première découverte de pétrole de surface
remonte au XIXe siècle figurez-vous. Toutefois, beaucoup plus près de
nous, notons les mobilisations suivantes. En 2012, il y a l'intensification de
la lutte citoyenne contre Pétrolia et son projet de forage avec fracturation
hydraulique à Haldimand, donc en plein cœur de Gaspé. Un peu plus tard, de 2013
à 2018, rappelons-nous la lutte acharnée de la municipalité Ristigouche Sud-Est
contre Gastem afin de préserver son eau potable. 2017-2018, une autre action
fort importante, Environnement Vert Plus participe à l'établissement du camp de
la rivière en opposition au puits Galt 4 situé à une vingtaine de
kilomètres à l'ouest de Gaspé.
Depuis mars 2019, donc depuis deux ans,
Solidarité Gaspésie s'oppose à Galt et plus largement à l'établissement d'une
filière des hydrocarbures. En 2020 et 2021, nous avons mené, donc, les actions
suivantes. L'opposition à la poursuite intentée par Gaspé Énergies contre le
MERN, celui-ci ayant refusé sa demande de permis d'exploration au puits Galt 6.
Une manifestation est organisée à Gaspé le 25 avril 2021 à laquelle
participent plus de 200 personnes. Il y a également...
M. Saucier (Carol) : ...également
la mise en circulation, en mai, d'une importante pétition contre les
investissements publics dans le projet Galt qui est parrainée par notre
députée, Mme Méganne Perry Mélançon. Pourquoi donc toutes ces mobilisations?
Essentiellement, pour cinq motifs, donc, pour lesquelles nous nous opposons à
la fois à la poursuite de Gaspé Énergie contre le MERN, au projet Galt lui-même
et au développement d'une filière des hydrocarbures.
Le premier motif, il est simple, mais il
est important, c'est pour protéger la protection, donc, du milieu hydrique.
Galt 6 est localisé dans un secteur où le milieu hydrique est très vulnérable
à la contamination des eaux de surface. Que se passerait-il en cas de
déversement de produits toxiques dans la rivière Petite Fourche qui est située,
rappelons-le, à moins de 800 mètres du site projeté depuis du puits, le
puits Galt 6? Cette petite rivière se jette elle-même dans la rivière York
qui est une rivière fort prisée des touristes, une rivière saumon.
Le deuxième motif, tout aussi important,
est l'absence d'acceptation sociale du projet Galt par les populations
concernées. Disons à cet effet que l'atteinte de l'acceptabilité sociale d'un
projet entraîne que le promoteur fournisse une information soutenue auprès des
autres parties prenantes afin que celles-ci puissent exercer leur pouvoir
d'influencer la prise de décision. Dans le cas du projet Galt, l'absence
d'information systématique et soutenue de la part de Gaspé Énergie est criante.
Un comité de suivi se fait lui aussi très discret et ne transmet pas
d'informations à la population. Bref, sans information ni consultation, il n'y
a pas d'acceptation possible.
• (15 h 30) •
Troisième motif, nous avons ici une
multinationale étrangère, vous allez comprendre pourquoi on passe de Gaspé
Énergie à une multinationale étrangère, aux intérêts pour le moins
questionnables. Nous faisons face ici à un acteur économique dont les intérêts
financiers risquent d'être bien éloignés des préoccupations de développement de
notre territoire et de la Gaspésie. En effet, Gaspé Énergie est en fait une
filiale d'un groupe beaucoup plus important, si vous voulez, Ressources Utica,
qui est elle-même un fonds spéculatif étranger qui détient une forte majorité
du capital de Gaspé Énergie.
Quatrième motif, l'incompatibilité de la
filière des hydrocarbures avec la nécessité d'une transition énergétique
durable. Le développement pétrolier dont on parle cadre très mal avec
l'importance pour le Québec d'amorcer une transition énergétique convaincante.
Or, des combustibles fossiles et faisant appel aux énergies renouvelables,
rappelons-le, qui sont bien acceptés chez nous, notamment en Gaspésie, quand on
pense au développement éolien. De plus, l'Alliance internationale de l'énergie
nous rappelle avec insistance la nécessité de ne pas développer, dans le monde,
de nouveaux projets pétroliers et gaziers.
Dernier motif, les investissements publics
mis à risque. On peut constater, et ça a été affirmé par, donc, des
intervenants à la commission au cours de cet avant midi, Madame, notamment
Carole Dupuis, la filière des hydrocarbures en Gaspésie, et plus largement au
Québec, ne saurait subsister sans un apport massif de fonds publics. Plusieurs
investissements publics distincts se sont soldés par une perte d'argent
évidente dans le cas de Junex. Dans le cas de Galt, avec Gaspé Énergie,
mentionnons que Ressources Québec, une filiale d'Investissement Québec, a misé
plus de huit millions de dollars directement dans ce projet pour en devenir
partenaire à hauteur de 17 pour cent.
Ceci dit, hein, Solidarité Gaspésie est
loin d'être seule à s'être mobilisée, donc nous sommes nombreux à nous
mobiliser depuis plusieurs années. Nous tenons à souligner que les luttes
contre la recherche et l'exploitation des hydrocarbures se sont exprimées de
manière éloquente dans plusieurs régions du Québec. Je parle ici, notamment,
des trois groupes le Regroupement Vigilance hydrocarbures Québec, plus connu
sous RVHQ, le groupe bas-laurentien Prospérité sans pétrole et le Comité de
citoyens responsables de Bécancour. Ces trois groupes ont mis en annexe du
mémoire de Solidarité Gaspésie, vous retrouvez donc un mémoire, pour chacun de
ces groupes, qui décrit la nature des activités qu'ils ont développées au cours
des dernières années. Le dénominateur commun de leurs luttes, c'est non à
l'exploitation du gaz de schiste dans la vallée du Saint-Laurent. Mentionnons
aussi que le Comité de citoyens de Bécancour est très préoccupé par le
chapitre 7 du projet de loi concernant les projets pilotes.
Maintenant, les questions et commentaires
plus précis sur le projet. Si nous saluons le geste important que le gouvernement
du Québec pose par le dépôt du projet de loi 21, Solidarité Gaspésie
demeure par ailleurs très préoccupé...
15 h 30 (version non révisée)
M. Saucier (Carol) : ...l'ampleur
des indemnités qui sont prévues en guise de versement aux pétrolières et
gazières, comme il est écrit d'ailleurs dans le chapitre VI du projet de
loi. Rappelons que la décision d'indemniser les entreprises constitue un choix
politique et non une obligation légale, comme nous le rappelait il y a fort peu
longtemps le Centre québécois du droit de l'environnement. Dans l'article 35,
plus précisément au chapitre VI du projet de loi, il est indiqué que des
frais seront remboursés aux entreprises pour couvrir leurs frais relatifs à
l'exploitation des puits pour la période historique de 2015 à 2021.
Le MRN évalue à 67 millions le
montant total qui pourrait être versé aux entreprises à ce chapitre. Nous avons
à ce sujet quelques questions. À partir de quels critères l'évaluation ce
montant-là a-t-il été obtenu? Deuxièmement, les pétrolières et gazières ont
déjà reçu d'importantes aides financières au cours des dernières années, à quel
montant le MRN estime-t-il ces aides aux entreprises? D'autre part, ces aides
seront-elles soustraites des indemnités prévues? Nous aimerions que ces
informations soient rendues publiques. De nombreuses aides publiques, donc, ont
été consenties aux entreprises jusqu'à maintenant sous forme de crédits
d'impôt, de participation au capital ou de subventions. Pourquoi les
contribuables du Québec devraient-ils de nouveau mettre la main dans leurs
poches pour offrir des indemnités aux pétrolières et gazières?
En conclusion, et en considérant toutes
les luttes citoyennes qui ont été menées, considérant l'absence d'acceptation
sociale par des projets locaux que de la filière énergétique elle-même par les
populations concernées, considérant enfin que l'argent public doit servir à
financer la transition énergétique et non pas à enrichir encore plus les
pétrolières et gazières, nous demandons au gouvernement du Québec de passer à
l'action en adoptant, au plus tard d'ici la fin de la présente session
parlementaire, le projet de loi n° 21, mais que celui-ci
soit amendé, notamment au chapitre des indemnités qui pourraient être versées
aux entreprises. Cette demande de ne pas octroyer de nouveaux fonds publics aux
pétrolières et gazières en guise d'indemnité est faite de concert avec de
nombreuses organisations environnementales et citoyennes de tout le Québec.
Nous avons déjà beaucoup donné, c'est assez. Merci de votre attention.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
M. Saucier, pour votre exposé. Nous allons maintenant penser à la période
d'échange avec les membres de la commission. M. le ministre, la parole est à
vous.
M. Julien : Oui, merci.
Merci infiniment, M. Saucier pour... et les commentaires que vous venez de
porter. Naturellement, bien, je pense qu'on est, vous et moi, au même endroit
sur plusieurs éléments. Vous me rappeliez, au début votre intervention, un peu
le printemps dernier, là, la fin de l'hiver, et le printemps dernier, quand je
suis allé en cour. Donc, vous connaissez bien le dossier et effectivement, là,
c'est des souvenirs qui ne sont pas très plaisants, mais qui, somme toute,
démontraient clairement notre volonté de prendre nos responsabilités dans les
dossiers d'hydrocarbures au Québec.
D'entrée de jeu, si vous permettez, vous
êtes, vous avez posé trois questions à l'intérieur de votre mémoire. Donc, si
je pouvais juste rapidement donner des réponses qui ne seront pas parfaites,
mais qui visent à répondre à vos trois questions. Vous demandiez : À
partir de quels critères d'évaluation les montants ont ils été obtenus par rapport
au volet en fin de compte indemnisation? C'est des frais d'exploitation et de
mise en valeur qui ont été payés, qui ont été évalués sur des bases de données
qui sont actuellement dénominalisées. Alors, on a des frais qui sont dus
justement à des crédits d'impôt. On a de l'information au ministère et au
ministère des Finances. Donc, ces données-là, là, c'est tangible, c'est
vérifiable, et on est capable de... pour les six dernières années puisqu'il y a
une perception... une perception des documents, en fin de compte, qui est
disponible, de toucher exactement à ces montants-là.
Vous mentionniez, en deuxième question, ils
ont déjà reçu d'importantes aides financières. C'est des pétrolières et
effectivement, on a déjà une estimation des sommes qui ont été reçues qui
devront être remboursées au net dans les indemnisations, on parle de 11 à 12 millions
actuellement, là, selon les documents qu'on a en place pour les 182 licences
et les 62 puits. Puis alors pourquoi ces informations ne sont-elles pas
publiques? Troisième question. Mais justement on aura un programme
d'indemnisation qui va venir préciser de manière très, très stricte et directe
tous les éléments qui vont rentrer dans le calcul. Et naturellement, pour
éviter l'enjeu de certains éléments, là, de manière fine puis des enjeux de
confidentialité, on va soumettre ce programme d'indemnisation à un vérificateur
externe indépendant qui va être en mesure d'appliquer directement ces
mesures-là. Donc...
M. Julien : ...prend par
exemple l'entente qu'il y a eu sur Anticosti à une autre époque, je serais bien
curieux que vous... que quelqu'un ici puisse me dire quels étaient les
critères, quels étaient les barèmes et quelles étaient en réalité les
validations pour finir à ces montants-là. Moi, je ne les vois pas, je ne suis
pas en mesure d'y toucher. Nous, on veut avoir un programme d'indemnisation
clair et appliqué de manière uniforme, équitable auprès de tous les joueurs et
connu de tous. Alors, le programme d'indemnisation, pour moi, doit être transparent
et doit être appliqué de manière équitable. Maintenant... C'était pour vos
trois questions.
Si je reviens sur... Une fois qu'on a dit
ça, avec les questions que vous me posez à l'intérieur de votre mémoire, malgré
tout, pour vous, vous nous dites qu'on ne doit pas indemniser les pétrolières
puis vous prenez à témoin M. Saucier, là, le Centre québécois du droit de
l'environnement, que j'entends beaucoup... J'ai hâte de les avoir ici, parce
que j'entends souvent cette citation-là.
Mais, dans le même document qu'ils
produisent, ils disent deux choses, puis c'est comme si le deuxième volet, on
ne le répétait jamais, lui. Ils disent: «Naturellement, bien qu'il soit tout à
fait possible légalement de procéder sans indemniser, certaines considérations
d'ordre politique, par exemple l'apparence...», etc. Alors là, on dit: La
politique. Et plus loin, ils viennent dire précisément: «En vertu de certaines
dispositions du droit international, des investisseurs étrangers pourraient
exiger des indemnisations.» C'est drôle, cette phrase-là...
Est-ce que vous en êtes conscient? Et
est-ce qu'en termes de droit international, de commerce international et en
termes, en fin de compte, de réputation pour le Québec, vous n'estimez pas
qu'il serait hasardeux de ne pas prévoir ces indemnisations auprès des gens qui
ont investi dans un cadre légal qui... leur permettait de bonne foi pour payer
des licences et des frais d'exploitation?
• (15 h 40) •
M. Saucier (Carol) : Oui.
Alors, est-ce que vous me voyez? Oui, vous me voyez toujours à l'écran?
Parfait.
Je pense que ce qui ce qui nous apparaît
important, d'une part parce que, bon, vous invoquez... le gouvernement invoque,
mais d'autres acteurs aussi, notamment du milieu financier, invoquent le fait
que la réputation du Québec est en jeu... Je dirais qu'on est un petit peu dans
un cas d'espèce ici par rapport à la filière des hydrocarbures, hein? Je pense
que dans le cas des mines ou dans d'autres secteurs, ça se passe, selon le
point de vue en tout cas de Solidarité Gaspésie, ça se passe autrement. D'une
part, bon, des collègues qui m'ont précédé ont bien dit que c'étaient des
investissements aussi qui pouvaient être risqués. Je crois que les acteurs
économiques, les pétrolières et gazières, le savaient, et c'est pour ça aussi
qu'elles comptent beaucoup sur le financement public pour appuyer leur
démarche.
Et, quand je dis: un cas d'espèce, c'est
dans ce sens-ci: je ne suis pas certain, par exemple, que les minières seraient
à ce point impressionnées si, effectivement, on disait: Écoutez, il n'y aura
pas d'indemnités, puisque vous avez déjà touché des fonds importants. Je ne
pense pas que ça réduirait la possibilité pour le Québec de pouvoir capter des
investissements étrangers, notamment pour les énergies renouvelables, la transition
énergétique. Je pense que ces acteurs-là sont très conscients du cas d'espèce
particulier du mode de fonctionnement de ces entreprises, dans le cas des
filières d'hydrocarbures. Alors, bon, je suis quand même moins sensible à ça.
Il est possible qu'au niveau du droit
international, bon, il y ait des choses qui doivent bouger. Je vous dirai que
nous ne sommes pas des spécialistes à ce niveau-là. De toute façon, hein, vous
savez très bien que les pétrolières et gazières s'apprêtent à intenter une poursuite
contre le gouvernement. Alors, on verra bien à ce moment-là ce qui va se
passer, ce qui serait d'ailleurs très dommage, parce qu'ils ont l'air fort
compétents dans ce type de stratégie, de poursuivre le gouvernement. Je pense
que vous en êtes un bon illustrateur, vous avez goûté à la sauce, comme on dit.
L'autre élément, c'est que j'aimerais
qu'on parle des indemnités peut-être en renversant un peu le mode de
raisonnement. Bon. D'une part, effectivement, bon, je pense que de rembourser
le coût des licences... De toute façon, l'acquisition des claims ou des permis,
hein, coûte extrêmement... très, très peu cher au Québec, bon, comparativement
à la Colombie-Britannique, etc. Bon. Alors, d'une part, ils ont acquis ces
droits, ces claims à un coût dérisoire. Alors, rembourser ça, bon,
effectivement, c'est totalement, c'est tout à fait marginal, je pense qu'il n'y
a pas de problème là.
Quand on parle des frais d'exploitation,
effectivement, si vous avez des factures, encore là, il faudra s'assurer que les
subventions, que les aides publiques aient été retranchées. Mais, encore là,
c'est que... je n'en ai pas parlé spécifiquement dans le mémoire, mais il y a
toute la question de la fermeture des puits. D'ailleurs, vous parlez de ça...
M. Saucier (Carol) : ...avec
un engagement de couvrir 75 % des coûts de fermeture. Alors, le problème,
c'est que vous avez mis, bon, une provision d'environ 33 millions, mais en
tout cas, après en avoir discuté avec plusieurs groupes, on pense que ça
pourrait coûter beaucoup, beaucoup, beaucoup plus cher que ça quand on regarde
aussi, là, l'expérience passée sur la fermeture des puits.
Le dernier élément à ce niveau-là qui ne
questionne aussi, pourquoi les contribuables québécois, pourquoi les
contribuables publics devraient-ils payer la note, notamment de la fermeture
des puits? Si on se mettait à retrancher, hein, de ce que, normalement, on
entend leur donner, les coûts de fermeture éventuels des puits, c'est peut-être
eux qui devraient nous rembourser. C'est peut-être eux qui devraient nous
rembourser des sous, hein? Alors, dans un cas comme celui-là, est-ce que d'une
part les entreprises accepteraient de rembourser? Je ne suis pas certain.
Alors, c'est un peu tout ça. Je pense
qu'il faut... Il faut regarder ça de très, très près au niveau des
compensations. Et nous, on pense que nous avons déjà beaucoup contribué, qu'à
toutes fins pratiques il n'y aurait pas de préjudice important en disant :
Écoutez, c'est terminé, hein? Le bar ouvert est terminé. Voilà!
M. Julien : Juste un
petit commentaire, là, pour faire du pouce avec ce que vous avez mentionné, qui
est très... qui est très intéressant. Puis naturellement, c'est des
questionnements qu'on a eu a priori, là, de la préparation du projet de loi,
puis qu'on aura certainement avec les collègues, là aussi, là, à l'étude
article par article éventuellement. Naturellement, quand vous dites :
Bien, s'ils devaient rembourser ces sommes-là, est-ce que ça ne serait pas eux
qui devraient faire un paiement?
Bon, à terme, là, les 44 millions
d'estimation, c'est sur les plans de fermeture qui sont actuellement tous
disponibles par rapport aux 182 licences, avec des montants de contingence
somme toute appréciables et de manière conservatrice qui ont été appliqués par
le ministère. Donc, ça donne 44 millions. 33 millions potentiellement à la
charge du gouvernement. Et naturellement, ce qu'on trouvait appréciable dans
cette démarche-là, c'est de dire : Tant et aussi longtemps que vous
n'obtenez pas les autorisations et la démonstration du ministère de
l'Environnement et du MERN, comme quoi la réhabilitation des sites n'est pas
adéquate, vous ne pourrez jamais toucher à l'autre 66 millions,
c'est-à-dire les deux tiers restants. Donc, pour nous, c'est un enjeu en fin de
compte. Si quelqu'un décide de ne pas se conformer, c'est non seulement à somme
nulle pour le gouvernement. On assumera les frais de fermeture, mais on ne
déboursera pas en fin temps des indemnités.
Alors, c'est un petit peu là qu'on en est.
Je pense que les bases de calcul vont être bonnes. Ce que je comprends
également dans votre intervention, puis je pense qu'on l'a eue déjà à quelques
reprises, c'est qu'on va peut-être gagner à préciser, à tout le moins de
manière assez claire, les intentions par rapport au programme d'indemnisation
pour que celui-ci, là, soit transparent le plus tôt possible, même dans la
démarche du projet de loi actuel, justement pour éviter les qui propos
éventuels sur à quoi pourrait ressembler ce programme-là. Donc, je pense qu'on
va gagner à le préciser parce que j'entends souvent en réalité ces
commentaires-là. Donc, si ce n'est pas clair, bien, on a un enjeu. Puis je veux
que ça soit très clair. Donc, on le fera au fur et à mesure. Je vais laisser
mes collègues vous poser quelques questions si vous permettez.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Donc, monsieur le député de Lac-Saint-Jean, la parole est à vous.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) :
Alors, bonjour, monsieur Saucier. Très heureux de vous entendre, surtout
les gens de la Gaspésie. J'ai eu la chance dernièrement, bien, en 2020,
d'avoir des consultations sur la mise en valeur du territoire et j'ai rencontré
vos élus chez vous. C'est très intéressant ce qu'ils nous mentionnaient au
niveau de l'économie de la Gaspésie, toute la question du tourisme et bien
d'autres économies, entre autres l'énergie renouvelable.
Oui, je veux revenir avec le projet de
loi. Vous savez que le projet de loi prévoit tout un mécanisme pour la
fermeture des puits. Et j'aimerais vous poser la question. Est-ce que vous
croyez que votre communauté gaspésienne, bon, vont avoir toute l'information
nécessaire? Et croyez-vous aussi qu'elles vont être rassurées par ce
mécanisme-là?
M. Saucier (Carol) : Écoutez,
je... Je l'espère. Je l'espère parce qu'on a été... On a été lourdement
échaudé. Monsieur Pascal Bergeron a été plus tôt, hein, aujourd'hui, avec un
Environnement Vert-Plus, en parler aussi de ce qui s'est passé à Bourque, donc,
des puits... Bien là, vous me parlez des fermetures à venir, mais tout ce qu'on
a vécu dans le passé, vous savez, on est... On est sur nos gardes, hein? On
est...
M. Saucier (Carol) : ...on est
méfiants, on est méfiants, c'est très clair. Et donc il y a des dizaines de
puits, voire davantage, au Québec, et notamment à Bourque, où on note
actuellement de la contamination, effectivement, dans les eaux souterraines,
alors... et ça va coûter extrêmement cher, tout ça, à l'État, hein? Donc, bon,
j'ose espérer, mais on reste un peu méfiants. On verra, à l'usage, si les mécanismes
de fermeture des puits seront suffisants dans ce qui est prévu par la loi.
Ce que j'aimerais peut-être ajouter, en
élargissant un peu, si vous me permettez, M. le député, là, du Lac-Saint-Jean,
je crois, c'est que, dans toute cette question-là des indemnités à donner, à ne
pas donner, le montant, etc., c'est qu'il y a comme un raisonnement, qui est
sous-jacent, qui est le suivant. C'est comme si ce type d'entreprises là... Et
je ne veux pas généraliser du tout, hein, à l'ensemble des entrepreneurs ou des
entreprises, loin de là, mais par rapport aux pétrolières et gazières, j'ai
l'impression que le raisonnement qui est fait, c'est, on va s'organiser... Bien
sûr, hein, ce sont des entreprises capitalistes, et, bon, ça fait partie de
l'ADN, donc il faut réaliser un certain nombre de bénéfices, de profits. Mais
c'est comme s'ils essayaient d'optimiser leurs revenus, ou leurs revenus
potentiels, mais tout ce qui pourrait être le passif, les effets indirects, les
coûts, les pertes, on va les socialiser, on va essayer de socialiser tout ça,
et c'est l'État qui ramasse ça. L'État, c'est nous, hein? Alors, c'est ce que
j'appelle la privatisation des bénéfices, et la socialisation des pertes. Et
c'est ça, au fond, qui nous fait beaucoup réfléchir par rapport aux indemnités.
• (15 h 50) •
Parce que, bon, je n'ai pas parlé aussi...
Mme Dupuis en a parlé ce matin, avec raison, dans le Front commun pour la
transition énergétique... la question des coûts de santé, la question aussi des
coûts psychologiques. Donc, tous ces préjudices qui ont été causés aux
communautés, hein, qui ont, finalement, vécu des divisions internes qui ont
vécu... Alors, ça, c'est... Bon, c'est sûr que c'est difficile à comptabiliser
et à quantifier, mais il reste que c'est encore une forme de socialisation des
effets indirects, hein, alors. Et c'est comme si les entreprises, ces
entreprises-là n'étaient pas conscientes de ça, ou s'en foutaient, tout
simplement. Ça fait partie des effets collatéraux.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Je
laisserais la parole à mon collègue. Merci, monsieur.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Donc, M. le député de Bourget, environ 1 min 30 s.
M. Campeau : Question assez
courte. Vous avez parlé d'acceptabilité sociale. Il y a donc des gens, aussi,
qui étaient en faveur des projets pétroliers. Alors, maintenant qu'on va
arrêter les projets pétroliers, est-ce que les tensions vont tomber, vont se
transformer? Comment vous voyez ça?
M. Saucier (Carol) : Bon,
vous avez raison de dire, hein, que par rapport à... Ce sont des dossiers qui
ont été très controversés, hein? Alors, il y a eu, bien sûr... Même au sein de
la population de Gaspé notamment, mais ailleurs au Québec aussi, il y a des
gens qui ont soutenu ces projets-là, et il y en a plusieurs qui s'y sont
opposés aussi, alors. Mais la question de l'acceptabilité, ou encore, la façon
d'arriver à une acceptation sociale, c'est aussi de dire, s'il n'y a pas un oui
clair et net de la part d'une majorité de populations concernées, c'est non. C'est
ça aussi, hein? S'il n'y a pas un oui clair, il n'y en aura pas. Et pour
arriver à un oui clair, bien, il aurait fallu que les entreprises donnent de
l'information largement en amont, partagent cette information avec les parties
prenantes, discutent, tiennent compte, etc., bon.
Alors, ça ne veut pas dire pour autant que
les projets auraient été acceptés, mais il n'y a jamais eu de ça, de ce
processus-là... de large consultation et de concertation publique. Alors,
qu'est-ce qui va se...
Le Président (M. Lemay) : M.
Saucier, ceci complète la période d'échange qu'on avait avec les membres du
gouvernement. Et je vais maintenant céder la parole à l'opposition officielle.
M. le député de Mont-Royal-Outremont, pour une période d'environ 11 minutes.
M. Arcand : Merci, M. le
Président. Bonjour, M. Saucier. Je suis en train de regarder votre mémoire et
je... Si je comprends bien dans ce que vous dites également, non seulement...
Évidemment, je pense qu'il n'y a aucun parti politique qui conteste le fait
qu'il faut sortir des hydrocarbures, ce que vous dites également. Vous voulez
voir le gouvernement sortir des...
M. Arcand : ...hydrocarbure
dans son rôle d'émetteur de permis, mais vous voulez également le voir sortir
dans son rôle d'investisseur. Et ce que ça veut dire, c'est qu'Investissement
Québec, la Caisse de dépôt, des fonds comme les Fonds de solidarité, etc. ne
devraient jamais intervenir dans ça.
M. Saucier (Carol) : C'est
clair. C'est clair. De toute façon, actuellement, il y a des... On le sait,
qu'il y a des pressions qui sont faites auprès de la Caisse de dépôt pour
qu'elle retire de son portefeuille des investissements, notamment au niveau des
sables bitumineux en Alberta ou au niveau des grands projets pétroliers ou gaziers.
Alors, Investissement Québec... Je vous soulignerai aussi quand on regarde la
session parlementaire, donc, de l'Assemblée nationale, au printemps dernier,
Mme Perry Mélançon posait un certain nombre de questions au ministre de
L'Économie, de L'Innovation, M. Fitzgibbon, sur les investissements
publics, donc, d'Investissement Québec dans... À un moment donné, il était tout
de même un peu de mal à l'aise pour justifier, bon, ce 8,4 millions qui
avait été donné. Et je vous dirai que pour avoir entendu le P.D.G. directement
aussi d'Investissement Québec qui mentionne : On n'a plus aucun intérêt dans ce
genre d'investissement. C'est exactement ce qu'il disait.
Alors, j'espère que ce genre de positions
va se développer et va se généraliser aussi. Je pense qu'il faut que l'État...
On ne doit plus servir... se servir des fonds publics pour encourager ce type
d'entreprises. On doit se servir, au contraire, des fonds publics, hein, qui ne
sont pas non plus infinis, pour financer la transition énergétique qui, elle,
va nécessiter des coûts aussi extrêmement importants, à la fois d'entrepreneurs
privés, mais aussi de l'État. Alors, qu'on mette l'argent là.
M. Arcand : En fait, ce
que vous dites essentiellement, je pense que l'ensemble des gens ici sont d'accord
avec ça, il n'y a pas véritablement d'enjeu. La difficulté, c'est que, si vous
me permettez l'expression, on vit toujours dans un monde, ce que j'appelle le
monde réel. Et dans le monde réel, très souvent, lorsqu'on décide de retirer
comme ça des permis, évidemment, il y a des négociations qui sont entreprises
avec les gens à qui on retire le permis, et ces négociations ont lieu. On voit
qu'à un moment donné, on en arrive à une période vraiment où l'État doit
décider un certain nombre de choses, doit décider de ne pas céder rien ou de se
retrouver en cour. Et là ça risque de coûter encore plus cher à l'État. Pendant
la période de questions, tout à l'heure, parce que le député de Jonquière avait
parlé d'un cas particulier qui n'était pas tellement loin de chez vous, qui
était le cas de l'estuaire du Saint-Laurent qui... et on parlait de la fameuse
compagnie Lone Pine Resources qui avait poursuivi... Et j'ai vu, à un moment
donné, une poursuite, là. Je ne sais pas quel est le résultat, jusqu'où on est rendu,
mais ils avaient poursuivi le gouvernement fédéral pour à peu près
119 millions, probablement le gouvernement fédéral parce qu'on était dans
des secteurs marins, là. Mais juste pour vous dire si demain matin, est-ce
que... Quand vous vous retrouvez dans une situation comme ça, est-ce que vous
croyez qu'il est toujours nécessaire d'avoir une position très inflexible dans
ce domaine-là, ou si, à un moment donné, l'intérêt qui doit prévaloir, c'est
l'intérêt du plus grand réalisme? C'est-à-dire que l'État essaie de payer le
moins possible, essaie de payer de la façon dont ils doivent fonctionner. Mais
il y a une décision, à un moment donné, de jugement à prendre par rapport à ça.
M. Saucier (Carol) : Ce
que je pense, M. Arcand, sur ça... Bien, en fait, ce que nous pensons
aussi à Solidarité Gaspésie. Bien sûr, bon, vous faites allusion à des intérêts
de négociation, le monde réel. Ce que j'aimerais, dans cette négociation-là,
c'est que l'on fasse valoir le principe non pas de l'intérêt privé, mais du bien
commun et de l'intérêt général. Que ce soit ce principe-là qui prévale
davantage, en tout cas, et à partir de ce principe-là, que le politique,
effectivement, évalue ce qu'il est possible ou bon de faire. Mais nous, notre
position, c'est de dire : Soyez attentifs à tout prix au bien commun et à...
M. Saucier (Carol) : ...intérêt
général et au fait qu'on a déjà beaucoup contribué en tant que citoyens et
citoyennes du Québec. Voilà.
M. Arcand : Non, je
comprends, je comprends. Et je donnais l'exemple ce matin, par exemple, ce
n'est pas relié à la Gaspésie, mais c'était relié à une compagnie minière qui
avait eu un permis du ministère, près du lac Barrière, c'est en Abitibi, et il
y avait eu des enjeux, et le permis avait été retiré, et il a fallu compenser,
à ce moment-là, ce n'était pas dans le pétrole, là, ce n'est pas dans le
domaine pétrolier, mais il avait fallu compenser cette entreprise là, à un
moment donné, qui avait investi et qui avait eu des coûts, etc. Et là, on s'est
retrouvé avec un problème où la communauté algonquine, à ce moment-là, ne
voulait pas de ce projet minier là et était intervenue. Alors, à un moment
donné, la question est... On peut se dire : Écoutez, on ne donnera aucune
compensation. Mais à un moment donné, il faut aussi avoir un équilibre dans ça.
M. Saucier (Carol) : Ce sera
aux politiques de voir ça dans les prochaines semaines, mais nous allons
surveiller ça de près.
• (16 heures) •
M. Arcand : D'accord. Dans
l'épisode de ce que la Gaspésie nous a appris, je comprends qu'un puits de
forage peut contaminer des sources d'eau potable, et même si la tête de pluie
se trouvait à distance réglementaire. Et donc, avant de fermer définitivement
les puits, est-ce que vous recommandez, en fait, de faire des études hydrogéologiques
qui sont conséquentes par rapport à ça? Parce que le danger, évidemment, c'est
qu'on ne règle pas le problème de façon définitive et qu'il peut y avoir des
fuites importantes. Est-ce que vous avez une opinion par rapport à ça?
M. Saucier (Carol) : Bien,
nous sommes tout à fait d'accord avec la nécessité qu'il y ait des études
hydrogéologiques conséquentes qui soient faites, tout à fait.
M. Arcand : Et vous jugez que
le gouvernement devrait le faire dans tous les cas?
M. Saucier (Carol) : Disons
que, honnêtement, je ne suis pas capable... de répondre «dans tous les cas»,
mais là où ça s'impose, oui, il faudrait que ce soit fait.
M. Arcand : D'accord. On a vu
aussi certaines entreprises, M. Saucier, certaines entreprises pétrolières, en
fait, regarder la possibilité de faire affaire avec certaines communautés
autochtones et de dire, finalement, ces communautés-là sont plutôt...
s'autodéterminent d'une certaine façon, que les lois du Québec ne s'appliquent
pas tout à fait, etc. Je sais que vous avez une communauté micmaque qui
probablement a la même approche que vous avez à ce stade-ci. Mais est-ce que
vous ne craignez... On a vu que, dans certains cas... En tout cas, je crois que
c'est Questerre qui a commencé à dire qu'ils avaient fait une entente, entre
autres, avec les Attikameks, ou quelque chose comme ça. Est-ce que c'est
quelque chose qui risque, à vos yeux, de représenter un problème à un moment
donné?
M. Saucier (Carol) : Bon,
écoutez, je crois, M. Arcand, que le cas, donc, auquel vous faites allusion,
c'est éventuellement le projet pilote de Questerre avec la communauté de
Wôlinak, qui sont, donc, près de Bécancour. Ce sont des Abénaquis, alors...
M. Arcand : Ah! C'est des
Abénaquis, O.K.
M. Saucier (Carol) : ...dont
on a entendu parler, là, il y a quelques semaines avec monsieur... notamment,
de Questerre. Alors, c'est une question qui est très complexe, hein, je dois
vous... on doit l'avouer. C'est une question qui est complexe par rapport aussi
aux droits des communautés autochtones sur leur territoire, le droit
d'exploiter de manière autonome aussi les ressources de leur territoire. Alors,
je pense qu'il faut le regarder, que ce soit par rapport... pas uniquement par
rapport à Questerre ou dans d'autres cas, la difficulté, c'est souvent... comme
d'ailleurs on a été confronté à ça dans certaines communautés en Gaspésie
aussi, où il y a des problèmes de dévitalisation, il y a des problèmes de
sous-développement économique et social, il y a un manque d'emplois, donc il y
a une vulnérabilité économique et sociale qui rend les gens très fragiles et
vraisemblablement parfois plus réceptifs à des projets dont l'intérêt
environnemental ou même l'intérêt à long terme du développement de la...
16 h (version non révisée)
M. Saucier (Carol) : ...n'est
pas assuré. Mais, à court terme, ça apparaît un peu comme, si vous voulez, une
planche de salut, une bouée de sauvetage. Alors, ce n'est pas simple de traiter
de ces questions-là. Et je pense que dans... Il faut regarder, effectivement.
Nous, on a des rapports quand même assez intéressants, ici, avec les Micmacs,
d'ailleurs, qui ne vivent pas dans une réserve, mais qui sont totalement
intégrés aussi à la communauté de Gaspé. Et je pense qu'il faut voir aussi...
il faut tenir compte de l'avis des communautés autochtones aussi, bien sûr. Là
aussi, il y a des négociations qui doivent se faire.
Le Président (M. Lemay) : ...et
monsieur le député. Nous allons maintenant céder la parole au deuxième groupe
d'opposition, Mme la députée de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, pour une durée de
2 min 45 s
Mme Lessard-Therrien : Oui,
merci beaucoup, monsieur le Président. Bien le bonjour. J'ai beaucoup apprécié,
là, vous entendre. Provenant d'une région dite éloignée, moi aussi, je trouve
qu'on a quand même des enjeux qui se ressemblent, notamment sur la question de
la diversité, de la diversification économique, ce sont des questions très,
très importantes. D'entrée de jeu, là, je tiens à vous rassurer que nous sommes
sur la même longueur d'onde sur la question du programme d'indemnisation. Moi,
je vous dirais, par chez nous, il n'y a pas beaucoup d'hydrocarbures, c'est
davantage des enjeux miniers qui nous touchent. J'aimerais peut-être mieux
approfondir ma connaissance au niveau des puits abandonnés en Gaspésie. Ça
ressemble à quoi?
M. Saucier (Carol) : Écoutez,
sur cette question-là, je pense que, là aussi, je vais faire preuve de
modestie. M. Bergeron, probablement, serait plus à même. Je n'ai pas,
disons, suivi, là, en détail la situation de l'ensemble des puits. Je sais qu'à
Bourque il y a de gros, gros, gros problèmes qui ont été mis en évidence il y a
quelques semaines aussi. On a découvert des contaminants importants dans les
eaux, donc, de ce puits. Et d'ailleurs la décontamination sera aux frais de
l'État également. C'est probablement vrai dans plusieurs autres puits. Est-ce
qu'on a aussi un suivi de ça qui est, alors, en dehors de Bourque? Je ne
pourrais pas vous dire, là. Le cas de Bourque est un cas patent pour nous, mais
je ne pourrais pas vous dire... Dans le cas de Galt, évidemment, et de
Haldiman, il n'y a pas eu, donc, de recherches plus précises parce que ce
sont... Galt était en cours, alors, effectivement, en cours, je dirais
d'activité. Il a été aussi en cour juridique. Mais comme ce sont des projets,
fort heureusement, qui vont se terminer d'ici quelques semaines, nous
l'espérons, bon, on verra bien ce qui va se passer. Mais il y a un suivi, dans
le projet de loi, qui est prévu, là, pour la fermeture des puits, là.
Mme Lessard-Therrien : J'ai
encore un peu de temps? Je reviens sur la question de la diversification
économique pour la Gaspésie. Tu sais, là, on parle beaucoup, bon, d'indemniser
les compagnies. Puis là j'ouvre vraiment une porte, là, moi, j'aurais peut-être
aimé vous entendre là-dessus, tu sais. Bien sûr, on ne veut pas nécessairement
indemniser les compagnies. Est-ce qu'il y aurait, quelque part, un endroit où
on devrait plutôt insérer cette question-là de la diversification économique?
Je ne sais pas ce serait quoi, le meilleur chemin, mais pour ajouter ça à la
réflexion, peut-être, pour le gouvernement du Québec. Non seulement il ne
devrait pas indemniser les hydrocarbures, les industries, mais devrait plutôt
aller chercher de l'argent pour doter la Gaspésie d'un fonds de diversification
économique. Est-ce que vous avez un peu réfléchi à ces questions-là?
Le Président (M. Lemay) : En
quelques mots, en quelques mots peut-être.
M. Saucier (Carol) : On
a réfléchi à ces questions-là, certainement, madame. D'ailleurs, on a publié,
il y a un peu plus d'un an, Solidarité Gaspésie, un document qui s'appelle
Piste de réflexion et propositions pour une sortie de crise postpandémie
COVID-19. Si vous allez sur le site Web de Solidarité Gaspésie, le document est
en ligne, ce document, bon, qui présente plusieurs pistes de solutions pour,
bon, sortir de cette crise économique et sociale...
Le Président (M. Lemay) : Merci,
monsieur Saucier. Donc, on a déjà écoulé le temps. Alors, nous allons passer au
député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui,
alors, bonjour, M. Saucier. Alors, j'ai d'abord un message à vous
transmettre, là. La députée de Gaspé m'a dit à peu près 10 fois, tout à
l'heure, puis vient de me texter encore de saluer monsieur Saucier. Alors, le
travail est fait, vous avez les salutations de ma collègue de Gaspé. Et puis
moi, je voudrais vous entendre d'abord concernant les projets...
M. Gaudreault : ...les
projets pilotes, oui, qui sont prévus dans les articles, je pense, c'est 42 et
suivants, là, du projet de loi n° 21. Est-ce que vous
avez une réflexion là-dessus? Et est-ce que, selon vous, les projets pilotes
sont suffisamment encadrés tels que présentés dans le projet de loi?
M. Saucier (Carol) : Écoutez,
Solidarité Gaspésie n'a pas approfondi. On n'a pas pu approfondir cette
question-là, là, de manière plus marquée, sauf que si vous regardez dans les
annexes qui sont là, il y a le mémoire, donc, du comité citoyens responsables
de Bécancour, et dans ce mémoire, il y a un ensemble de questions et de
recommandations qui s'adressent au chapitre VII, donc, pour les projets
pilotes.
Alors, je vous invite... on a mis ce
mémoire-là en relais d'une autre pour qu'effectivement, vous puissiez aussi
avoir accès aux préoccupations que les citoyens de Bécancour portent à cet
effet là. Je dirais que, sans aller dans le détail, que par rapport aux projets
pilotes, nous sommes tout à fait dans la foulée de ce que Mme Carole
Dupuis disait cet avant midi, hein, de la part du Front commun en transition
énergétique. Nous sommes tout à fait en phase avec ça.
• (16 h 10) •
M. Gaudreault : O.K.
Donc, un plus grand encadrement dans le projet de loi que ce qui est présenté à
l'heure actuelle. On va travailler là-dessus. J'aimerais vous entendre aussi...
vous dites dans votre mémoire... un des points importants, là, c'est que le
manque de transparence du ministère de l'Énergie et Ressources naturelles pour
estimer le montant qui pourrait être versé aux compagnies pour les fameuses
indemnités, là, ou les indemnisations. Pouvez-vous nous en parler un petit peu
plus, là, de ce que vous entendez par le manque de transparence? Quelle est
votre expérience là-dessus?
M. Saucier (Carol) : Bien,
c'est que quand il y a la... pardon, quand il y a eu ce dépôt du projet de loi
qui, encore une fois, un geste très important, je crois, bon, on apprend dans
une conférence de presse, aussi, qui suit le dépôt à l'Assemblée nationale par
monsieur le ministre Julien qu'effectivement, il y a des montants provisionnés,
notamment... de 67 millions pour les frais d'exploitation, mais on ne sait
pas sur quelle base ces montants-là... alors, bon, le ministre Julien nous en a
parlé tout à l'heure, mais c'est un débat qui est très complexe. Le commun des
mortels ne s'y retrouve pas. Alors, ce serait important qu'il y ait de
l'information, qu'il y ait... qu'on maximise l'information pour permettre aux
gens de comprendre les enjeux qui sont derrière ça, et c'est ça aussi qu'on
veut mettre de l'avant comme groupe citoyen.
Le Président (M. Lemay) :
Merci, M. Saucier. Et ceci complète notre période d'échange que nous
avions avec vous. Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux et je
vais suspendre quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre
place virtuellement. Merci encore.
M. Saucier (Carol) : Merci
beaucoup.
(Suspension de la séance à 16 h 11)
(Reprise à 16 h 17)
Le Président (M. Lemay) :
Alors, la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des
ressources naturelles reprend ses travaux. Et je souhaite maintenant la
bienvenue aux représentants du Centre québécois du droit de l'environnement. Et
je vous rappelle que vous disposez d'une durée de 10 minutes pour faire
votre exposé. Et par la suite il y aura un échange avec les membres de la
commission. Mais, tout d'abord, je vous invite à vous présenter ainsi que la
personne qui vous accompagne, puis vous pourrez débuter votre exposé. La parole
est à vous.
Mme Doré (Anne-Sophie) : Oui.
Merci, monsieur le Président.
D'abord, je me présente, Anne-Sophie Doré,
je suis avocate au Centre québécois du droit de l'environnement. Et je suis
accompagnée par Hugo Tremblay, qui est avocat, professeur à la Faculté de droit
de l'Université de Montréal et membre du comité juridique du CQDE.
Donc, monsieur le Ministre, Mmes et MM.
les députés, merci de nous recevoir. Le Centre québécois du droit de
l'environnement est toujours heureux de participer à vos travaux
parlementaires. J'ai presque envie de dire, aujourd'hui encore plus,
considérant l'objet l'objet du projet de loi 21.
Donc, d'entrée de jeu, le Centre québécois
du droit de l'environnement salue la volonté du législateur de mettre fin aux
activités de...
Mme Doré (Anne-Sophie) : ...et
d'exploitation d'hydrocarbures sur le territoire québécois. Ce projet de loi
s'inscrit dans la continuité avec les engagements et les actions du Québec dans
les dernières années, tant au plan de la lutte contre les changements
climatiques, que de la transition énergétique. La filière des hydrocarbures a
connu, comme vous le savez, une évolution notable dans les dernières années,
mobilisation citoyenne et absence totale d'acceptabilité sociale pour les gaz
de schiste, abandon des travaux à des projets à Anticosti, adoption de la Loi
sur les hydrocarbures qui resserre l'encadrement juridique de la filière,
adoption de la politique énergétique 2030 qui pose de nombreuses conditions à
l'exploitation d'hydrocarbures, en plus de miser résolument sur la transition
énergétique. Cette série d'événements pave le chemin, de façon prévisible et
cohérente, à l'annonce de la fin des hydrocarbures au Québec.
Le projet de loi 21 s'inscrit dans la
mission du ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles, qui doit
notamment promouvoir la transition énergétique et mettre en oeuvre des
programmes et des mesures pour faciliter cette transition. À l'heure où
l'Agence internationale de l'énergie recommande aux États de n'autoriser aucun
nouveau projet gazier ou pétrolier, de mettre fin aux subventions à ces
industries afin d'assurer la fin de la carboneutralité d'ici 2050. La
transition énergétique impose tout naturellement la fin des hydrocarbures au
Québec. Comme le mentionne le rapport de l'Agence internationale de l'énergie,
la transition énergétique s'inscrit, en plus, dans un contexte plus large de
lutte contre la crise climatique. La science climatique établit également, en
effet, la nécessité de fermer la porte à tout nouveau projet pétrolier et
gazier.
• (18 h 20) •
L'engagement d'atteindre la
carboneutralité, d'ici 2050, par différentes étapes pour respecter l'accord de
Paris, visant à limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius, s'est
également transposé au Québec, alors que le plan pour une économie verte fixe
cet objectif pour la province. Le Québec doit cependant rehausser la barre de
ses actions, alors qu'il est en voie d'échouer dans l'atteinte de la cible de
réduction des émissions de GES fixée pour 2020, au regard des dernières données
disponibles. Les actions entreprises doivent aller au-delà de celles qui
avaient été proposées par le plan d'action 2013-2020, donc notamment de
réaliser la transition énergétique. C'est d'ailleurs l'une des recommandations
du Comité consultatif sur la lutte contre les changements climatiques dans son
premier avis public, qui a été rendu public à l'automne dernier.
Dans ce contexte, le CQDE salue des gestes
concrets et prévisibles, comme le dépôt du projet de loi 21, mettent en œuvre
l'objectif de mettre fin à la recherche et l'exploitation des hydrocarbures au
Québec. Bien entendu, la science du climat exige que la quasi-totalité des
autres États devront suivre le pas à court terme. Une modalité de sortie
québécoise des hydrocarbures serviront donc, sans doute, de précédent pour ces
autres juridictions, donc leur justesse est d'autant plus importante. Le
leadership du Québec emporte ainsi un certain fardeau d'exemplarité qui doit
être gardé à l'esprit tout au long des travaux législatifs et réglementaires
liés au projet de loi 21.
En ce qui concerne les indemnisations, en
juin dernier, le CQDE a publié un rapport sur la fin des hydrocarbures qui
conclut que l'Assemblée nationale a tous les pouvoirs pour mettre fin à la
filiale des hydrocarbures, et ce, même sans les indemnisations, à condition que
cela soit explicité dans une loi. Le CQDE constate que le choix a plutôt était
fait de prévoir des indemnisations. À l'heure où les crises climatiques et de
la biodiversité s'accentuent, que les effets s'aggravent, les gouvernements de
tous les États doivent opérer rapidement la transition énergétique et
écologique. Et le CQDE estime que, dans ce contexte-là, ne pas indemniser une
industrie qui participe à ces crises environnementales est illégitime. Nous
saluons cependant l'intention annoncée de limiter au maximum le montant des
indemnisations qui pourrait être versé à l'industrie. Plusieurs raisons
militent en faveur de cette limitation, notamment le fait que l'industrie a
bénéficié d'un soutien généreux de l'État, durant de nombreuses années, sans
qu'elle ne génère de retombées économiques conséquentes qui prend plutôt des
risques environnementaux, y compris des risques de contamination des nappes
phréatiques.
Considérant le passif environnemental
légué par cette industrie, rendre l'indemnisation conditionnelle à la fermeture
définitive des puits et à la remise en état des sites est également un élément
essentiel du projet de loi 21. De manière plus précise, sur la mécanique du
programme d'indemnisation, le CQDE estime que la période de couverture
d'indemnisation est injustifiée. L'alinéa 2 de l'article 34 de la loi, mettant
fin aux hydrocarbures, qu'on a appelé ainsi, la loi qui est instituée par le
chapitre 1, prévoit que le programme indemnisera les titulaires de licence pour
les dépenses qui sont faites entre le 19 octobre 2015 et le 19 octobre 2021, ce
qui nous apparaît trop long. Le CQDE propose de modifier la date de départ de
l'indemnisation et, pour ce faire, plusieurs solutions sont ouvertes au
législateur. L'une de celles-ci, ce serait d'adopter le délai de prescription
de droit commun de l'article 2925 du Code civil du Québec, qui prévoit une
prescription de trois ans. Le législateur pourrait également choisir, comme
point de départ de la période d'indemnisation, la date à laquelle est entrée en
vigueur la Loi sur les hydrocarbures, puisque...
Mme Doré (Anne-Sophie) : ...la
loi en vertu de laquelle les licences ont été délivrées ou avec vertu de
laquelle elles ont été réputées avoir été délivrées. Si le législateur choisit
de rembourser les sommes dépensées durant une période de six ans, le CQDE
estime que la date de référence pour calculer ce six ans devra être modifiée.
Le projet de loi fixe la date au 19 octobre 2021, la date à laquelle le
premier ministre a annoncé l'intention gouvernementale de mettre fin aux
hydrocarbures. Or, cette annonce ne présentait qu'une intention. D'un point de
vue juridique, il serait plus cohérent de choisir la date d'entrée en vigueur
de la loi mettant fin aux hydrocarbures comme point de départ pour déterminer
la couverture du programme d'indemnisation.
Je le mentionne également, il est possible
de prévoir qu'une date butoir après laquelle aucune dépense n'est admissible à
une indemnisation sans lier cette date à un point de départ. Ainsi, le CQDE
estime que dans tous les cas, les dépenses faites après le 18 octobre 2021
ne devraient pas être admissibles au programme d'indemnisation.
En ce qui concerne les projets pilotes, la
loi mettant fin aux hydrocarbures envisage en effet l'autorisation de certains
projets pilotes. Pour le Centre québécois du droit de l'environnement, il est
essentiel que ces projets pilotes ne puissent pas, en aucun cas, servir de
manière détournée à poursuivre des activités de recherche et d'exploitation des
hydrocarbures. Selon nous, il est clair que l'article 42 de la loi mettant
fin aux carburants a préséance sur l'article 43. Ainsi, aucun projet
pétrolier ou gazier ne pourra être autorisé. Cependant,là, à la lecture de
l'article 43 de la loi mettant fin aux hydrocarbures, ça nous semble moins
limpide, là, le texte de cet article-là... ci. Dans sa présentation immédiate
du projet de loi 21, le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles
a mentionné que les projets pilotes serviraient à acquérir des connaissances
géoscientifiques sur les puits qui sont déjà existants. Or, le texte de
l'article n'est pas suffisamment clair à notre avis en ce sens.
Au niveau des risques de faillite, donc le
Centre québécois du droit de l'environnement invite le législateur ainsi que le
gouvernement a porté une attention particulière aux risques que les titulaires
de licence se prévalent des régimes régissant la faillite et l'insolvabilité
avant de réaliser les travaux de fermeture définitive des puits et de restaurer
les sites, obligations qu'ils auront en vertu de la loi. Le CQDE estime que
même en cas de faillite, les titulaires de licence, et leur syndic de faillite,
et autres ayants droit devraient être tenus d'assumer les coûts de ces
obligations en priorité sur les autres créances. L'État ne devrait pas avoir à
assumer entièrement des coûts de fermeture et de restauration en cas de
faillite d'un titulaire de licence. La décision... pardon, de la Cour suprême
du Canada peut d'ailleurs apporter des enseignements à cet effet.
En ce qui concerne l'article 69 de la
loi mettant fin aux hydrocarbures, le Centre québécois du droit de
l'environnement est rassuré par le fait que cet article aura pour effet de
mettre fin aux divers litiges auxquels fait face le Québec de la part de
l'industrie des hydrocarbures. Cela étant, le CQDE est d'avis que cet article
pourrait bénéficier d'une formulation plus explicite afin d'exprimer plus
clairement... le plus clairement possible aux poursuivants actuels et futurs
que leurs recours sont voués à l'échec. Soyons clairs, à notre avis, le texte
actuel de l'article 69 a déjà pour effet d'éteindre les poursuites
actuelles et de rendre impossibles les poursuites futures. Mais notre
suggestion vise à s'assurer que le message soit le plus clair possible de
manière à prévenir tout débat judiciaire.
En terminant, là, la dernière section du
mémoire du CQDE présente plusieurs propositions d'amendements à différents
articles de la loi mettant fin aux hydrocarbures, notamment afin d'ajouter à
l'objet de la loi, d'éviter certains problèmes d'interprétation et d'assurer
l'encadrement des projets pilotes sur... par la Loi sur la qualité de
l'environnement et ses règlements, donc en fonction de l'impact possible de ces
projets pilotes là sur l'environnement. Donc, en conclusion, on rappelle qu'on
est tout à fait en accord avec l'objet de ce projet de loi là qui est de
finalement mettre fin à l'industrie, l'exploration, la recherche
d'hydrocarbures sur le territoire du Québec, et il nous fera plaisir de
répondre à vos questions.
Le Président (M. Lemay) : Alors,
merci, madame Doré, pour cet exposé. Et nous allons maintenant débuter la
période d'échange avec les membres de la commission. Et je cède maintenant la
parole au ministre pour une période d'environ 16 minutes 30.
M. Julien : Oui, merci. Merci
infiniment pour la production du mémoire, Me Doré et M. Tremblay, puis pour
votre présence également ici aujourd'hui, puisque, vous savez, vos oreilles
doivent vous siler régulièrement, parce qu'on parle souvent en fin de compte de
vos positions pour valider certains attributs, surtout sur l'indemnisation.
Moi, je ne suis pas avocat, je suis comptable, mais j'entends bien chez vous,
Me Doré quand même, des nuances que je voulais juste valider. Parce que
j'attends toujours : Bien oui, mais vous...
M. Julien : ...le Centre
québécois des droits de l'environnement a dit qu'on n'est pas obligé
d'indemniser. Mais, en réalité, ça me semble être beaucoup plus nuancé que ça,
hein? Et puis... alors, c'est là que je veux valider avec vous. Vous
dites : Légalement, si je conçois bien, là, cette loi-là fait en sorte que
le Québec ne serait pas obligé d'amener d'indemnisation. Toutefois, selon
certains droits... le droit international, certains pourraient prétendre qu'ils
doivent être indemnisés. Puis on a des écoles avec l'ALÉNA, justement, là, qui
se sont avérées. Puis là, vous dites : Donc, il est légitime de penser à
une indemnisation. Alors, j'entends ces termes-là. Pour moi, c'est beaucoup
plus nuancé que quelqu'un qui dit : Mais, écoutez, là, le Centre québécois
des droits de l'environnement nous disent que l'indemnisation, c'est... non.
Alors, est-ce que je comprends bien votre position? Est-ce que c'est la
première version ou la deuxième version qui est la bonne?
Mme Doré (Anne-Sophie) : Merci
pour votre question. En fait, là, dès le départ, là, nous, dans notre rapport
qu'on a publié en juin dernier, on a mentionné, là, que c'est légitime de ne
pas indemniser cette industrie-là, que l'Assemblée nationale peut le faire.
Bien entendu, on a également aussi mentionné, je vous dirais, un bémol par rapport
aux accords internationaux. Cependant, il est évident que le fait d'accorder
une indemnisation ne va pas annuler entièrement le risque de poursuites autant
au niveau interne qu'au niveau du droit international. Il est possible que ces
indemnisations diminuent le risque, mais on ne peut pas non plus faire, disons,
l'équation si simple de dire : S'il y a indemnisation, il n'y a aucun
risque de poursuites. Celui-ci est complètement oublié.
• (16 h 30) •
J'ajouterais également que cette
possibilité là aussi qu'il y ait des poursuites à l'international ne doit pas
non plus être vue comme un frein à interdire à l'industrie, là, au Québec, et
c'est comme une forme de tentative d'intimidation, là, je vais le dire ainsi,
là, de mentionner, dès après présent, qu'il y aura des poursuites, peu importe
ce qui sera adopté, puis cette tentative ne devrait pas impacter la volonté du
Québec d'agir de manière responsable et dans l'intérêt général en mettant fin à
la recherche et l'exploitation des hydrocarbures. Puis je laisserais Hugo aussi
compléter ma réponse.
M. Tremblay (Hugo) : Oui,
mais en fait, Me Doré, je n'ai pas grand-hose à ajouter. Je pense que
c'est une question qui est très importante, et vous avez tout à fait raison de
le souligner. M. le ministre. Et j'ai l'impression, quant au droit
international, que les choses ont beaucoup évolué depuis l'ALÉNA. Les nouveaux
patrons, si l'on veut, d'accords internationaux en matière de protection des
investissements étrangers sont généralement beaucoup plus balancés, disons, en
faveur de la protection de l'action publique et l'action des gouvernements en
faveur de la protection de, justement, de l'intérêt public et de
l'environnement.
Donc, la situation évolue. On peut
toujours se poser la question : Est ce que ce sont... c'est une évolution
qui pourrait se voir dans la façon dont les panels d'arbitrage internationaux
vont trancher ce genre de dispute à l'avenir? La question est ouverte. Elle
n'est certainement pas résolue. Comme vous le mentionniez, M. le ministre, on
attend encore le résultat de plaintes qui ont été portées en vertu de l'ALÉNA.
Mais ce sont des plaintes qui, en tout cas jusqu'à très bientôt, là, vont
peut-être devoir se plier à de nouvelles façons de régler ces disputes-là.
M. Julien : Encore là,
pour faire du pouce un peu sur ce que vous mentionnez là, parce que j'essaie de
capter tous les éléments, là, qui sont plus nuancés. Donc, j'entendais
Me Doré qui disait : Oui, mais indemniser, ça ne nous prémunit pas du
risque. Je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, mais c'est ce que
je comprends. Moi, dans ma tête, je dis : Oui, mais pas indemnise, ça
augmente le risque. Moi, j'ai des aviseurs juridiques ici, là, au procureur, à
l'intérieur de mon ministère qui ont cette position là. Puis nous, ce qu'on
essaie de préconiser, à l'intérieur du projet de loi, c'est est-ce qu'on a une
approche pragmatique qui rembourse seulement les frais encourus qui ne sont pas
sur des frais qui seraient tendancieux à des perspectives, là, je le répète,
des récits homériques des milliards de dollars. Non, non, là, écoutez, là, on
va vous rembourser les dépenses. J'ai entendu Me Doré, là, déjà qui, dans
son cheminement, une fois qu'elle a dit que ce n'était pas obligatoire, a quand
même évalué, là, les délais de prescription selon différents motifs. Donc, si
je ramène ça sur...
16 h 30 (version non révisée)
M. Julien : ...le terrain du
projet de loi. Une fois qu'on a dit ça, est-ce que le fait de prévoir des
indemnités basées sur des éléments factuels démontrables par, en fin de compte,
là... le délai de six ans, prescription fiscale, puis c'est lié aux crédits, on
le paie au net, est ce que c'est une méthode, justement, puisqu'elle est
vérifiable, responsable et, je dirais, à tout le moins, équitable qui serait une
méthode à adopter, le cas échéant, si on adhérait au fait qu'on doit
indemniser?
Mme Doré (Anne-Sophie) : Je
l'ai mentionné dans ma présentation, en fait, nous, ce qu'on constate, en
effet, c'est que le choix est fait de faire une indemnisation. Puis, dans ce
contexte là, nous, on salue la volonté que ce soit une indemnisation qui soit
la plus minime possible et prévisible, avec des balises qui sont bien intégrées
dans une loi, et que ce soit un programme d'indemnisation, là, qui vienne par
la suite. Mais que les balises soient bien intégrées dans la loi et qu'il soit
limité au minimum.
M. Julien : Parfait. Parce
que j'entendais mon collègue, dans une autre discussion, mon collègue de
l'opposition, de Mont-Royal mentionner qu'à titre d'exemple, dans le passé, il
avait eu à négocier, là, c'est une négociation, un «give and take», puis
éventuellement, on a eu une espèce de deal, puis là, le deal, c'est peu
Anticosti, là, tu sais, on ne sait pas trop qu'est-ce qu'il y a dedans. Mais il
existe, et il y a une poignée de main qui se donne, pas pires amis. Je n'aime
pas beaucoup ça, moi, personnellement. J'aime mieux, en fin de compte, de venir
dire: Bien, écoutez, le programme d'indemnisation, ça va être noir sur blanc,
là, et si la dépense, là, ce n'est pas celle qui est nommée et qui est
vérifiable par un vérificateur externe, bien, fin des discussions, là. Donc,
j'aime bien ça.
Ça peut paraître un peu encadrant et
rigoureux, mais j'ai l'impression que c'est le volet équitable, justement, de
la démarche d'indemnisation qui va être à l'intérieur du programme
d'indemnisation. Est-ce que, encore là, si on prend pour acquis qu'on
indemnise, est-ce que c'est une méthode que vous privilégiez ou plutôt une
méthode où c'est plus du jugement de négociation, un peu, où on n'est pas
capable de toucher les motifs qui ont validé le calcul?
Mme Doré (Anne-Sophie) : Bien,
il est évident que, pour nous, la prévisibilité puis un minimum de transparence
dans le processus, ce sont des points positifs. La négociation derrière des
portes closes n'est pas une solution, évidemment, que nous privilégions, par
rapport à ce qui est proposé. Donc, en effet, la prévisibilité et le minimum de
transparence, ce sont des éléments qui sont bienvenus. Je ne sais pas si tu
veux ajouter.
M. Tremblay (Hugo) : Oui,
tout à fait. Bien, je suis d'accord avec Me Doré puis j'ajouterais, en fait,
que l'application d'un barème clair, comme vous dites, M. le ministre, est
certainement mieux venue, là, que le serrage de mains derrière des portes
closes. Donc, ça, c'est certainement un bon point.
Quant à nous, il y a des questions qu'on
se pose, quand même, à l'égard du projet de loi et en particulier à l'égard, de
mémoire, de l'article 36, qui, me semble-t-il, pourrait être d'une portée incertaine,
en tout cas, dans ma lecture, là, très sommaire ou, en tout cas, ma
compréhension très sommaire, là, du projet de loi. J'ai de la difficulté à
saisir exactement à quoi ça pourrait s'appliquer. Dans le sens où les deux
articles précédents, soit les articles 34 et 55, semblent viser des chefs
d'indemnisation qui sont assez prévisibles, qui pourraient être développés
évidemment par le programme d'indemnisation. Par contre, la question qu'on se
pose, c'est à quoi ça ferait référence, exactement, l'article 36. Et, dans la
mesure du possible, encore une fois, comme vous le dites, M. le ministre,
d'appliquer des barèmes qui soient clairs, d'emblée, que des lignes directrices
soient imposées par la loi est certainement mieux venu, encore une fois, que
quelque chose qui soit plutôt de nature discrétionnaire.
M. Julien : Parfait. Puis
j'entends bien ce que vous dites. Honnêtement, c'est certain que la réflexion
que vous portez, actuellement, là, me porte moi également, à réfléchir. On aura
l'occasion, avec les collègues, d'en discuter à l'article par article. Pour
moi, bien que ce soit un programme d'indemnisation qui n'est pas inscrit
totalement à l'intérieur de la loi, j'ai clairement l'intention de l'amener
ici, l'intention, là, claire, de ce programme-là pour qu'a posteriori, bien,
quelqu'un va pouvoir dire que c'était l'intention du législateur. Je ne sais
pas comment ça va fonctionner, mais les avocats vont me dire ça. Mais pour
dire, là, il n'y aura pas de cachet te, a priori de l'adoption du projet de
loi, on sera conséquents avec ce qu'on aura...
M. Julien : ...déterminé
ensemble comme programme d'indemnisation, le cas échéant ou, finalement, on
convient tous qu'il y aura indemnisation, et ça, on aura d'autres discussions
là dessus.
Une dernière petite question avant de
passer la parole à mes collègues. Donc, l'article 69, quand même, là, vous le
concevez comme moi, qu'il vient mettre un chapeau sur les recours.
L'interprétation que vous en faites est la même que moi?
Mme Doré (Anne-Sophie) : Oui,
exactement. Donc, dans le fond, nous, c'est vraiment... L'interprétation qu'on
en fait, là, à la lecture de l'article, c'est que ça met fin à tous les recours
éventuels et les recours actuels, là, qui sont... contestent la validité,
notamment, des règlements qui ont été adoptés en vertu de la Loi sur les
hydrocarbures.
M. Julien : Bien, moi aussi,
c'est ce ça, mes intentions. Ça fait qu'on ma dit, il fallait que je le
mentionne clairement, c'est ce que je fais aujourd'hui. Merci. Je passe la
parole à mes collègues.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Donc, monsieur le député de Lac-Saint-Jean, vous rappelant qu'il reste
environ 5 minutes à votre formation politique.
• (16 h 40) •
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Merci,
monsieur le Président. Alors, bonjour à vous deux. On a parlé beaucoup des
indemnisations, bien entendu, puis j'ai vu un peu dans votre mémoire aussi que
c'est lié aussi, en fait, avec toute la question de la réhabilitation des
puits, puis vous mentionnez aussi la remise en état, que, selon vous, que ça
doit demeurer une condition préalable nécessaire aussi pour les versements des
indemnisations. Ça fait que vous savez que, dans le projet de loi, bien, on
prévoit entre autres la fermeture, on prévoit aussi un encadrement
environnemental strict. Bien entendu, c'est le ministère de l'Énergie et le
ministère de l'Environnement qui devront notamment approuver les travaux de
fermeture de ces sites avant même de verser des indemnités. Et, selon vous,
est-ce que ces protections sont suffisantes à vos yeux?
Mme Doré (Anne-Sophie) : Mais,
a priori, il y a quand même certains questionnements, là, qui subsistent sur
les risques futurs que ces puits-là peuvent comporter. C'est évident que c'est
quand même une préoccupation. Et il faut vraiment s'assurer qu'à ce stade-ci ce
sont les meilleures pratiques qui sont employées pour assurer la fermeture et
la restauration des sites parce que, justement, ça peut quand même créer aussi
un passif environnemental dans bien des années, au-delà d'une période qui sera
couverte par le projet de loi 21, donc s'assurer vraiment qu'il y a beaucoup de
rigueur et de suivi, un suivi continu. Donc, au-delà de ce qui est présenté
dans le projet de loi, il y a beaucoup d'éléments qui relèvent davantage de la
mise en œuvre de celui-ci. Donc, ça serait extrêmement important d'avoir une
mise en œuvre rigoureuse également pour assurer qu'il y ait le moins d'impact
possible sur l'environnement et sur les communautés, là, qui sont à proximité
de ces puits qui seront l'objet de travaux de fermeture et de restauration.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Merci.
Et je vais laisser d'autres collègues.
Le Président (M. Lemay) : Monsieur
le député de Bourget, pour environ 3 minutes.
M. Campeau : Merci. Vous avez
parlé, au début, de la présentation du leadership du Québec là-dedans. Je pense
que c'est quand même évident, on est dans les premiers. Ce qui veut dire qu'il
faut innover à ce moment-là et en même temps, de préférence, ne pas se tromper
parce qu'il y en a qui nous regarde. Vous avez parlé de six ans à partir du
15 octobre 2015, le six ans à partir de l'entrée en vigueur de la loi ou
d'une prescription de droit commun de trois ans. C'est quoi, une prescription
de droit commun? Pourquoi ça s'appliquerait? Et pourquoi vous avez parlé de ça?
J'aurais aimé ça comprendre plus ce que ça veut dire?
Mme Doré (Anne-Sophie) : Bien,
en fait, par prescription de droit commun, c'est simplement, c'est que c'est la
prescription qui, d'emblée, s'applique automatiquement à tout recours
personnel... c'est ce qui est prévu par le droit civil québécois, donc par le
Code civil. Donc, de manière générale, c'est, je dirais, la prescription la
plus courante, c'est une prescription de trois ans. Donc, c'est pour cette
raison-là que nous, on le mentionne parmi les possibilités qui s'offrent au
législateur, là, pour fixer la période de couverture, là, de l'indemnisation.
Mais on fait quand même une série d'autres recommandations ou d'autres
propositions, disons-le ainsi, pour fixer la période d'indemnisation qui nous
semblait, nous, peut être, un peu plus cohérente avec l'objet de la loi, là,
au-delà d'aller de la période de prescription, là, de conservation des données
fiscales.
M. Campeau : Et cette
prescription-là, ça s'est déjà appliqué dans un domaine environnemental ou un
domaine semblable?
Mme Doré (Anne-Sophie) : Bien,
de manière générale, tu sais, on peut prendre, par exemple, juste, simplement,
la responsabilité pour une faute environnementale. Par exemple, s'il y a une
atteinte à l'environnement, ce sera quand même une prescription du droit commun
qui pourra s'appliquer. Hugo, est-ce que tu as un élément à ajouter sur la
prescription?
Le Président (M. Lemay) : Peut-être,
M. le ministre...
Une voix : ...
Le Président (M. Lemay) : Mais
attendez. Je crois que, M. le ministre, il reste une minute. Allez-y
M. Julien : Bien, juste pour
faire du pouce sur la question de mon collègue, parce qu'on a quand même...
M. Julien :
...actuellement, suite au règlement et à la loi, puis le règlement adopté en
2018. Donc, il y a des gens qui déjà, là, sont dans un cours... un cadre légal,
quatre ans en arrière, trois ans et demi, quatre ans. Puis là, si je m'en vais
dans les trois ans, bien, ils sont déjà dans un schème d'appels de droit. Donc,
pour vous, ça ferait sens, le trois ans, considérant ce qu'il y a actuellement
en cour puis les litiges, oui?
Mme Doré (Anne-Sophie) :
Bien, c'est une des options qu'on présente, mais c'est sûr qu'il y en a
d'autres aussi qu'on rattache davantage à la Loi sur les hydrocarbures,
notamment l'entrée en vigueur de la Loi sur les hydrocarbures, qui, même... ça
nous semble plus cohérente, en fait, avec le cadre, justement, dans lequel
s'inscrit le projet de loi que de se baser sur la prescription, là, la durée
durant laquelle il faut conserver les données fiscales.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup. C'est ce qui complète la période d'échange avec les membres du gouvernement.
Nous allons passer maintenant à l'opposition officielle, monsieur le député de
Mont-Royal-Outremont, pour environ 11 minutes.
M. Arcand : Merci,
monsieur le Président. Bonjour, Me Doré. Bonjour, Me Tremblay. Tout à l'heure,
je discutais avec mon collègue de Jonquière, qui n'a pas beaucoup de temps,
alors on essaie de s'entraider dans une certaine mesure. Il y a quand même
quelques poursuites qui sont présentes. Tout à l'heure, on parlait de la
fameuse Lone Pine Resources, ou quelque chose comme ça. Est-ce que vous avez
des informations? Est-ce que ces gens-là ont une cause? Est-ce que la cause est
considérée farfelue? Parce que j'ai vu, à un moment donné, des poursuites de
cent quelques millions de dollars, j'ai vu... bon, il y a Questerre, etc.
Est-ce qu'à votre avis il y a quelqu'un quelque part qui a une cause là-dedans
ou ce sont des procédures un peu farfelues?
Mme Doré (Anne-Sophie) : Je
vais quand même faire attention dans la formulation de mes commentaires parce
qu'il s'agit...
M. Arcand : Correct,
non. Mais moi, je pose la question, puis vous répondez comme...
Mme Doré (Anne-Sophie) :
Bien, il s'agit quand même de causes qui sont pendantes devant les tribunaux
et, en fait, des causes auxquelles a participé le Centre québécois du droit de
l'environnement, là, à titre d'intervenant.
Mais il y a un élément que j'aimerais
quand même préciser, là, notamment par rapport à Lone Pine, on parle quand même
d'un avis d'intention qui a été fait en 2012, là, il y a dix ans. C'est toujours
en délibéré. C'est un contexte qui est différent également. Et c'est des bases
qui sont différentes, là, pour instituer une poursuite. Donc, oui, on peut
regarder qu'est-ce qui s'est fait avec Lone Pine, mais il faut quand même se
replacer dans le contexte actuel pour envisager d'éventuelles poursuites en
fonction des accords internationaux.
M. Arcand : ...ça,
madame qu'ils poursuivent le gouvernement fédéral, parce que j'ai vu qu'ils
poursuivaient le gouvernement fédéral, là. C'était ça, là.
Mme Doré (Anne-Sophie) :
Exact. Puis en fait je laisserais peut-être Hugo poursuivre sur... Il est quand
même bien au fait de Lone Pine. Est-ce que tu voulais ajouter un élément sur
cette poursuite?
M. Tremblay (Hugo) :
Non. Bien, d'abord, je veux... je dois mentionner que moi-même, j'ai agi un peu
dans Lone Pine, là, donc je vais limiter mes commentaires. Je signale
néanmoins, là, que la réclamation Lone Pine a été réduite de moitié depuis le
début des procédures. Donc, ça, c'est premièrement.
Ensuite, quelles sont les chances de
gagner? Ça, c'est vraiment encore dans l'air, puis je ne me permettrais pas de
me prononcer là-dessus, compte tenu que je ne suis pas un expert en droit
économique international.
Par contre, les bases des recours qui sont
pris en droit interne, là, si l'on veut, en droit canadien, québécois, par, par
exemple, Questerre, par rapport à Gaspé Énergie, etc., ces bases-là sont très
différentes. On peut distinguer deux fondements. D'abord, un fondement en
droit administratif, c'est-à-dire l'action administrative, le contrôle
administratif de l'État, la façon de donner des licences, d'annuler des
licences n'a pas été faite correctement, illégalement, si l'on veut. Ça, c'est
le premier fondement. Puis le deuxième fondement, ce sont des recours en
dommages, c'est-à-dire que c'est très souvent lié à des fondements sur la base
d'expropriation des droits réels miniers, d'exploitation, d'exploration des
hydrocarbures. Donc, c'est deux fondements à distinguer.
Et non seulement les délais de
prescription pour ces affaires-là, ces deux fondements-là sont différents, mais
aussi les chances de gagner sont toutes très différents, non seulement en
fonction de la position des entreprises de façon très spécifique elles-mêmes,
c'est quoi, les bases de droits qu'elles ont, d'une part, mais aussi les
arguments qu'elles font valoir, donc, c'est malheureusement trop difficile à
répondre, en tout cas, de façon générique, à mon avis.
M. Arcand : D'accord. Ma
question aussi, c'est que le ministre a mis quand même...
M. Arcand : ...dans son projet
de loi, là, un montant d'une centaine de millions pour les compensations,
compte tenu de ce que vous savez, est-ce que ça vous apparaît réaliste?
Mme Doré (Anne-Sophie) : Mais
en fait, sauf erreur, le projet de loi ne mentionne quand même aucun montant
d'indemnisation, là, c'est plutôt, là, dans les communications publiques.
M. Arcand : Non, non, mais il
y a un budget, là, quand même.
Mme Doré (Anne-Sophie) : Oui,
il y a un budget qui est dans la tête du ministre, mais qui ne se reflète pas
dans le projet de loi. Moi, à titre d'avocate, c'est difficile pour moi de me
positionner sur est-ce que c'est suffisant, parce que, notamment, j'ai peu de
connaissance sur les montants qui sont nécessaires, là, pour assurer la
restauration complète des sites. Je n'ai pas l'expertise nécessaire pour me
positionner sur la suffisance de cette portion-là, mais je peux simplement
mentionner que ce n'est pas un montant qui est fixé dans le projet de loi à ce
stade-ci, là, il n'y a pas notamment de plafond d'indemnisation qui est fixé.
• (16 h 50) •
M. Arcand : Très bien. Vous
avez parlé entre autres d'un précédent, là, qui est celui de la rivière
Richelieu. Vous avez dit : Le législateur peut exproprier sans indemnisation en
autant qu'il précise son intention. C'est pour ça que vous suggérez en fait
cette demande-là que vous avez faite à ce niveau-là. Ma question, c'est
pareille forme d'expropriation, est-ce qu'elle a déjà eu lieu au Québec lorsqu'on
se retrouvait avec un détenteur des droits qui a dû acquitter des dépenses
directes ou indirectes pour obtenir ses permis? Est-ce qu'il y a déjà eu un cas
comme ça où il y a eu zéro compensation? À votre connaissance.
Mme Doré (Anne-Sophie) : Oui,
d'abord, on ne s'est pas positionné dans un rapport à l'effet qu'il s'agisse
d'une expropriation. En fait, nous, on estime davantage, là, qu'il n'est pas
nécessaire d'entrer dans le régime de l'expropriation dans ces cas-ci. Puis
pour un précédent, mais il y a quand même eu la fin... l'interdiction, là, de
toute activité pétrolière et gazière dans le fleuve Saint-Laurent, qui a mis
une forme de moratoire sur ces activités puisqu'il n'y a pas eu de
compensation, d'indemnisation dans cette première loi-là qui a été adoptée par
l'Assemblée nationale. Donc, il s'agit quand même d'un exemple assez probant,
là, à cet effet là. Est-ce Hugo, tu avais quelque chose à ajouter là dessus?
M. Tremblay (Hugo) : Non.
Bien, enfin, peut être très brièvement, là, aux alentours de 2009 je pense que
la Loi sur les ressources en eau, qui a un nom très, très long, là, dont je ne
me rappelle pas par cœur, là, mais a, disons, a stérilisé toute potentielle
réclamation de cette nature-là parce que le statut juridique des eaux souterraines
était incertain. Il y a plusieurs arguments à l'effet que les eaux souterraines
avant 2009 étaient assujetties à la propriété de ceux qui étaient justement les
propriétaires du sol, du terrain. Donc, pour parer à toute éventualité de
réclamation de la sorte, en fait, le législateur québécois a décidé de mettre
en place une disposition similaire à celle qu'on trouve actuellement dans le
projet de loi. Donc, ça pourrait être un précédent, comme vous le dites,
monsieur le député, il y a aussi la rivière Richelieu, là, la Loi sur la
rivière Richelieu, qui est un autre précédent. Puis je rappelle quand même un
projet de loi, le projet de loi 37 de 2013 ou 2014, qui est mort au
feuilleton, là, mais qui prévoyait une autre disposition de la sorte en matière
justement d'hydrocarbures.
M. Arcand : O.K. Très bien,
vous avez dit que le choix d'indemniser, c'est un choix politique plutôt qu'une
obligation légale. C'est ce que je crois comprendre dans votre mémoire. Par
contre, vous proposez un amendement à l'article 34 et là, ça semble ouvrir
la porte, et c'est peut-être moi qui comprends mal, là, ça semble ouvrir la
porte à une indemnisation personnelle des promoteurs qui sont détenteurs de
permis. Est-ce que j'ai bien compris, est-ce qu'il n'y a pas là une espèce de
contradiction apparente?
Mme Doré (Anne-Sophie) :
Donc... une contradiction par rapport à notre position initiale, j'imagine que
c'est...
M. Arcand : Oui. Bien, c'est
parce que vous vous ouvrez la porte à une indemnisation personnelle...
Mme Doré (Anne-Sophie) : Bien,
en fait, nous, c'est... je me permets de préciser, tu sais, dans un certain
point aussi, ce n'est pas nous qui allons écrire la loi, donc nous, on fait nos
commentaires qui sont d'entrée de jeu que ceux que j'ai mentionnés dans notre
présentation, mais par la suite, bien, on embarque un peu dans le train en ce
sens que oui, on veut quand même proposer des amendements au projet de loi qui
vont faire en sorte qu'il y aura le plus de barèmes de modalités établies par
la loi concernant...
Mme Doré (Anne-Sophie) : ...indemnisation
et que celle-ci sera limitée au strict minimum. Donc, c'est dans cet esprit-là
que nous proposons des amendements au projet de loi.
M. Arcand : O.K., et vous
dites également que... lorsque vous parlez du programme d'indemnisation du
ministre, vous acceptez, en fait, qu'il y ait ce que j'appelle un rapport
confidentiel de la part d'un vérificateur indépendant qui puisse assurer les
citoyens que cette indemnisation est raisonnable. Est-ce que j'ai bien compris
ça? Est-ce que ce ne serait pas mieux de mettre tout ça dans un projet de
règlement éventuellement?
Mme Doré (Anne-Sophie) : En
effet, là, nous, la proposition que l'on fait, c'est qu'il y ait une assurance,
là, d'indépendance de la part du vérificateur, là, notamment au regard de ses
actions par rapport à l'industrie et une indépendance relativement au
gouvernement. Mais en effet, nous, on ne fait pas la proposition que le
programme d'indemnisation soit créé par règlement. Ça ne fait pas partie des
propositions que nous faisons à l'heure actuelle.
M. Arcand : O.K. Lorsqu'on
parle de ce projet de loi, le ministre semble ouvrir la porte à un certain
nombre de projets dans le cadre de nouvelles technologies. Et plusieurs des
intervenants, depuis le début, disent : Écoutez, même pour des projets qui sont
des projets de transition énergétique, entre guillemets, qu'il faudrait
obligatoirement avoir une consultation de citoyens, un BAPE et ainsi de suite.
Est-ce que, ce que vous partagez... est-ce que vous avez, d'abord, des
inquiétudes sur cette espèce de projet de transition, là, dont on parle? Je
pense que le ministre avait parlé de géothermie ce matin et puis d'autres, là.
Est-ce que vous avez des inquiétudes par rapport à ça? Est-ce que vous
recommanderiez la même chose, c'est-à-dire une vaste consultation à chaque
fois, un BAPE ou que ce soit même inscrit dans la loi?
Le Président (M. Lemay) : Mme
Doré, est-ce que vous pouvez dire oui ou non?
Mme Doré (Anne-Sophie) : Oui.
Je veux dire, oui, ça fait partie de nos recommandations parce qu'on demande
l'application de la Loi sur la qualité de l'environnement en fonction des
impacts sur l'environnement reliés à ce projet.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien, merci. Donc, sur ce, je cède maintenant la parole à la députée de 3rnt*
pour environ 2 minutes 45 s.
Mme Lessard-Therrien : Merci,
Monsieur le Président. Bonjour à vous. J'ai très peu de temps. Le collègue est
allé un peu sur la question que je voulais vous poser sur les précédents par
rapport aux indemnisations. Vous savez, on a abondamment brandi votre rapport,
votre recommandation, qui disait qu'effectivement, les indemnités, c'est un
choix politique, ce n'est pas une obligation légale. Donc, on loge à la même
place que vous à ce niveau-là.
J'aimerais peut-être vous entendre
davantage sur le précédent que vous venez juste d'évoquer parce que pour moi,
ça, c'est vraiment super important. Si on indemnise dans ce cas-ci, j'ai
l'impression qu'on se met un peu le bras dans le tordeur puis que pour la suite
si, éventuellement, on veut légiférer sur d'autres secteurs économiques, bien,
on veut toujours être condamnés à devoir indemniser. Ça fait que j'aimerais peut-être
revenir sur cette question là du précédent.
Mme Doré (Anne-Sophie) : En
fait, je me permets d'ajouter, dans le cadre de cette réponse-ci... bon, il y a
eu, comme je l'ai mentionné, là, tout ce qui était exploration et exploitation
dans le fleuve. On peut penser également à tout ce qui est exploitation de
l'amiante qui a été interdite. Par contre, là, je pense que ce qui est vraiment
essentiel, c'est de dire que même s'il y a indemnisation dans ce cas-ci, il
faut que ce soit justement extrêmement bien circonscrit, bien balisé, pour
comprendre quel est le contexte actuel dans lequel ces indemnisations sont
faites pour ne pas que ça crée un précédent non plus pour, justement, dans le
futur, qu'il y ait une obligation, là, qui se forme de devoir indemniser
d'éventuelles industries qu'on pourrait vouloir limiter sur le territoire. Donc
si... c'est quand même important dans le cadre de vos travaux, aussi, qu'il y
ait cette attention qui soit portée là aux balises qui sont mises, là, pour le
programme d'indemnisation.
Mme Lessard-Therrien : Il me
reste une minute? Est ce qu'on a d'autres... est-ce que... puis là, c'est
peut-être... ça touche peut-être moins l'environnement, je ne sais pas si vous
allez être capable de me répondre, mais, tu sais, dans... j'essaie de penser à
d'autres secteurs, peut-être avec le tabac, par exemple. Quand on a interdit
les publicités, on n'a pas nécessairement compensé les compagnies de tabac.
Est-ce qu'on a des exemples positifs ou si... bien, là, vous venez d'en nommer,
là, mais peut-être en avoir davantage, en fait?
Mme Doré (Anne-Sophie) : Je
ne sais pas, Hugo, s'il y a autre chose qui te vient à l'esprit que ce qu'on a
déjà...
M. Tremblay (Hugo) : ...il y a
quelque chose qui me vient en tête, en fait, c'est l'affaire Strateco, là, donc
l'espèce de moratoire relatif à l'exploration sur l'uranium, qui est peut-être
un autre exemple à garder en tête.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Merci beaucoup pour cette réponse. Et nous allons maintenant céder la
parole au député de Jonquière pour environ, lui aussi,
2 min 45 s
M. Gaudreault : Oui, merci.
Alors, comme toujours, CQDE, extrêmement pertinent et intéressant. Moi,
j'aimerais vous entendre aussi sur la question des précédents, peut-être, Me
Tremblay, parce que vous avez une expertise, certainement, à l'heure actuelle,
d'ailleurs, dans le domaine du droit de l'environnement. Sur les
articles 115.10.1 et suivants de la Loi sur la qualité de l'environnement
où on parle nommément que, selon l'évolution de la science, on peut suspendre
ou révoquer un permis et 115.10.3 nous dit: «ça ne donne lieu à aucune
indemnité de la part de l'État», alors est-ce que ces articles, en l'espèce,
peuvent s'appliquer ou nous inspirer pour aller dans le même sens dans la loi
que nous avons devant nous présentement, dans le projet de loi?
• (17 heures) •
Mme Doré (Anne-Sophie) : Oui,
ça peut être une source d'inspiration, là. Par contre, je le précise que, dans
ce cas-ci, dans la Loi sur la qualité de l'environnement, on prévoit que des
autorisations pourraient être demandées pour la même activité en fonction de
conditions différentes. Donc, bien que ce soit, en effet, une source
d'inspiration, c'est quand même un contexte qui est très différent, considérant
que le projet de loi no 21 ferme la porte complètement à toute possibilité
d'activité.
M. Gaudreault : O.K. Mais
115.10.1 Parle quand même que selon, par exemple, l'évolution x de la science
ou des connaissances, et que ça peut causer des préjudices aux espèces
vivantes. Je veux juste bien comprendre la nuance que vous apportez, là.
Mme Doré (Anne-Sophie) : En
fait que ce que 115.10.1 permet au ministre de l'Environnement de révoquer une
licence, mais n'empêche pas à ce détenteur d'autorisation, pardon, de
redemander une éventuelle autorisation pour la même activité, s'il modifie, par
exemple, son projet. C'est la nuance que j'apporte.
M. Gaudreault : Oui, je
comprends. Maintenant, je voudrais vous entendre un petit peu plus sur les
projets pilotes que le ministre veut inclure dans son projet de loi. On en a
parlé un petit peu tout à l'heure, mais je voudrais vous entendre davantage.
Est-ce que vous trouvez que c'est assez balisé dans l'esprit de l'atteinte de la
carboneutralité ou des cibles de réduction de gaz à effet de serre du
gouvernement? Est-ce qu'on devrait aller plus loin là-dessus pour attacher ça
encore mieux?
Mme Doré (Anne-Sophie) : Bien,
nous, on demande, en fait, justement, à ce que tous les projets soient
assujettis à la Loi sur la qualité de l'environnement, parce que, justement,
c'est cette loi-là qui va permettre d'évaluer s'il y aura un impact sur
l'environnement, sur la lutte contre les changements climatiques. Et c'est le ministre
de l'Environnement qui a cette compétence-là plutôt que le ministre de
l'Énergie et des Ressources naturelles, donc une autorisation qui vient de ce
ministère-là serait plus appropriée à notre sens.
M. Gaudreault : O.K.
Le Président (M. Lemay) : C'est
ce qui complète la période d'échange avec la commission. Merci beaucoup, Mme
Doré et M. Tremblay, pour votre participation aux travaux de la commission.
Et je vais maintenant suspendre quelques
instants pour permettre aux prochains de pouvoir prendre place. Merci beaucoup
encore une fois.
(Suspension de la séance à 17 h 2)
17 h (version non révisée)
(Reprise à 17 h 14)
Le Président (M. Lemay) :
Alors, la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des
ressources naturelles reprend ses travaux. Et je souhaite maintenant la
bienvenue au représentant de l'Association pétrolière et gazière du Québec,
Monsieur Tetrault. Et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour faire votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Alors, je vous invite à vous présenter et à
débuter de ce pas.
M. Tetrault (Eric) : Merci
beaucoup. Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Mesdames, Messieurs les
membres de la Commission, d'abord, un merci très sincère de prendre le temps
d'écouter ce que l'association a à dire sur le projet de loi 21. Nous
sommes très heureux de pouvoir discuter avec vous aujourd'hui. Et, en fait, je
vais exposer quelques arguments que nous aurions aimé pouvoir discuter avec le
gouvernement dans les dernières années. Ça n'a pas été possible pour toutes
sortes de raisons, mais profitons-en aujourd'hui.
D'abord, vous dire d'entrée de jeu que
nous comprenons très bien, je dirais, le «statement» politique que fait le
gouvernement en disant qu'on va sortir des hydrocarbures. Évidemment, de notre
point de vue, on ne le voit pas comme ça. On ne sort pas des hydrocarbures tant
qu'on les consomme au Québec, ici et ailleurs dans le reste du monde également.
On sortira des hydrocarbures le jour où les gens ne mettront plus d'essence
dans leur voiture ou le jour où l'industrie n'aura plus recours au gaz naturel,
comme c'est le cas encore en ce moment. Et donc, pour nous, le projet de loi 21,
ce n'est pas une sortie des hydrocarbures, c'est renoncer à produire chez nous
le gaz naturel dont on a besoin. Et ça, c'est vrai, c'est une chose.
Mais, de notre point de vue, puisque nous
avons déjà des technologies, ça a beaucoup évolué, évidemment, parce que nous
avons des technologies pouvant produire le gaz naturel pratiquement sans
émissions, vous comprendrez que, de notre point de vue, le projet de loi
consiste à se condamner, pendant encore plusieurs années, probablement des
décennies, à importer tout notre gaz naturel, ce qui crée beaucoup plus
d'émissions que si on le produisait chez nous avec ces technologies modernes.
Et ce n'est pas moi qui le dis, c'est l'École polytechnique, c'est le CIREQ,
qui sont nos experts au Québec. Et c'est un rapport qu'on a fait faire il y a
deux ans déjà, où on a étudié quatre scénarios différents de chaîne
d'approvisionnement. Alors, j'ai fait parvenir une copie de ce rapport à la
commission aujourd'hui. Alors, je laisse là aux bons offices savoir si vous
voulez le distribuer, mais je pense que ce serait une lecture essentielle dans
les circonstances.
Il faut bien s'entendre sur ces technologies.
On ne dit pas que ces technologies sont sans failles. Ce qu'on dit, c'est qu'il
faudrait les tester au moyen de projets pilotes. Et ce qu'on pense, c'est que
l'urgence avec laquelle on vit aujourd'hui de réduire les émissions le plus
rapidement possible commande de tout essayer et de faire confiance aux
solutions que l'industrie apporte elle-même. Alors, c'est un projet de loi qui
s'adresse à l'industrie d'il y a 10 ans, si vous voulez. Elle a beaucoup
évolué. Il faudrait être capable au moins tester cette technologie-là.
Si au moins, dans les documents officiels,
on avait une date de péremption quelconque du gaz naturel, à la limite, je
pense qu'on comprendrait que, si on savait qu'on en aurait peut-être pour cinq
ou sept ans, pas plus, pour consommer le gaz naturel au Québec, ça ne vaudrait
certainement pas la peine de le produire chez nous. Mais ce qu'on pense, une
opinion que partage, d'ailleurs, monsieur Pineau aux HEC, j'ai entendu sur la
question hier ou avant-hier, ce qu'on pense, c'est qu'on en a encore pour des
décennies. Alors, ce que le projet de loi fait, c'est condamner le Québec à
importer tout son gaz naturel des États-Unis, de l'Ouest canadien, pendant
encore très longtemps, en créant trois fois plus d'émissions. Ça ne règle rien
du point de vue des émissions globales. Ça ne règle strictement rien du point
de vue de l'environnement.
Et la question toute simple que je pose,
c'est : Pourquoi ne pas l'essayer? Qu'est-ce qui nous empêche d'au moins
l'essayer? Nous avons invité tous les partenaires intéressés à faire partie
d'un projet pilote à venir, sans aucune obligation de leur part, pour pouvoir
constater sur place...
M. Tetrault (Eric) : ...que les
technologies là peuvent fonctionner. Alors, la question toute simple: Pourquoi
refuser d'au moins l'essayer au moyen d'un projet pilote? C'est la première
section de notre mémoire, la section environnement. Essentiellement, je vous
l'ai résumée. Alors, monsieur le ministre et plusieurs membres de la
commission, nous vous tendons la main, encore une fois, pour pouvoir être
capable de tester ces technologies-là.
La deuxième section, c'est sur l'économie.
Encore là, nous avons fait faire un rapport par les experts au Québec en la
matière qui sont.... J'ai envoyé copie de ce mémoire également ce matin au
secrétariat de la commission. Je pense qu'il faut absolument prendre
connaissance de ces chiffres-là. Et ce que ça dit, en fait, je vais les résumer
succinctement, ce que ça dit, c'est que nous avons pour 45 à 200 milliards de
valeur de gaz naturel dans le sous-sol québécois. Notre gaz est de bien
meilleure qualité que celui qu'on importe. Il a de meilleures concentrations et
coûtera moins cher à exploiter, très probablement moins cher sur le marché que
le gaz actuel également, il 100% sécuritaire. On sait que la question des
chaînes d'approvisionnement se pose avec beaucoup d'acuité aujourd'hui. Ça
signifie également des revenus de 150 à 300 000 millions par année pour le
gouvernement et entre 300 000$ et 500 000$ pour chaque municipalité qui pourra
être l'hôte de puits sur son territoire, servant à produire ce gaz naturel
propre, ce gaz à presque zéro émission que nous sommes en mesure de produire.
• (17 h 20) •
Alors, évidemment, pour ce qui est de
l'économie, ce sont des chiffres extrêmement intéressants, dans le contexte où
le Québec est aux prises avec, encore une fois, le déficit de plusieurs
milliards, où il faut sans doute refinancer le réseau de la santé dans les
prochaines années, le renforcer pour qu'il soit à même d'apporter une meilleure
réponse, certainement en cas de pandémie, mais de façon générale. Alors, je
vous invite à prendre connaissance de ces chiffres dans ce rapport fait par...
rapport indépendant.
Le troisième point. Je ne peux pas ne pas
aborder la question des droits autochtones et je suis franchement surpris de la
position du gouvernement quant aux droits autochtones. Une entreprise qui est
membre chez nous a signé une entente avec le Conseil des Abénakis de Wôlinak.
La lecture qu'on a faite, nous, c'est que, la Déclaration sur les droits des
autochtones des Nations unies, qui leur donne le droit à l'utilisation, le
plein droit à l'utilisation des ressources sur leur territoire, et la loi
fédérale C-15, c'est-à-dire la loi qui fournit un cadre de reconnaissance et de
mise en vigueur de cette loi-là, est très claire, elle est très claire. Ce sont
les articles 32, 1 et 2. J'en ai écrit un extrait directement dans le mémoire
que vous puissiez le lire, mais je vous invite à lire la loi au complet, la loi
C-15, sur le site du gouvernement du Canada. Je pense que c'est très clair que
les autochtones doivent être capables de disposer des ressources sur les
territoires traditionnels, les territoires qu'ils revendiquent. Je suis surpris
de voir que l'interprétation du gouvernement est contraire, mais je suis
également surpris de voir qu'ils ne sont même pas consultés dans cette
commission parlementaire pour savoir ce qu'ils ont à dire sur la question. Non
seulement c'est dans la loi, il faut les consulter sur la question des
ressources, mais je pense que, politiquement, ça aurait été un bon geste de
pouvoir les recevoir ici. Ils ont fait une demande. Je ne sais s'ils ont reçu
encore une réponse et s'ils ont été refusés. Je ne leur ai pas parlé
malheureusement aujourd'hui. Mais je sais qu'ils auraient beaucoup aimé
s'exprimer sur la question.
Mon quatrième point, c'est sur
l'acceptabilité sociale. Pendant des années, l'industrie s'est fait dire
d'aller chercher l'acceptabilité sociale, sinon il n'y aurait pas de
discussion. Moi, j'étais bien d'accord avec ça. Je trouvais que l'industrie
aurait dû commencer par ça il y a une dizaine d'années, une douzaine d'années.
Et même s'il n'y a jamais eu de balises gouvernementales pour toutes sortes de
bonnes ou de mauvaises raisons, l'industrie a pris sur elle-même d'aller
chercher l'acceptabilité sociale et nous sommes allés la chercher chez des
partenaires qui sont directement concernés par les projets pilotes que nous
aurions aimé faire dans les basses terres du Saint-Laurent. Nous avons fait
faire un sondage Léger qui date d'il y a quelques mois à peine, un sondage
totalement indépendant. Léger a lui-même trouvé et posé les questions parce
que, nous-mêmes, nous voulions en avoir le coeur net. Alors, je vais faire
parvenir également ce sondage au secrétariat de la commission...
M. Tetrault (Eric) : ...Aujourd'hui,
je vous invite à en prendre connaissance, je pense que les chiffres parlent
d'eux-mêmes. Je pense que les Québécoises et les Québécois en général font
preuve de pragmatisme et nous disent : Ça vaudrait peut-être au moins la
peine de l'essayer avant de refuser carrément d'aller de l'avant vers les
solutions de l'industrie. Les chiffres parlent d'eux-mêmes, je vous invite à en
prendre connaissance.
Ça amène une question, également, parce
que le gouvernement précédent, comme le gouvernement actuel, nous répète qu'il
n'y a pas d'acceptabilité sociale. Mais personnellement, je n'ai jamais vu de
chiffres, je n'ai jamais vu de sondages ou quoi que ce soit qui démontrait la
véracité de cet argument-là. Je me suis beaucoup promené sur le terrain dans
les dernières années, moi, ça ne correspond pas à ce que j'entends. Le sondage
correspond à ce que j'entends mais pas la déclaration selon laquelle il n'y a
pas d'acceptabilité sociale. J'aimerais que le gouvernement puisse au moins
produire des documents en ce sens-là pour qu'on puisse les comparer.
Cinquième et sixième points, très
rapidement, je prends 30 secondes, M. le président, les deux projets
pilotes. J'en ai parlé, nous tendons la main au gouvernement, encore une fois,
aujourd'hui pour qu'on puisse réaliser ces projets pilotes sans aucune
condition de notre part. On est prêt à faire des compromis. Et vous l'avez dans
les articles 43.1 et 43.5, M. le ministre, dans le projet de loi que vous
soumettez aux parlementaires en cette commission.
Et finalement, pour ce qui est des
compensations, vous avez lu notre position dans les journaux, on s'est exprimés
succinctement là-dessus. Pour nous, ce n'est pas une compensation, c'est une
confiscation. On a beaucoup, beaucoup de difficulté à comprendre la position du
gouvernement là dedans. On pense que si c'était le cas de n'importe quelle
autre industrie, sauf la nôtre, il y aurait des compensations qui seraient
équivalentes au montant des investissements qui ont été consentis.
Mais ce qu'il faut comprendre dans le cas
de l'industrie, c'est qu'on a été convenu par le gouvernement actuel, le
gouvernement précédent et l'autre avant, à venir faire de l'exploration et de
l'investissement au Québec. C'est à l'invitation du gouvernement qu'on l'a
fait. Et les gouvernements successifs nous promettent un cadre dans lequel on
pouvait opérer. Il n'a jamais été question d'interdire la production. On change
les règles du jeu à la fin. Il faut une compensation adéquate. Je pourrai
revenir sur cette question-là lors de nos échanges, M. le Président.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
monsieur Tetrault. Donc, nous allons maintenant céder la parole au ministre
pour notre période d'échange.
M. Julien : Oui. Merci,
merci, Monsieur le Président. Merci, monsieur Tetrault, pour votre allocution.
Bien, je vais avoir quelques petites questions. Merci pour vos documents. Donc,
je comprends qu'à l'Association pétrolière et gazière du Québec, vous
représentez, en fin de compte, vous représentez essentiellement des pétrolières
et des gazières puis vous le faites bien.
Je veux ramener quelques éléments qui ont
été discutés ou que j'ai entendus dans les médias de votre part ou de... Pour
voir, là... Pour bien concevoir, là, qu'est-ce qu'il en est. Premièrement, vous
êtes le premier qui nous dise que les indemnisations ne sont pas suffisantes,
donc je prends note de ça.
Il y a M.... qui a utilisé l'analogie d'un
billet de loterie gagnant dont on ne rembourserait que le prix d'achat,
l'empêchant de réclamer son gros lot. Si le billet était réellement gagnant,
pourquoi est-ce qu'on n'a pas réclamé le gros lot avant? Moi, je vais avoir
50 ans, là, le mois prochain, là, je vais être admissible à la FADOQ, ça a
de l'air, c'est bien. Et ceci étant, je perçois que l'âge d'or, en réalité, du
gaz et du pétrole est peut d'une autre époque. C'est ma perception. Encore là,
on joue sur des perceptions. Puis vous avez mentionné vous-même : on a
beaucoup évolué.
Comment ça se fait que dans une période
d'âge d'or au Québec... Puis là, j'ai fait le retour, Ça fait 160 ans,
certains... 190 ans. Puis actuellement, au Québec, là, vous nous dites
que, franchement, il y a... ces potentiels fantastiques de gros lot puis ça ne
s'est jamais avéré. Pourquoi?
M. Tetrault (Eric) : Bien,
parce que vous n'avez pas voulu qu'on procède à des projets pilotes, tout
simplement. Tout ce qu'on demande, c'est de tester la technologie en question.
Puis c'est très simple comme demande, je ne pense pas que ça implique beaucoup
de choses.
Et pour répondre directement à votre
question, M. le ministre, si nous savions, comme industrie, qu'on n'aura plus besoin
de gaz naturel au Québec, je dirais dans cinq ans, sept ans, même 10 ans,
pourquoi le produire chez nous? Je ne verrais pas la pertinence de ça. Mais je
pense, comme bien les gens, qu'on en a pour des décennies encore...
M. Tetrault (Eric) : ...ce que
l'industrie tente de faire, c'est d'être plus rapide que les gouvernements et
les autres secteurs de l'économie vers le zéro émission, vers la
carboneutralité. Et moi, je pense sincèrement, et c'est la raison pour laquelle
j'avais accepté ce mandat-là, je pense sincèrement que l'industrie va y arriver
avant les autres. La dernière conférence à laquelle j'ai assisté dans l'Ouest
canadien portait uniquement sur la capture et le stockage du carbone. Il n'y a
pas eu d'autres sujets que celui-là. L'industrie s'est mis en tête d'être la
meilleure parce qu'elle connaît son produit, elle connaît son infrastructure
puis elle dispose encore du capital nécessaire pour investir là-dedans.
Ce qu'on vous dit, en fait, monsieur le ministre,
c'est : Cesser par la contrainte le recours aux hydrocarbures risque de prendre
encore beaucoup, beaucoup de temps, à moins de forcer les gens à changer leurs
habitudes, ce qui n'est probablement pas le premier choix d'un gouvernement.
Nous, ce qu'on dit, comme industrie, c'est : Puisqu'on en a encore pour un
certain temps, est-ce qu'on est capable de le faire sans créer d'émission?
Est-ce qu'on aurait cette technologie-là chez nous? Moi, je vous dis que oui
puis je pense que ça vaut la peine de la tester, par exemple avec un projet
pilote avec nos collègues autochtones. Je vois très bien ça dans les cartons du
gouvernement. Je pense que c'est très jouable. Je pense que ce serait sage dans
les circonstances.
• (17 h 30) •
M. Julien : Vous mentionnez,
monsieur Tetrault, en fin de compte, des enjeux, entre autres, là, dans votre
allocution initiale, des enjeux potentiellement par rapport à la chaîne
d'approvisionnement. Bon, on sait très bien qu'au Québec, actuellement, 100
pour cent du pétrole et du gaz vient des États-Unis et du Canada, là, donc...
Alors, en termes de robustesse de la chaîne d'approvisionnement, je dors assez
bien le soir personnellement, mais... Puis je comprends également
qu'effectivement, il y a plus de 50 pour cent de l'énergie au Québec qui sont encore
de l'énergie fossile.
Mais quand vous me tenez le discours, là, d'un
projet carboneutre, avec toute l'expertise, je comprends également que des
endroits, comme dans l'Ouest canadien, par exemple, où économiquement, leur
base économique, leur développement... Tu sais, ils sont à la recherche de ces
solutions-là, puis déjà ils en exploitent beaucoup, beaucoup, beaucoup, et on
conviendra que c'est une voie de salut momentanée. Mais où je ne vous rejoins
pas par le sophisme des fois qui est utilisé, c'est de dire : On en a besoin,
on va en produire.
Moi, je regarde en avant de moi, je me dis : 2035,
c'est la fin des véhicules à essence au Québec. C'est un engagement, c'est
clair pour nous. Probablement qu'en 2042, là, la flotte de véhicules va être
pas mal tout électrique, sauf pour ceux qui voudront garder des voitures à long
terme. 2050, la carboneutralité. C'est demain, ça, c'est demain ça, pour nous.
Mais c'est comme si vous nous disiez : Non, non, on n'y arrivera pas. Puis
c'est clair que ce qu'on n'a pas fait dans les 50 dernières années au Québec,
qui ne s'est pas avéré, soudainement, même si on est plus dans l'âge d'or puis
on est en transition, c'est maintenant que ça va arriver, momentanément. Vous
comprenez que j'ai de la difficulté que ça.
M. Tetrault (Eric) : Oui. En
fait, notre position, ce n'est pas de dire qu'on n'y arrivera pas. Notre
position, c'est de dire qu'on va y arriver plus vite comme ça. Pour ce qui est
de l'électrification des véhicules, et tout ça, vous verrez dans les communiqués
qu'on a produits, on vous a toujours supporté là-dedans. La stratégie du Québec
d'électrifier le transport est une excellente stratégie. Le recours à
l'hydrogène, hydrogène vert en particulier. On pourrait discuter de l'hydrogène
bleu longtemps. On a beaucoup de projets avec des partenaires norvégiens pour
ce qui est de l'hydrogène bleu. On pense que ça va être prêt pour le marché et
beaucoup moins cher que l'hydrogène vert. Ça pourrait faire partie des
discussions qu'on a. Mais on pense que les stratégies du gouvernement du Québec
sont les bonnes et on vous a soutenu publiquement là-dedans.
Ce qu'on vous dit, c'est que, si vous voulez que
les Québécoises et les Québécois lâchent le pétrole, il va falloir les
contraindre. Regardez les chiffres. Regardez l'état de l'énergie du Québec les
trois dernières années, vous y êtes allé comme invité d'honneur. C'est clair
que sans contraintes très fortes sur la population pour qu'elle cesse d'acheter
des SUV, pour qu'elle cesse d'acheter des véhicules à essence, ça va être un
coup de force politique. Je ne voudrais pas être le gouvernement qui dit aux
gens qu'il faut absolument changer leurs habitudes de vie, je sais que ça va
être difficile.
Mais nous, ce qu'on fait, c'est qu'on prend acte
de ça, monsieur le ministre, puis on se dit : OK, probablement que ça ne
fonctionnera pas. Qu'est-ce qu'on a, nous, dans nos cartons, comme solutions
pour ça? Bien, on se dit : Faisons-le zéro émission, pour ce qui est du gaz
naturel...
17 h 30 (version non révisée)
M. Tetrault (Eric) : ...je
parle strictement du gaz naturel. Je ne parle pas du pétrole comme tel. Je veux
être clair, je parle du gaz naturel qu'on importe...
M. Julien : Juste
là-dessus, M. Tetrault, avez-vous un exemple clair de démonstration
probante de ce qui est énoncé, en fin de compte, comme production carboneutre
actuellement?
M. Tetrault (Eric) : Oui.
M. Julien : Puis oui,
laquelle nommément?
M. Tetrault (Eric) : Je
peux vous parler d'une PME qui s'appelle Groupe Patoine à Fortierville. Je les
ai rencontrés déjà il y a un an et demi, deux ans. La facture de propane est de
400 000 $ par année. C'est beaucoup d'argent pour une PME. Ils sont
dans la production porcine et dans la production de moulée porcine. Le gaz
naturel produit chez nous lui coûterait à peu près moitié prix. C'est
considérable pour une PME, puis c'est très important pour lui. Et le Groupe
Patoine ne demanderait pas mieux que ce qu'on est... qu'on mette à l'essai ces
technologies-là pour voir si ça peut fonctionner.
M. Julien : Ma question
n'est peut-être pas claire. Mettre à l'essai une technologie, avez-vous une
démonstration quelque part que cette technologie actuellement fonctionne?
M. Tetrault (Eric) : Non.
Nous voulons la tester au Québec. Et la raison pour laquelle nous voulons la
tester au Québec plutôt que, par exemple, en Norvège... je parle de la Norvège
parce que pour ce qui est du membre Questerre chez nous, comme vous le savez,
c'est... il y a beaucoup d'investisseurs norvégiens derrière cette
entreprise-là. La raison pour laquelle on veut le faire au Québec, c'est que
pour être zéro émission, nous avons absolument besoin d'électrifier l'ensemble
des opérations, exactement comme le gouvernement veut le faire avec le
transport. Et c'est au Québec que ça va coûter le moins cher. Le même projet
pilote, par exemple, on parle d'un projet pilote, M. le ministre, d'à peu près
une centaine de millions. Le même projet pilote aux États-Unis ou en Norvège ou
ailleurs coûte le double ou le triple parce que l'électricité n'est pas
accessible et n'est pas aussi bon marché qu'au Québec. C'est la raison pour
laquelle on veut le tester chez nous, mais c'est la raison aussi pour laquelle
lorsqu'on a eu une discussion entre les membres, moi, ce que je disais, c'est :
Il faut absolument commencer par un projet pilote ou vous allez inviter tous
les gens. Parce que vous ne pouvez pas dire tout simplement, puis je pense que
c'est le sens de votre question, vous ne pouvez pas dire tout simplement :
Ça va marcher, laissez-nous aller. Ce n'est pas ça du tout, du tout qu'on veut
faire.
M. Julien : Non, mais
mon principe, puis je vais laisser la parole à mes collègues, je n'ai rien
qu'une petite dernière question, mon principe c'est : Il y a des états qui
exploitent de manière hyper importante, qui ont des enjeux clairs par rapport à
ces défis-là, puis ils n'y arrivent pas. Puis nous autres on dit : Bien,
on va y arriver, puis on n'en fait pas encore. Mais j'entends ce que vous dites
comme projet pilote. Dernière petite question pour moi. Comment qui reste de
temps?
Le Président (M. Lemay) : Vous
êtes correct.
M. Julien : Mais pour
une autre après ou...?
Le Président (M. Lemay) : Cinq
minutes.
M. Julien : O.K., je
veux laisser mes collègues aussi.
M. Tetrault (Eric) : Non,
c'est correct.
M. Julien : Vous avez
mentionné un 2 février, M. Tetrault : Le montant indemnité
pourrait probablement se chiffrer en milliard.
M. Tetrault (Eric) : Oui.
M. Julien : Puis après
ça, M. Lévesque estimait plutôt à 500 millions. Vous connaissez, M. Lévesque?
Moi, je le connais assez bien depuis le printemps dernier. Puis alors... puis
là après ça, bien, c'est basé... milliards sur des revenus potentiels, 500 millions.
Puis ce qu'on observe actuellement, là, c'est... il y a une seule découverte
importante, découverte exploitable, on parle de 34 barils, là, par jour de
mémoire, là, qui est identifié dans les registres. Donc, la seule, c'est 34 barils
par jour identifiés dans les registres d'exploitation au Québec, puis vous vous
nous parlez de milliards.
M. Tetrault (Eric) : On
a besoin de se parler sérieusement, M. le ministre, parce que les évaluations
indépendantes et externes qu'on a fait faire, c'est beaucoup plus que ça, là.
Le Québec possède des réserves considérables de gaz naturel. On peut remplacer
tout le gaz naturel qu'on importe par le gaz du Québec pendant une quarantaine
d'années.
M. Julien : Pourquoi ce
n'est pas inscrit, ça, en fin de compte, dans les projets potentiels, là, qui
doivent être inscrits? Le seul qui est inscrit, actuellement, c'est 34 barils
par jour.
M. Tetrault (Eric) : Les
autorisations n'ont été faites au gouvernement.
M. Julien : Pourquoi?
M. Tetrault (Eric) : Parce
qu'on veut procéder par des projets pilotes sur des technologies zéro émission
d'abord.
M. Julien : O.K.
M. Tetrault (Eric) : Mais
je pense que ça amène une bonne discussion de fond. Sur les montants, juste
pour vous dire, il y a deux types de montants pour nous. La compensation, pour
vous, c'est ce qui devrait équivaloir aux investissements qui ont été consentis
depuis une trentaine d'années au Québec. Ça, le chiffre de 500 millions,
on s'approche de la vérité. Il nous reste à calculer beaucoup de choses parce
qu'il faut calculer le prix moyen du gaz naturel, etc., etc. Mais lorsque je
parlais de compensation, lorsque l'industrie parlait de compensation, elle
parlait d'être remboursée sur les investissements qu'elle a consentis. La somme
de milliards, c'est un chiffre approximatif qui demeure à préciser également,
mais ce chiffre-là correspond à tous les profits qui ont été perdus depuis une
quinzaine d'années, depuis une trentaine d'années au Québec.
M. Julien : Merci.
M. Tetrault (Eric) : Alors,
ça, on parle de deux choses différentes...
M. Tetrault (Eric) : ...encore
là, ça amène, je pense...
M. Julien : Je pense que mon
collègue a une question pour vous.
M. Tetrault (Eric) : ...une
discussion - oui, d'accord - une discussion avec vous.
Le Président (M. Lemay) :
Très bien. M. le député de Bourget, la parole est à vous pour environ trois
minutes.
M. Campeau : Bien, vous êtes
le seul à venir présenter un mémoire dans le sens que vous le faites
aujourd'hui, puis il n'y a pas de problème. Ce n'est pas parce qu'on a raison
ou pas raison, dans ce temps-là. Je dirais même que j'ai du respect pour ça.
Mais je vais reprendre un peu l'argument du ministre, mais d'une façon un peu
différente.
On a dit qu'on se dirigeait vers 1,5
million de voitures électriques en 2030. Le projet de loi 102, à l'étude
actuellement, nous... fait quelques changements en nous dirigeant vers ça. On
dit qu'on n'aura plus de voitures neuves à essence en 2035; on dit que c'est
ici qu'on a le moins de GES, mais on veut les réduire par 37,5%. Il y en a qui
trouvent que ce n'est pas assez, mais ce n'est pas la question d'aujourd'hui.
C'était écrit dans le ciel que ça s'en venait.
Puis l'autre chose, c'est: Dans les
dernières années, avez-vous produit beaucoup ou avez-vous investi beaucoup?
Alors, elle est où, la valeur marchande des droits révoqués? Je ne la vois pas.
M. Tetrault (Eric) : Bien,
elle est dans l'évaluation des rapports externes qui ont été faits, puis je
pense que, M. le Président, que je vais les déposer dès demain pour lecture,
parce que vous avez absolument besoin de prendre connaissance de ces études-là.
La raison pour laquelle il n'y a pas eu de production, c'est qu'on est allé
d'interdiction en moratoire, en BAPE, en étude stratégique, en BAPE sur l'étude
stratégique. C'est à peu près tout ce qu'on a fait dans les 10 dernières
années, on n'aurait même pas eu le temps de produire, puis on a participé de
bonne foi à tous ces travaux-là. Encore une fois, je vous reviens avec mon
argument: on se fait dire pendant 15 ans qu'on va avoir un cadre pour les
produire, pour se faire dire à la fin qu'on va les interdire. Vous comprendrez
que...
Puis, à la limite, je peux comprendre qu'un
gouvernement, politiquement, change les règles du jeu, c'est la prérogative
d'un gouvernement. Mais il va falloir s'entendre sur une forme de compensation
adéquate à ce moment-là, si d'aventure on ne peut pas au moins tester certaines
technologies en attendant, ce qui est la... une des deux demandes qu'on fait
aujourd'hui, en fait. Alors donc, pour répondre à votre question, c'est ça.
Je peux comprendre que... Je comprends
très bien, et les gens de l'industrie comprennent très bien que les gens veulent
en finir le plus rapidement possible avec l'usage des hydrocarbures dans le
monde, et je ne sais pas si je vous surprends en disant ça, mais les gens de
l'industrie eux-mêmes le savent. C'est pour ça qu'ils cherchent des solutions
pour réduire très rapidement l'empreinte, ils sont parfaitement conscients de
ça. Il ne faut pas voir l'industrie comme étant des gens qui cherchent des
moyens pour faire perdurer l'usage des hydrocarbures. Ce n'est pas ça du tout
qu'on dit, ce n'est pas ça du tout qu'on dit. Ce qu'on dit, c'est que
l'industrie a changé, elle possède des technologies qui risquent d'aller plus
rapidement que les stratégies gouvernementales, mais qu'on demande à ce que ça
soit au minimum testé.
• (17 h 40) •
Le Président (M. Lemay) :
Merci, M. Tetrault, et simplement pour vous mentionner que les documents que
vous avez mentionnés dans votre exposé initial sont sur le site Greffier,
disponibles pour les parlementaires, et, si vous en transmettez d'autres, on
les rendra disponibles, bien entendu.
M. Tetrault (Eric) : Donc,
c'est possible demain, c'est sûr?
Le Président (M. Lemay) :
Oui, sans problème.
M. Tetrault (Eric) :
D'accord.
Le Président (M. Lemay) :
Alors, nous allons maintenant céder la parole au député de Mont-Royal-Outremont
pour une période d'environ 11 minutes.
M. Arcand : Merci, M. le
Président. M. Tetrault, bonjour, bienvenue. Très franchement, j'imagine que
vous avez une position qui n'est pas facile, là, parce qu'évidemment vous
n'êtes pas la personne peut-être la plus populaire au Québec, pas parce que
c'est vous, mais parce que... ce que vous représentez, disons, comme industrie.
Moi, ma première question par rapport à
ça, c'est... D'abord, je sens dans votre mémoire, très franchement... vous êtes
une personne qui avez beaucoup d'expérience dans le domaine des relations
publiques, et du lobby, et de tout ça. Mais je sens derrière cette
présentation-là une certaine dose d'agressivité, dans le sens que vous
reprenez, par exemple, puis je vais simplement donner deux exemples, vous
reprenez les propos du professeur Pineau, vous dites: Écoutez, c'est une... qui
dit, et vous le citez abondamment: «C'est une hypocrisie de ne pas vouloir
produire localement, de ne pas vouloir réglementer la production et de se faire
un point d'honneur d'importer le pétrole et le gaz.» Ça, c'est une des
citations que je retrouve dans votre mémoire. Puis la deuxième citation: «La
démarche du gouvernement est à ce point inacceptable que son image auprès des
investisseurs étrangers s'en trouve déjà entachée, peu importe la suite. Le
Québec attire déjà cinq fois moins d'investissements étrangers directs que
l'Ontario. Sa façon de traiter l'industrie alourdit son cas.».
Bon. Moi, je me rappelle d'une discussion,
et j'entends ce que vous dites...
M. Arcand : ...vous avez des
projets, etc. Mais je me rappelle d'une discussion que j'avais eue, je crois
que c'était en 2009 ou en 2010, avec le président d'une entreprise qui
s'appelait GDF Suez, Gaz de France Suez, M. Mestrallet, qui était le président,
à ce moment-là, qui a d'ailleurs changé le nom et qui s'est appelé ENGIE, hein,
qui ont changé leur nom à un moment donné. Alors, et là, il m'avait dit, déjà
en 2009-2010: Écoutez, il faut changer de façon considérable le modèle d'affaires.
Et ils se sont lancés dans l'éolien, ils se sont lancés dans toutes sortes de
choses. Et on dirait que du côté de vos membres, je comprends, là, vous avez le
projet Wôlinak, Wôlinak ou... peu importe, cette nouvelle technologie-là, mais
j'ai beaucoup de difficulté... Vous avez ici, devant vous, les membres de
l'Assemblée nationale, quatre partis politiques différents, qui vont de gauche
à droite, et ainsi de suite, et qui ont tous passablement accepté le principe
de ce projet de loi qui est devant nous. Alors, à partir du moment où il y a
cette espèce d'unanimité de gens qui représentent le Québec par rapport à la
nécessité, comment se fait-il que des gens de l'industrie n'ont pu voir ça
venir d'une façon évidente? Pourquoi ne pas vous être lancés dans le solaire,
dans les biocarburants, dans l'hydrogène vert, dans d'autres formes d'énergie,
qui auraient représenté, certainement, un défi, mais... lequel le Fonds Vert
aurait participé, il y aurait eu, véritablement, là, des efforts?
On a l'impression, puis je vous le dis
très franchement, puis peut-être que je me trompe, mais l'impression qu'on a,
c'est que, dans le fond, vous ne voulez pas changer votre façon de faire. Vous
dites: Bon, on va essayer, peut-être, de les accommoder avec de nouvelles technologies,
auxquelles... on n'est pas sûr que vous y croyez vraiment. Mais est-ce que...
ma question est simple: Est-ce que vos membres, je ne parle pas de vous,
personnellement, vous parlez à vos membres... une base régulière, est-ce que
vos membres croient fondamentalement qu'ils peuvent en arriver éventuellement à
lâcher les hydrocarbures puis d'arriver avec des produits qui sont compatibles
avec ce que la population veut, actuellement?
M. Tetrault (Eric) : Allons-y
point par point. D'abord, vous avez une mauvaise impression de l'industrie. Ce
qu'on propose, là, le gaz naturel zéro émission, ça a pas mal plus de potentiel
de réduire les émissions que les éoliennes ou le solaire. Je n'ai pas à vous
énumérer à quel point les éoliennes et le solaire ont besoin d'hydrocarbures,
juste pour les construire, les aménager, stocker l'énergie que ça produit. La
réalité c'est que, dans l'industrie...
M. Arcand : Je suis content
que vous me disiez ça, parce que Mme Brochu, elle, à l'époque, je lui demandais
de faire du gaz naturel renouvelable. C'était un petit peu compliqué.
M. Tetrault (Eric) : Oui,
mais ça... Je ne veux pas en parler, aujourd'hui, mais je sais que le
contribuable le paie trois fois puis le paie trop cher. Puis on est très
sceptiques face à la possibilité d'en injecter 60% d'ici 2030. Ça, on pense
qu'on rêve en couleurs.
Mais, pour répondre à votre question, vous
avez une impression qui n'est pas la bonne de l'industrie. On préfère des
projets de gaz naturel zéro émission à n'importe quel projet d'éolienne ou de
solaire parce que ce n'est pas fiable. Regardez l'exemple de la Grande-Bretagne
ou de l'Allemagne, actuellement. La Grande-Bretagne, ils sont en crise de gaz
naturel, là, ils paient 400% de plus au moment où on se parle. Pourquoi? Parce
que ça fait deux ans qu'il ne vente pas, en mer du Nord. À moins d'inventer du
vent, là, ils sont dans le trouble pour un petit bout de temps encore. On ne
peut pas se fier à ça.
Et d'ailleurs, si on veut produire de
l'électricité, 65 % plus, dans les prochaines années, comme les documents
officiels du gouvernement le disent, pour tout électrifier au Québec, ça va en
prendre combien, d'éoliennes, puis où, puis avec quelle acceptabilité sociale
puis avec quelle fiabilité? Regardez les chiffres, là-dessus, ils ne sont pas
bons. La réalité, c'est que l'éolien et le solaire n'est pas prêt, et on ne
cesse de repousser la date où ça va être prêt.
Mais nous, on pense qu'on a de meilleurs
projets que l'éolien et le solaire. On pense que le gaz naturel zéro émission,
ça vaut 100 fois l'éolien et le solaire. Alors, oui, on a évolué. Nous, notre
perception, c'est qu'on évolue encore plus vite et plus rapidement que celles
et ceux qui ne cessent d'évoquer l'énergie alternative, qui n'est jamais,
jamais...
M. Tetrault (Eric) : ...on
n'a pas encore parlé de l'acheminer aux marchés, de forcer l'industrie à
changer tous ses procédés industriels pour s'y conformer. Ça va être des sommes
astronomiques sans savoir si c'est fiable. Pourquoi... pourquoi, dans nos installations,
dans notre réseau de la santé, il est prévu du gaz naturel? Parce qu'en bon
Québécois, c'est le seul backup fiable qu'on va avoir. Je ne voudrais pas être
sur la table d'opération, moi, quand il n'y a plus d'électricité, là. Et c'est
ça, l'idée, il faut toujours être soutenu par quelque chose qui est fiable.
Ça fait que, oui, on est conscient de
l'image qu'on projette et on sait qu'on est une espèce de vérité inconvenante.
Je le sais, les gens de l'industrie le savent, mais c'est ça qui nous pousse à
faire toutes sortes d'efforts pour proposer les solutions. Je vous répète, je
suis convaincu personnellement que l'industrie peut y arriver plus rapidement à
la carbo neutralité que n'importe quelle stratégie gouvernementale qu'on va
avoir., et je suis convaincu de ça. Pour moi, le secret, c'est le libre marché,
la concurrence, la venue des technologies et la facilitation, par les
gouvernements à tous les niveaux, de la circulation des capitaux nécessaires
pour qu'on puisse avec la technologie.
Regardez l'histoire du monde. On devait
mourir de faim dans les années 70, et la technologie a réglé ça. On s'en
allait dans une ère glaciaire en 1978. J'ai trouvé un vidéo de Spock, de Star
Trek, sur YouTube qui nous dit, avec le plus grand sérieux, qu'on s'en va dans
une ère glaciaire en 1978. Je ne blâme pas les gens, ce que je dis, c'est que
c'est toujours la technologie qui est venue au secours de l'humanité, et je
pense que ça va être encore une fois ça beaucoup plus que la contrainte sur les
comportements des gens qui va l'emporter, et c'est ce qui explique notre
position. Et je vous remercie de je vous remercie de... je vous remercie d'être
conscient que le rôle n'est pas facile, mais je peux vous assurer que,
personnellement, je suis très ouvert aux discussions et puis je suis très
ouvert aux échanges,
M. Arcand : Mais,
M. Tetrault, juste comme question, quand j'ai eu affaire à Énergir pendant
longtemps, Énergir, on leur demandait de faire du gaz naturel renouvelable. Le
gaz naturel, il y a eu des projets à Saint-Hyacinthe avec des matières
résiduelles.
M. Tetrault (Eric) : Oui.
• (17 h 50) •
M. Arcand : Il y avait
une possibilité, je pense que c'était à Dolbeau. Il y avait une possibilité
avec les copeaux de bois, avec les résidus forestiers, de faire du gaz naturel,
mais c'était extrêmement laborieux. Alors, la question est la suivante :
En quoi cette nouvelle technologie que vous avez... parce que de la façon dont
vous vous exprimez, c'est quelque chose de révolutionnaire? Alors, en quoi...
expliquez moi en quoi cette nouvelle technologie-là pourrait être
révolutionnaire et pourquoi le ministère de l'Énergie et des Ressources
naturelles ne semble pas comprendre ça aujourd'hui?
M. Tetrault (Eric) : Deux
raisons fondamentales. D'abord, il faut bien comprendre qu'Énergir est un
distributeur de gaz naturel bien plus qu'un producteur. Et nous, on représente
des producteurs de gaz naturel. Alors, si vous voulez savoir comment faire du
Coke, demandez aux gens qui font le Coke, demandez-le pas aux gens qui
distribuent le Coke. On est capable de le faire parce qu'on a la capacité
technologique, la capacité financière de le faire et on pense que ça va aller
beaucoup plus rapidement que le gaz naturel renouvelable.
L'autre raison pour s'intéresser à notre
projet est d'ordre économique. Non, on ne demande pas un sou au gouvernement,
pas un sou, pas un rond. Ce sont des capitaux entièrement privés qui vont aller
dans le projet pilote évalué à une centaine de millions. On ne demande pas un
au gouvernement combien le gouvernement dépense, à chaque année, en
subventions, là, pour le gaz naturel renouvelable puis supporter l'étendue du
réseau, puis, etc.? Le calcul rapide, là, on est rendu à quelques centaines de
millions, là. Alors, c'est un distributeur de gaz naturel n'est pas du tout le
concurrent pour nous, soit dit en passant. Ce qu'on souhaiterait, c'est qu'il
devienne le distributeur du gaz le plus propre au monde qui se trouverait à
être beaucoup moins cher.
Le Président (M. Lemay) : ...trop.
C'est ce qui concerne cette période d'échange. Maintenant, je cède la parole...
avant de céder la parole, est-ce qu'il y a consentement pour que la députée de
Sainte-Marie-Saint-Jacques puisse reprendre... Oui. Très bien, consentement.
Mme la députée de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Pour une durée d'environ
2 min 45 s.
Mme Massé : Merci, M. le
Président.Depuis 10 ans, votre association tente de pousser, à travers la gorge
des Québécois et Québécoises, des projets de forages pétroliers et gaziers dont
les Québécois et Québécoises ne veulent rien savoir...
Mme Massé : ...votre
association a fait du lobbying intensif auprès des dizaines d'élus provinciaux,
municipaux, partout au Québec. Vous avez utilisé, et utilisez encore parfois des
rhétoriques un peu fallacieuses pour essayer de dépeindre votre industrie comme
étant un acteur responsable. Vous avez appuyé Keystone XL, vous avez
appuyé la campagne pour GNL Québec, et j'en passe. Vous faites la promotion
d'un pétrole qui, soi-disant, respecte l'environnement et d'un gaz fossile qui
réduit les GES. Bien, voyons donc. Voyons donc. En 2016, d'ailleurs, vous
disiez que la fracturation hydraulique était un procédé tout à fait
sécuritaire. Sur votre page web, vous avez photoshopé une magnifique plante,
une magnifique plante dans un brûleur de gaz. Il faut le faire. Ça, on appelle
ça de l'écoblanchiment. On va se parler honnêtement, c'est la nouvelle marque
de commerce de votre industrie partout à travers la planète.
Malheureusement pour vous, les citoyens et
citoyens du Québec, ils ont vu à travers ce jeu-là. Partout, dans toutes les
régions, is se sont tenus debout devant vos membres qui utilisaient le «free
mining» pour débarquer dans leur cour puis essayer de forer sans leur
permission, sans leur consentement. Les citoyens, là, ils ont gagné cette
bataille historique, puis votre industrie a perdu. Vous avez perdu et vous
venez ici réclamer des indemnités, malgré les permis que vos membres ont eus à
rabais, malgré les pertes de Ressources Québec, malgré les passifs des puits
orphelins qu'on a encore peine à bouger actuellement, malgré les impacts sur le
territoire des dérèglements climatiques.
D'ailleurs, quand on lit la documentation
financière de votre industrie, vous avertissez vos investisseurs que
l'exploration du pétrole et du gaz comprend des risques inhérents. Pourquoi,
tout d'un coup, vous voulez nous faire assumer collectivement ces risques? Ma
question : Quel est le niveau de responsabilité que vos membres
reconnaissent dans la présente crise climatique?
Le Président (M. Lemay) : Il
vous reste environ 15, 20 secondes.
M. Tetrault (Eric) : Bien,
rapidement, vous lirez le sondage Léger. Je pense qu'il n'y a rien qui rentre
dans la gorge des Québécois. Vous vous trompez lourdement là-dessus. Pour ce
qui est du lobby, le ministre en sera témoin, je pense qu'on ne s'est pas parlé
depuis un an et demi, deux ans. Ça fait que je ne sais pas à quoi vous faites
référence quand vous dites qu'on passe notre temps à faire du lobby.
Keystone XL, le président américain regrette beaucoup sa décision. GNL
Québec, on pense que c'est une très mauvaise décision. Il y a un excellent
marché pour le GNL. Vous lirez les rapports de Morgan Stanley. La fracturation
est parfaitement sécuritaire. Vous lirez le rapport de..., les deux rapports du
BAPE et l'étude environnementale stratégique du Québec. Quant aux puits
orphelins, ils appartiennent à la SOQUIP et non pas au secteur privé.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Donc, maintenant, je cède la parole au député de Jonquière pour environ
2 min 45 s
M. Gaudreault : Oui. M. le
Président, moi, j'ai l'impression qu'on a devant nous un fumeur qui dit :
Moi, je veux arrêter de fumer, mais je vais vendre des cigarettes. Ça, c'est la
première chose qu'on a devant nous. La deuxième chose qu'on a devant nous,
c'est une association qui se présente sous un faux nom. L'Association de
l'énergie du Québec, ça n'existe pas. C'est l'Association pétrolière et gazière
du Québec. On a vérifié encore ce matin dans le registre des entreprises, le
nom Association de l'énergie du Québec n'existe pas. Alors, ça, ça en dit long
de deux manières.
Premièrement, c'est comme si quelqu'un
avait honte de sa vraie nature. Deuxièmement, ce n'est pas une association qui
fait la promotion de l'énergie sous toutes ses formes, incluant le
renouvelable, c'est une association qui fait du lobby organisé pour faire la
promotion de l'énergie fossile. Ça, c'est l'Association pétrolière et gazière
qui existe au Québec. Le plus choquant, c'est que cette association se permet
de donner des leçons au Québec en disant que de ne pas indemniser, si on retire
les droits, c'est agir comme une république de bananes. Moi, en ce qui me
concerne, c'est davantage une association de ce type, qui dit ça du Québec, qui
nuit à l'image du Québec.
Dans son mémoire, l'Association pétrolière
et gazière nous dit que le Québec est en retard puis il prône une approche
moderne. Bien, moi, je pense que le retard, il a changé de côté. Quand je
regarde les grandes institutions...
M. Gaudreault : ...financières
internationales, la Banque européenne d'investissement, la Caisse de dépôt et
placement du Québec, les grands groupes d'investissement mondiaux comme
BlackRock, les grandes compagnies d'assurance, ils se retirent des énergies
fossiles puis ils constatent qu'il y a beaucoup plus de risques dans les
énergies fossiles que dans d'autres types d'investissements. Donc, monsieur le
président, moi, je dis, quand le Québec est le champion des énergies
renouvelables, que nous en sommes si fiers, ce n'est pas le moment, quand
l'ensemble de la planète essaie de sortir des énergies fossiles, que nous, on
plonge là dedans. Ça serait complètement à contre sens.
Je termine en vous disant que, sur la question
des indemnités, que ce soit sur l'amiante, que ce soit sur le fleuve ou
l'estuaire à l'époque de Mme Normandeau, que ce soit avec les articles,
présentement, qu'ils le permettent dans la Loi sur la qualité de
l'environnement, le Québec n'a jamais été mis au bas de la planète pour agir
comme ça. Merci.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Donc, monsieur Tetrault, c'est ce qui complète la période d'échanges avec
les parlementaires. Alors, je vous remercie de votre contribution aux travaux
de la commission.
Et je vais suspendre les travaux quelques
instants pour permettre au prochain groupe de prendre place virtuellement.
Merci, monsieur Tetrault.
(Suspension de la séance à 18 heures)
18 h (version non révisée)
(Reprise à 18 h 8)
Le Président (M. Lemay) : Alors,
la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources
naturelles reprend ses travaux et je souhaite maintenant la bienvenue à M. Richard
Ouellet, professeur titulaire de l'Université Laval.
Je vous rappelle que vous allez disposer
de 10 minutes pour faire votre exposé, et ensuite, il y aura un échange
avec les membres de la commission.
Alors, M. Ouellet, la parole est à
vous.
M. Ouellet (Richard) : Merci
beaucoup, M. le Président.
Donc, j'interviens à titre personnel. Je
tiens à dire que je ne suis pas un expert des enjeux énergétiques. Je suis
plutôt penché vers le droit international économique. Je suis professeur de
droit international économique...
M. Ouellet (Richard) : ...depuis
maintenant vingt et un ans, à l'Université Laval. Donc, je m'intéresse au
contenu des accords de libre-échange, au droit du commerce, au droit de
l'investissement, et donc c'est un peu dans ce sens-là que je voudrais
aujourd'hui un petit peu partager avec vous quelques idées que j'ai sur le
projet de loi. Mais mes commentaires vont se centrer autour du préambule ou
d'un éventuel préambule, peut-être, à cette loi là et aussi sur le programme d'indemnisation,
donc le chapitre 6 de la loi.
Ce que je voudrais d'emblée souligner,
c'est que j'ai beaucoup apprécié l'étude de ce projet de loi. Je décode dans le
projet de loi un souci d'équilibre, d'abord, d'un côté de la balance, le fait
d'envoyer un signal fort que le Québec devient une juridiction qui prend un
virage vert, qui pose ici un geste concret dans ce sens-là, qui répond à
l'urgence climatique. Bon, évidemment, on ne règle pas globalement l'urgence
climatique, mais là je vois un geste concret assez fort, un signal assez
important. Donc, ça, c'est d'un côté de la balance. Et dans l'autre plateau de
la balance, je vois un souci pour le Québec de demeurer une juridiction
accueillante pour les investisseurs étrangers qui traitent convenablement les
gens d'affaires qui viennent chez nous tenter de développer les choses. Et pour
moi, ça me semble assez important parce que, bon, évidemment, à cause de mon
champ d'expertise sans doute. Il ne faut pas faire peur aux investisseurs. Nous
sommes dans un monde de plus en plus petit, de plus en plus globalisé. Et, bon,
ici, aujourd'hui, il est question des hydrocarbures, mais tantôt, on voudra
accueillir aussi des investisseurs dans le secteur... puis on le fait déjà,
dans le secteur des technologies de l'information, pour développer des vaccins
ou dans le secteur du bois, comme on le fait déjà aujourd'hui. Donc, c'est
important, je pense, d'envoyer des signaux équilibrés.
• (18 h 10) •
Entendez-moi bien, dans la présentation
que je vais faire maintenant, je ne viens pas ici défendre la position des
entreprises ou des investisseurs étrangers. Je voudrais rendre compte de la
réalité du droit international économique, de comment ça se passe devant les
tribunaux, devant les arbitres, quand on tranche un litige à connotation
économique. Donc, ne tirez pas sur le messager quand je vous parlerai de la
façon dont ça se passe dans un dossier comme Lone Pine ou quelle est l'attitude
de ceux qui réclament quand vient le temps de prendre des décisions comme
celles qu'on prend aujourd'hui.
Ma première remarque porterait donc sur le
préambule de la loi. Je serais assez partisan d'affirmer les choses de façon
assez forte dans un préambule de cette loi-là. Je m'explique. Ici, le Québec
devient une juridiction qui fait un choix affirmé, un choix assez tranché. Il
n'y aura plus d'exploration des hydrocarbures chez nous. C'est terminé.
L'exploitation de la saumure, c'est terminé. C'est un signal qui est
relativement fort et que beaucoup d'autres juridictions vont regarder. C'est
une loi qui va inspirer les choses et c'est une loi aussi qui... et ça, je vais
revenir là-dessus tout à l'heure, qui risque de se retrouver devant peut être
des arbitres, peut être les tribunaux. On va essayer d'éviter ça, mais c'est
possible que ça se retrouve là. Et donc exprimer les intentions du gouvernement
dans un préambule assez fort serait pour moi un signal important et ce serait
quelque chose sur laquelle, je pense, ça vaut la peine de travailler dans le
contexte que l'on connaît. Donc, ce serait ma première, si j'ose dire,
recommandation, si je peux employer ce terme-là.
Je voudrais ensuite aller vers le
chapitre 6, donc le chapitre sur le programme d'indemnisation. Ce qui est
important, quand on met en place un programme comme celui-là, puis je pense que
c'est ça, l'équilibre que j'ai senti en lisant la loi, c'est d'éviter les
poursuites, c'est d'éviter les arbitrages. Donc, les poursuites devant nos
tribunaux ici, au Québec, et les arbitrages, les arbitrages internationaux. Et
pour qu'un programme d'indemnisation comme celui-là fonctionne, d'abord, il ne
doit pas être... ça ne doit pas être un bar ouvert, puis ça, c'est une
préoccupation. J'ai assisté à quelques auditions, là, aujourd'hui dans le cadre
de la commission. Et je pense que tout le monde est d'accord là dessus, ça ne
doit pas être un bar ouvert, ça, c'est sûr. Je pense que tout le monde sera
d'accord là-dessus, mais il faudra que ce soit suffisamment attirant,
suffisamment alléchant pour qu'un investisseur, pour qu'une entreprise se
dise : Je ne vais pas engager une firme d'avocats, me lancer dans des
procédures qui vont prendre des années, me lancer dans des frais importants
pour réclamer un peu plus que ce que j'obtiendrais dans le cadre du programme
d'indemnisation. Il faut que le programme d'indemnisation soit suffisamment
intéressant pour qu'idéalement la totalité des entreprises, le plus grand
nombre d'entreprises se disent : Je vais m'asseoir avec le gouvernement,
je vais m'asseoir avec le comptable externe désigné dans la loi, et on va
régler comme ça. Ce sera très heureux que ça se fasse comme ça, parce que ça se
fera éventuellement sur une base contractuelle. Le gouvernement, donc, versera
des sommes, et la compagnie renoncera à tout recours...
M. Ouellet (Richard) : ...accordera
quittance, puis le dossier est fermé et bien fermé, et on ne saura plus en mode
inquiétude, à se demander combien de poursuites ou combien d'arbitrages
internationaux on va se faire demander. C'est vrai ce que j'énonce là, sur deux
plans, sur un plan interne, quant aux recours qu'il pourrait y avoir devant les
tribunaux, et il y en a déjà des poursuites devant les tribunaux. Donc, je
n'invente rien, ça existe et c'est ça qu'on veut éviter par le programme
d'indemnisation. On veut aussi éviter des arbitrages en vertu d'accords
commerciaux internationaux, et là, encore, je n'invente rien, le cas de Lone
Pine, tout le monde le connaît, on attend la décision dans, probablement, les
semaines qui viennent. Donc, se dire que l'on n'indemnisera pas, c'est
certainement un principe ou une idée intéressante, mais ce n'est pas comme ça
que réagit l'industrie, et il n'y a pas de véhicule juridique ni même de
véhicule politique pour empêcher ces gens-là de mobiliser des recours et, si
l'indemnisation n'est pas suffisamment intéressante, ils vont mobiliser des
recours.
Donc, l'idée centrale, c'est que les
entreprises ne voient pas davantage à aller devant les tribunaux ou à demander
l'arbitrage, c'est ça, l'idée. Et quand je lis le programme d'indemnisation qui
me semble assez bien équilibré, qui me semble assez bien conçu, il y a deux
petits constats pour lesquels je serais porté à suggérer des retouches, le
premier, c'est celui du délai de six ans. Donc, on a compris que les recours...
pardon, la période, pendant laquelle on pourra indemniser, s'étendra du 19
octobre 2015 au 19 octobre 2021. J'entends bien la justification que nous fait
valoir le ministère, monsieur le ministre que j'ai entendu aujourd'hui
également, c'est une idée, c'est l'idée de la prescription fiscale, c'est
l'idée que tout le monde a encore tous les papiers qu'il faut pour qu'on puisse
faire une vérification comptable complète pour l'ensemble de ce qui est
indemnisé. Le souci, c'est, si quelqu'un nous dit: Oui, mais moi, je les ai
encore, mes papiers, pour 20 ans, mettons, et l'essentiel de mes dépenses, je
les ai faites en 2013, par exemple, et votre programme d'indemnisation, il ne
m'intéresse pas. Si vous n'indemnisez pas mes années 2013-2014, je vais y
aller, devant les tribunaux, m'essayer ou je vais y aller en arbitrage
m'essayer.
Je croirais qu'il y a lieu d'avoir une
petite porte ouverte pour éviter beaucoup de recours, parce que je comprends
que ce n'est pas tout le monde qui a investi entre 2015 et 2021. On va avoir
des gens qui diront: Oui, mais, moi, j'ai suffisamment à aller chercher, en
dehors de cette période-là, pour que ça vaille la peine que je me passe du
programme d'indemnisation puis que je m'essaie ailleurs, et ce n'est pas tout à
fait ça qu'on veut, ce n'est pas ça, l'objectif de la loi. L'autre retouche que
je ferais peut-être, je pense qu'elle est sans conséquence financière ou
presque... ou, en tout cas, une conséquence financière minime, minime. Quand on
va en arbitrage ou quand on va devant les tribunaux et qu'on demande d'être
compensé, on demande toujours la juste valeur marchande de ce qu'on a perdu. Et
là, pour l'instant, le projet de loi indemnise, bon, indemnise pour la
fermeture des puits à hauteur de 75%, ça représentera une dépense de plus ou
moins 33 millions, d'après les évaluations qu'on a. Il y a aussi les autres
frais pour les renouvellements de licence, le maintien des lieux, on arrive
globalement à un total d'une centaine de millions, alors j'imagine qu'au
ministère les calculs se sont faits. Mais il y aura des gens qui diront: Moi,
je veux qu'on me rembourse mon gain potentiel et, en arbitrage, ça marche
souvent, ça marche souvent.
Ce que je ferais comme retouche au projet
de loi, c'est que je permettrais le recours à l'indemnisation pour la valeur
potentielle, pour qui? Pour ceux qui ont déclaré un gisement exploitable en
date du 19 octobre 2021, et j'entends qu'il n'y aurait qu'une seule entreprise
et que le gisement est tout petit. Là, on enverrait le signal de la part du
gouvernement du Québec qu'on a joué d'après les règles, les règles d'arbitrage,
les règles d'indemnisation. Et il y a eu un cas où il y a une perte potentielle
de profit, on va l'indemniser et on va lui offrir à cette entreprise-là. Si
jamais on se retrouvait devant un arbitre, bien, on pourra dire: Écoutez, on a
fait une offre raisonnable à cet investisseur-là et, si jamais la loi était
contestée, on dira: Écoutez, la loi est tout à fait conforme à la pratique dans
le domaine, donc... Et, encore une fois, j'insiste là-dessus, on est devant une
industrie, et ça, c'est quelque chose qu'il faut toujours garder à l'esprit,
l'industrie pétrolière, l'industrie gazière, c'est une industrie où ces gens-là
sont habitués de faire des investissements à perte. Pour neuf tentatives de
forage d'exploration, ils vont avoir un gain une fois sur dix...
Le Président (M. Lemay) : En
conclusion...
M. Ouellet (Richard) : ...habitués
à ça.
Le Président (M. Lemay) : En
conclusion.
M. Ouellet (Richard) : Oui.
Alors ce que je voudrais dire, c'est que c'est une bonne voie que d'avoir la
voie qui mènera à ces règlements-là. Par contre, il faudra avoir des contrats
extrêmement bien signés, et j'invite à la prudence là-dessus. Il faudra obtenir
des quittances, des renoncements aux recours, des choses comme ça. Il faudra
aussi avoir une très bonne tenue des registres pour savoir qui sont les
investisseurs, pour éviter que le jeu corporatif fasse qu'il y a des gens qu'on
ne voit pas venir. Donc, c'était l'essentiel des remarques que je pouvais
faire, que je voulais faire. On pourra rediscuter de tout ça par la période de
questions, ça me fera plaisir de développer un peu ma pensée.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Merci, monsieur Ouellette, pour votre exposé. Nous allons débuter
maintenant la période d'échanges avec les membres de la commission et monsieur
le ministre, la parole est à vous.
M. Julien : Oui, merci, merci
infiniment Monsieur Ouellette, parce que parce que vos réflexions sont hyper
intéressantes puis c'est une discussion qu'on a eue aussi entre nous, mais peut
être pas de manière... en tout cas, pas sur les mêmes thèmes exactement de ce
que vous apportez. Puis je trouve ça très intéressant. C'est beaucoup
d'éléments, de préoccupations, mais encore là, quand je vous écoute, bon,
j'aime bien le volet, là... potentiellement, vous avez raison, il y en a un, en
réalité, qui est déposé, 34 barils par jour. Donc, si c'est pour s'éviter des
problèmes, considérant que c'est assez à la marge comme prétention, alors on
verra, on discutera ici, puis avec nos aviseurs juridiques.
• (18 h 20) •
Mais est-ce que j'entends bien quand même,
vous, vous nous dites : L'indemnisation, là, puis c'est de manière assez
éclairée, là, doit permettre d'éviter le plus possible... Bien, alors, c'est un
équilibre, puis là, je vais dire... je vais l'interpréter comme un équilibre.
Plus... c'est sûr que si demain matin, on disait : Ça va être x milliards
de dollars, là, des montants faramineux, bien, certainement qu'il n'y aurait
pas beaucoup d'arbitrages qui se ferait, puis ça serait "Take the money
and run". Si c'était rien, ça va être la fin du monde. Mais moi, en tout
cas comme ministre, comme membre du gouvernement, je veux être présentable,
mais je vais accepter, en fin de compte, les recours. Je veux être... je veux
dire, on est de bonne foi. On fait une proposition. Mais je ne serai pas prêt à
faire, en fin de compte, puis peux être que peut-être que mes collègues sont
prêts à le faire, on a eu une discussion, mais à faire, en fin de compte, une
espèce de surenchère : Oui, bien, je pense qu'à ce niveau-là... moi, je
pense qu'on est au bon niveau. Vous le dites, c'est six ans, certains frais, il
y a... le mieux qu'ils peuvent faire c'est récupérer les billes pour six ans, il
n'y a pas de gain, il n'y a pas... bon, "that's it". Peut-être pour
un projet, quand vous dites la JVM, parce que là il y aurait une démonstration.
Mais moi, c'est ce que je propose à l'intérieur du projet de loi puis c'est ce
qu'on aura l'occasion de discuter.
J'aime bien aussi quand vous mentionnez,
bien, on parle d'investisseurs. Puis c'est vrai qu'ici, là, on avait une autre
présentation avant vous, là, qui était un peu moins, comment je dirais ça, pas
moins heureuse, mais plus difficile à tout le moins. Mais, tu sais, à la fin si
ça avait été des droits immobiliers pour un camping qui avait été octroyés par
le gouvernement, bien, c'est encore le gouvernement qui a octroyé ces
droits-là. C'est-à-dire qu'on a une responsabilité, comme gouvernement, on a adopté
des lois, des règlements, puis on a octroyé. Bon, peut-être qu'on n'aime pas
nécessairement, pour certains, la nature de l'industrie, mais ça infère quand
même le fait que l'investisseur, lui, s'est investi légalement parce qu'on lui
a permis de venir, avec nos lois et règlements. Donc, si des fois il faut
peut-être faire un peu fi de qu'est ce qu'ils font, parce que ça peut nous
toucher au coeur, mais à la fin, on a une responsabilité aussi comme État,
comme gouvernement, d'avoir mis des lois et des règlements qui permettaient de
poser des gestes, et les gens l'ont fait de manière légale. Donc, encore là,
moi, je pense qu'on doit trouver le juste milieu. Maintenant, j'ai tout dit ça.
Donc, pour vous, est ce que ça serait impensable qu'il n'y ait pas d'indemnisation?
M. Ouellet (Richard) : Écoutez,
ma position d'expert, là, je parle comme l'expert qui connaît le droit des
investissements, ma conscience citoyenne, c'est que j'aimerais donc ça que ça
ne coûte rien à mon gouvernement. Ma position d'expert, c'est de dire : Ne
pas verser d'indemnisation, bien, vos procureurs vont se retrouver devant les
tribunaux à répétition, puis tout le monde va s'essayer en disant : Le
gouvernement du Québec ne m'a rien donné, je ne peux pas croire, puis ce n'est
pas de même que ça marche d'habitude. J'avais des permis qui m'ont été donnés
par l'État. Dans certains cas, même, l'État a été partenaire avec moi. Puis là
on me dit, du jour... bien, pas du jour au lendemain, mais en tout cas, dans le
cadre d'un projet de loi on me dit : Tiens, c'est fini. Ce que tu avais
comme...
M. Ouellet (Richard) : ...d'affaires
comme activité... entreprise, c'est terminé. Mais normalement on est indemnisés
dans ces cas-là. Puis la loi est bien écrite là-dessus, on a soigneusement
évité de dire que c'est une l'expropriation, parce que je pense que, si jamais
on se retrouve en cour, on pourra prétendre que ce ne sont pas des
expropriations. Donc, là-dessus, la loi est bien écrite, me semble-t-il. Mais
essayer de ne pas indemniser personne, ça me semble utopique. Donc, pour
répondre... La réponse courte à votre question, c'est : je ne pense pas
que ce soit possible d'indemniser personne, il faut en donner.
M. Julien : Parfait.
Puis, quand je vous écoutais au regard du projet de loi qui est devant vous,
que vous avez regardé, est-ce que je décodais que, selon vous, le processus
d'indemnisation prévu à la loi est dans la bracket de pas généreux, dans votre
perception?
M. Ouellet (Richard) :
Moi, je pense qu'il est dans une bracket qui correspond assez bien à l'état de
l'industrie au Québec. Parce que c'est quoi, l'état de l'industrie au Québec?
C'est des gens qui avait des permis, c'est des gens qui ont eu des frais. C'est
des gens qui ont eu des opérations, mais ce n'est pas des gens qui ont eu des
gisements exploitables. Alors, on l'a dit : Bien, on va vous rembourser
les dépenses que vous avez faites, mais des expectatives de profits, bien, vous
n'en avez pas. Un peu comme ça a été dit avec le témoin avant moi, si c'était
le pactole, il aurait fallu nous le dire avant. Donc, moi, je dirais tout
simplement, pour être tout à fait dans l'état du marché puis de la pratique, je
dirais... je maintiendrais le projet de loi tel qu'il est là, j'ajouterais
peut-être juste une petite ouverture en disant : Si jamais vous faites des
pertes... vous avez des pertes potentielles parce que vous, vous aviez un
gisement exploitable en date du, alors, mettons, le 19 octobre 2021, vous
aviez un gisement déclaré, exploitable, nous, on va reconnaître qu'il y avait
peut-être du commerce à faire avec ça, à vous, on ouvre cette porte-là. Alors,
la loi pourrait dire : Si vous aviez un gisement exploitable en date de,
vous, les pertes potentielles, on peut les envisager. Les autres, vous ne nous
avez rien déclaré. Si le billet de loterie était gagnant, bien, il fallait
passer au dépanneur avant, là.
M. Julien : Parfait.
Mais alors, maintenant que vous me dites ça, donc, tu sais, on a un gisement
qui est nommé exploitable, là, qui a des documents, là, 34... par jour, il y en
a un au Québec, là. Le reste, en réalité, bon, c'est 182 licences,
62 puits. Mais a contrario, parce que c'est vrai que j'entends aussi le
discours, là, puis je vous le dis, là, on entend le discours : Oui, mais
il savait qu'il n'y avait pas de bénéfice potentiel, bon. Il y a des gens qui
prétendent, en fin de compte, que c'était même un schème pour venir chercher de
l'argent. Moi, j'ai de la misère à croire à ça. Mais, à la fin, comme
gouvernement, je suppose qu'on a aussi une responsabilité. Parce que si ici
tout le monde prétend qu'il n'y avait pas de possibilité, on n'aurait pas dû
octroyer des droits.
M. Ouellet (Richard) : C'est
ça. Puis, si vous ne donnez rien... comment l'industrie risque de réagir?
Personne ne le souhaite, là. Je ne souhaite pas ce que je vais dire maintenant,
mais... personne... on ne veut pas ça. Mais qu'est-ce qui peut arriver? Il
pourrait arriver que certaines compagnies disent : Parfait, vous ne voulez
plus de moi? Je m'en vais. Oui, mais le puits? Ah! bien, le puits, arrange-toi
avec. Et... alors que là...
M. Julien : Oui, mais,
encore là, sur la notion de puits... Parce que le projet de loi,
M. Ouellet, le bout, comme comptable, que j'aime bien, c'est : Je
t'aide à fermer tes puits puis je te rembourse les frais. Moi, si tout le monde
se sauve demain matin, ça me coûte 44 millions, là.
M. Ouellet (Richard) : C'est
ça.
M. Julien : Ça fait
qu'en termes économique, là... O.K. Alors, tu sais, on a une enveloppe d'à près
d'une centaine de millions avec les frais d'exploitation, mais on ne rembourse
pas les frais d'exploitation s'il n'y a pas la fermeture du puits. Donc, quand
vous donnez cette expectative-là, bien, avec le programme actuel, on est quand
même... on mitige ce risque-là, mais celui qui voudrait s'en aller, bien, il
n'aura pas son remboursement, indemnisation sur les frais d'exploitation.
M. Ouellet (Richard) : C'est
ça. C'est ça. Tandis que là le projet de loi, qu'est-ce qu'il prévoit, au fond?
Il ne le dit pas comme ça, mais l'État dit : Je vais être partenaire avec
toi. Je vais payer 75 % de la facture. On va s'assurer que les choses se
font comme il faut, que les sites sont bien réhabilités. Je vais te rembourser
ce que tu as payé jusqu'à maintenant. Tu ne présentes pas le billet de loterie,
ça fait que tu n'avais pas gagné. On va bien fermer les choses. Et le Québec
est une juridiction où l'exploitation des hydrocarbures est terminée. Alors,
moi, je pense que c'est la bonne façon de faire. Il y a les deux petits ajustements
que je propose, mais pour le reste je pense qu'on est dans la bonne ligne.
M. Julien : Parfait,
merci. Je vais laisser mes collègues poser les questions. Merci, monsieur
Ouellet.
Le Président (M. Lemay) : Très
bien. Donc, monsieur le député de Lac-Saint-Jean, la parole est à vous.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) :
Oui, bonjour, monsieur. Écoutez, très intéressant de vous entendre. Puis,
entre autres, au niveau des indemnisations, je sais que vous êtes... vous avez
fait vos recherches, vous êtes quand même quelqu'un qui est un spécialiste en
la matière. Puis, avant d'aller vers vraiment où est-ce que je veux vous
amener, j'aimerais quand même... parce que vous parlez de l'indemnisation d'un
montant qui...
M. Girard (Lac-Saint-Jean) : ...qui
vous semble, dans les cadres, tout ça, mais vous avez parlé... s'il n'y en
aurait pas, d'indemnisation, toutes les procédures judiciaires qu'il pourra y
avoir, et je ne pense pas que vous avez évalué jusqu'à combien ça pourrait...
parce qu'on vit dans un monde... oui, comme citoyen, on ne veut pas, mais il y
a des lois, il y a des règles, puis on vit dans un monde réel aussi. Donc,
comment ça pourrait représenter? J'ose m'imaginer... juste en termes d'image,
là... Je ne sais pas, vous n'avez sûrement pas dû faire la démonstration,
mais...
M. Ouellet (Richard) :
Évidemment que je n'ai pas chiffré. Ça, c'est sûr. Par contre, comme juriste,
comme professeur de droit, ce que je peux vous dire, c'est que ce qui est
évident, c'est que vous allez avoir trois phénomènes.
Le premier, c'est que vous allez avoir des
entreprises qui vont dire : Si je suis indemnisée, je m'essaie devant les
tribunaux. Alors là, vos procureurs devant les tribunaux, avec ce que ça coûte,
puis on va finir par probablement payer une indemnisation. Vous avez des gens
qui vont mobiliser l'arbitrage international en vertu de l'ACEUM, qui mène à
l'ALENA, puis on va se retrouver là. Puis vous avez aussi vos procureurs au
ministère de l'Environnement qui vont probablement être obligés de poursuivre
certaines compagnies qui vont dire : Moi, le puits, je le laisse comme ça
puis je m'en vais. Puis vous allez être obligé de prendre des recours pour
dire : Ça ne marche pas de même. Referme ton puits convenablement. Vous
allez prendre des poursuites contre cette compagnie-là. Vous allez devoir
peut-être, dans certains cas, exécuter à leur place.
Alors, c'est l'ensemble de ces choses-là
qui risquent d'arriver s'il n'y a pas de programme d'indemnisation. Moi non
plus, je n'ai pas envie qu'on mette des fonds publics à donner à ces
entreprises-là. Mais la réalité du marché, la réalité des choses, la réalité du
fonctionnement des affaires dans ce secteur-là et dans le droit des
investissements, c'est ça.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) :
C'est intéressant. Puis vous mentionnez les règles internationales qui sont
assez complexes. Puis ça m'amène aussi sur un autre élément aussi, toute la
question de la réputation du Québec en termes internationaux. Et on sait entre
autres... puis ce matin je l'ai posée, cette question-là. Quand vient le temps
des énergies renouvelables, des projets aussi vers la transition énergétique,
hein, tout ce qui est de l'éolien, du solaire, on sait qu'on a besoin
d'investisseurs, des fois, des capitaux étrangers aussi. Puis je vous donne un
exemple, entre autres, dans ma région, Valeo, qui est une coopérative
d'éoliennes qui, sans des capitaux étrangers, n'aurait pas été en mesure de
réaliser ce projet, qui est extrêmement important. Donc, c'est toute la question
de l'image. Et, si... En y allant avec notre position au niveau des
indemnisations, bien, vous croyez... est ce que vous croyez que ça envoie quand
même une image positive à dire aux gens : Regardez, venez investir dans
notre transition énergétique?
M. Ouellet (Richard) : Ça
montre la recherche d'équilibre pour le législateur québécois, et c'est ça que
j'aimerais qu'on lise un peu plus dans la loi, notamment dans le préambule puis
dans certains énoncés de la loi, parce que je ne suis pas à votre place hein,
c'est vous qui... ça émane de chez vous, le projet de loi, ce n'est pas moi qui
l'ai écrit, mais ce que je constate, c'est une espèce de recherche d'équilibre.
Et cette recherche d'équilibre là, je l'expliciterais dans la loi. Je dirais
que ça a été ça, le... ça été une des lignes directrices de la rédaction de la
loi.
M. Girard (Lac-Saint-Jean) :
...
Le Président (M. Lemay) : ...nous
allons passer la parole au député de Bourget pour environ trois minutes.
M. Campeau : Merci,
monsieur, M. Ouellet... beaucoup apprécié votre présentation. Juste un
commentaire puis la question qui va suivre. Vous avez mentionné que, si quelque
chose avait été investi avant 2015, comme 2013, 2014, il y a des gens, ils
pourraient dire : Oui, mais ce n'est pas juste pour moi, je vais être
compensé. Je ne suis pas surpris de la rhétorique, mais ça me rappelle
plusieurs projets que j'ai connus qui étaient dans les centres de recherche...
étudiés pendant bien des années, et ça ne rimait à rien. Alors, je me suis
dit : Ça fait partie du risque de l'industrie. Il me semble que six ans,
dans ce cas là, quand même une industrie mature, il me semble que c'est
généreux. Mais je me demande si... J'ai bien l'impression qu'on s'ouvre trop, trop
en disant : On va exclure avant 2015, il me semble.
La question que j'aurais, c'est... Le CQDE
ce matin nous disait... nous parlait d'une possible prescription de droit
commun qui serait pour trois ans. Comment voyez-vous ça? Est-ce que vous voyez
ça comme applicable, pas une bonne idée, ou qu'est ce que vous en dites?
M. Ouellet (Richard) : Il
faudrait que j'y réfléchisse, hein? J'ai le plus grand respect pour le CQDE et
pour les gens qui ont témoigné devant vous. Donc, je réagis un petit peu à
froid, là. J'ai fait ma réflexion en les entendant. Une prescription, c'est
donner un effet juridique à l'écoulement du temps. Alors, il y a des
prescriptions extinctives, on perd un droit parce qu'on ne s'en est pas servi
pendant un certain temps. C'est le cas, par exemple, pour un recours, hein?
Vous aviez un droit de recours. Vous ne vous en êtes pas servi pendant trois
ans. Il n'y en a plus, de droit de recours. N'essayez pas d'aller devant le
juge, ça ne marche plus. Ça, c'est une prescription qui éteint un droit. Et
vous avez aussi des prescriptions acquisitives. Ça fait tant de temps que les
choses se passent comme ça, bien, ça vous donne un droit au fil du temps.
• (18 h 30) •
Là, ici, une prescription de trois ans, ce
serait pour retourner en arrière en disant : La loi vient de dire que...
18 h 30 (version non révisée)
M. Ouellet (Richard) : ...le
droit d'opérer ce que tu voulais opérer, puis par l'effet d'une prescription,
on va remonter juste trois ans, ça voulait dire qu'il y avait quoi? Il y avait
un droit d'action il y a trois... J'avoue que je ne saisis pas très bien la
dynamique, là, qui serait derrière ça. Pour moi, ce n'est pas tout à fait ça,
une prescription, mais je vous réponds avec beaucoup de bémols puis beaucoup de
réserves parce qu'Anne-Sophie puis Hugo sont des gens que je connais et pour
qui j'ai une immense estime. Ils ont certainement réfléchi à ça, mais sur le
coup, je n'ai pas très bien vu le raisonnement.
M. Campeau : Bien, ce qu'on
en... avec votre présentation, c'est qu'on a besoin d'avoir une base solide. On
pense l'avoir là, mais ce n'est pas pour rien qu'il y a des discussions, c'est
pour s'assurer qu'elle est solide. Puis deuxièmement...
M. Ouellet (Richard) : Mais
ma petite...
M. Campeau : ...bien, on n'a
pas avantage à aller devant les tribunaux si on peut l'éviter. Ceci dit, on
n'est quand même pas pour dire à tout le monde : On ne veut pas y aller,
on ne veut pas y aller, on a peur. Mais c'est quand même... la situation idéale
serait de ne pas avoir à y avoir recours. Je me répète pas mal avec le verbe
avoir, là, O.K. Bien, je vous remercie beaucoup de votre présentation. Je pense
qu'il ne reste plus de temps de toute façon, hein?
Le Président (M. Lemay) : Exactement.
Donc, sur ce, nous allons passer au porte-parole de l'opposition officielle. M.
le député de Mont-Royal—Outremont, la parole est à vous.
M. Arcand : Merci beaucoup,
monsieur le Président. Et bonsoir, monsieur Ouellette.
M. Ouellet (Richard) : Bonsoir.
M. Arcand : Très heureux
pour... de vous entendre ce soir. Vous amenez effectivement des points qui sont
intéressants et qui nous amènent évidemment à réfléchir de façon importante
parce qu'on parle quand même de possibilités de beaucoup d'argent dans ça. On
parle de compensations, on parle de situations délicates, difficiles.
Vous qui avez quand même une expertise sur
le plan du droit international, est-ce que vous avez fait des vérifications
pour savoir s'il y avait une situation dans certains États dans le monde qui
pouvait se comparer un peu au Québec? Est-ce qu'il y a des États qui ont dit :
Nous, on ne veut plus d'hydrocarbures, qui ont été obligés de s'entendre avec
les entreprises? Est-ce que vous avez des cas ou avez entendu parler de cas
spécifiques à ce niveau-là?
M. Ouellet (Richard) : Non.
Je vais être très honnête avec vous, ce n'est pas le genre de recherches que
j'ai menées. Ce que j'ai surtout vérifié, c'est à la lumière de l'affaire Lone
Pine en droit international. C'est cet arbitrage qui est maintenant pendant
puis pour lequel on attend la décision prochainement. Je suis surtout soucieux
de savoir : Est-ce qu'on va reconnaître un argument du Canada dans
l'affaire Lone Pine? Je pense que c'est vous, plutôt aujourd'hui, qui
l'évoquiez en disant que Lone Pine avait poursuivi le gouvernement du Canada.
Est-ce qu'on va reconnaître l'argument
canadien qui dit : On n'est pas, ici, devant une expropriation? On a
utilisé des pouvoirs publics, sans discrimination, dans l'intérêt public pour
atteindre un objectif, ici, de protection environnementale, protection de la
qualité des eaux, etc., et donc, ce n'est pas considéré comme une
expropriation. Donc, ça ne donne pas lieu à de l'indemnisation. Si l'affaire
Lone Pine devait mener à ça, là, il y aurait un argument pour les gens qui
disent : Il ne faut pas indemniser du tout. Mais ce un argument parmi
d'autres parce que j'insiste sur le fait qu'en droit des investissements, tout
est jugé beaucoup au cas par cas. Et si vous cherchez de la jurisprudence, si
vous cherchez des arbitrages qui disent : Blanc, noir, bleu, rouge, vert,
vous allez toujours en trouver. Il y en a pour tout le monde et pour son père,
dans l'arbitrage en droit des investissements. Donc, ce qui est intéressant de
voir, c'est comment Lone Pine va se régler, puis comment ça doit nous inspirer,
nous, au Québec.
M. Arcand : Êtes-vous en
train de me dire qu'avant de mettre ses critères, le ministre devrait attendre
la décision sur Lone Pine à ce moment-là?
M. Ouellet (Richard) : C'est
très embêtant parce que si la décision dans Lone Pine ne nous aide pas, on va
être dans de beaux draps.
M. Arcand : O.K., très bien.
Vous avez dit que vous aviez beaucoup de respect pour le Centre québécois de
l'environnement, mais ce que je comprends, vous dites : Écoutez, des
obligations à une indemnisation, c'est pratique courante en matière
internationale. Le Centre québécois de l'environnement est d'avis contraire, il
pense que l'indemnisation n'est pas une obligation légale. Alors, à votre avis,
pourquoi le Centre québécois de l'environnement a tort?
M. Ouellet (Richard) : Ah!
Bien, en fait, ils ont raison quand ils affirment une chose, c'est qu'il y a
désormais des accords de libre-échange, par exemple, l'accord de libre-échange
que nous avons avec l'Union européenne, qui dit bien un peu ce que j'énonçais
tout à l'heure. Si on a affaire à une mesure prise dans l'intérêt public, sans
discrimination, en vue d'atteindre un objectif légitime, ça peut fort bien ne
pas être considéré comme une expropriation et une... quand ce n'est pas une
expropriation, il n'y a pas d'indemnisation, donc on n'a pas à indemniser.
Ce raisonnement là du Centre québécois du
droit de l'environnement, il a ses fondements, il a ses sources, il est très...
M. Ouellet (Richard) : ...cela
étant, ce n'est pas tout le monde qui voit les choses comme ça en droit des
investissements.
Et je dirais qu'au plan pratique, il est
évident que des investisseurs vont mobiliser de la jurisprudence, puis des
arbitrages qui disent : Tu as le droit d'être indemnisé, on va appeler ça une
expropriation, allons devant des arbitres, allons devant un juge, puis
réclamons, puis le gouvernement du Québec ne t'offre rien, alors, il faut absolument
se battre. Et c'est sûr que ça va arriver si le gouvernement du Québec n'offre
rien. Et ces gens-là n'auront rien à perdre, dans le sens où je veux payer un
peu mes avocats, puis je vais aller faire un gain. Là, au moins, avec un
programme d'indemnisation, il y aura un nombre important, me semble-t-il,
d'entreprises qui diront : Écoute, sans se battre, là, on va aller discuter
avec le comptable externe, qui est prévu dans la loi, on va recevoir un chèque
sans avoir à embaucher des avocats, puis se retrouver devant le juge ou devant
les arbitres, réglons ça au plus simple, puis allons-y comme ça. C'est pour ça
que je pense que le programme est bien.
M. Arcand : Ce que... Je
crois avoir bien entendu M. Tetrault, tout à l'heure, qui semblait indiquer,
évidemment, que les montants n'étaient pas évidemment ceux à quoi les
industries s'attendaient, évidemment. On comprend aussi qu'un gouvernement a
une responsabilité de gérer de façon responsable les deniers publics. Je sais
que le ministre nous dit : Écoutez, il faut mettre des critères. Ce sur quoi...
On ne peut pas être en désaccord avec ça. Mais la réalité, c'est que les
entreprises, de façon générale, d'après ce que j'ai entendu il y a environ 15,
20 minutes, là, j'ai l'impression que les entreprises n'accepteront pas
nécessairement les offres du gouvernement. Et à partir du moment où on a quand
même un nombre assez considérable de permis, les choses risquent de durer très
longtemps.
M. Ouellet (Richard) : Oui.
Ma vision des choses...
• (18 h 40) •
M. Arcand : Je ne veux pas
être pessimiste, là, mais on s'entend que ça... il risque d'y avoir
véritablement, là, un débat qui est... qui risque d'être assez long.
M. Ouellet (Richard) : Oui.
Je pense que la position qu'a pris le représentant de l'Association gazière...
pétrolière et gazière du Québec visait beaucoup aussi à balancer l'ensemble des
autres témoignages que votre commission a entendus, la position que prennent
certains des députés, qui disent : Il ne faut pas mettre un sou. Alors, lui
arrive avec sa demande... Il faut savoir que, dans cette industrie-là, c'est
plutôt courant que d'arriver avec des quantums, donc des demandes chiffrées,
extrêmement gonflées. Rien que dans l'affaire de Lone Pine, il faut savoir que
la poursuite a commencé à 250 millions, puis ils ont eux-mêmes baissé à
119 millions, puis on peut s'attendre à ce que, si, éventuellement, ils
gagnent, ce qui n'est pas du tout évident, ils vont toucher quelque chose comme
une dizaine de millions. Alors, entre le montant de base demandé au début, puis
le mandat qu'ils toucheront, ils ont multiplié par 25.
Alors, le chiffre du milliard qui a été
évoqué plus tôt, cet après-midi, me semble farfelu. Et je pense que le rôle,
peut-être, de quelqu'un qui représente cette industrie-là, c'est de dire :
Mettez assez d'argent. Puis c'est ça, sa stratégie, pour qu'éventuellement, les
entreprises récupèrent un peu. Je ne crois pas beaucoup au fait que ces
entreprises-là vont systématiquement se retrouver devant les tribunaux. Ce sont
des gens d'affaires, qui sont pragmatiques, et quand on leur offrira un
programme d'indemnisation qui couvre les frais encourus, je suis convaincu
qu'un nombre important de ces entreprises-là va dire : On va éviter d'aller
devant les tribunaux, avec les délais et les coûts que ça suppose.
M. Arcand : Est-ce que je me
trompe... je ne suis pas avocat... est-ce que je me trompe en disant que, quand
on a des poursuites comme ça, qui sont des montants, je dirais, farfelus, entre
guillemets, que ce n'est pas très bon? Moi, on m'a toujours expliqué... les
avocats que j'ai eus ont toujours expliqué que, quand on décide de faire une
poursuite, il faut mettre le plus possible les justes coûts, parce que, si, à
un moment donné, vous mettez trop, ce n'est pas vrai que vous allez aller
chercher plus. Au contraire, ça enlève de la crédibilité à votre poursuite.
Est-ce que vous êtes de cet avis-là?
M. Ouellet (Richard) : Je
suis de cet avis pour l'essentiel des recours juridiques, tels qu'ils
s'exercent de façon normale. Mais dans le secteur du droit des investissements,
on a vu souvent des demandes artificiellement gonflées de façon très
importante.
M. Arcand : D'accord.
M. Ouellet (Richard) : La
jurisprudence, je pourrais vous la citer, mais le temps ne le permet pas, là.
Mais il y a eu plusieurs cas où on a demandé de multiples fois le montant qui
était réaliste.
M. Arcand : Quand M. Tetrault
est intervenu, il a parlé de l'image, à l'international, du Québec, que cette
façon de faire d'un gouvernement, ça pouvait être nuisible au niveau de...
M. Arcand : ...l'image
internationale du Québec. J'aimerais avoir votre avis là-dessus.
M. Ouellet (Richard) : Je
pense qu'il faut avoir un souci de l'image du Québec. Ça me semble évident. Je
ne crois pas, contrairement à ce qu'il a énoncé, je ne crois pas que l'image du
Québec soit déjà ternie par le projet de loi. Je ne crois pas à ça. Je pense
que l'exercice auquel se livre l'Assemblée nationale, par la commission, par
les travaux que vous faites, montre que nous sommes des interlocuteurs sérieux
au Québec et qu'on va arriver avec une loi équilibrée, et c'est ça que les
investisseurs observent. Ce qui est très important pour les investisseurs,
c'est la prévisibilité. Est-ce que, si j'investis dans cette juridiction-là, je
saurai à quoi m'en tenir, je saurai quelles sont les conditions dans lesquelles
je pourrai avoir mes affaires? Quant aux autres gouvernements, ce qu'ils
observent, c'est le processus démocratique, c'est la transparence, et ça, Dieu
sait qu'au Québec nous sommes des leaders là-dedans. Donc, je ne vois pas très
bien en quoi l'image du Québec serait déjà souillée, là. C'est quelque chose
que j'avoue, là, ne fait pas partie de mon écran radar. Je ne vois pas très
bien à quoi on réfère quand on dit ça.
M. Arcand : O.K. Une de mes
questions porte également... Parce qu'on a toujours vu le secteur pétrolier et
gazier un peu comparable au secteur minier. Or, dans le secteur minier, il y a
déjà eu des compensations qui ont été données à des entreprises qui, pour
toutes les raisons du monde, se sont vues retirer le permis. Est-ce qu'à votre
avis on est dans des situations qui peuvent être similaires?
M. Ouellet (Richard) : Oui,
et c'est la pratique d'un gouvernement, comme le gouvernement du Québec, que
d'indemniser. Ça s'est manifesté dans le contexte minier. Alors, tout le monde
s'attend à ce que ce soit sensiblement la même chose dans d'autres domaines. Il
y a des activités qu'on ne veut plus sur notre territoire. Il y a des gens qui
avaient investi, avec des permis donnés par l'État ou, dans certains cas, même
l'État était partenaire. Il est normal et habituel qu'on verse une indemnité,
qu'on veut la plus petite possible, mais qu'on verse quand même.
M. Arcand : Mais est-ce que
les...
Le Président (M. Lemay) : En
conclusion, en conclusion.
M. Arcand : Oui, oui. Oui.
Alors, certain, je vais terminer là dessus, certain des montants qui ont été
versés dans les cas de règlement minier, est-ce que ça peut avoir, à votre
avis, une influence sur des règlements futurs dans le domaine des entreprises
pétrolières?
M. Ouellet (Richard) : Ça
pourra éventuellement être un guide, oui. Je ne suis pas au courant des
chiffres, je n'arrive pas... je ne pourrais pas vous dire que je connais les
chiffres versés, mais c'est sûr que c'est un guide.
M. Arcand : Très bien. Merci
infiniment, monsieur Ouellet.
Le Président (M. Lemay) : Merci,
Monsieur Ouellet. Et, sur ce, je cède maintenant la parole à la députée de
Sainte-Marie-Saint-Jacques pour environ 2 minutes 45.
Mme Massé : Merci, Monsieur
le Président. Bonsoir, monsieur Ouellet.
M. Ouellet (Richard) : Bonsoir.
Mme Massé : En fait, vous me
voyez bouleversée, bouleversée de parler du droit des investissements versus le
droit de nos enfants d'avoir une planète viable. J'en ai de la misère à
respirer. Ceci étant dit, j'ai deux minutes et j'ai deux questions. Une
première, le CQDE nous dit que l'Assemblée nationale du Québec est souveraine et
elle peut donc dire qu'on retire des biens sans indemnisation, à condition que
ce soit clairement écrit dans la loi, que son intention soit claire. Je vais
vouloir vous entendre là-dessus. Et l'autre élément, vous nous parlez de...
C'était sous l'accord de libre-échange de l'ALENA. Maintenant, on est rendus à
l'ACEUM. Et le même CQFD nous dit que, selon lui, l'ACEUM ne prévoit pas
désormais le type de recours utilisé par... au Canada. Ce n'est pas dans
l'ACEUM. Alors, j'aimerais vous entendre sur ces deux choses.
Le Président (M. Lemay) : Oui.
Merci. Alors, je répondrais d'abord à votre deuxième question. Ce que dit le
CQDE est juste. Cela étant, l'ACEUM prévoit aussi à son annexe 14-C que,
jusqu'au 1er juillet 2023, un investisseur qui a investi pendant l'avis de
l'ALENA peut encore exercer un recours. Donc, jusqu'au 1er juillet 2023,
une compagnie minière pourrait dire : Je me prévaux du chapitre 11 de
l'ALENA et j'exerce le même type de recours que... Et c'est ça qui est prévu dans
l'ACEUM. Cela étant, il est vrai que pour la suite des choses, l'ACEUM ne
prévoit pas le recours investisseur-État.
Pour votre première question, sachez que
je suis entièrement d'accord avec vous. Moi aussi, je suis un père de famille.
Entre le droit à la santé puis à un environnement sain de mes enfants puis le
droit des investisseurs, le choix est vite fait, puis ce n'est pas les
investisseurs. Puis, encore une fois, comme je disais, au début de mon
intervention, ne tirez pas sur le messager, je suis juste venu dire :
C'est quoi l'État du droit international sur ces enjeux-là? C'est sûr qu'il y a
des compagnies qui vont s'essayer si on...
M. Ouellet (Richard) : ...ne
leur donne pas quelque chose
Mme Massé : Et donc notre...
Ah! il ne me reste plus rien. C'est très...
Le Président (M. Lemay) : Mme
la députée de Sainte-Marie-Saint-Jacques, il vous reste 20 secondes si
vous voulez.
Mme Massé : Oh!
20 secondes. Je pensais que, ça, ça voulait dire «plus rien».
20 secondes.
Alors, ce que ça veut dire c'est comme
législateur, c'est comme État dûment élu, on est obligé de se plier devant
cette logique-là, alors que dans Lone Pine, le Canada nous dit que c'est
possible de se tenir debout dans la mesure de... dans l'intérêt public. Alors,
moi, je pense que je comprends que nous pouvons aller vers une
non-indemnisation en se tenant debout pour nos enfants.
Le Président (M. Lemay) : Merci.
Ceci termine ce bloc. Et nous passons maintenant la parole au député de
Jonquière.
M. Gaudreault : Oui.
Alors, bonjour, M. Ouellet. On s'est déjà connu dans une autre vie.
M. Ouellet (Richard) : Oui,
c'est ça.
M. Gaudreault : Ça me
fait plaisir de te revoir.
M. Ouellet (Richard) : Plaisir
partagé.
M. Gaudreault : Alors,
je vais me permettre cette familiarité. Le droit, tu sais, dans le fond, il y a
deux manières de voir ça. On peut dire : C'est comme ça que ça marche. Il
y a les précédents. Il y a la doctrine. Mais on peut le voir aussi comme
étant... Bien, on fait du droit nouveau. Puis là on fait de façon raisonnable,
en mesurant bien comme il faut, comme nous sommes des parlementaires
raisonnables, puis on fait du droit nouveau, et ça existe aussi. Donc, dans le
fond, là où il y a un point commun entre ton avis et celui du CQDE, c'est que
tout dépend d'une volonté politique, mais ce n'est pas interdit en soi de ne
pas indemniser.
M. Ouellet (Richard) : En
fait, je pense que c'est vrai de dire qu'en définitive, c'est un choix
politique. Si on suit, par exemple, cet avis-là en disant, le droit qui est en
train de s'écrire nous dit : On n'a pas à indemniser. On peut le faire. On
peut le faire.
Cela étant dit, moi, j'y vois deux
inconvénients. Le premier, c'est que ça me semble inévitable que les
compagnies, représentées par le témoin qui est venu avant moi à la commission,
ils vont s'essayer devant les tribunaux. Puis là ça nous coûte combien en
avocat? Puis ça nous coûte combien en arbitrage? Puis ça prend combien de
temps? Puis c'est quoi le trouble qu'on a? Puis c'est quoi l'incertitude autour
de ça?
Puis le deuxième inconvénient, c'est que
vous ayez des gens à l'étranger qui regardent ça de loin, hein, à notre époque
de médias sociaux où on regarde tout en 20 secondes, puis qu'ils
disent : Ah! au Québec, ils ont on fait ça comme des cowboys.
• (18 h 50) •
M. Gaudreault : Oui,
mais tantôt, vous...
M. Ouellet (Richard) : C'est
cette image-là qui pourrait rester, tu sais.
M. Gaudreault : Mais en
même temps, tantôt, tu disais : Ça ne ternit pas nécessairement l'image
internationale. On n'a pas l'air nécessairement des cowboys dans la mesure où
c'est bien fait. On n'est pas une république de bananes. On n'est pas une
dictature.
M. Ouellet (Richard) : C'est
sûr.
M. Gaudreault : Donc,
on travaille de façon démocratique. Et, bien, en gros, c'est ça, là, que je
voulais voir avec toi.
M. Ouellet (Richard) : Oui.
Bien, en fait, moi, je pense que l'approche qui est prise dans le projet de
loi, c'est une approche, comme je le disais, un peu d'équilibre, c'est à dire
un message très clair quant à la fin des hydrocarbures au Québec - en tout cas,
pour ce qui est de la production - puis une indemnisation, une certaine
collaboration, si on veut, avec les investisseurs étrangers.
M. Gaudreault : Mais un
mot...
M. Ouellet (Richard) : Mais
on peut jouer la carte du... aussi.
M. Gaudreault : Oui, un
mot, parce qu'il reste 15 secondes, là. Mais tant qu'à ça, moi, j'ai
l'impression qu'ils vont... ils risquent de poursuivre pareil. Alors, est-ce
qu'on n'est pas mieux de s'affirmer clairement puis dire : Il n'y en aura
pas d'indemnité, puis on se verra en cour.
M. Ouellet (Richard) : Si
on décide de jouer cette carte-là, ma crainte, c'est qu'ils vont tous s'essayer
parce qu'ils n'auront rien à perdre. Puisque, de toute façon, le gouvernement
m'offre zéro, je vais payer un peu un avocat, puis c'est sûr que je vais aller
au moins chercher quelque chose, un petit quelque chose, puis...
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup...
M. Ouellet (Richard) : ...les
membres du Barreau vont être contents.
Le Président (M. Lemay) : Merci
beaucoup, M. Ouellet pour votre contribution aux travaux de la commission.
Et la commission ajourne maintenant ses
travaux jusqu'à demain, mercredi, le 23 février 2022, après les affaires
courantes, où elle poursuivra les auditions publiques sur le projet de loi
numéro 21. Merci. Au revoir.
(Fin de la séance à 18 h 53)