(Quinze heures deux minutes)
Le Président (M. Iracà) : À l'ordre,
s'il vous plaît! Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de Commission
de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles
ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission
est réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et auditions publiques dans le cadre de l'étude du livre vert
intitulé Orientations du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles en matière
d'acceptabilité sociale.
Alors, Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements aujourd'hui?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme D'Amours (Mirabel) est remplacée par M. Surprenant (Groulx).
Auditions (suite)
Le
Président (M. Iracà) : Il va peut-être arriver plus tard, c'est ça?
Excellent, il n'y a pas de problème. Alors, nous entendrons cet après-midi la Fédération québécoise des municipalités,
l'Union des producteurs agricoles, M. Pierre Batellier et l'Association
canadienne de l'industrie de la chimie.
Alors, je
souhaite, bien évidemment, bienvenue à nos premiers invités. Merci de vous être
déplacés à l'Assemblée nationale.
Pour les fins d'enregistrement, je vous demanderai de bien vouloir vous
présenter. Je vous rappelle que vous disposez
de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la
période d'échange avec les membres de la commission. Alors, messieurs,
la parole est à vous.
Fédération québécoise
des municipalités (FQM)
M. Lehoux (Richard) : Merci. Richard
Lehoux, président de la Fédération québécoise des municipalités. M'accompagnent M. Patrick Émond, directeur des
politiques à la FQM, ainsi que M. Farid Harouni, conseiller politique.
Alors, M. le Président, M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources naturelles, les distingués membres de la Commission sur l'agriculture, les pêcheries,
l'énergie et les ressources naturelles, je remercie la commission d'avoir
invité la FQM à partager le point de
vue de ses membres sur le livre vert intitulé Orientations du ministère de
l'Énergie et des Ressources naturelles en matière d'acceptabilité
sociale.
La Fédération québécoise des municipalités
représente les intérêts de quelque 1 000 municipalités locales et régionales dans toutes les régions du Québec. Notre
mission est de soutenir les municipalités dans leurs champs de compétence actuels et futurs et de conjuguer les
forces des territoires pour assurer le développement durable de toutes
les régions du Québec.
D'entrée
de jeu, nous tenons à rappeler l'importance que les élus accordent à
l'acceptabilité sociale. Le développement des ressources naturelles tient une place très importante dans
l'économie de plusieurs MRC et municipalités membres de la FQM. Le processus d'information et de
consultation des communautés touchées par ces projets est essentiel pour
en assurer le succès. À ce titre, nous
saluons la volonté du gouvernement d'échanger avec les communautés locales des
projets de développement énergétique et minier.
Les secteurs énergétique et minier constituent
un extraordinaire moteur de développement pour toutes les régions du Québec. Dans ce domaine, la FQM attend
du gouvernement que le milieu municipal — et en particulier les MRC — soit impliqué activement dans la gestion et
la planification des activités énergétiques et minières et dans l'élaboration
des conditions d'implantation de leur activité. Fortes de l'expérience acquise
dans l'aménagement du territoire depuis plus
de 35 ans, les MRC ont démontré qu'elles sont en mesure de planifier leur
territoire dans une optique de
développement durable. Les compétences en matière de développement local et
régional ont d'ailleurs été rapatriées à
l'échelle de la MRC l'année dernière.
Le gouvernement ne doit pas faire l'erreur de travailler en vase
clos. Il est impératif que tout projet soit, en premier lieu, cohérent
avec la planification et le schéma d'aménagement des MRC.
Un facteur
clé de l'acceptabilité sociale est la consultation publique. Nous, les élus municipaux,
consultons nos populations et connaissons notre monde et nos territoires.
Nous avons les deux pieds sur le terrain tous les jours avec eux. Encore aujourd'hui, les élus municipaux sont parfois les
derniers informés d'un projet sur leur territoire. Trop souvent encore, nous devons modifier nos schémas pour nous conformer aux
intentions du gouvernement. Tel qu'exposé dans notre livre bleu pour une gouvernance de
proximité, la planification et l'aménagement du territoire,
c'est notre responsabilité, elle doit être respectée.
J'ajouterais également
qu'un effort devrait être fait en matière de partage de l'information entre les ministères. Souvent,
nous fournissons les mêmes données à trois ministères différents alors
que toute l'information est déjà disponible au ministère
des Affaires municipales et de
l'Occupation du territoire. La mise en oeuvre des recommandations du rapport Perrault permettrait de réduire les charges pour les
municipalités et faciliter l'action gouvernementale.
Ceci étant dit, en matière de gestion et développement de territoire,
le ministère de l'Énergie et des
Ressources naturelles a un rôle de premier plan à jouer. L'information est un élément crucial lorsqu'il est question d'acceptabilité sociale pour les projets de toute nature. Évidemment, cette réalité est
encore plus importante lorsqu'il s'agit du développement de nos ressources
naturelles. À ce titre, la FQM est
d'avis que le ministère doit faciliter l'accès à l'information sur les différents projets pour les élus municipaux. Cet accès est un
élément clé d'acceptabilité à chacune des étapes de développement des projets énergétiques ou miniers. La FQM recommande au ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles
de transmettre aux MRC et aux municipalités toute l'information sur les projets énergétiques ou miniers afin
de planifier et d'harmoniser l'ensemble des usages sur leur territoire.
En conséquence, la Fédération québécoise des municipalités demande au ministère de
l'Énergie et des Ressources naturelles d'arrimer les planifications des secteurs
énergétique ou minier aux objectifs du schéma
d'aménagement et de développement de chaque MRC concernée. En s'assurant de mettre en place les outils de communication et d'accompagnement performants, le ministère des Ressources naturelles marquerait des points cruciaux lors du déploiement de nouveaux projets
de développement.
La
FQM adhère à la proposition du livre vert visant à rendre plus transparents
et participatifs les mécanismes de planification et de consultation des usages dans les plans d'affectation du territoire
public. Toutefois, la FQM considère important d'impliquer les MRC et les municipalités concernées en
amont du processus d'élaboration des PATP afin de prendre en compte les enjeux de développement des milieux touchés et les préoccupations des citoyens et de limiter les conflits d'usage potentiels. Les MRC ainsi que les municipalités locales appliquent déjà ces mécanismes de planification participative
dans le cadre de l'élaboration de leurs schémas d'aménagement et de développement autant que pour la mise en place des plans d'urbanisme.
Impliquer
davantage les municipalités et MRC concernées lors du processus
d'élaboration de ces plans d'affectation du territoire public
permettrait de faciliter la prise en compte des craintes de citoyens et ainsi
limiter les conflits qui pourraient voir le
jour pendant le déploiement du projet. La FQM recommande également
d'élargir la portée des plans d'affectation
des territoires publics en intégrant les activités
énergétiques et minières afin de mieux prendre en compte les préoccupations
des MRC et des municipalités en amont d'éventuels projets... de développement
de projets miniers et énergétiques.
Bien
que les consultations tenues avant le début d'un projet soient
essentielles, il ne faut pas oublier la diffusion d'information et la cueillette de rétroaction pendant la mise en chantier du projet.
Un processus constant de communication avec les MRC et
les municipalités permettrait d'assurer de manière continue l'acceptabilité sociale d'un projet de développement. De plus, la FQM
croit que le ministère devrait financer et rendre disponibles des études
scientifiques visant à outiller les
collectivités et les citoyens. La FQM se questionne d'ailleurs
sur la pertinence de mettre en place par le ministère de l'Énergie et des Ressources
naturelles un bureau indépendant
d'analyse des retombées économiques et financières des projets majeurs.
• (15 h 10) •
Selon
nous, la multiplication des structures pourrait alourdir le processus
d'analyse quant aux impacts, aux retombées économiques et aux
répercussions des projets énergétiques et miniers. À cet égard, nous croyons
que le ministère de l'Économie, de la Science
et de l'Innovation pourrait, en collaboration avec le ministère de
l'Énergie et des Ressources
naturelles, produire ces analyses de
retombées économiques et financières des projets majeurs. De plus, le
ministère de l'Économie pourrait identifier les retombées socioéconomiques spécifiques au niveau régional afin d'améliorer la transparence
et la prise en compte des facteurs d'acceptabilité sociale dans l'analyse de
ces projets.
En
terminant, un partage équitable des bénéfices avec les communautés touchées est
un facteur déterminant de l'acceptabilité
sociale. Nous constatons que le ministère
de l'Énergie et Ressources naturelles inclut déjà cette réflexion sur le partage des bénéfices dans son livre vert.
Nous appuyons cette réflexion et croyons que le ministère doit prendre les moyens nécessaires afin de mettre en place des
mécanismes de partage des bénéfices avantageant les communautés locales.
D'une part, le gouvernement doit agir en cohérence avec l'accord de partenariat
Québec-municipalités signé l'automne dernier
concernant le partage des revenus. Cependant, il ne doit pas exclure un
mécanisme de compensation pour les
municipalités et les MRC touchées directement par les nuisances d'un projet.
Nous appuyons en cette matière le principe de pollueur-payeur visant à
atténuer l'impact sur les communautés d'accueil.
Alors, nous offrons à
M. le ministre toute notre pleine collaboration pour la poursuite de la
réflexion. Merci.
Le
Président (M. Iracà) : Alors, merci beaucoup, M. Lehoux. Nous allons
débuter maintenant la période d'échange avec la partie gouvernementale.
M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Arcand :
Merci, M. le Président. M. Lehoux, bienvenue parmi nous, de même que M. Harouni
et M. Émond. Je dois vous dire au
départ que la Fédération québécoise des municipalités est un joueur très
important, évidemment, pour nous
parce que très souvent, lorsqu'il y a des projets, ce n'est pas nécessairement
dans les grandes villes, c'est souvent dans des endroits où plusieurs de
vos membres s'y retrouvent.
Je
peux vous rassurer dès le départ, j'ai entendu vos commentaires sur toute la
question du bureau de projets que nous
voulons créer, votre inquiétude en disant : Est-ce qu'on va créer une structure
supplémentaire? Et je peux vous rassurer en vous disant au départ que ça va se faire, évidemment, avec les autres
ministères. Pour calculer les bénéfices économiques d'un projet, ça va se faire avec les Finances,
avec le ministère de l'Économie, etc. Donc, ce n'est pas, je dirais, un seul
ministère, il va y avoir une espèce de
bureau de projets dans lequel, évidemment, les Affaires municipales seraient
également impliquées à l'intérieur de ça. Donc, je peux simplement vous
rassurer sur cette question.
Maintenant, comme vous le savez, il y
a des plans d'action pour les schémas d'aménagement des MRC et le plan pour les territoires publics également. Comment
cette interaction entre les MRC et nous peut être bonifiée quand il s'agit
de ce que j'appellerais la conciliation des usages comme telle?
Le Président (M.
Iracà) : Alors, un de vous trois, M. Lehoux, M. Harouni ou
M. Émond.
M. Émond
(Patrick) : En lien avec la conciliation...
Le Président (M.
Iracà) : M. Émond.
M.
Émond (Patrick) : ...des
usages, je pense que, oui, M. le ministre, c'est très important.
Nous, je crois que, comme
vous l'avez mentionné d'entrée de jeu, il y a tout l'arrimage que l'on doit avoir en amont des
différents projets avec les schémas d'aménagement. Je pense que les MRC depuis, comme je le mentionnais, au-delà de
35 ans, font un exercice important de
planification et avec une vision globale du territoire. Pas nécessairement
juste en regardant les projets particuliers
en lien avec que ce soit l'exploitation des ressources naturelles ou autres,
mais avec une vision beaucoup plus globale de l'ensemble du territoire.
Sur
la question de comment est-ce qu'on pourrait concilier les usages, je pense
que, si on prend le temps, en amont de
projets, de s'asseoir ensemble avec le milieu, avec les municipalités et les
MRC concernées, il y a sûrement là une façon de faire, là, qui pourrait être établie en partenariat parce que, vous
savez, M. le ministre, c'est un mot que j'aime beaucoup utiliser parce qu'on a, dans notre nouvelle
entente, utilisé ce mot-là abondamment, et j'espère qu'on va le voir de plus en
plus, là, se mettre en place, qu'on
travaille en réel partenariat avec les élus locaux via leurs MRC respectives.
Je pense qu'on pourra établir lorsque
le temps sera venu... On est tout à fait, là, ouverts à regarder, là, comment
est-ce qu'on peut établir cette
relation-là pour cette conciliation des usages là. Je pense qu'en s'assoyant
autour d'une même table on va sûrement être capables de trouver une
solution. Parce qu'en impliquant aussi toutes les directions régionales, là,
entre autres, là, du ministère des
Ressources naturelles, mais aussi d'autres ministères... Parce que je pense
que, ce genre de projets là, il faut
les travailler vraiment, là, avec une plus grande ouverture possible, là, et ne
pas tomber, là, si vous me permettez l'expression, dans le panneau de
travailler en silo.
M.
Arcand :
Je dois vous dire que j'ai été surpris. Tout à l'heure, vous avez dit :
Encore aujourd'hui, il y a des entreprises qui viennent avec des projets
puis qui ne rencontrent pas les maires. Il me semble que...
M. Lehoux
(Richard) : Ils les rencontrent, mais après, M. le ministre.
M.
Arcand :
Ah! ils les rencontrent après. Avez-vous des cas à nous citer?
M.
Lehoux (Richard) : Ils vont rencontrer les citoyens et puis, après ça,
ils interpellent les élus. Et puis, entre-temps, bien, souvent, le citoyen a eu le temps de parler à l'élu, puis là l'élu,
il dit : Bien, de quoi vous me parlez? Je ne suis pas au courant,
là.
M.
Arcand :
Est-ce que vous avez une idée, pour vous, quel serait le meilleur processus de
départ lorsque quelqu'un arrive avec un projet? Est-ce qu'il le dépose
aux maires? Comment vous voyez ce scénario-là?
M.
Lehoux (Richard) : Bien, de un, il y a une autorisation qui doit être
demandée au ministère. Moi, je pense que
ça pourrait être le ministère qui fasse ce lien-là avec les élus, les
municipalités locales, les MRC pour déjà, là, mettre en amont des rencontres qu'il y aura sur le
terrain avec les différents propriétaires de... Là, je vais parler, là, de
projets, là, qui sont en secteur
privé. Là, c'est sûr que, lorsqu'on est en terres publiques, bien, je pense que
c'est vous qui êtes directement concernés,
mais le ministère, à notre point de vue, pourrait jouer ce rôle-là, d'être, là,
la transmission de l'information entre le promoteur du projet et la
municipalité, la MRC.
M.
Arcand :
M. Lehoux, vous avez une certaine expérience comme maire et au sein de la
Fédération québécoise des
municipalités, et, je dirais, depuis les cinq ou 10 dernières années,
inutile de vous dire jusqu'à quel point l'acceptabilité sociale, ça a été débattu de façon importante. À
travers l'expérience qui est la vôtre, quels sont les moyens, d'après vous,
les plus constructifs pour favoriser,
justement, ce dialogue? Est-ce qu'il y a vraiment des façons... Quand vous
regardez ce que j'appelle les
histoires à succès — parce
qu'on va essayer d'être positifs aujourd'hui — des projets qui ont fonctionné,
est-ce qu'il y a eu une façon de faire qui semblait plus évidente qu'une autre?
M. Lehoux
(Richard) : M. le ministre, moi, je pense que la première des
conditions, c'est la transparence, la transparence, là, de la part des
promoteurs de projets. Lorsqu'ils ont une idée, un projet pour un territoire x,
cette transparence-là avec le milieu. Je pense que, comme je le mentionnais,
vous pourriez être, là, l'interlocuteur entre les parties, mais on a eu... des histoires à succès, oui, il y en a eu, puis
je pense que la transmission de l'information la plus complète et la plus précise possible fait que le
projet va aller chercher cette acceptabilité sociale. Parce que, quand on parle
d'acceptabilité sociale, c'est tout, c'est
question de développement durable, question des retombées économiques qu'il
peut y avoir d'un certain projet. Et,
lorsqu'on est capables d'avoir le maximum d'information, nous, comme élus
municipaux... Parce que, je le
mentionnais tout à l'heure, on est les plus près du citoyen. Et, quand on a
cette information-là, bien, on peut aussi sécuriser nos citoyens, là,
dans cette orientation d'acceptabilité sociale.
Parce que moi, je ne suis pas le genre
d'individu à dire non à tous les projets, mais je veux bien les comprendre
pour être capable de bien les expliquer par
la suite aux gens, là, qui auraient certaines craintes, certaines oppositions.
Moi, je pense qu'il y a un élément
important, là, qui est incontournable, c'est la divulgation de toute
l'information possible, là, qui est
disponible, et en toute transparence, et le plus rapidement disponible pour les
élus locaux. Parce que, souvent, on l'a
vu, lorsque ça accroche, c'est parce qu'on est arrivé avec de l'information qui
est arrivée par la suite ou elle est arrivée par la bande. Ça, je pense que, si on oriente notre acceptabilité
sociale vers maximiser l'information qui arrive, là, dans le milieu, on est convaincus qu'on va être en
mesure, les élus municipaux... parce que je reste toujours convaincu qu'on
est, au premier chef, les premiers
interpelés, quand ça brasse, ça brasse au conseil municipal le premier lundi du
mois.
• (15 h 20) •
M.
Arcand :
Quand il y a eu l'entente Québec-Municipalités, et tout ça, évidemment, on a
augmenté, je pense, les redevances,
ça faisait partie de l'entente. Vous avez donc parlé, évidemment, du partage
des bénéfices, vous avez parlé que,
lors du pacte fiscal également, il y avait également question d'un mécanisme de
compensation pour les communautés d'accueil éventuellement pour...
Est-ce que vous pourriez me dire un peu ce que vous avez en tête quand on parle
de mécanisme de compensation? Ça, c'est ce
que je dirais si vous me permettez l'expression, c'est en sus, évidemment, des
ententes déjà...
M.
Lehoux (Richard) : Des redevances qui sont prévues dans l'entente
actuelle de partenariat avec les municipalités, oui. Un exemple concret, les chemins à double vocation, parce que c'est
souvent une problématique, là, qui intervient lorsqu'un projet s'implante. Les gens, là, vont exploiter la ressource,
puis peu importe de quel type elle est. À ce moment-là, les chemins à double
vocation seraient un élément essentiel à ajouter, en fin de compte, là, quand
on parle d'amener, là, des sommes
additionnelles pour compenser. Je pense que c'est... on a un exemple qui est
concret, là, actuellement puis qui se vit dans plusieurs régions du
Québec, là.
M.
Arcand :
Est-ce que vous diriez, de façon générale, que les entreprises se comportent
mieux maintenant qu'il y a cinq ans ou 10 ans? Est-ce qu'elles ont compris, en
général, le message ou si, encore, elles ont besoin d'un accompagnement
extrêmement serré au moment où on se parle?
M.
Lehoux (Richard) : C'est sûr, M. le ministre, qu'il y a eu, je pense,
une nette amélioration dans les dernières années. On a vu des projets se réaliser, et puis avec une nette
amélioration au niveau de l'acceptabilité sociale en lien avec ce que je mentionnais tout à l'heure, toute la
question de la transparence au niveau de l'information, mais il y a encore, là,
des fois, là, quelques récalcitrants, là,
qu'il faudrait peut-être qu'on encadrerait encore de façon un petit peu plus
précise, pointue, si je peux me permettre, certains éléments.
Entre
autres, là, quand on pense aux chemins à double vocation, c'est clair que,
lorsque les municipalités locales sont
aux prises à être obligées de faire la réfection de ces chemins-là et qu'elles
ont peu ou zéro aide, c'est clair qu'à un moment donné ce n'est pas
nécessairement juste au milieu où est-ce que la ressource est exploitée à
assumer ces frais-là, là, au niveau de cet
entretien additionnel qui est demandé par l'utilisation plus fréquente, là, du
réseau routier local, et tout ça, là. Ça fait que, ça, je pense que
c'est un exemple. Oui, il y a eu une nette amélioration, mais je pense qu'il y a toujours place, là, à continuer à
bonifier, là, cette approche-là par de la plus grande transparence au niveau de
l'information.
M.
Arcand :
J'ai une dernière question en ce qui me concerne. Le député de Sanguinet est un
économiste, et, vous savez, toute la
question des bénéfices économiques, parfois il y a des discussions. Il y a des
projets actuellement, par exemple, comme...
Énergie Est, à un moment donné, on entend l'entreprise dire : Écoutez,
vous avez des bénéfices de plusieurs milliards
de dollars dans ce projet-là. Puis il y a d'autres qui font des analyses et qui
disent : Écoutez, c'est 30 emplois. Il y a vraiment un décalage très important parfois lorsqu'on regarde la
façon dont les choses nous sont amenées. Et ma question, c'est : Pour vous, quels sont les éléments importants?
Quand on fait une analyse d'impact économique, pour vous, quels sont les éléments importants? Pour une
municipalité, est-ce que c'est de savoir le nombre d'emplois? Qu'est-ce
qui, pour vous, vous apparaît majeur là-dessus?
M.
Lehoux (Richard) : C'est sûr que toute la question de l'emploi, c'est
un facteur qui très important. Mais aussi c'est la raison pour laquelle on va dire : Il faut le regarder sous
un angle, là, beaucoup plus large que juste la... Oui, les retombées économiques directes, mais aussi, là,
celles qui peuvent, de façon plus indirecte, arriver aussi dans les milieux
parce que ça crée une activité,
l'implantation, là, de façon permanente, là, de l'exploitation de certaines
ressources naturelles. Pour ma part, là, au niveau de la fédération, je
pense que... À moins que Patrick, tu aurais un petit mot à ajouter?
M.
Émond (Patrick) : Bien, je pense, ce qui est important pour les
municipalités quand on parle de retombées économiques, c'est aussi pas juste les retombées positives, mais aussi
celles négatives. Pour une municipalité, il faut qu'elle sache, le projet, ça implique quoi aussi au niveau
de charges additionnelles. Si on regarde un projet comme Énergie Est, au niveau
sécurité, est-ce qu'il y a des ressources supplémentaires que ça va engager
pour la municipalité? Donc, comme ça,
à ce moment-là, on se trouve à avoir un portrait qui est complet des retombées.
Parce que ce n'est pas juste, seulement, des retombées positives. Il faut faire le décompte entre le positif et
le négatif, et, à ce moment-là, la collectivité a une idée juste du projet. Et ça soulève moins de doutes
parce que, quand on a juste un portrait positif du projet, on se dit :
Bien, ce n'est pas vraiment le portrait réel des choses.
M.
Arcand : Il faut, en fait, mesurer un peu ce que
j'appelle l'impact, là, des infrastructures locales. On a eu la mairesse de Port-Cartier qui est venue et qui nous
a expliqué qu'il y avait une rue qu'ils ont faite à un moment donné parce
qu'il y avait certains projets d'expansion,
et, aujourd'hui, cette rue-là n'est pas vraiment utilisée, il y a des maisons à
vendre un peu partout, et les coûts
ont été importants en termes d'aqueduc, d'égout et, enfin, tout ça.
Donc, je comprends très bien ce que vous voulez dire, mais tout ça doit
entrer en ligne de compte. C'est ça?
M. Lehoux
(Richard) : Exact.
M.
Arcand :
Très bien. Merci.
Le
Président (M. Iracà) :
Merci, M. le ministre. Alors, je vais céder la parole pour un temps restant de
3 min 30 s au député des Îles-de-la-Madeleine.
M.
Chevarie : Merci, M. le Président. Bienvenue à l'Assemblée nationale.
Merci pour vos réflexions. Par rapport à l'acceptabilité sociale, lors
de votre présentation, vous avez mentionné que les consultations publiques
étaient un facteur clé. Et, à cet effet-là, est-ce que votre regroupement,
association — la
fédération, en fait — a
des exigences particulières par rapport aux
promoteurs qui viennent dans les communautés de vos municipalités qui sont
membres de la fédération? Est-ce que
vous avez des exigences particulières? Est-ce que vous faites des
recommandations par rapport à ces exigences-là à vos municipalités?
M.
Lehoux (Richard) : C'est sûr que la base, c'est... il y a certaines
exigences qui sont déjà prévues, là, dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Puis, par la suite, les
municipalités et les MRC, par le biais des consultations, établissent eux-mêmes certaines règles, certaines
normes qu'elles doivent appliquer. Ça relève vraiment de chacun des territoires, là, à définir, là, au niveau de
l'acceptabilité de certains projets, quels paramètres ils vont mettre. Je vous
donne un exemple. Chez nous, quand il
y a une douzaine d'années, quand les premiers projets de développement éolien
sont arrivés, c'est sûr que la MRC
s'est positionnée avec l'ensemble de ses municipalités locales pour dire :
Bien, chez nous, la norme va être, je
ne sais pas, moi, 500 mètres d'une résidence et 1 500 mètres d'un
périmètre urbain, ce qui a été appliqué sur l'ensemble du territoire. À partir de cette base-là, bien, le
promoteur, lorsqu'il déposait un projet, bien, il était au fait qu'il avait cette exigence-là au départ à
respecter avant de nous déposer le projet. Ça fait qu'il arrivait avec une
information. C'est pour ça qu'on
dit : On doit être en amont, là, de la présentation publique au niveau des
projets pour que les promoteurs soient bien au fait, là, des
particularités que, là, on s'est données par territoire, puis elles peuvent
être différentes, là, d'une MRC à l'autre au Québec.
M.
Chevarie : Je comprends vos exigences au niveau des municipalités sur
le plan réglementaire, tout ça, mais, je
dirais, de façon plus pointue, par rapport aux promoteurs versus les
consultations publiques qu'il fait avec l'ensemble des citoyens ou des groupes représentatifs de la
municipalité, est-ce que vous avez des conditions comme telles que vous
soumettez à un promoteur?
M.
Lehoux (Richard) : Pas au niveau de la fédération. La fédération ne
s'ingère pas jusqu'à ce niveau-là. Je pense que c'est laissé, là, à la discrétion de chaque milieu de décider, là,
comment eux veulent travailler avec les promoteurs dans différents projets. Nous, il n'y a pas de
ligne directrice qui est donnée par la fédération, là, à nos membres, qu'ils
soient municipalité locale ou MRC, là.
M. Chevarie :
O.K. Une question peut-être plus générale.
Le Président (M.
Iracà) : 25 secondes, M. le député.
M.
Chevarie : Oui. Bon, je vais changer de question. Sur le plan de la
consultation, est-ce qu'on donne priorité au niveau local, ou au
régional, ou au national?
M.
Lehoux (Richard) : Je pense que le niveau local et régional, pour
nous, étant la MRC, ces deux-là, je pense qu'ils vont de pair. Ils vont se concerter entre eux pour, vraiment,
donner l'orientation qu'ils doivent apporter aux promoteurs des
différents projets.
Le
Président (M. Iracà) : Merci, M. Lehoux. Ceci met fin à la période
d'échange avec la partie gouvernementale. Nous allons procéder avec la période d'échange avec l'opposition
officielle, et je cède immédiatement la parole au député de Sanguinet.
• (15 h 30) •
M.
Therrien : Merci, M. le Président. Je vous salue, M. le
Président. Je salue les membres de la commission, le ministre et ses
collaborateurs. Je vous salue. Merci d'être ici, c'est très intéressant.
Vous
avez parlé, en tout cas, au début... même, en tout cas, un bout de temps, là,
de l'accès à l'information, vous disiez
que c'est extrêmement important. Là, j'imagine — puis je veux vous entendre là-dessus — que c'est, à quelque part, pour mieux identifier les problèmes qui sont
liés avec l'arrivée éventuelle d'un projet et ses impacts collatéraux que
ça pourrait avoir. J'imagine que c'est ça,
le lien entre l'accès à l'information et, justement, d'être capable
d'identifier les coûts qui sont liés aux municipalités qui vont devoir...
Une
voix : Qui accueillent.
M.
Therrien : ... — oui,
c'est ça — accueillir les projets comme tels. Je voudrais vous entendre là-dessus,
là. Parce que, si vous le
demandez, c'est peut-être parce qu'avant vous ne l'aviez pas nécessairement,
j'imagine.
M.
Lehoux (Richard) : Effectivement. Comme je mentionnais à M. le
ministre tout à l'heure, il y a eu quand même une amélioration dans les dernières années, puis on a vu aussi dans
plusieurs projets des succès par le fait, là, qu'on avait amélioré cet aspect-là de la divulgation de
l'information, et une information la plus précise possible et en lien avec
éventuellement des coûts. Parce que c'est
sûr qu'on va exploiter une ressource, il y a un projet qui se met en place, et,
oui, on disait : Il y a des bénéfices,
mais il y a des coûts aussi rattachés à ça pour que les gens puissent bien
mesurer l'impact, là, des
coûts-bénéfices par rapport aux projets qui sont présentés. Pour nous, c'est
une des préoccupations. Il y a eu une amélioration
dans les dernières années, mais on est convaincus qu'on peut aller encore un
petit peu plus loin pour faciliter encore de façon plus importante cette
acceptabilité-là.
M.
Therrien : O.K. Vous le mentionniez aussi quand on parlait
des impacts économiques, vous nous avez fait une certaine litanie de ce que vous entendiez par impacts économiques et
vous aviez insisté, justement, sur les problèmes liés, là, justement, à l'utilisation excessive de certaines routes ou,
bon... Hier après-midi, il y a des gens qui sont venus nous voir et qui parlaient d'impacts économiques,
mais des retombées négatives, comme vous l'avez fait, dans le sens que vous l'avez présenté tantôt, sauf qu'eux
rajoutaient aussi l'aspect, là, qu'on appelle en économie coûts d'opportunité.
C'est de dire, par exemple, si on utilise un
terrain pour, justement, faire en sorte d'exploiter la mine, ce terrain-là ne
sera plus disponible pour faire autre chose, donc plus disponible
pour l'agriculture, par exemple, ou pour autre chose.
Est-ce
que vous, dans les impacts économiques, vous allez inclure, vous aimeriez
inclure ce genre de coûts là aussi qui
ne sont pas nécessairement des conséquences négatives directement reliées à
l'utilisation de la mine, mais qui seraient, tout simplement, liés avec
l'opportunité perdue d'utiliser cette ressource à d'autres objectifs, tout
simplement?
M.
Lehoux (Richard) : C'est sûr qu'on voudrait recevoir, en fin de
compte, là, ces informations-là parce que je pense que ça met aussi, là, en perspective l'ensemble, là, de
l'apport économique qu'un projet peut apporter. C'est certain que nous, si on peut avoir cette information-là,
ça va être un élément additionnel à prendre en compte, là, dans l'implantation
de ces futurs projets là. Je pense que oui, il y a un intérêt, là,
significatif.
M.
Therrien : O.K. Donc, vous seriez donc, en tout cas,
intéressés à ce qu'on fasse éventuellement une analyse qui irait dans ce sens-là. Je ne sais pas si... Il
faudrait qu'on en parle plus tard avec le ministre, voir si ça se fait déjà. Je
ne suis pas au courant, là, si ces coûts
sont évalués dans la création d'une activité minière ou énergétique dans une
ville comme telle, je ne sais pas si c'est déjà inclus.
M.
Lehoux (Richard) : Dans certains projets, oui, ça peut avoir été tenu
en compte, mais ce n'est pas majoritaire, là. C'est pour ça que
peut-être, là, comme je le mentionnais à M. le ministre tout à l'heure, avoir
un petit peu plus d'encadrement dans cet objectif-là, je pense que ça serait un
élément positif.
M.
Therrien : O.K. Donc, ce n'est pas une règle, mais c'est
fait dans quelques cas, et vous aimeriez peut-être que ça soit fait plus
systématiquement. C'est ce que je comprends.
M.
Lehoux (Richard) : Plus systématiquement, parce qu'on a eu des
promoteurs qui, oui, l'ont fait, ils l'ont fait d'entrée de jeu, de mettre ces éléments-là de coût là dans l'ensemble de
la présentation de leur projet, mais ce n'est pas toujours le cas.
M.
Therrien : O.K. Parfait. Je voudrais faire du pouce avec ce
que vous avez mentionné auparavant. Quand vous parliez d'analyse économique, vous disiez qu'il y aurait un organisme
indépendant qui découle, si on veut, du MERN pour faire l'analyse économique, puis vous avez suggéré, tout simplement
afin d'éviter, là, une surabondance, là, d'étapes à franchir ou, en tout cas,
de ministères à toucher, dire : Bien, pourquoi on ne ferait pas
directement ça à l'intérieur du ministère de l'Économie?
Moi,
je vais essayer d'expliquer en quoi, moi, ça me dérangerait en quelque sorte,
que ce soit fait par le ministère de
l'Économie. Mais il ne faut pas prendre ça négativement, là, mais c'est une
réflexion que j'ai, je me dis : De faire une analyse avantage-coût sur les produits ou les
projets miniers, ça demande une expertise particulière en économie que la
plupart des économistes n'ont pas. Et puis,
en économie, c'est une science qui est extrêmement large et qui fait en sorte
qu'il y a des économistes qui ne pourraient
pas effectuer ce genre de travail. Alors, moi, quand je pense à ça, je me questionne à voix haute, je me dis : Est-ce
que le ministère de l'Économie est déjà pourvu de ce genre d'économistes qui
seraient capables de faire cette analyse
très pointue de la science économique? Entre autres, d'internaliser les
externalités négatives qu'on peut avoir d'un projet, entre autres, ce
n'est pas donné à tous les économistes de faire ça.
Alors,
ma question serait, tout simplement, de dire : Est-ce que cet organisme
indépendant deviendrait plutôt un expert
dans le genre d'évaluation de projets qui pourraient vous toucher
éventuellement et qui permettrait d'avoir une analyse plus fine, plus efficace, peut-être, à la limite, moins
coûteuse, dû à la répétition de ces projets-là? Est-ce que vous trouveriez, peut-être, que ce serait une
opportunité intéressante? Puis même, à la limite, cet organisme-là ou ce
département-là pourrait tellement être fort en internalisation... j'ai
trop de la misère avec ce mot-là, d'internaliser les externalités économiques à
un point tel que l'acceptabilité sociale s'en trouverait davantage précisée.
M.
Lehoux (Richard) : Oui, on pourrait être ouverts à cette
possibilité-là, certainement. Nous, on l'amenait beaucoup plus sur l'angle, là, d'avoir une certaine
cohérence entre les actions des différents ministères aussi. M. le ministre
nous a rassurés en début
d'intervention sur cet angle-là, mais la création de... pour nous, on ne veut
pas non plus alourdir, là, de façon
plus importante, là, un projet parce que, souvent, des fois, là, c'est ce qui
va faire que ça peut mettre fin, en fin de compte, là, à la possibilité d'un projet de voir le jour. Ça fait
que, oui, sur cet angle-là, je pense que ça pourrait être pensable parce que c'est certain qu'au niveau
économique ça prend, des fois, des spécialistes de façon un petit peu plus
pointue, si je peux me permettre, là.
M.
Therrien : Oui.
Bien, non, mais c'est parce que votre critique est très sensée, elle est aussi
reprise par beaucoup d'intervenants qui sont
ici, qui sont venus ici, et donc moi, je me dis, bien, à la limite, je pense
que vous avez raison, mais il y
aurait peut-être une façon de construire ce genre de département là qui
permettrait, justement, d'éliminer certains dédoublements ou des choses
du genre.
Par rapport
au schéma d'aménagement, est-ce qu'on pourrait s'en servir pour assurer une
meilleure harmonisation des usages pour favoriser l'acceptabilité
sociale?
M. Lehoux
(Richard) : Oui. Oui, parce que, dans le fond, c'est vraiment l'outil
qui est là depuis au-delà d'une trentaine
d'années, qui sert vraiment, là... et puis qui est révisé, là, de façon assez
systématique pour plusieurs MRC au Québec.
Je pense qu'il y a un outil là qui devrait être utilisé encore de façon plus
significative pour, vraiment, arrimer les
usages, là, qui peuvent être permis sur les territoires, quand on arrive avec
l'implantation d'un projet x, bien, qu'on s'assoie puis qu'on regarde à
l'intérieur du schéma d'aménagement actuel est-ce qu'il pourrait être bonifié,
modifié. Je pense que le milieu est
toujours ouvert à regarder ça en lien avec tout l'arrimage qui vient avec les
plans d'urbanisme des municipalités.
Puis, lorsqu'il y a des modifications à nos schémas d'aménagement, bien, tout
le monde est interpelé, des consultations publiques sont faites. Je
pense que c'est fait, là, avec toute la transparence, là, qu'on veut qui soit.
M.
Therrien :
Oui, oui, oui. Donc, ça met un peu dans le sens, là, de la transparence que
vous soulevez à l'intérieur de la démarche.
Est-ce que le livre vert... Dites-moi-le, là, je suis peut-être un peu naïf,
là, je n'ai pas vu nécessairement dans
le livre vert... Est-ce que le livre vert ouvre la porte à ça, la porte à
dire : Bien, on va utiliser davantage le schéma d'aménagement ou vous pourriez, à travers les
démarches utilisées dans le livre vert, dire : On pourrait l'insérer,
alors tout simplement... Je ne sais pas si vous comprenez ma question,
je ne suis peut-être pas clair, là.
M. Lehoux
(Richard) : Oui, oui, je comprends. C'est sûr que je crois qu'il y a
une place pour l'insérer, et c'est la
raison pour laquelle on insistait beaucoup dans notre mémoire sur cet angle-là,
là, de vraiment, là, faire jouer le rôle que le schéma d'aménagement doit jouer dans chacun de nos territoires.
Oui, ça serait pertinent, là, qu'on puisse, là, l'insérer dans toute la démarche actuellement de toute la
question sur l'acceptabilité sociale. Je pense que ça devrait, là, faire partie
intégrante. C'est la raison pour laquelle on l'amenait de façon régulière dans
notre mémoire.
M.
Therrien : O.K. Il
me reste combien de temps?
Le Président (M. Iracà) : Il vous
reste 40 secondes, M. le député.
M.
Therrien :
O.K. Bien, écoutez, moi, ce que j'ai trouvé, au départ, votre présentation, je
pense qu'elle était importante dans plusieurs sens, mais dans le sens où
vous disiez : Les municipalités sont des incontournables pour l'acceptabilité sociale. Et, quand je lis le livre
vert, j'ai espoir qu'on vous laisse davantage de place, justement, dans l'accès
à cette acceptabilité sociale. Je voudrais peut-être vous laisser là-dessus,
là.
M. Lehoux
(Richard) : Subsidiarité et puis imputabilité, je pense qu'on espère
aller encore un peu plus loin. Je pense,
ça fait partie de nous, notre livre bleu qu'on a déposé pour donner vraiment,
là, tout le sens, là, à la responsabilité que les élus ont et la
proximité qu'ils ont avec leur population, leurs citoyens.
Le
Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, M. Lehoux. Merci, M. le député
de Sanguinet. Alors, nous allons débuter
la période d'échange avec la deuxième opposition, je cède immédiatement la
parole à la députée de Saint-Hyacinthe.
Mme Soucy : Merci, M. le Président.
Bonjour à vous trois.
Une voix : Bonjour.
• (15 h 40) •
Mme
Soucy : Dans vos recommandations, la première recommandation que vous faites, je ne la citerai pas, là,
mais est-ce que vous parlez d'avoir
une étape pour chaque type de projet, une étape pour le projet en énergie, un
projet... Est-ce que c'est de ça que vous parlez? Ou précisez-le si ce
n'est pas...
M. Lehoux
(Richard) : Pour nous, en fin de compte, quand on parle d'arrimer les plans sectoriels, parce qu'on a beaucoup de planifications, là, qui se font, là, à gauche et à droite,
et il y a nécessairement, là, souvent peu d'arrimage entre ces planifications-là. Nous, on le mettait
comme première recommandation pour avoir la préoccupation que l'ensemble
de ces planifications-là soient vraiment arrimées avec les schémas
d'aménagement des MRC.
Mme Soucy : Ici, j'ai
la liste des documents qui sont consultés par secteur. C'est ce qu'il y a sur
le site présentement. Comment vous
faites, les municipalités? Est-ce que vous arrivez à faire le tri là-dedans?
Est-ce que vous naviguez là-dedans, puis
c'est très clair? Parce qu'il me semble, de l'extérieur, c'est très lourd. Je
me pose la question si c'est utile pour vous comme secteur de territoire. Je ne sais pas si vous le
consultez, si, pour vous, c'est clair. C'est un outil que vous vous servez ou
pas?
M. Lehoux
(Richard) : Moi, je pense...
Mme Soucy :
Non?
M. Lehoux
(Richard) : Non.
Mme Soucy :
O.K.
M.
Lehoux (Richard) : Quand vous me parliez de lourdeur, je pense que
vous avez un exemple concret, là. Et puis
d'harmoniser, d'arrimer les planifications, je pense qu'il y a un travail qui
pourrait être fait, là, de façon significative.
Mme
Soucy : Et j'y vais avec votre recommandation 6. Vous dites... bon,
vous recommandez, en fait, au MERN de
financer les études scientifiques afin que les MRC et les municipalités
concernées puissent mieux évaluer les impacts environnementaux, socioéconomiques. Précisez quel type d'étude devrait
se faire, mais qui ne se fait pas actuellement.
M.
Lehoux (Richard) : C'est parce que c'est plus dans le sens où il y a
des études qui se font actuellement, mais elles sont souvent faites par le promoteur. Et, nous, la demande va dans
le sens plus que ça devrait être plus au ministère d'assumer pour avoir la plus grande objectivité
parce que, lorsqu'une étude est apportée par un promoteur, pour le citoyen,
c'est sûr que ça laisse toujours une interrogation.
Mme
Soucy : C'est juste par crédibilité. Parce que, dans le fond, que ça
soit le promoteur qui fasse faire l'étude ou le MERN qui paie l'étude,
pour vous, ça fait une différence?
M. Lehoux
(Richard) : Bien, c'est une question de crédibilité, effectivement.
Mme
Soucy : O.K. Recommandation 8. D'après votre expérience, là, sur le
terrain, quelles sont les nuisances qui reviennent constamment? Puis
pourquoi qu'on n'arrive pas à les contenir?
M.
Lehoux (Richard) : Je vais revenir avec celle que j'ai mentionnée tout
à l'heure, toute la question, là, des chemins
à double vocation, c'est clair que c'est quand même une nuisance. On peut lui
donner le nom que l'on veut, mais il y a une compensation, là, qui
devrait suivre parce qu'il y a une utilisation qui est faite de façon plus
intensive...
Mme Soucy :
Des infrastructures.
M.
Lehoux (Richard) : ...au niveau des infrastructures. Je pense que
c'est beaucoup, beaucoup à cet endroit-là.
Mme Soucy :
Bien, c'est plus pour les infrastructures. O.K. O.K. Merci, monsieur...
M. Lehoux
(Richard) : Ça me fait plaisir...
Mme Soucy :
...messieurs.
Le
Président (M. Iracà) : Alors,
merci beaucoup, Mme la
députée de Saint-Hyacinthe. Je vous remercie, messieurs, beaucoup de votre présentation.
Je vais suspendre les
travaux quelques instants et j'invite le prochain groupe à prendre place.
Merci.
(Suspension de la séance à
15 h 44)
(Reprise à 15 h 46)
Le
Président (M. Iracà) :
Alors, je déclare la séance ouverte. À
l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite la bienvenue à nos invités. Pour les fins d'enregistrement, je
vais vous demander de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que vous
disposez d'une période de 10 minutes pour
votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange avec les membres
de la commission. Madame et messieurs, la parole est à vous.
L'Union
des producteurs agricoles (UPA)
M. Groleau
(Marcel) : Alors, merci
beaucoup, M. le Président de la commission, M. le ministre, MM. et Mme les députés. Il nous fait plaisir d'être avec
vous. Mon nom est Marcel Groleau, président de l'Union des producteurs agricoles. Et je suis accompagné de Mme Isabelle Bouffard — oui,
c'est ça, Bouffard — qui,
sur des questions plus techniques, là, pourra m'être d'une précieuse aide.
Alors,
rapidement, pour résumer notre mémoire... Alors, on tient à vous remercier de
nous recevoir pour pouvoir transmettre nos appréciations et commentaires
sur la question de l'acceptabilité sociale. Alors, l'acceptabilité sociale
constitue désormais un passage obligé pour l'implantation de tout nouveau
projet dans une communauté. Toutefois, comme
l'indique dans le livre vert... le thème «acceptabilité sociale» ne fait pas
l'objet d'une définition consensuelle. «De
plus, l'acceptabilité sociale ne signifie pas unanimité.» Alors, il faut
définir à brève échéance le terme «acceptabilité sociale», surtout dans le contexte d'un éventuel encadrement législatif.
En ce sens, même nous, on ne s'est pas arrêtés à tenter de trouver une
définition dans ce contexte-là, ce sera sans doute difficile d'arriver à un
consensus.
Rendre plus
transparents et plus participatifs les mécanismes de planification et de
conciliation des usages dans les plans d'affectation du territoire
public, communément appelés PATP, et les actualiser. Comme l'indique dans le livre vert... le ministère des Ressources
naturelles est responsable du processus d'élaboration des plans d'affectation,
qui consistent à définir pour chaque région des orientations relatives à
l'utilisation du territoire public, qui intègrent les vocations et les préoccupations des différents acteurs tout en limitant
les conflits d'usage entre les activités existantes et les projets. L'union comprend qu'avec cette
orientation le ministère souhaite élargir la portée des plans d'affectation
afin d'y inclure les activités minières et énergétiques.
L'union demande au ministère d'être vigilant
dans sa recherche d'optimisation des revenus et de protéger les superficies des terres publiques qui pourraient
être propices à l'exploitation de production alimentaire, alors, par exemple,
érablières, bleuetières ou autres fruits nordiques et même champignons, ce
qu'on appelle les produits forestiers non ligneux.
Alors, il faut, lorsqu'on aura à évaluer l'optimisation de ces territoires-là,
ne pas oublier que la fonction nourricière de la terre demeure
essentielle. Simplement au niveau acéricole au Québec, on parle de retombées de
610 millions et, au niveau du bleuet, de
90 millions, et il y a un grand potentiel de développement sur les terres
publiques dans ces deux secteurs-là.
Assurer la
mise en place de processus prévisibles d'information et de consultation à
toutes les étapes du projet. Alors,
l'union est sensible à cette orientation, qui privilégie une consultation des
parties prenantes le plus possible en amont d'un projet. De cette façon, le promoteur sera en mesure de prendre
davantage en compte les préoccupations des personnes directement touchées et celles des communautés
dans son projet. Bien que l'union soit favorable à l'établissement de guides,
d'indications et de matériel d'information,
elle reste perplexe à l'égard de la réalisation par le ministère de matériel
servant à présenter et à expliquer le projet. Selon nous, il s'agit
d'une responsabilité qui incombe au promoteur.
• (15 h 50) •
Favoriser un
partage des bénéfices. Alors, cette orientation propose de favoriser la
maximisation des retombées économiques
des projets dans les communautés d'accueil. Au cours des dernières années, une
tendance a été constatée. Lorsque les
projets ont des effets contraignants, l'une des façons d'en minimiser les
impacts est de les repousser vers les territoires
moins densément peuplés. C'est pourquoi les projets miniers et de production
d'énergie — éolien,
hydrocarbures — ou
de transport d'énergie — lignes de transport d'électricité et
pipelines — sont
très souvent localisés en secteur agricole et forestier. Pour ces raisons,
l'union est d'avis que ces propriétaires qui voient leur droit de propriété
compromis devraient aussi obtenir une
part des retombées, et non uniquement les communautés. Sans ces
propriétaires, le reste de la communauté
serait privé des retombées économiques associées à la venue d'un projet
énergétique ou minier.
Renforcer la
capacité d'analyse du ministère sur les impacts, les retombées économiques
et les répercussions des projets en
assurant la prise en compte des facteurs d'acceptabilité sociale. Alors,
concernant cette cinquième orientation, le livre vert propose la mise en place d'un bureau indépendant pour
analyser les retombées économiques et financières des projets majeurs, retombées qui seraient rendues disponibles par la
suite. Relativement à ce dernier élément, l'union est favorable à ce que le ministère
réalise certaines analyses économiques et qu'il coordonne le projet dans les différents
ministères intervenant dans les processus d'autorisation. Toutefois, contrairement au
constat auquel arrive le consultant embauché
par le ministère, l'union est d'avis que le processus
d'autorisation environnementale doit rester indépendant et éviter de donner l'impression d'être biaisé, notamment
par la perspective des retombées économiques. Le MDDELCC et le Bureau d'audiences
publiques sur l'environnement, le
BAPE, doivent pouvoir évaluer les impacts environnementaux en toute
impartialité.
En ce qui a trait à la mise en place du bureau indépendant d'analyse des retombées économiques
et financières des projets majeurs,
l'union souhaite sensibiliser le ministère. Avant d'aller de l'avant avec un projet ou le développement d'une filière, tous les risques doivent être analysés. De plus, il faut
s'assurer à la base que cela se traduira par des retombées économiques
réelles non négligeables pour le Québec, qui surpasseront l'ensemble des risques et des
coûts, notamment sur le plan
environnemental.
L'union estime qu'il est indispensable de tenir
compte de l'importance économique de l'agriculture et de la foresterie dans le
cadre de développement de tout projet minier ou énergétique soumis à
l'acceptabilité sociale. Les producteurs agricoles et forestiers du Québec
refuseront de subir les contraintes associées au développement de cette industrie, surtout s'il n'est pas clairement
démontré qu'elle sera bénéfique à
long terme, en fin de compte, pour la société québécoise.
L'autorisation de la Commission de protection du
territoire agricole, alors c'est un point qu'on ajoute. La commission
doit toujours pouvoir intervenir au sujet de tout projet non
agricole en zone agricole qui nécessite une autorisation préalable de la commission pour se réaliser. Le livre vert du ministère
ne suggère pas qu'il pourrait en être autrement,
mais l'union tient à préciser qu'une pareille éventualité serait inacceptable.
L'union s'oppose à toute diminution de
la compétence de la Commission de
protection du territoire agricole, car cette dernière dispose de l'entière
compétence pour autoriser un projet non agricole en zone agricole et
d'en juger les impacts sur le territoire agricole.
Autres éléments qui
amélioreront l'acceptabilité sociale, alors on parle des retraits des droits
d'expropriation. Nous souhaitons rappeler
l'importance du principe de la propriété privée dans notre société. Le droit
d'expropriation doit davantage être
associé à un privilège pouvant être exercé par une minorité d'organisations
tels gouvernement, sociétés d'État,
municipalités. L'union demande, par souci de transparence, que le droit
d'exproprier un propriétaire foncier pour le développement minier, pétrolier, gazier soit déterminé par
l'Assemblée nationale du Québec dans une loi particulière à chaque cas, et non plus par le gouvernement
siégeant en conseil, suivant les articles 235 de la Loi sur les mines et
36 de la Loi sur l'expropriation.
Développement d'ententes-cadres. La plupart des
projets miniers d'énergie développés en terres privées se retrouvent en secteur
agricole et forestier. L'expérience des dernières années démontre que le
développement d'une entente-cadre entre le promoteur et l'union est nécessaire
afin d'en arriver à une acceptabilité du projet auprès des producteurs. Rappelons que l'union a une grande
expérience dans ce domaine. L'union demande au ministère d'ajouter dans son livre vert un point qui contraindrait les
producteurs qui déploient des projets qui pourraient toucher plusieurs producteurs agricoles et forestiers à conclure une
entente-cadre avec l'association accréditée qui représente les producteurs
agricoles.
Responsabilité
en cas de contamination. Alors, en cas de contamination — et je terminerai là-dessus — par une entreprise minière ou énergétique, un propriétaire aura le fardeau de la
preuve et il devra intenter des recours contre la compagnie, qui dispose
souvent de moyens financiers beaucoup plus importants que lui.
Afin
d'améliorer l'acceptabilité sociale, le ministère doit s'assurer que les
producteurs agricoles et forestiers qui devront vivre avec une installation minière ou énergétique sur leurs
terres ne soient pas tenus responsables de ces activités ou ces infrastructures. L'union salue les
dispositions prévues à la Loi sur les mines qui prévoient que le ministère
devra veiller à ce que les
entreprises déposent 100 % des sommes nécessaires à la restauration du
site au cours des deux premières années
d'exploitation. Toutefois, l'union recommande que le ministère aille plus loin
en prévoyant la mise sur pied d'un fonds
afin de pallier tout problème qui pourrait survenir après la fermeture d'un
site pour les dossiers miniers ou ceux liés
à l'énergie. L'union invite le gouvernement à s'inspirer de l'une des décisions
de l'Office national de l'énergie qui oblige
les compagnies pipelinières à amasser suffisamment de fonds pour faire face à
leurs obligations lors de la cessation de leurs activités et aussi pour
couvrir tout dommage qui pourrait survenir après celles-ci.
Alors, en
conclusion, selon nous, l'acceptabilité sociale constitue désormais un passage
obligé pour l'implantation de tout
projet dans une communauté. Cependant, ce terme mérite d'être clairement défini
avant toute chose. L'exercice que le
ministère réalise au travers de son livre vert définit cinq grandes
orientations. L'union rappelle que plusieurs projets miniers ou énergétiques sont localisés en terres
privées, agricoles ou forestières. Ainsi, les demandes que l'union formule
auprès du ministère prennent tout leur sens. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, M. Groleau. Vous vous êtes
pratiqué. Vous êtes à 19 secondes avant la fin, donc vous avez fait
ça dans les temps. Bravo!
Alors, nous
allons débuter immédiatement la période d'échange avec la partie
gouvernementale. Je cède la parole à M. le ministre.
M.
Arcand : Merci beaucoup, M. le
Président. M. Groleau et Mme Bouffard, bienvenue parmi nous aujourd'hui.
Comme vous le savez, je pense que c'est très
majeur comme organisme. Je pense que l'organisation, l'UPA, est vraiment
un joueur incontournable dans plusieurs des projets que nous avons au Québec.
Et ma
première question... ou, en fait, mon premier commentaire, je devrais dire,
c'est que je peux vous sécuriser en
commençant, il n'est pas question de se substituer, sur le plan environnemental,
à ce qui existe déjà, que ce soient des BAPE, ou tout ça. Alors, je voulais simplement, d'entrée de jeu, vous
dire que ce n'est pas l'objectif. Nous, on pense que, lorsqu'un projet est devant nous, on a un rôle à
jouer comme ministère, et il est très important que la transparence règne,
que l'information soit connue du public le
plus possible en amont, on l'a répété à plusieurs reprises, et c'est en ce
sens-là que nous voulons agir.
Maintenant, j'aimerais vous poser une question
sur ce qui m'a intéressé beaucoup dans ce que vous avez dit jusqu'ici, c'est que vous parlez
d'ententes-cadres. Est-ce que vous pourriez m'en parler un peu plus? Est-ce que
vous en faites, des ententes-cadres,
au moment où on se parle? Comment ça se déroule actuellement avec les
producteurs agricoles lorsqu'il y a
un projet qui arrive sur une terre agricole, par exemple? Est-ce que les
agriculteurs doivent venir vous voir? Est-ce qu'ils peuvent faire des
ententes personnelles? Est-ce qu'ils doivent passer par l'UPA? Qu'est-ce qui se
passe actuellement?
M. Groleau
(Marcel) : Bien,
actuellement, on commence, lorsqu'un projet arrive... Prenons un projet de
ligne de transport d'électricité, la
région sur laquelle le projet va se déployer, nos fédérations régionales sont consultées
sur le tracé de moindre impact. Donc,
déjà là, il y a un travail qui commence par nos gens de donner leur opinion sur
le tracé de moindre impact en
fonction, bon, du projet lui-même. Naturellement, on ne peut pas déplacer
toujours le projet, mais nos producteurs
sont donc consultés par des rencontres publiques qu'on fait avec eux. On leur
présente le projet, puis on discute avec eux d'où tel ou tel pylône
pourrait être situé, bon, etc.
Par la suite,
une fois que le tracé est déterminé, on rencontre encore une fois les
producteurs et, à ce moment-là, on va chercher d'eux l'autorisation de négocier
en leur nom. Alors, c'est sûr que nous, on ne peut s'imposer comme leur négociateur. Ce sont eux qui nous confient ce
mandat-là, on essaie d'obtenir pour eux la meilleure entente en fonction
des conséquences que ça peut créer pour l'un
ou pour l'autre, et, par la suite, bien, le promoteur, avec cette
entente-cadre-là, va rencontrer les
producteurs et convenir avec eux d'une entente sur la base de cette entente-là.
Mais un producteur pourrait demander plus ou pourrait ne pas être satisfait de
cette entente-cadre-là. Ça ne lie pas nécessairement tous les producteurs,
mais ça crée un contexte de négociation transparente, plusieurs consultations.
Par
exemple, actuellement, dans le projet Énergie Est, on a commencé à discuter
avec les gens de TransCanada, mais
vraiment pour voir, là... Parce qu'ils nous ont expliqué la profondeur du
pipeline. Pour nous, elle n'est pas suffisante. Les risques encourus par les producteurs
lors de bris ne sont pas suffisants pour nous, donc on a des discussions avec
eux. Ça ne veut pas dire qu'on est
déjà d'accord avec le projet, mais on a commencé à analyser les conséquences.
Voilà, c'est un peu comme ça qu'on travaille.
Puis aussi ce qu'on a
d'intéressant, c'est que, dans ces ententes-cadres-là, nous, on négocie la
présence d'un RUPAC. C'est un représentant de l'UPA sur le chantier. Alors,
cette personne-là s'assure que les conditions qu'on a négociées... Profondeur du pipeline, nettoyage des sites, respect du
territoire, minimiser les impacts sur les terres, lui, il est là pour surveiller ça. Donc, ça donne aussi
confiance aux producteurs, qui, individuellement, ne pourraient pas s'offrir
ce genre de service là ou le négocier. Alors, c'est un peu comme ça qu'on agit
avec les producteurs.
Isabelle
est sur le comité de liaison avec Hydro-Québec, alors peut-être qu'elle peut
ajouter quelques informations, mais c'est...
• (16 heures) •
Mme Bouffard (Isabelle) : Bien, en gros, comme le disait M. Groleau,
bon, on a l'exemple d'Hydro-Québec. Hydro-Québec,
on a une entente provinciale, donc, pour les lignes. La façon dont ça se
déroule, c'est circonscrit dans cette entente-là. Mais cette
démarche-là, à chaque nouveau projet, Hydro-Québec, on a cette entente-là
générale. Mais, par exemple, un pipeline,
s'il y avait un nouveau pipeline, donc, à chaque fois, il y a, dans le fond,
une nouvelle entente qui est négociée de la façon dont M. Groleau
vous disait quand on a le mandat de nos producteurs, et ça couvre plusieurs éléments. Ça couvre les mesures d'atténuation des
impacts, donc, pour s'assurer que les terres reviennent dans leurs états
le plus rapidement possible. Ça couvre les
compensations, mais ça couvre aussi les documents juridiques. Donc, comme
le mentionnait M. Groleau, on veut
s'assurer que nos producteurs, à long terme, soient le plus couverts possible.
Et, dans le fond, ces compagnies-là,
vous le savez tous, ont des contentieux importants, donc on ne peut pas
demander individuellement à un
producteur agricole de se payer un contentieux à la hauteur des contentieux des
compagnies. Donc, ça permet d'avoir, dans
le fond, des forces comparables pour, dans le fond, s'assurer que les
producteurs signent des documents
qui ne seront pas à leur désavantage.
M.
Arcand : Et, en
général, cette formule que vous avez
employée, est-ce qu'il y a eu des ratés à un moment donné? Est-ce
qu'il y a toujours eu du succès? Est-ce qu'il y a eu des problématiques qui
sont survenues par rapport à ça?
M. Groleau
(Marcel) : De façon générale, ça fonctionne bien parce que les
producteurs ont confiance dans l'organisation,
puis ils sont sûrs qu'on va négocier la meilleure entente possible pour chacune
des circonstances. Mais, naturellement,
dans le cas, par exemple, du pipeline qu'a fait Valero Montréal, bon, il y a
quand même eu des producteurs qui
n'en voulaient pas du tout. Donc, c'est sûr qu'on rencontre ça aussi, là, donc.
Mais je pense que d'avoir une entente générale avec l'Union des
producteurs agricoles, dans la plupart des cas, a facilité beaucoup
l'acceptabilité sociale de ces projets-là.
M.
Arcand :
Qu'est-ce que vous faisiez dans le cas où vous aviez des producteurs qui
étaient... Est-ce que vous changiez, vous suggériez... Vous parliez du
pipeline Saint-Laurent probablement, là?
M. Groleau
(Marcel) : Oui.
M.
Arcand :
Est-ce que vous suggériez de changer le tracé? Vous essayiez de convaincre le
producteur? Le promoteur mettait plus d'argent? Comment est-ce que ça...
M. Groleau (Marcel) : En fait, quand le tracé est défini, on ne peut pas toujours changer le
tracé. Alors, c'est sûr qu'on prend
acte des récriminations des producteurs. Et c'est sûr aussi que des producteurs
en veulent quelquefois... certains producteurs peuvent en vouloir à
l'organisation parce qu'ils estiment qu'on aurait plutôt dû s'opposer que de convenir d'une entente. Mais on pense que notre
responsabilité de citoyens responsables, d'organisation responsable, c'est
aussi de protéger au mieux l'ensemble des
producteurs que de les laisser négocier chacun individuellement avec
l'entreprise. Alors, de façon générale, c'est bien compris, mais c'est
comme ça qu'on travaille.
M.
Arcand :
Et toutes ces ententes-cadres-là que vous faites, ça se fait à quel moment, je
dirais, de la procédure? Parce que
vous me dites : On réunit les producteurs, on essaie d'avoir leur
autorisation dans une deuxième rencontre, mais, dans certains cas, ça se fait avant même le... que ce soit le BAPE ou
d'autres organismes et d'autres permis soient faits, ça se fait en même
temps. Comment ça fonctionne?
Mme Bouffard (Isabelle) : Je vous dirais, de façon générale, si on regarde
le dossier Énergie Est, là, pour ne pas le nommer, bien, parce qu'il y a
eu un BAPE dernièrement, vous savez, certaines personnes ont dit que l'entente
était terminée. C'est loin d'être le cas,
là. Donc, je vous dirais, les ententes, c'est quelque chose qui dure sur une
très longue période, il y a souvent
des allers-retours. Donc, de façon générale, les ententes sont, je vous
dirais... Comme, dans ce cas-ci, les
ententes ne sont pas terminées. Je ne me rappelle pas dans Ultramar, il aurait
fallu que je refouille le dossier, voir si on avait terminé la négociation avant. Mais ça n'empêche pas qu'il y a
eu des demandes de faites au BAPE, il y a eu des demandes de faites à la
CPTAQ, ce qui fait qu'à terme l'entente a été encore améliorée.
Donc, ces ententes-là, aussi, il faut
se rappeler qu'un des éléments particuliers, c'est qu'elles sont développées
aussi parce qu'on donne la possibilité à ces
compagnies-là d'exproprier. Donc, nos producteurs, là, il faut se rappeler
qu'ils font face à des entreprises
qui, à terme, peuvent aller chercher ce droit d'expropriation là s'il y en a
quelques-uns d'entre eux qui décident
de ne pas signer. Donc, nous, on dit : Bien, regardez, il faut les
protéger puis, dans le fond, dans la mesure du possible, avoir les meilleures conditions, advenant que le projet aille
de l'avant. Donc, c'est le point de vue de l'union relativement à ça.
M.
Arcand :
Ce que je comprends, c'est que vous n'êtes pas défavorables à notre approche.
Vous avez les craintes que vous avez
exprimées sur un certain nombre de choses, mais l'idée qu'on ait une espèce
d'analyse économique le plus près
possible du début d'un projet, est-ce que vous pensez que ça peut aider à
l'acceptabilité sociale? Ou enfin, je dirais, ce n'est même pas une question d'aide à l'acceptabilité sociale, c'est
une question qu'on puisse avoir une idée assez rapide, de savoir si ce projet-là, finalement, est un
projet qui peut faire du sens économiquement. Est-ce que cette approche-là
vous semble la bonne?
M. Groleau (Marcel) : Bien, moi, je crois que c'est important d'avoir une bonne idée des
retombées économiques d'un projet
avant qu'il ne soit lancé. C'est sûr que ça va contribuer à le faire bien
accepter ou, au contraire, à le faire rejeter. Parce que, je veux dire, si
les preuves ne sont pas démontrées que le projet est économiquement et
environnementalement, tout compte fait, acceptable, les citoyens ne
l'accepteront pas.
Donc,
si ça peut faire aussi tomber certains préjugés sur les retombées pour le
gouvernement de tel ou tel projet et
qu'on est capable de démontrer les retours pour les communautés touchées, mais
aussi, comme nous, on l'expliquait, idéalement
les producteurs ou les propriétaires directement touchés également, c'est sûr
que ça va améliorer la réalisation et l'acceptabilité, selon nous, de
ces projets-là.
M.
Arcand :
Et, selon votre expérience, est-ce qu'il y a des formules de partage des
bénéfices pour les communautés que
vous avez déjà vues ou sur lesquelles vous vous dites que c'est quelque chose
qui devrait faire partie, si on veut, de notre guide, éventuellement,
des bonnes pratiques et d'avoir un processus qui va dans cette direction-là?
M. Groleau (Marcel) : Bien, en fait, actuellement, dans les expropriations auxquelles font
face éventuellement les producteurs,
il y a l'obligation pour l'entreprise de compenser pour les dommages et les
contretemps subis pendant l'installation
de la ligne électrique, ou du pipeline en question, ou d'un autre projet, mais
il n'y a aucune obligation de verser des redevances.
On
tente, nous, l'union, de négocier des redevances. On n'a jamais réussi
directement à obtenir des redevances dans un projet, par exemple, avec
Hydro-Québec ou avec les compagnies pipelinières, mais c'est sûr que ça, pour
les producteurs, c'est le bout qui est
difficile à accepter. Les municipalités vont toucher des taxes sur ces
installations-là qui sont des
immobilisations taxables, mais les producteurs chez qui ça passe — et ce sont eux qui vivent avec cette
installation-là à tous les
jours — eux
n'ont pas de retour directement après l'installation de ces... ils ne sont que
compensés actuellement, ils ne sont pas rémunérés.
M.
Arcand :
O.K. Très bien.
Le
Président (M. Iracà) : Merci, M. le ministre. Je vais céder la parole,
à ce moment-ci, au député de Côte-du-Sud.
M.
Morin : Oui, merci. Mme Bouffard, M. Groleau, je vais parler
d'acceptabilité sociale. Ça va dans les deux sens. Je lis que l'union
s'oppose à toute diminution de la compétence de la CPTAQ, car cette dernière...
Bon, vous savez qu'il y a eu un rapport au
niveau de cette commission-ci. Quand vous dites ça au niveau d'un grand projet
comme Énergie Est, ça me va, mais est-ce que, comme acceptabilité
sociale, on ne peut pas, certains irritants qui font qu'on est obligé de
demander la permission de la CPTAQ pour différents petits projets qui
pourraient peut-être simplifier...
M. Groleau (Marcel) : Là, on parle de projets, quand même... lorsqu'on parle dans ce livre
vert là, de projets assez importants, là, et...
M. Morin :
Oui, oui. Ça va. Ça, ça...
• (16 h 10) •
M. Groleau (Marcel) : Donc, je vais m'en tenir au livre vert, en fait, que vous avez
présenté. Moi, la CAPERN a un rôle de...
ce n'est pas la CAPERN, la Commission de protection du territoire agricole,
d'assurer l'harmonie des usages sur
le territoire agricole. Alors, c'est sûr que, pour un producteur agricole, par
exemple, biologique qui verrait ses sols à risque d'être contaminés par une exploitation minière, il faut que la
CAPERN puisse se prononcer. C'est elle qui a la... pardon, la CPTAQ puisse se prononcer, c'est elle
qui a l'autorité, la seule qui a l'autorité actuellement pour dire : Non,
regarde... Ou, à ce moment-là, il y aura des
décisions qui devront être prises, mais nous, on croit que la CAPERN doit...
la commission... C'est parce que, dans une
autre CAPERN, la CAPERN voulait faire la job de la commission, c'est pour
ça que ça m'a...
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Groleau (Marcel) : Mais la
commission, elle doit conserver son rôle, selon nous.
Le
Président (M. Iracà) : Ça va, M. le député?
M. Morin :
Oui.
Le
Président (M. Iracà) : Alors, j'avais le député d'Abitibi-Est. Est-ce
qu'il y a un autre député qui veut prendre la parole?
M.
Bourgeois : Combien de temps il nous reste?
Le Président (M.
Iracà) : Il nous reste deux minutes.
M. Bourgeois : Moi, ça va être très court. Je fais ça à
l'inverse. On a vécu, en Abitibi-Témiscamingue récemment, des
situations assez particulières, des projets d'implantation de porcheries. Le
livre vert, en lien avec des projets de ce type-là, ce qui est dedans par rapport à comment on fait, dans un cas
qui touche plus directement l'industrie de l'agriculture, vous voyez ça
comment?
M. Groleau (Marcel) : Bien, en fait, le promoteur, le fédéré, en l'occurrence, a fait
beaucoup de consultations auprès des
municipalités, puis tout ça, puis il a respecté les distances séparatrices
prévues à la loi, puis il a mis le projet dans une zone relativement peu peuplée comme... et c'est pour ça,
d'ailleurs, qu'il allait dans ce volet-là. Aujourd'hui, en faisant une bonne promotion de leur projet, ils
ont expliqué aussi les retombées possibles pour les producteurs de céréales,
qui pourront disposer, profiter de lisier, et tout, pour améliorer la fertilité
des sols.
Moi,
j'entends beaucoup moins de critiques maintenant qu'au départ, avant même que
la construction commence. Donc là, je
pense qu'on a un exemple d'un citoyen qui s'est comporté de façon responsable
par rapport à la communauté puis qui
est en train de démontrer que ce qu'il avait dit se réalise. Alors, ça fait
partie... je pense que le promoteur a une responsabilité, une fois qu'il
a l'autorisation, d'aller de l'avant avec son projet.
Le Président (M.
Iracà) : M. le député de Saint-Maurice, en 40 secondes.
M.
Giguère : 40 secondes? Ça va prendre 40 secondes. Moi, je veux
revenir — vous en
avez discuté un petit peu tantôt,
là — pour la
responsabilité en cas de contamination parce qu'on sait que, sur les terres
agricoles, c'est un petit peu spécial.
Souvent, c'est de génération en génération qu'ils sont là, donc ils ont cette
préoccupation-là de savoir, s'il arrive de quoi, qui qui est responsable, puis même quand ça va être fermé,
exemple, ce puits-là. Donc, vu que c'est de génération en génération,
j'aimerais ça...
Le Président (M.
Iracà) : En quelques secondes, M. Groleau.
M. Groleau (Marcel) : Bien, c'est sûr que la responsabilité... Comme Isabelle l'a dit, là,
les dommages peuvent être tellement
importants que, si les compagnies ne sont pas responsables, après
l'installation de l'ouvrage, des dégâts qu'ils peuvent causer, ou même après que l'ouvrage ne serve plus, c'est
sûr que les producteurs ne sont pas en mesure de faire face à ces
coûts-là.
Le
Président (M. Iracà) : Merci, M. Groleau. Alors, ça met fin à la
période d'échange avec la partie gouvernementale. Nous allons procéder à
la période d'échange avec l'opposition officielle, et je cède la parole au
député de Sanguinet.
M.
Therrien :
Merci, M. le Président. Je dois vous avouer que la partie gouvernementale m'a
volé quelques questions, alors donc...
Des voix :
Ha, ha, ha!
M.
Therrien : C'est la première fois que... Non, ça arrive
quelquefois, mais là disons qu'ils se sont ligués contre moi, alors donc...
Une voix :
...
M.
Therrien :
Oui, c'est ça. Alors, je ne vais peut-être pas, tout à fait, prendre tout mon
temps. Au départ, je voudrais vous poser une
question très simple. Moi, je suis sur la Rive-Sud de Montréal. La différence
entre dézoner pour une maison puis dézoner pour une mine?
M. Groleau (Marcel) : Ah! bien, c'est que, lorsque c'est pour une maison, souvent c'est une
municipalité qui fait la demande,
puis elle dépose à la commission de protection les justifications pour élargir
son périmètre urbain. Dans le cas
d'une mine, bien, c'est un projet qui a beaucoup plus d'impact sur
l'environnement, et, à long terme, aussi c'est... Tu sais, à chaque fois qu'on modifie la vocation
agricole ou forestière d'une terre, c'est irrécupérable. Alors, c'est pour ça
que tous les projets doivent faire l'objet d'une analyse très précise et que ce
soit justifié. Autant les municipalités doivent justifier l'étalement ou
l'expansion de leur périmètre urbain, autant le gouvernement ou ces entreprises-là
devraient justifier économiquement, environnementalement parlant et à long
terme ce déploiement-là.
M.
Therrien : Je vous pose la question parce qu'on sait tous... Puis je pense que vous avez raison de dire qu'on doit protéger le grenier québécois,
et puis, souvent, c'est ce qu'on se fait dire. Moi, je suis... on est en
banlieue, puis, tu sais, de plus en plus, les villes essaient de pousser, là, pour le développement économique, le développement urbain, là, vers les terres. Dans mon
coin, c'est les plus belles terres au Québec, il faut l'avouer. Donc, c'est...
Une voix :
...
M.
Therrien : Non,
mais c'est les terres de Saint-Constant, Saint-Rémi, des terres noires, là.
Puis disons que vous défendez, et
vous défendez très bien ce territoire-là, je vous en félicite, mais moi, quand je vois
ça, là, je dis : Bon, bien, écoutez, il y a des mines qui vont... ou il y a
de l'activité minière ou éolienne qui va s'installer. Bien, en quelque part, j'imagine que votre
sentiment de défense doit être aussi fort dans ce cas-là que dans le cas de
l'expansion urbaine. J'imagine que,
chez vous, vous devez tenir bec et ongles à cette zone-là, qui est une zone
d'avenir pour le Québec, évidemment. Comme vous dites, on ne peut pas
récupérer ça par la suite, là.
M. Groleau (Marcel) : Je crois que la commission a un rôle essentiel à jouer. Parce que,
nous, on va déposer nos arguments
devant la commission, le promoteur également, le gouvernement aussi ou la municipalité, et là la commission, avec
les critères prévus à la loi, va analyser le projet et donner ou non
l'autorisation ou limiter les autorisations d'usage ou de conversion du territoire agricole. Donc,
c'est une tierce partie qui agit. Et la commission n'est pas là pour
empêcher le développement économique du Québec, elle est là pour, tout en assurant le développement économique du Québec, protéger les terres agricoles.
M.
Therrien : Absolument.
Regardez, là, si on dit, par exemple, que ça soit pour le projet Énergie Est, ou une
mine, ou peu importe, là, une éolienne ou...
si on arrive puis on dit : On prend tant d'hectares, tu sais, c'est facile
à évaluer. Vous savez, là, tu sais,
d'évaluer des hectares qu'on va, tout
simplement, laisser, léguer à cette activité-là,
c'est facile à faire, tu sais. Le
prix d'une terre, ça se définit quand
même assez bien. Mais, quand il
s'agit d'une terre que tu vends à un autre
agriculteur, il n'y a pas de problème parce
que, tu sais, sa destinée agricole ne
sera pas mise en doute. Mais est-ce
qu'on ne devrait pas, justement, évaluer à la hausse la perte d'un territoire
agricole parce qu'en plus de la valeur du territoire
qu'on perd via la production qu'on perd on perd également pour toujours, tu
sais, une production agricole qui sert
à nourrir des Québécois? Je ne sais pas si vous me suivez. Y a-tu une
bonification qu'on doit faire, étant donné que c'est une perte qui est
pour toujours ou à peu près?
M. Groleau (Marcel) : Moi, je pense que bonifier une perte perpétuelle ou la calculer, c'est
difficile, là, chacun va avoir la...
Mais je crois qu'il faut s'assurer que, lorsqu'on le fait, c'est pour les
bonnes raisons. Moi, je dirais — puis c'est de mieux en mieux documenté, là — la production agricole au Québec, là, c'est
le premier secteur primaire, donc c'est
56 000 emplois. Et la transformation, c'est le premier secteur
manufacturier. Alors, c'est sûr que je pense que ça, c'est de plus en plus considéré et important dans
l'esprit des Québécois et de nos gouvernements, donc, et on a de plus en
plus d'alliés aussi.
Le
territoire agricole, c'est le poumon également au niveau environnemental, là,
et c'est... Et, en décembre dernier, à la COP21, on disait que, sans la
participation de l'agriculture, on n'arrivera pas à limiter le réchauffement
climatique à 1,5°. Si on ne faisait
qu'augmenter la matière organique dans nos sols, on ralentirait l'augmentation
du réchauffement climatique par le
captage du carbone. Et ça, c'est là, là, c'est une possibilité. Donc, je pense
que tout ça donne beaucoup d'arguments pour protéger au maximum le
territoire agricole.
M.
Therrien :
C'est intéressant, ce que vous me dites, là. Par rapport aux matières non
ligneuses, là, bleuets, champignons, entre
autres, là, comment on fait pour évaluer ça, la perte? Parce que, par exemple,
quand vous parlez du bleuet sauvage,
ce n'est pas nécessairement des bleuetières, c'est tout simplement du bleuet
forestier, là, qu'on retrouve un peu partout au Québec, là.
M. Groleau (Marcel) : Il y a les deux. On peut convertir des territoires où il y a du bleuet
sauvage, mais en faire des
bleuetières. Mais ça reste que c'est un bleuet sauvage, mais cultivé, si je
peux... Ce n'est pas comme les bleuets de corymbe, là, c'est...
M.
Therrien :
Non, non. Ce n'est pas comparable.
• (16 h 20) •
M. Groleau (Marcel) : Donc, ça, on peut faire ça.
Mais il y a aussi la cueillette de bleuets en milieu sauvage, et ça, notre approvisionnement au Québec en bleuets biologiques provient de ces territoires-là.
Alors, tout ce que vous voyez qu'on
exporte, qu'on voit sur nos tablettes en bleuets biologiques provient des territoires
où on cueille le bleuet naturel. Voilà.
M.
Therrien : Oui.
Mais, ma question c'était que... Oui, je connais la différence
entre le bleuet sauvage qui est cultivé
dans une bleuetière et le bleuet sauvage, je pourrais vous en parler longtemps — oui,
dans mon autre vie, j'ai fait ça — mais
c'est juste savoir comment on fait pour évaluer... Parce que
je me suis toujours dit que la cueillette du bleuet en forêt
n'est pas nécessairement limitée par la ressource, mais limitée par les
cueilleurs.
M. Groleau
(Marcel) : Bien, au Lac-Saint-Jean, actuellement, c'est un défi, effectivement,
de renouveler les générations de cueilleurs qui quittent, hein, parce que
c'est... Mais le Syndicat des producteurs de bleuets y travaille actuellement, on est en train de leur donner des outils aussi pour mieux cultiver,
mieux se repérer. On développe aussi, bon...
Ça devient aussi du tourisme. C'est devenu une activité aussi qu'on veut
intégrer au tourisme européen, et autre, tu sais, amener les touristes
se faire piquer en forêt pendant qu'ils ramassent du bleuet.
M.
Therrien : Les
mouches font un très bon travail, en effet.
M. Groleau
(Marcel) : Alors, il y a
plein de choses. Mais ça vous dit à quel point on peut faire beaucoup avec
le territoire agricole et forestier. Donc,
il faut intégrer tout ça. Avant de prendre la décision d'un projet minier ou
autre, il faut intégrer tout ça dans l'analyse. Et ce que M. Arcand
disait, les préanalyses doivent tenir compte de tous ces facteurs-là avant de
dire : Le projet, c'est le bon projet sur ce territoire.
M.
Therrien :
Bien, c'est juste qu'honnêtement, tu sais, par rapport au champignon sauvage,
qui n'est pas assez exploité au
Québec, là, il y a beaucoup de possibilités, on l'ignore, là. Mais c'est juste
que je vois un petit peu difficilement comment
on peut évaluer ça monétairement quand vient le temps d'arriver avec des
retombées économiques, là, sur un territoire forestier. C'est juste ça
que... Ma question était plus là-dessus.
M. Groleau (Marcel) : On peut
l'évaluer.
M.
Therrien :
Tu sais, mettons, dans une bleuetière, c'est 2 500 $ l'acre, à peu
près, là. On s'entend à peu près tous là-dessus.
Mme
Bouffard (Isabelle) : Bien,
peut-être juste vous dire, durant la rédaction de ce mémoire-là, il y a quand
même eu des communications avec le
Syndicat des producteurs de bleuets, puis ce qu'ils me disaient, c'est :
Bon, on connaît les bleuetières en
place, on sait, à certains endroits — en terres publiques, là, je vous parle — que c'est propice. Mais ils disaient : Il y a une cartographie qu'il
reste à faire de certains endroits où il y a peut-être eu des feux de forêt,
où, ils disaient, il y a vraiment un travail qui pourrait être fait pour
dire : Voilà tout ce qui est arrivé dans ce secteur-là, ce qui devrait amener, dans le fond, le secteur à être propice,
dans le fond, aux bleuets. Donc, il pourrait y avoir une cartographie, là,
ou un travail de fait pour dire : Dans
ces places-là, tout est là pour, dans le fond... tout a été là pour avoir des
bleuets. Donc, c'est quelque chose qui pourrait être fait, puis, dans le
fond, le syndicat est intéressé à développer cet élément-là.
M.
Therrien : O.K.
C'est intéressant. Comment qu'il reste de temps, M. le Président?
Le Président (M. Iracà) : Il reste
une minute, M. Therrien.
M.
Therrien : En
terminant, par rapport à ce que je vous disais tantôt — merci
pour la réponse, c'est très intéressant — bien, par rapport à la perte de terres
agricoles, là, dans le secteur où est-ce que je demeure, pas loin de chez
nous, là, il y a Napierville, là, ils ont un
projet d'éoliennes, puis on a entendu beaucoup, justement, la perte de
territoires agricoles, même si elle est limitée. Mais c'est pour montrer
à quel point votre travail est important pour conserver, justement, chaque parcelle de terre le plus
possible. Peut-être, vous entendre 30 secondes là-dessus, là, sur
l'évaluation qui peut être presque surdimensionnée.
M. Groleau
(Marcel) : En fait, au
Québec, il y a une particularité également, c'est que, dans
600 municipalités, les
superficies en culture sont bloquées, sont limitées aux superficies actuelles.
Il y a un moratoire sur l'agrandissement des superficies cultivées. Alors, c'est sûr que chaque mètre qu'on perd
ou chaque... devient une perte nette. À chaque fois qu'une municipalité s'agrandit, c'est une perte nette.
À chaque fois qu'on fait une route, c'est une perte nette. On ne peut
pas agrandir les superficies en culture, et ça, c'est un gros, gros, gros
problème.
Le
Président (M. Iracà) : Merci, M. Groleau. Ceci met fin à la
période d'échange. En fin de compte, M. le député de Sanguinet, vous avez pris tout votre temps.
Alors, vous aviez des questions intéressantes, oui. Alors, la deuxième
opposition, je vais céder immédiatement la parole à la députée de Saint-Hyacinthe.
Mme
Soucy : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Groleau, bonjour,
madame. Vous parlez des propriétaires fonciers dans votre mémoire. Bon, vous
craignez... bien, en fait, vous dites : Bon, il faudrait négocier. Puis
vous avez parlé d'Énergie Est qui
était un bon exemple, mais il existe déjà les taxes foncières pour dédommager,
en fait... qui est la loi sur les fiscalités municipales. Ne serait-il
pas moins compliqué de modifier cette loi-là que de négocier pour chaque
propriétaire avec les compagnies qui passent sur les terrains?
M. Groleau (Marcel) : Bien, la loi
sur le remboursement des taxes foncières et agricoles...
Mme Soucy : Non, en fait...
M. Groleau (Marcel) : Non, ce n'est
pas de ça qu'on... C'est parce que, là, je...
Mme
Soucy : Non. Bien, pour les municipalités, en fait, il y a déjà des
taxes foncières qui existent pour des municipalités.
Là, vous dites : Bien, on va négocier avec Énergie Est. Comment ça se
produit, vos négociations, actuellement? Parce qu'en fait, pour les villes, c'est plus facile de dire : On
va modifier une loi, mais, pour l'agriculteur, bien, ce n'est pas comme ça que ça se passe, chaque
agriculteur doit négocier. Comment ça va dans ces négociations-là avec une
grosse compagnie comme Énergie Est?
M. Groleau
(Marcel) : Bien, en fait, pour chaque agriculteur, c'est très
difficile parce que... C'est pour ça, d'ailleurs,
qu'ils nous confient le mandat de faire des ententes-cadres ou qu'ils acceptent
qu'on fasse des ententes-cadres qui
peuvent leur servir par la suite, là, de référence. La plupart sont très
heureux de ça. Mais l'enjeu pour les producteurs et même pour nous maintenant, c'est qu'on n'arrive pas à négocier des
redevances pour les producteurs sur les projets qui passent sur leurs
terres.
Mme Soucy :
Jusqu'à présent il n'y a pas eu...
M. Groleau
(Marcel) : Non, parce qu'on négocie...
Mme Soucy :
Ce n'est pas un succès.
M. Groleau (Marcel) : La compensation pour les impacts et les effets négatifs, c'est un
paiement. Après ça, on vit avec.
Alors que la communauté ou la province va bénéficier largement de ce projet-là,
nous, ceux qui vivent avec le projet, qui
doivent appeler s'ils veulent faire des travaux d'excavation, en plus, on leur
dit : S'il y a une faute lourde, vous êtes responsables, puis ça peut les entraîner à la faillite. C'est sûr que
moi, je trouve que la responsabilité qu'on incombe aux producteurs, aux
propriétaires...
Mme Soucy :
Elle ne vaut pas la compensation.
M. Groleau
(Marcel) : ...elle dépasse largement ce qu'ils reçoivent.
Mme Soucy :
Puis, comme les agriculteurs sont les plus visés habituellement, vous avez
raison que c'est essentiel de les protéger de ce genre de choses là puis de
mettre des mécanismes pour qu'ils soient protégés.
Craignez-vous
que la Commission de protection du territoire agricole du Québec perde son
pouvoir d'analyse et d'autorisation
quant à l'implantation des projets? Je pense que le ministre vous a un peu
rassurés tantôt, mais est-ce qu'il y
avait des indices qui allaient dans ce sens que vous avez vus ou certaines
déclarations du gouvernement pour que vous arriviez à avoir ce...
M. Groleau (Marcel) : C'est ça. Bien, c'est sûr que, pour nous, là, la défense du territoire
agricole, c'est un enjeu, puis on en a fait un enjeu important puis une
responsabilité pour l'organisation. La commission n'a pas un rôle facile à jouer parce qu'elle a des décisions difficiles à
rendre. Puis nous, on connaît cette problématique-là, on la connaît bien,
donc on souhaite que la commission ne soit
pas réduite à étamper des projets. On veut être certain qu'elle aura
l'opportunité de les analyser et de donner son opinion.
Mme
Soucy : Comme, madame, vous avez dit tantôt que vous négociez beaucoup
avec Hydro-Québec pour des compensations pour les agriculteurs. Mais, à
moins que je me trompe, mais Hydro-Québec Distribution ont déjà un mécanisme qui est établi lorsqu'ils prennent une
emprise sur une terre agricole versus un terrain en milieu urbain. Il y a
déjà un mécanisme qui existe chez
Hydro-Québec pour calculer la compensation. Alors, vous allez au-delà de ça?
Vous êtes capables d'aller au-delà de
ça avec Hydro-Québec, d'aller obtenir une compensation supérieure aux
mécanismes qui sont déjà en place?
Mme Bouffard
(Isabelle) : Bien, notre entente est pour le transport, et pas pour la
distribution, là.
Mme Soucy :
Ah! O.K. Avec TransÉnergie. O.K.
Mme Bouffard (Isabelle) : Oui. Puis, je vous dirais, elle est disponible
sur Internet. Donc, si vous êtes intéressée à la regarder...
Mme Soucy :
Non, mais je la...
Mme Bouffard
(Isabelle) : Non, non, non.
Mme Soucy :
...distribution...
Mme Bouffard
(Isabelle) : Mais ce n'est pas distribution, c'est transport, là.
Mme
Soucy : O.K. O.K. Alors,
votre rôle là-dedans, c'est quoi exactement? Parce que vous
dites que vous négociez pour les agriculteurs, c'est ce que vous avez
dit. Si c'est déjà établi, vous négociez quoi, là?
M. Groleau
(Marcel) : En fait, cette entente-là, elle est convenue parce qu'on
l'a négociée, puis elle sert de référence maintenant.
Mme Soucy : Ah! O.K.
M. Groleau (Marcel) : Mais Hydro-Québec
l'a négociée avec l'UPA.
• (16 h 30) •
Mme
Soucy : O.K. O.K.
Parfait. J'avais une petite question par
rapport à... Vous dites : Bon,
l'union demande au ministère
d'ajouter dans son livre vert un point qui contraindrait les promoteurs qui
déploient des projets qui pourraient toucher
plusieurs producteurs
agricoles et forestiers à conclure
une entente-cadre, comme vous l'avez mentionné. Vous voulez, dans
le fond, que ça soit inclus dans le
livre vert, mais, s'il y a un producteur qui ne veut pas, vous faites quoi?
C'est qu'on le suggérerait dans le livre vert, mais le mandat ne vous serait
pas automatiquement donné.
M. Groleau
(Marcel) : En fait, lorsqu'on
parle d'entente-cadre, chaque producteur doit lui-même quand même... C'est une entente-cadre, donc c'est une référence pour le producteur.
C'est comme je l'expliquais, le producteur, lui, après ça, ça lui donne au moins... Cette référence-là a
été acceptée par le promoteur, donc la profondeur du pipeline, la façon dont
les travaux vont être exécutés, la largeur qu'ils vont pouvoir creuser, de
remettre la terre arable sur le dessus, tout ça, et il y a des compensations de négociées en fonction... donc, d'avance. Mais, si le
producteur dit : Moi, ça ne me suffit pas, bien, à ce moment-là, comme Isabelle le disait, la compagnie a le pouvoir
d'expropriation. Puis, avant d'utiliser le pouvoir d'expropriation, bien, ils vont peut-être essayer de négocier
autre chose avec lui ou la compagnie va s'en tenir à l'entente-cadre puis elle va dire :
Regarde, nous, c'est ça ou on exproprie. Mais, au moins, avant d'être
exproprié, le producteur est sûr d'avoir minimalement un règlement
raisonnable.
Le
Président (M. Iracà) :
Merci. Merci beaucoup, M. Groleau, Mme Bouffard, de vous être
présentés. Merci de votre présentation. Alors, ceci met fin aux
échanges.
Je vais suspendre les travaux quelques instants
et j'invite le prochain groupe à prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 32)
(Reprise à 16 h 33)
Le
Président (M. Iracà) :
Alors, je déclare la séance ouverte. Je vous souhaite la bienvenue, monsieur.
Pour les fins d'enregistrement, je vais vous demander de bien vouloir
vous présenter. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par
la suite, nous procéderons à la
période d'échange avec les membres de
la commission. Alors,
monsieur, la parole est à vous.
M. Pierre Batellier
M. Batellier (Pierre) : Oui.
Bonjour, M. le Président, M. le ministre, mesdames messieurs les membres de la commission.
Alors, Pierre Batellier, je suis enseignant-chercheur à HEC Montréal
sur les questions de responsabilité sociale de
l'entreprise et étudiant au doctorat depuis trois ans sur la question
du rôle de l'État au regard de l'acceptabilité sociale. Et
j'ai aussi fait un examen de synthèse sur la
question des fonctions de l'analyse coût-avantage parce
que j'étais interpelé par, évidemment,
le livre vert. J'ai aussi été impliqué beaucoup à titre citoyen dans le dossier et les débats sur le gaz de schiste, le dossier minier et la consigne sur les
contenants de boissons aussi. Alors, je veux partager, donc, ces commentaires-là au regard, un peu, de
cette observation participante puis de cette expérience-là, apporter peut-être
une perspective un peu académique,
mais aussi une perspective citoyenne qui, j'espère, trouvera aussi un écho ici, dans
cette commission, au travers d'autres participants.
Alors, tout d'abord, je félicite le ministère
pour tenir cet exercice-là, avoir cette discussion sur l'acceptabilité sociale,
mais aussi sur le rôle des institutions publiques par rapport à cette question,
un rôle qui est majeur. Je salue l'ouverture,
la volonté de transparence aussi qu'on a eue au niveau, par exemple, du chantier, de mettre sur la table tous les rôles et responsabilités du ministère et de les ouvrir à la discussion. Je déplore peut-être
un petit peu, par contre, la relative
confidentialité et la publicité peut-être un peu limitée de cet exercice tant pour le
chantier que pour la commission.
Je
pense que d'autres acteurs pas
forcément invités auraient aimé peut-être avoir la chance de venir participer. Et les
délais ont été un petit peu courts,
mais je vais essayer de faire de mon mieux, partager mes commentaires et fournir quelques suggestions, pistes d'amélioration.
L'appréciation
générale, c'est que c'est un progrès significatif en termes de modernisation des outils et des
pratiques du ministère, notamment en
termes de prévisibilité, stabilité, de simplification. Tant pour les
promoteurs, mais aussi pour les citoyens,
c'est aussi des enjeux importants. On reconnaît des principes essentiels comme
l'importance de prendre en compte les attentes, les intérêts des
populations locales, leurs valeurs, on reconnaît la possibilité d'un refus. Ça,
c'est vraiment des principes fondamentaux.
Et aussi un certain nombre de gestes concrets qui sont présentés dans les
orientations, mais pour lesquels j'ai certaines nuances et pistes
d'amélioration que je vais présenter.
Alors, très
rapidement, avant d'arriver à ces orientations, quelques éléments sur la forme.
Tout d'abord, précision des termes
clés. J'invite le ministère, peut-être, à ajouter un glossaire à l'ensemble de
ce travail sur le livre vert. On mobilise beaucoup de
termes, peut-être avoir la définition. On sait, au niveau académique,
l'importance du sens qu'on donne aux
grands termes. Donc, des termes à définir, des termes, lorsqu'ils sont
différenciés, à nuancer, expliquer c'est quoi, la nuance entre ces
différents éléments.
Concernant la
définition de la notion d'acceptabilité sociale du ministère, je pense que
c'est bien qu'on n'enferme pas tout
de suite la notion dans une définition très précise. Il se tient actuellement
un débat très intéressant. Le fait que ce
soit très malléable, très flexible, ça fait que chacun des acteurs essaie de
construire sa vision de ce qu'est l'acceptabilité sociale. Par contre,
ça n'empêche pas qu'il faut y aller quand même par balises, donc... D'ailleurs,
c'est ce que fait le ministère. Parmi ces
balises-là, on dit que l'acceptabilité sociale n'est pas l'unanimité. Je pense
que c'est un élément à souligner,
c'est vrai. Par contre, c'est peut-être une finalité qu'il faut garder. Le
danger, c'est que, si on cherche juste une majorité ou un large consensus, un des réflexes, c'est qu'on va essayer,
plutôt, de contrer plutôt que de comprendre souvent les oppositions ou
les groupes minoritaires qui peuvent avoir des revendications parfois très
légitimes.
Ensuite,
l'acceptabilité sociale est beaucoup formulée comme processus de bonnes pratiques
des promoteurs. Je vous invite à
partager le fait que, dans la littérature académique, mais aussi beaucoup sur
le terrain, les gens le perçoivent comme
c'est non pas le promoteur qui fait accepter son projet, mais le public qui
accepte. Donc, on voit ça beaucoup comme la réponse que donne le public
à un projet. Puis, lorsqu'on parle de processus, la limitation qui est faite
ici, il y a un processus d'information et de
consultation, on invite le ministère à l'élargir à un processus de décision
beaucoup plus large et global.
Concernant la
définition du social de l'acceptabilité sociale, on sent qu'on essaie de
limiter, finalement, le social à la
communauté d'accueil. Je pense que c'est important de reconnaître l'importance
des communautés locales, qui ont parfois été négligées dans le passé. Par contre, peut-être que, pour certains
grands projets, par leur ampleur, leur portée symbolique ou identitaire, par leur effet systémique sur
l'économie et sur les territoires du Québec, il est parfois nécessaire d'avoir
une acceptabilité sociale à des échelles
supérieures, régionales ou nationales, et pas seulement une acceptabilité
sociale au niveau local.
Enfin, vous aurez l'acceptabilité sociale à
mesurer comme résultat aussi comme ministère, peut-être quelques suggestions de
balises. L'acceptabilité sociale n'est pas le simple fait de ne pas s'opposer.
Ne pas s'opposer, c'est de l'acceptation
sociale. Puis «acceptation», je vous ferai noter aussi que c'est de la
résignation, c'est de la soumission. C'est d'ailleurs la définition
qu'on donne aussi au verbe «accepter». Toute réponse du public est
potentiellement légitime, rationnelle et
informée, hein? S'opposer n'est pas une déviance sociale. Qui ne dit mot ne
consent pas forcément, hein? La
majorité silencieuse n'est pas forcément favorable au projet, comme elle n'est
pas forcément défavorable non plus. Et je vous invite aussi à considérer
le fait qu'il existe quand même plusieurs visions du monde du développement et
perspectives éthiques et que tout le monde n'est pas toujours a priori
favorable au développement et à la technologie.
Enfin, oui, aussi peut-être souligner, en lien
avec la majorité, que la majorité seule ne devrait pas forcément justifier un projet. Parfois, vous pouvez avoir
l'appui de 90 % de la population, mais, si un 2 % de la population
subit une violation de ses droits ou un transfert de richesse
inacceptable, ce n'est pas pour autant l'acceptabilité sociale.
• (16 h 40) •
Rapidement,
quelques constats ensuite qui sont faits par le ministère au début de son
analyse. Le ministre, dans son mot
d'introduction, souligne que les Québécois souhaitent collaborer au déploiement
des projets. Oui, c'est vrai, les citoyens
souhaitent collaborer au comment on
met en oeuvre les projets, mais ils veulent aussi collaborer au pourquoi
on fait les projets, à la définition des justifications, des critères d'évaluation
et au processus de décision.
On part aussi, semble-t-il, d'un postulat, un
petit peu, d'une crise envers les promoteurs. Je tiens à souligner aussi qu'on a quand même un passif de 10 ans
de tension, parfois — malheureusement, je le déplore — de
perception négative de l'action du ministère,
et il y a une situation, peut-être, de crise de confiance à l'égard des décideurs
publics qui doit être prise en compte et à considérer dans les signaux
qu'on va envoyer dans ce livre vert là pour restaurer la confiance du public. Et d'ailleurs, oui, la
confiance des investisseurs, c'est
important pour l'économie du Québec, mais la confiance du public est aussi fondamentale. Et, à ce titre-là,
disons, le positionnement comme accompagnateur étroit des promoteurs du ministère pourrait nuire
peut-être à la perception du rôle de régulateur puis d'arbitre du ministère, et
ça peut nuire à la confiance du public. Ça peut être des éléments,
finalement, dommageables et même contre-productifs pour l'environnement
d'affaires au Québec.
Enfin, vous parlez de quatre grands facteurs
d'acceptabilité sociale. Je vous souligne juste que la littérature académique — ça, c'est des hypothèses, ces quatre
facteurs — va bien
au-delà. Et d'ailleurs c'est beaucoup d'évaluations qui ont été commandées par le ministère des
Ressources naturelles qui documentent ces facteurs d'influence, je vous invite
à aller les considérer.
Le Président (M. Iracà) : Simplement
pour vous aviser, M. Batellier, il vous reste à peu près deux minutes.
M.
Batellier (Pierre) : Deux
minutes? Mon Dieu! Oui. Concernant la portée des actions, je m'interroge sur ce
que devient la mission de conservation et de
fiduciaire des ressources naturelles. C'est deux termes qu'on ne retrouve
pas sur les gestes qui sont couverts. On
parle beaucoup de ressources énergiques, minérales. Peut-être que, tout de
suite, on pourrait aussi associer le ministère de la Faune, des Parcs et
des Forêts. Que ce soit l'exploitation forestière ou la création de parcs et aires protégées, c'est aussi des projets qui ont
des enjeux d'acceptabilité sociale. Je vous invite aussi à intégrer la planification stratégique — et non pas seulement territoriale — des projets dans le livre vert justement en
lien avec la question du pourquoi.
J'irais
rapidement sur les orientations en faisant le lien aussi avec des discussions
qui ont eu lieu sur le livre vert, sur
la modernisation de la loi québécoise sur l'environnement. Oui, c'est important
de clarifier les rôles et responsabilités du ministère. Je vous invite, d'ailleurs, à le
faire directement dans le livre vert, de préciser aux citoyens c'est quoi, les
rôles et les fondements, est-ce qu'ils sont
légaux ou normatifs dans une stratégie récente de chacun des rôles du
ministère.
Concernant
l'orientation 2, sur la participation publique, je vous félicite, c'est des
points extrêmement positifs. J'amène
quand même le point qu'on a supprimé aussi beaucoup d'organismes de
concertation locale qui faisaient déjà une
partie de ce travail-là, donc essayer — notamment les CRE, les CLD — de voir quel héritage on peut aller
chercher.
Sur la mise
en place de processus prévisibles d'information et de consultation, des pistes
très intéressantes, les comités de
liaison, les processus proposés. Je vous invite, par contre, à les rendre, un
minimum, contraignants, j'ai cru comprendre
qu'on souhaitait qu'ils soient purement volontaires. C'est vrai qu'il faut une
flexibilité, mais je pense que le
principe devrait être qu'ils soient obligatoires. Et éventuellement peut-être
avoir certaines exemptions justifiées, là, mais ça, ça serait un signal
important au public.
Informer,
consulter en amont de l'étude d'impact. Là aussi, c'est important, là, si on
veut justement...Il faut que les citoyens soient consultés sur les
enjeux qu'on va évaluer, sur les préoccupations qu'ils ont parce que, sinon,
c'est contre-productif, puis on a des retours en arrière qui sont négatifs.
Enfin,
information vulgarisée, oui, mais aussi accès à l'information et disposition
d'information indépendante, crédible.
Vous parlez de rétro-information, c'est essentiel. Merci d'amener ces points,
de clarifier les prises... les grandes décisions
publiques. Par contre, ce que demandaient les citoyens, ce qui était ressorti
dans le chantier, on parlait beaucoup de rétroaction sur la
participation du public...
Le
Président (M. Iracà) : Merci, M. Batellier. Vous allez avoir
l'occasion, peut-être, de revenir sur certains points dans les périodes d'échange. Je vais céder la
parole immédiatement à M. le ministre pour un temps approximatif de
9 min 30 s.
M.
Arcand : Merci, M.
le Président. M. Batellier, bonjour. Bienvenue à cette audition que nous avons
ici, en commission parlementaire, sur cet enjeu extrêmement important.
Moi, ma
question au départ, c'est de savoir, essentiellement, selon votre expérience,
depuis le temps que vous étudiez ces
notions-là, quels sont les principaux enjeux qui touchent véritablement
l'acceptabilité sociale, particulièrement au Québec. On a dit aujourd'hui que les promoteurs s'étaient améliorés.
On a dit qu'il y avait des règlements qui étaient plus serrés qu'ils
étaient auparavant. On a dit que, de façon générale, il y avait un meilleur
équilibre entre le côté économique et la
protection de l'environnement, que les lois avaient été modifiées depuis
plusieurs années, etc. Pour vous, qu'est-ce qui demeure encore le plus
préoccupant au niveau de l'acceptabilité sociale?
M.
Batellier (Pierre) : Oui.
Puis je pense que, oui, il y a des progrès extrêmement importants aussi de la
part des promoteurs qu'il faut
souligner. On est dans une dynamique d'apprentissage extrêmement importante. Je
vais souligner un facteur, je pense
que c'est aussi le rôle, justement, des décideurs publics. Dans le dossier gaz
de schiste, dans le dossier minier, dans les contestations sociales
qu'on a eues, les gens ne sont pas fondamentalement contre ces activités-là, et
beaucoup des préoccupations venaient au
processus de décision qui encadrait, à l'encadrement de ces filières-là. Donc,
c'est toute l'importance, justement, de l'exercice qu'on fait.
Et, dans les
suggestions que j'amène aussi dans le mémoire, c'est vraiment de bonifier,
disons, cette prise en compte, cette
amélioration du processus de décision. Et j'insiste sur l'importance aussi du
rôle d'arbitre, de régulateur, et attention avec le rôle d'accompagnement. On peut comprendre ça, les promoteurs ont
été échaudés. Je comprends qu'on veut être à leurs côtés, les accompagner dans le développement, mais attention au
signal qu'on envoie au public. L'accompagnement du public apparaît un petit peu comme secondaire parfois, et il peut y
avoir une forme d'incohérence, et cette incohérence peut vraiment être difficile. Puis n'oubliez pas
qu'on est quand même 10 ans... on est dans un débat sur la... bien, dans
les suites d'un débat sur la collusion, sur
des tensions aussi autour des projets. Donc, ça, ce serait un aspect important.
Et peut-être
juste un exemple pour illustrer ça — c'était mon point sur lequel j'arrivais dans
ma présentation — c'est
dans les actions propres du ministère. Quand
on parle de processus d'information et de consultation, je pense qu'on parle
de guide bonnes pratiques pour le citoyen,
pour le promoteur, peut-être que ça prendrait un guide de bonnes pratiques
pour les fonctionnaires gouvernementaux,
comment on agit dans les projets, des devoirs de réserve dans la gestion, dans
les conflits, avoir une cohérence d'action,
une obligation d'évaluer a posteriori les gestes qui ont été posés, et encore
une fois la participation aussi au
niveau de la planification stratégique. On parle d'EES, de stratégie
énergétique, on n'a pas de politique
qui est envisagée pour ces grands exercices de planification, de politique de
consultation publique. Vous parlez d'une
politique de consultation publique avec les communautés locales, on ne voit
aucune consultation publique pour les grands exercices de planification
stratégique. Or, justement, c'est souvent pourquoi les projets, que se posent
les citoyens. Donc, c'est vraiment, je pense, un élément sur lequel il faut
absolument agir.
M.
Arcand : Merci. C'est
intéressant parce que mon sous-ministre a pris des notes sur le code d'éthique
ou enfin...
Une voix : De bonnes
pratiques.
M.
Arcand : ...les
bonnes pratiques que devrait avoir le ministère dans ses évaluations de ce
côté-là.
M. Batellier (Pierre) : Incluant
les...
M.
Arcand : Écoutez, je n'ai pas
beaucoup de temps, alors je vais juste vous poser une dernière question avant
que mes collègues puissent poser leurs questions.
Vous
avez l'air à dire que le BAPE doit continuer à mesurer certaines questions
économiques, j'ai vu ça dans votre mémoire.
Alors, à partir du moment où on accepte le principe qu'on a un bureau des
grands projets, sur le plan économique, qui va mesurer les effets économiques de plusieurs façons, comment vous
voyez le rôle du BAPE sur le plan économique à partir du moment où on fait ça? En vous disant en plus au départ que
notre ministère peut être accompagnateur, mais être accompagnateur ne
veut pas dire être promoteur, on s'entend là-dessus.
M.
Batellier (Pierre) : Non,
mais après il y a des symboles, il y a... En tout cas, il y a des messages
qu'on envoie, indirects, qui sont
aussi importants parfois que le fond du message lui-même. En tout cas, je pense
que, oui, ce bureau est d'ailleurs important — pour
revenir là-dessus, là, sur l'importance de ce bureau-là — pour
faire des analyses de coût-avantage et
peut-être dépasser l'analyse de retombées économiques, qui sont deux outils qui
n'ont rien à voir. Et souvent on les
confond, puis ça explique le fait qu'on n'ait pas du tout les mêmes résultats
en bout de ligne. L'émergence de ce
bureau, selon moi, ne doit en rien justifier un quelconque retrait de l'analyse
économique du BAPE. Mais déjà, là, le rôle
du BAPE, c'est d'éclairer la prise de décision gouvernementale dans une
perspective de développement durable, puis vous l'amenez, lui-même, qu'il doit englober les trois dimensions. Le
rôle que je vois, l'ancrage avec le BAPE, c'est que, pour moi, ce
bureau-là devrait éclairer les paramètres économiques, comme, par exemple,
l'Institut national de santé publique vient
éclairer les enjeux de santé publique pour les commissaires du BAPE par ses
études, par les prises de position comme
expert de ces questions-là. Donc, je le verrais comme ça, le rôle du bureau
d'analyse des... Je ne mettrais pas des impacts économiques, en tout
cas.
M.
Arcand : Merci.
Le Président (M. Iracà) : Donc,
merci beaucoup. Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Maurice.
• (16 h 50) •
M.
Giguère : Oui, monsieur. Une petite question ou deux. Vous dites que
ce serait important qu'il y ait rétroaction, donc, concernant, là, la participation du public aux projets. Donc,
j'aimerais ça que vous nous expliquiez comment vous voyez ça, ce mécanisme-là,
parce que c'est pas mal en amont, ça, là.
M.
Batellier (Pierre) : En
fait, un des enjeux, c'est que souvent... Puis j'en ai fait l'expérience en
participant à beaucoup de consultations publiques, que ce soit dans le cadre d'évaluations environnementales stratégiques,
de projets particuliers où, en tant
que citoyen, en tant que groupe, on amène un certain nombre d'éléments dans la
discussion, sauf qu'une fois,
ensuite, le promoteur arrive, et, finalement, il n'y a pas forcément eu une
synthèse des éléments qui ont été apportés
dans le cadre des discussions, et on ne nous explique pas, finalement,
qu'est-ce qui a été retenu, pas retenu, on ne justifie pas... Quand il y a, par exemple, un point dominant qui
vient dans les consultations publiques puis que, finalement, il est complètement évacué ensuite dans la prise
en compte, dans le rapport final, c'est des éléments qui sont souvent un
petit peu frustrants. Donc, on a l'impression d'être écouté, mais pas forcément
d'être entendu.
Donc, c'est
un petit peu ça, c'est comment on fait en sorte qu'on fait comprendre aux
citoyens qu'on les entend. C'est
qu'il faut trouver un moyen de leur faire part de : Voici la rétroaction
qu'on donne sur votre participation. Parce que les gens se découragent à participer, puis ça a l'air parfois
d'exercices, un peu, de façade, hein? On a participé, c'est fait, on peut passer à autre chose. Donc, c'est
ça. Ça se fait, il y a des pratiques, il y a une littérature large sur les
processus de rétroaction sur la participation. Ce n'est pas un exercice
évident, mais ça prend un certain courage de dire : On a retenu ces
éléments, on n'a pas retenu ces autres éléments, mais on peut le faire, on est
capable.
M.
Giguère : O.K. Vous dites aussi que les Québécois, dans l'ensemble,
là, bon, se sont impliqués si c'est pertinent qu'ils soient dans le projet. Moi, je ressens qu'on est loin, un petit
peu, du citoyen local puis de celui qui a de l'impact chez lui. On a vu l'UPA tantôt qui a passé, donc
il y a les agriculteurs que ça a un impact directement sur leur terre, il ne
faut pas... Quand je regarde ça, à moins que
je me trompe, mais il me semble qu'on est un petit peu loin de ça, là, on a des
groupes plus éloignés du...
M.
Batellier (Pierre) : Bien,
je pense qu'il faut redescendre jusqu'aux propriétaires, jusqu'à ceux qui sont
impactés le plus directement, puis
c'est peut-être quelque chose qu'on n'a pas suffisamment fait dans le passé.
Mais le point que je veux amener,
c'est qu'il y a quand même peut-être des projets qui devraient être évalués
puis dont on regarde l'acceptabilité
sociale à un niveau beaucoup plus large. Donc, oui, ça prend une acceptabilité
sociale au niveau local, mais peut-être aussi parfois, sur certains
grands projets, sur certains grands plans stratégiques qu'on fait, aussi une acceptabilité sociale beaucoup plus large dans
l'opinion publique. Et ça prendrait les deux pour peut-être... pour aller de
l'avant. Je ne sais pas si c'est le point.
Puis un autre élément que j'aimerais amener,
c'est que souvent on dit : Il faut restreindre, il faut limiter à la communauté d'accueil. Par contre, ça ne veut pas
dire que l'éclairage d'acteurs nationaux, régionaux, d'autres expériences
en dehors de la communauté d'accueil ne soit
pas pertinent. Donc, ça, c'est aussi à faire attention à ne pas enfermer
ça en une discussion locale en disant : Vous n'êtes pas légitimes, vous
n'êtes pas représentatifs. Il y a beaucoup aussi d'apprentissage puis d'expériences qui peuvent être... et de compétences
qui existent parfois pas au niveau local puis qui peuvent éclairer des
situations locales.
Mais juste un
point, peut-être ne pas diluer le local dans le national. Ce n'est pas vrai
qu'on va dire : Ah! bien, finalement, on regarde le projet à très large
échelle, ça fait que la petite communauté locale va être noyée dans des centaines de milliers de personnes. Je pense qu'il
faut différencier les deux, et décider, et évaluer les deux niveaux d'échelle.
Le Président (M.
Iracà) : Malheureusement, il ne reste plus de temps pour la partie
gouvernementale, pour les échanges. Alors,
il y a peut-être des bouts de réponse qui vont se retrouver dans d'autres
échanges. Je sais qu'il y avait d'autres
députés qui avaient des questions. Alors, sans plus tarder, je cède la parole à
l'opposition officielle, le député de Sanguinet.
M.
Therrien :
Merci, M. le Président. Je vous souhaite la bienvenue. C'était vraiment très
intéressant. Vous avez une maîtrise, c'est ça qui est écrit.
M. Batellier
(Pierre) : Oui, en sciences
politiques et économie de l'environnement, puis j'ai un D.E.S.S. en gestion.
J'ai deux maîtrises.
M.
Therrien : O.K.
Vous avez été aux HEC?
M.
Batellier (Pierre) : Oui.
D.E.S.S. en gestion aux HEC puis, en France, sciences po Paris, à la Sorbonne,
en économie et en sciences politiques.
M.
Therrien :
O.K. Je suis peut-être indiscret, mais c'est parce que je veux enligner mes
questions en fonction de la formation
que vous avez parce que vous avez parlé d'analyse économique tantôt, puis vous
étiez en arrière des collègues, donc,
que j'ai questionnés, puis je voyais que vous sembliez intéressé, puis j'ai
comme l'impression que vous me tendiez une perche virtuellement. Alors,
je vais en profiter...
Une voix : ...
M.
Therrien :
Oui, oui, j'ai beaucoup d'imagination, M. le député. Alors donc, je vais vous
tendre une perche, mais vous m'arrêtez si vous n'avez pas de réponse ou
si vous voulez passer à autre chose, là. Par rapport à l'analyse économique, vous dites qu'il y a une différence
entre l'analyse de retombées économiques puis l'analyse avantage-coût. Je suis parfaitement d'accord avec à ce niveau-là.
L'analyse avantage-coût, est-ce que vous avez un peu d'expérience
là-dedans? Je ne le sais pas, avez-vous un peu travaillé dans ce domaine-là?
M.
Batellier (Pierre) : Oui,
mais surtout sur ce que ça peut apporter, les limites, les différences avec les
autres outils. J'ai fait mon examen de synthèse doctoral sur la
question, donc je pourrais...
M.
Therrien :
O.K. Parfait. Parce que je vais vous dire franchement, je n'ai pas souvent
touché à ça. J'y ai touché un peu
dans le passé, là, mais pas au niveau environnemental, puis j'aurais aimé ça,
vous entendre là-dessus, par rapport à l'acceptabilité
sociale, l'utilité que ça peut avoir, l'analyse économique, si on fait une
analyse avantage-coût puis on inclut les externalités, à quel point on
peut aider à l'acceptabilité sociale. O.K. Je vais vous laisser là-dessus. Bon.
M.
Batellier (Pierre) : Oui.
Bien, je pense que c'est un des points
importants, puis un des postulats, malheureusement,
qui est fait, un peu implicite dans le livre
vert, c'est qu'un des problèmes liés aux réactions parfois négatives du public,
c'est qu'on ne leur vendrait pas assez bien
ou il n'y aura pas une bonne
compréhension, une bonne mise en valeur des retombées économiques. Je
pense qu'il y a aussi d'autres préoccupations, notamment quant à la prise en
compte des externalités négatives. Je pense, c'est important de mieux mesurer
les retombées économiques. Je pense qu'il y a une amélioration à faire de ce
point de vue là. Souvent, on les sous-estime, et je vous dirais que, souvent,
aussi on les surestime. Et puis je vous
dirais qu'il y a aujourd'hui quelques recherches rétroactives qui évaluent la
différence entre ce qui a été annoncé
puis ce qui a été concrètement réalisé. Donc, ça, ça pourrait être un bilan qui
pourrait être fait. Il y a beaucoup
de nuances qui peuvent être amenées aussi dans les emplois qu'on amène, qu'on
crée pour, justement, essayer d'avoir un bon regard sur ce que ce sont
des retombées positives.
Je vais
prendre un exemple tout de suite pour différencier, peut-être, pour le public,
ce que c'est, une analyse de retombées
économiques, par rapport à une analyse coût-avantage. Une analyse de retombées
économiques, par exemple, en termes
d'emploi, va vous dire : Telle filière, tel projet va créer
2 000 nouveaux emplois. Donc, ça, ça va être la perspective de l'analyse, disons, de manière brute. Ce que va
faire l'analyse coût-avantage, c'est qu'elle va regarder la mobilité de la main-d'oeuvre. O.K.? On crée
2 000 emplois. De ces 2 000 emplois, est-ce qu'il y en a
qui sont substitués? Est-ce que c'est un transfert de main-d'oeuvre?
Dans le
coeur, par exemple, du gaz de schiste, il y avait justement les deux points de
vue qui s'affrontaient, donc une
perspective de 2 000 emplois bruts, mais Jean-Thomas Bernard, qui
amenait, justement, une analyse coût-avantage, disait : Oui, mais il s'agit essentiellement d'un transfert de
main-d'oeuvre. Pour lui, le gain en termes d'emplois était nul, voire peut-être négatif, parce qu'on venait
déstructurer d'autres secteurs économiques existants. L'analyse coût-avantage
vient amener ce côté dynamique et vient
aussi prendre en compte toutes les externalités négatives que ne prend pas en
compte l'analyse de retombées économiques.
L'analyse de retombées économiques, c'est essentiellement les éléments positifs, fiscalité, emplois. Il y a des normes,
donc il y a... En tout cas, on pourrait faire un état... je l'ai fait sur ce
qui s'est fait au Québec. Et, de
l'autre côté, les externalités négatives, il y a beaucoup de choses qui ont été
amenées par le bureau du Vérificateur général sur toutes les
externalités à prendre en compte dans le cadre de ces exercices.
Vous parliez des conflits d'usage tantôt, on est
capable de chiffrer quel est l'impact d'une perte de territoire agricole, d'un ralentissement du trafic routier,
une dépréciation de la valeur des maisons, les coûts en termes
d'infrastructures, les coûts sur les activités
touristiques, les coûts sur la santé et l'environnement. Il y a toute une
littérature qui permet aujourd'hui de faire cet exercice, de monétariser aussi
ces externalités négatives.
M.
Therrien :
Bien, écoutez...
M. Batellier
(Pierre) : Et les coûts d'opportunité aussi. On parlait de coûts
d'opportunité aussi, ces...
M.
Therrien : Bien oui. Bien, c'est ça, tu sais, en économie,
on dit toujours que d'évaluer un projet, ce n'est pas d'évaluer les retombées économiques, c'est
d'évaluer le coût d'opportunité. Le deuxième choix de ce qu'aurait été notre
choix si ce projet-là n'était plus présent,
c'est l'idée du coût d'opportunité puis c'est comme ça, vraiment, que tu
évalues un projet. Les retombées économiques, c'est, en tout cas, une
façon non adéquate d'évaluer un projet économique.
M. Batellier (Pierre) : Bien, c'est une façon adéquate, mais c'est un
aspect de l'évaluation. Donc, juste savoir puis être... Je peux juste
amener, peut-être, une nuance...
M.
Therrien :
Oui, allez-y, allez-y.
M. Batellier (Pierre) : L'analyse coût-avantage, souvent, traditionnelle
amène ce qu'on appelle le bien-être général, c'est-à-dire elle va agréger toute la création de richesse pour essayer
de voir est-ce qu'on crée de la richesse ou est-ce qu'il s'agit d'une perte de richesse au niveau
collectif. Une des limites importantes à reconnaître de ça, c'est que souvent
on ne va pas regarder comment se
distribue cette richesse, on va dire : Il y a un gain net de
2 milliards de richesse qui est créé au Québec, mais l'analyse coût-avantage, elle ne va pas dire est-ce que,
quelque part, on fait un transfert de richesse, il y a des acteurs qui
perdent énormément, puis d'autres qui gagnent beaucoup.
Donc,
aujourd'hui, il se développe aussi ce qu'on appelle les analyses coût-avantage
par partie prenante, donc est-ce
qu'on peut le faire pour la communauté locale, pour le gouvernement et le
contribuable et après, de manière globale, pour le projet, pour le
promoteur, mais il faut différencier aussi par partie prenante cette analyse
coût-avantage-là.
M.
Therrien : Bien, écoutez, vous revenez exactement sur ce que
j'avais dit voilà quelques jours. Je ne me lance pas des fleurs, là,
mais c'est parce que j'avais exactement dit la même chose, c'est que, quand tu
fais une analyse avantage-coût, il faut que
tu distingues les récipiendaires des avantages et des coûts, et donc j'en avais
classifié trois, au niveau de la région, au niveau de l'entreprise puis
au niveau de l'État québécois.
Moi,
je suis parfaitement d'accord avec vous puis je vous dis franchement, à travers
un livre vert puis avec un responsable
d'analyse économique, je ne vois pas pourquoi on n'arriverait pas avec
qu'est-ce que vous proposez pour, justement,
consolider l'acceptabilité sociale au niveau technique et faire en sorte que la
population soit bien avisée dans ses
prises de position. Moi, je trouve ça extrêmement important puis que c'est une
voie de réussite assurée, ce genre de démarche là. Je veux vous entendre
là-dessus rapidement, là, parce qu'il nous reste...
• (17 heures) •
M. Batellier (Pierre) : Et puis je vous dirais que l'essentiel des
analyses des facteurs ayant mené, par exemple, à la mobilisation sociale sur le gaz de schiste ou même dans le dossier
des hydrocarbures tient pour beaucoup, justement, à l'absence de prise en compte de ces externalités
négatives. C'est un facteur très important des mobilisations sociales, et on serait capable, il existe aujourd'hui les
méthodologies, des moyens de prendre en compte aussi l'incertitude, de faire
en sorte de faire des analyses de sensibilité sur les grands paramètres.
Donc, on a les compétences, le moyen de le faire, de sortir peut-être aussi juste d'une approche économique pour aller
aussi dans une approche comptable. Ce que j'aime beaucoup dans la comptabilité,
dans un bilan financier, là, c'est qu'on voit les flux de trésorerie,
c'est : L'argent, il passe de où à où, de qui à qui?
Le
Président (M. Iracà) : Merci beaucoup, M. Batellier. Ceci met fin aux échanges avec l'opposition officielle. Nous allons maintenant procéder aux
échanges avec la deuxième opposition. Mme la députée de Saint-Hyacinthe.
Mme
Soucy : Merci, M. le Président. Je vais continuer sur analyse coûts. Ça va
bien, on parle d'analyse coûts avec
un économiste. Mais, quand on parle d'impacts, d'analyse coûts, devrait-on
mieux le vulgariser? Parce que je me pose
la question : Est-ce que les gens comprennent? Tu sais, l'information qu'on leur transmet, est-ce
qu'on devrait mieux la
vulgariser lors de la consultation publique et de la...
M. Batellier (Pierre) : Oui. Bien, je pense, madame, dans l'ensemble du
dossier, il y a un enjeu de vulgarisation. Après, faire attention à, parfois, la
simplification excessive, là, ne pas sous-estimer la capacité de compréhension,
là, puis de participer du citoyen. Des fois, on a un biais, un petit peu.
Mme Soucy :
...
M. Batellier (Pierre) : Non, non, mais je pense que c'est... Mais parfois
c'est très concret, là. Quand vous parlez de perte de valeur foncière des maisons, de changements... à devoir
adapter les usages du territoire, de coûts d'assurance, là, quand vous devez changer votre régime d'assurance,
vous avez un nouveau projet industriel à côté de chez vous, c'est une externalité négative. C'est des choses très
concrètes pour le citoyen. Mais je pense qu'on est capable de clarifier tous
ces éléments. C'est ça.
Puis
l'analyse coût-avantage, ce n'est pas... Je suis content d'avoir aussi un peu
de participation féminine dans le
comité d'évaluation, là, mais un élément qui est souvent laissé de
côté, c'est aussi l'analyse différenciée par genre, quel est l'impact spécifique des projets aussi sur les
femmes. Quand on évalue ces grands projets de ressources naturelles, c'est
aussi des impacts qui devraient être évalués
et qu'une analyse coût-avantage, là, n'aborde pas. Puis il y a beaucoup
de choses qu'on n'aborde pas dans une
analyse coût-avantage, là. Est-ce
qu'on respecte nos promesses? Est-ce qu'on respecte les valeurs locales?
Est-ce qu'on respecte les droits
fondamentaux, les droits humains? Donc, c'est une analyse coût-avantage,
analyse différenciée, il peut y avoir un
ensemble d'outils et de critères. Il y a
l'analyse multicritères, qui est largement utilisée aussi, là, par des
décideurs privés, qui joint une analyse coût-avantage à d'autres analyses.
Donc, on pourrait enrichir ça largement. On a toutes les compétences au Québec
et les moyens pour avoir vraiment des très bons outils d'analyse, mais ça prend une volonté politique et des moyens
financiers aussi pour structurer ces méthodologies et ces outils-là.
Mme
Soucy : Merci. Lors des consultations, il y a plusieurs personnes qui nous ont dit : Bien, on
devrait tenir compte de l'opinion
des gens locaux. Pourrait-on vraiment empêcher les gens de l'extérieur de venir
s'opposer à un projet? Vous, en tant que chercheur, j'aimerais ça avoir
votre point de vue sur ça.
M.
Batellier (Pierre) : Disons
que la recherche académique est aussi partagée et aussi n'arrive pas à
trancher. Est-ce que le social doit toujours se limiter au local?
À quel moment, on élargit ce social-là? C'est sûr que c'est problématique.
Je pense qu'il faut peut-être
différencier les deux, et pas forcément agréger toujours la population
locale avec... au niveau de la
décision, la population locale avec une échelle plus large. Malheureusement, la recherche, non, n'apporte pas forcément des pistes si
éclairantes de ce point de vue là.
Après, c'est
des décisions... Comme je le disais, là, des expériences externes, des acteurs
au niveau national peuvent apporter
des éclairages très intéressants. Puis il
y a peut-être des grands projets,
est-ce que... Je pense qu'à Anticosti c'est fondamental de consulter, par
exemple, la population
locale. Après, est-ce que ça ne nous concerne pas comme Québécois à
l'échelle nationale? Je ne sais pas si, quelque part, aussi on ne
devrait pas avoir un mot à dire, tous les contribuables, les citoyens québécois. Après, comment on
fait ça? Il y a des enjeux d'opérationnalisation, là, mais il y a
certains grands projets qui méritent,
je pense, une réflexion puis une évaluation de l'acceptabilité sociale à diverses échelles.
Puis ça ne veut pas dire agréger les deux, là, on ne va pas noyer la
petite communauté d'Anticosti dans la masse des millions de Québécois au moment
de l'évaluation.
Mme
Soucy : Vous dites que le
BAPE pourrait continuer à évaluer les questions économiques. Vous ne trouvez
pas que le BAPE a miné le processus global d'acceptabilité sociale en se penchant sur
l'économie, de toute façon, hein,
sachant que ce n'est pas son rôle principal?
M.
Batellier (Pierre) : Bien,
je fais toujours référence à son rôle, qu'il a pour mission
d'éclairer la prise de décision gouvernementale dans une perspective de développement
durable, lequel englobe les aspects écologique, social et économique, et moi, je pense que c'est toujours
important d'avoir aussi une perspective où on croise les trois dimensions,
là. Puis opposer environnement et économie, là, je pourrais vous citer toutes sortes d'externalités
négatives, d'impacts sur l'environnement qui ont un coût en termes de gestion publique, en termes de perte de valeur
foncière, en termes... On peut lier
très facilement environnement et économie, et je pense que ça prend aussi une entité qui
fait une analyse globale, de ne pas forcément les isoler.
Et nuire à l'acceptabilité sociale, je ne le sais pas. Malheureusement, il est mal outillé. Peut-être que, s'il avait un bureau d'analyse économique
et qu'il se fondait... Le BAPE fait des analyses et une enquête, mais il se
base beaucoup sur les ressources que lui met à disposition le ministère...
bien, en fait, les ressources qu'il va s'adjuger puis qui sont disponibles. Si de nouvelles ressources d'évaluation sont disponibles, peut-être le
BAPE arrivera avec des évaluations économiques beaucoup plus solides, beaucoup plus, peut-être, légitimes aux yeux à la
fois des citoyens, et des promoteurs, et des autres acteurs publics. Ce n'est pas une fatalité, loin
de là. Puis je pense qu'il faut garder... N'oubliez pas aussi la perception
publique du citoyen envers le BAPE, là.
Puis, aujourd'hui, là, les gens valorisent beaucoup les entités indépendantes
aussi dans l'analyse des projets, là. Voilà.
Le
Président (M. Iracà) : Merci
beaucoup, M. Batellier. Nous allons procéder à une période d'échange avec un
groupe indépendant. La députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, la parole est à
vous.
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Bonjour. Bonjour, chers collègues. Je
suis toujours dans mon saut de puce. Oui,
c'est important de rappeler que le BAPE, hein, je pense... Je ne me souviens
pas le nombre de commissaires, mais il
y a trois économistes qui travaillent au BAPE, ce n'est pas du monde dans le
social qui porte une analyse économique sur les projets, etc.
Vous avez
parlé de toute la question de l'accès à l'information, l'accès à l'information
avant l'étude d'impact, après la rétroaction, etc., et est-ce que vous
auriez d'autres éléments à nous apporter là-dessus?
M.
Batellier (Pierre) : Oui.
Bien, j'insisterais là-dessus, je pense qu'il y a un enjeu de vulgarisation,
mais, comme je le dis, il faut que ce
soit présent dans le livre vert. Ce n'est pas parce qu'on apporte une
information vulgarisée à côté qu'il ne faut pas avoir accès à
l'information. Puis la littérature montre aussi que, quand le citoyen sait
qu'il a accès à l'information, ça le
rassure, il n'ira peut-être pas forcément toute la fouiller ou la chercher,
mais il sait. Il faut voir aussi que souvent, derrière beaucoup de demandes
d'information, on me demande de l'information pour demander de l'information
parce qu'on estime qu'on ne l'a pas, elle
n'est pas disponible, ça inquiète le citoyen. Quand cette information est
rendue disponible, vous pouvez aller
voir d'autres juridictions, bien, peut-être qu'il y aura finalement moins de
demandes. Puis, quand le citoyen
demande de l'information, des fois, derrière, il faut voir ce qui est caché derrière,
c'est qu'il s'outille lui-même. Ce
que montre la recherche, c'est que, quand le citoyen n'a plus confiance dans
l'évaluateur du risque, dans le
générateur d'information, ce qu'il fait, c'est qu'il va s'informer lui-même, il
va demander de l'information, il va faire une recherche poussée
là-dessus, et c'est ça.
Et peut-être un dernier point, le citoyen, il
n'a pas toujours le goût de s'informer et de participer à toutes les consultations sur les projets, il a aussi une vie
et d'autres choses à faire, et il aimerait aussi parfois pouvoir s'appuyer sur
une entité crédible puis qu'il juge
indépendante, légitime pour faire ces exercices-là. Donc, c'est là où je refais
le lien une dernière fois avec
l'importance aussi de... Oui, on veut être accompagnateur des promoteurs,
attention, être accompagnateur du
citoyen, et puis pourquoi on ne serait pas juste régulateur et faire de
l'encadrement, comme on le fait traditionnellement, là, puis trouver un
juste équilibre, là?
Mme
Massé : Et je trouve ça intéressant parce qu'effectivement vous avez
abordé... Le ministre a tenu à préciser que, dans sa perception du rôle d'accompagnateur, ça ne voulait pas dire
d'être promoteur du projet, mais vous avez parlé de, parfois, la perception que ça peut provoquer chez les gens. Donc, ce
que vous proposez, c'est d'être beaucoup plus clair sur le rôle
d'encadrement ou de régulation...
M.
Batellier (Pierre) : La
frontière est parfois étroite, là. Dans les éléments qui sont amenés, pour moi,
c'est de l'encadrement. C'est
qu'après on veut lancer un message au milieu des affaires et c'est... Je
comprends aussi cette volonté-là, juste
avoir conscience aussi de ce message-là qu'on crée, qu'on envoie, puis est-ce
qu'on envoie le même message au public,
dont l'accompagnement, parfois, se retrouve en annexe, dans le livre vert, où
c'est toujours le citoyen en dernier? Quand on parle d'accompagnement,
c'est un aspect important.
Un dernier
point aussi qui, peut-être, me dérange un peu, moi, je suis citoyen, mon
premier réflexe pour comprendre c'est
quoi, le rôle et les fonctions des institutions publiques, j'ouvre la loi. Puis
moi, quand j'ai ouvert la loi sur le ministère, ses rôles et fonctions, je n'ai pas trouvé nulle part «accompagnement»,
«partenaire», ces éléments-là, et on parle beaucoup de tous les autres rôles qui sont dans le livre
vert. Puis j'ai découvert la stratégie, finalement, 2015-2018, où, là, on
explique tout ce virage sur le ministère, mais, bon, je trouve que...
est-ce que le débat a été fait aussi sur cette modification, changement, un peu, de mission fondamentale du
ministère? C'est la perception qui est aussi parfois un petit peu
problématique.
C'est là où
l'importance de, oui, mieux spécifier les rôles et responsabilités, mais
clarifier c'est quoi, les fondements, puis
c'est relié à quels documents. Dans le livre vert, puisque c'est une bonne
pratique, autant l'appliquer tout de suite dans le livre vert puis d'expliquer sur quoi se basent ces rôles-là. Je
ne veux pas dire que ce n'est pas légitime, là, d'accompagner, là, mais
il faut en faire une bonne discussion puis avoir les pour et les contre, là...
Le Président (M. Iracà) : Je vous
remercie, M. Batellier, mais, malheureusement, ça met fin aux échanges. Alors,
merci beaucoup de votre présentation, de vous être déplacé ici, à l'Assemblée
nationale.
Je suspends les travaux quelques instants et
j'invite le prochain groupe à prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 10)
(Reprise à 17 h 12)
Le Président (M. Iracà) : Nous
allons reprendre les travaux de la commission. Merci beaucoup de vous être déplacés. Je vous souhaite la bienvenue à l'Assemblée nationale. Pour des fins d'enregistrement, je vais vous
demander de vous présenter. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission. Monsieur, la parole est à vous.
Association
canadienne de l'industrie de la chimie (ACIC)
M. Hamelin
(Yves) : Merci de me
recevoir. Mon nom est Yves Hamelin. Je suis directeur régional pour le Québec de l'Association canadienne de l'industrie de la chimie. Alors, évidemment, je vais vous présenter la position de
l'association. Je vais utiliser
souvent l'acronyme ACIC, ça va me permettre de respecter mon 10 minutes. Alors,
évidemment, l'objectif, ce n'est pas
de lire le mémoire parce que vous l'avez en main. Donc, évidemment, c'est d'en
faire ressortir les éléments clés, évidemment, pour les fins de ce
processus d'auditions publiques et, évidemment, de respecter le temps alloué.
La
présentation va se faire en trois temps. D'abord, une brève introduction de qui
nous sommes parce que ça permet de
comprendre les tenants et aboutissants de notre position en tant
qu'association. Évidemment, je vais m'attarder aux cinq orientations parce que, pour chacune, il y a
des éléments, je pense, qui sont très positifs dans ce livre vert là, mais
il y a certains éléments sur lesquels ça
confirme des prises de position ou des échanges intéressants à avoir avec vous.
Et, évidemment, je présenterai une très brève conclusion.
L'ACIC, c'est une association pancanadienne qui
regroupe une cinquantaine de membres, dont 75 % des partenaires de l'industrie de la chimie.
Évidemment, le bureau central est situé à Ottawa. Moi, je suis responsable pour
le Québec, mais j'ai un collègue qui
s'occupe de l'Ontario, quelqu'un qui s'occupe de l'Alberta et quelqu'un qui
s'occupe de la Colombie-Britannique. Évidemment,
j'assume le rôle de directeur régional au Québec. C'est une quinzaine de membres au Québec. Évidemment, c'est un membership
de haut niveau, là. Ce n'est pas une carte de membre chez Costco, là, c'est des gens qui paient des cotisations
importantes. Et, évidemment, on est majoritairement en région, donc on est à
Valleyfield, Beauharnois, Verchères,
Bécancour, Buckingham. Donc, on est, évidemment, en périphérie de la grande
région métropolitaine. On génère
10 milliards de chiffre d'affaires et 5 milliards en exportations. On
est quatrième en termes de rang au secteur manufacturier et on est
responsable de 22 000 emplois et 110 000 emplois indirects.
La particularité de membership de l'association,
c'est que nos membres doivent adhérer à l'esprit et au code de pratique de la gestion responsable. Et ça,
évidemment, c'est un programme qui a été créé en 1985 au Canada, qui est
reconnu par l'ONU et adopté dans 60 pays. Ça constitue une
condition d'adhésion à l'association et ça permet de vérifier la performance de l'entreprise en matière de santé et sécurité, en matière
d'environnement et, évidemment, en tant que citoyen
responsable d'une localité. Par exemple, toutes nos usines ont un comité de
citoyens. Donc, quand on parlera tantôt d'expérience de comités de liaison, de
comités de citoyens, je pourrai partager des choses avec vous.
Une
vérification, c'est quatre jours, 152 activités et, évidemment, des
recommandations, donc, qui confirment à une population locale, évidemment, une crédibilité d'opération qui est
importante. Lors de la vérification, il y a un membre qui représente les citoyens de la localité qui est
là pendant quatre jours. Le rapport est public, sur le site, donc il y a une
transparence dont vous faites état dans le
livre vert, là, nous, qu'on vit depuis une cinquantaine d'années dans nos
vérifications.
Alors, les
orientations du livre vert. Alors, évidemment, de manière générale,
l'association salue l'initiative du ministère
dans le cadre du livre vert. Évidemment, on appuie l'objectif de moderniser les
outils et les pratiques, ça, c'est évident,
mais surtout une approche nouvelle qui vise à trouver un juste équilibre entre
le développement économique et la protection
du territoire. Évidemment, on reconnaît l'importance du leadership du
ministère, qui, pour nous, est important, et, évidemment, on est convaincus que les orientations manifestées à
l'intérieur du livre vert sont de nature à favoriser l'acceptabilité sociale. Nous, en 1982, on parlait
de ça à l'association, mais on ne savait pas trop, on parlait de responsabilité
sociale. Donc, ça vous donne une idée comment on avait intégré ça dans nos
pratiques.
Maintenant, les orientations. Alors, je vais les
passer une par une. L'orientation, la première, qui est rôles et responsabilités du ministère, alors,
définitivement, considérant la portée potentielle des projets, le ministère
suggère la mise en place de
mécanismes de coordination interministériels. Si cette coordination nous semble
inévitable, elle représente toutefois,
selon nous, tout un défi dans la culture gouvernementale actuelle. Alors, nous
souscrivons à l'intention, mais la
faisabilité soulève des interrogations. Il existe un risque, selon nous, que
cette coordination puisse alourdir le processus. La volonté de mieux accompagner les promoteurs permettra définitivement
une meilleure compréhension de l'ensemble de la démarche et, pour nous, aussi, considérant que ces promoteurs-là
sont souvent étrangers, une meilleure intégration à la culture québécoise. Et, pour nous, ça, c'est
primordial. Moi, j'ai travaillé dans des unités mondiales. La perception
des Québécois, des Canadiens, des
Américains, des Européens, dépendamment où on est, des Asiatiques, n'est pas la
même en termes d'acceptabilité
sociale, et le fait de les accompagner, pour moi, ça a une valeur ajoutée qui
est très importante. Évidemment, la
question qu'on soulève, c'est : Est-ce que ça doit se faire pour toutes
les catégories de projets?
Dépendamment de la nature du projet, là, il faudrait peut-être un peu
modéliser dépendamment de l'impact du projet.
La deuxième orientation, qui touche, évidemment,
les mécanismes, le PATP, de le rendre plus transparent et participatif, évidemment, on appuie fortement
cette approche-là. Nous, évidemment, on vit avec des comités de citoyens
depuis toujours, et c'est une approche qui
est gagnante, définitivement, de procéder de cette façon-là. Évidemment, comme
les plans d'affectation ont une portée qui
va au-delà des communautés locales, parce qu'évidemment il peut y avoir une
décision d'implantation énergétique ou d'un
site d'exploitation, évidemment, il faudrait s'assurer qu'il y a peut-être un
lien. En tout cas, pour nous, là, de l'expérience des comités de citoyens, un
comité de citoyens permanent au niveau provincial
pour amener un contrepoids sur la portée des projets nous apparaîtrait
peut-être une notion intéressante à explorer.
L'orientation
3, la mise en place de processus prévisibles en termes d'information et de
consultation, encore là, évidemment,
nous sommes tout à fait d'accord. Plus ça va se faire rapidement, et plus ça va
être accessible. La clé, c'est toujours
les communications. Donc, évidemment, c'est important. Et on dénote dans le
livre vert l'importance du comité de
suivi parce qu'un processus d'acceptabilité sociale, ça a un début, mais c'est
aussi évolutif, et, en cours de route, il faut trouver un moyen de
maintenir la qualité de l'information dans tout le processus. Évidemment, ça
pourrait être intéressant de définir un
cadre de référence. J'entendais tantôt des choses, je suis arrivé un peu à
l'avance, là, le danger d'un cadre de référence, c'est que ça limite la
flexibilité et l'innovation. Mais ça a aussi l'avantage de définir certains
paramètres, alors il faudrait trouver le juste équilibre entre définir un cadre
de référence et laisser place à certaines initiatives.
Mais je miserais davantage pour un certain cadre de référence où on essaie de
trouver une forme d'équilibre.
• (17 h 20) •
L'orientation
4, favoriser un partage des bénéfices avec la communauté d'accueil, je pense
que ça doit prendre la forme de
quelqu'un qui s'intègre dans une communauté. Embauche locale, achats locaux,
donations, participation à des oeuvres,
je pense que ça, c'est une façon de s'imprégner, et ça devrait aller de soi
dans une communauté où on décide de
s'établir.
L'orientation
5, renforcer la capacité d'analyse des impacts, évidemment, on parle de
retombées économiques et d'acceptabilité
sociale. Selon nous, cette orientation-là est majeure. Il est primordial que
les retombées économiques soient davantage
au rendez-vous. Aux trois paliers du
développement durable, l'environnement et l'acceptabilité sociale ont écarté,
selon nous, dans les dernières années, le
volet économique lors des derniers grands projets au Québec. Nous encourageons
fortement la mise sur pied d'un bureau
indépendant pour donner de la crédibilité à l'analyse des retombées
économiques.
En
conclusion, vous, vous le livrez en introduction, mais, définitivement,
l'acceptabilité sociale ne peut pas signifier «unanimité», parce qu'on n'arrivera jamais, particulièrement avec le
niveau de sensibilité et de perception de la notion d'acceptabilité sociale, surtout au Québec. Comme
le risque zéro n'existe pas en matière de développement et de changement, ce livre vert présente des avenues
intéressantes pour favoriser une notion d'acceptabilité sociale plus rationnelle et plus transparente, basée sur une
meilleure compréhension des rôles, définitivement. Parce que, pour tout
promoteur, c'est la prévisibilité qui est gagnante dans un projet, une volonté
d'accompagnement des promoteurs, définitivement, une meilleure intégration...
Le Président (M. Iracà) : ...pour
vous aviser, M. Hamelin, il vous reste une minute.
M. Hamelin
(Yves) : Ah! j'en ai pour
30 secondes. Une meilleure intégration interministérielle des projets, des
mécanismes de consultation mieux organisés
et plus transparents, une volonté d'une meilleure intégration des promoteurs
à la communauté locale et une meilleure prise
en compte des retombées économiques par la mise sur pied d'un bureau
indépendant. Merci de votre écoute. Et je suis disponible pour les échanges.
Le
Président (M. Iracà) : Merci, M. Hamelin. Nous allons débuter les
échanges avec la partie gouvernementale, et je cède immédiatement la
parole à M. le ministre.
M.
Arcand : Merci
infiniment, M. le Président.
Le Président (M. Iracà) : Votre
temps est d'à peu près 17 min 30 s.
M.
Arcand : Très bien,
merci. M. Hamelin, d'abord, bienvenue parmi nous en ce jeudi après-midi.
Peut-être, d'entrée de jeu, j'aimerais un
peu comprendre ce que l'association fait exactement, l'association canadienne.
Elle est quand même peu connue comme
association au Québec. Je vois qu'il y a des entreprises comme Dupont, CN, CP,
Dow, Shell, Honeywell, pour ne
mentionner que ceux-là, qui sont des membres chez vous, qui sont les grandes
entreprises qui... quelles sont les
entreprises au Québec qui opèrent et qui ont le potentiel d'avoir ce genre de
projets que l'on discute aujourd'hui et dans lequel ça demande une implication, une consultation citoyenne,
etc.? Est-ce que vous pourriez nous donner quelques exemples?
M. Hamelin
(Yves) : Oui. Alors, si on
parle pour le Québec, si vous parlez de Bécancour, bien, il y a Olin, qui est
un producteur de chlore, Arkema, producteur
de peroxyde d'hydrogène. Donc, il y a les Erco de ce monde à Buckingham au niveau du chlorate. On va avoir des Dow et des
Kronos au niveau du pigment de titane, National Silicates au niveau des
polymères. Donc, c'est le type de membres en région, fortement, qui peuvent
vivre de retombées indirectes des dommages
collatéraux très positifs de projets énergétiques, ou de projets d'implantation
miniers, ou peu importe, parce que la
molécule chimique, dans la dynamique de transformation, c'est un agent qui
vient aider, évidemment, toute l'industrie de la construction, de la
foresterie, des plastiques, du pharmaceutique, de l'aérospatiale.
Tout ce qu'on
touche, c'est chimique, là, fondamentalement, là. Donc, pour nous, d'aller
recadrer cette perception-là d'acceptabilité
sociale... En tout cas, moi, j'ai participé à des BAPE, là, les derniers, là,
IFFCO, Stolt LNGaz, je suis sur le C.A. de la société du parc à Bécancour, je suis sur le conseil d'administration
du Centre patronal de l'environnement du Québec, alors, de l'acceptabilité sociale, on en a entendu, évidemment,
beaucoup dans les dernières années. Donc, pour nous, c'est important de recadrer cette perception-là où, actuellement,
à peu près tout ce qui est «c'est dans ma cour» n'est pas acceptable dans une dynamique où il faut aussi
développer le Québec. Donc, on est des moteurs de l'économie, on participe à la chaîne avec nos organisations, et,
si on veut, évidemment, demeurer prospères, croître et donner l'occasion
à d'autres de venir s'établir, c'est là que notre lien est important pour
l'association.
Le Président (M. Iracà) : Merci.
M.
Arcand : Merci infiniment.
Vous avez dit quelque chose que je trouvais très intéressant, votre code de
gestion... juste avoir quelques
détails, là, de codes de gestion responsable pour vos entreprises. Pouvez-vous
juste me dire quels sont les éléments principaux de ce code-là?
M. Hamelin (Yves) : Alors, tout
d'abord, c'est une éthique et l'esprit de la gestion responsable, et c'est un programme qui a été développé suite aux incidents
en Inde, là. Bhopal, tout le monde l'a dans l'imaginaire, là, se rappelle
de ces instants catastrophiques, et là
l'industrie a décidé de se prendre en main parce qu'on ne pouvait pas continuer
à opérer une licence sociale avec ces
conditions-là. Donc, développé au Canada à travers trois codes de pratiques,
151 activités, une vérification de trois jours ou quatre, dépendamment
de la réalité des usines, qui s'assure que tout le volet santé et sécurité, environnement, sécurité opérationnelle
et transport est pris en compte et assure que nos membres opèrent dans
des conditions de gestion responsable et que les risques à la population sont
le plus possible éliminés.
Donc, ça veut
dire qu'on a un citoyen... Nous, on a tous des comités de citoyens
représentatifs de nos communautés qui font des meetings chez nous, qui
gèrent leur agenda, qui sont complètement indépendants, à qui on présente nos objectifs environnementaux, les problématiques
qu'on a et qui sont des ambassadeurs dans notre milieu. Et une vérification,
chez nous, c'est quatre jours, c'est un
rapport transparent et rendu public sur le site de l'association, auquel est
tenu responsable le dirigeant de l'entreprise en termes d'amélioration.
Donc, pour nous, c'est une caution importante de nos activités.
Nous, ce
qu'on souhaiterait même, c'est, pour une garantie meilleure de l'industrie de
la chimie... Parce que notre membership,
ce n'est pas toutes les entreprises. Pour nous, tous les fabricants de produits
chimiques devraient oeuvrer dans un environnement de gestion
responsable.
M.
Arcand : M. Hamelin, je vous
remercie, en tout cas. Parce que j'ai lu votre document, c'est un document qui
est quand même pas mal positif pour ce qui nous concerne. Alors, je tiens à
vous remercier parce que, vraiment, vous souscrivez passablement à l'ensemble de notre livre vert.
Alors, je vous remercie infiniment pour votre présentation aujourd'hui.
Le
Président (M. Iracà) : Alors, merci beaucoup, M. le ministre, Je vais
céder la parole immédiatement pour l'échange avec l'opposition
officielle avec le député de Sanguinet.
M.
Therrien :
Merci, M. le Président. Alors, bienvenue. Merci d'être parmi nous. Cadre de
référence, vous dites : Bien, on
a avantage à avoir un cadre de référence. Vous dites oui à la flexibilité,
mais, quand même, il faut définir certains paramètres. J'imagine que c'est en lien avec l'idée d'amener plus
rapidement l'acceptabilité sociale. C'est pour ça que vous considérez que le cadre de référence doit
être quand même solide, là, parce que... Je vais juste terminer mon idée, là,
parce qu'au départ, moi, je trouve que, dans
le livre vert, le principe de l'acceptabilité sociale n'est pas nécessairement
très bien défini au départ, mais il y a des
gens qui nous ont dit : Bien, ce n'est pas grave. De toute façon, c'est
dur à définir, puis, de toute façon,
c'est dans l'évolution des négociations, puis de la réflexion, puis des
analyses qu'on va atteindre cette acceptabilité
sociale. Donc, c'est plus dans la démarche que dans la définition. Alors, le
cadre de référence est important, j'imagine, pour accéder à cette
acceptabilité sociale?
M. Hamelin
(Yves) : Évidemment, même si
on s'entendait sur une... Évidemment, nous, on a perçu le livre vert comme étant des pistes d'orientation pour
construire quelque chose, là, qui est en devenir parce qu'évidemment
l'environnement change et évolue, et
je ne pense pas que ce serait une définition précise qui viendrait régler la
dynamique d'acceptabilité sociale.
Ceci étant
dit, moi, je pense qu'actuellement il y a un épiderme très sensible au Québec
sur à peu près tout projet qui a un
impact sur l'environnement, sur un cours d'eau ou sur une grenouille, sur une
couleuvre. Bon, vous voyez un peu
la... Alors, moi, je pense qu'il faut ramener ça dans un débat rationnel. Je
trouve ça dommage, actuellement, de voir des débats publics où c'est les pancartes qui dominent plus que le
rationnel et le débat. Alors, moi, je pense qu'en donnant un cadre de référence on va, au moins, ramener le
débat dans des perspectives un peu plus rationnelles. Et je pense qu'il faut faire confiance après ça aux institutions
publiques où... lesquelles, il y aura une démarche, et, à la fin, il y a
quelqu'un qui doit, je pense, prendre une décision. Il y a quelqu'un qui
a été élu de façon démocratique et, à un moment donné, il y a quelqu'un qui doit se positionner pour les intérêts, à la limite,
finaux du Québec. Alors, on n'aura jamais l'unanimité, il y a toujours des gens à qui on va déplaire. Mais,
si on rationalise la démarche avec des éléments un peu plus concrets, moi, je pense qu'à la limite ce sera plus légitimé
de prendre une décision en fonction de paramètres comme ceux-là parce
qu'il y aura un cadre de référence. Parce que, là, ce n'est pas toujours joli,
là, ce qu'on entend, malheureusement, là.
M.
Therrien : Le fait
aussi que, dans une région, il y a un projet qui soit proposé puis qu'il y ait
des gens qui viennent d'ailleurs, alors
qu'il n'y a pas nécessairement d'impacts globaux... qui viennent s'installer
avec des pancartes et viennent un peu
motiver les troupes qui sont contre, éventuellement, un projet, pour vous, ça
ne fait pas vraiment de sens, là, ce que vous me dites, ce que je
comprends, là.
• (17 h 30) •
M. Hamelin
(Yves) : Bien, moi, si le
processus est démocratique et bien mené, je n'ai pas de misère avec ça du
tout, là. Je trouve ça un peu dommage que,
parfois, on ne laisse pas place au débat. Et c'est ça qui est couvert par
l'actualité, puis c'est un peu ça
qu'on en retire. Moi, je pense qu'un projet, d'abord, il y a une communauté
locale qui va le vivre au quotidien.
Ça, pour moi, c'est important, ça commence là. Mais ce projet-là peut avoir une
portée nationale, et là ça vaut
la peine, si, par exemple, c'est une filière
énergétique, que d'autres personnes aient la chance de aussi... C'est pour ça
que, nous, le comité de liaison, qu'il a une
volonté locale, mais je pense qu'un comité de liaison permanent qui pourrait
jouer un rôle par rapport au comité de
liaison local puis, je dirais, remettre parfois un peu les pendules à l'heure
sur les mécanismes de référence pourrait devenir utile.
M.
Therrien : Moi, honnêtement,
ça va faire le tour. Merci, c'est très clair. Merci.
Le Président (M. Iracà) : Merci, M.
le député de Sanguinet. Alors, je vais céder la parole à la députée de Saint-Hyacinthe
pour des échanges avec le groupe du deuxième groupe de l'opposition officielle.
Mme
Soucy : Merci, M. le Président. Bonjour. En fait, vous venez de
répondre à ma question, qui allait dans le sens de : Donnez-nous des détails sur votre vision au niveau du
comité de liaison au niveau provincial. Vous venez de le faire, alors, écoutez, je voudrais juste vous
entendre sur... Croyez-vous que, par son rôle de promoteur, le MERN soit
l'entité, en fait, la mieux placée pour évaluer objectivement tous les
aspects d'un projet?
M. Hamelin (Yves) : Moi, ce que j'ai
senti, dans le livre vert, je pense qu'il est, de par son titre et de par ses responsabilités... je pense que c'est une entité
qui devient responsable de cette réalité-là. Moi, je pense que ça lui
appartient. Ça ne veut pas dire que
c'est un pouvoir unique et sur lequel il n'y a pas des éléments de partage, et
c'est pour ça qu'on parle de comité
interministériel. Moi, je pense que, dans de grands projets, c'est tout à fait
sain de partager des portées qui sont
un peu plus du domaine de l'environnement, un peu plus du domaine économique,
un peu plus du domaine du transport, du niveau... Je pense que ça, c'est
une dynamique qui est saine, mais, à la limite, évidemment, un pouvoir complètement partagé, on n'y arrivera pas non plus
à la fin, là. Moi, je pense qu'on doit s'imprégner, évidemment, de l'expertise d'un ensemble de ressources, comme un comité de
citoyens, une communauté locale, mais à la fin, moi, qu'il y ait quelqu'un qui assume un leadership, ça me va aussi, là. Les
gens seront imputables de leurs décisions. À un moment donné, il faut que le Québec avance aussi. Moi, je pense qu'on a
pris une pause qui, malheureusement, risque de nous faire mal pour beaucoup d'années. Actuellement, le secteur
manufacturier, là, il a passé de 23 % à 13 %. Nous, on va disparaître. Dans 10 ans, on ne sera pas ici
pour présenter des mémoires, là, on va avoir disparu, l'industrie de la
chimie, là. Je vous le dis, là, ce n'est pas une menace, c'est une réalité, on
ne sera plus au rendez-vous.
Mme
Soucy : Qu'est-ce que pensent vos membres du processus d'approbation
québécois du BAPE? Est-ce que c'est trop long, c'est trop contraignant?
Qu'est-ce que vous entendez?
M. Hamelin (Yves) : Il y a une
perception très négative parce que c'est lourd. Et il y a toute une dynamique
autour de ce processus-là. Moi, je suis allé présenter des mémoires, là — je
suis allé pour IFFCO, je suis allé pour Stolt
LNGaz — des
mémoires, évidemment, qui étaient positifs parce qu'évidemment il y avait un
équilibre économique à mettre dans
ces mémoires-là. Mais, de façon générale, l'environnement est actuellement un
peu le casseux de party des promoteurs
au Québec, actuellement. Et nous, là, gestion responsable, là, le produit,
c'est du berceau à la tombe, là. On est pour ça, là, toutes les vertus, protection de l'eau... mais je pense
qu'il y a moyen de rendre un processus pour lequel... où le rôle de leadership qu'on assume...
Actuellement, je pense qu'il nous fait un peu mal en termes de perception.
Alors, si la perception, c'est : Je ne vais pas m'établir au Québec
parce que c'est rendu la terre la plus hostile d'accueil en environnement, bien là il faut mettre le balancier
un peu plus... Et je pense... nous, on a soumis un mémoire dans le cadre
du livre vert sur les autorisations
gouvernementales. Il y avait dans ce livre vert là de belles intentions, on les
a manifestées, on a soumis des recommandations, mais il faut rendre le
processus un peu plus dynamique.
Et moi, je
vous entendais parler tantôt d'une dynamique économique du BAPE, on ne l'a
jamais sentie. Ça ne veut pas dire
que quelqu'un qui a une portée économique dans le BAPE... Moi, je pense, quand
on parlait de réviser la nomination
des commissaires du BAPE, moi, j'aurais aimé ça, voir un commissaire avec une
perspective économique qui gère ce
dossier-là. Donc, il y a un certain équilibre à rétablir. Je ne pense pas que
c'est un processus inutile, je pense qu'il
est sain de par sa notion, mais je pense qu'il faut, un petit peu, le recadrer
puis accélérer ce processus-là parce que, là, les délais qui sont véhiculés comme étant longs, mais qu'on veut
raccourcir par le livre vert, bien, l'expérience nous montre qu'il y a eu des processus très, très longs où nos
concurrents, Memphis, Tennessee, la Californie, la Louisiane, le promoteur
retourne après un mois, puis le terrain est
prêt, là. C'est ça, la concurrence. Ce n'est peut-être pas tout à fait ce qu'il
faut avoir, là, il faut retrouver un
juste équilibre, je pense que les extrêmes, c'est toujours dangereux dans
n'importe quoi, mais je pense qu'il faut améliorer le processus.
Mme Soucy : Avez-vous ou vos membres
ont-ils l'impression qu'au BAPE ils donnent plutôt un jugement défavorable,
côté économique, ce qui donne des munitions à ceux qui sont contre les projets?
M. Hamelin
(Yves) : Non. Moi, je n'ai
pas cette perception-là, mais j'ai l'impression que, dans le triangle du
développement durable, on n'y a pas donné le poids, je pense, qu'il fallait.
Dès qu'un projet a un niveau de risque environnemental, on a l'impression que la rationnelle du projet
n'est pas tout à fait au rendez-vous. Donc, je
pense, là, il y a un équilibre à rétablir.
Mme Soucy : Merci, monsieur.
M. Hamelin (Yves) : Ça me fait
plaisir.
Le
Président (M. Iracà) :
Merci, la députée de Saint-Hyacinthe. Bon congé de Pâques. Faites attention sur les
routes. Merci beaucoup, M. Hamelin, pour votre présentation.
Compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux jusqu'au
5 avril, 15 h 15. Merci.
(Fin de la séance à 17 h 36)